Al à eur NE de À MA HS rev FOR 7 ENCYCLOPÉDIE, DICTIONNAIRE RAISONNÉ DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS. TOME SIXIEME. ET—FN APTE Less » Éghat à LR HALLE ENCYCLOPÉDIE, DICTIONNAIRE RAISONNE DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS, PAR UNE SOCIETÉ DE GENS DE LETTRES. Mis en ordre & publié par M. DIDEROT, de l'Académie Royale des Sciences & des Belles- Lettres de Prufle ; & quant à la PARTIE MATHÉMATIQUE, par M. D’ALEMBERT, de l’Académie Françoife, de l’Académie Royale des Sciences de Paris, de celle de Prufle, de la Socièté Royale de Londres, de l'Académie Royale des Belles-Lettres de Suede, & de l'Inftitut de Bologne. Tantüm féries junuraque poller, Tantum de medio Jumpris accedit honoris ! HORAT. TOME SIXIEME. 6 nu ) G 16 D } ALI RP I NOT at | ARE SUN ET S ON, rue Saint Jacques , à la Science. l'aîné , rue & vis-à-vis la Grille des Mathurins. TON, Imprimeur ordinaire du Roy, rue de la Harpe. E N D, rue du Foin, vis-à-vis la petite Porte des Mathurins. ÜO Chez M'DCC LVE AVEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROF CALE "p \ SLI 1# où 19, 4€ 14% PAU | FA ‘ Ph : 5 gl j : ne MNT NES UE Le Ne “ ” ab 41 MAN 1 al à | ; - # !" 1 4 WA URE ton sépirdfinaite as «PRO H'A do: à 1 “A [PACA [2 CESSER EST RNn AVERTISSEMENT DES ÉDITEURS. LUS nous avançons dans notre carriere, plus nous voyons croître l'ars deur & le nombre de ceux qui veulent bien feconder nos efforts ; mais uné émulation fi flateule pour nous, & fi avantageufe pour l’entreprife dont nous fommes chargés, produit un inconvénient dans lequel nous fommes très-affi- gés de tomber. Nous recevons quelquefois de plufieurs mains én même tems mot : quand nos lumieres nous mettroient 2 mêmes droits que nous , & qu'ils croyent leu travail propre à leur faire honneur. C’eft par cette raïfon que nous n'avons pû employer dans ce Volume plufieurs morce aux trés- eftimablés que nous avons recûs für différentes matieres. Nous prions donc inftamment ceux qui dans la fuite voudront bién nous aider , de nous en prévenir de bonne-heure afin que nous prenions à tems les précautions néceflaires Pour nous épargner le chagrin de ne l'Encyclopédie eft à cet égard précifément dans le même cas que les Recueil démies. Les raifons que nous avons eues d’en avertir font bien naturelles. Non-{eulement cet Ouvrage renferme des matieres {ur lefquelles il eft impoñble que nous raflemblions en nous toutes les connoiflances nécellaires Pour en juger fürement ; mais dans le cas même où ces connoiflances ne nous Manqueroient pas, ce feroit nous rendre les tyrans de nos collegues , & nous expofer à en être abandonnés avec raifon > que de vouloir les plier malgré eux à notre façon de penfer, ou à celle des autres. Nous ne ferions même quelque- fois aucune difficulté d’inférer dans notre Ouvrage des articles Oppofés {ur un même fujet , s’il nous paroifloit aflez important & aflez épineux pour mériter qu'on. en traitât le pour & contre. Mais nous avons auffi quelque droit d’exiger qu'on ne nous fafle point un crime de nos juftes égards pour nos collegues ; les plaintes bien ou mal fondées dont ils peuvent être l'objet, ne doivent nullement retomber {ar nous. Cet avis , quoique déjà donné tant de fois, paroît avoir part d'un anonyme qui vient d'attaquer quelques articles de Mufique de M. Roufeau *, « Je crois, dit-il, devoir mettre les Éditeurs de l'Encyclopédie fur la voie des vérités qu’is s LOnorerit néploent, ou diffimulent , pour y Jubflituer des erreurs » GC MÊME des Opinions ». La déclaration que nous venons de faire doit nous mettre à l'abri d’une accufation fi ha: fardée. Du refte l’Auteur ne doit point regarder cette déclaration comme un aveu tacité ou indirect de la juftefle de fes remarques. M, Roufleau qui joint à beaucoup de connoif- fances & de coût en Mufique le talent de penfer & de s'exprimer avec hetteré ; queles re par lui-même pour que noùs entreprenions ici de foûtenif {a caufe. Il pourra , dans le Di&tionnaire de Muf- que qu'il prépate, tepoufler les traits qu'on lui a lancés. sil juge, ce! que nous n’ofons aflürer, que la brochure de l’anonyme le mérite. Pour nous, fans prendre d’ailleurs aucune nous ne pouvons nous perfuader | , En foit réellement l'auteur. Tout nous empêché de le croire : le peu de fnfation que la criti p fai de charger deux hommes de Lettres qui lui ont rendu e guée, &c qu'il n’a pas dédaigné de confulter quelquefo F Voyez la Brochure qui a pour titre, Erreurs für la Mufique dans F Encyclopédie, Tome V1. : is fur {es propres ouvrages : la ma A ij AVERTISSEMENT niere peu mefurée dont ontraite dans cette brochure M. Roufleau, qui a fouvent nommé avec éloges le muficien dont nous parlons (a), & qui ne lui a jamais manqué d'égards, même dans le petit nombre d’endroits où il a cru pouvoir le combattre : enfin les opinions plus que fingulieres qu'on foûtient dans cet écrit, & qui ne prévientient pas en fa faveur, entrau- tres, que la Géométrie eft fondée {ur la Mufique ; qu'on dois comparer à l'harmonie quel- que fcience que ce foit; qu'un clavecin oculaire dans lequel on fe borneroit à repréfenter l’analogie de l'harmonie avec les couleurs , mériteroit l'approbation générale, & ainfi du relte (4). Si ce font-là les vérités qu'on nous accufe d'ignorer, de négliger, ou de difh- muler , c’eft un reproche que nous aurons le malheur de mériter long-tems. | On nous en a fait un aûtre auquel nous fommes beaucoup plus fenfbles. Les habirans du Valais, fuivant ce qu'on nous écrit, fe plaignent de l’article Crétins , imprimé dans le IV. Volume, & affürent que cet article eft abfolument faux. La promefle que nous avons faite de rendre une prempte & exaéte juftice à toures les perfonnes qui auroient quelque fujet de fe plaindre, nous oblige à plus fofre raifon envers une nation eftimable , que nous n'avons jamais eu intention d’offenfer. Néanmoins , quand Particle Crétins feroit aufli fondé que nous croyons aujourd’hui qu'il l’eft ia » ilne feroit nullement injurieux aux peuples duValais; le Crétinage feroit une pure bifarrerie de la nature, qui n’auroit lieu, comme nous l’avons dit, que dans une petite partie de la nation , fans influer en aucune ma- niere fur lerefte, & qui par-là n’en feroit que plus remarquable. Quoi qu'il en foit , nous prions nos Léétéurs de regarder abfolument cet article comme non avenu, jufqu'à ce qu’on nous fournifle les moyens de nous rétraéter plus en détail. Plufeurs raïfons doivent faire excufer la faute où nous fommes tombés à ce fujet. L'article dont il s’agit a été tiré d’un mémoire dont l'extrait original nous a été communiqué par un de nos favans les plus refpeétables; trompé le premier ainf que nous, par ceux qui le lui ont envoyé. Le mé- moiïre avoit été lu à la Société de Lyon (c)., qui en a publié l’analyfe il y a quelques années dans tin deños ouvragés périodiques , & nous n’avons pas oi dire que cetre analyfe im- primée ait excité alors aucunes plaintes. Tout fembloit donc concourir à nous induire en erreur. Comment pouvions-nous penfer qu'une compagnie de gens de Lettres, très-à- portée parile peu de diftance des lieux de vérifier aïfément les faits , n’eût pas pris cette précaution finaturelle , avañtque de les publier ? Il nous paroit difficile de croire, comme on nous l'aflüre, que l’auteur du mémoire!, en 1e Hifant à fés confrerés de Lyon, fe foit uni- quement:propoié de tendre un piége à leur négligence ; mais s'il a formé ce projet, il n'a parmaälheur quetrop:bien réufli. Nous pouvons dh moins aflürer que cet évenement impré- vû nous rendra deformais très-circonfpeËts {ur tout ce qui nous viendra de pareilles fources. Peut-être ne devons-nous point faire fervir à notre juflfication le filence que la nation inréreflée a cru devoir garder jufqu'au môment Qù l'articlé Créns a paru dans l'Encyclo- pédie; nôus féntons ? avec autant dè réconnoiflancé que de regret, tout ce qu'il y a de fla- teur pournous dans la fenfibiliré’ que lés'häbitans du Valais nous témoignent. 0 n Après ces écläirciflemens néceflaires , il ne nous refte plus qu'a rendre les honneurs fu- nebres à deux colleaues que nous avons perdus, M. PABbéLenglet & M. l'Abbé Mallet. C’eft un devoir aufli juite que trifte, auquel nous nous fommes engagés, 6r que nous fe- rons fideles à remplir. Nous atténdons les mémoires dont nous avons beloin pour payer le même tribut à feu M. du Marfais qui nous a été enlevé au mois de Juin dernier, &dorit la perte n’eft pas mbin$ grande pour les Lettres que pour Encyclopédie. Nrcoras Lenerer Dù Fresnor, Prêtre, Licentié de la Maïfon de Sorbonne , né le 16 Oftobre1674, & mort le 1$ Janv. 1755, furun de nos plüs laborieux Ecrivains. Depuis Yâge de vingt ans-jufqu'à la fin de fà vie, il ne cefla de compofer un grand nombre d'ou- vrages fur lés objets les plus divers, &c même quelquefois les plus difparates. La plà- part de-ces écrits font dignes de curiofité pour les recherches qu'ils contiennent ; il feroit trop long d’éndonnér ici lalifte , aufir érendue que finguliére : on y trouve une traduétion françoile du‘Diurnal romain ;"& une de l’Imitation ; l'Crdinaire de la Meffe , avec des Ma- ximes tirées des SS. Petes june édition du nouveau Teftament , & une de Latance ; un traité du fecret dela Conféffion 8 un autre de l’apparition des Efprits ; une édition du roman de la Rofe; uné des Poëfies de Repnier ; Ayrreffa amoris cum. commentarus Benedich Curis; unitraité dé l’ufage des Romans, &œ la critique de ce traité par l’Auteur même. Ici on voit plufeuts livres d'Hiffoire , de Droit Canon,, & de Politique ; là diflérens écrits fur la Chimie, dont M. PAbbé Lengler s’étoit fort occupé. Celui de tous fes Ouvrages qui (a) Voyez lé mots ACÉOMPAGNEMENT ; page 75. col. 2. vers la fih; BASSE , page no. col. 2. 6: furctout la fin du mot CHIFERE Re UP TON, LU RS CANAHD ESHINEURE, = Lo Ra É (E) Voyez lt brochupe citée, page 46 , 64, € fur-tout depuis le page xr0 jufqu'a la fin. {c) Cette Société eft différente de l'Académie des Sciences & Belles-Lettres de laiméme ville, v+ # PEBMEND TE DURS À a eu le plus de fuccés, eft la Mézhode pour étudier l'Hifloire , avec un Catalogue des Principaux Hifloriens ; elle a été imprimée plufieurs fois , & traduite en plufieuts langues. Pendant la guerre de 1701, & depuis pendant la Régence , les correfpondances étrange- res qu’il entretenoit , le mirent à portée de faire parvenir au gouvernement des avis utiles , qui lui mériterent une penfon dont il a joui jufqu'à fa mort.Un des plus importans qu'il don- na fut par malheur unde ceux dont les circonftances empêcherent le plus de profiter. Il avoit fort connu en Allemagne & en Hollande un Général étranger , qui dans la derniere guerre de 1741, commandoit l'Armée & avoit la confiance d’un de nos principaux Alliés. Il dé- couvrit au Miniftere les raifons qui devoient rendre cet étranger fufpeët, &c l’évenement juftifia tout ce qu'il en avoit dit. | Sa mémoire étoit prodigieufe, fa converfation animée & pleine d’anecdotes, fon ftyle extrèmement négligé ; heureufement la plûpart des marieres qu'il a traitées étant de pure érudition, les vices de la diétion peuvent s’y pardonner plus aifément. Il écrivoit comme il parloit , avec beaucoup de rapidité , & par cette raifon 1l paroïfloit mieux parler qu'il n’écrivoit: fon peu de fortune ne lui laifloit pas toüjours le tems de revoir fes écrits avant que de les publier ; cette raïfon doit faire excufer les méprifes qui s'y trouvent. ” Sur la fin de fa vie il s’'adonna, dit-on, à la pierre philofophale, y altéra fa fanté , & s’y feroit ruiné s'il avoit pü l’être. L'amour de l'indépendance , ce fentiment fi naturel & fi nuifible , étoit fa grande pañflion, & lui fit refufer conftamment tous les poites avantageux que fes talens & {es connoiflances auroient pû lui procurer, foit dans les pays étrangers, foit dans fa propre patrie ; mais la liberté qu'il vouloit pour 1a perfonne , fe montroit iouvent trop à découvert dans fes écrits, & lui attira quelques difpraces de la part du Müiniftere ; 1l les recevoit fans murmure, & même fans chagrin, & confentoit à les fouffrir, pourvü qu'on lui permit de les mériter. Quelquefois aflez vif, quelquefois aufli indifférent fur fes propres intérêts, il a voulu que {on travail pour l'Encyclopédie füt ablolument gratuit. Outre plufieurs articles qu'il a revûs dans les trois derniers volumes , il nous en a donné en entier quelques-uns ; les plus confidérables font Confhturion de l'Empire & Diplomatique ; dans ce dernier il attaque avec plufeurs favans l'authenticité des titres &z des chartes du moyen âge. Les deux Bénédi&tins Auteurs de la nouvelle Diplomatique ; lui ont répondu dans la préface de leur fecond Vo- Jume. Nous n’entrerons point dans cett: queftion, & nous ne fommes point étonnés de voir M. l'Abbé Lengler combattu par de favans Religieux, qui peuvent être auf fondés qu'intéreflés à défendre l'opinion contraire. Enme Maizrer, Doëteur & Profeffleur Royal en Théologie de la Faculté de Paris, de la Maifon & Société royale de Navarre, naquit à Melun en 1713' d’une famille pleine de probité, & , ce qui en eft fouvent la fuite , peu accommodée des biens de la fortune. Après avoir fait fes études avec fuccès au collége des Barnabites de Montargis , fondé par les Ducs d'Orléans , il vint à Paris, & fut choïti par M. de la Live de Bellegarde Fer- mier général, pour veiller à l'inftruétion de fes enfans. Les principes de goût & les fenti- mens honnêtes qu'ileut foin de leur infpirer, produifirent les fruits qu'il avoit lieu d’en at- tendre. C’eft aux foins de cet inftituteur , fecondés d’un heureux naturel, que nous devons M. de la Live de Jully, Introduéteur des Ambafladeurs , &t Honoraire de l’Académie royale de Peinture, qui cultive les beaux Arts avec faccès , amateur fans oftentation, fans injufti- ce, & fans tyrannie. M. l'Abbé Mallet pañla de cet emploi pénible dans une carriere non moins propre à faire connoître fes talens ; ilentra en Licence en 1742 dans la Faculté de Théologie de Paris. Les fuccès par lefquels il s’y diftingua ne furent pas équivoques. C’eft l’ufage en Sorbonne à la fin de chaque Licence de donner aux Licentiés lés places , à-peu-près comme on le pratique dans nos colléges : les deux premieres de ces places font affeétées de droit aux deux Prieurs de Sorbonne; les deux fuivantes (par ün arrangement fondé fans doute fur de bonnes raifons ) font deftinées aux deux plus qualifiés de la Licence : le mérite dénué de titres n’a dans cette lifte que la cinquieme place ; elle fut donnée unani- mement à M. l'Abbé Mallet. ' pit Pendant fa Licence il fut aggrégé à la Maifon & Société royale de Navarre. Les hommes illuftres qu’elle a produits, Gerfon, Duperron, Launoï, Bofluet , & tant d'autres, étoient bien propres à exciter l’émulation de M. PAbbé Mallet, & avoient déterminé fon choix en faveur de cette Maifon célebre. | Tout l'invitoit à demeurer à Paris; le féjour de la Capitale lui offroit des reflources . aflürées , & le fuccès de fa Licence des efpérances flateufes. Déjä la Maifon de Rohan Vavoit choifi pour élever les jeunes Princes de Guemené Monthafon; mais fa mere & fa famille avoient befoin de fes fecours : aucun facrifñce ne lui coûta pour s'acquitter de ce Tome VI. | A y 7. AVERTISSEMENT devoir, ou plûtôt il ne s'’apperçut pas qu'il eût de facrifice à faire ; il alla remplir auprès de Melun en 1744 une Cure aflez modique, qui en le rapprochant de fes parens le met- toit à portée de leur être plus utile. Il y paffa environ fept années , dans l’obfcurité, la re- traite, & le travail, partageant fon peu de fortune avec les fiens, enfeignant à des hom- mes fimples les maximes de l'Evangile, & donnant le refte de fon tems à l'étude : ces années furent de fon aveu les plus heureufes de fa vie, & on n'aura pas de peine à Le croire. La mort de fa mere, & les mefures qu'il avoit prifes pour rendre meilleure la fruation de fa famille , lui permirent de revenir à Paris en 1751, pour y occuper dans le Collésce de Navarre une Chaire de Théologie , à laquelle le Roi l’avoit nommé fans qu'il le de- mandât. Il s’acquitta des fonétions de cette place en homme qui ne l’avoit point follicitée. Néanmoins la maniere diftinguée dont il là remplifoit ne l'empêchoit pas de trouver du tems pour d’autres occupations. [l mit au jour en 1753 fon Æ fau fur les bienféances oratoires , & fes Principes pour la leëture des Orateurs. La {olitude où il vivoit dans {a Cure avoit déjà produit en r745 fes Principes pour la leëlure des Poëtes. Malgré le befoin qu'il avoit alors de proteéteurs, il n’en chercha pas pour cet ouvrage ; il offrit à Meffeurs de la Live fes éleves ; ce fut fa premiere & {on unique dédicace. Ces différens écrits, & quelques autres du même genre qu'il a mis au jour , étant prin- cipalement deftinés à l'inftruction de la jeunefle, il ny faut point chercher, comme il nous en avertit lui-même , des analyfes profondes & de brillans paradoxes : il croyoit, & ce font ici fes propres paroles * , qu’en matiere de goût les opinions établies depuis long-tems dans la république des Lettres , font toûjours préférables aux fingularités & aux preftiges de la nouveauté ; maxime qu'on ne peut contelter en général , pourvû qu’une fuperftition aveu- gle n’en foit pas le fruit. Aïinf dans les ouvrages dont nous parlons , Auteur fe borne à expofer avec netteté les préceptes des grands maîtres, & à les appuyer par des exemples choifis , tirés des Auteurs anciens & modernes. Tant de travaux ne fervoient, pour ainfñ dire, que de prélude à de plus grandes entre- prifes. Il a laiflé une traduétion complete de l'Hiftoire de Davila, qui doit paroître dans quelques mois avec une préface. [l avoit formé le projet de deux autres ouvrages confidéra- bles , pour lefquels il avoit déjà recueilli bien des matériaux ; le premier étoit une Hiftoire générale de toutes nos guerres depuis l’établiffement de la Monarchie jufqu’à Louis XIV. inclufivement ; le fecond étoit une Hiftoire du Concile de Trente quil vouloit oppofer à celle de Fra-Paolo donnée par le P. le Courayer. Ces deux favans hommes, fi fouvent combattus , & plus fouvent injuriés , auroïent enfin été attaqués fans fiel & fans amertu- me , avec cette modération qui honore & qui annonce la vérité. Des circonftances que nous ne pouvions prévoir nous ayant placés à la tête de l’Ency- clopédie, nous crûmes que M. l'Abbé Maller, par fes connoïffances, par fes talens, & par - fon caraétere, étoit très-propre à feconder nos travaux. I1 voulut bien fe charger de deux parties confidérables , celle des Belles-Lettres & celle de la Théologie. Tranquille com- me il l’étoit fur la pureté de fes intentions & de fa doétrine , il ne craignit point de s’aflo- cier à une entreprife qui a le précieux avantage d’avoir tous les hommes de parti contre elle. Auf malgré leur jaloufe vigilance, les articles nombreux que M. l'Abbé Mallet nous avoit donnés fur les matieres les plus importantes de la Relioion , demeurerent abfolument fans atteinte. Mais fi ces articles furent à l'abri de la cenfure , fa perfonne n’échappa pas aux délateurs. Tandis que d’un côté les Auteurs d’une gazette hebdomadaire qui prend le nom d’eccléfraftique ** , cherchoïent, fuivant leur ufage, à rendre fa religion fufpeéte , le parti oppolé à ceux-ci Paccufoit de penfer comme eux. De ces deux imputations la derniere parut la plus importante au fevere difpenfateur des Bénéfices, feu M. l’ancien Evêque de Mirepoix, que fon âge avancé & fa délicatefle exceflive fur l'objet de l’accufarion ren- doient facile à prévenir. Ce Prélat , à qui on ne reprochera pas d’avoir voulu favorifer les Auteurs de l'Encyclopédie, fit en cette occafion ce que les hommes en place devroient toùjours faire ; il examina , reconnut qu'on l’avoit furpris , & récompenfa d’un Canonicat de Verdun la doëtrine & les mœurs de l’accufé. Un évenement f humiliant pour les enne- mis de M. l'Abbé Mallet, montra clairement que leur crédit étoit égal à leurs lumieres , & fort au-deflous de l’opinion qu'ils vouloient en donner. L * Préface des Principes pour la lecture des Poëtes, page 75° ; * * On peut juger par untrait peu remarquable en lui-même, mais décifif, du degré de croyance que cette gazette mérite. Nous avons dit dans l'éloge de M. de Montelquieu que ce grand homme quitroit fon travail fans en reffentir le moindre impreffion de fatigue , & nous avions dit quelques lignes auparavant que /à fanté s’étoit altérée par l'effet. LENT 6 pref- que infaillible des études profondes. Pourquoi en rapprochant ces deux pañlages , a-t-on fupprimé les mots leur & prefque in- faillible , qu'on avoit fous les yeux ? c’eft évidemment parce qu'on à fenti qu’un effet /ezr n'eft pas moins réel, pour n'é- tre pas reflenti fur le champ, & que par conféquent ces mots détruiloient l'apparence même de la contradiction qu’on prétendoit faire remarquer, Telle eft la bonne foi de ces Auteurs dans des bagatelles , & à plus forte raifon dans des æatieres plus férieufes, | DES EDITEURS. + Notre eftimable collegue méritoit fur-tout les bontés du Souverain pat fon attachement inviolable à nos libertés & aux maximes du Royaume , deux objets que les Auteurs de l'Encyclopédie fe feront toûjours une gloire d’avoir devant les yeux. On peut fe convain: cre par la leéture du mot Excoñmmunicanôn imprimé dans ce Volume, qué M. l'Abbé Mal: let penfoit fur cette importante matiere en Citoyen, en Philofophe , & même en Théolo- gien éclairé fur les vrais intérêts de la Religion. Un autre de fes articles, le mot Commus nion , ne doit pas faire moins d'honneur à {a modération & à fa bonne foi. 11 sy explique avec une égale impartialité, & fur le célebre Arnaud , dont les talens & les lumiéres ont fi étrangement dégeneré dans ceux qui fe difent fes difciples » & fur le farneux P, Pichon, profcrit par les Evêques de France , & abandonné enfin courageufement par fes confreres mêmes. M. l'Abbé Mallet, quoiqu'artaqué en différentes occafons par les Jouinaliftes dé Frévoux, ne chercha point à leur reprocher les éloges qu’ils avoient d’abord donnés au livre de ce Religieux ; fon peu de reflentiment & fon indulgence ordinaire le portoient à excufer une diftraction ft pardonnable. Z/ e/f naturel, nous difoit-il avec un ancien , de loiier les Athéniens en préfence des Aihéniens. Toute l'Europe a entendu parler de la Thèfe qui fit tant de bruit en Sorbonne il ÿ a plus de quatre ans, & dont | Auteur éroit M. l'Abbé de Prades , alors Bachelier én Théologie, & aujourd'hui Leéteur & Secrétaire des Commandemens de $. M. le Roi de Prufle , & Honoraire de l'Académie Royale dés Sciences & des Belles-Lettres de Berlin. L’accufé demandoit avec inftance à être entendu ; il promettoit de fe foûmettie fans-referve : inaïs il fe propofoit de repréfenter à fes fuges (& nous ne fommes ici qu'Hiftoriens ) qu’il avoit cru voir fa doëtrine fur les Miracles dans les ouvrages de deux des principaux membres de la Faculté, & que cette reflemblance, apparente ou réelle, avoit caufé fon erreur *. Plufieurs Docteurs craignirent , peut-être avec quelque fondement , les inconvéniens qui pouvoient réfulter d'un examen de cetre efpece, dût-il fe terminer à la décharge des deux Auteurs. Îls opinerent donc à condamner le Bachelier fans l’entendre : M. l'Abbé Mallet, moins prévoyant & plus équitable , fur avec beaucoup d’autres d’un avis con- traire ; mais le nombre l'emporta. Il mourut le 2$ Septembre 1755 d'une efquinancie qui lé conduifit en deux jours au tombeau. | Son efprit reflembloit à fon ftyle : il avoit jufte, net, facile, & fans affeétation ; mais cé qui doit principalement faire le fujet de fon éloge , c’eft l'attachement qu'il montra toû- jours pour {es amis, fa candeur , fon caractere doux & modefte. Dès qu'il patut à Verdun, il y acquit l’eftime & la confiance générale de fon Chapitre , qui le chargea dés ce mo- ment de fes affaires les plus importantes ; il fut toûjours confidéré de même par fes Supé- sieurs les plus refpeëtables. Quoique trésattaché à la Religion par principes & par état, il ne cherchoit point à en étendre les droits au-delà des bornes qu’elle s’eft prefcites elle- même. Les articles Dérfme & Enfer pourroient fervir À montrer combien il {avoit diftin- guer dans ces matieres délicates les hmites de la raifon & de la Foi. Il ne mérita jamais ni par {es difcours , ni par fa conduite , le reproche qu’on a quelquefois fait aux Théolo- giens d’être par leurs querelles une occañon de trouble **, L’affliétion que lui caufoient les difputes préfentes de l'Eglife, & le funefte triomphe qu'il voyoit en réfulter pour les ennemis de la Religion , lui failoient regretter que dés la naiflance de ces difputes le Gou- vernément n’eût pas impofé un filence efhicace fur une matiere qui en eftfi digne. Pendant la derniere Aflemblée du Clergé, il fit à la priere d'un des principaux membres de cette Aflemblée plufeurs mémoires théologiques qui établifloient de la maniere la plus nette & la plus folide la vérité, la concorde, &c la paix. Il paya fon zele de fa vie, ce tra- vail forcé ayant occafonné la maladie dont il eft mort à la fleur de fon âge. Ennemi de la perfécution , tolérant même autant qu’un Chrétien doit l'être, il ne vouloit employer contre l'erreur que les armés de l'Evangile , la douceur , la perfuañon , & la patience. line cherchoit point fur-tout à grofür à fes propres yeux & à ceux des autres la lifte déjà trop nom- breufe des incrédules, en y faifant entrer (par une mal-adrefle ñ commune aujourd’hui } la plûpart des Ecrivains célebres. Ne nous brouillons point , difoit-il, avec Les Philofophes. * L’Auteur [ défunt ] du Traité dogmatique fur les faux Miracles du tems ; & l'Auteur [auf défunt ] des Letrres Théo: logiques fur ces mêmes Miracles éphemeres , & fur ces Convulfons qui deshonorent notre fiecle. * ** Les Auteurs d'un Diftionnaire qui eftentre les mains de tout lé monde ont étendu çe reproche beaucoup au delà de ce qu'ils pouvoient fe permettre, Voyez le Diét, de Tri au mot Perturbareur, - LS, EprEnt RATE NN ITS L Fi. RSR PAR NOMS DES PERSONNES Qui ont fourni des Articles ou des fecours pour ce Volume & pour le fuivanr. Ous commencerons cette lifte par témoigner notre reconnoiflance à M. Momo FE, N qui a donné pour le Volume précédent l’asicle ENcausTiQUE. L’Avertiffement du cinquieme Volume étoit imprimé lorfqu’il nous a communiqué cer article ; nous n'avons pas héfité à le préférer à un autre qui étoit de nous, & que nous avons fupprimé , & nous nous fommes refervés à en faire mention dans l’Avertifflement du fixieme Volume. Le fuc- cès général de l'article de M. Monnoyÿe , l'a bien dédommagé du filence forcé que nous avons gardé jufqu'ici à fon fujet. M. le Comte »z TREssAN, Lieutenant-Général des Armées du Roi, Commandant pour le Roi à Toul, & membre des Académies Royales des Sciences de France , d'Angleterre, & de Prufle, nous a fait parvenir plufeurs morceaux dont nous ferons ufage à leurs articles. M. Donarr, Maître des Requêtes & Intendant de Bourges, a bien voulu donner aux hommes en place l’exemple du véritable intérêt qu'ils doivent prendre à l'Encyclopédie. I nous a envoyé un Mémoire important dont on a fait ufage; les Volumes füivans lui auront encore d’autres obligations. M. le Préfident nz Brosszs, Correfpondant honoraire de l'Académie Royale des Belles-Lettres, nous a communiqué les deux mémoires qu’il a lus à cette Compagnie {ur les érymologies ; on en a déjà profité pour ce mot, & on les mettra encore en œuvre ail- leurs ; nous lui devons auffi plufieurs autres morceaux qui ne nous feront pas moins utiles. M. p£ VoLTarre a donné, tant pour ce Volume que pour les fuivans, relativement à la Philofophie & à la Littérature , les mots FaciLE, FACTION, FANTAISIE, FASTE ; FAVEUR , FAVORI, FAUSSETÉ , FÉCOND , FÉLICITÉ, FERMETÉ, FEU, FIERTÉ S FIGURE, Finesse , FLeurt (Lürér.), Foigre , Force (Lirtér.), FRANCHISE > FRAN- ÇOIs , 6c. fans préjudice de plufieurs autres morceaux qu'il veut bien nous faire efpérer. M. Ducros, de l'Académie Françoife, de celle des Belles-Lettres , & Hiftoriographe de France , à qui nous devons quelques articles dans les Volumes précédens & dans celui- ci, nous en promet d’autres pour les fuivans. M. p'Anririe, de l'Académie Royale des Belles-Lettres, & Secrétaire de S. A. S. ME: le Duc d'Orléans, eft auteur de l’article ETÉSIENS. M. Ze Monnrer, de l’Académie Royale des Sciences, 8 Medecin ordinaire de Sa Majefté à Saint-Germain-en-Laye, a donné l’article FEU ÉLECTRIQUE. Quatre Perfonnes que nous regrettons fort de ne pouvoir nommer, mais qui ont exigé de nous cette condition , nous ont donné différens articles. Nous devons à la premiere les mots ETYMoLoGiE, ExISTENCE, & ExPANSIBILITÉ ; à la feconde les mots Evipence & FONCTION DE L’AME; à la troifieme les mots FATALITÉ , & Ficure (Théologie) , marqués de la lettre (2); à la quatrieme les mots FASTE , FAMILIARITÉ, FERMETÉ, FLATERIE , FRIVOLITÉ , & quelques autres. Une Femme que nous n'avons pas l'honneur de connoître , nous a envoyé les articles FALBALA, FONTANGE, & autres... : sl té 2 L M. D 'AvrTuyiLze, Commandant de Bataillon, & auteur de l'Effai fur la Cavalerie , in-4.°, à donné ETENDART , & une addition au mot Exercice. M. Razzier pzs Ourmes, Confeiller d'honneur au Préfidial de Rennes , a fourni pour ce Volume &r les fuivans, les mots EXPOSANT, FRACTION, INTÉREST, ImpPaïr, 6c. M. WarEezeT, Receveur Général des Finances, & honoraire de. l’Académie Royale de Peinture, a donné relativement à cet Art les mots ETUDE , EXPRESSION > EXTRÉ- MITÉS, FAIRE, FABRIQUE, FACILITÉ, FIGURE, FLEURS. | Nous avons confulté M. Rovzzze, de l’Académie des Sciences , für quelques articles de ce Volume: il feroit fort à fouhaiter pour notre Ouvrage que nous euflions été à pOr- tée de recourir à fes lumieres plûtôt & plus fouvent. À M. PerriNer D'ORvAL a bien voulu nous communiquer un ouvrage entier de {à compofition, dont'on s’eft fervi pour le mot FEU D’ArTIr1CE , & dont on fe fervira à tous les renvois de cet article. M. PERONNET, Infpetteur général des Ponts & Chauflées, a communiqué l’article PoMpE À FEU, pour le mot Feu. M. Bourczzar, Ecuyer du Roi, Chef de fon Académie à Lyon, & Correfpondant de l’Académie Royale des Sciences de Paris , à enrichi ce Volume d’un grand nombre a OR AMS MED ET EURE à vij d'articles fur la Maréchallerie. & fur le Manege. Nous ne, l’annoncérons plus .deformais que parmi nos Collegues ordinaires, dont il veut bien orner la life. RME 22 1 Te EN VS M. MarmonrTez eft auteur des mots EXTRAIT, FABLE, FARCE, FICTION , & Fi= NESSE (Morale.) | | hr Eu Un Théologien nous a envoyé l’article FILS DE Dieu. | M. pe Rarre, Secrétaire perpétuel de la Société Royale des Sciences de Montpel- lier, Membre de la Société royale de Londres , de l'Académie de Cortone, & de l'Inftitut de Bologne, nous a donné l’article FRO1D , que nous fommes forcés de renvoyer au Vo- lume fvant. Nous attendons de lui plufeuts autres morceaux. | M. Bourzzer le pere, Doëteur en Medecine de la Faculté de Montpellier, & Secré- taire de l'Académie des Sciences de Beziers, a donné l'article FACULTÉ, (Econ. animale.) M. Pessezrer eft auteur des mots EXEMPTION, FERMES du Rot, FERMIER (Général), FINANCES , 6 FINANCIER. | © M. Dvrour a donné aufñ quelques articles de Finance: M. Parrmks, Doëteur en Medecine de la Faculté de Montpellier, & déjà connu par le Prix qu'il vient de remporter ; quoique fort jeune , à l’Académie des Belles-Lettres, a donné différens articles fur des matieres d'Erudition , d'Anatomie, & de Medecine , dans lefquels il eft également verlé ; tels qu'EXTISPICE , FASCINATION, FAUNE, EVANOUIS- SEMENT , EXTENSEURS, FACE, FEMME (PAyfrologte), FLÉCHISSEUR , & plufieurs autres. M. pe Marcencr, Gentilhomme ordinaire du Roi, a donné quelques articles aux- quels on a mis fon nom. M. Desmanrs ; auteur de la Comédie de /’Impertinent, a fourni les articles FAT & FEMME (Morale). M. Le Ror, Doëteur en Medecine de la Faculté de Montpellier , & Membre de la So- ciété Royale des Sciences de la même Ville , a donné l’article Ev APORATION. Nous n'a- vons pè faire ufage , par les raifons expofées dans l’Avertiflement, de Particle FIEVRE qu'il nous a envoyé ; d’ailleurs les derniers feuillers de cet article ne nous fonr parvenus qu'après limpreflion du mot FIEVRE. | Par la même raifon nous n'avons pà employer deux articles fur le Feu militaire , dont lun eft de M. Lresaur, chargé du dépôt de la Guerre, & l’autre d’une main inconnue. Nous devons à M. Zr£rAUT d'autres morceaux dont nous ferons ufage. M. Guenrav, éditeur de la Colieëtion académique, & auteur de la belle Préface qui eft à la tête, a donné le mot ETENDUE. M. Ze Ror, Lieutenant des Chafles du Parc de Verfailles, ef auteur des articles Far- SANDERIE, FAUCONNERIE, & FERMIERS (Æcon. ruffique.) M. Quesnar le fils a donné FERMIERS (Econ. polug.) M. VNzcxer, Citoyen de Geneve, & Correfpondant de l'Académie Royale des Sciences de Paris, a donné pour le Volume fuivant le mot FROTEMENT. M. Le Romain, difiérens articles fur l’hiftoire naturelle des Ifles de l'Amérique. M. pe Leyre, auteur dé l'Analyfe de Bacon, le mot FANATISME. M. Fareuzr , Maître de Penfon à Paris, les mots ETUDE, EXPULSER , EXPLICITE, ExrTracTION des Racines { FESTE , FIDELE, &c. M. pe Virzigrs, quelques articles de Chimie, entrautres FLUX, ( Docrmaftque.) M. n°Azzzs, Correcteur à la Chambre des Comptes de Languedoc , le mot FIGURE, (Phyftologie.) 00m AS Ê LE M, pe ComPr, Curéde l'Aleu près la Rochelle, nous a envoyé pour l'article EAu- DE-v1E la maniere de diftillér les eaux-de-vie en grand , & d’autres articles. Nous invitons ceux qui habirent des endroits où il y a des manufaétures particulieres , & où l’on exécute des travaux en grand, à vouloir bieñ.nous communiquer des mémoires fur ces objets. M.Ferpivanp BertTaouD, Horloger, a donné machine à FENDRE,, en Horlogerie. M. Päpriron, Graveur en bois, les articles relatifs à fon Art. M. Macrmez, les articles d'Orfévrerie. A | MM. Durirar l'ainé & le jeune, différentes remarques, & quelques morceaux pour ce Volume & les fuivans. Il ne nous refte plus qu’à donner ici la life de nos Collegues ordinaires avec leur marque diftinétive , qui avoit été omife dans les deux précédens Volumes , & qu'on nous a priés de remettre dans celui-ci. Nous avons fur cette lifte deux avis à donner. Le premier , qu’on ny trouvera plus quelques-uns de nos anciens Collegues, que nous avons perdus où par mort, ou par leur abfence de Paris, ou par des occupations indifpenfables qui nous les ont enlevés. Le fecond, c’eft que nous devons une reconnoiflance particuliere à quelques-uns d’entr'eux , qui non contens de leurs travaux ordinaires pour notte Ouvrage, y enont-joint de furérogation. Ainfi M. de C ahufac , chargé des articles qui concernent iE AVERTISSEMENT, &. Je Théatre Lyrique, nous a communiqué pour le mot FESTE une defcription abrégée des plus brillantes qui ayent été données en France en différentes occafons importantes. Il a cru qu'un tel objet n'étoit pas étranger à l'Encyclopédie , tant à caufe des évenemens in- téreflans pour tout citoyen qui ont donné lieu à ces Fêtes, que par l'utilité qui peut ré- fulter de ces defcriptions pour l'Hiftoire & pour le progrès des Arts, NOMS DES AUTEURS, * M. DIDEROT. (-) M. ie B. D. H. | (C. D. J.) ou (D.J.) M. le Ch DE JAUCOURT (4) M BoucnEr D'ARGIS. (B) M DE CanHusac. (54) M. VENEL. (c) M. DAUBENTON , Subdelegué de Montbard; (D) M. GOUSSIER. (4) M. D'AUMONT. (E) M. l'Abbé DE LA CHAPELLE (e) M. BouRGELAT. (F) M. pu MaARrsaAIrs. (G) M. l'Abbé MALLET. (g) M. BARTHÉS. (CPE TRS (1) M. DAUBENTON, de l'Académie des Sciencss, (Æ) D'ARGENVILLE. (Z) M. TARIN. (0) M. D'ALEMBERT. (P) M. BLONDE, (Q) M. LE BLon®. (R) M. LaANDporïs. (S)M ROUSSEAU, de Geneve. (T) M. ze Roy, de l'Académie des Scienceté (P) M. Lours. (Z) M BELLIN, ENCYCLOPEDIE, O U DICTIONNAIRE RAISONNÉ DES SCIENCES, DES ARTS ET DES MÉTIERS: LA T, conjonétron copulat. (Gram.) Ce mot marque l’aétion de l’ef- prit qui lie les mots & les phra- les d’un difcours , c’eft-à - dire qui Les confidere fous le même rapport. Nous n’avons pas ou- blié cette particule ax m0: CoN- — JONCTION; cependant ilne fera pas inutile d’en parler ici plus particulierement. 1°. Notre & nous vient du latin &. Nous Pécri- vons de la même maniere ; mais nous n’en pronon- cons jamais le £, mème quand il eft fuivi d’une voyelle: c’eft pour cela que depuis que notre Poéfie Soft perfettionnée , on ne met point en vers un 6 devant une voyelle, ce qui feroit un bäillement ou hiatus que la Poëfie ne fouffre plus ; ainfi on ne di- roit pas aujourd’hui : Qui fert & aime Dieu , poffede toutes chofes. 2°. En latin le s de l’& eft toñjours prononcé ; de plus lé eft long devant une confonne , & il eft bref quand il précede une voyelle : Q2 mores hominum multorum vidie &s urbes. Horat. de Arte poëticé, v. 143, Reddere qui voces jam fit puer, êt pède cérto Signat humum ; geflit paribus collidéré, ét ram Colligit ët port temerè , ët mutatur in horas. Ibid. v..158. 3°. Il arrive fouvent que la conjonétion & paroît d’abord lier un nom à un autre, & le faire dépendre d’un même verbe ; cependant quand on continue de lire , on voit que cette conjonétion ne lie que les propofñitions , &c non les mots : par exemple, Céfar 4 égalé le courage d'Alexandre, & [on bonheur a été fatal à la république romaine. Il femble d’abord que bonheur dépende d’égalé, aufi-bien que courage; ce- pendant bozheur ef le fujet de la propoñition fuivan- Tome FI, ET te. Ces fortes de conftruétions font des phrafes oui ches, ce qui eft contraire à la netteté. 4°. Lorfqu’un membre de période eff joint au pré- cédent par la conjonétion 6, les deux An ne doivent pas être féparés par un trop grand nombre de mots intermédiaires, qui empêchent d’apperce- voir aifèement la relation ou liaifon de deux corre- latifs. 5°- Dans les dénombremens la conjon@tion & doit être placée devant le dernier fubftantif ; /a foi, l’efpé- rance , 8 la charité. Onmet aufli 6 devant le dernier membre de la période : on fait mal de Le mettre de- vant les deux derniers membres, quand il n’eft pas à la tête du premier. Quelquefois 1l y a plus d'énergie de répéter & : Je l'ai dit 8 a lui 8 à fa femme. 6°. Er même a fuccédé à voire méme, qui eft au jourd’hui entierement aboli. | 7°. Et donc : Vaugelas dit (Remarques, tome III. pag. 181.) que Coeffeteau & Malherbe ont ufé de cette façon de parler : Je l’entends dire tous Les jours à la cour, pourfuit-il, à ceux qui parlent le mieux ; il obferve cependant que c’eft une expreffion gafcon- ne, qui pourroit bien avoir été introduite à la cour, dit-il, dans le tems que les Gafcons y étoient en re- gne : aujourd'hui elle eft entierement bannie. Au refte, je crois qu'au lieu d'écrire & donc, on devroit écrire hé donc : ce n’eft pas la feule occafon où l’on a écrit & au lieu de l’interje@tion hé, & bien au lieu de hé bien , &cc. 8°, La conjonétion 6 eft renfermée dans la néva- tive z1, Exemple : 4 les honneurs ni les biens ne va. lent pas la fanté, c’eft-à-dire, € Les biens & les hon- neurs ne valent pas la fanté, I en eft de même du #6c des Latins, qui vaut autant que & zon. 9°. Souvent, au lieu d'écrire 6 4 refle, ou bien € les autres, on écrit par abbréviation 6%, c’eft-à+ dire 6 cætera. (F) À É 2 ÉSE TA ETABLAGE ou ETELLAGE, ou plisér ETA- LAGE , £. m. (Jurifprud.) en quelques coûtumés, comme en celle de Saint-Pol, art, 29 , eft un droit que le féigneur prend pour permettre aux marchands d’éxpoler & étaler leurs marchandifes en vente. Ailleurs ce droit eft appellé Aa/age, plaçage. (A) ETABLAGE, {, m. (4ré milir.) C’eft ainf qu'on appelle dans l’Artilierie, l’entre-denx des limomeres d’un avant-train où d’une chartette. (Q) ÉTABLE, {. m. (Ecorom. ruftig.) eft un petit bä- timent dans la bafle-cour d’une maïfon de campa- gne , ou une efpece d’angard fermé où l’on tient le bétail. On appelle Pouverie ; celle où l’on met les bœufs ; bergerie, celle où l’on met les moutons, &c. Voyez BERGERIE, &c. (P)- ETABLE, {. f. (Marine.) C’eft la continuation de la quille du navire, laquelle commence à lendroit où la quille cefle d’être droite. Voyez ETRAVE. Z nr , S’aborder de franc-étable. (Marine) C’eft lotfque deux bâtimens fe préfentent la proue pour s’aborder ou s’enfoncer avec leurs épérons. S’«bor- der èn belle où debout au corps, c’eft s'aborder par les flancs. (Z) ETABLER , voat. (Manege, Maréchallerie.) mot particulierement ufité dans les haras, pour défigner l’aétion de mettre les poulains, les étalons & Îles jumens dans l'écurie. Voyez HARAS. (e) *ETABLI, {. m. rerme d’Ars commun à prefque tous les ouvriers : 11s ont chacun leur érabli, L'ésabli” du bijoutier eft une efpece de table ayant tout-au- tour plufeurs places cintrées, pour autant d’ou- vriers qui y travaillent. Ces places font garnies vers le milieu dune cheville plate, fur laquelle ils ap- puient leur ouvrage ; d’une peau en-deflous pour recevoir les limailles ; & d’un ou plufeuts tiroirs pour différens ufages. Il faut que Peszb foit placé de maniere que toutes les places reçoivent également le grand jour. Il eft foûtenu par un ou plufieurs pi- Bérs, outre qu’il eft attaché ordinaitement à l'appui d’une fenêtre. Voyez les Planches du Bijoutier. Celui du Ceinturier, fur lequel 1l taille fon ou- vrage, eft une efpece de table où comptoït de bois de la longueur de quatre ou cinq piés. Îl en faut dire autant de celui du Chaïnetier, du Charpentier, du Chauderonnier. Mais outre cet é2bli commun à tant d’artifars, les Chauderonmiers en ont encore un qui leur eft propre, & qui fait une des principales parties de la machine qu'ils appellent sour & chauderons : on en parle ailleurs Foy. TOUR DES CHAUPERONNIERS, & la figure, Planche du Chauderonnier. E’érabli du Cieleur n’a rien de particulier. Celui des Corroyeurs eft une tablé faite de plu- feurs planches fortumies & bienjointés enfemble, fur laquelle les Corroyeurs donnent le fuif, l'huile, les couleurs aux cuirs, & toutes les façons , avec l’efti- ve & la pommelle. Cette table a ordinaitement trois piés &z dem de largeut, &c huit à neuf piés de lon- gueur ; elle eft pofée fut deux ou tfois treteaux, & aflujettie de maniere que les mouvemens que les ouvriers fe donnent eu travaillant , ne puiflent Pé- branler, Le Marbreur de papier a deux ésablis ; Pun qui lui fert pout marbrer, & l’autre pour liffer. Le premier lui fert à pofer le baquet , les peignes &c les pots à couleuts ; 1l broye fur Pautre les couleurs & life le papier marbré, & pour cet effet ileft chärgé de deux arbres ou pierres de liais, propres à ces deux ufa- ges difiérens. J’oyez des Planches du Marbreur. Voyez l'érabli pour travailler les pierres de rap: port , &c l’étau qui fert à les tenir pour les fcrèr, dans les Planches du Margaesenr en pierres de rapport. E T À L’érabli des Menufers eft une grofle table de bo's d'hêtre pour l’ôrdinaire | montée fur quatre piés de! bois de chêne forts à proportion , aflemblés à dou- bles ténons dans ladite table , & par le bas avec qua- tre fraverfes ; & à un pié du bout, & à trois pouces de la rive ou bord du devant, eft une mortoife quar+ . rée qui perce de part en part de trois pouces en Quarré, dans laquelle eft un morceau de bois fem blablement quarré , de neuf à dix pouces de long, dans lequel eft monté le crochet de fer : c’eft ce qux s’appelle boite du crochet. Voyez les Planches de Me= ruiferie. L’écabli des Plombiers eft une table de bois foûte- nue par des treteaux placés de diftance en diftance:. il a à une de fes extrémités un moulinet , avec une fangle autour, garnie d’un crochet de fer. Cet érabli leur fert pour fondre les tuyaux fans foudure. Le moulinet & la fangle font deftinés à tirer des moules le boulon qui leur fert de noyau, lorfque la fonte eft faite. Voyez les Planches du Plombier. Celui des ailleurs d’habits eft une large table {us laquelle ils coupent les habits ; & lorfque la befogne eft taillée , ils montent fur cette table, fe croffent les jambes fous eux, & travaillent à coudre & à achever leurs ouvrages. L’établi des Bourreliers & des Selliers n’eft autre chofe qu’un deflus de table de quatre piés de lon- gueur, & d’un pié &z demi de largeur ; il eft mobile, & fe place fur une efpece de bahut dans lequel ils jettent les rognures de leurs cuirs : c’eft fur cette table que ces ovivriers coupent & taillent leurs cuirs avec le couteau à pié. ETABLI, part. terme de Marine dont onfe fert quel- quefois pour dire étre fitué & giflant, & ce en parlant d’une côte: par exemple, la côte du Perou & du Chi- li eft établie zord & fud , pour dire qu’elle eft fituée nord &c fud. (Z) * ETABLIR, v. a&, (Grammaire, ) terme fort ufité dans la fociété, où 1l a diverfes fignifications déter- minées par les expreflions qu’on y ajoûte, Voici les principales : 7 | Etablir un commerce avec des nations fauvages, c'eft convenir avec elles des conditions fous lefquelles on veut négocier ; des marchandifes qu’on prendra d'elles, & de celles qu’on prétend leur donner en échange. | Esablir une manufaëlure; C’eft, en conféquence des lettres patentes qu’on a obtenues, raflembler des ow« vriers & des matieres ; faire conftruire des machines ou des métiers convenables aux ouvrages qu'on veut entreprendre ; enfin occuper des fabriquans, ouvriers & artifans, qu'onaauparavantin{truits, aux. étoffes ou autres choes pour lefquelles on a obtenu le priviléce. Etablir un métier, c’eft le faire monter 8x le met- tre en état de travailler, y mettre des ouvriers qui ÿ travaillent aétuellement, Voyez MÉTIER. Etablir un comptoir, une loge, une faëtorie; c'eft mettre un marchand & des commis avec des mar- chandifes dans un lieu propre pour le négoce. Voyez ComPrToir , LOGE, FACTORIE. Etablir fe dit encore des fonds & des fecours qu’on donne à un jeune marchand pour commencer fon commerce, & des prenuers fuccès qu’il a dans le négoce. Ce Jerine homme commence à s'établir, ou /oz pere l’a bien établi. L Etablir une caille ou mont de piéré ; c’eft faire des fonds pour les payemens ou lés prêts qui doivent fe faire dans l’une ou dans Pautre. Didionn. de Com merce ; de Trévoux, & Charnbers. | Etablir une où plufieurs pierres , une ou plufiears pieces de bois; c’eft tracer deffus quelque marque avec lettre alphabétique qui deftine à chacune fa place. Dans les grands atteliers, chaque Appareilleur E T À a fa marque particuliere pour reconnoître Îles pierres de fon département. *ETABLISSEMENT , f. m. (Gramm.) Il {e prend dans tous les fens qu'a le verbe érablir dans la même matiere. Voyez ETABLIR: ETABLISSEMENT , (Juri/p.) fiabilimentum, figni- fioit ce qui étoit établi par quelqu'ordonnance ou réglement. Il y a plufñeurs anciennes ordonnances qui font intitulées écabliffemens, entr'autres celles de S$. Louis, en 1270. Voyez ci-après ETABLISSEMENS DE S. Louis. (4) | ÉTABLISSEMENT DES FI£ËFs, ffabilimentum feu- dorum; c’eft une ordonnance latine de Philippe-Au- gufte , datée du premier Mai 1209, faite dans une aflemblée des grands du royaume à Villeneuve-le- Roi, près de Sens. Cette ordonnance eft regardée par les connoïffleurs comme la plus ancienne des rois de la troifieme race, qui porte une forme conf- titutive; auparavant ils ne déclaroient leur volonté qu’en forme de lettres. Elle eft finguliere , 1°. en ce qu'au lieu d’affermir les fiefs, comme le titre femble l’annoncer, elle tend au contraire à les réduire, en ordonnant que quand un fief fera divifé, tous ceux ui ÿ auront part le tiendront nuement & en chef si eigneur , dont le fief relevoit avant la divifion; &c que sil eft dû pour le fiefdes fervices & des droits, chacun de ceux qui y auront part les payeront à proportion de la part qu'ils y auront: 2°. ce qui ef encore plus remarquable , c’eft qu’elle eft rendue non-feulement au nom du roi, mais aufli en celui des feigneurs qui s’étoient trouvés en l’aflemblée ; favoir le duc de Bourgogne, les comtes de Nevers, de Boulogne, & de Saint-Paul , le feigneur de Dam- pierre, & plufeurs autres grands du royaume qui ne font pas dénommés dans lintitulé. Voyez Ze re- cueil des ordonnances de la troifieme race | & M. de Boulainvilliers, /estres fur les parlemens , tome I. pag. 174. (4) ETABLISSEMENS DE FRANCE, V0ye? ci-après ETABLISSEMENS DE $. Louis. ÉTABLISSEMENS GÉNÉRAUX, étoient ceux que le roi faïfoit pour tout le royaume, à la différence de ceux qu'il ne faifoit que pour les terres de fon domai- ne : ces derniers n’étoient pas obfervés dans les terres des barons. Voyez Beaumanoir , chap. xlyiij. p. 265. (4 c A LUPE Treae SUR LES JUIFs: il y a deux otdonnances latines concernant les Juifs, intitulées ffabilimentum ; Vune de Philippe-Augufte , Pautre de Louis VIIL. en 1213. Voyez les ordonnances de la troi- fieme race , tome 1. (4) | ÉTABLISSEMENS - LE - ROI, font la même chofe que les érabliffemens de S. Louis, Voyez l’article fui- yant. ETABLISSEMENS DE S. Louis, font une ordon- nance faite par ce prince en 1270; elle eft intitulée Les établiffemens felon lufage de Paris 6 d'Orléans, & de court de baronie. M. Ducange fut le premier qui donna en 1658 une édition de ces établiffemens à la fuite de l’hiftoire de S. Louis par Joinville. Dans fa préface fur ces établiffemens , 1] dit que ce font les mêmes que Beau- manoir cite fous le titre d’écabliffemens - le - Roi ; ce qui fe rencontre en effet aflez fouvent. Dans un manufcrit de la bibliotheque de feu M. le chancelier Dagueffeau , il y a en tête de cette ordonnance , ci commence X effabliffemens , le roy de France jelon l’ufage de Paris, & d'Orléans & de Tou- raine 6 d'Anjou, & de l'office de chevalerie & court de baron , &c. M. de Lauriere, dans fes notes fur ces établiffemens , trouve ce titre plus jufte, étant évi- dent que les coûtumes d'Anjou, du Maine, de Tou- rame, & de Lodunois, ont été tirées en partie de ces établiffemens, Tome FI, E T A 3 Cette même ordonnance, dans uñ ancien repiftre wi eft à l’hôtel-de-ville d'Amiens, eft intitulée es établiffemens de France ; confirmés en plein parlement Par les barons du royaume, Mais Ducange & plufieurs autres favans préten- dent que ce titre eft fuppofé; que ces érabliffemens n'ont jamais eu force de loi, & qu’il n’eft pas vrai qu'ils ayent été faits & publiés en plein parlement: ils fe fondent, 1°, Sur ce que, fuvant Guillaume de Nangis au- teur contemporain , S. Louis étant parti d’Aigue- mortes en 1269, le mardi d’après la Saint-Pierre qui arrive le 29 Juin, il n’eft pas poffible que ces éca- bliffemens ayent été publiés en 1270, avant le départ de ce prince pour l’Afrique. 2°. Sur ce que ces érabliffemens ne font pas dans la forme des autres ordonnances, étant remplis de ci- tations, de canons du decret, de chapitres des decré- tales, & de plufeurs lois du digefte & du code, 3°. Ce qui eft dit dans la préface , que ces éra= bliffemens furent faits pour être obfervés dans tou- tes les cours du royaume , n’eft pas véritable ; car fuivant larticle 15 du livre I. le douaire coûtumier eft réduit au tiers des immeubles aue le mari poffé- doit au jour du mariage; au lieu que fuivant le té- moignage de Pierre de Fontaines & de Beaumanoir, le douaire coûtumier étoit alors de la moitié des im- meubles des maris, conformément à l’ordonnance de Philippe-Augufte en 1214, qui eft encore ob{er- vée dans une grande partie du royaume. On répond à cela, 1°. Qu'il eft conftant que S. Louis fut près de deux mois à Aigue- mortes fans pouvoir s’embarquer , 8c qu'il mourut en arrivant à Tunis, la même année qu'il partit d’Aigue-mortes : ainfi étant décédé le 25 Août 1270, 1l s'enfuit qu'il étoit parti en 1270 , & non en 1269, comme le dit Guillaume de Nangis ; ce qui eft une erreur de fa part , ou une faute des co- piftes. 2°, La preuve du même fait fe tire encore du tef- tament de S.Louis, fait à Paris & daté du mois de Février 1269 ; car le roi étant parti vers le mois d'Août fuivant , ce n’a pû être qu’en 1270. 3°. Quoique ces érabliffemens foient remplis de citations de canons, de decrétales, & de lois du di- gefte & du code, il ne s’enfuit pas que ce ne foit pas une ordonnance ; car de quelque maniere qu’elle ait été rédigée , dès que ces écabliffemens furent au- torifés par le roi, c’étoit aflez pour leur donner force de loi. Cette ordonnance n’eft même pas la feule où il fe trouve de femblables citations : celle que le même prince fit au mois de Mars 1268 , por- te (article 4.) que les promotions aux bénéfices fe- ront faites felon les decrets des conciles & les déci- fions des peres ; & l’on doit être d’autant moins fur- pris de trouver tant de citations dans ces ésabliffemens, que c’étoit-là lordonnance la plus confidérable qui eût encore été faite; que l’idée étoit de faire un co- de général, & que l’on n’avoit pas alors l’efprit de précifion & le ton d'autorité qui convient dans la légiflation. 4°.S: Louis en confirmant ces érabliffemens n'ayant pas dérogé aux lois antérieures, ni aux coûtumes éta- blies dans fon royaume, il ne faut pas s'étonner fi à Paris & dans plufeurs provinces le douaire coù- tumier a continué d’être de la moitié des immeubles du mari, fuivant l'ordonnance de Philippe-Augufte en 1214. Enfin ce qui confirme que ces érabliffemens furent revêtus du caractere de loi, c’eft qu'ils font cités non-feulement par des auteurs à-peu-près contem- porains de $. Louis, tels que Philippe de Beauma- noir, mais auf par des rois, enfans & fuccefleurs de S, Louis, entr'autres par Spessle Bel dans {es 1} 4 ET À lettres du 18 Juillet 1326, où il dit qu'en levant le droit d’amortiflement fur les gens d’églfe , il fut les veftiges de S. Louis fon bifayeul ; ce qui fe rapporte évidemment au chapisre cxxv du premier livre des établiffemens. | Toutes ces confidérations ont déterminé M. de Lauriere à donner place à ces érabliffemens parmi les ordonnances de la troifieme race. Ces établiffemens font divifés en deux livres. Le premier contient 168 chapitres, & le fecond en con- tient 42. Quoique les mœurs foient bien changées depuis cette ancienne ordonnance, elle fert cepen- dant à éclaircir plufieurs points de notre Droit fran- çois. Voyez les notes de M. Ducange, & celles de M. de Lauriere fur cette ordonnance. (4) ETABLURE, (Marine.) Voyez ÉTRAVE. ETAGE, { m. (Jurifpr.) eflagium feu flagtum , fi- gnifioit mai/on , demeure , réfidence. Le devoir de Zige étage étoit l'obligation des vaf- faux de réfider dans la terre de leur feigneur, pour garder fon château en tems de guerre. Cet érage devoit fe faire en perfonne par le vaf- fal, huit jours après qu'il en avoit été fommé, Il de- voit amener fa femme &c fa famille ; & faute par lui de venir, le feigneur pouvoit faifir fon fief. Le vaffal ne pouvoit retourner chez lui pendant la ligence, c’eft-à-dire pendant le tems qu'il devoit l'érage ; & S'il le devoit à plufeurs feigneurs dans le même tems, il le faifoit fucceffiyement ; ou bien pen- dant qu'il étoit à l’érage d’un côté, de l’autre il four- nifloit des hommes au feigneur. Quand les vaffaux n’avoient point de maifon dans le lieu , le feigneur devoit leur en fournir. Foy. l'ar- ticle 195 de la coûtume d'Anjou, & /e 145 de celle du Maine , &c 4e gloffaire de Lauriere au mot Erape. À ç 2 AGE, terme d’Architeüture ; on entend par ce mot toutes les pieces d’un ou de plufeurs apparte- mens, qui font d’un même plain-pié. Etage foterrain ; celui qui eft voûté & plus bas que le rez-de-chaufiée. Les anciens appelloient gé- néralement tous les lieux voütés fous terre, cripco- porticus &t hypogea. Etage au rez-de-chauffée, celui qui eft prefqu'au niveau d’une rue, d’une cour, ou d’un jardin. Etage quarré, celui où il ne paroït aucune pente du comble, comme un attique. Etage en galetas ; celui qui eft pratiqué dans le comble, & où l’on voit des forces, des fermes, & autres pieces, quoique lambrifé. (P) | ETAGE, (Jard.) {e dit d’un rang de branches, ainf ue d’un rang de racines placées horifontalement &c fur la même ligne. ETAGER , f. m. (Juri/prud.) ou EST AGIER , oz MANSIONNIER , c’eft-à- dire celui qui demeure dans le fief ou terre qu’il tient du feigneur, ou qui eft obligé d'y venir réfider pendant un certain tems, en tems de guerre. * ILeft parlé des éragers dans les coûtumes de Tours, Lodunois, Anjou, Maine, Perche, & Bretagne. Voyez ci-devant ETAGE. (4) DU ETAGER LES CHEVEUX, cerme de Perruquier ; c’eft tailler les cheveux de maniere que les plus hauts foient les plus courts, & les plus bas foient les plus longs, afin que quand ils font frifés, les boucles foient arrangées fans fe gêner les unes les autres. ETAGUE , ITAQUE , ETAQUE , ITACLE, 70yez ITAQUE. | ETAT, (Marine.) Voyez ETAY. : ET AIN ,( m, (ff. nat. Minéralog. & Métallurg.) fannum , plumbum album , Jupiter, &c. c'eft un mé- tal blanc comme l’arsent , très-flexible &c très-mou, qui,quand on le plie, fait un bruit ou cri ( ffridor) qui le carattérife, & auquel il eft aifé de Le diftinguer: c'eft le plus leger de tous les métaux; il n’eftprefque point fonore quand ïl eft fans alliage, mais il le de: vient quand il eft uni avec d’autres fubftances métal- liques. C’eft donc une erreur de croire, comme font quelques auteurs, que plus l’ézir eft fonore., plus il eft pur. La pefanteur fpécifique de l’érain eft à celle de l’or comme 3 eft à 8. ee Les mines d’éuin ne font pas fi communes que celles des autres métaux ; il s’en trouve cependant en plufieurs pays , tels que la Chine, le Japon, les In- des orientales. Celui qui nous vient de ces derniers pays eft connu fous le nom d’évain de Malaque ; on lui donne la forme de petits pains où de pyramides tronquées ; ce qui fait que les ouvriers le nomment étain en chapeau. Il s’entrouve auflien Europe; il ÿena des mines en Bohème: celle de Schlakenwald en four- nit une aflez petite quantité, & pafle pour contenir auffl dé l'argent. Maïs de tous Les pays de l'Europe, il n’yenapointquiait des mines d’ézizaufli abondantes & d’une auffibonne qualité, que la Grande-Bretagne ; elle étoit fameufe pour fes mines d’éziz dans l’anti- quité la plus reculée : on prétend que les Phéniciens en connoïfloient la route , 8 y venoient chercher ce métal; le favant Bochart croït même que le nom de Bretagne eft dérivé du nom fyrien Fararanac, qui fi- gnifie pays d’eétain. Voyez le dif. de Chambers.Ce font les provinces de Cornotailles & de Devonshire qui en fourniflent fur-tout une très-grande quantité. Les mines d’érain ; comme celles des autres mé- taux, fe trouvent oupar filons, ou par males, ou par morceaux détachés. Voyez l'article FILON G MINE. Dans la province de Cornouailles , les filons de mi- nes d’éfain {ont environnés d’une terre rougeÂtre fer. rugineufe, qui n’eft yraifflemblablement que de lo- chre, Ces filons ne font quelquefois que légerement couverts de terre, & viennent même fouvyent aboutir & fe montrer à nud à la furface ; mais quand ils font cachés dans le fein des montagnes, les mineurs cher- chent aux environs de l'endroit où ils foupçonnent une mine d’érain, s'ils ne trouveront point ce qu’ils appellent en anglois shouds : ce font des fragmens du filon métallique, qu'ils fuppofent en avoir été déta- chés, foit par la violence des eaux du déluge univer- fel, foit par les pluies, les torrens, ou d’autres révolu- tions particulieres. On diftingue ces fragmens de mi- ne des autres pierres, par leur pefanteur : on dit qu’- ils font quelquefois poreux & femblables à des os calcinés. Quandils en trouvent, ils ont lieu de croire qu’ils ne font point éloignés du filon. Ils ont encore plufieurs manieres de s’aflürer de la préfence d’une mine d’étain; mais comme elles font communes À tou. tes les mines en général, nous en parlerons aux mors MINE, FILON, &c. La dire&tion des filons de mine d’éxiz de Cor- nouailles & de Devonshire , eft ordinairement de l'occident à lorient, quoique dans d’autres parties d'Angleterre les filons aillent ordinairement du nord au-fud ; pour lors conftamment ces filons s’enfoncent vers le nord perpendiculairement de trois piés fur huit de cours. Les mineurs ont remarqué que les cô- tés latéraux de ces filons qui vont de l’occident à lo- rient , ne font jamais perpendiculaires, maïs toûjours un peu inclinés, Voyez Les Tranfaitions philofophiques, n°. 69. Quand on a découvert une mine d’érair,onen fait l'exploitation de même qu'aux mines des autres mé- taux, c’eft-à-dire qu'on y pratique des puits, des ga- leries , des percemens, &c. Voyez ces différens articles. On trouve dans les mines d’érain de Cornoüaïlles des cryftaux polygones, que les mineurs appellent Cor- z5h diamonds, diamans de Cornoüailles. Il paroît qu'on peut les regarder comme une efpece de sre- nats : en effet on dit qu'ils font d’un rouge tranfparent comme le rubis ; d’ailleurs ils ont aflez de dureté ET À pour pouvoircouper le verre, Foyez des Tranfathors rhilofophiques , n°.138. ve Il ya en Saxe dans le diftriét d’Altemberg unemi- ne d'érain en mafle que les Allemands nomment ockwerck ; qui peut être regardée comme un pro- dige dans la Minéralogie ; cette mine a environ 20 toiles de circonférence , & fournit de la mine d’éreiz depuis la furface de la terre jufqu'à 150 toifes de profondeur perpendiculaire. La mine d’érain {e trouve auf par morceaux dé- tachés, & même en pouffere, & pour lors elle eft répandue dans les premieres couches de la terre: c’eft ce que les mineurs allemands nomment /éyfez- werck , & les anglois shoads. À Eybenftock en Saxe 1l ya une mine de cette efpece; on fouille le terrain l’efpace de plufeurs lieues jufqu’à fix & même dix toiles de profondeur, pour Le laver & en féparer la partie métallique: on y trouve des fragmens de mi- ne de fer & de mine d’éraën , & de ces munes en pou- dre; on y rencontre auf quelquefois des paillettes d’or. Dans d’autres endroits du même diftriét on ne fouille le terrain, pour le laver, qu’à quatre toifes de profondeur, parce que le roc fe trouve au-def- fous, & l’on ne va pas plus avant; peut-être l'expé- rience a-t-elle appris qu'il ne s’y trouvoit rien ; ce- pendant , fuivant les principes des Anglois., les frag- mens de mine d’ésain (shoads) annoncent le voifinage d’un filon , dont ils fuppofent toûjours que ces frag- mens ont été détachés. Quoiqu'il en foit, on fait un canal le long de ce terrain dans lequel on fait venir de l’eau d’une hauteur voifine, afin qu’elle puiffe en- traîner la partie terreftre inutile ; on place des fagots & brouflailles dans le fond du canal pour arrêter la artie minérale qui peut être utile ; des laveurs en Ps à épreuve de Peau defcendent dans le canal, & remuent avec des rateaux garnis de dents de fer; ils jettent hors du canal tout ce qui fe trouve de pierreux ; des jeunes garçons choififlent &.mettent à part ce qui eft bon. On enleve tous les jours avec une pelle la matiere pefante qui s'eft dépofée au fond du canal, & que l’eau n’a ph emporter; on la pañle par un crible de fil-de-fer; on regarde ce qui a pañlé comme de la mine prête à fondre ; on porte le refte au boccard pour y être mis en poudre & lavé. Ces détails font tirés de deux mémoires de MM. Saur & Blumenftein, inférés dans le traité de la fonte des mines de Schlutter, publié en françois par M. Hellot, de l'académie des Sciences, some II. pag. 591 & 587. & 588. Voici, fuivant la minéralogie de M. Wallerius, les différentes efpeces de mines d’écain connues. 1, L’érain vierge ; c’eft de l’érair qu’on fuppofe n’é- tre point minéralifé ni avec le foufre, ni avec l’arfe- nic, mais qui eft tout pur &c fous fa forme métallique. On le dit très-rare; cependant plufeurs naturalftes nent l’exiftence de lérain vierge, & prétendent que les morceaux de mines fur lefquels on voit des grains d’érain tout formés, ne préfentent ce métal que parce qu’on a employé le feu pour détacher la mine; opé- ration dans laquelle Pésaiz qui étoit minéralifé au- paravant, a été réduit, c’eft-à-dire mis dans Pétat métallique. 2°. Les cryflaux d'étain, que les minéralogiftes allemands nomment zi22- graupen : c’eft de l’érain combiné avec du fer & de l’arfemic , quia prisun arrangement régulier fous la forme de cryftaux à plufieurs côtés, dont les facettes font très-luifantes ; les fommets des angles font tronqués. Ces cryftaux {ont , à l'exception des vrais métaux, la fubftance la plus pefante qu'il y ait dans la nature. M. Nicholls dit que leur pefanteur fpécifique eff à celle de l’eau, comme 90 + eft à 10; ce qui a lieu de furprendre, d'autant plus que lésain eft le plus leger des mé- taux. Voyez les Tranfaüions philofophiques , r° 403. E T À ÿ Is ne font point durs; la couleur en eft owblanche, Où jaune , ou rougeâtre, ou brune , ou noire; ils font ordinairement tranfparens & de différentes gran- deurs. | | ÿ 3°. La ruine d’érain appellée Z'wirrer par les Al- lemands 3 C’eft de l’érair: minéralifé avec le fer & l’arfenic. On ne peut point y remarquer de figure réguliere; c’eft un amas despetits cryftaux difficiles à diftinguer, .qui font renfermés dans des matrices ou minieres de différente nature. Il paroît qu’elle ne difére de la précédente, que par la petitefe'de. fes .cryflaux, & qu’elle ne doit em être regardée que comme une variété. C’eft la mime d’éreir la plus commune. | 4° La pierre d'évain ; c'eft de la mine d’érair qui a pour matrice de la pierre de différente efpece , qu en mafque les petits cryflaux ; ce qui fait qu’elle reflemble à des pierres ordinaires ; dont on ne,pent la diflinguer que par fa pefanteur, 8 par l’odeur atfénicale que le few en fait partir. 5°. La mine d’étain dans du fable : ce font des par. ticules de mine d’éain qui fe trouvent mêlées avec de la terre ou du fable, qu’elles rendent noir. Ileft aifé de voir que ces deux dernieres efpeces ne devroient être regardées que comme des variétés dés deux précédentes; ainf il n’y a réellèément que deux efpeces de mines d’észir : ce font celles des 7° 2 & 3. La premiere paroït purement chimérique. M. Cramer, dans fa docimafte , parle d’une mine d’érain blanche, demi-tranfparente, très-pefante, qui reflemble aflez à dufpath À l'extérieur: c’eft, felon lui, de toutes les mines d’écain la plus rare. Cette mine eft, felon toute apparence , dela feconde efpece. On peut encore mettre les grenats au nombre des mi- nes d’érain, attendu que ces pierres en contiennent fouvent une portion, quoique très-petite. En géné- tal: on peut dire que les mines d’érais font compo- fées d’étzin, de beaucoup de parties ferrugineufes, d’une grande quantité d’arfenic , 8 d’une terre fub- tile, facile à vitrifier ou à réduire en fcories. Lamine d’érain fe trouve dans des pierres de toute efpece comme les mines des autres métaux ; M. Henckelremarque cependant que c’eft le talc blanc où argent de chat &t la fléatite, qu lui fervent de ma- trice , au lieu qu'il eft rare que ce foit du fpath. Lamine d’érair eft quelquefois engagée dans des roches fi dures , que les outils des ouvriers ne peu- vent la détacher ; & il y auroit de l'inconvénient à la faire fauter avec de la poudre ; pour lors on fait brüler du bois contre le roc, afin que le feu venant à la pénétrer la rende plus tendre & plus facile à dé- tacher ; la mine qui a été tirée de cette maniere ne peut être écrafée fous les pilons du boccard , qu’a- près avoir été préalablement calcinée, parce que fans cela elle feroit trop dure. Voici une mamiere de faire l’effai d’une mine d’e- tain ; elle eft de M. Henckel. Prenez une partie d’é tain noir, C’eft-à-dire de mine d’érzir grillée pulvé- rifée & lavée, où bien de mine d’ésain réduite en poudre, de potafle ou de flux noir deux parties, de poix un quart, & d'huile de lin un huitieme : faites fondre brufquement Le tout dans un creufet à grand feu. Voyez les élémens de Minéralogie de M, Henckel, part. II, Les mines d’érainfetrouvent prefque toñjoursunies avec un grand nombre de fubftances, qui les rendent difficiles à traiter ; telles font fur-tout les mines de fer arfénicales & réfractaires, que les Allemandsnom- ment wolffram , eifemmahl, fchirl, &cc. les ochtes, les pyrites: cela vient de la facilité avec laquelle le fer s’unit avec l’érar dans la fufon. Un autre obfftacle vient encore des pierres réfractaires ; c’eft- à - dire non- calcinables & non- vitrifiables, qui accompa- gnent très - fréquemment la mune d’érain : telles que 6 E T À le tale, le mica, la pierre de corne (ornflain), &cc. Les mines d’ésaix d'Angleterre fe trouvent fré- quemment jointes avec une fubftance, que les mi- neurs anglois appellent #w#dic ; ce n’eft autre chofe qu’une pyrite arfénicale, &c qui eft quelquefois un peu cuivreufe. Avant donc que de traiter la mine d’érain au fourneau, il faut: fa {éparet autant qu’- on peut de toutes ces mâtiéres étrangeres, qui ren- droient l’étairimpur & lui ôteroient fa duétilité. On fe fert pour cela du bocard, on y fait écrafer la mine, & l’eau des lavoirs entraine les particules étrangeres, tandis que la mine d'érain qui, comme on l’a remar- qué , eft très-pefante, refte au fond du lavoir. Les An- lois nomment black-in , étain noir, lamine d’érain, nil a été ainfi préparée : lesAllemands la nom- ment {innfletn, pierre d’étain. Mais ce lavage ne fuf- fit pas; il faut encore outre cela que la mine, après avoir été écrafée & lavée, foit grillée, afin d'en dé- gager la partie arfénicale. Ce grillage fe fait dans un fourneau de reverbere qui eft quarré: ce fourneau eft fermé en-haut par une large pierre qui a 6 piés de long 8c 4 piés de large , au milieu de laquelle eft une ou- verture quarrée d’un demi-pié de diametre. Cette pierre fert à en couvrir une autre femblable , qui eft à un pie de diftance au-deflous ; maïs cette derniere eft moins longue qu’elle d’un demi-pié , parce qu'il ñe faut point qu’elle aille jufqu’au fond du fourneau, attendu qu’il faut y laifler une ouverture pour le paf fage de la flamme qui vient de deflous , où l’on fait un grand feu de fagots. La partie antérieure reflem- ble à un four ordinaire à cuire du pain. Lorfque ce fourneau a été bien échauffé , on verfe l’érain noir par l'ouverture quarrée qui eft à la pierre fupérieure, il tombe fur la feconde pierre; & quand elle en eft couverte à trois ou quatre doigts d’épaifleur, on bou- che l'ouverture de la pierre fupérieure , afin que la flamme puifle rouler {ur la matiere qu’on veut gril- ler. Pendant ce tems, un ouvrier remue continuelle- ment cette matiere avec un rable de fer, afin que tout le mundic {oit entierement confumé ; ce que l’onre- connoit lorfque la flamme devient jaune, & par la diminution des vapeurs: cartant que le zndicbrüle, la flamme eft d’un bleu très-vif. Pour lors on pouffe toute la matiere grillée dans le foyer du fourneau ar l'ouverture qui eft au fond, & l’on retire le mê- lice de mine, de charbon & de cendres , par une ouverture quarrée qui eft pratiquée à un des côtés du foyer. On laifle refroidir le tout à Pair libre pen- dant trois jours ; ou fi l’on n’a pasle tems d’attendre, on l’éteint avec de l’eau, & ce mêlange devient com- me du mortier. Il faut l’écrafer de nouveau, avant que de le porter au fourneau de fufion. Voy. les Tran- faitions philofophiques ; n°. 69. Cependant il y a des mines d’éfain aflez pures pour pouvoir être traitées au fourneau defufon, fans qu’il foit befoin de les griller auparavant. Quelquefoisles mines d’érain font mêlées d’une fi grande quantité de parties ferrugineufes, qu’il eft impoffble de les en féparer entierement par le lavage; celle de Breyten- brunn en Saxe eft dans ce cas. Voici, fuivant M. Saur, la maniere dont on s’y prend pour la dégager de fon fer : elle eft aflez finguliere pour trouver place ici. D'abord on brife la mine en morceaux à-peu- près de la groffeur d’un œuf, puis on la calcine &c on l’écrafe au boccard; on la lave enfuite & on la calcine de nouveau dans un fourneau de reverbere: après quoi on met environ jo livres de la mine ainfi préparée dans une bañline, & on pañle par-deflus un aimant pour attirer le fer qu’on fépare à mefure que l’aimant s’en eft chargé; & l'on continue cette longue manœuvre jufqu’à ce qu’on ait enlevé le fer autant qu'on a pû. La même chofe fe pratique en Boheme; mais il fuit que la mine ait été pilée & la- vée, fans qu'il foit befoin qu’elle foit calcinée, Foy. b ET A le traité dé la fonte des mines de Schlutter, page 5864 come IT, de [a traduétion françoife. Dans les mines d’éreir d'Allemagne, on fait en- core tirer parti du foufre & de l’arfénic qui font dé- gagés dans la calcination de la mine ; pour cet effet la fumée qui en part eft reçue dans une cheminée de 49 ou $o toifes de longueur qui va horifontalement, &t aux parois de laquelle l’arfénic s'attache fous la forme d’une pouffere blanche. La même chofe fe pratique pour la calcination des mines de cobalt. Voyez l’article COBALT, Lorfque la mine d’érais a été préparée de la ma- mere qui vient d’être décrite, elle eft en état d’être traitée au fourneau de fufon. Nous allons donner le détail de cette opération, telle qu’elle eft décrite dans l'ouvrage allemand de Rœffler, qui a pour titre, Jhecalum Metallurgie politiffimum. Le fourneau où l’on fait fondre l’érain, eft un fourneau à manche de la même efpece que celui où l’on traite la mine de plomb, excepté quil eft plus petit, parce que l’éair fe fond plus aifément que le plomb. Il faut que le fol du fourneau foit élevé d’en- viron quatre piés au-deflus du rez-de-chauflée de l’at- telier ou de la fonderie ; le fol du fourneau fe fait avec une table de pierre fur laquelle on éleve les murs latéraux : le tout doit être fait avec des pierres propres à réfifter au feu, que l’on maçonne avec de la glaife mêlée d’ardoife pilée ; en fermant le four- neau on laiffe par-devantun œil ou ouverture d’envi- ron deux doigts,pour que l’érain & {es fcories puiffent tomber dans la cafle ou le baflin que l’on aura pra- tiqué à environ undemi-pié au-deflous de l’œil pour les recevoir. Il faut que l'ouverture par où pañle la tuyere foit difpofée de façon que le vent des {oufflets aille donner direétement fur l'œil par où la matiere fondue doit pañler; quand la fufon fera entrain, l’étain fondu tombera dans la cafle accompagné de fes fcories, que l’on a foin d’enlever continuelle- ment, & de mettre à part. L’érain fe purifie dans cette cafle; on a foin qu'il y foit toûjours tenu en fufon ; c’eft pourquoi on y met continuellement de la poufliere de charbon, & il faut que le vent des foufflets vienne donner {ur cet écaiz fondu en paffant par l’œil du fourneau ; c’eft pour cela que la cafe ne doit point être placée trop bas au-deflous de l’œil. Sur le rez-de-chauflée, au pié de la caffe, onpratique un creux ou fofle oblongue que l’on forme avec de la pierre & de la terre grafle ; ce creux fert à mettre l’érain pur que l’on puile à mefure avec des cuilleres de fer dans la cafe, quand il s’eft un peu refroidi; ou bien on fait un trou de communication de la cafe. avec la foffe ; & quand la caffe eft affez pleine, on débouche ce trou pour laïffer couler l’éraiz fondu qui va s’y rendre. Au haut du fourneau on pratique une chambre fublimatoire (c’eft une efpece de caïffe de bois que l’on enduit par-dedans avec de la terre grafle, pour que le feu ne puifle pas s’y mettre); on y laiffe quelques ouvertures ou fenêtres pour le pañlage de la fumée : cette chambre eft deftinée à re- tenir les particules les plus légeres de la mine d’érairz que la violence du feu pourroit entraîner en l'air; puotRees on forme une feconde chambre au-def- us de la premiere; on fait des deorés à côté du four- neau pour pouvoir monter à ces chambres, & une porte pour pouvoir charger le fourneau. On ne fe fert point de brafque, c’eft-à-dire d’un enduitde terre & dé charbon pour garnir ces fourneaux ; on y em- ploye feulement un mélange de terre grafle & d’ar- doife pilée. Pour charger le fourneau, on y met des couches alternatives de charbon & de mine mouil- lée ; on fait fondre brufquement, afin que l’érain n’ait point le tems de fe calciner, de fe diffiper ou de fe réduire en chaux, &c pour qu'il ne fafle, pour ainfi dire, que pañler au-travers du fourneau ; la mine qui eft en gros morceaux ne doit pas être confondué avec celle qui a été réduite en une poudre fine; il faut donc l’aflortir & fe régler là-deflus pour faire aller lé vent des fouflets: on donne, par exemple, un vent très-fort pour La mine la plus groffiere & pour les fcories auon remet au fourneau; mais on le mo- dére à proportion que la mine eft plus ou moins f- ne. Lorfque la mine eft d’une bonne efpece , & qu'- elle a été dûment préparée &z féparée des fubflances étrangeres, on'a de l'éreir très-coulant, c’eft-à-dire qui entre bien en fuñon, & qui eft très-duétile &c très-doux; mais fi l’on n’a pas eu toutes les précau- tions néceflaires dans le travail préliminaire, 8 qu'on n'ait pas fufifamment divifé la mine avant de la por- ter au fourneau, on aura un éair aîigre & caflant comme du verre. Le moyen d’y remédier, fera de le remettre au fourneau avec des fcories qui lui enle- veront fon aigreur, & le rendront tel qu'il doit être. Les fcories qu'on a enlevées de deflüs Pérair fondu fe jetrent dans l'eau, & on les écrale pour les re- mettre au fourneau avec les crafles qui peuvent contenir encore des parties métalliques. Les fcories peuvent être employées jufqu'à deux on trois fois dans la fonte, pour achever d’en tirer l'érair qui pent y être refté. Voïlà la maniere dont le travail de l’ééair fe fait en Allemagne; on ignore fi elle eft la même en An- gleterre, d'autant plus que les Anglois n’en ont don- né nulle part un détail fatisfaifant, quoique. per{on- ne ne füt plus à portée de jetter du jour fur cette matiere ; s'ils ont eu peur de divulguer leur fecret aux autres nations, leur crainte eft très:mal fondée, puifqu’en donnant la maniere d’opérer , ils ne donne- soient pas pour cela les riches mines d’ésair dont leur pays eft feul en poffeffion. Quoi qu’il en foit, voict le peu qu’on a pû découvrir de leurs procédés ; 1l a été commuüniqué à M. Rouelle, de l'académie royale des Sciences, à qui l’on en eft redevable. Le fourneau de fufon paroît être à-peu-pres le même que celui de Roœffler; Péraiz au fortir du four- neau eft reçu dans une cafe où il fe purifie ; quand cette cafle eft remplie, on laifle au métal fondu Le tems de fe figer, fans cependant fe refroidir entiere= ment, pour lors on frappe à grands coups de mar- teau à fa furface ; cela fait que l’érain fe fend & fe divife en morceaux qui reflemblent aflez aux gla- cons qui s’attachent en hyver le long des toits des maifons: c’eft-là ce qu'on appelle étain vierge ; l’ex- portation en eff, dit-on, défendue fous peine de la vie par les lois d'Angleterre. s On fait enfuite fondre de nouveau cet éfain ; on lé coule dans des lingotieres de fer fondu fort épaif- fes ; elles ont deux piés & demi de long fur un pié de large, & un demi-pié de profondeur. Ces Hin- goticres font enterrées dans dufable, qu’on a foin de bien échaufler. Après y avoir coulé l’éur , on les couvre de leurs couvercles qui font auf de fer. On laïfle refroidir lentement ce métal pendant deux fois vinet-quatre heures. Lorfqu'il eft tout-à-fait refroi- di, on {épare chaque lingot horifontalement entrois lames, avec un cifeau & à coups de maillet. La lame fupérieure eft de l’éraiz très-pur, & par conféqment fort mou; on y joint trois livres de cuivre au quin- tal, afin de lui donner plus de corps. La feconde la- me du lingot qui eft celle du milieu, eftde l'ésaiz plus aigte ; parce qu'il eff joint à des fubftances étrange- res, que Île travail n’a point pù entierement en dé- ager: pour corriger cette aigreur, on Jomt ca li- vres de plomb fur un qüintal de cet éczin. M. Geof- froi dit qu'on y joint deux livres de cuivre, La troi- fieme lame eft plus aigre encore , & l’on y joint neuf * Bivres de plomb, ou dix-huit, fuivant M. Geoffroi , fur un quintal ; alors on fait encore refondre le tout ; on le fait refroidir promptement : c’eft-là Peraix or- E T À 7 dinaire qui vient d'Angleterre. On voït pat-lx qu'il n'eft pas auf pur qu'on fe l’imagine , & qu'il eft déjà allié avec du cuivre & du plomb avant que de fortir de ce pays, Les Potiers-d’étain allient leur éir avec du bif- muth Où éfain de glace. Ceux de Paris mêlent du cuivre &c du régule d'antimoine avec l’ésaiz de Ma- laque; enfuite dequoi quand ils en veulent former des vafes ou de la vaïffèlle, on le bat fortement à coups de marteau, afin de rendre cet alliage fonore. C’eft ce qu'on appelle écroiir lérain: | Après avoir décrit les principaux travaux de lé tain ; nous allons parler de fes propriétés & des phé- nomenesqu'ilpréfente. L’ésains’unit facilementavec tous les métaux; mais il leur Ôte leur du&tilité, &c les rend aigres & caflans comme du verre: c’eft cette mauvaile qualité de l'érair qui la fait appeller par quelques chimiftes, diabolus metallorum. Un orain d'écairfuffit, fuivant M. Wallerius, pour ôter la mal= léabilité à un marc d’or; la vapeur même de l’ésair, quand 1l eff expofé à laétion violente du feu, peut produire le même effet: 1l le produit cependant moins fur le plomb, que fur les autres métaux. Voyez Cra- mer, £ome 1. page Go. Urbanus Hiærne, rome Il. pag. 92 & 102 ; & le laboratoire chimique de Kunckel. L’érain entre en fufion au feu très-promptement ; quandil eftfondu, il fe forme à fa furface une pellicule qui n’eft autre chofe qu’tine chaux métallique. Cette chaux d’érain s'appelle posée ; elle fert à polir lever: re, &c. Voyez POTÉE. Si on expof@l’eszin au foyer d’un miroir ardent, il répand une fumée fort épaifle, & fe réduit en une chaux blanche, légere & fort déliée; en continuant, il entre en fufion, & forme des petits cryftaux fem blables à des fils, Foyez Geoffroi, materia medica, page 283. tome I. Si on fait fondre enfemble parties égales de plomb & d’étair , en donnant un feu violent, l’ésain {e {6- pate du plomb pour venir à fa furface, y brûle en fcintillant , & donne une fumée comme feroit une plante. Dans cette opération, l'éaiz {e réduit en une chaux, &€ prend un arrangement fymmétrique ftrié ; mais il faut pour cela que l’opération fe fafle dans un creufet découvert, parce que le contaét de Pair eft néceflaire pour qw’elle réuffifle. Cette prépara- tion s'appelle écain fulmine fur le plomb ; elle donne une couleur jaune, propre à être employée fur la por: celaine & dans l'émail. L’érain entre dans la eompoñtion de la foudure pour les métaux mous, Voyez l'arr, SoupbuRrs. Il en: tre auffñ dans la compofition du bronze, Foyez BRON- ZE. Pour lors on lallie avec du cuivre, Si on fait fondre enfemble quatre parties d’érair & une partie de régule d’antimoine, & que fur deux parties de cet alliage on en mette une de fer, on ob: tiendra une compofñtion métallique très-dure, qui fait feu lorfqu’on la frappe avec le briquet: f on en met dans du nitre en fufñon , 1l fe fait un embrafe- ment très-violent. Cette expérience eft de Glauber. En faifant fondre une demi-ivre d’éseir , y joi- gnant enfute une once d’antimoine & une demi-once de cuivre jâune, on aura mne compoñition d’ésuirz qui réflemble à de Pargent. On peut y faire entrer du bifmuth au lieu de régule,, & du fer ou de l'acier, au lieu de cuivre jaune; le fer rend cètte compoñ- tion plus dure & plus difficile à travailler ; mais elle en eft plus blanche. Ce procédé éft de Henckel. M. Wallerius rapporte un phénomene de l’éxis qui mérite de trouver place ici: « Si on met du fer » dans de l’érain fondu , ces deux métaux s’allient » enfemble ; mais f: on met de l’éziz dans du fer fon » du, le fer &c l’érair fe convertiflent en petits slo- » bules, qui crevent & font explofion comme des » grenades ». Voyez la minéralogie deWallerius , tons. TI. pag. 546, de la traduilion françoife, 8 E T A Sion fait un alliage avec de l’ésaiz, du fer | & de larfenic, on aura une compoñition blanche, dure, un peu caffante, propre à faire des chandeliers, des boucles, &c. mais elle noircit à l'air, après y avoir été expofce quelque tems. | rain s'attache extérieurement au fer & au cui- vre: c’eft fur cette propriété qu’eft fondée l’opéra- tion d’étamer. Voy. cet article, &t celui deFER-BLANC. L’érain fait une détonation vive avec le nitre ; il donne une flamme très-animée : par cette opération il fe réduit en une chaux abfolue. Cinq parties d’é- tain en grenailles, mêlées avec trois parties de fou- fre pulvérifé & mifes fur le feu, s’enflamment vive- ment , & l’érain fe réduit en une chaux d’une couleur de cendre; fon continue la calcination, cette chaux devient brune comme de la terre d'ombre; fi on lex- pofe au fourneau de reverbere , elle devient d’un blanc fale ou jaunâtre: cette chaux d’érin fondue avec du verre de plomb & du fable, forme un verre opaque d’un blanc de lait, propre aux émaux &t à faire la couverte de la fayence. Foy. Les articl, EMAIL 6 FAYENCE. Il eft très-dificile de réduire la chaux de lérair , lorfqw’elle a été long-tems calcinée. Il y a lieu de foupçonner qu’une partie de ce métal a êté détruite par la calcination. L’érain {e diffout, mais avec des différences, dans tous les acides. Il fe diflout dans Pacide vitriolique, de la maniere fuivante: on met deux ou plufeurs parties d'huile de vitriol fur une partie d’ecair dans un matras, & on fait évaporer le mélange jufqu'à fic- cité ; on reverfe de l’eau iur le réfidu, & en donnant un degré de chaleur convenable, 1l fe met en diflo- lution. Sion verfe de l’alkali volatil dans cette diflo- lution, il fe précipite une poudre blanche qui, felon Kunckel, montre des veftiges de mercure. . L’efprit de nitre diflout l’écaiz, mais il faut qu'ilne foit point trop concentré. Cette diflolution eft d'un grand ufage pour la teinture en écarlate, parce qu'- elle exalte confidérablement la couleur de la co- chenille, & produit la couleur écarlate, ou le pon- ceau: mais pour réufflir il faut que la diffolution de l’érain dans l’eau-forte fe fafle lentement ; parce qu'il eft important de ne pas laïffer difliper la partie mo- bile de l’acide nitreux qui part lorfque la diffolution {e fait trop rapidement: rien n’eft donc plus à propos que d’affoiblir le diffolvant. L’érain diflous dans l’eau régale, forme une mañle vifqueufecomme de la glu,opaleë& blanchâtre. Quand ce métal eft allié avec du cuivre, la diflolution de- vient verdâtre: mais pour que la diflolution réufffle il faut, fuivant Caffus, que l’eau régale foit compo- fée de parties égales d’efprit de fel marin &c d’acide nitreux ; ou, felon M. Margoraf, de huit parties d’ef- prit de nitre & d’une partie de {el ammoniac: pour lors il fe précipite une poudre grife, qui eft de l’arfe- nic ; furquoi l’on remarquera qu'il eft très-dificile de féparer cette fubftance de l’ézir par la voie feche; il faut avoir recours à la voie humide. Le vinaigre diftillé agit auf fur lésaiz, mais diffi- cilement ; l’alkali fixe diflous dans l’eau, l'attaque lorfaw’il eft en limaille, L’éair s’unit facilement avec le foufre, & de cette umion il en réfulte une mafle firiée comme l’antimoine, fragile & difiicile à fon- dre. Il eft diffous parfaitement par Phepar fulphuris. L'érain s’amalgame très-bien avec le mercure, & fait avec lui une union parfaite : c’eft fur cette propriété qu’eft fondée l'opération d’étamer les pla- ces. Voyez l'article GLACES. Pour faire le beurre d’étain ou étain corne, on fait un amalgame compofé departies égales d’érain &r de mer- cure; à une partie de cet amalgame, on joint trois parties de fublimé corrofif, on diftille ce mélange : alors l'acide du {el marin abandonne lemercure pour E T À s’umr avec l’érain, 8 le rend volatil, Cette liqueur répand continuellement des vapeurs blanches : on Pappelle Zqueur fumante de Libavius. Les Alchimif- tes font ufage de cette liqueur pour la volatilifation de l'or. Mais parmi les phénomenes que préfente l’ésain, il n’en eft point de plus remarquable que celui par lequel on obtient la précipitation de l’or en couleur pourpre. Cette opération fe fait en mettant tremper des lames d’ésair bien minces & bien nettes dans une diflolution d’or, dans l’eau régale étendue de beau- coup d’eau: pour lors il fe fait un précipité d’un rouge foncé ou pourpre très-beau. Ce précipité dûüement préparé, peut fervir à donner de la couleur aux ver- res, aux pierres précieufes faétices, aux émaux, à la porcelaine, &c. Il y a beaucoup d’autres façons de la préparer, quil feroit trop long de rapporter ici. Celle que nous venons d’indiquer eft celle de Caf- fius, chimifte allemand. L’ésair ainfi uni avec la dif- folution d'or fans être édulcorée , peut teindre er pourpre la laine blanche , les poils, les plumes, les 06, Gc, en les faifant tremper dans de l’eau chaude, où l’on aura mis un peu de la diflolution qui vient d’être décrite. Voyez Juncker, confpe&us chemie , tab. xxxvi. p. 966. La diflolution d’érair ayant la pro- priété de donner une couleur pourpre avec la dif folution de lor , il n’eft point de moyen plus sûr pour éprouver sl y a de l’or mêlé avec quelqu’au- tre matiere ; parce que pour peu qu'il y en ait , la dif folution d’ésain verlée dans la diflolution d’or ne manquera pas de le déceler. M. Henckel, dans fon traité intitulé f/ora farurni- Jans , dit que plufieurs auteurs ont cru qu’on pouvoit tirer de l’érain du genêt (genifla) ; il cite à ce fujet un ouvrage qui a pour titre af#ronomia inferior , dans le- quel on rapporte la lettre d’un habile apoticaire de Baviere, qui prétend qu'ayant « brûlé du genêt pour » en avoir le fel, & en ayant mis la cendre dans un » creufet, elle entra en fufion & fe convertiten écain ; # que craignant qu'il ne fe füt par hafard gliflé quel- » que particule d’ésairz dans fon creufet, 1l avoit re- » commencé l’opération dans un nouveau creufet &c » avec de nouveau genêt, & qu'il avoit eu le même » fuccès ». M. Henckel femble ajoûter foi à ce phé- nomene, & continue « qu'il n’eft point impoñlible » que le genêt, ou une autre plante, ne fe charge de » quelques particules désir, attendu que ce métal » eft poreux, volatil, & très-chargé du principe in- » flammable ». Tollius rapporte un fait à-peu - près. femblable dans fes epiflolæ itinerariæ , & s'appuie d’A- lonfo Barba. Quoi qu’il en foit de toutes ces différen- tes autorités, c’eft à la feule expérience à faire voir ce qu’on doit en penfer. T'outes les propriétés de l’ésaiz dont nous avons parlé dans cet article , ont fait conclure à quelques chimiftes que ce métal étoit compolé 1°. d'une terre alkaline ou calcaire : ce qui le prouve, c’eft la difi- culté qu’on éprouve à vitrifier l’érair : en effet, ja- mais fa chaux ne fe vitrifie fans addition ; & quand. elle eft mêlée avec du verre, elle le rend opaque 8 laiteux, ce qui marque qu'il ne fe fait point une vraie combinaifon, Joignez à cela que l’ézz rend toüjours opaques & laiteux tous les difolvans aux- quels on l’expofe. Cette terre alkaline a la propriété du zinc & de la calamine; & M. Henckel a tiré de Vérain une laine philo[ophique, femblable à celle que fournit le zinc. 2°. L’ésain eft compofé de beaucoup de matiere inflammable ; ce que prouve fa détona- tion ayec le nitre, &c. 3°. Il entre auffi du principe mercuriel ou arfenical dans fa compofition ; ce que prouve l'odeur d'ail qu'il répand lorfqu’on le brûle. Voyez la minéralogie de Wallerius , tome I. pag. 551, & Juiv. Les ufages de l’érair font très-connus, On en trou- vera wera quelques-uns à la fuite de cet article. Le plus univerfelreft en poterie d’érain. Voyez l’artic. qui fuit ETAIN (Potiers-d’étain). On en fait des afliettes, des “plats, des pots, des pintes, & toutes fortes d’uftenfi- les de ménage. Mais une chofe que bien des gens “ignorent, c’eft que l’ufage des vaifleaux d’érair peut être très-pernicieux, non-feulement lorft ue ce métal eftallié avec du plomb, maïs encore lorfqu’il eft fans ‘alliage. M. Maroraff a fait voir dans les zrém, de l’a cad. royale des Scienc. de Berlin, année 1747, que tous les acides des végétaux agifloient fur l’érain , & en diffolvoient une partie : pour cet effet il a laïflé fé- journer du vinaigre, du vin du Rhin, du jus de ci- tron, Éc. dans des vaifleaux d’ésain d'Angleterre, dé tain de Malaque , &c d’érarr d'Allemagne, ëc toûjours il a trouvé qu'il fe diflolvoit une portion d’érain, Ce favant chimifte prouve dans le même mémoire, que lérain contient prefque toüjours de l’arfenic ,; non que cette fubitance foit de l’eflence de ce métal, puiqu'il a obtenu de l’écaiz qui n’en contenoit point du tout, mais parce que fouvent les mines d’écair contiennent ce dangereux demi-métal, qui dans l'o- pération de la fufion s’unit très- facilement avec lé- rain, 8 ne s’en fépare plus que très-dificilement. M. Margraff conclud de-là que l’ufage journalier des vaifleaux d’érain doit être très-pernicieux à la fanté, fur-tout fi lon y laïfle féjourner des liqueurs aigres ou acides. Voyez l’article ETAMER. À Pégard des ufages medicinaux de l’érain, par ce que nous avons dit, on voit qu'ils doivent être très- fufpeës ; cependant on le fait entrer dans celui qu’on appelle l'ati-heétique de potier ; qui n’eft autre chofe que de l’érain & du régule d’antimoine détonnés avec trois parties de nitre: mais les gens fenfés favent que c’eft un fort mauvais remede, & qui doit être par conféquent banni de la Medecine. Pour les autres ufages de lérair, nous renvoyons aux articles ETA- MER , FACTEUR D'ORGUE, FER-BLANC, GLACES, MIROIRS MÉTALLIQUES , &c. (—) . ETAIN, (Poriers- d’érain.) Tout ce que nous allons ajoñter fur l'étain a été tiré du diéfionnaire du Commerce 6 du diéfionnaire de Chambers. La diféinéhion des diffé- rens Étains , arf? que Les autres opérations qui fe fonr dans la boutique du potier-d’étain, fe fons trouvées aflez exatles , pour que L’artifle qui s’efl chargé de cette Partie z'ait eu befoin d’y faire ni addition, ni changement. Il faut bien diflinguer cette partie de l’article ETAIN de La partie qui précede. Je crois qu’on eût aifément reconnu qu'elles étoient de deux mains différentes, quand nous 'euffions pas pris la precaution d’en avertir. Les Potiers- d’étain diftinguent l’éfain doux qui eff le plus fin d’a- : vec l’érain aigre qui ne l’eft pas tant. L’érair doux étant fondu& coulé, puis refroidi, eft uni, reluifant, & maniable commé le plomb. Celui qu’on appelle du Pérou, qu'on homme petits chapeaux, eft le plus eftimé : c’eft de cet éraiz doux que les Faéteurs-d’or- gue font les tuyaux de montre de buffet, & les Miroi. tiers le battent en feuilles pour donner le teint aux glaces avec Le vifargent. Pour employer de lérziz doux en vaïfelle, les Potiers-d’étain y mettent de l’aloi, Cet aloi eft du cuivre rouge, qu'on nomme czivre de rofecte , fondu à part, & que l’on incorpore dans l’érain étant auf fondu. La dofe eft d'environ cinq livres de cuivre par cent d’érair doux: quelques-uns n’y en mettent que trois livres , & une livre d’érain de glace ou bi£ muth, &c pour lors il perd fa qualité molle, & devient ferme, dur, & plus fonnant qu’il n’étoit. À l'égard de l’érain aigre on y met moins de cuivre, felon qu'il left plus ou moins, & quelquefois point du tout , principalement fi on veut l’employer en poterie d’é- fair ; & qu'on en aït du vieux qui ait fervi pour le mélanger, & qui l’adoucit, | Tome VI, E T A 9 Pour connoïîtrele titre on la qualité de lérair , on en fait eflai. Voyez ESSAI, & La fuite de cer arricle. Les éains qui nous viennent d'Angleterre font fous plufieurs formes différentes. Les uns font en lingots, les autres en faumons, & lés autres en lames qu'on nomme verges. Les linsots pefent depuis trois livres jufqu'à 3 $ ; les faumons depuis deux cents cinquanté livrés jufqu’à environ quatre cents; & les lames en- viron une demi-livre, Lies faumons font d’une figure quarrée, longue & épaifle comme une auge de Ma= on; mais tous pleins. Les linsots {ont de la même forme, & les lames font étroites & minces. | Il fe tire des Indes efpagnoles une forte d'éain trèss doux qui vient en faumons fort plats, du poids de cent vingt à cent trente livres. Il en vient auf de Siam par mañles irrégulieres , que les Poticrs-détain . nomment Zrgots, quoiqu'ils foient bien différens de ceux d'Angleterre. L’éair d'Allemagne qui £e tiré de Hambours eft en faumons de deux cents juiqu’à deux cents cinquante livres, ou en petits lingots dé huit à dix livres, qui ont la figure d’une brique; ce qui les fait appeller de l’észin en brique, L’érain d'Allemagne eft eftimé le moins bon, à caufe qu'il a déjà fervi à blanchir le fer en feuille ou fer-blanc, Etain de glace, que les droguiftes appellent 8: muth; voyez BISMUTH. Il {ert à faire de la foudure légere. Voyez Souper. Une matiere qui reflemble affez à l’éain de glace, mais qui eft plus dure, qu’on appelle du inc (voyez ZINC), fert aux Potiers d'érain pour décrafler lé rain lorfqu'il eft fondu , avant de l’employer pour le jetter en moule, fur-tout fi c’eft de la vaiflelle e: faut prendre garde d’en mettre trop, car il occa- fionne des fouflures aux piéces. Ces foufflures font des petits trous cachés dans l'intérieur des pie- ces, fur-tout fi elles font fortes, & ces trous ne fe découvrent qu’en les tournant fur le tour. Une once ou environ de zinc fuffit pour décrafler quatte à cing cents livres d’éraiz fondu, Les Chaudeéronniers ne pourroient faire leur foudure fans zinc, &c. L’érain en feuille eft de lérair neuf du plus doux | qu'on a battu au marteau fur une pierre de marbre bien unie. Il fert aux Miroitiers à appliquer derriere les glaces des miroirs, par le moyen du vif-argent qui a la propriété de Fattacher à la glace : ce font les maitres Miroitiers qui travaillent cette forte d’érair pour le réduire en feuilles, ce qui leur fait donner dans leurs ftatuts le nom de Barreurs d'étair en feuilles Il fe tire de Hollande une autre efpece d’érain battu dont les feuilles font très:minces & ordinairement roulées en cornet; elles font ou toutes blanches > OÙ miles en couleur feulément d’un côté. Les couleurs qu'on leur donne le plus communément font le rou- ge, le jaune, le noir, & l’aurore; ce n’eft qu’un ver. nus appliqué fur l’érain: c’eft de cette forte d étain que les marchands Epiciers-ciriers appellent de Pappeau, dont ils mettent {ur les torches & autres ouvrages de cire qu'ils veulent enjoliver, & dont les Peintres fe fervent dans les armoiries, cartouches , & autres ofnemens, pour les pompes funebres où pour le fêtes publiques. | Etain en treillis ou en grilles. On nomme aïnfi cer- tains ronds d’érair à claire voie, que l’on voit atta- chés aux boutiques des Potiers d’étain, & qui leux fervent comme de montre ou d’étalage, Ces treillis font pour l'ordinaire d’éair neuf doux fans aloi ; c’eft-à-dire qui eft tel qu'il étoit en faumons ou lin gots, à la fonte près qu'on lui a donnée pour le met- tre en treillis. Cette efpece d’érain fe vend aux Mia roitiers, Vitriers, Ferblantiers, Plombiers, Fa£teurs. d'orgue, Eperonniers , Chauderonniers , & autres femblables ouvriers qui employent ce métal dans leurs ouvrages. Les Potiers- d’étain mettent Pérez en treillis pour la facilité de la vente, étant plus aifé 10 E T A de le débiter de cette maniere qu’en lHingots ou fau- mons. | Etain d'antimoine , que les Potiets-d’étain nom- ment vulgairement métal; c'eft de l’ésai neuf.qu’on à alliéde régule d’antimoine , d’ésain de glace. & de cuivre rouge, pour le rendre plus blanc. plus dur, & plus fonnant. Cet alliage fe fait en mettantur un éent pefant d’érain huit livres.de régule d’antimoine, une livre d'érain de glace, & quatre à cinq livres de cuivre rouge plus où moins, fuivant que l’érair eft plus ou moins doux. On ne l’employe guere qu’en cuilleres & fourchettes, qu'on polit en façon d’ar- sent. Voyez POLI. : Etain plané, c’eft de l’écair neuf d'Angleterre, comme il.eft dit cidevant. On le nomme étain pla- né, parce qu'il eff travaillé au marteau fur une pla- tine de cuivre placée fur une enclume avec un ou deux cuirs de caftor entre l’enclume & laiplatine, Cette maniere. de planer lésain le rend très-uni tant deflus que deflous, &c empêche qu'il ny paroïle aucuns coups de marteau. Il n’y a que la vaïfielle qui fe plane. Voyez FORGER L'ÉTAIN. Etain fonnant ou étain fin, c’eft celui qui eft un peu moindre que le plane, où il y a plus de vieux étain , & qui eft plus aigre ; ce qui le rend inférieur à l’ésain plané, & à meilleur marché. | Etain commun ; on le fait en mettant quinze livres de plomb fur uicent d’érain neuf; ou vingt livres, f l’érain neuf.eft bien bon. Les Potiers- d’étain vendent à différens artifans une forte de bas-érair, moitiéplomb & moitié érair neuf, qu'ils appellent «claire foudure ou claire étoffe : cette efpece d’écaiz eft la moindre de toutes. Il n’eft pas permis aux Potiers-d’étain de Pemployer dans aucun ouvrage, fi ce n’eft en moule pour la fabrique des chandelles’, à quoi il eft très-:propre. Onen fait auf cuis de petits ouvrages, que les Merciers appellent du himblor. Etain en rature, ourature d'étain ; c’eft de l’érain neuf fans alliage , que les Potiers-d’étain mettent en petites bandes très-minces, larges environ d’une ligne à deux, par le moyen du tour & d’un inftru- ment coupant nommé crochec, Cet érain en rature {ert aux Teinturiers pour leurs teintures, étant plus fa- cile à difloudre dans l’eau-forte quand il eft ainfi ra- turé , que s’il étoit en plus gros morceaux. Ils le mettent au nombre dès drogues non-colorantes ; ils s’en fervent particulierement pour le rouge écar- late. On nomme aufli ratures d’érain , tout ce que les crochets ôtent fur les pieces , que les Potiers- d’Etain font obligés de tourner. Il entre de l’écain dans l’alliage des métaux qui fervent à fondre les pieces d'artillerie, les cloches, êc les flatues, mais fuivant diverfes proportions. L’alliage pour l'artillerie eft de fix, fept, & huit li- vres d’érain , fur cent livres de rofette. L’ésair em- pêche les chambres dans la fonte des canons ; mais auf il eft caufe que la lumiere réfifte moins. Quant à l’alliage pour les cloches, voyez l'article CLOCHE; & à celui pour les ftatues équeftres, voyez l’article BRONZE. Il étoit autrefois permis aux François d'enlever de l’érain d'Angleterre, en payant le double des droits de fortie que payoient les Anglois. Ce commerce leur eft à-préfent interdit, & il n’y aplusqu’une feule compagnie angloïfe qui, à l’exclufion de toute au- tre , ait le privilége d'en faire le négoce; ce qui a doublé au moins le prix de l’érain, Voyez les di&ionn. du Commerce & de Chambers. ETAIN, (Effayer de ) On fait l’'effai de l'évair de cette mamere, pour en connoître la qualité &e le ti- tre. On prend une pierre de craie dure, fur laquelle on fait un trou rond comme la moitié d’un moule de balle , qui-contient environ deux onces d’étaiz ; on Yjointiune petite coùluré de deuxipouces de long &€ d’une ligne de large, & ä-peu-près auf profonde, &cela fur-la-furface «plate de la pierre; 8c par le moyen de cette.coulure qu’on nommete-jes, on em- phit:ce:trou d’ésair fondu; & lorfqw'ileft froid, on voit fa qualité. L’ésvsr doux eff clair, uni, d’égale couleur deflus&:deffous ; ilfe retire comme un petit point au milieu de l’effai. L’érair fin aigre fetretire plus aumilieu, &pique de blanc furlafurface silett unit lifant par-deflous. L’érain fin qui.eftrmoins bon, efttoutiblanc deflus & deflous. L'ésair-commun ft toutiblanc auf excepté où la queue-du-jet joint lesrond de l’effai, oil fe trouve un peu de brun ; & plus.ce brun-paroît avant dans l’effai , moins l’érair eftbon : enforte.quelf l’effai perd tout fon blanc & dévientibrun-enentier , ce n’eft:plus de l’észir com- mun, mais de la claire , que les Potiers -d'étain ne peuvent travailler : cela fert aux Ghauderonniers pour étamer, 6 aux Vitriers pour fouder les pan- neaux en.plomb; on peut cependantremettre cette claiteien étair:commun , enmettant fur chaque livre une livre d’éain fin. | L’érain fin qui fe tronve abaïflé , {etrétablit en y mettant une -quantité fufifante de bon é:ziz neuf ou.du plané. Il y en a qui effayent d’une autre maniere: on prend un moule à faire des balles de:plomb., & on jette de l’éair dedans; on pefe les balles des différens étains qu'on a jettés, &c le plus leger eft le meilleur. Enfin une méthode d’effayer plus commune & plus ordinaire, eft de toucher avec un_fer à fouder la piece qu’on veut eflayer; & on connoît fi elle eft bonne ou mauvaïle , à l'infpeétion.de da touche. La touche eft un coup de fer chaud en.coulant qui dénote la qualité de lérain ; s'il eft fin, l’endroït touché eft blanc, & pique un petit point au milieu: au commun l’endroit touché eftbrun autour, 8 blanc au milieu ; moins 1l y a de blanc. moins l’évir eff bon : cela a aflez de rapport à l’eflai à la pierre, & les gens du métier s’en fervent plütôt pour effayer quelque piece douteufe, que pour effayer des fau- mons où gros lingots ; car pour ceux-ci, 1l faut re- venir à l’une ou l’autre des deux manieres ci-deflus. Il eft conftant que la matiere d'ésaiz, principale- ment le commun, peut s’altérer en y mettant plus de plomb qu'il ne faut : mais outre qu’un autre ou- yrier s’y connoïtra ailément, l’obligation où fe trou- ve chaque maître de mettre {on poinçon {ur fon ou- vrage, ne le fera-t-1l pas connoitre pour ce qu'il eft > Si dans les provinces où on n’eft point aflujetti aux vifites des jurés , & où on ne marquera pas fa mau- vaile marchandife, on croit faire plus de profit, c’eft un mauvais moyen; Car 1°, à l’œuvre on connoît louvrier, & la marchandife fe connoit à l’ufer ; 2°, ce qu’on croit gagner d’un côté on le perd de l’autre, parce qu’elle eft plus mal-aifée à travailler; 3°, enfin On fe trompe fouvent foi-même, parce qu’étant ren- fermé dans un certain canton, cefte marchandife re- vient pour la plus grande partie à l’ouvrier qui l'a faite, ou aux fiens après lui : ainf il eft de l'intérêt &c de l’honneur du Potier-d’étain d’être fidele dans fa profefion, Voyez Les dilionnaires du Commerce & de Chambers. ETALAGE, f. m, (Jurifprud.) eft la même chofe qu'établage. Voyez ci-deffjus ETABLAGE. (4) ETALAGE, (Commerce) marchandife que l’on étale fur le devant d’une boutique, ou que l'on atta- che aux tapis qui font au coin des portes des maïfons, au-dedans defquelles 1! y a des magafins, L'érrlage fert à faire connoître aux paflans les fortes d’ouvra- ges ou marchandifes qu'on vend ou fabrique chez les marchands & ouvriers. Ce terme vient du mot d’efzl, où, comine on dit aujourd’hui, effa , qui fignifoit autrefois toutes lots tes de boutiques, Eralage fignifie auffñi un droit que payent les mar- chands pour la place ou la boutique que leurs mar- chandifes occupent dans un marché, ou dans une foire ; & c’eft ordinairement au profit du feigneur du lieu qu’on paye ce droit. | USER TA LA * Etalage fe dit encore d’une efpece de table étroite qui eft attachée avec des couplets de fer fur le devant des boutiques, qu’on abat le matin pour y faire l'éa- Lage des marchandifes , & qu'on releve le foir quand on détale. Ces éralages ; fuivant les ordonnances de police, ne doivent avancer dans la rue que de fix pouces. Di, de Comm. & de Trév. (G) ETALCHE, (if. nar. bor.) arbre exotique fort grand & épineux, qui reflemble au cedre & au ge- nevrier par {a feuille. En Numidie fon bois eft blanc; en Lybie il eft violet & noir; & en Ethiopie il ef tout-à-fait noir. Les Italiens le nomment /azgz. On en fabrique différens inftrumens de mufique : quand on y fait une coupure, il en découle une gomme Ou réfine qui reflemble au maftic. Selon les apparences, cet arbre eft une efpece de génevrier que C. Bauhin a nommé Juriperus major baccé rufefcente , & que Théophrafte appelle oxycedrus. On fe fert de fa réñ- ne pour faire du vernis. Hubner, dé. univerfel. ETALER , (Corrm.) expofer de la marchandife en vente , c'eft proprement ouvrir les boutiques &c les portes des magafns, y attacher les tapis, & y arran- ger les diverfes chofes qui indiquent aux pañlans ce qu’on vend dedans , afin de les exciter d’y entrer & de faire emplette. Il n’eft pas permis à tous marchands d’ésa/er tous les jours , ni en tous lieux. Le lieutenant de police, &c 1ous lui les commiffaires de quartiers, ont foin, à Paris, que les marchands n’étalent que dans les lieux & les tems permis par les ordonnances de police. Dit. de Comm. & de Trév. (G)- ETALER LES MARÉES, ( Marine.) c’eft, lorfque le vent & les marées font contraires à la route qu’on veut faire, être obligé de mouiller en attendant une autre marée favorable, foit pour fa route, foit pour entrer dans un port. Refouler la marée, c’eft le contraire de l’ésaler. (Z3 _*ETALIERES,(RETS DE BASSES-) £erme de Pêche, {orte de rets que les pêcheurs du reflort de l’'amirau- té de Coutances tendent à-peu-près de la même ma- niere que les filets flotés, dont on fe fert dans les cou- des ou les anfes, où la marée montante apporte avec elle à la côte beaucoup de varech, & où 1l meft pas pofñble d'établir des pêcheries toutes montées fur piquets. Les pêcheurs de Briqueville tendent leurs étalieres en demi-cercle , enfowiffant le pié du filet, comme on le pratique aux rets flotés, afin que le rets prête & s’abbaïfle à mefure que le varech pañle def- fus, & pour empêcher que les herbes n’aflujettiflent le filet, en enfablant ou chargeant de varech les ra- bans qui en tiennent la tête; outre quelques flotes de liège, les pêcheurs mettent dans le milieu de leur tente deux à trois piquets, hauts de dix “Me envi- on ; ils fervent à contenir les rabans, & à faire ou- vrir plus facilement lééaliere au reflux, car l’ésaliere ne prend rien que de marée baïiflante. Ces fortes de rets font établis à-peu-près de la même maniere que les colorets ou parcs volans des petits pêcheurs des côtes de Saintonge & d’Aunis, qui font avec leurs acons des pêcheries variables fur Îes bafles de fable qui font dans le fond des pertuis. *ETALIERES, APPLETS 04 TRESSURES FLOTÉES, terme de Pêche, Les pêcheurs de la côte de Bretagne dans l’amirauté de Saint-Malo, tendent leurs rets de piés ou treflures autrement que les autres, qui les amarrent fur des piquets en forme de bas parc; cel- les-ci fe tendent flotées & pierrées, ou plommées comme les cibaudieres , dont ce filet eft une efpece: Tome VI, E T A ar ce filet {e peut difpofer à pié, fans qu'il foit befoin de bateaux pour pratiquer cette petite pêche. Les pêcheurs étendent à plat, à la bafle-mer, leurs rets ou treflures dont le pié regarde la mer , & qu'ils enfablent en le garniflant , foit de pierres, ou de {a- ble ,ou torchis de paille ou de goefmont, fuivant ie lieu où ils fe trouvent, fuivant fa ligne dés flotes que les pêcheurs nomment Zone de montant, Ils couchent une autre ligne qu'ils nomment Ligne de bande; qui eft arrêtée, pendant que la mer monte, par des pierres où petits crochets de bois enfoncés dans le fable ; & au commencement du reflux, quand la mer com mence à perdre, on leve la ligne de bande parun des bouts où le pêcheur a frappé une boïée: cette ligne le dégage des pierres , ou enleve les crochets qui la retenoient. En même tems les éra/ieres ou treflures fe foûlevent au moyen des flotes, & fe foûtiennent de- bout jufqu’à la bafle-mer : pour lors le pêcheur ra- maffe le poiflon qui a monté à la côte avec la marée À & qui s’eft trouvé arrêté par le filet des ézalieres, . On ne pratique cette pêche que durant les chaleurs des mois de Mai, Juin, Juillet, Août, & Septembre. On prend indifféremment des poiflons ronds & plats. Les plus belles foles proviennent de cette pêche. ETALINGUER es CaBles, (Marine.) Voyez TALINGUER. ETALON, f. m. (Jurifprud. & Comm.) fignifie Le prototype ou l’exemple des poids & des mefures dont tout le monde fe fert dans un lieu pour la livraifon des denrées & marchandifes qui fe livrent par poids ou par mefure, Comme on a fenti de tout tems.la nécefité de re- gler les poids & les mefures , afin que chacun en eût d’uniformes dans un même lieu, on a auffi bientôt re- connu la néceffité d’avoir des étalons ou prototypes, foit pour regler les poids &-mefures que l’on fabri- que de nouveau, foit pour confronter &c vérifier ceux qu font déjà fabriqués, pour voir s'ils ne font point altérés, foit par l'effet du tems, ou par un ef- prit de fraude, & f l’on ne vend point à faux poids ou à faufle mefure. Les Hébreux nommoient cette mefure originale; où matrice, fcahac , quaft portam menfurarum arido- rum, la porte par laquelle toutes les autres mefures des arides devoient pafler-pour être jugées. Ils mar- quoient enfuite d’une lettre ou de quelque autre ca= ractere, les melures qui avoient pañlé par cet exa- men, 6c cette marque étoit appellée r7erfura judicis. Il y avoit auffñi des éra/ons pour la mefure des liquides &c pour les poids. Les Grecs nommoïient lésa/on des mefures utrpus Tporos , C’elt-à-dire /e prorotype des mefures. Les Romains le nommoient fimplement renfura > par excellence, comme étant la mefure à laquelle toutes les autres devoient être conformes. M, Menage croit que le terme éalon vient du latin eff talis , 8t que l’on a aufi appellé 4 mefure origina- le, pour dire que cette mefure qui eft expofée dans un lieu public, eft telle qu’elle doit être, ou plütôt que les autres mefures doivent être telles & confor- mes à celle-ci: mais il eft plus probable que ce terme vient du faxon ffalone , qui fignifie zefure. On difoit autrefois effellons ou effelons, pour éa<. lons ; comme on le voit dans les coûtumes de Tours, art. 41 ; Lodunois , chap. if, art, 3 © 4 ; &c Bretagne, art, 698, 699 ,; 6 700. Les étalons des poids & mefures ont toûjours été gardés avec grande attention. Les Hébreux les dépo- foient dans le temple , d’où viennent ces termes fi fréquens dans les livres faints: Ze poids du fanütuaire, La mefure du fantluaire. Les Athéniens établirent une compagnie de quinze officiers appellés merporquos , menfurarue EE »qui 1] 12 ET A avoient la garde des ésalons : c'étoient eux aufh qui ! xégloient les poids & mefutes. Dutems du Paganifme., les Romains les gardoient dans le temple de Jupiter au capitole, comme une chofe facrée & inviolable ; c’eft pourquoi la mefure originale étoit furnommée capitolina. LS Les empereurs chrétiens ordonnerent que les é:- Lons des poids & imelures feroient gardés par Les gou- verneurs oupremiers magiftrats des provinces. Ho- norius chargea le préfet du prétoire de l’éralon des mefures, & confia celui des poids au magiftrat ap- pellé comes facrarum largitionum, qui étoit alors ce qu'eft aujourd'hui cheznous le contrôleur-général des finances. | Juftinien rétablit l’ufage de conferver les éralons dans les lieux faints ; 1l ordonna que l’on vérifieroit tous les poids & toutes les mefures , & que les éra- lons en deroient gardés dans la principale églife de Conftantinople ; 1l en envoya de femblables à Rome, & les adrefla au fénat comme un dépôt digne de fon attention. La novelle 118 dit auffi que Pon en gar- doit dans chaque églife; il y avoit des boiffeaux d’ai- rain ou de pierre, &t autres mefures différentes. _ EnFrance, les éralons des poids & mefures étoient autrefois gardés dans le palais de nos rois. Charles- le-Chauve renouvella en 864 le réglement pour les étalons ; il ordonna que toutes les villes & autres lieux de fa domination , rendroient leurs poids &c mefures conformes aux éralons royaux qui étoient dans fon palais, & enjoignit aux comtes &c autres magiftrats des provinces d’y tenir la main : ce qui fait juger qu’ils étoient aufi dépofitaires d’éralons, con- formes aux éralons originaux, que l’on confervoit dans le palais du roi. On en confervoit auffi dans quelques monafteres & autres lieux publics. Le traité fait en 1222 entre Philippe-Augufte & Pévêque de Paris, fait mention des mefures de vin &t blé comme un droit royal que le prince fe réferve, & dont le prévôt de Paris avoit la garde. Le roi céda feulement à évêque les droits utiles qui fe levoient dans les marchés, pour en jouir de trois femaines l’u- ne, & ordonna au prevôt de Paris de faire livrer les mefures aux officiers de l’évêque : mais cela concer- ne plütôt le droit de mefurage, que la garde des éa- lons. Sous le regne de Louis VII. la garde des mefures de Paris fut confiée au prevôt des marchands. Les ftatuts donnés par S. Louis aux jurés-mefureurs font mention , qu'aucun mefureur ne pourroit fe fervir d'aucune mefure à grain qu'elle ne fût fignée, c’eft- à-dire marquée du feing du roi; qu'autrement il {e- toit en la merci du prevôt de Paris: que fi fa mefu- re n’étoit pas fignée, il devoit la porter au parloir aux bourgeois pour y être juitifiée & fignée. Les auteurs du Gallia Chrifliana , tome VII, col. 253. rapportent qu'avant l’an 1684, tems auquel la chapelle S. Leufroy fut démolie pour aggrandir les prifons du grand châtelet , on y voyoit une pierre qui étoit taillée en forme de mitre , qui étoit le mo- dele des mefures & des poids de Paris, & que de-là étoit venu l’ufage de renvoyer à la mutre de la cha- pelle de S. Leufroy , quand il furvenoit des contef- tations fur les poids & les mefures. M. abbé Le- bœuf, dans fa defcription du diocèfe de Paris , tom. I. penfe que cette pierre, qui par fa forme devoit être antique, avoit apparemment été apportée du pre- mier parloir aux bourgeois, qui étoit contigu à cette églife de Saint Leufroy ; il obferve que ce parloir &t un autre (fitué ailleurs) ont été le berceau de lhô- tel-de-ville de Paris (où l’on a depuis transféré les étalons des poids & mefures). Il y a encore en quel- ques villes de provinces des éralons de pierre, pour la vérification des mefures. Le roi Henri IE, ordonna en 1557, que les ésa/ons des gros poids & mefures feroient gardés dans l’hô- tel-de-ville de Paris. - Lorfqu’on établit en titre à Paris des jurés-mefu- reurs pour le fel, qui farfoit alors objet le plus im- portant du commerce par eau dans cette ville, on leur donna la garde des észlons de toutes les mefures des arides: c’eft pour la garde de ce dépôt qu'ils ont une chambre dans l’hôtel-de-ville. Les Apoticaires & Epiciers de Paris ont conjoin- tement la garde de l’écaloz des poids de la ville, tant royal que medicinal ; ils ont même, par leurs ftatuts, le droit d’aller deux ou trois fois l’année, afiftés d’un juré-balancier, vifiter les poids & balances de tous les marchands &c artifans de Paris; c’eft de-là qu'ils prennent pour devife Zances & pondera fervant. Il faut néanmoins excepter les Orfevres, qui ne font fujets à cet égard qu'à la vifite des officiers dela cour des monnoies , attendu que l’ész/oz du poids de l'or & de l'argent qui étoit anciennement gardé dans le palais du roi, eft gardé à la cour des monnoïes de- puis ordonnance de 1540. Les Merciers prétendent auffi n’y être pas fujets. Pour ce qui eft des provinces, la plus grande par- tie de nos coûtumes donnent aux {eigneurs hauts- jufticiers, & même aux moyens, le droit de garder les éralons des poids & mefurés, & d’en éralonner tous les poids & mefures dont on fe fert dans les juftices de leur reflort. Les coûtumes de Tours & de Poitou veulent que le Seigneur qui a droit de mefure en dépofe l’élor dans l'hôtel de la ville la plus proche, fi elle a droit de mairie ou de communauté, finon au fiége royal fupérieur d’où fa juftice releve, Dans Phôtel-de-ville de Copenhague il y a à la porte deux mefures attachées avec de petites chaînes de fer ; l'une eft l’aulne du pays, qui ne fait que demi- aulne de Paris ; l’autre eftla mefure que doit avoirun homme, pour n’être pas convaincu d’impuiffance. Cette mefure fut expofée en public fur les plaintes faites par une marchande, que fon mari étoit inca- pable de génération. Voyage de l'Enr.r. VIII. p.301. Les érzlons font ordinairement d’airain , afin que la mefure foit moins fujette à s’altérer. Lorfqu'on en fait l’effai, pour voir s'ils font juites, c’eft avec du grain de millet qui eft jetté dans une tremie, afin que le vafe fe rempliffe toùjours également. Foyez Loi- feau, des fergreuries , ch. Jx. n. 20. & fuiv. le trairé de la police ; tom. II. liv. W. ch, 1ij. le gloff. de Lau- riere, au mot Eralon. (4) ETALON, en termes d'Eaux & Forérs, fisnifie zx baliveau de l’âge que le bois avoit lors de la derniere coupe. L'ordonnancedes eaux & forêts, sir. xxxi. art. 4. fixe à cinquante livres l'amende encourue , pour avoir coupé un éralon, Voyez la coûtume de Bou- lenois, art, 32. (A) , ETALON, (Manëège & Maréchal.) Cheval entier , choïfi & deftiné à l’accouplement , & dont on veut tirer race. Voyez HARAS. ETALONNAGE oz ETALONNEMENT , £. m. ation d’éralonner, c’eft-à-dire de vérifier une mefure {ur léralon. Voyez ETALON. Ces deux mots font aufi ufités pour fignifier le droit qu’on paye à l'officier qui écelonne. L’ordonnance de 1567 pour l’ésalonnement des poids, portoit qu’il feroit payé aux gardes pour cha- que pile d’un ou plufieurs marcs , avec toutes les parties & diminutions, & auffi pour chaque garni- ture de trébuchet fourni de fes poids qu'ils auroïent étalonnés , trois deniers tournois , qui leur feroient payés par l’ouvrier 8& marchand defdits poids , tré- buchets , & balances. Par une ordonnance de l’année 1641, ce droit a été fupprimé ; & il y eft dit que les Balanciers , Mar- chands, Fondeurs, &c, pourront faire éralonner & LE À marquer leurs poids gratuitement au greffe de la cour des monnoies. Diéfionn, de Comm, de Trév. €: Chamb. (G slarse # | ETALONNER ; v. aût. ferme de Batiment, c’eft réduire des mefures à pareilles diffances, longueurs , & hauteurs , en ÿ marquant des reperes. (P) - ÉTALONNER, (Man. & Muréch.) couvrir une ju- ment, expreflions fynonymes. Voyez HARAS. ETALONNEUR , f. m. celui qui eft commis pour marquer êc étalonner les poids & mefures. L’ordon- nance de la ville de Paris nomme les jurés-mefuteurs de {el, éralonneurs de mefures de bois, Di&ion, de Comm. de Trév. & de Chamb. | ETAMBOT , f. m,. ( Marine.) L’érambot eft une piece de bois droite qui termine la partie de l'arriere des vaifleaux ; on le place prefque verticalement fur l'extrémité de la quille, à cet endroit qu'on nomme salon. Voyez Marine, Planche IV. fig. 1. n°. 4. la fi- tuation de l’éambos, Quelques-uns difent éembod. Cette piece doit être folidement aflujettie, pui£ qu’elle foûtient le gouvernail, & que c’eft {ur elle que viennent aboutir les bordages qui couvrent les façons de l'arriere; c’eft pour recevoir ces bordages qu’on fait à l’éembor, comme à l'étrave, une rablu- re. Voyez Marine, Planche VI. fig. 74. Vérambot dé- taché ; #6 eft la quefte ou la faïllie de l'érambor; ac, fa hauteur ; be, {a largeur par le bas ; fe, fa largeur par le haut ; g 4, la longueur du faux érzmbor : Ceft une piece de bois appliquée fur l’érembos pour le ren- forcer; =, la rablure ou cannelure pour recevoir les bouts des bordages ; à d, l'extrémité de la quille, fa quefte, & fon épaifleur. o e, contre-étambor : c’eft une piece courbe qui lie l’ésarmbor fur la quille ; & , te- fon qui entre dans une mortaife , afin que la partie extérieure de l’étembor s’entretienne mieux avec l’ex- trémité de la quille, laquelle eft auff jointe à fa par- tie intérieure par des chevilles de fer & de bois. On divife la hauteur de l’ézmbor comme on a fait celle de l’étrave, par piés, pour connoître commo- dément le tirant d’eau de l’arriere. La largeur de l’érambor eft épale à celle de la quil- le; on augmente fon épaifleur par embas de s lignes par pouce de l’épaïffeur de la quille, & à fon bout d'en-haut on le diminue d’un quart de cette épaif- feur ; on peut même faire le bas de l’érembor de toute Pépaifleur que la piece peut porter. Suivant plufeurs conftruéteurs | l’észmbor doit avoir de hauteur mefurée perpendiculairement à la quille, = & - de la longueur totale du vaifleau. Suivant cette regle , un vaïfleau qui auroit 168 piés de longueur ; auroit, en prenant le dixieme & le dou- zieme, 30 piés 9 pouces 7 lignes. D’autres donnent une quarantieme partie de moins de hauteur à l’écam- bot, qu'à l’étrave. Mais puifque l’érambos détermine la longueur du vaifleau à l’arriere | comme l’étrave détérmine la longueur du vaifleau en-avant , il vaut mieux additionner la hauteur du creux au milieu, la différence du tirant d’eau & le relevement du premier pont en-arriere, l’épaifleur du bordage du 1% pont, & la diftance du premier au fecond pont en-arriere fous le bau, y compris fon bouge , moins l'épaïffeur de la barre ä gouvernail : Paddition de toutes ces fommés indiquera la hauteur de Pétembor. Exemple, Un vaïflean de 110 canons & de 168 piés de lon- gueur ayant de creux au maitre couple, . . De relevement au premier pont en-arriere , y com- pris la différence du tirant TR RE NE bg. L'épafleur du bordage du d cie . Premier pont, . s 4 6 La diftance du premier au 23 PIés 9 pouc, fecond pont en-arriere, fouslebau, 2x 8 La hauteur de l’éambor {era ARS 13 * 32 piés 4 pou. 11 Ko. Le) ® o Cet exemple eft fuffifant pour les vaifleaux de tou- tes ie ; On remarquera {eulement que pour les frégates qui n’ont qu'un pont, il faut prendre le creux au maitre couple , le relèvement du pont à l'arriere, l’épaifleur du bordage du pont, & ajoûüter deux piés fix ou neuf pouces ; & pour les frégates & corvettes deux piés trois pouces, aux fommes ci-def. {us mentionnées. Quelques -uns pour avoir la hauteur de l’ésrmbos additionnent le creux à l’arriere, l’épaifleur des bor- dages du premier pont , le feuillet & la hauteur des {abords de la premiere batterie ou de la fainte-barbe, &t l’épaifleur de la barre d’arcafle, qui eft de treize pouces aux vaifleaux à trois ponts, de douze À ceux de foixante - quatorze canons , de neuf à dix à ceux de cinquante à foixante-quatre. A l'égard de la quefte ou faillie de l’écmbor, quel- ques charpentiers lui donnent un pié par chaque fx piés qu'il a de hauteur : ainf notre étembor cité ci- deflus de 32 piés de haut, auroit cinq piés au moins de quefte. M. Duhamel, dans fon traité de conitruc- tion pratique, d’où j'ai tiré prefque tout cet article, remarque qu’on ne voit aucune raïfon de lui don- ner de la quefte ; au lieu qu’en là fupprimant lé gou- vernaïl en doit être plus folidement établi, & par fa fituation perpendiculaire, réfifter mieux au fluide que sl étoit oblique : d’ailleurs la quefte de l’éram bot fait que tous les poids de la poupe tendent À dé- ler le vaifleau en cette partie, ou à ouvrir l'angle que l’érambot fait avec la quille. (Z) ETAMBRAIES , ETAMBAIES , ETAMBRAIS, ETAMBRES , SERRES DE MATS, £. f, (Marine) ce font deux grofles pieces de bois qui accolent un trou rond qui eft dans le tillac, par où pañle le mât, afin de renforcer le tillac en cet endroit , & tenir le mât plus ferme. Voyez Marine ; Planche VI. Ag. 215 la forme particuliere de l’ésembrai du grand mât. Dans un vaifleau de 60 canons & de 140 piés de longueur, l’éambrai du grand mât doit avoir 5 piés de long fur 4 de large, & 6 pouces d’épais. On met un ésambrat à tous Les mâts fur chaque pont du vaifléau. Voyez Marine, Planche IF. fo. 1, Vétar braie du grand mât au premier pont, n°. 205 ; Péome braie du grand mât au fecond pont, n°, 206 ; Perum- braie du mât de mifaine au premier pont, n°, 207: l’érambraie du mât de mifaine au fecond pont, n°. 208 ; l’étambraie du mât de mifaine au château d’a- vant, n°, 209 ; l’ésembraie du mât de beaupré, n°, 210; l’éfambraie du mât d’artimon, n°, 211. On appelle auffi écernbraie, le lieu où porte le pié du mât dans le fond du vaifleau. Etambraies du cabeflan ; ce font les ouvertures par où Aster les cabeftans, Voyez CABESTAN. n donne auffi le nom d’érambraie à une toile poit. fée qui fe met autour des mâts fur le tillac, de peur que l'eau ne les pourrifle. Voyez BRAïES. (Z) ETAMER, v. (Chimie, Arts € Métiers.) Etamer r'eft autre chofe qu’appliquer une lame légere d’é- tain fur un autre métal ; ce qui eft la même chofe que fouder, Voyez l’article SOuDURE. Les Chauderonmiers fe fervent d’un alliage compofé de deux parties d’é- tain &c d’une partie de plomb, pour éarer lesuften- files de cuifiné qui font de cuivre. Pour cet effet, on avive la pièce qu'on veut écemer , c’eft-à-dire qu’on la raclée avec un racloir ou inftrument de fer tran- chant, arrondi par le bout & arrêté dans un manche de bois aflez long ; on fait chauffèr la piece après . qu'elle a été avivée; on y jette de la poix-réfine, & 14 E T A enfuite l’étain fondu , que l’on frote -& étend avec une poignée d’étoupes. PE Il y a encore une autre façon d’érumer ; c'eft avec de {el ammoniac, Pour cet effet, on met la çaflerolle ou piece qu’on veut éramer fur le feu; lorfqw’elle eft bien chaude, on y jette du fel ammoniac dont on frote le dedans de la piece, ce qui nettoye parfaite- ment le cuivre; on y verfe promptement l’étain fon- du, & on l’étend en frotant avec de l’étoupe & du fel ammoniac. PE One flate, au moyen de cet étamage, de s'être mis à couvert des dangers du cuivre (voyez Particle Cuivre); mais il eft facile de prouver que c’eft une erreur, & que fans remédier totalement à un malon s’expofe à beaucoup d’autres. 1°. L’étamage ne cou- vre jamais patfaitément & entierement le cuivre du vaifleau qu'on veut éramer ; pour s’en affürer il fuffit de regarder au microfcope une piece qui vient d’être étamée , & l’on y remarquera toüjours des parties cui- vréufés qui n’ont point été recouvertes par l’étama- gé ; & l’on fait qu'une très-petite quantité de cuivre peut caufer un très-grand mal. 2°, L’alliage dont on 1e fert pour ésamer s: compoié d’étain & de plomb: les acides des végétaux font très-difpofés à agir fur ce dernier métal; & on verra à l’article PLOMB , que ce métal mis en diffolution fournit un poifon très- dangereux. 3°, Quand il n’entreroit que de l’étain bien pur dans l’étamage, on ne feroit point encore exempt de tout danger, attendu que l’étain contient toüjours une portion d’arfenic, qu'il eft prefque 1m- poffible d’en féparer par la voie feche. Voyez l'article ÉTAIN. Joignez à toutes ces confidérations, que fou- vent le degré de feu qu’on employe pour faire un ra- goût, eft plus que fuffifant pour faire fondre l’éta- mage ; & pour lors le cuivre doit refter à nud, du moins dans quelques endroits. (—) | ETAMER , ex termes de Cloutier d’épingle, c’eft don- ner aux clous de cuivre, éc. une couleur blanche qui imite celle de l'argent, par le moyen de l’étain; ce qui fe fait en faifant chauffer les clous dans un pot de terre jufqu'à un certain point : après quoi on jette dans ce pot de l’étain bien purifié & du fel ammo- niac, L’étain fe fond par la chaleur des clous, sy amalgamme , & les rend blancs. + EraMer Des Miroirs, c’eft y étendre fur le der- riere une compofition, qui s’y attache bien étroite- ment , & qui fert à réfléchir l’image des objets, Foy. MIROTR. La couche que l’on applique ainfi fur le derriere d’un miroir , s'appelle feurlle ; elle fe fait ordinaire- ment de vifargent, mêlé avec d’autres ingrédiens. Voyez MERCURE. | Quant à la méthode d’éramer les miroirs , voyez VERRERIE. Dans lés Tranfa@ions philofophiques , 2°. 245, on trouve une méthode d’ésamer les miroirs qui font en forme de globe; c’eft M. Southwell qui l’a com- muniquée au public. Le mêlange dont il fe fert eft compote de mercure & de marcaflite d'argent, trois onces de chaque ; d’étain & de plomb , une demi-on- ce de chaque: on jette fur ces deux dernieres matie- res la marcaffite, & enfuite le mercure; on les mêle êt on les remue bien enfemble fur le feu : mais avant que d'y mettre le mercure, 1l faut les retirer de deflus le feu, & attendre qu’elles foient prefque refroidies. Pour en faire ufage, le verre doit être bien chaud & bien fec. L'opération réufiroit pourtant fur un verre froid, quoiqu’elle fe fit ayec beaucoup plus de fuccès fur un verre chaud. Chambers. ETAMER , ( Hydraul.) Pour rendre les tables de plomb plus {olides , quand on les employe à des cu- ” vettes, des terrafles, & des réfervoirs, on les fait éramer en y Jettant deflus de l’étain chaud pour bou cher les foufllures, (K) ET A ETAMER, serme de Plombier, fignifie blanchir le plomb, le couvrir de feuilles d’étain après l'avoir fait chauffer. Ils appellent fourneau à étamer , un grand foyer de brique fur lequel ils allument un grand feu de braife au-deffous des ouvrages qu'ils veulent blan- chur. 7 oyex les figures du Plombier. L'article 33 des flatuts des Plombiers fixe les où- vrages qui doivent être ésameés dans les bâtimens neuis. Voyez PLOMB ; voyez auffi PLOMBIER. ETAMEUR , f. m. ouvrier qui étame. Les maî- tres Cloutiers de Paris prennent la qualité d’ése- meurs , & font appellés dans leurs ftatuts mufrres Cloutiers-Lormiers-Erameurs, Voyez CLOUTIER. ETAMINE, (Boranig.) font les filets fimples qui fortent du cœur fleuri d’une fleur, & autour du pif: til, Ces étamines ont leurs fommets ou leurs extré- mités un peu plus groffes que le refte , renfermant une poufhere qui s’épanouit, tombe, & féconde ee SHPE) des graines contenues dans le piftil. ÉTAMINE, ( Chimie.) inftrument de Pharmacie, efpece de filtre. Voyez FILTRE. (4) | ETAMINE.,, (Marine. ) il fe dit de Rétoffe dont on fait les pavillons, (Z) * EÉTAMINE o4 ÉTOFFE DE DEUX ÉTAIMS,. (Drap.) fi vous fabriquez une étoffe dont la trame ne foit point velue, ainfi qu'il y ena beaucoup, mais où cette trame foit de fil d’étaim ou de laine peignée comme la chaine, vous aurez une étoffe life, qui eu égard à l'égalité ou prefqu'égalité de fes deux fils, fe nommera écarmine ou étoffe a deux etaims. Une étoffe fine d’étaim fur étaim à deux marches &c ferrée au métier, fera l’ééamine du Mans. * ÉTAMINE, {. f, (Manuf. en foie.) La foyerie a fes éramines, ainf que la draperie. On en diftingue de fimples & de jafpées. L’ésamine femple eft une étoffe dont la chaîne n’eft point mélangée, & qui eff tramée de galette, laine, &c. La Jafpée a la chaîne montée avec un organfnretors, teint avec deux fils de deux couleurs différentes , & elle eft tramée de galette, laine, éc. | ÉTAMINE, en termes de Confifeur, eft une piece de cuivre ou de fer-blanc un peu creufe, & percée de plufieurs trous en forme de pañloire. On s’en fert pour égoutter les fruits, foit après les avoir blan- chi à l’eau, foit même en les tirant du fucre. Voyez la Planche du Confifeur. Au-deflous de l’éramine eft une terrine ou vale , qui reçoit ce qui tombe des chofes qu’on met égoutter. | ETAMPE ,ETAMPER ,ETAMPURE, &c. mots d'ufage dans différens arts. Voyez ESTAMPE, Es- TAMPER, &c. ETAMURE, f. f, fe dit de l’étain dont les Chau- déronniers fe fervent pour étamer les divers uften- files de cuivre, qu'ils fabriquent pour lufage de la: cuifine. Voyez ETAMER. ETANCES , (Marine.) Voyez ESTANCES. ETANCÇON, f. m. ( Archr.) grofle piece de bois qu’on met, foit au-dedans, foit au-dehots d’une mai fon, pour foûtenir un plancher, un mur qu’on fappe ou qu’on reprend par-deflous œuvre. Lorfqu’on bätit des maïfons, les charpentiers met- tent fouvent au-deflous des gremiers & des façades: quelques appuis ou étançons , qu'ils pofent alors non perpendiculairement, mais un peu de biais. Cepen- dant c’eftune chofe certaine, qu’un éfazçon pofé obli- quement ne fauroit fupporter une aufli pefante char- ge que celui à qui on donneroit une fituation perpen- diculaire. Tout le monde comprend aïfément cette vérité ; mais M. Mufichenbroek a calculé géométri- quement dans fes effais de Phyfique , combien un ap- pui peut moins fupporter lorfqu’il eft pofé de biais, que perpendiculairement. : Il fufht pour cela de concevoir que çet appui obli-” ETA eueeft lhypoténufe d'untrianglereftangie dontPaw. | tre côté eftila perpendiculaire, &'le troifiéme côté la ligne de la‘pérpendiculairejifqu'a Phypoténufe ou la bafe : on pénrdonccomparer la force, quiferoit dans lappurpolé perpendiculairément, avec celle-delhy- poténule ;'car lafôrce dupoids fe réfoud'en deux autres, l’une quitprefle dans la-direéhion de Pérar con, l’autre qui eft perpendiculaire à Pérangon > & fait point fur lui: orpar les’ Propriétés du triangle rectangle, la force totale féra àla premiere de ces deux forcés comme l’hypoténufe eftà la pérpendi- culaire ;-de fofte que laïfoice d’un appui poféperpen- diculairement fera à celle de Pappta‘oblique dans cé ème rapport, 8e puifque dans les petites obliqui- tés l’hypoténufe-ne diffère pas beaucoup de la ligne perpendiculaire, lés forcés les: äpptis qui ne font qu'un peu obliques, ne feront pas nôn plus fort diffe- rentes de celles dès appuis perpendiculaires. C’eft aufli ce que les. expériences ont confirmé au phyfi= tien hollandois. Voyez tome. defès effuis de‘ Phy/Jrq. - Mais comme ilieft bon defavoir quelleleft la force dés érangons où des poutres pofées perpendiculaire rent, &jufqu'à quel point on peut les charger avant qu’elles fe rompent; voici deux régles que donne M. Muffchenbroek, & qu’ila apprifes par un grand nom- bre d'expériences. 1%, 1°. La force d’un feul 8& même bois poié perpen- diculaïrement qui a la même 'épaileur , maïs une longueur'diférente & qui fe trouve comprimée par un fardeau dont il eft chargé par en-haut, eft en rar- {on inverfe-des quarrés des longueurs. De cette ma- niere, la force d'un érarçoz long de 10 piès eftà lafor- ce d’un autre appui de même épaïfleur, mais qui n'a que cinq piés de long , comme un éft à quatre. 2°, Les bois qui ont la même hauteur , mais dont Pépaifleur eft différente, fe trouvant chargés de pe- fans fardeaux , {e courbent par leurs côtés les plus minces. Les forces de ces fortes de bois font les unes aux autres, comme l’épaifleur des côtés qui ne fe plient pas, & comme le quarre de l’éparfleur des c6- tés quife courbent. #rricle de M,le Chevalier DE JAU- COURT. : ETancons, {.m. pl. (Marine.) ce font des pieces de bois pofées debout, qu'on met quelquefois fous les baux pendant que les vaiffeaux dérneurent amat- rés dans le port, pour les foûtenir & faire qu'ils fa- tiguent moins. (Z) rs ETANCÇONS de preffe d'Imprimerte, ce font des pie- ces de bois plus ou moins longues & par proportion de dix, de quinze, ou dix-huit pouces de perimetre, & pofées par une des extrémités fur le haut des ju- melles , & appuyées par l'autre, foit aux folives du plancher, foït aux murs du bâtiment, &r dfpofées de façon que chaque érançor à prelque toujours fon an- tagonite, c’eft-à-dire un autre éznçor qui luieft di- reétement oppofe. Ils fervent à maintemr une preîle dans un état ftable & inebranlable. ETANÇCON, e% rérme de Vergetier ; eft un morceau de bois qu'on met au mañche d'une raquette, pour remplir le vuide qu'y laiflent les deux bouts du cer- clé de la raquette , qui ne font pas encore réunis dans cet endroit. re | ETANCONNER zre prefle d’Imprimerie, c’eft par le moyen des étançons mettre une prefle en état de travailler, fans qu'aucun effort puifle la déranger de fon à-plomb. Voyez ETANÇON. ETANFICHE, f. f. terme d'Ouvyrier de bätiment, c’eft la hauteur de plufieurs bancs de pierre, qui font mafle dans une carriere. (P) , _ ETANG, L m. (Géog.) en latin ffagzum ; mot, dit Vatron, formé du grec seyre, g40d non rimam habet. L'étang ft un amas d’eaux dormantes qui ont quel- que profondeur, & qui font fournies, foit par les pluies, foït par quelques fources peu çonfidérables, ETA à Il différé dillac'énice que le lac Efplus grand, plié profond, qu'il reçoit & forme quelque riviere où ruifleau, au lièuque l’Ægih'èn forme, nin’entre- Soit. Il differe de la mare’ence/que la mare éftplus pêtite moins profondes "ér-plusfitétre fe deffécher durant lété, eu E ‘En France fous entendons coinunéemeént par le mot deérarp üniréfervoir d'éaifx douces dans'hn lieu bas, fermé par une digne on chauffée, pour y nout: tir dupoiflon, 8 c’eftce ue les anciens Latinsmon. moietit pyfcira. Unes plus confidérables érgs du royaume, eftceluide Villers dans lé‘ Bérrilà dix liettés de Bourges, qui, lorfqu'ileft dans fon plein, a ein Ou fix lieues de tour. L'endroit le phis favorable pour un é4zy , fera large, fpacieux enfoncé din côté, & relevé de au tre. Il faudra pouvoir y rafembler huit à dix piés d'eau. On en formera la chaufiée, où le mur define à foûtenir l'effort des eaux, dés meilleurs matériaux, On là fortifiera avec des pieux enfoncés profonde ment en terre, entre léfquels on placera dés brane ches d'arbres, des épines’, des oférs entrelacés & ferrés. On pratiquera à une des extrémités de l’ecvrg une oûverture, par laquelle l’eau fuperflue purfie s’écouler ; & une autre au fond de l’éxzp, par la: quelle ‘on puifle le vuidèr. Il faudra faire griller ces ouvertures. Celle par laquelle lézrp fe vuidera, s’ap- pelle/7 borde, Où voit qu’elle doit être à l’éndtoit le plus bas. Un terrein ne fourmiffant pas toutes for- tes de graines , un eng ne nourrit pas toutes fortes de porflons. C’eft au mois de Mai qu'on empoïffonne faunéang. À faut un millier d'alvin ou de petits poif- fons par arpent. Onne pêchera fon ér que de cinq ans en cinq ans, fi l’on veut avoir nne belle pêche, Cette pêche fe fera en Mars. Pour cet effet oh met l’érang à fec, & l’on prend'toût ce qui re doit pas fervir dalvin. | | On voit dans les Indes quantité d’évnps faits & ménagés avec indufiie, pour fournir de l’eau de pluie Pendant la féchereffe de l’été aux habitans qui {ont trop loi des rivieres, ou dont le terroir n’eft pas propre à crenfer des puits. Voyez CITERNE. Les érangs falés font des amas d'eaux de la mer qui n'ont qu'une iflue. Quand la marée eft haute, elle fé répand dans ces fortes d’érenes, & les laïfle remplis lorfqu’elle fe retire. Il y en à plufieuts dans lé mon- de. Nous en connoïffons quelques-uns dans ce royau- me, & entre autre celui qu'on appelle léang de Lan guedoc Ou de Maguelone : C'Eft même une efpece de lac qui fe décharge dans le golfe de Lyon. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. - | *ETANG, {. im. (Ezclum.) ceux qi fabriquent les enclumes appellent aïnf le réfervoir d’eau creu- {en tètre, oh ils trempent cès mailles de fer quand elles font forgées. Il faut que lérarg foit d’une capa: cité proportionnée à la force de la piece à tremper; fans cette précaution, l'eau metant pas aflez longe tems fraîche, là trempe en pourra être altérée. ETAPE, (Droit D’) Droër politique ; c’éft un droit en veïtu duquel le fouverain arrête les mat. chancifes qui arrivent dans fes ports, pour obliger ceux qui les tranfportent à Les expofèr en vente dans un marche ou un magañn public de fes états. Plufieurs villes anféatiques & autres jouiffent dif- féremiment du droit de faire décharger dans leurs ma- gafins les effets qui arrivent dans leurs ports, en èm- pêchant que les négocians puiflent les vendre à bord de leurs vaifleaux , ou les débiter dans les terres 6 Éeuxecirconvoifins. Le mot d’érape, {elon Ménage, vient de l'allemand flapelen , mettre en monceau, Guichardin prétend au contraire que le mot allemand viént du françois étaple, & celui-ci du latin fabulum, I] feroit bien difficile de dire lequel dés deux étymoloviftes à raie x6 ET A fon, maïs c’eft auffi la chofe du mondeifa moins ime portante, Je crois que les étrangers ne faurotent raifonna- blement fe plaindre de ce qu’on les oblige à expofer en vente leurs marchandifes dans le pays, pourvü qu'on les achete à un prix ratfonnable, Mais je ne déciderai pas ficeux qui veulent amener chez eux des marchandifes étrangeres, ou tranfporter dans un tiers pays des chofes qui croiffent ou qui fe fabriquent dans le leur , peuvent être obligés légitimement à Les expofer en vente dans les terres du fouverain par lef- quelles ils pañlent; 1l me femble du moins qu'on ne pourroit autorifer ce procédé, qu’en fourniflant d’un côté à ces étrangers les chofes qu'ils vont chercher ailleurs au-travers de nos états, & en leur.achetant enmêmetems à un prix rafonnable celles qui croif- fent ou qui fe fabriquent chez eux : alors il eft per- mis d’accorder ou de refufer le paffage aux marchan- difes étrangeres, en confidérant toüjours les incon- véniens qui peuvent réfulter de l’un ou de l’autre de ces deux partis. Je ne dis rien des traités que les di- verfes nations ont faits enfemble à cet égard, parce que tant qu'ils fubfiftent , 1l n’eft pas permis de les altérer. Voyez fur cette matiere Buddeus, Hertius, Puffendorf , & Struvius, de jure pub. rom. german. &c. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. ETAPE, f. £. (Art mir.) dans l’art militaire , ce font les proviñons de bouche & les fourrages qu’on diftribue aux foldats quand 1ls paffent d’une provin- ce dans une autre, ou dans les différentes marches qu'ils font obligés de faire. C’eft de-là qu'on appelle étapiers ceux qui font, marché avec le pays ou territoire, pour fournir les troupes de vivres. Chambers. Feu M.de Louvois fit dreffer par ordre du roi une carte générale des lieux qui feroient deftinés au lo- gement des troupes, & à la fourniture des érapes fur toutes les principales routes du royaume; & cette carte a depuis fervi de regle pour toutes les marches des recrues ou des corps quife font dans le royaume. Cet établiflement avoit été projetté fous le regne de Louis XIII. L’ordonnance qu'il rendit à Saint-Ger- main-en-Laye le 14 Août 1623, porte qu'il feroit établi quatre principales brifées dans le royaume; une de la frontiere de Picardie à Bayonne, une autre de la frontiere de la Baffe-Bretagne à Marfeille, une du milieu du Languedoc jufqu’au milieu de la Nor- mandie, & une autre de l’extrémité de la Saintonge aux confins de la Breffe ; qu’il feroit tiré de moindres brifées traverfant Les provinces qui fe trouveroient enfermées entre les quatre principales, & que dans ces brifées feroient affeétés de traite en traite cer- tains logemens & maïfons qui feroient délaïffées vui- des par les gouverneurs des provinces, baillis, fé- néchaux, gouverneurs particuliers, maires & éche- vins de villes; lefquels logemens feroïent mis en état de recevoir &r loger les gens de guerre de cheval & de pié , paffant de province à autre. Cet arrangement rendit Le logement &r le paffage des troupes moins onéreux aux provinces ; mais comme le foldat devoit vivre en route au moyen de fa folde fixée à huit fous par {oldat par ladite ordon- nance , les troupes chargées de leur fubfiftance ne manquoient pas les occafñons d'enlever des légumes, des volailles, & tout ce qui pouvoit contribuer à rendre leur noutriture meilleure. Ce fut dans la vüe d’obvier à cette efpece de pil- lage , que le roi Louis XIV. jugea à-propos de faire fournir la fubfftance en pain, vin , & viande, dans chaque lieu deftiné au logement. Cet établiflèment produifit dans les provinces tout l’effet qu'on pou- voit en attendre; les habitans de la campagne y trou- verent leur intérêt dans une confommation utile de leurs denrées; les troupes sûres de trouver en arri- E T À vant à leur logement une fubfiftance prête & abons dante, n’eurent plus de motifs de rien prendre; la difcipline devint réguliere dans les marches: enfin la facilité de porter destroupes d’une frontiereà l’autre, fans aucune difpofition préliminaire pouraffürer leur fübfiftance, ne contribua pas peu dans les dernieres guerres au fecret des projets & à la vivacité des opé- rations. Ainfles princes voifins ont toñjours regar- dé les ésapes comme un avantage infini que la France avoit en fait de guerre fur leurs états; qui par la conftitution de leur gouvernement & par.la diffé: rence de leurs intérêts, n’étoient pas fufceptibles d'un pareil établiffement. RE Pole -, Une utilité fi marquée n’avoit pas cependant em- pêche de fupprimer les ésapes en 1718 , au moyen de l'augmentation de paie que l’on accorda aux trou- pes. Infenfiblement on retomba dans les inconvé- miens que l’on avoit évités par cet établiflemént ; & les chofes en vinrent à un tel point, que Sa Majefté attentive à favorifer fes peuples & À maintenir la difcipline parmi fes troupes , ne crut rien faire de plus utile que de les rétablir par l'ordonnance du 13 Juillet 1727, dont les principaux articles font tirés de celle qui fut rendue le 14 Juin 1702. Code militaire par M. Briquet.. (Q | ETAPIER , £. m. (Ars milis,) eft celui qui fait un marché pour fournir aux troupes qui paflent dans une province, les vivres êr le fourrage néceffaires à leur fubfiftance & à celle de leurs chevaux. Foyez ETAPE, (Q) TMLTÉ | ETAQUE , (Marine.) Voyez ITAQUE. ETARCURE , £ f. (Marine. ) on fe {ert quelque- fois de ce mot pour défigner la hauteur des voiles: mais il w’eft ouere d’ufage. (Z) ETAT, {. m. (Méraph.) Etat d’un être en géné- ral &c dans le fens onthologique, c’eft la co-exiftence des modifications variables &z fuccefives , avec les qualités fixes & conftantes : celles - ci durent autant que le fujet qw’elles conftituent , 8r elles ne fauroient louffrir de détriment fans la deftruétion de ce fujet. Mais les modes peuvent varier , 8 varient effeétive- ment; ce qui produit les divers étars, par lefquels tous les êtres finis paflent. On diftingue l’érar d’une chofe en interne &r externe. Le premier confifte dans les qualités changeantes intrinfeques ; le fecond dans les qualités extrinfeques , telles que font les rela- tions. L’érar interne de mon corps, c’eft d’être fain ou malade ; fon ésar externe, c’eft d’être bien ou mal vêtu , dans un tel lieu, ou dans un autre. L’ufage de cette diftinétion fe fait fur-tout fentir dans la Morale, où 1l eft fouvent important de bien diftinguer çes deux érats de Phomme. Deux chofes qui ont les mêmes modifications ac- tuelles, font dans le même éar interne; & au con- traire. Il faut être circonfpelt dans l'application de ce principe, de peur de prendre pour les mêmes modi- fications celles qui ne font pas telles effeivement. Par exemple, la chaleur eft un mode de la pierre qui la conftitue dans un érar différent de celui qu’on ap- pelle le froid. Concevez trois corps égaux qui ont le même degré de chaleur, & fuppofez que deux de ces corps fe réuniflent & en forment un qui foit double du troifieme, il y aura dans Le corps double le même degré de chaleur que dans le corps fimple, quoique la quantité de chaleur , en tant qu’on la conçoit éga- lement répandue par toute la mafle, foit double dans le corps double. C’eft pour cela que l'Etat de chacu- ne des parties du même corps eft dit le même, ab- ffraétion faite de leur grandeur , pourvû qu’elles foient également chaudes , quoiqu'il faille plus de chaleur pour échauffenune partie plus grande que pour en échauffer une moindre. Wolf, ozcolog. S. 707. Le changement de relations change Pétat externe. : L’étas L'état interne d’un homme eft changé, quand de fain il devient malade, de gaitrifle, &c. car ces difpofi- tions du corps & de l’efprit font des modes, & réfi- dent dans l’homme même. Maïs celui qui de riche fe transforme en pauvre, ne perd que fon éfat externe en perdant fon droit fur des biens qui étoient placés hors de lui. Ces article eff de M. FORMEY. Etaz pe NATURE, (Droit nat.) C’eff proprement & en général l’état de l’homme au moment de fa naïffance : mais dans l’ufage ce mot a différentes ac- ceptions. _ Cet état peut être envifagé de trois mamieres ; ou par rapport à Dieu; ou en fe figurant chaque per- ionne telle qu'elle fe trouveroit feule & fans le fecours de fes femblables ; ou enfin felon la rela- tion morale qu'il y a entre tous les hommes. Au premier égard, l’éras de nature eft la condition de l’homme confidéré en tant que Dieu la fait le plus excellent de tous les animaux ; d'où 1l s'enfuit qu'il doit reconnoître PAuteur de fon exiftence, ad- mirer {es ouvrages , lui rendre un culte digne de lui, & fe conduire comme un'être doùé de raïon: de- Lorte que cet éfas eft oppolé à la vie & à la condi- tion des bêtes. , Au fecond égard, l’écar de nature eff la trifte fitua- tion où l’on conçoit que feroit réduit l’homme, s’il étoit abandonné à lui-même en venant au monde : en ce fens l’ésar de nature eft oppoié à la vie civilifée par l’induftrie &c par des fervices. Au troifieme égard , l’ésar de nature eft celui des hommes, entant qu'ils n’ont enfemble d’autres rela- tions morales que celles qui font fondées fur la liai- don univerfelle qui réfulte de la reffemblance de leur nature, indépendamment detoute fujétion. Sur cepié-là, ceux que l’on dit vivre dans l’égar de natu- ze, ce font ceux qui ne font n1 foûmis à l’empire l’un de l’autre, ni dépendans d’un maître commun : ainfi Vérat de nature eit alors oppoté à l'éras civil ; & c’eft fous ce dernier fens que nous allons le confidérer dans cet article. Cet nature et un ésar de parfaite liberté ; «un é dans lequel, fans dépendre de la volonté de perfonne , les hommes peuvent faire ce qui leur plaît, difpofer d'eux &t de ce qu’ils poffedent comme als jugent à-propos, pourvü qu'ils fe tiennent dans les bornes de la loi naturelle. ; Cet érar eft aufli un érar d'égalité , enforte que tout pouvoir & toute jurifdiétion eft réciproque : cat il eft évident que des êtres d’une même efpece &x d'un même ordre, qui ont part aux mêmes avan- tages de la nature, qui ont les mêmes facultés, doi- vent pareillement être égaux entr'eux , {ans nulle fubordination ; & cet érar d'égalité eft le fondement des devoirs de l’humanité. Voyez EGALITÉ. Quoique lésar de nature {oit un érat de liberté, ce met nullementun éser de licence; car un homme en cet érat n’a pas le droit de fe détruire lui-même, non plus que de nuire à un autre : il doit faire de fa H- berté le meilleur ufage que fa propre confervation demande de lui. L'écart de nature à la loi naturelle pour regle : la raïfon enfeigne à tous les hommes, s'ils veulent bien la confulter, qu’étant tous égaux & indépendans, nul ne doit faire tort à un autre au fujet de fa vie, de fa fanté, de fa liberté, & de fon bien. | Mais afin que dans l’ésas de nature perfonne n’en- ireprenne de faire tort à fon prochain, chacun étant égal, a le pouvoir de punir les coupables, par des peines proportionnées à leurs fautes, &c quitendent à réparer le dommage, & empêcher qu'il nenarrive un femblable à lavenir. Si chacun w’avoit pas la puiffance dans l’éces de nature, de réprimer les mé- & dans l'ufage elle eft connue fous le nom d’affem- blée des notables. | Il paroît auffi qu’en 165 1 la nobleffe fe donna de . grands mouvemens pour faire convoquer les érars généraux ; que leroi avoit réfolu qu'on les tiendroit à Tours, mais que ces éars n’eurent pas lieu: en effet 26 E T A ontrouve dans les regiftres de la chambre des comp- tes un arrêté fait par cette chambre, portant qwelle ne députeroit point à ces éfais. On tient encore de tems en tems des éxés particu- liers dans quelques provinces, qu’on appelle par cet- te raïon pays d'états ; tels que les érars d'Artois, ceux de Bourgogne, de Bretagne, éc. êc autres, dont on parlera dans les fubdivifons fuivantes. | Quelques perfonnes peu au fait des prmcipes de cette matiere, croyent que toute la robe indiftinéte- ment doit être comprife dans le sers-érar ; ce qui eff une erreur facile à réfuter. Il eft vrai que les gens de robe qui ne font pas no- bles, foit de naïffance ou autrement , ne peuvent être placés que dans Le siers-érar ; mais ceux qui Jouif- fent du titre & des prérogatives de noblefle , foit d’extraétion ou en vertu de quelque office auquel la nobleffe’eft attachée, ou en vertu de lettres parti- culieres d'annobliffement, ne doivent point être con- fondus dans le siers-érar ; on ne peut leur contefter le droit d’être compris dans l’ordre ou étar de la noblef- fe , de même que les autres nobles de quelque profef- fion qu'ils foient, 8& de quelque caufe que procede leur nobleñe, On entend par ordre ou étar de la nobleffe , la clafle de ceux qui font nobles; de même que par sers- écat on entend un troifieme ordre diftinét & féparé de ceux du clergé & de la nobleffe , qui comprend tous les roturiers, bourgeois, ou payfans , leiquels ne font pas ecclefiaftiques. Chez les Romaïns la nobleffe ne réfidoit que dans l'ordre des fénateurs, qui étoit l’ésas de la robe. L’or- dre des chevaliers n’avoit de rang qu'après celui des fénateurs, 87 ne joiufloit point d’une nobleife parfai- te, mais feulement de quelques marques d'honneur. En France anciennement tous ceux qui portoient les armes étoient réputés nobles ; &c il eft certain que cette profeflion fut la premiere fource de la noblef- fe ; que fous les deux premieres races de nos rois, ce fut le feul moyen d’acquérit la noblefe : mais il faut aufñ obferver qu’alors il n’y avoit point de gens de robe, ou plütôt que la robe ne faifoit point un érat différent de l'épée. C’étoient les nobles qui rendoient alors feuls la juitice : dans les premiers tems ils fié- geoient avec leurs armes ; dans la fuite ils rendirent la juftice fans armes & en habit long, felon la mode & l’ufage de ces tems-là , comme font préfentement les gens de robe. Sous la troifieme race il eft furvenu deux chan- semens confidérables, par rapport à la caufe produc- tive de la noblefe. g., L'un eft que le privilége de nobleffe dont jouif- foient auparavant tous ceux qui faifoient profefhion des armes, a été reftraint pour l’avenir à certains gra- des militaires, & n’a été accordé que fous certaines conditions ; enforte que ceux qui portent les armes fans avoir encore acquis la nobleffe, font compris dans Le sers-état , de même que les gens de robe non- nobles, L'autre changement eft qu'outre les grades mili- taires qui communiquent la noblefle, nos rois ont ‘établi trois autres voies pour l’acquérir ; favoir la pofleflion des grands fiefs qui annoblifloit autrefois les roturiers , auxquels on permettoit de poféder fiefs; l'annobliflement par lettres du prince; & en- fin l'exercice de certains offices d'épée , de judica- ture, où de finance, auxquels le roi attache le pri- vilége de noblefle. … Ceux qui ont acquis la nobleffe par l’une ou l’autre de ces différentes voies, ou qui font nés de ceux qui ont été ainf annoblis, font tous également nobles ; caï On ne COnnoît point parmi nous deux fortes de nobleffe. Si l’on diftingue la nobleffe de robe de celle d'épée, ce n'eft que pour indiquer les différentes cau- ET A fes qui ont produit l’une &c l’autre, & nôn pour étas blir entre ces nobles aucune diftinétion. Les honneurs & privilèses attachés à la qualité de nobles, font les mêmes pour tous les nobles, de quelque caufe que procede leur nobleffe, | On diftingue à la vérité plufeurs degrés dans la nobleffe ; favoir celui des fimples gentilshommes no- : bles ou écuyers'; celui de la haute noblefle, qui comprend les chevaliers, comtes, barons , && aütres feigneurs ; & le plus élevé de tous, qui eft celui des princes, Le degré de la haute noblefle peut encore recevoir plufieurs fubdivifions pour le rang : mais encore une fois il n'ya point de diftinétion entre les nobles par rapport aux différentes caufes dont peut procéder leur nobleffe, On ne connoît d’autres dif tinétions parmi la noblefle, que celles qui viennent de Pancienneté, où de lilluitration , ow de la puif- fance que les nobles peuvent avoir à caufe de quel- que oflice dont ils feroient revêtus : tels que font les offices de judicature, qui conferent au pourvü Pexercice d’une partie de la puiffance publique. Ce qui a pu faire croire à quelques-uns que toute la robe étoit indiftinétement dans le siers-érar, eft fans douteque dans le dénombrement des gens de cet érar on trouve ordinairement en tête certains magillrats ou officiers municipaux, tels que les prewôts des mar- chands, les maires & échevins, capitouls, jurats, confuls, & autres femblables officiers ; parce qu'ils font établis pour repréfenter le peuple, qu'ils font à la tête des députés du ters-érar pour lequel ils portent Ja parole. On comprend auffi dans le siers-état tous les officiers de judicature & autres sens de robe non nobles ; & même quelques-uns qui font nobles, foit d'extraétion ou par leur charge, lorfqu’en leur qua- lité ils ftipulent pour quelque portion du Zers-érar, Il ne s’enfuit pas de-là que toute la robe indiftinc- tement foit comprife dans le siers-érat ; les gens de robe qui font nobles, {oit de naiffance, ou à caufe de leur office, ou autrement, doivent de leur chef A + 5 / à Av être compris dans lésa de la nobleffe , de même que les autres nobles. Prétendroit - on que les emplois de la robe font incompatibles avec la nobleffe , ou que des maïfons dont l’origine eft toute militaire & d’ancienne che- valerie, ayent perdu une partie de l'éclat de leur nobleffe pour être entrées dans la magiïftrature, com- me il y en a beaucoup dans plufieurs cours fouve- raines, & principalement dans les parlemens de Ren- nes, d'Aix, & de Grenoble ? ce feroit avoir une idée bien faufle de la juftice, & connoïtre bien mal lhon- neur qui eft attaché à un fi noble emploi. L’adminiftration de la juftice eft le premier devoir des fouverains. Nos rois fe font encore honneur de la rendre en perfonne dans leur confeil & dans leur parlement: tous les juges la rendent en leur nom ; c’eft pourquoi lhabit royal avec lequel on les re- préfente , n’eft pas un habillement de guerre, mais la toge ou robe longue avec la mainde juftice , qu'ils regardent comme un de leurs plus beaux attributs, Les barons ou grands du royaume tenoient autre- fois feuls le parlement; & dans les provinces la juf- tice étoit rendue par des ducs, des comtes, des vi- comtes, & autres officiers militaires qui étoient tous réputés nobles, & fiégeoient avec leur habit de guer- re & leurs armes. | Les princes du fang &r les ducs & pairs concou- rent encore à l’adminiitration de la juftice au parle- ment. Ils y venoient autrefois en habit long 6 fans épée ; ce ne fut qu'en 15 51 qu'ils commencerent à en ufer autrement, malgré les remontrances du par- lement, qui repréfenta que de toute ancienneté cela, étoit refervé au roi feul. Avant M. de Harlaï, lequel {ous Louis XIV. retrancha une phrafe de la formule du ferment des ducs. & pairs, ils juroient de fe com- E % À “porter comme de bons &c fages confeillers au parle- ment. | f Les gouverneurs de certaines provinces font con- failles nés dans les cours fouveraines du chef-lieu de leur gouvernement. , | Les maréchaux de France , qui font les premiers officiers militaires, font les juges de la nobleffe dans les affaires d'honneur. Les autres officiers militaires font tous la fonétion de juges dans les confeils de guerre. ne Nos rois ont aufñ établi dans leuts confeils des confeillers d'épée, qui prennent rang &r féance avec les confeillers de robe du jour de leur réception. Ils ont pareillement établi des chevaliers d'hon- neur dans les couts fouveraines, pour repréfenter les anciens barons ou chevaliers qui rendoient au- trefois la juftice. Enfin les baillis & fénéchaux qui font à la tête des jurifdictions des bailliages &c fénéchauflées, non-feu- Îement font des officiers d'épée, maïs ils doivent être nobles. Ils fiégent l'épée au côté, avec la toque gar- nie de plumes, comme Les ducs &c pairs; ce font eux qui ont l'honneur de conduire Îa noblefte à l'armée * lorfque le ban & l’arriere-ban font convoqués pour le fervice du roi. Ils peuvent outre cet ofhce, rem- plir en même tems quelque place militaire , comme on en voit en effet plufñeurs. je Pourroit-on après cela prétendre que l’adminiftra- tion de la juftice fût une fonétion au-deffous de la nobleffe ? : L'ignorance des barons qui ne favoient la plüpart ni lireniécrire, fut caufe qu'on leur aflocia des gens de loi dans le parlement ; ce qui ne diminua rien de la dignité de cette cour. Ces gens de loi furent d’a- bord appellés es premiers fénateurs , maitres du parle- ment, & enfuite préfidens & confeillers. Telle fut l'o- rigine des gens de robe, qui furent enfuite multiphés dans tous les tribunaux. Depuis que l’adminiftration de la juftice fut con- fiée principalement à des gens de loi, les barons ou chevaliers s’adonnerent indifféremment, les uns À cet emploi , d’autres à la profeffion des armes ; les premiers étoient appellés chevaliers en lois ; les au- tres, chevaliers d'armes. Simon de Bucy premier pré- fident du parlement en 1344, eft qualifié de cheva- Lier en lois ; & dans le même tems Jean le Jay préfi- : dent aux enquêtes , étoit qualifié de chevalier. Les préfidens du parlement qui ont fuccédé dans cette fonétion aux barons, ont encore retenu de-là le titre & l’ancien habillement de chevalier. Non-feulement aucun office de judicature ne fait décheoir de l’état de noblefle, mais plufeurs de ces offices communiquent la noblefle à ceux quine l’ont pas, & à toute leur poftérité. Letitremêmede chevalier qui diftingue la plushaute noblefle, a été accordé aux premiers magiftrats. Ils peuvent pofléder des comtés, marquifats, ba- ronnies; & le roi en érige pour eux de même que pour les autres nobles : ils peuvent en prendre le ti- tre non-feulement dans les a@tes qu'ils paflent, mais fe faire appeller du titre de ces feigneuries. Cet ufa- ge eft commun dans plufieurs provinces , 8c cela n’eft pas fans exemple à Paris: le chancelier de Chivernt fe faifoit appeller ordinairement Le comte de Chiverni ; & fi cela n°eft pas plus commun parmi nous, c’éft que nos magiftrats préferent avec raifon de fe faire ap- peller d’un titre qui annonce la puiffance publique dont ils font revètus, plütôt que de porter le titre d’une fimple feigneurie. - Louis XIV. ordonna en 1665; qu'il y auroit dans fon ordre de S, Michel fix chevaliers de robe. Enfin le duché-pairie de Villemor fut érigé pour le chancelier Séguier , & n’a été éteint que faute d’hoirs mâles, Tome FI, E T A 27 … Tout cela prouve bien que la nobleffe de robe ne forme qu’un feul & même ordre avec la nobleffe d'épée, Quelques auteurs regardent même la pre: mere comme la principale : maïs fans entrer dans cette difcufhon , il fuffit d’avoir prouvé qu’elles tien- nent l’une &c l’autre le même rang, & qw’elles parti- cipent aux mêmes honneurs, aux mêmes priviléges, pour que l’on ne puifle renvoyer toute la robe dans le srers-êtat. M. de Voltaire en fon hiftoire univerfelle, som. IT. Pag. 240, en parlant du mépris que les nobles d’ar- mes font de la nobleffe de robe, & du refusque l’on fait dans les chapitres d’Allemagne, d’y recevoir cette noblefle de robe, dit que c’eft un refte de l’ancienne barbarie d’attacher de l’avihflement à la plus belle fonétion de humanité , celle de rendre la juftice. Ceux qui feroient en état de prouver qu'ils def- cendent de ces anciens Francs qui formerent la pre- miere nobleffe, tiendroient fans contredit le premier tang dans l’ordre de la nobleffe. Mais combien y a- t-1l aujourd’huu de maifons qui puiflent prouver une filiation fuivie au-deflus du x. ou xüi. fiecle ? L'origine de la nobleffe d'épée eft à la vérité plus ancienne que celle de la nobleffe de robe : maïs tous les nobles d'épée ne font pas pour cela plus anciens que les nobles de Ia robe, S'il y a quelques maïfons d’épée plus anciennes que certaines maïfons de ro- be, il y a aufli des maïfons de robe plus anciennes que beaucoup de maïfons d'épée, Il y a même aujourd’hui nombre de maïfons des plus illuftres dans l'épée qui tirent leur origine de la robe, & dans quelques-unes les aînés font demeurés dans leur premier état, tandis que les cadets ont pris le parti des armes : diroit-on que la nobleffe de ceux- ci vaille mieux que celle de leurs aînés ? Enfin quand la noblefle d’épée en général tien- droit par rapport à {on ancienneté le premier rang dans l’ordre de la nobleffe, cela n’empêcheroit pas que la nobleffe de robe ne fût comprile dans le mê- me ordre ; & 1l feroit abfurde qu’une portion de la nobleffe auffi diftinguée qu’eft celle-ci, qui jouit de tous les mêmes honneurs &c priviléges que les autres nobles, füt exceptée du rôle de la nobleffe, qui n’eft qu’une fuite de la qualité de nobles, & qu’on la ren- voyât dans le sers tar, qui eft la claffe des rotu- riers , précifément à caufe d’un emploi qui donne la nobleffe, ou du moins qui eft compatible avec la nobleffe déjà acquife. Si la magiftrature étoit dans le siers-érat, elle fe- roit du moins à la tête; au lieu que ce corps a toit jours été repréfenté par les officiers municipaux {eu- lement. Qu'on ouvre les procès-verbaux de nos coùtu- mes, on verra par-tout que les gens de robe qui étoient nobles par leurs charges ou autrement, font dénommés entre ceux qui compofoient l’ésar de no- blefle , & que l’on n’a compris dans le siers-érar que les officiers municipaux ou autres officiers de judica- ture qui n’étoient pas nobles, foit par leurs charges ou autrement. | | Pour ce qui eft des étars , il eft vrai que les magif- _trats ne s’y trouvent pas ordinairement, foit pour éviter les difcuffions qui pourroient furvenir entre eux & les nobles d’épée pour lerangér la préféance, foit pour conferver la fupériorité que les cours ont fur les érats. | Il y eut en 1558 une aflemblée de notables , tenue enune chambre du parlement. La magiftrature y prit pour la premiere fois {éance ; elle n’y fut point con- fondue dans le riers-état ; elle formoit un quüatrieme ordre diftingué des trois autres, & qui n’étoit point inférieur à celui de la nobleffe. Mais cet arrangement n’étoit point dans les principes, n’y ayant en France que trois ordres ou éars, &c qu’un feul ordre de no- D ji 28 E T A blefle: auffi ne trouve-t-on point d'autre exemple, “que la masiftrature ait paru à de telles affemblées ; elle n’affifta ni aux éers de Blois , n1 à ceux de Paris, ÉTAT, (Jurifpr.) ce terme a dans cette matiere plufieurs fignifications. ETAT D'AJOURNEMENT PERSONNEL, C’eft la pofñition d'un-accufé qui eft decrété d’ajournement perfonnel. Se repréfenter en ées d'ajournement per- Jonnel, c’eft fe préfenter en juflice prêt à répondre fur le decret. Un officier ou bénéficier qui demeure en éat d’ajournement perfonnel , demeure interdit juf- qu'à ce que le décret foit levé. ETAT D’ASSIGNÉ POUR ÊTRE OUI, c’eft la po- fition d’un accufé decrété d’afligné pour être où. Voyez l'article précédent. ETAT DE BATARDISE, c’eft la fituation d’un en- fant né hors le mariage. Voyez BATARDISE. ETAT ez matiere bénéficiale , fisgmifie recréance ou provifion. L'article 18 du titre xv. de l'ordonnance de 1667, porte que fi durant le cours de la procé- dure celui qui avoit la poffeflion attuelle du béné- fice décede , l’érar & la main-levée des fruits fera donnée à l’autre partie furunefimple requête, qui fe- ra faite judiciairement à l’audience, en rapportant Pextrait du regiftre mortuaire, & les pieces juftifi- catives de la litifpendance, fans autres procédures. Ce terme pris en ce fens eft principalement ufité en matiere de régale ; au lieu que dans les autres ma- tieres bénéficiales on dit recréance : quandil y a d’au- tres prétendans droit au bénéfice que le roi a con- féré en régale, l’ayocat du régalifte fe préfente en la grand chambre, & conclut fur lé barreau à ce que fa partie {oit autorifée à faire afligner les au- tres contendans, 8 cependant l'état, c’eft-à-dire qu'il demande que par provifion on adjuge la recréance à fa partie; fur quoi il intervient ordinairement arrêt conforme. (4) ETAT DERNIER , 62 matiere bénéficiale , eft ce qui caraétérife la derniere poffefion , foit par rapport à la nature du bénéfice , pour favoir s’il eftféculier ou régulier, facerdotal ou non, fimple ou à charge d’a- mes ; foit par rapport aux collateurs & patrons, pour favoir s’il eft en patronage ou en collation li- bre, &t à qui appartient le patronage ou la colla- tion ; foit enfin par rapport à la maniere de le pof- féder, pour favoir s’il eit en regle ou en commende libre ou decrétée. Ce dernier état décide fouvent les queftions pof- fefloires , c’eft-à-dire que l’on fe détermine en faveur du pourvi par celui qui avoit un droit, au moins ap- parent, au tems de la derniere provifñon, fivant le chapitre querelam 24 éxtra de elel. & eleë&li poteft. le chapitre cum olim 7 extr. de cauf. pofeff. & le chapi- tre confultationibus 19 , x de jure patron. Voyez La ju- rifprud, canon. au mot Etrar, feët. 2. (4 ETAT DERNIER , ex matiere de poffeffion, fignifie la fituation où les chofes étoient avant le trouble : ce terme fuppofe que l’észs des chofes étoit d’abord dif- férent, & qu’en dernier lieu il a changé. Foyez Pos- SESSION, POSSESSOIRE. ETAT DES ENFANS, c’eft le rang qu'ils tiennent dans la famille & dans la fociété, felon leur qualité de zaturels ou de légitimes, Lorfqu’on parle de l’éras des enfans , on entend auffi fouvent par ce terme leur filiation; ainfi rapporter des preuves de leur étas,, af Îûrer leur érar , c’eft établir la filiation. ETAT D'UNE FEMME, c’eft la fituation d’une fem- me en puiflance de mari. Cet éar a cela de fingulier, que la femme ne peut s’obliger fans Le confentement & autorifation de fon mari; elle ne peut pareille- ment efter en jugement fans être autorifée de lui, ou à fon refus par juftice, s’il y a lieu de l’accorder. ETAT DE LÉGITIMITÉ ..c’eft celui d’un enfant né d’un mariage légitime, ETAT (Je metrre en } de la part d’un accufe ; c’elt fe repréfenter à juftice. | pe ETAT, (mwertre une caufe, inffance, où procès en) c’eft l’inftruire &c faire tout ce qui eft néceflaire pour que l’affaire puifle être décidée, Voyez CAUSE, Ins: TANCE, PROCÈS. ÉTAT ET OFFICE font quelquefois termes fyno- nymes, Voyez OFFICE, ETAT fignifie quelquefois fimplement une place qui n’eft point office , foit que cette place foit une dignité, ou que ce foit une fimple fonétion onu com- nuflion., | ÉTAT DE PERSONNE, c’eft fa filiation & ce qui V’attache à une famille, On entend aufi quelquefois par-là tout ce qui donne un rang à quelqu'un dans la fociété ; comme la liberté, la vie civile, les droits de cité, la majorité, &c. ÉTAT PREMIER eft oppofé à dernier état, Voyez c1-devant ÉTAT DERNIER. | ÉTAT DE PRISE DE Corps, c’eft la fituation d’un accufé decrété de prife de corps. Foyez ce qui a été dit ci-devant ax mot ETAT D'AJOURNÉMENT PER- SONNEL. ETAT , (queflion d”) c’eft une conteftation où l’on révoque en doute la filiation de quelqu'un , ou fon érat , &t fes capacités perfonnelles. Woyez ETAT DE PERSONNE. (4) ÉTAT , en matiere de compte, fignifie un fableau ou mémoire dans lequel on détaille la recette 8 dépente du comptable , {es reprifes, &c. Il y a plufieurs {or- tes d’érats. ETAT, (bref) eft un compte par fimple mémoire, à la différence d’un compte qui eft rendu en la forme prefcrite par l'ordonnance. Voyez COMPTE Par BREF ÉTAT, | ETAT DE DÉPENSE, eft un mémoire de dépenfe Voyez COMPTE & DÉPENSE. | ETAT FINAL, @ la Chambre des Comptes, eft celui que le rapporteur écrit en fin du compte, fuivant ce qui réfulte des parties allouées où rejettées dans le compte, pe ETAT DES MaAISoNs ROYALES, eft le rôle des officiers qui y fervent, & qui doivent jouir en con- féquence de certains priviléges. Ces évars font en- voÿés à la cour des aides. Woyez Les réolemens des tailles , de 1614, art. xxjv. 1634, art. vi. € la de- claration du 30 Mai 16C4. ETAT DE RECETTE, eft un mémoire ou borde-: reau de recette. ETAT DE REPRISE, eft le mémoire des reprifes que fait le rendant compte. Voyez COMPTE 6 Re- PRISE. Etat pu Rot, en fhyle de la Chambre des Comptes, eff l’érar arrêté au confeil, de la recette & dépenfe - à faire par le comptable. Woyez ce qui eff dir dans l’article fuivant. ETAT AU VRAI, er ffyle de la Chambre des Comp- tes, eft un érar arrêté, foit au confeil, foit au bureau des finances , de la recette & dépenfe réellement faite par le comptable ; à la différence de l’ésas du roi, qui eft l’érar de recette & dépenfe qu'il avoit à faire. ETAT wt jacet, {e dit à la chambre des comptes, lorfqu'on tarde à clorre un compte. L’auditeur-rap- porteur du compte en doit faire l’état 7 acer, fui- vant l'ordonnance de 1454, pour empêcher que pendant ce retardement le comptable ne divertifle par des acquits mandiés , le fonds qu'il peut devoir. A N Fes en Normandie, fignifie ordre du prix de Padjudication par decrer. On dit senir état du prix de l'adjudication & des baux judiciaires. Article 5 de la coktume. (A) ETAT DE Nevir, en Angleterre , ef un ancien geoiitre gardé par le fecrétaire de l'échiquier, lequel contient l’énumération de la plüpart des fiefs que Le toi poffede dans le royaume d'Angleterre ; avec des enquêtes fur les fergenteries , & fur les terres échûes à fon domaine par droit d’aubaine. Il porte le nom de fon compilateur , Jear de Nevil, qui étoit un des juges-ambulans fous le regne d’'Henrilll, roi d’'An- pleterre. (4) | Erars D'ARTOIS , font une aflemblée des dépu- tés du clergé, de la noblefle, & du siers -érat de la province. Ils font convoqués par le roi, auquel feul en ap- partient le droit, fuivant le placard du 12 Janvier 1664. | L'objet de cette affemblée eft de régler ce qui ef néceffaire par rapport aux fubventions que la pro- vince accorde au roi, attendu qu’elle n'eft pas fu- jette aux impofitions qui ont lieu dans le royaume. Cet ufage eff fi ancien, qu'on n'en trouve point le commencement : on peut néanmoins l’attribuer à la compofition de 14000 liv. que firent les-habitans d'Artois avec le roi Charles V. le premier Décembre 1368, pour leur part de la contribution annuelle aux frais de la guerre. Cette fomme de 14000 liv. qui a toûjours été nommée l’ancienne aïde où compo- Jition d'Artois, étoïit réglée par les élus d'Artois, Boulenois, Saint-Pol, reflorts & relevemens, felon la caroline en charte du roi Charles VI, du 31 Ofto- bre 1400. | La tenue de ces états n’a jamais été interrompue, f ce n’eft depuis la prife d’Arras en 1640, jufqw’à la paix des Pyrenées , après laquelle le roi rétablit le pays dans fes anciens privilèges. La premiere aflem- blée fe tint dans la ville de Saint-Pol en 1660 ; mais depuis on les tient totijours à Arras. L’évêque d'Arras eft le préfident-né des éars, Voyez l'état de France de Boulainvilliers ; ditfionn. de la Martimere ; & Maillart fur la coéturme d’ Artois , p. 168. ETATS DE BOURGOGNE, font les ésers particu- liers ou affemblée destrois ordres du duché de Bour- gogne, qui fe fait tous les trois ans ou environ, au mois de Mai, à moins que le roi r’avance ou retarde la convocation, On y regle les impoftions de la province, À l'égard du détail de ceux qui y ont entrée. voyez la defériprion de Bourgogne, par Garreau. Voyez auffi ci-après ETATS DU CHAROLLOIS 6 ETATS DU Maconnoïs, ETATS DE BRESSE, font les ézass particuliers de cette province. Ils fe tiennent tolijoufs avant ceux de Bourgogne, dont ils font diftingués, quoique du refte la Breffe fafle partie du gouvernement de Bour- gogne. Le riers-érat y eft compoié des députés des vingt-cinq mandemens qui compofent tout le pays, Voyez Piganiol de la Force. ETATS DE BRETAGNE, autrefois fetenoient tous les ans; maïs dépuis 1630 on ne les affemble plus que de deux ans en deux ans. Le riers-étar elt com- pofé des députés des quarante communautés de la province, dont quelques-unes ont droit d'envoyer deux députés ; les autres un feulement. Ce corps n’a qu'une feule voix. ; ETATS Du BUGEY : outre les aflemblées généra- les des trois ordres , le siers-érar y tient des aflem- blées particulieres , avec la permiffion du gouver- neur. ETATS pu CHAROLLOIS : quoique le Charollois fafle partie-du duché de Bourgogne, il a néanmoins fes ésats particuliers, qui dépendent en quelque ma- Mere des éfars généraux de la Province, dont ils reçoivent les commiflions pour faire l’impofition de _ ur cotte-part des charges générales. Ces dérs sal femblent dans la ville de Charolles, E TA 29 ÉTAT DU CLERGE 07 ETAT DE L'EGList C’eft l'ordre des eccléfiaftiques , compofé de ceux qui fonit députés aux érars. ÊTATS DE DAUPHINÉ : cette province étoit ati trefois un pays d’ésass ; mais ils furent fupprimés en 1628, par une ordonnance qui etablit en leur place fix bureaux d’élé&tions. , ETATS GÉNÉRAUX » 0 ETATS DU ROYAUME ; c'eft-ä-dire ceux où fe trouvoient les députés des trois ordres de toutes les provinces, 74 OYez ci-dévant ETATS. ÊTATS DE LA LANGUEDOC, étoient ceux qui fe tenoient par les députés des trois ordres de la partié méridionale de la France ; laquelle partie étoit ana ciennement toute comprile fous le nom de pays dela Languedoc, qu'il ne faut pas confondre avec le Lan: guedoc proprement dit. Du tems que les Anglois poflédoient la Guyenne & autres pays circonvois fins, la Languedoc ne comprenoit que le Langue doc, le Quercy, & le Roüergue. ETATS DE LANGUEDOC : leur établiflement eft fortancien ; avant laréunion de cette province en un feul corps, les comtes deTouloufe & autres feigneurs particuhers aflembloient chacun leurs fujets, lorf qu'ils vouloient faire fur eux quelque impoñtion. Depuis la réunion de cette province à la couronne ; onobfervoit encore d’affembler les habitans du Lan- guedoc par fénéchauflées, jufqu'à ce que l’on trous va plus à propos de les convoquer tous enfemble, c’eft-à-dire deux députés de chaque diocèfe ; un pour le clergé, qui eft l’évêque ; & un baron pour la no- bleffe & les députés des principales villes. Quel- ques-uns prétendent que c’eft fous Charles VII. que cette derniere forme a étéétablie : on trouve cepen- dant encore depuis, quelqüies commifions adreflées aux fénéchaux ; & ce n'eit que depuis l’an 1500, tems auquel remontent feulement les regiftres des états , qu'on eft certain que la forme qui a lieu pré- fentement , étoit déjà obfervée, Les états de Languedoc s’aflemblent tous les ans: autrefois leur féance fe tenoit alternativement dans différentes fénéchauflées, préfentement ils s’afflem- blent ordinairement à Montpellier; larcheyèque de Narbonne en eft préfident-né. ETATS DE LA LANGUEDOYL, éfoient ceux. de la partie feptentrionale de France; ce qui comprenoit toutes les provinces qui font en-decà de la Loire, On difoit quelquefois , comme termes fynonymes, états de la Languedoyl € du pays coûtumier: cepen- dant le Lyonnois , qui fe régit par Le droit écrit, én: voyoit aufh fes députés aux é£ats de Languedoc. ETATS DU Ma CONNOïS : cette province, quoi- qu'elle fafle partie du gouvernement de Bourgogne, a {es ésars particuliers, qui font l’impofition des char- ges que le Mâconnois doit fupporter. Cette quotité étoit autrefois un quatorzieme au total ; aujourd’hui elle eft du onzieme. ÊTATS DE LA NOBLESSE, fignifie l’ordre de la no. bleffe dans les érats généraux 8 dans les procès-ver- baux de coûtume, & autres affemblées publiques. Quand on parle de l’érar de la nobleffe, on entend par- là les dépurés de l’ordre de la’ nobiefle. EÊTATS PARTICULIERS , font ceux d’une provin: ce ou d’une ville; ils font oppofés aux érars géné- raux, Voyez ci: devans ce qui en aéré dit #4 mor ÊTATS. 29 1 - ETATS DU ROYAUME , font la même chofe que les rats généraux. Noyez,ci-dévant ETATS. ETAT, (#éers-) c’eft le troïfieme ordre de és, compoifé des bourgeois & du peuple , mepréfentés dans laflemblé des érars par les députés dés villes: Voyez ce qui en a été dit ci-devant 208 ETAT. ETATS, (srois) font les troisiordres du royaume; . favoir le clergé, la noblefle,; &lersiers-érar 30 EL T A ETATS DES Vicces, font l’aflemblée particuliere -des officiers, principaux habitans & notables bour- geois des villes, lorfque le roi leur permet de s’af- {embler en forme d’éers, pour délibérer de leurs af- faires communes. (4), | ÉTAT, (Medecine.) api: CE tOTme eft employé pour défigner le tems de la maladie auquel les fymp- tomes n’augmentent plus ni en nombre ni en violen- ce, & fubfiftent dans le dernier degré de leur accroif- fement: c’eft alors que la maladie eft dans toute fa force. | On fe fert auf du même terme à l'égard de Paug- mentation fixée des fymptomes qui accompagnent le redoublement ou l’accès dans les maladies qu en {ont fufceptibles. Voyez MALADIE, FIEVRE, TEMS, REDOUBLEMENT, PAROXYSME 04 ACCÈS. (d) ETAT DE LA GUERRE, Ce que l’on appelle lésas de la guerre, c’eft la difpofition & les arrangemens néceflaires pour la faire avantageufement. C’eft pro- prement le plan de conduite qu'on doit fuivre, rela- tivement à la nature &c au nombre des troupes qu'on peut mettre en campagne, à celles de l'ennemi, & au caractere du général qui doit les commander. Ainfi un prince qui ne peut avoir des armées auffi fortes que celles de {on ennemi, doit luifaire une guer- redechicaneou défenfive.L’ésar de la guerre formé par fon général, confiftera à éviter les affaires décrfives, & à fe pofter toüjours aflez avantageufement pour détruire les projets & les defleins de l'ennemi, fans s’expofer à être forcé de combattre. Un général dont la cavalerie fera fupérieure à celle de l'ennemi, ré- glera l’écar de la guerre, pour la faire agir ; c’eft-à- dire que cet érat confiftera à faire enforte d'attirer l'ennemi dans les plaines, & à le tirer des endroits fourrés, propres à l'infanterie. Si au contraire il eft plus fort en infanterie , ou que la fienne foit meil- leure que celle de Pennemi, il occupera les lieux forts, où la cavalerie ne peut manœuvrer que difi- cilement. Enfin, dans quelque fituation qu’il fe trou- ve, l’état de la guerre confifte à régler tout ce que lon peut faire de mieux pour tirer le plus d'avantage poffible de fes troupes, arrêter les deffeins de l’en- nemi, & lui faire, autant que l’on peut , fupporter tous les malheurs de la guerre, Il n’appartient qu'aux généraux du premier ordre de pouvoir régler avec fuccès l'écart de la guerre qu’ils doivent faire; c’eft le fruit de la Science militaire, d’une expérience confommée & réfléchie , d’une grande connoïffance du pays qui doit être le théatre de la guerre, de la nature des troupes qu’on aura à combattre, dé l’habileté & du caraétere des géné- raux qui doivent les commander, &c. Nous fommes fort éloignés de vouloir effleurer feulement cette importante matiere, fur laquelle il y a peu de détails fatisfaifans dans les auteurs militaires. Nous ren- voyons les leéteurs à la feconde partie de l’Ars de la guerre, par M. le Maréchal de Puyfegur ; au Com- mentaire fur Polybe, de M. le chevalier Folard, some F, pag. 342 € fuiy. aux Mémoires de Montecucull, éc. Nous ajoûterons feulement ici deux exemples de projets de guerre bien entendus & bien exécutés, ui pourront donner quelques idées de l'importance ;: cette partie eflentielle de la guerre dans un gé- néral. En1674, les ennemis avoient formé le deffein de nous chañler entierement de l’'Alface. Ils avoient, felon M. le marquis de Feuquiere, une armée de plus de foixante mille hommes , & M. de Tutenne n’en avoit pas vinot mille effe@ifs. M, de Louvois étoit, dit-on, d'avis de ne faire qu’un bucher de cette pro- vince, pour empêcher les ennemis de s’y établir & d’y prendre des quartiers dhyver ; « mais M. de Tu- » renne, Le le srand nombre d’ennemis n’effraya # jamais, fut effrayé d’une telle réfolution, Ce grand E T À » capitaine fut d’un avis contraire à celui du mini£. » tre; 1l regla l’ésar d’une campagne d’hyver qu'il » CoMMuUNIqUA au roi, & lui promit de faire enforte » que les quartiers d’hyver des Impériaux en Alface, » 6c la conquête de cette province importante, de- # viendroient une pure imagination , par le deffein » qu'il s’'étoit formé, & les mefures qu'il s’étoit ré- » 1olu de prendre ». C’eft ce qu'il effeétua enfuite ; car 1l enleva tous Les quartiers de l’armée ennemie les uns après les autres, &c il chafla toute cette ar- mée établie en-decà du Rhin, bien au-delà de ce fleuve, pour aller chercher des quartiers ailleurs. On voit par-là un deffein pris 8 arrêté fur ce que l’en- nemi pouvoit faire. M. deTurenneavoitprévû que les Impériaux ne pourroient pas marcher enfemble en corps d'armée, ni demeurer unis, par la difficulté de trouver des vivres. Sur cette confidération il prend le parti de s'arranger pour les battre en détail, {ans qu'ils puflent fe fecourir les uns & les autres. Voilà un état de guerre, ou, fi l’on veut , un projet de guerre réglé, bien entendu, & également bien exécuté, Le fecond exemple qwon rapportera, eft celui de la campagne der 677 » deM. le Maréchal deCréqui. Ce général devoitagir contre M. le duc de Lorraine, qui avoit une armée fupérieure à la fienne ; mais dès le commencement de la campagne M. de Créqui avoit écrit au roi que cette armée fupérieure ne feroit rien, & qu'il finiroit lui-même cette campagne par la prife de Fribourg : c’eft-à-dire qu’il avoit réglé un état de guerre défenfive, fuivant lequel l’ennemi ne pourroit rien entreprendre contre lui, En effet, «ce » maréchal durant quatre mois, dit M. de Feuquiere, » ne perdit jamais fon ennemi de vüe, &c s’oppofa » toijours de front à tous les mouvemens en-avant » qu'il voulut faire, foit du côté de la Sarre, foit » pour pañler la Meufe du côté de Mouzon: fans que » dans aucun des mouyemens hardis que M. le Ma- » réchal de Créqui fit faire à fon armée, M. de Lor- » raine püt trouver l’occafon de le combattre; parce » que M. de Créqui, qui vouloit éviter un engage- » ment général, compaña fi fagement jufqu’à {es » moindres mouvemens , qu’il ne donna jamais à ce # prince aucun tems qui pûüt lui procurer la poffibi- » lité de l’attaquer avec l’apparence d’un fuccès heu- » reux. La campagne s’écoula prefque toute entiere » dans ces mouvemens, quiproduifirent aux enne- » mis une grande perte d'hommes, un grand dépé- » riflement des chevaux de leur cavalerie, &z de leurs » Équipages ». Le mauvais état de cette armée ayant obligé M. le duc de Lorraine de la féparer avant celle du roi, comme M. de Créqui l’'avoit prévû :« Notre général, » dit le favant officier qu’on vient de citer, qui fort » fecretement s’étoit préparé au fiége de Fribourg, » eut le tems de prendre cette placé avant que M. » de Lorraine püt feulement raffembler une partie » de fa cavalerie pour marcher au fecours de cette » ville». Mémoires de M, le marquis de Feuquiere, tome ÎI. de Pédition in-12. Il eft difficile de refufer fon admiration à des pro- jets de campagne tels que ceux dont on vient de parler ; on les voit aufh habilement exécutés que judicieufement conçûs. Il faut fans doute de très- grands talens pour produire de ces exemples de la Îcience du général; ceux qui les pofledent bien, font de grandes chofes avec de petites armées. Les efprits ordinaires fe contentent de pouffer le tems bien ou mal; les combinaïfons des différens defleins de l’ennemi , & des moyens propres à arrêter ces def. feins , leur paroïflent difficiles, & elles le font en effet. Il eft plus commode d’agir felon les occafions; mais lorfqu’on n’a point de projet ou d’objet antée- rieur, on parvient rarement à faire de grandes cho- ETA ET : ls. « Qui prévoit de loin ne fait rien par précipita- | | Long. Groff. »tion, puiqu'il y penfe de bonne heure ; & 1l eft FER Braf. os » difficile dé mal faire, lorfqu'on y a penfé aupara- 2, Galaubanss «4 #36 Æ » vant ». Teflament politique dn cardinal de Richelieu. Al Eftai (Q) NE : : pe n7# * | +) 40 quarant, . ETAT-MA35OR : on appelle étar-major général à 1) Itague . : } ; REY . l’armée , l’aflemblage de plufeurs officiers chargés LU DTA La . LUS. 'NROSEN HO Rides, d’aubans & salaubans u de veiller à tout ce qui concerne le fervice du corps; Poe galaubans . .. 40 2% fa marche, fon campement, fes logemens, fes fub- | 2? Æicontes, ., D + _ 48 4 | À | ‘ce & fa dfinline. 2 Boulines , ., . , .(46 quarant fiftances , fa police & fa difcipline. Batartide racage |. | À d L’érar-major de l’armée eft compofé du maréchal B PL ä général des logis de l’armée, dont la fon&tion eft de : à Là De PE Te +: +7 L T3 difpofer les marches &c de faire les campemens ; du C Fret a à : ‘* 4 13 maréchal général des logis de la cavalerie , qui doit | ? BIS POons + + + . 56 2 faire les détails de la cavalerie; du major général Funins du grand mâr. de linfanterie, pour les détails.de l'infanterie ; du 1Drifle . : Us s, 120 /06E capitaine des guides, qui en fournit quand il en eft 1 Itague ; ; ) j * ÀO 112 befoin ; de l’intendant avec les commiffaires ; d’un 2AFICO ES ON, PCA Re TU + 90 6: prevôt avec fes archers , pour faire juftice lorfqu’il | 2Efcoüets , . À 4 T'ON STORE en eft befoin, &c. . ES POUINESS., AS + MON 24 L'infanterie a un észr-major général, de même que 2 Bras ° S AUIC ‘ [86 34 la cavalerie legere & les dragons. L’érar-major gé- PEROU APE NES 5. néral de linfanterie fut créé par FrançoisI. en 152$, 2 Balancines A ES Us srl SON LE # celui de la cavalerie legere par Charles IX.en1565, 2 Cargues-points PIRE. PARCS & celui des dragons par Louis XIV. en 1669. 2 Cargues-fonds : °. . + 120 37 Îl y a aufi un ésar-major dans les places deguerre, | 2 Cargues-boulines ROSE TT & dans la plüpart des régimens. (Q) D'Pdénsidnues Le p.242, 20 0 TG ZT ETAT D’ARMEMENT,, ( Marine.) c’eft la lifte que ss a { ; : 2 se E lintendant de la marine envoye à la cour, conte- ee Mo rer 4 : Me Ga nant le nombre des vaifleaux qu’on doit armer dans A RE ï Fe TON SU ES ee 35 fon département ; avec.le nombre des officiers, & Dar. SO PANET ve: "SN UEX 2 autres officiers, matelots, &c. qui doivent y être : P L PURE à fe ‘ NES ; LPalndefals.. Ee 150 40 MS à PA PAPendours nn 0, Fe RON ÉTAT D'ARMEMENT DIDNINVAASSE AUS IC En AM -Brédindinnnl à at, 0 4. 72 3 eétail très-circonftancié, qui marque le nombre, la Enflechures ,. « … ,,. . 7pfquar, qualité &c les proportions des agrès, apparaux & RATES DAT LT ent: Mo 4 munitions qui font employés pour le mettre en éraf | x Batart de RCA 2 RE 108 UD 4 MS UE de faire fa Campagne ; & comme ce détail eft cu- 1 Ride d’eflai . . , 15 PU US 4° rieux, nous joindrons ici un éat d'armement pour un FOR MN NT p% quats aifleau du rot 1 no. ! à ax du roi du P EEE Tps Furins du grand hanier, ETAT de la'garniture, armement & rechange d’un 6 ar il RE COCO à vaiffeau du premier rang. A ARDECHE VERSO A Long. Grof. Rides e » > e . 2A. ER : SPAS | Breh pou || 7 Effai&ifonpalan, .. .. . Un x 6 Haubans d’artimon . . . . .. . . . 130 EL ' 7 l \nÉ à I Efai A A À z > È 18 7 1 Guinderefte È ‘ e e e ° 79 10 Haubans du grand mât . . . , . . 260 9. F ue ” : A à « 80 : I Effai Larre ' ; à : : à 40 17 I fague e e © ® s -26 9 Haubans de mizaine . . , . + 220 # 1 Fauffe itague sr * NES e 2 none 4 0 MOREL MENT DIN On ANUS à 2 Efcoutes . ‘ ; : + C4 D pb Sd Lo Lo A Lo LD CCurn EL SJ LD END &A LE ph pins LEE a. 2 Boulines . ; : : +68 LIUNS d'artinon. | Bas, ne LL! : e .C 88 Euflechures Le, 3 4. 4° 3 prquar. Pendours PAM a 3 8 RO ES ON RTE CRE 2 Balancines … . HU. . … 88 _ 4 Batards deracage . . . . 3 LU 2Gargues-pointss Lis de 1: f 100 _ DER ME Mi Le , ALT Que 5 Itagues , ; : «) 26 5 E LPO... 1 = + 35 3À Cargues-fonds . ., à #40 . 61 < : à 18 3 2 Contre-fanons , : .. 8o 2 DT Lie te Le PEAR 07, , 4 6 f | 4 F6 2% Enflechures 5 : : « A4p°quar, LOPYONE TL Le | Cuire agria Gambes de hune : MTL SE LOC MES TONER EAN OE PAUSE Rides d’aubans ., 3 YO NT 3 4 Ttague ? Palanquins EE $ _) 24 3+ 1 Batart deracage, HE de NE ORIERE 1 Dre S 60 32 à Je | Cr 20 3% 5 Palant d’armure . . , . 20 2: à Palanquins ANR AT AE * j 24 22 Hpue His de la vergue à : ñ Garniture du grand perroques, 1_ Balancine de fougue, - so 25 Ho TR: + . 36 3 Ÿ (Martinet . + . … I NS : 3 2 I Eftai e e e e " e “26 1 GRAN 2 Bras r PURE À Gambes dehune . + . : Q 72 de Pend ; UE Garniture du perroquet de fougue . *enqours ° ° ° r 2+ P pue. 2 Boulines . L $ : … 7213 6 FAURE NE ET 0 MS le, 59: 34un dl 2 Balançines ©, p° à de MAN MSG TS 22 Groff. Long. Long. Groff, Brafl. pouc. Brafl. … pouc s Dre : 5. : : ° +. 60 25 2 Cargues-points . … . + AA 2É 2 Cargues-points + + 76112 2 PAlANQUIIS AS LOT EEE, CNT 22 (Gambes de hune i .124 0 1 Palan de bout : : TÉTOR Rides d’aubans &t galeubans ‘051,401 ÉITPNES ISERE ; : Golig.p. 5 p Batart de racage : LOT DURE Merlin-lufin : S ù " Funins du mât d’ Le Bittore ; : : : 3 Dre. US AS NT OMN O Garniture du perroquet de beaupré, L Ttague AN e e e e 36 II 8 Aubans EX D) H 2 Efcoutes £: . ‘ } 1790006 \ j ; 10 Re 3% 2 Efcouets : ; : 026007 1 Eftai . © : ° ° ‘ 36 re 2, Boulines e e e 5 66 3 _ I Drifle d à D 7 2 Bras # 1 e e e ° 80 2. I Itague 12 .: 1 F x 5 3 LR v} Cargues-points e é e 80 7e 2, Balancines à s i à 30 I 5 2 Cargues-fonds . . . 116, pô 2 Bras … . j C \ UT 2 Cargues-boulines . . . . . 55 3 2 Cargues-points or, : | > 52 1 Cargue-bas . ° e . 46 24 Rides d’aubans ‘ A AE z Bree ° ° , ° 5 0 20 6 ; Batart de racage . ‘ Ji 16% 7 £ Rs it CE CLASS Le : À Les manœuvres des voiles d’eflai. | Dale do nee no 35 I Faux eftai pour lartimon de la voile L'PANTOQUN CS Bee De ee US ONE 2 delai." OM ESNS Fatdechites < 7 p® quar. QD NETETEE. , E MET or Rides d’aubans & Se RE RE TS) . 1 Efcoute &amure . 120 3% x Batart deracage . +. + . 50 ES 1 Faux eftai pour le grand mât de ja Fourrure d'eflii OS D AGUAE ë pe deftai + . . . - 4 2 Balancines Oo. .. . . 80 _ DS Ce de 4 0 eat on 0 cad 5 2% Funins du petit hunier. à pos a dit F5 32 ne Re QAR CE I Fu e : PE e grand hunier de | diVOule delta ONE EE ; ae à LC ROUE 2-45 ne ] 3 DOUTE A8 ER A I GE re Je à riore : x 3 3 1 Efcoute & amure . TOME Z M A AN * : ue” ; ; 1 Faux eftai pour la voile d'eftai du : Diff ad : à 2 : PETER NE ON: MITA RASE) TOUS M ÉRNRE Dale qe es Lulu , 200 aun. Toile meflis +: + . . , soaun. Filde voile mme, 30 lv. Eguilles de voile 60 livs Vieilles voiles pour fourrure . 4 2 Uffenfiles du Pilote. .15 Compas de route, 3 Volets. 1 Horlogé de quaït. 18 Horloges de demi-heure. 6 Lignes à fonder, pefant 29 livi $ Plombs à fonder, pef. 18 liv. 2 Lampes d’habiracle de euivre: 1 Huiliete, 215 Aunes pavois, ‘at Balané, Guindants 2 Enfeignes de poupe dé 25 aun,+ 20 faifant ; ; 46 aunes. 2 Pavillons de beaupré. « 12+ 10 faifantss + “+ » 22: E À Largeur, Hanteurs : 3 » Len tout 4 * 403% 27% sis 43 #3. BT e Grande flamme : Flamme ent» nf 2 2 Cornettes en pavillon GE ee 04 |) Es 8 Giriiettes » “IN cs EN 042 6: Les d Pise de livre, Fil pour pavillon. | + Jivtes, Fil pour coudre les pavillons, flammes & girouettes, | x2 Aïguilles pour rechange. 36 Aiguilles pour coudre lefdits pavillons.’ 2 Lignes pefant 6 liv. pour drifle de pavillon. 4 Fanaux defignal. 2 Cloches pefant 230 liv. 200 livres, Chandelles de cire pouf fanaux. : Canons & leurs uftenfiles, Ù : 16 Pieces de fonte . . de 36 pefant Goquintaux. d ï ï PEUR 2 Pieces d’étamine. : z 2 12 Pieces, + . de:,24 46 PER NAS EUR à 4O Sitanmnrstl: Contis 28 de 8 20 das cr ADel CCR 15 de 4 7 3 de fer « = 4 de 18 pef. 44quint.…. je de 12 33 de 8 23 de 6. 18 den Æ 15 rio Affuts gars. ÿ Affuts de rechange. 50 Roues d’affuts 3; Effieux d’affuts. Een” À Piérriers de fonte, pefant 34 quintaux. 8 Boîtes de fonte, pef. 5o liv. Pierriers de fér, pef. r6o liv. Boîtes. de fer, pef. 40 liv. 8 Clefs de pierriers de fer, pef. 1 liv. & demie. 358 quintaux, Poudre à canon. 20 quintaux , Poudre fine à moulquet, Boulets ronds. 800, : . de 361.pef. 721. piece. 256 quint. 1400: 3 . . “de, 24 21+ 301 2400 0% « s'RUOUIS 1167 20H06 2000. « + de 12 ‘10+ 210 (2% fUer 8 7 1000 + : . de 6 57 55 1 Éx Fret 4 FE es t-gdé : 2 200 Balles de pierriers de pierre. 1000 Boulets à deux têtes, pefant 16 liv. l’un portant l’autre. 260 paquets.de fer. 260 Lanternes à mitraille. 2100 Me- ches. 300 Palans àcanon. 120 Bragues. 120 Couffins. 200 Coins de mire. 100 Platines de fumieres. 100 Pinces de fer. 100 Anfpeéts. 28 Cullieres garnies. 12 Tirebours non garnis. 100 Refouloirs de bois. 80 Refouloirs de corde. 270 douzaines Parchemins. to livres, Fil à gargoufles. 72 Aiguilles à gargoufles. 1 Balance. 220 Porte-gargouflés, 100 Cornes à émor- cer. 100 Boute-feux. 4 Cricsi 4 Barrils à bourre. 2 Tamis à poudre, 6 Cuirs verts pour fouttes. 35 1. Blanc d’Efpagne. 4 barrils péfant 200 livres, Savon mou. 80 liv. Suif. 6o li. Liége. 12 barrils de Noir. 400 Plomb en table. : morceau, Vieilles voiles pour gargoufles. 4 Fanaux de fonte. so Fanaux de com- bat. 12 Lanternes claires. 4 Lanternes fourdes. 6 Lampions. 6 Mefures à poudre. ÿ Entonnoirs à pou- dre. 60 Aiguillettes. 4 Coupelles. 1 Huiliere. : liv. Coton filé. r8 Bâtons .de refouloirs. 18 Boutons de refouloirs, 24 Peaux en laine, 1590 Clous pour ef- ET A : couvillons. 2 Marteatix à dents. 1000 Clous pou? parquets. 6 Pieces cordages neufs de 2 ou 3 pouces, | pef.s3rliv. 18 Lignes, pefant $4 Liv. 20 iv. Merlin lufin.:6 Cordage refait, pef. 53 1 Hv. de 2 à 3 pouc. 4 iv. Fil de voiles. 12‘Aiguilles de voiles, 36Pou- lies doubles. 56 Poulies fimples. 6 liv. Fil-d’archal: 200 Grenades. 80 Tuyaux de grenades. 6o Pots-à- feu. 3oliv, Huile de noix. 25 liv.Soufre, 2 liv. Sal= petre. $o Chevrons de 4 prés. 24liv. Rouÿe brun, 3 Brofles à peindre. 2 Cadeñats pour foutes. 2 Bar res d’efcoutilles, pef. 18 liv. piece. 2 Haches & has | chots. 24 Crocs de palans, pef. 3 Liv. 10 Efpifloirs, | pef. 7 hv. piece. 18 Plate-bandes d’affuts, pef. to 1 60 Effes d’affuts, pefant demi-livre piece. 24 Che= | villes:à œillets d’affut, pef. 3 liv. 18 Grandes che- villes d’affut, pef. 15 liv. 24 Pantures de fabord, pef. 20 liv. 24 Gonds de fabords, pef. 14 liv. 30 An- neaux de fabords, pef. 2 iv. 24 Chevilles à boucles pour le bord, pef. 15 liv. 24 Chevilles à croc, pef. 14 liv. 80 Coffes. 60 Crampes. 150 Viroles, pefant 38 Liv. à raifon d’un quart piece, 150 Goupilles, pef, un huitieme de liv. piece, 18 Boutons de couvillons. Armes. 200 Moufquets. 70 Moufquetons. +o Piftolets. 300 Bandolieres. 1500 Balles de plomb, 70 Coute- las. 70 Haches d'armes, 30 Pertuifanes. 6 Halle- D'OR SOA TEL Coffre de l’armurier. 1 Bigorne, pefant 10liv. piece. 1 Etau, pefant 10 liv. piece. 2 Tenailles à vis. 1 Tenaille fans vis. 1 Filiere garnie de quarreaux. 1 Boîte à forêts, gar- nie. 3 Tourne-vis. 3 Cifeaux à froid. 3 Racloirs en- dehors. 2 Rapes. 2 Burins. 1 Bec-d’âne. 2 Cifeaux en bois. 2 Gouges. 2 paquets, Corde de boyaux. 3 pots Huile d'olive. 18 Limes afforties. 2, Marteaux. 3 Poinçons. : Tourne à gauche, | Uflenfiles du haîtré. 12 Batrils goudron, pefant 260 fiÿ, piece, 18 Broffes à goudronner. 1 Chaudiere à goudron. 800 liv. Suif. 6Goliv. Oing. 3 Ecops à laver le vaifleau. 18 Seillaux de cuir. 36 Seïllaux de bois. 3 Peaux de vache. 18 Peaux en laine. 24 Barrils de noir, 2 Lam- pes quarrées. 12 Ligoux. 1 Huiliere. 72 Racles. 36 Haches, pef. 36 Hv. piece. 36 Epifoirs, pef, 6 liv. piece. 3 Chaines de vergues de 14 brafl. pef, 260 1. 3 Grapins d’abordage & leur chaine, pefant 28oliv. 3 Grapins à main, pef, 3oliv. 2 Crocs à candelettes, pef. so liv. 5 Crocs de palans, pef. 6 liv. 15 Crocs de palanquins, pef. 4 Liv. 48 Grandes crampes, 48 Crampes de vergues. 6o Anneaux de veroues, pef, 2 liv. piece. 48 Coffes. ro douzaines, Balais. Uflenfiles du charpentier € calfas. 1 Bordage de 4 pieces, de 30 pieds. 2 Bordages de 2 pieces, de 30 pieds. 3 Planches de prufle. 120 Planches de fapin. 40 pieces, Planches refciées. 24 pieces, Chevrons. 24 Efparres.,24 Barres de cabef- tan. 2 T'apons d’efcubiete. 3 Pierres de meule. 1320 1v, Brai noir. 2 Pots à braï. 1 Cuilliere à braï. 600 Liv. Etoupes. 26 aunes, Frife pour {abare. 12 Pennes lou peaux. 400 liv. Plomb en table. 6o Maugeres de cuir. 1 Arpan. 2 Feuillets à point. 2 Couteaux à deux manches. 6Tarrieres. 12 Vrilles, 3 Gouges. 8 Mafles, 8 Marteaux à dents. 6 Cifeaux à froid. 6 Re- poufloirs, pef. 6 liv. piece. 2, Chaînes d’aubans, pe. 160liv. 2 Chaines de tirebords, pef. 12 liv. 15 Gam- bes de hunes, pef. 12 liv. 12 Chevilles d’aubans, pef. 25 liv. 36 Chevilles & gougeons, pef. 15 Liv. piece. 12 Chevilles à boucles, pef. 45 Liv. 3 Che: villes de billes , pef. 15 liv. 4 Verges de sirouette, ETA pef. 8. liv. Cercles de boutehors. 1 Scie de long. Chevilles à billore. Claviere. 8 Coins à ouvrier, pef. 9 liv. 18 Anneaux à fiche pour panneaux, pef. 2 liv. 2 Cercles de cabeftans, pef. 45 lv. 4 Fers d’archoutans, pef. 6 Liv. 100 Viroles, pef. un quart de livre. 100 Goupilles , pef. un huitieme de livre. 48 Crampes. Reboufe. 1 Gabaril de gouvernail. Uffenfiles de pompe. 12 Verges de fer, pef. 25 liv. 15 Heuzes, 18 Cho- pines.3 Crocs, pef. 15 liv. 2 Rouannes , pef. 25 liv. 2 Marteaux. 18 Chevilles, pef. 1 Liv. 24 Jouets, pef. une demi-livré. 2 Cercles, pef. 15 liv. 3 Bringue- balles. 2 Echinées de cuir-fort, pef. 22 liv. 3 Po- tences. Clouterie. 250 liv. Clous au poids. 1 ÿoo Doubles caravelles. 2500 Caravelles. 3000 Demi-caravelles. 3500 de Lifle. 4000 Double-tillacs. 4000 Tillacs.4000 Demi- tillacs. 6000 de Plomb. 7000 de Maugeres, 8000 de Pompes. ÿoo de Sabord. Uffenfiles du fond de calle, 60 Tonnes de 3 barriques , contenant 12 milliers pieces. 80 Pipes, contenant 8 milliers. 40 Barriques de 4 milliers. 30 Barrils à eau. 2 Manches à eau, pef. 150 liv. 20 liv. Liége. 24 Lanternes claires. 12 Lampions. 6 nullerolles, Huile d'olive. 2 livres > Coton filé. 700 iv. Chandelles de fuif. 12 Pelles fer. tées. 12 Pelles de bois. 4 Piques ou fapes. 30 Man- nes. 24 liv. Fer-blanc. 24liv. Fernoir. 2 Barres pour prifonniers , pef, 50 liv. 2 Cadenats, Cuifines. 2 Grandes chaudieres, pefant 100 liv. à Cuillie- res. 2 Ecumotres. 2 Crocs pour chaudiere. 2 Chai- nes, pefant 6 liv. piece. Chaloupes 6 canots garnis de leur gouvernail É roïets. 1 de 33 piés 9 pouces. 1 de 28 &c demi. 1 de 16 piés & denu. 4 Mâts. 3 Vergues &trinquettes. 3 Pa- | villons contenant 35 aunes & un quart. 4 Girouet- | tes, pef. 80 liv. 4 Grapins, pefant 8o liv. 6 Chande- | liers , pefant 30 liv. 2 Verges de girouettes, pefant 6 liv. 4 Ferrures de gouvernail, pefant 8 liv. ro Gaf- fes, pefant 2 iv. 72 Avirons. 12 Efcapes. Cordage pour amarrer derriere le vaiffeau, pefant $oo liv. 1 Piece cordage pour cableau de 4 pouces & demi , pefant 222 liv. 2 Pieces cordage, petite garniture de 2 pouces & demi, pefe 188 liv. 3 Pieces quarante- niers, pefant 42 liv. 3 Pieces lingues d’amarrage, pe- fant 9 liv. 6 livres Merlin luzin. 40 liv. Bitord, 16 Poulies fimples. 24 Caps de mouton. 18 Crampes. 12 Petits crocs. 6 Haches & marteaux. 3 Epifloirs, pefant 6 lv. 6 Racambauds, pefant x liv. & demie, x Piece cablot pour canot, de 2 pouces, pefant 94 livres. r Piece garniture du canot, de 1 pouce trois quarts, pefant 40 liv. 1 Piece quaranteniers pour le canot, pef. 14. Liv, r Liv. Luzin. 3 Voiles & trinquet- tes , contenant 204 aunes. Ornemens de. chapelle 1 Calice d'argent, fa patene , coeffe & étui. r Ci- | boire d’argent & fon étui. r Pierre benite. r Crucifix | d'argent. 4 Chandeliers d’argent. 1 Baflin d’argent. 2 Burettes d'argent. 1 Boîte d'argent pour les faintes huiles. x Bénitier d'argent. r Mifiel. 1 Rituel. : Ca- non, : Evanpgile. : Lavabo. 2 Corporaux, 1 Palle, 3 Purificatoires. 1 Voile. 2 Amits. 2 Aubes. 2 Cein- | tures, 1 Manipule. x Etole. 1 Chafuble. 3 Nappes. 3 Serviettes. 1 Devant d’autel. 1 Surplis. 1 Bonnet | quarré, 2 Couffins. 1 Clochette d’argent. 1 Boîte à | hoflies. 1 Fanal, 12 liv. Bougies, : Coffre pour met- | ire les ornemens de chapelle, Tome FI, f A ‘] NE : ET À 35. COFFRE DE MEDICAMENS pour fix mois, a S00 hontmes, Cordiaux. 36 onc. Confection d'Hyacinte. 24 onc. d’Alker< He à 32 onc. Opiate de Salomon. 2 iv. + Thériaque ne. | | Elcütuaire.. t | r2 liv.Catholicon fin. 40 iv, Catholicon fimple: 10 liv. Confeétion hamech. 8 liv.Diaprumcompofé. . 6 iv: Diaphocaica. 4liv. Tripira perfica. 2 liv. Pou- dre diacartami. 4 liv. Conferve de rofes. 4 dragm, Laudanum. Syrops fimples 6 compofes. 16 iv. 13 onc. Syrop rofat folutif, 16 liv. Syrop de chicorée compofé. 10 iv. Syrop d’abfynthe, 6 1. 3 onc. Syrop de fleurs de pêcher. 3 liv. Syrop de ca- pilaire. 3 iv. Syrop violat. 3 li. Syrop de limon. 3 liv. Syrop de coins. | | Miels. 16 iv. Miel rofat. 160 iv. Miel commun. Eaux, 60 livres. Eau cordiale. 12 liv. Eau de rofe. 12 livres. Eau de plantin. 8 liv. Eau de canelle. 128 liv. Eau de vie. 160 liv. Eau de chaux. 8 liv. Eau de la Reine d'Hongrie. Efprits. 9 oncés + Efprit de vitriol. 16 liv. Efprit de vin rectifié. | Huiles. 24 liv. Huile rofat. ; Liv. 8 onces. Huilede lys. 8 liv. Huile de percicum. 10 liv. Huile de camomille. 4 hv. Huile de laurier. 3 liv. Huile d'amandes dou- ces. 4 liv. Huile de terebenthine. 1 1. Huile de fcor- pion. Onguens. 1 Liv. Onguent rofat. 12 liv. Onguent d'album ra< fis. 16 Liv. Onguent d’althéa. 8 liv. Onguent popu- leum. 20 liv. Onguent baflicum. 4 iv. Onguent apo- ftolorum. 8 livres. Onguent égyptiac. 6 liv. Baume d’arceus, 12 liv. Terebenthine fine. 20 liv. Tereben- tine commune. Emplätres. 48 liv. Emplâtres diapalme. 10 Liv. ro onces. Em- plâtres betonica. 8 Liv. Emplâtres pro fraëluris. 14 | Liv. Emplâtres diachylum magnum cum grammis. 8 y. Emplâtres de mufcilage. 8 Liv. Emplâtres de vigo 4 mercurio. Trochifques. 12 onc. Trochifque de corne de cerf préparé. 12 onc. Trochifque de corail préparé. 8 onc. Trochif- que de thutie préparée, 8 onc.T'rochifque d’albumra- fs. 2 onc. Trochifque d’oftanadal. 6 onc. Trochif- que d’agaric. ni Mercures. 4 onc. Mercure doux. 1 1. 12 onc. Mercure préci- pité rouge. 1 once Mercure précipité blanc, 1 livre Mercure croqus metallorum. Drogues fimples, 10 liv. Senné. 4 liv. Rhubarbe. 6 Liv. Manne. 10 liv. Cafe en bâton. 4 onc..Scamonnée. 6 liv. Tama- tins. 1 liv. Turbith. 2 Liv. Polipode. 4 L. Mirobolans citrins. 4 liv. Jujubes. Semences, 40 liv. Orge mondé. 2 liv. Anis. 2 liv. Serrer con- tra. 16 liv. Semences froides. 4 liv. Semences de lin, Gommes, 2 liv. Encens. 2 liv. Myrrhe. 3 liv, Aloës. x liv. Maftic. 2 Liv. Galbanum. 2 liv. 8 onc. Elemi, Aftringens. 8 liy..Bol fin. 76 liv. Bol commun. 2 liv. Terre ft: | gillée, 2 liv. Sauge de dragon. 4 Liv. Cérufe. E ÿ 36 E T À Fleurs. | 4 liv. Rofes rouges. 4 liv: Camomille. 4 liy. Mé- lilot. Racines. .&liv. Ariftoloche longue & ronde:,21iv. Efguiny. sliv. Salfepareille. 80 iv. Gayac. 20 liv. Réglifle, Drogues minéraux. , s liv. Alun de roché. 12 onc: Alun brûlé. 2 liv. 8 onc. Calcanthum. 3 Hiv. Vitmol blanc. r liv: Vitriol de Chypre. ÿ liv. ÿ onc. Mimium. 2 liv. Verdet. z Hv. Vitriol romain. 12 onc. Cantarides. 4 liv. Creme de tartre, 4 iv. Cryftal minéral. 8 onc. Camphre. 8 Liv. Soufre en canon. 8 onc. Canelle, 8 onc. Soaffra- rena canon. 1 onc. 4 drach. Girofle. r onc. 4 drach. Pierre infernale. 6 liv. Cire jaune. 4 liv. Cire blan- che. 8 pierres Cauteres potentiels. 4 liv. Sucre can- dy. 4 onc, Sublimé corroñf, 6 liv. Suc de réglifle. & liv, Poix de Bourgogne. 1 liv. 8 onc. Noix mufca- des. 6o liv. des quatre farines. Herbes. 120 liv. Vulnéraires. 120 liv.. Carminatives. 120 liy. Emollientes. Tnffrumens. 1 Trépan, & toutes fes pieces. : Couteau courbe. r Scie avec fa feuille de rechange. 4 Cauteres ac- tuels différens, 2 Biftouris, un droit & un courbe. Bec de corbin. 1 Tenaille incifive. 2 Cifeaux à in- cifive. 4 Cannules différentes d'argent. 1 Pelican. 1 Davier. r Etui de Chirurgie garni. 12 Aiguilles cour- bes & droites. 2 Algaries d'argent, une droite & une courbe. 12 Lancettes à faigner. 2 Lancettes à bec. Des ligatures à faigner & à amputation. Uffenfiles. 2 Seringues. 2 Petites feringues. 6 Cannules de re- change. 2 Balances avec un marc de livre, r Trebu- chet avec plufieuts garnis. 2 Mortiers de ; liv. avec fon pilon. 2 Mortiers de 3 liv. 2 Baflines de cuivre pefant 5 liv. piece. 6 Spatules de fer. 8 Spatules de bois. 20 Gobelets d’étain. 1 Marmite pefant 20 liv. 1 Poëlon pefant 6 fiv. r Cogmard pefant 6 liv. : Cuillere à pot. r Ecumoire. 14 Rechaux. 4 Baffins à à barbe. 14 Ventoufes différentes. 72 Fioles de livre. 96 Fioles de prife. 30 Fioles pour loger les médica- mens. 14 Cogmards de terre. 20 Pots de terre à faire les bouillons, 30 Pots pour mettre les médicamens. 72 Pichets. 14 Ecuelles à bec différentes. 72 Petites écuelles rondes. Vieux linge. 14 Torchons. 2 Can- nes étamine blanche. 100 hiv. Eftoupe. 2 liy. Coton. 2 liv. Fil. Demi-liv. Soie. 12000 Epingles. ETAU, 1. m. (Commerce,) quelques-uns écrivent effau , & on prononçoit autrefois e//al. II fignifioit an- ciennement toutes fortes de boutiques, quoique ce ne füt proprement que le devant de la boutique fur lequel on met létalage. Préfentement érau Îe dit des lieux & places où les marchands-bouchers étalent leur viande dans les boucheries publiques de Paris. | _ Erau fe dit encore des petites boutiques, foit f- xes, foit portatives, où les marchands de marée ou autres menues denrées font leur négoce dans les hal- les. Enfin écaz s'entend des étalages ou ouvroirs des Savetiers & Ravaudeufes établis au coin des rues. Dittionn. de Comm, Chamb. & Trév. ETAU , ferme de Serrurerie & de plufieurs autres Pro- feffions ; c’eft une machine de fer compofée de plu fieurs pieces & d’une forte vis. Cette machine, qui ef fixée à un établi, fert à tenir fermement les pieces d'ouvrage fur lefquelles on fe propofe de travailler _de la lime ou du marteau. Cet outil eft néceffaire à beaucoup de profefions , &c ne doit point manquer dans un attelier de méchamique. On fabrique des étaux depuis le poids d’une livre ou deux, jufqu’à celui de 400, 500, & même 600, rAutaht un éaz eft néceffaire , Autant il impoîte qu'il foit bien fabriqué : nous allons en faire entendre la fadure. = | Un era confifte en deux montans paralleles que lon nomme corps où jumelles ( fig. 6. & fig. 7. PL du Taillandier), qui font attachées enfemble par le bas de Particulation nommée ginglyme , autrement 4 charniere, aïnfi que lon voit fg. 7. Chacun de ces corps eft percé d’un trou rond x x vers fa partie fu- | périeure, que lon appelle &i/, au-deflus duquel font és mâchoïres ed} amf nommées de leur fondion ; qui eft femblable à celle des animaux. L’une des m4- choires eft fixe; c’eft celle de la jumelle 4, qui s’ap- plique à l'établi; & l’autre, 2, eft mobile; & peut s'approcher ou s'éloigner horifontalement de la fixe, au moyen d’une forte vis qui pafle dans les yeux des jumelles, comme on voit fg. 7, qui repréfente un étau complet, La visa, dont la tête eft traverfée d’un levier, entre dans une boîte on écrou 4 quitraverfe l'œil de la jumelle fixe. Chaque jumelle doit être bien corroyée ê étirée ; on y épargne un renflement x y» dans lequel on perce l'œil à chaud. On releve auf la feuille rr, qui eft quelquefois cifelée en forme de coquille, dont l'ufa- ge eft d'empêcher la limaïlle de tomber entre la porte de la vis & la jumelle. On foude des bañdes d'acier aux parties fupérieures e d. Ces bandes d'acier, que Lon taille en façon de limes, font ce que proprement on appelle /es méchoires, dont les dents ou tailles, outre la prefion de la vis, aident à retenir plus for- tement les pieces que l’on ferre dans l’ésau. Vers le bas de la jumelle fixe on foude à chaud, ou on ajufte avec des rivets perdus deux plaques de fer fg, appellées 7ozes, entre lefquelles la partie in férieure 4 de la jumelle mobile eft recûe & retenue par une cheville ; laquelle cheville eft retenue par un écrou qu traverfe les trois pieces. Le prolonge- ment X de la jumelle fixe au-deffous des joues, s’ap- pelle pié, & porte fur le pavé de l’attelier. Le bas de la jumelle mobile fe termine ordinairement par une volute , comme on voit en z. .… Entre les joues &c les jumelles on ajufte un reflort d'acier G4,que lon voit eh place #g. 7, dont lufage eft d’éloigner les jumelles lune de l’autre lorfque l'on lâche la vis ; ce qui fournit le moyen de placer entre les mâchoires ce que l’on veut, & que lon comprime, aufli-bien que le reflort, en faifant tour- ner la vis en fens contraire, On attache lésaz à Pétabli par le moyen de la patte d’oie G5, &t de la bride G6 qui entoure la par- tie quarrée de la jumelle fixe qui eft près de l'œil. Les parties inférieures ont les arrêtes abattues, pour plus de grace & de legereté, On fixe la bride à la patte par une clavette qui pafle dans les mortoifes de ces deux pieces, ainfi qu'on la voit dans la fe, 7: & la patte eft arrêtée fur l’établi par plufieurs clous, ainfi que l’on peut voir figure premiere de La vignette. - Ce que nous venons de dire fuflit pour faire en- tendre la fabrique du corps de Pérez, qui eft un ou- vrage de forge, que l’on repare & reblanchit à la lime plus ou moins. Nous allons expliquer la fabri- que de la vis, & l’ufage des machines dont on fe fert pour la former. Le corps de la vis eft un cylindre de fer maffif Pour le corroyer onprendunebarre de fer 4? d'une longueur convenable, que l’on place entre les deux branches d’une autre barre 4? de fer plat. On chauffe letout enfemble ; on lefoude & corroye fur Penclume, juiqu’à ce qw’il foit devenu cylindrique &t d’une groffeur convenable, Cette opération faite, on foude fur le cylindre une virole de fer 4 4 qui doit former la tête de la vis. On étampe à chaud cette tête entre deux étampes, qui y impriment les moulures & la gorge que l’on voit foure 45, On y perce à chaud le trou qui doit recevoir le levier: am (fig. 7.) par le moyen duquel on fait tourner la vis dans fa boite. Après que la vis eft forgée, on en tourne le corps & la tête ; le corps, pour le rendre cylindrique ; &c la tête , pour perfetionner les moulures que les étampes n’ont formées qu'imparfaitement, & le ren- dre tel que l’on voit en 4°, | Pour tracer le filet de la vis, on prend une feuille de papier de forme parallélogramme redangle , dont les dimenfions {ont données par le développement du cylindre que lon veut former en vis. On divife les côtés de ce parallélogramme qui repréfentent la longueur, en autant de parties égales que l’on veut avoir de filets ou fpires à la vis. Chacune de ces di- wiñons doit être féparée en deux parties égales. On tire des diagonales 8, 7; 2,63 12, 133 9, 10, &c. qui divifent le parallélogramme en bandes des zones pa- ralleles | que l’on peut remplir alternativement d’u- ne couleur qui les fafle diftinguer. Ces zones doivent être telles, qu’en repliant le papier fur un cylindre, les bandes noires fe répondent aufli-bien que les bandes blanches, & forment chacune une hélice con- tinue autour du cylindre de la vis fur lequel le pa- pier doit être collé, comme on peut voir fig. 47. _ Lorfque le papier eft fec, on fait pañler fur Le corps de la vis l'empreinte des traits qui font fur le papier, en le coupant avec le cifeau B$, que les coups de marteau font imprimer dans Le corps de la vis. Quand cette opération eft faite, on échope avec le cifeau B? le fer compris entre deux traits paralleles ; on repare enfuite à la lime ou à la filiere toute cette cielure, & la vis fe trouve faite, comme on voit en AS, | Les figures 3. 4. 5. de la vignette repréfentent deux autres manmieres de former le filet de la vis. La fg. 4 eft un tour en l'air, Z. La poupée à clavette traver- fée par un arbre P O ( fig.) dont la partie P eft for- -mée en vis, dont les pas font autant diftans les uns des autres , que ceux de la vis qu’on fe propofe de faire, doivent l'être. », dans la vignette, la poulie fur laquelle pafle la corde dutourneur deroue( fg. 5.) a l’extrémité de l’axe de laquelle eft ajuftée la piece z, repréfentée feule fg.xy. C’eft une manivelle dou- ble. La fonétion de cette piece eft telle, que quoique la roue tourne toüjours du même fens, l'ouvrage tourne alternativement fur l’ouvrier ; & au contrai- re, comme lorfque l’on tourne au pié, il y a de fem- blables manivelles dans les machines hydrauliques Crest Tour), ce que fait aufi ouvrier repréfe- enté dans la figure: Kk ef la perche; A, la marche ou pédale ; 2zk, la corde. Il eft à remarquer qu’on ne peut pas faire de vis fur le tour, quänd l'ouvrage tourne toüjours du mêmesdens ; mais que le mouve- ment alternatif eft néceffaire pour que la vis P ne forte point de fa poupée. La figure 3 de la vignette.repréfente le même tra- vail, mais fans le fecours de la roue, en tournant feulement un moulinet qui eft monté fur la guide, ainfi qu'il fera explique en détaillant les pieces qui compofent cet affutage, repréfentées plus en grand dans les figures du bas de la Planche. ABCDEFG, eft en grand laflutage de la fg. 4: 4, tourillonqui coule dans la poupée à lunette marquée V: V2, les collets d’étain ou de cuivre quiembraffent ce tourillon: B, portion de la vis commencée avec les burins, bec-d’âne, grain d'orge, s,4:C,quarré de la vis, qui eft une vis de prefle : P, la boîte qui reçoit le quarré , dont le corps eft repréfenté en M ; en M?, fa virole garnie de quatre vis qui compri- ment le quarré : la même boite eft repréfentée en KL toute montée : F, l'arbre: Æ, la poulie fur la- quelle pañle la corde venant de la roue : GÆ, poupée des clavettes, dont la coupe fe voiten SST: N, une E T À 37 des clavettesou guides: À , une des clésqui affürent la poupée fur le banc dutour : Q , la poulie : Æ, J, la vis de la prefle tonte achevée: AT, extrémité des peignes droits & de côté, avec lefquels on trace les pas de vis, & dont on fe fert auf pour former les vis à filets aigus, différens des filets quarrés des vis d'ésaux “4 847, autre vis de preffe, dont le quarré eft percé pour y pañler des leviers, & dont le collet pratiqué à l'extrémité | fert À relever le fommier. Voyez PRESSE. | Explication des figures de l’affutage de la figure 3: ee, banc de l'établi : f/, poupée du guide , qui porte une boîte ou écrou dans laquelle pafle la vis de Par bre-guide Aer la boîte qui recoit le quarré réfervé à la tête de la vis d’étau, où il eft aflüré paf une ou deux vis; on coupe ce quarté après que la vis eff faite : 2k, deux poupées dans lefquelles le cylindre de la vis tourne & coule en long au defir du guide : 2, le porte-outil repréfenté féparément en gr: f', la clé qui aflüre le porte-outil fur le banc : p 00 , appa- reil des deux poupées & de la vis d’éraz, repréfenté féparément. : Les machines que nous venons de décrire, font peu en ufage aujourd’hui: la plüpart des vis d’ésas & de prefies fe font au cifelet , comme nous avons dit ci-deflus ; & l’adrefle des ouvriers eft telle, que les pas de vis font également bien formés: j’excepte celles que leur petit volume permet de former dans la filiere double (voyez FILIERE) , qui font toûjours mieux faites par ce moyen. Refte à parler de la fabrique de la boîte ou écrou. On prend , pour la former, une plaque de fer d’une épaifleur convenable D?, que l’on roule & arrondit fur un mandrin, On foude cette boîte, comme elle eft en D3. Ainfi formée, la vis pour laquelle elle eft faite, doit y entrer un peu librement. On prend en- fuite une verge de fer doux, de calibre à entrer dans les entre-filets de la vis, où on l'y plie comme on voit en C2, C3, jufqu’à ce que toute la vis en foit remplie. On lime lexcédent de ce filet, jufqu’à ce qu'il arafe prefque la vis ; & que tout monté fur cette vis, il pure entrer, quoiqu’un peu à force, dans la boîte 153, où on le laïfle en retirant feulement la vis. On enfle fur la boite la rondelle £2, & on y ajufte Le lardon D5, comme on voit en D4; 8 on braze toutes ces pieces enfemble avec du cuivre. Voyez BRAZER 6 SERRURERIE. On braze de la mê- me maniere diverfes autres rondelles, dont les unes font embouties pour former une culafle, comme on voit en 22 & en E3. On tourne cette culafle, fi lon veut, & la boîte ou écrou eft achevé, ainfi que la fig. DS le repréfente, On diftingue dans cette #g. le lardon & la tête de la vis. La figure 1? repréfente la même boîte fous un autre afpeét, avec le levier qui traverfe la tête de la vis. La virole que l’on voit fgwre.D4, & qui reparoît dans toutes les autres figures de la boîte , forme une portée qui s'applique contre [a partie extérieure de l'œil de la jumelle fixe 4 (foure 6), & empêche la boîte de pañler d’un bout à l’autre au-travers de l’œil. Le lardon 24 entre dans une entaille pratiquée à la partie inférieure de l’œil de cette jumelle. Ce lardon empêche la boite de tourner dans l'œil lorfque lon tourne la vis, qui a, ainf que la boîte, une portée qui s'applique fur la face antérieure de la jumelle mobile , fur laquelle on applique une rondelle Æ?, qui préferve la face de l'œil de l’ufure que le vio- lent frotement ne manqueroït pas d’y cauler. La figure 7 repréfente un érau à pié tout monté, êc prêt à être appliqué à un établi. On y voit le ref- fort G4 qui repouffe la jumelle mobile, &c fait bäil. ler la mâchoire , lorfque l’on détourne la vis de 7 vers Z: on tourne de z vers #2 pour comprimer la piece d'ouvrage que l’on a mife entre les mâchoires. 35 E T À Un étau confidéré mathématiquemient ; eft nne machine compofée de trois machines fimples; d’un lévier m4, d’une vis zh, &c d’un levier du troifieme genre, cde, qui eft la jumelle mobile, L’aétion com- binée de ces trois machines fimples, donne la com- reffion de l’éau; preflion beaucoup plus grande que Paétion de la main fur extrémité du levier #1. Mais on peut trouver direétement cette preflion, ou le rapport qu’elle a avec la puiflance appliquée en », en faifant ufage du principe de M. Defcartes. Pour cela, après avoir fermé l’ésez entierement, on re- matquera à quel point de la circonférence (dont la tête de l’érau eft le centre) répond l’extrémité 77 du levier am, On ouvrira l’ésu d’un feul tour de vis, jufqu’à ce que le levier foit revenu au même point de la circonférence où il s’étoit arrêté. On melurera avec une échelle quelconque l’intervalle qui alors fe trouvera entre les mâchoiïres. On mefurera: auf avec la même échelle la longueur du levier 2 #, à compter du centre de la tête jufqu’au point où la puiflance s'applique. Ondéduira (toüjoursen mêmes parties de l'échelle) la circonférence, dont le levier ‘am eftle rayon. Ondivifera enfuite cette circonféren- ce par l'intervalle qui eft entre les mâchoires, &c le quotient exprimera le rapport de la compreffion à la puiffance. Aïnfi fi on nomme 4 le rayon du cercle décrit par le levier am, & b l’intervalle entre les . . 4 4 Ad mâchoires, la circonférence fera —; &c divifant ce produit par #, intervalle entre les mâchoires, le quo- 4 . 4 ‘ tient —, fera à l'unité, comme la force de compref fion eft à la puuffance, Ona trouvé nouvellement le moyen de fabriquer les boîtes d’ésaux & de prefles , enforte que le filet de lécrou eft de la même piece que la boite ; ce qui a beaucoup plus de folidité que le filet brazé. Ce- pendant ce dernier, lorfqu'il eft bien brazé & ajufté, eft capable de réfifter à de très-grands efforts. Nous expliquerons à l’erricle Vis ou T'AREAU, la fabrique de ces fortes de boîtes. Il y a beaucoup de petits ézaux qui n’ont point de pié. Ces fortes d’éraux fe fixent à établi, au moyen d’une patte qui eft de la même piece que la jumelle fixe, & d’une vis dont la direétion eft parallele à la jumelle : on comprime l’établi entre cette patte & la partie fupérieure de la vis. (2) ETAU, outil d'Aiguillier- Bonnetier, repréfenté dans fa Planche, figure 3, eft une machine qui fert à creufer les châffes des aiguilles du métier à bas. À, la queue en forme de pyramide, qw’on enfonce, comme celle d’un tas d’orfévre, dans un billot de bois. B, le corps de l’ésau, qui a un rebord aaa qui empêche lésau d’enfoncer dans le billot. Les deux mâchoires laïffent entr'elles une ouverture quarrée F, dans laquelle on place une piece d’acier G, la- quelleaune gravure quireçoit l aiguille dont on veut faire la châfle.La piece G eft arrêtée dans l'ouverture F par la vis E qui la preffe latéralement : la piece C l'empêche de fortir par le côté par où elle eftentrée ; l’autre côté étant plus étroit , l'empêche également de fortir. Au-deflus de la gravure de la piece G eft une ouverture z, dans la mâchoire courbe de l’ésau : cette ouverture doit répondre exaétement au-deflus de cette gravure, & de l’aiguille qui y eft placée, On afflemble avec le corps de Pésau la piece. A, au moyen des trois vis 1, 2, 3, qu font Joindre cette piece fur les deux mâchoires. Il y a dans le plan fu- périeur de cette pieceune ouverture", par laquelle on fait pañler le poinçon X L, qui pañle enfuite par -louverture z de la mâchoire inférieure de l’ésau : ainfi le poincon eft exaétement dirigé fur l'aiguille, fur laquelle on le frappe avec un marteau ; le poin- çon fait ainfi une empreinte fur l’aiguille, qu’on ap- pelle chafle. Voyez CHASSE , & des figures des aiguilles des bas au métier, L’érau des Arquebufiers eft exaftement fait comme les éraux des Serruriers, & fert aux Arquebufers pour tenir en refpeét les pieces qu'ils venlent limer. Les éraux a main de l'Orfevre, du Bijourier, & de plufieurs autres Ouvriers en métaux , font des efpeces de tenailles qui fe reflerrent & s'ouvrent par le moyen d’une vis & d’un écrou qui $’approchent & s’écartent à volonté d’une des branches de léran Ils fe terminent à leur extrémité inférieure par une charniere femblable à celle d’un compas fimple. Les mâchoires en font taillées en lime horifontalement,& ont à leur milieu, vis-à-vis, un trou qui les prend de haut en-bas, pour recevoir le fil ou autre matiere propte à être travaillée. Voyez les explications de nos Planches, L’érau à bagues du Metteur en œuvre, eft formé dé deux morceaux de buis plats, ferrés avec une vis de fer, dont on fe fert pour former à l’outil différens ornemens fur les corps de bagues; ce qui pourroit s’exécuter difficilement dans un ét4x de fer, dont les mâchoires corromproïent les parties déjàtravaillées. L’érau du Chaïnerier eft femblable à tous les écaux des autres métiers. Celui du Charron eft un éau ordinaire, &c les Charrons s’en fervent pour ferrer les écrous , & for- mer des vis à la filiere. | L’érau du Coutelier ne differe pas de l’érau du Ser- rurier. L’ésau à brunir du Doreur, eft une tenaille dont les mâchoires font tarrodées , & prifes dans deux mor- ceaux de boïs aflez larges, quifervent à ménager la pierte à brunir., Voyez les Planches du Doreur. L’érau à main du Doreur, eft un éran qui fert à te- nir une petite piece à la main : 1l y en a de toute efpece. Voyez les Planches du Doreur. Les étaux plats du Doreur font des efpeces de te- haïlles dont les mâchoiïres font renverfées en-dehors, &t dont les Doreurs fe fervent pour retenir Les pieces fur leur plat ; elles font affemblées par une charniere à leur extrémité, & ont un petit reflort dans le mi- lieu. L’érau du Fourbiffeur eft fait comme les éraux des autres ouvriers, & n’a rien de fingulier. Voyez l’ar. icle ETAU , Serrurerie. Il en eff de même de l’észu du Ferblantier. L’étau du Gaïnier eft à branches plates, quarrées ; & {emblable à celui des Horlogers ; les Gainiers s’en fervent pour ferrer des petites vis, &c pour les tenir lus commodément. L’érau du Gaïnier, mais en gros ouvrage, reflem- ble à celui des Serruriers, &c. & fert à différens ufa- ges, mais principalement à plier les coins &c orne- mens qu'on pofe fur les ouvrages. L’ésau de bois des Orfévres, et une forte de tenaille dont les mâchoires font retenues par un écrou de fer qui les approche ou les éloigne l’une de Pautre à volonté. On fe fert de cet écau pour y ferrer des pie- ces finies, & dont on veut conferver le luftre, que le fer amatiroit. ETAY oz ET AI, (Marine) C’eft un gros cordage à douze tourons, qui par le bout d’en-haut fe termine à un collier, pour faifir le mât fur les barres ; &e par le bout d’en-bas il va répondre à un autre collier qu le bande & le porte vers l’avant du vaiffleau, pour tenir le mât dans fon affiette, &z l’affermir du côté de l'avant, comme les haubans l’affermiflent du côté de l'arriere, La poñition des différens éays fe connoi- tra plus aifément par la figure. | Le grand étay ou l’éray du grand mât : 1 defcend depuis la hune du grand mât jufqu’au haut de l’étra- ve, où il eft tenu par fon collier. Voyez Marine. Planche premiere, n°. 104. + Etay de mifene, 105. Eray d'artimon, 106, Etay du petit hunier, 88. ÆEïay du, grand hunier, 77. Etay du petit perroquet, 88. . ÆEtay du grand perroquet, 794 Etay du perroquet de fougue, 50: À l'égard de la longueur & groffeut de ce corda- ge, qu eft difiérente, fuivant fes fituations &c {es ‘ufages, on.peut les voir à l'article CORDAGES. (Z) _ ÉTAYE, £ f, rerme de bätiment; piece de bois pofée. en arc-boutänt fur une couche, pour retenir quelque mur ou pan de bois déverfé & en fur-plomb. On nomme étaye en gueule, la plus longue , ou celle qui ayant plus de pié , empêche le déverfement ;, & écaye droite, celle qui eft à-plomb, comme un pointal, ETAYE , serme de Blafon;, petit chevron employé pour foûtenir quelque chofe : il ne doit avoir que le tiers de la largeur ordinaire des chevrons. Yoyez CHEVRON. puis ETVAYEMENT, £:m. (Coupe des pierres.) plan- cher pour foûtenir Les voütesen p/ar-fond ; il fait le sd effet que le &intre dans les voûtes concaves. ; ad w. aët. éerme de bâtiment; c’eft retenir avec de grandes pieces de bois un-bâtiment qui tom- be en tuine, ou des poutres dans la refeétion d’un mut nutoyen. ’oyez ETAYE. (P) ET CÆTERA, (Jurifprud.) termes latins ufités dans les actes & dans le ftyle judiciaire , pour 1an- nonterque lon omet, pour abrèger, le furpluis d’une claufe dont il ny a que la premiere partie qui foit exprimée. Kufage de ces mots vient du tems que l’on rédigeoit les actes en latin, c’eft-à-dire juiqu’en 1539: on les a confervés dans le difcours françois, comme s'ils étoient du même langage, lorfqu’en par: lant on omet quelque chofe, " | | … C’eft fur-tout dans les aëtes des notaires que lon ufe de cés foïtes d’abbréviations, par rapport à cer- taines claufes de ftyle qi font toüjours fous-enten- dues ; c’eft pourquoi on ne fait ordinairement qu’en indiquer les premiers termes , & pour Le furplus on met feulement la lettre &c. c’eft ce que l’on appelle vuloaitement l& &cterz des notaires. L’ufage des & cærera dé la part des notaires, étant liné maniere d’abréger certaines claufes, femble avoir quelque rapport avec les notes où abbrévia- tions dont les notaires ufoient à Rome : ce n’eft pouttant pas la même chofe ; car les minutes des notaires de Rome étoient entierement écrites n notes & abbréviations , au lieu que l’& cæcera des notaires de France ne s'applique qu'à certai- nes claufes qui font du ftyle ordinaire des contrats, & que l’on met ordinairement à la fin : gzæ affidua fint in contrailibus, que etft expreffa non fint, inejle videñtur, fuivant la loi guod fr not, $. quia affidua , #. de ædil. editlo. Dans nos contrats ces claufes font conçûes en ces termes: Promertant, &tc, obligeant, &cc. renonçant, &c. Chacun de ces termes eft le com: mencement d’une claufe qu'il étoit autrefois d’ufage d'écrire tout au long, &z dont le furplus eft fous- entendu pat l’&c. Promerrant de bonne-foi exécuter le contenu en ces préfentes; obligeant tous fes biens, meubles & immeubles à l'exécution dudit contrat ; renonçant à toutes chofes à ce contraires. | Autrefois ces 6 cærera ne fe mettoient qu’en la minute. Les notaires méttoient les claufes tout au long dans la gfoffe. Quelques praticiens , entr’autres Mafuer, difent qu’ils doivent les intérprèéter & met- tre au long en la groffe : mais préfentement la plû: part desnOtaires mettent les & cæsera dans les sroffes & expéditions , aufi-bien que dans la minute; & cela pour abréger, Il n'ya plus guere que quelques notaires de province qui étendent encore les & cæ- tera dans les groffes & expéditions. Maïs foit que le notaire étende les & cætera , où __. Fe 39 qu'il s'agifle de les interpréter, il eft également cer. tain qu'ils, ne peuvent s'appliquer qu'aux objets qui font déterminés par l'ufage & qui font de ftyle, & fous-entendus ordinairement paï ces termes, pro- * PRettant ; obligeant , renonçant ; ainfi les termes pro- mettant ÔT Obliseanr ne peuveñt être étendus par ces mots, e7 Jon propre & privé nom. ni folidairement ou Par corps ; & Je terme reronçañs ne peut s’appliquer qu'aux renonciations ordinaires , dont on a parlé, & non à des renonciations au bénéfice de divifion dé cufion & fidéjuffion ; ni au bénéfice du fénatus-con: fulte Velléien ; f c’eft une femme quis’oblige, De même dans un teftament l’& cerera ne peut fup- pléer la claufecodicillaire qui y eftomife toutes ces claufes, &c autres femblables, rdigens JPeciali nord. &t ne font jamais fous-entendues. | F Les & cetera ne peuvent donc fervir à étendre les éngagemens ou difpofitions contenus dans les actes. n1 y fuppléer ce qui y feroit omis d’effentiel ; ils A peuvent fuppléer que ce qui eft de ftyle, &c qui feroit tolijours fous: entendu de droit, quand on n’auroit point marqué dé cerera : ainfi à proprement parler ils ne fervent à rien. Sur l'effet de cette odlanfe, voyez Dumolin, conf. æxviy, & en fon sr. des ufures, quefl. vij. Maynard , Liv. WIIT. ch. xxxj. Charondas, rép, Liv. XII, n. 44. & liv. IT, des pandeëtes ; Chorier fur Guipape , gueft. cxxyx. la pratique de Mafuet. tir, xvij. Loyfeau, des off. Liv, IL. ch, v.n, 71. Danty, de la preuve par té mO1nS , IT, part, ch.j, aux additions, | … Un feigneur, après avoir énoncé toutes les tértes dont 1l eft feigneur, ajoûte quelquefois un € cærera : ce qui fuppofe qu'il poffede encore d’autres feigneu- ries qui ne font pas nommées, quoiqu’ordinairement chacun foit aflez curieux de prendre tous fes titress mais quoi qu'il'enfoit, cet & cæsere et ordinairement indifférent, Il y a néanmoins des cas où une autre perfonne pourroit s’y oppofer : par exemple, f c’eft dans une foi & hommage , ou aveu & dénomibre- ment, & que le Yañlal, doit dans lintitulé, foit dans le corps de late, mît qu’il poffede plufeurs fiefs, terres ou droits ; & qu'après en avoit énoncé plu- fieurs, il ajoûtât un & cærera pour donner à enten: dre qu'il en poffede encore d’autres, le feigneur do- minant peut blâmer l’aveu, & obliger le vafal d’ex: primer tout au long les droits qu’il prétend avoit. L'onuffion d'un 6 cerera fit dans le fiecle précé- dent le fujet d’un différend très-férieux, 8 même d'une guerre entre la Pologne & la Suede. Ladiflas : toi de Pologne, avoit fait én 1635 à Stumdorf une treve de vingt-fix ans avec Chriftine reine de Suede; ils étoient convenus que le roi de Pologne fe quali. fieroit roi de Pologne & grand-duc de Lithnanie, & qu’enftute l’on ajoûteroit trois &c, &e. &e. que Chri£ tine fe diroit reine de Suede, grande -duchefle de Fin- lande, auf avec trois Gc. Éc. &c. ce qui fut ainft décidé à caufe des prétentions que le roi de Pologne avoit fur la Suede, comme fils de Sigifmond. Jean- Cafimir qui regnoit en Pologne en 165$, ayant en- voye le fieur Morftein en Suede, lui donna des let- tres de créance où par méprife on n’avoit mis à la fuite des qualités de la reine de Suede que deux &c. Ge. & au lieu de mettre de moire reone, on avoit mis de nos regnès; ce qui déplut aux Suédois. Charles- Guftave arma puiffamment, & ne voulut même pas accorder de fufpenfion d'armes ; il fit la guerre aux Polonois , prit plufteurs villes. Foyez l'hifloire du Jrecle courant, 1600, p. 347. (4) ._ ÊTE, fm. (Géog. 6 Phyf.) eft une des faifons de l’année, qui commence dans les pays feptentrion- naux le jour que le Soleil entre dans le figne du Cans cer, & qui finit quand il fort de la Vierge, Voyez SAISON & SIGNE. - Pour parler plus exaétement & plus généralement, Véré cominence lorfque la diffance méridienne du So- Teil au zénith eft laplus petite, & finit lorfque fa dif. tance eft précifément entre la plus grande & la plus petite. Voyez SOLEIL. } 1 Ni La fin de l'été répond au commencement de lau- ‘tomne. Voyez AUTOMNE. |! Depuis le commencement de l’éré jufqu'à celui de Tautomne, les jours font plus longs que les nuits; mais ils vont toüjours en décroiffant, & fe trouvent enfin égaux aux nuits au commencement de l’au- omne. Le premier jour de l’éré étant celui où le Soleil darde fes rayons le plus à-plomb, ce devroit être naturellement le jour de la plus grande chaleur ; ce- pendant c’eft ordinairement vers le mois d’Aoùût, c’eft-à-dire au milieu de l’ésé, que nous reflentons le plus grand chaud : cela vient de la longueur des jours & de la briéveté des nuits de l’écé, qui fait que la cha- leur que le Soleil a donnée à la terre pendant le jour, ubffte encore en partie au commencement du jour fuivant , & s’ajoûte ainfi à celle que le Soleïl donne de nouveau. La chaleur ainfi confervée de plufieurs jouts confécutifs , forme vers le milieu de lesé la plus grande chaleur poñble. Foyez CHALEUR. On appelle Zevant & couchant d'été | le point de Fhorifon où Le Soleil fe leve & fe couche au folfti- ce d'ese, Ces points font plus nord que les pomtse/2èc oïeft de l’horifon , qui font le levant & le couchant -deséquinoxes, Voy. EST, OUEST, LEVANT, Cou- CHANT: | Solflice d'été, voyez SOLSTICE. (0) ETECHEMINS, f. m. pl. ( Géog. mod. ) peuples de PAcadie ; ils habitent tout le pays compris depuis Bofton jufqu’au Port-royal. La riviere des Æreche- mins eft la premiere qu’on rencontre le long de la côte, en allant de la riviere de Pentagouet à celle de Saint-Jean. *ETEIGNAR Y, £ f. (Fontaines falantes.) c’eft ainfi qu’on appelle, dans les fontaines falantes, des femmes dont-la fonétion eft d’éteindre les braïfes t1- rées de deflous les poefles, & de les porter au ma- gain. ETEIGNOIR, f. m. (Eco. domefhiq.) petit cone creux de cuivre, d'argent, ou de fer-blanc, qu'on -met fur le lumignon de la chandelle pour l’éteindre. L’éreignoir des églifes eft emmanché d’une longue ba- ‘guette de bois. : * ETEINDRE, v. a. (Gram.)1l fe dit de tout corps auquel l’application dufeueft fenfible, rendre, c’eft faire ceffer lation du feu. Ce terme fe prend au fim- ple &c au figuré. L'eau éreinr le feu; l’âge éteint les -pañlions. ETEINDRE , (Pharmacie.) on fe fert de ce terme -dans un fens propre, en parlant d’une certaine pré- -paration médicinale du fer, qui conffte à plonger ‘dans de l’eau commune , & par conféquent à y ésen- dre, des morceaux de fer rougis au feu. Foyez FER. On fe fert de la même expreflion dans un fens fi- ‘guré, pour exprimer l’union du mercure à différen- “tes fubftances, qui détruifent la fluidité fans le dif- foudre chimiquement. Unir le mercure à quelques-unes de ces fubftan- ices, C’eft éreindre le mercure, &c. Voyez MERCURE. b vd TE en Peinture, c’eft adoucir, affoiblir. L'on éteint, l’on affoiblit les trop grands clairs, les ‘trop grands bruns dans un tableau; on les adoucit particulierement vers les extrémités. On dit, il faut “eéseaindre cette lumiere qui combat avec une autre; “lorfque vous aurez éreint cette partie, le refte fera un -meilleuneffet, ETELIN , (& la Monnoie.) petit poids qui eft de vingt-huit grains quatre cinquiemes, ou la vingtieme partie de l’once, … ÉTELON, £. m. (Archir.) c’eft l’épure des fermes &t de l’enrayeure d’un comble, des plans d’efcaliers, & de tout autre aflemblage de charpenterie, qu’on trace fur plufeurs doffes difpofées & arrêtées pour cet effet fur le terrem d’un chantier. (P) ETENDAGE , {. m. (Draperie.) c’eft une des opé- rations qu fe font fur les laines avant que de les em- ployer. Voyez Particle MANUFACTURE EN LAINE. ÉTENDARD , f. m. (Arr mil.) étoit autrefois un chiffon de foie envergé au bout d’une pique, de maniere quil tournoit comme une girouette, 8 s’é- tendoit au moyen du vent & de l’agitation : c’eft de- là peut-être qu'il a pris fa dénomination à lexemplé des vexillariones des Romains. Les érerdards étoient de toutes fortes de formes & de couleurs, au choix des chefs des différentes troupes de cavalerie; aujout- d’hutils font tous de fatin brodé d’or ou d'argent, 8 de foie, larges d’un pié en quarré, fixés fur une lance. « Il y aura dorénavant dans chaque efcadron de » cavalerie deux érerdards de la livrée de meftre de » camp. Sa majefté veut qu'aux éezdards Où il n’y » aura pas de fleurs-de-lis, il y ait du côté droit un » foleil, & que la devife du meftre de camp foit feu- » lément fur le revers; lefquels deux écerdards feront » portés par les cornetes äes deux plus anciennes » compagnies de chaque efcadron ». Ordonn. du 1. Février :689. Voyez DRAPEAU. Pendant la paix il n’y a point de cornetes attaz chées aux régimens de cavalerie , & ce font les lieu- tenans qua portent les éezdards. Une lettre du 7 Août 1731, qu'ontrouve dans le recueil de Briquet, regle que c’eft aux lieutenans de la compagnie à laquelle chaque écendard eft attaché , qui doit le porter. « Les lances des érerzdards feront de la longueur de » dix piés moins un pouce, compris le fer, qui eft » dans le bout d’en-haut , 6€ la douille qui eft à celui » d’en-bas, enforte qu'elles foient toutes uniformes »: Ordonn. du 7 Mars 1684. | Il eft aufhordonné de mettre au bout de la lance une écharpe de taffetas blanc. Le falut de l’érerdard fe fait en baïflant la lance doucement , & en la relevant de même. Ce falut eft dû au roi, à la reine, aux enfans de France, aux princes du fang & lépitimés, aux maré: chaux de France, au colonel général 8z au général de armée; on ne le doit au meftre de camp général & au commiflaire, qu’à l'entrée &c à la fortie de la campagne. Briquet, £. 99. En terme de Marine, ce qu'on nomme pavillon fur les vaifleaux s'appelle éserdard fur les galeres. L’érendard royal eft celui de la réale ou de [a gale- re commandante. . De tous les tems il y a eu des fignaux muets pout diftinguer lestroupes, les aider dans leurs marches, leur marquer le terrein & l'alignement fur lequel elles doivent combattre, régler leurs manœuvres, mais plus particulierement pout les rallier & réfor- mer en cas de déroute. Ces fignaux ont changé, fui- vant les tems &c les lieux, de figure 87 de nom. Mais comme nous défignons d’une maniere gériérale par le feul mot d’ez/eigre, toutes celles dont on a fait ufage en France depuis le commencement de la mo- narchie; ainfi les anciens comprenoient fous des ter. mes génériques tous leurs fignaux muets à quelques troupes qu'ils appartinflent, & quelle que pût être leur forme (4) ; les mêmes termes avoient encore chez eux comme chez nous, outre üne fignification générale, leur application particuliere. Chez les Ro- mains par exemple qui fe fervoient indifféremment des mots fonum € vexillum ; pour défigner tontes fortes d’enfeignes ; le premier mot fignifioit néan: moins d’une maniere exprefle les enfeignes de l’in- (a) Soir qu'ils fuflenc de relief, 'bas-relief, en images où érofles unies. bi ‘ fanterie E T A fañterie (4) légionnaire , & le fécond celles des trou pes de cavalerie. Nous diflinguons de même nos en- feignes en deux efpeces ; nous confervons le nom d’erféigne à celles dont on fe fert dans linfanterie ; nous appellons érezdards, guidons , corneres ; les en- feignes affeétées aux gens de cheval. Il y à toute apparence que dans les commente- mens les chofes les plus fimples & les plus aifées à trouver, {ervirent de fignes militaires. Des bran- ches de feuillages , des faifceaux d'herbes, quelques poignées de chacune , furent fans doute les premie- res enfeignes: on leut fubflitua dans la fuite des o1- feaux, ou des têtes d’autres animaux ; mais à me- fure que l’on fe perfeétionna dans la guerre, on prit auffi des enfeignes plus compofées, plus belles, & on s’attacha à les faire d’une matiere folide & du- rable, parce qu’elles devinrent des marques diftinc: tives & perpétuelles pour chaque nation. On mit encore au rang des enfeignes les images des dieux, (c) les portraits des princes , desempereurs (4), des Céfars (e), des grands hommes , & quelque: fois ceux des favoris (f). On adopta auffi des figures fymboliques : les Athé- niens avoient dans leurs fignes militaires la chouet- te , oïfeau confacré à Minerve ; les Thébains, le fphinx ; d’autres peuples ont eu des lions, des che- vaux , des minotaures, des fangliers, des loups , des aigles, L’aigle a été Penfeigne la plus commune de l’an- tiquité : celle de Cyrus & des autres rois de Perfe dans!la fuite , étoit une aigle d’or aux ailes éployées, portée au fommet d’une pique. L’aigle devint len- feigne la plus célebre des Romains ; elle étoit de même en relief pofée à l'extrémité d’une pique (g) fur une bafe ou ronde triangulaire, tenant quelque- fois un foudre dans fes ferres ; fa groffeur n’excédoit pas celle d’un pigeon: ce qui paroït conforme au rapport de Florus (2), qui dit qu'après la défaite de Varus, un /gr1fer en cacha une dans fon baudrier. L’on fait que chez les Romains le nombre des aï- gles marquoit exaétement le nombre des légions ; parce que laigle en étoit la premiere enfeigne, Les manipules avoient aufi leurs enfeignés ;-elles ne con- fifterent d’abord qu’en quelques poignées de foin qu’on fufpendoit au bout d’une longue perche, & c'eft de -là, dit Ovide, qu’eft venu le nom que l’on donna à ces divifions de l'infanterie légionnaire, (2) Le mot sexillum défignoit.encore les enfeignes des trous es fournies par les alliés de Rome : ce n’eft pas qu’on ne s’en Éryie quelquefois pour exprimer les enfeignes de l'infanterie romaine ; car toutes ces chofes font aflez {ouvent confondues, (ce) Les Epyptiens firent tout le contraire ; ils mirent au rang de [eurs dieux les animaux dont la figure leur avoit fervi d’en- feigne. Die dir que les Egyptiens combattant autrefois fans or- dre, & étant fouvent battus par leurs ennemis , ils prirent ens fin des étendards, pour fervir de guides à leurs tronpes dansla mêlée. Ces étendards éroient chargés de la figure de ces ani- maux qu’ils réverenc aujourd’hui : les chefs les portoient au bout de leurs piques , & pat-là chacun reconnoïfloit à quel corps où à quelle compagnie il appättendit. Cette précaution leur ayant procuré la viétoire plus d’une fois, ils s’en crurent redevables aux animaux repréfentés fur leurs enfeignes ; & en mémoire de ce fecours , ils défendirenc de les tuer, & ordori- nerent.même qu’on leur rendîtles honneurs que nous avons vü, Liv. L. parags IL, Tom. p. 183. de la trad, de L. Terraflon. (d) Tacite, Annal. I. iv. parle des images de Drufus. (e) Suétone, vie de Caligula ) chap. xjv. dit du roi des Par- thes:wranfpreffus Euphratem ; aquiles & figna romana:Cæfarum- que imagines: adoravit. (f) 1 eft. dit dans la vie de Tibere , que cet Empereur fit des largeflés aux légions de Syrie, parce qu’elles étoient les feu les qui neuflent pas admis les images de Séjan au nombre de leurs enfeignes militaires. | (8) Kénophon , div. WII. de la Ciropédie, (Live IV..chapit. xij. Signa. & aquilas du ces adhuc barbari polfident, Tertiam Jignifer prits , quam in manus ho flium veniret ; evulfit ; merfamque intra baltei Jui latebras gerens , in cruentä plu” de fic laruir. | Tome VI, Pertica fufpeñfos portabat longa mäniplos Vide maniplaris nomina miles habet. Ovid, 2. HT, faforums Dans les tems poftérieuts, cés marques de lan- cienne fimplicité firent place à d’autres plus recher- chées, dont on voit la repréfentation fur les médail- les & les monumens qui fe font confervés jufqu’à nous: c’étoit une loñgue pique traverfée à fon ex- trémité fupérieure d’un bâton en forme de T', d’où pendoit une efpece d’étofie quairéé, Foyez Montfau: con, Lipfe, &c, La hampe dé là pique portoit dans fa longueur des plaques rondes ou ovales, fur lef- quelles 6n appliquoit les imagés dés dieux, dés em- pereurs, & des hommes illuftres. Quelqués-uns dé ces fignes font terminés au bot par uné main ou- verte ; il y en a qui font ornés de couronnes de Lau rier , de tours & de portes de villes ; diflin@ion ho: norable accordée aux troupes qui s’étoient figna= lées dans une bataille, ou à la prife de quelqué place. . | L’éreridard de là cavalerie notnmé vexiilum où can: tabrum ; n’étoit qu'un piece d’étoflé précieufe d’en- viton un pié en quafré, que l’on portoit de même aü bout d’une pique terminéé én forme de T,, Les dragons ont encore fervi d’enfeignes à bien des peuples. Les Aflyriens en portoient. Suidas (:) cite un fragment qui donne le dragon pour énfeigné à la cavalerie indienne : il y en avoit un für mille chevaux ; fa tête étoit d'argent, & le refte du corps d'un tflu de foie de diverfes couleurs. Le dragon avoit la gueule béante , afin que l’air venant à sin- finuer par cette ouverture enflât le tiffu de foie Qui formoit le corps de l’animal, & lui fit imiter en quel: que forte le fiflement & les replis tortueux d’un vé- ritable dragon, | . Selon le même Suidas, les Scythes eurent pour enfeignes de femblables dragons. Ces Scythes pa- roïffent être le même peuple que les Goths, à qui l’on donnoit alors ce premier nom. On voit ces dra: gons fur la colonne trajane dans l’armée des Daces Fr 1l n'eft pas douteux que lPufage n’en ait été adopté par les Perfes (k) , puifque Zénobie leur en prit plu fieurs. . Après Trajan, les dragons devinrent lenfeigne païticulere de chaque cohorte, & l’on nomma #4- gonnares ceux qui les portoient dans le combat. Cet ufage fubfftoit encore lorfque Végece (IT. c, xij.) compofa fon excellent abregé de l’art militaires On prit enfin des enfeignes fymboliques ; conimé des armes, des devifes, & des chiffres ; lesunsétoient ceux des princes, ceux des chefs ou d’autres affedés aux troupes, L’honneur a fait de tous les tems une l6i capitale du refpeët & de l’attachement des peuples pour leurs enfeignes : quelques-uns ont pouflé ce fentiment juf- qu'à l’idolatrie; & pour ne parler que dès Romains ; on fait qu'ils fe mettoient à genoux devant les leurs - qu'ils juroïent par elles, qu'ils les parfimoient d’en- cens , les ornoient de couronnes de fleurs ; & les re- gardoient comme les véritables dieux des légions; hors les tems de guerre, ils les dépofoient dans les temples. Cômine il:ÿ avoit une grande infamie à les perdre, c’étoit aufli une grande gloire que d’en pren: dre aux ennemis; aufli préféroit-on plütôt de mou rir, que de fe les laiffer enlever ; & quiconque-étoit convaincu de n’avoir pas défendu {on enfeigne de tout fon pouvoir, étoit condamné à mourir: la faute rejaillifloit même fur toutela cohorte celle qui avoit. perdu fon enfeigne étoit rejettée de la légion & con trainte à demeurer hors de l’enceintetdu camp , & réduite à ne vivre que d'orge jufqu'à ce qu’elle eût : (i) Suidas , in verbo Indi, | 4 (k) In vopifco. Li F ai 42 ETE réparé fahônte-par des prodiges de valeur, Jamais les Romains nefrenit de traités de paix que fous la condition que leurs enfeignes Jeut fuffent rendues : de-là les louanges d’Augufte pat Horace (2), cet em- pereut s'étant ait reftituer les enfeignes que les Par- thes avoient pris à Craflus. Il faudroit des volumes éntiers pour rapporter tous les ufages dés anciens fur les enfeignes ; encore ne pourroit-on pas toûjours fe flater d’avoir démêlé la vérité dans ce chaos de variations fuccefives qui ont produit à cet égard une infinité de changemens dans les pratiques de toutes les nations. Quelles di: ficultés n’éprouvons-nous pas feulement pour accor- der entre éuxnos propres auteurs (72) fur ce qu'ils ont écrit des énfeisnes dont on a fait ufage dans les différens tems de nôtre monarchie ? L'opinion commune eft que l’oriflamme eft le plus célebreërle plus ancien detous nos érendards ; c’étoit celut de toute l'armée : on croit qu'il parut fous Da- gobert en 630, & qu'il difparut fous Louis XI. Les hifloires de. France en parlent diverfement. M. le préfident Héñault dit que Louis-le-Gros ef le pre- fier dé nos rois qui ait été prendre l’oriflamme à Saint-Denis. On vit eénfuite des sonfalons du tems de Charles IT, dit le Chauve, en 840; il ordonna aux cornettes de faire marcher leurs vaflaux fous leurs gonfalons. LEVQA COS Il y eut des érendards en 022. Charles HT: dit le Simple en avoit un attaché à fa perfonne dans la ba- taillé dé Soiflons contre Robert; celui-ci portoit lui- mème le fien, & celui de Charles étoit porté par un feigneur de la plus haute diftin@ion, nommé Fulbert. Depuis lés roïs de France ont eu pendant fort long- tems un érerdard attaché à leur perfonne ,-& diftinc- tifde cenx des troupes; On l’appelloit harmiere du ror, pennon royal, ou cornete blanche du roi. D’anciens hif- toriensont parlé des écezdards de Dagobert , de ceux” de Pepin ; mais Ducangé réfute ce qu'ils n ontdit, & prétend qu'ils n’ont pas exifté. - ne Sous la troifietné rate; les bamnerets & les com munes eurent dés bannières, & les chevaliers, ba- chéliers, écuyers ; des pennons. à Le connétäblé avoit auf une banniéré ; 11 avoit droit, en l’abfence du roi, de la planter à l’exclufion de'tous'autrés für la muraille d’une villé qu'il avoit PAC INRIA) ISERE SRER Un et as Ce droit étoit très-confidérable ; iloccafonna an grand démêlé entre Phiippe-Augulte & Richard-roi d’Angléterré, lorfqu'ils pafférent enfemble en Sicile. Ge dernier ayant forcé Mefine y planta fonéendard fur les murailles 3 Philippes’en tiouva fortcoffenie : «Eh quoi, dital, le roi d'Angleterre ofe-arborér fon » érendard fur le rempart d’une ville où il faitique-7e: » fuisw! A l’inftant ilordonnaà fes gens de l’arracher : ce que: Richard ayant fi, illui fit dire qu'ilétoit prêt à l’ôter; mais que fi lon.fe mettoit en devoir de le prévenir, 1 ‘auroit bien: du fang répandu. Phi- lippe fe:contenta de cette foûmiflion , & Richard fit enlevet l’érerdard, Brantome-ne-fixe l’origine des étendards dela cavalerie legere quéfous Louis XIL, il y a éépendant apparence qu'il ÿ en avoit long- temsanparavant: lei ,sreus Lés pnidons fubfiftent dépuis la levée des compa. anies d'ordonnance fous:Charles EX, 8 {ont affectés au corps de la gendarmerie: : | :Lesgardes-du-corps ont des enfeignes , 6e lespre: nadiers À lcheval un éerdards les gendarmes éc les cheväux-leperside la garde du roi ont des'énfeignes ;. les moufquétairesiont des enfeigriés &c des ésendards LD). pncEL fonte noftro refhrhit Jovi, à à aile Direpta Parthorumojuperbis : * Hoftibus. Liv. IV. Ode XVe (m) Claude Beneron eft l’auceur quiten aiciécrir le plus au long. Imprimé à Paris, n-12, 1742. p'Aue les dragons ônt des-enfeignes & des. éerdards , ces deux corps étant deftinés à fervir & à pié & à che- val: | Ondit fervir a lavornete ; quandon parle du fet- vice militaire près de la perfonne du ro. Les cornetes font connus depuis Charles VITE. A la bataille d’Ivri (1590) Henri IV. dit à fes troupes en leur montrant fon panache blanc : « Enfans, fi les cor- » netes vous manquent, voici le fignal du ralliement, » vous le trouverez au chemin de la viétoïire & de » l'honneur », [left fouyent parlé dans l’hiftoire de ces tems de La cornete blanche ; c’étoit l’érerdard du roi, ou en fon abfence celuidu général. Ily a encore dans la maifon du roi une charge de porte-cornete blanche , &t dans la compagnie colonelle du régiment colonel général de la cavalerie une autre charge de cornete blanche. Ducange a prétenduque la cornete blanche du roi a remplacé loriflamme vers le regne de Charles VI: mais cela lui a été contefté, Des étymologiftes ont dit que le nom de corzere qu’on a donné aux éterdards, vient de ce qu’une re1- ne attacha la fienne au bout d’une lance pour raffem- bler autour d'elle fes troupes débandées : d’autres prétendent que l'origine de ce nom eft tiré d’une ef- pece de cornete de taffetas ,.que les feigneurs de dif- tinétion portoient fur leur cafque ; elle étoit de la cou- leur de la yrée de celui qui la portoit, pour qu'ikpüt être aifément reconnu des fiens, & cela paroît plus vraïffemblable. Il y avoit encore d’autres raifons qui faïfoient porter de ces fortes de cornètes, comme pour empêcher que lardeur du Soleil n’échauffât trop la- cièr dé ce cafque, & que par cette raifon ilne causât des maux de tête violens ou pour que la pluie ne les rouillât pas, 8 n’engâtât pas les ornemens qui étoient || précieux. Le nom de corzere eft refté aux officiers qui portentiles érerdards. Ce font les troifiemes off- ciers des compagnies; ils fe font un principe de ne . jamais rendre leur érezdard qu'avec le dernier foupif. Dans l'ordre de bataille, chaque érezdard eit à-peu- près'au-centre du premier rang de la compagnie de . la-droite-8z de la gauche , où il eft attaché. Si Pefca- dron eft formé fur trois rangs! fa place eftà la tête de |! la cinquieme file en comptantipar le flanc; & fi l’ef: : cadron eft fur deuxrangs , ileeft à la feptieme file. -Plufieursofficiers de cavalerie ont penfé qu’il feroit avantageux de réformer un des deux éezdards qu'il y a par efcadron, & de les réduire à un feul comme ! dans les dragons. On ne petit difconvenir qu'à cer- tains égards la réforme d’un érendard ne fût un em- barras de moins pour la cavalerie : mas s’il ef de la plus grande: conféquence que les efcadrons foient à : lafmême hauteur pour fe couvrir mutuellement les flancs & pour la défenfe réciproque les uns des au- tres, & s’il faut néceffairement que les flancs de Pin- fanterie foient gardes par lés ailes de cavalerie, on fera forcé de reconnoitre qu’il eft abfolument indif- _ pénfable , pour que tous lés corps puiffent s’aligner entre eux, d'avoir deux éerdards par chaque efca- dron. S'iln’y avoit qu'un éerdard, il feroit pofble qu'il n'y eût pas deux efcadrons fur le même alignement, | & de cependant ils paruflent tous enfemble être exa@tement alignés ; les uns pourroïènt préfenter . leurfront, & les autres leur flanc dans un afpeét tout contraire, de forte qu'ils feroient à découvert dans leur pattie la plus foible : il pourroit encorerarriver de ce défaut d'érendards que lefcadron dé la droite de l'aile droite fût à la jufte hauteur du bataillon qui forme la pointe droite de l'infanterie, & que cepen- dant le flanc de cette infanterie fût dénué de cavale- rie, & quil y eût un jour favorable à l'ennemi pour {e couler derriere elle , parce que la gauche dé Paile droite de cavalerie en feroit trop éloignée, Silonré- pondque cefécond cas eft impoffble, parce qu’on ne pourroit former ce dermier efcadron de la gauche de Vaile droite fans s’appercevoir qu'il feroit tout-à-fait horsde l’alignement de l’infanterie,du moins convien- dra-t-on que pour remédier à ce défaut dès qu’il fera Des efcadrons qu auront deux éerdards ne feront pas fufceptibles de pareils inconvéniens , puifqu'ils auront deux points fixes : condition néceflaire pour avoir la poñtion de toute ligne droite. . Si les efcadrons de dragons n’ont qu'un érerdard, c’eft qu’ils font moins dans le cas de fervir en ligne , que d’être employés en corps détachés, & plütôt en pelotons qu’en efcadrons. D'ailleurs s’il n’y avoit qu'un ésendard dans un ef cadron de cavalerie, il feroit placé entre les deux compagnies du centre ; & ne fe trouvant pas appat- tenir à ces compagnies, elles n’auroient pas le même intérèt de le conferver: c’eft une prérogative qui ap- partient aux premieres compagnies, qui fe font un honneur de le défendre. Ces arcicle eff de M. DauTH- VILLE. ETENDARDS, (Jurd. ) s'appellent encore vorles : ce font les trois feuilles fupérieures qui s’élevent pour former la fleur de l’iris. Voyez Iris. (K) * ETENDOIR ; f. m. c’eft en général l’endroit où Von expofe , foit à l’aétion de l’air, foit à celle du feu, des corps qu'il faut fécher. Il fe dit auffi quelquefois de l’inftrument Fo fert à placer les corps convena- blement dans le heu appellé l’érezdoir. L'érendoir des Cartonniers eft un endroit où on étend les feulles de carton fur des cordes pour les faire {é- cher, après qu’elles font fabriquées & après qu’elles font collées. Celui des Chamoifeurs eft endroit où l’on a pofé des cordes pour étendre les peaux, afin qu’elles y {oient féchées & eflorées. L’étendoir des Mégiffiers eft un endroit garni de per- ches, fur lefquels ces ouvriers étendent les peaux de moutons pañlées en mégie, pour les faire fécher. Foy. Les fig. Planche du Mépiffier , vignerte. L’étendoir des Papeteries eft une falle où on met fé- cher le papier fur des cordes. Cet endroït eft prati- que de maniere qu'on peut y faire entrer plus ou moins d'air, felon qu’on le juge à-propos, au moyen de plufieurs ouvertures où fenêtres qu’on ferme & ouvre quand on veut avec des perfiennes. Voye PERSIENNES & la Planche de Papeterie, dans laquelle louvrier € met une feuille de papier fur la corde, au moyen d'un T'ou petite croix de bois, fur le travers de laquelle on plie la feuille en deux. L’ouvriere 2 apporte du papier pour le ranger par terre en piles comme des tuiles, & l’ouvriere D ôte le papier de deflus les cordes. Au bas de cette planche on voit le plan de l’érendoir. * ETENDRE, v. a@. terme relatif À lefpace, & danses autems. Ererdre, c’eft faire occuper plus efpace, ou embrafler plus de tems: on dit les mé- taux s'étendent {ous le marteau ; l'heure d’un rendez- Tome VI, apperçh, il faudra que l'aile toute entiere fe emette en mouvement, afin de fe dreffer de nouveau; OPÉ= ration qui fera perdre beaucoup de tems, fans qu'on puife encore efpérer d'y réufhr. vous s'étend. Il fe prend au fimple & au figuré, com: me on le voit dans ces exemples; ésezdre une nappe, étendre {es idées. ÊTENDRE, ez terme de Cornetier , S’entend de l’ac- tion d’applatir aux pinces, & d’allonger lé plus qu'il eft poffible les galins qui n’ont été qw’ouverts impar- faitement après la fente. ETENDUE,, 1. f. (Ordre encyclopédique , Sens ; Entendement, Philofophie, Métaphyfique.) On peut confidérer l’érerdue comme fenfation , où comme idée abftraite ; comme fenfation, elle eft l'effet d’une certaine aétion des corps fur quelques-uns de nos or- ganes ; comme idée abftraite , elle eft l'ouvrage de l’entendement qui a généralifé cette fenfation , & qui en a fait un être métaphyfique , en écartant tou- tes les qualités fenfibles & aétives qui accompagnent lérendue dans les êtres matériels. La fenfation de léserdue ne peut être définie par cela même qu’elle eft fenfation ; car il eft de l’effence’ des notions particulieres immédiatement acquifes par les fens, ainfi que des notions intelle@tuelles les plus générales formées par l’entendement, d’être les dernieres limites des définitions, & les derniers élé- mens dans lefquels elles doivent fe réfoudre. Il fufñra donc de rechercher auxquels de nos fens on doit rap- porter cette fenfation, & quelles font les conditions requifes pour que nous puiflions la recevoir. Suppolons un homme qui ait l’ufage de tous fes fens , mais privé de tout mouvement, & qui n’ait ja- mais exerce l'organe du toucher que par l’applica- tion immobile de cet organe fur une même portion de matiere ; je dis que cet homme n’auroit aucune notion de l’érendue , & qu'il ne pourroit l’acqué- rir que lorfqw’il auroit commencé à fe mouvoir. En effet il n’eft qu’un feul moyen de connoître lérendue d'un corps; c’eft l’application fucceffive & continue de l’organe du toucher fur la furface de ce corps: ce ne feroit point aflez que ce corps fût en mouvement tandis que l’organe feroit en repos , il faut que l’or- gane lui-même fe meuve; car pour connoître le mou- vement 1l faut ayoir été en mouvement, & c’eft par le mouvement feul que nous fortons pour ainfi dire de nous-mêmes , que nous reconnoiflons lexiftence des objets extérieurs, que nous mefurons leurs di- menfons , leurs diftances refpetives, ét que nous prenons pofleffion de lérerdue, La fenfation de l'éser- due n’eft donc que la trace des impreflions fuccefli- ves que nous éprouvons lorfque nous fommes en mouvement: ce n’eft point une fenfation fimple , mais une fenfation compofée de plufieurs fenfations de même genre; & comme c’eft par les feuls orga- nes du toucher que nous nous mettons en mouve- ment, & que nous fentons que nous din en mou: F à 44 ETE vement al s'enfuit quec’eft au toucher feul que nous devons: la fenfation de l'érerdie. On objettéra peut- être que nous recevons cette fenfation par la vüe, auf bien que par le toucher ; que l'œil émbrafle un plus grand SR la main n’en peut toucher, & qu'il mefure la diftance de plufeurs objets que la main ne fautoit atteindre même avec fes inftrumens. Tout cela eft vrai, mais n’eft vrai que de Poil inf- truit par le toucher ; car l'expérience a démontré qu'un aveugle de naïflance, à qui la vüe eft rendue tout-à-coup, ne Voit rien hors de lui, qu’il n’apper- çoit aucune analogie entre les images qui fe tracent dans le fond de fes yeux & Les objets extérieurs qu'il connoïfloit déjà par le toucher ; qu’il ne peut appré- tier leurs diffances ni reconnoître leur fituation, juf- qu'à ce qu'il ait appris à voir, c’efl-à-dire à remarquer les rapports conftans'qui fe trouvent entre les fenfa- tions de la vüe & celles du toucher: par conféquent un homme qui mauroit jamais exercé Forgane du toucher, ne pourroït apprendre à voir ni à juger dés dimenfions des objets extérieurs, de leurs fofmes, de leurs diftances, en un mot de l’érerdue ; & quoi- qu'on fupposâten mouvement les images qui feroient tracées dans le fond de fes yeux, cependant commeil ne connoîtroit point le mouvement par fa propre ex- périence,ces mouvemensapparens ne luidonneroient qu’une fimple idée de fucceffion, comme feroït une fuite des fons qui frapperoient fucceflivement fon oreille , ou d’odeurs qui afeteroient fucceffivément fon odorat ; mais jamais ils ne poutroient fuppléer à l'expérience du toucher, jamais ils ne pourroiïent ; au défaut de cette expérience, faire naître la per- ception du mouvement réel ; ni par conféquent celle de lérezdue fenfible. Et comment des {ens auffi diffé- rens que ceux de la vüe & du toucher, pourroient-ils exciter en nous cette derniere perception? L’œil ne voit point les chofes, il ne voit que la lumiere qui lu repréfente les apparences des chofes par diverfes combinaïfons de rayons diverfement colorés. Toutes ces apparences font en nous, ou plûtôt font nous-mê- mes,parce que l'organe de la vüe eft purementpaffif; & que ne réagiffant point fur les obtets ,iln’éprouve aucune forte de réfiftance que nouspuiflionsrappot- ter à des caufes extérieures : au lieu que Porgane du toucher eft un organe a@ifqui s'applique immédiate- ment à la matiere, fent les dimenfions & la forme des corps , détermine leurs diflances & leurs fitwations; réagit fur eux direétement & fans le fecours d’au- cun milieu interpofé, & nous fait éprouver une ré- fiflance étrangere , que nous fommes forcés d’attri: buer à quelque chofe qui n’eft point nous ; enfin c’eft le feul fens par lequel nous puiffions diftinguer notre être de tous les autres êtres, nous aflürer de la réa- lité des objets extérieuts, les éloigner ou les rappro- cher fuivant les lois de la nature, nous tranfporter nous-mêmes d’un lieu dans un autre, & par confé- quent acquérir la vraie notion du mouvement & de l’érendue. Le mouvement entre f. effentiellement dans la notion de l’érerdue, que par lui feul nous pourrions acquérir cette notion, quand même il n’exifteroit aucun corps fenfiblement étendu. Le dernier atome qui puifle être fenti par l’organe du toucher , n’eft point étendu fenfiblement , puifque les parties étant néceflairement plus petites que le tout, celles de cet atome échapperoient néceflairement au fens du tou- cher par la fuppofition : cependant fi organe du tou- cher étant mis en mouvement fe trouve affeété fuc- ceffivement en plufeurs points par cet atome, nous pourrons nous former par cela feul la notion de lé tendue, parce que le mouvement de l'organe & la continuité des impreffions fucceflives dont il eft af feêté, femblent multiplier cet atome &z lui donner de Pextenfion, Il eft donc certain que les impreffions continues & fucceflives que font les corps fur Les ofpanes du toucher mis en mouvement, confituënt la vraie notion de l’ééndue ; & même ces idées de mouvement &C d'érerdue font tellement liées entre elles & fi dépendantes lune de l'autre, qw'onne peut Concevoir nettement aucune ésezdue déterminée que par la vitefle d’un mobile qui la parcourt dans un tems donné ; & réciproquement que l’on ne peut avoir une idée précife de la viteffe d’un mobile, que par l’érendue qu'il parcourt dans un tems donné: Pi- dée du tems entre donc auffi dans celle de l’érendue ; & c’eit par cette raifon que dans les calculs phy- fico-mathématiques , deux de ces trois chofes , tems, vitefle , érerdue , peuvent toûjours être combinées de telle façon qu’elles deviennent l’expreffion & la repréfentation de la troifieme (car je ne diflingue pas ici l’ésezdue de l’efpace abfolu des Géometres, qu n’eft autre chofe que l’idée de l’érendue généra- liée autant qu’elle peut l'être) : ces trois idées doi- vent être inféparables dans nos raifonnemens, com- me elles Le font dans leur génération; & elles de- viennent d'autant plus fumineufes, qu’on fait mieux les rapprocher. Celles de Pefpace & du tems qui femblent , à certains égards, d’une nature entiere- ment oppofée ; ont plus de rapports entf’elles qu'on ne le croiroit au premier coup - d'œil. Nous conce- vons l’ésendue abftraite ou l’efpace ; commè un tout immenfe , inaltéfable, ina@tif, qui ne peut ni aug= . menter, m1 diminuer , ni changer, & dont toutes les parties font fuppotées co-exiiter à la fois dans une éternelle immobilité: au contraire toutes les parties du tems femblent s’anéantir 8: fe reproduire fans cefle ; nous nous le repréfentons comme une chaîne infinie, dont il ne peut exifter à - la - fois Qu'un {eul | point indivifible ; lequel fe lie avec celui qui nef déjà plus, & celui qui n’eft pas encore. Cependant, quoique les parties de l’éserdue abftraite ou de l’efpa- ce foient fuppofées permanentes , on peut y conce- voir de la fuccefion, lorfqiw’elles font parcourues pa un corps en mouvement ; & quoique les parties du téms femblent fuit fans celle & s’écoulér fans inter- tuption, lefpace patcoutu par uñ corps en mouve- ment fixe ; pourainf dire , la trace du tems, & donne une forte de confiftance à cette abftraétion legere 8 fugitive. Le mouvemerit éft donc le nœud qui lie les idées fi différentes en apparence du tems & de l’efpa- ce, comme il eft Le feul moyen par lequel nous puif- fions acquérir ces deux idées , & le feul phénomene qui puifle donner quelque réalité à celle du terms. On pourroit encore afligner un grand nombre d’autres rapports entre le tems & lefpace ; maïs il fufhra de parcourir ceux qui peuvent jetter quelque lumiere fur la nature de l’érerdue. L’efpace &r lé teins font le lien de toutes chofes; l’un embraffe toutes les co-exiftences poflibles ; l’autre toutes les füccefions pofbles. Le tems eft fuppofé couler avec uné vîtefle conftante & uniforme, par cela même qu’on en fait Püunité de mefure de toute füccefion; car il eft de l’effence de toute unité de mefure d’être uniforme : de même l'efpace et fuppofé uniforme dans tous fes points ; parce qu'il eft avec le teins la iefuré du mouvement ; d’ailleurs cette umiformité di temis & de Pefpace ne pourroit être altérée que par des exif tences réelles, que l’abftrattion exclut formellément de ces deux idées, Par la même raifon ces deux idées font imdéterminées, tant qu'elles font canfidérées hots des êtres phyfiques, defquels feuls elles peu vent recevoir quelque détermination. L'une & Pan- tre confidérées dans les chofes , font compofées de parties qui ne font point fimilaires avec leuf tout, c’eft-à-dire que toutes les parties de l’éezdue & de la durée fenfbles, ne font point étendue & durée; car puifque l'idée de fuccefionentre néceffairement dans l’idée de durée, cette partie de la durée qui répond E TE à une perception fimple, & dans liquelle non ne concéyons aucune {ucceffon, 1’eft point durées &c latome de matrere dans‘ lequel nos fens ne peuvent diftmguer de parties, n’eftpotit fenfiblemient éten- du. Paï grand foin de diftinguér l’érerdue abftraite de l’éreridue {enfible ,parcerque ce font en effet des 4c- céptionstres- differentes du même mot. La véritable étendue fenfible, c’eft lérerdue palpable : éllé confifte dans lés fenfations qu'exeitént en nous les furfacés des corps parcourues par letoucher.L’éfeñdre viiblé, fi l’on veut abfolument en admettre une, n’eft point une fenfatiomdireéte ; mais ue mdution fondée fur la correfporidance de nosf{enfations , & par laquelle nous jugeons dei l’érerdue palpable d’après certaines apparences préfentes à nos yeux. Enfin l’érerdue ab- ftraite eft l'idée des dimenfons de la matrére , fépa- rées par une abftraétion métaphyfique de toutes Les qualités fenfibles des corps, & par conféquént de tonte idée de limites, puifque l’éerdie ne peut être limitée en effet que par des qualités fenfibles. Il fetoit . à fouhaiter que chacune de eés diverfes aeceptions eût umterme propre pour l’exprimér : mais foit que l’onconfente ou que lon refufe de remédier à la con- fufion des fignes,, il eft très-important d'éviter la core fufion des idées; & pour éviter il faut, toutes les fois que lon parle de l’érendue , commencer par dé- termmer le fens précis qu’on attache à ce mot. Par cette feule précaution une infinité de difputes qui partagent tous les jours le monde philofophe , fe trouvéroient décidées où écartées. On demande fi léréndne eft divifible à Finfini : mais veut-on parler du phénomene fenfble, ow bién de Pidée abftraite de Pérendue ? Il eft évident que lérezdre phyfique ; celle que nous connoïffons par les fens, & qui fem ble appartemr de plus près à la matiere, n’éft point divifible à Pmfini; puifqu'après un certain nombre de diviforis ; le phénomène de l’éerdre s'évarotit, &t tombe dans le néant relativement à nos organes, Eft-ce feulement de Pidée abftraïte de l’érendie qu’on entend parler? Alors comme il entre de larbitraire dans la formation de nos idées abftraites , je dis que de la définition de celle-ci doit être déduite la folu- tion de la queftion fur l’infinie divifibilité. Si lon veut que toute partieintelligible de lérezdue foit de l’éez- due , la divifibilité à l'infini aura lieu ; car comimé les parties divifées intelleétuellenrent peuvent être re- préfentées par une fuite infinie de nombres, elles n'auront pas plus de limites que ces nombres, & {e- ront infinies dans le même fens, c’eft-à-dire que l’on ne pourra jamais afligner le dérnier terme de la divi fion. Une autre définition de Pérerdue abftraite au- roit conduit à une autre folution. La qüeftion fur l'infinité atuelle de l’étendue fe refoudroit de là mê- me mamere: elle dépend ; à l'égard de l’érerdie fenfi- ble, d’une mefure aétuelle qu'il eft impoñiblé de prendre; &c lérerdue abftraite neft regardée comme infinie, que parce qu'étañt féparée de tous lés'atitres attributs de la matiere, elle n’a rien en elle-même, comme nous Pavons déjà remafqué ; qui piñiflé la li- miter m1 la déterminer. On demande encote fi lesen- due conftitue ou non l’effence de la matiere? Jé ré- onds d’abord que le mot efferce eft équivoque , & qu'il faut en détèrminér la fignificaätion avant de Pem- ployer. Si la queftion propofée fe réduit à celle-ci, Vérerdue eft-elle un attribut de la matiere, tel que lon puïffe en déduire par le raifonnement tous {es autres attributs ? Il eft clait dans ce fens que l’érez- due , de quelque façon qu’on la prenne , né conffitue point l’effence de la matiere ; purfqu'il r’eft pas poffi- ble d'en déduire l'impénétrabilité , ni aticuñe des for- ces qui appartiennent à tous les corps connus. Si la quéMion propofée revient à celle-ci: eft-11 poffiblé de concévoir là matiere fans érendue ? Je réponds que Jidée que nous nous faifons de la matiere eft incom- À ll f ETE 45 pleté toutes les fois Que nous ométtons par ipnofanice Où par Oubli quelqu'un de fes attributs ; mais que Pé- rendue n’eit pas plus effentielle à la matiere, que fes autres qualités :’elles dépendent toutes!, aïnft du l’é. rerdue; de certaines conditions pour agit für fous. Lorfque cé$ conditions ont liew, elles dpiffént fur nous auffi nécelairement qne l'étendue, & toutes , fans éxcepter l'érerdue ; ne différént entr'elles que par Les différentes impreffions dont elles afé@ent nos Ofganes. Je né coriçois donc pas dans quel fens dé ttés-grands métaphyficiens ont cu & Voulu faire croire que l'éferdie étoït une qualité prémiere qui téfidoit dans les corps telle précifément, 8 fous la même forme qu'elle réfide dans nos perceptions; & qu'elle étoit diftinguée én cela des qualités fecondai- res, qui, felon eux, ne reffémblent en aucune ma- mere aux perceptions qu'elles excitent. Si ces méta phyficiens n’entendoient parler que dé l'étendue fon. fible, pourquoi refufoient-1ls'le titre de qualités pre- mierés à toutes les autres qualités fenfibles ? &e s'ils ne parloïent que de Pérérdre abftraite, comment voix. loient-ils tranfpotter nos idées dans la matiere, eux qui avoient üne fi grande répiignance à ÿ rétonnoi- tre quelque chofe de femblable à nos fenfations ? La caule d’une felle conträdiétion ne peut venir que Au refte comme il faut être de borne foi en toutes chofes, j'avoue que les queftions du genre de celles que je viens de traiter, ne font pas à beaucoup près aufiutiles qw’elles font épineufes ; que les erreurs en pareille matiere intéreflent médiocrement la fociété: &t que Pavancement des fciences a@ives qui obfer- vent & découvrent les propriétés des êtres, qui com- binent & multiplient leurs ufages, nous importe beaucoup plus que Pavancement des fciénces con- . templatives, qui fe bornent aux pures idées. Il eft bon, il eft mème néceflaire de comparer les êtres, & de généralifer leurs rapports ; mais il n’eft pas moins néceflaire, pouf employer avantageufement ces rapports généralifés, dé ne jamais perdré de vûe les objets réels auxquels ils fe rapportent, & de bien marquer le terme où l’abftraéion doit enfin s’arrê- ter. Jé cfois qu'on eff fort près de ce terme toutes les fois qu'on eft parvenu à des vérités identiques, vagues, éloignées dés chofés, qui conférveroient leur inutile certitude dans fout autre univérs gou- vérné par des lois toutes différentes, & qui ne nous font d'aucun fecours pour augmenter notre pti fance & notré bièn-êfre dans ce monde où nous vivons. Cet article eff de M. GÜE NAUT, éditeur de la colléétion académique ; ouvrage fur l'importance & l’utilité diquel il ne refté rien à ajoûter , après le difcouts plein de vües faines &c d'idées profon- des. què l’éditéur a mis à la têté dés trois premiers volumes qui viennent de patoitre. Sur léfendue géométrique, & fur la maniere dont 46 ETE les Géometres {a confiderent, voyez l’art. GÉOMÉ- TRIE, auquel cette difcuffion appartient immédia- tement. . 7 ETENDUE, (Voix) La nature a donné à la voix umaine une écerzdue fixe de tons; mais elle en a va- rié le fon à Pinfini, comme les phifionomies. De la même maniere qu’elle s’eft aflujettie à. cer- faines proportions conftantes dans la formation de nos traits, elle s’eft auf attachée à nous donner un certain nombre de tons qui nous ferviflent à expri- mer nos différentes fenfations ; car le chant.eft Le premier langage de l’homme. Voyez CHANT. Mais ce chant formé de fons qui tiennent de la na- ture l’expreflion du fentiment qui leur eft propre, a plus ou moins de force, plus on moins de douceur, &c. le volume de la voix qui le forme, eft ou large ou étroit, lourd ou leger : limpreflion qu'il fait fur notre oreille , a des degrés d'agrément ; il étonne ou flate , il touche ou il égaye. Voyez Son. Or dans toutes ces différences 1l ÿ a dans la voix bien orga- nifée qui les produit, un nombre fixe de tons qui forment fon érerzdue, comme dans tous les vifages il y à un nombre conftant de traits qui forme leur en- femble. Lorfque le chant eft deyenu un art, l’expé- rience a décompolé les voix différentes de l’homme, our en établir la qualité & en apprécier la valeur. Nos Muficiens en France n’ont confulté que la.na- ture, & voici la divifion qui leur fert de regle. _ Dans les vaix des femmes, le premier & le fecond deffus : ce dernier eît auffi appellé Bas-deffus. On don- né le même nom & on divife de la même maniere les voix des enfans avant la mue. Voyez Mur. Les voix d'homme font tailles ou haute-contres, ou baffe-tailles ou bafle-contres. Nous regardons comme inutiles les concordans & les faufets. Nous n’admettons donc en France dans la compo- fition de notre mufique vocale, que fix fortes de voix, deux dans les femmes, & quatre dans les hom- mes. La connoiffance de leur étendue eft néceffaire aux compoñteurs : on va l’expliquer par ordre. Premier deffus chantant: clé de fol fur la feconde ligne, parcourt depuis lus au-deffous de la clé, juf qu'au /z oftaye au-deflus de celui de la clé; ce qui fait diatoniquement dix tons & demi. | Second deffus, ou bas-deffus chantant : clé dur fur la premiere ligne , donne le /o/ en-bas au-deffous de la clé, & monte jufqu’au /7 oétave de celui de la clé; ce qui fait diatoniquement onze tons. Cette efpece de voix eft très-rare ; on en donne mal-à-propos le nom à des organes plus volumineux &t moms étendus que les premiers deflus ordinaires, parce qu'on ne fait quel nom leur donner. Je dois au furplus avertir que je parleici, 1° des voix en général : il y en a de plus érerdues; mais c’eft le très-petit nombre , & les obfervations dans les arts ne doivent s'arrêter que fur les points généraux: les regles ont des yües univerfelles, les cas particu- liers ne forment que des exceptions fans conféquen- ce. 2° Qu'en fixant diatoniquement l’érerdue ordi- naire des voix, on les fuppofe au ton de l’opéra, par exemple. Il n’y en a point qui, en prenant le ton qui lui eft.le plus favorable, ne parcoure fans peine à- peu-près deux otaves. Mais elles fe trouvent ref ferrées ou dans le haut ou dans le bas, lorfqw’elles font obligées de s’aflujettir au ton général établi ; & c’eft de ce ton général qu'il eft néceffaire de partir pour fe former des idées exactes des objets qu’on veut faire connoître. La haute-contre : clé d’zs fur la troifieme ligne. Son étendue doit être depuis l’7? au-deflous de la clé, juiqu'à Pur au-deflus ; ce qui fait deux oûtaves plei- nés, Ou douze tons. F’oyez HAUTE-CONTRE. Taille: clé d’us fur la quatrieme ligne. Elle doit donner l’us au-deffous de la clé, & le 22 au-deffus ; À ce cu-fait diatoniquement dix tons & demi: w Cette efpece de voix eft la plus ordinaire à l’hom: me; on s’en fert peu cependant pour nos théatres & pour notre mufique latine. On croit en avoir ap- perçi la caufe, 1°! dans fon érendue ,'moindre que celle de la haute-contre & dela bafe-taille : 2° dans lefpece de reflemblance qu’elle à avec elles. La taille ne Br pat le contrafte que lés fons dela bafle-taille & de la haute-contre ontinaturellement entreux,; ce qui donne, au chant une variété nécef. faire. | % | + Baffe-taille : clé de fz ur la quatrieme ligne , don: ne le /o/ au-deffous de la clé, &c le f2 3e au-deflus : diatoniquement Onze tons & demi. Woyey Basse- TAILLE. | U | -xBafle-contre : même clé 8 même portée en - bas que la bafle-taille , mais ne donne que lei en-haut. Le volume plus large, s'il eft permiside fe fervir de cette exprefñion, en fait une feconde différence. On fait ufage de ces voix dans les chœurs ; elles rem- pliffent & foûtiennent l'harmonie: on en a trop peu à l'opéra, l’effet y gagneroit. Voyez INSTRUMENT: On a déjà dit que le concordant 8x le fauflet étoient regardés comme des voix bâtardes & inutiles, Le premier eft une forte de taille qui chante fur la même clé, & qui ne va que depuis lus au -deffous de la clé, jufqu’au fa au-deflus : huit tons & derni dia: toniquement. On voit par le feul expofé, combien.on a abufé de nos jours de l'ignorance de la multititde à l'égard d'une voix très-précieufe que nous avons perdue. On veut parler ici de celle du fieur Lepage, qu’on difoit tout-haut n’être qu’un concordant, 8T qui étoit en effet la plus legere, la nueux timbrée & lamoins lourde bafle-taille que la nature eût encore offerte en France à l’art de nos Muficiens. Ce chanteur pat- couroit d’une voix égale & aifée ; plus de tons que men avoient éncore:parcouru nos voix de ce genre les’plus vantées. Il avoitde plus une grande facilité pour les traits de chant, qui feuls peuvent l’embellis & le rendre agréable. On lui refufoit l’exprefion ; l’attion théatrale, lés graces de la déclamation: peut. être en.effet n’étoit-ilque médiocre dans ces parties ; mais quelle voix ! &c il faut premierement chanter & avoir dequoi chanter à l'opéra. Le fauflet eft une voix de deflus face; elle par: court avec un fon aïigre les mêmes intervalles que les voix de deflus. Il y a des chanteurs qui fe le don- nent, en confervant la voix qu'ils avoient ayant la mue. Voyez Mu. D’autres l’ajoûtent à leur voix naturelle, & c’eft une miférable imitation de ce que Part a la cruauté de pratiquer en Italie. C’eft-là qu’un ancien ufage a prévalu fur lhuma- nité ; une opération barbare y produit des voix de deflus, qu’on croit fort fupérieures aux voix que la nature a voulu faire ; & de ce premier écart on-a pañlé bientôt à un abus dont les inconvéniens furpat- fent de beaucoup les avantages qu’on en retire. Ona vû plus haut quelle eft l’écerdue déterminée par la nature des voix de deflus. Les muficiens d’Ita- lie ont trouvé cette érezdue trop reflerrée ; ils ont travaillé dès l'enfance les voix des caftrari, & à force d'art ils ont crû en écarter les bornes, parce qu'ils ont enté deux voix faétices & tout-à-fait étrangeres, fur la voix donnée, Mais ces trois voix de qualités inégales , laiffent totjours fentir une diflemblance qui montre l’art à découvert, & qui par conféquent dépare toñjours la nature. L’érendue fa&ice des voix procurée par l’art, ne pouvoit pas manquer d’exciter l'ambition des fem- mes, qui fe deftinant au chant , n’avoient cependant qu'une voix naturelle. Dés qu'un deflus artificiel fournifoit (n'importe comment) plufeurs tons dans le haut & dans le bas, qui excédoient l’érezdue d'un: TE denis natürel, il S'enfnivoit que celui-ci paroit- foit lui être inférieur, & devenoït en effet moins utile, Les'compofiteurs reflerrés dans les boïnes de dix tons & demi, prefcrites pat la nature , fe trou- voient bien plus à leur aile avec des voix fadices, qui leur donnoient la liberté de fe jouer d’une plus grande quantité d'intervalles , & qui rendoient par conféquent leurs compofitions beaucoup plus ex- traotdinaires &c infiniment moins difhciles, Les voix de femme, f bien faites pour porter l'émotion juf- qu'au fond de nos cœurs, n’étoient plus dans leur état naturel qu'un obftacle aux écarts des muficiens ; & ils les auroient abändonnées à perpétuité pour fe fervir des caffrati (qu'on a d’ailleurs employés de tous les terms en femines fur les théatres d'Italie) , f ellés n'avoient eu l’adrefñle & le courage de gâter leurs voix pour s’accommoder aux circonftances, Ainfi à force d'art, de travail & de conftance, elles ont calqué fur leurs voix plufieurs tons hauts &t bas au-deflus & au-deflous du diapafon naturel. L'art eft tel dans les prands talens, qu'il enchante les Italiens habitués à ces fortes d’écarts, & qu'il fur- prend ê flate même les bonnes oreilles françoifes, Avec cet artiice les femmes fe font {oûtenues au théatre, dont elles auroient été bannies, & elles y difputent de talent & de fuccès avec ces efpeces bi- farres que l’inhumanité leur a donné pour rivales, Voyez CHANTEUR, CHANTRE. À la fuite de ces détails, qu'il foit permis de faire deux réflexions. La premiere eft fuggérée par les principes de l’art. [Il n’eft & ne doit être qu’une agréa- ble imitation de la nature ; ainfi le chant réduit en regles, foûmis à des lois, ne peut êtie qu’un embel- fiflement du fon dé la voix humaine ; & ce fon de la voix n’eft &c ne doit être que l’exprefion du fenti- mént, de la pañlion, du mouvement de lame, que Vâtt à intention d’imiter : ot 1l n’eft point de fitua- Hon de l'ame que l'organe, tel que la nature l’a don- né, ñe puifle rendre, Puifque le fon de la voix (ainf qu’on l’a dit plus Hauts & qu'on le prouve à larricle CHANT) eft le premier langage de l’homme, les différens tons qui compofent l’ererdue naturelle de fa voix, font donc relatifs aux différentes expreffions qu'il peut avoir à rendre, & fufifans pour les rendre toutes. Les tons divérs que l’art ajoûte à ces premiers tons donnés , fontdonc, 1° fuperflus ; 2° 1l faut encore qu’ils foient tout-à-fait fans éxpreffion, pufqu’ils font inconnus, étrangers, inutiles à la nature, Ils ne font donc qu'un abus de Part, &c téls que le feroient dans la Peinture, des couleurs faëtices, que les diverfes modifications dé la lümiere naturelle ne fautoient jamais pro- dure. Re PAT TR ART La feconde réflexion eff un cri de douleur & de pitié fur les ésaremens & les préjugés qui fubjuguent quelquefois des nations éntieres, & qui bleflent leur fénfibilité au point de leur laïffer voir de fang-froid les ufages les plus barbares. L’humanité, la raïfon, la religion, font également outragées par les voix faétices , qu'on fait payer fi cher aux malheureux à qu On les donne. C’eft fur les noirs autels de l’aya- rice que des peres cruels immolent eux-mêmes leurs fils, leur poftérité, & peut-être des citoyens qu’on auroit vû quelque jour la gloire & l'appui de leur pañrie, | Wat: s Qu'on fe croye pas, au refte, qu’une auffi odieufe cruauté produife infailliblement le fruit qu’on en.ef- pére ; de deux mille viétimes facrifiées au luxe & aux Bifarreries de l’art, à peine trouve-t-on trois fujets qiu réuniflent le talent & l'organe : tous les autres, créatures oïfives & languiflantes ne font plus qué le rèbut des deux iexes ; des membres paralytiques de Ta fociété ; nn fardeau inutile & flétriflant de la ferré qui les à produits , qui les nourrit, & qui les ETE 47 porte, Voytt EGALITÉ, SON, Voix, MAÎTRE À CHANTER. (B) ENT "ETENTES, ETATES,PAUS, CIBAUDIFRE, termes Jÿynonymes de Péche ; fotte de rets ou filets. Les rets dé hauts-pares , dans le reflort de l’anurauté du boutg d'Ault, qui font les érerces, drares ou palispour la pêche du poiffon paffager, font conformestau ca- libre prefcrit par ordonnance de 1681. Les pieces qui ont vingt, trente, quarante, cinquante brafless ont une braîle ou une brafle &z denue de chûte;.ces filets font pour lors montés fur une haute pérche , bout-à-terre, bout-à-la-mer, Onfles tend. encore en demi-cercle, | | Les pêcheurs qui font voïfins de l'embouchure dé la riviere de Bret, où les truites & les faumons ert- trent volontiers, en font aufli lapêche avec ces filets : ils font pour lors tendus de la même ma. nière que les rets traverfers de la côte de bafe- Normandie, Les pêcheurs plantent leurs petites per. ches ou piochons en droite ligne , bout-à-terte, bout. à-la-mer, ainf que dans les hauts-parcs; mais ils forment à l'extrémité un rond où ces poiffons s’arrê: tent, Cette forte de pêcherie peut alors être regardée comme une efpece de parc de perches & de filets, n'y ayant aucunes claies ni pierres par le pié pour le garnir. EE ETERNALS, f m. pl. (He eccléf.) hérétiques des premiers fiecles. Ils croyoïient qu'après la réfur- reétion le monde dureroit éternellement tel qu'il eft, &T que ce grand évenement n’apporteroit aucum changement dans les chofes naturelles. ETERNELLE , {. €. (Hifi. nat. Botan.) elichryfumr, Cette plante eft ainfi nommée, parce que fa fleur; quoique coupée de deflus le pié, fe conférve fans changer de couleur, C’eft un petit bouton’ jaune- pâle ou rougeâtre, dont la tige & les feuilles font d’un verd-blanchâtre ; elle vient de praine où de bou: ture, &c ne demande qu'une culture ordinaire. (Æ) _ ETERNITÉ, (Méraphyf.) durée infime &incom: menfurable,. , . ie jeu PPTUL On envifage l’érerniré ou la durée infinie, comme une hgne qui n’a ni commencement ni fin. Dans les fpéculations fur lefpace infini, nous regardons le lieu où nous exiftons ; comme un centre à l’égard de toute l'étendue qui nous environne ; dans les fpécu- lations fur l’érerniré, nous regardons le temsquinous eft préfent:, comme le milieu qui divife toutela ligne en deux parties égales: de-là-vient que divers auteurs fpirituels comparent le tems préfent à une ifthme qui s’eleve au milieu d’un vafte océan qui n’a point de bornes; 8 qui l'enveloppe de deux côtés. La philofophie fcholaftique: partage l’érerniré en deux , celle qui eft pañlée,, & celle qui eft à vénir; mais OUS les termes {cientifiques de l’école n’appren- nent rien fur, cette matiere. La nature de Pérerniré eftinconcevable à l’efprit humain : la raifon nous dé. . montre que l’érerniré pañlée a été, mais elle ne fauroit s’en former aucune idée quine {oit remplie de.contra- diétions. [l nous eft impofible d’avoir aucune-autre. notion d’une durée qui a pañlé fi ce n’eft qw’elle.a été toute préfente time fois ; mais tout ce qui a été une fois préfent , ef à une certaine diftance denous; & tout ce qui eft une certaine diftance de nous , quel: qu'éloigné qu'il foit, ne peut jamais être l’éserniré. ! La notion même d’une durée quilapañé, emporte qu’elle a, êté préfente une fois,..puitque l’idée'dé cellé-cirenferme aétuellement l’idée de l'autre. \C'eft donc là un myftere impénétrable à l’efprit humain: Nous fommes aflürés qu'il y a eu une éermiés; mais nous nous contredifons nous-mêmes, dès que nous voulons nous en former quelque idée. ; Nos difficultés fur ce point. viennent dé ce que nous ne faurions avoir d’autres idéés d’ancuné{orte de durée, que çelle par laquelle nous exiftons nous- A8 TE mêmes avec tous les êtres créés ; je veux dire une durée fucceflive | formée du pañlé, du préfent, & de l'avenir. Nous fommes perfuadés qu'il doit y avoir quelque chofe qui exifte de toute érermiré, & cependant 11 nous eft impoñlible de concevoir, fui- vant l'idée que nous avons de l'exiftence, qu'aucune chofe qui exifte puifle être de toute érerniré, Mais puifque les lumieres de la raifon nous didtent & nous découvrent qu'il y'a quelque thofe qui exifte nécef- dairemént de toute éermité, cela doit nous fufiire ; quoique nous ne le concevions pas. Or, 1°. 1l eft certain qu'aucun être n’a pû fe for- mer luiimême , ptifqu’il faudroit alors qu'il eût agi avant qu'il exiffât, ce qui implique contradiéion. 2°. Il s'enfuit de -là qu'il doit y avoir eu quelque être de toute éernire. 3°. Tout ce qui exifte à la maniere des êtres finis, ou fuivant les notions que nous avons de l’exiftence, ne fauroit avoir été de toute érerniré. 4°. Il faut donc que cet être éternel {oit le grand auteur de la nature, l'acier des jours, qui fe trou- vant à une diftance infinie de tous les êtres créés, à Pégard de fes perfe@tions, exifte d’une toute autre maniere qu'eux, & dont 1ls ne fauroient avoir au- cune idée. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. On demande fi l’ésernire eft fucceflive, c’eft-à-dire fi elle eft compofée de parties qui coulent les unes après les autres; ou bien fi c’eft une durée fimple qui exclut eflentiellement le pañlé & l’avenir. Les Scotiftes foûtienñent le premier fentiment , les Tho- miftes fe font déclarés pour le fecond. Chacun de ces deux partis eft plus fort en obje&ions qu’en fo- Jutions. Tous les chrétiens, difent les Scotiftes, de- meurent d'accord qu'il ny a que Dieu qui ait toù- jours exifté ; que les créatures n’ont pas toûüjours co-exifté avec lui; que par conféquent il exiftoit avant qu'elles exiftaflent. Il y avoit donc un avant lorfque Dieu exiftoit feul ; il n’eft donc pas vrai que la durée de Dieu foit un point indivifible : le tems a donc précédé l’exiftence des créatures. Par ces con- féquences ils croyent faire tomber en contradiction leurs adverfaires : car fi la durée de Dieu eft indivi- fible, fans pañlé ni avenir, il faut que le tems & les créatures ayent commencé enfemble; & fi cela eft, comment peut-on dire que Dieu exiftoit avant l’e- xiftence des créatures ? On ne prend pas garde, continuent les Scotiftes, wen faifant l’eéserniré un inftant indivifible, on af- foiblit lhypothefe du commencement des créatures. Comment prouvez-vous que le monde n’a pas toù- jours exifté ? n’efl-ce pas par la raïfon qu'il y avoit une nature infinie qu exiftoit pendant qu'il n’exiftoit pas? Mais la durée de cette nature péut-elle mettre des bornes à celle du monde? peut-elle empêcher que la durée du monde ne s’étende au-delà de tous les commencemens particuliers que vous lui vou- driez marquer ? Il s’en faut un point de durée indi- vifible, me direz-vous, que les créatures ne foient fans commencement ; car, felon vous, elles n’ont été précédées que de la durée de Dieu, qui eft un inftant indivifible, Elles n’ont donc pas commencé, vous répondra t-on; car s’il ne s’en falloit qu'un point (je parle d’un point mathématique) qu’un bä- ton neût quatre piés, il auroit certainement toute l'étendue de quatre piés. Voilà une inftance que l’on peut fonder fur la définition de Boëce, qui dit que léternité ef zrterminabilis vite rota fimul € perfeëla poffeffio; car fi l’on ne peut concevoir que tous les membres d’un homme demeurent diftinéts l’un de l’autre fous l'étendue d’un point mathématique, com- ment concevra-t-On qu'une durée qui n’a ni com- mencement nm fin, & qui co-exifte avec la durée fuc- ceflive de toutes les créatures , s’eft renfermée dans un inftant indivifble à ETE Cette hypothefe fournit une autre difficulté en fa= Veur de ceux qui foûtiennent que les créatures n’ont point eu de commencement. Si le decret de la créa- tion n’enferme pas un moment particulier, il n’a ja- mais exilté fans la créature ; car on doit concevoit ce décret fous cette phrafe : je veux que le monde foi. Il eft vifible qu’en vertu d’un tel decret le monde a dûexifter en même tems que cet aête de la volonté de Dieu. Or puifque cet aête n’a point de commen- cernent , le monde n’en a point auf. Difons done que le decret fut conçû en cette maniere: je veux que le monde exifie en un tel momenr. Mais comment pour- tons-nous dire cela, fi la durée de Dieu eft un point indivifible ? Peut-on choïfir ce moment-là ou celui- C1 plütôt que tout autre, dans une telle durée? Il femble donc que fi la durée n’eft point fuccefhive, le monde n’ait ph avoir de commencement. Ce font-là les principales raifons dont les Scotiftes fortihient leur opmion. Voici celles fur lefquelles les Thomiftes appuient la leur. 1°, Dans toute fuccef- fion de durée, difent-ils, on peut compter par mois, années, fiecles, &c. Si l'érerniré eft fuccefive, elle renferme donc une infinité de fiecles : or une fuccef- fon infinie de fiecles ne peut jamais être épuifée ni écoulée ; c’eft-à-dire qu’on n’en peut jamais voir la fn, parce qu'étant épuifée elle ne fera plus infinie. D'où lon conclut que s’il y avoit une éserniré fuccef. five, ou une fucceflion infinie de fiecles jufqu'à ce jour, il feroit impoñfible qu’on fût parvenu jufqu- aujourd’hui, puique cela n’a pü {e faire fans fran- chir une diftance infinie ; & qu’une diftance infinie ne peut être franchie, parce qu’elle feroit infinie & ne le feroit pas. 2°, L’érernité eft une perfettion eflentielle à Dieu ; or une perfeétion efentielle à Dieu peut-elle être fucceffive ? Dieu ne doit-il pas toûjours la pofféder toute entiere ? D'ailleurs , fi une perfeétion eflen- tielle à Dieu pouvoit être fucceflive, ou ce feroit chaque partie en particulier qui feroit cette perfec- tion, ou ce feroit la liaïfon de toutes ces parties fuc- céffives : or on ne peut {oûtenir ni l’une ni l'autre de ces deux opinions, Dira-t-on que chaque partie en particulier eft cette perfe&ion effentielle ? non fans doute , parce que chaque partie en particulier étant tantôt préfente, tantôt pañlée, tantôt future, il fau- droit dire qu’une perfection eflentielle peut éprouver les mêmes changemens. Dira-t-on que cette perfe&tion effentielle confifte dans la liaïfon de toutes ces par- ties fucceflives ? il faut donc accorder en même tems que Dieu , pendant toute l’érerziré, eft deftitué d’une perfeéhion qui hui eft effentielle, parce qu’il ne pof- fede jamais en même tems la liaifon de toutes ces parties. Voyez TEMS. Arsicle de M. FoRMEY. Nous rapportons ces objettions des Thomiftes & des Scotiftes, 1° parce qu’elles appartiennent à l’hif toire de la Philofophie, qui eft l’objet de notre ou- vrage : 2° parce quelles fervent à montrer dans quel labyrinthe on fe jette, quand on veut raifonner fux ce qu'on ne conçoit pas. * ETERNITÉ , 1. f. (Mytholog.) divinité des Ro- mains, qui n’a jamais eu de temples ni d’autels, On la repréfentoit fous la figure d’une femme qui tient le foleil d'une main & la lune de l’autre. Elle avoit encore pour fymbole le phénix, le globe, & Pélé- phant. ETERNÜMENT, £. m. Ge) C’eft une des fonétions fecondaires des organes de la refpiration, qui confifte dans une forte expiration excitée par un mouvement convulff, qui détermine l’air expiré à pafler principalement par les narines, pour en em- porter la caufe de l’irritation, qui a mus en jeu les puiffances qui fervent à la refpiration. Le méchanif- me de lérernémenr peut être plus particulierement expoié, de la maniere qui fuit, ; Immédiatement Immédiatement avant que d’éternuer, on fent une forte de chatouillement leger fous los cribleux, qui diftribue les nerfs olfa@ifs aux narines : ils’excite en- fuite une efpece de mouvement convulfif des muf- cles qui fervent à l’infpiration , qui dilatent le thorax beaucoup plus qu’à Pordinaire ; enforte que l'air en- tre dans les poumons en plus grande quantité: il y eft retenu le plus long-tems qu'il fe puifle, par l’ac- tion continuée des mufcles infpirateurs. L’on paroît dans cet état héfiter & fufpendre l’expiration qui doit néceflairement fuivre ; l’air retenu dans les poumons par la glotte, qui eft fermée dans ce tems-là, fe ra- réhe beaucoup plus que de coûtume , à proportion de ce qu'il féjourne davantage dans la poitrine : 1l dilate par conféquent très-fortement les parties qui de ns » il les applique contre les parois du thorax ; on fent une forte de prurit au creux de lef- tomac, vers le diaphragme. Cependantlescartilages des côtes, qui font pliés & retenus dans une fituation plus forcée qu’à ordinaire , tendent avec un effort proportionne à leur reflort trop bandé, à fe remettre dans leur état naturel. En même tems, & par une forte de convulfion, les mufcles expirateurs fe con- tra@tent très-fortement, & prévalent, par leur ac- tion prompte & fubite, fur les organes expirateurs, êc chaffent l’air des poumons avec une grande impé- tuofité, qui force la glotte à s'ouvrir ; frappe fes bords & toutes les parties par où 1l pañle : d’oùfe forme un bruit éclatant , fouvent accompagné d'tine efpece de cri. Les mufcles qui fervent à relever la racine de la langue, entrent aufñien contra&tion ; ce qui ferme prefque le pañfage par la bouche, & dé- termine l’air à {e porter prefque tout vers la cavité des narines, où 1l fe heurte fortement contre les membranes qui les tapiflent , & entraine avec lui toutes les matieres mobiles qui font attachées à leur furface. Tous ces efletsfont caufes par une irritation violente des nerfs qui fe diftribuent à ces membra- nes (voyez NEZ, NARINES, MEMBRANE PITUI TAIRE) ; laquelle irritation fe tranfmettant à la com- muné origine des nerfs, excite une convulfion géné- tale dans tous ceux qui fe diftribuent aux mufcles de la poitrine, du dos & de latête, de même qu’il ar- rive un fpafme umverfel en conféquence de la pi- quüûre, de la bleffure de tout autre nerf ou tendon, dans quelque partie du corps que ce {oit. Il n’eft par conféquent pas néceffaire, pour expli- quer le méchanifme de l’érernément, d'avoir recours à la communication particuliere des nerfs, qui n’eft pas bien prouvée, entre ceux de la membrane pitui- taire & ceux de la poitrine; car ce ne font pas les {euls organes de la refpiration qui font mis en jeu _dans l’érernéinent , mais encore les mufcles du cou & de la tête. Les poftérieurs la tirent en-arriere, & la retiennent dans cette fituation pendant la grande infpiration qui précede l’éserrément proprement dit; & enfuite les antérieurs agiffant à leur tour avec une grande promptitude, ramenent la tête, & la fléchif- {ent en-avant. Tels font les mouvemens combinés qui confti- tuent l’érerrément, Comme la toux fert à nettoyer les voies de l’air dans les poumons (voyez Toux), dé même lérerrément eit produit pour nettoyer les farines. L’irritation de la membrane pituitaire, caufée par les humeurs dont elle eft enduite, devenues acres, ou par toute autre matiere de même nature (voyez STERNUTATOIRE), portée & appliquée fur Les nerfs qui s’y difiribuent, forcent la nature à employer tous lès moyens poflibles pour faire cefler cette irrita- tion; ce qu’elle fait par le moyen de l’air qu’elle poule ayec impétuofité contre ces matieres irritan- tes, & qu'elle fait fervir comme de balai pour les enlever & les chaffer hors des narines, C’eft pour- Tome FI, ETE 49 quoi on éternue ordinairement le matin après le re- veil, & fur-tout en s’expofant au grand jour, à caufe de la ucofité qui s’eft ramaflée pendant la nuit, & qui eft devenue acre, irritante. L’érernd- ment Qu'elle excite , fert à l'enlever & à découvrir les nerfs olfa@ifs, pour qu'ils foient plus fenfibles à Paëtion des corps odoriférans. L’érernément produit encore plufieurs autres bons effets, entant que les fecouffes qui en réfultent, fe communiquent à toutes les parties du corps, & par- ticulierement au cerveau. Hippocrate faifoit exciter l’érernément pour faire fortir l’arriere-faix. Aphor. xlvy. Jet. 11, L’éternément qui {e fait deux ou trois fois après le fommeil , rend le corps agile, difpos, & ranime les fonétions de l'ame ; mais s’il eft répeté un plus grand nombre de fois de fuite , il affoiblit confidérablement , à caufe de la convulfondes nerfs; & il fait naître une douleur dans le centre nerveux du diaphragme, par le trop grand tiraillement qu’il y excite. Il peut produire bien d’autres mauvais ef- fets, dont ileft fait mention en parlant des remedes & autres chofes propres à faire éternuer. Voyez STER- NUTATOIRE 6 ERRHINS. L’écerniment eft aufli produit , mais rarement , par d’autres caufes que cette irritation des narines. Hoad- ly, of the refpiration, p. 96. fait mention d’un érer- añment habituel, caufé par un vice de l’abdomen, & peut-être aufi du diaphragme , puifque la refpi- ration ne fe faifoit que par le moyen des côtes. Hil- danus, cezt. I. obf. xxjv. fait mention d’un homme quiéternuoit à volonté, & qui faifoit cent érerzémens de fuite ; exemple bien fingulier, & peut - être uni- que. On a vü des femmes hyftériques faire des éser- aimens énormes, & pendant pluñeurs jours par in- tervalles. Le pere Strada a fait un traité de l’érerné- ment , dans lequel il donne la raifon de l’ufage établi de faluer ceux qui éternuent. C’eft , felon lui, une coûtume des Payens, qui étoit cependant reçüe chez les Juifs comme chez les Romtains. Voyez l’ouvrage cité G l’article fuivant, L’érerniment exceflif eft une affe@ion convulfive trop long-tems continuée, ou trop violente. L’indi- cation qui fe préfente , eft d’emporter la caufe de Pirritation qui produit la convulfion ; il faut confe- quemment employer des remedes adouciffans 8c mu- cilagineux , qui émouflent l’acreté des matieres atta- chées à la membrane piuutaire, & qui relâchent les nerfs trop tendus & trop fenfibles. On confeille pour cet effet le lait chaud , l'huile d'amandes doutes, at- tirés par le nez. On prétend aufl que lon peut arrê- ter l’érernément , en comprimant fortement avec le doigt le grand angle de l’œil ; fans doute parce qu’on engourdit par-là une branche du nerf de la cinquie- me paire, qui entre dans l’orbite avant que de fe répandre dans le tiffu, de la membrane piiuitaire. Lorique l’ésernüment dépend d'une fluxion confidéra- ble d'humeurs acres fur les narines, on doit travailler à les détourner du fiège qu’elles occupent, & où elles produifent un fymptome fi fatiguant, par le moyen des purgatifs hydragogues ; & dans le cas où l’érernément dépend de quelqw’autre maladie, il faut s'appliquer à en emporter la caufe par les remedes qui lui font appropriés.pour que l'effet cefle. Ces ar- ricle eft tiré en partie du commentaire & des notes fur les inffitutions de Boerhaave, par M. Haller. (4) ETERNUMENT, (Lirtér.) L’ancienneté & l’éten- due de la coûtume de faire des fouhaits en faveur de ceux qui éternuent, a engagé les Littérateurs à re chercher curieufement, d’après l'exemple d’Ariftote, fi cet ufage tiroit fon origine de la religion, de la {u- perfütion, des raifons de morale ou de phyfique. Voyez lä-deflus, pour couper court, Les écrirs de Stra. da, de Schootérins , &c /e mémoire de M. Morin, qui eff dans l’hifioire de l'académie des Difcriprions. SO E LE Mais toutes les recherches qu’on a faites à ce fu- jet , ne laiffent à defirer que la vérité ou la vraiffem- blance. Il faudroit être aujourd’hui bi@n habile pour deviner fi dans les commencemens l’on à regardé les éternmens comme dangereux, ou comme amis de la nature ; chaque peuple a pü s’en former des idées différentes, puifque les anciens medecins même ont été partagés : cependant aucun d’eux n’a adopté le . fyftème dé Clément d'Alexandrie, qui ne confidéroit les fternutations que comme une marque d’intem- pérance.& de mollefe : c’eft un fyftème à lui tout leul. Eaïflant donc à part la caufe inconnue qui a pû porter les divers peuples à faluer un mouvement convulfif de la refpiration, qui n’a rien de plus fin- guler que la toux ou le hoquet,, il fuffira de remar- quer que les Grecs & les Romains , qui ont donné comme les autres dans cet ufage , avoient la même formule de compliment à cette occafion ; car Le 94 des uns, vivez, & le falve des autres, portez- vous bien, font ab{olument fynonymes. Les Romains faifoient de ce compliment , dutems de Pline le naturalifte, un des devoirs de la vie ci- vile ; c’eft lui qui nous l’apprend. Chacun, dit-il, falue quand quelqu'un éternue, ffernutamentis falu- ramur; & il ajoûte, comme une chofe finguliere ,que l’empereur Tibere exigeoit cette marque d'attention & de refpeët de tous ceux de fa fuite, même en voya- ge & dans fa litiere: ce qui femble fuppofer que la vie bibre de la campagne ou les embarras du voyage, les difpenfoient ordinairement de certaines formali- tés attachées à la vie citadine. Dans Pétrone, Giton qui s’étoit caché fousun lit, s'étant découvert par un érernément, Eumolpus lui adrefle auffi-tôt fon compliment , falvere Girona ju be. Et dans Apulée femblable contre-tems étant ar- tivé plufeurs fois au galant d’une femme, qui avoit été obligé de fe retirer dans la garde-robe, le mari, dans fa fimplicité, fuppofant que c’étoit fa femme, Joliro fèrmone falutem ei precatus ef, fit des vœux pour {a fanté, fuivant l’ufage. La fuperflition qui fe glifle par-tout, ne manqua pas de s’introdure dans ce phénomene naturel, & d’y trouver de grands myfteres. C’étoit chez les Egyptiens, chez les Grecs, chez les Romains, une efpece de divinité familiere , un oracle ambulant, qui dans leur prévention les avertifloit en plufieurs rencontres du parti qu'ils devoient prendre, du bien ou du #fal qui devoit leur arriver. Les auteurs font remplis de faits qui juftifient clairement la vaine cré- dulité des peuples à cet égard. Mais l’érernément pañloit pour être particuhere- ment décifif dans le commerce des amans. Nous li- fons dans Ariftènete (epiff, v. Lb. IT.) que Parthénis, jeune folle entêtée de l’objet de fa pañlion, fe déter- mine enfin à expliquer fes fentimens par écrit à fon cher Sarpédon: elle éserzue dans l'endroit de fa let- tre le plus vif & le‘plus tendre ; c’en eft aflez pour elle, cet incident lui tient lieu de réponfe, & lui fait juger qu'au même inftant fon cher amant répondoit à {es vœux : comme fi cette opération de la nature, en concours avec l’idée des defirs, étoit une marque certaine de Punion que la fympathie établit entre les cœurs. Par la même raifon les poëtes grecs & latins difoient des jolies perfonnes, que es amours avoient éternué @ eur naiflance. Après cela l’on comprend bien qw’on avoit des obfervations qui diffinguoient les bons érerzémens d'avec les mauvais. Quand la lune étoit dans les fi- gnes du taureau , du lion, de la balance, du capri- corne, ou des poiflons , l’eserrément pafloit pour être un bon augure; dans lesautres conftellations, pour unmauvais préfage. Le matin, depuis minuit jufqu’à midi, fâcheux pronoftic ; favorable au contraire de- ÉTÉ : puis midi jufqu’à minuit : pernicieux en fortant du lt ou de Ja table ; il falloit s’y remettre, & tâchet ou de dormir , on de boire, ou de manger quelque chofe , pour rompre les lois du mauvais quart d'heure, On tiroit auffi de femblables induétions des érer= rhmens fimples ou redoublés, de ceux quife faifoient à droite ou à gauche , au commencement ou au mi- lieu de Pouyrage, & de plufieurs autres circonftan- ces qui exerçoient la crédulité populaire, & dont les gensfenfés fe moquoient, comme on Le peut voir dans Cicéron, dans Séneque , & dans les pieces des auteurs comiques. Enfin tous les préfagestirés des érerztmensont fini ; même parmi le peuple ; mais on a confervé religieu- fement jufqu’à ce jour dansles cours desprinces, ainfi que dansles maifons desparticuliers, quelque marque d'attention& de refpelt pour les fupérieurs qui vien. nent à érernuer. C’eft un de ces devoirs de civilité de l'éducation, qu'on remplit machinalement fans Y. penfer, par habitude, par un falut qui ne coûte rien, ë qui ne fignifie tien, comme tant d’autres puérili- tés dont les hommes font & dontils feront toujours efclaves, Arricle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. ETERSILLON,.,. ETRESILLON oz ARC-BOU- TANT, m, (Ars milis.) Ce font , dansl’Artillerie, les pieces de bois que l’on met entre des ais ou dof: fes, à-peu-près parallelement au niveau du terrain , pot empêcher l’éboulement desterres dans les gale. ries de mines, Voyez Mine. (Q ETEÉSIENS, (VeNTs ) Hydrogr. & Hifi. anc.) Les anciens donnoient le nom d’éséfrens, du terme grec érhotos, Qui fignifie azriverfaire, à des vents dont le fouffle fe faifoit fentir régulièrement chaque année, & rafraichifloit l’air pendant fix ou fept femaines, depuis le folftice d'été jufque dans la canicule. Le regne des vers évéfiens toit annoncé par ceux que Pon nommoït prodromes ou précurfèurs , durant quel ques jours. Ces vents mettant de la température dans Pair pendant la faifon des chaleurs, la plus commune Opinion veut qu'ils foufflent de la bande du nord ; & c’eft ainfi que le vent de nord étant le traverfier des bouches du Nil, dont Le cours en général eff du midi au feptentrion, les anciens attribuoient aux vers écéfiens, pendant Juin & Juillet, le refoulément des eaux du fleuve, qui pouvoit contribuer à fon dé- bordement régulier dans la même faïfon. Le rhumb de ce vent n’eft pas néanmoins tellement fixé à cette région du monde, qu'il ne participe de plufieurs au- tres ; &c le nom d’ééfiens eft appliqué à des vents ve: nans du couchant comme du feptentrion. C’eft par cette raïfon que dans plufieurs auteurs anciens, les étéfiens font déclarés favorables fur la Méditerranée, à ceux qui font route d’occident en orient ; & accu- {és d’être contraires pour la route oppofée. C’eft ainfi qu'on peut entendre les vers éréfiens dans quel- ques endroits de Cicéron & de Tacite. Ariftote ow l’auteur grec, quel qu'il foit, du traité intitulé Z Monde, dit formellement que les éséferstiennent éga- lement du vent Coups comme de l’éberce ; & Diodore de Sicile, iv. I. ch. xxxjx. étend la bande des vers éréfiens juiqu’au couchant d'été. On trouve même dans Pline &c dans Strabon, d’après Pofidonius , que des vents foufflans de l’eft font appellés éséfens ; mais il eft conftant qu’en cela ils s’écartent de lidée la plus générale qu'on doit avoir des vents éréfiens : 8e cette communication du nom d'éséfens à des vents étrangers à la région ordinaire des Eréfers, ne peut être admife ou autorifée, qu’autant que la dénomi- nation en elle-même deviendra propre à tout vent qui foufflera régulièrement. Il en feroit de même du nom de vent a/ifé, qui vient du vieux terme a/is, qui fignifie réglé, quoiqu'il foit fpécialement employé à défignerle vent qui règne furles mers renfermées entre les tropiques, & qui dans la mer du Sud par- ticulierement, conduit les navigateurs d’orient en “occident. Voyez VENT 6 ATISÉ, Cer article eftde M. D'ANVILLE, de l'académie royale des Infcriprions €: Belles: Lertres. ETÊTER, v. a@. (Jard.) c’eft couper entiere- sment la tête d’un arbre, enforte qu'il ne paroïît plus -que comme un bâton, un tronçon. Cette opération le fait quand on le plante fans motte, ou bien quand on veut greffer en poupée ; ou que l’on juge par le mauvais effet des branches, que l’arbre étant éréré en deviendra plus beau dans la fuite. (X) ETÊTÉ, ez Blafon, eft un terme dont on fe fert en France pour défigner un animal dont la tête a été ar- rachée de force, & dont le cou par conféquenteft raboteux & inégal; pour faire diftin@ion d’avec dé- fait ou décapité, auquel cas le cou eft uni comme fi Ja tête avoit été coupée. Foyez D'ÉFAIT. ETEUF, f. m. cerme de Paumier, c’eft une efpece de balle pour jouer & poufler ayec la main. Ce font des Paumiers qui les fabriquent ; auf font-ils appel- lés maîtres Paumiers - Raquetiers faifeurs d’éreufs , pelotes, & balles. Suivant leurs ftatuts, l’éreuf doit pefer dix-feptételins (l’ételin eft la vingtieme partie d’une once), & doit être fait & doublé de cuir de mouton, & rembourré de bonne bourre de tondeur aux grandes forces. | Il y a encore une autre forte d’éreuf ou balle dont On fe fert pour jouer à la longue paume ; il eft fort pe- tit 8r très-dur, & doit Être couvert de drap blanc & neuf, Le peloton fe fait de rognures bien ficelées & garnies de poix. Foyez PAUMIER. ETHER , f. m,(PAy/ig.) on entend ordinairement par ce terme une matiere fubtile qui, felon plufieurs philofophes, commençant aux confins de notre at- moiphere, occupe toute l'étendue des cieux, Voyez CIEL, MONDE, éx. Ce mot vient du grec «i%1p; c’eft pour cette rai- fon que l’on peutécrire indifféremment ærher ou éther, parce que fi la derniere maniere d’écrire ce mot en françois eft plus conforme à l’ufage, la premiere l’eft davantage à l’étymologie: : Plufeurs philofophes ne fauroient concevoir que la plus grande partie de PUnivers foit entierement vuide;.c’eft pourquoi ils le rempliflent d’une forte de matiere appellée éxher. Quelques-uns concoivent cet éther comme un corps d'un genre particulier, deftiné uniquement à remplir les vuides qui fe trou- vent entre les corps céleftes ; & par cette raifon ils le bornent aux régions qui font au-deflus de notre atmofphere. D’autres le font d’une nature fi fubtile, qu'il pénetre l'air & les autres corps, & occupeleurs pores & leurs intervalles. D’autres nient l’exiftence de cette matiere différente. de Pair, & croyent que Vair lui-même, par fon extrèmeténuité & par cette expanfon immenfe dont ilieft capable , peut fe ré- pandre jufque dans lesintervallesdes étoiles, & être la feule matiere qui sy trouve, Voyez Arr. L’éther ne tombant-pas fous les fens & étant em- ployé uniquement. ou en faveur d’une hypothèfe, où pour expliquer quelques phénomenes réels ou imaginaires ; les Phyfciens fe donnent la liberté de limaginer à leur fantaifie. Quelques - uns..croyent qu'il eft de la même nature que les autresicorps, & qu'ilken eft feulement diflingué:par fa ténuité & par les autres propriétés qui en réfultent ; &r c’eft:là l’e- Zher prétendu philofoplique. D’autres prétendent qu'il £ft d’une efpece.diflérente des Icorps ordinaires , Bt qu'il eft comme un cinquieme élément, d’une na- ture plus pure.plus fubtile, & plus fpiritueufe que les fubftances qui font autour de la terre, & dont aufh il na-pas les propriétés, comme la gravité, #c° Telle eft idée ancienne & commune que l'on _ Tome FI. IE CE À ST avoit de l’éher; ou de la matiere éthérée. Le terme d’érher fe trouvant donc embarraffé par “une fi grande variété d'idées, & étant appliqué atbi- trairement à tant de différentes chofes!, plufieurs phi- lofophes:modernes ont pris le parti de labandonner, &t de lui en fubftituer d’autres qui exprimafent quel- que chofe de plus précis. Les Cartéfiens employent le terme de mariere fab tile pour défigner leur éther, Newton employe quel quefois celui d’efprir fubtil, comme À la fin de fes Prin. cipes ; & d’autres fois celui de milieu fubril où érhé- ré, comme dans fon Oprique. Au refte , quantité de raïfons femblent démontrer qu’il y à dans Pair une matiere beaucoup plus fubtile que l'air même. Après qu'on a pompé air d’un récipient , il y refte une ma- tiere différente de l'air ; comme il paroît par certains effets que nous voyons être produits dans le vuide, La chaleur, fuivant l’obfervation de Newton, fe com- munique à-travers le vuide prefqu'aufh facilement: qu'à-travers l'air. Or une telle communication ne peutfe faire fans le fecours d’un corps intermédiaire, Ce corpsdoit être aflezfubtilpourtraverfer les pores du verre; d’où l’on peut conclure qu’il traverfe auffi ceux de tousles autres corps, & par conféquent qu'il eft répandu dans toutes les parties de l’efpace. Voyez CHALEUR, FEU, &c. Newton, après avoir ainfi établi l’exiftence de ce milieu éthére, pafle à fes propriétés, & dit qu’il eft non-feulement plus rare &c plus fluide que Pair, mais encore beaucoup plus élaftique &c plus aétif ; 8c qu’en vertu de ces proprietés, il peut produire une grande partie des phénomenes de la nature. C?eft,par “exemple, à la prefionde cemilieuqueNewton fem- ble attribuer la gravité de tous les autres corps ; & à {on élafticité, la force élaftique de l’air & des fibres nerveufes, l’émufion, la réfraétion, la réflexion, & les autres phénomenesde la lumiere; comme auffi le mouvement mufculaire, &c. On fent aflez que tout cela eft purement conjettural, fur quoi voyez Les ar- ticles PESANTEUR, GRAVITÉ, Éc. L’écherdes Cartéfiensnon-feulement pénetre, mais encore remplit exaétement, felon eux, tous les vui- des des corps, enforte qu’il n’y a aucun efpace dans l'Univers qui ne foit abfolument plein. Voyez Ma- TIERE SUBTILE , PLEIN, CARTÉSIANISME , &c. Newton combat ce fentiment par plufeurs rai- fons, en montrant qu’il n’y a dans Les efpaces célef- tes aucune réfiftance fenfible; d’où il s’enfuit que la matiere qui y eft contenue, doit être d’une rareté pro- digieufe,laréfiftance des corps étañt proportionnelle aleur denfité : files cieux étoient remplis exatement d'une matiere fluide, quelque fubtile qu'elle fût, elle réfifteroit au mouvement des planetes & des come- tes, beaucoup plus que neferoit le mercure. Yoyez RÉSISTANCE, VuIDE, PLANETE, COMETE, Gc. Harris & Chambers. (O) 210% - | ait ETHER,; (Chimr. & Mat, méd.)mous défignons fous ce nom la plus tenue & la plus-volatile des huiles connues,.que nous retirons-de:l’efprit - de:vin:par lintermede-de l’acide vitriolique, ou de Pacide niz treux. Voyez ETHER VIDRIOLIQUE\É ETHER:NIs TREUX. : | edge, af | 2tr ETHER-FROBENII ; (Chi, & Mat. méd.) Echer ou liqueur éthérée de Frobenius, c’eft une huile extrè- mement fubtile, legere; & volatile, fans couleur, d'une.odeurtrès-agréable ;:qui imprime à la peaurun fentiment de froid, qui eft frinflammable qu'elle brû- le fur la furface de Peau froide ; même en très:petite quantité, &t quia toutes lesautres propriétésdes hui- es eflentielles des végétaux très-rettihés1#Huire, Elle eft un des produits de la diftillation d'un mé- lange d’efprit-de-vin 8 d'acide vitriolique , c’eft-à- dire de lanalyfe de l’efprit-de-vin par Pintermede de lPacidevitriolique. 71 DA LITE G 52 ETH Cette fibflance eft corinue dans l’att depuis long- tems; on en trouve, finon des defcriptions exaétes , du moins des indications aflez manifeftés dans Ray- mond Lulle, Ifaac le hollandois, Bafile Valentin, & Paracelfe. Un grand nombre d'auteurs plus moder- nes en ont fait mention d’une maniere plus où moins claire, en ont décrit la préparation plus on moins completement ; & cependant cette liqueur finguliere eft reftée prefque abiolument ignorée ou négligée, jufqu'à ce que Frédéric Hoffman la tira de Poubli &c la ft connoitreprincipalement par les vertus médici- nales qu’il lui attribua; mais elle n’a été générale- ment répandue que depuis qu’un chimifte allemand, qu’on croit avoir caché fon nom fous celui de Fro- benius, publia les expériences fur cette fubftance finguliere, dans les Tranf. philof. années 1730.n.413. & 1733. nr. 428. C’eft à cet auteur que la liqueur dont il s’agit doit le nom d’éher. Les chimifies qui l’avoient devancé l’avoient nommée eat cempérée , efprit de vitriol volatil , efprit doux de vitriol , huile douce de vitriol, &c. tous ces noms expriment des erreurs , & doivent être par conféquent rejettés. Celui d’ésher, qui eft pris d’une qualité extérieure très-réelle du corps qu'il défigne, leur doit être pré- féré ; & il ne faut pas lui fubitituer cehu d'acide vi- zriolique vineux , parce que ce nom que lui ont don- né plufeurs chimiftes modernes très-illuftres, peche par le même défaut que les noms anciens. IL eff im- polé à cette liqueur d’après une faute idée de fa na- ture, comine nous le verrons dans la fuite de cet ar- ticle. Le leteur qui fera curieux d’acquérir une érudi- tion plus étendue fur cette matiere, pourra fe fatis- faire amplement en lifant la differtarion que le céle- breM.Pott a compoféeen173 2 fur l'acide vitriolique vineux, qu'il permet d’appeller aufli e/prir-de-vin vi- criolé, Celui qui fe contentera de connoître le procé- dé le plus sûr & le plus abregé pour préparer Pévher vitriolique en abondance, va le trouver ici tel que M. Hellot a eu la bonté de me le communiquer en 1752, avec permiflion de le répandre parmi les Ar- tifles; ce que je fis dès ce tems-là. Prenez de l’efprit-de-vinre@tifié, ou même de l’ef- prit-de-vin ordinaire, 8 de la bonne huile de vitriol telle qu'on nous lapporte de Hollande ou d’Angle- terre, parties égales, au moins deux livres de cha- cun: mettez votre efprit-de-vin dans une-cornue à Jangloife de verre blanc, de la contenance d’envi- ron fix pintes ; verfez deflus peu-à-peu votre huile de vitriol, en agitant votre mêlange qui s’échauffera de plus en plus à chaque nouvelle effufon de l'acide vitriolique, & en lui faifant parcoutir prefque tou- tes les parties de la cornue pour qu’elle s'échauffe uniformément, Quand vous aurez mêlé entierement vos deux liqueurs, le mélange fera fi chaud que vous ne pourrez pas tenir votre main appliquée au fond de la cornue ; il aura acquis une couleur délayée d'urine, lors même que vous aurez employé de Pa- cide vitriolique non coloré , & 1l répandra une odeur très-agréablé. Vous aurez préparé d'avance un fout- neau à bain de fable ; dans lequel vous aurez allu- mé un feu clair de charbon, & vous aurez difpofé à une diftance & à une élévation convenable, un grand balon ou deux moindres balons enfilés & déjà lutés enfemble. Dès que votre mélange fera fint, vous placerez votre cornue fur le bain de fable qui fera déjà chaud ; vous adapterez fon bec dans l’ou- verture du balon ; vous luterez , vous ouvrirez le petit trou du balon, & vous foûtiendrez, ou même augmenterez le feu , jufqu’au point de porter bruf- quement votre liqueur au degré de lébullition. Le produit qui paflera d’abord ne fera autre chofe qu’- uh efprit-de-vin très-déflegmé ; vous’ le teconnoîtrez à l'odeur ; bientôt après en moins d’une demi-heure ETH Pérher s’élevera ; la différence de l'odeur & la vié- lence du foufle qui s’échappera par le petit trou du balon, vous annonceront ce produit: alors bouchez le petit trou, appliquez fur vos balons &c fur la par- tie inférieure du cou de la cornue des linges mouil- lés, que vous renouvellerez fouvent ; ouvrèz le pe- tit trou de tems en tems, à-peu-près toutes les deux minutes, & laiflez-le ouvert pendant deux où trois fecondes ; foûtenez le feu , mais fans l’élever davan- tage ; & continuez ainf votre difüillation jufqu’à ce que votre cornue commence à s’obfcurcir par la pro- duéhon de legeres vapeurs blanches. Dès que ce figne paroïtra , enlevez votre cornue du fable, def- appareillez fur le champ , & verfez les deux liqueurs qui fe font ramaflées dans le récipient, dans un vaif- eau long & étroit ; vous appercevrez votre éther na- geant fur l’efprit-de-vin élevé dans la diffillation; vous féparerez ces deux produits encore plus exac- tement , fi vous les noyez d’une grande quantité d’eau : alors vous retirerez toute la liqueur infé- rieure par le moyen d'un petit fyphon , ou par celui d'un entonnoir à corps cylindrique , haut & étroit ; &c fi vous ne vous propofez que d'obtenir de l’érher, votre opération eft finie. Que sil vons arrive d’avoir pouffé le feu aflez fort pour que la premiere apparition des vapeurs blanches foit ace compagnée d’un gonflement confidérable de la ma- tiere, & d’un fouffle très-violent par le petit trou du balon ; fi vous n'êtes pas aflez exercé dans le manuel chimique pour favoir defappareiller dans un inftant , n’héfitez point à cafler le cou de vo- tre cornue: car fans cela vous vous expofez à pet- dre tous vos vaifleaux & vos produits , & peut-être à être bleflé confidérablement. Nous remarquerons au fujet de ce procédé ; pre- mierement , qu'il eft plus commode &c plus sûr dé faire le mêlange en verfant l’acide fur l’efprit-de-vin, qu'en verfant lefprit-de-vin fur l’acide, quoique la dernière maniere ne manque pas de partifans : mais M. Rouelle, M: Pott, & l’expérience font pour là premiere, Secondement, que, même en procédant au mêlange par la voie que nous adoptons, l’union de ces deux liqueurs s’opere avec bruit, chaleur, & agitation intérieure & violente du mêlange ; qu’on ne doit point cependant appeller eférvefcence avet. Hoffman, qui traite de ce phénomene dans une dif. fertation particuliere fut quelques efpeces rares d’ef. fervefcence. Fr. Hoffmanni, obf. phyfico-chim, fele&. Lib. IT, obf. jx. Voyez EFFERVESCENCE. Troifieme ment, la dofe refpettive des deux ingrédiens & leur dofe ab{olue, font néceflaires pour le fuccès de lo pération, ou au momns pour le plus grand fuccès, Si on employoit plus d’efprit-de-vin que d'acide vitrio: lique , non-feulement la quantité excédente d’efprit- de-vin feroit à pure perte , mais même elle retarde roit la produétion de l’éther | & en diminueroit la quantité : on pourroit tenter avec plus de raifon d'augmenter la proportion de l'acide vitrioliqué, Quant à la dofe abfolue des deux ingrédiens, on n'obtient rien fi elle eft la moitié moindre que celle que nous avons prefcrite, c’eft-à-dire f on n’em- loye qu'une livre de chaque liqueu#; & l’on a fort peu d’éther , fi lonopere fur une livre & demie de chacune. À la dofe de deux livres, au contraire, on obtient jufqu'à huit & neuf onces d'éher par uné feule diftillation, quantité prodigieufe, en compa- raïfon de celle qu’on obtenoit par l’ancien procédé ; qui exigeoit plufieurs cohobations. Quatriéèmement, le manuel effentiel, le véritable tout de main, le {e- cret de cette opération, confifte dans l’application foudaine du plus haut degré dé feu ; quoiqu'il foit éctit dans tous les livres Se traitent de cetté matié- re, qu'il faut adminiftrer le feu le plus doux , le plus infenfblement graduée, c’eft-à-dire prendre les pré- cautions lés plus sûres &e les plus dirédes pout man. que: fon objet. Il eft clair à-préfent par le fuccès du nouveau procédé, que l’acide vitriolique n’agit efi- cacement fur l’efptit-de-vin que lorfqu’il eft animé pat le plus grand degré de chaleur dont il eft fnfcep- tiblie dans ce mélange , & qu’une chaleur douce de- gagre & enleve l’efprit-de-vin auffi imaltéré qu'il ef po fible. Or lPérher n'eft abfolument autre chole que le principe huileuxide l’efprit-de-vin féparé des au- tros principes de la mixtion de cette fubftance, par ane ation dé l’acide vitriolique inconnue juiqu’à p''éfent ; mais vrafiemblablement dépendante de la grande affinité de cet acide avec l’eau, qui eft un principe très-connu de la mixtion ou de la compofi- ion de lefprit-de-vin. Cette aétion de l’acide pour- 10it bien aufli n'être que méchanique, c’eft-à-dire 1e borner à porter dans l’elbrit-de- vin une chaleur Îbien fupérieure à celle dont fa volatilité naturelle le irend fufceptible, & le difpofer ainfi à éprouver une diachrèfe pure & fimple, dont la chaleur feroit en ce cas l'unique & véritable agent, & à laquelle Pa- cide ne concourroit que comme bain ou faux inter- mede. Voyez ceque nous difons des bains chimiques à l’article FEU. Voyez auffi INTERMEDE. Toutes les propriétés de l’éher démontrent , à la rigueur , que cètte fubftance n’eft qu’une huile très- fubtile, comme nous l’avons déjà avancé au com- mencement de cet article ; & l’on ne conçoit point comment des chimiftes habiles ont pû fe figurer qu’- elle étoit formée par la combinaïfon de l'acide vi- triohique &c de l’efprit-de-vin. La feule propriete chimique particulieré que nous connoïfions à l’éther , eft celle de difloudfe facile- ment, & par le fecours d’uñe legere chaleur, certai- nes fubftances réfineufes, telles que la gomme éopale & le fuccm, qui font peu folubles à cé degré de cha- leur par les huiles eflentielles connues : mais on voit bien qüe ceci ne fauroit être regardé comme une propriété eflentielle où diflinétive, Tous les medecins qui ont connu lécher, lui ont accordé une qualité véritablement fédative, anti- fpafmodique ; ils l'ont recommandé fur-tout dans les coliques venteufes, dans les hoquéts opiniâtres, dans les mouvemens convulfifs des enfans, dans’ les accès des vapeurshyftériques, Ge. Il eft dit dans le recueil périodique d’obfervations de Medecine, Fév. 1755, qu'un remede nouveau ufité en Angleterre contre le mal à la tête, c'eft de prendre quelques draägmes d’é- cher de Frobenius dans le creux de la main, & de Vappliquer au front du malade. Quelques dragmes d’éther , c’eft comme le boïffeau de pilules de Crif- pin. Une perfonne qui fe connoïît mieux en dofes de remedes a appliqué , dans des yiolens maux à la tête, fur les tempes du malade, quelques brins de coton imbibés de fept à huit gouttes d’eérher ; & elle aflüre qu'au bout de quelques minutes la douleur a été dif fipée comme par enchañtement. Pendant cette ap- plication le malade éprouve fur la partie un fenti- ment de chaleur brûlante, auquel fuccede une fra- cheur très-agréable dès l’inftant que le coton eft en- levé. Au refte le charlatan de Londres qui difipoit, ou du moins qui traitoit les douleurs de tête par une application des mains, & qui vraflemblablement a donné leu à Particle du recueil d’obfervations que nous venons de citer, nemployoit point l’érher. Je tiens dir même obfervateur , que cinq ou fix gouttes d’écher données intérieurement , avoient fuüfpendu avec la même promptitude des hoquets violens, foit qu'ils fuffent furvenus peu de tems après le repas, foït au contraire l’eftomac étant vuide. La dofe ordinaire de Péfher pour lufage intérieur, eft de fépt à huit gouttes, On en imbibe un morceau de fucre, quon mange fur le champ, ‘ou qu’on fait fondre dans une liqueur appropriée & tiede, Quand ET H 53 on le prend de cette derniere façon , on peut ën aug- menter un peu la dofe, parce qu'il s’en évapore une partie pendant la diflolution du fucte. La bafe de la liqueur minérale anodÿné d'Hofr- man , n'eft autre chofe que de l’efprit-de-vin ém- preint d’une legere odeur éthérée » retiré paï une chaleur très-douce d’un mêlange de fix parties d’ef- prit-de=vin & une partie d'acide vitriolique. C’eft proprerment un éher manqué. Voyez LIQUEUR Mi- NÉRALIE ANODYNE D'HOFFMAN. Lexemen ultérieur de la fhatiere qui téfte dans la cornue après la produétion de l’éher, appartient à l'analÿyfe de Pefprit-de- vin; du Moins l'article de PEfprit-de-vin eft -il celui de ce Di&ionnaire , Où il nous paroît le plus convenable de le placer, Voyez ESPRIT-DE-VIN 4% mot VIN. ÊTHER INITREUX , (Chin. & Mar. med.) on peut donner te nom à une huile extrèmement fubtile, retirée de l’efprit - de - vin par l’intérmede de l'acide mitreux, pourvi qu'on fe fouvienne que #irreux ne fignifie ici abfolument que /£paré par l'acide nitreux. Il vaudroit peut-être mieux l’appellér érher de Navier. L'éther nirreux & l’éther de Frobenius ne font pro- prement qu'iine feulé 8& même liqueur ; la feule dif- férence qui Les diftingue, c’eft quélque variété dans l'odeur : celle de l’éher mirreux et moins douce , moins agréable. La découverte de lécher ritreux qui éft très-mo- derne , eft dûüe: au hafatd. Voici comment s’en expli- que (dans /es nrém. de l'acad. royale des Sc, an. 1742.) M. Navier meclecin de Chaalons-fur-Märne, qui l’a ObIErVÉ le premier: « Comme je compolfois une » teinture antr-{ pafmodique , où il entroit de l’efprit- » de-vin & de l’éfprit de nitre, le bouchôn de la bou- » téille où l’on avoit fait ce mêlange fauta, & il fe » répandit une forte odeur d’érher ». C’eft de l’ééhèr de Frobenius que l’auteur entend parler. M. Navier foupçonna avec juite raifon fur cet indice, que lé mélange de l’acide nitreux & de l’ef prit-de-vin devoit produire fans le fecouts de la dif- tillation & par une fimple digeftion, une liqueur {ermn- blablé à l’éfher de Frobeñius. Il mêla donc parties égales de ces deux liqueurs eñ mefureé & non en poids, dans une bouteille, qu'il boticha enfuite exac- tement, & dont il aflujettit le bouchon avec une fi- celle; & au bout de nerif jours il trouva une belle huilé éthérée très-claire &c prefque blanche, qui fur- nageoit le refte de fa liqueur, & qui faifoit environ un fixiemé du mélange. Il faut que M. Naviër âit employé dans cette exe périence un efprit de nitre beaucoup plus foible que l'efprit de nitre ordinaire non fuiant des diffillateurs de Paris, Où qu'il nait pas obfervé le tèms exa@ de la produétion de léfher, 8c qu'il ne Pait appercü qué lonp-téms après qu'il a été féparé, comme on le ya voir dañs un moment. En répétant l'expérience de M. Nävier, & en va- riant la propottion des deux matieres employées, on 4 déconvért qu'on obtenoït de l’éther par ce procédé, lors même qu'on employoit dix 8 doüze parties d’ef- prit-de-vin pour une d'acide nitréux foible ; & que l'aétion mutuelle de ces déux liqueurs n’avoit befoin d'être excitée que par la plus foible chaleur ; qu’elle avoit lieu au degré inférieur à celui de lacongéllation de l’eau. Fr Le mêlange de l'acide nitreux & de l’efprit-de- vin éft, tout étant d’ailleurs égal, éncoré plus, tu- multueux, plus violent, plus dangereux que celui de lacide vitriolique & de l’efprit-de-vin ;; phéno- mene qui peut préfenter une fingularité à ceux qui croyent que l'acide vitriolique eft ce qu’ils appel lent plus fort que l'acide nifreux, mais qui ne paroi tra qu'un fait tout fimple aux chimiftes qui fauront que nul agent chimique ne poflede uné force ab{o- 54 E TD H lue. Le premier mélange s'exécute d'autant plus fa- : cilement & plus sûrement , qu'on employe moins = ni e” A à A : : d’efprit de nitre fur la même quantité d’efprit-de-vin , -Êc un acide moins concentré: on a foin donc lorf- | qu'on n'a en vüe que lésher même, d’obferver ces : circonftances. On prend, par exemple, fix parties defprit-de-vin ordinaire; on le met dans une très- grande bouteille, eu égard à la quantité de mêlange qu’on a deflein d’y renfermer (il n’eft point mal de prendre une bouteille de cinq ou fix pintes pour un mêlange d’une livre & demie); on verfe deflus peu-à- peu une partie d'efprit de nitre foible non fumant ; on ferme la bouteille avec un bon bouchon de liégefice- lé avec foin, & on la place dans un lieu frais. Au bout de vingt-quatre ou trente-fix heures, le mélange qui jufqu'alors n'aura éprouvé aucune agitation inté- rieure fenfble, fubit tout d’un-coup une véritable éffervefcence, c’eft-à-dire un mouvement violent ‘dans fes parties, avec éruétation d'air, élévation de vapeurs, Ge. & elle eft accompagnée de la produc- tion de l’ésher, qu’on voit, l’effervefcence étant cef- fée, furnager le refte du mélange, & qu'on fépare par les moyens indiqués pour l’ézher de Frobenius. Cette effervefcence eft d’autant plus prompte & d'autant plus violente, qu'on employe de lefprit de nitre plus concentré, & de l’efprit-de-vin plus rectiñé ; que la quantité de Pefprit de nitre appro- che davantage de celle de l’efprit-de-vin ; & que ces réactifs {ont animés par un plus haut degré de cha- ieur. M. Rouelle a éprouvé par un grand nombre de tentatives, que la plus haute proportion à la- quelle on peut porter dans le mélange lefprit de nitre très-fumant, fans que l’effervefcence eût lieu dans le tems même du mêlange, étoit celle de deux parties d'acide contre trois d’efprit-de-vin ; & cela en fe rendant maitre , autant qu'il étoit poffble, de la troifieme circonftance du degré de chaleur, en mettant d'avance à la glace l’efprit-de-vin & l’a- cide, & les mêlant dans un vaifleau couvert de gla- ce. Ce vaifleau étoit un matras d’un verre très- -épais qu'on avoit cuiraflé, en appliquant deffus al- ternativement plufeurs couches de parchemin ou de vefñlies collées 8 bien tendues, & de ficelle gou- ‘dronnée & dévidée ferme, & près à près; on bou- -choit éxaétement ce matras, & on l’enterroit fous da glace. Malgré ces précautions, quelques heures après le mêlange fait, il eft arrivé plus d’une fois que le vaifleau a fauté en éclats ayec une explofion auf violente & un bruit auf fort que celui de la plus groffe piece d'artillerie. _ Tous les chimiftes qui ont préparé l’efprit de ni- tre dulcifié, foit par la digeftion feule, foit par la digeftion &c la difüllation, ont fait de l’érher ztreux fans le favoir ; mais ils l'ont tous diffipé ou entiere- ment, ou du moins pour la plus grande partie, com- me nous le déduirons ailleurs des faits que nous ve- nons de.rapporter ici, & des méthodes ordinaires de procéder à la préparation de l’efprit de nitre dul- ciñé, que nous expoferons-là, Voyez Acide nitreux à Versicle NITRE. Quoi qu'il ne foit pas clair encore que lésher r1- treux oït toùjours mêlé d’un peu d’acide, cependant comme cela ef très-poflible ,on doit, pour être plus aflüré d’avoir l’éther pur, le laver avec une eau char- gée d’alkali fxe, felon ce qui eft prefcrit dans les li- wres. Les vertus médicinales de cet éther ne font pas conftatées encore par un grand nombre d’obferva- tions ; on éft très-fondé à le regarder, en attendant, comme abfolument analogue, à cet égard, à l’ésher de Frobenius, : - M. Navier a auffi obtenu de l’éfher, en fubftituant üne diflolution de fer dans l'acide nitreux , à l’acide ritreux pur , dans une expérience d’ailleurs fembla- ET H ble par toutes fes circonftances à celle-que nous avons rapportée au commencement de cet article. Cet éther differe de celui qui eft produit par l'acide mtreux pur, en ce qu'il acquiert dans l’efpace d’en- viron trois femaines , une couleur rouge qui eft dûe à quelques particules de fer, &c. Cette derniere ex- périence, avec toutes fes circonftances & dépendan- ces, n'apprend rien; chofe très-ordinaire aux expé- riences tentées fans vüe. (4) ETHÉRÉ, adj. (Phyfique.) fe dit de ce qui appat- tient à l’éther, ou qui tient de la nature de l’éther. ÆEpaces éthéres , font ceux que l’éther occupe ; z14- fiere éthérée ; eft la matiere de l’éther, &c. (O | ETHICOPROSCOPTES, Erhicoprofcopræ, (Hifi, eccléf.) nom par lequel S. Jean Damafcene, dans {on traité des héréfies, a défigné certains feétaires qui erroient fur les matieres de Morale, & fur les chofes qu’on doit faire ou éviter , blâmant des chofes loïia: bles & bonnes en elles-mêmes, & en prefcrivant ou pratiquant d’autres mauvaifes, ou criminelles. Ce nom au refte convient moins à une feéte particulie= re, qu'à tous ceux qui alterent la faine Morale, {oit: par relâchement, foit par rigorifme. (G) ETHIOPIE, (Géog.) vafte contrée qui fait même la plus grande partie de l’Afrique, & celle qui s’a- vance davantage, tant vers l’orient que cl principalement. Les anciens reconnoïfoient deux fortes d’Ethio- piens, ceux d’Afie & ceux d'Afrique. Hérodote les diftingue en termes formels ; & voilà pourquoi dans les écrits de l'antiquité, le nom d’£shiopie eft com- mun à divers pays d’Afie & d'Afrique; voilà pour- quoi ils ont donné fi fouvent le nom d’zdiens aux Ethiopiens, &c le nom d’£Ærhiopiens aux véritables In- diens. Dans Procope , par exemple, l’Eshiopie eft ap- pellée Zzde. Voyez-en les raïfons dans lesobfervations de M. Freret. Le Chufiftan montre peut-être les premieres habis tations des Ethiopiens, pendant que l’Inde & l’Afri- que nous apprennent leurs divifions : auffi M. Huet loûtient fortement contre Bochart, que dans l’Ecri- ture l’Ærhiopie eft défignée par la verre de Chus. Voyez-en les preuves dans fon hiftoire du paradis | terreftre. Les Grecs s'embarrafflant peu de la fcience géo- graphique, nommerent Ærhiopiens tous les peuples qui avoient la peau noire ou bafanée : c’eft pour cela qu'ils appellerent les Colches Erkiopiens , & la Col- chide Erhiopie. Mais Ptolomée eft bien éloigné d’ê- tre tombé dans de pareils écarts: on lui doit au con- traire la divifion la plus exa@e &c la plus méthodique qu'il y ait de l’ancienne £rhiopie, Voyez fa géographie, lv, IV, ch. viy. vuy. & 7x. L'Erhiopie eft illuftre dans lantiquité à plufieurs égards ; & comme il ne fe trouve guere fous le ciet aucun peuple (ainfi qu'il n’y a prefque aucune gran- de maïfon) qui ne fe faffe gloire à-préfent, ou qui ne fe Toit autrefois vante d’être plus ancien que fes voi- fins, les Ethiopiens difputerent aux Esyptiens la pri- mauté de l’ancienneté, & ils étoient fondés À la pré- tendre fuivant M. l'abbé Fourmont. Voyez fa difler- tation à ce fujet dans Zes Mémoires de l'académie des Belles-Lettres, rome VIT. Nos géographes ne s'accordent point fur les pays que l’on doit nommer l’Erhiopie ; il me paroît feule- ment que l'opinion la plus reçûe, fondée ou non, donne pour bornes à PErhiopie moderne la mér rou- ge, la côte d’Ajan & le Zanguébar à lorient, le Mo- noëmupr &c la Caffrerie au midi, le Congo à l’occi- dent, la Nubie & l'Egypte au feptentrion. Voyez la Méthode géographique de l'abbé Lenglet Dufrefnoy. Malgré la prodigieufe chaleur qui regne dans cette immenfe contrée, &c malgré fa pofñtion fous la zone torride , elle eft néanmoins par-tout habitée, contre emidi EE l'opinion des anciens ; &c les plus grandes rivieres de PAfrique, le Nil & le Niger, y ont leurs fources. Poyez Les defcriptions de l'Afrique de nos Voyageurss On divife tout ce vafte pays en deux parties sé- nérales, favoir la haute & la baffle £rhiopie. La haute Ethiopie eft la partie la plus feptentrionale, & en même teims la plus orientale ; elle renferme la Nu- bie, l'Abyfinie, les Giaques ou Galles, &c les côtes d’Abex, d’Ajan, & de Zanguébar. La bafle Eshiopie s'étend le plus vers le midi & vers le couchant; elle renferme le Monoëmuei, le Monomotapa, & les grandes régions de Biafara , de Congo, &c des Caf. fres. Les Portugais ont découvert depuis environ deux fiecles & demi cette bafle Erhiopie, qui étoit prefque entierement inconnue aux anciens. Voyez J’Hifioire de la découverte des Portugais en Afrique. L’Erhiopie entiere eft entre le 23 degré de latitude feptentrionale , & le 3; de latitude méridionale, Sa longitude eftentre les degrés 33 & 85. Arzicle de M. de Chevalier DE JAUCOURT. SETHIOPIENS, f. m. plur. (PHILOSOPHIE DES) Hif?. de la Phul, Les Ethiopiens ont été les voifins des Egyptiens, & l'hiftoire de la philofophie des uns n'eftipas moins incertaine que l’hiftoire de la philo- fophie des autres. Il ne nous eft refté aucun monu- ment digne de foi fur l’état des fciences & des arts dans ces contrées. Tout ce qu’on nous raconte de Ethiopie paroît avoir été imaginé par ceux qui, ja- loux de mettre Apollonius de Tyane enparalleleavec Jelus-Chrift, ont écrit la vie du premier d’après cette vue. S1 l'on compare les vies de la plüpart des lésifla- teurs , on les trouvera calquées à - peu - près fur un même modele ; 8 une regle de critique qui feroit aflez sûre, ce feroit d’examiner fcrupuleufement ce qu’elles auroient chacune de particulier, avant que de l’admettre comme vrai, & de rejetter comme faux tout ce qu’on y remarqueroit de commun. Il y a une forte union que ce qu’on attribue de merveil- leux à tant de perfonnages différens, n’eft vrai d’au- cun. Les Erhiopiens {e prétendoient plus anciens que les Egyptiens, parce que leur contrée avoit été plus fortement frappée des rayons du Soleil qui donne la vie à tous les êtres. pe: . D'où l’on voit que ces peuples n’étoient pas éloi- gnés de regarder les animaux comme des développe- mens de la terre mife en fermentation par la chaleur du Soleil, & de conjetturer en conféquence que les efpeces avoient fubi une infinité de transforma- tions diverfes, avant que de parvenir fous la forme où nous les voyons ; que dans leur premiere OrIg1- ne les animaux naquirent ifolés ; qu'ils purent être enfuite mâles tout-à-la-fois & femelles, comme on en voit encore quelques-uns; & que la féparation des fexes n’eft peut-être qu’un accident , &c la nécef- fité de l’accouplement qu'une voie de générationana- logue à notre, organifation actuelle. Voyez l’article Dreu. - Quelles qu'ayent été les prétentions des Erkio- piens fur leur origine , on ne peut les regarder que comme une colonie d'Egyptiens; ils ont eu, comme ceux-c1, l’ufage de la circoncifion & des embaume- mens , les mêmes vêtements, les mêmes coûtumes ci- viles & religieufes ; les mêmes dieux, Hammon, Pan, Hercule, Ifis; les mêmes formes d’idoles, le même Miéroglyphe, les mêmes principes, la diftin- €tion du bien & du mal moral, limmortalité de l’ame êt les métempfycofes , le même clergé, le fceptre en forme de foc, &c. en un mot files Ærhiopiens n’ont pas reçu leur fagefle des Egyptiens, il faut qu’ils leur ayent tranfmus la leur ; ce qui eft fans aucune vraif- femblance: car la philofophie des Egyptiens n’a point un ar d'emprunt; elle tient à des circonftances inal- E T H 55 térables,c’eft une produétion du fol ; elle eft liée avec les phénomenes du climat par une infinité de rap- ports. Ce feroit en Ethiopie , proles fîne matre creata : on en rencontre les caufes en Egypte ; & fi nous étions mieux inftruits, nous verrions toûjours que tout ce qui eft eft comme il doit être’, &c qu'il n’y a rien d'indépendant, ni dans les exträvagances des hommes, ni dans leurs vertus. Les Ethiopiens s’avouoient autant inférieurs aux Indiens, qu'ils fe prétendoient fupérieurs aux Egyp- tiens; ce qui me prouve , contre le fentiment de quelques auteurs, qu'ils devoient tout à ceux - ci & rien aux autres. Leurs Gymnofophiftes , car ils en ont eu , habitoient une petite colline voifine du Nil ; 1ls étoient habillés dans toutes les faifons a-peu-près comme les Athéniens au printems. Il y avoit peu d’arhbres dans leur contrée ; on y remarquoit {eule- ment un petit bois où ils s’afflembloient pour déli- bérer fur le bonheur général de l'Ethiopie. Ils re- gardoient le Nil comme le plüs puiffant des dieux + c’étoit, felon eux, une divinité serre 6 eau. Ils na voient point d'habitations ; ils vivoient fous le ciel: leur autorité étoit grande; c’étoit à eux qu’on s’a- drefloit pour lexpiation des crimes. Ils traitoient les homicides avec la derniere févérité. Ils avoient un ancien pour chef. Ils fe formoient des difciples, &c. On attribue aux Ærhiopiens l'invention de lAftro- nomie & de l’Aftrolosie; & il eft certain que la féré- nité continuelle de leur ciel, la tranquillité de leur vie, & la température toijours égale de leur climat, ont dü les porter naturellement à ce genre d’études. Les phafes différentes de la Lune font , à ce qu’on dit, les premiers phénomenes céleftes dont ils furent frappés ; & en effet les inconftances de cet aftre me femblent plus propres à incliner les hommes à la méditation, que le fpeétacle conftant du Soleil, toûù- jours le même fous un ciel toüjours férain. Quoique nous ayons Pexpérience journaliere de la viciflitude des êtres qui nous environnent, il femble que nous nous attendions à les trouver conftamment tels que nous les avons vûüs une premiere fois ; & quand le * contraire eft arrivé, nous le remarquons avec un mouvement de furprife: or lobfervation & l’éton- nement font les premiers pas de l’efprit vers la re- cherche des caules. Les Ærhiopiens rencontrerent celle des phafes de la Lune; ils affürerent que cet aftre ne brille que d’une lumiere empruntée. Les ré- volutions & même les irrégularités des autres corps céleftes, ne leur échapperent pas; ils formerent des conjectures fur la nature de ces êtres; ils en firent des caufes phyfiques générales. Ils leur attribuerent différens effets, & ce fut ainfi que l’Aftrologie naquit parmi eux de la connoiffance aftronomique. Ceux qui ont écrit de PEtmiopie prétendent que ces lumieres & ces préjugés pañlerent de cette con- trée dans l'Egypte , &c qu'ils ne tarderent pas à péné- trer dans la Lybie : quoi qu'il en foit, le peuple par qui les Lybiens furent inftruits, ne peut être que de l’ancienneté la plus reculée. Atlas étoit de Lybie. L’exiftence de cet aftronome fe perd dans la nuit des tems: les uns le font contemporain de Moyfe : d’au- tres le confondent avec Enoch : fi l’on fuit un troi- fieme fentiment , qui explique fort bien la fable du ciel porte fur les épaules d’Atlas , ce perfonnage n’en fera que plus vieux encore ; car ces derniers en font une montagne. La philofophie morale des Egyptiens fe réduifoit à quelques points, qu'ils enveloppoient des voiles de l'énigme &c du fymbole : « Il faut, difoient -ils, » adorer les dieux, ne faire de mal à perfonne, s’e- » xercer à la fermeté, & méprifer la mort: la vérité » n’a rien de commun ni avec la terreur des arts ma- » giques, mi avec l'appareil impofant des miracles » ê du prodige: la tempérance eff la bafe de la ver- 56 ETH » tu: l'excès dépouille homme de fa dignité: ii n’y » a que les biens acquis avec peine dont on jouifle s avec plaifr : le fafte & l’orgueil font des marques # de petitefle: il n’y a que vanité dans les vifons & » dans les fonges, 6°c, ». Nous ne pouvons difimuler que le fophifte , qui fait honneur de cette doëlrine aux Erhiopiens , ne pa- roïffe s'être propofé fecrettement de rabaïffer un peu la vanité puérile de fes concitoyensquirenfermoient dans leur petite contrée toute la fagefle de l'Univers. Au refte en faifant des Erhiopiens Vobjet de fes éloges, 11 avoit très-bien choifi. Dès le tems d’Ho- mere, ces peuples étoient connus & refpettés des Grecs , pour l'innocence & la fimplicité de leurs mœurs. Les dieux même, felon leur poëte, fe plai- {oient à demeurer au milieu d'eux. Cedc.. . per auv- HOVAS CITIOTAES à à à « ÉCHu sue dE0b d° dJAt DAVTEG nr. Jupiter s'en étoit allé chez les peuples innocens de l'E- thiopie, & avec lui tous les dieux. Iliad. ETHIOPIQUE, adj. (Chronol.) Année éthiopique, eft une année folaire compofée de douze mois de trente jours, & de cinq jours ajoûtés à la fin. Voyez l’article AN. ETHIQUE,, £. f. eft la fcience des mœurs. Ce mot qui n’eft plus ufité , ou dont on ne fe fert que très- rarement pour défigner certains ouvrages, comme VErhique de Spinofa, &c. vient du grec #0, mœurs. Voyez MORALE, DROIT NATUREL, Gt. | ETHMOIDALE, adjett. e7 Anatomie; eft le nom d’une des futures du crane humain. Voyez CRANE. Les futures ordinaires font celles qui féparent les os du crane d’avec les os des joues : 1l yenaquatre, la tranfverfe , l’ethmoïdale , la fphéroïde, & la zygo- matique. Voyez SUTURE. … L’echmotdale tire {on nom de ce quelle regne au- tour de l’os-ethmoide, Foyez ETHMOIDE. (L) ETHMOIDE, adj. pris fubft. (Offéolog.) os fitué à la partie antérieure de [a bafe du crane, & qui fe trouve comme enchâflé dans une échancrure parti- culiere du coronal : il eft prefque tout placé dans les narines , dont il forme la cloifon. Son nom d'erhmoide, c’elt-à-dire cribleux, lui a été donné parcequ’en le regardant du côté du crane, ïl paroît percé d’une infinité de trous, comme un crible, [left joint avec le coronal, l’os fphéroïde, les os du fñez, les os maxillaires, les os unguis, les os du pa- las, & le vomer. Voyez tous ces mors. On a beaucoup de peine à féparer l’os erhmoïde fans le brifer ; cependant l’on y doit réuflir en sy prenant avec adrefle , & fur-tout en choififfant une de ces têtes feches qui ont les engrenures lâches. Quoique fa figure foit irréguliere , on peut dire féanmoins qu'elle approche plus de la cuboïde que ‘de toute autre ; mas il vaut mieux le confidérer fim- plement dans fa face externe & dans fa face interne. Etant examiné dans fa face externe, il préfente trois parties; ne fupérieure, une moyenne, & une -mférieure. La partie fupérieure , qu eft la plus petite & 1a plus connue, pale derriere l’épine frontale, s’éleve dans la cavité du crane, & porte le nom de cri/f gallr, crête de coq. La partie moyenne occupe toute la portion des narines qui eft entre les deux orbites ; elle eft compolée d’un grand nombre de lames offeu- fes, fines & très-caflantes, qui forment par leur dif- pofition plufieurs cellules & anfraétuofités irrégulie- res, La partie inférieure comprend toute la bafe of Âeufe qui fépare la cavité des narines. _ Ilfe trouve du côté de la cloifon , une raînure où les cellules de los echmoide s'ouvrent pour commu- niquer dans le nez; car dans tout le reffe de la por- tion cellulaire, les cellules font fermées pour la plà- part par les os voifins auxquels cette portion fe trou- ve jointe, En effet , elles font fermées en-hant par le coronal, & les finus frontaux s’abouchent par-de+ vant avec ces cellules, Dans la partie poftérieure &t dans la partie inférieure , ces cellules font fermées par Pos fphénoïde & par les maxillaires. Enfin dans la partie externe du côté de l'orbite, ces cellules font fermées par l’os unguis & par une lame fort égale, dont les anciens faifoient un os particulier qu'ils ont nommé os planum. On confidere dans la face interne de l’os eshmoïde une lame nommée cribleufe ; les trous qui sy trou- vent, retiennent le nom des nerfs olfaéifs qui y paf- fent. Cette lame eft traverfée fuivant fa longueur par l’éminence nommée créte de cog, dont j'ai parlé ci-deflus, Ingrafñias, né en Sicile en 1510, mort en 1580; favant anatomifte , à qui l’Oftéologie doit beaucoup de bonnes chofes, eft le premier qui aït donné une defcription exate de l’eshmoide, dans fes Commentai- res fur Le livre des os, de Galien. Son ouvrage fut im- primé à Palerme en 1603, ir-fol. & eft devenu trèss rare. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. ETHNARQUE, fm. (Hif. anc.) eft le gouvet-: neur d’une nation. Voyez TÉTRARQUE. Ce mot eft formé du grec t9ve, mation, &c apy commandement. Il y a plufeurs médailles d’'Hérode I, {urnommé le Grand, fur un côté defquelles on trouve HPo4or, & de l’autre côté EENAPKOT., c’eft-à-dire Hérode lechnarque. Nous lifons qu'après la bataille de Phi- lippe, Antoine paffant par la Syrie, établit Hérode & Phafaël fon frere, tétrarques, &en cette qualité leur confia l’adminiftration des affaires de la Judée, Jof. ant, Liv, XIV. ch. xx. Hérode eut donc le gouvernement de cette pro- vince avant que les Parthes entraffent en Syrie, ow avant Pinvañon d’Antigone, quiarriva environ cinq ou fix ans après qu'Hérode fut fait commandant en Galilée. Jof. Z XF. ch.xxjv,xxv, Conféqiiemment Hérode étoit alors vraimentefhnarque, car onnepou- voit pas le nommer autrement ; de façon qu'il faut que ce foit dans cet efpace de tems que les médailles qui lui donnent ce titre, ayent été frappées, Ces mé- dailles font une confirmation de ce que nous lifons dans l'hifoire , que ce prince fut chargé de ce gou- vernement avant d’être élevé à la dignité de roz. Jofephe appelle Hérode sésrargue au lieu d’eshnarque mais ces deux termes approchent fi fort l’un de l’au tre, qu'il étoit bien facile de les confondre, Voyez TÉTRARQUE. * Quoiqu'Hérode le Grand aït cedé de bonne vo- lonté à Archélaus tonte la Judée, Samarie & lIdn- mée, cependantJofephe nous dit qu'il fut feulappellé ethnarque. Dittionn. de Trév. & Chambers. ( G) ETHNOPHRONES , adj. mafc. pl. (Ai. écelée) hérétiques qui s’éleverent dans Le vi. fiecle ) & qui. prétendirent concilier la profeffion du Chriftianifme avec la pratique des cérémonies {uperftitieufes du Pagamifme , telles que l’Afrologie Moore, les forts , les auguress, & les autres efpeces de divina= tion, Ils pratiquotent auffi toutes les expiations des Gentils, célébroient toutes leurs fêtes, & obfer- voient religieufement tous leurs jours , leurs lunes, leurs tems, & leurs fafons ; de.là leur vint le nom d'Ethnophrones , compoié du grec éüvos, nation, gen- til, payen; & de œpwv, opinion, fentiment: c’eft-à. dire féclaires qui confervoient les fentimens des Gen- tils ou Chrétiens paganifans. S. Jean Damafc. here. 2. 94. (G) | ETHOPÉE, 1. £. (Rhéror.) ethopæia où ethopia; qu'on appelle auffi éhologie ; figure de Rhétorique. C’eft une defcription , un portrait des mœurs , paf fions, génie, tempérament, 6%. de quelque perfon- ne. Voyez HYPOTIPOSE. Ce ERNTTAL Ce mot eft formé dugrec #00, mœurs, cokrumes; & de ruë, facto, fingo, defcribo. Quintilien, Liv. LX. ch. ij. appellé cette figute #miratio morum alienorum : nous la nommons portrait ou carailere. Tel eft ce beau paflage où Sallufte fait le portrait de Catilina : fais magna vi & animi & corporis , [ed ingenio malo, pravoque , & le refte, qu'on peut voir dans cet hiftorien. Nous en citerons ici deux autres également admirables. L’un eft le portrait de Crom- vel, tracé par M. Bofluet dans fon oraifon funebre de la reine d'Angleterre. & Un homme, dit-il, s’eft ‘y trouvé d’une profondeur d’efprit incroyable ; hi- » pocrite raffiné autant qu'habile politique, capable » de tout entreprendre & de tout cacher : également » actif & infatigable dans la guerre & dans la paix, » qui ne laiffoit rien à la fortune de ce qu'il pouvoit » lui Ôter par confeil & par prévoyance ; mais au » refte fi vigilant & fi prêt à tout, qu'il n’a jamais » marquée les occafons qu'elle lui a préfentées : en- » fin un de ces efprits remuans & audacieux, qui » femblent être nés pour changer le monde ». L'autre eft la peinture que Sarrafin a faite de ce Waftein, fi fameux dans le dernier fiecle. « Albert » Walftein, dit-il, eut lefprit grand & hardi, mais » inquiet & ennemi du repos ; le corps vigoureux & » haut, le vifage plus majeftueux qw’agréable. IL fut » naturellement fort{obre, nedormant prefquepoint, » travaillant toùjours ; furmontant les incommodités » de la goutte & de l’âge, par la tempérance & par » l'exercice ; fupportant aifément la faim , fuyant les » délices, parlant peu & penfant beaucoup ; écri- y» vant [lui-même toutes les affaires ; vaillant & judi- » cieux à la guerre, admirable à lever &c à faire fub- » fifter les armées ; févere à faire punir les foldats, # prodigue à les récompenfer, pourtant avec choix » & deffein ; toûjours ferme contre le malheur ; civil » dans le befoin, aïlleurs fier & orgueilleux; ambi- » tieux fans mefure ; envieux de la gloire d’autrui, » jaloux de la fienne; implacable dans la haine, cruel >» dans la vengeance ; prompt dans la colere; ami de » la magnificence, de Poftentation & de la nouveau- » té ; extravagant en apparence, mais ne faifant rien 5; fans deffein , & ne manquant jamais du prétexte du # bien public, quoiqu'il rapportât tout à Paccroiffe- » mént de fa fortune ; méprifant la religion, qu'il » failoit fervir à fa politique; artificieux au poffible, » & principalement à paroître defintérefé : au refte » très-curieux & très-clairvoyant dans les deffeins » des autres; très-avilé à conduire les fiens, fur-tout # adroit à Les cacher ; & d'autant plus impénétrable, » qu'il affeétoit en public la candeur êc la fincérité, 5 8&c blâmoit en autrui la diffimulation, dont 1l fe fer- » voit en toutes chofes ». On divife léshopée en profographie , & éthopée proprement dite. La premiere eft une defcription du corps , de la contenance, de la figure, de l’ajufte- ment, &c.. L'autre eft le portrait de l’efprit & du cœur. Celui de Walftein, que nous venons de citer, réunit toutes ces parties. (G) ETIENNE , (SAINT-) Géog. mod. ville du Forez en France : elle eft fituée tur le ruiffeau de Furens. Long. DENAIN TES ETIENNE D'AGEN, (Sainr-) Géog: mod, ville de l’Agénois dans la Guienne, en France. ÉTIENNE D'ARGENTON, ( Saint.) Géogr. mod. ville du Berry en France : elle appartient à l’éle&tion de la Chatre. ETIENNE DE LAUZUN, (Suinr-) Géog. mod, ville de l’Agénois dans la Guienne, en France. ETINCELANT , cdj. ex termes de Blafon, fe dit des charbons dont il fort des étincelles. On appelle écu étincelant , celui qui eft femé d’étincelles, Bellegarde des Marches en Savoie, d’où eft forti le grand chancelier de$avoie, Janus de Bellegarde; Tome VI, E TI s7 d’azur à la fpheté de feu en fafce, courbée d’un an- gle du chef à l’autre; rayonnante & érincelante vers la pointe de l’écu d’or au chef de même ; chargé d’un aigle de fable à deux têtes. * ETINCELLES, £. £. (Phy.) molécules enflam- mées & d’une groffeur fenfble, qui fe détachent d’un corps qui brûle, & qui s’en élancent au loin. Il fe prend au fimple & au figuré ; & l’on dit, ce corps efe étincelant , & i/ n’a pas une étincelle de génie. | ETINCELLEMENT des étoiles fixes, La plüpart des Phyfciens attribuent aux vapeurs de l’'atmofphere cet ésincellement ou tremblotement que lon remarque dans la lumiere des étoiles fixes. Il neft en effet per- fonne qui regardant Phorifon par-deflus une vafte campagne dans un jour fort chaud, ne voye tous les objetscommeen vibration: la même apparence s’ob- ferve au-deffus d’un poële.Cet airtremblotant détour- nant fans cefle les rayons de lumiere , nous fait pa- roître de femblables vibrations dans la lumiere des étoiles. Quand on les regarde avec une lunette, alors ces rayons moins troublés & plus raffemblés , arri- vent à notre œil toüjours à-peu-près dans la même quantité, & l’érincellement difparoit. Cet etincellement n’a lieu que lorfque la lumiere eft fort vive ; on l’obferve quelquefois un peu dans Mercure & dans Vénus, & on le remarque dans le Soleil, vù même à-travers une lunette ou un verre enfumé, | En Arabie, fous le tropique du cancer, & à Ban- der-Abañ , port fameux du golfe perfique, où le ciel eft très-ferein pendant prefque toute l’année, on ne voit point d’éxncellement dans les étoiles; ce n’eft qu’au milieu de l’hyver qu’on en apperçoit tant- foit-peu. Dans le Pérou, où il ne pleut prefque ja- mais, tout le long de la côte, depuis le golfe de Guayaquil jufqu'à Lima , l’érincellement des étoiles éft bien moins fenfble que dans nos climats. Voyez SCINTILLATION 6 ETOILE. Hif?, acad. 1743. (0) _ ETINDROS, ( Hifloire nat.) pierre qu’Albert le Grand dit être femblable à du cryftal, & dont il pré- tend qu’il tombe continuellement des gouttes d’eau, Boëtius de Boot, de lapid, & gemm. ETIOLEMENT, {. m. (Bor.) altération qui fur- vient aux plantes qu’on éleve dans des lieux renfer- més, & qui confite en ce qu’alors elles pouflent des tiges longues, éfilées ; d’un blanc éclatant, ter- minées par de très -petites feuilles affez mal façon- nées, d'un verd-pâle. Eft-ce à un certain deoté d’hu- midité , au défaut d'air, de chaleur ou de lumiere, qu’on doit attribuer la caufe de cette altération ? M. Charles Bonnet, de Geneve, a déjà fait quelques expériences, par lefquelles ni humidité, ni le dé- faut d'air, ni le plus ou moins dé chaleur , ne lui ont paru influer fur l’ério/ement. Il foupçonne donc que cette maladie des plantes, qui eft fi remarquable, procede de la privation de la lumiere, Il n’aflüre rien cependant ; au contraire il reconnoît que ce fujet de- mande un examen plus approfondi, & un plus grand nombre d'expériences que celles qu’on a faites juf- qu'à ce jour, pour expliquer ce phénomene. Mais fur les expériences de qui pourroit-on compter plus frement que fur les fiennes, f fon tems le lui per- mettoit ? perfonne n’ignore combien la Phyfique lui eft déjà redevable. Voyez PUCERON. Aruicle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. ETIOLOGIE ox ÆTIOLOGIE, 1. f. (Medec.) de airie, caufe, & de noyce, difcours.C’eft lenomque l’on donne à la partie de la Pathologie dans laquelle on traite en général des caufes des maladies. Voyez Pa- THOLOGIE , MALADIE. On appelle auffi Erkiolo. gie, la recherche, la diflertation , l'expofition que lon fait particulierément d’une maladie diftinguée de toute autre. (4) ETIQUET, (Jwrifprud.) Dans la cofûitume de H | 38 ETI Troyes, art. 126 ; &t dans celle d'Angoumois y art. 110, eft le billet par écrit que le fergent qui fait des criées d'héritages faïfis, met ëc attache à la porte de l'auditoire du lieu; pour annoncer la confiftance de l'héritage, les noms du propriétaire & pourfuivans, & la fomme pour laquelle la faifie eff faite. Joyez ci: après ETIQUETTE. (4) | ETIQUET , voyez PRESSOIR. ETIQUETTE, f. f. (if. mod.) cérémonial écrit ou traditionnel , quiregleles devoirs extérieurs à l’é- gard des rangs , des places &c des dignités. Si la noblefle & les places n’étoient que la récom- penfe du mérite, & fi elles en fivoient tojours les degrés, on n’auroit jamais imagine d'ériquerte; le refpet pour la place fe feroit naturellement confon- du avec lerefpeét pour la perfonne. Maïs comme la nobleffe & plufieursautres diftinétions font devenues héréditaires ; qu'il eft arrivé que des enfans n’ont pas eu lé mérite de leurs peres; qu'il y a eu néceflare- ment dans la diftribution des places , des abus qu'il neft pas toûjours poflible de prévenir ou de réparer, ila été nécelfaire de ne pas laïffer les particuliers ju- ges des égards qu'ils voudroient avoir, & des devoirs qu'ils auroient à rendre : le bon ordre, la philofophie même, & par conféquent la juftice, ont obligé d’é- tablir des regles de fubordination. En effet, il feroit très-dangereux dans un état, de laifer avilir les pla- ces & les rangs, par un mépris, même fondé, pou ceux qui les occupent ; fans quoi le caprice, l’envie, lorgueil & l’injuitice, attaqueroient également les hommes les plus dignes de leurs rangs. Ainfi Pérs- gierte étant un abri contre le mépris perfonnel , eft aufli une fauve-garde pour le vrai mérite ; &, ce qui eft encore plus important, elle eft lé maintien du bon ordre. Les particuliers font maîtres de leurs fen- timens , mais non pas de leurs devoirs. Il faut convenir que , généralement parlant, la {é- vérité & les minuties de lézrqzerre ne forment pas un préjugé favorable pour un peuple qui en eft trop occupé. L'ériquette s'étend à mefure que le mérite diminue. Le defpotifme fait de l’ériguerte une forte de culte. D’un autre côté, 1l y a des peuples affez libres (les Anglois, qui fervent à genoux leur roi) , qui confervent une ériquefte fort cérémonieufe pour leur prince : il femble qu'ils veuillent Pavertir par- 1à qu'il n’eft que la repréfentation de l'autorité, C'eft à-peu-près dans le même fens qu'on appelle éiquertes certains petits écriteaux qui fe mettent fur des facs, des boîtes ou des vafes, pour diftinguer des chofes qui y font renfermées , & qui fans cela pourroient être confondues avec d’autres. Il y avoit une ériquerte chez les empereurs du bas empire, c’eft-à-dire lorfqu'il #’y avoit plus de Ro- mains, quoiqu'il y eût un gouvernement qui en por- toit le nom. | De tous tems 1l y a eu des diftinétions de rangs & de fontions dans un état ; mais l’étiquerre propre- ment dite, n’eft pas fort ancienne dans le fyftème adtuel de l'Europe : je ne crois pas qu'on en trouvât un détail en forme avantla feconde maifon de Bour- gogne. Philippe-le-Bon, aufi puiflant qu'un roi, fouffroit impatiemment de n’en pas porter le titre : ce fut peut-être ce qui lui fit former un état de maï- fon qui pût effacer celles des rois , par la magnificen- ce, lernombre des officiers, & le détail de leurs fonétions.Cette etiquette pafla dans la maïfon d’Autri- che, pat le mariage de Marie avec Maximilien. Les Mores avoient porte la galanterie &c les fêtes en Ef pagne ; lériquette y porta la morgue & l'ennui. L’ériquerte n’eft m févere ni réguliere en France. Il y a peu d’occafons d'éclat où l’on ne foit obligé de rechercher ce qui s’eft pratiqué à la cour en pa- teilles circonftances ; on l’a oublié, & l’on tâche de fe le rappeller, pour Poublier encore. Le François eftaffez porté à eftimer ce qu’il doit refpeéter, & à aimer ce qu'il eftime : il n’eft pas en lui de remplir froidement ni férieufement certains devoirs ; 1l y manque avec légéreté, ou s’en acquitte avec cha- leur, Ce qui pourroit être ailleurs une marque de fervitude, n’eft fouvent en France qu'un effet de l’in- chnation & du caraétere. Ces article eff de M. Du- CLOS, hifforiographe de France, € l’un des quarante de l’Académie françoife. | ETIQUETTE , (Jurifp.) enftyle de palais, eft un morceau de papier ou de parchemin que l’on atta- che fur les facs des caufes, inftances où procès, fur lequel on marque les noms des parties & de leurs procureurs. Celui auquel appartient lefac, met fon nom à droite , & le nom des autres procureurs à gau- . Che. Sic’eft une canfe , on meten tête de l'étiquette, caufe à plaider dans un tel tribunal ; & au-deflous des noms des parties on met le nom de avocat qui doit plaider pour la partie pour laquelle eft le: fac. Si c’eft une produ@ion de quelqu’inftance où procès, on met au haut de Périquesre le titre de la produétion, & la date du jugement en conféquence duquel elle eft faite. Au-deflus des noms des parties on met ce- luidu rapporteur ; & s’ilya plufieurs chambres dans le tribunal, on marque de quelle chambre il eft, On marque aufli l’enregiftrement des produétions, & le folo, L'origine de ce mot étiquette vient du tems que l’on rédigeoit les procédures en latin ; on écrivoit fur le fac, ef? hic quæftio inter N. . . . EN. . . . & fouvent au lieu d'écrire guæfhio tout au long, on mettoit feulement qgzæff. ce qui failoit eff hic queft, d’où les praticiens ont fait par corruption ériquerte. Voyez ci-devant ETIQUETTE, & ci-après ÉTIQUE- TER. On appelle ériquette au grand-confeil,, les placets & mémoires que l’on donne au premier Mmuflier, poux appeller les caufes à l'audience. (4) Etiquettes de témoins, voyez ci-après ETIQUETER. ETIQUETTE, serme de Péche , forte de petit cou- teau emmanché dont on fe fert pour cueillir les mou- les : ileft affez reffemblant à celui ayec lequel les marchandes de cerneaux ouvrent & préparent ce fruit. ki } ETIQUETER , (Jurijp.) en ftyle de palais , figni. fie ordinairement etre une étiquette fur un fac, ou plûütôt rertre fur un fac on fur une piece, un titre qui annonce brièvement ce qui y eff contenu. ETIQUETER DES TÉMOINS, c’eft lorfqu’on don- ne au juge, enquêteur où commiflaire qui fait l’en- quête , un brevet & mémoire parécrit ; qui con- tient Les noms des témoins, & fur quels articles des écritures ils font produits , afin qu'ils en {oient en- quis & oiis, comme il eft dit au ftyle de procéder des cours féculieres de Liege, ch. x. 6 ailleurs ; & aux ordonnances de la chambre d'Artois, chap, des plaidoyers; & du duc de Bouillon, ærricles cxxjy, & cexxi. On appelle éxquerte en Flandres, les faits & articles fur lefquels on fait entendre des témoins. Lorfqu’on a donné un écrit de dépoñitions, & qu’on declare que l’on ne fera point entendre de témoins au-dehors de ce qu’elles contiennent , on n’eft pas tenu dans ce parlement de communiquer à fa partie adverfe les éiquerres {ur lefquelles on veut faire en- tendre les témoins, fnffis au Droir Belgique, page 402. Etiqueter des témoins fignifie auf quelquefois es reprocher. (A) ETIRE., {. f. eftuninftrument dont les Corroyeurs fe fervent pour étendre leurs cuirs, pour en abattre le grain du côté de la fleur ou poil , ou bien pour les décrafler ; car cet inftrument s’employe à ces diffé. rens ufages. L’érire eft un morceau de fer ou de cui- vre plat , de fix pouces de largeur, & d'environ cinq ou fix lignes d'épaifleur ; plus large par en-bas qué par en-hant, & dont la partie la plus étroite forme une poignée par où l’ouvrier tient cet outil pour s’en fervir, On fe fert de l’ésire de cuivre pour les cuirs de couleur, de peur de les tacher. Voyez la figure, Planche du Corroyeur, & La vignette où l’on voit un ouvrier qu fe fert de Pésire. ETLINGEN , (Géog. mod.) ville de la Suabe au marquifat de Bade , en Allemagne. Long, 27. 6. lar, 48. 55. ETNA, voyez GIBEL 6 VOLCAN. *ETNET, {. m. Cr C’eft ainfi que dans les fonderies où l’on travaille le laiton, on appelle la pince à rompre le cuivre qui vient de l’arco. Foyez ARCO, | | ; ETOC, £ m. (Jurifpr.) terme d'eaux & forêts, qui fignifie fouche Parbres, Voyez l'art. 45. du titre premier de l’ordonnance de 1669. Ce terme paroît être venu par corruption de celui d’effoc, qui dans les fucceffions fignifie fozche. (4) | | *ETOFFE, f. £. (Ourdiffage.) eft un nom général qui fignifie toutes fortes d'ouvrages d’or, d'argent, de foie, laine, poil, coton ou fil, travaillés au mé- tier ; tels font les velours, les brocards, les moeres, les fatins, les taffetas, draps, ferges, &c, Voyez Draps, VELOURS, MANUFACTURE, &c. * ETorres fe dit plus particulierement de certai- nes fortes d’éroffes de laine leseres, qui fervent pour les doublures ou les robes des femmes, comme les brocatelles, les ratines, &c, * ETOFFE, serme de Chapelier: c’eft aïnfi que ces ouvriers nomment les matieres qui doivent entrer dans les chapeaux, comme les os de caftor, de lie- vre, de lapin, de chameau & d’autruche ; & les laines de moutons , d’agnelins & de brebis, On appelle #7 chapeau bien étoffé, quand il eft fuf- fifamment fourni de matiere, & que cette matiere œft bonne & bien conditionnée. * ETOFFE, ( Ruban.) s'entend de toutes les matie- res d’or & d'argent qui fervent à la fabrication des ouvrages de ce métier; ainfi on dit, donnez-moi des étoffes, pour dire, doznez-moi Les filés, clinquans , cablés , cordonnets ; &tc. qui me font néceffaires. Cha- que ouvrier a une petite boîte fermant à clé, fixée fur la grande barre de fon métier, près du pilier, dans laquelle 11 renferme fes éroffes. | *ETOrFE , (Manufaët. en foie.) Toutes les ésoffes de la manufature en foie font diftinguées en éroffes fagonnées & en étoffés unies. On appelle éroffes façonnées , celles qui ont une fi. gure dans le fond, foit déflein à fleur, foit carrelé, dc. Voyez ces articles, On appelle étoffes unies, celles qui n’ont aucune figure dans le fond, | Toutes les éoffes en général, foit faconnées, foit unies, fous quelque dénomination , genre ou efpece quelles puiffent être , ne font travaillées que de deux façons différentes ; avoir en fatin ou en taf- fetas. On appelle ésoffes travaillées en farin, celles dont Ja marche ne fait lever que la huitieme ou la cin- quieme pattie de la chaîne , pour faire le corps de l’écoffe. Voyez SATIN. On appelle éroffès travaillées en taffetas , celles dont la marche fait lever la moitié de La chaîne, & alter- nativement l’autre moitié, pour faire également le corps de Péroffe. Voyez TAFFETAS. Il y a encore une efpece d’éofe appellée férge ; mais comme ce n’eft qu'un diminutif du fatin, & que d’ailleurs cette éroffe n’eft faite que pour dou- blure d’habit , elle ne doit point être comprife fous la dénomination générale, Voyez SERGE. . Toutes les éroffes travaillées en fatin, {oït à huit fes, pour lever la huitieme partie; foit à cinq lif- ds, pour lever la cinquiemé, doivent être compo- Tome F. I s ET O so fes dèpuis $ portées (la portée de 80 fils) jufqu'à 100 portées ; mais les plus ordinaires, de 90, | Toutes les étoffes travaillées en taffetas, doivent être compofées depuis 40 portées fimples ou dou bles, jufqu’à r60, & à proportion de leur largeur. Il y a des moeres qui ont jufqu’à 90 portées doubles; ce qui vaut autant, pour la quantité des fils, que fs elles avoient 180 portées, Les éroffes ordinaires font de 40 à À portées dois bles ; ce qui vaut autant que 80 & 90 fimples, Outre les chaines qui font le corps des éroffes fa= çonnées, on y ajoûte encore d’autres petites chaines appellées poris, Ces poils font deftinés à lier la do rure dans les éroffes riches ; à faire la figure dans d'au- tres éroffes, telles que les carrelés > Cannelés, per- fiennes, doubles-fonds , ras de Sicile, &c, & dans les velours unis ou cifelés, à faire le velours. Voyez ces articles, Il y a beaucoup d’ésoffés façonnées qui n’ont point de poil, tant de celles qui font brochées foie, que de celles qui font brochées en dorure & en foie ; ce qu£ dépend de la richeffe de léroff, ou de la volonté du fabriquant, Cependant il eft de regle, lorfqw’une étoffe paile deux onces & demie , trois onces de do rure , de lui donner un poil, tant pour lier la doru re, que pour fervir à l'accompagner, On appelle accompagner la dorure, pafler une nas vette garnie de deux ou trois brins de belle trame de la couleur dé la dorure même, fous les lacs où cetto dorure doit être placée ; favoir d’une couleur au- rore pour l'or, &c d'une couleur blanche pour l’ar- gent. | Toutes les érofes , tant façonnées qu’umies, foit fatins , foit taffetas ; foit qu’elles ayent un poil, ow qu'elles n’en ayent point, doivent avoir une façon. de faire lever les lifles, à laquelle on donne le nom d’armure. Onpourroit cependant excepter les taffe- tas fans poil de cette regle, parce que la façon de faire lever les liffes dans ce genre d’érofe, eft unifor- me & égale dans toutes , de même que dans les fa- tins ; & à proprement parler ce n’eft que le poil qui. embatrafle pour l’armure , les mouvemens de la chaîne dans l’une ou l’autre éroffe ; étant fimples & afés. Voyez MANUFACTURE & ARMURE. * ETOFFE ; (Cowrell. Serrur. Taïll,) Prefque tous les ouvriers en fer & en acier donnent ce nom à des morceaux d'acier commun dont ils forment les par- ties non-tranchantes de leurs ouvrages : les parties tranchantes font faites d’un meilleur acier. Ils ont aufli une maniere économique d’employer tous les uvrages manqués, tous les bouts d’acier qui ne peu vent fervir; en un mot, toute piece d’acier rebutée pour quelque défaut : c’eft d’en faire de l’éoff. Pour cet eftet 1ls prennent une barre d’acier commun plus ou moins forte, felon la quantité de matiere de res but qu'ils ont à employer ; ils en forment unétrier, foit en louvrant à la tranche, foit en la courbant aw marteau ; 1ls rangent & renferment dans cet étrier la matiere de rebut ; ils la couvrent de ciment & de terre-glaife délayée ; ils mettent le tout au feu, & le foudent, Quand toutes ces parties détachées font bien foudées , & forment une mafle bien folide & bien uniforme , ils Pétirent en long, & en forment une barre plus ou moins forte, ae l'ouvrage au- quel 1ls la deftinent, Cette barre s’appelle de l'éroffe, ETOFFE, (ae) cerme de Potier d’érain ; C’eft une compofition faite en partie de plomb, & en partie d’étain, On lappelle auffi perire étoffe, claire étoffe, êc claire foudure, Voyez ETAIN. ETOFFE, terme de riviere, {e dit de toutes les.par- ties de boïs qui entrent dans la compofition d’un train. ETOFFÉ , adj. qui eft garni de bonne étoffe, en terme de Sellier, Un çarraile bien éroffé, eft celui dont H 1} 60 ET O les bois, les cuirs, les velours, &c. font d'’unebonne “qualité, | | Erorré. Les Corroyettrs appellent ## cuir diffé, “bien éroffé de Juif, de chair € \de fleur, -celurotle fuif ! a été mus bien épais dés deux côtés, ETOrrER, v.a@t. emverme de Sellier, fignifie erployer | - de boririe éroffe 5 AY épar oner m1 la qualité ni la quan site, dl | “ETOFFER /a érème ; C'elt, chez les Pariffiers, une “opération pat laquelleals éclairciffent la creme êr la ‘rendent moins ferme, en la remuant beaucoup avec la hache ou la fpatule. | ETOILE ; £. f. flella ,'én Affronomie , eft un nom u’on donne en général à tous les corps céleftes, “Poyez CIEL, ASTRE, 6c. On difftingue les éoiles par les phénomenes de leur mouvement, en fixes êT errantes. Les éroiles errantes {ont celles qui changent.conti- nuellement de place & de diftance les unes pat rap- port aux autres: ce font celles qu’on appelle pro- -prement planetes. Voyez PLANETE. On peut mettre auf dans la même clafle les aftres que nous appel- lons communément cometes. Voyez COMETE. Les éroiles fixes, qu’on appelle auf fimplèment étoiles dans d’ufage ordinaire, font celles qui obfer- vent perpétuellement la même diftance les unes par rappott aux autres, Voyez FIXE. j Les principaux points que les Afronomes éxami- nent par rapport aux étoiles fixes , font leut diftance, leur grandeur, leur nature, leur nombre, & leur mouvement. Ces différens objets vont faire la ma tiere de cet article. | Diffance des évoiles fixes. Les éroiles fixes font des corps extrèmement éloignés de nous; ê& fi éloignés, que nous n’avons point de diftance dans le fyitème des plänetes qui puifle leut être comparée. En effet , les obfervations aftronomiques nous ap- ‘prennent que la Terre, cette mafle qui nous paroît d’abord fi énorme, ne feroït vüe cependant du {o- leil que comme un point imperceptible, Il faut donc que le Soleil foit prodigieufement éloigné de nous ; & néanmoins cette diffance de la Terre au Soleil eft très-pétite en comparaïlon de celle des éroëles fixes. Leur diftance immenfe s’infere de ce qu’elles n’ont point de parallaxe fenfible, c’eft-à-dire de ce que le diametre de orbite de la Terre n’a point de propor- tion fenfible avec leur diftance ; mais qu’on les ap- perçoit de la même maniere dans tous les points de cette orbite : enforte que quand mêmie on regarde- æoit des éroiles fixes toute l’orbite que la Terre décrit chaque année , & dont le diametre eft double de la diftance du Soleil à la Terre , cette orbite ne paroï- trot que comme un point ; 6 l’angle qu’elle forme: : zoit à l’éroile feroïit f petit!, qu'il n’eft pas étonnant sil a échappé jufqu’ici aux recherches des plus fub- tils aftronomes, Suppofant cet angle d’une demi-mi- nute, ce qui eft beaucoup plus grand que l'angle vé- sitable, on trouveroit les ézoz/es plus loin de nous que le foleil 12000 fois, 6z au-delà. M. Huyghens détermine la diftance des étoëles par une attre méthode, c’eft-à-dire en fafant l’ouver- ture d’un télefcope fi petite, que le Soleil vü à-tra- vers, ne paroïfie pas plus gros que Sirius. Dans cet état, 1l trouve que le diametre du Soleil eft environ comme la 27664° partie de fon diametre, quand il eft vû à découvert. Si donc la diftance du Soleil étoit 27664 fois auf grande qu’elle left, on le verroit fous le même diametre que Sirius ; par conféquent fi on fuppofe que Sirius eft de même grandeur que le Soleil, on trouvera que la diftance de Sirius à la Ter- re eft à celle du Soleil, comme 27664 eft à +. On dira peut-être que ces méthodes font trop hy- pothétiques pour pouvoir en rien conclure ; maïs du moins on peut démontrer que les ésoiles font incom- ÉTO parablement plus éloignées que Saturne, puifque Sax" turne a une parallaxe , & que les éoiles n’en ont point du tout. Voyez SATURNE 6 PARALLAXE. De plus il fuit de ce que nous venons de dire unvpeu plus haut, que la difance des étoiles eflau moins ro000 fois plus grande que celle du folei}; fuppoñftion qu'on peut regarder comme inconteftable, _ Cette diflance immenfe des évoz/es fert à expliquer dans le fyftème du mouvement de la Terre autour du Soleil, pourquoi certaines étor/es ne paroïfent pas plus grandes dans un tems de l’année que dans l’au- tre; &pourquoi la diftance apparente où elles font les unés à l'égard des autres, ne fauroit varier fen- fiblement par rapport à nous : car il y a telle éroile dont la Terre s'approche efettivement dans lefpace de fix mois, de tout lé diametre de fon orbite; & par la même raifon elle s’en éloigne d’autant pendant les fix autres mois de l’année. Si nous ne pouvons donc reconnoïtre de changemens fenfbles dans la f- tuation apparente de ces éroiles, c'eft une marque qu’elles font à une diftance immenfe de la Terre, & que c’eft précifément de même que fi nous ne chan: gions point de lieu. Il en eft à-peu-près ainf, lorfque nous appércevons fur la Terre deux tours à peu de diftance l’une de l’autre, mais éloignées de notre œil de plus de dix mille pas; car f nous n’a- vançons que d’un feul pas, aflürément nous ne ver- rons pas pour cela les deux tours ni plus grandes, ni à une diftance plus confidérable lune de l’autre : il faudroit, pour qu'il y eût un changement fenfible, s’en approcher davantage. Ainfi, quoique la Terre foit un peu plus proche dans un tems de l’année de certaines éroiles , que fix mois après ou fix mois au paravant ; cependant comme ce n’eft pas mêmed’une cinq nullieme partie qu'elle én approche, il ne fau- toit y avoir de chängemens remarquables, foit dans la grandeur, foit dans diftance apparente de ces érois les, "4 Que Pon fuppofe préfentemert le Soleil à la même diftance que l’écoile fixe la plus proche de la Terre, il eft aïfé de voir que l'angle fous lequel il nous pa- toitroit , feroit au mous dix mille fois plus petit que celui fous lequel nous le voyons : or l'angle fous lez quel nous voyons le Soleil, eft d'environ 20 min tes où un demi-dégré. Il s'enfuit donc que f nous étions placés dans quelqu’éroile fixe, le Soleil nenous y paroïîtroit que fous un angle épal à la dix millieme partie de trente minutes, c’eft-à-dire d'environ dix tierces. | | On objettera peut-être que fi la diftance des éoi/es fixes étoit auf confidérable que nous venons de la fuppofer, il faudroit néceffairement que les éroiles fuflent beaucoup plus grandes que le Soleil; bien plus, qu'il s’enfuivroit qu’elles feroient au moins auf grandes que le diametre de l’orbe annuel de la Terre. C’eft une objeétion que nous allons examiner dans Particle fuvant , où nous parlerons de la gran- deur des éroiles. Grandeur € nombre des étoiles, La grandeur des étoiles fixes paroit être différente ; mais cette diffé- rence peut venir, au moins enpattie, dela différence de leurs diftances, & non d'aucune diverfité qu'il y, ait dans leurs grandeurs réelles. C’eft à caufe de cette différence qu’on divife les étoiles en fept clafles , ou en fept différentes gran- deurs. Voyez CONSTELLATION. … Les éroïles de la premiere grandeur font celles dont les diametres nous paroïffent les plus grands : après celles-là font celles de la feconde grandeur; & ainfi de fuite juiqu’à la fixieme, qui comprend les plus pe- tites éroiles qu’on puifle appercevoir fans télefcope. Toutes celles qui font au-deflus , font appellées éro- les télefcopiques. La multitude de ces éroiles eft confi- dérable, & on en découvre de nouvelles à mefure ‘aion employe de plus longues lunettes; fais il n’e- toit pas poffible aux anciens de les ranger dans les fix clafles dont nous venons de parler. Voyez TE- LESCOPIQUE: LEA pig en Ce n’eft pas qué toutes les ézoz/es de chaque claffe patoïflent-être précifément de la même grandeur ; ‘chaque claffe eff fort étendue à cet égard, & les écor- “es.de la premiere grandeur paroïflent prefque toutes différentes'en.éclat & en groffeur. 1l y a d’autres eroi- des de grandeurs intermédiaires, que les Aftronomes ne peuvent placer dans telle claffe plitôt- que dans la fuivante, & qu'ils rangent à caufe de cela entre ‘deux clafles, | 1 7 . Par exemple ,. Procyon, que Prolomée regarde ‘comme une ésor/e de la premiere grandeur, & que Tycho place dans la feconde clafle, n’eft rangé par Flamfteed ni dans l’une ñi dans l’autre ; mais allle place entre la premiere & la feconde. | Il faudroit même. à proprement parler, établir autant de clafles différentes qu'il y a d’éroiles fixes, Eneftet, ileft bien rare d’en trouver deux qui {oient précifément de la même grandeur ;.8c pour ne parler uniquement.que de celles de la premiere grandeur, voiciles principales différences qu'on y a reconnues. Sirius eft la-plus grande & la plus éclatante de toutes; enfuite on trouve qu'Aréturus furpafle en grandeur & en lumiere Aldebaran ou l'œil du Taureau, & lépi de la Vierge ; & cependant on les nomme com: munément éoiles de la premiere grandeur. Catalogue des. Étoiles de différentes grandeurs Jelon Kepler. De la preïniete grandeur, + % x, +. ‘14 Derluieconde D does Leu es 8: DÉRMOEME MES EU. nl 278; iDe la quatiieme, nn 0 Lo .2 0 à à De-larénquiemeste se MES «4 1h hs De la fixieme, . … , Des obfcures & nébuleufes, +» + » 13. , nn En tout, Me. Aù & 1302 ‘Ce nombre eft céhu des écoiles qu’on découvre à la vüûe fimple; car avec le télefcope, comme nous l'avons déjà dit, on en apperçoit beaucoup plus. Quelques auteuts affärent que le diametre appa- rent des éroiles de la premieré grandeur , eft d’une minute au moins; & comme on a déjà dit que l’or- bite de la Terre, vüe des écoiles fixes, paroît fous un angle moindre que 30 fecondes , ils ont conclu de-là que le diametre des éroiles, eft beaucoup plus grand ue celui de toute l’orbite de la Terre. De plus, di- {ent-ils, une fphere dont le demi-diametre égale feu- lement la diftance du Soleil à la Terte, eft dix mil- lions de fois plus grande que le Soleil; par confé- quent ils croyent que les éroiles fixes doivent être bien plus de dix millions de fois plus grandes que le Soleil. Il y auroit donc une différence énorme entie la groffeur du Soleil & celle des étoiles fixes ; & par conféquent on ne pourroit plus direque ce font des corps lumineux femblables, & on feroit aflez mal fondé à mettre le Soleïl au nombre des ésozles fixes, Mais on s’eft trompé : car les diametres même des plus grandes étoiles, vüs à-travers un télefcope qui rend les objets par exemple cent fois plus gros qu'ils ne {ont , ne paroïflent point du tout avoir de gran- deur fenfble, maïs ne font que des points brillans. Ainf cette prétendue grandeur des éroiles n’eft fondée que fur des obfervations fort imparfaites ; &c il eft vrai que quelques aftronomes peu habiles “en ce genre, fe {ont fort trompés dans les diame- tres apparens qu'ils ont afligné aux éroiles, L’angle fous lequel paroïffent les ésoiles fixes de la première grandeur, n’eft pas même d’une feconde ; car lorf- que la Lune rencontre l’œil du Taureau, le cœur du Lion, ou l'épi de la Vierge, l’occultation eft tel. E D O Gi L lement inflantanée , & l’éroile fi brillante à cet in- ant, qu'un obfervateur attentif ne fauroit fe troms ‘per , ni demeurer dans l'incertitude. pendant une démi-feconde de tems. Or fices éo7/es avoient par ‘exemple un diäfietre au moins dé cinq fecondes,, on les verroit s’éclipfer peu-à-peur, 8 diminter fen- fiblement de grandeur pendant près dé 10 fecondes de tems,, à raifon de 13 degrés que là Lune parcourt ‘en 24 heures, Il ÿ a autour des éroiles', {ur-toutpen- dant la nuit, une éfpece de faufle lumiere, un rayon: nement où fcintillation qui nous trompe, & qui fait , que nous les jugeons au moins cent fois plus gran- des qu'elles ne font. On fait difparoître cependant la plus grande partie de cette fauffe Inmiére, en re- gardant les éroiles par un trou fait à uné carte avec la pointe d’une aiguille, ou plütôt en y employant d’ex- cellentes Iuñettes d'approche qui en abiorbent la plus grande quaritité , püifqu'on n’y apperçoit les éroiles fixés que comme des points lumineux, 8 beaute coup plus petites qu'à la vüe fimple, On fait pour- tant que les lunettes d'approche groffiffent les ob- jets: or 1l femble que le contraire paroït à l’ésard des éroëles fixes ; ce qui prouve combien le diametre apparent de ces éroiles eft peu fenfible à notre égard. On ne fait commentle P. Ricciohi s’y eft laïflé trom- per, jufqu'à donner à Sirius un -diametre de 18 fe- condes; car fi on fuppofe qu’à la vûe fimple les deux lignes tirées des extrémités du diametre de Sirius forment dans notre œil un angle de 8 fecondes, une lunette qui augmenteroit 200 fois les objets, nous feroit par conféquent appercevoir cette éroile fous un angle de 3600 fecondes, c’eft-à-dire d’un degré: d’où il s'enfuivroit que Sirius vû à-fravers la lunette, paroîtroit d’un diametre prefque double de celui du Soleil'ou de la Lune. Or quoique les plus excellentes lunettes ne foient pas même capables d’abforber totalement cette faufle [lumiere qui envi- ronne les éroiles fixes ; il eft certain toutefois que Si- rius n’y paroit pas plus grand que la planete de Mars mefurée au micrometre ou à la vüe fimple ; mais lé diamètre de Mars dans fa plus petite diftance de la Terre eft au plus de 30 fecondes : ainfi quoique la funette augmente 200 fois environ le diametre ap- parent de Sirius, l’angle fous lequel on ÿ apperçoit cette éroile n’eft que d'environ 30 fecondes, c’eft- à-dire qu’à la vüe fimple ce diametre ne feroit guere que de la 200€ partie de 30 fecondes, ou d'environ neuf tierces. On demandera peut-être maintenant comment nous pouvons appercevoir les étoiles fixes, puifque leur diametre apparent répond à un anglé qui n'eft aucunement fenfble: mais il faut faire at. tention que c’eft ce rayonnement & cette fcintilla- tion qui Les environnent, qui eft caufe que ces corps lumineux fe voyent à des diftances fi prodisieufes , au contraire de ce qui arrive à l'égard de tout autre objet. L'expérience ñe nous apprend-t-elle pas qu’- une bougie ou un flambeau allumé fe voyent pen- dant la nuit fous un angle très-fenfible à plus de deux lieues de diftance ? Au lieu que fi dans le plus grand jour On expofe tout autre objet de pareille groffeur à la même diftance , on ne pourra jamais l’apperce- voir: à peine pourroit-on même diftinguer un objet qui feroit dix fois plus grand que la flamme de la bougie. La raifon de cela eft que les corps lumineux lancent de tous côtés une matiere incomparablement plus forte que celle qui eft refléchie par les corps non lumineux; & que celle-ci étant amortie par la réflexion, devient plus foible &c fe fait à peine fen- tir à une grande diftance : l’autre au contraire eft tellement vive, qu’elle ébranle avec-une force in- comparablement plus grande les fibres de la rétine ; À & ; , à pe °°2 ce qui produit une fenfation tout-ä-fait différente, & nous fait juger par cette raifon Les corps lumineux beauçoup plus grands qu'ils ne font, 7. ayez les Triés 62 ET O saftron. de M. 1e Monnier. Il n’eft pas inutile d’obfer- yet ici que la fcintillation des éroiles eft d'autant q moindre, que l'air eft moins charge de vapeurs ; auf dans les pays ‘où l'air eft extremement pur, comme dans l'Arabie, les ésoiles n’ont point de fcintillation. Voyez ETINCELLEMEN T, SCINTILLATION, & L'hift, de l’acad, de 1743 ; pag. 26. Catalogue des étoiles. On divife auffi les éroiles par apport à leur fituation, ensaftérifmes ou conftella- tions,quinefontautre chofe qu'un aflemblage de plu- feurs éroles voifines,qu'on confidere comme formant quelque figure déterminée , par exemple d’un ani- mal, éc. & qui-en prend le nom: cette divifon eft aufh ancienne au moins que le livre de Job, dansle- quel il eft parlé d’Orion & des Pleyades, 61e. Voyez CONSTELLATION & ARCTURUS. Outre les érorles qui font ainfi diflinguées en diffe- rentes grandeurs ou conftellations , il y en a quine font partié d’aucune. Celles qui ne font point +an- gées en conftellations font nommées z2formes, ou étoiles fans forme. Les aftronomes modernes ont forme de nouvelles conftellations de plufñeurs éroiles, que les anciens regardoïent comme étoiles informes ; com- me le cœur de Charles, cor Caroli , qui a été forméen conftellation par Halley , & l’écu de Sobieski , /eu- sum Sobiefci, par Hevelius, &c. 7. CŒUR,E CU, &c. Celles qui ne font point réduites en clafles ou grandeurs, font appellées étoiles nébuleufes ; parce qu’elles ne paroiffent que foiblement & en forme de petits nuages brillans. Voyez NÉBULEUX. Le nombre des éroiles paroït très-grand & prefque infini; cependant il y a long-tems que les Aftrono- mes ont déterminé le nombre de celles que les yeux peuvent appercevoir , qu'ils ont trouvé beaucoup moindre qu'on ne fe limagineroit. 125 ans avant J. C. Hipparque fit un catalogue, c’eft -à -dire une énumération des éroïles avec la defcription exacte de leurs grandeurs, fituations, longitude, latitude, Grec. Ce catalogue eft le premier dont nous ayons connoïffance ; & Pline ne craint point d’appeller cette entreprife, rem efam Deo improbam. Hippar- que fit monter le nombre des éror/es vifibles à 1022 ; elles étoient diftribuées en 48 conftellations. Prolo- mée ajoûta quatre étoiles au catalogue d’Hipparque , & fit monter le nombre jufqu’à 1026. Dans l’année 1437 , Ulug Beïgh petit-fils de Tamerlan, n’en compte que 1017 dans un catalogue nouveau qu’il fit, ou qu'il fit faire. Mais dans fe feizieme &r le dix-feptieme fiecles , lorfque l’Aftronomie commença à refleurir, on trou- va que le nombre des éroi/es étoit beaucoup plus grand. On ajoüta aux 48 conftellations des anciens douze autres nouvelles, qu’on obferva vers le pole méridional, & deux autres vers le pole feptentrio- nal, Gc. Voyez CONSTELLATION. Ticho Brahé publia un catalogue de 777 éroiles, vil obferva lui-même. Kepler, fur les obfervations e Ptolomée & autres, en augmenta le nombre juf- qu'à 1163: Riccioh jufqu'à 1468, & Bayer jufqu’à -1725. Halley en ajoûta 373, qu'il obferva lui-même vers le pole antar@ique: Hevelius, fur les obferva- tions de Halley & fur les fiennes propres, fit un ca- talogue de 1868 éroiles ; & depuis, Flamfteed en a fait un contenant 3000 éroiles, qu’il a toutes obfer- vées lui-même avec exaétitude, Il eft vrai que de ces 3000 éroiles il y en a beau- coup qu'on ne peut appercevoir qu’à-travers un té- lefcope. S'il arrive touvent dans les belles nuits d’hyver qu'on en voye une quantité innombrable, cela vient de ce que notre vüe eft trompée par la vivacité de leur éclat; parce que nous neles voyons que confufément , & que nous ne les examinons pas ar ordre : au lieu que quand on vient à les confidé- ser plus attentivement, & même à les difünguer l’u- ET O néaprès l'autre, il feroit bien difficile d'en trouverqui n'ayentété marquées dans les cartes ou les catalogues d'Hevelins ou de Flamfteed, Bien plus, fon a devant les yeux un de ces grands globes ,femblables à ceux de Blaen, & qu'on le compare avec le ciel; quelque excellente vûe que on ait , on n’en pourra guere découvrir , Même parmi les plus petites éroiles, qui n'ait été placée fur la furface de ce globe.Cependant le nombre des éroiles eft prefque infini. Riccioli (ce qui eft peut-être exagéré ) avance dans fon alma- gefle, que quand quelqu'un diroit qu'il y en a plus de 20000 fois 20000, il ne diroit rien que de pro- bable, \ En effet un bon télefcope dirigé vers un point quel- conque du ciel, en découvre une multitude immenfe, que l’œil feul ne peut pas appercevoir; particuliere- ment dans la voié laétée, qui pourroit bien n'être autre chofe qu'un affemblage d’éroiles trop éloignées pour être vies féparément ; mais arrangées fi prés les unes des autres, qu’elles donnent une apparence lumineufe à cette partie des cieux qu’elles occupent. Voyez GALAXIE & VOIE LACTÉE. Dans la feule conftellation des Pleyades, au lie de fix ou fept étoiles qu'appercoit l'œil le plus per- çant, le doéteur Hooke avec nn télefcope de douze piés de long, en a apperçû 78; & avec des verres plus grands, une quantité encore plus grande de dif. férentes grandeurs. Le P. Rheïta capucin , afftre qu'il a obfervé plus de deux mille éroz/es dans la feule conftellation d'Orion; il eft vraï que ce dernier fait n'a point été confirmé. Le même auteur en a trou- vÉ 188 dansles Pleyades; & Huyghens confidérant l’esoïle qui eft au milieu de l’épée d'Orion, a trouvé qu’au lieu d’une il yen avoit douze.Galilée en a trou- vé 80 dans l'épée d’Orion , 21 dans l’éroile nébu- leufe de fa tête, & 36 dans l’éroi/e nébuleufe nom- mée Prafepe. En 1603, Jean Bayer aftrologue allemand, pu- bla des cartes céleftes gravées où toutes les confiel- lations font deflinées avec les évoiles vifibles, dont chacune eft compofée. Il défigna ces étoiles par des lettres grèques, appellant l’une «, l’autre 8, &c. ce qui abrege les dénominations : ainfi on dit l’éroiZe 4 de la grande ourfe , au lieu de l’éroze de la feconde gran- deur , qui eft à l'extrémité de la queue de la grande ourfe, &c, Les changemens qu'ont éprouvé les éoifes {ont très-confidérables ; ce qui renverfe l'opinion des an- ciens , qui foûtenoient que les cieux & les corps cé- leftes étoient incapables d’aucun changement ; que leur matiere étoit permanente & éternelle, infini- ment plus dure que le diamant, & n’étoit point fuf- ceptible d’une autre forme. En effet jufqu’au tems d’Ariftote & même 200 ans après, on n’avoit encore obfervé aucun changement. Le premier fut remarqué l’an 125 avant J. C. Hip parque s’apperçut qu'il paroïfloit une nouvelle ésor- Le ; ce qui l’engagea à faire fon catalogue des évoiles, dont nous avons parlé, afin que la poftérité pût ap- percevoir les changemens de cette efpece qui pour- roient arriver à l’avenir. En 1572, Ticho Brahé obferva encore une nou- velle éroile dans Caffiopée, qui lui donna pareille ment occafion de faire fon nouveau catalogue. Sa grandeur d’abord furpañloit celle de Sirius & de la luifante de la Lyre, qui font les plus grandes de nos étoiles ; elle égaloit même celle de Vénus quand elle eft Le plus près de la Terre, & on l’appercut en pleir jour : elle parut pendant feize mois; dans les derniers tems elle commença à décroître , & enfin difparut tout-à-fait fans avoir changé de place pendant tout le tems qu’elle dura. . Leovicius parle d'une autre étoile qui parut dansla même conftellation vers lan 945, & reflembloit à Ê celle de 15725 & 1l cite une antre obfervation an- cienne, par laquelle il paroît qu’on avoit vü une nouvelle ésoile dans le même endroit en 1264. Keill prétend que c'étoit la même ésoile, 8& ne doute point qu’elle ne reparoïfle de nouveau dans 150 ans. Fabricius a découvert une autre nouvelle éroz/e dans le cou de la Baleine, qui parut & difparut dif- férentes fois dans les années 1648 & 1662. Son cours &c fon mouvement ont été décrits par Bouillaud. Simon Marius en a découvert une autre dans la ceinture d’Andromede en 1612 & 1613 : Bouillaud prétend qu'elle avoit déjà paru dans le quinzième fiecle. Kepler en à apperçü une autre dans le Ser- pentaire , & une autre de la même grandeur dans la conftellation du Cygne proche du bec, en l’année 601 , qui difparut en 1626; qui fut encore obfer- vée par Hevelius en 1659, jufqu’en l’année 1661 ; ë& qui reparut une troifieme fois en 1666 & en 1671, comme une éroile de la fixieme grandeur. Il eft certain par les anciens catalogues , que plu- fieurs des anciennes ézoz/es ne font plus vifibles à pré- fent : cela fe remarque particulierement dans les Pleyades ou fept éroiles , dont il n’y en a plus que fix que l’œil peut appercevoir: c’eft une obfervation qu'Ovide a faite 1l y a long-tems, témoin ce vers de cet auteur : Que Jéptem dici, [ex tamen effe folenr. Ce qu'il y a de plus remarquable, c’eft qu’il y a des écoiles dont la lumiere, après s’être affoiblie fuccef- fivement &c par degrés, s’éteint enfin abfolument pour reparoître enfuite; parmi ces dernieres éroiles, celle du cou de la Baleine eft célebre parmi les Aftro- nomes. Il arrive pendant huit ou neuf mois qu’on ceffe abfolument de voir cette éroile , & les trois on quatre autres mois de l’année, on la voit augmenter ou diminuer de grandeur, Quelques philofophes ont cru que cela venoit uniquement de ce que la furface de cette éroile eft couverte, pour la plus grande par- te, de corps opaques ou taches femblables à celles du Soleil ; qu'il n’y refte qu'une partie découverte où lumineufe ; & que cette éroile achevant fuccef fivement les révolutions ou rotations autour de fon axe , ne fauroit toûjours préfenter diretement fa partie lumineufe : enforte que nous devons lapper- cevoir tantôt plus, tantôt moins grande, & cefler de la voir entierement , lorfque fa partie lumineufe n’eft plus tournée vers nous. Ce qui a fait foupçon- ner que c’étoient des taches qui caufoient principale- ment ces changemens, c’eft qu’en diverfes années Péroile ne conferve pas une régularité conftante, ou n’eft pas précifément de la même grandeur : tantôt elle égale en lumiere les plus belles éroiZes de la fe- conde grandeur, tantôt celles de la troifieme ; en un mot l’augmentation ou la diminution de fa lumiere, ne répond pas à des intervalles égaux. Elle n’eft vi- fible quelquefois que pendant trois mois entiers: au lieu qu'on l’a vûe fouvent pendant quatre mois & davantage. Cependant cette opinion des Philofophes fur Papparition & la difparition des éroiles n’eft suere “vraiffemblable , fi on confidere que nonobftant quel- ques irrégularités , l’éroiZe de la Baleine paroît & dif paroît aflez répgulierement dans les mêmes faifons de l’année; ce qu’on ne doit pas raïfonnablement foupçonner dans l’hypothèfe des taches qui peuvent fe détruire ou renaître fans obferver d'ordre, foit pour les tems , foit pour les faïfons : il eft bien plus fimple de fuppofer, comme a fait M. de Maupertuis dans fon livre de la figure des aîtres, que ces fortes d'étoiles ne font pas rondes comme le Soleil, mais confidérablement applaties, parce qu’elles tournent fans doute très-rapidement autour de leur axe. Cette fuppoñition eft d'autant plus légitime, que l'on voit ET O 63 parmi nos planetes celles qui tournent le plus fapi= dement autour de leur axe,, être bien plus applaties que les autres, Jupiter, felon l’obfervation de M. Picard faite en 1668, & felon les mefures de MM. Caflini & Pound, eft confidérablement applati; ce qu'on ne peut pas dire des autres planetes : aufii Ju- Piter tourne-t-1l très-rapidement fur fon axe: Pout- quoi donc ne feroit-il pas permis de fuppofer des éroïles fixes plus ou moins applaties, felon œr’elles tournent plus ou moins rapidement ? d’ailleurs com= me de grofles planetes peuvent faire leurs révolu- tions autou de ces évoiles , & changer à notre égard la fituation de l’axe de ces corps lumineux, ils’enfuit que felon leur inclinaifon plus ou moins grande , ils paroïîtront plus ou moins éclatans, jufaw’à ne nous envoyer qu'une très-petite quantité de lumiere, Foy. la figure des aftres de M. de Maupertuis , chap. Vife pag. 114. feconde édition. | Montanari dans une lettre qu'il écrivit à la {o- cièté royale en 1670 , obferve qu'il y avoit alors. de moins dans les cieux deux étoiles de la feconde grandeur dans le navire Argo, qui ont paru jufqw’à l’année 1664 ; ilne fait quand elles commencerent à difparoiître , mais il aflüre qu'il n’en reftoit pas la moindre apparence en 1668 : il ajoûte qu'il a obfer- vé beaucoup d’autres changemens dans les ésoiles fi- xes , &t 1l fait monter ces changements à plusde cent. Nous ne croyons pas cependant que ces prétendues obfervations de Montanari méritent beaucoup d’at- tention, puifqu'il eft vrai, felon M. Kirch, que les deux belles ésoiles que Montanari prétend avoir per- du de vüe, ont été appercûes continuellement de- puis Ptolomée jufqu’a ce jour à un figne au- delà, ou 30 degrés loin de endroit du ciel où on les cher- choit, Ces éroïles, dit Montanari , font marquées & & 7 dans Bayer, proche le grand chien. L'erreur des cartes de Bayer vient fans doute de ce que cet auteur s’en eft rapporté aux traduétions latines du texte de Ptolomée ; au lieu que l’édition greque de Baîle nous apprend qu'il falloit chercher ces éroiles dans le vieux catalogue vers le 15 degré du Lion, &t non pas au 15 de l’Ecrevifle. Comme il y a des étoiles qui ne fe couchent ja- mais pour nous (voyez CIRCONPOLAIRE), il en eft d’autres qui ne fe levent jamais; ce font celles qui font à une diftance du pole auftral, moindre que no- tre latitude. M. Halley en avoit déjà dreflé un cata- logue (voyez CONSTELLATION) ; M. de la Caiïlle dans fon voyage récent au cap de Bonne-Efpérance, aflüre avoir fait en peu de tems un catalogue de plus de 9800 étoiles comprifes entre le pole auftral & le tropique du capricorne; il a conftruit un planifphere de 1930 de ces étoiles ; le tems en apprendra l’exac- titude. Nature des étoiles fixes. Leur éloignement immenfe ne nous permet pas de poufler bien loin nos dé- couvertes fur cet objet: tout ce que nous pouvons en apprendre de certain par les phénomenes, fe ré- duit à ce qui fuit. s 1°. Les éroiles fixes brillent de leur propre lunere; car elles font beaucoup plus éloignées du Soleil que Saturne , & paroïfent plus petites que Saturne: ce- pendant on remarque qu’elles font bien plus brillan- tes que Saturne; d’où 1l eft évident qu’elles ne peu- vent pas emprunter leur lumiere de la même fource que Saturne, c’eft-à-dire du Soleil. Or puifque nous ne connoïflons point d’autre corps lumineux dont elles puiflent tirer leur lumiere, que le Soleil, il s'en qu'elles brillent de leur propre lumiere. On conclut de-là 2°. que les éroi/es fixes font au- tant de foleils : car elles ont tous les caraéteres du Soleil ; favoir l’immobilité , la lumiere propre, &c, Voyez SOLEIL. 3°. Qu'il eft très- probable que les éroi/es ne font pas plus petites que notre Soleil, C4 ET O 4°. Qu'il eft fort probable que ces éroiles ne doi- vent point être dans une même furface fphérique du ciel; car en ce cas elles feroient toutes à La même diftance du Soleil, &c différemment diftantes entr’el- les, comme elles nous le paroiffent : or pourquoi cette régularité d’une part, & cette irrégularité de Vautre ? D'ailleurs pourquoi notre foleil occuperoit- al le centre de cette fphere des étoz/es ? 5°. De plus , il eft bien naturel de penfer que cha- que étoile eft le centre d’un fyftème & a des pla- netes qui font leurs révolutions autour d’elle de la même maniere que notre Soleil ; c’eft-àsdire qu’elle a des corps opaques qu’elle éclaire, échauffe, & entretient par fa lumiere : car pourquoi Dieu au- roit-1l placé tant de corps lumineux à de fi grandes diftances les uns des autres, fans qu'il y eût autour d'eux quelques corps opaques qui en reçuflent de la lumiere & de la chaleur ? Rien ne paroiït affü- rément plus convenable à la fageffe divine qui ne fait rien inutilement. Au refte nous ne donnons ceci que pour une legere conjeâure. Voyez PLURALITÉ Des Monpes. Les planetes imaginées autour de certaines éroiles | pourroïent fervir à expliquer le mouvement particulier qu’on remarque dans quel- ques-unes d’elles, & qui pourroit être caufé par l’ac- tion de ces planetes, lorfque la théorie dela précef- fion & de la nutation (voyez ces mots ) ne fufñt pas pour l’expliquer.C’eft ainfi que le Soleil eft tant-foit- peu dérangé par l’attion des fept planetes , fur-tout de Jupiter & de Saturne. Voyez mes recherches Jur de fÿflème du monde, II. partie, ch, jv. Mouvement des étoiles. Les étoiles fixes ont en gé- néral deux fortes de mouvemens apparens : l’un qu'on appelle premier, commun , où mouvement jour- nalier, Où mouvement du premier mobile ; c’eit par ce mouvement qu’elles paroïffent emportées avec la fphere ou firmament auquel elles font attachées, au- tour de la Terre d’orient en occident dans l’efpace de vingt-quatre heures. Ce mouvement apparent vient du mouvement réel de la Terre autour de fon axe. L'autre, qu’on appelle le fécond mouvement, eft celui par lequel elles paroïflent fe mouvoir fuivant l’ordre des fignes, en tournant autour des poles de lécliptique avec tant de lenteur, qu’elles ne décri- vent pas plus d’un degré de leur cercle dans l’efpace de 71 ou 72 ans, ou 51 fecondes par an. Quelques-uns ont imaginé , on ne fait fur quel fondement, que quand elles feront arrivées à la fin de leur cercle au point où elles Pont commencé, les cieux demeureront en repos, à moins que l’Etre qui leur a donné d’abord leur mouvement, ne leur or- donne de faire un autre circuit. Sur ce pié le monde doit finir après avoir duré en- viron 30000 ans, fuivant Ptolomée ; 25816 fuivant Ticho; 25920 fuivant Ricciohi, & 24800 fuivant Caflini. Voyez PRÉCESSION DES EQUINOXES. Mais ce calcul eft appuyé fur une chimere. En comparant les obfervations des anciens aftro- nomes avec celles des modernes, nous trouvons que les latitudes de la plûpart des érorles fixes font toù- jours fenfblement les mêmes ; abftraétion faite de la nutation prefque infenfible de l’axe de la Terre (Foy. NUTATION) ; maïs que leur longitude augmente toû- jours de plus en plus, à caufe de la précefon. _Ainfi, par exemple, la longitude du cœur du Lion fut trouvée par Ptolomée, l’an 138, de 24 3/; en 1114 les Perfans obferverent qu’elle étoit 174 30’; en 1364 elle fut trouvée par Alphonfe de 201 40/; en 1586, par le prince de Hefle, 241 11” éd, par Ticho , 244 17/; & en 1690, par Flamiteed, 259 31/ 20/: d’où il eft aifé d’inférer le mouvement ropre des éroiles, fuivant l’ordre des fignes, fur des cercles paralleles à l’écliptique. Ce fut Hipparque qui foupçonna le premier ce mouvement, en comparant Les obfervations de Ty° mocharis & Ariftille , avec les fiennes, Ptolomée qui vécut 300 ans après Hipparque, le démontra par des argumens inconteftables. Voyez LONGITUDE. Tycho Brahé prétendque l’accroiflement de lon- gitude eft d’un degré 25/ par chaque fiecle ; Coper- nic, d’un degré 23/40! 12///; Flamfteed & Ricaioli, d'un degré 23° 20/ ; Bowillaud, d’un degré 24! 54"; Hevelius, d’un degré 24! 46! 50//! : d’où il réfulte , fuivant Flamfteed , que l’accroïffement annuel de longitude des éroiles fixes doit être fixé à so". Cela pofé, 1l eft aifé de déterminer l’accroiffement de la longitude d’une étoile pour une année quelcon- que donnée ; & de-là la longitude d’une ésoiZe pour une année quelconque étant donnée, il eft aifé de trouver fa longitude pour toute autre année: par exemple la longitude de Sirius, dans les tables de M. Flamfteed pour l’année 1690, étant 94 49/ 1, on aura fa longitude pour l’année 1724, en multipliant l'intervalle detems, c’eft-à-dire 34 ans par 50"; le. produit qui eft 1700/, ou 28/ 20/, ajoûté à la lon- gitude donnée, donnera la longitude 104 17/ 21", Au refte la longitude des évoiles eft fujette à une petite équation que J'ai donnée dans mes Recherches Jur le fyfième du monde, IT, part. pag. 189. & je re- marquerai à cette occafon qu'au bas de la table fui- vante, page 190 du même ouvrage, pour la correc- tion de l’obliquité de Pécliptique , les mots ajorés & drés ont été mis par mégarde Pun à place de l’autre. Les principaux phénomenes des éroiles fixes qui viennent de leur mouvement commun & de leur mouvement propre apparens,outre leurs longitudes, {ont leurs hauteurs, afcenfons droites, déclinaifons, occultatiôns, culminations, lever & coucher. oyez HAUTEUR , ASCENSION , DÉCLINAISON, OccuL- TATION, &c, J’obferverai feulement ici que la méthode donnée au mot ASCENSION pour trouver l’afcenfon droite, n’a proprement lieu que pour le Soleil ; ce qu’on ap- pelle dans cet article le cofinus de la déclinaïfon de laftre , eft le cofinus de l’obliquité de l’écliptique. Pour trouver l’afcenfion droite des éroiles en géné- ral, on peut fe fervir des méthodes expliquées & détaillées dans les zrfhrutions aftronomiques de M, le Monnier, pages 383 & 387. Nous y renvoyons le lecteur. Le nombre des différentes éroiles qui forment cha- que conftellation, par exemple le Taureau, le Bou- vier, Hercule, &c. fe peut voir fous le propre arti- cle de chaque conftellation; TAUREAU, BOUVIER, HERCULE, &c. Pour apprendre à connoitre les différentes érozles fixes pat le globe, voyez GLOBE. Voyez les élèmens d'Aftronomie de Wolf ; Les diéfion- naires d'Harris & de Chambers ; /es mémoires de l’aca- démie des Sciences ; les inflirutions affronomiques de M. le Monnier, d’où nous avons tiré une grande partie de cet article. (O) ETOILES ERRANTES , eft le nom qu'on donne quelquefois aux planetes, pour les diflinguer des étoiles fixes. Voyez ÉTOILE 6: PLANETE. (0) ETOILES FLAMBOYANTES, eft le nom que l’on a donné quelquefois aux cometes, à caufe de la che- velure lumineufe dont elles font prefque toùjours accompagnées, Voyez COMETE. (0) ÉTOILE TOMBANTE , (Phyfique.) On donne ce nom à un petit globe de feu qu'on voit quelquefois rouler dans l’atmofphere, &7 quirépand çà & là une lumiere aflez vive. « Îl tombe aufhi quelquefois à ter- » re ; & comme il a quelque reflemblagce avec une » étoile,on lui donne lé nom d’etoile tombante. I] paroît » ordinairement au printems & dans l’automne. Lorf » que cette éroile vient à tomber, & qu’on rencontre » l'endroit où elle eff, onremarque que la matiere qui » refte » refte-encote, eft vifqueufe comme de la collé, de 5 couleur jaunâtre ; & que tout ce qui.en Étoit com- » buftible ou qui pouvoit répandre de la lunuere,, » fe trouve entierement confumé. On peut wmiter ces fortes d’éroiles, en. mêlant enfemble. du cam: » phre & du nitreavec un peude limon, quel'on ar- » rofe avec du vin ou de l’eau-de-vie, Lorfqu'on a » formé.de ce-mêlange une boule, & qu’on la jette # dans l'air après y avoir mis le feu, elle répand en » brûlant une lumiere femblable.à celle. de l’écoc/e » sombante ; & quand elle-eft tombée, il ne refte plus » qu'une matiere vifqueufe., quine differe pas de » celle-que laïffe l’éraile après fa chûte. lon »Ifloté çà. 8 là dans l'air du camphre qui eft » fort volatil; il y a-aufli beaucoup de nitre & du li- » mon fort délié ; de forteque ces parties venant à {e # rencontrer, s'incorporent-&.forment une lonpue » traînée, qui n’a plus alors-befoin que d’être allue. # mée par l’une -ou par l’autre de fes extrémités, à » l'aide de l’effervefcence-qui fe fait par le mélange » de quelquesautre matiere qu’elle rencontre, Aufli- » tôt que cette traînée eft.en feu , & que la.flamme » pafe d’un bout à l’autre, la matiere incombuftible » fe raflemble; elle devient beaucoup plus pefante » que l'air, & tombe alors pour la plus grande par- »tie à terre, La nature employe peut-être encore » quelque autre matiere pour produire ce phénome- »ne». Mufñlch. fais de Phyfig. $. 1683. &c: (O0) Erorre DE MER, ffella marina, (Hifi. nat.) ani- mal qui doit ce nom à fa figure. Plazc, XWIII, Les + étoiles de:mer font découpées, ou plütôt comme divi- fées en cinq parties qu’on peut nommer rayozs, La furface fupérieure des éroïles de mer, ou celle à la- quelle les jambes ne font pas attachées, eft couverte par une peau-très-dure: c’eft peut-être ce qui a dé- terminé Ariftote à les ranger parmi les teftacées ou animaux à coquilles ; mais Pline donne avec plus de _raifon à cette peau le nom de cal/um durum ; car elle reffemble par fa folidité à une efpece de cuir ; elle eft hériflée de diverfes petites éminences d’une matiere beaucoup plus dure , 8 qui reflemble fort à celle des os ou des coquilles. Cette peau fupérieure eft diffe- remment colorée dans diverfes étoiles : dans quelques- unes elle eft rouge: dans d’autres violette ; dans d’au- tres bleue, &jaunâtre dans d’autres ; & enfin elle.eft fouvent de diverfes couleurs moyennes entre celles- ci. Les mêmes couleurs ne paroïflent pas fur la fur- face inférieure, qui eft prefque couverte par les jam- bes & par diverfes pointes qui bordent fes côtés, plus longues que celles de la furface fupérieure. On voit au milieu de lérosle, lorfqu’on la regarde par-deflous , une petite bouche ou fuçoir dont elle Le fert pour tirer la fubftance des coquillages, def- quels elle fe nourrit, comme Ariftote l’a fort bien remarqué. Il auroit eu moins de raifon s’il avoit af- füré, comme il paroiït par la traduétion de Gafa , que les éroiles ont une telle chaleur , qu’elles brülent tout ce qu’elles touchent : Rondelet, qui veut faire par- ler Anftote plus raifonnablement, dit que cela doit s’entendre des chofes qu’elles ont mangées, qu’elles digerent très-vite. Pline cependant a adopté le fen- timent d’Ariftote dans le fens que Gaza l’a traduit ; car il dit expreflément, tar igneum fervorem effe tra- dunt, parlant de létoile, 25 omnia in mari contaifa adurat, Après quoiil parle comme d’une chofe diffé- rente de la facilité qu’elle a à digérer. | On a cru apparemment devoir leur attribuer une chaleur femblable à celle des aftres dont elles por- tent le nom. Quoi qu'’ilen foit de cette chaleur ima- ginaire , il eft certain qu’elles mangent les coquil- lages , & qu’elles ont autour de leur fuçoir cinq dents, ou plütôt cinq petites fourchettes d’une efpe- ce de matiere offeufe , par le moyen defquelles elles tiennent les coqullages, pendant qu’elles les fucent : Tome FL, FE : ETO 63 peut-être que c’eft avec les mêmes pointes. qu’elles ouvrent leurs coquilles, lorfqu’elles font de deux pieces. Chaque rayon de l’eéroz/e.eft fourni d’un grand nombre de jambes , dont lé méchamifme eft ce qu'il y a de plus curieux dans cet animal. Le Le nombre des jambes eft fi grand, qu'elles cou: vrent le rayon prefque tout entier du côté okelles lui font attachées. Elles y font pofées dans quatre rangs différens : chacun defquels eft d'environ foi: xante - féize jambes ;. & par conféquent l'étoile en- tiere eft pourvüe de 1520 jambes , nombre aflez merveilleux, fans que Bellon le poufsât jufqu’à près de cinq mille. Tout ce grand attirail de jambes ne fert cependant qu’à exécuter un mouvement très= lent ; auf font-elles f molles , qu’elles ne femblent guere mériter le nom de./ambes. À proprement par- ler, ce ne font que des efpeces de cornes telles que celles de nos limaçons de jardins, mais dontles étoiles fe fervent pour marcher; ce n’eft pas fimple- ment par leur peu de confiftance qu’elles reWemblent à des cornesde limaçons, elles ne leur font pas moins femblables par leur couleur & leur figure: elles font auf fouvent retitées comme les cornes d’un lima- çon; c’eft feulement lorfque l’érorle veut marcher, qu’on les voit dans leur longueur, encore leroile ne fait-elle paroître alors qu’une partie de fes jambes : mais dans le tems même que l’ésoi/e, ou plütôt leur reflort naturel les tient elles-mêmes raccourcies, on apperçoit toûjours leur petit bout, qui eft un peu plus gros que l’éndroit qui eft immédiatement au deflous. ; ; La méchanique que l’ésoile employe pour mar= cher , ou plütôt pour allonger fes jambes , doit nous patoitre d'autant plus curieufe , qu'on lapperçoit clairement; chofe rare dans ces fortes d'opérations de la nature, dont les caufes nous font ordinaire ment fi cachées, que nous pouvons également les expliquer par des raifonnemens très-oppofés ; il n’en eft point, dis-je, de même de la méchanique dont l’érozle fe fert pour allonger fes jambes. Il eft aifé de la remarquer très-diftinétement , fi-tôt que l’on a mis à découvert les parties intérieures d’un des rayons; en coupant fa peau dure du côté de la furface fupé- rieure de lérozle, ou de la furface oppoñée à celle fur laquelle les jambes font fituées : l’intérieur de lézoce paroît alors divifé en deux parties par une efpece de corps cartilagineux, quoique aflez dur. | Le corps femble compolé d’un grand nombre de vertebres faites de telle façon, qu'il fe trouve une coulfle au milieu du corps, qu’elles forment par leur aflemblage. À chaque côté de cette coulifle on voit avec plaifir deux rangs de petites fphéroïdes elliptiques , ou de boules longues , d’une clarté, d’u- ne tranfparence très -grande, longues de plus. d’une ligne, mais moins grofles que longues ; il emble que ce foient autant de petites perles rangées les unes au- près des autres. Entre chaque vertebre eft attachée une de ces boules de part &c d'autre de la couliffe, mas à deux diftances inégales. Ces petites boules font formées par une membrane mince, mais pour= tant affez forte, dont l’intérieur eft rempli d’eau; enforte qu'il n'y a que la furface de la boule qui foit membraneufe. [1 n’eft pas difficile de découvrir que ces.boules font faites pour fervir à l’allongement des jambes de l’éroile. On développetouteleuringénieufe méchanique , lorfqu’en preflant avec le doigt quel- qu’une de ces boules on les voit fe vuider, & qu’en même tems on obferve que les jambes qui leur cor refpondent fe sonflent. Enfin lorfqu’on voit qu'après avoir ceflé de prefler ces mêmes boules, elles fé rer: pliffent pendant que les jambes s’affaiflent & fe rac- courciflent à leur tour, qui ne fent que tout ce que L’éroile a à faire pour enfler fes jambes, c’eft de prel- fer les boules. Ces boules preflées fe déchargent de Î 66 ET O leur eau dans les jambes, qu’elles gonflent êc éten- dent aufli-tôt: mais dès que l’éror/e cefle de preffer les boules’, le reflort naturel des jambes qui les af faille , les raccourcit & chaffe l’eau dans les boules dont elle étoit fortie. Ces jambes ainf'allongées, les étoiles s’en fervent pour marcher fur les pierres & fur le fable , foit qu'elles foient à fec , foit que Peau de la mer les couvre, Mémoires de Pacad. royale des Scien- ces; 1710, pag. (34, 108% Arfcle de M. FORMEY , Jécrétaire de l'acad. roy: des Sciences & Belles-Lertres de Prulfe. | réfulte de ce détail , que l’éroile eft un infeête de mer, divifé en plufieurs rayons , ayant au milieu du corps une petite bouche où fuçoir, autour duquel font cinq dents ou fourchettes dures & comme ofleu- fes. La furface fupérieure de l’évoile de mer eft revê- tue d'un-cuit calleux, diverfement coloré. La furfa- ce inférieure & les rayons font couverts des jambes, dont le méchanifme eft, comme on l’a dit ci-deflus, extrèmement curieux. L'infette que Rondelet appelle fo/ei/ de mer ; & ce- lui que Gafner nomme une de mer , paroît être le mê- me que la petite ésorle de mer à cinq rayons dont on vient de parler ; mais 1l n’a point de jambes à fes rayons. Les cinq rayons font eux-mêmes les jambes. L'animal en accroche deux à l’endroit vers lequel 1l vent s'avancer, & fe retire ou fe traîne fur ces deux- là, tandis que le rayon qui leur eft oppofé, fe recout- bant en un fens contraire & s'appuyant fur le fable, poule le corps de l’érorle vers le même endroit: alors les deux autres rayons demeurent inutiles; mais 1ls ne le feroient plus, fi l'animal vouloit tourner à droi- te où à gauche, On voit par-là comment il peut aller de tous côtés avec une égale facilité, n’employant jamais que trois jambes ou rayons , & laiffant repo- fer les deux autres. = [l y a plufieurs autres efpeces d’érozles de mer gran- des & petites, qui reftent encore à connoitre aux Naturaliftes, fur-tout celles de la mer des Indes & du Sud: Les curieux en parent leurs cabinets, & Îles eftiment à proportion de leur groffeur, de leur cou- leur, du nombre & de la perfeétion de leurs rayons, Au refte les amateurs de cette petite branche de la Conchyliologie pourront fe procurer l’ouvrage de Linckius fur les éroiles de mer. En voici le titre : Linc- ki (Jok. Henr.) , de ffellis marinis liber fingularis cum obfervationib. (Chriff. Gab.)Fifcher ; accedunt Luydi, de Reaumur , & ( Dar.) Kave i7 hoc argumentum opufcula. Lipf. 1733, fol. cum tab. æneis 42, Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. ETOILE, ( Hiff. mod.) eft aufli une marque qui cara@térife les ordres de la jarretiere & du bain. Foy. JARRETIERE. L'ordre de l’écoie, ou de Notre-Dame de léroile, eft un ordre de chevalerie inffitué ou renouvellé par Jean roi de France, en l’année 1352; ainfi nommé à caufe d’une étoile qu’il portoit fur l’eftomac. D'abord il n’y eut que trente chevaliers, & de la nobleffe la plus diftinguée ; maïs peu-à-peu cet ordre tomba dans le mépris à caufe de la quantité de gens qu’on y admit fans aucune diftinétion : c’eft pourquoi Charles VIT. qui en étoit grand-maitre, le quitta &c le donna au chevalier du guet de Paris & à fes ar- chers. Maïs d’autres traitent tout cela d'erreur, & prétendent que cet ordre fut inftitué par le roi Ro- bert en 1022, en l'honneur de la fainte Vierge, du- rant les guerres de Philippe-de-Valois ; & que le roi Jean fon fils le rétablit. Le collier de l'ordre de l’érole étoit d’or à trois chaines, éntrelacées de rofes d’or émaillées alterna- tivement de blanc &r de rouge , & au bout pendoit une éroile d'or à cing rayons. Les chevaliers portoient le manteau de damas blanc, & les doublures de da- mas inçarnat ; la gonnelle ou cotte d'armes de même, E T © fur de devant de laquelle , au côté sanche , étoit une étoile brodée en or. Les chevaliers étoient obligésde dire tous les jours une couronne ou cinq dixaines dAve Maria 8t cinq Pater, & quelques prieres pour le roi & pour fonétat. Ce qui prouve que cet ordre a été inftitué par Robert, & non par le roi Jean, c’eft qu'on trouve une promotion de chevaliers de l'étoile fous le premier, fous Philippe - Augufte, 8 fous S. Louis. 2°. Il ne paroît pas que Charles VII. ait avili, comme on prétend, l’ordre de lésoile ; puif- que trois ans avant fa mort il le conféra au prince de Navarre Gafton de Foix fon gendre. Il'eft bien plus probable queLouis XI. ayant inftitué l’ordre de Saint Michel, les grands, comme ilarrive ordinairement, afpirerent à en être décorés, & que celui de l’ésoide tomba peu-à-peu dans l’oubli. | Juftintani fait mention d’un autte ordre de l’érozle à Mefline en Sicile, qu’on nommoit aufi l’ordre du croiffant. {1 fut inffitué en l’année 1268 par Charles d'Anjou frere de S. Louis, roi des deux Siciles. D’autres foñtiennent qu'il fut inftituéen 1464 par René duc d'Anjou , qui prit le titre de roi de Sicile s du moins il paroît par les armes de ce prince, qu'il fit quelque changement dans le collier de cet ordre: car au heu de fleurs de lumiere ou écoëles, il ne por- toit que deux chaïnes, d’où pendoïtun croifflant avec le vieil mot françois Loy, qui en langage de rébus fi- gnifioit Los en croifflant, C’eft-à-dire korzmeur en croif.. Jant ou s’augmentant. | Cet ordre étant tombé dans l’obfcurité , fut rele= vé de nouveau par le peuple de Mefline fous le nom de r0ble académie des chevaliers de l'étoile, dont ils re- duifirent l’ancien collier à une fimple érozfe placée fur une croix fourchue, & le nombre des chevaliers à {oïxante-deux. Ils prirent pour devife, monffrant re- gibus aflra viam , qu'ils exprimerent par les quatre M R + lettres initiales, avec une éroile au milieu : A Voyez CROISSANT. Voyez le diftionnaire de Trévoux & Chambers, (G) ETOILE , ez Blajon , fignifie la repréfentatiôn d’u- ñe éroile , dont on charge fouvent les pieces hono- rables d’un écuflon. Elle differe de la mollette ou roue d’un éperon , en ce qu’elle n’eft point percée comme la mollette. Foyez MOLLETTE. Elle eft ordinairement compofée de cinq rayons ou pointes : quand il y en a fix où huit, comme par- mi les Italiens & les Allemands, 1l en faut faire mens tion en expliquant le blafon d’une armoirie. Sur les médailles, les éroiles font une marque de confécration & de déification: on les resarde com- me des fymboles d’éteéfnité. Le P. Jobert. dit qu’el- les figniñient quelquefois les enfans des princes ré- onans, & quelquefois les enfans morts 8 mis au rang des dieux, Voyez APOTHÉOSE. Ménérr. & Trév, ETorLe, c'eft, duns la Fortification, un petit fort qui a quatre, cinq, ou fix angles faïllans & autant de rentrans, & dont les côtés fe flanquent oblique- ment les uns & les autres. Voyez FORT DE CAMPA- GNE G-FORT À ÉTOILE. (Q ÉTOILE ou PELOTE, (Manéve & Maréch.) termes. fynonymes dont nous nous fervôns pour défigner un efpace plus ou moins grand de poils blancs con- tournés en forme d’épi, & placés au milieu du front un peu au-deflus des yeux. On conçoit que ces poils blancs ne peuvent fe diftinguer que fur des chevaux de tout autre poil. Nous nommons des chevaux dont le front eft garni de cette pelote, des chevaux marqués en tête, & cette pelote entre toùjours dans le détail de leur fignalement. Les chevaux blancs ne peuvent être dits tels. | Souvent cette marque eft artificielle & faite de la main du maquignon, foit qu'il fe trouve dans la né- E T O ceffité d’appareiller un cheval quieft marqué en . tête avec un cheval qui ne l’eft pas, foit aufi pour tromper les ignorans qui regardent un cheval qui n’a point d’éroile, comme un cheval défedtueux. Foy. * ZAIN. Pour cet effet ils cherchent à faire une plaie au milieu du front de l’animal. Les uns y appliquent une écrevifle rôtie & brûlante : les autres percent le cuir avec une haleine, & pratiquent ainfi fix trous dans lefquels ils infinuent longitudinalement & tranfver- falement des petites verges de plomb, dont les ex- trémités reftent en-dehors, & débordent de maniere que ces verges font placées en figure d’éroile, Ils paf- {ent enfuite une corde de laine, ou un lien quel- conque fous ces fix pointes ; ils la recroifent enfuite deflus , & font autant de tours qu’il en faut pour que toute la place de la pelote foit couverte : après quoi ils arrêtent ce lien par un nœud, & rabattent les extrémités des verges fur la peau. Quelques jours après 1ls les retirent, & il en réfulte une plaie qui oc- fionne la chûte du poil , lequel en renaïflant reparoît blanc. Voyez Poiz. (e) ETOILE, (Artificier.) on appelle ainfi un petit attifice lumineux d’un feu clair & brillant, com- parable à la lumiere des ésoi/es. Lorfqu’il eft adhérent à un fauciflon, on l’appelle éroile à per. La maniere de faire cetté efpece d'artifice, peut être beaucoup variée ; tant dans fa compofition, que/dans fa forme, & produire cependant totjours à-peu-près le même effet. Les uns Les font en forme de petites boules maflives : les autres en boules de pâte, percées & enfilées comme des grains de cha- pelet : les autres en petits paquets de poudre fe- che, fimplement enveloppée de papier ou d’étou- pe: d’autres enfin en rouelles plates ,| de compof- tions aufh feches , mais bien preflées & enfilées avec des étoupilles. Doje de compofition pour les étoiles, Prenez quatre onces de poudre, deux onces de falpetre , autant de foufre; deux tiers de limaille de fer, de cam- phre , d’ambre blanc, d’antimoine, & de fublimé, de chacun demi-once: on peut fupprimer ces trois derniers ingrédiens fi l’on veut. Après avoir réduit toutes ces matieres en poudre, on les trempe dans de lPeau-de-vie, dans laquelle on a fait diffoudre un peu ‘de gomme adragant fur les cendres chaudes ; lorfqu'on voit que la gomme fe fond , on y jette les poudres dont on vient de parler, pour en faire une pâte, qu'on coupe enfuite par petits morceaux, & qu'on perce au mieu avant qu’elle foit feche, pour les enfiler avec des étoupilles. Des étoiles a pet. Lorfqu’on veut que la lumiere des éozles finifle par le bruit d’un coup, on prend un cartouche de cette efpece de ferpenteaux qu’on appelle Zardons, très-peu étranglé ; on le charge de la maniere des éroiles dont on.a parlé, à la hauteur -dun pouce ; enfuite on l’étrangle fortement , de forte qu'il n’y refte d'ouverture que celle qui eft né- ceffaire pour la communication du feu ; on remplit le refte du cartouche de poudre grenée, laiflant feu- lement au-deflus autant de vuide qu’il en faut pour le couvrir d’un tampon de papier, & l’étrangler to- talement par-deflus. On met cet artifice dans le pot de la fufée, d’où étant chafé par la force de la pou- dre, il paroït en étoile & finit par un pet. Des étoiles a férpenteaux. On étrangle un cartou- che de gros ferpenteaux de neuf à dix lignes de dia- “metre, à la diftance d’un pouce de fes bouts; & Payantintroduit dans fon moule pour le charger, on a un culot dont la têrine eft affez longue pour rem- pli exaétement le vuide qu'on a laïflé, afin que la pattie qui doit contenir la matiere du ferpenteau, {oit bien appuyée fur cette têtine pour y être char- pee avec une baguette de çuivre , comme les fer- AE | ET O ‘67 Penteaux ordinaires & de la même matiere de leur compoñition. | Le ferpenteau étant chargé & étranglé par fon bout, On renverfe le cartouche pour remplir la par- tie intérieure , dans laquelle entroit la têtine de la matiere feche où humide des éroiles fans l’étrangler. Mais auparavant il faut ouvrir avec un poinçon un trou de communication au ferpenteau dans le fond de cette partie, qu'on amorce de poudre avant que de mettre deflus la matiere à éro/e. Cette partie étant remplie & foulée comme il convient, on la laifle ainf pleine fans létrangler, Parrêtant feulement par un peu de pâte de poudre écrafée dans l’eau, pour l’amorcer & placer cet ar- tifice dans un pot de fufée volante fur cette amorce. Traité des feux d’Artifice. ÉTOILE , (Æorlogerie.) piece de la quadrature d’u- ne montre, où d’une pendule à répétition. On lui a donné ce nom à caufe de fa figure , qui reflemble à celle que l’on donne ordinairement aux éroiles, Elle a douze dents. Voyez fon ufage à l’article RÉPÉTI- TION, & la fig. 57, PL, TI, de l'Horlogerie 6 fuiv. marque B , & dans la 57 par 1, 2, 3-12, (T ÉTOILE, (Jard.) on appelle ainf plufeurs allées d’un jardin , ou d’un parc, qui viennent aboutir à un même centre, d’où l’on jouit de différens points de vüe. Il y a des éroiles fimples & des doubles. Les fimples font formées de huit allées ; les doubles de douze ou de feize. Etoile eft encore un petit oignon de fleur, dont la tige eft fort bafle, & la fleur tantôt blanche, & tantôt jaune : c’eft une efpece d’ornithogalum. (X) ÊTOILE, nom d’un outil dont fe fervent les Re- lieurs-Doreurs, On poule les étoiles après le bouquet & les coins ; on en met plufieurs entre les coins & le bouquet, pour y fervir d'ornement. On dit pouf fèr les coins 6 les étoiles. Voyez FERS À DORER. ETOILÉ , (Manuf. en foie.) c’eft une des pieces du moulin à mouliner les foies. Voyez l'article Sois. ÉTOILE , (Geéog. mod.) petite ville du Dauphiné. ETOILE , ady. rerme de Chirurgie. On donne ce nom à uneefpece de bandage qui eft de deux fortes, le /mple & le double. Le bandage éroilé fimple eft- pour les fra@ures du fternum & des omoplates. Il fe fait avec une bande roulée à un chef, longue de quatre aulnes, large de quatre travers de doigt. Si c’eft pour les omoplates, : on applique d’abord le bout de la bande fous l’une des aifelles ; on conduit le globe par-derriere fur l’épaule de Pautre côté, en paflant fur les vertebres : enfuite on defcend par-deflous l'aiffelle, pour reve- nir en-derriere croier entre les deux omoplates, & aflujettir le bout de la bande fous l’aiffelle, pour re- monter de derriere en-devant fur l'épaule, & conti nuer les mêmes croifés & circonvolutions, en fai- fant des doloires : on finit par quelques circulaires autour du corps. Quand on applique ce bandage pour le fiernum, on fait par -devant les croifés, qui dans le bandage pour Les omoplates fe font par-derriere, Le bandage érozlé double s'applique à la luxation des deux humérus à-la-fois, & à la fradure des deux clavicules. [Il fe fait avec unébande roulée à un chef, longue de fix à fept aulnes, large de quatre travers de doigt, qu’on applique d’abord par-devant , & avec laquelle on fait quatre /pica ; le premier fur le fter- num , le fecond entre les omoplates, & un fur cha- que épaule : enfuite on finit autour du corps. Sic’eft pour les clavicules , on aflujettit les deux bras au. tour du corps. Le nom de ces bandages vient de leur figure. (F) à Fer nt 'N ETOILÉ, (B/afon.) Une croix évoïlée eft celle qui a quatre rayons difpofés en forme de croix, aflez larges au centre, mais qui finiffent en pointe. Poyez CROIX, "n EU 68 ETO ETOILÉ ; à la Monnoie , {e dit d’un flanc qui re- cevant le coup de balancier, s’ouvre ou fe caile par un défaut de recuite. Voyez RECUIRE. _ ETOLE, £. f. (Hift. eccléf.) ornement facerdotal que les curés, dans l'Eghfe romaine , portent par- deflus le furplis, & quieft, felon quelques-uns, une marque de la fupériorité qu’ils ont chacun dans leur paroïfie. Le P. l'homaflin prétend au contraire que l’école paroït plus affeétée à ladminiftration des 1a- cremens , qu'à marquer la jurifdiétion. Thomaf. Difcipl. eccl. part. IV, iv. TL, ch. xxxvi]. Ce mot vient du grec sea, qui figmfe #7 robe longue; &, en effet, chez les anciens Grecs & Ro- mains l’érole étoit un manteau commun même aux femmes, & nous l'avons confondu avec l’orarium , qui étoit une bande de linge dont fe fervoient tous ceux qui vouloient être propres , pour arrêtér la fueur autour du cou & du vifage, & dont les empe- reurs faifoient quelquefois des largeffes au peuple romain, comme le remarque M. Fleury. Mœurs des Chrétiens, tir. xl. . L'éroleainfi changée de forme , eft aujourd’hui une longue bande de drap on d'étoile précieufe, large de quatre doigts, bordée ou galonnée, &t terminée à chaque bout par un demi-cercle d'étoile d'environ un demi-pié de large, fur chacun defquels eft une croix en broderie ou autrement. Il y a aufi une croix à l'endroit de l’ésole qui répond à la nuque du cou, & qui eft garni d’un linge blanc , ou d'une dentelle de la longueur d’un pié ou environ. L’éso/e fe pañe fur le cou, & pend ésalement par-devant perpen- diculairement à droite & à gauche, tombant pref- que jufqu'aux piés, fi ce n’eft à la mefle, où les prêtres la croïlent {ur l’eflomac, & les diacres la portent päfiée en écharpe de lépaule gauche fous le bras droit. L’érole des anciens étoit, comme nous avons déjà dit, fort différente de celles d’ajourd’hui ; il paroit même que c’étoit quelquefois un ornement fort ri- che, & un habit de cérémonie que les rois donnoient à ceux qu'ils vouloient honorer : de-là ces expref- fons de l’Ecriture, ffolam glorie induit eum, Les mo- narques d'Orient font encore aujourd’hui dans lufa- ge de donner des veftestèc des pelifles fort riches aux princes & aux ambafladeurs. L’ufage ou le droit qu'ont les curés de porter Péro- le, weft pas uniforme par-tout, Le premier concile de Milan ordonna aux prêtres de n’admimiftrer les facremens qu’en furplis &c en érole; ce que le cinquie- me de lamême ville, & celui d'Aix en 1585, enjoi- nirent même aux réguliers qui entendent les con- fefions. Les conftitutions fynodales de Roten, cel- tes d'Eudes de Paris , les conciles de Bude en 1279, de Roüer en 1581, de Reims en 1583, font aflifter les curés au fynode avec une école. Le concile de Cologne, en 1280, ne donne l’ésoZe qu'aux abbés, aux prieurs, aux archiprètres, aux doyens. Le {ÿ- node de Nîmes ne donne pas non plus d'école aux curés. En Flandres êc en Italie les prêtres prêchent foñjoûrs en éole. S. Germain, patriarche de Conf- tanunople , dans fes explications myftiques des ha- bits facerdotaux , dit que l’éro/e repréfente l’huma- nité de Jefus-Chrift teinte de {on propre fang. D’au- tres veulent qu'elle foit une figure de la longue robe que portoit le grand-prêtre des Juifs. Thomañf. D: cipl. dé l'Egl, part. IV. liv. I. ch. xxxvy. (G) | ‘© Erote, (Hiff. mod.) ordre de chevalerie inffitué par les rois d’Arragon. On ignore le nom du prin- ce qui en fut linfhtuteur, le tems'de fa création, aufli-bien que le motif de fon origine, & les marques defa difindion ; ôn conjecture feulement qu’elles confiftoient principalement en une éso/e ou manteau fort riche, & que c’eftide-là que cet ordre à tiré fon nom : les plus ançiennes traces qu'on en trouve, ne *% ET O remontent pas plus haut qu'Alphonfe V. qui com: mença à regner en 1416. Juftimiani prétend que cet ordre a commencé vers l’an 1332. $ ETOLE D'Or, (Ordre militaire a Venife.) ainfñinom- mé à caufe d’une éso/e d'or que les chevaliers portent fur l'épaule gauche, 8 qui tombe jufqu’aux genoux par-devant & par-derriere, & large d’une palme &z demie. Perfonne n’eft élevé à cet ordre, s’il n’eft pa- tricien ou noble Vénitien. Juftiniani remarque qu’on ignore l’époque de fon inftitution. * ETONNEMENT , f. m. ( Morale.) c’eft la plus forte impreffion ‘que puifle exciter dans l’ame un évenement imprévû. Selon la nature de l’évene- ment , l’éronnemenr dégénere en furprife , ou eft ac- compagné de joie, de crainte, d’admiration, de defefpoir. Il ie dit auffi au phyfique de quelque commotion intefline , ainf que dans cet exemple: j'eus La rére étonnée de ce coup; & dans celui-ci: certe piece ef? étonnée , Où 1l fignifie w7e afion du feu aflez forte pour déterminer un corps à perdre la couleur qu'il a, & à commencer de prendre celle qu’on fe propo- foit de lui donnef: ÉTONNEMENT DE SABOT, (Manége, Maréchal.) fecoufle | commotion que fouffre le pié en heurtant contre quelques corps très-durs ; ce qui peut princi- palement arriver lorfque, par exemple, le cheval, en éparant vigourenfement , atteint de fes deux pics de derriere, enfemble ou féparément, un mur qui fe trouve à fa portée & derriere lui. Cet évenement n’eft très-fouvent d’acune confé- quence ; il en réfulte néanmoins quelquefois des ma- ladies très-graves. La violence du heurt peut en efet occafionner a rupture des fibres & des petits vaif- feaux de communication du fabot 8 des técumens, ainfi que desexpanfons aponévrotiques du pié. Alors les humeurs s’extravafent, & détruifent tojours de plus en plus , par leur affluence, toutes les conne- xions, Ces mêmes humeurs croupies, perverties, & changées en pus, corrodent encore par leur acrimo- mie toutes les parties ; elles forment des vuides , elles donnent lieu à des fufées , & fe frayent enfin un jour à la portion füpérieure du fabot, c’eft-à-dire à la couronne : c’eft ce que nous appellons propre- ment fouffler au poil. | Sinous avions été témoins du heurt dont il s’agit, la caufe maladive ne feroit point du nombre de cel- les que nous ne fafflons que difficilement , & nous attribuerions fur le champ la claudication de l'animal à l’ébranlement que le coup a fufcité ; mais nous ne fommes pas toñjours certains de trouver des éclair- ciflemens dans la fincérité de ceux qui ont provoqué le mal, & quifont plus ou moins ingénus, felon lin- térêt qu'ils ont de déguifer leur faute 8 leur impru- dence : ainf nous devons , au défaut de leur aveu, rechercher des fignes qui nous le décelent. Il n’en eft point de véritablement univoques, car la claudication , l'augmentation de la douleur, la difficulté de fe repofer fur la partie, fa chaleur, l’en- gorgement du tégument à la couronne, la fievre, l’éruption de la matiere, capable de deffouder Fon- gle, fi l’on n’y remédie, font autant de fymptomes non moins caratériftiques dans une foule d’autres cas, que dans célui dont il eft quefhion. On peut ce- pendant, en rémontant à ce qui a précédé, &c en examinant fi une encloutre, ou des fcymes faignan- tes, ou l’encaftelure, ou des chicots, ou des mala- dies qui peuvent être fuivies de dépôts , ou une inf- nité d’autres maux qui peuvent affetter le pié de la même maniere, n'ont point eu lieu; décideravecure forte de précifion, &c être affüré de la commotion & de Péronrrement. . | | | Dès le moment du heurt , où il n’eft que quelares fibres léfées, &c.qu’une legere quantité d’humeurex- 1 travafée, on y pare aifément en employant les re- medes confortatifs & réfolutifs, tels que ceux qui compofent l’emmiellure fiivante. « Prenez poudre de plantes aromatiques , deux li- » vres ; farines réfolutives, qui font celles de feve, » d’orobe, de lupin & d'orge, En a : faites » bouillir le tout dans du gros vin, & ajoûtez-y miel » commun, fix onces, pour l’emmiellure, que vous » fixerez fur la folle ». Ce cataplafme cependant ne fauroit remplir tou- tes nos vües. Il eft abfolument important de preve- nir les efforts de la matiere, qui pourroit fouffler au poil dans linffant même où nous ne nous y atten- drions pas ; & pour nous précautionner contre cet accident, nous appliquerons-fur la couronne lem- miellure répercuflive que je vais décrire. « Prenez feuilles de laitue , de morelle & de plan- » tain, une poignée ; de joubarbe, demi-poignée : » faites bouillir Le tout dans une égale quantité d’eau 5 & de vinaigre : ajoûtez-y de l'une des quatre fart- » nes rélolutives, trois onces, &c autant de miel ». Mais les humeurs peuvent être extravafées de ma- niere à former ungcolle@ion & à fuppurer : alors il faut promptement fonder avec lestriquoiles toute la circonférence & la partie inférieure de l’ongle, & obferver non-feulement le lieu où il y a le plus de chaleur, mais celui qui nous paroît le plus fenfible, afin d’y faire promptement une ouverture avec le boutoir ou avec la gouge, ouverture qui offrira une ifluë à la matiere, & qui nous fournira le moyen de conduire nos médicamens jufqu’au mal même. Sup- pofons de plus que cette matiere fe foit déjà ouvert une voie par la corrofion du uflu de la peau vers la couronne ; nous n’en ouvrirons pas moins la folle, & cette contre-ouverture facilitera la déterfion du vuide & des partiesulcérées, puifque nous ne pour- rons qu'y faire parvenir plus aifément les injections vuinéraires que nous y adreflerons. On évitera, ainfi que je lai dit, relativement aux plaies fufcitées par les chicots, les encloüures, &c: (voye; ENCLOUU- RE), les rémedes gras, qui hâteroient la ruine des portions aponevrotiques, quis’exfolient fouvent en- fuite de la fuppuration (voyez FILANDRE) ; & l’on n’employera dans les panfemens que l’eflence de terebenthine , les fpiritueux, la teinture de myrrhe & d’aloës, &c. Si l’on apperçoit des chairs molles, on les confumera en pénétrant aufli profondément dans le pié qu'il fera poflible, avec de l’alun en pou- dre, ou quelqu’autre cathérétique convenable ; & en fuivant cette route on pourra efpérerde voir bien- tôtune cicatrice, oit à la conronne, foit à la folle, qui aura pas moins de {olidité que n’en avoient les parties détruites. . La faignée précédant ces traitemens, s’oppofera à l'augmentation du mal, favorifera la réfolution de lhumeur ftagnante, & calmera inflammation. Enfin il eft des cas où les progrès font tels, que la chûte de l’ongle eftinévitable, Je ne dirai point, avec M. de Soleyfel, qu'alors le cheval eft totalement perdu ; mais je laïfferai agir la nature, fur laquelle je me repolerai du foin de cette chûte & de la régé- nération d’un nouveau pié. Deux expériences m'ont appris qu'elle ne demande qu’à être aidée dans cette opération ; -ainfi J'uferai des médicamens doux ; je tempérerai la terebenthine dont je garnirai tout le pié, en y'ajoütant des jaunes d’œufs & de l'huile rofat : mes panfemens en un mot feront tels, que les Chairs qui font à découvert, & qui font d’abord très- vives, n'en feront point offenfées ; &c enfuite de la Stérifon on difinguera avec peine le pié neuf de celui qui n’aura été en proie à aucun accident. I feroit affez difficile , au furplus, de prefcrite ici êt à cet égardune méthode conftante ; je ne pourrois détailler que des regles générales, dont la variété E T O 69 des circonftances multiplie les exceptions, Quand on connoit l’immenfe étendue des difcultés de Part, on avoue aifément qu'on ne peut rien; on fe dé- pouille de ces vaines idéés que nous fuggere un amour-propre mal entendu, pour s'en rapporter à des praticiens habiles, que le favoir & l'expérience placent toüjours en quelque façon au-deflus de tous les évenemens nouveaux & inattendus qui furvien- nent. (e) ETOQUIAU , f. m. (Horlogerie.) fignifie en gé- néral, parmi les ouvriers en fer, we petite cheville qu’on met dans plufieurs cas à la circonférence d’une roue, pour l’empêcher de tourner au-delà d’un cer- tain point ; ainfi la cheville rivée à la circonférence du balancier, pour l’empêcher de renverfer, s’ap- pelle l’éroquiau, Voyez RENVERSEMENT. On donne encore ce nom à une petite cheville ri vée fur l’avant-derniere roue de la fonnerie, & qui fert à l'arrêter. Cette roue fe nomme /4 roue d’éroz quiau, Voyez ROUE, SONNERIE, 6'c. On appelle auffi de même nom toute piece d’une machine en fer, deftinée à en arrêter ou contenir d’autres. Il y a des éroquiaux à coulifle, & ilyena à patte. (T) ETOUBLAGE , f. m. (Jurifp.) droit feigneurial énoncé dans une charte d’'Odon archevêque de Roüen, de l’an 1262, qui fe levoit fur les efteules, terme qui fignifie également Ze b/e & Le chanvre, Du- cange en fon gloffaire, au mot effoublagium, croit que ce droitconfiftoit apparemment dans l'obligation de la part des fujets du feigneur, de ramañfler pour lui, après la récolte, du chanvre pour couvrir les maifons ; ce qui eft aflez vraiflemblable. (4) ETOUFFÉ, adj. (Docimaf.) {e dit d’un effai qui eft recouvert de fes fcories , parce qu’on n’a pas eu foin de donner ou de foûtenir le feu dans un degré convenable , ou qu’on a donné froid mal-à-propos : alors il ne boût plus & ne fume plus, parce qu’il n’a plus de communication avec Pair extérieur ; &c c’eft- là Porigine de fa dénomination. L’effai eft fort fujer à devenir éouffe , quand il eft mêlé d’étain. On dit encore dans le même fens , l’effai eff noye. Voyez ce mot. On remédie à ces deux inconvéniens en don- nant très-chaud, & mettant un peu de poudre de charbon fur la coupelle. Foyez EssAr. Arcicle de M. DE VILLIERS. EÉTOUFFÉ, (Jardinage.) On dit un bois, un arbre érouffé , quand ils font entourés d’autres arbres touf- fus qui leur nuifent. * ETOUFFER, v. a@. (Gramm.) Ilfe dit au fim- ple & au figuré, Au fimple, c’eft fuBprimer la com- munication avec l'air hbre ; ainfi l’on dit érouffer Le feu dans un fourneau : j'étouffe dans cet endroit. Au fi- guré , il faut érouffer certe affaire, c’eft-à-dire empè- cher qu’elle n'ait des fuites en tranfpirant. ETOUPAGE, f. m, £erme de Chapelier, qui fignifie ce qui refte de l’éroffe après avoir fabriqué les quatre capades qui doivent former le chapeau; & que ces ouvriers ménagent, après l'avoir feutré avec la main, pour garnir les endroits de ces capades qui {ont les plus foibles. Foyez CHAPEAU. ETOUPE, £. f. C’eft le nom que les Filaffieres donnent à la moindre de toutes les filaffes, tant pour la qualité que pour la beauté. Voye l'arricle COR- DERIE. ETourE À ÉTAMER. Les Chauderonniers nom- ment ainfi une efpece de goupillon au bout duquel il y a de la filafle, dontils fe fervent pour étendre l’é- tamure ou étain fondu , dans les pieces de chande- ronnerie qu'ils étament. J’oyez ETAMURE 6 ETA- MER, G les Planches du Chauderonnier. ETOUPER , terme de Chapelier, qui fignifie forz- fer Les endroits foibles d’un chapeau avec la mémeétoffe dont on a fait les capades. Voye ÉTOUPAGE, EN = 7o ET O ETOUPIERES, £. f, (Corderie.) femmés qui char- piflent de vieux cordages pour en faire de l’étoupe. ETOUPILLE, f. f, (Are mil & Pyrotechnie,) efpece de meche compofée de trois fils de coton du plus fin, bien imbibée d’eau-de-vie, ou de poulve- rin ou poudre écralée , qui fert dans l'artillerie & dans les feux d'artifice. | Maniere de faire l’écoupille. « On prend trois fils » de meche de coton du plus fin, & on obferve qu’il » n'y aiteni nœuds mi bourre, Ones trempe dans de » l’eau où l’on aurafait fondre un peu de falpette, » pour affermir l’éroupille. On roule & déroule cette # petite meche dans du poulverin humeété d’eau-de- » vie ; après cela on la met fécher fur une planche, » Pour juger dela bonté de Pécoupille, on en prend # un bout d'environ un pié de longueur, & il faut » que mettant le feu à un bout , 1l fe porte en même » terms à l’autre : s’il n’agit que lentement, c’eft une » preuve que la mechen’efl pas bienimbibée de poul- # verin, ou qu'elle n’eft pas feche. # L’éroupille fert à jetter des bombes fans mettre » le feu à la fufée, On en prend deux bouts d'environ ! » trente pouces de longueur, que lon attache en » croix fur la tête de la fufée, où l’on fait quatre pe- » tites entailles ; ce qui forme fept bouts qui tom- » bent dans la chambre du mortier , que l’on charge + de poudre feulement, fans terre. On peut cepen- s dant fe fervir d’un peu de fourrage pour arranger # la bombe. Lorfqu’on met le feu à la lumiere du + mortier, il fe communique à l’éroupille, qui le porte » à la fufée. De cette maniere la bombe ne peut ja- # mais crever dans le mortier, puifque la fufée ne # prend feu que quand elle en eftfortie. Le fervice de #.la bombe eft bien plus prompt, puifqu’il faut beau- # coup moins de tems pour charger le mortier, qu’a- # vec les précautions ordinaires. » On fe fert auf très-utilement de l’éropille pour # tirer le canon. On en prend un bout dont une par- # tie s’introduit dans la lumiere , & l’autre fe cou- # che de la longueur d’un ou deux pouces fur la pie- # ce. Au lieu d’amorcer comme à l'ordinaire, on » met le feu à l’ésoupille, qui le porte avec tant de # précipitation à la charge , qu’il n’eft pas poñble » de fe garantir du boulet; au lieu qu’en amorçant > avec de la poudre, on appercçoit de loin le feu de # la traînée, ce qui donne le tems d’avertir avant # que le boulet parte: c’eft ce que font Les fentinelles # que l’on pofe exprès pour crier bas, lorfqu'ils » voyent mettre le feu au canon. D'ailleurs l’écou- ».pille donne moins de fujétion que l’amorce, lorf- >» qu'il pleut oulqu'il fait beaucoup de vent ». | ETOUPILLER, v. a@. ez termes d’Arrificier; c’eft garnir les artifices des étoupilles néceflaires pour la communication du feu , & l’attacher avec des épin- gles ou de la pâte d’amorce. Didionn. de Trév. * ETOURDI, adj. (Morale.) celui qui agit fans confidérer les fuites de fon aétion; ainf l’érourdi eft fouvent expofé à tenir des difcours inconfidérés. _ Ilfe dit auffi au phyfique, de la perte momenta- née de la réflexion, par quelque coup recû à la tête : 1] tomba étourdi de ce coup. Onle tranfporte par méta- phore à une imprefñion fubitement faite, qui Ôte pour un moment à l’ame l’ufage de fes facultés: 27 fur gtourdi de.cette nouvelle, de ce diftours. ETOURDISSEMENT , f. m.(Medecine.) C’eft le premier degré du vertige: ceux qui en font affedés, {e fentent la tête lourde , pefante ; femblent voir tourner pour quelques momens les objets arbians, &t fontun peu chancelans fur leurs piés : fymptomes qui fe difipent promptement , mais qui peuvent être plus ou moins fréquens. : Cette affe@ion eft fouvent le commencement du vertige complet; elle eft quelquefois l’avant-cou- reut de l’apoplexie , de l'épilepñe : elle eft auf très- ETR communément un fymptome de l’affe&ion hypo- condriaque, hyftérique , des vapeurs. Voyez en {on lieu l’arricle de chacune de ces maladies, (d ETOURNEAU, furnus, {.m. (Hifi. nat. Ornith.) oMeau dont le mâle pefe trois onces & demie, & la femelle feulement trois onces, Cet oïfeau à neuf pouces de lonpueur depuis la pointe du bec jufqw'’au bout des pattes, & huit pouces trois quarts, fi on ne prend la longueur que jufqu’à l’extrémité de la. queue : l’envergure eft de feize pouces. L’écourneau eft de la groffeur du merle, & Ini reffemble par la figure du corps : fon bec a un pouce trois lignes de longueur depuis la poïnte jufqu’à l’angle de la bou- che; ileft plus large & plus applati que celui des merles & des grives. Le bec de l’érourneau mâle eft d’un jaune plus pâle que celui de la femelle :- dans l’un & dans l’autre la partie fupérieure £e trouve égale à la partie inférieure : la langue eft dure, ten- dineufe & fourchue : liris des yeux a une couleur de noifette, excepté la partie fupérieure, qui eft blanchâtre : 1l y à une membrane fous les paupie- res : les pattes ont une couleur de fafran, ou une couleur de chair : les ongles font noirâtres ; le doigt extérieur tient au doigt du milieu par fa premiere phalange : les jambes font couvertes de plumes en entier : la pointe des plumes eft jaunâtre dans celles du dos & du cou , & de couleur cendrée dans celles qui font fous la queue : quelquefois la pointe des plumes eftnoire, avec une teinte de bleu ou de pour- pre, qui change à diférens afpe@s. On reconnoît le mâle paf la couleur despourpre, qui eft plus appa- rente fur le dos ; par la couleur du croupion, qui tire plus fur le verd; & par les taches du bas-ventre, dont le nombre eft plus grand que dans la femelle. Les grandes plumes des ailes font brunes ; mais les bords de la troifieme & de celles qui fuivent, jufqu’à la dixieme , & de celles qui fe trouvent depuis la quinzieme jufqu’à la derniere , font d’un noir plus obfcur. Les petites plumes qui recouvrent les gran- des , font luifantes ; la pointe de celles du dernier rang ef jaune : les petites plumes du deffous de l'aile font de couleur brune, excepté les bords, qui ont du jaune-pâle : la queue a trois pouces de longueur; elle eft compofée de douze plumes qui font brunés, à l’exception des bords, dont la couleur eftjaunâtre. La femelle niche dans des trous d’arbres; elle pond quatre ou cinq œufs, qui {ont d’un bieu-pâle mêlé de verd. Les érourreaux fe nourriflent de fcarabées, de pe tits vers, &c. Ils vont en bandes ; ils fe mêlent avec: quelques efpeces de grives, mais ils ne les fuivent pas lorfqw'elles paffent en d’autres pays. On trouve quelquefois des variétés dans les oifeaux de cette efpece ;on en a vien Angleterre deux blancs, & un autre dont la tête étoit noire, & le refte du COrps blanc. L’érourneau apprend aflez bien à parler. Wil- lughby, Orzirh. Voyez SANSONNET , Oiseau. (1) ETOURNEAU, gris-étourneau, (Manége, Mar) nom d’une forte de poil qui, par la reffemblance de fa couleur avec celle du plumage de l’oifeau que lon. appelle ainfi, nous a portés à accorder au cheval qui en eft revêtu, cette même dénomination. Les chevaux étourneaux, felon les idées qui préoccu- poient les anciens, rarement ont les yeux bons ; & à mefure que la couleur de leur poil pañle , ils fe ral. lentiflent & ont peu de valeur. Ce poil mêlé d’une couleur jaunâtre , n’eft pas fi fort eftimé. Voyez a l’article Porz., le cas que l’on doit faire de ces judi- cieufes obfervations. (e) * ETRANGE,, adj. Il fe dit de tout ce qui eft ow nous paroiït contraire aux nofions que nous nous fommes formées des chofes, d’après des expériences bien où mal faites. Ainfi quand nous difons d’un homme qu’il eft érrar ge, noùs entendons que fon-aétion n’a rien de com- mun avec celle que mous croyons qu’un homme fenfe doit faire en pareil cas : de-là vient que ce qui nous femble ésrenge dans un tems, cefle quelquefois de nous le paroïtre quand nous fommes mieux inf truits, Une affaire range, eft eelle quinous offre un concours de circonftances auquel on ne s'attend point, moins parce qu'elles font rares, que parce qu'elles ont une apparence de contradiétion ; car fi les circonftances étoient rares, l’affaire , au lieu d’é- | tre érrange, {eroit-étonnante, furprenante, fingulie- | re, éc. ETRANGER, £ m. (Droit polir.) celui qui eft né fous une autre domination & dans un autre pays que le pays dans lequel il fe trouve. Les anciens Scythes immoloient & mangeoient | enfuite les érrangèrs qui avorent le malheur d'aborder | en Scythue. Les Romains, dit Cicéron, ont autre- fois confondu le mot d’ezremiavec celui d’étranger : peregrinus antea dittus hoftis, Quoique les Grecs fuf- fent redevables à Cadmus, ésranger chez eux, des | fciencesqu'illeur apporta de Phénicie, 1ls ne purent jamais fympathifer avec les érrangers les plus eftima- bles, & ne rendirent point à ceux de cet ordre qui s’etablirentenGrece, les honneurs qu'ils méritoient. Ils reprocherent à Antifthene que fa mere n’étoit pas d’Athenes ; & à Iphicrate, que la fienre étoit de Thrace : mais les deux philofophes leur répondirent que la mere des dieux étoit venue de Phrygie & des folitudes du mont Ida, & qu'elle ne laifloit pas d’être refpettée de toute la terre. Aufi la rigueur tenue contre les étrangers par les républiques de Sparte & d’Athenes, fut une des principales caufes de leur peu de durée. Alexandre au contraire ne fe montra jamais plus digne du nom de grand, que quand il fit déclarer par “un édit, que tous les gens de bien étoient parens les uns des autres, & qu'il n'y avoit que les méchans feuls que l’on devoit réputer érrangers. | Aujourd’hui que le commerce a lié tout l'univers, que la politique eft éclairée fur fes intérêts , que l’hu- manité s'étend à tous les peuples, il n’eft point de fouverain en Europe qui ne penfe comme Alexandre. On n’agite plus la queftion , & l’on doit permettre aux étrangers laborieux & induftrieux , de s’établir dans notre pays, en fe foümettant aux lois. Perfonne ignore que rien ne contribue davantage à la gran- deur, la puiflance & la profpérité d’un état, que Paccès libre qu'il accorde aux érrengers de venir s’y habituer , le foin qu'il prend de les attirer, & de les fixer par tous les moyens les plus propres à y réuf- fir. Les Provinces-mnies ont fait l’heurenté expé- rience de cette fage conduite. D'ailleurs on citéroit peu d’endroits qui ne foient aflez fertiles pour nourrir un plus grand nombre d'habitans que ceux qu’il contient , &z aflez fpacieux pour lés loger. Enfin s’il eft encore des états policés où les lois ne permettent pas à tous les ésrengers d’ac- quérir des biens-fonds dans le pays, de tefter & de difpofer de leurs effets, même en faveur des régni- «oles ; de telles lois doivent pañler pour des refles de ces fiecles barbares , où les étrangers étoient prefque regardés comme des ennemis, #rr. de M. le Chevalier DE JAUCOURT. ETRANGER, (Jwrifpr.) autrement aubain. Voyez AUBAIN & RÉGNICOLE. - ÉTRANGER fe dit aufli de celui qui n’eft pas de la famille. Le retrait lignager a lieu contre un acqué- reur éranger, pour ne pas laiffer {ortir les biens de la famille, | ÊTRANGER, (droif) voyez ci-dev, au mor DROIT, à l’article DROIT ÉTRANGER , & aux différens ar- ticles du droit de chaque pays. (4) ETRANGLEMENT , £ m. (Æydr.) On entend ETR 7i par ce mot l'endroit d’une conduite où le frotement U f.confidérable, que l’eaun’y pale qu'avec peine, ETRANGLER , v. a. c’eft Ôter la vie en com: primant le canal de la refpiration : enice fens on ne peut érangler qu'un animal; cependant on rangle une fufée , une manche, &-en général tout corps. creux dont on retrécit la capacité en quelque pont de fa longueur. ETRANGLER , ex termes d’Arvificiers; c’eft retrécir l’orifice d’un cartouche , en le ferrant d’une ficelle. ETRANGUILLON, f.m. Manège, Maréch.) ma: ladie quidans le cheval ef précifément la même qué celle quenous connoiïflons relativement à l’homme, fous lenom d’efguinancte. Quelque groffiere que pa- roifle cette exprefion, adoptée par tous les auteurs qui ontiécrit fur l’Hippiatrique , ainfi que par tous les Maréchaux,, elle eftnéanmoins d’antant plus figni. ficative , qu’elle préfente d’abord l’idée du fige & des accidens de cette maladie. Je ne me perdrai point ici dans des divifions fem: blables à celles que les Medecins ont faites de l’a gine, fous le prétexte d'en caraétérifer les différentes efpèces, Les différentesdénominations d’efrinancie , de kynancie, de parafquinancie,, & de parakynancie ne nous offriroient que de vaines diftinétions qui fe- roient pour nous d’une reflource d'autant plus foi- ble, que je ne vois pas que la medecine du corps humain en ait tiré de grands avantages, puifque Celfe, Arétœc, Aëtius, & Hipocrate même, leur ont prèté des fens divers. Ne nous attachons donc point aux mots , & ne nous livrons qu’à la recher- che &r à la connoïffance des chofes. On doit regarder l’éranguillon comme une mala: die inflammatoire | ou plütôt comme une véritable inflammation; dès-lors elle ne peut être que du genre des tumeurs chaudes , & par conféquent de la nature du phlegmon, ou de la nature de l’éréfypele. Cette : inflammation faifit quelquefois toutes les parties de la gorge en même tems, quelquefois aufh elle n’af. fette que quelques-unes d’entr’elles. L’engorgement n'at-1l lieu que dans les glandes jugulaires, dans les graifles , 6 dans le tiu cellulaire qui garnit exté- rieurement les mufcles ? alors le sonflement eft ma- nifefte , &c l’écranguillon eft externe, L’inflammation au contraire réfide-t-elle dans les mufcles mêmes du pharynx, du larynx, de l’os hyoïde , de la langue ? le gonflement eft moins apparent , &c lérranguillon eft interne. Dans les premiers cas, les accidens font legers, la douleur n’eft pas confidérable , la refpiration n’eft point gênée, la déglutition eft libre ; & les parties affeétées étant d’ailleurs expofées & foûmifes à Pac- tion des médicamens que l’on peut y appliquer fans peine, l’engorgement a rarement des fuites funeftes, ët peut être plus facilement diffipé. Iln’en eft pas de même lorfque l’inflammation eft intérieure ; non- {eulement elle eft accompagnée de douleur, de fie- vre, d'un violent battement de flanc, d’une grande rougeur dans les yeux, d’une excrétion abondante de matiere écumeufe ; mais l'air, ainfi que les ali- mens , ne peuvent que difficilement enfler Les voies ordinaires qui leur font ouvertes ; &c file mal aug- mente , & fe répand fur la membrane qui tapile Pintérieur du larynx & du pharynx , & fur les glan- des qu’elle renferme, lobftacle devient tel , que da refpiration & la déglutition font totalement intercep- tées ; 8c ces fonétions effentielles étant entierement fufpendues, l'animal eft dans le danger Le plus prefà fant. Notre imprudence eft communément la caufe pre: nuetede cette maladie. Lorfque nous expofons à un air froidun cheval qui eft en fueur, nous donnons lieu à une fupprefon de la tranfpirationt or les liqueurs 72 ET KR qui futchargent la mafle, fe dépofent fur es parties les moins difpofées à réfifter à leur abord; &cles por- tions glanduleufes de la gorge , naturellement affez lâches, &c abreuvées d'une graride quantité d'hu- meur muqueufe , font le plus fréquemment le lieu où elles fe fixent. 2°, Dès que nous abreuvons un che- val aufli-tôt après un exercice violent, & que nous lui préfentons une eau vive & trop froide ; ces mé- mes parties en fouffrant immédiatement l’impreffion, la boiflon occafionneid’une part le reflerrement fou- dain de toutes les fibres ide leurs vaifleaux , &c par une fuite immanquable, celui des pores exhalans, & des onifices de leurs tuyaux excrétoires. D'un autre côté, elle ne peut que-procurer l’épaifliflement de toutes les humeuts contenues dans ces canaux, dont les paroïs font d’ailleurs affez fines & afflez délices pour que les corpufcules frigorifiques agiflent &c s’exercent fur les liqueurs qui y circulent. Ces pre- miets éffets, qui produifent dans lhomme une ex- tinétion de voix ou un enrouement, fe déclarent dans le cheval par uñe toux fourde, à laquelle fouvent tous les accidens ne fe bornent pas. Les liqueurs étant retenues & arrêtées dans les vaiffeaux, celles qui y affluent font effort contre leurs parois, tandis qu’ils n’agiffent eux-mêmes que fur le liquide qui les contraint : celui-ci preflé par leur réa&tion, gêné par les humeurs en ftafe qui s’oppofent à {on paflage, & poufé fans cefle par le fluide qu'il précede, fe fait bientôt jour dans les vaifleaux voifins. Tel qui ne recoit, pour ainf dire, que les globules féreufes, étant forcé , admet les globules rouges ; & c’eft ainfñ qu’accroît l’engorgement, qui peut encore être fuivi d’une grande inflammation, vü la diftenfion extraor- dinaire des folides , leur irritation , & la perte de leur fouplefe enfuite de la rigidité qu'ils ont acquife. Ces progrés ne furprennent point, lorfqu’onréflé- chit qu'il s’agit ici des parties garnies & parfemées de nombre de vaifleaux prépofés à la féparation des humeurs, dont l’excrétion empêchée & fufpendue, doit donner lieu à de plus énormes ravages. En effet, l'irritation des folides ne peut que s'étendre & fe communiquer des nerfs de la partie à tout le genre nerveux : il y a donc dès-lors une augmentation de mouvement dans tout le fyftème des fibres & des vaifleaux. De plus, les liqueurs arrêtées tout-à-coup par le refferrément des pores & des tuyaux excré- toires, refluent en-partie dans la mafle, à De elles font étrangeres ; elles l’alterent inconteftable- ment , elles détruifent l'équilibre qui doit y regner. En faut-il davantage pour rendre la circulation irré-. guliere, vague & précipitée dans toute fon étendue ; pour produire enfiñ la flevre, & en conféquence la dépravation de la plüpart des fonétions, dont l’ex- crétion parfaite dépend toüjours de la régularité du mouvement circulaire ? Un funefte enchaînement de maux dépendant les uns des autres, &c nereconnoïffant qu'une feule & même caufe, quoique legere, entraîne donc fouvent la deftruétion & l’anéantiflement total de la machi- ne, lorfqu’on ne fe précautionne pas contre les pre- miers accidens, ou lorfqu’on a la témérité d’entre- ‘prendre d’y remédier fans connoître les lois de l’éco- nomie animale , & fans égard aux principes d’une faine Thérapeutique, Toutes les indications curatives fé réduifent d’a- bord ici à favorifer la réfolution. Pour cet effet on vuidera les vaifleaux par d’amples faignées à la ju- gulaire, que l’on ne craindra pas de multiplier dans les efquinancies graves. On prefcrira un régime dé- layant, rafraîchiffant : l’animal fera tenu au {on & à l’eau blanche; on lui donnera des lavemens émol- liens régulierement deux ou trois fois par jour; & la même décoétion préparée pour ces lavemens, mêlée avec fon eau blanche , fera une boiflon des ET R plusfalutaires. Sila fievre n’eft pas confidérable, on pourra lui adminiftrer quelques lecers diaphoréti- ques, àl’effet de rétablir la tranfpiratron, & de pouf- er en-dehors, par cette voie, l’humeur furabon- dante. Les topiques dont nous uferons, feront, dans le cas d’une grande inflammation , des cataplafmes de plantes émollientes ; 8: dans celui où elle ne feroit que foible & legere, & où nous appercevrions plü- tôt un fimple engorgement d’humeurs vifqueufes, des cataplafmes réfolutifs. Lors même quele mal ré- fidera dans l’intérieur, on ne ceflera pas les applica- tions extérieures ; elles agiront moins efficacement, “maïs elles ne feront pas inutiles, puifque les vaif- feaux de toutes ces parties communiquent entr'eux,, êt répondent les uns aux autres, Si la fquinancie ayant été néglipée dès les com= mencemens , l'humeur forme extérienrement un dé- pôt qui ne puifle fe terminer que par la fuppuration;, on mettra en ufage les cataplafmes maturatifs ; on examinera attentivement la tumeur, & on l’ouvrira: avec le fer aufli-tôt que l’on y appercevra de la fluc- tyation. Il n’eft pas pofible de foulager ainf l’amimal dans la circonftance où le dépôt eft interne ; tous les chemins pour yarriver, & pour reconnoître préci- fément le lieu que nous devrions percer, nous font interdits : mais les cataplafmes anodyns fixés exté- rieurement , diminueront la tenfion & la douleur. Nous hâterons la fuppuration , en injeétant des lx- ueurs propres à cet eflet dans les nafeaux de l’ani- mal, & qui tiendront lieu des gargarifmes que l’on prefcrit à l’homme; comme lorfqu'il s’agira de re- foudre , nous injeéterons des liqueurs réfolutives. Enfin la fuppuration étant faite & le dépôt abcédé,, ce que nous reconnoîtrons à la diminution de la fie- vte, à l’excrétion des matieres mêmes, qui flueront en plus ou moins grande quantité de la bouche du. cheval ; à une plus grande liberté de fe mouvoir, & a nous lui mettrons plufeurs fois par jour des billots enveloppés d’un linge roulé en plufieurs doubles, que nous aurons trempés dans du miel rofat. Toute inflammation peut fe terminer par-là en. gangrene , & l’efquinancie n’en eft pas exempte. On conçoit qu'alors le mal a été porté à fon plus haut degré. Tous les accidens font beaucoup plus vio- lens. La fievre , lexcrétion des matieres vifqueufes,, qui précede la féchereffe de la langue & l’aridité de toute la bouche ; l’inflammation &c la rougeur des yeux, qui femblent fortir de leur orbite; l’état in- quiet de l'animal, l’impoffbilité dans laquelle il eft, d’avaler, fon oppreflion, tout annonce une difpofi- tion prochaine à la mortification. Quand elle eft for- mée, la plüpart de ces fymptomes redoutables s’é vanoiiflent, le battement de flanc eft appaité , la douleur de la gorge eft calmée , la rougeur de l'œil difipée, l'animal, en un mot, plus tranquille ; mais. on ne doit pas s’y tromper, l'abattement occafonne plütôt ce calme êt cette tranquillité faufle & appa- tente, que la diminution du mal. Si l’on confidere exattement le cheval dans cet état, on verraque fes yeux font ternes & larmoyans, que le battement de fes arteres eft obfcur ; & que du fond du fiége de la maladie s’échappent & fe détachent des efpeces de filandres blanchâtres , qui ne font autre chofe que: des portions de la membrane interne du larynx & dupharynx, qui s’exfolie : car la gangrene des parties internes, principalement de celles qui font membra- neufes, eft fouvent blanche. | Ici le danger eftextrème. On procédera à la cure par des remedes modérément chauds , comme par des cordiaux tempérés : on injeCtera par les nafeaux du vin dans lequel on aura délayé de la thériaque, ou quelques autres liqueurs fpiritueufes : on applique- raextérieurement des cataplafmes faitsavec des plan- tes : Di À tes réfolutives les plus fortes, & fur lefquels on aura fait fondre de l’onguent ftyrax ; & l’on préviendra Vanéantidement dans lequel la dificulté d’avaler précipiteroit inévitablement l’ansmal , par des lave- mens nutritifs, | . Quant à lobftacle qui prive l'animal de la faculté de refpirer, ‘on ne peut frayer un pañlage à l'air, au- quel la glotte n’en permet plus, qu’en faifant une ou- verture à la trachée, c’eft-à-dire en ayant recours à la bronchotomie ; opération que j'ai pratiquée avec fuccès, & que j'entrepnis avec d'autant plus de con- fance, qu’elle a été premierement tentée fur les ani- maux : car Avenfoër parmi les Arabes, ne la recom- manda fur l’homme qu'après l’expérience qu'il en fit ku-même fur une chevre. Il s’agifloit d’un cheval réduit dans un état à n’6- ter tout efpoir de le guérir, au moins par le fecours des remedes, Il avoit un battement de flanc des plus vifs: l’œ1l appercevoit fenfiblement À l’infer- tion de l’encolure dans de poitrail, une fréquence & une intermittence marquée dans la pulfation des ca- æotides. Les arteres temporales, ou du larmier, me firent {entir aufli ce que dans l’homme on appelle 7 pouls caprifant, Les veines angulatres & jugulaires étoient extrèmement gonflées ; Le cheval étoit com- me hors d’haleine , & pouvoit à peine fe foûterur ; fes yeux étoient vifs, enflammes, &, pour ainfi parler, hors des orbites ; fes nafeaux fort ouverts ; fa langue brûlante & livide , fortoit de la bouche ; une matiere vifqueufe, gluante & verdâtre, en dé- couloit : il n’avaloit aucune forte d’alimens ; Les plus liquides, dont quelque tems anparavant une partie pañloit dans le pharynx, tandis que celle qui ne pou- voit pas enfiler cette voie naturelle, revenoit & fe dégorgecit par les nafeaux , n’outre-pafloient plus la cloïfon du palais : l’inflammation étoit telle enfin, que celle de l'intérieur du larynx fermant l’ouver- ture de la glotte, occafonnoit la dificulté de refpi- rer, pendant que celle qui attaquoit les autres par- ties, étoit la caufe unique de l’impoflibilité de la dé glutition. | Dans des maladies aiguës & compliquées, il faut parer d’abord aux accidens les plus preffans ; des cir- conftances urgentes ne permettent pas le choix du tems, & la néceffité feule détermine. L’animal étoit prêt à fuffequer, je ne penfai donc qu’à lui faciliter la Liberté de la refpiration. Je m’armai d’un biftouri, d’un fcalpel, & je me munis d’une canule de plomb que je fis fabriquer fur le champ ; j’en couvris l’en- trée avec une toile très-fine, & j’attachai aux an- neaux dont elle étoit garnie fur les côtés du pavil- lon, un ken, dans le deffein de l’aflujettir dans la trachée. Le cheval: pendant ces préparatifs, étoit tombé, je fus contraint de l’opérer à terre; je le pouvois d’autant plus aifément, que fa tête n’y repofoit point, & que cette opération eft plus facile dans l’animal que dans l’homme, en ce que, 1° l’étendue de fon encolure préfente un plus grand efpace; & parce qu’en fecond lieu , non-feulement le diametre du canal que je voulois ouvrir eft plus confidérable, mais 1l eft moins enfoncé & moins diftant de l’enve- loppe extérieure. La partie moyenne de l’encolure fut le lieu qui me parut le plus convenable pour mon opération, atten- du qu’en ne m'adreffant point à la portion fupérieu- re, je m'éloignois de l’inflammation , qui pouvoit avoir gagné une partie de la trachée; &c que plus près de la portion inférieure , je courois rifque d’ou- tx des rameaux artériels & veineux provenant #es carotides & des jugulaires , & qui par des varia- tions fréquentes font fouvent en nombre infini dif perfées à l'extérieur de ce conduit. Jemployaïi enfyite un aide, auquel j’ordonnai de Tome FI, É E T R 73 piicer conjointement avec moi, & du côté Obpofé ; la peau, à laquelle je fis une incifion de deux trac vers de doigts de longueur. Je n’intéreflai que les té. gumens ; & les muicles étant à découvert, je les. {éparai feulement pour voir la trachéezartere, à la- quelle je fis une ouverture dans l'intervalle de deux de fes anneaux , avec un fcalpel tranchant des deux côtés. L'air fortit aufli-tôt impétueufement par cette nouvelle iflue , & cet effort me prouve que la glotte étoit prefqu’entierement fermée ; & que la petite quantité de celui qui arrivoit dans les poumons par l'infpiration, s’y raréfioit, & ne pouvoit plus s’en échapper. Le foulagement que l'animal en reffentit, fut marqué. Dès cette grande expiration , & au moyen des mouvemens alternatifs qui la fuivirent : 1l fut moins inquiet, moins embarraflé, Ces avan- tages me flaterent , & j’apportai toutes les atten- tions néceflaires pour aflürer le {uccès de mon Opé= ration, La fixation de la cannle étoit un point important ; il falloït l’arrêter de maniere qu’elle ne püt entret ni {ortir toute entiere dans la trachée ; accident qui au roit été de la derniere fatalité, foit par la difficulté de l'en retirer, foit par les convulfons affreufes qu'elle - auroit infailliblement excitées par fon imprefon fur une membrane d’ailleurs f fenfible , que la moindre partie des alimens qui fe détourne des voies ordinai- res, 6€ qui s’y infinue, fufcite une toux qui ne cefle qu'autant que par cette même toux l'animal parvient à l’expulfer. Maïs les liens que j’avois déjà attachés aux an- neaux , me devenoient inutiles ; la forme 8 les mou: vemens du con du chéval, rendoient ma précaution infufifante, Jimaginai donc d’ôter les bandelettes s &c je pratiquai deux points de future, un de chaque côté, qui prit dans ces mêmes anneaux, & dans les levres de la plaie faite au cuir. La canule ainfi affti- rée , je procédai au panfement, qui confifta fimple- ment dans lapplication d’un emplâtre fenétré fait avec de la poix, par conféquent très-agelutina- tif, que je plaçai , comme un contentif & un défenfif capable de garantir la plaie de l’accès de l'air exté- rieur ; & je n'eus garde de mettre en ufage la char- Pie, dont quelques filamens auroïent pû s’introduire dans la trachée. Ce r’étoit point encore aflez ,» les points de future maintenant la canule de façon à s’op- pofer à fon entrée totale dans le conduit, qu’elle te- noit ouvert ; mais fa fituation pouvoit être changée par les différentes attitudes de la têtede l'animal, qui étant muë en-hant & en-avant, auroit pà la tirer hors du canal : aufi prévins-je cet inconvénient, en aflujettiflant cette partie par une martingale attachée d'un côté à un furfaix qui entouroit le corps du che- val, êc de l’autre à la muferole du licou; enforte que je le contraignis à tenir fa tête dans une pofition prefque perpendiculaire. Je Ini fs enfuite une ample faignée à la jugulaire feulement, dans l'intention d’é: vacuer ; & le même foir jen pratiquai une autre à la faphene, c’eft-à-dire à la veine du plat de la cuifle, dans la vûe de folliciter une révulfion. La canule demeura cinq jours dans cet état. Les principaux accidens difparurent infenfiblement ; _& je ne doute point que cet amandement ,-qui fut vifi= ble deux heures même après que j’eus opéré » ne {oit, dù à la facilité que j’avois donnée au cheval d’infpi- rer & d'expirer, quoiqu’artificiellement : l’anxiété, l'agitation, & enfin l’anéantiffement dans lequel if étoit, provenant fans doute en partie de la contrain- te & de la difficulté de la refpiration; contrainte qui caufoit une intermiffion de la circulation dans les poumons ; & intermifion qui ne pouvoit que retar- der & même empêcher la marche & la prosrefion du fluide dans toutle refte du corps, puifque toute la K. 74 ETR mafle fanguine eft néceflairement obligée de pañler parce vifcere. | L'animal fut néanmoins encore trois jours après l'opération , fans recouvrer la faculté d’avaler des alimens d'aucune efpece, & fanspouvoir refpirer par le larynx. Je pris pendant cet'intervalle de tems, le parti de le foûtenir par des lavemens de lait, tantôt pur, & tantôt coupé avec de l’eau dans laquelle je faifois bouillir uneou deux têtes de mouton , juf- qu'à entiere féparation de latchair & des os. L'effet de ces davemens ne pouvoit être que falutaire, pufqu’ils étoient très-capables de tempérer l’ardeur des entrailles, & qu’une quantité de fucs nutritifs s’introduifoit tohjours dans le fang par la voie des vaifleauxlaétés qui partent des gros inteftins , & que J'ai appércüs très-diftinétement dans le cheval. Télles étoient les reffources legeres dont je profi- tois : J'enavois encore moins pour placer des garga- rifmes, cependant effentiels & néceffaires, dès qu'il falloit.calmer l’ardeur &: la fécherefle des parties du gofier, les détendre, diminuer l’efpece d’oblitération de leurs orifices excréteurs, & rétablir enfin le cours de la circulation. J’injeétai à cet effet par la bouche & par les nafeaux une déco@ion d'orge, dans laquelle je mettois du-miel-rofat & une petite dofe de fel de Saturne. L’injeétion par la bouche poufloit la liqueur jufqu’à la cloïfon du palais, & jufque fur la bafe de la langue ; & celle que j’adreflois dans les nafeaux , s’étendoit par les arriere-narines jufque fur les par- ties enflammées de l’arriere-bouche , qu’elle baignoit &c qu’elle détrempoit. Je laffai encore dans la bou- che de l’animal, des billots que je renouvellois tou- tes les deux heures, & que j’avois entourés d’une éponge fortement imbuë de cette même décoftion. Mes vœux furent remplis le quatrieme jour ; les ali- mens liquides commencerent à pañler, ce que je re- connus en voyant defcendre la liqueur injeétée le long de l’œfophage, dont la dilatation eft fenfible à l'extérieur dans le tems de la déglutition ; & lorfque je bouchoïs la canule, l’air expiré frappoit & échauf- foit ma main au moment où je la portois à lorifice externe des nafeaux. Je retirai donc cet inftrument, êc je mis fur la plaie de la trachée-artere, qui, au- tant que j'en pus juger, fut fermée dans lefpace de trois jours, un.plumaceau trempé dans une décoc- tion vulnéraire &c du miel-rofat. J’eus la précaution de le bien exprimer, dansla crainte qu’il n’en entrât dans le conduit, & je couvris le tout d’un grand plumaceau garni de baume d’arcéus , que je tentai d’aflujettir par un large collier ; mais le foir je trou- vai mon appareil dérangé , & la difficulté de le main- tenir me fit changer de méthode. Je crus n’entrevoir aucun danger à procurer la réunion des tégumens , J'y pratiquai un point de future qui fut fufifant ; car cette réunion commençoit à avoir lieu dans les an- gles. Je chargeai la plaie d’un plumaceau enduit du même baume , & j’appliquai par-deflus ce pluma- ceau un emplâtre contentif : aufli Le fuccès répondit à mon attente ; il ne furvint point d’emphyfeme, accident que j’avois à redouter, & la plaie de la peau fut cicatrifée le fixieme jour, ce qui eñ fait en tout onze depuis celui de l’opération. | J'ai dit que dès le quatrieme les alimens liquides commençoient à pañler. Je fis donc préfenter au che- val de leau-blanche avec Le fon ; il n’en but qu’une feule gorgée, & je continuai toùjours les lavemens, quoiqu’enfin il parvint à boire plus aifément & plus copieufement de l’eau , dans laquelle je fis mettre de la farine de froment : le tout pour réparer la longue abftinence, & pour rappeller fes forces. Je ne ceflai point encore les gargarifmes ; l’inflammation des par- tes intérieures avoit été fi confidérable, que je crus devoir prolonger & réitérer fans cefle mes injec- tions , & elles étoient fi convenables, qu'il furvint une forte de mortification à toutes ces patties. En effet, l’ardeur s'étant calmée , le pouls étoit concentré & confervoit fon irrégularité ; les yeux, de vifs & ardens qu'ils étoient , devinrent mornes 6e larmoyans ; la fenfbilité des parties afflé@ées paroif- foit moindre , ou plûütôt le cheval fembloit moins fouffrir, mais ilétoit dans un état d’abattement quine me préfageoit rien que de funefte. J’ajoûtai à mes in- jeétions quelques gouttes d’eau-de-vie, & la morti. fication que je foupçonnois fe déclara par le figne pathognomonique ; car je vis fortir par la bouche une humeur purulente, jointe à plufeurs petits filas mens blanchâtres , tels que ceux dont jai parlé. . Après la chüte de cette efpece d’efcharre, les par- ties affeétées devinrent de nouveau fenfbles : jen jugeai par la crainte & par la répugnance que lani- mal avoit pour les injeétions. Je fubftituai le vin à l’eau-de-vie, ce qui les rendit plus douces, & plus appropriées à des parties vives & exulcérées. Enfin au bout de vingt jours je le purgeai : cinq jours après je réitérai la purgation ; enforte que opération, les deux faignées qui lui fuccéderent , leslayemens nour- : rilans, le lait, le fon, la farine de froment , l’eaw blanche , les gargarifmes & les deux breuvages pur- gatifs, furent les remedes qui procurerent la guéri- fon radicale d’une maladie qui difparut au bout d’un mois. C’eft affürément au tempérament de l'animal que doit fe rapporter la ceffation de la mortification, ain- fi que l’exfoliation & la cicatrifation des parties ul- cérées. La nature opere en général de grandes mer- veilles dans les chevaux; elle feconde même les in- tentions de ceux qui la contrarient fans la connoître, & qui ne favent mi la confulter ni la fuivre : car on peut direhautement, à la vüe de l'ignorance des Ma- réchaux , que lorfqu'ils fe vantent de quelques fuc- cès , ils ne les doivent qu'aux foins qu’elle 4 eus de rettifier leurs procédés & leursdémarches, D'ailleurs l'expérience nous démontre que dans cet animal les plaies fe réunifent plus aifément que dans l’homme ; la végétation , la régénération des chairs eft plus prompte & plus heureufe, elle eftmême fouvent trop abondante ; les ulceres, les abcès ouverts y dégé- nerent moins fréquemment en fiftules : fon fang eft donc mieux mêlangé , il eft plus fourni de parties _ gélatineufes, douces & balfamiques ; il circule avec plus de liberté , fe dépure plus parfaitement, eft moins fujet à la diffolution & à la dépravation que le fang humain , perverti & fouvent décompofé par un mauvais régime &c par des excès. Ces réflexions néanmoins ne prouvent eflentiel- lementrien contre l’analogie du méchanifme du corps de l’homme & de l’animal : elle eft véritablement conftante. S’éloigner de la route qui conduit à la gué- rifon de l’un , & chercher de nouvelles voies pour la guérifon de l’autre, c’eft s’expofer à tomber dans des écarts continuels. La fcience des maladies du corps humain préfente à l’Hippiatrique une abondante moiflon de découvertes & de richefles , nous de- vons les mettre à profit ; mais la Medecine ne doit pas fe flater de les pofféder toutes : l’'Hippiatrique cultivée à un certain point, peut à fon tour devenir un thréfor pour elle. (e) ETRAQUE, 1.f. (Marine. c’eft la largeur d’un bor- dage, Erraque de gabord, premiere étrague, c’eft la largeur du bordage qui eft entaillé dans la quille. (Z} ÉTRAVE, f. f. (Marine) L’érrave eft une ou plu- fieurs pieces de bois courbes qu’on aflemble à la quille, ou plütôt au ringeot par une empature , com- me les pieces de quille le font les unes avec les au- tres ; elle termine le vaifleau par l’avant.On la fait or- dinairement de deux pieces empatées l’une à l’autre. Les empatures de l’ésrave ont de longueur au moins quatre fois l’épaiffeur de la quille. ETR Comme les bordages & les préceintes de l'avant vont fe terminer fur l’érave, on y fait une rablure pour les recevoir. Voyez , Planche IF. de Marine, fig. 4,29, 3. la fituation de l’etrave. On a coûtume de piéter l’ésrave , c’eft-à-dire qu’on la divife en piés fuivant une ligne perpendiculaire. Ces divifons font.très-commodes dans l’armement , pour connoître le tirant d’eau des vaifleaux à l’a- Vant. La largeur de l’ésrave eft égale à la largeur de la quille par le bas ; fon bpaïfièue en cet endroit eft aufli égale à l’épaifleur de la quille, mais elle ang- mente en-haut de quatre lignes & demie par pouce de largeur. .… Pour avoir la hauteur de l’érrave, plufieurs conf- truéteurs prennent un quart de la longueur de la quille, ou un peu moins ; d’autres un dixieme ou un douzieme de la longueur totale du vaiffeau. Il vaut mieux établir la hauteur de l’ésrave en ad- ditionnant la hauteur du creux, le relevement du premier pont en-avant, la diftance du premier au fecond pont , de planche en planche, l’épaiffeur du bordage du fecond pont, la diftance du fecond au troifieme pont, l’épaifleur du bordage du troifieme pont, la tonture du barrot du troïfieme pont à l’en- droit du coltis, & deux fois la hauteur du feuillet des fabords de la troifieme batterie, | Ileft clair que, comme l’étrave doit s'étendre de toute la hauteur du vaifleau , la fomme des diféren- tes hauteurs que nous venons de marquer, doit donner celle de l’ésrave ; mais ces hauteurs ne font point les mêmes pour les vaifleaux de différent rang, & chaque conftruéteur les peut changer fuivant fes différentes vües. Mais en fuivant la méthode ci-def- fus , il fera aifé de l’appliquer à tous vaifleaux de différentes grandeurs: voici cependant un exemple pour la rendre plus fenfible fur un vaifleau de cent dix pieces de canon. La hauteur du creux eft de 23 piés opouc. lig, Le relevement du premier pont à lPavant eft . . 2 7 La hauteur du premier au | fecond pont doit être de 6 9 L’épaifleur du bordage du fecond pont, .: . 4 La hauteur du fecond au troifieme pont, de . . 6 8 Epaifleur des bordages du troifieme pont,, . . 3 La tonture du barrot du troi * fieme pont à l’endroit du coltis, peut avoir environ Pr: Enfin deux fois la hauteur du feuillet des fabords de la troifieme batterie, DRE 2 En additionnant toutes ces ommes , la hauteur de l’é- trayve réduite à la perpen- diculaire fera de . . 41 piés 9 pouc. 7 lig. Il eft bon d’obferver que pour les frégates qui n’ont qu’un pont, il faut additionner le creux, le re- levement du pont en-avant, la hauteur du château d'avant , de planche en planche, l’épaifleur du bor- dage de ce château, & le bouge du barrot du châ- teau à l’endroit du coltis ; ce qui donnera la hau- teur de l’ésrave pour ces {ortes de bâtimens. A l'égard de l'échantillon de cette piece, c’eft- ä-dire fa groffeur , on la regle fur la grandeur du Vaifleau. Dans un vaifleau de 176 piés de long, elle a d’é- païfleur fur le droit un pié cinq pouces, & de lar- geur fur le tour un pié neuf pouces, Tome VI, ETR 75 Dans un vaiffeau de 1 so piés de long, elle a d’é- pafleur fur le droit 1 pié 2 pouces 5 lignes, & de largeur fur le tour un pié fix pouces huit lignes. Dans un vaifleau de 96 piés de long, fon épaaf- feur dix pouces, fa largeur un pié deux pouces fix lignes. La proportion entre ces trois grandeurs eft aifée a trouver. (Z ETRAYERS, (Jurifpr.) fuivant des extraits des repiftres de la chambre des comptes , dont Bacquet fait mention en fon traité du droit d'aubaine , chap. Jv. {ont les biens demeurés des aubains & épaves (c’eft-à-dire étrangers venus de fort loin) qui font demeurans dans le royaume, & vont de vie à tré- pas fans hoirs naturels de leur corps nés dans le . royaume. - Cés mêmes extraits portent qu'érayers font pa- reillement les biens des bâtards qui vont de vie à trépas fans hoirs naturels de leir corps ; & que tels biens appartiennent au roi. Voyez ci-après ETREU- RES, qui a quelque rapport à étrayer, (4 ÊTRE , {. m. (Méaph.) notion la plus générale de toutes, qui renferme non-feulement tout ce qui eft, a été, ou fera, mais encore tout ce que l’on conçoit comme poflble, On peut donc définir l’é- tre ce à quoi l’exiftence ne répugne pas. Un arbre qui porte fleurs & fruits dans un jardin eft un étre; mais un arbre caché dans le noyau ou dans le pe- pin n’en eft pas moins un, en ce qu'il n'implique point qu'il vienne au même état. Il en eft de mé- me du triangle tracé fur le papier , ou feulement conçu dans l'imagination. Pour arriver à la notion de l’ére , il fuffit donc de fuppofer unies des chofes qui ne font point en contradiétion entre elles , pourvû que ces chofes ne foient point déterminées par d’autres, ou qu’el- les ne fe déterminent point réciproquement. C’eft ce qu'on appelle l’effence par laquelle l’ére eft pof- fible. Voyez ESSENCE, ATTRIBUT, MODE. ÊTRE FEINT , c’eft un ére auquel nous fuppofons que l’exiftence ne répugnepas,quoiqu’elle luirépugne en effet. Cela arrive, par exemple, lorfque notreima- gination combine des parties qui femblent s’ajufter, mais dont lé tout ne pourroit néanmoins {ubffter.Un peintre peut joindre une tête d’homme à un corps de cheval, & à des piés de bouc; maïs un peu d’atten- tion à la difproportion des organes , montre que leur affemblage ne produiroit pas un &re vivant. Cepen- dant comme on ne fauroit abfolument démontrer l’impoñlibilité de ces éres, on les laiffe dans la clafe des érres ; &c 1l faut les nommer ébres feines. ÊTRE IMAGINAIRE, c’eft une efpece de repré- fentation qu'on fe fait de chofes purement abftrai- tes, & qui n'ont aucune exiftence réelle, ni même poflible. L'idée de l’efpace & du tems font ordinai- -rement de ce genre. Les £rfiniment perits des Mathé- maticiens font des érres purement émaginaires , qui ne laïffent pas d’avoir une extrême utilité dans Part d'inventer. Une telle notionimaginaire met À la place du vrai une efpece d’érre , qui le repréfente dans la recherche de la vérité : c’eft un jetton dans le calcul, auquel il faut bien prendre garde de ne pas donner une valeurintrinfeque , ou une exiftence réelle, Foy. DIFFÉRENTIEL, INFINI, Ge. ÊTRE EXTERNE, c’eft celui qui a une relatiog quelconque avec un ére donné, ÊTRE SINGULIER , y0yez INDIVIDU. ÊTRE UNIVERSEL, c’eft celui quin’a pas toutes | fes déterminations, mais qui ne contient que celles qui font communes à un certain nombre d'individus -ou d’efpeces. Il y a des degrés d’univerfalité qui vont en augmentant à mefure qu'on diminue le nombre des déterminations, & qui vont en diminuant quand les déterminations fe multiplient, Les &res univerfaux K ij 76 ETR qui ne font autre chofe-que les genres &tlesefpeces, fe forment par abfiraétion, lorfque nous ne confi- dérons que les qualités communes à certains érres, pour en former une notion fous laquelle ces éres foient compris. La fameufe queftion de l’exiftence 4 parte rei des univerfaux, qui a fair tant de bruit au- trefois mérite à peine d’être indiquée aujourd’hui. Pierre & Paul exiftent : mais où exifte l’idée géné- rale de homme , ailleurs que dans le cerveau qui l’a conçde ? Voyez ABSTRACTION. ÊTRE ACTUEL, c’eft celui qui exifte avec toutes fes déterminations individuelles, & on l'appelle ainfi par oppofition au fuivant. ÊTRE POTENTIEL 04 EN PUISSANCE, c’eft cel qui n’eéxiflepas encore, mais qui a ou peut avoir fa raifon fufifante dans des érres exiftans: c’eft ce qu’on appelle la piffance prochaine. Mais quand les érres qui renferment la raifon fufifante de quelques au- tres n’exiflent pas encore eux-mêmes, la puiffance des étres qui en doivent réfulter eft dite éloignée ; & cela plus ou moins, à proportion de Péloignement où font de l’exiftence les ésres qui renferment leur raïon d’exiftence, Une femence féconde à laquelle il ne manque que le tems & la culture, eft dans la puiffance prochaine de devenir la plante ou Parbre qwelle contient ; mais les plantes de même efpece qui viendront de la femence produite par la plante qui eft encore cachée elle-même dans fa femence, ne font que dans une puiflance éloignée. ÊTRE POSITIF, c’eft celui qui confifte dans une réalité, & non dans une privation. La vûe, par exemple, la lumiere, font des érres pofirifs qui défi- gnent des chofes réelles dans les fujets où ils fe trou- vent. | ÊTRE PRIVATIF , C’eft celui qui n'exprime qu'un défaut , & l’abfence de quelque qualité réelle : tels font l’aveuglement, les ténebres, la mort. On trans- forme fouvent par une not:on imaginaire ces priva- tions en érres réels, & on leur donne gratuitement des attributs pofitifs: cependant c’eft un abus, & l’érre privatif n’eft autre chofe que la négation de tout ce qui convient à l’ésre poñtif. ÊTRE PERMANENT, c'eft celui qui a toutes fes déterminations effentielles à la fois. Un horloge eft un ére permanent, dont toutes les parties exiftent enfemble. ÊTRE succEssIF, c’eft celui dont les détermi- nations eflentielles font fucceflives : tel eft le mou- vément, dont une détermination n’exifte qu'après l’autre. ÊTRE SIMPLE, COMPOSÉ, FINI, INFINI, NÉ- CESSAIRE , CONTINGENT , VRAI; voyez-en les arti- cles, Article de M. FORMEY. ÊTRE MORAL, (Droit nar.) Les êtres moraux font certaines modifications attachées aux chofes, foit effentiellement par la volonté divine, foit par irif- titution humaine pour le bonheur & lavantage des hommes dans la fociété, autant qu’elle eft fufcepti- ble d’ordre & de beauté, par oppoñition à la vie des bêtes. Tous les étres moraux eflentiellement attachés aux ‘chofes, peuvent être réduits à deux, le droit & l’o- blisation : c’eft-là du moins le fondement de toute moralité ; Car on ne reconnoit rien de moral , foit ‘dans les attions, foit dans les perfonnes, qui ne ” vienne ou de ce que l’on a droit d’agir d’une cer- taine maniere, où de ce que l’on y eft obligé. Les étres moraux qui ont été produits par l’inftitu- tion divine, ne peuvent être anéantis que par le créateur : ceux qui procedent de la volonté des hommes , s’aboliffent par un effet de la même vo- lonté , fans pourtant que la fubftance phyfique des perfonnes reçoive en elle-même le moindre change- “ment. Par exemple, quand un gentilhomme eft dé- grade , il ne perd que les droits de la nobleffe ; tout ce qu'il tenoit de la nature fubfifte toujours en fon entier : c’eft ce qu'exprime fi bien le beau mot de Démetrius de Phalere , lorfqu’on eut appris à ce phi- lofophe que les Athéniens avoient renverfé fes ta- tues ; mais, répondit-il, i/s n'ont pas renverfé la ver- tu en confidération de laquelle ils me les avoient dref. Jêes. Article de, M: le Chevalier DE JAUCOURT. ÊTRE SENSITIF o4 ÂME, voyez EVIDENCE. TRE SUPRÈME, Dieu, premiere caufe , intel- ligence par effence. Voyez EVIDENCE. | ETRÉCIR un CHevaL, ( Manége & Maréchal.) c’eft l’amener infenfiblement fur un terrein moins étendu ; c’eft en refferrer la pifte. (e) | ETRÉCIR , (S-) ation du cheval qui diminue, en fe refferrant lui-même, l’efpace fur lequel on l’e- xerce, & qui faufle ainf les lignes qu’il devroit dé- crire. Voyez RETRÉCIR 6: ELARGIR. (e) ETRENNES, ff (Hiff. anc. & mod.) préfens que lon fait le premier jour de l’année. Nonius Mar- cellus en rapporte fous les Romains l’origine à Tatius roi des Sabins, qui régna dans Rome conjointement avec Romulus, & qui ayant regardé comme un bon augure le préfent qu’on lui fit le premier jour de Pan de quelques branches coupées dans un bois confa- cré à Sérenua déefle de la force, antorifa cette coù- tume dans la fuite, & donna à ces préfens le nom de ffrenæ, Quoi qu'ilen foit, les Romains célébroient ce jour-là une fête de Janus, & honoroïent en mè- me tems Junon ; mais ils ne le pafloient pas fans travailler, afin de n'être pas parefleux le refte de l’année. Ils fe faifoient réciproquement des préfens de figues, de dattes, de palmier, de miel, pour té- moigner à leurs amis qu’ils leur fouhaitoient une vie douce & agréable. Les cliens, c’eft-à-dire ceux qui étoient fous la protetion des grands, portoient ces fortes d’érrennes à leurs patrons , & y joignoient une petite piece d'argent. Sous l'empire d’Augufte, le fénat, les chevaliers, & le peuple, lui prétentoient des étrennes, & en fon abfence ils les dépofoient au capitole. On employoit le produit de ces préfens à acheter des ftatues de quelques divinités; l’empereur ne voulant point appliquer à fon profit les libéralités de fes fujets : de fes fucceffeurs , les uns adopterent cette coutüme , d’autres labolirent ; mais elle n’en eut pas moins lieu entre les particuliers. Les pre- miers chrétiens la defapprouverent, parce qu’elle avoit trait aux cérémonies du Pagamifme , & qu’on y mêloit des fuperftitions : mais depuis qu'elle n’a plus eu pour but que d’être un témoignage d’eftime ou de vénération , l’Eglife a ceffé de la condamner. Voyez AN. (G) ETRENNE , (Comm.) fe dit, parmi les Marchands, de la premiere marchandife qu'ils vendent chaque jour. Ils difent en ce fens : voila mon étrenne : certe étrenne me portera bonheur. Did, de Comm. de Tréy. & Chamb. (G) ETRENNER, v. n. parmi les Commerçans & fur- tout Les Dérailleurs, c’eft commencer à vendre. Me voulez-vous pas m'étrenrer ; je n'ai encore rien vendu. (G | en (Jurifprud.) vieux mot qui fignifoit -extirper, arracher. Voyez Beaumanoir, ch. xljx. lvuiy. & les chap. xxvy. 6 xxvii. du premier livre des établif= èmens. (À) | ETRÉSILLON, ez Architeëture , piece de boïs fer- rée entre deux doffes, pour empêcher l’éboulement des terres dans la fouille des tranchées d’une fonda- tion. On nomme encore érréfllon, une piece de bois aflemblée à tenon 8&c mortaife avec deux crochets, qu'on met dans les petites rues, pour retenir à de- meure des murs qui bouclent & déverfent. Ces érré- fillons > qu'on nomme auf écançons , fervent encore à retenir les pié-droits &c plate-bandes des portes & ETR des croifées, lorfqu’on reprend par fous-œuvre un mur de face, ou, qu’on remet un poitrail à une maï- fon. Ainf érréfillonner, c’eft retenir les terres & les bâtimens avec des doffes & des couches debout, & des érréfillons en-travers. (P) ÉTRIER, f. m. (Manépe.) efpece de grand an- neau de fer ou d'autre métal, forgé & figuré par l’é- peronnier, pour être fufpendu par paire à chaque felle au moyen de deux étrivieres (voyez ETRIVIE- RES); & pour fervir, l’un à préfenter un appui au pié gauche du cavalier lorfqu’il monte en felle & qu'il met pié à terre, & tous les deux enfemble à foûtenir fes piés; ce qui non-feulement l’affermit, mais le foulage d’une partie du poids de fes jambes quand il eft à cheval. On ne voit des veftiges d’aucune forte d’appui pour les piés du cavalier, ni dans les colonnes, ni dans les arcs, ni dans les autres monumens de l’antiquité , fur lefquels font repréfentés nombre de chevaux, dont toutes les parties des harnois font néanmoins parfai- tement diflinétes. Nous ne trouvons encore ni dans les auteurs grecs & latins, ni dans les auteurs an- ciens.des, diétionnaires & des vocabulaires, aucun terme qui défigne l’inftrument dont nous nous fer- vons à cetégard, & qui fait parmi nous une portion de l'équipage du cheval: or le filence de ces mêmes auteurs, ainfi que celui des marbres & des bronzes, nous a porté à conclure que les étriers étoient tota- lement inconnus dans les fiecles reculés , & que les mots fapes , flapia , flapeda , biflapia, n’ont été ima- ginés que depuis que l’on en a fait ufage. . - Xenophon dans les leçons qu’il donne pour mon- ter à cheval, nous en offre une preuve. Il confeille au cavalier de prendre de la main droite la criniere &z les rênes, de peur qu’en fautant il ne les tire avec rudeffe ; & telle eft la méthode de nos piqueurs lorf- qu'ils fautent fur le cheval. Quand le cavalier, dit-il, eft appefanti par l’âge, fon écuyer doit le mettre à cheval à la mode des Perfes. Enfin il nous fait enten- dre dans le même pañlage, qu'il y avoit de fon tems des écuyers qui drefloient les chevaux, de maniere qu'ils fe baïfloient devant leurs maîtres pour leur fa- ciliter Pa@ion de les monter. Cette marque de leur habileté , qu'il vante beaucoup, trouveroit de nos jours plus d’admirateurs dans nos foires que dans nos manéges. Raphaël Volateran , dans fon épitre à Xenophon in re equeflri , nous développé la maniere des écuyers des Perles, & les fecours qu'ils donnoient à leurs maitres ; ils.en foûtenoient, dit-il, les piés avec leurs dos. Pollux & Vegece confirment encore notre idée. Si quelqu'un, felon le premier, veut monter à cheval, il faut qu'il y monte, ou plütôt qu’il y defcende, de deflus un liëu élevé , afin qu'il ne fe bleffe point lui- même en montant; & il doit faire attention dene point étonner &:gendarmer le cheval par l'effort de fon poids & par fa chûte : fur quoi Camérarius a préten- du que le cheval nud ou harnaché, devoit être ac- coûtumé à s’approcher du montoir, foit qu'il fût de pierre, de bois, ou de quelqu’antre matiere folide. Quant à Vegece (liv. I. de re milirari) il nous fait une defcription de l’ufage que les anciens faifoient des chevaux de bois qu'ils plaçoient en été dans les champs, 8 en hyver dans les maïfons. Ces chevaux . fervoient à exercer les jeunes gens à monter à che- val; ils y fautoient d’abord fans armes , tantôt à droit, tantôt à gauche, & ils s’accoûtumoient enfuite infenfiblement à y fauter étant armés. Les Romains imiterent les Grecs dans l’un 8e l’au- tre de ces points. De femblables chevaux de bois étoient propofés à la jeunefle qui s’exerçoit par les mêmes moyens, & qui parvenoit enfin à fauter avec autant d’adreffe que de legereté fur routes fortes de ET R 77 chevaux, À l'égard des montoirs, il y én avoit à quantité de portes, Porchachi dans-fon livre intitulé funerali antichi , rapporte une infcription dans la- quelle le montoir eft appellé fsppedaneum , 8 qu'il trouva gravée fur un monument très-endommagé en allant de Rome à Tivoli, La voici : Dif, ped. facrum, Curie dorfifere & clunifère Ur infüliare G defulsare Cornmoderur. Pub. Craffus mul Sue Crafle bene merenri Suppedaneur hoc, cum rifu pol. La précaution de conftruire des montoirs aux dif. férentes portes & même, fi l’on veut, d’efpaces en efpaces fur les chemins, n’obvioit pas cependant à l'inconvénient qui réfultoit de l'obligation de def cendre & de remonter fouvent à cheval en voyage ou à l’armée ; fans doute que cette aétion étoit moins dificile pour les Romains qui étoient en état d’avoir des écuyers: mais comment ceux qui n’en avoient point & que l’âge ou des infirmités empéchoient d'y fauter, ponvoient-ils fans aucune aide parvenir juf- que fur leurs chevaux ? Ménage en s’étayant de l'autorité de Voffius, à foûtenu que S. Jérôme eft Le premier auteur qui ait parlé des évriers. Il fait dire à ce faint,que lorfqu’il re- çut quelques lettres, ilalloit monter à cheval & qu’il avoit déjà le pié dans l’étrier, 2 biflapia : mais ce paf. fage ne fe trouve dans aucune de fes épîtres. Le P. de Montfaucon en contefe la réalité, ainfi que celle de l'épitaphe d’un romain, dont le pié s’étant engagé dans l’érier, fut trainé fi long-tems par fon cheval qu'il en mourut. Sans doute que cette infcription que tout au moins il regarde comme moderne, ainfi que beaucoup de favans, eft la même que celle qui fuit : D, M. Quifquis leélurus accedis , Cave J? amas , gt finon Amas ; penficula mifer qui Sine amore vivit dulce exit Nihil ; ajt ego tam dulce Anhelans me incaute perdidi , Er amor fuit Equo dum afpeëtus formofiff. Durmioniæ puelle Vireuncule Surmma polvoria placere cuperem Cafu defiliens pes hafît flapie Traitus inferri. In rem tuam maturè propera. Vale. Le même P. de Montfaucon, après avoir témoi. gné fa furprife de ce que des fiecles fi renommés & f vantés ont été privés d’un fecours auf utile, auf néceflaire , & aufli facile à imaginer, fe flate d’en avoir découvert la raifon. « La felle n’étoit alors, dit:1l, » qu'une piece d’étoffe qui pendoit quelque- » fois des deux côtés prefque jufqu’à terre. Elle étoit » doublée & fouvent bourrée. Il étoit difficile d’y » attacher des érriers quitinffent bien , foït pour mon- » ter à cheval, foit pour s’y tenir ferme & commo- » dément. On n’avoit pas encore l’art de faire entrer » du bois dans la conftruétion des felles : cela paroît » dans toutes celles que nous voyons dans les monu- » mens. Ce n’eft que du tems de Théodofe que l’on » remarque que les felles ont un pommeau, & que » felon toutes les apparences, le fond en étoit une » petite machine de bois. C’eft depuis ce tems-[à » qu'on a inventé les érriers, quoiqu’on ne fache pas » précifément le tems de leur origine ». Il eft certain que l’époque ne nous en eff pas con= nue ; mais j’oblerverai que leur forme varia fans doute , felon le goût des fiecles &c des pays où ils 78 E TR furent fabriqués. L’avidité de nos ayeux pour les ornemens , leur fit bien-tôt perdre de vûüe la véri- table deftination de cés parties du harnoïs de mon- ture. Une rofe en filigramme , qu’on pouvoit à peine difcerner de deux pas, & que la moindre éclabouf- fure enfoüifloit ; des nervures d’une eroffeur difpro- portionnée pour porter fur un ésrier la décoration d’un édifice gothique que l’on admiroiït ; une multi- tude d’angles aigus, de tranchans, d’enroulemens entaflés, formoient à leurs yeux une compofition élégante qui leur déroboit les défeänofités les plus fenfbles. | La moins confidérable étoit un poids fuperflu ; elle frappa nos prédécefleurs : mais en élaguant pour remédier , 1ls conferverent quelques ornemens , & 1ls fupprimefent des parties d’où dépendoit la sûreté du cavalier. Nous les avons rétablies : on découvre néanmoins encore dans nos ouvrages de ce genre des refles & des traces de ce mauvais goût. Nous employons, par exemple, beaucoup de tems à for- mer des moulures qui difparoïffent aux yeux, ou que nous n’appercevons qu'à l’aide de la boue qui en rem- plit & qui en garnit les creux ; nous creufons les an- les rentrans quelquefois même aux dépens de la fo- faite ; nous pratiquons enfin des arrêtes vives , aufli déplacées que nuifbles à la propreté. Quoi qu'il en foit, on doit diftinguer dans Perrier, lol, le corps , la planche, & la grille. L’œil n’eft autre chofe que l’ouverture dans la- quelle la courroie on l’étriviere qui fufpend l’ésrier eft pañlée. Le corps comprend toutes les parties de l’anneau qui le forme, à l’exception de celles fur lefquelles le pié fe trouve aflis. | Celles-ci compofent la planche, c’eft-à-dire cette efpece de quadte rond, ou oval, ou quarré long , ou d’autre forme quelconque, dont Le vuide eft rem- pli par la grille ; & la grille eft cet entrelas de verges de même métal que lérrier , deftinée à fervir d’ap- pui aux piés du cavalier , & à empêcher qu'ils ne s'engagent dans le quadre réfultant de la planche avec laquelle elles font fortement foudées. Il n’y a pas long-tems que nos ésriers étoient fans grille. Des accidens pareils à celui qu'éprouva la- mant infortuné dont j'ai rapporté l’épitaphe préten- due, nous perfuaderent de leur néceffité : quelques éperonmers cependant fe contenterent de ramener contre le centre les parties de la planche, qui for- ment l’avant & l’arriere de l’ésrier ; mais ce moyen endommagea d’un autre côté le foulier de la bot- te, & rendit la tenue des esriers beaucoup plus dif- ficile. On en cara@térife afez fouvent les différentes for- tes, eu égard aux différentes figures qui naïffent de divers enlacemens des grilles. Nous difons des ériers à cœur, à quarreaux, à trefles, à armoiries , lorfque les grilles en font formées par des verges contour- nées en cœur , en trefles, en quarreaux, ou lorfqu’- elles repréfentent les armoiries de ceux à qui les étriers appartiennent. ' L’œil doit être fitué au-haut du corps, & tiré de la même piece de métal par la forge. On le perce d’abord avec le poinçon, pour faciliter l'entrée des bouts ronds & quarrés de la bigorne par le fecours de laquelle on l’aggrandit. Sa partie fupérieure faite pour repofer fur l’étriviere, doit être droite, cylin- drique, & polie au moins dans toute la portion de {a furface, qui doit porter & appuyer fur le cuir : elle doit être droite; parce que la courroie naturel- lement plate ne fauroit être pliée en deux fens fous la traverfe qu’elle foûtient, fans que les bords n’en foient plus tendus que le milieu, ou le milieu plus que les bords. II faut qu’elle foit cylindrique , parce que cette forme eft la moins difpofée à couper ou à écorcher ; & c’eft par cette même raïfon qu’elle doit: être polie: il eft de plus très important que les an- : gles intérieurs foient vuidés à l’équerre pour loger ceux du cuir, & que les faces intérieures foient ar- rondies & liflées , puifque ce même cuir y touche & frote fortement contre elles, Du refte la traverfe ne peut avoir moins de deux lignes de diametre; autre- ment elle feroit expofée à manquer de force; & moins d’un pouce & quelques lignes de longueur dans œuvre, l’érriviere que l’œil doit recevoir ayant communément un pouce au moins de largeur. Il eft encore des ésriers dont l’œil eft une partie fé- parée & non forgée avec le corps ; il lui eft fimple- ment aflemblé par tourillon. Cette méthode eut fans doute lieu en faveur de ceux qui chanfent leurs étriers fans attention ; peut-être efpéroit-on que l’é- triviere tordue ou tournée à contre-fens fe détor- droit elle-même, ou reviendroit dans fon fens natu- rel dans les inftans où le pié ne chargeroit pas l’é- trier : mais alors le trou qui traverfe le corps dans le point le plus fatigué, laffoiblit néceffairement ; en Æecond lieu , le tourillon foible par fa nature eft ex- pofé à un frotement qui en hâte bien-tôt la deftruc- tion ; enfin le cavalier a le defagrément pour peu qu'iln’appuie que legerement fur la planche, de voir l’ésrier tourner fans cefle à fon pié, l'œil préfenter fa carne à la jambe, & y porter fouvent des attein- tes douloureufes. | Le corps nous offre une efpece d’anfe dont les bouts feroient allongés , & dont l'œil eft le fommet ainf que le point de fufpenfon, Il faut que de l’un & de l’autre côté de cet œil Les bras de l’anfe foient égaux par leur forme, leur longueur, leur largeur, & leur épaifleur, & qu’ils foient pliés également. Nos éperonniers les arrondiilent en jonc de trois li- gnes de diametre pour les felles de chaffe , &c de qua- tre lignes pour les chaïfes de pofte. L’anfe eft en plein cintre, les côtés font droits & paralleles, le tout dans le même plan que l’œil. Communément & au bout des deux bras au-def- fus des boutons, de même diametre, qui les termi- nent, on foude la planche & la grille. La planche eft alors faite de deux demi-cerceaux de verge de fer équarrie, fur trois ou quatre lignes de hauteur & deux & demi de largeur. Ils compo- fent enfemble un cercle ou un oval peu différent du cercle, dont le grand diametre ne remplit pas l’en- tre-deux des bras par lui-même ; maïs il fe trouve pour cet effet prolongé de cinq ou fix lignes par les bouts de ces cerceaux repliés, pour former un col- let avec la principale piece de la grille foudée avec eux & entre eux deux. Il eft effentiel dans cette con- ftruétion que les parties qui forment la grille foient foudées d’une même chaude pour chaque côté. Si l’éperonnier ufe de rivets pour affemblerles portions de la grille, 1l ne doit pas fe difpenfer de les fouderde même : il peut néanmoins en afflembler quelques pointes avec la planche par mortaife, pourvû que ce ne foit pas près du corps. Le fer de la grille eft ordinairement tiré {ur l’o- fange, & pole fur les angles aigus. L’angle d’où naît la furface où le pie doit prendre fon appui, fera néan- moins tavalé, pour ne pas nuire à la femelle de la botte, Il eft bon que le milieu de la grille foit médio- crement bombé en contre-haut, la tenue de l’ésrier en devient plus aïfée. Quant à la planche, elle fera horifontale, les bras du corps s’éleveront perpendi- culairement, leur plan la divifera également par moitié , l’œil enfin fe trouvera dans ce même plan & dans la direétion du centre de gravité du tout ; fans ces conditions l’ésrier fe préfenteroit toüjours défeétueufement au cavalier, & il tendroit plütôt à le fatiguer qu’à le foulager & à l’affermir. L’érrier que nous appellons érrier quarré , ne tire ETR pas fa dénomination de la forme quarrée de fa plan- che ; car elle pourroit être ronde on ovale, &:nousne lui conferverions pas moins ce nom. Il ne differe des autres érriers dont nous avons parlé, que parce que {a planche eft tirée du corps même, & non foudée à ce corps. Pour cet effet les bras fe biffurquent à un pouce ou deux au-deflus de la planche, chacun dans un plan croifé , à celui du corps; & les quatre verges qui ré- fultent de ces deux biffurcations, équarries comme celles des planches ordinaires, font repliées en-de- dans pour imiter le collet de la planche foudée : à fx lignes de -là elles font encore repliées d’équerre en-déhors : à quinze ou feize lignes de ce fecond an- gle, elles font encore repliées d’équerre pour être abouties par foudure. Tous ces plis font dans le même plan. La traverfe principale de la grille eft auffi re- fendue en fourche par les deux bouts. Ses fourchons font foudés aux faces intérieures des parties qui re- ptéfentent les collets , c’eft-à-dire qui font comprifes Æntre le premier & le fecond retour d’équerre depuis la biffurcation du corps, Les autres pieces de la grille font affemblées par foudure avec la traverfe & par mortaife dans la planche. La largeur de lésrier mefurée fur la grille entre les deux bras du corps, doit furpaffer de quelques lignes feulement la plus grande largeur de la femelle de la botte. À l'égard de la hauteur entre le cintre & le mi- lieu de la grille, il faut qu’elle foit telle qu’elle ne foit ni trop nitrop peu confidérable. Dans le premier cas le pié pourroit pañler tout entier au-travers, & le ta- lon feroir alors l'office d’un crochet, qu’un cavalier defarçonné dans cette conjonéture ne pourroit défai- fir fans fecours ; & dans le fecond, le pié plus épais à la boucle du foulier qu'ailleurs, pourroit aufli s’en- gager. Cette mefure ne peut donc être déterminée avec jufteffe ; mais chacun peut aifément reconnoî- tre fi les évriers qu’on lui propofe lui conviennent, Il ne s’agit que de les préfenter à fon pié chauffé de fa botte dans tous les fens poffibles ; &c fi l’on fe fent pris & engagé , on doit les rejetter comme des inftrumens capables de cauferles accidens les plus funeftes. L'ésrier ébauché de près à la forge, doit être fini à la lime douce ; & enfuite s’il eft de fer, étamé, argen- té, ou doré, & enfin bruni. S'il eft de quelque beau métal, il n’eft queftion que de le mettre en couleur & de le brunir; car après cette derniere opération, il donnera moins de prife à la boue, & fera plus facile- ment maintenu dans l’état de netteté qui doit en faire Le principal ornement. Dans quelques pays, comme en Italie & principa- lement en Efpagne, quelques perfonnes fe fervent d’écriers figurés en efpece de fabot , & formés par l’af- femblage de fix bouts de planche de quelque bois Kit & leger. Les deux latérales font profilées pour en re- .Cevoir une troifieme , qui compofe la traverfe par la- quelle le tout eft fufpendu. Une quatrieme recouvre le deflus du pié. La cinquieme termine le fabot en- avant ;.@& le pié tout entier trouve fur l’inférieure ou fur la fixieme, une affiette commode. On peut dou- bler de fourrure ces fortes d’ésriers, qui peuvent avoir leur utilité maloré le peu d'élégance de leur forme. Les Selliers appellent évriers garnis , ceux dont la planche eftrembourrée. Cette précaution a fans dou- te été fuggérée par l’envie de flater la délicateffe des perfonnes du fexe. Dans nos manéges nous comprenons fous le nom feul de chapeler, les étrivieres & les érriers. Vi 0yez ETRIVIERES. Ajufler les étriers , ou les mettre à fon point , c’eft donner à l’étriviere une longueur telle que l’ésrier foit à une hauteur mefurée, & que le pié du cava- lier puifle porter & s'appuyer horifontalement fur la grille. Voyez Ibid. Retroufler Les étriers ; c’eft les fufpendre en-arriere ETR & les éleyer de maniere qu'il foit impoffble à Pani- mal inquiet & tourmenté par les mouches, d’y en- gager un de fes piés lorfqu’il cherche à fe débarraf. fer des infeêtes qui le piquent & qui le fatiguent. Voyez ÊTRIERES. Tenir l'étrier. Cette expreffion a deux fens : nous l’'employons pour défigner l’aétion de tenir l'érier , a l'effet d'aider à quelqu'un à monter en felle, & pour défigner l’adrefle & la fermeté du cavalier qui ne laifle échapper ni l’un ni l’autre dans les mouve- mens les plus rudes & les plus violens de l'animal. On tient dans le prermer cas l’étrivicre droite avec la main gauche, la main droite étant occupée à tenir le cheval par le montant de la têticre de la bride, On doit faire attention de ne tirer & de ne pefer fur l'étriviere , que lorfque le cavalier a mis le pié à l’érrier oppofé, À mefure qu'il s’éleve fur ce mê- me érrier gauche, on augmente infenfiblement Pap- pui fur l’étriviere , de façon que les forces réful- tantes d’une part du poids du cavalier , & de l’au= tre de la puiflance avec laquelle laide s’employe foient tellement proportionnées que la felle ne tour- ne point. Nombre de palefreniers mal-adroits & in- capables de connoître les raifons de cet accord & de cette proportion néceflaires, devancent l’aétion du cavalier; ils déplacent la felle au moyen de leur premier effort, &c l’attirent à eux ; le Cavalier par {on poids la ramene enfuite à lui ; & de ce frotes ment fur le dos de l’animal , d’où réfulte pour lui un fentiment fouvent defagréable , naïflent fréquem- ment les defordres d’un cheval devenu par cette feule raïon difficile au montoir. Il arrive de plus que très- fouvent ces mêmes palefreniers, dans la main gau- che defquels réfide la grande force dontils font doüés, font en quelque forte contraints de roïdir en même tems la main droite, tirent de leur côté ou en-arriere la tête de l'animal, & Pobligent naturellement eux mêmes à tourner & à fe défendre. Voyez MonTorr. Lorfque le cavalier eft en felle , l’aide doit préfenter Vérrier à fon pié droit dans un fens où l’étriviere ne foit pas tordue. L'adref]e de tenir l’étrier ou les étriers , dans le fecond fens, dépend de la fermeté du cavalier , fes évriers étant parfaitement ajuftés à fon point ; & cette fer- meté ne confifte point, ainfi que plufieurs ignorans l’imaginent , dans la force de l’appui fur ces mêmes ériers , & dans celle des cuifles & des jarrets, mais dans l’aifance avec laquelle le cavalier les laïfle,pour ainfi parler, badiner àfon pié fans un déplacement notable , & dans ce grand équilibre & cette juftefle qui caraétérifent toüjours homme de cheval. Perdre Les étriers, eft une expreflion qui préfente une idée direétement contraire à celle que nous offre celle-ci. Lorfque les ésriers ont échappé aux piés du cavalier , nous difons qu’#/ 7e es a pas tenus , ou qu’il les a perdus ; ce qui fignifie une feule & même chofe. Le trop de longueur des ésriers occafionne fouvent cette perte, & plus fouvent encore l’incertitude ; l’ébranlement du corps du cavalier, & fon peu de tenue. Faire perdre les étriers. Les fauts, les contre-tems d’un cheval peuvent faire perdre les érriers. Faire perdre les étriers à fon adyerfaire : cette périphrafe étoit ufitée en parlant de ceux qui combattoient au- trefois. Rien n’étoit plus glorieux dans un tournoi, lorfque d’un coup de lance on ébranloit fi fort fon ennemi, qu'il étoit forcé de perdre les érriers. Pefèr fur Les étriers : cet appui eft la plus douce des aides confiées aux jambes du cavalier ; maïs elle n’a d'eflicacité qu’autant qu'elle eft employée fur un cheval fenfible : elle produit alors l'effet qui fuit Pap- proche des gras de jambes fur un cheval moins fin: celle-ci fe donne de la part du cavalier, en pliant in- fenfiblement & par degré les genoux, jufqu’à ce que 50 ETR es gras de jambe foient plus ou moins près du corps * de l'animal, ou le touchent entierement felon le be- foin. L'autre s’adminiftre au contraire en étendant la jambe, & en effaçant on en diminuant te que l’on obferve dans le genou de tout homme bien placé à cheval, lorfqu'il m’agit point des'jambes. Toutes les deux operent fur le derriere de l'animal, : & lé chaffent en-avant également. Le eavalier ne peut s'étendre & pefer für les éiers, qu'il n’en ré- fulte une legere preflion de fes jambes contre le corps du cheval; &t c’eit cette preflion bien moin- : äré que la premiere, qui détermine le derrière en- avant, quand elle eftefeëtuée fur les deux éériers à raifons égales, & de côté quand ellen’alieu que fur un d'eux. On’conçoit fans doute que cette aide ne detrande que l’extenfion de la cuiffe & de la jambe, & non que le cavalier panche fon corps de côté, & foit par conféquent totalément de travers. Quelque générale que foit cêtte maniere dans lesélevés des : maîtres les plus renommés, & dans ces maîtres euix- ‘ mêmes , il eft conftant que c'eft un défaut qui prive : non-feulement l’aétion du cavalier de la grace q’ac- compagnent toùjours l’aifance & la facilité , mais qui s'oppofe encore à la liberté des mouvemens aux- duels on follicite Panimal, & que l’on defire de lui imprimer. Chauffer les 'étriers, Pout Îes chauffer parfaitement, on y doit mettre le pié ,-enforte qu'il dépañle fimple- ment d'environ un pouce l’avant de la planche : de plus, le pié doit néceffairement porter hortfontale- nent {ur le milieu de la grille, fans appuyer plus fortement fur Le dedans que fur le dehors, ou fur le dehors que fur le dedans. Le vice le plus commun eft d’enfoncer tellement le pré, que le talon touche &c répond à l'arriere de la planche ; ‘outre le fpeéta- cle defagréable qu'offre une pareille poftion, 1 eft à craindre que le pié ne s'engage enfin fi fort , que le cavalier ne puifle l’en tirer. Une feconde habitude non moins repréhenfible & auf fréquente, eft celle de pefer infiniment plus fur un côté de lérrier , que fur l’autre: la jambe alors paroît eftropiée ; en pe- fant en effet fur le dehors , la cheville du pié fe trouve fauflée en-dehors , nous en avons un exem- . ple dans prefque tous nos académiftes ; & en pefant fur le dedans, la cheville eff fauflée en-dedans.Silon faifoit plus d'attention à la fituation des éleves qui commencent, & fi, conformément à des principes puifésdans leur propre conformation , on leur enfei- gnoit les moyens de foütenir,, de relever fans force la pointe des piés, & de les maintenir totjours ho- rifontalement ; noùs n’aurions pas ce reproche à leur faire. Quelques écuyers, ou plütôt quelques perfon- nes, qui ne doivent ce titre qu’à lignorance de ceux qui leur font la grace dele leuraccorder,tombent dans Le défaut oppofé au premier.La pointe de leur pié n’ou- tre-pafle pas la planche ; elle eft au contraire fixée fur la grille, & elle eft beaucoup plus baffle & plus rès de terre que le talon: 1°. par cette pofition qui leffe les yeux des fpetateurs, ils attirent l’esrier en- arriere de la ligne perpendiculaire fur laquelle 1l doit être: en fecond lieu, l’ésrier porté en-arriere, leurs jambes en font plus rapprochées du corps de lani- mal qu'ils endurciffent, & que leurs talons relevés &x armés du fer effrayent ; ainñ elles font fans cefle en aétion fans que le cavalier s’en apperçoive, & infenfblement le cheval acquiert un degré d’infen- fibilité fi confidérable, qu’il méconnoît les aides, & n’obéit plus qu'aux châtimens. Mettre le pié à l’étrier. Rien ne paroît plus fimple que de mettre le pié à l’érier ; on diroit à cet effet qu'il fufit d'élever la cuifle 8 la jambe, & d’enf- fer cet anneau : maiscette ation demande beaucoup de précaution. Je débuterai par les réflexions que me * fuggere la méthode de la plus grande partie des mai- plileger : tres: ils: doivent éxcufer ina fincérité en faveur de l'utilité dont elle peut être an public ; & f j'ai la témérité de les condamner fur des points que le créat le plus novice ne doit pas ignorer, je me plais à croire que ces points ne leur ont échappé que vüû la contention de leur efprit captivé par les feules gran- des difficultés que nous avons à vaincre das notre art. Pour procurér à l’écolier la facilité de mettre lé pié à lésrier :, ils commencent par lui impofer une loi, qui ne doit être prefcrite qu'aux poftillons , ou à ceux qui montent à cheval en bottes fortes ; als lui ordonnent en effet de faïfir l’étriviere au-deflus de Poil de Vérrier avec la main droite : l’éleve eft donc obligé de fe baïffer pour fuivre le précepte : dans ce même mftant fa main gauche armée des rênes, de là gaule, & des crins, fe trouve élevée au-deflus de fa tête ; fon corps incliné forme une forte de demi-cer- cle, & c’eft dans cette fituation qu'on exige qu'il porte le pié à l’érrier, c’eft-à-dire prefque à la hauteur de fa maiñ. On comprendra fans peine qu’une pa- teille épretive n'offre tout au moinsrien de gracieux à la vüe, fans parler de l'effort que le commençant fait dans l’idée de fe conformer à un principe né- ceflaire pour favorifer l'entrée d’un foulier large & quarré dans anneau que la main fert alors à fixer, mais qui dans les autres circonftances ne doit point être adopté. Le pié une fois dans lérrier, 1ls lui com- mandent de s’élever de terre fans aucune autre con- fidération. Suppofons à-préfent que le cavalier près du cheval & vis-à-vis de fon épaule ait les rênes, la gaule dans la main, & fe foit muni d'une fufiifante quantité de crins ; j'imagine qu’en lui confeillant de porter le pié droit en-arriere , de fixer tout fon poids fur ée pié, & de lever le pié gauche, celui-ci par- Yiendra très-aifément à la hauteur de l’ésrier, qu'il enfilera fans obftacle & fans contrainte , le corps dementant dans une pofition droite, la tête étant élevée, & le cavalier confervant cet état de force & de liberté dont il ne doit jamais fortir, Pirai plus loin, j'examinerai comment cet écolier a chauflé ce même étrier ; fi fon pié eft engagé trop avant, je Pinfiruiras des inconvéniens qui en réfultent. Le premier eft de bleffer , d’étonner , ou de gendarmer le cheval, en appliquant la pointe contre fon ventre ; ce qui eft en- core une des principales raifons de la crainte & de l’averfion que les chevaux , & principalement les poulains , témoignent lorfqu’on veut les monter. Le fecond eft de chafler l’érier & l’étriviere contre le corps de l’animal: dès-lors le cavalier ne peut ren- contrer une aflette pour aflürer le poids de fon corps, qu'il ne peut élever qu'autant que l’ésrier eft fur une ligne dau & fon pié repofant d’ailleurs fur fa partie concave , & par conféquent fur fa partie la plus foible , il ne peut perdre & quitter terre fans rifquer de tomber en-arriere & de {e renverfer. Le pié doit donc porter à plat fur lé ttier par fa portion la plus large qui eft marquée par le commencement des phalanges. Voyez Mox- TER À CHEVAL. Je conviens qu’un tel écuyer qui permet à fes académiftes de profiter d’un montoir de pierre pour monter en felle , on tel autre qui fouffre qu’un palefrenier prete la main à fes éleves, & y foûtienne leur jambe gauche pour qu'ils puiffént fauter & s’y jetter à la maniere des piqueurs &c des maquignons , dédaignent de femblables foins ; mais ces foins font-ils utiles & néceflaires ? c’eft ce dont dépoferont leurs propres difciples, par la grace avec laquelle ils profiteront du fecours des ésriers lorfqu’ils en feront ufage en montant à cheval, & ce que nous laiffons d’ailleurs à décider à tous ceux qui fans partialité tenteront la folution de cette de- mande. (e) ‘ ETRIER , (Offéolog.) un des quatre offelets de la caïfle du tambour, ainfi nommé à çaufe de fa os ance blañce avéc un étrier, Voyez-en la figure dans Vefale & du Verneévy. On le divife en réte, én jambes on branches, & en Bale. Sa bafe qui, à la maniere des anciens érriers, 'eft point percée, bouche la fenêtre ovale dans la- quelle elle eft comme enchäflée. Sa sére eft jointe à Vos orbiculaire. Les deux branches de cet offelet ne font point parfaitement égales ; la poftérieure eft or- dinairement un peu plus longue, plus courbe & plus groffe ; elles font crenfées toutes les deux par une fainure qui fe continue fous la tête de lérrier, Sa fi- tuation eft prefque horifontale ; fa tête eft tournée du côté de la membrane du tambour, & fa Bafè eft attachée au fond de la caifle. L’efpace enfermé entre fa bafe & fes branches, eft tapifié d’un périofte très-délié, & parfemé de vaif- feaux , felon les obfervations de Ruyfch. L’érrier eft couché, par rapport À la fituation dé l'homme confidéré comme étant debout. Sa tête eft en-dehors , auprès de l’extrémité de la jambe de l’en: clume. Sa bafe eft en-dedans , & enchâfée dans la fenêtre oyale. La jambe longue eft couchée en-ar- riere, & la courte en-devant, toutes les deux dans un même plan, Par-là on connoîtra facilement fi un érrier eft du côté droit ou du côté gauche. * Ingraffias & Colombus s’attribuent tous deux la découverte de cet offelet ; maïs malgré leurs préten- tions , cette découverte paroît plütôt devoir être at- tribuée à Euftachi, & la maniere dont il s'exprime eft trop précife pour qu’on le foupçonne d’en impo- fer. « Je peux me rendre ce témoignage, dit-il, # qu'avant que qui que ce fût eût parlé de l’ésrier, ni +» que qui que ce füt l’eût décrit, je le connoiflois * très-bien ; je l’avois fait voir à plufieurs perfonnes # à Rome, & même je l’avois fait graver en cuivre ». L’écrier n’a qu’un mufcle , décrit premierement par Varole, mais d’une maniere très-défe@ueufe , puuif- qu'il ne décrit que ce feul mufcle dans l'oreille in- terne. Cafferius le trouva en 1601 dans le cheval & dans le chien, le repréfenta d’après ces animaux, & : le prit avec aflez de raifon pour un ligament. En ef. fet, dans l’homme c’eft un mufcle tendineux, petit, court, paffablement gros , & caché dans la petire pyramide offeufe du fond de la caiffe. La cavité qu'il occupe, touche de fort près le conduit offeux de la portion dure du nerf auditif. Il fe termine par un ten- don grêle, qui fort de la moitié ofleufe par le petit trou dont la pointe de la pyramide eft percée, Ce tendon, en {ortant du trou, fe tourne en- devant ÿ & s'attache au cou de l’érrier, du côté de la jambe la plus grande & la plus courbe de cet offelet. Nous 1gnorons l’ufage de l’ésrier, & vraiflemblablement nous l’ignorerons toüjours. Article de M, le Chevalier DE JAUCOURT. | | ETRIER ; erme de Chirurgie, bandagé dont ôn fe fert pour la faignée du pié. Il fe fait avec une bande longue d’une aulne & demie ou environ, large-de deux travers de doigt, roulée à un-chef. Le chitur- ! gien qui eft aflis, où qui a un genou en terre, après - avoir réuni la plaie, & avoir pofé la comprefle, qu'il foûtient avec le pouce de la main gauche, fi cet au pié droit, prend le globe de la bande, dont il laïffe pendre l'extrémité de la longueur d’un pié: il ofe ce bout für fon genou, & l’aflujettit par le taz on du malade : il conduit alors le #lobe fur la com- prefle ; pour faire un circulaire de devant en-arriere ! autour de la partie inférieure de la jambe. On vient” croifer fur la comprefle ; on pafle fous la planté du Pié, & on revient fous la malléole interne : on con- duit le globe de bande poftétieurement ; Pour croi- fer le tendon d’Achille : & quand on eft parvenu fut la ‘malléole externe, on dégage le bout qui étoit fous le.talon. On le releve fur la comprefle , & on le conduit fur la malléole externe; ‘pour le noïer Tome VI, | | ETR 8i aVéc l’autre extrémité de la bande. Ce bandagé répréfénte un ésrier, d’où lui vient fon nom, Si là bande fe trouve trop longue, on employe le fuperfl à faire quelqués circonvolutions qui croifent les pre: micres, Îl faut noüer lés deux bouts de la bande an. térieurément fur Le coup dé pié, afin que le malade ne {oit point incommodé du nœud en fe couchant fur lé côté, comme il atriveroit » fi le nœud étoit fait fur la malléole externe » Comme quelques per- fonnes le pratiquent. Il ne faut pas négliger les plus petites chofes , lorfqu’elles peuvent procurer de ai. fancé aux malades. Voyez Le pié gauche de le figure 1. Planche X XX, de Chirurgie, (F7) ETRIER, en Architeëture, efpece de lien de fer COU- dé quarrémenten deux endroits, qui fett à retenir par Chaque bout uné chevetre de charpente affemblée à tenon dans la folive d’énchevétrure , & fur laquelle l’écrier eft attaché. Il fert auffi à armer une Poutre qui eft éclatée. | | ÊTRIER, (Marine.) C’eft un des chaînons des Ca- dènes de haubans , qu’on chéville fur une feconde Précinte, afin dé renforcer ces cadenes. (Z ÊTRIERS , ( Marine.) Ce font dé petites cordes dont les bouts {ont joints enfemble pat des épiflures. On s’en fert pour fairé couler une vergue Ou quel- qu'autre chofe au haut dés mâts, le long d’une corde, On s’en fert auffi dans les chaloupes, pour tenir la- viron au tolet., (Z) | ETRIERE , . f. (Manége.) petit morceau de cuir d'environ nn pan & demi de longueur, & dont la largeur eft d'environ dix lignes, placé À chaque côté de la felle ; à l'effet de tenir les étriers fufpendus & relevés en-arriere, Il eft fixé par fon extrémité fupé- rieure en-arriere &à côté de la bande de fer quifortifie l’arçon de detriere,& À environ cinq doigts dela poin- te de ce même arçon. Il eft fendu dansfon milieu > & {on extrémité inférieure eft terminée par un bouton, qui n’eft autre chofe qu’un morceau de cuir plus épais , arrondi & percé, dans le trou duquel on fait pailer cette même extrémité ; après quoi On pratique une legére fente ou une très-pétite ouverture à l’e- . frere que l’on replie par le bout , pour infinuer ce bout dans la fente : & de ce rephs réfulte une {orte. de nœud qui retient le bouton. Lorfque l’on veut re- lever ou retrouffer l’étrier, on pañle daris un des bras de l’efpece d’anfe que nous offré fon Corps (voyez ÊTRIER), l’érriere, dont on arrête enfuite l'extrémité inférieure, en l’engageant par le bouton dans la gran: de fente qui en occupe le milieu. Il faut obferver ici, 1°. que le cuir dont il s’agit, doit être cloïié de maniere qu’il tombe pérpendicu- lairement, & qu'il fuive la diredion des pointes de l’arçon dont il dépend. Quelques felliers dans les pes tites villes le placent horifontalement , & l’arrêtent par fon milieu, après en avoir fendu l’une dés ex. trémités. Cette pratique eft défedlueufe, en ce que d’une part l’étrier étant retrouflé, eft porté f fort en. arriere & en-haut, que le moindre heurt de l’animai contre un corps dur, le blefferoit effentiellément : & que de l’autre les deux doubles de cuir , dont les deux extrémités fe replient pour émbrafer l’étrier,. font une faillie trop confidérable & difformme. 2°. If eft important que les clous fervant à fixer l’évriere s foient minces &E legers : parce que dans le cas où, pat limprudence d’un palefreniet l’étrier étant fu peñdu , l'animal feroit accroché dans fa marche > &: retenu pat l’étriviere ; oh doit préférer Qué l’étriere cede plûtôt que l’étriviere’, dont le cheval poñtroit emporter la boucle ; &c d’ailleurs la folidité que l’on doit exiger, rie va pas jufqu'à une réfiftance télle à qu'elle pourroit ,fdans de femblables circonftances, obliger l’animal à un effort dont {es membres pour: roient auf fe reflentir.- 18 Ha Onretroufe Les étriérs pourprévenir des accidens L 82 ETR fAcheux, fouvent occafonnés par la négligence d’un : cavalier, qui, en defcendant de cheval, les larfle : imprudemment dans la poñtion où 1ls fe trouvent. : 1] peut arriver en éffet que l'animal tourmente & in- quiéte par les mouches, êc cherchant à s’en détivrer, | enpage l’un de fes piés de derriere dans l’étrier, êc s’ellropie dans les mouvemens qu'il fait pour le dé- : barraller. Quelques cavaliers les releyent fur la fel- le, ‘dontils ne craignent pas fans doute de gâter le fiége ; d'autres les retroufent fur le cou du cheval . fans tedouter les contufions qui réfulteroient du fro- tement de l’animal à l’endroit fur lequel ils repofent. Mais outre ces inconyéniens , ils ne font point aflez aflürés, & peuvent en retombant donner lieu à ce- lui dont j'ai d’abord parlé. ” Il eff des perfonnes qui, eu égard à Pufage des étrieres, lès nomment srouffe-érriers , porte-érriers. (e) ETRILLE , { f. (Manège, Maréchall,) inftrument de fer érmmanché de bois, un de ceux que le pale- frenier employe pour panfer un cheval. NL'érille paflée plufieurs fois à poil & à contre-poil avec vitefle & lesereté fur toutes les parties appa- rentes du corps du cheval, qui ne font pas dotées d’une trop grande fenfbilité, ou occupées par les racines des crins, détache la boue, la crafle, la poufliere, ou toutes autres malpropretés qui ternif- feñt le poil de cet animal, & nuifent à fa fante. Elle livre à l'effet de la broffe, qu’elle précede dans le panfement , ce qu’elle ne peut enlever; & elle fert à nettoyer ce fecond inftrument , chaque fois qu'on a broffé quelque partie. Joyez PANSER. On donne en divers lieux divers formes aux ésrid- des. Celles que nombre d’éperonniets françois appel- lent dunom d’érrilles a la lyonnoife, femblent à tous égards mériter la préférence. Nous en donnerons une exacte defcription, après avoir détaillé les parties que:l’on doit diftinguer dans lésri//e en général, par comparaifon à celle à laquelle je m’arrête : nous in- diquerons les plus ufitées entre celles qui font con- nues. Les parties de lésritle font le coffre & fes deux re- bords, le manche, fa foie empatée , & fa virole; les rangs, leurs dents, & leurs empatemens,, le cou- teau de chaleur, les deux marteaux : enfin les rivets qui lient & uniffent ces diverfes pieces, pour en compofer un tout folide. Le coffre n’eft autre chofe qu’une efpece de gout- tiere réfultante du relevement à l’équerre des deux 13 q extrémités oppolées d’un plan quarré-long. Dans l’ésrille. a.la lyonnoife il préfente un quarré -long de tolé médiocrement éparfle, dont la largeur eft de fx àfépt pouces, & la longueur eft huit à dix. Cette longueur fe trouve diminuée par deux ourlets plats que fait l’ouvrier en repliant deux fois fur-elles-mé- mes les deux petites extrémités de ce quarré-long ; &c ces ourlets larges de deux lignes , &C dont lépaif- feur doit fe trouver fur Le dos de lerrille, & non.en- dedans, font ce que lon nomme es rebords du coffre. A l’épard des deux extrémités de ce parallélozramme bien applani, elles formentles deux côtés égaux & oppofés de ce même coffre , lorfqu’elles ont été rail- léés en dents, & rephées à l’équerte. fur le plan de V’érrille : & ces côtés doivent avoir dix, ou douze li- gnes de hauteur égale dans toute leur longueur. Le manche-eft de bouis, d’un pouce.fix ou dix lignes de diametre, &-long d'environ quatre ou cinq pouces. Il eff tourné cyhndriquement, &c ftrié dans toute fa circonférence par de petites cannelures ef- . pacées trés-près les unes des autres, pour en rendre la tenue dans la main plus ferme & plus aifée, 8 il eft ravalé à l’extrémité par laquelle la foie doit y pénétrer, à cinq ou fix lignes de diametre, à l'effet d'y recevoir une virole qui en.a, deux ou trois, de largeur, & qui n'y eff,pofée. que, pour la, défendre contre l'effort de cette foie, qui tendtotjours à le fendre. Il eft de plus placé à angle droit fur le mui- lieu d’une des grandes extrémités, dans un plan qui feroit avec le dos du coffre un angle de vingt à vingts cinq degrés. Il yeftfixé au moyen de la patte, qui fè termine én une foie aflez longue pour l’enfiler dans le fens de fa longueur, & être rivé au-delà. Cette patte forgée avec fa foie, felon l’angle ci-deflus , & artêtée fur le dos du coffre par cinq rivets au moins, ne fert pas moins à le fortifier qu'à l’emmancher : auffi eft-elle refendue {ur plat en deux lames d’é- gale largeur, c’eft-à-dire de cinq ou fix lignes cha= cune, qui s'étendent en demi $ avec fymmétrie, lu» ne à droite & l’autre à gauche. Leur union, d’où naït la foie, & qui doit recevoir le principal rivet, doit être longue & forte ; & leur épaifleur, fufifante à deux tiers de ligne par-tout ailleurs, doit augmenter infenfiblement en approchant du manche, & fe trou- ver de trois lignes au moins fur quatre de largeur à la naiffance de la foie, qui peut être beaucoup plus nunce, mais dont il eft important de river exaétement. l'extrémité. Les deux parois verticales du coffte, & quatre lames de fer également efpacées & pofées de champ fur fon fond parallélement aux deux parois , com- pofent ce que nous ayons nommé Zesrangs. Trois de ces lames font , ainf que celles qui font pattie du coffre, fupérieurement dentées, & ajuftées de ma- niere que toutes leurs dents toucheroiïent en mème tems par leurs pointes,unplanfur lequel on repoferoit l'érrille. Celle qui ne l’eft point, & qui conflitue le troifieme rang , à compter dès le manche, eft pro- ptement ce que nous difons être le couteau de cha- leur. Son tranchant bien dreflé ne doit pas atteindre au plan fur lequel portent les dents ; mais il faut qu’il en approche également dans toute fa longueur : un intervalle égal à leur profondeur d’une ligne plus ou moins, fufit à cet effet. Chacun de ces rangs ef fixé par deux rivets. qui traverfent le coffre, & deux em- pattemens qui ont été tirés de leurs angles inférieurs par le fecours de la forge. Ces empattemens font ronds ; ils ont fix à fept lignes. de diametre, & nous les comptons dans la longueur.des lames, qui de l’un à l’autre bout.eft la même que celle du coffre. Il eft bon d’obferver que ces quatre lames ainfi appliquées, doivent être forgées de façon que tandis que leurs empattemens font bien affis, il y ait un efpace d’en- viron deux lisnes.entre leur bord inférieur & le fond du coffre, pour laiffer.un libre paflage à la crafle & à lapoufliere que le palefrenier tire du poil du che- val, & dont il cherche à dégager & à nettoyer fon. étrille, en frappant. furle pavé ou contre quelqw’au- tre corps dur. C’eft pour garantir fes rebords &r.fes.carnes des impreffions de ces.coups , que l’on place à fes deux petits côtés, entre les deux rangs les plus diftans du manche, un morceau de fer tiréfur quarré, de qua- tre-oucinq lignes. long de trois ou quatre pouces , refendu , felon.fa longueur, jufqu’à cinq lignes près de fes. extrémités, en deux lames d’une égale épaif- {eur, &aflez féparées pour recevoir & pour admet- : tre celle du. coffre à fon rebord. Ces morceaux de. fer forment les marteaux : la lame fupérieure en eft coupée &raccoutcie, pour qu’elle ne recouvre que ce même rebord.;.8& l’autre eft couchée entre les deux rangs, &.fermement unie au, coffre par deux outrois rivets. Les angles de ces marteaux font abat. tus 8 arrondis comme. toutes les carnes deFinftru- ment; fans exception, êc afin de parer à tout ce qui pourroit blefer lJ’animal.en Pétrillant. Par cette mê- me raifon les dents.qui.repréfentent le fommet d’un triangle ifofcele affez-allongé ,» ne font.pas aiguës: jufqu’au point de piquer : nulle d’entr'elles ne s'élève au-deflus des autres, Leur longueur doit être pro= 0 LR AR portionnée à la fenfibilité de l'animal auquel lésrille eft deftinée. Elles doivent, en paflant au-travers du poil, atteindre à la peau, mais non la déchirer. La lime à tiers-point, dont on fe fert pour les former, doit aufh être tenue par l’ouvrier très-couchée fur le plat des lames, afin que leurs côtés & leurs fonds dans l'intervalle qui les fépare , préfentent un tranchant tel que celui du couteau de chaleur ; c’eft- à-dire un tranchant fin & droit, fans être affilé ou en état de couper, & elles feront efpacées de pointe à pointe d’une ligne tout au plus. Toute paille, cerbe, faufle ou mauvaife rivure, faux-joint ou dent fendue, capable d’accrocher les crins du cheval , ou le poil , font des défeétuofités mufibles , & qui tendent à donner atteinte au plus bel ornement de cet animal. Entre leë efpeces d’érrillesles plusufitées, il en eft dans lefquelles on compte fept rangs, le couteau de chaleur en occupant le milieu : les rebords en font ronds , le dos du coffre voüté , & les rangs élevés fur leurs empattemens, jufqu’à laiffer x ou fept li- gnes d’efpace entr'eux & le fond du coffre. Leurs marteaux n’ont pas deux lignes de grofleur & de faillie, & ils font placés entre le deuxieme & troi- fieme rang. La patte du manche eft enfin refendue en trois lames, dont les deux latérales ne peuvent être confidérées que comme une forte d’enjolive- ment. Il eft évident, 1°. que ce feptieme rang n’eft bon qu’à augmenter inutilement le poids & le volume de cetinftrument. 2°. L’efpace entre le fond & les rangs eft non -feulement exceffif, puifque quand il feroit d’une feule ligne , cette ligne fufiroit pour empêcher l’adhéfion de la crafle, & pour en faciliter lPexpulfion ; mais il eft encore réellement préjudi- tiable , parce que les rangs peuvent être d’autant plus facilement couchés & détruits, que les tiges de leurs empattemens font plus longues. 3°. Les mar- teaux étant auf minces & aufli courts, ne méritent pas même ce nom ; fitués entre le fecond & le troi- fieme rang , ils ne fanroient & par leur pofition & pat leur faillie garantir les rebords & les carnes. 4°. Ces rebords ronds n’ont nul avantage fur les rebords plats , & n’exigent que plus de tems de la part de l’ou- vrier. Enfin la patte ne contribuant pas à fortifier le coffre, ne remplit qu'une partie de {a deftination. - Il eft encore d’autres ésrilles dans lefquelles les rangs font feulement dentés jufqu’à la moitié de leur longueur, tandis que de Pautre moitié ils repréfen- tent un couteau de chaleur oppofé dans chaque rang, & répondent à la moitié dentée de l’autre. Commu- nément l’ouvrier forme les rangs droits fur leurs bords fupérieurs & inférieurs. Ces rangs formés droits, il en taille en dents la moitié ; mais foit par ignorance , foit par parefle ou par intérêt , il s’é- pargne le tems & la peine de ravaler le tranchant du refte, & dès-lors l’appui du couteau fur le poil s’op- pofe à ce que les dents parviennent à la peau. Je conviens qu'un ouvrier plus intelligent ou de meil- leure foi, peut, en ravalant les tranchans, obvier à cette défedtuofté. Cette pratique néanmoins ne m'offre aucune raifon de préférence fur la méthode que je confeille , car elle fera toûjours plus compli- quée ; & d’ailleurs l’expérience démontre qu’un cou- teau de chaleur occupant toute la longueur de le- zrille, n’eft pas moins efficace que les fix moitiés qui entrent dans cette derniere conftruétion. Au furplus , 8 à l'égard des ouvriers qui blanchif- fent à la lime Le dos du coffre, nous dirons que ce foin eft aflez déplacé relativement. à un femblable infirument ; & nous ajoûterons encore qu'il peut ap- porter un obfftacle à fa durée, l’impreflion de la for- ge, dont ils dépoullent le fer en le limant, étant un Tome FI, ETR 8% vernis utile qui l’auroit long-tems défendu des at- teintes de la rouille. (e) ETRILLER zx cheval, (Man.) Voyez ETRILLE ; PANSER. ETRIPER, (Manëge.) mot bas, terme profcrit, &e qui ne devroi ) qui ne deéVroit pas trouver une place dans cet ou- vrage; c'eft par cette raifon que je renvoie le lec- teur qui en defrera une explication, au diéionraire de Trévonx. (e ÊTRIPER, (Corderie.) fe dit d’un cordage dont les filamens s’échappent de tous côtés. ETRIVIERE, 1. £. (Manépe\ courroie de cuir par laquelle les étriers font fufpendus, Telle eft la défini- tion que nous trouvons dans le diffionnaire de Tré- VOUx. . On pourroït accufer les auteurs de ce vocabulaire d aVOIr 1c1 mis très-mal-à-propos en ufage une figure qu'ils connoiflent fous le nom de p/éonafme ; car fi le terme de courroie préfente toûjours l’idée d’un cuir coupé en bandes , 1l s’enfuit que cette maniere de s'exprimer, corroie de cuir, eft évidemment redon- dante. Il eft vrai que deux lignes plus bas on lit dans le même article cette obfervation très-importante À & très-digne d’être tranfmife à la poftérité par la voie de leur ouvrage: 4 la pofle aux ênes de Mon. treau , 1l n'y a que des étrivieres de corde, Maïs cette diftin@ion d’étriviere de corde & d’étriviere de CUT» fuggérée par des notions acquifes dans cette même polte , ne doit point autorifer celle de courroie de cuir & de courroie de corde ; ainfi la redondance n’en eft pas moins certaine. Quoi qu'il en foit, les courroïes que nous em- ployons communément à l’effet de fufpendre & de fixer les étriers à une hauteur convenable, & qu varie felon la taille du cavalier, font de la longueur d'environ quatre piés & demi, & leur largeur eft d'environ un pouce, Plufieuts perfonnes donnent au cuir d'Angleterre la préférence, & prétendent que les ésrivieres faites de ce cuir réfiftent beaucoup plus, & font moins fujettes à S’allonger, Je conviendrai de ce premier fait d'autant moins aifément, qu'il eft démenti par l’ex- périence. Le cuir d'Angleterre n’eft jamais À cet égard d’un auffi bonufage que le cuir d’Honorie rafé, pañlé en alun, au fel & au fuif; & f quelques-unes des lanieres que l’on en tire, paroiflent fufceptibles d’al- longement, ce n’eft qu'aux Selliers que nous devons nous en prendre, La plûpart d’entr’eux fe contentent en effet de couper une {eule longueur de cuir dont ils forment une paire d’érrivieres. Celui quia été en- levé du côté de la croupe, a une force plus confidé- rable que celui qui a été pris du côté delatêtes & de-là l'inégalité conftante des ésrivieres. Chacune d’el- les doit donc être faite d’une feule laniere coupée dans le cuir du dos & de la croupe à côté l'une de l’autre , pour être placée enfuite dans le même fens ; & comme Pétriviere du montoir, chargée du poids entier du cavalier, foit qu'il monte à cheval, foit qu'il en defcende, ne peut conféquemment à ce far- deau que fubir une plus grande extenfon, il eft bon de la porter de tems en tems au hors-montoir, & de lui fubftituer celle-ci : par ce moyen elles parvien- nent toutes les deux au période dernier & pofñible de leur allongement, & elles maintiennent dès-lors les étriers à une égale hauteur. Du refle cette précaution n’eft néceflaire qu’au. tant que nous perfévererons dans l’idée que l’on doit toüjours & abfolument monter à cheval & en def- cendre du côté gauche ; car fi, la raifon l’emportant fur le préjugé , on prenoit le parti d’y monter & d’em defcendre indifféremment à gauche & à droite, elle deviendroit inutile, & l'attention de varier cette ac- tion de maniere à charger les ésrivieres également & auf fouvent l’une que l’autre, fufroit incontefta- Là 84 ETR blement. Voyez Exercices & MONTorr. À une de leurs extrémités, c’efl-à-dire à celle qui naît du cuir pris dans la croupe , eft une boucle à ardillon fortement bredie. On perce l’autre d’un nombre plus ou moins confidérable de trous. Pour cet effet on marque avec le compas fur une de ces lanieres, la diftance de ces trous que lon pratique avec l’ermporte-prece, Cette diftance n’eft point fixée, & l’ouvrier à cet égard ne fuit que fon caprice ; il doit néanmoins confidérer que fi tous Les trous font efpacés d’un pouce dans toute la longueur du cuir percé, il fera bien plus difficile an cavalier de rencon- trer le point jufte qui lui convient , que s'ils étoient faits à un demi-pouce les uns des autres. La première laniere étant percée, on l’étend fut l’autre, de façon qu’elles fe répondent exa@tement, foit dans leur lar- geur, foit dans leur longueur ; & l’on pañle enfuite un poinçon dans chacun des trous que l’on a prati- qués , pour marquer le lieu précis {ur lequel, rela- tivement à la feconde, l’emporte-piece doit agir. Le porte-érriviere eft une boucle quarrée dé- pourvüûe d’ardillon , qui doit être placée de chaque côté de la felle, Le plus près qu'il eft poffible de la pointe de devant de l’arçcon, 8 maintenue par une bonne chappe de fer qui embrafle la bande, & qui eft elle-même arrêtée par un fil-de-fer rivé de part & d'autre. Ce fil-de-fer eft infiniment plus ftable qu’un fimple clou, qui joue & badine après un certain tems dans l’ouverture qu'il s’eft frayée, & qui peut d’un côté laifler échapper la chappe, & de l’autre occafñonner la ruine de l’arçon. Quant à la pofition de la boucle contre la pointe de devant de ce même arçon, elle favorife l’afliette du cavalier, qui dès-lors n’eft point rejetté trop en-arriere, & qui ocqupe tobjours le milieu dela felle ; & cette boucle que l’on a fubftituée aux anciens porte-étri- vieres attachés fixement à l’arçon de devant & à la bande, & qui blefloient fouvent & Thomme & l’ani- mal, ne doit pas être moins mobile que toutes celles qui foûtiennent les contre-fanglots. L’extrémité percée de l’ésriviere qu'elle doit rece- voir, fera introduite, 1° dans un bouton coulant que l’on fera gliffer jufqu’à l’autre bout ; 2° dans l'œil de l’étrier ; 3° dans le même bouton, afin que les deux doubles de l’érriviere y foient inférés; 4° dans cette boucle, de façon qu’elle revienne & forte du côté du quartier. Cette opération faite, le fellier bouclera & fixera cette lamiere, en inférant indiffé- remment l’ardillon de la boucle bredie dans un des trous percés , jufqu’à ce qu’un cavalier quelconque le mette à fon point. Je, ne fai quel eft le motif qui a pù déterminer à bannir depuis peu les boutons coulans : ils peuvent, j'en conviens , s’oppofer à la facilité d’accourcir ou d’allonger l’ériviere; mais cet obftacle eft-1l fi confi- dérable, qu’il doive en faire profcrire l’ufage ? Le moyen de reconnoitre la jufte hauteur à la- quelle doit être placé létrier, eft de le faifir avec une main, d'étendre l’autre bras le long de l’ésriviere, & de l’allonger ou de la raccourcir jufqu'à ce que! cette laniere &c l’étrier foient enfemble de la lon- gueur de ce même bras ; c’eft -à - dire que l’extré- mité des doigts portée d’une part jufque fous le quar- tier, le-deflous de la grille atteigne l’aiffelle même du cavalier. C’eft ainfi que communément zous mer- cons lésrétriers a notre point; &x cette méfure eft dans la juftefle requife, relativement à dés hommes bien proportionnés. Enfuite nous faifons remonter la bou- cle de l’ésrivieretrès-près de celle qui forme le porre- érriviere, afin qu’elle n’endommage pas par un fro= tement continuel la pointe de l’arçon , le-panneau le quartier, & ne bleffe point l'animal & le cavalier, dontelle pourroit , avec les trois doubles de cuir qui l’avoifinent , ofenfer le senou. Nous rapprochons per mures ETR enfin de [a traverfe fupérieure de l'œil de l’étrier, le bouton coulant defliné à maintenir exaétement l'union des deux doubles apparens qui réfultent de l’écriviere ainf ajuftée. Les érrivieres dont nous nous fervons dans nos ma- néges , ont environ cinq piés & demi de longueur, &c la même largeur que les autres ; elles font pañlées dans un anneau de fer fufpendu & attaché à une chappe de cuir que l’on place &c que l’on accroche au pommeau de la felle. Ces érrivieres, les étriets , cet anneau & cette chappe forment enfemble ce que nous nommons précilément ur chapelet. Chacun des eleves auxquels nous permettons l’ufage des étriers, en à un qu'il tranfporte d’une felle à l’autre, à me- {ure qu'il change de cheval. Quelqu’ancienne que foit la pratique du chapeles dans les écoles, elle n’eft pas fans inconvénient. En premier lieu, elle nous altraint à admettre tohjours un pommeau dans la conftruéhion des felles à piquer. 2°. L’anneau & les boucles des ésrivieres, qui defcendent, une de chaque côté, fur le fiége 8 fur les quartiers, le long de la batte de devant, peuvent endommager & le fiége &t cette même batte. 3°. Il réfulte de cette même boucle relevée le plus près qu'il eft poffible de l’an- neau , ainfi que des trois doubles de cuir qu regnent à l'endroit où l’ésriviere eft bouclée, un volume'très- capable de bleffer ou d’incommoder le cavalier. En- fin, avec quelque précifion qu'il ait ajufté & fixé fes étriers à une hauteur convenable fur une {elle, cette précifion n’eft plus la même, eu égard aux autres {elles qu'il rencontre , parce que fi la batte de devant fe trouve plus baffe, l’ésriviere eft trop longue ; com- me fi la batte fe trouve trop élevée, l’ésriviere eft trop raccourcie, Toutes ces confidérations m'ont déterminé à re- chercher les moyens d’obvier à ces points divers. Au lieu de faire du pommeau un porte-érriviere, je fut- pends les ésrivieres à la bande, comme dans les felles ordinaires ; mais je fubftitue à la boucle fans ardil- lon, c’eft-è-dire au porte-étriviere connu & ufité, une platine 4 de fer d'environ une ligne d’épaifleur ; fa longueur eft de quatre pouces & demi : à fon extré- mité fupérieure eft un œil demi-circulaire, & infe- rieurement elle eft entr’ouverte par une châfe lon- gue d’un pouce & demi, & large d'environ huit ou neuf lignes. Les montans de cette châffle doivent avoir au moins deux lignes de largeur. Cette platine eft engagée par fon œil dans une chappe femblable à celle dont j'ai fait mention, &c qui eft également rivée dans la bande qu'elle embrafle : aufli la tras verfe droite de cet œil doit-elle être arrondie, ainfi que la traverfe inférieure de la platine ; fans cette précaution, la premiere détruiroit inévitablement & avec Le tems la chappe dans laquelle ce nouveau porte-étriviere eft recû , tandis que la feconde porte- roit une véritable atteinte au crochet auquel elle || donne un appui. Ce crochet Z peut être auf large || que la châffe a d’ouverture. Il eft compofé d’une pla- fine de fer auffimince que l’autre, & il eft inférieu- . rement terminé par un œil demi-circulaire , dont la partie la plus baffle doit être formée en jonc droit, au moins de deux lignes & demie de diametre ; & tellement allongée , qu'entre les deux angles inté- rieurs 1] y ait un intervalle de quatorze ou quinze li. gnes. Ces pieces doivent être forgées fans {oudure. Une courroie d'environ deux piés & demi de lon- gueur eft ici fufhfante. On la pañle d’abord dans l'œil du crochet ; on en plie l'extrémité fur la traverfe | droite & ronde qui en forme la partie inférieure, & On la bredit immédiatement au-deflous, On infere énfuite fon autre extrémité dans l’œil de Pétrier, & : dans une boucle à ardillon près de laquelle elle eft ourdie, & qui fert à fixer l’ésriviere àun certain point ; au moyen de Pintroduétion de cet ardillon dans un ÉTAT des trous percés à l’extrémité inférieure de la lanie- re, qui dans la plus grande portion de fon étendue eft fimple , & non à deux doubles, Dans cet état on accroche les étrivieres aux porte-étriers , avec d’au- tant plus de facilité qu'ils font très-mobiles, & qu’en foûlevant les quartiers de la felle on les appercoit fur le champ ; & pour que le crochet ne fe dégage point de la châfle qui Le contient, il eft muni d’un petit reflort fixement attaché par deux rivets près de la partie fupérieure de fon œil, & qui s’éleve en s’éloignant du montant, pour s’appliquer à la pointe. Par cette méthode on remédie à tous les incon- véniens qui réfultent des chapelets fufpendus au pommeau, ainf que de ceux dont on fe fervoit au- trefois , & qui embrafloïent toute la batte. Si l’on a attention dans la conftruétion de ces nouveaux porte- écrivieres , de les forger exaétement d’une même lon- gueur, &t de les adapter à toutes les {elles du ma- nége, il eff certain que les étrivieres décrochées aïfé- ment en appliquant un doigt contre le reflort, qui dès-lors eft rapproché du montant, feront tranfpor- tées d’une felle à l’autre, fans que leur longueur puiffe jamais en être augmentée ou diminuée, pourvünéan- moins qu'elles ayent {ubi l’extenfion dont elles font d’abord fufceptibles, & que les platines des crochets foient toutes égales, Ici nous fupprimons totalement les boutons coulans, puifqu’ils ne feroient d’aucune utilité, vû la fimplicité de chaque érriviere, On com- prend fans doute que cette invention peut avoir lieu indiftinétement fur toutes fortes de felles ; elle a été adoptée par une foule d'étrangers que l’ufage & Pha- bitude ne tyrannifent point, & qui ont fait fans peine céder l’un. & l’autre à l'avantage d’avoir toûjours la même pare d'ésrivieres , fur quelque felle qu’ils mon- tent. Dans les manéges où les éleves ne peuvent mon- ter à cheval que par le fecours d’un étrier (voyez ETriers), on place le chapelet au pommeau : les étrivieres & les deux étriers font enfemble du côté gauche, Le palefrenier pefe fur la batte, pour obvier à ce que la felle ne tourne ; & lotfque le cavalier eft en felle , on enleve le chapelet. Quelquefois auff ce même chapelet eft inutile, en ce qu'il ne lui refte qu’un feul étrièr & qu'une fenle écriviere paflée dans l'anneau fufpendu à la chappe de cuir. Cette maniere de préfenter aux difciples un appui pour qu'ils puif- fent s'élever jufque fur l’animal,, ne {eroit nullement condamnable , fi l’on étoit attentif à mefurer la hau- teur de l'etrier à la taille de chaque difciple ; mais le tems qu'exigeroit cette précaution, engage à pañler très-legerement fur ce point d’autant plus important, qu'il eft impoñlible qu'un cavalier monte à cheval avec grace, fi l’étrier n’eft point à une hauteur pro- portionnée. Je préférerai donc toñjours à cet égard une fimple courroie d'environ cinq piés, non rez phée, & bredie à fon extrémité inférée-dans l'œil del’'étrier. Cette courroie eft préfentée de façon que cette même extrémité touche du côté du montoir en-atriere de la batte, tandisque le palefrenierplacé au hors-montoir, maintient le refte de la laniére fur le pommeau êz en-avant de cette même batte ; & peut par la fimple aétion d'élever où d’äbaifler la main , lever ou abaïfler létrier au gré & felon la volonté &c le defir du difciple. GS tn Les ésrivieres ne font point placées dans les {elles depofte, comme dans les autres. Voyez PORTEZ ÉTRIVIERES. Voyez auffi SELLE. (e) LEE * ETROIT , adj. (Gremm.) terme relatif à la di- menfon d’un corps ; c’eft le correlatif de Zérge, Si cette dimenfion confidérée dans un objet, relatives ment a ce qu'elle eft dans ur Autre que nous prenons pour méfure , ne nous paroït pas aflez gran é, fois difons qu'il'effiésroir, Quelquéfois c'eft Pufige que | nous-mêmes faifons de la thofe ; qui nous la fait dire ETR 8$ large ou étroite : nous fommes alors un des termes de la comparaifon. Zarge.eft le correlatif d’étroits Les termes large & écroir ne préfentant rien d’abfolu 3 non plus qu'une infinité de termes femblables > ce qui eft large pour l’un » Cftérrois pour l’autre ; & ré. ciproquement, Error s’employe au moral & au phy- fique , & l’on dit 27 canal érroit & un efprit étroir. ETROIT > adj. (Jurifpr.) en Cette matiere fignifie ce qui fe prend à la lettre &c en toute rigueur, coin= me droit étroir, V4 OYeZ ci-devans DROIT ÉTROIT,. On dit auf qu'un juge à fait d’érroites inhibirions ke pour dire des déferfès féveres. Etroir confeil, ou confeilérroir, voyez au mot CON- SEIL ÉTROIT. (4) G ÉTROIT de boyan , (Manépe, Maréchal.) expref- fon aflez impropre » par laquelle on à prétendu dé- figner un cheval qu manque de Corps, & dont le ventre s'éleve du côté du train de derriere > à-peus près comme celui des lévriers. L’animal qui peche ainfi dans fa conformation , étoit anciennement ap= pellé cffrac, efélame, | Ce défaut eft direétement oppofé à celui des che: vaux auxquels nous reprochons d’avoir univentre de vache. (e ; ETRONCÇONNER, (Jardinage) et le même qu’ébotter, ététer, Voyez ETÊTER. ETROPE,, £. f. (Marine) On donne ce nom en général à des bouts de cordes épiflés,, à l'extrémité defquels on a coûtume de mettre une coffe de fer (efpece d’anneau) pour accrocher quelque chofe. ETROPE, GERSEAU, HERSE DE POULE, (Ma- rine.) C’eft une corde qui eft bandée autour d’un moufle ou arcafle de poulie, tant pour la renforcer &t empêcher qu’elle n’éclate, que pour fufpendre la poulie aux endroits où elle veut être amarrée, ÉTROPES DE MARCHE-PIÉ, (Marine.) Ce font des anneaux de corde qui font le tour de la vergue, au bout defquels & dans une coffe paffent les mar- che-piés. Ils ont chacun un cep de mouton pour roi- dir ces marche-piés, les faififfant vers le bout de la vergue. G 1e ETROPES D'AFFUT, (Mar.) Ce font des hérfes avec des coffes, qui font pañlées au bout de derriere du fond de l’affüt d’un canon, où l’on accroche les palens. (Z) ETROUSSE , . f. (Jurifpr.) fignifie adjudicarion faite en juflice. Ce terme n’eft plus guere ufité que dans les provinces. On dit l’écroufe d'un bail Judi= ciaire ; l'ésrouffe des fruirs, &c. | Etrouffe eft auf un droit feigneurial dû X 14 fe gneurie de Linieres en Berry, qui eft d’un céftain nombre de deniers plus ou moins confidérable Fe lon l’état & facultés. des habitans, Ce droit fe paye pour l’érrouffe & malerroulfe. loyez Le ploff: de M. de Lauriere; au mot érrouffe. (4) LEUR 0 ETRUSQUE , (ACADÉMIE) Hf mod. fociété de favans qui s'aflemblent à Cortone ville de Téfcane, Elle ne fut fondée que’ pendant l'automne deirz27, par quelques gentilshommes qui cultivoient les Bel- _ les-Lettres & létude des antiquités, Pour favoriler le même genre d’études, ils firent acquifition du beau cabinet de l’abbé Onofrio Baldelli , & y ajoûterent une ample bibliotheque. [ls'ouvrirentoce double thréfor au public, dans un: äppartement du’ palais de fon'altefle royale , qui éft à Cortone: Les acadé: miciens ont pris Le nom d’Etrufques, quiconviéht au but de leur établiffement ; piifqu'ils s'appliquent principalemeut à raflembler ce qu'on peut déterrer des’ monumens des Urrbres, des Pélaftes, des Etrifques, «qui habitoïent l’ancienne 75e) Len {ymbole eft auffi relatif à ce but ; Fin srépié py thique avec ün ferpenr antour, 88 le mot où la devite, obfcur& derre lucida Pañso', "pris de Lucrecé > & qui L fatalluñon à lexplicationtdes antiquités, que fe pro 86 ETEN pofent ces académiciens. Ils s’affemblent tous les mois, & font des difcours fur des matieres d’érudi- tion. La poéfie eft exclue de leurs aflemblées, parce qu'ils croyent qu’elle détourne l’efprit de la recher- che de la vérité. Un grand nombre de favans & de beaux efprits de toute l'Italie, principalement parmi la noblefle , s’eft empreflé à entrer dans ce corps, dont le nombre eft maintenant fixé à cent. Plufieurs étrangers ont defiré d’y être agprégés. Le célebre Buonarotti fut choifi pour préfident perpétuel ; ce- pendant ils ont une dignité particulhiere qu'ils renou- vellent tous les ans fous le nom de Lucumon, qui étoit le titre des chefs des douze anciennes républi- ques étrufques. Biblioth. italig. tom. IV. & V. (G) ETTINGEN , (Géogr. mod.) ville du cercle de Franconie en Allemagne : elle eft fituée fur le Mein. ÆETUAILLES, f. f. (Fontaines Jalantes.) c’eft ainfi qu'on appelle des magafns où l’on dépole le fel en rail. ETUDE, f. f. (Arts & Sciences.) terme générique qui défigne toute occupation à quelque chofe qu'on aime avec ardeur ; mais nous prenons ici ce mot dans le fens ordinaire ; pour la forte application de l’ef- prit , foit à plufieurs Sciences en général , foit à quel- que-une en particulier, Je n’encouragerai point les hommes à fe dévouer à l'étude des Sciences, en leur citant les rois & les empereurs qui menoient à côté d’eux dans leurs chars de triomphe, les gens de lettres & les favans. Je ne leur citerai point Phraotès traitant avec Apoilo- nius comme avec fon fupérieur, Julien defcendant de fon throne pour aller embraffer le philofophe Maxi- me, &c. ces exemples font trop rares & trop fin- guliers pour en faire un fujet de triomphe : il faut vanter l’éude par elle-même & pour elle-même. L'étude eft par elle-même de toutes les occupations celle qui procure à ceux qui s’y attachent, les plai- frs fes pluis attrayans, les plus doux &r les plus hon- nêtes de la vie ; plaïfirs uniques , propres en tout tems, à tout âge & entous lieux. Les lettres, dit l’homme du monde qui en a le mieux connu la va- leur, n’embarraffent jamais dans la vie ; elles for- ment la jeunefle , fervent dans l’âge mûr, & réjoif- {ent dans la vieïllefle ; elles confolent dans l’adyer- fité, & elles rehauffent le luftre de la fortune dans la profpérité.; elles nous entretiennent la nuit &r le jour ; elles nous amufent à la ville , nous occupent à la campagne, & nous délaffent dans les voyages : Studia adolefcentian alunt. .«... Cicer. pro Archia. Elles {ont la reflource la plus füre contre l’ennni, ce mal affreux & indéfiniffable, qui dévore les hom- mes au milieu des dignités & des grandeurs de la cour. Voyez ENNUI. ER Je fais de l’écude mon divertiflement 8 ma confo- lation , diloit Pline, &)je ne fai rien de f.fâcheux aqu’elie n’adoucifle. Dans ce trouble que me caufe l'indifpoñition de ma femme, la maladie de mes gens, la mort même de quelques-uns; je ne trouve d'autre remede que l’ésude, Véritablement, ajoûte-t-il, elle me faitmieux comprendre toute la grandeur du mal, mais elle-me le fait aufi fupporter avec moins d’a- mertume, ; + LI Elle orne l’efprit de.vérités- agréables , utiles .ou néceffaies ; elle éleve l’ame par la beauté de la vé- ritable gloire, elle apprend à connoître les hommes tels qu'ils font , en les faifant voir tels qu'ils ontété, & tels qu'ils devroient être ; elle infpire du zele & de l’amour.pour la patrie ; elle nous rend plus. hu- | mains, plus-généreux plus juftés, parce, qu’elle nous rend plus.éclairés fur,nos devoirs, & {nr.les liens de l'humanité : oc! ; | C’eft par l'étude que nous formes . Contemporains de sous les hommes. . Æt citoyens de rous-lesilieuxs Fr "ER D Enfin c’eft elle qui donne à notre fiecle les lumie- res êt les connoiflances de tous ceux qui l’ont pré- cédé : femblables à ces vaifleaux deftinés aux voya- ges de long cours, qui femblent nous approcher des pays les plus éloignés, en nous communiquant leurs produétions & leurs richeffes. Mais quand l’on ne regarderoit l’ésude que comme une oifiveté tranquille , c’eft du moins celle qui plai- ra le plus aux gens d’efprit, & je la nommerois vo- lontiers l'oifveré laborieufe d'un homme fage. On fait la réponfe du duc de Vivonne à Louis XIV. Ce prince lui demandoit un jour à quoi lui fervoit delire: « Sire, lui répondit le duc, qui avoit de » l’embonpoint & de belles couleurs, la leéture fait » à mon efprit ce que vos perdrix font à mes joues ». S'il fe trouve encore aujourd’hui des détraéteurs des Sciences ,. & des cenfeurs de l'amour pour l’ésude, c'eft qu'il eft facile d’être plaifant, fans avoir raifon, &t qu'il eft beaucoup plus aifé de blâmer ce qui eft louable, que de limiter; cependant, graces au Ciel, nous ne fommes plus dans ces tems barbares où l’on laifloit l’ésude à la robe, par mépris pour la robe & pour l'étude. Il ne faut pas toutefois qu’en chériffant l’éude, nous nous abandonnions avenglément à l’impétuo- fité d'apprendre & de connoître ; l’ésude a fes regles, aufh-bien que les autres exercices , & elle ne fauroit réuflir, fi l’on ne s’y conduit avec méthode. Mais il n’eft pas poffible de donner ici des inftruétions par- ticulieres à cet égard : le nombre de traités qu'on a publiés fur la direétion des ésudes dans chaque fcien- ce, va prefqu’à l'infini; & sil y a bien plus de doc- teurs que de doétes, 1l fe trouve aufli beaucoup plus de maïtres qui nous enfeignent la méthode d’étu- dier utilement, qu'il ne fe rencontre de gens qui ayent eux-mêmes pratiqué les préceptes qu'ils don- nent aux autres. En général , un beau naturel & Pap- plication affidue furmontent les plus grandes diffi- cultés. : | Il y a fans doute dans lPérude des élémens de tou- tes les {ciences, des peines & des embarras à vain- cre; mais on en vient à bout avec un peu de tems, de foins &,de patience , & pour lors on cueille les rofes fans épines. L'on dit qu’on voyoit autrefois dans un temple de Pile de Scio , une Diane de mar- bre dont le vifage paroïfloit trifle à ceux qui en- troient dans le temple, &t gai à ceux qui en fortoient. L’écude fait naturellement ce miracle vrai ou préten- du de Part. Quelque auftere qu’elle nous paroïffe dans les commencemens , elle a de tels charmes en- fuite, que nous ne nous féparons jamais d’elle fans un fentiment de joie & de fatisfattion qu'elle laifle dans notre ame. Il eft vrai que cette joie fecrete dont une ame flu- dieufe eft touchée, peut fe goûter diverfement, felon le caraétere différent des hommes , & felon l’objet qui les attache ; car il importe beaucoup que léde. roule fur des fujets capables d’attacher. Il y a des hommes qui pañlent leur vie à l’ésude de chofes de fi mince valeur , qu'iln’eft pas furprenant s'ils n’en recueillent nigloirenicontentement. Céfar demanda à des étrangers qu'il voyoit paflionnés pour des fin- ges, fi les femmes de leurs pays n’avoient point d’en- fans. L’on peut demander pareillement à ceux qui ! n’étudient que des bagatelles, s'ils n’ont nulle con- noïffance de chofes qui méritent mieux leur applica- tion. Il faut porter la vüe de Pefprit fur des ézudes qui le récréent , l’étendent , & le fortifient, parce qu’elles: récompenfent tôt ou.tard du tems LE lon ya employé. Aya x Une autre chofe très-importante ; c’eft de com Tr mencerde bonne-heute d’entrer danscette noble car- riere. Je fai qu'il n’y a point de tems dans la vie au- quel il ne foit lojiable d'acquérir de la fcience, com- E TU me difoit Séneque : je fai que Caton l’ancien étoit fort âgé lorfqu'il fe mit à l'ésvde du grec ; mais mal- gré detels exemples, il mé paroït que d’entrepren- dre à la fin de fes jours d'acquérir l'habitude & le goût de l’érude, cet fe mettre dans un petit chatriot pour apprendre à marcher, lorfqw’on a perdu Pufage de fes jambes. | On ne peut guere s’arrêter dans l’éde des Scien- tes fans décheoir : les mufes ne font cas que de ceux qui les aiment avec pañion. Archimede craignit plus de voir effacer les doétes figures qu'il traçoit fur le fable, que de perdre la vie à la prife de Syracufe; mais cette ardeur fi louable &z fi néceflaire n’empé- che pas la néceflité des difra&tions & du délaffe- ment: aufli peut-on fe délafler dans la variété de l'éude ; elle fe joue avec les chofes faciles, de la peine que d’autres plus férieufes lui ont caufée. Les objets différens ont le pouvoir de réparer les forces . de lame, & de remettre en vigueur un efprit fati- gué. Ce changement n’empêche pas que lon n'ait toùjours un principal objet d’éude auquel on rap- porte principalement fes veilles. ” Je confeillerois donc de ne pas fe jetter dans lex- cès dangereux des ésudes étrangeres, qui pourroient confumer les heures que l’ondoit à l’érude de fa pro- feflion. Songez principalement, vous dirai-je, à or- ner la Sparte dont vous avez fait choix ; 1l eftbon de voir les belles villes du monde , mais il ne faut être citoyen que d’une feule, Ne prenez point de dégoût de votre éude, parce que d’autres vous y furpañlent. À moins que d’avoir l'ambition auf déréglée que Céfar, on peut fe con- tenter de n’être pas des derniers : d’ailleurs les éche- lons inférieurs {ont des degrés pour parvenir à de plus hauts. Souvenez-vous fur-tout de ne pas regarder l’écxde comme une occupation ftérile ; mais rapportez au contraire les Sciences qui font l’objet de votre atta- chement, à La perfeétion des facultés de votre ame, &c au bien de votre patrie. Le gain de notre ésude doit confifter à devenir meilleurs, plus heureux & plus fages, Les Egyptiens appelloïient les bibliotheques Le thréfor des remedes de l'ame: l'effet naturel que l’écu de doit produire , eft la guérifon de fes maladies. Enfin vous aurez fur les autres hommes de grands avantages, 87 vous leur ferez toüjours fupérieur, fi en cultivant votre efprit dès la plus tendre enfance par l’érude des fciences qui peuvent le perfetionner, vous imitez Helvidius Prifcus , dont Tacite nous a fait un f beau portrait, Ce grand homme, dit-il, très-jeune encore, & déjà connu par fes talens, fe jetta dans des ésudes profondes ; non, comme tant d’autres, pour mafquer d’un titre pompeux une vie inutile 8 defœuvrée, mais à deffein de porter dans les emplois une fermeté fupérieure aux évenements, Elles lui apprirent à regarder ce qui eft honnête, comme unique bien; ce qui eft honteux ; comme l'unique mal ; & tout ce’qui eft étranger à l’ame, comme indifférent, Arsicle de M, le Chevalier DE JAUCOURT. ETUDES , (Lirtérar.) On défigne par ce mot les exercices littéraires ufités dans l’inftruêtion dela jeunefle ; érudes grammaticales , études de Droit, études de Medecine, Ge. faire de bonnes rudes, L'objet des études a été fort différent chez les dif= férens peuples 8 dans les”différens fiecles. 1] n’eft pas de mon fujet de faire ici lhiftoire de ces variétés, onpeut voir fur cela Z rrairé des études de M. Fleury. Les érudesordinaires embraflent aujourd’hui la Gram- maire &c fes dépendances, la Poéfie, la Rhétorique, toutes les parties de‘la Philofophie, 6‘. Au tefte, jeme borne à éxpofer ici mes réflexions fur le choix & fur la méthode des ésudes qui convien- nent le mieux nos ufages r à nos befoins; & come E TU 87 me Îe latin fait le principal & prefque l'unique objet de linftitution vulgaire, jemattacherai plus partis culierement à difcuter la conduite des ésudes latines. Plufieurs favans , grammairiens & philofophes ont travaillé dans ces derniers tems à perfe@tionner le fyftème dés éudes ; Locke entr’antres parmi les An- glois ; parmi nous M. le Febvre, M. Fleury; M. Rol: lin, M, du Marfais, M, Pluche, & pluféurs autres encore, fe font exercés en ce genre. Préfque tous ont marqué dans. le détail ce qui fe peut fairé en cela de plus utile, & ils paroïffent convenir à lé. gard du latin, qu'il vaut mieux s'attacher aujout d’hui, fe borner même à l'intelligence de cette lan- gue, que d’afpirer à des compoñitions peu néceflai- res, & dont la plüpart des étudians ne font pas capa- bles. Cette thèfe , dont j’entreprends la défenfe . eft déjà bien établie par les auteurs que J'ai cités & pat plufeurs autres également favans. ‘ Un ancien maître de l’univerfité dé Paris , qui en 1666 publia une traduétion des capifs de Plaute. s’énonce bien pofitivement fur ce fujet dans la pré face qu'il a mife à ce petit ouvrage. « Pourquoi dit-il, » faire perdre aux écoliers un tems qui eft f » précieux, & qu'ils pourroient employer fi utile- » ment dans la leéture des plus riches ouvrages de » l'antiquité? . . . : Ne vaudroit-il pas mieux oc » cuper les enfans dans les colléges, à apprendre » PHiftoire, la Chronologie, la Géographie, un peu » de Géométrie & d’Arithmétique , & fur-tont la pus » reté du latin & du françois , que de les amufer dé » tant de regles’ & inftru@ions de Grammaire ? . . » Il faut commencer à leur apprendre le latin par » l’ufage même du latin, comme ils apprennent le » françois , & cet ufage confifte à leur faire lire, tra » duire & apprendre les plus beaux endroïts des aua » teurs latins ; afin que s’'accoûtumant à les entendre » parler, 1ls apprennent eux-mêmes à parler leur » langage ». C’eft ainfi que tant de femmes, fans étude de grammaire, apprennent à bien parler leur langue, par le moyen fimple & facile de la conver: fation & de la leûture ; & c’eft de même encore que la plüpart des voyageurs apprennent les langues étrangeres. Un autre maître de l’univerfité qui avoit profeflé aux Graflins, publia une lettre fur la même matiere en 1707: j'en rapporterai un article qui vient À mon fujet. « Pour favoir l'allemand, l'italien, lefpagnol, » le bas-breton , l’on va demeurer un où deux ans » dans les pays où ces langues font en ufage, & on » les apprend par le feul commerce avec ceux qui » les parlent ? Qui empêche d'apprendre aufñ Le la+ » tin de Ja même maniere? & fi ce n’eft par l’ufage » du difcours & de la parole, ce fera du moins par » Pufage de la ledure, qui fera certainement beau » coup plus für & plus exaét que celui du difcours. » C’eft ainfi qu’en ufoient nos peres il y a quatre ou # cinq cents ans », M. Rollin, srairé des études, p. 128. préfere auf pour les commençans l’explication dés auteurs à la pratique de la compofition ; & cela parce que les thèmes ; comme il le dit, « ne font proprés qu’à tour- # menter les écoliers par un travail pénible & peu »utile , 8 à leur infpirer du dégoût pour une de » quine leur attire ordinairement de la part-des mai- » tres que des reprimandes & des châtimens ; car, » pourfuit-il, les fautes qu’ils font dans leurs thè- » mésg@tant très-fréquentes & prefqu'inmévitables,, » les le deviennent auf : au lieu que » l’explitation des auteurs, & la traduétion, oùils _» ne produifent rien d'eux-mêmes, 8 ne font que fe # prêter au maitre , leur épargnent beaucoup de- »# téms, de peines & de punitiens ». M: le Febvre eft encore plus décidé 1à : deflus > voici comme il s'explique dans faréth0de, pari 20: 88 ETU 4 Je me-gardäi-bien, dit:il, de fuivre fa maniere que » Fon fuit ordinairement, qui eft de commencer par #-[a compofition. Je mefuis tobjours étonné de voir » pratiquer une telle méthode pour inftmure les en- # fans dans la connoiffance de la langue latine’; -car » cette langue après tout, eff comme les autres lan- »# gues : cependant qui a jamais -oùi dire qu’on com- » mence l’hébreu , l'arabe, lefpagnol, &:c. par la » compoftion? Un homme qui déliberelà-deflus , » n'a.pas grand Commerce avec la faine raïfon ». En effet, comment pouvoir compofer avant que d’avoir fait provifion des matériaux que l’on doit employer ? On commence par le plus difficile ; on préfente pour amorce à des enfans de fept à huit ans, les difiicultés les plus compliquées du latin, & l’on exige qu'ils faflent des compofñtions en cette langue, tandis qu'ils ne font pas capables de faire la moindre lettre en françois fur les fujets les plus ordinaires & les plus connus, Quoi qu’il en foit, M. le Febyre fuivit uniquement [a méthode fimple d'expliquer les auteurs, dans linftruétion qu'il donna lui-même à fon fils ; il le mit à explication vers l’âge de dix ans, & il le fit continuer de la même maniere jufqu’à fa quator- zieme année, tems auquel mourut cet enfant cé- lebre, qui entendoit alors couramment les auteurs grecs & latins les plus difficiles : le tout fans avoir donné un feul inftant à la firuéture des themes, qui du refte n’entroient point dans le plan de M. le Feb- vre., comme il eft aifé de voir par une réflexion qu’il ajoûte à la fin de fa r7éthode : « Où pouvoïient aller, » dit-1l, de fi beaux & de fi heureux commence- » mens ! Que n’eût-on point fait, fi cet enfant fût # parvenu jufqu'à la vingtieme année de fon âge ! # combien aurions - nous Iù d’hiftoires greques & » latines, combien de beaux auteurs de morale, » combien de tragédies, combien d’orateurs ! car + enfin le plus fort de la befogne étoit fait ». Il ne dit pas , comme on voit, un feul mot des thèmes ; 1l ne parle pas non plus de former fon fils à la compoñition latine, à la poéfie, à la rhétorique. Peu curieux des produ&tions de fon éleve , il ne lui demande , 1l ne lui fouhaite que du progrès dans la leêture des anciens , &c il fe tient parfaitement affüré du refte : bien différent de la plüpart des parens & des maîtres, qui veulent voir des fruits dans les en- fans, lorfqu’on n’y doit pas encoretrouverdesfleurs. Mais en cela moins éclairés que M. le Febvre , ils s’inquietent hors de faifon , parce qu'ils ne voyent pas, comme lui, que la compoñition n’eft propre- ment.qu’un jeu pour ceux qui font confommés dans l'intelligence des auteurs, 8 qui fe font comme trans- formés en eux par la ledure afidue de leurs ouvra- ges. C’eft ce qui parut bien dans mademoifelle le Febvre, fi.connue dans la fuite fous le nom de #14- dame Dacier.: on fait qu’elle fut inftruite, comme fon frere, fans avoir fait aucun thème ; cependant quelle gloire ne s’eft-elle pas acquife dans la littérature gre- que & latine ? Au refte, approfondifflons encore plus cette matiere importante, & comparons les deux méthodes, pour en juger par leurs produits. . L'exercice littéraire des meilleurs colléges, de- puis fept à huit ans jufqu'à feize & davantage , con- fifte principalement à fe former à la compoñtion du latin; je veux dire à lier bien ou mal en profe & en vers quelques centaines de phrafes latines : habitude du refte qui n’eft prefque d'aucun ufage dans le cours de la vie. Outre que telle eft la fécherefle & la dif- ficulté de ces opérations ffériles, qu'avec une appli- cation conftante de huit ou dix ans dela partdes éco- liers & des maîtres , à peine eft-il un tiers des difci- ples qui parviennent@ s’y rendre habiles; je dis mé- me parmi ceux qui achevent lenr carriere: çar je ne parle point ici d’une infinité d’autres.qui fe rebu- æ Es ET teñt aû milièu de la conrfe , & pour qui la dépenfe déjà faite fe trouve abfolument.perdue. En un mot, rien de plus ordinaire que de voir de bons efprits cultivés avec foin, qui, après s’être fatigués dans la compofñition latine depuis fix à fept ans jufqu’à quinze ou feize , ne fauroient enfuite produire aucun fruit réel d’un travail fi long & pénible ; au lieu qu'on peut défier tous les adver- faires de la méthode propofée, de trouver un feul difciple conduit par des maîtres capables, qui ait mis envain le même tems à l'explication des auteurs, & aux autres exercices que nous marquerons plus bas, Aufli plufieurs maîtres des penfions & des colléges reconnoiflent-ils de bonne foi Le vuide &c la vanité de leur méthode, & ils gémiflent en fecret de fe voir aflervis malgré eux à des pratiques déraifonnables qu'ils ne font pas toûjours libres de changer. Tout ce qu'il y a de plus éblouiffant 8 de plus fort en faveur de la méthode ufitée pour le latin , c’eft que ceux qui ont le bonheur d’y réuflir 8 d’y bril» ler, doivent faire pour cela de grands efforts d’ap- phication & de génie ; & qu’ainf l’on efpere avec quelque fondement qu'ils acquerront par-là plus de capacité pour l’éloquence & la poëéfie latine : mais nous l’avons déjà dit, & rien de plus vrai, ceux qui fe diftinguent dans la méthode régnante , ne font pas le tiers du total. Quand il feroit donc bien conf- tant qu'ils düffent faire quelque chofe de plus par cette voie, conviendroit-1l de négliger une méthode qui eft à la portée de tous les efprits, pour s’entêter d'une autre toute femée d’épines, & qui n’eft faite que pour le petit nombre, dans l’efpérance que ceux qui vaincront la difficulté, deviendront un jour de bons lâtiniftes ? En un mot, eft-il jufte de facrifier la meilleure partie des étudians , & de leur faire pex- dre le tems & les frais de leur éducation, pour pro- curer à quelques fujets la perfeétion d’un talent qui eft le plus fouvent inutile, & qui n’eft prefque ja- mais néceflaire ? Mais que diront nos antagoniftes , f. nous foûte- nons avec M. le Febvre, que le moyen le plus efi- cace pour arriver à la perfeétion de l’éloquence la- tine , eft précifément la méthode que nous confeil- lons ; je veux dire là leéture conftante, l'explication & la traduétion perpétuelle des auteurs de la bonne latinité? On ignore abfolument, dit ce grammairien célebre, la véritable route qui mene à la gloire lit- téraire ; route qui n’eft autre que l’ésude exaûte des anciens auteurs, C’eft, dit-il encore, cette pratique fi féconde qui a produit les Budés, les Scaligers, les Turnebes, les Paflerats, & tant d’autres grands hommes : Wiam illam planè ignorant quë& majores nof2 tros ad æternæ famæ claritudinem perveniffe videmus. Quænamilla fit fortal[è rogas,vir clariffime ? Nulla cerrè alia quam veterum fcriptorum accurata leëlio. Ea Bu- deos & Scaligeros ; ea Turnebos , Pafferatos , € tot ir- gentia nomina édidit, Epift. xlij. ad D, Sarrau. Schorus, auteur allemand , qui écrivoit il y a deux fiecles fur la maniere d'apprendre lelatin, étoit bien dans les mêmes fentimens. « Rien, dit-il, de » plus contraire à la perfeftion des études latines, ».que l’ufage où l’on eft de négliger limitation des » auteurs, & de conduire les enfans au latin pltôt » par des compoñtions de collége, que par la ledure » aflidue des anciens»: Negue verd quicquam perni- tiofius accidere fludiis linguæ latinæ poteff, quam quod negleétä omni imitatione, puéri à fuis magifiris magis quäm a Romanis ipfis latinitatem difcere cogantur. An- tonii Schori Zbro de ratione docendeæ € difcende linguæ latine, page 34. }Auffi la méthode qu’indiquent ces favans, étoit proprement la feule ufitée pour apprendre le latin, lorfque cette langue étoit fi répandue en Europe, qu'elle y étoit prefque vulgaire ; au tems, par exem- - ple, ple; de Charlemagne & de S. Louis. Que faifoit-on pour lors autre chofe, que lire ou expliquer les au- teurs > N'eft-ce pas de-là qu’eft venu le mot de Zec- teur, pour dire profeffeur ? & n’eft-ce pas enfin ce qu'il faut entendre par le præleétio des anciens lati- niftes ? terme qu'ils employent perpétuellement pour défigner le principal exercice de leurs écoles, &qui ne peut fignifer autre chofe que l’explication des li: vres clafiques. Voyez les colloques d'Erafme. D'ailleurs , il n’y avoit anciennement que cette voie pour devenir latinifte : les diétionnaires fran- cois-latins n’ont paru que depuis environ deux cents ans ; avant ce tems-là il n’étoit pas poflible de faire ce qu'on appelle w shème, &1l n’y avoit pas d'autre exercice de latinité que la ledture ou l'explication des auteurs. Ce fut pourtant, comme dit M. le Feb- vre, ce fut cette méthode fi fimple qui produifit les Budés ; lesil'urnebes , les Scaligers. Ajoütons que ce fut cette méthode qui produifit madame Dacier. Quoi qu'il en foit , il eft vifible qu’on doit plus attendre d’une inftruétion grammaticale fuivie & raifonnée , où les dificultés fe développent à me- fure qu'on les trouve dans les livres, que d’un fa- tras de regles ifolées , le plus fouvent fauiles 6e mal concüés ; & qui, bien que décorées du beau nom de principes, ne font au vrai que les exceptions des regles générales, ou, fi on veut , les caprices d’une fyntaxe mal développée. Au refte, l'exercice de léxplication eft tout-à- fait indépendant des dificultés compliquées dont on régale des enfans qui comméncent. En effet, ces dif- ficultés fe trouvent rarement dans les auteurs ; elles ne font, pour ainfi dire, que dans l'imagination &c dans les recueils de ces prétendus méthodiftes, qui loin de chercher le latin, comme autrefois, dans les ouvrages des anciens, fe font frayés une route à cette langue, par de nouvéaux détours oùils bruf- quent toutes les difficultés du françois ; route fca- breufe & comme impratiquable, en ce que les tours, les expreffions & les figures des deux langues ne s’ac- cordant prefque jamais en tout , la fallu, pour aller du françois au latin, imaginer une efpece de méchani- que fondée fur des milliers de regles; mais regles em- brouillées , & Le plus fouvent impénétrables à des énfans, jufqu'à ce que le bénéfice des années & le fentiment que donne un long ufage , produifent à la fin dans quelques-uns une mefure d'intelligence & d’habileté que l’on attribue fauflement à la pratique de ces regles. | Cependant il eft des obfervations raifonnables que l’on doit faire fur le fyftème grammatical, & qui ré- duites pour les commençans à une douzaine au plus, forment des regles conftantes pour fixer les rapports les plus communs de concordance & de régime; &c ces regles fondamentales clairement expliquées , font à la portée des enfans de fept à huit ans. Celles qui font plus obfcures , & dont l’ufage eft plus rare, ne doivent être préfentées aux étudians que lorf- qu'ils font au courant des auteurs latins. D'ailleurs, la plüpart de ces regles n’ont été occafionnées que par l’ignorance où l’on eft, tant des vrais principes du latin, que de certaines expreflions abrégées qui font particulieres à cette langue ; &c qui une fois bien approfondies, comme elles le font dans Sanc- tius, Port-royal & ailleurs, ne préfentent plus de vraie difficulté , & rendent même inutiles tant de regles qu'on a faites fur ces irrégularités apparentes. La briéveté qu’exige un article de diétionnaire, ne me permet pas de m'étendre ici là-deflus; mais je compte y revenir dans quelque autre occañon. . l’ajoïte que l’un des grands avantages de cette nouvelle ïnftitution , c’eft qu’elle épargneroit bien cles châtimens aux enfans ; article délicat dont on Tome VI, | 1 ET U 89 ne parle guère, mais qui mérite autant on plus qu'un autre d'être bien difcuté. Je trouve donc qu'il y a fur cela de l’injuftice du côté des parens & du côté des maîtres ; je veux dire trop de molléffe de la-part des uns, & trop de dureté:de la partdes antres. En effet, les maîtres de la méthode vulgaire, bor: nés pour la plüpart à quelque connoiffance du latin; & entêtés follement dela compoñtion des thèmes ; ne ceflent de tourmenter leurs éleves, pour les pou: fer de, force à ce travail accablant ; travail quine paroiît inventé que pour contrifter la jeunefle, & dont il ne réfulte prefqu’aucun fruit, Premier excès qu'il faut éviter avec foin: Les parens , d'un aûtre côté, bien. qu'inquiets ; impatiens mème fur les progrès de leurs enfans, n’ap- prouvent pas pour l'ordinaire qu’on les mene par la voie des punitions, En vain le fage nous. affüre que Pinftruétion appuyée de la punition, fait naître la {az gefle; & que l'enfant livré à fes caprices devient la honte de fa mere (Prov. xxjx. 16.) ; que celui qui ne châtie pas fon fils, le hait véritablement (i:4, x}. 24) ; que celui qui l'aime , eft attentif à le cor tiger, pour en avoir un jour de la fatisfaétion. Æcc/e: | Jraflig. xxx. 1. En vainil nous avertit que fi on fe familiarife avec un enfant , qu’on ait pour lui de la foibleffe & des complaifances, il deviendra comme un cheval fou: gueux , & fera trembler fes parens ; qu’il faut par conféquent le tenir foûmis dans le premier âge, le châtier à-propos tant qu’il eft jeune , de peur qu'il ne fe roidiffe jufqu’à l'indépendance, & qu'il ne caufe un jour de grands chagrins. hid. xxx, 8. 9.10, 114 12. En vain S. Paul recommande aux peres d'élever leurs enfans dans la difcipline & dans la crainte du feigneur. Ephef. vf. 4. Ces oracles divins ne font plusécoutés : les pa= rens , aujourd'hui plus éclairés que la fagefle mème, rejettent bien [din ces maximes ; & prefque tous aveugles & mondains, ils voyent avec beaucoup plus de plaïfir les agrémens & l’embonpoint de leurs en- fans, que le progrès qu'ils pourroient faire dans les habitudes vertueufes. Cependant la pratique de l’éducation févere eft trop bien établie & par les pañlages déjà cités, & pat les deux traits qui fuivent, pour être regardée comme un fimple confeil. Il eft dit au Deuréronome xx. 18. &tc. que s’il fe trouve un fils indocile 8 mu- tin, qui, au mépris de fes parens, vive dans l’indé- pendance & dans la débauche, il doit être lapidé pat le peuple, comme un mauvais fujet dont il faut dé- livrer la terre. On voit d’un autre côté que lesrand prêtre Héli, pour n’avoir pas arrêté les defordres de {es fils, attira fur lui &c fur fa famille les plus terri= bles punitions du Ciel. Liv. ZI, des Rois, ch. ÿ. Il eft donc certain que la mollefle dans l’éduca= tion peut devenir criminelle ; qu'il faut par confé: quent une forte de vigilance & de févérité pour con- tenir les enfans , & pour les rendre dociles & labo- rieux : c’eft un mal , j'en conviens , mais c’eft un mal inévitable. L'expérience confirme en cela les maximes de la fagefle ; elle fait voir que les châti- mens font quelquefois néceffaires , &c qu’en les re- jettant tout-à-fait on ne forme guere que des fujets inutiles & vicieux. Quoi qu’il en foit, le meilleur, l’unique tempéra- ment qui fe préfente contre l’inconvénient des pun tions ; c’eft la facilité de la méthode que je propofes méthode qui, avec une application médiocre de la part des écoliers , produit tohjours un avancement raïfonnable , fans beaucoup de rigueur de la part des maîtres. [ls’en faut bien qu’on en puifle dire autant de la compofition latine ; elle fuppofe beaucoup de talent & beaucoup d'application , ëz c’eft la caufe malheureufe , mais la caufe néceflaire, de tant de 90 E © U châtimensianon inflige aux jeunes latiniftes, & que les maîtres ne pourront jamaïs fupprimer, tant qu'ils demeuteront fideles à cette’ méthode. - Ileft donc à fouhaiter qu’on change le fyflème des études ; qu’au lieu d'exiger des enfans avec rigueur des compoftions difficiles &c rebutantes , inacceffi- bles au grand nombre, onne leur demande que des opérations faciles , &t en conféquence rarement fui- vies des corre@tions & du dégoût. D'ailleurs la jeu- nefle pale rapidement; &c ce qu'il faut favoir pour entrer dans le monde, eft'd’une grande étendue, C’eft pour cette raifonqu'il faut fair au plus vite le bon & lPutile de chaque chofe, &c gliffer fur tout le refte; ainfi le premier âge doit être employé par préférence à faire acquifition des connoïffances les plus néceffaires. Qu’eft-ce en effet que l’éduca- tion , fi cer’eft l’apprentiflage de ce qu'il faut favoir &c pratiquer dans le commerce de la vie? or peut- on remplir ce grand objet, en bornant linftruétion de la jéunefle au travail des thèmes & des vers? On fait que tout cela n’eft dans la fuite d’ancun ufage, & que le fruit qui refteide tant d’années d’ésudes ; fe réduit à peine à lintellisencedu latin :Je dis à peine, &c je ne dis pas aflez, Il n’eft guere de latimifte qui n’avoue de bonne foi que le talent qu'il avoit acquis au collége pour compofer en profe & en vers, ne lui faifoit point entendre couramment les livres qu’il n’avoit pas encore étudiés: Chacun , dise, avoue qu'après fes brillantes compoñitions, Horace, Vir- gile, Ovide, Tite-Live & Tacite, Cicéron & Tri- bonien ; ont fouvent mis en défaut toute fa latinité. Il falloit donc s'attacher moins à faire des vers inu- tiles , qu’à bien pénétrer ces auteurs par la lecture & par la traduétion ; cé qui peut donner tout-à-la- fois ces deux degrés également néceffaires & fnf- ffans, intelligence facile du latin, éloquence & compoftion françoife. À | Pour entrer dans le détail d’unéinftruétion plus utile, plus facile, & plus fuivie, je crois qu'il faut mettre les enfans fort jeunes à l4, B, C: on peut commencer dès l'âge de trois ans ; & pourvü qu’on leur fafle de ce premier exercice un amufement plü- tôt qu'un travail, & qu'on leur montre les lettres fuivant les nouvelles dénominations déjà connues parplnfieurs ouvrages, ils lirontenfuite couramment & de bonne heure , tant en françois qu’en latin : on fera bien d’y joindre le grec & le manufcrit. Du refte, trois ou quatre ans feront bien employés à fortifier l'enfant fur toute forte de leéture, & ce {era une gran- de avance pour la fuite desézvdes,où1limportede lire aifément tout ce qui fe préfente. C’eft un premier fondement ptefque toûjours négligé ; il en réfulte que les progrès enfuite font beaucoup plus lents & plus difficiles. Je voudroïs donc mettre beaucoup de foin dans les premiers tems, pour obtenir une lec- ture aifée, & une prononciation forte & diftinéte ; car c’eft-là,fi je neme trompe, l’un des meilleurs fruits de l’éducation. Quoi qu'il en foit, fi Pon donne aux enfans, comme livre de leûture, les rudimens latins: françois , ils feront aflez au fait à fix ans pour expli- quer d’abord le catéchifme hiftorique, puis les col- loques familiers , les hiftoires choifies, l’appendix du P; Jouvency, &c. Le maître aura foin, dans les premiers tems, de rendre fori explication fort littérale ; il fera fentir la raifon des cas & les autres variétés de Grammaire ; prenant tous les jours quelques phrafes de l’auteur, pour y montrer lapplication des regles. On expli- que de mêmé, à proportion de l’âge & des progrès des enfans, tout ce qui eff relatif à l’Hiftoire & à la Géographie, les expreffions figurées , &c. à quoi on les rend attentifs par diverfes interrogations. Ainf la principale occupation des étudians , durant les premieres années, doit être d'expliquer des auteurs faciles, avec l'attention fi bien recommandée par M, Pluche, de répéter plufeurs fois la même leçon , tant de latin en françois que de françois en latin : après même qu'on a vü un livre d’un bout à l’autre , &t non par lambeaux, comme c’eft la coûtume , il ef bonde recommencer fur nouveaux frais , & dete- voir le même auteur en entier. On fent bien qu'il ne faut pas fuivre pour cela l’ufage établi dans les col- lèges, d'expliquer dans le même jour trois ou qua= îte auteurs de latinité ; ufage qui acommode fans doute le libraire, & peut - être le profefleur, mais qui niut véritablement au progrès des enfans, lef- quels embarraffés &c furchargés de livres, n’en étu- dient aucun comme il faut ; outre qu'ils les perdent, les vendent & les déchirent, & conftituent des pa- rens (quelquefois indigens ) en frais pour en avoit d’autres. Au furplus, je confeille fort, contre l'avis de M, Pluche, d'expliquer d’abord à la lettre, & confé: quemment de faire la conftruétion ; laquelle eft, comme Je crois, très-utile, pour ne pas dire indif- penfable , à l’égard des commençans, Quant à l'exercice de la mémoire, je né deman: derois par cœur aux enfans que les prieres & le pe- tit catéchifme, avec les déclinaifons & conjugaifons latines & françoifes : mais je leur ferois lire tous Jes jours, à voix haute & diftin@e, des morceaux choi: is de l’hifoire, &r je les accoûtumerois à répéter fur le champ ce qu'ils aur@ient compris & retenu ; quand ils feroient affez forts, je leur ferois mettre le tout par écrit. Du refte ; je les appliquerois de bonne heure à l'écriture , vers l’âge de fix ans au plütard >; &c dès qu'ils fauroïent un peu manier la plume , je leur ferois copier plufieurs fois tout ce qu’il y a d'ir- régulier dans les noms & dans les verbes, des prété- rits & fupins, des motsilolés, &c. Enfuite À mefure qu'ils acquerreroient l'expédition de l'écriture, je. leur ferois écrire avec foin la plüpart des chofes qu'on leur fait apprendre , comme les maximes choi- lies , le catéchifme, la fyntaxe, & la méthode, les vers du P. Buffier pour PHiftoire & la Géographie, & enfin les plus beaux endroits des Auteurs. Ainfñ j'exigerois d'eux beaucoup d'écriture nette & lifible, mais je ne leur demanderois guere de leçons, perfua: dé qu’elles font prefque inutiles | & qu’elles ne lai fent rien de bien durable dans la mémoire, | Par cette pratique habituelle & continuée fans ini |. tetruption pendant toutes les éudes , on s’affüreroit que toûjours pour apprendre par cœur, & dont on ne fauroit empêcher ni découvrir la négligence à cet égard, à moins qu'on ne mette à cela un tems conf dérable, qu'on peut employer plus utilement, D’ail- leurs, bien que l'écriture exige autant d'application que l’exercice de la mémoire , elle eft néanmoins plus fatisfaifante & plus à la portée de tous les fu- jets ; elle eft en même tems plus utile dans le com- merce de la vie, & fur-tout elle fuppofe la réfidence &c l’affiduité; en un mot, elle fixe le corps &c l’ef- prit, & donne infenfiblement le soût des livres & du cabinet : au lieu que le travail des leçons ne donne le plus fouvent que de l'ennui. À Outre explication des bons auteurs , & la répéti- tion du texte latin, faite, comme on l'a dit, fur l’ex- plication françoife, on occupera nos jeunes latiniftes à traduire de la profe & des vers; mais au lieu de prendre, fuivant la coûtume, des morceaux déta- chés de l’explication journaliere, je penfe qu'il vaut mieux traduire un livre de fuite, en pouflant toû- jours l’explication qui doit aller beaucoup plus vite. Le brouillon &e la copie de l’écolier feront écrits polément, avec de l’efpace entre les lignes , pour corriger ; opération importante , qui eft autant du aïfément du travail des écoliers , qui reculent pre : maître que du difciple, & à laquelle il faut être fi- dele. La verfion fera donc corrigée avec foin, tant pour l'orthographe que pour le françois ; après quoi elle fera mile au net fur un cahier propre &t bien en- tretenu. | | Ces pratiques formeront peu-à-peu les enfans, non-feulement aux touts de notre langue , mais en- core plus à écriture ; acquifition précieufe , qui eft propre à tous les états & à tous les âges. Il feroit à fouhaiter qu’on en fît un exercice claf fique , & qu'on y attachât des prix à la fin de lan- née. J’ajoûterai fur cela, qu’au lieu de longs bar- bouillages qu’on exige en penfums, il vaudroït mieux demander chaque fois un morceau d'écriture cor- reéte, &, s'il fe peut, élégante. A l'égard du grec, l'application qu’on y donne eff le plus fouvent infruétueufe, fur-tout dans les collèges, où l’on exige des thèmes avec la pofition desaccens: on pourroit employer beaucoup mieux le tems qu'on perd à tout cela; c’eft pourquoi j'en voudrois dé- charger la jeunefle, perfuadé qu'il fufit à des éco- liers de lire le grec aïfément, &c d'acquérir l’intelli- gence originale des mots françois qui en font deri- vés. Si cependant on étoit à portée de fuivre le plan du P. Giraudeau, on fe procureroit par fa méthode une intellisence raifonnable des auteurs grecs ; le tout fans fe fatiguer, & fans nuire aux autres ésudes. Mais travail pour travail , il vaudroit encore mieux étudier quelque langue moderne , comme l’i- talien, l’efpagnol, ou plûtôt langlois, qui eft plus utile & plus à la mode : la grammaire angloife eft courte & facile ; on fe met au fait en peu d'heures. A la vérité la prononciation n’eft pas aïfée , non- feulement par la faute des Anglois, qui laïflent leur orthographe dans une imperfeétion , une inconfe- quence qu’on pardonneroït à peine à un peuple igno- rant, mais encore par la négligence de ceux qui ont fait leurs orammaires & leurs diétionnaires, & qui n'ont pas indiqué , comme ils le pouvoient, la va- leur aétuelle de leurs lettres , dans une infinité de mots où cette valeur eft différente de l’ufage ordinaï- re. M. King, maître de langues à Paris, remédie au- jourd'huu à ce défaut ; 1l montre l’anglois avec beau- coup de méthode, & il en facilite extrèmement la leêture & la prononciation. Au refte, un avantage que nous avons pour l’an- glois, 8 qui nous manque pour le grec, c'eft que la moitié des mots qui confhtuent la langue moder- ne, font pris du françois ou du latin ; prefque tous les autres font pris de l'allemand. De plus , nous fommes tous les jours à portée de converfer avec des Anglois naturels, & de nous avancer par-là dans la connoïflance de leur langue. La gazette d'Angleterre qu'on trouve à Paris en plufieurs endroits, eft enco- re un moyen pour faciliter la même éxde. Comme cette feuille eft amufante , & qu’elle roule fur des {u- jets connus d’ailleurs ; pour peu qu’on entende une partie, on devine aifément le refte ; & cette lecture donne peu eu l'intelligence que l’on cherche. La fingularité de cette ésude, &e la facilité du pro- grès , mettroient de lémulation parmi les jeunes gens , à qui avanceroit davantage ; & bientôt les plus habiles ferviroient de guides aux autres. Je con- clus enfin que , toutes chofes égales ,on apprendroit plus d’anglois en un an que de grec en trois ans ; c’eit pourquoi comme nous ayons plus à traiter avec PAngleterre qu'avec la Grece, que d’ailleurs il n’y a pas moins à profiter d’un côté que de l’autre, après le françois &z le latin , je confeillerois aux jeunes gens de donner quelques momens à l’anglois. Vajoûte que notre empreflement pour cette lan- gue adouciroit peut-être nos fiers rivaux, qui | a nous, en çonféquence, des fenti- Tome VI, | E Ÿ U 97 mens plus équitables ; ce qui peut avoir fon utilité dans l’occafon. Du refte, ileft des exercicésencore plus utiles au grand nombre , & qui doivent faire partie de l'édu- cation; tels font le Deffein,, le Calcul & l’Ecriture, la Géométrie élémentaire, la Géographie, la Mufi- que, 6e, [ne faut fur cela tout au plus que deux le- çons par femaine ; on y employe fouvent le tems des récréations, & l’on en fait fur-tout la principale oc- cupation des fêtes & des congés. Si l’on eft fidele À cette pratique depuis l’âge de huit À neuf ans jufqu'à la fin de l'éducation , On fera marcher le tout à {a fois, fans nuire à l’ésude des langues ; & l’on aura le plaïfir touchant de voir bien des fujets réufär à tout, C’eft une fatisfaétion que j’ai eu moi-même aflez fou- vent. Aufli je foûtiens que tous ces exercices font: moins difficiles & moins rebutans que des thèmes, & qu’ils attirent aux écoliers beaucoup moins de pu= mtions de la part des maitres. Depuis l’âge de douze ans jufqu’à quinze & feize ; on fuivra le fyftème d’ésudes expofé ci-deflus ; fais alors les enfans prépareront eux-mêmes l’explica- tion, Pour cela on leur fournira tous les fecours traduëtions , commentaires, Gc. L’ufage Contre m'a toüjours paru déraifonnable ; il eft en effet bien étrange que des maîtres qui fe procurent toutes {or- tes de facilités pour entrer dans les livres , s’obfti- nent à refufer les mêmes fecours à de jeunes éco- liers. Au furplus , ces enfans feront occupés à diver- fes compoftions françoifes & latines : fur quoi lune des meilleures chofes à faire en ce genre, eft de don- ner des morceaux d'auteurs à traduire en françois ; donnant enfuite tantôt La verfion même À remettre en latin , tantôt des thèmes d'imitation {ur des {u- jets femblables. On pourra les appliquer également à d’autres compoftions latines, pourvû que tout fe fafle dans les circonftances & avec les précautions qui conviennent. Je ne puis m’empêcher de placer ici quelques réflexions que fait fur cela M. Pluche, com. VI. du Spettacle de la Nature, pag. 125. «S'ileft, dit-il, de la derniere abfurdité d’exiger » des enfans de compofer en profe dans une langue » qu'ils ne favent pas, & dont aucune reole ne peut » leur donner le. goût ; il n’eft pas moins abfurde » d'exiger de toute une troupe, qu’elle fe mette à » méditer des heures entieres pour faire huit ou dix » vers, fans en fentir la ftruéture ni l'agrément: il » vaudroit mieux pour eux avoir écrit uné peti- » te lettre d'un ftyle aifé , dans leur propre langue, » que de s'être fatigué pour produire à coup für de » mauvais vers, foit en latin foit en grec, » Il'eft fenfible que plufieurs courrontles mêmes » rifques dans le travail des amplifications & des pie- » ces d’éloquence , où 1l faut que l’efprit fournifle » tout de lui-même , Le fonds &c le ftyle: peu y réuf- » fiffent ; s'il s’en trouve fix dans cent , quelle vraif- » femblance y a-t1l à exiger des autres de Pinven- » tion, de l'ordonnance, du rafonnement, des ima- » ges, des mouvemens , & de léloquence? C’eft de- » mander un beau chant à ceux qui n’ont ni mufi- » que ni gofer, . . . . Lorfqu’une heureufe facilité de » concevoir & de s’énoncer encourage le travail » des jeunes gens , & infpire plus de hardieffe an » maître, je voudrois principalement infiiter fur ce » qui a Pair de délibération ou de raifonnement ; » j'auroisifort à cœur d’aflujettir un beau naturel à » ce goût d’analyfe, à cetefprit méthodique &r aifé, » qui eft recherché & applaudi dans toutes:les con- » ditions., puifqu’il n’y à aucun état où il ne faille » parler fur le champ, expofer un projet; difcuter » des inconvéniens, 8 rendre compte de ce qu’on avi, Éc, ». | Quoi qu'il en foit, il eft certain que des enfans bien dirigés par la-nouvelle méthode , auront vü M ji | 9? | 1 | dans leur cours d’éudes quatre fois plus: de latin qu’onn'en peut voir par la méthode vulgaire. En ef fet, l'explication devenant alors le principal exerci- ce clafique, on pourra expédier dans chaque féance au moins quarante lignes. d'auteur, prole ou vers ; 8 toûjours, comme on l’a dit, en répétant de latin en françois, puis de françois en latin, lexplication faite par le maître ou par un écolier bien préparé : travail également efficace pour entendre le latin, & pour s’énoncer en cette langue. Car il eft vifble -qu'après s'être exercé chaque jour pendant huit où dix ans d’humanités à traduire du françois en latin , &c cela de vive voix & par écrit , on acquerrera mieux encore qu'à préfent la facilité de parler latin: dans Les clafles fupérieures, fuppofé qu’on ne fit pas aufli-bien d’y parler françois. Ce travail enfin, con- tinué depuis.fix ans jufqu'à quinze ou feize, donnera moyende voir &c d'entendre prefquetous les auteurs claffiques, les plus beaux traités de Cicéron, plu- fieurs de {es oraifons, Virgile & Horace en entier ; de mêmeque les Inftituts de Juftinien, le Catéchif- me du concile de Trente, &c. , En effet, loin de borner l’infttuion, des huma- niftes à quelques notons d’'Hiftoire & de Mytho- logie , inftitution futile, qui ne donne guere de fa- cilité pour aller plus lon, on ouvrira de bonne heure Le fan@tuaire des Sciences & des Arts à la jeu- nefle : & c’eft dans cette vüe, qu’on joindra aux livres de clafle plufeurs traités dogmatiques, dont la connoïflance eft néceflaire à de jeunes lhittéra- teurs ; mais de plus on leur fera connoitre , par une leéture aflidue , les auteurs qui ont le muyeux écrit en notre langue , Poëtes , Orateurs, Hifto- riens, Artiftes, Philofophes ; ceux qui ont le mieux traité la Morale, le Droit , la Politique, &c. En même tems , on entretiendra , comme on a dit, 8x cela dans toute la fuite des ésudes , lArithmé- tique & la Géométrie, le Deflein, l’Ecriture, &c. ILeft vrai que pour produire tant de bons effets, il ne faudroit pas que les enfans fuflent diftraits, comme aujourd’hui, par des fêtes & des congés per- pétuels,qui interrompent à chaque inftant lesexerci- ces & les erudes : 1l ne faudroit pas non plus qu'ils fuflent détournés par des repréfentations de théa- tre ; rien ne dérange plus les maîtres & les difciples, &c rien par conféquent de plus contraire à Pavance- ment des écoliers , lors même qu’ils n’ont d'autre étude à fuivre que celle du latin. Ce feroit bien pis encore dans le fyflème que je propofe. Durefte, on pourroit accoûtumer les jeunes gens à paroître en public, mais toüjours par des exercices plus faciles, & qui fuffent le produit des ésdes cou- tantes. [l fufiroit pour cela de faire expliquer des auteurs latins , de faire déclamer des pieces d’élo- quence & de poëfe françoife ; & l’on parviendroit au même but, par des démonftrations publiques fur la fphere , l’'Arithmétique, la Géométrie, &c. Je ne dois pas oublier ici que le goût de molleffe &t de parure , qui gagne à-préfent tous les efprits, eft une nouvelle rafon pour faciliter le fyftème des études, & pour en ôter les embarras & les épines. Ce goût dominant , fi contraire à l’auftérité chré- tienne, enleve un tems infini aux travaux littérai- res, & nuit par conféquent aux progrès des enfans. Un ufage à defirer dans l'éducation, ce feroit de les tenir fort fimplement pour les habits ; mais fur-tout ( qu'on pardonne ces détails à mon expérience) de les mettre en perruque où en cheveux courts, & desiplus courts , jufqu’à l’âge de quinze ans. Par- là on gagneroit un tems confidérable , & l'on évi- teroit plufieurs inconvéniens , à l'avantage des en- fans 8t de ceux qui les gouvernent: ceux - ci alors, moins détournés pour le fuperflu, donneroient tous leurs foins à la culturenéceffaire du corps & de l'ef- prit ; cequidoitêtre le but desparens 8 des maîtres. Quor qw'il en {oit , les dernieres années d’huma- nités, employées tant à des leétures utiles & fuivies , qu'à des compofñtions choifes & bien travaillées, formeroient une continuité de rhétorique dans un oût nouveau ;rhétorique dont on écarteroit avec loin tout ce qui sy trouve: ordinairement d’inutile & d’épineux. Pour cela , on feroit compofer le plus fouvent dans la langue maternelle; & loin d'exercer les jeunes rhéteurs {ur des fujets vagues , inconnus , ou. indifférens , on n’en choifiroit jamais qui ne leur fuient connus &c proportionnés. Je ne voudrois pas même donner de verfions, f ce n’eft tout au plus pour les prix, fans les expliquer en pleine clafle; ë&t cela parce que la tradu@tion françoife étant moins un exercice de latinité qu’un premier eflai d’éloquen- ce, déjà bien capable d’arrêter les plus habiles, & on laifle des obfcurités dans le texte latin, on amor- tit mal-à-propos la verve & le génie de l’écolier, lequel a befoin de toute fa vigueur & de tout fon feu pour traduire d’une maniere fatisfaifante. Je ne demanderoïis donc à de jeunes rhétoriciens que des traduéhons plus on moins libres, des lettres, des extraits, des récits, des mémoires, & autres produétions femblables, qui doivent faire toute la rhétorique d’un écolier; produétions après tout qui font plus à la portée des jeunes gens, & plus inté- reffantes pour le commun des hommes ,que les dif- cours boufis qu'on imagine pour faire parler Hec- tor & Achille, Alexandre & Porus, Annibal & Sci- pion, Céfar & Pompée, &c les autres héros de PHit toire ou de la Fable. Au refte, c’eft une erreur de croire que la Rhé- torique foit eflentiellement & uniquement l’art de perfuader. IL eft vrai que la perfuañon eft un des grands effets de l’éloquence ; mais il n’eft pas moins vrai que la Rhétorique eft également l'art d’inflrui- re, d’expofer, narrer, difcuter, en un mot, l’art de traiter un fujet quelconque d’une mamiere tout-à-la- fois élégante & folide. N'y a-t-il point d’éloquence dans les récits de l’Hiftoire, dans Les defcriptions des Poëtes , dans les mémoires de nos académies, &c, à Voyez ELOQUENCE, ELOCUTION. Quoi qu'il en doit , l’éloquence n’eft point un art ifolé , indépendant , & diftingué des autres arts s, c’eft le complément & le dernier fruit des arts & des connoïffances acquifes par la réflexion, par la leéture , par la fréquentation des Savans, & fur- tout par un grand exercice de la compoñition ; maïs c’eft moins le fruit des préceptes, que celui de li- mitation & du fentiment , de Pufage & du goût: { c’eft pourquoi les compoñitions françoifes , les le- &tures perpétuelles, & les autres opérations qu’on a marquées étant plus inftruétives , plus lumineufes que l'étude unique 8 vulgaire du latin, feront toû- jours plus agréables & plus fécondes, toûjours en- fin plus efficaces pour atteindre au vrai but de la Rhétorique. Quant à la Philofophie, on la regagde pour l’or- dinaire comme une fcience indépendante & diftinéte de toute autre ; & l’on fe perfuade qu’elle confifte dans une connoïflance raïfonnée de telle & telle ma- tiere : mais cette opinion pour être aflez commune, n’en eft pas moins faufle. La Philofophie n'eft pro- prement que l’habitude de réflechir & de raïfonner, ou fi l’on veut, la facilité d'approfondir & de traiter les Arts & les Sciences. Voyez PHILOSOPHIE: Suivant cette idée fimple de la vraie Philofophie, elle peut, elle doit même , fe commencer dès les premieres leçons de prammaire, êc fe continuer dans tout le refte des ésudes. Ainf le devoir & lhabileté du maître confiitent à cultiver toüjours plus Fintel- ligence que la mémoire ; à former les difciples à cet efprit de difcufion & d'examen qui caraéérile Fhomme philofophe ; & à leur donner, pat la leQu- +e des bons livres , & par les autres exercices, des notions exaétes & fufifantes pour entrer d’eux-mé- mes enfuite dans la carriere des Sciences &c des Arts. Ilfaut en un mot fondre de bonne heure, identifier, s’il'ett poffible, la philofophie avec les. humanités. Cependant malgré cette habitude anticipée de ré- flexion & de raifonnement, ileft toùjours cenfé qu'il faut faire un cours. de philofophie ; mais il feroit à fouhaiter pour les écoliers & pour les maîtres ; que ce cours fût imprimé. La diétée,, autrefois néceflar- re., eft devenue, depuis l'impreflion, une opération _ ridicule, En effet, il feroit beaucoup plus commode d'avoir une Philofophie bien méditée & qu'on pût étudier à fori aife dans un livre, que de fe fatiguer à écrire de médiocres cahiers tobjours pleins de fau- tes & de lacunes. Nous nous fervons avec fruit de la même bible , de la vulgate qui ef commune à tous les Catholi- ques ; on pourroit avoir de même fur les Sciences des traités uniformes, compolés par des hommes ça- pables, &qui travailleroient de concert à nous don- ner un corps de doétrine auffi parfait qu'il eft pofi- ble ; le toutavec l'agrément & fous la direétion des fupérieurs. Pour lors , le tems qui fe perd à diéter s’employeroit utilement à expliquer & à interroger : &c par ce moyen , une feule claffe de deux heures & demie tous les jours hors les dimanches & fêtes, fuf- firoit pour avancer taifonnablement ; ce qui donne: roit aux maîtres & aux difciples le tems de prépa- ter leurs leçons, ê&c de varier leurs études. Ily a plus à retrancher dans la Logique, qu’on n°ÿ fauroit ajoûter ; il me femble qu’on en peut dire à- peu-près autant de la Métaphyfique. La Morale eft trop négligée , on pourroit l’étendre & l’approfon- dir davantage. À l’égard de la Phyfique, 1l en fau- droit aufñ beaucoup élaguer ; négliger ce qui n’eft que de contenfion & de curiofité, pour fe livrer aux recherches utiles & tendantes à l’économie. Elle devroit embrafler,jene dirai pas l’Arithmétique êc Les élémens de Géométrie, qui doivent venir long-tems auparavant , mais l'Anatomie, le Calendrier , la Gnomonique, &c. le tout accompagné des figures convenables pour l'intelligence des matieres. On expoferoit les queftions clairement & comme hiftoriquement , donnant pour certain ce qui eft conf tamment reconnu pour tel par les meilleurs Philofo- phes ; le tout appuyé des preuves & des réponfes aux difficultés. Tout ce qui n’auroit pas certain caraëtere d'évidence & de certitude, feroit donné fimplement comme douteux où comme probable. Au refte, loin de faire fon capital de la difpute , & de perdre le tems à réfuter les divers fentimens des Philofophes, on ne difputeroit jamais fur les vérités connues , parce que cês controverfes {ont toùjouts dérafonnables, &c fouvent même dangereufes. À quoi bon foûtenir thèfe fur l’exiftence de Dieu, fur fes attributs, fur la liberté de l’homme , la fpiritualité de lame , la réalité des corps, &c. N’avons-nous pas fur tout ce- la des points fixes auxquels on doit s’en tenir com- me à des vérités premieres? Ces queftions deyroient être expofées nettement dans un cours de philo- fophie , où l’on rafflembleroit tout ce qui s'éft dit là -deflus de plus folide , mais où elles feroient traitées d’une mamere poftive, fans qu'il y eût d'e- xercice reglé pour les attaquer ni pour les défen- dre, comme il n’en eft point pour difputer fur les propofñitions de Géométrie. Il eft encore bien des queftions futiles que lon ne devroit pas même agiter. Le premier homme a- t-il eu la Philofophie intufe ? La Logique eft-elle un art ou une fcience ? Y a-t-1l des idées faufles ? A:-t- on l'idée de limpoñfble ? Peut-l y avoir deux infi- aus de même efpece ? Enfin l’univerfel & parte rei, E TU 93 le futur contingent, le adum qua malum, la divif. bilité du continu, &c, font.des queftions également inutiles | & qui ne méritent guere l'attention d’un bon efprit. Un cours bien purgé de ces chimeres fcholaftiques, mais fourni de toutes lesnotionsintérefflantesfur if toire naturelle, fur la Méchanique, & fur les Arts uti- les, fur les mœurs étfur les lois,fe trouveroit à la por- tée des moindres étudians ; rs pour lors, avec le {eul fecours du livre & du profefleur, ils p'ofiteroient de tout ce qu'il y a de.bon dans lafaine Philofophie ; le tout fans {e fatiguer dans la répétition machinale des argumens , êc fans faire la dépenfe ni létalage des thèfes » qui, à le bien prendre, fervent. moins à découvrir la vérité. qu’à fomenter l’efprit de parti de contenfon, & de chicane, we Comme le but des fotenans eft plütôt de faire parade de leur éude 8& de leur facilité, que de cher- cher des-lumueres dans une difpute éclairée, ils {e font un point d'honneur de ne Jamais démordre de leurs aflertions ; 8 moins occupés des intérêts de la vérité que du foin de repoutler leurs aflaillans, ils employent tout l’art de la Scholaftique & toutes les reffources de leur génie, pour éluder les meil- leures objeétions,, & pour trouver des faux-fuyans dont ils ne manquent guere au befoin; ce qui entre- tient Les efprits dans une difpofñition vicieufe, incom- patible avec l'amour du vrai, & par conféquent nui- fible au progrès des Sciences, . Je ne voudrois donc que peu on point de thèfes : J'aimerois mieux des examens fréquens fur les divers traités qu'on fait apprendre; examens réitérés, par exemple , tous les trois mois, avec l'attention de ré- pèter dan$ les dermers ce qu'on auroit vù dans les précédens : ce feroit un moyen plus efficace que les thèfes, pour tenir les écoliers en haleine, & pour prévenir leur négligence. En effet, les thèfes ne ve- nant que de tems à autre, quelquefois au bout de plufieurs années, 1l n’efk pas rare qu’on s’endorme fur fon étude, & cela parce qu'on ne voit rien qui preile : on fe promet toüjours de travailler dans la fuite ; mais comme on n’eft pas preflé,8c que l’on voit encore bien dutems devant{oi, la parefle le plus fou- vent l'emporter, infenfiblement le tems coule, la t4- che augmente, &c à la fin on fe tire comme onpeut. Les examens fréquens dont je viens de parler {er- viroient à réveiller les jeunesgens. Ce feroit là com- me le prélude des examens généraux & déciffs que l’on fait fubir aux candidats ë qui font toûjours plus redoutables pour eux que épreuve desthèfes. Au fur- plus, il conviendroitpour le bien de la chofe, & pour ne point déconcerter les fujets mal-à-propos, de s’en tenir aux traités aétuels dont onferoit l’objet de leurs études , de les examiner fur cela feub, & le livre à la main, fans chercher des difficultés éloignées non contenues dans l'ouvrage dont il s’agit. Que ces traités fuflent bien complets & bien travaillés comme on le fuppofe, ils contiendroient tout ce que lon peut fouhaiter {ur chaque matiere ; & c'eft pourquoi un éleve poffédant bien fon livre, & ré- pondant deflus pertinemment , devroit toûjours être cenfé capable, & comme tel admis fans difficulté. Ï regne fur cela un abus bien digne de réforme. Un examinateur à-tort & à:travers propofé des quef- tions inutiles, des difficultés de capriceque l'étudiant n'a jamais vües , & {ur lefquelles on le met aifément en défaut. Ce qu'il y a de plus fâcheux encore & de plus affligeant , c'eft que leshommes n’eftimant d’or: dinaire que leuts propres opinions , & traitant pref. que tout le refte d’ignorance ou d’abfurdité, l'exa- minateur rapporte tout à fa maniere derpenfer , il en fait en quelque forte un premier principe, & la commune mefure de la doëtrine & du mérite, Mal. heur au repondant qui à fuçé des opinions contrai 94 Et TOC res; fouvent avec bien de l’ésude & du talent il ne viendra pas à bout de contenter fon juge, On fait que Newton & Nicole s'étant préfentés à l’examen furent tous les deux réfufés ; & cela chacun dans un genre où il égaloit dès-lors ce qu'il y avoit de plus célebre en Europe. Il vaut donc mieux qu'un difciple ait fa tâche con- nue & déterminée ; & que rempliffant cette tâche, il puifle être tranquille & für du fuccès ; avantage qu'on n’a pas à préfent. Quoi qu'il en foit, ceux qui dans l'éducation pro- pofée quitteroient leurs ésudes vers l’âge de quator- ze ans, ne fe trouveroient pas, comme aujourd’hui , dans un vuide affreux de toutes les connoïffances qui peuvent former d’utiles citoyens : ils feroient dès- lors au fait de l’Ecriture & du Calcul , de la Géogra- phie, & de l'Hifloire, &c. À l'égard du latin, ils en- tendroient fufifamment les auteurs clafliques ; & les traduétions perpétuelles qu’ils auroient faites de vi- ve voix & par écrit, pendant bien des années, leur aurotent déjà donné du ftyle & du goût pour écrire en françois. D'ailleurs 1ls connoîtroient par une fré- quente leéture nos hiftoriens & nos poëtes ; & ils au- roient même, pour la plûpart, une heureufe habitu- de de réflexion & de raifonnement , capable de leur donner une entrée facile aux langues étrangeres & aux fciences les plus relevées. Ainfi quand ils n’au- roient pas beaucoup d’acquis pour la compoñtion latine, ils ne laïfleroient pas d’en être au point où doivent être des enfans deftinés à des emplois difici- les: au lieu que dans l'éducation préfente, fi l'on ne réuffit pas dans les thèmes & les vers, on ne réuf it dans rien; & dès-là, quelque génie qu’on ait d'ailleurs , on pañle Le plus fouvent pour un fujet inepte ; ce qui peut influer fur le refte de la vie. À l'égard de ceux qui fuivroient jufqu’au bout le nouveau plan d'éducation, il eft vifible qu’ils feroient de bonne heure au point de capacité néceffaire pour être admis enfuite parmi les gens polis & lettrés, puifqu’à l’âge de dix-fept ou dix-huit ans ilsauroient, outre les étymologies greques, une profonde intelli- gence du latin , & beaucoup de facilité pour la com- potion françoife ; 1ls auroient de plus l’'Ecriture élé- gante & l’Arithmétique, la Géométrie , le Deffein , la Philofophie : le tout joint à un grand ufage de notre littérature. Les gens qui brillent le plus de nos gouts avoient-ils plus d’acquis à pareil âge? Combien d'illuftres au contraire qui font parvenus plus tard à ce néceflaire honnète & fufifant , malgré l’applica- tion conftante qu’ils ont donnée à leurs éudes | Quel peut donc enfin , & quel doit être le but de fa réforme propofée ? C’eft de rendre facile & peu coûteufe non-feulement la littérature latine & fran- goife, mais encore plufieurs autres exercices autant ou plus utiles, & qu'il eft prefque impoñfible de lier avec la pratique ordinaire; c’eft d’éviter aux parens la perte affligeante de ce que leur coûte une éduca- tion manquée ; & c’eft enfin d’épargner aux enfans les châtimens & le dégoût , qui font prefque infépa- rables de linftitution vulgaire. Du refte, je l’ai dit ci-devant, & je crois pouvoir le répéter ici, l'éducation doit être lapprentiffage de ce qu'il faut favoir & pratiquer dans le commer- ce de la fociété. Qu'on juge à préfent de l'éducation commune; & qu’on nous dife fi les enfans, au fortir du collège, ont les notions raifonnables que doit avoir un homme inftruit & lettré. Qu’on fafle atten- tion d'autre part que des enfans amenés, comme on Va dit, au pot d'entendre aifément Cicéron , Vir- gile, & Tribonien, & de les traduire avec une forte de goût; au point de pofléder, par une le&ure affi- due , les auteurs qui ont le mieux écrit en notre lan- gue, & de manier avec facilité le Calcul, le Deffein, d'Ecriture, 6c, que ces enfans, dis-je, auroïent alors EVE une aptitude générale à tous les emplois; & qu'ils : Pourroïent choifir par conféquent dans les diverfes profeflions , ce qui s’accorderoit le mieux à leursin- térêts ou à leurs penchans. Un autre avantage important , c’eft qu’on épar- gneroït par cette voie plufieurs années À la jeunefe ; attendu que les fujets, toutes chofes égales, feroient alors plus formés & plus capables à quinze & feize ans, qu'ils ne fauroïent l'être à vingt par Pinftitution latine ufitée de nos jours. ni: Je ne puis diffimuler mon étonnement de ce que tant d’académies que nous avons dans le royaume , au lieu d'examiner les divers projets d'éducation, & d’expofer enfuite au Public ce qu’il y a fur cela de plus exaët & de plus vrai, laïflent à de fimples par- ticuliers le foin d’un pareil examen , & ne prennent pas la moindre part à une queftion littéraire qui ref {ortit à leur tribunal. | Ce feroit ici le lieu d’entrer dans quelque détail fur les inftruétions & les ésudes relatives aux mœurs: maïs cet article qui feroit long, ne convient qu'à um traité complet fur l'éducation; & ce n’eft pas de quoi il s’agit à préfent: nous en pourrons dire quelque chofe dans la fuite en parlant des mœurs. Du refte, nous avons là-deffus un ouvrage de M. de Saint- Pierre que je crois fort fupérieur à tout ce qui s’eft écrit dans le même genre ; il eft intitulé, Projec pour perfeitionner l'éducation : je ne puis mieux faire que d'y renvoyer les leéteurs. J’ajoûterai feulement la citation fuivante, » Les Iégiflateurs de Lacédémone & de la Chine , : » ont prefque été les: feuls qui n'ayent pas crû devoir » {e repofer fur l'ignorance des peres ou des maîtres, » d’un foin qui leur a paru l'objet le plus important » du pouvoir légiflauf. Ils ont fixé dans leurs lois le » plan d’une éducation détaillée, qui pût inftruire à » fond les particuliers fur ce qui faifoit ici bas leur » bonheur ; & ils ont exécuté ce que, dans la théo- » rie même, on croit encore impoñfble , la forma- » tion d’un peuple philofophe. L’hiftoire ne nous » permet point de douter que ces deux états mayent » Êté très-féconds en hommes vertueux. Théorie des » Jentimens agréables , page 192. » Cet article ef? de M. F4IGUET, maître de penfion à Paris. L'auteur de l'article COELÈGE ne peut, il l’ofe dire , que fe fe- liciter beaucoup de voir tout ce qu'il à avancé il y a trois ans dans ce dernier article, appuyé aujourd'hui JE Jolidement & fans reflriétion par les réflexions & l’expé- rience d'un homme de mérite, qui s'occupe depuis long- tems 6 avec fuccès de l'inffruition de la Jeuneffe. Voyez auffi CLASSE, EDUCATION, &c, ETUDES MILITAIRES. On peut voir au motEco- LE MILITAIRE quelles doivent être ces ésudes. Nous ajoûterons ici les réflexions fuivantes, que M. Le- blond nous a communiquées, & qu'il avoit déjà données au Public dans le mercure d’Août 1754. Plan des différentes matieres qu’on doit enftisnér dans une école de Mathématique militaire. Une école de Mathématique inftituée pour un régiment ou pour de jeunes officiers, doit avoir pour objet de les inf truire par régles & par principes des parties de cette fcience néceflaires à l'Art militaire, Elle doit différer, à bien des égards, d’une école deftinée à.former de fimples séometres & des phyfi- ciens. Dans celle-ci, le profefleur doit travailler à mettre fes éleves en état de s'élever aux fpéculations les plus fublimes de la haute Géométrie. Dans celle- là , il faut qu'il fe borne aux objets qui ont un rap- port immédiat à la fcience militaire ; qu'il s'applique à les rendre d’un accès facile aux jeunes officiers , à faire enforte qu’ils puiffent remplir dans le befoin, avec intelligence & diftinétion, les fonétions d’Ingé- meur & d’Artilleur. | Ceft dans cet efprit que l'on a rédigé le plan que lon va expofer. Les différentes matieres qu’on y propofed’enfeigner , renferment aflez exaétement les véritables élémens de PArt de la guerre. On croit qu'il eft important de les fixer; parce qu'un Profef- {eur, dont le goût fe porteroit vers des objets plus brillañs, mais moins utiles aux Militaires, pourroit s’y livrer & négliger les connoïffances dont ils ont le plus de befoin. Cet inconvénient , auquel on ne fait peut-être pas aflez d'attention , eft pourtant très- confidérable ; & l’on ne peut y remédier qu'en ré- glant l’ordre & la matiere des leçons , relativement au but ou à l’objet de l’établiffement de Pécole. Un plan de cette efpece, qui, outre le détail des matieres que le profeffeur. doit enfeigner , contien- droit encore l’énumération des livres les plus pro- pres à mettre entre les mains des Militaires, pour leur faire acquérir Les connoïffances dont ils ont be- foin fut chacune de ces matieres, pourroit être d’u- ne srande utilité, Les jeunes genulshommes répan- dus dans les provinces, dans les régimens & dans les lieux où il n’y a point d’école de Mathématique, pourroient , en étudiant fuccéffivement & avec or- dre les différens ouvrages indiqués dans ce plan, fe former eux-mêmes dans la fcience de la guerre & dans les parties des Mathématiques dont elle exige la connoïiflance, __ .. À On eft fort éloigné dé croiré que lé plan qu’on ptopofe , réponde entierement à ces vies : on le donne comme un effai qu'on pourra perfeétionner dans la fuite, fi lon trouve qu’il puifle mériter quel- que attention, On le foùmet aux obfervations & aux réflexions des perfonnes également inftruites de la Géométrie & de l’Art militaire, qui Youdront bien l’examiner. On l’a divifé en dix articles, qu’on peutregarder comme autant de claffes particulieres. _Aricle premier. Comme l’Arithmétique fert d'in: troduétion à là Géométrie & aux autres parties des Mathématiques, & qu’elle eft également utile dans la vie civile & militaire , on en donnera les premiers élémens , c’eft-à-dire les quatre premieres regles. On y ajoûtera les principales applications qui peu- vent fervir à en rendre l’ufage familier. On traitera auffi de la regle de trois ou de proportion. _ On aura foin de faire entrer les commencçans dans lefprit de ces diverfes opérations, & de les leur fai- re démontrer, pour qu'ils contraétent l’habitude de ne rien faire par routine, ou fans en favoir la rai- fon. LE 2. Après l'explication des premueres regles de PA- rithmétique , on traitera de la Géométrie : & comme tn traité trop étendu poufroit lafer aifément l’at- tention de jeunes officiers, peu accoûtumés aux tra- vaux qi demandent quelque contention d’efprit, on fe bornera d’abord aux chofes les plus faciles & les “plus propres à les familiarifer avec cenouveau genre d'étude, & à les mettre en état de pañler à la Fortifi- cation. L’abrégé dé la Géométrie de l'officier, ou l'é- quivalent , peut fufhire pour remplir cet objet. 3. On commencera la Fortification par l’explica- tion de fes regles & de fes principes: on ne parlera d’abord que de là réguliere, L’on donnera tout ce qu appartient à l’enceinte des places de guerre, & la conftruétion de leurs différens dehors, On aura foin de joindre aux plans des Ouvtages de la Fortification , les,coupes ou profils pris dedaf- férens fens, pour ne rien omettre de tout ce qui peut contribuer à en donner des idées précifes & exaétés. _ L’explication fuivie de la troifieme édition du livre intitulé, Elémens de fortificarion , &cc. dépuis le Commencement juiqu’au chapitre ou à l’article des | 1Yfèmes de fortification exclufivement , pent rem- plr Pobjet qu’on propofe ici. 4. À lafuite de cette premiere partie de la Fortif- cation, On donnera quelque teinture du lavis des | EE (Gi plans. Cette occupation., utile à plufeuxs égards, peut rendre l’érude dela Fortification plus agréable 8e plus intéreffante ; mais onaurà foin de faire obfer- ver aux jeunes officiers; que, ce n’eft point par des plans bien lavés que les perfonnes inftruites jugent du mérite & de l’habileté de ceux qui les préfentent , mais par des explications nettes & précifes fur la forme ; l'emplacement, la conftruétion , les üfages 8 propriétés des différens ouvrages marqués fur ces plans. C’eft pourquoi on les excitera à s’occuper plus férieufement de la théorie de la Fortification que du favis des plans, qu'on peut regarder comme une efpecede délafflementdes autres éues quidemandent plus d'attention. | 5. Après Les préliminaires de Géométrie & de For: tication, on reviendra à cette premiere fcience que l’on fera én: état alors de traiter avec plus d'éten- due. On donnera d’abord'tout l’eflentiel -des 4162 mens, &c enfuute la Géométrie-pratique dans un grand détail, Onne négligera rien pour mettre les com mençans en état d'exécuter toutes les différentes opérations qui fe font fur:le terrein , foit pour le tracé des figures, foit pour lever des plans, des cat: tes. 6?c. | , | La Géométrie élémentaire & pratique de M, San veur, que l’on vient d'imprimer, peut fervir àremplir ces difiérens objets, Les éléméns de cet auteur, quoi- que très coufts , contiennent néanmoins toutes les principales propofñtions qui fervent de bafe aux dif- férentes parties des Mathématiques. Il a sû réunir enfemble le mérite de la clarté, de la facilité, & de la briéveté, À l'égard de fa Géométrie-pratique , on y trouve tous les détails néceffaires pour tra- vailler fur.le papier & fur le terrein. Par ces difé- rentes raifons , on croit cet ouvrageïtrès-propre à une école de lefpece dont il s’agit. Lorfqu'il {era bien entendu, on pafñlera aux Méchaniques & à l’'Hydraulique: . 6. Onne propofe pas de donner dés traités bien étendus de ces deux matieres; il duffira, pour la pre- miere , de fe borner à l'explication & aux ufages des machines fimples & des compofées qui peuvent s'entendre aifément. À l'égard de Hydraulique, on donnera les principes pour comprendre les effets des machinesordinaires mifes enmouvementpar l’aäion des liquides & des fluides ; téls font les moulins à au , à vent, les pompes, &c. On enfeignera aufli à mefurer la dépenfe des eaux jailliffantes, la quan tité que peuvent donner les courans, les rivieres, à évaluer la force de leur ation contre les obftacles qu'on peut leur oppofer, 6 I fera auf très-convenable de donner la théorie du mouvement des corps pefans , pour expliquer celle du jet des bombes, qu’un officier ne doit gue- re ignorer. L’Abrégé de Méchanique de M. Trabaud à prefque toute l'étendue néceflaure pour remplir ces différens objets. Il s’agira feulement d’en appliquer les principes à la réfolution des problèmes les plus proprés à «en faire voir l'utilité &c à en faciliter l’u- fage &t l'intelligence. La premiere partie du nouvel ouvrage du même auteur, intitulé, le mouvement des corps terrefires confidéré dans les machines | &xc. peut fervir de fupplément , dvet égard , à fon abrégé dé Méchanique. S1 quelqu'un doutoit de l'utilité de ces connoïf- fances pour un officier , on lui tépondroit qu’à la vé- rité elles font moins indifpenfables que la Géométrie & les Fortifications, mais que cependant il peut fe trouver, & qu'il fe trouve en effet plufñeurs circonf- tances à la guerre, où l’onen éprouve la necefité. Il s'agira par exemplede mouvoir des fardeaux très- pefans, de mettre du canon.en batterie, delle rele- ver lorfqu'il eft tombé ou que fon affut eff brié ; : de le tranfporter dans des lieux élevés par des paf< 96 E T Ü fages difficiles , où les imulets & les cheyatix ne peu- vent être d’aucunufage , c. Pour l'Hydraulique , elle pent fervir à pratiquer des inondations aux environs d’une place, dun camp ou d’un retranchement, pour les rendre moins acceffbles; à faigner des riviéres, des ruiffleaux , à détourner leurs couts, à donner aux ouvrages qu'on oppofe à leur aétion les dimenfions néceffaires pour qu'ils puiffent réfifter à leur impreffion, & enfin à beaucoup d’autres chofesique l’ufage de l’art de la guerre peut faite rencontrer fouvent. 7. Les parties des Mathématiques qu’on propoie de traiter dans lesrarticles-précédens, peuvent être regardées comme les feules néceflaires dans une école compofée d'officiers: Lorfqu’elles feront bien entendues ,ilne s'agira plus que d’en faire l’appliea- tion aux différentes branches de l'Art militaire aux: quelles elles fervent de fondement. La fortificationirréeuliereayant été omife d’abord à caufe de fa difficulté , on y reviendra après les Me- chaniques & l’'Hydraulique, * | Onexpliquera auparavant les diférens fyflèmes deFortification propofés par les ingénieurs les plus célebres. On en examinera les avantages &r. les dé- fauts, & l’on fera entrer les commençans dans les vües des inventeurs de ces fyffèmes, On tâchera par : là de les accoûitumer à raïfonner par principes fur la Fortification: c’eft:prefque le feul avantage qu’on puifle tirer de l’érude de ces différentes conftru&tions. Pour la-fortification irrégulière , on la traitera avec toute l’étendue qu’elle mérite par fon impor- tance: on expliquera fort en détail {es regles géné- rales-& particulieres; &, pour les rendre plus fen- fibles, on les appliquera à diverfes enceintes aux- quelles onfüppofera les différentes irrégularités qui peuvent ferencontrer le plus ordinaitement. On examinera les fortifications de nos meilleures pla- ces, pour faire voir la maniere dont ces regles s’y trouvent obfervées, & pour faire juger de la pofi- tion des dehors dans les terreins irréguliers. On ne peut guere indiquer de livres où Pon trou- ve tous ces objets traités ou difcutés comme il con- viendroit qu'ils le fuffent: Maïs l’on pourra s’en for- mer des idées affez exactes, en joignant, fi l’on veut, aux Elémens de fortification , dont on a déjà parlé , la Fortification d'Ozanam ; le premier &c le fecond vo- lume des Travaux de Mars, par Alain Maneflon Mal- let; l’Archireëlure militaire moderne , par Sébañftien Fernandès de Medrano ; ce que dit M. Rozard de [a fortification irréguliere dans fon Trairé de la nouvelle fortification françoife ; V’'Archire‘ture militaire, par le Chevalier de Saint-Julien ; le Parfait ingénieur fran- gois , RC. On traitera auffi de la fortification des camps, de {a conftruétion des lignes , & des retranchemens, de celle des redoutes, fortins, &c. qu’on fait fouvent en campagne, . On fera tracer tous ces différens ouvrages fur le terrein, & l’on donnera la maniere d’en déterminer la grandeur relativement aux ufages auxquels ils peuvent être deftinés , & aû nombre de troupes qu'ils doivent contenir. 8. Comme la fcience dé l’Artillerie eft une des plus eflentielles à lArt militaire, & qu’elle influe également dans la guerre des fiéges 8 dans celle de campagne, On donnera un précis de tout ce qu’elle a de plus intéreflant pour tous Les officiers. Les Mérnores d'artillerie de M. de Saint-Remi font Pouvrage le plus complet & le plus étendu fur cette matiere; mais commeils font remplis de beaucoup de détails peu importans & peu néceflaires à la plû- part des officiers, on fe contentera.de donner un ex- trait de ce qw’ils contiennent de plus généralement utile ; où bien l’on fe fervira du premier volume des Elémens de la guerre des figes , quitraite des armes en ufage dans les armées, depuis linvention de la poudre à canon, 9. Après l’Artillerie, on donnera tout ce qui con- cerne le détail de Pattaqne & de la défenfe des pla- ces. On pourra fe fervir pour cet effet du fecond & du troïfieme volume des E/émens de la guerre des féé- ges, Que nous venons de citer; du traité de M. le Ma- réchal de Vauban, fur la même matiere ; 8x de l’Z»- gérieur de campagne, par M. de Clairac. On trouve dans ce dernierouvrage beaucoup de regles, d’obfer- vations , &c d'exemples fur l'attaque & la défenfe des petits lieux, commeboures, villages, châteaux, Éc. qui peuvent être d’un grand ufage à tous les officiers à qui l’attaque ou la défenfe de ces fortes de poftes eft ordinairement confiée, | 10. On traitera aufli de la ÇCaftramétation ; on donnera les regles générales qui doïvent toñjours s’obierver dans l’arrangement ou la difpofition des camps, On pourra fe fervir pour cet effet de l’Effai Jur la Caframétation, imprimé chez Jombert en 1748, On terminera ce cours d’ésude par un abrégé de Tac: tique , & un précis des ordonnances ou réglemens militaires. On né peut indiquer d’autte livre , pour fervir de bafe aux leçons de Taëtique, que l4rr de La guer- re , par M. le Maréchal de Puyféour. Il eft vraïflem- blable que cette matiere ne fera pas traitée d’abord d’une maniere aufli parfaite qu’on pourroit le def- rer, mais il eft très-important de l'eflayer ; car en fafant des efforts pour la rendre intéreffante, on pourra difpofer infenfiblement les efprits à ce genre d'étude, & parvenir à en donner le soût. Lorfqu'il fe trouvera plufeuts résimens dans uri même lieu , les Officiers de ces régimens feront in- vités d’affifter aux leçons de Taëtique; & ils pour- tont y communiquer leurs réflexions ou leurs obfer: vations fur l’exécution des différentes évolutions & manœuvres enfeignées dans l’ouvrage de l’illuftre auteur que nous venons de citer. C’eft un moyen très-propre à exciter Pémulationdes jeunes officiers, à les engager à réfléchir furles opérations militaires, & à en étudier les regles & les principes; & ce font ces différens avantages qui doivent réfulter d’une école établie pour les former dans la fcience de la guerre, On pourra , dans le cours des leçons de Tadique; faire ufage du Commentaire fur Polybe, par M. le Chevalier de Folard ; mais on choifira les endroits où cet auteur donne des préceptes fur les différentes aétions des armées, & l’on ne le fuivra point dans les digreffions & les paragraphes moins importans , qui fe trouvent dans fon ouvrage , dont l'examen ou la difcuflion demanderoit trop de tems. Le Pro: feffeur aura foin d'indiquer à ceux quivoudront soc. cuper de cette matiere, les autres livres dont la lec- ture peut être la plus utile ; tels font es Mémoires de Montécucul, de M. de Feuquieres ; Z Parfait capitai= ne, par M: le duc déRohan ; les Réfexions militaires, par M. le Marquis de Santa-Cruz ; l'Arc de La glLer- re , par Vautier ; M. de Quincy ; Exercice de infan: terie, par M. Botte, &c. À l'égard des réglemens militaires , on fe fervira pour les expliquer , de Pabrégé contenu dans la troi- fieme édition du livre intitulé, E/émens de Part mili. aire , par M. d'Héricourt: on aura foin d’y ajoûter les ordonnances & les inffruétions poftérieures à cette édition. Cette matiere eftextrèmement impor- tante à tous les officiers, tant pour connoître les. droits attribués à leurs différens grades , que pour la régularité du fervice &c l’obfervation de la police fuilitaire. (Q) | ETUDE, (Juripr.) c'eft amfi qu’on appelle l’'en- droit où Les clercs d’un procureur, où un procureur même ETU mème travaille tient fes facs & fes papiers, On dit, une grande étude, une bonne étude, &C.: ETUDE, serme de Peinture. On a vù juiqu'à pré. fent que prefque tous les termes employés dans Part de Peinture, ont deux fignifications; & cela n’eft pas étonnant. La langue d'une nation eft fotmée avant que les Arts y foient arrivés à un certain degré de perfettion.. Ceux qui les premiers prati- des fignifications particulieres les Arts font méchaniques, plus ils ont befoin dé £ à = LA 2h R Ur termes nouveaux, & plus ils en créent; parce que leur ufage confifte dans une plus grande quantité d'idées qui leur font particulieres. L'art poétique 4 mots qui lui foient confacrés ; des idées gé= nérales peuvent exprimer ce qui conftitue les ouvra-: peu de ges qu'il produit. La feule partie de cet art qu'on peut appeller méchanique , comprend la mefure des vers, & les formes différentes qu'on leur donne ; & celle-là feule aufi a des mots qui ne peuvent être en ufage que pour elle, comme re, Jfonner , ron- deau, &c. La Peinture en a davantage, parce que la partie méchanique en eft plus étendue : cependant elle tient encore tellement aux idées univerfelles , que le nombre des mots qui lui font propres eft aflez borné. Peut-être pourroit- on mettre la Mufique au troïfieme rang, Gc. mais pour né pas nrécarter de mon fujet, le mot étude, dans l’art dont il eft queftion, , premierement l'exercice raifonné de toutes fgnifie les parties de Part; enfuute 1l fisnife le réfultat de cet exercice des différentes parties de [a Peinture; c’eft-” à-dire qu’on appelle ésudes, Les eflais que le Peintre fait en exerçant fon art. Dans la premiere fignification, ce mot comprend tout ce qui conftitue l’art de la Peinture. Il faut que V'Artifte qui s’y deftine, ou qui le profefle, ne né- glige l’ésude d'aucune de fes parties ; & l’on pourroit, autorifé par la fignification peu bornée de ce feul’ mot, former un traité complet de Peinture ; maïs le projet de cet ouväage, & l’ordre plus commode qu'on y garde, Sy oppofent. Ainfi je renvoye le: lecteur, pour le détail des connoïflances qui doivent être un objet d’ésude pour les Peintres, aux articles de Peinture répandus dans ce Diétionnaire : cepen- dant pour que celui-ci ne renvoye pas totalement: vuides ceux qui le confulteront, je dirai ce que l’on ñe fauroit trop recommander à ceux qui fe deftinent aux Beaux-Arts , & fur-tout à la Peinture. _ La plus parfaite étude eft celle de la nature; mais il faut qu’elle foit éclairée par de fages avis, ou par les Inmieres d’une raifon conféquente & réfléchie. La nature offre dans le phyfique & dans le moral les beautés & les défauts, les vertus & les vices. Il s’agit de fonder fur ce mélange des principes qui dé- cident le choix qu’on doit faire ; & l’on doit s’atta- cher à les rendre fi folides, qu'ils ne larffent dans l'efprit de l’artifte éclairé, & dans le cœur de Phom-. me vertueux, aucune indécifion fur la route qu'ils doivent tenir. Pour ce qui eft de la feconde fignifi- cation du mot éude , il eft encore général à certains égards ; & fi l'on appelle ainf tous les effais que font les Peintres pour s'exercer , ils les diftinguent cependant par d’autres noms : par exemple, s'ils s’exercent fur la figure entiere, ils nomment cet ef- fai académie ; ainf le mot ésude eft employé affez or- dinairement pour les parties différentes deffinées ou peintes. On dit: we étude de tête ; de mains , de piés, de draperie , de payfage ; & l’on nomme e/quiffe le pro- jet d'untableau, foit qu'il foit tracé, defliné, ou peint: on appelle ébauche ce même projet dont l’exécution nef ee commencée , & généralement tout ouvra: (a 7 d S LU . VIE: 4-4 Tome FT, | quent ces Arts, commencent par fe fervir des mots dont la fignification eft générale ; mais à mefure que l’art fe perfettionne , il crée da langue, & adapte à. une partie des mots généraux ; Enfin il en invente, C’eft alors que plus porter, & à conférver quelque chofe. Il ÿ a de grand | évuis pour les chapeaux, les‘ uns de bois'& lesautres ! BAINS, . pour le profit & pour Pufage. (P) ge de Peinture qui n’eft pas achevé, Ces article eff de, M. WATELET. se Cr JR …ÆTUDIANS EN DROIT, (/wri/prud.) font ceux: qui prennent des leçons d’un profefleur, fut le Droit. civil & le canonique, ou fur lun de ces deux droits . fewiement. . | X,CIQITS, Voyez ÉCOLES De Droit, & aux mors BACHE- | LIER, DOCTEUR EN DRorT, DROIT, FACULTÉ: , DE DROIT, LICENTIÉ, PROFESSEUR EN DROIT. ii m CERN RRQ ER a. ETUI, fm. éfpece de-boîte qui fert à mettre, &° LE HO 3 DT de de carton, Lesiés à cure-dens, à aiguilles 8 à épin-° gles , font de petits cylindres creufés en dedans ; avec un couvercle , dans lefquels on enferme.ces pé= ] | tits uftenfles de propreté ou de couture. } - > pe ge il y ‘ JS SUIS ES Il s’en fait d’or, d'argent , où piqués de clous de, ces deux métaux; & d’autres encore de bois, d’yvoi- re, ou de carton couvert dé cuir. 7 vas Les différentes efpecès d'éuis font. en fi grand c. nonibre, qu'il feroit impofhble de les décrire toutes.” ETUVE, L f en Archireure, c’eit la piece de” | l'appartement du baïn échaufféé par dés poëlés, Les anciens appelloient hypocauftes lès fourneaux foù-" | terrains qui fervoient à échauffer leurs bains, Poyez Palladio parle de la coùtume que les anciens. avoient, d’échauffer leurs appartemens par des tuyaux non-apperçüs., qui partant d’un même foyer, pafloient à-travers des murs, & portoient læ chaleur dans les différentes pieces d’un bâtiment = : on ne fçait trop fi c’étoit un ufage ordinaire chez eux, Où feulement une curiofité ; mais quelques au- teurs prétendent que cette maniere de pratiquer les” étuves étoit bien au-deflus de celle d'Allemagne | _ÉTUVÉ D'OFFICE, Voyez OFFICE. (P). ETUVE, (Chapelier.) lieu fermé que l'on échaufe añn d'y faire fécher quelque chofe. Les Chapehiers font fecher leurs Chäpeanx dans ET ReS JA Rte, is De , * > : deséruves, à deux réprifes différentes ; feavoir, la pre micre fois, après qu'ils ont été dreflés & nus en forme en fortant de la foulerie ; & la feconde , après qu'ils les ont tirés de la teinture. Voyez CHAPEAU ETUVE, ez Confiferie , eft un uftenfile en forme de petit cabinet, où il y a, par étage, diverfes ta= blettes de même fil d’archal, pour foûtenir çe ao y veut faire fécher. Voyez la Planche du Conffeur. ETUVE, ex terme de Raffinerieen fucre , eft une pie- ce de fonte de trois piés de long fur deux de large vuide fut üne furface &c par un bout : on la renver= fe, ce bout fans bords tourné du côté de la chemi- née. Elle eft fcellée fur des grillons ou füpports de fer, au-deffus des grilons où l’on fait le féu..Il ÿ a plufieurs de ces écuves dans une raffinerie, deftinées à communiquer de la chaleur dans les greniers où elle eft néceffaire. Celle qui fert à échaufler l’éruve où l’on fait fécher les pains , eft couverte de plu- | fieurs lits detole, pour rallentir la chaleur qui feroït exceflive , feulement aux environs du foyer. Voyez SUCRE 6 RAFFINERIE. ETUVE, s'entend encore , ex rerme de Raffineur de Jucre , de l’endroit où l’on met étuver le fucre en pains ; c’eft une efpece de chambre à-peu-près quar= rée, où il y a des folives d'étage en étage, à déux piés l’une de l’autre. Ces folives font couvertés de lattes attachées par les deux bouts à la diftance en- viron de quatre pouces : il ny a que celles du milièw qui ne tiennent point fur les folives, parce qu'il eft plus facile d’arranger les pains dans les coins de lé tuve, À mefure que l’on emplit les étages, on place, en venant des deux côtés, au milieu, où l’on laifle un efpaçe vuide de fept à 8 pouces, qui fert à faire mon- 98 ETY tèr la chaleur jufqu'au haut de Térve; afin que Îes pains foient tous étuvés dans le même terms, Il faut faire un féutoujours égal, Si dans les premiers jours on en faifoit, il feroit à craindre que l’eau du pain né tombât dans la pâte; ce qui le feroit fouler, & donneroit beaucoup de peine à refaire: fi on en fait trop, une grande quantité de pains tougiront au | lieu de blanchir. 44 ETUVÉE , f. f. en termede Cuifine, eft le nom qu’on donne à une forte de préparation de poiflon, que lon fait cuire dans de bon vin, avec oignons, champignons , & épices ; le tout enfemble {ur un grand feu dont on fait monter la flamme dans la caf- {erole poiflonniere, on autre uftenfile dont on fe fert pour lors, afin de brûler le vin. ETUVER, 67 férme de Cirier,c’eit mettre dans un lit des cierges nouvellément jettés , afin de concentrer la chaleur & de la réduire au degré néceflaire, pour. recevoir lés impreflions qu'il faut donner à la cire. ETYMOLOGIE, f.f. (Liz) c’eft origine d’un mot. Lé mot dont vient un autre mot s’appelle" priminif, &c célui qui vient du primitif s'appelle dérivé, On don- ne quelquefois au primitif même lé nom d’ésymolo- gie ; ainf l’on dit que pater eft l’ésymologie de pere. Les mots n’ont point avec ce qu'ils expriment un rapport néceflaire ; ce n’eft pas même en vertu d’u- ne convention formelle & fixée invariablement en- tre les hommes, que certains fons réveillent dans nôtre éfprit certaines idées. Cette liaïfon eft l'effet d’üuné habitude formée dans l'enfance à force d’en- téndre répéter les mêmes {ons dans des circonftan- cès à-peu-près femblables : ellé s’établit dans l’efprit des peuples, fans qu'ils y penfent ; elle peut s’effa- cer par l'effet d’une autre habitude qui fe formera auffi fourdement & par les mêmes moyens. Les cir- conftances dont la répétition a determiné dans l’ef- rit de chaque individu le fens d’un mot, ne font jamais exaétement les mêmes pour deux hommes ; elles font encore plus différentes pour deux généra- tions. Ainfi à confidérer une langue indépendam- ment de fes rapports avec les autres langues, elle a dans elle-même un principe de variation. La pronon- ciation s’altere en pañlant des peres aux enfans ; les acceptions des termes fe multiphent , fe remplacent les unes les autres ; de nouvelles idées viennent ac+ croître les richeffes de l’efprit humain ; 1l faut détour- ner la fignification primitive des mots par des mé- taphores ; la fixer à certains points de vüe particu- liers, par des inflexions grammaticales ; réunir plu- fieurs mots anciens , pour exprimer les nouvelles combinaifons d'idées. Ces fortes de mots n’entrent pas toüjours dans l’ufage ordinaire : pour les com- prendre, il eft néceflaire de les analyfer , de re- monter des compofés ou dérivés aux mots fimples ou radicaux, & des acceptions métaphoriques au fens primitif, Les Grecs qui ne connoïfloient guere * que leur langue, & dont la langue, par Pabondance de fes inflexions grammaticales, & par fa facilité à compofer des mots, fe prêtoit à tous les befoins de leur génie, fe livrerent de bonne heure à ce genre de rechérches , & lui donnerent le nom d’ézyrolo- gie. c'eft-à-dire, connoïfflance du vrai fens des mots; Car éryuer rc AtËtoc fignifie le vrai fens d'un mot, d’érupos y vrai. | Lorfque les Latins étudierent leur langue, à l’e- xemple des Grecs, 1ls s’'apperçurent bien-tôt qu’ils la devoient prefque toute entiere à ceux-c1. Le tra- vail ne fe borna plus à analyfer les mots d’une feu- le langue , à remonter du dérivé à fa racine; on ap- prit à chercher les origines de fa langue dans des langues plus anciennes, à décompofer non plus les mots, mais les langues : on les vit fe fuccéder & fe mêler, comme les peuples qui les parlent.Lesrecher- ches s’étendirent dans un champ immenfe ; mais EÉTY quoïqu'elles devinffent fouvent indifférentés pout la” connoïflance di vrai fens des mots ; on garda l’an-” cien nom d’érymologie, Aujourd'hui les Savans don- nent ce nom à foutes les recherches fur l’origine des mots ; & c’eft dans ce fens que nous lemployerons dans cét article. | dés. L’Hiftoire nous a tranfmis quelques ééymologies , comme celles des noms des villes où des lieux aux- quels Les fondateurs ou les navigateurs ont donné , {oit leur propre nom, foit quelque autre relatif aux’ circonftances de Fa fondation ou de la découverte. À la referve du petit nombre d’érymologies de ce gen-' re, qu'on peut regardèr comme certaines, & dont la certitude purement teflimoniale ne dépeñd pas des regles de l’art étymologsique , Portgine d’un mot eft en général un fait à deviner, un fait ignoré, au- : quel on:ne peut arriver que par des conjeétures, en : partant de quelques faits connus. Le mot eft donné ; il faut chercher dans l’immenfe variété des langues, les différens mots dont il peut tirér fon origine. La! reflemblance du fon, l’analosie du {ens, l’hiftoire: des peuples qui ont fucceffivement occupé la rièême contrée, Où qui y Ont éntretenu ün grand commer- ce; font les premieres lueurs qu’on fuit : on trouve enfin un mot aflez femblable à celui dont on cher che l’érymologie, Ce n’eft encore qu'une fuppoñition qui peut être vraie Ou faufle : pour s’aflürer de la vé- rité, on examine plus attentivement cette reflem- blance ; on fuit les altérations graduelles qui ont con- duit fuccefivemént du primitif au. dérivé ; on pefe le plus ou le moins de facilité du changement de cer- taines lettres en d’autres; on difcute les rapports en- tre les concepts de lefprit 8 les analogies délicates: qui ont pù guider les hommes dans l'application d’un même fon à des idées très-différentes ; on compare le mot à toutes les circonftances de l’énigme : fouvent il ne foûtient pas cette épreuve, & on en cherche un autre ; quelquefois (& c’eft la pierre de touche des ézymologies, comme de toutes les vérités de fait} toutes les circonftances s’accordent parfaitement avec la fuppoñtion qu'on a faite; l’accord de cha- cune en particulier forme une probabilité ; cette probabilité augmente dans une progreflion rapide , à mefure qu'il Sy joint de nouvelles vraïffemblan- * ces; & bien-tôt, par l’appui mutuel que celles-ci fe prêtent , la fuppofñition n’en eftplus une, & acquiert la certitude d’un fait. La force de chaque vraïflem- blance en particulier , & leur réunion, font donc Punique principe de la certitude des étymologies ; comme de tout autre fait, & le fondement de la diftinétion entre les éymologies poflibles , proba= bles , & certaines. Il fuit de-là que l’art étymologi- ue eft, comme tout art conjetural, compolé de Re parties, l’art de former les conje@ures on les fuppoñitions, & l’art de les vérifier ; ou en d’autres termes l'invention & la critique : les fources de la premiere , les regles de la feconde, font la divifion naturelle de cet article; car nous n’y comprendrons point les recherches qu’on peut faire fur les caufes primitives de linftitution des mots, fur l'origine & les progrès du langage , fur les rapports des mots avec l'organe qui les prononce , &c les idées qu'ils expriment. La connoïffance philofophique des lan- gues eft une fcieñce très-vafte, une mine riche de vérités nouvelles & intéreffantes. Les érymologies ne font que des faits particuliers fur lefquels elle appuie quelquefois des principes généraux ; ceux- C1, à la vérité , rendent à leur tour la recherche des écymologies plus facile & plus füre ; maïs fi cet article devoit renfermer tout ce qui peut fourni aux étymolosgiftes des conjeûtures ou des moyens de les vérifier , 1l faudroit qu'il traitât de toutes les Sciences. Nous renvoyons donc fur ces matie+ rés aux articles GRAMMAIRE ; INTERJTECTION ; ET Y LANGUE, ANALOGIE, MÊLANGE, ORIGINE € ANALYSE DES LANGUES, MÉTAPHORE, ONOMA- TOPÉE, ORTOGRAPHE, SIGNE, &c. Nous ajoûte- rons feulement , fur l'utilité des recherches étymo- logiques, quelques réflexions propres à défabufer du mépris que quelques perfonnes affeétent pour ce genre d'étude. Sources des conjettures étymologiques. En matiere d’étymologie, comme en toute autre matiere, lin- vention n'a point de regles bien déterminées. Dans les recherches où les objets fe préfentent à nous, où il ne faut que regarder & voir, dans celles auffi qu'on peut foûmettre à la rigueur des démonftra- tons , 1l eft poffible de prefcrire à l’efprit une mar- che invariable qui le mene fûrement à la vérité : mais toutes les fois qu'on ne s’en tient pas à obfer- vér fimplement ou à déduire des conféquences de principes connus , il faut deviner; c’eft-à-dire quil faut, dans le champ immenfe des fuppofñitions poff- bles , en faifir une au hafard, puis une feconde , & plufieurs fucceflivement , jufqu’à ce qu’on ait ren- contré l'unique vraie. C'eft ce qui feroit impofhble, fi la gradation qui fe trouve dans la haïfon de tous les êtres, & la loi de continuité généralement ob- {ervée dans la nature , n’établifloient entre certains faits, & un certain ordre d’autres faits propres à leur fervir de caufes, une efpece de voïfinage qui dimi- nue beaucoup l’embarras du choix, en préfentant à l'efprit une étendue moins vague , êc en le rame- nant d'abord du pofhible au vraiflemblable ; l’analo- gie lui trace des routes où 1l marche d’un pas plus für : des caufes déjà connues indiquent des caufes femblables pour des effets femblables. Aïnfi une mé- moire vafte & remplie, autant qu'il eft pofüble, de toutes les connoiflances relatives à l’objet dont on s’occupe, un efprit exercé à obferver dans tous les changemens quille frappent, l’enchaînement des effets & des caufes, & à en tirer des analogies ; fur-tout Phabitude de fe livrer à la méditation , ou, pour mieux dire peut - être, à cette rêverie nonchalante dans laquelle l’ame femble renoncer au droit d’appel- ler fes penfées , pour fes voir en quelque forte pañer toutes devant elles, & pour contempler, dans cette confufion apparente , une foule dé tableaux & d’af- femblages inattendus, produits par la fluétuation ra- pide des idées, que des liens auffi imperceptibles que multipliés amenent à la fuite les unes des autres; voilà ;, non les regles de l'invention, maisles difpofi- tions néceflaires à quiconque veut inventer, dans quelque genre que ce foit ; & nous n'avons plus ici qu’à en faire l'application aux recherches étymolo- giques, en indiquant les rapports Les plus frappans, & les principales analogies qui peuvent fervir de fondement à des conjettures vraiflemblables.. 1°. Il eft naturel de ne pas chercher d’abord loin de foi ce qu’on peut trouver fous fa main. L'examen attentif du mot même dont on cherche l’esyrologie, . &.de toutce qu'il emprunte, fi j’ofe ainf parler, de l’analogie propre de fa langue , eft donc le premier pas à faire. Si c’eft un dérivé, 1l faut le rappeller à fa racine , en Le dépouillant de cet appareil de termi- naifons & d’inflexions grammaticales qui le décui- fent ; fi c’eft un compofe, 1l faut en féparer les diffé- rentes parties : ainfi la connoïffance profonde de la langue dont on veut éclaircir les origines , de fa grammaire, de fon analopie , eft le préliminaire le plus indifpenfable pour cette étude. 2°, Souvent le réfultat de cette décompofition fe termine. à des mots abfolument hors d’ufage ; il ne faut pas perdre, pour cela, l’efpérance de les éclair- cir , fans recourir à une langue étrangere : la lan- gue même dont on s'occupe s’eft altérée avec le _tems ; l'étude des révolutions qu’elle a efluyées fe- Tome VL, E T Ÿ 99 ta voir dans les monumens des fiecles pañlés ces mêmes mots dont l’ufage s’eft perdu , & dont on a confervé les dérivés ; la leéture des anciennes char- tes &c des vieux gloffaires en découvrira beaucoup; les dialeétes ou patois ufités dans les différentes provinces, qui n’ont pas fubi autant de variations que la langue polie, où qui du moins n’ont pas fubi les mêmes , en contiennent auffi un grand nombre : c’eft là qu'il faut chercher. | 3°, Quelquefois les changèmens arrivés dans la prononciation effacent dans le dérivé prefque tous les veftiges de fa racine. L'étude de Pancien langage & des dialectes , fournira aufli des exemplesides va- riations les plus communes de la prononciation ; & ces exemples autoriferont à fuppofer des variations pareillesdans d’autres cas. L’ortographe, qui fe con- ierve lorfque là prononciation change , devient un témoin aflez für de l’ancien état de la langue, & indique aux étymologiftes la filiation des mots, lorfque la prononciation la leur désuife. 4°. Le problème devient plus compliqué , lorfque les variations dans le fens concourent avec les chan- gemens de la prononciation. Toutes fortes de tropes & de métaphores détournent la fignification des mots ; le fens figuré fait oublier peu-à-peu le fens propre, & devient quelquefois à fon tour le fonde- ment d’une: nouvelle figure ; enforte qu’à la longue le mot ne conferve plus aucun rapport avec fa pre- miere fignification, Pour retrouver la trace de ces changemens entès les uns fur les autres , il faut connoître les fondemens les plus ordinaires des tropes & des métaphores ; il faut étudier les diffé- rens points de vüe fous lefquels les hommes ont en= vifagé les différens objets, les rapports, les analo- oies entre lesidées, qui rendent les figures plus na- turelles ou plus juftes, En général, l'exemple du pré- fent eft ce qui peut le mieux diriger nos conjeätu- res.fut le pañlé ; les métaphores que produïfent à chaque inftant fous nos yeux les enfans , les gens grofliers, & même les gens d’efprit , ont dû fe préfenter à nos peres ; car le befoin donne de lefprit à tout le monde: or une grande partie ‘de ces métaphores devenues habituelles dans nos lan- gues, font l'ouvrage du befoin où les hommes fe font trouvés de faire connoître les idées intelle@uel- les & morales, en fe fervant des noms des objets fen- fibles : c’eft par cette rafon,& parce que la nécef: fité n’eft pas délicate , que le peu de juftefle des métaphores n’autorife pas toijours à les rejetter des conjettures. étymologiques. Il y a des exeriples'de ces fens deétournés , très-bifarres en apparence , & qui font indubitables, | | 5°. Il n’y a aucune langue dans l’état a@uel des chofes qui ne foit formée du mélange ou de Palté- ration de langues plus anciennes, dans lefquelles on doit retrouver une grande partie des racines de la langue nouvelle : lorfqw’on a pouffé auf loin qu'il eft poffible , fans fortir de celle-ci, la décompofition & la fihation des mots, c’eft à ces langues étrange- res qu'il faut recourir. Lorfqu’on fait les principa- les langues des peuples voifins , ou qui ont occupé autrefois le même pays , on n'a pas de peine à découvrir quelles font celles d’où dérive immé- diatement une langue donnée , parce qu’il eft im- poffible qu’il ne s’y trouve une très-grande quantité de mots communs à celle-ci, & fi peu déguilés que : Ja dérivation n’en peut être conteftée : c’eft ainfi qu'il n’eft pas nécefaire d’être verfé dans l’art éty- mologique , pour favoir que le françois & les autres langues modernes du midi deVEurope fe font formées par la corruption du latin mêlé avec le langage des nations qui ont détrit FEmpire ro- main. Cette connoiïflance groffiere, oùmene la con- noïffance purement hiftorique des Me fuccef= 1} Too ET Ÿ fives du pays, par diférens peuples, indiquent fuf- famment aux étymologiftes dans quelles langues ils doivent chercher les origines de celle qu’ils étudient. 68. Lorfqu'on veut tirer les mots d’une langue moderne d’une ancienne , les mots françois , par exemple, du latin, 1l eft très-bon d'étudier cette lan- gue, non-feulement dans fa pureté & dans les ouvra- ges des bons auteurs ,:mais encore dans les tours les plus corrompus, dans le langage du plusbas peuple &c desprovinces. Les perfonnesélevées avec foin &inf- truites de la pureté du langage, s’attachent ordinai- rement à parler chaque langue, fans la mêler avec d’autres : c’eft le peuple groffier qui a le plus contri- Pué à la formation des nouveaux langages c’eft lui qui ne parlant que pour le befoïn de fe faire enten- dre, néglige toutes les lois de analogie, ne fe refu- fe à l’ufage d’aucun mot, fous prétexte qu'il eft étran- ger , dès que lPhabitude le lui a rendu famulier ; c’eft de lui que le nouvel habitant eft forcé , par les néceflités de la vie & du commerce , d'adopter un plus grand nombre de mots; enfin c’eft toüjours par le bas peuple que commence ce langage mitoyen qui s'établit néceflairement entre deux nations rap- prochées pat un commerce quelconque ; parce que de part & d'autre perfonne ne voulant fe donner la peine d'apprendre uné langue étrangere, chacun de on côté en adopte un peu, & cede un peu de la fienne, 7°. Lorfque de cette langue primitive plufieurs fe font formées à la fois dans différens pays, l'étude de ces différentes langues, de leurs dialeétes, des varia- tions qu’elles ontéprouvées; la comparaifonde la ma- niere différente dont elles ontaltéré les mêmes infle- x10n$ , ou les mêmes fons de la langue mere , en fe les rendant propres ; celle des direétions oppofées , f j'ofe ainfi parler, fuivant lefquelles elles ont détour- né le fens des mêmes expreflions; la fuite de cette comparaïfon., dans tout Le cours de leur progrès, & dans leurs différentes époques, ferviront beaucoup à donner des vües pour les origines de chacune d’en- tre elles: ainfi Pitalien: &c le gafcon qui viennent du latin, comme le françois, préfentent fouvent le mot intermédiaire entre un mot françois 8: un mot latin, dont le paflage eût paru trop-brufque & trop peu vraiflemblable, fi on eût voulu tirer immédiatement l’un de l’autre, foit que le mot'ne foit effeivement devenu françois que parce qu'il a été emprunté de l'italien on du gafeon, ce qui eft très-fréquent, foit qu'autrefois ces trois langues ayent été moins diffé- rentes. qu'elles neile font aujourd’hui. 8°. Quand plufieurs langues ont été parlées dans le même pays & dans le même tems , les traduétions réciproques de lune à Pautrefourniffent aux étymo- logiftes une foule de conjedures précieufes. Ainf pendant que notre langue & les autres langues mo- dernes fe formoient, tous les-aétes s’écrivoient en latin ; 8 dans céux qui ont été confervés , le mot La- tin nous indique très-{ouvent l’origine du mot fran- çois ; que lesaltérations fucceffives de la prononcia- tion nous auroient dérobéer, c’eft cette voie quinous a appris que wetier vient de miniflerium ; marguillier, de marricularius , &c, Le diétionnaire de Ménage eft rempli de ces fortes d’ésymologies , & le gloffaire de Ducange en eft une fource inépuifable. Ces mêmes traduéhons ont l'avantage de: nous procuret des exemples conftatés d’altérations très -confidérables dans la prononciation des mots, &c de différences très-fingulieres entre le dérivé &le primitif, qui font fur-tout très-fréquentes dans les noms des faints ; & ces exemples peuventautorifer à former des conjec- tures auxquelles, fans eux, omn’auroit ofé {e livrer. M. Freret à fait ufage de ces traduétions d’une:lan- -gue à une autre ; dans fa differtation fur le mot du ‘Ann; Où, pour prouver que cefte terminaifon celti- que fienme une ville , & non pas une #rontagne ; il allegue que les Bretons du pays de Galles onttra- _ duit ce mot dans le nom de plufieurs villes, parle mot de caër, & les Saxons par le mot de Eurgh, qui fignifient inconteftablement v://: : il cite en particu: lier la ville de Dumbarton, en gallois , Caërbriton ; & celle d'Edimbours, appellée par les anciens Bre- tons Dun-eden, &c parles Gallois d'aujourd'hui Caër- eden. 9°. Indépendamment de ce que chaque langue tient de celles qui ont concouru à fa premiere for- mation, 1l n'en eft aucune qui n’acquiere journelle- ment des mots nouveaux, qu'elle emprunte de fes voifins & de tous les peuples avec lefquels elle a quelque commerce. C’eft fur-tout lorfqu’une nation teçoit d’une autre quelque connoiffance ou quelque art nouveau, qu’elle en adopte en même tems les termes. Le nom de houffole nous eft venu des Italiens, avec l’ufage de cet inftrument. Un grand nombre dé termes de l’art dela Verrerie font italiens, parce que cet art nous eft venu de Venife. La Minéralogie eff pleine de mots allemans. Les Grecs ayant été les prenmuers inventeurs des Arts & des Sciences, & le refte de l’Europe les ayant recûs d'eux , c’eftà cette caufe qu'on doit rapporter Pufage général parmi toutes les nations européennes, de donner des noms grecs à prefque tous Les objets fcientifiques. Un éty- mologifte doit donc encore connoître cette fource & diriger fes conjectures d’après toutes ces obfervas= tions, & d’après Phiftoire de chaque art en parti- culier. 10°. Tous les peuples de la terre fe font mélés en tant de manieres diféérentes , & le mélange des tan- gues eft une fuite fi néceffaire du mélange des peu- ples,. qu'il eft impoñlible de limiter le champ ouvert aux conjeétures des étymologiftes. Par exemple , on voudra du petit nombre de langues dont une langue s’eft forméeimmédiatement, rémonter à des langues plus anciennes ; fouvent même quelques-unes dé ces languesfe font totalement perdues : le celtique, dont notre langue françoife a pris plufeurs racines , eft dans ce cas; on en raffemblera les veftiges épars dans Pirlandois, le gallois, le bas-breton., dans les anciens noms des lieux de la Gaule, &c. le faxon., le gothique , & les différens dialeétes anciens &: mo- dernes de la langue germanique, nous rendront en pattie la langue des Francs. On examinera foigneu- lement ce qui s'eft confervé de la langue des pre- miers maîtres du pays, dans quelques cantons parti- culiers, comme la baffle Bretagne, la Bifcaye.. PE- pire, dont l’âpreté du fol 87 la bravoure des habitans ont. écarté les conquérans poftérieurs. L’hiftoire än- diquera les invañons faites dans les tems les plus re- culés, les colonies établies furles côtes par les étran- sers, les différentes nations que le commerce ou la néceflité de chércher un afyle, a conduits fucceffi- vement dans une contrée. On fait que le commerce des Phéniciens s’eft étendu furtoutes les côtes de la Méditerranée , dans un tems où les autres: peuples étoient encôre barbares ; qu'ils y ont établi un très- grand nombre de colomes ; que Carthage , une de ces colonies, a domuné fur une partie de PAfrique , & s’eft foûimus prefque toute l’Efpagne méridionale, On peut donc chercher dans le phénicien où l’hébreu un grand nombre de mots grecs, latins, efpagnols, &c. On pourra par la même raïfon fuppofer que les Phocéens établis à Marféille, ont porté dans la Gaule méridionale plufieurs mots grecs. Au défaut même delhiftoire on peut quelquefois fonder fes uppoñ- tions fur les mélanges de peuples plus anciens que les hiftoires même, Les courfes connues des Goths & des autrés nations feptentrionales d'un bout de l'Ettropéà Pauütre ; celles des Gaulois & des Cimmériens'dans des fieçles pluséloïgnés; cellés des Scythes enAñe, 4 racine ik ou mulk, Qui fignifie Zeit dans toutes les donnent droit de foupconner des migrations fembla- bles , dont les dates trop reculées feront reftées in- connues, parce qu'il n’y avoit point alors dé nations policées pour en confervér lamémoiïre, & par con- féquent le mélange de toutes les nations de l’Europe & de leurs langues , qui a dû en réfulter. Ce foup- çon, tout vague qu’il eft, peut être confirme par des ‘étymologies qui en fuppoferont la réalité, fi d’ail- leurs elles portent avecelles un caraétere marqué de vraiflemblance ; & dès-lors on fera autorifé à recou- tir encore à des fuppoñtions femblables, pour trou- ver d’autres ésyrolopies, A'uexyer, traite Le lait; cOm- poté de lé privatif & de la racine ex, lait ; mulgeo & mulceo en latin, fe rapportent manifeftement à la langues du Nord ; cependant cette racine n’exifte feule ni én grec ni en latin. Les mots /lyern, fuéd, flar, ang. di, or. ffella , latin, ne font-ils pas ÉVI= demment la même racine, ainfñi que le mot unvn, la lune, d'où menfes en latin; & les mots 007, ang. maën, dan. mond, allem.? Des éymologies fi bien vérifiées, m’indiquent des rapports étonnans entre les langues polies des Grecs & des Romains, & les langues groffieres des peuples du Nord. Je me pré- terai donc , quoiqu'avec réferve , aux ésymologies d’ailleurs probables qu’on fondera fur ces mélanges anciens des nations, & de leurs langages. 11°. La connoïflance générale des langues dont on peuttirer des fecours pour éclaircir les origines d’une langue donnée, montre plütôt aux étymologif- tes l’efpace où ils peuvent étendre leurs conjeétures, qu’elle ne peut fervir à les diriger; il faut que ceux-ci tirent de l'examen du motmême dont ils cherchent l’o- rigine, des circonftances ou des analogies furlefquelles ils puifent s'appuyer. Le fenseft le premier guide qui fe préfente : la connoïffance détaillée de la chofe ex- primée par le mot, & de fes circonftances principa- les, peut ouvrir des vües. Par exemple, fi c’eft un lieu, fa fituation fur une montagne ou dans une val- lée ; fi c’eft une riviere, fa rapidité, fa profondeur ; & C'eft un infrument ; fon ufage ou fa forme ; fi c’eft une couleur, le nom des objets les plus communs, les plus vifibles auxquels elle appartient ; fi c’eft une qualité, une notion abftraite, un être en un mot, qui ne tombe pas fous les {ens, il faudra étudier la maniere dont les hommes font parvenus à s’en for- mer l’idée, & quels font les objets fenfibles dont ils ont pù fe fervir pour faire naître la même idée dans Pefprit des autres hommes, par voie de comparaifon ou autrement, La théorie philofophique de l’origine du langage & de fes progrès, des caufes de limpofi- tion prinutive des noms ; eft la lumiere la plus füre qu'on puifle confulter ; elle montre autant de fources aux éfymolopiftes , qu’elle établit de réfultats géné- raux, & qu’elle décrit depas de lefprit humain dans Pinvéhtion des langues. 5 lon vouloit entrer ici dans, les détails, chaque objet fourniroit des indications particulières qui dépendent de fa nature , de celui de nos fens pat lequel il'a été connu , de la maniere dont il à frappé les hommes, & de fes rapports avec les'autres objets, foit réels, foit imaginaires, Il eft donc inutile de s’appefantir fur uné matiere qu'on pourroit à peine efleurer ; larsicle ORIGINE DES LANGUES, auquel nous renvoyons , ne poutra mé me tenférmer que les principes les plus généraux : lès détails 8 l’application ne peuvent être le fruit que d’un examen attentif de chaque objet en parti- culiér. L'exemple des érymologies déjà connues , &c Panalogie qui en réfulte , font le fecours le plus gé- féral dont on puiffe s’aider dans cette forte de con- jetures , comme dans toutes les autres, & nous en avons déjà parlé. Ce fera encore une chofe très-utilé de fe fuppofer foi-même à la place de ceux qui ont eu à donner des noms aux objets ; pourvinqu'en fe EX IOT mette bien à [eur place , & qu'ont oublié de bonne foi tout ce qu'ils ne devoient pas favoir, on connofs tra par foi-même, avec la difficulté, toutes les réf fources & les adrefles du befoin : pour la vaincre l’on formera des conjettures vraiffemblables fur les idées qu'ont voulu exprimer les premiers nomen- clateurs, & l’on cherchera dansles langues anciennes les mots qui répondent à ces idées. | 12°, Je ne fai fi en matiere de conjeétures étymos logiques , les analogies fondées fur la fignification des mots, font préférables à celles qui ne font tirées que du fon même, Le fon paroît appartémir dirette: ment à la fubftance même du mot ; mais la vérité eft que lun fans Pautre n’eftrien, 8x qu’ainfi l’un & l’au- tre rapport doivent être perpétuellement combinés danstoutes nos recherches: Quoi qu'il en foit , non- feulement la reflemblance des fons, mais encore des rapports plus où moins éloignés , fervent à guider les étymologiftes du dérivé à fon primitif, Dans ce gente rien peut-être ne peut borner les induétions, & tout peut leur fervir de fondement , depuis la ref, femblance totale:, qui, lorfqw’elle concourt avec lé fens , établit Pidentité des racines jufqu'auxreflem- blances les plus legeres ; on peut ajoûüter | jufqu’aw caraétere particulier de certaines différences, Les fons fe diffinguent en voyelles & en confonnes , & les voyelles fontreves ouZo7gues, La reflémblance dans les {ons fuflit pour fuppofer des éymologies, fans au- cun égard à la quantité , qui varie fouwveñt dans le même langue d’une génération à l’autre, où d’une ville à une ville voifine : il feroit fuperflu d’eñ citer des exemples. Lors même que les fons ne font pas entierement les mêmes , fi les confonnes fe reéflem- blent, on n'aura pas beaucoup d’égard à la différence des voyelles ; effetivement l'expérience nous prou- ve qu’elles font beaucoup plus fnjettes à varier que les confonnes : ainfi les Anglois | en écrivant grace comme nous, prononcent gréce. Les Grécs modernes ne ee 1 k | es: | prononcent 4 êc épfilon, ce que les ‘anciens pro- nonçoient à4 & upfilon: ce que les Latins pronon- çoient ox, nous le prononçons , Onne s’arrête pas même lorfqu'il y a quelque différenceentre les con- fonnes, pourvü qu'il refte entr’elles auélqu’analosie, & que les confonnes correfpondantes dañis le dérivé 8 dans le primitif , fe forment par dés mouvémens femblables des organes ; enforte que'la prononcia- tion | en devenant plus forte ou plus foible, puiffe changer aifément June &r l’autre. D'après les obfer- vations faites fur les changemens habituels. de:cer- faines confonnes en d’autres , les Grammairiens les ont rangées par clafles , relatives aux diférens orga- nes qui fervent à les former: ainfilep, le 4 & le font rangés dans la claffe des lettres labiales ; parce qu'on les prononce avec les levres (Voy: #umobLe re TRES, quelques confidérations fur le rapport dés let- tres avec les organes): Toutes les foïs done que le changement ne 1e fait que d’une confonné à une autre confonne, l’altérationidu dérivé n’eft point en- cote aflez grande pour faire méconnoître le primitif, Onétendmême ce principe plus loin scaril fuffitique le changement d’uneconfonne enune autre foit-prou- vé par un grand nombre d'exemples, pour qu'on fe permette de le fuppofer ; & véritablement 6n a toû- jours droit d'établir une fuppoñition ‘dont les faits prouvent la poffbilte, à A So ON! 2f 13°. En même tems que la facilité qu'ont lés Let: tres à fe transformer les ‘unes dans les autres, don- ne aux étymolosiftes une liberté illimitée dé con- jetürer , ns égard à la quantité profodique des fyt- fabes , au fon des voyelles, & prefqué fans ésard aûx confonnes même, il eft cependant vrai que tou: tes ces chofes , fans en excepter la quantité, fervent felquefois à indiquer dés conjetturés Réutreufes Une yllabe longue (je prends exprès pour exemple la 102 ET Ÿ quantité, parce que qui prouve le plus prouve le moins) ; une fyllabe longue autorife fouvent à fup- pofer la contration de deux voyelles, & même le retranchement d’uneconfonneintermédiaire.Je cher- che l’érymologie de pinus; & comme la premiere fyl- labe de pirus eft longue, je fuis porté à penfer qu’elle eft formée des deux premieres du mot picinus, dé- rivé de pix; & qui feroit effetivement le nom du pin, fionavoit voulu Île définir par la principale de {es produétions. Je faique l’x, lec, le g , toutes lettres gutturales, fe retranchent fouvent en latin, lorfqu’el- les font placées entre deux voyelles ; & qu’alors les deux fyllabes fe confondent en une feule, qui refte longue : maxilla, axilla, vexillum, texela, mala, ala, velum, tela. 14°. Ce n’eft pas que ces fyllabes contraétées 8 téduites à une feule fyllabe longue , ne puiffent, en pañlant dans une autre langue, ou même par le feul laps de tems, devenir breves : aufli ces fortes d’in- duétions: fur.la quantité des fyllabes, fur l'identité des voyelles. fur l’analogie des confonnes ; ne peu- vent guere être d’ufage que lorfqu'il s’agit d’une dé- tivation immédiate. Lor{que les degrés de filiation fe multiplient, les degrés d’altération fe multiplient auff à un tel point , que le mot n’eft fouvent plus re- connoïffable. En vain prétendroit-on exclure les transformations de lettres en d’autres lettres très- éloignées. Il n’y a qu’à fuppofer un plus grand nom- bre d’altérations intermédiaires, :8& deux lettres qui ne pouvoient fe fubftituer immédiatement lune à l’autre, fe rapprocheront par le moyen d’une troi- fieme. Qu’ya-t-11de plus éloignéqu'un 2 & une /? ce- pendant le a fouvent pris la place del’/confonneou du digamma éolique. Le digamma éolique , dans un très-prand nombre de mots adoptés par les Latins, a ête fubftitue à l’efprit rude des Grecs, qui n’eftautre chofe que notre 2, & quelquefois même à l’efprit doux ; témoin éraspos , vefper, ÀP> ver, &c. De fon côté l’f'a été-fubftituée dans beaucoup d’autres mots latins , à Pefprit rude des Grecs; rep, fuper, £ë , fex, ve, fus, &c. La même afpiration a donc pü fe changer indifféremment.en # & en f. Qu'on jette les yeux fur le Vocabulaire. hagiologique de l'abbé Chatelain, im- primé àlatête du Didéionnaire de Menage, & lonfe convaincraspat, les prodigieux changemens qu'ont fubi les noms des faints depuis un petit nombre, de fiecles, qu'iln’y a aucune écymologie, quelquebifarre qu’elle paroïfle, qu’on ne puifle juftuifier par:dés exemples avérés; & que par cette voie on peut, au moyen desvariations intermédiaires multipliées à volonté, démontrer la poffbilité d’un changement d’un fon quelconque , en tout autre fon donné. En effet ,1l y a peu de dérivation auffi étonnante-au pre- miercoup.d’œil, que celle de Jour tirée de dies ; 8c 1l y en. a peu.d’aufli certaine. Qu'on réfléchiffe, de plus que la variété des métaphores entées les unes fur les autres ,aproduit des-bifarreries peut-êtrepluis grandes, & propres à juflifier par conféquent-des étymologies :auffi éloignées par rapport au fens, que les autres le font par rapport au fon. Il faut donc avouer que tout a pù fe changer-en tout, & qu’on n'a.dtoit de regarder aucune fuppoñtion étymologi- que comme abiolument impoñfible. Mais que faut -1l conclure -de-là 2? qu’on-peut {e livrer avec tant de favans hommes à l’arbitraire des conjeétures., 8 bâ- tir furides fondemens aufli:ruineux de vaftes fyftè- mes d’érudition; owbien.qu’on doit regarder l'étude des ézymologies commen jeu puérile, bonfeulement pour amufer des enfans? Il faut prendre un jufte mi- lieu. Il eft bien vrai qu'à mefure qu’on fuit l’origine des mots, enremontant de degré en degré,, les alté- gations fe multiplient , foit dans la prononciation , foitidans les fons, parceque, excepté les feules in- flexions grammaticales, chaque pafñlage eft une alté- ET Ÿ ration dans l’un & dans l’autre ; par conféquent la liberté de conjeîturer s'étend en même raifon., Mais cette liberté, qu’eft-elle ? finon l'effet d’une incerti- tude qui augmente toiours. Cela peut-il empêcher. qu’on nelpurle difcuter de plus près les dérivations les plus immédiates , 8 même quelques autres éy- mologies qui compenfent par l'accumulation: d’un plus grand nombre de probabilités, la diftance plus grande-entre le primitif & le dérivé, & le peu de refflemblance entre Pun & l’autre, foit dans le fens, {oit dans la prononciation. Il faut donc, non pas re-. noncer à rien favoir dans ce genre, mais feulement fe réfoudre à beaucoup ignorer. Il faut, puifqu’il y a des étymologies certaines , d’autres fimplement pro- bables, & quelques-unes évidemment faufles , étu- dier les caraéteres qui diftinguent les unes des au tres, pour apprendre, finon à ne fe tromper jamais, du moins à {e tromper rarement. Dans cette vûe nous allons propofer quelques regles de critique, d’après lefquelles on pourra vérifier fes propres con- jeétures & celles des autres. Cette vérification eft la. feconde partie &c le complément de l’art étymolo- gique, Principes de critique pour apprécier La certitude des érymologies. La marche de la critique eft l’inverfe, à quelques égards, de celle de l’invention : toute oc- cupée de créer, de multiplier les fyftèmes & les hy- pothefes , celle-ci abandonne lefprit à tout {on eflor, &c lui ouvre la fphere immenfe des poffbles ; celle-là au contraire ne paroït s’étudier qu’à détrui- re, à écarter fucceflivement la plus grande. partie. des fuppofitions & des poffibilités ; à rétrécir la! car- riere , à fermer prefque toutes les routes, & à. les . réduire, autant qu’il {e peut, au point unique de la certitude & de la vérité. Ce n’eft pas à dire pour cela qu'ilfaille féparer dans le cours de nos recherches ces deux opérations, comme nous les avons féparéesici., pour ranger nos idées fous un ordre plus facile : mal- gré leuroppoñition apparente, elles doivent toûjours marcher enfemble dans l’exercice de la méditation ; & bien loin que la critique, en modérant fans cefle l’eflor de l’efprit , diminue fa fécondité , elle empê- che au contraire d’ufer {es forces , & de perdre un tems utile à pourfuivre des chimeres : elle rapproche continuellement les fuppoñtions des faits ; elle ana- lyfe les exemples, pour réduire les pofbilités 6c. lès analogies trop généralesqu'on en tire ,-à des in- duétions particulieres , &: bornées. à certaines cir- conftances: elle balance les-probabilités & les rap- ports éloignés, par des probabilités plus grandes ëz, des rapports plus prochains. Quand elle ne peut les, oppofer les uns aux autres , elle les apprécie ; où la. raïfon de nier lui manque , elle établit la raifon de, douter. Enfin elle fe rend très-diffcile fur les carac- teres du vrai, au rifque de le rejetter quelquefois, pour ñe pas rifquer d'admettre le faux avec lui..Le fondement de toute la critique eft un principe bien fimple, que toute vérité s'accorde avectout ce qui eft vrais êTque réciproquement cequis’accordeavec toutes les-vérités, eft vrai: de-là il fuit qu'une hy- pothefeimaginée pour expliquerun effet, eneftla vé- ritable çaufe,toutes les fois qu’elleexpliquetoutes.les, circonftances: de l’effet ,. dans quelque détail qu'on. analyfe ces circonftances , & qu'on développe les corollaires de lhypothèfe. On fent aifément que l’ef- prit humain ne pouvant connoître qu'une très-petite. partie de la chaine qui. lie tous les êtres , ne voyant de chaque effet qu’un petit nombre de circonftances, frappantes , & ne pouvant fuivre une hypothèfe que dans fes conféquences les moins éloignées. le prin- cipe ne peut jamais recevoir cette application com- plette & univerfelle, qui nous donneroit une certi- tude du même.genre que celle des Mathématiques. Le hafard a pü- tellement combiner un certain nom bre de circonftances d’un effet, qu’elles correfpon- dent parfaitement avec la fuppoñition d’une caufe qui ne fera pourtant pas la vraie. Ainfi Paccord d’un certain nombre de circonftances produit une probabi- litétoùjours contrebalancée par la poffibilité du con- traire dansuncertaintapport , & l’objet dela critique eft de fixer ce rapport. Il eft vrai que l’augmentation du nombre des circonftances augmente la probabi- lité de la caufe fuppotée , & diminue la probabilité du hafard contraire, dans une progreflion tellement rapide, qu'il ne faut pas beaucoup de termes pour mettre Pefprit dans un repos aufli parfait que le pour- roit faire la certitude mathématique elle-même. Cela pofé, voyons ce que fait le critique fur une conjec- ture oufur une hypothèfe donnée. D’abord il la com- pare avec le fait confidéré, autant qu’il eft poffible, dans toutes fes circonftances, & dans fes rapports avec d’autres faits. S'il fe trouve une feule circonf tance incompatible avec l’hypothèfe , comme il ar- rive le plus fouvent , l’examen eft fini : fi au con- traire la fuppofition répond à toutes les circonftan- ces , il faut pefer celles-ci en particulier, difcuter le plus ou le moins de facilité ayec laquelle chacune fe prèteroit à la fuppofñtion d’autres caufes ; eftimer chacune des vraiflemblances qui en réfultent, & les compter, pour en former la probabilité totale. La recherche des érymologies a , comme toutes les au- tres, fes regles de critique particulières, relatives à lobjet dont elle s'occupe , & fondées fur fa nature. Plus on étudie chaque matiere, plus on voit que cer. taines clafles d’effets fe prêtent plus ou moins à cer- taines clafles de caufes ; 1l s'établit des obfervations générales, d’après lefquelles on exclut tout-d’un- coup certaines fuppofñtions , & l’on donne plus ou moins de valeur à certaines probabilités. Ces obfer- _ vations & ces regles peuvent fans doute fe multiplier à l’infini ; 1l yen auroit mème de particulieres à cha- que langue &t à chaque ordre de mots ; il feroit im- poflible de les renfermer toutes dans cet article, & nous nous contenterons de quelques principes d’une application générale, qui pourront mettre fur la voie : le bon fens , la connoïffance de lhiftoire & des langues , indiqueront-affez les différentes regles relatives à chaque langue en particulier. 1°..1l faut rejetter toute étymologie, qu'on ne rend vraiflemblable qu’à force de fuppoñitions multi- pliées. Toute fuppoñition enferme un degré d’incer- ‘üitude, un rifque quelconque ; & la multiplicité de ces rifques détruit toute aflürance raifonnable. Si donc on propofe une étymologie dans laquelle le pri- mitif foit tellement éloigné du dérivé, foit pour le fens, foit pour le fon, qu'il faille fuppofer entre l’un & l’autre plufeurs changemens intermédiaires, la vérification la plus sûre qu’on en puifle faire fera l’examen de chacun de ces changemens. L’érymolo- ge eft bonne, fi la chaîne de ces altérations eft une fuite de faits connus direétement, ou prouvés par des indu@tions vraiflemblables ; elle eft mauvaife, fi lintervalle n’eft rempli que par un tiflu de fuppoñ- tions gratuites. Ainfi quoique jour foit auffi éloigné de dies dans la prononciation,qu'a/fana left d’equus : lPune de ces é:ymologies eff ridicule, & l’autre et cer- taie. Quelle en eft la différence? Il n’y a entre jour & dies que l’italien giorzo qui fe prononce dgiorno, & le latin Zurnus , tous mots connus & ufités; au lieu que fanacus, anacus, aquus pour dire cheval, . n’ont jamais exifté que dans l'imagination de Mena- ge. Cet auteur eft un exemple frappant des abfurdi- tés, dans lefquelles on tombe en adoptant fans choix ce que fusgere la malheureufe facilité de fuppofer tout ce qui eft poffible: car il eft très-vrai qu'il ne fait aucune fuppoñition dont la poffbilité ne foit juftifiée par des exemples. Mais nous avons prouvé qu'en multipliant à volonté les altérations intermé- ET Y 103 diaires , foit dans le fon, foit dans la fignification,, il eff aïfé de dériver un mot quelconque de tout autre mot donné : c’eft le moyen d'expliquer tout, & dès- lors de ne rien expliquer; c’eft le moyen aufli de | ‘juftiñier tous les mépris de l'ignorance. 2°. Il y a des fuppoñitions qu'il fautrejetter, par- ce qu'elles n'expliquent rien ;ilyenad’autres qu'on doit rejetter , parce qu’elles expliquent trop. Une étymologie titée d’une langue étrangere n’eft pas ad- mifible, fi elle rend raifon d’une terminaifon propre à la langue du mot qu'on veut éclaircir; toutes les vraiflemblances dont on voudroit Pappuyer, ne prouveroient rien, parce qu’elles prouveroient trop: ainfi avant de chercher l’origine d’un mot dans une langue étrangere, il faut l'avoir décompofé, lavoir dépouillé de toutes fes inflexions grammaticales > réduit à fes élémens les plus fimples, Rien n’eft plus ingénieux que la conjeéture de Bochart fur le nom d’rfula Britannica, qu'il dérive de l’hébreu Barat- anac ; pays de étain, & qu’il fuppofe avoir été don. né à cette île par les marchands phéniciens ou car- thaginois, qui alloient y chercher ce métal. Notre regle détruit cette ésymologie : Britannicus'eft un ad Jettif dérivé, où la Grammaire latine ne connoît de radical que le mot £ritan. I] en eft de même de la ter- minaifon celtique #4gum , que Bochart fait éncore venir de l’hébreu m0ku7, fans confidérer que la ter- minaifon #72 où s (car magus eft aufli commun que magum) et évidemment une addition faite par les Latins, pour décliner la racine celtique »74g. La plü- part des étymologiftes hébraïfans ont été plus fujets que lesautres à cette faute ; & il faut avoüer qu'elle eft fouvent difficile à éviter, fur-tout lorfqu’il s’agit de ces langues dont l’analogie eft fort compliquée & riche en inflexions grammaticales. Tel eft le grecs où les augmens & les terminaifons déguifént quel- quefois entierement la racine. Qui reconnoîtroit, par exemple , dans le mot Puwero Le verbe àrre , dont 1l eft cependant le participe très-réculier? S'il y avoit un mot hébreu hemmer, qui fignifiât comme fauves, arrangé. Où joint, il faudroit rejetter cette origine pour s’en tenir à la dérivation grammaticale. J’ai appuyé fur cette efpece d’écueil, pour faire fen- tirce.qu'on doit penfer de ceux qui écrivent dés vo- lumes d’ésymologies, & qui ne connoiffent les lan- gues que par un coup-d’œil tapide jetté fur quelques diétionnaires. | 3°. Une étymologie probable exclut celles qui ne font que poffibles. Par cette raïfon, c’eft une regle de critique prefque fans exception, que toute &y- mologie étrangere doit être écartée, lorfqué la dé- compoñtion du mot dans fa propre langue répond exatement à lidée qu'il exprime : ain celui qui guidé par l’analogie de parabole , paralogifine, &c. chercheroït dans la prépofition greque:7ap2 l’origine de parafol & parapluie , {e rendroit ridicule. 4°. Cette érymologie devroiït être encore rebutée par une autre regle prefque toùjours sûre, quoi- qu’elle ne foit pas entierement générale: c’eft qu'un mot n’eit jamais compolé de deux langues différen- tes, à moins que le mot étranger ne {oit naturalifé par un long ufage avant la compofition; enforte que ce mot n'ait befoin que d’être prononcé pour être entendu: ceux même qui compofent arbitrairement des mots fcientifiques, s’aflujettiffent à cette regle, guidés par la feule analogie, f ce n'eft lorfqu'ils joignent à beaucoup de pédanterie beaucoup d’igno- rance ; ce qui arrive quelquefois : c’eft pour cela que notre regle a quelques exceptions. 5°. Ce fera une très-bonne loi à S’impofer, fi l’on veut s’épargner bien des conjettures frivoles., de ne s'arrêter qu'à des fuppofñtions appuyées fur un cer- tain nombre d'induétions , qui leur donnent déjà un commencement de probabilité, & les tirent dela 104 EE DY | plus | toutes lesreflemblances s’alterent ;\plus les rapports | deviennent vagues &c: fe réduifent à de fimples pc fibilités ; plus les fuppoñitions font multipliées, cha- -cune eft une fource d'incertitude ; il faut donc fe fai. ! -re né loi de ne s’en permettre qu'une à la fois, & ! par conféquent:de né remontet de chaque-mot qu’à fon étymologie immédiate ;ou bien-il faut qu'une fuite | “de ”faits inconteftables remplie l’intervallé entre Fun & l’autre, 8e difpenfe dé toute fuppoñtion. 11 | .eft bon en:général derne fe permettre que des fuppo- tions déjà rendues vraiflemblables par quelques in- -duéhons, On doit vérifier par l’hiftoire des ‘conqué- tes des migrations des peuples., du commerce, -desrarts, de lefprit humain én général; & du pro- grès de chaque nation emparticulier , les éÿmolopies qu'onétablit fur les mélanges des peuples & des lan- “guess; pardes exemples connus, celles qu'on tire dés -Changemens du fens , aumoyen des métaphores; par la connoïffance hifiorique &c grammaticale dela pro- nonciation de: chaque langie & de fes révolutions, celles qu'onfonde fur les altérations de la prononcia- tion t-compateritoutes les:éymologies fuppofées, {oit -avec la-chofé nomméer, fa nature , fes rapports & Ion analogie avec les différens êtres , foit avecla -chronologie des altérations fuccefives , & l’ordre -invariable des progrès de l’euphonie. Rejetter enfin toute étymologie contredite par un feul fait; & n’ad- -méttre comme certaines que celles qui feront ape .puyées furuntrès-grand nombre de probabilités réu- HIES Sr 0 suc? 9 57 p'lolos ho 20°. Je finis ce tableau raccourci de tout l’art éty- -mologique-par la plus générale des regles , qui les renferme toutes ; celle de douter beaucoup, On n’a +point à craindre que ce doute produife une incérti- tude univerfelle ; il:y4, même dans le genre éty- mologique:,deschofes évidentes à leur maniere ; des 'N ” dérivations finaturelles, qui portent un air de vérité . "fi frappant; que peude gens s’ytrefufent. A l’égard de celles quin’ont pasices caratteres, ne vaut-il pas ‘beaucoup mieux s'arrêter en-decà des bornesideila certitude, que d'aller au-delà? Le grandiobjet de l’art :étymologique n’éft pas: de rendre raifon de lorigine de tous Les mots fans exception , & j’ofe diré que ce feroït un but aflez frivole. Cet art eff principalement :Fecommandable en ce qu'il fournit à la Philofophie .des matériaux 8 des obfervations pout élever le grand édifice de la théorie générale dos langues ; or Tome VI, v À - l ignorer, ‘ ; Mère Li à 0 } ‘4 1 1232 le pe 4,24 e > Nous n'avons plus pour finir cet article qu'à y. ETY pour cela il importe bien plus d'employer des ob: férvations certaines, que d'en accumuler, un grand nombre, J’ajoûte qu'il {eroït aufh impofhble qu’inu- tile de connoître l’ésymologie de tous les mots : nous AVONS VÜ combien l'incertitude augmente des qu'on €ft parvenu à la troifieme-ou quatrieme étymologie , Combien on eft obligé d’entañler de fuppoñtions , combien les poffibilités deviennent vagues ; que {e+ roit-ce fi l’on vouloit femontet au-delae & combien Cependant ne férions-nous,pas loin encore de la pre- ere mpoñtion des noms ? Qu'on refléchifle à la multitude de hafards qui ont {fouvent préfidé à cette impoñition ; Combien de noms tirés de circonftances étrangéres à la chofe, qui n'ont duré qu'un inftant , & dont il'n’a refté aucun veftige, En Voici un exem- Ai 11100, 72 1 TOR, 7 h = À) LM d PRIS 1 ple ‘un prince s’étonnoit en traverfant les falles.du palais, de la quantité de marchands qu'il voyoit. Ce qu'il ÿ a de plus. finguliér , lui dit quelqu'un. de‘{a luité ; c’eft qu’on ne peut rien demander à ces pens KR, qu'ils ne vous le fourniflent fur le champ , la chos fe n'eût-elle jamais exité, Le prince rit ; On le pria den faire leffai : il s’approcha d’une boutique , & dit : Madame , vendéz-vous des …, .. dés falbalasà La matchande, fans demander l'explication d’ unmot qu’elle entéridoit pour la premiére fois, lui dit: oiùti = Monfeigneur , & lui-montrant des pretintailles & dés garnitures de robes de fêmme ; voilà ce que vous demandez ; c’eft cela même qu'on appelle des #72 las. Ce mot fut répeté , & fit fortune. Combien de mots doivent leur origine à des circonftances auffr léperes, & auf propres à mettre en défaut toute la nous aVOns dit, qu'il y a des éymologies certaines, ARC 24 € eut SAIS CRUE PTE M5 131 LE AT à + ain: tn menu il ÿ en à de probables , & qiron peut tohjours Éviter l'erreur, pourvû qu’on fe réfolve à beaucoup fagacité des HRoEne? Concluons de tout ce que Joindre quelques réflexions fur l'utilité des recher= ches ‘étymologiques > pour les difculper du reproche de frivolité qu'on IUT AP GuvENt. _ 2 LU; Deptis qu'on connoît l’enchaînement général qux ‘unit toutes'les vérités; depuis que la Philofophie ot: plütôt la raifon, par fes progrès, a fait dans les fcien« Ces, ce qu'avoient fait autrefois les conquêtes des Romains parmi les nations ; qu’elle a réuni toutes les parties du monde littéraire, & renverfé les bar rieres qui divifoient es gens de lettres en autant de petites républiques étrangeres les unes aux autres ;: que leurs études avoient d'objets différens : je ne fau- rois Croire qu'aucune fotte de recherches âit grand béfoïn d'apologie : quoi qu'il en foit ,le développe-' ment des principaux ufages de l'étude étymolosique. ne peut être inutile ni déplacé à la fuite de cet ar miclerae Jui tip: € ed - L'application la plus médiate de l’art étymolosï. que ; eft la recherche des origines d’une langue en particulier : Le réfultat de ce travail, poufié auffiloin qu'il peut l'être fans tomber dans des conjeures trop arbitraires, eft une partie effentielle de l’ana- lyfe dune langue , c’eft-à-dire de la connoiflance completé du fyftème de cette langue , de fes élémens radicaux , de la combinaifon dont ils font fufcepti- bles’, éc. Le fruit de cette analyfe eft la facilité de comparer les langues entr’elles fous toutes fortes de: apports, prammatical, philofophique , hiftorique , &c: (voyez au mot LANGUE , les deux articles ANA LYSE & COMPARAISON DÉS LANGUES). On ferit aifément combien ces préliminaires font indifpenfa- bles pour faïfir en grand & {ous fon vräi point de vüe la théorie générale de la parolé , & Ta marche de l’efprit humain dans la formation & les progrès du langage ; théorie qui , comme toute autre, a be- foin pour n'être pas un roman , d’être éontinuelle- ment rapprochée des faits. Cette théorie ef la four- O ji ETY O8 Lit s “Mots, cConfid 191 sf | EX sin thet A) Gr C1 +. TIRYLITECr 2 2 1 ALLER + CU à Ja faine philofophie, en détrufant dés; étreurs 110- 77] J'Y x HD 26000 TE IIC 9 AT (Hp EL Sie 5} i vétérees. ", Pr” ot mirtrolocnotus dla: inment el 6 6 FEU PiOn fait Bmbien de yftèmés ont été fabriqués fur la Pathre & l'origine de nos connoiffances ; l’entéfement Had edit on a foûtény Qué toutes nos idées étoient nnées ; & la multitude innombrable de ces £tres imaginaires dont noô$ fchôlaftiques avoient rempli Yüunivers , en prérant hne réalité à toutes les abftrac- ions de leur éfprit, viftualités, formalités, degrés siétaphyfiqués entités, Quiddités, 6e. &c, &c. Rien, je parle d’après Locke , met plus propre à en dé- frompér , qu'un examen fuivi de la maniere dont les | hommes font parvenus à donner desnoms à cesfortes | d'idées abitraîtes ou fpiritiellés, & même à fedonner de nouvelles idées par lé moyen de ces noms, On les | voit partir des premieres images des objets qui frap- pent les fens, & s'élever par degrés jufqi’aux idées des êtres invifibles & aux abftraéhons.les plus géné- rales : on voit les échélons fur léfquels ils fe font ap- puyés ; les métaphores & lés'analogies qui. les ont aidés , fur-tout les combinaifons qu'ils ont faites de Jignes déjà inventés , &c lartifice de ce calcul des mots par lequel ils ont formé , compofé , analylé toutes fortes d’abftraétions inacceffibles aux fens & à imagination, précilément c6mme les nombres ex- primes par plufieurs chifires fur lefquels cependant Te calculateur s'exerce avec facilité. Or de quel ufa- ve n'eft pas dans ces recherchés délicates l'art éty- mologique , l'art de fnvre lès expreffions dans tous leurs paflages d'une fignification à Pautre, êc. de dé- couvrir la haon fecrete dés idées qui a facilité ce paffage ? On me dira que Ja fine métaphyfique &c l’obfervation afidue dés’opérations de notre efprit doit fnfire feule pour convaincre tout homme fans préugé, que les idées, même des êtres fpirituels, viennent toutes des fens : On aura raïfon ; mais cette vérité n'eft-elle pas mile en quelque forte fous les yeux d’une mamere bien plus frappante : & n’ac- quiert-elle pastoute l'évidence d’un point de fait;par Vétymologie fi connue des mots Jpiritus, animus, mysd- pa, rouakh, &c. penfée, délibération, intelligence , &ct. I! feroit fuperfln de s'étendre ici fur les érymologies de ce genre,;qu'on poufroit accumuler ; Mais Je CroIs qu'il eft très-difficile qu'on s'en OCCUpeun. peu. d’a- près ce point de vûe : en effet, l’efprit humain en fe réplant ainfi fur lui-même pour étudier fa marche. ne peut-il pas retrouver dans les tours finguliers que les premiers hommes ont imaginés pour expliquer desidées nouvelles en partant des objetsconnus,bien ‘des analogies très-fines &c très-juites entre plufeurs idées, bien dés rapports de toute efpece que la né- ceflité tohjours mpémieufe avoit faïfis, & que la pa- refle avoit depuis oubliés ? N’y peut-il pas voir fou- vent la gradation qu'il a fuivie dans le paffage d’une idée à une autre, dans l’invention de quelquesarts? & par-là cette étude ne devient-elle pas une branche intéréflante de la métaphyfique expérimentale? Si ces détails fur les:langues & les mots dont l’art éty- mologique s’occupe, font des grains de fable, il eft 1} a un. TL CENETTUE D FOX UT :L 11 Cie y 17 fléralé qui gouVérne routes les langues , à laquelle : dm om DATE « (4! F es er Pt RES ON pla DC Din: « FSU SEAL LE 11 précieux de les ramafer,, puifque.ce font des grains dé fable que l'efptit humain a jetés dans. fa route , _$& qui.peuvent feuls nous, indiquer la:trace de.fes pas (voyez ORIGINE DES LANGUES }). Indépendam- _mentide ces vües curieufes &philofophiques, létu- de dontinous parlons , peur devenir d’une-applica- ion wuelle., 8e prêter à la Logique des fecours pour appuyer.nos rafonnemens fur. des fondemens foli- des Locke ,,8c depuis M. l'abbé de. Condillac , ont montré que le langage eft véritablement une.ef- -péce de calcul, dont la Grammaire, & même la Lo- gique engrande partie , ne font que les-regles ; mais . Cercalcul.eft bien plus compliqué que celui des nom- | bres, {yet à bien plus d’erreurs.&c de difficultés. Une les principales eff l’efpecé d’impoffbilitéoù les hom- _mes fe trouvent de fixer exaétement le fens des fignes auxquels ilsin’ont appris.à herdes idées que par une Pabitude formée dans l'enfance, à force d’entendre répéter les:mêmes fons dans des circonflances fem- blables, mais qui ne le fontijamais entierement ; en- orte que, n.denux hommes, ni peut-être le même homme dans des tems:différens ; n’attachent préci- fément au même-mot la:même idée, Les métaphores -multiphées-par:le befoin &-par une éfpece de luxe d'imagination..qui.s’'eft auffi dans-ce: genre créé de faux befoins,.ont compliqué:de:plus-en-plus les dé- -toûrs de.ce labyrinthe immenfe,|6-l’homme intro- ‘dut, fi. fofe ainf.patlér savant que fes yeux:fuffent ouverts ;méconnoïtifa route &chaque:pas:Cepen- dant tout l'artifice de.ce caleuk ingénieux dont Arif- tote nous a donné les regles ;tout l’art du fyllostfme eft fondé. fur l’ufage des mots dans le:même fens; l'emploi d’un même!mot dans deux fens-différens fait de tout raifonñement-un fophifme ;:& ce.genre de:foph{me,'peut-être le. plus commun:de tous, eft une des fources les plus -ordinaites de nos erreurs. Le moyen le plus sûr, ou'plütôt le feul de nous dé- tromper, & peut-être de parvenir un jour à ne rien affirmer de faux, {eroit de n'employer dans nosini- -duéfions aucun terme, dont:le fens ne fütexaûte- ment,.connu-& défini:Jerne prétens affürément: pas qu'on, ne puifle donner-uneé-bonne définition d’un mot, fans connoître: fon érymologie:: maïs*du moins eft-1l certain qu'il faut :connoître avec précifion!la marche & l’embranchement de fes différentes accep- tions. Qu'on me permette quelques: réflexions à ce fujet. F | | Jai crû voir deux défauts régnans dans la plüpart des définitions répanduesdans les meilleurs ouvra- ges philofophiques. J’en-pourrois citer des exemples tirés des auteurs les plus eftimés & les plus eftima- bles , fans fortir même de l'Encyclopédie. L’un con- fifte. à" donner pour la définition d’un mot lénoncia- tion.d’une feule dé fes acceptionsparticulieres: l’au- tre défaut eft celui de ces définitions dansilefquelles, pour vouloir y comprendre toutes les acceptionsdu mot, il arrive qu'on ny:comprend:dans le fait au- cun, des caraëteres qui diflinguent la chofe de-toute autre, &c que par conféquentonne définit rien. Le-premier défaut. eft très commun, fur-tout quandl s’agit de ces-mots: qui expriment les idées abftraites les-plus fanulieres.; 8e dont les’acceptions fe multiplient d'autant plus par l’ufage fréquent de la converfation , qu'ils ne répondent à aucun objet phyfique & déterminé qui-puifle ramener conftam- ment l’efprit à un fens précis.Il n’eft pas étonnant qu’on s'arrête à celle de-cesracceptions dont: on eft le plus frappé dans linftantsoù l’on écrit, ou bien la plus favorable au fyflème qu'on a entrepris de prouver, Accoïtumé par exemple, à entendre loüer l’inagination, comme la qualité la plus brillante dur géme ;faif d'admiration pour la nouveanté ; la gran- deur, la multitude, & la corréfpondance des ref- forts dont fera compofée la machine d’un beau poë- tie : un homme dira, ÿ’appelle émaginarion cet efprit inventeur qui fait créer, difpofer, faire mouvoir les parties & l’enfemble d’un grand tout. Il'n’éft pas dou- : teux que fi dans toute la fuite de fes raifonnemens, | Pauteur n’employe jamais dans un autre fens le mot C4 EVE RATS l : , D) , TA n RCE imagination (ce qui eft rare), l’on n'aura rien à lui | reprocher contre l’exaitude de {es conclufons : mais qu’on y prenne garde, un philofophe n’eft point ! autorifé à définir arbitrairement les mots. Il parle à des hommes pour les inftruire ; il doit leur parler dans leur propre langue, & s’aflujettir à des conyen- ions déja faites, dont il n’eft que le témoin, & non 1e juge. Une définition doit donc fixer le fens que les Hommes ont attaché à une expreflion, & non lui en donner un nouveau. En effet unsautre jotira aufü du droit de borner la définition du même mot à des ac- Ceptions toutes différentes. de celles auxquelles le prémier s’étoit fixe : dans la vüe de ramener davan- age ce mot à fon origine, il croira y réuffir, en l’ap- | pliquant au talent de préfenter toutes {es idées fous des images fenfbles, d’entaffer les métaphores & les comparaifons. Un troifieme appellera magination cette mémoire vive des fenfations, cette repréfen- tation fidele des objets abfèns, quinous les rend avec ! force, qui noustient lieu de leur réalité, quelquefois ! même avec avantage , parce qu’elle rafflemble fous : un feul point de, vûe tous les charmes que la nature ! ne nous préfente que fucceflivement. Ces derniers pourront encore rafonner très-bien, en s’attachant conftamment au fens qu'ils auront choïfi ; mais il eft évident qu'ils parleront tous trois une langue diffé- rente, & qu'aucun des trois n'aura fixé toutes les idées qu'excite le mot 2magination dans l’efprit des françois qui l’entendent, mais feulement l’idée mo- mentanée qu'il a.plu à chacun d’eux d’y attacher. Le fecond défaut eft né du defir d'éviter le pre- mier. Quelques auteurs ont bien fenti qu’une défini- tion arbitraire ne répondoit pas au problème pro- | pote, & qu'il falloit chercher le fens que les hom- mes attachent à un mot dans les différentes occafions où ils l’employent, Or, pour y parvenir, voici le procédé qu’on a fuivi le plus communément, On a raflemblé toutes les phrafes où l’on s’eft rappellé d’a- voir .vù le mot qu’on vouloit définir ;-on en a tiré les différens fens dont il étoit fufceptible, & on a t- ché d’en faire une énumération exacte. On a cher- ché enfuite à exprimer, avec Le plus de précifion qu'on apû, ce qu'il y a de commun dans toutes ces acceptons différentes que l’ufage donne au même mot : c'eftce qu'on a appellé le fens le plus général du mot ; & fans penfer que le mot n’a jamais eu ni pù avoir dans aucune occafñon ce prétendu fens, on | a crû en avoir donné la définition exaéte: Jeñe cite- rai point ici plufieurs définitions où j'ai trouvé ce dé- faut ; je ferois obligé de jufifier ma critique; & cela feroit peut-être long. Un homme d’efprit, même en fuivant une méthode propre à l’égarer, ne s'égare que jufqu'à un certain point; l'habitude de la juftefle le ramene toùjours à certaines vérités capitales de la matiere ; l’erreur,n’eft pas complette, & devient plus difficile à développer. Les auteurs que j’aurois à citer font dans ce cas ; & j’aimé mieux, pour ren- dre le défaut de leur méthode plus fenfble, le porter à l’extrème:; & c’eft ce queje vais faire dans l’exem- ple fuivant. … Qwonfe repréfente la fouledes acceptions du mot efpris, depuis fon fens primitif /pirirus , haleine, juf- qu'à ceux qu'on hu donne. dans la Chimie, dans la Littérature, dans.la Jurifprudence,, efprirs acides, ef- Prit\de Montagne ,.efprit.des lois, &c.-qu’on effaye d'extraire de toutes.ces acceptions.une idée qui foit commune a toutes, onverra s’évanoiur tous les ca- raéteres qui diftinguent l’efprit, dans quelque fens qu’on le prenne, de toute autre chofe. Il ne reftera CGL3 LL 2 4 109 pas même l'idée vague de /ééxliré : car ce mot n’a aucun fens, lorfqu’il s’agit d’une fubflance immaté- elle; & il. n’a jamais été appliqué à l’efprit dans.le fens de talenr, que d’une maniere métaphorique. Mais quand,on pourroit dire que l’efprit dans.le fens le plus général eft wne chofe fubrile, avec combien d'êtres cette qualification ne lui feroit-elle. pas com- mune ? & feroit-ce là une définition qui doit conve- mir jawdéfini, & ne convenir qu’à.lui ? Je fai bien que les difparates,de cette multitude d’acceptions différentes font un peu plus grandes, à prendre le mot dans toute l'étendue que lui donnent les: deux langues latine & françoife; mais on m’avoüera que fi le latin fût refté langue vivante, rien n’auroitem- pêché que le mot /p#rius n’eût reçu tous les fens que nous donnons aujourd’hui au mot efprie. Jai voulu rapprocher les deux extrémités de la chaîne, pour rendre le-contrafte plus frappant : il le feroit moins, fi nous. n’en confidérions qu’une partié ; mais il {e- toit toüjours réel. À {e renfermer même dans la lan- -gue. françoife feule, la multitude & Pincompatibilité des acceptions du mot e/pris font telles, que perfon- né, je crois, n’a été tenté de les comprendre ainf toutes dans une feule définition , & de définir l’efprit -€n général. Mais. le vice de cette méthode n’eft pas moins réel, lorfqu'il n°eft pas aflez fenfible pour em- pêcher qu'on ne la fuivé: à mefure que le nombre &t la diverfité des acceptions diminue, l’abfurdité s’affoiblit; & quand elle difparoît, il refte encore lerreur, J'ofe dire que prefque toutes les définitions où l’on annonce qu’on va définir les chofes dans le fens le.plus général, ont.ce défaut, & ne définiffent véritablement rien; parce que leurs auteurs, en vou- lant renfermer toutes les acceptions du mot, ont en- trepris une chofe impoffble: je veux dire, de rafleme bler fous une feule idée générale des idées très-dif- férentes entr'elles, & qu'un même mot n’a jamais pù défigner que’ fucceffivement, en ceflant en quel. -que.forte d’être le même mot. . Ce n’eft point ici le lieu de fixer les cas où cette 4. h d ft / { = \, Le Le 2 méthode eft néceflaire ,:& ceux où l’on pourroits’en pañler ; ni de développer l’ufage dont elle pourroit étre, pour comparer les mots entr’eux. Foyez MOTS & SYNONYMES. On trouveroit des moyens d'éviter ces deux dé. fauts ordinaires aux définitions, dans l'étude hifto- rique de la génération des termes & de leurs révo- Jutions : 1l faudroit obferver la maniere dont les hommes ,ont fuccefliyement augmenté , refferré s ] 4 4 - 1 0 modifié , changé totalement les idées qu'ils ont at- tachées à chaque mot ; le fens propre de:la racine pfimitive , autant qu'il eft poñible d’y remonter; les métaphores qui lui ont fuccédé ; les nouvelles méta- 4 L4 ° phores entées fouvent fur ces premieres, fans aucun rapport au-fens primitif. On diroit : « tel mot, dans “jun tems., a reçü.cette fignification ;-la. génération Û DENT » {uivante y a ajoûté cet autre fens ;.les hommes » l'ont enfuite employé, à défigner telle idée ; ils y » ont été conduits par analogie; cette fignification » eft le fens propre ; cet autre eft un fens détour- » né, mais néanmoins en ufage ». On diftingueroit dans cette généalogie d’idées.un certain nombre d’é- poques:/piritus, ouffle , elprit, principe de la vie; efprit » fubftance penfante ; efprit , zalent de: penfer , &c. chacune de ces époques donneroit lieu à une défini- tion particuliere ; on jauroit du moins toùjours une idée précile de ce qu’on doit définir ; on n’embrafle- roit point à la fois tous les fens d’un mot ;:8c en mê. me tems.,on n’en exclueroit arbitrairement aucun ; on expoferoit tous ceux qui font recûs,; & fans fe fai- tele légiflateur du langage, on lui donneroit toute la netteté dont il eft fufceptible,, & dont nous avons béfoin pour raifonner jufte. Sans doute, la méthode que je viens de tracer ET Y T10O (torê XX.) “ & {ur-tout les deux Mémoires que M. le Préfident de Brofles à lüs à la même académie 3 Jur les étymologies ; titre trop modefte!, puifqw’il s'ÿ agit principalement des grands objets de la fhée- rie générale des langues, & dés raïfons fuffifäntes de Vart de la parole. Comme l’auteut'a! bién vou nous les communiquer ; nous en euffions profité Plus fouvent, s’il ne ft pas entré dans notre plan de renvoyer la plüs'erande partie des vües profon- | dés & philofophiques dont 18 font remplis; aux articles LANGUES, LETTRES, ONOMATOPÉE, Mé TAPHÔRE, &c. Voyez ces mors | EAU IERSR Nous concluerons donc cet article, en difañts aveé Quintilien ? 7e gars iéirur ram parva fafliliat ele- menta . 2. quia interiora velit facri hijus-adénritis bus apparebit multa ferum fübtiliras | que #ô% mod acuere ingenia!, [éd éxercere alriffimam guoque ermdirio = ner pojfit. FKLE9D D'OENEUEESD "AE 07 ETYMOLOGIQUE (ART), Lirrérar. Celt l'art de remonter à la fource des, mots, de débrouiller la . dérivaifon , l’altération , & le dégiufement de ces : mêmes mots, de les dépouiller de ce qui, pour ainfi , . Fà e E Le a Qu 37 1 dire, leur eft étrancer, de découvrir les changémens 0 AZ ’ 1 JRiLE) LD Lt { ent ds Dre ru qui leur {Ont arrivés, & par ce moyen de! les Fâme= | ner à la fimplicité de leur Origine. | 7 à \) 11149 { ; « ILeft vrai que les changemens & les altérations que les motsont foufferts font fi. fouvent arrivés par ca- price ou par hafard , qu'il,eft aifé de prendre une con: | jeéture bifarre pouruneanalopieré guliere. D'ailleurs: _1left difficile de retourner dans les fiecles.pañlés,pour fuivre les variations, &c: les viciffitudes.des, langues. Avouons encore, que:la,plüpart des favans quis’at: . tachent à l'étude ésyrzologique ont le malheur: de fe, formerdes fyftèmes,fuivant lefquels ilsinterpretent, d'après |leur deffein particulier, les mêmes | mots, . conformément au.fens. qui..eft.le plus favorable à. _ leurs hypothèfes, | Cependant malgté ces inconvéniens , l’art érymo= logique ne doït point pafler pour un: objet frivole:,: ni pour une entreprife toûjours vaine & infrueu: fe. Quelque incertain qw’on fuppofe-cet art, il a, ! comme les äutres, fes principes &c fes regles. Il fait une partie de la littérature dont l'étude peut. être quelquefois un fecours, pour éclaircir l'origine des nations, leurs migrations ; leur commerce , 6cid’au- tres points également obfcurs par leur antiquité. De | plus, on ne fauroït débrouiller la formation des mots qui fait le fondement de l’art, f l’on n’en examine les relations avec le caraëtere de l’efprit des peuples ët la difpofition de leurs organes; objet, fans doute, digne de Pefprit philofophique: Concluons que lattéyrolopique né peut être thé: prié, ni par rapport à fon objet, qui fe trouve lié avec la connoiffance de l’homme, ni par rapport aux conjedures qu'il partage avec tant d’autres arts né ceffaires à la vie. | Enfin il n’eft pas impofible , au milieu de lincertés tude 8 de la fécherefle de l'étude éymologique, d'y 112 E Ü porter cet efprit philofophiqué qui doit dominer par- tout, & qui eft le fil de tous les labyrinthes. Foyez Particle ETYMOLOGIE. Article de M. le Chevalier DE JaucoURT. ns #k eŒE UE V EU, (Gram.)1Il y a quelques obfervations à faire fur ces deux lettres, qui fe trouvent l’une auprès de l’autre dans l'écriture... ah RE 1°, .Eu, quoiqu’écrit.par deux caraéteres, n’indi- que-qu'un fon fimple dans les deux fyllabes du mot heureux, dit M. l'abbé de Dangeau , Opuft. p.41 0.8 de même dans fu, peu, cc. & en grec ivyto , fertile. Non mme carminibus vincet, nec thracius Orpheus: Virg. cl, jvs v: 55, Le où lamefure duvers fait voir qu'Orpheus n’eft que de deux fyllabes. , Den 1 La grammaire générale de Port-royal a remarqué il ya long:tems, que EU eff un fon fimple, quoique nous l'écrivions-avec deux voyelles, chap. 1. Car, qui fait la voyelle.? c’eft la fimplicité du {on ,.& non la maniere de défigner le {on par.une ow par plufeurs lettres. Les Italiens défignent le fon ox parle fimple carattere ; ce qu n'empêche pas que.o ne foitéga- lement un fon fimple, {oit en italien. foit en fran- COIS. | {on particulier de chaque voyelle., quoique ces deux fons {oient énoncés par une feule émiflion de voix, ai,e-ly i-é, pitié s Ut j nuit sobruit, fruit :. au lieu, que dans fez vous n’entendez ni l’e ml’; vous en- tendez un fon particulier ,.tout-à-fait différent de l'un & de l’autre : & ce qui a fait écrire ce fôn par des cara@teres., c’eft qu'il eft formé par une difpofi- tion d'organes a-peu-près femblable à celle qui forme "e & a cellé qui forme l4. 7, * 2°. Eu, participé paflif du verbe avoir. Ona écrit heu, d'habitus; On'a auffi écrit fimplement #, comme on écrit 4, il a: enfin on écfit communément ex, ce quia donné ‘Hew de prononcer e-7; mais cette maniere dé prononcer n’a jamais êté générale. M. de Callieres ; del’Académie françoïfe, fecrétaire du ca- binet du feu roi Louis XIV. dans {on sraité dubon & di mauvais uifage des manières dèl parler, dit qu'il ÿ a bien des! courtifans & quantité de dames qui difent j'ai eu qui eft, dit-il, un mot d’une feule fyllabe, qui doit fe prononcer comme s’il n’y avoit qu’un 7. Pour moïje crois que puifque l’e dans ez ne fert qu’à groffir le mot dans l'écriture, on feroit fort bien de le fupprimer, &:d’écrire z, comme on écrit 47 y a, à, 8; & comme nos peres écrivoient fimplement z , & non y » 261. Villehardotin, page 4. maint confeil i0r, c'eft-à-dire y eur; & pag. 63, mul t or. 3°, Eu s'écrit par eu dans œuvre, fœur, bœuf, œuf. On écrit communément æz/, & l’on prononce eur/; & c’eft ainf.que M. l'abbé Girard Pécrit. 4°. Dans nos provinces méridionales, commu- nément les perfonnes qui,:aw lieu de leur idiome, parlent françois, difent j’ai ven, j'ai creu, pourveu fer, &c.au lieu de dire vx ,iéru pourvu, fur, te. ce ui me fait croirequ'ona prononcé autrefois j'ai veu; & C’eft ainfiqu'on le trouve écrit dans Villehardotin & dans Vigenere., Mais aujourd’hür qu’on prononce v4, cré, &c. le prote de Poitiers même & M. Reftaut ont abandonné la grammaire de M. labbé Regnier, & écrivent fimplement éché, m4, fu, v4; voulu, b4, pourvi , &c. Gramm. de M. Réftaut , féxieme édit. pag. 238. 6239. (F) Eu; (Géogr. mod.) ville de la haute Normandie, en France ; elle eft fituée dans un vallon;fur la Brile. Long. 19.5.3. lat. So. 24 52. EVACUANT, adj. (Thérapeutique & Mat, méd.) | . Dans: la diphthongue au contraire on entend le Le mot d’évacuant pris dans fon fens le plus général, convient à tout médicament , où à tout autre agent artificiel par le fecours duquel on procure l’expulfion de quelqu’humeut ou de quelqu’excrément hors du corps humain. Les évacuans {e divifent en chirurgicaux & en phar- maceuriques. La claffe des premiers comprend la fai- gnée , les diverfes fcarifications , les fangfues , les véficatoires , les cauteres, les fetons, la paracen= thefe , l'ouverture des abcès, &c, Les évacuans pharmacentiques, qui font plus connus fous ce nom qué les précédens, font des médicamens qui chaffent hors du corps divers excrémens ramañlés dans leurs réfervoirs particuliers , & qui provo- Quent, augmentent ou entretiennent les excrétions. Ces évacuansprennent diférens noms, felon qu'ils affectent différens couloirs. On appelle vomirifs ceux qui agiflent fur l’eftomac , & déterminent fon éva- cüation par la bouche ; prgarifs , ceux qui pouflent les matieres par en-bas; fudorifiques 8 diaphoréri- ques, ceux qui éxtitent fes fueursou la tranfpiration; diurétiques | ceux qui augmentent l'écoulement des urines ; expetforans, Ceux qui provoquent les cra- chats ; fahvans, ceux qui provoquent le flux de bou- che ou l’excrétion de la falive ; errhins, ceux qui dé- terminent une évacuation féreufe par les narines. Voyez les articles particuliers. Les anciens divifoient ces derniers évacuans en généraux &t en particuliers. Les généraux , difoient- ils, évacuent efficacement une région particuliere ; &t par communication tout le refte du corps ; ils en reconnotoient trois de cette efpece, les vomirifs, les purgatifs, & les fudorifiques. Les particuliers étoient ceux qu'ils prétendoient n’évacuer qu'une certaine partie ; ainf les diurétiques étoient cenfés déchar< ger la partie convexe du foie ; les érrhins le cerveau, &c. Mais cette divifñion étoit vaine & abfoluiment mal-entendue ; car il n’eft aucune évacuation qui ne puiffe être regardée comme générale dans un certain fens. La déplétion des vaifleaux ; & fur-tout une détermination d'humeur vers un couloir quelconque (détermination qui conftitue dans la plüpart des cas l'effet le plus intéreflant des évacuations), pouvant procurer des changemens généraux dans le fyftème entier des vaifleaux & fur toute la mafle des hu- meurs , tandis que réciproquement l'évacuation de leflomac, des inteftins, & même celle de la peau, peuvent ne pas s'étendre au-delà de laffe@ion par- ticuhere de ces parties, du moins par rapport à la matiere évacuée, & fans avoir égard à leurs a&tions organiques , que les anciens ne faïfoient pas entrer én confidération, La divifion la plus générale des médicamens, eff celle qui les diflingue en évacuans & en altérans; ceux-c1 different des premiers, que nous venons de définir, en ce qu'ils n’agiflent que d’une façon bien moins fenfble, foit fur les {olides, foit fur les flui- des , qu'ils font cenfés affe@ter de plufieurs différen- tes façons. Voyez ALTÉRANT. C’eft principalement à-propos des éyacuans que les Medecins fe font occupés de cette grande quef- tion de théorie thérapeutique ; favoir Pexplication de cette propriété des divers médicaméns , qui leur fait affeéter certains organes plütôt que d’autres, qui : rend le tartre ftibié vomitif, le fel de Glauber pur- gatif, le nitre diurétique , lalkali volatil fudorifi- que, & le mercure falivant, &c. Voyez MÉDica- MENT. Quelles font les affe&tions, les fymptomes , les fignes qui indiquent ou qui contre-indiquent les évz- cuans ? Comment faut-il préparer Les différens fujets; @c dans les différens cas, à l’adminiftration des éys- cuans ? Ces problèmes thérapeutiques ne peuvent fe réfoudre d'une maniere générale, Voyez Les articles particuliers E V À particuliers, fur-tout VOMITIF, PURGATIF, Supo- RIFIQUE. (4) EVACUER UNE PLACE ox UN PAYS, c’eft, dans Art militaire, en faire retirer les troupes qu'on y avoit établies. Le terme d’évacuer s'employe ordinairement pour une efpece de retraite volontaire, faite en vertu d’u- ne capitulation ou de quelque traité de paix. (Q) EVALUATION, ff, (Gramm.) prixque l’on met à quelque chofe, fuivant fa valeur. On fait à la mon- noie l'évaluation des efpeces , à proportion de leur poids & de leur titre. On fait faire par des arbitres l’épaluation des marchandifes. En Hydraulique on appelle l'évaluation des eaux , le produit de leur dé- penfe. Voyez DÉPENSE. , _ EVALUER, v. a. eftimer une chofe fon rufte prix. EVALUER , (Archireët, ) c’elt en général dans l’ef- timation des ouvrages , en régler le prix par compen- fation, eu égard à la matiere, à la forme, & même à des altérations, qui ayant été faites par ordre, ne font plus en exiftence. (P) EVANGÉLISER, (Juri/p.) vieux terme du palais, qui figmifoit vérifier un procès ou un fac, pour s’aflu- rer s'il étoit complet. Cette vérification s’appelloit aufñ évangile.Cesexpreflions;,tout improptes qu’elles font, avoient été adoptées par les anciennes ordon- nances : celle de Louis XII. du mois de Mars 1408, art, 99. veut que les grefhers rendent aux parties leurs facs & produétions, après avoir grofloyé la fentence ; ou sl en eft appellé, les clorre & évangé- lifer. On auroit dû dire les évangélifer & les clorre, arce que la vérification du fac fe faifoit avant de le clorre. C’étoit afin queles parties ne püflent rien re- tirer de leurs produétions , n1 y ajoûter; & que le _ juge d'appel vit fur quelles pieces on avoit jugé en premiere inftance. François [. par fon ordonnance “donnée à Vs-fur-Thille au mois d'Oétobre 1535, ck. vi]. art, 15. réitéra la même injon@ion aux gref- fers, de faire porter les procès dont il avoit été ap- pelle, clos, évangelifés &c fcellés, le plus diligemment que faire fe pourroit, par un feul meflager, fi faire le pouvoit. Préfentement cette évangélifation ou vérification ne fe fait plus; on rend aux parties leurs produétions, fans les vérifier niles clorre. Il eft vrai quautrefois, avant de conclure un procès en la cour, on faifoit la collation ou vérification des pieces ; mais depuis long-tems, pour plus prompte expédi- tion, on reçoit Le procès & on admet les parties à conclure, comme en procès par écrit : on ajoûte feu- lement à la fin de l’appointement de conclufons, ces mots, fauf a faire collation, c’eft-à-dire fauf à véri- fier fi les produëtions principales font completes. Il y a encore quelques provinces où l’on fe fert de ce terme évargélifer, pour dire vérifier, rendre authenri- que. Par exemple, en Limofin on appelle évangélifer un teftament olographe, lorfqu'il eft dépofé chez un notaire, & rendu folennel. f’oyez ci-après EVANGILE € EVANGÉLISTE, (4) EVANGÉLISTE, . m. ( Hiff. listér) On nomme ainf dans les académies où compagnies littéraires, celui des académiciens fur qui rombe le fort pour être témoin &c infpeéteur du {crutin, ou pour y tenir la place d’un officier abfent ; ain il peut y avoir plu- : fieurs évangélifies à un fcrutin. EVANGÉLISTES , ad. mafc. plur. ( Aif£ eccléf. & Théolog.) terme particulierement confacré pour dé- figner les quatre apôtres que Dieu a choifis & infpi- rés pour écrire l’évangile ou Fhiftoire de Notre Sei- gneur Jefus-Chrift, & quifont S. Matthieu, S.Marc, S. Luc, &S. Jean. Voyez EVANGILE. Ce mot eft compofé d’ù, bene ,& d’ayytate, j'an- z07ce une nouvelle ; c’eit-à-dire porteur de bonnes nou- pelles. C'Eft dans ce fens que Cicéron dit à Atticus : # fuaves épiflolas tuas uno rempore mihi datas duas : | Tome FI, ; E V À 113 gribus evangelia que reddarm ne[c10, deberi quidem planè ê fateor. : Dans la primitive Eglife on donnoit auffi le nom d évangélifle à Ceux qui annonçoient Pévangile aux peuples > étant choïfis pour cette fonétion par les apotres, Qui ne pouvoient pas par eux-mêmes pu- blier le chriftianifme Par tout le monde, Mais ces évangélifes n'étoient point attachés à un troupeau Particulier, comme les évêques ou les pafteurs ordi- naires ; 1ls alloïient par-tout où les envoyoient les apôtres, & revenoient vers eux quand ils s’étoient acquittés de leur commiffion : auf étoit-ce une fonc- tion extraordinaire qui a ceflé avec celle des apô- tres, à moins qu'on ne veuille leur comparer nos mifionnaires. foyez MISSIONNAIRES. dE Quelques interpretes penfent que c’eft dans ce {ens que le diacre S. Philippe eft appellé évangiélifle dans les aétes des apôtres, ch. xxy. v.8., & que S, Paul écrivant à Timothée, lui recommande (ch. jy, y. 5.) de remplir les fon@ions d’évangélifle. Le même apô- tre, dans fon épître aux Ephéfens (c4. jy. ». 11), met les éyargéliffes après les apôtres & les prophetes. M. de Tillemont a employé le mot évangelife dans le même fens. « Beaucoup de ceux qui embrafferent » alors la foi, dit cet auteur, remplis de l'amour d’u- » ne fainte philofophie, commencerent à diftribuer » leurs biens aux pauvres, & enfuite allerent en dif. » férentes contrées faire l'office d’éyangélifles, prê- » cher Jelus-Chrift à ceux qui n’en avoient pas en- » core entendu parler, & leur donner les livres fa- » crés des évangiles, c. ». (G) ÉVANGÉLISTES, (Jurifp.) fuivant Pancien ftyle du palais, font ceux qui véfifient un procès ou un {ac , pour connoître fi les produétions font comple- tes, & fi l’on n’y a rien ajoûté ou retranché. Les no- taires-fecrétaires du roi près les cours de parlement, étoient autrefois ainfi nommés évangélifles , à caufe qu'ils évangélifoient & vérifioient les procès, tant ceux qui étoient apportés en la cour, que ceux qui fe mettoient fur le bureau , en les conférant ou col- lationnant avec le procès ou extrait du rapporteur. Ils font ainfi appellés dans le ftyle du parlement de Touloufe, par Gabriel Cayron, Liv. IF. tir. x. pag. 670. On donne préfentement ce nom aux confeil- lers qui font la fonétion d’afliftans près du rappor- teur, pour vérifier s’il dit vrai. On nomme quelque- fois deux rapporteurs pour une même affaire, 8 en ce cas le fecond eft appellé évangélifle. Quand on rapporte un procès danstoutes les regles, il y a deux confeillers-affiftans aux côtés du rapporteur, dont l’un tient Pinventaire , & l’autre les pieces ; & après que le rapporteur a expofé les faits & les moyens , l'un lit les claufes des pieces produites, l’autre les induétions qui en font tirées. Dans les procès qui ont été vüs des petits commiflaires , Les commiflaires tiennent lieu d’évangélifles à l’égard du rapporteur, attendu qu'ils ont déjà vü les pieces. On appelle aufi évangélifles à la chambre des comptes , les deux con- feillers - maîtres qui font chargés» l’un de fuivre le compte precedent , l’autre de vérifier les acquits 4 pendant qu’un confeillér-auditeur rapporte un comp- te. Voyez EVANGILE 6 EVANGÉLISER. (4) EVANGILE , f. m. (Théol.) du grec tvayyiauor, heureufe nouvelle, C’eft le nom que les Chrétiens don- nent aux livres canoniques du nouveau T'eftament, qui contiennent lhiftoire de la vie, des miracles, de la mort, de la réfurreétion & de la doétrine de Jefus- Chrift, qui a apporté aux hommes l'hezreufe nou velle de leur réconciliation avec Dieu. Les éplifes greque & latine, & les ociètés pro- teftantes ne reconnoiflent que quatre évangrles cano- niques ; favoir ceux de, Matthieu, de S. Marc, de S. Euc, & de S. Jean. | S. Matthieu écrivit le premier l’épangile vers l'an Fa < x Lu 114 E V À 41 de l'ere chrétienne, en hébreu ou en fyriaque , qui étoit fa langue vulgaire alors «en ufage dans la Paleftine : on croit que ce fut à la priere.des Juifs nouvellement convertis à la fo. S. Epiphane ajoûte que ce fut par un ordre particulier des apôtres. Le texte original de S. Matthieu fut traduit en grec de très-bonne heure. Quelques auteurs eccléfaftiques attribuent cette verfion à S. Jacques, d’autres à S. Jean: ce qu'il y a de certain , c’eft qu’elle eft très ancienne. La verfion latine ne l’eft guere moins ; elle eft exaûte & fidele, mais le nom de fon auteur eft inconnu. Le texte hébreu fe confervoit encore du tems de S. Epiphane &c de S. Jérôme, & quelques favans ont prétendu qu'il s’eft confervé parmi les Syriens ; cependant en comparant le fyriaque qui fubfifte auoutd’hui , avec le grec, il eft aïfé de fe convaincre que le premier nef qu’une traduétion de celui-ci, comme le prouve M. Mille dans fes prole- gornenes, pag. 1237 & fuiv. m'a Quelques-uns ont conjeéturé que S. Maïc écrivit fon évanpile en latin, parce qu’il le compofa à Rome fur ce qu'il avoit appris de $. Pierre, & pour fatis- faire aux defirs des Chrétiens de cette Eglife: ce fut vers l'an 44 de Jefus-Chrift. Cependant S: Auguftin & 5. Jérôme atteftent que tous les évangiles, à l’ex: ception de celui de S. Matthieu , avoient été écrits primitivement en grec; & d’ailleurs du tems de S: Marc la langue greque n’étoit pas moins familiere à Rome que la latine. Aurefte la difpute feroit bientôt terminée, sl étoit für que les cahiers de Pévargile dé S. Marc qu’on conferve à Prague, & l’évangile entier de cet apôtre, qu’on garde précieufement à Venife, font l'original écrit de la main de S. Marc ; car le P, dom Bernard dé Montfaucon, dans le jour: nal de fon voyage d'Italie, chap. jv. pag. 35 6 [uiv. attefte qu'après avoir foigneufement examiné ce der- nier manu{crit , 1l a reconnu qu’il étoit écrit en ca- raëteres latins. Au refte, comme ce n’eft qu’en 1355 que l’empereur Charles IV. ayant trouvé à Aqulée Poriginal de S. Marc écrit, difoit-on, de fa main, en fépt cahiers, 1l en détacha deux qu’il envoya à Pra- gue ; & que l’original de Venife n’eft confervé dans cette république que depuis l’an 1420, ainfi que M. Fontanimi la prouvé dans une lettre au P. de Mont- faucon, inférée dans le même journal, ces prétendus originaux ne décident rien contre l’antiquité & Pau- thenticité du texte grec, reconnue & atteftée par les anciens peres, | ; S. Luc étoit originaire d’Antioche ( où il fut con- verti par S. Paul), & par-là dès l'enfance exercé à parler & à écrire engrec, quele regne des Séleucides avoit rendu la langue dominante dans fa patrie. Il s’attacha à S. Paul, qu'il fuivit dans fes voyages ; ce qui a fait penfer à Tertullien que faint Paul étoit le véritable auteur de lévangile qui porte le nom de S. Euc ; & à faint Grégoire de Nazianze, que faint Luc lécrivit, fe confiant fur le fecours de S. Paul. D’au- tres ont prétendu qu'il lécrivit fous la dire&tion de S. Pierre, Mais on n’a aucune preuve poftive de toutes ces affertions ; & S. Luc n’infinue nulle part que ces apôtres l’ayént porté à écrire , ni qu'ils Lui ayent diété fon évangile. Eftius & Grotius croyent que S. Luc écrivit fon évangile vers l’an 63 de J. C. Fopinion fa plus fivie & la mieux appuyée, eft qu’il écrivit en grec en faveur des églifes de Macédoine & d’Achaie, vers la 53° année de l’ere chrétienne. Son ftyle eft plus pur & plus correét que celui des autres évangeliftes, quoiqu’on y rencontre des tours de phrafe qui tiennent du fyriaque fa langue mater- nelle, &c même du génie de la langue latine, fi l’on en croit Grotius dans fes prolégomenes fur cet évan- gélifte. Les critiques ne font pas d'accord fur l’année pré- gife ni fur le lieu où faint Jean compofa fon évargile, Plufieurs ont avancé que ce fut à Ephefé, après fon retour d’exil dans Pile de Pathmos , une des Spora- _des dans la mer Egée : d’autres foûtiennent que ce fut à Pathmos même, Plufieurs manufcrits grecs por tent qu’il Pécrivit trente-deux ans après lAfcenfion de Jefus-Chrift ; d’autres lifent trente, & d’autres lient trente-un ans : les uns en fixent l'époque fous empire de Domitien , les autres fous celui de Tra- jan. L’oprmion la plus commune eft que l’évangile de S. Jean fut écrit après fon retour de Pathmos, vers l’an 98 de Jefus-Chrift , la premiere année de Tra- jan , foixante-cinq ans après l’Afcenfion du Sauveur, & que Pévangélifte étoit alors âgé d’environ quatre- Vingts-quinze ans. Quoi qu'il en foit, aux inftances de fes difciples, des évêques &c des églifes d’Afe, il fe déterminaà écrire fon éyangile, pour loppofer aux héréfies naïffantes de Cerinthe & d'Ebion , qui moient la divinité du Verbe ; à l’incrédulité des Juifs , & aux idées des Platoniciens & des Stoïciens: quoique M. le Clerc & d’autres modernes croyent qu'il avoit emprunté de Platon ce qu'il dit du Verbe divin ; mais fa doûtrine fur ce point eft bien diffé= tente de celle des Platoniciens, Foyez PLATON:- CIENS. S. Jean àvoïit écrit fon évangile en grec, & on le confervoit encore en original dans l’éslife d’Ephefe au feptieme fiécle, au moins au quatrieme , ainfi que Pattefte Pierre d'Alexandrie. Les Hébreux le tradui: firent bientôt én hébreu, c’eft-à -dire en fyriaque, & la verfion latine remonte auffi jufqu’à l’antiquité la plus reculée. La canonicité de ces quatre éyanpiles eft démon: trée par le foin & la vigilance avec lefquelles les églifes apoftoliques en ont confervé des exemplaires originaux ou des copies authentiques ; par les déci- fions de différens conciles, & notamment de celui de Trente; par le concours unanimie des peres & des auteurs eccléfaftiques, à n’en point reconnoître d’au- tres ; &c enfin par la confeflion mêmie des feétes fépa: rées de lEglife romaine, Les Sociniens même les re: connoiflent , quoiqu'ils tentent d’en altérer le fens par des interprétations arbitraires & forcées. Voyez SO CINIENS. Les hérétiquies, fur-tout dans les tems les plus re- cules , ne fe font pas contentés de rejetter tous ou quelques-uns de ces évangiles, où fe trouvoit la réfu- tation de leurs erreurs ; mais ils en ont encore fuppoé dé faux & d’apocryphes.,, qui fuffent favorables à leuts prétentions. Au catalogue de ces évangiles apo- cryphes, nous joindrons fur chacun d’eux une ob{er- vation abregée, mais fuffifante pour en donner une idée au commun des lecteurs. Entre cés évangiles apocryphes & fans autorité ; dont les uns font venus jufqu’à nous, & les autres font entierement perdus, on compte: 1°, L’évangile felon les Hébreux. 2°. L’évangile felon les Nazaréens, 3°. L’évangile des douze Apôtres. 4°. L’évangile de S. Pierre, Les critiques conjeéturent qui ces quatre éversgi les ne font que le même fous différens titres, c’eft- à-dire l'évargile de S. Matthieu, qui fut corrompu de bonne-heure par les Nazaréens hérétiques ; ce qui porta les Catholiques à abandonner aufli de bonne- heure l’original hébreu ou fyriaque de S. Matthieu, pour s’en tenir à la verfion greque, qu’on regardoit comme moins fufpete , ou moins fufceptible de fal. fification. 5°. L’évangile felon les Egyptiens. 6°. L’évangile de la naïffance de la fainte Vier- ge: on l’aen latin 7°. L’évangile de S. Jacques ; qu’on a en grec & en latin, fous le titre de proréyangile de S, Jacques, -8°, L'évangile de l'enfance de Jefus : on l’a en grec & en arabe. 9° Lpege de S. Thomas: c’eft le même que le précédent. Lo. L’évangile de Nicodème : on l’a en latin. 11°, L’évangile éternel. 12°. L'évengile de S. André. 13°. L’évangile de S. Barthelemi, 14°. L’évangile d’Apellés. 15°. L’évangile de Bafilide. 16°, L’évangile de Cérinthe. 17°. L’évangile des Ebionites. U 18°. L’évangile des Encratites, ou de Tatien. 19°. L’évangile d'Eve. 20°, L'évangile des Gnoftiques. 21°. L'éyangile de S. Marcion : c’eft le même que celui qui eff attribué à S. Paul. | 22°. L'évangile de S, Paul : le même que celui de Marcion. 23°. Les petites & les grandes interrogations de Marie. ; 24°. Le livre de la naïflance de Jefus, qu'on croit avoir été le même que le protévangile de $. Jacques. 25°. L’évangile de S. Jean, autrement le hvre du trépas de [a faite Vierge. 26°. L'évangile de S. Mathias. 27°. L’évangile de la perfe&tion. 28°. L’évangile des Simoniens. 29°. L’évangile felon les Syriens. . 30°. L’évangilefelon Tatien : le même que celui des Encratites. Voyez ENCRATITES. 31°. L’evangile de Thadée , ou de S. Jude. 32°. L'évangile de Valentin: c’eft le même que Pévangile de la vérité. y Re 33°. L’évangile de vie, ou l’évangile du Dieu vi- yant. 34°. L’évangile de S. Philippe. 35. L’évangile deS. Barnabé. 36°. L’évangile de S. Jacques le majeur. 37°: L’évangile de Judas d'Ifcariote. 33°. L’évangile de la vérité, qui eft le même que celui de Valentin. 39°. Les faux évangiles de Leucius , de Seleucus, de Lucianus, d'Hefychius. Tel eff le catalogue des évangiles apocryphes, que M. Fabricius nous a donné dans fon ouvrage intitulé codex apocryphus novi Teffamenti, I] s’agit maintenant d’en tracer une notice abrégée d’après ce favant écri- vain & d’après le P.Calmet, dans fa differtation {ur les évangiles apocryphes. 1°. Les quatre premiers évangiles apocryphes, fa- voir l’évangile felon les Hébreux , Vévangile des Naza- réens l’évangile des douye apôtres , & l'évangile de'S. Pierre, paroïflent n’avoir été que l’évargile même de S. Matthieu; mais altéré par diverfes particularités qu'y avoient inferé les chrétiens hébraïians, & qu'ils difoient avoir apprifes de la bouche des apôtres , ou des premiers fideles. Les Ebionites le corrompirent encore par des additions & des retranchemens favo- tables à leurs erreurs. Dès le tems d’Origene , cet éyangile ainfiinterpolé ne pafloit plus pour authenti- que, 8 Eufebe le compte pagmi les ouvrages fuppo- fés. Quelques peres en ont cité des paflages, qui ne fe trouvent ni dans le texte grec de S. Matthieu , ni dans le latin de la vulgate: par exemple, S, Jérôme fur l’épitre aux Ephéfiens, en rapporte cette fenten- ce; Ne foyez jamais dans la joie, finon lorfque vous voyez votre frere dans la charité : S. Clément d’Alexan- drie (Ssromar. lib. I.) en cite ces paroles Ce/ui qui admirera regnera, & celui qui regnera fe repofera. Ori- gene fur S. Jean fait dire à Jefus-Chrift, fuivant Lé- vangile des Hébreux: Ma mere, le S. Efpric ma pris par un de mes cheveux, € m'a tranfporté fur La hate montagne du Thabor, S, Jérôme, 4, LIT, contre Pe- Tome FI, E V A 115 lage, cz. 7, rapporte qu’on lifoit dans le même év47- gile , que la mere de Jefus & fes freres lui difoient : Voila Jean qui baptife pour la rémiffion des péchés, al. dons nous faire baptifer par lui. Mais Jefus leur répon- dit: Quel mal ai-je fair pour me faire baptifèr par lui ? Ji ce eff que cela même que je Viens de dire ne foit un péché d'ignorance. D, Calmet rapporte encore dans le corps de fon commentaire , un aflez bon nombre d’autres paffages tirés de cet évangile , que les chré- tiens hébraïfans nommoient auf l'évangile des apô- tres ; prétendant l’avoit recû du collége des apôtres. On l’appelloit auf lévangile des Nazaréens , parce qu'il étoit entre les mains des premiers Chrétiens nommés Mazaréens , de Nazareth, patrie de J. C. Ce nom qui n'avoit d’abord rien d’injurieux, le devint enfuite parmi les Chrétiens mêmes, qui lapplique- rent à une fete opiniâtrément attachée aux cérémo- nies de la loi , qu’elle croyoit abfolument néceffaires au falut, L’évangile de S. Pierre étoit à l’ufage des Docetes, hérétiques du ÿj. fiecle, qui prétendoient que Jefus-Chrift n’étoit né, n’avoit fouffert, & n’é- toit mort qu’en apparence. Voyez DOCETES € Na- ZARÉENS. Quelques peres font aufi mention d’un Ouvrage adopté par Héracléon ami de Valentin, & intitulé Za prédication de S. Pierre, qui paroît avoir été le même que l’évangile de S. Pierre. ILne nous refte des quatre évangiles dont nous venons de parler, que des fragmens cités par les peres & les interpretes. Le corps de ces ouvrages ne fubfite plus depuis très- long tems. Îl. L'évangile felon les Egyptiens pafle pour le plus an. cien des évangiles purement apocryphes, Son exif- tence eft atteftée par S. Clément pape, ep. ÿ. 12. S. Clément d'Alexandrie, ffromar. lib. III. Saint Epi- phane , heref. 62. Saint Jérôme , proæm, ir March. êt d’autres écrivains eccléfaftiques. M. Grabe juge qu'il fut écrit par les chrétiens d'Egypte, avant que S. Luc eût écrit le fien ; & qu'il a en vûe l'ouvrage des Egyptiens, lorfqu’à la tête de fon évangile il dit, que plufieurs avant lui avoient tenté d'écrire l’hif- toire des commencemens du Chriftianifme. M. Mille prétend qu’il a été compofé en faveur des Effeniens qui, {elon lui , furent les premiers & les plus parfaits chrétiens de l'Egypte. Quoi qu'il en foit, voici quel- ques traits finguliers de cet ouvrage. S. Clément pa- pe cite de cet évangile ; qu’un certain homme ayant demande à Jefus-Chrift quand le monde devoit finir, le Sauveur lui répondit : Lorfque deux ne féront qu'un, quand ce qui ef? au-dehors fèra au-dedans , & lorfque l’homme € la femme ne feront ri mâle n1 femelle. S. Clé. ment d'Alexandrie ajoûte , @ lorfque vous foulerez aux piés les habits de votre nudité, Au rapport de ce dernier auteur (féromar. Lib. III.) on lifoit dans le même épangile, que Salomé ayant demandé à Jefus- Chrift : Jufqu’a quand les hommes mourront-ils ? Jefus lui répondit : Tant que vous autres femmes’ Produirez des enfans. J'ai donc bien fait de n'avoir point d’enfans, repliqua Salomé ? Maïs le Sauveur lui dit: Nourrife Jéx-vous de toutes fRrees d’herbes | à l'exception de celle qui eft amere. Clément d'Alexandrie en cite encore ces paroles : Je fuis venu pour détruire les œuvres de le femme , c'eft-à-dire Pamour &c la génération. Maxi- mes dont les hérétiques des premiers tems, ennemis du mariage, & livrés aux excès les plus dénaturés , ne manquoient pas d’abufer. Cet évangile eft abfolu- ment perdu, à l’exception des fragmens qu'on vient . de lire. IT. L’évangile de la naiffance de La Vierge. On en connoït jufqu'à trois ; & nous en avons encore deux entiers. Le principal eft le prorévangile attribué à S. Jacques le mineur, évêque de Jérufalem. On l'a en grec & en latin. Le fecond eff l’évargile de la nativi. té de la Vierge, qu'on a en latin, & qui n’eft qu’un abrégé du prorévangile, Le troifieme Le fe trouve 1 116 E V À plus. Maïs S. Epiphane (keref. 26. 7.12.) en citeun trait fabuleux 8 très-remarquable : c’eft que Zacha- rie pere de Jean-Baptifte, étant dans le temple où 11 offroit l’encens, vit un homme qui fe préfenta devant lui avec la forme d’un âne, Etant forti du temple, il s’écria: Malheureux que vous êtes, qu'efi-ce que vous adore; ! Mais la figure qu'il avoit vüe lui ferma la bouche, & l’empêcna d’en dire davantage, Après la naiffance de Jean-Baptifte, Zacharie ayant recouvré Pufage de la parole, publia cette vifion; & les Juifs pour l'en punir, le firent mourir dans le temple. C'eft peut-être une pareille rêverie qui a fait penfer à quelques payens, que les Juifs adoroient une tête d'âne; comme le rapporte Tacite, L6. F. hifi. Voy. cetteconjetlure développée par M. Morin, qui cite le trait rapporté par S. Epiphane, dans les wémoires de l’acad. des Tnfcriptions , tom. I. pag. 142. & Juiv. Au refte, ces faux évangiles dont le prorévangile pa- roit être l'original, font très-anciens, puifqu’ils font cités comme apocryphes par les peres des premiers fiecles , & que Tertullien & Origene y font quel- queiois alluñon. | IV. L’évangile de l'enfance de Jefus a été fort con- nu des anciens. C’eft un recueil des nuracles qu'on fuppofe opérés par Jefus-Chrift depuis fa plustendre enfance, dans fon voyage en Egypte, & après fon retour à Nazareth jufqu’à l’âge de douze ans. Nous lavons en arabe, avec une verfion latine d'Henri Sikius. M. Cotelier en a aufli donné un fragment en grec, Voici queiques échantillons des fables & des abfurdités que contient ce faux évangile. On y rap- poire la naiflance de Jefus-Chrift, avec ces circonf- tances : que Jofeph ayant couru à 'Bethléem chercher une fage femme, & étant revenu avec elle à la ca- verne où Marie s’étoit retirée, 1l la trouva accou- chée, & l’enfant enveloppé de langes& couché dans la crêche: que la fage-femme, qui étoit lépreufe, ayant touché l’enfant , fut aufhi-tôt guérie de la lé- pre: que l'enfant fut circoncis dans la caverne, & {on prépuce confervé par la même femme dans un vafe d'albâtre, avec des onguens précieux; & que c'eft ce même vale qui fut acheté par Marie la Pé- cheretle , qui oignit les piés du Sauveur, On ajoûte que Jeius fut préfenté au temple, accompagné d’an- ges qui l’environnoient comme autant de gardes : que les mages étant venus à Bethléem, fuivant la prédiétion de Zoroaftre , Marie leur donna une des bandes , avec lefquelles elle enveloppoit Le petit Je- fus ; & que cette bande ayant été jetrée dans Le feu, en fut tirée entiere & fans avoir été endommagée. Suivent la fuite de la fainte famille & fon féjour en Egypte. Ce féjour dure trois ans, & eft fignalé par une foule de miracles qui ne font écrits nulle part ailleurs ; tels que ceux-ci: une jeune époufée qui étoit devenue muette, recouvra la parole en embraf. fant le petit Jefus : un jeune homme changé en mu- let, reprit {a premiere forme: deux voleurs nommés Titus & Dumacus, ayant laïffé pafler Jofeph 8 Ma- rie fans leur faire de mal, JefugChrift leur prédit que l’un & l’autre feroit attaché en croix avec lui. De retour à Bethléem , il opere bien d’autres prodi- ges. Deux époufes d’un même mari ayoïient chacune une enfant malade : l’une s’adrefla à Marie, en ob- tint une bandelette de Jefus, l’appliqua fur fon fils, & le guérit. L'enfant de fa rivale mourut : grande jaloufe entre elles. La mere de l'enfant mort jette le fils de autre dans un four chaud ; mais il n’en reflent aucun mal : elle le précipite enfuite dans un puits, & on l’en retire fain &t fauf. Quelques jours après, cette mégere tombe elle-même dans ce puits, & y périt. Une femme avoit un enfant nommé Judas, poflédé du démon; c’eft Judas Ifcariote : on l’appor- ta près de Jefus, à qui le poffédé mordit le côté, & fut guéri; c’eft ce même côté qui fut percé de la lan- E V A ce à la paffion. Un jour, des enfans jouant avec Je- fus, faloient de petits animaux d’argile ou de terre : Jefus en faifoit comme eux ; mais il les animoit, en- forte qu'ils marchoïent, bûüvoient, & mangeoient. Ce miracle eft rapporté dans l'alcoran , fra 3. € 3. & dans le livre intitulé so/dos Jefu. Jofeph alloit avec Jefus par les maïfons de la ville , travaillant de fon métier de charpentier ou menuifier; tout ce qui fe trouvoit trop long ou trop court, Jefus Paccourcif- foit ou l’allongeoit fuivant le befoin, Jefus s'étant mêlé avec des enfans qui jouoient, les changea en boucs, puis les remit en leur premier état. Un jour de fabbat Jefus fit une petite fonraine avec de la ter- re, & mit fur fes bords douze petits momeaux de même matiere. On avertit Ananie que Jefus violoit le fabbat ; il accourut, & vit avec étonnement que les petits moineaux de terre s’envoloient. Le fils d’A- name ayant voulu détruire la fontaine, l’eau difpa- tut, 6c Jefus lui dit que fa vie difparoïroit de même : aufh-tôt 1l fécha & mourut. On y raconte encore qu'un maître d'école de Jérufalem ayant fouhaité d'avoir Jefus pour difciple ; Jefus lui fit divertes queftions qui l’'embarrafferent, & luiprouverent que fon difciple en favoit infiniment plus que lui : enfuite Jefus récita feul l'alphabet ; le maître interdit l'ayant voulu frapper, fa main devint aride, & il mourut{ur lechamp. Enfin Jefus âgé de douze ans,paroît au tem- ple au milieu des doéteurs, qu’il étonna par fes quef- tions & fes répon{es, non-feulement fur la loi, mais encore fur la Philofophie, l'Aftronomie, & fur tou- tes fortes de fciences. Jofeph.8z Marie le ramenenir à Nazareth, où il demeure jufqu'’à l’âge de trente ans, cachant fes miracles êc étudiant la loi. Teleft le pré- cis des principales chofes contenues dans le texte arabe, traduit par Sikius. Le fragment grec traduit par M. Cotelier , differe uu peu quant à l'ordre des miracles & quant aux circonftancés:; mais il renfer- me encore plus d'impertinences, &c des contes plus ridicules. : V. L’évangile de Nicodème n’a pas été connu des anciens, pas même de Paul Orofe & de Grégoire de Tours, qui ne le citent jamais fous ce titre, quoi- qu'ils citent les adfes de Pilate, avec lefquels l’éver- gile de Nicodème a beaucoup de conformité. De-là M.Fabricius, de apocryph. nov. Teflam. p.213. con- jedture avec beauconp de vraïflemblance, que ce _ font les Anglois qui ont forgé lévangile de Nicodème tel que nous Pavons, fur-tout depuis qu’ils ont voulu faire paffer Nicodème pour leur premier apôtre. En effet le latin dans lequel cet ouvrage eft écrit eft très- barbare, & de la plus baffe latinité, Il rapporte toute lhiftoire du procès, de la condamnation, de la mort &c de la réfurreétion de Jefus-Chrift, avec mille cir- conftances fabuleufes ; & il finit par ces termes: 4x nom de la très-fainte Trinité ; fin du récit des chofes qui ont été faites par notre Sauveur Jefus-Chriff, & qui a éré trouvé par le grand Théodofe empereur, dans le pré- toire de Pilate , 6 dans les écrits publics, Fair l'an xjx de Tibere , Le xviy. d'Hérode roi de Galilée, Le 8. des ca lendes d'Avril, le 23. Mars de la ccij. olympiade, fous des princes des Juifs, Anne € Caïphe, Tour cela à été écrit en hébreu par Nicodème. VI. L’évangile éternel eft encore plus moderne: c’eft la produétion d’un religieux mendiant du xuj. fiecle ; elle fut condamnée par Alexandre IV, & brû. lée, mais fecretement, de peur de caufer du fcandale aux freres. Cet auteur qui avoit tiré {on titre de l’a- pocalypfe, où il eft dit, chap. xjv. 6, qu'un ange porte Pévanpile éternel & le publie dans toute la terre & à tous les peuples du monde, prétendoit que lé- vangile de Jetus-Chrift , tel que nous avons, feroit aboli ou du moins abregé , comme la loi de Moyfe l’a êté par l’évengile, quant à {es cérémonies & à fes lois judicielles. L VII. L'évangile de S. André n’eft connu que par le decret du pape Gélafe, qui l’a relegué parnu les livres apocryphes. VII, L’évangile de S. Barthelemi fut auffi condam- né par le pape Gélafe. Saint Jérôme &c Bede en font mention. D. Calmet penfe que ce n’étoit autre chole que l’évangile de S. Matthieu, qui, felon Eufebe & uelques autres, avoit été porté dans les Indes par . Barthelemi, où Pantænus le trouva & le rapporta à Alexandrie. Mais fi c’eût été l’évargile pur & non altéré de S. Matthieu, le pape Gélafe l’auroit-l con- damne ? .… IX. L’évangile d'Apellés eft connu dans Saint Jérô- me & dans Bede, non comme un évangile nouveau, compofé exprès par cet héréfiarque, mais, comme quelqu'un des anciens évangiles qu'il avoit corrompu à fa fantaifie, pour foûtenir & accréditer fes erreurs. X. L’évangile de Bafilide étoit en effet un ouvra- ge compofé par ce chef de feûte, & intitulé de la {orte par un homme qui propofoit fans détour fes vifons êc fes erreurs, fans vouloir les metire à l'abri de quelque grand nom, comme failoient les autres hérétiques, qui fuppoloient des évangiles fous le nom des apôtres. M. Fabricius conjecture que cet évargile de Bafilide n’étoit autre chofe qu’une efpece de com- mentaire fait par cet héréfiarque fur les quatre évaz- grles, & diftribué en vingt-quatre livres, dont on a quelques fragmens dans le fpicilége de M. Grabe. Bafilide te vantoit d’avoir appris fa doétrine de Glau- cias interprete de S. Pierre, & la donnoit par con- féquent avec confiance comme la doëtrine même du chef des apôtres. | XI. L’évangile de Cérinthe eft, felon S. Epiphane, Rare. 51. un de ceux qui avoient été écrits par les premiers chrétiens avant que Saint Luc écrivit le fien. Le même pere femble dire ailleurs, que Cérin- the fe tervoit de l’évangile de S. Matthieu, altéré fans doute relativement à {es erreurs. Et dans un autre endroit, il rapporte que les Alopiens attribuoient à ce novateur l’évangile de S. Jean. Mais l'erreur étoit eroffiere, puifque S. Jean n’écrivit fon évargile que pour combattre l’hérefie de Cérinthe. Il ne nous refte plus rien de l'évangile de ce dernier, Voyez ALOGIENS. ” XII. L'évangile des Ebionites étoit l’évangile de S. Matthieu, auf altéré en plufeurs endroits, pour favorifer leur dogme contraire à la divinité de J. C. par exemple celui-ci, qu'après avoir été baptifé par Jean-Baptifte, Jefus-Chrift étant forti de l’eau, Le faint-Efprit parut fur lui &c entra en lui fous la for- me d’une colombe ; alors on ouit une voix du ciel qui difoit : Vous étes mon fils bien-aimé, en qui j'ai mis na complaifance : & encore, Je vous ai engendré au- jourd’hui. I] nous refte encore quelques autres frag- mens peu confidérables de cet évangile, cités pars. Epiphane, hæref. 30. chap. xv, n°. 16 & 21, Voyez EBIONITES. XIU. L'évangile des Encratites n’étoit que les quatre évangiles fondus en un feul par Tatien; & {elon Théodoret, hæretic. fabul. lib. I. cap. xx. les catholiques des provinces de Syrie & de Cilicie s’en lervoient aufh bien que les Encratites. Au refte il 'étoit pas reconnu pat l’Eglife pour authentique. Voyez ENCRATITES. XIV, L’évangile d'Eye étoit en ufage parmi les Gnoftiques , "8& contenoit beaucoup ,d’obfcénités, dont on peut voir le détail dans S. Epiphane , keref. 26, n. 2. 3. 4. 8. 8 11. Voyez GNOSTIQUES. XV. L'évangile des Gnoftiques étoit moins un li- vre particulier, qu’une colleétion de tous les évar- giles faux & erronnés, compolés avant eux ou par eux-mêmes : tels que les évangiles d'Eve, de Valen- tin, d'Apellés, de Bafilide, de l'enfance de Jefus , êtC. | E V A 117 XVI. L’évangile de Marcion n’étoit que l’évangile de S. Luc, tronqué & altéré fuvant la fantaifie de Marcion & de fes fe&tateurs. On a des exemples de ces altérations dans Tertullien, dans S. Epiphane ; & D. Calmet les a remarquées exa@ement dans fon commentaire fur les évangiles, Poy. MARCIONITES. XVII, L’évangile de $. Paul eft moins un livre réel & apocryphe, qu'une falfification de titre de la façon des Marcionites , qui attribuoiest à fäint Paul l’évangile de S. Luc. L'erreur an tefte eût été s : | peu importante, s'ils n’euflent corrompu dans des matieres eflentielles l’évarzgile même de S. Luc, le feul qu'ils admettoient ,. mais défiguré à leur ma- mere. X VII. Les {nterrogations de Marie, Les Gaoftiques avoient deux livres de ce nom; lun intitulé , Zs grandes Interrogations de Marie, l’autre, es petites Interrogations de Marie, Ces deux ouvrages étoient également .un tiflu d'infamies écrites par cés fanati. ques, dont le culte confiftoit principalement en im- puretés monftrueufes. XIX. Le livre de la Naïffance du Sauveur étoit un ouvrage apocryphe que le pape Gélafe condamna fous un même titre , avec celui de Za Vierge & de la S'age - femme. Dom Calmet conjetture que c’étoit à- peu-près le même que le protévangile dè S. Jacques , où l’on raconte la naïffance du Sauveur, & Pépreu- ve que la Sage-femme voulut faire de Pintégrité de Marie apres l’enfantement. XX. L’Ævanpgile de S. Jean, ou Le livre du trépas de la Vierge, eft condamné dans le decret de Gelafe 8 {e trouve encore engrec dans quelques bibliotheques: quelques manufcrits l’attribuent à S. Jacques , frere du Seigneur , & d’autres à S. Jean l’'Evangélifte. XXI. L’ÆEvangile de $. Mathias eft connu par les _peres, qui n’en. ont cité que le nom: on a aufh des actes apocryphes de S, Mathias, & des traditions ou maximes qu'on croit extraites du faux évangile qui couroit autrefois fous le nom de cet apôtre, & dont plufeurs anciens hérétiques , entr’autres les Carpo- cratiens, abufoient pour autorifer leurs erreurs. 7. CARPOCRATIENS. XXII. L’Evanpile de la perfettion ; ouvrage obfce- ne , produétion des Gnoftiques , qui avoient le front de fe donner ce nom , qui à la lettre figniñie un 4em- me parfait , quoiqu'ils fuflent , par leurs dérégle- mens , les plus abominables de tous les hommes. XXII. L’Evanpgile des Simoniens , ou des difciples de Simon le Magicien, étoit diftribué en quatre li- vres où tomes remplis d'erreurs & d’extravagances imaginées par ces hérétiques qui combattoient'la création, la providence, le mariage, la génération, la loi, & les prophetes. C’eft tout ce qu’on en fait par les conftitutions apoftoliques , Ziv. VE. ch, xviÿ, ë&c par la préface des canons arabiques du concile de Nicée, rome IL. concil. pag. 386. Voyez SIMONIENS, XXIV.L'Evanpgile felon les S'yriens, dont l’exiften- ce a cté atteftée par S. Jérôme & par Eufebe, étoit probablement le même que l’évangrle des Nazaréens , ou l’évangile hébreu de S. Matthieu, dont fe fervoient les Chrétiens de Syrie & des provinces voifines ; &€ nous avons déjà remarqué que ces deux évargiles n°e- toient pas entierement purs & fans altération. XXV. L’Evangile de Tatien étoit une efpece de concorde des quatre évangiles. Tatien, qui, après avoir.été difciple de S. Juftin ; étoit tombé dans l’er- reur, avoit retranché les généalogies & tout ce qui prouvoit que Jefus-Chrift étoit né de la race de Da- vid felon la chair: cette alrérationne fe trouvant pas dans l'harmonie ou concorde qui porte le nom. de Tatien, dans les bibhotheques des peres, montre que ce n’eft point le véritable évazgrle de Tatien, mais l'harmonie d'Ammonius d'Alexandrie, Tatien 118 E V A écrivit {on évangile en grec, & il eft perdu, Théodo: . ‘xet en parle hæreric. fabular. Hb. I c. xx. XXVI. L’Evangile de Thadée où de S. Jude, fe trouve condamné dans le decret du pape Gelafe : M. Fabricius douté qu'il ait jamais ne ; & l’on n’en connoît aucun exemplaire. XXVII. L’Evanpile de Valentin où des Valenti- niens , qui l’appelloient auffi l’évangile de vérité, étoit un recueil de tous leurs dogmes, ou plütôt de leurs impertinences. Voici comme 1l débutoit : ?ame, ou la penfée, d’une grandeur indeffruëlible, ou mdéfe&ti- ble par fon élévation, foxhaice le falut aux indeflruc- ibles qui font parmi les prudens , les pfychiques, ou les animaux , es charnels & les mondaïns : Je vais vous parler de chofès ineffables, fecretes, & qui font élevees au-deffus des cieux qui ne peuvent être entendues nt par Les principattés | ni par les puiffances , ni par les fujets, ni par aucuns autres que par l’entendement n- muable , &c. Tout le refte étoit du même ton em- phatique. S. Epiphane nous a détaillé les rêveries des Valentiniens , Aæref. 31. leur chef prétendoit te- nir {a doûrine de Theudas, ami de S, Paul. Voyez VALENTINIENS. XXVIIL L’Evangile de vie ou l’évangile vivant, étoit à l’ufage des Manichéens , fur le témoignage de Photius , cod. 85. Voyez MANICHÉENS. XXIX. L’Evanpgile de S, Philippe: les Manichéens s’en fervoient encore. Les Gnoftiques en avoient auf un fous le même titre. S. Epiphane , keref: 26. n°, 13. en rapporte ce fragment, où l’on entrevoit es abominations de ces hérétiques: Ze Seigneur m'a découvert ce que l’ame devoit dire lorfqu’elle feroit arri- yée dans Le ciel, & ce quelle devoit répondre à chacune des vertus célefles. Je me fuis reconnue & recueillie ; & jen ai pointengendré d'enfans au prince de ce monde , au démon ; mais j'ai extirpé fes racines : j'ai réuni les mem- Pres enfemble : je connois qui vous êtes , étant moi-rné- 7ne du nombre des chofes célefles ; ayant dit ces chofes , on la laiffe paffer: que Jt elle a engendré des enfans , on La retient jufqu’a ce que fes enfans foient revenus a elle, € quelle Les ait retirés des corps qu'ils animent fur la terre. Voyez GNOSTIQUES. XXX. L’'Evangile de S. Barnabé, Tout ce qu’on en fait, c’eft qu'un ouvrage compôfé fous ce titre, ap- paremment par des hérétiques , eft mis au nombre des livres apocryphes , & condamné comme tel par le pape Gelafe. XXXI. L’Evangile de S. Jacques le Majeur. I fut, dit-on, découvert en Efpagne, en 1595, fur une montagne du royaume de Grenade, avec dix-huit livres écrits fur des plaques de plomb, dont quel- ques-unes étoient de cet apôtre ; entre autres une mefle des apôtres avec fon cérémoniel , & une hif- toire évangélique. Le pape Innocent XI, condamna tous ces faux écrits en 1682. XXXII. L’Evangile de Judas Iftariote avoit été compofé par les Cainites, pour foütenir leurs impié- tés. Ils reconnoifloient un premier principe , ou une vertu fupérieure à celle du créateur, &t difoient que Cain, les Sodomites, Coré, & Judas Ifcariote lui- même, qui {eul entre les apôtres avoit connu ce myftere d’iniquité , avoient combattu en faveur de ce premier principe, contre la vertu du créateur. On voit qu'ils n’étoient pas délicats fur le choix de leurs patriarches. Ce faux évangile, dont les anciens ont beaucoup parlé , eft abfolument perdu. 7oye CAÏNITES. XXXIIL L’Evangile de La vérité , eft le même que: celui de Valentin ou de fes difciples , dont nous avons parlé plus haut. XXXIV. Les faux Evangiles de Leucius, Lucianus, Seleucus, & Hezychius ; font ou de fimples corrup- tions des vrais évangiles, où quelques-uns des évar- giles apocryphes dont nous venons de rendre com- pte. M. Grabe, dans fes notes fur S. Irénée, Zv. I. Chapitre xvij. dit qu'il a trouvé dans la bibliothe- que du collése de Chrift, à Oxford, un exemplai- re du faux évangile de Lucius; & il en rapporte un fragment , qui contient l’hiftoire du maitre d’écoler de Jérufalem, narrée dans l’évergile de l’enfance de Jefus. Voyez ci-deflus, arsicle IV. Nous ne pouvons mieux terminer ce détail em- prunté & abrégé de la diflertation de Dom Calmet, fur les évangiles apocryphes, que par une réflexion qui eft toute à l'avantage des quatre évangiles que lEglife catholique , & même les feêtes chrétiennes , reconnoïflent pour authentiques. Outre que ceux- ci Ont pour eux le témoignage uniforme &c conftant d’une fociété toûjouts fubfiftante depuis plus de dix - fept fiecles, intéreflée à difcerner & à con- ferver les monumens qui contiennent le dépôt de fa créance & de fa morale, & qu’elle n'a ja- mais manqué de réclamer contrée l’introduétion des faux évanpiles foit en les condamnant & les excluant de fon canon , foit en les combattant par la plume des peres , foit en montrant la nouveauté de leur origi- ne , foit en remarquant les caraéteres dé fuppoñition qu les diftinguent des livres divinement infpirés, {oit enfin en montrant l’oppoñition qui regne entre fa doëtrine & les erreurs des évenpiles apocryphes : il fufiit de jetter de bonne foi les yeux fur les uns & fur les autres, pour fe convaincre que la fageffe & la vérité ont préfidé à la compoftion des livres faints admis par léglife , tandis que les faux évangiles font évidemment l’ouvrage du fanatifme 8 du menfon- ge. Les myfteres contenus dans les évangiles authen- tiques font à la vérité au-deflus de la raïon, mais ils ne font ni extravagans m1 indignes de la majefté de Dieu , comme les rêveries qu’on rencontre dans les évangiles apocryphes. Les miracles racontés par nos évangéliftes ont tous une fin bonne, loïrable , & fainte , & moins encore la fanté des corpsque la fain- teté des ames, la converfon des pécheuts, la mani- feftation de la vérité. Les prodiges imaginés par les falfificateurs ne femblent faits que pour l’oftenta- tion : les circonftances puériles & ridicules dont ils font accompagnés , fufhfent pour les décréditer. En- fin, la doétrine des mœurs eft fi belle, fi pure, f fainte dans les écrits des apôtres, qu’elle eft l’ob- jet de l'admiration de ceux mêmes qui la pratiquent le moins ; & la morale des faux évangéliftes eft marquée au coin de la débauche & de l’infamie. Ce parallele feul fufroit à tout efprit fenfé, pour déci- der, quand nous n’aurions pas d’ailleurs une certitu- de de traditions & de témoignages les plus refpe&ta- bles , pour conftater l’origine & l’authenticité de nos évangiles. (G) | EvANGILE, (Hiff. eccléf.) eft auffi le nom que les Grecs donnent à leur livre d’office , où font conte-. nus , felon l’ordre de leur calendrier & de leur an- née eccléfaftique , les évangiles qu'ils lifent dans leurs églifes , dont le premier eftl'évangile de S. Jean qu'ils lifent de fuite , à la referve de trois jours qu'ils pren- nent d’unautre évangile , 8 ilscommencent cette lec- ture le dimanche de Pâques, lifant ce jour-là : 27 prin- cipio erat verbum , & ainfi de fuite. Ils commencent le lendemain de la Pentecôte l’évangile de S. Mathieu qu'ils continuent , à la referve de quelques jours qu'ils prennent d’un autre évangélifte ; c’eit ce qu’on peut voir traité aflez au long par Allatius, dans fa I, Differtation des livres eccléfiaftiques qui font en ufa- ge chez les Grecs. Chambers, (G) * ÉvaNGiLes, adj. pris fubftantiv. ( Myrkol. ) fêtes que les Ephéfiens célébroient en l’honneur d’un berger qui leur avoit indiqué les carrieres d’où l’on tira les marbres qui furent employés à la conf truétion du temple de Diane; ce berger s’appelloit Pixodore, On changea {on nom en celui de /’Eyar- gélifle; on hui faifoit tous les mois des facrifices ; on alloit en proceffñon à la carriere. On dit que ce fut le combat de deux béliers qui donna lieu à la dé- couverte de Pixodore : l’un de ces deux beliers ayant évité la rencontre de fon adyerfaire, celui-c1 alla fi rudement donner de la tête contre une pointe de rocher qui fortoit de terre, que cette pointe en fut brifée ; le berger ayant confdéré l'éclat du rocher, trouva que c’étoit du marbre, Au refte , on appel- loit ailleurs évangiles ou évangélies, toutes les fêtes qu’on célébroit à l’occafon, de quelque bonne nou- velle : dans ces fêtes, on faifoit des facrifices aux dieux ; on donnoit des repas à fes amis , & l’on réunifloit toutes les fortes de divertiflemens. EvANGILE, (Jurifprud.) dans l’ancien ftyle du pa: lais, fignifioit la vérification que les greffiers font des procès qu'ils reçoivent , pour s’aflürer fi toutes des pieces y font. Le terme d’évangile a été ainfi em- ployé abufvement dans ce fens , pour exprimer une chofe {ur la vérité de laquelle on devoit compter comme fur une parole de l’éergile. L’ordonnance de Charles IX. du mois de Janvier 1575, arr. 4. à la fin, enjoint aux greffiers de donner tous les faces des procès criminels , informations, enquêtes, & autres chofes femblables, aux meflagers , jurés, & reçus au parlement, & ajoûte que pour Pévangrle, lefdits grefiers auront fept fols 6 deniets tournois feule- ment ; & la cour, par {on arrêt de vérification, or- donna que lefdits greffiers ; ou leurs commis, fe- roient tenus de clorre & de corder tout-à-lentour les facs, & les fceller en forte qu'ils ne puiflent être ouverts , dont ils feront payés par les parties, pour les clorre, évangélifer, corder & fceller , à taifon de 6 fols parifis pour chaque procès; ainf d’évangile on a fait évangélifér ; on a auf tiré delà le mot évangélifle, Voyez ci-devant EVANGÉLISER 6 EVANGÉLISTE. (4) EVANOUIR, v. n. (Æ/gebre.) On dit que l’on fait évanoiir une inconnue d’une équation, quand on la fait difparoître de cette équation, en y fubftituant la valeur de cette inconnue. #oyez ÉQUATION. Quand il y a piufieurs inconnues dans un problè- me, une des difficultés de la folution confifte à faire évanoüir les inconnues , qui empêchent de reconnoi- tre la nature & le degré de ce problème. (Æ) Avant que de parler des opérations par lefquelles on fait évanoïir les inconnues, il eft néceflaire de dire un mot de celle par laquelle on fait évanoxir les fra@ions. Rien n’eff plus fimple; on réduit toutes les fra@tions au même dénominateur (voyez FRACTION)); on donne ce même dénominateur aux quantités non fraétionnaires qui peuvent fe trouver dans l’équa- tion, enfuite on fupprimé ce dénominateur, ce qui eft permis, puifque des quantités qui font égales étant divifées par une même, font égales entr’ellés. Par e 2 Ba exemple, foit a+? + ri on aura _—— D æ(c— x? h k(c— ent EtC=f) — ED ,&ahc—ahf+xc— xf+"xt h=kc—Kkf. Voyez RÉDUCTION, CONs- TRUCTION, 6. | Il eft bon auff de dire un mot de l’opérätion par laquelle on fait éyanoir les radicaux, lorfqu'ils ne font que du fecond degré. Par exemple, fi on a a + ÿ/x= x?, on aura x2= ax, & (x? — a)? == x; de’mêmefñionaa+yx= x?+y7y,on aura d’abord (x? — 4 Ly y) 2=x, équation qu'on peut changer en celle-ci (x? —4)?+y +2 Vy ne PT Ne . . (x? — a) er A EE =;y ;j On VOit Évi- demment que par cette méthode on fera difparoïtre à chaque opération au moins un radical, & qu’ainfi on les fera fuccefivement difparoître tous. À Pégard E V À 119 du cas où il y à plufieurs radicaux de différente ef- pece, nous en parlerons plus bas. (0) Cela pofé, fi l’on a deux équations, 8 dans cha cune de ces équations une quantité inconnue d’uné dimenfion , On peut faire évanozir l’une de ces deux inconnues, en faifant une égalité de fes différentes valeurs tirées de chaque équation; par exemple, fi l’on a d’une part.a + x = b+ y, & d’une autre part cx+dy=A48g; de la premiere équation on tirera x =b+y-a, & l’on déduira de la feconde x = Lee , Ce qui donnera cette équation & + y 4 = a , d'où x eft éyanouie, Si la quantité qw'il s’agit dé faire éyanoiir eft d’uz ne dimenfion dans une des équations, & qu’elle en ait plufieurs dans l’autre, il faut fubflituer dans cette autre équation la valeur de cette inconnue, prife dans la premiere: par exemple, fi l’on avoit x y y — a3 & x3 + Y1=b by a a x, On tireroit de la pre- F ss 3 miere équation + = ; & mettant cette valeur em L Ja place de x dans la feconde équation, elle deÿien: droit F +3 =bby- = , où + ne paroit plus. Quand il arrive que dans aucune des deux équa- tions, la quantité inconnue n’eft d’une feule dimen- fion, il faut trouver dans chaque équation la valeur de la plus grande puiffance de cette inconnue ; & fi ces puiffances ne font pas les mêmes, on multiphera l'équation qui contient la plus petite puiflance de cette inconnue par la quantité que l’on fe propofe de faire évanotir, où par fon quarré ou fon cube ; &c. jufqu’à ce que cette quantité ait la même pruf- fance qu’elle a dans l’autre équation : après quoi l’on fait une équation des valeurs de ces puiffances ; d’où réfulte uné nouvelle équation, dans laquelle la plus haute puiffange de la quantité que l’on veut faire évanoiir , eft diminuée de quelque degré, & en ré- pétant une pareille opération, l’on fera évanozir en- fin cette quantité: par exemple, fixx+ax=6yys &axy—=cxt—d3,& quil s’agifle de faire éva- noir x , la premiere équation donnera x x = b y y = a x, & la feconde produira xx = = ; d’où nai- a%y ét: ! RE | 2, —d3. r tra cette équation byy=ax="—; dans la: quelle x eft réduite à une dimenfion; on peut par con- féquent la faire évanozir, en fuivant la méthode que l'on a déjà expliquée. Pareillement, fi.73=x7y+abx,& yy=xx— xy+cc; pour faire évanotir y, on multiphera la derniere équation par y, qui deviéndra alors 35 = yxx—xy? +ccy,demême dimenfon que la pre- miere ; ainfixyy+abx=ÿyxx-xy?+cc}s où y eft réduite à deux dimenfions. Enfuite par le moyen de cette derniere équation &r de la plus fim- ple des équations donnéesyy=xx—xy"+cc, on pourra faire éardiir entierement y, en obfervant ce qui a été dit ci-deflus, S'il y a plufieurs équations &z autant de quantités inconnues, alors pour faire évanoüir une quantité inçonnue , il faut aller par degrés. Suppofons que les équations aX=YZ?»X += X = y + 3 75 & que l’on veuille faire éyanouir x; de la premiere équation 4 x = y? On tirex—2t; & fubflituant cette valeut de x dans la feconde ou la troifiemie équation, on aura les équations ZE + y = t: 6 ex =y + 3 73 d’où Pon peut enfin faire évanoiir & à cornme ci-deflus: | | . Quand la quantité inconnue a plufeurs dimien- * fions, il eft quelquefois fort embarraflant de la chaf: fer ; mais les exemples fuivans , que l’on peut repat- der comme autant de regles; diminueront beaucoup le travail; 120 E V A 1°, x étant éyanouie des équations a x x + b x 4 c=o,&fxx+gx+h=o,ilvientak—#g—2cf Xah+bh—cgxbf+agg+cffxc=o. 2°. La même inconnue x étant évaroie des équa- tionsaxt + bxx+cx+d=o, &fxxtexth= o,onentireah—bg—2cfXahh+bh-cg—2df Xfh+ch-dgxagg+cff+3agh+bss+ dffxdf= 0. 3°. Les équations à x4 + Bxt Lcxx+dx+ e=0o,&fxx+gx+A—0o, dont on fera évaroiir x, donnerontah—bg—2cf xah3 +bh—cg—2df Xbfhh+agge+cff x chh—dgh+egg— 2efg +3 agh+bigg—dffx dfh+ 2ahh+ 3 PERMET RES PeT rex O, Ge. Par exemple, pour faire évanoxir x, ou pour la chafler des équationsx x+$x—3yy7=0,& 3xx— 2 x y + 4 = 0, on fubflituera refpeétivement dans la premiere regle, pour les quantités a, b, c, & f, g, h, les quantités tr, $, — 3 yy & 3; — 27; +4,en obfervant très-exaétement de mettre, comme 1l con- vient, les fignes + & —; ce qui donnera 4 + 10 y + 1877 X 4+ 20 — 6 y5 X 15 + 4YY — 277 Y X— 3973 =0, OU 16 + 40 y +727 +300 — 90 75 + 6974=0o. De même, pour chafler y des équations y? —xyy —3x=0,àyy+xy—xx+3—=0o,onnaqua fubflituer dans la feconde regle, pour les quantités a, b,c, d, f, g, h, les quantités fuivantes r, —X,0,—3%51,%, —x x +3; &il vient 3—xx+ x x X9—06xx+xt— 3x Ha LOx X— 3x + SH LE MT HO EG xT ri EX = 3 x = 0; effaçant enfuite ce qui fe déftuit, & mul- tipliant,ona 27 —18xx+3x4,—09xxt+xt, + 3x4,—18 x2, +12 x#= 0, Enfin ordonnant les termes, l'équation devient x° +18 x4—4$ xx + Tes | Ces regles, qui fe trouvent dans l’arithmétique uni- verfelle de M.Newton, peuvent être appliquées & por- tées à des degrés quelconques ; mais alors le calcul * devient très-pémble, quoiqu'il y ait eu quelques per- fonnes qui fe foient donné la peine de chercher une regle générale, pour chaffer d’une équation des quan- tités inconnues élevées à des degrés quelconques. Mais l’application de la regle générale aux cas par- ticuliers eft fouvent beaucoup plus embarraffante, ul ne le feroit de faire évanozir les inconnues par la méthode ordinaire. M. Newton n’a point démontré comment il a dé- couvert ces regles, parce qu’elles font une confé- quence très-fimple de ce qui a ëté dit; par exemple, on a dans le premier cas x x + 2e + : =O;È xx FL 0 par conféquent 2# + = 4 : à ah-cf bfS 28 de x dans l’équation a x x + b x + c =0, on trou- Et Ro ne 2 ADP EU 9 à LIELTPATENT. Bf-ag avoir délivré cette équation de fra&ions , & lavoir réduite à fes plus fimples termes , elle deviendra ah—bg—2cfxah+bh cg x f +age+cff x c—0. Les deux autres regles fe découvriront de la même maniere ; mais le travail croîtra à propor- tion.des degrés:des inconnues. (Æ) ; À ces méthodes, :pour. faire évanozir les incon- nues, nous ajoüterons les obfervations fuivantes. Si l’on 4, par exemple, y5 = x y y + a b x & 3 =gqxx +fxy4 cs, c'eft-à-dire deux équations d’où l’on tire x = ; & fi l’on met cette valeur vera — —— ke 0; & après | oùy monte au même degré ; on aura d’abord xy y + abx=qxx+fxy +0 ; équation où y ne monte plus qu’au fecond degré, & d’où l’on tire y y — gx +fxy+e —abx 3 —Y4%xFfxy2+cyi—abxy x Sr TNT INDES T es —=qgxx+fxy + =xyyt+abx;onaura donc les deux équations, XYY+abx=qxx+frxyt+e, xyy+abx— JI#2+fxyr+cy3 bee + qui ne montent plus qu’au fecond degré, & qu’on abaïflera à un degré plus bas, par la méthode em- ployée ci-deflus pour abaiffer les deux équations données du troïfieme degré à deux autres du fecond. Cetexemple bien entendu & bien médité fuffra pour enfeigner à réfoudre tous les autres; car en général ayant deux équations en y du degré #, ou qu’on peut mettre toutes deux au degré 77, fi on veut faire éva- or y; On tirera d’abord de la comparaïfon des deux équations données une équation du degré #7— , 9 à Se rr 1, d'où l’on tirera une valeur de ÿ"-leny" “;& m--1 . cette valeur de y” étant fubftituée dans l’une des deux équations primitives, on aura une nouvelle , , M— I s n . équation eny .Ainfi, au lieu des deux équations primitives en y”, on en aura deux en y” ", fur lef- quelles on opérera de même, & ainfi de fuite. Lorfqu’on fera arrivé à deux équations où y ne fera plus qu’au fecond degré, on peut , par la mé- thode précédente, abaiffer encore ces équations à deux du premier, & alors le problème n’aura aucu- ne dificulté ; ou bien on peut réfoudreces équations du fecond degré par la méthode ordinaire (voyez ÉQUATION), comparer enfuite les valeurs de y qui en réfulteront, Ôter enfin les radicaux du fecond de- gré par la méthode expliquée plus haut; & il n’y au ra plus qu’une inconnue fans radicaux. On peut encore s’y prendre de la maniere fuivan- te, pour faire en général évanoärr y de deux équa- tions quelconques ; on remarquera que les deux équa- tions doivent avoir un divifeur commun ; on fuppo-' fera donc qu’elles en ayent un; on divifera la plus haute équation par la feconde, la feconde par le ref. te, le premier refte par le fecond, &c. fuivant les regles connues pour trouver le plus grand divifeur commun de deux quantités (voyez DivisEuR), juf- qu'ätce qu’on arrive à un refte qui ne contienne plus de y; on fera ce refte —o, & on aura l'équation cherchée où il n’y aura plus qu’une inconnue. Ce refte fuppofé égal à zéro, donnera pour divifeur com- mun aux deux équations l'équation linéaire ou du premier degré en y, qui dans ce cas aura été le di- * vifeur de la derniere opération. Quand il y a plus de deux inconnues, par exem- ple,x,7y, ?, &c. on réduit d’abord les inconnues à une de moins ; on fait évanouir x on y, &c. en trai- tant ? & les autres comme une conftante ; enfuite on réduit les inconnues reftantes à une de moins, & ainfi du refte. Cela n’a aucune difficulté. Dès qu’on fait réduire toutes les inconnues à une feule , il n’y a plus de difficulté pour faire évazozir les radicaux quelconques, par exemple, foit y” x+ 3 ; + Vyta=a) &x+tVy+b=ec,onferay x =7, 3 ÿ oux=??,yy+a=tr,ouy+ta=s,Vy+è= g,; ou y+b=9g, & on aura les équations fiivan- tes:x—22,y+a—s3,y+b=gq,z+t=a,x+ q = c, defquelles on fera évanouir t,7,q, ce qui les réduira à des équations fans radicaux, où il ny aura plus que x & y. Voyez RADICAL, RACINE » EXTRACTION, &c. Au refte il y a bien des ças où lon peut par de __ fimples fmples élévations de puiflances faire évanozir les ra- dicaux ; ainfi la méthode précédente n’eft que pour les cas dans lefquels ces élévations de puiffances ne fufroient pas, ou demanderoient trop de dextérité pour être employées d’une maniere convenable. (O) EVANOUISSEMENT des inconnues , des frattions, des radicaux , en Algebre , Voyez l’article EVANOUIR. EVANOUISSEMENT , fubit. mafc. (Medecine) foi- bleffe qui faïfit la tête & le cœur d’un animal, qui fufpend tous fes mouvemens , & lui dérobe les ob- jets fenfbles. Ce mot répond à l'éxausr d'Hippocra- te, & préfente abfolument la même idée, L’éva- noïiflement a {es degrés ; les deux extrèmes font la défaillance & la fyncope, Voyez SYNcOPrE 6 Dé- FAILLANCE. Les évanoziflemens font beaucoup plus rares parmi _ Jes brutes, que dans l’efpece humaine ; la tête, dans les brutes a moins de fympathie avec le cœur. La Nevrographie comparée de Willis expliqueroit ai- fément ce phénomène ; mais elle ne s'accorde pas avec les obfervations de Lancify, dans fon traité de corde & anevryfmatibus , prop. 47. € fiv. Il fufit d'admettre que les nerfs cardiaques different dans Thomme & dans les autres animaux, comme M. de Senac l’infinue, dans fon Tracé du cœur , tome I, p. 126. Il eft dangereux de croire avec Willis, chap. xxi. de fa Defcription des nerfs , que ces variétés de Torigine des nerfs cardiaques conftituent les diffé- tences de l’efprit dans l’homme, le finge, & les au- tres quadrupedes. Tout ce qui corrompt 8 qui épuile le fang ou Les efprits ammaux; tout ce qui trouble les fonétions du cerveau, ou les mouvemens du cœur, peut anéan- tir, pour quelque tems, les fenfations & les forces de l'animal, | Les caufes les plus ordinaires de l’évanoxiffement «le la part des fluides, font une diminution fubite & confidérable de la mafle du fang , par de grandes hémorrhagies, des évacuations abondantes, par les fueuts ou par les felles ; la raréfaétion du fang, par des bains chauds, par des enyvrans, par des fudo- rifiques ; une trop grande quantité de ce fluide, qui fe porte vers la tête ou le cœur, & dont ces or- ganes ne peuvent fe débarrañer, comme dans les fujets pléthoriques, dans ceux qui arrêtent impru- demment une évacuation critique, ou qui, après s’é- tre échauftés, boivent à la glace, & prennent des bains frais; la dégénération du fang, & peut - être des efprits , que produifent les morfures venimeu- es. les poifons, les narcotiques , le fcorbut, la ca- chexie, Les pâles couleurs , les fievres intermitten- tes, les fevres pourprées & peflilentielles, &c. le défaut des efprits, dont quelque obftacle empêche la fecrétion, ou l’influx vers le cœur; les exercices wiolens , le manque de nourriture , les pañions vi- ves , les études pénibles , l’ufage immodéré des plaïirs , 8 leur extrème vivacité, une fituation perpendiculaire ou trop renverfée, peut jetter les malades dans des défaillances, en empêchant le fang de monter dans les carotides, ou de revenir par les jueulaires. Lower croit que la férofité qui fe fépare du plexus-choroïde, au lieu d’être reçüe dans len- tonnoir, peut, quand la tête eft trop panchée en arriere , tomber dans le quatrieme ventricule ge prefler la moëlle allongée : mais on ne peut foûte- air ce fyftème, à moins de fuppofer la rupturé des vaifleaux lymphatiques , qui partant du plexus-cho- roide , vont fe terminer à la glande pituitaire, vaif- eaux que Cowper a décrits dans l’appendice de fon Anatomie. Charles Pifon dit que la fluxion de la férofité du cerveau fur le nerf de la fxiemze paire implanté dans Le cœur, eft la caufe de la plus funefte de toutes les fyncopes, qui détruit l’homme dans un inftant, Il _ om FL + \ E V À 121 faut remarquer que la huitieme paire du cerveau, où la paire vague , ef la même que celle qui eft dé- fignée par la fixieme paire de Charles Pifon: Galien ne reconnoïfloit que {ept paires de nerfs du cerveau ; Vefal en a connu dix, & a confervé le nombre de fept ; Spigel en a fait huit, en ajoûtant les nerfs ol- faëtis ; mais la fixieme paire dans ces diverfes énur- mérations, étoit toûjours la paire vague, & c’eft du côté gauche de cette paire que part le zervulus cordis décrit par Vefal. Les caufes de lévanoxiffement > Qui attaquent les parties folhides , font les abcès de la moëlle allongée, ou des nerfs du cerveau; les bleffures de la moëlle épiniere, des nerfs, destendons; les vertiges, les affections hyftériques & hypocondriaques , les dou- leurs extrèmes ; les bleflures du cœur » {es ulceres, fes abcès , fes inflammations , fes vices de confor- mation ; la graifle dont il eft furchargé quelquefois vers fa bafe ; l’hydropifie du péricarde, & fon adhé- fon au cœur (qui peut bien n'être pas auffi dange- reufe qu’on croit, comme M. Dionis l’a obfervé dans {a differtation fur la mort fubite) ; les anevryfmes de l'aorte & de l’artere pulmonaire, les offifications, les polypes , les tumeurs extérieures qui referrent les gros vaifleaux; les varices, dans les perfonnes qui Ont trop d’embonpoint. On peut appeller évaroziffemens [ympathiques , ceux que produfent les abcès des principaux vifce- res, les épanchemens de fang dans le bas-ventre ou dans d’autres cavités, les hydropifies, l'évacuation précipitée des eaux des hydropiques , ainfi que des matieres purulentes dans les abcès ouverts; les vices dans Peffomac qui rejette les alimens, ou qui ne les digere pas bien ; les matieres vermineufes, qui irri- tent les tuniques de l’eftomac ; les excrétions du bas- ventre fupprimées, les membres fphacelés, la reper- cuffion du venin dartreux ou de la petite verole vers l'intérieur du corps ; les odeurs fortes, maïs encore plus les fuaves, dans les hyftériques ; tout ce qui af- rête les mouvemens du diaphragme & des mufcles intercoftaux, les embarras confidérables du poumon. Cette derniere clafle renferme les défauts de la dila- tation, les dilatations & les conftriétions violentes, qu'excitent dans les poumons un air trop raréfié, un air excefhivement denfe, ou froid & humide; les va- peurs qu'exhalent des foûterrains méphitiques, ou des lieux inacceflibles depuis long-tems à l’air exté- rieur. Il feroit aifé de rendre cette énumération plus lon- gue ; mais 1} faut négliger toutes les caufes que l’ob-- fervation ne peut faire connoître, comme la con- vulfion & la paralyfe des gros vaifleaux, Gr. M. Michelotti, page 6. de la préface de fon traité de Jéparatione fluidorum , dit que fans le fecours des Ma- thématiques on ne peut difcerner les caufes obfcures de l’évanoïiflement. Pour réfoudre les problèmes qui ont rapport à ces caufes, 1l ne faut quelquefois em- ployer que les notions lesplus fimples ; mais pref- que toijours 1l faudroit avoir une analyfe fort fu- périeure à l’analyfe connue, qui abrégeât des cal- culs qu’un trop grand nombre d’inconnues rend im- pratiquables , ou admettre de nouveaux principes méchaniques qui diminuaflent le nombre de ces in- connues. S1 l’on fuppotoit dans les vaiffeaux fanguins une certaine inflexibilité qui rendit leur diametre conf- tant , la même quantité de fang qui eût conferve plus long-tems la vie & les forces de l’animal dans à fle- xibilité de l’état naturel, ne peut le garantit alors d’un épuifement total & d’une langueur moïtelle. Telle eft la fubftance d’une propofition que Beliini a donnée fans démonftration dans le traité de rmiffione Janguinis, qui fait partie des opufcules adrefés à Pitcairn. Il eft évident que dans cette fuppoñition le ER 122 E V A fang pañleroit avec bien plus de facilité dans les veï- nes que dans les vaiffeaux fecrétoires , dont les plis, la longueur & la flexibilité lui oppoferoient une ré- fiftance beaucoup plus grande ; donc toutes les fecré- tions feroient fort diminnées, & par conféquent celle des efprits animaux ne feroit plus aflez abon- dante pour entretenir la circulation. Je crois que de femblables propofitions ne prouvent pas plus l'utilité des Mathématiques dans la Medecine, que la fuppu- tation des jours critiques dans les maladies, ne prou- ve le befoin de l’Arithmétique. Les pafhons & l'imagination ont beaucoup de for- ce fur les perfonnes d’un tempérament délicat ; ce pouvoir eft inexplicable , aufi-bien que Fobferva- tion finguliere de Juncker, qui afüre que l’évanozif fement eft plus prompt &c plus décidé quand l’homme fuccombe à [a crainte de Pavenir, que quand il eft frappé d’un mal préfent. Peut-être Juncker a fait cètte comparaïifon pour favorifer le fyftème de Stahl, qui explique avec une facilité fufpeëîte plufeurs bi- farreries apparentes dans les caufes de la fyncope. Dans lévanoziffement profond ou dans la fyncope les arteres ne battent point, la refpirationeft obfcu- re ou infenfble , ce qui le diftingue de Papoplexie ; on ne voit point de mouvemens convulfifs confidé- æables, comme dans l’épilepfie ; les fortes pañffions hyftériques en different aufh, non-feulement par le pouls, mais encore par la rougeur du vifage, par un fentiment de fuffocation qui prend le gofier, &c. On explique ordinairement le vertige & le tinte- ment d'oreille, qui précedent l’évaroziflement, par la preflion des arteres voifines fur les nerfs optiques êc acouftiques ; mais on a beaucoup de peine à conce- voir comment ces arteres peuvent prefler les nerfs, lorfqu’elles font épuifées après de grandes hémorrha- oies : l'expérience de Baglivi paroït venir au fecours. Cet auteur obfervant la circulation du fang dans la grenouille , remarqua que lorfque l'animal étoit près d’expirer, le mouvement progreflif du fang fe rallen- tifloit, & fe changeoïit en un mouvement confus des molécules du fluide vers les bords du vaifleau. Cette expérience fait connoitre que l’affoibliflement du cœur augmente la preffion latérale dans les arteres capillaires. Le poids de l’eftomac & des inteftins produit un tiraillement incommode , quand l’antagonifme des mufcles du bas-ventre & du diaphragme ceffe , de même que la pefanteur des extrémités fatigue les mufcles qui y font attachés, lorfqu'ils ne fe font plus équilibre. Un pouls petit, rare & intermittent, dé- couvre l’atonie des arteres, la langueur des forces vitales, & la grandeur des obftacles qui retardent la circulation. L’aphonie précede quelquefois la perte des autres fonétons, fans doute à caufe de la fym- pathie des nerfs récurrens avec les nerfs cardiaques. Le refroidiflement & la pâleur des extrémités vien- nent de l’affaiflement dés membranes des vaifleaux capillaires, qui ne font plus frappées d’un fang chaud &r atuf. La refpiration eft infenfible, parce que le mouvement du diaphragme & des mufcles intercof- taux Eft fufpendu. Cælius Aurelianus, #0rborum acu- torum, Lib. IT. cap. xxxiy. verf. .finem, & Walæus, ont obfervé des mouvemens irréguliers & convul- fifs dans les levres. On doit regarder ces leseres con- vulfons d’un côté de la bouche, comme l’effet de la paralyfe des mufcles du côté oppofé. La matiere de a fueur 8 de la tranfpiration infenfible, condenfée par le froid, fe raffemble en petites gouttes gluan- tes, qui s’échappent à-travers les pores de la peau, €n plus grande abondance aux endroits où le tiffu de la peau eft plus délié ; aux tempes , au cou, vers le cartilage xyphoïde. Quand l'évanouiffementeft mortel par fa durée, ou à la fuite d’une longue maladie, le çou fe tourne ; &c la couleur du vifage tirant fur Le verd, annonce le commencement de la putréfation des humeurs. Que file malade revient d’un long éva- noïiflement , 1 poufle de profonds foupirs : ce mou- vement automatique eft néceflaire pour ranimer la circulation du fang. Hippocrate nous apprend, æphorifine xl. du deu- xieme livre, que ceux quis’évanotiflent fréquemment, fortement & fans caufe manifefle; meurent fubitement, Il faut bien prendre garde à ces trois conditions, comme Galien le prouve par divers exemples dans. fon commentaire {ur cet aphorifme. On voit la raifon de cet aphorifme dans le détail des caufes de l’éva- : noïiffement. On voit auffi.pourquoi des perfonnes qui s’évanoiuflent fréquemment, tombent enfuite dans des fievres inflammatoires. Aretée a obfervé que des gens qui ont été attaqués de fyncope, ont quelque- fois des legeres inflammations, la langue feche; qu°- ils ne peuvent fuer ; qu'ils font engourdis, & fouf- frent une efpece de contraétion : ceux-là, dit-il, tombent dans la confomption. 4 Une perte de fang exceflive après un accouche- ment laborieux & des efforts imprudens, la fuppref- fon des vuidanges#jettent fouvent dans des défail- lances mortelles. Il y a peu à efpérer, quand la fyn- cope fuccede à la fuffocation hyftérique ; 1l y a moins de danger lorfqu’elle Paccompagne. De fréquentes défaillances font de très - mauvais augure au com- mencement des maladies aiguës & des fievres ma- lignes, ou lorfqu’elles tendent à la crife qui les ter- mine; cependant les malades ne font pas alors abfo- lument defefpérés. Les plus terribles fyncopes {ont celles qu’occafionnent une ardeur & une douleur in- fupportables dans les petites véroles , au tems de {a fuppuration ; un violent accès de colere, un éméti- tique dans un homme déjà affoibli ; l’érofion de l’ef- tomac par les vers, dans les enfans ; l’irritation du poumon pat la fumée du charbon, ou par un air in- fecté ; le reflux des gangrenes feches & humides ; le virus cancéreux. On a vü des fyncopes qui ont duré jufqu’à trente-fix heures, fans qu’elles ayent été fui- vies de la mort. Les défaillances dans les maladies chroniques, font moins dangereufes que dans les ma- ladies aigués ou dans les fievres malignes. En géné- ral habitude diminue le danger , & l’examen de la caufe doit régler le prognoftic. | Aretée a fort bien remarqué que le traitement de la fyncope étoit fort dificile , & demandoit une ex- trème prudence de la part du medecin. Dans les évanotiffemens legers on fe contente de jetter de l’eau fraîche fur le vifage; on frote les le- vres de fel commun ; on applique fur la langue du poivre ou du fel volatil ; on approche des narines du vinaigre fort, de l’eau de la reine d’Hongrie ; on em- ploye les ffernutatoires, & on relâche les habits lor£ qu'ils font trop ferrés. Il n’eft pas inutile de froter les paupieres avec quelques gouttes d’une eau fpiritueu- fe ; d'appliquer fur la poitrme êc fur les autres par- ties,des linges trempés dans quelqu’eau fortifiante, $i ces fecours{ontineficaces, il faut fecouer le malade, l'irriter par des friétions , des impreffions douloureu- fes, préférables aux forts fpiritueux, Il faut craindre pourtant l'effet d'une grande agitation dans des corps épuifés. La premiere imprefion du chaud & du froid, eftaufiavantageufe que lapphcation continue peut être nuifble. Des noyés ont été rappellés à fa vie par la chaleur du foleil, du lit, des bains, On étend quelquefois le corps fur le pavé froid ; on fait tomber de fort haut & par jets, de l’eau froïde fur les membres, ce Un officier qui avoit couru la pofte plufieurs jours de fuite pendant les grandes chaleurs, arriva à Mont- pellier , & en defcendant de cheval, tomba dans un évanotiflement qui réffta à tous les remedes ordinai- res. M, Gauteron, l'auteur dés mémorres fur l'évpano- + ration des liquides pendant le froid, imprimé avec ceux de l'académie royale des Sciences, aznée 1709, fut appellé, & lui fauva la vie en le faifant plonger dans un bain d’eau glacée. On fe fert encore de lavemens acres, & avec de la fumée de tabac; mais on peut les négliger tant qu'il refte des fignes de vie, & il ne faut y avoir re- cours que l'évanotiflement wait duré au moins un quart- d'heure. Riviere recommande la vapeur du pain chaud fortant du four. Les fyncopes hypocon- driaques & hyftériques demandent des remedes foe- tides, tels que le caftoréum, le fagapénum, &c. La teinture de fuccin eft utile dans les défaillances pro- duites par l’agitation des nerfs. . C’eft une maxime générale , qu'il ne faut jamais faigner dans l’évanoxiffement aétuel. On peut s’en écarter quelquefois , pourvü que le corps ne foit pas engourdi par le froid , & que le pouls ne foit pas en- tierement éteint ; lorfque le poumon a été refferré tout-à-coup par le froid, ou dilaté par une violente raréfadion, dans la pléthore, dans certaines épilep- fies , dans des affe@tions hyftériques : mais ce remede ne doit être tenté qu'avec une extrème circonfpec= tion, & lorfque tous les autres {ont inutiles. Quand les malades ont recouvré l’ufage de la dé- elutition, 1l faut leur faire avaler un trait d’excel- lent vin vieux, ou d’une eau aromatique & fpiri- tueufe, telle que l’eau dé cannelle , de mélifle, 6e. Dans la fuppreffion des regles ou des vuidanges, il faut employer fagement les emménagogues, & ne pas ufer de ftimulans trop forts, crainte de fuffoquer la malade ; & dans les maladies aiguës 1l faut éviter ce quidérangeroit l'opération de la nature, en exci-' tant des purgations ou d’autres excrétions. Îlfaut fe défier de la vertu cordiale qu’on donne à l'or, aux pierres précieufes, au béfoard oriental. Un verre de bon vin prévient les défaillances que la faignée pro- duit dans les perfonnes trop fenfibles. Quand le ma- lade eft parfaitement remis, 1l faut employer des re- medes qui réfolvent le fang difpofé à fe coaguler, qui pourroit caufer des fievres inflammatoires. IL faut arrêter l'évacuation des eaux des hydropi- ques, quand ils tombent en défaillance. Il faut auffi reflerrer le ventre à mefure que les eaux s’écoulent quand on fait la paracentefe dans le bas-ventre : il faut détourner du fommeil d’abord après les défail- . lances. La faignée eft indifpenfable , quand le cœur 8vles gros vaifleaux font embarraflés par la pléthore. Dans les corps affoiblis parles évacuations, il faut difpofer le malade dans une fituation horifontale; le repos, de legeres friétions ; une nourriture aifée à digérer, animée par un peu de vin, fuffifent pour le rétablir. Dans les épuifemens 1l faut prendre des bouillons de veau préparés au bain-marie , avec la tapure de corne de-cerf, des tranches de citron, un peu de macis, & une partie de vin. Le vin vieux &e le chocolat font de bons reftaurans. Lorfqne le fang eft difpofé à former des concrétions , on peut faire ufage de bouillons de vipere, de linfufion de la ra- cine d’efquine dans dwpetit-lait, &c: De petites fai- gnées dans le commencement, une vie fage & ré- glée, un exercice modéré, conviennent dans le cas des varices & desanevryfmes. Les anévryfmes & les vices du cœur n’ont que des remedes palliatifs, quoi- que Lower donne la récette d’un cataplafme,. dont Papplication diffipa les fymptomes que produifoient, dit-1l, des vers engendrés dans le péricarde, & qui rongeoient le cœur. Dans les défaillances qui accom- pagnent les fievres putrides & malignes, on donnera les abforbans , les teftacées,, les cordiaux legers ; les eaux de chardon beni, de fcordium. On tiendra les couloirs de Purine & de la tranfpiration ouverts, le ventre libre : on aurarecours aux véficatoires & aux aromates tempérés, On peut donner féparément Tome VI, | E V À 123 dans les fievres colliquatives , les acides de citron , d'orange, de limon, le vinaigre & les abforbans ; les anodyns même font quelquefois néceflaites. M. Chi- rac a fort vanté les émétiques & les purgatifs , indif. penfables dans beaucoup de cas ; mortels dans les Au AU » plénitudes de fang , maladies du cœur, (2) On connoït les remedes du fcorbut, des poïfons } des hémorrhagies, Pour calmer le defordre que les FRE excitent , ‘il faut joindre à la faignée des oiflons chaudes & délayantes, Dans les blefures des membranes, des nerfs & des tendons» il faut di- later lesmembranes par de grandes incifions couper les tendons & les nerfs, ou y éteindre le rent Un auteur très-célebre ordonne la faignée dans les maladies hypocondriaques ; il veut encore que dans certaines épilepfes , dans des maux hyftériques, on aflocie avec la faignée les remedes qui donnent dés fecoufles aux nerfs. L'application de cette regle pa- roît très-délicate , 8 demande beaucoup de fa gacité. Dans les fuper-purgations il faut donner le lauda- num &c du vin aromatifé chaud, pendant le jour de la thériaque à Pentrée de la nuit. Il feroit dange- reux de fuivre des pratiques fingulieres, & d’imiter, par exemple, dans toutes les fyncopes qui viennent de la fupprefion des menftrues, Foreftus &F aber, qui nous aflürent qu'une fyncope de cette efpece fut guérie par un vomitif, i Aretée a crû que dans les maladies du cœur l’ame s’épuroiït, {e fortifioit , & pouvoit lire dans l'avenir; mais fans porter la crédulité fi loin, on peut trouver un fujet de fpéculation fort vafte dans la différente impreflion que l’évaroiffèment fait fur les hommes. Il eft des perfonnes que le fentiment de leur défail- lance glace d’effroi , d’autres qui s’y livrent avecune efpece de douceur. Montagne étoit de ces derniers, comme il nous apprend 4v. I, defes eflais, chlyj. Il eft donc des hommesqui ne frémiflent pas à la vûe de leur deftruétion; M, Addifon a pourtant fuppofé le contraire dans ces vers admirables de fon Caton : -Whence this fecret dread and inward horror, Of falling into nought? Why fhrinks the foul Back on her Jelf, and flartles at deftruition à "Ts he Divinity that flirs wichin us, "Tis Heaven it Jelf, chat points out an hereafter ; And intimates etérnity 10-Man. TE Mais comment pouvons-nous craindre de tomber dans le néant (of falling into nought) , & nous avons une conviéhon intime de notre immortalité (474 intimates erernity 10 mat) ? Île paroît qu'il eft inu- tile de chercher de nouvelles preuves dé l’immorta lité de l'ame, quandon nedoute point quecé ne foit une vérité révélée, port Je remarquerai en finiflant , que M. Haller dans le commentaire qu’il a fait fur le merhodus difcendi me- dicinam de Boerhaave , à l’article de la Pathologie, indique un traité de Lipothymiä, ou dela défäillan- ce, par J. Evelyn, imprimé avec l'ouvrage de cet auteur fur les médailles anciennes 8& modernes, Mais M. Haller a été trompé; c’eft une digreflion fur la phyfonomie, qui fait partie du livre anglois d’Eve. lyn ; imprimé à Londres , 3#-fo/. en 1697. Cer article efe de M. BARTHÉS\, doëteur en Medecine de la faculté de Montpellier. : | ; *EVANTES, f. f (if. anc.) c'étoit des prêtrefles de Bacchus : on les nommoit ainfi , parce qu'en cé- lébrant les Orgies elles couroient comme fi elles avoient perdu le fens, en criant Evan, Evan, ohé Evan. Voyez; BACCHANALES. + ET Ce mot vient de Acer, qui eft un normde Bacchus. EVAPORATION , 1. f (Phy/1g. pare, Aérologie,) Quoiqu'il y ait peu de mots qui ait chezles auteurs des acceptions plus variées que celuici , on peut Q 1 124 E V À cependant dire en général, qu'on lui donhe princi- palement deux fignifications. Quelquefois il{e prend pour l'opération particuhere, parlaquelle.on expofe . les corps à une chaleur plus on moins forte, pour les priver en tout ou en partie de leur humidité. On lui donne cette fignification dans ces manieres de parler : L’évaporation des diffolurions des fels doir être conduite lentement ; fo l'onwveur obtenir de beaux cryflaux. L'évaporation fe fait par le moyen du feu. L’évaporation:; confidérée dans ce fens, appartient à la Chimie, Eee Le même mot fe prend fouvent pour le paflage ou l’élévarion de certains corps dans l’atmofphere. Dans ce fens on peut dire , l’évaporation de leu a lieu dans les gelées les plus fortes. C’eft fous ce point de vie que nous devons confidérer l’évaporation dans cet article. Commençons par en donner une idée auf claire qu'il nous fera poffible. | Prefque tous les corps liquides & la plüpart des folides expofés à l’air, par l’aéion de ce fluide feule, ou aidée d’une chaleur modérée, s’élevent peu-à- peu dans l’atmofphere, les uns totalement , d’autres feulement en partie: ce pafläge ; ou cette élévation totale ou partiale des corps dans l’atmofphere, les Phyficiens Pappellent évaporarion, Les corps élevés dans Pair par l’évaporation ; s'y {oûtiennent dans un tel état, qu’ils font abfolument invifibles, jufqu’à ce que par quelque changement arrivé dans Patmof- phere ; leurs particules fe réuniflent en de petites mafles quitroublent fenfiblement la tranfparence de l'air : par exemple, l'air eft (comme nous le ferons voir dans la fuite) en tout tems plein d’eau-qui s’y eit élevée par évaporation, & y demeure invifble juiqu’à ce que de nouvelles circonftances réuniflent fes molécules ,difperfées , en de, petites mafles qui troublent fenfiblement fa tranfparence. C’eft ce.qui diftingue lévaporation de lélevation dans latmot. phereide.certains corps petits &c legers, tels que la poufliere, qui ne s’y élevent & ne s’y foûtiennent que par limpulfion méchanique de l'air agité, qui confervent dans l’air leur même volume, leur opa- cité, & retombent dès que l’air ceffe d’être agité. L'élevation de certains corps dans l’atmofphere, produite pat ün degré de chaleur fuflifant pout les décompoler, ou par Puftion même, a un plus grand rapport avec l'éyaporation. Les particules élevées par ces moyens dans Pair, font de la même nature que celles qui s’y élevent par l’évaporation;.elles s’y {oûtiennent aufli dans un tel état de divifion, qu’el- les font parfaitement invifibles, Par exemple, le fou- fre En brûlant fe décompofe ;: lacide vitriolique & le principe inflammable dont il étoit compoté (voy: SOUFRE), dégagés l’un de Pautre, s’élevent dans l’atmofphere & y deviennent invifibles. Par la cal- cination, lesmétaux imparfaits fe décompofent ; leur principe inflammable s'élève dans l’atmofphere.Les matieres animales ou végétales, privées de leurs parties volatiles libres & de l’eau furabondante, ex: pofées au degré de feu néceflaire pour les änalyfer, le décompofent; & par cette décompofitior, il fe dégage des principes volatiles, propres à s'élever. & fe foûtenit dans l’atmofphere. Par ces exemples ileft clair. que l’évaporation ne differe point éflentielle! iment de lélevation des:particules volatiles! déga- gées par l’application d’une chaleur fuffifantey; pour décompofer les corps; ou.par luftion ; que’cesiopé- rationsine font-que difpôfer lescorpsà l’élevation de certaines de-leurs parties; qu'aurefte les particules qui s'élevent dans l’air par cette voie, font de la mé: me nature, & s’y foûtiennent de même que celles quiis’y. élévent par évaporation : cependant l’ufage a voulu qu’on n’appellât point évaporarion, Péleva- tion des particules détachées par ces opérations qui décompofent les corps; ila reftreint la fignification de ce mot à l'élevation des parties volatiles fibres & dégagées de principes qui puiffent les fixer, & qui pour s'élever dans l’atmofphere, ou ne deman- dent aucune chaleur artificielle, où demandent feu- lement une chaleur modérée, qui n’excede guere celle de l’eau bouillante, Ce que j'ai dit jufqu'icime paroît fufhfant pour donner une idée exaéte de ce qu'on entend par évaporarion. Entrons aétuellement en matiere, & confidérons premierement quels {ont les corps fufceptibles d’évzporation, & quelle eft ia nature des particules qui s’élevent par cette voie dans l’atmofphere. Parmi les corps fufceptibles d’évaporation , les H- quides tiennent fans doute le premier rang; la plû- part de ces corps expofés à l’air libre, s’'évaporent fans le fecours d’aucune chaleur étrangere, & même dans les plus fortes gelées : mais ily en a auffi quine font fufceptibles d’évaporation , qu'autant qu’ils font expofés à une chaleur plus ou moins forte. Ainf, par exemple, les huiles graffes expofées à l'air libre à l’abri des rayons du foleil , ne fouffrent pas une évaporation {enfible: maïs expofés à la chaleur de Peau bouillante, elles s’'évaporent, & de plus ac- quierent par une ébullition continuée, la propriété de s’'évaporer fans le fecours d’une chaleur étran- gere ; propriété qu’elles acquierent demême en ran- ciflant. L’huile de tartre par défaillance, & la plà- part des eaux meres expolées à l’air libre, attirent l’humidité de l'air, bien loin de s’évaporer : mais une chaleur plus où moins forte, 8 qui n’excede pas le degré de l’eau bouillante, les fait évaporer. L’acide vitriolique eft auf fujet à l’évaporation ; maïs il de- mande pour s’'évaporer une chaleur d'autant plus forte, qu'il eft plus concentté : de forte que quand il eft bien concentré, il faut pour l’éleyer dans latmo- fphere un degré de chaleur, qui va prefque à faire roupit le vaiffeau dans lequel il eft contenu. Les li- queurs qui s’évaporent avec le plus de rapidité font principalement l’eau pure, les vins, l’efprit-de-vin, l’'éther vitriolique & nitreux, l'efprit volatil.de fel ammomiac, l'acide nitreux fumant, l'acide fulphu- reux ; le dernier eft fi volatil, que fuivant letémoi- gnage de Stahl (obf. & animad. ccc,. 37.) expoféà Vair libre, il s’évapore vingt fois plus vite qu’une égale quantité d’efprit-de-vin le mieux redifié: cet acide paroît s’évaporer plus rapidement que-tousiles liquides que je viens de nommer; les autres, à-peu- près fiuvant l’ordre dans lequel jeles ai placés. M. de Maiïran a prouvé par destexpériences, que l'efprit de-vin s'évapore huit fois plus rapidement quel’ean. Voyez fa differt. fur la glace. 1 Les corps folides, tirés des animaux 8c des végés taux, font aufli pour la plûpart fujets à l’ézporarions St même plufieurs matières minérales n’en font pas exemptes. Ainf.la terre.qu’on appelle proprement bumus,eft fufceptible d’évaporarion. La foude les fels neutres à bafe-faline, à-bafe-terreufe, à bafe: métallique; perdent aufi par lépaporaion; maïs je doute qu'ilspuiflent perdre par cette voie autre chofe que leur eau descryftallifation; & je penfe quénous devons encore fufpendre notre jugement fur ce qu’a- vancent quelques auteurs , que le fublimé corrofif, la lune cornée, & les autres fels neutres qui penvent {e fublimer dans les vaifleaux fermés, peuvent aufi s'élever êc fe foûtenir dans l'atmofphere famsife-dé: compofer. Le mercure 8 larfenic des boutiques | ow, pour parler avec plus d’exaétitude , la chaux du régule-d’arfenic, le minéral fingulier de matureren même tems acide 67 vitriolique, paroïffent aufi de: Voir trouver place parmi les corps lufceptibles ide vaporation jh © L'artg L'eau, l'air, le principe inflammable 8: des molé: cules de nature terreufe, font en généraliles matiez resqui s’élevent.dans l’atmofphere par l'évaporarion, Faifons en particulier quelques réflexions fur cha- cune de ces matieres. | _ Tyalong-tems que les Phyficiens ont remarqué que l’eau farfoit la matiere principale de l’évapora- ron, Pour feconvaincre de cette vérité , il a fufh de remarquer que les corps liquides ou humides étoient les plus fufceptibles d’évaporation, 8 que les parti- -cules quis’élevent par cette voie de prefque tous Les corps, même folides , reçües & amañlées dans des “vaifleaux convenables, fe préfentoient fous une for- me liquide. Or l’eau étant la bafe de tous les liqui- des de la nature , il étoit facile d’en déduire que les corps perdoient principalement de l’eau par l’évapo- ration, Il ny a pas plus de dificulté par rapport à l'air : ce fluide étant contenu abondamment dans toute forte d’eau , il eft clair qu’il doit s'élever avec elle dans Patmofphere. Nous verrons dans la fuite que cet air rendu élaftique par la chaleur , contri- bue à accélérer l’évaporation de l'eau. Par l’évaporation il s’éleve aufi dans l’atmofphere des molécules de nature terreufe : maïs ces molécu- les font par elles-mêmes incapables de.s’élever dans l'air; elles n’acquierent cette propriété, qu'autant qu'elles contraétent une union intime avec des mo- lécules d’eau. Ainfi, pat exemple, les terres pures, animales ou végétales, bien loin d’être fuicepti- bles d’évaporation , réfiftent au contraire à la plus grande violence du feu: ces mêmes terres combi- nées avec l’eau, dans les huiles, les fels acides, les dels alkalis volatils, deviennent propres à s'élever avec elle dans l’atmofphere, Ce que je viens de dire des molécules terreufes, fe peut appliquer au principe inflammable. Les mo., lécules de ce corps principe font à la vérité très : dé- liées, & s’élevent dans l’air avec une extrème faci- té, lorfqurelles font libres 8 dégagées : mais il eft tellement fixé dans tous les corps, où il n’eft pas combiné avec l’eau, qu'il ne sy trouve jamais li- bre & propre à s'élever dans l’atmofphere par une évapôration proprement dite; on le trouvera, au contraire , conftamment combiné avec l’eau dans tous les corps, d’où il peut s'élever dans l’air par cette voie. Mais quoique le principe inflammable ne s’éleve point feul dans l’atmofphere par une évapo- ration proprement dite ; cependant combiné d’une certaine mamere avec les molécules terreufes & Peauw, ilrend ces corps fufceptibles d’une évapora- tion beaucoup plus rapide. C’eft une vérité connue des Chimiftes, & qu'il féroit aifé de prouver par . un gfand nombre d'exemples ; je me contenterai d’alléguer celui de l'acide fulphureux volatil. L’a- cide vitriolique eft moins volatil que-les autrès ; il s’évapore mème plus difficilement que l'eau, quoi- qu'il ne foit pas concentré: combinez cet acide d’u- ne certaine maniere avec le principe inflammable, 1l en rélulte l'acide fulphureux volatil, dont l'éva- poration eft ; comme nous l’avons dit plus haut, vingt fois plus rapide que celle de lefprit-de-vin. Cedque je viens d'avancer, que le principe inflam- mable ne s'élève point feul dans l'atmofphere par VPévaporation, paroîtra peut-être {ujet à une difi- culte. On pourra m'objetter que plufieurs métaux impatfaits expoiés à l'air libre, {e ronillent, ou, cé ui revient au même, perdent leur principe in- flaämmable fans le fecours d’aucune chaleur étran- _ gere; & qu'au moins dans ce cas, le principe in- lammable peut s'élever dans l’atmofphere feul & Pat une véritable éyaporation : mais il n’eft pas diffi- cile dé répondre à cette difficulté. Pour la réfoudre 11 fuffit de remarquer que dans ce cas le principe inflammable ne s'éleve! pas dans l’atmofphere par une fimple évaporation ; mais qu'avant de s'y éle- ver, 1loufire une opération préliminaire, une cal- “Cination qu'on appelle par voie humide, P, ROUILLE, E V À 125 L'eau que l’air dépofe fur les métaux, aidée peut-être de l'acide univerlel répandu dans l'air, les attaque infenfiblement, les décompofe ; & dégageantle prin- cipe inflammable de la terre qui le fxoit , elle le rend propre à s'élever avec elle dans l’atmofphere, Si les réflexions que je viens de faire fur les terres pures &c le principe inflammable {ont juftes ; fi ces Corps principes ne s’élevent dans l’atmofphere par V’évaporation proprement dite , qu'autant que l’eau fe trouve combinée avec eux; ne fommes-nous pas en droit d’en conclure que Peau doit être regardée, pour ainf dire, comme la bafe ou le fondement de toute évaporation ? On doit feulement en excepter celle du mercure; encore pourroit-on foupçonner, avec le célebre M. Rouelle (Voyez fes cahiers , ann. 1747.), que l’eau qui fe trouve unie à ce fluide, contribue beaucoup à le rendre évaporable ; & que ce n'eft qu’en lui enlevant cette eau, qu’on peut par des opérations affez fimples, & qui n’alterent pas fa nature , lui donner un degré de fixité , tel qu'il réfifte pendant long-tems à un feu aflez violent. De quelle maniere, par quel méchanifme fingu- lier les particules dont nous venons de parler, peu- vent-elles s'élever dans Patmofphere & s’y foûte- ir ? Ces particules & celles du fluide dans lequel elles s’élevent, fe refufant par leur extrème ténuité aux fens & aux expériences, les Phyficiens ont t4- che de répondre à cette queftion par des hypothèfes : mais ces hypothèfes quoique très-ingénieufes , pa- roïflent toutes avoir le défaut général ds ces fortes de fyftèmes , d’être gratuites & de s'éloigner de la nature. Nous allons donner une idée aufli exaûte qu'il nous fera poflible, de ces différentes fuppofñ- tions, 8 marquer en même tems les difficultés qu’el- les paroïflent foufirir. L'Encyclopédie étant defti- née à tranfmettre à la poftérité les connoïffances , ou, f.l’on veut, les idées de ce fiecle, je me crois auf obligé de tranfcrire ici ce que j’ai donné fur cette matiere , dans un mémoire qui doit être impri- mé à la fin des mémoires de l'académie des Scien- ces, pour l’année 1757. Les corps fufceptibles d’évaporation s'évaporent d'autant plus rapidement , qu'ils font plus échauf- fés. C’eft fans doute cette obfervation toute fimple qui a donné lieu à l’hypothèfe la plus généralement adoptée, fur le méchanifine de l’évaporarion. On a fuppofé que les molécules d’eau étant raréfiées par la chaleur, ou, ce qui revient au même, par l’adhé. fon des particules ignées, leur pefanteur fpécifque diminuoit à tel point que les molécules, devenues plus legeres que l’air, pouvoient s'élever dans ce fluide , jufqu'à ce qu’elles fuffent paryenues à une couche de l’atmofphere, dont la pefanteur{pécifique füt égale à la leur. Les vapeurs, dit s'Gravefande (Eté de Phyf. prem. édit, 2543), s'élevent en l'air & Jontfoñtenues à differentes hauteurs , fuivanrt la dif. férence dei leur confhtution; auffi-bien que de celle de l'air ; 8e à cette occafion il cite le parag, 1477, où il dit: Sion fuppofe que le fluide € Le folide font de même gravité fpécifique , ce corps ne moñtera ni ne defcendréi, nas reflera fufpendu dans le fluide à la hauteur où on l'aura mis. Les paroles de cet homme refpe@table que je viens de rapporter ; fufiront pour'donner une idée précife -de ce fentiment. Tâchons de faire voir en peu de mots qu'il eft contraire à l’obfervation. Je demande- fai premierement aux FE qui adoptenticette Le ; n LA” . -opimon, quel degré de chaleur ils croyent néceflai- re pour raréfer les molécules d’eau,au point qu’elles déviennent fpécifiquement plus legeres que l'air, S'ils confultent les obfervations , ils feront obligés de f- xér ce degré beaucoup au-deflous durterme dela glace , puifque la glace s'évapote même dans les froids les plus rigoureux, Voyez la diff. fur la glace de 126 E VA M.deMaïan, p. 3 08.Or je ne crois pas que perfonne puifle de bonne-foi regarder ce deoré de chaleur comme capable de rendre le volume des molécules d’eau huit cents fois plus grand ; & pourpeu qu’on y refléchifle , on s’appercevra bien-tôt qu'il feroit très-aifé de prouver le contraire. Il eft vrai que M. Mufchenbroek a tâché de faire voir par un calcul, que la chaleur du terme dela glace étoitcapable de ra- réfier Les molécules d’eau, jufqu’à Les rendre fpécif- quement plus legeres que l'air, Voici fon rafonne- ment. 4 Nous avons vüque la vapeur de l’eau bouil- » lante eft 14000 fois plus rare que l’eau même ; or # la chaleur de cette vapeur eft alors au thermome- » tre de 212 degrés. La chaleur de l'été en plein mi- .» di de oo degrés; par conféquent la vapeur de l’eau » ainfi échauffée, fera alors 5043 fois plus rare que » Peau; &c fi l’on fuppofe que la chaleur du thermo- » metre eft de 32 degrés, 1l faudra que la vapeur » foit 2113 fois plus rare que l’eau : or l'air n’eft » d'ordinaire que 600 , 700, ou 800 fois plus rare » que l’eau, & par conféquent la vapeur fera encore » plus rare que l’air. Mais il gele lorfque le thermo- » metre eft au 32 degré; par cônféquent la vapeur » pourra fortir de l’eau & de la glace en hyver, & » s'élever enfuite dans l'air ». Effais de Phyfique, pag. 739. Mais il eft clair que le célebre phyficien s’eft trompé dans cet endroit ; & fans m’arrêter à com- battre le fond de fon calcul, je me contenterai de faire obferver , que fi au lieu du thermometre deFa- renheit , qui met le terme de la glace au 32 degré, 1 s’étoit fervi du thermometre de M. de Reaumur, qui -met le même terme au zéro, 1l auroit conclu du mê- -me calcul que la chaleur du terme de la glace étoit incapable de raréfer les molécules d’eau en aucune -Maniere. D'ailleurs, quand bien même on accorderoit pour un moment la pofibilité de cette fuppoñition, il n’en feroit pas plus difficile de faire voir que la nature n’eft point d'accord avec ce fentiment: en effet, “cette opinion exclut toute idée d’uniformité dans la répartition des vapeurs fur toute l'étendue de l’at- mofphere. Elle fuppofe néceffairement qu’en été, dans les grandes chaleurs , les particules d’eau très- raréñées devroient s'élever fort haut, & abandon- ner la partie de l’atmofphere qui avoifine la terre ; qu’au contraire en hyver, ces mêmes particules con- denfées & plus pefantes, devroïent fe trouver en beaucoup plus grande quantité proche de la terre, qu'en été: or tout le contraire a lieu, comme je l'ai prouvé dans le mémoire que j'ai déjà cité. Ces re- marques me paroïflent fufhfantes pour faire voir que fi les molécules d’eau s’élevent dans l'air, ce n’eft pas parce qu’elles deviennent fpécifiquement plus lege- res que celles de ce fluide, & qu’on ne doit pas croi- re que les particules , en s’élevant & fe foûtenant dans l’atmofphere , fuivent les mêmes lois qu'un corps folide répandu dans ce fluide. Je ne m’arrête- rai pas davantage à combattre cette opinion , croyant qu'il feroit inutile de s’attacher à entafñler un grand nombre d’argumens contre ces fortes de fuppoñitions, que les Phyficiens négligent de plus en plus, rt que leurs auteurs même défendent avec peu de chaleur. M. Hamberger a fenti le défaut de vraiffemblance de Phypothèfe que nous venons de combattre; & l'ayant réfutée folidement dans fes élémens de Phy- fique ; 8 dans fa belle differtation fur les caufes de l'élévation des vapeurs , il lui fubftitue une autre hypothèfe qui lui paroît plus conforme aux obfer- vations, mais qui examinée fuivant les lois de la faine Phyfique ,me femble fouffrir pour le moins au- ant: de diffcuités que la premiere, « Si nous fuppo- #fons, dit-il p. 57 dela Differcation que nous venons # de citer, que la molécule. fufceptible. d’évapo. » ration, tandis qu’elle eft encore contiguëé au corps » dont elle s'efforce de s'éloigner , eft environnée » dans fa furface intérieure de particules ignées , & » par fa partie fupérieure contiguë à l’air, dans cette » fuppofñition , le feu & l'air étant des fluides plus » legers que la molécule, lui adhéreront; donc ils » agiront fur elle , mais inégalement. L’air agira » avec plus de force que le feu, à caufe de la diffé- » rence qui fe trouve entre les gravités fpécifiques » de ces deux fluides : par conféquent, la molécule » fufceptible d’'éyaporation , tendra vers les deux par- » ties oppofées, par une réaétion inégale, c’eft-à- » dire avec plus de force vers le haut que vers le » bas». C’eft ainfi qu'il expliquoit le méchanifme du paffage d’une molécule évaporable dans Pair ; mais cette explication me paroît fujette à des ob- jeétions auxquelles il feroit difficile de fatisfaire. En effet, M. Hamberger fuppofe qu’une molécule qui eft à la furface d’un corps évaporable, de l’eau , par exemple , s’éleye dans l'air parce qu’elle adhere plus à l'air, qui eft fupérieur, qu'aux parricules ig- nées qui la ceignent inférieurement ; mais dans cette explication , il fait entierement abftraétion de la co- héfion des molécules d’eau entr’elles : or quels corps pourra-t-on de bonne foi fuppoferfetoucher & avoir une force de cohéfion, fi l’on refufe de reconnoître que les molécules d’eau affemblées en mafñfe fe tou- chent & s’attirent réciproquement par une force de cohéfion ? Voyez COHÉSION. M. Hamberger paroît lui-même reconnoître:taci- tement le peu de vraiffemblance de cette explica- tion ; puifque dans lédition de 1750 de fes Ælémens de Phyfique , que j'ai entre les mains , il n’avance plus que cette élévation des particules évaporables {oit dûe à leur adhéfion plus grande à l'air qui eftau- deflus, qu'aux molécules ignées qui les ceignent infé- rieurement. Il fe contente de dire en général, que les molécules ignées paffant des corps chauds dans l'air, plus froid que les corps, elles entraînent avec elles les particules évaporables. Mais malgré cette mo- dification , l’hypothèfe n’en eft pas plus d’accord avec les obfervations. Si on fuppofe avec M. Ham- berger, que l’évaporation {e fait par le pañlage des particules ignées des corps évaporables, dans l’air plus froid que ces corps, il s’enfuivra néceflaire- ment qu'il n’y aura point d’évaporation toutes les fois que les corps qui en font fufceptibles feront auffi froids ou plus froids que Pair ; ce qui eft évi- demment contraire à l’obfervation. Dans l’ouvrage que nous venons de citer, M. Hamberger fait encore une addition plus effentiel- le à fa premiere hypothèfe; 1l:y avance que Les par- ticules évaporables qui font à la fuperficie des corps, -paffent dans l’air par voie de diflolution, 1040 fo- lutionis ( Elémens de Phyfique, $. 477.) & à cet- te occafon, il cite le paragraphe 242. où il fe pro- pofe d'expliquer le méchanifme de la diflolution, & où il détermine la maniere dont les particules du corps diflous s’arrangent dans les A des mo- lécules du diffolvant. M. Hamberger n’eft pas le feul qui ait dit que lévaporation fe faifoit par une efpece de diflolution : plufieurs phyficiens ayant adopté, comme lui , une hypothèfe fur la diflolution, ont cri expliquer le méchanifme de l’évaporation ; en di- fant qu'il étoit femblable à celui de la diffolution. Pour combattre les fyftèmes de ces auteurs fur l’éva- poration , 1l faudroit donc commencer par examiner : les différentes hypothèfes qu'ils ont adoptées fur le méchanifme dela diffolution ; mais cet examen ap partient proprement à la Chimie, & fera fait par M. Venel à larsicle MENSTRUE, beancoup mieux que je ne pourrois le faire. Je me contenterai de dire ici, qu'ilme paroit que jufqu'à préfent les Phyficiens ne nous ont sonné fur ce fujet que de pures fuppoñ- E VA tions; &z que c’eft une chofe généralement reçûe des Chimites éclairés , juges compétens dans cette matiere , que ces hypothèfes des Phyficiens font * très-éloignées d’être d'accord avec les phénomènes de la diflolution. Après avoir explique la maniere dont les particu- les évaporables {e détachent de la fuperñcie des corps, & pañlent dans l’air, M. Hamberger fe fert d’une nouvelle fuppoñition , pour expliquer le mé- chanifme par lequel les molecules s’élevent dans l’atmofphere : il penfe que l’air eft échauffé par les vapeurs ; que cet air chargé de vapeurs , devenu plus chaud, & par conféquent plus rare & plus leger que l'air environnant , s’éleve néceflairement , & par fon mouvement entraine avec lui les vapeurs: mais cette feconde partie de fon hypothèfe a enco- re le défaut de fuppofer que les molécules évapo- tables ne s’élevent dans atmofphere qu’autant que les corps defquels elles fe détachent font plus chauds que l’air environnant ; ce qui eft, comme nous l’a- vons déjà remarqué, contraire à l’obfervation jour- naliere, 16 Après cet examen des principales hypothèfes que les Phyficiens nous ont données fur l’évaporation , je crois, comme Je l’ai déjà dit , devoir rendre compte de ce que j'ai donné moi-même fur cette matiere. C’eft ce que je vais faire en tranfcrivant une partie de mon mémoire, pour en expliquer clairement le deffein : je commence par quelques remarques fur le mot dffolution. « Le mot diffolution eft employé parles Chimiftes, » pour fignifier des chofes très-différentes. Quelque- y fois ils s’en fervent pour exprimer l’aétion du dif- » folvant fur le corps qui s’y diflout, C’eft dans ce » fens qu'ils difent que la dffolution du [el dans l’eau . # fe fait par l'atlion des molécules d'eau , qui , comme s autant de coings , S'infinuent entre les molécules du » fel, ou parce que les molécules d'eau ont une affinité s particuliere avec les particules du fel. Dans d’autres # circonftances, il fe fervent du mot ffolution, pour » fignifier le mélange fingulier qui réfulte de la fuf- » penfon du corps diffous dans le diflolvant. Onat- » tache cette idée au mot dffolution , lorfqu’on dit : s la diffolution du cuivre dans l'huile de vitriol eft bleue. # C’eit dans ce dernier fens que j'employerai ordi- > naïrement le mot ffolurion dans ce mémoire, S'il » n'arrive de lui donner la premiere fignification, » j'aurai foin de le déterminer par les termes qui l’ac- # compagneront. » Nous n'avons jufqu'ici aucune connoiffance cer- # taine fur le méchanifme de la diflolution, confdé- # rée comme l’aétion du diflolvant. Les meilleurs s Chimiftes prétendent que la nature du mélange » fingulier dudiflolvant , & du corps diflous qui conf. + titue l’état de diflolution , eft mieux connue , & # qu'il confifte dans l’umion intime des dernieres mo- » lécules de ces deux corps. Mais comme cette con- » fidération n’eft point eflentielle à mon objet, je # ne m'arrèêterai point à examiner les expériences s qui femblent démontrer la vérité de ce fentiment. s Il me fufhira de remarquer que ce mélange fingu- » lier, qui conflitue l’état de diffolution , eît carac- # térifé par une propriété fenfible à laquelle on peut » le reconnoitre. » Cette qualité fenfible , c’eft la tranfparence. » Ainfi, de Paveu de tous les Chimiftes , lorfqu’un > corps folide ou fluide eft fufpendu dans un fluide + de forte que du mélange de fes deux corps, ilen » téfulte un fluide homogene & tranfparent , alors # On peut dire que les deux corps font mêlés dans » Pétat d'une véritable diflolution. Si au contraire # un Corps folide divifé en molécules très-fubtiles, + eft fufpendu dans un fluide tranfparent , de forte » que du mélange de ces deux corps , 1l réfulte un E V A 127 » tout hétérogene opaque; alors on peut aflürer qu'il » n’y a point de véritable diffolution, & que le corps » folide eft fufpendu dans le fluide , dans l’état que » les Chimiftes appellent sas de Jimple divifion mé. » chanique. De même fi. deux fluides font mêlés en- » femble , de forte que leurs molécules , quoique »très-fubtiles , ne foient cependant pas fi intime- » ment umies , qu'elles ne confervent encore leurs » propriétés particulieres ; le fluide qui réfulte du » mélange de ces deux fhudes , n’eft point homoge- » ne. Les réfraétions différentes que la lumiere fouf. » fre en le traverfant, le rendent opaque , quoique » compofé de deux fluides tranfparens ; & dans ce » cas, il n’y a point de véritable diffolution ; ces » deux fluides font mêlés dans l’état de fimple divi- » fion méchanique. » Après ce que je viens de dire fur la difolution, » on concevra aifément le deffein de ce mémoire. » Le voici en peu de mots. Perfonne n'ignore que » Peau peut fe charger de fel , &c le foûtenir dans » Pétat de véritable diflolution. On fait de plus que » le mélange d’eau & de fel a certaines propriétés » particulieres ; que, par exemple, une certaine » quantité d’eau à un degré de chaleur donné , ne » peut tenir en diflolution qu'une quantité de fel » déterminée ; qu’étant faoulée de fel à un degré » de chaleur donné , elle en pourroit difioudre de » nouveau, fi on l’échauftoit d'avantage ; qu’au con- » traire , fi elle venoit à fe refroidir , elle laiferoit » néceflairement précipiter une partie du fel qu’elle » tenoit en diflolution. Appliquez au mélange d’air » ct d’eau, qui conftitue notre atmofphere, ce que »je viens de dire fur les diffolutions des fels dans » l’eau, c’eft-là le principal objet de la premiere par- » tie de ce mémoire. Je me propofe donc de faire » voir que l’air de notre atmofphere contient toû- » jours de l’eau dans l’état de véritable diffolution ; » qu’une quantité d’air déterminée à un degré de » chaleur donné , ne peut tenir en diffolution qu’une » certaine quantité d’eau ; qu'étant faoulé d’eau à un » depré de chaleur donné , il en pourroit difloudre » de nouvelle, fi on léchauffoit davantage ; qu'au » contraire, fi étant faoulé d’eau à un degré de cha- » leur donné, il vient à fe refroidir, il laifle nécef- » fairement précipiter une partie de l’eau qu’il tenoit » en diflolution. Lu ARTICLE PREMIER. L'eau fouffre dans l'air une véritable diffolurion, « Cette propoñition peut facile- » ment fe démontrer par une expérience connue de » tout le monde, mais à laquelle on n’avoit pas fait » toute l’attention qu’elle mérite. Il s’agit feulement » de mettre un jour d'été de la glace dans un verre » bien fec. Le verre s’obfcurcit bien-tôt après ; fes » parois extérieures fe couvrent d’une infinité de pe- » tites bulles d’eau. L’eau qui, dans cette expérience, » s'attache en très-sgrande quantité aux parois du » verre , fe trouvoit donc fufpendue dans lair qui » lenvironnoit , & comme elle ne troubloit point fa » tranfparence , cette expérience réuffiffant par le » tems le plus ferein , il eft clair qu’elle y étoit con- # tenue dans l’état d’une véritable diflolution. Ce » font les premieres réflexions que j’ai faites fur cette » expérience / qui m'ont conduit de conféquence en » conféquence , à toutes les propofñtions que je tä- » cherai d'établir dans ce mémoire. ART. II, Cette diffolution à les mêmes propriétés que la diffolution de la pläpart des fels dans Peau. « L'air » échauffé à un degré de chaleur donné, ne peut te- » nir en difolution qu’une quantité d’eau détermi- » née, Si étant chargé de cette quantité d’eau, il » vient à fe refroidir , il laïfle précipiter une partie » de l’eau qu'il tenoit en diflolution (a). Si au con- (a) « J'employe dans ce mémoire les mots précipiter & » précipitation dans le fens des Chimiftes, pour fenifer le 128 E V À s traire 1l s’'échauffe , il en peut difloudre davanta- » ge. L'expérience qui fuit me paroït démontrer évi- # demment la vérité de ce que je viens d'avancer. » Vers le commencement du mois d’Août de l’an- s née derniere , le tems étant fort ferein , je pris une # bouteilleronde de verre blanc : je la bouchaï exac- + tement ; elle ne contenoitque de l’air, dont la cha- » leur étoit ce jour là au vingtieme degré du ther- » mometre de M. de Reaumur : je laïffai cette bou- + teille fur ma fenêtre , & quelques jours après j’ob- # fervai le matin, que le froid de la nuit ayant fait » defcendre mon thermometre au quinzieme degré, » ce froid avoit déja fait précipiter une partie de + l’eau difloute dans l’air renfermé dans ma bouteil- # le. Cette eau étoit ramaflée en petites gouttelettes, # à la partie fupérieure , qui étant la plus expofée, #devoit fe refroidir la premiere. Après cette pre- # muere ohfervation, je tranfportai ma bouteille fur # la plate-forme de notre obfervatoire ; je l’y fixai » fur Le porte-lunette de la machine paralla@ique ; je # mis au même endroit un thermometre : vifitant ma s bouteille tous les matins ; j’obfervai qu'au 15° de- + gré, 1l fe formoit une petite rofée dans l’intérieur # & à la partie fupérieure de la bouteille | & que # cette rofée étoit d'autant plus confidérable , que le + froid de Ja nuit avoit fait defcendre le thermome- » tre plus bas ; enfin vers le fixieme degré , la rofée # qui fe formoit dans l’intérieur de la bouteille »# étoit fi confidérable, que j'ai cru pouvoir en con- # clure, qu’une grande partie du poids de l’a, au # moins en été, doit être attribuée à l’eau qu'il nent » en diflolution. Lorfque la chaleur étoit aflez forte, # l'air contenu dans la bouteille diflolvoit dans le # jour l’eau qui s’étoit précipitée pendant la nuit. # Voici une autre expérience qui , dans le fond, + ne differe point de la précédente , &c qui demande # beaucoup moins de tems. Je prends un jour d’été # un globe de verre blanc (2) ; je bouche exaéte- # ment fon ouverture ( c ) ; examinant ce globe avec # toute l’attention poflible, on n’y peut pas décou- # vrir une feule gouttelette d’eau. Ce globe étant # ainfi préparé , je le place fur un grand gobelet + plein d’eau refroidie prefqu’au terme de la glace ; # de maniere qu'une partie du globe foit contigue à + l’eau : après avoir laiflé les chofes dans cet état # pendant trois ou quatre minutes , je retire le glo- # be, & ayant efluyé la partie mouillée , qui éroit + contigue à l’eau, on la trouve couverte intérieu- # rement depetites gouttes d’eau : cette eau fe redif- # fout à mefure que le globe fe réchauffe ; enfiute s laiflant échauffer l’eau contenue dans le gobelet, # & y expofant le globe à diverfes reprifes, on ob- # ferve que moins l’eau du gobelet eft froide , moins # eft grande la quantité d’eau qui fe précipite , & # qu'enfin au-deflus d’un certain degré, il ne fe pré- # cipite plus rien. Dans cette expérience , Je mets :» feulement une partie du globe dans l’eau froide, ‘# afin de concentrer dans un petit efpace l’eau qui # fe précipite : fi on plongeoit le globe tout entier » dans l’eau froide, l’eau qu fe précipiteroit ne fe- » roit pas en aflez grande quantité pour être bien 2 pallage de l'état de véritable diffolution d’un corps dans un >» menitrue à l’état de fimple diviion méchanique ». Des corps qui de l’état de diflolution ont paflé à celui de divilion méchanique, les uns tombent au fond de la liqueur , d’autres {e ramaflent à fa furface , d’autres y reftent fufpendus. (b) « Je me fers de globes tout neufs, afin qu'on ne puifle 5» pas foupçonner qu'on y ait mis de l’eau. Plus ce globe eft > grand, plus le fuccès de cette expérience eft manifefte, | > ja furface des globes naugmentant pas dans la même raï- » fon que la quantité d’air qu’ils contiennent. (c) » Je mets premierement fur l'ouverture un morceau de » carte, enfuite plulieurs couches de cire fondue ; par-deflus » Ja cire je mets du lut ordinaire bien étendu & bien féché > fans aucune crevañle : enfin je couvre le tout d’un linge en- æ duit d'un lut fait avec le blanç d'œuf & la chaux. » fenfiblement étendue fur toute la furface inté- » rieure du globe. » On pourroit penfer que, quoique je ne me ferve » que de globes tout neufs , l’air auroit cependant » pù y porter des particules d’eau qui, étendues fur » toute la furface du globe, ne s’appercevroient pas, » &t ne deviendroient fenfibles dans cétte expérien- »ce , que parce que l’inégalité de chaleur des pa- » rois du globe les feroit fe ramaffer dans l’endroit le » plus froid. Cette idée pourroit faire douter, fi l’ex- » périence dont 1l s’agit eft effeétivement démonf » trative ; c’eit pourquoi j'ai cru qu'il ne feroit pas » inutile de prévénir cette objetion par l'expérience » qui fuit. Jai pris un globe de verre, bouché com- » me Je lai dit ci-deflus : dans l’expérience dont il » s'agit, l’eau refroidie au huitieme deoré , produi- » foit une précipitation bien fenfble fur la partie du » globe qui lui étoit contigué. Au dixieme desré, » il ne fe faifoit aucune précipitation : l'eau étant » froide à ce degré, j’ai expolé ce globe au foleït. » Il eft certain que dans ce dernier cas , la chaleur » des parties du globe qui étoit hors de l’eau , fur- » pañloit plus la chaleur de la partie du globe qui » Étoit contigué à l’eau , que lorfque le globe étoit » dans la chambre , & que l’eau étoit froide au hui- » tieme degré : cependantil ne fe faifoit aucune pré- » cipitation ; d’où il réfulte , que l'inégalité de cha- » leur des différentes parties du globe , ne fuffit pas » pour produire cet effet ; que par conféquent les » gouttelettes d’eau , qui dans cette expérience fe » précipitent fur la partie du globe contigue à l’eau » froide , n’étoient point auparavant étendues fur » toute la furface intérieure du globe ; & en un mot, »que cette expérience démontre effeétivement ce » que nous avions deffein de prouver. # Nous avons démontré dans l’article précédent ;- » que l’eau fe foûtient dans l'air , dans Pétat d’u- »ne véritable diflolution (/). Maintenant fi l’on » pefe attentivement toutes les circonftances des » deux expériences que je viens de rapporter , om » fera obligé de convenir qu’elles démontrent tout » Ce que nous avons avancé au commencement de » cet article. Nous devons encore remarquer, que » de même que les fels enfe cryftallifant, retiennent » une partie de l’eau qui les tenoit en diffolution > # ainf l’eau qui fe précipite, retient une partie de » l’air qui la tenoit en diffolution : de même que plu« » fieurs fels privés de leur eau de cryftallifation , la » reprennent s'ils font expofés à l’air ; ainfi l’eau dé- » pouillée, s’il eft permis de parler ainf, de fon air » de cryftallifation , le reprend bien-tôt après: d’où » il fuit qu’il y a une parfaite analogie entre la diflo- » lution des {els dans l’eau , & celle de l’eau dans » l'air ; de forte que le phyficien, qui pourra déve. » lopper le méchanifme de la diffolution des fels dans » l’eau, expliquera en mêmetems le méchanifme de » l’élevation & de la fufpenfion de Peau dans l'air, &z » donnera , pour ainfi dire , la clé de l'explication + entiere & exate de la formation de plufeursmé- » téores #. Quoique les deux articles de mon mémoire, que, je viens de tranfcrire, paroïfent fuffifans pour éta- blir ce que je m’étois propofé, que l’eau fe foûtient dans l’air dans l’état de diflolution, & que cette dif. folution a les mêmes propriétés que celle des fels dans l’eau : je crois cependant qu'il ne fera pas inu- tile d’ajoûter le troifieme article, fur la maniere de déterminer les caufes qui font varier la quantité d’eau que l'air tient en diflolution , parce que les (4) « Outre l'ean véritablement difloute, l'air contient » fouvent de l’eau furabondante qui trouble fa tranfparences » & forme les nuées & les brouillards, Qa voit bien qu'il ne » s'agit ici que de la premiere, S. expériences éxpériences rapportées dans cet article, cohfirrent encore cette théorie. ARTICLE III, Maniere de déterminer les caufes qui font varier la quantité d’eau que l'air libre tient enr dif- Jolution. « L’aw de notre atmofphere ne contient » pas toujours la même quantité d’eau en diflolu- s tion: deux caufes principales, levent & la cha- » leur, la font varier très- confidérablement. Avant » de pañler au détail des obfervations que j'ai faites » fur ce fujet , je dois premierement expliquerce que » j'entends par degré de faturarion de l'air; dé crirel’ex- # périence dont je me fers pour la déterminer , &cre: » connoître le plus ou le moinsd’eau que l’airtient en # diflolution. » Nous avons démontré plus haut que l'air peut » difloudre d'autant plus d’eau , qu'il eft plus chaud. 3 Cela pofé, on conçoit aifément qu'il y a.en tout #.tems un certain degré de feu auquel l’air feroit » faoulé d’eau. P’appelle ce degré , degré de faturation » de l'air. Suppofons., pour merendre plus clair, que le 28 d’Août l’air de l’atmofphere tienne en diflo- » lution une quantité d’eautelle qu'ilenferoit faoulé » au dixieme degré : ce jour-là lair pourroit être re- s froidi jufqu'à ce degré, fans qu'il fe précipitât au- # cune partie de l’eau qu'il tient en difiolution : re- + froidi à ce degré, il ne pourroit diffoudre de nou- » Velle eau; refroidi au-deflous de ce degré, il l4- » cheroit néceffairement une partie de l’eau qu'il # tenoit en diflolution ; &1l en laïifleroit précipiter » une quantité d'autant plus grande, que le froid # feroit plus fort : dans ce cas Le dixieme degré fera + appellé Ze degré de faturation de l'air. Il eft clair que s» plus le degré de faturation eft élevé, plus l’airtient » d’eau en diflolution; d’où il fuit qu’en obfervant » chaque jour le degré de faturation de l'air, exami- + nant en même tems les circonftances du tems., on # peut aifément parvenir à la .connoiflance des cau- » fes qui font varier la quantité d’eau que l’air tient #en diffolution, Voici l’expérience facile dont je me + fers pour déterminer le degré de faturation de l’air, # fuppofé que le degré foit au-deflus du terme de la »glace. (e | » Je prends de l'eau refroidie, au point de faire pré- # cipiter fenfiblement l’eau que l'air tient en diflolu- » tion fut les paroïs extérieures du vaifleau dans le- » quel elle eftcontenue. Je mets de cétte eau dans » un grand verre bien fec, y plongeant:la boule d’un >» thermometre , afin d'obferver fon desré de cha- + leur (f) : je la laifle échauffer d’un demi-desré, »# après quoi je la tranfporte dans un autre verte, Si » à ce nouveau degré l’eau difloute dans l'air {e pré. + cipite encore fur les-paroiïs extérieuresidu verte, + je continue de laïfler échauffer l’eau de demi-de- » gré en demi-depré, jufqu'à ce que j'aye faïfi.le de- » gré au-deffus duquel ilne fe précipite plus rien. Ce » degré eft le degré de faturation de l’air.….Par exem- » ple, le foir du $ Oétobre 1752, la chaleur de l'air + Étant au treizieme degré, l’eau qu'il tenoit en dif. # folution commencçoit à fe précipiter {ur le verre # refroidi au cinquième degré & demi : au-deflus de » ce degré , la furface extérieure du verre reftoit {e- + che ; au-deflous de ce deoré., l'eau qui fe précipi- # toit de Pair fur le verre, étoit d'autant plus conf- …. () 5 Quoiqu'aù moyende cette expérience on ne pnifle > déterminer le plus ou moins d’eau que l'air tientien diflolu- > tion, que pour les téms où le degré de faturation ft au- > deflus duterme de fa glacé, je crois cependant que perfon: » néne me contefléra que les conclufions que. j'enttire,, ne > puillent auf s'appliqueriaux tems.où ce degré.eft au-def. > (ous duterme.de fa.glace. (f) » Pour faire cette expérience avec facilité & exa@i- » tude, on doit fe feivir de thermometre à efprit-de - vin, > dont boule &e tuyau foient auf petits qu'il eft pofible: +» Les thermometres dont je me {ers, font gradués fur l'és x chelle de M.de Réaumur », Tome VI. : in E V À t29 » dérable ; que le vetreétoit plus froid. El ef clair » queïce jour-là le degré de faturation de l’air étoit ” Un peu au-deflus du cinquieme degré & demi, pui£ » qué refroidi a ce degré , il commencçoït. à laifer * précipiter une partie de l’eau qu'il tenoit en diflo- » lution. On peut donc, au moyen de cette expé- #rience, déterminer en diffétens tems le degré de »# faturation de Pair, & ainf reconnoitre les cäufes # qui font varier la quantité d’eau qu'il tient en dif= » {olution », | | ver Je ne dois point oublier ici de parler d’une objec< tion quin’aété propofée par un habile phyficien, & qui au premier coup-d’œil paroît renverfer la théo- rie. que je viens de tâcher d'établir. Voici lobjeton; Suivant les experiences de quelques phyficiens, l’eau sévapore dans le vide; elle peut donc s'élever fans le fecoursde l'air, fans ÿ être foûtenue | comme je Par dit dans-l’état de diflolution. Mais f le phyfcien avoit fait attention que l’eau contient une quantité immenfe d’air dont on ne peut la purger cnticrement, ëc qu’elle ne peut s'évaporer fans. que l'air qu'elle contient fe développe, ilauroit aifément remarqué que.cette objeétion renferme un, paradoxe, & qu'il elt impoñlible qu’un efpace.contenant de l'eau qui s’é- vapore., refte parfaitement vuide d'air, Jufqu'ici nous avons examiné quels font les corps fufceptibles d’évaporation , quelle eft la nature des: particules qui s’élevent dans l’air par cette voie, par quelles fuppoñtionslesPhyficiens avoient tâché d’ex- pliquer le:méchanifme de l’évaporarion:; enfin dans la. partie du mémoire que jelviens. de tranfcrire » J'ai confidéré l’état dans lequel l’eau évaporée fe trou: voit fufpendue en, l’air; & j'ai tâché de faire voir qu’elle y étoit fufpendue dans l’état de diffolution : ë& que cette diffolution avoit les mêmes propriétés. que celle de la plüpart des fels dans l’eau. Poux ache- ver ce qui concerne cette matiere, il nousrefte {eur lement à parler des caufes qui accélerent ou retar- dentl’évaporation ; & à rechercher l'utilité générale: de cette propriété finguliere de la plus grande partie desicorps,, par laquelle ils peuvent s'élever dans l'at-, mofphere, | : Perfonne n’isnore que la chaleur eft la caufe qui accélere le plus l’évaporarion ; ainf les corps fufcep- tibles d'évaporarion , expofés au foleil ou à l'a@ion. du feu, s’évaporent d’autant plus rapidement, qu’ils font, plus échauffés. Ces -corps ne peuvent être échauttés , fans communiquer leur chaleur à l'air en vironnant. Cet air étant échauffé, fon degré de cha- leur devient plus éloigné de fon degré de faturation 3 il acquiert donc par-là plus d’aétivité à difloudre les, particules évaporables, & à s’en charger. Remar- quons encore avec M,Hamberger, que l'air contigu. aux corps évaporables, lorfqu’il eftéchauffé par l’ac- tion du feu, devient plus rare & plus lever, s'éleve &t fe renouvelle continuellement; & que cerenou vellement continuel de l'air ne contribue pas peu à accélérer l’évaporations à à . L'air contenu en grande quantité & fous. une for- me non-élaftique dans l’intérieur des corps fufcepti- bles d'évaporation: .eft encore un agent qui, mis en aéhion par la chaleur, contribue à accélérer l’évapo- ration 1C'eft cequ'on.obferve tous les jours dans l’éo- lipyle.:.Ce vafe à demi-plein d’eau étant mis fur le feu jufqu'à ce que l’eau bouille, Vair contenu dans cette eau recouvrant. par, la chaleur fon élafticité , s’endégage, s'échappeavec rapidité par l'ouverture étroite de ce vaifleau , & entraîne peu-à-peu tonte l’eau dans laquelle il étoit contenu. Dans ce/cas if eft,viñble que l’air extérieur ne peut point agir fur l’eau contenue dans l’éolipyle, & que Pévaporasion de cette.eau eft entierement dûe au développement de l’air qui, y étoit contenu, Voyex ÉOUPYLE. _+Le vent naturel ou artificiel accélers au lé F R 130 E V A poration; ce qui paroît dépendre principalement du renouvellement continuel de l’air qui environne les corps. Indépendamment de la chaleur & du vent, diver- fes circonftances de l’atmofphere peuvent encore augmenter On diminuer la rapidité de l’évaporarion. Par rapport à ces circonftances de l’atmofphete, qui font favorables ou contraires À l’évzporarion , nous pouvons établir, d’aptès Pobfervation de cetteregle générale, que plus le degré de chaleur de l’air eft au- deflus de fon degré de faturation, plus l’évaporation eft rapide. Cela pofé,, pour déterminer les circonf- tances dans lefquelles l’éyaporarion eft plus ou moins rapide, il fufiira d’obferver dans quelles circonftan- ces le degré de chaleur de l'air eft plus éloigné de fon degré de faturation, Pendant la nuit le degré de chaleur de Pair eft of- dinairement de beaucoup plus près du degré de fatur- ration, que dans le jour; quelquefois même Pair fe refroidit pendant la nuit jufqu'au degré de faturation ou au-delà, comme je lai fait voir dans la feconde partie de mon mémoire : aufli obferve-t-on que l’e- vaporation eft beaucoup moïs rapide pendant la nuit que dans le jour. Il y a encore une autre caufe qui concourt à rendre léyaporation plus lente dans la nuit que pendant le jour ; c’eft que dans la nuit l'air eft ordinairement moins agite. La rapidité de l’évaporation {ouffre encore beau- coup de variétés, fuivant la direétion du vent. Le vent de nord eft celui par lequel le degré de chaleur de l'air ef le plus éloigné de fon degré de faturation. ‘C’eft aufli par Le vent que lévaporation eft la plus ra- pide; au moins pins-je Paflürer avéc certitude du bas Languedoc, où je lai obfervé, &il eft vraïflem- blable que ce doit être la même chofe dans pref- que toute l’Europe. Après le nord vient le nord- oùeft, qu’on appelle ici w7ag1ffral, en Italie z7aeftro ; c’eft le plus falutaire , & celui qui regne lelplus dans le bas Languedoc. Lorfqwil fouffle dans ce pays, Pair y eft un peu plus chargé d’eau que pat le vent de nord ; maïs il'eft encore très-ficcatif, c’eft: à-dire favorable à l’évaporation. Le fud-eft, qui vient di- reétement de la mer, eft le vent par lequel le deoré de chaleur de l'air eft le plus près de fon degré de fa- turation ; auf l’évaporarion eit-elle moins rapide lorf qu'il fouffle , que par tout autre vent. | pe) On voit par ce que nous venons de dire, qu'il ny à point d’umiformité dans l’évaporarion ; que fui- vant les différens états de Patmofphere , elle eft plus ou moins rapide, quelquefois nulle ; & que même il arrive certaines nuits que l'air fe refroidiflant au- delà du degré de fâturation , les corps évaporables augmentent du poids de l’eau que lai dépofe {ur eux. La conftiturion de Pair étant donc aufli varia- ble, il n’eft pas poflble de déterminer la quantité d’eau qui peut s'élever dans l’atmofphere dans l’ef- pace d’un jour, ni même pendant une année. M. Muflchenbroeck a déterminé fur fesobfervations fai- tes à Leyde , & fur celles de M. Sedileau, faites en France, qu’année moyenne l’eau contenue dans un baffin quarré de plomb’, diminuoit à-peu-près de 28 pouces de hauteur, &c'que par conféquent l’évapora- tion alloit à cette quantité ; maïs ce n'eft qu'un 4-pei près, l'évaporation étant d’un tiers plus confidérable certaines années que d’autres, commeñl paroît par les obfervations de M. Sédileau, Voyez l’Effai de phy- fique, pag. 775. Voyez auf FLEUVE , PLUIE, ét. : Tous les animaux, tous les-vésétaux, uñe partie des minéraux, la terre qu’on appelle proprement humus, qui formée des débris des animaux &c des vésétaux, fournit en même tems la matiereprochaine de ces corps ; enfin l’eau : toutes ces fubftances font, comme nous lavons dit plus haut, fufceptibles d’e- gaporation, Cette multitude immenfe de corps aux- quels s'étend cette propriété , nous fait aflez comë prendre qu’elle appartient en quelque mamiere à l’é- conomie générale de notre globe: &, en effet, c’eft au moyen de cette propriété que l’eau, qui fait la bafe de tous les corps vivans, eftreportée & difiri- buée fans cefle fur toute la furface de la terré, con- tre fa pente naturelle, qui la porte à fe ramañfler toute entiere dans les endroits de la terre qui font les moins éloignés de fon centre : par elle les matieres animales & végétales, parvenues par la pourriture au dernier degré de leur réfolution, s’élevent dans l'atmofphere, pour être reportées enfuite à la terre; & fervir à la conftruétion de nouveaux êtres, C’eft en confidérant cette circulation admiable, qwon peut prendre, avec quelques phyficiens , une idée aufi grande que jufte de utilité prémiere &c pour ainfi dire cofrique du fluide qui environne notré globe. Finiflons en appliquant à ce fluide la penfés de Virgile fur lame du monde : Scilicet huc reddi deinde ac re[oluta referri Omnia, nec morti effe locum. Géorg. Lib. 17, Cet article ef? de M. LE Ror, doëleur en Medecine de la faculté de Montpellier, 6: de la fociété royale des Sciences de La même ville, EVAPORATION , (Chimie) L’évaporation eft un moyen chimique dont l’ufage eft très-étendu ; il con- fifte à diffiper par le moyen du feu, en tout ou en partie, un liquide expofé à Pair libre, & qui tient en diflolutionune fubftance , laquelle n’eft'mi vola tile , ni altérable au degré de feu qui opere la diffs pation de ce hquide. On a recours à l’évaporztion pour opérer la fépas ration dont nous venons de parler, toutes les fois qu’on ne fé met point en peine du liquide relevé par le feu : lorfqu'on veut lé retenir au contraire dans une vüe philofophique, médicinale ou économique; comme dans examen chimique d’un liquide com- poié ; dans la préparation des firops aromatiques & alkali-volatils, & dans la concentration d’une tein ture, on doit avoir récours à la diftillation, Voyez DisTiLLATION. Auffi n’eft-ce proprement que l’eau que l’on fépare de diverfes fubftances moins volati- les, dans les cas où lévaporation eft la plus em- ployée. L'évaporation a fur la diftillation cet avantage fn gulier , qu’elle opere la féparation qu’on fe propofe, en beaucoup moins de tems que la diftillation ne los pere, foit que Pair contribue matériellement à cet effet, foit qu'il dépende uniquement de la liberté . qu'ont les vapeurs de fe raréfier dans Pair libre jufz qu’à la diffipation abfolue , c’eft-à-dire jufqu'à la deftruttion de toute liaifon agprégutive (voyez Le mor CHIMIE, par ex. ); ainfi on doit mettre en œuvre cé moyen fimple & abregé, toutes les fois qu'une des circonftances énoncées ci-deflus ne s’oppofe point à fon emploi. | Le degré de feu étant égal, une éyaporation eft d'autant plus rapide, que le liquide à évaporer eft expofé à l'air libre fous une plus grande furfice; & au contraire. ZA On diffipe par l’évaporarion l’eau furabondante à la diflolution d’un fel; & une partie de l’eau de la dif {olution , pour difpofer ce fel à la cryitallifation. Voyez SEL & CRYSTALLISATION, La cuite desfi- rops, celle des robs, des gelées, des élettuaires, &c la préparation des extraits des végétaux, la deffic= cation du lait, Gc. s’exécutent paf l'eyanorationr Quoïquele degré de feu auquel onexécute ces di: verfes opérations, foit aflez leger, puifqu'ilne peut excéder la chaleur dont eft fufceptible l’eäu bouil- lante chargée de diverfes matieres, cependant l’eau bouillante, & même l’eau agitée moins fenfiblement par un degré de chaleur inférieur, attaque la com- E VA poñtion intérieure de plufeurs fubftances , & fur: tout de certains fels & de certains extraits, Voyez EXTRAIT , voyez auffi SEL. Îl faut dans ces cas exé- cuter l'évaporation à une foible chaleur. | On a communément recours au bain-marie dans ces occafons ; & ce fecours eft non-feulement très- commode à cet égard, mais il devient même quel- quefois néceflaire lorfqu’oneft obligé de fe fervir de vaifleaux de terre ou de verre, qu’on n’expofe au feu nud qu'avec beaucoup de rifque, On eft dans le cas de fe fervir indifpenfablement de vaifleaux de terre ou de verre, lorfque les matieres À traiter s’al- téreroient en attaquant les vaifleaux de métal. Les diflolutions de fel qu’on veut difpofer à la cryftalli- fation par l'évaporation , {e traitent tohjours dans des vaifleaux de terre ou de verre. Voyez VAISSEAUX s V0yez SEL. M, / On exécute des éyaporations dans toute la latitude du feu chimique , qui s’étend depuis le degre le plus foible (voyez FEU) jufqu’à ébullition des liquides compofés, qui font les fujets ordinaires des évapora- ions, c’eft-à-dire des diflolutions plus où moins rap- prochées de divers fels, des décoëtions de végétaux ou de fubftances animales, &c. L’évaporation qui s’O- pere par la feule chaleur de l’atmofphere, eft connue dans Part fous le nom d’évaporarion irfenfible. Notre célebre M. Roüelle a employé lévaporation infenfble Avec un très-grand avantage dans fes travaux fur les fels. Voyez SEL, voyez CRYSTALLISATION. Elle n'eft pratiquable que fur ces fubitances ; tous les au- tres corpolés folubles dans l’eau, éprouveroient dans les mêmes circonftances un mouvement inteftin qui les dénatureroit. Voyez FERMENTATION. Les lois de manuel, felon lefquelles il faut hâter, retarder ou fufpendre l’évaporarion, e déduifent des différentes vües qu’on fe propofe en l’employant, & fe trouvent dans les articles particuliers où il s’agit de produits chimiques ou pharmaceutiques obtenus par ce moÿen. Voyez CRYSTALLISATION , Ex- TRAIT, SiROP, ROB, GELÉE, Ge. (8) EVAPORER , v. a@. (Docimaft.) ou faire fumer une coupelle, {e dit de la defficcation qu’on lui donne en la mettant renverfée fous la moufile une heure avant que d'y mettre le régule , f elle ef faite de cendres de bois, parce qu’il y refte prefque toûjours une petite portion d’alkali qui attire l'humidité de l'air. Celles qui font faites de cendres d’os d'animaux, ne veulent pas être recuites pendant fi long-tems, parce qu’elles ne retiennent pas l'humidité auffi for- tement ; elles ne contiennent que celle qui fe répand affez uniformément dans tous les corps environnés de l’atmofphere, qu’elles prennent À la vérité en af Lez grande quantité par leur qualité d’abforbans. On peut conftarer la préfence de l'humidité dans les cot- pelles, par la diftillation ; maïs ce n’eft pas pour la leur enlever feulement qu’on les éyapore, c’eft en- _£ore pour difiiper quelques portions de phlosiftique | qui peut y Être, foit de la part des liqueurs mucila- gineufes , avec lefquelles on pelote la cendrée pour l’humeéter, ou des petites molécules de charbon que la calcination n'aura pû détruite : ainfi faute d’ée- porer la coupelle , il peut arriver ou que le plomb foit enlevé par petites gouttes par lexpanfon des Vapeurs aqueufes fortant ayec impétuofité de la cou- pelle, ou réduit par le phlogiftique qu'il y trouve ; ce qui occafionnant une effervefcence & un bour- foufflement , fait fendre la coupelle, Quand les va- Peurs font en petite quantité, le plomb ne fait que fe trémoufler & changer de place; enforte qu'il fe tépand quelquefois. Voyez COUPELLE G AFFINAGE, au Mob ESSAT, Cer article ef de M. DE VILLIERS. “EVASER, y. a@. (Arc méchanig.) c'eft aggrandir l'ouverture, enforte que l’orifice dé la chote évafée © Tome PI. pa k EURE 132 {oit plus étendu que fon fond, On r’évafe que ce qua Étoit déjà ouvert. EVASER, Evasé » (Jardin) On dit qu'un arbre Cft trop évafe, quand 1l a trop de circonférence :. on le dit de même d’une fleur. K EVATES , fubft. m. (Ait, anc.) c’étoit une bran- che ou divifion des druides | anciens philofophes celtiques. Poyez DRuIDES. Strabon divife les philofophes bretons & gaulois en trois feétes, les bardes, les vues » les druides, Il ajoûte que les bardes étoient poëtes 8 muficiens; les évates , prêtres & naturaliftes ; les druides ; Mora= ltes aufi-bien que naturalifies : mais Marcellin ; Voflius,& Hornius les réduifent tous à deux fettes s favoir, Les bardes & les druides. Enfin Céfar, y, FI. les renferme tous fous le nom de druides, Les évares ou vates de Strabon font probablement ceux que d’autres auteurs, & particulierement Am mien Marcellin appelle exbages ; mais M. Bouche # dans fon Hifloire de Provence, Liv. I. chap. ij.les dif- tingue. « Les ares, dit-il, étoient ceux qui prenoient » foin des facrifices & des autres cérémonies de la » region ; & les eubages pañloient leur tems À La » recherche & à la contemplation des myfteres de »lanature. 74 0yez EUBAGES ». Chambers. G) EVAUX, (Géog. mod.) ville du Bourbonnois, en France. Long. 20, 10. Lar, 46415, | EUBAGES , f. m. (Hift. anc.) étoient une clafle de prêtres ou philofophes chez les anciens Celtes où Gaulois. Chorier penfe que les exbages font les mê- mes que les druides & les faronides de Diodore : d’autres penfent que les eubages {ont ceux que Stra- bon , &y, IP. p. 196. appelle évates ou vates. Sur ce principe, il y a lieu de conjetturer qu'il devroit avoir Écrit ezgages ; étant très- facile de prendre r pour T. Voyez EVATES, | Quoi qu’il en foit, les exbages paroiffent avoir été une clafle différente des druides. Voyez DRUIDES. Did, de Trév, € Chambers. (G) * EUBOULIE,, f. f. (Myrhol.) déefle du boncon: feil ; elle avoit un temple à Rome. Son nom eft for- mé de «ÿ, bien, & de Cour , corifeil, EUCHARISTIE Cf (Théol.) du grec xapis ia, atfion de graces ; facrement de la loi nouvelle , ainft nommé parce que Jefus-Chrift, en l’inftituant dans la derniere cene, prit du pain, & rendant graces à fon pere , benit ce pain, le rompit , le diftribua à fes apôtres , en leur difant, ceci ef? mon corps ; & que c’eft le principal moyen par lequel les Chrétiens rendent graces à Dieu, par Jefus-Chrift. On lappelle auf cene du S elgneur, parce qu'il fut inflitué dans la derniere cene 5 COMMUNION ; parce que c’eft le lien d’urité du corps de Jefus-Chriit & de l’Eglife ; Saint Sacrement , & parmi les Grecs , les Saints myfleres par excellence, parce que c’eft le principal des fignes des chofes facrées établi parJé- tus-Chrift ; viarique, parce qu'il eft particulierement néceflaire pour fortifier les fideles dans le paflage de cette vie à l’autre. Les Grecs lappellent fyraxe ou exlogie, parce que c’eft le lien de laflembiée du peuple, & la fource des bénédidtions de Dieu fur les Chrétiens. Voyez Communion , SACREMENT, MYSTERE , VIATIQUE, &c. Les Théologiens catholiques définiffent l'eucharif: se, un facrement de la loi nouvelle qui, fous les efpeces ou apparences du pain & du vin, contient réellement, véritablement , & fubftantiellement le corps & le fang de Notre- Seigneur Jefus-Chrift, pour être la nourriture {pirituelle de nos ames , en Y entretenant la vie de la grace. Ils la confiderent aufli comme un facrifice proprement dit, dans le- quel Jefus- Chrift eft offert à Dieu fon.pere par le miniftere des prêtres, & renouvelle , d’une maniere non fanglante , le facrifice fanglant qu'il ft de fa vie R 1] 132 E UC fur l'arbre de la croix , pour la rédemption du genre humain. Par ce facrifice de la nouvelle loi, les mé- rites de la mort & pañlion de Jefus-Chrift font appli- qués aux fideles; & on l'offre dans l’Eglife catholi- que, pour les vivans & pour les morts, Voyez Sa- CREMENT 6 SACRIFICE. La matiere de ce facrement eff le pain de froment & le vin; la difcipline de Péglife latine eft de .confa- crer avec du pain azymé ou fans levain: celle de l'églife greque.eft de fe fervir de pain levé; l’un & Pautre eft indifférent pour la validité du facrement. C’eft un précepte de traditioneccléfiaftique, de mé- let un peu d’eau dans le vin; la pratique en eft conf tante parmi les Grecs & les Latins ; & elle éftconfir- mée par S. Cyprien & par les autres peres. Ce mé- lange figure Punion des fideles avec Jefus-Chrift. La forme de ce facrement font ces paroles de Je- fus-Chrift, pour le pain, ceci eff mon corps ; pour lé vin, ceci ef? le calice de mon [ang , ou c’eff mon fang ; paroles que le prêtre prononce, non pas en {on pro- re nom , maïs au nom de Jefus-Chrift ; & par la ver- tu defquellés le pain &ile vin font tranflubftantiés ; où changés au corps & au fang de Jefus-Chrift. Voyez TRANSSUBSTANTIATION: Les évêques & les prêtres ont toüjours été les feuls miniftres où confécrateurs de l’excharifhie ; mais añciennement les diacres là diftribuoient aux fide- les, & ils pourroient encore aujourd’hui la difpen- fer, par ordre de l’évêque. Depuis l'inftitution de l’eschariflie , les Chrétiens ont , de tout tems, célébré ce myftere dans leurs af femblées relisieufés, dans lefquelles les évêques ou les prêtres bénifloient du pain & du vin, & le diftri- buoient aux affiftans, comme étant devenu par la confécration le vrai corps & le vraifang deJ.C.De-là lerefpe&t qu’ils ont eu pour l’euchariffie,&t l’adoration qu'ils lui ont rendue, comme on peut s’en convain- -cre par Les prieres qui, dans toutes les lithurgies , fu vent lesparolesde la confécration, & qui font autant d’aétes ou de témoignages d’adoration , & de monu- mens de la foi des peuples.Les cathécumenes & les pé- nitens n’affiftoient point à laconfécrationde l’eucharif- tie , & ne participoient point à fa réception. Jufqu’au douzieme fiecle , les fideles la recevoient fous les deux efpeces du pain & du vin ; tant dans l’églife latine que dans l’églife greque. Cette dermiere a rete- nu fon ancien ufage ; mais l’éghife latine a adopté celui dé n'admitiftrer l’euchariflie aux fimples fide- les, que fous l’efpece du pain. Le retranchement de la coupe, ou de l’elpece du vin , a occafionné les guerres les plus fanylantes en Bohème dans le quinzieme fiecle , & l’on en agita le rétabliffement au concile de Trente; mais enfin la ditcipline pré- fente de l’éslife , à cet égard , a prévalu. Voyez HuS- SITES 6 TABORITES. La préfénce réelle de Jefus-Chrift dans lezcharif- tie, a été premierement atraquée dans le neuviemé fiecle , par Jean Scot , dit Erigene ou l’Hibernois, qui avoit été précepteur de Charles le Chauve. Cet écrivain , que les Proteftans ont voulu faire paffet pour un grand génie, n’étoit qu'un fcholaftique tres- obfcrir dans {es exprefñions, & dont l'ouvrage fut l'euchariffte , connu à peine de trois ou quatre de fes contemporains, feroit demeuré dans un éternel ou- bli, fi les Calviniftes ne l’en euflent tiré , pout fe prévaloir de fon autorité ; mais au fond , ellé n’eft pas en elle-même d’un grand poids ; & le ftyle embrouillé de cet auteur ne décide pas une contro- verfe fi importante. Bérenger , archidiacte d’Angers, excita un peu plus de rumeur dans le onzieme fiecle. Il nia ouver- tement la préfence réelle & la tranflubftantiation : On tint, tant en France qu’en ltalie, divers conciles où il fut cité ; il y compatut, fut convaincu d’er- E UC reurs ; il les rétraëta & y rétomba ; Enfin, après dif- | férèntes variations, il mourut catholique er 1083, fi l’on en croit Clavius, l’auteur de la chronique de S. Martin, Hildebert du Mans, & Balride évêque de Dol, auteurs contemporains de Bérenger. Voyez BÉRENGARIENS. | Dans le feizieme fiecle , les Proteftans ont attaqué l’euchari(fie ; mais tous ne s’y font pas pris de la mé- me mamere. Luther & fes feétateurs, en reconnoif- fant la préfence réelle de Jefus-Chrift dans l’euchz- rifiie, ont rejetté la tranflubftantiation,foûtenant que la fubftance du pain & du vin demeuroit avec le cofps &c le fang de Jefus - Chrift. Voyez Consugs- TANTIATION 6 IMPANATION. Zuingle au contraire a enfeigné que lewchariflie n’étoit que la figure du corps & du fang de Jélus- Chrift, à laquelle on donnoit le nom des chofes dont elle ef la figure. Voyez ZUINGLIENS. Enfin Calvin a prétendu que lezchariffie renférme feulement la vertu du corps & du fang de Jefus- Chrift, & qu’on ne le reçoit dans ce facrement que par la foi, & d’une mamiere toute fpirituelle : les Anglicans ont adopté cette derniere doëtrine ; & lon peut voir, dans la belle hiftoire des variations écrite pat M. Bofluet , quel partage ces diverfes opimons ont occafionné parmi les Proteftans, Voyez CALvI- NISME & CALVINISTES, A entendre Calvin, fes premiers feétateurs &c les miniftres calviniftes, le dogme de la préfence réelle univerfellement établi dans l’églife romaine, n’étoit ren moms qu’une idolatrie manifefte & fufifante pour autorifer le fchifme qui en a féparé une gtande partie de l’Allemagne & tout le nord de l'Europe, 8 cependant , par une inconféquence évidente, ce même Calvin & fes feétateurs n’ont pas fait difficulté de communiquer, en matiere de religion, avec les Luthériens, qui font profeffion de croire la préfence réelle. Voyez LUTHÉRIENS. A Jamais difpute n’a été agitée avec plus de chaleur ue celle de la préfence réelle. Jamais queftion n’a été plus enveloppée de fubtilités de la part des no- vateurs, ni mieux & plus profondément difeutée de celle des Catholiques. Nous allons donner un précis des principales raïfons de part &c d’autre. | Les Catholiques prouvent la vérité de la préfence réelle par deux voies ; lune qu'ils appellent de dif- cuffion , l’autre, qu'ils appellent de prefcriprion. La voie de difcuffion confifte à prouver la vérité de la préfence réelle, par les textes de l’Ecriture qui regardent la promefle de leuchariflie, fon infti- tution , & l’ufage de ce.facrement : ceux qui concer- nent la promefle font ces paroles de Jefus-Cbrift, en S. Jean, chap. VI. ÿ.54. & fuiv. j£ vous ne mangez La chair du Fils de l'homme, & ne buvez [on Jang, vous n'aurez point ma vieen vous : ma chaïr ef? véritablement viande, € mon fang ef? véritablement breuvage. Celux qui mange ma chair 6 qui boit mon fang derneure en mot G moi en lui.Les paroles de l’inftitution font celles-ci ,: enS.Matt.chap.XX VI.verf. 26. S.Marc , XIV.verf. 22. S. Luc, chap. XXII. verf. 19. prenez & mangez, ceci ef? mon corps; prenez & buvez , cect ef} mon [ang où le calice de mon fang. Enfin les textes, où il s’agit de l'ufage de leuchariflie, fe trouvent dans la premiere épitre de S. Paul aux Corinthiens, chap. XX. verf. 16.Le caliceque nous béniffons n’efi-il pas la communi- cation du fang de Jefus-Chrif? ? le pain que nous rom- pons n’eff-il pas la participation du corps du Seigneur ? & dans le chap. fuiv. verf. 27. après avoir rapporté les paroles de l’inftitution,, l’apôtire ajoûte : ain qui conque aura mangé ce pain ou bé le calice du Seigneur indignerment ; fera coupable de la profanation du corps 6 du fang du Seigneur. Ces textes, difent les Catholiques, ne peuvent s'entendre que littéralement & dans le fens propre. C’eft ainfi que les Capharnaïtes, & les apôtres mê- me, entendirent les paroles de la promefle ; & Je- fus - Chrift ne dit pas un mot pour les détromper fur le fond de la chofe , quoiqu'ils fe trompaflent {ur la maniere dont Jefus-Chrift devoit donner fon corps à manger 6 fon fang à boire : ils penfoient en effet qu'il en feroit de la chair & du fang de Jéfus-Chrit comme des alimens ordinaires, & qu'äls les rece- vroient dans leur forme aturelle & phyfique ; idée qui fait horreur & quu les révolta. Mais Jefus-Chrift fans leur expliquer la maniere facramentelle dont il leur donneroit fa chair pour viande, & {on fang pour Preuvage, n’èn promet pas moins qu'il leur donnera l'un & lautre réellement ; & les Calvimiftes con- Yiennent'que dans ces pañlages il s’agit du vrai corps & du vrai fang de Jefus-Chrift, | Le pain & le vin ne font ni fignes naturels ni fignes arbitraires du corps & du fang de Jefus- Chrift ; & les paroles de l’inftitution feroient vuides de fens, fi fans avoir préparé l’efprit de fes difciples, le Sau- veur eût employé une métaphore aufi extraordinai- re pour leur dire qu'il leur donnoit le pain & le vin comme des fignes, ou des figures de fon corps & de fon fang. Enfin les paroles qui concernent l’'ufage de leuchariffie ne font pas moins précifes ; il n’y ft mention m de fymboles , ni de fignes, ni de figu- res, mais du corps & du fang de Jefus-Chrift, & de la profanation de l’un & de l’autre , quand on re- çoit imdignement l’eucharifhe. D'ailleurs ,ajoûtent-ils, comment les peres , pen- dant neuf fecles entiers, ont-ils entendu ces paroles, non pas dans les écrits polémiques, ou dans des ou- Vrages de controverfe, mais dans leurs catéchefes ou imltruétions aux cathécumenes, dans leuts {er- mohs & leurs homélies au peuple ? Comiment , pen- dant le même efpace de tems, les fideles ont-ils en- tendu ces textes ? Que croyoient-ils ? Que penfoient- ils ? Lorfque dans la célébration fréquente des faints myfteres, le prêtre ou le diacre leur préfentant l’ez- chariflie, dant , corpus Chrifii, voila ou ceci eff Le corps de Jefus-Chriff, is répondoient amer, ileflvrai; %, comme le fuppofent les Calviniftes, les uns & les autres ne croyoient pas la préfence réelle, le langa- ge des peres & célui du peuple n’étoit qu’un langa- ge évidemment faux & illufoire. Les Pafteurs, com- me le remarque très-bien l’auteur de la perpétuité de la foi , auroient fans cefle employé des expref- fions.qui énoncent précifément & formellement la préfence réelle de Jefus-Chrift dans l’exchariffie, pour wenfeigner qu'une préfence figurée & métaphori- que ; & les peuples , de leur côté , intimement con- vaincus que Jefus-Chrift n’étoit pas réellement pré= fent dans l’eucharijhie , auroient conçû leur profef- fion de foi dans des termes qui énonçoient formelle- ment là réalité de fa préfence. Cette double abfur- dité eft inconcevable dans la pratique. _ La voie de prefcription confifte à prouvet, que depius la naïffance de l’Eglife, jufqu’au téms où Bé- rengér à commencé à dogratifer , l'Eglife greque &z latine ont conftamment & unanimement profeflé la foi de la préfence réelle, & lont encore profeflée depuis Bérenger juiqu'a Calvin, & depuis Calvin juiqu'à nous: c’eit ce qu'ont démontré nos contro- verfiftes par la tradition non interrompue des peres de l’'Eglife, par les décifions des concilés, par tou- tes les lituroies des éghifes d'Orient & d'Occident, paf la confeffion même des feétes qui fe font fépa- rées de l’Eglife , telles qué les Neftoriens , les Euty- Chuens, Ge. ils ont amené les Calviniftes à ce point. On connoït l’époque de la naïffance dé votre erreur fur la préfence réelle : vous l’avez empruntée des Vaudois, des Petrobrufiens, des Henticiens; vous emontez juiqu'à Bérenger, ou tout au plus, jufqu’à E UC 133 Jean Scot. Vous êtes donc venu troubler l’'Eclife dans fa poffeffion., Et quels titres avez-vous pour la Combattre? Voyez HENRICIENS, c. , Les Proteftans répondent: 1°, que les preuves ti: rées de l’Ecriture ne font pas décifives ; & que les textes allégués par les C atholiques peuvent auffi- bien fe prendre dans un fens métaphorique , que ceux-ci: Génef. chap. XLVI, verf, 2. Les fps vaches grafles & les fept épis pleins font [ept années d'abondans ce : & dans Daniel, chap, XXI, vérf. 28, ce pro= phete expliquant à Nabuchodonofor ce que fignis fioit la ftatue coloffalé qu'il avoit vüe en {onge , il lui dit , vous êtes La tête d’or ; ou ce que Jefus-Chrift dit dans la parabole de l’yvraie, en S. Matt. chap. XXII, celui qui féme le bon grain , c’eff le Fils de L'hom: mme ; le champ , c’eft le monde ; la bonne fèmence » ce fon \ es enfans du royaume ; l’yvraie, ce Jont les méchans : lennemi qui la femée, ef? le diable ; la moiffon ef? la tonfommation des fiécles ; les moïffonneurs [ons Les an ges ; & S. Paul, en parlant de la pierre d’où coule: rent des fources d’eau pour défaltérer les Ifraëlites dans le défert, dit däns la premiere épître aux Co- rinthiens , chap. X, verf. 4. or /a pierre éroit le Chriff. Toutes ces expreffions , ajoûtént-ils , font évidem ment métaphoriques : donc , &c, ù On leur réplique avec fondement , que la difpari- té eft des plus fenfibles, & elle fe tiré de la nature des circonftances, de la difpofition des efprits, & des regles du langage établies & rectes parmi tous les hommes fenfés. Pharaon & Nabuchodonofor de- mandoïent l’explication d’un fonge : le premier de- mandoit à Jofeph ce que fignifoient ces fept vaches grafles & ces fept épis pleins qu'il ayoit vûs pen- dant fon fommeil ; il ne pouvoït donc prendre que dans un fens de figmfication & de figure la réponfe de Jofeph. Il en eft de même de Nabuchodonofor , par rapport à Daniel, ce monarque auroit perdu le fens commun, sil eût imagine qu'il étoit réellement la tête d’or de la ftatue qu'il avoit vüe en fonge : mais il comprit d’abord que cette tête pouvoit bien être une figure de fa propre perfonne &c de fon empire ; comme les autres portions de la même flatue, com pofées les unes d'argent, les autres d’airain, celles- ci de fer, celles-là d'argile, étoient des fymboles de différens autres princes & de leurs monarchies. Je: fus-Chrift propoloit & expliquoit une parabole dont lé corps étoit allégorique , 8 qui renfermoit nécef- fairement un fens d'application. Perfonne ne pou- voit s’y méprendre : enfin $S. Paul développoit aux fideles une figure de l’ancien Teftament. Les efprits étoient fufifamment difpofés à ne pas prendre le figne pour la chofe fignifiée : mais il n’en eft pas. ainfi de ces paroles que Jefus-Chrift adrefla à fes apôtres , cect eft mon corps , ceci ef mon fang. Le pain & le vin ne font pas fignes naturels du corps & dur fang; &c fi Jefus-Chrift en eût fait alots des fignes d'inftitution ou de convention, les réglés ordinai: res du langage 8e du bon fensne lui euflent pas permis de fubftituer à l’autre un de ces termes qui mauroient eu qu'un rapport arbitraire ou d'infüitution ; par exemple, onne dit pas que du lierre foit du vin, parce qu’il devient figne de vin à vendre, par la convention & linftitution des hommes ; on ne dit point qu'une branche d’oliviér eft la paix , parce que, en conféquence des idées convenues , elle eft le figne de la paix. Les apôtres n’étoient nullement prévenus; J.C. n’avoit préparé leurs efprits paraucu- ne expoftion ou convention préliminaire : ils de- voient donc néceflairement entendre fes paroles dans le fens auquel il les prononçoit ; c’eft-à-dire dans le fens propre & littéral. Ces raifons qui font fimples 8 à la portée de tout le monde , n'ont pas paru tel- les à un écrivain , qui, après avoir vécû long-tems _ parmi les Catholiques ; & penfé comme eux, s’eft 134 E UC depuis tetiré chez les Anglicans, dont il a éponfé prefque toutes les erreurs. Il qualifie le livre de /4 Perpétuité de La foi, qui contient ces raïfonnemens & beaucoup d’autres femblables, de Triomphe de la dia- lectique fur la raifon.C’eft au leéteur à juger dé la juf- tefle de cette application. IT. A la chaîne de tradition qu’on leur oppofe, les Proteftans objeétent qu'il n’y a point ou prefque point de pere qui n’ait dépofé en faveur du fens figuratif & métaphorique , & qui n'ait dit que l’euchariflie mê- me après la confécration , eft figure , figne , antitype, Jymbole, pain, & vin. Mais toutes ces chicanes que les Calviniftes ont rebattues en mille manieres, fe détruifent aifément par cette feule folution ; que leuchariflie étant compolée de deux parties, l’une extérieure & fenfible, l’autre intérieure & intelligi- ble, il n’eft pas étonnant que les peres fe fervent fou- vent d’expreffions qui ne conviennent à cefacrement que felon ce qu'il a d'extérieur; comme on dit une infinité de chofes des hommes, qui ne leur convien- nent que felon leurs vêtemens. Ainfi levcharifhe étant tout-à-la-fois, quoique fous différens rapports, figure & vérité, image & réalité, les peres ne laïf- fent pas de donner aux fymboles , même après la confécration, les noms de pain & de 27, & ceux d'image & de figure ; puifque d’un côté les noms fui vant ordinairement l'apparence extérieure & fenfi- ble, la nature du langage reçü parmi les hommes nous porte à ne les pas changer, lorfque ces appa- rences ne font pas changées ; & que de l’autre, par les mots d'image & de figure , 1ls n’entendent point une image & une figure vuide, mais une figure & une image qui contiennent réellement ce qu’elles re- préfentent. En effet , quand les peres s’expliquent {ur la partie intérieure & intelligible de Pezchariflie, c'eft-à-dire fur l’eflence & la nature du facrement, ils s'expriment d’une maniere fi nette &c fi précife, qu'ils-ne laiffent aucun lieu de douter qu’ils n’ayent admis la préfence réelle. Ils enfeignent, par exem- ple, que Zes fymboles ayant été confacrés & fairs eu- chariflie par les prieres que le Verbe de Dieu nous a en- feignées , font la chair 6 le [ang de ce même Jef[us-Chrift qui a té fait homme pour l'amour de nous. S. Juftin, à. apologie. Que l'agneau de Dieu qui efface les péches du monde, eft préfent fur La table facrée ; qu’il ef immole par les prêtres fans effufion de fang, & que nous prenons véritablement fon précieux corps & Jon précieux fan. Gelafe de Cyzique, d’après le premier concile de Nicée. Que Jefus-Chrift ayant dit du pain, ceci ef? mon corps ; qui ofera en douter deformais ? & lui-même ayant dit , ceci ef? mon fang ; qui oferoit en entrer en doute , en difant que ce nef} pas Jon fang? Il a autrefois changé l’eau en vin en Cana de Galilée ; pourquoi ne méritera- c-il pas d’être cré , quand il change le vin en fon [ang ? S. Cyrille de Jérufalem, catech. jy. Que par la parole de Dieu & l’oraifon , le pain eft changé rout.d’un-coup au corps du Verbe par le Verbe , [elon ce qui a été dit par le Verbe même: ceci eff mon corps. S. Grég, de Nyf. orat. catech. Que le créateur & le maître de la nature , qui produit du pain de la terre , fait enfuite fon propre corps de ce pain ; parce qW'il le peut & l’a promis: 6: ce- lui qui de l'eau a fait du vin , fait aufft du vin fon fang. S. Gaudence évêque de Brefcia, 17 Exod, trait, y. Que le Jaint-Efpric fair que le pain commun propofé Jur la table, devient le propre corps que Jefus - Chrift a pris dans fon incarnation. S. Ifidore de Damiete , ép. cjx. Que leucharsfiie eff le corps & le fang du Seigneur , même pour ceux qui le mangeant indignement , mangent 6 boivent leur jugement, S. Auguft, Ly. V. du baptéme contre les Donatiffes , chap, vi. Que nous croyons que le corps qui eff devant nous, n’efl pas Le corps d’un hom- me commun 6 femblable a nous, & Le [ang de même ; rnais que nous le recevons comme ayant ëté fait le pro- re corps & le propre ang du Verbe qui vivifie toutes chofes, S, Cyrille d'Alexandrie, explicar. du 1j. de fes anathem. Que le prêtre invifible (J. C.) change par une puiffance fecrete les créatures vifibles en la fubftance de Jon corps 6 de fon fang , en difant: prenez & mangez, cect eff mon corps. S. Eucher oz S. Céfaire, homel, v. J'ur la päque. Que le fainr- Efprit étant invifiblement Ppréfent par le bon plaifir du Pere & la volonté du Fils, fait cette divine opération ; & par La main du prêtre il confacre , change , & fait les dons propofés (c’eff-à dire le pain & le vin), le corps & Le [ang de Jejus - Chrif. Germain patriarche de Conftantinople, dans fa théo- rie des myfteres. Que le pain & le vin ne font point figures du corps & du fang de Jefus- Chrif, mais que c’ef? le corps même déifié de Jefus-Chrift; Notre-Seigneur ne nous ayant pas dit, ceci ef? la figure de mon corps, mais ceci eff mon corps ; & n'ayant pas dit de même, cect ef la figure de mon fang , mais ceci eft mon fang. S. Jean de Damas, de /a foi orthod. lib, IV. chap. xj. Ilne feroit pas difficile d’accumuler de pareils pafla- ges des peres, des conciles, dés auteurs eccléfafti- ques, & des théologiens, jufqu’au xv]. fiecte, pour former une fuite de tradition conftante, & de mon- trer que tous ont penfé que les fymboles font chan- gés, tranfmués, tranfélémentés, tranfubitantiés ax corps & au fang de Jefus-Chrit. Dire après cela que ces peres & ces écrivains n’ont parlé que par métaphore, où , comme l’auteur que nous avons ci- té ci-deflus, qu'il n’y a aucun de ces pañlages fur le- quel on ne puifle difputer ; c’eft plûtôt aimer la di£ pute, que fe propofer la recherche de la vérité, & contefter qu'il fañle clair en plein jour. La doërine êt le langage des peres fur la préfence téelle, ne peuvent paroître équivoques qu'à des efprits préve- nus & déterminés à trouver des figures dans les dif- cours les plus fimples. Les miniftres calviniftes ne l'ont que trop bien fenti; & pour éluder le poids d’une pareille auto- rité, ils ont imaginé différens fyftèmes qui tendent tous à prouver que la créance de la préfence réelle n'a pas été la foi de la primitive églife & de l’an- tiquité. Les uns, comme Blondel dans fon éclaircif- fement fur l’euchariflie, ont fait naître l'opinion de la tranflubftantiation long-tems après Berenger : les autres, comme Aubertin, le miniftre de la Roque , &t M. Bafnage, ont remonté jufqu’au vij. fiecle, où ils ont prétendu que contre la foi des fix premiers fiecles, Anaftafe religieux du mont Sinaï, avoit en- feigné le premier que ce que nous recevons dans Peuchariflie n’eft pas l’antitype , mais le corps de Je- fus-Chrift ; que cette innovation fut embraflée par Germain patriarche de Conftantinople en 720, par S. Jean de Damas en 740, par les peres du 1j. con- cile de Nicée en 787, par Nicéphore patriarche de Conftantinople en 806; que le même langage pañla d’orient en occident, comme il paroît par les livres: que Charlemagne fit faire au concile de Francfort en 794. Pour fentir l’abfurdité de ce {yftème , il fufit de fe rappeller que depuis S. Ignace le martyr & S. Juftin, tous les peres grecs dont nous avons cité quelques-uns, avoient enfeigné conftamment que l'euchariflie étoit le vrai corps & le vrai fang de Je- fus-Chrift ; que lorient étoit plein des ouvrages de ces peres, & des liturgies de S. Bañile & de S. Chry- foftome , où la préfence réelle eft fi clairement énon- cée, Anaftafe le Sinaite n’a donc rien innové en tenant précifément le même langage que les auteurs qui l’avoient précédé. Quant à l'occident, Aubertin oubliant qu’il a at- tribué à un concile nombreux &c célebre, tel que celui de Francfort , l’introduétion du dogme de la préfence réelle, lui donne une origine encore plus récente. Il pretend que Pafchafe Ratbert d’abord moine , puis abbé de Corbie, dans un traité du corps G du farg du Seigneur, qu'il compofa vers l’an 8 31, & dédia à Charles-le-Chauve en 844, rejetta Îe {ens de la figure , admis jufqu’alors par tous les fide- les, & y fubftitua celui de la réalité, fruit de fon imagination ; que cette nouveauté prit fi rapidement en moins de deux fiecles , que lorfque Bérenger vou- lut fevenir au fens de la figure, on lui oppofa com- me immémorial Le confentement de toute l’Eglife décidée pour le fens de la réalité. Mais 1°. puifqu'il s’agifloit de conftater l'antiquité de l’un ou l’autre de ces deux fentimens, Bérenger qui vivoit au xj. fiecle étoit-ilféloigné du neuvieme & fi peuinftruit, qu'il nepütreclamer contre l'innovation de Pafchafe Rat- bert, & mème la démontrer? Dans tous les conciles où il'a comparu, s’eft = il jamais défendu autrement ue par des fubtilités métaphyfiques ; a-t-1l jamais allégué le fait de Ratbert à Lanfranc &c à fes autres adverfaires, qui lui oppofoient perpétuellement l’an- tiquité ? C’eût été un moyen aufh court qu'il étoit fimple, pour décider cette impartante queftion, 2°, Suppofons pour un moment que Berenger ñe fût pas imftruit, ou ne voulüt pas nfer de tous fes - avantages ; le fyftème d’Aubertin & des miniftres f’en eft pas moins abfurde: car le changement qu'ils fuppofent, introduit par Ratbert dans la créance de lÉglife univerfelle fur Peucharifhe, s’eft fait brufque- ment &c tout-à-coup, ou infenfiblement & par de- grés. Or ces deux fuppoñitions font également fauf- fes. En premier lieu, il faut bien peu connoître les hommes, leurs pafions, leur caraëtere , leur atta- chement à leurs opinions en matiere de religion, pour avancer qu'un particulier fans autorité , tel qu'un fimple religieux, puife tout-à-conp &, pour ainfi parler , du jour au lendemain , changer la créance publique de tout l'Univers pendant neuf fiecles fur un point de la derniere conféquence , & d’un ufage aufh général, aufli journalier pour le peu- ple que pour les favans, fans que les premiers fe foû- levent, fans que les autres reclament, fans que les évêques & les pafteurs s’oppofent au torrent de ler- reur. C’eft une prétention contraire à l’expérience dé tous les fiécless Combien de fang répandu dans l'Orient pour la difpute des images infiniment moins impottante? & que de guerres &t de carnages dans le xvj, fieclé ; lorfque les Luthériens & les Calvini£ tes ont voulu faire prédominer leurs opinions ! Les hommes du fiecle de Rathert auroient été d’une ef- pece bien finguliere ; 8&c totalement différente du ca- raétere des hommes qui Les ont précédés & quiles ont fuivis. Encore une fois, il faut ne les point connoî- tre, pour avancer qu'ils fe laiffent troubler plus tran- quillement dans la pofleflion de leurs opinions , que dans celle de leurs biens. Dans l’hypothèfe des Cal. viniftes, Pafchafe Ratbert étoit un novateur décidé ; & cependant ce novateur aura été protégé des prin- ces, cru des peuples fur fa parole, chéri des évêques avec lefquels il a afhfté à plufieurs conciles, refpeété dés favans qui feront demeurés en filencé devant lui. Luther & Calvin qui, felon lesminiftres, ramenoient ‘au monde la vérité, & qui ont été accueillis bien différemment , autoient été bien embarraflés eux- mêmes à nous expliquer ce prodige. : Refté donc à dire que le fentiment de Pafchafe, combattu d’abord par quelques perfonnes, féduifit infenfiblement & par degrés la multitude à la faveur des ténebres du x. fiecle , qu’on a appellé un fiécle de plomb 8x de fer. Maïs d’abord ces adverfawes de Pafchafe qu’on fait fonner fi haut, fe réduifent à ce Jean Scot dont nousavons déjà parlé, à un Heribald auteur très-obfcur, à un anonyme, à Raban Maur, & à Ratramne ou Bertramne ; & ces trois derniers quiontreconnu la préfence réelle aufli expreflément que Pafchafe, ne difputorent avec lui que fur quel- ques conféquences de leuchariffie, fur une erreur de fait, fur quelques mots mal-entendus de part & d’au- E UC 135 trés, Qui né touchoierit point au fond de la qüeftion à tandas que Pafchäfe avoit pour lui Hinemararcheveés que de Reims, Prudence évêque de Troyes, Flora diacre de Lyon, Loup abbé de Ferrieres, Chriftian Drutmar, Walfridus, les prélats les plus célebres ; & les auteurs les plus accrédités de ce tems-là, Cé neuvième fiecle, que les Calviniftes prennent tant de plaifir à rabaïfler, a été encore plus fécond en grands hommes inftruits de la véritable doûrine dé l'Eglite, & capablés de la défendre. On ycompteen Allemagne S. Unny archevêque de Hambourg, apô: tre du Danemark & dela Norvege ; Adalbert un de fes fuccefleurs ; Brunon archevêque de Cologne , Willelme archevêque de Mayence ; Francon& Bur- chard évêques de Wormes, Saint Udalric évêque d'Augsbourg , S, Adalbert archevêque de Prague, qui porta la for dans la Hongrie, la Pruffe, & la Li- thuanie ; S. Boniface & S, Brunon, qui la prêcherent aux Ruflens. En Angleterre on trouve S. Dunftan archevèque de Cantorberi, Etelvode évêque de Win: chefters, & Ofwald évêque de Worcefter: en Italie, les papes Etienne VIIL. Léon VII. Marin, Agapet IT, & un grand nombre de favans évêques : en France, Etienne évêque d'Autun , Fulbert évêque de Char- tres, S. Mayeul, S. Odon, $. Odilon, premiers ab- bés de Clugny: en Efpagne, Gennadins évêque de Zamore, Attilan évêque d’Afturie, Rudeimde évê- que de Compoftelle ; & cela fous le regne d’empe- reurs & de princes zélés pour la foi. Or foûtenir que tant de grands hommes , dont la plüpart avoient vé- cu dans le neuvieme fiecle, & pouvoient avoir été témoins, ou avoir connu lestémoins de l'innovation introduite par Radbert, l’ayent favorifée dans l’ef- prit des peuples; c’eft fe joïer de la crédulité des lecteurs. Une derniere confidération qui démontre dite les Proteftans font venus troubler lEglife catholique dans fa pofleffion; c’eft que fi cette derniere eût in- nové au jx. fiecle dans la foi fu leuchariffie, les Grecs qui fe font féparés d'elle vers ce tems:là ; n’eufent pas manqué de lui reprocher fa défeétion. Or c’eft ce qu'ils n'ont jamais fait: car peu de temis après que Léon IX, eut condamné l’héréfie de Berenger , Mi- chel Cerularins patriarche de Conftantinople , pus blia plufieurs écrits, où il noublia rien de ce qui pouvoit rendre odieufe lEglife latine;ïl Pattaque en- tre autres avec chaleur fur [a queftion des azymes quine fait rien au fond du myftere, & allesue la di: verfité des fentimens des deux églifes fu ce point, comme un des principaux motifs du fchifme, fans dire un mof fur la préfence réelle. -Dans le concile de Florence , où l’on traita de [4 réunion des Grecs ; l’empereur de Conftantinople & les évêques fes fujets agiterent toutes les queftions fur lefquelles on étoit divifé, & en particulier celle qui regardoit les paroles de la confécration ; mais il ne fut pas mention de cellede la tranfubftantiation, n: de la. préfence réelle. Les Grecs & les Latins étoient donc dans cette perfuafion commune , que dans l’une & l’autre églife il ne s’étoit introduit au- cune mnovation fur cet article : car dans la difpof- tion où étoient alors les efprits depuis plus de trois cents ans, fi cette innovation eût commencé chez les Grecs à Anaftafe le Sinaïte , ou chez les Latins à Pafchafe Ratbert , ils nauroient pas manqué de fe là féprocher réciproquement. Dira-t-on que pour le bien de là paix & pour étouffer dans fa naïflance quels que fete ennemie du dogme de la préfence réelle, les deux éolifés convinrent de concert dé ce point: mais en premier lieu , la réunion moins conclue que projettée à-Florénée ne fut pas durable, 8: Marc d’E- phèfe,: Cabafilas ; 8e les autres évêques grecs qui rompirent les premiers l’accord, loin de combattre la préfence réelle, la foûtiennent ouvértément dans 136 E U C leurs écrits, Comme en conviennent Les plus éclaiz rés d’entre les Proteftans ; & entre autres Guillaume Forbes évêque d'Edimbourg, dans le chap, jv. du liv prem. de fes confiderationes æquæ 6 pacificæ contro- verfarum hodiernarium de facramento eucharifhiæ. En fecond lieu, pour peu que l'églife greque eût pù for- mer quelqu’accufation à cet égard contre l’églife ro: maine, pouvoit-elle faifir une occafon plus favora- ble pour acquérir de nouveaux défenfeurs à cette imputation , que la naïflance de lhéréfie des facra- mentaires. En vain ces dermers s’efforcerent en 1570 d’extorquer de Jéremie patriarche de Conftantino- ple.; quelque témoignage favorable à leur erreur. Il leur répondit nettement : Oz rapporte fur ce point plu- fieurs chofes de vous, que nous ne pouvons approuver en aucune forte. La doctrine de la fainre Eglife eft donc, que dans la facrée cene ; après la confécration & bénéditfion de pain efl changé & paffé au corps même de Jefus-Chrif, € le vin en fon fang , par la vertu du faint-Efprir : & enfuite, Le propre & véritable corps de Jefus-Chriff eff contenu fous les efpeces du pain leve. La même chofe eft atteftée par Gafpard Pucerus hiforien 8 mede- cin celebre ; par Sandius anglois, dans for miroir de l'Europe, chap. xxÿ ; par Grotius , dans l’examen de l'apologie de River : mais ce que la bonne-foi de Jére- mie avoit refufé aux théologiens de la confeffion d’Augsbourg, l’avarice d’un de fes fuccefleurs Cy- tille Lucar l’accorda aux largefles d’un ambafladeur d'Angleterre ou dé Hollande à la Porte. Il ofa faire publier une profeflion de foi, conforme aux erreurs des Proteftans fur la préfence réelle. Cette piece fut condamnée dans un fynode tenu à Conftantinople en 1638, par Cyrille de Berée fucceffeur de Lucar, & dans un autre tenu en 1642, fous Parthenius fuc- ceffeur de Cyrille de Berée. L’églife greque a encore donné de nouvelles preuves de la conformité. de fa foi avec l’églife latine, fur la préfence réelle de Je- fus - Chrift dans l’euchariflie, par les conciles tenus à Jérufalem & à Bethléem ; le premier en 1668, & Vautre en 1672. Les ates en font dépofés dans la bibliotheque de $. Germain-des-Prés, & imprimés dans les deux premiers volumes du grand ouvrage de l’abbé Renaudot, intitulé de a perpétuité de la foi, où l’on trouve auffi tous.les témoignages des Maro- nites, des Arméniens, des Syriens, des Cophtes, des Jacobites, des Neftoriens , des Rufles ; en un mot de toutes les feétes qui fe font féparées de l’égliferomai- ne , ou qui font encore en différend fur quelques points avec l'églife greque, qu’elles reconnoïflent néanmoins pour leur tige. Les favans s’appercevront aifément que nous n’a- voris fait qu’abrèger 1ci & propofer en gros Les prin- cipaux argumens de nos controverfiftes, &les dif- ficultés les plus fpécieufes des Proteftans. Le but de cette analyfe eft de fuggérer cette réflexion à ceux de nos leéteurs qui n’ont jamais approfondi cette matiere. Il s’agit ici d’un myftere : qu’en a-t-on crû dans tous les tems & dans la fociété établie par Jelus-Chrift, pour regler les fentimens des Chré- tiens en-matiere de rehgion ? Alors la chofe.fe réduit à une pure queftion de fait, aifée à décider par les monumens que nous venons d'indiquer : car fi l’on veut rendre la raifon feule-arbitre du fond de cette difpute, nous convenons qu’elle eft un abyfme de difcultés, &c-nous n’écrivons ni pour les renouvel- ler, m1pour les multiplier, Foyez Bellarmin,, les car- dinauxdu Perron, de Richelieu,M. de Vallembourg , M.Bofluet , if. des variat, expofttion de la foi, avert. € inftruët. paftor. Arnauld, Nicole, Peliflon, & Ze perpétuité de la foi, (Gin ne re EUCHITES , fomapl. Ævchire, (Hifl-eccléf.) an- ciens-hérétiques ainf.nommés, du grec éuyr, priere, parce-qu'ils foñtenoient .que la prisre feule etoit fufifante pour fe fauver:; {6 fondant fur.ce paflage E UC mal entendu de S, Paul aux Theflaloniciens, chap: , V. verf. 17. Jêne intermiffione orate, priez fans relä- che: en conféquence & pour vacquer À cet exercice continuel de l’oraifon , ils bâtifloient dans les places publiques des maifons, qu'ils appelloient adoratoi= res. Les Exchites rejettoient les facremens de bap- tême, d'ordre, & de mariage, & fuivoient les er- reurs des Maffaliens dont on leur donnoïit quelque- fois le nom, auffi-bien que celui d’ezchouféafles, On les condamna au concile d’Ephèfe tenu en 431. S. Cyrile d’Alèxandrie, dans une de fes lettres; reprend vivement certains moines d'Egypte, qui fous prétexte de fe livrer tout entiers à la contem- plation & à la priere, menoient une vie oifive & fcandaleufe. On eftime encore aujourd’hui beaucoup dans les fetes d'Orient ces hommes d’oraifon, & on les éleve fouvent aux plus importans emplois. Chambers. (G) EUCHOLOGE , fm. evchologium , ( Hiff. eccléf. & Luurgie. ) d’un mot grec, qui fignifie à la lettre un difcours pour prier ; formé d’évyn , priere , & de 102 vos, difcours. | L'ezchologe eft un des principaux livres des Grecs où font renfermées les prieres & lesbénédi@ions dont ils fe fervent dans l’adminiftration des facremens,dans la collation des ordres, & dans leurs liturgies oumef- fes: c’eft proprement leur rituel, & l’on y trouve tout ce qui a rapport à leurs cérémonies. M. Simon a remarqué dans quelques-uns de {es ouvrages, qu'on fit à Rome fous le pontificat d’'Ur- bain VIII. une aflemblée de plufñeurs théologiens catholiques fameux, pour examiner cet exchologe ow rituel. Le P. Morin qui y fut préfent, en parle auf quelquefois dans fon livre des ordinations. La plû- part des théologiens fe réglant fur les opinions des doéteurs fcholaftiques | voulurent qu’on réformât ce rituel grec fur celui de l’églife romaine, comme s’il eût contenu quelques héréfes, ou plütôt des cho- fes qui rendoient nulles ladminiftration des facre- mens. Luc Holftenius, Léon Allatius, le P, Morin & quelques autres qui étoient favans dans cette matie- re, remontrerent que cet ezchologe étoit conforme à la pratique de l’églife greque , ayant le fchifme de Photius; & qu’ainfi on ne pouvoit le condamner, fans condamner en mêmetems toute l’ancienne égli- {e orientale. Leur avis prévalut, Cet exchologe a été imprimé plufieurs fois à Venife en grec, & l’on en trouve aufli communément des-exemplaires manuf- crits dans les bibliotheques. Mais la meilleure édition & la plus étendue , eft celle que le P.Goar a publié en grec.êc en latin, à Paris, avec quelques augmen- tations & d'excellentes notes. Chambers. (G) EUCIN A, (Æif4. mod.) ordre de chevalerie qui fut établi, felon quelques-uns, lan 722 par Garcias Ximenès roi de Navarre. Sa marque de difin&ion étoit, à ce que l’on dit, une croix rouge fur une. chaîne ; & s’il étoit vrai.qu'il eût exifté, ce feroit le plus ancien de tous les ordres dechevalerie ; maison en doute avec fondement. On peut voir fur l'inftitu- tion des ordres militaires /es mots CHEVALERIE € ORDRES MiriTATRES. (G) EUDOXIENS, f. m. pl. (Æ/4 eccléf.) branche ow divifion des Ariens ainfi nommée de fon chef Eudoxe patriarche, premierement d’Antioche, puis de Conf. tantinople ; où il favorifa l’Arianifme.de tout fon pouvoir auprès des empereurs Conftance 8 Valens. Les Eudoxiens fwivoient les mêmes erreurs que. les Actiens &c les Eunomiens, foûtenant, comme eux, que lefils de Dieu avoit êté créé de rien, & qu'il.avoit une volonté diftinéte &c différente de celle de fon pere. Voyez AËTIENS 6 EUNOMIENS., (G) EVÊCHE, { m. (Æif£ eccléf. & Jurifprud.) eft l'E glife ou le bénéfice d'un évêque; ces fortes de béné- fices {ont féculiers &du nombre de ceux que l’on ap+ pelle pelle confiftoriaux : ils ont dignité êc jurifdiétion fpi- xituelle annexées. | Quelquefois par le terme d’évéché on entend le fiége d’un évêque, c’eft-à-dire le lieu où eft fon égli- fe : quelquefois on entend fingulierement la dignité d’évêque ; mais on dit plus régulierement en ce fens épifcopat. | | ; RU ee Evéché fignifie auf Ze diocèfe ou territoire foûmis à la jurifdi@ion fpirituelle d’un évêque. Enfin on fe fert quelquefois du terme d’évéché , pour exprimer la demeure de l’évêque ou palais épif- copal. Li Les évéchés font les premiers &c les plus anciens de tous les offices & bénéfices eccléfiaftiques. L’inflitution des premiers évéchés eff prefque auf ancienne que la naïflance de l’Eglife. Le plus ancien eff celui de Jérufalem, où S. Pierre fut cinq ans, depuis l’an 34 de Notre-Seiyneur, & où il mit en fa place S. Jacques le mineur. Le fecond qui fut établi, fut celui d’Antioche, où S. Pierre demeura fept ans, puis y mit Evodius. Le troifieme , dans l’ordre des tems, eft celui de Rome, dont S. Pierre jetta les fondemens lan 45 de Jefus-Chrift. | Ainf Jérufalem & Antioche ont été fuccefive- ment le premier évéché en dignité ou principal fiége de l’Eglile; mais Rome eft enfuite devenue la capi- tale de la Chrétienté. … L’évéché de Limoges fut fondé par S. Martial vers Yan 80. S. Clément pape envoya vers l’an 94 des évêques en plufeurs lieux, comme à Evreux, à Beauvais; il envoya S. Denis à Paris, & S. Nicaife à Roten. Les évéchès fe multiplierent ainfi peu-à-peu dans tout le monde chrétien; mais les éredtions des nou- veaux évéches devinrent {ur-tout plus communes dans le xï. fiecle, & dans le fuivant ; car au com- mencement du xuy. fiecle , ils étoient en fi grand nombre du côté de Conftantinople , que le pape, écrivant en 1206 au patriarche de cette ville, lui permit de conférer plufieurs évéchés à une même per- fonne. ; * La pluralité des évéchés a cependant toüjours été défendue par les canons , de même que la pluralité des ‘bénéfices en général; mais on a été ingénieux dans tous les tems à trouver des prétextes de difpen- es, pour pofléder plufieurs évéchés enfemble, ou un évéché avec des abbayes. Ebroïn évêque de Poitiers fut le premier en 850, qui pofléda un évéché & une abbaye enfemble : les chofes ont été pouflées bien plus loin ; car le cardinal Mazarin évêque de Metz poffédoit en même tems treize abbayes ; &c quant à la pluralité des évéchés, Jannus Pannonius, un des plus habiles difciples du fameux profefleur Guarini de Vérone, étoit à fon décès évêque de cinq villes; le cardinal de Joyeufe étoit tout-à-la-fois archevé- que de Touloufe, de Rouen, & de Narbonne ; & il y a encore.en Allemagne des princes eccléfaftiques qui ont jufqu’à quatre évéchés , & plufeurs abbayes. L’étendue de chaque eévéché n’étoit point d’abord limitée; ce fut le pape Denis qui en fit la divifionen l’année 308. Dans les premiers fiècles de l'Eglife, chaque | évêque étoit indépendant des autres ; il n’y avoit ni métropolitains, ni fuffragans : il n’y avoit d’abord -dans chaque province qu’un évéché, jufqu’à ce que le nombre des Chrétiens s'étant beaucoup accrà, on érigea plufieurs évéchés dans une même province ci- vile, lefquels compoferent enfemble une province eccléfiaftique. : | Le concile de Nicée tenu en 325, attribua-à l’é- vêque dela métropole ou capitale de la provinceune Æupériorité fur les autres évêques comprovinciaux ; d'où eff venu la difinétion des évéchés métropolitains, Tome VI, | EVE 137 que Pon a nommés archevéchés, d’avec les autres évéchés de la même province, qu’on appelle füffra- gans , à Caufe que les titulaires de ces éyéchés ont droit de fuffrage dans le fynode métropolitain, ou plûtôt parce qu’anciennement ils affifloient à l’élec- tion du métropolitain, qwils confirmoient fon élec- tion , & le confacroient. + ha | Les métropoles font ordinairement les feules égli- fes qui ayent des fuffragans ; il y a cependant quel- ques évéchés qui ont pour fuffragans des évêques iz partibus , que l’on donne à évêque diocéfain pour l'aider dans fes fonétions. | VTT Îl y a auffi quelques évéchés qui ne font fuffragans d’aucun archevêché, mais font foñmis immédiate ment au faint Siége, comme celui de Québec en Ca- nada. | Enfin il y a des pays qui ne font d’aucun évéché, tels que la Martinique , la Guadeloupe, la Cayenne, Marigalande, Saint-Domingue, & autres îlés fran- çoifes de l'Amérique , qui font adminiftrées pour le fpirituel par plufieurs religieux de divers corps, qui en font les pafteurs, & qui prennent leurs pou- voirs du fiége ou de l'archevêque dé Saint-Domin- gue, ville fituée dans la partie qui eft aux Efpa- gnols. | Le même concile de Nicée dont on a déjà parlé, porte encore que l’on doit obferver les anciennes coûtumes établies dans l'Egypte, la Lybie, & la Pentapole ; enforte que l’évêque d'Alexandrie ait l'autorité fur toutes ces provinces. Ce degré de ju- rifdiétion attribué à certains évéchés fur plufieurs pro- vinces, eft ce que l’on a appellé parriarchat ou pri- mate. . | L'autorité des conciles provinciaux fufifoit , fui- vant l’ancien droit, pour l’éreétion des évéchés & des métropoles ; mais depuis long-tems on n’en érige plus fans l’autorité du pape. ÎL faut auf entendre les parties intérefées : favoir les évêques dont on veut démembrer le diocèfe, le métropolitain auquel On veut donner un nouveau fuffragant, le clergé & le peuple du nouveau diocèfe que-l’on veut former, le roi, & les autres feigneurs temporels. Ces nou- veaux établiflemens ne fe peuvent faire en France fans lettres patentes du Roi, dûment enresiftrées. Lorfqu’un pays eft ruiné par la guerre, ou autre calamité, on unit quelquefois l’évéché de ce pays à un autre, ou bien on transfere le fige de l’évéché dans une autre ville: ce qui doit fe faire avec les mêmes formalités qu’une nouvelle éreétion. Il y a en France dix-huit archevêchés métropoli- tains, & cent treize évéchés qui font leurs fuffragans. Ces évéchés ne {ont pas partagés également entre les métropolitains ; car depuis long-tems, pour l’érec- tion des métropoles, on a eu égard à la dignité des villes, plütôt qu’au nombre d’évéchés fuffragans : il n'y a cependant point d’archevèché, qui n’ait plu- fieurs évéchés fuffragans. Les évéchés étoient autrefois remplis par éle@tion. Préfentement en France,.c’eft le Roi qui y nomme. Un évêque ne doit point fans caufe légitime être transféré d’un évéché à un autre. > Voyez BÉNÉFICES CONSISTORIAUX, CONCOR- DAT ; ÉLECTION, EvÊQUE, NOMINATION ROYALE, PRAGMATIQUE. (4) EVÊCHÉS ALTERNATIFS, font ceux que l’on con- fere tour-à-tour à des catholiques & à des luthériens. Il y en a en Allemagne. Quand l’évêque eft catholi- que, fon grand-vicaire eft proteftant; & vice verf4, quand l’évêque eft proteftant, fon grand-vicaire eft catholique. L’évéché d'Ofnabruk eft du nombre de ces évéchés alternatifs. (A) EVÊGRÉ DiocésAIN, voyez EVÊQUE Diocé- SAN | 138 EVE EVÊCHÉ 1N PARTIBUS , voyéx ci-après EVÈQUE IN PARTIBUS. | EvêcHé MÉTROPOLITAIN ; voyez ARCHEVÉ- QUE, G ci-après EVÈQUE MÉTROPOLITAIN , M£- TROPOLE, MÉTROPOLITAIN, EvÊcHés SÉCULARISÉS, font ceux qui ne font plus en titre de bénéfices , 8 qui font poflédés par des laïcs; ceux de Magdebourg &c de Bremen en Al- lemagne, l'ont été , & ne font plus confidérés que comme des principautés féculieres qui appartien- nent à des proteftans, Tableau de l'Empire germanig. page89. (4) EVÈCHÉ SUFFRAGANT, eft celui qui eft foûmis à une métropole. Voyez ce qui a été dut ci-devant fur Les EVÉÊCHÉS en général, &c ci-après EVÈQUE M£- TROPOLITAIN, MÉTROPOLE, MÉTROPOLITAIN. (4) Evêcué VAcANT, eft celui qui n’eft point rem- pli de fait, ou qui de droit eft cenfé ne le pas être. Il eft vacant de fait par la mort de l’évêque; 1l eft vacant de droit, par les:mêmes caufes qui font va- quer les autres bénéfices. Joyez RÉGALE , SIÈGE VACGANT: (4) EVECTION, . f (Affron.) eftun terme que les anciens aftronomes ont employé pour défigner ce qu'ils appelloient La libration de la lune. Foyez Lr- BRATION: Dans: la nouvelle aftronomie, quelques aftrono- més ont employé ce mor pour défigner une des prin- cipales équations du mouvement de la lune, qui eft proportionnelle au finus du double de la diftance de la lune au foleil, moins l’anomalie de la lune. Cette équation eft de 1 degré 20 minutes, felon quelques avteurs ; felon d’autres, de 1° 16/, 1° 187, Ge. Sa quantité n’eft pas encore exaétement déterminée, ni par la théorie, ni par les obfervations ; mais après l'équation du centre , elle eft la plus grande de toutes les équations de la lune, fans en excepter la variation, qui n’eft qu'environ la moitié de celle- ci. Voyez VARIATION. M. Mayer, dans fes nouvelles tables de la lune pu- bliées dans le fecond volume des mémoires de Paca- démie de Gottingen, s’eft fervi du terme d'éveéion pour défigner l'équation dont il s’agit. C’eft l'évec- tion qui fait varier l'équation du centre dans les ta- bles newtoniennes de la lune, de plus de deux de- grés & demi. Poyez EQUATION & LUNE. (0) * EyYECTIONS , evetiones , (Hifi. anc.) c’étoit une permiflion écrite de l'empereur, ou des gouverneurs, ou des premiers officiers, fur laquelle on pouvoit cou- rir la pofte, fans bourfe délier. On préfentoit cette permilion à toutes les ftations. S1 Le chemin condui- foit au lieu de la réfidence d’un gouverneur , 1l fal- loit avoir l’attention d’aller chez cet officier faire ratiñier fa permifion, qui marquoit & la durée du voyage, & le nombre des chevaux accordés au voyageur. Il y eut un tems où les gouverneurs mé- mes avoient befoin d’un billet de franchife fouffigné de l’empereur, ou du préfet du prétoire, ou de l’of- ficier appellé dans le palais agifler officiorum. EVEILLER, v. a@. c’eft interrompre le fommeil. * EVENEMENT , . m. (Gram.) terme par lequel on défigne, ou la produétion, ou la fin, ou quelque circonftance remarquable & déterminée dans la du- tée de toutes les chofes contingentes. Mais peut-être cé terme eft-l un des radicaux de la langue; & fer- vant à définir les autres termes, ne fe peut-il définir lui-même ? Voyez l’article DICTIONNAIRE. Voyez auffi à l'article ENCYCLOPÉDIE, la maniere de fixer la notion des termes radicaux. - ÉvENEMENT , eventus, (Medecine. ) ; ce terme ef employé pour fignifier la fin d’une maladie, Piffue qu’elle a, bonne ou mauvaïfe. Rien n’eft plus néceffaire , & ne peut faire plus d'honneur à un medecin praticien, que de favoir prédire quel {era l’évezemenr dans une maladie; car il eft continuellement expofé à être interrogé à ce fujet : Profper Alpin a donné une excellente doc- trine fur l’art de prévoir & d'annoncer les évererens des maladies, dans fon livre de prefagienda visa & NOTÉE, La vie eft une maniere d’être déterminée du corps . humain ; la maladie eft aufli un état déterminé de ce mème corps, différent de celui qui conftitue la fan- té, & contraire à la vie : la maladie tend à la mort: il fe fait par la condition , qui établit la maladie, un changement dans le corps, tel qu’il eft en conféquen- ce abiolument différent de l’état de fanté ; ainf le corps neft pas difpofé dans la maladie, comme ileft en fanté. Le medecin compare les forces de la vie. telle qu'elle exifte encore après l’établiflement dela maladie, avec celle de la maladie même ; &c 1l juge par cette comparaifon fi la caufe de la maladie fera, fupérieure à celle de la vie ou non, c’eft-à-dire f la maladie fe terminera par la mort ou par le retour, de la fanté, ou par une autre maladie , ou par la feu- le confervation de la vie, fans efpérance de fanté : les fignes par lefquels le medecin connoit ce qui doit arriver dans les maladies, & la maniere dont elles doivent fe terminer , font appellés proghofhcs, Foy SIGNE, PROGNOSTIC. (d) , ÉVENT , f. m. (Comm. ) au fujet de l’aunage des étoffes de laine, fignifie ce ‘qui eft donné par les auneurs au-delà de la jufte mefure ; ce qui va àmuñ pouce fur chaque aune. Le reglement des manufac- tures du mois d’Août 1669, veut que les auneurs: mefurent les étoffes bois-à-bois & fans évezr. Voyez, Pouce-ÉvVENT. Dithionn, de Comm. de Tréy. 6 \de Chamb, (G) - ÉVENT , eft, dans l Artillerie, une ouverture ron- de ou longue, qui fe trouve dans les pieces de ca non & autres armes à feu, après que l’on ena fait l'épreuve avec la poudre, & awelles fe trouvent défetueufes. Il y a des évezts qui ne paroïffent quel- quefois que comme la trace d’un cheveu, &c par où néanmoins l'air fuinte & la fumée fort. On rebute: ces pieces, & on leur cafle les anfes. Voyez ÉPREU- VE. (Q) | *ÉVENTS, cerme de Fonderie, font des tuyaux de: cire adhérans à la figure, &c qui étant renfermés dans le moule de potée, & fondus par la cuiflon, ainfr que les cires de la figure, laïffent dans le moule de potée des canaux qui fervent à laifler une iflue Li- bre à l’air renfermé dans l’efpace qu'occupoient les. cires qui , fans cette précaution , étant comprimé par la defcente du métal , romproit à la fin le mou- le, ou fe jetteroit fur quelque partie de la figure Voyez les Planches de la Fonderie des figures équeffres. ÉvENTSs , er terme de Fondeur en fable, font de pe- tits canaux vuides, par où l'air contenu dans les moules , peut fortir à mefure que le métal fondu en prend la place : il font formés par des verges de lai- ton qui laiffent leur empreinte dans les moules ou avec la branche. Voyez FONDEUR EN SABEE. ÉvVENTS, ez terme de Raffinerie ; ce font des con- duits ménagés dans les fourneaux, au milieu, der- riere les chaudieres , & fur les coins , pour donner iflue aux fumées, & pafler dans les cheminées. ÉVENTAIL,, inftrument qui fert à agiter l'air &c à le porter contre le vifage, pour le rafraichir dans- les tems chauds. La coûtume qui s’eft introduite de nos jours parmi les femmes , de porter des évezrails,. eft venue de l'Orient, où la chaleur du climat rend l’ufage de cetinftrument & des parafols prefqu'in- difpenfable. Il n’y a pas long-tems que les femmes, européennes portoient des évensails de peau pour fe rafraîchir l'été 3 mais elles en portent aujourd’hut aûffi-bien en hyver qu'en été , maïs c’eft feulement pour leur fervir de contenance. En Orient on fe fert de grands évertai!s de plu- mes pour fe garantir du chaud & des mouches, En Italie & en Efpagne, on a de grands évenrails quar- rés , fufpendus au milieu des appartemens, particu: dierement au-deffus des tables à manger , qui, par le mouvement qu'on leur donne & qu'ils confervent long-tems à caufe de leut fufpenfon perpendiculai- re, rafraichifent l’air en chaflant les mouches. . Chez les Grecs on donne un éverztail aux diacres dans la cérémonie de leur ordination; parce que dans VPéglife greque , c’eft une fon@ion des diacres que de chaffer avec un éventail les mouches qui incom- modent le prêtre durant la meffe. … Vicquefort , dans fa traduétion de l’ambaffade de Garcias de Figueroa, appelle évertails certaines che- minées que les Perfans pratiquent pour donner de l'a & du vent à leurs appartemens, fans quoi les chaleurs ne feroient pas fupportables. Ÿoyez-en la defcription dans cetauteur, pag. 38. . Préfentement ce qu’on appelle en France , & pref- que par toute l’Europe , un éventail , eft une peau très-mince, on un morceau de papier , de taftetas, ou d'autre étoffe lesere, taillée en demi-cercle, & montée fur plufieurs petits bâtons & mofceaux de diverles matieres, commede bois, d'ivoire, d’écail- le de tortue, de baleine, ou de rofeau. Les éventails fe font à double ou à fimple pa- Diet DEA | .… Quand le papier eft fimple , les fleches de la mon- ture fe collent du côté le moins orné de peinture ; lorfqu'il eft double , on les coud entre les deux pa- piers, déjà collés enfemble, par le moyen d’une e£ pece de longue aiguille de laiton , qu’on appelle zre fonde. Avant de placer les fleches , ce qu’on appelle monter un éventail, on en plie le papier, enforte que le pliage s’en fafle alternativement en-dedans & en- dehors. | Ayez pour cet effet une planchette bien unie, faite en demi-cercle , un peu plus grand que le pa- pier d’éverrail; que du centreilen païte vingt rayons égaux , & creufés de la profondeur de demi- ligne ; prenez alors l’éverail, & le pefez fur la planchet- te; le milieu d’en-bas appliqué fur le centre de la planchette ; fixez-le avec un petit clou ; puis l’arré- tant de maniere qu'il ne puifle vaciller , foit avec quelque chofe de lourd mis par en-haut fur les bords, foit avec une main; de l’autre preflez avec un liard Ou un jetton le papier , dans toute fa longueur, aux endroits où il correfpond aux rayes creufées à la planche : quand ces traces feront faites, déclouez & retournez léversail la peinture en-deflus ; mar- quez les plis tracés , & en pratiquez d’autres entre eux , jufqu'à ce qu'il y en ait lé nombre qui vous convient : ce pliage fait , déployez le papier , & ou- vrez un peu les deux papiers de l’éverrail à endroit du centre ; ayez une fonde de cuivre plate, arron- die par le bout , & large d’une ligne ou deux ; ta- tonnez & coulez cette fonde jufqu’en - haut, entre chaque ph formé où vous avez à placer les brins de bois de léventail : cela fait, coupez entierement la gorge du papier fait en demicercle ; puis étalant les brins de votre bois, préfentezæn chacun au conduit formé par la fonde entre les deux papiers ; quand ils teronttous difribués , collez le papier de l'éventail {ur les deux maîtres brins ; fermez -le ; rognez tout ce qui excede les deux bâtons, & le laiflez ainfi fermé juiqw'à ce que ce qui eft collé {oit fec, après quoi l'éventail {e borde. Les fleches fe trouvent prifes aflez folidement dans chaque pli, Qui a environ un demi-pouce de large ces fleches qu’on nomme affez communément /es bé- tons de l'éventail, fonttoutes réunies par le bout d’en- Tome VI, duà in Vs di | EVE 139 bas , & enfilées dans une petite broche dè métal, que l'on rive des deux côtés : elles font-très-minces ; Ont quatre à cinq lignes de largeur jufqu’à l’ens droit où elles font collées au papier ; au-delà , elles ne font larges au plus que d’une ligne , &prefqu’auf. fi longues que le papier même : les deux fleches des extrémités font beaucoup plus larges que les-deux autres, & font collées furle papier qu’elles couvrent entierement , quand l’éverrail eft fermé : le nombre des fleches ou brides ne va guere au-delà de vingt: deux : les montures des évenrails fe font par les maî- tres Tablettiers ; mais ce font les Eventailliftes qui lès plient 8 qui les montent. Les éventaïls médiocres {ont ceux dont il fe fait [a plus srande.confommation : on les peint otdinaite- ment fur des fonds argentés avec des feuilles-d’ars gent fin, battu & préparé par les Batteurs d’or : on en fait peu fur des fonds dorés., l'or fin étant trop cher, & le faux trop vilain Pour appliquer les feuil. les d'argent fur le papier , aufli-bien que pour faire des ployés, on fe fert de ce que les Eventailliftes ap. pellent fimplement 42 drogue, de la compofition de laquelle ils font grand myftere , quoiqu'il femble: néanmoins qu’elle ne foit compofée que de gom- me ; de fucre candi & d’un peu de miel, fondus dans de Peau commune, mêlée d’un peu d’eau-de: vie on met la drogue avec une pétite éponge; & lorf. que les feuilles d’argent font placées deffus, on les appuie legerement avec le prefloir , qui n’eft qu'une pelote de linge fin remplie de coton : fi l’on employe des feuilles d’or, on les applique de même. Lorfque la drogue eft bien feche , on porte les feuilles aux batteurs , qui font où des relieurs ou des papetiers , qui les battent fur la piérre avec le marteau ; ce qui brunit l’or & l'argent, & leur done: ne autant d'éclat que fi le brunifloir y avoit pañé. Voyez les figures de l'Eventaillifle. ÉVENTAIL, en cerme d'Orfévre en grofferie, eft un tiflu d’ofier en forme d'écran, qu’on met au-devant du vifage, & au milieu duquel on a pratiqué une efpece de petite fenêtre, pour pouvoir examiner de près l’état où eft la foudure , & le désré de chaleur qui lui eft néceflaire. | VENTAIL , (Jardinage. ) eft un rideau de char- mille qui couvre, qui mafque quelqu’objet, On dit, un arbre en éventail, (K). ÉVENTAIL , terme d’Emailleur ; Cell une petite platine de fer-blanc ou de cuivre, de fept où huit pouces de diametre , qui fe termine en pointe pat en-bas , où. elle eft emmanchée dans une efpece de queue de hois. Cet éventail empêche l’ouvrier d’être incommodé par le feu de la lampe À laquelle il tra- vaille : il fe place entre l’ouvrier & la lampe , dans un trou percé à un pouce où deux du tuyau de ver- re, par où le vent du foufilet excite le feu de la lam- pe. #oyez EMAIL. | ÉVENTAILLISTE, {. mafc. marchand qui fait & vend des éventails, On a dit autrefois £venrailler. La communauté des maîtres Eventailliffes n’eft pas fort ancienne : leurs ftatuts font poftérieurs à la dé- claration de 1673, par laquelle Louis XIV. érigea plufieurs nouvelles communautés dans Paris. : Anciennement les Doreurs {ur cuir eurent des, conteftations ayec les marchands Merciers & les Peintres, pour la peinture, monture , fabrique, & vente des éventails ; il leur fut fait défenfesen 1674, de prendre d’autre qualité que celle de Doreur.fur cuir, & de troubler les Merciers dans la pofefion où ils étoient de faire peindre & dorer les éventails par les Peintres & Doreurs , & de les faire monter par qui ils voudroient. LE; Peu-à-près cet arrêt, la nouvelle communauté des £venraillifles fut érigée, &c reçut fes à églemens 1 140 EVE fuivant lefquels 11 eft arrêté que la communauté fera régie par quatre jurés, dont deux feront renouvel- lés tous les ans au mois de Septembre , dans une af- femblée à laquelle tous les maîtres peuvent affifter fans diftinétion. a On ne peut être reçù maitre fans avoir fait qua- tre ans d’apprentiflage , & avoir fait le chef-d’œu- vre : néanmoins les fils de maîtres font difpenfés du chef-d'œuvre, ainfi que les compagnons qui épou- fent des veuves ou des filles de maîtres. Les veuves jotiffent des priviléges de leur défunt mari, tant qu'elles reftent en viduité ; cependant elles ne peuvent pas prendre de nouveaux appren- tifs. Voyez le dictionn. & les réglem. du Comm. ÉVENTER Les voires, v, a@. (Marine. ) c’eft mettre le vent dedans , afin que le vaifleau fafle route. (Z) ÉVENTER , (Chaffe.) On dit , éventer a voie ; c’eft quand elleeft f vive que le chien la fent, fans mettre letnez à terre, ou quand après un long défaut, les chiens ont le vent du cerf qui eft fur le ventre dans une enceinte. On dit aufi, éventer un piège , c’eft- à-dire faire enforte de lui ôter l'odeur , parce que file renard, ou la bête que l’on veut prendre, en a le vent, il n’en approchera jamais ; & pour éverter le piège, on le fait tremper vingt-quatre heures en eau courante ou claire , & on le frotte avec des plantes odoriférantes, comme ferpolet , thin fauva- ge, & autres. ÉVENTER , ÉVENTÉ, EXPOSÉ À L'AIR, (Jard.) Des racines évenrees {ont très-mauvaifes & très- nuifibles à la reprife des jeunes plans. ÉVENTER 2 bateau ; terme de Riviere ; qui figni- fie dégager un bateau qui {e trouve preflé entre deux autres. ÉVENTILER , (Jurifp.) terme de Pratique, qui fi- gniñe la même chofe que veztiler ; ce dernier terme eft le plus ufité. Voyez VENTILATION 6 VENTI- LER., (4) ÉVENTILLER , v. paf. (Faucon. {e dit de l’oifeau lorfqu'il fe fecoue en fe foûtenant en Pair. On dit qu'un oifeau s’évercille, lorfqu’il s’égaie & prend le vent. EVÊQUE, epifcopus, (Hifé ecclèf. & Jurifp.) eft un prélat du premier ordre qui eft chargé en parti- culier de la conduite d’un diocèfe pour le fpirituel, & qui, conjointement avec les autres prélats, par- ticipe au gouvernement de l'Eglife univerfelle. Sous le terme d’évéques {ont aufli compris les ar- chevêques, les primats, patriarches, & le pape mê- me, lefquels font tous des évêques , & ne font diftin- gués par un titre particulier des fimples évégzes, qu'à caufe qu’ils font les premiers dans l’ordre de l’épif- copat , dans lequel il y a plufieurs degrés différens par rapport à la hiérarchie de PEglife, quoique par rapport à l’ordre les évéques ayent tous le même pou- voir chacun dans leur diocèfe. Le titre d’évéque vient du grec ériouomos, 8e fignifie furveillanr ou infpeiteur. C’eft un terme emprunté des payens ; car les Grecs appelloient ainfi ceux qu’ils envoyoient dans leurs provinces, pour voir fi tout étoit dans l’ordre. Les Latins appelloient aufi epifcopos ceux qui étoient infpeéteurs & vifiteurs du pain & des vivres: Cicéron avoit eu cette charge, epifcopus oræ cam- panie. Les premiers chrétiens emprunterent donc du gou- vernement civil le terme d’évéques , pour défigner leurs gouverneurs fpirituels ; & appellerent diocèfe la province gouvernée par un évéque, de même qu’on appelloit alors de ce nom le gouvernement civil de chaque province. | * Le nom d’éyéque a été donné par S. Pierre à Jefus- Chrift ; 11 étoit auffi quelquefois appliqué à tous les prètres en général, & mème aux laïcs peres de fa mille. | Mais depuis long-tems, fuivant lufage de l'Églife, ce nom eft demeuré propre aux prélats du premier ordre qui ont fuccédé aux apôtres, lefquels furent les premiers évéques inftitués par J. C. | On les appelle aufli ordinaires , parce que leurs droits de jurifdiétion & de collation pour les bénéf- ces leur appartiennent de leur chef 6 ;ure ordinario, c’eft-à-dire /xivant le droit commun. Les évêques font les vicaires de Jefus -Chrift, les fucceffeurs des apôtres, & les princes des prêtres = is poffedent la plénitude 8 la perfedtion du facer- doce dont Jefus-Chrift a été revêtu par fon pere 3 deforte que quand un évéque communique quelque portion de fon pouvoir à des miniftres inférieurs, 1l conferve toùjouts la fuprème jurifdition & la fou- | veraine éminence dans les fonétions hiérarchiques. Ils font les premiers pafteurs de lEglife établis pour la fanétification des hommes, étant les fuccef: feurs de ceux auxquels Jefus-Chrift a dit : Æ/ez, pré chez a toutes les nations, en leur enfeignant de garder Lou Ce que Je VOUS ai dit. Fe Il appartient à chacun d’eux d’ordonner dans fon diocèfe les miniftres des autels, de confier le foin des ames aux pafteurs qui doivent travailler fous leurs ordres ; c’eft pourquoi ils doivent, fuivant le droit commun , avoir l’inftitution des bénéfices & R difpofition de toutes les dignités eccléfiaftiques. Chaque évégue exerce feul la jurifdi@ion fpirituelle fur le troupeau qui lui eft confié, 8 tous enfemble ils gouvernent l’Eglife. La dignité d’évéque eft très-refpe@table, puifque leur inftitution eft divine, leurs fon@tions facrées, & leur fucceflion non interrompue. L’épifcopat eft le plus ancien & le plus éminent de tous les bénéf- ces : c’eft la fource de tous les ordres & de toutes les autres fonétions eccléfaftiques. Le Jefus-Chrift dit en parlant des apôtres leurs prédé- ceffeurs, que qui les écoute, l'écoute; & que qui les méprife , le méprife. Ils font les peres & les premiers doéteurs de l’Esli- fe, auxquels toute puiffance a été donnée dans le ciel & fur la terre, pour lier & délier en tout ce qui a rapport au fpirituel. | Les apôtres ayant prêché l’évangile dans de gran: des villes, y établifloient des évéques pour inftruire & fortifier les fideles , travailler à en augmenter le nombre, gouverner ces églifes naiflantes, & pour établir d’autres évégues dans les villes voifines, quand il y auroit affez de chrétiens pour leur donner un pafteur particulier. Je vous ai laiffé à Crete, dit faint Paul à Tite, afiz que vous gouverniez le troupeau de. Jefus-Chrift, & que vous établiffiez des prêtres dans Les villes où la foi fe répandra. Par le terme de prérres il entend en cet endroit les évégzes , ainfi que la fuite de la lettre le prouve. Le nombre des évêques s’eft ainfi multiplié à me= fureque la religion chrétiennea fait des progrès. Pen- dant les premiers fiecles de l’Eglife , c’étoient les évé- ques des villes voifines qui en établifloient de nou- veaux dans les villes où ils le croyoient néceffaire ; mais depuis huit ou neuf cents ans il ne s’eft guere fait d’établiflement de nouveaux évêchés fans l’au- torité du pape. Il faut aufi entendre les autres par- ties intéreflées, & en France il faut que l'autorité du roi intervienne. Voyez ce qui a été dit ci-devant: à ce fujet 4x mor EVÊCHÉ. Le pape, comme fucceffeur de S. Pierre, eft le premier des évêques; la prééminence qu'il a fur eux eft d’inftitution divine. Les aûtres évéques font tous fuccefleurs des apôtres ; mais Les diftinétions qui ont été établies entr’eux par rapport aux titres de pa- triarches, de primats 8 de métropolitains ; font de droit eccléfaftique. S« Paul, dans fon épire 7, à Timorhée, dit que quis cpifcopatum defiderat, bonum opus defiderat, Les évèchés n'étoient alors confidérés que comme une charge très-pefante; il n’y avoit mi honneurs ni ri- chefles attachés à cette place, ainfi l'ambition ni l’in- térêt ne les faifoient point rechercher : plufeurs , par un efprit d'humilité , fe cachoient loriqu’on les venoit chercher pour être évéques. À l'égard des qualités que $. Paul defire dans un évêque: oporter, dit-il, epifcopu irreprehenftbilem effe, unius 4xoris vérum , fobrium , caflum, ornatum , pru- dentem , pudicum, hofpiralem , doëtorem , non vinolen- tu, non percuflorem, fèd modeflum :; non Litisiofum , 20% Cupidum , [ed f1œ domui bené præpofitum , filios habentem fubditos cum omri caflitate. | Ces termes, wnius uxoris virum, fignifient qu'il falloit n'avoir été marié qu’une fois, parce que l’on n'ordonnoit point de bigames : d’autres entendent par-là que l’évéque ne doit avoir qu’une feule églife, qui eft confidérée comme fon époufe. . C'eft une tradition de PEglife, que depuis l’Afcen- fion de Notre Seigneur les apôtres vécurent dansile célibat : on élevoit cependant fouvent à lépifcopat & à la prêtrife des hommes mariés ; ils étoient obli- gés dès-lors, ainfi que les diacres , de vivre en con- tinence, & de ne plus regarder leurs femmes que comme leurs {œurs. La difcipline de l’églife latine n'a jamais varié {ur cet article, Les femmes d’évéques fe trouvent nommées dans quelques anciens écrits ; epifcope ; à caufe de la dignité de leurs maris, Mais peu-à-peu dans l’églife latine on ne choifit plus d’évégues quifuflent aétuellement mariés, & telle eft encore la difcipline préfente de Péglife latine : on n'admet pas à l’épifcopat, non plus qu’à la prêtrife, celui qui auroit té marié deux fois. Dans les églifes fchifmatiques, telles que l’églife greque, les évéques &c prêtres font mariés. On trouve dans l’hiftoire eccléfiaftique plufieurs exemples de prélats qui furent élus entre les laïcs, tels que S. Nicolas & S. Ambroïfe ; mais ces élec- tions n’étoient approuvées que quand l’humilité de ceux que l’on choififfoit pour pafteurs, étoit fi uni- verfellement reconnue | qu’on n’avoit pas lieu de craindre qu'ils s’enorgueilliffent de leur dignité ; & bientôt on n’en choïfit plus qu'entre les clercs. Les évéques doivent, fuivant le concile de Trente ; être nés en légitime mariage, & recommendables en mœurs & en fcience : ce concile veut auff qu'ils foient âgés de trente ans ; mais en France il fuit, fuivant le concordat » d'avoir vingt-fept ans com- mencés. On trouve quelques exemples d’évégues qui furent nommés étant encore fort jeunes. Le comte Héribert, oncle de Hugues Capet, fitnommer à l’ar- chevêché deReims fon fils qui n’étoit âgé que de cinq ans; ce qui fut confirmé par le pape Jean X. Ces exemples finguliers ne doivent point être tirés À con- féquence. Le concordat veut auffi que celui qui eft promi à l'évêché , foit do&teur ou licentié en Théologie, ou en Droit civil ou canonique : il excepte ceux qui font parens du roi , ou qui font dans une grande élé- vation. Les religieux mendians qui, par la regle de leur ordre, ne peuvent acquérir de degrés , font auffi exceptés. L’ordonnance de Blois & celle de 1606 ; ont confirmé la difpoftion du concordat par rapport aux degrés que doivent avoir les évêques : le concor- dat n’explique pas fi ces degrés doivent être pris dans Uneuniverfité du royaume ; mais on l’a ainf inter- Preté, en conformité de l’ufage du royaume. 1 w’eft pas abfolument néceffaire que l’évêque ait obtenu fes degrés avec toutes les formes ; il fufit qu'il ait obtenu des degrés de grace, c’eft-à-dire de EVE T4r CEUX qui s'accordent avec difpenfe-de:téms d’étüde &c de quelques exercices ordinaires; mais les grades de privilège accordés par lettres du:papeêc de fes lé. gats, ne fufiiroiènt pas en France. HT L’ordonnance de Blois, article r. porte que le roi 1e POTMerA aux prélatures qu'un mois après: là va- cance d'icelles ; qu'avant la délivrance dés lettres de nominaton , les noms des perfonnesferont envoyés à Pévéque diocèfain du lieu où ils auront étudié-les cinq dernieres années ; enfemble aux chapitres des églifes 8 monafteres vacans » lefquels informeront refpeétivement de Ja vie, mœurs & dodrine ; &c de tout feront procès - verbaux qu'ils enverront à Sa Majefté. 1 sat L'article 2, porte qu'avant l'expédition deslettres de nomination, les archevêques & les évégres nom: més feront examinés fur léur dorine: aux faintes lettres, par un archevêque où évéque que Sa Majefté commettra ; appellés deux doéteurs en Théologie ; lefquels enverront leurs certificats de la Capacité ou infuflifance defdits nommés. L’article-r. de l’édit de 1606 y eft conforme, | Mais ces difpofitions n’ont point eu d’execution ; ou ne font point aflez exaétement obfervées, On à toléré pendant quelques années que les nonces du Pape, qui n’ont aucune jurifdi@ion en France ; Te- çuffent la profeffion de foi du nommé à Pévêché, & fiflent l'information de fes vie » MŒœurs & capacité ; & de l’état des bénéfices ; ce quieft contraire au droit des ordinaires , & a été défendu par un arrêt de ré- glement du parlement de Paris > du 12 Décembre 1639. L’ufage des autres églifes n°eft pas par-tout fem- blabie à celui de France: quelques-unes fuivent la {ef _ fion xx. du concile de Trente, fuivant laquelle, au défaut de degrés, il fuffit que l’évéque ait un certificat donné par une univerfité, qui attefte qu'il eft capable d’enfeigner les autres; & f c’eftunrégulier, qu'il ait l’atteftation de {es fupérieurs. Les canons veulent que celui qu’on élit pour éyé- que {oit au moins foûdiacre. Le concile de Trente veut que l’évéque foit prêtre fix mois avant {a promo tion; mais le concordat, qui fait l’énumération des qualités que doivent avoir ceux qui font nommés par le roi, n’exige point qu'ils foient prêtres ni foûdiae cres ; & l’ordonnance de Blois fuppofe qu'un fimple clerc peut être nommé évégue fans être dans les or. dres facrés. En effet | L'arr. 8. de cette ordonnance veutque dans trois mois, à compter de leurs provi- fions, les éyéques foient tenus de {e fairé promouvoir aux faintsordres: & que fi dans trois autres mois ils ne fe font mis en devoir de le faire, äls foient privés de leur églife, fans autre déclaration ; fuivant les faints decrets. re Pour ce qui eft de la nomination des évêques dans les premiers fiecles de l'Eglife , ils étoient élus par le clergé & le peuple. On ne devoit facrer que ceux que le clergé élfoit & que le peuple defiroit ; mais le métropolitain & léyéque de la province devoient inftruire le peuple, afin qu'il ne fe portât point à de- mander des perfonnes indignes ou incapables de rem- plir une place fi éminente. | Les laïcs conferverent long-tems le droit d’aflifter aux éleétions , 87 même dy donner leur fuffrage; mais la confufion que caufoit ordinairement la mul: titude des éleéteurs , & la crainte que le peuple n’eût pas le difcernement néceflaire pour les qualités que doit avoirun évéque , firent que l’on n’admit plus aux éleétions que le clergé : on en fit un décret formel dans le huitieme concile général, tenu à Conftanti: nople en 869 ; ce qui fut fuivi dans l’églife d'Occi- dent comme dans celle d'Orient. On défendit en m£- me tems de recevoir pour évéques ceux qui ne fe- roient nommés que par les empereurs’ ou par les 142 EVE rois. Ce‘changement n’empêcha pas que lon ne fût obligé de demander le confentement & l'approbation dés fouverains, avantique de facrer ceux qui étoient élus ; on fuivoit cette regle même par rapport aux papes, qui ont été long-tems obligés d’obten le confentement des fuccefleurs:de Charlemagne. Pour ce qui'eftdes évêchés de France, nos rois de da premiere race en difpofoïent , à lexclufion du peu- ple 8 duiclergé:; il eff du moins certain que depuis Clovis jufqu'à l'an 590, il n’yeut aucun évégue inf tallé’finon par l'ordre ou du confentement'du roi : on procédoit cependant à uneéletion, mais ce n’é- toit que pour la forme. : Dans le feptieme fiecle nos rois difpofoient pareïl- lement des évêchés. Le moine Marculphe , qui vi- voit'en:ce fiecle, rapporte la formule d’un ordre ou préceptepar lequel le roi déclaroit au métropolitain, qu'ayant appris la mort d’un tel évégue , 1l avoit ré- {olw, de avis des évéques & des grands, de lui don- ner untel pour fuccefleur. Il rapporte aufli la for- mule d’une requête des citoyens de la ville épifco- pale, par laquelle ils demandoiïent au roi de leur donner pour évégue un tel, dont ils connoifloient le mérite; ce qui fait voir que lon attendoit le choix, ou dumoins le confentement du peuple. Louis le Débonnaire rendit aux églifes {a liberté des éleîtions; mais par rapport aux évêchés, 1l pa- roît que ce prince y nommoit , comme avoit fait Charlemagne; que Charles le Chauve en ufa auf de même, & que ce ne fut que fous les fuccefleurs de celui-ci que le droit d’élire les évégues fut rétabli pendant quelque tems en faveur des villes épifcopa- les. Les chapitres des cathédrales étant devenus puif- fans, s’attribuerent l’éleétion des évéques ; mais il fal- loit toùjours l'agrément du rot, Depuis l'an 1076 jufqw’en 1150, les papes avoient excommunié une infinité de perfonnes, & fait périr plufeuirs millions d'hommes par les guerres qu’ils fuf- citerent pour enlever aux fouverains l’inveftiture des évêchés, & donner l’éleftion aux chapitres. Il paroît que c’eft à-peu-près dans le même tems que des évéques commencerent à fe dire évéques par la grace de Dieu ou par la miféricorde de Dieu, diviné miferatione. Ce fut un évêque de Coutances qui ajoûta le premier, en 1347 ou 1348, en tête de fes mande- mens ê&cautres lettres, ces mots, & par la grace du faint fiége apoflolique, en reconnoiflance de ce qu'il avoit été confirmé par le pape. Pour revenir aux nommations des évêchés, le pape Pie IT. & cinq de fes fuccefleurs combattirent pendant un demi-fiecle pour les ôter aux chapitres &c les donner au roi. Tel étoit le dernier état en France avant le concordat fait entre Léon X. & François I. - Par ce traité les éleétions pour les prélatures fu- rent abrogées , & le droit d’y nommer a été transféré tout-entier au roi, fur lanomination duquel le pape doit accorder des bulles, pourvû que celui qui eft nommé ait les qualités requifes. Le roi doitnommer dansles fix mois de la vacance: fi la perfonne n’a pas les qualités requifes par le con- cordat , & que le pape refufe des bulles , le roi doit en nommer une autre dans trois mois, à compter du jour que le refus qui a été fait des bulles dans le con- fiftoire, a été figmifié à celui qui les follicitoit. Si dans ces trois mois le roi ne nommoit pas une perfonne capable , lepape, aux termes du concordat, pourroït y pourvoir, àla charge néanmoins d’en faire part au roi, & d'obtenir fon agrément; mais il n’y a pas d'exemple que le pape ait jamais ufé de ce pouvoir. Celui: que le roi a nommé évéque , doit dans neuf mois, à compter de fes lettres de nomination, ob- tenir des bulles, ou juftifier des diligences qu’il a fai- tes pour les obtenir ; autrement il demeure déchû de plein droït du droit qui lui étoit acquis en vertu de {es lettres. | | | Sile pape refufoit fans raifon des bulles à celui qui eft nommé par le roi , il pourroit fe faire facrer par le métropolitain, fuivant l’ancien ufage, ou fe pour- voir au parlement, où1l obtiendroitun arrêt en ver: : tu duquel le nommé jouiroit du revenu, & confére- roit les bénéfices dépendans de fon évêché, Le nouvel évéque peut, avant d’être facré , faire tout ce qui dépend de la jurifdiétion fpirituelle : il a la collation des bénéfices 8 l’émolument du fceau ; mais il ne peut faire aucune des chofes gzœ funr or- dinis, comme de donner les ordres, impoferles mains, faire le faint chrême. | | Les conciles veulent que Pévéque fe fafle facrer où confacrer, ce qui eft la même chofe, trois mois après {on inftitution ; que s’il differe encore trois mois, il foit privé de fonévêché. L’ordonnance de Blois veut auflique les évéques fe faflent facrer dans le tems porté par les conftitutions canoniques. Anciennement tous les évégzes de la province s’af fembloient dans Péglife vacante pour affifter à l’é- leétion , & pour facrer celui qui avoit été élu. Lorf qu’ils étoient partagés fur ce fujet, on fuivoit la plu- ralité des fuffrages. Il y avoit des provinces où le métropolitain ne pouvoit confacrer ceux qui avoient été élus , fans le confentement du primat. Quand ils ne pouvoient tous s’afflembler , il fufifoit qu'il y en eût trois qui confacraflent l’élu , du confentement du métropolitain qui avoit droit de confirmer l’élec- tion. Ce réglement du concile de Nicée , renouvellé par plufieurs conciles poftérieurs, a été obfervé pen- dant plufieurs fiecles. [1 eft encore d’ufage de faire facrer le nouvel évégue par trois autres éyégues; mais il n’eft pas néceffaire que le métropolitain du pourvi fafle la confécration. Cette cérémonie fe fait par les évêques auxquels les bulles font adreflées par le pape. Les métropolitains font facrés, comme les autres évêques, pat ceux à qui les bulles font adreffées. Voici les principales cérémonies qu’on obferve dans l’Eglife latine pour la confécration d’un évéque. Cette confécration doit fe faire un dimanche dans l’églife propre de l'élu, ou du moins dans la provin- ce, autant qu'il fe peut commodément. Le confécra- teur doit être afifté au moins de deux autres évéques « il doit jeüner la veille, & l’élu auffi. Le confécrateur étant aflis devant l’autel, le plus ancien des éyéques - affiftans lui préfente l'élu, difant : ’Eglife catholique demande que vous eleviez ce prêtre à la charge de l’épifco- pat. Le confécrateur ne demande point s’il eft digne, comme on faifoit du tems des éleétions, mais feule- ment sil y a un mandat apoftolique , c’eft-à-dire la bulle principale qui répond du mérite de l'élu, & il la fait lire. Enfuite l’élu prête ferment de fidélité au faint fiége, fuivant une formule dont il fe trouve un exemple dès le tems de Grécoire VII. On y a depuis e £ (e) ajoûté plufeurs claufes, entrautres celle d’aller à . Rome rendre compte de fa conduite tous les quatre ans, ou du moins d'y envoyer un député ; ce quine s’obferve point en France. Alots le confécrateur commence à examiner l'élu fur fa foi & fes mœurs, c’eft-à-dire fur fes intentions pour l'avenir ; car on fuppofe que l’on eft aflüré du pañlé. Cet examen fini , le confécrateur commence la mefle : après l’épître & le graduel ilrevient à fon fiége ; & l'élu étant aflis devant lui , il l’inftruit de fes obligations, en difant : #7 évéque doit juger, inter- prêter, confacrer, ordonner, offrir, baptifer 6: confirmer. Puis l’élu s'étant profterné, & les évéques à genoux, on dit les litanies, & le confécrateur prend le livre des évangiles, qu’il met tout ouvert fur le cou & {ur les épaules de l'élu, Cette cérémonie étoit plus facile du tems que les livres étoient des rouleaux, vo/mi- na ; çar l’évangile ainf étendu, pendoit des deux côtés comme une étole. Le confacrant met enfuite fes deux mains fur la tête de l'élu, avec les évégques affiftans , en difant : recevez de Jainr Efprir. Cette im- poñtion desmainseftmarquéedans l’Ecriture, £ Tir. c.7v.v. 145 & danses conflitutions apofñtoliques , ZivaVIlT se, 7. ibeft fait mention de l’impoñtion du livre, pour marquerfenfiblement l'obligation de por. ter le joug. du fesgneur 8 de prêcher l'évangile. Le confécrateurdit enfuite une préface, oil prie Dieu de donner à l’élu toutes les vertus dont lesornemens dugrand-prêtre de l’ancienneloiétoientles fymboles myftérieux; &tandis:que l’on chante l'hymne du S. Efprit , al lui fait une-onétion-fur la tête avec le faint chrême ;/puis ilacheve la priere qu'ilacommencée, demandantipour lui abondance de la grace &r de la vertus qui eft marquée par cette onétion. On chante Tepfeaunet3 2. qui parle del’onétion d’Aaron., & le confécrateur oint les mains-de l'élu avec le faint chrême: enfiite il bénit le.bâton paftoral , qu'il lui donne-pour:marque defa jurifdi@tion: Il bénit-auff l'anneau, & le lui met au doigt en figne-de-fa foi, lexhoftantde garder PEglife fans tache, comme l’é- poule de Dieu. Enfuiteal lui te de deflus:les épaules le:livre des évangiles, qu'illui met entre les mains, endifant: prenez l'évangile, 6allez précher au peuple qui vous ef? commis ;1car Dieu eff affez puiflant pour vous augmenter fa grace. Vs Là fe continue la meffez.ôn lit l'évangile., 8 au- trefois le nouvel évéque prêchoit, pour commencer d'entrer en fonétion : à l’offrande il offre du pain & du vin, fuivant Pancien ufage ;! puis il {e joint au confécrateur, & achevé avecliu la mefle, ohilcom- mumefoustles deux efpeces,: & debout. La meffe. achevée le confécrateur bénit la mitre &les gants, marquant leurs figmifications myttérieufes!; puis il inthronife le confacré dans: fon liège: ÆEnfuite 1onr chante le Te Deum ; & cependant les éyéques affiftans promenent le confacré par toute l’églife, pour lemon- trer au peuple. Enfin il donne la bénédi@ion folen- nelle. Porufical. rom. de confècrat. epifcop. Fleury, inffies au Droit eccléf. tom, L part. I. c. xj. pag. 110. E fuiv. | Autrefois l’évéque devoit, deux mois après {on fa- cre, aller vifiter fon métropolitain, pour recevoir de ur les inftruétions & les avis qu’il qugeoït à-pro- pos de lui donner. L'évéque étant facré doit prêter en perfonne fer- ment de fidélité au roi: jufqu’à ce ferment la régale demeure ouverte, Voyez SERMENT DE FiDÉLAITÉ. On trouve dans les anciens auteurs quelques paf- fages, qui peuvent faire croire que dès les premiers fiecles de l’Eglife les éyéques portoient quelque mar- que extérieure de leur dignité ; l’apôtre S. Jean, & S. Jacques premier évéque de Jérufalem, portoient une lame d’or fur la tête , ce qui étoit fans doute imité des pontifes de l’ancienne loi, qui portoient fur le front une bande d’or fur laquelle le nom de Dieu étoit écrit. Les ornemens épifcopaux font la mitre, la crofle, la croïx peétorale, l'anneau, les fandales : Pevéque peut faire porter devant lui la croix dans fon dio- cefe ; mais il ne peut pas la faire porter dans le dio- cefed’un autre évégue, parce que la croix lévée eft un figne de jurifdiétion. Il n’y a communément que les archevêques qui ayent droit de porter le pallium, néanmoins quel- ques évégues ont ce droit par une conceflion fpeciale du pape. Voyez PALLTUM. | . Quelques évéques ont encore d’autres marques ‘honneur fingulieres; par exemple, fuivant quel- ques auteurs , l’éyégue de Cahors a le privilège dans Ceftaines cérémonies de direla meffe ayant {ur l’au- tel l'épée nue, le cafque, & les gantelets, ce qui eft relatif aux qualités qu’il prend de baron & decomte, VC, y Plufieurs évégzies d'Allemagne , qui font ptinces font verains, en ufent de même. » LE En France il y à fix épéques ou archevêques qui font pairs eccléfiaftiques ; favoir, trois ducs & trois comtes (voyez PArRs) ; la plûpart des autres évêques pofledent auffi de grandes feigneuries attachées à leur évêché. C’eft dé-là qu’ils ont été admis dansles confeils du roi; & dans les parlemens le refpe& que l’on a pour leur miniftere, à engagé à leur donner dans les affemblées le premier rang, qui, fous les rois de la premiere race, appartenoit à la noblefe. On ne croit pourtant pas que ce foit à canfe de leurs feigneuries, qu’on leur à donné la qualité de monféigneur, qu'ils font en ufage de fe donner entre eux ; il paroit plûtôt qu’elle vient du terme fenior ; qui, dans la primitive églife , étoit le titre commun à tous les évéques & à tous les prêtres : on les appels loït ainfi féxiores ou fénieurs , parce qu’on choïfiffois ordinairement les plus'añciens des fideles pour gou- verner les autres : on les qualifioit auffi de très-faints, très-pieux , & très-vénérables ; préfentement on leur donne le titre de révérendiffime. À l'égard de Pufage où l’on eft de défioner chaque évéque par le nom de la ville où eft le fiége de {on églife, comme M. de Paris, M. de Troyes, ait heu dé dire M. l'archevêque de Paris, M. levéque de Troyes, ce n’eft pas d’anjourd’hui que cela fé pra- tique. En effet Calvin dans fon livre intitulé Z7 ma. ñiere de réformer l'Eglife , a dit dès l'an x 549 ; quOI- qu'en taillant, Monfieur d’ Avranches, en parlant de Robert Cenalis. Il étoit d’ufage autrefois de fe profterner devant eux &z de leur baifer les piés, ce qui ne fe pratique plus'qu'à Pégard du pape: mais il eft encore demeu- ré de cet ufage ; qué quand l’évégue marche étant re- vêtuide fes orneméns épifcopaux , il donne de [x main des bénédiétions que les afliftans reçoivent à genoux. Les nouveaux évéques , après leur facre, font or- dinairement une entrée folennelle dans la ville épif- copale & dans leur églife ; plufieurs avoient le droit d'être portés en pompe par quatre des principaux _ barons ow vaflaux de leur évêché , appellés dans quelques titres cafari majores où homines epifcopi : dans quelques diocefes ces vaffaux doivent À l'évéque une ! gouttieré Ou cicrge d’un certain poids. Par exemple, les feigneurs de Corbeil, de Mont: Ihéri, la Ferté-Alais, & de Montjay, devoient à l’églife de Paris un cierge , & étoient tenus de por- ter lévéque , aufli-bien que les feigneurs de Torcy, Tournon, Lufarche, & Conflans St Honotine : :f eft dit auffi dans quelques anciens aveux, que le fei- gneur de Bretigni étoit un de ceux qui devoient por- ter l’évéque à fon entrée. Les évêques d'Orléans fe {ont toûjours maintenns en pofleffion de faire folennellement leur entrée, @& ont de plus le privilége en cette occafion'de délivrer des criminels ; ce privilége qu'ils tiennent dé La pié- té de nos rois, avoit recu ci-devant beaucoup d’ex- tenfion. Les criminels yenoient alors de toutes parts {e rendre dans les prifons d'Orléans pour y obtenir leur grace, ce qui a été reftraint par un édit du mois de Novembre 1753, dont nous parlerons chaprès au 10t GRACE. Quelques évéques joïnflent dans leur églhife d’un _ droit de joyeux avenement, femblable à celui dont le Roï eft en poffeffion à fon avenement à la cou ronne. M. Lotiet en donne un exemple de lévéque de Poitiers, qui fut confirmé dans ce droit par arrêt du parlement en r53r. | On trouve auf qu'en 1350 l’évéque de Clermont avoit interdit fon diocefe , faute de payement des redevances qu'il prétendoit pour fon joyeux avene- . ment; le roi Jean manda par lettres patentes à fon 144 EVE baïlli d'Auvergne , de faire afligner Ke prélat pour lever l’interdit, n'étant permis à perlonne , dit-il dans ces lettres, d'interdire aucune terre de {on do- maine. Les canons défendent aux évéques d’être long-tems hors de leur diocèle , & ne leur permettent pas de faire leur réfidence ordinaire hors de la ville épifca- pale ; c’eft pourquoi Philippe le Long ordonna en 1319 qu'il n’y auroit dorénavant nuls prélats au par- lement , ce prince faifant, dit-1l, confcience de les empêcher de vaquer au gouvernement de leur fpi- situalité. Dans la primitive églife les évéques n’ordonnoient tien d’important fans confulter le clergé de leur dio- cèle, presbyterinm , & même quelquefois le peuple. Il étoit facile alors d’aflembler tous Les clercs du dio- cèfe, vù qu'ils étoient prefque toüjours dans la ville épifcopale. | Lorfque l’on eut établi des prêtres à la campagne, ce qui arriva vers l’an 400, on n’aflembla plus tout le clergé du diocèfe que dans des cas importans, comme on fait aujourd’hui pour les fynodes diocé- fains ; mais les évéques continuerent à prendre l’avis de tous les eccléfiaftiques qui faifoient leur réfiden- ce dans la ville épifcopale, ce qui paroït établi par plufieurs conciles des v. & vj. fiecles, qui veulent que l’évéque prenne l’avis de tous les abbés, prêtres, & autres clercs. Dans la fuite le clergé de la cathédrale vêcut en commun avec l'évéque, &t forma une efpece de mo- naftere ou de féminaire dont lPévéque étoit toùjours le fupérieur ; le chapitre fut repardé comme le con- {sil ordinaire & néceflaire de l’évéque ; tel étoit en- core l’ordre obfervé du tems d'Alexandre III, mais depuis, les chanoines ont infenfblement perdu le droit d’être le confeil néceflaire de l’évêque, fi ce n’eft pout ce qui concerne le fervice de l’églife ca- thédrale ; pour ce qui eft du gouvernement du diocè- fe , l'évéque prend l’avis de ceux que bon lui femble, La jurifdiétion qui appartient aux évêques de doit divin, ne confifte que dans le pouvoir d’enfeigner, de remettre les péchés, d’adminiftrer aux fideles les facremens, & de punir par des peines purement fpi- rituelles ceux qui violent les lois de l’Eglife. Suivant les lois romaines les éyéques n’avoient au- cune jurifdiétion contentieufe ; même entre clercs; mais les empereurs établirent les évégues arbitres né- ceffaires des caufes d’entre les clercs & les laïcs; cette voie d'arbitrage fut infenfiblement convertie en jurifdi£tion : les princes féculiers , par confidéra- tion pour les évéques, ont beaucoup augmenté les droits de leur jurifdi&ion, en leur attribuant un tri- bunal contentieux pour donner plus d'autorité à leurs décifions fur les affaires ; ils Leur ont auffi accordé, par grace {péciale, la connoïffance des affaires per- {onnelles intentées contre les clercs, tant au civil qu’au criminel. À l'égard des affaires entre laïcs pour chofes tem- porelles, Conftantin le Grand ordonna que quand une partie voudroit fe foûmettre à l’avis de Pévégue, l’autre partie feroit obligée d’y déférer, &c que les jugemens de Vévéque feroient 1rréformables, ce qui rendoit les évêques juges fouverains ; cette loi fut 1n- {érée au code théodofien, 4v. XVI. ait. x. de epifco- pali aud. Juftinien ne la mit pas dans fon code, mais le crédit des évéques fous les deux premieres races de.nos rois, la part qu’ils eurent à l’éleétion de Pe- pin, la grande confidération que Charlemagne avoit pour eux, firent que nos rois renouvellerent le pri- vilége accordé aux évégues par Conftantin : on en fit une loi qui fe trouve dans les capitulaires , o7z. I. div. VI, cap. ceclxv]. L’ignorance des x. xj. & x1j. fiecles donna lieu aux évêques d'accroître beaucoup leur jurifdiéion çon- FVE tentieufe ; ils étoient devenus les juges ordinaires des pupilles, des mineurs, des veuves, des étran- gers, des prifonniers, & autres femblables perfon- nes ; ils connoïfloient de l’exécution de tous les con- trats où l’on s’étoit obligé fous la religion du fer- ment, de l’exécution des teftamens, enfin de pref- que toutes les affaires. | Maïs à mefure que l’on eft devenu plus éclairé, les chofes font rentrées dans l’ordre ; la jurifdiétion contentieufe des évéques a été réduite, à l'égard des laics, aux matieres purement fpirituelles , & à lé- gard des clercs, aux affaires perfonnelles. Les évéques ont divers officiers pour exercer leur jurifdiétion contentieufe ; favoir, un official, un vi- ce-vérent , un promoteur , un vice-promoteur Te autres officiers néceflaires. Jufqu'au xi. fiecle:,les évêques exercçoient eux-mêmes leur jurifdition fans officiaux ; préfentement 1ls fe repofent ordinaire- ment de ce foin fur leurofficial , ce quin’empêche pas que quelques-uns n’aillent une fois, à leur avene- ment, tenir l'audience de l’oficialité ; il y en a nom- bre d'exemples, & entr'autres à Paris celui de M. de Bellefonds archevêque, lequel fut inftallé le 2 Juin 1746 à l’officialité, & y jugea deux caufes avec la- vis du doyen & chapitre de N:D. Voyez Jurisprc- TION ECCLÉSIASTIQUE ; OFFICIAL, VICE-GÉ- RENT, PROMOTEUR, Les conciles & les ordonnances impofent aux évé- ques l'obligation de vifter en perfonne leur diocèfe, & de faire vifiter par leurs archidiacres les endroits où ils ne pourront aller en perfonne. Voyez Visite. L’évéque fait par lui ou par fes grands-vicaires tous les aétes qui font de jurifdiétion volontaire &c gra- cieufe , tels que les dimifloires , la collation des bé-. néfices, les unions, l'approbation des confeffeurs , vicaires, prédicateurs, maîtres d'école ; la pernuf- fion de er pour les prêtres étrangers, la per- miffion de faire des quêtes dans le diocèfe ; la béné- diéion des églifes, chapelles, cimetieres 8e leur re- conciliation ; la vifite des églifes paroifales &c au- tres lieux faints, celle des chofes qui y font conte- nues & qui font requifes pour le fervice divin; la vifite des perfonnes & celle des monafteres de re- ligieufes ; les difpenfes touchant lordination des clercs ; les difpenfes des vœux , des irrégularités ; des bans de mariage, enfin ce qui concerne les cen- fures & les abfolutions. Voyez JURISDICTION vo: LONTAIRE. | Il y a certaines fonétions que Les évéques doivent remplir par eux-mêmes, comme de donner la con- firmation & les ordres, bénir le faint chrème & les faintes huiles, confacrer les évêques, &c. Lorfqu’un évéque fe trouve hors d'état de remplir les devoirs de Pépifcopat à caufe de fes infirmités , ou pour quelqu’autre raïfon, on lui donne un co- adjuteur avec future fucceffion. Le co-adjuteur doit travailler avec lui au gouvernement du diocèfe. Le : pape en accordant des bulles au co-adjuteur fur la. nomination du roi, fait le co-adjuteur évéque in par- tibus infidelium, afin qu’il puifle être facré & confé- rer les ordres. Voyez CO-ADJUTEUR. Les évéques font foûmis , comme les autres fjets du roi, à la jurifdi@ion féculiere en matiere civile ; à l'égard des matieres criminelles, un évégue ne peut être jugé pour le délit commun que par le concile de la province, compofé de douze évêques, & au- quel doit préfider le métropolitain; mais pour le cas privilégié, les évéques font comme les autres ecclé- fiaftiques fujets à la jurifdiétion royale ; & s’il arrive qu'un éyéque caufe quelque trouble dans l’état par fes adions, par fes paroles ou par fes écrits, le par- lement, & même les juges royaux inférieurs , peu- vent arrêter le trouble & en empêcher les fuites, tant par faifñe du temporel que par des ämendes, decrets, EVE decrets, & autres voies de droit felon les circonf- fances, AU La tranflation d'un évégue d’un fiége à un autre, fut pratiquée pour la premiere fois dans le iii. fiecle en la perfonne d'Alexandre évéque de Jérufalem ; elle fut enfuite défendue au concile d’Alexandrie en 340, &t au concile de Sardique en 347. Etienne VII. fit déterrer le corps de Formofe fon prédécefleur, & lui fit faire {on procès fous prétexte qu’il avoit été transféré de l'évêché de Porto à celui de Rome ; ce qu'il fuppofoit n'avoir point encore eu d'exemple. Cette aétion fut improuvée par le concile tenu à Ro- me l’an 901; Sergius IIL. entreprit de la juftifier. Les conciles ont tojours condamné les tranfla- tions qui feroient faites par des motifs d’ambition, de cupidité ou d’inconftance ; mais ils les ont per- mifes lorfqw’elles font faites pour le bien de l’Eglife, Autrefois un évégue ne pouvoit être transféré d’un fiége à un autre, que par ordre d’un concile provin- cial; mais dans lufage préfent une difpenfe du pape fufit avec le confentement du roi. Un évêque, fuivant les canons, devient irrégulier en certains cas; par exemple, s'il a ordonné l’épreu- ve du fer chaud ou autre femblable, s’il a autorifé un jugement à mort ou s’il a aflifté à l'exécution. (4) En Allemagne, la plüpart des évêchés font élec- tifs. Ce font les chapitres des cathédrales ou métro- poles, ordinairement compoiés de nobles, qui ont le droit d’élire un d’entr'eux à la pluralité des voix, Ou bien de le poftuler ; cette éleétion ou poftulation confere à celui fur qui elle tombe la dignité de prin- ce de l’empire, la fupériorité territoriale, le droit de féance & de fuffrage à la diete de l'Empire ; & celui qui a été élà ou poftulé reçoit pour les états qui lui font foûmis l’inveftiture de l’empereur, & jouit de fes droits comme prince de l’Empire, in- dépendamment de la confirmation du pape dont il a befoin comme évégue. Le traité de paix de Weftphalie a apporté un grand chargement dans les évêchés d’Allemagne ; il yen eut un grand nombre de fécularifés en faveur de plu- fieurs princes proteftans : c’eft en vertu de ce traité ue la maifon de Brandebourg poffede l’archevêché de Magdebourg ; celui de Halberftadt, de Minden, Gc. la maifon de Holftein celui de Lubeck , &c. L’é- vêché d’Ofnabrug eft alternativement pofledé par un catholique romain , & par un prince de la maïfon de Brunfwick-Lunebourg qui eft proteftante. (—) EVÊQUE-ABBÉ ; les abbés prenoient ancienne- ment ce titre, apparemment parce qu'ils joüifloient de plufieurs droits femblables à ceux des évéques. ÉVÊQUE ACÉPHALE , eft celui qui ne releve d’au- cun métropolitain , mais qui eft foûmis immédiate- ment au faint fiége. EVÊQUE ASSISTANT ; on donne ce titre À Rome à quelques évéques qui entrent dans des congréga- tions du faint office. EVÊQUES-CARDINAUX, fignifioit d’abord éyéques Propres Ou ex chef; on donna ce titre aux évéques aux- quels fut accordé le privilége d’être mis au nombre des cardinaux de l’éplife romaine, c’eft-à-dire qui étoient 2rcardinati fèu intra cardines ecclefie, Il y avoit des prêtres &c des diacres cardinaux avant qu'il eût des évéques-cardinaux ; ce ne fut que fous le pon- tificat d’Etienne I V. Anaftafe le Bibliothécaire dit que ce pape obligea les fept évéques-cardinaux à cé- lebrer tour-à-tour, tous les dimanches , fur l’autel deS. Pierre. Ces évéques, dans le xj. fiecle , pre- noïent féance dans les aflemblées eccléfiaftiques de- vant les autres évéques , même devant les atchevé- ques &t les primats; dans le fiecle fuivant les card:- naux-prêtres & les diacres s’attribuerent le droit de fiéger après les cardinaux-évéques, Voyez pour le fur- plus au 720t CARDINAUX, Tome VI, | EVE ï45 ÉVÊQUE CATHÉDRAL, cathedralis : on appelloit ainfi les évégues qui étoient à la tête d’un diocèfe RE: la différence des chorévêques qui étoient d’un ordre inférieur. EVÊQUE COMMENDATAIRE, c’étoit celui quite- noit un évêché en commende, comme cela fe prati- quoit abufivement tandis que le faint fiège fut trans- feré à Avignon, Il n’y avoit prefque point de cardi- nal qui n’eût un ou plufieurs évêchés en commende, ce qui fut défendu par le concile de Trente. ÉVÊQUE DE LA COUR; on donne quelquefois ce titre au grand aumônier du roi, Voyez GRAND-AU= MÔNIER. 5 ÉVÊQUE DIO CÉSAIN, eft celui qui a le gouver« nement du diocèfe dont il s’agit; lui feul peut faire, ou donner pouvoir de faire, quelqu’aête de jurifdics tion fpirituelle dans fon diocèfe. Foyez DiocésaiN Ë JURISDICTION ECCLÉSIASTIQUE. ÉVÊQUE 1N PARTIBUS INFIDELIUM, Ou come me on dit fouvent par abbréviation, éyéque ir parti. bus, eft celui qui eft promû à un évéché fitné dans les pays infideles. Cet ufage a commencé du tems des croifades , où il parut néceflaire de donner aux villes foûimifes aux Latins des éyéques de leur com . munion , qui conferverent leurs titres, même après qu'ils en furent chaflés ; on continua cependant de leur nommer des fuccefleurs. Les incurfions faites par les Barbares, & principalement par les Muful- mans, ayant empêché ces évéques de prendre poflef- fion de leurs églifes & d’y faire leurs fonétions, le concile 22 srullo leur conferva leur rang & leur pou- voir pour ordonner des clercs & préfider dans l’é- life, On les appelle auffi quelquefois évêques ritulaires OU zulla renentes , quoïqu’on dût plütôt les appeller évêques non titulaires. Ces évêques in partibus ont caufé beaucoup de trou ble dans les derniers fiecles , ce qui a donné lieu à plufieurs réglemens pour en reformer les abus. Ceux qui font donnés ‘pour füuffragans à quelque | évêque ou archevêque , font regardés d’un œil plus favorable, | Dans Paffemblée du clergé de 165, il fut réfol que les évéques in partibus ne feroient point appellés aux afflemblées particulieres des évéques ; que l’on feroit à Rome les inftances néceflaires , afin que le pape ne leur donnât point de commiffion à exécuter : dans le royaume ; que M. le chancelier feroit prié de ne point donner des lettres patentes pour l’exécu- ption des brefs adreflés à ces éyéques, & que quand il feroit néceflaire de les entendre dans les aflem blées, tant générales que particulieres, on leur don- neroit une place féparée de celle des évêques de Frans ce; mais que cette délibération n’auroit point lieu , tant à l’égard des co-adjuteurs nommés à des évêchés de France avec future fuccefion, que des anciens évêques qui fe feroient démis de leur évêché, Voyez des mémoires du Clergé. EVÊQUE MÉTROPOLITAIN, ou archevêque, eft celui dont le fiege eft dans une métropole , & qui a fous lui des évéques fuffragans. y. ARCHEVÊQUE, MÉTROPOLE , MÉTROPOLITAIN. EVÊQUES zulla tenentes ; Voyez EVÈQUES IN PARTIBUS. EVÊQUES TITULAIRES ; Voyez EVÊQUES IN, PARTIBUS. Sur les évégues, Foyez Lancelot, Infhr. Lib. I, rie, v. Voyez aufh les Textes de Droit civil & canonique, indiqués par Jean Thaumas & par Brillon, en leuts diétionnaires ; Rebuffe, en fa Pratique bénéficiale , part. I, chap. forma vic. archiep. depuis le nombre Jia juiqu’à 136. Fontanon, rome 1. Voyez les Mémoires du Clergé, aux différens titres indiqués dans l'abré- é, (À _ 86 (4) L 146 EUF EVERGETE, (Hif. anc.) furnom qui fignifie bienfaireur ou bienfaifant , & qui a été donné à plu- fieurs princes: Les anciens donnerent d’abord cette épithete à leurs rois, pour quelques bienfaits inf- gnes, par lefquels ces princes avoient marqué ou leur bienveillance pour leurs fujets, ou leur refpe&t envers les dieux. Dans la fuite, quelques princes prirent ce! furnom, pour fe diftinguer des autres princes qui portoient le:même nom qu'eux. Les rois d'Egypte, par exemple, fuccefleurs d'Alexandre , ont prefque tous porté le nom de Prolemée ; ce fut le troifieme d’entre eux qui prit le furnom d’évergere, pour fe diftinguer de fon pere & de fon ayeul ; & cela, dit S. Jérome , parce qu'ayant fait une expédi- ‘tion militairé dans la Babylone , il reprit les vafes que Cambylfe avoit autrefois enlevés des temples d'Egypte, & les leur rendit. Son petit-fils Ptolemée Phifcon, prince cruel & méchant, affe@ta auffi le fur- nom d’evergere ; maïs fes fujets lui donnerent le nom de Kakergetes, c’eft-à-dire malfaifant, Quelques rois de Syrie, des empereurs romains après la conquète de l'Egypte, & quelques fouverains, ont été aufli furnommés évergetes | comme il paroît par des mé- dailles 87 d’autres monumens. Chambers. (G) EVERRER , v. at. (Chaffe.) opération qu'on fait aux jeunes chiens , quand ils ont un peu plus d’un mois ; elle confifte à leur tirer le filet ou nerf de la längue, qu'on nomme ver, d’où l’on a fait éverrer. On pfétend que cette opération fait prendre corps au chien, & l’empêche de mordre. _* EVERRIATEUR, f. m. (Æf. anc.) c’eft ainfi qu'on appelloit l’héritier d’un homme mort; ce nom lui venoit d’une cérémonie qu'il étoit obligé de faire après les funérailles , & qui confiftoit à balayer la miaifon , s’il ne vouloit pas y être tourmenté par des lemures. Ce balayement religieux s’appelloit ever- re, mot compolé de la prépoñtion ex & du verbe verro, je balaye. (er | EVERHAM, (Géog. mod.) ville du Worcefter- shire, en Angleterre. Elle eff fituée fur Avon. Log. 13. 44. lat, 52, 10. EUFRAISE , eufrafia, 1. f. (Hifi. nat. bo.) genre de plantes à fleur monopétale & anomale, qui pré- fente une forte de mufle à deux levres; celle du def- fus eft relevée & découpée en plufeurs parties, cel- le du deflous-eft divifée ‘en trois parties dont chacu- ne eft recoupée en deux autres. Il fort du calice un piftil qui entre comme un clou dans la partie pofté- rieure de la fleur : ce piftil devient dans la fuite un fruit ou une coque oblongue qui eft partagée en deux loges, & qui renferme de petites femences. Tournefort , {n/f?. rei herb. Voyez PLANTE. (1) EUFRAISE, (Mar, méd.) cette plante pañle pour un bon ophthalmique : mais on peut avancer que e’eft une verturéellementimaginaire; & on peut l’avancer avec d'autant plus d’affürance, que c’eft à l’eau qu’on diftille de cette plante , que cette propriété eft attri- buée ; car l’eufraife étant abfolument inodore , l’eau d'exfraile eft de l’eau exaétement privée de toute vertu médicinale particuliere. Voyez EAUX DISTIL- LÉES. | Quelques perfonnes fe fervent de l’eufraife féchée en guife de tabac, pour fumer dans les maladies des eux. Mais 1l eft encore fort clair que l’excrétion de a falive excitée par la fumée de l’exfraife , ne fait pas une évacuation plus falutaire que fi elle étoit excitée par la fumée de toute autre plante inodore. L'eau d’exfraife entre dans le collyre roborant de la pharmacopée de Paris. (4) EUGENIA , 1. £. (Hif£. nat. bo.) genre de plan- te à fleur en rofe , compofée ordinairement de qua- tre pétales faits en forme de capuchon , & difpofés en rond, Le calice devient un fruit mou , ou une baie arrondie un per fillonnée-& furmontée d’une couronne. Ce fruit renferme un noyau un peu épais. ie Ne) americanarum genera, par M.Miche- EL | EVIAN , ( Géog. mod.) ville du duché de Cha- blais , en Savoie; elle eft fituée fur le lac de Gene- ve. Long. 24, 15. lat. 46. 23. | EVICTION , £ £. (Jurifpr:) fignifioit la même chofe que garantie , ou aëlion en garantie : on confon- doit ainfi cette ation , avec la caufe qui la produit parminous. L’évidion eftla privation qu'un pofleffeur fouffre de la chofe dont il étoit en pofleffion , foit à titre de vente , donation , legs, fucceflion , ow autrement. L’éviélion a lieu pour des meubles, lorfqu'ils font revendiqués par le propriétaire , & pour des im- meubles , foit que le propriétaire les reclame , ou que le détenteur foit affigné en déclaration d’hypo- theque , par un créancier hypothécaire. €” Il n’y à d'éviélion proprement dite, que celle qui eft faite par autorité de juftice ; toute autre dépof- feflion n’eft qu'un trouble de fait, & non une vérita- ble évion. ù On peut néanmoins être auffi évincé d’une acqui- fition par retrait féodal, lignager, ou convention nel, & fi le retrait eft bien fondé, y acquiefcer, fans attendre une condamnation. Un bénéficier peut auffi être évincé par dévolut. Si celui qui eft évincé a un garant , il doit lui dé- noncer l’évidlion ; & dans ce cas, l’éviéfion peut don- ner lieu à la reftitution du prix, & à des domma- ges & intérêts. Voyez DÉNONCIATION & GARAN- TIE. C’eft une maxime en Droit, que quem de eviélione tenet aitio , eundem agente repellir exceprio. La plüpart des autres textes de droit qui parlent de lévidion, doivent être appliqués à la garantie ou 2 en garantie. Voyez au digefte de evidionibus, EVIDENCE, f. f. (Mécaphyfi4.)le terme évidence fignifie une certitude fi claire & fi manifefte par elle- même, que l’efprit ne peut s’y refufer. Il y a deux fortes de certitude; la foi, & l’éyz- dence. La foi nous apprend des vérités qui ne peuvent être connues par les lumieres de la raïfon. L'éviden- ce eft bornée aux connoïffances naturelles. Cependant la foi eft toüjours réunie à l’évidences car fans l'évidence, nous ne pourrions reconnoître aucun motif de crédibilité, & par conféquent nous ne pourrions être inftruits des vérités furnaturelles. La foi nous eft enfeignée par la voie des fens ; fes dogmes ne peuvent être expofés que par l’entre- mile des connoïfflances naturelles. On ne pourroit avoir aucuneidée des myfteres de la foi les plus inef- fables, fans les idées même des objets fenfibles ; on ne pourroit pas même, fans l'évidence, comprendre ce que c’eft que certitude , ce que c’eft que vériré , ni ce que c’eftque la fo: : car fans les lumieres de la rai fon, les vérités révélées feroient inacceflibles aux hommes. L’évidence n’eft pas dans la foi ; mais les vérités que la foi nous enfeigne font inféparables des con- noiffances évidentes. Ainfi la foi ne peut contrarier la certitude de l’évidence ; & l'évidence, bornée aux 1l faut qu’il foit af ré évidemment par fa mémoire, de fon exiftence fuc- cefhve ; car fans la certitude de la durée de fon exif: tence, 1] ne peut pas avoir une connoiffance sûre & difiinéte des rapports cflentiels qu'il y aentre fes fen- fations & fon être fenfitif, & entre {es fenfat: ) » à tions la caufe aétive de fes fenfations ; il ne Pourra pas _s’appercevoir qu'il a.eu des fenfations qui l’ont trom- pé dans fes rêves, &il ne fera pas plus affûré de fon exiftence fucceflive, que de l’exiftence des objets de fes fenfations : ainfi ilne peut pas plus douter de le: xiftence de ces objets, que de fon exiftence fucceffi= ve. S'il doutoit de fon exiftence fucceflive il anéanti- roit par ce doute toutes les raifons qu'il vient d’allé guer en faveur de fon égoifine ; s’il ne doute pas de fon exiftence fuccefive, il reconnoît les moyens par lef- quels 11 s’eft aflüré de la fidélité de fa mémoire : ainfi 1l ne doutera pas plus de l’exiftence des objets fenfibles , que de fon exiftence fucceflive, & de fon exiftence aétuelle, Ceux qui opinent en faveur de l'égoifme, doivent donc au moins s’appercevoir que le tems même qu’ils employent à raifonner , contre= dit leurs raifonnemens. Mon ame, vous direz-vous, ne peut-elle pas être toïjours dans un état de pure illufion, où elle {e- roit réduite à des fenfations repréfentatives d’ob jets qui n’exiftent point ? Ne peut-elle pas auffi avoir fans l’entremife d’aucun objet réel, des fenfations affeétives qui l’intéreffent , & qui la rendent heureu= fe ou malheureufe ? Ces fenfations ne feroient-elles pas les mêmes que celles que je fuppofe qu’elle re- çoit par l'entremife des objets qu’elles me repréfen- tent ? Ne fufhroient-elles pas pour exciter mon atten- tion, pour exercer mon difcernement & mon intelli= gence, pour me faire appercevoir les rapports que ces fenfations auroient entr'elles, & les rapports qu’elles auroient avec moi-même ? d’où rélulteroit du moins une évidence idéale , à laquelle je ne pour rois me refufer. Mais vous ne pouvez vous diffimu- ler qu’en vous fuppofant dans cet état, vous ne pou vez avoir aucune éyzdence réelle de votre durée , nt de la vérité de vos jugemens, & que vous ne pouvez pas même vous en impofer par les raifonnemens que vous faites attuellement ; car ils fuppofent non-feu- lement des rapports aëtuels, mais aufli des rapports fucceflhifs entre vos idées , lefquels exigent une du- rée que vous ne pouvez vérifier, & dont vous n'auriez aucune évidence réelle: ainfi vous ne pou- vez pas férieufement vous livrer à ces raifonnemens. Maïs f votre pyrrhonifme vous conduit jufqu’à dou- ter de votre durée, ne foyez pas moins attentif à. éviter les dangers que vos fenfations vous rappel- lent, de crainte d’en éprouver trop cruellement la réalité ; leurs rapports avec vous font des preuves bien prévenantes de leur exiftence & de la vôtre. Mais toüjours il n’eft pas moins vrai, dira-ton, u'il n’y a point de rapport effentiel entre mes {en- Abe & les objets fenfibles , & qu’effetivement les fenfations nous trompent dans les rêves: cette objeétion fe détruit elle-même. Comment favez-vous que vos fenfations vous ont trompé dans les rêves ? N’eft-ce pas par la mémoire ? Orla mémoire vous af. fûre aufi que vos fenfations ne vous Ont point tront- 154 E VI pé relativement à laréalité des objets,puifqu’ellesne vous ont repréfenté que des objets qui vous ont au- paravant procuré ces mêmes fenfations par la voie des fens. S'il n’y a pas de rapport effentiel entre les objets & les fenfations, les connoïflances que la mé- moire vous rappelle, vous affürent au moins que dans notre état aëtuel il y à un rapport condition- nel & néceffaire. Vousne connoiflez pas non plus de rapport eflentiel entre l'être fenfitif & les fenfa- tions, pufqu'il n’eft pas évident que l’être fenfitif ne puifle pas exifter fans Les fenfations. Vous avouerez auffi, par la même raifon , qu'il n’y a pas de rapport eflentiel entre l’être fenfitif & la caufe aétive de nos fenfations, Maïstoûüjours eft-il évident par la réalité desfenfations, qu'il y a au moins un rapport nécef- faire entre notre être fenftif & nos fenfations, &z entre la caufe-aétive de nos fenfations & notreêtre {enftif, Or un rapport néceflaire connu nous af- fre évidemment de la réalité des corrélatifs. Le rapport néceflaire que nous connoïflons entre nos fenfations & les objets fenfibles ; nous affüre donc avec évidence de la réalité de ces objets, quels qu'ils foient ; je dis quels qu'ils foient , cat je ne les connois point en eux-mêmes, mais je ne connois pas plus mon être fenfitif: ainfi je ne connoïs pas moins les corps ou les objets fenfibles, que je me connois moi: même. De plus nos fenfations nous découvrent auffi entre les corps, des rapports néceffaires qui nous afiirent que les propriétés de ces corps ne fe bornent pas à nous procurer des fenfations ; car nous recon- noiflons qu'ils font eux-mêmes des caufes fenfibles , qui agiflent réciproquement les unes fur les autres ; enforte que le fyftème général des fenfations eft une démonfiration du fyflème général du mécha- nifme des corps. La même certitude s’étend jufqw'à la notion que j'ai des êtres fenfirifs des autres hommes ; parce que les inftruétions vraies que j’en ai reçües, & que j'ai vérifiées par l'exercice de mes fens, établiflent un rapport néceffaire entre les êtres fenfitifs de ces hom- mes, & mon être fenftif. En effet je fuis aufli affüré de la vérité de ces inftruétions que j'ai confirmées par l'exercice de mes fens, que de la fidélité de ma mémoire, que de la connoïffance de mon exiften- ce fucceffive, & que de l’exiftence des corps ; puifque c’eft par la même évidence que je fuis affüré de La véri- té de toutes ces connoiffances. Eneffet la vérification des inftruétions que j’aireçües des hommes , me prou- ve que chacun d'eux a, comme moi , un être fenfitif qui a reçù les fenfations ,ou les connoïffances qu’il m'a communiquées, & que j'ai vérifiées par l’ufage de mes fens. 41°. Qu'un être fenfitif, qui eft privativement & exclufivement affe@é de fenfations bornées à lui, &z qui ne font fenties que par lui-même, eft réel- lement diftinét de tout autre être fenfitif. Vous êtes aflüré, par exemple, que vous ignorez ma penfée ; Je fuis affüré aufli que j'ignore la vôtre : nous con- noiflons donc avec certitude que nous penfons fé- arément , & que votre être fenfitif 87 le mien font réellement & individuellement diftinéts lun de l’au- tre. Nous pouvons, 1l eft vrai, nôuscommuniquer nos penfées par des paroles, ou par d’autres fignes corporels, convenus, & fondés fur la confiance ; mais nous n’ignorons pas qu'il n’y a aucune liaifon néceflaire entre ces fignes & les fenfations, &c auw’ils font également le véhicule du menfonge &r de la vé- rite. Nous n’ignorons pas non plus quand nous nous en fervons, que nous n’y avons recours que parce que nous favons que nos fenfations font incommu- micables par elles-mêmes : ainf l’ufage même de tels moyens eft un aveu continuel de la connoïffance que nous avons de l’incommunicabilté de nos fen- fations, & de l’individualité de nos ames, On eft convaincu pat-là de la faufeR de l'idée de Spinofa fur lunité de fubftance dans tout ce qui exifte. 42°. Que les êtres fenfitifs ont leurs fenfations à part, qui ñe font qu’à eux, &c qui font renfermées dans les bornes de la réalité de chaque être fenfitif qui en eft affeété ; parce qu'un être qui fe fent {oi- même ne peut fe fentir hors de lui-même, & qu'il n'ya que hf qui puifle fe fentir foi - même: d’où il s’enfuit évidemment que chaque être {enfitif eft fim- ple, & réellement diftiné de tout autre être fen- fitif, Les bêtes mêmes font affürées de cette véri- té; elles favent par expérience qu’elles peuvent s’en- tre-caufer de la douleur, & chacune d’elles éprouve qu'elle ne fent point celle qu’elle caufe à une autre: c’eft par cette connoiflance qu’elles fe défendent, qu'elles fe vengent, qu’elles menacent, qu’elles at- taquent, qu'elles exercent leurs cruautés dans les pañlions qui les animent les unes contre les autres ; & celles qui ont befoin pour leur nourriture d’en dévorer d’autres , ne redoutent pas la douleur qu’el- les vont leur caufer. 43°. Qu'on ne peut fuppofer un aflemblage d’8. tres qu ayent la propriété de {entir, fans reconno?- tre qu'ils ont chacun en particulier cette propriété ; que chacun d’eux doit {entir en fon particulier, à part, privativement & exclufivement à tout autre; que leurs fenfations font réciproquement incommu: nicables par elles-mêmes de Pun à l’autre; qu'un tout compofé de parties fenfitives, ne peut pas for: mer une ame ou un être fenfitif mdividuel ; parce qu@®chacune de ces parties penferoit féparément & privativement les unes aux autres; & que les fen- fations de chacun de ces êtres fenfitifs n’étant pas communicables de lun à lautre, il ne pourroit y avoir de réunion ou de combinaifons intimes d'idées, dans un aflemblage d’êtres fenftifs, dont les divers états ou pofitions varieroient les fenfations, & dont les diverfes fenfations de chacun d’eux feroient in= connues aux autres. De-là il eft évident qu’une por- tion de matiere compofée de parties réellement dif tinétes, placées les unes hors des autres, ne peut pas former une ame, Or toute matiere étantécompoiée de parties réellement diflinétes les unes des autres, les êtres fenfitifs individuels ne peuvent pas être des fubftances matérielles. PR 44°. Que les objets corporels qui occafionnent les fenfations, agiffent fur nos fens par le mouvement. 45°. Que le mouvement n’eft pas un attribut ef- fentiel de ces objets ; car ils peuvent avoir plus ou moins de mouvement, & ils peuvent en être privés entierement ; or ce qui eft eflentiel à un être en eft inféparable, & n'eft fufceptible ni d'augmentation, n1 de diminution, ni de ceflation. 46°. Quele mouvement eftune ation; que cetté aétion indique une caufe; & que les corps font les fujets paflifs de cette aétion. 47°. Que le fujet pafif, &c la caufe qui agit fur ce fyet paf, font eflentiellement diftin@s l’un de lautre. 48°. Que nous fommes aflürés en effet par nos fenfations, qu'un corps ne fe remet point par lui- même en mouvement lorfqu’il eft en repos, & n’aug- mente jamais par lui-même le mouvement qu'il a re- çu : qu’un corps quien ment un autre, perd autant de fon mouvement que celui-ci en reçoit ; ainf, ri- goureufement parlant, un corps n’agit pas fur un autre corps ; l’un eft mis en mouvement, par Le mou- vement qui fe fépare de l’autre ; un corps qui com- munique fon mouvement à d’autres corps, n’eft donc pas lui-même le mouvement ni la caufe du mouve- ment qu’il communique à ces corps, | 49°. Que les corps n'étant point eux-mêmes la caufe du mouvement qu'ils reçoivent, ni de l’aug- -E VI mentation du mouvement qui leur furviént, ils fort réellement diftin@s de cette caufe. 50°. Que les corps ou les objets qui occafionnent nos fenfations par le mouvement, n'étant eux -mê- mes ni le mouvement ni la caufe du mouvement, ils ne font pas la caufe primitive de nos fenfations ; car ce n’eft que par le mouvement qw’ils font la caufe conditionnelle de nos fenfations. 51°, Que notre ame ou notre être fenfitif ne pou- vant fe caufer lui-même fes fenfations, & que les corps ou les objets de nos fenfations n’en étant pas eux-mêmes la caufe primitive, cette premieré caufe eft réellement diftinéte de notre être fenfitif, & des objets de nos fenfations. 52°. Que nous fommes aflürés par nos fenfations, que ces fenfations elles-mêmes, tous les effets & tous les changemens qui arrivent dans les cotps , font pro- duits par une premiere caule ; que c’eft l’aion de cette même caufe qui vivifie tous les corps vivans, qui conftitue eflentiellement toutes les formes aéti- ves, fenfitives, & intelleétuelles ; que la forme ef- fentielle & aétive de l’homme, entant qu’animal rai- fonnable, n’eft point une dépendance du corps & de lame dont il eft compofé ; car ces deux fubftances ne peuvent agir, par elles-mêmes, l’une fur l’autre. Ainfi on ne doit point chercher dans le corps ni dans l'ame, ni dans le compofé de l’un & de l’autre, la forme conftitutive de homme moral, c’eft-à-dire du principe aéif de fon intelligence , de fa force d’in- tention, de fa liberté , de fes déterminations mora- les, qui le diftinguent effentiellement des bêtes. Ces attributs réfultent de Pate même du premier prin- cipe de) toute intelligence & de toute activité ; de l’adte de l’Etre fuprème qui agit fur lame, qui l’af- fe@te par des fenfations, qui exécute fes volontés dé- cifives, & qui éleve l’homme à un degré d’intelli- sence & de force d'intention, par lefquelles il peut fufpendre {es décifions, & dans lefquelles confifte fa liberté. Cette premiere caufe, & {on a&tion qui eft une création continuelle, nous eft évidemment indi- quée ; mais la maniere dont elle agit fur nous, les rap- portsintimes entre cette aétion & notre ame, font in- accefhbles à nos lumieres naturelles ; parce que l’ame ne connoît/pas intuitivement le principe aétif de {es {enfations, ni Le principe pañfif de fa faculté de fentir: elle n’apperçoit fenfiblement en elle d'autre caufe de fes volontés & de fes déterminations que fés fenfa- tions mêmes. : | 53°. Que la caufe primitive des formes a@ives fenfitives , intelleduelles,, eft elle-même une caufe puiflante, intelligente & direétrice ; car les formes aives qui confiftent dans des mouvemens & dans des arrangemens de caufes corporelles ouinftrumen- tales , d'où réfultent des effets déterminés, font el- les-mêmes des aétes de puiflance, d’intelhigence, de volonté direétrice. Les formes fenfitives dans lef- quelles confiftent toutes les différentes fenfations de lumiere ; de couleurs, de bruit, de douleur, de plai- fir, d’étendue, &c. ces formes par lefquelles toutes ces fenfations ont entr’elles des différences effentiel- les, par lefquelles les êtres fenfitifs les diftinguent néceffairement les unes des autres, & par lefquelles ils font eux-mêmes aflujettis à ces fenfations, font des effets produits dans les êtres fenfitifs par des ac- tes de puiflance , d'intelligence, & de volonté dé- cifive, puifque les fenfations font les effets de ces attes, quipar les fenfatrons mêmes qu'ils nous cau- fent, font en nous la fource & le principe de toute notre intelligence , de toutes nos déterminations , & de toutes nos ations volontaires. Les formes in- tellé@uelles dans lefquelles confiftent les liaïifons , les-rapports & les combinaifons des idées , & par lefquelles nous pouvons déduire de nos idées auel- les d’autres idées ou d’antres connoiffances, confif- Tome VI, E VI 155 tent eflentiellement auffi dans des a@tesde puiffance, d'intelligence, & de volonté décifive; puifque ces aëtes font eux-mêmes la canfe conffitutive, efficien: te, &c direétrice de nos connoïffances, de notre rai- fon, de nos intentions, de notre conduite, de nos décifions. La réalité de la puiffance, de l’intelligen- ce, des intentions ou des caufes finales , nous eft connue évidemment par les aétes de puiflance , d'in- telhgence , d’intentions & de déterminations éclai rées que nous obfervons en nous-mêmes ; ainfi on ne peut contefter cette réalité. On ne peut pas con- tefter non plus que ces aétes ne foient produits en nous pat une caufe diftinéte de nous-mêmes : or une caufe dont les actes produifent & conftituent tes ac- tes mêmes de notre puiflance, de notre intelligence, eft néceflairement elle-même puiflante & intelligens te; & ce qu'elle exécute avec intelligence , eff de même néceflairement décidé avec connoiflance & avec intention. Nous ne pouvons donc nous refufer à l’évidence de ces vérités que nous obfervons en nous-mêmes, & qui nous prouvent une puiflance, une intelligence , & des intentions décifives dans tout ce que cette prenuere caufe exécute en nous & hors de nous, ÿ4°. Que chaque homme eft affüré par la connoif- fance intime des fonétions de fon ame , que tous les hommes & les autres animaux qui agiflent & fe di- rigent avec perception & difcernement, ont des fen- fations & un être qui a la propriété de fentir ; & que cette propriété rend tous les êtres fenftifs fufcepti- bles des mêmes fon@tions naturelles purement rela- tives à cette même propriété ; puifque dans les êtres fenfitifs , la propriété de fentir n’efl autre chofe que la faculté pañive de recevoir des fenfations, & que toutes les fonétions naturelles, relatives à cette fa- culté, s’exercent par les fenfations mêmes. Des êtres réellement différens par leur eflence, peuvent avoir des propriétés communes. Par exemple, la fubftan- tialité, la durée , l’individualité , la mobilité, &c. font communs à des êtresdle différente nature. Ainfi la propriété de fentir n'indique point que l'être fen- fitif des hommes & l’être fenftif des bêtes foient de même nature. Nos lumieres naturelles ne s'étendent pas jufqu’à l’eflence des êtres. Nous ne pouvons en diftinguer la diverfité , que par des propriétés qui s’excluent eflentiellement les unes les autres, Nos connoïffances ne peuvent s'étendre plus loin que par la foi. En effet J’apperçois dans les animaux l’exer- cice des mêmes fonétions fenfitives que je reconnais en moi-même ; ces fonétions en général fe reduifenr à huit, au d/cernement, à la remémoration, aux rela- tions , aux éndications , aux abffrattions , aux déduc- tions , aux induilions, & aux paffions. Il-eft évident que les animaux difcernent , qu'ils fe reflouvien- nent de ce qu'ils ont appris par leurs fenfations ; qu'ils apperçoivent les relations ou les rapports qu'il y a entr’eux & les objets qui les intéreflent, qui leur font avantageux.ou qui leur font mufibles : qu’ils ont des fenfations indicatives qui les affürent de l’exiftence des chofes qu'ils n’apperçoivent pas par l’ufage ac- tuel des fens ; que la feule fenfation, par exemple, d’un bruit qui les inquete , leur indique fürement une caufe qui leur occafonne cette fenfation; qu'ils ne peuvent avoir qu’une idée abfiraite générale de cette caufe quand ils ne l’apperçoivent pas; que par conféquent ils ont des idées abftraites : que leurs fen- fations aduelles les conduifent encore par déduétion ou raifonnement tacite à d’autres connoïffances ; que, par exemple, un animal juge par la grandeur d’une ouverture & par la groffeur de fon,corps s'il peut pafler par cette ouverture. On ne peut pas non plus douter des indu@tions que les animaux tirent de leurs fenfations , & d’où refultent les déterminations de leurs volontés : on apperçoit aufh qu'ils aiment, ÿ 156 E VI qu'ils haïffent, qu'ils craignent , qu'ils efperent, qu’: ils font fufceptibles de jaloufie, de colere , &c. qu'ils font par conféquent fufceptibles de paffions. On ap- perçoit donc effeétivement dans les animaux l’exer- cice de toutes les fonétions dont les êtres fenftifs font capables dans l’ordre naturel par l’entremife des corps. 55°. Que les volontés animales, ou purement fen- fitives, ne confiftent que dans les fenfations, & ne {ont que les fenfations elles-mêmes , entant qu’elles font agréables ou defagréables à l'être fenfitif; cat vouloir, eft agréer une fenfation agréable ; ne pas vouloir, eft defagréer une fenfation defagréable ; être indifférent à une fenfation, c’eft n’être affedté ni agréablement ni defagréablement par cette fen- fation. Agréer & defagréer font de l’effence des fen- fations agréables ou defagréables : car une fenfation qui n’eft pas agréée n’eft pas agréable, & une fen- {ation qui n’eft pas defagréée n’eft pas defagréable, En effet, une fenfation de douleur qui ne feroit pas douloureufe , ne feroit point une fenfation de dou- leur; une fenfation de plaifir qui ne feroit pas agréa- ble, ne feroit pas une fenfation de plaifir. Il faut ju- ger des fenfations agréables & defagréables, comme des autres fenfations : or quand lame eft affedée de fenfations de rouge , ou de blanc, ou de verd, &c. elle fent & connoït néceflairement ces fenfa- tions telles qu’elles font ; elle voit néceflairement rouge, quand elle a une fenfation de rouge. Elle agrée de même néceflairement, quand elle a une fenfation qui lui eft agréable ; car vouloir ou agréer n'eft autre chofe que fentir agréablement : ne pas vouloir ou defagréer n’eft de même autre chofe que fentir defagréablement. Nous voulons joüir des ob- jets qui nous caufent des fenfations agréables, & nous voulons éviter ceux qui nous caufent des fen- fations defagréables ; parce que les fenfations agréa- bles nous plaifent , & que nous fommes léfés par les fenfations defagréables ou douloureufes: enforte que notre bonheur ou notre malheur n’exifte que dans nos fenfations agréables ou defagréables. C’eft donc dans les fenfations que confifte, dans lordre natu- rel, tout l'intérêt qui forme nos volontés ; & les volontés font elles-mêmes de lefflence des fenfa- tions. Ainfi, vouloir ou ne pas vouloir, ne font pas des aétions de l'être fenfitif, mais feulement des af- fetions , c’eft-à-dire des fenfations qui l’intéreflent agréablement ou defagréablement. Mais il faut diftinguer l’acquiefcement & le dé- fiftement décifif, d’avec les volontés indécifes. Car l’acquiefcement & le défiftement confiftent dans le choix des fenfations plus ou moins agréables | & dans le choix des objets qui procurent les fenfations, & qui peuvent nous être plus où moins avantageux, ou plus ou moins nuifibles pareux-mêmes. L’être fen- ftif apperçoït par les différentes fenfations qui pro- duifent en lui des volontés a@tuelles, fouvent op- pofées , qu'il peut fe tromper dans le choix quand il 1'eft pas fuffifamment inftruit ; alors il fe détermine par fes fenfations mêmes à examiner & à déliberer avant que d'opter & de fe fixer décifivement à la jotuflance des objets qui lui font plus avantageux , où qui l’affeétent plus agréablement. Mais fouvent ce qui eft a@tuellement le plus agréable, n’eft pas le plus avantageux pour Pavenir; & ce qui intérefle le plus, dans l’inftant du choix, forme la volonté dé | cifive dans les amimaux,, c’eft-à-dire la volonté fen- fitive dominante qui a fon effet exclufivement aux autres. 56°. Que nos connoïffances évidentes ne fuffifent pas; fans la foi, pour nous connoître nous-mêmes, pour découvrir la différence qui diflingue effentiel- lement l’homme ou l'animal raifonnable, des autres ras animaux : car, à ne confulter que l'évidence ; la rai E VI fon elle-même aflujettie aux difpofitions du corps; ne paroïtroit pas eflentielle aux hommes, parce qu’il y en a qui font plus flupides, plus féroces, plus in- fenfés que les bêtes ; & parce que les bêtes marquent dans leurs déterminations , le même difcernement que nous obfervons en nous-mêmes , {ur-tout dans leurs déterminations relatives au bien & au mal phy- fiques. Mais la foi nous enfeigne que la fageffe fu- prème eft elle-même la lumiere, gx éclaire rout hom- me venant en ce monde ; que l’homme par fon union avec l'intelligence par effence , eft élevé à un plus haut degré de connoïffance qui le diftingue des bë- tes ; à la connoïffance du bien & du mal moral, par laquelle il peut fe diriger avec raifon & équité dans l'exercice de fa liberté; par laquelle il reconnoît le mérite "@& le démérite de fes aftions, & par laquelle il fe juge lui-même dans les déterminations de fon libre arbitre, & dans les décifons de fa volonté. L'homme n’eft pas un être fimple, c’eft un com- pofé de corps & d’ame ; mais cette union périffable n’exifte pas par elle-même ; ces deux fubftances ne ne peuvent agir Pune fur l’autre. C’eft l’aétion de Dieu qui vivife tous les corps animés, qui produit continuellement toute forme aûtive, fenfitive, & intelleëtnelle. L’homme reçoit fes fenfations par l’entremife des organes du corps, mais fes fenfa- tions elles-mêmes & fa raifon font l'effet immé- diat de l’ation de Dieu fur lame; ainfi c’eft dans cette aétion fur l’ame que confifte la forme eflentielle de l’animal raifonnable : l’organifation du corps eft la caufe conditionnelle ou inftrumentale des fenfa- tions, & les fenfations font les motifs ou les caufes déterminantes de la raifon & de la volonté décifive. C’eft dans cet état d’intellisence & dans la force d'intention, que confifte le libre arbitre, confidéré fimplement en lui-même. Ce n’eft du moins que dans ce point de vüe que nous pouvons l’envifager & le concevoir, relativement à nos connoïiffances naturelles ; car c’eft l'intelligence qui s’oppofe aux déterminations animales & fpontanées, qui fait hé- fiter , qui fufcite, foûtient & dirige l’intention , qui rappelle les regles & les préceptes qu’on doit obfer- ver, quinous infiruit fur notre intérêt bien entendu, qui intérefle pour le bien moral. Nous apperéevons que c’eft moins une faculté aétive , qu’une lumiere qui éclaire la voie que nous devons fuivre, & qui nous découvre les motifs légitimes & méritoires qui peuvent regler dignement notre conduite. C’eft dans ces mêmes motifs, quimous font préfens , &c dans des fecours furnaturels que confifte le pouvoir que nous avons de faire le bien & d'éviter le mal: de mêmeque c’eft dans les fenfations affe@ives déreolées, qui for- ment les volontés perverfes, queconffte aufile pou- voir funefte que nous avons de nous livrer au mal & de nous fouftraire au bien. ‘Il y'a dans Pexercice de la liberté plufieuts aêtes qui, confidérés féparément, femblent excluretoute hberté. Lorfque lame a des volontés qui fe contra- rient, qu’elle n’eft pas fufifamment inftruite fur.les objets de fes déterminations, &c qu’elle craint de fe tromper, elle fufpend, elle fe décide à examiner & à déhbèrer, avant que de fe déterminer : elle ne peut pas encore choïfr décifivement , mais elle veut: de- cifivement déhbérer. Or cette volonté décifive ex- clut toute autre volonté décifive, car deux volontés décifives ne peuvent pas exifier enfemble ; elless’en- tranéantiroient , elles ne feroient pas deux volontés décifives ; ainf l’ame n’a pas alorsle double pouvoir moral d’acquiefcer ou de ne pas acquiefcer décifive- ment à la même chofe:elle n’eft donc pas libre À'cet égard. Il eneft de même lorfqu’elle choifit décifive- ment ; car cette décifion eft un aéte fimple & défini- tif, qui exclut abfolument toute autre décifion, L’a- me n’a donc pas non plus alors le double pouvoir E VI moral de fe décider ou de ne fe pas décider pour la même chofe : elle n’eft donc pas libre dans ce mo- ment ; ainf elle n'a pas, dans le tems où elle veut décifivement délibérer, nidans le tems où elle fe dé- termine décifivement , le double pouvoir aétuel d’ac- quiefcer & de fe défifter, dans lequel confifte la li- berté ; ce qui paroît en effet exclure toute liberte. Mais il faut être fort atrentif à diffinguer les volontés indécifes des volontés décifives. Quand lame a plu- fieurs volontés indécifes qui fe contrarient , 1l faut qu’elle examine & qu’elle délibere ; or c’eft dans le tems de la délibération qu’elle eft réellement libre, qu’elle à indéterminément le double pouvoir d’être décidée, ou à fe refufer ou à fe livrer à une volonté indecife, puifqu'elle dehibere effectivement, ou pour fe refufer, ou pour fe livrer décifivement à cette vo- lonté , felon les motifs qui la décideront après la dé- libération. Les motifs naturels font de deux fortes, irffruhifs & affectifs ; les motifs inftruétifs nous déterminent par les lumieres de la raifon ; les motifs affe@ifs nous de- terminent par le fentiment a@uel, qui eft la même chofe dans l’homme que ce qu’on appelle vulgaire- ment £z/inû dans les bêtes. La liberté naturelle eft reflerrée entre deux états également oppofés à la liberté même : ces deux états {ont l’invincibilité des motifs 8 la privation des motifs. Quand les fenfations affettives font trop preffantes & trop vives relativement aux fenfations inftru@i- ves &auxautres motifs aétuels, lame ne peut, fans des fecours furnaturels , les vaincre par elle-même, La liberté n’exifte pas non plus dans la privation d’in- térêts & de tout autre motif ; car dans cet état d’in- différence les déterminations de l’ame, fi Pame pou- voit alors fe détérminer, feroient fans motif, fans taïfon, fans objet : elles ne feroient que des déter- minations fpontanées, fortuites , &c entierement pri- vées d'intention pour le-bien ou pour le mal, & par conféquent de tout exercice de liberté & de toute direétion morale. Les motifs font donc eux-mêmes de l’effence de la liberté ; c’eft pourquoi les Philofo- phes & les Théologiens n’admettent point de libre arbitre verfatile par lui-même , ni de hbre arbitre néceflité immédiatement par des motifs naturels ou furnaturels. Dans l'exercice tranquille de la liberté, Pame fe détermine prefque tobjours fans examen & fans dé- libération, parce qu’elle eft inftruite des regles qu’el- le doit fuivre fans héfiter. Les ufages légitimes éta- blis entre les hommes qu vivent en fociété, les pré- ceptes & les fecours de la religion , les: lois du gou- vernement qui intéreflent par des récompenfes ou par des châtimens, les fentimens d'humanité; tous ces motifs réums à la connorffance intime du bien & du mal moral, à la connoïffance naturelle d’un premier principe auquel nous fommes aflujettis, & aux connoïffances révelées, forment des regles qui foïmettent les hommes fendés 8 vertueux. La loi naturelle fe préfente à tous les hommes, mais ils Pinterpretent diverfement ; 1l leur faut des regles pofitives & déterminées, pour fixer &aflürer leur conduite, Ainfiles hommes fages ont'peu à exa- miner &c à délibérer fur leurs intérêts dans le détail de leurs a@&ions morales ; dévoués habituellement à la regle & à la néceflité de la regle, ils font immédia- tement déterminés par la regle même. Mais ceux qui {ont portés au déréglement par des pafions vives & habituelles, font moins foûmis par eux-mêmes à la regle, qu'attentifs à la crainte de l’in- famie& des'punitions attachées à l’infraétion de la re- gle. Dans l'ordre naturel, les intérêts ou les'affec- tions fe contrarient; on héfite, on délibere,, on ré- pugne à la regle; on eft enfin décidé ou par la paf- fon qui domine , ou par la crainte des peines, E VI ‘157 Ainñ la regle qui guide les uns fufht dans l'ordre moral pour les déterminer fans héfiter & fans délis bérer; au lieu que la contrariété d'intérêt qui af _fecte les autres, réfifte à la regle ; d’où nait l’exercice de la liberté animale, qui eft toûjours dans l’homme un defordre, un combat intenté par des pafñons trop vives qui réfultent d’une mauvaife organifation du corps , naturelle ou contraétée par de mauvaifes ha- bitudes qui n’ont pas été réprimées, L’ame eft livrée alors à des fenfations affe@ives, fi fortes & fi difcor- dantes, qu’elles dominent les fenfations inftructives qui pourroient la diriger dans fes déterminations ; c’eft pourquoi on eft obligé dans l’ordre naturel de recourir aux pumitions & aux Châtimens Les plus ri- goureux , pour contenir les hommes pervers. Cette liberté animale ou ce conflit de fenfations affectives qui bornent Pattention de l’ame à des paf. fions illicites , & aux peines qui y font attachées, c’eft-à-dire au bien & au mal phyfique ; cette pré- tendue liberté, dis-je, doit être diftinguée de la li- berte morale ou d'intelligence, qui n’eft pas obfédée par des affeétions déréglées ; qui rappelle à chacun fes devoirs envers Dieu , envers foi-même, envers les autres ; qui fait appercevoir toute l’indignité du mal moral, de l’iniquité du crime , du déréglement ; qui a pour objet le bien moral , le bon ordre, l’ob- fervationde laregle, la probité, les bonnes œuvres, les motifs ou les affeéions licites, l’intérêt bien en- tendu. C’eft cette liberté qui fait connoître l'équité, la néceffité , les avantages de la regle; qui fait chérir la probité , l'honneur, la vertu, & qui porte dans l’homme l’image de la divinité : car la liberté divine n’eft qu'une pure liberté d'intelligence. C’eft dans l’idée d’une telle liberté, à laquelle l’homme eft élevé par fon union avec lintelligence divine , que nous appercevons que nous fommes réellement libres : & que dans l’ordre naturel nous ne fommes libres effectivement, qu'autant que nous pouvons par notre intelligence diriger nos détérminations morales, ap- percevoir, examiner, apprécier les motifs licites qui nous portent à remplir nos devoirs, & à réfifter aux affeétions qui tendent à nous jetter dans le dérégle- ment : aufh convient-on que dans l’ordre moral les enfans , les fous , les imbécilles ne font pas libres. Ces premieres vérités évidentes font la bafe des con- noiflances furnaturelles, les premiers développe- mens des connoïfances naturelles, lés vérités fon- damentales des Sciences, les lois qui dirigent Pefprit dans le progrès des connoïflances , les restes de la conduite de tous les animaux dans leurs aétions rela- tives à leur confervation, à leurs befoins, 4 leurs inclinations , à leur bonheur , & à leur malheur. *EVIEN , adj. (Myzh.) furnom de Bacchus : on dit qu'il lui refta d’une exclamation de joie que fon pere, tranfporté d’admiration, poufla en lui voyant défaire un géant. Evizs vient des mots grecs: «5 de, courage , In! fils. por # EVIER , £. m. (Maçon:) pierre creufée & percée d’un trou, avec grille, qu’on place à hauteur d’ap- puidans une cuifine, pour laver la vaiflelle & en faire écouler l’eau: c’eft auf un canal.de pierre qui fert dégoût dans une cour ou une allée. (P) EVINCER , v. a. (Juri/prud.) c’eft dépofléder quelqu'un juridiquement d’un héritage ou autre im- meuble. On peut être évircé en plufieurs manieres, comme par une demande en complainite, où par une demande en defiftement ; par une demande en dé- claration d’hypotheque , parune faïfie réelle, par un retrait féodal ou lignager, où par un remeré ou re- trait conventionnel : bien entendu que dans tous ces cas le pofleffeur n’eft point évincé de plein droit en vertu des procédures faites contre lui ; ilñe peut être juridiquement qu’en vertu d’un jugement qui 158 EUL adjuge la demande, & dont il n’y ait point d'appel, ou qui foit paffé en force de chofe jugée. (4) EVIRÉ, adj. er termes de Blafon, {e dit d’un lion ou autre animal qui n’a point de marque par où l’on uifle connoître de quel fexe il eft. EVITÉE , f. f. (Marine. c’eft la largeur que doit avoir le lit ou le canal d’uneriviere pour fournir un libre paflage aux vaifleaux. C’eft aufh un efpace de:mer où le vaïflean peut tourner à la longueur de fes amarres. Chaque vaifleau qui eft à l'ancre doit avoir fon évirée , c’eft-à-dire de l’efpace pour tour- net fur fon cable , fans que rien l’en empêche. (Z) EVITER , v. neut. (Marine) On dit qu'un vaif- feau a évité, lorfqu’étant mouillé 1l a changé de fi- tuation bout pour bout à la longueur de fon cable, fans avoir levé fes ancres ; ce qui arrive au change- ment de vent ou de marée : & dans les ports où ily a beaucoup de vaifleaux & pas aflez d’efpace pour qu'ils puiflent éviter fans fe choquer les uns contre les autres, on les amarre devant & derriere, pour les retenir & les empêcher de tourner; ce qu'ils fe- roient s'ils n’avoient que leurs ancres devant le nez. Eviter au vent, {e dit d’un vaifleau lorfqu'il pré- . fente fa proue au vent. Eviter à marée, c’eft lorfque le vaifleau préfente avant au courant de la mer, à la longueur de fes amarres. (Z) * EVITERNE,, f. m. (Mych.) divinité à laquelle les anciens facrifioient des bœufs roux : c’eft tout ce que nous en favons. Les dieux de Platon, ceux qu’il regardoit comme indiflolubles, & comme n'ayant point eu de commencement & ne devant point avoir de fin, font appellés par cet auteur Evirernes ou ÆEyintegres. | EVITERNITÉ, {. f. (Mécaphyf.) durée qui a un commencement, mais qui n’a point de fin. EULOGIE, f. f. dans l’hifloire de l'Eglife, Quand les Grecs ont coupé un morceau de pain pour le con- facrer, 1ls taillent le refte en petits morceaux, & les diftribuent à ceux qui n’ont pas encore communié, ou les envoyent à ceux qui font abfens ; & ces mor- ceaux font ce qu'ils appellent ez/ogies. Ce mot eft grec, compolé de «5, bene, bien, & Aéyo, Je dis ; c'eft-à-dire Pereditfum, béni. Pendant plufeurs fiecles l’églife latine a eu quel- que chofe de femblable aux eulogies , & c’eft de-là qu’eft venu l’ufage du pain bénx. On donnoit pareillement le nom d’eslogie à des gateaux que les fideles portoient à l’églife pour les faire bénir. Enfin l’ufage de ce terme pañla aux préfens qu’on faifoit à quelqu'un, fans aucune bénédi&tion. Voyez le Jéfuite Greetfer dans fon traité de benedilionibus G maleditionibus , Liv. IT. ch. xxij. xxjv, &e. où il traite à fond des eulogies. Il paroïît par un pañlage de Bollandus fur la vie de S. Melaine, ch. 7v. que les exlogies étoient non-feu- lement du pain, mais encore toutes fortes de mets ‘bénis, ou préfentés pour l’être. Depuis , toutes for- tes de perfonnes bénifloient & diftribuoient les ex/o: gres; non-feulement les évêques & les prêtres , mais encore les hermites , quoïque laïcs, le pratiquoient. Les femmes pouvoient aufñi envoyer des exlogies, comme 1l paroît par la vie de S. Vaulry, ch. ij, n°. 143 dans les Bollandiftes , Aéfa fantt. Jan, 1om.1. page 20. Le vinenvoyé en préfent étoit auffi regardé com- me ewlogie. De plus, Bollandus remarque que l'Eu- chariftie même étoit appelléeezlogie, Aëa fanët, Jan. som. II. p.199. Chambers. (G) EUMECES , (if. nar.) pierre fabulenfe qui fe trouvoit. dans la Ba@riane; elle reflembloit. à un caillou : on croyoit que mife {ous la tête elle rendoit des oracles, &apprenoit à celuiqui dormoit, ce qui Lib. XX XVII. cap, x. E UN s’éroit paflé pendant fon fommeil. Pline, A1. nat: * EUMÉNIDÉES, adj. pris fub. (Myrhoz.) fêtes que les Athéniens célébroient en l'honneur des Eu- ménides. La feule chofe que nous en fachions, c’eft qu'il étoit défendu aux efclaves & autres domeftiques d'y prendre part. * EUMENIDES, f. £ (Mych.) On dit que les fu- ries furent ainfi appellées après qu’Orefte eut expié le meurtre de fa mere, Il eft vrai qu'elles ceflérent alors de le tourmenter, à la follicitation de Minerve; mais elles avoient ce furnom long -tems avant cet évenement. Jupiter fe fert des Exménides pour châ- tier les vivans, ou plütôt pour tourmenter les morts. Elles ont dans les Poëtes une figure effrayante : elles portent des lambeaux, des ferpens fifflent fur leurs têtes, leurs mains font enfanglantées. Il y avoit près de l’Aréopage un temple confacré aux Érméni- des : les Athéniens les appelloient es dévffès yéné- rables. EUMETRES , (if. nat.) pierre d’un verd de porreau, confacrée à Bélus & vénérée par les Affy- riens, qui s’en fervoient à des fuperftitions. * EUMOLPIDES , f. m. (Mych.) prêtres de Cé- rès : ils avoient le pouvoir dans Athenes d’initier aux myfteres de cette déefle, & d’en exclure, Cette excommunication fe faifoit avec des fermens exécra- bles ; elle ne cefloit que quandils le jugeoient à-pro- pos. Ils étoient appellés Eumolpides , d'Eumolpe roi des Thraces, qui fut tué dans un combat où il fecou- roit les Eleufins contre les Athéniens. EUNOFIUS , (if. nat.) pierre connue des an- ciens , qu’on croit être la même chofe que l’æzire où pierre d’aigle, EUNUQUE, f. m. (Medecine, Hift. anc. € mod.) Ce mot eft fynonyme de chétré; il eft employé par conféquent pour défigner un animal mâle à qui l’art a Ôté la faculté d’engendrer : il eft cependant d’ufage que l’on ne donne le nom d’euruque qu'aux hommes à qui l’on a fait fubir cette privation, & on fe fert ordinairement du mot chérrépour les animaux. Voyez CASTRATION. Toutefois les Italiens ont retenu les mots caflrato, caffrati, par lefquels ils diftinguent les hommes qui ont été faits eurques dans leur enfance, pour leur procurer une voix nette 8&c aiguë, Woyez CASTRATI. Eunuque eit un mot grec, qui fignifie proprement celui a qui les teflicules ont été coupés , détruirs : les La- tins Pappellent caffratus, fpado. Comme celui d’evruque eft particulierement em- ployé pour fignifier 72 homme chätré, ainfi qu’il vient d’êtrè dit, c’eft fous cette acception qu’il va faire la matiere de cet article ; & pour ne rien laïffer à def: rer, elle fera tirée pour la plus grande partie de lHi/2 toire naturelle de M, de Buffon, some 1 1. de l’édirion 1-12. La caffrarion, ainfi que l’ixfbularion, ne peuvent avoir d’autre origine que la jaloufe, dit cetilluftre auteur ; ces opérations barbares & ridicules ont été imaginées par des efprits noirs & fanatiques, qui, par une bafle envie contre le genre humain , ont diété des lois triftes & cruelles où la privation fait la vertu, & la mutilation le mérite. Les Valéfiens, hérétiques arabes, faifoient un acte de religion, non-feulement de fe châtrer eux- mêmes, d’après Origene , mais encore de traiter de la même façon, de gré ou de force, tous ceux qu'ils rencontroient, Epiphan. kæref. dvi. On ne peut rien imaginer de bifarre & de ridicule fur ce fuyet que les hommes n’ayent mis en pratique, ou par pafhion où parfuperfhtion. La caftration eft auffi devenue un moyen de-punition pour certains crimes ; c’étoit la peine de Padultere chez les Egyp= -tiens, . L'ufage de cette opération eff fort ancien, & gé- néralement répandu. Il y avoit beaucoup d'esrugues chez les Romains. Aujourd’hui dans toute l’Afe & dans une partie de l’Afrique, on fe fert de ces hom- mes mutilés pour garder les femmes. En Italie cette opération infâme & cruelle n’a pour objet que la per- fe@tion d'un vain talent. Les Hottentots coupent un tefticule à leurs enfans, dans l’idée que ce retran- chement les rend plus legers à la courfe. Dans d’au- trespays les pauvres mutilent leurs enfans pour étein- dreleur poftérité , & afin que ces enfans ne fe trou- vent pas un jour dans la mifere &t dans laffhiétion où fe trouyent leuts parens, lorfqu’ils n’ont pas de pain à leur donner. Il ÿ a plufeurs efpeces, de caftrations. Ceux qui n’ont en vüe que la perfeétion de la voix, {e conten- tent de couper les deux tefticules ; mais ceux qui font animés pat la défiance qu'infpire la jaloufie, ne croi- toient pas leurs femmes en füreté fi elles étoient gar- dées par des ezruques de cette efpece : ils ne veulent Que ceux auxquels on a rétranché toutes les parties extérieures de la génération. L’amputation n’eft pas Le feul moyen dont on fe foit fervi : autrefois on empéchoit l’accroiflement des tefticules fans aucune incifion; Pon baignoit les enfans dans l’eau chaude & dans des décoétionse plantes ; enfuite on prefloit & on froifloit les tefticu- les avec les doigts, aflez long-tems pour en meur- trir toute la fubftance ; & on en détruifoit ainf l’or- ganifation. D’autres étoient dans l’ufage de les com- primer avec un inftrument : on prétend que ce der- nier moyen de priver de la virilité ne fait courir au- cun rifque pour la vie. L’amputation des tefticules n’eft pas fort dange- teufe , on la peut faire à tout âge ; cependant on préfere le tems de l'enfance. Maïs l’amputation en diere des parties extérieures de la génération eft le plus fouvent mortelle, fi on la fait après l’âge de quinze ans : & en choififlant l’âge le plus favorable, qui eft depuis fept ans jui{qu’à dix , il y a toüjours du danger. La difficulté que lon trouve de fauver ces {ortes d’eurnuques dans l'opération , les rend bien plus chers que les autres : Tavernier dit que les premiers coûtent cinq ou fix fois plus en Turque & en Perfe. Chardin obferve que l’amputation totale eft toùjours accompagnée de la plus vive douleur ; qu’on la fait aflez fûrement fur les jeunes gens , mais qu'elle eft très-dansereufe, paflé l’âge de 1; ans; qu'il en échap- pe à peine un quart; & qu'il faut fx femaines pour guérir la playe. Pietro della Valle dit au contraire, que ceux à quion fait cette opération en Perfe, pour punition du viol & d’autres crimes du même genre , en guériflent fort heureufement , quoique avancés en âge ; & qu’on n’applique que des cen- dres fur la plaie: nous ne favons pas fi ceux qui fu- bifloient autrefois la même peine en Egypte, com- me le rapporte Diodore de Sicile, s’en tiroient auf heureufement : felon Thévenot, il périt toùjours un grand nombre de negres, que les Turcs foümettent à ceïte opération , quoiqu'ils prennent des enfans de huit ou dix ans, Outte ces eunuques negres , il y a d’autres euru- ques à Conftantinople, dans toute la Turquie, en Per- fe, &c. qui viennent pour la plüpart du royaume de Golconde, de la prefqu’ile en deçà du Gange, des royaumes d’Affan, d’Aracan, de Pépgu, & de Mala- bar, où le teint ef gris ; du golfe de Bengale, où ils font de couleur olivâtre : il y en a de blancs de Géor- gie & de Circaffie, mais en petit nombre. Tavernier dit , qu'étant au royaume de Golconde en 1657, on y fit jufqu’à vingt - deux mille euruques, Les noirs viennent d'Afrique , principalement d’Ethiopie ; ceux-ci font d'autant plus recherchés & plus chers, qu’ils font plus hotribles: on vent qu'ils ayent le nez E UN. 159 forr plat, le regard affreux, les lèvres fort grandes & fort grofles, & fur-tout les dents noires &c écar: tées les unes des autres. Ces peuples ont communé- mént les dents belles'; mais ce feroit un défaut pour un énruque noir, qui doit être un monftre des plus hideux. Les euruques auxquels on n’a laiffé que les tefti- cules, ne laiflent pas de fentir de l’irritation dans ce qui leur refte, & d’en avoir lé figne extérieur, même plus fréquemment que les autres hommes : cette partie qui leut a été laiflée n’a cependant pris qu’un très-petit accroiflement, fi la caftration leur à été faite des l'enfance ; car elle demeure à-peu-près dans le même état où elle étoit avant l’opération. Un eunuque fait à l’âge de fept ans, eft, à cet ésard, à vingt ans, comme un enfant de fept ans: ceux au contraire, qui n’ont fubi l'opération que dans le tems de la puberté, ou un peu plus tard, font à-peu-près comme les autres hommes. «Il y à des rapports finguliers entre les parties » dé la génération & celles de la gorge, continue » M. de Buffon; les ezuques n’ont point de barbe ; » leur voix, quoique forte & perçante, n’eft jamais .» d’un ton grave ; la correfpondance qu'ont certar- » taines parties du corps humain, avéc d’autres fort » éloignées & fort différentes , & qui ef ici fi mar- » quée, pourroit s’obferver bien plus généralement ; » mais on ne fait point aflez d'attention aux effets , »lorfqu'on ne foupçonne pas quelles en peuvent » être les caufes : c’eft fans doute par cette rai- » fon qu'on n’a jamais fongé à examiner avec »foin, ces correfpondances dans le corps hu- » main, {ur lefquels cependant roule une grande » partie du jeu de la machine animale: il y a dans » les femmes une grande correfpondance entre la »# matrice, les mammelles , & la tête ; combien n’en » trouveroit-on pas d’autres, fi les grands medecins » tournoient leurs vües de ce côté-là ? Il me paroït » que cela feroit plus utile que la nomenclature de # l’Anatomie ». | | Les Medecins n’ont pas autant négligé l’obferva- tion de ces rapports, que M. de Buffon femble le penfer ici. Ceux qui font verfés dans la Medecine favent que cette obfervation eft au contraire une de celles qui les a le plus occupés de tous les tems dès le fiecle d'Hippocrate ; mais les fouhaits de M. de Buffon , à cet égard , fuflent-ils abfolument fondés , nous pourrions dès-à-préfent les regarder comme ac: complis. Nous avons des ouvrages qui ont précifé- mént pour objet ces correfpondances modernes en- tre différentes parties du corps humain , ou dans lef- quels il en eft traité par occafion ; on peut citer comme une produétion du premier genre le Spécimen novi Medicine confpeëtlus, à Paris, chez Guérin ; & la thèfe de M. Bordeu , medecin de l’univerfité de Montpellier, & doëteur-régent de la faculté de Me- decine de Paris, dans laquelle il fe propofe d’exa- miner az omres corporis partes digefliont opitulentur ? 1752. & y conclut pour l’affirmative, Un onvrage du fecond genre , eft une autre thèfe de ce dernier, en forme de diflertation , fur la queftion sérum Aqui-” rañie minerales aguæ morbis chronicis ? 1751. où l’on trouve d'excellentes chofes , particulierement fur les correfpondances dont il s’agit. « On obfervera, dit M. de Buffon en finiffant fur » la matiere dont il s’agit, que cette correfpondance » entre la voix & les parties de la génération, fe re- » connoît non-feulement dans les erzxques, mais auf- » fi dans les autres hommes, & même dans les fem- » mes ; la voix change dans les hommes à l’âge de » puberté , &c les femmes qui ont la voix forte font » foupçonnées d’avoir plus de penchant à l'amour». C’eft ainfi que le grand phyficien qui vient de nous occuper fe borne à donner l’hiffoire des faits, 160 E UN lorfque Les caufes paroïflent cachées : cette condui- te eff fans doute bien imitable pour tous ceux qui : LA écrivent en ce genre. Maïs la referve que l’on doit avoir à entrepren- dre de rendre raïfon des phénomènes finguliers que préfente la nature , doit-elle être tellement générale w’elle tienne toijouts l'imagination enchaîïnée ? La : q ] 8 foiblefle de la vüe n’eft pas une raifon pour ne point faire ufage de fes yeux; lors même qu’on eft réduit | à marcher à tâtons, on arrive quelquefois à fon but. Aïnfi il femble qu'il doive être permis de tenter des explications: quelque peu d’efpérance qu’on ait de le faire avec fuccès, il fuffit de n’en être pas abfolu- ment privé, & qu'il puifle être utile de réuffir ; ce qui a lieu, ce femble ; lorfqu’on donne pour fonde- ment aux explications des principes recùs, qu’elles ne font que des conféquences qu’onen tire, & qu’on peut faire une application avantageufe de ces con- féquences. C’eft dans cette idée que l’on croit être autorifé à propofer ici un fentiment fur la caufe du changement qui furvient à la voix des enfans mâles, dès qu'ils atteignent l’âge de puberté, & par con- féquent fur la raifon pour laquelle les femmes & les euruqgues n’éprouvent point ce changement. Ce fentiment a pour bafe l’opinion de M. Fer- rein fur le méchanifme de la voix. Ce célebre ana- tomilte l’attribue, comme on fait, aux vibrations des bords de la glotte, femblables à celles qni s’ob- fervent dans les inftrumens à cordes : ce fentiment eft admis par plufeurs phyfologiftes, & a droit de figurer en effet parmi les hypothèfes ingénieufes & plaufbles ou au moins foûtenables. Ileneft, felon ce fyftème, des bords de la glot- te, que l’auteur appelle rubans % parce que ceux-là font comme des cordes plates ; 1l en eft de ces bord comme des cordes dans les inftrumens, où elles font les moyens du fon : puifque ces rubans produifent des fons plus hauts ou plus bas, à proportion qu'ils {ont plus où moins tendus par les organes propres à cet effet, qu'ils font par conféquent fufceptibles de vibrations plus où moins nombreufes. Ces fens doivent auffi être aigus ou graves, tout étant égal, à proportion que ces rubans font gros ou grêles, de même que les inftrumens à cordes produifent des fons aigusou graves, felon la différente grofleur des cordes dont ils font montés. Cela fuppofé , nous confidérerons, 1°. que le fluide féminal qui eft préparé dans les tefticules à l’âge de puberté, n’eft pas deftiné feulement à {er- vir pour la génération, hors de l’individu qui le fournit , mais qu'il a aufli une très-grande utilité, entant qu'il eft repompé de fes refervoirs par les vaifleaux abforbans , & que porté dans la maffe des humeurs , 11 s’unit à celle avec laquelle il a le plus d’analogie, qui eft fans doute la lymphe nourriciere, à en juger par les effets fimultanés ; qu'il donne à cet- te lymphe , que l’on pourroit plütôt appeller l’ef- Jence des humeurs , la propriété de fournir à l’entre- tien, à la réparation des élémens du corps, de fes fibres premieres, d’une maniere plus folide, en four- niflant des molécules plus denfes que celles qu’elles remplacent. 2°, Que ce fluide rend ainfi la texture de toutes les parties plus forte, plus compaéte ; ce qui établit dès-lors la différence de conftitution en- tre les deux fexes. 3°. Que cette augmentation de forces dans les fibres qui compofent le corps des mâ- les, eftune caufe furajoïtée à celle qui produit l’aug- mentation de forces commune aux deux fexes ,,en- tant que celle-ci n’eft que l’effet du fimple accroiffe- ment, par laquelle caufe furajoütée fe forme une forte de rigidité dans les fibres des hommes en puber- té, qui leur devient propre. 4°. Que c’eft cette ri- gidité, tout étant égal, qui rend les hommes plus robuftes , plus vigoureux en général que les femmes, plus fufceptibles qu'elles de fupporter la fatiue, fa violence même des exercices, des travaux du corps, Gc. Ne s’enfuit-il pas de-là que cette rigidité s’éta- bliffant proportionnément dans toutes les parties du corps, dans l’état naturel , ne doit rendre nulle part les changemens qui s’enfuivent , auffi fenfibles que dans les organes dont la moindre altération fait appercevoir plus aifément que dans les autres, une différence marquée dans l'exercice de leurs fonc- tions ? ces organes font, fans contredit , les bords de la glotte , relativement aux modifications des fons qu'ils ont la faculté de produire par leurs vibrations caufées par le frotement des colonnes ou filets d’air qui agiflent comme un archet , 7 #0dum plé&ri, {ur ces bords membraneux & flexibles: ceux-ci devenus plus épais, plus forts, par la caufe furajoûtée quiet commune à tous les organes dans les mâles, c’eft.à- dire l'addition du fluide féminal à la Iymphe nourri- ciere, doivent être ébranlés plus difficilement, & n°ê- tre fufceptibles , cæreris paribus, que d’un moindre nombre de vibrations , mais plus étendues : par con- féquent les {ons qu’elles produifent doivent être moins aigus, & enfuite devenir graves de plus en plus, en raïfon inverfe de l'augmentation d’épaif- {eur &c de rigidité dans les fibres qui compofent les cordes vocales : ce qu'il falloit établir pour l’expli. cation dont il s’agit. Delà s'enfuit celle de tont ce qui a rapport au phénomène principal , qui eft le changement de la voix, dans le tems où la femence commence à fe féparer dans les tefticules. On fe rend aïfément raïfon de ce que les eur ques n'éprouvent pas ce changement à cet âge ; ils fuivent, à rous égards, le fort des femmes: le corps de ceux-là, comme de celles-ci, ne fe fortifie que par la caufe unique de l’accroiflement qui leur eft commune ; ils refkent par conféquent débiles, foi- bles comme elles ; avec une voix grêle | com- me elles, ils font privés, comme elles, de la marque oftenfible de virilité, qui eft la barbe , pour l’accroiflement de laquelle il faut apparemment un fluide nourricier plus plaftique, tel que celui qui eft préparé-dans le corps des mâles, en un plus grand degré de force {ythaltique dans les {olides en géné- ral ; force qui produit cet effet au menton & d’autres proportionnés , dans toutes les parties du corps, tels qu'une plus grande vigueur dans les mufcles, plus d'activité dans les organes des fecrétions, &c. Ces conjeéturés fur les caufes du défaut de bar- be, femblent d’autant plus fondées, que l’on voit les hommes d’un tempérament délicat & comme fémi- nin, n'avoir prefque point ou très-peu de cette for- te de poil ; & au contraire , les femmes vigoureufes &t robuftes avoir au menton, fur la levre fupérien- re fur-tout, des poils aflez longs & aflez forts pour qu'on puifle leur donner aufi le nom de barbe; car on doit obferver, à ce fujet, que toutes les femmes ont du poil fur ces parties du vifage, comme fur plu- fieurs autres parties du corps; mais que ce poil eft ordinairement follet 8 peu fenfible, fur-tout aux blondes ; que les hommes ont aufli du poil fur pref- que toutes les parties du corps, mais plus fort, tout étant égal , que celui des femmes ; qu’il en eft cepen- dant de celles-ci qui font plus velues que certains hommes, dont 1l en eft qui ont très-peu de poil, les eznuques {ur-tout , à proportion qu'ils font d’un tempérament plus délicat , plus eféminé , & yice verfa. C'eft de cette obfervation qu’eft né le pro- verbe, vir pilofus & fortis 6 luxuriofus : voilà par conféquent encore une forte de correfpondance en- tre les poils & les parties de la génération ; d’où on peut tirer une conféquence avantageufe à l’ex- plication donnée : d’où on eft tohjours plus en droit de conclure que la différente complexion femble faire toute la différence dans les deux fexes ; & que la EUN la complexion plus forte dans les hommes dépend principalement du recrément féminal. Mais fur tou- tes ces particularités, voyez Porx.. Nous finirons ces recherches fur la nature de la caufe qui vient d’être établie, concernant les fuites de la féparation de la liqueur fpermatique , à Pégard de la voix fur-tout, enappuyant la théorie qui a été donnée de ces effets, par les obfervations fuivantes. Les adultes à qui les tefticules ont été emportés , par accident ou de toute autre maniere , devien- nent efféminés , perdent peu-à-peu les forces du cotps, la barbe ; en un mot leur tempérament dé- génere entierement: mais le changement eftfur-tout fenfble par rapport à la voix, qui de mâle, de gra- ve qu’elle étoit, devient grêle, aigue, comme celle des femmes. Boerhaave, Comment, in propr. inflir. $. 658. fait mention d’un foldat qui avoit éprouvé tous ces effets, après avoir perdu les tefticules par un coup de feu. Les jeunes gens qui contraétent la criminelle habitude d’abufer d'eux - mêmes par la maftupration, ou qui fe livrent trop tôt & immodé- _rément à l’exercice vénérien , en s’énervant par ces excés d'évacuation de femence dont ils fruftrent la mafle des humeurs , perdent fouvent la voix, ou au moins difcontinuent de la prendre grave, & fi elle n’avoit pas encore eu le tems de devenir telle , elle refte grêle & aiguë comme celle des femmes, plus long-tems qu’iln’eft naturel; ce qui ne fe répa- re quelquefois jamais bien, fi la caufe de ce defor- dre eft devenue habituelle, parce que toutes les au- tres parties du corps reftent foibles à proportion, &c. Voyez MASTUPRATION. Les grandes maladies, qui caufent un amaigrife- ment confidérable, qui jettent dans le marafme, pro- duifent auffi des changemens dans la voix, la rendent aigue, grêle, dans ceux-mêmes qui lavoient le plus grave ; changement qu'il faut bien diftinguer, & qui eftréellement bien différent de la foibleffe de la voix, qui eft auf très-fouvent un autre effet des mêmes caufes alléeuées. Ces changemens du ton habituel de la voix, qui viennent d’être rapportés, ne pou- Vant être attribués qu’au défaut de réparation dans les parties folides , dans les fibres en général, & en particulier dans celles qui compoñfent les bords de la glotte , dans lefquels la diminution de volume eft proportionnée à celle qui fe fait danstoutes les autres parties, ne laiflent, ce femble, prefqu’aucun doute fur la vérité de l’explication que l’on vient de propo- fer, qui paroît d’ailleurs être fufceptible de quelque utilité, fans aucun inconvénient dans la pratique médicinale , par les conféquences ultérieures qu’elle peut fournir, concernant les différens effets des mê- mes maladies comparées dans les deux fexes, dans les mâles enfans & adultes, dans les euruques, con- cernant la difpofition à certaines maladies, qui fe trouve plus dans un de ces états que dans un autre: on fe bornera ici à en citer un exemple , d’où on peut tirer la conféquence pour bien d’autres. Selon Pifon, come II. page 384. les ennuques & les femmes ne font pas fujets à la goutte, non plus que les jeunes gens, avant de s'être livrés à l'exercice vénérien. En ef. fet, les obfervations contraires font très-rares, &c. Voyez SEMENCE, Voix. 6 GOUTTE. (4) EUNUQUES , eunnchi M. m. pl. ( Aiff. eccléf.) eft aufli le nom qu'on donnoit à une feéte d’hérétiques qui avoient la manie de fe mutiler non-feulement eux-mêmes &c ceux qui adhéroient à leurs fentimens, mais encore tous ceux qui tomboient entre leurs Mains, . Quelques-uns croyent quele zele inconfidéré d’O- rigene donna occafñon à cette fete. Il eft probable aufh qu'une fauffe idée de la perfeétion chrétienne, prife d’un texte de S. Matthieu mal entendu ; con- jribua à accréditer cette extravagance, On donna Tone WI, EVO 16 aufh à ces hérétiques le nom de Valéfiens, Voyez V 4. LÉSIENS. Chambers, (G) | | . EUNOMIENS, f. m. pl. (Hif, eccl,) feête d’héré- tiques qui parurent dans le jy. fiecle. C’étoit une branche des Âriens , ainfi nommée d’Eunome leur chef, qui ajoûta plufieurs héréfes à celles d’Arius. Cet homme fut fait évêque de Cyzique vers l’an 360, & enfeigna d’abord fes erreurs en fecret > puis ou- vertement , ce qui le fit chaffer de fon fiége. Les ro ANDRE de fe placer fur celui de mais après la LA ES a rene ane à l'exil, 8 mourut en Cappadoce, DEN Eunome foûtenoit entr'autres chofes, qu'il con- me Dieu auffi parfaitement que Dieu fe connoif. oit hu-même ; que le Fi ieu n’étoit D: de nom ; AT AUS He Ro humanité, mais eee ne He IMaNIté ; ment par la vertu & par fes opérations ; que la foi toute feule pouvoit fauver quoique l’on commit les plus grands crimes, & qu’on. y perféverât. Ilrebaptifoit ceux qui avoient été déjà baptifés au nom de la Trinité ; haïffant fi fort ce myf- tere qu'il condamnoit la triple immerfion dans le baptême. Il fe déchaïna auffi contre le culte des mar. tyrs, & l'honneur rendu aux reliques des faints. Les Eunomiens foûtinrent auf les mêmes erreurs : on les appelloit autrement Trog/odyes. Voyez TROGLODY- TES. Dilionn. de Trévoux & Chambers. (G) | EUNOMIO - EUPSYCHIENS , f. m. pl. (Æf. eccl,) fete d’hérétiques du jv. fiecle, qui fe fépare- rent des Eunomiens pour une queftion de la connoif. fance ou fcience de Jefus-Chrift , quoiqu’ils en con- fervaflent d’ailleurs les principales erreurs, Woyez EUNOMYIENS, TL Nicéphore parle des Æunomio-Eupfychiens ; liv. XI. ch. xxx, comme étant les mêmes que Sozomene appelle Eutychiens, lv. VIT, ch. xvij. Suivant ce der- nier hiftorien, le chef de cette fede étoit un euno- mien appellé Euryche » & non pas Ezplyche, comme le prétend Nicéphore : Cependant ce dernier auteur. copie Sozomene dans le paflage où il s’agit de ces hérétiques » Ce qui prouve que tous deux parlent de la même feéte ; maïs il n’eff pas facile de décider le. quel des deux fe trompe. M. de Valois , dans fes zo- tes Jur Soyomene, s’eft contenté de remarquer cette différence » fans rien prononcer ; & Fronton du Duc en à fait autant dans fes zoces fur Nicéphore, Voyez le‘ dicfionn. de Trévoux 8 Chambers. (G) EVOCATION, (Lirér.) opération religieufe du paganifme , qu’on pratiquoit au fujet des manes des morts. Ce mot défigne auffi ld formule qu'on em- ployoit pour inviter les dieux tutélaires des pays où l’on portoit la guerre, à daigner les abandonner & à venir s'établir chez les vainqueurs, qui leur pro- méttoient en reconnoïffance destemples nouveaux, des autels & des facrifices. Arricle de M. Le Chevalier DE JaucourT. EVOCATION des dieux tutélaires, ( Littérar. Hip. anc.) Les Romains, entr'autres peuples, ne man- querent pas de pratiquer cette opération religieufe & politique, avant la prife des villes, & loriqu'ils les voyoient réduites à l'extrémité : ne croyant pas qu'il fût poffible de s’en rendre les maîtres tant que leurs dieux tutélaires leurferoient favorables, & re- gardant comme une impiété dangereufe de les pren- dre pour ainfi dire prionniers, en s’emparant par force de leurs temples , de leurs ftatues, & des lieux Qui leur étoient confacrés , ils évoguoient ces dieux de leurs ennemis; c’eft-à-dire qu'ils les invitoient par une formule religieufe à venir s'établir à Rome, où 1ls trouveroient des ferviteurs plus zélés à leur rendre les honneurs qui leur étoient dûs. : Tite-Live, Zvre F. décad, J. rapporte l'évocation que fit Camille des dieux Véiens, en ces mots : « C’eft X 16 EVO # fous votré conduite, Ô Apollon Pythien, & par » l’inftigation de votre divinité, que je vais détruire # la ville de Véies : je vous offre la dixieme partie »# du butin que j’ÿ ferai. Je vous prie aufli, Junon, # qui demeurez préfentement à Véies , de nous fui- » vre dans notre ville, où l’on vous bâtira un temple » digne de vous ». Mais le nom facre des divinités turélaires de cha- que ville étoit prefque tohjours inconnu aux peu- ples , & révelé feulement aux prêtres, qui, pour éviter ces évocations, en faifoient un grand myftere, & ne les proféroient qu’en fecret dans les prieres fo- lennelles : aufhi pour lors ne les pouvoit-on évoquer qu’en termes généraux , & avec l’alternative de l’un ou de l’autre fexe, de peur de les offenfer par un titre peu convenable. Macrobe nous a confervé, Sasurn. lib. III, c. 7x. la grande formule de ces évocations, tirée du livre des chofes fecretes des Sammoniens : Sérénus préten- doit l’avoir prife dans un auteur plus ancien. Elle avoit êtée faite pour Carthage; mais en changeant le nom, elle peut avoir fervi dans la fuite à plufeurs autres villes, tant de l’Italie que de la Grece, des Gaules, de l’Efpagne & de PAfrique, dont les Ro- mains ont évoqué les dieux avant de faire la conquête de ces pays-là. Voici cette formule curieufe. « Dieu ou déeffe tutélaire du peuple & de la ville » de Carthage, divinité qui les avez pris fous votre # protettion, je vous fupplie avec une vénération » profonde, & vous demande la faveur de vouloir » bien abandonner ce peuple & cette cité ; de quit- » ter leurs lieux faints, leurs temples, leurs cérémo- # mes facrées,, leur ville; de vous éloigner d’eux; » de répandre l’épouvante , la confufion , la négli- » gence parmi ce peuple & dans cette ville : & pif » qu'ils vous trahiflent, de vous rendre à Rome au- » près de nous ; d’aimer & d’avoir pour agréables nos » lieux faints, nos temples, nos facrés myfteres ; & » de me donner, au peuple romain & à mes foldats, » des marques évidentes & fenfibles de votre protec- » tion. 51 vous m'accordez cette grace, je fais vœu » de vous bâtir des temples & de célébrer des jeux » en votre honneur ». Après cette évocation ils ne doutoient point de la perte de leurs ennemis , perfuadés que Les dieux qui les avoient foûtenus jufqu’alors , alloient les aban- donner, & transférer leur empire ailleurs. C’eft ainfi que Virgile parle de la defertion des dieux tutélaires de Troye, lors de fon embrafement : Exceffère omnespadytis, arifque relitlis, Di quibus imperiwm hoc Jleterat, , . . Æneid. lib. IT. Cette opinion des Grecs , des Romains, & de quelques autres peuples, paroît encore conforme à ce que rapporte Jofephe, Zv. WI. de la guerre des Juifs, ch. xxx, que l’on entendit dans le temple de Jérufalem, avant fa deftruétion , un grand bruit , & une voix qui difoit, forcons d'ici ; ce que l’on prit pour la retraite des anges quigardoïent ce faint lieu, & comme un préfage de fa ruine prochaine : car les Juifs reconnoifloient des anges protecteurs de leurs templesr& de leurs villes, | Je finis par un trait également plaifant & fingulier, qu'on trouve-dans Quinte-Curce, Ly. IV. au fujet des évocations. Les Tyriens , dit-il, vivement preffés par Alexandre qui les afliégeoit, s’aviferent d’un moyen aflez bifarre pour empêcher Apollon, auquel ils avoient uñe dévotion particuliere, de les aban- donner. Un de leurs citoyens ayant déclaré en plei- ne aflemblée qu'il avoit vü en fonge ce dieu qui fe retiroit de leur ville, ils lierent {a flatue d’une chaîne d’or, qu'ils attacherent à l'autel d'Hercule leur dieu tutélaire, afin qu'il retint Apollon, Voyez X$ zmém, EVO de Pacad, des Infcript. tom. V. Article de M. le Cheva. ler DE JAUCOURT. | EVOCATION des manes, (Littérar) c'étoit là plus ancienne, la plus folennelle, & en même tems celle qui fut le plus fouvent pratiquée. Son antiquité remonte fi haut, qu'entre les difé- rentes efpeces de magie que Moyfe défend , celle-ei y eft formellement marquée: Nec fr. .. qui quærat 4 mortus veritatemn, L’hiftoire qu'on répete fi fouvent à ce fujet, de l’ombre de Samuël évoquée par la mat gicienne, fournit une autre préuve que les época- tions étoient en ufage dès les premiers fiecles, & que la fuperftition a prefque toijouts triomphé de la raïfon chez tous les peuplées de la terre, Cette pratique pañla de l'Orient dans la Gréce, où on la voit établie du tems d’Homere. Loin que les Payens ayent resardé l’évocarion des ombres comme odieufe & criminelle, elle étoit exercée par les mi- nifires des chofes faintes. Il y avoit des temples con: facrés aux manes, où l’on alloit confulter les morts : il y en avoit qui étoient deftinés pour la cérémonie de Pévocation. Paufanias alla lui-même à Héraclée 5 enfuite à Phygalia, pour évoquer dans unde ces tem ples une ombre dont il étoit perfécuté. Périandre , tyran de Corinthe, fe rendit dans un pareil temple qu étoit chez les Thefprotes, pour confulter les ma- nes de Mébiffe. Les voyages que les Poëtes font faire à leurs hé ros dans les enfers, n’ont peut-être d’autre fonde- ment que les éyocations, auxquelles eurent autrefois recours de grands hommes pour s’éclaircir de leur deftinée. Par exemple, le fameux voyage d’Ulyffe au pays des Cymmériens, où il alla pour confulter l'ombre de Tyréfias; ce fameux voyage, dis-je, qu'Homere a décrit dans l’Odyflée, a tout l’air d’une femblable évocation, Enfin Orphée qui avoit été dans laThefprotie pour évoquer le phantôme de fa femme Euridice, nous en parle comme d’un voyage d’enfer, &t prend de -[à occafon de nous débiter tous les dogmes de la Théologie payenne fur cet article : exemple que les autres Poëtes ont fuivi. Mais il faut remarquer ici que cette maniere de parler , évoquer une ame , n'eft pas exalte; car ce que les prêtres des temples des manes, & enfuite les ma- giciens, évoquoient , 'étoit nile corps ni l’ame, mais quelque chofe qui tenoit le milieu entre le corps & l'ame, que les Grecs appelloïient #Jwaw, les Latins Jimulacrum , imago, umbra tenuis. Quand Patrocle prie Achille de le faire enterrer, c’eft afin que les images legeres des morts, Ja Kauovro, ne l’em- pêchent pas de pañer Le fleuve fatal. Ce n’étoit ni l’ame ni le corps qui defcendoient dans les champs élyfées, mais ces idoles. Ulyfe voit l'ombre d’Hercule dans ces demeures fortunées, pen- dant que ce héros eft lui-même avec les dieux im= mortels dans les cieux, où il a Hébé pour époufe. C'étoit donc ces ombres, ces fpeêtres ou ces mänés, comme on voudra les appeller, qui étoient évoqués. De favoir maintenant fi cesombres, ces {fpectres ou ces manes ainfi éyogués apparoifloient , ou fi les gens trop crédules fe laifoient tromper par l'artifice des prêtres, qui avoient en main désfourbes pour les fervir dans l’occafon , c’efkce qu'il n’eft pas difficile de décider, , Ces évocations, fi communes dans le paganifme ; fe pratiquoient à deux fins principales ; ou pour con- foler les parens & les amis, en leur faifant apparot. tre les ombres de ceux qu'ils régrettoient; ou pour en tirer leur horofcope. Enfuite parurent fur la fcene les magiciens, qui fe vanterent aufñli de tirer par leurs enchantemens ces ames, ces fpeîres ou ces phantômes de leurs demeures fombres. Ces derniers, muniftres d’un art frivole & fanefte; vinrent bieatôt à employer dans leurs éyocarions les EVO. pratiques les plus folles & les plus abominables ; ils alloient ordinairement {ur le tombeau de ceux dont ils vouloient évoquer les manës ; ou plütôt, felon Suidas, ils s’y laiffoient conduire par un bélier qu'ils tenoïent parles cornes, & qui ne manquoit pas, dit cetauteur, de fe profterner dès qu'il y étoit arrivé. On faifoit là plufieurs cérémomes, que Lu- _cainnous’a décrites en parlant de la fameufe magi- cienne nommée Permenide ; on fait ce quil en dit : Pour des charmes pareils elle garde en tous lieux Tout ce que la nature enfante d'odieux ; Elle méle a du [ang qu'elle puife en fes veines, Les entrailles d'un lynx, 8tc. Dans les éyvocations de cette efpece, on'ornoit les autels de rubañs noiïrs & de branches de cyprès ; on y facrifoit des brebis noires : & comme cetart fatal s’exerçoit la nuit, on immoloit un coq, dont le chant'annonce la lumiere du jour, fi contraire aux enchantemens. On finifloit ce lugubre appareil par desvers magiques, & des prieres qu’on récitoitavec beautoup de contorfions. C’eft ainfi qu'on vint à bout de perfuader au vulgaire ignorant &c flupide , que cette magie avoit ün pouvoir abfolu , non-feu- lément fur les hommes’, maïs fur les dieux mêmes, fur les aftres , fur le foleil, fur la lune, en un mot, fur toute la nature. Voilà pourquoi Lucain nous dit : L'univers les redoute, € leur force inconnue S’éleve impudemment au-diffus de la nue ; La nature obéir a fes impreffions, Le foleil étonné fent mourir Jes rayons, Et la lune artachée à fon throne fuperbe, Trenvhlante, fans couleur, vient écumer fur l'herbe, Perfonne n’ignore qu’il y avoit dans le paganifme différentes divinités, les-unes bienfaifantes & les au- tres malfaifantes, à qui les magiciens pouvoient avoir recours dans leurs opérations. Ceux qui s’a- drefloient aux divinitésmalfaifantes , profefloient [a magie goétique, ou forcelerie dont je viens de par- ler. Les lieux {oûterrems étoient leurs demeures ; Tobfcurité de la nuit étoitle tems deleurs évocarions; & des victimes noires qu'ilsimmoloient, répondoient à la noirceur de leut art. Tant d’extravagances & d’abfurditésétablies chez des nations favantes & policées, nous paroïfent in- eroyables ; maisindépendamment du retour fnrnous- mêmes, qu'il feroit bon de faire quelquefois, Péton- nement doit cefler, dès qu’on confidere que la magie & la théologie payenne fe touchoient de près, & quelles émanoient lune &c l’autre des mêmes prin- wipes. Voyez MAGIE, GOËTIE, MANES , Lému- RES, ENCHANTEMENS, Ge. Article de M. le Cheva- dier DE JAUCOURT. EVOCATION, (Jurifprud.) eft appellée en Droit divis tranflatio ou evocario ; ce qui fignifie ur change- ment de juges, qui fe fait en Ôtant la connoifflance d’une conteftation à ceux qui devoient la juger, fe- on l’ordre commun , & donnant à d’autres le pou- voir d’en decider. Plutarque, en fon rraité de l'amour des peres, re- garde les Grecs comme les premiers quiinventerent les évocurions & les renvois des affaires à des fiéges étrangers ; & il en attribue la caufe à la défiance que les citoyens de la même ville avoient les uns des au- res, qui les portoit à chercher la juflice dans un au- tre pays, comme une plante qui ne croiïfloit pas dans le leur, 5 Les lois romaines font contraires à tout ce qui dé- range l’ordre des jurifdiétions, & veulent que les pres puiflent toüjours avoir des juges dans leur rovince , comme 1l paroît par la loi ywres ordinem , au code de jurifdidt, omn. jud, & en l'auth, f vero, | Tome VI. , EVO 163 “cod. de jud, ne provinciales recedentes à patrid, ad longinqua trahantur examina, Leur motif étoit que fouvent l’on n’évoquoit pas dans l’efpérance d’obte- nir meilleure juftice , mais plütôt dans le deflein d’é- loigner le jugement , & de contraindre ceux contre lefquels on plaidoit, à abandonner un droit légitime, par l’impofibilité d'aller plaider à 200 lienes de leur domicile : commodins ef? illis (dit Cafiodore, Bb. FT, c. #xiy,) caufam perdre, quam aliquid per talia dif= pendia conquirere , fuivant ce qui eft dit en l’auth. appellat. à Les Romans confidéroient auf qu'un plaideur faifoit injure à fon jugé naturel, lorfqu’il vouloit en avoir un autre, comme 1l eft dit en la loi litigatores, in principio , À. de recept. arbirr. Il y avoit cependant chez eux des juges extraor- dinaires, auxquels feuls la connoïffance de certaines matieres étoitattribuée ; &des juges pour les caufes de certaines perfonnes qui avoient ce qu’on appel loït privilegium fori, aut jus revocandi domum. Les empereurs fe faifoient rendre compte des af. faites de quelques particuliers , mais feulemént en deux cas ; l’un, lorfque les juges des liéux avoient refufé de rendre juftice, comme il eft dit en l’authen- tique wr différent judjces, c. J. & en l’authéntique de quaftere, $. fuper hoc ; l’autre, lorfque les veuves, pupilles & autres perfonnes dignes de pitié, déman- doient elles:mêmes l’evocaion de leur caufe, par la crainte qu’elles avoient du crédit de leur partie. Capitolin rapporte que Marc Antonin, furnommé le philofophe, loin de dépouiller les juges ordinaires des caufes des parties, renvoyoït mème celles qui le concernoïient, au fénat. : Tibere vouloit pareïllement que toute affaire, grande ou petite ,-paffat par l'autorité du fénat. Iln’en fut pas de même de l’empereur Claude’, à qui les hiftoriens imputent d’avoir cherché à attirer à lui les fonétions des magiltrats , pour en retirer profit. | * Il eft parlé de lettres évocatoires dans le code théo- dofien & dans celui de Juftinien, au titre de decurio» nibus filentiariis ; mais ces lettres n’étoient point des éyvocations, dans Le fens où ce terme fe prend par- ii notis: c’étoient proprement des congés que le prince donnoit aux officiers qui étoient en province, pour venir à la cour; ce que l’on appelloit éyocare ad cormitatum, Il faurentendre de même ce qui eff dit dans la no- vélle 131 de Juftimien : ze decurio aur cohortatis per. ducatur in jus , citra juffionem principis. Les lettres évocatoires que le prince accordoit dans ce cas, étoient proprement une permiflion d’affisner l’ofi- cier, lequel ne pouvoit être autrement afligné en jugement , afin qu'il ne fût pas libre à chacun de le diftraire trop aifément de fon emploi. En France les évocations trop fréquentés, & faites fans caufe légitime , ont totjours été regardées com- me contraires au bien de la Juftice ; & les anciennes ordonnances de nos rois veulent qu’on laïfle à cha- ue juge ordinaire la connoïffance des affaires de fon diftrié. Telles font entr'autres celles-de Philippe-le- Bel, en 1302; de Philippe de Valois, en 1344; du roi Jean, en 13$1 & 1355 ; de Charles V.en1357; de Charles VI. en 1408, & autres poftérieurs. Les ordonnances ont auf reftraint l’ufage des évo: cations à certains cas, & déclarent nulles toutes les évocations qui feroient extorquées par importunité ou par inadvertance , contre la reneut des ordon- nances. C’eft dans le même efprit que les caufes fur lef- quelles l'évocarion peut être fondée , doivent être mû- rement examinées, & c’eft une des fon@hions prin- cipales du confeil. S'il y a lieu de laccorder, l’afaire eft renvoyée ordinairement à unautre tribunal ; & X ij 164 EVO il eft très-rate de la retenir au confeil , qui n’eft point cour de juflice, maïs établi pour maintenir l’ordre des jurifdiétions, & faire rendre la juftice dans les tribunaux qui en font charges. Voici les principales difpofitions que l’on trouve dans les ordonnances fur cette matiere. L’ordonnance de Décembre 1344, veut qu’a la- venir il ne Joit permis à qui que ce foit de contrevenir aux arrêts du parlement 71 d'impétrer lettres aux fins de retarder où empêcher l'exécution des arrêts , ni d'en pourfuivre l’enthérinement, à peine de Go 1. d'amende... Le roi enjoint au parlement de n’obéir € obtempérer en façon quelconque à telles lettres, mais de Les déclarer aulles, iniques & fubreptices, ou d'en référer au roi, & érftruire Ja religion de ce qu’ils croiront étre raifonnable- ment fait, S'il leur paroît expédient. Charles VI. dans une ordonnance du 13 Août 1369, fe plaint de ce que les parties qui avoient des affaires pendantes au parlement, cherchant des fub- terfuges pour fauguer leurs adverfaires , furpre- noïent de lui à force d’importunité , 8 quelquefois par inadvertance, des lettres clofes ou patentes, par lefquelles contre toute juftice, elles faifoient inter- dire la connoïiffance de ces affaires au parlement, qui eft, dit Charles VI. Ze miroir & la fource de route da juffice du royaume | & faïloient renvoyer ces mé- mes affaires au roi, en quelque lieu qu'il fût; pour remédier à ces abus , il défend très-expreflément au parlement d'obrempérer a de telles Lettres, foit ouvertes ox clofés , accordées contre le bien des parties, au grand fcandale & retardement de la Jufhice , contre le flyle & les ordonnances de la cour , à moins que ces lettres ne: foient fondées fur quelque caufe raifonnable , de guoi il charge leurs confciences : il leur défend d’ajoù- ter foi, ni d’obéir aux huiffiers, fergens d'armes & autres officiers porteurs de telles lettres, ains au contraire, S'il y échet, de les déclarer nulles & injufles, ou. au moins fubreptices ; où que s’il leur paroît plus expédient , felon la nature des caufes & la qualité des perfonnes , ils en écriront au roi & en inftrui- ront fa religion fur ce qu'ils croyent être fait en telle occurence. L’ordonnance de Louis XII. du 22 Décembre 1499 s’explique à-peu-près de même , au fujet des lettres de difpenfe & exception , furprifes contre la: teneur des ordonnances ; Louis XII. les déclare d’a- vance nulles, & charge la confcience des magiftrats d’en prononcer la fubreption & la nullité , à peine d’être eux-mêmes defobéiffans & infraéteurs des or- donnances. L’édit donné par François I, à la Bounrdaïfiere le 18 Mai 1529, concernant les évocarions des parle- mens pour caufe de fufpicion de quelques officiers , fait mention que le chancelier & les députés de plu- fieurs cours de parlement, lui auroient remontré combien les évocarions étoient contraires au bien de la juftice ; & l’édit porte que les lettres d’évocarions feront o&royées feulement aux fins de renvoyer les caufes & matieres dont il fera queftion au plus pro- . chain parlement, & non de les retenir au grand confeil du roi, à moins que les parties n’y confen- tiflent, ou que Le roi pour aucunes caufes à ce mou- vantes , n'oétroyât de fon propre mouvement des lettres pour retenir la connoïflance de ces matieres audit confeil. Et quant aux matieres criminelles , là où fe trouvera caufe de les évoquer , François. or- donne qu’elles ne foient évoquées , mais qu'il foit commis des juges fur les lieux jufqu’au nombre de dix. Le même prince par fon ordonnance de Villers- Cotterets , arr. 170 , défend au garde des fceaux de bailler lettres pour retenir par les cours fouverai- nes la connoiffance des matieres en premiere inf- tance ; ze auffi pour des ôter de leur juridiction ordi- E V O naïte, & les évoquer & commettre à autres ; ainfi qu'il en a été grandement abujé par ci-devanr. | Et fi, ajoûte l'err. 171 , lefdites lettres étoient au= trement baillées, défendons à tous nos juges d’y avoir égard ; &c il leur eft enjoint de condamner les impé- trans en l’amende ordinaire, comme de fol appel, tant envers le roi qu’envers la partie, & d’avertir le roi de ceux qui auroient baïllé lefdites lettres, pour en faire punition felon l'exigence des cas. Le chancelier Duprat qui étoit en place , fous le même règne , rendit les évocarions beaucoup plus fréquentes ; & c’eft un reproche que l’on a fait à fa mémoire d’avoir par-là donné atteinte à l’ancien ordre du royaume , & aux droits d’une compagnie dont 1l avoit été Le chef. Charles IX. dans l'ordonnance de Moulins, are, 70 ; déclare fur les remontrances qui lui avoient été faites au fujet des évocarions , n’avoir entendu & n'entendre qu’elles ayent lieu, hors Zes cas des édits & ordonnances, tant de lui que de fes prédécef- Jeurs, notamment en matieres criminelles ; efquelles il veut que ;. fans avoir égard aux évocations qui auroïens été obtenues par tmportunité ou autrement , il foir palfé outre a l’inftrutlion 6 jugement des procès criminels » à moins que les évocarions,, foit au civil ou au cri- minel , euflent été expédiées pour quelques cau- fes qui y auroient engagé le roi de fon commande- ment , & fignées par l’un de fes fecrétaires d’état 5 &t dans ces cas, 1l dit que les parlemens & cours fouveraines ne pafleront outre, mais qu’elles pour- ront faire telles remontrances qu’il appartiendra. L’ordonnance de Blois , art. 97 , femble exclure abfolument toute évocation faite par le roi de fon propre mouvement; Henri III. déclare qu’:/ #’ertend dorefnavant bailler aucunes lettres d’évocation, fois générales ou particulieres, de fon propre mouvement ; il veut que les requêtes de ceux qui pourfuivront les évocations foient rapportées au confeil privé par les maîtres des requêtes ordinaires de Phôtel qui feront de quartier, pour y être jugées fuivant les édits de la Bourdaifiere & de Chanteloup, & autres édits poftérieurs ; que fi les requêtes tendantes à évocation fe trouvent raifonnables, parties oüies & avec con- notflance de caufe , les lettres feront o@royées & non autrement, 6'c. Il déclare les évocations qui fe- roient ci-après obtenues, contre les formes fufdites, nulles & de nul effet 6 valeur ; & onobflant icelles , il veut qu'il foit pafle outre a l'inffruttion & jugement : des proces, par les juges dont ils auront été évoqués. L’édit du mois de Janvier 1597, regiftré au par- lement de Bretagne le 26 Mai 1598, borne pareil- lement en l’art, 12, l’ufage des évocarions aux feuls cas prévüs par les ordonnances publiées & vérifiées par les parlemens ; l'arc. 13, ne voulant que le con- feil foit occupé ès caufes qui confiftent en jurifdic- tion contentieufe , ordonne qu’à l’avenir telles ma- tieres qui y pourroient être introduites, feront in- continent renvoyées dans les cours fouveraines, à qui la connoïffance en appartient, fans la retenir, ne diftraire les fujets de leur naturel reflort & jurifdic- : tion. ; Et fur les plaintes qui nous font faites, dit Hen- tilV. en l’arr, 15, des fréquentes évocations qui troublent l’ordre de la juftice , voulons qu’aucunes ne puiflent être expédiées que fuivant les édits de Chanteloup & de la Bourdaïfere , & autres édits fur ce fait par {es prédécefleurs, & qu’elles foient fignées par l’un des fecrétaires d'état & des finances qui aura reçû les expéditions du confeil , ou qu’elles n'ayent été jugées juftes & raifonnables, par zorre- dit confeil, {uivant les ordonnances. L'édit du mois de Mai 1616 , art, 9, dit: Vou- lons & entendons , comme avons toùjours fait, que les cours fouveraines de notre royaume foient. maintenues & confervées en la libre & entiere fonc- tion de leurs charges, & en l'autorité de jurifdiéhon qui leur a été donnée par les rois nos prédécef ieurs. La déclaration du dernier Juillet 1648 porte , arr. 1que Les réglemens fur le fait de la juftice portés par les ordonnances d'Orléans, Moulins & Blois , feront exattement exécutées & obfervées fuivant les vérifi- cations qui en ont été faites en nos compagnies fou- veraines,avec défenfes, tant aux cours de parlement qu'autres juges , d'y contrevenir : elle ordonne au chancelier de France de ne fceller aucunes lettres d’évocation que dans les termes de droit, & après qu’elles auront été réfolues fur Le rapport qui en fera fait au confeil du roi par les maîtres des requêtes qui feront en quartier ; parties oies, en connoiflance de caufe. La déclaration du 22 OGtobre fuivant porte, arc. 14, que pour faire connoître à la poftérité l’eftime que le roi fait de fes parlemens , & afin que la juf- tice y foit adminiftrée avec l'honneur & l'intégrité requife , le roi veut qu'à l'avenir les articles 91, 92397» 98 6 99 de l'ordonnance de Blois, {oient inviolablement exécutés ; ce faifant, que toutes affaires qui giflent en matiere contentieufe , dont les inftances font de-préfent ou pourront être ci-après pendantes , indécifes & introduites au confeil , tant par évocation qu'autrement , Joient renvoyées comme de roi les renvoye par-devant les juges qui en doivent naturellement connoitre , fans que le confeil prenne connoïffance de telles & femblables matieres ; lef- quelles fa majefté veut être traitées par-devant les juges ordinaires , & pas appel ès cours fouveraines , fuivant les édirs & ordonnances, &c. Le même article veut aufh qu'il ne foit délivré aucunes lettres d'évocation générale ou particuliere , du propre mouvement. de Ja majefté ; aïns que les re- quêtes de ceux qui pourfuivront lefdites évocations foient rapportées au confeil par les maitres des requêtes qui feront en quartier, pour y étre jugées Juivant les édits, & oëtroyées , parties oùtes ; 6 avec connoiffance de caufe & non autrement. Il eft encore ordonné que lefdites évocarions {e- æont fignées par un fecrétaire d'état ou des finances qui aura rec les expéditions, lorfque les évocarions auront été délibérées ; que les évocations qui feront ci-après obtenues contre les formes fufdites , ons déclarées nulles & de nul effer & valeur , &t que ronobf- tant icelles , il fera pañlé outre à linftruétion & ju- gement des procès par les juges dont ils auront été évoqués : & pour faire cefler les plaintes faites au roi à l’occafon des commiffions extraordinaires par lui ci-devant décernées, 1l révoque toutes ces com- miflions , & veut que la pourfuite de chaque ma- tiere foit faite devant les juges auxquels la con- noïffance en appartient. ge Leslettres patentes du 1x Janvier 1657, annexées à l'arrêt du confeil du même jour, portent que le roi ayant fait examiner en fon confeil, en fa pré- fence , les mémoires que fon procureur général lui avoit préfentés de la part de fon parlement , con- cernant les plaintes fur les arrèts du confeil que l’on prétendoit avoir été rendus contre les termes des ordonnances touchant les évocarions , & {ur des ma- tieres dont la connoïflance appartient au parlement: {a majefté ayant toùjours entendu que la juftice fût rendue à es fujets par les juges auxquels la connoif- fance doit appartenir fuivant la difpofition des or- donnances , & voulant même témoigner que les re- montrances qui lui avoient été faites fur ce fujet, par une compagnie qu’elle a en une particuliere con- fidération, ne lui ont pas moins été agréables que le zele qw’elle a pour fon fefvice lui donne de fatis- fadion ; en conféquençe , le roi ordonne que les EVO 165 ordonnances faites au fujet des évocations feront exattement gardées & obfervées , fait très-exprefles inhibitions & défenfes à tous qu'il appartiendra d’y contréventr, n'y de traduire fes fujets par-devant d’autres juges que ceux auxquels la connoiffance en appartient fuivant les édits & ordonnances, à peine de nullité des jugemens & arrêts qui feront rendus au confeil, & de tous dépens, dommages & inté- rèts contre ceux qui les auront pourfuivis & obte- nus ; en conféquence , le roi renvoye à fon parle- ment de Paris les procès fpécifiés audit arrêt, &c. On ne doit pas non plus omettre que fous ce re- gne , ces évocations s'étant aufl multiphées , le Rot par des arrêts des 23 Avril, & 12 & 26 O&tobre 1737, & 21 Avril 1738, a renvoyé d'office aux fiéses or- dinaires , un très-grand nombre d’affaires évoquées au confeil, ou devant des commiffaires du confeil ; & enfuite 1l fut expédié des lettres patentes qui fu- rent enregiftrées , par lefquelles la connoïffance en fut attribuée , foit à des chambres des enquêtes du parlement de Paris , foit à la cour des aydes ou au grand-confeil, fuivant la nature de chaque affaire. On diftingue deux fortes d’évocarions ; celles de grace, & celles de juftice. On appelle évocations de grace, celles qui ont été ou font accordées par les rois à certaines perfonnes , Où à certains corps ou communautés, Comme une marque de leur proteétion , ou pour d’autres confi- dérations telles que les committimus , les lettres de garde-gardienne , les attributions faites au grand- confeil des affaires de plufeurs ordres religieux, &c de quelques autres perfonnes. Les évocations de grace font ou particulieres, c’eft- à-dire bornées à une feule affaire ; ou générales, c’eft-à-dire accordées pour toutes lés affaires d’une même perfonne ou d’un même corps. L’ordonnance de 1669, art, 1 , du titre des évo- cations, & l'ordonnance du mois d’Août 1737, art. 1, portent gw’aucune évocation générale ne [era accordée , Je ce n’eft pour de très-grandes & importantes confidéra- tions qui auront êté jugées telles par le roien fon confeil ; ce qui eft conforme à l’efprit & à la lettre des an- ciennes ordonnances , qui a toüjours été de confer- ver l’ordre commun dans Padminiftration de la juftice. Il y a quelques provinces où les commirtimus 8e autres évocations générales n’ont point lieu ; ce font celles de Franche-Comté, Alface, Rouffillon , Flan- dre & Artois. | Il y a auffi quelques pays qui ont des titres parti- culiers pour empêcher l’effet de ces évocations, ou pourles rendre plus difficiles à obtenir , tels que ceux pour lefquels on a ordonné qu’elles ne pourront être accordées qu'après avoir pris l’avis du procureur général ou d’autres officiers. Dans d’autres pays, les évocations ne peuvent avoir lieu pour un certaingenre d’affaires,comme en Normandie & en Bourgogne , où l’on ne peut évo- quer les decrets d'immeubles hors de la province. On nomme évocation de juftice , celle qui eft fon- dée fur la difpofition même des ordonnances, com- me l’évocarion fur les parentés &z alliances qu’une des parties fe trouve avoir dans le tribunal où fon affaire eft portée. C’eft une regle générale, que les exceptions que les lois ont faites aux évocarions mêmes de juflice,, s'appliquent à plus forte raifon aux évocations qui ne font que de grace ; enforte qu’une affaire qui par fa nature ne peut pas être évoquée fur parentés & alliances , ne peut l’être en vertu d’un commitimns ou autre privilége perfonnel. Quant à la forme dans laquelle lévocation peut être obtenue, on trouve des lettres de Charles V. du mois de Juillet 1366 , où 1l eft énoncé que le roi 166 E VO . pour accélérer le jugement des conteftations pen- dantes au parlement, entre le-duc de Berry & d’Au- verene, & certaines églifes de ce duché, les évoqua à fa perfonne, vivæ vocis oraculo, Il ordonna que les parties remettroient leurs titres par-devant les gens de fon grand-confeil ; qui appelleroient avec eux autant de gens de [a chambre du parlement qu'ils jugeroïent à propos, afin qu'il jugeñt cette affaire fur le rapport qui lui en feroit fait. Ces termes viyæ vocis oraculo patoïffent fignifier que lévocation fut ordonnée ou prononcée de la pro- pre bouche du roi, ce qui n’empêcha pas que fur cet ordre ou arrêt, il n’y eût des lettres d’évocarion expédiées ; en effet, il eft dit que les lettres furent préfentées au parlement , qui y obtempéra du con- fentement du procureur général , &c le roi jugea l'affaire. Ainf les évocarions s'ordonnoient dès-lors par lettres patentes , & ces lettres étoient vérifiées au parlement ; ce qui étoit fondé fur ce ee toute évo- cation emporte une dérogation aux ordonnances du royaume, & que l’ordre qu’elles ont prefcrit pour ladminiftration de la juftice , ne peut être changé que dans la même forme qu'il a été établi. Il paroït en effet , que jufqu'au tems de Louis ‘XIII. aucune évocarion n’étoit ordonnée autrement ; la partie qui avoit obtenu les lettres, étoit obligée d'en préfenter l’original au parlement , lequel véri- foit Les lettres ou les retenoit au grefle, lorfqu’elles ne paroïfloient pas de nature à être enregiftrées. Les regiftres du parlement en fourniffent nombre d'exemples, entre autres à la date du 7 Janvier 4555, où l’on voit que cinq lettres patentes d’évo- cation, qui furent fucceflivement préfentées au par- lement pour une même affaire , furent toutes rete- nues au greffe fur les conclufons des gens du roi. Plufieurs huifiers furent decretés de prife-de-corps par la cour, pour avoir exécuté une évocation fur un duplicata ; d’autres, en 1591 & 1595, pour avoir fi- grmifié des lettres d’évocation au préjudice d’un arrêt du 22 Mai 1574, qui ordonnoit l'exécution des pré- cédens reglemens , fur le fait de la préfentation des lettres d’évocation , {ans duplicata. Les évocations ne peuvent pas non plus être faites par lettres miflives, comme le parlement l’a obfervé en différentes occafions , notamment au mois de Mars 1530, où il difoit, que l’oz #’a accottumé faire une évocation par lettres miffives , ains Jous lettres pa- sentes nécef[uires, Ontrouve encore quelque chofe d’à-peu-près fem- blable dans les regiftres du parlement, au 29 Avril 1561, & 22 Août 1567; & encore à l’occafion d’un arrêt du confeil de 1626, portant évocarion d’une affaire criminelle , le chancelier reconnut l'irrégula- rité de cette évocation dans fa forme , & promit dé la retirer; n’y ayant, dit-il, à l'arrêt d’évocarion que la fignature d’un fecrétaire d’état , & non le fceau. L'expérience ayant fait connoïître que plufeurs plaideurs abufoient fouvent de leyocation même de juitice , quoiqu’elle puiffe étre regardée comme une voie de droit, on l’a reftrainte par l’ordonnance du mois d'Août 1669, & encore plus par celle de 1737. 1°. L’évocation fur parentés & alliances , n’a pas lieu à l’égard de certains tribunaux ; foit par un privi- lége accordé aux pays où ils font établis, comme le parlement de Flandre & les confeils fupérienrs d’AI- face & de Rouffillon; foit parce que ces tribunaux ont été créés exprefflément pour de certaines matie- res, qu'on a crû ne pouvoir leur être ôtées pour d'intérêt d’une partie, comme les chambres des comp- tes, les cours des monnoies, les tables de marbre, & autres jurifdiétions des eaux & forêts. Cette évocation n’eft pas non plus admife à Pégard des confeils fupérieurs , établis dans les colonies françoifes ; mais les édits de Juin 1680, & Septem= bre 1683 , permettent à ceux qui ont quelque procès contre un préfident ou confeiller d’un confeil fupé- rieur, de demander leur renvoi devant l’intendant de la colonie ; qui juge enfuite l'affaire , avec un au- tre confeil fupérieur , à fon choix. | 2°. I y a des affaires qui, à caufe de leur nature, ne font pas fufceptibles d'éyocasion , même pour pa- rentés & alliances. na. Telles font les affaires du domaine ; celles des pai- ries & des droits qui en dépendent, file fond du droit eft contefté ; celles où il s’agit des droits du roi, en- tre ceux qui en font fermiers owadjudicataires. Fels font encore les decrets &c les ordres; ce qui s'étend, fuivant ordonnance de 1737, sir. j. arr. 25, à toute forte d’oppofñition aux faifies réelles ; parce qu'étant connexes néceffairement à la faifié réelle elles doivent être portées dans la même jurifdi@ion ; {oit que cette faife aït été faite de l’autorité d’une cour où d’un juge ordinaire, ou qu’elle l'ait été en vertu d'une fentence d’unjuge de priviléve, La même regle a lieu pour toutes les conteftarions formées à l’occafion des contrats d'union, de direéion, ou au- tres {emblables. 3°. L’évocation ne peut être demandée que par celui qui eft a@tuellement partie dans la conteftation qu'il veut faire évoquer, & du chef de ceux qu y font parties en leur nom & pour leur intérêt per- fonnel. Il fuit de-là , que celui qui a été feulement affioné comme garant, où pour voir déclarer le jugement commun, ne peut pas être admis à demander l’évo- cation, fi l'affaire n’eft véritablement liée avec lui; comme 1l eft expliqué plus en détail par les articles 30, 31, 8 32 de l'ordonnance de 1737. Il fuit encore du même principe, qu'on ne peut évoquer du chef des procureurs généraux, ni des tuteurs, curateurs, fyndics, directeurs des créan- ciers, on autres adminiftrateurs , s'ils ne dont parties qu’en cette qualité, & non pour leur intérêt parti- culier. | En matiere criminelle, un accufé ne peut évoquer du chef de celui qui n’eft pas partie dans le procès, quoiqu'il fût intégeflé à la réparation du crime , ow ceffionnaire des intérêts civils : ul n’eft pas admis non plus à évoquer du chef de fes complices on co-ac- cufés ; s’il eft decreté de prife-de-cotps , il ne peut demander Peévocarion qu’après s'être mis en état. 4°. Il a encore été ordonné avec beaucoup de fa- gefle, que leévocarion n’auroit pas lieu dans plufieurs cas, à caufe de l’état où la conteftation que l’on voudroit faire évoquer, fe trouve au tems où lévo- cation eft demandée ; comme loriqu'on à commencé la plaïdoterie ou le rapport, où qu'on n’a fait fente fier l’aéte pour évoquer, que dans la dermiere quin- zaine avant la fin des féances d’une cour, ou d’un femeftre pour celles qui fervent par femeitre, | Une partie qui après le jugement de fon affaire ne demande l’évocarion que lorfqu'il s’agit de l'exécution de l'arrêt rendu avec elle, ou de lettres de requête civile prifes pour l’attaquer, ne peut y être reçue, à moins qu'il ne foit furvenu depuis arrêt de nou velles parentés , ou autre caufe légitime d’évocarion, De même, celui qui n'étant point partie en caufe principale n’eft intervenu qu’en caufe d'appel, ne peut évoquer , fi ce n’eft qu'al n'ait pü agir avant la fentence. | La partie qui a fuccombé fur une demande en éo- cation , n’eft plus admife à en former une feconde dans la fuite de la même affaire, s’il n’eft furvenu de nouvelles parentés ou de nouvelles parties; &cf la feconde demande en évocation étoit encore rejettée, elle feroit condamnée à une amende plus forte, & en d’autres peines, felon les circonftances, | À \ > Telles font les principales reftriétions qui ont été faites aux évocations mêmes, qui paroïflent fondées fur une confidération de jufuce, & fur la crainte qu'une des parties n’eût quelque avantage fur l’au- tre, dans un tribunal dont plufieurs officiers font fes parens ou alliés. Si l'un d'eux s’étoit tellement inte- reflé pour elle, qu'il eût fait fon affaire propre de fa caufe, les patens & alliés de cet officier fervi- roiént auf à fonder l’évocarion, Mais l'ordonnance de 1737 a prefcrit une procédure très-fommaire, pour les occafons où l’on allegué un pareil fait; & il faut pour l’établir, articuler & prouver trois cir- conftances; favoir, que l’ofüicier ait follicité les ju- ges en perfonne, qu'il ait donné fes confeils, & qu'il ait fourni aux frais. Le défaut d’une de ces trois cir- conftances fuffit pour condamner la partie qui a foû- tenu ce fait en une amende , & quelquefois à des dommages &c intérêts, & d’autres réparations. Au furplus , pour que la partie qui demande l’é- vocation ait lieu d'appréhender le crédit des parens ou alliés de fon adverfaire dans un tribunal, il faut qu'ils foient dans un degré aflez proche pour faire :préfumer qu'ils s’y intéreflent particulierement ; qu'ils foient en aflez grand nombre pour faire une forte impreflion fur lefprit des autres juges ; enfin qu'ils foient a@tuellement dans des fonétions qui les mettent à portée d’agir en faveur de la partie, à la- quelle ils font attachés par les liens du fang ou de l’affinite, C’eft dans cet efprit que les ordonnances ont fixé les degrés, le nombre, & la qualité des pa- Pour LES PARLEMENS PS ROUE, PYTENLS 0 MNT AG Touloufe, Bordeaux . . . . .{ + Rouen, Bretagne . . . - , .(" °°" F4, Dijon, Grenoble, Aix. . . .] Pau, Metz, Befançon . . . . { 5 Le grand-confeil . . . . . . .” .... 4 Cour des aides de Paris . . . .... 4 ch: Autres cours des aides . + . . .... 3 À l'égard de la qualité de chaque parent ou al- lié qui peut donner lieu à Pévocarion, il faut qu'il ait actuellement féance & voix délibérative dans fa compagnie, où qu'il y foit avocat général owpro- cureur général. On fait même une différence entre les officiers ordinaires, & ceux qui ne font pas obligés de faire un fervice aflidu & continuel; tels que les pairs, les confeillers d'honneur, & les honoraires, lef- quels , en quelque nombre qu’ils foient, ne fe comp- tent que pour un tiers du nombre requis pour évo- quer; comme pour quatre, quand il faut douze pa- rens ou alliés ; pour trois, quand il en faut dix ; pour deux, quand il en faut fix ou huit ; & pour un, quand il en faut trois, quatre, ou cinq. . Les pairs & les confeillers d'honneur ne peuvent donner lieu à évoquer que du parlement de Paris; & les maîtres des requêtes, que du parlement & du grand-confeil, quoique les uns & les autres ayent entrée dans tous les parlémens. On ne compte plus pour l’évocarion les parens ou alliés qui feroient morts depuis la cédule évocatoi- re, où qui auroient quitté leurs charges: s'ils font devenus honoraires , on les compte en cette qualité feulement. S'il atrive aufi que la partie du chef de laquelle on deémandoit l’évocarion cefle d’avoir inté- rèt dans l’affaire, on n’a plus d’épard à fes parentés ë alliances. L'objet des lois a encore été de prévènir les in- convéniens des demandes en évocarion ; en établif- fant une procédure fimple &abresée pour y ftatuer. Si la partie évoquée de eff du corps. 10 parens ou alliés. à of s 100 eo 27 11 5u ee EVO 167 tens & alliés qui pourroient donner lieu à Péyocarion. À l’épard de la proximité, tous les afcendans ou defcendans, 8 tous ceux des collatéraux, gx fpe. clert parentumm 6 liberorum inter fe referunt , c’eft-à- dire les oncles ou grands-oncles , néveux ou petits- neveux, donnent lieu À l’évocarion ; mais pour les autres collatéraux, la parenté ou l’alliance n’eft comptée pour Pévocarion que jufqu’au troifieme de- gré inclufivement ; au lieu que pour la récufation, elle s’étend au quatrième degré en matiere civile, & au cinquieme en matiere criminelle. Les degrés fe comptent fuivant le droit canoni- que. Voyez au mot DEGRÉ DE PARENTÉ. On ne peut évoquer du chef de fes propres parens & alliés, fi ce n’eft qu'ils fuflent parens ou alliés dans un degré plus proche de l’autre partie. Une alliance ne peut fervir à évoquer , À moins que le mariage qui a produit cette alliance ne fub- fifté au tems de l'évocation, ou qu’il n’y ait des en- fans de ce mariage ; l’efpece d’alliance qui eft en- tre ceux qui ont époufé les deux fœurs , ne peut auf fervit à évoquer que lorfque les deux maria- ges fubfiftent , ou qu’il refte des enfans d’un de ces mariages , ou de tous les deux. Le nombre des parens ou alliés néceflaire pour évoquer , eft replé différemment, eu égard au nom- bre plus où moins grand d'officiers, dont les cours font compofées , &c à la qualité de celui du chef duquel on peut évoquer..C’eft ce qu’on peut voir. par le tableau fuivant. S2 elle ner ef pas. 12 parens ou alliés. D A CVES = +1 _ mt 8 [2 ” LI e e L e e e ° 12 Li LL + AG C’eft au confeil des parties qu’elles font exami- nées ; maïs il y a des procédures qui doivent fe faire fur les heux, dont la premiere eft la cédule évoca- toire. On appelle ainfi un a@e de procédure par léquel la partie, qui veut ufer de évocation , déclare à fon adverfaire qu’elle entend faire évoquer l'affaire de la cour où elle eft pendante ; attendu que parmi les offi- ciers de cette cour, il a tels & tels parens ou alliés : le même aûte contient une fommation de confentir à l’évocation & au renvoi en la cour, où il doit être fait fuivant l'ordonnance ; où à une autre, flelle lui étoit fufpeéte. ‘ La forme de cet aëte & celle des autres procédu- res qui doivent être faites fur les lieux , fe trouvent en détail dans l’ordonnance de 1737. L’évocation fur parentés 8 alliances eft réputée confentie, foit qu’il y ait un confentement par écrit, foit que le défendeur ait reconnu dans fa réponfe les parentés & alliances, fans propofer d’autres moyens pour empêcher l'évocation, foit enfin qu’il ait gardé le filence pendant le délai prefcrit par l'ordonnance ; dans chacun de ces cas, le démandeur doit obtenit des lettres d’évocation vonfentie, dans un tems fixé par la même ordonnance, faute de quoi le défendeur peut les faïre expédier aux frais de l'évoquant. Les cédules évocatoires font de droit réputées pour non avenues ; & les cours peuvent pañler ou- tre'àu jugement de l'affaire, fans qu'il foit befoin d’ar- rêt du confeil. 1°, Lorfque l'affaire n’eft pas de nature à être évoh , 7 168 E VO quée, ou lorfque l’évocarion eft fondée fur fes paren- tés & alliances d’un procureur général, d’un tuteur, ou autre adminiftrateur, qui ne font parties qu’en cette qualité. 2°. Lorfqu’on n’a pas obfervé certaines formali- tés néceflaires pour la validité de l’aéte de cédule évocatoire, & qui font expliquées dans les arzicles 38, 39 » 6o , 70 ; & 78 , de l'ordonnance de 1737. 3°. Lorfque l'évocation eft fignifiée dans la quin- zaine , avant la fin des féances ou du femeftre d’une cour. 4%. Quand l’évoquant s’eft défifté avant qu'il y ait eu aflignation au confeil. En d’autres cas il eft néceffaire d’obtenir un arrêt du confeil, pour juger fi l’évocarion eft du nombre de celles prohibées par l'ordonnance. 1°, Quand la cédule évocatoire a été figmifiée, depuis le commencement de la plaidoierie ou du rapport. 2°, Quand l’évocarion eft demandée trop tard par celui, ou du chef de celui qui a été affigné en garan- tie, où pour voir déclarer l’arrêt commun ; ou quand auparavant la fignification de la cédule évocatoire , il a ceflé d’être engagé dans l’affaire que l’on veut évoquer par une disjonétion , ou de quelque autre maniere. 3°. Quand l’évoquant n’a pas fait apporter au greffe les enquêtes & autres procédures, dans les délais portés par l'ordonnance. Pour éviter les longueurs d’une inftruétion, Por- donnance de 1737 a permis dans ces cas au défendeur d'obtenir , fur {a fimple requête, un arrêt qui le met en état de fuivre fon affaire dans le tribunal où elle eft pendante ; ce qui a produit un grand bien pour la juftice , en faifant cefler promptement & fans autre formalité , un grand nombre d’évocations formées dans la vûe d’éloigner le jugement d’un procès. S’il ne s’agit d’aucun des cas dont on vient de par- ler, on inftruit l’inftance au confeil, dans la forme qui eft expliquée par les arricles 28 ,.45 , 53 , 54, 58 6 65 , de l'ordonnance de 1737. Si la demande en évocation fe trouve bien fondée, l’arrêt qui intervient évogue la conteftation principa- le, & la renvoye à une autre cour , pour y être inf- truite & jugée , fuivant les derniers erremens. Autrefois le confeil renvoyoit à celle qu’il jugeoit le plus à-propos de nommer ; mais l'ordonnance a établi un crdre fixe, qui efttoüjours obfervé, àmoins qu'il ne fe trouve quelque motif fupérieur de juftice qui oblige le confeil de s’en écarter, ce qui eft très- rare. Le retivoy fe fait donc, Du parlement de Paris, au grand-confeil , où au parlement de Roïen, Du parlement de Roïen , à celui de Bretagne. Du parlement de Bretagne, à celui de Bordeaux. Du parlement de Bordeaux, à celui de Touloufe. De celui de Touloufe , au parlement de Pau ou d'Aix. Du parlement d'Aix, à celui de Grenoble. Du parlement de Grenoble , à celui de Dion. Du parlement de Dijon, à celui de Befançon. De celui de Befançon , à celui de Metz. De celui de Metz, au parlement de Paris. De la cour des aides de Paris, à celles de Roûen ou de Clermont. De la cour des aides de Clermont, au parlement de Bretagne , comme cour des aides. De celle de Clermont, à celle de Paris. … Du parlement de Bretagne ,| comme cour des ai- des, à celle de Bordeaux. De celle de Bordeaux, à celle de Montauban. De celle de Montauban , à celle de Montpellier. De celle de Montpellier, à celle d’Aix. E V © De cèlle d'Aix, au parlement de Grenoble; com: me cour des aides. Du parlement de Grenoble , comme cour des ai= des , à celui de Dijon, comme cour des aides. Du parlement de Dijon , comme cour des aïdes ; à la cour des aides de Dole, De celle de Dole , au parlement de Metz, com: me cour des aides. Et du parlement de Metz, comme cour des aides ; à la cour des aides de Paris. Si la demande en évocation paroît mal fondée, on ordonne que fans s’arrêter à la cédule évocatoire, les parties continueront de procéder en la cour, dont l'évocation étoit demandée, & l’évoquant eft condam- rl 2 t e né aux dépens , en une amende envers le roi, & une envers la partie , quelquefois même en fes domma- ges & intérêts. Telles font les principales regles que l’on fuit pour les demandes en évocations , qui ne peuvent être ju- gées qu'au confeil. Dans les compagnies femeftres , ou qui font com- pofées de plufieurs chambres, lorfqu’un de ceux qui ont une caufe ou procès , pendant à l’un des femef- tres, ou en l’une des chambres , y eft préfident on confeiller , ou que fon pere, beau-pere, fils, gen- dre, beau-fils, frere, beau-frere, oncle ,neveu, ou coufin - germain, y eft préfident ou confeiller, la conteftation doit être renvoyée à l’autre femeftre , ou à une autre chambre de la même cour , fur une fimple requêre de la partie qui demande ce renvoy, communiquée à l’autre partie, qui n’a que trois jours pour y répondre , & l’on y prononce dans les trois jours fuivans : ce qui Fe auf, lorfque dans le même femeftre on dans la même chambre, une des parties à deux parens au troifieme degré, ou trois, jufqu'au quatrieme inclufivement. S'il arrive dans une compagnie femeftre , que par un partage d'opinions, ou par des recufations, il ne refte pas aflez de juges dans un femeftre, pour vui- der le partage, ou pour juger le procès , ils font dé- volus de plein droit à l’autre femeftre ; mais toutes les fois qu'il ne refte pas aflez de juges, foit dans cette compagnie , foit dans celles qui fe tiennent par chambres & non par femeftres, pour vuider le partage, il faut s’adreffer au confeil pour en faire ordonner le renvoi à une autre cour, & alors il com- mence ordinairement par ordonner que le rapporteur & le compartiteur envoyeront à M. le chancelier , les motifs de leurs compagnies , qui font enfuite en- voyés à la cour , à laquelle le partage eft renvoyé par un deuxieme arrêt. | Ce font les cours fupérieures qui connoïffent des demandes en évocation , ou en renvoi d’une jurifdic- tion de leur reflort dans une autre, foit pour des parentés & alliances, foit à caufe du défaut de ju- ges en nombre fufffant , ou pour fufpicion; c’eftune des fon@ions attachées à l'autorité fupérieure. qu’el- les exercent au nom du roi , & les ordonnances leur laifent le choix de la jurifdiétion de leur reflort où l'affaire doit être renvoyée. On ne peut évoquer des préfidiaux fur des parentés & alliances, que dans les affaires dont ils connoïffent en dernier refort ; & il faut , pour pouvoir deman- der l’évocarion ; qu’une des parties foit officier du préfidial , ou que fon pere, fon fils, ou fon frere y foit officier, fans qu'aucun autre parent ni aucun allié , puifle y donner lieu. Elle fe demande par une fimple requête, qui eft fignifiée à l’autre partie ; & il y eft enfuite flatué, fans autres formalités , fauf Pappel au parlement du reflort , & le renvoi fe fait au plus prochain préfis dial , non fufpeét. Les regles que l’on a expliquées ci-deflus fur les matieres & les perfonnes qui ne peuvent donner leu lieu à l’évocarion , s'appliquent auffi aux demandes en renvoi d’un femeftre d’une chambre ou d’une ju- tifdiétion à un autre, ou en évocation d’un préfidial. Les canfes 8 procès évoqués doivent être jugés par les cours auxquelles le renvoi en a té fait fut- vant les lois, coûtumes , & ufages des lieux d’où 1ls ont été évoqués , n'étant pas jufte que lé change- ment de juges change rien à cet égard à la fituation des parties, & fi l’on s’écartoit de cette regle y elles pourroient fe pourvoir au confeil contre le juge- ment. | L'éyocarion pour caufe de connexité ou litifpen- dance a lieu lorfque Le juge fupérieur, déjà faifi d’une conteftation , attire à lui une autre conteftation pen- dante dans un tribunal inférieur, qui a un rapport néceffaire avec la premiere , enforte qu’il foit indif- penfable de faire droit fur l’un & l’autre dans le mé- me tribunal ; mais il faut que cette connexité loit bien réelle, finon les patties pourroient {e pourvoir contre le jugement qui auroit évoqué. . Meffieurs des requêtes de l’hôtel du palais à Paris, peuvent aufli , dans le cas d’une connexité vérita- ble, évoquer les conteftations pendantes devant d’au- tres juges, même hors du reflort du parlement de Paris : à l'égard des requêtes du palais des autres patlemens , elles n’en ufent qu'à l'égard des juges du reffort du parlement où elles font établies. Les juges auxquels toutes les affaires d’une cer- taine nature ont été attribuées , comme la chambre du domaine , la table de marbre, 6’c. aufli-bien que ceux auxquels on a attribué la connoïflance de quel- que affaire particuliere, ou de toutes les affaires d’u- ne perfonne où communauté » évoque pareillement les affaires qui font de leur compétence , & celles ui y {ont connexes ; Mais la partie qui ne veut pas déférer à l’évocarion, a la voie de fe pourvoir par Vappel, fi Le tribunal qui a évoque, & celui qui eft dépouillé par Pévocario®, {ont reflortiflans à la mé- me cour : s'ils font du refort de différentes cours, & que celles-ci ne fe concilient pas entr'elles , dans la forme portée par l'ordonnance de 1667, pour les conflits entre les parlemens & les cours des aydes qui font dans la même ville , il faut fe pourvoir en réglement de juges au confeil ; & il en eft de même, s'il s’agit de deux cours. L’éyocation du principal, eft, quand le juge {upé- rieur , {aif de l'appel d’une fentence qui n’a rien pro- noncé fur le fond de la conteftation, l’évoque & y prononce , afin de tirer les parties d'affaire plus promptement ; ce qui eft autorifé par l'ordonnance de 1667, tit. vj. art. 2. qui défend d’évoguer les cau- fes, inftances , & procès pendans aux fiéges infé- rieurs, ou autres jurifdiétions , fous prétexte d’ap- pel ou connexité , f£ ce #’eft pour juger définitivement à l'audience ; & fur le champ, par un feul & même ju- gerrzeTife L’ordonnance de 1670 , #is. xxvJ. art, $. ordonne la même chofe pour les évocarions en matiere crimi- . nelle : la déclaration du 13 Mai 1673, art. 9. a mê- me permis, dans les appellations de decret & de pro- cédurés appointées en la tournelle, lorfque les af- faires feront legeres & ne mériterant pas d’être inf- truites,, d'évoquer le principal , en jugeant , pour y faire droit définitivement, comme à l’audience, après que les informations auront été communiquées au procureur général , & l’inftruétion faite fuivant lor- donnance du mois d’Août 1670. L’ordonnance de la Marine, sir. 1j. art. 14. permet aux officiers des fiéges généraux d’amirauté , d’évo- quer indiftin@er..ent des juges inférieurs , les caufes qui excéderont la valeur de 3000 liv. lorfqu'ils fe- ront faifis de la matiere par l’appel de quelque ap- pointement owinterlocutoire donné én premiere inf- tance. (4) Tome VI. E V O 169 EVOCATOIRE, (Jurifp.) fe dit de ce qui fert de fondement À une évocation, Les parentés au degré de l'ordonnance, font des caufes évocatoires. On fait fignifier aux parties une cédule épotatoire, c’eft-à- dire un aéte par lequel on demande au confeil du roi qu'une inftance pendante dans une cour, foit évo- quée dans une autre, attendu les parentés & allian- ces qu'une des parties a avec un certain nombre des juges. Voyez CÉDULE 6 EvocaTioN. (4) EVOLI , (Géog. mod. ) petite ville du royaume de Naples , en Italie. EVOLUTIONS (res), quon appelle auf notions, font, dans l’Artimilitaire , les différens mou vemens qu'on fait exécuter aux troupes pour Les fot- mer ou mettre en bataille, pour les faire marcher de différens côtés , les rompre ou partager en plufieurs parties, les réunir enfuite, & enfin pour leur donner la difpofition la plus avantageufe pour combattre, fuivant les circonftances dans lefquelles elles peu- vent fe trouver. L’infanterie & la cavalerie ont chacune leurs évo- lutions particulieres. La cavalerie peut, en rigueur, exécuter tous les différens mouvemens de l’infante- rie ; mais On fe borne ordinairement dans les éyo/z- sions de la cavalerie , aux mouvemens qui lui font les plus utiles, relativement à fes différens ufages, Il eft très-effentiel que les troupes foient bien exercées aux évolutions , pour exécuter facilement toutes celles qui leur font ordonnées. I/ er ef£, difoit Démetrius de Phalere, fuivant que Polybe le rap- potte, d’une armée comme d’un édifice. Comme celui-ci ef? folide lorfqu’on a foigneufement travaillé en détail Jur toutes les parties qui le compofènt; de même nne ar- mée ef? forte lorfque chaque compagnie, chaque foldat a été inftruit avec foin de tout ce qu’il doit faire, L’officier particulier , dit M. Bottée, doit favoir les mêmes chofes que le foldat, & connoître de plus les ufages particuliers de chaque évolution, pour {e fervir des moyens les plus fmples dans l’exécution des ordres qui peuvent lui être donnés par fes fupé- rieurs; car rien n’eft plus néceffaire à l’heureux fuccès des entreprifes, que l’habileré des officiers particuliers. C’étoit-là , felon Polybe, le fentiment de Scipion. Toutes les nations policées ont en dans tous les tems des regles pour la formation, l’arrangement, &z les mouvemens des troupes. Sans la connoiffance &t la pratique de ces regles, une troupe de gens de guerre ne feroit qu'une mafle confufe , dont toutes les parties s’embarrafleroient réciproquement. Par le moyen des évo/urions on remédie à cet in- convénient. On donne à toutes les parties d’une trou: pe des mouvemens réguliers , qui la maintiennent toüours dans Pordre qu’elle doit obferver, tant pour foûtenir les efforts de l’ennemi , qu’afin que les dif- férentes parties qui le compofent puiflent concourir également à en augmenter la force &c la folidité. Les évolurions de l’infanterie font plus aifées à exé: cuter que celles de la cavalerie ; car, outre que le cheval ne fe meut pas de tout fens avec la même fa- cilité qu'un homme à pié, l'inégalité de fes deux di- menfons, c’eft-à-dire de fa largeur & de fa longueur, oblige à différentes attentions pout le faire tourner dans une troupe ; attentions qui ne feroient point né- ceflaires pour faire mouvoir de la même maniereun homme à pié. On donnera dans cet article le détail des princi- pales évolutions de linfanterie , qui fervent, pour ainf dire , de regles ou de modeles à celles de la cavalerie, & on le terminera par un précis de celles de la cavalerie. E V O ÉVOLUTIONS DE L'INFANTERIE. 170 Obférvations préliminaires. TI. Toute troupe qu’on affemble pour quelqu’opjet que ce foit, doit d’abord être mifé eh bataille, c’eft- à-dire former des rangs & des files. Voyez RANGS & FILES. Si l’on place plufieurs rangs de fuite les uns der- riere les autres, les files feront compofées d'autant d'hommes qu'il y aura de rangs. Voyez BATAILLON. Lorfqu’une troupe eft en bataille, dans l’ordre où elle doit combattre, les files & les rangs font ferrés autant qu'il eft pofble pour donner plus de force à la troupe, en réuniflant ainf toutes {es parties pour en former une efpece de corps folide. Dans cet état de prefhon, la troupe ne fe meut pas aufli facilement que s’il y avoit quelqu'intervalle en- tre les rangs & les files. C’eft pourquoi lorfqu'il ne s’agit pas d'attaquer l'ennemi ou d’en foûtenir les efforts , les hommes de la troupe ou du bataillon peuvent être dans une fituation moins gènante pour marcher plus commodément & plus legerement. De cette confidération naïflent deux fortes de dif- pofñtions de files & de rangs; favoir, des fées. ferrées &z ouvertes, & des ranps ferrés & ouverts. Les files font ferrées , lorfque les foldats de cha- que rang fe preflent tellement les uns &g les autres, qu’il ne leur refte que la Zberté du coude pour fe fer- vir de leurs armes. Lorfque Les foldats d’un même rang font ainf pref- fés, on peut évaluer environ à deux piés l’efpace qu'ils occupent chacun dans le rang. Si l’on veut faire {errer Les foldats en marchant, autant qu'il eft pofñble , cet efpace peut fe reduire à 18 pouces ; mais alors bien des officiers croyent qu'ils font trop gênés pour fe férvir aifément de leurs armes : &. £omme ils ne font pas dans Le bataillon pour préfenter uniquement leur corps à l'ennemi, qu’ils ont befoin de lufage de leurs bras, il fuit de-là qu’on ne doit fer- rer les files qu’autant qu’on le peut fans aucun in- convénient à cet égard. Lorfque les files font ouvertes, 1l doit y avoit en- trelles, pour l’exécution des différens mouvemens dont on parlera dans la fuite, un efpace égal, ou à-peu-près égal, à celui qu’elles occupent étant ferrées. Aïnf l’épaifleur d’une file ferrée étant à-peu-près de deux piés, les files auront à-peu-près ce même intervalle entr’elles lorfqu’elles feront ouvertes. Il y a des cas particuliers où les iles font beau- coup plus ouvertes, comme lorfqu’il s’agit de faire Vexercice, ou le maniement des armes, d'occuper un efpace déterminé avec peu de troupes, &c. mais il n’eft point queftion alors de les faire manœuvrer comme fi elles étoient en préfence de l'ennemi. C’eft pourquoi ces différens cas qui fortent de la loi géné- rale, ne peuvent être ici d'aucune confidération. Si l’union ou la preflion des files eft néceflaire pour donner de la folidité à un corps de troupes, il eft clair que celles des rangs ne left pas moins, & par conféquent qu’ils doivent fe ferrer les uns fur les autres autant qu'il eft poffible pour fe foûtenir réci- proquement. Il feroit à fouhaiter pour la folidité de la troupe, qu'ils fuflent, pour ainf dire, colés les uns fur les autres ; mais alors la troupe ne pourroit marcher qu'avec beaucoup de peine & pendant peu de tems. Si on la fuppofe immobile, ou qu’on veuille la faire tirer arrêtée, elle pourra fe tenir'ainfi, afin que le quatrieme rang, f elle a quatre rangs, puifle tirer fans incommoder le premier , cC’eft-à-dire que le bout des fufils des foldats du quatrieme rang dé- paflent les hommes du premier (voyez EMBOÏTE- MENT ):smais s’il s’agit de marcher , 1l faut que l’é- paifleur du rang, en y comprenant l’intervalle qui le fépare du rang qui fuit immédiatement, foit d’en- viron trois piés. Dans cette pofition, on dit qwe Les rangs font ferrés a la pointe de l'épée (æ) ; parce que le bout des épées des foldats de chaque rang'touchefle devant de la jambe des foldats du rang qui eft der- riere. de Cette preflion de rangs ne devroit fe faire que lorfqw'on eft prêt à combattre, oa qu’on veut mar- cher dans l’ordre propre au combat, parce qw’elle gêne toüjours un peu la marche du foldat, &c que d’ailleurs il ne faut qu’un inftant pour faire ferrer à la pointe de l’épée quatre ou cinq rangs éloïgnés les uns des autres, par exemple, de 12 piés; car alors le dernier rang n’eft éloigné du premier que de huit toifes, C’eft pourquoi, comme il eff remarqué dans une note de l’Ars de La guerre de M. le maréchal de Puyfegur (com. I. pag. 194.), fi l'ennemi eff à 15 ou 16 toiles, la troupe qui a fes rangs ouverts a encore le tems de fe ferrer avant d’être jointe par ennemi, & à plus forte raifon fi l’on en eft à une plus grande diftance. On obferve dans la note qu’on vient de ci ter, qu'il y a cependant une attention à faire fur ce fujet, « c’eft que s'il y avoit de la cavalerie à por- » tée, comme elle peut marcher fort vite, 1l faut fe » ferrer plütôt; mais il n’y a que les Huflards ou de » la cavalerie de pareille efpece, qui puiflent parcou- » rir cent pas, qui font 50 toiles, avant que votre » bataillon ait ferré fes rangs, le dernier n'ayant que » huit toifes à parcourir ». # On peut voir dans l’arsicle 3. tom. I. du dixieme chapitre de l’Arr de la guerre, les différens inconvé- niens qui refultent de marcher toûjours à rangs fer- rés. Quel que puifle être l’ufage contraire, comme un ufage ne tient pas lieu de raïfon , nous croyons que ceux qui liront avec attention ce que M. le ma- réchal de Puyfegur a écrit fur ce fujet, douteront am moins de la plüpart des avantages qu’on attribue à la méthode de marcher & de faire toutes les évo/x- tions à rangs {errés. Quoi qu'il en foit, comme les évolutions que nous allons expliquer , exigent dans différens cas que les rangs foient un pen ouverts, nous appellerons razes ouverts, ceux qui avec leur intervalle OCCuperont un efpace double de celui qu'ils occupent étant {errés 4 c’eft-à-dire fix piés ou environ. L’ordonnance du 6 Mai 1755, prefcrit douze piés où fix pas de deux piés chacun pour l'intervalle des rangs ouverts. C’eft à-peu-près la même diftance qu'- on obfervoit autrefois en conformité du réglement du 2 Mars 1703, rapporté dans le code miliraire de M. Briquet. Ce feroit peut-être 1c1 le lieu d’examiner quel eft le nombre de rangs qu’on doit donner à une troupe d'infanterie, pour lui donner la formation la plus avantageufe pour le combat; mais c’eft ce qu’on ne peut guere fixer par des ratfonnemens folides & dé- monfiratifs. | (a) L'expreffon de /érrer les rangs. a la pointe de l'épée, com- mence à n'être plus d'un ufage général dans les troupes. On lui fubftitue celle de érrer les rangs en-avanr, La raifon de ce changement, c'eft que le Roi ayant or- donné de renouveler les ceinturons de l'Infanterie (ce qui doit être fini dans l’efpace de trois ans), les nouveaux cein- turons feront faits de maniere que le foldat portera l'épée fur le côté le long de la cuifle , à-peu-près de la même maniere qu’on porte les couteaux de chafle. Or lorfque toutel'Infän terié portera ainf l'épée , l'expreffion de /érrer les rangs à la poin- te de l'épée, ne fera plus exacte, parceque les foldats de cha- que rangne pourront plus toucher le bout des épées du foldat du rang qui fes précédera. Cependant comme cette expreffion eft ancienne, & qu'il ne feroiït pas impoñhible qu’elle prevalüt für la nouvelle, nouscontinuerons de nous en fervir, mais re Jui donnant la même fignification qu'a celle de ferrer les rangs .en-avant ; par laquelle on entend qu'il fut Les ferrer autant que eft poñfble les uns fur fesautres , fans génerla marche de {oldate C Tout le monde convient qu’il faut néceflairement plufñeurs rangs les uns derriere les autres, pour que da troupe ou le bataillon doit capable de réfftance , &c d'attaquer avec fermeté une troupe qu'il veut combattre. Mais cette confidération ne fixe pas le | nombre de ces rangs. L’ufage à beaucoup varié fur ce fujet. Chez les | Grecs la phalange étoit à feize de hauteur ,rc’eft-à- dire qu’elle avoit feize rangs de foldats {voyez PHA- LANGE) : chez les Romains, les corps particuliers d'infanterie étoient à dix de hauteur. En France, ainfi que dans le refte de l'Europe, dutems de M, de Turenne & de Montecuculli , linfanterie étoit ran- gée en bataille fur huut & fur fix rangs. Ce dernier général dit dans fes mémoires, qu'il faut que l’infanterie {oit à fix de hauteur , afin qu’elle puifle faire un feu continuel dans loccafñon. S°:/ y avoit moins de fix rangs, dit cet auteur célebre, Le premier ne pourroit pas avoir recharge quand le dernier auroit tiré ; ainfe le feu ne feroit pas continuel : & fi au contraire il y en avoit plus de fx, le premier feroit oblige de perdre du tems , 6 d'attendre que les derniers euffent éiré pour recommencer. Sie feu continuel par rangs avoit été la feule raifon qui eût fait mettre l'infanterie à fix de hauteur du tems de Montecuculli, on auroit dû l’arranger fur trois depuis la fupprefion des moufquets (voyez MoOUsQUET ), c’eft-à-dire depuis environ 17043 çar l’expérience a prouvé qu’on peut aifément tirer deux eoups.de fufils contre un de moufquet. C’eft pourquoi trois rangs de foldats atmés de fit fils, feront en état de tirer autant de coups dans le même tems, que fix rangs de même nombre d’hom- mes armés de moufquets , c’eft-à-dire de faite égale- ment un feu continuel par rangs. Mais ce petit nom- bre de rangs n'a pas paru fufhfant pour donner de la folidité au bataillon. L’ufage plûtôt que le raïfon- nement, femble avoir décidé depuis long temsrque linfanterie doit être en bataille fur quatre rangs. Ce- pendant comme il y a des occafons où une plus grande profondeur eft néceflaire , & que c’eft au général à en juger, il paroîtroit aflez naturel de s’en rapporter à lui pour la fixation du nombre de rangs fur lequel il veut combattre, & de n’avoir un ordre général que pour mettre les troupes uniformément en bataille dans toutes les occafions ordinaires. Cette obfervation paroït d'autant mieux fondée, que la plüpart des évolutions dont on va donner le détail, confiftent à augmenter & à dimimirer le front & la profondeur du bataillon ; ce qui fuppofe que le nombre des rangs fur lefquels on met une troupe en bataille n’eft jamais fixé invariablement. On peut répondre à cela , que l’objet de ces évo- lutions eft principalement de faire marcher les trou- pes dans toutes fortes de paflages & de défilés, & pour cet effet de réduire leur front ordinaire à la largeur du lieu où elles doivent pañler ; ce qui ne peut fe faire qu'en augmentant le nombre des rangs de la troupe, &c. Mais il y a un grand nombre d’au- tres circonftances à la guerre, où la profondeur du bataillon doit varier ; comme, par exemple , dans l'attaque des poftes, des retranchemens ; lorfqu’il s’agit de rompre une troupe, de forcer un pañlage, Gc, Dans ces occañons, 1l eft clair que les troupes doivent avoir plus de profondeur que lorfqu’elles fe bornent à fe fufiller ou à fe pafler réciproquement pat les armes ; car dans ce dermier cas leur trop de hauteur peut nuire, & nuit effe@ivement à la célé- rité & à la füreré de leur feu. Voyez EMBOÎTE- MENT. Il fuit de ces différentes obfervations, que peut- être feroit-il avantageux d’avoir deux ordres de ba- taille différens ; favoir, l’un pour paroître dans les Tome VI, E V O 17i tevies 8 pour tirer, & l'autre pourchargerla bäyons nette au bout du fufil, L 4 Dans le premier, il feroit fufifant de mettre les troupes à trois de hauteur conformément à-l’inftru ion du r4Mai1754, qui potte : guésomtes-les fois que l'infanterie prendra les armes, pour quelqu'occaftort que ce Joit ; elle foir formée fur ÉTOLS TATLDS, pl 0 Dans lé fecond ordre on pourroit, en fuiÿant 1x même inftruétion , mettre les troupes fur fxwtangs ainf qu’elle le prefcrit lorfqul s’agit de les exercer aux évolutions, | Praha v. L'ordre de bataille fur fix rangs, qui étoit en u{a= ge du tems de M. de Turenne, comme nous l'avons déjà obfervé , eft fans doute meilleur pour\charger l’ennemi que celui de quatre-ranos. Cependant,comz me ce dermer eft le plus généralement établi par lu fage, & qu'il tient d’ailleuts. une efpece de milieu entre les deux ordres de: trois & de fix rangs dont on vient de. parler, ce fera celui dont on fe fervira dans cet article, où l’on trouvera d’ailleurs les re- gles nécefläites pour le changer comme on voudra, c'eff-à-dire pour mettre une troupe qui eft en batail- le fur Quatre rangs, fur un plus grand ou un plus pe: fit nombre de rangs, hioboneads hante: Après ces, notions générales fur arrangement. & la formation des troupes, nous allons. entrer dans le détail des principales mosions ou évolutions du baz taillon : mais nous obferverons auparavant qw’elles peuvent être confidérées dertrois manieres diffé- rentes. | an Abe n 1°, En mouvemèns qui s’exécutent homme par homme, sn 7 2°. En mouvemens.qui fe font pat tout Le batail lon enfemble. | a Et 3°.:en.mouyemens qu, s'exécutent par diffé rentes parties ou divifions du bataillon, 1 Les mouvemens qui s’exécutent homme par hom- me, font ceux que les hommes qui compofent Le. ba- taillon font chacun en particulier , indépendamment les uns des autres. Ils fe meuvent néanmoins tous. enfemble , de la même maniere & dans le même tems ; mais chachn exécute fon mouvement en en- tier, fans confidérer celuide fon camarade que pour le faire uniformément avec lui. FA 3 _ Les mouvemens qui fe font par tout, le bataillon: enfemble , font ceux dans lefquels on.le.confidere comme un corps folide oujun feul tout, dont toutes les parties fe meuvent par un mouvement commun. Chaque homme n’agit alors que comme partie du tout, en fuivant le mouvement ou la détermination. générale de tout le bataillon, ù Enfin les mouvemens par parties ou par divifons,' font ceux dans lefquels chaque divifion fe meut avec les hommes qui la compofent , comme dans lesmou _ vemens de [a troupe entiere ; & cela fans confidérer. le mouvement particulier des autres parties que pour agir uniformément avec elles lorfqu’elles fe meuvent toutes du même fens ou de là même maniere. ARTICLE IL Du mouvement d'homme par homme, Le mouvement d'homme par homme a pour objet de faire trouver la face du bataillon de tel côté que l’on veut, fans lui faire changer de terrein, ce qui fert à le faire mar cher vers la droite ou vers la gauche, ou en-arriere, Ce mouvement peut s’exécuter également , les files & les rangs étant ferrés ou ouverts. , _ Nous fuppoferons fur les Planches , que les files & les rangs font ferrés ; & afin que les figures occupent moins d’efpace, nous prendrons une partie du ba- taillon pour la répréfentation du bataillon entier. Soit donc ( fig. 1. PI. I. des évolutions) le bataillon 4BCD, ou une defes parties quelconque, rangée en bataille fur quatre rangs ; les foldats font Marques. Y 172 EVO par de gros ponts noirs, qui défignent le centre de l’efpace qu'ils occupent : comme on fuppofe qu'ils fe touchent, il ne faudroit pas d'intervalle entre eux ; maïs alors les figures féroient trop confufes. On a tiré fur chacun de cés points une petite ligne droite, pour exprimer les armes du foldat & le côté où il fait face, qu’on a fuppofé être le haut dé la planche. Si lon veutque cette troupe fafle face du côté du flanc droit BC, on fait le commandement à droite ; alors tous les hommes de la troupe tournent fur eux- mêmes, jufqu'à ce qu'ils ayent en face le terrein op- poié au flanc droit B C de la troupe, fig. 2. Pour faire ce mouvement, les foldats s'appuient furiune feule jambe, & tournent fur un talon comme fur un pivot: On pourroiït tourner également {ur lu- ne ou l’autre jambe; mais l’ufage a décidé pour la gauche: ainf c’eft fur cette jambe que tournent tous Îles hommes du bataillon. Ils doivent commencer & achever ce mouvement fans interruption , & dans le même tems le faire brufquement, fans que les armes & les bras changent de fituation. | Suivant linftruétion du 14 Mai 1754, ïl doit y avoir un intervalle de deux pouces entre les deux talons de chaque foldat. . . Il eft évident que fi l’on fait exécuter quatre fois de fuite ce même mouvement, & toùjours de même fens, que le quatrieme remettra le bataillon dans fa premiere potion ; & que tous les hommes qui le compofent, auront chacun décrit la circonférence d’un cercle, dont chaque mouvement particulier eft le quart. Ce mouvement s’appelloit autrefois par cette raïifon, quart de tour à droite ou à gauche ; à- préfent on le nomme fimplement 4-droire on a-gau- che. Il eft d’ufage lorfqu’on fait faire a-droite à ‘une troupe , de lui faire exécuter les quatre parties de ce mouvement : ainfi au premier commandement à droite , la troupe fait face au térrein du flanc droit ; au fecond,, elle fait face à la queue du bataillon; au troïfieme, au terrein du flanc gauche; & au quatrie- me , elle fe remet dans fa premiere pofition. La deuxieme figure de la I. Planche repréfente la troupe qui a fait un 4-droite, La rroifieme figure de la méme Planche, la même troupe qui a fait deux 4-droite, La quatrieme , la troupe qui en a fait trois : le qua- trieme 4-droire, qui la remet dans fa premiere pofi- tion, peut être repréfenté par la premiere figure, ” Il eft évident que les mêmes mouvemens que l’on vient d'expliquer pour faire tourner le bataillon vers fa droite, peuvent s’exécuter également en tournant vers la gauche. | Pour cet effet, la troupe étant en bataille (2. 1. PI. I.) ,le commandant dit 4 gauche ; alors chaque foldat tourne à gauche, comme il tournoit à droite dans le mouvement précédent : ce qui peut être re- préfenté par la guatrieme figure, &xc. REMARQUES. I. Ayant expliqué les quatre mouvemens à droi- te, il eft aifé, fans le fecours de nouvelles figures, de concevoir la maniere dont les mêmes mouve- mens s’exécutent à gauche ; c’eft pourquoi on a crû qu’il étoit imutile de les multiplier fans nécefité à cette occafion. On fe contentera de même dans la fuite de ne donner des figures que pour les mouve- mens d’un feul côté, c’eft-à-dire pour la droite ou pour la gauche. . IL. Le tour entierque l’on exécute par quatre a-droi- & , comme on vient de l’expliquer, peut fe faire en deux fois, en faifant faire un demi-tour par un feul mouvement à tous les foldats du bataillon. Pour cet effet, on commande äu bataillon de faire demi-tour à droite (c’eft ainfi qu'on s'exprime pour faire décrire une demi-circonférence à tous les fol- dats de la troupe ou du bataillon) ; alors en fe tour nant vers la droite, & faifant le demi-tour d’un feul mouvement fur le talon gauche, ils font face au côté oppofé au front du bataillon. Un fecond demi - toux exécuté de même, les remet dans leur premiere po- fition. Le demi-tour à gauche s'exécute également, en faifant tourner les hommes de la troupe vers la sau- che, au lieu de la droite, L’inftruétion du 14 Mai 1754 ordonne d'exécuter ce mouvement en trois tems : au premier, le foldat doit porter le pié droît derriere Le gauche, les deux talons à quatre pouces de diftance l’un de Pautre : au deuxieme , le foldat doit tourner fur les deux ta- lons, jufqu’à ce qu’il fafle face du côté oppofé; & au troifieme , reporter le pié droit à côté du gauche. III. Lorfqu'une troupe a fait un mouvement à droi- te on à gauche, & qu’on veut qu’elle reprenne fa premiere pofition, on lui dit remertey vous ; ce que là troupe exécute en faifant un mouvement oppofé à celui qu’elle à d’abord fait, ou en revenant fur fes pas de la même maniere. . L Ainfi la troupe ayant d’abord fait, par exemple, un demi-tour à droite, elle fe remettra en faifant un demi-tour à gauche ;. & fi elle en avoit fait un à gauche, elle fe remettroit en en faifant un autre à droite. | ds. Si elle a fait un a-droite où un 4-gauche , elle fe re- mettra de même, par un autre quart de tour oppofé au premier, c’eft-à-dire à gauche ou à droité, IV. Onne fait point faire trois quarts de tour par un feul commandement ; parce que les hommes de la troupe auroient trop de peine à l’exécuter de fuite êt avec exactitude. V. Ce mouvement des 4-droite & des 4-gauche s’enfeione ordinairement dans l’exercice ou Le mat nement des armes, auquel il paroit appartenir par- ticulierement ; parce qu'il n’eft pas poffble de faire. faire l’exercice fans le fecours de cette évolurior, attendu qu’elle apprend à fe tourner de tous les fens pour charger le fufil, le manier, & le préfenter: mais fon ufage indifpenfable dans l’exercice, n’em- pêche point qu’elle ne foit comprife dans les diffé- rentes motions du bataillon, dont elle eft la pre= miere & la plus fimple. On a crû par cette raïfon qu’elle devoit précéder ici les autres , d’autant plus que l’on ne parle point du maniement des armes dans cet article. ARTICLE III, De la maniere de ferrer le bataillon, On ferre le ba- taillon en avançant les files & les rangs les uns fur les autres, & on l’ouvre en les éloignant pour lui donner plus de front ou plus de profondeur. Il faut fuppoler que le bataillon dont on veut ferrer les rangs , les a d'abord affez éloignés les uns des autres, pour qu'ils puifent s’approcher davan- tage : car il eft évident que s’ils étoient à trois piés de diftance, c’eft-à-dire ferrés à la pointe de l'épée, le mouvement dont il s’agit feroit impoññble. Il faut auffñi pour ferrer les files , qu’elles foient aflez diftantes les unes des autres pour qu'on puifle les approcher davantage, c’eft-à-dire qu’elles occu- pent un efpace de plus de deux piés dans le rang. On peut ferrer le bataillon de plufieurs manieres : 19:47 $ en avant. 51e Ê par rangs. < en arriere. a" ( fur {on centre, Lou fur la droite. 5°. S parles. < fur la gauche. 6°. furde centre. Pour ferrer le bataillon par rangs en avant, of ordonnera au premier de ne pas bouger; & aux au- tres de s’approcher de cetang, jufqu’à une diffance déterminée quelconque. Le fecond rang doit marcher très-lentement, afin que les autres ferrent infenfiblement , & que tout le reflerrement des rangs foit fait dans le même tems, La ceriquieme fioure repréfente une partie du bataïl- lon en bataille à rangs ouverts, & qui n’a point fait de mouvement. La figure fixieme fait voir ce même bataillon dont les quatre derniers rangs ont ferré fur le premuer; de maniereique le fecond s'étant approché du pre- mier, le troifhieme a pris la place du tecond ; & que le quatrieme s'étant approché du troifieme , le cin- quieme a pris la place qu’occupoit le troifieme rang. Ileft clair que par ce mouvement, le bataillon a diminué de moitié l’efpace qu'il occupoit en hau- teur ou en profondeur. _ Dans cette figure, les points noirs repréfentent les hommes après le refferrement du bataillon; & les zéros, Les places qu'occupoient ceux du quatrieme & cinquieme rang, lefquelles demeurent vuides par le ferrement des rangs de la troupe fur le premier. On fe fervira de ces deux fortes de points dans les figures fuivantes, &c on les employera dans le même fens, | REMARQUES. I. Il eft aflez d'ufage dans les différens mouve- mens que l’on fait exécuter aux troupes, pour les exercer aux évolurions , & lorfque la manœuvre ou Vévolurion qu'on veut leur faire exécuter enfuite, ne demande pas une poftion ouun arrangement diffé- ‘rent de celui que le bataillon avoit d’abord, de le faire remettre après chaque mouvement dans fa pre- miere pofition : ainfi après avoir fait ferrer les rangs en avant, on les fait ouvrir en arriere, pour les re- mettre comme ils étoient d’abord. Pour cet effet on ordonne au premier de ne point bouger ; on fait faire aux autres demi-tour à droite , & on les fait marcher chacun en avant, jufqu’à ce qu'ils occupent le même terrein fur lequel ils avoient d’abord été placés. On fait faire enfuite à ces rangs denu -tour à gauche , pour faire face du même côté que le premier rang : & la troupe eft ainfi remife dans fa premiere pofñtion. Dans ce mouvement, les rangs qui vont en avant pour fe remettre marchent d’un pas égal : mais Le fe- cond ne fe met en mouvement, que lorfque le pre- mier s’eft avancé de l'intervalle qui doit être entre les rangs. Le troifieme, que quand le fecond s’eft avancé de la même quantité ; & ainfi du quatrieme, Il. On peut faire ferrer les rangs en avant en mar- chant, Pour cet effet le premier rang marche très- doucement, ou 1l fait des pas d’environ un pié ; les autres rangs vont plus vite, ou ils font de plus grands pas, jufqu'à ce qu'ils foient entierement {errés les uns fur les autres. Pour ferrer le bataillon par rangs en arriete, on ordonne au dernier rang 4B (fig. 7.) de ne pas bouger, & aux quatre autres de faire demi-tour à droite ; ce que les lignes qui repréfentent les armes ou le devant des rangs font voir exécuté dans la f- gure. On fait enfuite ferrer ces rangs fur le dernier AB, de même maniere que dans le mouvement précé- dent: ce qui étant fait (fg. 4.), on ordonne aux* quatre premmers rangs de faire demi-tour à gauche, Pour faire face au terreiñ oppofé au front du batail- lon. Ce qui eft exécuté, fig. 9. | Par ce mouvement, ce bataillon laifle vers le front une étendue vuide, égale à celle qu'il occupe aprés l'avoir exécuté, & il diminue l’efpace qu'il Occupoit en profondeur de la moitié, comme dans Le mouvement précédent. + Pour faire remettre le bataillon , on commandera E V O 173 au derniér tang de ne point bouger, & l’on ordonne Ta aux autres de marcher en-avant, jufqu'à ce qu'ils ayent répris chacun leut premiere pofition. Pour ferrer le bataillon par rangs fur {on centre, On le fuppofera fur cinq rangs en bataïllé, ou fur un autre nombre quelconque impair, On ordonnera au rang du milieu 7 2 (fig. 10.) de ne pas bouger ; on fera faire demi-tour à droite au premier & deuxieme ranp ; on le fera enfuite mar- Chér, ainfi FE lé quatrieme & cinquieme rangs, pour ferrer fur le troifieme 4 B: ce qui étant fait’, le premier 8 deuxieme rangs feront demi - tour à gauche, pour faire face au même côté que le refle du bataillon, REMARQUES. TJ, Il eff aifé de ferrer le bataillon pat la même méthode, fur tel rang que l’on veut ; il fuit d’'ordon- ner au rang fur lequel on veut ferrer, de ne pas bou ger, & de faire avancer fur lui les autres, comme on vient de lexécuter. | Il. Pour remettre le bataillon dans fon premier Ordre, ou fa premiere poftion ; on ordoñneta aux deux derniers rangs de faire demi-tour à droite, en- fuite de marcher, ainf qu'aux deux autres dela t6: té, pour reprendre le terrein qu'ils occupoient d’a- bord, Lorfqueles deux derniers rangs y feront par- venus, 1ls feront demi-tour à gauche, & la troupe fera alors dans fon premier état. Pour ferrer le bataillon par files, c’eft-à-dire pour diminuer l’étendue de fon front, il faut, comme on l’a déjà remarqué , que les files foient aflez efpacées les unes des autres , pour qu’elles puiffent fe rappro- cher ; car il eft évident que fi elles font f proches, que les foldats nayent que la liberté du coude, é*eft: a-dire fi chaque file n’occupe qu'environ deux piés, le reflerrement ne feroit pas pofible. Nous fuppofe- rons dans les exemples fuivans, qu’elles ont quatre piés de largeur, y compris l’épaifleur dés hommes de la file ; c’eft environ deux piés d'intervalle de lune à l’autre. Les fuppoñtions ‘différentes qu'on pourra faire à cet égard, ne changeront rien à l’e- xécution des mouvemens que l’on va expliquer. Nous avons dit qu’on ferre le bataillon par files fur la droite, fur la gauche , & fur le centre : ces différens mouvemens n’ont, pour ainfi dire, befoin ni d'explication, ni de figures, après ce qu’on a vù ci-devant fur la maniere de ferrer les rangs du ba- taillon. | | … En effet, il n’y a qu'à regarder les filés comme dés rangs, & faire enfuite fur ces files confidérées comme rangs, les mêmes opérations par lefquelies on a ferré les rangs. Ainfi pour ferrer le bataillon 4BCD (fig. 11.) fur la file B C'de la droite , il faut commander à cette file de ne pas bouger ; à toutes les autres de faire à- droite &c de s’approcher, ou fe ferrer enfuite fur £ €, La figure 12. fait voir ce mouvement exécuté. On ordonne après cela à toutes les files qui ont marché, de faire à-gauche, pour faire face du même côté qué la file BC; & l’on a le bataillon ferré fur cette file , réduit à la moitié de fon front. Fig. 13, On ferrera le bataillon de la même maniere fur la file de la gauche. Pour le ferrer fur la file du centre EF (fe. 14), on ordonnera à cette file de ne pas bouger, aux f- les de la droite de faire à-gauche fur le talon droit, & à celles de la gauche de faire à-droite fur le talon gauche ; après quoi on commandera aux files de la droite & de la gauche, de fe ferrer fur la file du cen- tre £ F; les files de la droite partiront du pié droit, & celles de la gauche du pié gauche : elles marche- ront le pas ordinaire fur celles du centre, & elles s’arrêteront fucceflivement à mefure qu'elles join- dront celle qui les précede, 174 ESVrO On fera enfuite remettre les files de la droite & de la gauche dans la même poñtion que celle du cen- tre, enfaifant faire vx a-droite fur le talon droit, aux files de la droite , & un 4-gauche fur Le talon gauche, aux files de la gauche ; alors tout le bataillon fera fa- ce du même côté 48, & il aura diminué écalement fon. étendue vers la droite & la gauche, REMARQUES. I. Il eft évident qu’on ferrera de la même ma- riere le bataillon fur telle autre file qu’on voudra. II. On peut ferrer le bataillon de pié ferme fur telle de fes files que l’on veut, comme on vient de l’expliquer ; mais on peut auffi Le ferrer de mé- mie en marchant ; alors les files s’approchent en mar- chant autant qu'il eft poffible, de celle fur laquelle elles doivent fe ferrer. MA ReTATGLE SQL NE Des différentes manieres d'ouvrir le bataillon. Les mouvemens néceflaires pour ouvrir le bataillon font abfolument Les mêmes que ceux qui fervent à le fer- rer ; mais ils s’exécutent en fens contraire, Ainfi on peut ouvrir le bataillon: 1°. ( ch-avant, 2°, L par rangs. < en-arriere, 3 en-avant & en-arrieres 4°. vers la droite. 5°. L par files, Z vers la gauche, 6°. vers la droite & la gauche. Pour ouvrir le bataillon 4 BCD (fig. 15.) par rangs en-avant, on ordonne au dernier rang DC de ne point bouger ; aux autres de marcher en- avant. On obferye de ne faire marcher le fecond rang, qu'après que le premier eft avancé d’une diffance convenable ; le troifieme, qu'après que le deuxieme a marché un peu en-avant; & amf des autres rangs. Lorfque le premier rang eft aufi avancé qu'on le veut, & qu'ils fe trouvent à-peu-près également efpacés on diftans les uns des autres , le comman- dant du bataillon leur ordonne de s'arrêter, en di- fant halte, | La figure fait voir ce mouvement achevé; le pre- mier rang 4 B C étant parvenu en FG, le dernier n’a point bougé. Les zéros marquent la place que le fecond &r le quatrieme rangs Occupoient avant de marcher en- avant. , On fuppofe dans {a figure que l’on a double l'in- tervalle des rangs : ainfi le premier 4 B s’eft avan- cé d’un intervalle 4 F', égal à la profondeur du ba- taillon ; Le fecond s’eft avancé du premier à la dif- tance d’un intervalle, double de celui qui étoit d’a- bord entre les rangs ; le troifieme eft venu occuper la place 4 B du premier; & le quatrieme, celle du troifieme ; le cinquieme D C n’a pas bougé. On ouvrira de la même maniere le bataillon par rangs en-arriere. On ordonnera au premier rang de ne pas bouger ; où fera faire demi-tour à droite aux autres rangs ; & l’on commandera enfuite au dernier rang de mar- cher devant iui autant qu’on le jugera néceffaire; & aux autres rangs de marcher à {a fuite comme dans le mouvement, pour ouvrir les rangs en-avant. Lorfqu’on les trouvera affez avancés, on leur or- donnera de s’arrèter & de faire demi-tour à gauche, pour faire face du même côté que le premier rang. Pour ouvrir le bataillon 4 BCD (figure 16.) en- avant &c en-arriere, on ordonnera au rang du cen- tre F G de ne point bouger ; & à ceux de derriere, de faire demi-tour à droite. On fera enfuite marcher les premiers & derniers rangs en-avant, dans le mê- Me tems , autant qu'on le jugera néceflaire; on les fera enfiute arrêter en difant ha/se. On commandera aux derniers rangs de faire demi-tour à gauche: alors le bataillon 4 CB D occupera l’efpace HILK, c’eft-à-dire qu'il aura augmenté en-avant &c en-ar+ riere l’efpace qu'il occupoit d’abord. Pour ouvrir les bataillons par files, il faut revar- der les rangs comme des files, en faifant faire à droi- te ou à gauche aux files, fuivant les mouvemens qu’elles doivent faire en-avant ou en-arriere ; & fai fant enfuite tout ce quia été pratiqué ci-devant pour ouvrir les rangs du bataillon; on ouvrira ésalement les files. i Ainfi pour ouvrir le bataillon Æ (fig. 17.) par f- les vers la droite, on ordonnera à la ile 4 B de la gauche de ne pas bouger, &c aux autres de faire à- droite. On les fera enfuite marcher en-avant ; ob- fervant que la feconde ne fe mette en marche, que lorfqune la premiere aura fait quelques pas en-avant. La troifieme de même, après la deuxieme ; ainf de fuite. Lorfque la file de la droite fera aflez avancée, on ordonnera à toutes les files de s'arrêter, ou de faire halte; on fera faire à gauche , furle talon droit, à toutes les files, excepté la premiere 48 qui r’a pas bougé ; & le bataillon fera face alors du même côté AC. : On ouvrira de la même maniete le bataillon par files vers la gauche, & vers la droite & la gauche em même tems, en ordonnant à la file du centre de ne pas bouger, &c. | Il eft évident que par ce mouvèment on augmen- te Le front du bataillon, de la même maniere quepar” celui de l’article précédent, on augmente fa profon- deur : c’eft pourquoi fi l’on veut faire écarter les f= les., de maniere que leur intervalle foit double de celui qu’elles ont otdinairement quand elles font fer- rées , 1l faut que la file de la droite, f l’on ouvre le bataillon de ce côté , marche devant elle d’un efpacé égal à celui du front de la troupe; & quelles autres qui la fuivent reglent leurs pas, de mamere qu’elles laiffent infenfiblement entre elles un intervalle dou- ble de celui qu’elles avoient d’abord. Si l’on vouloit que l'intervalle des files devint tri- ple ou quadruple , +. il faudroit que la file du flanc du bataillon, du côté qu’on veut louvrir , s’avançät d’un efpace triple ou quadruple, &c. du front qu'ik avoit avant ce mouvement, Lorfqu’on veut doubler l'intervalle des files, ow au lieu de deux petits pas d’un pié &c demi qu’elles occupent étant ferrées, leur en donner un de quatre, le foldat qui fuit la premiere file quimarche enavant fur la droite ou la gauche du bataillon, commence à marcher au troïfieme pas de la file qui le précede : au cinquieme, lorfque l'intervalle des files doit être triple, 6e. & cela afin que toutes les files marchent enfemble , & que le mouvement foit plus prompte- ment exécuté. REMARQUE. Dans les différens mouvemens exécutés dans les articles ptécédens, on.a toûjours obfervé de faire marcher les foldats en avant, & non pas de côté, ou par pas obliques, afin de rendre ces mouvemens plus fimples & plus réguliers. On fe difpenfe néanmoins ‘quelquefois de cette fimplicité de mouvement , qui n’eft pas , à la vérité, d’une néceflité abfolue , mais qu'il eft bon de conferver pour accoñtumer les trou- pes à exécuter avec grace & précifion les com- mandemens qu’on leur fait pour changer leur ordre de bataille ou leur premiere formation. Cette mé- thode eft d’ailleurs très-ancienne , puifqu’elle étoit obfervée dans les mouvemens de la phalange des. Grecs. E V O ARTICLE V. De la maniere de doubler les rangs & Les files d'une troupe ou d’un bataillon, & de les dédoubler.. Doubler les rangs d’une troupe , ce n’eft pas lui en donner huit lorfqu’elle n’en a que quatre ; 8c dou- bler des files, ce n’eft pas non plus fi elles font , par exemple , au nombre de 120 en former 240 ; mais doubler les rangs , c’eft doubler le nombre d'hommes de chaque rang ; & doubler les files, c’eit également doubler le nombre d'hommes dont elles {ont com- pofées. : Aïn fi l’on a un bataillon dans lequel les rangs {oient de 120 hommes ; doubler les rangs de ce ba- taillon , c’eft les mettre à 240 ; & doubler les files, fi elles font à quatrerhommes , c’eft les mettre à huit. Il eft évident qu’en doublant les rangs , on aug- mente le front du bataillon de moitié , mais qu’on diminue aufñ fes files de moitié, & qu’en doublant les files, on diminue le front du bataillon de moitié, mais qu'on augmente fa hauteur de moitié : car com- me le bataillon eft compofé de deux dimenfions , fa- voir, de fon étendue de front, & de fa hauteur ou profondeur , & que dans les différens mouvemens , dont nous venons de parler , on n’y ajoûte pas de nouveaux foldats ; il eft clair qu’on ne peut augmen- ter une dimenfon qu'aux dépens de l’autre, c’eft-à- dire Le front que par la hauteur , &r celle-ci par le front. Comme ces manœuvres d'augmenter & de dimi- nuer les rangs & les files du bataillon fe font plus commodément , & par cette raïfon plus ordinaire- ment en les augmentant ou diminuant de la moitié, que fi on les augmentoit ou diminuoit de toute au- tre partie, elles ont été appellées doublemens & dé- doublemens : de-là vient qu’on les énonce par ces ex- preffions, doubler & dédoubler les rangs , doubler &c dédoubler Les files. ; Ces différentes évolutions ont pour objet d’éten- dre ou de reflerrer le bataillon , pour augmenter la force de l’une ou de l’autre de fes dimenfons , fui- vant leterrein qu’il doit occuper , & la pofition de l'ennemi quil doit combattre. On va donner la ma- niere de les exécuter. On peut doubler les rangs en avant & enarriere, & les différentes manœuvres de faire ce mouve- ment, peuvent ; fuivant M. Bottée , fe réduire à ‘cinq principales. 1°, Par rangs. 2°, Par demi-files. 3°. Par quart de files, 4°. Sur les ailes. $°, En-dedans ou dans le centre. Par le premier doublement , on double l’interval- le des rangs en doublant leur étendue. Par le deuxieme, on conferve le même intervalle des rangs en les doublant. Par le troifieme, on partage la troupe en deux ‘parties, lorfqu’elle a beaucoup de hauteur, enforte qu'il y a entre ces deux parties un intervalle capa- ble de contenir plufieurs rangs. #1) Par le quatrieme ; on ouvre les files lorfqu'elles font trop ferrées , de maniere qu’on puifle pafler dans les intervalles, & l’on met les chefs demi-files au premier rang. Enfin le cinquieme, c’eft lorfque les files {ont trop ferrées , & qu'on veut que le premier rang occupe les aïles ou les flancs du bataillon. PREMIER PROBLÈME. Doubler les rangs à droite en-avant. On commandera au premier & autroifeme rangs de ne point bouger, & au deuxieme & au dernier E VO 175 de marcher enfemble ; favoir , le fecond , pour en- trer dans les intervalles des hommés du premier ,,& le quatrième , pour entret de même dans le troi- fieme, | ITA g, | Pour entrer ainf les-uns.dans les autres, chaque foldat du fecond rang va fe placer à la droite-de fon chef de file dans le premier , de même chaque foldat du quatrieme à la droite du troïfiemeirang quieft dans la même file. pu. Si le doublement fe faifoit à gauche, chaque fol dat du deuxieme 8 quatrieme rang felplaceroit.à la gauche du foldat qui eftivis-à-vis.-de lui. dans Le rang qui doit être double. | Si latroupe étoit fur un-plus sranidinombre de rangs que quatre, par exemple fur fix. il faudroit ordonner alors au premier, au troifieme & au cin- quieme de ne point bouger; ou ce qui eft plus com mode, ordonner , comme on le fait dans l’ufage or- dinaire , aux rangs impairs de ne point bouger, & aux autres , c’eft-à-dire aux rangs pairs , de dou- bler, Éc. F | On double plus communément les rangs. à gau- che qu’à droite , mais ce mouvement n’a pas plus de difficulté d’un côtéque de l’autre. : .. | Soit la troupe ou le bataillon 4 BCD (fig.18.), dont on veut doubler les rangs à droite, on com- mandera donc au premier 4B, &autroifieme£F, Où aux rangs impairs, de ne point bouger., & aux deux autres , de doubler ; favoir, le fecond G H, dans le premier 4B , & le dernier D C, dans le troifieme £ F ; alors les foldats de G Æ iront fe met- tre chacun à la droite de leur chef de file dans le rang 4 B , pendant que ceux de D C feront de mê- me dans E F. Pour faire remettre cette troupe dans fa premiere pofition, on dira : rangs qui avez doublé, remettez- vous ; alors les rangs qui ont doublé , font demi- tour à droite fut le talon droit , lorfque le double. ment a été fait à droite, comme on le fuppofe ict., & à gauche fur le talon gauche, lorfqu'il a été fait à gauche ; & au mot de arche , les foldats des rangs qui ont doublé, partant du pié gauche, font autant de pas pour reprendre les places qu'ils occupoient d’abord, qu'ils en ont fait pour joindre les rangs qu'ils ont doublés. Lorfqu'ils y font parvenus, on leur ordonne de s’arrêter,&c enfuite de faire face en tête par un demi. tour à droite fur le pié droit, ou par un demi-tour à gauche fur le talon gauche. On doublera de la inême maniere les rangs en ar- riere ; & pour cet effet, on fera entrer le troifieme rang dans le quatriéme , & le premier dans le {e- cond. REMARQUES. I. Plufieurs officiers font remettre par un À-droite ou par un à-gauche , les rangs qui ont donblé ; & cela, parce que les foldats de ces rangs n'ont pas ordinairement aflez de place dans les ranos qu'ils ont doublés , pour faire commodément le demi-tour à droite owà gauche : d’ailleurs la marche en devient : un peu plus aifée , le foldat fe préfentant alors plus direétement à la ligne oblique qu’il doit décrire pour fe remettre, & que de plus, 1l ne s’agit plus , lor{- qu'il eft parvenu à fon premier pofte , que de faire un à-gauche fur le talon gauche , pour faire feu à . fon chef de file, IT, Il eft évident que pour doubler les rangs , üL faut qu'ils foient en nombre pair dans le bataillon ; c'eft pourquoi s’il devient en nombre impair, com me, par exemple , cinq ou fept, on fupprimeroit le dernier rang, & l’on en formeroit des files À la droi. te ou à la gauche du bataillon, II PROBLÈME. . Doubler Les rangs par demi-files à droite en- avant. Soit Le bataillon 4 BCD (fig. 19. ), rangé à l’or- dinaire {ur quatre rangs, on ordonnera aux deux premiers 4 B, E F,de ne pas bouger , & l’on fera aux dutres ce commandement : & droite par chefs de demi-files , doublez vos rangs \en-avant ; alors les fol- dats du troifieme rang G A, qui eft formé ou com- polé des chefs de demi-files , ayanceront pour fe met- tte-chacun à la droite de leurs chefs de files dans le premier rang; ceux du quatrieme Le fuivront, &c fe placeront derriere eux dans le fecond rang. Pour les faire remettre , on: ordonnera aux rangs qui ont doublé ,-de faire demi-tour à droite ou à gauche , &alots les foldats du quatrieme rang for- tiront du fecond pour aller reprendre leur premier pofté ; ceux du troifieme les fuivront pour aller auffi reprendre leur premier terrein ; lortqu'ls y fe- ront parvenus les uns &les autres, on leur fera faire face en tête par un demi-tour à droite fur le talon droit. Voyez fur ce mouvement la premiere remar- que du problème précédent , fur la maniere de faire remettre les rangs qui ont doublé ; elle peut égale- ment s'appliquer 1c1. On doublera de la même maniere Îles rangs par demi-files à gauche , & par demi-files en-arriere ; à droite où à gauche. 176 III PROBLÈME. Doubler les rangs par quart de files en-avant. Si la troupe ou bataillon eft rangé fur quatre rangs, ce mouvement eft abfolument le même que le pre- mier de cet article : fi on le fuppofe fur un plus rand nombre de rangs, comme , par exemple, fur au , elle fe réduira au précédent. Pour cet effet, on le fuppofera partagé en deux troupes de quatre rangs chacune : la premiere fera compofée des quatre premiers rangs AB, EF, G H, & IL; & la feconde, des quatre derniers KM, NP,RS,&CD,(fg.20.) On doublera les deux premiers rangs AB8&TE F, par demi-files à droite ou à gauche, c’eft-à-dire par les deux rangs G H&I EL, On doublera de même les deux rangs XM & NP par les demi-files qui forment les rangs À S&CD, & l’on aura le bataillon , dont les rangs feront dou- blés par quart de files en-avant. On fera remettre chaque rang dans fa premiere poñition , comme dans le fecond mouvement de cet article. < Il eft évident que ce mouvement s’exécutera en- arriere avec la même facilité qu’en-avant : 1l en fera de même de celui de doubler les rangs fur le centre ou fur les quarts de files du milieu, par quarts de fi- les de la tête &c de la queue , ou bien fur la tête & fur la queue , par quarts de files du milieu, IV. PROBLÈME. Doubler Les rangs en-avant par demi-files fur les ailes. Soit le bataillon ou une partie du bataillon 4B CD (Jig. 21.), rangé fur quatre rangs , & dont on veut doubler les rangs en-avant par demi-files fur , les aîles. | On commandera aux deux premiers rangs 42, EF, de ne point bouger, & aux deux derniers G & DC, de fe ferrer à la pointe de l’épée : on fera faire à droite à chacun de ces demi-rangs de la droi- te, 8 à gauche à chacun de ceux de la gauche : on fera enfuite marcher ces demi-rangs devant eux, jufqw’à ce que les files du centre où du milieu L M & NP, foient à la droite & à la gauche des demi- files du bataillon , .c’eft-à-dire L M à la droite de CF,&NPàcelle de 4F, | On fera faire après cela un à-droiîte 8 un à-saxe che à ces demi-rangs ainfi avancés, & on les fera marcher devant eux jufqu’à ce qu'ils foient dans la direétion des deux rangs 4 B & E F, qui n’ont point bougé, | Un mouvement oppofé à celui qu’on vient de dé- crire ; les fera remettre dans leur premiere pof- tion, Il eft évident qu’on doublera de la même maniere les rangs en-arriere ; car fi l’on fait faire un demi- tour à droite ou à gauche à la troupe, pour qu'elle fafe face à la queue du bataillon, on pourra alors regarder les derniers rangs comme les premiers , & ceux-ci comme les derniers : 1l me s’agit plus après céla que derépeter ou exécuter fur la troupe, ainf tournée , le mouvement qu'on vient d'expliquer. On pourra ainfi doubler, par ce même problème, les rangs.en-avant ou en-arriere par quarts de files. Pour exécuter ce mouvement , la troupe doit être rangée fur huit, douze, feize, 6*c. de hauteur, c’eft-à- dire que le nombre de fes rangs doit être multiple de quatre, ou qu'il puifle fe divifer par quatre : fuppo- {ons le bataillon CD E F( fig. 22.), rangé fur huit de hauteur , on imaginera une ligne droite quelcon- que 4 B , qui le partagera en deux troupes de qua- tre d’hauteur chacune. On regardera chacune de ces troupes ; comme une. troupe dont il faut doubler les rangs par demi- files fur les ailes ; ce qu’on exécutera facilement par le moyen du problème précédent. Il eft évident que ce mouvement ayant été exé- cuté fur chacune des deux parties du bataillon C D E F, dans le même tems ce bataillon aura doublé fes rangs par quarts de files fur les ailes. | La figure rend cela trop fenfble pour s’y arrêter plus long-tems. On doublera également les rangs de cette même troupe par quarts de files de la tête & de la queue. - Pour cet effet, on confidérera encore la troupe où le bataillon 4 BCD ( Ég. 23.), qu’on fuppofe toûjours à huit de hauteur , divifé en deux troupes particulieres de quatre rangs chacune ; on ordonne- ra au quatre rangs du milieu de ne point bouger, & l’on fera doubler les deux premiers rangs de la trou- pe delatête, c’eft-à-dire le premier & le fecond, par demi-files de cette troupe fur les aîles en-arrie- re : on fera également doubler les deux derniers rangs de la feconde troupe én-avant par demi-files fur les aîles ; & lorfque ce mouvement fera exécu- té fur chacune des deux troupes, ce qui doit fe faire dans le même tems, la troupe entiere aura doublé fes files par quarts de files de la tête & de la queue, ce qui eft évident. | Dans la figure les deux premiers demi-rangs de la tête à droite, ont fait à droite pour s’avancer vers la droite ; 8c ceux de la gauche, à gauche pour s’a- vancer aufh de ce côté : les deux derniers demi-rangs de la queue, ont fait auffi chacun le même mouve- ment. | Les lignes ponétuées repréfentent le chemin qu'ils font à droite & à gauche , pour aller occuper les ailes des quatre rangs du milieu. | On doublera encore les files par quarts de files fur les aîles en tête & en queue, en fe fervant de la même méthode ; car fuppofant toùjours la troupe à huit de hauteur , & divifée en deux troupes de qua- tre rangs chacune , le troifiemeëc le quatrieme rang de la premiere partie, doubleront le premier & le deuxieme en-avant , par demi-files fur les ailes ; le cinquieme & le fixieme, c’eft-à - dire les deux pre- miers de la deuxieme troupe , doubleront également les deux derniers en-arriere , par demi-files fur les aîles, Ge, T x e E VO V. PROBLÈME. Doubler les rangs en-dedans par demi-files. Pour exécuter ce mouvement , foit la troupe 4 BCD fig. 24.); on ordonnera aux deux derniers rangs, fi la troupe eft rangée fur quatre rangs, com- me onle fuppofe ici, aux trois derniers , fi elle eft fur fx, &c, de ne point bouger, & aux deux premiers ranps de farre à-droite & à-gauche par demi-rang : chaque demi-rang de la tête marchera enfuite de- vant lui, c’éft-à-dire ceux de la droite, vers la droi- te, ceux de la gauche , vers ce côté , & cela jufqu’à ce que les files du centre de la droite & de la gauche débordent la droite ou la gauche des deux derniers rangs , qui n'ont point bougé de lépaiffeur d’une f- le, On fait faire après cela face en tête par un à-droi- te & un à-gauche aux deux rangs qui ont marché, & l’on fait avancer les deux derniers dans l'inter- Valle qui fe trouve ainñ entre les deux parties des premiers, &c le mouvement eft achevé ( fig. 25.). Ce mouvement s’exécutera en-arriere avec la même facilité ; car faifant faire face à tous lés rangs à la queue du bataillon, par un demi-tour à droite ou à gauche, les deux derniers rangs pourront alors être regardés comme les premiers : c’eft pourquoi ce qu'on vient d'expliquer pour doubler ces rangs en-dedans, s’appliquera également à doubler les deux dérniers rangs de la même maniere. Pour doubler les rangs en-dedans par quarts de files, lorfque la troupe 4 BCD (fg. 26.) eft, par exemple, à huit de hauteur. On la confidérera comme féparée en deux parties, chacune de quatre de hanteur ; & alors on fera pour chaque partie ce qui vient d’être enfeigné ci-devant. La figure 26 repréfente ce mouvement exécuté. On a marqué par des zéros la place qu’occupoient Îes rangs qui ont doublé. On doublera également les rangs du centre en- dedans , par quarts de files de la tête & de la queue. Pour cet effet on fera marcher à droite les quatre demi-rangs du centre de la droite , & à gauche ceux de la gauche, jufqu'à ce que les files du centre de ces Tangs fe trouvent dans l’alignement de la file de la droiteë&de la gauche des rangs dela tête& de la queue: après quoi on fera faire un demi-tour à droite aux deux rangs de la tête; on les fera marcher devant eux, pour aller fe placer dans l'intervalle des deux premiers demi-rangs du centre, où étant parvenus, ils feront face en tête par un demi-tour À gauche, Pendant que ces deux rangs s’avanceront ainf vers le troifieme & le quatrieme, le feptieme & le hui- fieme marcheront devant eux, pour aller fe mettre à la hauteur du cinquieme & du fixieme rang : lorf. de y feront arrivés, le mouvement dont 1l s’agit era exécuté. Voyez la figure 27. On doublera de même les rangs de la tête & de la queue par quarts de files du centre ou du milieu. Pour faire ce mouvement ( fig. 28.) on fera mar- cher fur la droite & fur la gauche chacun des demi- rangs de la droite & de la gauche du premier & du fecond rang ; & de même ceux du feptieme & du hui- tieme, qui marcheront en-avant jufqu’à ce que les files du centre qui les terminent , fe trouvent dans l'alignement des files de la droite & de la gauche des ranos du centre, &c. ÂARTICLE VL Du doublement des files. Tout ce que l’on a dit fur le doublement des rangs, peut s'appliquer au dou- blement des files, & s’exécuter de la même maniere. . Car f l’on fait faire à-droite ou a-gauche aux rangs d'une troupe en-bataille, elle fera face à l’une de fes ailes ; & alors les files pourront, comme on l’a déjà dit, être confidérées comme des rangs, & les rangs comme des files, , Tome VI, EVO 177 C’eft pourquoi on pourra doubler Les files en au tant de manieres qu’on a doublé les rangs ; favoix 1°, Par files À droite & à gauche, 2°. Par files en tête. 3°. Par files en queue, 4°. Par tête & par queue. 5°. En-dedans, Pour doubler les files à droite & à gauche, il faut que les rangs foient aflez ouverts pour qu'un autre rang puifle fe placer dans leur intervalle. Il faut remarquer que ce qu’on appelle ici doubler les files, s’exprimeroit plus exa@ement pat doubler le ombre des rangs, puifqu'on ne fauroit doubler le nombre d'hommes des files, qu’on ne double le nombre des rangs de la troupe où du bataillon; mais comme il ne s’agit pas d'introduire de nou- veaux termes dans les éyo/urions , mais de bien ex pliquer ceux qui fontenufage, nous entendons donc par doubler les files, doubler leur étendue, ou le nom- bre d’hommes dont on les avoit compofées d’abord, Lorfque les rangs font ferrés à la pointe de l'épée, &t qu'on ne veut point les ouvrir, on ne peut dou- bler les files que par l’une des quatre dernieres ma- meres qu’on vient de déterminer, c’eft-à-dire par tête où par queue, par tête 8 par queue, & en-de- dans. Quand ils font ouverts, on peut fe fervir de toutes les différentes manieres du doublement ; mais c’eft tout au plus dans l’exercice, dit M. Bottée : car comme les dernieres font moins fimples que la pre- miere , celle-ci doit être préférée toutes les fois qu’on veut imiter les mouvemens ou les manœuvres qu’on exécute à la guerre. PREMIER PROBLÈME. Un bataillon ou une troupe quelconque étant en bataille, doubler les files à droites Soit la troupe 4BCD (fig. 29.) rangée fur quatre rangs, 1l s’agit de doubler fes files à droite. Si les rangs de cette troupe font ferrés, on les fera Ouvrir par Ce commandement : ouvrez vos rangs, Alors le premier rang marchera en-avant de trois fois l'efpace néceffaire pour l'intervalle d’un rang & fon épaifleur, c’eft-à-dire, dans cet exemple, de 9 piés: le fecond s’avancera feulement de 6, & le troifieme de 3 : le dernier ne bougera pas. | | S1 la troupe étoit rangée fur fix rangs, le premier s’avanceroit de 15 piés, le fecond de 12, le troifieme de 9 , le quatrieme de 6 , le cinquieme de 3, & le fi- xieme ne bougeroit point. l On fuppofe dans la fioure que les rangs font ou- verts, & qu'il ne s’agit plus que de faire doubler les files. On ordonnera pour cet effet aux files qui doivent être doublées, de ne point bouger. Ces files font la premiere à droite , lorfque le doublement fe fait à droïte ; puis la troifieme, la cinquieme, la feptieme, &c. afin que les files qui doivent être doublées, fe trouvent chacune entre celles qui doivent doubler. On commandera enfuite aux files qui doivent dou- bler, de faire à-droite fur Le talon gauche , 8 d’en- trer dans celles qui-n’ont point bougé à leur droite ; ce qui peut fe faire de deux manieres. 1°. Lorfque les chefs de files qui doublent, fe met: tent devant les chefs de files qui font doublés. 2°. Lorfque Les chefs de files qui doublent, fe met- tent derriere ceux des files qu’on veut doubler. Cette derniere méthode paroît préférable à la pre- nuere, parce qu'il eft plus aifé aux chefs de files qui doivent doubler , de fe placer direétement derriere ceux des files qu’on veut doubler, que de fe mettre direétement devant eux : c’eft aufüi celle qui eft d’un ufage plus commun. Mais quelle que foit celle de ces deux manieres qu’on adopte, les files qui doublent doivent toûjours entrer dans celles qu’elles doivent 178 E VO doubler en pattant du piégauche, & en marchant de côté fans tourner le corps. | Ce mouvement peut s’exécuter fans que les files qui doivent doubler faffent à-droite ; fur-tout lorf- que le doublement fe faiten-avant ; car on:peut faire marcher les foldats, pour leur faire joindre les files qu'ils doivent doubler, parun pas oblique ou de cô- té. Mais le mouvement-qu’on leur fait d’abord faire à droite , les met en état de marcher plus facilement, &c par Lan avec plus degrace, pour s’avan- cer dans les files qu'ils doivent doubler. Quoi qu'il en foit, chaque foldat doit obferver d'occuper le milieu de l'intervalle qui fe trouve en- tre Les hommes des files qui font doublées. Lorfque les files qui doublent font ainf.entrées dans celles qu'elles doivent doubler, on les fait arré- ter en difant , halte, Si elles ont fait un à-droite pour s’avancer dans les files voifines, on leur fait faire face en tête par un à-gauche fur le talon gauche. Pour faire reprendre à la troupe fon premier ar- rangement, On ordonne aux files qui ont èté dou- blées de ne point bouger, & l’on fait aux autres çe commandement: 4 gauche, remettez vos files. Alors les files qui ont doublé font à-gauche , & elles vont, en marchant de côté, reprendre la place qu’elles avoient d’abord occupée , &. Il eft évident qu'on doublera les files à gauche de la mêmemaniere, en faifant faire du côté du flanc gauche ce que l’on vient de faire exécuter vers le droit. Lorfque les files font doublées, il eft clair que Pon a diminué le nombre des hommes du front du batail- lon de moîtié : fi après cela elles fe trouvent encore ‘en nombre pair, & qu’on les redouble une feconde fois , elles feront quadruplées, & le front du batail- lon réduit au quart de celui qu'il avoit d’abord ; ce qui eft évident. - SECOND PROBLÈME. Doubler Les files par demi-rangs vers l'aile droite ou gauche. Soit la troupe ou le bataillon 4 BC D (fig. 30.) dont on veut doubler les files par demi-rangs; par exemple, de la gauche 42 vers la droite BC. On commandera aux demi-rangs de la droite de ne pas bouger, 87 à ceux de la gauche de faire à- droite fur le talon gauche, & de marcher enfuite tous enfemble de côté, pour entrer dans les inter- valles des demi-rangs qu’ils doivent doubler ; favoir Île premier dans le milieu de lintervalle du premier & du fecond demi-rang de la droite ; le fecond dans lintervalle des fecond &c troifieme , &c. Lorfqu'ils feront exaétement placés derriere les demi-rangs dont ils doivent doubler les files, on leur fera faire face en tête par un à-gauche. On fera remettre la troupe dans fa premiere pofi- tion, en ordonnant aux demi-rangs qui ont doublé de faire à-gauche ; & de marcher enfute de côté, en faifant face à l’aile gauche, pour aller reprendre leur premier pofte à cette aile : lorfqu'ils y feront parvenus, on leur commandera de faire ha/se ou de s'arrêter, & on leur fera faire face en tête par un à- droite. Il eft évident qu’on doublera les files de la gauche par demi-rangs de la droite, de la même maniere. REMARQUES. Au lieu de faire marcher par le côté les demi- rangs qui doivent doubler les files des autres, ainfi que les auteurs qui ont écrit fur la Ta@tique, le pref crivent ; on pourroit, ayant d’abord fait faireun de- mi-tour à droite ou à gauche à ces demi-rangs, les faire marcher enfuite devant eux, c'eft-à-dire fai- fant face à la queue du bataillon, jufqu’au milieu de l'intervalle des rangs dontils doivent doubler les files ; après quoi leur faifant faite à droite ou à gau- che pour faire face à l’aile dans laquelle :ls doivent entrer, leur ordonner de marcher dans l'intervalle des demi-rangs de cette aile, jufqu’a ce que les chefs de files de ces demi-rangs foiènt parvenus dans la premiere file de la droite ou de la gauche de ce ba- tallon : alors les demi-rangs qui auront ainfñi mar- ché, feront face en tête par un à-droite ou un à- gauche. Ce mouvement s’exécuteroit de cette maniere avec plus de grace, de régularité & de facilité, qu”- en faifant marcher les foldats de côté, comme il eft enfeigné dans les différens traités d’évoluions, Voyez la figure 31. IT. Il eft clair qu’au lieu de doubler ainf les files en-dedans, c’eft-à-dire en faifant placer les chefs de files des demi-rangs qui doivent doubler , derriere ceux des demi-rangs qui ne doivent pas bouger, on. peut faire ce mouvement en-avant, en faifant placer les chefs de files des demi-rangs qui doivent marcher, devant les demi-rangs dont les files doivent être dou- blées, &c. TROISIEME PROBLÈME. Doubler Les files à droite ou à gauche par quarts de rangs. Ce problème peut être confidéré comme entiere- rement femblable au précédent , & par conféquent il peut s’exécuter de la même mamiere. Pour le démontrer, foit le bataillon 4 BCD (fe. 32.) dont on veut doubler les files par quarts de rangs à droite. On imaginera la troupe partagée en deux parties égales X & Ÿ, par une ligne droite FG, tirée de la tête à la queue. Alors les quarts de rangs de la troupe entiere fe- ront les demi-rangs de la moitié de chacune de ces deux parties ; c’eft pourquoi doublant les files de ces parties par demi-rang à droite, il eft évident qu’on aura doublé les files de la troupe entiere par quarts de rangs à droite ; ce qu'il falloit exécuter. Il eft évident que ce mouvement s’exécutera de la même maniere à gauche , & qu'il partage la troupe en deux parties, éloignées l’une de l’autre de l’éten- due d’un quart de rang. QUATRIEME PROBLÈME. À droite & à gauche, par quarts de rangs des ailes, doubler des files fur les quarts de rangs du milieu. Il s'agira, comme dans le problème précédent, de confidérer la troupe comme divifée en deux par- ties égales par une ligne tirée de [a tête à la queue, -& de faire doubler les files de la gauche des demi- rangs de la droite, par les demi-rangs de la droite de cette partie ; & les files de la droite des demi- rangs de la gauche, par les demi-rangs de la gauche de cette partie, & le mouvement fera exécute. Foy. la figure 33. CINQUIEME PROBLÈME. A droite & à gauche, par quarts de rangs du nulieu ; doubler les files des quarts de rangs des ailes. Pour exécuter ce mouvement, on confidérera en- core la troupe comme divifée en deux parties égales par le centre; & l’on doublera les files des demi- rangs à droite, de la partie dela droite, par les demi- rangs de la gauche de cette même partie ; & les files des demi-rangs à gauche , de la partie de la gauche, par les demi-rangs de la droite de cette même partie. Par ce dernier mouvement la troupe fe trouve fé- arée en deux parties éloignées l’une de l’autre de l'intervalle d’un demi-rang,. Voyez la figure. 3 4. E V O SIXIEME PROBLÈME Doubler Les files en tête où en-avant On fuppofe toüjours la troupe rangée fur un nom- bre de files pair, c’eft-à-dire qui peuvent fe divifer exactement en deux parties égales. Soit la troupe 4BCD (figure 35.) dont on veut doubler les files en-avant. Ce mouvement peut s’e- xécuter vers la droite B C' ou la gauche 4 D : nous fuppoferons qu’on veut le faire vers BC. On commandera à la file BC de ne point bouger, ainfi qu'a la troifieme , cinquieme , feptieme , & ainfi de fuite ; enforte que chaque file qui doit fe mou- voir, fe trouve toüjours entre deux files qui ne bou- gent point. On fera enfuite marcher'en-avant les files qui doi- vent doubler, jufqu'à ce que les ferre-files débor- dent le premier rang de l'intervalle qui eft entre les rangs. On commandera à toutes les files qui auront mar- ché de faire à-droite, & de s’avancer devant elles juiqu’à ce qu’elles foient chacune vis-à-vis la file qu’elles avoient à droite, & qui n’a pas bouge ; ce quu étant exécuté ; On leur fera faire face en tête par un à-gauche, & lemouvementpropoféfera achevé. . Pour faire remettre cette troupe dans fa premiere poftion, les files qui auront doublé feront à-sauche, &t elles marcheront devant elles jufqu’à ce qu’elles foïient parvenues vis-à-vis le milieu des intervalles des files qu'elles ont doublées : là elles feront à-gau- che, pour faire face à la queue du bataillon ; & elles marcheront enfuite devantelles pour reprendre leur premiere place entre Les files qui n’ont point bougé. Elles feront après cela face en tête par un demi-tour à droite. Ce mouvement s’exéeutera de la même maniere à gauche. REMARQUES. I. Il eff d'ufage , avant de doubler les files en- avant, de faire ferrer les rangs à la pointe de l'épée. Cette attention, qui n’eft point abfolument nécef- faire, donne néanmoins plus de facilité pour execu- ter ce mouvement avec précifion ; car les foldats n'ayant entr’eux que l'intervalle dont ils ont befoin pour marcher, font moins expofés à fe déranger de l’ordre qu'ils doivent obferver. 11. On peut doubler de la même maniere les files en-arriete. Car ayant fait faire demi-tour à droite ou à gau- che aux files qui doivent doubler, elles n’ont plus qu’à faite les mêmes manœuvres en-arriere qu’on vient de leur faire faire en-avant. III. On doublera auf, en fuivant la méthode de ce problème, les files en-avant & en-arriere, ou en tète & en queue en même tems. Pour cet effet on fuppofera la troupe partagée en deux parties égales par une ligne droite, parallele à la tête ou à la queue du bataillon , qui coupera les files en deux également : alors il ne s’agira plus que de doubler la partie de la tête par les files de cette partie en-avant, & de doubler celle de la queue en- arriere ; ce qui étant fait, la troupe aura doublé fes files en-avant & en-arriere. SEPTIEME PROBLÈME. Doubler les files en-dedans vers la droite ou vers la gauche. Soit le bataillon 4BCD ( fig. 36.) dont on veut doubler les files en-dedans vers la droite BC. On diftinguera d’abord les files qui doivent dou- bler, de celles qui doivent être doublées : ces der- meres font dans ce problème les premiere, troifie- me , Cinquieme, &c. On ordonnera à ces files, c’eft- à-dire à celles qui doivent être doublées, de s’ou- var én-avant êt en-arriere , jufqu'à çe que les demi- Tome VI, | E V O 179 : filès de la tête débordent le premier ranÿ dé linter: valle qui doit être entre les rangs, & que celles. de la queue débordent également le dernier rang. Ce mouvement étant exécuté , les files qui dois vent doubler font à-droite , & elles vont enfuite oc- cuper la place ou l'intervalle lai’ par les files qui fe font ouvertes, & qui doivent être doublées. Lorfqu’elles font parvenues dans la direétion des demi-files qui ont marché en-avant & en-arriere on leur fait faire face en tête par un à-gauche 8 le mouvement eft achevé, art Pour remettre la troupe, les files qui ont doublé font a-gauche , & enfuite elles vont reprendre leur premiere place , & les files qui fe font ouvertes en- avant & en-arriere font les mouvemens néceffaires pour reprendre leur premiere ‘place ; c’eft-à-dire que celles qui ont été en-avant font un demi tour à droite ou à gauche pour faire face à la queue du bataillon, & marcher enfuite vers le centre pour reprendre la place qu’elles y occupoient d’abord : pendant que celles qui fe font ouvertes en-arriere , marchent en-avant, pour fe rejoindre aux précé= dentes, | VIIL PROBLÈME, Doubler les files par derni-rangs. On peut doubler les files par demi-rangs. 1°. En-avant, ou en-arriere, 2°. Par la tête, 8 par la queue en même tems: 3°. En-dedans. ; Soit la troupe FG MK, (fig. 37. ) dont on veut doubler Les files par demi-rangs en-avant par exem- ple vers la droite GX. î Ce doublement peut fe faire de deux manieres. Dans la premiere » tous les demi-rangs de [a droi. te G À doivent marcher en avant Jufqu'à ce que les ferre-files débordent les chefs de files des demi-ranos de la gauche de l’intervalle qui doit être entre 1e rangs. Après quoi l’on fait faire A-droite aux dre rangs de la gauche, & on les fait marcher devant eux jufqu’à ce qu'ils foient parvenus derriere les demi-rangs qui ont marché en-avant : lorfqu'ils en . occupent exaétement la place, on leur fait faire face En tête par un à-gauche , & le mouvement eft achevé. | Dans la feconde maniere les demi-rangs de la droite ne doivent pas bouger, A l'égard de ceux de. la gauche, on les fait marcher en-avant jufqu’à ce que les ferre-files débordent les chefs de files des de rangs de la droite de l’intervalle quisdoit être entre les rangs. On commande alors aux demi-rangs uL ont marché, de faire à-droite, & d’aller devant ne jufqu’à ce que la file qui mene la tête fe trouve ali- gnée fur la file de la droite qui n’a point bouoé, & les autres files qui la fuivent, fur toutes celles qu compofent les demi-rangs de la droite. Alors on ordonne aux files qui ont marché de faire à-gau- che pour faire face à la tête du bataillon , & le mou- vement eft exécuté. REMARQUES. I. Cette feconde maniere de doubler les files par demi-rangs eft plus fimple que la premiere ; parce quül n’y a que la moitié du bataillon qui fe meut pour exécuter le mouvement dont il s’agit; au nr que dans la premiere, la troupe entiere a befoin de fe mouvoir : mais on peut faire exécuter les mou vemens de chacune de ces parties dans le même tems. [Te On ne parlera pas de la maniere de fairerez mettre la troupe après qu’elle a exécuté le mouve- ment précédent. Cette opération paroît trop aifée pour s'arrêter à la détailler. On en ufera de même dans les mouvemens fuivans. dia: Il eft évident que le mouvement qu’on vient d’ex- Z ï 180 EVO pliquer s’exécutera à gauche comme on vient de le faite à droite ; & gw'on doublera aufli également /es fÂles en-arriere ou en queue par demi-rangs de la même maniere , qu’en avant ot en tête. Pour es doubler en-dedans par exemple vers la droire, | Les demi-rangs de la droite s’ouvriront en-avant & en-arriere , c’eft-à-dire que les demi-files des de- mirangs de la tête maïcheront en-avant jufqu'à ce que les ferre-files deices demi-tangs débordent les chefs de files des demi-rangs de la gauche ; de l'in- tervalle qui doit être entre les rangs, & les demi- files des demi-rangs de la queue feront deri-tour a- droite pour faire face à la queue. Ces demi-rangs marcheront enfuite devant Eux; fut le derriere du bataillon, jufqu'à ce qu'ils débor-. dent le dernier des demi-rangs qui doivent doubler les files, de l'intervalle qu’on doit laïffer entre les: rangs. On fera faire demi-tour à gauche à ces demi- rangs pour qu'ils faflent face en tête, & lon com- mandera aux demi-rangs qui doivent doubler, de faire à droite & de marcher enfuite devant eux pour aller fe placer dans Pititervalle des demi-rangs de la tête & de la queue de la droite du bataillon. | Lorfqu'ils y feront parvenus, on leur fera faire face en tête par un 4-gauche, & le mouvement fera exe- CUtÉ. On doublera de la même maniere les files de la gauche en-dedans par demi-rangs de la droite. IX. PROBLÈME. Doubler les files par quarts de rangs. Ce problème peut s’exécuter en autant de ma- nicres que le précédent & par les mêmes mouve- mens. Soit la troupe ou le bataillon 4 BCD (fe. 38. ) dont on veut doubler les files , pat exemple à droite en-avant, par quarts de rangs. On le fuppofera partagé en deux également de la tête à la queue par une ligne droite quelcon- que FG. re On confidérera alors chaque moitié comme une troupe particuliere dont les demi-rangs feront les quarts de rangs de la troupe entiere. Préfentement fi l'on fait doubler les files de cha- que demi-troupe par demi-rangs vers la droite, il ef évident que la troupe ou le ‘bataillon prépofé ABC D aura doublé fes files par quarts de rangs à droite. . c y | On voit par ces exemples qu'il ne s’agit dans ce roblème que de répéter les mèmes manœuvres du précédent. C'’eft pourquoi l’on fe difpenfera , pour abréger, d'entrer dans un plus grand détail des au- tres mouvemens qui le concernent. Pour doubler Les files de la même troupe ex 1ére, où en queue , a-droite &T a-gauche par quarts de rangs du milieu. On la fuppofera encore divifée en deux parties - égales par la ligne droite FG (fig. 39.) qui coupe les rangs en deux également. On ordonnera aux quarts de rangs de la droite & à ceux de la gauche de ne point bouger , & aux quarts derangs du milien de marcher en-avant ;, jui qu’à ce que leurs ferre-files débordent les chefs de files des quarts de rangs de la droite & de la gau- che , de lintervalle quieft entre les rangs. On commandera alors aux quarts de rangs du mi- lieu vers la droite, de faire à-droite, &x à ceux de la gauche de faire à-gauche > &c de marcher enfuite devant eux jufqu'à ce qu'ils foient vis-à-vis les quarts de rangs dont ils doivent doubler les files. Lorfquils feront exaétement placés vis-à-vis ces files, on leur fera faire face entèête; favoir, aux E VO quarts du milieu à-droite par wz d-gauche, & à ceux de la gauche par vx 4-droite ,| &e le mouvement fera exécuté. | Il eft évident que ce mouvement s’exécutera en arriere de la même façon. Par ce mouvement la troupe fe trouve partagée en deux parties à droite 8& à gauche, éloignées l’une de l’autre de lintervalle d’un demi-fang. Si l’on veut doubler les files du milieu à droite & à gauche par quarts de rangs des aîles, il faut faire faire à ces quarts de rangs ce qu'on vient de faire exécuter à ceux du milieu. On doublera de même les files fur les aïles, par tête & par queue; par quarts de rangs du milieu, foit à droite on à gauche, ou bien à droite 6c à gau- che en même tems. On les doublera également par quarts de rangs eri-dedans foit vers la droite où vérs la gauche, foiteri-avant ou en-artiere, &c foit enfin par la tête & par la queue. Tout cela paroït trop aifé à exécuter après ce qui précede, pour s’y arrêter plus long-tems. ARTICLE VII. Des Converfrons. L: Nous avons déjà expliquéenquoiconffte le mou- vement appellé converfon. Voyez CONVERSION. C’eft pourquoi il ne s’agit guere ici que d'en don- ner la figure. Soit pour cet effet le bataïllon 4 BC DK fig. 40.) qui a fait un quart de converfion à gauche fur de fol- dat 4 de lagauche du premier rang. On a marqué par des zéros la place des foldats de ce bataillon avant le quart de converfion, &par des points noirs à l'ordinaire celle qu'ils occupent . Chacun après l'exécution des quarts de converfon ; c’eft-à-dire lorfque le bataillon eft parvenu en 4 E FG où il fait face à l’aile gauche de la premiere pofition. : Le réétanple ou quarré long 4 1 K H,, repréfente l’efpace ou le terrein qu'il occuperoit sil faifoit un fecond quart de converfion, & 4L MN, le lieu où il fe trouveroit s’il en exécutoit un troifieme. Un quatrieme quart de converfion remettroit le batail- lon dans fa premiere poñtion. | Silon tire la diagonale 4 C'du retangle ou quar- té long 4 BCD, & que du point 4 pris pour cen- tre & del’intervalle de cette diagonale , on décrive l'arc CF, il exprimera le chemin du ferre-file du flanc oppofé à celui fur lequel fe fait le mouvement. C’eft pourquoi fi l’on acheve de décrire la circon- férence du cercle dont AC eft le rayon, ëlle ren- fermera le terrein néceflaire ponr exécuter la con- verfon entiere du bataillon 4 B C D. , Si l’on tire la diagonale 4 F de la feconde pof- tion du bataillon, on verra facilement que l’angle FAC, formé par les deux diagonales 4C& 4F, eft droit, &qu’ainfi dans chaque quart de conver- fion le foldat du dernier rang de la file de l'aile op- pofée au mouvement décrit un quart de circonfé- rence dans chaque quart de converfion, comme tous les autres foldats du bataillon. Dans le quart de converfion aile qui foûtient , c’eft-à-dire la file dans laquelle fe trouve le pivot , & les files voifnes jufqu’au tiers à-peu-près du front du bataillon x doivent marcher très-lentement, & obferver lemouvement de laîleoppofée pour fe re- gler fur elle, de maniere que les rangs foienttoû- jours en ligne droite , comme s'ils étoient autant de lignes inflexibles mouvantes autour du centre ou du pivot. Le quart de converfion s'exécute d’antant plus ar fément que les troupes font placées fur moins de rangs , querces rangs font moins étendus, & qu'ils font plus ferrés les uns fur les autres, ARTICLE VIIL De la converfion avec pivot au centre. Comme on trouve. dans le quart de convetfion tout. ée qi con- cerne da converfon.entiere,, il fufira de confidérer ici le quart de converfion, lorfque le pivot eft au centrés 1 e ah dos: .: Cette efpece.particuliere de quart de conveifon, en prenant.pour pivot le foldat du centre:du'pre- mierrang, fe nomme ordinairement /e mouline,quels quefois.aufh converfion centrale; on. peut lexécuter pour plufieurs raifons. vil Si ohurron - 1% Parceque dans cette manœuvre:il faut moins de terrein pour tourner le bataillon , ,que:slitour- noit fur un de fes angles, & qu'il peut {e rencontrer des terreins ferrés 8 coupés...où un.bataïllonjatroit à peine l’efpace néceflaire pour tourne. le: pivot étant au centre, & dans lefquelsäl ne L'auroit pas, f le: pivot étoit à un de fes angles, ir) ° » 2°, Pouraccélérer l'exécution du quartdeconver: ! fion. Car. en. prenant. le pivot au centre. on diminue la moitié du.chemin que font.les foldats., lorfque le pivot eft aux flancs ; & l’on diminue par conféquent ! dermoitié le tems-du-morivément : ce qui. eft.très-im- portant dans plufieurs.occafons., principalement, » lorfque l'ennemi marchant pour tomber {ur leflanc # qui eft toûüjours le plus proche de lui, & quieftce- | » lui fur lequel il faut que le bataillon tourne .pour » lui faire front, ce flanc demeure long-tems expo- » Le ; & le bataillon court rifque d’être attaqué ayant » qu'il ait achevé {on tour: auquel ças il ne peut » foûtenir le choc ». Ars de la guerre, de M. le ma- réchal de Puyfegur, rome I. page 258. 3°. Pour maintenir des troupes qui marchent en colonne, ou les unes derriere les autres, fur la mê- me direttion où on les a mifes d’abord; & cela f pat quelques raifons on eft obligé de leur faire fai- re un quart de converfion, pour faire face à un flanc de la marche, & qu’enfuite on leur fafle faire un autre quart de converfion pour reprendre leur che- min. Si on fait tourner ces bataillons fur le centre , on ne change pas la tireétion de leur marche, parce que les pivots reftent fur la même ligne ; ce qui n’ar- rive pas lorfqu’on fait le quart de converfon en:pre- nant l’un des angles pour pivot ; c’eft ce qui peut fe démontrer très-aifément de cette maniere. Soient les bataillons 4 B, 4 B, &c. ( fig.-41.) qui marchent à la fuite l’un de l’antre dans la ligne droi- te X Y, qui pañle par leur centre. Si l’on fuppofe que chaque bataillon fafñle un quart de converfon fur le centre, pour faire face à l’un de fes flancs, parexemple au flanc À , ils feront portésen ab, ab, &:c. fion leur fait faire enfuiteun autre quart de con- verfon,dans le fens oppofé au premier, c’eft-à-dire de gauche à droite ; fi le premier a été fait de droite à gauche , il eft évident que tous ces bataillons re- prendront leur premiere pofition. Si GHK fig. 42) eft la direétion du chemin que fuivent les mêmes bataillons 4 B,.4B ,.Ec. & que le flanc gauche, par exemple, dans ces bataillons {oit fur cette ligne; fi on leur fait faire face en flanc par un quart de converfion de droite à gauche, ils feront placés fur la même ligne en ab, ab, Gc. & fi enfuite on veut les remettre en marcheMuivant leur premiere direétion, on ne pourra le Fs qu'en leur faifant exécuter un quart de converfon de gauche à droite , fur l'angle oppofé au premier pivot : alors ils fe trouveront placés enC D, C D, &c. où les gauches c C &c. font éloignées de leur premiere po- ftion de l'intervalle du front du bataillon. Comme on fuppofe l’ennemi fur le flanc gauche de la marche de ces bataïllons, cette manœuvre en approche les bataillons de l’étendne de leur. front : fi elle. étoit répètée deux fois, ils s’en approcheroïent de deux E V'O 181: fois-cette même éténdue ;ce.qui feroit un inconyé= niént fort confidérable. mtoÿay 91 ons Si l'on veut fairereprendreauxtroupes eh marche leur premiere direéton., elles ne font plus en. ligne, droite les unes à la:fuite desautres, principalement. s'il y a un.grand nombre de troupes en marche., & qu'ikn’y en ait qu'une partie qui ait fait la manœu- vre qu'on vient d'expliquer : dans-ces.fortes.decir= conftances , le quaït de converfonlle Pivot auicEN= tre, eft donc plus avantageux que celui. qui.eft à l’un dessangles ; il s’agit de donner {a maniere de-d’exé- Cuters: ras vil | ù Le -- Onprend pour pivot le chef de file qui -eft a mis lieuoiisaucentré du-bätaillon: où confidere enfuite a troupe comme féparée ou divifée en deux parties; à l’une defquelles on fait faire le quart de conyerfion en-avant, 6e à l’autre én-arriere. La file où eftle-pi- vot.eft celle qui termine la pattie--du bataillon qui faitile quart de converfion-en-avant, laquelle par- te l’éxécute de la:même maniere qu'on la expliqué gi-devant : le plus difficile de cettemanœuvre fe fait pat la partie du bataillon qui fait le quart de, con- verfonten atriere. must I Cette partie fait d'abord nn demi-tour à droite, -Pour faire:face à:la queue du:bataillon!, & eñfuite un quart de converfon du-même côté; que. le fait l’autre partie du même bataillon, c’eff-à-dire qu'elle le faità droite, fi la premiere partie le fait de ce.cô- 16ou à ganche , f'cette même partie l’a fait vers la gauche, | ntarez Suppofons que le-bataillon.4B DE, (fs. 43 :) -Qqui fait le quart de .converfion fur Je centre. le faffe de droite à gauche, le chéf de file placé au mi- lieu.ou-au centre du premier,rang.41B, fervira de -pivots,& ;la partie du. bataillon dela droite de la file € M, fera le quart de converfon..en-avant-de droite à gauche, à la maniere ordinaire, c’eft-à-di- re que,cette partie C B.D.M viendrafe placer én CEGN ; par un quart .de converfion.de:idroite à gauche, eh 0 Pendant le rems que cette moitié du bataïllon fe- ra cette manœuvre, l’autre, après avoir fait un de- mi-tour à droite , fera un quart deconyerfon de droite à gauche :ice qu’il yade particulier dans ce mouvement, c’eft que le foldat M, ferre-file.de la file de la droite du milieu du bataillon dans.fa pre- imiere poñtion, qui devroiït fervir de;pivot au quart de converfon de la partie C 4.E Midu. bataillon ;ne le peut, parce quele bataillon fe trouveroit alors avoir fes deux parties féparées entre elles de l’in- tervalle de la hauteur ou -profondeur'du bataillon. Pour éviter cet inconvénient, Le foldat €, qui-a fervi de pivotau quart de converfion, de la premiere partie dubataillon,en fert encore à lafeconde.Pendañt qu'il tourne avec la droite du bataillon, le foldat mafqué -M décrit un quart de cercle autour du pivot €, tel qu’il eft marqué dans la figure, Les autres foldats de la partie 4 C M B, en font de même , en fe jettant fur la droite, & en marchant de maniere que cha- que demi-rang de la gauche fe trouve toûjours en li- gne droite avec les demi-rangs de la droite. Lorfque cette partie aura décrit le quaït de converfon, cel- le de la gauche aura;ainf également fait le fien ; c’eft pourquoi il ne s’agira plus que de lui faire faire undemi-tour à gauche ;, pour que tout le bataillon entier fe trouve faire face du même côté Z F. REMARQUES. L:On peut faire fairenon-feulement le quart de converfionà un bataillon, fur un pivot pris au mi- heu ou au centre du premier rang , mais encore à tel endroit de la troupe qu'on veut, commeautiers ou au quart. Il fuflit pour cet.effet d'exécuter tout ce qu'onvient d'expliquer pourle quart de converfion far le ventre, & d’obferver que la file où l’on pren: dra le pivot termine la partie de laitroupe qui fait _lelquart de converfion en avant. Mais onremarque- raiqu'en changeant ainfi la pofition du pivot, 1l'en : réfulte quelque changement au terrein que la trou- pe occupe; c’eft-à-direrquelletfe: trouve après le quart de converfion plus avancée ou reculéeique fi ofavoit prise pivot aucentre:c’eft pourquoilorf- qu'iln’y a pas de raifon particuliere pouf changer ainf la poñition du pivot ; il:paroït qu'il eft plus’ à propos, pour conferverile même terreincaürant qu'il eft poffible, de prendre plütôt le pivot aueerm tre du bataïllon.que dans tout autre point, Confor- mément à la méthode que l’on vient d'expliquer! qui eft la plus ufitée & lt plus imples 02 26u0a ri If, Le pivot pourroit auffi être pris dans ‘celui des rangsque l’on voudroit dubataillon } comme du troifieme , au quatrieme, Gc. en avertiflant feule- ment les rangs qui fe meuvent dans la mème filé, de faire auffi leur quart de converfion aütourde lux. Mais cette méthode n’eft pas d’ufage ; à cañfé de {on peu d'utilité. ao 1 MSc &E Ar, II. Lorfqu'un bataillon eft en bataille 5-67 "q'on veut le faire marcher fur l’un de fes flancs par deux divifions , chacune de la moitié du front®du bätaïl- | Ton ;on peut, comme le dit M. le maréchal dé Piy- fegur, faire exécuter à chacune dé ces parties un quart de converfonfur le centre, c’eft-à-dire fur deux pivots pris chacun au‘milieu de chaque demi- rang du front du bataillon. Lorfque ce motivement eftexcecuté, les deux divifions du bataïllon‘fe met- tent'en marche ,obfervant de garder toùjoursla mê- me diftance entre elles , afin qu’elles puiflent fe met- tre en bataille-exaétement , par un'autre quart de converfion fur le centre, exécuté dans un fens op- ‘Pofé au premier. Par ce mouvement, on diminue le chemin que feroient les foldats les plus éloignés du pivot, f on faifoit le quart de converfion ordinaire ; & on fe tourne ainfi en bien moins de tems. ARTICLE IX. Dés'converfions à plufiéurs pivots ; ou par différentes divifions du bataïllon. On appelle divifions d’une trou- ? pe ou d'un bataillon , les différentes partiés dans lef- quelles on le partage. Voyez Divisions. Pour faire tourner Le bataillon fur plufieurs pi- vots à la fois, il faut qu'il foit rompu ou partagé en divifions : & toutes les divifions tournant enfemible du même côté, par un quart de converfion , elles font face à l’un des flancs du bataillon, & elles fe trouvent placées les unes derriere les autres; ce qui les met en état-de marcher vers le terre du flanc du bataillon auquel elles font face. Le quart de converfion à plufieurs pivots où par divifñions, demande quelques obfervations particu- lieres dont voici les deux principales, 1°, Il faut que les divifions du bataillon ayent plus d’étendue de la droite à la gauche que de pro- -fondeur de la tête à la queue; parce que Le quart de converfion, après qu'il eft fait, mettant les files de chaque divifion dans la direétion des rangs, il arri- veroit, fi les files occupoient plus d’efpace que les rangs, étant ferrées autant qu’elles peuvent l'être, qu’elles ne pourroient être renfermées dans l’éten- due du front du bataillon: c’eft pourquoi Le quart de converfion par divifion feroit alors impoffñble. Soit fuppofé, par exemple , un batallon de 480 hommes , à huit de hauteur, les rangs feront de 60 hommes : fuppofons qu’on veuille le rompre par dix divifions , elles auront chacune 6 hommes de front & 8 de profondeur. Si on Les conçoit à la fuite lune de l’autre, les files derces dix divifions feront enfem- ‘ble de dix fois 8 hommes, c’eft-à-dire de 80. Mais le front du bataillon n’étant que de 60, les 80 home: mes de file ne pourront fe tenir dans cette même éténdné done té. am ein, Suge PDT Si NS, 2°, En fuppofant les divifions plus éténdues en largeur qu’en profondeur, comme dans la troupe A BCD’, (fig. 44.) divifée en trois parties! épales, AE ,EF,8 FB, il arrivera encore très-fouvent que fi chaque homme décrit exaétement le quart de cérclé, comme on le décrit dans le’ quart de con- vérfion ordinaire, que les foldats les plus éloignés du pivot de chaque divifion, anticiperont fur le ter- | rein de la divifion voifine ; ce qui ne peut manquer de tendre léuf mouvement impoffible, ou du moins trésdéfetueux. La figure-précédenté rend cet inconvénient très- fénfible.-On'a tracé les quarts-de cercle que décri- ventiles chefs de files & les ferre-files, qui termt nent [a droite de chacune de ces diviñions. Or l’on voit que les arcs qui marquent le chemin des ferre-fles, anticipent fur le terrein des divi- fions de leur droite ; ce qui fait voir que ces ferre- filésidoivent être fort gênés on embarraflés dans l'exécution dé! leur mouvement. : - Cétïe obfervation a: été faite par M. le maréchal de Puyfeeur , dans fon Trairé de l'Art de la guerre. | ”. L’infpettion de la figure 45 , dans laquelle on a marqué le ‘bataillon précédent arrêté au milieu dé fon mouvement, fufit pour en démontrer la juf- tefferin On a tracé dans cette figure Île chemin que fait chaque foldat de la droite du premier & du der- nier rang de chaque divifon , afin de faire voir que le premier rang de toutes ces divifions fait fon mou- vément fans aucun obftacle ; mais qu'il n’en eft pas de même des! foldats dé la droite des trois derniers rangs de chaque divifion, qui étant plus éloignés du pivot que les foldats de la gauche du premier rang, ne peuvent pafler le premier front du bataillon ou la ligne fur laquelle font les pivots fans fe rompre. C’eft pourquoi les foldats de ces droites , au lieu de {e’tenir toijours derriere leurs chefs de files , -doi- vent aller droit devant eux jufqu'à ce que la droite de chacun de:ces derniers rangs ait paflé au-delà du pivot de la divifion qui le fuit immédiatement à droite. Alors ils peuvent s’ouvrir ou fe jetter fur leur droite autant qu'il eft néceflaire pour bien achever leur mouvement , en fe redreffant fur la gauche de. leur divifion, dont les foldats ont dû exécuter le | “quart de converfon fans être obligés de s’ouvrir ni de fe reflerrer. Plus la troupe qui fait ainfi le quart de converfion fur plufieurs pivots a de rangs, & plusilfaut d’at- tention pour le faire exécuter exaétement. M. le maréchal de Puyfegur remarque encore à ce fujet, que fi l’on s’apperçoit de quelqu’imper- | -fettion dans l'exécution de ce mouvement, on ne doit pas l’attribuer aux troupes qui le font, mais au mouvement même qui ne peut fe faire fans qu'il y paroiïfle un peu de confufion; mais qu'il n’en eft pas pour cela moins utile, parce que cette efpeced’irrégu- larité ne paroït que dans le tems du mouvement: car aufli+ôt qu'il eft fini, les troupes fe trouventen batail- le comme elles doivent l’être fur des lignes droites. Du mouvement d’un bataillon fur fa droite ou fur [æ longer, ou fans augmenter l'étendue de gauche fans | fon front, On trouve dans l’4r de la guerre de M. le maréchal de Puyfegur , la defcription d’un mou- vement propre à faire marcher, lorfqu’on eft proche de l'ennemi, un bataillon fur l’un de fes flancs, fans augmenter l’étendue du front du bataillon, ou fans s’alonger de droite à gauche. | Dans la circonftance de la proximité de l’enne- mi , il n’eft pas poflble de faire le quart de conver- fion ordinaire pour fe mouvoir vers la droite.ou la E VW O gauche du bätaillon, parce que l'ennemi pourroit l'attaquer pendant le mouvement ou avant qu'il fût remis en bataille, auquel cas il pourroit le défaire très-facilement. | | Pour éviter cet inconvénient, M. de Puyfegur fuppofe un bataillon de dix compagnies rangées fur fix rangs de douze hommes chacun , & il propofe de faire faireun quart de converfion à droite ou à gau- che par demi-rang de compagmie, c’eft-à-dire dans cet exemple par fix hommes ; alors chaque compa- gnie forme deux rangs vers la droite ou la gauche du bataillon. Et dans cet état , on peut le faire mar- cher vers l’un de ces deux côtés fans qu’il augmente l'étendue de fon front ( pourvû que toutes les files obfervententr’elles en marchant la même diftance }, &t le fairerémettre enfuite dans fa premiere pofition en un inftant. S1 le bataillon a marché ainfi vers la droite, on lui fera faire face en tête par un quart de conver- fion à gauche , que feront chacun des demi-rangs de compagnies qui en ont fait un à droite ; ou bien comme le dit M. le maréchal de Puyfegur , chaque partie qui a fait le quart de converfion pour faire face à droite, achevera le cercle entier, &elle fera enfuite demi-tour à gauche, Ge, Voyez L'Art de La guerre, tome TI, p.205, de La fig. 2. de la pl. 13. du réme livre. REMARQUES. I. Pour faire ce mouvement tel qu’on vient de l'expliquer, 1l faut que les rangs ayent un inter- valle égal au front des demi-rangs de chaque com- pagnie. Si cet intervalle eft plus petit, il faut fixer le nombre d'hommes de chaque rang qui doivent tourner , Ou faire le quart de converfion à droite ou à gauche , relativement à l’efpace qui ef entre les rangs. I. Si la troupe étoit à quatre de hauteur , il eft évident que ce mouvement fe réduiroit à doubler les files à droite ou à gauche, & enfuite à faire marcher le bataillon vers celui de ces côtés qu’on voudroit , & le faireenfuite remettre en dédoublant les files. ARTICLE X. De la contre- marche. On appelle contre-marche , la marche qu'on fait faire à des foldats d’une troupe ou d’un bataillon , dans un fens oppofé à la poñition des autres foldats de la même troupe. _ Ainf dans la contre-marche, une partie du ba- taillon marche vers la queue du bataillon | ou vers la droite ou la gauche , c’eft-à-dire dans un fens ou une direétion oppofée à la face du bataillon : auf le nom de contre-marcheeft-il compofé de contre & de znarche, qui eft la même chofe que fi on difoit marche contraire, Ou contre les uns & Îles autres. La contre-marche fe fait de plufieurs façons. 1°. Par files à droite ou à gauche, 2°. Par rangs à droite ou à gauche. La contre-marche fert à placer la tête du batail. lon à la queue, fans fe fervir du quart de converfion qui fait changer de terrein au bataillon, c’eft-à-dire qui le place à la droite ou à la gauche de fa premiere poñtion, & qui d’ailleurs ne peut fe faire lorfqu’on eft à portée de l’ennemi , parce qu’il pourroït tom- ber fur le flanc du bataillon pendant le mouvement ; & le détruire ou le difliper très-facilement dans cet état. Elle fert auf à changer la poñition du batail- lon, c’eft-à-dire à lui faire occuper un autre ter- tein à fa droite ou à fa gauche , d’une maniere plus fimple & plus fûre que par le quart de converfion. S'il faut fe retirer de devant l'ennemi « rien n’eft » plus dangereux ( dit M. Bottée, Exercice de l'in- s fanterie ) que de commander le demi-tour à droite ; » à peine le foldat entend-t:l çe commandement E V O 193 » qu'il fuit en confufion. Dans la contre-marche , il » eft occupé du foin de garder {on rang & fa file ; » ce qui le diflipe d’une partie de fa crainte. Il fe »-raflüre quand il voit que celui qui le commande »” manœuvre toûjours , & ne s’abandonne point au » fort. De même, s’il faut tourner tête à l'ennemi # ( dit ce même auteur } qui marche à vous pour » VOUS attaquer en queue , vous ne le ponvez faire » de bonne grace & promptement que par la con- »# tre-marche : car le demi-tour de converfon de- # mande trop de tems, vous fait prêter le flanc ) &C » outre cela, vous laïflez votre premier terrein à » droite on à gauche, fi vous tournez fur une aîle. # Si vous vous contentez de faire demi-tour à droi= » te, vos chefs de file fe trouvent en queue , auffi- » bien que les officiers qui doivent être à la têtes. Par la contre-marche, on évite ces inconvéniens. Malgré cet avantage, comme elle exige que les files {oient ouvertes, elle n’eft plus guere d'ufage à pré- fent , ainfi que nous l'avons déjà obfervé au mor CONTRE-MARCHE, Elien , auquel on renvoye dans cet endroit , en traite avec un grand détail. M. de Bombelles s’eft aufl fort étendu fur cette manœuvre , dans fon Traz- té des évolutions militaires. I prétend que pour peu qu'on en connût l'utilité , l’on prendroit un Join partis culier d'accoñtumer l'infanterie à La favoir parjairemenr. Il eff vrai que prefque tous les auteurs militaires pa- roiflent en faire cas, 8 qu’ils donnent tous la ma- niere de l’exécuter. M. Bottée qui avoit de lexpé- rience dans la guerre , & qui s’étoit acquis beau- coup de diflin@ion dans la place de major du régi- ment de la Fere , regarde cette évo/urion comme fort utile. Par toutes ces confidérations ; nous croyons devoir en donner une idée plus détaillée que nous ne lPavons fait au mo CONTRE-MARCHE, La contre-marche fe fait 1°. en confervant le mê- me terrein, 2°, en gagnant du terrein, & 3°. en le perdant. PREMIER PROBLÈME. Faire la contre-marche par files, en conférvant le même terreir, - Cette évolution peut fe faire également À droite & à gauche : nous fuppoferons qu’on veut la faire À gauche, Soit pour cet effet , le bataillon 4 BCD (fig. 46.) dont les files font ouvertes de maniere À laïfler pal- fer un foldat dans leur intervalle. On commandera à tous les chefs de file , c’eft-à-dire aux {oldats du premier rang 4 B, de faire demi-tour à gauche fur le pié gauche, pour fe placer, par ce mouvement. : dans l'intervalle des files ; après quoi on leur ordon- nera de marcher: ce qu'ils feront devant eux dans l'intervalle ou l'ouverture des files »Jufqu’à ce qu'ils foient parvenus à la place du dérnier rang, Pendant que le premier gagnera ainfi la queue du bataillon : les autres rangs s’avanceront fuccefivement jufqu’à la place du premier, où étant arrivés, ils feront de même un demi-tour à gauche, & ils fuivront le pre- mier rang pour fe placer derriere lui » Comme dans leur premiere pofition. Ce mouvement étant ainfi exécuté, le premier rang fe trouvera placé fur le terrein du dernier , le fecond fur celui du troifieme, le troifieme fur celux du fecond , & le quatriemefur le terrein du premier. Lorfque les troupes font exercées à faire ce mou- vement , On leur ordonne de l’exécuter en difant: 4 gauche, ou bien, a droite par files, faites La contre-mar. che, À ce premier commandement , les chefs de file font demi-tour à droite ou à gauche, On dit enfuite, marche. À ce fecond commande ment, toutes ies files fe mettent en marche, pour occuper le terreindes rangs qu’elles doivent rem plir, 184 E V O Lorfqu’elles y font parvenues , on leur ordonne de s'arrêter, en difant,, halte. La contre-marche fe fera par files à droite, de la même maniere. REMARQUES. I. On fait remettre le bataillon par une feconde contre-marche,, exécutée dans le même fens ou du même côté que la premiere ,.c’eft-à-dire à droite, fi a premiere a été faite à droite, &c. IE. Quelques auteurs font avancer deux pas aux chefs de file, avant de leur faire faire le demi-tour à droite ou à gauche ; mais ces pas en avant ne font pas néceflaires. Au contraire, il paroït plus fimple de laifler le premier rang à la même place, & de lui faire faire à-droite ou à-gauche ; parce que, par ce mouvement , 1l fe trouve d’abord dans lintervalle où il doit marcher , c’eft-à-dire , entre la file qu'il quitte & celle qui la fuit immédiatement du côté où {e fait la contre-marche. | 3. Nous avons dit que la contre-marche exigeoit que les files fuffent ouvertes, & que c’étoit là un des principaux inconvéniens que les taéticiens moder- nes trouvoient dans l’exécution de ce mouvement. Mais, comme le dit M. de Bombelle , lorfqu’un ré- giment fera bien exercé, il fera prefque auf facile- ment la contre-marche à files & rangs ferrés, que quand ils font ouverts, pourvü néanmoins qu'on ne prefle pas les files autant qu’on le fait aujourd’hui, c'eft-à-dire que relativement à l’ancien ufage, on laiffe aflez d’efpace à chaque foldat dans le rang , pour qu'il ait la liberté de charger & de tirer facile- ment. D'ailleurs, comme l’épaifleur d’un homme, mefurée de la poitrine au dos,eft afiez ordinairement la moitié de l'étendue qu'il occupe de front , ou d’un coude à l’autre, fi dans l’exécurion de la con- fre-marche, les foldats qui veulent pañfer dans les in- tervalles des files, fe mettent , lorfqu’elles font {er- rées, un peu de côté, & que ceux de ces files en faflent de même, par un à-droite ou un à-gauche, al eft clair que le paflage entre les files n’aura rien de dificile m d’embarraffant. SECOND PROBLÈME. A droite ou à gauche par files ; faire la contre-marche en quittant Ou en perdant le terrein , ou la file après Jor. Suppofons qu'un bataillon 4BCD, (fig. 47.) s'éloigne de l'ennemi , en s’avançant fur le terrein X, que 48 foit le premier rang ou la tête de ce bataillon. Suppofons auf que l'ennemi qui vient du terrein Y pourfuive ce bataillon. Si l’on fait avancer le premier rang À B, pour occuper la place du dernier, c’eft-à-dire fi l’on exé- cute la contre-matche, conformément au problème précédent, le bataillon ne changera pas de terrein, gmais feulement de pofition. Si le premier rang 4 B reftant dans la même pla- £e, les autres vont fe mettre derriere lui, il eft évi- dent alors que le bataillon abandonnera le terrein occupé par les derniers rangs, & qu’ainf il quitte ou il perd ce terrein. Il eft aifé , après cette explication , de compren- dre en quoi confifte la contre-marche en quittant ou en perdant le terrein. C’eft cette contre-marche que les anciens appelloient évolution macédonique, parce qu’elle avoit été imaginée par les Macédoniens. Pour exécuter cette contre-marche , le premier rang À B fait demi-tour à droite, fi la contre-marche doit fe faire à droite, & à gauche , fi elle fe fait de ce côté, afin de faire face à la queue du bataillon. Nous fuppoferons que la contremarche fe fait à droite. | | exécutée EVO Lorfque le premier rang 4 B a faït ce mouve- ment, il refte à la même place, & les foldats des autres rangs paflent fucceflivement à la droite des Chefs de files & dans leur intervalle, de maniere que chaque foldat va fe placer derriere fon chef de file, comme dans la premiere difpoftion du bataïllon ; c’eft-à-dire que les foldats du fecond rang G A, vont fe placer derriere le premieren Z L ; ceux du troifie- me MN,enO P; & ceux duquatrieme DC,enRS. Lorfqw'ils font ainfi tous arrivés dans les places ou fur le terrein qu'ils doivent occuper, ils font de- mi-tour à droite fur le pie droit pour faire face du même côté que les chefs de file, c’eft-à-dire au terrein de la queue du bataillon qu’ils viennent de quitter. Il eft évident que cette contre-marche fe fera à gauche , de la même maniere qu’on vient de l’ex- pliquer pour la droite: toute la différence qu'il y aura, c'eft que les foldats des rangs qui fuivent le premier, au lieu de pañler à la droite des chefs de files, pour aller {e placer derriere eux, paflent à la gauche. Pour faire remettre la troupe ou le bataillon , on ordonne au premier rang de faire demi-tour à droi- te, & on commande aux autres rangs d’aller {e pla- cer derriere leurs chefs de files, comme dans le pre- mier mouvement, pour y reprendre leur premiere pofition. Ils font enfuite un demi-tour à droite pour faire face du même côté que le premier rang. III PROBLÈME. AÆ-droite par files ; faire la contre-marche en gagnane le terrein, Soit le bataillon 48 CD ( fig. 48.), dont le pre- miet rang eft 4 B, qui s’avance fur le terrein X, & qui par conféquent fait face à ce terrein. Soit fup- pofé que l'ennemi pourfuit ce bataillon & qu’il s’ap< proche de la queue, la cozsre-marche en gagnant du terrein confifte à faire revenir Le bataïllon fur fes pas, de maniere que le dernier rang D C reftant à la mê- me place, les autres viennent fe mettre devant lui en s’approchant de l’ennemi de la hauteur du batail- lon : on dit alors g4’on gagne du terrein , parce que l’on s’approche de l’ennemi ; au lieu que dans la contre-marche précédente on dit g4’on en perd, par la raifon que le bataillon s’en éloigne, & qu'il lux quitte ou abandonne le terrein qu’il occupoit, Cette contre-marche étoit appellée chez les an- ciens évolution laconique, parce qu’elle eft de in- vention des Lacédémoniens. | Réfolution, On ordonne au premier rang 4B de faire demi-tour à droite, & à la troupe de marcher; ce qui fe fait par ce commandement, rzarche. Alors chaque foldat du premier rang s’avance vers la queue du bataillon ; favoir, le premier de la droi- te, en marchant à côté de la file de la droite, & les autres dans les intervalles des files qui les joignent immédiatement de ce même côté. Lorfque le premier rang a ainfi pañlé l’intervalle qui eft entre lui & le fecond, le fecond fait aufli de- mi-tour à droite, & tous les foldats dont il eft com pofé marchent à la fuite de ceux du premier rang, en obfervant de s’en tenir toûjours éloigné de la dif tance qui doit être entre les rangs, ou de les fuivre le plus près qu’il eft poffible, files rangs font ferrés à la pointe de l'épée, ce qui donne plus de facilité à exécuter cette contre-marche avec précifñon. Quand les foldats du fecond rang ont pañé le troi- fieme rang , ceux de ce dernier rang font demi-tour à droite , & ils fuivent ceux du fecond jufqu’à ce qu'ils ayent pañlé le quatrieme rang : alors on fait faire halte à tout le bataillon, & le mouvement eft REMARQUE E V O REMARQUE S« I. Le premier rang ne doit s’avancer au-delà du dernier , que de l’épaiffeur du bataillon. C’eft pour- quoi fi l’on fuppoe que les rangs étant ferrés occu- pent un pas de trois piés , le premier rang ne mar- chera au-delà du dernier que de trois de ces pas. IT. Comme les foldats du premier rang, & ceux des rangs qui le fuivent, ayant fait demi-tour à droi- te, fe trouvent à côté de la file qu’ils occupoient d’a- bord , & qu'ils marchent enfuite devant eux, 1l fuit de-là qu'après l'exécution de la contre-marche le ba- taillon fe trouve plus avancé fur le terrein de fa droi- _ te, de l’épaifleur d’un homme, que dans fa premiere ofition. LT. Cette contre-marche peut s’exécuter aifément à files ferrées. IV, Elle s’exécutera à gauche de la même maniere qu'à droite ; toute la différence qu'il y aura, c’eft qu'il faudra faire d’abord le demi-tour à gauche au lieu de le faire à droite. Pour faire remettre la troupe ou le bataillon, on ordonnera aux foldats du premier rang de faire de- mi-tour à gauche, & de marcher enfuite devant eux dans les intervalles des files des autres rangs, pour aller reprendre leur premier terrein 48. Lorfqu'ils auront paîlé le fecond rang, les foldats de ce rang feront aufli le demu-tour à gauche, 8 ils fuivront ceux du premier. Le troifieme rang fera de même À l'égard du fecond , & ils marcheront tous jufqu’à ce qu'ils ayent repris leur premiere pofition, &c. IV. PROBLÈME. 4 droite par chefs de files & de demi-files , faire La contre-Tnarche, | Soit le bataillon 4 8 CD ( fig. 49.) rangé fur fix de hauteur, auquel on veut faire faire la contre- mafche par chefs de files & de demi-files, c’eft-à- dire par lesÂoldats du premier rang 4 8 .& du qua- trieme EF, Il faut confidérer la troupe comme divifée en deux également, par une ligne droite quelconque £ A, qui coupe les files en deux également, & ordonner enfuite à chaque démi-troupe , confidérée comme troupe entiere, de faire la contre-marche du premier problème , ou celle du fecond ou du troïfieme. Si l’on veut exécuter celle du premier, les chefs de-files & ceux de demi-files feront demi-tour à droi- te fur le pié droit; ce qui étant fait , les chefs de files marcheront devant eux jufqu’au terrein du troifieme | rang , & les chefs de demi-files jufqu'à celui du fi- xieme. Chaque demi-file fuivra fon chefde file, en- forte que le premier rang occupera la place du troi- fieme, le troifieme celle du premier ; le fecond fe re- trouvera fur fon même terrein, mais feulement plus à droite de l’épaiffeur d’un homme. Le quatrieme rang occupera la place du fixieme , le fixieme celle du quatrieme, & le cinquieme fe retrouvera, com- me le fecond, fur fon terrein. | Par cette contre-marche les chefs de files {e.trou- vent chefs de demi-files, & ceux-ci chefs de files. Cette évolution s’exécutera à gauche de la même mamere qu’à droite. Il eff clair qu’elle eft exaétement conforme à celle du premier problème, c’eft pour- quoi on ne s’y arrêtera pas davantage, On ne parlera pas non plus de la contre-marche par. chefs de demi-files & par ferre-files , qui n’a pas plus de difficulté ; nide celle par quart de files ; qu’on re- dira, en fuppofant les files diviféés en quatre par- ties , à celle des contre-marches qu’on voudra, ex- pliquées dans les trois premiers problèmes précé- dens. De la contre-marche par rangs. Après avoir expli- qué la contre-marche par files, il eft aifé de çonçe- Tome FI. | 18$ à 4 } voir la maniere d'exécuter cette évo/ztion par rangs; car faifant faire à droite où d'ganche au bataillon ; les rangs deviennent des files, avec lefquelles on peut faire les mêmes évo/utions des précédens pro- blèmes. Mais comme malgré cette identité dé mou- vémens, les Taéficiens traitent ordinairement de la contré-marche par rangs comme de celle par files, nous CrOYOnS par cette confidération devoir entrer dans quelques détails particuliers fur la contre-mar- che par rangs , quoique ce détail nous paroïle aflez peu utile lorfqu'on a bien conçu les trois premiers problèmes de cette évolurion Par fe OMAN V. PROBLÈME, A droite par rangs, faire la contre-marche. Ce problème a pour objet de faire paffer la droîte du bataillon à la gauche, ou la gauche À la droite. ” Il peut fe réfoudre en confervant le même terrein Ou en le quittant, pour en occuper un pareïl fur la droite ou fur la gauche. Et Nous fuppoferons d’abord que la troupe doit con- ferver le même terrein. | Soit le bataillon 4 B C D ( fg. $0:) dont on veut tranfporter la droite BC, à la gauche 4 D par la contre-marche. Pour exécuter cette évolurion, tout le bataillon fera d’abord à droite fur le talon droit; le pié droit reftera fur l'alignement de chaque rang , & le corps fe trouvera en-dehors, | ù ni On commandera enfuite au-bataillon de marcher. Au commandement , chaque foldat de la file 2 C deda droite, marchera direétement devant luiun ow deux petits.pas, & il fera après demi-tour à droite fur le talon droït, pour fe trouver vis-à-vis l’inter- valle du rang qui fuit le fien. Ils marcheront enfuite tous enfemhle, chacun dans l'intervalle oppoté, fui- vis de tous les foldats de leurrang, qui feront cha- cun demi-tour à droite dans le même endroit du pre- mier : 1ls marcheront ainf jufqu’à ce qu’ils foient par- venus fur le terrein de la file 4 D de la gauche, où étantarrivés on fera arrêter le bataillon par ce com- mandement, ka/re. On lui ordonnera enfuite de faire à droite fur.le pié droit, pour qu'il fafe face en tête, &t:le mouvement fera exécuté. VERT La contre-marche s’exécutera à gauche par rangs de la même maniere. | Pour cet effet les foldats de la file 4 D de la gau- che, feront d’abord à gauche : enfuite ilsavanceront un ou deux petits pas, & ils feront demi-tour À gau- che fur le pié gauche. Ils marcheront après cela dans les intervalles des rangs, fuivis des foldats des rangs auxquels 1ls appartiennent, jufqu’à ce qu'ils foient fur le terrein de la file B C de la droite ,-& ils ache- veront ce mouvement comme le précédent, REMARQUE. Lorfqu'une troupe fait la contre-marche par rangs ; le premier 4 B peut marcher dans l'intervalle qui le {épare du fecond, commeon l’a enféigné dans le pro- blème précédent ; mais il peut marcher auffi en-de- hors du rang, &c cela en faifant demi-tour à gauche fur le pié gauche ; alors Le pié gauche des foldats refte dans l’alignement du rang , & leur corps eft en-de- hors. Les autres rangs faifant le même mouvement! marchent; favoir, le fecond dans l'intervalle qui le fépare du premier; le troifieme dans l'intervalle qui le fépare du fecond, & ainfi de fuite. En exécutant ainfi la contre-marche, la troupe fe trouve plus avancée vers la tête de l'intervalle ou de l’efpace qu’un homme occupe dans le rang; 8&c en la faifant de la premiere maniere , elle fe trouve ré- culée ou éloignée dela tête du même efpace, qu'on . peut évaluer environ à un pié & demi ip cts piss, c et ET ke 186 E V O. VI. PROBLÈME. Faire la contre marche par rangs en changeant de terrein, ou, comme on le dit ordinairement, ez gagnant le terre, La troupe qui veut faire la contre-marche par rangs en changeant de terrein , peut en changer en fe plaçant fur le terrein de fa droite, ou fur celui de fa gauche. Nous fuppoferons que c’eft vers la gau- che. | On commencera l'exécution de cette contre-mar- che comme dans le problème précédent; maïs au lieu de faire arrêter les foldats de la file BC de la droite ( fig. 51.), fur le terrein 4 D de celle de la gauche, on les fera avancer au-delà en FG, c’eft-à-dire juf- qu'à ce que les foldats des différens rangs du batail- lon qui forment la file 4 D, fe retrouvent fur leur même terrein 4 D. On fera alors arrêter toute la troupe, & on lui fera faire à droite fur Le pié droit, pour qu’elle fafle facé en tête comme dans fa premiere poñtion. La troupe ou le bataillon changera de terrein de la même maniere {ur la droite, par une contre-mar- che exécutée vers ce côté, comme on vient de l’ex- pliquer vers la gauche. VII PROBLÈME, Faire La contre-marche par demi-rangs, partant des ailes ou des flancs du bataillon. Soit le bataillon ou la troupe 4 BCD ( fig. 52.) : 6n la fuppofera divifée en deux également par une ligne droite quelconque Æ F, tirée de la tête à la queue du bataillon. Alors il ne s’agira plus, pour réfoudre le problème propolé, que de faire exécuter à la moitié de la troupe à droite, la contre-marche à gauche par rangs, & à la partie de la gauche, la con- tré-marche à droite aufli par rangs , expliquée au cinquieme problème. Ainf, pour exécuter cette contre-marche, on or- donneÿa aux demi-rangs à droite de faire à droite!, &r à ceux de la gauche de faire à gauche. Les foldats de la file BC de la droite avanceront enfuite un ou deux petits pas, ainfi que les foldats de la file 4 D de la gauche. Ils feront enfuite les uns & les autres un demi-tour; favoir, ceux de la droite ; à droite fur le pié droit ; & ceux de la gauche, à gauche fur le pié gauche. Ils avanceront après cela dans Îles intervalles des rangs fuivis des foldats des demi-rangs, qui feront le demi tour à droite & à gauche où les premiers l’ont fait, & ils marcheront jufqu’à ce qu'ils foient parvenus de part:&c d'autre fur le terrein des deux files du cen- tre G H 8 IK. Lorfqu’ils y feront arrivés, les demi- rangs de la droite feront à droite, & ceux de la gau- che à gauche, pour faire face du même côté; ce qui étant fait le mouvement feraæxécuté. Il eft évident que l’on fera la contre-marche de la même maniere par derni-rangs partant du centre, par quarts de rangs, &c. ARTICLE XI. Do la maniere de border La haie , € de former des haies. Nous avons déjà dit que border La haie ou fe mettre en haie, c'eft difpofer plufeurs rangs ou plufeurs files fur une ligne droite. Voyez BORDER LA HA1E. Ce -qui a donné heu au nom que porte cette évolution, c'eft qu’on fe fert effeétivement du mouvement dans %equel.elle confifte, pou difpofer une troupe le long ‘d’une tué, d’unretranchement, &c. Former des haies, c’eft, dit M. de Bombelles (srairé -des évolutions militaires ), compofer plufieurs haies avec.un nombre donné de files. E VO Ainfi on peut former des haies par compagnie, & par telle autre divifion que l’on veut. M. Bottée ne fait point de diftimétion entre l’ex- preffion de border la haie & de former des haies, ce qui eft aflez conforme à l’ufage; mais il paroïît qu'il de- yroit être retufe à cet égard, pour ne point expofer les officiers à regarder ces deux évolutions comme ne faifant qu’un même mouvement. Pour éviter cet inconvénient, nous allons en par- ler féparement. PREMIER PROBLÈME, Par rangs border la haie. Soit le bataillon ou la troupe 4 BCD (fig. 53.) à laquelle on veut faire border la haie par rangs. On commencera par faire ouvrir les rangs en- avant , enforte que leur intervalle foit à-peu-près égal à l’étendue de chaque rang. On fera faire enfuite un quart de converfon à chaque rang & du même côté, c’eft-à-dire à droite ou à gauche, après quoi la troupe ne formera qu'un feul rang LH (fig. 54.). Pour faire remettre le bataillon, on fait faire de- mi-tour à droite au rang, ou à la haie L H( fig. 54.), & enfuite un quart de converfon à tous les rangs particuliers dont il eft compolé, & dans le fens op- pofé à celui qu'ils ont fait d’abord ; après quoi fai- fant ferrer les rangs en-arriere, la troupe fe trouvera dans fa premiere poñition. IL PROBLÈME. A droite par rangs , border la haie en tête. Pour faire cette évolution , tous les rangs qui fui- vent le prenuer, doivent faire à-droite, & aller en- fuite fe placer fur l'alignement du premier 4 B (Jig. 55.) ; favoir , le fecond immédiatement à côté en £ F; le troifieme à côté du fecond, &c, REMARQUE. M. Bottée dit que cette évo/urion ne vaut rien; lorfque les rangs {ont fort grands ; la raïfon en eft fans doute la lenteur de fon exécution, & la diffi- culté de faire arriver tous ces différens rangs en mê- me tems fur l’alignement du premier 4 B. Si l’on fuppofe que le bataillon foit compofé de quatre rangs de cent vingt hommes chacun, il aura 40 toïfes de front, en donnant 2 piés à chaque hom- me dans le rang. Lorfque ces quatre rangs feront ré- duits à un feul , 1ls occuperont une étendue de 24a toiles; & comme les lignes obliques que décrivent les foldats du quatrieme rang feront encore plus gran- des que cette étendue, il eft aifé de concevoir qu’il faudroit un tems confidérable à ces foldats pour par- courir un auffi grand efpace. ; Si malgré cetinconvénient on veut exécuter cette évolution , elle {e fera à gauche de la même maniere qu’on vient de l’enfeigner à droite; elle fe fera auf également en queue, à droite & à gauche en tête, & de même en.queue: dans cette derniere mamiere on diminue le tems de fon exécution de moitié. III. PROBLÈME. A droite par files, border la haïe en téte. Cette évolution eft abfolument la même que celle du premier problème, en regardant les files comme des rangs, c’eft-à-dire après avoir fait faire à-droite ou à-gauche au bataillon. . Ainfi pour exécuter ce mouvement , on fera d’a- bord ferrer les rangs, & l’on fera ouvrir les files d’un intervalle à-peu-près égal à leur longueur ou leur étendue, | E VO Énfuite on fera décrire, en même tems, un quatt ile converfion à droite à toutesles files, chaque chef de file étant pris pour pivot; alors elles ne forme- «ont qu'un feul rang à la tête du bataillon. Voyez de fig. 56. Ce mouvement s’exécutera de la même maniere à gauche, Il fe fera aufli évalement en queue; mais alors ce feront les ferre-files qui ferviront de pivot au quart de converfion que feront chacune des dif- rentes files du bataillon. I V. PROBLÈME. Une troupe ou un bataillon étant rangé en bataille a l'ordinaire, en former des haies. Pour former des haïes il faut divifer Les rangs du bataillon en autant de parties égales qu’on veutavoir de haies ; & faifant enfuite border la haie À chaque - partie, on aura autant de haies que les rangs auront de divifons. Ainfi fi l’on veut former deux haies, il faut divifer les rangs en deux également ; fi l'on en veut trois, en trois, &c. Si lon veut former des haies par compagnies , 1l faut diviferles rangs par compagnie , & l’on aura au- tant de haies qu'il y aura de compagnies. Soit la troupe ou le bataillon 4 BCD (fig. 57.) auquel on vent faire former , par exemple , quatre haies. | On divifera les rangs en quatre parties égales, & on les ouvrira en-arriere, enforte que leur intervalle oit égal au front de chaque divifion , C’eft-à-dire dans cet exemple au quart du rang 4 B. On fera faire après cela demi-tour à droite à teut le bataillon. Eniuite fi l’on veut formet les haies à gauche, comme dans la figure, on prendra pour pivot les foldats qui terminent à gauche les divifions de cha- que rang, &c on fera faire un quart de converfion à gauche fur.ces pivots à chaque divifion. Lorfque ce mouvement fera exécuté » la troupe formera quatre haies, qui feront face à gauche, com- me 1l eft repréfenté dans la figure 56 où les zéros marquent la place des foldats avant le quatt de con- verfon de chacune des divifons des rangs, & les points noirs les mêmes foldats formant les quatre Baies demandées. Pour remettre le bataillon , on fera faire dermi- tour à droite aux haies, pour qu’elles faflent face à la droite BC, Chaque divifion fera enfuite un quart de converfon à droite, fur les mêmes pivots que ce- lui qu’elle a fait à gauche, ce qui étant exécuté , la troupe fera alors dans fa premiere poñition. = REMARQUES. Si les rangs du bataillon font divifés par compa- gnies, & que chaque compagnie foit de quarante hommes rangés fur -quatre rangs , elles auront dix hommes de front. Si le front du bataillon eft ainf divifé de dixen dix hommes , &c les rangs efpacés de intervalle que ces dix hommes occupent dans le: rang , 1l eft clair qu'en faifant former des haies À tout le bataillon, chaque haïe fera compofée d’une compagme, & qu'ainfi on aura formé des haies par compagnie, IT: Si l’on vouloit former les haies vers la droite du bataillon, le premier {oldat de la droite de chaque dvifon ferviroit de pivot, & toutes les divifions fe- TOient chacune un quart de converfion à droite {ur CE pivot: alors toutes les haies feroient face à la droite du bataillon. | Tome FI, EVO V, PROBLÈME. 187 Augmenter & diminier Le nombre des larg dune Éroupe en bataille, par Le n0yen de l'évolution précédente. Soit la troupe ou le bataillon 4 BCD (Ag. 58.) rangé fur quatre rangs , 6 qu'on veut mettre {ur cinq. On divifera les rangs en cinq parties égales ; & après les avoir ouverts de l'intervalle de chaqué di- vifion, comme on le voit Par les quatre rangées de zéros dans la figure 57, on leur fera former cinq haies par la méthode du problème précédent. Elles font marquées par les points noirs de la figure, Suppofant qu’on ait formé ces haies de droite à gauche , on leur fera faire demi-tour à droite, pour qu’elles faflent face au flanc droit. On divifera enfuite chaque haie en Cint parties égales, & on les fera ferrer de maniere qu'il ny ait entre les haies qu’un efpace égal à l'étendue de cha que divifon... On commandera après cela aux divifions de for- mer des rangs ; ce qu'elles feront en décrivant un quart de converfion de droite à gauche, Elles forméront alors les cinq rangs repréfentés dans la Jigure par le premier 4 B du bataillon , & par les quatre lignes pon@uées EF, GA, IL, & MN. Les quarts de cercle pondués expriment le che- min du foldat de la droite de chaque divifion des haïes pour former des rangs ; &c les quarts de cercle en lignes pleines, ceux qui ont été décrits par les foldats de la droite des divifions des rangs, pour for- met les haies. Pour diminuer par la même méthode le nombre des rangs d’un bataillon, foit la troupe 4BCD ( fig. 39.) rangée fur quatre rangs qu'on veut réduire à trois, . : On divifera chaque rang en trois parties égales , pour en former autant de haies repréfentées par les trois lignes de points noirs AR, ST, & VX. On divifera enfuite ces haies en autant de parties égales que l’on veut former de rangs , c’eft- à -dire entrois dans ces exemples ; & après avoir augmenté leur intervalle de l’efpace néceflaire pour le front de chaque divifion, ou avoir fait avancer $ T'en FG & VX en HI, on leur fera former des rangs qui occuperont l'étendue marquée pat les lignes 4 M, NO & PQ. REMARQUES. I. Pour que cette évolution puifle s’exécuter avec précifion , 1l faut que le nombre d'hommes des rangs du bataillon , & celui des haies, puiflent fe divifer exattement en autant de parties égales que l’on veut avoir de rangs. Si le rang 4 B de la troupe 4 BCD ( figure 59.) avoit été de cinquante hommes > On n’auroit püen former trois divifions égales ; s’il avoit été de qua rante-huit, on auroit eu trois divifions de feize hom- mes chacune. Ces divifions auroient formé , avec les quatre rangs de la tfoupe, des haïes de foixante- quatre hommes, dont on ne peut non plus prendre le tiers ; ce qui fait voir que la méthode précédente de changer le nombre des ranos d’une troupe , n’eft pas générale |, comme Le difent plufeurs auteurs, & notamment M. Bottée dans {on rraité des éVO= lufions, | Lorfque les rangs peuvent être partagés en antant de parties égales qu’on en veut former , les haies fe- ront toûjours fufceptibles d’être divifées par le mê- me nombre , parce qu’elles en feront multiples, ou qu'elles contiendront chaque divifion de rang autant de fois qu'il y aura de rangs. C’eft pourquoi la feule condition qu’exige le pro blème précédent pour être général , js s’agit- a 1j 158 E V O d'augmenter le nombre des rangs d’une troupe ou «un bataillon, c’eft que 4e rang puifle étre divifé en au- tant de parties égales que l’on veut avoir de rangs; mais pour le diminuer ce n’eft pas aflez de cette premiere condition , 2/ faut encore que les haies fe divifent par le anéme nornbre. Quelque néceflaire que foit cette circonftance, elle ne paroït pas avoir été remarquée par les écri- vains militaires, IT. Il y a des methodes différentes dans plufieurs circonftances, pour changer le nombre des rangs du bataillon, c’eft-à-dire pour les augmenter & pour les diminuer. Voici les exemples qu’en donneM. Botrée. « Étant à 4 fe mettre à 2, étant à 8 fe mettre à 4, » étant à 16 fe mettre à 8, étant à 20 fe mettre à 10, » étant à 24femettre à 12, étant à 12 fe mettre à 6, » étant à 6 fe mettre à 3, étant à 18 fe mettre à 9: # doublez les rangs par demi-files. Au contraire, dit cet auteur, étant à 2 fe mettre »à4,de4à8, de 8 à 16, de 10 à 20, des à 10, » de 12 à 24, de 6 à 12, de 3 à 6 : doublez les files » par le côté ou en queue, » Etant à 4 fe mettre à 6 on à 123 à 3, à 9, & à » 18 : triplez les files, vous ferez à 12 : doublez les # rangs par demi-files, vous ferez à 6 : doublez-les # encore de même , vous ferez à 3 ; puis triplez les » files, vous ferez à 9 : enfin doublez les files, vous # ferez à 18. » Pour fe remettre à 15 de hauteur, lorfqu’on eft » à 4, il faut fe mettre à 5, pat la regle générale » (c’elt ainfi que M. Bottée appelle la méthode du pro- blème précédent) ; « & à 15 en triplant les files ». III. Malgré la fimplicité & la facilité de ces me- #hodes, on peut en trouver d’autres dont l'exécu- tion , dans plufeurs cas, ne fouffrira pas plus de dif- ficulté. Par exemple, fi l’on a une troupe rangée fur qua- tre rangs, & qu'on veuille la mettre à ses , On di- vifefa les rangs en cinq parties égales : on fera mar- cher la cinquieme partie de la droite ou de la gauche du bataillon en arriere, jufqu’à ce que lepremier rang de cette partie dépañe le dernier des quatre autres, de l'intervalle qui doit être entre les rangs : on fera faire un quart de converfion à cette partie, de ma- niere que fon dernier rang devenu le premier, foit dans l'alignement du flanc des quatre autres du même côté: on ouvrira les rangs de la cinquieme partie, & on leur fera border la haïe , & faire enfuite un quart de converfon, pour former le cinquieme rang demandé Cette méthode fera toüjours très-facile pour aus- menter d’unrang le nombre des rangs d’un bataillon : elle peut fervir auf à les augmenter de deux rangs, en faifant fur deux divifions des rangs ce que l’on vient de faire fur une ; maïs elle a l’inconvénient de déranger l’ordre & l’arrangement des foldats d’une même compagnie ; inconvément auquel on fait beau- coup plus d'attention à-préfent qu’autrefois, & dont la redification eft vraiflemblablement dûe aux ob- {ervations de M. Le maréchal de Puyfégur fur ce fu- jet. Voyez le chapitre xj. de l'art de la guerre de cetil- luftre auteur, som. I. fur Parrangement des compagnies 6: des officiers dans le bataillon, Pour diminuer de même le nombre desrangs d’une troupe ou d’un bataillon ; par exemple, pour le met- tre à trois lorfqu'il eft à quatre. On divifera le dernier rang CD (figure Go.) en deux également ; on leur fera faire demi-tour à droi- te, & l’on fera décrire un quart de converfion à cha- que demi-rang CE, DF vers les ailes y les extrémités C & D étant prifes chacune pour pivot. Ce mouve- ment étant exécuté , le demu-rang C Æ de la droite occupera la ligne droite € G; &c celui de la gauche, ® E VO On fera avancer ces demi-rangs d’un petit pas ou environ, & on les partagera en trois parties égales. On fera décrire un quart de converfion à chacune de ces parties ; avoir, à celle de la droite CG, à droite fur le talon ganche; & à celle de la gauche D Æ, à gauche fur le talon droit ; & on leur ordonnera de marcher en-avant, pour aller fe placer à côté des ailes des trois premiers rangs, éc, IV, Ce mouvement peut être un peu long à exé- cuter , lorfque les rangs du bataillon font fort éten- dus ; car s'ils occupent, par exemple, un efpace de quarante toiles, les demi-rangs en occuperont vingt; & les foldats Æ£ & F les plus éloignés des pivots C& D, décriront chacun Le le quart de converfon des lignes d’environ foixante toïfes, ce qui ne peut manquer de rendre leur mouvement fort lent ; mais on peut en abreger l’exécution en faifant faire à- droite à la moitié du dernier rang de la droite, &c à- gauche à celle de la gauche ; après quoi les faifant marcher devant eux, de maniere que lorfque cha- que tiers du demi-rang aura dépafñlé les files de la droite & de la gauche, il fafle un quart de conver- fion pour aller fe placer à la droite & à la gauche des trois premiers rangs qui n’ont bougé, &c. V. Il faut obferver que pour que ce mouvement fe fafle exaétement, il faut que le nombre des (oldats des rangs puifle fe divifer en fix parties égales ; au- trement il y aura des divifions inégales qui rendront le mouvement dont il s’agit moins régulier. ARTICLE XIL. De La formation des Bataïlions. I. Du bataillon quarré. La formation ordinaire du bataillon fur deux dimenfons inégales, eft la plus ordinaire & la meilleure , lorfqu’on a plufieurs ba- taillons à placer les uns à côté des autres, ou lorfque les flancs ne peuvent être attaqués ; mais fi l’on eft expofé aux attaques de l'ennemi de différens côtés à-la-fois, & dans un pays découvert , la forme or- dinaire du bataillon n’eft pas propre à en diftribuer. Ou partager la force également : 1l faut donc dans ces circonftances s'appliquer à réunir les foldats , pour les mettre en état de s’aider réciproquement pour foûtenir les efforts de l’ennemi de tous les différens côtés qu'il peut attaquer. De toutes les figures qu’on peut faire prendre alors au bataillon pout faire feu de tous côtés, la plus fim- ple, & celle qui a été la plus eftimée & la plus pra- tiquée jufqu'à préfent , eff celle du quarré (voyez BA- TAILLON QUARRÉ), où Pon a donné la maniere de trouver par le calcul le côté de ce bataillon, lorf- que le nombre d'hommes dont on veut le compoler,, eft donné, Il s’agit d'expliquer ici la méthode de changer fa forme ordinaire en quarré par des mou vemens réguliers. PREMIER PROBLÈME. Un bataillon ou une troupe quelconque d'Enfanterie étant en bataille, en former un bataillon quarré & centre plein. On fuppofe que celui qui veut faire exécuter cette évolution à une troupe , fait l'extraétion de la racine: quarrée, pour trouver le côté du nombre quarté donné, ou, ce qui eft la même chofe, du nombre d'hommes dont le bataillon eft compofé. Réfolurion. On commencera par trouver par le À 4 calcul le côté du quarré donné, ou le côté du plus grand quarré contenu dans le nombre d'hommes don: né, lorfque ce nombre ne forme pas un quarré par: fait. On mettra enfuite la troupe par différens double- mens de files , à la hauteur la plus approchants qu'on £EVO potnra de celle qielle doit avoir étarit difpofée en quatré. 4 | Onprendra après cela la différence du front au- quel elle fera réduite à celui quelle doit avoir dans le quatre ; ‘6x l’on fera marcher ‘cette différence fur Je derriere de la troupe, pour y former autant de rangs qu'il fera néceflairé pour rendre les files de la troupe épales aux rangs, lorfque le nombre d’hom- mes dont elle féra compofée , fera un quarré par- fait; Ou pour former autant de rangs qu’on pourra, lorfqu'il né le fera pas. Soit, par exemple, un bataillon de 400 hommes rangés à quatre de hauteur, où fur quatre rangs dont on veut former un bataillon quarré. Les rangs feront dé cent hommes chacun, & les files dé quatre. On cherchera la racine quarrée de ce nombre, & l'on trouvera 20 pour fa valeur, fans refte ; ce qui fait voir que le nombre propofé, 400 , eft un quarré parfait : en effet, 20 multipliés par 20, donnent 400 pour produit. Cette premiere opération fait voir que lorfque le Bataillon fera difpofé en quarré , fes rangs &c fes files féront chacun de 20 hommes , racine quarrée de A00. On doublera les files aurant de fois qu’on le pout- Ya, pour approcher de la hauteur du nombré 26. Après le premier doublement , les rangs feront ré- duits à so hommes, & les files en auront huit. En doublant les files encore une fois, les rangs au- *ont vingt-cinq hommes, & les files feize , nombre le plus approchant dé vingt qu’il eft poffible de trou- vér de cette maniere; car fi on les doubloit encore une fois , elles feroient à trente-deux, qui excede où furpafle le nombre vingt qu’elles doivent avoir. D'ailleurs ce dernier doublement ñe potrroit plus s'exécutér, à caufe du nombre impait vingt-cinq auquel le fecond doublement a réduit Les rangs, dont on ñé peut prendre la moitié. La troupe ou le bataillon étant par lé fecohd dou blement à vingt-cinq de front & {eize de hauteur, on Ôtera de vingt-cinq le nombre d’hommés vingt du font du quatré ; il reftera einq files de feize hotimes chacune , qu’on fera matcher à la queue de la trou pe, &t dont on forméra quatre rangs de vingt hom= hes chactüin, Etc. Il eftévident quié par cette formation on confttui- ra toures fortes de bataillons quartés à céntre plein, lorfque le nombté d'hommes qu'on äuta, fera un quarré parfait. Cette même regle pourra même avoïf lieu, quél que foit lé nombre d'hommes du bataillon ; il en té- fultera feulement quelque petite diféténcé dans fes deux dimenfions , lorfque les hommes dont il fera cées les unes derriere les autres , ferrées à la pointe de Pépéé , forfmeront une troupe de vingt-un hom- mes de front, & de vingt de hauteur où profondeur. À Pégard de la fixieme ; de quinze de front, on la placéra à la queue, en formant avec le nombre d'hommes quelle contient ; autant de rangs qu'on. 199 EVO pourra, c’eft-à-dire deux dans cet exemple + il ref- tera dix-huit honimes dont on pourra former des pe- lotons fur les angles, ou un dernier rang plus ou- vert que les autres ; ce quu peut fe faire fans incon- vénient. | Lorfque le bataillon quarré à centre plein eft for- mé , il s’agit de lui faire faire face de tous côtés, de maniere que chaque côté ait exaétement la même défenfe & le même feu. | Rien n’eft plus aifé que de donner cette difpoñition aux quatre premiers rangs qui forment les côtés ex- térieurs du quarré; mais il n'en eft pas de même pour la leur donner conjointement avec les côtés in- térieurs. Voici la méthode que prefcrit M. Bottée pour cet effet. Il faut d’abord faire préfenter les armes en tête & en queue par demi-files. Enfuite faire marquer par deux fergens , l’un en tête & l’autre en queue, les hommes qui doivent faire à-droite, &c ceux qui doivent faite à-gauche ; lavoir, Au premier rang , un de l’aile gauche à gauche. Au fecond, deux à gauche & un à droite. Autroifieme, trois à gauche & deux à droite, & ainfi de fuite dans le même ordre fur chaque demi-file de la tête & de la queue. Pour aller plus vite on peut mettre deux fergens à chaque aile, dont l’un difpofera Les foldats de cha- que demi-file de la tête, dans l’ordre qu’on vient d'expliquer; & l’autre ceux de la queue, &c. Il faut obferver, 1°. à l'égard des demi-files du bataillon qui font face en queue, que leur aile gau- che eft dans la file de l’aile droite qui fait face en tête, & l'aile droite dans la file de la gauche des demui-files de la tête. 2°, Que quand les files ou les rangs font en nom- bre impair, il eft indifférent que le rang du milieu fe tourne pour faire face à la queue du bataillon, ou qu'il refte dans fa premiere potion, parce qu'il fe trouvera toïjours que le foldat du milieu de ce rang fera indifféremment face en tête ou en queue, & que les deux parties ou les deux moitiés du même rang feront, l’une face à droite, & l’autre face À gauche. k Nous n’entrerons pas dans un plus grand détail fur le bataillon quarré à centre plein. Il eft aifé d’obferver que ce bataillon, pour peu qu'il foit un peu confidérable, ne peut fe mouvoir que très-difficilement ; que les foldats des rangs in- térnieurs au-delà du quatrieme, ne peuvent faire ufage de leur feu, & que le canon ne peut manquer d'y caufer beaucoup de defordre. Par ces différentes confidérations nous ne parle- ons point des autres bataillons à centre plein; c’eft- à-dire, ni des triangulaires, ronds, otogones, rhom- bes, Gt. nous renvoyons ceux qui voudront en étu- dier la formation, au livre de M. Bottée, intitulé Etudes militaires. Des bataillons à centre vuide. Les bataillons à cen- tre vuide ont un plus grand front que Les pleins, & par conféquent ils peuvent oppofer un plus grand feu à l’ennemi: l’on peut d’ailleurs enfermer dans leur intérieur, ou dans le vuide qui eft au centre, l'artillerie , le thréfor de l’armée, des bagages, & différentes autres chofes que l’on veut conferver, & dont on veut dérober la connoiffance à l’ennemi. Formation du bataillon quarré à centre yuide. Soit fuppofé un bataillon ordinaire 4 BCD ( fig: 61.) de quatre cents hommes, non compris les grenadiers ë& le piquet, rangé fur quatre rangs de cent hommes chacun. On partagera le front 4B en huit divifions éga- les, ou à-peu-près égales , s’il ne peut fe partager exaétement dans çe nombre de parties, Par exemple, le front 4 B étant de cent hommes ; fa huitieme partie eft de douze, & l’on a le refte quatre, c’eft-à-dire que douze eft contenu huit fois dans cent avec le refte quatre. Pour faire difparoître ce refte quatre , on mar- quera les deux divifions du centre EF, de treize hommes chacune, ainfi que la divifion 8 G de-la droite, & 4 Æ de la gauche. On ordonnera enfuite à tout le bataillon de faire demi-tour à droite , afin que lorfque le quarré fera. formé, le premier rang fe trouve en-dehors du ba- taillon. On commandera aux deux divifions du centre, que l’on confidérera comme uné feule divifion £ F, de ne point bouger , & au refte du front de la droi- te & de la gauche , de faire enfemble un quart de converfon ; favoir, au refte du front de la droite, devenu gauche par le demi-tour à droite, de faire un quart de converfion à droite ; & au côté de la gauche , devenu droite ; de le faire à gauche. | Ce mouvement étant exécuté, l’on a trois côtés du bataillon ; pour avoir le quatrieme, il ne s’agit plus que de replier une partie des deux côtés qui viennent de faire un quart de converfon , de ma- niere qu'ils forment le quatrieme côté oppofé à la divifion du centre. Pour cet effet , on ordonne aux deux premieres divifions, de chacun de ces côtés, de ne point bou- ger , & aux divifions X & Ÿ, qui les terminent , de faire enfemble un quart de converfion qui les joi- gne enfemble en F, pour fermer le bataillon. Par ce dernier mouvement , les quatre côtés du bataillon font formés , comme la figure le fait voir. On ordonne à tous les hommes du bataillon de faire demi-tour à droite, pour faire face en-dehors du bataillon. Le bataillon , après ces différens mouvemens ; + n'eft pas encore entierement formé ; les angles ayant des efpaces vuides , il faut les remplir pour qu'il foit régulierement quarré. Pendant que le bataïllon fe forme de la maniere qu'on vient d'expliquer , les officiers des grenadiers. & ceux du piquet , partagent chacun leur troupe en deux patties égales ; ce qui fait quatre troupes ow quatre pelotons ( voyez PELOTONS ), avec lefquels on remplit les angles du bataillon. Pour évaluer le nombre d'hommes néceflaires pour remplir chacun de ces efpaces, il faut en déter- miner les dimenfons. Pour cet effet, foit l’un de ces angles rentrans à remplir a bc (fig. G2.), on imaginera une parallele fg au côté ab, à la diftancede ce côté de deux piés, c’eft-à-dire de l’épaifleur d’une file : on imaginera de même une autre parallele / au côté bc, égale. ment éloignée de ce côté : on prolongera parla pen- fée les lignes qui forment les deux fonds du bataïl- lon, jufqu'à ce qu’elles fe rencontrent en 4, On aura alors le quadrilatere f/ 4 d ä remplir. Si l’on fuppofe que les rangs foient ferrés à la pointe de l'épée, 1ls occüperont chacun avec leur intervalle un efpace de trois piés; ce qui donnera. neuf piés pour la dimenfon d f ou # Z, qui eft égale à l’épaifleur des quatre rangs du bataillon, & {ept piés pour l’autre d z ou f !, qui a deux piés de. moins. Préfentement il faut obferver que-les hommes qui doivent remplir le quadrilatere f / kd, doivent for- mer des rangs des côtés d f & dh, & que comme haque foldat occupe dans le rang un efpace à-peu- près de deux piés , le côté d f pourra contenir cinq hommes de front, & le côté dk, quatre en fe fer- rant un peu fur « à & c g. Ain 1l faudra buit hommes pour garnir les deux E VO côtés d f &: d h du quadrilatere f/ 44, & le foldat ui fera en d, appattiendra également à chacun des côtés df & dh On formera trois rangs en-dedans de ce quadrila- tere, derriere chacun des deux premiers, à La dif- tance de trois piés de ces premuers ; le tout ainñ qu'on le voit dans la figure où les points blancs ou les zéros repréfentent les foldats du peloton que on veut former. On aura dix-fept hommes pour remplir Pangle dont il s’agit : on leur fera préfenter les armes, com- me les petites lignes tirées fur les zéros l’indiquent. A l'égard du foldat du fommet à, il peut indifférem- ment préfenter fes armes du côté d fou dk , ou fui- want la diagonale du petit quadrilatere d/f4 /. REMARQUES. T. Si le bataillon propofé étoit à plus on moins de hauteur , on évalueroit le nombre d'hommes dont . On auroit befoin pour en remplir les angles, de la même maniere qu'on vient de le faire , en confidé- rant quelles feroient.les deux dimenfons du quadri- lateère qu'on voudroit remplir. E. Lorfque le nombre d'hommes qu’on a pour chaque peloton des angles du quarré, eft plus grand qu'il n’eft néceffaire pour les remplir, on peut faire entrer dans le vuide du bataillon l’excédent, pour fervir d’une efpece de réferve propre à fuppléer aux hommes qui pourroient enfuite manquer aux trou- ! pes ou pelotons auxquels ils appartiennent. Il. I ya une autre maniere plus fimple de former Te bataillon quarré , fans avoir la peine de remplir les angles , comme dans la formation précédente. Pour cet effet, 1l faut comprendre les grenadiers & le piquet dans les divifions du bataillon , en met- tant à l'ordinaire les grenadiers à la droite du batail- Jon, & le piquet à la gauche. Suppofons le bataillon de treize compagnies, y compris les grenadiers , & regardant Le piquet com- mé une autre compagnie , On aura quatorze com- | pagnies de front : comme ce nombre de compagnies : ne peut fe partager exatement en huit divifions d’un nombre de compagfies completes , on les divifera en cinq parties ; favoir, la premiere divifon à droi- te de deux compagnies ; la feconde, de trois ; latroi- fieme, de quatre ; la quatrième , de trois ; & la cin- .quièeme , de deux : cela pofé , on fera faire demi- tour à droite à tout le bataillon : on ordonnera à la -divifion du centre de ne point bouger, & aux deux autres divifons de la droite & de la gauche, de faire un quart de converfon , comme dans la formation : précédente ; alors chaque divifion de deux compa- : gnies , de la droite & dela gauche, fera un autre -quaft de converfion pour former le quarré. Ce qui étant exécuté, on fera avancer les deux côtés du quarré de la droite & de la gauche en-de- dans le bataillon, jufqw’à ce que le dernier rang de : chacun de ces'côtés , qui étoïent le premier avantle | demi-tour à droite , fe trouve dans le prolongement .ou Palighement des files qui terminent la droite & | la gauche de la divifion du centre, & le bataillon era alors formé. Si l’on fuppofe que les compagnies foient de qua- | tante hommes, & qu’elles foient à quatre de hau- teur, elles auront chacune dix hommes de front : la _divifion du centre, compofée de quatre compagnies, : aura quarante hommes de front; les deux côtés qui Ont chacun trois compagnies , auront trente hom- mes de front ; mais étant entrées dans le bataillon, elles atigmentent leur front de quatre hommes de l'aile droite de la tête & autant de la queue, ce qui fait que ces côtés ont chacun trente-huit hommes de front ; maïs Les foldats de la droite & de la gauche de la tête & de la queue , qui augmentent le front des côtés , diminuent par-là la tête & la queue de deux { oldats : donc il n’en refte que rrente-huit pour ces côtés ; donc, &c. VAN REL REMARQUE. Linftruëtion du r5 Mars 1754, fe fert pour chan- ger un bataillon ordinaire en bataillon quarré, de cette même formation ; mais elle donne à ce batail: lon le nom de colonne. | | Fes D Cette colonne ou ce bataillon eft à fix de hau- teur ; 1l eit fermé du côté de la queue par le piquet: les grenadiers font à la tête en-dehoys ; ils ne font parte d'aucun des côtés du bataillon , & ils peu- vent par conféquent fe porter également vers célui de ces côtés qu'on juge à-propos. Voyez l'inftruc- tion qu’on vient de citer. dés: Il ÿ a plufieurs autres manieres de former le ba- taillon quarré à centré vuide ; on fe bornera à en ajoûter 1c1 une, qui paroït plus générale que celle qu'on vient d'expliquer, mais aufli qui exige la con- noïflance de l’extraétionde la facine quarrée que cette derniere ne fuppofe point. sf Soit une troupe d'infanterie d’un nombre quel- conque d'hommes, comme de douze cents, dont on veut faire un bataillon quarré , qui paroïfie , par exemple , de trois mille fix cents hommes ; il s’agit d’abord de trouver la hauteur qu'on doit donner à ce corps de troupes. Uri On commencera par extraire la racine quarrée de trois mille fix cents : on la trouvera de foixan- te : on multipliera ce nombre par deux, ce qui don- nera cent vingt pour le produit: on multipliera auffi foixante moins deux; ou cinquante - huit par deux, | ce qui donnera cent feize , Qui étant ajoûtés à cent vingt, font deux cents trente-fix : ce nombre eft le front que doivent former les douze cents hommes propotés en bataille, pour les transformer enfuite En bataillon quarré. Le front du bataillon ou de la troupe de douze Cents hommes , étant ainfi trouvé , on aura fa hau- teur ou le nombre de fes rangs, en divifant douzé cents par deux cents trente-fix , c’eft-à-dire la fom- me où le nombre de tous les hommes de la troupe, par le nombre de ceux qui forment le front ; faifant cette divifion , on trouvera le nombre de cinq pour le quotient : c’eflle nombre des rangs que doit for- mer la troupe propofée : il refte vingt hommes, ‘qu'on pourra , après la formation du bataillon , pla- cer en pelotons à quelques-uns de fes angles pour le couvrir , Ou méttre dans le vuide ou le centre, pour fervir à remplacer les pertes que peut faire le | bataillon. Maintenant pour former le bataillon quarré, on fera mettre la troupe de douze cents hommes à cinq de hauteur : on la divifera enfuite en quatre parties ; avoir , la premiere à droite de cinquante-huit hom- me de front , la feconde de foixante , la troifieme de cinquante-huit , & la quatrieme de foixante. _ On fera faire demi-tour à droite à la partie de la droite & aux deux de la gauche , & l’on ordonnera à Ces trois parties de faite un quart de converfon ; favoir , à la premiere de la droite, à droite, c’eft- a-dire vers la gauche de la premiere poñtion , & aux deux parties de la gauche, à gauche ou vers la droite de leur premiere pofition. | Ce premier mouvement étant exécuté , il ne s’a- gira plus pour former le bataillon quarré, que de faire faire à la derniere divifion, un deuxieme quaté de converfion dans le même fens que lé premiers alors les divifions foixante & foixante feront oppd= fées , ainfi que celles de cinquante-huit & cinquan- te-huit, qu'on fera entrer dans le bataillon , jufqu’à ce que les premiers rangs de ces parties, devenuis | les derniers par le demi-tour à droite, fe trouvant 192 E VO dans l'alignement des files qui terminent la droite & la gauche des deux derniers de foixante. On fera faire après cela face en-dehors aux divi- fions qui ont fait le demi-tour à droite, & l'on aura le bataillon quarré demandé , qui paroîtra de trois mille fix cents hommes , dont chaquecôté fera de foixante hommes , & la hauteur de cinq. Pour prouver que ce bataillon contiendra les dou- ze cents hommes propofés, confidérez que les deux faces oppofées de foixante hommes, en contiennent à cinq de hauteur, trois cents chacune , ce qui fait fix cents pour les deux, ci . . : . . + 600 Que les deux autres côtés en contiennent cHiemble, RTE ue: Due 212, 480 Plus les vingt de refte « . . + « - 20 So à OR ONE PE SE Si l'on fixoit la hauteur ou le nombre des rangs de.chaque côté du bataillon; fi l'on vouloit par exemple que les troupes y fuffent à fix de hauteur, il faudroit divifer le nombre d’hommes donnés dou- ze cents par fix. Onauroit deux cents hommes pour chaque rang ou pour le front du bataillon à réduire en quarré. … Pour le faire , il faut ajoûter à ce nombre quatre unités, ce qui donnera deux cents quatre, dont le quart cinquante-un fera le côté du quatré de- “‘mandé. : On le formera comme le précédent en divifant le front réel deux cents.en quatre parties, dont la pre- miere fera de quarante-neuf hommes, la feconde decinquante-un , la troifieme de quarante-neuf, êc la quatrieme.de cinquante-un. On aura douze rangs de cinquante-un hommes, TANT RES 1 eu SUINES et 612 … Plus douze rangs de quarante-neuffaifant 588 Total “ PONTS à 1200 h°*. Si l’on vouloit mettre-le bataillon quarré à qua- tre de hauteur , il faudroit donner d’abord cette hau- teur à la troupe propofée douze cents, ajoûter qua- tre unités à fonfront trois cents , ce qui fera trois cents-quatre, dont le quart foixante-feize fera Le côté du quarré cherché. On le formera comme les pré- cédens, en divifant le front en quatre parties , dont la premiere & la troifieme ayent deux unités de moins que la feconde & la quatrieme. Si L'on veut favoir quel eft Le plus grand quarré apparent qu’on .peut former avec une troupe d’un nombre d'hommes donnés, comme par exemple de douze cents , il eft clair que ce plus grand quatré {era celui où les rangs de la troupe feront fimples , c’eft-à-dire dont chaque côté ne fera formé que d’un feul rang. C’eft pourquoi comme le nombre d'hom- mes propofés compofent le front de la troupe en- tiere, il faudra lui ajoûter quatre.unités, ce qui don- nera douze cents-quatre, dont le quart trois cents- un fera le côté du quarré qu’on pourra former avec douze cents hommes , & qui feroit, s’il étoit plein, de neuf mille fix cents-un hommes. Après la formation du bataillon quarré, on pour- rôit, à l'imitation de la plûpart des auteurs qui ont écrit fur les évolutions, donner celle des autres ba- taillons , comme celle des triangulaires , des ronds, des oétogones, &c. Mais comme il ne doit pas être queftion ici d’un traité complet fur cette matiere, en referve ce détaïl pour un ouvrage particulier, que l’on fe propofe de donner inceflamment fur cette matiere, & quivaura pour titre Æémens des Evolu. tions , où Motions militaires de l’'Infanterie,. On ter- minera ce long article par l'explication du mouve- ment appellé 4 Paflage du défilés où du por. ARTICLE XIIL Du Paflage du défilé ou du pons. Lotfqu’une troupe marche en ordre de bataille fur un grand front | &c qu’elle eft obligée de pañer dans unlieu plus étroit, 1l faut néceffairement qu’elle fe rompe pour proportionner {on front à l'étendue ou à la largeur du pañlage ou du défilé dans lequel elle doit entrer. Ce pañlage eft appellé défilé , lorf- qu'il ne permet dy pafler que fix ou huit hommes de front ; & comme la plüpart des ponts qu’en ren- contre en campagne, & qu’on fait exprès pout Le pañlage des troupes, n’ont guere plus de largeur, de-là vient apparemment que le mouvement nécef- faire pour faire pañler une troupe dans ces fortes de: lieux étroits, a été appellé Ze paffage du défilé ou du pont. i Il y a des défilés plus petits & d’autres plus lar: ges ; la méthode de faire pañler une troupe par un défilé capable de contenir fix ou huit hommes de front , s'applique aifément à tous les autres défilés. Il eft évident qu’on peut faire pañler un défilé à une troupe, pat {a droite, fa gauche, ou fon cen- tre ; mais la meilleure façon ef de le lui faire pañler par le centre, ce qui s’exécute aifément lorfque le défilé a de largeur le double dela hauteur de la trou- pe ou du bataillon, parce qu’on peut alors faire pañler en même tems une file de la droite &t de la gauche, qui faifant enfemble un quart de.conver- fon pour entrer dans le défilé , forment un rang du double de la hauteur de la troupe; çe qui.en fait avancer également les deux parties de la droite êr de la gauche dans le défilé. | Soit ABCD ( fig. 63.) un bataillon auquel on veut faire pafler le pont X F de douze piés de lar- geur ; c’eft-à-dire qui ne permet le paflage qu'à fx hommes de front à-la-fois. Soit fuppofé ce bataillon à trois de hauteur , & que le centre fe trouve pla= cé exattement devant le milieu du pont, On prendra dans le centre une divifion de fix hommes, de façon qu'il y en ait trois du côté de læ droite, & autant de celui de la gauche. On fera avancer cette divifionfur le pont, & l’on.ordonnera au côté dela droite durefte du bataillon de faire à- droite, & à celui de la gauche de faire à-gauche ; chacune de ces aîles s’avancera enfuite d’un petit pas vers le centre, pour que les files qui fuivent im- médiatement celles de la droite & de la gauche de la divifion du centre qui occupele pont, fe tronvent dans le prolongement de ces files. Alors:la file dela gauche de l’aîle droite, & celle de la droite de Paile gauche, feront chacune un quart de converfion pour former un rang de fix hommes qui marchera à la fuite de la divifñion du centre ; les autres files de cha- cune des aîles feront le même mouvement pour fui- vre:les deuxfiles précédentes ; & lorfqu’elles feront ainfles.unesderriere lesautres, le bataillon formera une colonne dont Le front fera du double de la hau- teur de la troupe, & la profondeur de la moitié du front du bataillon. # Cette colonne s’avance direétement au-delà du pont autant qu’on le juge néceffaire pour pouvoir lui faire reprendre aifément fon premier ordre de bataille. On plante aflez ordinairement desjalons a & & dans l’alignement des deux côtés du pont, pour que la colonne ne s’écarte pont dans fa marche de cette diretion. Lorfqu’on la trouve fuffifamment avancée, on lui ordonne de s'arrêter. On commande à la divifion du centre de ne point bouger ; aux demi-rangs de la droite de la. colonne, de faire à-droite, & à ceux de la gauche, de faire à- | gauche ; gauche , 8 de former enfuite chacun un quart de converfon, favoir la divifion des demi-rangs de la droite à droite, & celle des demi-rangs de la gauche à gauche , pour aller reprendre leur premiere pof- tion à la droite 8c à la gauche de la divifion du cen- tre, & la troupe {e trouve ainf remife'dans le même ordre de bataille où elle étoit avant le pañlage du pont ou du défilé. Foyez la feconde difpofition de la FL. C3. | _ Cette évolurion peut s’exécuter encore de la ma- miere fuivante , par laquelle on augmente plus promptement le front de la divifion du centre, ce qui peut être plus avantageux lorfqu’on eft à portée d’être attaqué au-delà du paffage ou du défilé. . Soit encore (fg. 64) le bataillon 4BCD qu doit pafler le pont ou le défilé Æ 7. On fuppofe que le centre de ce bataillon fe trouve exactement placé vis-à-vis le milieu du défilé, qui peut conte- nir de front le double d'hommes de la hauteur du bataillon. On fuppofe aufli que ce bataillon eft à trois de hauteur. On marquera la divifon du centre compofée dans ces exemples de fix files dont trois feront du côté de la droite , &c trois du côté de la gauche. On fera avancer ces fix files dans le défilé, &l’on ordonnera au refte des demirangs de la droite de faire à-gauche, &c à celui de la gauche de faire à- droite. Alors les files de ces demi-rangs feront face l’une à l’autre ; & à mefure que celles du centre avance- tont, celles de la droite & de la gauche qui fuivent immédiatement Ja divifion du centre, marcheront juiqu’à ce qu’elles le trouvent dans l'alignement des files qui la terminent à droite & à gauche. Lorf- qu'elles y feront parvenues, elles feront un quart de converfion de part & d’autre pour former un rang , &celles fuivront la divifion du centre ; les au- tres files qui les fuivent feront le même mouvement, comme dans l'exemple précédent. Mais ce qui rend cette évolution différente , c’eft qu’au lieu de faire avancer la divifion du centre aflez au-delà du défilé pour que tout le bataillon foit en colonne, onne la fait marcher qu’à une diftance un peu plus grande que le double de la hauteur du bataillon , & l’on or- donne à la divifion égale qui la fuit, c’eft-à-dire dans cet-exemple aux trois rangs qui la fuivent im- médiatement , compofés de trois files du côté droit, &t d'autant de files du côté gauche, de faire à-droite &c à-gauche par demi-rang , &c de marcher enfuite devant eux pour aller fe placer à la droite & à la gauche de la divifion du centre. Les trois rangs qui les fuivent immédiatement font le même mouvement , & de cette maniere la troupe fe reforme à droite & à gauche par des divi- fions de la hauteur du bataillon, Voyez la feconde difpoñtion de la figure 64. | REMARQUES. TI. Pour exercer les troupes à cette évo/urion, on fait placer à quatre ou cinq toifes en-avant du cen- tre fix {ergens à droite &-autant à gauche , faifant face les uns aux autres. - Ils laiffent entr’eux la largeur qu’on veut fuppofer un défilé, & l’on y fait pañler le bataillon dé Ja ma- mere qu’on vient de l'expliquer. On le fait reformer enfuite par la premiere ou la feconde des deux mé- thodes précédentes. | [1 Il eft évident quedans cette évo/urion on ne dé- Tange point l’ordre des foldats, ni des compagnies. Elles fe trouvent enfemble en colonne comme dans l'ordre de bataille ordinaire au bataillon. _ ÎTT. Lorfque le défilé n’a de largeur que pour le paflage d’une file de front, c’eft -à-dire pour trois Soldats, f le bataillon eft à trois de hauteur, pour Tome FT. | A | PR EVO ü93 quatre s’il eft à quatre, €, on le pafle par files de cette maniere, On fait marcher les trois files div centre dans le défilé , & Ï On fait faire à-gauche à l'aile droite , & à-droite à l’aîle gauche, La file qui fuit immédiate- ment à droite la divifion du centre, fait un petit pas eravant, 6 un quart de converfion à gauche, qui la met à la fuite des divifions du centre avec lef- quelles elle s’avance dans le défilé. La file de la droite de l’aîle gauche s’avancée aufi d un petit pas comme la précédente, & elle fe met à fa fuite par un quart de converfon à droite. Chacune des files de l’aîle droite & de l'aile gau- che du bataillon, fait alternativement le même mou vément pour entrer dans le défilé, Lorfque la pre nuere de la gauche de l’aîle droite fe trouve au-delà elle fait à-droite, & elle marche devant elle jufqu'à le ferre-file où le foldat de la queue dépafñle d’envi- ton un petit pas le ferre-file de la droite de La divi- fion du centre. Alors elle fait un quart de converfion à gauche pour aller reprendre fa premiere pofition à côté de la file de la droite du centre. La file de la droite de l’aîle gauche qui la fuit im médiatement , fait aufi-tôt fa fortie du défilé , OÙ lorfqw’elle a joint la queue de la divifion du centre, un àgauche. Enfuite elle marche devant elle, pour que le foldat qui la termine dépañle d’environ un pié le ferre-file de la file de la gauche du centre ; puis elle fait un quart de converfon à-droite pour re- prendre fa premiere poftion à la gauche de la di- vifion du centre. | Enfuite la file de la droite qui fuitimmédiatement, va fe replacer à la droite de la même maniere ; celle de la gauche qui fuit à la gauche, &toutes les files de la droite & de la gauche faifant ainfi le même mouvement, le bataillon fe trouve reformé au-delà du défilé, comme dans la feconde méthode précé- dente, IV. Quoique dans le pañlage du défilé précé- dent , on dife qu’on ne fait pañer qu'une ou deux files , fuivant fa largeur, il eft aifé néanmoins d’ob- ferver > qu'il y en pañle réellement autant que le dé- lé peut contenir d’hommes de front. Mais ces files ne font point celles dela premiere difpofition du ba- taillon. Elles font formées des rangs qui deviennent files dans le défilé, comme les files y deviennent rangs. Or 1l n’y pañle qu'un de ces rangs À la fois, COmMpolé d'une ou deux files, c’eft-à-dire qu'il n’y pañle qu'une ou deux files de la premiere pofition : mais 1l y en pale autant dela feconde, que la lar- geur du défilé peut en contenir, | V. Lorfqu’on a un bataillon en bataille fur qua: tre Ou fix de hauteur ; on peut le mettre en colonne ou. lui donner beaucoup plus de profondeur que de front ,.enfe fervant de l’évolurion précédente , c’eft- a-dire en faifant d’abord mouvoir le centre en-avant, &c lui donnant pour frontcelui que doit avoir laco- lonne , &c le faifant fuivre enfuite parles aîles de la droite & de la gauche: du bataillon de la même ma- mere que pour le paflage du défilé ou du pont, . MBottée, après avomtraité fort aulong du paf: fage du défilé , terminé l’article où ilen fait men- tion, par les réflexions fnivantes.que nous croyons devoir rapporter. < TPE « Ces chofes paroïffent f fimples , dit cet auteur ; » qu'on croiroit qu'il eft prefque fuperflu de les écris “re; mais ceux qui ont fait laguerre, connoïffent » de quelle importance il eft de défiler avec ordre: » On gagne un tems confidérable par-là, êcrrien » n’eft plus précieux que lé tems devant lennemi , » foit pour ménager fa retraite, foit pour s’aflürer » de la viétoire », RASE È * Notre intention étoit de terminer ici cet:article + mais l’ordonnance fur l'exercice de l'infanterierdu | Bb | 194 E V O 6 Mai 175%, qui vient depatoître, nous engage, pou le rendre plus complet , à y ajoüter la formation de deux colonnes dont elle*fait mention, c’eft-à-dire 1 de la-co/onne d'attaque, &t de celle de retraire. De la colonne d'attaque, Avant d'expliquer cette | évolution , 1l faut obfervet: | 1°. Que les bataillons , depuis la réforme faite | après la paix d’Aix-la - Chapelle en 1748, font de douze compagnies de quarante hommes chacune, en y comprenant deux fergens & un tambour, & qu'ils ont de plus une compagnie de grenadiers de : quarante-cinq hommes. 2°. Que les douze premieres compagnies qui for- ment le bataillon font réunies deux à deux ; enforte qu’elles divifent le bataillon en fix parties, ou divi- fions de deux compagnies chacune, non compris les srenadiers. Deux compagnies réunies font appellées cozpa- gries couplées, & le corps qui en refulte fe nomme peloton. Il fuit de-là que le bataillon eft compofé de fix pelotons, & d’une compagnie de grenadiers ; elle doit être immédiatement à la droite du bataillon quand il eft formé par la droite, & à la gauche lorf- qu'il eft formé par la gauche. Le piquet du bataillon eft toüjours, lorfque le ba- taillon eft en bataille, au côté ou au flanc oppofé à celui qu'occupent les grenadiers. Voyez PIQUET. Les bataillons auxquels on veut faire former la colonne dont il s’agit ici, ou qu’on veut exercer aux autres évolutions , doivent être à fix de hauteur, fui- vant l’ordonnance du 6 Mai 1755, qui confirme en cela la difpofition de l’inftruétion du 14 Mai 1754. Cette colonne doit être de deux bataillons. Formation de la colonne d'attaque. Soïent les deux bataillons 48 & CD (fig. 65.) rangés en bataille fur la même ligne , & éloignés l’un de l’autre de l’in- tervalle que les piquets, qu’on a fupprimés dans cette figure, devroient occuper. Ces deux bataillons font divifés en pelotons, dans l’ordre prefcrit par les reglemens qu’on vient de ci- ter ; favoir le premier peloton à la droite du batail-. lon À _B, formé par la droite ; le fecond à la gauche, Gc. & les grenadiers G à la droite du 1° peloton. Le fecond bataillon formé par la gauche ,-a fon premier peloton à la gauche, le fecond à l’aile droi- te, & la compagnie de grenadiers à la gauche. Le piquet du premier bataillon devroit être à la gauche de ce bataillon, & celui du fecond à la droite du fien; ils ne s’y trouvent point, parce que lorf- qu’on veut former la colonne, on le fait rentrer dans le bataillon. Pour cet effet, le major ayant fair le calcul de la ” force des deux bataillons, ez y comprenant les pi- quets, fait avertir les commandans des pelotons. de les égalifer , en les mettant a um méme nombre de files, le- quel il fixera ; & chaque commandant de peloton doit en faire informer les officiers de ferre-file. . 4 Auffi-tôt après cet avértiflement, les capitaines # des piquets leur feront faire demi-tour à droite, # marcher huit pas en-arriere de deux piés chacun, # &t faire enfuite à-droite &c à-gauche, pour aller fe » difperfer derriere leur bataillon, chaque foldat à # portée de fa compagnie. -# Les commandans des pelotons dont le nombre » des files excédera celui que le major aura fixé, fe- » ront pañler cet excédent derriere le fixiemerang;êz #dans les pelotors qui auront moins de files qu'il: # n'aura été ordonné, les officiers de ferre-file feront » entrer le nombre de foldats néceffaire pour les # completer, prenant de préférence ceux de leur pe- # loton qui étoient de piquet, &t après eux ceux des: | # compagnies les plus voifines qui ne feront point # employés, à ui ra:| Pendant cette opération, le major fait ouvrir les batailions à droite & à gauche, autant qu’il eft né- ceflaire pour y introduire les files qui doivent fervir à égalifer les pelotons, À l'égard des foldats furnimétaires Qui ne font point admis däns les pelotons, dès que le major fait les commandemens néceflaires pour former la co lonne, ils font à-droite & à-sauche pour aller fe for- mer fur trois rangs au centre de l'intervalle des ba- taillons, c’eft-à-dire vers Ÿ,K Ils doivent être com- » mandés par un lieutenant, s'ils ne font pas plus » de trenté hommes ; & par ün capitaine avec un » lieutenant , s'ils font en plus grand nombre; & » ces officiers feront de ceux qui étoient auparavant » de piquet, les autres fe trouvant à leurs compa- » Ones ». . Après cette préparation le major commandera, 1. Prenez garde à vous pour former la colonne d’ar- taque. 2. Je parlé aux premiers pelotons. 3. Marche. Au dernier commandement, les prémiérs pelo- tons de chacun des deux bataillons 4 B & CD, matcheront en-avant, en F 8 en Æ7, par huit pas redoublés (4), qui font feize piés, ou environ cinq pas de trois piés: | Le premier F fera enfiute à gauche, & le fecond H à droite , & ils marcheront après cela pour fe réunir en X & Ÿ, vis-à-vis le centre de leur inter- valle; où s’étant joints, ils feront face en tête, & ils marcheront en-avant vers T, T, pour former la tête de la colonne. Les troifiemes pelotons de chaque bataillon 4e ront de même que les deux précédens, huit pas re- doublés en-avant, aufli-tôt que ces pelotons auront paflé devant eux, & 1ls marcheront; favoir, celui du bataillon de la droite par fon flanc gauche, & celui de la gauche par Le flanc droit, pour fuivre les deux premiers pelotons, &'{e réunir derriere eux ;» après avoir fait face en tête étant arrivés en X & Y, Cette manœuvre fe fera de même fucceffivement: par les cinquiemes pelotons de chaque bataillon, puis pat les fixiemes, les quatriemes, & les deuxie- mes. Comme ces dermers doivent fermer la colon- ne, ils ne marchent point d’abord en -avant; mais aufi-t0t que les quatriemes pelotons les ont dépaf- tés, le premier 4 avance en Z par le flanc gauche ; . le fecond B par le flanc droit ; & lorfqu’ils fe font ainfi réunis, 1ls font face en tête, & ils marchent à la fuite des quatriemes pelotons. REMARQUES. es I. Il eft évident qu’au lieu de faire pañler ainfi fucceflivement les pelotons devant le front du ba= taillon, on peut les faire pafler à la queue , c’eft- à-dire derriere le fixieme rang: pour cet effetil fufit de commander aux deux bataillons de faire demi tour à droite, avant de leur ordonner de marcher: « Les officiers & fergens des premiers pelotons » qui font en ferre-file , iront joindre au’ premier » commandement ceux qui font à la tête de leur » premier rang ; ceux des deuxiemes pelotons paf- » feront en ferre-file : dans les autres pelotonis , ‘ils. ‘ #ne quitteront leur place ordinaire que lorique leur » peloton ayant longé le frontidu bâtaillon , la filer » de la gauche ou de la droite arrivera derriere le # peloton quile précede ; alors ils s’atrêteront pour’ » fe trouver tous en colonne lorfqw’elle fera for » mée:, obfervant de s’y partager également, afin » d'occuper les flancs dé tous lés pelotons. Al’ésard » des commandans des bataillons, ils fe’ placeront » à la tête dela colonne »: Ordonn. du 6 Mai 17551: (a) Où appelle pas redoublés , des pas de deux piés, qu'on, doit faire dans le tems qu’on feroit un pas ordinaire, c'elt-à-. dire pendant la durée d'une feconde. Voyez Pas, | IE. Le peloton compofé des foldats furnumérai- rés, fe placera en S derriere la colonne, à quatre pas de deux piés en-arriere de fon dernier rang : ce peloton fera fur trois rangs. | IV. La compagnie G dé grenadiers du bataillon A:B de la droite, ayant fait à-gauche au commande- ment de marche, occupera fucceflivement le vuide que le départ des pelotons laïflera à fa gauche , &c elle arrivera ainfi {ur le flanc droit de la queue de la colonne, au dernier rang de laquelle elle appuiera la file gauche de fon premier rang à deux pas de deux piés , en-dehors de l'éloignement du flanc droit dela colonne ; comme on le voit en G. A égard des greradiers du bataillon de la gauche € D, ils vien- dront fe placer de même en G fur Le front gauche, à là queue de la colonne. Ces deux compagnies ont, dans la figure, le même front que les pelotons des bataillons ; parce qu'ils font à trois de hauteur, & que ces pelotons le font à fix. V. Les tambours, à l’exception de deux qui fe tiendront aux deux côtés de la colonne, fe place- ront à droite & à gauche du peloton furnuméraire S. VI, La colonne ainfi formée, aura deux pelotons de front & fix de profondeur; c’eft-à-dire environ vingt-quatre foldats de front, & trente-fix de pro- fondeur. VII. La colonne fe divife en trois feétions ; la premiere , compofée des premiers & troifiemes pe- lotons ; la feconde, des cinquiemes & fixiemes ; & la derniere, des quatriemes & deuxiemes. Ces fec- tions, foit en marchant ou lorfque la colonne eft arrêtée, doivent toùjours conferver quatre pas de deux piés, de diftance entr’elles. ù On peut voir dans l'ordonnance du 6 Mai 1755, que nous-avons prefque copiée Jufqu'ici, quels: font les fienaux prefcrits pour la faire marcher de diffé- tens {ens, & la maniere de la rompre pour la remet- tre.en batarlle.* | Ceux qui connoiflent le srairé dela colonne de M. le chevalier de Folard , s’appercevront aifémentique la précédente a beaucoup de rapport à celle que propofe.cet habile officier. Elle n’en differe guere. 1° Qu’ence que M.:de Folard compofe la fienne depuis-un:bataillon jufqu’à fx , & que celle dont il s’agit n’en doit avoir que deux. Et 2°. En ce que cetauteur veut qu’on introduife des armes de longueur dans les corps qui compofent faicolonne, comme des efpeces de piques ou de per- tuifanes de onze piés de long. Ces armes doivent être difperfées, de maniere qu’au premier rang de chaque feétion , & aux deux premieres files des flancs, ou (comme l’auteur les appelle) des faces de la colonne; il y ait un piquier entre deux fufiliers , afn de fraifer ainfi d'armes de longueur les: côtés ex- térieurs de la colonne ,\pour'en rendre Papproche plus refpetable à la cavalerie. Ex -. Hefticertain. qu'un corps d'infanterie comme la colonne, armé & difpofé de même, ne pourra: être entamé: que très-dificilement par de la cavalerie, _ qu'il poutra-percer:, & culbuter Les autres corps qui lu feront: oppofés, rangés à la méthode ordinaire fur un grand front &c peu de profondeur: c’eft prin- cipalement dans ces fortes de cas, c’eft-à-dire lorf- qu'on peut approcher de l’ennerni & le charger, que lon peut tirer de grands avantages de la colonne : catisl s’agit d’ation de feu, elle y'eft moins pro- preque:le bataillon ordinaite , à caufe de l’épaifleur de fes files, & du peu d’étendue de fon front. « Auf . #Mde:Folard'dit:il, -gue Je propre della colonne ef? » dans Pailion ; qu'il ne s’agit pas de tirailler , mais » d'en venir d'abord aux coups d'armes blanches , & de »# J0tndre l'ennemi ; parce .qu'alors le feu ra plus lieu & DE, Er ; ct _ » Qu'il R°y en a aucun à efuyers», Traité de la colenne, pag. 18. 7.01 Tome FI, EVO 195$ Pour former la colonne, fuivant M. le chevalier de Folard, 27 ne s’agir que de doubler, tripler, quadru- plier, 6 quintupler les files ; c’eft- a-dire les hauffer ou Les baiffer , fèlon la force €: la foibleffe des corps. . La méthode qui lui paroît la plus fimple pour cet eflet, confifte 4 divifèr le bataillon en autant de fec- tions 6 fur autant de files où de rangs de fronts, qu'on en veut mener a la charge, M. de Folard fuppofe le. bataillon de 550 fufi- liers, les grenadiers compris. Ce nombre lui paroît le plus parfait pour former le bataillon. Il fuppofe aufli qu'il eft à cinq de hauteur; ce qui eft la moindre que le bataillon puifle avoir pour le choc. Cela potfé , l’armée étant en bataille fur deux li- gnes &c une referve, « la cavalerie fur les aïles, &c » l'infanterie au centre ; la diftribution, l'ordonnance » des troupes ,.& le choix des corps qui doivent » former les colonnes fnr le front étant fait, on fé- » parera les grenadiers de chacun de ces corps ; on » commencera par ce commandement : » À vous batarllons. » Attention. » À droite par manches (a) triplez vos files. » Au commandement, premierement la manche » du centre du bataillon rentre dans celle de la droi- » te, le premier rang derriere le premier ; le fecond. » derriere Le fecond , & ainfi des autres. » En même tems la manche de la gauche entre » dans: les deux premieres manches jointes enfem- » ble; le premier rang derriere le premier dela man- » che du centre, le deuxiemelderriere lé deuxieme, » & ainfi du refte : de forte que chaque: bataillon fe » trouve à quinze de hauteur, étant rare qu’il y ait » des furnumétaires ». M. de Folard fuppofe que le bataillon ainfimis en colonne , aura:trente files de front. Il eft évi- dent qu'il en auroit trente-trois au lieu de trente : mais ce favant officier prend ici un! nombre rond, qui-approche très-fenfiblement de la force: du ba- taillon. | | «Au Commandement précédent, les deux ou les » trois compagnies de grenadiers , fuppofé que la » colonne foit de plus de deux bataillons, fe porte- »ront à la queue de la derniere feftion , chacune à ».cinçq Ou fix de hauteur ». oyez cette colonne, f- gure GG. des évolutions, diviféeen trois feétions avec les grenadiers à la queue. - Sules:grenadiers ne font pas corps: avec la co- lonne, c’eft qu'il faut toûjours , dit M.de Folard, féparerun corps d'élite & de réputation ; que d’ail- leurs comme les bataillons ordinairesne peuvent réfifter achoc de la colonne, quand même leur épaifleur feroittriple.:de celle qu’on leur donne com- munément, lorfqu’elle les a rompus,:on peut faire partir les grenadiers après les fuyards, les jetter dans les intervalles des bataillons ou des efcadrons, Ou pour tout autre ufage que les commandans des colonnes jugeront à-propos. | 2 « Si lon veut former deux colonnes d’une feule, » ou la couper en deux de tête à queue, on fait ce » commandement : » Adroïte & a gauche formez deux colonnes. own Marche. e » Halte. Pb < ph 9 + » Ce commandement: fe fait lorfqu’après avoir # percécune ligne, on veut profiter de cet avantage # pour tomber à droite & à gauche fur les flancs des # bataillons quifont à côté, & qui foûtiennent-en- » core contreiceux qui leur font oppofés: Ce:mou- »vemenñt ne doit fe-faire que lorfque la premiere li- :h : »gne: tient ferme encore aux endroits où iln’y a (a) M. de Folard appelle #ancle , le tiers du front du bataillon : ainf le bataillon a trois manches ; {avoir celle de la droite’, celle du centre, & celle de la gauche. Bbi 196 | ÆVre # pas de colonnes. Traité de la colonne , page 70. Voyez ce traité & le livre intitulé , fércimens d'un homme de guerre fur le nouveau fyflème du chevalier de Folard, par rapport à la colonne , &c. Voyez aufli la préface du fixieme volume du commentaire fur Po- lybe. De la colonne de retraite. La colonne de retraite ne differe guere de celle d'attaque. Elle eft compo- fée de même de deux bataillons, divifés chacun en fix pelotons, rangés à la file les uns des autres , à- peu-près dans le même ordre que dans cette pre- miere colonne. | Aiïnfi le front de la colonne de retraite eft de deux pelotons , comme celui de la colonne d'attaque êc fa profondeur eft de fix, Dans cette colonne , les deux piquets de chaque bataillon ne font pas confondus dans les bataillons, comme dans la précédente. Leur pofte eft à la tête & à la queue de la colonne, avec les grenadiers de chaque bataillon qui font placés immédiatement de- vant le piquet qui appartient à leur bataillon. Pour donner une idée de la formation de cette colonne, on fuppofera deux bataillons divifés dans leurs pelotons, comme dans la colonne précédente, rangés en bataille fur la même ligne , les grenadiers à la droite du bataillon de la droite, & le piquet à la gauche ; les grenadiers du bataillon de la gauche à gauche , & le piquet à la droite. On fera d’abord marcher en-avant les grenadiers & le piquet du bataillon de la droite ; favoir les arenadiers de fix pas de deux piés, & le piquet de trois des mêmes pas. La compagnie des grenadiers s'étant ainfi avancée, fait à-sauche, & ellemarche enfuite par fon flanc gauche, pour aller fe placer ; ar un à-droite, {ur le piquet de fon bataillon. À l’égard du piquet du bataillon de la gauche, on lui fait faire demi-tour à droite , ainfi qu'aux pelo- tons des deux bataillons, à l’exception néanmoins des deuxiemes pelotons qui terminent à gauche le bataillon de la droite, & à droite celui de la gau- che. Les grenadiers de ce dernier bataillon font auffi le même mouvement. Le piquet du bataillon de la gauche, après le de- mi-tour à droite, fait un certain nombre de pas re- doublés devant lui, pour s'éloigner de fa premiere potion d’un efpace à-peu-près égal au front de fon bataillon , afin qu'il y ait un intervalle fufifant pour former la colonne , entre cette premiere pofition & celle à laquelle il fera parvenu. Il va enfuite fe pla- cer, par deux quarts de converfion gauche, vis-à- vis’ le piquet du bataillon de la droite. Pendant ce tems-là, les cinq pelotons de chaque bataillon qui ont fait demi-tour à droite ; font en- femble un quart de converfon qui les met en face les'uns des autres; c’eft-à-dire que ceux du bataillon dela droite le font à droite , & ceux du bataillontde la gauche, à gauche. La compagnie de grenadiers qui y eft jointe le fait également, en fuivant les pe- lotons de {on bataillon avec lefquels 1l'eft en ba- taille. 11 gl Gi Lorfque ce mouvement eftachevé, les deuxiemes pelotons qui n’ont point bougé font l’un ä-gauche, & l’autre à-droite , & ils marchent apfès l’un-ê l’autre pour fe rejoindre derriere le piquet, &:la compagnie de’grenadiers du bataillon dela droite ; &-tout de fuite’, ils font à-droite & à-gauche,:pour fe retrouver face en tête. ; | Les autres pelotons des deux bataillons, que le quartde converfion a mis'en face les uns des autres ;: s’approchent enfuite:, de maniere que le dernierrang: de ceux du bataillon derla droite fe trouve aligné fur: la file droite du fecond peloton de ee bataillon qui fait face en tête, & que le dernier rang de ceux du bataillon de la gauche le foit également fur. la file gauche du fecond peloton de ce même bataillof. Lorfque tout ceci eft exécuté , les grenadiers du bataillon de la gauche fe détachent de ce bataillon, & 1ls avancent par un pas oblique de gauche à droi- te, jufqu'à ce que la premiere file de la gauche foit algnée & joignant le rang extérieur du piquet du mê- me bataillon. Ils font alors un quart de converfon qui leur fait couvrir lé piquet de leur bataillon. REMARQUES. LIL eft évident, par la formation que l’on vient d'expliquer, que les cinq pelotons de chaque bataïl- lon qui compofent Les flancs ou les faces de la colon- ne , laïflent entre eux un intervalle égal à l’excès du front des deux pelotons de la tête, c’eft-à-dire des deuxiemes pelotons de chaque bataillon, fur ledow ble de leur hauteur. C’eft pourquoi fi ces pelotons ont enfemble 24 hommes de front, qui occupent environ 48 piés d’é- tendue ; les bataillons , à 6 de hauteur, en auront 15 de profondeur, les rangs étant ferrés à la pointe de l'épée: ainf1l y aura, dans cette fuppoñition , un intervalle de 18 piésæntre les deux flancs de la co- lonne, IT. Il fuit auffi de [a formation précédente de la colonne de retraite, que le front des deuxiemes pe- lotons de chaque bataillon ne doit jamais être plus petit que le double de la hauteur de chaque batail- lon. C’eft apparemment par cette raifon que l’ordon- nance du 6 Mai 1755 porte, que f£ es deuxiemes pe- lotons des deux bataillons formoient enfemble moins de Jeixe files ; l’on y Joindroit autant de files prifes dans les quatriemes pelotons ; qwil feroit néceffaire pour les porter jufqu'a ce nombre. (a) IT. Lorfque la colonne ft entierement formée ; on fait faire demi-tour à droite à tous les hommes dont elle eft compofée , à l’exception de la compa- gnie de grenadiers, du piquet du batdllon de la droi te, & des deuxiemes pelotons de chaque bataillon qui forment la tète ou plütôtla queue dela colonne, pui- que cette colonne a pour objet de fe retirer de devant l’ennemi, lefquels doivent continuer de faire face en tête. On obferve feulement de faire faire face en-de- hors aux deux files de la droite &de la gauche de ces pelotons, & cela par un à-droite & un à-gauche , afin quetoute la longueurdes flancs de la colonneneforme qu’un feul & même rang en-dehors. Les grenadiers & le piquet du bataillon de la gau- che, lefquels font devant le côté de la colonne op- poié à celui que forment les deuxiemes pelotons de’ deux bataillons, font aufli face en-dehors de cette colonne. | | IV. 11 € évident que la colonne de retraite peut marcher de tous les fens , comme celle d’attaque. Voyez dans l'ordonnance du 6 Mai 1755 , les diffé- rens commandemens pour la former, la maniere de la rompre ,-de la mettre en bataille, éc: Article de M. LE BLOND,. . ÉVOLUTIONS DE LA CAVALERIE. Le nombre des, auteurs qui ont écrit fur les évolutions de la cava= lerie , w’eft pas fort confidérable , & il n’y arguere que M. le maréchal de Puyfégur qui foit entré dans un détail raifonné fur ce fujet. Ontne prétend: point donner icrun traité fur cette matiere ; on fe propofe feulement d'expliquer les regles & les principes des manœuvres qui fervent de debat ou d’élémens à tous les mouvemens que la cavalerie peut exé- cuter. 42 Ces manœuvres peuvent fe réduire auxfuivantes. .(a) Ce FOR ÈTE » fuivant M..de Folard, eft. le plus pots | front que la colonne puifle avoir, La colonne « ditcerauteur, . » peut fe maintenir dans fa force depuis trente files ou trente- » quatre » méme jujqu'a fee»; il croit défectueux tour nombre plus grand ou plus petit. Tr. de ls celonne, page. EVO 19. À ferrer & à ouvrir les files & Les rangs. 2°. Au demi-tour à droite ou à gauche, qu’on ap- pelle aufi volte-face, L 3°. Aux à-droite 8 aux à-gauche par divifon du front.de l’efcadron. 4°. À la demi-converfion que la plûpart des au- teurs modernes appellent caracole, 5°." A faire marcher lefcadron par différentes di- vifñons, pour le faire défiler, & le remettre enfuite en bataille. Et 6°. à doubler & à dédoubler les rangs de lef- cadron, I PROBLÈME. Un efcadron étant en bataille , lui faire ferrer où ouvrir Le Jes files. Lorfque l’efcadron étant en bataille, fi les cava= liers occupent chacun plus de trois piés, on peut les faire ferrer les uns fur les autres, pour les réduire à cette diflance. Pour le faire, 1l faut obferver que les chevaux rie peuvent pas tourner fur eux-mêmes dans le rang, comme le font les foldats dans le bataillon , à caufe de l’mégalité de leurs deux dimenfions, à moins que les files ne foient plus ouvertes que l’éten- due de la longueur du cheval; ce qu’on ne fuppofe point 1c1 : c’eft pourquoi la méthode pratiquée pour cet effet dans l’infanterie ne peut avoir lieu dans la cavalerie. Quand même les files feroient plus efpacées que de la longueur d’un cheval, on ne pourroit les ferrer qu'à cette diftance, en faifant tourner les chevaux du même côté, & en les faifant enfuite ferrer les uns fur les autres ; ce qui laïfleroit encore occuper aux files environ 7 piés ou 7 piés & demi de largeur. 11 faut donc avoir recours à une autre méthode : el- le confifte, comme les chevaux ont la faculté d’aller de côté , à les faire ferrer les uns fur les autres, en marchant un peu de côté ; c’eft ce qui s'exécute très- promptement & très-facilement, lorfque Les chevaux {ont un peu dreflés à cette manœuvre. Il eft clair qu'on peut ouvrir les files de la même manieré ; lorfqu’on les trouve trop ferrées, À l'égard des-rangs , s'ils font plus éloignés Les uns des autres qu'il ne convient, on fait avancer les derniers fur le premier ; & s’il s’agit de les ouvrir, le premier avan- ce , & ceux qui le fuivent prennent enfuite telle dif tance qu'on juge à-propos. SECOND PROBLÈME. Un éfcadron étant en bataille, hii faire faire face du cô- té oppolé à fon front, ou , ce qui eff le méme, lui faire exécuter le derni-tour a droite. ù Voyez DEMI-TOUR À DROITE, où l’on a donné la maniere d'exécuter ce mouvement en doublant-. le nombre des rangs de l’efcadron, pour laifler aux chevaux l’efpace néceffaire pour tourner dans le rang, & en faifant rentrer enfuite les rangs les uns dans les autres, &c. Il eft aifé d’obferverque par ce mouvement le premier rang devient le dernier ; ce qui eft un in- convénient aflez confidérable, qu’on ne peut néan- moins éviter que par le quart de converfon : mais ce dernier mouvement a celui de faire changer la trou- pe de terrein, & d'exiger d’ailleurs de part & d’autre de l’efcadron dés intervalles égaux à fon front. [y a une autre maniere de faire tourner l’efca- dron de la tête à la queue, qui peut aufi fervir à faire marcher la troupe par l’un de fes flancs ; ce qui nee peut point par le demi-tour à droite qu’on a dé- Jà Expliqué. Cette méthode confifte à divifer le front de lefcadron en divifons qui ayent au moins la lof- gueur du cheval, & à faire tourner enfuite ces di- vifions, comme on fait tourner les foldats fur EUX» | E VO 10? mêmes dans l'infanterie, pour faire ä-droite où à: gauche : on va en donner l’exemple dans Le proble. me fluvant. | TROISIEME PROBLÈME. Faire à-droite où ä-gauche par divifions. du front de lef: cadron ; pour faire volte-face ou le demi-tour a droi- te, G pour marcher par la droite où par la gauche de efcadron, Comme le feul obftacle qui empêche le cavalier de fe tourner dans le rang, ainfi que le fait le foldat , n'eft autre chofe que la longueur du cheval qui à plus de deux fois fa largeur, il faut ; pour temédier à cetinconvémient , prendre dans le ans un nombre de cavaliers fufñfant pour que le front furpañe la longueur du cheval ; confidérant enfuite ces Cava- liers comme formant un feul corps inflexible , on pourra les faire tourner tous énfemble dans le rano \ de la même maniere qu'on le fait dans le quart de converfon & les à-droite & les à-gauche de l'infan- terie. On a déjà obfervé que chaque cavalier Occtüpe, à- peu-près, trois piés de largeur dans le rang , & que la longueur du cheval eft d'environ 7 piés ou 7 piés & demi : il fuit de-là que deux cavaliers joints en- femble n’occupent que 6 piés de front, & par con- féquent qu'ils ne peuvent tourner dans le rang , pat- ce que ce front eft plus petit que la longueur du che. val. Mais trois cavaliers, qui occupent un efpace de 9 piés, peuvent le faire ; & à plus forte raifon, qua- tre, cinq, fix, fept, &c. cavaliers, Si l’on fait tourner des divifions de trois cavaliers, les rangs qu’elles formeront après avoir faitle quart du tour, ne feront qu’à la diftance d'environ un pié & denni les uns des autres, & par conféquent trop près pour pouvoir marcher en-avant, fans que les chevaux fe donnent des atteintes. Cette grande pro= xinuté ne permettroit pas non plus que les divifions fiflent enfemble leur mouvement; elles s’'embarraf. feroient trop les unes & les autres dans fon exécu- tion. Il faudroit , pour éviter cet inconvénient, qu’< elles le fiflent fucceffivement. Mais fi l’on fait tourner enfemble quatre cavaliers; ils occuperont un efpace de douze piés; & comme le cheval n’en a qu’environ fepr & demi, les rangs que ces divifions formeront, après avoir fait la moi- tié du demi-tour , feront éloignés les uns des autres d’environ quatre piés & demi. Alors ces divifions peu- vent tourner enfemble, & marcher en“ävant, fans aucune dificulté. Si l'on fait les divifions de cinq cavaliers , les tanps qu'elles formeront après avoir tourné à droite ou à gauche, auront à-peu-près fept piés & demi d’inter- valle, c’eft-à-dire environ la longueur d’un cheval ; fielles font de fix cavaliers, cet intervalle fera de dix piés , & fi elles font de fept , d'environ douze piés. Cette derniére diftance eft celle que M. le maréchal de Puyfégur prétend qu'il doit y avoir entreles rangs; c’eft pourquoi il regarde le mouvement dont il s’agit par divifions de fept cavaliers, comme plus parfait que par tout autre nombre. Cependant comme le mouvement par quatre ca- valiers s'exécute aïfément ,que ce nombre eft moins difficile à compter que toute autre divifion , l’ufage le plus ordinaire des troupes étant de marcher ou de défiler par quatre, il fuit de-là que ces divifions peu- vent, pour ainfi dire, fe former elles-mêmes : ce fe- fa, parcette raïon, le mouvement par quatre qu’on expliquera ici ; mais ce qu’on en dira pourra s’appli- quer à toute autre divifon d’un plus grand nombre de cavaliers. Soit la figure 67, (z) une partie quelconque de (a) On à marqué dans cette figure @ dans les deux fui- 198 E V O l'efcadron rangé fur deux rangs 4 B & CD, divifés par quatre cavaliers. Chaque divifion eft marquée par des points qui forment une efpece d’accoliade qui renferme les quatre cavaliers qui doivent ma- nœuvrer enfemble. - Pour que cette troupe fafle à-droite, il faut que le cavalier de la droite de chaque divifon foétienne, ainfi qu'on s'exprime ordinairement, c’eft-à-dire qu’il ferve de pivot, & que les autres faffent autour de lui un quart de converfon. L'expérience fait voir qu'il n’y a rien de plus aïfé à exécuter que ce mouvement. Le cavalier qui /o4- tient n’a autre chofe à faire qu’à ployer, pour ain dire , fon cheval de maniere qu'il fuive le mouve- ment de ceux qui tournent avec lui; ce qui eft facile lorfque les chevaux font accoûtumés dans l’efcadron, où ils prennent l'habitude de marcher à côté les uns des autres, & à la même hauteur. La figure 68. fait voir le mouvement exécuté & le nouvel ordre qui en réfulte. La troupe eft alors fur autant de rangs qu'il y a de diviñons dans le rang, lefquels font face à la droite de l'efcadron. Si l’on fait un fecond à-droite , la troupe fera face à la queue de l’efcadron. Voyez la figure C9. Les deux à-droite precédens qu’on a fuppofe être exécutés en deux tems, peuvent être faits par un feul mouvement fans interruption, comme dans l’infan- terie. Alors fi les officiers veulent pañler à la tête de l'efcadron , ils tournent autour de l’un des flancs; mais fi l’on faitte demi-tour en deux tems, il fe trou- ve , après le premier à-droite, des ouvertures dans la profondeur de l’efcadron, comme on le voit dans la figure 68, par où les officiers peuvent pañler. Le fecond à-droite reforme lefcadron vers la queue, ide la même maniere qu'il l’étoit à la tête avant le mou- vement. REMARQUES, I. Il faut obferver que le demi-tour à droite de la maniere qu’on vient de le fuppofer exécuté, change un peu le terrein de l’efcadron ; car par ce mouve- ment on laifle à fa gauche un efpace prefqu'égal au front de chaque divifion, on capable de contenir troischevaux lorfque les divifions font de quatre ca- valiers. On à marqué cet efpace dans la fgure 69 , par-la repréfentation ponétuée des chevaux:qui Poc- cupoient d’abord; mais on gagne vers la droite de l’efcadron un efpace de pareille étendue. IL. Il fe fait auf quelques changemens dans le de- dans ou l'intérieur de l’efcadron, mais feulement dans Varrangement des hommes de chaque rang, Les chif- fres par lefquels on a marqué lès hommes dans la pre- miere poñtion (fig. 67.), font voir dans la feure Go. en quoi confifte cette efpece de dérangement. IL. Si l’on veut faire ce mème mouvement à gau- che, c’eft le cavalier de la gauche de chaque divifion qui fert de pivot: il tourne fur le pié de devant du montoir , qui eft le gauche, & les autres cavaliers de la même divifion tournent autour de lui &r avec lui, comme dans le quart de converfon. IL eff évi- dent qu’on peut faire le demi-tour à gauche d’un feul mouvement continu , comme à droite. IV. Par le mouvement qu'on vient d'expliquer , une ligne de cavalerie, c’eft-à-dire une fuite d’efcadrons placés en ligne droite à côté les unsides autres, peut tourner pour marcher fur fa droite ou fur fa gauche, dans le tems néceflaire , à quatre ou fix cavaliers pour décrire un quart de converfon. C’eft pourquoi comme l’exécution de ce mouvement demande très- peu de tems, c’eft celur, dit M. le maréchal de Puy- eour, dont il faut fe fervir comme le plus für &z le vantes, lesichevaux par leur projection perpendiculaire fur le terrein: on diffingue par-là plus aifément le mouvement des chevaux & l’efpace qu'ils occupent, que s'ils étoient cepréfentés en élévation ou en perfpectives ; Le E V O plus prompt, lorfqu’on eft près de l’ennemi 8 qu’on eft obligé de s'ouvrir fur la droite ou fur la gauche. $. Au lieu de faire des divifions qui obligent de compter, comme de cinq ou de fix, &c. cavaliers, on peut divifer le front de chaque compagnie en deux parties, &c faire le mouvement précédent fur la droi- te ou fur la ganche par demi-compagnie. Si l’on a, par exemple , un efcadron de quatre compagmes de trente-fix hommes chacune ; ces com- pagnies formées fur trois rangs auront douze hom- mes de front , & l’efcadronen aura quarante-huit. Pour faire tourner cet efcadton à droite, ou pour le faire marcher fur fa droite , on commandera 4 droite par fix , Ou par demi-compagnie ; & le mouvye- ment étant exécuté , la troupe ou lefcadron mar- chera fur fa droite par un front de trois demi-com- pagnies, c’eft-à-dire dans cet exemple de dix-huit hommes. Si lon veut que ces trois demi-compagnies fe joi- gnent fans intervalle, il faut avoir attention que les rangs ne foient éloignés les uns des autres , avant le mouvement, que de 18 piés ou de la diftance nécef- faire pour mettre fix cavaliers à côté les uns des aufres. | De la converfion. Les converfions fe font, dans la cavalerie, de la même maniere que dans linfante- rie : 1l n’y a de différence que dans les termes du commandement. Ce qu’on appelle quart de converfion dans l’infan- terie, fe nomme aflez ordinairement caracole dans la cavalerie. Quelques auteurs donnent néanmoins le nom de caracole à la demi-converfion ou au demi- tour que fait l’efcadron confidéré comme corps in- flexible, pour faire face à {a queue ; alors le quart de converfion eft appellé demi-caracole , maïs ce der- nier terme eft peu ufité : on dit plus communément faire marcher [a gauche ou fa droite, fuivant que le quart de converfon doit fe faire de Pun ou de Fau- tre côté. | Pour exécuter le quart de converfion ou la demi- caracole, on fait arrêter la troupe, felle eft en mar- che , par ce commandement , halte : &t lon dit en- fuite, f le quart de converfion doit fe faire à droite, doucement la droite, marche la gauche ; de-là. vientique ce mouvement eft appellé fazre marcher [a gauche, Si la demi-caracole doit fe faire à gauche, on fait ce commandement : doucement la gauche marche la droite. « Comme ces dermeres expreflions font équivo- ques, en ce qu'elles peuvent s'appliquer au mouve- ment de l’efcadron par la droite ou par la gauche, & qu’elles ne font point prefcrites par les ordonnan- nances , on croit qu'il eft plus à-propos d’exprimer la demi-caracole par le terme de quart de converfion , ‘comme le fait l'ordonnance du 22 Juin 1755 fur lPe- xercice de la cavalerie. brefs: Le terme de caracole n'a pas-totjours ‘exprimé de demi-tour à droite ou à gauche de l’éfcadron: ôntlé donnoit autrefois à un mouvement de chaque file’, qui fe faifoit fneceflivement par le flanc:dé lelca- dron : on l’employoit pour infulterun efcadronen: nemi mal monté , ou qui ne pouvoit quitter’ fon terrein. D'nr" üt Dans ce mouvement chacune des files fe détachoit fucceflivement de l’efcadron, & elle alloit pañlér de- vant l'ennemi en ferpentant, &cen faifant des paña- des à droite & à gauche pour drer la mire à ceux qu’elle infultoit ; elle-revenoit enfuite par Pautre flanc de l’efcadron, & paflant derrière elle reprenoit fa pre- miere pofition, | Lorfqu’on vouloit exécuter ce mouvement, lof: ‘ficier qui commandoit Fefcadron faifoit ce commar- dement : 4 moi l’aileidroite par caracole à gauche en fui Jert front en queue, EVO. … On difoit, 67 faifant front en quent, parce que la file, pour fe remettre, tournoit infenfiblement le front vers la queue pour l'aller regagner & pañler derriere k ; … La caracole fe faifoit auf par quart de rang ; alors chaque quart alloït paffer fucceflivement devant l’ef- cadron ennemi, en faifant des décharges de mouf- queton ou dé piftolet, & il alloit enfuite fe reformer ou reprendre fa premiere place par le derriere ou la ueue de Péfcadron. | Ce détail fur ce qui tegarde la caracolé, peut fer- vir de fupplément à ce qu’on en a dit ax mot CARA- COLE, Où l’on en a parlé un peu trop brièvement. De la demi-converfion fur le centre. Nous avons déjà obfervé que le demi-touf à droite ou à gauche avoit linconvémient de faire du premier rang de l’efcadron le dernier, & du dernier le pre- mier ; que la demi-converfion n’avoit pas ce même défaut, mais qu’elle exigeoit de grands intervalles à droite & à gauche de l’efcadron , & qu’elle en chan- geoit le terrem. | On peut remédier à ces deux inconvéniens, en faifant tourner l’efcadron fur fon centre de la même maniere qu'on fait tourner le bataillon dans l'infan- terie: , Pour cet effet, l’efcadron étant divifé en deux par- ties, fi l’on veut que la demi-converfion fe fafle de gauche à droite, la partie de la gauche ne bougera point, & l’on fera faire le demi-tour à droite à Pau: tre partie, par divifions de quatre, cinq ou fix hom- mes de front. Alors les deux moitiés de l’efcadron fe trouveront diftantes l’une de l’autre à-peu-près de l'intervalle d’une des divifions de celle qui a fait le demi-tour à droite. On fait enfuite ce commande- ment : À droite fur le centre faites ur quart de converfion. Le cavalier qui eft à la droite du premier rang de la partie de la gauche qui n’a pas bougé, fert de pivot au mouvement de cette partie qui fait le quart de converfion à l’ordinaire. L'autre tourne en même tems du même fens & fur le même pivot, mais en confervant toüjours Le même intervalle qui Pen fé- Dore | Lorfque la premiere partie a fait fon quart de converfon , la feconde a fait le fien également ; elle fait face au côté oppolé à celui de la premiere, & elle en eft éloignée de l’intervalle du front d’une des divifions avec lefquelles elle a d’abord fait le demi- tour à droite. Pour faire face du même côté que la premiere moitié de l’efcadron, elle fait encore le demi-tour à droite par Les mêmes divifions de fon front. Lorfque ce mouvement eft exécuté, l'intervalle qui [a fépa- roit de la premiere partie de l’efcadron, fé trouve rempli, & toute la troupe fait face du même côté, qui dans cet exemple eft le côté droit. ti _ Il eft évident que ce mouvement peut s’éxécuter de la même maniere tant à gauche qu’à droite. Pour rendre ce mouvement plus aifé à concevoir, nous nous fervirons de la figure 70 , tirée de l’art de la guerre de M. le maréchal de Puyléeur , some I. page B7a \ | Elle reptéfente un efcadton de cinquante fix hommes de front, compolé de quatre compagnies de quarante-deux cavaliers chäcune. Les deux compagnies de la droite ont fait à-droite Par demi-compagnie, c’eft-à-dire par des divifions de fept cavaliers: ce qui les a éloignés des'deux au- tres de l'intervalle 4 B FH; égal à-peu-près au front ‘de fépt cavaliers. LL : Les lignes pondtuées À M & 1 N, repréfentent le terrein que l’efcadron occupera, après avoir fait le quart de converfion fur le centre ou le pivot À. La moitié de Pefcadron à gauche viendra fe placer à EVO ro par fon Mouvement autour de Z, en AILK, Les cavaliers O,& P décriront, pour cet effet, les quarts de cercle OK &PT. TURC | | La moitié de l’efcadron à droite, tournant en mé me terms fur le point 4, le cavalier B fe trouvera en ©, lorfque le quart de cercle fera décrit ; le ca valier D en E , & celui qui eft en Fen G.A l'égard. des cavaliers À & S', ls feront en M & N, & is auront décrit les arcs RM &SN. 4 “Aïnfi après le quart de converfion achévé, là fois tié de l’efcadron à droite occupera Pefpace CGNM3 elle fera féparée de la gauche par les lignes AT & CG, & elle fera face à la gauche de l’efcadron. Pour lui faire faire face à droite, comme lé fait la moitié qui eft à la gauche, on lui fera exécutet lé demi-tour à droite par les mêmes divifions avec lef: quelles elle a d’abord fait ce même mouvement, c’eft-à-dire par demi-compagnie ou par divifions de fept cavaliers de front. Alors là premiere divifion,, dont le pivot eft en €; occupera l’efpace ou l’inter- valle 4C, & l’efcadron fera aurfi formé fur le flané droit , fans intervalle au centre. Si l’on veut que lefcadron fafle tête à la queue; il eft clair qu’au lieu du quart de converfion, il faut lui faire exécuter le denu-tour entier tout dé fuites après quoi les deux compagnies qui ont fait d’abord à droite par divifions de demi-compagnie , n’ont qu’à faire encore une fois ce même mouvement, pouf faire face du même côté que les deux autres, & pour : fe rejoindre avec elles fans intervalle. n Par ce mouvement on fait tourner l’efcadron; fans qu’il change de terrein , & l’on conferve toù- jouts le premier rang à la tête. Comme le rayon du cercle n’eft alors que la moitié du front de l’efcadron, ” les quarts de cercle que décrivent les cavaliers ne font que la moitié de ceux qu’ils décriroient, f l’on prenoit pour rayon le front entier. C’eft pourquoi le quart de converfon & la demi-converfon fur le centre s’exécutent dans un tems une fois plus court, que quand le pivot eft à l’un des angles de l’efcadron, Marniere de faire marcher & défiler l'eftadron par dif- férentes divifions, 6 de Le reformer. Les différentes di- vifions en ufage dans l'infanterie pour mouvoir ow faite marcher lé bataillon, comme les manches, demi. manches, pélotons ou fé&ions, &c. ne {ont point con- nues dans la cavalerie, On fe fert de divifiqns plus naturelles, & ce font celles des quatre compagnies dont l’efcadron eft ordinairement compofé. Comme il eft difficile de trouver des terréins. où des chemins aflez larges pour que l'efcadron puiflé marcher en bataille , c’efl-à-dire les quatre cOMpPa= gnies rangées à côté les unes des autres fur la même ligne droite, on eft obligé de le rompre en différentes parties , qui ont, lorfqu’on le peut, les quatre com- pagnies dont il eft formé. On ne défile fur un front : plus petit que celui d’une compagnie, que lorfque les lieux où l’efcadron doit pafler, ne permettent pas de faire autrement. ÿ | La premiere regle pour faire mouvoir ou maïcher une troupe de cavalerie, eZ, dit l'ordonnance du 22 Juin 175$, de s'éloigner le moins qu'il ef? poffible de l’ordre de bataille, & de préférer les manœuvres par lef quelles on peut Je reformer le plus promptèment 6 avec mnoins dé cherriri. pc - ‘ Suppofons un efcadron de cent vingt hommes, où de quatre compagnies de trente cavaliers. cha: cune, ranges.furtrois rangs ; il aura quarante hom= mes de front, & chaque compagnie en aura dix. Comme le cavalier occupetrois piés dans le rang, le front de cet efcadron fera de vingt toifes : en les rompant par compagnies, & les mettant à la fuite les unes des autres, elles formeront enfemble douze fanes de dix hommes chacun. d: * Les rangs-auffi ferrés qu'il eft poffible pour mar: 200 E V © cher, he peuvent guere occuper moins de douze ‘piés ou de deux toifes, en joignant énfemble la lon- ueur du cheval, & l'intervalle qui fépare les rangs Les uns des autres; c’eft pourquoi les douze rangs occuperont environ 24 toifes d’étendue (4). | Les quatre compagnies à la fuite les unes des au- tres auront trois intervalles. lefquels, en compre- nant le rang des officiers à la tête de chaque compa- gnie, peuvent s’évaluer chacun environ à l'épaif- feur de deux rangs , ou à quatre toifes ; par conle- quent les trois enfemble font douze toifes. Cestoiles ajoûtées aux vingt-fept précédentes , donnent envi- xon trente-fix toifes pour la longueur.de l’efcadron, en marchant par compagnie, comme il en occupe “vingt en bataille : lorfqu'il reprendra cette premiere difpofition, il lui reftera feize toifes pour l'intervalle qui le féparera de l’efcadron voifin. Si l’on veut réduire cet intervalle à la moitié du front de l’éfcadron, c’eft-à-dire à dix toifes, comme de prefcrivent le projes d’inftruélion pour la cavalerie, inféré dans le code militaire par M. Briquer, & l’or- donnance du 22 Juin 1755; on y parviendra aïfe- ment en ferrant un tant-foit-peu les rangs & les in- tervalles des compagnies, ou bien de la maniere fui- vante. ‘Onconfidérera les officiers qui font à la tête de chaque compagnie, comme formant un rang ; ainf Ton aura quatre rangs d'officiers, qui joints aux dou- ze des cavaliers, font enfemble feize rangs. On par- tagera trente toiles ou 180 piés, c’eft-à-direl’efpace qu'occupe le front du bataillon, avec l'intervalle de de toiles, en feize parties égales, & l’on aura onze piés pour l’épaifleur de chaque rang ; ce qui eft un efpace fufifant pour que les chevaux marchent aifé- ment les unes derriere les autres fans fe. donner d’at- teintes. | Si l’efcadron eft plus fort qu’on nele fuppofe ici, 41 eft évident qu’on trouvera de la niême maniere quelle doit être l’épaifleur de chaque rang, pour que la troupe n’occupe, en marchant par compagnie, qu'une fois & demie la longueur ou l'étendue de fon ront. Quoique la marche de lefcadron par compagnie foit plus avañtageufc pour réunir la troupe , ou la mettre en bataille plus facilement que lorfqu’elle marche fur de plus petites divifions, néanmoins com- me on eft obligé de fe régler 1à-deflus , fuivant les différens paflages qu’on rencontre , 1l arrivé qu’on fait quelquefois défiler l'efcadron par un-cavalier, par deux, par quatre, &c. Pour défiler par un , le premier cavalier du pre- mier ranp de la compagnie de la droite ou de la gau- che, c’eft-à-dire du côté par où l’on veut commen- cer le mouvement , marche en-avant ; le deuxieme vient prendre fa place, & le fuit : les autres en font de même fucceflivement. Lorfque le premier rang a ainf défilé , le fecond en fait de même, & enfuite le troifieme. La feconde compagnie, ou celle qui fuit immédia- tement celle qui a d’abord défilé, fe met de même à la fuite de la premiere ; elle eft fuivie de la troifième, & celle-ci de la quatrieme. Si la troupe marche par deux, les deux premiers cavaliers de la droite ou de la gauche du premier æang de la compagnie de la droite on de la gauche, marchent d’abord en-avant; Îe troifieme & le qua- trieme viennent eniuite par un à-droite ou un à-sau- £he par deux (2), prendre la place des deux pre- … (a) On peut diminuer environ 4 piés ou une toife de cette étendue, parce que le dernier rang n’a d’'épaiffeur que la lon- gueur du cheval. | (b) Comme il n’eft pas poffible que deux cavaliers dont le front eft de 6 piés, tournent dans le rang , il faut qu'avant de faire ce mouvement ils gagnent deux où trois piés de terrein muets, 8 ils fe mettent à leur fuite. Les autres ca- valiers du même rang en font de même deux à deux, ainfñ que ceux du fecond rang, puis ceux du troïfie- me. Les autres compagnies de l’efcadron défilent en- fuite fuccefliyement, de la même maniere que la premiere. Si la troupe marche par quatre ,-les quatre pre- nuers cavaliers de la première compagnie dela droi- te ou de la gauche, fuivant le côté par où l’on veut commencer, avancent d’abord droit devant eux : les autres du mêmerang font un à-droite ou un à-gauche par quatre, &c 1ls fe mettent fucceflivement à la fuite des quatre premiers : les cavaliers du fecond & du troifieme rang de la même compagnie en font de mê- me, puis ceux de la feconde , & enfuite ceux de la troifieme & de la quatrieme, Il faut obferver que fi les compagnies qui compo- fent l’efcadron font de trente hommes, comme on l'a fuppofé dans cet article, on ne pourtoit faire dé- filer les rangs par quatre, parce qu'ils ne fe divife- roient pas exaétement par ce nombre , mais qu'l faudroit les faire défiler par cinq; c’eft-à-dire par demi-front de compagnie; ce qui fe fait de la même maniere que par quatre. Pour reformer l’efcadron , fuppolant qu’il marche par compagnie , la premiere, comme le porte l’or- donnance du 22 Juin175$, fe portera legerement huit pas en-avant, pendant que celle qui fuit fera à- gauthe, & tout de fuite à-droite pour fe former à la gauche de la premiere. Les deux autres continue- ront à marcher devant elles, jufqu’à ce que chacune étant arrivée où celle qui la précede a fait à-gauche, elle n’ait plus que l’efpace néceflaire pour exécuter ce mouvement ; &c elle fera enfuite à-droite par com- pagnie, lorfque fon premier rang fera arrivé à la hauteur de la gauche de la compagnie qui la pré- cede. Lorfque l’efcadron a défilé par deux ou par qua: tre, on reforme fuccefliyement chaque compagnie, & enluite l’efcadron par la réunion de ces compa- gnies én bataille. Pour reformer une compagnie qui défile, par exemple, par un, on la fera d’abord marcher par deux, enfuite par quatre, fi le nombre d’hommes de Chaque tang le permet, c’eft-à-dire fi les rangs con- tiennent pluñeurs fois quatre exaétement : dans ce Cas On formera la compagnie en-avant, en faifant d'abord arrêter la premiere divifon, pendant que les autres du même rang fe placeront fucceffivement à côté les unes des autres, Lorfque le premier rang fera formé, le fecond fe formera de même, & en- fuite le troifieme. Si les quatre compagnies font enfemble ce mou- vèment, elles fe trouveront formées dans le même tems, & elles pourront après cela former l’efcadron, comme on l’a vi ci-devant. ) Si la compagmie eff de trente hommes rangés fur trois rangs; comme chaque rang fera de dix hom- mes, 1l né pourra fe divifer par quatre ; c’eft pour- quoi pôur reformer la compagnie qui aura défilé par un, On la fera d’abord marcher par deux, & l’on re- formera les rangs par deux , comme on vient de l’ex- pliquer par quatre. Tout l'inconvénient de ce mou- vement, c’eft qu'il eft plus long que lorfqw'on peut. me) d'abord reformer les compagmies par quatre. PROBLÈME. Doublers les rangs de L’eftadron ou d'une froupe quelconque de cavalerie, ou les dédoubler. Nous avons déjà obfervé dans les évo/urions de du côté où ils doivent tourner afin d’avoir l’efpace néceffaire pour le faire, | | lTnfanterie , l'infanterie, que l’exprefion dédoubler les rangs , ne fignifioit pas d'en doubler le nombre, mais feule- ment celui, des hommes de chaque rang. La maniere de doubler les rangs dans la cavalerie, n’eft pas la même que dans l'infanterie , parce que les cavaliers font toûjours trop ferrés dans le rang, pour pouvoir introduire un nouveau cavalier entre deux. Mais cette évolution fe fait très-aifément & très- fimplement par le moyen des à-droite & des à-sau- che par divifions de rangs. On peut doubler les rangs dans la cavalerie, par la droite, par'la gauche, & par l’un & l’autre côté en même tems. On ne donnera 1c1 que cette derniere méthode, l'exécution des deux autres n’aura pas plus de difficulté, Soit fuppofé une troupe de cavalerie de 120 maïi- tres, rangée fur deux rangs qu’on veut réduire à un feul , & cela par la droite & par la gauche en même tems. On divifera le fecond rang en deux également. La moitié de la droite fera à-gauche par divifions de cinq cavaliers ; & celle de la gauche, à- droite par les mêmes divifions. Ces deux demi-rangs marcheront enfuite devant eux; favoir, celui de la droite, jufqw’à ce que fa der- mere divifion déborde le premier rang d’environ 3 piés, oude l’épaifleur d'un cheval ; & celui de la gauche, jufqu'à ce que fa derniere divifion déborde également la gauche du premier rang de la même quantité. Alors les divifions du demi-rang de la droite feront à-droite, & celles de la gauche à-gauche ; & elles marcheront devant elles jufqu’à ce qu’elles foient dans lalignement du premier rang. | Il eft clax que fi lon avoit quatre rangs de cava- lerie, on les réduiroit à deux de cette même maniere, : REMARQUES. I. Pour exécuter ce mouvement , 1l eft néceflaire que les rangs {oient éloignés les uns des autres du front, au moins des divifions de chaque demi-rang ; c’eft-à-dire, dans l'exemple précédent , où les divi- fions font de cinq cavaliers, qu'il faut que les rangs ayent au moins quinze piés d'intervalle. IT. Au lieu de faire les divifions des demi-rangs de cinq cavaliers , on les auroit pù prendre de trois; mais alors ces divifions, en marchant vers la droite & la gauche, auroient été un peu trop ferrées les unes fut les autres pour pouvoir marcher aifément. On r’auroit pù prendre ces divifons de quatre hom- mes, parce que le demi-rang étant de quinze cava- liers ne peut {e divifer exattement par quatre. IL. On peut par cette méthode augmenter le front d’un efcadron dont les rangs {ont en nombre impair, ow, ce qui eft la même chofe , diminuer le nombre de ces rangs. R | Si lon a , par exemple, une troupe de cavalerie ur trois rangs, & qu’on veuille la réduire à deux, on partagera le troifieme rang en quatre parties éga- les ; on fera marcher les deux de la droite à la droite des deux premiers rangs , & celles de la gauche à la gauche des mêmes rangs, & l’on aura ajufté l’efca- dron en bataille fur deux rangs. Pour dédoubler les rangs. Si lon a une troupe de cavalerie fur un rang , &c qu'on veuille en former deux, on la divifera en deux parties égales : on fera marcher l’une de ces parties trois ou quatre pas de trois piés en-avant. Si l’on fuppofe que ce foit la moi- tié du premier rang à droite qui ait marché en-avant, “celle de la gauche fera à-droite par divifion de trois, quatre Ou cinq hommes , fuivant que le demi-rang ie divifera exaétement par l’un de ces nombres. Le demi-rang de la gauche marchera enfuite derriere . Tome FT, | E VO 201 celui de la droite , jufqu’à ce que fa premiere divi: fon fe trouve derriere les quatre où Cinq cavaliers de la droite, fuivant que cette divifion fera de quatre Ou cinq hommes. | Lorfque le demi-rang de la gauche aura ainf mar- che, on lui fera faire à-droite par les mêmes divi- ions par lefquelles on la d’abord fait tourner à gau- che, &c il fe trouvera placé derriere le premier, & fafant face du même côté, w Par cette méthode, fi la troupe eft fur quatre rangs, on la réduira également à deux, On peut obferver par ce qu'on vient de dire fur le doublement & le dédoublement des rangs , que c’eft avec raifon que M. le maréchal de Puyfegur dit dans fon livre de l’ Art de la guerre, que par le moyen du quart de tour à droite ou à gauche par divifions de rangs, la cavalerie peut exécuter les mêmes mou- vemens que l'infanterie. On n’entrera point ici dans un plus grand détail fur les évolutions ou manœuvres de la cavalerie ; on croit avoir donné les plus effentielles & les plus fon- damentales : on renvoye pour toutes les autres aux ordonnances militaires concernant la cavalerie, & particulierement à celle du 22 Juin 1755, Ces arzicle ef? de M, LE BLOND, EVOLUTIONS NAVALES , ( Marine.) Ce font les différens mouvemens qu’on fait exécuter aux vaif- feaux de guerre pour les former ou mettre en batail- le , les faire naviger, les rompre , les réunir, &c. Voici les élémens de cet art important. Avant de donner les plans de tous les mouvemens que peuvent faire les armées navales , il faut com- mencer par une regle qu’on met en pratique dans toutes les différentes évolutions , qui prouve que le chemin le plus court que puiffe faire un navire pour enjoindre un autre, 8 par conféquent pour prendre le pofte qui lui eft deftiné , par rapport à un autre navire qui doit lui fervir d'objet, eft d’arriver fur lui, autant qu'il pourra, en le tenant toüjours au même rhumb de vent. Méthode générale pour joindre un vaifleau qui eft Jous le vent, par la route la plus courte, fig. 1. Pour mettre cette regle en exécution, il faut releyer avec un compas de variation le navire fur lequel vous de- vez vous régler ; .8&c en faifant votre route, le tenir toüjours au même air de vent que vous l’avez rele- ve : la figure démontre que c’eft la voie la plus courte que vous puifhez faire. Par exemple, fi le vaifleau 4 qui chaffe, parcourt la ligne AN, & le vaifleau B qui eft chañfé , la ligne BN, de telle forte qu'ils fe trouvent toüjours fur des lignes CD, GA, IK, LM, paralleles à 4B,ils font toûjours dans Le même rhumb un à légard de l’autre ,: & ils fe rencontreront au point N, où les lignes AN & BN concourent. Ici le vaifleau 4, le vent étant au nord, a relevé le vaif- feau B au fud de lui ; 1l Le doit toùjours tenir au mé- me air de vent, foit en arrivant ou venantaa vent, felon qu'il refte de l'arriere, ou qu'il gagne de l’a- vant de vafeau B : par cette manœuvre 1l arrivera au point C lorfque ledit navire fera au point D, qui fera toüjours au fud de lui : de même il fera au point E,lorfque l’autre viendra en F, &ils fe tiendront toû- jours dans. le même rhumb ; & ainf des autres points, jufqu’à ce qu'ils fe joignent en N, jonction des deux lignes. J'ai dit qu'il faut que le navire À arrive ou tienne le vent, pour peu qu'il forte du rhumb auquel il a relevé le vaiffeau qu'il doit joindre ; ce qui, ne fe peut faire que lorfque le navire 8 gagne de l'avant ou refte de l'arriere ; fuppofant qu'il faffe toüjours la même route ; fi le vaifleau 2 va de l'avant, il reftera plus du côté de left; & 1l faudra que le chaffeur tienne le vent, pour l'avoir toïjours au rhumb re- Ce Ce 202 E VO levé, &il le joindra plus loin en parcourant fa ligne AO ; mais fi le vaifleau chafé refte de Parriere, il refte plus à l’oueft : alors il faudra que le vaiffeau À arrive , jufqu'à ce qu'il remette le vaifleau B au fud, rumb rhelevé, & il le joindra au point Men parcou- rant la ligne AM; ce qui prouve qu'il faut avoir à chaque inftant l’œil fur le compas. Il faut remarquer que file vaifleau 4 fe doit met- tre par le travers du vaifleau B dans une autre co- lonne, il faut tenir le bâtiment B au même air de vent, comme nous venons de dire ; & quand il fera À la diftance requife, il tiendra la route du général : mais s’il doit fe mettre dans la même ligne , &e fi c’eft de l'avant du vaifleau 2, il doit le tenir un peu plus fous le vent ; s’il doit fe mettre de l’arriere , 1l le tiendra un peu plus au vent : l'expérience de Pofi- cier doit décider cette route fans erreur fenfible, par un coup-d’œil réglé par la pratique. Maniere de connottre f on eff au vent ou fous le vent d'un autre vaiffeau à la voile, figure 2. Dans les diffé- rens mouyemens d’une armée navale, une des prin- cipales attentions qu’on doit avoir , eft d'éviter les abordages : ils font rares de vent arriere ou largue, un coup de gouvernail en garantit; mais lorfque deux vaifleaux courent au plus près , l’un amuré ftribord , & l’autre bas-bord , & qu’ils font l’un con- tre l’autre; l’entètement de vouloir pafler au vent, ou l'incertitude de la manœuvre que l’on doit faire, fi l’on n’a pas de l'expérience, jette fouvent dans de fÂcheux accidens , 7 dans des embarras dont on a que trop de peine à fe tirer. Pour ne courir aucun rifque, il faut relever de bonne-heure, avec un compas de variation, le na- vire qui vient à votre rencontre ; sil vous refte dans la perpendiculaire au lit du vent, les deux vaiffeaux font également au vent, & fe rencontreroient, fi Fun des deux ne prenoit le parti d'arriver; ce qu'il faut cependant toûjours faire fans balancer. Cette figure fera mieux connoître ce qui en eft. Les vaif- feaux 4 & B vont au plus près d’un vent du nord, l’un amuré ffribord , & l’autre bas-bord ; ils fe trou- vent eft & oùeft l’un de l’autre, qui eft la ligne 4 B perpendiculaire au lit du vent FG; s'ils font toùr jours la même route, & qu'ils parcourent Pun la L- ne AE, & l’autre la ligne BÆ, avec dés circonf- tances femblables, c’eft-à-dire tenant également le plus près, & allant également vite, ils fe rencontre- tont au point £, puifqu'ils parcourent deux lignes égales, &c que les angles E BG & E 4 G font égaux. Si le vaiffeau C va à l'encontre du vaiffleau B avec les mêmes circonftances, & que la ligne C7 qui eft tirée du vaifleau C perpendiculaire au vent, ne ren- contre pas le vaifleau B, & que cette ligne pale du côté d’où le vent vient ; le vaifleau C fera la ligne CF, & arrivera au point F, lorfque l’autre fera an point £ , & il fe trouvera au vent de la quantité FÆ égale à [a ligne BH ; au contraire, le vaifleau D dont la ligne D J tirée perpendiculaire au vent , ne rencontre pas le vaifleau B, & pañle fous le vent, c’eft-à-dire du côté du fud, fera fous le vent du vaiffeau B, & viendra au point G lorfque le vaif- feau B arrivera au point E, & il fera fous le vent de la quantité GE, égale à B I. Ainf lorfqu’on fera exaétement toutes ces obfer- vations, & qu'on relevera de bonne-heure le vaif- feau qui court fur vous, on aura le tems d’arriver pour éviter Pabordage; ce qu'on doit faire fans ob- ftination , fur =tout lorfqw’il eft queftion d’un pavil- lon, ou d’un capitaine plus ancien. Il eft dangereux d'attendre trop tard pour arriver; on n'y eft plus à tems, lorfqu’on eft à une certaine diffance ; & pour lors le feul parti qu'il y ait à prendre, c’eft que les deux vaiffeaux donnent vent devant. Figure 3. Cette figure fert à démontrer que le- E VO plus coutt chemin qu’on puifle faire pour aller à un vaifleau qu’on chafle , & fur lequel on peut mettre le cap fans lovoyer, eft de fe tenir tohjours au mé- me air de vent auquel on l’a relevé aufli-tôt qu’on l’a découvert. Je fuppofe que le ‘vent eft à left, &c que le navire qu’on chafle eft au nord-oueft de vous à fix lieues, c’eft-à-dire que le chaffeur eft au point A, & le chaffé en B; s’il prend chaffe en faifant le nord-oùeft, dont la ligne 4 > marque le chemin, en faifant le nord-oûeft comme lui , il refte toûjours au même air de vent; & le plus court chemin d'aller à lui, eft de fuivre la même ligne. Si vous lui gagnez une lieue fur trois lieues , quand il aura fait fes trois, vous en aurez fait quatre ; il eft certain que quand il en aura fait dix-huit, vous en aurez fait vingt-qua- tre, & que vous aurez gagné fur lui les fix lieues qu'il avoit d'avance fur vous , & que vous le Join- drez au point 2 : on voit par-là qu'il vous faut faire plus de chemin fur cet air de vent pour le joindre, que fur tous les autres qu'il peut courir: qu'il fafle , par exemple, le nord nord-oûeft en parcourant la ligne BR; lorfqu’il arrivera au point NW, le chaffeur fera en S ; & il lui reftera au nord-oûeff,la ligne NS étant parallele à la ligne B 4, qui eft au nord-oûeft; lorfquw’il fera au point £, l’autre arrivera en T, & ils feront totjours fud-eft & nord-oùeft l’un de l’autre, Il n’y a qu'à jetter la vüe fur ces différentes po- fitions & figures, pour voir que toutes les lignes des différens triangles fonttoutes des nord-oùeft ; & lorf- que le vaiflean chaffé feroit au point À, le chaffeur l'y joindra, l'ayant toûjours tenu au même air de vent: mais il aura fait moins de chemin pour Pat- traper , puifque le vaifleau B n’aura fait que feize lieues & demie , & le navire 4 un peu plus de vingt- deux. Il arrivera la même chofe, lorfque le navire B prendra chaffe à l’oueft-nord-oueft, en parcourant la ligne B 10; parce que cet air de vent eft à la mé- me diftance du nord-oùeft, que le nord-nord-oûeft dont je viens de parler: toute la différence qu'il y aura, c’eft que dans la chafe du nord-nord-oùeft , le chaffeur fera fa route entre le nord-otieft quart de nord & le nord-nord-oûeft,& dans la chaffe de l’oueft- nord-oûeft, le chaffeur courra entre le nord-oeft quart d’oueft, & l’oüieft-nord-oïeft. L’on voit par cette démonftration, que plus le vaifleau chañlé s’é- loignera de la ligne du nord-oeit, moins le chaffeur aura de chemin à faire pour le joindre ; s’il veut s’en- fuir en faifant le nord, il parcourt BG, où1l fera joint , & le chaffeur fera le nord quart de nord-oueft prenant quelques degrés vers le nord-oûeft,décrivant la ligne 4 G, où vous voyez qu'il lui refte toùjours au nord-oueft, & qu’il le joindra après avoir courir dix-huit lieues +, pendant que le chañlé n’en fera que uatorze : maïs sil prenoit chafle au nord-nord-eft , il décriroit la ligne B 3 , & le chaffenr, 43 qui eftle nord prenant un peu de l’oüeft, & lle joindra quand il aura fait près de quatorze lieues, & l’autre dix & 1; mais il refte toüjours au nord-oùeft, comme 1left facile à remarquer. Il faut avec le compas le relever à chaque inftant, & tenir le vent, ou arriver, felon qu’on fuppoferoit que le vaifleau chaffé va de Pa- vant, ou refte de l'arriere. Utilité duquarré pour les mouvemens d'une armée na- vale, fig. 4.Pourfaciliter les mouvemens d’une armée, & pour éviter l'embarras d’avoir toijours un com- pas devant les yeux, il fantavoir fur le gaillard de Parriere un grand quarré 4 BCD, dont la ligne EF réponde à la quille du vaifleau , de telle maniere que le point £ foit du côté de la proue, & le point F du côté de la poupe: la ligne FÆ repréfente done totijours la route que tient le vaiffeau ; la ligne G A marque fon travers ; & quand le vaifleau eft au plus près, les diagonales € 4, D B', marquent , l’une la route que tiendra le vaifleau quand 1l aura reviré, &c l’autre fon travers. Maïs pour tirer plus d’utilité de ce quarré , 1l faut le partager en feize rhumbs. Dans cette figure quatrieme on füppofe le vent au nord foufflant du point N, lorfque le vaifleau 7 court au plus près fur la ligne ZÆ , l’amure à bas- bord, l'angle NIE faifant un angle de fix rhnmbs de vent ; lorfqu'l aura reviré, il courra fur la diagonale B D, l'angle NI D étant égal à l'angle NI E , & par conféquent de fx rhumbs ; & l’autre diagonale AC fera par {on travers. Ce quaïré bien compris fera d’un grand ufage pour tenir facilement fon poîte dans une armée, & il fera fort aifé à l'officier qui fe promene fur Le pont, de voir d’un coup-d’œil s'il y eff. Jen montrerai Pu- tilité dans tous les différens mouvemens où l’on pour- ra le mettre en pratique. Ce quarré peut être encore fort utile, fans avoir befoin de compas, dans la propofition précédente, démontrée dans la deuxieme figure; le vent vient du point N, & le lit du vent eft la ligne N M. Le navire 1 court au plus près l’amutre à bas-bord , faifant la route LE ; le navire X court au plus près Pamure à ftribord, faifant la route À Æ , parallele à la diago- nale B D. Selon ce qui a été dit plus haut , tirez {ur votrequarré la perpendiculaire au lit du vent, qui {era la ligne X L; ce qui fera facile, en faifant l’an- gle E IX de deux rhumbs de vent,ou de vingt-deux degrés trente minutes fupplément de fix rhumbs , ou dedoixante-fept degrés trente minutes valeur de l’an- gle NIE ; files deux navires J & X faifant route, reftent toùjours dans la même perpendiculaire au lit du vent ZX, ou dans la même parallele à cette li- gne , ils fe rencontreront au point Æ, & s’aborde- ront. | Ordre de marche au plus près du vent fur une ligne. Pour faire marcher l’armée au plus prés du vent fur une ligne , un pavillon rayé blanc & rouge au bout de la vergue d’artimon, figure 5. L'armée faifant route au plus près du vent, le général marche le premier à la tète de toute la ligne, tous les vaif- feaux marcheront {ur une même ligne dans les eaux du général, en faifant le même air de vent ; ils {e fer- rerontjufqu’à deux tiers de cable fi le tems le permet, pour connoître avec le quarréde la quatrieme figure, l’on eft exattement dans Les eaux du général fur le- quel où doit fe regler. | Il faut le tenir précifément par la ligne ZE , & - vous n’en fortirez pas en tenant le même air de vent que lui. | Maniere de revirer par lacontre-marche dans Pordre de marche au plus près du vent [ur une ligne, fig. 6. Le oé- néral dans l’ordre demarche étant à latête delaligne, les navires qui le fuivent le voyant revirer, vont ous revirer dans fes eaux les uns après les autres ; on ne fait aucun fignal pour ce mouvement: on doit obferver exaétement de pañler toùjours fous le vent d’un navire que l’on fuit qui aura reviré , & de bien regler fa bordée avant que de donner vent de- vant ; enforte qu’elle ne foit ni trop longue, ni trop courte, afin que les diftances foient toùjouts bien obfervées. Chacun fe trouvera après avoir reviré plütôt fous le vent du vaifleau qui aura reviré avant lui, qu'au vent, étant Le feul moyen pour bien fer- ter la ligne & garder l’ordre de marche. Pour cet ef- et1l faut donner vent devant aufli-tôt que yous cou- vrez le boffoir de deflous le vent du vaïffeau qui aura teéviré avant vous, au cas qu'il foit dans fon pofte ; car siln’y étoit pas, il ne faut pas vous regler fur lui, mais à fon chef de divifion dans Les eaux de qui il faut revirer; ce que l’on connoîtra facilement par la ligne TE du quarré. Dans l'ordre de marche au plus près du vent [ur une ligne , fig. 7. Lorfqu'on revire tous en même tems, Torne FI, j ÿ EVO 203 & que l’arriere-sarde devient avant-garde, maniere de 1e mettre en ligne au plus près du vent. Pour avertir tous les vaifleaux de revirer en même tems fans faire la contre - marche , un pavillon de Malte au bâton du pavillon du petit mât de hune, Pour faire donner vent devant à tous les vaifleaux en même tems, un pavillon bleu au même endroit, & Ôter le pavillon de Malte, L'armée qui couroit d’un vent de nord à l’Eft-norde eft, l’amure à bas-bord fur la ligne BA, vient dere- virer pour courir à l'O, N. O! l’amure à ftribord, Par- riere-garde devant faire l'avant-garde, ê chaque vaifleaumet le cap à la route qu'il doit faire pour aller prendre fon pofte dans la ligne CD, | Pour exécuter ce moñvément avec quelquetor- dre, il faut que le vaiffeau.B 9 ferve de regle toute l’armée ; que chaque navire, le général excepté, aille fe mettre dans fes eaux ; 8 qu’y étant arrivé : il coure au plus près comme lui. Ledit navire 9 qui étoit le dernier de la hgne 43 doit, dès qu'il a re- viré, s’aller mettre à la tête de la ligne CD, & prendre fon pote, qui eft fuppofé au point 9, de l'arrière du commandant; loriqu'il y eft arrive, il eft de la prudence du capitaine qui le commande, ! de carguer de voiles ,; ou de mettre en panne, lorf- qu'il croit avoir laïiflé Pefpace que doivent occuper les autres vaifleaux de l’arriere-varde, lequel efpa- ce doit être pris depuis le point 8 9 où il a reviré, On voit en jettant les yeux fur la figure, que cha- que navire de la ligne B 4, numérotée depuis 1 juf- qu'à 9, doit s’aller placer dans la ligne CD, à fon même numéro, en fuivant les lignes ponétuées qui marquent la route que chacun doit tenir. | Ils doivent fur-tout avoir la précaution de ména- ger leur voilure , enforte que chaque navire paffe toujours de l’arriere de celui qui doit être devant lu£ dans la ligne CD , & le tienne à une diftance rai- fonnable , afin de ne le point couper &c d'éviter les abordages, qui font plus à craindre pour les vaif- feaux de cette nouvelle avant-garde, que pour ceux du corps de bataille & de l'arriere -garde, ceux-c# devant feulement obferver de mettre plus de voile, comme ayant plus de chemin à faire pour prendre leur pofte. Vous voyez, par exemple, que le com- mandant 1 qui doit parcourir la ligne 4 €, pour fe mettre à la tête de CD, a [a plus longue courfe à faire , & par conféquent le plus de voile à mettre, & après lui les vaifleaux 2, 3, &c. Aïnfi le plus ou le moins de chemin doit décider de la voilure qu’on doit faire. Dans l’ordre de marche au plus près du vent fur une ligne pour revirer vent arriere, & prendre lof pour lof, un pavillon rouge au bout de la vergue d’artimon , & un pavillon blanc fous les barres du perroquet d’artimon. | | Si ayant reviré & pris lof pour lof, on veut met= tre l’armée en ligne au plus près du vent, & que l’a vant-garde fafle l’arriere-garde , un pavillon rayé blanc & rouge au bout de la vergue d’artimon, en Ôtant les autres pavillons. Ce mouvement fe fait de la même maniere que le précédent; il n’y a que la différence de revirer vent arriere, au lieu de le faire vent devant: ce qui met l’armée plus fous le vent. Du refte chaque vaifleau va prendre fon pofte dans la-digne C D ,en obfer- vant les mêmes circonftances ci-deflus détaillées; Silegénéral, après avoir fait revirer enmêmetems tous les vaifleaux de la ligne 4 B, fig. 8. remetle pa. villon de Malte à la place du pavillon bleu; il faut que toute l’armée fafle l'O. N. O. & coure. au plus près ftribord dans l’ordre où elle fe trouve, & que tous les navires fe tiennent les uns à l'égard des au- tres, par le même air de vent où ils étoient avant qu'ils euflent reviré ; c’eft-à-dire que Fast PE, N LD) 204 EVO Æ, au plus près bas-bord , chaque vaïffeau doit tenir à l'E. N.E, celui qui eft à ftribord de ln, & qui doit être devant lui lorfqu’on fera en ligne l’amure à bas- bord, & à la même diftance qu'il étoit dans la ligne A B.Le quarré peut être utile pour ce mouvement. Il faut que le vaifleau qui eft au milieu du quarré, & qui parcourt la ligne ZE, qui eft l'O. N. O. tienne les vaifleaux qui font à ftribord de lui par la ligne 1 C, c ceux qui font à bas-bord par la ligne 1 4, la diago- nale AC étant fuppofée £.N. E. & O.S.0. en obier- vant ces circonftances, toute l’armée fera E. N.E.&x O.S.0. & arrivera toute en mêmetems dans la ligne FE, chacun au point marqué ; & dans la ligne DC, où l’on fuppofe que le général fait figne de virer: pour lors toute l’armée {e trouvera en ligne au plus près du vent, l’amure à bas-bord, telle que vous la voyez en DC. Dans l’ordre de marche au plus près du vent fut une ligne , pour revirer vent arriere & prendre lof pour lof, un pavillon rouge au bout de la vergue d’artimon , & un pavillon blanc fous les barres du perroquet d’artimon. Pour faire tenir tous les vaifleaux dans l’ordre où ils fe trouvent après avoir reviré, un pavillon de Malte au bâton de pavillon du petit mât d’hune. Lorfque l’armée a pris lof pour lof, la manœuvre eft la même que celle dont on vient de parler, quand elle a donné vent devant. Dans l’ordre de marche au plus près du vent fur une ligne, pour avertir tous les vaifleaux de revirer en même tems, un pavillon au bâton de pavillon du petit mât d’hune. Pour faire donner vent devant à tous les vaif- feaux ,en même tems un pavillon bleu au même en- droit, & Ôter le pavillon de Malte. Pour faire courir tous les vaifleaux dans l’ordre où ils fe trouvent après avoir reviré , un pavillon de Maite au bâton de pavillon du petit mât d’hune, & Ôter le pavillon bleu. Pour faire revirer tous les vaïifleaux en même tems, un pavillon bleu au même endroit, & ôterle pavillon de Malte. Ordre de marche fur trois colonnes. Pour mettre lar- mée dans l’ordre de marche fur trois colonnes au plus près du vent, un pavillon blanc à croix bleue au bout de la vergue d’artimon, fig. 9. L'armée marchant au plus près fur trois colonnes, les commandans feront à la tête , & les vaifleaux fe ferreront jufqu’à deux tiers de cable, fi le tems le permet. Les commandans , qui font les vaifleaux ACE, doivent fe tenir, les uns à l’égard des au- tres , fur la perpendiculaire de la ligne du plus près qu'ils courent : comme l’armée a le cap à l'E. N.E, d’un vent de nord , les lignes 4C, CE , doivent être N, N. O.& S.S.E,. fi l’armée couroit l'O. N. 0. Pamure à ftribord, ces lignes feroient N. N.E, & S. S.0....ainfides autres rhumbsde vent où l’on peut courir. Chaque navire des trois colonnes fe tiendra au même air de vent. Pour déterminer la diftance d’une colonne à l’au- tre , le vaifleau 4 , qui eft à la tête de la colonne fous le vent , doit avoir le vaiffeau D , qui eft à la queue de la colonne du milieu , fur la perpendiculai- re de la ligne du vent ; & il en eft de même du vaif- feau €, qui eft à la tête de la colonne du milieu , qui doit aufh avoir le vaifleau F de la queue de la co- lonne du vent , fur la perpendiculaire du vent, c’eft- à-dire que fi le vent eft au nord, les lignes 4 D , C F, doivent être eft & oûeft , fuppofé que les deux colonnes de vent ferrent la file , & gardent les dif- tances ordonnées , ce qui eft de conféquence dans £e mouvement. On doit obferver toutes ces circonftances qui pa- roitront abfolument néceflaires, loriqu'il faudra re- EVO virer par la contre-marche ; chaque navire voit par le quarré , sil eft dans fon pofñte , c’eft-à-dire s'il a les vaifleaux de fa colonne par la ligne 1 E ; les vaif- feaux qui doivent être par fon travers dans les au- tres colonnes, doivent lui répondre par la ligne Œ IT, & les têtes doivent avoir les queues des colon- nes par la ligne À L, l’armée marchant l’amure à-bas- bord ; mais fi elle eft amurée ffribord , ce doit être la ligne P Q, fig. 4. Ordre de marche par trois colonnes au plus près du vent, Pour revirer par la contre-marche , un pavil- lon mi-parti blanc & rouge au bâton du petit mât d’hune , fig. 10. Le vaifleau 4 de la colonne 4 B , qui eft fous le vent, revirera le premier, & tous ceux de la même colonne revireront fucceflivement dans fes eaux au point À ; les deux autres colonnes continueront leur bordée jufqu’à ce que la tête € de la colonne du mi- lieu fe trouve au point &, c’eft-à-dire jufqu’à ce que le vaifleau À lui refte par Pair de vent perpendicu- laire à celui fur lequel ledit vaifleau 4 court, qui fai- fant l'O. N. N. lamure à ftribord, il doit lui refter au S. 5, O. qui fera la ligne GA ; caen même tems que le navire € parcourt la ligne CG, le vaifleau 4 arrive au point À; alors le vaifleau C, donne vent devant, & le refte de la colonne CD vient pareille- ment revirer au point G; pendant ce tems là , la co lonne du vent £ F court toüjouts l’amure à-bas-bord, jufqu’à ce que la tête Æ arrive au point 7, & voye les deux vaifleaux C & 4 l’un par l’autre dans les points LXK, c’eft-à-dire lorfqu’ils lui reftentau $.S. ©, qui eft l’air de vent perpendiculaire à celui fur le- quel ils courent, qui eft la ligne ZX ; ces trois têtes doivent arriver en même tems aux points J LX ; ces lignes AK,CG,plusG L & E I étant égales. En obfervant ces mouvemens avecexaétitude, les commandans fe trouvent de front après avoir revi- té, auffi-bien que tous les navires de chaque colon- ne , & l’armée fe trouvera fur les colonnes X M, LN,10, dans le mème ordre qu'auparavant. Il paroît par la figure , que la colonne de deffous. le vent coupe les deux du vent; mais fi on exa= mine cette marche, on trouvera dans l’exécution que la chofe n'arrive pas, parce qu’en même tems que. le vaiffleau 4 parcourt 4 À, le navire D arrive au point T ; & pendant que le même vaifleau À par- court HS , qui eft ou qui doit être la jonéhion des. deux colonnes, le navire D arrive en S en même. tems que le navire À ; ainfi pour que le vaifleau 4 afle de l'arriere du vaifleau D , à une diftance rai- fonnable , il faut qu'il ménage fa voilure , & que le: vaifleau D ferre fa file. | A l'égard de la colonne du vent, avant que celle, de deffous le vent l'ait jointe , le navire F'eft au point I où il doit revirer ; comme la diftance de la colon- ne du milieu à celle du vent eft la même, elle ne la coupera pas plus qu’elle n’a été coupée par celle de deffous le vent ; mais pour bien exécuter ce mou- vement , il faut que les vaifleaux de chaque colonne ferrent leur file à la diftance ordonnée. | Pour favoir par le quarré (fg. 4.) quand les té. tes des deux colonnes du vent doivent revirer , ce doit être aufñi-tôt que le vaiffleau € a le vaifleau 4 par la ligne J-C du quarré. Ordre de marche fur trois colonnes au plus près du vent. Pour avertir les vaifleaux des trois colonnes de revirer en même tems fans faire la contre-marche, un pavillon de Malte au bâton de pavillon du petit mât d’hune. Pour faire donner vent à tous les vaifleaux en même tems , un pavillon bleu au même endroir, & ôter le pavillon de Malte, fig. 1r. Pour faire courir tous les vaifleaux dans l’ordre où ils fe trouvent après avoir reviré , un payillon de Maite au bâton de pavillon du petit mât d’hune, & Ôter le pavillon bleu. Pour faire donner vent de- vant à tous les vaifleaux en même tems, un pavil- lon bleu au même endroit, & ôter le pavillon de Malte. Les vaifleaux des troiscolonnes 4B,CD,EF, ont reviré tous en même tems, & courent d’un vent nord àl O.N. O0. lPamure à fribord, parcourant les l1- gnes de la figure ; il faut dans ce mouvement , qui eff le même que celuide la fig. 7. excepté que danscelle- là , l'armée eftfurune ligne, & dans celle-ci fur trois colonnes ; il faut , dis-je , que chacun obferve les mêmes circonftances que j'y ai dites , qui font que les navires de chaque colonne courent dans le me- me ordre où 1ls fe trouvent , & qu’ils {e tiennentles uns à l'égard des autres par le même air de vent, & la même diftance où ils étoient avant qu’ils euffent re- viré, par exemple, que chaque colonne foit £. N.£, & O.S$. 0. qui eft la ligne du plus près bas-bord, afin que la colonne 4 3 arrive en même tems fur la li- gne G Æ, la colonne C D fur la ligne 7 X, & la co- lonne E F fur la ligne L M ; dans cet inftant , le gé- néral faifant fignal à l’armée de revirer une fecon- de fois tous en même tems, les colonnes GÆ,1K, L M , fe trouveront formées dans le même ordre, & telles qu’elles étoient : ces obfervations font plus détaillées dans la figure 8. L'armée marchant fur trois colonnes , le général au amilien de fon efcadre ; maniere de faire mettre en bataille L’efcadre de deffous le vent, mettant de panne un pavil- don blanc au-deffus de la vergue d’artimon, figure 12. L’efcadre 4B, qui eft fous le vent, met en pan- ne ; l’efcadre C 2 du milieu va faire le corps de bataille, & l’efcadre £ F du vent va prendre l’a- vant-garde en formant la ligne B E ; pour faire ce: mouvement avec ordre & régularité , 1l faut avoir un point fixe , fur lequel on puiffle gouverner pour aller prendre {on poñte par Le plus court chemin & fans embarras ; dans celiu-ci le navire D, qui eft à la queue de la colonne du milieu, a ce point fixe à- peu-près , en l’imaginant à la diftance de deux tiers de cabie de l’avant du vaifleau qui eft en panne , pour s’aller mettre devant lui fur la même ligne à la diftance de ces deux tiers de cable. L’expérience don- mera tres-peu d'erreur pour ce point imaginaire, & tous les navires de fa colonne doivent fe régler fur lui, gouverner au même air de vent, & le tenir à la même diflance, & toûüjours fur la ligne £. N. E. & 0.5.0: puifque la colonne couroitàl'£. N.E.auplus près: lur ce principe ils arriveront tous en même tems {ur la Ligne de bataille BE ; à l'égard de la colonne du vent , 1l faut que le vaifleau F, qui eft à la queue, gouverne toùjours au vent du vaifleau €, qui eft à Ja têre de la colonne du milieu , qui eft de fe régler fut lui , de gouverner au vent pour lui pañler au vent - à une diftance raïfonnable, c’eft-à-dire un demi-ca- ble à-peu-près , & tous les vaiffleaux de fa colonne, doivent faire comme ceux de la colonne du milieu, qui eft de fe régler fur lui, de gouverner au même rhumb de vent, de le tenir à la même diftance, 8 que toute l’efcadre en marchant foit toûjours £. N. £. & O.S. O, le coup-d’œil eft plus beau , & le mouve- ment plus gracieux d'arriver tous en même tems, pour#ormer la ligne de combat B £ ; comme l’efca- dre FE a une fois plus de chemin à faire que l’efca- dre CD , il faut qu’elle force de voiles Le plus qu’elle pourra , & que la colonne du milieu regle fa voilu- re pour faire une fois moins de chemin que la co- lonne du vent. L'armée marchant fur trois colonnes | maniere de la faire mettre en bataille. L'efcadre deffous le vent pre- nant l’avant-garde, un pavillon bleu au bout de la vergue d'artimon, & ajoûter un pavillon rayé blanc &e bleu fous les barres du mât du perroquet d’arti MON ; EUTE 13s E VO 205. L’efcadre 4 B qui eftfous le vent, va prendre l’a- -Vant-garde de la ligne B H, & occuper l'intervalle GA; l’efcadre du milieu va former le corps de ba- taille , & occuper l'intervalle I L , & l’efcadre £ F du vent, va prendre l’arriere-garde, & fe mettre dans la place de l’efcadre AB : dans cette évolurion l’efcadre 4 B a la plus longue courfe à faire & au plus près , & par conféquent elle doit forcer de voi- les pour prendre l'avant-garde le plütôt qu’elle pour- ra : dans ce mouvement les deux colonnes du vent n’ont pas de véritable point fixe, fur quoi fe régler pour aller prendre leur pofte; elles peuvent fe {er- vir d’un point imaginaire , qui tiendra , fans erreur fenfible, la place du point fixe : il faut que le navi- re C, de la tête de la colonne du milieu , donne chaf: fe au point À , qui doit être pris à la diftance de deux tiers de cable de la poupe du vaïfleau B, qui eft à la queue de la colonnede deflous le vent ; cette diftance ef l'intervalle ordonné entre chaque navi- re ; ainfi aufli-tôt que le fignal eft fait pour ce mou- vement, le vaifleau C doit relever avec un compas le point X, & fachant à quel rhumb il lui refte, il doit toûjouts tenir ce point au même air de vent ; de cet- te maniere, lorfque le navire B arrivera en G, qui fera fon pofte , le navire Carriveraen L, qui fera le fien; & là, il fera l'E. N.Æ. comme l'avant-garde : tous es navires de la colonne € D, doivent fe régler en marchant fur leuftête C, & fetenirtous £.N.E, & O. S. O. les uns des autres, & à la même dif. tance, En fuivant cette regle, cette colonne courra a-peu-près à l’eft, & fera beaucoup moins de voile que la colonne de deflous le vent , ayant beaucoup moins de chemin à faire , & larguant pour aller pren- dre fon pofte : la colonne du vent fera la même ma. nœuvre que la colonne du milieu , & le navire E de la tête, relevera le point M qui eft à deux tiers de cable de la poupe du vaïfleau D , & lui donnera chafle, le tenant toüjours au même air de vent qu'il l’a relevé : lorfque le vaifleau D arrivera au point 1, qui fera fon pofñte dans la ligne de combat, le na- vire E arrivera au point 4, qui fera le fien dans la même ligne ; & toute la colonne £ F du vent obfer- vant les mêmes circonftances, c'eft-à-dire fe tenant £. N.E.& O.S. 0. les uns des autres, & à la même diffance qu'ils étoient, cette colonne £ F du vent fera prefque vent arriere, mettant le cap au S.S$. Æ. & fera peu de voile, ayant beaucoup moins de che- min à faire que les deux autres colonnes : il eft facile de voir que, fi au lieu de donner chaffe au point ima- ginaire M & Æ, on donnoit chaffe aux corps des navi- res DB, le navire C rencontreroit le vaifleau 2 au point L, & le vaifleau £ rencontreroit le navire D au point, quieftlajonétion des deux lignes de route; à quoi on remédie en donnant la chaffe aux points X & M, puifque cette manœuvre donne le tems aux vaifleaux B & D de pañler de l'avant , & aux vaif- feaux € & E , de fe mettre de l’arriere-d’eux, qui eft leur pofte , & de faire enfuite l’Æ, N. £. comme l’a- vant-garde. … L'armée marchant fur trois colonnes | maniere de Lx faire mettre en bataille. L’efcadre de déflous le vent revirant de bord pour prendre l’arriere-garde & pour prendre le moins de chemin qu’on pourra , un pavil- lon blanc au bout de la vergue d’artimon , & ajoù- tant le pavillon Hollandois au. bout du petit mât d’hune, fg. 13. La colonne À B de deflous le vent , revirera de bord pour aller prendre Parriere-sarde ; l’efcadre du milieu D C, va faire le corps de bataille ; & l’efca- dre du vent £ F, doit forcer de voiles pour prendre l'avant-garde. _ Dans cette évo/urion, le vaïfleau À de la tête de la colonne de deflous le vent étant également au vent, comme le vaifleau D de la queue de la colon: 506 E V OÔ ne du milieu, devroit lerencontrer au point X: ain- fiilfaudra que ce vaifleau 4 ménage fa voilure, & manœuvre de maniere qu'il n’aborde pas le vaiffleau D, mais qu'il lui pañle fous le vent à une diffance rai- fonnable ; & le vaifleau D aura foin de ferrer fa file pour éviter l’abordage, comme on a và dans la figu- re neuvieme, Ainf lelcadre :4 B {e trouvera placée en KM, & l’efcadre D. Cen I L: dans tout ce tems-là le vaifleau F de la queue de la colonne du vent, a dû donner chafle à un point imaginaire prisenviron à la diftan- ce de deux tiers de cable de l’avant du vaifleau C: ain- fi le navire F arrivera en G aufh-tôt que le navire € arrivera en L. Tous les autres vaïfleaux de la colon- ne F £ doivent fe régler fur le vaifeau F, gouverner au même rhumb , le tenir à la même diftance, &c toù- jours en £. N. E. & O.S. O. comme on a vüyg: 11, L'ordre d'une armée qui force un pallage , fig. 15 & 164 Quelques-uns veulent qu’on mette l’armée qui pale un détroit, fur deux colonnes, lesmoindres vaifleaux de puerre à la tête & les plus gros à la queue, &t que les brülots & les bâtimens de charge foient entre les deux lignes. Je trouve néanmoins quelque difficulté dans cet ordre, parce que files deux colonnes font fort eloi- gnées , elles pourront être féparées par quelque ac- cident, ou coupées. S1 elles font peu éloignées, elles feront doublées , c’eft-à-diretfie l'ennemi les atta- quant de part & d’autre les mettra l’une & l’autre en- tre deux teux. J’aimerois donc mieux ranger l’armée qui forceun -paflage en ordre de retraite , en repliant un peu les ailes de part & d’autre pour leur donner moins d’é- tendue : de cette maniere, l’armée ne pourroit être attaquée de nulle part, fans y avoir de quoi fe dé- £endre, Ordre de retraite, fig.17 6 18. Quand une armée eft obligée de faire retraite à la vüe de l’ennemi, on la range fur l'angle obtus B4C, comme on le voit dans la figure. Le général À eft au milieu & au vent; la partie 4.8 de l’armée qui eft à la gauche du général, eft rangée fur la ligne du plus près. ftri- bord, & la partie 4 C fur la ligne du plus près bas: bord; les brülots & les bâtimens de charge font au milieu. Cette maniere de ranger l’armée dans la retrait me paroît très-bonne, comme le repréfente la fieu- re17, parce que les ennemis ne peuvent pas s’ap- procher des vaiffleaux fuyards, fans fe mettre fons le feu de ceux qui font plus au vent. Ainf les vaifleaux ennemis D ne pourront pas s’approcher des vaifleaux Æ , fans fe mettre fous le feu du général 4 & de fes matelots. Si on appréhendoit que l’armée en cet ordre ne fût trop étendue, on pourroit un peu rephérfes deux aîles, & lui donner la figure d’une demi-lune au mi- lieu de laquelle un convoi pourroit être en füreté. L'ordre d’une armée qui garde un paflage, fig. 19. Pour garder efficacement un paflage, il faut avoir une ar- mée qui foit prefque double de celle qu’onveut empé- cher de paffer : alors.-on la divifera en deux parties , qui croiferont l’une d’un côté du paflage & l’autre de l’autre. Ainf pour garder le détroit 4 Æ par où on veut-empêcher que l’armée CD ne pañle; on fera croifer l’efcadre 4 B du côté 4 du détroit, & l’ef- cadre £ F de l’autre ; puis quand l’ennemi C2 fe. préfentera au paflage , l’efcadre EF qui fe tronvera au vent, fondra vent arriere fur lui, tandis que l’ef- cadre 4 B tiendra le vent pour le couper. De cette mamiere, il fera impoññble à l’efcadre € D d'échapper, quelque manœuvre qu’elle fafle. Sion ne prend pas ces précautions, & que l’armée qui garde le paflage fe trouve être fous le vent, com- me AB ;l’armée C D, entenantiun peu auffile vent, poutfa ranger le côté Æ du détroit, & échapper: Si l’armée qui garde le paflage fe trouve au vent, comme E F, l’armée € D larguera un peu plus, pour ranger le côté 4 du détroit; & mille accidens aflez ordinaires à la mer lui pourront donner lieu d’amu- {er l’ennemi, jufqu’à ce que la nuit furvienne. Du vent de nord-oïteff, fig. 20, L'armée rangée fur fix colonnes, faifant vent arriere, le cap au fud-eft ,les généraux £ D Fe tiendront les uns à l’ésard des au- tres fur la perpendiculaire du vent, & en avantcha- cun des deux colonnes qui le fuivent. Pour mettre l’armée fur fix colonnes ventarriete, le général Æ fera à la tête de fes deux colonnes, & un peu en-avant de fes deux matelots, qui formera le corps de bataille, Les deux autres commandans feront favoir l'avant-garde D à la droite du général, & en- avant de fes deux colonnes, & l’arriere-garde Fà fa gauche, auffi à la tête de fes deux colonnes ; & tous les trois généraux fe tiendront fur la perpendiculaire T L de la route qu’ils font. Il eft important, dans cet ordre de marche, que le général Æ fe trouve à la diffance requife des deux autres commandans D & Æ , afin que tous les vaifleaux de l’armée puif- {ent prendre leur pofte fur la ligne 1 L, comme il eft ici marqué par les lignes ponétuéés : quand le géné- ral £ aura le dernier vaifleau G de la colonne du de- dans de l’arriere-garde , au troifieme air de vent de lui, il tiendra de même le vaifleau Æ au troifieme air de vent : l'intervalle des colonnes, par cette ob- fervation fera telle qu’il convient pour mettre les vaifleaux en ligne de combat, du côté qu'il plaira ! ! ‘au général. Cette évolution n’eft point employée dans Îles fi- gnaux de M.de Tourville, quoiqu’elle le foit dans les ordres qu'ilemploye,&qu’elle paroïffe fort bonne. Du vent d'eff, fig. 21. Mettre l’armée vent arriere fur fix colonnes, en forte que les deux commandans foient, à l’égard du général, furles deux côtés du plus près ; favoir celui de la droite pour fe mettre l’amure à ftribord, Le cap au nord-nord-eft ; & celuide la gau- che , l’'amure à bas-bord, le cap au fud-fud-eft. Lepéneral 8 qui eft fous le vent , à la tête de fes deux colonnes, & en avant de {es deux matelots, for- mera le corps de bataille; les deux autres comman- dans 4 & C'feront, à fon égard’, fur les deux plus près du vent d’eft, favoir celui de la droite au nord- nord-eft , & celui de la gauche, au fud-fud-eft : de cette maniere, l’armée fera parée pour êtte en ba- taille du côté qu'on voudra, mais plus prômptement que dans la figure précédente; parce que les trois généraux mettant en panne, où faifant petite voile, tous les vaifleaux de leurs efcadres viendront occu- per leur pofte dans les intervalles marqués fur les lignes B 4 & BC, qui fe trouveront , par cette f- tuation , dans l’ordre de marche le plus avantageux pour fe mettre en bataille lorfqu’on eft vent arriere. Les diftances qui doivent fe trouver entre les co- lonnes feront proportionnées à leur longueur; fi le navire D de la colonne de dedans de l’avant-sarde fe met au nord-eft du général 2, ou au quatrieme air de ventde lui, ainfñ que le marque la ligne rouge , il faudra que le navire Æ de la colonne du dedans de l’arriere-garde obferve la même chofe à l'égard du général? , fe tenant au fud-eft de lui. Cette évolution n’eft point employée dans les fi- gnaux de M. de Tourville, quoiqu’elle foit dans les ordres qu'il employe, & qu’elle paroïffe fort bonne, Cet article eff tiré d'un Manuftrit qui m'a été commu niqué par une perfonne bien intentionnée pour la per- feclion de cet Ouvrage, @ qui avoit été long-tems à por- tée d'acquérir des connoïffances sûres de tout ce qui con- cerne La Marine. EVONIMOIDE, f. m. (Boran.) arbrifleau très- flexible du Canada, & très - commun aux environs E U P dé Québec; il s’éleve confidérablement , par le {e- cours des arbres vorfins autour defquels il s’entortil- le tantôt de droite à gauche, & tantôt de gauche à droite. Quoiqu'il foit dépourvû de mains & de vril- les, 1l embrafle cependant les autres arbres fi forte- ent, qu’à mefure qu'ils groffiffent il paroït s’enfon- cer & s’enfevelir dans leur écorce & leur fubftan- ce: de forte qu'en comprimant & reflerrant les vaifleaux qui portent le fuc nourricier , il empêche qu'il ne s’y: diftribue, & les fait enfin périr. Si dans fon voifinage 1l ne rencontre point d’arbre pour s’é- lever, il fe tortille fur luismême. On pourroit rap- porter cette plante au rang des fufains , autrement bonnets de prêtre. Je ne fai pourquoi M. Danty d’If nard en a fait un genre particulier dans les Méz, de l'académie des Sciences , ann. 1716 ,; où il donne fon caractere & fes efpeces : nous ne le fuivrons point dans ces minuties. Ærsicle de M. le Chevalier DE Jau- COURT. “EVORA , (Géog. mod.) capitale de l’Alentéjo , en Portugal. Lozg. 10. 25. lar, 38, 28. EVORA DE MONTE, (Géog. mod.) ville de lA- lentéjo en Portugal. EUOUAE ; mot barbare formé des fix voyelles qui entrent dans les deux mots /&culorum amen. C’eft fur les lettres de ce mot qu’on trouve indiquées dans les pféautiers & les antiphoniers, les notes par lef- quelles , dans chaque ton & dans les diverfes modi- fications de chaque ton, il faut terminer les verfets des pfeaumes ou des cantiques. (S) EUPATOIRE, f. f. eupatorium , (Hifi. nat, bot.) genre de plante à fleur compofée de plufieurs fleu- rons, auxquels tiennent des filamens longs & four- chus. Ces fleurons font découpés & portés fur des embryons , & foûtenus par un calice long, cylin- drique , & écailleux : chaque embryon devient dans la fuite une femence garnie d’une aigrette, Tourne- fort, Inff. rei herb. Voyez PLANTE. (1) EUPATOIRE FEMELLE , bidens, (Hifi. nat. bot.) genre de plante à fleurs pour l'ordinaire en fleurons, compofées de plufeurs pétales découpés qui tien- nent à un embryon ,& qui font entourées, d’un ca- lice. Quelquefois il y a des fleurs en demi-fleurons : l'embryon devient une -femence terminée par des pointes. Tournefort, Inf?. rei herb. Voyez PLANTE. ES: LUPETALOS , (Æff. nas.) pierre dont parle Pli- ne , qui étoit de quatre couleurs , & que de Boot regarde comme une opale. EUPHÉMIE, f. f. ( Belles-Lertres. ) évgsuie ,. mot compofé de év, bien, & gnui, je dis ; nom des prieres que les Lacédémoniens adrefloient aux dieux : elles étoient courtes & dignes du nom qu’elles portoient , car ils leur demandoient feulement z puilchra bonis adderent : « qu'ils puffent ajoûter la gloire à la ver- » tu ». Renfermer en deux mots toute la morale des philofophes srecs, pour en faire l’objet de fes vœux, cela ne pouvoit fe trouver qu’à Lacédémone. re. de M. le Chevalier DE JAUCOURT. EUPHÉMISME , f.m, évomuouoe, de êv , bien | heu- reufement ; racine de om , Je dis, L’euphémifme eft un trope, puifque les mots n’y font pas pris dans le fens propre : c’eft une figure par laquelle on déguife à l'imagination des idées qui font ou peu honnêtes, ou defagréables, outriftes, ou dures ; & pour cela ônnefe fert point des expréflions propres qui exci- teroient direétement ces idées. On fubfitue d’autres termes qui réveillent direétement des idées plus hon- nêtes ou moins dures ; on voile ainfi les premieres à Fimagimation!,.on l'en diftrait, on l’en écarte; mais par lesadjoints 8z les circonftances, l’efprit entend bien ce qu’on a defflein de lui faire entendre. Il y à donc deux fortes d'idées qui donnent lieu de recourir à l’exphémifine, | 1°. Les idées deshonnêtes, at 2°: Les idées defagréables, durésou triftes, À l'égard des idées deshonnêtes,, on peut obfer ver que quelque refpeétable que doit la nature 8 fon divin auteur , quelques utiles & quelques nécef: faires même que foient les penchans que la nature nous donne , nous avons à les regler ; &:1ly a bien des occafons où le fpeétacle direét des objets &cices lui des a@tions nous émeut, nous trouble ; nous dpi te. Cette émotion qui n’eft pas l'effet libre de notre volonté, & qui s’éleve fouvent en nous malgfé nous-mêmes, fait que lorfque nous avons a parler de ces objets ou de ces aétions ; nous avons reconrs à l'exphémifine : par-là nous ménageons notre prepre imagination, & celle de ceux à qui nous parlons , &T nous donnons un frein aux émotions intérieures. C’eft une pratique établie dans toutes les nations policées ; où l’on connoît la décence & les égards, En fecond lieu, pour ce qui regarde les idées du- res, defagréables, ou triftes , il eft évident que lorf. qu'elles font énoncées direétement par les térmes 307 propres deftinés à les exprimer, elles caufent üne impreffion defagréable qui eft bien plus vive que fi l’on avoit pris le détour dé l’euphérifine. Il ne fera pas inutile d’ajoûter ici quelques autres réflexions, & quelques exemples en faveur des per- fonnes qui n’ont pas le livre des tropes, où il eft parlé de l'euphémifine, atticle 15. p. 164. . Les perfonnes pen inftrüites croyent que les La- tins n’avoient pas la délicatefle dont nous parlons ; c’eft une erreur. Il eft vrai qu'aujourd'hui nous avons quelquefois recours au latin , pour exprimer des idées dont nous n'ofons pas dire le nom propre en françois; mais c’eit que comme nous n'avons appris les mots latins que dans les livres, ils fe préfentent en nous avec une idée accefloire d’érudition & de leéture qui s’eme pare d’abord de Pimagination ; elle la partage ; elle l'enveloppe ; elle écarte l’image deshonnête, & ne la fait voir que comme fous un voile. Ce font deux objets que l’on préfente alors à limagination, dont le premier eftle mot latin qui couvre l’idée obfcène qui le fuit ; au lieu que comme nous fommes accoû- tumés aux mots de notre langue; l’efprit n’eft pas partagé : quand on fe fert des termes propres , il s'occupe direétement des objets que ces termes f- gnifient. Il en étoit de même à l'égard des Grecs & des Romains : les honnêtes. gens ménageoient les termes, comme nous les ménageons en françois. & leur ferupule alloit même quelquefois fi loin, que Ciceron nous apprend qu'ils évitoient là rencontre des fyllables qui, jointes enfemble , auroient pû ré- veiller des idées deshonnêtes : cëm nobis non dici- tur ; fed nobifèum ; quia fe ita diceretur, obfceniès con. currerent litteræ, ( Orator. c:xlv.:n. 154. Cependant je ne crois pas que l’on ait poftpofé la prépoñition dont parle Ciceron par lé motif qu’il en donne ; fa propre imagination l’a féduit.en cette oc- cafon. Il y a en effet bien d’autres mots tels que tenus, en >; Vérd , quoque, Ve, que; DOUr É, &c. que l’on place après Les mots devant lefquels ils de- vroient être énoncés felon lanalogie commune. C’eft une pratique dont il n’y a d'autre raïfon que la coûtume, du moins felon la conftru@tion ufuelle, dabat hanc licentiam confuetudo, Cic. otat.n. 155. c. xl. Car felon la conftru&tion fignificative, tous ces mots doivent précéder ceux qu'ils fuivent; mais pour ne point contredire cette pratique, quand il s’agit de faire laconftru@ion fimple ; on change perd en fed , & au heu de e7im, on dit zarr, &c. Quintilien eft encore bien: plus rigide fur les mots obfcènes ;ilne permet pas même l’exphémifine, par- ce que maloré le voile dont l'exphémifme couvre li- dée obfcène , il n’empêche pas de l’apperçevoir, Or. 208 E U P il ne faut pas , dit Quintilien, que par quelque che- min que ce puifle être, l’idée oBfcène parvienne à lentendement. Pour moi, pourfuit-il, content de la pudeur romaine, je la mets en sûreté par le fi- lence ; car il ne faut pas feulement s’abftenir des pa- roles obfcènes, mais encore de la penfée de ce qué ces mots fignifient, Ægo Romant pudoris more con- tentus , verecundiam filentio vindicabo. Quint. Juff. 1, VIIT, c.3.n. 3. Obfcenitas verd non a verbis tantum abefe deber, fed à fignificatione, Ib. !. VI, c. üj, DE RISU , n. 3. Tous les anciens n’étoient pas d’une morale auffi févere que celle de Quintilien ; 1ls fe permettoïent au moins l’esphémifme, & d’exciter modeftement dans lefprit l’idée obfcène. « Ne devrois-tu pas mourir de honte, dit Chre- » mès à fon fils, d’avoir eu l’infolence d'amener à » mes yeux, dans ma propre maifon, une ...? Je # n’ofe prononcer un MOT DESHONNÊTE en pré- » fence de ta mere, & tu as bien ofé commettre » une action infâme dans notre propre maïfon ». Non mihi per fallacias, adducere ante oculos. . Pudet dicere häc prefente VERBUM TURPE, at teid nullo modo puduir facere. Terenc. Heaut. aë, F, fe. JV. V. 18. « Pour moi j’obferve &j'obferveraitoüjours dans » mes difcours la modeftie de Platon, dit Cicé- # ron ». Ego fervo & fervabo Platonis verecundiam. Traque teëlis verbis, ea ad te fcripft, quæ apertiffimis aiunt Stoici, Illi ,etiam crepitus, aiunt.œæquè liberos ac ruttus, effe opportere. Cic. L. LX, epiff. 22. Æquè eâdem modefhié, potins cim muliere fuife, quam concubuiffe dicebant. Varro, de Ling. latin, LV. fub fine. Mos fuit res turpes & Jædas prolata honeffiorum con- vertier dignitate. Arnob. L, F. C'étoit par la même figure qu'au lieu de dire 7e yous abandonne , je vous quitte ; les anciens difoient fouvent , vivez , portez-vous bien, vivez foréts. Omnia vel medium fant mare, vivite fylvæ , Vire. Ec. VIII. y. 58. Et dans Térence, And. a@&.I[V. fc. 1j. v. 13. Pam- phile dit, « J’ai fouhaité d’être aimé de Glycerie; » mes fouhaits ont été accomplis ; duewtous ceux qui » veulentnous féparer SOIENT EN BONNE SANTÉ ». Valeant qui inter nos diffidiumvolunt. Il eft évident que valeant n’eft pas au fens propre; 1l n’eft dit que par euphémifme. Madame Dacier traduit valent par s’en aillent bien loin; je ne crois pas qu’elle ait bien rencontré. | Les anciens difoient aufñi avoir vécu, avoir été, s’en être allé, avoir paflé par la vie, vit funütus. Fungi, or , fignifie paffér par ; dans un fens métapho- rique, évre délivré de , s'être acquirté de , au lieu de dire étre mort. Le terme de zzourir leur paroïfloit en certaines occafions un mot funefte. Les anciens portoient la fuperfition jufqw’à croire qu'il y avoit des mots dont la feule prononciation pouvoit attirer quelque malheur, comme fi les pa- roles, qui ne font qu’un air mis en mouvement, pou- voient produire naturellement par elles-mêmes quel- qu'autre effet dans la nature, que celui d'exciter dans l'air un ébranlement qui fe communiquant à l'organe de l’oùie , fait naître dans l’efprit des hommes les idées dont ils font convenus par l'éducation qu'ils ont reçüe, . Cette fuperftition paroïfloit encore plus dans Les cérémonies de la religion ; on craignoiït de donner aux dieux quelque nom qui leur fût defagréable : c’eft ce qui fe voit dans plufeurs auteurs. Je me conten- terai de ce feul paflage du poëme féculaire d'Hora- ce : « Ô Ilythie , dit le chœur des jeunes filles à Dia- . EUP » fle, Où fi vous aimez mieux être invoquée fous là _» nom de Lucine ou fous celui de Géxitale » : Lenis Ilythia, tuere matres, Sive tu Lucina probas vocari, # a à Seu Geritalis. Horat, carm. fecul, On étoit averti au commencement du facrifice ou: de la cérémonie, de prendre garde de prononcer au- cun mot qui püt attirer quelque malheur ; de ne dire que de bonnes paroles, hona verba fari ; enfin d’être: favorable de la langue , favete linguis, ou linguä, ou ore ; & de garder plütôt le filence que de prononcer quelque mot funefte qui pût déplaire aux dieux ; & c'eft de-là que favete linguis fignifie par extenfon , faites filence. Favete linguis. Horat. /. IT. od, j. Ore favete omnes, Virg. Ænaid. 1. V. y, 71, Dicamus bona verba, venit natalis, ad aras Quifquis ades, lingua, vir, mulierque fave. Tibull. 2. ZI. el, 1j. y. 14 Profpera lux oritur, linguifque, animifque favete, Nunc dicenda, bono, funt bona verba, die. Ovid. Faf, 1, I. v. 71e Par le même efprit de fuperftition ou par le même fanatifme , lorfqu’un oifeau avoit été de bon augure, & que ce qu’on devoit attendre de cet heureux pré- fage , étoit détruit par un augure contraire, ce {e- cond augure n’étoit pas appellé mauvais aupure, on le nommoit l’autre augure, par euphémifme , ou l’au- tre oifeau ; c’eft pourquoi ce mot a/sr, dit Feftus , veut dire quelquefois cozrraire, mauvais, ALTER 6 pro bono ponitur, ut in auguriis, altera cm appellatur AVIS, que utique profpera non eff. Sic ALTER nonnunquam proadyerfo dicitur € malo, Feft. yoce ALTER. Il y avoit des mots confacrés pour les facrifices ; dont le fens propre & littéral étoit bien différent de ce qu'ils fignifioient dans ces cérémonies fuperfti- tieufes : par exemple, maûlate, qui veut dire rzagis autlare , augmenter davantage, fe difoit des viétimes qu'on facrihoit. On n’avoit garde de fe fervir alors d’un mot qui pût exciter dans l’efprit l’idée funefte de la mort ; on fe fervoit par euphémifine de maëlare, ausmenter, foit que les viétimes augmentaflent alors en honneur, foit que leur volume füt grofli par les ornemens dont on les paroit, foit enfin que le facri- fice augmentât l’honneur qu'on rendoit aux dieux. De même au lieu de dire oz bräle fur Les aurels, ils difoient , les autels croiflent par des feux, adolefcune ignibus are. Virg. Georg. 1, IV, v. 370, car adolere & adolefcere figniñient proprement croire ; & ce n’eft que par ewphémifme qu'on leur donne le fens de briler. Nous avons fur ces deux mots un beau pañage de Varron : Maitare verbum ef Jacrorum , HET SUDHLLET LOT diétum , quaft magis augere ac adolere , unde G magmen= tum, quafi majus augmentum ; nam hofhi@ tanguntur molé falf&, € tum immolate dicuntur : cum vero ile, - Jfunt, & aliquid & illis in aram datum eff, matlare di cuntur per laudationem , itemque boni hominis fignifica- tionem., Varr. de vité pop. rom. L, I, dans les frag- I120715. Dans l’Ecriture-fainte le mot de #éir eftemployé quelquefois au lieu de #azdire, qui eft précifément le contraire. Comme il n’y a rien de plus affreux à concevoir que d'imaginer quelqu'un qui s’emporte jufqu’à des imprécations facrileges contre Dieu mé- me, on fe fert de béir par euphémifrnes, &c les cir= conftances font donner à ce mot le fens contraire. Naboth n’ayant pas voulu rendre au roi Achab une vigne qui étoit l'héritage de fes peres., la reine Jezabel, femme d’Achab , fufcita deux faux témoins qui dépoferent que Naboth avoit blafphémé contre Dieu & contre le roi : or l'Ecriture , pour exprimer çe LE LP be blafphème,, fait dire aux témoins que Naboth a béni Dieu & le roi : véri diabolici dixerunt contra eum refhimoninum coram multitudine: benedixit Naboth Deur © regem, Reg. III. cap. xxj. v. 10. & 13. Le mot de bénir eft employé dans le même fens au livre de Job, Cf V. 5. ME C’eft ainf que dans ces paroles de Virgile , auri _ facra fames, fe prend par euphémifine pour execrabilis. (Tour homme condamné au fupplice pour fes mau- vaifes attions, étoit appellé /acer, dévoué ; de-là, par extenfñon autant que par ewphémifime, Jacer figni- fie fonvent méchant, exécrable : homo facer is ef quere populus judicavit, ex quo quivis homo malus aique 1m- probus Jacer appellari Joler, parce que tout méchant mérite d’être dévoié, facrifié à la juftice. Cicéron n’a garde de dire au fénat que les domef- tiques de Milon tuerent Clodius : ils firent, dit-il, ce que tout maïtre eût voulu que fes efclaves euf- fent fait en pareille occafion. Cic. pro Milone, n.29. Lamer Noire, fujerte à de fréquens naufrages, & &ont les bords étoient habités par des hommes ex- irèmement féroces, étoit appellée Porr-Euxin, c’eft- à-dire ser hofpitaliere, mer favorable à fes hôtes, iEivoc, hofpitalis. C'eft ce qui fait dire à Ovide que le nom de cette mer eft un nom menteur : Quern renet Euxini mendax cogfomine litrus. H Ovid. Trif£. 1. PF. el. x. v, HE Malgré les mauvaifes qualités des objets , les an- ciens qui perfonnifioient tout, leur donnoïent quel- quefois des noms flateurs , comme pour fe les rendre favorables, ou pour fe faire un bon préfage; ainfi c'étoit par exphémifme & par fuperftition, que ceux qui alloient à la mer que nous appellons aujourd’hui zner Notre, la nommoient er hofpitaliere, c’eft-à-dire mer qui ne nous fera point funefte, où nous ferons reçus favorablement | quoiqu’elle foit communé- ment pour les autres une mer funefte. | Les trois furies, Alefto , Tifiphone.& Mévere, ont été appellées Ewménides, Euueveïe | c’eft-à - dire douces, bienfaifantes, hexzevolæ, On leur a donné ce nom par euphémifme, pour fe les rendre favorables. Je fai bien qu'il y # des auteurs qui prétendent que ce nom. leur fut donné quand elles eurent ceflé de tourmenter Orefte ; mais cette aventure d’Orefte eft remplie de tant de circonftances fabuleufes, que j’ai- me mieux croire que les furies étoientappellées Æz- mérides avant qu'Orefte fût venu au monde: c’eft ainfi qu’on traite tous les jours de £ozzes les perfon- nes les plus aigres & les plus difficiles, dont on vèut appaifer l’emportement ou obtenir quelque bienfait. Il y a bien des occafions où nous nous fervons aufh de cette figure pour écarter des idées defagréa- bles, comme quand nous difons Ze maître des hautes- œuvres, Où que nous donnons le nom de ve/ours-mau- risnne à une forte de gros drap qu’on fait en Mau- rienne, contrée de Savoie, & dont les pauvres Sa- voyards font habillés. Il y aauffiune sroffe étoffe de fil qu’on honore du nom de damas de Caux. . Nous difons auffi Dieu vous affifle, Dieu vous bé- riffe, plütôt que de dire, 7e n'ai rien à vous donner. Souvent pour congédier quelqu'un on lui dit : vo/a qui eff bien , je vous remercie, au lieu de lui dire , a/2ez- vous-en. Souvent ces façons de parler, courage, tout ira bien, cela ne va pas fe mal, &cc. font autant d’ez- phémifines. ILy a , fur-tont en Medecine, certains exphémif- mes qui font devenus fi familiers qu'ils ne peuvent Plusiervir de voile , les pérfonnes polies ont recours à d'autres facons de parler (Æ) EUPHONIE , {. f. srme de Grammaire, pronon- ciation facile. Ce mot eft grec ;, supoyiæ , RR. éU y berne, GE ovni, vox.; ainfl euphonie. Vant autant que yoix bonne, c’eft-à-dire prononciation facile, agréable, Tome VI, di E U P 209 Cette facilité de prononciation dont il s’agit ici, vient de la facilité du méchanifme des'organes de la : 1 E A f parole. Par exemple, on auroit de‘la peine à pro- noncer 714 ame, ma épée; On prononce plus aifé= ment 72071 ame, mon épée. De même on dit pareupho- ME, 707 are, 8t même m'amie, au lieu de #4 arriie. | | C’eft par la raïfon de cette facilité dans la pronon- ciation, que pour éviter la peine que caufe l’harus où bâillement toutes les fois qu’un mot finit par une voyelle, & que celui qui fuit commence par une voyelle , on infere entre ces deux voyelles certaines confonnes qui mettent plus de liaifon , 6 par con- féquent plus de facilité dans le jeu des organes de la parole. Ces confonnes font appellées Zesrres euphori- ges, parce que tout leur fervice ne confifte qu’à fa- ciliter la prononciation. Ces mots profum , profui » profueram, 8ce. font compoñés de la prépoñtion pro & du verbe fm ; mais file verbe vient à commencer, par une voyelle, on infere une lettre euphonique entre la prépofition & le verbe; le d eft alors cette lettre euphonique, pro-d-ef?, pro-deram , pro-d-ero, êtc. Ce fervice des lettres euphoniques eft en ufage dans toutes les langues, parce qu'il eftune fuite na- turelle du méchanifme des organes de la parole. C’eft par la même caufe que l’on dit r2’aimet-ilà dira-t-on ? Le seft la lettre euphonique ; il doit être entre deux divifions, & non entre une divifion & une apoñirophe , parce qu'il n’y a point de lettre mangée : mais il faut écrire a-2’er, parce que le z eft-là le fingulier de vous. On dit va-fen, comme on dit allez-vous en, allons-nous en. V. APOSTROPHE. Oz eft un abregé de homme ; ainfi comme on dit l'homme, on dit auf 27, f l’on veut : L'interrompt le bâllement que cauferoit la rencontre de deux voyelles, 2, 0, fon, &c. S'il y a des occañons où il femble que l’ephonie fafle aller contre l’analogie grammaticale, on doit fe fouvenir de cette réflexion de Cicéron , que l’u- fage nous autorife à préférer l’exphonie à l’exa@itude rigoureufe des regles : imperratum eff à confuerudine , ut peccare fuavitatis caufé licerer, Cic. Orar, c, xcvi. CF) EUPHORBE , £. m. (H:ff. na. bot.) genre de plan- te de la clafle des tithymales ; elle eft ainfi nommée, dit-on , d’Euphorbe, medecin du roi Juba, & frere du celebre Antoine Mufa, medecin d’Augufte; mais Saumaife a prouvé que cette plante étoit connue fous ce nom long-tems avant le medecin du roi de Lybie. Voici fes caraëteres : fa fleur, fon fruit & fon lait reflemblent à ceux du tithymale ; fa forme eft angu- leufe ; de même que dans ie cierse ; elle eft ornée de piquans , & prefque dénuée de feuilles, Boerhaave & Miller en comptent dix à douze efpeces, & ce der- nier auteur y joint la maniere de les cultiver ; mais nous ne parlerons que de lefpece d’où découle la gomme dite exphorbe. Elle s'appelle exphorbium anti- quorum verum dans Commellin , 4ort, med. Ami. 23e &c par lès Malais Jéadidacalli, Hort, malab. vol. ÎT. tab, Ixxxy. &c C’eft un arbrifleau qui vient dans les terres fa blonneufes , pierreufes & fériles des pays chauds, à la hauteur de dix piés & davantage. Sa racine eft grofle, fe plonge perpendiculairement dans la terre, & jette des fibres de tous côtés ; elle eft ligneufe in- térieurement, couverte d’une écorce brune en-de- hors , & d’un blanc de lait en dedans. Sa tige qui eft fimple, a trois on quatre angles; elle eft comme ar- ticulée & entrecoupée de différens nœuds, & les an: gles font garnis d’épines roides , pointues, droites, brunes & luifantes, placées deux à deux. Elle eft compofée d’une écorce épaïle F verte-brune » & d’u- ne pulpe humide, blanchâtre, pleine de lait, & fans partie ligneufe. Elle fe partage en plufieurs branches. 210 E U P dénuées de feuilles , à moins qu’on ne véuille donner le nomde féwilles à quelques petites appendices ron- des, épaïfles , laiteufes, placées fur les bords feules à feules fous les épines , & portées fur des queues courtes, épaifles , applaties, vertes & laiteutes. Les fleurs naïflent principalement du fond des f- nuofités qui fe trouvent fur les bords anguleux & entre les épines ; elles font au nombre de trois en- femble, portées fur un petit pédicule d'environ un demi-pouce, cylindrique, verd, laiteux , épais &c droit. La fleur du milieu eft la plus grande , & s’épa- noit la premiere, les autres enfuite, lefquelles font fur la même ligne , portées fur de très-petits pédi- cules, où même elles n’en ont point du tout. Ces fleurs font compofées d’un calice d’une feule piece, renflé, ridé, coloré , partagé en cihq quar- tiers , & qui ne tombent pas ; elles ont cinq pétales de figure de poire, convexes, épais , placés dans les échancrures du calice, & attachés par leur bafe au botd du calice. Du milieu de ces fleurs s’élevent des étamines au nombre de cinq ou fix, fourchues, rou- ges par le haut , fans ordre. Le pyftil eft un ftyle fim- * ple qui porte un petit embryon arrondi , triangulai- re, & chargé de trois ftygmates. Lorfque les fleurs paroïflent , les appendices fewillées ou ces petites feuilles tombent. Il fuccede à ces fleurs des fruits ou des capfules à trois loges, applaties, laiteufes , vertes d’abord , &c qui en partie rougiflent un peu dans la fuite, d’un goût aftringent.Ces capfules contiennenttrois grainesron- des, cendrées extérieurement , blanchâtres intérieu- tement. On trouve fouvent dans les facs de peau dans lefquels on apporte la graine d’euphorbe ; des fragmens de cette plante , des morceaux d’écorce, des capfules féminales & des fleurs defféchées, qui peuvent fervir à confirmer la defcription qu’en vient de lire de cet arbufte. Ïl croît en Afrique, en Lybie, aux îles Canaries, à Malabar, & dans d’autres endroits des Indes orien- tales. Il eft par-tout rempli d’un fuc laiteux , très- âcre &très-cauftique , qui en diftille dans quelque endroit qu’on y fafle une incifion. On donne à ce fuc cauftique , defféché & endurci , le même nom de la plante. Voyez les deux articles fuivans. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. EUPHOREE, {. f. (Hiff. nat. des drogues.) gomme réfine en gouttes ouen larmes, fans odeur, d’un jaune- pâle ou de couleur d’or, brillantes; tantôtrondes, tan- tôt oblongues, branchuës & caverneufes ; d’un goût très-âcre, cauftique, & provoquant des naufées. L’euphorbe ne fe diffout point dans l’eau commun- ne ; les huiles, l’efprit de terebenthine , lefprit de vin, l’eau-de-vie, n’en diflolvent qu'une lesere portion, & la plus huileufe. Le vin, le vinaigre, n’en diflolvent pas beaucoup davantage. L’efprit de nitre , l’efprit de vitriol , le pénetrent fans ébulli- tion, & l’amolliffent fans le difloudre. Le fuc de ci-. tron dépuré en diflout une partie gommeufe , & la fépare d'avec fa partie terreftre. Enfin l'huile de tar- tre en tire une forte teinture. Toutes ces diverfes ex- périences ont fait mettre l’euphorbe au rang des gom- mes, & non des réfines. Le fcadidacalli des Malabares paroït être larbrif- feau qui donnoit l'ephorbe des anciens ; maïs 1l eft vraïiflemblable que celle qu’on reçoit en Europe, vient de plufieurs efpeces du même genre de plante; car les Anglois tirent leur exphorbe des îles Canaries ; les Hollandois, de Malabar ; les Efpagnols , les Ita- liens, les François, de Salé au royaume de Fez. Dans tous ces pays-là on perce l’arbriffeau de loin avec une lance ; ou bien on fe couvre le vifage pour faire ces incifions, afin d'éviter d’être incommodé par l’exhalaifon fubtile & pénétrante du fuc laiteux, wolatil & cauftique qui fort de la plante en grande E CE quantité, Ce fuc eft fouvent recù dans des peaux de moutons, où il fe durcit en gomme jaune , tirant fur le blanc, friable , & qu’on nous apporte en petits morceaux, | On recommande de choifir l’ephorbe pure, nette, pâle, âcre, & d’une faveur brülante. Arricle de M, le Chevalier DE JAUCOURT. | | EUPHORBE, ( Pharm. 6 Mar. med, ) Nous n’em- ployons aujourd'hui cette gomme-réfine que dans les préparations-externes, & jamais dans celles qui font deftinées pour l’intérieur , à canfe de fa grande caufticité. | | Quelques auteurs ont cependañt prétendu la cor- _riger; foit en la faifant infufer dans de l’huile d’a- mandes douces, & enfuite dans du fuc de citron; foit en la faifant diffoudre dans du vinaigre, la fil- trant & la rapprochant en confiftance folide ; foit en l’enfermant dans un citron ou dans un coing, que l’on couvroit de pâte & qu’on faifoit cuire au four ; foit enfin en la faifant diffoudre dans de Pacide vi- triolique foible, & la faifant deffécher : mais on peut dire que toutes ces correttions, ou font infufffantes, on énervent le remede au point de le rendre inutiles Il eft donc beaucoup plus sùr de ne point employer l’exphorbe pour lufage intérieur; puifque fes effets font dangereux ; & que d’ailleurs nulle obfervation particuliere ne nous engage à rifquer ce danger en faveur de quelque vertu finguliere. | L’euphorbe eft un violent purgatif hÿdragogue, qui , à la dofe de quatre ou cinq grains ; fait des ra= vages fi étonnans , qu’on doit plus le regarder com= me un poifon, que comme un médicament : appliqué extérieurement , c’eft un épipañtiques | Mefué ne le recommande qu’à l'extérieur dans la téfolution des nerfs, dans leur convulfon , leur en- gourdiflement, leur tremblement, &r toutes leurs utres affeétions, qu'il regardoit comme froides. Il le recommande aufli dans les douleurs de foie & de la rate: pour cet effet on fe broye avec de huile, & on en frote la région de ces vifceres. Fernel dif que ce remede eft excellent contre la fcyatique &c la paralyfe. Herman dit qu'il s’en fervoit avec fuccès pour fondre les tumeurs skirrheufes. u On vante beaucoup l’euphorbe pulvérifé daris la ca- rie des os, &z il eft très-ufité dans ce cas ; on faupou- dre les os cariés avec l’etphorbe feul, ou mêlé avec partie égale d’iris de Florence, ou d’ariftoloche ron- de. Voyez CARIE. L’euphorbe eft un puiflant fternutatoire; on doit même éviter de s’en fervir dans cette vüe, à caufe de fa trop grande aébivité, qui eft telle qu’il fait fou- vent éternuer jufqu'au fang. C’eft aufli ce qui fait qu’il eft très-incommode à pulvérifer; car pour peu qu'en refpire le pileur, ileftattaqué d’un éternument violent qui dure plufeurs heures : on a donc foin de larrofer dans le mortier avec un peu d’huile d'olive ou d'amande douce, pour éviter cet inconvénient. Le mieux eft, malgré cette reflource , de ne faire cette opération que dans un mortier couvert. Voyez PILER. On prépare une huile d’esphorbe avec cingonces de vin, dix onces d’huile, demi-once d’exphorbe , faï- fant cuire le tout jufqu’à ce que le vin &c l'humidité foïient exhalés. Cette huile peut être employée dans les maladies ci-deflus énoncées. L’euphorbeentre dans l’onguent d’arthanita, & dans les emplâtres diaboranum, de rarnis , & Véficcatoire b 4 À EUPHRADE, f. f. (Myth.) génie qui préfidoit aux feftins. L’on mettoit fa ftatue fur Les tables pour s’exciter au plaifir, | EUPHRATE, (Géog. anc. 6 mod.) grand fleuve qui prend#fa fource au mont Ararat dans l'Arménie, êt 1e jette dans ie golfe Perfique, après s’être joint au Tigre. - EUR # EUPHRONE,, f. € (Myth. ) déefle de la nuit. Son nom eft compoié de êu, bien, & de gpur confit, c'eft-à-dire qui donne bon confeil. à, 1 * EUPHROSINE,, £. f. ( Myth. ) l’une des trois sraces, celle qui repréfente Le plaïir. | * BUPLOÉ , adj. pris fubit. ( Myzk. ) furnom de Vénus, proteëtrice des voyageurs par mer. Îl y avoit fur une montagne près de Naples, un temple confa- cré à Vénus Euploe. EURE, ( Géog. mod. ) riviere qui prend fa fource au Perche, en France, elle fe jette dans la Seine , un peu au-deflus du Pont-de-l’Arche. EUREOS, (Æf. nat.) pierre femblable à un noyau d'olive ; elle étoit ftriée ou remplie de can- nelures. Boece de Boot croit que c’eft la même chofe que ce que les modernes appellent prerre Judaïque, EVREUX, (Géog. mod.) ville de la haute Nor- mandie, en France; elle eft fituée fur l’Iton. Long. 17. 48. 30. lat. 49. 1. 24. | me, EURIPE,, {. m. (Belles-Lertr.) nom qu’on donnoit aux canaux pleins d’eau, qui ceignoient les anciens cirques.Tous ceux de la Grece avoient leurs euripes ; mais celui du cirque de Sparte, formé par un bras de l’'Eurotas , acquit ce nom par excellence. C’étoit -là que tous les angles Ephebes, c’eft-à-dire les jeunes Spartiates qui fortoient de leur feizieme année, fe partageoient en deux troupes, lune fous le nom d'Hercule , l'autre fous le nom de Lycurgue ; &t que chacune entrant dans le cirque par deux ponts op- pofés, elles venoient fe livrer fans armes un com- bat , où l’amour de la gloire excitoit dans ce moment entre les deux partis, uné animofité qui ne différoit guere de la fureur. L’acharnement y étoit fi grand, qu’à la force des mains ils ajoûtoient celle des ongles & des dents, jufqu’à fe mordre, pour décider de la vidtoire ; jamais ce combat ne fe terminoit, qu'uñ des deux partis n’eût jetté l’autre dans PExripe. II faut entendre là-deflus Cicéron, qui eut la curiofité d'aller voir ce fpeîacle à Lacédémone. Voici fes propres termes: Ædolefcentium greges Lacedæmone sidimus ipfi, tncredibili contentione certantes , Pugnis ; calcibus , unguibus ; morfu denique , ut exanimarentur prius, quam fe victos faterentur. Voilà comme les jeunes Lacédémeniens mon- troient ce qu'ils pourroiïent faire un jour contre l'ennemi. Auf Les autres peuples couroient à la vic- toire, quand ils la voyoient certaine ; mais les Spar- tiates couroient à la mort, quand même elle éfoit affürée, dit Séneque; & il ajoûte, swrpe eff cuiliber viro fugiffe, Laconi vero deliberaffe ; c’eft une honte à qui que ce foit d’avoir pris la fuite, mais c’en eft une à un Lacédémonien d’y avoir feulement {on- gé. Cet article et de M. le Chevalier DE JAUCOURT. _ Eurrpe, (7) f. m. Géog. petit détroit de la mer Egée fi ferré, qu’à peine une galere y peut pañler, fous un pont qui le couvre entre la citadelle & le donjon de Négrepont. Tous les anciens géographes, hiforiens , naturaliftes , & les poëtes même, ont parlé du flux & du reflux de l’Euripe ; les uns felon le rapport qu’on leur en avoit fait , & les autres fans lavoir peut-être confidéré affez attentivement en divers tems & en divers quartiers de la Lune. Mais enfin le P. Babin jéfuite nous en a donné, dans le fiecle pañlé , une defcription plus exa@e que celle des écrivains qui l’ont précédé ; & com- me cette defcription eft inférée dans les voyages de M. Spon , qui font entre les mains de tout le monde, jy renvoye le leéteur. . Le doéteur Placentia , dans fon Ægeo rediyivo, dit que l’Ezripe a des mouvemens irréguliers pen- dent dix-huit ou dix-neuf jours de chaque mois, & des mouvemens réguliers pendant onze jours, & qu'ordinairement il ne grofflit que d’un pié, & rare- ment de deux piés, Il dit aufi que les auteurs. ne Tome VI, | EUR 21? s'accordent pas fur le flux & le reflux del’ Eripets que les uns difent qu'il fe fait deux fois ; d’autres lept, d’autres onze ; d’autres douze", d’autres qua- torze fois en vingt-quatre heures : maïs que Loirius l'ayant examiné de fuite pendant un jour entier , il l'avoit obfervé à chaque fix heures d'ine maniere évidente, & avec ün mouvement f violent , qu'à chaque fois il pouvoit faire tourner alternativément les roues d’un moulin, if, rar. génér: É part. tome L, pag. 489. Voyez GOUFRE, {| fr J ajoûterai feulement que S.Juflin & S: Grépoiré de N azianze fe font trompés, quand'ils ont écrit qu'Ariftote étoit mort de chagrin de n’ayoir pù coms prendre la caufe du flux &c du reflux de lÆ uripe 5 car outre que l’hiftoire témoigne que ce philofophe accufé fauflement d'impiété , & fe fouvenant de lPinjufice faite à Socrate, aima mieux s’émpoifon- ner que de tomber entre les mains de fes ennemis ; i£ n'eft pas plus vraiflemblable qu'un homme tel qu’A. riftote foit mort de la douleur de n’avoir pù explis quér un phénomene de la nature, quil le feroit que cette raifon abrégeât les jours d’un petit-mañre. L’ignorance éclawée. & l'ignorance abécédaire ne troublent pas plus l’une que l’autre la tranquillité de lame. Article de M. le Chevalier DE JA UCOURT, * EURIPIDE, {. m. ( Æiff, anc. ) coup de dés qui valoit quarante. Cette dénomination vient ou d’Eu- ripide qui fut un des quarante magiftrats qui fuccé- derent aux trente tyrans.. & qui l’inftitua; ou de fes collegues, qui par afféion pour lui donnerent fon nom à ce coup de dés viétorieux. pe EUROPE, ( Géog.) grande contrée du monde habitée. L'étymologie quieft peut-être la-plus vrai£ femblable , dérive le mot Europe du phénicien zr appa, qui dans cette langue fignifie vifage blanc ; épi. thete qu’on pourroit avoir donné à la fille d’Agénor fœur de Cadmus, mais du moins qui convient aux Européens, lefquels ne font ni bafanés comme les Afiatiques méridionaux , ni noirs comme les Afri- cains. L'Europe n’a pas toüjouts eu ni lé même nom, ni les mêmes diviñons, à l’égard des principaux peu ples qui l'ont habité ; & pour les fous-divifions , elles dépendent d’un détail impoflble, faute d’hiftoriens qui puiffent nous donner un fil capable de nous tirer de ce labyrinthe, Mais loin de confidérer dans cet article lErope telle que l’ont connue les anciens, dont les écrits font parvenus Jufqu’à nous, je ne veux dire ici qu’un feul mot de fes bornes, | Elle s'étend dans fa plus grande longueur depuis le cap de Saint-Vincent en Portugal & dans lAlcar. ve, fur la côte de l’Océan atlantique, jufqu’à l’em- bouchure de PObi dans l’Océan feptentrional, par l'efpace de 1200 lieues françoifes de 20 au degré, où de 900 milles d'Allemagne. Sa plus grande largeur, prie depuis le cap de Matapan au midi dela Morée juiqu'au Nord-Cap, dans la partie la plus fepten- trionale de Norwege, eit d'environ 733 lieues de France de 20 au degré pareillement, ou de $ so mil- les d'Allemagne, Elle eft bornée à lorient par l’Afe; au midi par Afrique , dont elle eft féparée par la mer Méditerranée ; à l’occident par l'Océan atlanti- que, ou occidental, & au feptentrion par la mer Glaciale. | Je ne fai fi l’on a raïfon de partager le monde en quatre parties, dont l’Europe en fait une ; du moins cette divifon né paroït pas exate, parce qu'on n'y fauroit renfermer les terres arétiques & les antaréti- ques, qui bien que moins connues que le refte, ne laiflent pas d’exifter & de mériter une place vuide fur les globes & fur les cartes. | Quoi qu'il en {oit, l’Europe eft toüjours la plus petite partie du monde; mais, cemme | io 1 EUR 212 Pauteut'de l’efprit des lois, elle eft parvenue à un fi haut degré de puiflance, que l’hiftoite n’a prefque : rien à lui comparer là-deflus ; fi l’on confidere l’im- menfté des dépenfes, la grandeur des engagemens, le : nombre des troupes, & la continuité de leur entre- tien, mêmeldorfqu'elles font le plus inutiles &. qu'on | ne les a que pour loftentation. D'ailleurs 1limporte peu que l£zrope foit la plus petite des quatre a du monde par l'étendue de fon terrein , puiqu’elle eft lalplus confidérable de toutes par fon commerce, par fa navigation, par {a fertilité, par les lumierés & l’indufirie de fes peu- ples, par la connoïffance des Arts, des Sciences, des Métiers, & ce qui ef le plus important, par le Chri- ftianifme , dont la morale bienfaifante ne tend qu’au bonheur de la fociété. Nous devons à cette reli- gion dans le gouvernement un certain droit politi- que, & dans la guerre un certain droit des gens que la nature humaine ne fauroit aflez reconnoitre ; en paroïfant n'avoir d'objet que la félicité d’une autre vie, elle fait encore notre bonheur dans celle-ci. L'Europe eft appellée Celrique dans les tems les plus anciens. Sa fituation eft entre le 9 & le 93 de- gré de longitude, & entre le 34 & le 73 de latitu- de feptentrionale. Les Géographes enfeigneront les autres détails au leéteur, rricle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. EUROPÉEN , adj. heures européennes , en Chrono: logie 8 Affronomie. Voyez HEURE. | EUROTAS, (Géog. & Hiff. anc.) riviere du Pélo: ponefe, ou de la Morée de nos jours, fameufe à plu- fieurs égards, & en particulier pour avoir baigné les murs de Sparte. On l'appelle aujourd’hui Fajili- potamos. Les Lacédémoniens publierent que la déefle Vé- nus, après avoir pañlé ce fleuve, y avoit jetté fes braflelets & autres ornemens de nie dont elle étoit parée, & avoit pris enfuite la lance & le bou- cher pour fe montrer en cet état à Lycurgue, &c fe conformer à la magnanimité des dames de Sparte. Ce fleuve eff toùjours tellement femé de rofeaux magnifiques, qu'il ne faut pas s'étonner qu'Euripide dans fon Helene le furnomme Callidonax. Les jeunes Spartiates en faifoient ufage pour coucher deflus, 8 même on les obligeoit d’aller les cueillir avecleurs mains fans couteau & fans autre inftrument : c’étoit- là leurs matelas & leurs lits de plume. L’Eurotas eft encore, comme dans les beaux jours de la Grece, couvert de cygnes d’une fi grande beau- té, qu’on ne peut s'empêcher d’avouer que c’eft avec raïfon que les Poëtes lui ont donné lPépithete d’o/o- rifer : Taygetique phalanx , 6 oloriferi Eurotæ Dura manus. , . . . dit Stace. Autrefois cette riviere fe partageoit en plufeurs bras ; mais aujourd’hui on mt bien embarraflé de difcerner celui qui s’appelloit Ewripe, c’eft-à- dire ce canal où fe donnoit tous les ans le combat des Ephebes ; car le Vafilipotamos n’eft guere plus gros en été près de Mifitra, que ne l’eft la riviere des Gobelins à Paris. Mais admirons fur - tout la deftinée de ce fleuve, par ce qu’en a dit Séneque, Hanc Spartam Euroras “amnis CUrCunfluit , qui pueritiam indurat , ad futuræ militie patientiam : les Lacédémoniens y plongeoïient leurs enfans, pour les endurcir de bonne-heure aux fatigues de la guerre , & les Turcs s’y baignent dans lefpérance de gagner le royaume des cieux. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. * EURYALÉ, {. f. (Myth) une des trois gorgo- nes, fille de Phorcys & fœur de Medufe ; elle n’étoit fujette ni à la vierllefle ni à la mort. * EURYNOME, £, f, (Mych.) un des dieux infer- EUS nauxs il fe ÉRnTe des cadavres. Il étoit repréfenté dans le temple de Delphes, par une ftatue noire, aflife fur la peau d’un vautour, & montrant les dents. | * EURYSTERNON, adj. pris ubft. (My:#.) qui a la poitrine large ; furnom de la Terre, Elle avoit un temple dans lAchaie, proche d’Egé. Sa prêtrefle étoit veuve d'un feul mari, & ne pouvoit en épou- fer un autre, EURYTHMIE , (Ares lib.) c’eft ,en Archireëture , Peinture, & Sculpture, felon Vitruve, une certaine majelté & élégance qui frappe dans la compofition des différens membres ou parties d’un bâtiment, ou d’un tableau, qui réfulte des juftes proportions qu’on y a gardées. Voyez PROPORTION. Ce mot eft grec, & fignife littéralement une ar: monie dans toutes les parties ; il eft compoté de év, hier, & fvôuos, rhythmus, cadence ou convenance des nom- bres, fons, &c autres chofes femblables, #, RaxYTH- MUS. Cet auteur met l’eurishmie au nombre des parties effentielles de l'Architeéture ; il la décrit commeune chofe qui confifte dans la beauté de la conftruétion, ou laflemblage des différentes parties de l'ouvrage quien rendent l’afpeët agréable : parexemple, quand la hauteur répond à la largeur, &c La largeur à la lon- gueur , &c. Dit. de Trév. & Chambers. * EUSBBIE , f. f. (Mysk.) c’eft ainfi que les Grecs appelloient la Piété qu'ils avoient diviniée. EUSEBIENS, £. m. pl. (Æif4 eccléf.) nom qu’on donna dans le jv. fiecle à une faétion d’Ariens, à caufe de la faveur & de [a proteétion que leur obtint de l’empereur Conftance , Eufebe d’abord évêque de Béryte, puis de Nicomédie , & enfin patriarche de Conftantinople ; qu'il ne faut pas confondre avec Eufebe évêque de Céfarée, que plufeurs écrivains ont aufli accufé d’Arianifme, mais que plufeurs au- tres ont tâché d’en juitifier, mais qui ne fut jamais chef de parti. Voyez ARIANISME & ARIENS. (G) EUSTACHE, (L'ILE DE SAINT-) Géog. mod. île de Amérique feptentrionale : c’eft la plus forte des Antilles, par fa fituation. Long. 17. 40. lat, 16. 40. EUSTATHIENS , fm. plur. (if. eccléf.) eft un nom que lon donna aux catholiques d’Antioche, dans le quatrieme fiecle , à Poccafñon du refus qu'ils firent de ne recevoir aucun autre évêque que $aïnt Euftathe , que les Ariens avoient dépoié. Ce nom leur fut donné pendant lépifcopat de Paulin, que les Ariens fubftituerent à S. Euftathe vers l’an 330, lorfqu'ils commencerent à tenir des affemblées particulieres. Vers lan 350, Léontius de Phrygie appellé l'Eznuque , qui étoit Arien, & qui fut inftallé fur le fiége d’Antioche, defira qué les Euflathiens fiflent leur fervice dans fon églife; ce qui fut accepté: & ainf l’églife d’Antioche fervit indif- féremment aux Ariens &z aux Catholiques. Ce que nous venons de dire donna lieu à deux établiflemens , qui ont toüjours fubffté depuis dans PEglife. Le premier fut la pfalmodie à deux chœurs; cependant M. Baillet croit que s'ils inflituerent la pfalmodie à deux chœurs, ce fut à deux chœurs de Catholiques , & non pas par maniere de réponfe au chœur de Ariens, Le fecond fut la doxologie , Glo+ ria Patri & Filio, & Spiritui fanito. Voyez DoxoLo- GIE. Cette conduite qui fembloit renfermer une ef- pece de communion avec les Ariens, choqua beau- coup de Catholiques, qui commencerent à tenir des aflemblées particulieres , & formerent ainf le fchif- me d’Antioche. S. Flavien évêque d’Antioche en 381 ,& Alexan- dre un de fes fuccefleurs en 482 , procuretent entre les Eufiathiens & le corps de l’églife d'Antioche, sine réunion dont Théodoret a raconté les circon- ffances, Dit. de Trév. & Chambers. (G) : EUSTATHIENS , éft aufli le nom donné à des hérétiques qui s’éleverent dans le quatrième fiecle, & qui trerent leur nom d’un moine appellé Æuffa- thius ; fi follement entêté de fon état, qu'il condam- noit tous les autres états de vie. Baronius croit que c'eft le même qu'un nivine d'Arménie que S. Epi- phane appelle Æuraëius, Les erreurs & les pratiques de cet héréfiarque que Socrate, Sozomene, & M. Fleury fur leur autorité, ont confondu avec Euftathe , évêque de Sébañte, qui vivoit aufh dans le quattieme fiecle, font rapportées à ces chefs par les peres du concile de Gangres en Pa- phlagonie, tenu lan 376. Euftathe & fes feltateurs y ont accufés ; 1°. de condamner le mariage, & de féparer les femmes d'avec leurs maris; 2°. de quit- ter les aflemblées publiques de l’Eglife, pour en te- nir de patticuhieres; 3°. de fe referver les oblations à eux feuls ; 4°. de féparer les ferviteurs de leurs maîtres & les enfans de leurs parens, fous prétexte de leur faire mener une vie plus auftere ; $°. de per- mettre aux femmes de s’habiller en hommes ; 6°. de méprifer les jeûnes de l’Eglife , & d’en pratiquer d’autres à leur fantaifie |, même le jour du di- manche; 7°, de croire qu'il étoit défendu en tout tems de manger de la viande; 8°, de rejetter les oblations des prêtres mariés ; 9°. de méprifer lescha- pelles bâties en l'honneur des martyrs, leurs tom- beaux, & les aflemblées pieufes qu’y tenoient les fideles; 10°. de foûtenir qu’on ne peut être fauvé fans rénoncer effe&tivement à la pofleffion de-tous fes biens. Le concile fit contre ces erreurs & füper- flitions, vingt canons qui ont été inférés dans le co- de descanons de l’Eglife univerfelle. Dupin, Biblios. des auteurseccléftaft. du quatrieme fiecle, Fleury, Hiff. _ eccdé/iaft. 10m, IV. Liv, XVIT. tir. xxxv. (G) EUSTYLE , f. m.(Archireët.) eft une efpece d’é- difice dont les colonnes font placées à la diftance la plus convenable l’une de l’autre ; l'intervalle entre les deux colonnes étant précifément deux diametres & un quart d’une colonne, excepté celles qui font dans le milieu des faces devant & derriere , qui font cloignées les unes des autres de trois diametres. Ce mot et grec & compofé de êv, benè, bien, & de gonce , Colonne. L’euflyle tient le milieu entre le picnoftyle &c l’a- téoityle. Voyez PICNOSTYLE ; &c. Vitruve , v. IUT. chap. i7. obferve que l’euffyle eft de toutes les manieres de placer les colonnes celle qu’on approuve le plus, & qu’elle furpafle toutes les autres en commodité, en beauté, & en force. foy. de Diflionn, de Trév. & Chambers, (P) EUSUGAGUEN , (Géog. mod.) ville de la pro- vince d'Héa , au royaume de Maroc, en Afrique. * EUTERPE,, £, f. (Mychol.) celle des nt qui préfidoit aux inftrumens à vent ; on la repréfentoit couronnée de fleurs, jouant de la double flûte, & ayant l’amour à fes genoux, On lui attribue l’inven- tion de la tragédie ; & en conféquence, on ajoûte à fes attributs un mafque &c une maflue. EUTHANASIE , f. £, (Théol.) mort heureufe, où paflage doux &c tranquille, fans douleur , de ce mon- de en l’autre, Voyez MORT. Ce mot eft formé du grec êu, bénè, bien, & de $a- varos, mort. (G) * EUTHENIE,, {. f. (Mychol.) c’eft ainfi que les Grecs appelloient l’abondance qu’ils avoient divini- fée , mais qui n’eut jamais chez eux ni de temple ni d’autel, EUTIM , (Géog. mod.) ville du Holftein en Alle- magne. | EUTYCHIENS , £.m. pl. (if. eccléf.) hérétiques qui réfuloient d'admettre deux natures en Jefus- bien entendus E UT 213 Chriff, & qui tirerent leur nom d’Eutychès, archi: mandrite ou abbé d’un monaftere célebre de Conf tantinople , & qui vivoit dans le cinquieme fiecle. _L'averfion qu'Eutychès avoit pour le Neftoria- nifme le précipita dans un excès oppofé & non moins dangereux, On croit que quelques pañlages de S. Cyrille d'Alexandrie, qui foûtint vivement luni- té de perfonne contre Neftorius , cngagerent Buty- chès à foûtenir l’unité de nature ; mais ces paflages ne hui font nullement favorables : comme On peut voir dans M, Witafle, Traité de l’incarnation , part, IT, quefl, vj. art, 1. fect, Le Cet héréfiarque foûtint d’abord que le Verbe, en defcendant du ciel ; avoit apporté {on COrps qui n’a voit fait que pañler dans celui de la fainte Vierge, comme par un canal ; ce qui approchoit de l’héréfie d’Apollinaire. Mais il retra@a cette propoñition dans le fynode de Conftantinople, où fa doëtrine fut d'a bord condamnée par Flavien: mais on ne put le fai. re convenir que le corps de Jefus-Chrift fût de mê- me fubftance que les nôtres; au contraire, il paroît qu'il n’en admettoit qu'un phantaftique, comme les Valentiniens & les Marcionites, Il n’étoit pas ferme & conféquent dans fes opinions, car il fembla qu'il reconnoifloit en Jefus-Chrift deux natures , même avant union hypoftatique ; conféquence qu'il tiroit apparemment des principes de la philofophie de Pla- ton, qui fuppofe la préexiftence des ames : aufli Eu- tychès croyoit-l que l’ame de Jefus-Chrift avoit éré unie à la divinité avant l’incarnation. Mais il ne vou- lut jamais admettre de diftindion de natures en Je fus-Chrift après l’incarnation , difant que la nature humaine avoit été alorsabforbée parla nature divine, comme une goutte de miel qui tombant dans-la mer ne périroit pas, mais feroit engloutie. #’oyez la dif fertation du pere Hardoüin de facramento altaris, dans laquelle cet auteur développe très-nettement tous les fentimens des Ezrychiens, Quoique cette héréfie eût été condamnée dans lé fynode qui fnt tenu à Conftantinople en 448 , & dont nous avons déjà parlé, Eutychès ne laïffa pas que dé trouver des partifans &z des défenfeurs : {ot tenu du crédit de Chryfaphe, premier eunuque dw palais impérial , de l’a@ivité de Diofcore fon ami, patriarche d'Alexandrie, & des fureurs d’un archi- mandrite fyrien nommé Barfumas , il fit convoquer en 449 un concile à Ephefe , qui n’eft connu dans l’Hiftoire que fous lenom de Érigandape , À caufe des violences qu'y exercerent les Æurychiens , dont le chef y fut juftifié ; mais fon erreur fut éxaminée de nouveau & anathématifée dans le concile général de Chalcédoine tenu en 451 : les légats du pape S. Léon qui y affifterent , {oûtinrent que ce n’étoit point aflez de définir qu'il y a deux natures en Jefus- Chrift; mais ils infifterent fortement à ce que, pour Ôter tout équivoque , on ajoûtât ces mots , Juris étre changées , confondues , ni divifées. | Mais cette décifion du concile de Chalcédoine , quoiqu’elle fût l'ouvrage de plus de cinq à fix cents évêques , n’arrêta pas les progrès de l’Eutychianif- me : quelques évêques d'Egypte qui avoient affifté à ce concile ,publierent ouvertement à leur retour, que S. Cyrille y avoit été condamné & Neftorius . abfous ; ce qui caufa de grands defordres : plufeurs, par attachement à la doétrine de S. Cyrille, refu- foient de fe foïmettre aux decrets du concile de PAT Pipes ; qu'ils y croyoient faufflement oppo- ES EN! Cette héréfie qui fitdegrands ravages dans tout l'O- tient , fe divifa à lalongue en plufeurs branches. Ni- céphore n’en compte pasmoins de 12 ; les uns étoient appellés fhemaric: où apparentes , parce qu'ils attri- buoient à Jefus-Chrift un corpsphantaflique ; d’autres Théodofiens, du nom de Théodofe , évêque d’Alexan- 214 EUT drie ; d’autrés Jacobires, du nom d’un certain Jacob ou Jacques , Jacobus, de Syrie ; cette branche s’éta- blit elle-même en Arménie, où-elle fubffte encore. Voyez JACOBITES. | Lesautres principales font:celles desThéopañfchites, qui prétendoientquedans la paflion de J.C. c’étoit la divinité qui avoitfouffert ; les Acéphales, c’eft-à-dire fans chef ; les Sévériens,, ainñi nommés d’un moine appellé Sévere , qui monta fur le fiége d’Antioche en $13 ; on les appella encore Corrupricoles & Incorrup- sicoles. Voyez ces mots, Les Séveriens fe partagerent encore en cinq faétions, favoir les Agnoëtes ou Agnoiïtes ; les partifans de Paul, pénares, c’eft-à-dire les noirs, les angélites ; enfin les Adriates &c les Co- nonites. Trévoux , Chambers, & l'Hift. eccléfraf. (G) EUTYCHGENS , f. m. pl. ( Hiff. eccléfiaft. ) étoit auffi le nom d’une autre feéte d’hérériques moitié Ariens & moitié Eunomiens , qui commença à paroi- tre à Conftantinople dans le quatrieme fiecle. LesEunomiens à Conftantinople difputoient alors vivement entr’eux, favoir fi le fils de Dieu connoiït le jour & l’heure du jugement dernier ; les uns fe fon- doient principalement fur ce paflage de l’évangile de S. Math. chap. xxjv. verf. 36. ou plütôt fur celui de S. Marc, chap: xii. verf. 32. où il eft dit que 4 fils nelle connoït pas, mais qu'il n'y a que de pere. Euty- chius ne fit pas difficulté de foûtemir, même par écrit, que le fils connoifloit le dernier jour : ce fen- timent déplaifant aux favans du parti d'Eunomius, il fe fépara d'eux, & fe retira vers Eunomius qui étoit alors en exil. Cet hérétique penfa comme Eutychius, que le fils n’ignoroit rien de ce que le pere fait, & le reçut à fa communion. Eunomius étant mort bien-tôt après, le chef des Eunomiens à Conftantinople refufa d’ad- mettre Eutychius, qui pour cette raïfon forma une fe&e particuliere de ceux qui s’attacherent à lui, & qui furent nommés esychiens, Ce même Eutychius avec un certain Theophro- nius contemporain de Sozomene, furent les auteurs de tous les changemens que les Eunomiens firent dans l’adminiftration du baptême : ils confiftoient, “elon Nicéphore , à le donner par une feule immer- fion, & à l’adminiftrer, non pas au nom de la Tri- mté, mais en mémoire de la mort de Jefus-Chrift. Nicéphore appelle le chef de cette fete Eup/y- chius, & non Eurychius, & {es fettateurs Euromioeu- pfÿchiens. V. EUNOMIOEUPSY CHIENS. Chamb. (G EVUIDER, v. a@. ez Arehireiture ; c’eft tailler jour quelque ouvrage de pierre ou de marbre, com- me des entre-las ; ou de menuïferie, comme des pan- neaux de clôture de chœur, d'œuvre, de tribune, Ge. autant pour rendre ces panneaux plus legers, que pour voir à-travers. (P ) EVUIDER , ex terme de Cloutier - Faifeur d'aiguilles courbes ; c’eft faire une petite coulifle au-deflus ou au-deflous du trou pour contenir le fil, & Pempé- cher de s’écarter à droïte ou à gauche, pour le ren- dre d’égale groffeur avec le corps de l'aiguille ; au- trement il déchireroit la partie que l’aiguillen’auroit point affez ouverte. | EVUIDER, en terme de Chauderonnier ; c’eft mettre la derniere main à l'ouvrage, dégager les contours, pincer les angles, &r leur donner ie de grace. * EVUIDER, (Ouvriers en fer) Ce terme fe prend encore en un fens particulier chez les ouvriers en fer. Ils évuidens au marteau, à la lime, à la meule, & à la polifloire, lorfqu’au lieu de laïffer à un inftru- ment tranchant, ou autre piece, une furface plane, ils creufent plus ou moins cette furface, & la ren- dent concave. EVUIDER , en terme de Cornetier, eftl’opération par laquelle on forme les dents d’un peigne parle moyen d’un guide-âne qui en fcie une, pendant qu'une au- E X A tre lame moins avancée, comme nous l'avons dit à fon article, trace la fuivante, C’eft par ce moyen qu’on garde une même diftanceentretoutes les dents . d'un peigne. EVUIDOIRR , £. m. (Lutherie.) outil dont les Fac: teurs d’inffrumens à vent {e fervent pour accroître en- dedans les trous de ces inftrumens qui forment les tons ; 1l confifte en une meche de perce, emmanchée dans une poignée comme une lime. Woyez les figures dans les Planches de Lutherte. Fe EXACERBATION, £. f. (Medecine, ) Voyez RE- DOUBLEMENT , PAROXYSME o4 ACCÈS, MALA- DIE , FIEVRE. * EXACTEUR, £. m. (Æi/ff. anc.) c’étoit, 1°. un domeftique chargé de pourfuivre le rembourfement des dettes de fon maître. 2°. Un autre domeftique qui avoit l’œil fur les ouvriers. 3°. Un officier de l'empereur qui hâtoit Le recouvrement de limpôt appellé pecuniarum ffealium ; on le nommoit auf compulfor. 4°, Un autre officier qui fuivoit les pa= tiens au fupplice, & qui veilloit à ce que l’exécu- tion fe fit, ainfi qu’elle avoit été ordonnée par les, juges. Celui-ci s’appelloit exaéfor fupplicir. EXACTION , fub. f. (Jurifprud.) c’eft l'abus que commet un officier public qui exige des émolumens au-delà de ce qui lui eft dù. (4) * EXACTITUDE, f. £. (Morale.) terme relatif à des regles prefcrites ou à des conditions acceptées. L’exathirude eft en général la conformité rigoureufe à ces regles & à ces conditions, EXAGERATION, f. £. figure de Rhérorique par la= quelle on augmente ou l’on amplifie les chofes, en les faifant paroître plus grandes qu’elles ne font par rapport à leurs qualités bonnes ou mauvaifes. Voyez HYPERBOLE. Ce mot eft formé d’exaggero , j'exagere, qui eft compofé de la prépofition ex, & d’agger, un mon- ceau, une élevation de terre. (G) EXAGÉRATION , en Peinture, eft une méthode de repréfenter les chofes d’une maniere trop chargée & trop marquée, foit par rapport au deflein , foit par rapport au coloris, ou à la poftion des objets. L’exagération n’eft permife , foit dans la forme foit dans la couleur des objets, que lorfqu’elle les fait paroître tels qu’ils font , du point d’où 1ls doi- vent être vûs, autrement c’eft tojours un vice. (R} Mais il eft fouvent difficile d'éviter ce vice : le peintre qui réuñit en ce genre , & qui ne fait point {ortir l'objet de fon caraëtere , doit , entr’autres ta- lens , être doué d’une profonde connoïffance des ef- fets de la perfpettive & de l'effet des couleurs : cette congoiflance eft abfolument néceffaire dans tous les grands ouvrages , où l’on ne peut s’empé- cher d'employer l’exagération du deflein, celle de la forme des objets, & celle du ton des couleurs, foit dans Les clairs , foit dans les ombres , à caufe de la fuperficie du fonds fur lequel on travaille , de La dif- tance où l'ouvrage doit être vh , & du tems qui fait toüjours perdre beaucoup du brillant des couleurs. Voilà l’artifice merveilleux qui , dans les diftances proportionnées à la grandeur des tableaux, foûtient le caractere des objets particuliers , & du tout en- femble. Perfonne, peut-être , n’a rendu cette favante exagération , plus heureufe & plus fenfble , que Ru- bens l’a fait dans les grandes machines. Arzicle de M, de Chevalier DE JAUCOURT. EXAGONE,, voyez HEXAGONE. EXAHEDRE , voyez HEXAHEDRE € CUBE. EXALTATION de la Jainte-croix , ( Hif£. ecclef. } fête de l’églife romaine qu'on célebre le quatorzieme jour de Septembre, en mémoire de ce qu'Héraclius portalla vraie croix de J. C. fur fes épaules , à l’en- droit du mont-Calvaire, d’où elle avoit été enlevée x4 ans auparavant par Cofroès rot de Perfe , lorf- qu'il prit Jérufalem fous le regne de l'empereur Phocas. : Les vi@oires d'Héraclius ayant forcé Siroès , fils & fucceffeur de Cofroès, à demander la paix , une des principales conditions du traité, fut la reftitution de la fainte-croix. On raconte qu'Héraclius voulut la conduire lui-même à Jérufalem, & qu’y étant ar- rivé, il la chargea fur fes épaules pour la porter avec plus dé pompe fur le Calvaire : on ajoûte qu'étant à la porte qui mene à cette montagne , 1l ne put avancer tant qu'il fut revêtu des habits impériaux enrichis d’or & de pierreries,mais qu’il porta très-fa- cilement la croix dès qu’il eut pris , par le confeil du patriarche Zacharie, des habits plus fimples & plus modeites, ; Telle eft l’opinion commune fur l’origine de cette fête : cependant long - tems avant le regne d'Héra- clius , on en célebroit une dans l’églife greque &c la- tine en l'honneur de la croix fous le même nom d'e- xaliation , en mémoire de ce que J.C. dit, en par- ant de fa mort, en S. Jean, chap. xij. verf. 32. Lor/- que j'aurai éré exalté , j’atiirerai toute chofe à moi ; &t encore chap. vi. verf. 28. Quand vous aurez exalté de fils de lhomme , vous connoîtrez qui je fuis. Le pere du Sollier affüre que M. Chaftelain penfoit que cette fête avoit été inftituée à Jérufalem du moins 240 ans avant Héraclius: Il eft certain qu'on eñ Célebroit une du tems de Conftantin, où peu de tems après , à laquelle on pourroit donner le nom d’exa/sation ; car Nicephore : rapporte qu'on y célebrôit la fêre de la dédicace du temple bâti par fainte Hélene, & confacré le 14 de Septembre de l’an 335 ; jour auquel on en renou- velloit tous les ans la mémoire ; 1l ajoûte que cette fête fut auffi appellée l’exalration de la crôix , à caufe d’une cérémonie qu'y pratiquoit l’évêque de Jérufa- lem, qui montant fur un lieu éminent, bâti exprès en mamere de tribune , que les Grecs appelloient Îles mmyfleres facrés de Dieu ou la fainteté de Dien , y élevoit la fainte-croix pour l’expofer à la vûe du peu- ple & à fa vénération. Chambers. (G) | EXALTATION , (Algeb.) Quelques auteurs fe font fervis de ce mot, en parlant des puiflances , pour defigner ce qu’on appelle autrement leur é/evarion ; mais ce dernier moteft beaucoup plusufité , & l’au- tre doit être profcrit comme inutile; Voyez ELEVA- TION. (0) en 7” o EXALTATION , (Jurifprud.) eft l'élévation de quelqu'un à une dignité eccléfiaftique ; mais ce ter- me eft devenu propre pour la papauté : l’exalrarion du pape’eft la cérémonie que l’on fait à fon couron- nement, lotfqu’on le met fur l’autel de S. Pierre. (4) EXALTATION , ( Chimie. ) terme figuré , ou plû- tôt fans fignification déterminée , employé par les anciens chimiftes , pour exprimertoute purification, atténuation , amélioration , augmentation d’éner- gie, de vertu, 60 | . A Li C’étoit des fels &c des foufres exaltés , qui faifoient les odeurs &r les faveurs agréables ; la vertu alexi- pharmaque narcotique des médicamens , &c. Ce jargon n’eft point vieilli en Medecine : on dit fort bien encore dans les écoles & dans les conful- . tations , be exalrée , fucs exaltés, fels & foufres exal- tés; &c. @c la plüpart de eux qui prononcent ces mots, croyent bonement defigner par-là des êtres réels: (+ EXAMEN de confcience ; ( Théolog. ) revüe exaéte qu'uñpécheur fait de fa vie pañlée , afin d’en récon- noitre les fautes & de s’en confeffer. Tous les Théologiens qui ont écrit du facrement de pénitence, & particulierement les ançiens peres, E X À 21ÿ ont beaucoup infifté fur la nature &c les qualités de cet examen , comme fur une voie néceflaire pouf préparer & conduire le pécheur au répentir fincere de fes fautes, S. Ignace martyr le réduit À cinq points: 1°. rendre grace à Dieu de fes bienfaits : 2°. lui de- mander les pracés & les lumieres néceflaires pour connoïtre & diftinguer nos fautes : 3°, repañler dans notre mémOire toutes nos occupations, aétions, pen fées, paroles(à quoi il faut ajoûter les omiffions),afin de découvrir en quoi nous avons offenfé Dieu: 4°. à lui en demander pardon, & concevoir un regret fin: cere de lavoir offenfé: 5°. à former une ferme réfolu: tion de ne plus l’offenfer à l’avenir, & prendre toutes les précautions néceffaires pour nous préferver du- péché , & en fuir les occafions. (G) EXAMEN, (Jurifp.) eft l’épreuve dé la capacité d’une perfonne qui fe préfente pour acquérir un état ou remplir quelque fon@ion qui demande une cer: taine capacité. | Ainf dans les Arts 8 Métiers , les afpirans à là Maitrifle fubiflent un examen , & doivent faire leut chef-d'œuvre. Ceux qui fe préfentent pour avoir la tonfure où pour prendre les ordres , pour obtenir le vifa de l’é- vêque fur des provifons , font ordinairement exa- mines ; voyez l’édit de 16095. Les étudians dans les univerfités fubiflent aufi plufieurs examens, avant d’obténir léurs degrés : ce- hui qui, après avoir foûtenu fes examens &c autres actes probatoires , a été réfufé , s’il prétend que ce {oit injuftement , peut demander un exazzez public. Ceux qui font pourvûs de quelque office de jufti- ce, font examinés fut ce qui concerne leur état , à moins qu'ils ne foient difpentés de l’examen ; en con- fidératiôn de leur capacité bien connue d’ailleurs, S1 Pofficier pañle d’une charge ou place à une au- tre, qui demande plus de capacité ou quelque con- noiffance particuliere , 1l doit fubir un nouvel exa- men, Voyez la Rocheflavin ; des parlemens ; iv. VI. ch. xxviy. (A) . EXAMEN À FUTUR, voyez ENQUÊTE D'EXAMEN À FUTUR. * EXAMILION , f. tn. (Æff. mod.) muraille céle= bre que l’empereur Manuel Paléologue fit élever fur Pifthme deCorinthe : elleavoit fix milles de longueur elle couvroit le Peloponefe contre les incurfions des barbares : elle partoit du port Lechée, & s’étendoit jufqu’au port de Cenchrée. Amurat fecond la démo- lit : les Vénitiens la reconftruifirent en quinze jours: elle fut renverfée pour la feconde fois par Beglerbey; ê& ne fut point relevée. MEN | EXAMINATEUR , £ m. (Jurifp.) Voyéz Com: MISSAIRE AU CHASTELET , COMMISSAIRE EN= QUÊTEUR, & au mot ENQUÊTEUR. (4) EXAMINER vx compte, (Commerce.) c’eit le lire avec exaitude , en pointer les articles, en vérifier le calcul, pour en découvrir les erreurs. Dionn, de Comm. Voyez COMPTE. | | EXANGUIN , adj. er Anatomie , {e dit dés vaif- feaux qui ne renferment point la partie rouge du fang. | A" Il y a quatre fortes de vaifleaux exanguins ; fa= voir, les vafleaux chylidoques , les vaifleaux /ympha- riques , les vaifleaux zerveux , & les vaifleaux /écré- toires. M. Quefnay, eff. phyf. fur l’économie animale; Voyez CHYLIDOQUES , NERVEUX, c. | EXANTHEME , f. m. ( Medecine.) tEaybnna , dé- rivé de arte, qui fignifie efflorefcere, fleurir, d’où les Latins ont appellé les exanshemes , efflorefcenriæ , efflorefcences ; c’eft un terme employé pour expri- mer l’éruption (qui fe fait fur la peau) des humeurs viciées , dans le corps humain ; qui fé portent de l’intérieur à la furface ; & y forment des taches qui ne s’élevent pas au-deflus du niveau de la peau, ou 16 ÆXA de petites tumeurs de différentes efpeces , de la cou- leur des tégumens, on d’une couleur différente, Puifque les exanthemes , proprement dits, paroïf- fent effentiellement fur la peau; il s'enfuit donc que la matiere morbifique , qui les forme, a fon fiége dans les vaifleaux cutanés , & que cette matiere eft de nature à ne pas y couler librement , & à y faire naître conféquemment des obftruétions , foit parce que le fluide, qui eft propre à ces vaifleaux , a trop de confiftance, pêche par épaififlement ; foit parce qu'il y a pénétré par erreur de lieu , errore loci , une humeur plus grofiere qui en a dilaté, forcé les ori- fices , & en a engorgé le canal trop étroit, pour les recevoir dans l’état naturel (voyez ERREUR DE LIEU); foit parce qu'ils ont été reflerrés , retrécis par quelque caufe que ce foit : ces différentes cau- fes, propres à produire des exazthemes , peuvent être internes & externes ; ainfi après de grandes fueurs , qui ont fait perdre au fang fes parties les plus fluides , il fe forme des puflules prurigineufes par des humeurs privées de véhicule, épaiffies, ar- rêtées dans les vaifleaux cutanés : il fe forme desta- ches rouges ou pourprées , fur la furface du corps, lorfque le fang a perdu fa confiftance au point que fes globules rouges puiflent pénétrer dans les vaif- feaux fecrétoires de la peau, où ils ne pourroïent pas être admis, lorfque le fluide a fa confiftance ac- tuelle : les matieres aeres, qui font portées dans les Vaifleaux cutanés, ou qui font appliquées au-dehors fur les tégumens, peuvent auf produire des exan- themes en caufant des conftriétions , des irritations dans les tuniques de ces vaifleaux , qui en diminuent la capacité , y arrêtent les humeurs : dans ces trois fortes de cas , il y a toüjours défaut de méabilité dans les fluides , foit par une mauvaife qualité qui leur eft propre, foit par l’état contre nature des {o- lides qui les contiennent , foit par le concours du vice des parties contenues & contenantes. Voyez TACHE , PUSTULE , GALE, &c. Les exarthemes fébriles font ceux qui méritent le plus d'attention , parce qu’ils font le plus fouvent formés d’un dépôt de matiere critique, que lafievre porte dans les vaifleaux de la peau: cette matiere s’y arrête & les obfirue, parce qu’elle n’eft pas af- {ez atténuée pour couler librement dans toute leur étendue : 1l confte, par des obfervations faites fur des cadavres , qu'il fe fait aufli quelquefois de fem- blables dépôts critiques , qui forment des efpeces d’e- xanthemes fur la furface des parties internes ; dans ces cas la fievre ne fe termine pas par le retour de la Jante ni par la mort, mais elle dévénere en une autre maladie : 1l eft évident par confêquent , queila cau- fe efficiente de cette éruption exazthémateufe, eft la nature ou la force de la vie, qui fait circuler les humeurs dans les vaifleaux, qui fépare de la mafle les fluides viciés , & qui les porte dans des vaifleaux proportionnés à leur denfité, à leur mobilité, & au egré de mouvement avec lefquels ils fe préfentent à leur orifice ; ce qui s’opere conféquemment par . un méchanifme femblable à celui des fecrétions : les exanthemes {ont différens , felon la différente nature de la matiere morbifique , quelquefois ils font rou- ges wparce qu'ils font formés par un fang inflamma- toire, épais, qui engorge les vaifleaux cutanés, & d’autres fois 1ls font jaunätres ou de couleur de la peau , parce que la matiere de l’engorgement.eft un fluide féreux ou lymphatique , qui pêche de même par l’épaififfement : c'eft auffi de ces différences que les fievres exanthémateufes prennent leurs diffé- sens noms ; telles {ont les fcarlatines , les pétéchia- les rouges , pourprées, les miliaires , la rougeole, la petite vérole. Voyez chacun de ces mots en fon dieu , fur-tout le dernier, & l'article, de la FE VRE ÉRUPTOIRE. (4) | EXARQUE, fm. ( Æif£. ecclef. ) titre de dignité eccléfiaftique dans les premiers fiecles de l'Eglife. On donnoit le nom d’exarque à l’évêque de la prin= cipale ville d’un diocèfe, c’eft-à-dire comme ce mot le fignifioit alors ,de plufeurs provinces eccléfiafti- ques ; c’eft ce que les Latins appellent depuis pra , &t les Grecs patriarche. Voyez PATRIARQHE 6 PRi- MAT. Il y avoit en Orient autant d’exargues que de dio- cèfes : le premier étoit celui d’Afe, & réfidoit à Ephe- fe. Polycrate évêque de cette ville préfida au con- cile d’Afie, tenu au fujet de la queftion de la pâque; ce qui montre que l’exarchat de cette ville n’étoit pas fondé fur des conditions purement humaines. , Il ne nous refte pas de preuves fi éclatantes dans l'antiquité de deux autres exarchats , Céfarée en Cappadoce & Héraclée en Thrace.Nous voyons feu- lement que Firmilien évêque de Céfarée , avoit at- tiré un grand nombre d’évêques de fon parti contre le pape Etienne, dans la difpute fur là rébaptifation: des hérétiques. Le patriarche d’Antioche ayant travaillé long- tems à diminuer lautorité des exarques, la fit abolir dans le concile de Chalcédoine. Il ne leur refta que la qualité d’exarques , avec un rang de diftin@ion. après les cinq patriarches , mais fans aucune jurif- diétion fur les métropolitains de leur diocefe, L’£- vêque de Conftantinople s’empara aufi de la jurif- diétion des exarques du Pont & de l’Afie : ce dernier. exarchat fut, à la vérité, rétabli par un édit du ty- tan Bafilic ; mais l’empereur Zénon , prefqu’auffi- tôt après , rendit au patriarche de Conftantinopleies droits dont il joiifloit fur cette province. Thomafl. difcipl, eccléf. part. j. iv. I, chap. vüy. Bingham , org. eccléf. tom, I. div. IL. ch. vij.. 25 remarque qu’on appelloit autrefois les patriarches exarques d'un diocèfe, c’eft-à-dire d’un grand gou- vernement de la ville capitale duquel ils étoient évê- ques, &t qu'on donnoit aux métropolitains Le titre d’es xarques d’une province ; d’où il conclut que l’exar- que étoit la même chofe quelle patriarche, ce qui eft vrai dans Île fond, pour les tems qui ont précé- dé le concile de Chalcédoine ; mais depuis, le nom d’exarque na plus été qu’un vain titre , leurs hon- neurs & leur jurifdiétion ayant été attribués aux pa- triarches. VE FE. Le nom d'exerque eft encore ufité parmi les Grecs modernes , pour fignifier un dépuré , un délégué ; par exemple, ceux que le patriarche envoye en diverfes provinces , pour voir fi l’on y a obfervé les canons eccléfiaftiques , fi les évêques font leur devoir, & fi les moines font dans la regle. Goar, iz nor. ad office. Conflantinop. (G) EXARQUE, {. m, (A8, anc. ) dans l'antiquité étoit un nom que donnoïent les empereurs d'Orient; à certains Officiers qu'ils envoyoient en Italieen qua- lité de lieutenans ou plütôt de préfets, pour défen: dre la partie de ltalie qui étoit encore fous leur obéffance, particulierement la ville de Ravenne, contre les Lombards qui fe font rendus maîtres de la plus grande partie de lItalie, en L’exarque fauloit fa réfidence à Ravenne; cette ville avec cellede Rome étoittout ce qui-reftoit aux empereurs en Italie. Le patricien Boethius, connu par fontraité de con Jolatione philofophiæ ; fut le premier exarque, Il fut nommé en 568 par Juftin le jeune. Les exarques {ub- fifterent pendant 185 ans, &-finirent à Eutychius, fous l’exarquat duquel Aftulphe ou Aftolphe , roide Lombardie, s’empara dela ville de Ravenne. Le pere Papebroch, dans {on propylœum ad aëta Jan. Mai, a fait une differtation fur le pouvoir & les fonétions de l’exarque d'Italie à l’éle&ion & à l'or dination du pape. | Heraclius ; EXC Heraclius, archevêque cle Lyon, defeendant de Pilluftre maifon de Montboifier, fut créé par l’em- : pereur Fréderic exarque de‘tout le royaume de Bour- gogne: dignité qui jufque-là étoit inconnue par-tout ailleurs qu’en Italie , & particulierement dans la ville de Ravenne. Mencftrier , kiff. de Lyon. Homere, Philon & d’autres anciensauteurs , don: nent paretllement le nom d’exarques au chorifte ou maitre des muficiens dans les anciens chœurs, ou à celui qui chante le premier : car le mot &pyo ou «p- ou, fignifie également commencer & commander, PVoytz CHŒUR. Chambers. (G ) | EXASTYLE , {, m. terme d’Architeëfure ; te mot vient du grec , & fe dit d’un portique ou porche qui a fix colonnes de front, comme le porche de la Sor- bonne , à Paris. ( P) EXCAVATION, dans l’Archireture, c’eftl’a&tion de creufer & d’enlever la terre des fondemens d’un bâtiment. Palladio dit, qu'il faut creufer jufqu'à : de Ja hauteur de tout le bâtiment. EXCEDANT , ( Commerce, ) ce qui eftau-delà de la mefure. | On appelle enterme de Commerce, excedantd’au- nage , ce que l’on donne ou ce qui eft dû au-delà de l’aunage ordinaire, en aunant des étoffes , toiles & autres marchandifes qui fe mefurent & fe vendent à l’aune. On dit auñli #éxéfice d'aunage & plus fou- vent bon d'aunage, Voyez BÉNÉFICE & BON D’AU- NAGE. Diéionn. de Commerce. | * EXCELLENT , adj. ( Gram. ) terme de compa: raifon , quimarquele dernier degré poffible de bonté phyfique ou morale. Il n’y a rien de mieux que ce ui eft excellent, Il fe dit du tout ou d’une de fes par- tes ; de l'être entier ou de quelqu’une de fes qualités. EXCELLENCE, {. £. ( Æifi. mod, ) eft une qua- lité outitre d'honneur qu’on donné auxambaffadeurs & à d’autres perfonnes qu’on ne qualifie pas de ce- lui d’alteffe ; parce qu'ils ne font pas princes, mais qui font au deffus de toutes les autres dignités infé- Mieures. Voyez QUALITÉ. | En Angleterre & en France on ne donne ce titre qu'aulambafladeurs : mais il éft fort commun en Allemagne & en Italie. Autrefois ce titre étoit ré- fervé pour les princes du fang des différentes mai- fons royales ; mais ils l’ont abandonné pour prendre celui d'akefe, parce que plufieurs grands feigneurs prenoïent celui d'excellence. Voyez ALTESSE. Les ambaffadeurs ne font en poffeffion de ce titre que depuis 1593, quand Henri IV. roi de France en- voyaleduc de Nevers en ambaffade auprès du pape, où 1l fut d’abord complimenté du titre d’exce/lence. Dans la fuite on donna le même nom À tous Les am- bafladeurs réfidens dans cette cour , d’où cet ufage s’eft répandu dansles autres. Voyez AMBASSADEUR. Les ambaffadeurs de Venife ne jouiffent de ce ti- tre que depuis 1636, tems auquel l’empereur & le roid’Efpagne confentirent à le leur donner. Les ambafladeurs des têtes couronnées ne veulent point donner ce titre aux ambafladeurs des princes d'Italie, où cet ufage n’eft point établi, La cour de Rome n’accorde jamais la qualité d’ex- cellence à aucun ambaffadeur quandil eft eccléfiafti- que, parce qu'elle la regarde comme un titre fécu- Lier. Les regles ordinaires & l’ufage du mot excelle. ce ont varié un peu par rapport à la cour de Rome. Autrefois les ambafñladeurs de France à Rome, don- noïent le titre d'excellence à toute la famille du pape alots régnant, au connétable Colonne, au due de Bracciano, & aux fils aînés de tous ces feigneurs , de mêmequ’aux ducs Savelli, Cefarini, &c.. . , mais à préfent ils font plus réfervés à cet égard ; cepen- , dant ils traitent toûjours d'excellence toutes les prin- cefles romaines. La cour de Rome de fon côté, & les princes ro- Tome FI, | EXC 1 fans donnent ée même titre au chancelier, aux miniftres &c fécrétaires d'état, & aux préfidens des cours fouveraines én France, aux préfidens des con- feils d'Efpagne , au chancelier de Portugal , & à ceux quirempliflent les premieres places dans les au- tres états , pourvû qu’ils ne foient point eccléfaftr: ques. | Le mot excellence étoit autrefois le titre qué por toient les rois &c les empereurs : c’eft pourquoi Anaf- tafe le bibliothécaire appelle Charlemagne /o7 ex= cellence. On donneencore ce titre au fénat de Venifes où après avoir falué le doge fousle titre de férénifime > onqualifie les fénateurs de vos excellences. Le lber diurnus pontif. rom. traite d'excellence les exarques & les patriciens. Voyez TiTrr, Les François & les Italiens ont renchéri fur la fm: ple excellence, & en ont fait le mot excellentiffime &c excéllentiffimo , qui a été donné par plufieurs papes, rois, 6c. mais le mot exce/lentiffime n’eft plus d’u- fage en France, Wiquefort & Chambers. (G) EXCENTRICITÉ, f. f. ( Affronom, ) proprement eft la diflance qui eft entre les centres de deux cer- cles ou fpheres qui n’ont pas le même centre. Voyez EXCENTRIQUE. Ce mot n’eft guere ufité en ce fens. Æxcentricité, dans l’ancienne Aftronomie , eft là diflance qu’il y a entre le centre de l'orbite d’une planete, &le corps autour duquel elle tourne, Voyei PLANETE. Les aftronomes modernes qui ont précédé Kepler; à compter depuis Copernic, croyoïent que les pla- netes décrivoient autour du foleil non des ellipfes , mais des cercles , dont le foleil n’occupoit pas le cen- tre, Il ne leur étoit pas venu en penfée d'imaginer d'autrés courbes que des cercles ; mais comme ils avoient obfervé que le diametre du foleil étoit tan- tôt plus grand, tantôt plus petit, & que le foleif étoit 7 à 8 jours de plus dansles fignes feptentrionaux que dans les méridionaux, ils en concluoient avec rafon que le foleil n’occupoit pas le centré de l’or- bite terreftre, mais un point hors de ce centre , tel - que Ia terre. étoit tantôt plus près, tantôt plus loin du foleil. Kepler vint , & prouva que les planetes décrivoient fenfiblement autour du foleil des ellip- fes dont cet aftre occupoit le foyer. Foyez ELLIPSE PLANETE, KEPLER , SYSTÈME , Gc. à Excentricité ; dans la nouvelle Aftronomie, eft la diftance qui fe trouve entre Le centre € de l'orbite elliptique d’une planete ( PL. affron. fig. 1.) | & le centre du foleilS, c’eft-à-dire la diftance qui eft en- tre le centre de l’ellipfé & fon foyer. On l’appelle auff exeentriciré fimple, L'excentricité double eff la diftance qu'il y a entre les deux foyers de lellipfe; quieft égale à deux fois l’excenrricité fimple, ou l'excenrriciré tout court. 4 oyeg. FOYER & ELLIPSE, &ec, Trouver l'excentricité du foleil. Puifquele plus grand demi-diametre apparent du foleil eft au plus petit comme 32/43" eft à 31/ 48/, ou comme 1963" à 1898” ; la diftance la plus grande du foleil à la terre fera à la plus petite comme 1963 eftà 1898. Voyez APPARENT, DISTANCE 6 Vision. Donc puifque PS+S A4 = PA—= 3861 ( Planche affronom. fig: 14), lerayon CP fera 1930 ; & par conféquent SC=PC—-PS= 32 Donc CP étant ro0000, CS fera trouvée = 1658. | Donc, l’excentricité du foleil ou de la terre SC étant une petite partie du rayon CP, l'orbite ellipti= que de la terre ne doit pas s'éloigner beaucoup de la forme circulaire. Ainf il n’eft pas étonnant qu'un calcul fait fur le pié d’un cercle excentrique ré: ponde à-peu-près aux obfervations faites groffiéres ment, comme elles l’étoient avant la perfe@ion des inftrumens aftronomiques. Cependant. on s’apper- çoif façilement que les obfervations ARPARE beaus e 215 E X C coup nnieux encore à l’hypothèfe elliptique , & c’eft celle que tous les aftronomes fuivent aujourd’hui. L’excentricité de l'orbite terreftre paroît être toù- jouts là même, ou plütôt les inégalités qu’on y ob- ferve font très-petites. Il n’en eft pas ainfi de celle de la lune qui eft fujette à des variations continuelles & très-fenfibles. On remarque aufh quelques chan- gemens dans celles de Saturne, de Jupiter, &c. Voyez TERRE, SATURNE, JUPITER , LUNE, &c, Voy. aufh ÉQUATION, EVECTION , &c. (O EXCENTRIQUE, adj, ez Géomerrie, fe dit de deux cercles ou globes qui, quoique renfermés l’un dans l’autre, n’ont cependant pas le même centre, & par conféquent ne font point paralleles ; par oppofñition aux concentriques qui font paralleles , & ontunfeul &t même centre. Voyez CONCENTRIQUE. EXCENTRIQUE , f. m. dans la nouvelle 4/f/rono- nie , Ou cercle excentrique, eft un cercle comme PD AE ( Planch. affronom. fig. 1.) décrit du cen- tre de l'orbite d’une planete C, & de la moitié de l'axe CE | comme rayon. Voyez EXCENTRICITÉ. L’excentrique ou cercle excentrique , dans l’ancienne Aftronomie de Ptolomée, étoit la véritable orbite de Ja planete même, qu’on fuppofoit décrite autour de la terre & excentrique à la terre : on l’appelloit auffi déférent, parce que dans l’ancienne Affronomie ce cercle étoit imaginé fe mouvoir autour du centre C, &t emporter en même tems un autre cercle nommé EpiCYCLE , dont le centre étoit comme attaché à la circonférence du déférent, & dans lequel la planete étoit fuppolée fe mouvoir, Voyez DÉFÉRENT , EPI- CYCLE. Au lieu des cercles excentriques autour de laterre, les modernes font décrire aux planetes des orbites elliptiques autour du foleil : ce qui explique toutes les irrégularités de leurs mouvemens & leurs diftan- ces différentes de la terre, &c, d’une maniere plus exacte & plus naturelle. Voyez ORBITE, PLANETE, éc. | L’anomalie de lexcentrique | chez plufeurs aftro- nomes modernes, eft un arc du cercle excenrrique comme 4 À compris entre l’aphélie 4 & la ligne droite X L', qui, paflant par le centre de la planete K, eft tirée perpendiculairement à la ligne:des ap- fides 4 P. Voyez ANOMALIE. Equation excentrique ; dans l’ancienne Aftrono- mie ; eft la même chofe que la proffaphérefe. Foyez ce not, Le lieu excentrique de la planete dans fon orbite, eft Le point de fon orbite où.elle eft rapportée étant vüe du foleil. Foyez HÉLIOCENTRIQUE 6 GÉO- CENTRIQUE. (0) * EXCEPTER , v.a@. terme relatif à quelque loi commune, L’excéption-eft des chofes qui ne font pas fous la loi. Ce terme pourroit bien être encore * un de ceux qu’on ne peut définir. EXCEPTION, (Jurifprud.) fignifie quelquefois referve, comme quand quelqu'un donne tous fes biens à l'exception d’une maifon ou autre effet qu’il fe re- ferve. Celui qui dit tout purement & fimplement mexcepte rien, (4) Exceprion, eft aufi quelquefois une dérogeance à la regle en faveur de quelques perfonnes dans cer- tains cas: on.dit communément qu’il n’y a point de regle fansexception, parce qu'il my a point de regle, fi étroite foit elle , dont quelqu'un ne puifle être exempté dans des circonftances particulieres ; c’eft auf une maxime en Droit, que exceptio firmat regu- Lam, c’eft-à-dire qu'en exemptant de la regle celui qui eft dans le cas de l’exceprion , c’eft tacitement prefcrire-lobfervation de la regle pour ceux quine font pas dans un cas femblable. (4) Exception, fignifie auffi moyen & défenfe: on com- prend fous ce terme toutes fortes de défenfes. Il ya E X C des exceptions proprement dites, telles que les 2x ceptions dilatoires & déclinatoires qui ne touchent | point le fond, & d’autres exceprions péremptoires qui font la même chofe que les défenfes au fond. (4) EXCEPTION D'ARGENT NON COMPTÉ, 707 nus merate pecuriæ ; ft la défenfe de celui qui a reconnu avoir reçu une fomme, quoiqu'il ne l'ait pas réelle- ment reçue, Suivant Pancien droit romain, cette exceprion pou: voit être propofée pendant cinq ans ; par le droit nouveau ce délai eft reduit à deux ans, à l'égard des reconnoïflances pour prêt, vente, ou autre caufe femblable; mais la loi ne donne que trente jours au débiteur , pour fe plaindre du défaut de numération des efpeces dont il a donné quittance. Comme dans le cas d’une reconñoïffance furprife fans numération d’efpeces , il pourroit arriver que le créancier laiffät pafler les deux ans de peur qu’on ne lui oppofàt le défaut de numération , la loi per- met au débiteur de propofer cette exception par for- me de plainte, de la retention injufte faite par le créancier d’une obligation fans caufe. Cette exception etoit autrefois reçue dans toute la France , fuivant le témoignage de Rebufe. Préfentement elle n’eft reçue dans aucun parle- ment du royaume contre les aétes authentiques, lorf. qu'ils portent qu’il y a eu numération d’efpeces en préfence des notaires ; le débiteur n’a dans ce cas que la voie d’infcription de faux. À l’égard des aétes qui ne font point mention de la numération en préfence des notaires, Pufage n’eft pas uniforme dans tous les parlemens, L’exceprion eft encore recue en ce cas dans tous les parlemens de droit écrit , mais elle s’y pratique diverfement. Au parlement de Touloufe elle eft reçue pendant dix ans : mais fi elle eft propofée dans les deux ans, c’eft au créancier à prouver le payement, au lieu que fi elle n’eft propofée qu'après les deux ans ; c’eft au débiteur à prouver qu'il n'a rien reçu. Au parlement de Grenoble, c’eft toûjourstau dé biteur à prouver le défaut de numération. | Dans celui de Bordeaux elle eft reçue pendant 30 ans, mais 1l faut que la preuve foit par écrit ; & l’ex- ception n'eft pas admife contre les contrats qui por= tent numération réelle. : La coûtume de Bretagne, art. 280; accorde une a@tion pendant deux ans à celui qui 4 reconnu avoir reçu, lorfque la numération n’a pas été faite. On tient pour maxime , en général, que l’excep- tion d'argent non compté n’eft pas reçue au parle- ment de Paris, même dans les pays de droit écrit de fon reflort , ce qui reçoit néanmoins quelque ex= plication. Il ya d’abord quelques coûïtumes dans le reflort de ce parlement , qui admettent formellement lex ception dont il s’agit, même contre une obligation ou reconnoiffance authentique , mais c’eft au débi- teur à prouver le défaut de numération; telles font les coùtumes d'Auvergne, ch. xviij. art. 446 5. la Marche, art. 99. R Dansiles autres lieux du reflort de ce même parle- ment, où iln°y a point de loi qui admette l'exception, ellene laifle pas d’être auffi admife, mais avec plu- fieuts reftriétons; favoir, queic'eft tohjours au débi- teur à prouver le défaut denumération , quand même il feroit encore dans les deux années;äl fautaufi qu’il obtienne des lettres de refcifion contre fa reconnoïf- fance .dans les dix ans à compter du jour de laéte; &t fuivant l'ordonnance de Moulins & celle de 1667, ilne peut être admis à prouver par témoins le dé faut de numération d’efpeces contre une reconnoif= fançce.par écrit, encore qu'il füt queftion d’une fom- CN E XeC me moïndre de 100 livres, à moins qu'il n’y ait déjà un commencement de preuve par écrit; & fi c’eft un aéte authentique qui fafle mention de la numération d’efpeces à la vüe des notaires , 1l n’y a en ce cas, comme on l’a déjà dit, que la voie d’infcription de faux. (4) , EXCEPTION CIVILE, fiuvant le droit romain, étoit celle qui dérivoit du droit civil, c'eft-à-dire de la loi, telles que les exceptions de la falcidie , de la tré- bellianique, de difcuffion & de divifion,, à la diffé- rence des exceptions prétoriennes qui n’étoient fon- dées que fur les édits du préteur , telles que les ex- ceptions de dol, guod vi, quod metis caufà vel juris- jurandi. (A) “1 EXCEPTION DÉCLINATOIRE, eft celle par laquelle le défendeur, avant de propofer fes moyensau fond, décline la jurifdiétion du juge devant lequel il eft af- figné, & demande fon renvoi devant fon juge na- turel , ou devant le juge de fon privilége, ou autre juge qui doit connoître de l’affaire par préférence à tous autres. Les exceptions déclinatoires doivent être propolées avant conteftation en caufe; autrement on eft répu- té avoir procédé volontairement devant le juge, & on n’eft plus recevable à décliner, F’oyez DÉCLINA- TOIRE 6 RETENTION. (4) | syh, EXCEPTION DELA CHOSE JUGÉE, exceptiorei ju- dicate ; c’eft la défenfe que l’on tire de quelque ju- gement. Voyez CHOSE JUGÉE. (4) EXCEPTION DILATOIRE, eft celle qui ne touche pas le fond, mais tend feulement à obtenir quelque déla. Parexemple, celui qui eftafligné comme héri- tier, peut demander un délai pour délibérer s'il n’a pas encore pris qualité, De même celui auquel on demande le payement d’une dette avant l'échéance, peut oppofer que l’ac- tion eft prématurée. Ces fortes d’exceprions {ont purement dilatoires, c'eft-à-dire qu’elles ne détruifent pas la demande ; maïs 1l y en a qui peuvent devenir péremptoires , telle que l’exceprion par laquelle la caution demande la difcuffion préalable du principal obligé ; car fi par l'événement le principal obligé fe trouve folvable, la caution demeure déchargée. Celui qui a plufieurs exceptions dilatoires les doit propofer toutes par un même aûte , excepté néan- moins la veuve & les héritiers d’un défunt, quine font tenus de propofer leurs autres excepsions qu’a- près que le délai pour délibérer eft expiré. Voyez l'ordonnance de 1667, tir, v, art, 6, & vitre vj. @ je. (4) EXCEPTION DE DISCUSSION ET DE DIVISION, font celles par lefquelles un obligéreclame le bénéf- ce de difcuflion ou celui de divifion. Voyez Discus- SION & Division. (4) EXCEPTION DE DOL exceptio doli mali, eft la dé- fenfe de celui qui oppofe qu’on l’a trompé. Cette ex- ception eft perpétuelle, fuivant le droit romain, quoi- que l’aétion de dof foit fujette à prefcription. (4 ) EXCEPTION de dote cauté non numerarä , eft une efpece particuliere d'exception d'argent nonnombré, qui eft propre pour la dot lorfque le mari en a donné quittance comme sl avoit reçue, quoiqu'il n’y ait pas eu de numération réelle de deniers. ÿ La novelle 100 donne dix ans au mari pour:pro- pofer cette exceprion. Voyez DoT. (4) EXCEPTION NÉGATOIRE, eft la défenfe qui con- fifte feulement dans la dénégation de quelque point de faitoude droit. Foyez DÉNÉGATION,. (4) EXCEPTION PÉREMPTOIRE, eff celle qui détruit lation; on l'appelle auffi défnfe ou moyen au fond ; tel eft le payement de la dette qui eft demandée, tels font auffi les moyens réfultans dtsne tranfadtion, d’u- en rénonciation ou d’une prefcription, par vertu de Tome VI, | - E X C 219 laquelle le défendeur doit être déchargé de la de- mande, Les exceptions péremproires peuvent être propofées en tout état de caufe, (4) EXCEPTION PERPÉTUELLE ; on appellequelque- fois ainfi l'exception péremptoire, parce qu’elle tend. à libérer pour toûjours le débiteur; à la différence de l'exception dilatoire, qui ne fait qu'éloigner pour un tems le jugement de la demande. On peut aufli entendre par exceprion perpétuelle , celle qui peut être propofée en tout tems, comme font la plûüpart des exceptions, lefquelles font perpé- tuelles de leur nature, fuivant la maxime temporalie ad agendum perpetua Junt ad excipiendum. Les excep= tions perpétuelles prifes en ce fens, font oppofées à celles qui ne peuvent être.oppofées après un certain tems, telles que font toutes les exceptions dilatoires 5 l'exception d'argent non compté, & celle de la dot non payée. (4) EXCEPTION PERSONNELLE, eft celle qui eft ac- cordée à quelqu'un en vertu d’untitre ou de quelque confidération qui lui font perfonnels ; par exemple, fi on a accordé une remife perfonnelle à un de plu- fieurs obligés folidairement , cette grace dont il peut feul exciper ne s'étend point aux autres co-obligés, lefquels peuvent être pourfuivis chacun folidaire- ment. Poyez ci-après EXCEPTION RÉELLE. (4) EXCEPTION PRÉTORIENNE, Voyez ci-devant Ex- CEPTION CIVILE. (4) EXCEPTION RÉELLE, eft celle qui fe tire ex vifce- r1bus rer ; & qui eft inhérente à la chofe, telle que l’ex- ception de dol, l'exception de la chofe jugée, & plufeurs autres femblables : ces fortes d’exceprions peuvent être oppofées par tous ceux qui ont intérêt à la chofe, foit co-obligés ou cautions ; ainfi lorfqu’un des co- obligés a tranfigé avec le créancier, les autres co- obligés peuvent exciper contre lui de la tranfaétion, quoiqu'ils n’y ayent pas été parties. (4) EXCEPTION TEMPORAIRE, Ou comme quelques- uns l’appellent improprement, exception temporelle eft celle dont l’effet ne dure qu’un tems, telles que les exceptions dilatoires, ou qui ne peut être propolée que pendant un certain tems, comme l’exceprion d'argent non compté. FR Sur les exceptions en pénéral , voyez az digefle, au code & aux influe, les titres de exceprionibus ;l’ordon- nance de 1667, #£, 7x. Dumolin, fly du parlement , chapit. x. Le Bret, de l'ancien ordre des Jugemens à ch. xxx. Henris, com. Il. Liv. IF. queft. GS. (4) * EXCES, f. m. (Grammaire) au phyfique, c’eft la différence de deux quantités inégales, | Au moral, Pacception m’eft pas fort différente. On fuppofe pareillement une mefure à laquelle les qualités & les aétions peuvent être comparées ; & c'eft par cette comparaifon qu’on juge qu’il y a excès ou défaut, | EXCÈS , {. m. (Commerce) fignifie quelquefois ce qui excede une mefure, c’eft-à-dire ce qui eft au- delà de la dimenfion ou capacité qu’elle doit avoir. Ce terme n’eft guere en ufage en ce fens que dans les bureaux des cinq groffes fermes du roi, établis fur les ports de mer pour y recevoir les droits de fortie des vins & eaux-de-vie qu'on y embarque pour l’é- tranger. Les commis de ces bureaux appellent excès, ce que les barriques contiennent au-delà des cinquante vel- tes, qui eft le pié ordinaire fur lequel le tarif regle les droits de fortie. Ainfi quand la barrique eft de 60 veltes, l'excès eft de dix veltes, que le commis fait payer à raïfon de tant par velte, à proportion du droit que les cinquante veltes ont payé. Voy. VELTE, Diétionn, de Comm. de Trév. & Chamb. (G) EXCESTER, ( Géog. mod.) ville d'Angleterre , fituée fur la riviere d’Ex. Long. Heat $0.52: 6 1 520 E X C EXCIPER , v: neut. (Jurifprud.) fignifie quelque- fois fournir des exceptions proprement dites ; il fignifie auffi quelquefois employer une piece pour fa défen- fe : on dit, par exemple, exciper d’une rénonciation , d’une quittance ; 1l n’eft pas permis d’exciper du droit d’autrut, c’eft-à-dire de vouloir fe faire un moyen d'une chofe qui n'intéreffe qu'un tiers, & non celui qui en excipe.. (A EXCIPIENT , L:m. (Pharmacie.) On défigne par ce nom une fubftance, foit molle, foit liquide, qui fert à raffembler &c à lier les différens ingrédiens d’u- ne compoftion pharmaceutique, ou qui fournit un vehicule ou une enveloppe à une drogue fimple. L’excipient d’une medecine eft ordinairement de Peau commune ; celui d’une opiate , d’une maffe de pillules, d’un bol , une conferve ou un fyrop; celui d’un julep ou d’une potion cordiale, une eau diftil- lée, &c. Voyez ces articles particuliers, Un liquide deftiné à recevoir une ou plufieurs dro- gues , eft également appellé du nom d’excipiens, foit qu’elles foient folubles par ce liquide, foit qu’elles ne le foient pas. L’excipient des compoñtions fous forme folide , n’en diflout jamais les ingrédiens. 1°. L’excipient doit toûjours ou concourir à rem- plir l’indication qu’on fe propofe dans la prefcription du médicament dont ïl fait partie, ou pour le moins être indifférent. 2°, Il ne doit point avoir la propriété de détruire ou d’altérer la vertu des médicamens qu'il reçoit. On ne doit point , par exemple, incorporer des matieres alkalines , foit ferreufes, foit falines , avec un exci- pient acide, éc. On commet une faute de cette efpe- ce, lorfqu’on fe fert du fyrop de limon pour excipiens dans la préparation de la confeétion hyacinthe, qui contient des alkalis terreux , & qui doit à ces matie- res abforbantes fes propriétés les plus connues; car l'acide du citron fe combinant avec ces fubftances, en détruit la vertu abforbante autant qu'il eft en lui. Voyez CONFECTION HYACINTHE 44 mor CONFEC- TION. On trouvera à l’article FORMULE , les lois généra- les des mélanges pharmaceutiques. (2) EXCISE , £. £. ( Æif£. mod. 6 Comm. ) eft une en- trée où impôt nus fur la bierre , l’aile ou bierre douce, le cidre, & autres liqueurs faites pour les vendre , dans le royaume d'Angleterre, dans la prin- cipauté de Galles, & dans la ville de Berwick, fur la riviere de Twed. Voyez IMPÔT. L'impôt de l’excife fut d’abord accordé an roi Charles fecond par un ate du parlement en l’année 1660, pour la vie de ce prince feulement : mais il a été continué & augmenté par différens parlemens fous les différens princes qui ont regné depuis, & il a été étendu à l’Écofle, Get impôt dans l’état où 1l eft attuellement, eft fur le pié de 4f. 9 d. par ton- neau de bierre forte ou d’aile, & de 1 f. 6. d:pour petite bierre. Maintenant comme on accorde aux Braffeurs pour le rempliffage de la bierre trois tonneaux fur 23, pour l’aile ou bierre douce, deux fur 22; l’excife exat d’un tonneau de forte bierre monte à 4. £ 1 d. +: celuide l'aile ou bierre douce, 4 f. 3 di; & ce- lui delapetitebierreàifid.i1q#+ : L'excife eft une des plus confidérables branches du revenu du roi : anciennement ce droit étoit af fermé : mais à préfent il'eft régi pour le roi par fept comimiflaires qui demeurent au bureau général de l'excifé, reçoivent tout le produit de l’excifé de la bierre , de l’aile, & autresliqueurs, &c du dreche, qui fe perçoit fur toute l’Angleterre, & le portent authréfor. Voyez ECHIQUIER. Leurs appointemens font de 800 liv. par an, & ils s’oblisent par ferment de ne recevoir de droits ou de falaire que du roi feulement. On peut appeller des commis de l’excife à cinq autres qu’on nomme les commiflaires des appels. Le nombre des officiers qui font employés dans cette branche des revenus eft fort grand. Outre les commiflaires ci-deflus & leurs officiers fubordonnés, comme les porte-regiftres, les ambulans, &c.…..il y a un auditeur de l’excife avec fes commis, Éc...un porte-repiftre , un fecrétaire, un foHiciteur, un caf fier, unreceveur, un clerc des affärances, un con- cierge, un portier ; un arithméticien pour l’argent , un jaugeur général, des chiffreurs généraux avec leurs afliftans, des ambulans , un fecrétaire pour les . marchandifes qui ne fe tranfportent pas, des exami: nateurs, un fecrétaire pour les journaux qui ont été examinés, des chiffreurs , des examinateurs, &c... pou la diftillerie de Londres pour le vinaigre, le cidre, &c. Il y a auffñi des examinatenrs pour Le dre- che, des intendans généraux & autres, de la brafle+ rie de Londres, avec des affiftans & autres officiers au nombre de cent, des intendans généraux, 8cau- | tres pour la diffillerie de Londres, avec d’autres officiers au nombre de 40, un colleéteur, & un in- | tendant pour les liqueurs qu’on fait venir , avec un intendant de débarquement à la doianne , &c. Les appointemens annuels de tous les officiers de l'excife montent fmivant le calcul de M. Chamber- layne à 23650 livres. De plus il y a dans les provinces cinquante col- leéteurs & 150 infpeîteurs, avec un grand nombre d'officiers inférieurs appellés jaugeurs ow colleëfeurs de l'excife ; ce qui augmente le nombre de ceux qui font employés à la perception de ce revenu, juf- qu’au nombre de 2000, L’excife fur la bierre, laile, & les autres liqueurs qui font fujetes à ce droit, même en terns de guerre, monte à 1100000 livres par an, & eft percû fur 300000 perfonnes ou environ. L’impôt fur le dreche avec l'impôt qu’on à ajoûté fur le cidre, &c. monte entre fix à fept cents mille livres par an, & fe perçoit fur une plus grande quan- tité de monde que le premier. Et cependant toute la dépenfe faite pour le-re- cueillement de ces droits, ne monte pas à vingt fols pour livre fterling : ce qu’on regarde comme une exattitude & une économie, dont on ne peut pas trouver d'exemple dans aucuns revenus percûs {oit dans ce pays , foit par-tout ailleurs. Tel eft le prix ou le produit exa@ des différentes impoftions de Pexcife. 1°. Unimpôt de 2 f. 6 d. par tonneau, dont quin- ze deniers par tonneau pendant la vie de fa majefté, & les autres 15 d. qui doivent toüjours fubffter, comme étant propre au gouvernement civil, dédu- tion faite de 3700 liv. par femaine pour les annui- tés, produit denet . . . . 260837 liv. 2°. Un impôt de neuf deniers par tonneau, accordé à Guillaume III. & à Marie pour o9 ans, à commencer en Janvier 1692, à la charge de payer 124866 Liv. par an pour les annuités , & 7567 liv. par an, pour la furvivan- Ce FproduEbnEt 0; 0 LU ei EE que 3°. Neuf autres deniers par tonneau pour toljours , accordés-à Guillau- me II , & Marie, à la charge de payer 100000 lv. par an à la banque, com- me auf différentes annuités à vie, produit. desnet, "nm 7) 4 4°, Neuf autres deniers par tonneau pour 16 ans, continués à la reine Anne, depuis Mai 1713, pour 95 ans, pour le payement de 140000 Liv. par an, fur un million de billets de loterie, avec . 150106 les annuités de 99 ans, &c. produit net 159808 liv. qui avec quelques au- tres impôts accordés par un acte plus récent; Monte d uni à 1. 184808 s°. Un impôt fur les mauvais vins & efprits qui n’ont été tirés qu’une fois , continué jufqu’aw 24 Juin r710, PrOIE EN ET EC ML ÉTLÉ7 6°, L’excife fur l'aile & la bierre en Ecofle , qui eft affermée moyennant... 33500 Ton ne tu sn ST 7O div: Chambers. (G) EXCLAMATION,, f. f. figure de Rhétorique , par laquelle l’orateur élevant la voix, 8& employant une interje@ion foit exprimée foit fous-entendue, fait paroïtre un mouvement vif de furprife, d’indigna- tion , de pitié, ouquelqu’autre fentiment excité par là grandeur & l'importance d’une chofe. Telle eft celle-ci d ciel! 6 terre ! &rc. & celle-ci de Ciceron contre Catilina, 6 rems ! 6 mœurs ! Le fénat connoît ce traître, le conful le voit, & il vit! Que dis-je? il vit, 1l ofe paroître dans le fénat ! Et cette autre dans l’oraifon pour Celius: Prok, du mmmortales l'cur interdum in hominum fceleribus ma- ximis ; aut connivetis, aut prefentis fraudis pænas in diem refervatis ? En françois les interjeétionse / hélas, 6 Dieu ! &c. font les caraéteres de lexclzmarion. En latin on fe fert de celle-ci, 4, heu, heu ! ah ! proh fuperi, proh Dem atque hominum fidem ! quelquefois cependant l’interjeétion ef fous-entendue, comme riférum me ! hoccine Jeculum ! L’interjeétion eft le langage ordi- naire de admiration & de la douleur. Voyez INTER- JECTION. Chambers, ( G) EXCLUSIF , (Jurifprud. ) fignifie qui a l'effet d’exclure. On appelle drois ou priviléceexclufif, celui qui eft accordé à quelqu'un pour faire quelque cho- fe, fans qu'aucune autre perfonne ait la liberté de faire le femblable. Claufe exclufive, eft celle qui dé- fend d'employer quelque chofe en certains ufages où au profit de certaines perfonnes ;, voix exclufive dans les éle&ions, eft celle qui tend à empêcher que quelqu'un ne foit élu. Voyez ExcLus1ON. (4) EXCLUSION , f. f. ez Marhématique. La métho- de des exclufions eft une maniere de réfoudre les problèmes en nombres, en rejettant d’abord & ex- cluant certains nombres comme n’étant pas propres à la folution de la queftion. Par cette méthode le problème eft fouvent réfolu avec plus de prompti- tude & de facihité. M. Frenicle mathématicien fort habile , qui vivoit du tems de Defcartes, .eft un de ceux qui s’eft le plus fervi de cette méthode d’exc/- fion. « M. Frenicle étoit le-plus habile homme de fon » tems dans la fcience des nombres; & alors vi- # voient MM. Defcartes , de Fermat, de Roberval, » Wallis, & d’autres, qui égaloient ou peut-être » furpafloient tous ceux qui les avoient précédés. » La conjonéture du tems avoit beaucoup aidé ces » grands génies à fe perfe@tionner dans cetté {cien- » ce. Carla plüpart des favans s’en piquoient alors : » & elle devint tellement à la mode , que non-feu: » lement les particuliers, mais même les nations di£ » férentes fe faifoient des défis fur la folution des » problèmes numériques : ce qui a donné occafon » à M. Wallis de faire imprimer en l’année 1658 le » livre intitulé Commercium epiflolicum ; oh l’on voit les défis » difpute. Dans ces combats d’efprit, M. de Freni- » cle étoit toüjours le principal tenant, & c’étoit » lui qui faïfoit le plus d'honneur à la nation fran- » çoife. que les Mathématiciens de France fai- # foïent à ceux d'Angleterre ; les réponfes des uns , » les répliques des autres, & tout le procédé deleur EXC 221 » Ce qui lefaifoitle plus admirer, c’étoit la faci* ».lité qu’il avoit à réfoudre. les: problèmes les plus * difficiles, fans néanmoins y employer l’Algebre, ».qui donne un très-grand' avantage à ceux qui fa» »vent s'en fervir. MM. Defcartes, de Fermat, » Wallis, 8 les autres, avoient. bien de la peine avec:tont leur.alsebre, à trouver la folution de: » plufieurs propoñitions numériques, dont M. de Fre-: » nicle, fans l’aide de cette fcience, venoit aïfé= ment à bout par la feule force de fon génie, qui » lui avoit fait inventer une méthode particuliere * pour cette forte de problèmes, Je vous. déclare ins »-géniment, dit M. de Fermat dans une defésilettres » imprimées dans le recueil. de fes Ouvrages, que » J'admire le génie de M. de Frenicle, qui fans l’Alge- » bre poule ft avant dans la connoiffance des nombres 3 » G ce que j'y trouve de plus excellent, confifte dans l& » viteffe de fes opérations. M. Defcartes ne l’admitoit # pas moins : /oz arithmérique, dit-il au-pere Merfen- »ne, en parlant de M. de Frenicle , dois étre excel. »lente, puifqu'elle le conduit à une chofe où l’analyfe: » a bien de la peine à parvenir. Et comme le remar- » que l’auteur de la vie de M. Defcartes, ce juge- » ment eft d'un poids d'autant plus grard, que M. » Defcartes étoit moins prodigue d’éloges , particu- » lierement en écrivant au P. Merfenne, à qutil avoit » coûtume de confier librement fes penfées. Enfin » Von ne peut rien dire de plus avantageux que ce » que le célebre M. de Fermat, qui connoïfloit auff- » bien que perfonne la force de tous ceux qui fe mê- » loient alors de la fcience des nombres, dit dans » une de fes lettres, où parlant de quelque chofe qu'il # avoit trouvée : 1! n'y a, dit-il, rer de plus difficile » dans toutes les Mathématiques ; & hors M. de Freni- » cle ; 6 peut-être M. Defcurtes ;jedoute qué‘perfonne | »enmconnoiffe le fecrer. De M1 Defcartes,, il n’en eft » pasibien aflüré; mais il répond de M. de Fre-: » nicle. » Cette méthode fi admirable: qui va, dit M. » Defcartes, où l’analyfe ne‘peut aller qu'avec bien »# de laipeine , eft celle que M. de Frenicle!, qui l'a » voit inventée, appelloït {4 méthode des excluffons. » Quand'ilavoit un problème numérique Aréfou-: »# dre ;“au lieu de chercher a-quel nombre! les‘cendi- » tions du problème propofé conviennent, ! il texas » minoit au contraire à quels Rombres elles ñe péu-: » ventconvenir; & procédant tohjours par exc. » Jion ; 1l trouvoit enfin le nombre qu’il cherchoit. » Tous les mathématiciens de fon tems avoient une »envie extrème de favoir cette méthode; 8 entre » autres M. de Fermat prie inftamment le pere: Mer. » fenne, dans une de fes lettres, d’en obtenir de M, » de Frenicle la communication. Je/u5 enamrois, dit. will, une très-grande obligation ; 6 je ne ferois jamais » difficulie de l’avoiier. Y ajoûte qu'il voudroit avoir » mérité par les fervices ; cette faveur; & qu’il ne » défefpete pas de la payerpar quelques invéntions » qui peut-être lui feront notüvelles. | : Ji » Quelqu'inftance que l’on en ait faite à M. de » Frenicle ; 1l n’a jamais voulu pendant fa vie don- » ner Communication de cetté méthode : mais après » fa moït elle fe trouva dans {es papiers; & c’eftun » destraités que l’on a donnés dans le recueil intitu- » LE divers ouvrages de Mathématique Edé Phyfique s » par MM. de l'Académie royale dés Sciences, à Pa # ris 1603. Comme c’eft une méthode de pratique, » 6c qu'en fait de pratique on a bien pHôt fait d’in- » ftruire par des exemples que par des préceptes ; » M. de Frenicle ne s'arrête pas à donner de longs » préceptes pour tous les cas différens qu peuvent » fe rencontrer ; mais après avoir établi en peu de » mots dix reples générales, il enmontre lapplica- » tion par dix exemples choïfis &t affez étendus », Mém, de l'Acad, des Sciences 1693, p, 50 ; 51, $a, = Le À E X C On ne dit ici tien davantage de cette méthode, par- ce qu'il feroit difficile de donner en peu de patoles une idée aflez claire de cette fuite de dénombre- mens & d’exclufrons, en quoi elle confifte : 1l la faut voir dans le livre même : d’ailleurs depuis que les méthodes de l’Algebre font devenues famihieres & ont été perfettionnées elle n’eft plus d'ufage, & ne peut être que de fimple curiofité. ( O EXCOMMUNICATION,., 1. f, (Hiff, anc,) fépa- ration de communication où de commerce avec une perfonne avec laquelle onen avoit auparavant. En ce fens, tout homme exclus d’une fociété ou d’un corps, & avec lequel les membres de ce corps n’ont plus de communication, peut-être appellé excommu- nié; & c’étoit une peine ufitée en certains cas parmi les Payens, &qui étoit infligée par leurs prêtres. On défendoit à ceux qu’on excommunioit , d’aflifter aux facrifices , d'entrer dans les temples ; on les hvroit aux démons 8 aux Eumenides avec des impréca- tions terribles : c’eft ce qu’on appelloit Jacris snter- dicere, diris dévovere, execrari. La prêtrefle Théano, fille de Ménon , fut loüée de n'avoir pas voulu dé- voüer Alcibiade aux furies, quoique les Athéniens l’euffent ordonné ; & les Eumolpides, qui en ce point obéirent au peuple, furent très-blâmés, parce qu’on n’en devoit venir à cette peine qu'aux dernieres ex- trémités. Elle paffa chez les Romains, mais avec la même referve ; &c nous n’en voyons guere d’exem- ples que célui du tribun Afcius, qui ayant pü em- pêcher Craflus de porter la guerre chez les Parthes, courut vers la porte dela ville par laquelle ce géné- ral.devoit fortir pour fe mettre à la tête des troupes ; & R'jettant certaines'hétbes fur un brafier, 1l pro- nonça des imprécations contre Craflus. La plus ri- goureufe-punitionqu'infligeaffent les druides,chez les Gaulois; c’étoit, dit Céfar Z. FT. d'interdire la com- munionide leurs myfteres à ceux qui ne veulent point acquiefcer à leur jugement. Ceux qui font frappés de cette foudre, pañlent pour fcélérats & pour im- pies ; chacun fuit leur rencontre & leur entretien. S'ils ont quelqu’affaire, on ne leur fait point juftice, ils font exclus des charges & des dignités , ils meu- rent fans: honneur & fans crédit. On.pouyoit pour- tant., pat le repentir & après quelques épreuves, être rétabli dans fon premier état ; cependant fi lon mouroit fans avoir été téhabilité, les druides ne laïfloient pas d'offrir un facrifice pour lame du de- funt. (G). :: EXCOMMUNICATION , ( Théologie.) peine ecclé- faftique par laquelle on fépare & prive quelqu'un de la communication ou du commerce qu'il étoit aupa-, ravant en. droit d’avoir.avec les membres d’une fo- ciété religieufé. J’oyez COMMUNION. LA 4 L’excomnmiunication, en général, eft une peine fp1. rituelle fondée en raifon, & qui opere les mêmes ef- fets dans la fociété religieufe, que les châtimens in- fligés par les-lois pénales produifent dans la fociété civile, Ici les légiflateurs ont fenti qu'il falloit oppo- fer au crime un frein puiflant ;. que la violence & l’injuftice ne pouvoient être réprimées que par de fortes barrieres ; 8 que dès qu’un citoyentroubloit plus ou moins l’ordre public , il étoit de l’intérêt:êc de la füreté de la fociété, qu’on privât le perturba- teur d’une partie des avantages, ou même de tous les'avantages dontil jouifloit à l’abrides conventions qui-fontle fondement de cette fociété :de-là les peï- nes pécuniaires où. corporelles, &la privation dela liberté ow de la vie, felon l’exigence des forfaits, De même dansune fociété religieufe, dès qu’un membre en viole. les lois.en matiere grave, & qu’à cette in- fration il ajoûte l’opimâtreté , les dépoñitaires de l'autorité facrée font en droit de le priver, propor- tionnellement au crime qu'ilacommis , de quelques- uns ou de tous les biens {pirituels auxquels 1l partiçi- poit antérieurement, E X C C’eft fur ce principe , également fondé fur le droit naturel & fur le droit pofitif, que l’exconmuñicarion reftreinte à ce qui regarde la religion, aeu-lieu par- mi les Payens & chez les Hébreux , & qu’elle l’a en- core parmi les Juifs & les Chrétiens. L’excommunication étoit en ufage chez les Grecs ; les Romains & les Gaulois, comme on l’a vù par l’ar- ticle précédent ; mais plus cette punition étoit ter- - sible; plus les lois exigeoient de prudence pout linfliger ; au moins Platon dans fes lois, Zy. VIE. la recommande-t-1l aux prêtres & aux prêtrefles. Parmi les anciens Juifs onféparoit de la commu- mon pour deux caufes , l’impureté légale, & le cri- me. L'une & l’autre excommunication étoit décernée par les prêtres, qui déclaroient l’homme fouillé d’u- ne impureté légale , ou coupable d’un crime. L’ex- communication pour caufe d’impurete cefloit lorfque cette caufe ne fubfftoit plus, & que le prêtre décla- roit qu’elle avoit plus lieu. L’excommunication pour caufe de crimene finifoit que quand le coupable re- connoïfiant fa faute , fe foümettoit aux peines qui lui étoient impofées par les prêtres ou par le fanhé- drin. Tout ce que nous allons dire roulera fur cette derniere forte d’excommunication. | On trouve des traces de l’excommunication dans Efdras, Liv. I. c.x. y. 8. Un Caraite cité par Selden, Liv. I, c. vij. de fynedriis, affüre que l’excommunica- tion commença à n’être mife en ufage chez les Hé- breux que lorfque la nation eut perdu le droit de vie &t de mort fous la domination des princes infdeles. Bafnage, hiff, des Juifs, liv. V, ch. xvüiy, art. 2. croit que le fanhédrin ayant été établi fous les Machabées, s’attribua la connoiffance des caufes eccléfiaftiques & la punition des coupables; que ce fut alors que le mélange des Juifs avec les nations infideles , rendit l'exercice de ce pouvoir plus fréquent , afin d’empê- cher le commerce avec les Payens , & l'abandon du Judaifme. Mais le plus grand nombre des inter- pretes préfume avec fondement que les anciens Hé- breux ont exercé le même pouvoir & infligé les mê- mes peines qu'Efdras , puifque les mêmes lois fub- fiftoient ; qu'il y avoit de tems en tems des tranfgref- feurs, & par conféquent des punitions établies. D’ail- leurs ces paroles fi fréquentes dans les Livres faints écrits avant Efdras, azima que fuerir rebellis adverfus : Dominum, peribit , delebitur; (8 felon l’hébreu) ex- Jcindetur de populo fuo , ne s’entendent pas toûjours de la mort naturelle, mais de la féparation du com- merce ou de la communication i facris, On voit l’excommunication conftamment établie chez les Juifs au tems de Jefus-Chrift, puifqu’en S. Jean, ch jx. v. 22. xij, v, 42, xvj,v. 2. &i dans S. Luc, chap. y. v. 22. il avertit fes apôtres qu’on les chaffera des fynagogues, Cette peine étoit en ufage parmi les Efféniens. Jofephe parlant d’eux dans {on hifloire de la guerre des Juifs, Liv. IT. chap. xij. dit « qu'aufi-tôt qu'ils ont furpris quelqu'un d’entr’eux » dans une faute confidérable, 1ls le chaffent de leur, » corps; & que celui qui eft ainfi chañlé , fait {ou- » vent une fin tragique: car comme 1l eft lié par des » fermens & des vœux qui empêchent de recevoir » la nourriture des étrangers , &c qu'il ne peut plus » ayoir.de commerce avec ceux dont il eft féparé , » il fe voit contraint de fe nourrir d’herbages, com- » meune bête, jufqu’à cequefon corps fe corrompe, » &c que fes membres tombent & fe détachent. Il ar- » rive quelquefois, ajoûte cet hifiorien , que les Ef- » féniens voyant ces excommumiés prêts à périr de » mifere, fe laiflent toucher de compañfon, les re- » tirent & les reçoivent dans leur fociété, croyant » que c’eft pour eux une pénitence aflez févere que » d’avoir été réduits à cette extrémité, pour la puni- » tion de leurs fautes ». Voyez ESSÉNIENS. . Selonles rabbins , lexcommunication confifte dans E X C la privation de quelque droit dont on jouiffoit äupa- ravant dans la communion ou dans la fociété dont oneftmembre, Cette peine renferme ou la privation des chofes faintes, ou celle des chofes communes, ou celle des unes & des autres tout à-la-fois; elle eft impolée par une fentence humaine » pour quelque faute ou réelle ou apparente, avec efpérance néan- moins pour le coupable de rentrer dans lufage des chofes dont cette fentence la privé. Voyez Selden, div. TZ, ch, vij. de fynedrüs. Les Hébreux avoient deux fortes d’excommunica- &onS; lexcommunication majeure, & V'excommunica- tion mineure : la premiere éloignoit l’excommunié de la fociété de tous leshommes qui compofoient lEgli- fe : la feconde le féparoit feulement d’une partie de , cette focièté, c’eftà-dire de tous ceux de la fynago- gue ; enforte que perfonne ne pouvoit s’aflcoir au- prés de lui plus près qu’à la diftance de quatre cou: dées, excepté fa femme & fes enfans, ILne pouvoit être pris pour compofer le nombre de dix perfonnes néceflaire pour terminer certaines affaires, L’excom- munie métoit compté pour rien, & ne pouvoit ni ! boire ni manger avec les autres. I] paroït pourtant parle talmud, que lexcommunication nexcluoit pas les excommuniés de la célébration des fêtes » ni de l'entrée du temple , ni des autres cérémonies de rez ligion, Les repas qui fe faïfoient dans le temple aux fêtes folennelles , n’étoient pas du nombre de ceux dont les excommuniés étoient exclus ; le talmud ne met entr'eux & les autres que cette diftin&tion, que les excommuniés n’entroient au temple que par le côté gauche, & fortoient par Le côté droit ; au lieu que les autres entroient par le côté droit, & fortoient : par le côté gauche : mais peut-être cette diftindion ne tomboit-elle que fur ceux qui étoient frappés de Pexcommunication rnineure. Quoiqu'il en foit , les doéteurs juifs comptent juf- qu'à vingt-quatre caufes d’excommunication , dont quelques-unes paroïflent très-legeres, & d’antres ridicules ; telles que de garder chez foi une chofe nuifble ; telles qu'un chien qui mord les pañlans, fa- crifier fans avoir éprouvé {on couteau en préfence d’un fage ou d’un maître en Ifraël, ec. L’excommu rication encourue pour ces caufes , eft précedée par Ja cenfure qui fe fait d’abord en fecret ; mais fi celle- ci n'opere rien, & que le coupable ne fe corrige pas, lamaijon du jugement, c’eft-à-dire l’'aflemblée des juges , lui dénonce avec menaces qu'il ait à fe cor- riger: on rend enfuite la cenfure publique dans qua- tre fabbats, où l’on proclame le nom du coupable &z la nature de fa faute ; & s’il démeure incorrigible , on l’excommunie par une fentence concûe en ces termes: gu ur tel foit dans la féparation où dans lex. communication ; Où qu'un tel foit [éparé, On fubifoit la fentence d’excommunicarion ou du- tant la veille ou dans le fommeil. Les juges ou l’af- femblée, où même les particuliers ; avoient droit d'excommunier,pourvû qu'il:y eût une des 24 caufes dont nous avons parlé , & qu’oneñt préalablement averti celui qu'on excommunioit, qu’il eût à fe cor- riger ; mais dans la regle ordinaire c’étoit la maifon du jugement ou la cour de juftice qui portoit la fen- tence de l’excormmunication {olennelle, Un particulier pouvoit en excommunier un autre ; il pouvoit pa tellement s’excommunier lui-même > comme , par exemple, ceux dont il eft parlé dans les Aëkes, ch. XX], y. 12. & dans /e Jecond livre d'Efdras, ch. x. V: 29. qui s'engagent eux-mêmes , fous peine d’ex- Communication , les uns à obferver la loi de Dieu , les autres à fe faifir de Paul mort ou vif Les Juifs lan- . GOient quelquefois l’excommunication contre les bé. tes, 6c les rabbins enfcignent qu’elle fait fon effet jufque fur les chiens. LS L'excommunicarion qui artivoit pendant le fom- E X C 223 meil, étoit lorfqw’un homme voyoit en fonge les ju- _ SéSquiparune fentence juridique l’excommunioient, Où même un particulier qui excommunioit ; alors il fe tenoit pour véritablément EXCOMMUNMEÉ , parce que , felon les doéteurs > 11e pouvoit faire que Dieu, ou par fa volonté > OU Par quelqu'un de fes minif- tres, l’eût fait Excommunmier. Les effets de cette ex- communication {ont tous les mêmes que ceux dé l'excommunication juridique » Qui Le fait pendant la veille. , Si l'excommunié frappé d’une communication rai neure ,-n'obtenoit pas fon abfolution dans un mois après l’avoir encourue ; On la renouvelloit encore pour lefpace d’un mois ; & fi après ce terme expiré il ne cherchoit point à fe faite abfoudre, ôn le foû- mettoit à l’excommunication majeure, & alors tout commerce lui étoit interdit avec les autres ;ilne pouvoit ni étudier ni enfeignér, ni donner ni prendre à lotage. Il étoit réduit 4-peu-près dans l’état de ceux auxquels les anciens Romains interdifoient l’eau & le feu. Il pouvoit feulement recevoir fa nourriture d’un petit nombre de perfonnes ; &t ceux qui avoient quelque commerce avec lui durant le tems de fon exCOmmunication ; Étoient {omis aux mêmes peines Ou à la même excommunicarion ; felon la fentence des juges, Quelquefois même les biens de l’excommunié étoient confifqués & employés à des ufages facrés, paï une forte d’excommunicarion nommée cherem , dont nous allons dire un mot, Si quelqu'un mouroit dans Pexcommunication, on ne faifoit point de deuil pour lui, & l’on marquoit, par ordre de la juftice, le lieu de fa fépulture, ou d’une groffe pierre ou d'un amas de pierres, comme pour fignifier qu'il avoit mé- rité d’être lapidé. Quelques critiques ont diftingué chez les Juifs trois fortes d’excommunications > eXprimées par ces ffOIs termes, midui, cherem , & Jchammata, Le pre- mier marque l’excommunication mineure » le fecond la majeure, & le troifieme fignifie une excommunicas tion au-deffus de la majeure, à laquelle on veut qu’ait été attachée la peine de mort, & dont perfonne ne pouvoit abfoudre, L'excommunicarion nidui dure 3Q jours, Le cherem eft une efpece de réaperavation de la premiere ; il chaffe l’homme de la fYnapogue, & le prive de tout commerce civil. Enfin le Jchammata fe publie au fon de 400 trompettes, & Ôte toute efpérance de retour à la fynagogue. On croit que le maranatha dont parle S. Paul, eftla même chofe que le Jhammata ; mais Selden prétend que ces trois ter- mes font fouvent fynonymes , & qu’à proprement parler les Hébreux n’ont jamais eu que deux fortes d'excommunications, la mineure & la majeure, Les rabbins tirent la maniere & le droit de leurs excommunications, de la maniere dont Débora & Ba- fac maudiflent Meroz, homme qui, felon ces dot teurs, n’aflifta pas les Ifraélites. Voici ce qu’on er lit dans le Livre des Juges, ch. y. v.23. Maudiffez Me- roz, dit l’ange du Seigneur : maudiffez ceux qui s’af. Jeyeront auprès de lui, parce qu'ils ne font pas venus an Jecours du Seigneur avec les forts. Les rabbins voyent évidemment , à ce qu'ils prétendent > dans ce pañla- ge, 1° les malédi&ions que lon prononce contre les excommuniés ; 2° celles qui tombent fur les perfon- nes qui s’afleyent auprès d’eux plus près qu’à la dif tance de quatre coudées ; 3° Ja déclaration publique du crime de l’excommunié ; Comme on dit dans le texte cité, que Meroz n’eft pas venu à la guerre du Seigneur ; 4° enfin la publication de la fentence À fon de trompe, comme Barac excommunia ; dit-on, Meroz au fon de 400 trompettes : mais toutes ces cérémonies font récentes. Ils croyent encore que le patriarche Hénoch ef l’auteur de la formule de la grande excommunication dont ils fe fervent ençore à-préfent, & qu'elle leux 224 E X C a été tranfmife par une tradition non interrompue depuis Hénoch jufqu’aujourd’hui. Selden, iv, 7. ch, vij. de jure natur. € gent. nous a défenfeurs de Henri IV. roi d'Allemagne fe re- » tranchoiïent à dire, qu’un fouverain ne pouvoit » être excommunié. Mais il étoit facile à Grégoire » VII. de montrerque la puiffance de lier &c de délier > a été donnée aux apôtres généralement , fans dif- # tinétion de perfonne, & comprend les princes com- # me les autres. Le mal eft qu'il ajoûtoit des propo- » fitionsexcefhves. Que l’'Eglife ayant droit de juger # des chofes fpirituelles, elle avoit , à plus forte raï- » fon, droit de juger des temporelles : que le moin- » dre exorcifte eft au-deffus des empereurs, puifqu'il # commande aux démons: que la royauté eft lou- » vrage du démon, fondé fur l’orgueil humain; au + lieu que le facerdoce eft l’ouvrage de Dieu: enfin # que le moindre chrétien vertueux eff plus vérita- # blement roi, qu'un roi criminel; parce que ce prin- » ce neft plus un roi, mais un tyran: maxime que # Nicolas É', avoit avancée avant Grégoire VII. & # qui femble avoir été tirée du livre apocryphe des # conftitutions apoftoliques, où elle fe trouve ex- # preflément. On peut lui donner un bon fens, la # prenant pour une expreflion hyperbolique , com- # me quand on dit, qu'un méchant homme n’eft pas # un homme : mais de telles hyperboles ne doivent + pas être réduites en pratique. C'eft toutefois fur # ces fondemens que Grégoire VII. prétendoit en gé- + néral, que fuivant le bon ordre c’étoit l’Eglife qui # devoit diftribuer les couronnes &c juger les fouve- | # rains, & en particulier il prétendoit que tous les » princes chrétiens étoient vañfaux de l’églife romai- # ne, luidevoient préter ferment de fidélité & payer » tribut. , » Voyons maintenant les conféquences de ces # principes. Il fe trouve un prince indigne &c chargé » de crimes, comme Henri IV. roi d'Allemagne ; car » je ne prétens point le juflifier. Il eft cité à Rome » pour rendre compte de fa conduite ; il ne compa- » roît point. Après plufieurs citations , le pape l’ex- # communie : il méprife la cenfure. Le pape le dé- s clare déchù de la royauté, abfout fes fujets du fer- # ment de fidélité , leur défend de lui obéir, leur per- 5 met ou leur ordonne d’élire un autre roi. Qu’en ar- s) tivéra-t-1l >? Des féditions, des guerres civiles dans #» l'état, des fchifmes dans l'Eglife. Allons plus loin : # Un toi dépofé n’eft plusunroi: donc, s'il continue » à fe porter pour roi, c’eflun tyran, c’eft-à-dire un » ennemi public , à qui tout homme doit courir fus, » Qu'il fe trouve un fanatique, qui ayant Iù dans # Plutarque la vie dé Timoléon ou de Brutus, fe per- Tome VA I E X C 22$ » fuade que rien n’eft plus glorieux que de délivrer » la patrie ; ou qui prenant de travers les exemples » de l'Ecriture, fe croye fufcité comme Aod , ou » comme Judith, pour affranchir Le peuple de Dieu : » voilà la vie de ce prétendu tyran expofée au ca- » price de ce vifionnaire, qui croira faire une action » héroïque, & gagner la couronne du martyre. [l n’y » en a, par malheur , que trop d’exemples dans lhi- » floire des derniers ae & Dieu a permis ces » fuites affreufes des opinions fur lexcommunication, » pour en defabufer au moins par l’expérience. » Revenons donc aux maximes de la fage antis » quité. Un fouverain peut être excommunié com- * me un particulier, je le veux ; mais la prudence ne » permet prefque jamais d’ufer de ce droit. Suppofé » le cas, très-rare, ce feroit à l’évêque auf - biens » qu’au pape, &c les effets n’en feroient que fpiri- » tuels ; c’eft-à-dire qu’il ne feroit plus permis au » prince excommunié de participer aux facremens, » d'entrer dans l’églife , de prier avec les fideles, nà » aux fideles d'exercer avec lui aucun aëte de reli- . # gion: maïs les fujets ne feroient pas moins obligés » de lui obéir en tout ce qui ne feroit point contrai- »te à la loi de Dieu. On n’a jamais prétendu , au » moins dans les fiecles de l’Eglife les plus éclairés, » qu'un particulier excommunié perdit la propriété » de fes biens, ou de fes efclaves, ou la puiffance pae » ternelle fur fes enfans, Jefus-Chrift, en établiffant » fon évangile, n’a rien fait par force, mais tout par » perfuafon , fuivant la remarque de S. Auguftin ; il » a dit que fon royaume n’étoit pas de ce monde, & # n'a pas voulu É donner feulement lautorité d’ar- » bitre entre deux freres ; il a ordonné de rendre à » Céfar ce qui étoit à Céfar, quoique ce Céfar füt » Tibere, non-feulement payen, mais Le plus méchant » de tous les hommes : en un mot il eft venu pour » réformer le monde , en convertiflant les cœurs ; » fans rien changer dans l’ordre extérieur des chofes » humaines. Ses apôtres &c leurs fucceffeurs ont fuivi » le même plan, & ont toûjours prêché aux particu- # liers d'obéir aux magiftrats & aux princes, & aux » efclaves d’être foümis à leurs maîtres bons ou mau- » vais, Chrétiens ou infideles », Plus ces principes font inconteftables, & plus on a fenti, furtout en France, que par rapport à l’ex- communication il falloït fe rapprocher de la difcipli- ne des premiers fiecles, ne permettre d’excommu- nier que pour des crimes graves & bien prouvéss diminuer le nombre des excommunications pronon- cées de plein droit ; réduire à une excommunicarion mineure la peine encoutue par ceux qui communi- quent fans néceflité avec les excommuniés dénon- cés ; &c enfin foûtemir que l’excommunication étant une peine purement fpirituelle, elle ne difpenfe point les fujets des fouverains excommuniés de l’obéiffan- ce düe à leur prince, qui tient fon autorité de Dieu même ; &c c’eft ce qu'ont conftamment reconnu non« feulement les parlemens, mais même le clergé de France, dans les excommunications de Boniface VIII, contre Philippe-le-Bel; de Jules IT. contre Louis XII ; de Sixte V. contre Henri IT ; de Grégoire XIII. con- tre Henri [V ; & dans la fameufe aflemblée du clergé de 1682. En effet, les canoniftes nouveaux qui femblent avoir donné tant d’étendue aux effets de l’excommu nication ; 8&c qui les ont renfermées dans ce vers technique : Os, orare , vale, communio, menfa negatur, _c’eft-à-dire qu’on doit refufer aux excommuniés [a converfation, la priere, le falut , la communion, la table, chofes pour la plüpart purement civiles & temporelles ; ces mêmes canoniftes fe {ont relà- chés de cette févérité par cet autre axiome auffi exe primé en forme de vers à . - 326 EXC Utile, lex, humile, res ignorata, necelfe. Qui fignifie que la défenfe n’a point de lieu entre Île mari & la femme , entre les parens, entre les fu- jets & le prince ; &c qu'on peut communiquer avec un excommunmié fi l’on ignore qu'il le foit, ou qu'il y ait lieu d’efpérer qu’en converfant avec lui, on ourta le convertir; ou enfin quand les devoirs de ke vie civile ou la néceffité l’exigent. C’eft ainfi que François premier communiqua tobjours avec Henti VIIL. pendant plus de dix ans, quoique ce dernier fouverain eût été folennellement excommunie par Clément VIT. | ” De-là le concile de Paris, en 829, confirme une ordonnance de Juftinien qui défend d’excommunier quelqu’un-avant de prouver qu'il eft dans le cas où, felon les canons, on eit en droit de procéder contre fui par excommunication. Les troifieme & quatrieme conciles de Latran & le premier concile de Lyon, en 1245, renouvellent & étendent ces reglemens. Selon le concile de Trente, féff. 23. c. üiy. de reform. lexcommunication ne peut être mile en ufage qu’a- vec beaucoup de circonfpe&tion, lorfque la qualité du délit l’exige, & après deux monitions. Les con- ciles de Bourges en 1584, de Bordeaux en 1583, d'Aix en 1585, de Touloufe en 1590, & de Nar- bonne en 1609, confirment & renouvellent le de- cret du concile de Trente, & ajoûtent qu'il ne faut avoir recours aux cenfures , qu'après avoir tenté inutilement tous les autres moyens. Enfin la cham- bre eccléfiaftique des états de 1614 , défend aux évêques ou à leurs officiaux , d’oétroyer monitions ou excommunications , finon en matiere grave & de conféquence. Mém. du clergé, tom. VII. pag. 990. E fuiv.s107. € [uiv. Le cas de l’excommunication contre le prince pour- toit avoir lieu dans le fait , 8 jamais dans le droit ; car par la Jurifprudence reçüe dans le royaume, &c même par le clergé, les excommunications que les papes décernent contre les rois & les fouverains, ainfi que les bulles qui les prononcent, font rejettées en France comme nulles. Mém. du clergé, com. VI. pag. 998; & 100$. Elles n’auroient par conféquent nul effet, quant au temporel. C’eft la doûrine du clergé de France, aflemblé en 1682, qui dans le premier de fes quatre famèux articles, déclara que les princes &r les rois ne peuvent être, par Le pouvoir des clés, direéte- ment ou indiretement dépofés, ni leurs fujets dé- liés du ferment de fidélité. Doétrine adoptée partout le clergé de France, & par la faculté de Théologie de Paris. Libert, de l’églife gallic. art. 15. «On ne peut excommunier les officiers du roi, dit M. d'Héricourt , lois eccléfraff. de France, part. I, ch. xxij. art, 27, » pour tont ce qui regarde les fonc- » tions de leurs charges. Si Les juges eccléfaftiques # contreviennent à cette loi, on procede contre eux # par faïfie de leur temporel. Le feul moyen qu'ils # puiflent prendre, s’ils fe trouvent léfés par les ju- # ses royaux inférieurs, c’eft de fe pourvoir au par- » lement; fi c’eft Le parlement dont les eccléfiafti- # ques croyent avoir quelque fujet de fe plaindre, » ils doivent s’adreffer au roi; ce qui n’auroiït point » de lieu, fi un juge royal entreprenoit de connoïtre » des chofes de la foi, ou des matieres purement » fpirituelles, dont la connoiffance eft refervée en # France aux tribunaux eccléfiaftiques : car dans ce # cas les juges d’églife font les vengeurs de leur ju- » rifdidtion, & peuvent fe fervir des armes que l’E- # glife leur met entre les mains». | Comme nous ne nous propofons pas de donner ici un traité complet de l'excommunication, nousnous contenterons de rapporter les principes les plus gé- néraux, les plus sûrs, &cles plus conformes aux ufa- fages du royaume fur cette matiere. Lorfque dans une loi ou dans un jugement ecclé- fiafique on prononce la peine de lexconmunicas tion ; la loi ou le jugement doivent s'entendre de’ lexcommunication majeure qui retranche de la com munion des fideles, | L’excommunication eft prononcée ou par la loi qui déclare que quiconque contreviendra à fes difpof- tions, encourra de plein droit la peine de lexcommu- zication , fans qu’il foit befoin qu’elle foit prononcée par le juge; ou elle eft prononcée par une fentence du juge. Les canoniftes appellent la premiere excom- mumication, late fententiæ ; & la feconde, excommu- cation férerde fententiæ. Il faut néanmoins obferver que comme on doit toùjours reftraindre Les lois pé- nales | l’excommunication n’eft point encourue de plein droit, à moins que la loi ou le canon ne s’ex- prime fur ce fujet d’une mamere fi précife, que Pon ne puifle douter que l'intention du légiflateur wait été de foùmettre par le feul fait à l’excommunication ceux qui contreviendront à la loi. _ Les excommunications prononcées par la loi, de xigent point de monitions préalables ou monitoires ; mais les excommunications à prononcer par le juge, en exigent trois, faites dans des intervalles conve- nables. Voyez MONITOIRE. | On peut attaquer une excommunication, où com« me injufte, où comme nulle ; comme injuite, quand elle eft prononcée pour un crime dont on eft inno- cent, ou pour un fujet fi leger, qu'il ne mérite pas une peine fi grave: comme nulle, quand elle a été prononcée par un juge incompétent , pour des afai- res dont il ne devoit pas prendre connoiffance, & quand on a manqué à obferver les formalités pre£ crites par les canons & les ordonnances. Néanmoins Pexcommunication, mème injufte, efttohjours à craime dre ; & dans le for extérieur, l’excommunié doit {e conduire comme fi lexcommunication étoit légitime, Le premier effet de l’excommunication eft que Pex- communié eft féparé du corps de l’'Eglife, &c qu'il n’a plus de part à la communion des fideles, Les fui- tes de cette {éparation font que l’excommunié ne peut ni recevoir ni adminiftrer les facremens, ni mê- merecevoir après fa mortlafépultureeccléfiaftique, étrepourvüde bénéficespendant fa vie où en confé- rer, mi être élü pour les dignités, ni exercerla jurifdic- tion eccléfiaftique. On ne peut même prier pour lux dans les prieres publiques de l’'Eglife: & de-là vient qu’autrefois on retranchoit des dyptiques les noms desexcommuniés. Voy.DyYPTIQUES. Ileft même dé- fendu aux fideles d’avoir aucun commerce avec les excommuniés : mais comme le grand nombre des excommunications encourues par le {eul fait avoient rendu très-difficile l'exécution des canons qui dé- fendent de communiquer avec des excommuniés, Le pape Martin V. fit dans le concile de Conftance une conftitution qui porte, qu'on ne fera obligé d'éviter ceux qui font excommumiés par le droit, ou par une fentence du juge, qu'après que lexcommunicarion aura été publiée, & que l’excommunié aura été dé- noncé nommément. On n’excepte de cette regle qué ceux qui font tombés dans l’excommunication pour avoir frappé un clerc, quand le fait eft fi notoite qu'on ne peut le diffimuler, ni le pallier pat aucune excufe quelque qu’elle puiffe être. La dénonciation des excommuniés nommément , doit fe faire à la mefle paroiffiale pendant plufieurs dimanches con- fécutifs; & les fentences d'excommunication doivent être affichées aux portes des églifes, afin que ceux qui ont encouru cette peine foient connus de tout le monde, Depuis la bulle de Martin V, le concile de Bâle renouvella ce decret , avec cette différence que, fuivant la bulle de Martin V. on n’excepte de la loi, pour la dénonciation des excommuniés, que ceux qui ont frappé notoirement un clerc, qu'on eff. E X C œbligé d'éviter dès qu'on fait qu'ils ont commis ce érime ; au lieu que le concile de. Bäle veut qu'on Évi- te tous ceux qui font excommuniés notoires, quoi- qu'ils nayent pas été publiquement dénoncés. Cet article du concile de Bâle a été inféré dans la prag- matique fans aucune modification, & répété mot pour.mot dans le concordat. Cependant on a toù- jours obfervé en France de n’obliger d'éviter les ex- communiés que quand ils ont êté nommément dé- noncés, même.par rapport à ceux dont Pexcommunt- cation eft connue de tout le monde, comme celle des perfonnes qui font profeflion d’héréfie. Voyez CoNCORDAT & PRAGMATIQUE. Avant que de dénoncer excommumié celui qui a encouru une excommunication /atæ fententiæ , il faut le citer devant le juge eccléfaitique , afin d’e- - xaminer le crime qui a donné lieu à lexcommunica- tion, & d'examiner s'il ny auroït pas quelque moyen légitime de défenfe à propofer. Au refte, ceux qui communiquent avec un EXCOMMUNIÉ dénoncé , {oit pour le fpirituel , foit pour le temporel, n’encourent qu'une excommunication mineure. Dès qu’un excommunié dénoncé entre dans l'E- alife , on doit faire ceffer l'office divin ; en cas que l’'excommunié ne veuille pas fortir , le prêtre doit même abandonner l’autel ; cependant sil avoit com- mencé le canon , il devroit continuer la facrifce jui qu’à la communion inclufivement, après laquelle 1l doit fe retirer à la facriftie pour y réciter le refte des prieres de la mefe : tous les canoniftes convien- nent qu'on doit en ufer ainfi. | Dans la primitive Eglife, la forme d’excommuni- cation étoit fort fimple : les évêques dénonçoient aux fideles les noms des excommunmiés , & leur interdi- {oient tout commerce avec eux. Vers le jx. fiecle, on accompagna la fulmination de l’excommunicatior d’un appareil propre à infpirer la terreur : douze prê- tres tenoient chacun une lampe à la main, qu’ils jet- toient à terre & fouloient aux piés : après que l’évé- que avoit prononcé l’excommunication , on fonnoit une cloche, & l’évêque & les prêtres proféroient des anathèmes & des malédi@ions. Ces cérémonies ne font plus guere en ufage qu’à Rome, où tous les ans le jeudi-faint, dans la publication de Ja bulle 27 cena Domini (voyez BULLE), l’on éteint &c1 on brife un cierge : mais l’excommunication en foi n’eft pas moins terrible 8& n’a pas moins d'effet, foit qu’on obferve ou qu’on omette ces formalités. L’abfolution de l’excommunication étoit ancienne- ment réfervée aux évêques : maintenant 1l y a des excommunications dont les prêtres peuvent relever : ily en a de réfervées aux évêques, d’autres au pape, L’abfolution du moins folennelle de l’excommunica- tion eft auf accompagnée de cérémonies. Lorfqu’on s’eft affüré des difpofitions du pénitent , l’évêque à la porte de l’églife , accompagné de douze prêtres en furplis, fix à fa droite & fix à fa gauche, lu de- mande s’il veut fubir la pénitence ordonnée par les canons, pour les crimes qu'il a commis ; 1l demande pardon, confeffe fa faute , implore la pénitence , & romet de ne plus tomber dans le defordre : enfuite l’évêque affis & couvert de fa mitre récite les fept pfeaumes avec les prêtres , 6 donne de tems en tems des coups de verge ou de baguette à l'excommunié , puis il prononce la formule d’abfolution qui a été déprécative jufqu’au xuy. fiecle, & quidepuis ce tems Âeftimpérative ou conçue en forme de fentence ; enfin il prononce deux oraïfons particuheres, qui tendent à rétablir le pénitent dans la poffeflion des biens fpirituels dont il avoit été privé par l'excommu. zication. À l’ésard des coups de verges fur le péni- tent , le pontifical qui prefcrit cette cérémonie, com- me d'ufage à Rome, avertit qu'elle n’eft pas reçue partout, & ce fait eft juilifié par plufñewrs rituels . Furl EXC 227 des églifes de France, tels que celui de Troyes en 1660 , & celui de Toul en 1700. Lorfqu’un excommunié a donné avant fa mort des fignes finceres de repentir, on peut lui donner après fa mort l’abfolution des cenfures qu'il avoit encou- Tues. Comme un excommumié ne peut efter en juge- ment , on lui accorde une abfolution indicielle ou abjolutio ad cautelam » pour qu'il puifle librement pourfuivre une affaire en juftice : cette exception n’eft pouftant pas reçue en France dans lestribunaux féculiers. C’eft à celui qui a prononcé lexcommunt- cation , Ou à fon fuccefleur, qu'il appartient d’en don- ner l’abfolution. Sur toute cette matiere de l’excor- #urication , On peut confulter le pere Morin, de pæ- rit. Eveillon, rraité des cenfüres ; M, Dupin , de antiq. ecclef. difcipl. differt. de excomm. excellent ouvrage de M. Gibert , intitulé, zfage de L'éolifè gallicane : contenant les cenfures ; les lois ecclefraff, de France, par M. d'Héricourt , premiere part. chap. xxij. & le nou vel abregédes mémoires du clergé, au mot cenfures. (G) Lifez auffi le traité des excommunications par Col- let, Dijon 1689, 7-12. 8 qui a été réimprimé de- puis à Paris. Cette matiere eft digne de l'attention des fouverains , des fages, & des citoyens. On ne peut trop refléchir fur les effets qu'ont produit les foudres de l’excommunication , quand elles ont trou- VÉ dans un état des matieres combuftibles, quand les raïlons politiques les ont mifes en œuvre, & quand la fuperftition des tems les ont fouffertes. Grégoire V. en 998, excommunia le roi Robert, pour avoir époufé fa parente au quatrieme degré ; mariage en {o1 légitime, & des plus néceffaires au bien de l’état. Tous les évêques qui eurent part à ce mariage , al- lerent à Rome faire fatisfaétion an pape : les peu- ples, les courtifans mêmes feféparerent du roi; & les perfonnes qui furent obligées dele fervir, purifierent par le feu, toutes les chofes qu’il avoit touchées. Peu d’années après en 1092, Urbain II. excom- munia Philippe I. petit-fils de Robert, pour avoir quitté {a parente. Ce dernier prononca fa fentence d'excommunication dans les propres états du roi, à Clermont en Auvergne, où fa fainteté venoit cher- cher un afyle ; dans ce même concile où elle prêcha la croifade , & où pour la premiere fois le nom de pape fut donné au chef de l’Eglife , à l’exclufion des évêques qui le prenoient auparavant. T'ant d’autres monumens hiftoriques , que fourniffent les fiecles pañlés fur les excommunications | & les interdits des royaumes, ne feroient cependant qu'une connoïffan- ce bien ftérile, fi on n’en chargeoït que fa mémoire. Mais il faut envifager de pareils faits d’un œil phi- lofophique , comme des principes qui doivent nous éclairer , & pour me fervir des termes de M. d’A- lembert , comme des recueils d'expériences morales faites fur le genre humain. C’eft de ce côté là que l’hiftoire devient une fcience utile & précieufe, Foy. HISTOIRE. Addition de M. le Chevalier DE Jau- COURT. EXCOMPTE ox ESCOMPTE, f. m.pecunie rermif. Jio , (Jurifp.) eft la remife que fait le porteur d’une lettre ou billet de change d’une partie de la dette, lorfqu'il en demande le payement avant l'échéance, ou que la dette eft douteufe & difficile à exiger. L’excompte differe du change en ce que celui-ci fe paye d'avance , au lieu que Pefcompte fe paye à mefure que l’on s’acquitte : l’e/compre eft fouvent un détour que l’on prend pour colorer l’ufure. On appelle auf excompte dans le Commerce, lorf- qu'un marchand prend de la marchandile à crédit pour trois, fix, neuf, douze ou quinze mois , à la charge d’en faire l’excompte à chaque payement, c’eft- à-dire de rabattre fur le billet deux & demi pourcent, qui tiennent lieu d'intérêt , à-pr ee sue PAYEs OA 228 E X € Voyez Ve parfait négociant de Savary , Barrême , & ci-après EXCOMPTER , & ci-devant ÉSCOMPTE. (A) EXCOMTER où ESCOMPTER , verb. a. (/z- riprud.) c’eft faire l’efcompte ou diminution d’une fomme iur une lettre ou billet de change. On appelle auffi excompter | vendre de ces fortes d'effets {ur la place, au-deffous de leur valeur, pour acquitter quelque dette. Voyez ci-deffus EXCOMPTE. EXCORIATION, f. f. (Medecine.) dépouillement de l’épiderme ou du repli de la peau, tant des parties externes que des parties internes , par quelque cau- fe que ce 1oit. | ; Comme toutes les parties douées de monvément & de fentiment , font revêtues onu de l’épiderme, ou d’une membrane fine & déliée qui les tapifle, ou de mucofité qui leur fert de liniment; cette épi- derme, cette membrane fine, cette mucofité, peu- vent être emportées par des accidens , des frote- mens externes , ou par des remedes internes corro- fifs : en un mot, l'épiderme s’excoriera par toute force capable de produire cette abrafion, comme par frotement violent, par des matieres acres , par le croupiflement des humeurs, la colliquation, la mor- tification, la brûlure. La partie dépouillée reffent alors de la douleur, de la chaleur, de l’ardeur, de la cuiffon, de linflam- mation ; elle fe deffeche , fe retire, répand une tu- meur tenue rouveûtre , fe revêt enfuite d’une croû- te, jette du pus, s'ulcere, & forme une efcharre. On préviendra le mal en oignant la partie expo- fée à un frotement violent, de quelque corps gras, pour la garantir. On guérit le mal par la fuppreffion des caufes de lexcoriation, en couvrant la partie ex- coriée d’un topique huileux, ondueux, balfamique, ami des nerfs ; en l’étuvant avec un liquide un peu aftringent & antiputride ; en évitant tout attouche- ment , & l’expoñtion à l’air nud : dans les excoria- tions internes , 1l faut injeéter ou prendre les reme- des les plus adouciffans. Voilà qui fufit pour les excoriations en général; mais il furvienr fréquemment aux enfans en parti- culier , des rougeurs & des excoriarions en différen- tes parties du corps, fur-tout derriere les oreilles, au cou &c aux cuifles. Il eft bon d'indiquer ici le trai- tement de ces fortes d’excoriations , qui font très-com- munes. Celles des cuiffes proviennent ordinairement de lPacrimonie de Purine , qui à force de pañfer fur l’é- piderme l’enleve , & infenfblement laïffe la peau délicate de ces jeunes créatures à découvert, On guérira ces excoriations, en baffinant doucement deux Ou trois fois par jour les parties excoriées avec de l’eau tiede , qui diffoudra & emportera avec elle les fels acrimonieux qui en font caufe.On peut auff dé- layer dans l’eau de la cérufe réduite en poudre fine, de la craie ou de l’ardoiïfe calcinée, & l'appliquer fur Ja partie excoriée après la lotion. Mais f l’inflammation & l’excoriation étoient con- fidérables , il feroit à-propos d’ufer enfomentation, deux ou trois fois par jour , de la folution de tro- chifques de blanc de rhafis dans de Peau deplantain; lon aura foin en même tems de ne rien épargner pour que les parties foient feches, & pour qu’elles ne fe frotent point les unes contre les autres ; ce que l’on obtiendra en employant un peu d’onguent def- ficatif rouge ou de diapompholyx, & en interpofant entre les partiès des morceaux de vieux linge fin, chaud & fec. C’eft à la nourrice à avoir ce foin & à y veiller avec attenmon, L'enfant ne fait que crier & pleurer , celui du riche comme celui du pauvre, celui du prince, comme celui du berger. Arricle de M. le Chevalier DE JAU COURT. EXCORTICATION , f. f, (Pharmacie, ) eft ac- tion de dépouiller quelque chofe de fa peat ou écor- ce ; on lappelle aufli décortication. Voyez EcorcE 6 DÉCORTICATION. | EXCREMENT , f. m. (Medecine. excrementume: ce terme eft employé dans un fens plus où moins étendu : il fignifie, en général, toute matiere foit folide, foit fluide , qui eft évacuée du cotps des ani- maux, parce qu'elle eft furabondante, ou mutile , où nuifible. Le fang menftruel eft une matiere excrémentitielle rejetrée des vaifleaux de la matrice, oùil étoit ramat fé en trop grande quantité. Les matieres fécaies font pouflées hors du corps où elles ne peuvent être d’au- cune utilité pour l’économie animale, étant dépouil- lées de toutes les parties qui pourroient contribuer à la formation du chyle. L’urine, la matiere de latranf. piration, font aufñ féparées de la mafle des humeurs, où elles ne pourroient que porter la corruption, qu” elles commencent à contraéter elles-mêmes. Prefque toutes les humeurs excrémentitielles font formées des recrémens, qui ont degénéré à force de fervir aux différens ufages du corps. Voyez RECRÉMENT, SE- CRÉTION. . Le mot excrément, employé feul, eft plus particu- liérement deftiné à défigner la partie groffiere, le marc des alimens & des fucs digeftifs , dont l’'évacua- tion fe fait par le fondement : on y comprend auf vulgairement l'urine : ce font les excrémens pius abondans du corps humain , fous forme {enfble. Voyez DÉJECTION, TRANSPIRATION, URINE.(d) EXCRÉMENS, (Chim.) Voyez FÉCALE (Mariere). EXCRÉMENS, (Chimie & Alchimie.) Les Alchi- miftes n’ont pas laïflé que de travailler fur les ex- crémens humains ; on a prétendu en tirer un fel au- quel on a attribué de très-grandes vertus : il faut, dit-on, pour cela prendre des excremens après qu'ils ont été féchés au foleil de l’été. On fait brûler cette matiere jufqu'à ce qu'elle devienne noire ; on en rém- plit des creufets ou pots, & on la réduit en cendres au feu le plus violent, & de ces cendres on tire un {el fixe, Ou bien, on prend des excrémens humains defféchés, on les arrofe avec de lurine épaiffe par l’évaporation; on laïfle putréfier ce mélange, enfui- te on le met en diftllation ; on mêle enfemble les différens produits qu’on a obtenus, & on réitere plu- fieurs fois le même procédé. Ce travail eft très-dé- goûtant & d’une parfaite inutilité, Foy. Teichmeye- ti 2nfhr, chimic, p. 172. & l’aurea catera Homeri. EXCREMENTEUX, EXCREMENTIEL, EX« CREMENTITIEL , adj. font des épithetes fynony- mes, que l’on donne en Medecine à toutes les ma- tieres qui font de la nature des excrémens en géné. ral. Voyez EXCRÉMENT. (4) EXCRETEUR & EXCRETOIRE , € dit des conduits par lefquels paflent les humeurs qui font féparées du fang. Voyez HumEUR & GLANDE. EXCRETION , f. ferme de Medecine, qui fert à exprimer en général l’aétion par laquelle les diffé rentes humeurs, qui ont été féparées du fang, {ont portées hors des organes fecrétoires, Voyez SEcRÉ- TION, EXCRÉTOIRE, GLANDE. Le mot excrétion , eft auffi employé pout fignifer particulierement l’expulfon des matieres fécales , des urines, des fueurs. On donne aufli quelquefois le nom d’excrérion à la matiere même évacuée, Voyez EXCRÉMENT. (d} EXCROISSANCE, f. f. ( Médecine.) fe dit en ge- néral de toute tumeur contre nature, qui fe forme par le méchanifme de l’accroifflement fur la furface des parties du corps; ainf les verrues font des exeroif Jances, comme les fics, les polypes, les farcomes, Éc. Voyez VERRUEWFIC , POLYPE, SARCOME. (d) EXCURSION, f. f, rerme d’Aftronomie. Les cer cles d'excurfion font des cercles paralleles à Péclips tique, & placés à une telle diftance de ce grand cercle , qu'ils renferment ou terminent l’'efpace des plus grandes excurfions on deviations des planetes par rapport à l’écliptique. Ces excurfions doivent être fixées à environ 7 degrés, parce que les orbites des planetés font fort peu inclinées à l’écliptique, de forte que la zone qui renferme toutes ces orbites n'a qu'environ fept deprés de largeur d’un côté, & de l’autre. Voyez INCLINAISON, CERCLE. Les poïnts où une planete eft dans fa plus grande excurfion , {e nomment Litres. Voye LIMITE. (O0) EXEUSATION, f. f (Jurifprudence.) {e dit des raïfons & moyens que quelqu'un allegue pour être déchargé d’une tutelle, curatelle, ou autre charge publique, Voyez TUTELLE, CURATELLE, Lorfqiw'on s’excuie feulement de comparoître en perfonne en juftice, cètte excufe s’appelle une exoi- 7e. Voyez EXOINE. (4 * EXCUSE, £. f. (Grémmaire.) râifon ou prétexte qu'on apporte à celui qu’on a oflenié, pour affoiblir à fes yeux la faute qu’on a commife. EXE AT, {.m. (Jurifp.) terme latin ufité comme françois, en matiere eccléfaftique , pour exprimer la permiflion qu'un évêque donne à un prêtre de fortir du diocefe où il a été ordonné. Le concile de Nicée, can. 16. 6 17: celui d’Antioche, can. 3. & celui de Chalcédoïine défendent aux clercs de quitter l'églife où ils ont été ordonnés, fans la permifion de l’évêque ; les évêques des autres diocèfes ne doivent point leur permettre de célébrer la mefle ni de faire aucune autre fondion eccléfiaftique s’ils ne font ap- paroir de leur exeat, autrement ils doivent être ren- voyés à leur propre évêque. S'ils s’obffinent à ne point fe ranger à ce devoir, ils encounrent l’excom- munication. Le concile de Verneuil en 844, renou- velle le decret du concile de Chalcédoine, Le di- mifioire eft différent de l’exear, le premier étant une permifhon d'aller recevoir la tonfure ou quelqu’or- dre eccléfiaftique, dans un autre diocèfe que celui où on eft né. Les fupérieurs réguliers donnent auff à leurs religieux une efpece d’exear, pour aller d’un couvent dans un aütre; maïs dans l’ufage cela s’ap- pelle une obédience, Voyez DiMISSOIRE, OBÉDIEN- CE, RELIGIEUX. (4) EXEBENUM, (Æf. rar.) pierre d’un blanc écla- tant, & dont Pline dit que les Orfévres {e fervoient pour polir l'or. H5f. rar. Lib. XX XVII. cap, x. *EXÉCRATION, £f. (Gramm.) c’eft l'expref- fion de l’averfion la plus forte que l’ame foit capable de concevoir. Il fe prend auff pour ces fortes de {er- mens , par lefquels on appelle fur les autres ou fur 101 les vengeances du ciel les plus terribles. *EXECUTER, v. at. ( Gramm.) on réduire en acte. Il fe dit au phyfique 8 au moral. On exécute un ouvrage; on exécute une #éfolution , un projet, &c, EXÉCUTEUR DE LA HAUTE JUSTICE, (Jurifpr.) eft celui qui exécute les jugemens qui con- demnent les criminels à mort ou à quelque peine a£ flétive. On lappelle exécuteur de la haute Juflice, parce que les hauts-ufliciers, ce qui comprend auff les juges royaux, font les feuls qui ayent ce que l’on appelle Jus gladii, droit de mettre à mort. | On l’appelle auffi d’un nom plus doux, maitre des hautes œuvres , à caufe que la plüpart des exécutions à MOft, OÙ autres peines afiiüves, fe font fur un échafaud où au haut d'une potence , échelle ou pi- Lori. Mais 1e nom qu’on lui donne vuleairement ef ce- Îui de bourreau, Quelques-uns tiennent que ce mot eft celtique ou ancien gaulois ; &, eneffet, les bas Bretons, chez lefquels ce langage s’eft le mieux con- fervé fans aucun mélange , fe fervent de ce terme, & dans le même fens que nous lui donnons. D’autres EXE 229 le font venir de l'italien shirro ou birro > Qui fignifie un archer ou farellire du prevér, dont la fonétion eft réputée infâme. On en donne encore d’autres éty- mologies, mais qui n’ont rien de vraiflemblable, [n’y avoit point de bourreau ou exécuter en titre chez les Ifraélites ; Dieu avoit commandé à ce peu- ple que les fentences de mort fuffent exécutées par tout le peuple, ou par les accufateurs du condamné, Ou par les parens de l’homicide » la condamnation : étoit pour homicide, ou par d’autres perfonnes fem- blables , felon les circonftances. Le prince donnoit fouvent à ceux qui étoient auprés de lui, & fur-tout aux Jeunes gens, la commiffion d’aller mettre quel- qu'un à mort, on en trouve nombre d'exemples dans l'Ecriture ; & loin qu’il y eût aucune infamie atta= chée à ces exécutions, chacun fe faifoit un mérite dy avoir part. Îl y avoit auffi chez les Juifs des gens appellés sor- tores , qui étoient établis pour faire fubir aux crimi. nels les tortures ou peines auxquelles 1ls étoient con- damnés : quelquefois ils fe fervoient de certains fa- tellites de leurs préfets, nommés Jpiculatores, parce qu'ils étoient armés d’une efpece de javelot ou pi- que ; mais il femble que l’on ne fe fervoit de ceux-ci que lor{qu'il s’agifloit de mettre À mort fur le champ, comme de couper la tête, & non pas lorfqu’il s’agit foit de fonetter, ou faire {ouffrir autrement les cri- minels : c’eft de-là que l’exécuceur de La haute juflice eft nommé parmi nous en latin sorsor, Jpiculator : on l'appelle aufli carrifex. Chez les Grecs cet office n’étoit point: méprifé ; puriqu'Ariftote, Zv.. PT. de fes Politiques, chap. der rer, le met au nombre des magiftrats, Îl.dit même que par rapport à fa néceflité, on doit le temr,pour un des principaux offices. | Les magiftrats romains avoient des, miniftres ou fatellites appellés Zéores, liéteurs ; Qui furent infti- tués par Romulus , oumême, felon d'autres, par Ja. nus; ils marchoient devant les magifirats, portant des haches enveloppées dans des faifceaux de verges ou baguettes. Les confuls en avoient douze ; les pro- comuls, préteurs & autres magiitrats en avoient feu- lement fix ; ils faifoient tout-A-la-fois l'office de fer gent & de bourreau. Ils furent nommés léfeurs, parce qu'ils iotent les piés & les mains des criminels avant. l'exécution ; ils délioient leurs faifceaux de verges, foit pour foietter les criminels, foit pour trancher la tête. On fe fervoit aufi quelquefois d’autres perfonnes pour les exécutions; car Cicéron, dans la feptiéme- de fes Verrines, parle du portier de la prifon, qui failoit l'office de bourreau pour exécuter les juge mens du prèteut: aderat, dit-il ) Jañitor carceris, cars nifex prætoris, mors, terrorque fociorum ; G: civium lie. cor. On fe fervoit même quelquefois du miniftere des: {oldats pour l'exécution des criminels > non-feule- ment à l’armée , mais dans la ville même ; fans que cela les deshonorât en aucune maniere. Adrien Beyer, qui étoit penfonnaire de Roter- dam, fait voir dans un de fes Ouvrages, dont l’ex- trait eft au Journal des S'avans de 170 3 P: 88, qu'an- ciennement les juges exécutoient fouvent eux-mé- mes les condamnés ; ilen rapporte plufeurs exem- ples tirés de lhiftoire facrée & profane ; qu’en Ef- pagne, en France, Italie & Allemagne, lorfque plu- fleurs étoient condamnés au fupplice pour un même crime , on donnoit la vie à celui qui vouloit bien exécuter les autres ; qu'on voit encore au milieu de. la ville de Gand deux ftatues d’airain d’un pere & d'un fils convaincus d’un même crime, où le fils fer. Vit d’exécureur à {on pere ; qu’en Allemagne ; avant que cette fon@ion eût été érigée en titre d’ofice , le plus jeune de la communauté ou du Corps de ville en étoif chargé ; qu’en Françonie C’étoit le nouveau Fe 7 230 FE À marié ; qu'à Reutlingue, ville impériale de Suabe, c’étoit le confeiller dernier reçû ; & à Stedien, petite ville de Thuringe, celui dés habitans qui étoit le der- nier habitué dans le lieu. On dit que Witolde , prince de Lithuanie , intro- duifit chez cette nation que Le criminel condamné à mott'eût à {e défaire lui-même de fa main, trouvant étrange qu'un tiers ; innocent de la faute, fût em- ployé & chargé d’un homicide ; mais fuivant lopi- nion.commune , On ne regarde point comme un ho- micide, où du moins comme un crime , l'exécution à mort qui eft faite par le bourreau, vù qu'il ne fait qu'exécutér les ordres de la juftice, & remplir un mi- niftere néceflaire. Puffendorf, en fon traité du droit de la nature & des gens, met le bourreau au nombre de ceux que les lois de quelques pays excluent de la compagnie des hon- nêtes gens, ou qui ailleurs en font exclus par la coù- tume &c l'opinion commune; &t Beyer, que nous avons déjà cité , dit qu’en Allemagne la fonétion de bourreau eft communément jointe au métier d’écor- cheur ; ce qui annonce qu’on la regarde comme quel- que chofe de très-bas. | Il y a lieu de croire que ce qu'il dit ne doit s’ap- pliquer qu’à ceux qui font les exécutions dans les petites villes , & qui ne font apparemment que des valets ou commis des exécureurs en titre établis dans les grandes villes ; car il eft notoire qu’en Allemagne ces fortes d'officiers ne font point réputés infèmes , ainfi que plufieurs auteurs Pont obfervé : quelques- uns prétendent même qu’en certains endroits d’Alle- magne le bourreau acquiert le titre & les priviléges de nobleffe, quand il a coupé un certain nombre de têtes, porté par la coûtume du pays. Quoiqu'il en foit de ce dernier ufage , il eft cer- tain que le préjugé où l’on eft en France & ailleurs à cet égard , eft bien éloigné de la maniere dont le bourreau eft traité en Allemagne. Cette différence eft fur-tout fenfible à Strasbourg , où il y a deux exe- cureurs, lun pour la juftice du pays, Pautre pour la juftice du roi: le premier, qui eft allemand, y eft fort confidéré : l’autre au contraire , qui eftfrançois , n’y eft pas mieux accueilli que dans les autres villes de France. Les gens de ce métier font auffi en poffeffon de re- mettre les os difloqués ou rompus, quoique le corps des Chirurgiens fe foit fouvent plaint de cette en- treprife ; il eft intervenu différentes fentences qui ont laifé le choix à ceux qui ont des membres diflo- qués ou démis , de fe mettre entre les mains des Chi- rurgiens , ou en celles du bourreau pour les fraures ou luxations feulement , à l’exclufion de toutes au- tres opérations de Chirurgie : il en eft de même en France dans la plüpart des provinces. Beyer dit encore que quelques auteurs ont mis au nombre des droits régaliens, celui d'accorder des provifons de l'office d’exécureur. Il ajoûte que ceux qui ont droit de juitice, n’ont pas tous droit d’avoir un exécuteur, mais feulement ceux qui ont #er472 1m- perium , qu'on appelle droit de glaiveou juflice de fang. En France, le roi eft Le feul qui ait des exécureurs de jufice , lefquels font la plüpart en titre d'office ou at commifliondu roi. Ces offices, dit Loyfeau, font les feuls auxquels il n’y a aucun honneur attaché ; ce qu’il attribue à ce que cet office, quoique très-né- ceflaire, eft contre nature. Cette fonétion eft même regardée comme infâme ; c’eft pourquoi quand les lettres du bourreau {ont fcellées , on les jette fous la table. Les feigneurs qui ont haute-juftice, n’ont cepen- dant point de bourreau, foit parce qu'ils ne peuvent créer de nouveaux offices, foit à caufe de la difcul- té qu'il y a de trouver des gens pour remplir cette fonction. Lorfqu’il y a quelqu'exécution à faire dans une juitice feigneuriale, ou même dans une juftice royale pour laquelle 1l n'ya pas d’exécuteur, on fait venir celui de la ville la plus voifine. Barthole fur la loi 2. f. de publicis judiciis, dit que fi l’on manque de bourreau, le juge peut abfoudre un criminel, à condition de faire cette fonétion , foit pour un tems, {oït pendant toute fa vie ; & dans ce dernier cas celui qui eft condamné à faire cette fonc- tion, eft proprement /ervus pœne : il y en a un arrêt du parlement de Bordeaux, du 13 Avril 1674. Voyez la Peyrere, less. E, Si le juge veut contraindre quelqu’autre perfonne à remplir cette fonétion , il ne le peut que difficile- ment. Gregorius Tolofanus dit, vix porefl. Paris de Puteo, en fon traité de fyrdico , au mot ranivolrus, dit que fi on prend pour cela un mendiant ou autré perfonne vile, il faut lui payer cinq écus pour fon falaire, quinque aureos. Ii s’éleva en l’échiquier tenu à Roïen à la S, Mi- chel 1312, une difficulté par rapport à ce qu'il ny avoit point d’exécuseur, ni perfonne qui en voulüt faire les fonétions. Pierre de Hangeft, qui pour lors étoit bailli de Rotien, prétendit que cela regardoit les fergens de la vicomté de l’eau ; mais de leur part ils foütinrent ayec fermeté qu’on ne pouvoit exiger d'eux une pareille fervitude ; que leurs prédéceffeurs n'en avoient Jamais été tenus, & qu'ils ne s’y aflu- jettiroient point ; qu'ils étoient fergens du roi, & tenoient leurs fceaux de Sa Majefté ; que par leurs lettres il n’étoit point fait mention de pareille chofe. Ce débat fut porté à l’échiquier, où préfidoit l’évé- que d'Auxerre , où il fut décidé qu'ils n’étoient pas tenus de cette fonétion ; mais que dans le cas où il ne fe trouveroit point d’exécureur, ils feroient obligés | d’en aller chercher un, quand bien même ils iroient au loin , & que ce feroit aux dépens du roi, à l’effet de. quoi le receveur du domaine de la vicomté de Rouen {eroit tenu de leur mettre entre les mains les deniers néceffaires. Cependant un demes confreres, parfaitement inf truit des ufages du parlement de Rouen, où il a fait long-tems la profeffion d'avocat , m’a affüré qu’on tient pour certain dans ce parlement , que le dernier des huiffiers ou fersens du premier juge peut être contraint , lorfqu'il n’y a point de bourreau, d’en faire les fonétions. Comme ces cas arrivent rare- ment, on ne trouve pas afément des autorités pour les appuyer. à En patcourant les comptes & ordinaires de la pre- vôté de Paris, rapportés par Sauval, on trouve que c’étoient communément des fergens à verge du châ- telet qui faifoient office de tourmenteur juré du roi au châtelet de Paris. Ce mot rourmenteur venoiït du latin sortor, que l’on traduit fouvent par le terme de bourreau. Ces tourmenteurs jurés faïfoient en effet des fonétions qui avoient beaucoup de rapport avec celles du bourreau. C’étoient eux , par exemple, qui faifoient la dépenfe & les préparatifsnéceffaires pour exécution de ceux qui étoient condamnés au feu; ils fournifloient aufli les demi-lames ferrées où on expoloit les têtes coupées fur l’échafaud : enfin on voit qu'ils fournifloient un fac pour mettre le corps de ceux qui avoient été exécutés à mort, comme on voit par les comptes de 1439, 1441 &c 1449. Cependant il eft conftant que cet office de tour- menteur juré n’étoit point le même que celuide bour- reau : ce tourmenteur étoit Le mème officier que lon appelle préfentement queffonnaire. Il eft vrai que dans les juftices où il n’y a point de queftionnaire en titre, on fait fouvent donner la queftion par le bourreau. On fait néanmoins une dif férence entre la queftion préparatoire & la queftion définitive ; la premiere ne doit pas être donnée par la main du bourreau, afin de ne pas imprimerune E AE hote d'infamie à celhi qui n’eft pas encore condamné à mort: c’eft apparemment l’efprit de l'arrêt du 8 Mars 1624, rapporté par Bañlet , come I. liv, VI, vie, x. ch. ij. qui jugea que la queftion préparatoire ne devoit pas Etre donnée par le bourreau , mais par un fergent ou valet du concierge : il paroît par-là qwil n’y avoit pas de queftionnaire en titre. Pour revenir au châtelet, les comptes dont on a déjà parlé juftifient que les tourmenteurs jurés n’é. toient pas les mêmes que le bourreau ; celui-ci eft nommé 7raêtre de la haute juffice du roi, en quelques endroits exécuteur de la hante Juffice & bourreau. Aünfi dans un compte du domaine de 1417, on couche en dépenfe 45 f. parifis payés à Etienne le Bré, maître de la haute juftice du-roi notre fire, tant pour avoir fait Les frais néceffaires pour faire bouillir trois faux monnoyeurs , que pour avoir Ôté plufieurs chaînes étant anx poutres de la juftice de Paris, & les avoir apportées’ez Jon hérel : c’étoit le langage du tems. Dans un autre compte de 1425, on porte 20 fols payés à Jean Tiphaine, exécureur de la haute juftice, pour avoir dépendu & enterré des criminels qui étoient au gibet. Le compte de 1446 fait mention que l’on paya à Jean Dumoulin, fersent à verge, qui étoit auffi tour- menteur juré, une fomme pour acheter à fes dépens trois chaînes de fer pour attacher contre un arbre près du Bourg-la-Reme, & là pendre & étrangler trois larrons condamnés à mort. On croiroit jufque- 1à que celui qui fit tous ces préparatifs , étoit le bour- eau ; mais la fuite de cet article fait connoître le contraire, Car On ajoûte : C pour une échelle neuve oi Zefdirs trois larrons furent montés par le bourreau qui les executa G mit à mort, &c. En effet, dans les comptes des années fuivantes il eft parlé plufieursfois de lexécureur de la haure juffice, lequel, dans un compte de 1472, eft nommé mañtre des hautes-œuvres; & l’on voit que le fils avoit fuc- cédé à fon pere dans cet emploi: & en remontant au compte de 1465, on voit qu'il avoit été fait une exé- cution à Corbeil. On trouve encore dans le compte de 1478, que on paya à Pierre Philippe, maître des bafles - œu- vres , une fomme pour avoir abattu l’échafaud du pilori , avoir rabattu les tuyaux où le fang coule audit échafaud , blanchi iceux & autres chofes fem- blables, qui ont aflez de rapport aux fon@ions de Vexécuteur de la haute juflice: ce qui pourroit d’a- bord faire croire que l’on a mis, par erreur, af. tre des bafles- œuvres pour mañtre) des hautes- œuvres; mais tout bien examiné, il paroît que l’on a en effet entendu parler du maïtre des bañles- œuvres que Yon chargeoïit de ces réparations, fans doute comme étant des ouvrages vils que perfonne ne vouloit fai- re, à caufe du rapport qu} cela avoit aux fondtions du bourreau. Du tems de faint Louis il y avoit un bourreau fé- melle pourles femmes : c’eft cequel’on voit dans une ordonnance de ce prince contre les blafphémateurs, de l’année 1264, portant que celui qui aura mesfait ou mefdit, fera battu par lajuftice du lieu tout de ver- ges ez appert ; C’eft à fçavoir L hommes par hommes, € La femme par feules femmes, fans préfence d'hommes. Traité de la Pol, tome I. p. 546. Un des droits de lexécureur de la haute juflice, eft avoir la dépouille du patient, ce qui ne s’eft pour- tant pas toüjours obfervé par-tont de la même ma- mere; caren quelques endroits les fergens & archers avotent cette dépouille, commeil paroît par une or- donnance du mois de Janvier 1 304 , rendue par le juge êc courier de la juftice féculiere de Lyon, de l'ordre de l'archevêque de cette ville , qui défend aux bedeaux où archers de dépouiller ceux qu'ils EX E 23 iettoient en prifon, fauf au cas qu'ils fuffent con- damnés à mort, à ces archers d’avoir les habits de CEUX qui auroient été exécutés. L’exécureur de La haute Juflice avoit autréfois droit de prife, comine le roi & les feigneurs , c’eft-ä-dire de prendre chez les uns & les autres, dans Les lieux où 1l fe trouvoit, les provifions qui lui étoient né ceflaires, en payant néanmoins dans le tems du cré- dit qui avoit lieu pour ces fortes de prifes. Les let- tres de Charles VI, du $ Mars 1308, qui exemptént les habitans de Chailly & de Lay près Paris ‘du droit de prife, défendent à tous les maîtres de l'hôtel du roi, à tous fes fourriers, chevaucheurs (écuyets), à l’exécureur de notre haute Juflice, Ga tous nos autres officiers, 8 à ceux de la reine, aux princes du fang , êt autres qui avoient accoûtumé d’ufer de prifes, d’en faire aucunes fur lefdits habitans. L’exécurenr fe trouve là, comme on voit, en bonne compagnie. Il eft encore d’ufage en quelques endroits, que l’exécureur perçoïve gratuitément certains droits dans les marchés, Un recueil d'ordonnances & ftyle du châtelet de Paris, imprimé en 1530, gothique, fait mention'que le bourreau avoit à Paris des droits fur les fruits 4 verjus, raifins , noix, noïfèttes., foin, œufs & laine : fur les marchandsforains pendant deux mois;undroit fur le paffage du Petit-pont , fur les chafle-marées , fur chaque malade de $. Ladre, en la banlieue ; fur les gateaux de la veille de l'Epiphanie ; cinq fols de chaque pilorié ; fur les vendeurs de creffon, fur les pourceaux , marées, harengs : que fur les pourcéaux qui couroient dans Paris , 1l prenoit la tête où cinq {ols, excepté fur ceux de S. Antoine. Il prenoit aufli des droits fur les balais, fur le poiffon d’eau douce, chenevis, fenevé ; &c fur les jufticiés tout ce qui eft au-deflous de la ceinture, de quelque prix qu'il fût. Préfentement la dépouille entiere du patient lui ap= partient. Sauval en fes antiquités de Paris, tome II. p. 437. titre des redevances fingulieres diés par Les eccléfiafii- ques, dit que les religieux de S. Martin doivent tous les ans à l’exécuteur de la haute juffice cinq pains & cinq bouteillés de vin, pour les exécutions qu’il fait fur leurs terres ; mais que Le bruit qui court que ce jour-là ils le faifoient dîner avec eux dans le refec- toire, fur une petite table que l’on y voit, eft un faux bruit, Que les religieux de fainte Genevieve lui payent encore cinq fols tous les ans le jour de leur fête, à caufe qu'il ne prend point le droit de havée , qui eft une poignée de chaque denrée vendue fur leurs terres. Que l'abbé de Saint-Germain-des-Prés lui donnoit autrefois, le jour de S. Vincent patron de fon ab- baye, une tête de pourceau, & le faifoit marcher le premier à la procefion, Que du tems que les religieux du Petit-Saint-Ans toine nourriffoient dans leur porcherie près l’éslifé des pourceaux qui éouroient les rues, & que ceux qui en noutrifloient à Paris n’ofoient les faire fortir, tout autant que le bourreau en rencontroit, il les menoïit à l'hôtel- Dieu, & la tête étoit pour lui : ou bien on li donnoït cinq fous ; que préfentement il a encore quelques droits {ur les denrées étalées aux halles & ailleurs les jours-de marché. Ces droits, dont parle Sauval, font ce que l’on appellé communément havage, & ailleurs havée, havagium ; havadium , vieux mot qui fignifie le droit que l’on à de prendre fur les grains dans les marchés autant qu’on en peut prendre avec la main. Lebour- reau de Paris avoit un droit de havage dans les marchés , & à caufe de l’infamie de fon métier, on ne lui laifloit prendre qu'avec une cuillere de fer: blanc ; qui fervoit de mefure, Ses prépoés qui pers 232 E X € cevoientce droit dans les marchés, marquoienñtavec la craie {ur le bras ceux & celles qui avoient payé ce droit, afin de les reconnoître: mais comme la perception de ce droit occafonnoiït dans les mar- chés de Paris beaucoup de rifque entre les prépo- {és du bourreau 87 ceux qui ne vouloient pas payer ou fe laïfler marquer, il a été fupprimé pour Paris depuis quelques années. | L'exécuteur de la haute - juffice de Pontoife avoit aufli le même droit; maïs par accommodement 1l appartient préfentement à l’hôpital-général. Il ya néanmoins encore plufieurs endroïts dans {e royaume où le bourreau perçoit ce droit ; & dans les villes mêmes où il n’y a pas de bourreau, lorfque celui d’une ville voïfine vient y faire quelque exécu- tion, ce qui eftordinairement un jour de marché, 1l per fur les grains & autres denrées fon droit de avage ou havée. ; L’exécureur ne fe faifit de la perfonne du condamné qu'après avoir oùi le prononcé du jugement de la condamnation. Il n’eft pas permis de le troubler dans fes fonc- tions, ni au peuple de l’infulter ; mais lorfqu’il man- que à fon devoir, on le punit felon la juftice. Sous Charles VII. en 1445, lors de la ligue des ‘Armagnacs pour la maïfon d'Orléans contre les Bour- guignons, le bourreau étoit chef d’une troupe de bri- gands ; il vint offrir fes fervices au duc de Bourgo- gne , &r eut l’infolence de lui toucher la main. M.Du- clos, en fon hiffoire de Louis XT, fait à cette occafion une réflexion, qui eft que le crime rend prefque égaux ceux qu'il aflocie. Lorfque les fureurs de la ligue furent calmées , &c que les affaires eurent repris leur cours ordinaire, le bourreau fut condamné à mort pour avoir pendu le célebre préfident Briflon, par ordre des ligueurs, fans forme de procès. Il n’eft pas permis au bourreau de demeurer dans l'enceinte de la ville, à moins que. ce ne foit dans la maifon du pilori, où fon logement lui-eft donné par fes provifons ; comme il fut jugé par un arrêt du par- Jement du 31 Août 1709. Cayron; en fon ftyle du parlement de Touloufé, L IT, tir, jv. dit que l’exécuteur de la haute-juftice doit mettre la main à tout ce qui dépend des excès qui font capitalement puniflables ; comme à la mort, fuftigation & privation de membres , tortures, ge-. hennes, amendes honorables , & banniflement en forme, la hart au cou; car, dit-il, ce font desmorts civiles. | Cette notion qu’il donne des exécutions qui doi- vent être faites par la main du bourreau, n’eft pas bien exacte ; le bourreau doit exécuter tous les juge- mens, foit contradiétoires ou par contumace, qui condamnent à quelque peine, en portant mort na- turelle ou civile, ou infamie de droit : ainf c’eft lui qui exécute tous les jugemens emportant peine de mort ou mutilation de membres, marque & fuftiga- tion publique, amende honorable in figuris. Il exe- cute auf le banniflement, foit hors du royaume, ou feulement d’une ville ou province, lorfque ce banniflement eft précédé de quelque autre peine » comme du fouet, ainfi que cela eft affez ordinaire ; auquel cas, après avoir conduit le criminel jufqu’à la porte de la ville, 1! hu donne un coup de pié au cul en figne d’expulfon. Le bourreau n’affifte point aux amendes honora- bles qu’on appelle /éches. hr. Ce n’eft point lui non plus qui fait les exécutions fous la cuftode, c’eft - à - dire dans la prifon ; telles que la peine du carcan & du fouet » que lon ordon- ne quelquefois pour de legers délits commis dans la prifon, ou à l’égard d’enfans qui n'ont pas encore atteint l’âge de puberté; çes exécutions {e font or- dinaïrement pat le queftionnaire, ou pat quelqu'un des geoliers ou awichetiers. | Pour ce qui eft de la queftion ou torture, voyez ce qui en a été dit ci-devant. Enfin le bourreau exécute toutes les condamna- tions à mort, rendues par le prevôt de l’armée ; il exécute aufli les jugemens à mort, ou autre peine affliétive , rendus par Le confeil de guerre , à l’excep- tion de ceux qu'il condamne à être pañlés par les armes, ou par les baguettes. (4) EXÉCUTEUR DE L’INDULT , (Jurifprud.) Voyex INDULT. EXÉCUTEUR TESTAMENTAIRE , eft celui que le défunt a nommé, par fon teftament ou codicile , pour exécuter ce teftament ou codicile, &c autres difpofitions de dermiere volonté. Il n’étoit pas d’ufage chez les Romains de nom- mer des exécuteurs tefflamentaires, les lois romaines croyoient avoir fufifamment pourvû à l'exécution des teflamens, en permettant aux héritiers de pren- dre poffeflion , & accordant diverfes a@ions aux lé- gataires & fidei-commiffaires , & en privant de Phé- rédité les héritiers qui feroient refraétaires aux vo- lontés du défunt, | Dans les pays coûtumiers, où les difpofitions uni- verfelles ne font toutes que des legs fujets à déli- _vrance, on a introduit l’ufage des exécureurs teffa- mentaires , pour tenir la main à l’exécution des der- nieres volontés du défunt ; il n’y a prefque point de coûtume qui ne contienne quelque difpoñition fur cette matiere, Toutes perfonnes peuvent être nommées exécu- teurs teflamentaires , fans diftinétion d'âge, de fexe , ni de condition : ainfi les mineurs adultes & capa- bles d’affaires, les fils de famille, les femmes même en puiflance de mari, peuvent être nommés pour une exécution teftamentaire. Il y a des exécuteurs teflamentaires honoraires. c’eft-à-dire qui ne font chargés que de veiller à l’e- xécution du teftament, & non pas de l’exécutereux- mêmes ; & dans ce cas ceux qui font chargés de le xécution effettive, peuvent être appellés exécureurs teflamentaires onéraires , pour Îes diftinguer des pre miers qui ne {ont point comptables, Quoique les exécureurs teffamentaires foïent ordi- naïrement nommés par teftament ou codicile, on diftingue encore deux autres fortes d’exécureurs ref= camentaires , les uns qu'on appelle Zépitimes , & d’au- tres danifs. Le légitime eft celui auquel la loi donne le pou- voir de tenir la main à l’exécution de certaines dif- pofñitions, tel que l’évêque ou fon économe , & au défaut de l'évêque le métropolitain, pour procurer le payement des legs pieux en faveur des captifs, & pour la nourriture & entretien des pauvres, fuivant Les lois 28 6 40. cod. de epife. &t la novelle 131. c. x. L’exécuteur teflamentaire datif eft celui que le juge nomme lorfque le cas le requiert; comme on voit en la loi 3. #, de alimentis, où 1l eft dit que le juge peut charger un d’entre les héritiers , de fournir feuE les alimens légués. Les lois romaines ne donnent point à l’évêque l’e. xécution des autres difpofitions à caufe de mott, pas même des autres legs pieux; il peut feulement pro curer l'exécution des difpoñitions pieufes , lorfque l'exécuteur teflamentaire néglige de le faire. Le droit canon va beaucoup plus loin, car il auto« rife l’évêque à s’entremettre de l’exécution de tous les legs pieux, foit lorfqu'il n’y a pas d’exécureur ref tamentaire, où que celui qui eft nommé néglige de: faire exécuter les difpoñtions pieufes. C’eft fur ce fondement que quelques interpretes de droit ont décidé ; que les juges d’Eglife peuvent. connoître de l'exécution des teftamens ; ce qui a meme même été adopté dans quelques coûtumes : mais cela a été réformé par l'ordonnance de 1539, qui réduit lés juges d’églife aux caufes fpirituelles & eccléfiaf tiques ; & les évêques ne font point admis en France à s'entremettre de l'exécution des less pieux, La charge ou commiffion d'exécuteur teflamentaire n'eft qu'un fimple mandat, fujet aux mêmes regles que les dutres mandats, excepté que celui-ci au lieu de prendre fin par la mort du mandant, qui eft le te tateur, ne commence au contraire qu'après fa mort. L'exécureur reflamentaire nommé par teftament ou codicile, n’a pas befoin d’être confirmé par le Juge ; le pouvoir qu'il tient du teftateur & de la loi ou coûtume du heu, lui fufät. Il ne peut pas non plus dans fa fonéhon excéder le pouvoir que l’un & l’au- tre lui donnent. , La fonétion d’exécuteur teffamentaire étant une charge privée, il eft libre à celui qui eft nommé de la refuier, fans qu’il ait befoin pour cela d’ancune excufe; & en cas de refus , il ne perd pas pour cela le legs qui lui eft fait, à moins qu'il ne paroifle fait en confidération de l’exécution teftamentaire ; de forte que s’il accepte ce less, il ne peut plus refufer la fon@tion dont il eft le prix. Il ne peut plus auffi fe démettre de cette charge, lorfqu’il l’a acceptée, à moins qu’il ne furvienne quelque caufe nouvelle. Il doit apporter dans fa commiflion toute l’at- tention qui dépend de lui, & par conféquenit il eft tefponfable de fon dol & de ce qui arriveroit par fa faute & par fa négligence, fans néanmoins qu'il foit tenu des fautes legeres. Un exécurenr teflamentaire qui ne feroit chargé que de procurer l’exécution de quelque difpoñition fans avoir aucun maniement des deniers , Comme cela fe voit fouvent en pays de Droit écrit, n’eft pas obligé de faire inventaire, ni de faire aucuné autre diligence que ce qui concerne fa commiffion. Au contraire, en pays coûtumier où il eft faifi de certains biens du défunt , il doit aufi-tôt qu'il a con- noïffance du teftament , faire procéder à l’inventai- re, les héritiers préfomptifs préfens , on d'iment ap- pellés ; & en cas d’abfence de l’un d’eux , il doit Y appeller le procureur du roi ou de la juftice du lieu. Dans quelques coûtumes , l’exécuteur teflamentaire, n'eft faifi que des meubles & effets mobiliers, com me à Paris; dans d’autres, comme Berri & Bour- bonnoïs : ils font farfis des meubles & conquêts. D’autres coûtumes encore reftraignent de diver: fes manieres le maniement que doit avoir l'exéez- teur ceftarmentaire, a (4 Loch à LA Leteftateur peut pareillement lereftraindre, com- me bon lui femble, par fon teflament ou codicile, Ileft auffi du devoir de l’exécureur teflamentaireen pays coûturmier, de faire vendre les meubles par au- tonté de juffice, de faire le recouvrement des dét- tes aétives & des deniers qui proviennent tant des meubles que des dettes aëtives, 8& du revenu dès immeubles, qu'il a droit de toucher, dans cértaines coûtumes , pendant l’année de fon exécution tefta mentaire. Il doit acquitter d’abord les dettes paf ves & mobiliaires, enfuite les legs. LS RP SR Si les deniers dont on vient de parler ne fufifent pas pour acquiter les dettes & les difpoñtions du teftateur, l'exécureur reflamentaire peut vendre des immeubles jufqu’à dûe concurrence , ainf que le décident plufieurs coûtumes ; en le faifant néan. mOIns ordonner avec les héritiers, faute par eux dé fournir des deniers fuffifans pour acquiter les déttes mobiliairés 87 leos, Le pouvoir que l’exécureur tefflamenraire tient du défunt ou de la loi, lui eft perfonnel ; de forte qu'il ne peut le Communiquer ni le transférer à un autre, Ce pouvoir finit par La mort de l'exécureur téflamen Tome VI, + SE E V8 233 aire, Quand elle arriveroit avant que {a commiflion {oit finie, Il n’eft point d'ufage d’en faire nommer un autre à fa place ; c’éft à héritier À achever ce qui réfleàfaire. Lorique le défunt à nommé plufieuts exécrieurs tefamentaires, ils ont tous un pouvoir cpal, & doi: vent agit conjointement : néanmoins en cas que l’uñ d’eux foit abfent hots du pays, l’autre peut valable- ment agir feul. Pendant l’année que dure la éommiffion de l'exées- Leur ne les légataires des chofes où fommes mobiliaites, peuvent intenter ation contre lui pour avoir payement de leur légs, pourvt que la délivran- ce en foit ordonnée avec l’héritier. Il peut auf rete- nir par fes mains le legs mobilier qui lui eff fait. Il ne peut point demander de fataire, quand même il n’auroit point de legs, le mandat étant de fà nature gratuit, Eu | | Après l’année révolue , l’exécureur teflamentaire doit rendre compte de fa geftion , à moins que le téftateur ne l’en eût difpenié formellement. S'il y a plufeurs exécureurs seflamentaires , ils doi: vent tous rendre compte conjointement, fans néan- moins qu'ils foient tenus folidairement du relhiquat,, mais feulement chacun perfonnellement pour leur part & portion. Le compte peut être rendu à lama ble, où devant des arbitres ; ou % les parties ne s’ar- rangent pas ainfi, l’exécureur tefamentaire peut être pourfuivi par juftice. S Les coûtumes & les anciennes ofdonhances ne font pas d'accord entr’elles fur le juge devant lequel en ce cas doit être rendu ce compte ; les unes veu- lent que ce foit le juge royal; d’autres admettent la concurrence & la prévention entre les juges royaux & ceux des feigneurs; quelques coûtumes en don- nent la connoïffance au juge d'églhie , foit exclu. vement, Ou par prévention. | Préfentement les juges d’églife ne connoïffent plus de cès matieres; & fuivant l'ordonnance de 1667 , le comptable doit être pourfuivi devant le juge qui l’a commis, ou. s’il n’a pas été nommé par jufice, devant le juge de fon domicile. | L'éxécureur teffamentaire doit potter entecette tout ce qu'il a reçu Ou dû recevoir, fauf la teprife de ce qu'il n'a pas reçu ; il peut potter en dépenfé tout ce qu’il a dépenié de bonñe-foi ; il en eff même crû à {on ferment, pour les menues dépenfes dont on ne peut _ pas tirér de quittance ; il peut auf y employer les’ frais du compte , attendu que c’eft à lui à lesavancer. S'il y à un reliquat dù par l’exécuceur teflamentaire, Où par l'es héritiérs , les mtérêts en font dûs, à comp- ter de la clôture du compte; s’il eft arrêté À l’amia- _ ble, ou fi le compte eft rendu en juftice , à compter | de la demande. Quand Pexécuteur tefaméhtaire eft nommé par ju | tice, ou qu'il accepte la commiffion par un aête au=° | thentique, il ÿ a de cé jour hypotheque fur fes biens ; hors ce cas, l'hypotheque n’eft acquife contre lui que’ du jour des condamnations. Il en eft de même de l’hy- potheque qu'il peut avoir fur les biens de la fnccef> fon. Voyez les lois civiles , tir, des rèffam. Ricard , des donar, part. Il. c.j. & [. les'arrétés dé M.de Lamoiïgnon; & Furgoles, &r. des reflam. t. IV. com. x. feël, 14. (4) EXÉCUTION , (Jurifprud. ) fignife laccomplif= Jement d'une chofe, comme l’exécurion d’un atté, d'un contrat, d'un jugement, foit {entence Ou arret, EXÉCUTION, fignifie aufh quelquefois faifie , dif cuffion de biens d’un débiteur pour fe procurer le payement de ce qu'il doit. EXÉCUTION DE BIENS, voyez SAISIE-EXÉGU- TION, SAISIE GAGERIE, SAISIE RÉELLE. | EXÉCUTION DÉFINITIVE d’un aéte où d'ün ju= sement, eft l’accompliflement qui eft fait purement & fimplement des claufes ou FE qu'il rén- £ 234 EXE ferme fans qu'il y ait lieu de rien répéter dans la fuite ; à la différence de l'exécution provifoure qui peut être révoquée par le jugement défininf. Mais fi ce jugement confirme ce qui avoit été ordonné par provifion, on ordonne en ce cas que l’exécusion pro- vifoire demeurera définitive, c’eft-à-dire qu’elle de- meurera fans retour. ( 4) | EXÉCUTION DES JUGEMENS, voyez JUGEMENS. EXÉCUTION DE MEUBLES , voye; GAGERIE, SAISIE & EXÉCUTION , SAISIE GAGERIE. ÉXÉCUTION PARÉE, parata executio, Ceft-à- dire celle qui eft toute prête, & que l’on peut faire en vertu de Pate tel qu'il eft, fans avoir befoin d'autre formalité ni d’autre titre. En vertu d’un titre qui emporte exécurion parée , on peut faire un commandement , & enfuite faïfir êt exécuter, faifir réellement. Ces contrats & jugemens qui font en forme exé- cutoire emportent exécusion parée contre obligé ou le condamné ; mais ils n’ont pas d'exécution parée contre leurs héritiers légataires, biens tenans, &c au- tres ayant caufe, qu'on n’ait fait déclarer ce titre exécutoire contre eux. C’eft pourquoi on dit ordi- naïrement que le mort exécute Le vif, mais que le Vif n’exécute pas le mort. L’ufage eft pourtant contraire en Normandie, fui- vant l’arr, 129 du reglement de 1666. Voyez le recueil, de queff. de M. Bretonnier ,ayec les additions au mot groffe de contrat. ( 4) ÉXÉCUTION PROVISOIRE, eft celle qui eft faite par provifion feulement, en vertu d'un jugement provifoire, & en attendant le jugement définitif, Voyez ce qui eff dit ci-deffus à l’article EXÉCUTION DÉFINITIVE. (4) EXÉCUTION-SAISIE , voyez SAISIE, EXÉCUTION TESTAMENTAIRE, c’eft l’accom- pliflement qui eft fait par l’exécuteur teflamentaire des dernieres volontés d’un défunt portées par fon teftament ou codicille. Foyez ce qui ef? dis ci-def[us a article EXÉCUTEUR TESTAMENTAIRE. ( 4) EXÉCUTION TORTIONNAIRE , Voyez SAISIE TORTIONNAIRE. | ExÉCUTION MILITAIRE, c’eft le maflacre d’une ville ou le ravage d’un pays, qu'on permet à des foldats lorfque la ville ou Le pays ontrefufé de payer les contributions. Voyez CONTRIBUTION. ( 0) Exécution, £f.( Opera) on fe fert de ce ter- me: pour exprimer la façon dont la mufique vocale & inftrumentale font rendues. Il eft difficile de bien connoître une compofition muficale de quelque ef- pece qu’elle foit, fi on n’en a pas entendu l'exécu- sion, C’eft de cet enfemble que dépend principale- ment limpreffion de plaifir, ou d’ennu., La meil- leure compofition en mufique paroït defagréable , infipide, & même fatigante,, avec une mauvaife exécution. En 1669 l'abbé Perrin & Cambertraffemble- rent tout ce qu'ils pürent trouver de muficiens à Pa- ris, & ils firent venir des voix du Languedoc pour former l’établiffement de lopera. Lull: qui par la prévoyance de M. Colbert, fut-bientôt nus à leur place, fe fervit de ce qu'il avoit fous fa main. Le chant & l’orcheftre étoient dans ces commence- mens ce que font tousles Arts à leur naïffance. L’o- “pera italien avoit donné l’idée de lopera françois : ARE qui étoit Florentin, étoit muficien comme l’é- toient-de fon tems. les célebres compoñteuts de de- jà Les monts, & il ne pouvoit pas l'être davantage. Les exécutans qui hü auroient été néceflaires, sil Payoit été plus ,étoient encore loin de naître. Ses compofitions furent doncen proportion de la bonne mufique de fon tems, êt de la force de ceux qui de- voient les exécuter. 24 Comme il avoit beaucoup de gémie & de goût, ke \ l’art fous fes yeux, & par fes foins, faifoit toùjouts quelques progrès ; & à mefure qu'il le voyoit avan- cer, {on génie auff faifoit de nouvelles découvertes, &c créoit des chofes plus hardies, Defpotique fur fon. théatre & dans fon orcheftre , il récompenfoit les efforts, & punifloit à fon gré le défaut d'attention & de travail. Tout plioit fous lui : il prenoit Le vio- lon des mains d’un exécutant qu’il trouvoit en fau- te , 8c le lui cafloit fur la tête fans que perfonne ofàf fe plaindre ni murmurer. Aïnfi l'exécution de fon tems fut pouflée auf loi qu’on devoit naturellement l’attendre ; & la diftance étoit immenfe de létat oùil trouva l’orcheftre & le chant, à l’état où il les laïffa. | Cependant ce que nous nommons très-imptopre- ment Le récicarif (voyez RÉCITATIF), fut la feule pat- tie de lexécution qu’il porta & qu'il ponvoit por- ter jufqu’à une certaine perfeétion; il forma à fon gré les fujets qu'il avoit, dans un genre que perfon- ne ne pouvoit connoître mieux que lui; & comme ilavoit d’abord faiñ une forte de déclamation chan- tante qui étoit propre au genre & à la langue, 1l ur fut loifible de rendre fuffifante pour fon tems l’exé- cation de cette partie, fur un théatre dont il étoit le maitre abfolu, & avec des fujets qu'il avoit formés, qui tenoient tout de lui, & dont il étoit à la fois le . créateur & l’oracle fuprème. Mais l'exécution de la partie inftrumentale &c du chant devoit s'étendre dans la fuite aufñi loin que pouvoit aller l’art lui-même ; & cet art fufceptible de combinaïfons à l’infim, ne faifoit alors que de naître. Par conféquent l’orcheftre de Lulli, quoi- qu'auffi bon qu’il fût poffible, n’étoit encore lorf- qu'il mourut qu'aux premiers élémens. On a beau . quelquefois fur cet article employer la charlatane- tie pour perfuader le contraire, tout le monde fait que du vivant de Lulli, les violons ayoient befoin de recourir à des fourdines pour adoucir dans cer- taines occafons ; 1l leur falloit trente répétitions, & une étude pénible, pour jouer paffablement des mor- ceaux qui paroïffent aujourd'hui aux plus foibles écoliers fans aucune difficulté. Voyez ORCHESTRE. Qu'on ne m'oppofe point les fourdines dont on fe fert quelquefois dans les orcheftres d'Italie, Ce n’eft point pour faireles doux qu'on y a recours. C’eft pour produire un changement de {on , qui fait tableau dans certaines circonftances, comme lorf- qu'on veut peindre l’horreur d’un çachot fombre, d’une caverne obfeure, &c. | De même le chant brillant , leger, de tableau, de grande force, les chœurs de divers deffeins,, & à plu- fieurs parties enchaïnées les nnes aux autres, qui produifent de fi agréables effets, ces duo, ces trio favans & harmonieux, ces ariettes qui ont prefque tout le faillant des grands aria d'Italie, fans avoir peut-être aucuns des défauts qu’on peut quelquefois _ leur reprocher; toutes ces différentes parties enfin de la mufique vocale trouvées de nos jours, ne pou- voient venir dans l’efprit d’un compofteur qui con- noïfloit la foibleffe de fes fujets. Le récitatif d’ail- leurs , la grande fcene fufiloit alors à la nation à laquelle Lulli devoit plaire. Les poëmes immortels de Quinault étoient tous coupés pour la déclama- tion: la cour & la ville étoient contentesde ce genre; elles n’ayoient ni ne pouvoient avoir idée d'un autre. - L'art s’eft depuis développé : les progrès qu'il a relli, &c, de même celles de nos bons maîtres fran- COS d’aujourd'huu font fort fupérienres à cellesqu'on ' E; AIME admiroit fut la fin du dernier fiecle. L’exécurion à fuivi Part dans fes différentes marches ; leurs pro- grès ont ête & dû être néceflairement les mêmes. Les routes trouvées par les compofiteurs ont dû in- difpenfablement s'ouvrir pour les exécutans ; à me- fure que Part de la navigation a pris des accroifle- mens par les nouvelles découvertes qu’on a faites, il'a fallu auffi que la manœuvre devint plus parfai- te. L'une a été une fuite néceflaire de l’autre, Aïnfi en examinant de fang froid & avec un peu de réflexion les différences fucceflives d’un genre deftiné uniquement pour le plaifir ; en écartant les déclamations que des intérêts fecrets animent; en fe dépouillant enfin des prérugés que l'habitude, & Pignorance feules accréditent, on voit qu'il n’eft tien arrivé de nos jours fur la Mufique , qui ne lui {oit commun avec tous les autres arts. La Peinture, la Poëfie, la Sculpture, dans toutes leurs différentes tranfmigrations des Grecs chez les Romains , de chez les Romains dans le refte de l'Italie, & enfin dans toute l’Europe , ont eu ces mêmes développe: mens. Mais ces arts ont avancé d’un pas plus rapide que la Mufique, parce que leur perfettion dépendoit du géme feul de ceux qui ont compofé, La Mufque au contraire ne pouvoit parvenir à la perfeétion, -que lorfque l’exécurion auroit été portée à un certain point, &c il falloit au génie le concours d’un très- grand nombre d’artiftes différens que le tems pou- voit feul former. M. Rameau a faifi le moment : 1l a porté l'exécution déja préparée en France par le travail & l'expérience de plus de foixante ans, à un degré de perfeétion égal à celui de fes compofitions dramatiques. Voyez CHANTEUR , ORCHESTRE, OpPErA.(B) EXÉCUTOIRE , (Jurifprud.) fe dit de tout ce Guipeut être mis à exécution, comme un afte ou un contrat exécutoire, une fentence, arrêt, ou autre jugement exécuroire, EXÉCUTOIRE DE DÉPENS, eft une commifion en patchemin accordée par le juge, & délivrée par le oreffier, laquelle permet de mettre à exécution la taxe qui a été faite des dépens. | ‘ Lorfque c’eff la partie qui obtient l’exéeuroire; cela s’appelle Zever lexécutoire ; lorfque le juge en accor- de d'office contre une partie civile ou fur le domai- ne du roi ou de quelque autre feigneur pour les frais d’une procédure criminelle, cela s'appelle décerner exécutoire, Voyez Les art.1 6 © 17 du tr, xxv. de l'or- donnance de 1670. Les exécutoires qui font ‘accordés par les juges _ royaux & autres juges inférieurs, font intitulés du nom du juge : ceux qui émanent des cours fouve- faines, font intitulés du nom du roi. NY Celui qui n’eft pas content de l’exéeztoire, peut eninterjetter appel de même que dela taxe; excepté pour les exeécutoires émanés des cours fouveraines, où l’on pourvoit par appel de la taxe & par oppoñ- tion feulement contre l'exécuroire, fuppoté qu'il n'ait "pas été délivré contradiétoïrément. Voyez Con- TRAINTE PAR CORPS, DÉPENS & ITERATO. (A) … EXÉCUTOIRE (forme), eft celle qui eft néceffaire pour mettre un aête à exécution, comme à Paris, qu'il foit en parchemin , &c intitulé du nom du juge; cette forme n’eft pas par-tout la même. Voyez Le re- cueil de queft. de Bretonnier , avec les additions au mot GROSSE. (4 ) | | or I . EXÉCUTOIRE NONOBSTANT L’APPEL,, c’eft-à- dire. Ce qui peut être mis à exécution, fans que l’ap- pelipuifle l'empêcher; dans les jugemens qui. doi- vent avoir une exécution proviloire, on.met ofdi- nairement à.[a fin ces mots, ce qui fera exécuté non- cbfians l'appel > 6 fans préjudicter, c’eft-à-dire que l'appel r’empêchera pas l'exécution , mais que cette Tome VI, _EXE 335 exécution provifoire de fera pas de préjügé contre l'appel. (4) , ÉXÉCUTOIRE PAR PROVISION , c’eft ce que l’on n'exécute qu'à la charge de rendre en définitive s’il y échet. F7. ci-dev, EXÉCUTION DÉFINITIVE, (4 ) EXEDRES, ff (Al. anc.) étoient ancienne- ment les lieux où les Philofophes , les Rhéteurs, les Sophiftes avoient coûtume de tenir leurs conférences & de difputer entr’eux. Ce mot vient du grec eéedbe, qui fignifie la même chofe. M. Perrault croit que les exedres étoient des efpeces de petites académies où les gens de Lettres s’aflembloient, Voyez ACADÉMIE, Cependant Budée prétend que ce que les anciens. appelloient exedres, répondoit plûütôt à ce que nous appellons chapitres dans les cloïtres ou dans:les églia fes collégiales) (G). EXEGESE NUMÉRIQUE ox LINÉAIRE, figni- fie, dans l’ancienne Algebre , l'extraction nnérique OÙ linéaire des racines des équations , c’eft-à-dire la folu= tion numérique de ces équations. ou leur conftruc- tion géométrique. J’oyez ÉQUATION, CONSTRUC- TION , RAGINE. Viete s eft fervi de ce mot dans fon alsebre, Voyez ALGEBRE. EXEGESE, {. f. (Hif & Belles-Lesrr.) fe dit d’une explication ou expofition de quelques paroles par d’autres qui ont le même fens , quoiqu’elles nayent pas le même fon, Ainf plufieurs interpretes de la Bible éroyent que dans les paflages de l’Ecrituré où l’on trouve 2484 pater, dont le premier eft fyriaque, & le fecond' eft latin ou grec, ce dernier n’eft ajoûté que par exegefe, & pour faire entendre ce que:le premier figmie. Voyez AB. Chambers, (G) : EXEGETES, {. m, (Hif anc.) étoient chez les Athéniens des perfonnes favantes dans les lois, que les juges avoient coûtume de confulter dans les cau- fes capitalés. 1) Ce mot.eft grec , Séipries& vient d’éysoner, je conduïs, Les exegetes étoient: les interpretes des lois... Dittionn. de Trév. & Chambers. (G) | EXEGETIQUE ,, f. f serme, de l'ancienne: Alsebre s c’eft ainfi que Viete appelle l’art detrouver lesæaci- nes des équations d’un problème ; foit.en. nombres, foit en lignes, felon que le problème eft numérique) Où géométrique, Foyez RACINE ; ÉQUATION 1 Ëc. Voyez auffi EXEGESE. (0), . TE EXEMPLAIRE, adj. (Jarifp.) fe dit de la-fubfti. tution qui eft faite par Les parens à leurs enfans tom- bés en démence. Cette fubftitution a été furnommée exemplaire, parce. qu'elle: a étéantroduite à l’exem- ple de la pupillarion, Voyez Sussrirurron: (4) EXEMPLE, f, m..( Morale.) ation vicieufe ou vertueufe qu’on fe propofe d'éviter où d’imiter, L'exemple eft d'une grande efficace, parce qu'il: frappe-plus promptement,& plus vivement.que tou- tes/les raifons &r les préceptes; car la regle ne:sex- prime qu'en termes vagues, au-lieu que lexemple fait naître, des idées déterminées ,.& met la.chofe fous les yeux,1que les hommes croyent-beaucoup plus que leurs oreilles. ar ny és) > - Bien des,gens regardent comme un inflin@ de la feule nature sou comme l’effetide la conftitution des organes’, lalforce des exemples, \& lé! penchant de: l’homme à imiter ; mais ce ne font pas là les feules: caufes de la pente qui nous porte à nous modeler fur lesautres:, l’éducation y à fans. doute la plusgrande parte on quil alu ot : b eut Ilieft difficile que lesimauvais exemples n’entrai- nent l’homme, s'ils font-fréquens à fa vüé ; &vsäls lui.deviennent familiers. Un des plus grands fecouts pour l'innocence , c’eft de ne-pas connoïtre le vice: par lessexeïmples de ceux que-nous fréquéntons. Ms de Buffy répétoit fouvent ; qu'à force de nerrouver ! MIE vd 236 EXE | rien qui vaille dans fon chemin, on ne devient rien qui vaille foi-même. Il faut un grand courage pour fe {oûtenir feul dans les fentiers de la vertu , quand on eft entouré de gens qui ne les fuivent point. D’ail- leurs dans les états où les mœurs font corrompues, . la plüpart des hommes ne tirent point de fruit du pe- tit nombre de bons exemples qu'ils voyent ; & dans Péloignement ils fe contentent de rendre avec froi- deur quelque juftice au mérite. Dans les divers gouvernemens, les principes de leur conflitution étant entierement différens, non- feulement les exemples de bien & de mal ne font pas les mêmes, mais les fouveraïns ne fauroient fe mo- deler les uns fur les autres d'une maniere utile, fixe &t durable ; c’eft ce que Corneille fait fi bien dire à Augufte : Les exemples d'autrui fuffiroient pour m'inffruire, Si par l'exemple feul on pouvoit fe conduire ; Mais fouvent lun fe perd où l'autre s’eft fauve, Et par où l'un périt, un autre eff conferve. Enfin dans toutes les conjon@tures de la vie, avant que de prendre les exemples pour modeles, 1l faut toùjours les examiner fur la loi, c’eft-à-dire fur la droité raïifon: c’eft aux aétions à fe former fur eile, & non pas à elle à fe plier pour être conforme aux aétions. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. EXEMPLE, (Belles. Lertr,) argument propre à la Rhétorique, par lequel on montre qu’une chofe ar- rivera ou fe fera d’une telle maniere, en apportant pour preuveun ou plufeurs évenemens femblables arrivés en pareille occafion. Si je voulois montrer, dit Ariftote, Lvre IT. de la Rhétorique, que Denis de Syracufe ne demande des gardes que pour devenir le tyran de fa patrie, je di- rois que Pififtrate demanda des gardes ; & que dès qu'on lui en eut accordé , il s'empara du’ gouverne- ment d’Athenes; j’ajoûterois que Théagene fit la mê- me chofe à Mégare : j'alléguerois enfuite les autres exemples de ceux qui font parvenus à la tyrannie par cette voie, & J'en concluürois que quiconque deman- de des gardes, en veut à la liberté de fa patrie. On réfout cet argument en montrant la difparité qui fe rencontre entre les exemples & la chofe à la- quelle on veut les appliquer. (G) * EXEMPT, adj. (Gramm.) terme relatif à quel- que loi commune, qui n’oblige point celui qu'on en dit exempt. | ; ExEMPT DE L'ORDINAIRE , (Jurifpr.) fe dit de certains monafteres , chapitres & autres eccléfiafti- ques, foit féculiers ou réguliers , qui ne font pas foù- mis à la jurifdi@ion de l’évêque diocefain , & rele- vent de quelqu’autre fupérieur eccléfiaftique , telque le métropolitain ou le pape. Voyez ci-après EXEMP- TION. (4) 9 ExEMPT, (Jurifpr.) eft aufli un officier dans'cer- tains corps de cavalerie, qui commande en l’abfence du capitaine & des lieutenans. Ces'ofhiciers ont fans doute été appellés exempts, parce qu'étant au-deflus des fimples-cavaliers, ils font difpenfés de:faire le: même fervice, Les exemprs, pour marqué de leur aü- torité, portent un bâton de commandement qui eft d’ébene , garni d’yvoire par les deux bouts; c’eft ce que l’on appelle /e béron d'exempt. Quelquefois ‘par ce terme, béton d'exempt ; on entend la place même d'exempé. rs Il-y a des exempts dans les compagnies des gardes du corps, qui font des places confidérables. Il'yaraufi des exvémprs dans la compagnie de la connétablie, lefquels font chargés , avéc les autres officiers de cette compagnie , de notifier les ordres de MM. les maréchaux de France pour les affaires du point d'honneur, & d'arrêter ceux qui font dans Je cas de l'être, en vertu des ordres qui leur font donnés pour cet effet, E XE 11 y a parellement des exempes dans le corps des matéchauflées, däns la compagnie de robe-courte, dans fa compagnie du guet à cheval, 87 même dans celle du guet à pié. Ces exempts font ordinairement chargés de notifier les ordres du roi & de faire les captures, foit en exécution d’ordres du roi direéte- ment, ou en vertu de quelque decret où contrainte par corps. Les exemprs de maréchauflée n’ont pas Le pouvoir d'informer, comme il fut jugé pat arrêt du grand-confeil du 2 Avril 16:16. (4) | | EXEMPTION , (Jurifprud.) eft un privilège qui difpenfe de la regle générale. EXEMPTION DE TAILLES, c’eft le privilège de ne point payer de tailles ; qui appartient aux ecclé- fiaftiques, aux nobles & autres privilégiés. Voyez TAILLES. EXEMPTION DE TUTELLE, c’eft la décharge de la fonétion de tuteur. (4) EXEMPTION DE L'ORDINAIRE, eft le droit que quelques monafteres, chapitres & autres eccléfafti- ques , tant féculiers que réguliers, ont de n’être point foûmis à la jurifdi@ion fpirituelle de Pordinai- re, c’eft-à-dire de leur évêque diocéfain. Dans les premiers fiecles de l'Eglife tous les ecclé- fiaftiques de chaque diocèfe étoient foûmis à leur évêque diocéfain, comme ils le font encore de droit commun. Perfonne alors n’étoit exempt de la jurif- diétion fpirituelle de l’évêque ; monafteres , reli- gieux, abbés, chanoines réguliers &c autres, tout étoit foûmis à l’évêque. Ontrouve dès le v. fiecle plufieurs priviléges ac- cordés aux grands monafteres, qui ont quelque rap- port avec les exemptions proprement dites. Ces mo- nafteres étoient la plüpart fondés, ou du moins gou- vernés par des abbés d’une grande réputation, qui s’attiroient la vénération des fideles ; les évêques en devinrent jaloux, ce qui donna lieu aux abbès de fe fouftraire à l’autorité de leur évêque : les uns ne voulurent reconnoître pour fupérieur que le métro- politain, patriarche ou primat ; d’autres eurent re- cours au pape, qui les prit fous fa proteétion. Les chapitres, qui étoient pour la plüpatt compo- fés de réguliers, voulurent aufi avoir part à ces exemptions ; ce qui eut lieu beaucoup plus tard par rapport aux chapitres féculiers. | La plus ancienne exemprion connue en France, eff. celle du monaftere de Lerins , qui fut faite par le concile d'Arles en 455. | Les évêques eux-mêmes ont accordé quelques exemptions ; témoin celle de l’abbaye deS. Denis.en 637, qui fut faite par Landry, évêque de Paris, du confentement de fon chapitre & des évêques de la province. Il paroït néanmoins que l’ufage ne fut pas toûjouts uniforme fur ce point en France ;:car les exemptions, tant des chapitres que des monañteres étoient inconnues fous le regne de Pepin , comme il paroït par le concile de Vernon, tenu en 755. En Orient les exemptions de l'ordinaire. avec foû- miffion au patriarche où au métropolitain , furent très-communes : On en trouve des exemples dès le vJ. fiecle. - Les priviléges ou exemprions ainfi accordés à quel- ques monafteres , étoient confirmés en France par les rois ; on en trouve les formules dans Marculphe , où l'on voit que ces exemptions n’avoient pas alors pour but de fouftraire les monafteres à la jurifdiétion fp1- rituelle de l’évêque, mais feulement d'empêcher qué l'évêque allant trop fouvent dans le monaftere avec une fuite nombreufe', ne troublât le filence & la fo- litude qui y doivent regner, wquieta fent monafteria s c’éft le motif ordinaire des anciennés chartes d’e- xemptions. C’elt auf pour empêcher lès évêques de fe mêler du temporel du monaîtere, &c afin de per- mettre aux religieux de{e choifir un abbé, pourvû EXE qu'il fût béni par l’évêque du lieu ; d’ordonner que | Pévêque ne pourroit punir les fautes commifes dans le cloître par les religieux, que quand les abbés au- roïent négligé de.le faire ; & de ne pas permettre que lon exigeñt de l’argent pour l’ordinaire , ou pour la confécration des autels. | On rapporte à la vérité quelques chartes des vi. vif. & ÿx. fiecles, par lefquelles des monafteres pa- roiflent avoir été entierement affranchis par les pa- pes de la jurifdiétion fpirituelle de l’évêque ; mais les plus habiles critiques regardent ces conceñions com- me fuppofées, & ce ne fut guere que vers Le x]. fie- cle que les papes commencerent à exempter quel- ques monafteres de la jurifdiétion fpirituelle des évé- ques. Ces exemptions furent révoquées au concile de Eyon en 1025, & blâmées par faint Bernard, qui vivoit fut la fin du xj. fiecle & au commencement du x1. & par faint François, qui vivoit peu de tems après; ce qui fuppofe qu’elles n’étoient point ordi- naires en France : il n'eft même point parlé alors d'exemptions pour les chapitres féculiers ; & en effet ceux quifont exempts ne rapportent pour la plüpart que des titres poftérieurs au xi. fiecle. Quelque purs qu'ayent p être les motifs qui ont donné lieu à ces exemptions, il eft certain que les exemptions perpétuelles font contraires à l’ordre na- turel & au droit commun; & que fi on les a faites pour un bien , elles produifent auffi fouvent degrands inconvéniens , fur-tout lorfque les exempts ne font fofimis à aucune puiflance dans le royaume, comme au métropolitain ou au primat, & qu'ils font foûmis immédiatement au faint fiése. Les premiers fondateurs des ordres mendians f- A rent ploiré d’être foûmis à tous leurs fupérieurs ec- . cléfiaftiques ; ceux qui font venus enfuite, guidés par d’autres vües, ont obtenu des exemptions. Elles furent fur-tout multipliées pendant le {chif me d'Avignon ; les papes & les antipapes en accor- doient chacun de leurpart, pour attirer ou conferver les monafteres ou les chapitres dans leur parti. Toutes ces exemptions accordées depuis le com- mencement du fchifme , furent révoquées par Martin V. avec Papprobation du concile de Conftance. Les évêques tenterent inutilement au concile de Latran de faire réduire tous Les moines au droit com- mun : on révoqua feulement quelques priviléges des mendians. On demanda auf la révocation des exerprions au concile de Trente ; maïs le concile fe contenta de téprimer quelques abus, fans abolir les exemprions. _ L’ordonnance d'Orléans avoit déclaré tous les chapitres féculiers & réguliers foümis à l'évêque, nonobflant toute exempsion ou privilége ; mais l’or- donnance de Blois, & les édits poftérieurs qui y font conformes , paroiflent avoir autorfé les exemprions, lorfqu’elles font fondées fur des titres valables. La poffeffion feule , quoiqu’ancienne & paifible, eft infuffifante pour établir une exemprion. Cette ma- xime eft fondée fur l'autorité des papes S. Grégoire le Grand, de Nicolas I. & Innocent IIL. {ur celle des conciles , entr’autfes du troifieme concile de Ra- venne , en 1314; de ceux de Tours, en 1236; & de Vorcefter, en 1240 ; fur les textes dudroit canon & lautorité des gloflateurs. Elle a été aufi établie par Cujas & Dumolin . & par MM. les avocats géné- taux Capel, Servin, Bignon, Talon. Maïs quoique la pofeflion ne fuffifepas feule pour établir une exerpéon , elle fuffit feule pout détruire une exemprion , parce que le retour au droit commun ef toijours favorable. | Les attes énonciatifs du titre dexernption; St ceux même qui paroïflent le confirmer, font pareillement infufifans pour établir feuls l’exemprion ; il faut rap- porter le titre primordial, EXE 237 . Les conditions néceffaires pour la validité de cé titre, font qu’il foit en forme authentique, {lon l’u- fage du tems où il été fair ; que l’évêque y ait con- fenti, où du moins qu'il y ait été appellé, 8 que le TOI ait approuvé l’exemption : enfin qu'il n’y ait au: cune claufe abufive dans la bulle d’exemprion. Si les claufes abufives touchent la fubftance de latte, elles le rendent entierement nul: f au con- traire la claufe ne touche pas le fond , elle eft nulle, fans vicier le refte de latte. On diftingue deux fortes d’exemprions, des unes perfonnelles , les autres réelles, Les premieres font cel- les accordées à un particulier, ou aux membres d’une communauté. Les exemptions réelles {ont celles qui font accordées en faveur d’une églife féculiere ou répuliere. Ces deux fortes d'éxernprions {ont ordinai- rement réumies dans le même titre, Toute exemprion étant contraire au droit com mun, doit être renfermée ftriétement dans les termes de Paéte, & ne peut recevoir aucune extenfion. En France, lorfque les chapitres féculiers qui font exempts de l'ordinaire, font en pofeffion d'exercer fur leurs membres une jurifdi@ion contentieufe , & d’avoir pour cet effet un official, on les maintient ordinairement dans leur droit & pofleffion, & en ce cas l'appel de l’official du chapitre refortit à l’offi- cialité de l’évêque. Du tefte les chapitres exempts font fujets à la ju< rifdiétion de l'évêque, pour la vifite & pour tout ce qui dépend de fa jurifdiétion volontaire, Ils ne peuvent auffi refufer à l’évêque les droits honorifiques qui font dûs à fa dignité, comme d’a- voir un fiége élevé près de l'autel, de donner la bé nédiction dans l’églife, & d’obliger les chanoines à s’inchiner pour recevoir la bénédiion. Quelques chapitres ont été maintenus dans le droit de vifiter les paroïffes de leur dépendance, à la char- ge de faire porter à l’évêque leurs procès-verbaux de vifite, pour ordonner fur ces procès-verbaux ce qu’il jugeroit à-propos. Lorfque l’official de ces chapitres féculiers ne fait pas de pourfuites contre les délinquansdans le terms prefcrit par le titre du chapitre, la connoiflance des délits et dévolue à l’official de l’évêque. La jurifdiétion des réguliers eft toñjours bornée à l'étendue de leur cloître ; & ceux qui éommettent quelque délit hors du cloître , font fujets à la jurif= diétion de l’ordinaire. L’évêque peut contraindre les religieux vaga- bonds, même ceux qui fe difent exempts, de ren- trer dans leur couvent; il peut même employer contr'eux à cet effet les cenfures eccléfiaftiques, s'ils refufent de lui obéir. | Les cures qui fe trouvent dans l’enclos des mo- _nafteres, chapitres ou autres églifes exemptes, font fujettes à la vifite de l'ordinaire ; & le religieux où prêtre commis à la defferte des facremens, &c chargé de faire les fonétions curiales , dépend de l’évêque entout ce qui concerne ces fonctions & l’adminiftra- tion des facremens. Quelqu'exemprion que puiflent avoir les féculiers & réguliers , ils font toûjours foûmis:aux ordonnan- ces de Pévêque pour tout ce qui regarde l’ordre gé-. néral de la police eccléfaftique, comme lobferva- tion des jeûnes & des fêtes, les proceffions publi- ques & autres chofés femblables, que évêque peut ordonner ou retrancher dans fon diocèle, fuivant le pouvoir qu'il en a parles canons. Les exempts féculiérs ou répuliers ne. peuvent = 7 = - 3 confeifer les féculiers fans la permiflion de l'évêque | diocéfain, qui peut limiter le lieu, les perfonnes, le tems 8e les cas, & révoquer les pouvoirs quand: il le juge à-propos. : \ : Les exempts ne peuvent auffi prêcher, même dans 238 EXE leur propré éplife , fans s'être préfentés à leur évé. ue. ils ne pourroient le faire contre fa volonté ; &c os a préfence , même dans leur éghfe , als doivent attendre fa bénedi@ion. Pour prêcher dans les autres églifes ils ont befoin de fa permifñon, qui eft révocable ad nutum, -_ Lorfque les exempts abufent de leurs privilèges, als doivent en être privés, fuivant la doûrine du con: cile de Latran, en 1215; de celui de Sens, en 1269; d'Avignon, en 1326 ; & de Saltzbourg , en 1366. Ils péuvent même quelquefois en être privés fans en avoir abufé, lorfque les circonftances des tems, des lieux & des perfonnes exigent quelque change- ment. Voyez le traité de exemprionibus de Jacobus de Canibus, & celui de Baldus ; /es Mémoires du Clergé, tom. I..6 VI, la Bibliot. can, tom, I. p. Coz. Preuves des libertés, tom, II. ch, xxxviiy, Fevret, traité de lAbaus, li. LIL. ch. 7. les Lois eccléfrafhiques de d'Hé- rgcourt, part. I. ch. xj. (4) EXEMPTIONS , (Æinances.) c’eftun privilège qu difpenfe d’une époftion , d’une contribution, ou de toute autre charge publique & pécuniaire , dont on devroit naturellement fupporter fa paït & portion. Une exemption de cette efpece eft donc une excep- tion à la regle générale , une grace qui déroge au droit commun. Mais comme il eft jufte & naturel , que dans mn gouvernement quelconque ; tous ceux qui partici- pent aux avantages de la fociété , en partagent auñli les charges ; il ne fauroit y avoir en finances d’e- xemption abfolue & purement gratuite ; toutes doi- vent avoir pour fondement une compenfation de fer: vices d’un autre genre , & pour objet le bien géné- al de la fociété. La noblefle a prodigué fon fang pour la patrie; voilà le dédommagement de la taille qu’elle ne paye pas. Voyez TAiLLE, NOBLESSE. Lesmagiftrats veillent pour la füreté des citoyens, au maintien du bon ordre , à l’exécution des lois ; leurs travaux & leurs foins compenfent les exermp- sions dont ils jouiflent. | Des citoyens auffi riches que defintéreflés , vien- nent gratuitement au fecours de la patrie, réparent en partie la rareté de l’argent , ou remplacent par le facrifice de leur fortune, des reflources plus oné- reufesau peuple ; c’eft au peuple même à les dédom- mager pat des exemptions qu'ils ont ft bien méritées. Des étrangers nous apportent de nouvelles ma- nufatures , Ou viennent perfettionner les nôtres ; il faut qu’en faveur des fabriques dont ils nous en- sichiflent , ils foient admis aux prérogatives desre- gnicoles que lon favorife Le plus. Des exemptions fondées fur ces principes , n’au- ront jamais rien d’odieux ; parce qu’en s’écartant, à certains égards , de la regle générale, elles rentre- ront tohjours, par d’autres voies, dans le bien com- mun. Ces fortes de graces & de diftinétions , n’excite- roient & ne juftifieroient les murmures du peuple, & les plaintes des citoyens , hommes d'état, qu'au- tant qu'il arfiveroit que par un profit , par ununté- rêt pécuniare , indépendant d’une exemption très- avantageufe ; le bénéfice de la grace excéderoit de beaucoup les facrifices que l’on auroit faits pour s’en. : rendre digne ; la véritable compenfation fuppofe né- ceffairement de la proportion : il eft donc évident. que dès qu'il n’y en aura plus entre l’exemption dont on jouit, & ce que l’on aura. fait pour la mériter, on eft redevable du furplus à la fociété ; elle eft le centre où tous les rayons doivent fe réunir ; il faut s’en féparer , où contribuer dans fa proportion à {es charges. Quelqu'un oferoit-1lfe dire exempt de co- opérer au bien commun ? on peut feulement y con: courir différemment , mais toïjours dans la plus exacte égalité. E X E S'il arrivoit que la naïffance, le crédit, l’opulens ce, ou d’autres confidérations étrangeres au bien public , détruififlent, ou même altéraflent des maxi- mes fi précieufesau gouvernement ,ilenréfulteroit, contre la raïifon, la juftice & l’humanité , que cer- tains citoyens jotiroient des plus utiles exemprions, paï la raifon même qu'ils font plus en état desparta- ger le poids des contributions , & que la portion in fortunée {eroit punie de fa pauvreté même , par la furchrage dont elle feroit accablée. Que les exemptions foient toljours relatives, ja- mais abfolues, & l'harmonie générale n’en fouffrira: point la plus legere atteinte ; tout fe maintiendra dans cet ordre admirable , dans cette belleumité d’ad- nüniftration, qui dans chaque partie, apperçoit, em brafle & foûtient l’univerfalité. | | Ces principes ont lieu, foit que les exemprions por: tent fur les perfonnes , foit qu’elles favomfent.les chofes. ; On n’exempte certains fonds, certaines denrées ; certaines marchandifes des droits d'entrée , de ceux de fortie, des droits locaux, qu’en faveur du com- merce, de la circulation , de la confommation , & toüjours relativement à l'intérêt que l’on a derete= nir Où d'attirer , d'importer ou d'exporter le nécef- faire ou le fuperflu. Il ne faut pas au furplus confondre les privilèges & les exemptions. Toutes les exemptions font des privilèges , en ce que ce font des graces qui tirent de la regle générale les hommes & les chofes à qui l’on croit devoir les accorder. Mais les priviléges ne renferment pas feulement des exemptions. | Celles-ci ne font jamais qu’uriles & purement paf: Jives , en ce qu’elles difpenfént feulement de payer ou de faire une chofe ; au lieu que les privilèges peu= vent être à la fois utiles ou honorifiques , ou tous les deux enfemble , & que non-feulement ils difpenfent de certaines obligations, mais qu'ils donnentencore quelquefois Le droit de faire & d’exiger. Voyez Pri- VILÉGE pour le furplus des idées qui les diftinguent & les caratérifent. EXEQUATUR, {, m. (Jurifprud.) terme latin qui, dans le ftyle des tribunaux, s’étoit long - tems confervé , comme s'il eût été françois. C’étoit une ordonnance qu'un juge mettoit au bas d’un jugement . émané d’un autre tribunal, portant permiflion de le mettre à exécution dans fon reflort ; c’étoit propre- ment un pareatis, Voyez PAREATIS, (4) EXERCICE, f. m, (Arr. milir.) On entend par ce terme, dans l’art de la guerre, tout ce qu’on fait pratiquer aux foldats, pour les rendre plus propres au fervice militaire. ù frs Aïnfi l'exercice confifte non-feulement dans Le ma niement des armes &c les évolutions, mais encore dans toutes les autres chofes qui peuvent endurcir le foldat, le rendre plus fort 8 plus.en état de fuppor- ter les fatigues de la guerre. | Dans l'ufage ordinaire , on reftraint le terme d’e- xércice au maniement des armes ; maïs chez les Ro- mains , on le prenoit dans toute fon étendue. Les exercices regardoient les fardeaux , qu'il falloit accot- tumer les foldats à porter ; les .différens ouvrages qu'ils étoient obligés de faire.dans les camps &c dans les fiéges, & l’ufage & le maniement de leurs ar- mes. | Les fardeaux que les foldats romains étoient obli- gés de porter, étoient fort pefans ; car outre les vi- vres qu’on leur donnoit , fuivant Cicéron, pour plus de quinze jours , ils portoient différens uftenfiles ,. comme une fcie, une corbeille, une bêche, une ha- che, une marmite pour faire cuire leurs alimens, trois. ou quatre pieux pour former les retranchemens du. &añnp, &c. Îls portoient auffi lents ariñes qu'ils na bandonnoïent jamais , & dont ils n’étoient pas plus embarraflés que de leurs mains , dit l’auteur que nous venons de citer. Ces différens fardeaux étoient f confidérables ; que l’hiftorien Jofephe dit, dans le fecond livre de la guerre des Juifs contre les Ro- mains ; qu'il y avoit peu de différence entre les che- vaux chargés & les foldats romains. " Les travaux des figes étoient fort pénibles, & ils tegardoiïént uniquement les foldats. “ Durant la paix on leur faifoit faire des chemins, » conftruire des édifices , & bâtir même des villes en- » tieres , fi l’on en croit Dion Caflius , qui l’aflüre # de la ville de Lyon. Il en eft amf de la ville de # Doesbourg dans les Pays-Bas, & dans la Grande- » Bretagne, de cette muraille dont il y a encore des » reftes, & d’un grand nombre de chemins ma- » gnifiques ». Nieuport , coér. des Rom. L'exercice des armes fe faifoit tous les jours, en temps de paix & de guerre, par tous les foldats, ex- cepté les vétérans. On les accoûtumoit à faire vingt milles de chemin d’un pas ordinaire en cinq heures d'été, & d’un pas plus grand, vingt-quatre milles dans le même tems. On les exerçoit aufli à courir, afin que dans l’occafon ils pûflent tomber fur len- nemi avec plus d’impétuofité , aller à la découver- te , 6c. à fauter , afin de pouvoir franchir les foffés qui pourroient fe rencontrer dans les marches & les pañlages difficiles: on leur apprenoit enfin à nager. & On n’a pas toüjours des ponts pour pañer des ri- »# vieres : fouvent une armée eft forcée de les traver- » fer à la nage, foit en pourfuivant l'ennemi , foit en # {e retirant : fouvent la fonte des neiges , ou des # orages fubits, font enfler les torrens , & faute de # favoir nager , on voit multiplier les dangers. Auffi » les anciens Romains , formés à la guerre par la # guerre même , & par des périls continuels, ayoient- »# ils choïfi pour leur champ de Mars un lieu voifin # du Tibre : la jeunefle portoit dans ce fleuve la » fueur & la poufliere de fes exercices | & fe délafloit » en nageant de la fatigue de la courfe ». Vegece, trad, de M. de Sigrais. | Pour apprendre à frapper l'ennemi, on les exer: çoit à donner plufeurs coups à un pieu. « Chaque # foldat plantoit fon pieu de façon qu'il tint forte- #5 ment, & qu'il eût fix piés hors de terre : c’eft con- # tre cet ennemi qu'il s’exerçoit , tantôt lui portant # fon coup au vifage ou à la tête , tantôt l'attaquant # par les flancs, & quelquefois fe mettant en poftu- » re de lui couper les jarets, avançant, reculant & #tâtant le pieu avec toute la vigueur & l’adrefe »# que les combats demändent. Les maîtres d’armes # avoient fur-tout attention que les foldats portaf: y fent leurs coups fans fe découvrir », Vegece , mé- ne trad, que ci-deffus: | | On peut voir dans cet auteur le détail de tous Les autres exercices des foldats romains : ils étoient d’un ufage général ; les capitaines & les généraux mêmes ne s’en difpenfoient pas dans les occafons impor- tantes. Plutarque rapporte , dans la vie de Marius, que ce général defirant d’être nommé pour faire la guerre à Mithridate , « combattant contre la débilité s de fa vieilleffe , ne failloit point à fe trouver tous les jours au champ de Mars, & à s’y exerciter avec » les jeunes hommes, montrant fon corps encore + difpos & leger pour manier toutes fortes d'armes , »è piquer chevaux ». Trad, d'Amyot. Ce même auteur rapporte auffi que Pompée , dans la guerre civile contre Céfar , exerçoit lui-même fes troupes ; « & qu'il travailloit autant fa perfonne, #5 que s’il'eût été à’la fleur de fon âge ; ce qui étoit # de grande efficace pour aflürer &encourager les # autres de voir le.grand Pompée, âgé de cinquan- # te-huit ans , combattre à pié tout armé , puis à che- | EXE 239 # val dépaignèr fon épée fans difficulté, peñdant que » {où cheval couroit à bride-abattue , & puis la ren- » gaignet tout aufh facilement ; lancer le javelot, » non-feulement avec déxtérité, de donner à point # nommé , mais auf avec force, de lenvoyer f loin * que peu de jeunes gens le pouvoient pailer », Fe de Pompée d'Amyot. 4} Il eft aifé de fentir les avantages qui réfultoient de l'ufage continuel de cesexercices. Les corps étoient en etat de foûtenir Les fatigues extraordinaires de la guerre, & il arrivoit, comme le dit} ofephe; que chez les Romains la guerre étoit une méditation , & la paix un exercice, <# L'auteur de l’hifloiré de la milice françoife dit, avec beaucoup de vraiflemblance, qu'il y a lieu de conjetturer que dès l’établifement de la monarchie françoïfé dans les Gaules:il ÿ avoit exercice pour les {oldats, « Il eft certain, dit-il, qu’on faifoit des re- » vües dans'ce qu’on appelloit le champ de Mars , & » qui fut depuis appellé le champ de Mai, On y exa- # minoït avec foin les armes des foldats ; pour voir » fi elles étoient en état; & cette attention marqué » qu'on ne négligeoit pas lés autres chofes qui pouz # voient contribuer aux fuccès de la guerre. » On commence à voir fous la troifiéme race ; » dès le tems de Philippe [. ce que j'ai appellé, dit « toüjours le P. Daniel, l'exercice général ( c’eft celui » qui confifte à accoûtumer les foldats au travail & » à la fatigue). Ce fut vers ce tems-là qué commen: » cerent les tournois, où les feigneurs & les gentils- » hommes s’exerçoient à bien manier un cheval, à » fe tenir fermes fur leuts étriers, à bien dreffer un » coup de lance, à fe fervir du boucliér, à porter & » à parer les coups d’épées, à s’accoûtumer à fuppor- # ter le faix du harnois, & aux autres chofes utiles & » néceflaires pour bien combattre dans les armées : » mais pour ce qui eft de l’exerciceparticuliér,qui con- » fifte dans les divers mouvemens qu’on fait faire aux » troupes dans un combat, je n’ai rien trouvé d’écrit »# fur ce fujet jufqu’au tems de Louis XI. » H/foire dè la milice françoife, tom. I. pag. 376. « Nous remarquons aujourd’hui, dit lilluftre 8 profond auteur des confidérarions fur les caufes de Le grandeur des Romains , » que nos armées périffent » beaucoup par le travail immodéré des foldats ; & » cependant c'étoit par un travail immenfe que les » Romains fe confervoient. La raïfon en eft je croi, » dit cet auteur, que leurs fatigues étoient conti- » nuelles ; au lieu que nos foldats paflent fans cefle » d'un travail extrème à une extrème oifiveté, ce qui » eft la chofe du monde la plus propre à les faire pé- » ir, Nous n'avons plus une juite idée des exercices » du corps. Un homme qui s’y applique trop nous » paroît méprifable, par la raifon que la plüpart de » ces exercices n'ont plus d'autre objet que les agré- » mens ; au lieu que chez les anciens , tous, jufqu'à » La danfe, faifoit partie de l’Art militaire ». Confrdé. rations fur la grandeur des Romaïns, &tc. L'invention de la poudre à canon a été la caufe de la ceffation totale, pour dinf dire , de tous Les exerce: ces propres à endurcir le corps & à le fortifier pour fupporter les grands travaux. Avant cette époque; la force particuliere du corps caradérifoit Le héros ; on ne négligeoit rien pour {e mettre en état de fe fer: vir d'armes fort pefantes. 4 On voit encore aujour« » d’hui dans l’abbaye de Roncevaux les maflues de » Roland & d'Olivier, deux de ces preux fi fameux » dans nos romanciers du tems de Charlemagne: » Cette efpece de maflue eft un bâton gros comme » Le bras d’un homme ordinaire ; il eft long de deux » piés & demi; il a un gros anneau à un bout, pour » y attacher un chaînon ou un cordon fott, afin qué » cette arme n’échappât pas de la main; & à l’autre . » hout du bâton fonc trois chainons , auxquels eft at- 240 E X E # taché une boule de fer di poids de Hit livres, # avec quoi on pouvoit certainement aflommer un » homme armé, quelque bonnesique fuflent fes ar- # mes, quand le bras qui portoit le coup étoit puif- # fant. Il n’y a point d'hommes de cetems aflez forts ».pour manier une telle arme: c’eft qu’alors on exer- » çoit dès la plus tendre jeuneffe les enfans à porter # à la main des poids fort pefans ; ce qui leur fortifioit #.le bras; & par l’habitude ils yacquéroient une for- » ce extraordinaire: ce qu'on ne fait plus depuis plu- » fieurs fiectes ». Hi/£, de la milice frang, par le P. Da- mel C’eft par des exercices de cette efpece qu’ils acqué- roient cette force de bras qui produifoient ces coups extraordinaires, qu'on a beaucoup de peine à croire aujourd’hu., Voyez EPÉE. Les armesque lufagede lapoudrea introduites dans les armées, n’exigeant aucun effort confidérable , on s’eft infenfblement deshabitué de tous les exercices qua pouvoient augmenter la force du corps, & l’endurcir aux travaux. On ne craint point de dire qu’on porte un peu trop loin aujourd’hui la négligence à cet égard: de-là vient que notre jeune noblefle, quoi- que pleine de valeur & d’envie de fe fignaler à la guerre, foütiendroit difcilement une longue fuite de travaux rudes & pénibles , le corps n’y étant point aflez accoütume. On fait combien nos cuiraf- {es, fi legeres en comparaifon de l’armure des an- ciens gendarmes, paroiflent incommodes par leur poids : quel qu’en foit l’utilité & la néceflité, on s’en débarrafferoit fouvent dans l’aétion même, fi les reglemens n’obligeoient pot à les porter. Le défaut d'exercices fatigans eft la caufe de cette efpece de mollefle. « Auffi, dit le P. Daniel, excepté la mé- » diocre fatigue de l’acadèmie où paffent les jeunes # gens de condition, & qui confifte à s’accoütumer à »# manier un cheval, à en fouffrir Les fecoufles, à faire # des armes, & à quelques autres exercices, les {ol- » dats, foit cavaliers, {oit fantaflins, font pour la »# plüpart des fainéans que laverfion pour le travail » & l’appas de la Hicence engagent au fervice , dont # plufeurs y périffent, foit par la foiblefle de leur # tempérament, foit parce qu'ils font déjà ufés de dé- » bauche. Ils ne portent pour la plüpart que leurs ar- » mes, beaucoup plus legeres que celles des anciens, » qui outre les offenfives en avoient de défenfives, » c'eft-à-dire des cafques, des cuirafles , des bou- » chers. Dans les campemens & dans les fiéges où » 1ls n'ont guere que le travail des tranchées, 1ls de- » meurent oïfifs la plüpatt du tems. Les plus gros » travaux fe font par des payfans qu'on fait venir » des villages circonvoifins. Je ne parle point ici des # officiers dont la plüpart fe piquent autant de luxe, » de délicateffe, de bonne-chere , que de valeur & # d'application aux fonétions de leurs charges. Quel- »# le différence tout cela doit-1lmettre entre nos trou- » pes & celles de ces anciens Romains »! Mifloire de la milice franç. tom. II. pag. Gou. L'exercice des troupes de l’Europe aujourd’hui , confifte uniquement dans le maniement des armes & dans les évolutions. Voyez EVOLUTION. Le maniement des armes, qu’on appelle commu- nément l'exercice, comme nous l'avons déjà dit, a pour objet d’habituer les foldats à fe fervir avec grace , promptitude, & accord , des armes propres à l'infanterie, c’efl-à-dire du fufl avec la bayon- nette au bont, qui eft aujourd’hui la feule arme du foldat. | Cet exercicerenferme plufeurs chofes arbitraires. Ses regles générales, fuivant M. Bottée, font de faire obferverau foldatune contenançefiere, noble, & ai- fée. Or comme il eft poffible que des mouvemens qui paroïflent aifés & naturels aux uns , ne le foient pas également aux yeux des antres; que des tems & des pofitionsque les uns jugent néceffaires, les autres les croyent inutiles; 1l arrive de-là que l'exercice n’a point encore eu de regles fixes & invariables parmi nous (a): regles cependant qui ne feroient pas fort difficiles à trouver, fi l’on vouloit fe renfermer dans le pur néceffaire à cet égard, c’eft-à-dire réduire le maniement des armes aux feuls mouvemens que le foldat peut exécuter devant l'ennemi , 8 ne pas s’at. tacher à faire paroïtre une troupe par une cadence & une mefure de mouvemens, plus propre, dit M. le. maréchal de Puyfegur, & donner de lasterition aux Jpeülateurs , qu'a remplir l'objes capital , qui eft d'ap- prendre aux foldats comment us doivent fe fervir de leurs armes un jour d’alion. Art de la guerre, s. I. pag: 131. Ce même auteur, après avoir donné un projet d'exercice qui renferme tout ce qu’il y a d’utile dans le maniement des’armes, obferve qu’il y a bien d’au« tres chofes dont il faut que les foldats foient inf- truits; « que le principal objet du maniement des: » armes doit être de bien montrer au foldat comment: » 1] doit charger promptement fon fufil , foit avec la » cartouche ou en fe fervant de fon fourniment pour » mettre la poudre dans le canon, foit que la bayon-. » nette foit au bout ou non ; comment il doit condui- » re fon feu dans les occafons où il peut fe trouver; » de l’accoûtumer à ne Jamais tirer fans ordre, & » fans regarder où 1l tire, afin de ne pas faire des » décharges mal-à-propos, ainfi que cela arrive tous » les jours aux troupes qui ne font pas inftruites de: » cette maniere; de le faire tirer au blanc contre » une muraille, afin qu'il voye le progrès qu'il fait. » & comme on eft obligé de charger le fufl , foit. » debout, ou un genou enterre, 1l faut que ces deux » manieres de le faire entrent dans ce qui regarde le » maniement des armes ». Art de la guerre, rom. I. pag. 137. & 138, Ajoûtons à ces différentes obfervations , qu'il fe: roit peut-être très-utile de faire connoître au fol-. dat toutes les différentes pieces du fufl, afin qu'il puïffe lé démonter , le nettoyer , & s’appercevoir: plus facilement des réparations dont cette arme. peut avoir befoin pout être en état de fervice. Il feroit encore à-propos d'apprendre aux foldats. à bien mettre la pierre au fufil, pour qu’elle frappe ä-peu-près vers le milieu de la batterie: car on fait. que lorfque les pierres {ont trop longues , elles caf- fent au premier coup, & que quand.elles font trop courtes, elles ne font point de feu. Plufeurs militaires très - intelligens prétendent auffi qu'il faudroit accoûtumer les foldats à ne pas s’effrayer des chevaux qui s’avanceroient fur eux avec impétuofité, L'expérience fait voir qu'un kom, me réfolu, fuit feul.pour détourner un cheval-em-, porté ou échappé de {on chemin: c’eft pourquoides foldats bien exercés à voir cette manœuvre, feroient plus difpofès à faire ferme contre une troupe de ca. valerie qui voudroit les mettré en defordre. le} C’eft le fentiment particulier de M. le marquis-de. Santa-Crux. Cet illufre & favant officier général, dit fur ce fujet, « que les officiers d'infanterie doi- » vent, en préfence de leurs foldats, faire monter » fur un cheval fort & robufte, tel homme aw’on » voudra choïfif, qui viendra fondre enfuite fur un, » fantaflin, qui Pattendra de pié ferme, fenlement, » un bâton à la main; & ils verront qu'en ne faifant, » que voltiger le bâton aux yeux du,cheval, où en, » le touchant à la tête, ce cheval fera un écart fans » vouloir avancer , à moins qu'il ne foit drefé à ce: » manége. De-là les officiers, continue M. le mar- » quis de Santa-Crux, prendront occafon de repré, (2) Ceci étoit écrit avant l'ordonnance du 6 Maï1755, qui décide définitivement tout ce qui a rapport à l’exercrce des l'infanterie, | » fentes ÿ fenter aux foldats, que fi un cheval s'effarouche »# d’un homme qui tient ferme, n’ayant qu’un bâton # à la main, à plus forte raifon ils trouveront que les # éfforts de la cavalerie font inutiles contre des ba- » taillons ferrés, dont les bayonnettes, les balles & » l'éclat des armes, la fumée & le bruit de la poudre # {ont plus capables d’épouvanter les chevaux », Reflex. milie. som. III. pag. 85. À l'exercice concernant le maniement des armes, où a ajoûté l'exercice du feu | comme le nomme l'inf- truétion du 14 Mai 1754 : exercice très-eflentiel , qui cônfifte à accoûtumer les troupes à tirer enfemble, ou féparément , par feétion, pelotons , &c. fuivant qu'on le juge à-propos. Voyez FEU. Le fond & la forme de nôtre exercice ordinaire eft fort ancien, Il paroït être imité de celui des Grecs, rapporté par Elien dans fon traité deT'aétique. Le P, Daniel croit que nous l'avons rétabli & perfe@ionné fur le modelè des Hollandois ; & cela fur ce. que M. de Montgommeri de Corbofon, qui vivoit fous Char- les IX. & Henri IL. parlant dans {on tiaité de la mi- lice françoife, de l’exercice particulier des foldats dé- crit par Elien, le compare avec celui qui fe faifoit alors en Hollande fous le comte Maurice, & non point avec celui qui fe faifoit en France. | On trouve dans le livre intitulé le Maréchal de ba- taille, par Loftelneau, imprimé en 164%, l'exercice ëx les évolutions en ufage dans les troupes du tems de Lotus XTIT. Louis XIV. donna un reglement fur ce fujet en 1703. Comme les troupes ayoient encore alors des moufquets & des piques , on fut obligé de le réfor- mer peu de tems après, à caufe de la fuppreffion de ces deux armes, ce qui arriva vers l’année 1704. Ce æeglement accommodé à l’ufage des troupes armées de fufils, qu’on trouve dans le code militaire de M. Briquet &c dans béaucoup d’auties livres, à été aflez conftamment & uniformément obfervé par toute Pinfanterie, jufqu’à l'ordonnance du 7 Mai 1750, qui a introduit beaucoup de changemens dans l’an- cien exercice, Voyez cette ordonnance, l'inftfuétion concernant fon exécution donnée en 1753 ; celle du 14 Mai 1754, Qui raflemble tout ce qui avoit été pré- cédemment ordonné fur cette matiere; & l’ordon- nance du 6 Mai 1755. Voyez auf, page 131 de l’art dé la guerre par M. le maréchal de Puyfegur, rom. I. à quoi l’on peut réduire lé maniement des armes, pour ne rien faire d’inutile. | Les majors des places doivent, fuivant les regle- mens militaires , faire faire l'exercice général aux troupes de la garnifon une fois le mois; & les ma- jors des régimens d’infantérie, deux fois la femaine aux foldats des compagnies qui ne font pas de gàr- de. Ordonn. de Louis XIV. du 12 O&. 1661. À cet exercice, néceflaire pour apprendre äux foldats le maniement des armes dont ils fe férvent ; M. le Marquis de Santa-Crux voudroit qu’on ajoû- tât les exercices généraux qui peuvent les rendre plus propres aux différens travaux qu’ils ont à faire dans les armées. « I] faut, dit cet auteur, aecoûtumer les » foldats à remuer la terre , à faire les fafcines & à » les pofer ; à planter des piquets, à favoit {e {ervir » dé gabions pour fe rétrancher en formant le foflé, » le parapet, & la banquette dans l'endroit que lés “ingénieurs auront tracé, ou le parapet & la ban- » quette feulement , prenant la terre èn-dedans de » lamême maniere que cela fe pratique dans les tran- » chées pour les attaques des places ; car lorfqu'il eft » befoïn de faire de femblables travaux, fur-tout à # la vûe de l'ennemi , les troupes qui ne s'y {ont pas » EXErCées fe trouvent embarraflées &c Les font im- # parfaitement ou trop lentement. Reflexions milir. rom. Î. p.30 3. de la trad. de M. de Vergy. € même auteur vent auf qu'on accoûtume les Tome FL | EXE 241 foldats à conferver dans les marches, le pain qu’on leur diftribue pour un certain tems, parce qu’on voit dans divers corps un fi grand defordre à ce füjet, “que dès le premier jour les foldats vendent leur » pan ou le jettent pour n'avoir pas la peine de le » porter ; & après 1ls font obligés de voler pour vi- » vre, Ou ils font bien malades faute de nourriture, » Ou la faim les fait deferter », Méme vol, que ci-de- Van ; p. 898. | | Cet auteur veut encore qu’on inftruife les fantaf. fins à monter en croupe de la cavalerie » Parce que cela eft fouvent néceflaire pour les paflages des ri- vieres, les marches précipitées, &c. Il obferve auffi «que les anciens apprenoïent aux foldats À manier » les armes des deux mains , & qu'il ne feroit pas » inutile que le foldat sût tirer de la main gauche » dans les défenfes des murailles & des retranche- » mens qui ont un angle fort obtus vers la droite; » ou lorfqu’étant à cheval il eft néceffaire de tirer » vers le côté droit : qu’il y auroit également de » l'avantage à exercer les cavaliers à fe fervir de la » main gauche pour le fabre, fur-tout lorfque dans » les éfcarmouches l’ennemi lui gagne ce côté-Ilà, » parce qu'alors ils ne peuvent pas fe fervir du fabre » avec la main droite, à moins qu'il ne foit fi long, » qu'il puifle bleffer de la pointe. » Les Germains, du tems qu'ils n’étoient pas moins » guerriers qu'ils le font aujourd’hui, dit toñjours » M. de Santa-Crux , accoütumoient leurs troupes » à fouffrir la faim, la foif, la chaleur, & le froid. » Platon ajoûte à ce confeil celui de les accoûtumer » à la dureté du lit; à l'égard de ce dernier, Zes entre » préneurs ont grand. foin qu'il foit.obfervé : quant aux » fept autres, quoique les accidens de la guerre y. » expofent aflez de tems en tems, il eft certain que » fi dans une longue paix on n’eft pas expofé nécef. » fairement à efluyer quelque fatigue , il faudroit » S’accoïtumer à celle que le métier force fouvent » d'endurer, &c,m. : Quant à la cavalerie, M. de Santa-Crux veut que les cavaliers exercent leurs chevaux à franchir des foflés, à grimper fur des montagnes, & à galoper dans les bois, afin que ces différens obftacles ne les atrétént point dans l’occafion ; que les chevaux foient habitués à tourner promptement de l’une & de l’autre main; qu’on les empêche de ruer, de peur qu'ils ne mettent Les efcadrons en defordre ; qu’on évite avec foin qu’ils ne prennent le mords aux dents, &c qu'ils ne jettent les cavaliers par terre ou qu'ils ne les emportent malgré eux au milieu des ennemis. À ces avis généraux, tirés de Xénophon dans {on traité du général de la Cavalerie, M. de Santa -Crux ajoûte qu'il faut accoûtumer les chevaux à ne pas s’épouvanter de la fumée, du bruit de la poudre, de celui des rambours & des trompettes dont on {e fert dans les armées : il propofe auffi de mettre aux chevaux des brides qui les obligent à tenir la tête un peu élevée , afin que les cavaliers {ojent plus couverts; d’avoir des étriers un peu courts, parce qu'en s'appuyant deflus on a plus de force, & qu’on peut alonger plus facilement le corps & le bras pour frapper, &c. Voyez le xxviij, & Le xxx. chapitres des réflex. milir, de M. de Sänta-Crux, som. I. Les exercices de la cavalerie dont on vient de par: ler, font des exercices généraux qui peuvent lui être trés-utiles; mais à l'égard de celui qui concerne le maniement des armes, foit à pié foit à cheval, qu’on appelle ordinairement l'exercice de la cavalerie , nous tenvoyons à l’ordonnance du 22 Juin 1755. Nous obferverons feulement ici fur ce fujet , qu’un point très-effentiel dans cet exercice, c’eft de bien accoû- tumer la cavalerie à marcher enfemble , de maniere que les différens rangs de l’efcadron fe meuvent com me s’ils formoient un corps folide, fans St leur 242 EXE ordre dans aucün cas. Cette méthode, dit la Noue dans fes difc. milit. « donne un grand fondement à la » viétoire. » C’eft par-là que du tems de cet auteur, la cavalerie allemande avoit la réputation d’être la meilleure de l'Europe. Les rangs de cette cavalerie ne paroïfloient pas feulement ferrés en marchant & en combattant, « ains collés les uns avec les autres , » ce qui procede , dit ce favant officier, d’une ordinaire » accofiumance qu'ils ont de Je tenir toñjours en corps, » ayant appris ; tant par Connoiflance naturelle que par » épreuve, qe le fort emporte rotjours le foible. Et ce » qui rend bontémoignage, ajotte-t-l, qu'ils ne faillent » guere en ceci , cf? que qand ils font rompus , ils fe re- » tirent & fuyent fans fe féparer , étant tous joints en- » femble ». Difcours milir. du feigneur de la Nouë, Pag. 310. Terminons cet article par quelques réflexions de M. le chevalier de Folard , fur l'exercice des troupes pendant la paix. « Dans la paix, la parefle , la négligence, & le » relâchement des lois militaires, font d’une très- » grande conféquence pour un état; car la guerre » furvenant, on en reconnoît aufli-tôt le mal, & ce # mal eft fans remede, Ce ne font plus les mêmes » foldats ni les mêmes officiers. Les peines & les tra- » vaux leur deviennent infupportables ;1ls ne voyent » rien qui ne leur paroïfle nouveau , & ne connoif- » fent rien des pratiques des camps & des armées. »# Si la paix #a pas été aflez longue pour faire ou- » blier aux vieux foldats qu’ils vivoient autrefois fe- # lon les lois d’une difcipline reglée & exatte, on >» peut leur en rappeller la pratique par des moyens » doux & faciles; mais fi la paix a parcouru un ef- » pace de plufieurs années, ces vieux foldats, qui » font l’ame & l’efprit des corps où 1ls ont vieilli, # feront morts ou renvoyés comme inutiles, obligés » de mendier leur pain, à moins qu'ils n’entrent aux » invalides : mais cette reflource ne fe trouve pas » dans tous les royaumes, & en France même elle » n’eft pas trop certaine : fouvent une infirmité fein- »te, aidée de la faveur, y ufurpe une place qui n’a » été deftinée qu'aux infirmités réelles : les autres, » qui ne font venus que vers la fin d’une guerre, au- » ront oublié dans la paix, ce qu'ils auront acquis » d'expérience danses exercices militaires, & entre- » ront en campagne très-corfompus &t très-1pn0rans. » Les vieux officiers feront retirés ou placés; s'il en » refte quelques-uns dans les corps, ils pafleront (fi » la corruption ne les a pas gagnés) pour des rado- # teurs & des cenfeurs incommodes parmi cette fou- » le de jeunes débauchés & de fainéans fans applica- +» tion & fans expérience. Ceux qui aimeront leur » métier fans l'avoir pratiqué, pour être venus après s la guerre, feront en fi petit nombre, qu'ils fe ver- »#ront fans pouvoir , fans autorité , inconnus à la » Cour; &t ce fera une efpece de prodige s'ils peu- » vent échapper aux railléries & à l'envie des au- » tres, dont f, conduite eft différente de la’leur. Je # ne donne pas ceci, dit M. de Folard , comme une # chôfe qui peut arriver, mais comme un fait d’ex- #périence journaliere. ..… Maïs faut-il beaucoup de + tems pour corrompre la difcipline nulitaite & les » mœurs des foldats & des officiers ? Bien des gens, » fans aucune expérience du métier, fe l’imaginent: + ils fe trompent; un quartier d’hyvér fuffit.... Les + délices de Capoue font célebres dans lhiftoire : ce » ne fut pourtant qu’une affaire de cinq mois d’hy- » ver; & ces cinq mois firent plus de tort aux Car- » thaginois, que la bataille dé Cannes n’en avoït fait » aux Romains ». AL Pour éviter ces inconvéniens, M. de Folard pro- pofé « de former plufñeurs camps en été , où les »# Officiers généraux exerceroient eux-mêmes leurs # troupés dans les grandes manœuvres de la guerre, Fr Ë À E » c'eft-à-dire dans la Ta@ique, que les foldats non » plus que les officiers, ne peuvent apprendre que » par l'exercice, On formeroit par cette méthode des » oldats expérimentés, d’excellens officiers, & des » généraux capables de commander les armées ». Comment. fur Polybe, vol. IT, p. 286. & fuir. C’eft ce qu'on obferve en France depuis quelques années, &t dans quelques autres états de l’Europe. Moyen excellent pour entretenir les troupes dans l’habitude des travaux militaires , & pour faire acquérir aux ofMciers fupérieurs l’ufage du fervice 8 du comman- dement. (Q) À ces réflexions générales de M. le Blond fur les exercices, M. d'Authville a cru pouvoir ajoûter les obfervations particulieres qui fuivent. Pour concevoir tout ce qu’on doit enfeigner &c apprendre aux exercices , on doit fe repréfenter les troupes fuivant leurs différentes efpeces & dans tous les différens cas où elles peuvent fe trouver : on ré nit ces cas fous quatre points de vüe. - 1°. Lorfqw’elles font fous les armes pour s’inftruire de ce qu’elles doivent faire dans toutes les circonf- tances de la guerre. 2°, Lorfque pour les endurcir & les fortifier, on les fait ou travailler ou marcher. 3°. Lorfque loin de l’ennemi elles font fous les ar: mes, foit en marche, foit pour pañler des revües, foit pour faire des exercices de parade, pour rendre des honneurs, faire des réjouiflances , ou aflifter à des exécutions, 4°. Lorfqw’en préfence de l'ennemi, elles atten- dent l’occafon de le combattre avec avantage, le cherchent, lattaquent, le pourfuivent , ou font re traite. Pour parvenir à rendre le foldat capable de rem: plir tous ces objets, les exercices doivent être très fréquens ; c’eft le plus sûr moyen d'établir & main- tenir dans les armées une bonne difcipline. Il faut s’appliquer à entretenir les anciens foldats dans Pufage de tout ce qu’ils ont appris &c de tout ce qu'ils ont fait pendant [a guerre ,"& les infiruire fur les nouvelles découvertes faites au profit des armes, - qui font ordinairement le fruit & la fuite des progrès faits à la guerre ; on doit avec encore plus de foin former les nouveaux foldats, &r les exercer plus fou- vent dans tout ce que les uns & les autres font obli- gés de favoir. Les exercices fe renferment en cinq parties princi< pales : 1°. Maniement des armes propres à chaque efpe= ce de troupes, on y doit comprendre l’art de monter à cheval. Foyez MANIEMENT DES ARMES, € roues ce qui a rapport a l’'ÉQUITATION. 2°, La marche, mouvement par lequel une trou pe, foit à pié foit à cheval, fe porte avec ordre en- avant ou de tout autre côté. Voyez MOUVEMENT 3°. Les évolutions : on entend par-là tous les chan- gemens de figure qu’on fait fubir à une troupe. Foy. EVOLUTION. | | 4°. Le travail, qui confifte dans la conftruion des retranchemens, forts, ou d’autres ouvrages faits pour Pattaque & défenfe des places & des camps, & dans le tranfport des chofes qui y font néceflaires. 5°. La connoïffance des fignäux , tels que les di- vers fons de la trompette, des tambours, &c. Voyez SIGNAUX. | L’ordonnance du 6 Mai, quant aux exercices de l'infanterie, & celle du 22 Juin 1755, en ce qui con- cerne la cavalerie, font fi étendues qu'il feroit im- poflible de les rapporter ici. Avant que de fixer ce qui doit être.exécuté dans les exercices | le miniftere de la guerre a cru qu'il devoit confulter chaque corps de troupes en particulier ; pouf cet effet il a. été adreflé à tous les régimens de cavalerie 8 d'in- EXE fanterie depuis la paix, & fucceflivément d'année en année, des inftruétions fur lefquelles les épreu- ves ont été faites des meilleurs moyens d'exercer Les troupes, fuivant que la derniere guerre en avoit fait fentir la néceflité, &c fuivant le génie de la nation: {ur ces inftruétions les commandans des corps, après avoir pris l’avis des officiers, ont fait leurs obferva- tions , qui ont été examinées par le miniftre de la guerte dans des affemblées d'officiers généraux; & fur le compte qu'il en a rendu au Roi, il a plà à Sa Majefté rendre les ordonnances dont on vient de parler. . - Ces ordonnances contiennent les titres fuivans : Cavalerie. Desobligations des officiers, & de la maniere dont ils doivent faluer, De l'école du cavalier. Du maniement des ârmes à pié. Du maniément des armes à cheval. Delinfpettionàäpié. De l'infpection à cheval. Des maximes générales pour les manœuvres. Des manœuvres pour une compagnie. Des manœuvres pour un ré- giment. Des manœuvres pour une Infanterie, Des obligations des officiers & de la maniere dont ils doivent porter les armes & en faluer , ainf que les fer- gens. De l’école du foldat. De la formation & aflémblée du bataillon. Du maniement des armes. De la marche. Des manœuvrés par rang & par file: Des évolutions pour rompre & reformer les bataillons. De la colonne. De l'exercice du feu. : Des batreries , dés tambours, & des fignaux relatifs aux évolutions, | Des revües, Si nous furpaflons les anciens én adrefle , en agi- lité , il faut convenir qu'ils nous étoient bien fupé- rieursen force , puifqu'ils s’apphquoient fans cefle à la Gymnaftique , & à fortifier leurs foldats, On trouve ci-deflus , en abrégé , les différens exer- cices des Romains : pour ce qui eft des Grecs, dont la Tadtique d’Elien renferme tous les exercices , un officier fort favant nous en promet une traduétion dans peu de tems avec des notes; elle fera précédée d’un difcours fur la milice des Grecs en général, S'il eft d’une indifpenfable néceflité que toutes les troupes en général {oient conftamment exercées aux différentes manœuvres de la guerre, on peut aflürer que cette loi oblige plus effentiellement la cavalerie que l’infanterie : non-feulement le cavalier doit fa- voir tout ce qu’on fait pratiquer au fimple fantaf- fin ; deftiné à un genre de combat différent , il faut encore qu'il s’y forme avec la plus grande attention, &c qu'il y forme en même tems fon cheval : il faut qu'il apprenne à manier ce cheval, & à le conduire avec intelligence ; qu'il l’accoûtume à l’obéiffance & à la docilité; qu'il Le drefle à un grand nombre de mouvemens particuliers ; que par des foins vigilans, il entretienne & augmente la force & la vigueur na- turelle de cet animal , fa foupleffe & fa legereté, &c qu'il le rende capable de partager tous les fentimens dont il eft lui-même tour-à-tour animé, foit à l’af- et de ennemi, foit au commencement du com- bat , foit dans la pourfuite : il n’eft rien de plus dan- gereux pour un cavalier, que de monter un cheval mal dreflé : la perte de fa vie & de fon honneur le punit très-fouvent de fa négligence à cet égard. La Grece divifée en autant de républiques qu’elle contenoit de villes un peu confidérables , offroit au- tour de leur enceinte, le fpe@acle fingulier & frap- . pant d’une multitude d’habitans incefflamment occu- pés à la lutte, au faut, au pugilat , à la courfe, au jeu du difque : ces exercices particuliers fervoient troupe de ciñquante maîtres. Des fignaux. de préparation à un exercice général de toute la na . ti0n , qui fe renouvelloit tous les quatre ans en Elide (proche de la ville de Pife, autrément dite Olym- pie ) , & formoit la brillante {olemnité des jeux olympiques. Si l’on refléchit fur le caractere des Tome VI, | EXE 243 perfonnages illuftres, à qui lon attribue le rétablifs fement de ces jeux, on verra qu'ils étoient pures ment politiques , 8 qu'ils avoient moins pour objet ou la réligion ou l'amour des fêtes , que d'infpirer aux Grecs une utile aéivité, qui les tint toijours préparés à la guerre. A | Les exercices dans lefquels il falloit excellet, pouf entrer dans la carriere olympique , entrétenoient lé corps agile, fouple, leger, & procuroient aux Grecg une vigueur & une adreffe qui les rendoit fupérieurs à leurs ennenus, = | | C’eft dans la même vûe & pour les mêmes raifons que furent inftitués les jeux pythiques Les amphic- tions, les députés des principales villes de la Grecé y préfidoient, & regloient tout ce qui pouvoit cons tribuer à la füreté 8 à la pompe de la fête. Quant aux Romains, moins éloignés de nos tems; l’on fait que chacune de leurs immenfes conquêtes a été le fruit de leurs exercices , & de l'attention qu'ils apportoient à former des foldats. E On accoûtumoit les foldats romains , comme ôn l’a dit plus haut , à faire vingt milles de chemin d’un pas ordinaire en cinq heures d'été | & d’un pas plus grand, vingt-quatre milles dans le même tems : ces pas comparés à ceux que prefcrit la nouvelle ordon- nance , leur font égaux, fuivant l’exaéte fupputation des heures, des milles, & des piés. Voyez Pas. L’hyver comme l'été , les cavaliers romains étoient tégulierement exercés tous les jours ; & lorfque la rigueur de la faifon empêchoit qu’on ne pt le faire à l’a, ils avoient des endroits couverts , deftinés à cet ufage. On les drefloit à fauter fur des chevaux de bois, tantôt à droite, tantôt à gauche ; premie- rement fans armes, enfuite tout armés, & la lancé ou l'épée à la main: après que les cavaliers s’étoient ainf exercés feul à feul, ils montoient à cheval, & on les menoit à la promenade, Là on leur faifoit exé: cuter tous les mouvemens qui fervent à attaquer êz à pourfuvre en ordre : fi on leur montroit à plier ; c’étoit pour leur apprendre à fe reformer prompte- ment , & à retourner à la charge avec la plus grande impétuofité. On les accoûtumoit à monter &c à def: cendre rapidement par les lieux les plus roides & les plus efcarpés , afin qu’ils ne puflent jamais fe trou- ver arrêtés par aucune difficulté du terrein, Enfin les exercices des Romains (au rapport de Jo: fephe, Liy, LIT. ch. vj.) né différoient en rien des vé: titables combats : ils pouvoient , ajoûte-t-1l , fe nom mer batailles non fanglantes , &c leurs batailles des exercices fanglans, | | L’hiftoire nous fait voir une des principales cau= fes des fuccès d’Anmibal, dans le relâchement où leg Romains étoient tombés après la premiere guerré punique, WE: | Vingt ans de négligence ou d'interruption dans leurs exercices ordinaires, les avoient tellement éner: vés & rendus fi peu propres aux manœuvres de læ guerre , qu'ils ne purent ténir contre les Carthagi= nois , & qu'ils furent défaits autant de fois qu'ils ote: rent paroiître devant eux en bataille rangée : ce né fut que par l’ufage des armes qu'ils fortirent peu-à- peu de l’état de foiblefle 8 d’abattement où les avoit réduits le mauvais emploi qu’ils avoient fait du repos de la paix : de fages généraux firent revivre dans les légions lefprit romain , en y tétabliffant l’ancienne difcipline & l'habitude des exercices : alors leur cou: rage fe ranima ; & l'expérience leur ayant donné de nouvelles forces , d’abord ils arrêterent les progrès rapides de l’ennemi , enfuite ils balancerent fes {uc- cès, enfin ils en devinrent les vainqueurs. Scipiont fut un de ceux qui contribua davantage à un fs prompt changement : il ne croyoit pas qu'il y eût de meilleur moyen pour afürer la viétoire à fes trou« pes, que de les exerçer fans relâche, C’eft dans cettæ hi 244 EXE occupation qu'on le voit goûter les premiers fruits de la prife de Carthagenñe ; moins glorieux d’une fi brillante conquête , qu’ardent à fe préparer de nou: veaux triomphes , tout le tems qu'il campa fous les murs de cette place, fut employé aux différens exer- cices militaires, Le premier jour, toutes les légions armées faifoient en courant un efpace de quatre nulles ; le fecond, les foldats au-devant de leurs ten- tes s’occupoient à nettoyer & à polir leurs armes ;'le troifieme ; ils fe comnbattoient les uns les autres avéc des efpeces de fleurets ; le quatrieme étoit donné au repos des troupes, après quoi les exercices recom- mençoient dans lé même ordre qu'auparavant. Un hiftorien éclairé nous à confervé le détail des mouvemens que Scipion faifoit faire à fa cavalerie : 1l accoûtumoit chaque cavalier féparément à tour ner fur fa droite & fur fa gauche ; à faire des demi- tours à droite & à gauche ; il inftruifoit enfuite les efcadrons entiers à exécuter de tous côtés, & avec précifion , les fimplés, doubles & triples conver- fions ; à fe rompre promptement, foit par les aïîles, {oit par le centre, & à fe réformer avec la même le: gereté :1l leur apptenoit fur-tout à marcher à l’enne- mi avec le plus grand ordre, & à en revenir de mê- me. Quelque vivacité qu'il éxigeât dans les diverfes manœuvres des efcadrons ; 1l vouloit que les cava- liers gardaflent toûjours leurs rangs , & que les in- tervalles fuflent exatement obfervés : il penfoit, dit Polybe, qu’il n’y a rien de plus dangereux pour la cavalerie , que de combattre quand elle a perdu fes rangs. Si les Grecs & lesRomains ont furpañlé toits les an- ciens peuples parleur conftante application au métier de la guerre, on peut direavec autant de vérité, qué depuistreize cents ans, les François l’emportent par le même endroit fur le reftede l'Europe ; maïs com- me ils n’ont acquis cetté fupériorité qu’à la faveur de fréquens exercicés ; ils doivent pour fe la conferver, perfifter dans la pratique d’un moyen qui peut, lui feul, maintenir leur réputation fur des fondemens inébranlables : lés joûtes & les tournois, genre de fpedaclé dans lequel la nation françoiïfe s’eft dif- tinguée avec tant d'éclat, entretenoient parmi cette nobleffe qui a toûjours été la force & l’appui de l’é- tat, l’adrefle, la vigueur & l'intelligence néceffai- res dans la guerre. L’ordonnance de ces fêtes céle- bres avoit quelque reflemblance avec les jeux olym- iques des Grecs ; mais lon peut aflürer que l’éta- Éement de nos camps d'exercices | remplacera les anciens fpeétacles de nos peres, mais avec d’autant plus d'utilité pour Pétat. Une raïfon bien puiffante , fi l’on veut y faire at- tention, pour prouver la néceflité des exercices, éft que tous les defordres qui arrivent dans les troupes, &c les malheurs qu'éprouvent fouvent les armées, viennent ordinairement de l’inaétion du foldat : Phif- toire eft remplie d'exemples de cette vérité. Les foldats d'Annibal, onne fauroit trop le redire, accoûütumés à endurer la faim, la foif, le froid, le chaud, & les plus rudes fatigues de la guerre, ne fe furent pas plütôt plongés dans les délices de la Campanie, qu'on vit la parefle, la crainte, la for- bleffe & la lâcheté, prendre la place du courage, de l’ardeur , de l’intrépidité , qui peu de tems avant avoient porté la terreur jufqu’aux portes dé Rome. Un feul hyver pañlé dans linaétion & dans la dé- bauche , enfit des hommes nouveaux, &r coûta plus à Anmbal que le paflage des Alpes & tous les com- bäts qu'il avoit donnés jufqu’alots. Les exercices des François, qui après les Grecs & les Romaïns, ont été fans contredit les plus grands guerriers , font fort anciens ; fi l’on en juge par les avantages qu'ils remporterent fur les Romains mê- mes, & par les armes ançiennes qui fe trouvent dans tous lés magafñns d'artillerie, & dont il n’a roit pas été pofhible de fe fervir fans une habitude continuelle. 2e" L’hifoire de la premiere &c dé la feconde race de ñoOs rois ne nous apprend rien de particulier au fujet de leurs exercices. On né peüt que former des con- Jeétures fur ce que nous offre aduellement le bom ordre qu’on remarque dans les armées de Clovis, de Pepin, & de Charlèmagne. La defcription des armes dont parlent Procope & Grégoire de Touts, ne nous laiffe pas douter que les premiers François ne dûffent être bien exercés, pour fe fervir de l'épée, de la hallebarde, de la maflue , dé la fronde, du mai let , & de la hache. Ces armes, pour s’en fervir avec avantage ,exis geoient des exercices, comme on vient de le dire : mais lorfque, depuis l'invention de la poudre on y fubftitua des afmes à feu, il fallut changer ces exer- cices &t les rendre encore plus fréquens , pour éviter de funeftes accidens & pour s’en ervir avec adrefé, Addition de M. D'AUTHVILLE. EXERCICE DE LA MANŒUVRE, ( Marine.) C’elt la démonfiration & le mouvement de tont ce qu'il faut faire pour appareïller un vaifleau, mettre en panne, virer, arriver, mouiller, &c. (Z EXERCICE, (Medecine | Hygiène.) Ce mot, dans le fens dont il s’agit, eft employé pour exprimer l’aéfion par laquelle les animaux mettent leur corps en mouvement, ou quelqu’une de fes parties, d’une maniere continuée pendant un tems confidérable , pour le plaifir ou pour le bien de la fanté. Cette aétion s’opere par le jeu des mufcles, qui font les feulsorganes parle moyen delquels les.ani- maux Ont la faculté de fe trañnfborter d’un lieu dans un autre, de mouvoir leurs mémbres conformémient à tous leurs béfoins. Voyez MUSCLE, On treftreint cependant la figrification d'exercice en général, à exprimer l’a@tion du corps à laquellé on fe livre volontairement êc fans une nécefñité ab: folue, pour la difinguér du travail ; qui eft le plus {ouvent une aétion du corps à laquelle on fe porte avec peine, qui nuit à la fanté & qui accélere le cours de là vie , par l’excès qui en eft fouvent inféz parable. L'expérience fit connoître à ceux qui firent les pré: muers quelqu'attention à ée qui peut être utile ou nuifible à la fanté , que Pexercice di mouvement mu£ culaite eft abfolument néceffaire pour la conferver aux hommes & aux animaux qui font fufcepribles de cette aétion. En conféquence de cétte obfervation la fage antiquité , pour exciter les jéunés sens à exer= cer leur corps, à le fortifier &c à le difpofer à foûtemir. les fatigues de l’agriculture & de la guerre, jugea néceflaire de propofer des prix pour ceux qui fe dif tingueroient dans les jeux établis à cét effet. C’eft dans la même vûe que Cyrus, parmi les foins qu'il prenoit pour l'éducation des Perfés , leur avoit fait une loi de ne pas manger avant d’avoir exercé leur corps par quelque genre de travail. | L’utilité de l'exercice étant ainifi réconnue, défer- mina bientôt les plus anciens medecins à rechercher les moyens de la pratiquer, les plus convénables & les plus avantageux à l’économie animale. D’après des abfervations , multipliées à ce fujet , ils parvin- rent à donner dés regles, des préceptes fur les diffé: rentes mamiérés de s'exercer ; de contribuer par ce moyen à conferver fa fanté & à.fé rendre robufte : ls en firent un'art qu'ils appellerent gyrnaflique me- dicinale, qui fit partié de celui qui a pour objet d’én- tretenir l’économie añimale dans fon état naturel, c'eft-à-dire de PAygière, parce qu'ils rangerent le | mouvement du corps parmi les chofes les plus nécef faires à la vie, dont le bon ou le mauvais ufage con: tribue le plus à la conferver faiñne, ou à en altérer EXE Pintégrité, Îl fut mis au nombre de Cé qu'on appelle dans les écoles /es fix chofes non: naturelles. Voyez HYGIÈNE € GYMNASTIQUE, “ Lé moyen le plus efficace pour fâvotiler lès ex: crétions , c’eft fans doute le mouyément du corps opéré par l'exercice ou le travail, parce qu'il ne peut pas avoir lieu fans accélérer le cours des hu= meurs, fans augmenter les caufes de enr fluidité &c de la chaleur naturelle : d’où doit s’enfuivre une élaboration ; une coéfion plus parfaite, qui difpofent chaque humeur partièulrere à fe féparer du fang , à fe diftribuer & à couler avec plus de facilitéidans fes propres conduits ; enforte que les humeurs excré: mentitielles étant portées dans leurs couloirs; & en: hute jettées hors de ces conduits ou du corps même, en quantité proportionnée au mouvement qui en à facilité la fécrétion (fur-tout celle de Jatranfpiration infenfible, par le moyen de laquelle la mafle des hu: meuts{e purifie & fe décharge des ruines de tous les recrémens , de la férofité furabondante, dégénérée, lixivielle, plus que par toute autre excrétion),, l’ex- crétion en général fe fait avec d'autant plus de re- gle, quelle a été davantage préparée par le mouve: ment du corps, entant qu’il a empêché ou corrigé Pépaiffiflement vicieux que les humeurs animales j pour la plüpart, & le fang fur-tout, font difpofés naturellement à contra@ter, dès qu’elles font moins agitées que la vie faine ne le requiett ; entant qu’il a déterminé tous les fluides artériels à couler plus librement du centre à la circonférence (ce qui rend aufli leur retour plus facile), d'où doit réfulter un plus grand abord de la férofité excrémentitielle vers toute l’habitude du corps où elle doit être évacuée, Aïnñ l'exercice & le travail procurent la difipation de ce qui, au grand détriment de l’économie ani: male, refteroit dans le corps par le défaut de mou: vement, | L'exercice contribue pareillement À favorifer l’ou- _vrage de la nutrition. L’obfervation journaliere prouve que la langueur dans le mouvement circulai. _ te, empêche que l'application du fuc nourricier des parties élémentaires ne fe fafle comme il faut pour la réparation des fibres fimples , qui ont perdu plus qu'elles ne peuvent recouvier. C’eft ce dont on peut fe convaincre , fi Pon confidere ce qui arrive à l’é: gard de deux jeunes gens nés de mêmes parens, avec la même conftitution apparente, qui embraflent deux genres de vie abfolument oppofés ; dont l’un s’adon: ñe à des occupations de cabinet , à l’étude, À la mé- ditation , meñe une vie abfolument fédentaire:, tan: is que l’autre prend un païti entierement oppolé fe livre à tous les exercices du corps, à la chafe , ‘aux “travaux militaires, Quelle différence n’obfervet:on pas entre ces deux freres ? celui-ci eft extrèmement robufte, réfifte aux injures de l'air, fapporte impu. ‘nément la faim , la foif, les fatigues les plus fortes } fans que fa fanté en fouffre aucune altération HE 1] eft fort comme un Hercule : le premier au contraite €ft d'un tempérament très-foible, d’une fanté tot. jours Chançelante , qui fuecombe aux moindres pei- es de corps où d’efprit ; il devient malade à tong les changémens de faifon, de la tempétature de Pair même : C’eft un homme aufli délicat qu’une jeune fille Valétudinairé, Cette différence dépend abfolument dé l'habitude contraîée pour lé mouvement dans Fun, & pour le repos dans l’autre. Cependant l'exercice & le travail produifént de très-mauvais efféts dans l’économie animale , lorf- qu'ils font pratiqués avéc excès ; ils ne peuvent pas Augmenter le mouvement circulaire du fang ; fans augmenter le ffotement des fluides contre les folides, ëz de ceux-ci entreux. Ces effèts | dès qu’ils font produits avec trop d’aétivité où d’une marñiéré trop durable ; difpofent toutes les humeurs à l'alkalefcen- 345 | ce; à la pourriture. Lorfque quelqn'um a fait unes coutferviolente ; & aflez longue pour le fatiguer beaucoup, fa trahfpiration | a fueur font d'une odeur fétide ; l’urine qu'il rend enfuite eft'extrème- ment rouge ;puante , âcre; brûlante, par conféquent femblable à celle que l’on rend dans les maladies les plus aiguës. Le repos du corps & de Pefprit, 8e lé fommeil ;étoient lestéemedes que confeilloïent: dans ce cas les anciens medecins, dit le commehtateur dés aphorifmés de Boerhaave, SE L'exercice continu, fans être mêmeexcefif } Tor tribue beaucoup à hâtér la vicillefte ; en produifari® trop promptèment loblitétation des vaileans nouts ficier$ ; en faifant perdre ienr fluidité! am huineura plaftiques qu'ils contichnent, eh defféchant les 2 bres mufculairés, en offifiant les tuniques des: gros vaifleaux : tous ces effets font aifés à concevoir: : à. Aïnfi les mouyemensidu côrpstrop continuiés pois vantinure auf confidérablement à l’économie ania male faine , 1l eft aifé de conclure qu'ils doivent pros duire le même effet ; même fans être excefifs ; dans le cas’ où il y-a trop d’agitation dans le corps par caufe de maladies og THE T NT L'exercice ne doit donc pas être employé comme femede dans les maladies qui font digues de létir naz ture, ou dans celles qui deviennent telles : tant qu+ elles fubfiftent dans cet état, où il y à toûjours troj de mouvement abfolu ou refpettif aux forces des nialades , il ne fant pas ajoûtet à ce qui eft un excès. Mais lorfque l'agitation caufée par la maladie ; cefle, que la convälefcence s'établit ; &t même dar les fevres lentes, he&tiques,qui ne dépendent fouvent que de legérsengorgemens habituels dans les extt@mis tésartérielles ;jquiformentde pétitesobfruétions daris les vifceres du bas-ventre, dès tubercules peu confiz dérables dans les poumons; Pexercice eff très-utile dans ces différens cas, pourvique l’on en choififfe le genré convenable à la fituation du malade ; awil foit réglé à proportion des forces ; & varié fuivant les befoins. Poyez dans les œuvres de Sydenham ,, les prands élo+ es qu'ildonne , d'après une longue expériencé dans a pratique, à l'exercice employé pour la curation de la plüpart des maladies chroniques, & particulieré- ment à l'équitation: Voyez auffi EQUITATION Les moÿens d'exercer le corps de différentes max mieres ; fe réduifent à-peu-près aux fuivans : mais en les défignant 1l convient d’en diftinguer les différeng genres: les ans font a@ifs , d’autres {ont purement pafffs, &c d’autres mixtes. Dans les préemers le mouvement eft entierement produit par les pérfon- nes qui s'exercer : dans les féconds le mouvement eft entierement procuré par des caufes qui agiflent fu les petforines à exercer. D'ans les defniérs 3 Ces péra fonnes 6perent différens mouvemens de leur COrpS &t en reçoivent en même tems des corps fur lefquels ils font portés. | Parmi les exercices du prentier genre, il y eh a qui font propres à exercer toutes les parties du côtps ; comme les jeux de paume, du volant , du billard ; de la boule, du palet ; la chafle , Padion de füte des armes, de fauter pat amufemerit, Dans tous ces exers cicès on met en mouvement tous les membres ; ot marche; on agit des bras ; on plie ; Où toufne lé tronc , la tête en différens fens ; on parle avec plus ou moins de véhémence ; on cfie quelquefois, &cs Il ÿ en a qui ne mettent eñ a@ion que quelques par< fies du corps feulemént ; éomifie la promenade, l’ace tion dé voyager à pié, dé courir, qui exercent prina cipalément lesextrémités inféfieures ; Pa@ion de ras mer, de jouer du violon, d’autresinftrumens à corde; qui mettent én aétion les mufcles des extrémités fu Périeures ; les différens exercices dé là voix & dé 14 téfpifation ; qui renferment lation de parler beau coup ; de déclarer; de hantér, de joïer des diffés 246 EXE rens inftrumens à vent, :prodiifent le jeu des bou monss ainfirdes autres moyens d'exercice; que l’on peut rapporter à ces différentes efpeces. | - Lefecond genre de moyens propres à procurer dur mouvêément au corps, Qurdoivent être fans-a@ion de la part:de ceux qui fontiexercés, renferme lagita- tionopérée parle branle d’unberceau , pat la gefta- tion; par iles' différentes voitures , comme celles d’eau, lesilitieres, les différens coches ou carrofñes, Fc, tes Ye 1e LE - Le dernier genre d'exercice; qui participe aux deux précédens; regarde celui que l’onfait étant aflis, fans autte appui, fur une corde fufpendue êz agitée s1ce quiconftitue la rarlorre; & le jeu qu’on appelle lef- carpelertes l'équitation avec différens degrés dermou: vement, tel.que le pas:du cheval, letrot,:le galop, &t autres fortes de moyens'quipeuvent avoin du rap- port à-ceux-là, dans lefquels:onseft enaétion de af férentes-parties durcorps pouf fe tenir ferme, pour fe garantit des ichûtes, pour-exciter à marcher, pour arrêter, pour refrérier l'animal fur lequel oneft mon: té; ainfi.ondonne lieu en mêmetemsau mouvement des mufcles, & on eft expofé aux ébranlemens ; aux fecoufles dañs:les entralles-furitout ; auxagitations lus ou moins fortes de la, machine ,owde Pamimal: fur lequel. on eft porté ; d’où rélulte véritablement un double effet, dont l’un eft réellement aëtif, & autre pal, Le premier genre d’exercicene peut convenir qu aux pérfonnes en fanté qui fontrobuftes ;ou à ceux qui'ayantété malades, infirmes, {e font accoütumés par desrés-aux-exercices violens. : : Le fecondgenre doit être employé parles perfon- nesfoibles,-quine-péuvent foûtenir que dés mouve- mens modérés-& fans faire dépenfe de forces, dont au contraife. ils n’ont pasrde refte. L’utilité de ce genre d'exercice fe fait fentir particulierement à l’é- gard-des'enfans qui, pendant le tems de la plus gran- de foiblefle de l’âge, ne peuventfe pañfer d’être pref- que continuellement agités ; fecoués ; & qui, lorf- qu'on les prive dumouvement pendant un trop long 2 terms, témoignent par leurs cris le befoin qu'ils en ont 3,cris qu'ils ceflent en s’endormant, : dès qu’on leur procure fufifammentlesavantages attachés aux différensevercices quileur conviennent ,telsque ceux de l'agitation accompagnée de douces fecoufles, & du-branle-dans. le berceau, par l’éffet duquel le corps de-l’enfant qui y eft contenu, étant porté contre {es parois alternativement d’un côté à l’autre, en éprou- ve descompreflions répétées fur fa furface , qui tien- nent lieu du mouvement des mufcles. Ceux qui ont été affoiblis par de longues maladies, font pour ainfi direredevenus enfans: ils doivent prefqu’être traités de même qu'eux pour les alimens &c l'exercice; c’eft- a-dire que ceux-là doivent.être de très-facile digef- tion , & celui-ci de nature à n’exiger aucune dépenfe de forces de la part des perfonnes qui en éprouvent l'effet. Le dernierigenre peut convenir aux perfonnes lan- guiflantes , qui, fans avoir beaucoup de forces, peu- vent cependant mettre un peu d’aétion dans exercice _ & l’augmenter par degrés, à proportion qu’elles re- prennent de la vigueur ; qui ont hefoin d’être expo- fées à l'air renouvellé & d’éprouver des fecoufles modérées, pour mettre plus en jeu le fyffème des folides &z1la mafle.des humeurs ; ce qui doit être continué juiqu'à ce.qu'on puifle foûtenir de plus grands.efforts, & pañler aux exercices dans lefquels on produit foi-même tout le mouvement qu’ils exi- Es a On doit chferver.en général, dans tous les cas où. lon fe propofe de faire.de l'exercice pour le-bien de la fanté , de choifir, autant qu'il.eft poffible , le inoyen qui plait davantage, qui recrée l’efprit en mème téms qu'il met le corps en aétion; parce que, comme dit Platon, la liaifon qui eft entre l’ame 8e le corps, re permet pas que le corps puifle évre exercé Jans lefprit , Glefprit fans le corps. Pour que les mou vemens de celui-ci s’operent librement , il faut que lame , libre de tout autre foin plus important, de toute contention étrangere à l’occupation préfente, difinibue aux organes la quantité néceflairé de fluiz de nerveux: il faut par conféquent que l’efprit foit affetté agréablement par l'exercice, pour qu’il feprête à l’aétonqui l’opere | &t réciproquement le corps doit être.bien difpofé , pour:fournir au cerveau le moyen qui produit la tenfon des fibres de cet organe au degré convenable pour.que l'ame agïffe librement fur elles, 87. en reçoive de même les imprefiions qu’elles lui tranfmettent. vien Il refte encore à faire obferver deux chofes nécef- faires pourque lexerciceen général foit utile & avan tageux à l’économie animale ; favoir ; qu'il faut ré- gler le tems auquel il convient de s'exercer, & la du- rée.de Pexercice, buy L'expérience a prouvé que l'exercice convient mieux avant de manger, &c fur-tout avant le dîners On peut aïfément fe rendre raifon dercet effet , Fe tout ce qui a été dit des avantages que produifent les mouvemens du corps. Pour.qu’ils puiflent difiper le fuperflu de ce que la nourriture a ajoûté à lamañle des humeurs, il faut que ladigeftionfoit faite dans les premieres & dans les fecondes voies, & que cefuper- flu foit difpoté à êtreévacué ; c’eft pourquoi exercice ne peut convenirque long-tems après avoirimangé; c’eft pourquoi il convient mieux avant le diner.qu’a- vant le fouper : ainf l'exercice, en rendant alors plus libre le cours des humeurs , les rend auffi plus difpa- fées aufecrétions , prépareiles différens diflolvans qui fervent à la diflolution des alimens , 8 met le corps dans la difpofition la plus convenable à rece- voir de nouveau la matiere de fa nourriture. C’eft fur ce fondement queGalien confeille unrepos entier à ceux dont la digeftion & la coétion fe font lente- ment &c imparfaitement , jufqu’à ce qu’elles foient achevées ; fans doute parce que l'exercice pendant la digeftion précipite la difiribution des humeurs avant que chacune d’elles foit élaborée dans la mafle, && ait acquis les qualités qu’elle doit avoir pour la fonc- tion à laquelle elle eft deftinée : d’où s’enfuivent des acidités,, des engorgemens , des obftru£tions, Un Îe- ger exercice après le repas , peut cependant être utile. à ceux dont les humeurs font fi. épaifles, circulent avec tant de lenteur, qu’elles ont continuellement befoin d’être excitées dans leur cours, dans le cas dont il s’agit fur-tout, pour que les fucs digeftifs foient féparés & fournis en fuffifante quantité: les di- geftions fongueufes veulent ab{olhment le repos. Pour ce qui eft de la mefure qu'il convient d’ob- ferver à l'égard de la durée de l'exercice ; on peut fe conformer à ce que prefcrit Galien fur cela, /2. II. de fanitate tuendä, cap. ule, I] confeille de continuer l'exercice, 1° jufqu’à ce qu’on commence à fe fentir un peugonflé ; 2° jufqu’à ce que la couleur de la fur- face du-corps paroïfle s’'animer un peu plus que dans lerépos;.3° jufqu’à ce qu’on fe fente une legere af fitude ; 4° enfin jufqu’à ce qu’il furvienne une petite: fueur, ou au moins qu'il s’exhale une vapeur chaude de l’habitude du corps : lequel de ces effets qui fur- vienne, il faut, feloncet auteur, difcontinuer l’exer- cice ; ilne pourroit pas durer plus long-tems fans de- venir exceflif, & par conféquent nuifble, Cela eft fondé en raïfon, parce que le premier & le fecond de ces fignes annoncent que le cours des: humeurs eft rendu fuffifamment libre du centre du corps à fa circonférence &c dans tous les vaifleaux de la peau, & que la tranfpiration eff difpofée à s'y faire convenablement. Le troifieme prouve que lon a fait une dépenfe fufifante de forces; & le quatrieñ me, que le fuperflu des humeurs fe diffipe, & qu'ainf Pobjet de l'exercice à cet épard eft rempli. On ne peut pas finir de traiter ce qui regarde l’e- xercice, fans dire un mot fur les lieux où il convient de le faire préférablement , lorfqu’on a le choix. Celfe confeille fort que la promenade fe faffe en plein air, à déconvert, & au foleil plütôt qu'à l'ombre, fi on n’eft pas fujet à en prendre mal à la tête, attendu que les rayons folaires contribuent à déboucher les pores, à faciliter l’infenfible perfpiration; mais fionne peut pas s’expofer fans danger au foleil, on doit fe mettre à couvert par le moyen des arbres ou des murailles, plütôt que fous un toit, pour que lon foit toûüjours dans un lieu. où l’air puifie être aifément renouvellé, &t les mauvaifes exhalaifons emportées, &c. 11 refteroit encore bien des chofes à détailler fur le fujet qui fait la matiere de cet article ; mais les bornes de louvrage auquel il eft deftiné, ne per- mettent pas de lui donner plus d’étendue, On le ter- mine donc en indiquant les ouvrages qui peuvent fournir plus d'inftruétion fur tout ce qui a rapport à ce vafte fujet ; ainfi voyez Galien , qui en traite fort au long dans fes écrits ; Celfe, dans le premier livre de es œuvres ; Lommius, qui a fait le commentaire de ce livre ; Gheyne, dans fon ouvrage de fanirate znfirmorum tuenda ; Hoffman en plufieurs endroits de fes œuvres , & particulierement dans fa differtation Jur les fept lois médicinales, qu’il propofe comme re- gles abfolument néceffaires à obferver pout confer- ver la fanté. Voyez aufli Ze commentaire des aphorifines de Boerhaave , par l'illufire Wanfwieten , pagfim. Tous les inftitutionniftes , tels que Sennert, Rivie- re, 6c. peuvent être utilement confultés {ur lemême fujet, dans la partie de Hygiène où il en ef traité. () | EXERCICES , ( Manége.s) s'applique particuliere- ment ou principalement aux chofes que la noblefle apprend dans les académies. « Ce mot comprend par conféquent l’exercice du cheval , la danfe, l’a&ion de tirer des armes & de voltiger, tous les exercices militaires, les connoiffan- ces néceffaires pour tracer &c pour confiruire des fortifications , le deflein, & généralement tout ce que l’on enfeigne & tout ce que l’on devroit enfei- gner dans ces écoles. On dit : ce gentilhomme a fait tous fes exercices avec beaucoup d'applaudiffement. | On ne voit aucune époque certaine d’où l’on plüfle partir pour fixer avec quelque précifon le tems de l’établifflement de ces colléses militaires qui font fous la proteétion du roi, &c fous les ordres de M. le grand écuyer, de qui tous les chefs d’Acadé- nue tiennent leurs brevets. Ce qu'il y a de plus confiant & de plus avéré eft l’ignorance dans laquelle nous avons ignominieufe- ment langui pendant les fiecles qui ont précédé Les regnes de Henri IL. &r, de Henri IV. Jufque-là notre nation ne peut fe flater d’avoir produit un feul homme de cheval «&c un feul maître. Cette partie eflentielle de l’éducation de la noblefle n’étoit, à notre honte, confiée qu'à des étrangers qui accou- \toïent en foule pour nous communiquer de très-foi- bles lumieres fur un art que nous n'avions point en- core envifagé comme un art, & que François I. le pere & le reftaurateur des Sciences & des Lettres avoit laiflé dans le néant, d’où il s’étoit efforcé de tirer tous les autres. D'une autre part ceux des gen- tilshommes auxquels. un certain degré d’opulence permettait de recourir aux véritables fources., s’a- cheminoient à grands frais vers l'Italie, & y por- toient affez inutilement des fommes. confidérables, {oit qu'ils. bornaffent leurs travaux & leur applica- tion à de legeres notions qu’ils croyoïent leur être EXE 247 perlonnellement &c indifpenfablement néceffaires | 10it qu'ils ne fuffent pas exempts de cet amour pro- | pre & de cette préfomption fi commune dé nos jours, & qui ferment tous les chemins qui condui- fent au favoir ; nul d’entre eux ne revenoit en état d'éclairer la patrie. Elle {eroit plongée dans les mê- mes ténebres, & nous aurions peut-être encore be- foin des fecours de nos voifins, fi une noble émula= tion n’etit infpiré les $. Antoine les la Broûe , & les Pluvinel. Ces hommes célebres, dont le fouvenir doit nous être cher, après avoir tout facrifié pour s'inftruire fous le fameux Jean-Baptifte Pignatelli , aux talens duquel Pécole de Naples dut la upério= rité qu’elle ent conftamment fur l'académie de Ro me, nous firent enfin part des richefles qu'ils avoient: acquifes ,&c par eux la France fut peuplée d’écuyers François » Qui l'emiporterent bien-tôt fur les Italiens mêmes. L'état ne fe reflentit pas néanmoins des avant: ges réels qui auroient dû fuivre & accompagner ces fuccès. On en peut juger par le projet qui ter- mine les inftruétions que donne Pluvinel à Louis XIII. dans un ouvrage que René de Menou de Charnifay, écuyer du roi, & gouverneur du duc de Mayenne , crut devoir publier après fa mort. Pluvinel y dévoile avec une fermeté digne de lui, les raïfons qui s’oppofent invinciblement à la fplen- deur des académies & à l’avancement des éleves : &T l’on peut dire que fes expreffions caradérifent d'une maniere non équivoque cette fincérité philo- fophique, également ennemie de l’artifice & de l’a- dulation, qui lui mérita l’honneur d’être le fous-gou- verneur , l’écuyer, le chambellan ordinaire, & un des favoris de fon roi ; fincérité qui déplairoit & ré- volteroiït moins, fi la gloire d’aimer la vérité ne cédoit pas dans prefque tous les hommes À la fatisfaétion de ne Îa jamais entendre, Ceux qui font à la tête de ces établiffemens n’ont, felon lui, d'autre but que leur profit particulier. If eft conféquemment impoflible qu'ils allient exacte- ment leurs devoirs avec de femblables motifs. La crainte d'être obhigés de foûtenir leurs équipages fans fecours , & aux dépens de leurs propres biens, les engage à tolérer les vices des gentilshommes pour les retenir dans leurs écoles, & pour y en attirer d’autres. Il s’agiroit donc à la vûe des dépenfes im- menfes auxquelles les chefs d'académie font aflu- jettis, de les défintéreffer à cet égard, en leur four- mflant des fonds qui leur procureroient & les moyens d'y fubvenir, & la facilité de recevoir & d’agréer de pauvres gentilshommes que des penfions trop fortes en éloignent. Pluvinel propoie enfuite la fondation d’une académie dans quatre des princi- pales villes du royaume, c’eft--dire, à Paris, à Lyon, a Tours, & à Bordeaux, Il détaille fes parties que l’on doit y profefler ; il indique en quelque fa- çon les reglemens qui doivent y être obfervés foit pour les heures, foit pour le genre des exercices, I1s’é- tend fur les devoirs des maîtres & fur les excellens effets que produiroit infailhiblement une entreprife qu'il avoit fuggerée à Henri IV. &c dont ce grand monarque étoit prêt à ordonner l’exécution, lorf- qu'une main meurtriere nous Le ravit. Enfin toutes les fommes qu'il demande au roi fe réduifent à celle de 30000 liv. par annéé prélevée fur les penfons qu'il fait à la noblefle, ou affe&ée fur les bénéfices ; & fi les gentilshommes., continue-t-il, élevés dans |. ces écoles venoient à tranfgrefler les ordonnances , leurs biens feroient confifqués au profit de ces col: léges d'armes , afin que peu-à-peu leurs revenus augmentant, la noblefle qui génut dans la pauvreté, y fût gratuitement nourrie &c enfeignée. On ne peut qu’applaudir à des vües auffi fages ; elles auroient été fans doute remplies, f la mort eût | 245 EXE permis à Pluvinel de joüir plus long-tems de la con- fiance de fon prince. Il y a lieu de croire encore que les reproches qu'il fait aux écuyers de fon tems font légitimes. L'intérêt & le devoir fe concilient rare- ment, & il n’eft qu'un fond inépuifable d’amout pour la patrie qui puifle porter à fe confaérer de fens froid à un état dans lequel on eft néceflairement contraint d’immoler lun à l’autre. Tel fut le fort de Salomon de la Bioûe. Cette illuftre & malheureufe vitime de l'honneur & du zele fe trouva fans ref- fource., fans appui, n’ayant aucune retraite, & ne poflédant, pour me fervir de fes propres termes, qu’un mauvais caveçon ufé prét a mettre au croc. ACCa- blé de vieillefle, d’infirmités 8c de mifere, 1l eut néanmioïns le courage de mettre au jour un ouvra: ge utile & précieux. Les grands hommes ont feuls le dtoit de fe yanger ainfñ; mais les témoignages qu’ils laiflent à la poftérité de leurs travaux & de leurs mérites, font en même tems des monumens honteux de lingratitude &c des injuftices qu'ils éprouvent. | Quelque confidérable que püût être alors la fomme de 30000 liv. par année , fomme de proportionné- nent au téms où nous vivons, formeroit aujour- d’hui, en égard à une femblable fondation , un objet très modique , je ne doute point que la nobleffe gra- tifiée par le prince, & les bénéficiers , n’euflent fup- porté avec une forte d’empreflement cètte impofi- tion & cette charge. Premierement elle étoit répar- tie fur untrop grand nombre de perfonnes , pour que chacune d’elles en particulier püt en être bleflée , & fouffrir de cette diminution : en fecond lieu les gen- tilshommes auroient inconteftablement fai cette circonftance, pour prouver par leur foïmiffion & par leur zele à contribuer à l’éducation de leurs pa- reïls, combien ils étoient dignes de [a faveur du fou- Verain & des récompenfes dont ils joïifloient. Enfin les bénéficiers eux-mêmes pouflés par cet efprit de religion qui doit tous les animer, m’auroient peut- être recherché que les voies de concourir avec efficacité à élever un édifice dont le vice devoit être banni, & dans lequel la vertu devoit être cul- tivée , infpirée &c chérie. Rien n’eft plus énergique que le difcoufs que Lu- .cien met dans la boriche de Solon; ce Syrien qui “nous a laïffé des traits marqués d’une philofophie épurée , pour rappeller l’idée de lPancienne vertu des Athéniens, fait parler ainfi le légiflateur dans un de fes dialogues. « Nous croyons qu’une ville » ne confifte pas dans l’enclos de fes murailles , mais » dans le corps de fes habitans ; c’eft pourquoi nous # avons plus de foin de leur éducation que des bâti- # mens & des fortifications. En leur apprenant à fe » gouverner dans la paix & dans la guerre , nous les » rendons invincibles & la cité imprenable. Après » que les enfans font fortis de deffous l'aile de leurs » meres, & dès qu’ils commencent à avoir le corps # propre au travail & lefprit capable de raifon & # de difcipline, nous les prenons fous notre con- » duite, & nous exerçons l’un & l’autre. Nous croyons # que la nature ne nous a pas fait tels que nous de- # vons ètre, & que nous avons befoin d’inftruétion » 8 d'exercice pour corriger nos défauts, & pour # accroître nos avantages. Semblables à ces jeunes » plantes que le jardinier foûtient avec des bâtons, » & couvre contre les injures de l’air jufqu’à ce » qu’elles foient affez fortes pour fupporter le chaud # &c le froid, & réfifter aux vents & aux orages. » Alors on les taille, on les redrefle , on coupe les » branches fuperflues pour leur faire porter plus de » fruit, on Ôte les bâtons & les couvertures pour les » endurcir & pour les fortifier ». Avec detels principes, & une attention auffi fcru- puieufe à former & à inftruire la jeuneñle, il n’eft pas étonnant que les Grecsavyent été par les lois» par les fciences, & par les armes, un des plus fä- meux peuples de l'antiquité. Les Romains les imite- rent en ce point. Dès l’âge de dix-fept ans ils exer- çoient leurs enfans à la guerré; & pendant tout le tems qu'ils étoient adonnés aux exercices militaires ils étoient nourris aux dépens de la fépublique ow de l’état. Ils s’appliquoient de plus à en regler le cœur, à en éclairer l’efprit; c’eft ainfi qu'ils devin- rent dans [a fuite les maïtres du monde, & qu'ils étendirent par leurs mœurs autant que parleurs vic- toires un émpirè dont la grandeur fut la récompenfé de leur fageñle. Je ne fai fi l'examen de la plüpatt des jeunes gens qui fortent de nos académies ne noûs fappelleroit pas l’exemple que nous propofe Xenophon dans un enfant qui croyoit avoir tout appris, & pofñléder toutes les parties de la fcience de la guerre, tandis qu'il n’avoit puifé dans l’école que la plus lesere teinture de la Taétique, & qu'il n’en avoit remporté qu'une éftime Outrée de lui-même accompagnée d’uné patfaite ignorance. Je ne rechercherai point fi Por peut & fi l’on doit comparer Les progrès qu'ils y ont faits avec ceux de leurs premieres années (voyez Les mots COLLEGE & ETUDE); & fi ces mêmes pro- grès fe bornent pour les uns & pour les autres à imiter leurs maïtres dans leurs vêtemens & dans leurs manieres, à être très-mal placés à cheval par la raïfôn qu'ils y font à leur aife, à tenir leurs cou- des en l’air, à agir fans cefle des bras , fans penfer aux facades que produifent des mouvemens ainff defordonnés, & fous le prétexte d'éviter un air af feété , à fe vanter par-tout de fautes & d’exploits u'ils n’ont jamais faits , à louer leur adrefle fur les nie qu'ils n’ont pas même montés, à parler de Ja forcé de leurs jarrêts, à méconnoitre jufqu’aux premiers principes qui indiquent le plat de la gour metre, à retenir des mots impropres qu'ils regar- dent comme des mots feçus, comme celui de dépeler des chevaux , que quelques-uns par une élépante métaphore fubflituent au mot dénozer ; à faire ufage enfin de quelques termes généraux qu'ils appliquent tobjours mal, & fur le fouvemt defquels 1ls fe fon- dent pour perfuadetr, ainfi que l’enfant dont parle Xenophon, qu'ils ont acquis par la profondeur de leur favoir l'autorité de juger du mérite des maîtres, & de couronner les uns aux dépens des autres; tous ces détails nous entraîneroient trop loin, & m’écar- teroient infailliblement de mon but. Les plus grands’ légiflateurs ont envifagé comme un point impor- tant du gouvernement, l'éducation de la jeunefle ; ce feul point n'arrête & m'occupe. Voté par goût à fon inftruétion , & non par néceflité, je crois pou- voir efpérer que toutes les idées que me fuggéreront le bien & l'avantage public, ne une point fufpec- tes : un objet auffi intéreflant doit mettre en effet la franchife à abri des reproches de l’indifcrétion dont elle eftfouvent accompagnée : & pour me prému- nir d’ailleurs contre les efforts d’une bafle jaloufe dont on n’eft que trop fouvent contraint de repouf- fer vivement les traits , je protefte d'avance contre toute imputation abfurde, & contre toute maligne application. Tout vrai citoyen eft en droit d'attendre des foins généreux de fa patrie ; mais les jeunes gens, &c fur- tout la nobleffe | demandent une attention fpéciale. « La fougue des pañlions naïflantes , dit Socrate, » donne à cet âge tendre les fecouffes les plus vio- » lentes : il eft néceflaire d’adoucir l’âpreté de leur » éducation par une certaine mefure de plaifir; & » 11 n’eft que les exercices où fe trouve cet heureux » mélange de travail & d'agrément , dont la prati- » que conftante puifle leur agréer & leur plaire ». Ces exercices font purement du refort des a 4 | Or mm nd ts EXE Or dès que dans ces écoles nous fommes certains par ce mélange heureux, de pouvoir parer au dégoût qu'in- fpireroiït naturellement une carriere toûjours hérif- fée d’épines, au milieu defquelles on n’appercevroit Hi la moindre fleur, 11 ne nous refte qu’à chercher es moyens d’y mettre un ordre , & de donner à ces 52 EXE les ont rendus néceflaires. On ne réuffit dans Le com- merce du monde, que fous la condition d’êtreutile, ou fous la condition d'y mettre de l’agrément ; celle- ci fuppofe encore une politefle fimple, douce, & ai- fée, {ans laquelle les talens n’ont aucun prix, & que des enfans n’acquerront qu’en renonçant à tous les “plis de la premiere éducation , & en apprenant ce qu'ils n’ont jamais appris, c’eft-à-dire à penfer, à parler & à {e taire. Tel eft en général le but que l’on devroit fe pro- pofer dans toutes les académies. Je conviens qu’é- levées fur un femblable plan, il feroit aflez difficile qu’elles fuffent nombreufes ; mais fix écoles de cette éfpece feroient d’un fecours réel à l’état, ne s’entre- détruiroient point les unes & les autres , & fe {oû- tiendroient d’elles-mêmes fans des faveurs telles que celles que demandoit Pluvinel, fur-tout fi les agré- mens des emplois militaires dépendoient du féjour &c des progrès que des éleves y auroient faits. Je dois au furplus déclarer ici, que je n’ai préten- du blâmer que les abus & non les perfonnes. Je fai _que les intérêts, ou plütôt la vanité des hommes, fe trouvent étroitement liés avec ceux de lerreur; mais la vraie philofophie ne refpeëte que la vérité, &c n’en médite que le triomphe. D'ailleurs je me fuis cru d'autant plus autorifé à en prendre ici la défen- fe, que les écoles que je propofe répondroient plei- nement aux vûes fupérieures d’un miniftre, qui, par létabliflement de l’école militaire , nous a prouvé que les grands hommes d’état s’annoncent toüjours ar des monumens utiles & durables. (e) EXERESE , ez Chirurgie, eft une opération par laquelle on tire du corps humain quelque matiere étrangere , inutile, & même pernicieufe, Ce mot eft grec, LÉcuipeois ; il vient du verbe cÉaipo, eruo , extraho, j'te, je retire. L’exerefe fe fait de deux façons : par extraion, quand on tire du corps quelque chofe qui s’y eft for- mée ; & par détrattion, quand on tire du corps quel- que chofe qui y a été introduite par-dehors. L'opération de la taille ou Iythotomie, l’accou- chement forcé, &c. font de la premiere clafle; & la {ortie d’une balle, d’un dard, feroit de la feconde. Quelques auteurs ne donnent le nom de detrattion , à l’adion de tirer un corps étranger quieft entré par- dehors, que lorfqu’on eft obligé de faire une incifion à une partie oppofée à celle par où Le corps étranger s’eft introduit ; cette diftinétion n’eft pas de grande utilité. Le point important pour fe bien conduire ici, eft d'examiner avec attention, 1°. quelle eft la partie dont on veut tirer quelque chofe, & s’éclairer fur la ftruéture de cette partie : 2°, quels font les corps étrangers que l’on veut faire fortir, quelle eft leur forme & leur nature, s'ils font durs, mous, friables, compreflibles, ronds, quarrés, ovoides, triangulai- res, Gc. 3°. quels font les différens inftrumens qu’on y peut employer, & choïfir les plus propres à ce deffein, ou en imaginer de plus parfaits : 4°. quand il faudra les mettre en ufage, & comment. On a donné les autres principes généraux qui con- cernent l’opération de l’exerefe , au mor Corps ÉTRANGERS. (YF EXERGUE, £. f. (Hifi, anc. & mod.) fignife, chez des Médaillifles ; un mot, une devife , une date, &c. qu'on trouve quelquefois dans les médailles au-def- fous des figures qui y font repréfentées. Joyez MÉ- DAILLE , LEGENDE, &c. Ce mot eft dérivé des mots grecs &&, de , & ho, ouvrage. | Les exergues font ordinairement au revers des mé- daïlles, cependant il y en a qui font fur le devant ou fur la face. Les lettres ou les chiffres qui fe trouvent dans Pe- xergue des médailles, fignifient pour l'ordinaire ou fe nom de la ville dans laquelle elles ont été frappées, ou la valeur de la piece de monnoïe: celles:ci feu- lement S.C, marquent par quelle autorité elles ont été fabriquées. Chambers. (G) EXFOLIATION , er Chirurgie , eft la féparation des parties d’un os qui s’écaille , c’eft-à-dire qui fe détache par feuilles ou par lames minces. Voyez Os. Ce mot eft compofé des mots latins ex, &c folium, feuille. | Quand une partie de la furface du crane a été À nud pendant quelque tems, elle eft fujette à l’exfo- liation : l’'ufage de la poudre céphalique ne fert de tien pour avancer l’exfoliation, Dionis. On ne doit point trop hâter la guérifon des blef- fures faites aux os; mais on doit laifler aux os letems de fe rétablir d'eux-mêmes ; ce qu'ils font quelque: fois fans exfoliation, {ur-tout dans les enfans. On ne peut pas guérir les caries des os fans ex/0= liation, Voyez CAR1E. Les os découverts ne s’exfo- lient pas toùjours ; on a vû des dénudations confidé: rables qui ont duré fix mois avec fuppuration , où la furface de l'os s’eft revivifiée au lieu de s’exfolier: on peut lire à ce fujet des obfervations de M. de {a Peyronie, inférées dans un mémoire de M. Quefnay fur les exfoliations du crane, dans le premier volume des mémoires de l’acad. royale de Chirurgie. On trou- vera dans ce même mémoire plufeurs obfervations qui montrent l’ufage du trépan perforatif pour accé- lerer l’exfoliation & pour l'empêcher; l’ufage de la rugine & des couronnes du trépan pour procurer l’exfoliation ; les cas où il a fallu employer le cifeau & le maillet de plomb pour enlever à plufñeurs re- prifes des portions d’os altérées, &c les obftacles par- ticuhiers qui peuvent retenir & engager une piece d'os qui doit fe féparer. (7) C’étoit une opinion commune & reçue parmi les anciens, que tous les os découverts doivent s’exfo- lier; c’eft pourquoi ils tenoient pendant long-tems les levres de la plaie écartées l’une de lautre, en at. tendant cette exfoliation. L'expérience & la raifon ont détruit ce préjugé , & ont fait voir qu’en tem ponnant les plaies où les os font fimplement décou- verts, on en retarde la guérifon, & l’on expofe les bleffés à des accidens fâcheux : ce n’eft pas cepen- dant que lexfo/iarion des os ne foit prefque toûjours l'ouvrage de la pure nature, 8c que la plüpart des précautions qu’on prend pour produire cette ex/o- lation , ne foient d’ordinaire inutiles ou nuifibles » il faut dire hautement ces fortes de vérités, En effet, combien de fois voit-on des chirurgiens, qui, pendant des mois entiers, même pendant des années entieres, fe flatent vainement de parvenir à Pexfoliation d’une partie de quelque os, par le char- pi fec, lefprit-de-vin, les cauftiques, & la rugine, tandis que d’autres fans tous ces fecours, voyent en peu de tems une heureufe exfo/ation fe produire chez leurs malades, c’eft qu’alors la nature étoit elle-mêe- me l’attifte de l’exfokarion, Le plus grand fecrer du chirurgien eft de laïfler agir cette nature, d’obfer- ver fes démarches, de ne pas contrecarter fes opé- rations, de conferver à la partie fa chaleur naturel: le, ou de l’augmenter quand elle eft languiffante. I n’y a pas feulement de la droiture, mais du bon fens, à reconnoitre dans les Arts les plus utilès, les bornes &c les limites de leur puiffance. Les habiles gens qui profeffent de tels arts ny perdent rien, & les fripons trouvent moins de dupes. Adision de M. le Chevalier DE JAUCOURT. 21 On donne auf le nom d’exfoliation, à la fépara- tion d’une membrane, d’untendon, & autres patties molles , froiflées & meurtries parquelque caufe ex- térieure , où altérées par l’impulfion de l’air à l’occa- fion d'une plaie, où par des matieres purulentes; le OZ, Me em mm) ge” ae E X H défaut de cette féparation dans cette derniere cir- conftance, eft une caufe de fiftule, F’oyez FISTULE. F ‘ ÉXFOLIATIF , terme de Chirurgie, remede propre à faire exfolier Les os cariés, c’eft-à-dire à faire fépa- ret par feuilles la carie de la partie faine. Voyez Ca- RIE & EXFOLIATION. L£ On nomme suyaz exfoliarif, un inftrument qui perce los en le ratiffant, & en enlevant plufeurs feuilles les unes après les autres, La tige êc la mutte de cet inftrument ne different point de celles du tré pan couronné , puifqu’il fe monte fur l’arbre du tré- . pan, de même que les couronnes, Voyez cette ftruc- ture ax mot TRÉPAN. La partie inférieure du trépan éxfoliatif eft une efpece de lame inégalement quar- rée, épaifle de deux lignées dans fa partie fupérieure, un peu moins dans linférieure ; large d’environ fix lignes & demie, & longue d’un pouce. Du milieu de la partie inférieure de cette lame fort une petite meche d’une ligne de longueur pour le plus, qui d’une bafe un peu large fe termine par une pointe. Cette petite meche fért de pivot à toute la machine. Cette lame, qui eft tout-à-fait femblable au vile- brequin des Tonneliers, qu’ils appellent leur perçosr, doit avoir fix tranchans oppofés , deux fur les par- ties latérales de la lame , deux à fa partie inférieure, & deux aux deux côtés de la petite meche. Cestran- Chans font formés par de véritables bifeaux tournés . de droite à gauche, afin de couper de gauche à droite. Cette lame doit être d’un bon acier, mais la trempe doit en être douce : telle eff la trempe par paquets, qui eft celle qui convient le mieux pour les inftru- mens qui doivent agir fur des corps durs ; & fi les ouvriers voyent qu'elle foit encore trop dure , ils ont le foin de donner un recuit bleu, pour adoucir la trempe & la rendre moins aigre. L’ufage du trépan exfoliatif n’eft pas fréquent ; il peut cependant trouver fon utilité, & il ne faut pas le fouftraire de Parcenal de Chirurgie, ou quelques praticiens le resardent comme inutile. Voyez la fig. 4: PL XVI. (T°) | - EXHALAISON, ff. (Phyfiq.) fumée ou vapeur qu s’exhale ou qui fort d’un corps, &c qui fe répand dans l’air. J’oyez EMANATIONS. Les mots d’exhalaifon &t de vapeur fe prennent d’or- dinaire indifféremment l’un pour l’autre ; mais les auteurs exa@sles diftinguent.Ils appellent ÿapeurs,les fumées humides qui s’élevent de l’eau & des autres corps liquides ; & exhalaïfons , les fumées fechés qui viennent des corps folides , comme la terre, le feu, les minéraux, les foufres, les fels, 6. Foyez VA- PEUR. u ge Les exhalaifons, prifes dans ce dernier fens ; font des corpufcules où écoulemens fecs, qui s’élevent des corps durs &c térreftres, foit par la chaleur du foleil, foit par l'agitation de Pair, foit par quelque autre caufe. Les corpufcules parviennent jufqu’à une certaine hauteur dans l’air, où fe mêlant avec les vapeurs, ils forment les nuages , pour retomber enfuite en rofée , en brouillard, en pluie, &c. Foyez ATMOSPHERE , NUAGE, PLUIE. Voyez auffi EvA- PORATION. al Les exhilaifons nitreufes 8£fulfureufes fontla prin- cipale matiere du tonnerre, des éclairs ; & dés divers autres météores qui s’engendrent dans lair. Voyez TONNERRE, ÉCLAIR, &c. MNevwton prétend que l'air vrai & permanent eft formé par des éxhalaifons élevées des corps lés plus durs & les plus compas. Voyez AIR. Harris & Chambers. = L° | On voit quelquefois, dit M. Muffchenbroeck, flotter dans l’aix de fort grandes traînées d’exhalaifons qui font d’une feule & même efpece; elles different EX H 253 feulement, quant à la figuté qu'elles avoient aupas ravant dans la terre, en ce que de corps folides qu”- elles étoient, elles font devenues-fluides ; ou bien en ce que de fluides denfes qu’elles étoïent ; elles ont été réduites en un fluide plus rare, & dont les pat- ties fe trouvant alors féparées les unes des autres, peuvent flotter dans l'air 8&c y refter fufpendues: elles doivent par conféquent avoir confervé plufieurs des propriétés qu’elles avoient auparavant ; favoir cel- les qui n’ont pas été changées par la raréfaétion : elles auront donc auffi les mêmes forces qu’elles avoient déja, lorfqw’elles étoient encore un corps folide ou un fluide plus denfe ; & ces forces feront uffñ les mêmes que celles qu’elles auront, lorfaw’el- les fe trouveront changées en une mafle femblable à celle qwelles formoient avant que d’être raréfiées, On n'aura pas de peine à concevoir que la chofe doit être ainfi, lorfqu’on viendra à confidérer qu'il s’éz vapore beaucoup d’eau en été dans un jour , & qué cette eau s’éleve dans Pair. Lors donc qu’on fe te: préfente cette portiond’air qui couvre un grand lac, ou qui fe trouve au-deflus de la mer, on doït conce- Voir alors que cette partie de l’atmofphere fe charge en un jour d’une grande quantité de vapeurs , fur= tout s’il ne fait pas beaucoup de vent. Il arrive quel- quefois que le mont Véfuve 8 le mont Etna exhalent une fumée d’une épaifleur affreufe , & qu’ils vomif- fent dans l'air une grande quantité de foufre ; ce qui y fait naître de gros nuages de foufte. Après une bas taille fanglante & où il y à eu beaucoup de monde de tué, les corps, que l’on enterre alors ordinaire ment les uns proche des autres , & peu profondé- ment , doivent exhaler une très: mauväife odeur Jorfqu’ils viennent à {e corrompre; & ces exhalai- Jons qui tiennent de la nature du phofphore , ne cef- fent de s'élever chaque jout dans l’air entrès-grande quantité au-deflus de l'endroit où ces cadavres fé trouvent enterrés. (On peut juger de-Rà, pour le dire en pañlant, combien ef pernicieufe notre mé- thode d’enterrer dans les églifes , & même dans des cimetierés au milieu des grandes villes). De grands champs où l’on n’a femé qu’une feule forte de grai- he, rempliffent l'air qui fe trouve au-déflus d'eux, d’un nuage d’exhalaifons qui font par-tout de même hatute. Ces amas de vapeurs ou d’éxhz/aifons d'une mème efpéce qui fe font dans Pair & le rempliffent, font poules par le vent d’un lieu dans un aûtre, oùils fencontrent d’autres parties de nature différente qui fe font aufhi élevées dans Pair, &c avec lefquelles ils fé confondent. Il faut donc alors qu'il naïffe dé ce mélange les mêmes effets , ou des effets femblables % ceux que nous pourrions obferver, filon verfoit ou méloit dans un verre des corps femblablès à ceux qux conftituent ces vapeurs. Qu'il feroit beau & utile em même tèms , de connoitre les effets que produiroient plufieurs corps par le mélange que lon en feroit ! Maïs les Philofophes n’ont encore fart que fort pe de progrès dans ces fortes de mélanges ; car les corps que l’on a divifés en leurs paities, & mêlés enfuite enfemble ou avec d’autres, font jufqu'à préfent en très-petit nombre, Puis donc que l’atmofphere con- tient des parties de toute forte de corps térreftres qui y nagent & qui fe rencontrent , il faut que leur mélange y produife untrès -grand nombre d'éfets que l’art n’a pû encore nous découvrir; par confé= quent il doit naître dans l’atmofphere une infinité de phénomenes que nous ne faufions encore ni com- prendre ni expliquer clairement. Il ne feroït pour- tant pas impofhble de parvenir à cette cConnoïfance, fi l’on faifoit un grand nombre d’expériences fur les mélanges des corps; matiere immente, puilqu'un pe- tit nombre dé corps peuvent être mêlés enfernble d’un trèsistand nombre de manierés, comme il pa- 254 E X H roît évidemment parle calcul des combinaïfons. Il eft donc entierement hors de doute que les météores doivent produire un grand nombre de phénomenes dont nous ne comprendrons jamais bien les caufes, &c fur lefquels les Philofophes ne feront jamais que des conjettures. Voyez MÉTÉORES. | Il y a quelquefois, continue M. Muffchenbroeck, de violens tremblemens de terre, qui font fendre ëc crever de groffes croïtes pierreufes de la grandeur de quelques milles , 8 qui fe trouvoient couchées fous la furface de la terre. Ces croûtes empêchoient auparavant les exhalaifons de .certains corps fitués encore plus profondément, de s'échapper & de fortir de deflous la terre ; maïs aufli-tôt que ces efpeces de voûtes fe trouvent rompues & brifées, les paflages font comme ouverts pour les vapeurs , qui venant alors à s’élever dans l'air, y produiront de nouveaux phénomenes. Ces phénomenes dureront aufi long- tems que durera la caufe qui les produit, & ils cefle- ront dès que cette même caufe fe trouvera confu- mée. Muflch. effai de Phyfique, $. 1471-1493. Voyez VorcaNn. On peut voir dans leff4i fur les poifons, du doéteur Mead, comment & par quelle raifon les vapeurs-mi- nérales peuvent devenir empoifonnées, Voyez Por- SON, & l’article fuivant. On trouve dans les Naturaliftes plufieurs exem- ples des effets de ces exhalai[ons malignes : voici ce qui eft rapporté dans l’Aïffoire de l'académie des Scien- ces pour l’année 1701. Un maçon qui travailloit au- près d’un puits dans la ville de Rennes, y ayant laiflé tomber fon marteau, un manœuvre qui fut.envoyé pour le chercher, fut fuffoqué avant d’être arrivé à la furface de l’eau ; la même chofe arriva à un {e- cond qui defcendit pour aller chercher le cadavre, & 1l en fut de même d’un troifieme : enfin on y def- cendit un quatrieme à moitié yvre, à qui on recom- manda de crier dès qu'il fentiroit quelque chofe : 1l cria bien vite dès qu’il fut près de la furface de l’eau, &c on le retira aufli-tôt; mais il mourut trois jours après. Il dit qu'il avoit fenti une chaleur qui lui dé- voroit les entrailles. On defcendit enfuite un chien, qui cria dès qu'il fut arrivé au même endroit, & qui s’évanoiut des qu'il fut en plein air ; on le fit revenir en lui jettant de l’eau , comme il arrive à ceux qui ontéte jettés dans la grotte du chien proche de Na- ples. Voyez GROTTE. On ouvrit les trois cadavres, après les. avoir retirés avec un croc, &.on n’y re- marqua aucune caufe apparente de mort; mais ce qu'il y a de plus fingulier, c’eft que depuis plufieurs années on buvoit de l’eau de ce puits, fans qu’elle fit aucun mal. | natà Autre fait rapporté dans l’hiffoire de académie des Sciences, ann: 1710. Un boulanger de Chartres avoit mis dans fa cave, dont l’efcalier avoit 36 degrés. fept à huit poinçons de braife de fon four. Son fils, jeune homme fort & robufte , y étant defcendu.avec de nouvelle braïfe &t de la lumiere , la lumiere s’é- teignit. au mieu de l’efcalier ; il remonta, la rallu- ma, êt redefcendit. Des qu'il fut dans la cave, il cria qu'il n’en pouvoit plus, & cefla bientôt de crier. Son frere, auffi fort que lui, defcendit à l’inftant; il cria de même qu’il fe mouroit, & peu de tems après fes cris finirent : fa femme defcendit après lui , une fervante enfuite , & ce fut toûjours la même chofe. Cet accident Jetta la terreur dans tout le voifinage, êc perfonne ne fe prefloit plus de defcendre dans. la cave. Un homme plus hardi que les autres, perfuadé que les quatre perfonnes qui étoient defcendues dans la cave n’étoient pas mortes, voulut aller les fecou- tir; ilcria, & on nele revit plus. Un fixieme homme demanda un croc pour retirer ces corps fans defcen- dre en-bas ; 1l retira la fervante, qui ayant pris l'air, fit un foupir & mourut, Le lendemain un ami du béulanger voulant retirer ces corps avec un croc, fe fit defcendre dans la cave par le moyen d’une corde, & recommanda qu'on le retirât dès qu’il crie- roit. Il cria bien vite; mais la corde s'étant rompue, il retomba, & quelque diligence qu’on fit pour re- nouer la corde , on ne pute retirer que mort. On louvrit : il avoit les meninges extraordinairement tendues , les Idbes dti poumon tachetés de marques noirâtres , les inteflins enflés &sr0s comme le bras, enflammés &t rouges comme du fang; & ce qu'il y avoit de plus fingulier, rous les mufcles des bras, des cuifles & des jambes comme féparés de leurs parties, Lemagiitrat prit connoïffance de ce fait 6€ on confulta des medecins. Il fut conclu que la braife qui avoit été mife dans la cave, étoit fans doute mal éteinte ; & que comme toutes lescaves de Chartres abondent en falpetre , la chaleur de la braife avoit fans doute fait élever du falpetre une vapeur maligne & mortelle ; qu'il falloit par conféquent jetter dans la cave une grande quantité d’éau, pour éteindre le feu & arrêter le mal, ce qui fut exécuté: enfuite de quoi on defcendit dans la cave un chien avec une chandelle allumée ; le chien ne mourut point , & la chandelle ne s’éteignit point: preuve certaineique le péril étoit pañlé. À ces deux faits nous pouvons en ajoûterun troi- fieme, rapporté par le doëteur Connor dans fes dif Jert. medic. phyfiq. Quelques perfonnes creufoient la terre dans une-cave à Paris , croyant y trouver um thréfor caché : après qu’elles eurent travaillé quel- que tems,, la fervante étant defcendue pour appeller fon maître, les trouva dans la pofture de gens qui travairoient ; mais ils étoient morts. Celui qui te- noit la beche , & fon compagnon qui rejettoit la térre avec la pelle, étoient tous deux fur pié, & fem- bloïent encore occupés.à leur travail : la femme de l’un d'eux étoit aflife fur fes senoux , comme fi elle eût été lafle ,:ayant fa tête appuyée fur fes mains, dans la pofture de quelqu'unquirêve profondément ; & un jeune homme avoit fon haut-de-chaufles bas, & fembloit faire fes néceflités fur le bord de-la foffe, ayant les yeux fixés en terre : enfin/touis paroïfloient dans des attitudes 8 des aétions naturelles ; les yeux ouverts & la bouche béante de maniere qu'ils fem bloient encore refpirer ; maisilsétoient roides com- me des,ftatues , & froids comme marbre. Chambers. (Omer ÉXHALAISONS MINÉRALES 04 MOUPHETES, habitus minerales, mephitis, &c. (Hifi nat: minéral:) Il part des veines ou filons métalliques , {ur-tout lorfqu’ils {ont proches de la furface de la terre, des vapeurs qui fe rendent fenfbles , & qui dans l’obfcu- rité de la nuit paroïflent quelquefois enflammées. La : même chôfe atrive dans le fein de la terre, au fond des galeries.& foûterreins des mines dont onttire les métaux, charbons de terre:ê& autres fubftances mi- nérales., Ces vapeurs ou.éxhalaifôns s'échappent par les fentes. crevafles &z cavités qui fe trouvent dans les roches ;elles font de différentes efpeces, 8z:pro= duifent des effets tout différens. Tantôt elles échauf- fent l’air fi confidérablement, qu’il eft impoffble que les ouvriers puiflent continuer leurs travaux {ous terre ; cela arrive fur-tout durant les grandes cha- leurs , où l’ar'extérieur de l’atmofphere n'étant pas agité par lewent, refte dans un état de ffagnation qui empêche l'air contenu dans-les foûterreins de fe re- nouveller &c de circuler librement. Les ouvriers font fort. incommodés de ces exhalaifons,; elles excitent chez eux des toux convuifves:, 16c leur donnént Ja pauvresimineurs {ont.tout-d’un-çoup fuffoqués par ces Vapeurs dangereufes. : E X H Ces exhalaifons paroiffent comme un brouillard ui s’éleve dans Les foüterreins des mines ; quelque- fois elles ne s’élevent que jufqu’à cinq ou fix pouces au-deflus du fol de la mine ; d’autres fois elles s’an- noncent en affoibliflant peu-à-peu , & même étei- -gnant tout-à-fait les lampes des onvriers : elles fe ma- nifeftent aufh fous la forme de filamens ou de toiles d'araignées, qui en voltigeant s’allument à ces lame es, & produifent , comme nous l'avons remarqué à Parcicle CHARBON FOSSILE, les effets de la poudre, À canon ou du tonnerre, Voyez ces article. Mais le hénomene le plus fingulier que les exkalaifons nous préfentent, c’eft celui que les mineurs nomment #4/- lon. On prétend qu'on voit à la partie fupérieure des galeries des mines, une efpece de poche arrondie, dont la peau reffemble à de la toile d’araignée. Si ce fac vient à fe crever , la matiere qui y étoit renfer- mée {e répand dans les foûterreins, &c fait périr tous ceux qui la refpirent. Voyez le ditfionn. de Chambers. Les mineurs anglois croyent que ce ballon eft formé par les émanations qui partent de leurs corps & de leurs lumieres ; s’élevent vers la partie fuperieure des galeries foûterreines, s’y condenfent, &c fe cou- vrent à la longue d’une pellicule, au-dedans de la- quelle elles fe corrompent &t deviennent peftilen- tielles : au refte chacun eff le maître d’en penfer ce qu'il voudra. Les exhalaifons minérales , quoique toüjoursper- nicieufes, n'ont cependant point toutes le même de- gré de malignité. Les minéralogiftes allemands nom- ment féwaden les plus mauvais ; elles fe font fen- tir principalement dans les mines d'où l’on tire des minéraux fujets à {e décompofer par le contaét de l'air, telles que les terres alumineufes & fulphureu- fes; & ceux dans la compofition defquels 1l entre beaucoup d’arfenic, comme font les mines d’argent rouges &c blanches, les mines d’étain , les mines de fer arfénicales, les pyrites arfénicales blanches , les mines de colbalt, &c. d’où l’on voit que la maligni- té de ces exhalaïifons ou mouphetes, vient de Parfe- nic dont elles font chargées ; & 1l y a lieu de croire que ce qui les excite, eft l'efpece de fermentation que caufe la chaleur foûiterreme. | Heureufement ces exhalaifons ne regnent pas toù- jours dans les mines; il y en a qui ne s’y font fentir que dans de certains tems ; d’autres ne {e manifeftent qu'accidentellement, c’eft-à-dire lorfque les ouvriers viennent à percer avec leurs outils dans des fentes ou cavités, dans lefquelles des minéraux arfénicaux ont été décompolés, ou bien qui ont fervi de retraite à des eaux croupies , à la furface defquelles ces ex- halaifons {e préfentent quelquefois fous la forme d’u- ne vapeur bleuâtre, qui fort par le mouvement cau- 4€ à ces eaux, & fe répand dans les foüterreins par les pañlages qu'on lui a ouverts ; elle eft fouvent ac- compagnée d’une odeur très-fétide. [l ne faut point confondre avec les mouphetes que nous venons de décrire, les exhalaïfons qui regnent dans certaines mines , où l’on a été obligé de mettre le feu, afin de détacher le minéral de la roche dans laquelle il fe trouve enveloppé ; comme cela fe pratique quelque- fois, & fur-tout dans les mines d’étain. On fent aifé- ment que par cette opération il doit s’exciter dans les foûterreins des vapeurs & fumées, qu'il feroit très-dangereux de refpirer. Il y a d’autres exhalaifons minérales qui, fans être : arfémicales, ne laiflent point que d’être très -dange- * reufes , & de produire de funeftes effets ; telles font. E X H 2,55 celles qui fe font fentir en Italie, dans la fameufe grotte du chien, &c. | Souvent 1l fe fait à la furface de la terre , & dans fon intérieur, des exhalaifons très-{enfibles &.très- confidérables : elles fe montrent fur-tout le matin, dans le tems que la rofée tombe ; & à la fuite de ces exhalaifons , les mineurs trouvent les flons des mi- nes qui font dans le voiïfinage ftériles , dépourvus du minéral qu'ils contenoient , 8&c femblables à des os cariés ou à des rayons de miel ; pout lors ils difent qu'ils fonc venus trop tard. C’eft-lÀ proprement ce qu'on nomme exhalaifon , exhalario , en. allemand auffwitterng, Quelquefois l'effet en eft plus rapide, les vapeurs paroïflent enflammées, elles fortent de la terre accompagnées d’une épaifle fumée, 8 pro= duifent des éruptions, à la fuite defquelles les veines métalliques fe trouvent détruites. Ces phénomenes . femblent avoir la même caufe que les volcans. 77 oyeg cer article, Enfin il y a encore des exhalaïfons ou va- péurs que l’on appelle :7ha/ariones ; enallemand eir- Witterung; On défigne par-Rvles vapeurs qui regnent dänsiles foûterreins des mines qui ont été long-tems abandonnées, :& à la fuite delquelles quelques au- teurs difent qu’on trouve une matiere vifquenfe ou gclatineufe, attachée aux parois. des foûterreins, dont par la fuite des tems il fe forme desminéraux métalliques. Quoi qu’il enoit, il paroîttqu'il n’eft: point douteux que lesexhalaifons qui s’excitent dans les entrailles de la terre, ne contribuent infiniment à la formation des-métaux où du moins à la com- pofition &r décompoftion des minéraux métalliques, pufqu'il eft aifé de voir que par leur moyenilfe fait continuellement des diflolutions , qui enfuite font fuivies de nouvelles combinaïfons. Pour péu qu’on fafle réflexion à ce qui vientd’être dit ; on vetta que les exhalaifons minérales jouent un grand rôle dans la nature , & fur-tout pour la cryftallifation & la minéralifation. Voyez ces deux articles. I] y à auf tout lieu de croire que c’eft à ces exhalaifons minéra- Les que toutes les pierres colorées font redevables de leurs couleurs; parce que les parties métalliques mi- fes dans l’état de vapeurs, font atténuées au point de pouvoir pénétrer les fubftances les plus dures & les plus compaétes, C’eft le fentiment du célebre Kunckel. i M. Lehmann, favant minéralogifte, a fait un ex- cellent commentaire allemand fur un affez mauvais traité des zouphétes de Théobald, Il finit fon commen- taire par conclure, que les exhalaifons minérales ou mouphetes nefont autre chofe « qu'un corps compofé » d’une terre très-atténuée, d’un foufre très-fubtil, » 8c d’un fel très-volatil qui produit fur les roches » 6c pierres, dans le fein de la terre, la même chofe » que le levain produit fur la pâte, c’eftà-dire qu'il » pénetre , développe, mûrit, & augmente. Les exhalaifons minérales étant aufli dangereufes & incommodes qu'on l’a vü dans cet article, on prend un grand nombre de précautions pour en ga- rantit les ouvriers, & pour faciliter la circulation de lair dans les foûterreins. On fe fert pour cela des percemens , quand il eft poffble de les pratiquer, c’eft-à-dire qu'on ouvre une galerie horifontale au pié d’une montagne; & cette galerie fait, avec les bures ou puits perpendiculaires de la mine, une ef- pece de fyphon qui favorife le renouvellement de ; Pair. Maïs de toutes les méthodes qu’on puifle em- “ployer ; il n’en eft pas de plus sûre que la machine de Sutton. Voyez cet article, (—) celles qui font fulphureufes , & par lefquelles, pod; |: * EXHALATOIRE, f. f. (Fontaine falante.) c’eft parler le langage de la Chimie, l’acide fulphureux volatil eft dégagé ; fouvent.elles font périr ceuxqui À üne forte de conftruétion particuliere aux falines de -Rofieres. Dérriere les poefles il y a des poeflons qui ont le malheur d’y être expofés. Celles donf’il ét, «| Ont vingtun piés de long fur cinq de large ; & der- parlé dans Particle CHARBON FOSSILE font de cette ‘| "riere ces poeflons, une table de plomb à - peu - près _ efpece, Il y a lieu de croire qu'il en eft de même de de même longueur & largeur, fur laquelle font éta- 256 E X H bles plufieuts lames de plomb, pofées de champ de la hauteur de quatre pouces. Ces lames forment plu- fieurs circonvallations, & la machine entiere’ s’ap- pelle exhalatoire. La deftination dé lexha/aroire elt d'évaporer quelques parties de l’eau douce, en pro- fitant de la chaleur qui fort par les tranchées ou che- minées de la grande poeñle, & de dégourdir l’eau avant qu’elle tombe dans la grande chaudiere. EXHAUSSEMENT , f. m. ( Archireët, ) c’eft une hauteur ou une élevation ajoûtée fur la derniere plin- te d’un mur de face, pour rendre l'étage en galetas plus logeable. On dit auf qu'une voûte, qu'un plan- cher, 6:c. a tant d’exkauffement, (P) EXHAUSTION, f. f. rerme de Mathématiques. La méthode d’exkauffion eft une maniere de prouver l’é- galité de deux grandeurs, en faifant voir que leur différence eft plus petite qu'aucune grandeur afli- gnable ; & en employant, pour le démontrer, la ré- duétion à l’abfurde. Ce n’eft pourtant pas parce que l’on y réduit à l'abfurde , que l’on a donné à cette méthode le nom de méthode d'exhauflion : mais comme l’on s’en fert pour démontrer qu'il exifte un rapport d'égalité en- tre deux grandeurs, lorfqu’on ne peut pas le prou- ver diretement , on fe reftraint à faire voir qu’en fuppofant lune plus grande ou plus petite que l’au- tre, on tombe dans une abfurdité évidente: afin d'y parvenir, on permet à ceux qui nient l'égalité fuppofée , de déterminer une différence à volon- té; & on leur démontre que la différence qui exif- teroit entre ces grandeurs (en cas qu'il y en eût) fe- roit plus petite que la différence affignée ; 8c qu'ainfi cette différence ayant pù être fuppofée d’une peti- tefle qui, pour ainfi dire, épuisér toute grandeur af- fignable, c’eft une néceflité de convenir que la diffé- rence entre ces grandeurs s’évanoiit véritablement. Or c’eft cette petitefle indicible, imaflignable, &c qui épuile toute grandeur quelconque, qui a fait don- ner à la méthode préfente le nom de mérhode d’exhau- flion, du mot latin exhauflio, épuifement. La méthode dexhauffion eft fort en ufage chez les anciens géometres , comme Euclide , Archimede, €c. Elle eft fondée fur ce théorème du dixieme livre d'Euclide, que des quantités font égales lorf- que leur différence eft plus petite qu'aucune gran- deur aflignable ; car fi elles étaient inégales, leur différence pourroit être aflignée ; ce qui eft contre lPhypothèfe. C’eft d’après ce principe qu’on démontre que, fi un polygone régulier d’une infinité de côtés eft infcrit ou circonfcrit à un cercle, l’efpace qui con- {titne la différence entre le cercle & le polygone s’épuiféra & diminuera par degrés ; de forte que le cercle deviendra égal au polygone. Voyez QUADRA- TURE , POLYGONE, &c. Voyez auffi LIMITE, IN- FINI, &c, (E) Le calcul différentiel n’eft autre chofe que la mé- thode d’exhauflion des anciens, réduite à une analyfe fimple & commode; c’eft la méthode de déterminer analytiquement Les limites des rapports ; la métaphy- fique de cette méthode eft expliquée très-clairement au mot DiFFÉRENTIEL. EXHÉRÉDATION, £. £. (Jurifpr.) eft une dif- poñition, par laquelle on exclut entierement de fa {ucceffion ou de fa légitime en tout ou en partie, ce- lui auquel , fans cette difpofition, les biens auroient appartenu comme héritier, en vertu de la loi ou de la coûtume, & qui devoit du moins y avoir fa léoi- time. | Prononcer contre quelqu'un l’exhérédarion , c’eft exheredem facere , c’eft le deshériter. Ce terme deshé- river fignifie néanmoins quelquefois dépofféder ; & des- héritance n’eft point fynonyme d’exhérédation , il fi- grifie feulement defasféne ou dépoffeffion. d’exhéréder fon pere, EXH Pour ceaui eftdu terme d’exhérédation, on 1e prend quelquefois pour la difpofition qui Ôte l’hoirie, quel- quefois auf pour l’effet de cette difpofition, c’eft-4- dire la privation des biens que fouffre l'héritier. Dans les pays de droit écrit, tous ceux qui ont. droit de légitime doivent être inftitués héritiers, du moins pour leur légitime, ou être deshérités nom- mément, à peine de nullité du teftament ; de forte que dans ces pays l'exhérédation eft tout-à-la-fois une peine pour ceux contre qui elle eft prononcée, & une formalité néceflaire pour la validité du tefta- ment , qui doit être mile à la place de l'inftitution, lorfque le teftateur n’inftitue pas ceux qui ont droit de légitime. | En pays coûtumier où linftitution d’héritier n’eft pas néceflaire , même par rapport à ceux qu ont droit de légitime, l’exhérédation n’eft confidérée que comme une peine, La difpofition qui frappe quelqu'un d’exhérédarion eft réputée fi terrible, qu’on la compare à un coup de foudre: c’eft en ce fens que l’on dit, lancer le fou- dre de l’exhérédation ; ce qui convient principalement lorfque le coup part d’un pere juftement irrité con- tre fon enfant, & qui le deshérite pour le pumir. L’exhérédarion la plus ordinaire eft celle que les pere & mere prononcent contre leurs enfans & au- tres defcendans ; elle peut cependant-auffi avoir lieu en certains pays contre les afcendans , &c contre les collatéraux, lorfqu’ils ont droit de légitime, foit de droit ou ftatutaire. Mais une difpoñition qui prive fimplement l’héri- tier de biens qu'il auroit recueillis, f… le défunt n’en “eût pas difpofé autrement, n’eft point une exhéréda- tion proprement dite. Il y a une quatrieme clafle de perfonnes fujettes à une efpece d’exhérédation, qui font les vaflaux; comme on l’expliquera en fon rang. Toutes ces différentes fortes d’exhérédations {ont exprefles ou tacites. Il y a auñi l'exhérédarion oficieufe. Suivant le droït romain, l'exhérédarion ne pouvoït être faite que pat teftament, & non par un codicile; ce qui s’obfervoit ainfi en pays de droit écrit: au eu qu’en pays coûtumier il a tofñjours été libre d’exhe- réder par toutes fortes d’aétes de derniere volonté. Mais préfentement , fuivant les articles 15 & 16 de l'ordonnance des teftamens, qui admettent les tefta- mens ologtaphes entre enfans & defcendans, dans les pays de droit écrit; il s'enfuit que Pexhérédasion des enfans peut être faite par un tel teftament , qui n’eft, à proprement parler, qu'un codicile. On va expliquer dans les fubdivifons fivantes, ce qui eft propre à chaque efpece d’exhérédarion. (A) ÉXHÉRÉDATION DES ASCENDANS: dans les pays où les afcendans ont droit de légitime dans la fuccef- fion de leurs enfans ou autres defcendans, comme en pays de droit écrit & dans quelques coûtumes, ils peuvent être deshérités pour certaines caufes par. leurs enfans ou autres defcendans , de la fucceflion defquels il s’agit. Quoique cette exhérédation ne foit permife aux enfans , que dans le cas où les afcendans ont grande- ment démérité de leur part, on doit moins en ces cas la confidérer comme une peine prononcée de la part des enfans, que comme une fimple privation de biens dont les afcendans fe font rendus indignes ; çar il ne convient jamais aux enfans de faire aucune difpof- tion dans la vùe de punir leurs pére 8 mere; c'eff un foin dont ils ne font point chargés: ils doivent toûjours Les refpelter , & fe contenter de difpofer de leurs biens, fuivant que la loi Le leur permet. Le droit ancien du digefte & du code , n’admet- toit aucune caufe pour laquelle il fût permis au fils A l'égard À l'égard de la mere, la foi 28 au code de inoff: ref. tam. en exprime quelques-unes, qui font rappéllées dans la novelle 115 dontonvaparler. . Suivant cette novelle, chap. yv, les afcendans peu: vent être exhérédes par leurs defcendans,, pour dif férentes caufes qui font communes au pere & à la mere, & autres afcendans paternels & maternels : mais le nombre des caufes de cette exhérédarion n’eft pas fi grand que pour celle des defcendans, à l’égard defquels la novelle admet quatorze caufes d’exhéré- darion ; au lieu qu’elle n’en reconnoit que huit à l’é- gard des afcendans. Ces caufes {ont : 1°. S1 les afcendans ont par méchanceté procuré la mort de leurs defcendans ; il fuffit même qu'ils les ayent expofés & mis en danger de perdre la vie par quelque accufation capitale ou autrement, à moins que ce ne ft pour crime de lefe-majefté, 2°. S'ils-ont attenté à la vie de leurs defcendans, par poifon, fortilége , ou autrement. 3°. S1 le pere a fouillé le lit nuptial de fon fils en commettant un incefte avec fa belle-fille ; la novelle ajoûte, ou en fe mêlant par un commerce criminel avec la concubine de fon fils ; parce que, fuivant le droit romain, les concubines étoient , à “certains égards , au niveau des femmes lépitimes : ce qui na pas lieu parmi nous. 4°. Si les afcendans ont empêché leurs defcen- dans de tefter des biens dont la loi leur permet la dif. pofition. | ÿ°- Si le mari, par poifon ou autrement , s’eft efforcé de procurer la mort à fa femme, ou de lui caufer quelque aliénation , 6 vice versé pour la fem- me à l'égard du mari; les enfans dans ces cas peu- vent deshériter celui de leur pere, mere, ou autre afcendant qui feroit coupable d’un tel attentat. 6°. Si les afcendans ont négligé d’avoir foin de leur defcendant, qui eft tombé dans la démence ou dans la fureur. 7°. S'ils népligent de racheter leurs defcendans qui font detenus en captivité, 8°. Enfin l'enfant orthodoxe peut deshériter fes afcendans hérétiques ; mais comme on ne connoît plus d’hérétiques en France, cette regle n’eft plus guere d’ufage. Voyez ce qui eft dit ci-après de l’exké. rédation des defcendans, (A) EXHÉRÉDATION DES COLLATÉRAUX, eft celle _ qui peut être faite contre les freres & fœurs & autres collatéraux qui ont droit de légitime, ou quelqu’au- tre referve coûtumiere, | Les lois du digefte & du code qui ont établi l’obli- gation de laïffer la légitime de droit aux freres & fœurs germains ou confanguins, dans le cas où le érere inftitueroit pour feul héritier une perfonne in- fame , n’avoient point reglé les caufes pour lefquel- les, dans céfmême cas, ces collatéraux pourroient être deshérités. C’eft ce que la novelle 22, ch. xlvi. a prévü. Il ya trois caufes: 1°. Si le frere a attenté fur la vie de fon frere, 2°. S'il a intenté contre lui une accufation capi- _ fale, ; 3°. Siparméchanceté il luia caufé ou occafonné la perte d’une partie confidérable de fon bien. Dans tous ces cas, le frere ingrat peut être deshé- rité &c privé de fa légitime; 1l feroit même privé, comme indigne, de la fuccefon ab irteflar ; & quand le frére teftateur n’auroit pas inftitué une perfonne infame, il ne feroit pas néceffaire qu'il infhituât ou deshéritât nommément fon frere ingrat. Il peut li- brement difpofer de fes biens fans lui rien laïfler, & fans faire mention de lui. Ce que l'on vient de dire d’un frere ) doit épale- ment s'entendre d’une {œur. | Dans les pays coûtumiers où les collatéraux n’ont point droit de légitime , il n’eft pas néceffaire de les Tome VI, EXH 257 inflitüet ni deshériter nommément ; ils n’ont ordiriais tement que la referve coûtumiere des propres qui eft à Paris des quatre quints, & dans d’autres coûtumes plus ou moins confidérable. L’exhérédarion ne peut donc avoir lieu en pays coûtumier , que pour priver les collatéraux de la portion des propres, ou autres biens que la loi leur deftine, & dont elle ne permet pas de difpofer par teftament. | | La referve coûtumiere des propresou autres biens, ne pouvant être plus favorable que la légitime, il eft fenfible qué les collatéraux peuvent être privés de cette referve pour les mêmes caufes qui peuvent donner lieu à priver les collatéraux de leur léoiti- me, comme pour mauvais traitemens , injures gras ves, & autres eaufes exprimées en la novelle 22, CRE x ÉXHÉRÉDATION DES DESCENDANS, voyez ci= après EXHÉRÉDATION DES ENFANS. EXHÉRÉDATION cum elogio , eft celle qui eft faite en termes, iñjurieux pour celui qui eft deshérité ; comme quand on le qualifie d’ingrat , de fils déna> ture, débauché, &c. Le terme d’éZoge fe prend dans cette occafon en mauvaife part: c’eft une ironie à fuivañt ce qui eft dit dans la loi 4, au code théodof, de leoitim, hered, | _" Les enfans peuvent être exhérédés cum elogio, lorfqu’ils le méritent. Il n’en eft pas de même des collatéraux ; l’exhérédarion prononcée contre eux cum elogio, annulle le teflament, à moins que les faits qui leur font reprochés par le teftateur ne foient notoires. Voyez Mornac , fur La loiv21, cod, dein offe teflam. Baïdet , iv. I. ch. xiij. & rome IT. iv. II. ch. %vity. Journ, des aud. rom: I. div. I. ch, xxxjv. (4) . EXHÉRÉDATION DES ENFANS 6 autres defcen- dans , eft une difpofition de leurs afcendans qui Léè prive de la fucceflion, & même de leur légitime : car ce n'eft pas une exhérédation proprement dite que d’ê- tre réduit à fa légitime, & il ne faut point de caufe païticuliere pour cela. Sr Si l’on confidere d’aboïd ce qui s’obfervoit chez les anciens pour la difpofition de leurs biens à l'égard des enfans, on voit qu’avant la loi de Moyfe les Hé- breux qui n’avoient point d’enfans, pouvoient dif pofer de leurs biens comme ils jugeoient à - propos ; & depuis la loi de Moyfe, les enfans ne pouvoient pas être deshérités ; ils étoient même héritiers né. ceflaires de leur pere, & ne pouvoient pas s’abite- nir de l’hérédité, ir, Chez les Grecs l’ufage n’étoit pas uniforme ; {es Eacédemoniens avoient la liberté d'inflituer toutés fortes de perfonnes au préjudice de leurs enfans ; même fans en faire mention ; les Athéniens au con traite ne pouvoient pas difpofer en faveur des étran- gers, quand ils avoient des enfans qui n’avoient pas démérité, mais pouvoient exhéréder leurs enfans def. obéiffans & les privef totalement de leur fucceffion: Suivant l’ancien droit romain , les enfans qui étoient en la puiffance du teftateur, devoient être infüitués ou deshérités nommément ; au lieu qué ceux qui étoient émancipés devenaht comme étran- gers à la fanulle, & ne fuccedant plus, le pere n’é- toit pas obligé de les inftituer ou deshériter nommé- ment ; il en étoit de même des filles & de leurs def= cendans. Quant à la forme de l’exhérédarion , il fal- loit qu’elle füt fondée en uüne caufe légitime ; & fi cette caufe étoit conteftée, c’étoit à l'héritier à la prouver; mais le teftateur n’étoit pas obligé d’expri- mer aucune caule d’exhérédarion dans ton teftament. Les édits du préteur qui formerent le droit moyen, accorderént aux enfans émancipés, aux filles & leurs defcendans , le droit de demander la poñeffion des biens comme s’ils n'avoient pas été émancipés , au moyen de quoi ils devoient être inflitués où deshé- 258 EXH rités nommément, afin que le téftament füt valable. Ces difpofitions du droit prétorien furent adop- tées par les lois du digefte & du code, par rapport à la nécefhité d'inftitution ou exhérédation exprefle de tous les enfans fans diftinéion de fexe ni d’état. Juftinien fit néanmoins un chañgement par la loi 30. au code deinoff. teflam. &c par la novelle 18. ch. 7. par lefquelles il difpenfa d’inftituer nommément les enfans & autres perfonnes qui avoient droit d’in- tenter la plainte d'inofficiofité, ou de demander la pofleffion des biens contra tabulas , c’eft-à-dire les defcendans par femme, les enfans émancipés êc leurs defcendans , les afcendans & les freres germains ou confanguins, surpi perfond inflituté ;il ordonna qu'il fufiroit de leur laifer la lévitime à quelque titre que ce fût, même de leur faire quelque libéralité moin- dre que la légitime , pour que le teftament ne püt être argué d'inofficiofité. Cette loi, au furplus , ne changea rien par rapport aux enfans étant en la puif- fance du teftateur. Ce qui vient d’être dit ne concernoit que le pere &c l’ayeul paternel, car il n’en étoit pas de même de la mere & des autres afcendans maternels ; ceux-ci métoient pas obligés d’inftituer ou deshériter leurs enfans & defcendans ; ils pouvoient les pañler fous filence, ce qui opéroit à leur égard le même effet que lexhérédation prononcée par le pere. Les enfans n’avoient d'autre reflource en ce cas, que la plainte d’'inoffciofité, en établiffant qu'ils avoient été injuf- tement prétérits. La novelle 115, qui forme le dernier état du droit romain fur cette matiere, a fuppléé ce qui manquoit aux précédentes lois : elle ordonne , ch. 47. que les peres, meres, ayeuls & ayeules, & autres afcen- dans , feront tenus d'inftituer ou deshériter nommé- ment leurs enfans & defcendans ; elle défend de les pañer fous filence ni de les exhéréder, à moins qu'ils ne foient tombés dans quelqu'un des cas d’ingrati- tude exprimés dans la même novelle ; &c il eft dit que le teftateur en fera mention, que fon héritier en fera la preuve, qu’autrement le teftament fera nul quant à l’inftitution ; que la fucceflion fera déférée ab :7- toffat, & néanmoins que les legs &c fideicommis par- ticuliers, 8 autres difpofñtions particulieres, feront exécutées par les enfans devenus héritiers ab zrteflar. Suivant cette novelle, il ny a plus de différence entre les afcendans qui ont leurs enfans en leur puif fance , & ceux qui n’ont plus cette puiffance fur leurs enfans ; ce qui avoit été ordonné pour les héritiers fiens, a été étendu à tous les defcendans fans diftin- étion. A l'égard des caufes pour lefquelles les defcendans peuvent être exhérédés, la novelle en admet quatorze. 1°, Lorfque l’enfant a mis la main fur fon pere ou autre afcendant pour le frapper , mais une fimple me- nace ne fufhroit pas. | 29, Si l’enfant a fait quelqu’injure grave à fon af- cendant, qui fafle préjudice à fon honneur. 3°. Si l'enfant a formé quelqu’accufation ou aétion criminellefcontre {on pere , à moins que ce ne fût pour crime de lefe-majefté ou qui regardât l'état. 4°. S'il s’'aflocie avec des gens qui menent une mauvaile vie. 5°. S'il a attente fur la vie de fon pere par poifon ou autrement. 6°, S'il a commis un incefte avec fa mere : la no- velle ajoûte, ou s’il a eu habitude avec la concubine de fon pere ; maïs cette derniere difpofition n’eft plus de notre ufage, comme on l’a déjà obfervé en par- lant de l’exhérédation des afcendans. 7°. Si l'enfant s’eft rendu dénoncrateurde fon pere ou autre afcendant, & que par-là 1l lui ait caufé quelque préjudice confidérable. -8%, Si l'enfant mâle a refufé de fe porter çaution pour délivrer fon pere de prifon, doit que le pere y foit detenu pour dettes ou pour quelque crime, tel qu'on puifle accorder à laccufé fon élargiffement en donnant caution ; & tout cela doit s’entendrefup- poié que le fils ait des biens fufhifans pour caution ner {on pere, & qu'il ait refufe de le faire, 9°. Si l'enfant empêche l’afcendant de tefter. : ;: 10°. Si le fils, contre la volonté de fompere, s'eft aflocié avec des mimes ou bateleurs & autres gens de théatre, ou parmi des gladiateurs, & qu'il ait perfévéré dans ce métier, à moins que le petene füt de la même profefhon. | % 11°. Si la fille mineure, que fon pere a voulu ma» rier & doter convenablement, a refufé ce qu'on:lui propofoit pour mener une vie defordonnée; mais fi le pere a négligé de marier fa fille jufqw’à 25 ans, elle ne peut être deshéritée, quoiqu’elle tombe en faute contre fon honneur, ou qu’elle fe marie fans le confentement de fes parens , pourvii que ce foit à une perfonne libre. TP: Les ordonnances du royaume ont reglé autrement la conduite que doivent tenir les enfans pour leur mariage: l’édit du mois de Février 1556 veutique les enfans de famille qui contraétent mariage fans Le confentement de leurs pere & mere, puifientiêtre exhérédés fans efpérance de pouvoir quereller l’exhé. rédation ; maïs l'ordonnance excepte les fils ägés de . 30 ans & les filles Âgées de 25, lorfqu'ils fe font mis en devoir de requérir le confentement de leurs pere &t mere : l'ordonnance de 1639 veut que ce‘confen- «tement {oit requis par écrit, ce qui elt encore cons firmé par lédit de 1697. 12°. C’eft encore une autre caufe d’exhérédations fi les enfans négligent d’avoir foin de leurs pere, mere , ou autre afcendant, devenus furieux. | 13°. S'ils négligent de racheter leurs afcendans detenus prifonniers. | | 14°. Les afcendans orthodoxes peuvent deshériter leurs enfans & autres defcendans qui font hérétiques. Les exhérédations prononcées pour une telle caufe avoient été abolies par l’édit de 1576, confirmé par l’article 31 de l’édit de Nantes ; mais ce dernier-édit ayant été révoqué , cette regle ne peut plusguere être d'ufage en France. | Il n’eft pas néceffaire en pays coûtumier, pour la validité du teftament, d’inflituer ou deshériter nom- mément les enfans & autres defcendans ; mais ils peuvent y être deshérités pour les mêmes caufes que la novelle 115 admet; &z lorfque lexhérédarior eft declarée injufte, tout leteftament eft nul comme fait abirato , à exception des legs pieux faits pour l'ame du défunt, pourvû qu'ils foient modiques. Foy. au digefte iv, X XVIII. tir. sy. au code liv. WI. tir. xxviy. aux tnfñit, iv. IL, tit. «iij. Furgole, cages teflamens, tom. IT. ch, vüy. fe, 2. (4) | | EXHÉRÉDATION DES FRERES & SŒURS. Woyeg ci-devant EXHÉRÉDATION DES COLLATÉRAUX. \ EXHÉRÉDATION OFFICIEUSE , eff celle qui eft faite pour le bien de l'enfant exhérédé, & que léslois mêmes confeillent aux peres fages & prudens, com me dans la loi :6.$. 2. ff. de curator. furiofo dardis. Suivant la difpofition de cette loi, qui a été éten- due aux enfans diflipateurs, le pere peut deshériter fon enfant qui fe trouve dans ce cas, &c inftituer fes petits-enfans , en ne laiffant à l’enfant que des ali- mens, & cette exhérédarion eft appellée officieñfe. F. FURIEUX & PRoniGuE. (4) : ü EXHÉRÉDATION DES PERE & MERE. Voyez ci- devant EXHÉRÉDATION DES ASCENDANS. LÉ EXHÉRÉDATION TACITE, eft celle quieft faite en pañlant fous filence dans le teftament , celui qui devoit y être inftitué ou deshérité nommement:; c’eft ce que l’on appelle plus communément prétéri- ion, Voyez PRÉTÉRITION..(4) | - EXHÉRÉDATION DES VassAUX ; c’eft ainfi que les auteurs qui ont écrit fous les premiers rois de la troïfieme race, ont appellé la privation que le vaflal foufiroit de fon fief, qui étoit confifqué au profit du feigneut. L'origine de cette expreffion vient de ce que dans la premiere inflitution des fiefs, les devoirs réciproques du vañlal & du feigneur marquoient, de la part du vaflal, une révérence & obéiffance pref- qu'égale à celle d’un fils envers {on pere, ou d’un -chient envers fon patron; & de la part du feigneur , Une prote@tion & une autorité paternelle; de forte Le la privation du fief qui étoit prononcée par le eigneur dominant contre fon vaflal, étoit compa- gée à l’exhérédation d’un fils ordonnée par fon pere. Voyez le faëlum de M, Huflon, pour le fieur Aubery feigneur de Montbar. On voit aufü dans les capitulaires & dans plufieurs conciles à peu-près du même tems, que le tèrme d'exhérédation fe prenoït fouvent alors pour la priva- tion qu'un fujet pouvoit fouffrir de fes héritages &c autres biens de la part de fon féigneur : ec de liberis hominibus diximus , ‘ne fortè parentes eorum contra juf° titiam fiant exhæredati, 6 regale obfequium minuatur, € ip haredes propter indigentiam mendici vel latrones, &c. (4) EXHIBITION , £ € (Jarifprud.) fignifie lation de montrer des pieces. L’exhibirion a beaucoup de rapport avec la communication qui fe fait fans dé- placer; la communication a cependant un effet plus étendu; car on peut exkiber une piece en la faifant paroître fimplement , au lieu que communiquer, mê- me fans déplacer , c’eft laifler voir & exaïniner une piece. (4) *EXHORTATION, £. f. (Gramm.) difcours par lequel on fe propofe de porter à une a@ion qrelqu'un qui eft libre de la faire ou de ne pas la faire , ou du moins qu'on regarde comme tel, EXHUMATION, £. f. (Jurifprud.) a&ion d’exhu- mot. Voyez EXHUMER. On ne peut en faire aucune fans ordonnance de quftice. Le concile de Reims, tenu en 1583, défend _dexhumer les corps des fideles fans la permifion de l’évêque. Mais cette difpofition ne doit s'appliquer que quand il s’agit d’exhumer tous les offemens qui font dans une églife ou dans un cimetiere, pour en faire un lieu profane. Lorfqu'il s’agit d’exhumer quel- qu'un , foit pour le transférer dans quelqu’autre lieu où il a choïfi fa fépulture ,ou pour vifiterle cadavre à l’occafion de auelque procédure criminelle, l’or- donnance du juge royal fuit, c’eft-à-dire une fen- tence rendue fur les conclufions du miniftere public. Voyez les mém. du Clergé, tom, LIL. pag. 405. 409. É 452. tom. VI. pag. 375. 378.6 1123, & tom, XII, | Pag. 449: & SÉPULTURE. (4 * EXHUMER , v. a@. ( Gramm.) c’eft tirer un cadavre de la terre, ce qui fe fait quelquefois lici- tement , comme lorfque les lois l’ordonnent. On lit dans Brantome & dans le ditionnaire de Trévoux, qu'après la mort de Charles Quint, il fut arrêté à l’inquifition, en préfence du roi Philippe IT. fon fils , que fon corps feroit exhumé & brûlé comme hérétique, parce que ce prince avoit tenu quelques propos legers fur la foi. Ces peuples font bien reve- nus de cette barbarie, comme il Le paroît par les pro- Pofitions avantageufes qu’ils ont faites récemment à M. Linnæus. | | EXHYDNA , forte d’ouragan. Joyez OURAGAN. EXIGENCE, £. £. (Jurifprud.) fignifie ce que les tirconftances demandent que l’on fafle. Il y a beau- coup dechofes qui doivent être fuppléées par le juge Suivant l'exigence du cas. (4 TEXIGER, v. at, (Gramm.) c’eft demander une _£hofe qu'on a droit d'obtenir, & que cehu à quon Tome VI E XI 259 la demande a de la répugnance à accorder. On dit , il exige le payement de cette dette, On peut exiger , même d’un miniftre d'état, qu'il foit d’une probité {crupuleufe. | EXIGIBLE , adj, (Jurifprud.) fe dit d’une dette dont le terme eft échû & je payement peut être de= mandé ; ce qui eft dû, n’eft pas toñjours exigible ; 1 fat attendre l’échéance ; Jufque-là , dies cedir, dies non verit, (A - EXIGUE, 1. £. (Jurifprud.) c’eft l’aûte pat lequel celui qi a donné des beftiaux à cheptel, fe départ du bail & demande au preneur exhibition > compte, & partage des beftiaux, Ce mot vient d'exiguer, Voy.. ci-après ÉXIGUER. (4) EXIGUER, (riprud.) qu'on dit auf exiger ow exequer , terme dont on fe fert dans les coûitumes de Nivernois, Bourbonnois, Berry, Sole, & autres lieux où les baux à cheptel font en ufage, pour exprimer que lon fe départ du cheptel, & que l’on démande exhibition, compte & partage des beftiaux qu avoient été donnés au preneur à titre de cheptel, Quelques-uns tirent ce mot 44 exigendis rationibus, à caufe qu’au tems de l’exigue ou réfolution du chep- tel, le bailleur &cle preneur entrent en compte ; mais cette étymologie n’eft pas du goût de Ragueau , le quel en fon gloflaire au mot exiger , dit que c’eft ë flabulis educere pecudes ; que chez lesRomains on fe fervoit de ce mot exigere, pour dire faire fortir Les beffiaux de l’étable, & qu’en effet lorfqu'on veut fe départir du cheptel, on fait fortir les beftiaux de l’étable du preneur auquel on les avoit confés. La coûtume de Bourbonnois, arr, 34 3, dit que quand bêtes font exigées & prifes par le bailleur, le preneur a le choix, dans huit jours de La prifée à lui notifiée & déclarée, de retenir les bêtes ou de les dé- laïffer au bailleur pour le prix que celui-ci les aura priées. M, Defpommiers dit fur cet article , r#°, 3 E futs Vans ; qu'en fimple cheptel felon la forme de l’exi- gue prefcrite en cet article, foit que le bailleur ou le preneur veulent exiguer, le preneur doit commen cer par rendre le nombre de bêtes qu'il a recûes felon Veftimation; après quoi on partage le profit & le croît fi aucun y a ; que l’eftimation ne transfere pas au preneur la propriété des beftiaux ; qu’elle eft faite uniquement pour connoître an tems de lexigué s’il y a du profit ou de la perte ; que cette eftimation eft fi peu une vente, qu’on a foin de ftipuler dans les baux à cheptel , que le preneur au tems de l'ex: gué fera tenu de rendre même nombre & mêmes efpeces de beftiaux qu’il a recûs, & pour le même prix. Cet auteur remarque encore que lexiguëé du bé tail donné en cheptel avec le baïl de métairie, ne fe fait pas à volonté; qu’on ne peut le faire w’après l'expiration du bail de métairie, le cheptel étant un accefloire de ce bail, À légard du fimple cheptel, la coûtume de Berry, £f, xvÿ. art, 1 & 2, dit que le bailleur & le preneur ne peuvent exiguer avant les trois ans pañlés, à compter du tems du bail, & fi le bail eft à moitié, avant les cinq ans. Celle de Nivernoïs, ch, xxÿ. arr, o. dit que le bail- leur peut exiguer, demander compte & exhibition de fon bétail ,& icelui prifer une fois Lan , depuis le dixieme jour devant la nativité de S. Jean-Baptifte jufqu'audit jour exclus, & non en autre tems. Que fi le preneur traite mal les bêtes, le bailleur Les peut exiguer toutes fois qu'il y trouvera faute fans forme de juftice , fauf toutefois au preneur de répéter fes intérêts au cas que le bailleur a tort, ou en autre tems que le coûtumier. Mais, comme lobferve Co. quille fur are. 9, du ch. xx). de la coûtume de Niver- nois , cela dépend de la reole sénérale des fociétés, k ij 360 E XI qui défend de les diffoudre à contre-tems, &t ne veut pas non plus que l’on foit contraint de demeurer en {ociété contre fon gré. Ainf la claufe appofée dans le cheptel,que le bail- leur pourra exiguer toutes fois &c quantes, doit être interprétée bénignement & limitée à un tems com- mode ; deforte que le bailleur ne peut exiguer en hy- ver , 1 au fort des labours on de la moon. Coquille à l’endroit cité, remarque encore que la faculté d’exiguer toutes fois &c quantes, doit être réci- proque & commune au preneur, qu'autrement la #ociété feroit léonine. Lorfqu’un métayer après l'expiration de fon bail eft forti du domaine ou métairie fans aucun empé- chement de la part du propriétaire, ce dernier n'eft pas recevable après l’an à demander l’exigué ou re- mife de fes beftiaux, quoiqu'il juftifie de l’obliga- tion du preneur ; n'étant pas à préfumer que le maï- tre eût laiflé fortir {on métayer fans retirer de lui les beftiaux, & qu’il eût gardé le filence pendantun an. Mais quand Les beftiaux font tenus à cheptel par un tiers, l’action du bailleur pour demander l’exigue dure 30 ans. La coûtume de Nivernois, ch. xx}. arf, 10. porte qu'après que le bailleur aura exigué &c prié les bêtes, le preneur a dix jours par la coûtume pour opter de retenir les bêtes fuivant l’eftimation , ou de les lait fer au bailleur ; que fi le preneur garde les beftiaux, il doit donner caution du prix, qu'autrement le baïl- leur le pourra garder pour l’eftimation. L'article 11. ajoûte que quand le preneur a fait la prifée dans le tems à lui permis, le bailleur a le même tems & choix de prendre ou laïffer les bef- tiaux. | | La coûtume de Berry dit que fi le bétail demeure à celui qui exiguë & prife, il doit payer comptant; e fi le bétail demeure à celui qui fouffre la prifée, 1e huitaine pour payer. L'article 551. de la coûtume de Bourbonnois chat- ge le preneur quiretient les beftiaux de donrer cau- tion du prix, autrement les bêtes doivent être mi- fes en maintierce. Voyez CHEPTEL. ( 4) EXJIA oz ECIJA, ( Géog. mod. ) ville de l’An- daloufie, en Efpagne ; elle ef fituée fur le Xenil. Long. 13.23. lat. 37. 22. EXIL , £. m. ( if. anc.) banniflement. Voyez l’article BANNISSEMENT. Chez les Romains le mot ex1/, exilium, fignifioit proprement une ixéerdition, Où exclufion de Peau € du feu, dont la conféquence naturelle étoit, que Ja perfonne ainfi condamnée étoit obligée d'aller vivre dans un autre pays, ne pouvant fe pañler de ces deux élémens. Auffi Ciceron, 44 Heren. ({uppofe quil foit l’auteur de cet ouvrage) obferve que 4a fentence ne portoit point précilément le mot d’e- xil, mais feulement d’inrerdichion de l’eau & du feu. Voyez INTERDICTION. Le même auteur remarque que l'exil n’étoit pas à proprement parler un châtiment, mais une efpece. de refuge & d’abri contre des châtimens plus rigou- reux : exilium non effe fupplicium , [ed perfugium por- sufque fupplicii. Pro Cæcin, Foy. PUNITION ox CHA- TIMENT. Il ajoûte qu'il n’y avoit point chez les Romains de crime qu'on punit par l’exi/, comme chez les autres nations : mais que l’exil étoit une efpece d’abri où on fe mettoit volontairement pour éviter les chaï- nes, l'ignominie, la faim, &c. Les Athéniens envoyoient fouvent en exz/ leurs généraux & leurs grands hommes, {oit par jaloufie de leur mérite, foit par la crainte qu'ils ne priffent trop d'autorité. Voyez OSTRACISME. | Exil e dit auffi quelquefois de la relégation d’une erfonne dans un lieu , d'où il ne peut fortir fans songé, /’oyez RELÉGATION. Ce mot eff dérivé du mot latin exilium, on de . exul ; qui fignifie exilé; & les mots exclium ou exu font formés probablement d’exzre folum, hors de fon pays natal. nr Dans le ftyle figuré, on appelle honorable exil} une charge où emploi, qui oblige quelqu'un de de- meurer dans un pays éloigné &c peu agréable. Sous le regne de Tibere, les emplois dans les pays éloignés étoient des efpeces d’exi/s myftérieux. Un: évêché en Irlande, où même une ambañflade, ont été regardés comme des efpeces d’exils : une réf dence ou une ambaffade dans quelque pays barba- re, eft une forte d’exil. Voyez le Didionnaire de Tré- voux 8 Chambers. (G) EXILLES , ( Géog. mod. ) ville de Piémont ; elle appartient au Briançonnois ; elle eft fituée fur la Daire. Long. 24. 35. lat. 45. 5. EXIMER , v. aët. (if. & droit publ. d Allema= gne.) On nomme ainf en Allemagne l’a@tion par la- uelle un état ou membre immédiat de l'empire eff ouftrait à {a jurifdi@ion, &c privé de fon fuffrage à la diete. Les auteurs qui onttraité du droit public d'Allemagne, diftinguent deux fortes d’exemption, la sorale & la partielle, La premiere eft celle par la- quelle un Etat de l'empire en eft entierement déta- ché, au point de ne plus contribuer aux charges pu bliques, & de ne plusreconnoitre l'autorité de lEm- pire ; ce qui fe fait ou par la force des armes, ou par ceflion, C’eftainfi que la Suifle, les Provinces-Unies des Pays-Bas, le landgraviat d’Alface, &c. ont été eximés de l'Empire dont ces états relevoient autre= fois. L’exemption partielle eft celle par laquelle un état eft fouffrair à la jurifdi£tion immédiate de l’'Em- pire, pour n’y être plus fofmus que médiatement ; ce qui arrive lorfqu’un état plus puiflant en fait ôter un autre plus foible de la matricule de l'Empire, & lui enleve fa voix à la diete; pour lors celui qua exime doit payer les charges pour celui qui eft exi- mé, & ce dernier de fujet immédiat de l'Empire ,| Aro à médiat, ou landfafle, Voyez cet arti= cle, (— EXINANITION, f. f. (Medecine. ) Ce terme figni- fie la même chofe qu’évacuation : il eft employé de même pour défigner l’aétion par laquelle il fort quel- que matiere du corps en général, ou de quelqu'une de fes parties, {oit par l'opération de la nature, foit par celle de l’art. Poyez ÉVACUATION. (d) EXISTENCE, f. f. (Meéraphyf.) Ce mot oppofé 4 celui de zéant , plus étendu que ceux de réalité & d’ac- tuelité, oppofés, le premier à l'apparence, & le fe- cond à la poffibilité fimple ; fynonyme de l’un & de l’autre, comme un terme général l’eft des termes particuliers qui lui font fubordonnés (voyez Syxo= NYME), fignifie dans fa force grammaticale, l’érar d'une chofe entant qu’elle exifle. Mais qu’eft-ce qu’exif> ter ? quelle notion les hommes ont-ils dans l’efprit lorfqu’ils prononcent ce mot ? & comment l’ont-ils acquife ou formée ? La réponfe à ces queftions fera le premier objet que nous difcuterons dans cet arti- cle : enfuite, après avoir analyfé la notion de l’exif2 tence, nous examinerons la maniere dont nous paf= fons de la fimple impreffion pañlive & interne de nos fenfations , aux jugemens que nous portons fur le. xiflence mème des objets, & nous eflayerons d’éta- br les vrais fondemens de toute certitude à cet égard. | De la notion de l’exiflence. Je penfe, donc je fuiss difoit Defcartes. Ce grand homme voulant élever fur des fondemens folides le nouvel édifice de fa phi- lofophie, avoit bien fenti la néceñlité de fe dépouil- ler de toutes les notions acquifes , pour appuyer deformais toutes {es propoñtions fur des principes dont l’évidence ne feroit fufceptible ni de preuve r3 Ld ES de douté; mais il étoit bien loin de penfer que ce remier ralfonnement, ce premier anneau par lequel 1l prétendoit faïfr la chaîne entiere des connoiïffances humaines , fuppofât lui-même des notions très-ab£ traites, & dont le développement étoit très-difcile ; celles de penfée & d’exiffence. Locke en nous appre- nant, ou plütôt ennous démontrant le premier que toutes les idées nousviennent des fens, &c qu'il n’eft aucune notion dans l’efprit humain à laquelle 1l ne foit arrivé en partant uniquement des. fenfations , nous a montré le véritable point d’où les hommes font partis , & où nous devons nous replacer: pour fuivre la génération-de toutes leurs idées. Mon def- fein n’eft cependant point ici de prendre l’homméau premier inftant de {on être, d'examiner comment {es fenfations font devenues desidées,, & de difcuter fi l'expérience feule lux a appris à rapporter fes fen-! fations à des diftances déterminées, à les fentir les unes hors des autres, & à fe former l’idée d’étendue, comme le croit M, l'abbé de Condillac ;:ou fi ; com- me je le crois, les fenfations propres de la-vüe, du toucher, & peut-être de tous les autres fens, nefont pas néceflairement rapportées à une diftance quel-: conque les unes des autres , &c ne préfentent pas:par elles-mêmes l’idée de l'étendue, Foyez IDÉE ; SEN- SATION, VUE, TOUCHER , SUBSTANCE SPIRI- TUELLE. Je n’ai pas befoin de ces recherches : fi l’homme à cet épard a quelque chemin à faire, il eft tout fait long-tems avant qu'il fonge à fe former la notion abftraite de lexiffence ; & je puis bien le fup- pofer arrivé à un point que les brutes mêmes ont cer- tainement atteint,finous avons droit de juger qu’elles ont une ame. Voyez AME DES BÈTES. Il eftau moins inconteftable que l’homme a fù voir avant que d’ap- prendre à raifonner & à parler; & c’eft à cette épo- que certaine que je commence à le confidérer. En le dépouillant donc de tout ce que le progrès de fes réflexions lui a fait acquérir depuis, je Le vois, dans quelqu'inftant que je le prenne , ou plûtôt je me fens moi-même aflailli par une foule de fenfations & d'images que chacun de mes fens m’apporte, & dont l’aflemblage me préfente un monde d'objets dif- tinéts les uns des autres, & d’un autre objet qui feul m’eft préfent par des fen{ations d’une certaine efpece, & qui eft le même que j’apprendrai dans la fuite à nommer #02. Mais ce monde fenfible , de quels. élé- mens eft-il compofé? Des points noirs, blancs, rou- ges, verds, bleus, ombrés ou clairs, combinés en millemanieres, placés les uns hors des autres , rap- portés à des diftances plus ou moins grandes, & for- ‘mant par leur contiguité une furface plus ou moins enfoncée fur laquelle mes regards s'arrêtent ; c’eft à quoi fe réduifent toutes les images que je reçois par le fens de la vùe. La nature opere devant moifurun efpace indéterminé, précifément comme le peintre opere fur une toile. Les fenfations de froid, de cha- leur, de réfiflance, que je reçois par le fens du tou- cher, me paroïflent aufli comme difperfées çà & là dans un efpace à trois dimenfions dont elles déter- münent les différens points ; & dans lequel, lorfque les points tangibles font contigus , elles deffinent aufli des efpeces d'images , comme la vüe, mais à . leur maniere, & tranchées avec bien moins de net- teté. Le goût me paroît encore une fenfation locale, toùjours accompagnée de celles qui font propres au toucher, dont elle femble une efpece limitée à un Organe particulier. Quoique les fenfations propres de l’oùie & de l’odorat ne nous préfentent pas à-la- fois (dumoins d’une façon permanente) uncertain nombre de points contigus qui puiflent former des figures & nous donner une idée d’étendue, elles ont cependant leur place dans cet efpace dont les fenfa- tions de la vüe & du toucher nous déterminent les * dimenfons; & nous leur affignons toüjours une f- E XI 261 tuation , foit que nous les rapportions à une diftance éloignée de nos organes, ou à ces organes mêmes, Il ne faut pas omettre un autre ordre de fenfations plus pénétrantes, pour ainf dire, qui rapportées à l'intérieur de notre corps , en-oceupant même quel. quefois toute l’habitude , femblent remplir les trois dimenfions de l’efpace, & porter immédiatement avec elles Pidée de l’étendue folide. Je ferai de ces fenfations une claffe particuliere , fous le nom de sait intérieur Où fixieme fens, 8 J'y tangerai les douleurs qu'on reflent quelquefois dans l’intérieur des chairs, dans laicapacité des inteftins, & dans les os mêmes ; les nauféés, le mal-aife qui précede lévanoiiflement, la faim , la foif , l'émotion qui accompagne toutes les paflions ; les frflonnemens, foit de douleur , foit de volupté ; enfin cette multitude defenfations confufes qui ne nous abandonnentjamais, qui nous circon{cri- venten quelquefortenotre corps,quinous ie rendent toûjours préfent, 8 que par cette raïfon quelques . metaphyficiens ont appellées fers de la coexiflence de otre corps. Voy.les articles SENS & ToUcHER. Dans cetteefpece d’analyfe de toutes nos idées purement fenfibles’, je n’aï point rejetté les expreflions qui fup- pofent desnotions réfléchies, & des connoïflances d’unordre bien poftérieur à la fimple fenfation : il falloit bien m'en {ervir. L'homme réduit aux fenfa- tions n’a point de langage , & il n’a pû les défigner que par les noms des organes dont elles font propres, ou des objets qui les excitent ; ce qui fuppole tout le | fyftème de nosjugemens fur lexi/fence des objets ex- térieurs , déjà formé. Mais je fuis für de n’avoir peint que la fituation de l’homme réduit aux fimples im- preffions des fens, & je crois avoir fait l’'énuméra- tion exaête de celles qu'il éprouve : ilen réfulte que toutes les idées desobjets que nous appercevons par les fens , fe réduifent, en derniere analyfe, à une foule de fenfations de couleur, de réfiftance , de fon à Éc. rapportées à différentes diftances les unes des au- tres, &c répandues dans un efpace indéterminé, comme autant de points dont l’aflemblage & les com- binaïfons forment un tableau folide (f l’on peut em- ployer ie ce mot dans la même acception que les Géometres) , auquel tous nos fens à-la-fois fournif- fent des images variées & multipliées indéfiniment, Je fuis encore loin de la notion de Pexiffence , & je ne vois jufqu’ici qu'une impreffion purement paflive, ou tout au plus le jugement naturel par lequel plu- fieurs métaphyficiens prétendent que nous tranfpor- tons nos propres fenfations hors de nous-mêmes à pour les répandre fur les différens points de l’efpace que nous imaginons, J’oyez SENSATION, VUE & ToucHer, Mais cetableau compofé de toutes nos fenfations, cet univers idéal n’eft jamais le même deux inftans de fuite; & la mémoire qui conferve dans le fecond inftant l’imprefion du premier, nous met à portée de comparer ces tableaux paflagers ; &t d’en obferver les différences. (Le développement de ce phénomene n’appartient point à cet article, & je dois encore le fuppoler, parce que la mémoire n’eft pas plus Le fruit de nos réflexions que la fenfa- tion même, Voyez MÉMOIRE). Nous acquérons les. idées de changement & de mouvement (Remarquez que je dis idée, & non pas motion ; voyez ces deux ar= cicles); Plufieurs aflemblages de ces points colorés, chauds ou froids, &c, nous paroïffent changer de diftance les uns par rapport aux autres, quoique les points eux-mêmes qui forment ces aflemblages, gar- dent entr’eux le même arrangement ou la même co- ordination. Cette coordination nous apprend à dif- tinguer ces affemblages de fenfations par mañles, Ces males de fenfations coordonnées, font ce que nous appellerons un jour oëjess ou individus. Voy. ces deux mors, Nous voyons cesindividus s'approcher, fe fuir, difparoïître quelquefois entierement, ou pour reparoi- 262 E XI tre encore. Parmi ces objets ou grouppes de fenfa- tions-qui compofent ce tableau mouvant, il en eft un qui , quoique renfermé dans des limites très-étroi- . tes en comparaïfon du vafte efpace où flottent tous les autres, attirenotre attention plus que touit le refte enfemble. Deux chofes fur-tout le diftinguent , fa préfence continuelle , fans laquelle tout difparoït, & la nature particuliere des fenfations qui nous le rendent préfent: toutes les fenfations du toucher S'y rapportent , & circonfcrivent exaétement l’efpace dans lequel il eft renfermé. Le goût & l’odorat lui | appartiennent auf ; mais ce qui attache notre atten- tion à cet objet d’une maniere plus irréfiftible, c’eft le plaifir & la douleur, dont la fenfation n’eft jamais rapportée à aucun autre point de l’efpace. Par-là cet objet particulier, non-feulement devient pour nous le centre de tout l'univers , &c Le point d’ornous me- furons toutesles diftances, mais nous nous accoutu- mons encore à le regarder comme notre être propre; & quoique les fenfations qui nous peignent la lune &lesétoiles, ne foient pas plus diftinguées de nous : que celles qui fe rapportent à notre corps, nous les regardons comme étrangeres, & nous bornons le fentiment du woi à ce petit efpace circonfcrit par Le plaïfir &c par la douleur ; mais cet aflemblage de fen: : fations auxquelles nous bornons ainfi notre être, n'eft dans la réalité, comme tous es autres affembla- ges des fenfations , qu'un objet particulier du grand tableau qui forme l’univers idéal. Tous Les autres objets changent à tous les inftans, paroïflent & difparoiïffent , s’approchent & s’éloi- gnent les uns des autres , & de ce moi, qui, par fa préfence continuelle , devient Le terme néceflaire au- elnous les comparons. Nous les appercevons hors de nous, parce que Pobjet que nous appellons zous, n’eft qu’un objet particulier, comme eux > & parce ue nous ne pouvons rapporter nos fenfations à dif- férens points d’un efpace, fans voir les affemblages de ces fenfations les uns hors des autres ; mais quoi- qu'apperçüs hors de nous , comme leur perception eft toùjours accompagnée de celle du #10: , cette per- ception fimultanée établit entr’eux & nous une rela- tion de préfence qui donne aux deux termes de cette relation, le moi &t l’objet extérieur, toute la réalité que la confcience affüre au fentiment du woi. Cette confcience de la préfence des objets n’eft oint encote la notion de l’exiffence, &c n’eft pas mê- me celle de préfence ; car nous verrons dans la fuite que tous les objets de la fenfation ne font pas pour cela regardés comme préfens. Ces objets dont nous obfervons les diftances êt les mouvemens autour de notre corps, nous intéreflent par les effets que ces diftances & ces mouvemens nous paroïffent produire fur lui, c’eft-à-dire par les fenfations de plaïfir ëc de douleur dont ces mouvemens font accompagnés ou fuivis. La facilité que nous avons de changer à vo- lonté la diftance de notre corps aux autres objets im- mobiles, par un mouvement que l'effort qui l’ac- compagne nous empêche d'attribuer à ceux-ci, nous £ert à chercher les objets dont l’approche nous donne du plaïfir, à éviter ceux dont l'approche eft accom- pagnée de douleur. La préfence de ces objets de- vient la fource de nos defirs & de nos craintes, & le motif des mouvemens de notre corps, dont nous dirigeons lamarche au milieu de tous les autres corps, précifément comme un pilote conduit une barque fur une mer femée de rochers & couverte de barques ennemies. Cette comparaïfon, que je n’employe point à titre d'ornement , fera d'autant plus propre à rendre monidée fenfble, que la circonftance où fe trouve le pilote, n’eft qu’un cas particulier de la fituation où {e trouve l’homme dans la nature, en- vironné, preflé , traverfé, choqué par tous les êtres: fuivons-la, Si le pilote ne penloit qu'à éviter les ro- chers qui paroïffent à la furface de farmer, le nau< frage de fa barque, entre-ouverte par quelqu’écueil caché fous les eaux , lui apprendroit fans doute à craindre d’autres dangers que ceux qu'il apperçoit ; il n'iroit pas bien loin non plus, s’il falloitqu’en par- tant il vit le port ob:il defire arriver. Comme lui, : l’homme eft bientôt averti par les effets trop fenf- bles d’êtres qu’il avoit ceflé de voir, foit en s’éloi- gnant , foit dans le fommeil, ou feulement en fer- mant les yeux, que les objets ne font point anéantis pour avoir difparu , 8c que les limites de fes fenfa- tions ne font point les limites de lunivers. De-là naît un nouvel ordre de chofes , un nouveau monde intelleétuel, auf vafte que le monde fenfble étoit : borné. Siuniobjet emporté loin du fpeétateur par un mouvement rapide, fe perdenfindans l'éloignement, * l'imagination fuit fon cours au-delà de la portée des fens, prévoit fes effets, mefure fa vitefle; elle con- ferve le plan des fituations relatives des objets.que les fens ne voyent plus; elle tire des lignes de -com- munication des objets de la fenfation aûtuelle à ceux de la fenfation pañlée, elle en mefure la diftance, elle en détermine la fituation dans lefpace ; elle parvient même.à prévoir les changemens qui ont dû arriver dans cette fituation ; par la vitefle plus où moins: grande deleur mouvement. L'expérience vérifietous les calculs, &dès-là ces objets abfens entrent, com- me les préfens , dans le fyftème général de nos defirs, de nos craintes , des motifs de nos a@tions, & l’hom- me, comme le pilote, évite &r cherche des objets qui ! échappent à tous fes fens. Voilà une nouvelle chaîne & de nouvelles rela- tions par lefquelles les êtres fuppofés hors de nous fe lient encore à la confcience du 107, non plus par la fimple perception fimultanée , puifque fouvent ils ne font point apperçüs du-tout , maïs par la conne- xité qui enchaîne entreux les changemens de tous les êtres & nos propres fenfations, comme caufes &c: effets les uns des autres. Comme cette nouvelle chat- ne de rapports s'étend à une foule d’objets hors de la portée des fens , l’homme eft forcé de ne plus con- fondre les êtres mêmes avec fes fenfations, & il ap- prend à diftinguer les uns des autres, les objets pré« _fens, c’eft-à-dire renfermés dans les limites de la. ! fenfation a@tuelle , & liés avec la confcience du #10. par une perception fimultanée ; & les objets abfens, c’eft-à-dire des êtres indiqués feulement par leurs effets, ou par la mémoire des fenfations pañlées que nous ne VOyOns pas, Mais qui par un enchaînement quelconque de caufes &c d'effets, agiflent fur ce que nous voyons ; que nous verrions s'ils étoient placés. dans une fituation &c à une diftance convenable, & que d’autres êtres femblables à nous voyent peut- être dans le moment même ; c’eft-à-dire encore que ces êtres, fans nous être préfens par la voie des fen- fations, forment entr'eux , avec ce que nous voyons &c avec nous-mêmes, une chaîne de rapports, foit d’aétions réciproques , foit de diftance feulement ; rapports dans lefquels le #04 étant todjours un des termes, la réalité de tous les autres nous eft certifiée par la confcience de ce moi, Effayons à - préfent de fuivre la notion de lex:/= . sence dans les progrès de fa formation. Le premier fondement de cette notion eft la confcience de notre propre fenfation, & le fentiment du #0: qui réfulte de cette confcience. La relation néceflaire entre l’être appercevant & l'objet apperçü , confi- déré hors du #07, fuppofe dans les deux termes la même réalité ; il y a dans l’un & dans l’autre un fon- dement de cette relation, que l’homme, s'il avoit un langage, pourroit défigner par le nom commun d’exiffence ou de préfence; car ces deux notions ne fe- roient point encore diftinguées l’une de l’autre. L'habitude de voix reparoître les objets fenfbles | XT aprèsles avoir perdus quelque tems , & de retrouver en eux les mêmes caraéteres & la même a@on fur nous, nous a appris à connoître les êtres par d’au- | tres rapports que par nos fenfations, &r à les en dif- tinguer. Nous donnons , fi j’ofe ainfi parler, notre aveu à imagination qui nous peint ces objets de la fenfation pañlée avec les mêmes couleurs que: cenx de la fenfation préfente , & qui leur affigne comme celle-ci, un lieu dans l’efpace dont nous nous voyons environnés ; & nous reconnoiflons par conféquent entre ces objets imaginés & nous, les mêmes rap- ports de diftance & d’aétion mutuelle que nous ob- fervons entre les objets aétuels de la fenfation, Ce apport nouveau ne fe termine pas moins à la conf- cience du #07, que celui qui eft entre l’être apperçù &rl'être appercevant;1lne fuppofe pas moins dans | es deux termes la même réalité, & un fondement de leur relation qui a pü être encore défigné par lenom commun d'exiffence; ou plütôt la@tionmême de l’ima- gination,lorfqw’elle répréfente ces objetsavecles mé- mes rapports d'action & de diftance, foit entr’eux, foit avec nous, eft telle, queles objets a@uellement pré- Îens aux fens, peuvent tenir lieu de ce nom général, &t devenir comme un premier langage qui renferme {ous le même concept la réalité des objets aétuels de la fenfation , &c celle de tous les êtres que nous fup- pofons répandus dans l’efpace, Mais il eft très-ime portant d'obferver que ni la fimple fenfation des:ob- jets préfens, nila peinture que fait l'imagination des objets abfens, ni le fimple rapport de diftance ou d'aétivité réciproque , commun aux uns & aux au: tres, ne font précifément la chofe que l’efprit vou droit défigner par le nomcommun d’exifferce; c’eft le fondement même de ces rapports, fuppofé com- mun au #02, à l’objet vü & à l’objet fimplement dif. tant, fur lequel tombent véritablement & le nom d’exiflence & notre afirmation , lorfque nous difons qu'une chofe exifte. Ce fondement commun n’eft ni ne peut être connu immédiatement ; & ne nous eft indiqué que par les rapports différens qui le fuppo: fent: nous nous en formons cependant une efpece d'idée que nous tirons par voie d’abftra@ion du té- moignage que la confcience nous rend de nous-mê- mes & de notre fenfation aétuelle; c’eft-à-dire que nous tranfportons en quelque forte cette confcience du 0i fur les objets extérieurs, par une efpece d’af- fimilationvague, démentie aufli-tôt par la fépara- tion de tout ce qui caraétérife le 07, mais qui ne fuffit pas moins pour devenir le fondement d’une abflraétion ou d’un figne commun, & pour être l’ob- jet dé nos jugemens. Voyez ABSTRACTION & JUGE- MENT. Le concept de Pexzffence eft donc le même dans un fens , foit que l’efprit ne l’attache qu’anx objets de la fenfation , foit qu'il ’étende fur les objets que lima- gimation lui préfente avec des relations de diftan- ce & d'aéhivité , puifqu'il efttoüjours primitivement renfermé dans la confcience même du 10 générali- 1é plus ou moins. À voir la maniere dont les enfans prètent du fentiment à tout ce qu'ils voyent ,-& l’in- chination qu'ont eu les premiers hommes à répandre l'intelligence & la vie dans toute la nature ; je me perfuade que le premier pas de cette généralifation a été de prêter à tous les objets vûs hors de nous tout ce que la confcience nous rapporte de nous mê- me, 6: qu'un homme, à cette premiere époque de la raifon, auroit autant de peine à reconnoître une fubftance purement matérielle , qu’un matérialifte en a aujourd'hui à croire une fubftance purement {pi- rituelle, ou un cartéfien à recevoir l’attradion. Les différences que nous ayons oblervées entre les ani- maux &c les autres objets, nous ont fait retrancher de ce concept l'intelligence , & fucceflivement la {enfbilite. Nous ayons vû qu'il navoit été d'abord EXT 263 “tendiw'aux objets dé la fenfation adtuelle ; &c’eft à cette fenfation rapportée hors de nous; qu’il étoit attaché ; enforte qu’elle en étoit commelle figne in- féparable , & que l’efprit ne penfoit pas à en diflin: guersLes relations de diftance & d’adivité. dés ob. jets à nous, étoient cependant appercüesi; elles indiquoient aufh avec le #05 un rapport qui fuppoz foitévalement le fondement commun auquel le con ceptide l’exiffence emprunté de la confcience du MO, n'étoit pas moins applicable ; mais commerce rapx pott n’étoit préfenté que par la fenfation elle-mê- me, on ne dut y attacher fpécialement le concept de Pexzflence, que lorfqu'onreconnut des objets ab- fens, Au défaut du rapport de fenfation , qui céfloit d'être général , le rapport de diftance & d'adivité généralifé par l'imagination, & tranfpottéides ob+ Jets de la fenfation ‘a@tuelle à d’autres objets fuppoz {és', devint le figne de lexiffence commun aux deux ordres d'objets, & le rapport de fenfation a@uelle ne fut plus que le figne de la préfence, c’eft-à dire d’un cas particulier comprisfous le concépt général d’e- æiffence. CA Je me fers de ces deux mots pour äbréger ,& pour defigner ces deux notions qui commencent efeétive- ment à cette époque à être diftinguées l’une de Pau- tre , quoiqu'elles n’ayent point encore:acquis toutes les limitations qui doivent les caradtérifér dans la fuite. Les fens ont leuts illufions, & imagination ne connoît point de bornes: cependant &les illi- fions des fens & les plus grands écarts de l'imagina- tion , nous préfentent des objets placés dans Pefpa- ce avec les mêmes rapports de diftance &rd’aûtivité, que les impreffions les plus régulieres des fens& de la mémoire. L'expérience feule à pü apprendre à diflinguer la différence de’ces deux icas ; &'à nat tacher qu’à l’un des deux le concept de Pexiffénce. Onremarqua bien-tôt que parmi ces tableaux, il y en avoit qui fe repréfentoient dans un certain ‘of- dre , dont les objets produifoient conftamment les mêmes effets qu'on pouvoit prévoir, hâter ou fuir, & qu'il y en avoit d’autres abfolument paflagers ; dontlesobjetsneproduifoientaucuneffet permanent, &t ne pouvoient nous infpirer ni crainteseni defirs À nifervir de motifs à nos démarches. Dès-lors ils n’en- trerent plus dans le fyftème général des êtres au mi- heu defquels l’homme doit diriger fa marche, &l’on ne leut attribua aucun rapport avec-la confcience permanente du 7202, qui fuppofât un fondement hors de ce moi. On diftingua donc dans les tableaux des fens & de l'imagination , les objets exiffans des objets fimplement apparens | & la réalité de iHufon. La liaifon & Paccord desobjets apperçusavec le fyftème général des êtres déjà connus, devint laregle pour jur- ger de la réalité des premiers, & cetteregle fervit aufli à diftinguer la fenfation de l’imagination dans les cas où la vivacité des images &le manque de points de comparaïfon auroit rendu l’erreut inévi- table, comme dans les fonges & les délires : elle {er- vit:aufh à démêler les illufions des fens eux-mêmes dans les miroirs, les réfraétions, 6:c, & ces illufñons une fois conftatées, on ne: S’en tint plus à féparer V'exiffence de la fenfation ; il fallut encore féparer la {enfation du concept de lexifferce , & même de ce- lui de préfence , 8 ne la regarder plus que comme un figne de Pune & del’autre, qui pourroit quelque- fois tromper. Sans developper avec autant d’exaéti- tude que l'ont fait depuis les philofophes modernes, la différence de nos fenfations &c des êtres qu’elles repréfentent, fans favoir que les fenfations ne font que des modificatious de notre ame, & fans trop s’embarrafler fi. les êtres exiftans &t les fenfations forment deux ordres de chofes entierement féparés lun de l'autre, & liés feulement par une correfpon- dançe plus ou moins exafe, & rçélativeà de certai- 264 EXI nes lois , on adopta de cette idée tout ce qu’elle de pratique. La feule expérience fufiit pour diriger les craintes , les-defirs , & les aétions des hommes les moins philofophes , relativement à l’ordre réel des chofes., telles qu’elles exiftent hors de nous, & cela ne les empêche pas de continuer à confondre les fenfations avec les objets même, lorfqu’il n’y a aucun inconvénient pratique. Maïs malgré cette confufion , c’eft toùjours {ur le mouvement & la diftance des objets, que fe seglent nos craintes, nos defirs , & nos propres mouvemens : ainfi lef- prit dut s’accoûtumer à féparer totalement la fen- fation de la notion d'exyflence | & 1l s’y accoûtu- ma tellement, qu’on en vint à la féparer auffi de la notion de préfence , enforte que ce mot préfence , fignifie non-feulement l’exiffence d’un objet aétuelle- ment apperçû par Les fens, maïs qu'il s'étend même à tout objet renfermé:dans les limites où les fens peu- vent aétuellement appercevoir, &c placé à leur por- tée , foit qu'il foit apperçù ou non. Dans ce fyftème général des êtres qui nous envi- +onnent , fur lefquels nous agiflons , & qui agaflent fur nous à leur tour, il en eft que nous avons vüs pa- roitre & reparoître fucceflivement , que nous avons regardés comme parties du fyftème où nous fommes placés nous mêmes , & que nous ceflons de voir pour jamais : il en eft d’autres que nous n'avons Jamais vûs, & qui fe montrent tout-à-coup au milieu des êtres, pour y paroiître quelque tems & difparoître enfin fans retour. Si cet effet n’arrivoit Jamais que par un tranfport local qui ne fit qu’éloigner Pobjet pour toûjours de la portée de nos fens , ce ne feroit w’une abfence durable : mais un médiocre volume ‘eau , expofé à un air chaud , difparoït fous nos yeux fans mouvement apparent ; les arbres &c Les animaux ceflent de vivre, & 1l n’en refte qu’une très - petite partie méconnoiffable , fous la forme d'une cendre legere. Par -là nous acquérons les notions de deftruétion , de mort , d’anéantifle- ment. De nouveaux êtres, du même genre que les remiers , viennent les remplacer ; nous prévoyons É fin de ceux: c1 en les voyant naître, &c l’expérien- ce nous apprendra à en attendre d’autres après eux. Ainfi nous voyons les êtres fe fuccéder comme nos penfées. Ce n’eft point ici le lieu d'expliquer la gé- nération de la notion du tems , ni de montrer com- ment celle de l’exiffence concourt avec la fucceffion de nos penfées à nous la donner. Voyez Succes- SION, Tems € DURÉE. Il fuffit de dire que lorf: que nous avons ceflé d'attribuer aux objets ce rap- port avec nous, qui leur rendoit commun lé témoi- gnage que nos propres penfées nous rendent de nous- mêmes , la mémoire, en nous rappellant leur image, nous rappelle en même tems ce rapport qu’ils avoient avec nous dans un tems, où d’autres penfées qui ne ont plus , nous rendoïent témoignage de nous-mêé- mes, & nous difons que ces objets ons ére ; la me- moire leur affigne des époques &c des diftances dans la durée comme dans l'étendue. L'imagination ne peut fuivre le cours des mouvemens imprimés aux corps , fans comparer la durée avec l’efpace parcou- ru ;elle conclura donc du mouvement pañlé & du lieu préfent , de nouveaux rapports de diftance qui ne font pas encore ; elle franchira les bornes du -moment où nous fommes, comme elle a franchi les limites de la fenfation attuelle. Nous fommes forcés alors de détacher la notion d’exiffence de tout rap- port avec nous & avec la confcience de nos penfées qui n’exifte pas encore , & qui n’exiftera peut - être jamais. Nous fommes forcés de nous perdre nous- mêmes de vûe, & de ne plus confidérer pour attri- buer l’exiffence aux objets que leur enchaïnement avec le fyflème total des êtres, dont l’exi/fence ne nous eft, à la vérité, connue que par leur rapport E XI avec la nôtre, maïs qui n’en font pas moins indépen- dans, & qui n’exifteront pas moins, lorfque nous ne ferons plus. Ce fyftème , par la liaifon des caufes & des effets, s'étend indéfiniment dans la durée comme dans l’efpace. Tant que nous fommes un des termes auquel fe rapportent toutes les autres parties parune chaîne de relations a@uelles, dont la confcience de nos penfées préfentes eft le témoin, les objets exif- tent, Îls ont exiffé, fi pour en retrouver l’enchaîne- ment avec l’état préfent du fyftème , il faut remon: ter des effets à leurs caufes ; ils exzfferonr , s'il faut ‘au contraire defcendre des caufes aux effets: ainfi l'exiflence eft pañlée , préfente , ou future, fuivant qu'elle! eft rapportée par nos jugemens à différens points de la durée, | Mais foït que l’exiffence des objets foit pañlée, pré: fente, ou future , nous avons vû qu’elle ne peut nous être certifiée, fi elle n’a ou par elle-même, ou par l’enchaïînement des caufes & des effets, un rap: port avec la confcience du roi , ou de notre exiffen: ce momentance. Cependant quoique nous ne puif- fions fans ce rapport aflrer lexiffence d’un objet, nous ne fommes pas pour cela autorifés à la nier, puifque ce même enchaînement de caufes & d'effets établit des rapports de diflance & d’ativité entre nous &c un grand nombte d'êtres , que nous ne con- noïflons que dans un très-petit nombre d'inffans de leur durée, ou qui même ne parviennent jamais à notre connoiffance. Cet état d'incertitude ne nous préfente que la fimple notion de poffibilité | qui ne doit pas exclure l’exiffence , mais qui ne la renferme pas néceffairement. Une chofe poflible qui exifte, eft une chofe aétuelle ; ainf toute chofe aftuelle eft exiftente, & toute chofe exiftente eft aftuelle , quoi- qu'exiffence & atlualite ne foient pas deux mots par= faitement {ynonymes , parce que celui d’exifhence . eft abfolu, & celui d'aéfzaliré eft correlatif de po/f- bilité. Jufqu'ici nous avons développé la notion d'exif rence ; telle qu’elle eft dans l’efprit de la plüpart des hommes, fes premiers fondemens, la maniere dont elle a été formée par une fuite d’abftra@ions de plus en plus générales , & très-différentes d’avec les no tions qui lui font relatives où fubordonnées. Mais nous ne Pavons pas encore fuivie jufqu'à ce point d’abftraétion & de généralité où la Philofophie l’a portée. En effet, nous avons vù comment le fenti- ment d4 m01, que nous regardons comme la fource de la notion d’exiffence, a été tranfporté par abftrac- tion aux fenfations mêmes regardées comme des ob. jets hors de nous; comment ce fentiment 44 moi a été généralifé en en féparant l'intelligence & tout - ce qui caractérife notre être propre ; comment en- fuite une nouvelle abftraétion l’a encore tranfporté des objets de la fenfation à tous ceux dont les effets nous indiquent un rapport quelconque de diftance ou d’aétivité avec nous-mêmes, Ce degré d’abitrac- tion a fufhi pour l’ufage ordinaire de la vie, & la Phi- lofophie feule a eu befoin de faire quelques pas de. plus, maïs elle n’a eu qu’à marcher dans la même route; car puifque les relations de diftance &r d’a@i- vité ne font point précifément la notion de l’exi/fen- ce , & n’en font en quelque forte que le figne nécef- faire, comme nous l'avons vû; puifque cette notion n’eft que le fentiment 44 moitranfporté par abftrac- tion, non à la relation de diftance , mais À l’objet même qui eft le terme de cette abftraétion, on a le même droit d'étendre encore cette notion à de nou- veaux objets, en la refflerrant par de nouvelles ab£ tra@ions, & d’en féparer toute relation ayec nous de diftance & d’aûtivité, comme on en avoit pré- cédemment féparé la relation de l’être apperçu à l'être appercevant. Nous ayons reconnu que ce n’étoit plus par le rapport immédiat des êtres avec | | TOUS, E XI tous, mais par leur liaifon avec le fyftème général, dont nous faifons partie, qu'il falloit juger de leur exiftence, Il eft vrai que ce fyftème eft toûjours lié avec nous par la confcience de nos penfées préfen- tes; mais 1l n’eft pas moins vrai que nous n’en fom- mes pas parties eflentielles, qu’il exiftoit avant nous, qu'il exiftera après nous, & que par conféquent le rapport qu'il a avec nous n’eft point néceflaire pour qu'il exifte, & l’eft feulement pour que fon exifferce nous foit connue : par conféquent d’autres fyffèmes entierement {emblables peuvent exifter dans la vafte étendue de l’efpace, ifolés au milieu les uns des au- tres, fans aucune aétivité réciproque, & avec la _ eule relation de diflance, puiqu’ils font dans l’ef- pace, Et qui nous a dit qu’il ne peut pas y avoir auñfi d’autres {yftèmes compofés d'êtres qui n’ont pas, même entr'eux, ce rapport de diftance, & qui n’e- xiftent point dans l’efpace ? Nous ne les concevons point, Qui nous a donné le droit de nier tout ce que nous ne concevons pas, & de donner nos idées pour bornes à l'univers ? Nous-mêmes fommes-nous bien frs d’exilter dans un lieu, & d’avoir ayec aucun au- tre être des rapports de diftance ? Sommes-nous bien {ürs que cet ordre de fenfations rapportées à des dif tances idéales les unes des autres , corréfpondent _ exactement avec l’ordre réel de la diftance des êtres exiftans ? Sommes-nous bien fûrs que la {enfation qui nous rend témoignage de notre propre corps, lui fixe dans l’efpace une place mieux déterminée, que la fenfation qui nous rend témoignage de l’exiffence des étoiles, & qui, néceflairement détournée par aberration , nous les fait toñjours voir où elles ne font pas ? Voyez SENSATION € SUBSTANCE SPIRI- TUELLE. Or fi le 707 , dont la confcience eft l’uni- que fource de la notion d’exiflence , peut n'être pas lui-même dans l’efpace, comment cette notion ren- fermeroit-elle néceflairement un rapport de diftance avec nous? Ilfaut donc encore l’en féparer, comme on en a féparé le rapport d’aétivité & celui de fen- ation. Alors la notion d’exiffence fera aufi abftraite awelle peut l'être, & n’aura d’autre figne que le mot même d’exiflence; ce mot ne répondra, comme on le voit, à aucune idée ni des fens ni de l'imagination, fi ce n'eft à la confcience du moi, mais généralifée & féparée de tout ce qui caratérife non-feulement le 707, mais même tous les objets auxquels elle a pû être tranfportée par abfiraétion. Je fai bien que cet- te généralifation renferme une vraie contradi@ion , mais toutes les abftraétions font dans le même cas, &c c’eft pour cela que leur généralité n’eft jamais que dans les fignes & non dans les chofes (voyez IDkE ABSTRAITE): la notion d’ex/Ænce n’étant compofée d'aucune autre idée particuliere que de la con{cien- ce même du wo, qui eft néceflairement une idée fimple, étant d’ailleurs applicable à tous les êtres fans exception, ce mot ne peut être, à proprement parler, défini, & il fuffit de montrer par quels de- grés la notion qu'il défigne a pà fe former. Je n'ai pas cru néceffaire pour ce développement, de fuivre la marche du langage & la formation des noms qui répondent à lexifence , parce que je re- garde cette notion comme fort antérieure aux noms qu’on lui a donnés, quoique ces noms foient un des premiers progrès des langues. Voyez LANGUES 6 IVERBE SUBSTANTIF. Je ne traiterai pas non plus de plufieurs queftions agitées parles Scholaftiques {ur Pexiflence, comme ff elle convient aux modes , fi elle n’eff propre qu’à des in- dividus, &c. La folution de ces queftions doit dépen- dre de ce qu’on entend par exiflence ; &t il n’eft pas difficile d'y appliquer ce que j'aidit. 7 0ÿez IDENTI- TÉ, SUBSTANCE, MODE, & INDIvIDU. Je ne me fuis que trop étendu, peut-être , fur une analyfe beaucoup plus dificile awelle ne paroîtra impor- Tome WT, À CRU E XI 26$ tañte; mäis j'ai èru que la fituation de l’homme dans la nature au milieu des autres êtres, la chaîne qué fes fenfations établiffent entre eux & lui, & la ma: niere dont ilenvifage fes rapports avec eux; devoient être repardés comme les fondemens mêmes dé la Phi- lofophie, fur lefquels rien n°eft à négliger, Il ne me refte qu'à examiner quelle forte de preuves nous avons de l’exiffence des êtres extérieurs. : 48 Des preuves de l’exiflence des étres extérieurs, Dans la fuppoñtion où nous ne connoîtrions d’autres objets que ceux qui nous font préfens par la fenfa- tion, le jugement par lequel nous regarderions ces objets comme placés hors de nous, & répandus dans l’efpace à différentes diftances , ne feroit point une erreur ; 1l ne feroit que le fait même de l’impreffion que nous éprouvons, &c il ne tomberoit que fur uné relation entre l’objet & nous, c’eft-à-dire entre deux chofes également idéales , dont la diftance feroit auf purement idéale & du même ordre que les deux ter mes, Car le m0; auquel la diftance de l’objet feroit _ alors comparé, ne feroit jamais qu’un objet particu= lier du tableau qüe nous offre l’enfemble de nos fen fations, il ne nous feroit rendu préfent, comme tous les autres objets, que par des fenfations , dont la pla- ce feroit déterminée relativement à toutes les autres fenfations qui compofent le tableau, & il n’en diffé reroit que par le fentiment de la confcience , Qui ne lui affigne aucune place dans un efpace abfolu. Sà nous nous trompions alors en quelque chofe, ce fe= roït bien plütôt en ce que nous bornons cette conf cience du #0: à un objet particulier, quoique toutes les autres fenfations répandues autour de nous foient peut-être également des modifications de notre fubf tance. Mais puifque Rome & Londres exiftent pour nous lorfque nous fommes à Paris, puifque nous ju< geons les êtres comme exiftans indépendamment de nos fenfations & de notre propre exifence , l’ordre de nos fenfations qui fe préfentent à nous les unes hors des autres, & l’ordre des êtres placés dans l’ef pace à des diftances réelles les unes des autres, for- ment donc deux ordres de chofes, deux mondes fé. parés, dont un au moins (c’eft l’ordre réel ) eft ab- folument indépendant de l’autre, Je dis ur an moins, car les réflexions , les réfraétions de la lumiere Ar SA tous les jeux de l'Optique, les peintures de lPimapi- nation, &c fur-tout les illufions des fonges, nous prouz vent fufifamment que toutes Les impreffionsdes {ens, c'eft-à-dire les perceptions des couleurs, des fons > du froid, du chaud, du plaifir & de la douleur, peu- vent avoir lieu, & nous repréfenter autour de nous des objets, quoique ceux-c1 n’ayent aucune exiffence téelle. Il n’y auroit donc aucune contradi@ion à ce que le même ordre des fenfations, telles que nous les éprouvons, eût lieu fans qu’il exiftât aucun autre être; & de-là naît une très-prande difficulté contre la certitude des jugemens que nous portons fur l’or- dre réel des chofes, puifque ces jugemens ne font & ne peuvent être appuyés que {ur l’ordre idéal de nos fenfations. Tous les hommes qui n’ont point élevé leur notion de l’exiffence; au-deflus du degré d’abftraîion par le- quel nous tranfpoïtons cette notion des objets im- médiatement fentis, aux objets qui ne font qu'indi= qués par leurs effets & rapportés À des diftances hors de la portée de nos fens (voyez la premiere partie de cet article), confondent dans leurs jugemens ces deux ordres de chofes. Ils croyent voir, ils croyent tou- chet les corps, & quant à l’idée qu'ils fe forment de l’exiflence des corps invifibles , l'imagination les leux peint revêtus des mêmes qualités fenfbles; car c’eft le nom qu’ils donnent à leurs propres fenfations, & ils ne manquent pas d’attribuer ainfi cés qualités à tous les êtres. Ces hommes-là quand ils voyent un objet où il n'eft pas, croyent que des images faufles L] ' f 260 E Si & trompeufes ont pris la place de cet objet, 8 ne s’appercoivent pas que leur jugement feul eft faux. Il faut l'avouer, la correfpondance entre l’ordre des fenfations & l’ordre des chofes eft telle fur la plüpart des objets dont nous fommesenvironnés, & qui font fur nous les impreffions les plus vives &c les plus re- latives à nos befoins , que l'expérience commune de la vie ne nous fournit aucun fecours contre ce faux jugement, & qu’ainf il devient en quelque forte na- turel & involontaire, On ne doit donc pas être éton- né que la plûpart des hommes ne puiffent pas imagt- ner qu’on ait befoin de prouver l’exi/fence des corps. Les philofophes qui ont plus généralifé la notion de l’exiffence , ont reconuu que leuts jugemens & leuts fenfations tomboient fur deux ordrès de chofes très- différens, & ils ont fenti toute la difficulté d’affürer leurs jugemens fur un fondement folide, Quelques- uns ont tranché le nœud en niant l’extflence de tous les objets extérieurs , & en n’admettant d'autre réa- lité que celle de leurs idées : on les a appellés £goif- tes 8 Idéalifles, Voytz EGOISME 6 IDÉALISME, Quelques-uns fe font contentés de nier l’exiffence des corps & de l'univers matériel, & on les a nommés Immatérialifles. Ces erreurs font trop fubtiles, pour être fort répandues ; à peine en connoît-on quelques partifans, fi ce n’eft chez les philofophes Indiens, parmi lefquels on prétend qu'il y a une feéte d’Egoif- tes. C’eft le célebre évêque de Cloyne, le doéteur Berkeley, connu par un grand nombre d'ouvrages tous remplis d’efprit &c d'idées fingulieres, qui, par fes dialogues d’Hylas & de Philonous , a dans ces derniers tems réveillé l’attention des Métaphyficrens fur ce fyftème oublié. Foyez Corps. La plüpart ont trouvé plus court de le mépriferique de lui répon- dre, & cela étoit en effet plus aifé. On effayera dans l’arcicle IMMATÉRIALISME , de refuter {es raifonne= mens, & d'établir l’exiffence de l'univers matériel : : on fe bornera dans celui-ci à montrer combien il eff néceffaire de lui répondre, & à indiquer le feul gen- re de preuves dont on puifle fe fervir pour affürer non-feulement l’exiffence des corps, mais encore la réalité de tout ce qui n’eft pas compris dans notre fenfation aétuelle &c inftantanée. Quant à la néceflité de donner des preuves de l’exiflence des corps & de tous les êtres extérieurs ; en difant que l'expérience & le méchanifme connu de nos {ens, prouve que la fenfation n’efl point l’objet, qu’elle peut exifter fans aucun objet hors de nous, & que cependant nous ne voyons véritablement que la fenfation, l’on croiroït avoir tout dit, fi quelques métaphyficiens ; même parmi ceux qui ont prétendu refuter Berkeley, n’avoient encore recours à je ne fai quelle préfence des objets par le moyen des fen- fations, & à l’inclination qui nous porte involontai- rement à nous fier là-deflus à nos fens. Mais com- ment la fenfation pourroit-elle être immédiatement & par elle-même un témoignage de la préfence des corps, puifqu’elle n’eft point le corps, & fur-tout puifque l'expérience nous montre tous les jours des occafñons où cette fenfation exifte fans les corps ? Prenons celui des fens , auquel nous devons le plus grand nombre d'idées, la vüe. Je vois un corps, c’eft à-dire que j’apperçois à une diftance quelcon- que une image colorée de telle ou telle façon; mais qui ne fait que cette image ne frappe mon ame que parce qu’un faifceau de rayons mis avec telle ou tel- le vîtefle eft venu frapper ma retine, fous tel ou tel angle ? qu'importe donc de l’objet, pourvû que l’ex- trémité des rayons, la plus proche de mon organe, foit müeavec Lien vitefle & dans la même direc- tion ? Qu'importe mème du mouvement des rayons, fi les filets nerveux qui tranfmettent la fenfation de la retine au férforium , font agités des mêmes vibra- tions que les rayons de lumiere leur auroient com- E XI muniquées ? Si l’on veut accorder au fens du toucher une confiance plus entiere qu'à celui de la vûe, fiw quoi fera fondée cette confiance ? Sur la proximité de l’objet & de Porgane? Maïs ne pourrai-je pas toù- jours appliquer ici le même raifonnement que j’af fait fur la vüe ? N’y at-il pas aufli depuis les extré- mités des papilles nerveufes, répandues fous Pépi-= derme, une fuite d’ébranlemens qui doit fe commu niquer au /ér/orium? Qui peut nous affürerque cette fuite d’ébranlemens ne peut commencer que par une imprefhon faite fur l'extrémité extérieure du nerf, & non par une imprefion quelconque qui commencé fur le milieu ? En général, dans la méchanique dé tous nos fens, il y a toüjours une fuite de monve: mens tranfmis pat une fuite de corps dans une cer- taine direction , depuis l’objet qw’on regarde comme la caufe de la fenfation jufqu’au Jerforium , c’eft-à- dire jufqu’au dernier organe, au mouvement duquef la fenfation eft attachée ; or dans cette fuite, le mou- vement & la direétion du point qui touche immédia= tement le /énforium , ne fuffit-il pas pour nous faire éprouver la fenfation, & n’eft-il pas indifférent à quel point de la fuite le mouvement ait commencé; & fuivant quelle direétion il ait été tranfmis à N’eft- ce pas par cétte raifon, que quelle que foit la courbe décrite dans l’atmofphere par les rayons, la fenfa- tion eft toüjours rapportée dans la direéhon de Ia tangente de cette courbe? Ne puis-je pas fegarder chaque filet nerveux par lequel les ébranlémens par- viennent jufqu’au féz/orium , comme une efpece de rayon ? Chaque point de ce rayon ne peut-il pas recevoir immédiatement un ébranlement pareil à celui qu'il auroit reçû du point qui le précede, & dans ce cas n’éprouverons-nous pas la fenfation:, fans qu’elle ait été occafionnée par l’objet auquel nous la tapportons? Qui a pu même nous aflürer que l'ébran- lement de nos organes eft la feule caufe pofiible de nos fenfations? En connoiflons-nous la nature? Si par ün dernier effort on réduit la préfence immédiate des objets de nos fenfations à notre propre corps, je demanderai en premier liew, par où notre corps nous eft rendu préfent ; fi ce n’eft pas aufli par des fenfations rapportées à différens points de l’ef= pace; & pourquoi ces fenfations fuppoferoient plû- tôt l’exiffence d’un corps diftingué d'elles , que les fenfations qui nous repréfentent des arbres, des mai- fons, 6e. & que nous rapportons auffi à différens points de l’efpace. Pour moi je n’y vois d'autre dif- férence, finon que les fenfations rapportées à notre corps font accompagnées de fentimens phis vifs ow deplaifr ou de douleur; mais je n’imagine pas pour- quoi une fenfation de douleur fuppoñeroït plus né- ceffairement un corps malade, qu’une fenfation de bleu ne fuppofe un corps réfléchiffant des rayons de lumiere. Je demanderai en fecond lieu, fi les hom- mes à qui on a coupé des membres, 6e qui fentent des douleurs très-vives qu’ils rapportent à ces mem bres retranchés, ont par ces douleurs un fentiment immédiat de la préfence du bras ou de lajambe qu'ils n’ont plus. Je ne m’arrêterai pas à réfuter les confé« quences qu’on voudroit tirer de linelinationquenous avons à croire l’exiflence des corps malgré tous-les raifonnemens métaphyfiques ; nous avons la même inclination à répandre nos fenfations fur la furface des objets extérieurs, & tout le monde fait que Fha: bitude fuffit pour nous rendre les jugemens les plus faux prefque naturels. ayez COULEUR. Concluons qu'aucune fenfation ne peut’immédiatement , 8€ par elle-même, nous aflürer de l’exi/fence d'aucun corps. Ne pourrons-nous donc fortir de nous-mêmes ê&& de cette efpece de prifon,, où la nature nous retient enfermés & ifolés au milieu de tous les êtres ? Fau- dra-t-il nous réduire avec les idéaliftes à madmettre d'autre réalité que notre propre fenfation à Nous E XI connoïflons un genre de preuves, auquel nous fom- mes accoûtumés à nous fier ; nous n’en ayons même pas d'autre pour nous affürer de lexi/fence des objets, qui ne font pas atuellement préfens à nos fens, & fur lefquels cependant nous n'avons aucune efpece de doute : c’eft l’induétion qui fe tire des effets pour remontet à la caufe. Le témoignage, fource de toute certitude hiftorique, &c les monumens qui confr- ment le témoignage, ne font que des phénomenes qu’on explique par la fuppoñtion du fait hiftorique. Dans la Phyfique, l’afcenfon du vifargent dans les tubes par la prefion de lair, le cours des aftres, le mouvement diurne de la terre, & fon mouvement annuel autour du foleil, la gravitation des corps, fontautant de faits qui ne font prouvés que par l’ac- cord exa@ de la fuppofition qu’on en a faite avec les phénomenes obfervés. Or, quoique nos fenfations ne foient ni ne puiflent être des fubftances exiftantes hors de nous, quoique les fenfations a@uelles ne {oïent ni ne puffent être les fenfations pañlées , elles {ont des faits ; & fi en remontant de ces faits à leurs caufes, on fe trouve obligé d’admettre un fyftème d'êtres intelligens ou corporels exiftans horsde nous, tune fuite de fenfations antérieures à la fenfation attuelle, enchaînées à l’état antérieur du fyftème des êtres exiftans ; ces deux chofes, l’exiffence des êtres extérieurs & notre exiffence pañlée , feront appuyées {ur le feul genre de preuves dont elles puiflent être fufceptibles : car puifque la fenfation a@tuelle eft la feule chofe immédiatement certaine, tout ce qui n’eft pas elle ne peut acquérir d'autre certitude que celle qui remonte de l'effet à fa caufe. Or on peut remonter d’un effet à fa caufe de deux manieres: ou Le fait dont il s’agit n’a pû être produit que par une feule caufe qu’il indique néceffairement, ou qu'onpeut démontrer la feule poffible par la voie d'exclufion ; & alors la certitude de la caufe eft pré- cifément égale à celle de l’effet : c’eft fur ce principe qu’eft fondé ce raifonnement , quelque chofe exifte : donc de toute éternité il a exifté quelque chofe ; & tel eft le vrai fondement des démonftrations méta- phyfiques de l’exiffezce de Dieu. Cette même forme de procéder s’employe auf le plus communément dans une hypothèfe avouée , & d’après des Lois con- nues de la nature : c’eft ainfi que les lois de la chûte des graves étant données , la vitefle acquife d’un ‘cotps nous indique démonftrativement la hauteur dont 1l eft tombé. L’autre maniere de remonter des effets connus à la caufe inconnue, confifte à deviner la nature précifément comme une énigme , à imagi- ner fucceflivement une ou plufeurs hypothèfes, à les fuivre dans leurs conféquences , à les comparer aux circonftances du phénomene, à les effayer fur les faits comme on vérifie un cachet en l’appliquant fur fon empreinte: ce font-là les fondemens de l’art de déchiffrer, ce font ceuxde la critique des faits, ceux de la Phyfique; & puifque ni les êtres exté- rieurs,, ri les faits paflés n’ont, avec la fenfation ac- tuelle, aucune liaifon dont la néceffité nous foit dé- montrée, ce font aufli les feuls fondemens poffbles de toute certitude au fujet de l’exrfferrce des êtres ex- térieurs & de notre ex1ffence pañlée. Je n’entrepren- drai point ici de développer comment ce genre de preuves croit en force depuis la vraiflemblance juiqu’à la certitude, fuivant que les degrés de cor- refpondance augmentent entre la caufe fuppofée & lesphénomenes ; ni de prouver qu’elle peut donner à nos jugemens toute l’aflärance que nous defirons: cela doit être exécuté aux articles CERTITUDE E PROBABILITÉ. À l'égard de l'application de ce gen- re de preuves à la certitude de la mémoire, &à l’e- xiffence.des corps, voyez IDENTITÉ PERSONNELLE ’ MÉMOIRE, & IMMATÉRIALISME. EXISTENCE, SUBSISTANCE, (Grammaire, ) Ilne Tome VI, E X O 267 faut pas confondre ces deux mots : l'exiffence fe don. ne par la naïflance ; la fub/éffance, par les alimens. Le terme d’exifler, dit à ce fujet l'abbé Girard , n'eft d’u- fage que pour exprimer l’évenement de la fimple exifience ; &c l’on employe celui de Jubfifler, pour dé- figner un évenement de durée qui répond à cette extfence, Où à cette modification. E xifler ne {e dit que des fubftances, & feulement pour en marquer l'être réel ; Jub/ifler s'applique aux fubftances & aux modes, mais tOÜjours avec un rapport à la durée de leur être, On dit de la matiere » de Pefprit, des corps, qu'ils exiffent, On dit des états, des Tan ges, des affaires, des lois, & de tous les établiffe- mens qui ne font ni détruits, ni changés, qu’ils /x8= Jifienc. Article de M, le Chevalier DE Javco URT. * EXITERIES , adj. pris fubft. (Myt2.) fêtes que les Grecs célébroient par des facrifices & des vœux adreflés aux dieux, lorfque leurs généraux étoient fur le point de fe mettre en marche contre quelque ennemi. Les particuliers avoient auf leurs exiréries qu'ils féroient , lorfqu'ils partoient pour quelque voyage. EXMOUTEH , (Géog. mod.) ville de la province de Devon en Angleterre. Long. 14. 20, Lar, So. FE EXOCATACELE, f. m, (Æif. anc.) dans l’anti- quité étoit une dénomination générale, fous laquelle On comprenoit plufeurs grands officiers de léglife de Conitantinople ; comme le grand-économe , le grand-chapelain, le grand-maître de la chapelle, le gardien de l’argenterie, le grand-garde des archi- vés, le maïtre de la petite chapelle, & le premier avocat de l'églife. Chambers. (G) EXOCIONITES, f. m. pl. nom donné aux Ariens d’un lieu appellé Exocionium , dans lequel ils fe reti rerent êc tinrent leurs afflemblées, après que Théo- dofe le grand les eut chaffés de Conftantinople. (G) EXODE, f. m. (Théol, & Hif. facrée.) livre cano- nique de l’ancien T'eftament, le fecond des cinq li- vtes de Moyfe, Voyez PENTATEUQUE. Ce nom, dans fon origine greque, fignifie à la let- tre voyage ou fortie ; & on le done à ce livre, pour marquer celle desenfansd’[frael hors de l'Egypte fous la conduite de Moyfe. Il contient l’hiftoire de tout ce qui fe paffla dans le defert | depuis la mort de Jo- feph jufqu’à la conftruétion du tabernacle, pendant quatre ans. Les Hébreux lPappellent vee7/e fémork , des pre- muers mots qui le commencent, & qui fignifient en latin hæc funt nomina , fuivant leur coûtume de déf- gner les livres de l’Ecriture, non par des titres géné- raux qui en défignent Le contenu ; mais par les pre- miers mots de chacun de ces livres. Joy. Brtr. (G) EXODE, éxodium , (Théoc.) dans les feptante f1- gnifie la fin ou la conclufion d’une fête. Voy. FÊTE. Ce mot figmifioit proprement le Awirieme jour de La fête des tabernacles , qu'on célébroit principalement en mémoire de l'exode on de la fortie d’Esypte , & du féjour des Ifraélites dans le defert, EXODE , f. f. ( Listérat.) en latin exodia ; poëme plus ou moins châtié , accompagné de chants & de danfes , & porté fur le théatre de Rome pour fervir de divertiflément après la tragédie. Les plaifanteries groffieres s'étant changées en art fur lé théatre des Romains, on joüa l’Atefla- ne, Comme on joue aujourd’hui parmi nous la pie- ce comique à la fuite de la piece férieufe. Le mot exode , exodia, fignifie iffues. Ce nom lui fut donné à limitation des Grecs, qui nommoient exodion le dernier chant après la piece finie. L'auteur étoit ap. pellé exodiarius , lexodiaire. Il entroit fur le théa… tre à la fin des pieces férieufes, pour diffiper la trif. tefle & les larmes qu'excitent les paflions de la tra. gédie, &c 1l jouoit cependant la piece Ms aveg l 265 E X O le même mafque & les mêmes habits qu'il avoït eus dans la piece férieule. TT: Mais ce qui caraétérifoit particulierement lexode étoit la licence & la liberté qu’on avoit dans cette piece d’y jouer fous le mafque,, jufqu'aux empereurs mêmes. Cette liberté qui permettoit de tout dire dans les bacchanales, cette liberte qui exiftoit dans toutes les fêtes & dans tous les jeux, cette liberté que les foldats prenoient dans les trromphes de leurs généraux, enfin cette hberté qui avoit régné dans l'ancienne comédie greque , fe trouvoit ainfi dans les exodes ; non-feulement les exodiaires y contre- faifoient ce qu'il y avoit de plus grave, & le tour- noient en ridicule, mais ils y repréfentoient hardi- ment les vices, les débauches, & les crimes des em- pereurs, fans que ceux-ci ofaflent ni les empêcher ni les en punir. A Ils jugerent apparemment qu'il étoit de Ja bonne politique de laïfler ce foible dédommagement à un peuple belliqueux, prêt à fecouer le joug à la pre- miere occañon, & d’ailleurs à un peuple fier & ac- tif, qui depuis peu de tems avoit perdu l'empire, & qui n’avoit plus ni de magiftrats à nommer, ni de tribuns à écouter. Sylla , homme emporté, mena violemment les Romains à la liberté ; Auguite rufé tyran, les conduifit doucement à la fervitude : pen- dant que fous Sylla la république reprenoit des for- ces, tout le monde crioit à la tyrannie ; & pendant que fous Augufte la tyrannie fe fortifioit par les jeux du cirque & les fpeétacles , on ne parloit que de liberté. On connoît les débauches de Tibere , & on fait le malheur d’une dame de condition appellée Ma/- lonia , qui accufée d’adultere par l'ordre de ce prin- ce, parce qu'elle n’avoit pas voulu répondre à fes infamies , s’Ôta la vie d'elle-même après lui avoir re- proché fon impureté, Obftœnirate or hirfuto. atque olido feni clare exprobaté : ce reproche ne manqua pas d’être relevé dans l'exode qui fut chantée à la.fin d’une piece atellane. On entendit avec plaïfir l’exo- diaire s'arrêter & pefer long-tems fur ce bon:mot, hircum vetulum Capreis naturam ligurire; bon mot qui fe répandit dans tout Rome, êc qui fut appliqué géné- ralement à l’empereur, Suétone, vie de Tibere , chap. xly. ss On fait que Néron, entr’autres crimes, ayoït em- poifonné fon pere , & fait noyer fa mere ; le comé- dienDatus chanta en grec, à la fin d'une piece atel- lane, «die mon pere , adieu ma mere ; mais en chan- tant adieu mon pere , il repréfenta par fes geftes une perfonne qui boit ; & en chantant adieu ma mere, il imita une perfonne qui fe débat dans l’eau, & qui {e noye ; & enfuite il ajoûta, Pluton vous conduit à la mort, en repréfentant aufi par fes geftes le fé- nat que ce prince avoit menacé d’exterminer, Suet, vie de Néron, ch. xxxjx. Voyez ATELLANES. Dans ces fortes d’exodes ou de fatyres, on inféroit encore fouvent des couplets de chanfons répandus dans le public, dont on faifoit une nouvelle applica: tion aux eirconftances du tems. L’aéteur commençoit le premier vers du vaudeville connu, & tous les fpec- tateurs en chantoient la fuite fur le même ton. L’em- pereur Galba étant entré dans Rome, où fon arri: vée ne plaifoit point au peuple, Pexodiaire entonna la chanfon qui étoit connue:, vezit io fimus à villé, le camard vient des champs : alors tout le monde chanta la fuite , & fe fit un plaïfir de la répéter avec des acclamations toûjours nouvelles. Suétone vie de Galba. Quelquefois on redemandoit dans une feconde repréfentation l'exode qui avoit déjà été chantée, &c on la faifoit rejouer, fur -tout dans les provin- ces, où l’on n’en pouvoit pas toüjours avoir de nouyelles. C’eft ce qui fait dire à Juvenal: ee + Tandemqueredis ad pulpita nosum £Exodium. Sat iy, N. 174 Les exodes fe joüerent à Rome plus de so ans, fans avoir fouffert qu’une legere interruption de quelques années ; & quoique fous le regne d’Augufte elles dépluffent aux gens de bon goîût, parce aw’el- les portoient toûjours des marques de la groffiereté de leur origine , cependant elles durérent encore long-tems après le fiecle de cet empereur. Enfin elles ont reflufcité à plufeurs égards parmi nous: car quel autre nom peut-on donner à cette efpece.de farce , que nous appellons comédie italienne, & dans quel genre d'ouvrage d’efprit peut-on placer des-pie- ces où l’on femoque de toutes les regles du théatre à des pieces où dans le nœud 8 dans le dénoïement, on femble vouloir éviter la vraiffemblance ? des pieces où l’on ne fe propofe d'autre but que d’exci- ter à rire par des traits d’une imagination bifarre à des pieces encore où l’on ofe avilir,, par une imita- tion burlefque, l'aîtion noble & touchante d’un {u- jet dramatique ? Qu'on ne dife point, pour la défen- fe de cette T'haliebarbouillée, qu’on l’a vü plaire au public autant que les meilleures pieces de Racine & de Moliere : je répondrois que c’eft à un public mal compofé, & que même dans ce public il y a quantité de perfonnes qui connoïffent très-bien le peu de va- leur de ce comique des halles ; en effet, quand la conjonéure ou la mode qui l’a fait naître font paf {és , les comédiens ne font plus reparoître cette mê- me farce, qui leur avoit attiré tant de concours: & d’applaudiffemens. Voyez FARCE 6: PARODIE. Arris cle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. EXODE fignifioit auf une ode, hymne, ou canti- que, pat lequel on terminoit chez les anciens une fête, ou un repas. (G) EXODIAIRE, {. m. (Lirér.) dans l’ancienne tra. gédie romaine, étoit un bouffon ou farceur qui pa- roifloit fur le théatre quand la tragédie étoit fie, & formoit ce qu'on appelloït Pexodium, ou la con- clufon du fpeétacle, pour divertir les fpe@ateurs. Voyez EXODE. (G) EXOINE, ( Jurifprud. ) fignifie excufe de celui qui ne comparoït pas enperfonne en juitice,, quois qu'il füt obligé de le faire. | s Quelques-uns tirent l’étymologie de ce terme de Jurnis, qui dans les capitulaires fignifie erpéchemenr, d'où l’on a fait Jonniare, & enfuite exoniare, pour dire, tirer d’embarras ; d’autres font venir exoire d’un autre mot barbarè ; exidoniare, quaff non effe idoneurs fe adfirmare : ne poutroit-on pas fans tirer les chofes de fi loin, le faire venir d’exonerare, par- ce que lexoëxe tend à la décharge de l’abfent à Il eft parlé d’efloize ou exoine., ce qui eft la même chofe, dans les établiflemens de S. Louis, c2. jx, On y voit qu'alors l’effoize étoit pour le défendeur ce que le contremant étoit pour le demandeur qui de- mandoit lui-même la remife. Foyez auffi Beauma- noir, ch. 17. 6t l’auteur dugrand coûtumier, Zyre LIL, chapitre vij. | 3 L'exoëne a heu quand celui qui devoit comparof- tre en perfonne devant le juge, ne peut pas y venir pour caufe de maladie, bleflure, ou autre empêche ment légitime, tel que la difficulté des chemins lor£ qu'ils font impraticables, ou lorfque la communica=’ tion eft interrompue par une inondation, par la guerre , par la contagion, &c. Dans tous ces cas, celui qui veut fe {ervir de l’exoïne doit donner pro- curation fpéciale devant notaire à une perfonne qui vient propofer fon exoine;, & qui affirme pour lui qu'il ne peut pas ven. La procuration doit conte: nit le nom dela ville, bourg ou village ,paroïfe, rue & maifon où l’exoiné elt retenu. Si ceft pour caufe de maladie, 1lfaut rapporter un certificat d’un medecin d’une faculté approuvée, qui doitdéclarer E X O la qualité de la maladie ou bleflure, & que l’exoëne ne peut fe mettre en chemin fans péril de fa vie; & la vérité de ce certificat doit être atteftée par fer- ment du medecin devant le juge du lieu, donc il fera dreflé procès-verbal qui fera joint à la procuration, On donne quelquefois le nôm d’exoire aux certifr- cats & pieces qui contiennent l’exoine on excufe ; ces pieces doivent être communiquées au miniftere public & à la partie civile, s’il y en a une, & on permet aux uns & aux autres d'informer de la vérité de Pexorne. On peut propofer fon exoëne en matiere civile, comme en matiere criminelle. Celui qui propofe l’exoire n’eft pas obligé de don- nercaution derepréfenter l’exoiré, ni d'affirmer qu'il eft venu exprès pour propofer l’exoine. L'effet de Vexoine, quand il eft jugé valable, eft que l’abfent eft difpenfé de comparoïtre tant que la caufe de Le sorte fubfite ; mais dès qu’elle cefle, il doit fe repré- fenter. Voyez le ritre ij. de l'ordonnance criminelle.( 4) EXOINER , (Jurifprud. ) fignifie exeufer ou pro- Pofer V'excufe de quelqu'un qui ne comparoît pas en perfonne en juftice comme il étoit obligé de lefaire. Ceterme paroit venir du latin exonerare , déchar- ger. Voyez ci-deffus EXOINE. ( 4) | EXOINEUR , (Jurifprud, ) eft celui qui eft por- teur de l’excufe d’un autre, ou qui propofe fon ex- cufe au fujet de ce qu'il ne paroît pas en perfonne enjuftice. Voyez ci-deffus EXOINE 6 EXOINER. (4) EXOLICETUS, (4f£. nur.) on la nomme auf hexecantholirhus , pierre fort petite qui fe trou- voit, dit-on, en Lybie, au pays des Troglodites, dans laquelle on diftinguoit 40 couleurs. Foyez Ph- ni hift nat. lib, XX XVII, cap, x. * EÉXOMIDE, 1. f. (if. anc.) vêtement des Grecs, qui leur ferroit.étroitement le corps, & leur laifloit les épaules détOuvertes. Les efclaves, les domeftiques, & le petit peuple porterent l’exomide chez les Romains ; ils y ajoûterent feulement un manteau : il fut auffi à l’ufage du théatre. À Lacédé- mone , les hommes s’en couvrirent, les femmes ail- leurs. Il feroit difficile parmi nos vêtemens d’au- iourd’hui d’en trouver un qu’on pût comparer à l’e- xomide, Voyez ENDROMIS.. EXOMOLOGESE,, f. f. (Théolog. & hiff. eccl. ) confeffiors ; mot dérivé du grec. Ce terme eft fort ufité dans l’hiftoire eccléfaftique des premiers fiecles ; mais il paroît employé en différensfens dans lesécrits des peres. Quelquefois il fe prend pour toute la pé- nitence publique, tous les exercices & les épreuves par lefquelles on faifoit pafler les pénitens jufqu’à la réconciliation que leur accordoit lEglife. C’eft en ce fens que Tertullien dit Zb. de Pænit, ch. jx. Exo- mologefis profternendi € humilificandi hominis difcipli. ña ef. de ipfo qgoque habitu atque vitlu mandat , Jfacco € cineri incubare, corpus fordibus. obfcurare, animum maroribus dejicere, Et les Grecs ont donné fouvent ce nom à tonte la pénitence. Les Occidentaux l’ont reftraint plus particuliere- ment à la partie de ce facrement qu’on nomme con- fefflion. Ainf S. Cyprien dans fon épiître aux prêtres &t aux diacres, fe plaignant qu'on reçoit trop faci- lement ceux qui font tombés pendant la perfécution, & que fans pénitence, ni exomologefe , ni impoñition des mains, on leur donne l’euchariftie ; S. Cyprien, disje, prend le mot d’exomologefe, non pour toute la pénitence comme Tertullien, maïs pour une par- tie, c’eft-à-dire fuivant la fignification du motgrec, pourune confeffion qui pouvoit fe faire après avoir achevé la pénitence avant que de recevoir l’impo- fition des maïns : mais on ne fait fi cette confeflion étoit fecrete oupublique. Fleury, kiff. eccléf. tom. IT. iv. VI. ts, xlij. Voyez CONFESSION. Il paroït cependant que l'Eglife n’a jamais exigé E X O 369 de confeffion publique pour les fautes cachées , coma me on le voit par les capitulaires de Chärlémagne, & par les canons de divers conciles. (G) EXOMPHALE > Î f, cerme de Chirurgie ,-eft un nom général qui comprend toutes les’ efpeces de defcentes ou de tumeurs qui furviennent au nom- bril par le déplacement des parties {olides qui font renfermées dans la capacité du bas-ventre, Ainfiles auteurs ont mis mal-à-propos au nombretdes her: es de lombilic des tumeuts humorales qui “ont point de caraltere particulier pour être fituées en cette partie, L’hydromphale eft une tumeur aqueufe à lombilic, qui ne préfente pas d'autre indication que l’oœdeme dont il eft une elpece. Voyez ŒDEME. Nous en dirons autant du pneumatomphale où tu meur venteufe de lombilic: Voyez EmPnyseme dx varicomphale, Voyez VARICE, Etc. Les parties internes qui forment une tumeur ex térieure après avoir paflé par l’anneau de lombi- lie, font l’inteftin & l’épiploon. Si l’inteftin fortfeul, c’eit un enteromphale; l'épiploon feul forme Pépi- plomphale ; & la tumeur formée par l'épiploon & par l'inteftin conjointement , fe nomme: ésséro-épi- plomphale. | Cette maladie ne differe des autres hernies que par fa fituation ; elle a les mêmes indicationss élle produit les mêmes fymptomes ; elle eft fufceptible des mêmes accidens : nous en parlerons ‘au! mot HERNIE. a: La réduétion des parties qui forment cette hernie, eft l'intention principale qu'on doit fe propofér dans fon traitement. Voyez RÉDUCTION. Lorfque les parties font réduites, il fiutles contez nir avec un bandage convenable. Voyez BRAYER. Onfe fert pour maintenir les parties réduites dans la hernie ombilicale, d’un fil de fer ou de laiton aflez fort, contourné comme on le voit fig. 3. Plañche VI: de Chirurgie. On le garnit de bourre, & one revêt de futaine ou de chamoïs : on employe pluscommu- nément le brayer, foure 7. Chirurs. Planche XXIX. On voit dans le fecond volume des mémoires de l'académie royale de Chirurgie un bandage mécani- que pour l'exomphale. M. Suret qui en eff l’auteur, a placé dans la pelote du bandage des reflorts, au moyen defquels le ventre eft toûjours également comprimé dans fes différens mouvemens. Ce ban dage a été trouvé très-utile & fort ingénieux : la mécanique en eft empruntée de l’horlogerie. M, Su: ret eft toûjours fort louable d’en avoir fait l’appli- cation à {on bandage. (F) | EXOMPHALE , ( Manëge, Maréch. )) ce wefft point par la fimple connoïffance que j'ai acquis de la dif poñtion & de l’arrangement des parties contennies dans la cavité abdominale du cheval, 8 conféquem- ! ment à l’analogie, que je prétens que la hernie dont il s'agit , peut avoir lieu dans lamimal : jen ai vû . , 3 L4 k het qui en étoient réellement attaqués: & il feroitaffez ‘inutile d'entreprendre de démontrér par désraïifon nemens la certitude & la poffibilité d’un fait dont d’autres yeux que les miens peuvent avoir été té- moins. Il ne feroit pas moins fuperflu de détailler les moyens de remédier à cette maladie, en quelque façon incurable, foit que lon envifage les différens eforts auxquels tout cheval utile eft expofé, foit que l’on confidere les embarras qu’occafionneroient & la nécefité d'opérer la rentrée de l’inteftin, car l'animal w’eft pas fufceptible de l’épiplomphale, 8e: l’importance de maintenir cet inteftin rentré, parle fecours d’un bandage qu’on ne parviendroit jamais à aflujettit parfaitement. Cette. hernie fe manifefte pat une tumeur circonfcrite, & plus ou moins con: fidérable , mais toñjours fenfible & douloureufe au ta@t &c à la compreffion; elle a fon fiège à l'endroit . de l'anneau ombilical. Il eft étonnant qu'aucun au- 270 E X O teur n’en ait fait mention; ceux qu'un défaut auffi eflentiel a trompés, feroient fans doute en droit de leur reprocher leur filence. (e) EXOPHTHALMIE, 1, f. (Med, ) maladie parti- culiere des yeux. Ce mot grec qu eft exprefif, & que je fuis obli- gé d'employer, fgnife fortie de l'œil hors de fon or- bite; mais 1] ne s’agit pas de ces yeux gros & élevés ui fe rencontrent naturellement dans quelques per- {onnes, nide cette efpece de forjettement de l’œil, qui arrive à la fuite de la paralyfie de fes mufcles, ni enfin de ces yeux éminens & faillans, rendus tels par les efforts d’une difficulté de refpirer , d’un te- nefme , d’un vomiflement, d’un accouchement labo- rieux , & par toutes autres caufes , qui ‘interceptant en quelquemmaniere la circulation du fang, le re- tiennent quelque tems dans les veines des parties fu- périeures: Nous entendons ici par exophthalmie ( 8& d’après Maitrejan, qui en a feul bien parlé ) la groffeur & éminence contre nature du globe de l’œil, qui s’a- vance quelquefois hors de l’orbite , fans pouvoir être recouvert des paupieres, & qui eft accompa- gnée de violentes douleurs de l’œil &c de la tête, de fievre, & dinfomnie, avec inflammation aux par- ties extérieures & intérieures de l'œil. Cette trifte &t cruelle maladie demande quelques détails. Elle -eft caufée par un prompt dépôt d’une hu- meur chaude, âcre, & vifqueufe , qui abreuvant le corps vitré , l'humeur aqueufe , & toutes les autres parties intérieures du globe, les altere, & fouvent les détruit. La chaleur & l’acrimonie de cette hu- meut fe manifeftent par l'inflammation intérieure de toutes les parties de l'œil, & par la douleur qui enréfulte. Son abondance ou fa vifcofité fe font connoïtre par la groffeur & l’éminence du globe de l'œil, quin’eft rendu tel que par le féjour & le dé- faut de circulation de cette humeur. Il paroît que le corps vitré eft augmenté outre me- fure par l’extrème dilatation de la prunelle, que Von remarque toüjours dans cette maladie. Il paroît auf, que Fhumeur aqueufe eft femblablement aug- mentée, par la profondeur ou l'éloignement de lu- vée, & par l’éminence de la cornée tranfparente. Le globe de l'œil ne peut grofir extraordinaire- ment , &c s’avancer hors de l'orbite, fans que lenerf optique, les mufetesde l’œil, & toutes fes membra- nes , ne foient violemment diftendus. Voilà d’où vient l’inflammatién de tout le globe de Poil, la violente douleur qu’éprouve le malade, la fievre, linfomnie, &c. L’exophthalmie fait quelquefois des progrès très- rapides; &:quand elle eft parvenue à fon dernier période , elle y demeure long-tems. Ses effets font , que l’œil revient rarement dans fa groffeur naturelle, que la vüe fe perd ou diminue confidérablement. Soit que cette maladie foit produite par fluxion, ou par congeftion, file malade continue de fentir des élancemens de douleurs terribles, fans inter- valle de repos, l’inflammation croît au-dedans & au- dehors , les membranes qui forment le blanc de l'œil, fe tuméfient extraordinairement , les paupie- tes fe renverfent , le flux de larmes chaudes & âcres fucceède,. & finalement l’œil fe brouille ; ce qui eft un figne.avant-coureur de la fuppuration des parties internes, & de leur deftruétion. Après la fuppuration faite, la cornée tranfparen- te s'ulcere, & les humeurs qui ont fuppuré au-de- dans du globe, s’écoulent. Alors les douleurs com- mencent à diminuer , &c Pœil continue de fuppurer, quiqu’à ce que toutes les parties altérées {oient mon- difiées; enfuite il diminue au-delà de fa groffeur na- turelle, & enfinil finit par fe cicatrifer. Il arrive fouvent que l'humeur qui caufe cette ma- ladie ; ne vient pas à fuppurer, mais s’atténue ; fe téfout infenfiblement , & reprend le chemin de la circulation ; dans ce cas, la douleur & les autres ac- cidens fe calment , œil fe remet quelquefois dans fa groffeur naturelle , ou ce qui eft ordinaire, demeu- re plus petit. La vüe cependant fe perd prefque toû- jours , parce que Le globe de l'œil ne peut s'étendre fi violemment , fans que fes parties intérieures ne fouffrent une altération qui change leur organifa- tion , fans que Le corps vitré ne fe détruife, & fans que le cryftallin ne fe corrompe,de même que dans les cataraétes purulentes. Le traitement de l’exophthalmie demande lesteme- des propres à vuider la plénitude, à détourner l’hu- meur de la partie malade, à adoucir & à corriger cette humeur viciée. Ainfi la faignée du bras doit être répetée fuivant la grandeur du mal & les for- ces du malade : on ouvre enfuite la jugulaire & l’ar- tere des temples du même côté; on applique des vé- ficcatoires devant ou derriere les oreilles ; on fait un cautere au-derriere de la tête , ou on y pafñleun féton. Les émolliens, adouciffans & rafraïchiffans font néceffaires pendant tout le cours de la maladie ; mais tous ces remedes généraux doivent être admi- niftrés avec ordre & avec prudence. Il ne faut pas non plus négliger les topiques con- venables, les renouveler fouvent , & les appliquer tiedes, foit pour relâcher la peau, foit pour tempé- ter l’inflammation extérieure de l’œil , car ils ne fer- vent de rien pour l’inflammation intérieure. Lorfque le mal eft fur fon déclin , ce qu’on con- noit par la diminution de l’inflammation & de la dou- leur , on fe fert alors des topiques réfolutifs, c’eft- à-dire de ceux qui par leurs parties fubtiles, volati- les & balfamiques , échauffent doucement l'œil, at- ténuent & fubtilifent les humeurs , &c les difpofent à reprendre le chemin de la cfulation. C’eft auffi fur le déclin de la maladie, 8 quand la fievre eft appaï- fée , qu’on doit commencer à purger le malade par in- tervalles & à petites dofes, en employant en même tems les décoétions de farfepareille &r de fquine. Si dans le cours du mal on s’apperçoit que les ac- cidens ne cedent point aux remedes, & que l’œil fe difpofe à fuppurer , on doit fe fervir de topiques en forme de cataplafme , pour avancer davantage la fappuration : on les appliquera chaudement fur l'œil malade, & on les renouvellera trois ou quatre fois le jour. Quand le pus eft formé, & même quelquefoisavant qu'il le foit entierement , on épargnera de cruelles douleurs au malade, en ouvrant l’œil avec la lan- cette, en perçant avec art la cornée le plus bas qu’il eft poffible , & dans le lieu le plus propre à procu- rer l'écoulement des humeurs purulentes. À mefure que le globe fe vuude , 1l fe flétrit, & les douleurs diminuent à proportion que les parties al- térées fe mondifient : on panfe enfuite l’œil avec les collyres déterfifs & mondifians, jufqu’à ce que lou- verture foit difpofée à fe cicatrifer ; alors on fe fert de defficatifs , & l’on pourvoit à l’excroïflance de chair , qui furvient quelquefois après l’ouvertu- re ou après l’ulcération de la cornée, Arzicle de M. Le Chevalier DE JAUCOURT. *EXORBITANT, adj. (Gramm.) terme qui n’eft guere relatif qu'à la quantité numérique : c’eft l’ex- ceffif de cette quantité. Ainfi on dit : Z exige de moi ne forme exorbitante. Voyez EXCÈS. EXORCISME ; f. m.(Thcol, & Hiff. eccléf.) priere ou comuration dont on fe fert pour exorcifer, c’eft à-dire chafler les démons des corps des perfonnes qui en font poflédées , ou pour les préferver du dan- ger. Voyez DÉMON. | Ce mot eft tiré d’un mot grec qui fignifie adius rare, conjurare ; Conjurer, Dans la plüpart des dic- tionnaïrés on fait exorcifine & conjuration Îyhonÿ- mes ; cependant la conjurationn'eft proprement qu'u- ne partie de l’exorcifme , & l’exorcifme eft la cérémo- nie entiere , la conjuration n'étant que la formule par laquelle on ordonne au démon de fortir, Les exorcifimes font en ufage dans l’églife romaine; on en peut diftinguer d’ordinaires, qui ont lieu dans les cérémonies du baptême & dans la bénédi&tion de l’eau qui fe fait tous les dimanches ; & d’extraordi- aires qu'on fait fur les démoniaques , contre les ma- ladies, Les inféétes,, les orages, 6e, e Si lon en croit l’hiftorien Jofephe, Salomon avoit compofé des charmes & des exorcifmes très-puiffans contre les maladies ; mais le filence de l’Ecriture {ur cet article, a plus de poids que l’autorité de Jofephe, Ce qu'il y a de certain , c'eft que l’ufage des exor- cifines eft auf ancien que l’Eglife, Tefus-Chrift me- me , fes apôtres & fes difciples , & depuis les évê- ques, Les prêtres & les exorciftes, l’ont pratiqué dans tous les fiecles. M. Thiers, dans fon srairé des fuper- fisions , rapporte différentes formules de ces exorcif= mes, &t cité en particulier l’éxémple de S. Grat, qui par le moyen des exorci/mes ; obtint de Dieu qu'il n’y auroit plus de rats dans le pays d’Aoft , ni à trois milles à la ronde. Le même auteur penfe qu’on peut encore aujourd’hui fe fervir des exorcifmes pour une bonne fin, contre les rats, les fouris, les chenilles, les fauterelles, le tonnerre, &c. mais il aflüre que pour cela il faut avoir le caraëtere requis 8€ approu- vé par l'Eglife ; fe fervir des mots & des prieres qu’- elle autorife , fans quoi ces exorcifines font des abus &c des fuperftitions. Dans les tems où lès épreuvés avoient lieu , les exorcifmes y entroient pour quelque chofe ; on exor- cifoit l’eau froide ou bouillante , le fer chaud , le pain, Gc. avec lefquels devoit fe faire l'épreuve. Ces pratiques étoient fréquentes én Aneleterre du tems d'Edouafd ll. le pain ainfi éxorcifé fe nom- moit cor/ned.Lendinbrock rapporte des exemples d’e- xorcifines avec le pain d’orge , d’autres avec le pain êc Le fromage qu’on faifoit avaler à l’accufé tenu de fe juftifier. Oncroit que c’eft de-là qu’eft venue cetre imprécation populaire : gue ce morceau m'étrangle, fi je re dis pas la vérité. Voyez ÉPREUVE , ORPALIE, &c. Diéfionn. de Trévoux & Chambers. On trouve aufli dans Delrio, difquifft. magic. les Formules des exorcifines ufitées en pareil cas. (G) EXORCISME MAGIQUE, ( Divinar,) formule dont fe fervent les magiciens ou forciers pour conjurer, c’eft-à-dire attirer ou chaffer les efprits avec lef- quels ils prétendent avoir commerce. Nous tirerons tout ce qu'on va lire fuf cette ma- _tiere du mémoire de M. Blanchard de Pacadémie des Belles-Lettres , concernant les exorcifmes magi- ques , 8 qu'on trouve dans le X71. vol, des mémoires de cetre académie, | « Agrippa , dit cet académicien ; rapporte trois » mamieres de conjurer les efprits ; la premiere natu- » relle, qu fe fait par le moyen des mixtes avec lef- » quels ils ont de la fympathie ; la feconde qui eft » célefte, fe fait par le moyen des corps céleftes, » dont on emplove la vertu pour attirer ou pour » chafler les efprits ; la troifieme qui eft divi- » ne &r la plus forte, fe fait par le moyen des noms » divins & des cérémonies facrées : cette derniere » Conjuration né lie pas feulement les efprits , mais # aufh toutes fortes de créatures, lés déluges , les » tempêtes , les incendies, les ferpens , les maladies # épidémiques , Étc , » Îl y a'outre cela des fumigätions proprés pour » attirét les efprits, & il y en a d’autres pour les » chaffer; il faut favoir les mêler & s’en fervir à-pro- » pos. Les anciens magiciens ont crû que l’homme _» En vertu dés facremens qui lui font propres, peut E X O 271 » commander aux efprits, & les Contraindte de lus » obéir; parce qu’en ufant de ces inftrumens facrés, » il tient la place des dieux , & eft en quelque forte » élevé à leur ordre. Comme ces inftrumens facrés » viennent des dieux qui les donnent aux homnres, » 11 ne faut pas s’étonner s’ils ont une vertu qui les » élève au-deffus des efprits. Le livret intitulé , ez= » chiridion Leonis pape, à fervi à garer les efprits es » quoiqu'il n’y ait rien que debon, dit M. Blanchard, » dans les oraïfons qu'il contient ; mais la grande » quantité de croix dont il eft plein, marque ‘de l& » fuperftition ». ” L'auteur ajoûte qu'il à Îà dans cet ouvrage uns conjuration pour fe mettre à couvert de toutes les armes offenfives , qui lui patoît illicite, parce qu’elle confond témérairement les noms adorables de Dieu, & les inftrumens facrés de la paflion de Jefus-Chrift, avec les noms des faits & les inftrumens de leur martyre..... On trouve dans le même livret des paroles attribuées à Adam, lorfqu'il defcendit aux lymbes, & l’on prétend que tout homme qui les por: te écrites fur lui, n’a rien à craindre dans quelque danger qu'il fe trouve ; on afsûre même qu’en les mettant fur un bœuf ou fur un mouton, le boucher ne pourra [es tuer, | Parmi les croix qui doivent accompagner les exor- cifines magiques ; 1 doit y en avoir de rouges, faites avec du fang de l’index ou du pouce, à certainstems de la Lune, à certaines heures dela nuit, à des jours marqués ; d’autres noires avec du charbon beni : tou- tes pratiques fuperftitieufes & condamnäables. Il em eft de même de la verveine, & de lufage de la cueil- lir, en fe tournant du côté de lorient, en appuyant la main gauche fur Pherbe , en prononçärit certaines paroles. Les cercles font encore d’un grand ufage dans toutes ces opérations : on les trace avec de la craie exorcifée : ils font employés pour renfermer les efprits , afin qu'ils ne nuïfent ni à l’opérateur , n£ aux aflhiftans. Tout le monde fait l’analogie dela figure circulaire avec l’unité qui eft le fymbole parfait de Dieu. La différence de ces cercles confifte dans les noms & les figures qui y font ou différentes , ou in- différemment placées , & ce changement a fes raï= {6ns dans Les proportions numériques. On ne rapportera de tous ces exorcifines , que ce- lui qui fe fait fur le livre magique ; piece fuffifanté pour faire juger que ces extravagances font l’ouvra- ge de quelques théologiens ignorans & impies., En voici la formule : « Je vous conjure tous , & je vous commande à » tous tant que vous êtes d’efprits , de fecevoir cé » livre qui vous eft dédié, afin qu'autant de fois » qu'onlelira,vous ayez à paroître fans délai, & en » forme humaine douce & agréable , à ceux qui li- » sont ce livre, en telle façon qu’il leur plaira, foit » en général, foit en particulier, c’eft-à-dire un ou » plufeurs , au defir du leéteur , fans nuire ni faire » aucun mal à qui qué ce foit de la compagnie ; ni » au corps, ni à lame , ni à moi qui le commande; » qu'auffi-tôt que la lecture en fera faite, vous ayez » à comparoitre , ou plufieurs, ouunen particulier, » au choix de l’exorcifant , fans bruit , fans éclat, » rupture, tonnere ni fcandale, fans illufion, men: » fonge ou fafcination : je vous en conjure par tous » les noms de Dieu qui font écrits dans ce livre. Que » fi celui ou ceux qui feront appellés, ne peuvent » apparoître , ils feront tenus d’en envoyer d’autres, » qui diront leur nom, & pourront faire leur même » fonétion & exercer leur pouvoir, & qui feront un » ferment folemnel & inviolable d’obéir aux ordres » du leéteur incontinent & aufli-tôt qu'il voudra, » fans qu'il ait befoin d’autre fecours , aide ; ou for- »ce, & autorité. Venez donc au nom de toute la » cour célefte, & obéiflez au nom du pere, du fils; 272 E X O » & du faint-efprit. Aïnfi foit-il. Levez-vous , & ve- » nez par la vertu de votre roi, & par Les fept cou- #ronnes de vos rois, & par les chaînes fulphurées , # fous lefquelles tous les efprits & démons font arrê- » tés dans les enfers. Venez, & hâtez- vous de venir # devant ce cercle, pour répondre à mes volontés, » faire & accomplir tout ce que je defire. Venez » donc, tant de l’orient que de l'occident , du midi » & du feptentrion , & de quelque part que vous » foyer, Je vous en conjure par la vertu & par la » puiffance de celui qui eft trois & un, qui eft eter- » nel & co-égal, qui eft un Dieu invifble , confub- » fanciel, qui a créé le ciel , la terre &x la mer, & # tout ce qu'ils contiennent , par fa parole». L'opinion commune, eft que les exorcifmes & les conjurations magiques font conçües en des termes barbares &z inintelligibles ; celui-ci n’eft pas du nom- bre , on n’y voit que trop clairement le mélange des objets les plus refpeétables de notre religion avec les extravagances, pour ne rien dire de plus, de ces vi- fionnaires. On attribue celui-c1 à Arnaud de Ville- neuve, Seulement pour en entendre les dernieres pa- roles , il eft bon de favoir que les magiciens faifoient préfider quatre de ces efprits aux quatre parties du monde : c’étoient comme les empereurs de lumvers. Celui qui préfidoit à lorient étoit nommé Lucifer, celui de l'occident A/ffharoth , celui du midi Levia- than , & celui du feptentrion Æmaimon ; & il y avoit pour chacun d’eux des exorcifines particuliers & un exorcifme général , que M. Blanchard n’a pas jugé à- propos de rapporter. Comme les efprits ne font pas toüjours d’humeur à obéir, & font rebelles aux ordres, on a tiré de la cabale un exorcifime plus abfurde que tous les autres, qui donne des charges & des dignités aux démons ; qui les menace de les dépouiller de leurs emplois, &t de les précipiter au fond des enfers, comme s'ils avoient une autre demeure. Il faut obferver que, {e- lon les magiciens , le pouvoir de chacun de ces ef- prits eft borné ; qu’il feroit inutile de l’invoquer pour une chofe qui ne feroit pas de fa portée ; & quil faut donner à chacun pour fa peine , une récompen- Le qui lui foit agréable : par exemple, Lucifer qu’on évoque Le lundi dans un cercle, au milieu duquel eft fon nom, fe contente d’une fouris ; Nembroth reçoit Ja pierre qu’on lui jette le mardi; Aftharoth eft ap- pellé le mercredi, pour procurer l’amitié des grands, &t ainfi de fuite. Au refte ces exorcifmes des magiciens modernes font tous accompagnés de profanations des noms de Dieu & deJ.C, excès que n’ont pas même connu les payens , qui dans leurs conjurations magiques n’a- bufoient pas des noms de la divimte, ni des myfteres de leur religion. Mém, de lacad, des Infeript, tome XII. pag. 51. 6 fuiv. (G) EXORCISTE,, £. m, ( Théolog. ) dans l’Eglife ro- maine, c’eit un clerc tonfuré quu a reçü les quatre ordres mineurs , dont celui d’exorcifle fait partie. On donne aufli ce nom à l’évêque, ou au prêtre délégué par l’évêque , tandis qu'il eft occupé à exor- cifer une perfonne poflédée du démon. Foy. ExoR- CISME. Les Grecs ne confidéroient pas les exorcifles com- me étant dans les ordres , mais fimplement comme des miniftres. S. Jerôme ne les met pas non plus au nombre des fept ordres. Cependant le pere Goar, dans fes otes fur l’euchologe , prétend prouver par divers paflages de faint Denys & de faint Ignace mar- tyr, que les Grecs ont reconnu cet ordre, Dans l’é- glife latine, les exorciftes {e trouvent au nombre des ordres mineurs après les acolythes : & la cérémonie de leur ordination eft marquée, tant dans le jv. con- cile de Carthage, can, 7. que dans les anciens ri- tuels, Ils reçevoient le livre des exorçifmes de la E X O Es main de l’évêque , qui leur difoit eñ même tems: Recevez ce livre ; & apprenez par mémoire , & avez Le pouvoir d'impofer les mains aux énergumenes, foit bap- afès , oi catéchumenes : formule qui eft toïjours en ufage. | M. Fleury parle d’une efpece de gens chez les Juifs, qui couroient le pays, faifant profeffion de chafer les démons par des conjurations qu'ils attribuoïent à Salomon : on leur donnoit auffi le nom d’exorcifles, Il en eff fait mention dans l’évangilé, dans les a@es des apôtres , & dans Jofephe, S. Juftin martyr , dans {on dialogue contre Tryphon, reproche aux Juifs que leurs exorcifles fe fervoient, comme les gentils , de pratiques fuperfhitieufes dans leurs exorcifmes, em- ployant des parfums & des ligatures : ce-qui fait voir qu'il y avoit aufli parmi les payens des gens qui fe méloient d’exorcifer les démoniaques. Lucien en touche quelque chofe, ". Dans l’églife catholique il n’y a plus qué des pré- tres qui faflent la fonction d’exorcifles , encore ce n'eit que par commiffion particulière de l’évêque. Cela vient, dit M. Fleury, de qui nous empruntons ceci, de ce qu'il eft rare qu'il y ait des poflédés , & qu'il fe commet quelquefois des impoftures, fous pré: texte de poffeffion du démon ; ainfi il eft néceffaire de les examiner avec beaucoup de prudence. Dans les premiers tes, les poffeffions étoient fréquentes, fur tout entre les payens ; 8 pour marquer un plus grand mépris de la puiflance des démons, où don- noit là charge de les chaffer à un des plus bas minif- tres de léglife : c’étoit eux auf qui exorcifoient les catéchumenes. Leurs fonétions , fuivant le pontif- cal, font d’avertir le peuple, que ceux qui ne com munioient point, hflent place aux autres ; deverfer l'eau pour le miniftere ; d’impofer les mains fur les poñédés. Il leur attribue même la grace de guérir les ‘ maladies, Inffirurion au droit eccléf, rom, I, chap. vj. pag. 62. (G EXORDE, exordium , {. m, (Belles-Lertres.) pre- miere partie du difcouts , qui fert à préparer l’audi- toire & à l’inftruire de l’état de la qüeition, ou du moins à la lui faire envifager en général. Ce mot eft formé du latin ordir:, commencer, par une méthaphore tirée des Tifferands, dont on dit, ordiri telam , c’eft-à-dire commencer La toile en la mettant fur le métier, & difpofant la chaîne de ma- niere à pouvoir la travailler. L’exorde dans art oratoire, eft ce qu’on nomme dans une pièce de théatre prologue , en mufque pré lude , & dans un traité dialeétique préface , avant- propos, en latin proemium. . Cicéron définit l'exorde une partie du difcours ; dans laquelle on prépare doucement l’efprit des au. diteurs aux chofes qu’on doit leur annoncer par la fuite. L’exorde eft une partie importante, qui deman- de à être travaillée avec un extrème foin : auf les orateurs l’appellent-ils Œffciilima pars orarionis. On diftingue deux fortes d’exordes ; l’un modéré ; où l'orateur prend, pour ainfi dire, fon tour de loin; l'autre véhèment, où 1l entre brufquement & toxt- à-coup en matiere : dans le premier on prépare & lon conduit les auditeurs par degrés, & comme in- feniblement , aux ehoïfes qu'on va leur propofer ; dans le fecond l’orateur étonne fon auditoire , en paroïflant lui-même tranfporté de quelque pañion fubite. Tel eft ce début d’Ifaie , imité par Racine dans Athalie : Cieux , écoutez ; terre, prête l'oreille. ou celui-ci de Cicéron contre Catilina : Quoufque tandem abutere | Catilina ; patientié nofré à Les exordes brufques font plus convenables dans les cas d’une joie , d’une indignation extraordinai- res - , 4 E X O res, Ou de quelqu’autre paflion extrèmement vive : hors de-là ; ils feroient déplacés : cependant nous avons des exemples de panégyriques d’orateurs fa- meux , qui entrent en matiere dès la premiere phra- fe, & pour ainfi dire, dès le premier mot, fans qu'aucune pañlion l'exige : tel eft celui de Gorgias, qui commence fon élogé de la ville & du peuple d’E- lispar ces mots: Elis, bearacipiras : & celui de faint Grégoire de Nazianze:,. à la loüange de faint Atha- nafe: Arhanafiumlaudans vircutem laudabo. Les exor- des brufques & précipités étoient plus conformes au goût & aux mœurs des Grecs qu'au goût & aux mœurs des Romains. ff Lesqualités de l'exode font, 1°. la convenance, c’eft-ä-direle rapport 82 la liaifon qu'il doit avoir avec le refte du>difcours , anquel il doit être comme la partie eft au tout , enforte qu'il n’en puifle être détaché-ni adapté dansune occafon différente, & peut-être contraire, Les anciens orateurs paroïffent avoir eté peu fcrupuleux fur cette regle ; quelque- fois leurs exordes n’ont rien de commun avec le refte du difcours, fi ce n’eft qu'ils font placés à la têre de leurs harangues. : | * 2°.La modeftie où une pdeur ingénue , qui inté- reflemerveillenfement les auditeurs en faveur de l’o- rateur, & lui attire leur bienveillance. C’eft ce que Cicéron louele plus dans l’orateur Craflus + firerime ën L, Craflo pudor quidam,qui non modo non obefler ejus orationt, féd etiam probitatis commendatione prodeffer ; &c1l raconte delui-même,qu'aucommencement de fes harangues , un trouble involontaire agitoit fon efprit, &c qu'un tremblement univerfel. s’emparoit de {es membres: Unair fimple & naturel porte un caraîtere de candeur , qui fraie le chemin à la perfuañon. 3°. La briéveté, c’eft-à.dire qu’un exorde ne doit point être trop étendu , & encore moins chargé de détails inutiles; ce n’eft pas le lieu d’approfondir la matiere , ni de fe livrer à l’amplification : il ne doit pas non plus être tiré de trop loin , tels que ceux de ces deux plaidoyers burlefques de la comédie des plaideurs , où les prétendus avocats remontent juiqu'au cahos , à la naiffance du monde, & à la fondation des empires , pour parler du vol d’un chapon. LE 4°. Enfin le ftyle doit en être périodique, noble, grave , mefuré ; c’eft la partie du difcours qui de- mande à être la plustravaillée , parce qu’étant écou- fée la premiere, elle eft auffi plus expofée À la criri- que, Aufhi Cicéron a-t-il dit: ve/ibula adirufque ad caufam facias illufires. L'exorde eftregardé par tous les Rhéteurs, comme une partie eflentielle du difcours ; cependant autre- fois devant Paréopage , on parloit fans exorde , fans mouvemens , fans péroraifon , felon Julius Pollux ; mais 1] faut fe fouvenir que le tribunal de l’aréopa- ge» firefpettable d’ailleurs , n’étoit pas un juge fans appel fur le bon goût & fur les regles de l’éloquen- ce, Voyez ARÉOPAGE, (G) EXOSTOSE , séococ , ( Med.) eft une tumeur extraordinaire qui vient à un os, & qui eft fréquente dans les maladies vénériennes. Foyez Os. Les fcorbutiques & les écroüelleux font auffi fort fujets aux exoffofes. Pour guérir les exo/fofes, il faut combattre la caufe intérieure par les fpécifiques , ou par les remedes généraux , sil n’y a point de fpécif. ue connu contre le principe de la maladie. Les cau- a dexoflofe peuvent être détruites, & le vice local fübffter ; on le voit journellement dans le gonfle: ment des os par le virus vénérien. Il y atdes exofto- fes qui fupputent, & dont la fituation permet qu'on en féfle ouverture & l’extirpation : on peut em- ployer dans ce cas tous les moyens dont on a parlé dans l’article de la carie &c de l’exfoliation. Voyez ces ar20t5 à Tome VI, EX O 273 En effet, le traité des maladies des os contient beaua coup d’obfervations importantes fur la nature, les | caulés êt les moyens curatifs de l’exoffofe enparticu- Ber, L’auteur décrit ainf la maniere d'attaquer les Sas s 1 | exoflofës qui n’ont point fondu par letraitement de la vérole, Ou de toute autte caufe interne. + Ondoit découvrir la tumeur de l’osenfaifant une incifon cruciale ; en‘emporte une partie des angles; On panfe à {ec , on leve l'appareil le lendemain, & on fewfert du trépan perforatif ; On fait plufieurs trous profonds & aflez près les uns des autres ; Ob- fervant qu'ils occupent toute la tumeur qu'on veut émporter. On fe fert enfuite d’un cifeau ouw-d’une | gouge bien coupante, & d’un mailletde plomb avec lequel on frappe modérément ;-pour Couper tout ce qui a été percé par le petforatif. Ces trous a4oiblif. ient los sil fe coupe ‘plus facilement, fans courir aucun rifque de l’éclateren le coupant avecile cis féan, C’eit un moyen dont fe fervent les Menuifiers pour! éviter que leur bois ne s'éclate en travaillant avec le cifeau. NIET | | Si la tumeureft confidérable, & qu'il faille répés | terles coups de cifeauoude maillet > On peut remet- tre lerefte de l'opération au lendemain > parcequeles [A2 Lé { » , «i COUPS réitérés pourroient ébranler la moelle au point | decaufer parla fuite un abcès. Quand on a tout enle- Vé, On panfe l'os comme ila été dit; & pourque l'ex foliation {oit prompte on applique deflus la diffolu- tion du mercure faite par leau-forte ou par lefprit de nitre ;:c’éft un des meilleurs remedes qu'on puifle employer: on ne-préfere le feu que lorfque la carie eft profonde , qu’elle eft avec vermoulure ou -ex: croiffance de chair confidérable. (7) EXOTÉRIQUE & ESOTÉRIQUE, adj. NE dela Prop.) Lepremierde ces mots fignifie exe cérieur, le fecond, intérieur: »:: Les anciens philofophes avoient une double doc: trine ; l’une externe, publique ou exorérique; l’autre interne , fecrete ou é/orérique. La prémiere s’enfei- gnoit ouvertement à tout le monde, la feconde étoit refervée pour un petit nombre de difciples choifis. Ce n’étoit pas différens points de doftrine que l’on enfeignoit en public ou en particulier, c’étoit les mêmes fujets, mais traités différemment, felon que lon parloit devant la multitude ou devant les difei= ples choïfis. Les philofophes des tems poflérieurs com. poférent quelques ouvrages fur la doëtrine cachée de” leurs prédéceffeurs, mais ces traités ne font point parvenus jufqu’à nous ; Eunape, dans la vie de Por: phyre , lui en attribue un , & Diogene de Laërce ere cite un de Zacynthe, Voyez ECLECTISME, Les Grecs appelloient du même nom les fecrets des écoles & ceux des myfteres, 8e les philofophes n’étoient guere moins circonfpeës à révéler les pre= miets, qu'on l’étoit à communiquer les feconds. La plüpart des modernes ont résutdé cet ufage comme un plaifir ridicule, fondé far le myitere , ou comme une petitefle d’efprit qui cherchoit à tromper. Des motifs fi bas ne furent pas ceux des philofophes : cette méthode venoit originairement des Egyptiens, de qui les Grecs l’emptunterent ; & lesuns & les au- tres ne s’en fervirent que dans la vûe du bien public, quoiqu'elle ait pû par la fuite des tems dégénérer en petitefle. | Il n’eft pas difficile de prouver que cette méthos de venoit des Égyptiens, c’eft d'eux que les Grecs tirerent toute leur fcience &c leur fageñle, Hérodote, Diodore de Sicile, Strabon, Plutarque , tous les an. ciens auteurs en un mot, font d’accord fur ce point: tous nous affüirent que les prêtres égyptiens, qui étoient les dépefitaires des fciences, avoïentune double philofophie ; l’une fecrete 8 facrée, l’autre publique & vulsaire. | Pour juger quel pouvoitêtre le butde MA, m + 27 4 E X O il fant confidérer quel:étoit le caraétere desprètres égyptiens. Elenrapporteque dans les: premiers tems ils étoient juges & magiltrats. Confidérés\fons ce point de vüe, le bien publicdevoit être le principal objet de: leurs foins :dan$ ce qu'ils enfeipnoiént:, comme dans ce qu'ils cachoïent; enconféquence ils ont été les premiers qui ontiprétendu avoir commiu- nication avec les dieux: quiont enfeigné:le dogme dés peines & des récompenfes d’une autre vie, & qui; pour foûtenir cettesopinion, ont établi les myf- teres dont le fecret étoit l'unité de Dieu. ‘y CI Une preuve évidenteique de: but des inftruétions fecretes: étoitle:bien public, c’eft le foin.que l'on prenoit de lescommuniquér principalement aux rois &c aux magiftrats. «lies Egyptiens, ditClément d’Ale- » xandfie ; ne révelent point leurs myfteres indiftine- #tement:à toutes fortes derperfonnes ; ilsn’expofent #pointauxprophanes leurs vérités facrées ; ils ne sx les confient qu’à ceuxquidoivent fuccéder à Pad- #aminitration de l’état ,-& A quelques-uns de leurs » prêtres les plus recommandables parleur éduca- »tion ; leur favoir &c:leurs qualités»: L’autorité-de Plutarque confirme la même chofe. « Lesrois, dit-il, étoient choifis parmi les prêtres » ou parmi leshommes de guerre. Ces deux états #éroient honorés &crefpeétés, l’un à caufe de fa a- mefle, & l’autre à caufe de fa bravoure ; mais lorf: ».qu'on choïfifloit un ‘homme derguerre:; on l'en- » voyoit-d’abordiau collége des prêtres.;:où iléroit # anftruit de leur philofophie:fectete , 8t:oùù onlui # dévoiloit la vérité cachée fous le voile des fables » & des allégories». ns | oi à Les mages de Perte, les druides des Gaules & les brâchmanes destindes,, tous femblables aux prêtres égyptiens, &-quiconime eux participoient à ladmi- niftration publique, avoient de: la même maniere & dans la mêmevüe leur doûrine publique & leur doc- trine fecrete: 1 Ce qui a fait prendrele change auxanciens.êc aux modernes-fur lé but dela double doétrine, &c leur a fait imaginer qu’elle n’étoitr qu'un artihce-pour con: ferver:la gloire des fcrences:ê&c de ceux qui en fai- foient profeffion, a.été lopmion générale que les fables-des dieux êc dés héros avoient été inventées par lesfiges de la premiere antiquité , pour déguifer & cacher des vérités naturelles Smorales, dont ils vouloient avoir le plaifir de fe réferver l'explication. Les philofophes grecs des derniers tems: font les au- teurs-de-cetté fauflehypothefe,;carileft évident que : Paneienne Mythologie duPaganifme naquit de la cor- ruption de l'ancienne tradition hiftorique 3: COTTUP= tion qui naquit elle-même des préjugés & des folies du peuple, premier auteur-des fables & des alléso- ries:.ce qui dans la fuite donna lieu d'inventer lu- fage de la double doëtrine ,non pour Le fimple plaïfir d'expliquer les prétendues vérités cachées fous l’en- veloppe de ces fables, mais-pour tourner au bien du peuple les fruits mêmes de fa folie & de fes pré- jugés. Les légiflateurs grecs furent les premiers de leur nation quivoyagerent en Egypte. Comme les Esyp- tiens étoient alors le peuple le plus fameux dans l’art du gouvernement , les premuers Grecs qui projette: rent de réduire en fociété civile les différentes hordes outribus errantes de la Grece, allerent s’inftruire chez cette nation favante, des principes qui fervent - de fondement à la fcience des légiflateurs, & ce fut le feul objet auquel ils s’appliquerent : tels furent Orphée, Rhadamante, Minos, Lycaon, Triptoleme, &c. C’eft-là qu'ils apprirent lufage de la double doc- trine:, dont l’inftitution des myfteres, une des par- ties des plus effentielles de leurs établifemens poli- tiques , eftun monument remarquable. Voyez Les dif- fertations fur l'union de la Religion, dela Morale 6 E X P ! de la Politique, tirées de Varburton par M..de Si | houete, som. .II. differs. viij. Art. de M, FORMEY. | EXOTIQUE,, (Jardin.) fe dit d’une plante étrane gere, d'unfruit, Cerre plante eff exotique, 1, à EXPANSIBILITÉ, {€ (Phyfique.) propriété de certains fluides, par laquellé.1ls tendent fans :ceffe à occuper un.efpace plus.srand. L’air & toutes:les : fubftances qui ont acquis le degré de chaleur nécef- . faire/pour leur vaporifation , comme l’eau au-deflus dutermé de l’eau-bowillante , font expanfibles: IE fuit de notre définition, que ces fluides ne font re- : tenus dans de:certaines. bornes que par la force com primante d’un obftacle étranger, &c queléquihbre de cette force avec la force-expanfver, détermine l’éfpace aétuel qu’ils occupent. Tout corps expanfi- ble eft donc aufliicomprefhble; & ces deux termes oppofés n’expriment que deux effets néceflaires d'u: ne propriété unique dont nous allons parler. Nous traiterons dans cet article, YiT 9 Premierement | de l’expanfihilité confidérée en elle-même 8 comme une propriété mathématique de certains corps:, de fesilois, & de fes effets. Secondement, de l’expanfibilité confidérée phy: fiquement ; des fubftancestauxquelles elle. appar- tient, & des caufes qui la produifent. | Troïfiemement, de lexpanfihiliré comipärée-dans les différentes fubftances auxquelles elle appartient. Quatriemement , nous indiquerons en peu demots les ufages de lexpanfibilisé, & la part qu’elle a dans la produétion des:principaux phénomenes de; la na- turesls #01 1 Es De l'expanfibilité er elle-même , de fes lors , G\de fes effets. Un corps expanfble laiffé à lui-même, ne peut s'étendre. dans un plus grand efpace &c l’occuper uni- formément tout entier, fans que toutes fes parties s’éloignent également les unes des autres : le prinet- pe unique de l’expanfibiliré eft donc une force quel= conque; par laquelle les parties du fluide expanfible tendent continuellement à s’écarter les unes:des au tres, & lutent en tout fens contre les forces com= preflives qui les rapprochent, C’eft ce qu’exprime le terme de répulfion , dont Newton s’eft quelquefois fervi pour la défipner. Cette force répulfive des particules peut fuivré différentes lois, c’eft- à -dire qu’elle peut croître & décroitre en raïfon de telle ou telle fonétion des dif- tances des particules. La condenfation ou la réduc- tion à un moindre efpace, peut fuivre aufli dans tel ou tel rapport ; l’augmentation de la force compri- mante ; & l’on voit au premier coup-d’œil que la loi qui exprime le rapport.des condenfations ou des ef paces à la force comprimante, & celle qui exprime le rapport de la force répulfive à la diftance des par- ticules, font relatives l’une à l’autre , puifque lefpa- ce occupé, comme nous l'avons déjà dit, n’eft dé- terminé que par l’équilibre de la force comprimante avec la force répulfive. L’une de ces deux lois étant donnée, :l eft aifé de trouver l’autre. Newton a le premier fait cette recherche (Ziv. II, des principes, prop. 23.) : & c’eft d’après lui que nous allons don: ner le rapport de ces deux lois, ou la loi générale de l'expanfihilite, La même quantité de fluide étant fappofée , & la condenfation inégale, le nombre des particules fera le même dans des efpaces inégaux ; & leur diftance mefuréé d’un centre à l’autre, feratoüjours enraifon des racines cubiques des efpaces ; ou, ce qui eft la même chofe, en raifon inverfe des racines cubiques des condenfations : carla condenfation fuit la rafon inverfe des efpaces, fi la quantité du fluideeft la mê- me’; & la raifon direéte des quantités du fluide ; f les efpaces {ont égaux. Cela pofé : foient deux cubes égaux, mais rem plis d’un fluide inégalement condénfé; la prefion E XP quexerce le fluide fur chacune des faces des deux cubes , & qui fait équilibre avec l’aétion de la force comprimante fur ces mêmes faces , eft égale au nom- bre des particules quiagiffent immédiatement fur ces faces , multiplié par la force de chaque particule, Or chaque particule prefle la furface contigné avec la même force avec laquelle elle fuit la particule voïfi- ne: car ici Newton fuppofe que chaque particule agit feulement fur la particule la plus prochaine; il a foin, à la vérité, d'obferver en même tems que cette fuppoñtion ne pourroit avoir lieu, fi l’on re- gardoit la force répullive comme une loi mathéma- tique dont l’aétion s’étendit à toutes les diffances, comme celle de la pefanteur, fans être arrêtée par les corps intermédiaires, Car dans cette hypothèfe il faudroit avoir égard à la force répulfive des parti- cules les plus éloignées, & la force comprimante de- yroit être plus confidérable pour produire une égale condenfation ; la force avec laquelle chaque particu- le preffe la furface du cube, eft donc la force même déterminée par la loi de répulfion , & par la diftance des particules entr'elles; c’eit donc cette force qu'il faut multiplier par le nombre des particules, pout avôir la preflon totale fur la furface, ou la force comprimante. Or ce nombre à condenfation égale feroit comme les furfaces ; à furfaces égales , il eft comme les quarrés des racines cubiques du nombre des particules, ou de la quantité du fluide contenu dans chaque cube, c’eft-à-dire comme les quarrés des racines cubiques des condenfations ; ou, ce qui eft la même chofe , en raifon inverfe du quarré des diftan- ces des particules, puifque les diftances des particu- les font totjours en raifon inverfe des racines cubi- ques des condenfations. Donc {a preflion du fluide fur chaque face des deux cubes , ou la force compri- mante, eft toüjours Le produit du quarré des racines cubiques des condenfations, ou du quarré inverfe de la diffance des particules, par la fonétion quel- conque de la diftance , à laquelle la répulfion eft pro- portionnelle. nr Donc, fi la répulfion fuit la raïfon invetfe de la diftance des particules, la preffion fuivra la raifon inverfe des cubes de ces diftances,, ou, ce qui eft la même chofe , la raifon direéte des condenfations. Si la répulfion fuit la raifon inverfe des quarrés des di- ftances, la force comprimante fuivra la raifon in- verfe des quatriemés puiffances de ces diftances, ou la raifon directe des quatriemes puiflances des raci- nes cubiques des condenfations ; & ainfi dans toute Re , en ajoûtant toüjours à l’expofant quel- _conque z de la diftance , qui exprime la loi de répul- fon, l’expofant du quarré ou le nombre 2. Et réciproquement pour connoître la loi de la ré- pulfon, il faut toûjours divifer la force comprimante par le quarré des racines cubiques des condenfa- tions ; ou, ce qui eft la même chofe, fouftraire toû- jours 2 de l'expofant qui exprime le rapport de la force comprimante à la racine cubique des conden- fations : car on aura par-là le rapport de la répulfion avec les racines cubiques descondenfations, & l’on fait que la diftance des centres des particules fuit la raïfon inverfe de ces racines cubiques, D’après cette regle, 1] fera toùjours aifé de con- noître la loi de la répulfion entre les particules d’un flude, lorfque l'expérience aura déterminé le rap- port de la condenfation à la force comprimante : ainf les particules de l'air, dont on fait que la con- denfation eft proportionnelle au poids qui le com- prime (voyez Arr), fe fuient avec une force qui fuit la raifon inverfe de leurs diftances. Il y a pourtant une reftriétion néceflaire À mettre à certe loi: c’eft qu’elle ne peut avoir lieu que dans une certaine latitude moyenne entre l’extrème com- prefhion & l’extrème expanfon. L’extrème compref. Tome FI, | EB-XNE 275 fon a pour bornes le contaét, où toute proportion celle, quoiqu'il y ait encore quelque diftance entre es centres des particules. L’expanfon, à la vérité ha point de bornes mathématiques ; mais fi elle eft l'effet d’une caufe méchanique interpofée entre les particules du fluide, & dont l'effort tend à les écar- ter, On ne peut guere fuppofer que cette caufe agifle à toutes les diffances ; & la plus grande diftance à la- quelle elle agira,fera la borne phyfique de lexpanfibi= lire, Voilà donc deux points où Îa loi de la répulfion ne s’obferve plus du tout : l’un À une diftance très- courte du centre des particules, & l’autre à une di= flance très-éloignée ; & il n'y a pas d'apparence que cette loi n’éprouvé aucune irrégularité aux appro: ches de l’un ou de Pautre de ces deux termes, Quant à ce quiconcerne le terme de la compreffion à fi l'attra@ion de cohéfion a lieu dans les petites dif tances; comme les phénomenes donnent tout lieu de le croire (voyez TuyAUXx cAPrLLAIRES ; RÉ= FRACTION DE LA LUMIERE, COHÉSION, Inpu- RATION, GLACE, CRYSTALLISATION DES SELS, RAPPORTS CHIMIQUES , 6c. ); il eft évident au premier coup-d'œ1l que la loi de la répulfion doit commencer à être troublée, dès que les particules en. s’approchant atteignent les limites de leur attradion mutuelle, qui agiffant dans un fens contraire À la ré. pulfñon, en diminue d’abord l'effet & le détruit bien. tôt entierement , même avant le contact ; parce que croifant dans une propottion plus grande que l’in- verfe du quarré des diftances ; tandis que la répul- fon n’augmente qu’en raifon inverfe des diftances fimples, elle doit bientôt furpafer beaucoup celle-ci. De plus, fi, comme nous l'avons fuppofé, la répul- fon eft produite par une caufe méchanique, interpo- fée entre les particules, 8 qui faffe également effort fur les deux particules voifines pour les écarter, cet effort ne peut avoir d’autre point d'appui que la fur- face des particules ; les rayons, fuivant lefquels fon aétivité s’étendra, n’auront donc point un centre uni- que, mais ils partiront de tous les points de cette {ur- face ; & tes décroiffemens de cette a@ivité ne feront relatifs aux centres mêmes des particules, que lorf- que les diftances feront aflez grandes pour que leux rapport, avec les dimenfions des particules , foit de- venu inaffignable ; & loriqu’on pourra fans erreur fenfble , regarder la particule toute entiere comme un point. Or, dans la démonftration de la loi de l’expanfibilité , nous n’avons jamais confidéré que les diftances entre les centres des particules » Puifque nous avons dit qu'elles fuivoient la raifon inverfe des racines cubiques des condenfations. La loi de la répulfon , & par conféquent le rapport des conden- fations avec les forces comprimantes, doit donc être troublée encore par cette raifon, dans le cas où la compreffion eft pouflée très-loin, Et Je dirai en paf- fant , que fi l’on peut porter la condenfation de l'air jufqu’à ce degré , il n’eft peut-être pas impoflible de former d’après cette idée des conje@ures raifonna- bles fur la tenuité des parties de l'air, & fur les limi- tes de leur attra@ion mutuelle, Quant aux altérations que doit fubir la loi de la répulfion aux approches du dernier terme de l’ex- panfon, quelle que foit la caufe qui termine l’ac- tivité des forces répulfives à un certain degré d’ex- panfon, peut-on fuppofer qu’une force dont l’ac- tivité décroît fuivant une progreflion qui par fa na- ture n’a point de dernier terme, cefle cependant tout-à-coup d'agir fans que cette progreffion ait été altérée le moins du monde dans les diftan- ces les plus voifines de cette ceffation totale à & puifque la Phyfique ne nous montre nulle part de pareils fauts, ne feroit:il pas bien plus-dans l’a. nalogie de penfer que ce dernier térme a été préparé dès long-tems par une efpece de corre&tion à la loi M m ÿ 276 E X P du décroiflement de la force ; correction qui la mo- difie peut-être à quelque diftance qu’elle apifle, ëc qui fait de la loi des décroiffemens une loi comple- xe , formée de deux où même de plufieurs progref- fions différentes , tellement inégales dans leur mar- che , que la partie de la force qui fuit la raifon in- verfe des diftances, furpafle incomparablement dans toutes les diftances moyennes les forces reglées par les autres lois, dont l’effet fera infenfble alors ; & qu’au contraire ces dernieres l’emportent dans les diftances extrèmes, & peut-être aufli dans les ex- trèmes proximités à Les obfervations prouvent effeétivement que la loi des condenfations proportionnelles aux poids dont l'air eft chargé, ceffe d’avoir lieu dans les de- grés extrèmes de compreflion & d’expanfion. On peut confulter là-defflus les phyficiens qui ont fait beaucoup d'expériences {ur la compreflion de l'air, & ceux qui ont travaillé fur le rapport des hauteurs du barometre À la hauteur des montagnes. Voyez AIR, MACHINE PNEUMATIQUE , & BAROMETRE. On à de plus remarqué avec raïfon à larzicle AT- MOSPHERE , que fi les condenfations de l'air étotent exaCtement proportionnelles aux poids qui le com- priment, la hauteur de l’atmofphere devroit étre 1n- finie ; ce qui ne fauroit s’accorder avec les phénome- nes. Voyez ATMOSPHERE. l Quelle que foit la loi, fuivant laquelle les parties d'un corps expanfble fe repouffent les unes les au- tres, c’eft une fuite de cette répulfion que ce corps forcé par la compreffion à occuper un efpace moin- dre, fe rétablifle dans fon premier état, quand la compreffon cefle, avec une force égale à la force comprimante. Un corps expanfble eft donc €lafti- que par cela même (voyez ELASTICITÉ), mais tout corps élaftique n’eft point pour cela expanfble ; té- moin une lame d’acier. L’élafticité eft donc le genre. L’expanjibiliré 8 le refort font deux efpeces ; ce qui les cara@térife effentiellement, c’eft que le corps ex- panfble tend toûüjours à s'étendre, & n'eft retenu que par des obftacles étrangers : Le corps à reflort ne tend qu’à fe rétablir dans un état détermine ; la for- ce comprimante eft dans le premier un obftacle au mouvement, & dans l’autre un obftacle au repos. Je donne le nom de reffort à une efpece particuliere d’é- lafticité, quoique les Phyficiens ayent jufqu’ici em- ployé ces deux mots indifféremment l’un pour l’au- tre, &-qu'ils ayent dit également le refflort de l'air & lélaflicité d’un arc ; & je choïfis pour nommer l’ef- pece le mot de reffors , plus populaire que celui d’é- lafficiré , quoiqu’en général, quand de deux mots juf- que-là fynonymes, on veut reftraindre l’un à une fignification particuliere, on doive faire attention à conferver au genre le nom dont lufage eft le plus commun, & à défigner l’efpece par le mot crenifi- que, Voyez SYNONYMES. Mais dans cette occafion , il fe trouve que le nom de reffort n’a jamais été don- né par le peuple, qu'aux corps auxquels je veux en limiter l'application ; parce que Le peuplene connoît guete ni l'expanfibilité ni l'élafticité de Pair : enforte que les favans feuls ont ici confondu deux idées fous les mêmes dénominations. Or le mot d’é/afhcité eft le plus familier aux favans. * [left d’autant plus néceflfaire de diftinguer ces deux efpeces d’élafhcité , qu'à la réferve d’un pe- tit dômbre d'effets, elles n’ont prefque rien de com- mun, & que la confufion de deux chofes aufli diffé- rentes, ne pourroit manquer d'engager les Phyfi- ciens qui voudroient chercher la caufe de Pélaficité en général dans un labyrinthe d’erreurs & d’obfcuri- tés. En effet, l’expanfibiliré eft produite par une caufe qui tend à écarter les unes des autres les parties des corps ; dés-lors elle ne peut appartenir qu’à des corps adtuellement fluides , & fon aétion s'étend à toutes E X P les diflances, fans ponvoir être bornée que par La ceffation abfolue de la canfe qui Pa produite. Le ref- fort, au contraire, eft l’effet d’une force qui tend à fapprocher les parties des corps, écartées les unes des autres; il ne peut appartenir qu'à des corps durs; &t nous montrérons ailleurs qu'il eftune fuite nécef- faire de la caufe qui les conftitue dans l’état de du- rèté, Woyez GLACE, INDURATION, & RESSORT. Par cela même que cette caufe tend à rapprocherles parties des corps, la nature des chofes établit pour borne de {on aëtion le contaét de ces parties, &elle cefle de produire aucun effet fenfible, précifément lorfqw’elle eft la plus forte. On pourroit pouffer plus loin ce parallele ; mais il nous fuffit d’avoir montré que l’expan/thiliré eft une efpece particuliere d’élafticité , qui n’a prefque rien de commun avec le reflort. Jobferverar feulement qu'il n’y a & ne peut y avoir dans la nature que ces deux efpeces d’élafticité ; parce que les parties d’un corps, confidérées les unes par rapport aux autres, nepeuventfe rétablir dans leurs anciennes fituations , qu’en s’approchantouens’éloignant mutuellement.Il eft vrai que la tendance qu’ont les parties d’un fluide pefant à fe mettre de niveau, les rétablit auffi dans leur premier état lorfqu’elles ont perdu ce niveau; maisce rétabliffement eftmoinsunchangement d’état dufluide,& un retour des parties à leur ancienne fitua- tion refpeétive , qu’un tranfport local d’une certaine quantité de parties du fluide en mañle par l'effet de la pefanteur ; tranfport abfolument analogue au mou- vement d’une balance qui fe met en équilibre. Or, quoique ce mouvement ait auf des lois qui lui font communes avec les mouvemens des corps élafti- ques, ou plütôt avec tous les mouvemens produits par une tendance quelconque (Foyez TENDANCE), il n’a jamais été compris fous le nom d’é/afficiré ; par- ce que ce dernier mot n’a jamais été entendu que du rétabliflement de la fituation refpeétive des parties d’un corps, & non du retour local d’un corps entier dans la place qu’il avoit occupé. L’expanfihiliré ou la force par laquelle les parties des fluides expanfbles fe repoufent Les unes les au- tres, eft Le principe des lois qui s’obfervent foit dans Ja retardation du mouvement des corps qui traver- fent des milieux élaftiques , foit dans la naïffance & la tranfmifion du mouvement vibratoire excité dans ces mêmes milieux. La recherche de ces lois n’ap- partient point à cet article. Voy. RÉSISTANCE DES FLUIDES 6 SON. De l’expanfibilité confidèrée phyfiquement ; des [ub- lances auxquelles elle appartient, des caufes qui la pro: duifent ou qui l’augmentent. L’expanftbilité appartient à l’air; voyez ATR : elle appartient aufli à tous les corps dans l’état de vapeur; voyez VAPEUR : ainf l'efprit-de-vin, le mercure, les acides les plus pe- fans , & un très-grand nombre de liquides très-difé- rens par leur nature & par leur oravité fpécifique, peuvent cefler d'être incomprefhbles , acquérir la propriété de s'étendre comme lair en tout fens & fans bornes, de foûtenir comme lui le mercure dans le barometre, & de vaincre des réfiftances & des poids énormes. Voy. EXPLOSION & POMPE À FEU, Plufieurs corps folides même, après avoir été liqué- fiés par la chaleur, font fufceptibles d’acquérir auffi l’état de vapeur & d’expanfihilire, fi lon pouffe la chaleur plus loin: tels font le foufre, le cinnabre plus pefant encore que le foufre, & beaucoup d’au- tres corps. Il en eft même très-peu qui, fi on aug- mente totijours la chaleur, ne deviennent à [a fin expanfbles, foit en tout, foit en partie : car dans la plüpart des mixtes, une partie des principes deve- nus expanñbles à un certain degré de chaleur, aban- donnent les autres principes , tandis que ceux-ci teftent fixes; foit qu'ils ne foient pas fufceptibles de l’éxparfibiliré, {oit qu'ils ayent befoin pour l’ac- quérir d’un degré de chaleur plus confidérable. L’énumérarion des différens corps expanfbles, & examen des circonftances dans lefquelles ils acquie- rent cette propriété, nous préfentent plufieurs faits généraux. Premierement, de tous les corps qui nous font connus (car je ne parle point ici des fluides élec- triques & magnétiques , ni de l’élément de la chaleur où éther dont la nature eff trop ignorée), l'air eft le feul auquel Pexpan/ébiliré paroïle au premier coup- d’œil appartenir conflamment ; & cette propriété, dans tous les autres corps , paroïît moins une qualité attachée à leur fubftance , & un caraétere particu- lier de leur nature, qu'un état accidentel & dépen- pendant de circonftances étrangeres. Secondement, tous les corps , qui de folides ou de liquides devien- nent expanfbles, ne le deviennent que lorfqu’on leur applique un certain degré de chaleur. Troifie- mement , il eft très-peu de corps qui ne deviennent expanfbles à quelque degré de chaleur : mais ce de- gré neft pas le même pour les différens corps, Qua- triemement, aucun corps folide ne devient expanfi- ble par la chaleur, fans avoir paffé auparavant par l’état de liquidité. Cinquiemement, c’eft une obfer- vation conftante, que le degré de chaleur auquel une fubftance particuliere devient expanfble , eft un point fixe & qui ne varie jamais lorfque la force qui preffe la furface du liquide n’éprouve aucune varia- tion. Ainf le terme de l’eax bouillante, qui n’eft au- tre que le degré de chaleur néceflaire pour la vapo- rifation de l’eau ( Voyez le mémoire de M. l'abbé Nol- let furle bouillonnement desliquides , 76m. de l'a- cad. des Sc. 1748. ), refte tohjours le même, lorf- que l'air comprime également la furface de l’eau. Sixiemement , fi l’on examine les effets de l’applhica- tion fucceflive des différens degrés de température à une même fubftance, telle par exemple que l’eau, on la verra d’abord, fi le degré de température eft au-deflous du terme zéro du thermometre de M. de . Reaumur, dans un état de glace ou de folidité. Quand le thermometre monte au-deflus du zéro , cette glace fond &x devient un liquide. Ce liquide augmente de volume comme la liqueur du thermometre elle-mê- me, à mefure que la chaleur augmente ; & cette aug- mentation a pour terme la diffiparion même de l’eau, qui réduite en vapeur, fait effort en tout fens pour s’é- tendre, & brife fouvent les vaifleaux où elle fe trou- verefferrée: alors fi la chaleur reçoit denouveaux ac- croiflemens , la force d’expanfon augmentera enco- re, & la vapeur comprimée par la même force occu- peroïit un plus grand efpace. Ainfi l’eau appliquée fucceffivement à tous les desrés de température con- nus, pañle fuccefflivement par les trois états de corps folide (Foyez GLACE), de liquide (Voyez Liquipe£), & de vapeur ou de corps expanfble. Foy VAPEUR. Chacun des pañlages d’un de ces états à l’autre, ré- pond à une époque fixe dans la fucceflion des diffé- rentes nuances de température ; les intervalles d’u- ne époque à l’autre , ne font remplis que par de fim- ples augmentations de volume ; mais à chacune de ces époques, la progrefñion des augmentations du volume s’arrête pour changer de loi , & pour recom- mencer une marche relative à la nature nouvelle que le corps femble avoir revètue. Septiemement, f de la confidération d’un feul corps , & des change- mens fuccefifs qu'il éprouve par l'application de tons les degrés de température, nous paflons à la confidération de tous Les corps comparés entre eux Stappliqués aux mêmes degrés de température, nous en recueillons qu’à chacun de ces degrés répond dans chacun des corps un des trois états de folide, de li- quide ;oude vapeur , & dans ces états un volume dé- terminé : q'on'peut ainf regarder tous les corps de Ja nature comme autant de thermometres dont tous E X P EN les états &z les volumes poffibles marquent un certain degré de chaleur ; que ces thermometres font conf- truits furune infinité d'échelles & fuivent des marches entierement différentes; mais qu'on peuttoüjoufs rap- porter ces échelles les unes aux autres, par le moyen des obfervations qui nous apprennent que tel état d’un corps & tel autre état d’un autre corps , répon- dent au même degré de chaleur ; enforte que le degré - qui augmente le volume de certains folides, en con- vertit d’autres en hquides , augmente feulement le volume d’autres liquides, rend expanfbles des corps qui n’étoient que dans l’état de liquidité ; & ang- mente l’expan/ihilité des fluides déjà expanfibles. n Ilréfulte de ces derniers faits, que la chaleur rend fluides des corps, qui fans fon ation feroient reftés folides ; qu’elle rend expanfibles des corps qui refte- roient fimplement liquides , fi fon aétion étoit moin- dre ; & qu’elle augmente le volume de tous les corps tantolides que hquides & expanfbles. Dans quel- que état que foient Les corps, c’eft donc un fait gé- . néral que la chaleur tend à en écarter les parties, & que les augmentations de leur volume , leur fufion & leur vaporifation , ne font que des nuances de l’ac- tion de cette caufe , appliquée fans cefle à tous les corps , mais dans des degrés variables. Cette ten- dance ne produit pas les mêmes effets fenfibles dans tous les corps ; il faut en conclure qu’elle eff inégale- ment contre-balancée par lation des forces qui en retiennent les parties les unes auprès des autres, & qui confituent leur dureté ou leur hudité, lor£ qu'elles ne font pas entierement furpañlées par la ré- puifion que produit la chaleur. Je n’exanune pointici quelle ef cette force, ni comment elle varie dans tous les corps. Voyez GLACE & INDURATION. Il me fufit qu'on puifle toûjours la regarder comme une quantité d’aétion , comparable à la répulfion dans chaque diftance déterminée des particules entr’el- les, & agiflant dans une direétion contraire. Cette théorie a toute l'évidence d’un fait, fon ne veut l’appliquer qu'aux corps qui paflent fous nos yeux d’un état à l’autre; nous ne pouvons douter que leur expanfibilité, ou la répulfion de leurs par- ties , ne foit produite par la chaleur, & par confé- quent par une caufe méchanique au fens des Carté- fiens , c’eft-à- dire dépendante des lois de l’impul- fion , puifque la chaleur qui n’eft jamais produite originairement que par la chüte des rayons de lu- miere , ou par un frotement rapide , ou par des api- tations violentes dans les parties internes des corps, a toüjours pour caufe un mouvement aûuel, Il eft encore évident que la même théorie peut s’appliquer également à l’expanfibiliré du feul corps que nous ne voyons jamais privé de cette propriété ; je veux di- re de Pair. L’analogie qui nous porte à expliquer toùjours Les effets femblables par des caufes fembla- bles , donne à cette idée l’apparence la plus fédui- fante ; mais l’analopie eft quelquefois trompeufe : les explications qu'elle nous préfente ont befoin, pour fortir du rang des fimples hypothèfes | d’être développées , afin que le nombre & la force des in- duétions fuppléent au défaut des preuves dire@es. Nous allons donc détailler les raifons qui nous per- fuadent que l’expanfihiliré de Pair n’a pas d'autre cau- fe que celle des vapeurs ; c’eft-à-dire la chaleur ; que l’air ne differe de l’eau à cet égard, qu’en ce que le dégré , qui réduit les vapeurs'aqueufes en eau & même en glace, ne fuffit pas pour faire perdre à l'air fon expanfibilisé ; & qu'’anfi, l’air eft un corps que le plus petit degré de chaleur connu met dans l’état de vapeur : comme l’eau eft un fluide que le plus petit degré de chaleur connu au-deflus du terme de la gla- ce met dans l’état de fluidité, & que le degré de lé bullition met: dans l’état d’expanfibiliré, Il n’eft pas difficile de prouver que Pexpan/ibilisé 278 E X P de l’air ou la répulfion de fes parties , eft produite par une caufe méchanique , dont l’effort tend à écar- ter chaque particule de la particule voifine, & non par une force mathématique inhérente à chacu- ne d'elles, qui tendroit à les é/oigxer toutes les unes des autres , comme l’attraétion tend à les rappro- cher, foit en vertu de quelque propriété inconnue de la matiere, foit en vertu des lois primitives du Créateur : en effet, fi l’attraétion eft un fait démon- tré en Phyfique, comme nous nous croyons en droit de le fuppofer, il eft impofñble que les parties de l’air fe repouflent par une force inhérente & mathéma- tique. C'eft un fait que les corps s’attirent à des diftances auxquelles jufqw’à préfent on ne connoît point de bornes ; Saturne & les cometes , en tour- nant autour du Soleil , obéiflent à la loi de l’attrac- tion : le Soleil les attire en raïfon inverfe du quarré des diffances ; ce qui eft vrai du Soleil, eft vrai des plus petites parties du Soleil, dont chacune pour fa part, & proportionnellement à fa mafle, attire auffi Saturne fuivant la même loi. Les autres planetes, leurs plus petites parties & les particules de notre air, font douées d’une force attra@ive femblable, qui dans les diftances éloignées , furpañle tellement toute force agiffante fuivant une autre loi, qu’elle entre feule dans le calcul des mouvemtens de tous les corps céleftes:orileftévident que files parties de l’air fe repoufloient par une force mathématique, l’attrac- tion bien loin d’êtrela force dominante dansles efpa- ces céleftes, feroit au contraire prodigieufement fur- pañlée par la répulfon ; car c’eftun point de fait,que dans la diftance aétuelle qui fe trouve entre les parties de l'air, leur répulfion furpaffeincomparablement leur attraction : c’eft encore un fait que les condenfa- tions de l’air font proportionnelles aux poids, &c que par conféquent la répulfion des particules dé- croit en raifon inverfe des diftances , & même , com- me Newton l’a remarqué, dans une raifon beaucoup moindre , fi c’eft une loi purement mathématique : donc Les décroiflemens de l’attraétion font bien plus rapides, puifqu’ils fuivent la raifon inverfe du quar- ré des diftances ; donc fi la répulfion a commencé à furpaffer l’attra@tion , elle continuera de la furpañfer, d'autant plus que la diftance deviendra plus grande ; donc fi la répulfion des parties de l’air étoit une force mathématique , cette force agiroït à plus forte rai- fon à la diftance des planetes. On n’a pas même la reffource de fuppofer que les particules de l’air font des corps d’une nature diffé- rente des autres, & aflujettis à d’autres lois ; car l’ex- périence nous apprend que l’air a une pefanteur pro- pre ; qu'il obéit à la même loi qui précipite les autres corps fur la terre, & qu'il fait équilibre avec eux dans la balance. Voyez Air. La répulfion des par- ties de l’air a donc une caufe méchanique, dont l’ef- fort fuit la raifon inverfe de leurs diftances : or l’e- xemple des autres corps rendus expanfbles par la chaleur , nous montre dans la nature une caufe mé- chanique d’une répulfon toute femblable : cette cau- fe eft fans cefle appliquée à l’air ; fon effet fur l’air, fenfiblement analogue à celui qu’elle produit fur les autres corps, eft précifément l’augmentation de cet- te force d’expan/ibiliré ou de répulfon, dont nous cherchons la caufe ; & de plus, cette augmentation de forceeft exaétement aflujettie aux mêmes lois que fuivoit la force avant que d’être augmentée. Il eftcer- tain que l’application d’un degré de chaleur plus con- fidérable à une mafñfe d'air, augmente fon expar/fbi. liré : cependant les phyficiens qui ont comparé les condenfations de l'air aux poids qui les compriment, ont toüjours trouvé ces deux chofes exaétement pro- portionnelles, quoiqu'ils n’ayent eu dans leurs ex- périences aucun égard au degré de chaleur , & quel qu'ait été ce degré, Lorfque M. Amontons s’eft aflüré EXP ( Mém. de Acad. des Scienc. 1702.) que deux mafles d’air , chargées dans le rapport d’un à deux , foù- tiendroiïent , fi on leur appliquoit un égal degré de chaleur , des poids qui feroient encore dans le rap- port d’un à deux; ce n’étoit pas, comme on le dit alors , une nouvelle propriété de l’air qu'il décou- vroit aux Phyficiens ; il prouvoit feulement que la loi des condenfations proportionelles aux poids , avoit heu dans tous les degrés de chaleur ; & que par conféquent , l’accroiflement qui furvient par la chaleur à la répulfon, fuit toûjours la raifon inver- fe des diftances. | S1 nous regardons maintenant la répulfon totale qui répond au plus grand degré de chaleur connu, comme une quantité formée par l’addition d’un cer- tain nombre de parties 4,b,c,e, f,g,h,i, &c. qui foit le même dans toutes les diftances , 1l eft clair que chaque partie de la répulfion croit &c décroit en même raifon que la répulfon totale, c’eft-à-dire en raifon inverfe des diffances, & que chacun des ter- mes fera ©? © &c. or il eft certain qu'une partie do do d; de ces termes, dont la fomme eft égale à la différence de la répulfon du grand froid au plus grand chaud connu, répondent à autant de degrés de chaleur ; ce feront, fi l’on veut , les termes 4,b,c,e: or comme le dernier froid connu peut certainement être enco- re fort augmenté ; je demande fi, en fuppofant qu'il furvienne un nouveau degré de froid , la fomme des termes qui compofent la répulfon totale , ne fera pas encore diminuée de la quantité . » & fuccefli- vement par de nouveaux degrés de froid des quan- tités # &: je demande à quel terme s’arrêtera. cette diminution de la force répulfve toñjours cor- refpondante à une certaine diminution de la cha- leur , & toùjours aflujettie à La loi des diftances in- verfes, comme la partie de la force qui fubfifte après la diminution : je demande en quoi les termes g, k,z, different des termes a, 2, c; pourquoi différentes parties de la force répulfive, égales en quantité, & reglées par la même loi, feroient attribuées à des caufes d’une nature différente ; & par quelle rencon- tre fortuite des caufes entierement différentes pro- duiroïent fur le même corps des effets entierement femblables & aflujettis à la même loi. Conclure de ces réflexions, que l’expan/thilire de l’air n’a pas d’au- tre caufe que la chaleur, ce n’eft pas feulement ap- pliquer à l’expanfibilité d’une fubftance la caufe qui rend une autre fubftance expanfble ; c’eft fuivre une analogie plus rapprochée, c’eft dire que les caufes de deux effets de même nature , & qui ne different que du plus au moins, ne font aufli que la même caufe dans un degré différent : prétendre au contraï- re que l’expanfibilire eft effentielle à Pair , parce que le plus grand froid que nous connoïflions , ne peut la lui faire perdre ; c’eft reflembler à ces peuples de la zone torride , qui croyent que l’eau ne peut cef- fer d’être fluide , parce qu'ils n’ont jamais éprouvé le degré de froid qui la convertit en glace. Il y a plus : l’expérience met tous les jours fous les yeux des Phyficiens , de l’air qui n’eften aucune ma- mere expanñble ; c’eft cet air que les Chimiftes ont démontré dans une infinité de corps, foit liquides, foit durs , qui a contraété avec leurs élémens une vérita- ble union , qui entre comme un principe effentiel dans la combinaifon de plufeurs mixtes, & qui s’en dégage, ou par des décompofitions & des combinai- fons nouvelles dans les fermentations & les mélan- ges chimiques, ou par la violence du feu : cet air ainfi retenu dans les corps les plus durs , & privé de toute expanfibilité ; n'eft -1l pas précifément dans le cas de l’eau, qui combinée dans les corps n’eft plus fluide, & cefle d’être expanfble à des degrés de chaleur très-fupérieurs au degré de l’eau bouillante, EX P comme l'air ceffe de l’être à des degrés de chaleut trés-fupérieurs à celle de l’atmofphere ? Qu'au degré de chaleur de l’eau bouillante , l'eau foit dégagée des autres principes par. de nouvelles combinaifons , elle paffera immédiatement à l'état d’expar/ibiliee + de même dégagé & rendu à Ini-même dans la, dé- compofition des mixtes, n'a befoim que du plus pe- tit degré.de chaleur connu, pour devenir expanfi- ble: ille deviendra: encore, fans l'application d’un intermede chimique ; par, Peffet de la feule cha- leur, lorfqw’elle fera affez forte pour vaincre l’u- nionqu'la contraétée avec les principes du mixte : c’eft précifément de la mème maniere que l’eau fe fépare dans la diftillation des principes avec lefquels elle eft combinée , parce que malgré fon union avec eux, elle eft encore réduite en vapeurs par un degré de chaleur bien inférieur à celui qui pourroit êle- _vet les-autres principes : or dans lun: & l’autre phé- nomène , c’eft également la chaleur qui donne.à l’air & à l'eau toute leur expan/fébilité, &il n'y a aucune différence que dans le degré de chaleur qui vaporife lune & l’autre fubftance ; degré qui dépend bien moins de leur natute particuliere , que de l’obftacle, qu'oppofe à l’attion de la chalenr l’union qu’elles ont contradée avec les autres principes, enforte que prefque toùjours l’air a befoin , pour devenir expan- fible:, d'un degré de chaleur fort fupérieur à celui qui vaporife l’eau, Il réfulte de ces faits, 1°. que l'air perd {on expanfibilité par fon union avec d’autres corps, comme l’eau perd , dans lé même cas, fon expanfihilité & fa liquidité ; 2°. qu’ainfi, ni lexpan- fibilité , ni la fluidité n’appartiennent aux élémens de cés deux fubftances .. mais feulement à la mafle. ou à laggrégation formée de la réunion de cesélémens, comme l’a remarqué M. Venel dans fon mémoire fur l'ahalyle des eaux de Selters (Mém. des correfp. de l'acad. des Sciences , tome II.) ; 3°. que la chaleur donne également à ces deux fubftances l’expan/frhiliré, par laquelle leurunion ,avecles principes des mixtes, eftrompue; 4°. enfin, que l’analogie entre l’expar: fibilité de l'air & celle de l’eau , eft complete à tous égards; que paf conféquent , nous avons eu raifon de regarder l’air comme un fluide aftuellement dans l’é- tat de vapeur, & qui n’a befoin, pour y perfévérer, que d’un degré de chaleur fort au-deflous du plus grand froid connu. Si je me fuis un peu étendu fur cette matiere , c’eft afin de porter le dernier coup à ces fuppoñtions gratuites de corpufcules branchus, de lames fpirales, dont on compofoit notre air, & afin de fubflituer à ces rêveries, honorées fi mal-à- propos du nomdeméhanifime,une théorie fimple,qui rappelle tous les, phénomenes de l'expan/tbiliré dans différentes fubftances, à ce feul fait général , que la chaleur tend à écarter les unes des autres les parties de tous les corps. Je n’entreprends point d'expliquer ici la nature de la chaleur , n1 la maniere dont elle apit : le peu que nous favons fur l'élément qui pa- roît être le milieu de la chaleur , appartient à d’au- tres articles. PF. CHALEUR, FEU , FROID, & TEm- PÉRATURE. Nous 1gnorons fi cet élément eff, oun’eft pas lui-même un fluide expanfible , 8 qu’elles pour- roient être en ce dernier cas les caufes de fon expan- fébiliré ; cär je n’ai prétendu affigner la caufe de cette propriété , que dans les corps où elle.eft fenfible pour nous. Quant à ces fluides qui fe dérobent à nos fens, &c dont l’exiftence n’eft conftatée que par leurs ef- fets, comme le fluide magnétique, le fluide éleétri- que, &c l'élément même de la chaleur, nous connoif- {ons trop peu leur nature, & nous ne pouvons en parler autrement que par des conjeétures ; à la ve- rité , ces conjectures femblent nous conduite à pen- fer qu'au moins le fluide éle@rique eft éminemment expanfble. Voyez les articles FEU, ÉLECTRIQUE, MAGNÉTISME,ÊTHER , @ TEMPÉRATURE, | E X P. 279 | Quoique l’expañfbilitédes vapeurs &de Pair, doive être attribuée à la chaleur comme à fa véritable cau. {e, ainfique nous l’avons prouvé, l'expérience nous montre une autre caufe capable, commeila chaleur d'écarter les parties du corps, de produire une vé- ritable répulfion , & d'augmenter du moins l'expars fibilisé , % elle ne fuffit pas feule pour donner aux cofps cette propriété ;. ce qui ne paroît effeétivèment pas par l’expérience. Je parle de l’éledricité : on fait que deux corps également éle@rifés fe repouflent mutuellement, 6 qu'ainfi un fyftème de corps.élec- triques foutniroit un tout expanfble : on fait que l’eau électrifée fort par un jet continu de la branche capillaire d’un fyphon, d’où elle ne tomboit auparas vant que goutte à goutte ; l’éleûricité augmenté donc la fluidité des liqueurs, 8 diminue l’attraction de leurs parties , puiique c’eft par cette attration ue l’eau fe foûtient dans les tuyaux capillaires US TUYAUX CAPILLAIRES ) : On ne peut donc douter que l’éleétricité ne foit une caufe de tépuifion entre les parties de certains corps, & qu’ellesne foit capable de produire un certain degré d’'expanfiliré s foit qu’on lui attribue une aftion particuliere, indé. pendante de celle-du fluide de la chaleur, {oit qu’on imagine , ce qui eft peut-être plus vraiflemblable, qu’elle produit cette répulfion par l'expar/ibilité que le fluide éleétrique reçoit lui-même du fluide de la chaleur , comme les autres corps de [a nature. Plufeurs perfonnes feront peut-être étonnées de me Voir diftinguer ici la répulfion produite par l’é- leétricité , de celle dont la chaleur eft la véritable caufe ; 8 peut-être regarderont-elles cette reflem blance dans les effets de l’une & de l’autre comme une nouvelle preuve de l'identité qu’elles imaginent entre le fluide éleétrique & le fluide de la chaleur, qu’elles Confondent très- mal à-propos avec le feu, avec la matiere du feu, & avec la lumiere’, toutes chofes cependant très-différentes. Voyez FEU, Lu- MIERE , & PHLOGISTIQUE. Mais rien n’eft plus mal fondé que cette identité prétendue entre le fluide éleétrique &c l'élément de la chaleur. Indépendam ment de la diverfité des effets, il fuffit pour fe con- vaincre que l’un de ces élémens eft très-diftingué de l’autre , de faire réflexion que le fluide de la chaleur pénetre toutes les füubftances, & fe met eh équilibre dans tous les corps, qui fe communiquent tous réci- proquement les uns par les autres, fans que jamais cette commumeation puifle être interrompue par aucun obftacle : le fluide éle@rique, au contraire, refte accumulé dans les corps éle&trifés & autour de leur furface, s'ils ne font environnés que des corps qu'on a appellès é/eéfriques par eux-mêmes, c’eft.à- dite qui ne tranfmettent pas l’éleétricité, du moins de la même maniere que les autres corps ; comme l'air eft de ce nombre, le fluide élerique a befoin, pour fe porter d’un corps dans un autre, & s’y met- tre en équilibre, de ce qu’on appelle 42 conduéteur (voyez ConpuctEur); & c’eft à la promptitude du rétabliffement de l'équilibre, dûe peut-être à la prodi- gienfe expanfibiliré de, ce fluide, qu'il faut attribuer l’étincelie, la commotion, & les autres phénome- nes qui accompagnent le rétabliflement fubit de la communication entre Le corps éleétrifé en plus, &le corps éleétrifé en moins. Voyez ELECTRICITÉ & COUP FOUDROYANT. J’ajoûte que fi le fluide élec- trique communiquoit univerfellement d’un corps à l’autre, comme le fluide de la chaleur, ou même s’il traver{oit l'air aufli librement qu'il traverfe l’eau, 1l feroit refté à jamais inconnu, comme il le feroit néceflairement pour un peuple de poiflons, quelque philofophes qu’on pût les fuppofer ; le fluide exifte- toit, mais aucun des phénomenes de Péleétricité ne feroit produit, puifqu’ils fe réduifent tous à l’accu- mulation du fluide éleétrique aux environs de cer- 280 E X P tains corps, & à la communication intérrompue où rétablie entre les corps qui peuvent être pénétrés par ce fluide. Puifqne l’éleétricité eft une caufe de répulfontrès- différente de la chaleur, il eft naturel de fe demander f elle agit fuivant la même loi de la raïfon inverfe dés diftances, ou furvantune autre loi. On n’a point , encore fait les obfervations néceflaires pour décider cette queftion: mais les Phyficiens doivent à MM. le Roy & d’Arcy , linftrument qui peut les mettre un jour en état d’y répondre. Voyez au mot ELECTRO- METRE , l’ingénieufe confttuétion de cet inftrument, qui peut fervir à donner de très-erandes lumieres fur cette partie de la Phyfique. Perfonne n’eft plus capa- ble que les inventeurs de profiter du fecours qu'ils ont procuré à tous Les Phyficiens ; & puifque M. le Roy s’eft chargé de plufeurs articles de l’'Encyclo- pédie qui concernent l’éleétricité, j’ofe l’inviter à nôus donner la folution de ce problème au 0 RÉ- PULSION ÉLECTRIQUE. Jai dit qu’i/ ne paroifloit pas par l'expérience que l’éleéfricité feule par rendre expanfible aucun corps de la nature; & cela peut fembler étonnant au premier éoup-d’œil, vû les prodigieux effets du fluide élec- trique & l’aétiontranquille de la chaleur, lors même qu'elle fufit pour mettre en vapeur des corps affez pefans. Je crois pourtant que cette différence vient de ce que dans la vérité la répulfon produite par Pélec- tricité eft fi foible en comparaifon de celle que pro- duit la chaleur, qu’elle ne peut jamais que diminuer lPadhérence des parties, mais non la vaincre, & faire pañler le corps, comme le fait la chaleur , de l’état de liquide à celui de corps expanfble. On fe tromperoit beaucoup , f l’on jugeoit des forces abfolues d’un de ces fluides pour écarter les parties des corps par la grandeur & la violence de fes effets apparens. Les effets apparens ne dépendent pas de la force feule, mais de la force rendue fenfble par les obftacles qu’elle a rencontrés. J’ai déjà remarqué que tous les phénomenes de léleétricite venoient du défaut d’é- quilibre dans le partage du fluide entre les différens corps & defon rétabliflement fubit: or cedéfaut d’é- quilibre n’exifteroit pas, fi la communication étoit continuelle. C’eft pour cetteraifon que le fluide élec- trique ne produiroit aucun effet fenfible dans Peau, uoiqu'il n’en eût pas une force moins réelle. Nous Éne par rapport à l'élément de la chaleur, pré- cifément dans le cas où nous ferions par rapport au fluide éleétrique, finous vivions dans l’eau. La com- unication de l’élément de la chaleur fe fait fans ob- ftacle dans tous les corps ; & quoiqu'il ne foit pas aduellement en équilibre dans tous, cette rupture d'équilibre eft plûtôt une agitation inégale, & tout au plus une condenfation plus ou moins grande dans quelques portions d’un fluide répandu par-tont , qu’- une accumulation forcée d’un fluide dont l’aétivité foit retenue par des obftacles impénétrables. L’équi- libre d’agitation & de condenfation entre les diffé- rentes portions du fhude de la chaleur, fe rétablit de proche en proche & fans violence ; il a befoin du tems , & n’a befoin que du tems. L'équilibre dans le partage du fluide éleétrique entre les différens corps fe rétablit par un mouvement local & par une efpe- ce de tranfvañon fubite , dont l’effet eft d'autant plus violent, que le fluide étoit plus inégalement partagé. Cette tranfvañon ne peut fe faire qu’en fupprimant l’obftacle, & en rétabliffant la communication; & dès que l’obftacle eft fupprimé , elle fe fait dans un inftant inaflignable. Enfin le rétablifement de l’équi- libre entre les parties du fluide éleétrique, fe fait d’u- ne maniere analogue à celle dont Peau fe précipite pour reprendre fon niveau lorfqu'on ouvre Péclufe qui la retenoit, & il en a toute limpétuofité. Le ré- tabliffement de l'équilibre entre les différentes por- E # BR tions du fluide de la chaleur, reflemble à la maniere dont une certaine quantité de fel fe diftribue unitor- méêment dans toutes les portions de l’eau quille tient» en diflolution, & 1l en a le caraëtere lent & paifible. La prodipieufe a@ivité du fluide éleétrique , ne déci- . de donc rien fur la quantité de répulfon qu'ileft ca pable de produire; & puifqw’effetivement l’éledtri-= cité n’a jamais pù qu’augmenter un peu la fluditéde l’eau fans jamais la réduire en vapeur, nous devons conclure que la répulfion produite par l’éledricité eft incomparablement plus foible que celle dont la cha=! leur eft la caufe : nous fommes fondés par confé-: quent à regarder la chaleur comme la vraie caufe de: lexpanfibilité , & à définir l’expanfibiliré, confidérée phyfiquement, l’état des corps vaporifés par la cha= leur. | rh De Pexpanfibilité comparce dans les différentes fu» Jlances auxquelles elle appartient. On peut comparers l'expanfibilité dans les différentes fubftances’; fous: plufeurs points de vûe. On peut comparer 1°. la los: de l’expanfibilié, on des décroiffemens de la force répulfive dans les différens corps ; 2°: le degré de chaleur où chaque fubftance commence à devenir? expanfble ; 3°. le degré d’expan/ibilisé des différens» corps, c’eft- à-dire le rapport de leur volume à leur? male , at mème degré de chaleur. | À l'égard de la loi que fuit la répulfion dans les: différens corps expanfbles, il paroît prefque impof= fible de s’aflürer diretement par l'expérience, qu’- elle eft dans tous les corps la même que dans Pair. La plüpart des corps expanfbles qu’on pourroit foû- mettre aux expériences , n'acquierent cette proprié- té que par un degré de chaleur aflez confidérable,, &e rien ne feroit fi difficile que d’entretenir cétte cha- leur au même point, auffi long-tems qu'il le faudroit: pour les foûmettre à nos expériences. Si l’on effayoit de les charger fucceflivement, comme l'air, par dif férentes colonnes de mercure , le refroidiflement produit par mille caufes & par la feule néceflité de placer le vaifleau fur un fupport, & d’y appliquer la main ou tout autre corps qui n’auroit point le même degré de chaleur, viendroit fe joindre au poids des colonnes pou condenfer la vapeur: or comment démêler la condenfation produite par l’ac-* tion des poids, de la condenfation produite par un refroidiflement dont on ne connoît point la mefureà Les vapeurs de l’acide nitreux très-concentré & fur- chargé de phlogiftique, auroient à la vérité cet avan- tage fur les vapeurs aqueufes , qu’elles pourroient demeurer expanfbles à des degrés de chaleur au- deflous même de celle de l’atmofphere dans des jours très-chauds. Mais de quelle maniere s’y prendroit- on pour les comprimer dans une proportion connue; puique Je mercure, le feul de tous les êtres qu’on pût employer à cet ufage, ne pourroit les toucher fans être diffous avec une violente effervefcence qui troubleroit tous les phénomenes de l’expanfibilire ? On lit dans les eflais de phyfique de Muffchen- broek, $. 1330, des vapeurs élaftiques produi- tes par la pâte de farine, comprimées par un poids double , ont occupé un efpace quatre fois moindre, Mais j'avoue que j'ai peine à imaginer comment ce célebre phyfcien a pû exécuter cette expérience avec les précautions néceffaires pour la rendre con- cluante, c’eft-a-dire en confervant la vapeur, le vaifleau , les fupports du vaiffeau , & la force com- primante , dans un degré de chaleur toüjours le mê- me. De plus, on fait que ces mêmes vapeurs qui s’'é- levent des corps en fermentation, font un mélange d’air dégagé par le mouvement de la fermentation, & d’autres fubftances volatiles ; fouvent ces fubftan- ces abforbent de nouveau l'air avec lequel elles s’é- toient élevées, & forment par leur union chimique avec lui un nouveau nuxte, dont l’expan/ftbiliré peut être — mt int. EE RO RS NON JO + — être beaucoup moindre , ou même abfolument nulle. Voyez lesarticles EFFERVESCENCE 6 CLyssus. M. Muflchenbroek n'entre dans aucun détail fur le pro- cédé qu’il a fiivi dans cètte expérience ; & je préfu- me qu'il s’eft contenté d’obferver Le rapport de la compreffon à l’efpace, fans faire attention À toutes les autres circonftances qui peuvent altérer l’expan- fibiliré de la vapeur: car s’il eût tenté d'évaluer ces circonftances, 1l y eût certainement trouvétrop de dificultés pour ne pas rendre compte des moyens qu'il auroit employés pour les vaincre ; peut-être même auroit-il été impoñible d'y réufür, Ileft donc très-probable que l'expérience ne peut nous apprendre fi les vapeurs fe condenfent ou non, comme l'air, en raifon des forces comprimantes, & fi leurs particules fe repouflent en taifon inverfe de leurs diflances : ainfi nous fommes réduits fur certe queftion à des conjeftntes pour & contre. D'un côté la chaleur étant, comme nous l'avons prouve, la caufe de l’expan/ibilité dans toutes les fub- ftances connues, on ne peut guere fe défendre de croireque cette caufe agit dans tous Les corps, iuivant la mème loi ; d'autant plus que toutes les différences qui pourroient réfulter des obftacles que la contextu- re de leurs parties & lés lois de leur adhéfion met- troient à l’aétion dela chaleur,fontabfolument nulles, dès que les corps font une fois dans l’état de vapeur : les dernieres molécules du corps font alors ifolées dans le fluide , où elles nagent; elles ne réfiftent à fon action que par leur mafle ou leur figure,qui étant con- ftamment les mêmes, ne forment point des obftacles variables en raifon des diflances, & qui ne peuvent par conféquent altérer par le mélange d’une autre loi, le rapport de l’aétion propre de la chaleur avec la diftance des molécules fur lefquelles elle agit. D'ailleurs l'air fur lequel on a fait des expériences, n'eft point un air pur; il tient toûjours en difloiution une certaine quantité d’eau, & même d’autres ma- teres, qu'il peut auffi foûtenir au moyen de leur union avec l’eau. Voyez ROsÉE. La quantité d’eau attuellement diffoute par Pair, eft toûjours relative à {on degré de chaleur. Voyez EVAPORATION 6 Hu- MIDITÉ. Ainfi la proportion de l’air à l’eau dans un certain volume d'air, varie continuellement ; cepen- _ dant cette différente proportion ne change rien à la loi des condenfations, dans quelque état que foit l'air qu'on foûmet à l'expérience. Il eft naturel d’en con- clure, que Pexpanfrbiliré de l’eau fuit la même loi que celle de l'air, & que cette loi ef toijours la même ; quelle que foit la nature du corps expofé à l’a@ion de a chaleur. | De l’autre côté on peut dire que l’eau ainf élevée &c foûtenue dans l’air par la fimple voie de vaporifiz= sion , C’eft-à-dire par l'union chimique de fes molé- culesavec celles de l’air, n’eft, à proprement parler, expanfble que par lexpanfibiliré propre de l'air, & peut être aflujettie à la même loi, fans qu’on puifle rigoureufement en conclure, que l’eau devenue ex- panfible par la vaporifation proprement dite, & par une action de la chaleur qui lui feroit a ppliquée im- médiatement, ne fuivroit pas des lois différentes. On peut ajoûter qu'il y a des corps qui ne fe confervent dans l’état d’expanfibilité, que par des degrés de cha- leurtrès-confidérables &très-fupérieurs à la chaleur qu'on a jufqu'ici appliquée à l'air. Or quoique la cha- leur dans un degré médiocre produife éntre les molé. cules des corps une répulfion qui fuit la raifon inver- fe des diftances, 1l eft très-poflible que la loi de cette tépulfion change lorfque la chaleur eft-pouflée à des degrés extrèmes , ou fon a@ion prend peut - être un nouveau caratere; ce qui donneroit une loi diffé- rente pour [a répulfion dans les différens Corps. Aucune des deux opinions n’eft appuyée {ur des preuves aflez certaines pour prendre un parti. J’a- Tome VI, | EXP 281) VOuerai pourtant que je panche à croire la loi de ré: pulfon uniforme dans tous les corps, Tous les degrés de chaleur que nous pouvons connoître » font vraif- femblablement bien-loin des derniers degrés dont elle éft fufceptible, dans lefquels feuls nous pouvons fuppofer que fon aétion foufire quelque changément ; dt quoique l’uniformité de la loi dans l'ait uni à l’eau, quelle que foit la proportion de ces deux fnbftances , ne fufife pas pour en tirer une conféquence rigou- reufe , généralement applicable À tons les corps ; elle prouve du moins que le Corps expanfible peut être fort altéré dans la nature & les dimenfons de fes molécules, fans que la loi foit en rien déran- gée; & c'en eft aflez pour donner À la propofition. générale bien de la probabilité. PIE Mais fi l'on peut avec vraïflemblance fuppofer la même loi d expanfibilité pour tous les Corps , il s’en faut bien qu’il y ait éntre eux la Même unifor- mité par rapport au degré de chaleur dont ils ont befoin pour devenir expanfbles, Jai déjà remar- qué plus haut que ce commencement de Ja vapo. rifation des corps comparé à l'échelle dé la chaleur, répondoit toûjours au même point pour chaque corps placé dans les mêmes circonftances » & à dif- férens points pour les différens corps ; enforte que fi l'on augmente eraduellerment la chaleur > Tous les corps fufceptibles de l’expanfibiliré parviendront fuc- ceflivement à cet état dans un ordre toüjours le mê- me. On peut repréfenter cet ordre que j’appelle lor- dre de vaporifation des corps , en dreffant, d’après des obfervations exaétes, une table de tous ces points fixes, & former ainfi une échelle de chaleur bien plus étendue que celle de nos thermometres. Cette table, qui feroit très -utile aux progrès de nos con- noiflances fur la nature intime des Corps , n’eft point encore exécutée : mais les Phyfciens en étudiant le phénomene de l’ébullition des liquides , & les Chi- miftes en décrivant l’ordre des produits dans les dif. férentes diftiilations (Voyez EBULLITION & Drs- TILLATION), ont raflemblé aflez d’obfervations Pour en extraire les faits généraux, qui doivent for- mer la théorie phyfique de l’ordre de Vaporifation des corps. Voici Les faits qui réfultent de leurs obier- vations. | 1°. Un même liquide dont la furface ef également comprimée, fe réduit en vapeur & fe diffipe toûù- jours au même degré de chaleur : de-là la conftance du terme de l’eau bouillante, Poyz ÉBuLLITION € 4 mémoire de M. l'abbé Nollet, 29. La Vaporifation n’a befoin que d’un moindre degré de chaleur , fi la fur- face du liquide eft moins comprimée , Comme il ar rive dans l'air raréfié par la machine pneumatique ; au contraire, la vaporifation n’a lieu qu'à un plus grand depré de chaleur, fi la preflion fur la furface du hquide augmente, comme il atrive dans le diget- teur ou machine de Papin. Foyez Dicesteur. De. là l’exaéte correfpondance entre la variauon legere du terme de l’eau bouillante & les variations di, ba- rometre, 3°. L'eau qui tient en diffolution des ma- tieres qu ne s’elevent point au même degré de cha= leur qu’elle, on même qui ne s'élevent point du-tout, à befoin d’un plus grand devré de chaleur pour par venir au terme de la vaporifarion où de l’ébuliition. Ainf pour donner à l’eau bouillante un plus grand degré de chaleur , on la charge d’une certaine quan- tité de fels. Voyez Particle BAIN-MAR1E. 4°. Au contraire l’eau, ou toute autre fubftance unie à un principe qui demande une moindre chaleur pour s’é: lever, s’éleve auffi à un degré de chaleur moindre qu’elle ne s’éleveroit fans cette union. Ainfi l’eau unie à la partie aromatique des plantes monte À un moindre degré de chaleur dans la diftillation que l’eau pure; c’eft fur ce ne qu’eft fondé le pro= cédé par lequel on rectifie les eaux & les efprits aro- Nn 282 E X P matiques.. Woyez REGTIFICATION. Ainf l'aci- de nitreux devient d'autant plus volatil , qu'il eft plus furchargé de phlogiftique ; &c le même phlogif- tique uni dans le foufre avec l'acide vitriolique , donne à ce mixte une volatilité que lacide. vitrio- lique feul n’a pas. 5°. Les principes qui fe féparent des mixtes dans la diflillation , en acquérant l’ex- panfion vaporeufe , ont befoin d’un degré de cha- leur beaucoup plus confidérable que celui qui fufi- roit pour les réduire en vapeur s'ils étoient purs &c raflemblés en mafle ; ainf dans l’analyfe chimique le desré de l’eau bouillante n’enleve aux végetaux & aux animaux qu’une eau furabondante , inftrument néceflaire de la végétation & de la nutrition, maïs qui n’entre point dans la combinaifon des mixtes dont ils font compofés.Ÿ. ANALYSE VÉGÉTALE G'ANIMA- LE. Ainf l’air qu’un degré de chaleur très-au-deffous de celui que nous appellons froid, rend expanñble, eft cependant l’un des dermiers principes que le feu {épare de la mixtion de certains corps. 6°. L’ordre de la vaporifation des corps ne paroît fuivre dans au- cun rapport l’ordre de leur pefanteur fpécifique. Qu'on fe rappelle maintenant la théorie que nous avons donnée de l’expan/ibiliré, Nous avons prouvé que la caufe de l’expan/ibiliré des corps eft une force par laquelle la chaleur tend à écarter leurs molécu- les les unes des autres, & que cette force ne difere que par le degré de celle qui change laggrégation folide en aggrégation fluide, & qui dilate les parties de tous les corps dont elle ne détruit pas l’agoréga- tion. Cela pofé, le point de vaporifation de chaque corps, eft celui où la force répulfive produite par La chaleur commence à furpañfer Les obftacles ou la fom- me des forces qui retenoient les parties des corps les unes auprès des autres. Ce fait général comprend tous ceux que nous venons de rapporter. En effet, ces forces font, 1°. la preffion exercée fur la furface du: fluide par latmofphere ou par tout autre corps : 2°. la pefanteur de chaque molécule : 3°. fa force d’adhéfion ou d’affinité qui Punit aux molécules voi- fines, foit que celles-ci foient de la même nature ou d’une nature différente. L’inftant avant la vaporifa- æion du corps , la chaleur faifoit équilibre avec ces trois forces. Donc fi on augmente l’une de ces for- ces, foit la force comprimante de l’atmofphere, foit l’union qui retient les parties d’un même corps au- _ près les unes des autres fous une forme aggrégative, foit l'union chimique qui attache les molécules d’un principe aux molécules d’un autre principe plus fixe, la vaporifation n'aura lieu qu’à un degré de chaleur plus grand. Si la force qui unit deux principes eft plus grande que la force qui tend à les féparer, ils s’éle- veront enfemble , & le point de leur vaporifarion fera relatif à la pefanteur des deux molécules élé- mentaires unies, & à l’adhérence que les molécules combinées du mixte ont les unes aux autres, & qui leur donne la forme aggrégative ; & comme les mo- lécules du principe le plus volatil font moins adhé- rentes entr'elles que celles du principe plus fixe, 1l doit arriver naturellement qu’en s’interpofant entre celles-ci, elles en diminuent l’adhérence , que l’u- monaggrégative foit moins forte, & qu’ainf Leterme de vaporifation du mixtefoit mitoyen entre les termes auxquels chacun des principes pris folitairement com- mence à s'élever. Des trois forces dont la fomme détermine le degré de chaleur néceflaire à la vapo- rifation de chaque corps , il y en a une, c’eft la pe- fanteur abfolue de chaque molécule, qui ne fauroit être appréciée, n1 même fortienfible pour nous. Ainfi la preffion fur la furface du fluide étant à-peu-près conftante, puifque c’eft toüjours celle de l’atmofphe- re, avec lequel il faut toüjours que les corps qu’on veut élever par le moyen de la chaleur communi- quent a@uellement (voyez DiISTILLATION) ; l’ordre E XP de vaporifation des corps doit être principalement relatif à l’union qui attache les unes aux autres les molécules des corps ; c’eft ce qui eft effeétivement conforme à l’expérience , comme on peut le voir à Particle DISTILLATION. Enfin cet ordre ne doit avoir aucun rapport avec la pefanteur fpécifique des corps , puifque cette pefanteur n’eft dans aucune pro- portion, ni avec la pefanteur abfolue de chaque mo- lécule , ni avec la force qui les unit les unes aux autres. Il fuit de cette théorie, que fi on compare l’expar- Jibilité des corps fous le troifieme point de vûe que nous ayons annoncé, c’eft-à-dire fi l’on compare le degré d’expanfon que chaque corps reçoit-par l’ap- plication d’un nouveau degré de chaleur , & le rap- port qui en réfultera de fon volume à fon poids; cet ordre d’expanfibiliré des corps confidéré fous ce point de vüe, fera très-différent de l’ordre de leur vapori- Jation, En effet, aufli-tôt qu’un corps a acquis l’état d’expanfon , les liens de l'union chimique ou aggré- gative qui retenoient fes molécules font entierement brifés, ces molécules font hors de la fphere de leur attration mutuelle ; & cette derniere force ; qui dans l’ordre de vaporifation devoit être principale- ment confidérée , eft entierement nulle & n’a aucune part à la détermination de l’ordre d’expanfibiliré. La pefanteur propre à chaque molécule devient done la feule force, qui, avec la preflion extérieure toi jours fuppofée conftante, fait équilibre avec laétion de la chaleur. La réfiftance qu’elle lui eppote eft feu- lement un peu modifiée par la figure de chaque mo- lécule , & par le rapport de fa furface à fa mañe, s’il eft vrai que le fluide auquel nous attribuons l’é- cartement produit par la chaleur agifle fur chaque molécule par voie d’impulfon ; or cette force & la modification qu’elle peut recevoir n’étant nullement ptoportionnelles à l’union chimique ou agerégative des molécules, il eft évident que l’ordre d’expunfibi- lité des corps ne doit point fuivre l’ordre de vapori- J'ation, & que tel corps qui demande, pour devenir expanfble, un beaucoup plus grand degré de cha- leur qu’un autre , reçoit pourtant d’un même degré de chaleur une expanfon beaucoup plus confidéra- ble ; c'eft ce que l'expérience vérifie d’une maniere bien fenfible dans la comparaifon de l’expanfibilisé de l’eau & de celle de l'air. On fuppofe ordinairement que l’eau eft environ huit cents fois plus pefante fpé- cifiquement que l'air; admettons qu'elle le foit nflle fois davantage, il s'enfuit que Pair pris au degré de chaleur commun de l’atmoiphere , & réduit à n’oc« cuper qu’un efpace mille fois plus petit , feroit auffi pefant que l’eau. Appliquons maintenant À ces deux corps le même degré de chaleur, celui où le verre commence à rougit. Une expérience fort fimple rap- portée dans les leçons de Phyfique de M. Pabbé Noi. let, prouve que l’eau à ce degré de chaleur occupe un efpace quatorze mille fois plus grand. Cette ex= périence confifte à faire entrer une goutte d’eau dans | une boule creufe, garnie d’un tube, dont la capacité {oit environ 14000 fois plus grande que celle de la goutte d’eau, ce qu'on peut connoître aifément par la comparaifon des diametres ; à faire enfuite rougir la boule fur des charbons, & à plonger l’extrémuté du tube dans un vafe plein d’eau : cette eau monte & remplit entierement la boule, ce qui prouve qu’il n’y refte aucun air, & que par conféquent la goutte d’eau en remplifloit toute la capacité. Mais par une expérience toute femblable, on connoit que l'air aw même degré de chaleur qui rougit le verre, n’aug- mente de volume que dans le rapport de trois à un. Et comme cet air par fon expanfon remplit déjà un volume mille fois plus grand que celui auquel il faus droit le réduire pour le rendre fpécifiquement aufñii pefant que l'eau , il faut multiplier Le nombre de:3 3 se E X P ou, ce qui eft la même chofe, divifer celui de 14000 par mille, ce qui donnera le rapport des volumes de Peau à celui de l’air, à poids égal, comme 14 à 3 ; d’où l’on voit combien l’expafbilité du corps le plus difficilement expanñble, furpañle celle du corps qui le dévient le plus aïfément. RAY L'application de cette partie de nôtre théorie à Pair 8 à l'eau, fuppofe que les particules de leau font beaucoup plus leseres que celles de lai, puif- qu'étant les unes & les autres ifolées au milieu du fluide de la chaleur, & ne réfiftant guere à fon ac- tion que par Leur poids, l’expanfon de l’eau eft fi fu- périeure à celle de l’air : cette fuppoñtion s’accor- de parfaitement avec lextrème différence que nous remarquons entre les deux fluides, par rapport au degré de leut vaporifarion : les molécules de l'air, beaucoup plus pefantes, s’élevent beaucoup plütôt que celles de l’eau , parce que leur adhérence mu- tuelle eff bien plus inférieure. à celle des parties de l’eau, que leur pefanterir n’eft fupérieure. Plus on fuppofera les parties de l’eau petites & legeres, plus Je fluide fera divifé fous un poids égal en un grand nombre de molécules ; plus l’élément de la chaleur, interpoié entre elles, agira fur un grand nombre de parties, plus fon ation s’appliquera fur une grande furface, les poids qu'il aura à foûlever reftant les mêmes, & par conféquent plus l’expan/éiliré fe- ‘xa confidérable. Mais il ne s’enfuit nullement de- là, que le corps ait befoin d’un moindre degré de chaleur , pour être rendu expanfible. Si l’on admet, avec Newton, une force attractive qui fuive la rai- on inverfe des cubes de ces diftances : comme il eft démontré que cette attra@ion ne feroit fenfble qu’à des diftances très-petites , & qu’elle feroit infinie au point de contat ; il eft évident, r°. que l’adhéren- ce réfultante de cette attraétion , eft en partie rela- tive à l'étendue des furfaces par lefquelles les molé- cules attirées peuvent fe toucher , puifque le nom- bre des points de‘contaët eft en raifon des furfaces touchantes : 2°. que moins le centre de gravité eft éloigné des furfaces , plus ladhéfon eft forte: en effet, cette attraétion qui eft infinie au point de con- tait , ne peut jamais produire qu’une force finie, par- ce que la furface touchante n’eft véritablement qu'un infiniment petit ; la molécule entiere eft par rapport à elleuninfini, dans lequel la force fe partage en raifon de l’inertie du tout : fi cette molécule groffif- it juiqu’à un certain point, il eft évident que tout ce qui fe trouveroit hors des limites de la fphere fen- fible de l’attraétion cubique , feroit une furcharge à Loûtenir pour celle-ci , & pourroit en rendre l'effet oul : fi au contraire la molécule fe trouve toute en- tiere dans la fphere d’attra@ion , toutes fes parties ‘contribueront à en augmenter l'effet, & plus le cen- tre de gravité fera proche du conta& , moins cette force qui s'exerce au contaét fera diminuée par la for- ce d'inertie des parties de la molécule les plus éloi- gnées : or plus les molécules, dont un corps eft for- mé, feront fuppofées petites , moins le centre de ravité de chaque molécule eft éloigné de leur fur- 2e » & plus elles ont de fuperficie , relativement à leur mañe. -Concluons que la petitefle des parties doit d’abord retarder la vaporifarion, puis augmenter l’expanfihili- té, quand une fois les corps font dans l’état de vapeur. Je ne dois pas omettre une conféquence de cette théorie fur l’ordre d’expanfibiliré des corps , compa- ré à l'ordre de leur vaporifation: c’eft qu'un degré de chaleur qui ne fufiroit pas pour rendre un COTrps ex- panfble peut fuffire pour le maintenir dans l’état d’ex- panfibilité. En effet, je fuppofe qu'un ballon de verre ne {oit rempli que d’eau en vapeur, êt qu'on plonge ce ballon dans de l’eau froide : comme le froid n’a point une forcé pofitive pour rapprocher les parties des _ Tome FI, + Î Le De E X P 283 corps ( voyez FROID }, il en doit étré de cette ea comme de Pair, qui, lorfqu’il ne communique point avec l’atmofphere, n'éprouye aucune condenfation en fe refroidiffant. L’attra@ion des parties de l’eau ne peut tendre à les rapproche , puifqu’ellesnefont pointplacées dans la fphere de leur-attion mutuelle : leur pefanteur , beaucoup moïingre que celle des parties de l’air, ne doit pas-avoir plus de force pour vaincre l'effort d’un degré de-chaleur ; que l'air foû- tient fans {e condenfer, La preflion extérieure eft nulle ; l’eau doit donc refter en état de vapeur dans le ballon, quoique beaucoup: plus froide que l’eau bouillante , ou du moinselle ne doit perdre cet état que lentement & peu-ä-peu , à :mefure que les mo: lécules qui touchent immédiatement au verre adhés rent à fa furface refroidie » s’y réuniflent avec les molécules quileur font contiguës, & ainfi fucceflives ment, parce que toutes les molécules , par leurrexs pañ/fibilité même, s’approcheront ainf les unes après les autres de la furface du ballon, jufqu'à ce qu’elles foient toutes condenfées. IL ef cependant vrai que dans nos expériences ordinaires, dès que la chaleur eft au-deflus du desré de l’eau bouillante sles vas peurs aqueufes.redeviennent de l’eau ; mais cela n'eft pas étonnant, puifque la preffion de l’atmo- {phere apit toûjours fur.elles pour les rapprocher, & les remet par-là dans la fphére de leur aétion mu- tuelle ; quand l’obftacie de la chaleur ne fubffte plus. | On voit par-là combien fe trompent ceux qui s’imaginent que l’humidité qu'on voit s'attacher aus tour d’un verre plein d’une liqueur glacée:, eftune vapeur condenfée par le froïd:: cet effet , de même que celui de la formation des nuages , dé la pluie | &z de tous les météores aqueux , eft une vraie précipis tation chimique par un degré de froid qui rend l’air incapable de tenir en diffolution toute l’eau dont il s’étoit chargé par l’évaporation dans un tems plus chaud ; & cette précipitation eft précifément du même genre que celle de la crême de tartre > Iorf: que l'eau qui la tenoit en diffolution s’eft refroidie, Voyez HUMIDITÉ © PLure. L On fent aifément combien une table qui repréfen- teroit , d’après des obfervations-exactes ; le réfultat d’une comparaifon fuivie des différentes fubftances & l'ordre de leur expanfibilité , pourroit donner de vües aux Phyficiens ; fur-tout fon y Mmarquoit tou- tes les différences entre cet ordre & l’ordre de leur vaporifation. Je comprendrois dans cette comparai= fon des différentes fubftances par rapport à l’expans Jibilité, la comparaifon des différens degrés d’expan- _ Jibilité entre Pair, qui contient beaucoup d’eau , & l’air qui en contient moins , ou qui n’en contient point du tout. Muflchenbroek a obfervé que l’air chargé d’eau a béaucoup plus d’élafticité qu’un au= tre air, & cela doit être , du-moins lorfqne la cha- leur eft affez grande pour réduire l’eau même en va- peur ; car il pourroit arriver auffi qu'au-deflous de ce degré de chaleur , l’eau difloute en l'air & unie à chacune de fes molécules, augmentât encore la pe= fanteur par laquelle elles réfiftent À la force qui les écarte. D'ailleurs comme on n’a point encore con- nu les moyens que nous donnerons à l’article #umi> dité, pour favoir exaétement combien un air ef plus chargé d’eau qu'un autre air ( voyez HUMIDITÉ)> on n'a point cherché à mefurer les différens degrés d’expanfibiliré de l'air, fuivant qu’il contient plus ou moins d’eau, fur-tout au deoré de la température moyenne de latmofphere : il feroit cependant aifé de faire cette comparaifon par un moyen aflez fim- ple ; il ne s’agiroit que d’avoir une cloche de verre affez grande pour y placer un barometre, & d'ôter toute communication entre l’air renfermé {ous la clo: che & l’air extérieur ; la cire, ou mieux!encore, la Nni 254 E X 1 Int gras des Chimiftes , qui ne foufnirorent à l’air au. cune humidité nouvelle , feroient excellens pour cet nfage :onauroit eu foin de placer fous lä cloche une certaine quantité d’alkali fixe du tartre bien fec, & dont on connoîtroit le poids. On fait que l’air ayant moins d’afinité avec Peau que cet alkali, celui-ci fe chargée peu- à - peu de l’humidité qui étoit dans l’air : fi donc;-en obfervant de faire l'expérience dans une chambre ; dontlatempérature foit maintenue égale, afin que les variations d’expanfibilisé, provenantes de la: chaleur ; ne produifent aucun mécompte ; fi, à mefurerique l’alkali/abforbe une certaine quantité d’eau , le barometre haufle owbaiffe , on en con- clura que Pair enpérdant l’eau qui lui étoit unie, devient plusiou moins expanfible ; & l’on pourra toüjours ;enipefant l’alkali fixe , connoïtre par l’aug- mentation de fon poids le rapport della quantité d’eauique l'air a perdue au changement qu fera ar- rivé dans fon expanjibiliré : 1 faudra faire l’expérien- ce en donnant à l'air différens degrés de chaleur, pour s’affürer fi le plus oule moins d'eauaugmenteou diminueWl’expan/ébiliré de air dans un même rapport, quelle que foit la chaleur; & d'après ces différens rapports conftamment obfervés, ilfera aifé d’en con- ftruire des tables: l’exécution de ces tables peut feu: le donner la connoïffance exaéte d’un des élémens qui entre dans la théorie des variations du barometre ; & dès-lors il eft évident que ce travail eft un préa- lable néceflaire à la recherche de cette théorie. Des ufages de lexpanfibilité | € de la part qu’elle à dans la produition des plus grands phéñomenes de la nature: 1°. C’eft par l’expan/ibiliré que les corps s’é: levent dans la diftillation & dans la fublimation ; & c’eft l'inégalité des degrés de chaleur , néceflaires pour lexpan/ibilisé des différens principes des mix- tes, qui rend la difillation un moyen d’analyfe chi mique. Voyez DISTILLATION. : 2°, C’eft l’expan/ibilité qui fournit à l’art 8e à La nature les forces motrices les plus puiflantes êc les plus foudaines. Indépendamment des machines où l’on employe la vapeur deleau bouillante ( voyez l’article EAU) ; l'effort de la poudre à canon (voyez Poupre À cANON), les dangereux effets de la moin- dre humidité qui fe. trouveroit dans-les moules où l’on coule les métaux-en fonte , les volcans & les tremblemens deterre, & tout ce qui, dans l’art & dans la nature, agit par une explofion foudaine dans tou- tes les direétions à la fois, eft produit par un‘fluide devenu tout-à-coup expanñble, On avoit autrefois attribué tous ces effets à l’air comprimé violemment, puis dilaté par la chaleur : mais nous avons vû plus haut, que l’air renfermé dans un tube de verre rou- gi au feu , n’augmente de volume que dans le rap- port dertrois à un ; or une augmentation beaucoup plus confidérable , feroit encore infenfible en com- paraifon de la prodigieufe expanfion que l’eau peut recevoir. L'air que le feu dégage des corps, dans lef- quels ileft combiné , pourroit produire des effets un peu plus confidérables ; maïs la quantité de cet air efttohjonrs fi petite, comparée à celle de l'eau qui _s’éleve des corps au même degré de chaleur, qu’on doit dire avec M. Rouelle , que dans les différentes explofions , attribuées communément à l’air par les Phyficiens ; fi l'air agit comme un, l’eau agit comme mille, La promptitude & les prodigieux effets de ces “explofions ne paroîtront point étonnans , fi l’on confidere la nature de la force expanfive & la ma- miere dont elle agit. Tant que cette force n’eft em- ployée qu’à lutter contre les obftacles qui retiennent les molécules des corps appliquées les unes contre les autres, elle ne produit d’autre effet fenfible, qu’une dilatation peu confidérable ; mais dès que l’obflacle eft anéanti, par quelque caufe que ce {oit, chaque molécule doit s’élançcer avec une force éga- lé à celle qw'avoit l'obftaclé pour la retenir, plus le petit depré de force, dont la force expañfiye a dû lurpañèr celle de l’obftacle : chaque motécule doit donc recevoir in mouvement local d'autant plus ra- pide ‘qu'il a fallu üne plus grande force pour vain- cre l’obffacle; c’eft cet unique principe qui déterminé la force de rouresles éxplofions : ainf plus la chaleur néceflaire à la vapoñfarion et confhiderable, & plus l’explofion eftrerriblé; chäque molécule continuera de fe mouvoir dans la même direction avec la mème vitefle jufqu’à ce qu’elle foit arrêtée ou détournée par de nouveaux obftacles ; & l’on ne connoît point les bornes de la viteffe que lés molécules dés corps peu- vent recevoir par cètte Voie au moment de leur ex- panfon: L'idée d'appliquer cette réflexion à l’érup- ton de la lumiere & à fa prodigieufe rapidité , fe préfenté naturellement. Mais j'avoue que j'aurois peine à m'y livrer, fans un examen plus approfon- di; Car cetté explication , toute féduifante qu’elle éft au premier coup-d’œil, me paroît combattue par les plus grandes difficultés, Voyez INFLAMMATION & LUMIERE. nm" | | y ‘3°. C’eft l’expanffhiliré de l'eau qui, en foùlevant les molécules de huile embrafée , en les divifant , en multipliant les furfacés, multiplie en même rai- fon le nombre des points émbrafés à la fois, produit la flamme , & lui donne cét éclat qui la cafadténife, Vôyez FLAMME, by edit 4°. L'inégale éxparfbilité produite par l’applica- tion d’une chaleur différente aux différentes parties d'une mafle de fluide expanfble, rompt par-là mé me l’équihibre de pefanteur éntre les colonnes de ce fluide, & y forme différens courans : cette inégali- té de pefanteur entre l’air chaud & l’air froid, eftle fondement de tous les moyens émployés pour diri- ger les mouvemens de l’air à l’aide du feu (voyez FOURNEAU 6 VENTILATEUR À FEU ) : elle eft auf la principale caufe des vents. Voyez VENT. 5°. Cétte inégalité de pefanteur eft plus confidé- rable encore, lorfqu'un fluide, au moment qu'il de- vient expanfble, {e trouve mêlé ayéc un fluide dans l’état de liquidité: de-là l’ébullition des liquides par les vapeurs, qui fe forment dans le fond du vafe qui kes contient; de-là l'effervelcence qui s’obferve pref- que toûüjours dans les fnélanges chimiques au mo- ment où les principes commencent à agir l’un fur l’au- tre pour fe combiner, foit qué cette effervefcence n’ait d'autre canfe que l’air qui fe dégage d’un des deux principes ou de tous les deux , comme il arrive le plus fouvent (voyez ÉFFERVESCENCE ), foit qu’un des deux principes foit lui-même en partie réduit em vapeur dans le mouvement de la combinaifon , com- me il arrive, fuivant M. Rouelle, à lefprit de nitre, dans lequel on à mis difloudre du fer où d’autres matieres métalliques. De-là les mouvemens intef- tins, les courans rapides qui s’engendrent dansles corps atuellement en fermentation , 8 qui par l’a- gitation extreme qu'ils entretiennent dans toute la mafle , font l’inftrument puiflant du mélange intime de toutes {es parties, de l’atténuation de tous les principes, des décompoñitions & des recompoñtions. qu'ils fubiffent, 6°. Si le liquide avec lequel fe trouve mêlé le flui- de devenu expanfble , a quelque vifcofité , cette vifcofité foütiendra plus ou moins long -tems l’ef- fort des vapeurs, fmvant qu'elle eft elle-même plus où moins confidérable : [a totalité du mélange fe remplira de bulles , dont le corps vifqueux formera les parois , & l’efpace qu'elle occupe s’augmentera juiqu'à ce que la vifcofité des parties foit vaincue par le fluide expanfible ; c’eft cét effet qu’on appels le gonflemenr. Voyez GONFLEMENT, 7°. Si tandis qu'un corps expanfble tend à occu- pex un plus grand'efpace, le liquide dont il eft envt- | fonné , acquiert une confiftence de plus’ en plus grande , & parvient enfin à oppofer par cette con- fiftance , un obftacle infurmontable à l’expanfon du Corps en vapeur ; le point d'équilibre entre la réfit- tance d’un côté & la force expanfve de l’autre, dé- terminera & fixera la capacité & la fioure des paroïs, formera des ballons , des vafes, destuyaux, des ra= -mifications où durés ou flexibles , toûjours relative- ment aux différentes altérations de l’expacbilire d’un côté, de la confiftance dé l’autre ; enfofte que ces vaifleaux & ces ramifications s’érendront & fe compliqueront à mefure que le corps expanfible s’é- tendra du côté où 1l ne trouve point encore d'obfta- cle , en formant une efpece de jet ou de courant , & que le liquide , en, fe durciflant à-’entouf , Environ: nera ce courant d'un canal folide : 1l n'importe à quellé caufe on doive attribuer ce changement de confiflance , où cette dureté furvenue dans le liqui- de, dont le corps expanfble eft environné, foit au feul réfroidiflement(voyez VERRERIE),{Oit à Ja eryf- tallifation de certaines partiés du hquide (voyez VÉ- GÉTATION CHIMIQUE ) , foit à la coagulation, où à ces trois caules réunies, ou peut-être à quelqu'au- fre caufe inconnue. Joyez GÉNÉRATION & MOLÉ- CUÜLES ORGANIQUES. : > | 8°. Il réfulte de tont cet article, que prefque tous les phénomenes.de la phyfiqué fublunaire font pro- duits par la combinaïfôn de deux forcés contraires; Îa force qui tend à rapprocher les parties des corps ou l'attraction , & la chaleur qui tend à les écarter, dé même que la phyfique célefte eft toute fondée fur la combinaïfon de la pefanteur &c de la force projec: tile : j'employe cette comparaïfon d’après M. Nee- dham, qui a le premier concu l’idée d’expliquer les myfteres de la génération par la combinaïlon des deux forces attractive & répulfive (voyez les obferva- sions microfcopiques de M. Needham , fur la compofi- tion & la décompofition des fubftances animales & wégétales). Ces déux forces fe balançant mutuelle- ment, fe mefurent exatement l’une l’autre dans le point d'équilibre, &cil fufhroit peut-être de pouvoir rapporter une des deux à une mefure commune êc à une échelle comparable, pour pouvoir foûmettre au calcul la phyfique fublunaire, comme Newton y a foûmis la phyfique célefte. L’exparyfibiliré de lairnous en donne le moyen, puifque par elle nous pouvons mefurer la chaleur depuis le plus grand froid juf- qu'au plus grand chaud connu, en comparer tous lès deprés à des quantités connues, c’efl-à-dire à des poids , & par conféquent découvrir la véritable pro- portion entre un degré de chaleur & un autre decré. Îl eft vrai que ce calcul'eft moins fimple qu'il ne pa roit au prenuer coup-d’œil. Ce n’eft point ici le lieu d'entrer dans ce détail. Voyez TEMPÉRATURE 6 THERMOMETRE. J’obferverai féulement, en finif- Jant, que plufeurs phyficiens ont nié la poffibilité de trouver exaétement cette proportion ; quoique M. Amontons ait depuis long-tems mefuré la chaleur par les différens poids que foûtient le reffort de l'air. Ce: la prouve que bien des vérités font plus'près de nous , que nous n’ofons le croire. Il y en a dont on difpute, & qui font déjà démontrées; d’autres qui n'attendent pour l’être qu’un fimple raifonnement, Peut-être que l’art de rapprocher les obfervations les unes des autres, & d’appliquer le calcul aux phé- nomenes, a plus manqué encore aux progrès de la Phyfque, que les obfervarions mêmes. _ EXPANSION, f. £. en Phyfique, eft l’a@ion par laquelle un corps eft étendu & dilaté, foit par quel- que caufe extérieure , comme celles de la raréfac- tion ; {oit par une caufe interne, comme l’élafticité, Voy. DILATATION, RARÉFACTION, ÉLASTICITÉ, … Les corps s'étendent par la chaleur; c’eft pour- quoi leurs pefanteurs fpécifiques font différentes , E X P 265$ fuivant les diférentes faifons dé l’année. Voyez Prs SANTEUR SPÉCIFIQUE, EAU, Ge. Voyez ff? Py- ROMETRE 6 EXTENSION, Voyez craeflus EXpAN- SIBILITÉ. Chambers. ali We Cr … EXPANSION, (Anai.) fignifie prolongement tons fnuation ; C'eft ainfi que l'on dit cxpanfion mémbres reufe » ligamenteufe > tnufculeife + cette derrière fé pond précifément au platÿfma myoidès des Grecs, C’et une idée très-phyfologique de confidérérton tes les fibres du corps animal Commé'des expañfions d’autres fibres ; ainfi les fibres du cerveau HE font six des développeriens & des expanfons des Wait Canx fanguins qui y aboutiflènt, Les nerf font des éxpan/tons des fibres du cerveau, &'les fibres de tous les vaifleaux font à leur tour des expanfions desders terestamifications des nerfs. (y) Ba: 6 EXPECTANT, adj..pris {übit. (Jurifp.) eft cet qui atténd l’accompliffement d'une gtace qui lui eft dûeou‘promife, tel que célur qui à Pagrémeñt de la premiere charge vacante, où celui qui a nne éxpec- tative fur le premier bénéfice qui! vaqueræ Il y à quelquefois plufieurs dépeélrns Mur un même collaz teur, l’un en vertude fes grades, ün dutre en vettu d'un tndult, un autre pour le ferfient de Adél#e. PVoy- EXPECTATIVE, GRADUÉ , INDUL 6. (4 EXPECTATIVE 2 (Jur/fp. )'énmatiers Bèhé ficiale, où grace expetarive, eft lefpérance 6 dtoit qu'un eccléfiaftique a au, premier bénéfice vacant! du'nombre de ceux qui font flijets À fon Pxpédariye, e On ne connut pointiles ex petasives tant que Pon obferva l’ancienne difcipline dé l'Évlife , de nor donner aucun clerc fans titre: chaque" clérc étant at- tache à fon églife par le titre dé‘fon ordination ; & ne pouvant fans Cauie lébitime être tantéré d’une épifé à une autre, aucun d’entr’eu étdit dans le cas de demander l’expeélarive d’un bénéfice vacant.” Il y'eut en Orienr des le v. fiécle quelques ordi fations vapues & abfolues, c’eéft-à2diré DER fans titre, Ce qui fut défendu äu concile dé Chalcédoine., & catte difcipliné fut confervée dans totre PEelifé jufqu'à la fin du xj. fieclé ; maisoh s’en rélAéha bear coup dans le x17, en'ordonnanr dés clérét fans titre, &t ce fut la première caufe qui dohna lieu aux etaces expettatives &c aux referves; deux manjeres dé poutre voir d'avance ‘aux bénéfices qi Viéndroient À ÿa- quer dans la fuite. FRET EPA Adrien IV, qui tenoit le faint fiépe vers le milieh du xi. fiecle, pañfe pour le premier qui aït déthandé que l’on conférât des prébendes aux périonnes qu'il défignoit, Il y a une lettre de ce pape qui prie l'évé- que de Paris, en vertu du. refpett qu'il doit au fuc- ceffeur du chef des apôtres, de conférer àu chance- lier de France la prémiere dignité où la prémiere pré- bende qui vaqueroit dans l’églife de Paris: Les fuc- ceffeurs d’Adrien IV. regarderent Ce droit comme attaché à leur dignité, &c ils en parlent dans les de- crétales comme d’un droit qüi ne pouvoit leur être contefté. SE Les expeitatives qui étoient alors uftéés , Étoient donc'une aflürance que le pape donnoit X'un clerc, d’obrenir un bénéfice loriqu'il féroit vacant ; par exemple, la premiere prébende qui vaqueroit dans une telle églife cathédrale ou collégiale. Cette forme de conférer les bénéfices vacans ne fut introduite que par degrés. ot re CEE D'abord l'expeéfative n’étoit qu'unie fimple récom mandation que le pape fatoit aux prélats én faveur des clercs qui avoient été à Rome, -ou,qui avoient rendu quelque fervice à l’Eglife. Ces recommanda: tions furent appellées mardara de providendo, man: dats apoftoliques , expeéarives, où graces expectarives. Les prélats déférant ordinairement à ces fortes de prieres , par refpett pour le faint fiéve, elles devin- _ rent fi fréquentes que les évêques, dont la collation 286 E X P fetrouvoit gËnée ; négligerent quelquefois d’avoir égard aux expeéfatives que le pape aecordoit fur eux. Alors les papes, quicommençoient à étendre leur pouvoir, changerent les prieres encommandemens; & aux lettres monitoriales qu’ils donnoient d’abord feulement , ils en ajoüterent de préceptoriales , &c enfin. yen joignirent mêmed’exécutoriales portant attribution de jurifdiétion à un commiflaire pour con- traindre l'ordinaire à exécuter la grace accordée par le pape, ou.pour conférer, au refus de l'ordinaire; & pour le contraindre onalloit jufqu’à l’excommu- nication: cela fe pratiquoit dès le x. fiecle: Etienne, évêquede Tournai, futnommé par le pape, exécu- teur des mandats ou expeélatives adreffés au chapitre de S. Agnan, & 1l déclara nulles les proyifons qui avoient été accordées par ce chapitre au préjudice des lettres-apoftoliques. ET Les expectarives s’accordoient fi facilement à tous venans, que Grégoire IX. fut obligé en 1229, d’y in: érer cette claufe, /£ zon fcripfimus pro alio, Il réola auf que chaque pape ne pourroit donner qu’une feu- le.expeélative dans chaque églife.. Ses fucceffeurs éta- blirent enfuite l’ufage de révoquer au commence- ment de leur pontificat , les expetfatives accordées par leurs prédécefleurs , afin d’être plus en état de faire grace à ceux qu'ils voudroient favorifer, L’ufage des expeitarives & des referves nes’étendit as d’abord furles bénéfices éle@ifs , mais feulement a ceux qui étoient à la collation de l’ordinaire ; mais peu-à-peu les papes s’approprierent de diverfes fa- çons la collation.de prefque tous les bénéfices. La facilité aveclaquelle les papes accordoient ces expeitatives, fut caufe que la plus grande partie des diocèfes devint deferte, parce que prefque tous les clercs fe retiroient à Rome pour y obtemir des béné- fices. | PAPA … La pragmatique fan@ion ou ordonnance qui fut publiée par S.. Louis en 1268, abolit indireétement les expeitatives & mandats apoftoliques , en ordon- nant de conferver le droit des collateurs & des pa- trons. Quelques-uns ont voulu révoquer en doute l'authenticité de cette piece, fous prétexte qu’elle n’a ‘commencé à être citée que dans le-xvJ. fiecle ; mais elle paroît certaine , & en effet.elle a été comprife au nombre des ordonnances de S. Louis dans le re- cueil des ordonnances de la troifieme race, qui s'impri- me au louvre par ordre du Roi. Quelque tems après faint Louis , on fe plaignit en France des expeclarives & des mandats ; le célebre ‘Durant, évêque de Mende, les mit au nombre des chofes qu’il y avoit lieu de réformer dans le concile général: cependant celui qui fut affemblé à Vienne en1311,nentaucun épard à cette remontrance, & es papes continuerent de difpofer des bénéfices, comme ils faifoient auparavant. L'autorité des fauffes decrétales, qui s’accrut beau- coup fous Clément V. & Boniface VIII, contribua encore à multiplier les graces expeifatives. Mais dans le tems que les mandats &c les referves Étoient ainf en ufage, les papes en accordoient or- dinairement à ceux qui étudioient dans les univerfi- tés. Boniface VIII. conféra fouvent des bénéfices aux gens de Lettres, ou leur accorda des expecfatives pour en obtenir. L’univerfité de Paris envoya elle-même en 1343 au pape Clément VI. la Lifte de ceux de fes membres auxquels elle fouhaitoit que le pape accordât de ces TACES A RES Pendant le fchifme qui partagea l’Eglife depuis la mort de.Grégoire X I. les François s'étant fouftraits à l'autorité des papes, de l’une & de l’autre obédien- ce, firent plufeurs réglemens contre les reierves, Îles expeétarives & les mandats apoftoliques. Il y a en- fraurres des'lettres de Charles VI, données à Paris le y Mai 1399,r-qui portent qu’en conféquence dela fouftraétion de La France à l’obédience de Benoît XILE, On pourvoifoit par éleétion aux bénéfices éleétifs à & que les ordinaires conféreroient ceux qui étoient de leur collation, fans avoir ésard aux graces expec- tatives données par Clément VIH. & par Benoît XIII, & par leurs prédéceïleurs. "M Mais ces réglemens ne furent exécutés que pen- dant cette {éparation, qui ne fut pas de longue due rée, & l’expetative des gradués étoit fi favorable- ment reçüe en France , que l’aflemblée des prélats françois, tenue en 1408 , s'étant fouftraite à l’obé- dience des deux papes, ordonna en même tems que l’on conféreroit des bénéfices à ceux qui étoient com= pris dans la lifie de l’univerfité. La veu Le concile tenu à Bafle en 1438 , révoqua toutes les graces expedfarives, laiflant feulement au pape la faculté d'accorder une fois en fa vie un mandat pour un feul bénéfice, dans les églifes où 1l ya plus de dix prébendes; & deux mandats, dans les églifes ‘où 1l ya cinquante prébendes ou plus. Il ordonne aufli de dénñer la troïfieme partie des bénéfices à des gra dués, doéteurs, licentiés où bacheliers dans quelauë faculté. C’eft-Jà l’origine du droit des gradués, qu'on. appelle aufh expeélarive des gradués, parce qu’en ver- tu de leurs grades ils requierent d'avance le premier bénéfice qui viendra À vaquer. Voyez GRADUÉ. La pragmatique fanétion faite à Bourges dans la même année, abolit.entierement les graces expeda= tiyes, & rétablit les éle@tions. IN TE. . Mais par le concordat pañlé entre Léon X. & François 1, on renouvella le réglement qui avoit été fait au concile de Bafle, par rapport aux expedarives & mandats apoftoliques. Depuis, le concile de Trente a condamné én gé- néral toutes fortes de mandats apoñtoliques & de let- tres expeifatives , mème celles qui avoient été accor- dées aux cardinaux. | Il ne refte plus en France de graces expedlatives que par rapport aux gradués , aux indultaires, aux bre- vetaires de joyeux avenement, de ferment de fidé- lité, & de premiere entrée : 1l faut néanmoins ex- cepter l’églife d'Elna, autrement de Perpignan, dans laquelle le pape donne à des chanoïnesencore vivans des coadjuteurs , J4b expeëtatione futuræ prebende : mais cette éghfe eft du clergé d’'Efpagne, & ne fe conduit pas felon les maximes du royaume. La difpofition du concile de Trente, qui abolit nommément les expetfatives accordées aux cardi= - naux, jointe à l’abrogation génerale, a fait douter fi le concile ne comprenoit pas les fouverains auffi- bien que les cardinaux ; mais les papes & la congré- gation du concile ont déclaré le contraire en faveur des empereurs d'Allemagne , en leur confervant le droit de préfenter à un bénéfice. de chaque collateur de leur dépendance, qui eft ce que l’on appelle droës de premiere priere. ) Cet ufage a pañlé d'Allemagne en France dans le xv]. fiecle, & Henri IE, par “ue lettres patentes du 9 Mars 1577, vérifiées au grand-confeil, mit les bre- vets de joyeux avenement au nombre des droits royatux. Voyez JOYEUX .AVENEMENT. Les brevets de joyeux avenement font des efpeces de mandats par lefquels le roinouvellement parvenu à la couronne , ordonne à l’évêque où au chapitre 1 * , n qui confére les prébendes de l’églife cathédrale , de conférer la premiere dignité ou la premiere prébende de la cathédrale qui vaquera, à un clerc capable qui eft nommé par le brevet du roi, red L’indult des officiers du parlement de Paris eft'auffi une efpece de mandat, par lequel le roi, en vertu du pouvoir qu'il a reçû du fant fiége, nomme un clerc, officier ordinaire du parlement de Paris, ou un autre clerc capable, fur la préfentation de l’off: E X P cier du parlement à un collateur du royaume, ou à un patron eccléfaftique, pour qu'il difpofe en fa fa- veur du premier bénéfice qui vaquera à fa collation ou à fa préfentation. .… L’ufage des mandats accordés par Le pape aux of- ficiers du parlement de Paris fur la récommandation des officiers de cette compagnie , commença dès la fin du xiÿ. fecle : on voit un rôle de ces nomina- tions. dès lan 1305. Benoît XII. Boniface I X. Jean XXII, & Martin V. donnerent aux rois de France des expedtatives pour les officiers du parlement: ce droit feregle préfentement fuivant les bulles de Paul JL. & de Clément IX. Poyez INDULT. | Les brevetaires de ferment de fidélité, dont le droit a été établi par une déclaration du dernier Avril 1599, vérifiée au grand-confeil , font encore des expectans ; le brevet deferment de fidélité étant de même une efpece de mandat ou grace expedlarive, par lequel Le roi ordonne au nouvel évêque, après qu'il lui a prèté ferment de fidélité , de conférer la prenuere prébende de l’églife cathédrale à fa colla- tion, qui vaquera par mort, au clerc capable d’en être pourvû , qui eft nommé par le brevet. Foyez SERMENT DE FIDÉLITÉ, Enfin nos rois font en pofleffion immémoriale de conférer par forme d’expeéfative une prébende, après leur premiere entrée dans les églifes dont ils font chanoines, Le parlement confirme ce droit, comme étant fondé fur des traités particuliers ou fur des ufages fort anciens. Quelques évêques joiiflent d’un droit femblable à leur ayenement à l’épifcopat , notamment l’évêque de Poitiers. Sur les graces expeéfatives on peut voir Rebuffe, prax. benef, part, I. de expetativo ; Franc. Marc, come L. quefl, 1100, & 1186; Chopin, de facr. Lib, I, dir. ii, 71. 18. les traités faits par Joa. Staphileus , Ludovic, Gomefus, & Joan. Nic. Gimonteus, Voyez auffi Les rném. du Clergé, premiere édir. rome IT. part. 11. rir. x7. les lois eccléf. de d'Héricourt, part. I. chap, vüÿ. É Jiñv. le recueil de jurifpr. can, au mot Expert. (A) EXPECTORANT , adj. (Med, Thérap.) on défi- gne par cette épithete les remedes où médicamens propres à faciliter, procurer , rétablir l’expeltora- tion ordinaire , ou la toux, qui eft l’expettoration violente. Voyez EXPECTORATION, Toux. Les expeëlorans peuvent être regardés par confé- quent comme des purgatifs de la poitrine ,qui fervent . à préparer les humeurs, dont l’excrétion doit fe faire dans les voies de l’air pulmonaire ; qui rendent ces humeurs (attachées aux parois de ces cavités, ou répandues dans les cellules, dans les ramifications des bronches) fufceptibles d’être évacuées, jettées hors des poumons par le moyen de l’expeétoration ; qui excitent, qui mettent en jeu les organes propres à cette fonétion. Pour que les matieres excrémentitielles on mor- bifiques , qui doivent être évacuées par les vaifleaux aériens , foient fufceptibles de fortir aifément des conduits excrétoires, ou des cavités cellulaires bron- chiques dans lefquelles on les conçoit extravafées, elles doivent avoir une confiftence convenable: lof. qu'elles font trop épaïffes, trop vifqueufes, elles for- tent difficilement des canaux, qu’elles engorgent avant leur excrétion ; ou, lorfqu’elles en font for- tes, qu’elles font répandues dans Les cellules & dans les ramifications des bronches, qu’elles font adhé- rentes aux parois de ces vaifleaux aériens de la tra- chée artere même, elles réfiftent à être enlevées par limpulfion de l’air dans les effortsde lexpeétoration, & mêmede la toux: il eft donc néceflaire d'employer des moyens qui donnent à ces humeurs la fluidité qui leur manque, en les délayant , en les atténuant au D de rendre leur excrétion ou leur expulfion fa- giles, E X P 287 On peut remplir ces indications pat dés médica- MEN appropriés, employés fous difiérentes formes, comme celles de bouillons , d’apofemes , dé tifan- nes, de juleps: mais comme aucun des remedes ainf compoiés, n'eft fufceptible d’être potté immeédiaté= ment dans les vaifleaux aériens des poumons, & qu'- ils ñe produifent leuts efuts qu'en agiffant comme tous les altérans, c’eft-à-diré éntant qu'ils font por= tés dans la mafle dés humeurs » & qu'ils n changent les qualités ; on ne péut pas tévarder cés remedes COMME expelorans proprement dits ; on he doit don: nêr exattement ce not qu'à Céux, Qui, étant retenus dans la bouche, dans le gofier , tels Que les lodchs : les tablettes , peuvent par leurs exhalaïfonis fournir à l’air (qui pañle par ces cavités avant d’entrer dans les poumons) des particules dont il fe Charge, & qu'il porte immédiatement dans lés cavités de ce vif, cere, où elles agiflent par leurs différentes qualités fur les parois de ces cavités, ou fur les matiéres qui y font extravafées : les vapeurs humides, émollientés, ré folutives ou irritantes, portées dans les poumons, avec l’air infpiré , agiflent à-peu-ptès de là même maniere pour favorifer l’expeétoration. | Les autres remedes que l’on émploye comme ex- péilorans, en les faifant parvenir aux poumons par les voies du chyle, ne doivent être repardés comme purgatifs de ce vifcere, que comme la décofion dé tabac, la teinture de coloquinte (qui puréent quois que feulement appliqués extérieurement), font pla= cées parmi les purgatifs des inteftins : on ne peut rer dre raifon de l'opération des remedes qui ne fervent à l’expeétoration , qu'après avoir été mêlés aupara= vant dans la mafle des Humeurs, qu’en leur fuppo- fant une propriété fpécifique , une analogie qui les rend plus fufceptibles de développer leur ation dans les glandes ou les cavités bronchiques, que dans les autres parties du corps (voyez MÉDICAMENT }); à moins que l’on ne dife que les humeurs, qui doivent faire la matiere de l’expe&toration, ne font que par- ticiper aux changemens que les remedes, dont il s’a git, ont opéré dans toute la mafle des fluides: mais la plüpart des remedes employés comme expedorans, produifent des effets trop prompts , pour que lon puife les attribuer ainfi à une opération générale. On ne doit pas confondre , ainfi qu’on le fait fou vent, les remedes béchiques avec les expedorans , at. tendu que ceux-là font particulierement deflinés À calmer litritation, qui caufe la toux, lorfqw’elle eft trop violente; qu’elle n’eft pas néceffairé pour favo- rifer l'évacuation des matieres excréméntitielles ou morbifiques des poumons ; & qu’elle ne confifte qu’- en efforts inutiles & très-fatiguans , occafionnés par cette irritation exceflive. Les béchiques qui font in- diqués dans ce cas , ne font pas employés pour pro= curer l’expeétoration, mais au contraite pour corri ger Le vice qui excite mal-à-propos le jeu de cette fonétion , puifqu’il l’excite fans l'effet pour léquel elle doit être exercée. Les béchiques , en général, agiflent en incraflant, en émouffant les Humeurs trop atténuées, & dont l’acrimonie piquante irrite la tu- nique nerveufe qui tapifle les voies de l'ait dans les poumons ; au lieu que les expeéorans produifent leurs effets en incifant , en divifant les mucoftés pulmo- nairés, en irritant les vaifleaux qui en font l’excré- tion, les organes qui en operent l’expulfion : ils font même quelquefois employés à cette derniere fin, de maniere à agir feulement aux environs de la glotte, dont la fenfibilité met en jeu tous les inflrumens de l’expeétoration laborieufe , c’eft-à-dire de la toux s dans ce cas on peut comparer les expeélorans aux fup- poñitoires : Hippocrate connoïfloit l’ufage de cette efpece de remedes propres à procurer l'évacuation des matieres morbifiques contenues dans les pou- mons, Dans le cas d'abcès de cé vifcére, il confeils 2838 E XP | loit, lorfque le tems critique approchoit, c’eft-à-dire lorfque la fuppuration étoit achevée, d'employer du vin, du vinaigre mêlé avec du poivre, des liqueurs acres en gargarifme, des errhins &c autres fimulans propres à vuider l’abcès, & à en chafler la matiere hors des poumons par l’expeétoration. Comme il y a des maladies bien différentes entre elles , qui exigent l’ufage desexpeélorans, les différens médicamens que l’on employe fous ce nom, ont des qualités plus ou moins aétives; on doit par confé- quent les choifir d’après les différentes indications. Les maladies aiguës ou chroniques, avec fievre, tel- les que la peripneumonie, la phthifie, ne compor- ent que les plus doux, ceux qui produifent leurs ef- fets fans agier, fans échautfer, comme les déco@ions de racine de réglifle, de feuilles de bourache, le fuc de celles-ci, les infufions de fleurs de fureau ; les po- tions huileufes avec les huiles d'amandes douces , de Lin, récentes; les diflolutions de manne, de miel , de fucre dans les décoétions ou infufions précédentes ; de blanc de.baleine récent dans les bouillons gras, dans les huiles fufdites, &c. Les forts apéritifs, propres à incifer, à brifer la vifcofité des humeurs muqueufes , tels que font les apotemes, les tifannes de racines apéritives, des bois fudorifiques ; les différentes préparations de foufre, d'antimoine ; diaphorétiques, &c. conviennent aux maladies chroniques, fans fievre , comme le catat- æhe , l’afthme : on trouvera fous les noms de ces dif- #érentes maladies , une énumération plus détaillée des médicamens indiqués pour chacune d’entr’elles, les différentes formes fous leiquelles on les employe, & les précautions qu’exigent leur ufage dans les dif- férens cas. On ne peut établir ici aucune regle géné- tale, ainf voyez TOUX , PERIPNEUMONIE, PHTHI- SIE, RHÔÜME, CATARRHE, ASTHME, 6 autres ma- dadies qui ont rapport a celles-ci. (4 EXPECTORATION, f. f. expectoratio (Medec ) ; ce terme eft compote de la prépoñition ex, de, & du fubflantif pedus, poitrine ; ainfi il eft employé pour expriner la fonttion par laquelle les matieres excré- mentitielles des voies de l’air, dans les poumons, en {ont chafices & portées dans la bouche, ou tout d’un trait hors du corps , en traverfant cette derniere ca- vité ; c’eft la purgation de la poitrine & des parties qui en dépendent, dans l’état de fanté & dans celui de maladie. Comme cette purgation fe fait par le haut, elle a £té mile par les anciens au nombre des évacuations du genre de l’azacarharfi; Hippocrate lui a même fpé- cialement donné ce nom (5. aphor. 8.) avanahapois , purgatio per [puta. L'expeiloration eft donc une forte d’expulfion de la matiere des crachats tirés des cavités pulmonai- res, dont l’iffue eft dans le gofier ; c’eft une efpece de crachement , foit qu'il fe fafle volontairement, foit qu’il fe fafle involontairement , par l’effet de la toux : mais tout crachement n'eft pas une expeélora- sion, Voyez CRACHAT, ToUx. | L’éjeétion de la falive, qui ne doit point avoir lieu dans l’économie animale bien reglée, ne peut auffi être regardée comme une expeéforation; cette déno- mination-c1 ne convient abiolument qu'à l’'évacua- tion des humeurs muqueufes, deftinées à Inbrifier toutes les parties de la poitrine expofées au conta& de l'air refpiré ; lefquelles humeurs étant de nature à perdre la fluidité avec laquelle elles fe féparent, & à s’épaifiir de maniere qu’elles ne peuvent pas être abforbées &c portées dans la mafñle des fluides, s'accumulent &c furabondent au point qu’elles fati- guent les canaux qui les contiennent, ou par leur volume, en empêchant le libre cours de l'air dans fes vaifleaux, ou par leur acrimomie, effet du féjour & de la chaleur animale, enirritant les membranes EX P qui tapiflent les voies de l'air. Ces différentes caufes font autant de fémulus, qui excitent la puiffance mo: trice à mettre en jeu les organes propres À opérer l’expeéloration ; de forte qu’il enceft de cette matiere excrémentitielle , comme dela mucofité des natines, de la #orve : cette mucofté fe féparant continuelle- ment dans les organes fecrétoires de la membrane Pituitaire, pour la défendre auffi du conta@ de l'ait, eft continuellement renouvellée ; par conféquent il jen a de furabondante, qui doit être évacuée par ‘éternuement ou par l’aétion de fe moucher. Foyez MORVE, ETERNUEMENT, Moucuer, Il eft donc très-naturel qu'il excite dans l’économie animale un moyen de jetter hors du corps lés humeurs lubrifan- tes, qui furabondent dans les voies de l'air, plus où moins, felon le tempérament {ec où humide : ce moyen eft l’expeñoration : ainfi 1l n’y a que l'excès ou le défaut qui faffent des léfions dans cette fonc- tion, qui eft très-néceflaire par elle-même dans l’é- tat de fanté , entant qu’elle s’exerce d’nne maniere proportionnée aux befoins établis par la conftitution propre à chaque individu : cependant il faut con- venir, qu'en général ils fe font naturellement très- peu fentir : mais il n’en eft pas de même dans un grand nombre de maladies, foit qu'elles ayent leur fiége dans les poumons, ou que la matiere morbif- que y foit portée, dépofée de quelqu’autre partie où de la mafle même des humeurs. Il arrive très-fouvent que la nature opere des crifes très-falutaires par le moyen de l’expedoration : les obfervations à ce fujet Ont fourni au divin Hippocrate la matiere d’un grand nombre de prognoftics & de regles dans la pratique médicinale. oyez fes œuvres paffim. Le méchanifme de l’expeélorarion s'exerce donc par l’aétion des organes de la refpiration; la glotte s’étant fermée pour un inftant, pendant lequel Îes mufcles abdominaux fe contraétent, fe roidifent ; preflent les viiceres du bas-ventre vers l'endroit où ils trouvent moins de réfiftance: c’eft alors vers la poitrine où le diaphragme, dans fon état de relâche- ment, eft pouflé dans la cavité du thorax, ü y for- me une voute plus convexe, qui preffe les poumons vers la partie iupérieure de cette cavité, en même tems que les muicles qui fervent à l'expiration ab- baiffent fortement & promptement les côtes; & par conféquent toutes les parois de la poitrine s'appli quent fortement contre les poumons , les compri- ment en tout fens , en expriment l’air qui ef pouité de toutes les cellules bronchiques , de toutes les bronches mêmes, vers la trachée artere : mais lo tifice de celle-ci fe trouvant fermé, la direction de Vair (mû avec force felon l’axe de toutes les voies aériennes ) change par la réfiftance qu'il trouve à fortir ; il fe porte obliquement contre les parois ; leur fait efluyer une forte de frotement qui ébranle, qui emporte ce qui eft appliqué contre ces parois, avec une adhéfion fufceptible de céder aïfément ; qui entraîne par conféquent la mucofñté furabondante. Dans le mêmeinftant que l’effort a enlevé ainf quel: que portion de cette humeur, [a glotte vers laquelle cette matiere cit portée, s'ouvre avec promptitude pour la laïfer pañler , fans interrompre le courant d’air qui l’emporte de la trachée artere dans la bou- che , & quelquefois tout d’un trait hors de cette der: niere cavité, par conféquent hors du corps : ce der= nier effet a lieu, lorfque la matiere dont fe fait l’ex- pulfon eft d’un petit volume (mais affez pefante par fa denfité , d’où elle a plus de mobilité), qu’elle fe trouve fituée par des efforts précédens près de l'ou= verture de la trachée-artere, c’eft-à-dire dans ce ca- nal même ou dans les troncs des bronches. Dans le cas, au contraire, où la matiere excrémenteufe fe trouve fituée dans les cellules ou dans les plus pe- tites ramifications bronchiques, c’eft-à-dire dans le fond E X P fond des cavités aériennes des poumons, il faut fou- vent plus d’un effort expeétorant pour l’en tirer ; il faut qu'elle foit ébranlée & élevée par fecoufles , avant d’être mife à portée d’être jettée hors des pou- mons : On peut cependant concevoir auffi un moyen par lequel elle peut être tirée & expulfée d’un feul trait, mème de l'extrémité des bronches , fi l’on fe repréfente que l'air comprimé avec force & fubite- D ment par les organes expiratoires , fort comme sil étoit fucé, pompé des plus petites ramifications & des cellules qui les terminent ; d’où il doit fe faire, que les matieres qui en font environnées, foient en- trainces avec lui, & fuivent l’impétuofité du torrent qu'il forme, dont Le cours ne fe termine que dans la bouche ou dans l’air extérieur. L’exfpetforation , pour être naturelle, c’eft-à-dire conforme à ce qui fe doit faire dans l’état de fanté, doit être libre &c fe faire fans effort; elle differe par conféquent de la toux, qui eft une expulfon forcée (excitée indépendamment de la volonté, opérée par des efforts convulfifs, ) des matieres étrangeres ou excrémenteufes ou morbifiques, contenues dans les vaifleaux aériens des poumons; c’eft une expefora- tion laborieufe & (comme on dit dansles écoles, mais improprement ) contre-nature, puilqu'elle eft alors un véritable effort, que la nature même opere pour produire un effet falutaire , qui eft la purgation des poumons : 1l en eft comme des tranchées, qui difpo- fent à l’excrétion des matieres fécales, L’on doit mê- me fouvent regarder la toux, par rapport à l’éva- cuation, comme un tenefme de la poitrine, entant que les mouvemens violens en quoi confifte la toux, ne font que des efforts fans effet, c’eft-à-dire qui tendent feulement à expulfer quelque chofe des pou- mons, fans qu'il fe fafle aucune autre expulfion réel- le que celle de l'air. La toux peut auffi être regardée comme une préparation à l'expeéoration : on peut dire que les fecoufles qu’elle opere fervent à donner de la fluidité aux matieres qui engorgent les glandes bronchiques ; qu’elle facilite & procure l’excrétion de ces matieres hors des vaiffeaux qui compofent ces glandes; & qu’elle enleve enfin ces excrémens, &les ‘jette hors du corps. Par ces confidérations ne doit- on pas regarder la toux comme le plus puiffant de tous les remedes expettorans ? Voyez Toux,ExPEc- TORANT, BÉCHIQUE, ASTHME, PÉRIPNEUMONIE, PHTHISIE. (d) EXPEDIENT , { m.(Jurifprud.) en flyle de Palais, fignifie un arrangement fait pour l'expédition d’une affaire. Ce terme vient ou de celui d’expédier, ou du latin expediens, qui fignifie ce qui eff d-propos & conve- nable, A . Il y a deux fortes d’expédiens : lun:, qui eft un ac- cord volontaire figné des parties ou de leurs procu- teurs ; l’autre , qui eft l’appointement ou arrange- ment fait par un ancien avocat ou un procureur, de- vant lequel les parties fe font retirées en conféquen-. ce de la difpofition de l’ordonnance , qui veut que l’on en ufe ainf dans certaines matieres, ou en con- féquence d’un jugement qui a renvoyé les parties de- vant cet avocat ou procureur pour en pafler par fon avis. Cet accord ou avis eft qualifié par les ordonnan- ces d’expédienr ; c’eft une voie ufitée pour les affaires legeres, L'origine de cet ufage paroît venir d’un réolement du parlement , du 24 Janvier 1735, qui enjoignoit aux procureurs d’avifer ou faire avifer par confeil, dans quinzaine , fi l'affaire eft foûtenable ou non , & au dernier cas de paffer l’appointement ou expédient. L'ordonnance de 1667, er. yj. contient plufeurs difpofitions au fujet des matieres qui fe vuident par cxpédient ; c’eft le terme de palais. Elle veut que les appellations de déni de renvoi Tome VI, Li E X P 289 êe d'incompétence foient inceffamment vuidées par Pavis des avocats & procureurs géneraux , & les folles intimations & defertions d'appel, par l'avis d’un ancien avocat, dont les avocate ou les p'ocu- leurs Conviendront ; que ceux qui fuccomberont fe- ront condamnés aux dépens, qui ne pourront être modérés > Mais qu'ils feront taxés par les procureurs des parties {ur un fimple mémoire, Dans les caufes qui fe vuident par expédient, la préfence du procureur n’eft point néceflaire lorfque les avocats font chargés des pieces. Les qualités doivent être fipnifiées avant que d’al- ler à | expédient, & les prononciations rédigées &g fi- gnées aufh-tôt qu’elles auront été arrêtées. En cas de refus de figner par l’avocat de l'une des parties, l'appointement ou expédier doit être reçu, pourvü qu'il foit figné de l'avocat de l'autre partie & du tiers, fans qu'il foit befoin de fommation n; autre produétion, | Les appointemens où expédiens {ur les appellations qui Ont été vuidées pat l’avis d’un ancien avocat, ow par celui des avocats & procureurs généraux, font prononcés & recûs à l'audience {ur la premiere fome mation, s’il n’y a caufe lévitime pour l'empêcher. Au châtelet, & dans plufeurs autres tribunaux $ lorfqu’on demande à l'audience la réception de ces fortes d'accords & arrangemens, on les qualifie d’ex- pédiens ; au parlement on les qualifie d’appointemens. Voyez DISPOSITIF € APPOINTEMENT. Voyez auffe Imbert ex fa pratique, liv. IL, chap. y. & les notes de Guenois, fur Le chapitre xüÿ, où il remarque que les expédiens pris entre les procureurs , ne peuvent être retraëtés par les parties , &cne font fujets à defayeu à moins qu'il n’y ait du dol. Voyez auf Bornier fur le tit, v]. de d'ordonnance de] 067, art, 4. E fuiv. (4) EXPEDIER , v. aû. (Jurifprud.) fignifie délivrer une grofle , expédition, /ou copie collationnée d’un aéte public & authentique. On expédié en la chan- cellerie de Rome des bulles & provifions , de même qu'en la grande & en la petite chancellerie on EXpÉ= die diverles lettres &! commiflions, Les greffiers ex- pédientdes grofes, expéditions , & copies des arrêts, fentences , & autres jugemens. Les commifaires : notaires , huifliers, expédiens chacun en droit foi les procès-verbaux & autres aétes qui font de leur mi- nitere, Voyez EXPÉDITION. (4 | | EXPÉDIER, faire une chofe avec diligence, On expedie des, affaires, quand on les termine prompte- ment : on expédie des perfonnes , quand on traite avec elles diligemment des affaires qu’on a avec elles. EXPÉDIER, fignifie quelquefois faire partir des mar- chandifes, On dit en ce fens expédier un voiturier , un vaifleau, un balot pour quelque ville. Diéionn. de Cormrmerce. 5 EXPEDITEURS , . m. (Commerce.) On nomme ainfi à Amfterdam.une forte de commiffionnaires , à qui les marchands qui font le commerce par terre avec les pays étrangers, comme l'Italie, le Piémont, Geneve, la Suifle , & plufeurs villes d'Allemagne, ont coûtume de s’adrefler pour y faire voiturer leurs marchandifes, | Les expéditeurs ont des voituriers qui ne charient que pour eux d’un lieu à un autre, & une cotrefpon- dance reglée avec d’autres expédireurs qui demeu- rent dans les villes par où les marchandifes doivent pafler , qui ont foin de les faire voiturer plus loin, & ainfi fucceflivement jufqu'au lieu de leur defts. nation. Lorfqu’un marchand a difpofé fa marchandife, if lénvoye chez fon expedireur avec un ordre figné de fa main, contenant à qui & où il doit l’envoyer. Les expéditeurs la font conduire par leurs gens , ont foin d’en faire la déclaration dans la derniere place de la U.o 290 E X P domination des Hollandois; & quelque tems après ils donnent au marchand un compte des frais de for- tie & de voiture, à quoi ils ajoütent un droit de com- miffion plus ou moins fort, fuivant l'éloignement des lieux. Ce droit eft ordinairement d’une demi riche- dale ou vingt-cinq fous par fchifpont de 300 livres, lorfque les marchandifes font pour Cologne, Franc- fort, Nuremberg, Leipfk, Breflaw, Brunfwik , & autres places à-peu-près également diftantes d’Amf- terdam; pour celles qui font plus éloignées, on en augmente la commiflion à proportion. C’eft auf à ces expéditeurs, que s’adreffent les né- gocians d’Amfterdam lorfqu'ils attendent des mar- chandifes de leurs correfpondans étrangers , & qu’- elles leur doivent venir par terre. Alors, en leur en donnant une note, ces expéditeurs ont foin d’en faire les déclarations, & d’en payer les droits d’entrée, ce qui épargne bien des lettres, des démarches, êe du tems aux commerçans. Diéhionn. de Comm. Trév. & Chambers, EXPÉDITION ROMAINE , (ZÆff.) Autrefois, lorfque les életeurs avoient élû un empereur, 1l étoit tenu, après avoir reçû la couronne impériale en Allemagne, d'aller encore fe faire couronner à Rome des mains du pape, & les états de l’Empire lui accordoient des fubfides pour ce voyage, qu'on appelloit expeditio romana ; les empereurs étoient par-là cenfés aller prendre poffeffion de la ville de Rome : mais depuis Charles-Quint , aucun empe- reur ne s’eft foûmis à cette inutile cérémonie, foyez l’article EMPEREUR € MOIS ROMAINS. (—) EXPÉDITION D'UN ACTE , (Jurifprud.) {e prend quelquefois pour la rédaétion qui en eft faite ; quel- quefois pour la grofle, ou autre copie qui eft tirée fur la minute. Lés greffiers & notaires diftinguent la groffe d’une fimple expédition ; la groffe eft en forme exécutoire ; l’expédirion eft de même tirée fur la nu- nute, mais elle a de moins la forme exécutoire, On diftingue l'expédition qui eft tirée fur la minute , de celle qui eft faite fur la groffe. La premiere fait une foi plus pleine du contenu en la minute : l’autre ne fait foi que du contenu en la groffe , & n’eft propre- ment qu'une copie collationnée fur la grofle. On peut lever plufeurs expéditions d’un même aëte, foit pour la même perfonne, ou pour Les diffé- rentes parties qui en ont befoin. Il y a eu un tems où l’on faifoit une différence en- tre une copie collationnée à la minute, d'avec une expédition tirée fur la minute ; parce que les expédi- tions péoprement dites, fe faifoient fur un papier dif- férent de celui qui fervoit aux copies collationnées. Maïs depuis que les notaires font obligés de fe fervir du même papier pour tous leurs aétes ; l’expédirion & la copie tirée fur la minute font la même chofe. Dans les pays où il n’y a point de groffe en for- fe, la premiere expédition en tient lieu ; & dans ces mêmes pays, il faut rapporter la premiere expédi- tion pour être colloquée dans un ordre: comme ail- leurs il faut rapporter la groffle. On diftingue en ce cas la premiere expédition de la feconde, ou autres fubféquentes. EXPÉDITION DE COUR DE ROME, voyez ci-après EXPÉDITIONNAIRES. (4) : EXPÉDITION, f. f. (Art milir.) eft la marche que fait une armée pour aller vers quelque lieu éloigné commettre des hoftilités. (Q) EXPÉDITION MARITIME , ( Marine.) fe dit d’une campagne des vaifleaux de guerre on marchands, foit pour quelque entreprile, oit pour le commerce, foit pour des découvertes. (Z) EXPÉDITION, (Comm.)s’entend fouvent chez les marchands, & fur-tout chez les banquiers , des let- tres qu’ils écrivent chaque ordinaire à leurs cortef- pondans. D’autres fe fervent du mot dépéches, Voyez "DÉPÊCHES. Dit. de Comm, EXPÉDITION, (Ecriture) on employe ce terme pour exprimer le ftyle le plus vif de l'écriture. Il y a cinq fortes d’expédtions ; la ronde ou grofle de pro- cureur ; la minute des procédures ou d’affaires ; la coulée panchée, liée de pié en tête , généralement fuivie de tout le monde; la coulée mêlée de ronde ; êc la bâtarde liée en tête feulement. Voyez des Plan- ches , Où vous trouverez des modeles de toutes ces fortes d'écriture. EXPÉDITIONNAIRES DE COUR DE ROME ET DES LÉGATIONS , (Jurifpr.) font des officiers établis en France pour {olliciter en cour de Rome, exclufivement à toutes autres pérfonnes, par l’en- tremife de leurs correfpondans, toutes les bulles, relcrits, proviñons, fignatures, difpenfes, & autres attes, pour lefquels les églifes, chapitres, commu- nautés, bénéficiers, & autres perfonnes, peuvent fe pourvoir à Rome ; foit que ces aétes s’expédient par confiftoire ou par voie fecrete, en la chambre apoñtolique , en la chancellerie romaine, & en la da- terie qui en dépend, ou en la pénitencerie, qui eft aufli un des offices de la cour de Rome. Ils ont auffi le droit excluñfde folliciter les mêmes expéditions dans la légation d'Avignon, & autres lé- gations qui peuvent être faites en France. On les appelloit autrefois banquiers - folliciteurs de cour de Rome ; on les a depuis appellé hanquiers-ex- péditionnaires de cour de Rome & des légations. La dé- claration du 30 Janvier 1675 , leur a donné le titre de confeillers du roi. On les appelle quelquefois pour abrèger , fimplement banquiers en cour de Rome. _ On diftingue par rapport à eux trois tems ou états différens ; favoir celui qui a précédé l’édit de 1550, appellé lédie des perites dates ; celui qui a fuivi cet édit , jufqu’à celui du mois de Mars 1673, par lequel ils ont été établis en titre d’office ; & le troifñieme tems eft celui qui a fuivi cet édit. D'abord pour ce qui eft du premier tems, c’eff- à-dire celui qui a précédé l’édit de 1550 , il faut obferver que tandis que les Romains étoient mai- tres des Gaules , il n’y avoit de correfpondance à Rome pour les affaires eccléfiaftiques ou temporel- les, que par le moyen des argentiers ou banquiers, appellés argentari, nummularit, & trapezite. La fonétion de ces argentiers ayant fini avec Pem- pire romain, des marchands d'Italie, trafiquant en France, leur fuccéderent pour la correfpondance à Rome. Mais ce ne fut que vers le douzieme fiecle, que les papes commencerent à ufer du droit qu’ils ont préfentement dans la collation des bénéfices de France. Les marchands italiens trafiquant en France, & qui avoient des correfpondances à Rome, étoient appellés Lombards, ou Caorfins , on Caourfns , Caorfini , Caturcini , Carvafini, & Corfini. Quelques-uns prétendent qu'ils furent nommés Caorfins , parce qu’ils vinrent s'établir à Cahors ville de Quercy, où étoit né le pape Jean XXIL.qui occu- poit le faint-fiége à Avignon depuis 1316 jufqu'en 1334: mais ce furnom de Cuor/ins étoit plus ancien, puifque S. Louis fit une ordonnance en 1268, pour chafler de fes états tous ces Caorfins & Lombards , à caufe des ufures énormes qu’ils commettoient. D’autres .croyent que ce fut une famille de Flo- rence appellée Caor/ina , qui leur donna ce nom. Maisil eff plus probable que ces Caourfins étoient de Caours ville de Piémont, & que l’on a pù quel- quefois appeller de ce nom finguher tous les Italiens &c les Lombards qui faïfoient commerce en France.» En effet on les appelloit plus communément Lom- bards , Italiens, & Ultramontains. | Du tems des guerres civiles d'Italie , les Guel phes qui fe retirerent à Avignon & dans Le pays d’o- E X P bédience , étañt favorifés des papes dont äls avoïent | foütenu le parti , fe mêlerent de faire obtenir les graces & expéditions de cour de Rome ; on les ap- pella mercatores € fcambiatores domini pape , comme le témoigne Mattlueu Paris, lequel vivoit vers le milieu du treizieme fiecle: ce fut-là l’origine des banquiers-expéditionnaires de cour de Rome , qui fu- rent depuis appellés 2aflitores bullarum & negoriorum ZTILDETLL TONI Dans ce premier tems , ceux qui fe mêloient en France de faire obtenir les graces & expéditions de cour de Rome , étoient de fimples banquiers qui n’a- voient aucun caraétere particulier pour folliciter les expéditions de cour de Rome; ils n’avoient point ferment à juftice , d’où il arrivoit de grands incon- véniens. Les abus qui fe commettoient pat ées banquiers &t à la daterie de Rome touchant la réfignation des bénéfices, étoient portés à tel point que le clergé s’en plaignit hautement. Ce fur à cette occafñon qu'Henri Il. donna au mois de Juin 1550 , l’édit appellé communément des petites dates , parce qu'il fut fait pour en réprimer Pabus. M. Charles Dumolin a fait fur cet édit un favant commentaire. Cet édit ordonna entre autres _chofes, que les banquiers & autres qui s’entremet- toient dans le royaume des expéditions qui fe font en cour de Rome & à la légation, feroient tenus dans un mois après la publication de cet édit , de faire ferment pardevant les juges ordinaires du lieu de leur demeure , de bien & loyalement exercer ledit état; & défenfes furent faites à tous eccléfiaf- _ tiques de s’entremettre de cet état de banquier 6 sxpéditionnaire de cour de Rome , ou légation. On re- garde communément cet édit comme une loi qui a commence à former la compagnie des barquiers-ex- péditionnaires de cour de Rome. Ceux qui étoient ainf reçûs par le juge, ne pre- noient encore alors d’autre titre que celui de bax- quiers ; & comme ils étoient immatriculés, on les furnomma dans la fuite matriculaires , pour les dif- tinguer de ceux qui furent établis quelque tems après par commiflion du roi, & de ceux qui furent créés en titre d'office. . Les démêlés qu'Henri II. eut avec la cour de Ro- me, donnerent lieu à une déclaration du 3 Septem- bre 1551, regiftrée le 7 du même mois, portant dé- fenfes à toutes perfonnes , banquiers & autres, d’en- voyer à Rome aucun courier pour y faire tenir or & argent, pour obtenir des provifions de bénéfices, & autres expéditions. Cette défenfe dura environ quin- ze mois. Pendant ce tems, les évêques donnoient des provifons des abbayes de leur diocefe , fur la nomination du roi. Henri II. donna un autre édit le premier Février 1553, qui fut regiftré le 15 du même mois, portant défenfes à toutes perfonnes de faire l'office de han quier-expéditionnaire en cour de Rome fans la permif- ion du roi, C’eft la premiere fois que l’on trouve ces banquiers qualifñiés d’expéditionnaire en cour de Rome, Au refte , il paroït que cet édit n’eut pas alors d'exécution par rapport à la nécefité d'obtenir la permihion du roi, & que les banquiers matriculai- - xes recûs par les juges ordinaires , continuerent feuls alors à folliciter toutes expéditions en cour de Rome, Le nombre de ces banquiers matriculaires n’étoit fixé par aucun reglement ; 1l dépendoit des juges d’en recevoir autant qu'ils jugeoient à-propos, & ces banquiers étoient tous égaux en fonétion, c’eft-à- dire qu'il étoit libre de s’adrefler à tel d’entre eux que l’on vouloit pour quelque expédition que ce fût. Au commencement du dix-feptieme fiecle, quel- ques perfonnes firent diverfes tentatives, tendantes à reftraindre cette liberté , & à attribuer à certains Tome VI, E X P 291 banquiers; éxclufivement aux autres, lé droit de folliciter feuls les expéditions des bénéfices de no- mination royale, | La premiere de ces tentatives fut faite en 1607 par Etienne Guefñer,, Lequel fat commis & député à la charge de banquier-folliciteur, fous l’autorité des ambafladeurs du roi en la cour de Rome, pour ex- pédier lui feul les affaires confifloriales & matieres bénéficiales de la nomination & patronage du roi, fans qu'aucun autre s’en püt entremettre, &c pour jouir de tous les droits & émolumens que l’on a coù- tume de payer pour telles expéditions. Les banquiers & folliciteurs d’expéditions de cour de Rome , demeurans tant ès villes de France que téfidans en cour de Rome, fe pourvürent au conteil du roi, en révocation du brevet accordé au feur Guefier; les agens généraux du clergé de France intervinrent , &c fe joignirent aux banquiers; & fur le tout il y eut arrêt du confeil le 22 Oétobre 1609, par lequel le roi permit à tous fes fujets de s’adrefler à tels banquiers & folliciteursque bon leur fembleroit, comme 1l s’étoit pratiqué jufqu’alors, nonobftant le brevet du fieur Gueffier, qui futrevoqué & annulé ; & le roi enjoignit à fes ambaffadeurs en cour de Ro: me, de faire garder en toutes expéditions de France en cour de Rome l’ancienne liberté & regles pref- crites par les ordonnances. Il y eut une tentative à-peu-près femblable, faite en 1615 par un fieur Efchinard , qui obtint un bre- vet du roi pour être employé feul, fous l'autorité des ambafladeurs de France réfidans à Rome, aux expéditions de toutes matieres qui fe traiteroient en cour de Rome pour le fervice du roi , avec qualité d’expédirionnaire du roi en cour de Rome, {ans néan- moins préjudicier à la liberté des autres expédition zaires , en ce quu regardoit les expéditions des autres fujets du roi. Les banquiers & follicitenrs de cour de Rome de toutes les villes de France & les agens généraux du clergé, ayant encore demandé la revocation de ce brevet , 1l fut ordonné par arrêt du confeil du 2$ Janvier 1617 qu'il feroit rapporté, & qu'il feroit li- bre de s’adreffer à tel banquier que l’on voudroit pour toutes fortes d’expéditions. Enfin par un autre arrêt du confeil du 30 des mé- mes mois & an, il fut défendu d'exécuter de préten- dus ftatuts ou reglemens, faits par l’ambaffadeur de France à Rome le premier Novembre 16 14, de l’au- torité qu'il difoit avoir du roi. Ce reglement conte- noit l’établiffement d’un certain nombre de ban- quiers pour la follicitation des expéditions pourfui- vies par les fujets du roi, & plufeurs autres chofes contraires à la liberté des expéditions, & fingulie- rement à l’arrêt de 1609 dont l'exécution fut erdon- née par celui-ci, & en conféquence qu'il feroit libre de s’adrefler à tel banquier que l’on jugeroit à-pro- pos. L’établiffement des harquiers - expédirionnaires en titre d'office, fut d’abord tenté par un édit du 22 Avril 1633, portant création de huit offices de #an- qguiers-expéditionnaires en cour de Rome dans la ville de Paris; de quatre en chacune des villes de T'ouloufe & de Lyon ; & de trois en chacune des villes de Bor- deaux, d’Aix, de Rouen, Dijon, Rennes, Greno- ble , & Metz. Cet édit fut publié au fceau le 22 Juin de la même anfiée : mais fur la requête que les agens généraux du clergé préfenterent au roile 25 du même mois de Juin , il intervint arrêt du confeil le 10 Dé- cembre fuivant, par lequel il fut furfis à l'exécution de cetédit. | _ Le nombre des banquiers matriculaires s'étant trop multiplié, tant à Paris que dans les autres villes du royaume, Louis XILL. par fon édit du mois de Novembre 1637, portant reglement pour le con: Oo 292 E X P trôle des bénéfices, ordonna (art, 2.) qu'avenant vacation des charges & commiffions des banquiers- {olliciteurs d’expéditions de cour de Rome & de la légation , par la démiffion ou le décès de ceux qui exerçoient alors lefdites charges , en vertu des com- miffions à eux oétroyées par les juges royaux, ils fe- roient éteints & fupprimésjufqu'à ce qu'ils fuflent ré- duits au nombre de quarante - fix; favoir douze en la ville de Paris , cinq en celle de Lyon, quatre à Touloufe & autant à Bordeaux, & deux en chacune des villes de Rouen, Rennes, Aix, Grenoble, Di- jon, Metz, & Pau. Ceux qui exerçoient alors ladite charge de ban- quier dans les autres villes, furent fupprimés. Défenfes furent faites à tous juges & officiers royaux de donner dorénavant aucune commiffon, ni de recevoir aucune perfonne à l'exercice de ladite charge de banquier, à peine de nullité. Il fut aufli ordonné par le même édit, que quand les banquiers des villes dans lefquelles on en avoit confervé feroient réduits au nombre fpécifié par lé- dit, il feroit pourvû par le roi aux places qui de- viendroïient enfuite vacantes, par des commufhions qui feroient données gratuitement. Cet édit fut regiftré au grand-confeil Le 7 Septem- bre 1638; mais il ne le fut au parlement que le 2 Août 1649, lorfqu’on y apporta la déclaration du mois d’Oétobre 1646, qui y fut regiftrée fur lettres de furannation avec l’édit de 1637, pour les articles qui ne font pas revoqués par la déclaration de 1646. Cette déclaration contient plufieurs difpofitions par rapport aux banquiers en cout de Rome ; mais elle ne fait point mention de la légation: ce qui pa- roit n'être qu'un oubli , les reglemens poftérieurs ayant tous compris la légation aufli bien que la cour de Rome. L'article 2. veut que les banquiers-expéditionnaires puiflent exercer leurs charges , ainfi qu'ils le pou- voient faire avant l’édit du contrôle, nonobftant les reglemens portés par icelui, & conformément à ce qui eft contenu en la déclaration. L’édit du 22 Avril 1633, qui avoit le premier or- donné la création d’un certain nombre de barzquiers- expéditionnaires en titre d’oflice , n’ayant point eu d'exécution, on revint fur ce projet en 1655 ; & il paroït qu'il y eut à ce fujet deux édits, fous deux datés du mois de Mars de ladite année. L'un de ces édits portoit création de douze offi- ces de barquiers-expéditionnaires de cour de Rome dans la ville de Paris : cet édit eft rapporté par de Chales, en fon diétionnaire; il paroît néanmoins qu’il n’eut pas lièu; on ne voit même pas qu’il ait été enregi- ftré. ’ L'autre édit daté du même tems, & qui fut regi- ftré au parlement le 20 du même mois, portoit créa- tion de douze offices de Parquiers royaux expédirion- naires en cour de Rome pour tout le royaume, aux- quels on attribua le pouvoir de faire expédier en cour de Rome les bulles & provifons de tous les bénéfices qui font à la nomination du roi, comme archevêchés, évêchés, abbayes, prieurés conven- tuels, dignités, penfons fans caufe ; avec défenfes aux autres banquiers de fe charger direétement ou indireétement de l’envoi en cour de Rome d’aucu- nes lettres de nomination, démiffion, profeffion de foi, procès-verbaux, & autres procès fervant à ob- tenir des provifñons &c bulles, fur peine de nullité, interdiction de leurs charges, & 4000 liv. d’amen- de. L’édit déclaroit nulles toutes les provifions de bénéfices &c bulles, au dos defquelles le certificat de Pun de ces douze banquiers ne fe trouveroit pas ap- pofé, & les bénéfices impétrables; avec défentes aux juges d’y avoir aucun égard, & aux notaires & {er- gens de mettre les impétrans de ces bulles en poflef- fion des bénéfices, à peine d'interdidion & de nulli: té defdites poffeffions., Enfinilétoit enjoint aux fecré- taires des commandemens de fa majefté, d’inférer dans les brevets & lettres de nomination aux bénéf- ces qui s’expédieroient, la claufe que les impétrans feroient expédier leurs bulles & provifions par l’un des banquiers créés par cet édit. Il y eut encore un autre édit du mois de Janvier 1663 , portant création de barquiers-expéditionnaires en cour de Rome € de la légation : cet édit eft rappellé dans celui du mois de Décembre 1689, dont on par- lera ci-après. Mais 1l paroît que toutes ces différentes créations de Banguiers-expéditionnaires en titre d'office, n°eu- rent pas lieu ; la fonétion de harquier-expéditionnaire de cour de Rome étoit alors remplie par des avocats au parlement, faifant la profefion & étant fur le tableau. Ce ne fut que depuis l'édit du mois de Mars 1673, qu'il y en eut un entitre d'office; & c’eft ici que com- mence le troïfieme tems ou état que l’on a diftingué par rapport aux Panquiers. expédirionnaires. Cet édit fut regiitré dans Les diférens parlemens. Le préambule porte entre autres chofes, que les abus qui fe commettoient journellement dans les ex= péditions concernant l'obtention des fignatures, bul« les, & provifions de bénéfices, &c autres aétes apof- toliques qui s’expédioient pour les fujets du roi en la cour de Rome & légation d'Avignon, étoient mon- tés à tel point, que l’on avoit vû débiter publique- ment plufeurs écrits de cour de Rome faux & alté- rés, & fort fouvent des difpenfes de mariage fauf- {es ; ce qui avoit caufé de grands procès, même trou- blé le repos des confciences, & renverfé entiere- ment l’état & la sûreté des familles : qu'ayant trouvé. que ce defordre provenoit de ce que plufieurs par- ticulhiers, fous prétexte de matricules obtenues des: juges &c officiers royaux, même des perfonnes fans qualité n1 caraétere , s’étoient ingérés de faire cette fonétion qui s'étend aux affaires les plus importan- tes du royaume, & pour leurs peines , falaïres, &z Vacations, exigeoient impunément tels droits que bon leur fembloit ; que pour y apporter remede , il avoir été créé en titre d'office des barquiers-expédi= tonnaires de cour de Rome par édit du mois de Mars 1655 , fuivant lequel il devoit y en avoir douze à Paris ; mais que cet édit n’avoit pas été exécuté, ce nombre n'étant pas fufifant. En conféquence , par cet édit de 1673 il fut créé en titre d'office formé & héréditaire un certain nom- bre de banquiers-expéditionnaires de cour de Rome 6 de: la légation ; favoir pour Paris vingt; pour chacune des autres villes où 1l ya parlement , & pour celle de Lyon, quatre , & deux pour chacune des autres vil- les où 1l y a préfidial. L’édit leur donne le droit de folliciter feuls & à l’exclufon de tous autres , & fai: re expédier à leur diligence, par leurs correfpon- dans, toutes fortes de refcrits, fignatures, bulles: & provifñons, & généralement tous aétes concer- nans les bénéfices & autres matieres pour tous les fujets du roi gx font de la jurifditlion fpirituelle de la cour de Rome & de la légation. Cette reftriétion fut mile alors, parce que cet édit fut donné avant la révocation de celui de Nantes, tems auquel les Re- ligionnaires étoient tolérés dans le royaume. | L’expédition des aétes dont on vient de parler, eft attribuée aux harquiers-expéditionnaires , de quel- que qualité que puiffent être ces aétes , & de quelque maniere qu'il foit beloin de les expédier, foit en chambre (c’eft-à-dire apoftolique) , ou en chancel- lerie, par voie fecrete, ou autrement. | L'édit défend à tous matriculaires, commiffion- naires, & autres, de fe charger à l'avenir direéte= ment où indireétement d'aucun envei en cour de: Ce Rome & en la lépation, & de s’entremettre de folh- citer lefdites expéditions, à peine de punition exem- plaire ; même à tous particuliers de le fervir du mi- mitere d’autres banquiers que ceux qui furent alors créés, à peine de 1000 liv. d'amende pour chaque contravention; & tous refcrits & aûtes apoftoliques qui auroient été obtenus après le 15 Mai fuivant, furent déclarés nuls, avec défenfes à tous juges d'y avoir égard, mi de reconnoitré d’autres banquiers que ceux créés par cet édit, à peine de defobéiflance. Ces nouveaux offices furent d’abord exercés par ‘commiflion , fuivant un arrêt du confeil du 29 Avril de la même année, portant qu’il y feroit commis en attendant la vente, favoir trois en la ville de Paris, deux à Lyon, & deux à Touloufe; enforte qu'il y avoit alors deux fortes de harquiers-expéditionnaires les uns matriculaires., c’eft-à-dire qui avoient eu un matricule du juge ; les autres, commiflionnaires qui - avoient une commiflion du roi pour exercer un des nouveaux offices. , Un arrêt du confeil du 29 Septembre 1674, défen: dit aux banquiers matriculaires & commiflionnai- tes, & autres perfonnes de la province de Bretagne, de fe charger d’expéditions pour aucuns bénéfices, ou perfonnes hots de cette province. | ; Il y eut encore le 11 Novembre fuivant un arrêt , du confeil, qui ordonna lexécution de l’édit du mois de Mars 1673, & de la déclaration du mois d'Oûto- bre 1646. 44 .. Le nombre des Panquiers -expéditionnaires | créés par l'édit du mois de Mars 1673, fut réduit par une déclaration du 30 Janvier 167$, à douze pour Paris, trois pour chacune des villes de Touloufe &z de Bor- deaux, deux à Rouen, Aix, Grenoble, Dijon, Metz & Pau, & quatre à Lyon. Cette même déclaration leur attribue le titre de con/éillers du roi banquiers-ex- Péditionnaires de cour de Rome € de la légation. , L’édit du mois de Décembre 1689, rétablit & créa huit offices héréditaires d’expédirionnaires de cour de Rome 6 des légations dans la ville de Paris, un à Touloufe, deux à Rouen, Metz, Grenoble, Aix, Dion, & Pau, pour faire, avec les anciens établis dans lefdites villes, un feul & même corps dans chacune des villes de leur établiflement , aux mêmes honneurs, privilèges, prérogatives, droits de commitiimus , franc -falé dont jouifloient les an- ciens, &t à eux attribués par l’édit de création du mois de Janvier 1663, & la déclaration du mois de Janvier 1675. | Par un autre édit du mois de Janvier 1690, on fup- prima les huit offices de conféillers-banquiers-expédi- tionnaires de cour de Rome 6: des légations , créés par édit de Mars 1679, fupprimés par la déclaration du 30 Janvier 1675, & rétablis par édit du mois de Décembre 1689, pour fervir en la ville de Paris ; & les fonétions , honneurs, droits, priviléges, & émo- lumens attribués à ces huit offices, furent umis aux douze offices confervés, ayec confirmation de leurs droits & privilèges ; le tout moyennant finance. Ces huit offices fupprimés en 1690 , furent réta- blis par édit du mois de Septembre 1691, pour faire avec les douze anciens le nombre de vingt , aux mé- mes honneurs, droits, &c privilèges attribués par les précédens édits. L’édit du mois d'Août 1712 porte, entre autres Chofes, création d’un office de banquiers -expédition- naire thréforier de la bourfe commune , par augmenta- tion dans ladite communauté ; mais la compagnie ayant acquis en commun cet office , fait exercer la fonétion de thréforier par celui de fes membres , qui eft choïfi à cet effet: au moyen de quoi il n'y a pré- fentement à Paris que vingt banquiers-expéditionnaires, . Pour ce qui éft des offices femblables qui avoient été créés dans plufieurs villes des provinces, les #a7- L E XP 292 quirS-expéditionnaires de Paris #1 aÿant acquis en commun la plus grande partie, la déclaration du œ Oétobre 1712 leur donna un délai pour commettre à ces offices ; en attendant ils ont commis à l’exer- cice des perfonnes capables, réfidantes dans les vil- les pour lefquelles ces offices avoient été créés, Par la déclaration du 3 Août 1718, le toi dit qu'ayant reté informé que les harquiers-expédirionnaires de Pa- ris Ont grande attention de ne commettre À lexer- cice de ces offices de arquiers-expédirionnaires qui leur appartiennent dans les provinces, que de bons fujets & capables d’en bien remplir les fon@ions, il proroge de fix années le délai qui leur avoit été ac- cordé par la déclaration du 9 O&tobre 1712, pour commettre à ces offices de province ; & depuis ce tems ce délai a été prorogé de fix années en fix are nées jufqu'à préfent. Pour être reçu banguier-expéditionnaire en cour de Rome, il faut: 1°, Être Agé de 25 ans, fuivant l’édit de Noyem- bre 1637, arr, 11. & la déclaration du mois d’Odo- bre 1646, art, 10. | 2°. Les mêmes articles veulent auf qu’ils foient . perfonnes laïques , non officiers, ni domeftiques d’aus cuns eccléfiaftiques ; l’édit du mois de Juin 1551, avoit déjà défendu à tous eccléfaftiques de s’entre- mettre dans cet état. 3° - Suivant l’are, 33. des ftatuts de 1678, & de 1699, il faut être reçu avocat dans un parlement. 4°. I] leur étoit auffi défendu par l'ars. 11. de l'éa dit de 1637, de pofléder ni exercer conjointement deux charges de contrôleur , banquier & notaires même le pere & le fils, oncle, gendre & neveu , deux freres, beaux-freres, où coufins-germains , tenir & exercer en même tems lefdites charges de contrô- leur , banquier & notaire , comme auf qu'aucun banquier ne fe chargera en même tems des procura- tions & autres altes , pour envoyer en cour de Ro- me ou à la légation , fi le notaire qui auroit recu lef dits aëtes, où l’un d’iceux étoit fon pere, fils, frere, beau-frere , gendre , oncle, neveu, ou coufin-per= main, Gc. . Mais cette difpofition fut modifiée lors de l’enre= giftrement au grand - confeil, qui reftraint ces dé- fenfes aux parens des contrôleurs & banquiers feu= lement, & non des notaires ; & à l’égard des aûes reçus par des notaires, parens des banquiers, l'arrêt d’enregiftrement ordonne que cette défenfe n’aura pas lieu. Enfin la déclaration de 1646 , arr. 2. ayant ordon- né que les banquiers - expéditionnaires feroient leurs fonétions avec la même liberté qu'ils ayoient avant l’édit du contrôleur ; on en doit encore conclure que les incompatibilités, dont on a parlé, n’ont plus lieu, nu les défenfes faites par rapport aux actes recus pat les notaires parens des barquiers-expéditionnaires. d Les offices de hanquiers -expédirionnaires {ont {eue lement incompatibles avec les charges de greffier des infinuations eccléfiaftiques , & de notaire apoftoli- que ; du refte, elles font compatibles avec toutes au- tres charges honorables. | 5. L'article 2. de l’édit de 1637, & l’arr, 10. dela déclaration dé 1646, veulent que ceux qui fe pré- fentent pour être reçus, ayent été clercs ou commis de banquiers de France pendant l’efpace de cinqans, ou de cour de Rome pendant l’efpace de trois ans > dont ils feront tenus de rapporter des certificats » qu'autrement leurs réceptions feront déclarées nul- les, &'qu'l leur eft défendu de faire expédier aucu-. nes proviñons , à peine de 2000 liv. d’amende , &c. tous dépens, dommages & intérêts des parties; mais ces difpoftions ne s'obfervent plus, n'ayant point été rappellées par l’édit du mois de Mars 1673 , qui, | a créé les hanquiers-éxpéditionnaires en titre d'office, & fixé leur capacité 294 EXP 6°. L’arricle 2. de l’édit de 1637 ,'ordonnoït qu’on ne recüt que ceux qui feroient trouvés Capables , après avoir été examinés par les barguiers , qui fe- roient commis par le chancelier : cet examen fe fait ‘préfentement par toute la.compagnie des fanquiers- expéditionnaires , qui donne au récipiendaire un cer- tificat fur {a capacité, & un confentement fur fa ré- ception, fuivant l'ersicle 33. des ftatuts de 1678 & 1609. | 7°. Le même art. &le 10.de la déclaration de 1646, ordonnoient encore que ceux qui feroient reçus, -donneroient caution & certificateurs {olvables dela fomme de 3000 liv. devant les baïllifs 8 fénéchaux du lieu de leur réfidence ; ce qui ne s’obferve. plus 8°. Enfin ils doivent prêter ferment devant les baïllifs & fénéchaux du lieu, fuivant l'arc, 2. de l’é- dit de 1637; l’édit du mois de Juin 1550, vouloit que ceux qui exerçoient alors, fiflent dans un mois ferment devant les juges ordinaires du lieu de leur demeure, de bien & loyaument exercer ledit état ; de faire loyal regiftre , & même ferment 3 quincon- tinent qu'ils aurotent reçu les procurations pour fai- re expédier , ils prendroient la date d’icelles & les noms des notaires, témoins infcrits, & le lieu de la confeétien de ces procurations , &c. Il eft défendu à toutes autres perfonnes fans ca- raétere, de s’immufcer en la fonétion de barquier-ex- péditionnaire , foit par eux ou par perfonnes interpo- fées, de procurer ou folliciter les expéditions de cour de Rome , & aux parties d’y employer autres que les banquiers , à peine de faux , & aux juges d’avoir aucun égard à celles qui n’auront pas été expédiées à la diligence & follicitation defdits banquiers , & qui n'auront pas été par eux cotées & enreaiftrées , comme il eft ordonné , lefquelles expéditions font &clarées nulles, & les bénéfices obtenus furicelles, impétrables : c’eft la difpofition exprefle de l’arz, 12. de l’édit de 1637. ‘T1 éft cependant permis par le même article , à ceux qui voudront envoyer exprès en cour de Rome ;, êx y employer leurs amis qui y font réfidens , de le fai- re, pour vü que les pieces , fujetes au contrôle, ayent été contrôlées , &c toutes pieces, mémoires & expé- ditions entegiftrées & cotées par l’un des 2arquiers de France , chacun en fon département. L'article 7. de la déclaration de 1646, ajoûte une condition, qui eft que les procurations ad re/ignan- dum , & autres aêtes, pour envoyer en cour de Ro- me , foient enregiitrés au greffe des infinuations , &c que les fignatures apoftoliques | ainfi obtenues , foient enfuite vérifiées & reconnues par des hen- quiers ; ou autres perfonnes dignes de foi à ce con- noïflans , devant un juge royal , & qu’elles foient regiftrées èfdits regiftres. L'article 2. de la déclaration du 3 Août 1718, qui forme à cet égard le dermier état , porte que le roi n’éntend point empêcher les parties de dépêcher à Rome ou à Avignon , des couriers extraordinaires , ou d’y aller elles-mêmes, pour retention de dates &c expéditions de bulles & fignature , en chargeant néanmoins , avant le départ du courier, le regiftre d’un banquier-expéditionnaire, de l'envoi qui fera fait ; lequel envoi contiendra fommairement les noms de limpétrant, du bénéfice & du diocèfe, le genre de vacance , le nom du courier , & l’heure de fon dé- part ; 6e fi c’eft la partie elle-même qui fait la cour- fe, il en doit être fait mention ; le tout , à peine de nullité. | L'article fuivant porte encore que S. M. n’entend pas non plus empêcher les parties, préfentes en cour de Rome ou dans la ville d'Avignon, de faire expé- dier en leur faveur toutes bulles , refcrits, & autres _graces, qui leur feront accordées, à la charge par fefdites parties, de les faire vérifier & certifier véri- tables par deux defdits angaiers -expédirionnaires à avant l'obtention des lettres d'attache, dans les cas où 1l eft néceflaire d’en obtenir, & avant de les faire fukminer ; le tout, à peine de nullité. Il eft néanmoins défendu par l’ars. 4, aux parties, ptéfentes en cour de Rome ou dans la ville d’A- vignon, de faire expédier fur vacance par mort, au- cunes proyifions en leur faveur, des bénéfices fitués dans les provinces du royaume, fujettes à la préven- tion du pape & des légations, à moins qu'il n’appa- roifle de l'avis donné auxdites parties, de la vacan- ce des bénéfices par le regiftre de l’un defdits 4zz- guiers,quien aura été préalablement chargé ; le tout, à peine de nullité, L’ambañadeur de France à Rome , avoit fait le premier Novembre 1614, de prétendus ftatuts où reglemens, pour les banquiers -expéditionnaires, {ui- vant l'autorité qu’il difoit en avoir du roi ; mais par arrêt du confeil du 30 Janvier 1617, il fut défendu de les exécuter, comme contenant plufieurs chofes : contraires à la liberté des expéditions, & fingulie- rement à l'arrêt de 1609 , dont on a déjà parlé. Les banquiers-expédirionnaires dreflerent aufli eux- mêmes en 1624 d’autres ftatuts, pour la difcipline de leur compagnie , & obtinrent au mois de Février de la même année des lettres patentes, portant confr- mation de ces ftatuts , adreflées au parlement, où ils en demanderent l’enrepiftrement ; mais les notaï- res apoftoliques y ayant formé oppoñtion en 1626, il intervint un arrêt de reglement entre eux, le 10 Février 1629 , fur produétions refpeltives & fur les conclufions du miniftere public, par lequel , fans s'arrêter aux lettres patentes du mois de Février 1624, & aux ftatuts attachés fous le contre-fcel def. dites lettres , ni à l’oppoñition formée par les notai- res apoftoliques à lenregiftrement de ces lettres , les parties furent mifes hors de cour : l’arrêt contient néanmoins plufieurs difpofitions de reglemens pour les notaires apoftoliques & pour les Eanquiers ; maïs comme il ne fait, à l'égard de ces derniers, que rap- peller les difpofitions de l’édit de 1550, il eft inutile de les rapporter d’après cet arrêt. Depuis ce tems , la compagnie des banquiers em cour de Rome a obtenu le $ Mars 1678 un arrêt du confeil, portant omologation de ftatuts, compofés de 34 articles, en date du 29 Janvier précédent ; il y a encore d’autres ftatuts du 15 Mai 1699 , compo- 1és de 44 articles |, omologués par un arrêt du con- feil du 21 Août fuivant ; & par un autre arrêt du confeil du 3 Juillet 1703 , il leur a encore été don- né de nouveaux ftatuts & reglemens en 2r articles, pour fervir de fupplément aux anciens. . Les fonéions & droits des banquiers-expédirion- | raires Ont encore été reglés par divers édits, décla- rations , lettres patentes , & arrêts de reglemens, dont on va faire l’analyfe. D'abord, pour ce qui eft de leurs regiftres, l’édi- du mois de Juin 1550 leur ordonne de faire bonéz loyal regiftre de la date des procurations pour faire expédier , des noms des notaires & témoins infcrits, & le lieu de la confe&ion , enfemble du jour qu'ils auront envoyé ces procurations à Rome ou à la lé- gation ; qu'ils feront aufli ténus de figner au-deffous chaque expédition qu'ils feront & enregifireront, afin que les parties en puiffent prendre des extraits 3 que les banquiers enregiftrerontle jour & l’heure que: les couriers partiront pour faire expéditions à Ro= me ou à la légation; il eft auffi enjoint aux hazquiers d’enregiftrer la réponfe qu'ils auront eue de leurs {olliciteurs en cour de Rome, aufñi-tôt qu’ils l’auront reçue, où du moins lorfqw’ils recevront les fignatu- res & bulles des expéditions , & que faute de cé, il: n’y fera ajoûté aucune foi : l’édit prononce auff des peines contre ceux qui auront falfifié les resiftres. dés bangniers, L'orsicle 3. de l’édit de 1637, leur ordonne pareil- Jement de faire bon & loyal regiftre , qui contienne au moins. 300 feuilles, & avant d’y écrire aucun aëte d’expéditions apoftoliques, de le préfenter à l’arche- vêque ou évêque diocéfain, ou à fon vicaire ou of- ficial, ou au lieutenant généralde la fénéchauflée ou bailliage du lieu, lefquels feront coter de nombre tous les feuillets du regiftre, parapheront & feront parapher chaque feuillet par leur greffier, & figne- ront avec eux l’aéte qui fera écrit à la fin du dermier feuillet, contenant le nombre des feuillets du regif- tre, le jour qu'il aura été paraphé, & quel quantie- me eft Le regiftre ; le tout à peine de faux contre les banquiers, de 3000 lv. d’amende, & de tous domma- ges & intérêts des parties : lufage eft préfentement de faire parapher ces regiftres par le lieutenant gé- néral. L'article 6 de la déclaration de 1646, porte qu'au défaut du lieutenant général du bailliage ou fé- néchauflée , on s’adreffera au juge royal en chef plus prochain du heu. , Suivant l’article 4 du même édit de 1637, & l'ar- zicle $ de la déclaration de 1646, les banquiers-expé- ditionnaires doivent écrire en l’une des pages de cha- que feuillet de leur regiftre le jour de l'envoi, avec articles cotés de nombres continus, qui contiendront en fommaire la fubftance de chaque aéte bénéficiai- re, & de toute autre commiflion pour expéditions apoftoliques, bénéficiales, &c autres, dont 1ls feront chargés, le jour & le lieu de la confeétion de l’aéte , du contrôle & enregiftrement d’icelui, les noms des parties , notaires , témoins , contrôleurs, & commet- tans ; & enfuite des jours d'envoi, le jour de l’arri- vée du courier ordinaire & extraordinaire ; & en Pautre page, vis-à-vis de chaque article, ils doivent pareillement écrire le jour de réception , la date, le quantieme livre & feuillet du regiftrata de l’expédi- tion, avec le jour du conféns, fi aucun y a, &c le nom du notaire qui l'aura étendu, ou la fubftance fom- maire du refus ou empêchement de l'expédition; 1ls doivent auf coter chaque expédition apoftolique de leur nom & réfidence, du #°.de l’article de commif- fion d'icelle, du nom de leur correfpondant, & du jour qu'ils lauront délivrée, le figner ou faire figner par leur commis ; & en cas de refus en cour de Rome ou empêchement, les banquiers {feront obligés d’en délivrer aux parties certificat ; le tout fous pareille peine de 6000 l. d’amende , &c de tous dépens , dom- mages &c intérêts des parties. L’amende a depuis êté réduite à 3000 liv. par l’ersicle 7 de la déclaration de 1646. Le furplus de l’ersice eft encore obfervé. L'article 6 du même édit de 1637, défend aux banquiers-expéditionnaires d’avoir plus d’un regiftre , ni d’enregiftrer aucun aéte d'expédition apoftolique furun nouveau resiftre, que le précédent ne foit en- tierement rempli, à peine de punition corporelle contre les banquiers, privation de leurs charges, 6000 liv. d'amende, dépens, dommages &c intérêts des parties. Il leur eft enjoint de repréfenter leurs re- giftres aux archevêques & évêques de leur réfiden- ce, -8r au procureur général du grand-confeil, tant à Paris, qu’en tous autres lieux où ledit confeil tien- dra fa {éance ; à tous les autres procureurs généraux du roi, & à leur fubititut en la ville de Lyon, lor{- qu'ils en feront par eux requis , pour voir s'ils y ont gardé la forme prefcrite par cet édit, fansnéanmoins “que fous ce prétexte ils puiffent être défaifis de leur répiftre. | On peut, en vertu de lettres de compulfoire & ar- rêt rendu fur icelles , compulfer les regiitres des /an- quiers en cour de Rome, comme il fut jugé par un ar- rêt rendu en la grand’chambre le 10 Février 1745, rapporté dans le XII. rome des mémoires du clergé, : On peut encore fur la forme en laquelle doivent être ces regifires, voir l'ordonnance de M. le lieute- nant civil du 31 Janvier 1689. E X P 295 Voilà pour ce qui concerne les regiflres des ban guiers-expéditionnaires, Pour ce qui eft des autres réglemens qui concer- nent leurs fonétions , l’édit du mois de Juin 1550 ordonne que les bazquiers , en délivrant les expédi- tions par eux faites, feront tenus de mettre & écrire leurs noms & demeures, à peine d’être privés pour toùjours de l’exercice dudit état de banquier dans le royaume, d'amende arbitraire, & dommages & in- térêts des parties. Ce même édit déclare que fi les arguiers contre- viennent à ces difpofitions, ou faifoient faute autre- ment en leur charge & regiftre, il feroit procédé con- tre eux par emprifonnement de leur perfonne, juf- qu'à pleine fatisfattion des dommages & intérêts des parties, & de punition corporelle , s’il y échet, avec défenfe à tous eccléfaftiques de s’entre-mettre de cet état de banquier , & expéditions de cour de Rome ou légation. . L’édit de 1637, arr. 13. & la déclaration de 1646, art, 11. défendent aux banquiers de fe charger à mê- me jour d'envoi pour diverfes perfonnes de Pexpé- dition d’un même bénéfice, foit par même où divers genres de vacance ; & il leur eft enjoint de faire fi- gner leur commettant en leur regiitre, s'il eft pré- {ent, article de la commuiflion par lui donnée pour le fait des bénéfices, s’il fait figner, finon qu'ils fe- ront mention qu'il a déclaré ne favoir figner. Cette premiere partie de l’article ne s’obferve plus; lar- ticle ajoûte que s'ils ont été chargés par des perfon- nes abfentes , ils en coteront les noms, qualités & demeures en l’article de la commiffion ; le tout à pei- ne de 2000 liv. d'amende , & des dépens, domma- ges & intérêts des parties. Comme quelques banquiers, moyennant certaines fommes dont ils compofoient avec Les parties, fai- foient enforte que le courier, étant à une ou deux journées de la ville de Rome, fît porter le paquet qui lui étoit recommandé, par quelque poftillon ou autre, qui par une diligence extraordinaire Île de- vançoit d’un jour, pour prévemr ceux qui par le même courier avoient donné charge & commiffion d'obtenir le même bénéfice, ce qu'ils appelloient faire expédier par avantage : l’article 14 de l’édit de 1637, qui prévoit ce cas, défend très-exprefflément à tous hanquiers de faire porter aucuns paquets ni mémoires par avantage & sratification, à peine de faux, & de 3000 liv. d'amende. Il eft enjoint à tous : couriers de porter ou faire porter, & rendre en un même jour dans la ville de Rome, toutes les lettres, mémoires, & paquets dont ils auront été chargés en un même voyage, fans fe retarder, faire ou prendre aucun avantage en faveur des uns, & au préjudice des autres, à peine de pareille amende, & de tous dépens, dommages & intérêts des parties, auxquel- les il eft défendu de fe fervir de provifions prifes & obtenues par tels avantages: ces provifions font dé- clarées nulles ; & il eft défendu aux juges d’y avoir aucun égard. Les banquiers ne doivent, fuivant l’arcicle 15 du même édit, recevoir aucunes procurations n1 autres actes fujets à contrôle, ni les envoyer en cour de Rome , ni à la légation , s’il ne leur apparoït qu'ils ayent été contrôlés & enregiltrés; ils doivent les coter de leurs noms & numero , à peine de nullité ; de 2000 livres d'amende contre le banquier, en cas, de contravention, dépens, dommages & intérêts des parties. | data L'article fuivant , réitere les défenfes qui avoient déjà été faites par l’édit de 1550 aux éarquiers d’en- voyer des mémoires, 8t de donner charge de rete- nir date fur réfignations, fi par le même courier & par le même paquet, ils n’envoyent les procura- tions , à peine de privation de leurs charges, 3009 296 E X P livres d'amende, & d'autre plus grande peine à lar- ‘à bitrage du juge. | L'article 12 de la déclaration de 1646 réitere les mêmes défenfes : l’édit de 1637 déclare de plusauffi nulles toutes provifons par réfignation qui auront été expédiées & délivrées au correfpondant de Ro- me , après la mort du réfignant, & plus de fix mois après le jour d'envoi, comme étant grandement fuf- peétes d’avoir été expédiées {ur procurations en- voyées après le décès, ou pendant l’extrème mala- die du réfignant, après avoir fur mémoire fait rete- nir la date ,à moins que l’impétrant ne faffe voir que contre fa volonté, & fans fraude ni connivence, l'expédition a été retardée à Rome, ou qu'il y a eu quelque autre empêchement légitime. Il eft ordonné par l’article 24 du même édit de 1637, que les éarquiers qui feront convaincus d’a- voir commis quelque faufleté, anti-date, ou autre malverfation en leürs charges, feront punis comme fauflaires à la difcrétion des juges, même par priva- tion de leurs charges ; maïs afin qu'ils ne foient pas témérairement & impunément calomniés , édit veut que perfonne ne foit reçü à s’infcrire en faux contre leurs regiftres & expéditions faites parleur entre- mife, qu'auparavant 1l ne fe foûmette par aéte recû au greffe de la jurifdiétion ordinaire, ou de celle en laquelle le différend des parties fera pendant , à la peine de la calomnie , amende extraordinaire en- vers le roi , & en tous les dépens, dommages & in- térêts du Pariquier, au cas que le demandeur en faux fuccombe en la preuve de fon accufation , fans que ces peines & amendes puiflent être modérées par les juges. La déclaration de 1646, article 12 , défend de faire expédier aucunes provifons en cour de Rome pour bénéfices non confiftoriaux, & qui ne font pas de la nomination du roi, fur procurations furannées, à peine de nullité. L’ordonnance de 1667, tit, xv. art. 8. porte qu'il me fera ajoùté foi aux fignatures & expéditions de cour de Rome, fielles ne font vérifiées, & que la vérification fe fera par un fimple certificat de deux banquiers expéditionnaires , écrit fur l'original des fi- natures & expéditions , fans autre formalité. L’édit de 1673, enjoint aux banquiers expédition- naires de garder & obferver exattement les ordon- nances au fujet des follicitations & obtentions de toutes fortes d’expéditions de cour de Rome & de Ja légation fous les peines y contenues, enfemble de mettre au dos de chacun des aûtes qu'ils auront fait expédier leur certificat figné d’eux, contenant le jour de l’envoi & de la réception, à peine de nul- lité des ates, dépens, dommages &c intérêts des parties. Enfin la déclaration du 3 Août 1718, donton a déjà parlé, contient encore plufieurs autres regle- mens pour les fonétions des banquiers expeditionnaires, L’urticle 5 ordonne que les banquiers expédition- maires de Paris feront feuls, & à l’exclufion de tous autres banquiers , expédier les bulles de provifion des archevéchés, évêchés, abbayes, & de tous au- tres bénéfices du royaume étant à la nomination du roi; qu'ils pourront auf faire expédier toutes fortes de provifons de bénéfices, difpenfes de mariage, & autres expéditions de cour de Rome pour toutes les provinces du royaume, & queles banquiers éta- blis dans les autres villes, ne pourront travailier que pour les bénéfices fitués , & les perfonnes étant dans le reffort où ils font établis, à peine de 3000 livres d'amende. Pour prévenirtoute contravention auxreplemens, & procurer au public la facilité des expéditions, l’article 6 de la même déclaration ordonne que les banquiers expéditionnaires, {oit en titre ou par com- E XP mifion , ne pourront s’abfenter tous à la fois , & dans le même tems, de la ville dans laquelle ils ont été établis par les reglemens , à peine de 500 livres d’a- mende, & de tous dépens, dommages & intérêts des parties, auxquelles en cas d’abfence de tous les banquiers de la ville, il eft permis de fe pourvoir de- vant le lieutenant général, ou autre premier juge du principal fiége, & en cas d’abfence ou empêche ment de celui-ci, devant le plus ancien officier du fiége , fuivant l'ordre du tableau, pour y déclarer l'envoi qu'ils defirent faire, 8 fommairement les noms de limpétrant du bénéfice & du diocèfe, le genre de vacance, & le nom de la perfonne par le miniftere de laquelle ils defirent faire l’envoi , dont if leur fera donné aëte &c permiffion de faire l’envoi par la perfonne par eux choifie, après qu'il fera ap- paru au lieutenant général ou autre premier officier, de l’abfence de tous les #azquiers par un procès-ver- bal de perquifition de leurs perfonnes, lequel ferz dreffé par deux notaires royaux Ou un notaire royal en préfence de deux témoins, avec fommation aux- dits banquiers de fe trouver dans üne heure devant le lieutenant général. Enûn l’article 7 porte que f les propriétaires de ces offices négligent de les faire remplir trois mois après la vacance, il y fera pourvû par des commif- fions du grand fceau, &c. Comme les banquiers expéditionnaires qui font em- ployés dans cette profeffion, ne peuvent quelquefois expédier par eux-mêmes toutes les affaires dont ils font chargés, il leur eft permis par l’arricle 25 de l’édit de 1637 pour leur foulagement, d’avoir près d'eux en la ville de leur réfidence un ou plufeurs commis laïques pour exercer leur charge en leur ab- fence , maladie, ou empêchement, fans néanmoins avoir de regiftre féparé. On a même vü ci-devant que fuivant l’édit de 1637, &c la déclaration de 1646, il falloit avoir été clerc ou commis d’un banquier expédirionnaire pen- dant un certain tems pour être recû en cette charge, mais cela ne s’obferve plus. Les droits 8 émolumens des Bangquiers-expédirion= naires de cour de Rome ont été reglés par plufeurs édits & déclarations, & par des tarifs arrêtés au confeil, notamment par les édits des 22 Avril 16 ee Mars 1655 & 1673, par la déclaration du 30 Jan- vier 1675, & le tarif arrêté au confeil le 2; Mai de la même année, lequel fut réformé au confeil le 4 Septembre 1691, & augmenté des droits portés par l’édit des mêmes mois & an, l'arrêt du confeil du 3 Juillet 1703 , contenant de nouveaux ftatnts, lé. dit de Juin 1713, & les lettres-patentes ou déclara. tion du 3 Août 1718. ,: La bourfe commune qui a lieu entre eux, avoit été ordonnée dès 1655 par l’édit du mois de Mars de ladite année; ce qui fut confirmé par un arrêt du confeil du 15 Mai 1676, & par l’édit du mois de Janvier 1600. Depuis l’établiffement de la bourfe commune, il ÿ avoitun thréforier de ladite bourfe , dont les fonc. tions furent reglées par un arrêt du confeil du 22 Janvier 1697. Cette fonétion n’étoit point encore érigée en titre d'office , mais par édit du mois d’Août 1712, il fut créé un vingt-unieme office de hzrquier- expéditionraire, thréforier de la bourfe commune ; & cet office ayant été acquis par la compagnie des 447- quiers-expéditionnaires de la ville de Paris , eft exer- cé par celui que la compagnie nomme à cet effet, Les privilèges des arquiers-expéditionnaires con fiftent , | 1°. En lexemption de tutelle, curatelle, commif- fon , & de toutes autres charges publiques , qui leur a été accordée par l’article 26, de l’édit de 16 37 ; qui porte que c'eft pour leur donner moyen d'exercer NUE leurs EX Teurs charges avec affiduité , & fans diftration. 2°, L’édit du mois de Mars 1678 les décharge de plus nommément de la colleéte des deniers royaux, & de guet & garde. | 3°. L’édit de 1637, ert. 26, leur donne auff droit de commitiimus aux requêtes du palais du parlement de leur réfidence pour les caufes qui concerneront la confervation de leurs privilèges, & les droits dépen- dans & attribués à leur emploi. Ce droit de commit. zimus a depuis été étendu à toutes les caufes perfon- nelles & mixtes des hanquiers-expéditionnaires | & leur a été confirmé par la déclaration du 30 Jan- mier 167$. , 4°. La même déclaration leur attribue le droit de franc-falé, & confirme tous leurs autres droits & privileges portés par les précédens édits. Ils ont encore été confirmés par une déclaration du 3 Août 1718, qui rappelle les précédens régle- mens, & explique plufeurs de leurs difpofitions. Au mois de Juin 1703, 1l y eut un édit portant création entitre d'office de 20 confeillers contrô- leuts des expéditions de cour de Rome, & des léga- tions pour la ville de Paris, & de quatre pour cha- cune des villes de Touloufe, Bordeaux, Rouen, Aix , Grenoble , Lyon, Dijon, Metz & Pau, pour contrôler & enregiftrer toutes les expéditions de cour de Rome, & des légations. | Ces offices de contrôleurs, tant pour Paris que pour les autres villes & les droits qui y étoient attri- bués, furent réunis par déclaration du 3 Juillet 1703 aux vingt offices de banquiers-expéditionnaires de la ville de Paris, avec faculté à eux de commettre un certain nombre d’entre eux pour faire à Paris les fonéhons de ces offices, & de les faire exercer dans les provinces par qui bon leur fembleroïit , après que ceux qu'ils auroient commis auroient prêté ferment devant le juge des lieux. | Ces mêmes offices de contrôleurs furent enfuite fupprimés par édit du mois de Juin 1713 ; mais le même édit créa entitre d'office formé , & à titre de furvivance, 20 offices d’infpeéteurs-vérificateurs des expéditions de cour de Rome & de la légation pour Paris ; & quatre pour chacune des villes de Toulou- fe, Bordeaux, Rouen, Aix, Grenoble, Lyon, Di- jon, Metz & Pau. Cet édit contient auffi quelques réplemens pour les droits des hanquiers-expédition- J24116S, 7 A Enfin par édit du mois d'O&tobre fuivant , les inf ecteurs-vérificateurs furent fupprimés , les contrô- eurs furent rétablis avec les droits & privileges por- tés par l’édit de Juin 1703, & ces offices &c droits de contrôleurs furent réunis, moyennant finance, aux vingt offices de harquiers-expéditionnaires établis à Paris. Il avoit été créé au mois d’Août 1709 des gardes des archives des banquiers-expéditionnaires en cour de Rome, lefquels furent unis à la compagnie def- dits banquiers par déclarations des 18 Avril 1710, & . 4 Février 1711 ; ils en furent défunis par l’édit du mois d’Août 1712, qui porte auf création de l’office de thréforier de la bourfe commune , & par une dé- claration du 9 Oétobre fuivant ces gardes des archi- ves furent fupprimés. Sur les banquiers-expéditionnaires de cour de Rome € des légations, voyez les mémoires du clergé aux en- droits que l’abrégé indique fous le mot harquiers- expéditionnaires ; le traité de l’ufage € pratique de cour de Rome , attribué a Perard Caftel, avec Les notes de Dunoyer ; les Lois eccléfiafliques de d'Hericourt , Jeconde partie, sir, de la forme des provifions; la biblio- cheque canonique au mot BANQUIER , € /a Jurifpru- . dence canonique au même titre. (A | EXPÉRIENCE 5 { €. terme abftrait, (Philofophie.) fignifie communément la connoiffance acquife par Tome VI, ls EXP 297 ün long -ufage de la vie, jointe aux réflexions que l’on a faites fur ce qu'on a vü, & {nr ce qui nous eft arrivé de bièn &de mal, En ce fens, la leéture de l'Hiftoire eft fort utile pour nous donner de l'expérience 3 elle nous apprend des faits, 8e nous montre les évenemens bons où mauvais qui en ont êté la fuite & les conféquences. Nous ne vénons point au monde avec la connoïffänce des caufes & des effets ; c’eft uniquement l'expérience qui nous fait voir ce qui eft caufe & ce qui eft effet, enfuite notre propre réflexion nous fait obferver la liaifon & l’en- _Chaînement qu’il y a entre la caufe & l'effet, Chacun tire plus ou moins de profit de fa propre: expérience, felon le plus ou le moins de lumieres dont on a été doué en venant au monde. Les voyages font auffi fort utiles pout donner de Pexpérience ; maïs pour en retirer cet avantage, on doit voyager avec l’efprit d’ebfervation. . Homere , au commencement de l’Odyflée, vou lant nous donner une grande idée de fon héros, nous dit d’abord qu'Ulyfle avoit vû plufieurs villes, & qu'il avoit obfervé les mœurs de divers peu- ples. Voici comment Horace a rendu les vers d’Ho- mere : Dic mihi, mufa, viruin, captæ pofi tempora Trojes Qui mores hominum multorum vidis & urbes, | Art poét. verf. 1413 Ainfi quand on dit d’un homme qu’il a de l’expé- rience , qu'il eft expérimenté, qu'il eft expert, on veut dire qu'outre les connoïffances que chacun ac- quiert par l’ufage de la vie, ila obfervé particulie- rement ce qui regarde fon état, Il ne faut pas féparer le fait de l’obfervation : pour être un officier expé- rimenté, 1l ne fuffit pas d’avoir fait plufieurs cam- pagnes, il faut les avoir faites avec l’efprit d’obfer- vation , & avoir sù mettre à profit fes propres fautes ê celles des autres, La raifon qui doit nous infpireï beaucoup de con- fiance en l'expérience, c’eft que la nature eft uniforme aufli-bien dans l’ordre moral que dans l’ordre phyfi= que; ainfi toutes Les fois que nous voyons les mêmes caufes , nous devons nous attendre aux mêmes effets, pourvû que les circonftances foient les mêmes. Il eft affez ordinaire que deux perfonnes qui font de fentiment différent , alleguent chacun l'expérience en fa faveur : c’eft l’obfervateur le plus exaë&, le plus defintéreflé & le moins pañlionné qui feul a raifon. Souvent les paffions font des lunettes qui nous font voir ce qui n’eft pas, ou qui nous montrent les ob= jets autrement qu'ils ne font. Il eftrare que les jeunes gens qui entrent dans le monde, ne tombent pas en inconvénient faute d'expérience. Après Les dons de la nature, l’expérience fait le principal mérite des hom- mes, En Phyfique le mot expérience fe dit des épreuves que l’on fait pour découvrir les différentes opérations: & le méchanifme de la Nature. On fait des expérien- ces fur la pefanteur.de l’air, fur les phofphores, fur la pierre d’aimant , fur l’éledricité, &c. La pratique de faire des expériences eft fort en ufage en Europe depuis quelques années, ce qui a multiplié les con noiffances philofophiques, &c les a rendues plus com- munes ; mais ces épreuves doivent être faites avec beaucoup de précifion & d’exa@itude, fi l’on veut en recueillir tout le fruit qu'on en doir attendre : fans cette précaution, elles ne ferviroient qu’à éga- rer. Les fpéculations les plus fubtiles & les médita- tions les plus profondés ne font que de vaines ima= ginations, fi elles ne font pas fondées fur des expés riences exa@tes. (F) EXPÉRIENCE , (Phlofophie nat.) eft l'épreuve de l'effet qui réfulte de l’application mutuelle ou du mouvement des corps naturels , afin de découvris Pp 298 E X P certaïns phénomenes , & leurs caufes, Voyez Exp£- RIMENTAL. ; j EXPÉRIENCE , £ piareipue ” (Medecine. c’eft la con- moifflance acquife par des obfervations aflidues 8c par, un long ufage , de tout ce qui peut contribuer à la confervation de la fante &c à la ouérifon des mala- dies. Voyez EMPIRISME 6 EMP1RIQUE. Expérience {e dit aufhi de épreuve que font les Medecins fur le corps humain ou fur celui de quel- qu'animal , d’un moyen, d’uneopération, d’une dro- gue dont ils ont lieu de croire, par le raifonnement, que lufage peut être utilement appliqué contre quel- que maladie, ou dont ils cherchent à connoître le bon ou le mauvais effet. Voyez DROGUE, REMEDE, OPÉRATION. (d) | EXPÉRIMENT AL , adj. (Philofophie natur.) On appelle Philofophie expérimentale, celle qui fe fert de la voie des expériences pour découvrir les lois de la Nature. Voyez EXPÉRIENCE. Les anciens , auxquels nous nous croyons fort fu- périeurs dans les Sciences, parce que nous trouvons plus court & plus agréable de nous préférer à eux que de les lire, n’ont pas négligé la phyfique expéri- mentale , comme nous nous l’imaginons ordinaire ment : ils comprirent de bonne heure que lobferva- tion & l'expérience étoient le feul moyen de con- noître la Nature, Les ouvrages d’'Hippocrate feu {e- roient fuMifans pour montrer l'efprit qui conduifoit alors les philofophes. Au lieu de ces fyftèmes,, fiñon meurtriers, du moins ridicules, qu’a enfantés la mede- cine moderne, pour les profcrire enfuite, on y trou- ve des faits bien vüûs 8 bien rapprochés ; on y voit un fyflème d’obfervations qui fert encore aujour- d'hui, & qui apparemment fervira totjours de bafe à l’art de guérir. Or je crois pouvoir juger par l’état de la Medecine chez les anciens , de l’érat où la Phy- fique étoit parmi eux, & cela pour deux raifons: la premiere, parce que les ouvrages d'Hippocrate font lesmonumens les plus confidérables quu nous reftent de la phyfique des anciens ; la feconde,, parce que la Medecine étant la partie la plus effentielle & la plus intéreflante de la Phyfique, on peut toûüjours juger ‘avec certitude de la maniere dont on cultive celle- ci, par la maniere dont on traite celle-là, Telle ef la Phyfique , telle eft la Medecine ; & réciproque- ment telle eft la Medecine, telle eft la Phyfique. C’eft une vérité dont l'expérience nous aflüre, puif- qu'à compter fenlement depuis le renouvellement des Lettres, quoique nous püflions remonter plus haut, nous avons toûjours yü fubir à l’une de ces fciences les changemens qui ont altéré ou dénaturé l’autre. ES : Nous favons d’ailleurs que dans le tems même d'Hippocrate plufieurs grands hommes, à la tête def- quels on doit placer Démocrire ; s’appliquerent avec fuccès à lobfervation de la Nature. On prétend que le médecin envoyé par les habitans d’Abdere pour guérir la prétendue folie du philofophe , le trouva occupé à difléquer & à obferver: des animaux ; & Fon peut deviner qui fut jugé le plus fou par Hippo- crate, de celui qu’il alloit voir, ou de ceux qui l’a- voient envoyé. Démocrite fou ! lui qui , pour le diré ici en pañlant, avoit trouvé la maniere la plus philo- fophique dé joiur de la Nature 8 des hommes; fa- voir d'étudier l’une & de rire des autres. : "Quand jé parle, au refte , de Papplication que les ‘anciens ont donnée à la phyfique expérimentale, je ne fai sl faut prendre ce mot dans tonte fon éten- due: La phyfique expérimentale roule fur deux points qu'ilne fautpas confondre, l'expérience proprement dite, & l’obfervation, Celle-ci, moins recherchée & moins fubtile , fe borne aux faits qu'elle a fous les yeux , à bien voir &c à détailler les phénomenes de foute efpece que le fpeftagle de la Nature préfente : celle-là au contraire cherche à la pénétrer plus pro: fondément , à lui dérober ce qu’elle cache ; à créer, en quelque maniere , par la différente combinaïfon des corps , de nouveaux phénomenes pour les étu- dier : enfin elle ne fe borne pas à écouter la Nature, mais elle linterroge& la prefle. On pourroit appeller la premiere, la phyfique des faits, où plûtôt /z phy- Jique vulgaire 6 palpable ; 8 réferver pour l’autre le nom de phyfique occulte, pourv qu’on attache à ce môt une idée plus philofophique & plus vraie que n’ont fait certains phyficiens modernes, & qu'on le borne à défigner la connoïffance des faits cachés dont on s’affüre en les voyant , & non le roman des faits fuppofés qu'on devine bien ou mal, fans les cher- cher nt les voir. Les anciens ne paroïflent pas s’être fort appliqués à cette derniere phyfique , ils fe contentoient de lire dans la Nature ; mais ils y lifoient fort affidument , & avec de meilleurs yeux que nous ne nous l'ima- ginons: plufeurs faits qu’ils ont avancés, & qui ont été d’abord démentis par les modernes, fe font trou- vés vrais Quand on les a mieux approfondis. La mé- thode que fuivoient lés anciens en cultivant l'obfer- vation plus que l'expérience, étoit très-philofophi= que , & la plus propre de toutes à faire faire à la Phy- fique les plus grands progrès dontellefüt capable dans ce premier âge de lefprit humain, Avant que d’emi ployer & d’ufer notre fagacité pour chercher un fait dans des combinaifons fubtilés , il faut être bien at fûré que ce fait n’eft pas près dé nous & {ous notre main, comme il faut en Géométrie réferver fes ef- forts pour trouver ce qui n’a pas été réfolu par d’aw tres. La Nature eft fi variée & f riche, qu’une fim- ple colleétion de faits bien complete avanceroit pro- digieufemert nos connoïflances ; & s’il étoit poflble de pouffer cette colleétion au point que rien n’y man- quât, ce feroit peut-être le feul travail auquel un phyficien dût fe borner; c’eft au moins celui par le- quel 1l faut qu’il commence, & voilà ce que les an- ciens ont fait. [ls ont traité la Nature commé Hip- pocrate a traité le corps humain; nouvelle preuve de Panalogie êc de la reflemblance de leur phyfique à leur medecine, Les plus fages d’entr’eux ont fait, pour ainf dire, la table de ce qu'ils voyoïent , Pont bien faite,& $’en font tenus-là.[ls n’ont connu del’ai- mant Que fa proprièté qui faute le plus aux yeux, celle d’attirer le fer : les merveilles de l’Eleétricité qui les entouroient, & dontom trouve quelques tra. ces dans leurs ouvrages, ne les ont point frappés, parce que pour être frappé de ces merveilles il eût falhu'en voir le rapport à des faits plus cachés que l'expérience a sû découvrir dans ces derniers terms : car l'expérience, parmi plufieurs avantages, a entre autres cehu d'étendre le champ de l’obfervation. Um phénomene que l’éxpérience nous découvre, ouvre nos yeux furuneinfinité d’autres qui ne demandoïent; pour aïnfi dire, qu'à être apperçhs. L’obfervation, par la curiofité qu’elle infpire & par les vuides qu’elle laiffe, mene à l'expérience ; l'expérience ramene à l’obfervation par la même curiofté qui cherche à remplir & à ferrer de plus én plus ces vuides ; ainft on peut regarder en quelque maniere l'expérience & l’obfervation comme la fuite & le complément Fune de l’autre. Les anciens ne paroïffent avoir cultivé l’expérien- ce que par rapport aux Arts , & nullement pour fa- tisfaire , comme nous, üne cuiriofité purement phi- lofophique. Ils ne décompofoient & ne combinotent les corps qué pourentirer des mfagesutiles ou agréa- bles, fans chercher beaucoup à en connoître le jeu ni la ftrudture. Ils ne s’arrêtoient pas même fur les détails dans la defcription qu’ils faifoient des corps > & s'ils avoientbefoin d’être juftifiés fur ce point, ils le feroient en quelque manieré fuffifamment par le EUX (P peu d'utilité que les modernes ont trofvé à fuivre une méthode contraire. | C’eft peut-être dans l’hiftoire des animaux d’Arif- tote qu’il faut chercher le vrai goût de phyfique des anciens, plûütôt que dans fes ouvrages de phyfique, où 1l eft moins riche'en faits & plus abondant en pa- roles , plus raifonneur & moins inftruit ; car telle eft tout-à-la-fois la fageflé & la manie de lefprit hu- main, qu'il ne fonge guere qu'à amafler & à ranger des matériaux, tant que la colleétion en eft facile & abondante ; mais qu’à linftant que les matériaux lui manquent , il fe met aufh-tôt à difcourir ; enforte que réduit même à un petit nombre de matériaux , il eft toûjours tenté d’en former un corps, & de dé- layer en un fyftème de fcience , ou en quelque chofe du moins qui en ait la forme, un petit nombre de connoiïflances imparfaites & ifolées. Mais en reconnoiïflant que cet efprit peut avoir préfidé jufqu'à un certain point aux ouvrages phyfi- ques d’Ariftote, ne mettons pas fur fon compte l’abus que les modernes en ont fait durant les fiecles d’igno- rance qui ont duré fi long-tems, ni toutes les inepties que fes commentateurs ont voulu faire prendre pour les opinions dé ce grand homme. , Je ne parle de ces temsténébreux, que pour faire mention en paffant de quelques gémies fupérieurs, qui abandonnant cette méthode vague & obfcure de phu- lofopher , laifloient les mots pour les chofes, & cherchoient dans leur fagacité & dans létude de la Nature des connoïflances plus réelles, Le moine Bacon, trop peu connu & trop peu là aujourd’hui, doit être mis au nombre de ces efprits du premier ordre ; dans le fein de la plus profonde ignorance, » el 7. ‘il fut par la force de fon génie s'élever au-deflus de fon fiecle, & le laïfler bien loin derriere lui : auf fut-il perfécuté par fes confreres , & regarde par le peuple comme un forcier, à-peu-près comme Ger- bert l’ayoit été près de trois fiecles auparavant pour Les inyentions méchaniques ; avec cette différence que Gerbert devint pape, & que Bacon refta moine & malheureux. Au refte le petit nombre de grands génies qui étu- dioientainfilaNature en elle-mème, jufqu’à la renaif- : fance proprement dite de la Philofophie , n’étoient pas vraiment adonnés à ce qu’on appelle phyfique ex- périmentale. Chimiftes pitôt que phyficiens, 1ls pa- roiflent plus appliqués à la décompofition des corps particuliers , &t au détail des ufages qu'ils en pou- voient faire, qu'à l'étude générale de la Nature. Ri- ches d’une infinité de connoïiflances utiles ou curieu- fes, mais détachées, ils isnoroient les lois du mou- vement , celles de l’'Hydroftatique , la pefanteur de Vair dont ils voyoient les effets, & plufeurs autres vérités qui font aujourd’hui la bafe 8 comme les élé- mens de la phyfique moderne. a: Le chancelier Bacon, Anglois comme le moine, {car ce nom & ce peuple font heureux en philo- fophie) , embrafa le premier un plus vafte champ : 1l entrevit les principes généraux qui doivent fervir de fondement à l’étude de la Nature, il propofa de les reconnoitre par la voie de l'expérience, il an- nonça un grand nombre de découvertes qui fe font faites depuis. Defcartes qui le fuivit de près, & qu'on accufa (peut-être aflez mal-à-propos) d’avoir puifé des lumieres dans les ouvrages de Bacon, ou- vrit quelques routes dans la phyfique expérimentale, maïs la recommanda plus qu'il ne la pratiqua ; & c’eft peut-être ce qui l’a conduit à pluñeurs erreurs. Il eut, par exemple, le courage de donner le premier des lois du mouvement; courage qui mérite la re- connoïffance des Philofophes, puifquil a mis ceux qui l'ont fiv: , fur la route des lois véritables ; mais l'expérience, ou plütôt, comme nous le dirons plus bas, des réflexions fur les obfervations les plus com- - Tome VI, E X P 299 munes, lui auroient appris que les lois qu’il avoit doris nées étoient infoûtenables. Defcartes, & Bacon lui même, malgré toutes les obligations que leur a la Philofophie , lui auroient peut-être été encore plus utiles, s'ils euffent été plus phyficiens de pratique & moins de théorie ; mais le plaïfir oifif de la médita- tion & de la conjeêture même , entraîne les grands efprits, Ils commencent beaucoup & finiffent peu; ils propofent des vûes, ils prefcrivent ce qu'il faut faire pour en conftater la jufteffe & l'avantage, & laïflent le travail méchanique à d’autres, qui éclai- rés par une lumiere étrangere, ne vont pas auffi loin que leurs maîtres auroient été feuls : ainfi les uns penfent ou rêvent, les autres agiffént où manœu- vrent, & l’enfance des Sciences cf longue, ou, pour mieux dire, éternelle, | Cependant l’efprit de la phyfique expérimentale que Bacon &t Defcartes avoient introduit, s’étendit infenfiblement. L’académie del Cimento à Florence, Boyle & Mariotte, & après eux plufeurs autres, fi- rent avec fuccès un grand nombre d'expériences « les académies fe formerent & faifirent avec empref- lement cette maniere de philofopher : les univerfités plus lentes, parce qu’elles étoient déj toutes formées lors de la naïflance de la phyfque expérimentale ; {ui virent long-tems encore leur méthode ancienne. Peu- a-peu la phyfique de Defcartes fuccéda dans les éco. les à celle d’Ariftote , ou plûtôt de fes commenta- teurs. Si on ne touchoit pas encore à la vérité > OI étoit du-moins fur la voie : on fit quelques expérien- ces ; on tenta de les expliquer : on auroit mieux fit de fe contenter de les bien faire, & d’en faifr l’ana- logie mutuelle : mais enfin il ne faut pas efpérer que lefprit fe délivre fi promptement de tous es préJu- gés. Newton parut, & montra le premier ce que fes prédéceffeurs r’avoient fait qu’entrevoir, l'art d’in- troduire la Géométrie dans la Phyfique , & de for- mer , en téuniflant l’expérience au calcul, une fcien- ce exaête, profonde, lumineufe, & nouvelle : auffi grand du-moins par fes expériences d'optique que par fon fyftêème du monde, il ouvrit de tous côtés une carriere immenfe & sûre; l'Angleterre faïfit ces vies ; la fociété royale les regarda comme fiennes dès le moment de léur naïffance : les académies de France s’y prèterent plus lentement & avec plus de peine, par la même raifon que les univerfités avoient eue pour rejetter durant plufeurs années la phyfique de Defcartes : la lumiere a enfin prévalu : la généra- tion ennemie de ces grands hommes, s’eft éteinte dans les académies & dans lesuniverfités, auxquelles les académies femblent aujourd’hui donner le ton = une génération nouvelle s’eft élevée ; car quand les fondemens d’une révolution font une foisjettés, c’eft prefque toüjours dans la génération fuivante que la révolution s’acheve; rarement en-decà, parce que les obftacles périffent plûtôt que de céder; rarement au-delà, parce que les barrieres une fois franchies , l’efprit humain va fouvent plus vite qu’il ne veut lui- même, jufqu’à ce qu’il rencontre un nouvel obfta- cle qui l’oblige de fe repofer pour long-tems. Qui jetteroit les yeux fur luniverfté de Paris, y trouveroit une preuve convaincante de ce que j’a- vance. L'étude de la géométrie & de la phyfique ex- périmentale commencent à yregner. Plufeurs jeunes profefleurs pleins de favoir, d’efprit, & de courage (car il en faut pour les innovations, même les plus innocentes ), ont ofé quitter la route battue pour s’en frayer une nouvelle ; tandis que dans d’autres écoles, à qui nous épargnerons la honte de les nom- mer, les lois du mouvement de Defcartes, & même la phyfique péripatéticienne, font encore en hon- neur. Les jeunes maîtres dont je parle forment des éleves vraiment inftruits, qui, au fortir de leur phi- lofophie , font initiés aux vrais RHRGIES de toutes Puy 300 E À E les fciences phyfico-mathématiques,, & qui bien loin d’être obligés (comme on l’étoit autrefois) d’oublier ce qu'ils ont appris, font au contraire en état d’en faire ufage pour fe livrer aux parties de la Phyfique qui leur plaifent le plus. utilité qu’on peut retirer de cette méthode eff fi grande, qu'il feroit à fouhaiter ou qu’on augmentât d’une année le cours de Philofo- phie des colléges, où qu'on prit dès la premiere an- née le parti d'abréger beaucoup la Méraphyfique & la Logique , auxquelles cette premiere année eft or- dinairement confacrée prefque toute entiere. Je n’ai garde de profcrire deux fciences dont je reconnois l'utilité & la néceffité indifpenfable ; mais je crois qu'on les traiteroit beaucoup moins longuement, fi on les réduifoit à ce qu’elles contiennent de vrai & d’utile ; renfermées en peu de pages elles y gagne- roient, & la Phyfique auffi qui doit les fuivre. C’eft dans ces circonftances que le Roi vient d’é- tablir dans l’univerfité de Paris une chaire de phyfi- que expérimentale. L'état préfent de la Phyfique par- mi nous, le goût que les ignorans mêmes témoignent pour elle, l'exemple des étrangers, qui jouiffent de- puis long-tems de l’ayantage d’un tel établiffement, tout fembloit demander que nous fonpeaffions à nous en procurer un femblable. L’occafñon ne fut jamais plus favorable pour affermit dans un corps auff utile & auf eftimable que luniverfité de Paris, le goût de la faine Phyfique, qui s’y répand avec tant de fuccès depuis plufeurs années. Le mérite reconnu de l’aca- démicien qui occupe cette chaire, nous répond du fuccès avec lequel 1l la remplira. Je fuis bien éloigné de lui tracerun plan que fa capacité & fon expérience lui ont fans doute déjà montré depuis long-tems. Je prie feulement qu'on me permette quelques réfle- xions générales fur le véritable but des expériences. Ces réflexions ne feront peut- être pas inutiles aux jeunes éleves, qui fe difpofent à profiter du nouvel établiflement fi avantageux au progrès de la Phyfi- que. Les bornes & la nature de cet article m'oblige- ront d’ailleurs à abréger beaucoup ces réflexions, à ne faire que les ébaucher, pour ainf dire, & en pré- fenter l’efprit & la fubftance. Les premiers objets qui s'offrent à nous dans [a Phyfque, font les propriétés générales des corps, & les effets de l’aétion qu’ils exercent les uns fur Les autres. Cette aétion n’eft point pour nous un phéno- mene extraordinaire ; nous y fommes accoütumés dès notre enfance : les effets de l'équilibre & de l’im- pulfion nous font connus, je parle des effets en gé- néral: car pour la mefure & la loi précife de ces ef fets, les Philofophes ont été long-tems à la chercher, & plus encore à la trouver : cependant un peu de réflexion fur la nature des corps, jointe à l’obferva- tion des phénomenes qui les environnoïent, auroient dû, ce me femble, leur faire découvrir ces lois beau- coup plütôt. J’avoue que quand on voudra réfoudre ce problème métaphyfiquement & fans jetter aucun regard fur l’univers , on parviendra peut-être dif- cilement à fe fatisfaire pleinement fur cet article, & à démontrer en toute rigueur qu’un corps qui en ren- contre un autre doit lui communiquer du mouve- ment : mais quand on fera attention que les lois du mouvement fe réduifent à celles de l'équilibre , & que par la nature feule des corps il y a antérieure- ment à toute expérience & à toute obfervation un cas d'équilibre dans la nature, on déterminera faci- lement les lois de l’impulfion qui réfultent de cette loi d'équilibre. Voyez EQUIL18RE. Il ne refte plus qu’à favoir fi ces lois font celles que la nature doit obferver. La queftion feroit bien-tôt décidée, f on pouvoit prouver rigoureufement que la loi d’équili- bre eft unique ; car il s’enfuivroit de-là que les lois du mouvement font invariables &c néceflaires. La Métaphyfique aidée des raifonnemens géométriques E X fourniroit, fije ne me trompe, de grandes Inmieres fur l’unité de cette loi d'équilibre , & parviendroit peut-être à la démontrer (voyez EQUILIBRE) : mais quand elle feroit impuiflante fur cet article , lobfer- vation & l'expérience y fuppléerôient abondam- ment. Au défaut des lumieres que nous cherchons fur le droit, elles nous éclairent au moins fur le fait, en nous montrant que dans Punivers, tel qu'ileft, la loi de l'équilibre eft unique ; les phénomenes les plus fimples & les plus ordinaires nous affürent de cette vérité. Cette obfervation commune, ce phénome- ne populaire, fi on peut parler ainfi, fuffit pour {er- vir de bafe à une théorie fimple & lumineufe des lois du mouvement : la phyfique expérimentale n’eft donc plus néceffaire pour colo ie ces lois , qui ne font nullement de fon objet. Si elle s’en occupe, ce doit être comme d’une recherche de fimplecuriofité, pout : réveiller & foûtenit l'attention des commençans, à- peu-près comme on les exerce dès l'entrée de la Géo- métrie à faire des figures juftes , pour avoir le plaifir de s’aflürer par leurs yeux de ce que la raifon leur a déjà démontré : mais un phyficien proprement dit, n'a pas plus befoin du fecours de l'expérience pour démontrer les lois du mouvement & de la Statique, qu’un bon géometre n’a befoin de regle & de com- pas pour s’aflürer qu'il a, bien réfolu un problème diflicile. La feule utilité véritable que puiflent procurer au phyficien les recherches expérimentales {ur les lois de l'équilibre, du mouvement, & en général fur les af feétions primitives des corps, c’eft d'examiner atten- tivement la différence entre le réfultat que donne la théorie & celui que fournit l'expérience , 8 d’em- ployer cette différence avec adrefle pour détermi- ner, pat exemple, dans les effets de l’impulfion , l’al- tération caufée par la réfiflance de Pair ; dans les ef- fets des machines fimples , laltération occafonnée par le frotement & par d’autres caufes. Telle eft la méthode que les plus grands phyficiens ont fuivie , & qui eft la plus propre à faire faire à la Science de grands progrès: car alors l'expérience ne fervira plus fimplement à confirmer la théorie ; mais différant de la théorie fans l’ébranler , elle conduira à des vérités nouvelles auxquelles la théorie feule n’auroit pû at- teindre. Le premier objet réel de la phyfique expérimentale font les propriétés générales des corps, que l’obfer- vation nous fait connoître, pour ainfi dire, engros, mais dont l’expérience {eule peut mefurer & déter- miner les effets ; tels font, par exemple, les phéno- menes de la pefanteur. Aucune théorie n’auroit pi nous faire trouver la loi que les corps pefans fuivent dans leur chüte verticale ; mais cette loi une fois connue par l’expérience , tout ce qui appartient au mouvement des corps pefans, foit reétiligne foit curviligne , foit incliné foit vertical , n’eft plus que du reflort de la théorie ; & fi l’expérience s’y joint , ce ne doit être que dans la même vûe & de la même maniere que pour les lois primitives de limpulfion. L’obfervation journaliere nous apprend de même que l’air eft pefant , mais l’expérience feule pouvoit nous éclairer fur la quantité ab{olue de fa péfanteur : cette expérience eft la bale de l’'Aérométrie, & le rafonnement acheve le refte. Voyez ARÉOMÉTRIE. On fait que les fluides preffent & réfiftent quand ils font en repos, & pouffent quand ils font en mou- vement ; mais cette connoiflance Vague ne fauroit être d’un grand ufage. Il faut, pour la rendre plus précife &c par conféquent plus réelle & plus utile, avoir recours à l'expérience ; en nous faifant con- noître les lois de l’'Hydroftatique , elle nous donne en quelque maniere beaucoup plus que nous ne lui demandons ; car elle nous apprend d’abord ce que nous n'aurions jamais foupçonné , que les fluides : Fr À À ne preflent nullement comme les corps folides, ni comme feroit un amas de petits corpufcules con- tigus & preflés. Les lois de la chûte des corps, la quantité de la pefanteur de l’air, font des faits que l'expérience feule a pù fans doute nous dévoiler, mais qui après tout n’ont rien de furprenant en eux- mêmes : il n’en eft pas ainfi de la preflion des fluides en tout fens, qui eft la bafe de l'équilibre des flui- des. C’eft un phénomene qui paroït hors des lois gé- nérales, & que nous avons encore peine à croire , même lorfque nous n’en pouvons pas douter : mais ce phénomene une fois connu, l’'Hydroftatique n’a guere befoin de l'expérience : 1l y a plus, FHydrau- liquemême devient une fcience entierement ou pref- qu'entierement mathématique ; je dis prefqu’entiere- ment, car quoique les lois du mouvement des fluides fe déduifent des lois de leur équilibre, àl y a néan- moins des cas où l’on ne peut réduire les unes aux autres qu’au moyen de certaines hypothèfes, & l’ex- périence eft néceffaire pour nous aflürer que ces hy- pothèfes font exaêtes & non arbitraires. Ce feroit ici le lieu de faire quelques obfervations fur Pabus du calcul & des hypothèfes dans la Phyfi- que, fi cet objet n’avoit été déjà rempli par des géo- metres mêmes qu’on ne peut accufer en cela de par- tialité, Au fond, de quoi les hommes n’abufent-1ls pas? on s’eft bien fervi de la méthode des Géometres pour embrouiller la Métaphyfique : on a mis des fi- gures de Géométrie dans des traités de l'ame ; & de- puis que l’aéion de Dieur a été réduite en théoremes, doit-on s'étonner que l’on ait eflayé d’en faire au- tant de l’a@tion des corps ? Voyez DEGRÉ. Que de chofes n’aurois-je point à dire 1c1 fur les Sciences qu’on appelle phyfico-mathematiques , fur PAftronomie phyfique entr'autres, fur l’Acouftique, fur Optique & fes différentes branches, fur la ma- niere dont l'expérience & le calcul doivent s'unir pour rendre ces Sciences le plus parfaites qu'il eft poñble ; mais afin de ne point rendre cet article trop long, je renvoie ces réflexions &c plufieurs autres az mot PHYSIQUE , qui ne doit point être féparé de ce- lui-ci. Je me bornerai pour le préfent à ce qui doit être le véritable & comme l’unique objet de la phy- fique expérimentale; à ces phénomènes qui fe multi- plient à l'infini, fur la caufe defquels le raifonnement ne peut nous aider, dont nous n’appercevons point la chaîne, ou dont au-moins nous ne voyons la liai- fon que très-imparfaitement, très-rarement, & après les avoir envifagés fous bien des faces : tels font, par éxemple , les phénomenes de la Chimie , ceux de l’élericité, ceux de l’aimant, & une infinité d’au- tres. Ce font-là les faits que le phyfcien doit fur-tout chercher à bien connoitre : il ne fauroit trop les mul- fiplier ; plus il en aura recueilli, plus il fera près d’en voir l’union : fon objet doit être d’y mettre l’ordre dont ils feront fufceptibles, d'expliquer les uns par les autres autant que cela fera poffble, &c d’en former, pour ainf dire, une chaîne où il fe trouve le moins de lacunes que faire fe pourra ; il en reftera toûjours aflez ; la nature y a mis bon ordre. Qu'il fe garde bien fur-tout de vouloir rendre raifon de ce qui lui échappe ; qu'il fe défie de cette fureur d'expliquer tout , que Defcartes à introduite dans la Phyfique, qui a accoûtumé la plüpart de fes feétateuts à fe con- tenter de principes & de raïfons vagues, propres à foûtenir également le pour & le contre. On ne peut s'empêcher de rire, quand on lit dans certains ou- vrages de Phyfique les explications des variations du batometre, de la neige, de la grêle, & d’une in- finité d’autres faits. Ces auteurs, avec les principes & la méthode dont ils fe fervent, feroient du-moins auf peu embatraffés pour expliquer des faits abfo- Jument contraires ; pour démontrer , par exemple, qu’en tems de pluie le barometre doit haufer, que | EXP 301 la neïge doit tombèr en été & la grêle en hÿver, & ainfi des autres. Les explications dans un cours de Phyfique doivent être comme les réflexions dans l'Hiftoire , courtes, fages, fines , amenées par les faits , Ou renfermées dans Les faits mêmes par la maniere dont on les préfente, . Au refte, quand je profcris de la Phyfique la ma= mie des explications, je fuis bien éloigné d’en prof- crire cet efprit de conjetture , qui tout-à-la-fois timi- de &t éclairé conduit quelquefois à des découvertes, pourvû qu'il fe donne pour ce qu'il eft, jufqu’à ce qu'il foit arrivé à la découverte réelle: cet efprit d’analogie, dont la fage hardiefle perce au - delà de ce que la nature femble vouloir montrer, & pré= voit les faits, avant que de les avoir vûs. Ces deux talens précieux & fi rares, trompent à la vérité quel- quefois celui qui n’en fait pas affez fobrement ufage: mais ne fe trompe pas aïnfi qui veut, Je finis par une obfervation qui fera courte, n’é- tant pas immédiatement de l’objet de cet article, mais à laquelle je ne puis me refufer. En imitant l’e- xemple des étrangers dans l’établifflement d’une chaire de phyfique expérimentale qui nous manquoit, pour- quoi ne luivrians-nous pas ce même exemple dans l’établiflement de trois autres chaires très-utiles, qui nous manquent entierement, une de Morale, une de Droit public, & une d'Hiftoire ; trois objets qui appartiennent en un certain fens à la philofophie ex- périmentale, prife dans toute fon étendue, Je fuis cer- tainement bien éloigné de méprifer aucun genre de connoïflances ; mais 1l me femble qu’au lieu d’avoir au collège royal deux chaires pour l’Arabe, qu'on n’apprend plus; deux pour l’'Hébreu, qu’on n’ap- prend guere; deux pour le Grec, qu'on apprend affez peu, & qu'on devroit cultiver davantage; deux pour lEloquence, dont la nature eft prefque le feul maître, on fe contenteroit aifément d’une feu le chaire pour chacun de ces objets; & qu’il man- que à la fplendeur & à l'utilité de ce collége une chaire de Morale, dont les principes bien dévelop pés intérefferoient toutes les nations; une de Droit public, dont les élémens même font peu connus em France ; une d'Hiftôire enfin qui devroit être occu- pée par un homme tout-à-la-fois favant & philofo- phe, c’eft-à-dire par un homme fort rare, Ce fouhait n’eit pas le mien feul ; c’eft celui d’un grand nombre de bons citoyens; & s'il n’y a pas beaucoup d’ef- pérance qu'il s’accomplifle , il n'y a du moins nulle indifcrétion à le propofer. (0) EXPERTS, f. m. pl, (Jurifpr.) font des gens ver- fés dans la connoïfflance d’une fcience , d’un art, d’une certaine efpece de marchandife, ou autre cho- {e ; lefquels font choïfis pour faire leur rapport & donner leur avis fur quelque point de fait d’où dé- pend la décifion d’une conteftation, & que l’on ne peut bien entendre fans Le fecours des connoïffances qui font propres aux perfonnes d’une certaine pro- feffion. | Par exemple, s'il s’agit d’eftimer des mouvances féodales, droits feigneuriaux, droits de juftice & honorifiques, on nomme ordinairement des feigneurs & gentilshommes poflédant des biens-& droits de même qualité ; & pour l’eftimation des terres labou- rabies, des labours, des grains, & uftenfiles de la- bour , on prend pour experts dés laboutreurs ; s’il s’a- git d’eftimer des bâtimens, on prend pour experts des architettes, des maçons , &c des charpeñtiers , cha- cun pour ce qui eft de leur reflort ; s’il s’agit de vé= rifier une écriture, on prend pour experts des maîtres écrivains ; & ainfi des autres matieres. Les experts font nommés dans quelques anciens auteurs /uratores , parce qu'ils doivent prêter fer. ment en juftice avant de procéder à leur commif fion; & comme on ne nomme des experis que fur 302 E XP desmatieres de fait, de-là vient l’ancienne maxime: ad queflionem faéti refpondent juratores , ad queffo- nem juris refpondent judices ; c’eft auf de -là qu'ils font appellés parmi nous 7wrés , ou experts jurés, Mais préfentement cette derniere qualité ne fe don- ne qu'aux experts qui font en titre d'office, quoique tous experts doivent prêter ferment. L’ufage de nommer des experts nous vient des Ro- mains; car outre les arpenteurs, merfores , qui fai- foient la mefure des terres, & les huifliers-prifeurs, fummarit, qui eftimoient les biens, on prenoit aufh des gens de chaque profeffion pour les chofes dont la connoïffance dépendoit des principes de l’art.Ainfi nous voyons en la novelle 64, que l’eftimation des légumes devoit être faite par des jardiniers de Con- ftantinople , ab hortulanis € ipfis horum peritiam ha- bentibus ; ce que l’on rend dans notre langue par ces termes , & gens à ce connoiffans. | Les experts étoient choilis par les parties, comme il eft dit en la loi hac editfali per eos quos utraque pars eleperit ; on leur faifoit prêter ferment fuivant cette même loi, énerpofito facramento ;& la novelle 64 fait mention que ce ferment fe prêtoit fur les évangiles, divinis nimirum propofitis evangelus. 4 Ils font qualifiés d’arbitres dans quelques lois, quoi- que la fonétion d’arbitres foit différente de celle des experts, ceux-ci n'étant point Juges. Le droit canon admet pareïllement l'ufage des ex- perts, puifqu’au chap. vj. de frigidis € maleficiatis il eft dit qu'on appelle des matrones pour avoir leurs ‘avis : volers habere certitudinem pleniorem,quafdam ma- tronas fue parochiæ providas & honeflas ad tuam præ- fentiam evocafi. En France autrefois il n’y avoit d’autres experts que ceux qui étoient nommés par les parties, ou qui étoient nommés d'office par le juge, lorfqu'il y avoit lieu de le faire. Nos rois voulant empêcher les abus qui fe com- smettoïent dans les mefurages & prifées de terres, vifites & rapports en matiere defervitude, partages, toifés , & autres aétes dépendans de l’architeäture &r conitruétion , créerent d’une part des arpenteurs Ju- rés, & de l’autre des jurés maçons &c charpentiers, en toutes les villes du royaume. La création des jurés-arpenteurs fut faite par Hen- t1 IL. par édit du mois de Février 1554, portant créa- tion de fix offices d’arpenteurs & mefureurs dés ter- res dans chaque bailliage, fénéchauflée, & autres reflorts. Henri III. par autre édit du mois de Juin 157$, augmenta ce nombre d’arpenteurs de quatre en chacune defdites jurifdiétions ; 1l leur attribua l’hérédité & la qualité de prudhommes-prifeurs de ter- res, Il y en eut encore de créés fous le titre d’experes- jurés-arpenteurs dans toutes les villes où il y a jurif- didtion royale, par édit du mois de Mai 1689. Tous ces arpenteurs-prifeurs de terres furent fupprimés par édit du mois de Décembre 1690, dont on par- lera dans un moment. | D'un autre côté Henri III. avoit créé par édit du mois d'Oftobre 1574, des jurés-maçons & char- pentiers en toutes les villes du royaume, pour les vifites, toifés, & prifées des bâtimens , & tous rap- ports en matiere de fervitude, partage, & autres actes femblables. IL y eut aufh au mois de Septembre 1668, un édit portant création en chaque ville du reflort du parle- ment de Touloufe, de trois offices de commiflaires- ‘prudhommes-experts Jurés, pour procéder à la véri- fication & eftimation ordonnées par juftice des biens & héritages faifis réellement, à la liquidation des dé- gâts , pertes, &c déterioration, à l'audition & clôture des comptes de tutelle & curatelle. Mais la plüpart des offices créés par ces édits ne furent pas leyés à çaufe des plaintes qui furent faites E X P contre ceux qui avoient été les premiers pourvûs de ces offices: c’eft pourquoi l'ordonnance de 1667, tir, xx. art, 11, Ordonna que les juges & les parties pourroient nommer pout experts des bourgeois ; &c. qu’en cas qu'un artifan füt intéreflé en {on nom, il ne pourroit être pris pour expers qu'un bour- geois. Mais comme il arrivoit tous les jours que des per- fonnes fans expérience fufifante s’ingéroient de faire des rapports dans des arts & métiers dont ils n’a- voient ni pratique ni connoïflance, Louis XIV. crut devoir remédier à ces defordres, en créant des ex- perts en titre ; ce qu'il fit par différens édits, Le premier eft celui du mois de Mai 1600, par lequel 1l fupprima les offices de jurés- maçons & charpentiers créés par l’édit du mois de Décembre 1574, & autres édits & déclarations qui auroïent. pü être donnés en conféquence ; & par le même édit 1l créa en titre d'office héréditaire pour la ville de Paris cinquante experss jurés ; favoir vingt-cinq bour- geois ou architeétes , qui auront expreflément & par ae en bonne forme, renoncé à faire aucunes entre- prifes directement par eux , ou indireétement par perfonnes interpofées , ou aucunes aflociations avec des entrepreneurs , à peine de privation de leur char- ge; & vingt-cinq entrepreneurs maçons, ou maîtres ouvriers: & à l’égard des autres villes, il créa fix Jurés-experts dans celles où il y a parlement, cham- bre des comptes, cour des aides; trois dans celles où il y a généralité, & autant dans celles où il ya préfidial, avec exemption de tutelle, curatelle, lo- gement de gens de guerre, & de toutes charges de ville & de police ; & en outre pour ceux de Paris, le droit de garde-gardienne au châtelet de Paris. Il eft dit que les pourvûs de ces offices pourront. être nommés experts ; avoir ceux de la ville de Pa- ris , tant dans la prevôté & vicomté, que dans toutes les autres villes & lieux du royaume; ceux des villes où il y a parlement, tant dans ladite ville que dans l'étendue du reflort du parlement; ceux des autres villes, chacun dans les lieux de leur établiffement ; & dans le reflort du préfidial ou autre jurifdiétion ordinaire de ladite ville, pour y faire toutes les vi- fites, rapports des ouvrages, tant à l'amiable qu’en juftice, en toute matiere pour raifon des partages, licitations, fervitudes , alignemens, périls imminens, vifites de carriere , moulins à vent & à eau, cours d'eaux, & chauflées defdits moulins, terrafles & jardinages, toifées, prifées , eftimation de tous ou- vrages de maçonnerie, charpenterie, couverture, menuiferie, {culpture, peinture, dorure, marbre, ferrurerie, vitretie, plomb, pavé, & autres ouvra- ges & réception d'iceux, & généralement de tout ce qui concerne & dépend de l'expérience des chofes ci-deflus exprimées ; avec défenfes à toutes autres perfonnes de faire aucuns rapports & autres aétes qui concernent ces fortes d’opéfations, & aux par- ties de convenir d’autres experis , aux juges d’en nom- mer d’autres d'office, & d’avoir égard aux rapports qui pourroient être faits par d’autres. | Ce même édit ordonne qu’il fera fait un tableau des cinquante experts, diftingué en deux colonnes, lune des vingt-cinq experts -bourgeois-architeêtes , l'autre des vingt-cinq experis-entrepreneuts. Îl regle leurs falaires & vacations ; ordonne qu'ils prêteront ferment devant le juge des lieux ; qu'à Parisles vingt- cinq experts-entrepreneurs feront four-à-tour toutes les {emaines la vifite detous les atteliers & bâtimens qui fe conftruifent dans la ville & fauxbourgs ; qu'ils {eront à cet effet afiftés de fix maîtres maçons, pour faire leur rapport des contraventions qu'ils remar- queront , dont les amendes feront perçües par Le fer- mier du domaine; qu’on ne recevra aucun maitre maçon, que les jwrés-experts. entrepreneurs n’ayent êté Mandés pour être préfens à l'expérience & chef. d'œuvre des afpirans, & qu'ils n'ayent été certifiés capables par deux defdits jurés, &c pat le plus ancien ou celui qui fera député de la premiere colonne, qui afliftera , fi bon lui femble, au chef-d'œuvre. Il y avoit déjà des grefliers de l’écritoire , pour écrire lesrapports des experts ; le nombre en fut aug- menté par cet édit, Voyez GREFFIERS DE L’ECRI- TOIRE. TT 4 Le fecond édit, donné par Louis XIV. fur cette matiere , eft celui du mois de Juillet de la même an- née, donné en interprétation du précédent, Il porte création en chaque ville du royaume où il y a bail- liage, fénéchauilée, viguerie, ou autre fiége & jurif- diétion royale, de trois experts, & un grefñer de lé: critoire dans chacune de ces villes pour recevoir leurs rapports. Le troifieme édit eff celui du mois de Décembre de la même année, par lequel Louis XIV. fupprima lès offices d’arpenteurs-prifeurs de terre, créés par édits des mois de Février 1554 & Juin 1575; & en leur place il créa en titre d'office trois experrs-pri- feurs & arpenteurs jurés dans chacune des villés où 1l y a parlement, chambre des comptes, & cour des aides, & auf dans les villes de Lyon, Marfeille, Orléans, & Angers, pour faire avec les fix experes jurés, créés par édit du mois de Mai précédent, pour chacune des villes où il y a parlement , chambre des comptes, & cour des aides, le nombre de neuf ex= perts -prifeurs & arpenteurs jurés ; & avec les trois créés par le mème édit, pour les villes de Lyon, Marfeille, Orléans , & Angers, le nombre de {rx ex- perts-prifeurs & arpenteurs jurés ; création de deux dans les villes où il y a généralité ou préfidial, pour faire avec les trois créés par le premier édit le nom- bre de cinq, & un quatrieme dans les autres villes Où 1l y en avoit déjà trois : enforte que tous ces ex: perts, à l'exception de ceux de Paris, fuffent doré- navant expercs-prifeurs 6 arpenteurs jurés , pour faire feuls, à l’exclufion de tous autres, tont ce qui eff porté par l'édit du mois de Mai 1690 ; comme auff tous les arpentages, mefurages, & prifées de ter- rés, vignes , prés, bois , eaux, îles, patis, commu- nes, & toutes les autres fonétions attribuées aux ar- penteñrs-prifeurs par les édits de 1 554 & 1575. Foy. ARPENTEURS. tte Le quätrieme édit eft celui du mois de Mars 1606, portant création d’offices d’experts-prifeurs & arpen- teurs jurés, pat augmentation du nombre fixé par les édits des mois de Mai, Juillet, & Décembre 1690. Au moÿen de ces différentes créations, il y a ptéfentement à Paris foixante experts jurés ; favoir trente experts -bourgeois , & trente experrs-enitre- preneurs. DE 2 L’édit de 1696 porte auffi création de déux of- ces dé prifeurs nobles dans chaque évêché de la pro- vince dé Bretagne. Dans le même tems il ÿY éut un Temblablé édit adreflé au parlement de Roïen, & un autre au parlement de Grenoble. Ilavoit été créé des offices de petits-voyers, dont les fonétions, par édit du mois de Novembre 1697, furent unies à celles des experts créés par édits de 1689, 1690, & 16096. En conféquence de ces édits, on avoit établi des experts jurés dans le duché de Bourgogne & dans les pays de Brefle , Bugey, & Gex, de même que dans es autres provinces du royaume. Mais fur les réMOntrances des états de la province dé Bourgo- gne,,ces officiers furent fupprimés par édit du mois d’AOÛt 1700, tant pour cette province, que pour les pays de Breffe, Bugey, & Gex. , ee Les maîtres Graveurs-Cifeleurs de Paris {ont ex- péris en titre , pour vérifications & tuptures des cellés. | CE E X P 303 , Lorfqu'il s’agit d'écriture, on nomme des maîtres ÉCHIVAINS expercs pour les vérifications. Dans toutes les villes où il y a des éxperts en titre, les parties ne peuvent convenir, & les juges ne peu- vént nommer d'office que des experes du nombre de ceux qui {ont en titre, à moins que cé né foit {ut des matieres qui dépendent de connoiffances propres à d'autres pérfonnes : par exemple s’il s’agit de quél- que fait de commerce, on nomme pOur experts des marchands; fi c’eft un fait de banque, on nomme des banquiers, # Le procès-verbal qué font les experts pour. conftaz ter l’état des lieux ou dés chofes qu'ils ont vüs » S'ap pelle rapport ; & quand on ordonne qu'une chofe fera eftimée 4 dire d'experts, cela fignifie que les experts diront leur avis fur leftimation, & eftimeront la chofé ce qu'ils croyent qu’elle peut valoir, Lorfque la conteflation eft dans un lieu où il n’y a point d'experts en titre, on nomme pour experts les perfonnes le plus au fait de la matiere dont il s’agit. Suivant l'ordonnance de 1667, titre xx. les jugé: mens qui ordonnent que des liéux & ouvrages 1e: ront vûs, vifités, toifés, ou eftimés par experts ; doivent faire mention exprefle des faits fur lefquels les rapports doivent être faits, du jugé qui fera com- mis pOur procéder à la nomination des éxperrs ,te- cevoir leur ferment & fapport, comme auffi du dé: lai dans lequel les parties devront comparoir parde- vant le commiffaire. Si au jour de l’affignation une des parties ne com- pare pas, ou eft refufante de convenir d'experts, lé commiflaire en doit nommer un d’office pour la par: tie abiente ou refufante, pour procéder à la vifite avec l'expert nommé par l’autre partie. Si lés deux parties refufent d'en nommer , le juge én nomme aufli d'office, le tout fauf à recufer ; & fi la recu- fation eft jugée valable , on en nomme d’autres à la place de ceux qui ont été recufés. Le commiflaire doit ordonner par le procès-ver- bal de nomination des experss, le jour & l'heure pouf comparoir devantihni & faire le ferment: ce qu'ils féront tenus de faire fur la premiere affionation ; & dans le même tems on doit leur remettre le ju- gement qui a ordonné la vifite, à laquelle ils doi- vent vacquer inceflamment. à Les juges & les parties peuvent nommer pour et: perts dés experts -bourgéois ; & en cas qu'un arffan loit intéreflé en fon nom éontre un bourgeois , on ne peut prendre pour tiers qu’ün exper- bourgeois. Il eft de la regle que les experts doivent faire ré- diger leur rapport fur le lieu par leur gréffiér, & figner la minute avant de partir de deflus le lieu. Voyez Pordonnance de Charles IX, de l'an 1567. Les experts doivent délivrer au commillaire leur rapport en minute, pour être attache à fon procès- verbal, & tranfcrit dans la même groffé ou cahier. Si les experts font contraires en leur rapport, le juge doit nommer d'office un tiers qui {éra aflifté des autres en la vifite ; & fi tous les experts S’accor- dent , ils ne donnent qu'un feul avis & par un mé- me rapport, finon ils donnent leur avis féparé- ment. L'ordonnance abroge l’'ufage dé faire recevoir en juitice les rapports d’experrs,, & dit feulement que les,parties peuvent les prodiure ou les. conteter , fi bon leur femble. La produétion dont parle l'ordon- nance, ne fe fait que quand l'affaire eft appointée; l'ufage eft de demander l’entérinement du rapport à ce que le juge n’ordonne que quand il trouve le rapport en bonne forme, & qu'il n’y a pas Lieu d’en ordonner un nouveau. j; Il eft défendu aux experts de recevoir aucun pré= fent des parties, ni, de fouffrir qu'ils, les défrayent où payent leur dépenfe, direétement ou indireftes 304 E X P ment, à peine de concuffion & de 300 livres d'a- | mende applicable aux pauvres des lieux. Les vaca- tions des experts doivent être taxées par le commit- faire. ‘La partie la plus diligente peut faire donner au procureur de d'autre partie, copie des procès-ver- baux & rapports d'experts ; & trois jours après pour- fuivre l'audience fur un fimple aête, fi l'affaire ef d'audience, ou produire le rapport d'experts , fi le procès eft appointé. | Les experts ne font point juges; leur rapport n’eft jamais confidéré que comme un avis donné pour in- ftruire la religion du juge ; &c celui-ci n’eft point af- tremt à fiuvre l'avis des experts. Si le rapport eff nul, ou que la matiere ne fe trou- ve pas fuffifamment éclaircie, le juge peut ordon- ner un fecond, & mème un troifieme rapport. 51 c’eft une des parties qui requiert le nouveau rap- port, & que le juge l’ordonne, ce rapport doit être fait aux dépens de la partie qui le demande. Voyez l'article 184. de la coûtume de Paris , & les coftumes de Nivernois ; Bourbonnois , Melun , Eflampes , &c Montfort. | Pour ce qui concerne La fonétion des experts en matiere de faux principal ou incident, ou de recon- noiflance en matiere criminelle, lorfque l’on a re- cours à la preuve par compataïfon d'écriture, voyez l'ordonnance du faux du mois de Juillet 1737 ,; FAUX & RECONNOISSANCE. (4) EXPERT-ÂRCHITECTE 04 EXPERT-BOURGEO!S, eft celui qui n’eft point entrepreneur de bâtimens, Voyez ce qui en ef? dit cr devant. EXPERT - ARPENTEUR - MESUREUR -PRISEUR , étoit un expert deftiné à mefurer 8t eftimer les ter- res, prés, bois, &c. Ces experts-arpenteurs ont été fupprimés. Voyez ce qui en eff dit ci-devant au mot Ex: PERT. ExPerT-BourGeoïis, eft différent d’un bour- geois que l’on nomme pour expert, Avant qu'il y eût des experts en titre, On nommoii pour experts des bourgeois , comme cela fe pratique encore dans les pays où il n’y a pas d'experts, Mais depuis la créa- tion des experts, dans les pays oùilyena, on en- tend par expert-bourgeois , un expert en titre qui n’eft pas entrepreneur de bâtimens. Voyez ci-devanr Ex- PERT. EXPERT-IURÉ , eft celui qui eft en titre d'office. Voyez ci-devant EXPERT. EXPERT-NOBLE ; il en fut créé par édit de 1696. Voyez ce qui en eff dit ci-devant au mot EXPERT. EXPERT NOMMÉ D'OFFICE, eft celui que le ju- ge nomme pour une païtie abfente, ou qui refufe d’en nommer , ou pour Les deux parties, lorfqw’elles n’en nomment point, ou enfin qu'il nomme pour tiers-expert, lorfque les parties ne s'accordent pas fur le choix. | EXPERT SURNUMÉRAIRE 04 SURNUMÉRAIRE : quelques auteurs appellent ainfi Le sers-expert , parce qu'il eft nommé outre le nombre ordinaire. ExPERT Tiers, eft celui dont les parties con- viennent, ou que le juge nomme d'office, pour dé- artager les experss qui font d’avis différent. (4) EXPIATION, £. f. ( Théologie.) C’eft ladion de fouffrir la peine décernée contre le crime, & par conféquent d’éteindre la dette ou de fatisfaire pour ane faute; ainfi l’on dit qu'un crime eft expié par l’ef- fufion du fang de celui qui l’a commis, Voyez Lus- TRATION , PROPITIATION , SATISFACTION. Les Catholiques romains croyent que les ames de ceux qui meurent {ans avoir entierement fatisfait à la juftice divine, vont après la mort dans le purga- toire, pour expier les reftes de leurs péchés. Voyez PURGATOIRE. ÆExpiarion fe dit aufi des cérémonies par lefqnel- Îles les hommes fe purifient de leurs péchés, & en particulier des facrifices offerts à la divinité, pouf lui demander pardon &implorer famiféricorde, Foy. SACRIFICE. La fête de l’expration chez les Juifs, que quelques traduéteurs appellent Ze jour du pardon, fe célébroit le dixieme jour du mois de Tifri, qui répondoit à une partie de nos mois de Septembre & d'Oûtobre. On s’y préparoit par un jeûne ; & enfuite le grand-prè- tre revêtu de fes habits facerdotaux, après avoir of- fert un bœuf en facrifice , tecevoit du peuple deux boucs & un bélier , qui lui étoient préfentés à l’en- trée du tabernacle ou du temple. Il tiroit le fort fur ces deux boucs, en mêlant deux billets dans l’urnes lun pour le Seigneur, &c l’autre pour azazel, c’eft- à-dire pour le bouc qui devoit être conduit hors du camp ou de la ville chargé des péchés du peuple, & appellé hireus emiffarius, bouc émüflaire, & par les Hébreux agazel. Voyez APOPOMPÉE & AZAZEL. Le srand-prêtre immoloit pour le péché le bouc qui étoit deftiné par le fort à être offert au Seigneur, ë réfervoit celui fur lequel le fort du bouc émiflaire étoit tombé : enfuite prenant l’encenfoir , du feu fa- cré des holocauftes , & d’un encens préparé qu'il jettoit deflus , il entroit dans le fanétuaire, y faifoit fept afperfions du fang du bouc qu'il avoit immolé ; après quoi il revenoit dans le tabernacle ou dans ie temple, y faifant des aïperfñons de ce même fans, & en arrofant les quatre coins de l'autel des holo- cauftes. Le fan@uaire, le tabernacle &c l'autel étant ainfi purifiés , le grand -prêtre fe faifoit amener le bouc émiflaire, mettoit fa main fur la tête de cet animal, confefloit fes péchés & ceux du peuple, &c prioit Dieu de faire retomber fur cette viéhime les malédiétions & la peine qu’ils avoient méritées. Le bouc étoit alors conduit dans un lieu defert, où il étoit mis en liberté, &, felon quelques-uns, préci- pité. Le grand-prêtre quittant alors fes habits, fe la= voit dans le lieu faint; puis les ayant repris, il of- froit en holocauite deux béliers, l’un pour le peuple, & l’autre pour lui-même. Il mettoit fur l'autel La graifle du bouc immolé pour lé péché du peuple ; après quoi tout Le refte de cette viétime étoit porté hors du camp, & brûlé par un homme qui ne ren- troit dans le camp qu'après s’être purifé en fe lavant: celui qui avoit conduit le bouc émiffaire dans le de- fert, en faifoit de même. Telle étoit l’expiarion {o- lennelle pour tout le peuple parmi les Hébreux. Les Juifs modernes y ont{ubftitué l’immolation d’un coq. Outre cetteexpiation générale, leurs ancêtres avoient encore plufeurs expiations particulieres pour les pé- chés d’ignorance, foit pour les meurtres involontai- res. foit pour les impuretés lécales , foit par des fa- ; P P £ ; P crifices, {oit par des ablutions ou des afperfions : on en peut voir l’'énumération & le détail dans le chap. x]. & plufieurs autres endroits du Lévitique. Les Chrétiens qui fe font lavés du fang de Agneau fans tache, n’ont point eu d’autres cérémonies d’ex- piation particuliere , que celle de l'application des mérites de ce fang répandu fur le Calvaire , laquelle fe fait par les facremens, & en particulier par le fa- crifice de la mefle , qui eft un même facrifice que ce- lui du facrifice de la croix ; les cérémonies, comme l’afperfion de l’eau benite, n'étant que des fignes ex- térieurs de la purification intérieure gi’opere en eux le S. Efprit. On expie fes péchés par la fatisfaétion c’eft-à-dire par les œuvres de pénitence qu’on pra- tique & qu'on accomplit par les mérites de Jefus- ® Chrift, Voyez SATISFACTION , MÉRITES, &c. (G) EXPIATION , (Lirrérature.) aête de religion établi généralement dans le Paganifme pour purifier les cou: pables &c les lieux qu’on croyoit fouillés, où pour appaifer la colere des dieux qu’on fuppofoit irrités. La cérémonie de l’expiation ne s’employa pas feu- | lement ent 2 mon “né 4) uns lement pout Les crimes , elle fut pratiquée dans mille autres occafions différentes ; ainfi ces mots fi fré- quens chez les anciens, expiare, luffrar €, purgare, Jebruare , fignifioient faire des aëfes de religion pour ef- facer quelque faute ou pour détourner des malheurs, à l’occafion des objets que la folle fuperftition pré- fentoit comme de finiftres préfages. Tout ce qui fem- bloit arriver contre l’ordre de la nature, prodiges, montres , fignes céleftes, étoit autant de marques du courroux des dieux ; & pour en éviter l'effet, on inventa des cérémonies religieufes qu’on crnt capa- bles de l’éloigner, Comme on fe forma des dieux tels que les infpiroit ou la crainte ou l’efpérance, on éta- blit à leur honneur un culte où ces deux pafñons trouverent leur compte : il ne faut donc pas être fur- pris de voir tant d’expiations en ufage parmi les Payens. Les principales, dont je vais parler en peu de mots, fe faifoient pour l'homicide, pour les pro- diges, pour purifier les villes, les temples & les ar- imces, On trouvera dans le recueil de Grœvius & de Gronovius, des traités pleins d’érudition {ur cette matiere. 1°. De toutes les fortes d'expiarions, celles qu’on employoit pour l’homicide, étoient les plus graves dés les fiecles héroïques. Lorfque le coupable fe trou- voit d’un haut rang , les rois eux-mêmes ne dédai- gnoient pas de faire la cérémonie de l’expiation : ainfi dans Apollodre, Copréus qui avoit tué Iphite, €ft expié par Euryfthée roi de Mycenes ; dans Héro- dote, Adrafte vient fe faire expier par Créfus roi de Lydie ; Hercule eft expré par Céix roi de Trachine ; Orefte , par Démophoon roi d’Athenes ; Jafon, par Circé, fouveraine de l’île d’Æa. Apollodore, 4r- gonautic. Lb. IV, nous a laiffé un grand détail de la cérémonie de cette derniere expiation, qu'il eft inu- file de tranfcrire. Cependant tous les coupables de meurtre invo- lontaire n'expioient pas leur faute avec tant d’appa- reil ; il y en avoit qui fe contentoient de fe laver fimplement dans une eau courante : c’eff ainf qu'A- chille fe purifia après avoir tué le roi des Léleges. Ovide parle de plufieurs héros qui avoient été puri- fiés de cette maniere ; mais il ajoûte qu'il faut être bien crédule pour fe perfnader qu’on puiffe être purgé. d'un meurtre à fi peu de frais: Ah nimium faciles qui trifla crimina cedis Flumneé rolli poffe pututis aqua, | Fat. GB. II. 43. Les Romains, dans les beaux jours de la républi- que, avôient pour lexpiation de l'homicide des cé- rémonies plus férienfes que les Grecs. Denys d'Ha- licarnafle rapporte comment Horace fut expié pour avoir tué fa fœur ; voici le paffage de cet hiftorien : “ Après qu'Horace fut abfous du crime de parricide, % le roi, convaincu que dansune ville qui faifoit pro- » feflion de craindre les dieux , le jugement des hom- # mes ne fuffit pas pour abfoudre un criminel, fit #* verur les pontfes, & voulut qu'ils appaifaflent # les dieux &r les génies, & que le coupable paffät * par toutes les épreuves qui étoient en ufage pour > expier les crimes où la volonté n’avoit point eu de * part. Les pontifes éleverent donc deux autels, l’un * à Junon proteärice des fœurs, l’autre au génie du # pays. On offrit fur ces autels plufeurs facrifices ® dexpiation, après lefquels on fit pañler le coupable # fous, le joug ». | … La féconde forte d’expiarion publique avoit lieu. dans l'apparition des prodiges extraordinaires, & étoitune des plus folennelles chez les Romains. Alors le fénat, après avoir confulté les livres fibyllins , ordonnoit des jours de jeûne, des fêtes, des prieres, des facrifices , des le&tifternes » pour détourner les malheurs dont on fe Croyoit menacé ; toute la ville Tone VI, ni + AS FER A 30$ étoit dans le deuil & dans la confternation , tous les temples étoient ornés, Les facrifices expiatoires 1e nouvellés, & les ledifternes préparés dans les places publiques. Voyez LECTISTERNE. La troifieme {orte d’expiarion fe pratiquoit pour purifier Les villes. La plüpart avoient un jour marqué pour cette cérémonie, elle fe faifoit à Rome le $ de Février. Le facrifice qu'on y offroit, fe nommoit arburbium , {elon Servius; & les victimes que l’on immoloit, s’appelloient amburbiales, au rapport de Feftus, Outre cette fête, il Y en avoit une tous les cinq ans pour expier tous les citoyens de la ville ; & c’eft du mot lufirare, expier, que cet efpace de tems a pris le nom de luftre. Les Athéniens porterent en- core plus loïn ces fortes de purifications » Car ils en ordonnerent pour les théatres & pour les places où fe tenoient les affemblées publiques. Une quatrieme forte d’expiation, étoit celle des temples & des lieux facrés : f quelque criminel mettoit les piés, le lieu étoit profané » il falloit le purifier. Œuipe exilé de fon pays, alla par hafard vers Athenes, & s'arrêta dans un bois facré près du. temple des Euménides; les habitans fachant qu'il étoit criminel l'obligerent aux explarions néceflaires.. Ces expiations confiftoient à couronner des coupes facrées, de laine récemment enlevée de la toifon: d’une jeune brebis; à des libations d’eau titées de trois fources ; à verfer entierernent & d’un feul jet la derniere libation, le tout en tournant le vifage vers le foleil : enfin il falloit offrir trois fois neuf branches d’olivier (nombre myftérieux), en pro- nonçant une priere aux Euménides. Œdipe, que for état rendoit incapable de faire une pareille cérémo- nie, en chargea [fmene fa fille. La cinquième & derniere forte d’expiation publi que, étoit celle des armées, qu'on purifioit avant & après le combat: c’eft ce qu’on nommoit armilufirie. Homere décrit au premier livre de lIliade, lexpiatiore qu'Agamemnon fit de fes troupes, Voyez ARMILUS- TRIE. . Outre ces expiations ; 11 ÿY en avoit encore pour étre 1utié aux grands & petits myfteres de Cérès,, à ceux de Mythra, aux Orgies, &ec. Ii y en avoit même pour toutes les aétions de la vie un peuimportantes. les noces, les funérailles, les voyages. Enfin le peu- ple recouroit aux purifications dans tout ce qu'il efti- moit. être de mauvais augure, la rencontre d’une belette, d’un corbeau, d’un lievre ; un fonge, un orage imprévû, & pareilles fottifes, Il eft vrai que pour ces fortes d’expiations particulieres il fuffifoit quelquefois de fe laver ou de changer d’habits ; d’au- tres fois on employoit l’eau , le fel, l'orge , le lau= rier & le fer pour fe purifier : Es vanum ventura hominrm Lenus omirid nOCIS Farre pio placent, € faliente fale. Tibull. 26, III. elep, jy. ver. 54 On croirait, après ce détail, que tout fans excep- tion s’expioit dans le Paganifime ; cependant on fe tromperoit beaucoup, car il paroît poñtivement par un paflage tiré du livre des Ponsifes que-cite Cicéron (leg. Gb. IT .) qu'il yavoitchez les Romains, comme chez les Grecs, des crimes inexpiables : facram com. miffum quod neque expiari porerit | impiè comrriflum efts guod expiari poterit, publici facerdoces expianto. Tel _eft ce pañlage décifif, auquel je crois pouvoir ajoû ter 1c1 le commentaire de l’auteur de l’£fprir des lois, parce que fon parallele entre le Chrifhanifme & le Paganifme fur les crimes irexpiables, eft un des plus beaux morceaux de cet excellent livre ; il méritéroit d’être gravé au frontifpice de tous les ouvrages théo- logiques fur cette importante matiere. « La religion payenne (dit M. de Montefquieu) , » cette religion qui ne défendoit que quelques. cris: Qq 306 E X P # mes groffiers , qui arrêtoit la main & abandonnoit | » le cœur, pouvoit avoir des crimes zzexpiables ; # mais une religion qui enveloppe toutes les paflions, # qui n'eft pas plus jaloufe des aétions que des defirs » & des penfées ; qui ne nous tient point attachés » par quelques chaînes, mais par unnombre innom- » brable de fils ; qui laifle derriere elle la juftice hu- » maine, & commence une autre juftice ; qui eft » faite pour mener fans cefle du repentir à l’amour, » &c de l'amour au repentir ; qui met entre Le juge & » le criminel un grand médiateur , entre le jufte &z » le médiateur un grand juge : une telle religion ne » doit point avoir de crimes izexpiables. Mais quoi- » qu’elle donne des craintes & des efpérances à tous, » elle fait affez fentir que s’il n’y a point de crime » qui par fa nature foit irexpiable, toute une vie » peut l'être ; qu'il feroit très- dangereux de tour- » menter la miféricorde par de nouveaux crimes &c » de nouvelles expiations; qu'inquiets fur les ancien- » nes dettes, jamais quittes envers le Seigneur, nous » devons craindre d’en contratter de nouvelles, de » combler la mefure, & d’aller jufqu’au terme où la » bonté paternelle finit ». Efprit des lois, liy. XXTF., ch. xuy. Laiflons au le@eur éclairé par l’étude de l’Hiftoire, les réflexions philofophiques qui s’offriront en foule à fon efprit fur l’extravagance des expiations de tous les lieux & de tous les tems ; fur leur cours, qui s’étendit des Egyptiens aux Juifs, aux Grecs, aux Romains, &c. fur leurs différences, conformes aux climats & au génie des peuples : en un mot, fur les caufes qui ont perpétué dans tout le monde la fu- perfition du culte à cet égard, 8e qui ont fait prof- pérer le moyen commode de contraéter des dettes, &c de les acquitter par de vaines cérémonies. Je fache peu de cas où l’on ait tourné les idées re- : ligieufes de l’expiation au bien de la nature humaine. En voici pourtant un exemple que je ne puis pafler fous filence. Les Argiens, dit Plutarque, ayant con- damné à mort quinze cents de leurs citoyens, les Athémiens qui en furent informés , frémirent d’hor- reur, & firent apporter les facrifices d’expiarion, afin qu'il plût aux dieux d’éloigner du cœur des Arpiens une fi cruelle penfée. Ils comprirent fans doute que la févérité des peines ufoit Les reflorts du gouverne- ment ; qu’elle ne corrigeoit point les fautes ou les ctimes dans leurs principes , & qu’enfin Patrocité des lois en empêchoit fouvent l'exécution. Arzicle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. EXPILATION D'HÉRÉDITÉ, (Jurifpr.) c’eft la fouftraétion en tout ou partie des effets d’une hé- rédité jacente, c’eft-à-dire non encore appréhendce par l'héritier. Îl faut auffi, pour que cette fouftrac- tion foit ainfi qualifiée, qu’elle foit faite par quel- qu'un qui n'ait aucun droit à la fucceffion; ainf cela n'a pas lieu entre co-héritiers. Ce délit chez les Romains étoit appellé crimrer ex- pilate hareditatis, 8 non pas furtum, c’eft-à- dire larcin , parce que l’hérédité étant jacente, il n’y a encore perfonne à qui on puifle dire que le Harcin foit fait. L'héritier n’eft pas dépoffédé des effets fonf- traits, tant qu'il n’en a pas encore appréhendé la offeffion ; & par cette raifon l’aétion de l'avoir ap- pellée aého furti, n’y avoit pas lieu: on ufoit dans ce cas d’une pourfuite extraordinaire contre celui qui étoit coupable de ce délit. Cette attion étoit moins grave que celle appellée aflio furti; elle n'étoit pas publique , mais privée : c’eft-à-dire que celui qui Pintentoit, ne pourfuivoit que pour fon intérêt particulier, & non pour la ven- géance publique. Le jugement qui intervenoit, étoit pourtant infa- mant ; c’eft pourquoi cette pourfuite ne pouvoit être intentée que contre des perfonnes çontre lefquellès on autroit pu intenter l’aétion frs, fi l’hérédité eût été appréhendée ; ainfi cette aétion n’avoit pas lieu contre la femme qui avoit détourné quelques effets de la fuccefhion de fon mari : 1l y avoit en ce cas une ation particuliere contr’elle, appellée aéo rerum amatarum ; dont le jugement n’étoit pas infamant, . Au refte la peine du délit d'expilation d'hérédise étoit arbitraire chez les Romains , comme elle Peft encore parmi nous. Outre la refhitution des effets enlevés, & les dom- mages & intérêts que l’on accorde à l'héritier, celui qui a fouftrait les effets peut être condamné à quel- que peine aflliétive , & même à mort, ce qui dépend des circonftances ; comme, par exemple, fi c’eft un domeftique qui a fouftrait les effets. L’héritier qui, après avoir répudié la fuccefion en a fouftrait quelques effets, peut être pourfuivi pour caufe d’expilarion d'hérédite, A l'égard du conjoint furvivant , ou des héritiers du prédécédé qui recelent quelques effets, voyez RE- A Voyez le titre du digefte expilatæ hæreditaris. EXPIRATION, f. f. expirario, (Phyftolog.) c’eit une partie eflentiellede Paëtion par laquelle s’exhale la refpiration ; c’eft celle qui fair fortir des poumons l’air qui y a pénétré pendant linfpiration. Foyez RES- PIRATION. | Expiration, quand on joint l’épithete de derniere, fignifie la même chofe que /4 mors, C’eft cette der- mere attion du corps qui s'exerce , non'par une force qui dépende de la volonté, ou qui foit l'effet de la _ vie, mais par une force qui lui eft commune avec tous les corps, même inanimés ; ainfi l’air eft chaffé de la poitrine dans ce dernier inftant , parce que les forces de la vie ceffant d'agir, & les mufcles inter- coftaux étant rendus comme paralytiques par le dé- faut d'influence du flude nerveux, les fepmens car- tilagineux des côtes, qui ont été flechis & bandés par l’aéion de ces mufcles , fe redreflent par leur propre reflort, dans le moment qu’elle ceffe ; ils ra- baïflent les côtes en même tems que le diaphragme fe relâche & remonte dans la poitrine ; ce qui en di- minue la capacité en tous fens , & en exprime l’air pour la derniere fois. Foyez MorT. (4) _ EXPIRATION , (Comm.) fin du terme accordé, jugé ou convenu pour faire une chofe ou pour s’ac- quitrer d’une dette, On dit l'expiration d’un arrêt de furfeance, l’expi- ration des lettres de répi, l'expiration d’une promef- fe, d’une lettre de change, d’un billet payable au porteur. Dittionn. de Commerce, EXPIRER , (Comm.) finir, être à La fin ou au bous du terme, en parlant d’écrits ou de conventions, pour l'exécution defquels il y a un terme préfix. On dit en ce fens, votre promef]e eft expirée, il y a long-tems que j'en attends le payement. Il faut faire fon protêt, faute de payement d’une lettre de change, dans les dix jours de faveur; on court trop de rifque de les laifer expirer. Ditlionn. de Commerce. EXPLÉTIF , EXPLÉTIVE., adj. rerme de Gram- maire, On dit, rot explétif (méthode greque , liv. vur, c,xv. art, 4.) ; & l’on dit, particule explétive. Servius ( Ænæid, verf. 424.) dit ,expleriva conjunéhio , & l’on trouve dans fidore, Ziv. I. chap. xj. conjunéliones ex- pletive. Au lieu d’explérif 8 d'explétive , On ditauffi, Juperflu oifif ; furabondanr. 3 Ce mot explérif vient dulatin explere , remplir. En effet, les mots exp/érifs ne fervent , comme les in- terjeétions , qu'à remplir le difcours, & n’entrent pour rien dans la conftruétion de la phrafe, dont on entend également le fens , foit que le mot expluf foit énoncé ou qu'il ne le-foit pas. Notre moi & notre vous font quelquefois exp/érifs | dans le ftyle familier : on fe fert de 05 quand on 2] ETIX CP parle à l'impératif 8 au préfent : on fe fert de vous dans les narrations. Tartuffe, dans Moliere ; aé£. ay. fc. 2. voyant Dorine, dont la gorge ne lui paroif- {oit pas aflez couverte, tire un mouchoir de fa po- che , & lui dit : À o + + « Ah,rmion Dieu, jeyons prie, Avant que de parler , prenez-moi ce mouchoir ! & Marot a dit : Faites- les moi Les plus laïds que l’on puiffe ; . Pochez cet œil , feffez-moi cette cuiffe. Enforte que lorfque je lis dans Térence ( Heaur. ait, j. fe. 4. verf. 32.) , fac me ut fciam, je fuis fort tenté de croire que ce meeft explétif en latin, comme notre "10: en françois. On a auffi plufieurs exemples du vous explétif, dans les facons de parler familieres : / vous la prend, € l'emporte , &c. Notre même eft fouvent expléuf : le roi y ef? venu lui-même: j'irai moi-même ; ce même “ajoute rien à la valeur du mot roi, ni à celle de 7e. | Au troïfiemé livre de l’Enéide de Virgile , vers 632. Achéménide dit qu'il a vû /xi-mémele Cyclope fe faifir de deux autres compagnons d'Ulyfle, &c les dévorer : . L Vidi, ego-met, duo de numero , &tc. Où vous voyez qu'après vädi & après ego, la par- ticule mes n’ajoûte rien au fens , ainfi ses eff une par- ticule expéerive, dont il y a plufieurs exemples : ego- met narrabo ( Térence, Adelphes , aü. jv. fe. 3. ver]. 13.), & dans Cicéron, au 4v. F. épi. Jx. Vatinius prie Cicéron de le recevoir tout entier fous fa pro- tection , füfcipe me-mer totum ; c’eft ainfi qu’on lit dans les manufcrits. La fyllabe er, ajoûtée à l'infinitif paffif d’un verbe latin,eft explétive,puifqu’elle n'indique nitems,niper- fonne, ni aucun autre accident particuher du ver- be ; il eft vrai qu’en vers, elle fert à abrévier li de linfinitif, 8 à fournir un daétyle au poëte: c’eft la raïon qu’en donne Servius fur ce vers de Virgile: Dulce caput, magicas invitam accingi-er artes. . IT, En. v. 493. Accingier , id ef?, pr@parari ; dit Servius 3 ACCIX- CIER autem utad infinitum modum ER addatur , ratio efficic metri ; ram cum in eo ACCIN GI ultima fit longa ; addité ER fyllabé, brevis.fie ( Servius, ibid. ). Mais ce qui eft remarquable , & ce qui nous autorife à regarder cette fyllabe comme explétive, c’eit qu'on en trouve aufhi des exemples en profe : Vans cliens , pro fe caufam DICIER vulr. apud: Cic. lv. V. ad familiares, epift. jx. Quand on ajoûte ainf quel- que fyllabe à la fin d’un mot, les Grammairiens di- {ent que c’eft une figure qu’ils appellent paragoge. Parmi nous, dit M. l'abbé Repnier , dans ja gram- maire , pag. 565$. in-4°. il y a aufli des particules explétives ; par exemple , les pronoms me, te, fe, joints à la particuleez, comme quand on dit : Jemr'en retourne , 1l5°en va ; les pronoms noi, toi, lu, em- ployés par repétition : s°2/ re veur pas vous le dire ; je vous le dirai; moi ; il ne m'appartient pas, à mOi , de me rnéler de vos affaires ; il lui appartient bien, à lu, de parler comme 1l fait, &c.. Ces mots enfin , feulement , à tout hafard , après tout, & quelqu'autres , ne doivent fouvent être re- gardés que comme des mots explétifs & furabon- dans, c’eft-à-dire des mots qui ne contribuent en rien à la conftruétion ni au fens de la propoñition , mais 1ls ont deux fervices. 1°. Nous avons remarqué ailleurs que les langues fe font formées par ufage & comme par une efpece d'inftiné, & non après une délibération raifonnée de Tome VI, LE E X P 307 tout un peuple ; ainf quandicertaines façons de par- ler ont été autorifées par une langue pratique, & qu'elles font reçues parmi.les honnêtes gens de la nation, nous devons les admettre, quoiqu’elles nous paroiffent compofées de mots redondans & .combi- nés d’une maniere qui ne nous paroît pas réguliere. Avons-nous à traduire ces deux mots d'Horace ; Junt quos , &cc. au lieu de dire quelques-uns fonr qui, êtc. nous devons dire, i/y enaqui, &c. on pren- dre quelqu’autre tour qui.foit en ufage parmi nous. : L’académie Françoilé a remarqué que dans cette phrafe : c’eff une affaire où il y va du falut de l'ésar , la particule y paroît inutile , puifque o2 fuit pour le ens ; ais, dit l'académie , ce font la des formules dont on ne peut rien ôter (remarques & décifions de l’acad, Franç. chez Coiïgnard, 1698.) : la particule ne eft aufh fort fouvent explérive , &t ne doit pas pout cela être retranchée : J'ai affaire, & Je ne yeux pas qu'on vienne 1m 1nLerTOMpre ÿ Je Crairs pOuTtANE que vous neventez: que fait là ce ze ? c'ef vorre venue que je crains ; Je devrois donc dire fimplement , je crains que vous veniez : non, dit l'académie , :/ eff certain , ajoûte-t-elle, auffi-bien que Vaugelas, Bouhours, Éc. qu'avec craindre , ermpécher, & quelqu’autres ver- bes > 1l faut néceffairement ajoûter la négative ze : j empêcherai bienque vous ze foyez dunombre, &c. Remarg. & décif. de l'acad, pag. 30. C'eft la pentée habituelle de celui qui parle , qui attire cette négation : Je 7e veux pas que VOUS Veniez ; Me crains , en fouhaitant que vous ne veniez pas : mon efprit tourné vers la négation , la met dans le dif- cours. Voyez ce que nous avons dit de la fyllepfe & de l’attraétion , ax mot CONSTRUCTION, rom. IF, pag. 78 E& 79. Ainfi le premier fervice des particules explérives, c’eft d'entrer dans ceïtaines façons de parler con- facrées par l’ufage, Le fecond fervice, & le plus raifonnable, c’eft de répondre au fentiment intérieur dont on eft afledé, &c de donner ainfi plus de force & d'énergie à l’ex- preffion. L'intelligence eft prompte; elle n’a qu’un inftant , fpiritus quidem promptus eff ; mais le fenti- ment eft plus durable ; 1l nous affede , & c’eft dans le tems que dure cette affefion, que nous laiflons échapper les interjeétions , & que nous prononçons les mots explerifs ; qui font une forte d'interjeion, puifqu'ls font un effet du fentiment. aa C’eft à vous a fortir , vous qui parlez. Moliere. Vous qui parlez, eft une phrafe explétiye, qui don- ne plus de force au difcours. Je l'ai vé , dis-je ,v& , de mes propres yeux vi, Ce qu’on appelle v4. Molere, Tarruffe, aëf. v. fe. 3 Et je ne puis du tout me mettre dans l’efprit , Qu'il air ofé tenter Les chofes que l’on dit. Id. ip. Ces mots, v4 de mes yeux , du tout , font explérifs, & ne fervent qu'à mieux aflürer ce que l’on dit: Je ne parle pas fur le témoignage d'un autre: je l'ai vi moi- même ; je l'ai entendu de mes propres oreilles : & dans Virgile, au zeuvieme livre de l'Enéide, vers 457. Me, me adfum qui feci , 1m me convertite ferrum. Ces deux premiers me ne font là que par énergie & par fentiment : elocurio ef£ dolore turbati ; dit Ser- vius. (F) EXPLICITE , adj. ( Gramm. & Théolog. ) terme de l’école ; expliqué , développé. Le contraire & cor- relatif eft implicite, qui fignifie ce qui n'eff pas dif. tinclement exprimé. On dit, volonté explicite, volonté implicite. | Volonté explicire, eft une volonté bien exprefe &-bien marquée. Volonté implicite au contraire eft Qqi 308 E X P celle qui fe manifefte moins par des paroles que par des circonftances & par des faits. On dit de même, oi explicite , foi 1mplicire. : La foi explicite, de [a maniere qu’on l'entend d’or- dinaire, eft-un acquiefcement formel à chacune des vérités que l'Eglife nous propofe; au lieu que la foi implicite eft un acquiefcement vague, indéterminé, mais refpettueux & fincere , pour tout ce qui peut faire l’objet de notre croyance, C’eft ce qu’on ap- pelle Za-foi du charbonnier. La plüpart des hommes n’ont proprement qu’une foi implicite ; ils n’ont communément ni aflez d’in- telligence, n1 aflez de loiïfir, pour difcuter tant de propofitions que les théologiens nous préfentent comme des dogmes, & dont la connoiffance appro- fondie eft néceffaire pour la foi explicite, prife au fens le plus étendu. Mais ils ont prefque tous plus de tems & de pénétration qu'il n’en faut pour faifir le dogme explicire & fondamental que le Sauveur nous recommande ; je veux dire la confiance ou la foi que nous devons avoir en fa parole, en fa puif- fance, & en fa miflion. C’eft principalement dans ce dernier fens que le inot foi eft employé dans le nouveau-Teftament , comme on pourroit le prouver 1ci par la citation d’un grand nombre de pañlages. C’eft même fur la foi que nous devons avoir en J. C. qu’eft fondée celle que nous devons à l’Eglife ; dès qu’il eft cer- tain qu'elle a parlé, nous devons nous foûmertres, fans referve : mais le refpe& que les décifions de l'E- glife exigent de nous, ne doit être donné qu'à des décifions inconteftables, & non à de fimples opi- nions débattues parmi les Scholaftiques. C’eft fur quoi les fideles ne fauroient êtretrop attentifs. Foyez For,EGLise, 6e. Cer article ef de M. FAIGUET. EXPLOIT , . m. (Jzrifprud, ) fignifie en général tout aéte de juftice ou procédure fait par le minifte- re d’un huiflier ou fergent ; foit judiciaire , comme un exploit d'ajournement, qu’on appelle auff exploit d’affignation ou de demande ; foit les aétes extrajudi- ciaires, tels que les fommations, commandemens , faifies, oppoñtions, dénonciations, proteftations , & autres actes femblables. . Quelques-uns prétendent que le terme d’exploir vient du latin explicare, feu expedire ; maïs il vient plûtôt de placitum , plaid : on difoit auf par cor- ruption plaitum , & en françois pler. On difoit auffi explacitare fe, pour Je tirer d'un procès, & de-là on a appellé exploits ou exploite, les aétes du miniftere des huifliers ou fergens qui font ex placito , ou pour exprimer que ces actes fervent à fe tirer d’une con- teftation. Les formalités des exploits d’ajournemens &c cita- tions font reglées par le cirre ij. de l’ordonnance de 1667 : quoique ce titre ne parle que des ajourne- mens, 1l paroit que fous ce terme lPordonnance a compris toutes fortes d'exploits du miniftere des huifiers ou fergens , même ceux qui ne contiennent point d’afignation, tels que les commandemens , oppofitions , Ge. | On ne voit pas en effet que cette ordonnance ait reglé ailleurs la forme de ces autres explorrs ; & dans le sitre xxxuy. des faifies & exécutions, arr. 3, elle or- donne que toutes les formalités des ajournemens fe- ront oblervées dans les exploits de faifie & exécu- tion, & fous les mêmes peines ; ce qui ne doit néan- moins s'entendre que des formalités qui fervent à rendre l'exploit probant & authentique, & à le faire parvenir à la connoïffance du défendeur , lefquelles formalités font communes à tous les exploirs en gé- néral ; mais cela ne doit pas s'entendre de certaines formalités qui font propres aux ajournemens , com- me de donner aflignation au défendeur devant yn juge compétent, de déclarer le nom & la demeure du procureur qui eft conftitué par le demandeur. Il eft vrai que l'ordonnance n’a pas étendu nom- mément aux autres exploërs les formalités des ajour- nemens , comme elle l’a fait à l'égard des fafies & exécutions , mais 1l paroït par le procès-verbal, & par lès termes mêmes de Pordonnance, que l’efprit des rédaéteurs a été de comprendre fous le terme d’ajournement toutes fortes d’exploirs, & qu'ils fuf fent fujets aux mêmes formalités, du moins pour celles qui peuvent leur convenir , lordonnance n'ayant point parlé ailleurs de ces différentes fortes d’exploits qui {ont cependant d’un ufage trop fré- quent, pour que l’on puifle préfumer qu'ils ayent été oubliés. C’eft donc dans les anciennes ordonnances , dans ce que celle de 1667 prefcrit pour les ajournemens, &c dans les crdonnances , édits, & déclarations po- fférieures que l’on doit chercher les formalités qui font communes à toutes fortes d’exploits, Les premieres ordonnances de la troifieme race qui font mention des fergens ne fe fervent pas du terme d’exploirs en parlantde leurs aétes ; ces ordon- nances ne difent pas non plus qu’ils pourront exploi- ter , mais fe fervent des termes d’a/ourner ; exécuter exercer leur office. " £ La plus ancienne ordonnance où j’aye trouvé le terme d’exploir , eft celle du roi Jean, du pénultieme Mars 1350, où il dit que les fergens royaux n’au- ront que huit fols par jour quelque nombre d’exploirs qu'ils faffent en un jour, encore qu'ils en faffent plu- fieurs, & pour diverfes perfonnes ; qu’ils donneront copie de leur commiflion au lieu où ils feront l’ex- ploit , & aufli copie de leurs refcriptions s'ils en font requis ; le terme dereftriprions femble fignifier en cet endroit la même chofe qu’explois rédigé par écrit, Dy Pendant Îa captivité du roi Jean, le dauphin Charles, en qualité de lieutenant général du royau- me , fit une ordonnance au mois de Mars 1356, dont l'article 9 porte que les huiffiers du parlement, les fergens à cheval, & autres en allant faire leurs ex- ploits menoient grand état, & faifant grande dépen- fe aux frais des bonnes gens pour qui ils faifoient les exploits ; qu'ils alloient à deux chevaux pour gagner plus grand falaire, quoique s’ils alloientpour leurs propres affaires, ils iroient fouvent à pié, ow feroient contens d’un cheval ; le prince en confé- quence regle leurs falaires, &c il défend à tous rece- veurs, gruyers, ou vicomtes d'établir aucuns fer- gens ni commiffaires , mais leur enjoint qu'ils faflent faire leurs exploits & leurs exécutions par les fergens ordinaires des baïllages ou prévôtés. Ces exploits étoient comme on voit des contraintes ou aétes du miniftere des fergens. | Dans quelques anciennes ordonnances, le terme d’exploirs fe trouve joint à celui d’emerde, C’eft ainf que dans une ordonnance du roi Jean du 25 Septeme bre 1361 , il eft dit que certains juges ont établi plu- fieurs receveurs particuliers pour recevoir les amen- des, compofñtions, & autres exploirs qui fe font par- devant eux. Il fembleroit que le terme exploit fignie fie en cet endroit we peine pécuniaire, comme l’a- mende, à moins que l’on n’ait voulu par-là défigner les frais des procès-verbaux, & autres aétes qui fe font devant le juge, &c que l’on n’ait défigné le coût de l’aéte par le nom de l’aéte même. Le terme d’ex- ploit fe trouve aufi employé en ce fens dans ph fieurs coûtumes, & il eff évident que l’on a pù com- prendre tout-à-la-fois fous ce terme un aête fait par un huiflier ou fergent , & ce que le défendeur devoit payer pour les frais de cet aéte. L’ordonnance de Louis XII. du mois de Mars 1498 , parle des exploirs des fergens & de ceux des EX P fous-fergens ou aides : elle déclare nuls ceux faits par les fous-fergens; & à l'égard des fergens, elle leur défend de faire aucuns ajournemens ou autres exploits fans records & atteftations de deux témoins, ou d’un pour le moins, fous peine d’amende arbi- traire, en grandes matieres ou autres dans lefquel- les la partie peut emporter gain de caufe par un feul défaut. L’ordonnance de 1667 obligeoit encore les huifiers à fe fervir de records dans tous leurs ex- ploirs ; mais cette formalité a été abrogée au moyen du contrôle, & n’eft demeurée en ufage que pour les exploits de rigueur , tels que les commandemens retordés qui précedent la faifie réelle, les exploits de faifie réelle, Les faifies féodales, demandes en re- trait lignager , emprifonnemens, &c. L'article 9 de Pordonnance de 1539, porte que fuivant les anciennes ordonnances, tous ajourne- mens feront faits à perfonne ou domicile en préfence de records & de témoins qui feront infcrits au rap- port & exploit de l’huifier ou fergent, & fur peine de dix livres parifis d'amende. Le rapport ou explor ef en cet endroit Paéte qui contient l’ajournement. On appelloit alors l’exploit rapport de l’huiffer , parce que c’eft en effet la relation de ce que l’uuffer a fait, & qu'alors l’exploir fe rédigeoit entierement fur le lieu ; préfentement l’huifier drefle l'exploit d'avance , & remplit feulement fur le lieu ce qui eft néceffaire. Cette ordonnance de 1539 n’oblige pas de libel- ler toutes fortes d’exploirs , mais feulement ceux qui concernent la demande & l’aétion que la novelle . 112 appelle Æbelli conventionem , & que nous appel- lons exploit introduitif de l'inflance, à quoi l’ordonnan- ce de 1667 paroît conforme. L’édit de Charles IX. du mois de Janvier 1573, veut que les huifiers & fergens faffent regiftre de leurs exploits en bref pour y avoir recours par les parties en cas qu’elles ayent perdu leurs exploits ; cette formalité ne s’obferve plus, mais les repiftres du contrôle y fuppléent. Les formalités des exploits font les mêmes dans tous les tribunaux tant eccléfiaftiques que féculiers: elles font aufi à-peu-près les mêmes en toutes ma- tieres perfonnelles, réelles, hypothécaires, où mixs tes, civiles , criminelles, ou bénéficiales , fauf le li- belle de l'exploit, qui eft différent felon l’objet de la conteftation. | Dans la Flandre, l’Artois , le Haynaut, l’Alface, & le Rouflillon, on donnoit autrefois des affigna- tions verbalement & fans écrit ; mais cet ufage a été abrogé par l’édit du mois de Février 1696, & la pre- miere regle à obferver dans un exploir , eft qu'il doit être rédigé par écrit à peine de nullité. I] y a néanmoins encore quelques exploiss qui fe font verbalement , tels que la clameur de haro: les gardes-chafle aflignent verbalement à comparoîïtre ‘en la capitainerie ; les fergens verdiers, les fergens dangereux , & les mefliers donnent aufli des aff- gnations verbales ; mais hors ces cas, l’exploir doit être écrit. Il n’eft pas néceflaire que l’exploir foit entierement écrit de la main de l’huiflier ou fergent qui le fait ; il peut être écrit de la main de fon clerc ou autre per- fonne. Bornier prétend que l'exploit ne doit pas être écrit de la main des parties; mais cela ne doit s’en- tendre que dans le cas où l'exploit feroit rédigé fur le lieu, parce que les parties ne doivent pas être Préfentes aux exécutions, afin que leur préfence n'anime point leur adverfaire. Les buifiers ou fergens font feulement dans l’ufa- ge d'écrire de leur propre main, tant en l'original qu'en la copie de l’exploir , leurs noms & qualités, & le nom de la perfonne à laquelle ils ont parlé & lafé copie de l'explois ; ce qu'ils obfervent pour s E X P 309 juftifier qu'ils ont donné eux-mêmes l’expéoir, Il n'y a cependant point de reglement qui les aflujettiffe à écrire aucune partie de l’exposr de leur propre main. Il eft vrai que l’arricle 14. du sitre ij, de l’ordon- nance de 1667, qui veut que les huiffiers fachent écrire & figner , femble d’abord fuppofer qu'il ne fufit pas qu'ils fignent Pexploi, qu’il faudroit auffi qu'ils en écriviflent le corps de leur propre main: mais l’article ne le dit pas expreflément , & les nul- lités ne fe fuppléent pas. L’ordonnance n’a peut-être exigé que les huifhers fachent écrire , qu'afin qu'ils lifent & fignent l’explois en plus grande connoïiflance de caufe, & qu’ils foient en état d'écrire la réponfe ou déclaration que le défendeur peut faire fur le lieu au moment qu'on lui donne l’exploir , & d’écrire les autres mentions convenabies fuivant l'exigence des cas, fuppoté qu'ils n’euflent perfonne avec eux par qui ils puflent faire écrire ces fortes de réponfes ou mentions : 1l eft mieux néanmoins que l’huiffier rem- plifle du moins de fa main le parlant à , c’ett-à-dire la mention de la perfonne à laquelle il a parlé en donnant l’exploir, 8 les réponies, déclarations , & autres mentions qui peuvent être à faire. Au refte il eft néceflaire , à peine de nullité, que les huifliers ou fergens fignent l'original & la copie de leur explore. | Il eft défendu aux huifliers & fergens, par plu- fieurs arrêts de reglemens, de faire faire aucunes f- gnifications par leursclercs, à peine de faux, notam- ment par un arrêt du 22 Janvier 1606 ; & par un re- glement du 7 Septembre 1654, article 14. il eft dé- fendu aux procureurs, fous les mêmes peines, de recevoir aucunes fignifications que par les mains des huifliers : mais ce dernier reglement ne s’obferve pas à la rigueur ; les huiffiers envoyent ordinairement par leurs clercs les fignifications qui fe font de procu- reur à procureur. Depuis 1674 que le papier timbré a été établi en France, tous exploiss doivent être écrits für du pa- pier de cetteefpece, à peine de nullité, Il faut fe {er- vir du papier de la généralité & du tems où fe fait l'exploit ; l'original & la copie doivent être écrits fur du papier de cette qualité, Il y a pourtant quel- ques provinces en France où l’on ne s’en {ert pas. Tous exploits doivent être rédigés.en françois, à peine de nullité, conformément aux ordonnances qui ont enjoint de rédiger en françois tous aétes pu- blics. | On doit auf, à peine de nullité, marquer dans l’exploir la date del’année , du mois, & du jour au- quelil a été fait, On ne trouve cependant point d’or- donnance qui enjoigne d’y marquer la date du mois & de l’année : mais cette formalité eft fondéeren rai- fon, & l'ordonnance de Blois la fuppofe néceffaire, puifque l’article 173 de cette ordonnance, enjoint aux huiffiers de marquer le jour & le tems de devant ou après midi, Il eft vrai que cet article ne parle que des exploits contenant exécution, faiñe, ou arrêt, qui font en effet prefque les {euls où l’on fafle men- tion du tems de devant ou après midi. À l'égard des autres exploits , il fuit d’y marquer la date de l’an- née, du mois, & du jour, comme cela fe pratique dans tous les aëtes publics : ce qui a été fagement établi, tant pour connoître fi l’huiffier avoit alors le pouvoir d’inffrumenter, & fi l’exploir a été fait em un jour convenable , que pour pouvoir juger fi les pourfuites étoient bien fondées lorfqu’elles ont été faites. : / On ne peut faire aucuns exploits les jours de di , , nn ER . manche & de fêtes à moins qu'il n’y eût périlen la demeure, ou que le juge ne l’eût permis en connoif- fance de caufe ; hors ces cas, les exploits faits un jour de dimanche ou de fête font nuls , comme il‘eft at- tefté par un aéte de notoriété de M. le lieutenant ci= 310 EXP vil le Camus, du 3; Maï 1703 : mais fuivant ce même ae, on peut faire tous exploits pendant les vaca- tions & jours de ferie du tribunal. La plüpart des exploits commencent par la date de l’année, du mois, du jour; 1l n’eft pourtant pas eflentiel qu’elle foit-ainfi au commencement : quel- ques huiffiers la-mettent à la fin, & cela paroît mê- me plus régulier, parce que l’exp/oir pourroit n’a- voir pas été fini le même jour qu’il a été commencé. Il n’y a point de-replement qui oblige de marquer dans les exploits à quelle heure ils ont été faits ; l’or- donnance de Blois ne l’ordonne même pas pour les faifes :-1l feroit bon cependant que l'heure füt mar- quée dans tous les explozrs, pour connoître s'ils mont as été donnés à des heures indûes ; car ils doivent ‘être faits de jour : quelques praticiens ont même pré- tendu que c’étoit de-là que les exploits d’affignation ont été nommés ajournement ; mais ce mot fignifie affignation-a-certain jour. Pour ce qui eft du lieu où l'exploit eft fait, quoi: qu'il ne foit pas d’ufage de le marquer à la fin com- me dans les autres aûtes, 1l doit toujours être expri- mé dans lecorps de l’explois ; fi l'huiffier inftrumente ‘dans le lieu de fa réfidence ordinaire , & que l'exploit {oit donné à la perfonne , 1l doit marquer en quel en- droit il l’a trouvé ; fi c’eft à domicile, 1l doit marquer le nom de la rue ; s’il fe tranfporte dans un autre lieu ‘que celui de fa réfidence , il doit en faire mention. L’étendue du reflort dans lequel les huifñiers & ergens peuvent exploiter, eft plus ou moins gran- de, felon le titre de leur office. Voyez HuiIss1ERS ‘6 SERGENS. L’exploit doit contenir le nom de celui à la requête de quu il eff fait ; mais cette perfonne ne doit pas y être préfente: cela eft expreflément défendu par l’or- ‘donnance de Moulins, arsicle 32. qui porte que les huifiers ne pourront aucunement s’accompagner des parties pour lefquelles ils exploiteront, qu’elles pour- ront feulement y envoyer un homme de leur part, pour défigner les lieux &c les perfonnes ; auquel cas celui qui fera ainfi envoyé, y pourra aflifter fans fuite & fans armes. L’ordonnance ne donne point de recours à la par- tie contre l’huifier, pour raïfon des nullités qu’il peut commettre ; c’eit pour cela qu’on dit commu- nément, 4 al exploite point de garant : cependant lorfque la nullité eft telle qu’elle emporte la déchéan- ce de l’aétion, comme en matiere de retrait ligna- ger, l'huiffier en eft refponfable. Les huiffers doivent, à peine de nullité, marquer dans l’exploir leur nom, furnom, & qualités, la ju- rifdiéion où ils font immatriculés , la ville, rue, &c paroïfle oùuls ont leur domicile, & cela tant en la co- pie qu’en l'original de exploit ; ils font même dans ’ufage d'écrire leurs qualités, matricule & demeure de leur propre main, pour faire voir qu'ils ont eux- mêmes dreflé l’exploir : mais il n’y a pas de reglement qui l’ordonne. Ils doivent auf, à peine de nullité, marquer dans Pexploit le domicile & la qualité de la partie: ce n’eft pourtant pas une nullité de mettre quelqu’une des qualités des parties, pourvû que les perfonnes foient défignées de-maniere à ne pouvoir s’y méprendre, Outre le domicile aêuel, la partie fait quelquefois par l'exploit éleétion de domicile chez le procureur qu’elle conffitue, où chez quelque autre perfonne. Tous exploits doivent être faits à perfonne ou do- micile, & faire mention en l'original & en la copie, de ceux auxquels l'exploir a été laïffé : Le tout À peine de nullité & d'amende. Il eft d’ufage que l’huiffier remplit cette mention de fa propre main. Les exploits concernant les droits d’un bénéfice, peuvent cependant être faits au principal manoir du bénéfice; comme aufli ceux qui conçernent les droits & fonétions des offices où commiffions, peu: vent être faits au lieu où s’en fait l'exercice. Quand les huiffiers ou fergens ne trouvent per- fonne au domicile, ils font tenus , fous les peines fufdites, d’attacher leurs exploits à la porte, & d’en: avertir le proche voifin par lequel ils font figner lex- ploir ; & s'il ne le veut ou ne le peut faire, 1ls en doi- vent faire mention; & en cas qu'il n’y eût point de proche voifin, il faut faire parapher l’exploir parle juge , & dater le jour du paraphe ; & en fon abfence ourefus , par le plus ancien praticien, auxquels il eft enjoint de le faire fans frais. Tous huïfliers & fergens doivent mettre au bas de Poriginal de leurs exploirs , les fommes qu'ils ont re- cûes pour leur falaire, à peine d’amende. Enfin ils font obligés de faire contrôler leurs ex- ploits dans trois jours de leur date, à peine de nulli- té des exploits 8& d'amende contre les huiffiers. Voyez CONTRÔLE. (4) EXPLOIT D'AJOURNEMENT , c’eft une afligna- tion: on comprend cependant quelquefois fous ce terme , toutes fortes d'exploirs. Voyez AJOURNE- MENT. , EXPLOIT D’ASSIGNATION, eft celui qui ajourne la partie à comparoître devant un juge ou officier public. Voyez AJOURNEMENT 6 ASSIGNATION. ExPLOIT CONTRÔLE, eft celui qui eft enresiftré fur les regiftres du contrôle , & fur lequel il eft fait mention du contrôle. ExpLo1T DE Cour, eft un avantage ou aéte que lon donne à la partie comparante, contre celle qui fait défaut de préfence, ou défaut de plaider, ou de fatisfaire à quelque appointement. Voyez la coktume de Bretagne , art. 159. Sedan, 321. EXPLOIT DOMANIER, c’eft la faifie féodale dont ufe le feigneur fur Le fief pour lequel il n’eft pas fer- vi : elle eft ainf appellée dans la coûtume de Berri, LE, V. art. 25. | EXPLOIT DE JUSTICE 04 DE SERGENT, c’eft le nom que quelques coûtumes donnent aux aëtes qui font du miniftere des fergens. Voyez la coftume de Bretagne, art. 77, 92, 229. Berri, tit. 1j. art. 29. E.32. ExPLOIT LIBELLÉ, eft celui qui contient le fu- jet de la demande, & les titres & moyens, du moins fommairement. ExPpLoiT NUL, eft celui qui renferme quelque défaut de forme, tel que l’exploir eft regardé comme non fait. ExXPLOIT 72 palis, eft une forme particuliere d’exploit , ufitée entre les habitans du comté d’Avi- enon & les Provençaux. Il y a des bateliers fur le bord d’une riviere, qui fait la féparation de ces deux pays: ces bateliers font obligés de recevoir tous les exploits qu'on leur donne , & de les rendre à ceux auxquels ils font adreflés ; c’eft ce que l’on appelle un exploit 2 palis. Voyez Defmaifons , er. À, n. 4. ÆExpLoit DE RETRAIT, c’eft une demande en retrait. ExPLOIT DE SAISIE, c’eft le procès - verbal de fafe. ë ExPLo1T DU SEIGNEUR , c’eft la faifie féodale. Voyez les coûtumes de Montargis, Dreux, Berri , Or- léans , & ci devant EXPLOIT DOMANIER. EXPLOIT vVERBAL, eft celui qui eff fait fans écrit. Les cas où les exploits peuvent être ainfi faits, {ont marqués ci-devant 44 mot EXPLOIT. Sur les exploits en général, voyez Imbert, Papon, Bornier. (4 EXPLOITABLE, adj. (Juri/prud.) fe dit de ce qui peut être exploité. | On appelle bois explortables , ceux qui font en âge d’être exploités, c’eft-à-dire coupés. Biens exploitables , {ont ceux qui peuvent être faifis. EXP Meubles exploitables , font ceux qui peuvent être faifis & exécutés. Il y a en ce fens deux fortes de meubles qui ne font point exploitables ; favoir ceux qui tiennent à fer & à clou, &c font mis pour per- pétuelle demeure , lefquels ne peuvent être faifis qu'avec le fonds : les autres font ceux que l’on eft obligé de laïffer à la partie faife , tels que le lit, les uftenfiles de labour, & autres chofes refervées par l'ordonnance. Voyez EXÉCUTION , MEUBLES, SAI- SiE. (4) | _ EXPLOSION, f. f. er Phyfique, fe dit proprement du bruit que fait la poudre à canon quand elle s’en- flamme, ou en général l'air, quand il eft chaffé ou dilaté avec violence : c’eft pour cela que le mot ex- plofion fe dit auffi du bruit qui fe fait quelquefois lorf- qu'on excite la fermentation dans des liqueurs en les mêlant enfemble. Il paroît que l’explofon vient de Peffort de l'air qui, reflerré auparavant , fe dilate tout-d’un-coup avec force. Mais comment Pinflam- mation de la poudre & le mélange de deux liqueurs produifent -ils cette dilatation fubite & bruyante ? comment & pourquoi l’air étoit-il auparavant ref- ferré ? voilà ce qu'on n’explique point, &, à parler vrai, ce qu’on ignore parfaitement. Woyez POUDRE À CANON, FERMENTATION, &c. Voyez ci-devant EXPANSIBILITÉ. (0) EXPLOSION , (Chimie.) voyez FULMINATION. EXPONENTIEL , adj. (Géomér. tranjcend.) Quan- tité exponentielle, eft une quantité élevée à une puif- fance dont l’expofant eft indéterminé & variable. Voyez EXPOSANT. Ïl y a des quantités exponentielles de plufieurs de- grés ou de plufeurs ordres. Quand l’expofant eft une quantité fimple & indéterminée , on l'appelle une quantité exponentielle du premier degré. Quand l’expofant eft lui-même une exponentielle du premier degré, alors la quantité eft une exponer- tielle du fecond degré. Ainf z? eft une exponentielle du premier degré, parce que la quantité y eft une quantité fimple : mas 3 : + eft une quantité exponentielle du fecond degré , parce que eft une exponentielle du premier degré. 5; De même ? eft une exponentielle du troifieme de- = P ; 3 gré, parce que l’expofant > en eft une du fecond. ; | Il faut remarquer de plus que dans les quantités exponentielles , la quantité élevée à l’expofant varia- ble peut être conftante comme dans >, ou variable comme dans ? ; ainfi on peut encore à cet égard diftinguer les quantités exponentielles en différentes efpeces. La théorie des quantités exponentielles eft expli- quée avec beaucoup de clarté dans un mémoire qu’on trouvera au come Î. du recueil des œuvres de M. J. Ber- noulh, Laufanne 1743. Le calcul des quantités expo- nentielles , de leuts différentielles, &c, fe nomme ca/- cul exponentiel, On peut aufh voir les regles de ce calcul expliquées dans /4 premiere partie du traite du calcul intégral de M. de Bougainville. Au refte , c’eft à M. Jean Bernoulli que la Géométrie doit la théo- rie du calcul expanentiel , branche du calcul intégral devenue depuis fi féconde. - Ouire les quantités exponentielles dont les expo- fans font réels, il y en a aufli dont les expofans font imaginaires ; & ces quantités font fur tout fort uti- les dans la théorie des finus & des cofinus des angles. Voyez SiNvs. La méthode générale pour trouver aifément les différentielles des quantités exporentielles , c’eft.de fnppoñer ces‘exponentielles égales à une nouvelle in- E X P 311 connue, de prendre enfuuite les logarithmes de part & d'autre, de différentier, & de fubftituer ; ainfi faifant y” =, on aura x log. y=log. 7; donc dx x 3 oud (y )= dx log. y + 22 =y* d x lop. . Log. y + 2 = e. « Foy. LOGARITHME. Donc dz x ‘ Es x< y +22 43 «Donc fi on a à différentier 4 ; comme 3 a eft alors égal à y, &t que dy —0, on aura pour différentielle 4° dx X log. a; & ainf des autres. Courbe exponentielle, eft celle qui eft exprimée par une équation exponentielle, Voyez COURBE. Les courbes exporentielles participent de la nature des algébriques &r des tranfcendantes ; des premie- res, parce qu'il n'entre dans leur équation que des quantités finies ; & des dernieres, parce qu’elles ne peuvent pas être repréfentées par une équation al- gébrique. Car dans les courbes à équations algébri- ques, les expofans font toüjours des nombres dé- terminés & conftans, au lieu que dans les équations des courbes exponentielles les expofans font varia- bles, Par exemple, a y = x? eit l'équation d’une courbe algébrique ; y = 4° eft l'équation d’une cour- be exponentielle; cette équation y = 4° fignifie qu’u- ne ordonnée quelconque y, eft à une ordonnée conf. tante que l’on prend pour l’unité, comme une conf. tante a élevée à un expofant indiqué par le rapport de l’abfciffe x à la ligne que l’on prend pour l'unité, eft à la ligne prife pour l'unité, élevée à ce même expofant. C’eft pourquoi fi on prend 8 pour cette li= gne qui repréfente l'unité, l’équation y = 4° rédui- te à une exprefñon & à une tradu@ion claire, re- * & e , Cl v4 = 44 Fr L vient à celle-ci += — ; l'équation y = eftcelle = de la logarithmique. Joyez LOGARITHMIQUE. De si Ë Ve x EEE & même y = x” fignifie ; € ainf des autres. b Equation exponentielle, eft celle dans laquelle il y a des quantités exponentielles, &c. Ainfi y = ÿ eft une équation exporentielle, On réfoud les équauons exponentielles par loga- rithmes, lorfque cela eft poffible. Par exemple, fi on avoit a° =, x étant l’inconnue, on auroit x log. x + 3 log. à a = log. & & x — Fr” ; de même fi on avoit ac Hbc" +ge=k, on en tireroit l'équation c* (ac?+bc+g)=KRk, & x logarith. c + logarith. (ac?+bc+g) — log. k; d’où l’on tuirera x. Mais il y a une infinité de cas où on ne pourra trouver x . qué par tâtonnement , par exemple, fi on avoit «* LA? =c, &c. Voyez LOGARITHME. C’eft par les équations exponentielles qu’on prati- | que dans Le calcul intégral opération qui confifte à repalfer des logarithmes aux nombres. Soit, par exem- ple, cette équation logarithmique x = log. y , fup- pofant que c {oit le nombre qui a pour logarithme tr, on aura 1 = log. c & x log. c = x— log. y. Donc (7. LoGARITHME) log. — log. y, & c°=y.(0} EXPORLE, (Jurifp.) voyez ESPORLE. EXPORTATION , TRANSPORT , dans le Com merce, eft l'action d'envoyer des marchandifes d’un pays à unautre. Voyez COMMERCE. On tranfporte tous les ans de l'Angleterre une quantité immenfe de marchandifes ; les principales fortes font le. blé, les beftiaux, le fer, la toile, le sue E X P plomb, Pétain, le cuir, le charbon, Île houblon, le lin, le chanvre , les chapeaux, la bierre, le poiflon, les montres, les rubans. Les feuls ouvrages de laine qu’on ttanfporte tous les ans, font évalués à deux millions de livres fterl. & le plomb, Pétain & le charbon, à $ooo0o livres fterl. Voyez LAINE. _ La laine, la terre à dégraiffer, &c. font des mar- chandies de contrebande, c’eft-à-dire qu'il eft dé- fendu de tranfporter. Voyez Commerce 6 CoN- TREBANDE. Pour les droits de fortie, voyez IMPÔT, Droits, &c. Chambers. EXPOSANT , f. m. (Æ4/gebre,) Ce terme a diffé- rentes acceptions felon les différens objets auxquels on le rapporte. On dit, l’expo/ant d’une raifon, lex- Po/ant du rang d’un terme dans une fuite, l’expofant d’une puiflance. L’expofant d’une raifon (il faut entendre la péo- métrique, car dans l’Arithmétique ce qu’on pourroit appeller de ce nom, prend plus particulierement ce- lui de différence) : l'expofant donc d’une raïfon géo- métrique eft le quotient de la divifion du conféquent par l’antécédent. Aïnf dans la raifon de 2 à 8, l’ex- pofant eft 5 = 4; dans celle de 8 à 2, l’expofant eft +=}, &c. Voyez PROPORTION. C'eft l'égalité des expofans de deux raifons qui les rend elles-mêmes égales, 8c qui établit entr’elles ce qu'on appelle proportion. Chaque conféquent eft alors le produit de fon antécédent par l’expofant commun. Il femble donc, pour le dire en paflant, qu'ayant à trouver le quatrieme terme d’une pro- portion géométrique, au lieu du circuit qu’on prend ordinairement, il feroit plus fimple de multiplier di- rettement le troifieme terme par l'expofant de la pre- miere raifon, au moins quand celui-ci eft un nom- bre entier. Par exemple, dans la proportion com- mencée 8. 24 : : 17. *, le quatrieme terme fe trou- veroit tout-d’un-coup, en multipliant 17 par lexpo- fant 3 de la premiere raifon ; au lieu qu’on prefcrit de multiplier 24 par 17, 8 puis de diviier le produit | par 8. Il eft vrai que les deux méthodes exigent éga. lement deux opérations, puifque la recherche de l’'expofant fuppofe elle-même une divifion ; mais daus celle qu’on propofe, ces deux opérations, s’exécu- tant fur des termes moins compolés, en feroient plus courtes & plus faciles. Voyez REGLE DE TRors. L’expofant du rang eft, comme cela s’entend affez, le nombre qui exprime le guantieme eft un terme dans une fuite quelconque. On dira, par exemple, que 7 eft l’expofant du rang du terme 13 dans la fuite des impairs ; que celui de tout autre terme T de la 5 T+: même fuite eft —— ; &c plus généralement que Pex- pofant du rang d’un terme pris où l’on voudra dans une progreflion arithmétique quelconque, dont le premier terme eft défigné par p, & la différence par d, eft Re ï. On nomme expo/fant, par rapport à une puifance, un chiffre (en caraétere minufcule) qu’on place à la droite &c un peu au-deffus d’une quantité, foit numé- rique, foit algébrique, pour défigner le nom de la puiflance à laquelle on veut faire entendre qu’elle eft élevée. Dans a#, par exemple, 4 eft l'expofans qui marque que 4 eft fuppofé élevé à la quatrieme puif- fance. - Souvent, au lieu dun chiffre, on employe une lettre ; & c’eft ce qu’on appelle expo/ant indérerminé. 2" eft à élevé à une puiffance quelconque défignée a par x, Dans Va, n défigne le nom de Ia racine qu’on fuppofe extraite de la grandeur a, 8. Autrefois, pour repréfenter la quatrieme puiffance de a, on écrivoit aaaa; exprefhion incommode, & pour l’auteur, & pour le leéteur , fur-tout lorfqu'il À s’agifloit de puiffances fort élevées. Defcartes vint, qui à cette répétition faftidieufe de la même racine {ubfhitua la racine fimple, furmontée vers la droite de ce chiffre qu’on nomme expofant, lequel annonce au premier coup-d’œil combien de fois elle eft cen- fée répétée après elle-même. | Outre l'avantage de la briéveté & de la netteté, cette exprefion a encore celui de faciliter extrème- ment le calcul des puiffances de la méme racine, en le réduifant à celui de leurs expofans , lefquels pouvant d’ailleurs être pris pour les logarithmes des puiffan- ces auxquelles 1ls fe rapportent, les font participer aux commodités du calcul logarithmique. Dans l’ex- poié qui va fuivre du calcul des expofans des puiffan- ces, nous aurons foin de ramener chaque réfultat à l'expreflion de l’ancienne méthode, comme pour fer- vir à la nouvelle de démonftration provifionnelle ; renvoyant pour une démonftration plus en forme à l’article LOGARITHME, qui eft en droit de la reyen- diquer. Muluiplicarion. Faut-il multiplier a” par a ? On fait la fomme des deux expofans, & l’on écrit a *#. En effet quem = 3,&nr=21;a" "" 20 = 4 aŸ — aan = ua X à a. Divifion. Pour divifer 4” par z” , on prend la différence des deux expofans, & l’on écrit #7 7”. = 11 ÿ —— 2 ae: À — En effetquem—$,8&n—2;a" 3 aadadada RAT A = 4 4 Sin = m, l’expofant réduit devient o, & le quo= tient eft 4° — 1 ; car (au lieu de 7, fubftituant 7: qui à lui eft égale par fuppoñition) 4° = 47 T7? = = — = LT Le Sir > m, l'expofant du quotient fera négatif. Par TT = 1 = 47 5 os Ben exemple, quem—=2,&n—5;a a ?, Mais qu’eft-ce que & ?? Pourlefavoir, inter- rogeons l’ancienne méthode, 4°? eft donné pour ä & I lexprefion de == = —— = ,5.Cequi fait voir daadada ad qu'une puiflance zégarive équivaut à une fra@ion dont le numérateur étant l’unité, le dénominateur eft cette puiflance même devenue pofirive : comme réciproquement une puiflance pofitive équivaut à une fraction, dont le numérateur eft encore Punité, & le dénominateur cette même puiflance devenue ré 1 ? +m gative, En général a— = a + #, On peut donc fans inconvénient fubftituer l’une de ces deux expref- fions à l’autre : ce qui a quelquefois fon utilité. * Elévation, Pour élever a” à la puiffance dont lex- pofant eft r, on fait le produit des deux expofans , & lon écrit a" *%,, , En effet Quem—=2, 2-3: ie ER EE = addadada=4aXaaxX 44. Extraition. Comme cette opération eft le con- traire de la précédente; pour extraire la racine 2 de . . . . mr a”, on voit qu'il faut divifer m par z, &c écrire a; : . En effet quem—6,&n=3;ar—=a3—a=aa 3 =Viaaaca. On peut donc bannir du calcul les fignes radi- caux qui y jettent fouvent tant d’embarras, & trai- ter les grandeurs qu'ils affeétent comme des puflan- ces, dont lesexpo/ans font des nombres rompus. Car D 8 3 fi TI v'« — un; Va Me RC Qn ne dit rien de l’addiion , ni de la Jouflraëton ; parcs E X P ‘parce que n1 la fomme , ni la différence de deux pruf- lances de la même racine, ne peuvent fe rappeller à un expofant commun, & qu’elles n’ont point d’ex- preffion plus fimple que celle-e1, 47 + 4°. Mais el- les ont d’ailleurs quelques propriétés particulieres, que je ne fache pas avoir jufqu’ict été remarquées , quoiqu'elles puiffent trouver leur application. Elles ne feront point déplacées en cet article. Premiere propriété. La différence de deux puifan- ces quelconques de la même racine, eft toïjours un multiple exaét de cette racine diminuée de l'unité, fTL ñ - e & —: & A e. ceft-à-dire Que —— donne toüjours unquotient æxatt. ss = LS — = 220 nu re fans refte, 3 Lt. 3 Obfervez en paflant que dans le premier exemple 4 —4 =60=3X4x5. Ce qui n’eft point un ha- fard, mais une propriété conftante de la différence des troifieme & premiere puiflances, laquelle eft toù- jours égale au produit continu des trois termes con- fécutifs de la progreffion naturelle, dont le moyen eft la premiere puiffance même ou la racine. t md =a—-1XaKaxkt. Seconde propriété. La différence de deux puiffances quelconques de la même racine eft un multiple exaét de cette racine axgmentée de l’unité , quand la diffé- rence des expo/äns des deux puiflances eft un ñnom- ï 12 À bre pair ; c’eft-à-dire que —® donne un quotient exaét, quand #— 2 exptime un nombre pair. 4 P SAT ; 2 — 4 = = 12, fans refle, parce que 3—1=2,nombre pair. e 3 — 40 6 _ 6 Fans L En : L Mais Es = Le = = laiffe un refte , parce que 3—0=3 n'ef pas un nombre pair, Troifieme propriére. La fomme de deux puiflances quelconques de la même racine eft un multiple exaét de cette racine augmentée de l’unité, quand la difé- rence des expofans des deux puiflances eft un nom- LA 2 bre impair ; c’eft-à-dire qüe —= donne un quo- tient exa@t, quand #—» exprime un nombre impair. 43 ° 64 + Dm _ <= = $= 13, Jans refle , parce que 3—0=3, nombre pair. 4544! __ 64+4 __ 68 ,. hu , 3—12=2 net pas un nombre impair, Démonfiration commune. Si l’on compare 2° + 4°. confidéré d’une part x Ve ? TRE comme dividende avec & € 1, confidéré de l’autre comme divifeur, il en réfulte quatre combinaifons différentes; favoir, a + à a — 4° ar on a + 47 = z re 4 — I Œ=— I CES a + I Maintenant , fi l’on vient à effectuer fur chacune la divifion indiquée , on trouvera (& c’eft une fuite des lois générales de la divifion alsébrique) 1°. Que dans toutes les hypothèfes, les termes du quotient (fuppofé exa&) font par ordre les puiffan- ces confécutives & décroiffantes de 4, depuis & y compris 4%! jufqu’à 4° inclufivement ; d’où il fuit que le nombre des termes du quotient exaë , ou , CÈ qui eft la même chofe, l’expojent du rang de fon der- mier terme eft m— 7. 2°. Que dans les deux premieres hypothèfes les Tome VI, R E XP 313 termes du quotient ont tous le figne +, &que dans les deux dernieres ils ont alternativement & dans le même ordre les fignes + & = ; deforte quele figne + appartient à ceux dont l'expofant du rang eft impair, & le figne — à ceux dont l’éxpèfañs du rang eft pair, 3°: Que, pour rendre la divifion exaê@te, le der hier terme du quotient doit avoir le figne — dans les premuere & troifieme hypothèfes, & le figne + dans la feconde & dans la quatrieme, ve La figure fuivante met fous les yeux le refultat des deux derniers articles. La ligne fupérieure re préfente l’ordre des fignes qui affectent les divers termes du quotient, relativement aux quatre diffé- rentes hypothèfes ; l’inférieure marque le figne que doit avoir dans chacune le dernier terme du quo» tient, pour rènüre la divifion exacte, TI, kyporhefe. Seconde, Troifieme, UALFIENME +. FR +. ++. 6e LE, -, de — > Ce FRS +, Gé ce n La feule infpeëtion de la figure fait voir que la di- vifon exaëte ne peut avoir lieu dans la premiere hypothèfe, puifqw’elle exige le figne — au dernier terme du quotient, & que‘tous y ont le figne + ; que par une raifon contraire elle a toûjours lieu dans la feconde ; qu’elle l’a dans la troifieme , quand l’expo- Jant du rang du dernier terme, où (fupra) m—# eff pair ; & dans la quatrieme, quand m7 eft impair. J'ai remarqué (8c d’autres fans doute l’auront fait avant moi) que la différence des troifieme & pre- miere puiflances de la même racine eft égale au pro- duit continu de trois termes confécutifs de la pros gteflion naturelle , dont le moyen eft la premiere puiflance même ou la racine. .,73 =r1=7—;% TIR TEI RCE | Cette proprièté au refte dérive d’une autre ulté: rieure. Les expojans des deux puiflances étant queZ. coques , pour vû que leur différence foit 2, on a gé- néralement 7" =r-1xr7xr4+i;...& la dé. monftration en eft aifée, Car dans le fecond mem- bre le produit des extrèmes eftrr= 1 : or filon mul- tiplie le terme moyen 7” par rr= 1, onauta r* ? æ 17 mais 7° =7r”, puifque (patfuppoñtion) m—n—=2, d'où m—=72+ 2, Ceci eft peu de chofe en foi : maïs n’en pourroit- On pas faire ufage, pour réfoudre avec facilité toute équation d’un degré quelconque, qui aura ou 4 quë TENTE on pourra donner cette forme x” — x" =: —0o, dé forte que m1 — n y foit = 2, & dont une des racines fera un nombre entier. En effet, Cherchant tous les divifeuts ou fa@teurs de «, & pour plus dé commodité les difpofant par ordre deux à deux, de façon que chaque paire con- tienne deux faéteurs correfpondans de z, comme on voit iciceux de 12...,1,. à, 3..,. on eft aflüré qu’il s’en trouvera une paire qui fera Se FE, Choifif fant donc dans la ligne inférieure (que je fuppofe contenif les plus grands faéteurs ) ceux qui font des puiffances du degré z, oubienil ne s’en trouvera qu”- un, & dès-là fa zieme racine fera la valeur de x, ou il s’en trouvera plufieurs ; & alors les comparant avec leurs co-faéteurs, on fe déterminera pour celui dont le co-faéteur eft le produit de fa rie racine dimi= nuée de l’unité par la même racine augmentée de Vunité. Par exemple, | Soit l'équation à réfoudre , ..xÿ —x3—3000=0, on trouve que les fateurs de 3000 font par ordre, L 4 3 À 5 64, 25 NEO E 3000° 1500° 1000° 750° 600° 500° 397$° 300° 250° 7 200" 150° 12e 20° r'o0° CE oc - En confultant, fi on le juge néceffaire, la table 15? * Re 314 E X P des puiffances, on trouve que la ligne inférieure ne contient que deux cubes, 1000 & 125, Le premier ne peut convenir, parce que fon co-fafteureft 3, & EN. | que ere étant 10) il devroit être 10 — 1 X 10 +1=9X 11— 99: mais le fecondconvient par- faitement , parce que d’un côté fa racine cubique étant $, de l’autre fon co-faéteur eft 24 = 4 x 6 — s—iX5+1...Onadoncx—s. Refte à trouver le moyen de donner à tonte équa- tion propofée la forme requife , c’eft-à-dire de la ré- duire à fes premier, troifieme, & dernier termes ; de façon que les deux premiers foient fans coefficiens, & les deux derniers négatifs. C’eft l'affaire des Algé- briftes, & pour eux une occafon précieufe d’em- ployer utilement l’art des transformations, s’il va jufque-là. Il eft au moins certain que dans les cas où l’on pourra ainfi transformer l'équation, la méthode qu'- on propofe ici aura lieu, pourvû qu'une des racines de l’équation foit un nombre entier. On convient que cette méthode ne s'étend jufqu’ici qu’à un très-petit nombre de cas, piufqu’on n’a point encore, & qu’on n'aura peut-être jamais de méthode générale pour réduire les équations à la forme & à la condition dont il s’agit: mais on ne donne auffi la méthode dont il s’agit ici, que comme pouvant être d’ufage en quelques occafions. Arcicle de M. RALLIER DES OURMES. Il ne nous refte qu’un mot à ajoûter à cet excel- lent article, fur le calcul des expo/ans, Que fignifie, dira-t-on, cette expreflion 4°”? Quelle idée nette préfente-t-elle à l’efprit ? Le voici. Il n’y a jamais de quantités négatives & abfolues en elles-mêmes. El- les ne font telles, que relativement à des quantités poñtives dont on doit ou dont on peut fuppofer qu’- elles font retranchées; ainfi a ” ne défigne quelque chofe de diftiné , que relativement à une quantité a exprimée ou foufentendue ; en ce cas 4 ” mar- que que fi on vouloit multiplier 4° par a° ”, il fau- droit retrancher de l’expofanr n autant d’unités qu'il * _ r e ” I y en a dans » ; voilà pourquoi 47” équivaut à 4%, ou à une divifion par a”: & ”n’eft autre chofe qu’u- à 1 ne maniere d'exprimer 4, plus commode pour le calcul. De même 4° n'indique autre chofe que 4” X :2 mm . , , . & "ou— = 1; 4° indique, fuivant la notion des & expofans , que la quantité « ne doit plus fe trouver dans le calcul; & en effet elle ne s’y trouve plus: comme 4 ” indique que la quantité « doit fe trou- ver dans le calcul avec 77 dimenfions de moins, & qu’en général elle doit abaïfler de 7: dimenfions la quantité algébrique oùelle entre par voie de multi- plication. Voyez NÉGATIF, [2 LI 1 Paflons aux expofans fraionaires. Que fignifie a ? Pour en avoir une idée nette, je fuppofea=66; donca= eft la même chofe que (#4): or dans (2 )5, par exemple, l’expofant indique que ? doit être écrit un nombre de fois triple du nombre de fois qu'il eft écrit dans le produit (44) ; & comme il y : eft écrit deux fois (#8), il s'enfuit que ( #8 )5 in- dique que » doit être écrit 6 fois; donc (6b)5 eft Ægal à 89 ; donc par la même raïfon (48 )+ indique que P doit être écrit La moitié de fois de ce qu'il eft écrit dans la quantité 26; donc il doit être écrit une fois ; donc (22 Y=b; don =b=y a [ny aura pas plus de difficulté pour les expofans fadicaux, dont très-peu d'auteurs ont parlé. Que f- goife ; par exemple , « VW. 2? Pourle trouver, onre- EXP |. Marquera que 1/2 n’eft point un Vrai nombre, mais une quantité dont on peut approcher auff près qu’on veut, fans l’atteindre Jamais ; ainfi fuppofons que È exprime une fraétion par laquelle on approche con tinuellement de y 2 ; 4 V2 aura pour valeur appros , ri chée la quantité + ;, dans laquelle p & 4 feront des nombres entiers qu’on pourra rendre auffi exaûs qu'on voudra, jufqu’à l’exa@itude abfolue excluf- vement. Ainfi « V 2 indique proprement la limite d’une quantité , & non une quantité réelle; c’eft la limite de « élevé à un expofars fraétionnaire qui ap- proche de plus en plus de la valeur de y 2. Poyez EXPONENTIEL, LIMITE, &e. (0) EXPOSANT , (Jurifp.) eft le terme ufité dans les lettres de chancellerie pour défigner l’impérranr, c’eft- à-dire celui qui demande les lettres, &c auquel elles font accordées. On l’appelle expofanr, parceque ces lettres énoncent d’abord que de la part d’un tel il a été expofé telle chofe ; & dans le narré du fait, en parlant de celui qui demande les lettres, on le qua- lifie toijours d’expofant; & dans la partie des lettres qui contient la difpofition , le roi mande à ceux aux- quels Les lettres font adreflées, de remettre l’expo- Jant au même état qu'il étoit avant un tel aûe: fi ce font des lettres de refcifñion, ou fi ce font d’autres lettres, de faire jouir l’expofans du bénéfice defdites lettres. Voyez Les flyles de chancellerie, (4) EXPOSÉ , adj. (Jurifp.) en ftyle de chancellerie & de palais, fignifie Ze rarré du fait qui eft allégué pour obtenir des lettres de chancellerié, ou pour ob- tenir un arrêt fur requête. Quand les lettres font obtenues fur un faux expofé, on ne doit point les en- tériner ; & fi c’eft un arrêt, les parties intéreflées doivent y être reçües oppofantes. (4) EXPOSER vre marchardife en vente, v. a@. (Com- merce.) c’eft l’étaler dans fa boutique , l’annoncer au public, ou laller porter dans les maïfons. Cette derniere maniere d’expofer en vente fa mar- chandife, eft ce qu’on appelle co/portage, & eft dé- fendue par les ftatuts de prefque toutes les commu- nautés des Arts & Métiers de Paris. Zoyez CoLror- TAGE & COLPORTER, Diéionn. du Comm, (G EXPOSITION D'ENFANT ou DE PART, (/x- rifpr.) eft le crime que commettent les pere & mere qui expofent on font expofer dans une rue ou quel- qu'autre endroit, un enfant nouveau-né, ou encore hors d’état de fe conduire, foit qu’ils le faffent pour fe décharger de la nourriture & entretien de l'enfant, faute d’être en état d’y fournir, ou que ce foir pour éviter la honte que leur pourroit caufer la naïffance de cet enfant, s’il n’eft pas légitime. Ce crime eft puni de mort , fuivant l’édit d'Henri II. vérifié au parlement le 4 Mars 1556 (voyez Jul. Clarus, & gus annot. qu. lxxxüij. n. 7.) ; maïs on s’eft un peu relâché de cette rigueur, & l’on fe con- tente ordinairement de faire fouetter & marquer ceux qui font convaincus de ce crime. | Ceux qui en font complices, foit pour avoir porté l'enfant, ou pour avoir sù qu’on devoit lexpofer, font auf puniffables, felon les circonftances. La facilité que l’on a préfentement de recevoir dans Phôpital des enfans-trouvés tons les enfans que l’on y amene, fans obliger ceux qui les conduifent de déclarer d’où ils viennent , fait que l’on n’entend plus parler de ce crime dans cette ville, Foyez EN- FANT EXPOSÉ. (4) EXPOSITION D'UN FAIT , eff le récit de quelque _ chofe qui s’eftpañé. EXPOSITION DE MOYENS, fe dit pour établifle: ment des moyens ou rafons qui établiffent la de- mande. Une requête, un plaidoyer, une piece d’é- criture, contiennent ordinairement d’abord lexpo/é tion du fait, & enfuite celle des 0yers. (4) EXPOSITION DE PART, voyez ci-devant Éxpo- SITION D'ENFANT € ENFANS EXPOSÉS. (4) EXPOSITION DE BATIMENT, e2 Architeëture ; c’eft la maniere dontun bâtiment eft expofé par rap- port au foleil & aux vents. La meilleure expo/rion, felon Vitruve, eft d’avoir les encoïgnures oppofées aux vents cardinaux du monde. EXPOSITION 04 SOLAGE. Voyez ASPECT, EspA- LIER, FRUITIER, 6c. EXPRESSION, f. f. (Ælgebre.) On appelle en Algebre expreffion d’une quantité , la valeur de cette uantité exprimée ou repréfentée fous une forme . algébrique. Par exemple, fi on trouve qu’une incon- nue xeft—y'aa+bb, a & b étant des quantités connues , y” 4 a + b b. fera l’expreffion de x. Une équation n’eft autre chofe que la valeur d’une même quantité préfentée fous deux expreffions différentes. Voyez ÉQUATION. (0) EXPRESSION, (Belles - Lettres.) en général eft la repréfentation de la penfée. | | On peut exprimer fes penfées de trois manieres ; par Le ton de la voix ,; comme quand on gémit ; par Le gefle, comme quand où fait figne à quelqu'un d'avan- cer ou de fe retirer ; & par la parole, foit prononcée, foit écrite. Voyez ELOCUTION. | Les expreffions fuivent la nature des penfées ;, il y en a de fimples, de vives, fortes, hardies, riches, fublimes, qui font autant de repréfentations d'idées femblables : par exemple , la beauté s’ezvole avec le terns, s'envole eft une expreffion vive, & qui fait ima- ge;flony fubflituoit s’ez va, on affoibliroit l’idée, & ainf des autres. L’expreffon eft donc la maniere de peindre {es idées , & de les faire pañler dans l’efprit des autres. Dans l’Eloquence & la Poëfie eo e eft ce qu’on nomme autrement diéhion ,.élocution, choix des mots w’on fait entrer dans un difcours ou dans un poëme. Il ne fufñit pas à un poëte ou à un orateur d’avoir de belles penfées , il faut encore qu'il ait une heu- reufe expreffion ; fa premiere qualité eft d’être claire, l'équivoque ou lPobfcurité des expreffions marque néceffairement de l’obfcurité dans la penfée : Selon que notre idée eff plus ou moins obfcure, L’expreffion La fuit où moins nette où plus pure; Ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement , Ec les mots pour le dire arrivent ai[émenr. Boil. Art poët. Un grand nombre de beautés des anciens auteurs, dit M. de la Mothe, font attachées à des expreflions qui font particulieres à leur langue, ou à des rap- ports qui ne nous étant pas fi familiers qu’à eux, ne nous font pas le même plaifir. Voyez ELOCUTION, Dicrion, STYLE, LATINITÉ, &c, (G) EXPRESSION , (Opéra.) C’eft le ton propre au fen- timent , à la fituation, au carattere de chacune des ONE ; À À patties du fujet qu’on traite. La Poëfie, la Peinture & la Mufique font une inutation. Comme la premiere ne confifte pas feulement en un arrangement métho- dique de mots, & que la feconde doit être tout au- tre chofe qu’un fimple mélange de couleurs, de mê- me la Mufique n’eft rien moins qu’une fuite fans ob- jet de fons divers. Chacun de ces arts a & doitavoir une expreffion, parce qu'on n'imite point fans expri- mer, ou plütôt que l’expreffion eft l’imitation même, Il y a deux fortes de Mufique, l’une 2rfrurenrale, lautrewocale, & l'expreffion eft néceffaire à ces deux elpeces, de quelque maniere qu’on les employé. Un concerto,une fonate, doivent pendre quelque chofe, ou ne font que du bruit, harmonieux, fi l’on veut, maïs fans vie. Le chant d’une chanfon, d’une can- tate, doit exprimer les paroles de la cantate & de la chanfon, finon le muficien à manqué {on but; & le Tome VI, | E XP 31$ chant , quelque béau qu'il foit d’ailleurs, n’eft qu’un contre-fens fatiguant pour les oreïlles délicates. … Ce principe puifé dans la nature, & toüjours sûr pour la Mufique en général , eft encore plus particu- Kérement applicable à la mufique dramatique ; c’eft un édifice régulier qu'il faut élever avec raifon , Or+ dre & fymmétrie : les fymphonies & le chant font les grandes parties du total, la perfe@tion de l’en- femble dépend de l’'expreffion répandue dans toutes fes parties. Lulh a prefqu’atteint à la perfe@ion dans un des points principaux de ce genre, Le chant de déclama- tion , qu'il a adapté f heureufement aux POËÈMES ini= mitables de Quinaut , a toûjours été le modele de l’expreffion dans notre mufique de récitatif, yz oyez RÉ- CITATIF. Mais qu'il foit permis de parler {ans dé- guifement dans un ouvrage confacré à la gloire & au progrès des Arts. La vérité doit leur fervir de flambeau ; elle peut feule, en éclairant les Artiftes 4 enflammer le génie , &c le guider dans des routes st. res vers la perfection. Lulli qui a quelquefois excellé dans l’expreffon de fon récitatif, mais qui fort fou- vent auffi l’a manquée, a été très-fort au-deflous de lui-même dans l’expreffion de prefque toutes les au- tres parties de fa mufque. Les fautes d’un foible artifte ne font point dange- teufes pour l’art ; rien né [es accrédité, on les re- connoît fans peine pour des erreurs, & perfonne ne les imite : celles des grands maîtres font toïjours fu- neftés à l’art même, fi on n’a le courage de les dé- velopper. Des ouvrages confacrés par des fuccès conftans , font repardés comme des modeles ; on con- fond les fautes avec les beautés, on admire les unes, on adopte les autres. La Peinture feroït peut-être encore en Europe un art languiffant, fi en refpeétant ce que Raphaël a fait d’admirable, on n’avoit pas OfÉ relever les parties défedtueufes de fes compofñ- tions, L’efpece de culte qu’on rend aux inventeurs ou aux reftaurateurs des Ârts, eft affürément très- légitime ; mais il devient un odieux fanatifme, lor£- qu'l eft pouflé jufqu’à refpeéter des défants que les génies qu'on admire autoient corrigés eux-mêmes, s'ils avoient pû les reconnoître. . Lulli donc , qui en adaptant le chant françois déjà trouvé, à l’efpece de déclamation théatrale qu'il a créée, a tout-d’un-coup faif le vrai genre , n’a en général répandu l’expreffion que fur cette feule par- tie : fes fymphonies, {es airs chantans de mouve- ment , {es ritournelles , fes chœurs, manquent en général de cette imitation, de cette efpece de vie que l’expreffion feule peut donner à la Mufique. On fait qu’on peut citer dans les opera de ce beau géme des ritournelles qui font à l'abri de cette criti- que, des airs de violon & quelques chœurs qui ont peint, des accompagnemens même qui font des ta- bleaux du plus grand gente. De ce nombre font fans doute le monologue de Renaud, du fecond aûte d’Armide ; l’épifode de la häine, du troifiemie ; quel ques airs de violon d'Ifis, le chœur, 244ys lui-même, Sc. Maïs ces morceaux bien faits font f peu nom- breux én comparaifon de tous ceux qui ne peignent rien & qui difent toñjours la même chofe, qu'ils ne fervent qu’à prouver que Lulli connoïfloit affez la nécefité de l’expreffion , pour être tout-à-fait inex- ctfable de lavoir f fouvent négligée où manquée. _ Pourfaite fentir la vérité de cette propoñtion, 1 faut le fuivré dans fa mufique inftrumentale & dans fa mufique vocale. Sur la premiere il fufit de citer des endroits f frappans, qu'ils foient fenls capables d'ouvrir les yeux {ur tous les autres. Tel ét, par exemple, l'air de violon qui dans le premier aéte de Phaëéton fert à toutes les métamorphofes de Pro- tée ; ce dieu fe transforme fucceflivement en lion, én atbré, en monftre marin, en du > En flam- r 1] 316 E XP me. Voilà le deffein brillant & varié que le poëte fournifloit au muficien. Voyez l'air froid , monotone & fans exprefion, qui a té fait par Lulli. On regarde comme très-défetueux le quatrieme aëte d’Armide ; on fe demande avec furprife depuis plus de 60 ans, commentun poëte a püimaginer un ace fi miférable. Seroit-il pofible que fur ce point, fi peu contefté, on fût tombé dans une prodigieufe erreur ? & quelqu'un oferoit-il prétendre aujourd’hui que le quatrieme aëte d'Armide , reconnu générale- ment pour mauvais ,auroitparu peut-être, quoique dans un genre différent, aufh agréable que les quatre autres, à Lulli avoit rempli le plan fourni par Qui- nault ? Avant de fe récrier fur cette propoñtion (que pour le bien de l’art on ne craint pas de mettre en- avant), qu'on daigne fe reflouvenir qu'il ny a pas trente ans qu'on s’eft avifé d’avoir quelque eftime pour Quinault; qu'avant cette époque, à fur-tout pendant la vie de Lulli, qui joiifloit de la faveur de la cour & du defpotifme du théatre , toutes les beau- tés de leurs opera étoient conftamment rapportées au muficien ; que le peu de vices que le défaut d'expérience des {peétateuts y laïfloit appercevoir, étoit fans examen rejetté fur Le poëte. On fait que Quinault étoit un homme modefte & tranquille , que Lulli n’avoit pas honte de laïffer croire à la cour &c au public, fort au-deflous de lui. Après cette obfer- vation, qu'on examine Armide ; qu'on réfléchifle fur la pofition du poëte & du mufcien, fur le deffein donné, & fur la maniere dont il a été exécute. L'amour le plus tendre, déguifé fous les traits du dépit le plus violent dans le cœur d’une femme toute- puiffante, eft le premier tableau qui nous frappe dans cet opera. Si l'amour l'emporte Îur la gloire, fur le dépit, fur tous les motifs de vengeance qui animent Armide, quels moyens n’employera pas fon pouvoir (qu’on a eu l’art de nous faire connoïtre immenfe) pour foûtenir Les intérêts de fon amour? Dans le pre- mier acte, fon cœur eft Le joiet tour-à-tour de tous les mouvemens de la pañon la plus vive: dans le {econd elle vole à la vengeance, le fer brille, le bras eft prêt à frapper ; l'amour l’arrête, & il triomphe. L'amant & l’amante font tranfportés au bout de lu- nivers ; c’eft-là que la foible raifon d’Armide combat encore ; c’eft-là qu’elle appelle à fon fecours la haine qu'elle avoit crû fuivre, & qui ne fervoit que de prétexte. à l’amour. Les efforts redoublés de cette divinité barbare cedent encore’la viétoire à un pen- chant plus fort. Mais la haine menace : outre les craintes fi naturelles aux amans, Armide entend en- core un oracle fatal qui, en redoublant fes terreurs, doit ranimer fa prévoyance. Telle eft la poñition du poëte & du mufcien au quatrieme aéte. Voilà donc Armide livrée fans retour à fa tendref- fe. Inftruite par fon art de l’état du camp de Gode- froy, joüiffant des tranfports de Renaud, elle n’a que fa fuite à craindre ; & cette fuite, elle ne peut la redouter qw’autant qion pourra détruire l’enchan- tement dans lequel fa beauté, autant que le pouvoir de fon art, a plongé fon heureux amant. Ubalde ce- pendant & le chevalier Danois s’avancent ; & cet épifode eft très-bien lié à lation principale, lui eft nécefflaire, &c forme un contre-nœud extrèmement ingénieux. Armide, que je ne puis pas croire tran- quille, va donc développer ici tous les reflorts, tous les efforts, toutes les reffources de fon art, pour ar- rêter les deux feuls ennemis qu’elle ait à craindre. Tel eft le plan donné, & quel plan pour la mufique ! Tout ce que la magie a de redoutable ou de fédui- fant, les tableaux de la plus grande force, les images les plus voluptueufes , des embrafemens, des orages, des tremblemens deterre , des fètes brillantes, des enchantemens délicieux; voilà ce que Quinault de- mandoit dans cet acte : c’eft-là le plan qu'il a tracé, queLulliauroit dû fuivre , 8 terminer en homme de génie par unentr'aéte , dans lequel là magie auroit fait un dernier effort terrible , pour contrafter avec la volupté qui devoit régner dans l’aéte fuivant. . Qu'on fe repréfente cet aéte exécutéde cette ma- niere, & qu’on le compare avec le plat aflemblage des airs que Lulli y a faits ; qu’on daigne fe reffou- venir de l’effetqu’a produitune fête très-peu eftimable par {a compofition, qui y a été ajoûtée lors de la derniere reprife, & qu'on décide enfuite s’il eft pofli= ble à un poëte d'imaginer un'plus beau plan, & à un muficien de le manquer d’une façon plus complete. C’eft dec le défaut feul d’expreffion dans la mu: fique de cette partie d'Armide, qui l’a rendue froide, infipide, & indigne de toutes les autres. Telle eft Ia fuite füre du défaut d’expreffion du mufcien dans les grands deffeins qui lui font tracés : c’eft toùjours fur Peffet qu'on les juge ; exprimés , 1ls paroiffent fubli- mes ; fans expreffion , on ne les apperçoit pas, ou s'ils font quelque fenfation, c’eft toüjours au defavantage du poëté. Mais ce n’eft pas feulement dans fes fymphonies que Lulli eft repréhenfible fur ce point ; fes chants, à l'exception de fon récitatif, dont on ne parle point ici, & qu'on fe propofe d'examiner ailleurs (voyez RÉCITATIF), n’ont aucune expreffion par eux-mèe- mes, & celle qu’on leur trouve n’eft que dans les pa- roles auxquelles ils font unis. Pour bien développer cette propoftion, qui heurte de front un préjugé de près de quatre-vingts ans , il faut remonter aux prin- . CIpes: La Mufiqué eftune imitation , & limitation n’eft & ne peut être que l’expreffion véritable du fentiment qu'on veut peindre. La Poéfie exprime par lès pa- roles, la Peinture par les couleurs, la Mufique par les chants ; & les paroles, les couleurs, les chants doivent être propres à exprimer ce qu'on veut dire, peindre ou chanter. Mais les paroles que la Poéfie employe, reçoivent de l’arrangement, de l’art, une chaleur, une viequ’el- les n'ont pas dans le langage ordinaire ; & cette cha- leur, cette vie doivent acquérir un chant, par le fe- cours d’un fecond art qui s’unit au prémier , une nou- velle force, & c’eft-là ce qu’on nomme expreffion en Mufique. Ondoit donc trouver dans la bonne Muf- que vocale, lexpreffion que les paroles ont par elles- mêmes ; celle qui leur eft donnée par la poëfe; celle qu’il faut qu’elles reçoivent de la mufque ; & une derniere qui doit réunir les trois autres , &c qui leur eft donnée par le chanteur quiles exécute. Or, en général, la mufique vocale de Lulli, au tre, on le répete, que le pur récitatif, n’a par elle- même aucune expreffon du fentiment que les paroles de Quinault ont peint. Ce fait eft fi certain, que fur le même chant qu’on a fi long -tems crû plein de la plus forte expreffion , on n’a qu’à mettre des paroles qui forment un fens tout-à-fait contraire , & ce chant pourra être appliqué à ces nouvelles paroles, aufli- bien pour le moins qu'aux anciennes. Sans parler ici du premier chœur du prologue d’Amadis, oùLulli a exprimé éveillons-nous comme il auroit fallu expri- mer erdormons-nous, on va peindre pour exemple &c pour preuve un de fes morceaux de la plus grande réputation. Qu'on life d’abord les vers admirables que Qui- nault met dans la bouche de la cruelle, de la barbare Médufe : Je porte l’épouvante 6 la mort er tous lieux, Tout fe change en rocher a mon afbeït horrible. Les traits que Jupiter lance du haut des cieux, | N'ont rien de ft terrible Qu'un regard de mes yeux Il n’eft perfonne qui ne fente qu'un chant qui fe: E À E roit l'expreffion véritable de ces paroles ; ne fauroit fervir pour d’autres qui préfenteroient un fens ab{o- lument contraire ; or le chant que Lulli met dans la bouche de l’horrible Médufe , dans ce morceau & dans tout cet ate, eft fi agréable, par conféquent fi peu convenable au fujet, fi fort en contre-fens, qu'il iroit très-bien pour exprimer le portrait que horrible, aimable, change en rocher à mon afpe& rime & s’enflame a mon afpeët C6 du haut des cieux, n’ont rien de comparable - aux EXP 317 l'amour tiomphant feroit de lui-même. On ne re Préfente ici, pour abreger, que la parodie de ces cinq vers, avec les accompagnemens , leur chant & la bafle, On peut être sûr que la parodie très-ailée à faire du refte de la fcene, offriroit par-tout une dé» monftration auf frappante. | - Be à | Rx mable : lan- gu "un regard de mes regards 318 EXP Il n’y'a donc évidemment, ni dats le chant de ce morceau, ni dans lesiaccompagnemens qui n’en font qu’une froide répétition, tien qui cara@térife l'affreux perfonnage qui parle ; &les paroles fortes qu'il dit : l'expreffion ; en un mot, y efttoralement manquée. D'où vient donc ce preftige® car il eft certain que ce morceau & tout l’aéte produifent un fort grand effet. L’explication de ce paradoxe eft facile, fi l’on veut bien remonter aux fources. Dans les commen- cemens on n’a point apperçü le poëte dans Les opéra de Lulli : ce mufcien n'eut point de rival à com- battre; nide critique lumineufe à craindre. Quinault étoit déchiré par les gens de lettres à la mode, & on fe gardoit bien de croire que fes vers puflent être bons. Orrentendoit des chants qu'on trouvoit beaux, le chanteur ajoûtoit l’expreffion de l’aétion à celle des paroles, & toute l’impreflion étoit imputée au mu- ficien, qui n’y avoit que très-peu où point de part. Cependant par l'effet que produit late de Mé- dufe, dépouillé, comme:l eft réellement , de l'ex- praffion qu’il devoit recevoir de la mufique, qu’on juge de limpreffion étonnante qu'il auroit faite, s’il avoit eu cet avantage qui lui manque abfolument. Quelques réflexions fur ce point font feules capables -dé rendre très-croyable ce qu’on lit dans l’hiftoire ancienne de la mufique des Grecs: plufieurs de leurs poéfies nous reftent ; leur mufique leur prétoit füre- ment une nouvelle expreffion , les fpeétateurs d’Athe- nes n’étoient pas gens à fe contenter à moins ; & par les parties de leurs fpeétacles que nous admirons en- core, il eft facile de nous convaincre combien de- voit être furprenante la beauté de leur enfemble. Comment fe peut:il, dira-t-on peut-être, qu'en accordant l’expreffion à Lulli dans préfque tout fon técitatif, en convenant même qu'il l’a pouflée quel- quefois jufqu’au dernier fublime, on la lui refufe dans les äutres parties qu'il connoiffoit fans doute auffi-bien que celle qu’il a fi habilement maniée ? On pourroit ne répondre à cette conjeéture que par le fait: maïs il eft bon d’aller plus avant, & d'en développer la caufe phyfique. La fcene & le chant de déclamation étoient l’objet principal de Lulii : tel.étoit le genre à fanaïflance, Lorfque l'art n’étoit éncore quai. berceau, Quinault n’avoit pas pû con- perfes opéra , comme il les auroit sûrement coupés de nos jours, que l’art a reçü fes accroïflemens. Foy. ExécurTion. Ainf Lulli appliquoit tous les efforts de fon génie au récitatif, qui étoit le grand fond de fon fpettacle ; fes airs de mouvement, pour peu qu'ils fuffent différens de la déclamation ordinaire , faïifoient une diverfion agréable avec la langueur inféparable d’un trop long récitatif ; & par cette feule raifon, ils étoient conftamment applaudis : les ac- teurs les apprenoient d’ailleurs fans beaucoup de peine, & le public les retenoit avec facilité. En fal- loit-il davantage d'un muficien que la cour & la ville loüoient fans cefle, qui pour foûtenir fon théatre, fe trouvoit fans doute preffé dans fes compoñitions, & qui marchoit au furplus en proportion des forces de fes exécutans & des connoïflances de fes audi- teurs. | Mais eft-:il bien sûr que le chant doit avoir par lui- même une expreffion, qui ajoûte une nouvelle cha- leur à l’expreffion des paroles ? cette prétention n’eft- elle pas une chimere? ne fufit-il pas qu’un chant pour être bon, foit beau, facile , noble, & qu'il faffe pañler agréablement à l'oreille des paroles, qui par. elles-mêmes expriment le fentiment ? On répond, 12. que la mufique étant une imita- tion, & ne pouvant point y avoir d'imitation fans expreffion , tout chant qui n’en a pas une par lui-mê- me, peche évidemment contre le premier principe de l’art. 2°. Cette prétention eft fi peu chimérique, que dans Lulli même on trouve, quoiqu'en petit nombte des fymphonies, des chœurs, des airs de mouvement qui ont l’expreffon qui leur eft propre, & qui par conféquent ajoûtent à Pexprefffor des pa- roles: 3°. Que cette expreffion eft répandue en abon- dance fur les compoftions modernes ; que:c’eft - là. précifément ce qui fait leur grand mérite aujour« d’hur, &c qui dans leurnouveanté les failoit regarder comme barbares, parce qu’elles étoient en contra” dition entiere avec celles qui en manquoient , & qu’on étoit en poflefion d'admirer. 4°. Un chant, quelque beau qu'il foit, doit paroïtre difforme, lorf- qu'appliqué à des paroles qui expriment un fenti- ment ,il en exprime un tout contraire. T'el ef le pre- mier chœur du prologue d’Amadis dont on a déjà parlé; qu’à la place de ces mots évei//ons- nous , on chante ceux-ci ezdormons-nous, on aura trouvé une très-belle expreffion : mais avec les premieres para- les on ne chante qu’un contre-fens., & ce chant tres- beau devient infoûtenable à qui fait connoïître, dif- tinguer, & refléchir. Le contre-fens & la lenteur de ce chœur font d'autant plus mfupportables, que le réveil eft caufé pat un coup de tonnerre. 5°. Je de- mande ce qu’on entend par des chants faciles ? La faci- lité n’eft que relative au degré de talent, d’expérien- ce , d’habileté de celui qui exécute. Ce qui étoit fort difficile il y a quatre-vingts ans, eft devenu de nos jours d’une très-grande aifance ; & ce qui n’étoit que facile alors , eft aujourd’hui commun, plat , infipide. Il en eft des fpettateurs comme des exécutans ; la fa- cilité eft pour eux plus ou moins grande, felon leur , _ plus où moins d’habitude & d’inftruétion. Les Indes galantes, en 1735, paroïfloient d’une difficulté in- lurmontable ; le gros des fpeétateurs foftoit en dé- clamant contre une mufique furchargée de doubles croches , dont on ne pouvoit rien retenir. Six mois après, tous les airs depuis l'ouverture jufqu’à la der- niere gavote, furent parodiées & füs de tout le mon- de, À la reprife de 17$ x, notre parterre chantoit ri/- lant foleil, &tc, avec autant de facrlité que nos pe- res pfalmodioient Arride k ertcore plus aimable, &cc. C’eft donc dans l’expreffion que confifte la beauté du chant en général ; & fans cette partie eflentielle, il eft abfolument fans mérite. Il refte maintenant:à examiner en quoi confifte en particulier l’expreffior du chant de déclamation (c’eft ce qu’on expliquera à l’article RÉCITATIF), & celle que doit encore y ajoûter l’aéteur qui l’exécute. | Quoique ce que nous nommons très-impropre- ment récirarif doive exprimer réellementles paroles, & qu'il ne puifle pas porter trop loin cette qualité importante , 1l doit cependant être toüjours fimple, & tel à-peu-près que nous connoïflons la déclama- tion ordinaire: c’eft la maniere dont un excellent co- médien débiteroit une tragédie, qu'il faut que le mu- ficien faififle & qu'il réduife en chant. Voyez RÉ- CITATIF. Et comme il eft certain qu'un ‘excellent comédien ajoûte beaucoup à l’expreffion du poëte pat fa maniere de débiter , il fant aufli que le récita- tif foit un furcroit d’expreffion, en devenant une de- clamation notée & permanente. Mais l’aéteur qui doit le rendre ayant par ce moyen une déclamation trouvée, de laquelle il ne fauroit s’écarter, quelle eft donc l’expreffior qu'il peut enco- -re-lui prêter ? Celle que fuggere une ame fenfble, toute la force qui naît de l’aétion théatrale, la grace que répandent {ur les paroles les inflexions d’un bel organe, l’impreflion que doit produire un gefte no- ble, naturel, & toûjours d'accord avecle Chant. Si l'opéra exige de l’expreffion dans tous les chants & dans chacune des différentes fymphonies, il eft évident qu'il en demande aufli dans fa danfe. Voyez BALLET, DANSE, CHANT, DÉBIT, DÉBITER, MAITRE À CHANTER, D'ÉCLAMATION, EXÉCU- TION, OPÉRA, RÉGITATIF, & RÔLE, (3) EXPRESSION, (Peinsure.) Il eft plus aifé de déve- lopper le fens de ce terme, qu'il n’eftfacile de rédui- re en préceptes la partie de l’art de la Peinture qu'il fignifie. Le mot exprefffor s'applique aux aétions & ‘aux pafions, comme le mot ration s'adapte aux formes & aux couleurs: l’un eft l’art de rendre des qualités incorporelles , telles que le mouvement & les affections de l’ame : l’autre eff l’art d’imiter les ‘formes qui diftinguent à nos yeux Les corps des uns des autres, & les couleurs que produit l’arrange- ment des parties qui compofent leur furface. Repréfenter avec des traits les formes des corps, imiter leurs couleurs avec des teintes nuancées &. combinées entre elles, c’eft une adrefle dont l'effet foûmis à nos fens, paroït vraifflemblable à l’efprit : mais exprimer dans une image matérielle & immo- bile le mouvement , cette qualité abftraite des corps; faire naître par des figures muettes & inanimées li- dée des pañlions de lame , ces agitations internes & cachées; c’eft ce qui en paroïfflant au-deflus des moyens de l’art, doit fembler incompréhenfible. Cependant cet effort de l’art exifte ; &c l’on peut dire des ouvrages qu'ont compofés Les peintres d’ex- Preffior, ce qu'Horace difoit des poéfies de Sapho : Spirat adhuc amor , Vivuntque commiffr calores Æolie fidibus puelle. Pour parvenir à fentir la pofhbilité de cet effet de la peinture, il faut fe repréfenter cette union fi inti- | me de l’ame & du corps, qui les fait continuellement participer à ce qui eft propre à chacun d'eux en par- ticuhier. Le corps fouffre-t-il une altération , lame éprouve de la douleur ; lame eft-elle affe@ée d'une paflion violente, le corps à l’inftant en partage l’im- prefhion: il y a donc dans tons les mouvemens du corps & de l’ame une double progreflion dépendante VPune de l’autre; & l’artifte obfervateur attaché à examiner ces différens rapports, pourra, dans les mouvemens du corps, fuivre les impreffons de l’a- me. C’eft-là l'étude que doit faire le peintre qui af- _ Pire à la partie de l’expreffion ; fon fuccès dépendra de la finefle de fes obfervations , & fur-tout de la juitefle avec laquelle il mettra d’accord ces deux mouvemens. Les paflions ont des degrés, commeles couleuts:ont des nuances; elles naïffent, s’accroif- {ent , parviennent à la plus grande force qu'elles puilfent avoir, diminuent enfuite & s'évanouiflent. Les leviers que çes forces font mouvoir, fuivent la progreflion de ces états différens ; & lartifte qui ne peut repréfenter qu’un moment d’une pañlion , doit connoître ces rapports, s'il veut que la vérité fafle le mérite de fon imitation. Cette vérité, qui eft une exa@te convenance, naïîtra donc de la précifion avec laquelle (après avoir choifi la nuance d’une pañfion) il enexprimera le jufte effet dans les formes du corps &c dans leur couleur; s’il fe trompe d’un degré, {on imitation fera moins.parfaite; fi {on erreur eft plus confidérable ; d’une contradi@ion plus fenfble naï- tra le défaut de vraiffemblance qui détruit l’illufion. Mais pour approfondir cette partie importante, puifque c’eft elle qui ennoblit l’art de La Pemnture en la faifant participer aux opérations de l’efprit ; il {e- toit néceflaire d’entrer dans quelque détail fur les pañfions , & c’eft ce que je tâcherai de faire au mot PASSION. Je reprendrai alors les principes que je viens d’expofer ; & les appliquant à quelques déve- loppemens des mouvemens du Corps rapportés aux ImOouvémens de l’ame, je donnerai au moins l’idée d’un ouvrage d’obfervations qui feroient curieufes & utiles, mais dont l'étendue & la difculté extrè- mes pourront nous priver long -tems. Cer article ef£ de M. WATELET. EXPRESSION, (Pharm, Chimie.) eft lation de EX P 319 preffer un corps pour en faire fortir une liqueur. L'expreflion fe fait ow à laide d’une prefle, ou à l’aide d’un linge, dans lequel on renferme les matie- res, & qu'une ou deux perfonnes tordent plus ow moins fortement: cette derniere maniere eft fuff- fante pour exprimer certaines infufions , décoétions, les émulfons , les feces des teintures , &c. Maisona communément recours à la prefle, lorfqu’on veut tirer les fucs des fruits , des plantes , des fleurs, :c. _fur-tout quand ces fruits ne font pas très-fucculens: ces dernières matieres doivent être difpofées à l4- cher leurs fucs par une opération préalable, qui con: fifte à Les piler ou les raper. Foyez Prier € Raper. L’exprefffon par le fecours de la preffe, ef encore employée pour retirer des femences émulfives les huiles qui font connues dans l’art fous le nom d’Aui/e par expreffion: telles font les huiles d'amandes, de noix , de femences froides, de graine de lin, de ches nevis, &c. Poyez HUILE. (6) EXPULSER, cerme de Medecine, chaffer ayec efs fort, poufler hors les humeurs, 6e. à EXPULSER, ferme de Pratique , chafler avec une {orte de violence & par autorité de juftice : expulfer fe dit fur-tout d’un propriétaire qui voulant occuper fa maifon par lui-même, force un locataire à la fui céder avant l'expiration de fon bail. Voy. Evincer. L'ufage eft communément à Paris, qu'au cas d’ex- pulfon par le propriétaire ou par acquéreur, on ac- corde fix mois de joïiffance gratuite au locataire 4 comme endédommagement des dépenfes qu'ila faites pour s’atranger dans la maifon qu’on lui Ôte , & de celles quil doit faire enfuite pour s’arranger dans une autre; ce qui fort fouvent n’eft pas fufceptible de compenfation. Quoi qu'il en foit, la faculté que la loi donne em certains cas d’expu/fér un locataire avant le terme convenu, paroît abfolument contraire à l’eflence de tous les baux: car enfin la deftination, la nature À & la propriété d’un bail, c’eft d’affürer de bonne- fo1 au locataire l'occupation a@elle d’une maifon pour un tems limité, à la charge par lui de payer certaine fomme toutes les années , mais avec égale obligation pour les contra@tans , de tenir & d’obfer.. ver leurs conventions réciproques , ln de faire jouir , & l’autre de payer, 6e. | Quand je m'engage à donner ma maïfon pour fit ans, je conferve il eft vrai la propriété de cette maï- fon, mais je vends en effet la joiiffance des fix ane nées; car le louage & la vente font à-peu-près de même nature , fuivant le droit romain ; ils ne diffe- rent proprement que dans les termes ; & comme dit Juftinien, ces deux contrats fuivent les mêmes re- gles de droit : Zocario € conduëtio proxima eff emptioni & venditiont , iifdemque juris regulis confifiit. Lib, TTL. 2nfhie, tit. xxy, Or quand une chofe eff vendue & li- vrée, on ne peut plus la revendiquer, l'acheteur eft quitte en payant, & il n’y a plus À revenir: de-là dé: pendent la tranquillité des contraëtans & le bien gé- néral du commerce entre les hommes ; fans cela nulle décifion, nulle certitude dans les affaires. La faculté d'occuper par foi-même accordée au propriétaire malgré la promefle de faire joüir, por- tée dans le bail, ft donc vifiblement abufive & con= traite aubien de la fociété, C’eft ce qu’on nomme le Privilége bourgeois ; c’eft, à proprement parler, le pri- vilége de donner une parole & de ne la pas tenir: pratique odieufe, par laquelle on accoûtume les hommes à la fraude & à fe joiier des flipulations & des termes. Outre que par-là on fait panchet la ba-." lance en faveur d’une partie au defavantage de l’au/ tre; puifque tandis qu'on accorde au propriétaire/a faculté de reprendre fa maifon , on refufe au locatai. re la liberté de réfilier fon bail, : Au furplus fi cette prérogative eftinjufte, gle eft E X P 32 en même tems illufoire ; puifque le propriétaire pou- . vant y renoncer par une claufe particuhere , les lo- cataires qui font inftruits ne manquent point d'exiger : la renonciation : ce qui anéantit dès lors le préten- du droit bourgeois ; droit qu'il n’eft pas.poflible de conferver, à moins qu’on netraite-avec des:gens peu ! au fait de ces ufages., & qui foient induits'en erreur : par les notaires, lefquelsaurefte manquenteffentiel- : lement au miniftere qui leur eft confié, quand ils né- : gligent de guider les particuliers dans la paflation des baux & autres aétes. Un avocat célebre:m’a fait ici une dificulté. Le notaire , ditsl ,.doit être impartial pour Les contrac- tans: orilcefleroit de l’être fi, contre les vües & l’in- térêt du propriétaire , il inftruifoit Le preneur de tou- tesles précautions dont la loi lui permet l’ufage pour affermir-{a location. Tant pis pour lui sl ignore ces précautions; que ne s’inftruit-1l avant que de con- clure? que ne va-t-il confulterun avocat, qui feuleft capable de le diriger ? Il n’eft pas difficile de répondre à cette difficulté: on avoue bien que Le notaire doit être impartial, c’eft un principe des plus certains; mais peut-on le croire impartial, quand:il n’avertit pas un locataire de l’infufifance d’un bail qui ne lui aflüre point un logement fur lequel il compte, & qui eft fouvent d’une extrème conféquence pour fa profeflion, fa fabrique , ou fon commerce ? Peut - on le croire im- partial, quand il cache les moyens de remédier à cet inconvénient , & qu'il n’exige pas les renonciations autorifées par la loi ? On veut que le moindre parti- culier, avant que d’aller chez un notaire, fafle une confultation d'avocat pour les affaires les plus fim- ples : on veut donc que les citoyens paffent la moi- tié de leur vie chez les gens de pratique. On fent que l'intérêt fait parler en cela contre l'évidence &c la juftice ; que fur la difficulté dont il s’agit, un notaire peut aufi-bien qu’un avocat donner des inftruétions fuffifantes ; &c l’on fent encore mieux qu'il le doit, en qualité d’officier public, chargé par état d’un miniftere de confiance, qui fuppoie né- ceflairement un homme integre & capable, lequel fe doit également à tous ceux qui l’employent, &c dont la fonétion eft de donner aux aétes l’authenticité , la forme & la perfeétion nécefaire pour les rendre va- lides. Le notaire en faifant un baïl doit donc aflürer au- tant qu'il eft poffible , l'exécution de toutes les clau- fes qui intérefent les parties ; il doit les interroger pour démêler leurs intentions , leur expliquer toute l'étendue de leurs engagemens; & en un mot puif- que la promeffe de faire jouir, faite par Le propriétai- re, ne fufiit pas pour l’obliger, s’il ne renonce expref- fément au privilége qu’il a de ne la pas tenir, 1l eft de la religion du notaire d’inférer cette renonciation dans tous les baux, jufqu’à ce qu’une légiflation plus éclairée abroge tout-à-fait la prérogative bourgeoïe, &c donne à un bail quelconque toute la force qu'il doit avoir par fa deftination, en fuivant l'intention des parties contraétantes. Au furplus notre jurifprudence paroït encore plus déraifonnable, en ce qu’elle attribue à l’acquéreur d’une maïlon le droit d’expulfer un locataire malgré Ja renonciation du vendeur au droit bourgeois: car enfin fur quoi fondé peut-on accorder l’expulfion dans ce dernier cas? L’acquéreur fuppofé ne peut pas avoir plus de droit que n'en avoit le premier maître ; l’un ne peut avoir acquis que ce que l’au- tre a pù vendre : or l’ancien propriétaire ayant cedé la jouiffance de fa maïfon pour un nombre d'années, ayant même renoncé , comme on le fuppofe, au droit d'occuper par lui-même &c d'expulfer {on lo- cataire pour quelque caufe que ce puifle être, cette jouiffance ne lw appartient plus, & 1l n’en fauroit E XP ‘difpoler en faveur d’un autre. Ainf lié par fes èn- gagemens & par fes renonciations , il ne peut plus vendre fa maifon {fans une referve bien formelle en faveur du locataire ; referve effentielle & tacite, qui, quand elle ne feroit pas énoncée dans le con- trat de vente, ne perd rien pour cela de fa force, attendu que fuivant les termes employés dans plu- fieurs baux, & fuivant l’efprit dans lequel ils font tous faits, le fondstêc la fuperficie de la maïfon de- viennent l’hypotheque «lu locataire. En un mot , l’ancien propriétaire ne peut vendre de fa maifon que ce qui lui appartient, que ce qu'il n’a pas en- core vendu, je veux dire la propriété ; 1l la peut vendre véritablement cette propriété , mais avec toutes les fervitudes , avec toutes les charges qui y font attachées , & auxquelles il eft affujetti lui- même : telle eft entre autres la promeñle de faire joiir , ftipulée par un bail antérieur , & fortifiée des renonciations ufitées en pareil cas ; promefle par conféquent qui noblige pas moins l'acquéreur que le propriétaire lui-même. Au furplus, fi l’ufage que nous fiivons facilite 2 vente & l’achat des maifons dans les villes, comme quelques-uns me l'ont objeété bien leperement quelle gêne &c quelle inquiétude ne jette-t:1l pas dans toutes les locations, lefquelles au refte font infini- ment plus communes, & dès-là beaucoup plus inté- reflantes. D'ailleurs, fi le privilége bourgeois étoit uné fois aboïi, on n’y penferoit plus au bout de quel- ques années, & les maïfons fe vendroient comme au- paravant, comme on vend tous les jours les maifons de campagne & les terres, fans qu'il y ait jamais eu de privilége contre le droit des locataires, De tout cela il réfulte que le prince légiflateur étant proprement le pere de la patrie, tous les fujets étant réputés entre eux comme les enfans d’une mé- me famille , le chef leur doit à tous une égale pro- teétion : qu’ainf toute loi qui favorife Le petit nom- bre des citoyens au grand dommage de la fociété, doit être cenfée loi injufte & nuifible au corps na- tional ; loi qui par conféquent demande une prompte réforme. Telle eft la prérogative dont il s’agit, & dont il eft aifé de voir l’imuitice & l’inconféquence. Au refte il n’eft pas dit un mot du privilège bout- geois dans la coûtume de Paris. La pratique ordi- | naire que nous fuivons fur cela, vient originaire- ment des Romains, dont la gloire plus durable que leur empire , a long-tems maintenu des ufages que la fagefte & la douceur du Chriftianifme doivent, ce me femble, abolir. | . Quoi qu'il en foit, les inftituteurs de ceprivilége, tant ceux qui l’ont introduit dans le droit romain; que ceux qui ébloüis par ce grand nom l'ont enfuite adopté parmi nous ; tous, dis-je, ont été des gens diftingués, des gens en place, des gens en un mot qui poflédoient des maifons ; lefquels entraînés par le mouvement imperceptible de l'intérêt, ont écou- té avec complaifance les allégations du propriétaire qui leur étoient favorables, & qui en conféquence leur ont paru décifives : au lieu qu’à peine ont-ils prêté l'oreille aux repréfentations du locataire, qui tendoient à reftraindre leurs prérogatives, & qu'ils ont rejettées prefque fans examen. De forte que ces rédadeurs, éclairés fans doute & bien intentionnés, mais féduits pour lors par un intérêt mal-entendu, ont dépofé dans ces momens le caraétere d'impartta- lité , fi néceffaire dans la formation des lois : c’eft ainf qu'ils ont établi fur la matiere préfente des re- gles qui répugnent à l'équité naturelle, & qu'un lé- glateur philofophe & defintéreflé , un Socrate, ua Solon , n’auroit jamais admifes, Jai voulu favoir s’il y avoit dans les pays voifins un privilége bourgeois pareil au nôtre, j'ai {à qu'il n’exiftoit dans aucun des endroits dont j'ai eu des | inftruétions ; inftruétions ; feulement en Prufle, lufage eft favo- rable à l'acquéreur, mais nullèment à l’ancien pro- priétaire, En Angleterre & dans le comtat Venaif- fin, l’ufage eft abfolument contraire au nôtre; &c la réponfe que j'enaieuede vive voix & par écrit, porte qu'un bail engage également le propriétaire , l’acqué- reur, les adminiftrateurs , &c autres ayant caufe, à laïfler jouir les locataires jufqu’au terme convenu; pourvü que ceux-ci de leur côré obfervent toutes les claufes du bail: jurifprudence raifonnable & décifi- ve, qui prévient à coup sûr bien des embarras & des procès. - Au furplus, j'ai infinué ci-devant que les proprié- taires n’avoient dans le privilége bourgeois qu’un intérêt mal-entendu; nouvelle propofition que je “veux démontrer fenfiblement : 11 fuffit d obferver pour cela que fi cette prérogative étoit abrogée, &. que les locataires fuffent pour toûjours délivrés des {ollicitudes & des pertes qui en font les fuites ordi- naires, ils donneroïent volontiers un cinquantième en fus des loyers a@tuels. Dans cette fuppoñition qui n’eft point gratuite, ce feroit une augmentation de trente livres par année fur une maïfon de quinze cents livres de loyer, ce feroit foixante francs d’ang- mentation fur une maifon de trois mille livres; ce qui feroit en cinquante ans cinq cents écus fur l’une, & mille écus fur l’autre : or peut-on évaluer l’avan- tage du privilège dont il s’agit, & dont l’ufage eft même aflez rare par les raifons qu’on a vües ; peut- on, dis-je, évaluer cet avantage à des fommes fi confidérables, indépendamment des pertes que le propriétaire effuie de fon côté par les embarras & les frais de procédures, dédommagement des loca- taires, &c. ? Sur cela, c’eft aux bons efprits à décider fi l’u- fage du privilége bourgeois n’eft pas véritablement. dommageable à toutes les parties intérefées, & par conféquent , comme on l’a dit, à toute la fociété. Mais je foûtiens de plus , que quand il y auroit du defavantage pour quelques propriétaires dans la fuppreffion de ce privilège , ce ne feroit pas une raifon fuffifante pour arrêter les“difpenfateurs de nos lois ; parce qu'outre que la plus grande pat- tie des fujets y eft vifiblement léfée, cette partie , eft en même tems la plus foible, & cependant la plus laborieufe & la plus utile. C’eft elle qui porte prefque feule la mafñe entiere des travaux néceffai- res pour l'entretien de la fociété, & c’eft conféquem- ment la partie qu’il faut le plus ménager, pour l’in- térêt même des propriétaires : vérité que notre ju- tifprudence reconnoît bien dans certains cas; par exemple , lorfqu’elle permet au locataire de retro- ceder un baïl, malgré la claufe qui l’aflujetrit à de- mander pour cela le confentement du maitre. C’eft ge les juges inftruits par l’expérience & par le rai- onnement, ont fenti que l’intérêt même du proprié- taire exigeoit cette tolérance, le plus fouvent né- ceflaire pour la füreté des loyers. _ Les anciens légiflateurs qui ont admis la préroga- tive bourgeoife , ne comprenoïent pas fans doute que l'utilité commune des citoyens devoit être le fondement de leurs lois , & devoit l'emporter par conféquent fur quelques intérêts particuliers. Ils ne confidéroient pas non plus qu’au même tems qu'ils étoient propriétaires, plufeurs de leurs proches & de leurs amis étoient au contraire dans le cas de la location, que plufeurs de leurs defcendans y feroient infailblement dans la fuite , & qu'ils travailloient fans y penfer contre leur patrie & contre leur pof- térité. Article de M. FAIGUET. EXPULSIF, adj. serre de Chirurgie ; efpece de bandage dont on fe fert pour chaffer en - dehors le pus du fond d’un ulcere fiftuleux ou caverneux, & donner occafon à la cavité de fe remplir de bonnes Tome VI. EXS 321 chaits, ou pour procurer le-recollément des parois, Ce bandage n’eft que contentifdes comprefles gra duées nommées expu/ves, Voyez COMPRESSE. On obferve dans ce bandage que les circonvolu- tions de la bande s’appliquent de façon qu’elles com- priment du fond de l’ulcere vers fon ouverture: (F7) EXPULSION, f. f, (Jurifp.)+en cerme de Palais, fignifie la force que l’on employe pour faire fortir quelqu'un d’un endroit où il n°a pas droit de refter, Le procès-verbal d’expulfion eft le récit de ce qui fe pafle à cette occafon : il eft ordinairement fait en vertu d’un jugement ou ordonnance qui pérmet l’ex- pulfion. On expulfe un locataire ou fermier qui eft à fin de baïl & qui ne veut pas fortir,, ou faute de paye- ment des loyers & fermages : le Jugement quipermet lexpulfion autorife ordinairement auffi à mettre les meubles fur le carreau. On expulfe auffi un poifef- {eur irtrus, qui eft condamné à quitter la joïnffance d’un héritage. Voyez CONGÉ , FERMIER , Loca- TAIRE, RÉSILIATION. (4 EXPULSION,, {. f. ( Medecine.) ce terme fignife la même chofe qu'excrétion, évacuation ; C’eft l’a&ion par laquelle la nature décharge le corps de quelque matiere récrémentitielle on morbifique , foit par la voie des felles ou des urines, foit par tout autre or- gane fecrétoire & excrétoire. Foyez Les art, EXCRÉ-+ TION, ÉVACUATION, DÉJECTION, CRISE. (d) EXSPECTATION, f. f. ( Medecine.) c’eft un ter- me emprunté du latin par les Medecins, qui , en gé- néral, ne l’employent même que rarement : il eft prefque affeêté à la doûtrine de Stah] & de fes fedta- teurs, dans les écrits defquels on le trouve fouvent, {oit qu'ils l’adoptent fous certaines fignifications, foit qu'ils le rejettent fous d’autres, En effet, ce mot peut être pris dans différentes ac: ceptions, qui ont cependant cela de commun, qu’el- les fervent toutes à défigner le genre de conduite du malade ou du medecin dans Le cours de la maladie, qui confifte en ce que l’un ou l’autre évite, plus ou moins , d'influer fur l’éyenement qui la termine, laifle agir la nature , ou attend fes opérations pour fe déterminer à agir. On peut donc diftinguer plufeurs fortes d’exfpec- tattons : la premiere peut être confidérée, par rap= port au malade, entant qu’elle a lieu, ou parce qw'il n'y a pas d'autre parti à prendre, ou parce qu’il prend celui-là de propos délibéré, c’eft-à-dire, dans le pre- mier cas, lorfqu’il n’eft pas à portée de recevoir des fecours de l’art, ou qu'il n’eft pas en état , en difpo- fition de s’en fournir par quelque caufe que ce foit : dans le fecond cas, lorfqu'il eft dans l’idée que les fecours font inutiles ou nuifbles, & qu’il s’obftine à ne vouloir point en recevoir, Comme il y a bien des maladies qui fe font guéries par la nature feule livrée à elle-même, une telle conduite, toute hafars deufe &r imprudente qu’elle eft, peut être par confé- quent fuivie d’un heureux fuccès dans bien des oc= cafons ; c’eft par cette confidération que Stahl n’a pas craint d'établir dans une differtation , qu'il exifte une medecine interne, c’eft-à-dire des moyens de guérir les maladies indépendamment d’aucun fecours de l’art ; ergd exiflir medicina fine medico , conclud cet auteur. L'ex/petfation de cette premiere efpece peut auf _ être confidérée, par rapport au medecin, comme ayant lieu dans le cas où il affete de ne point em= ployer des remedes, des médicamens, dans le trai= tement des maladies, ou pour mieux dire ; lorfqu’il ne les traite point , & qu’il fe borne à être /pectareur ozfif des efforts de la nature, à en attendre les effets. L’exfpetlation ainfi conçue à l’égard du malade & du medecin, eft une attente pure & fimple; elle n’eft autre chofe qu’une véritable inaction, de laquelle on ne peut aucunement dire qu’elle foit une mes de. $ 322 EXS traiter les maladies: Nous verrons dans fn fuite ce qt'on doit-penfer d'unertelle conduite, qui eft direc: tement oppofée à cellé que tiennent ceux ‘dont le fyftème les porte à ne compter que furiles fecoufs de Part pour la guérifon dessmaladies. un | L'exfpeëlarion de la feconde efpeceine differe de la précédente, que paf les apparences d’un traitement fous lefquelles on la mafque:; ellern’eft pas plus mé- thodique , quoiqu’elle puifle quelquefois être plus fondée enr taifon :‘ellera donc lieu, lorfqu'un mede- din ayant pour principe, dans la pratique, de tout attendre de la nature! pour la guérifon de la:malas dié cache fa défiance des fecours de-l'art, par l’ufa: ge des feuls remedes qui font fans conféquence , & qui ne produifent prefque d'autre effet que celui d'a mufer les malades | 8e deremplir le:tems en atten- dant l'événement des maladies. … La même chofe peut avoir lieu, lorfque le mede- cih trop igorant, engénéral, pour favoir ordonner des remedes à-propos, ou ne connoiffant pas le gen: re de maladie qu'il a à traiter, eft aflez timide ou affez prudent pour éviter de nuire, lorfqu'ilne peut pas être utile, 8: fe borne aufli à ne faire que gagner du tems & à foûtenir la confiance du malade en pa- roiflant travailler à fa guérifon , fans faire réelles ment rien de ce qui peut contribuer à la procurer. L’exfpeëtarion dans ce dernier cas, eft proprement ce que les Latins appellent curéario; c'eft un retar- dement motivé; c’eft le rôle du semporifeur fage & adroït qui attend à comnoître avant d'agir, qui ne fe détermine point tant qu'il ne voit pas clair, &c qw'il efpere d’avow des indications plus décidées à fuivre. : Ces différens traitemens, quoique fans conféquen-. ce dans la fuppoñition., font fouvent fuivis d’un heu- reux fuccès, dont le medecin fe fait honneur & pro- fit, tandis qu'il n’a, tout au phis, d'autre mérite que : célui d’avoir laiffé agir la nature, de ne lavoir pas troublée dans fes opérations. C’eft la confidération de‘pareïlles cures, qui a fourni à Stahl le fujet d’une différtation iraugurale, de euratione æquivocæ, dans laquelle il diminue très-confidérablement le très- grand nombre de prodiges en fait de guérifons, que l'on attribue fouvent, même de bonne foi, aux fe- cours de l’art. Il prouve que les medecins anodyns font des vrais exfpettans , fans s’en douter , fans fa- voir même en quoi confifte l’ex/peéarion , fans en connoître le nom + ils n’ordonnent que des remedes doux, benins, des petites faignées, des purgatifs le- gers, des juleps, des eaux difüllées qui ne produi- fént que peu de changemens dans la difpofition des malades , qui n’empêchent pas, ne troublent pas l'o- pération de la nature, quoiqu’ils foient le plus fou- - | vent placés fans être indiqués, & même contre ce qui eft indiqué. + Enfin , l’exfpeitation de la troifieme efpece peut . | être regardée comme un moyen d’obferver ce que la nature fait dans les maladies, en reconnoiffant fon autocratie (voyez NATURE), en lui laflant le téms d'agir conformément aux lois de l’économie ahimäle, fans s’oppofer aux efforts de cette puif- fänce motrice par des remedes qui pourroient pro- dire des changemens contraires à ce qt'elle fait pour détruire la caufe morbifique (voy. COCTION); en attendant qu’elle donne le fignal de lui fournir des fécours par les phénomènes indiquans ; enforte que les medecins qui prennent cette forte d’exfpefarion pour regle dans le traitement des maladies, ne ref- tént dans l’inadtion qu'autant qu'il faut pour être dé: términés À agir de concert avec la nature. . Telle eft la méthode que fuivoit & qu’enfeigne, dans toutes fes œuvres admirables, le grand Hippo- crate | curatio methodicaz c’eft donc mal-à-propos que l’on reprocheroit à ceux qui s’y conforment dans leur. pratique , d'être des Jpectateurs-oififs : ce weft que ès EX SI cette fage exfpeïlation qu'a célebréet8&-recommandée le fameux:Stahl en profcrivant toute autre inaétion dans le traitement des maladies:, qui ne feroit pas fondée fut lesregles.qui établiffent lé concours de lx nature-8a de l'art ,.dans tousiles- cas où céhu-ci peut-être utiles: r «11° 1408 su 00 Tin 4 Pour fe convaincre que la grande maxime , l'ex Reélaide cet auteur; ne mérite pas le ridicule qu'on a-Voulu y attachet, en ne juseant, pour ainfi direz queJur l'éniquetre du fac, onm'a qu'à lire ayec-atten, tion fon commentaire fur le traité de Gédeon Harvé de curatione morborum per exfpettationem ; ony Verta qu'il n’a fait qu'inffter fur la pratique des anciens, qui étoit toute fondée fur l’obfervation, àla faveur de laquelle ils attendoient,. à lawérité, léseffets qui fournifent les indications pour fe déterminer à agir; mais qui agifloient lorfqu'ils: jugeoient que les {e- cours pouvoient êfreutiles , à plus-forte raifonllor{- qu'ils leur paroïfloiènt néceflaires ;:qui voyoient par conféquent-dans la plûpart des préceptes du pere de la Medecine: des confeils d'agir, mais après l’attente du tems favorable:,:des mouvemens :préparatoirés aux cmifes annoncées'par là marche.de la nature étu« diée.. connue par une longne-fuite d’obfervations; crifes, que l’art peut favorifer, diriger, mais qu'il ne peut pas fuppléer, parce quela nature feule opère les co&ions , qui doivent néceflairement précéder les crifes. Voyez COcTIOoN. | Il n’eft pas:moins aifé de juffifier lesmodeles que fé propofent les partifans de l’ex/peéfation méthodi- . que dont'il s’agit aétuellement , & de les juftifier par leurs propres écrits, des imputations des modernes fyftématiques : ceux-ci, fans égard pour les obfer- vations des anciens, pour les regles que ceux-ci ont établies d’après l'étude de la nature , de la vraie phyfique du corps humain, regardent cette doftrine (avec autant d'injuftice, de hardieffe & d’ignorance qu’Afclepiade le fit autrefois), comme wre longue méditation fur la mort ; ils croyent qu'Hippocrate & fes feétateurs n’agifloient point dans le cours des. maladies, ne fournifloient aucun fecours , & fe bor- noient à obferver , à peindre la nature aux prifes: avec la caufe morbifique; à attendre l’évenement, fans concourir à faire prendreaux maladies unetour- nüre avantageufe ; & cela, parce que ces anciens: maîtres ne fe hâtoient pas, comme on fait de nos jours , d’ordonner des remedes fans attendre qu'ils fuflent indiqués par les phénomènes de la maladies: parce qu'ils ne faifoient pas dépendre, comme om fait de nos jours, la guérifon des maladies:de la feule ation des remedes ; parce qu'ils n’avoient point de méthode de traiter indépendante de l’obférvation de chaque maladie en particulier ; parce qu’ils n’ayoient point de regle générale d’après laquelle ils dûflent:: par exemple, faigner ou purger dans les fievres cons: tinues, a/ernis diebus, fans examinet fi la difpofition: aduelle du malade comportoit l’ufage des remedes: qu'ils employoient. : UT Mais toutes ces raifons , bien loin de fournir des conféquences contre ce grand medecin; ne peuvent: {ervir, lorfqu’on les examine fans prévention, qu'à démontrer l’imprudence de la pratique impérieufes des modernes, & établir , par oppoñition , la fagetle, de la méthode modefte & circonipeéte des anciens + celle-c1 n’eft continuellement occupée à obferver; | que pour agir avec connoïffance de caufe , que pour ne: pas empêcher des fecours, fans qu'ils foient indie! qués par la nature même qui en a befoin, c’eft-à-. dire par l’état a@uel de la maladie qui les exige, par: la difpoñition aux effets qu'ils doïvent.opérer. ‘Il faut cependant convenir que fur ces principes ils apiffoient très-peu , parce que la nature ayantla faculté par elle-même de guérir la plüpart des ma- ladies, préfente très-rarement.des occafons de fup-. Ce cd pléer à fon défaut par le fecours de l'art : ils né les employoient donc que pour aider dans les beloins bien marqués : ils ne connoïfloient pas une infinité de moyens de laider fans la troubler, parce que leur matiere médicale étoit encore très-bornée, & rédui- te à des drogues prefque toutes très-fortes , très-ac- tives : s'ils avoient eu nos minoratifs , ils auroient moins craint de purger ; ils en auroient fait ufage pour favorifer, pout foûtenir la difpofition de la na- ture, fa vergence à procurer une évacuation de la ma- tiere morbifique par la voie des felles;mais ils ne con- noïifloient pas ces minoratifs ; ils ne pouvoient donc pas agir dans bien des cas où nous pouvons le faire, pour aider la nature dans fes opérations : ils connoif- {oient encore moins l’art de ne faire qu'amufer par des fecours inutiles, fans conféquence : la medecine politique n’étoit pas encore inventée , & fubftitnée à la vraie medecine : on n’avoit pas encore l’adrefle de favoir s’attribuer, comme on fait à préfent, l’hon- neur d’une cure qu'on n’a pas même {à favorifer, à Jaquelle on a peut-être eu la mal-adrefle de s’oppo- der , en contrariant la nature qui travailloit à la pro- curer : enforte que cette puifflance médicatrice a fou- vent à furmonter tous les obftacles de la guérifon, autant par rapport au traitement de la maladie, qu’à la maladie elle-même. Les principes dela méthode ex/peélantedes anciens, que l’on trouve répetée par-tout dans tous leurs ou- vrages, étoient bien différens, ainfi qu'il a été ci-def- fus établi. Le divin Hippocrate les a admirablement rédigés dans fes aphorifmes, & les a ainfi réduits en regles faciles à fuivre , & folidement appuyées fur {on recueil d’obfervations concernant les maladies épidémiques : regles qui ont été adoptées par le plus grand nombre des medecins qui l'ont fuivi, con- vaincus par leurs propres obfervations, de la vérité de celles de leur chef, C’eft denc d’après ces regles que l’on doit juger les anciens ; que l’on doit voir Aus fpéculation ne menoit qu'à l'inaétion, ne tendoit qu’à faire des fpec- tateurs oïfifs : 1l fufira, pour le fujet dont il s’agit 1c1, d'ouvrir le livre des aphorifmes , & d'examiner quelques-uns de ceux qui fe préfentent : ne voit-on pas, par exemple , que dans l’aphorif. jx. feët, 2. cet auteur fecommande qu'avant de purger les malades, on rende leur corps fluide , c’eft-à-dire qu'on dif- pofe aux excrétions les humeurs morbifiques:, en les délayant fufifamment, en favorifant la coétion de ces humeurs, afin qu’elles puiffent fortir avec facili- té : ce précepte ne renferme-t-il pas des confeils d’a- gir ? n'annonce-t-1l pas que l’art doit favorifer & pro- curer la purgation ? mais en même tems notre auteur veut qu'on attende le tems convenable pour la pro- curer : voilà donc auffi un confeil d’exfpeétation; mais elle n’eft pas oïfive cette exfpeéfation , puifqu’il en- tend qu’on employe le tems à préparer le corps à l’é- vacuation qui doit fuivre, Telle eft la maniere dont ce grand maître établit fes regles : maniere raïifonnée , qui a fervi de fon- «lement à la medecine dogmatique, qui lui a fait con- noître les exemptions à ces mêmes regles, lorfqu’el- les en ont été fufceptibles ; ainf, par rapport à celle qui vient d’être rapportée, comme il eff des cas dans lefquels la préparation à la purgation n’eft pas né- ceflaire , or/que l'humeur morbifique eff abondante € difpofée 4 pouvoir étre évacuée tout de fuite : il recom- mande (aphor. xxjx, feël. 2.) que, les chofes étant ainf, méme au commencement des maladies, lon fe hâre de procurer l'évacuation de cette humeur : il condamne l'ex/pettation dans ce cas, comme pouvant être nuif- ble, fans être en contradidion avec lui-même : à l'égard de l’apkor, xx]. Jet. 1, dans lequel il établit expreffément , que lon doit feulement purger les hu- grenrs qui font cuites ; & non pas celles qui fons encore Tome FI, EXS 333 crues , 6 qu'il faut bien fe garder de purger dt commen. cement des maladies : dans le premuer cas , il fuppofe que la coétion n’eft pas néceffaire : que les humeurs motbifiques ont aéluellement les qualités qu’elle pourroit leur donner : il n’y a donc pas de difpoñi- tion plus favorable à attendre : dans le fecond cas ; cette difpoñition à l’excrétion des humeurs n’exifte pas ; 1l y a donc lieu à l’exfpedarion pour préparer à la coétion , & donner le tems à ce aw’elle fe faffe avant que d'agir, pour procurer l'évacuation : ;f donne une leçon bien plus importante (aphor. xxr. Jet. L)s qui prouve d’une maniere convaincante, qu'il étoit bien éloigné de ne confeiller qu'une ex Jpettation oïfive : cette lecon confifte à faire obfer- ver qu'il eft erès-néceffaire de prendre garde au cours que la nature donne aux humeurs ; d'où elles viennens 5 ok elles vont, 6 d’en procurer l'évacuation par les voies vers lefquelleselles tendent + il faut donc agir dans ce Cas, pour procurer cette évacuation ; mais il ne faut pas le faire fans confidération ; il faut attendre que les humeurs à évacuer fe foient portées dans les cou. loirs qui leur conviennent , & en favorifer ,en pro- curer l’excrétion par ces mêmes couloirs. On pourroit rapporteruntrès-grand nombre d’au- tres preuves de ce que l’on a avancé ti- devant, ti- rées de toutes les parties des ouvrages du prince des Medecins , pour démontrer qu’en recommandant l’ex/peétarion dans plufieurs cas, il ne fe propoloit point de défendre l’ufage des fecours de Part, mais il le perfetionnoit, en [a faifant fervir à le diriger en le fubordonnant à l’obfervation des phénomenes que lexpérience a appris À être propre à indiquer les cas , où ces fecours peuvent être employés utile. ment ; en un mot, en étabhiffant que c’eft la nature qui guérit les maladies, qu’elle n’a befoin du mede cn, que pour l'aider à les guérir pltôt,, plus fre- ment & plus agréablement , lorfqu’elle ne fe fufit pas à elle-même pour cet effet ; que celni qui fait les fonétions de medecin, peut tout au plus fe flater d’a2 voir bien fecondé cette puiffance dans les cures qu’il paroïîtopérer, parce qu'il eft par conféquent trésrare que l’art foit utile dans le traitement des maladies ; parce que fes véritables regles , qui ne doivent être hétées que par l’obfervation, font très-peu con= nues ;, parce qu'il n’eft de vrais medecins que ceux qui les connoïfient, & qui font perfuadés que la prin- cipale fcience du guérifleur confifte À bien étudier &c à bien favoir quid natura faciat € ferat, & à ne faire que concourir avec elle, su On ne peut s’affürer de ce que la nature s'efforce de faire, & de ce qui peut réfulter de fes efforts ,' qu’en attendant les phénomenes qui indiquent le tems où on peut placer les remedes avec fuccès (voyez SIGNE , INDICATION) : c’eft par cette confidéra tion que le célebre Hoffinan ( roms, LÏI. eff. 11, chap. xjsverf. 7.) regarde lexfheétation méthodique , com- me un grand fecret pour réuffir dans la pratique de la Medecine. Cette ex/peélation , qui non-feulement n'eft pas une inaétion pure &c fimple , ni-une fpécu- lation oïfive, mais une conduite éclairée du mede- cin, qui influe réellement fur l'évenement des mala- dies, & qui tend à le rendre heureux : conduite qui confifte à attendre de la nature le fignal d'agir, lorf- qu'elle peut le donner à-propos, & à employer ce tems d'attente à préparer par des moyens convena. bles ; qui n’excitent aucun trouble , aucun mouve- ment extraordinaire , Les changemens , à l’opération defquels il fe propofe de concourir enfuite par des moyens plus aétifs , plus propres à procurer les ex- crétions , les crifes , fi elles ont befoin d’être exci- tées, à laïfler ces mouyemens falutaires à eux - mê- mes , lorfque la préparation fuffit pour que les coc- tions , les crifes s’effettuent autant qu'il eft néceffai- re, lorfque la nature eft affez forte, Le pour ainfi > 5 1j DA EXS dire , en affez bonne fanté (quoique dans un corps où font des caufes morbifiques) pour fe fuflire à elle- même, ainf qu’elle fait dans prefque tous Les fujets robuites, bien conftitués , qui guériffent fi fouvent de bien des maladies confidérables , fans fecours de medecins , mais non pas fans ceux de la medecine naturelle , que la divine Providence a attachée à la feule difpofition de la machine animale , nufe en œuvre par une puiflance motrice, toïjours portée à éloigner tout ce qui peut nuire à la confervation de l’individu , même dans les efforts qui paroïflent être le plus contraire à cette confervation : puiflan- ce, dont l’eflence eft autant inconnue, que fes opé- rations font évidentes & aflez généralement utiles, pour qu’on doive y avoir égard. C’eft fur ce fonde- ment que porte ab{olument la doétrine de Pexfpec- tation, qui confifte par conféquent à obferver l'or- dre le plus conftant de ces opérations, ce qui les précede & ce qui les fuit : doétrine dont les connoif- fances qui la forment , ne peuvent qu'être acquifes avec beaucoup de peine, & par une étude conti- nuelle de l’hiftoire des maladies, recueillie par les grands maîtres qui ont fuivi cette doëtrine ; par une extrème application à obferver , à recueillir, à com- parer les faits, ainfi qu'ils l'ont pratiqué eux - mé- mes : c’eft le feul moyen que l’on ait pour parvenir à être auffi utiles qu'eux au genre humain , préfent & futur. Mais c'eft un moyen trop difficile à employer, pour qu'il n'ait pas été négligé , &c même rejetté par ceux qui ont voulu abreger le chemin qui con- duit à la réputation & à la fortune : la facilité de faire des fyftèmes , de les adopter , d’en :mpoier au public, pour qui le rideau eft toijours tiré fur les vérités qui caraétérifent la fcience médicinale , a fourni l'expédient : on a étudié la phyfique du corps humain dans le cadavre ,mais non pas celle du corps vivant , qui paroît être généralement plus ignorée que jamais : on s’eft montré plus favant dans les écoles, dans les livres, depuis la découverte de Ia circulation du fang ; mais on n’a prefque rien fait pour l'avancement de l’art de guérir : on a multi- plié les remedes à l'infini : on en a même trouvé de nouveaux ; mais il n’y a pas moins de maladies mor- telles , de maladies longues, incurables. Tous ces défauts ne peuvent raifonnablement être attribués qu’à l'abandon qu’on a fait de la route tenue par les anciens, c’eft-à-dire de l’obférvation à la faveur de laquelle ils avoient fait de très- grands progrès, en très-peu de tems: progrès qui ont été fufpendus , dès qu'on a ceflé d’obferver ; par conféquent , de- puis plufeurs fiecles, & particulierement depuis que l’on ne s’eft occupé dans Pétude de la Medecine, que des produétions de l'imagination, auxquelles on s’eft eorcé de foïmettre , d'adapter la pratique de l’art ; depuis qu’on'fair vonfifter cet art dans Île feul ufa- ge des remedes, dont on nestire Pindication que de l’idée que l’on fe forme fur la nature de la caufe morbifique : idée le plus fouvent conçûs d’après les hypothèfes que l’on a embraflées ; enfin depuis que l’on ne fait aucune attention aux différens mouve- mens falutaires , ou tendans à l’être , qui s’operent dans le cours des maladies, indépendarnment d’au- cun fecours:, aux efforts de la puiflance confervatri- ce, pour le bien de fon individu (voyez EFFORT ), & que l’on'trouble tout dans l’ordre des matura- tions , des codtions , des erifes , qui font lesopéra- tions fur lefquelles les maladies les plus violentes. peuvent être terminées heureufement ; même fans aucun {ecours , dont le défaut ; par conféquent,, eft bien moins nuifible que le mauvais ufage ; d’où on {eroit fondé à conclure, que l'abus de la Mede- cine a rendu cette fcience plus permicieufe que fe- courable à l'humanité, E & Mais comment a-t-on jamais fü que la nature _ feule pouvoit produire de bons effets, fi ce n’eft par le moyen de l’obfervation ? 6 a-t-on pù obferver ces effets, fans laifler à elle-même la caufe qui les produit ? [la donc fallu attendre pour obferver: on ne peut , par conféquent , réparer tous les défauts de la pratique de nos jours , qu'en rétabliffant lex Jpéétarion , à la faveur de laquelle feule, on peut ap- prendre à agir avec méthode, pour fecourir les hom- mes dans leurs maladies , &c fans laquelle on ne par- viendra jamais à rendre l’art de guérir , digne de fon nom, & aufli utile au genre humain, qu'il eft fufcep- tible de l'être. Voyez MEDECINE, MÉTHODE CU: RATIVE, &c. (d) EXSUCTION , £. f. Ce terme eft employé par M, Quefnay, effai phyfig. pour fignifier l’exéraélion qui fe fait du fuc des alimens, par Le méchamifme de la digeftion. Voyez DIGESTION. (4) EXTASE, {, f, (Theolog.) raviflement de l’efprit hors de fon affiete naturelle , ou fituation dans la- quelle un homme eft tranfporté hors de lui-même, de maniere que les fon@ions de fes es font fut pendus. a. + Le raviflement de $, Paul jufqu’au troifieme ciels étoit ce que nous appellons exsafe, L’hiftoire ecclé- fiaftique fait foi que plufeurs faints ont été ravis en extafe pendant des journées entieres. C’eft un état réel, trop bien attefté pour qu'on puiffe douter de fon exiftence. ; Mais comme le menfonge & limpofture s’effor- cent de copier la vérité, & d’abufer de chofes d’ail- leurs innocentes, il eft bon d’obferver que les faux myftiques , les enthoufiaftes , les fanatiques ont fup= pofé des extafes, pour tâcher d’autorifer leurs réve- ries ou leurs impiétés. Le faux prophete Mahomet perfuada aux Arabes ignorans que les accès d’épi- lepfe auxquels il étoit fujet , étorent autant d’exrafes où il recevoit des révélations divines. (G) ExTASE, {. m. (Medecine. ) Ce terme, dérivé du grec, éft employé fous différentes fignifications par les auteurs ; Hippocrate s’enfertenplufeurs endroits de fes ouvrages, pour marquer une aliénation d’ef- prit très-confidérable , un délire complet, tel que celui des phrénétiques, des manmiaques. Woyez Les coaques, text, 486, lib. LE, les prorethiques | XVI. 12, 13+ 14: Sennert, prax. medic, lb. I. part, IT. cap. xxxQ parle auf de l’exrafe en différens fens ; 1l lui donne entr'autres, avec Scaliger, celui d’ezthoufafme , quois que très-impropre. Voyez ENTHOUSIASME. L’ufage a prévalu d’appeller exsafé une maladie foporeufe en apparence, mais mélancolique en effet, dans laquelle ceux qui en font affe@tés, font privés de tout fentiment & de fout mouvement , fem- blent morts, & paroïflent quelquefois roides comme une ftatue, fans l’être , autant que dans le serane 6 le catochus ; ils n’ont par conféquent pas la flexibilité des cataleptiques : ils en font diftingués d’ailleurs, en ce qu'ils avoient avant l’attaque , lefprit forte- ment occupé de quelqw’objet, & qu'ils fe Le rappel- lent fouvent apres l’accès extatique. Ils ont cepen< dant cela de commun, que s'ils font debout, ils ref- tent dans cette fituation immobiles, & de même de toute autre attitude dans laquelle ils peuvent être furpris par l’attaque. Voyez CATALEPSIE. Nicolas Tulpius, Henride Hers &c autres, rappor- tent des obfervations, par lefquelles ils affürent avoir vü des filles & de jeunes hommes pafionnément amoureux tomber dans l’exrafe, par le chagrin de ce qu’on leur refufoit l’objet de leur paflion, &c n’en revenir que parce qu’on leur crioit qu’on la fatisfe- roit. La dévotion produit aufli quelquefois ceteffet, comme il en confte par l’obiervation du Capucm, dont parle lemême Henri de Hers, M. de Sauvage dit dans fes claffes de maladies, avoir vü en 1728 à Mont- pellier, un homme qui ayant oi dire qu’on devoit le faire prendre pour le traduire en prifon , en fut f frappé de peur, qu'il en perdit le mouvement & le fentiment : on avoit beau crier, l’interroger, le pin- cer,ilne bougeoït nine difoit mot ; il tenoit les yeux à demi-ouverts, retenant toûjours la même attitude dans laquelle 1l avoit été faif d’épouvante, Les faignées, les émétiques , les clyfteres acres, irritans; lesfternutatoires, Les cauteres aétuels ; tous ces remedes employés avec prudence , féparément ou conjointement , felon que le cas l'exige, peu- vent remphr toutes les indications dans cette mala- die. On doit avoir attention de ne faire d’abord ufage que des moins violens, en paflant par degrés aux plus aéifs. (4) EXTENSEUR , adj, pris fubff, (4zar.) eft le nom d'un mufcle qui produit le mouvement des os , que les Anatomiites appellent exsenfron. Ce mouvement eft oppofé à la flexion, & devient même une flexion en fens contraire , fi la forme de l'articulation ne s’y oppofe, comme on le voit dans les fplenius & complexus , dans les cubitaux & ra- élaux externes, dans les exverfeurs des doigts du pié, éc. Les mufcles extenfeurs des doigts de la main & du pié, n’ont point d'autre nom que celui qu'ils tirent de leur fonétion. M. Morgagni obferve que les muf- cles du pouce & des autres doigts de la main, fur- tout les exsenfèurs, préflentent beaucoup de variétés dans les différens fujets, pour ce qui regarde Le nom- bre & la diftribution de leurs tendons, & qu’on ne peut en promettre une defcription bien certaine. Voyez {es adverfar. anat. II, pag. 40. On peut appli- quer cètte remarque aux excemfèurs des orteils, com- me nous verrons plus bas. L’exrenfeur commun des doigts de la main, vient de la partie poftérieure & inférieure ducondyle exter- ne de l’humerus ; il fort d’une gaine tendineufe qui enveloppe & pénetre les mufcles anconé, radial & Cubital externes : il fe divife en trois portions char- nues, terminées par trois tendons qui paffent fous le lgament annulaire commun externe du poignet. Un quatrieme tendon qui va au petit doigt, mais qu’on ne trouve pas toùjours, pafle pour un anneau parti- culier du même higament. Les extrémités de ces ten- dons s’inferent aux tubercules oblongs & tranfverfes des parties fupérieures externes des têtes des fecon- des phalanges ; entuite elles s’écartent latéralement en deux bandelettes qui fe réuniflent encore, & s’at- tachent aux faces convexes des troifiemes phalanges près de leurs bafes. L’exrenfeur propre dupetitdoigteftenveloppé dans fon principe de la gaine tendineufe du coude, dont il eft parlé ci-deffus, Il eft attaché Le long de la moitié fupérieure externe de l’os du coude. Son tendon di. vilé fuperficiellement dans le trajet fur Le dos de la main, accompagne le quatrieme tendon de l’exren- Jeur commun, & s’unit avec lui fur le quatrieme os du métacarpe. L'excenfrur propre de l'index, qu’on appelle aufi * indicateur, Vient par un principe tendineux de la par- tie externe & moyenne du cubitus, au-deflous de Vattache du grand exterfeur du pouce. Il eft encore un peu attaché au ligament inter-offeux ; il fe ter- mine par un tendon qui pafle par le ligament annu- laire des tendons de lexrenfeur commun, & qui s’u- nit avec le tendon de ce mufcle qui va au doigt in- dex,, an-deflus de la tête du premier os du méta- carpe. | | Le petit exsezfeur du pouce de la main vient de la partie externe & prefque fupérieure de l'os du coude ; il s’attache entuite au liÿament inter-ofleux , forme un tendon qui-paffe dans le finus antérieur de E À 325 la tête inférieure du rayon, &sunit avec lé tendon du grand extenfur du pouce, fur la partieconvexe de la bafe de la feconde phalange. Le grand exrenfèur du pouce de la main , tire fon origine de la partie externe & moyenne du cubitus ; il s'attache aufli au ligament inter-offeux , & à la pattie moyenne du radius. Son tendon pañle fous le lhgament tranfverfal externe du poignet ; & après s'étre uniayec le tendon du petit extenfeur, Va {e ter- muinèr à la partie convexe de la troifieme phalange, près la bafe, Le long exrenfeur des doigts du pié, vient du côté externe de la tête du tibia ; de Pé Pine antérieure de la tête du péroné, de la partie fupérieure du liga= ment inter-offeux : il eft attaché le long de la face interne du péroné. En paflant fous le ligament an- nulaire commun, il fe divife en quatre tendons qui fe portent fur la face fupérieure des quatre derniers orteils, Le court extenfeur des orteils vient de la partie fupérieure &c antérieure du calcanéum & de l’aftras gal; il fe divife en quatre tendons, dont le prémier s'attache à la partie convexe de la premiere pha- lange du pouce, Les autres tendons forment dans les tiois doiopts fiuivans, avec les tendons du long exrez. Jeur, des tendons communs qui s’inferent aux fecon- des phalanges de ces doigts : de- à les tendons des deux extenfeurs fe féparent; & s’uniffant derechef ; fe terminent aux troifiemes phalanges, L'excenfeur propre du pouce eft attaché aux trois quarts fupérieurs de la face interne du péroné , à la partie voifine du ligament inter-offeux, & un peu à l'extrémité inférieure du tibia. Son tendon s’in{ere à la partie fupérieure de la premiere tête de la derniere phalange du pouce. Cowper, & après lui Douglas, ont admis un court extenfèur du gros orteil ; mais ce mufcle, par leur defcription , femble faire partie du court extenfeur des orteils, ainnfi que l’a penié M. Albinus. 7 oyez {on ouvrage intitulé, Æforia mufèulorum hominis, pag. 603. Il eft aifé d'expliquer l’extenfion libre de chaque doigt de la main, & l’extenfion néceflairement f- mulranée des quatre doigts du pié après le pouce , par la différence des exrenfeurs des doigts dé la main &t du pié. La myographie comparée du chien, don- née par M. Douglas , explique aufñ la fmultancité de l’extenfon des doigts de cet animal, | On trouvera la comparaifon des mufcles exten Jeurs & fléchiffeurs, dans lerticle FLéÉcuisseur. g£ | RES RLITE » LE (Pkyf.) eft la propriété que certains corps ont de pouvoir foufrirde l’exten- fon, Ce mot fe dit principalement des cordes, des métaux, Gc. Voyez DUCTILITÉ 6 EXTENSION. EXTENSION, f. f. (Phyf:) en parlant des corps, eft la même chofe qu’ééendue. Voyez Erenpue. EXTENSION fignifie aufli la même chofe que di/- tation ; expanfion , raréfalion. Noyez ces mots. On voit une preuve bien fenfible de lexrenfron des métaux par la chaleur, à la machine de Marly; toutes les barres qui fervent à communiquer le mouvement des foues, varient tellement de longueur, qu’on a été obligé de faire plufieurs trous à l’endroit de leur jonéion, pour les ajufter entr’elles à proportion de leur longueur. Suppofant deux tiers de ligne pour l’alongement d’une barre de fer de fix piés, ce feroit fix pouces fur cent toiles ; ce qui produiroit dans le jeu des piftons un dérangement confidérable, fans la précaution dont on vient de parler. La chaleur,rainf que le froid, doivent par cette raifon déranger fou. vent les horloges de clocher : la même raifon peut influer quelquefois fur les montres de poche, D’ha- biles artiftes ayant remarqué que lexrenfion du fes 326 EXT par le chaud , eft à celle du cuivre comme 3 à $, ont employé cette idée d'une maniere ingémieufe pour donner aux verges des pendules une forme telle, qu’elles ne fouffrent point d’exenféon par la chaleur. Voici en général & en‘peu de mots une idée des moyens qu'ils ont employés pour cela. Ils ont atta- ché la verge de fer à la partiefuperieure d’un cylindre de laiton : ce cylindre eft fixement attaché par fa partie inférieure ; 1l fe dilate de bas en-haut, tandis que la verge fe dilate de haut en-bas ; &g en faifant la longueur du tuyau à celle de la verge, comme 3 à 5, il eft vifible que le tuyau fera autant dilaté de bas en- haut,que la verge de haut en-bas,&c qu’ainfi la diftan- ce de l'extrémité inférieure de la verge à Pextrémité inférieure & fixe du tuyau, fera conftante : donc fi lespoint autour duquel la verge ofcille, eft placé près de l'extrémité inférieure du tuyau, le pendule confervera une longueur conftante. Voy. PENDULE, €: les mémoires de l’acad. 1741. Voyez auffi les leg. de Phyf. de M. l'abbé Nollet, rome 1, pag. 365. êtc. € l'article EXPANSIBILITÉ. ExrTension enfin fe dit des métaux duëtiles , qui étant frappés ou tirés , font étendus par cette opé- ration, & occupent une plus grande furface on une plus grande longueur qu'auparavant , fans occuper proprement un plus grand efpace, parce qu'ils per- dent en folidité & en profondeur , ce qu'ils gagnent en fuperficie. Voyez DUCTIUTÉ. (0) EXTENSION fe dit aufli, ez Medecine, des mem- bres que l’on alonge aux approches du fommeil, du froid fébrile , & des accès d’hyftéricité. C’eft lef- pece de mouvement du corps que les Latins appel- lent pardiculatio, qui eft prefque toùjours accom- pagnée du bâillement. L’alongement des membres fe fait principalement par l’aétion de tous leurs mufcles extenfeurs. Il fem- ble , dit M. Haller dans une note fur Ze $. 628. des inflitutions de Boerhaave, que lation des mufcles fléchifleurs , qui eft prefque continue, & qui eft do- minante même pendant le fommeil, enforte qu’elle détermine la figure , l'attitude du corps pendant ce tems-là, gêne & plie tellement les troncs des vaif- feaux fanguins & des nerfs, qu'il eft néceffaire que les mufcles extenfeurs fe mettent en ation pour les dégager, en donnant aux membres un état contrai- re à celui de flexion, dans lequel ils font le plus long-tems , c’eft-à-dire en Les étendant; ce qui met les vaifleaux dans une direétion égale, & rend plus libre le mouvement des humeurs qui y font conte- nues: la diftribution des efprits eft aufli conféquem- ment plus facile dansles nerfs,qui font alors exempts de toute compreflion. Voyez MUSCLE. (4) EXTENSION , ( Med. ) alongement des fibres du corps humain par des caufes externes ou internes. Quoique nous ignorions d’où procede la cohéfion mutuelle des élémens qui conftituent la fibre, nous favons par expérience que le principe qui les unit, peut augmenter ou diminuer. Îl en eft des fibres du corps humain comme des parties de fer qu’on alon- ge en forme de fil, ou comme d’une corde d’inftru- ment de mufique, qui s’alonge avec des poids juf- qu'au moment de la rupture, Nos fibres font pareil- lement fufceptibles d’alongement & d’accourciffe- ment avec élaflicité. Voyez FIBRE. Nos vaifleaux qui font compotés de fibres, font également capables de fe prêter à limpulfion du flui- de, & peuvent être diftendus jufqu’à un certain point fans rupture. Il faut donc qu'il y ait non-feulement dans les fibres folides, mais dans les membranes, Les vaifleaux, & les vifceres qui en font formés, une faculté d’alongement , d’accourciffement , & de reflort, un degré fixe & dérerminé de cohéfion juf- qu’à un certain point. Or le défaut, ou l’excès de çette cohéfion dans les fibres , quileur permet d’être difiendues jufqu'à un certain point, peut donner naïflance à une infinité de defordres. La trop grande exrenfion des fibres , des vaifleaux, & des vilceres du corps humain, peut être occa- fionnée 1°, par une trop grande plénitude, un amas d'humeuts, la compreflion, l’obftruétion, la fup- preflion des évacuations, la violence de la circula- tion, le manque de foûtien ou de point d’appui dans les Bleflures. 2°. Elle peut être produite femblable- ment par des vents, l’inflammation, la conftipation, l'hydropife , lœdème , l’empième, &c. Dans tous ces cas, 1l faut détruire les caufes qui produifent l’a- bord de liquides dans leurs canaux , ou qui les y re- tiennent, & fi l’on n’y peut parvenir, tirer l’aumeur contenue par une nouvelle ouverture. Les fuites de la trop grande extenfion des parties du corps humain, font palpables par les effets de la torture , de la rétention d’urine, & même par la sgrof- feffe. Eneffet, dans les états de l'Europe où fe donne la gueflion, ce tourment inutile & barbare qui fait frémir humanité , il y a des pays, où après avoir fufpendu des criminels, on leur attache au bout des piés des poids de centaines de livres, qu’on augmen- te par degrés. Il réfulte de cette diftenfion exceflive, une efpece de paralyfe fur les parties inférieures qui deviennent immobiles pendant plufeurs jours. La même chofe arrive à la vefñe , qui n’eft plus ca- pable de fe reflerrer , quand elle a fouffert une trop violente diftenfion par une ifchurie ; enfin la peau & la membrane adipeuie du bas-ventre, font fi con- fidérablement diftendues dans les femmes grofles, qu'après qu’elles ont été délivrées, cette peau refte flaique & ridée toute leur vie La trop grande diftenfion arrive encore dans Îes luxations , les fraétures, les efforts avec réfiftance, le foulevement d’un poids, une courbure trop forte, & autres efforts femblables, dans lefquels cas, les parties trop tendues , demandent à être remifes dans leur état naturel, avant qu’elles foient rompues. La trop grande extenfion des mufcles , des tendons , des ligamens, qu’on éprouve dans les maladies convul- lives & fpafmodiques, exige la guérifon particuliere de ces maladies, Lorfque les vaifleaux du cerveau ont été rompus par une exceflive diftenfon, ils déchargent les flui- des qu'ils contenoient , d’où naïfflent une infinité d’accidens, depuis le vertige jufqu’à l’apoplexie la plus complete. Les feuls remedes confiftent dans la faignée , la révulfion, le trépan, &c. pour l’évacua- tion des humeurs extravafees, On empêche que les vaifleaux foibles ne foient diftendus à Pexcès par lesfluides qu'ils contiennent, au moyen d’une compreflion générale; car plus la fibre eft tiraillée, & plus elle s’affoiblit. Ainfi les bandages & les appareils qui preffent fur la chair, en donnant aux vaifleaux une efpece de foûtien 6 de point d'appui, font ce que ne fauroient faire les folides trop affoiblis, c’eft-à-dire, qu'ils s’oppofent à la diftenfion des vaiffeaux. La diftenfion qui vient de la trop grande féche- refle & rigidité des fibres, fe guérit par les émol« liens , les humeétans , les adouciffans , les gras. Les fibres diftendues par quelque caufe que ce foit, acquierent de la dureté, de la réfiftance , de la maigreur , enfuite perdent leur élafhicité, ou fe rom- pent. Leur conta@ mutuel eft moins preflé, les in- terflices des membranes deviennent plus grands, & laïffent pafler les humeurs qu'ils devroient retenir : les cavités des vaifleaux s’étréciflent , & enfin fe ferment. Les nerfs éprouvent la douleur, Îa flu- peur, la paralyfie : la partie où les liquides abor- dent , fe tuméfie, s’appefantit , jaunit, ou pälit. Après qu’on a détruit les caufes de la trop grande extenfion, Al faut rapprocher let parties & les foûtes [re nir; mais lé relâchement qui en réfulte, quand il a été extrèmement violent, eftun mal mcurable. 47. socle de. M, le Chevalierde JAUCOURT: 2" EXTENSION, serme de Chirurgie, aëtion par la quelle on ‘étend , en tirant à for,'une partie luxée ou fraturée, pour remettre les os: dans leur fituation naturelle, Elle fe, fait avec les mains,iles lacqs ou autresinftrumens convenables, Eléfoppofetoñjours la contre-extenfion par laquelle on retient le corps, pour l'empêcher de fuivre la partie qu'on tire. - Pour bien faire l’exrenffon & la contre-extenfion ; ilfaut que les parties foient tirées &retenues avec égale force; &rque les forces qui tirent & qui re- tiennent, foient ; autant qu’il eft poflible appliquées aux parties mêmes quiiont befoin de l’exrezfcon & de la contre-extenfion.Les extenfions doivent fe faire par degrés!, & on les proportionne à l'éloignement des parties, & à la force des mufcles qui réfiftent à l’ex- zenfion, S1 l’on tiroittout-à-coup avec violence, on courroït rifque de déchirer 8: de rompre les mufcles, parce que leurs fibres-n’auroient point eu le tems de ceder à la force qui les alonge. Si les maïns ne fufh- fent pas, on employe les lacqs. Voyez Lacos.(F) + EXTENSION , 62 Mufique, eft , felon Ariftoxene, une des quatre parties de là mélopée, qui confifte à foûtenir long -tems le même fon : nous l’appeons aujourd'hui senxes Voyez TENUE. (S) + EXTENUATION, Lf.( Belles-Lettres..) figure de Rhétorique, par laquelle on diminue une chofe à deflein. Par exemple, fun adverfaire qualifie une ation de crime énorme, de méchanceté exécrable, on l'appelle fimplément vne faute, une fragilité par. donnable, Cette figure eft oppofée à l’hyperbole. Voyez HYPERBOLE.(G) : EXTÉNUATION, fub. £. ( Medecine. ) en latin ex- tenwatio : c’eit une forte de maïgreur-qui arrive en . peu de tems, par l’affaiflement des vaifleaux de tout le corps en général, après de grandes évacuations , de fortes diflipations d’humeurs quelconques. Voyez MAIGREUR , AFFAISSEMENT. (4) EXTERNE, 04 EXTÉRIEUR , adj. (Phyf.) eft unterme relatif qui fe dit de tout ce qui eft au-de- hors d’un corps. La furface d’un corps, c’eft-à-dire cette partie qui paroit & fe préfente: aux yeux ou au toucher ;.eft la partie exserne du corps. : Dans ce fens, exrerne elt oppolé à znterne ou i7- sérieur, Voyez INTERNE. EXTERNES, ( angles) en Géométrie, font les an- gles de toute figure retiligne, qui n’entrent point dans fa formation, mais qui font formés par fes cÔ- tés prolongés au-dehots. Voyez ANGLE , € IN- TERNE. Les angles exrernes d’un poligone quelconque pris enfemble font égaux à quatre angles droits. Dans un triangle , l’angle exrerne D O A4 ( Planch. Géom. fig. 76.) eft égal à la fomme des angles intérieurs op- polés y » 4. Voyez TRIANGLE. Ces propofñtions font démontrées par-tout, (£ ) EXTERNE, adj. ( Anar, ) terme relatif, qu’on. prend dans le fens connu de tout le monde, quand Ôn dit par exemple ségurnens externes : M. Winflow appelle exserne ce qui eft le plus éloigné d’un plan qu'onimagine partager également tout le corps en partie droite, & en partie gauche , & interne, ce qui en eft le plus proche ; c’eft ainf qu’on oppofe les mufcles exernes, &c internes. Hippocrate donne le not d’exrerres aux parties les plus éloignées du cœur. # EXTINCTION, ff. ( Phyf. ) eft l’a@ion d’étein- dre, c’eft-à-dire d’anéanuir ou de détruire le feu, la flamme ou la lumiere. Voyez LUMIERE , FLAM- ME,6c a Boerhaave nie quil y ait proprement rien qui foit capable d'éteindre le feu; c’eft, ditil, un corps Jai | EXT $2} pereris > d'une nature immuable;& nous ne pouvons Pas p'us le détruire que nous népouvons le créer, Koyez FEU. JC | Cela peut être; mais il n’en eft pas moins vra ! qu'on arrête l’ation decette matiere qui formel ce | que nous appellons Z feu, Aïnfi'dire que l’eau n'é- | ternt pas le fe, parcé qu’elle ne détruit pas la ma- réfoudre, Les feétateurs d’Ariftote expliquent l'extréon du feu pat le principe d’antipériftafe où de confrarièté A ainfi, difent-1ls, l’eau chafle le feu, parce que lés qualités de l’eau font contraires À Celles du feu : l’une étant froide & humide ; & l’autre chaud & fee Ma!g Outre que ce n’eft pas là uné explication, puifqu’éllé ne rend point railon de cette contraricté , élle në paroît pas même fatisfaifanté pour ceux qui fe con- tentent de mots vuides de fens ; car le feu eft étéint avec l'eau chaude aufli-bien qu'avec l’eau froide, &x: Voyez ANTIPERISTASE. A dr : Quelques modernes apportent deux caufés plus plaufibles de lextinéion du feu; favoir la diffipaz tion , comme quand les matieres qui lui fervent d’a- liment font difperfées par un vent trop violent; 6e là fuffoçation, quand il eft téllément comprime qu'il né peut plus conférver fon mouvement libre , com: me 1} arrive quand on jette de l’eau deflus. | On fent bien que cette explication eft encore très-legere & très-vague. Avoïons franchement que nous 18n0rons ponrquot l’eau éteint le feu, comme nous 1gnorons pourquoi une pierre tombe, pour- quoi nous remuons nos doigts, & la caufe de cent autres phénomenes auffi communs , & auff inexpli- cables pour nous. (0) EXTINCTION, (Jurifprud.) s'applique en cette mätiere à différens objets, favoir : Extinilion dela chandelle : c’eft lorfqu’on fait une adjudication à lextinéion de petites bongiès ou chan- dellés, comme cela fe pratique dans les fermes du ROï. Voyér CHANDELLE ÉTEINTE. ‘!Extintion d'une charge fonciere, réelle, ou kypos théquaire ; c’eft lorfqu’on amortit quelque charge qui toit impofée fur un fonds. Extinction du doiiaire : c’eft lorfque la femme & les enfans qui avoient droit de joüir du doïaire, font décédés, ds que lon a compolé avec eux, & ra- cheté le dotaire. Extinilion d’une famille ; c’eft lorfqw’il n’en refte plus perfonne. | Extintlion d'un fidei-commis , ou d’une Jubflicurion ; c'eft lorfque le fidei-commis ou fubflitution eft fini, foit parce tous les degrés font remplis, 8 que les biens deviennent libres, foit parce qu'ilne {e trouve plus perfonne habile à recueillir les biens en vertu de la difpofition, … Extinéhion de ligne direële , ou collarérale ; c’eft lorf. que dans une famille une ligne fe trouve entiere- ment défaillante , c’eftä-dire qu'il n’en refte plus perfonne. Extintlion de nom ; c’eft lorfqu'il ne fe trouve plus perfonne de ce nom. Extinilion d'une rente; c’eft lorfqu’une rente eft amortie ou rembourfée. | Éxtintion d'une fervitude ; c’eft quand un héritage eft déchargé de quelque fervitude qui y étoit im poiée. Esxtinétion d'une fubfhturion , voyez ci-deflus Exa tinéhion d’un fidei-commis, ( A EXTIRPATION, f£. f. eft un serme de Chirurgie} qui fignifie coxper entierement une partie, Comme une loupe, un polype, un cancer, rc. | L’amputation du bras dans l’article, eft une exrir. pation de l’extrémité fupérieure. Ÿ. AMPUTATION. EXTISPICE, 1. m, (-Auriquité,) infpettion des fière du feu ;"c’eft éluder la difficulté au lieu de la 325 EXT entrailles des vidimes, dont les anciens tiroient des préfages pour l'avenir. Varron & Nonius dérivent ce mot de exra & fpécio. Voyez ANTHROPOMANTIE, ARUSPICES. 1. Si l’on ajoûtoit foi aux conjeltures de Mercerus ;. de Salden, & de Lomeyer fur le facrifice d’Abel, 8&z à celles du rabbin Eliezer fur les Teraphim , on fe- roït remonter les ex#/pices jufqu’au tems des patriar- ches. Il eft au-moins douteux que cette efpece de dr- vination fe foit introduite chez les huis; les paflages de l’Ecriture qu’on allegue pour le prouver, regar- dent feulement les Chaldéens ; cependant Jac. Ly- dius affûre que les exrifpices ont pañlé des prêtres juifs aux Gentils. Voyez fes Agonifhica facra, p.m.6o. On ne voit dans les poëmes d'Homere aucun vef- tige de cette divination , fi ce n’eft peut-être dans le douzieme livre de l’Odyflée, vers 394-6;1l l’a pour- tant connue , s’il faut en croire Euftathe, dont la note fur le vers 221 du dernier livre de l’Ihade eft citée par Feith, p.. 131 de fes antiquirates homericæ, Feith auroit pû citer encore le commentaire d’Eufta- the fur le vers 63 du premier livre de l’Ihade, les re- marques de Didyme aux mêmes endroits, Hefychius au mot iep. Mais une autorité bien plus décifive eft celle de Galien , qui explique de même que ces grammairiens l'ip du vers 63 du premier hvre de l'Iliade. Voyez Le F, rom. de l’éd, greque de Bâle des œu- vres de Galien, p. 41. Les extifpifces étoient connus long-tems ayant Homere. Herodote, iv. ZI. nous apprend que Ménélas , après la guerre de Troie, étant retenu en Egypte par les vents contraires, fa- crifia à fa barbare curiofité deux enfans des naturels du pays, & chercha dans leurs entrailles l’éclaircif- fement de fa deftinée. Ce fait, & plufieurs autres re- cueillis par Geufus, à la fin de la premiere partie de fon rraité fur les victimes humaines, prouvent évidem- ment que Peucerus s’eft trompé loriqu’il a cru qu'He- liogabale avoit le premier eu recours à l’'Anthropo- mantie. Voyez Peucerus de divinatione, p. m. 371. Vitruve, chap. jv. Lv. I. donne aux extifpices une origine bien vraiffemblable : il dit que les anciens confidéroient le foie des animaux qui paflôient dans les lieux où ils vouloient bâtir ou camper ; après en avoir ouvert plufeurs, s'ils trouvoient généralement les foies des animaux gâtés , ils concluoient que les eaux & la nourriture ne pouvoient être bonnes en ce pays-là , deforte qu'ils l’abandonnoient aufli-tôt. On ne fera pas furpris que les anciens donnaffent au foie une attention particuliere, fi l’on confidere qu’- ils attribuoient à ce vifcere la fanguification : cette opinion eft très-ancienne. Martinus, dans fon cad- mus græco-phœnix, veut que cubbada, nom que les habitans d’Amathonte donnoïent au fang, vienne de l’hébreu cayed, qui veut dire foie. Le P. Thomaflin a approuvé cette conjeéture dans fon gloffaire hébraï- que ; ce qui la confirme & la rapproche du fujet que nous traitons, c’eft que S. Grégoire de Nazianze croit que l’art des exsifpices eft venu des Chaldéens & des Cypriots. | Bulengetus , tom. TI. de fes opuftules, p. 318, fait dire à Onofander , iz ffratepicis , que c’étoit la coù- tume, avant que de fixer un camp, de confidérer les entrailles des viétimes pour s’aflürer de la falubrité de l'air, des eaux, & de la nourriture du pays. Ono- fander dans fon ffratégique , ne dit rien de femblable, quoiqu'il parle du choix d’un lieu fain pour l’affiette d’un camp. P,m. 16.17. M. Peruzzi, com. I.des mé. de l'acad. de Cortone, p.46. dit que la fagacité qui fait preflentir aux ani- maux les changemens de tems, a pû faire croire aux anciens qu'ils portoient encore plus loin la connoif- fance de l'avenir. Il obferve que , Je erano buone ( le interiora ) da cio ne argomentavano una perfetta coffi- tufione d’ria, e benigno influffo di flelle, chi rende i EXT cibi falubri , e teneffe lontane le malattie, che il pi dèlle volte dalla catriva qualita dé médefimi provengano , e Parimente mali auguri, quando era il contrario , ne ar gomentavano, Ce paflage développe la penfée de Dé- mocrite, quu foûtenoit que les entrailles des viftimes préfageoient par leur couleur ê leurs qualités , une conftitution faine ou peftilentielle, la ftérilité même ou l'abondance. Voyez Cicéron, iv. I. de divinat.cha- pis. Ii. Hippocrate, de vit. acut. nous apprend que les principes de l’art des exrifpices n’étoient pas invaria- bles : 1l femble que les fyftèmes des Philofophes, les fourberies des prêtres & des magiftrats ont obfcurci les premieres notions de cet art , fruit précieux des » obfervations faites pendant une longue fuite de fie- cles. En effet, Apollonius de Tyane dans Philoftra- te,%b. VII, ch. vy. [. 15, prétend que les chevreaux & les agneaux doivent être préférés pourles exrifpi- ces , aux coqs & aux cochons, parce qu'ils font plus tranquilles, & que le fentiment de la mort, plus foi- ble chez eux, n’altere point ces mouvemens naturels qui revelent l’avenir. On pouvoit dire avec la mê- me vraiflemblance, que l’extrème irritabilité ren- doit les mouvemens naturels bien plus énergiques & plus fenfbles, & c’eft fans doute ce qui a déter- miné certains peuples à regarder comme plus pro- phétiques les entrailles des coqs, des cochons & des grenouilles. Par une fuite de fon fyftème, Apollo- nius foûtient que les hommes font de tous les ani- maux, les moins propres à faire connoître l'avenir par l’infpeétion de leurs vifceres. Cette conféquen- ce, qu'il eût été à fouhaiter que tous les hommes euflent adoptée, étoit direétement contraire à l’o- pinion générale, Voyez Porphyre, de abflin. lib, II. art, 51, . La friponnerie des prêtres payens , & leur igno- rance, nous doivent faire fufpendre notre jugement fur ces viétimes auxquelles on ne trouva point de cœur, dont parlent Cicéron, Pline , Suétone, Julius Obfequens, Capitolinus, Plutarque, 6’. Les inci- fions fuperficielles des vifceres retardoient les en- treprifes, quoique tout promit d’ailleurs un fuccès heureux. Le P. Hardouin , fur Pline, rom. 1. p. 627. col, 2. imagine qu’alors ces vifceres étoient bleflés imprudemment par le couteau du viétimaire. Pent- être y avoit-il auffi de la fourberie de la part des fa- crificateurs. Les regles particulieres que les anciens fuivoient dans les exzifpices {ont fi incertaines, qu'il eft inutile de s’y arrêter. Tous les compilateurs, par exemple, & fur:tout Alex, ab Alexandro, rome ÎT. p.m. 346-6, Peucerus, de divinat, p.m. 361. affürent qu’on n’a jamais douté qu’un foie double , ou dont le lobe appellé caput jecinoris étoit double, ne préfa- geât les plus heureux évenemens. On lit pourtant dans l'Œdipe de Seneque, vers 359 360, que ç’à toù- jours été un figne funefte pour les états monarchi- ques. Ac, femper omen unico imperio grave, En capita paribus bina confurgunt toris, Voyez les notes de Delrio & de Farnabius fur ces vers, où ils étendent cette regle à tous les états, fe fondant fur les témoignages de divers auteurs. Ilrefte à examiner fi le principe fondamental de la divina- tion par exrifpice, a moins d'incertitude que les dé- tails de cet art qui font parvenus jufqu'à nous. Perfonne n’a regardé cela comme une queftion, j'ofe dire que c’en eft une, & qu’elle tient aux quef- tions les plus curieufes & les plus difficiles de la phi- lofophie ancienne. Les partifans de cette divination ont fait valoir l'argument tiré du confentement général des peu= ples, qui ont tous eu recours aux exsifpices. Foyer Cicéron, de div. 1, La foibleffe de cet argument eft reconnue | reconnue, Voyez Bayle, continuation des penftes fur Za comete, . 32. Par ce que nous avons dit de l’o- rigine des exs/pices , on Voit que quelques anciens avoient des idées très-philofophiques fur l'influence du climat. Il eft évident qu’on n’a pù appliquer les ëxtipifces, qui avoient d’abord fervi à s’aflürer de la falubrité d’une contrée, & tout au plus de fa ferti- lité ; il eft évident, dis-je, qu’on n’a pù les appliquer aux accidensde la vie humaine , qu’en fuppofant que le chimat décidoit des mœurs, des tempéramens, & des efprits , dont les variétés dans un monde libre doivent changer les évenemens. D'un autre côté ceux qui foûtenoient le fatalifme le plus rigoureux, étoient par là-même obligés de reconnoitre que cette divination eft pofñlible ; car puifque tout eft lié par une chaîne immuable, on eft forcé de concevoir qu’une certaine viétime a un rap- port avec la fortune du particulier qui l’immole, rap- port que l’obfervation peut déterminer. Le fyftème de l’ame du monde favonifoit aufli les extifpices ; les Stoïciens, à la vérité, ne vouloient pas que la Divinité habitât dans chaque fibre des vifce- res, & y rendit fes oracles ; ils aimoient mieux fup- pofer une efpece d’harmonie préétablie entre les f- gnes que préfentoient les entrailles des animaux, & les évenemens qui répondoient à ces fignes. Voyez Cicéron, de divin. I. chap. li, Mais quoique ces phi- lofophes renonçafent à une application heureufe & évidente de leurs principes, c’étoit une opinion aflez répandue, que cette portion de la Divinité qui oc- cupoir les fibres des animaux, imprimoit à ces fibres des mouvemens qui découvroient l’avemir, Stace le dit formellement, Theb. liy. VIII, v. 178. Aut cœfis faliat quod numen in exris. & Porphyre y fait allufion, quand il dit que le phi- lofophe s’approchant de la divinité qui réfide dans fes entrailles, y roïc anndivoïc aûré cœAëlyvois, Y pui- fera des aflürances d'une vie éternelle ; & quelques philofophes penfoient que les ames féparées des ani- maux répondoient à ceux qui confultoient leurs vif- ceres. Maïs le plus grand nombre attribuoit ces fignes prophétiques aux démons, ou aux dieux d’un ordre inférieur ; c’eft ainf qu'ont perfé Apulée & Martia- nus Capella. Laétance & Minutius Felix ont attribué l’arufpicine aux anges pervers ; cette opinion, au- tant que les raifons politiques, a déterminé l’empe- teur Théodofe à donner un édit contre les extifpices. Je finis par une réflexion de l’Epiétete d’Arien, div. I, ch. xvi. qui eft très-belle; mais il eft affez fin- gulier qu’eile foit dans la bouche d’un arufpice. Les entrailles des viétimes annoncent, dit-il, à celui qui les confulte, qu’il eft parfaitement libre, que s’il veut faire ufage de cette liberté, 1l n’accufera perfonne & ne fe plaindra point de fon fort ; il verra tous les éve- nemens fe plier à la volonté de Dieu & à la fienne. £ 4 \ Poe ; EXTORNER,, (Commerce. ) rermes de teneurs de livres : ils fe difent, mais improprement, des fautes que l’on fait par de fauffes pofñitions. Les véritables termes font re/lorne & reflorner. Voyez RES- TORNE 6 RESTORNER. Dit, de Comm. EXTORQUER , v. a. (Jurifprud.) c’eft tirer quelque chofe par force ou par importunité, comme quand on tire de quelqu'un un confentement forcé Par carefles ou par menaces ; un teftament ou autre aûte eft exrorqué, quand on s’eft fervi de pareilles voies pour le faire figner. Les aétes exrorqués font nuls par le défaut de confentement libre de la part de celui quiles foufcrit, & à caufe de la fuggeftion & captation de la part de celui qui a cherché à fe procurer ces aétes. Voyez CAPTATION , CONTRAIN- TE, FORCE, MENACES, SUGGESTION. (4 EXTORSION , £. f, (Jurifpr.) fe dit des émolu- Tome VI. | EXT 329 mens exceflifs que certains officiers de juftice pour- roient tirer d’autorité de ceux qui ont affaire à eux, ce que l’on appelle plus communément cozcuffion, Ce terme fe dit aufli des aétes que l’on peut faire pañler à quelqu'un par crainte ou par menaces, Voyez EXTORQUER. (4) EXTRA , (Juri/p.).eftun terme latin dont on. fe fert ordinairement pour défigner les decrétales en les citant par écrit, pour dire qu’elles font exvra corpus Juris, parce que dans le rems que cette maniere de les citer fut introduite , le corps de Droit canon ne confiftoit encore que dans le decret de Gratien. EXTRA eft aufli, ex flyle de Palais, une abré- viation du terme éxsraordinaire, Au parlement, les caufes qui ne font pas employées dans les rôles des provinces , font portées à des audiences extraordi- naires ; ce que l’on défigne en mettant fur le doflier, extra, pour dire extraordinaire. (A) | EXTRACTION , 1. £. (Arithm. & Algeb.) L’exa trattion des racines eft la méthode de trouver les ra cines des nombres ou quantités données, Poyez RA- CINE. Le quarré, le cube , & les antres puiffances d’une racine ou d’un nombre, fe forment de la multiplica- tion de ce nombre par lui-même plus ou moins de fois, felon que la puiffance eft d’un degré plus ou moins élevé. Voyez PUISSANCE. La multiplication forme les puiffances , l’exerac- tion des racines les abaïfle, & les réduit à leurs pre- miers principes ou à leurs racines ; deforte qu’on peut dire que l’exrrattion des racines eft à la formation despuiffances par la multiplication, ce que l’analyfe eft à la fynthèle. Ainfi 4 multiplié par 4, donne 16, quarré de 4, ou produit de 4 par lui-même, 16 multiplié par 4, donne 64 , cube de 4, ou produit de 4 par fon quarré.. C’eft ainf que fe forment les puiffances. Auffi la racine quarrée de 16 eft-elle 4; car 4 eft le quotient de 16 divifé par 4 : la racine cubique de 64 eft pareillement 4; car 4 eft le quotient de 64 divifé par 16, quarré de 4. C’eft-là ce qu’on entend par l’exrraitlion des racines. Par conféquent extraire La racine guarrée » cubique , &c. d'un nombre donné, par exemple, 16 ou 64, c’eft la même chofe que trouver un nombre, par exem- ple 4, qui multiplié une ou deux fois, €c. par lui- même, forme la puiffance donnée, Voy, PUISSANCE. Harris & Chambers. Extraifion des racines quarrée & cubique. De la racine quarrée. Extraire la racine quarrée d'un nombre, c’eft décompofer un nombre quelconque, de façon que l’on trouve un nombre moindre, le- quel multiplié par lui-même, produife exatement le premier, ou du moins en approche le plus qu'il eft pofhble. Cette regle eft d’ufage en plufieurs cas ; je me contente d’en rapporter un exemple, pour faire juger des autres. Un officier commande un détache- ment de 625 hommes, dont 1l veut faire un bataillon uarré : pour cela il n’a qu’à exrraire la racine quar- rée de 625 ; il trouvera, s’il a le tems & le talent, qu'il faut mettre 25 hommes de front & autant fur les côtés, c'eft-à-dire qu'il faut mettre 25 rangs de 25 hommes chacun. Surquoij’obferve que l’exrraéfion des racines étant proprement la décompoftion d’un produit formé par une Ou plufieurs multiplications , il faut confidérer d’abord la génération de ce produit, & c’eft ce que nous allons faire. Si je multiplie 25 par 25, j'ai le quarré 625. Que fais-je pour avoir ce produit ? je multiplie 2 dixaines &c ÿ unités par 2 dixaines & 5 unités ; & pour cela je prends d’abord le quarré des unités, en difant $ fois j ou 5 X 5 font 25, . £ d 330 EXT fe pole x 8e retiens 25 puisse multiplie 2e 0 une fois les dixaines 2 par les unités, 25 lorfque je dis $ x 2 font 12, que je pole 124 à pauche dé mon." | LT _ Je multiplie une fécohde fois les dixaines e les ünités $, lorfque je dis2 X 5 font 10, je pole o é&c retiens 1. Enfin je multiplie les dixaines 2 par elles- mêmes, Ce qui me den le quarré de ces dixaines, én difant, 2X2font 4, & 1 de retentie font $, que je pofe à gauche du 0. J'ajoûte ces fommes, & J'ai le produit 62$ dont on propolfe de tirer la racine quarrée ; c'eft-a-diré qu'il s’agit de trouver lé nombre qui, multiplié par lurmême, a formé le quarté 625. Mais avant que de commencer cette opération, on doit avoir la table fuivante fous fes yeux, ou plütôt dans fa mémoire. / " a ss s à Racines, " Quarrés, Cubes. je: L I La nf rer 8 3 ! | 27 4 16 64 ÿ 2j 125 G 36 216 7 A9 343 8 GA $12 CHERE 729 10 100 1000 Cela pofé, je partage mon nombre total62s en.deux tranches , comme lon voit ci-a-côté. La premiere tranche à gauche qui pourroit avoir deux chiffres, peut auffi n'en avoir qu'un; mais toutes les autres tranches à droite font néceflairement de deux chiffres ; & pour le démontrer, prenons les plus.petits chiffres poflibles , par exemple 100. Si on multiplie 100 par 100, on aura le quatté 1, 00, 00 en trois tranches , dont la premiere à gauche n’a qu’un chiffre, tandis que les autres en ont deux. Prenons à-préfent les plus grands chiffres poffibles, 999. Si on les multiplie par eux-mêmes , On aura le quarré 99, 80, o1, qui fait trois tranches chacune de deux chiffres, & non davantage. Au furplus les différentes tranches, fuivant le fyftème de la progref- fion décuple, expriment les unités, dixaines, cen- taines, c. de la racine totale. Ces premieres notions une fois établies, je dis : la racine quarrée de 6 eft 2 pour 4; voilà déjà nos di- LA xaines trouvées ; je les pofe en forme 6-25 de quotient à côté de 625, comme lon 6-25 | 25 voit dans l’exemple : puis Je les quarre = endifant,2X2font4,&jetire cequar- ? 2 ré 4 de la premiere tranche 6, difant, 4 4 de 6 refte 2. LE) la Il faut obferver que ces deux dixaines dont J'ai formé le quarré font 20; & qu’ainfi en difant 2 X 2 font 4, 4 de 6 refte 2, c’eft comme fi je difois 20 % 20 font 400, 400 de 600 refte 200. Je baïffe à-préfent le 2 de la feconde tranche 25 ; ce qui fait avec mon premier 2, réfidu de mon 6, 22. Je m’attache enfuite à chercher le fecond chiffre de la racine totale ; & comme dans le produit de la multiplication ci-deflus expofée , j'ai employé deux Lois les dixaines 2 , autrement une fois 4 dixaines multipliées par les unités $ , jy dois trouver la même fomme ou quantité, én décompofant, pour l'exrac- sion de la racine. Je prends donc deux fois les dixaines 2, ce qui fait 4 dixaines : j'écris ce 4 fous le 2 de ma feconde tranche, & je dis : en 22 combien de fois 4? il y ef 5 & refte 2, qui avec le 5 de la feconde tranche, que je n'ai point baiflé, pour éviter l'embarras, fait 28, ceft-à-dire le quarté jufte des unités. ÿ que je cherchois, & que je viens de trouver pour {econd chiffre de la racine totale 25 : je pofe donc.s en for- me de quotient à côté du 2 déjà trouvé auparavant, Je forme le quarré 25 de ces unités 5 ; puis je mul- tiplie les mêmes unités $ par le double. 4 des dixai< nes 2, & Je tire ces deux produits de ma derniere tranche & du réfidu de [a premiere, ml c'eft-ä-dire des22#, ei issus", lol: 225 en difant 5X5 font 25, 2$ de 25 refleo 000 8 retiens 2; 5x4 font 20 & 2 de rete- nus font 22, 22 de,22 refte o. | Ces deux produits fe tirant exa@tement fans aucun refte, je conclus que la racine quarrée de 625 eft tout juite 25. Pour derniere preuve je multiplie 2$ par 25 ; &c retrouvant le produit 625, je demeure pleinement convaincu que mon opération eft exaéte. Maïs voici une autre méthode que je préfere, à plufieurs égards. On commence l’opération à Pordi= naire pour la premiere tranche ; la différence ne pa- roit qu’à la feconde , 8x elle eft la même dans tou- tes les fuivantes. Au lieu donc de tirer deux fois nos dixaines 2, c’eit-à-dire 4 dixaines , & de dire, com- me on fair communément, pour trouver le fecond chiffre d’une racine, en 22 combien de fois 4, 1ly eft ÿ; ne prenons que la moitié 11 du nombre 22; ne prenons aufhi que la moitié de nos 4 dixaines , c’eft-à-dire, ne tirons qu’une fois nos dixaines 2 de notre moitié 11. Ecrivons 2 fous 11-en SITE 0e CTP EL SE TON & difons, en 11 combien de fois 2, il 2 s'y trouve 5 fois, comme 4 s’eft trou- vé ÿ fois en 22, 2 étant à 11 comme 4 à 22, Je pofe donc $ pour fecond chiffre de la racine to- tale du quarré 625 ; mais comme ce ÿ pourroit | quelquefois être trop fort, je le pofe féparément, comme chiffre que je dois éprouver: & alors, pour vérifier s’ileft bon , & fans examiner fi je pourra tirer du dernier réfidu le quarré 25 des unités. 5, quarré qui doit encore fe trouver en 625, puifqu'il y eft entré par la multiplication ; je procede tout de fuite à la preuve: pour cela je multiplie 2$ par 25; & trouvant au produit 625, je m’aflüre que la racine quarrée de 625 eft tout jufte 25. Si la fomme à décompofer, ou dont on cherche la racine , au lieu de 625 n’étoit, par exemple ,que 620, pour lors le procédé donneroit encore 25 pour racine totale ; mais venant à la preuve , & multi pliant 25 par 25, on auroit le produit 625 plus fort que 620 : on verroit par-là que le chiffre à éprou- ver $, qu'on auroit mis pour fecond chiffre de la ra- cine totale, feroit un peu trop fort.Onmettroitdone 4, & l’on en feroit l’épreuve en multipliant 24 par 24 ; on tireroit le quarré 576 de 620, en cette forte, . . .. . . . . . . + + 620 & l'on verroit pour lors avec certitude 576 que la racine quarrée de620eft24,ou. 44 tre le réfidu 44, qui fait une efpece de raétion dont il ne s’agit pas ici. Si après avoir mis 4 pour fecond , troifieme, qua- trieme chiffre d’ung racine, ce 4 fe trouvoit encore trop fort par l'épreuve qu'on en feroit, alors au lieu de 4 on ne mettroit que 3, & l’on viendroit à ia preu- ve, comme on a vü ci-deflus. Cette maniere d’exrraireeftpréférable, en ce qu’elle diminue les nombres fur lefquels on opere, & qu'il a toûjouts moins à tâtonner. C’eft-là proprement l'avantage de cette méthode , laquelle eft fur-tout bien commode pour l'extraition de la racine cubique, où elle abrege beaucoup l'opération ; c’eft pourquoi il eft bon de s’y accoütumer dès la racine quarrée, il eft plus facile de l’'employer enfuite dans l'exrracs, sion de la racine cubique. Au refte la démonfiration qu’on vient de voir de EXT ser + e 0 3 = Ne Textraëion de la racine quarrée, & que je n'applique ici qu'à un quarré de deux tranches dont la racine « . Le A0 4 ne contient que des dixaines & des unités; cette dé- « , : . ? monftration , dis-je, convient également à un nom- bre plus grand , dont la racine contiendroit des cen- taines, des mille, &c. en y appliquant les décom- pofitions &c les raifennemens qu'on a vùs ci-deflus. 4 füffit, en Arithmétique, de convaincre & d’éclai- rer l’efprit fur les propriétés & les rapports des petits nombres que l’on découvre par-là plus facilement, &c qui font abfolument les mêmes dans les plus grands nombres, quoique plus dificiles à débrouiller. D'ailleurs je n’ai prétendu travailler ici que pour les commençans , quine trouvent pas toñjours dans des Kvres ni dans les explications d’un maître de quoi fe fatisfaire , & je fuis perfuadé que plufieurs verront avec fruit ce que je viens d’expofer ci-deflus, Si quel- questuns n’en ont pas befoin, je les en félicite, & les en eflime davantage. Le plusgrand réfidu poffible d’une racinequarrée, eft totjours le double de la racine même; ainf la racine quarrée de 8 étant 2 pour 4, le plus grand ré- fidu‘pofüble de la racine 2 eft 4, double de 2. La racine quarrée de 15 étant 3 pour 9, le plus grandréfidu poflible de la racine 3 eft6, double de 3. La racine quarrée de 24 étant 4 pour 16, le plus grand réfidu poflible.de la racine 4 eft 8, double de 4, &t ainfi de tous les autres cas. | De la racine cubique. On peut dire à-peu-près de da racine cubique ce que nous avons dit de la racine quarrée; extraire la racine cubique, c’eft décompo- {er unnombre quelconque, de façon que lon trouve un nombre moindre, lequel étant multiplié d’abord par lui-même, & enfuite par fon quarré, ou par Le produit de la premiere multiplication, donne exac- tement le premier nombre propoié, ou du moins en approche le plus qu'il eft pofhble. Ainfi exeraire la racine cubique de 15625, c’eft trouver par une dé- eompoñtion méthodique la racine cubique 25, la- quelle étant multipliée d’abord par elle-même, pro- duit le quarré 615, & multipliée une feconde fois par fon quarré 625 forme le cube 15625. On atrouvé, en-examinant les rapports & la pro- greflion des nombres , que cette multiplication dou- ble de 25 par 25, &c de 25 par fon quarté 625, pro- duit premierement le cube des dixaines 2 du nombre propofé 25; cube qui fait 8000, parce que le 2 dont il s’agit eft 20. Or 20 X 20 font le quarré 400, 20 X 400 font le cube 8000. : Secondement, cette cubification produit le triple du quarré des dixaines 2, multiplié par les unités 5, ce qui fait 6000 ; & cela, parce que le 2 dont il s’a- it eft véritablement 2 dixaines 20. Or en Le quar- tant, & difant 20 X 20, on a 400, en triplant ce quarré 400, on a 1200, en multipliant ce produit 3200 par les unités ÿ, on a 6000. Troifiemement, cette cubification de 25, & ainf à proportion de toute autre, produit Le triple 6odes dixaines 2; triple 60 multiplié par le quarré 25 des unités $, ce qui fait 1500. | Enfin cette cubification produit le cubé 125 des unités 5. Ces quatre produits par- tels, favoir : 1°. Le cube des dixaines . . . , . . . 8000 2°. Le triple du quarré des dixaines 2 multiplié par les unités ÿ . . . . . . 6000 3°. Letriple des dixaines 2 multiplié par le quarré 25 des unités s . . , . . . 1ÿoo 2 Éecube des UNITÉS 5... : A T25 Ces produits forment, dis-je, le cubetotal... 15625 Au refte la génération de ces divets produits eft plus difficile à démontrer dans Les deux multiplica- tions que lon employe pour former un:nombre cu- be, que dans la feule multiplication que on employe | Tome FIL, EXT 921 pour formerunnombre quarré, Laraïfon en.ef,, que dans ces deux multiplications les produits partiels fe confondant entr'eux, & rentrant les uns dans les au: tres , on ne les découvre guere que par la décompo- fition, au moins tant qu’on employe l’arithmétique vulgaire. | | On fait par la pratique &e par l’examen, que ces divers produits réfultent néceffairement de ces deux rultiplications par une propriété qui-leur eft effen- telle, & qui fufüt, lorfqu’elle eft connue , pour con: vaincre & pour éclairer. Il ne s’agit donc que de fa- voir procéder à la décompofition d’un nombre quel: conque , & d’en tirer ces différens produits d’une ma- mere facile & abrégée, ce quia fon utilité dans l’oc- cafñon. Par exeple, on dit qu'un bloc de marbre quarré de tous fens a 15625 pouces cubes; & fur cela on demande quelle eft {a longueur, largeur, & profon- deur, Je le trouve, en tirant la racine cubique de 15625. Pour cela je partage ce nombre en deux tran- ches, dont la premiere à gauthe n’a que deux chif fres, la feconde en a trois, La premiere tranche à gauche peut avoir trois, ou deux, Ou même un feul chiffre ; mais les fuivantes doivent toüjouts être com- pletes, & tojours detrois chiffres, ni plus, ni moins: c’eft ce que l’on pèut vérifier aifément par le produit cubique des nombres 100 & 999 ; produit qui donne d'un côté r, 000, 000, & de l'autre 997, 002, 999. Je dis donc, la racine cubique de 15 eft 2 pour 8 ; j'écris 2 en forme de quotient, comme 162513 l’on voit cià-côté ; puis je tire de la pre-—"3"°291? miere tranche 15 le cube de ce2,en 76 | difant 2 x 2 font 4, 2 X 4 font 8, c’eft-à-dire 8 mille: or 8 mille tirés de 15 mille, refte 7 mille que j'écris au-deflous de 15, comme l’on voit dans l'exemple. Enfuite, pour trouver le fecond chiffre de la raci- ne totale, & ainfi du troifieme, quatrieme, &c. en füppofant le nombre à décompofer beaucoup plus grand, je baïfle le 6 de la feconde tran- 1s-62 $| che, lequel avec le 7 réfidu de la pre-- 15792912 miere à gauche fait 76; puis jeprens 12 7 6 triple du quarré du premier chiffte troie © vé 2, j'écris ce nombre 12 fous 76; & je dis, en 76 combien de fois 12, il y eft6 pour 72, & refte 4, le: quel avec les 25 qui reftent de la feconde tranche, fait 425, fur lefquels je dois tirer le triple du premier chiffre 2 dixaines, c’eft-à-dire 60 multiplié par le quarré 36 du fecond chiffre trouvé , ou chiffre éprou- vable 6, dont le produit 2160 ne fe peut tirer du refte 425, fans parler du cube 216 du même chiffre 6 ; cube quidevroit encore être contenu danse refte 42. Jé vois donc que le-chiffre à éprouver 6 que j'ai trouvé pour fecond chiffre de la racine totale, & que J’avois mis à part, ne convient en aucune forte, J’é prouve donc le chiffre ÿ ; & pour cela je dis $ x 12 font 60, 6o tirés de 76, refte 16, lefquels avec le refte 25 de la feconde tranche font 162$ 15-625} 7 6 6 o 1 6 Je forme à préfent Le triple du pre- mier chiffre 2 cire ; Celà dire 60 Eu multiplié par le quarré 25 du fecond 7 6 chiffre 5, je tire le produit 1500 de © © 1625, après quoirefte 125 ;cequifait © © 25 juftement le cube des unités 5, queje À? 3 00 dois encore tirer, An) Je vois par-là que la racine cubique du nombre 15625 eft 25 fans refte, & qu’ainfi je puis pofer ÿ en forme de quotient pour fecond chiffre de la raçine totale. Pour derniere preuve je prends le ds de 25 ; & ti 33% EX T retrouvant 15625, je ne puis plus douter que mon “Opération ne foit exaéte. | Mais fans tirer tous ces produits partiels enfemble ou féparément , on peut prendre un chemin plus court, comme on l’a marqué en parlant de la racine quarrée ; on dira donc, en fe fervant du nombre propofé, la racine cubique de 15 eft 2 pour 8; j'écris 2 en forme de quotient , j'en forme le cube 8 que je tire de la premiere tranche 15, en difant 4 2 X2 font 4, 2X 4 font 8; 8 de 15, refte 7. Voilà l'opération faite pour la premiere tranche, & le cube du premier chiffre 2 tiré. Pour trouver maintenant le fecond chiffre de la racine totale, & ainfi du troifieme, quatrieme, 6. en fuppofant Le nombre propoié plus grand; je ne triple point, comme ci-devant, le quarré 4 du pre- mier chiffre 2, ce qui feroit 12. Je ne prens que le tiers de cette fomme, c’eft-à-dire que je prens fim- plement le quarré 4 du chuffre 2, fans Le tripler. En récompenfe, & pour conferver la proportion, après avoir baïflé le premier chiffre 6 de la feconde tran- che , lequel avec le 7 réfidu de la premiere fait 76: je n’en prens que Le tiers 25 ; de même qu’au lieu de 12, je ne prens que 4; J'écris ce 4 fous 25, comme on voit ci-deflus ; & pour lors je dis, en 25 combien de fois 4, il y eft 6, com- me 12 eff fix fois en 76. Je pofe donc 6 > 6 pour fecond chiffre de ma racine; mais 3 4 comme 6 n’eft proprement qu'un chiffre 4 à éprouver, dont je ne fuis pas sûr; Je le pofe à l’écart pour m'en fouvenir, &c je fais mon épreuve. Ayant donc trouvé 26 pour racine totale, je vois bien qu’il y a un réfidu dans le nombre propoté ; ré- fidu qui doit fatisfaire aux deux autres produits que je néglige detirer: favoir le triple du premier chiffre 2 dixaires , ou 60 multiplié parle quarré 36 du chif- fre à éprouver 6; plus le cube 216 du même 6. Mais encore un coup je néglige la formation & la fouf- traction de ces derniers produits qui font les moins confidérables ; & dès que j'ai trouvé un nombre pour le fecond , troifieme, ou quatrieme chiffre d’une ra- cine, je procede à la cubification de tous les chiffres que j'ai trouvés pour racines; & je tire le produit, s’il eft pofhible, de toutes les tranches dont j'ai fait l’extrailion. Aïnfi, dans l'exemple propofé ayant trouvé 26, je cubife 26, c’eft-à-dire que je multiplie 26 par lui- même, & que je multiplie enfuite le quarré 676 par le même 26; & trouvant alors 17576 pour cube de 26, je vois que je ne le faurois tirerde 6 mes deux tranches 15625, ce qui nef r62ÿle une preuve que le chiffre à éprouver 6 7 6 de la racine trouvée 26 efttrop fort. Je 23 prens alors le chiffre inférieur 5 pour 4 l’éprouver, ce qui fait la racine totale 25. Je cubifie ce dernier nombre 25; & trouvant le produit ou le cube 15625, qui fe peut tirer fans refte des deux tranches 15—625, je vois avec évidence que la ra- cine cubique de 15625 eft tout juite 25. Si le nombre propofé au lieu de 15625, n’etoit que 15620, le procédé donneroit encore 25 pour ra- cine; mais alors le cube 15625 de la racine 25 , ne fe pouvant tirer de 15620, je verrois évidemment que 2.5 n’eft pas au jufte la racine cubique de 1 5620; je mettrois donc pour fecond chiffre 4 au lieu de 5, ce qui feroit 24 pour racine totale; je léleverois au cube, êc je tirerois le cube 13824 de 13620 ;& pour lors je verrois, à n’en pou- voir douter, que la racine cubique de 15620 eft 24, outre le refte 17096, lequel fait une efbece de fraétion dont on peut tirer la ra- cine cubique par des procédés connus; mais dont je 15620 13824 1796 ne parlerai point ici, pour ne pas alonger davantage ce morceau qui paroîtra peut-être déjà trop étendu. Au refte, cequ’on vient d’expoferict fur de petits nombres, peut s'appliquer à tous les autres cas, &é pourra même répandre quelque lumiere fur ces opé- rations dificiles que je n’ai point encore vües trat= tées d’une maniere fatisfaifante, &r que j'ai fait com- prendre à des enfans de dix ans par le feul moyen de l’arithmétique employée ci-deflus, | . Le plus grand réfidu poffible d’une racine cubi- que eft la racine elle-même multipliée par 6, & ou- tre cela le plus grand refidu poffible de la racine im- médiatement inférieure, Par exemple, la racine cu- bique de 26 étant 2 pour 8, le réfidu 18 eft le plus grand réfidu poffble de la racine 2, Or ce réfidu eff. formé du fextuple 12 de la racine 2, & du plus grand réfidu poffible 6 de la racine inférieure. La racine cubique de 63 étant 3 pour 27, le rés fidu 36 eft Le plus grand réfidu poffble de la racine 3 5 or ce réfidu eft formé du fextuple 18 de la racine 3, &c du plus grand réfidu poflible 18 de la racine infé- tieure 2. La racine cubique de 124 étant 4 pour 64, le ré- fidu 60 eft Le plus grandréfidu poffible de la racine 43 or ce réfidu eft formé du fextuple 24 de la racine 4, & du plus grand réfidu poffible 36 de la racine infé=< rieure 3 ; & ainfi des autres. Ces article ef? de M, FAr« GUET , maître de penfion a Paris. Lorfqu’un nombre n’a pas de racine exaéte, il eft facile d'approcher auf près qu’on veut de la racine par le moyen du calcul décimal, fur quoi voyez Les articles APPROXIMATION 6 DÉCIMAL. Il ne s’agit que d’ajoûter au nombre propofé un certain nombre de zéros, & d’extraire enfuite la racine à l'ordinaire. Il ÿ a des cas, tels que ceux où la racine n’eft pas exatte, où 1l eft plus commode d'indiquer l’exerac= so. Alors on fe fert de ce figne y”, auquel on ajoûte l’expofant de la puiflance, sil ne s’agit pas de la puiffance feconde, car dans ce cas on le foufentend 2 quelquefois. Ainfi y” ou y” fignifient racine quarrés 3 : ; v/, racine cubique, 8tc: Voyez RACINE, Au lieu d'extraire la racine quarrée-quarrée, on x | 4 peut extraire deux fois la quarrée, parce que y = 2x2 | y”. Au lieu d’extraire la racine cubo-cubique, on peut extraire la racine cubique, 8e enfuite la racine | 6 2x quarrée, car y =y rl ÿ en à qui n’appellent point ces racines cubo-cubiques , mais quadrato-cubiques. IL faut obferver la même regle dans les autres cas, où. les expofans des puiffances ne font pas des nombres premiers entr’eux. Preuve de l’extraëlion des racines, 1°, Preuve de la racine quarrée. Multipliez la racine trouvée parelle- même ; ajoûtez au produit le refte, s’il y en a un; & dites que l’opération a été bien faite, fi vous avez une fomme égale à celle dont on vous avoit propofé d’extraire la racine quarrée. 2°. Preuve de la racine cubique, Multipliez la raci- ne trouvée par elle-même, & le produit par la ra- cine. Ajoûtez à ce dernier produit le refte, s’il y en a un; & concluez que l’exrratlion a été bien faite, s’il vous vient une fomme égale à celle dont vous aviez à extraire la racine cubique. Il n’y a point d’exrratfions de racines, dont {a preu: ve ne fe faile de cette maniere. Extraire les racines des quantités algébriques. Le f- gne radical annonce feul d’une maniere évidente l’extraition des racines des quantités algébriques fin ples. Ainfi Vauelta, y aacc eft ac, aa cceît 3ac, V/49 a4x x eft 7aax,. Pareillement Ve eft af bb aab 9Oaaz? 3a% 3/4 2 ? 856 RE LE RS, Here PTE Ée MN ÉÉÈÉ ÉÉ JR ST non et, &Vaabl efty'e 6. On a auf bV'azcc Lam Q l Dia = QUEXVaaccæbXac—abc;&3c Ve = c 347 = Dact Chibi ; 4bbs# EE 3CX 1587 in Dr rRr2 êc £ Vire En c X Dbxx 22bxx+6bx3 ne Sac + Je dis que dans ces cas l’ex- traction eft évidente ; parce qu’on voit du premier coup-d'œil que les quantités propofées ont été en- gendrées par la multiplication des racines qu’on leur attribue , & queza=axa,aacc=acXac, gaacc=ZGacx3ac, &tc. Mais lorfque les quan- tités algébriques font complexes ou font compofées de plufieurs termes, alors l’exsraéfion s’en fait com- me celle des nombres. Soit propofé d’exsraire la racine quarrée de a a + 2 a b +b b, Ecrivez d’abord à la racine la racine quarrée du premier terme za, favoir a. Souftrayez le quarré de 2, il reftera 2 a & + Bb, Pour trouver le aabkrab4bb | «+8 tefte de la racine, divi- RE —— ————{ez le fecond terme 2 4b, par le double de zou par PPS 2 a; & dites en 24b, r n combien de fois 24, vous e(® 12 trouverez b de fois ; be- ra donc le fecond terme de la racine cherchée. Mul- tipliez & par 2 a + », & fouftrayez le produit. La fouftra@ion faite, 1l ne refte rien : d’où il s’enfuit que a + beft la même racine exate de a at24b+85 Soit propoié d'extraire la racine quarrée de 44 + Gaib+sÿaabb— 12483 +484. Mettez d'abord au quotient la facine quarrée 4 « du premier terme 2#, Soufirayez le quarré de « 4, il reftera 6 43 h4 ÿ aa bb— 312 a b3 + 484, Dites en 6 «5 4, com- bien de fois 244, vous trouverez 3 a b ; écrivez donc 3 a b à la racine. Multipliez 3 46 par 2444 34b, & fouftrayez le produit 6 a? & + oaabb, La fouf- traétion faite , il reftera — 4 a a bb 12 ab5 + 44, Continuez l'opération, & dites derechef en — Aaa bb 12483, combien de fois 244 4 Gab,ou le double des deux premiers termes, vous trouverez — 2 bb. Ecrivez donc à la racine — 26; multipliez —20b pariaa+tG6ab-»bp, & fouftrayez ce produit. La fouftra@tion faite, il ne reftera plus rien. D'où il s'enfuit que la racine cherchée éft à à + 3ab—26b. Voici l'opération tout au long. a+ Gal +5 aabb=12abt+ 404] aa +3ab—2bb O —Gañb+saabb=r114ab3 +484 + Gañb—oaabb | O —4aabb—12 483 + 4b4 +4 aa bbLr2ab3— 44 L 0. CRD Pareillèment la racine quarrée de xx — 4 x4 x = x—:, celle de y4+4y3 —8 y + 4— 2Y +27 — 2; celle de 16 af —144aaxx4+ 9x4 Lirbbxx — 1644 bb + Ab 3 xx 4 aa + 2 bb: comme il paroït par ce qui fuit. XX—AaX+ aa | x— la —X x / EE: ——— O—axtk aa e) ou. D X4— 24 42x24 16 24 H1207%7— 16 aabb | 3x7 4ant2bb 9 +4 LE en | 0 — 24 a2a2L Gt HAL x 16 42bb 9 a ë EXT Ne 333 nee) GE, VIT AI =8y FA SO dr | 9 +493 +477 © —4yYy | TAYY=-8Y+4. (OT O (@] Soit propofé d'extraire la racine cubique de a?! +3aab+ 3 abb+ 82%. Voici comment cette opé- ration fe fait. 2 +34ab+3abbt | 446 de 2y zaa | +34aab]| A+ aab+3abl+ps (] CPI à sine Extrayez la racine cubique du premier terme a? &t vous aurez a; mettez donc z à la racine. Souf- trayez le cube de 4 ou 43, il reftera 3 ax b+34bb +25. Dites : combien de fois le quarré de a multiplié par 3, eft:il dans 3242? Il vous viendra #de fois; écri- vez donc $ à la racine. Souftrayez de 43 +34 ab + 3420b +63, le cube de 4+ b, La fouftraétion fai- te, 1l ne vous reftera plus rien; donc 4 +4 eftla ra- cine que vous cherchiez. Pareillement z + 2 ?— 4 fera la racine cubique de {6 + 6 75 — 40 {3 +967 — 64; & ainfi des racines des puiffances plus le. vées. (£) LE, Sur l’exraëlion des racines des équations, voye£ CAS IRRÉDUCTIBLE, ÉQUATION, RACINE, 6. On peut extraire facilement par /ogarithmes les ras cines des quantités numériques ; c’eft la méthode de tous les calculateurs. Voyez LoGARITHME. Extraire la racine d’une quantité irrationnelle, Soit ; par exemple, 3 2/2, dont on veut extraire la racine quarrée, on fuppofera que x — y/y foit la racine cherchée , & on aura ++ + y — 2 x y —3 — 2y/2; &t faifant les parties rationnelles égales aux rationnelles, & les irrationnelles aux irrationnelles, OnauarxxEy=3,xy/y=y2; d'où l’ontire xÀ 7 5 +Y=3; doncyy=3y=-2,&y Æi=i1ou2; doncx?=—1ou2; donc: —y2; où y/2—1, eft la quantité cherchée. On peut appli- quer cette méthode aux cas plus compofés. Voyez la . Jctence du calcul du P. Reyneau, / Analyfè démontrée du même auteur, l’Algebre de M. Claïraut, & d’au- tres ouvrages. C'eft par cette méthode d'extraire les racines des quantités itrationnelles, qu’on trouve fouvent la ra- cine commenfurable d’une équation du troifieme de- a œ— Es bc RTE cn LE gré ; Car ya +VÈLVa— "8 exprimant la racine d’une telle équation, fi on trouve x + y pour la . racine cubique de a+ y/b,x— y/y fera la racine cubique de 4 — y/£ ; ainfi la racine cherchée de l’é- quation fera 2 x ; mais lorfque la racine eft commen- furable , il eft plus court de la chercher par le moyen des divifeurs du dernier terme. En général l’artifice de la méthode pour extraire les racines des quantités irrationnelles, c’eft de les fuppofer égales à un polynome compofé de radicaux & de quantités rationnelles inconnues, felon qu'on le jugera le plus convenable. On formera enfuite au- tant d'équations qu’on aura pris d’inconnues ; & cha- cune de ces équations doit avoir des racines com- menfurables , fi le polynome qui repréfente la racine a été bien choifi. Ainfi la réfolution de ces équations n'aura aucune difficulté. Au refte le mot exrraëtion {e dit plus proprement & plus ordinairement de l'opération par laquelle on trouve les racines des quantités algébriques où nus 334 EXT métriques que de celle pat laquelle onitronve Les : racines des équations , le mot racine ayant deux fens très-différens dans ces deux cas. J’oyez Ra CINE. (0) EXTRACTION ou DESCENDANCE, en Généalogie, fignifie Ze fouche ou la famille dont une perfonne eft -defcendue. Voyez DESCENDANCE & GÉNÉALOGIE. 11 faut qu’un candidat prouve la nobleffe de fon ex- sraëtion, pour être admisdans quelqu'ordre de che- alerie où dans certains chapitres, Gr. F’oyez CHE- VALIER , ORDRE, &c. | “EXTRACTION , NAISSANCE o4 GÉNÉALOGIE , Voyez NAISSANCE 6 GÉNÉALOGIE. EXTRACTION, e7 Chirurgie, eft une opération par laquelle , à l’aide de quelqwinftrument ou de Vapplieation de la main, ontire du corps quelque matiere étrangere qui s’y eft formée, ou qui s’y e introduite contre l’ordre de la nature. Telle eft lexérailion de la pierre, qui fe forme dans la veffie ou dans les reins, Ge. Foyez PIERRE. Voyez auf LYTHOTOMIE. L’evsraëlion appartient à l'exérèfe, comme lefpece à fon genre, Voy. EXÉRÈSE & CORPS ÉTRANGERS. EXTRACTION , (Chimie. ) L’extraëtion eft une opé- ation chimique par laquelle on fépare d’un mixte, d’un compofé-ou d’un fur-compofé , un de leurs prin- cipaux conftituans , en appliquant à ces corps un menftrue convenable. Cette opération à été appel- lée par plufieurs chimiftes , folution partiale. L’ex- zrailion eft le moyen général par lequel s'exécute cette analyfe fi utile à la découverte de la conftitu- tion intérieure des corps , que nous avons célébrée dans plufeurs articles de ce Diétionnaire , fous le nom d’ezalyfe menflruelle, Voyez ANALYSE MENS- TRUELLE, au mot MENSTRUE. (4) EXTRADOS, f. m. (Coupe des pierres.) c’eft la furface extérieure d’une voûte lorfqwelle eft régu- diere, comme l'rados , {oit qu’elle lui foit paral- leleou non. La plûpart des voûtes des ponts anti- ques étoient exrradoffées d’égale épaifleur. Le pont Notre-Dame à Paris eft ainfi exsradoffé. (D) EXTRADOSSÉ, adje@. ez Architecture, On dit guune voûte eft exsradoffée , lorfque le dehors n’en et pas brut, & que les queues des pierres en font coupées également , enforte que le parement exté- sieur eft auffi nni que celui de la doüelle, comme à da voûte de l'églife de S. Sulpice à Paris. (P) EXTRAIRE, tirer quelque chofe d'une autre. Voyez ŒxTRACTION. En sermes de Commerce , il fignife faire de dépouillement d’un journal ou de quelqu'autre livre à l’ufage des marchands & banquiers , pour voir ce qui leur eft dû par chaque particulier, où les fommes qu’ils en ont reçhes à-compte. CEEM = EXTRAIT , f. m. (Belles-Lertr.) fe dit d’une ex- pofñtion abregée , ou de lépitome d'un plus grand puvrage. Voyez ÉPITOME. Un extrait eft ordinairement plus court & plus fu- iperfciel qu'un abregé. Voyez ABREGÉ. Les journaux & autres ouvrages périodiques qui aroïffent tous les mois, & où l’on rend compte des Livres nouveaux, contiennent ou doivent contenir des extraits des matieres Les plus importantes, ou des morceaux les plus frappans de ces livres. oy. JouR- AL. (G) L’extrait d’un ouvrage philofophique, hiftorique, ec. n’exige, pour être exaét, que de la juftefle &e de la netteté dans l’efprit de celui qui Le fait, Expri- amer la fubffance de l'ouvrage, en préfenter les rai- fonnemens ou les faïts capitaux dans leur ordre & gans-leur jour, c’eft à quoi tout l’art fe réduit ; mais pour un extrait difcuté , combien ne faut-il pas réunir de talens & de lumieres ? Voyez CRITIQUE. On fe plaignoït que Bayle en impofoit à fes lec- teurs, en rendant intéreffant l’exerais d’un livre qui ge l'étoit pas ; 1] faut ayouer que la plûpart de fes fuccefleurs-ont bien fait ce qu’ils ont pù pour éviter ce reproche ; rien de plus fec que les exerairs qu'ils nousdonnent , non-feulernent des Hyres fciennifiques, mais des ouvrages Jittéraires. Nous ne parlerons point des extraits dont l'igno- rance .&c la mauvaife foi ont de tout tems inondé {x Littérature, On voit des exemples de tout ; mais il en eft qui ne doivent point trouver place dans un ouvrage férieux & décent, & nous ne devons nous occuper que des journaliftes eftimables. Quelques- uns d’entreux, par égard pour le public, pour les auteurs & pour eux-mêmes , fe font une loi de re parler des ouvrages qu’en hiftoriens du bon ou du mauvais fuccès, ne prenant fur eux que d’en expofer le plan dans une froide analyfe. C’eft pour eux que nous hafardons ici quelques réflexions que nous avons faites ailleurs {ur l'art des exsrarss, appliquées au genre dramatique, comme à celui de tous quieft le plus généralement conou & le plus legerement critiqué. : La partie du fentiment eft du reflort de toute per- fonne bien organifée ; 1l n’eft befoin ni de combiner ni de réflechir pour favoir fi l’on eft émû, & le fut- frage du cœur eftun mouvement fubit & rapide. Le public à cet égard eft donc un excellent juge. La va- nité des auteurs mécontens peut bien fe retrancher fur la legereté françoife, fi contraire à lillufion, & fur ce caraétere enjoié qui nous diftrait de la fitna- tion la plus pathétique, pour faifir une allufon ou Mune équivoque plaifante. La figure, le ton, le gefte d’un aéteur, un bon mot placé à propos , ou tel autre incident plus étranger encore à la piece, ont quek- quefois fait rire où l’on eût dù pleurer ;#mais quand le pathétique de lation eft foûtenu, la plaifanterie ne fe foûtient point : on rougit d’avoir ri, & l’on s’a- bandonne au plaïfir plus décent de verfer des larmes. La fenfbilité & l’enjouement ne s’excluent point, & cette alternative eftcommune aux François avec les Athéniens , qui n’ont pas laiflé de couronner So- phocle. Les François frémiffent à Rodogune, & pleu. rent à Andromaque: le vrailes touche, le beau les faifit; & tout ce qui n’exige ni étude ni réflexion , trouve en eux de bons critiques. Le journalifte n’a donc rien de mieux à faire que de rendre compte de Pimpreflion générale pour la partie du fentiment. I n’en eft pas ainfi de la partie de l’art ; peu la connoif- fent, & tous en décident : on entend fouvent raifon ner là-deflus, & rarement parler taïfon, On lit une infinité d’extrairs & de critiques des ouvrages de théatre ; le jugement fur le Cid eft le feul dont Le goût foit fatisfait; encore n’eft-ce qu'une critique de détail, où l'académie avoue qu'elle a fuivi une mau- vaife méthode en fuivant la méthode de Scudéri, L’a cadémie étoit un juge éclairé, impartial & poli, peu ‘de perfonnes l’ont imitée ; Scudéri étoit un cenfeur malin, groffier, fans lumieres, fans goût : il a eu cent initateuts. Les plus fages, effrayés des dificultés que préfente ce genre de critique, ont pris modeftement le parti de ne faire des ouvrages de théatre que de fimples analyfes : c’eft beaucoup ponr leur commodité par- ticuliere , mais ce n’eft rien pour l'avantage des Let- tres. Suppofons que leur exsrais embrafle & déve- loppe tout Le deffein de l'ouvrage, qu'on y remarque l’ufage & les rapports de chaque fil qui entre dans ce tifu, l’analyfe la plus exaéte & la mieux détaillée fera toÿjoursun rapport infuffifant dont l’auteur aura droit de fe plaindre. Rappellons-nous ce mot de Racine, ce qui me difingue de Pradon , c’ef? que je fai écrire : cet aveu eft fans doute très-modefte ; mais il eft vrai du moins que nos bons auteurs different plus des mauvais par les détails & le coloris, que par le fond & l’ordonnance. - Combien de fituations; combien de traits, de cas EXT LE 27 On eft donc injuite fans Le vouloir, peut-être même par la crainte de l'être, lorfqu'on fe borne au fimple extraic 8 à l'analyfe hiftorique d’un ouvrage de théa- tre. Que penferoit-on d’un critique qui, pour don- ner une idée du S. Jean de Raphael, fe borneroit à dire auñl eft de grandeur naturelle , porté fur une aigle, tenant une table de la main gauche ; & une plume de la main droite ? Il eft des traits fans doute dont la ‘beauté n’a befoin que d’être indiquée pour être fentie; tel eft, par exemple , le cinquieme afte de Rodogune : tel eft le coup de génie de ce peinire qui, pour exprimer la douleur d'Agamemnon au {a- crifice d’Iphigénie, l’a repréfente le vifage couvert d’un voile ; mais ces traits font aufh rares que pré- cieux. Le mérite le plus général des ouvrages de Peinture, de Sculpture, de Poëñe, eft dans l’exécu- ton ; & dès qw’on fe bornera à la fimple analyfe d’un ouvrage de goût, pour le faire connoitre, on fera auf peu ratfornable que fi l’on prétendoiït fur un plan géométral faire juger de l'architecture d’un pa- Jais. On ne peut donc s'interdire équitablement dans un extrait littéraire, les réflexions &c les remarques inféparables de la bonne critique. On peut parler en fimpie hiftorien des ouvrages purement dida@iques; mais on doit parler en homme de gotit des ouvrages de goût. Suppofons que l’on eût à faire l’exsrais de la tragédie de Phedre ; croiroit-on avoir bien inftruit le public, fi, par exemple, on avoit dit de la fcene de la déclaration de Phedre à Hyppolite : « Phedre vient implorer la proteétion d’Hyppolite » pour fes enfans, mais elle oublie à fa vûe le def- » ein qui l’amene. Le cœur plein de fon amour, elle » en lafle échapper quelques marques. Hyppolite » lui parle de Théfée, Phedre croit le revoir dans » fon fils ; elle fe fert de ce détour pour exprimer la * pafhion qui la domine : Hyppolite rougit & veut fe » retirer ; Phedre le retient, cefle de diffimuler, & # lui avoue en même tems la tendrefle qu’elle a pour » lui, & l’horreut qu’elle a d’ellemêmes. Croiroit-on de bonne-foi trouver dans fes le@eurs une imagination aflez vive pour fuppléer aux détails qui font de cette *efquifle un tableau admirable } Croiroit-on les avoir mis à portée de donner à Ra- cine les éloges qu’on lui auroit refufés en ne parlant de ce morceau qu’en fimple hiftorien ? Quand un journalifte fait à un auteur l’honneur de parler de lui, il lui doit les éloges qu'il mérite, il doit au public les critiques dont l'ouvrage eft faf- ceptible , 1l fe doit à lui-même un ufage honorable de l'emploi qui lui eft confié: cet ufage confifte à s établir médiateur entre les auteurs & Le public; à éclairer poliment l’aveugle vanité des uns, & à rec- tifier les jugemens précipités de l’autre, C’eftune t4- che pénible & difficile; mais avec des talens, de EXT 335 l'exércice &t du zele, on peut faire beaucoup pour le progres des Lettres, du goñt & de la raifon. Nous Lavons déjà dit, la partie du fentiment a beaucoup de Connoïfleurs, la partie de l’art en a peu, la partie de lefptit en a trop, Nous entendons ici par prie, cette efpece de chicane qui analyfe tout, & même , ce qui ne doit pas Être analyfé, Si chacun de ces juges fe renfermoit dans les bore nes qui lui font preicités, tout feroit dans l’ordre » mais celui qui n'a que de lefprit, trouve plat tout ce qui m'eftique fenti: celui qui n’ef que fenfible trouve froid tout ce qui n’eft que penié ; & celui qui ne connoît que l’art, ne-fait grace ni aux penfées ni auxdentimens, dès qu'on a péch4 contre les regles ; voik pour la plüpart des juges. Les auteurs de leur côté ne font pas plus équitables ; ils traitent de bor- nés ceux qui n'ont pas été frappés de leurs idées d'infenñbles ceux qu'ils n’ont pas émûs, & de pée dans ceux qui leur parlent des regles de l’art, Le journalifte eit témoin de cette diflention ; c’eft À lui d’être le conciliateur. El faut de l’autorité , dira-t-l où fans doute ; mais: il Ini eft facile d’en acquérir. Qu'il fe donne la peine de faire quelques exrrairs, où ilexamine les caraëteres & les mœurs en philofophe Le plan 8 la contexture de l'intrigue en:homme de Part , les détails & le ftyle en homme de goût : à ces conditions , qu’il doit être en état de remplir, nous lui fommes garans de la confiance générale, Ce que nous venons de dire des ouvrages dramatiques, peut & doit s'appliquer à tous les genres de Littérature Poyez CRITIQUE. Ces article eff de M. MARMONTEr.. EXTRAIT, (Jurifpr.) fignifie ce qui eft tiré d'un aéte ou d’un regiftre , ou autre piece. Quelquefois on entendpar cet exfrair un abregé, quelquefois une copie entiere. : EXTRAIT BAPTISTATRE, eft une expédition d’un aëte de baptême tiré fur le regiftre deftiné à écrire .ces fortes d’aétes. Foyez BAPTÊME & REGISTRES. EXTRAIT LÉGALISÉ , eff celui dont la vérité eft atteftée par une perfonne fupérieure à celle qui a délivré lexrrair. Voyez LÉGALISATION. EXTRAIT DE MARIAGE, eft une expédition ou copie authentique d’un aéte de célébration de maria- ge, tiré fur le regiftre deftiné à écrire les mariages, Voyez MARIAGE 6 REGISTRE DES MARIAGES. . EXTRAIT SUR LA MINUTE, eft une expédition tirée {ur la minute même d'un ae, à la différence de ceux qui font tirés feulement fur une expédition ou fur une copie collationnée.. Le premiet, c’efl-1… dire celui qui eft tiré fur la minute, eft le plus au- thentique. EXTRAIT MORTUAIRE, eft l'expédition d’un atte mortuaire , c’eft-à-dire la mention qui eft faite du décès de quelqu'un fur le regiftre deftiné À cet effet. Voyez MORTUAIRE & REGISTRES MORTUAIRES. EXTRAIT D'UN PROCÈS, eft l’abregé d’un pro= cés, c'eft-à-dire un mémoire qui contienne Ja date de toutes les pieces , & Le précis de ce qui peut fervir à la décifion du procès, Les rapporteurs ont ordinai- rement un exerair à la main, pour foulager leur mé- moire , lorfqu'ils font le tapport d’un procès. Le re crétaire durapporteur fait communément fon exvrraie du procès, pour foulager lerapporteur ; mais le rap- porteur doit voir les chofes par lui-même, & ne doit pas fe fier à l’exrrair de fon fecrétaire, qui peut être infidele , foit par inadvertance, ou pour favorifer une des parties au préjudice de l’autre. Le rappor- teur doit donc répulierement faire lui-même fon ex- trait, ou fi-bien vérifier celui de fon fecrétaire, qu'il puifle attefter les faits par lui-même. On voit dans le ftyle des cours, des lettres patentes du roi de lan. née 1625, pour difpenfer un confeiller de faire lui- même {es exsrairs, à caufe qu'il avoit la vûe baffle. Ceux qui fe fervent de l’exrrais de leur fecrétaire " 33 EX T 3 tont ordinairement , en le vérifiant , un exirais à leur maniere , & plus concis , qu’on appelle Ze Jous-extrait. . EXTRAIT DES REGISTRES, c’eft ce qui efttiré de - quelque regiftre public. Cetantitulé fe met en tête des expéditions des jugemens qui ne font délivrés qu’en abregé, c’eft-à-dire qui ne font pas en forme exécutoire, Les extraits des regifires des baptèmes, mariages , fépultures , °c. font ordinairement des expéditions entieres des aétes qu'ils contiennent. Voyez EXPÉDITION , REGISTRES € JUGEMENT. ENTRAIT DE SÉPULTURE, voyez EXTRAIT MOR- TUAIRE. EXTRAIT DE BATARD dans quelques coûtumes , comme Boulenois, Hainaut & Montreuil, fignifie le droit que les feigneurs hauts-jufticiers ont de par- tager entr’eux les biens d’un bâtard décédé fans hoirs & abinteflat. Voyez ESTRAYERES. (4) EXTRAIT, (Chimie, Pharmacie, & Thérapeuri- que. ) Ce mot pris dans le fens chimique.le plus gé- néral , fignifie un principe quelconque , féparé par le moyen d’un menftrue d’un autre principe , avec le- quel il étoit combiné, ou pour le définir en deux mots , le produit de l’extraétion. Voyez EXTRAC- TION. Le nom d’extrais eft beaucoup plus ufité dans un fens moins général , & il eft prefque reftreint par Pu- fage à defigner une matiere particuliere , retirée de certaines fubftances végétales par lemoyen de Peau. Le menftrue aqueux , qui eft l’inftrument de cette féparation,, ou fe trouve dans la plantemème ,onon le prend du dehors : dans le premier cas, qui eft celui des plantes aqueufes , on les écrafe &c on les expri- me ; par-là on obtient un fuc chargé par diflolution réelle de la partie extraëtive, &c par cantufion de la fécule de la plante, & de faréfine particuliere, lorf- qu’elle eft réfineufe. Si on applique une eau étran- gere à une plante, on en fait Pinfufion ou la décoc- tion, & enfuite l'expreffion : la liqueur fournie par ces opérations , eft auff ordinairement troublée ; par la préfence de quelques matieres non diffoutes: or ce n’eft que la matiere réellement diffoute , combinée chimiquement avec l'eau, qui eft le véritable exsrars dont il s’agit ici. Voyez SUC , INFUSION, Décoc- TION, 6 FÉCULE. ! Pour préparer un extrait, c’eft-à-dire pour le re- tirer de l’eau , & le féparer des parties étrangeres ou féculentes , on n’a donc qu’à prendre certaines 1n- fufons, certaines décoétions , certains fucs, Les défæ- quer par la réfidence , par la filtration à-travers la chaufle , ou les clarifier par le blanc - d'œuf (voyez DÉFÉCATION, FILTRATION, CLARIFICATION }), & évaporer enfuite,, À feu doux , ordinairement au bain marie , jufqu’à la confiftence appellée d’exsrair mou, ou fimplement d’exérait ; exprefhon fufifam- ment exaéte , parce qu’on ne réduit que rarement les extraits fous forme folide. La confiftence d’exsrair, eft l’état de la molleffe à-peu-près , moyen entre la confiftence frupeufe , & la confiftence des tablettes, ou l’état folide (voyez SiROP , TABLETTES ). On apprend fufifamment par l'habitude, à faifir quelques fignes fenfbles, aux- uels on reconnoît cet état, qui eft eflentiel à la per- fedion de l'extrait, & fur -tout à fa confervation ; il faut que le doigt éprouve quelque réfiftance , en preffant un exérait refroidi ; il doit laifer à fa furfa- ce une preffon durable , & s’en détacher fans en rien emporter, c’eft-à-dire ne pas coller, L’extrair que nous voulons defigner ici , eft d’une couleur noirâtre, & d’unefaveur plus ou moins ame- re, toûjours mêlée d’un goût de réfiné, ou de cara- mel. Les fubftances végétales , qui fournaffent un pa- reil extrait, lont les racines , les tiges , les bois , les écorces , les plantes, celles des fruits & des femen- çes, & enfin les fleurs, EXT L’extrair , confidéré généralement comme la ma tiere des décottions par l’eau de ces fubftances vé- gétales, ou comme leur fuc clarifié, épaifli , 8 au- quel convient la defcription que nous venons d’en faire, peut contenir diverfes fubftances ; favoir, toutes les matieres végétales , folubles par l’eau (voyez EAU, Chimie), le corps doux, le mucila- ge, & les autres efpeces du corps muqueux ::mais les fubftances retirées par l’évaporation des décoc- tions & des fucs végétaux, ne font appellés exsraies, qu’autant qu’une certaine fubftance particuliere , fa- voir, celle qui donne lieu à cet article, y prédomine. Cette fubftance particuliere , appellée fpéciale- ment extrait , eft mal connue des Chimiftes. Voicz cependant les propriétés auxquels on la reconnoit : l'extrait, proprement dit, a éminemment cette fa- veur amere, fuivie d’un arriere-goût de fucre brülé, que nous avons énoncé plus haut. Diftillé à la vio- lence du feu ( dans des vaifleaux très-élevés , caril fe gonfle facilement , voyez DISTILLATION ) ; il donne à-peu-près les mêmes principes qu'une plante purement extraflive (yoyez ANALYSE VÉGÉTALE, au mot VÉGÉTAL) ; 1l eft combuftible: on retrouve dans fes cendres , comme dans celles d’une plante de l’alkali fixe , du tartre vitriolé & du fel marin : lorfqu'il eft bien defléché , il eft en partie foluble par l’efprit de vin ; mais ce qui le caraétérife pro- prement, c’eft fon zwriverfalité dans toutes les fub- ftances qne nous avons nommées plus haut. Les dif- férentes efpeces de corps muqueux, fe trouvent dans un petit nombre de ces fubftances , & y font com- me accidentelles ou étrangeres : l'exsrair eft le princt- pe de la compoñtion intérieure des organes de la plante ; il eft cette matiere générale , qui fe retire par l’eau de toute feuille, racine , &c. Comme ce n’eft ordinairement que dans des vües pharmaceu- tiques qu’on prépare des exrraits, & qu'on n’a pas obfervé que le mélange des fubftances muqueufes al- térât la vertu médicinale de lexsrais proprement dit ; on ne fe met point en peine de les en féparer, excepté qu’elles n’empêchaffent que le médicament ne fût de garde ; car dans ce cas , ou il faudroit les féparer , ou renoncer à pofféder fous la forme d’ex- trait , la matiere médicamentale d’une pareille plan- te : on ne s’avife point , par exemple , de préparer lexrrait de guimauve, par cette derniere raifon. Mais fi on vouloit préparer un exsrait dans des vies philofophiques , il faudroit tâcher de le fépa- rer de ces diverfes fubftances ; ce qui n’eft pas aïfé : l'unique moyen que nous A AOCRS aujourd’'hut , c’eft de partager Le tems pendant lequel on apphi- que l’eau, ou d’en varier la chaleur , & d’obferver dans quel tems ou à quel degré fe fépare la fubftan- ce qu’on veut rejetter, & celle qu'on vent retenir. Les extraits renferment fous un petit volume tous les principes utiles des fubftances , dont la vertu mé- dicinale ne réfidoit point dans des principes volatils, difipés par la décoétion ou l’évaporation, ou dans des parties terrenfes ou réfineufes , féparées par la défæcation, ou épargnées par le menftrue aqueux. Les plantes aromatiques , &rcelles qui contien- nent un alkali volatil libre, ne doivent donc point être expofées aux opérations qui fourniflent des ex- traits ; au moins ne doit-on pas efpérer de concen- trer toute la vertu de la plante dans l’extrais : on ne doit pas non plus fe propofer d'extraire , par le moyen de l’eau , les parties médicamenteufes des fubftances , qui n’operent que par lenrs racines ; c’eft ainfi qu’on ne doit point fubffituer la décoétion ou l’exrrair de jalap à fa poudre. Certaines écorces très terreufes , comme le quinquina , peuvent être dans pluñeurs cas , des remedes bien diférens de ces ma- tieres données en fubftance ; à çaufe de l'effet ab- forhant forbant dûù à leurterre , qui ne pafle qu’en petite quantité dans l’exsraër. Certains végétaux inodores , tels que Le féné, l'éllébore | qui font des purgatifs très efficaces, donnés en fubftance ou en infufion, fourniflent des extraits qui ne purgent que très-foiblement : les ro- fes perdent aufh, par une longue évaporation, leur vettu purgative ; quelques autres au contraire , tels que l'écorce de fureau, donnent des extraits qui re- tiennent toute leur vertu purgative. Le principal avantage que nous fourniffent les re- medes réduits fous la forme d'extraits, c’eft la fa- cilité de les conferver , & de les faire prendre aux malades. L’exrrair eft toüjours une préparation officinale. On trouve dans diverfes pharmacopées plufieurs, ex- traits compofés: La pharmacopée de Paris n’a retet nu que l'exéraié panchymagogue, Voyez PANCHYMA- GOGUE. Les els de la Garaye font des exvrairs, Voyez Hy- DRAULIQUE , (Chimie). Certains fucs épaifhis , comme le cachou, l’hypo- cils, l’opium , & l’aloès , font des exvrairs folides ; voyez ces articles. La thériaque célefte eft un ex- srait compoié. Voyez THÉRIAQUE. | Outre les médicamens dont nous venons de par- fer, on connoït encore fous le nom d’exrrair, pli- fieurs préparations pharmaceutiques, tirées des fub- ftances métalliques ; mais ces préparations font plus connues fous le nom de seinture ( voyez SUBSTAN- CES MÉTALLIQUES 6 TEINTURE ) : le feul exrair de Mars eft fpécialement connu fous ce nom. ’oyez FER. (8) EXTRAIT , dans le Commerce, a diverfes fignifica- tions. Ilfignifie 1°, un projet de compte qu'un négociant envoye à fon correfpondant, ou un commiffionnaire à fon commettant., pour le vérifier. 2°. Ce quief tiré d’un livre ou d’un regiftre d’un marchand. L'extrazs d’un journal forme un mémoire. 3°. C’eftaufh un des livres dont les marchands & banquiers fe fervent dans leur commerce : on l’ap- pelle autrement Zvre de raifon , & plus ordinairement le grand livre. Voyez LIVRE. Chambers. EXTRAJUDICIAIRE, adj. (Jurifpr.) fe dit des altés qui non-feulement font faits hors jugement & “non coram judice pro tribunali fedenre, mais auf qui ne font point partie de la procédure & inftruétion, Ce terme exsraudictaire eft oppolé à Judiciaire ; ainf une requfiuon eft judiciaire , ou fe fait judiciai- rement, quandelle eft formée fur le barreau. Les aff- gnations, défenfes, & autres procédures tendantes à inftruire laffaire & à en pourfuivre le jugement , font auf des aétes judiciaires, c’eft -à - dire formés par la voie judiciaire ; au lieu qu’un fimple comman- dément, une fommation, un procès-verbal, & au- tres actes femblables, quoique faits par le miniftere d’un huiflier ou fergent, font des aëtes exrrajudiciai- res ; lorfqu'ils ne contiennent point d’affignation. Les aêtes judiciaires ou procédures tombent en péremption ; au lieu que les aétes exrrajudiciaires ne font fujets qu’à la prefcription. (4) EXTRAORDINAIRE, adj. fignifie quelque chofe qui n'arrive pas ordinairement. Voyez ORDINAIRE. Courters extraordinaires ; {ont ceux qu'on dépêche exprès dans les cas preflans. Armbafladenr où envoyé extraordinaire , eft celui qu'on envoye pour traiter & négocier quelqu’affaire particuliere 8 importante ; comme un mariage, un éraité, une alliance, &c. où même à l’occafion de quelque cérémonie, pour des complimens de con- doléance, de congratulation, &c. Voyez AMBASSA- DEUR 6 ORDINAIRE, Une gazette , un journal , ou des zouve/les extraor- Tome FI, EXT 337 dinaires , font celles qu'on publie après quelque éve- nement important, qui en contiennent le détail & les Particularités, qu’on ne trouvé point dans les nouvelles ordinaires. Les auteurs des gazettes fe fervent de poft-fcripts ou fupplémens, au lieu d’ex- traordinaires, Chambers. ; EXTRAORDINAIRE ÿ (Jurifprud.) fignifie fouvent Procédure criminelle. Quelquefois les procureurs met- tent ce mot fur leurs doffiers, pour dire que la caufe n'eft point au rôle d'aucune province, mais doit fe pourluivre à une audience eXtraordinaire. | Audience extraordinaire, eft celle que le juge don- né en un autre tems que celui qui eft accoûtumé. Frais extraordinaires de criées, voyez CRIÉES G FRAIS, Jugement à l'extraordinaire, c’eft-à-dire celui qui eft rendu fur une inftruétion criminelle. Procédure extraordinaire, c’eft en général la proz cédure criminelle ; il faut néanmoins obferver ce qui eft dit dans l’article fuivant. Reglement à l'extraordinaire, c’eft lorfque le juge ordonne que les témoins feront recolés & confron- tés ; car juique-là la procédure, quoique criminelle, n'eft pas réputée vraiment exvraordinaire. Reprendre l'extraordinaire, c’eft lorfqw’après avoir renvoyé les parties à l'audience fur la plainte &in- formation, ou même avoir converti les informations en enquêtes , on ordonne , attendu de nouvelles charges qui font furvenues , que les témoins feront récolés & confrontés. Voie extraordinaire , c’eft la procédure criminelle, Prendre la voie exrraordinaire , c’eft fe pourvoir par plainte, information, 6:c. au lieu que la voie ordi- naire eft celle d’une fimple demande civile. (4 EXTRA TEMPORA , (Jurifbrud.) eft une ex- prefion purement latine , qui eft de ftyle dans la chancellerie romaine, pour fignifier une difpenfe , par laquelle le pape permet de prendre les ordreshors les tems de l’année prefcrits par les canons, & fans garder les interftices de droit. Foyez INTERSTIcES. Ces tems prefcrits pour la réceprion des ordres fa- crés font les quatre femaines qu’on appelle quarres tems, Voyez QUATRE-TEMS. (4 EXTRAVAGANTES, (Jurifpr.) eft le nom que lon donne aux conftitutions des papes, qui font pof- térieures aux clémentines: elles ont été ainf appel- lées guaft vagantes extra corpus juris, pour dire qu’- elles étoient hors du corps de droit canonique , lea quel ne comprenoit d’abord que ledecretdeGratien ; enfuite on y ajoûta Les decrétales de Grégoire IX. le fexte de Boniface VII. & les clémentines. Enfin les extravagantes ont êté elles - mêmes inférées dans le corps de droit canonique; elles font placées à la fuite des clémentines, à la fin du troifieme tome, qu’on appelle communément /e fete ; ou liber Jextus decre- talium de Boniface VIII. : [l y a deux fortes d’exéravagantes, favoir celles de Jean XXII. & les exrravagantes communes. Les extrayagantes de Jean XXII. font vingt épîtres decrétales où conflitutions de ce papé qui ont été diftribuées fous quatorze titres fans aucune divifion par livres, attendu la briéveté de la matiere. On ignore précifément en quel temscette colleion pa tut. Son auterir mourut en 1334. . ; st GR François de Pavinis , Guillaume de Monteélandune & Zenzelinus de Caffan, ont fait des glofes & apol- tilles fur ces extravagantes, | | Celles qu’on appelle exrravagantes communes font des épitres, decrétales ou conftitutions de divers pa: pes quitinrent le faint-fiége , foit avant Jean X XII. ou depuis ; elles font divilées par livres comme les decrétales, 8 l'on y a fuivi le même ordre de ma. tieres : mais comme il nes’y trouve aucune conflitus tion fur les mariages, qui font l’objet du quatrieme Vy | 338 EXT livre des decrétales, on a fuppofé que le quatrieme livre des extravagantes communes manquoit, de forte qu'il n’y a que quatre livres qui font intitulés prerier, fecond , troifieme, &t cinquieme. Cesextravagantes n’ont par elles-mêmes en France aucune autorité, fi ce n’eft autant qu’elles {e trou- vent conformes aux ordonnances de nos rois & aux ufages du royaume; de forte qu’elles font rejettées toutes Les fois qu’elles fe trouvent contraires aux li- bertés de l’églife gallicane , ou à notre droit françois. 4 c TRAVASATION , EXTRAVASION , f. f£. ( Medecine, ) font des termes fynonymes en Mede- cine , qui fignifient une effufion hors des vaiffeaux , de quelque humeur que ce foit, dans le corps humain ; {oit qu’elle fe foit répandue dans le tiflu des par- ties, comme le fang dans l’échymofe; on dans quel- que grande cavité, comme la férofité dans l’'hydro- pifie. | L'un & l’autre de ces mots font formés du latin extra, dehors, & vafa, vaifleau ; ils ne different que par la terminaifon, qui eft arbitraire. le L’extravafation peut être caufée par une replétion extraordinaire, ou une trop forte diftenfion,, qui di- late trop les orifices des vaifleaux, ou en déchureles parois. Voyez PLÉTHORE. L’excoriation & l’érofon des parties contenantes peut aufä donner lieu à l’épanchement des parties contenues. Voyez ACRIMONIE. Il peut auf être une fuite de la faignée , des contufons, lorfque le fang fe répand entre chair &c cuir. Voyez ÉCHYMOSE. Les remedes propres à prévenir l’exéravafation ou à la corriger, ne peuvent être déterminés que rela- tivement aux différentes caufes qui peuvent la pro- duire, ou qui l’ont produite : tels {ont la faignée, les évacuans contre la pléthore, les adouciflans contre l’acrimonie, les réfolntifs contre la contufon, &c. Lorfque l’extravafatior eft fivie d’un épanche- ment confidérable d’humeurs dans quelque cavité, le remede le plus sûr eft de fe hâter d’en faire l’éva- cuation, par le moyen des opérations propres à cet effet; telles que celle du trépan pour l'intérieur du crâne, l’'empyeme pour l'intérieur de la poitrine, la paracenthefe pour l'intérieur du bas-ventre, la ponc- tion pour l’hydrocele, &c. Voyez TREPAN, EM- PYEME, PARAOENTHESE, PONCTION, 6. (d) EXTRÈME, (Géom,) Quand une ligne eft divi- fée, de maniere que la ligne entiere eft à l’une de fes parties, comme cette même partie eft à l’autre, on dit en Géométrie que cette ligne eft divifée en moyenne & extrème raifon, Voici comme on trouve cette divifon : Soit la ligne donnée 4 B=— a (PL. géom. fig. 64. n. 1.) ; foit le grand fegmentx, le petit fera a — x; alors par l’hypothèfea:x::x:a—x. Doncaa—ax —=x x, par conféquent za= x x + a x ; & en ajoûtant + a 4 de chaque côté, pour faire de xx + ax + = a a un quarré parfait, l’équa- tion feraiaa=mxxtax+raa. Or, puifque la derniere quantité eft exaétement un quarré, fa racinex+ia= Via; &e par tranf- _poftion on trouvera V£aa—-#a=x, Cela polé, fur 4 B = 4, élevés à angles droits CB = a; enfuite tirez CA, dont le quarré eft égal à AB” STONE" = aa. Donc 4 C— Viaa; avec ANG. décrivez l'arc 4D, vous aurez C 4 = CD; ain BD=CD-CB=V£iaa — = x — x. Portez donc BD fur la ligne 4B, depuis B jufqu’en £ ; & la ligne AB fera coupée en moyenne & exrrème rai- fon au point E. Cela ne peut pas fe faire exaétement par les nom- bres ; mais fi on veut avoir une approximation rai- fonnable , 1l faut ajoûter enfemble le quarré d’un nombre quelconque, 8 le quarré de fa moitié, & extraire par approximation laracine quarrée de toute la fomme ; d’où Otant la moitié de la srandeur. don née , le refte fera le plus grand fegment. Voyez Ap- PROXIMATION, EXTRACTION, & l’article EQUA- TION , Gc. (E). | EXTRÈMES d’une proportion ; font le premier & le quatrieme terme. Joyez PROPORTION & MOYEN. EXTRÈME-ONCTION, £. f. (Théoz.) facrement de l’églife catholique, inftitué pour le foulagement fpirituel &c corporel des malades, auxquels on le donne en leür faifant diverfes onétions d'huile benite par l’évêque, qu’on accompagne de diverfes prieres qui expriment le but &c la fin de ces on@tions. Sa ma- tere elt l'huile, & fa forme la priere. Voyez SACRE- MENT , ONCTION, FORME, MATIERE, &c, es Proteftans ont retranché l’exérème-ontfion du nombre des facremens , contre le témoignage for- mel de l’Ecriture & la pratique conftante de l’Eglife pendant feize fiecles. | On lappelle extrème-onttion, parce que c’eft la derniere des onttions que reçoit un chrétien, ou qu’on ne la donne qu’à ceux qui font à l'extrémité, ou au moins dangereufement malades. Dans le trei- zieme fiecle on la nommoit onétion des malades, unitio infirmorum , & on la leur donnoit avant le via- tique; ufage qui, felon le P. Mabillon, ne fut chan- gé que dans le treizieme fiecle, mais qu’on a pour- tant confervé ou rétabli depuis dans quelques égli- fes, comme dans celle de Paris, q ._ ‘Les raifons que ce favant bénédiétin apporte de ce changement, c’eft que dans ce tems-là 1l s’éleva plufeurs opinions erronées, qui furent condamnées dans quelques conciles d'Angleterre. On croyoit, par exemple, que ceux qui avoient une fois reçù ce facrement, s'ils venoient à recouvrer la fanté, ne devoient plus avoir de commerce avec leurs fem mes, ni prendre de nourriture, nimarcher nuds piés: quoique toutes ces idées fuffent faufles &c très - mal fondées, on aima mieux, pour ne pas fcandalifer les fimples , attendre à l'extrémité pour conférer ce fa- crement ; & cet ufage a prévalu. On peut voir fur cette matiere es conciles de Worcefter & d’Excefler en 1287 ; celui de Winchefkeren 1308 ; & le P. Mabillon, ad. SS. bened. fæc. 17, pag. 1. La forme de l’extrème-onifion étoit autrefois indi- cative & abfolue ; comme il paroït par celle du rit ambrofien , citée par S. Thomas, S. Bonaventure, Richard de Saint-Vi@tor, &c. Arcudius, Zv. F. de extrem. un. cap. v. en rapporte auffi de femblables,,; ufitées chez les Grecs : cependant généralement chez ceux-ci elle a été déprécative, ou comme en forme de priere; celle qu’on lit dans l’euchologe , pag. 417, commence par ces mots; Parer fanite , animarum & corporum medice, &tc. Celle de Péglife latine eft auffi déprécative depuis plus de 600 ans: on trouve celle- ci dans un ancien rituel maaufcrit de Jumiege , qui & au moins cette antiquité: Per iflam unitionem € fuam püffimam mifericordiam indulgear tbi Dominus quid- quid peccafii per vifum, &c. qu'on trouve dans tous les rituels faits depuis ; & ainfñ des autres oraïfons, relatives aux onétions qui fe font fur les différentes parties du corps du malade. . Ce facrement eft en ufage dans l’églife greque & dans tout l'Orient, fous le nom de l’hwile fainte. Les Orientaux l’adminiftrent ; avec quelques circonftan- ces différentes de celles qu'employent les Latins ; car prenant littéralement ces paroles de l’apôtre S. Jac» ques dans fon épître, ch, v. ÿ. 4, Infirmatur quis in vobis?Inducat presbyteros ecclefiæ,& orent fiper eum ur- gentes eum oleo innomine Domini , &c.ils n’attendent pas que les malades foient à l’extrémité, ni mêmeen danger; mais ceux-ci vont eux-mêmes à l’éghfe, où on leur adminiftre ce facrement toutes les fois EXT qu'ils font indifpofés : c’eft ce que leur reproche Arcudius , Lb. F, de extrem. unët. cap. ul, Cependant le P. Goat en reconnoiflant la réalité de cet ufage dans les églifes orientales, dit que cette ortfétion n’eft pas facramentelle , mais cérémomielle, & donnée aux malades dans l'intention de leur rendre la fanté; comme on a vû quelquefois dans l’églife latine, des évêques & de faints perfonnages employer à la mê- me fin les onétions d’huile benite , ainfi qu'il paroït par une lettre d’Innocent [. à Decentius, rapportée dans le some IT. des conciles, pag. 1248. Outre cela les Grecs affemblent plufeurs prêtres & jufqu’au nombre de fept, pour des raifons myftiques & allé- goriques, qu'on peut voir dans Arcudius & dans Si- méon dé Theflalonique. Il paroît par le facramentai- re de S. Grégoire, de l'édition du P. Menard, page 233 , que dans l’églife latine on employoit aufli plu- fieurs prêtres ; mais l’ufage préfent eft qu’un {eul prêtre confere validement ce facrement. Le P, Dandini, dans fon voyage du Mont-Liban, diftingue deux fortes d’on&tions chez les Maronites ; lune qu’on appelle l’oréhion avec l'huile de la lampe : mais cètte onétion, dit-il, n’eft pas celle du facre- ment qu’on n’admimitroit ordinairement qu'aux ma- lades qui éroient à l'extrémité ; parce que cette huile eft confacrée feulement par un prêtre, & qu’on la donne à tous ceux qui fe préfentent, fains ou malades indifféremment, même au prêtre qui officie. L’au- tre efpece d’ontion, fuivant cet auteur, n’eit que pour les malades ; elle fe fait avec de Phuile que lé- vêque feul confacre le jeudi-faint, & c’eft à ce qu'il paroît leur onétion facramentelle. Mais cette onétion avec l’huile de la lampe eft en ufage non-feulement chez les Maronites, mais dans toute l’églife d'Orient, qui s’en fert avec beau- coup de refpett. Il ne paroît pas même qu'ils la dif- tinguent du facrement de l’exsrème-onülion, {ice n’eft comme l’obferve le P. Goar, qu'ils la regardent com- ne une fimple cérémonie pour ceux qui font en fan- té, & comme un facrement pour les malades. Ils ont dans les grandes églifes une lampe dans laquelle on conferve l'huile pour les malades, & ils appellent cette lampe / lampe de l'huile jointe à la priere. (G) EXTREMIS , (Jurifpr.) on appelle ir extremis, le derniér tems de la vie, où quelqu'un eft atteint d’une maladie dont il eft décédé. Les difpofitions de derniere volonté, faites ir ex tremis , font quelquefois fufpeétés de fuggeftion ; ce qui dépend des circonftances, Voyez TESTAMENT, SUGGESTION. | | Les mariages célébrés iz extremis avec des perfon- nes qui ont vécu enfemble dans la débauche, font nuls quant aux effets civils. Voyez MARIAGE. (4) EXTRÉMITÉ, 1. f. (Gramm.) eft la partie qui eft la derniere & la plus éloignée d’une chofe , ou qui la finit & la termine. | | C’eft en cé fens qu'on employe ce mot.dans les phrafes fuivantes. Les extrémités d’une ligne font des points. On ne peut pas aller d’une exrrémité à l’au- tre, fans pañler par le milieu. EXTRÉMITÉS DU CORPS HUMAIN (es) Medec, doivent être obfervées dans les maladies , {ur-tout dans celles qui font aiguës; parce qu’elles peuvent fournir un grand nombre de fignes prognoftics très- importans pour juger de lévenement. Il n'arrive ja- mais que Les hommes meurent fans qu'il fe faffequel- que changement notable dans l’extérieur des exeremi- £és : on peut y confdérer principalement la chaleur; le froid, la couleur, le mouvement & la fituation ref- peétivement à l’état naturel. C’eft toüjours un bon figne dans les maladies ai- gues, que les extrémités ayent une chaleur tempérée, égale à celle de toutes les autres parties , avec fou- plefle dans la peau. On peut trouver les exérémités EX S 339 ainf chaudés dans les fievres les plus malignes ; mais cette éhaleur n’eft pas également répandue dans tou- tes les parties du corps, comme lorfque les éxrré- mités {ont moins chaudes que lé tronc : d’ailleurs les hypocondres font ordinairement durs dans ce qui primam ejus litteram dicere non polfet , irridet. Quand les Latins confervoient le mot grec daris leur lan- gue, ils le prononçoient à la greque, & l’écrivoient alors avec le figne d’afpiration : ghilofophus de qrao- cogos, Philippus de LUCE ëc. mais quand ils n’af: piroient point Le , ils écrivoient fimplement f: c’eft ainfi qu'ils écrivoient fama ; quoiqu'il vienne conf- tamment de omun 3 & de même fuga de quyà , fur de pop, Êc. , | Le À! . a Pour nous qui prononvons fans afpiration Île o qui fe trouve dans les mots latins ou dans les francois, je ne vois pas pourquoi nous écrivons philofophe , Philippe, &c. Nous avons bien le bon efprit d'écrire fe, quoiqu'il vienne de gçôc; front, de @porris ; Éc. Voyez; ORTOGRAPHE. | Les Éoliens n’aimoiïent pas l’efprit rude ou , pour parler à notre maniere, le 2 afpiré : ainh ils ne fai- foïent point ufage du & qui fe prononçoit avec afpi- ation ; & comme dans l’ufage de la parole ils fai- foient fouvent entendre le fon du je fans afpiration, & qu'iln’y avoit point dans l’alphabet grec de ca- raétere pour défigner ce fon fimple , ils en invente- rent un; ce fut de repréfenter deux gere l’un fur Pautre F, ce qui fait précifément le F qu’ils appelle- vent digamma ; & c’elt de-là que es Latins ont pris leur grand F. Voyez la Méthode greque de P, R;p. 42: Les Éoliens fe fervoient fur-tout de ce digarmima, pour marquer le fe doux, ou, comme on dit abufi- vement, l’« confonne ; ils mettoient ce y à la place de Pefprit rude : ainf l’on trouve Foños, virum, au eu de Gwocs Fiomepos , au lieu de écœspos, vefperus ; Fesdne, au lieu de «91 avec l’efprit rude, vefks, &tc. &t même, felon la méthode de P.R. (ibid) on trouve /érFus pour férvus, DaFus pour Pavus, &c. Dans la fuite, quand on eut donné au digarema le fon du fe, ou fe fervit du 7 où digamma renverfé pour marquer le ve, | Torns Fa | F À Mattinius » à l’article F, fe plaint de ce que quel: ques grammairiens ont mis'cette lettre au nombré des demiwoyelles ; elle n’a rien de la demi-voyelle, dit-1], à MOINS que ce ne foit par rapport au nom qu'on lui donne efe : Nihil aliud habes femivocalis nié zormèmus prolationerñ. Pendant qué d’un côté les Eo- liens changeoïent l’efprit rude en f, d’un autre leg Efpagnols changent le f'en hé afpiré ; ils difent 4ari+ à pour, farine , hava pour faba , hervor pour fervor » hermofo pour formofo, humo au lieu de fumo, &c. Le double f, f, fignifie par abbréviation es parts deëtes , autrement digefle ; c’eft le recueil des livres des jurifconfultes romains, qui fut fait par ordre dé Juftinien empereur de Conftantinople : cet empereur appella également ce recueil digeffe, mot latin, 8 pandeiles , mot grec, quoique ce livre ne fût écrit qu’en latin. Quand on appelle ce recueil digefle, on lé cite en abregé par la premiere lettre de ce mot Z. Quand dans les pays latins on voulut fe fervir de l’autre dénomination , & furtont dans un tems où le grec étoit peu connu, & où les Imprimeurs na- voient point encore dé caraéteres grecs, on fe fervit du double f, F, c’eft Le figne dont la partie inférieu: re approche le plus du &: grec , premiere lettre de rave, c’eftà-dite livres qui contiennent toutes les décifions des jurifconfulres. Telle eft la raifon de l’uz fage du double f, f, employé pour fignifier les parts deites ou digéffe dont on cite tel ou tel livre. Le diétionnaire de Trévoux, article F, fait les obfervations fuivantes: | | 1°. En Mufque, Fzr-fz eff la troifiemté des clés qu'on met fur latablature, 2°. Æ, fur les pieces de monnoie, eft la marque de la ville d'Angers. | | 3°. Dans le calendrier eccléfaftique , elle eft I& fixieme lettre dominicale, (F) F, (Ecriture,) fi l’on confidere ce cara@tere du côté de fa formation, dans notre écriture ; c’eft dans l'italienne & la ronde , la huitième, la premiere, & la feconde partie de l’o ; trois flancs de lo lun fur l’autre, &c la queue de la premiere partie de Lx. L’£ coulée a les mêmes racines, à l’excéption de fa par- tié fupézieure qui fe forme de la fixiéme & de la fep- tierne partie de lo: on y employé un mouvement nuxte des doigts & du poignet, le pouce plié dans fes trois jointures. Voyez lès Planches à la table de PEcrituré, planche des Alphabets. F-UT-FA , (Mufique.) F-ut-fe, où fimplement F: cataétere ou terme de Mufique , qui indique la note de la gamme que nous appellons #7. Foy. Gamme. C’eft auffi le nom de la plus baffe des trois clés de la Mufique. Voyez CLés. (5) F, (Comm.) les marchands , banquiers , teneurs de livres, fe fervent de cette lettre pour abréger les renvois qu'ils font aux différentes pages, ou comme ils s’exprimeñt au folio de leurs livres & regiftres. Ainfi F°, 2. fignifie fo/io 2. ou page feconde, Les florins fe marquent aufli par un F de ces deux manieres : FL ou FS: Dit, du Comm.8e Chambers, (G) FABAGO , (Bot.) genre de plante à fleur en rofe, compofée de plufeurs pétales difpofés en rond. If fort du calice un piftil, qui devient dans la fuite ua fruit membraneux de forme qui approche de la cy< lindrique , & qui eft ordinairement pentagone. ê fruit eft compofé de cinq capfules, & s'ouvre en cinq patties, dont chacune eft garnie d’une lame qui fert de cloifon pour féparer la cavité dufruit, I renferme des femences, applaties pour de À. X 34 FAB Ajoûtez aut-caraéteres de ce genre, que les feuilles font oppofées, & qu’elles naïflent deux à deux fur les nœuds de la tige. Tournefort, 47/2, rez herb. Voyez PLANTE. (1) ù * FABARIA , adj. pris fubft. (Myrk. & Hiff. anc.) facrifices qui fe faifoient à Rome fur le mont Cé- lien, avec de la farine, des feves, & du lard, en l'honneur de la déefle Carna femme de Janus. Cette cérémonie donna le nomaux calendes de Juin , tems endant lequel elle fe célébroit. - FABIENS, {. m.pl. (Æf. anc.) une partie des Luperques. Voyez LUPERQUES 6 LUPERCALES. Ces prêtres étoient divifés en deux collèges , dont l’un fut appellé collège des Fabiens, de Fabius leur chef; & l’autre, collège des Quintiliens , de leur chef Quintilius. Les Fabiens étoient pour Romulus , & les Quintiliens pour Remus. Voyez QUINTILIENS. Dit, de Trèv. & Chambers. (G) FABLE, f. f. (LA) Myrk. nom colle&if fans plu- tiel, qui renferme l’iftoire théologique, l’hiftoire fabuleufe , l’hiftoire poétique, & pour le direenun mot, toutes les fables de la théologie payenne. Quoiïqu'elles foient très-nombreufes , on eff par- venu à les rapporter toutes à fix ou fept claffes, à 1n- diquer leurs différentes fources , & à remonter à leur origine. Comme M. l’abbé Banier eit un des mytho- logiftes qui a jetté fur ce fujet le plus d'ordre & de netteté, voici le précis de fes recherches. Il divife la fable, prife colle&tivement, en fables hiftoriques , philofophiques , allégoriques , morales, mixtes, & fables inventées à plaïfr. Les fables hifloriques en grand nombre, font des hiftoires vraies, mêlées de plufeurs fiions : telles font celles qui parlent des principaux dieux &r des héros, Jupiter, Apollon, Bacchus, Hercule, Jafon, Achille. Le fond de leur hiftoire eft pris dans la vé- rité. Les fables philofophiques font celles que les Poë- tes ont inventées pour déguifer les myfteres de la philofophie ; comme quand ils ont dit que l'Océan eft le pere des fleuves ; que la Lune époufa l’air, & devint mere de la rofée. Les fables allegoriques font des efpeces de paraboles , renfermant un fens myftique ; comme celle qui eft dans Platon, de Po- rus & de Pénie, ou des richefles & de la pauvreté, d’où naquit l'Amour. Les fables morales répondent aux apologues : telle eft celle qui dit que Jupiter en- voye, pendant le jour les étoiles fur la terre, pour s'informer des ations des hommes. Les. fables mix- zes font celles qui font mêlées d’allégorie & de mo- tale, & qui n’ont rien d’hiftorique ; ou qui avec un fond hiftorique , font cependant des allufions ma- nifeftes à la Morale ou à la Phyfique. Les fables in- ventées à plaïfir , n'ont d'autre but que d’amufer : telle eft la fable de Piyché, & celles qu'on nom- moit uilefiennes & fybarirides. | Les fables hiftoriques {e diftinguent aifément, parce qu’elles parlent de gens qu’on connoît d’ailleurs. Cel- les qui font inventées à plaïfir, fe découvrent par les contes qu’elles font de perfonnes inconnues, Les fables morales , & quelquefois les allégoriques, s’ex- pliquent fans peine : Les philofophiques font remplies de profopopées qui animent la nature ; l’air & la terre y paroïflent fous Les noms de Jupiter, de Junon , &c. En général, il y a peu de fables dans les anciens poëtes qui ne renferment quelques traits d’hiftoire ; mais ceux qui les ont fuivis, y ont ajoûté mille cir- conftances de leurimagination. Quand Homere, par exemple, raconte qu'Éole avoit donné les vents à Ulyfle enfermés dans une outre , d’où fes .compa- gnons les laifferent échapper; cette hiftoire envelop- -pée nous apprend que ce prince avoit prédit à Ulyfle le vent qui devoit fouffler pendant quelques jours, 8x qu'il ne fit naufrage que pour n’avoir pas fuivi fes gonfeils: mais quand Virgile nous dit que le même Eole, à la priere de Junon, excita cetteterrible ter pête qui jetta la flote d’'Enée fur les côtes d'Afrique, c’eft une pure fiétion, fondée furice qu'Eole étoit regardé comme le dieu des vents. Les fables mêmes que nous avons appellées phrlo/ophiques ; étoient d’abord hiftoriques , &z ce n’eft qu'après coup qu’on ya Jetté l’idée des chofes naturelles: de-là ces fabres mixtes , qui renferment un fait hiftorique & nn trait de phyfique , comme celle de Myrrha & de Leuco- thoé changée en arbre qui porte l’encens , & celle de Clytie en tournefol. ps Venons aux diverfes fources de la fzble. 1°, On ne peut s'empêcher deregarder la vanité comme la 1° fource des fables payennes. Les hom- mes ont cru que pour rendre la vérité plus recom- mandable , il falloit l’habiller du brillant cortége du merveilleux : ainfi ceux qui ont raconté les premiers les ations de leurs héros , y ont mêlé mille fi&ions. 2°. Une feconde fource des fables du Paganifme eft le défaut des cara@teres ou de lécriture. Avant que l’'ufage des lettres eût été introduit dans la Grece, les évenemens & les aftions n’avoient guere d’au- tres monumens que la mémoire des hommes. L'on fe fervit dans la fuite de cette tradition eonfufe &z défigurée ; & l’on a ainfñ rendu les /z5/es éternelles , en les faïfant pañler de la mémoire des hommes qui en étoient les dépofitaires, dans des monumens qui devoient durer tant de fiecles. 3°. La faufle éloquence des orateurs & la vanité des hiftoriens, a dù produire une infinité de narra- tions fabuleufes. Les premiers fe donnerent une en- tiere liberté de feindre & d'inventer; .& l’hiftorien lui-même fe plut à tranfcrire de belles chofes, dont il n’étoit garant que fur la foi des panégyriftes. 4° Les relations des voyageutrsont encore intro duit un grand nombre dé fables. Ces fortes de gens fouventignorans & prefque totours menteurs, ont pù aifément tromper les autres, après avoir été trompés eux-mêmes. C’eft apparemment fur leur relation que les Poëtes établirent les Champs élyfées dans le charmant pays de la Bétique ; c’eff de-là que nous font venus ces fables, qui placent des monftres dans certains pays , des harpies dans d’autres, ici des peuples qui n’ont qu'un œil, là des hommes qui ont la taille des géans. ] 9, On peut regarder comme une autre fource des fables du Paganifme , les Poëtes,, le Théatre, les Sculpteurs , & les Peintres. Comme les Poëtes ont tohjours cherché à plaire, ils ont préféré une incé- nieufe fauffeté à une vérité commune ; le fuccès juf= tifant leur témérité, ils nemployerent plus que la fition ; les bergeres devinrent des nymphes ou des nayades ; les bergers, des fatyres ou des faunes; ceux qui aimoient la mufque, des Apollons; les belles voix, des mufes; les belles femmes, des Vénus; les oranges, des pommes d’or ; les fleches & les dards, des foudres & des carreaux, Ils allerent plus loin : ils s’attacherent à contredire la vérité, de peur de fe rencontrer avec les hiftoriens. Homere a fait d’une femme infidele , une vertueufe Pénélope ; & Virgile a fait d’un traître à fa patrie,un héros plein de piété. Ils ont tous confpiré à faire pafler Tantale pour un avare, & l'ont mis de leur chef en enfer, lui qui a - été un prince très-fage & très-honnête homme. Rien ne {e fait chez eux que par machine. Lifez fleurs poé- fies. La pour nous enchanter tour eff mis en ufages Tout prend un corps > #7 ame ; ur efprit ; ur vifage ; | Chaque vertu devient une divinité, Minerve eff la prudence, & Vénus la beauté. . . à Leurs fables paflerent des poëmes dans les hiftoi- res, & des hiftoires dans la théologie ; on farma un } fÿfème de religion fur les idées d'Héfiode & d'Ho: mere; On érigea des temples, & on offrit des vid mes à des divinités qui tenoient leur exiftence de -deux poëtes. Cu: I faut dire encore que la 48e monta fur le théatté comme fur fon throne, &c ajoûter que les Peintres & les Sculpteurs travaillant d’après leur imagina- tion , ont aufhi donné cours aux hiftoires fabuleufes $ en les confacrant par les chefs-d’œuvre de leur art. On a tâche de furprendre le peuple de toutes manie- res: les Poëtes dans leurs écrits, le théatre dans fes repréfentations , les Sculpteurs dans leurs flatues, ët les Peintres dans leurs tableaux ; ils y ont tous COncOurU. se 16°. Une fixieme fource des fables eff la pluralité ou l'unité des noms. La pluralité desnoms étant fort com- mune parmi les Orientaux, on a partagé entre plu- fieurs les aétions &c les voyages d’un feul : de-là vient ce nombre prodigieux de Jupiters , de Mercures,éc On a quelquefois fait tout le contraire ; & quandileft arrivé que plufieurs perfonnes ont porté le même nom, on a attribué à un feul ce qui-devoit être par- tagé entre plufieurs : telle eft l’hiftoire de Jupiter fils de Saturne , dans laquelle on a raflemblé les avan- tures dé divers rois de Crete qui ont porté ce nom; auf commun dans ce pays-là, que l’a été celui de Ptolemée en Egypte. . 7°. Une 7° fource des fables fut l’établiffement des colonies, & l'invention des arts: Les étrangers égyptiens ou phéniciens qui aborderent en Grece, en policerent les habitans, leur firent part de leurs coûtumes, de leurs lois , de leurs mamieres de s’ha- biller & de fe-nourrir : on regarda ces hommes com- ine des dieux , & on leur offrit dés facrifices : tels furent fans doute les premiers diéux des Grecs ; telle eft, par exemple, l’origine de la fx6/e de Promethée; de même, parce qu'Apollon cultivoit la Mufique & la Medecine, il fut nommé le dieu de ces arts : Mer- cure fut celui de l’Eloquence, Cérès la déefle du blé, Minerve celle des manufaétures de laine ; ainf des autres, A Luc LA 8°. Une 8° fource des fables doit fa naïffance aux cérémonies de la religion. Les prêtres change- rent un culte férile en un autre qui fut lucratif, par “mille hiftoires fabuleufes qu’ils inventerent; on n’a jamais été trop {crupuleux fur cet article. On décou- yroit tous les jours quelque nouvelle divinité, à la- quelle 1l falloit élever de nouveaux autels; de-1à ce fyfième monfirueux que nôus offre la théologie payenne. Ajoûtez ici la manie des grands d’avoir des dieux pour ancètres ; il falloit trouver à chacun, fui- -vant fa condition, un dieu pour premiere tige. de fa race, & vraiflemblablement on ne manquoit pas alors de généalogiftes , auffi complaifans aw’ils Le ont aujourd’hüi: Nous ne donnerons point pourune fource des fe bles, l'abus que les Poëtes ont pù faire de l’ancien Teftament, comme tant de gens pleins de favoir fe le font perfuadés; les-Juifs étoient une natiomtrop méprifée defes voifins, & trop peu connue des peu- ples éloignés, d’ailleurs trop jaloufe de fa loi & de Les cérémonies, qu’elle cachoït aux étrangers, pour qu'il y aitiquelque rapport entre les héros de la bible & ceux de la. fable, | . 9°. Mais une fource réellement féconde des fabzes payennes, c’eft l'ignorance de l'Hiftoire & de la Chro- nolopie. Comme on ne commença que fort tard, fur- | tout dans 14 Grèce, à avoir l’ufage de écriture si 1e pafla plufeurs fiecles pendant lefquels le fonve- ni des évenemens remarquables ne fut -confer- vé que 22 21 ® EE qu e juiqu’à trois ou quatre générations, On fe-ttouvoit dans le labyrinthe de l’liftoire des dieux;voù l'on ! fencontroit toûjours Jupiter, Satutne, le Ciel-&c la | Tome VI, Par tradition. Après qu'on avoit temonté F AB 34 Terre, _Cepeñdant coïnine lés Grecs réplis de va: mie, ainf que les autres peuples, vouloient paffet Pour anciens, ils fe forgerent une chronique fabu- leufe de rois imaginaires, de dieux, & de héros, qui ne furentjamais. [ls transférerent dans léur hiftoire La plüpart des évenemens de celle d'Egypte ; & lor£ qu'ils voulurent temonter plus haut, ils te firent qué fubftituer des fables à la vérité. Ils étoient dé vrais enfans , comme le reprochoit à Solon un prêtre d'Ez sypte ; lorfqu'il s’agifloit de parler des tems éloi- gnés ; ils fe perfuadoient que leurs colonies ayOient peuplé tous les autres pays, & ils tiroient leurs noms de ceux de leurs héros. 10°. L'ignorance de la Phyfiqué eft unie ro° {our ce de quantité de fables payennes, On vint à rappor- ter à des caufes animées; des effets dont On ignoroit les principes; on prit les vents pour des divinités fougueufes , qui caufent tant dé ravages fur terre & fur mer. Falloit-il parler de arc-en-ciel dont on ignoO- roit la nature,onen fit une divinité. Chez les Payens, Ce n'eff pas la vapeur qui produit le tonnerre C’efl Jupiter armé pour effrayer la rerre ; Un orage terrible aux yeux des matelots, C’eft Neptune en courroux qui gourmande les flotsi Echo n'eff pas un Jon qui dans l'air reteri]e , C'eff une nymphe en pleurs qui fe plainrde Nerciffe, Ainfi furent formées plufieurs divinités Phyfiques , &t tant de fables aftronomiques , qui eurent cours dans le monde. 11°. L’ignorance des langues ; fur-tont de ta phéni- cienne, doit être fegardée comme une onziemé fource des plus fécondes d’une infinité de fables du Paganifme. Il eft für que les colonies forties de Phé- nicie , alléreñt peupler plufieurs contrées de la Gres ce ; & comme la langue phénicienne a plufieurs mots équivoques, les Grecs les expliquerent felon le fens qui étoit le plus de leur génie : par exemple, le mot Tlpha dans la langue phénicienne, fignifie également UT taureall, Où u7 navire, Les Grecs amateurs du merveilleux , au lieu de dire qu'Eutope avoit été portée füurun vaifleau , publierent que J upiter chan- gé en taureau l’avoit enlevée, Dn mot #07 qui veut dire vice ; ils firent le dieu Momus cenfeur des dé fauts des hommes; &c fans citer d’autres exemples, il fufft de renvoyer le leteur aux Ouvrages de Bo: chart fur cette matiere, ; 12°. Non-feulement les équivoques dés langues orientales ont donné lien à quantité de fables Payer res ; mais même les mots équivoqués de la langue greque en ont produit un grand noïnbre : ainfi Vé- nus eft fortie de lécume de la met, parce que Aphro- dite qui étoit le nom qu’ils donnoïent à cette déeffe : fignifoit l'écurie. Ainfi le premier temple de Delphes avoit été confifuit par le fecotirs des ailes d’abeil: les ,; qu'Apollon avoit fait venit des pays hyper boréens ; parce que Pteras dünt!le nom veut dire une aile de plume, en avoit été Parchite@e, 13°, On a prouvé par des exemples incontefta: bles, que là plûüpärt des fables des Grecs venoient d'Egypte &c de Phénicie. Les Grecs en apprenant là religion des Égyptiens, changerent & les noms & lés cérémonies des dieux dé l'Orient, pour faire croire qu'ils étoient nés dans leur pays ; comme nous le voyons dans l’exeriple d'Ifis,& dans une infinité “d’autres. Le culte de Bacchus füt formé fur celué ‘d’'Ofiris: Diodore le dit expréflénient, Une régle pé- nérale qui peut fervir à jugeride l’origine d'un grand nombre de fables du'Paganifine.; c’eft de voir {eule= ment les: noms des chofes, pour décider {s'ils font phéniciens, grecs, ou latins; l’ôn découvtira par ce feul'examen , le pays natal, où le tranfport de Quäris tité de fables. : | ES En quatorzieme lieu; il ne-faut point douter quis X x 1} l'ignorance. de la navigation n'ait fait naître une infi- nité de fables. On ne parla, par exemple, de l’Océan que comme d’un pays couvert de ténebres, oùlefo- | Jeil alloit fe coucher tous les foirs avec beaucoup de fracas, dans le palais de Thétis. On ne parla des ro- | chers qui-compofent'le détroit de Scylla & de Cha- | rybde, que comme de deux monftres qui engloutif- {oient les vaifleaux. Si quelawun alloit dans le golfe de Perfe , on publioit qu'il étoit allé jufqu’au fond de l'Orient, & au pays où l'aurore ouvre la barriere du jour; & parce que Perfée eut la hardiefle de fortir du détroit de Gibraltar pour Îe rendre aux îles Or- cades , on lui donna le cheval Pégale , avec l’équi- age de Pluton 8 de Mercure, comme s’il avoit été impoñhble de faite un f long voyage fans quelque fe- cours furnaturel. Concluons que l’ignorance des an- ciens peuples , foit dans l’Hiftoire, foit dans la Chro- nologie, foit dans Les Langues, foit dans la Phyfique, {oit dans la Géographie, foit dans la Navigation, a fait germer des fables innombrables. Quinziemement , il eft encore vraifflemblable que plufeurs fables tirent leur fource du prétendu com- merce des dieux, imaginé à deflein de fauver l’hon- neur des dames qui avoient eû des foibleffes pour leurs amans ; on appelloit au fecouts de leur répu- tation quelque divinité favorable ; c’étoit un dieu métamorphofé qui avoit triomphé de l’infenfibilité de la belle, La fable de Rhéa Sylvia mere de Remus & de Romulus , en eft une preuve bien connue. Amulius fon oncle, armé de toutes pieces, & fous la figure de Mars, entra dans fa cellule ; & Numitor fit courir le bruit que les deux enfans qu’elle mit au monde , ayoient pourpere le dieu de la guerre. Sou- vent même les prêtres étant amoureux de quelque femme , lui annonçoient qu’elle étoit aimée du dieu qu'ils fervoient : à cette nouvelle, elle fe préparoit À aller coucher dans le temple du dieu, & les parens l'y conduifoient en cérémonie. Si nous en croyons Hérodote (iv. I.ch. xvüj.), il y avoit une-dame de Babylone , de celles que Jupiter Belus avoit fait choïfir par fon premier pontife , qui ne manquoit jamais de fe rendre toutes les nuits dans fon tem- ple: de-là ce grand nombre de fils qu'on donne aux dieux. Voyez FILS DES DIEUx. Enfin, pour ne rien laïfer à defirer, s’il eft poffi- ble , fur les fources des fables, on doit ajoûter ici que prefque toutes celles qui fe trouvent dans les métamorphofes d'Ovide, d'Hyginus, & d’Antonius Liberalis, ne font fondées que fur des manieres de s'exprimer figurées & métaphoriques: ce font ordi- naïrement de véritables faits, auxquels on a ajoûté quelque circonftance funaturelle pour les parer. La cruauté de Lycaon qui condamnoit à mort les étrangers, l’a fait métamorphofer en loup. La flu- pidité de Mydas, ou peut-être l'excellence de fon ouie , lui a fait donner des oreilles d'âne. Cérès avoit aimé Jafon, parce qu'il avoit perfeétionné l’agriculture dont cette déefle, fuivant l'imagination des Poëtes , avoit appris l’ufage à la Grece. Dans d’autres occafñons, les:métamorphofes qu’on attri- bue à Jupiter & aux autres dieux, étoient des fym- boles qui marquoient les moyens, que les princes qui portoient ces noms, ayoient mis En œuvre pour dite leurs maïtrefles. Ainf l'or dont fe fervit Pre- tus pour tromper Dana, fit dire qu’il. s’éroit chan- gé en pluie d’or ; ou bien, comme le remarque Euf- tathius, ces prétendues métamorphofes n'étoient que des médailles d’or, fur lefquelles on les voyoit gravées, 8 que les amans donnoient à leurs mai- | trefles ; préfent pluspropre par la rareté du métal & la fineffe de la gravuré à rendre fenfbles les belles, que de véritables métamorphofes. Tel eft le fonde- ment des fables dont on vient de parler; & fi l’on aven trouve pas le dénoïemént dans les fources 4 ? quon vient d'indiquer, on les découvrira dans les métaphores. —…. Ce féroit préfentement Le lieu de difcuter en quel tems ont commencé les fables : mais il eft impoñfble d’en fixer l’époque. Il fuffit de favoir que nous les trouvons déja établies dans lesécritsiles plus anciens qui nous reftent de l'antiquité profane ; il fufit en- core de ne pas ignorer que les premiers berceaux des fables font l'Egypte & la Phénicie, d’où elles fe répandirent avec les colonies en Occident , &c fur- tout dans la Grece, où elles trouverent un fol pro- pre à leur multiplication. Enfuite, de la Grece elles pafferent en Italie, &c dans les autres contrées voi- fines. Il eft certain qu’en fuivant un peu l’ancienne tradition, on découvre aifément quetc’eft-là le che- min de l’idolatrie & des fables, qui ont totjours mar- ché de compagnie. Qu'on ne dife donc point qu'Hé- fiode & Homere en font les inventeurs, ils men par- lent pas eux-mêmes fur ce ton ; elles exiftoient avant leur naïffance dans les ouvrages des poëtes qui les précéderent ; ils ne firent que les embellir. Mais il faut convenir que le fiecle le plus fécond en fables & en héroïifme, a été celui de la guerre de Troye. On fait que cette célebre ville fut prife deux fois ; la premiere par Hercule, l’an du monde 2760; & la feconde , une quarantaine d'années après, par l’armée des Grecs, fous la conduite d’Agamemnon, Au tems de la premiere prife, on vit paroître T'héla- mon, Hercule, Théfée , Jafon, Orphée, Caftor, Pollux, & tous les autres héros de la toifon d’or, A la feconde prife parurent leurs fils ou leurs petits- fils, Agamemnon, Ménélaüs, Achille, Diomede , Ajax, Heëtor, Enée, &c, Environ le même tems fe fit la guerre de Thebes, où brillerent Adraïîte, Œdi- pe, Ethéocle, Polinice, Capanée , &c tant d’autres héros, fujets éternels des poëmes épiques & tragi- ques. Auf les théatres de la Grece ont-ils retentf mille fois de ces noms illuftres; 8 depuis ce tems tous les théatres du monde ont cru devoir les faire reparoître fur la fcene. | Voilà pourquoi la connoïffance , du moins une connoïflance fuperficielle de la fable, eft fi générale Nos fpectacles, nos pieceslyriques & dramatiques, & nos poéfies en tout genre, y font de perpétuellesallu- fions ; les eftampes , les peintures, les ftatues qui dé- corent nos cabinets, nos galeriés , nos plafonds, nos jardins, font prefque toûjours tirées de la fable: en- fin elle eft d’un fi grand ufage dans tous nos écrits nos romans, nos brochures, 8 même dans nos dif cours ordinaires, qu'il n’eft pas poffble de l’ignorer à un certain point , fans avoir à rougir de ce manque d'éducation; mais de porter fa curiofité jufqu’à ten ter de percer les divers fens, ou les myfteres de la fable, entendre les différens fyftèmes de la théologie, connoître les cultes des divinités duPaganifme, c’eft une fcience refervée pour un petit nombre de fa- vans; & cette fcience qui fait une partie très-vafte des Belles-Lettres, & qui eft abfolument néceffaire pour avoir l'intelligence des monumens de Panti- quité, eft ce qu’on nomme /4 Mythologie, Foy. Mv= THOLOGIE. Art, de M.le Chevalier DE JAUCOURT, FABLE apologue, ( Belles. Lerrres.) infrudion dé- ifée fous l’alléporie d’une aétion. C’eft ainfi que la Mothe l’a défime: il ajoûte ; c'e} un perit poème épique, qui ne Le cede au grand que par l'étendue. Idée du P, le Boflu, qui devient chimérique dès qu'on la preffe. Les favans font remonter l’origine de [a fable, à l'invention des caraéteres fymboliques & du ftyle f- -guré, c’eft-à-dire à invention de l’allégorie dont la fable eft une efpece. Mais l’allégorie ainfi réduite à ‘une action fimple, à une moralité précife , eft com- munément attribuée à Ffope , comme à fon premier. inventeur, Quelques-uns lattribuent à Héfiode êc'a F AB Archiloque; d’autres prétendent que les f24/es cons nues fous lé nom d'Efope, ont été compofées par Socrate, Ces opinions à difcuter font heureufement plus curieufes qu’utiles. Qu'importe après tout pour le progrès d’un art, que fon inventeur ait eu nom ÆEfope, Héfiode, Archiloque ; &cc. l'auteur n’eft pour nous qu'un mot; & Pope a très-bien obfervé que cette exiftence ideale qui divife en feétes les vivans fur les qualités perfonhelles des morts, ferréduità quatre ou cinqlettres. On a fait confifter lartifice de la fable, Xciter les hommes au tribunal des animaux. C’eftcomme fi on prétendoit en général pe la comédie citât les fpec- tateurs au tribunal de fes perfünnages, les hypocri- tes au tribunal de Tartufe, les avares au tribunal d’Arpagon, 6. Dans l’apologne , es animaux [one quelquefois les préceptéurs des hommes , Lafontaine l’a dit : mais ce n’eft que dans le cas où ils font repré- fentés meilleurs & plus fages que nous. NAUT Dans le difcours que la Mothe a mis à la tête de fes fables, il démêle en philofophe l’artifice caché dans ce genre de fiétion : il en a bien vû le principe &t la fin; les moyens feuls lui ont échappé, Il traite, en bon critique, de la juftefle & de Pumité de l’allé- gorie, de la vraiflemblance des mœurs &c des carac- teres, du choix de la moralité & des images qui l’en- veloppent: mais toutes ces qualités réunies ne font qu'une fable réguliere ; & un poëme qui n’eft que ré- gulier , eft bien loin d’être un bon poëme. C’eit peu que dans la f2b/e une vérité utile & peu commune, fe dépuife fous le voile d’une allégorie ingémeufe; que cette allégorie, par la juftefle & l’u- nité de fes rapports, conduife direétement au fens moral qu’elle fe propofe ; que Îés perfonnagées qu’on yemploye,;rempliffent l’idée qu’on a d'eux. La Mothe a obfervé toutes ces regles dans quelques-unes de fes fables ; il reproche, avec raifon, à Lafontaine de les avoir négligées dans quelques-unes des fiennes. D’où vient donc que les plus défeétueufes de Lafontaine ont un charme & un intérêt, que n’ont pas les plus tégulieres de la Mothe ? _ Ce charme & cet intérêt prennent leur fource non-feulement dans le tour naturel & facile des vers, dans le coloris de l’imagination, dañs le con- trafte &c la vérité des caraéteres , dans la jufteflé & la précifion du dialogue, dans la variété, la force, &r la rapidité des peintures , en un mot dans le génie poétique, don précieux & rare, auquel tout l'excel- lent efprit de la Mothe n’a jamais pü fuppléer ; mais encore dans la naïveté du récit & du ftyle ; carac= tere dominant du génie de Lafontaine, On a dit : Le flyle de la fable dois être fimple , fami- lier, riant, gracieux , naturel ; € méme naïf. I falloit dire, 6 fur-tout naif. of: Effayons de rendre fenfble l’idée que nous atta- chons à ce mot zaiveé, qu’on a fi fouvent employé fans l’entendre, | "s' La Mothe diftingue le naïf du naturel; mais il fait confifter le naïf dans l’expreffion fidele, & non reflé: chie , de ce qu’on fent ; &c d’après cette idée vague, il appelle naïf le 42”il mourr du vieil Horace. Il nous femble qu’il faut aller plus loin , pour trouver Le vrai carattere de naïveté qui eft effentiel &r propre à la Piblé, à ed NT à À La,vérité de caraétete à plufieurs nuances qui la diftimguent d’élle-même : où elle obferve les ména- gemens qu'on fe doit & qu'on doit aux autres ; & dn l'appelle frcérisé ; ouelle franchit dès qu’onla pref, la barrière des égards, & on lanomme frarchife ;iou- elle n'attend pas même pour fe montrer à découvert; que les ciréonftances l’y engagent 8e que les décer:: ces l'y autorifent, &elle devient imprudence 5 ia: difcrétion , témérité , fuivant qu'elle eft plusrow moins offenfante où dangereufes Si elle découle de: FAB 345 lame par un penchant naturel 8 non refléchi , elle et fimplicité ; f la fimplicité prend fa fource dans cette pureté de mœurs qui n’a rienà diffimuler ni à féindre , elle eft candeur ; fi à la candetir fe'joint une innocence peu éclairée, qui croit que tout ce quiefl naturel eft bien, c’eft ingénuité ; lingénuité fe ca- rattérife par des traits qu’on auroit en foi-même in- térêt à dépuifer, & qui nous donnent quelque avan- tage fur celui auquel ils échappent, on la omme Raiveté y Ou ingériuité naive, Ainfi La fimplicité ingé= nue eft un caraétere abfolu 8 indépendant dés airs conftancés ; au lieu‘que la naïveté eff relative. Hors les puces qni m'ont La nu inquiété, ne feroit dans Agnès qu’un trait de fimplicité , f elle-parloït à fes compagnes, Jamais je né m'ennuie, ne féroit qu'inpénu, fr elle ne faifoit pas cet aÿeu À un home qui dôit s’en offenfer. Il en éft de même dé L'argent qu’en ont reçu notre Alain & Georgette, êc. Par conféquent cé qui eft compatible avec le catac- tere naïf dans tel tems, dans tel lieu, dans tel état ; ne le feroit pas dans tel autre, Georgette eft naïve autrement qu'Apnés; Agnès autrement que ne doit l'être une jeune fille élevée à la cour, ou dans le monde : celle-ci peut dire & penfér ingénuement des chofes que l’éducation lui a rendues familières $ & qui paroïtroient refléchies & recherchées dans la premiere, Cela pofé , voyons ce qui conftitué la naiveté dans la fxble, & l'effet qu'elle y produit. LaMothe à obfervé que le fuccès conftant & unis verfelde la fable, venoït de ce que Pallégorie y mé- nageoit & flatoit l’amour-propre : rien n’eft plus vrai, ni mieux fenti ; mais cet àrt de ménager & de flater l’as mou propre , au lieu de le bleffer, n’eft autre chofe que l’éloquence naïve, Péloquence d’Efope chez les anciens, &c de Lafontaïne chez les modérnes: De toutes les prétentions des hommes, la plus générale & la plus décidée regardé la fagefe & les mœurs : tien n'eft donc plus capable de lés indifpos fer, que des préceptes de morale & de fageflé prés | fentés diretement. Nous ne parlérons point de la fatyre; le fuccès en eft affüré: f elle en bleffé un % elle en flate mille, Nous parlons d’ane philofophie févere, mais honnête , fans amertume & fans pots fon, qui n’infulte perfonne , & qui s’adrefle à tous : c’eft précifément de celle-là qu’on s’offénfe. Les Poë- tes l'ont dépuifée au théatre & dans l'épopée, fous Pallégorie d'une aétion , & ce ménagement l’a fait recevoir fans révolte : mais touté vérité ne peut pas avoir au théatre fon tableau particulier ; chaque pie- ce ne peut aboutir qu'à uné moralité principale ; & les traits accefloirés répandus dans le cours de l’ac- tion, pañlent trop rapidement pour ne pas s’effacer Pun l’autre : l'intérêt même les abforbe, & ne nous laïffe pas la liberté d'y refléchir, D'ailleurs Pinftru- étion théatrale exige uit appareil qui n’eft ni dé tous les eux ni de tous lestems ; c’éft un miroir publié qu'on n'éleve qu'à grands frais & à force dé machi ñes. [er eft 4-peu-près de même de l'épopée. On a donc VOulunous donner dés glaces portatives auf fideles: & plus commodes, où chaque vérité folée _ eût fon image diftin@e : GE delà l'invention des pes tits poëmes allégoriques. 4 Dans ces tableaux, of pouvoit nous peindre 4! nos yeux {ous trois fymboles différens ; où fous les traits de nos femblablés, comme dans la fable du Sa vétier 8 dû Financier, däns célle du Berger &du Roi, dans celle du Meunier & fon fils, &c: Où fous 16 non des êtres furnaturels 87 allégoriques, comme . dans la ÿ#b/e d’Apollon & Borée; dans cellé dé ja 346 F A 5 Difcorde, dans les contes orientaux, & dans nos contes de fées; ou fous la figure des. animaux & des êtres matériels, que le poëte fait agir & parler à notre mamere : c’eft le genre le plus étendu, & peut-être le feul vrai genre de la fable , par la raifon même qu'il eft le plus dépourvû de vraiffemblance à notre égard. Il s’agit de ménager la répugnance que chacun fent à être corrigé par fon égal. On s’apprivoife aux leçons des morts, parce qu’on n’a rien à. démêler avec eux, & qu'ils ne fe prévaudront jamais de l’a- vantage qu'on leur donne : on fe plie même aux maximes outrées des fanatiques & des enthoufiaftes, parce que l'imagination étonnée ou éblouie en fait une efpece d'hommes à part. Mais le fage qui vit fimplement & familierement avec nous, & qui fans chaleur & fans violence ne nous parle que le lan- gage de la vérité & de la vertu, nous laifle toutes nos prétentions à l'égalité : c’eft donc à lui à nous perfuaderparune illufionpaffagere qu'il eft, non pas au-deffus de nous (il y auroit de l’imprudence à le tenter), mais au contraire fi fort au-deflous, qu’on ne daigne pas même fe piquer d’émulation à fon égard, & qu’on reçoive les vérités qui fémblent lui échapper, comme autant de traits de naïveté fans conféquence. ar | Si cette obférvation eft fondée, voilà le preftige de la fable tendu fenfible, & l’art réduit à un point déterminé. Or nous allons voir que tout ce qui con- court à nous perfuader la fimplicité & la crédubté du poëte, rend la fable plus intéreflante ; au lieu que tout ce qui nous fait douter de la bonne-foi de fon récit, en affoiblit l'intérêt. Quintilien penfoit que les fables ayoient furtout du pouvoir fur les efprits bruts & ignorans ; il par- loit fans doute des fables où la vérité fe cache fous une enveloppe grofliere : mais le goût, le fentiment & les graces que Lafontaine y a répandus, en ont fait la nourriture &c les délices des efprits les plus délicats, les plus cultivés, & les plus profonds. Or l'intérêt qu’ils y prennent , n’eft certainement pas le vain_plaïfr d’en pénétrer le fens. La beauté de cette allégorie eft d’être fimple &c tranfparente, & il n’y a guere quelles fots qui puiflent s’applaudir d’en avoir percé le voile. | Le mérite de prévoir la moralité que la Mothe veut w’on ménage aux leéteurs, parmi lefquels il compte fs fages eux-mêmes, fe réduit donc à bien peu de chofe : aufli Lafontaine, à l'exemple des aneïens, ne s’eft-1l puere mis en peine de la donner à devi- ner ; il l’a placée tantôt au commencement , tantôt à la fin de la fable ; ce qui ne lui auroit pas été indif- férent , s’il eût regardé la fable comme une énigme. Quelle eft donc l’efpece d'illufion qui rend la fa- ble fi féduifante? On croit entendre un homme affez fimple & aflez crédule, pour repéter férieufement les contes puérils qu’on lui a faits; &c c’eft dans cet air de bonne - foi que confifte la naïveté du récit & du ftyle. On reconnoît la bonne-foi d’un hiftorien, à’at- tention qu'il a de faifir & de marquer les circonftan- ces, aux réflexions qu'il y mêle, à l’éloquence qu'il employe à exprimer ce qu'il fent ; c’eft-là fur-tout ce qui met Lafontaine au-deflus de fes modeles. Efo- pe raconte fimplement, mais en peu de mots; il fem- ble repéter fidelement ce qu’on lui a dit: Phedre Y met plus de délicatefle & d'élégance , : mais auff moins de vérité. On croiroit en effet que rien ne dût mieux carattérifer lanaiveté , qu’un ftyle dénué d’or- nemens ;: cependant Lafontaine a répandu dans le fien tous, les thréfors de laPoëéfie , & il n’en eft que plus naïf. Ces couleurs fi variées & fi brillantes {ont elles-mêmes les traits dont la nature fe peint dans les Écrits de ce poëte, avecune fimplicité merveilleufe, Ce preftige de l’art paroït d’abord inconcevable : mais dès qu'on remonte à la caufe, on n’eft plus fur- pris de l'effet. Non-feulement Lafontaine a oùi dire ce qu’il +a- conte, mais 1l l’a vù; 1 croit le voir encore. Cen’eft pas un poëte qui imagine , ce n’eft pas un conteur qui plaifante; c’eft un témoin préfent à l’adion, & qui veut vous y rendre préfent vous-même. Son érudi- tion, fon éloquence , fa philofophie, fa politique, tout ce qu'il a d'imagination, de mémoire, & de fentiment , 1l met tout en œuvre de la meilleure foi du monde pour vous perfuader; & ce font tous ces efforts, c’eft le férieux avec lequel il mêle les plus grandes chofes avec les plus petites, c’eft l'impor- tance qu'il attache à des jeux d’enfans, c’efl l’inté- rêt qu'il prend pour un lapin & une belette, qui font qu’on eft tenté de s’écrier à chaque inftant , Ze or homme ! On le difoit de lui dans la fociété, for ca- raclere n'a fait que paffer dans fes fables. C’eft du fond de ce caraëtere que font émanés ces touts fi natu- rels, ces expreffions fi naïves, ces images fi fideles ; 6c quand la Mothe a dit, du fond de fa cervelle un vrais naïf s’'arrache, ce n’eft certainement pas le travail de Lafontaine qu'il a peint. S'il raconte la guerre des vautours, fon génie s’é- leve. I plut du [ang ; cette image lui paroïît encore foible, Il ajoûte pour exprimer la dépopulation : Et Jur Jon roc Promethée efpéra De voir bien-10t une fin à [à peine, La querelle de deux coqs pour une poule, lui rap4 pelle ce que Pamour a produit de plus funefte : Amour tu perdis Troye. Deux chevres fe rencontrent fur un pont trop étroit pour y pañler enfemble ; aucune des deux ne veut re culer : 1] s'imagine voir Avec Louis le Grand, Philippe quatre qui s'avance Dans Pile de la Conférence. Un renard eft entré la nuit dans un poulailler : Les marques de [a cruauté Parurent avec l'aube, On vit un étalage , De corps Janglans 6 de carnage; Peu s’en fallur que le foleil Ne rebrouffär d'horreur vers Le manoir liquide, &cci La Mothe a fait à notre avis une étrange méprife ; en employant à tout propos, pour avoir l’air natu= _rel, des expreffions populaires & proverbiales : tan+ tôt c’eft Morphée qui fait /isiere de pavots ; tantôt c’eft la Lune qui eft empéchée par les charmes d’une magi cienne ; 1c1 le lynx attendant le gibier, prépare {es dents 4 l’ouvrage ; là le jeune Achille eff fors bien mo riginé par Chiron. La Mothe avoit dit lui-même, mais prenons garde a la baffeffe, trop voifine du fami= lier. Qu’étoit-ce donc à fon avis que faire liriere de. pavots ? Lafontaine a toûjouts Le ftyle de la chofe: Un mal qui répand la terreur , Mal que le ciel en [a fureur Inventa pour punir les crimes de La terre. é L) e e e Les rourterelles fe fuyoient : Plus d'amour , partant plus de joie. Ce n’eft jamais la qualité des perfonnages qui le décide. Jupiter n’eft qu’un homme dans les chofes familieres ; le moucheron eft un héros lorfqu’il com bat-le lion: rien de plus philofophique 8 en même tems rien de plus naïf, que ces contraftes! Lafon- taine eft peut-être celui de tous les Poëtes qui pale d’un, extrème à l’autre avec le plus de juftefle & de _ rapidité, La Mothe a pris ces paffages pour de la gai- FAB té philofophique , & il les regarde comme uñe four-\ | “ce du riant: mais Lafontaine n’a pas deflein qu’on _ imagine qu'il s’égaye à rapprocher le grand du pe- tit; il veut que l’on penfe, au contraire, quèile fé- : : ‘rieux qu'il met aux petites chofes , les lui fait mêler - &c confondre de bonne -foi avec les grandes; &il -réufhit en effet à produire cette 1llufon. Par - [à fon _ ftyle ne fe foûtient jamais , ni dans le familier, ni dans l’héroïque. Si fes réflexions & fes peintures Vemportent vers l’un , fes fujets le ramenent à l’autre, & toüjours fi à-propos, que le leéteur n’a pas le tems de defirer qu'il prenne l’eflor, ou qu'il fe ‘modere. En li, chaque idée réveille foudain l’ima- ge & le fentiment qui lui eft propre ; on le voit dans es peintures, dans fon dialogue ,. dans fes haran- ues. Qu'on life, pour. fes peintures, la fable d’'A- pollon & de Borée, celle du Chêne & du Rofeau; pour le dialogue , celle de Agneau & du Loup, celle des compagnons d'Ulyffe ; pour les monolo- gues & les harangues, celle du Loup &c des Bergers, celle du Berger & du Roi, celle de l'Homme & de la "Couleuvre : modeles à-la-fois de philofophie & de poëfie. On a dit fouvent que l’une nuifoit à l’autre; qu'on nous cite, ou parmi Les anciens, ou parmi les modernes, quelque poëte plus riant, plus fécond, plus varié, plus gracieux & plus fublime, quelque philofophe plus profond & plus fage. Mais ni fa philofophie, ni fa poëfie ne nuifent à fa naïveté: au contraire, plus il met de l’une & de l’autre dans fes récits, dans fes réflexions, dans fes peintures ; plus il femble perfnadé,pénétré de ce quil raconte, & plus par conféquent 1l nous paroît fim- ple & crédule. ; Le premier foin du fabulifte doit donc être de pa- xoître perfuadé ; le fecond , de rendre fa perfuafñon amufante ; le troifieme, de rendre cet amufement utile, _ Pueris dant fruflula blandi | Doëtores , elermenta velint ut difcere prima, Horat. Nous venons de voir de quel artifice Lafontaine s'eft fervi pour paroître perfuadeé ; & nous n’avons plus que quelques réflexions à ajoûter fur ce qui dé- truit ou favorie cette efpece d’illufion. Tous les caraéteres d’efprit fe concilient avec la naiveté, hors la finefle & l’affe&tation. D'où vient que Janot Lapin, Robin Mouton, Carpillon Fretin , da Gent-Trore-Meru , &tc. ont tant de grace &c de naturel? d’où vient que don Jugement, dame Mé- amoire , & demoifelle Imagination , quoique très-bien carattérifés , font fi déplacés dans la fable ? Ceux-là font du bon homme ; ceux - ci de l’homme d’efprit. On peut fuppofer tel pays ou tel fiecle , dans le- quel ces figures fe concilieroïient avec la naïveté : par exemple, f. on avoit élevé des autels au Juge- ment, à l’Imagination, à la Mémoire, comme à la Paix, à la Sageffe , à la Juftice, &c. les attributs de ces divinités feroïent des idées populaires, & il n’y auroit aucune finefle , aucune affeétation à dire, /e dieu Jugement , la déeffe Mémoire , la nymphe Imagina- sion ; mais le premier qui s’avife de réalifer, de ca- rattérifer ces abftraétions par des épithetes recher- chées, paroît trop fin pour être naïf, Qu'on reflé- chifle à ces dénominations, don, dame, demoifelle : ileft certain que la premiere peint la lenteur, la gra- vité , le recueillement , la méditation, qui caractéri- fent le Jugement: que la feconde exprime la pom- pe, le fafte & l’orgueil, qu’aime à étaler la Mémoire : que la troifieme réunit en un feul mot la vivacité, la legereté, le coloris, les graces, & fi l’on veut le caprice & les écarts de imagination. Or peut - on fe perfuader que ce foit un homme naïf qui le pre- mier ait Vü & fenti ces rapports & ces nuances ? Si Lafontaine employe des perfonnages allégori- FAB ‘347 ques, ce n'eft pas lui qui les inventé tôn eft déjà fa. miliarifé avec eux. La fortune, la môrt, le tems, tout.cela eft rech. Siquelquefois ilen'introduit de fa façon, c'eft toûjours en homme. fimple > c’eft que-fc- que-non , frere de la Difcorde; c’eft sien-C-mien , fon pere, &c. La Mothe, au contraire, net toute la finefle qu'il peut à perlonnifier des êtres moraux & métaphyfs |. ques: Perfonnifions, dit-il, les versus @ Les vices 2 arinons , felon nos befoins, tons les êtres ; & d’après cette licence, il introduit la vertu, le talent ,: & la réputation, pour faire faire à celle-ci un jeu de mots à la fin de la fab, C’eft encore pis, lor{que l’igros rance groffe d'enfant, accouche d'admirarion , de des noifelle opinion , & qu'on fair verir l’orgueil 6 La pareffe pour nommer l'exfars, qu'ils appellent la ve. rité, La Mothe a beau.dire qu'il fe trace un nouveau chemin ; ce chemin l’éloigne du but. | : Encore une fois le poëte doit jouer dans la fz4/e le rôle d’un homme fimple & crédule ; & celui qua perfonnifie des abftra@tions métaphyfiques avec tant de fubtilité , n’eft pas le même qui nous dit férieufe ment que Jean Lapin plaidant contre darne Belette, allègua la contume & l’u age, | Mais comme la crédulité du poëte n’eftjamais plus faive, ni par conféquent plus amufante que dans des fujets dépourvûs de vraiflemblance À notre égard, ces fujets vont beaucoup plus droit au but de l’a- pologue, que ceux qui font naturels &: dans l'or dre des poflibles. La Mothe après avoir dit, Nous pouvons ; S'il nous plais, donner pour vé. _ ritäbles Les chimeres des tems paflès , ajoûte : Mais quoi? des vérités modernes Ne pouvons-nous nfer auffi dans nos befoins à Qui peus le plus , ne peutil pas le moins ? Ce raifonnement du plus at moins n’eft pas conces vable dans un homme qui avoit lefprit jufte , & qui avoit long-tems refléchi fur la nature de l’apo- logue, La fable des deux Amis, le Payfan du Danu. be, Philemon 8 Baucis, ont leur charme & leur in- térêt particulier : mais qu’on y prenne garde, ce n’eft là ni le charme ni l'intérêt de l’apologue. Ce n’eft point ce doux foûrire, cette complaifance intérieu- re qu'excite en nous Janot Lapin, la mouche du cos che , ec. Dans les premieres, la fimplicité du poëte n'eft qu'ingénue & n’a rien de ridicule: dans les der- nieres, elle eft naïve & nous amufe à fes dépens. C’eft ce qui nous a fait avancer au commencement de cet article, que les fz2/es, où les animaux , les plantes , les êtres inanimés parlent & agiflent à no- tre maniere , font peut-être les feules qui méritent le nom de fables. Ce n’eft pas que dans ces fujets même il ny ait une forte de vraiflemblance à garder, mais elle eft relative au poëte. Son caraétere de naïveté une fois établi, nous devons trouver poflible qu’il ajoûte foi à ce qu'il raconte ; &z de-là vient la regle de fuivre les mœurs ou réelles où fuppofées. Son deffein n’eit pas de nous perfuader que le lion, l'âne & le renard ont parlé, mais d’en paroïître perfuadé lui-même; &t pour cela il faut qu'il obferve les convenances, c’eft-à-dire qu'il fafle parler & agit le lion, l’Âne & le renard, chacun fivant le caraétere & les intérêts qu'il eft fuppofé leur attribuer : ainfi la regle de fui= vre les mœurs dans la fable, eft une fuite de ce prin= cipe , que tout y doit concourir à nous perfuader la crédulité du poëte. Mais il faut que cette crédulité foit amufante , & c’eft encore un des points où la Mothe s’eft trompé; on voit que dans fes fables il vife à être plaïfant, & rien nef f contraireau génie de çé poëme : FAB L/n homme avoir perdu fa fenre à Îl veut avoir un perroquet. -#e confole qui peut : plein de la-borne dames. Il vèut du moins chez lui remplacer fon caquet. 34$ Lafontaine évite avec foin tout ce qui a l’air de da plaïfanterie ; s’il lut en échappe quelque trait, 1l a grand foin de l’émoufler : A, ces mots l'animal pervers, C'eff le ferpent que je veux dire. Voilà une excellente épigramme, & le poëte s’en ‘feroit tenu là, s’il avoit voulu être fin ; maïs il vou- loit être, ou plätôt il étoit naïf: il a donc achevé, Ceft le ferpent que je veux dire, «Et non l’homme : on pourroit aifément S'y tromper. De même dans ces vers qui terminent la fxble du Fat folitaire, Qui défignai-je, à votre avis; Par ce rat f£ peu fecourable ? T/n moine ? non ; mais un dervis ; 4] ajoûte : Je fuppofe qu'un moine eff rojours charitable. La fineffe du ftyle confifte à fe laifler deviner; la naiveté, à dire tout ce qu’on penfe. | Lafontaine nous fait rire, mais à fes dépens, & c’eft fur lui-même qu'il fait tomber leridicule, Quand pour rendre raifon de la maigreutr d’une belette, il obferve qu'elle Jortoir de maladie: quand pour expli- quer comment un cerf ignoroit une maxime de Sa- lomon , il nous avertit que ce cerf n’étoit pas accoñtu- né de lire: quand pour nous prouver l’expérience d’un vieux rat, & les dangers qu’il avoit courus , il remarque qu'i/ avoir même perdu fa queue à la bataille : quand pour nous peindre la bonne intelligence des chiens & des chats, 1l nous dit : Ces animaux vivorent entreux comme coufins: Cette union fe douce, & prefque fraternelle, E difiois ous les vorfins , ñousrions, mais de [a naïveté du poëte, & c’eft à ce piége fi délicat que fe prend notre vanité. L’oracle de Delphes avoit, dit-on, confeillé à Efope de prouver des vérités importantes par des contes ridicules. Efope auroit mal entendu l’oracle, fi au lieu d’être rifble 1l s’étoit piqué d’être plaïfanr. Cependant comme ce n’eft pas uniquement à nous amufer, mais fur-tout à nous inftruire, que la fable eft deftinée, l’'illufon doit fe terminer au développe- ment de quelque vérité utile : nous difons 44 deve- doppement , & non pas & la preuve; car il faut bien obferver que la fable ne prouve rien. Quelque bien adapté que foit l'exemple à la moralité , l'exemple £ft un fait particulier, la moralité une maxime géné- wale; & l’on fait que du particulier au général il n’y a rien à conclure. Il faut donc que la moralité foit ane vérité connue par elle-même , & à laquelle on n'ait befoin que de réfléchir pout en être perfuadé. L'exemple contenu dans la fable, en eft l’indication Sc non la preuve ; fon but eft d’avertir, & non de convaincre ; de diriger l’attention,& non d’entraîner le confentement, de rendre enfin fenfible à l’imagi- nation ce qui eft évident à la raifon : mais pour cela al faut que l'exemple mene droit à la moralité, fans diverfion, fans équivoque; & c’eft ce que les plus grands maîtres femblent avoir oublié quelquefois : La vérité doit naître de la fable, La Mothe l’a dit & la pratiqué , il ne le cede même à perfonnedans cetté partie : comme elle dépend de la jufteffe &c de la fagacite de l’efprit, & que la Mo- the evoit fupérieurement l’une & l’autre, le fens moral de fes fables eft prefque tohjours bien faifis bien déduit , bien préparé. Nous en exceptons quel- ques-unes, comme celle de lefoma, celle de l’a raïgnée & du pelican. L’effomac patit de {és fautes 3 mais s’enfuit-1l que chacun foit puni des fiennes à Le même auteur a fait voir le contraire dans la fable dw chat & du rat. Entre le pélican & l’araignée, entre Codrus 8 Néron l'alternative eft-elle f preflante qu'héfiser ce fht choifir? & à la queflion, /equel des deux voulez-vous imiter ? n’eft-on pas fondé à répon= dre, #1 l’un ni l'autre? Dans ces deux fables la mo: ralité n’eft vraie que par les circonftances , elle eft fauffe dès qu’on là done pour un principe général. La Fontaine s’eft plus négligé que la Mothe fur ls choix de la moralité ; il femble quelquefois la cher< cher après avoir compofé fa fable, {oit qu'il affete cette incertitude pour cacher jufqu’au bout le deffeire qu'il avoit d’inftruire ; foit qu’en effet il fe {oit livré d’abord à l'attrait d’un tableau favorable à peindre, bien für que d’un fujet moral il eft facile de tirerune réflexion morale, Cependant fa conclufion n’eft pas toiours également heureufe ; le plus fouvent pro= fonde, lumineufe , intéreffante , & amenge par un chemin de fleurs ; mais quelquefois auffi commune . faufle ou mal déduite, Pa exemple, de ce qu'un gland, & non pas une citrouille, tombe fur le nez de Garo, s’enfuit-il que tout foit bien à Jupin pour chaque état mit deux tables au Inonde > L’adroit, Le vigilant & Le fort font affis \ A la premiere, & lès petits * Mangent leur refle à la feconde. Rien n’eft plus vrai; maïs cela ne fuit point de l’ez xemple de laraignée 8: de l’hirondelle : car l’arais gnée, quoiqu'adroite & vigilante , ne laïfe pas de mourir de faim. Ne féroit-ce point pour déguifer ce défaut de juftefle, que dans les vers que nous ayons cités, Lafontaine n’oppofe que les peresà l’adroie, av. vigilant & au forc ? S’ileûtdit Ze foible, Le négligent 8e le mal-adroir, on eût fenti que les deux dernieres de ces qualités ne conviennent point à l’araignée, Dans la fable des poiffons & du berger , il confeille aux rois d'ufer de violence : dans celle du loup dévuifé em berger, 1l conclut, Quiconque eft loup , agiffe en loup. Si ce font-là des vérités, elles ne font rien moins qu'utiles aux mœurs. En général, le refpe& de La fontaine pour les anciens, ne lui a pas laiflé la liberté du choix dans les fujets qu'il en a pris; prefquetoutes {es beautés {ont de lui, prefque tous fes défauts font des autres. Ajoûtons que fes défauts font rares, & tous faciles à éviter, 87 que fes beautés fans nombre font peut-être inimitables, Nous aurions beaucoup à dire fur fa verfification où les pédans n’ont fü relever que des négligences , & dont les beautés ravifflent d’admiration les hom- mes de l’art les plus exercés , &r les hommes de goût les plus délicats ; mais pour développer cette partie avec quelqu'étendue , nous renyoyons à l’arricle VERS. Du refte, fans aucun deffein de loüer ni de critia quer, ayant à rendre fenfibles par des exemples les perfeéhions & les défauts de l’art, nous croyons de. voir puifer ces exemples dans les auteurs les plus eftimables , pour deux raifons, leur célébrité & leur autorité, fans toutefois manquer dans nos critiques aux égards que nous leur devons; & ces égards con- fiftent à parler de leurs ouvrages avec une impartia. lité férieufe & décente, fans fiel & fans dérifion 5 méprifables recours des efprits vuides & des ames baffes. Nous avons reconnu dans la Mothe une in- vention ingénieufe, une compoftion réguliere, beaucoup de juftefle &c de fagacité, Nous avons pe Î À fté de quelques-unes de fes réflexions fur fa fable, & nous renvoyons encore le leéteur à fon difcours, éomme à un morceau de poétique excellent à beau- conp d’égards. Mais avec la même fincérité nous ävons crû devoir obferver {es erreurs dans la théo- rie, & fes fautes dans la pratique, ou du moins ce qui nous a paru tel; c’eft au lecteur à nous juger. Comme Lafontaine a pris d’Efope, de Phedre, de Pilpay, &c. ce qu'ils ont dé plus remarquable, & que deux exemples nous fufhfoient pour développer nos principes, nous nous en fommés tenus aux deux fa- buliftes françois. Si l’on veut connoître plus particu- Kerement les anciens qui fe font diflingués dans ce genre de poëñe , on peut confulter l’article FABU- LISTE. Article de M. MARMONTEL. FABLE, (Belles-Lerrr.) fi&tion morale, Voyez F1c- TION. | | Dans les poëmes épique & dramatique , là fable, lation, le fujét, font communément pris pour fy- nonymes ; mais dans une acception plus étroite, le lujet du poeme eft l’idée fubftantielle de laétion : Pa&ion par conféquent eft le développement du fu- jet, l'intrigue eft cette même difpoñition confidérée du côté des incidens qui nouent & dénouent l’aétion. Tantôt la fable renferme une vérité cachée, com- me dans l’Iliade; tantôt elle préfeñte diredement des exemples perfonnels & des vérités toutés nues s comme dans le Télémaque & dans la plüpart de nos tragédies. Il n’eft donc pas de l’effence de la fable d’être allégorique, il fuflit qu’elle foit morale, & c’eft ce que le P. le Boffu n’a pas aflez diftingué. Comme le but de la Poëéfie eft de rendre, s’il eft pofble, les hommes meilleurs & plus heureux, un poëte doit fans doute avoir égard dans le choix de {on ation, à linfluence qu’elle peut avoir fur les mœurs ; &, fuivañt ce principe, on n’auroit jamais dû nous préfenter le tableau quientraine Œdipe dans le crime, ni celui d'Ele&tre criant au parricide Oref- te : frappe, frappe, elle a tué notre pere. Mas cette attention générale à éviter les exem- ples qui favorifent les iméchans, & à choifir ceux qui peuvent encourager les bons , n’a rien de commun avec la regle chimérique de n’inventer la fable &e les perfonnages d’un poëme qu'après la moralité ; mé- thode fervile & impraticable, f cen’eft dans de pe- tits poëmes, comme l’apologue , où l’on n’a ni les grands reflorts du pathétique à mouvoir, ni une longue fuite de tableaux à peindre ; ni le tiffu d’une intrigue vafte à former. Voyez EPOPÉE. left certain que l’Iliade renferme la même vérité que l’une des fables d’Efope, & que lation qui con- duit au développement de cette vérité, eft la même au fond dans l’une & dans l’autre; mais qu'Homere, “ainfi qu'Efope, ait commencé par fe propofer cette vérité; qu'enfuite 1l ait choifi une aétion & des per- fonnages convenables , & qu'il n’ait jetté les yeux dur la circonftance de la guerre de Trove, qu'après s'être décidé fur les caraéteres fiéifs d’Agamemnon, d'Achille, d'Hetor, &c c’eft ce qui n’a pù tomber que dans l’idée d’un fpéculateur qui veut mener, s’il eft permis de le dire, le génie à la lifiere. Un fculp- teur détermine d’abord l’expreflion qu’il veut ren- dre, puisil define fafigure , & choifit enfinle marbre ‘propre à l’exécuter ; mais les évenemens hiftoriques ‘Ou fabuleux, qui font la matiere du poëme héroïque, ne {e taillent point comme le marbre : chacun d’eux a fa forme effentielle qu'il n’eft permis que d’embel- lir; & c’eft par le plus ou le moins de beautés qu’elle ‘préfente ou dont elle eft fufceptible , que fe décide ‘le choix du poëte : Homere lui-même en eft un ‘exemple: | L’ation de POdyflée prouve, fi l’on veut, qu’un état où qu'une famille {ouffre de l’abfence de fon chef; mais elle prouve encore mieux qu'il ne faut Tome FI, | F À B 349 point abandonner fes intérêts domeftiques pour fe inêler des intérêts publics, ce qu'Homere certaine- ment n’a pas eu deflein de fâire voir. De même on peut conclure de lation del’Enéide) que la valeur & la piété réunies font capables des pins grandes chofes ; mais on peut conclure aufli qu’on fait quelquefois fagement d’abandonner une femme après l'avoir féduite, & de s'emparer du bien d’au- trui quand on le trouve à fa bienféance ; maximes que Virgile étoit bien éloigné de vouloir établir. Si Homere & Virgile n’avoient inventé la fable de leurs poëmes qu’en vûe de la moralité, toute l’adtion n'aboutiroit qu’à un feul point ; le dénouement fe- toit comme un foyer où fe réumiroient tous les traits de lumiere répandus dans le poëme; ce qui n’eft pas à ainfi l’opinion du pere le Boflu eft démentie par les! exemples mênies dont il prétend l’autorifer. La fable doit avoir différentes qualités , les unes particulieres à certains genres, les autres communes à la Poëfie en général. Voyez pour les qualités comz munes, des articles FICTION , INTÉRÊT ; INTRIGUE, UNITÉ , Éc. Voyez pour les qualités particulieres , les divers genres de Poéfie, à /eurs articles, Sur-tout comme il y a une vraiflemblance abfolue & une vraiflemblancc hypothétique ou de conven: tion , & que toutes fortes de poëmes ne font pas in- différemment fufceptibles de lune &r de l’autre, voyez; pour les diflinguer , Zes articles F1CTION, MERVEIE: LEUX 6 TRAGÉDIE. Article de M. MARMONTEL, FABLIAUX , f. m. (Lirrérat, franç.) Les anciens Contes connus fous le nom de fabliaux , font des poë- mes qui, bien exécutés, renferment le récit élégant &E naïf d’une ation inventée, petite, plus ou moins intriguée, quoique d’une certaine proportion, mais agréable ou plaïfante, dont le but eft d’inftruire ow d’amufer. IE nous réfte plufeurs manufcrits qui contiennent des fabliaux : il y en a dans différentes bibliotheques, & fur-tout dans celle du Roi; mais un manufcrit des plus confidérables en ce genre, eft celui de la biblio- theque de faint Germain des Prés ; n°, 1830. Lesau= teurs Les moins anciens dont on y trouve les ouvraz ges, paroïflent être du regne de S. Louis, Ces fortes de‘poéfies du xij. & xii. fiecles, prou= vent que dans Les tems de la plus grande ignorance ; non-feulement on à écrit, mais qu’on a écrit en vers = le manufcrit de l’abbaye de S. Germain en contient plus de 150 mille. M. le comte de Caylus en a ex- trait quelques morceaux dans fon mémoire fur les fa- bliaux , inféré au rome XX, du recueil de Pacadémie des Inferipr. & Belles-Lettres, Cependant le meilleur des fabliaux de ce manuferit, ainfi que ceux dont lé plan eff le plus exaét, font trop libres pour être ei- tés; & en même tems, au milieu des obfcénités qu’ils renfermént, on y trouve de pieufes & longues tärades de l’ancien Teftament. Une telle fmplicité fait-elle Péloge de nos péres ? Arricle de M, le Cheva- liér DE JAUCOURT. * FABRICATION, f. f. rerme d'Art méchan. Cet l’aétion par laquelle on exécute certains ouvrages felon les regles prefcrites. [ls’applique plus fréquem- ment aux atts qui employent la laine, le fil, le co- ton, &c. qu'aux autres. On dit Z fabrication d'une éroffe ; ainft faire eft plus général que fabriquer. FABRICATION, {. m. & la Monnoie , eft l’exécu- tion d’une ordonnance qui préfcrit la fonte & le mon- noyage d’une quantité de métal. Voyez MONNOIE. FABRICIEN , f, m. (5/4 mod.) officier eccléfaf. tique ou laic, chargé du foin du temporel des églifes, C’eft dans les paroifles la même chofe que le z1ar- guillier. Dansles chapitres ; c’eft un chanoine charsé des réparations de l’églife , de celle des biens, fer- mes, &c. & de leur vifite , dont 1l perçoit les reve- nus & en compte au chapitre, On le nommé en quel: X y 3 50 F À B ques endroits chambrier. Dans certains chapitres il ef perpétuel ; dans d’autres il n’eft qu'à tems, amovible ou révocable à la volonté du chapitre. (G) * FABRIQUANT , £. m. (Commerce.) On appelle ainf celui qui travaille ou qui fait travailler pour {on compte des ouvrages d’ourdiflage de toute efpe- ce, en foie, en laine, en fil, en coton, rc. Il eftrare qu'on applique à d’autres arts Leterme de fabriquanr. Je crois celui de fabrique un peu plus étendu. FABRIQUE DES EGLISES , (Jzrifp.) Ce terme pris dans Le fens littéral, fignifie Z conffrutiion des éolifes. On entend auf par-là les reconftruëlions &e autrés réparations quelconques, 8e généralement tou- tes Les dépenfes qui fe font, foit pour le bâtiment, foit pour fa décoration, & pour les vafes facrés , livres 8 ornemens qui fervent au fervice divin. On éntend encore pat ce mème terme de fabrique, le remporel des églifes, confiftant, foit en immeubles, où en revenus ordinaires ou cafuels, affe@tés à l’en- tretien de l’églife & à la célébration du fervice divin. Enfin par le terme de fzbrique on entend auffi fort fouvent ceux qui ont l’adminifiration du temporel de léglife, lefquels en certaines provinces font ap- pellés fabriciens, en d’autres marguilliers, luminiers, êtc. La fabrique eft auffi quelquefois prife pour le corps ou aflemblée de ceux qui ont cette adminiftra- tion du temporel. Le bureau ou lien d’afflemblée eft auffñ quelquefois défigné fous le nom de fabrique, Dans la primitive Eglife, tous les biens de cha- que églife étoient en commun ; l’évêque en avoit Pintendance & la direétion, & ordonnoït comme 1l jugeoit à propos de l’emploi du temporel, foit pour la fabrique, foit pour la fubfiftance des miniftres de Péglife. Dans prefque tous les lieux les évêques avoient fous eux des économes , qui fouvent étoient des prê- tres & des diactes , auxquels ils confioient Padmi- niftration du temporel de leur éghfe , dont ces éco- nomes leur rendoient compte. Ces économes touchoïent les révenus de l’églife, & avoient foin de pourvoir à fés néceflites, pour léfquelles ils prenoient fur les revenus de l’églife ce qui étoif néceflaire ; enforte qi'ils faifoient vraiment la fon@ion de fabriciens. Dans la neuvieme feflion du concile de Chalce- doine, tenu en 451, on oblipea les évêques , à loc- cafion d’Ibas évêque d’'Edefle , de choïfir ces écono- mes de leur clergé ; de leur donner ordre fur ce qu'il convenoit faire, &z de ldhr faire rendre compte de tout. Les évêques pouvoient dépofer ces économes, pourvû que ce füt pout quelque caufe légitime. * En quelques endroïts, fur-tout dans l’églife gre- que, ces économes avoient fous eux des co-adju- teurs. On pratiquoit aufh à-peu-près la même chofe dans les monafteres ; on choïfiffoit entre les religieux les ‘plus anciens , celui qui étoit le plus propre à gouver- ner Le temporel pour lui. Vers le milieu du jv. fiecle les chofes changerent de forme dans l’églife d'Occident ; les revenus de chaque églife ou évêché furent partagés en quatre Jots ou parts égales, la premiere pour l’évêque, la feconde pour fon clergé & pour les autres clercs du diocèfe, la troifieme pour les pauvres, & la qua- trieme pour la fabrique, c’eft-à.dire pour l'entretien ‘êc les réparations de l’églife. Ce partage fut ainfi ordonné dans un concile tenu à Rome du tems de Conftantin. La quatrieme por- | tion des revenus de chaque églife fut deftinée pour ! da réparation des temples & des églifes. Le pape Simplicius écrivoit à trois évêques que ce quart devoit être employé ecc/efaflicis fabriciis. C'eft apparemment de-là qu'eft venu le terme de /a- brique. w On trouve auf dans des lettres du pape Gelafe ; en 494, dont l’extrait eft rapporté dans le canon vo- bis X XIII. caufé xij. queft. 1. que l’on devoit faire quatre parts, tant des revenus des fonds de l’églife, que des oblations des fideles ; que la quatrieme por- tion étoit pour la fabrique, fabricis verd quartam à qué ce qui refteroit de cette portion , la dépenfe an- nuelle prélevée , feroït remis à deux gardiens idoi- nes, choifis à cet effet, afin que s’il furvenoit quels que dépenfe plus confidérable, #2ajor fabrica , on eût la reflource de ces deniers, ou que l’on en acherât quelque fonds. Le même pape tepete cette difpoñition dans les cans 25. 26. & 27. au mème titre. Il fe fert par-tout du terme fabricis, qui fignifie en cet endroit les coz/fruc: tion 8 réparations; & la glofe obferve fur le canon 27, que la conféquence qui réfulte naturellement de tous Ces canons, eft que les laïcs ne font point tenus aux réparations de la fabrique, mais feulement les clercs. Saint Grégoire le Grand, dans une lettre à faint Auguftin apôtre d’Angleterre, prefcrit pareillement la referve du quart pour la fabrique. Le decret de Gratien contient encore, loco citatos un canon (qui eft le 31.) prétendu tiré d’un concile de Tolede, fans dire lequel , où la divifion & l’em ploi des revenus eccléfaftiques font ordonnes de même ; enforte, eft-il dit, que la premiere part foit employée foigneufement aux réparations destitres, c’eft à-dire des églifes & à celles des cimetières , Je- cundim apoffolorum præcepta: mais ce canon ne fe trouve dans aucun des conciles de Tolede, La col- leétion des canons faite par un auteur incertain, qui eft dans la bibliotheque vaticane, attribue celui-ci au pape Sylveftre : on n’y trouve pas ces paroles, Jecundim apoftolorum precepta ; & en effet du tems des apôtres il n’étoit pas queftion de fabriques dans le fens où nous le prenons aujourd’hui, ni même de rés parations. Quoi qu’il en foit de l’autorité de ce canon, celles que l’on a déjà rapportées font plus que fuffifantes au moins pour établir lufage qui s’obfervoit depuis le jv. fiecle par rapport aux fabriques des églifes, ufa- ge qui s’eft depuis toüjours foûtenu. Grégoire Il. écrivant en 729 aux évêques &c au peuple de Thuringe, leur dit qu'ilavoitrecommandé à Boniface leur évêque de faire quatre parts des bieñs d’églife, comme on l’a déjà expliqué, dont une étoit pour la fabrique, ecclefafhicis fabricis reférvandam. En France on a toùjouts eu une attention particus liere pour la fubrique des églifes. Le 57° canon du concile d'Orléans, tenu en $tx par ordre de Clovis, deftine les fruits des terres que les églifes tiennent de la libéralité du roi, aux répa- rations des églifes , à la nourriture des prêtres & des pauvres. | Un capitulaire de Charlemagne, &e l’année 801, ordonne le partage des dixmes en quatre portions, pour être diftribuées de la maniere qui a déjà.été dite : la quatrieme eft pour la fabrique , guarta ir fabricé ipfrus ecclefie. Cette divifion n’avoit d’abord lieu que pour les fruits; & comme les évêques & les clercs avoient l'adminiftration des portions de la fabrique & des pauvres , ce reglement fut obfervé plus où moins exattement dans chaque diocèle, felon que les ad- miniftrateurs de la part de la fabrique étoient plus ou moins fcrupuleux. Dans la fuite l’adminiftration de [a part des f2- briques, dans les cathédrales &c collégiales , fut con- fiée à des clercs qu'on appella marguilliers en quel- ques églifes. On leur adjoignit des marguilliers laïcs, comme dans l’églife de Paris, où il y en avoit des l’an 1204. | Dans les éghfes paroifiales:, les biens de la fubri. que ne font gouvernés que par des marguilliers laïs, Les revenus des. fabriques font deftinés à l’entre- tien & réparation des églifes ; ce n’eft que fubfdiai- tement, & en cas d'infuifance des revenus des fz- briques, que l’on fait contribuer les gros décimateurs & les paroïfliens. AU AUTRES L'édit du mois de Février 1704avoiticréé en titre d'office des thréforiers des fabriques dans toutes les villes du royaume ; mais par l’édit du mois de Sep- tembre fuivant ils furent fupprimés pour la ville & fauxbourgs de Paris ; & par un arrêt du confeil du 24 Janvier 170$, ceux des autres villes furent réu- nis aux fabriques. | | | L'article 9 de l’édit de Février 1680; porte que le tevenu des fabriques ; après les fondations accom= plies, fera appliqué aux réparations , achat d’orne- mens &autres œuvres pitoyables, fuivant les faints decrets ; & que les marguilliers feront tenus de faire bon &c fidele inventaire de tous les titres & enfei- gnemens des fabriques. | Les évêques recevoient autrefois Les comptes des fabriques; mais ayant népligé cette fondion, les ma- giftrats en prirent connoïflance , fuivant ce qui eft dit dans une ordonnance de Charles V. du-mois d'Oc: tobre 1385. Le concile de Trente & plufieurs conciles provin- ciaux de France, veulent que ces comptes foient rendus tous les ans devant l’évêque. Charles IX. par des lettres patentes du 3 Oëétobre 1571, enattribua la connoiflance aux évêques, ar- chidiacres & officiaux dans leurs vifites, fans frais, avec défenfes à tous autres juges d’en connoître ; mais cela ne fut pas bien exécuté, &ïilyaeubien | des variations à ce fujet. Henri II. par un édit de Juillet 1578, attribua la connoiflance de ces comptes aux élus. Le 11 Mai 1582, le clergé obtint des lettres portant révocation de cet édit, & que les comptes fe rendroïent comme . avant l’édit de 1578. Le pouvoir des élus fut rétabli par un édit de Mars 1587; mais 1l ne fut pas regiftré au parlement , & le clergé en obtint encore la révo- cation. Les élus furent encore rétablis dans cette fonétion par édit de Mai 1605, Le 16 Mai 1609, le clergé obtint des lettres con- formes à celles de 1571 ; elles furent vérifiées au parlement , à la charge que les procureurs fifcaux fe. roient appellés à l’audition des comptes. Ces lettres furent confirmées par d’autres du 4 Septembre 1619, regiftrées au grand-confeil , & par deux déclarations de 1657 & 1666, mais qui n’ont été regiftrées en aucune cour. L’édit de 1695, qui forme le dernier état fur cette matiere, ordonne, art. 17, que ces comptes feront rendus aux évêques êc à leurs archidiacres ; mais ils doivent en connoïtre.eux-mèmes , & non par leurs officiaux. Pour ce qui eft des jugemens rendus fur Les comp- tes des fabriques, ils font exécutoires par provifion, fuivant les lettres patentes de 1571, & celles de 1610. . Lesbiensdeg fabriques ne peuvent être aliénés fans néceflité, &c fans y obferver les formalités néceflar. res pour l’aliénation des biens d’églife. + Le concile de Rouen, en 1581, défend fous de grieves peines de les aliéner que par autorité de l’or- dinaire, & de les employer autrement qu’à leur def- ‘#ination. On ne peut même faire les baux des biens des /z- briques fans publication, & l’on ne peut les faire par anticipation , tu pour plus de fix ans. La déclaration du 12 Février 1661 , veut que les églifes & fabriques du royaume rentrent de plein droit & de fait, fans aucune formalité de juflice, , Tome VI, | | 7 F À B 351 dans tous les biens, terres & domaines qui leur ap Partiennent, & qui depuis 20 ans avoient été vendus Ouengagés par lesymarguilliers fans permiflion, & fans-avoir gardé les autres formalités néceflaires. "Dans les affemblées de fabrique, le euré précede les:marguilliers ; mais ceux-ci précedent les officiers dubaillage, lefquels n’y aflifient que comme ptin= cipaux habitans. Voyez MarGuILLIER € RÉPARA- TIONS. (4) 14 FABRIQUE, f.f. (Archir.) maniere de conftruire quelqu'ouvrage, mais ilne fe dit guere qu’en parlant d'un édifice. Ce mor vient du latin fabrica, qui figni- fie proprement forge. Il défigne en Italie. tout bâti ment confidérable : il fignifie auffi en françois la ma- mere de conftruire, ou une belle conftruétion ; ainfi on dit que l’obfervatoire, le pont royal à Paris, &c. font d’une belle fabrique. (P) ‘FABRIQUE DES VAISSEAUX, (Marine. ) fe dit de la maniere dont un vaifleaw eft conftruit, propre à chaque nation; deforte qu’on dit 7 vaiffeau de fa- brique hollandoïfe, de fabrique angloife, &c. (Z) . FABRIQUE fignifie, dans le langage de la Peinture, tous les bâtimens dont cet artoffre la repréfentation : ce mot réunit donc par fa fignification , les palais ainfi que les cabanes. Le tems qui exerce égaleméné {es droits fur ces différens édifices, ne les rend que plus favorables à la Peinture; & les débris qu'il oc cafonne font aux yeux des Peintres des accidens fi féduifans, qu'une clafle d’artiftes s’eft de tout tèms confacrée à peindre des ruines. Il s’eft aufi totjours trouvé des'amateurs qui ont fenti du penchant pour ce genre de tableaux. Lorfqu'il eft bien traité, indé- pendamment de limitation de la nature , il donne à penfer : eft-1l rien de fi féduifant pour l’efprit à Un palais conftruit dans un goût fage , où les parties con- Viennent fi bien qu'il en réfulte un tout parfait, ce palais fi bien De que rien n’eneftaltéré, nous plaira fans doute; mais nous appercevons prefqu’en un même inftant ces beautés fymmétriques , il ne nous laïfle rien à defirer. Eft-il à moitié renverié , les parties qui fubfftent nous préfentent des perfeétions qui nous font penfer à celles qui font déjà détruites. Nous les rebâtiflons , pourainfidire, nous cherchons à en concevoir l’effet général. Nous nous trouvons attachés par plufeurs motifs de réflexion ; jufqu’à la variété que des plantes crûes au hafard, ajoûtent aux couleurs dont les pierres fe trouvent nuancées par les influences de l'air, tout attache les regards & l’attention. Indépendamment de cette claffe d’artiftes qui choï- fit pour principal fujet de fes ouvrages des édifices à moitié détruits, tous les Peintres ont droit de faire entrer des fabriques dans la compofition de leurs ta- bleaux , & fouvent les fonds des fujets hiftoriques peuvent ou doivent en être enrichis. Sur cette partie les regles fe réduifent à quelques principes généraux, dont l'intelligence & le goût des Artiftes doivent faire une application convenable, Celui quime pa- roît de la plus grande importance , eft l'obligation d’avoir une connoïfflance approfondie des regles de PArchitedure : l’habitude réitérée de former des plans géometraux, &c d'élever enfuite fur ces plans les repréfentations perfpe@ives de différens édifices, eft une des fources principales de La vérité & de la richeffe de la compoñtion. Il réfulte de cette habi- tude éclairée, que les édifices dont une partie inté- rieure eft fouvent le lieu choifi d’une fcene pittoref- que , s'offrent aux fpettateurs dans la juite apparence qu'ils doivent avoir. Combien de ces périftiles , de ces fallons, de ces temples, vains fantômes de foli- dité & de magnificence, s’évanoturoient avec la ré- putation des artiftes, fi. d’après leurs tableaux on en faifoit l'examen en les réduifant à leurs plans géomé- traux ? Combien d’effets de perfpetives frouverions: Yyÿ 3 52 F A B mous ridicules &c faux , fi on les foûmettoit à cette épreuve ? L’exécution féveré des regles, je ne puis trop le répéter, eff le foûtien des Beaux-arts, comme les licences en font la ruine. Dañs celui de la Pein- ture, la perfpettive linéale eff un des plus fermes ap- puis de l’illufion qu’elle produit : cette perfpeétive donne les regles des rapports des objets; &c puifque nous ne jugeons des objets réels que par les rapports qu'ils ont entr’eux , comment efpere-t-Oon tromper les regards , f. l’on n’imite précifément ces rapports de proportions par léfquels nos fens perçoivent ëc fous excitent à juger? Les grands peintres ont étudié avec foin l’Archite@ure indépendamment de la Perf- peltive , & ils ont trouvé dans cette étude les moyens de rendre leurs compofitions variées, riches & vraif- femblables. Il feroit à fouhaiter que les Architeëtes puffent s’enrichir aufli des connoïffances & du goût qu’infpire l’art de la Peinture, en le pratiquant ; ils ÿ puiferoient à leur tour des beautés & des graces qu’on voit fouvent manquer dans exécution de leur compoñtion. Les Arts ne doivent-ils pas briller d'un plus vif éclat, lorfqu'ils réüniflent leurs lumieres ? Voyez PERSPECTIVE, RUINES, &c. Cet article eff de M. WATELET. FABULEUX , adj. (Æiff. anc.) On appelle sms fabuleux où héroiques , la période où les Payens ont feint que regnoient les dieux & les héros. _ Varron a divifé la durée du monde en trois pério- des : la premiere eft celle du tems obfcur êz incer- tain, qui comprend tout ce qui s’eft pañlé jufqu'au déluge , dont les Payens avoient une tradition conf- tante ; mais ils n’avoient aucun détail des évenemens qui avoient précédé ce déluge, excepté leurs fitions fur le cahos, fur la formation du monde &c fur l’âge d’or. La feconde période eft le tems fabuleux, qui comprend les fiecles écoulés depuis le déluge juf- qu’à la premiere olympiade, c’eft-à-dire 1552 ans, felon le P. Pétau ; ou jufqu’à la ruine de Troye, ar- rivée l’an 308 après la fortie des Hébreux de l’'Egyp- te, & 1164 après le déluge. Voyez l'article FABLE. Didionn, de Trévoux & Chambers: (G) * FABULINUS, (Myck.) dieu de la parole. Les Romains l’inyvoquoient &c lui faïfoient des facrifices lorfque leurs enfans commençoient à bégayer quel- ues mots. Car FABULISTÉE, f. m. (Lisrér.) auteur qui écrit des fables, fabulas, c’eft-à-dire des narrations fabuleu- fes , accompagnées d’une moralité qui fert de fonde- ment à la fiétion. Non-feulement un fzbulifle doit fe propofer fous le voile de la fiétion, d’annoncer quelque vérité mo: rale, utile pour la conduite des hommes , maïs en- core l’annoncer d’une maniere qui ne rebute point l'amour-propre , toüjours rebelle aux préceptes di- reûs, & tobjours favorable à ces déguifemens heu- reux qui ont l’art d'inftruire en amufant. Les enfans nouveaux venus dans le monde, n’en connoiffent pas les habitans , ils ne fe connoïffent pas eux-mêmes ; mais il convient de les laifer dans cette ignorance le moins qu’il eft poflible. Il leur faut ap- prendre ce que c’eft qu'un lion, un renard, un finge, & pour quelle raifon on compare quelquefois un homme à de tels animaux : c’eft à quoi les fables font deftinées, & les pfemieres notions de ces chofes pro- viennent d'elles’; enfuite par les raifonnemens & les conféquences qu’on peut tirer des fables , on forme le jugement & les mœurs des enfans. Plütôt que d’é- tre réduits à corriger nos mauvaifes habitudes , nos parens devroient travailler à les rendre bonnes, pen- dant qu’elles font encore indifférentes au bien &c au mal ; or les fables y peuvent contribuer infiniment, êc c’eft ce qui a fait dire à Lafontaine qu’elles étoient defcendues du ciel pour fervir à notre infiruétion : - FAB L'apologue ef! un don qui viènt des immortels s Ou. fi c'eff un prefènt desthommesss 0 FE 3e ". Quiconque nous d'à fait, mérise des aurels. Efope, fuivant tous les critiques, mérite ces au- tels : c’eft à lui qu’on.eft redevable de ce beau pré: fent ; c’eft lui qui a la gloire de cetteinvention, ou du moins qui a fi bien marié ce fujet., qu’on l'a re- gardé dans l’antiquité comme le pere ou le principal auteur des-apologues : c’eft ce qui a engagé Philof trate à embellir cette vérité par une fioningénieufe. « Efope, dit-il, étant bérger, menoit fouvent paître » fes troupeaux près d’un temple de Mercure où il » entroit quelquefois , faifant au dieu de petites of- » frandes, comme, de fleurs, d’un:peu de lait, de » quelques rayons de miel, & lui demandant avec » inftance quelques rayons de fagefle. Plufeurs {e » rendoient aufli dans le même temple pour lemême » deffein, & faifoient au dieu des offrandes tres-con- » fidérables. Mercure voulantreconnoître leur piété, » donna aux uns le don de l’Aftrologie , aux autres » le don de PÉloquence, & à quelques-uns le don de » la Mufique. Il oublia par malheur Efôpe ; mais » comme fon intention étoit de le récompenfer, 1l » lui donna le don de faire des fables » .., Revenons - à l’hiftoire. | Efope a cela de commun avec Homere, qu’on ignore le vrai lieu de fa naïffance ; néanmoins lopi- nion générale le fait fortir d’un bourg de Phrygie, Il florifloit du tems de Solon, c’eft-à-dire vers la 5 2° olympiade ; il naquit efclave, & fervit en cette qua= lité plufieurs maitres. Il apprit à Athenes la pureté de la langue greque, comme dans fa fource ; perfec- tionna fes talens par les voyages, & {e diftingua par fes réponfes dans l’affemblée des fept fages. Sa haute réputation étant parvenue jufqu'aux oreilles de Cré- fus roi de Lydie, ce monarque le fit venir à fa cour, le prit en afle@ion, & l’honora de fa confiance. Mais l'étude favorite d’Efope fut toûjours la Plilofophie morale , dont il remplit foname & fon efprit, con- vaincu de l’inconftance & de la vanité des grandeurs humaines : on fait fon bon mot fur cet article. Chy- lon lui ayant demandé quelle étoit occupation de Jupiter, remporta d'Efope cette réponfe merveilleu- fe : Jupiter abaiffe les chofes hautes ; € éleve Les chofes baffes. Cependant il fut traité comme facrilege; car ayant été envoyé par Créfus au temple de Delphes, pour offrir en fon nom des facrifices, {es difcours fur la nature des dieux indifpoferent les Delphiens, qui le condamnerent à la mort. Envain Elope leur ra- conta la fable de l’aigle & de l’efcarbot pour les ra- mener à la clémence, cette fable ne toucha point leur cœur ; ils précipiterent Efope du hant de la ro- che d’'Hyampie, & s’en repentirent trop tard. Après fa mort les Athéniens fe croyant en droit de fe l’approprier, parce qu'il avoit eu pour fon pre- mier maitre Démarchus citoyen d’Athenes, lni éri gerentune ftatue, que l’on conjetture avoir été faite par Lyfippe. Enfin pour confoler la Grece entiere qui pleuroit fa perte , les Poëtes furent obligés de femdre que les dieux l’avoient reflufcité. Voilà tout cequ’on fait d’Efope , même en raflemblant divers paffages d'Hérodote, d’Ariftophane, de Plutarque , de Dio- gene de Laërce & de Suidas. M. de Méziriac en a fait unbelufage dans la viede ce fabulifle, qu'il a publiée en 1632. Il n’eft pas facile de décider f Pinventeur de Papo- logue compofa fes fables de deffein formé, pour en faire une efpece de code qui renfermäât dans des fi&ions allégoriques toute la morale qu'il vouloit en: feigner ; ou bien fi les différentes circonftances dans lefquelles il fe trouva, y ont iuccefivement donné lieu. De quelque façon & dans quelque vüe qu’il ait compoié fes fables, 1l eft certain qu’elles ne font pas FAB toutes parvenues jufqu'à nous, les añciens en ont cité quelques-unes qui nous manquent ; mais 1] reft' pas moiïns certain qu'elles étoient fi familieres aux Grecs, que pour taxer quelqu'un d'ignorance ou de flupidité , il avoit paflé en proverbe de dire, cer homme ne connoft pas même Efope. Il faut ajoûter à fa gloire, qu'il fut employer ayec art contre les défauts des hommes , les leçons les plus fenfées & les plus ingénieufes dont l’efprit hu- main pût s'avifer. Celui qui a dit que fes apologues font les plus utiles de toutes les fables de l'antiquité, favoit bien juger de la valeur des chofes : c’eft Platon qui a porté ce jugement. Il fouhaite que les enfans fucent les fables d'Efope avec le lait, 8 recommande aux nourrices de les leur apprendre; parce que, dit- il, On ne fauroit accoütumer les Hommes de trop bonne heure à la vertu. : Apollonius de Thyane ne s’eft pas expliqué moins clairement fur le cas qu'il faifoit des fables d'Efope, aufli ne font-elles jamais tombées dans le mépris. Notre fiecle , quelque dédaigneux & quelqu’orgueil- Jeux qu’il foit, continue de les eftimer ; & le travail que M. Leftrange a fait fur ces mêmes fables en An: gleterre, y eft toûjours très-applaudi. Quoique la vie du fabuliffe phrygien, donnée par Planude, foit un vrai roman, de l’aveu de tout le monde, il faut cependant convenir que c’eft un ro- man heureufement imaginé, que d’avoir confervé dans l’inventeurde lapologue fa qualité d’efclave, & d’avoir fait de fon maitre un homme plein de vanité. L’efclave ayant à ménager l’orgueil du maître, il ne devoit lui préfenter certaines vérités qu'avec pré- caution ; & l’on voit auffi dans fa vie, que le fage Efope fait toïjours concilier les épards & la fincé- rité par fes apologues. D’un autre côté, le maitre qui s’arroge le nom de philofophe , ne devoit pas être homme à s’en tenir à l'écorce; il devoit tirer des fic- tions de l’efclave les vérités qu'il y renfermoit : 1l devoit fe plaire à l’artifice refpetueux d'Efope, & lui pardonner la leçon en faveur de l’adreffe & du géme. Nous autres fabulifles, pouvoit dire Efope, nous fommes des efclaves qui voulons inftruire Les hommes fans les fâcher, & nous les regardons com- me des maîtres intelligens qui nous favent gré de nos ménagemens, & qui reçoivent la vérité, parce que nous leur laifons l'honneur de la deviner en partie. Socrate fongeant à concilier enfemble le caractere de poëte & celui de philofophe , fit à fon tour des fables qui contenoïent des vérités folides, & d’excel- lentes regles pour les mœurs ; il confacra même les dermers momens de fa vie à mettre en vers quel- ques-uns des apologues d’Efope. Mais ce digne mortel, qui pañle communément pour avoir eu le plus de communication avec les dieux, n’eft pas le feul'qui ait confidéré comme fœurs la Poëfie & les Fables. Phedre, affranchi d’Aupufte, & dans la fuite perfécuté par Séjan, fuivit l’exemple de Socrate , &c fa façon de penfer. Se voyant fous un regne où la tyrannie rendoit dangereux tout genre d'écrire un peu libre & un peu élevé, il évita de fe montrer d’une facon brillante , & vécut dans le com- merce d’un petit nombre d'amis, éloigné de tous lieux où l’on pouvoit être entendu par les délateurs, & L'homme, dit-il, fe trouvant dans la fervitude, * parce qu'il n'ofoit parler tout haut, 9lifla dans fes # narrations fabuleufes les penfées de fon efprit, & » fe mit par ce moyen à couvert de la calomnie», Préface du troifieme livre de [es fables, qu’il dédia à Eutyche. Il s’occupa donc dans la folitude du cabinet. à écrire des fables, & fon génie poétique lui fut d’une grande reflource pour les compofer en vers tambi- ques. Quant à la matiere, 1] la traita dans le goût d'Elope ,-comme il le déclare lui-même : F AB Æfopus auélor, quar materiam reperir, Hanc ego polivi verffbus fenaris. 353 Il ne s’écarta de fon modele qu'à quelques égards, mais alors ce fut pour le mieux. Dutems d'Efope, par exemple , la fable éroit comptée fimplement, 14 mo- ralité féparée, & roûjours de fuite. Phédré né ctut” pas devoir s'affujéttir à cet ordre méthodique il! embellit la nattation , & tranfporte quelquefois la moralité de la fin au commencement de la fable. "Ses" fleurs, fon élégance & {on extrème briéveté lé Fen= dent encore très-recommandable ; & fi l’on y vett + faire attention , on reconnoîtra dans le poëté de. . Phrace le caraétere de Térence. Sa fimplicité eff fi belle, qu'il {emble difcile d'élever notré langue à ce haut point de perfeétion. Son laconifme eft toù= jours clair , il peint toïjours par des épithétés con- venables; & {es defcriptions renfsrmées fouvent en un feul mot, répandent encore de nouvelles graces: dans fes ouvrages. | Ileft vrai que cet auteur plein d’agrémens, a été très: peu connu pendant plufieurs fiecles ; mais ce phéno: mene doit feulement diminuer notre furprife à L'é- gard de lobfcurité qui a couvert la gloire de Pater- culus fon contemporain, & pareillementde Quinte- Curce, dont perfonne n’a fait mention avant le xv. fiecle. Phedre a prefque eu le même fort ; Pierte Pi . thou partage avec fon frere l’honneur de Pavoir mis le premier au jour, l’an 1596. Les favans dé Rome jugerent d’abord que c’étoit un faux nom ; maïs bien: tôt après ils crurent rencontrer dans fon ftyle les ca- raéteres du fiecle d’Augufte , & per{onne n’en doute aujourd’hui, Phedre eft devenu ‘un de nos précieux auteurs claffiques, dont on a fait plufeurs traduc- tions françoifes & de très - belles éditions latines, ! publiées par les foins de MM. Burman & Hoopgftra- ten, en Hollande, depuis l'édition de France à lu- fage du Dauphin. ru Après Phedre, Rufus Feftus Aviénus , qui vivoit fur la fin du jv. fiecle, fous l’empite de Gratién, nous a donné des fables en vers élésiaques | & les à dé- diées à Théodofe l’ancien, qui eft le même que Ma- crobe."Mais les fables d’'Aviénus font bien éloignées de la beauté & de la grace de celles de Phedre; ou- tre qu’elles ne paroïffent guere propres aux enfans, s'ileft vrai, comme le penfe Quintilien, qu’il ne leur faut montrer que les chofes les plus pures & les plus exquifes. Faerno (Gabrieli), natif de Crémone en Italie, poëte latin du xvj. fiecle ,. mort à Rome en 1567, s’eft attiré les louanges de quelques favans,: pour avoir mis les fables d'Efope en diverfes fortes de vers ; mais il auroit été plus eftimé,, dit M. de Thouw, s’il n’eût point caché le nom de Phedre, fur lequel il s’étoit formé, ou qu'il n’eût pas fupprimé fesécrits, qu'il avoit'entre les mains. Vainement M. Perrault a traduit les fables de Faërno en françois ; fa traduc- tion qui vit le jour à Paris en 1699, eft entigrement tombée dans l’oubli. Je n’ai pas fait mention jufqu’ici de deux fabuliffes. grecs nommés Gabrias &t Aphthon, parce que Le petit détail qui les concerne, eft plûtôt une affaire d’éru« dition que de goût. Au refte les curieux trouveront dans la Bibliotheque de Fabricius tout ce qui regarde ces deux auteurs ; j’ajoüterai feulementque c’eft du premier que veut parler Lafontaine, quand il dit : Mais fur-tout certain Grecrenchérir, & fe pique D'une élégance laconique : Il renferme todjours fon conte en quatre vers, Bien ou mal; je le laile & juger aux experis. - Si quelqu'un me reprochoit encore mon filence à l’épard de Locman, dont les fables ont été publiées en arabe & en latin par Thomas Erpenius , je lui . ferois la même réponfe, & je le renverrois à la 3 354 F A B bliotheque de d'Herbelot , à lHiffoire orientale lHot- tinger, ou à d’autres érudits, qui ont difcuté lincer- titude de toutes les traditions qu’on a débitées fur Le compte de ce fabulifle étranger. Mäis Pilpay ou Bidpay paroiît plus digne de nous artêter un moment. Quoique ce rare efprit ait gou- verné l’Indoftan fous un puiflant empereur, 1l n’en étoit pas pour cela moins efclave ; car les premiers miniftres des fouverains, & fur-tout des defpotes, le font encore plus que leurs moindres fujets : auffi Pilpay renferma fagement fa politique dans fes fa- bles, qui devinrent le livre d’état & la difcipline de lIndoftan. Un roi de Perfe digne du throne , prevenu de la beauté des maximes de l’auteur, envoya re- cueillir ce thréfor fur les lieux, & fit traduire l'ou- vrage par fon premier medecin. Les Arabes lui ont aufñ décerné l'honneur de la traduétion, & il eft de- meuré en poffeffion de tous Les fuffrages de POrient. Paccorderois volontiers à M. de la Morhe que les fa- bles de Pilpay ont plus de réputation que de valeur ; qu’elles manquent par le naturel, lPunité & la jui- teffe des penées ; & que de plus elles font un com- pofé bifarre d'hommes & de génies dont les avantu- res fe croifent fans cefle. Mais d’un autre côté Pilpay eft inventeur, 8 ce mérite compenfera tobjours bien des défauts. Enfin le célebre Lafontaine a paru pour effacer tous les fzbulifles anciens & modernes ; j’ofe mê- me y:comprendre Efope & Phedre réunis. Si le Phry- gienala premiere gloire de l'invention, le François a certainement celle de l’art de conter , c’eft la fecon- de; & ceux qui le fuivront, n’en acquerront jamais une troifieme. Envain un excellent critique des amis de Lafon- taine, M. Patru, voulut le difluader de mettre fes fables en vers ; envain il lui repréfenta que leur prin- cipal ornement étoit de n’en avoir aucun; que d’ail- leurs la contrainte de la poéfie, jointe à la févérité de notre langue , l’embarrafferoit continuellement, & banniroit de la plüpart de fes récits la briéveté, qu’on peut en appeller l'ame, puifque fans elle il faut néceflairement que la fable languifle. Lafontaine par fon heureux génie furmonta tous ces obftacles, & fit voir que les graces du laconifme ne font pas tellement ennemies des mufes françoifes, que l’on ne puifle dans Le befoin les faire aller enfemble. Nourrides meilleurs ouvrages du fiecle d’Augufte, de ne cefloit d'étudier, tantôt 1l a répandu dans es fables une érudition enjouée, dont ce genre d’é- crire ne paroïfloit pas fufceptible ; tantôt, comme dans le payfan du Danube, il a faifi le fublime de l’é- loquence. Mille autres beautés fans nombre quinous enchantent & nous intéreflent, brillent de toutes parts dans fes fables ; & plus on a de goût, plus on eft éclairé, plus on eft capable de les fentir. Quelle admirable naïveté dans le ftyle & le récit ! Combien d’efprit voilé fous une fimplicité apparente | Quel naturel ! quelle facilité de tours &t d'idées ! quelle connoïffance des travers du cœur humain ! quelle pureté dans la morale ! quelle finefle dans les expref- fions l quel coloris dans les peintures. Voyez l’arricle FABLE, où l’on a fi bien développéen quoi confifte le charme de celles de Lafontaine. Ce mortel, unique dans la carriere qu’il a courue, néàChâteau-Thierry en 1621, mort à Paris en 1605, eft le feul des grands hommes de fon tems qui n’eut point de part aux bienfaits de Louis XIV. Il yavoit droit par fon mérite & par fa pauvreté. Cet hom- me célebre, ajoûte M. de Voltaire, réunifloit en lui les graces, l’ingénuité, &cla crédulité d’un enfant: il a beaucoup écrit contre les femmes, & il eut toù- _ jours le plus grand refpe&t pour elles : 1l faifoit des vers licencieux, & il ne laïfla jamais échapper au- F A B. cune équivoque ; fi fin dans, fes ouvrages, fi fimple. * dans fon maintien & dans fes difcours , fi modefte dans fes produéhons , que M.de Fontenelle a dit plaï- famment que c’étoit par bêtife qu'il préféroit les fa=, . bles des anciens aux fiennes ; en effet il a prefque . toûjours furpañlé fes originaux, fans le croire &r fans. _ s’en douter. | .… Il a tiré d'Efope, de Phedre, d’Aviénus, de Faër- ne, de Pilpay, & dequelques autres écrivains moins connus , plufeurs de fes fujets ; mais comment les. rend-t-1l ? toujours en les ornant & les embelliffant , au point que. tontes les beautés font. de lui, & les. défauts, s’il y ena, font des autres. Par exemple, le fond de la fable intitulée, Ze meénier, Jon fils & l’äne, eft empruntée de lagafo de Frideric Widebra- me, que Dornavius a donné dans l’arphitheatrune Japientie focraticæ, tom. I. pag. 502. 1n-fol. Hanovr. 1619. Dans l’auteur latin c’eft un récit fans grace , fans fel & fans fineffe ; dans le poëte françois c’eft ur chef-d'œuvre de l’art, une fable unique en fon genre, une fable qui vaut un poeme entier. Chofe étonnan- te ! tout prend des charmes fous la plume de cet aï- mable auteur, jufqu’aux inégalités &c aux négligen- ces de fa poëéfie. D'ailleurs on ne trouve nulle part. une façon de narrer plus ingémeufe , plus variée, plus féduifante ; & cela eft fi vrai, que fes fables font peut-être le feul ouvrage dont le mérite ne foit ni balancé ni contredit par perfonne en aucun pays du monde. | En un mot, le beau gémie de Lafontaine lui a fait rencontrer dans ce genre de compoñtion mille 8 mille traits qui paroiflent tellement propres à fon fujet, que le premier mouvement du leéteur eft de ne pas douter qu'il ne les trouvât auffi-bien que lui: C’eft-à vraiflemblablement une des raifons qui ont engagé plufeurs poëtes à l’imiter ; & tous , fans en excepter M. de la Mothe, avec trop peu de fuccès. Nous ne prétendons pas nier qu'il ne fe trouve dans les fables de ce dernier écrivain, de la juftefle, une compoftion réguliere, une invention ingémieufe, quantité d'excellentes tirades , d’endroits pleins d’ef- prit, de fineffe & de délicatefle ; mais il n’y a point ce beau naturel qui plait tant dans Lafontaine. M. de la Mothe n’a point attrapé les graces fimples & ingénues du fzb/ier de madame de Bouillon; il femble qu'il réfléchifloit plus qu'il ne penfoit, & qu'il avoir plus de talent pour décrire que pour peindre. Foyez encore à ce fuet l’article FABLE. | On loûa exceffivement celles de M. dela Mothe, lorfqu’il les récita dans les affemblées publiques de l’Académie Françoiïle ; mais quand elles furent im- primées, elles ne foûtinrent plus les mêmes éloges. Quelques perfonnes fe fouviennent encore d’avoir oui raconter qu’un de fes plus zélés partifans avoit donné à fon neveu deux fables à apprendre par. cœur, l’une de Lafontaine, & l’autre de la Mothe. L'enfant , âgé de fix à fept ans, avoit appris promp- tement celle de Lafontaine, & n’avoit jamais pü re- tenir un vers de celle de la Mothe, Il ne faut pas croire que le public ait un caprice injufte , quand il a improuvé dans les fables de la Mo- the des naïverés qu'il paroît avoir adoptées pour toû- jours dans celles de Lafontaine : ces naïvetés ne font point lesmêmes. Que Lafontaine appelleunchat qui eft pris pour juge, /4 maj efté fourrée,cette épithete fait une image fimple, naturelle & plaante, mais que M. de la Mothe appelle un cadran r greffier foluire, cette idée alambiquéerévolte, parce qu'elle eft fans juftefle 8 fans graces. | Je fuis bien éloigné de faire ces réflexions pour jetter le moindre ridicule fur le mérite diftingué d’un homme des plus eftimables que la France ait eus dans les Lettres , & dont l’odieufe envie n’a püù termir la gloire. M. Houdart de la Mothe, mort fexagénaire à Parisen 1731, après avoir eu le malheur d’être privé de l’ufage de fes yeux dès l’âge de vingt-quatre ans, ® étoit un efprit très-pénétrant, très-étendu ; un écri- vain fécond &r délicat ; un modele de décence, de politeffe & d’honnêreté dans la critique. Ses ouvra- ges , en grand nombre , font remplis de beautés , de goût & d’érudition choifie, Enfin les fables même qu’il a publiées, indépendamment des autres mor- ceaux excellens qui nous reftent de lui en pluñeurs genres, empêcheront toüjours qu'on n’ofe le mettre au rang des auteurs médiocres. Te Je ne dirai rren de nos voifins ; le talent de conter fupérieurement n’a point pañlé chez eux, ils n’ont point de fabuliffes, Je fai bien que le poëte Gaï a fait en anglois des fables eftimées par {a nation, & que Geller, poëte faxon, a publié des fables & des con- tes qui Ont eu beaucoup de fuccès dans fon pays ; mais les Anglois ne regardent les fables de Gai que comme fon meilleur ouvrage , & les Alle- mands même reprochent à Geller d’être monotone & difus. Je doute que ce qui manque à lun pour être excellent, 8 que deux défauts auffi confidérables que ceux qu'on reconnoit dans l’autre, puiffent être rachetés par.la pureté du ftyle, la délicateffe des penfées , &c les fentimens d’amour & d'amitié qu’on dit que celui-ci a fü répandre dans ce genre d'ouvra- ges ; &c par la force de l’expreffion, & la beauté de la morale & des maximes qu’on accorde à celui-là, “rricle de M. le Chevalièr DE JAUCOURT. . FAÇADE, ff. (Archir.) c’eft le frontifpice ou la firuéture extérieure d’un bâtiment. On dit le fronif _ picé d’une églife, d’un temple, d’un monument pu- blic, &é. On dit la façade du côté des jardins, du côté de la rue, de la cour, du grand chemin, &c. On appelle encore façade latérale, le mur de pignon ou le retour d’un bâtiment ifolé, C’eft par la déco- ration de la façade d’un édifice, que l’on doit juger de importance de ce dernier, du motif qui l’a fait élever, & de la dignité du propriétaire: c’eft par {on ordonnance que la capacité d’un architeéte fe ma mifefte, & que les hommes intelligens jugent de la relation qu'il a fù obferver entre la diftribution des dedans, & celle dés dehors, & de ces deux parties avec la folidité. L'on peut dire que la façade d’un bâ- timent eff à l'édifice, ce que la phyfionomie eft au corps humain : celle-ci prévient en faveur des qua- lités de l’ame; l’autre détermine à bien juger de lin- térieur d’un bâtiment. Mais, de même qu’un pein- tre , un fculpteur doit varier les expreffions de {es figures, afin de ne pas donner à un. foldat le carac- tere d’un héros, n1 aux dieux de la fable , des traits qui tiennent trop de l'humanité ; il convient qu'un architeéte fafle choix d’un genre de décoration, qui défigne fans équivoque les monumens facrés, les édifices publics, les maifons royales, & les demeu- res des particuliers ; attention que nos modernes ont trop négligée jufqu’à préfent. Tous nos fronti{- pices,, nos façades extérieures portent la même em- preinte : celles de nos hôtels font revêtues des mê- mes membres d’architeure, & l’on y remarque les mêmes ornemens qui devroient être refervés pout nos palais ; négligence dont il réfulte non-feulement un défaut de convenance condamnable , mais enco- reune multiplicité de petites parties, qui ne produi- fent le plus fouvent qu'une architeéturé mefquine, & un defordre dont e reflentent prefque toutes les produétions de nos jours , fans excepter les temples confacrés à la Divinité. Malgré l'abus général dont nous parlons, nou- allons citer les frontifpices & Les fzçades de nos bâ- timens françois les plus capables de fervir d’autoti tés, & dont les compofitions font lés plus exemptes des défauts que nous reprochons ici. De ce nombre font ; la façade du Louvre du côté de Saint-Germain F À C 355 PAuxerrois, par Claüde Perault, pour.la décoration des palais des rois: la façade de Verfailles, du côté des jardins , par Hardoüin Manfard, pour les mai: fons royales : la fçade du château de Maifons > par François Manfart, pour les édifices de ce gente: là façade du côté de la cour de l'hôtel de Soubife, paf M, de la Mair, pour la demeure de nos grands fei- oneurs : la façade de la maïfon de campagne de M, de la Boïffiere, par M. Carpentier, pour nos belyés ders & nos jolies maifons de Campagne : les fagades de la mailon de M. de Janvri, fauxboure Saint-Ger: main, par M. Cartaut, POuf nos maïfons particus lieres : la façade du bâtiment de la Charité stue Ta ranne,par M. Deftouches, pournos maifons À loyer: le frontifpice de l’églife de Saint Sulpice, pat M, de. Servandoni, pour annOncer la grandeur & la maz gruficence de nos édifices facrés : celui des Feuillans du côté de la rue Saint. Honoré, pour la pureté de larchitedure, par François Manfart: celui de lé glife de la Culture de Sainte Catherine, pouf la fin: gularité, par le P. de Creil, Enfin nous terminerons cette énumération par la décoration de la porte de Saint - Denis , élevée fur les defleins de François Blondel, comme autant de modeles qui doivént fer: vir d'étude à nos architectes, attirer l’attention des amateurs, & déterminer le jugement de nos proprié- taires. Voyez la plus grande partie des façades que nous venons de citer, & les defcriptions qui en ont été faites, répandues dans les Avr volumes de L’Arz chitetlure françoife. Voyez auf les façades que nous donnons dans cet Ouvrage, PL, d’Architeëture. (P} FACE, (Anar) vifage de l’homme. Cette partié animée par le fouffle de Dieu, fuivant l'exprefion de Moyfe (Gez. ÿ. 7.), a des avantages très-confi- dérables fur celle qui lui répond dans les autres ani: maux, & qu'on appelle Éec, mufeau, ou hure, Voyez BEC, &c. Cicéron, Ovide, Silins Italicus, & plufieuts au tres, ont femarqué que l’homme feul de tous les ani: maux ; a la facetournée vers le ciel. Brown, Z 17. ch. J. de fon ouvrage fur les erreurs populaires, a dit Jà-deflus des chofes aflez curieufes, Foy, Brown’s Wofcks, p, me, 149-151. . M. de Buffon, dans le fééond tome de fon hiffoire na: iurelle, a exprimé parfaitement les traits cara@térif= tiques qui péignent les pañlions fortes par le change: ment de la phyfonomie. Si l’on confidere combien les pafñions ont de degrés & de combinaïfons diffé rentes, fi l’on obferve enfuite que chaque modifica= tion des mouveméns de l’ame eft reconnoiïflable à des ÿeux exercés on fera étonné de la diverfté pro- cigieufe des mouvemens , dont les mufcles de la face {ont fufceptibles, Voyez Paysronomie. , On juge encore du tempérament ; & prefque des mœurs êc du caraétere d’efprit, par l’infpettion des rides du front. Le principe de cet art, dont Pappli= cation paroît fort vaine, a été fingulierement défens du par M. Lancif, dans une differtation qui eft à la tête du Thearrum arar. de Manget. Foy. Métopos- COPIE. AIT Les Anatorifles font aflez d’accord fur l’expoñ- tion des os de la face ; mais ils different extrèmement dans les defcriptions des mufeles de cette parties Celles de Santorini font trèsremarquables, Obferr. añat, chap. 7. Voyez les articles particuliers des os & des muicles de la face ; comme MAxILLAIRE , Mas« SETER, Ge, - °. FN : On difingnela face en partie fapérieure ou front, & en partie mférieure, Enfinon fe fert du mot face, $ k ‘ » Fa | pour exprimet le Côté fupérieur, antérieur, 6, de différentes parties du corps. (£) _ Face, (Sérméiorique.) Voyez VisAGe, | : Face hippocratique , voyez VISAGE HiPPOCRATIS QUE: k 350 F À C sénéral un des FACE, f. f. en Géomér. défigne en 5 plansqui compofent la furface d’un polyhedre : ainfi on dit que l’hexahedre à fix faces. PV. POLYHEDRE. La face ou le plan fur lequel le corps eft appuyé, ou fuppofé appuyé, eft appellée proprement fa Pa/e, & les autres plans gardent le nom de face. Chacune des faces peut fervir de bafe, ou être fuppofée fervir de bafe. Cependant lorfqu’un corps eft long & étroit, comme un obélifque , on prend pour bafe a face la moins étendue. (0) * FACE, (Æffrol, jud. & Divinar.) c’eft la troifie- me partie de chaque figne du zodiaque, que les Af- trolôgues ont regardé comme compofé de 30 degrés. Ils ont divifé ces 30 deprés en trois. Les dix premiers degrés compofent la premiere fuce; les dix fuivans, la feconde ; & lesdix'autres, la troifieme face. Ils ont enfuite rapporté ces faces aux planetes , & ils ont dit que Vénus cotrefpondoit dans telle circonftance à la troifieme face du Taureau, c’eft-a-dire qu’elle étoit dans les dix derniers degrés de ce figne.On voit bien quetontes ces idées font arbitraires, &c que fi l’Aftro- logie fonde fes prédi@ions fur ces divifions, il ne faut que les connoître un peu pour être defabufés. Quand on conviendroit qu’en conféquence de la liai- {on, qui eft néceflairement entre tous les êtres de l'U- nivers, il ne feroit pas impofhble qu'un effet relatif au bonheur ou au malheur de l’homme, dûüt abfolu- ment co-exifter avec quelque phénomene célefte, ‘enforte que l’un étant donné, autre réfultât ou fui- vit toours infailliblement; peut-on jamais avoir un aflez grand nombre d’obfervations pour fonder en pareil cas quelque certitude ? Ce qui doit ajoü- ter beaucoup de force à cette confidération , c’eft que toute la durée de nos obfervations en ce genre ne fera jamais qu'un point, relativement à la durée du monde, antérieure & poftérieure à ces obferva- tions, Celui qui craindroit, lorfque le Soleil defcend fous Fhorifon, que la nuit qui approche ne fût fans fin, feroit regardé comme un fou: cependant je voudrois bien que l’on entreprit de déterminer le nombre des expériences fufhfant pour ériger un éve- nement en loi uniforme & invariable de l'Univers, lorfqu’on n’a de la conftance de l’évenement aucu- ne démonftration tirée de la nature du méchanifme, & qu'il ne refte, pour s’en aflüirer, que des obfèr- vations réiterées. | FACE D'UNE PLACE, (Forrificar.) c’eft la même chofe que le fronr d’une-place: c’eft un de fes côtés, compolé d’une courtine &z de deux demu baftions. Voyez FRONT. | , ‘+ Lorfqw’on veut attaquer une place, 1l eff très-im- portant d’en bien connoître les différentes faces, ou les diférens fronts, afin d'attaquer le plus foible ou celui qui donne le plus de facilité pour les appro- ches, & pour y faire arriver Les munitions commo- dément, Voyez ATTAQUE. (Q)° | FACEs (/es) d’un ouvrage de Fortification , font en général les deux côtés de l’ouvrage les plus avancés vers la campagne, ou le dehots de la place. . Ainfi les faces du baftion font les deux côtés qui forment un angle faillant du côté de la campagne; elles font par leur pofition les plus expofées de tou- £es les parties de l’enceinte, au feu de l’ennemi ; & comme elles ne font d’ailleurs défendues que par le flanc du baftion oppofé , elles font les parties les plus foïbles du baftion, ou de l’enceinte des places forti- fées : c’eft par cette raïfon que Pattaque du baftion de fait'par lès faces ; on y fait breche ordinairement vers le milieu ou lettiers, à compter de l’angle flan- qué ; on fe trouve par-là en état , lorfqu’on s’eft éta- bli fur la breche, d'occuper plus promptement tout l'intérieur du baftion. foy. ATTAQUE DU BAsTION. Les.faces du baftion doivent avoir au moins 35 ou 40 toifes, afin que le baftion ne foit pas trop pe- tit. On les trouve bien proportionnées à so ; parce qu’elles donnent alors le baftion d’une grandeur rai- onnable, Lorfqw’elles doivent défendre quelqu’ou- vrage au-delà du foflé , al faut qu’elles ayent la lon- gueur néceflaire pour les bien flanquer; elles ne doi- vent point être trop inclinées vers la courtine, afin de défendre plus avantageufement ou moins obli- quement l’approche du baftion, Les faces de la demi-lune, des contre-pardes, des tenaillons ou grandes lunettes, 6c, font de même les deux côtés de ces ouvrages qui forment un angle vers la campagne ; ainf que celles des places d’ar- mes du chemin couvert. Ces dernieres devroient avoit toûjours 15 ou 20 toifes, afin de rendre les places d’armes plus grandes, & de pouvoir flanquer plus avantageufement les branches ou les côtés du Chemin couvert , qui en font flanqués ou défendus. Voyez CHEMIN COUVERT & PLACES D’ARMES DU CHEMIN coUvERT. (Q) l FACE, (Arts, Deffein, Sculpture, Peinture.) nom donné par les Deffinateuts À une dimenfion du corps humain, pour fixer les juftes proportions que ces parties doivent avoir enfemble, à Pour cet effet, les Deflinateurs divifent ofdinai- rement la hauteur du corps en dix parties égales, qu'ils appellent faces en terme d’art ; parce que la face de l’homme a été le premier modele de ces me- fures. On diftingue trois parties égales dans chaqué face, c’eft-à dire dans chaque dixieme partie de la hauteur du corps: cette feconde divifion vient de celle que lon a faite de la face humaine en trois par- ties égales. La premiere commence au-deffus du front , à la naïffance des cheveux, & finit à la raci- ne du nez; le nez fait la deuxieme partie de la faces & la troifieme, en comménçant au-deflous du nez ;; va jufqu’au-deflous du menton. Dans les mefures du refte du corps, on défigne quelquefois la troifieme partie d’une face, ou une trentieme partie de toute la hauteur, par le mot de #ez, ou de longueur du nez, La premiere face dont nous venons de paler, qui eft toute la face de l’homme, ne commence qu'à la naïflance des cheveux, qui eft au - deflus du fronit 5 depuis ce point jufqu'au fommet de la tête, il y a encore un tiers de face de hauteur, ou, ce qui eft la même chofe, une hauteur égale à celle du nez: ainft depuis le fommet de la tête jufqu’au-bas du men- ton, c’eft-ä-dire dans la hauteur de la tête , 11 y a une face & un tiers de face ; entre le bas du menton & la foffette des clavicules, qui eft au-deffus de la poi- trine , il y a deux tiers de face: ainf la hauteur de- puis le deffus de la poitrine jufqu’au fommet de la tête, fait deux fois la longueur de la face ; ce qui eft Ja cinquieme partie de toute la hauteur du corps. Depuis la foffette des clavicules jufqu’au-bas des mammelles,on compte une face : au-deflous des mam- melles commence la quatrieme face, qui finit au nombril, & la cinquiemerva à l'endroit où fe trouve la bifurcation du tronc ; ce qui fait en tout la moitié de la hauteur du corps. On compte 2 faces dans la longueur de la cuiffe jufqu’au genou ; le genou fait üne demi face, Il y a 2 faces dans la longueur de la. jambe , depuis le bas du genou jufqu’au coup-de-pié, ce qui fait en-tout neuf faces &c demie ; & depuis le coup-de-pié jufqu’à la plante dupié, 1l y a une de- mi-face , qui complete les dix faces, dans lefquelles on a divilé toute la hauteur du corps. Cette divifion a été faite pour le commun des hommes ; mais pour ceux qui font d'une taille haute & fort au-deflus du commun, il:fe trouve environ une demi- face de plus dans la partie du corps, Qué eft entre les mammelles & la bifurcation du tronc: c’eft donc cette hauteur de furplus dans cet endroit du corps qui fait la belle taille. Alors la naïfance de la bifyrcation dutronc ne fe rencontre-pas précifément | au au mieu de la hauteur du corps, mais un pet au- deflous. . Lorfqu’on étend les bras, de façon qu'ils foient tous deux fur une même ligne droite & horifontale, la diftance qui fe trouve entre les extrémités des grands doigts des mains, eft égale à la hauteur du corps. Depuis la foffette qui eft entre les clavicules jufqu’à l’emboîture de l’os de l'épaule avec celui du bras, il y a une face : lorfque le bras eft appliqué: contre le corps &c plié en-avant, on y compte qua- tre faces ; favoir deux entre l’emboîture de l’épaule & l'extrémité du conde, & deux autres depuis coude jufqu’à la premiere naïffance du petit doigt, ce qui fait cmq faces ; & cinq pour le côté de l’autre bras, c’eft en tout dix faces, c’eft-à-dire une longueur égale à toute la hauteur du corps, | Ilrefte cependant à l’extrémité de chaque main la longueur des doigts, qui eft d'environ une demi-f4- ce ; mais iL faut faire attention que cette demi-face fe | 2 | se perd dans les emboîtures du coude & de l'épaule, lorfque les bras font étendus. | … La main a une face de longueur ; le pouceauntiers de face, ou-une longueur de nez, de même que le plus long doigt du pié; la longueur du deffous du pié eft égale à une fixieme partie de la hauteur du corps en entier. ! Si l’on vouloit vérifier ces mefures de longueur fur un feul homme, on les trouveroit fautives à plufieurs égards ; parce qu'on n'a rien obfervé de parfaitement exaét dans le détail des proportions du corps humain. Non-feulement les mêmes patties du corps n’ont pas les mêmes dimenfions proportion- nelles dans deux perfonnes différentes, mais fouvent dans la même perfonne , une partie n’eft pas exaéte: ment femblable à la partie correfpondante : parexém- ple, fouvent le bras ou la jambe du côté droit, n’a pas exattement les mêmes dimenfions que le bras ou la jambe du côté gauche, &x, | Il a donc fallu des obiervations répétées pendant long-tems , pour trouver un milieu entre ces difé- rences, afñn-d’étabhr au jufte les dimenfions des par: ties du corps humain, & de donner une idée des proportions qui font ce que l’on appelle Z2 belle na- ture. Ce n’eft pas, par la comparaïfon du corps d’un homme avec celui d’un autre homme, ou par des mefures aûuellement prifes fur un grand nombre de . fujets, qu’on a pü acquérir cette connoiffance; c’eft par les efforts qu’on a faits pour imiter & copier exac- tement la nature: c’eft à l’art du deffein qu'on doit tout ce que l’on peut favoir en ce genre, Le fenti- ment &c le goût ont fait ce que la méchanique ne pou- voit faire, on a quitté la regle .& le compas, pour s’en tenir au coup-d’œil; on a réalifé fur le marbre toutes les formes , tous les contours de toutes les par- ties du corps humain, & on°a mieux connu la na: ture pat la repréfentation , que par la nature même. Dès qu'il y a eu des ftatues,, on a mieux jugé de leur perfe&tion en les voyant, qu’en les mefurant. C’eft par un grand exercice de l’art du Deflein, &c par un fentiment exquis, que les grands ftatuaires {ont parvenus à faire fentir aux autres hommes les juftes proportions des ouvrages de la nature. Les anciens ont fait de fi belles flatues , que d’un com- mun accord on les a regardées comme la repréfen- tation exaéte du corps humain le plus parfait, Ces ftatues , qui n’étoient que des copies de l’homme, {nt devenues des originaux ; parce que ces copies n'étoient pas faites d’après un feul individu, mais d’après l’efpece humaine entiere bien obfervée, & fi bien vüe , qu’on n'a pü trouver aucun home dont le corps-füt aufli bien proportionné que ces fta- tues, C'eft donc fur ces modeles que l’on a pris les mefures du corps humain , telles que nous les ayons rapportées. | | _ Tome VE FAC 357 U feroïit éncote bien plus difficile de déterminer les mefures de la groffeur des différentes parties du Corps ; l’embonpoint ou la maigreut change fi fort ces dimenfions, & le mouvement des mutcles les fait varier dans un f grand nombre de pofitions ; qu'il eft prefque impoñible de donner là-deflus des réfultats fur lefquels on puife compter; Telles font les réflexions judicieufes que M. dé Buffon a jointes aux divifions données par les defli- nateurs de la hauteur & de la largeur du corps hi main, pour en établir les proportions. Voyel'article PROPORTION. Voyez fon ÆfE. nat, tom. LI, p. 545, 17-4°, Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FACE, ez Mujique:, eft une combinaifon ; Où des fons d’un accord, en commençant par celui qu’on veut, & prenant les autres felon leur fuite naturelle ou celle des touches duclavier qui forment le même accord: d’où 1l fuit qu'un accord a autant de faces poffibles, qu'il y a de {ons qui le compofent ; car chacun peut être le premier à fon tour, L'accord parfait we, mi, fol; a trois faces: Par a premiere ur, mi, fol, tous les doigts fon rangés par: tierces, & la tonique eft fous le premier. Par la fe conde mi, fol,-ut, il y a une quarte entre les deux derniers doigts, & la tonique eft fous le troifieme. Par la troïfieme fo/, u4, mi, la quarte eft entre les deux premiers doigts, & la tonique eft fous celui dn milieu, Voyez RENVERSEMENT. Comme les accords diffonnans ont ordinairement. quatre fons , ils ont auf quatre faces , qu’on peut trouver avec la même facilité. Foy. Dorcrer. (S) … FACE, er terme d’Architeëture , eftun membre plat ce a beaucoup de largeur & peu de faillie, Telles ont les bandes d’une architrave, d’un larmier, &c. Voyez BANDE. (P) FACE , (Manege.) terme qui dans notre art figni- fe la même chofe que celui de chamfrin. Nous em- ployons l’un & l’autre pour défigner fpécialement tout l’efpace , qui, depuis les fourcils ou le bord in: férieur des falieres, repne jufqw'à l'endroit où les-os du nez terminent inférieurement leur trajet. Les chez vaux dont le chamfrin eft blanc , c’eft-à-dire dont l'étoile on la pelote, qui eft fituée au milieu du front, fe propage & s'étend en forme de bande jufqu’aux nafaux, {ont appellés Be/le face. L’épithete prouve fans doute que cette marque a été confidérée comme un trait de beauté dans l'animal. Quoique nous ayons confervé cette expreffion, nous n'adoptons pas una- rimement les idées des anciens À cet égard; nous nous croyons fondés à rejetter aufli celles awäls {e {ont formées de la bonté,du bonheur ou du malheur, de la franchife ou de lindocilité du cheval , relati- vement à l’exiftence ou à la non-exiftence de cette bande de poils blancs, à fa non-interruption ou à fa difparition dans certaine étendue, à fon plus où moins de prolongement fur la levre antérieure, qui,noyée: ou recouverte entierement de ces mêmés poils ,. conftitue le cheval qui boit dans le blanc, dans Le lait. L’ignorance érigea les conjeêtures de ces premiers obfervateurs en maximes; & s'il eft éncoré parmi nous une foule de perfonnes qui Les honorent de ce nom, n’en accufons que laveuglement avec lequel elles fe livrent au penchant qui les porte à encenfer des erreurs, tellement accréditées par lé tems & par le préjugé, qu’elles tfiomphent dela vérité même. On exclut avec foin des haras les étalons & les ju= mens Pelle face, par la raïfon qu’ils fourniroient trop de blanc, & que les poulains qu'ils ptoduiroïent , pourroient en être entächés d’une maniere très-def- agréable à. la vüe; (e) toile ARTS . FACES DE PIGNON , sérme d’Horlogerie, ce {ont. les plans ou côtés qui terminent l’épaifleur d’un pi. gnon, Les Horlogers poliffent ordinairement celles qui font expolées à la vüe. Pour qu’elles os bien ù L z 358 FAC faités, 1 faut qu’elles foient fort plates , & bien bril- lantes : comme cela eft aflez difficile à exécuter, on a imaginé un imftrument ou outil, pour Îes adoucir &c les polir. Voyez l'article fuivant OUTIL A FAIRE DES FACES ; voyez auffi PIGNON, &c, (T) FACES, (outil a faire des) Horlogerie; c’eft un inf- trument dont les Horlogers fe fervent pour polir les faces des pignons. La tige du pignon pañle au-travers' du trou qui eft au milieu de la piece ?, contre la face du pignon. On applique cette partie P enduite des matieréS néceflaires pour la polir ou l’adoucir, & on la tient par la zones, Il faut fuppofer qu'on fait tour- ner le pignon tout comme un. foret; & qu’on ap- puie l’outil contre fa face, de même qu’on appuie la piece à percer contre le foret. Cette piece P étant mobile furles deux points #, z de la zone ou anneau z ; 8 cet anneau étant mobile de même fur les points 0, 0 de laizone $, fixés à angles droits avec les pre- miers #, #, 1 s”enfuit que fi la main vacille dans l’opé- ration, la face du pignon ne s’en polira pas moins plate, ces différentes zones obéiffant en tout fens à tous les mouvemens qu’on pourroit faire, & la pla- que P frotant par-là tojours également fur toutes les parties de la face P, tant près du centre que vers les extrémités. Voyez FACES DE PIGNON. (T°) FACE, PLATE-FACE , (Lurher.) c’eft dans le fût d'orgue les parties XLMN , Planc. I. fig. 1. placées entre les tourelles. Ces plares-faces font quelquefois bombées ou concaves, felon la volonté de celui qui donne le deffein de l’orgue. On doit faire enforte que les plates-faces correfpondantes foient femblables & fymmétriques ; que les tuyaux dont elles font rém- plies foient de même grandeur, & leurs bouches arrangées fymmétriquement ; enforte que fi celles des tuyaux d’une plate-face vont en montant d’un fens, comme, par exemple, de la partie latérale de l'orgue vers le mieu, celles de l’autre pla - face aillent en montant de l’autre partie latérale vers le milieu, où elles fe réuniroient fi elles étoient pro- longées ; ou bien elles font le chevron rompu, com- me dans la fig. r. auquel cas [a pare-face correfpon- dante doit être femblable. FACE D'OUTIL, serme d’ufage chez les Orfévres € autres Artifles. On appelle ainfi le bifeau d’un écho- pe formé fur la meule, & avec lequel on coupe. Faire ce hifeau fur la meule ou la pierre à l'huile, s'appelle faire La face de l'outil. FACENTE, £ f. (Géom.) eft le diminutif de face. Il fe dit des plans qui compofent la furface d’un po- lyhedre, lorfque ces plans font fort petits. Les auroirs & verres qui multiplient les objets, font taillées à facettes. Voyez VERRE À FAGETTES ou POLYHEDRE. (0) | _ FACETTES, en terme de Diamantaire, voyez PANS. * FACHEUX, adj: ( Gramm. ) terme qui eft du grand nombre de ceux par lefquels nous défignons ce qui nuit à notre bien-être : nous l’appliquons aux perfonnes & aux chofes. Si l’on fait à un commer- çant quelque banqueroute confidérable au moment où ileft preflé par des créanciers, la banquéroute eft un évenement fécheux; la conjonéture où il fe trouve eft fächeufe, fes créanciers font des gens f#- cheux. On voit par les fécheux de Moliere, qu’un f4- cheuxeftun importun qui furvient dans un moment intéreflant , occupé , où la préfence même d’ün ami eft de trop , 8 où celle d’un indifférent embarrafle & peut donner de l'humeur, quand elle dure. . FACIALE ; ér Anatomie, nom de la principale artere de la face. Haller: | ; FACIENDAIRE , f. m. (Æiff. eccléf[.) nom qu’on donne dans quelques maifons religieufes, à celui qui eftichargé dés commiflions de la maïfon. FACILE; adj. (Liriér. & Morale.) ne fignifie pas feulement une chofe aïfément faite, mais encore qui paroït l'être. Le pinceau du Correge eft facile, Le ftyle de Quinaut eft beaucoup plus facile que celui de Defpréaux , comme le ftyle d’Ovide l’emporte en facilité fur celui de Perfe. Cette facilité en Pein- ture, en Mufique, en Éloquence, en Poëéfie, con- fifte dans un naturel heureux , qui n’admet aucun tour de recherche, &c qui peut fe pafler de force & de profondeur. Aïnfi les tableaux de Paul Veronefe ont un air plus facile & moins fini que ceux de Mi chel-Ange. Les fymphonies de Rameau font fupé- tieures à celles de Lulli, & femblent moins faciles. ofluet eft plus véritablement éloquent & plus facile que Flechier. Rouffeau dans fes épîtres n’a pas à beaucoup près la faciliré 8 la vérité de Defpréaux. Le commentateur de Defpréaux dit que ce poëte exaét & laborieux avoit appris à lilluftre Racine à faire difficilement des vers ; & que ceux qui paroif- fent faciles , font ceux qui ont été faits avec le plus de difculté, Il eft très- vrai qu'il en coûte fonvent pour s'exprimer avec clarté : il eft vrai qu'on peut arriver au naturel par des efforts ; maïs il eft vrai auffi qu'un heureux gémie produit fouvent des beau- tés faciles fans aucune peine, & que l’enthoufiafme va plus loin que l’art. La plüpart des morceaux paf fionnés de nos bons poëtes , font fortis achevés de leur plume, & paroïffent d'autant plus fczZes qu'ils ont en effet été compofés fans travail : imagination alors conçoit & enfante aifément. Il n’en eft pas ainf dans les ouvrages didactiques : c’eft-là qu’on a befoin d’art pour paroître facile, Il y a, par exemple, beau- coup moins de faciliré que de profondeur dans l’ad- mirable effai fur l’homme de Pope, On peut faire fa- cilement de très-mauvais ouvrages qui n’auront rien de gêné, qui paroîtront faciles, & c’eft le partage de ceux qui ont fans gémie la malheureufe habitude de compofer, C’eft en ce fens qu'un perfonnage de l’an- cienne comédie, qu'on nomme italienne, dit à un : autre : Tu fais de méchans vers admirablement bien. Le terme de facile eft une injure pour une femme : c’eft quelquefois dans la fociété une loïange pour un homme : c’eft fouvent uh défaut dans un homme d’érat. Les mœurs d’Atticus étoient faciles, c’étoit le plus aimable des Romains. La facile Cléopatre fe donna à Antoine aufli afément qu’à Céfar. Le facile Claude fe laiffa gouverner par Agrippine. Facile n'eft-là, par rapport à Claude, qu'un adoucifle- ment, le mot propre eff foible. Un homme facile eft en général un efprit qui fe rend aifément à la raïifon, aux remontrances ; un cœur qui fe laïfle fléchir aux prieres : & foible eft celui qui laiffe prendre fur lui trop d'autorité. Article de M. DE VOLTAIRE. FACILITÉ , {. f. cerme de Peinture, Dansles Arts & dans les talens, la faczliré eft une fuite des difpo- fitions naturelles. Un homme né poëte répand dans fes ouvrages cette aïfance qui caraétérife le don que lui afait la nature. Voyez FACILE. L’artifte que le ciel a doùé du génie de la Peinture, imprime à fes couleurs la legereté d’un pinceau facile ; les traits qu'il forme font animés & pleins de feu. Eff-ce à la conformation &c à la combinaifon des organes que nous devons ces difpofitions qui nous entrainent comme malgré nous, & qui nous font furmonter les difficultés des Arts ? Eft-ce dans l’obfcurité des caufes phyfiques de nos fenfations que nous devons recher- cher Les principes de cette facilité? Quelle qu’en foit la fource, qu'il feroit avantageux de l’avoir affez ap- profondie pour pouvoir diriger les hommes vers les taleñs qui leur conviennent, pour aider la nature, & pour faire de tant de difpofitions fouvent igno- rées ou trop peu fecondées , un ufage avantageux au bien général de l’humanité ! Au refte la fzciliré feule, en découvrant des difpofitions marquées pour un f talent, ne peut pas conduire un artifle à la perfec- tion ; 1l faut que cette qualité foit fufceptible d’être dirigée par la réflexion, On naît avec cette heureufe aptitude ; mais il faudroit s’y refufer jufqu’à ce qu’on eût préparé les matériaux dont elle doit faire ufage. Il faudroit enfin qu’elle ne fe développât que par de- grés, & c’eft lorfque la fucilise eft de cette rare efpe- ce, qu'elle eft un für moyen pour arriver aux plus grands fuiccès. Et qu'on ne croye pas que la patience & le travail puiflent fubvenir abfolument au défaut de facilité: non. SiPun & l’autre peuvent conduire par une route pénible à des fuccès, il manquera toû- jours à la perfeétion qu'on peut acquérir ainfi, ce qu’on defire à la beauté, lorfqw’elle n’a pas le char- me des graces. On admire dans Boileau la raifon for- tifiée par un choix laborieux d’expreflions juftes & préciles. Bien moins captif, le talent divin & facile de Lafontaine touche à-la-fois l’efprit & Le cœur. La faciliré dont je dois parler ici, celle qui regarde particulierement l’art de la Peinture , eff de deux ef- peces. On dit facilité de compofition, & le fens de cette facon de s’exprimer rentre dans celui du mot génie ;.cat un génie abondant eft le principe fécond qui agit dans une compofition facile : fl faut donc remettre à en parler lorfqu’il fera queftion du mor GÉNIE. La feconde application du terme facr/ire eft celle qu’on en fait lorfqu'on dit wr pinceau facile ; c’eft l’expreflion de l’aifance dans la pratique de l’art. Un peintre, bon praticien, affüré dans les principes du clairobfcur, dans l'harmonie de la couleur, n’hé- fite point en peignant ; fa broffe fe promene hardi- ment, en appliquant à chaque objet fa couleur lo- cale. Il unit enfemble les lumieres & les demi-tein- tes ; il joint celles-ci avec les ombres. La trace de ce pinceau dont on fuit la route, indique la liberté, la franchife , enfin la faciliré. Voilà ce que préfente l’idée de ce terme, &c je finis cet article en hafardant le confeil de fe rendre févere & difficile même dans les études par lefquelles on prépare les matériaux de l'ouvrage ; mais lorfque la réflexion enafixéle choix, de donner à l'exécution du tableau cet air de liberté, cette facilite d'exécution quiajoute au mérite de tous les ouvrages des Arts. Article de M. WATELET. * FAÇON, f. m. (Gramm.) Ce terme a un grand nombre d’acceptions différentes. Il fe dit tantôt d’une mamiere d’être, tantôt d’une maniere d’agir. 7 ef? ha- billé d'une étrange façon : [es façons Jont étranges : les façons de cet ouvrage feront confidérables, la façon en ef? belle € fimple. Dans ces deux derniers exemples c’eft un terme d'art. Il embrafle dans celui-là, tout le travail ; il a rapport dans celui-ci, au bon goût. du travail. Quand on dit, cer ouvrage eff en façon d'è- bene, de marquererie ou de tabatiere, on veut faire en- tendre qu'on lui a donné ou la forme qu’on donne au même ouvrage quand on le fait d’ébene , ou celle qu'on remarque à: tout ouvrage de marqueterie en . général, ou la forme même d’une tabatiere, Façon {e rapporte aufli quelquefois à la maniere de travailler d'unartifte, ainfi que dans cet exem- ple : ces moulures, ces contours font à la façon de Ger- ain ; ou même à la perfonne, comme quand on dit, ce trait eff de votre façon; c’eft-à-dire , 7e crois qu'il efl de vous , tant il reffemble 4 ceux qui vous échappent. En Grammaire il eft fynonyme à our : cette façon de parler r’ejt pas ordinaire, Façons fe prend aufli pour une forte de procédés particuliers à un état : 2/ a sou- zes les façons durs galant homme : il ef? inutile d’avoir avec moi de mauvaifes façons : ces gens étoient mis d'une certaine façon : ils étoient d'une certaine façon. Des fa- gons où des formalités déplacées, font prefque la mê- me chofe : yous faites trop de façons : abrepez ces fa- gons-la. Une façon d’aftrologue , c’eft un homme qu’on feroit tenté de prendre pour tel, à des ridicu- les qui lui font communs, à lui & aux Aftrologues. _ Tome VI, F A C 359 La façon en eft mefquine & petite; mais on dit mieux le faire en Peinture (voyez FAIRE EN PEINTURE) : c’eft la maniere de travailler. La #1a/-façon eit une maniere de dire abregée parmi les Artiftes: vous en Payeriez la mal-façon, où la mauvaïle façon. Il y a beaucoup d’autres acceptions de façor, les précé- dentes font les principales. De façon que, de maniere que, {ont des conjonétions qui lient ordinairement la caufe avec l'effet ; la caufe eft dans le premier mem- bre, l'effet dans le fecond : 17 fe conduit de façon qu'il Je fit exclure de certe fociéré : où l’on voit que de façon que & de maniere que font dans plufieurs cas des conjonctions collectives, & qu’elles réfument toutes les différentes liaifons de la caufe avec l’effet. FAÇONS D'UN VAISSEAU , (Marine) On entend par ce mot, cette diminution qu’on fait À l'avant & à l’arriere du deflous du vaifleau; de forte que l’on dit Zes façons de l'avant & les façons de l'arriere, Va OyEZ MARINE, Planche I, (Z) * FAÇON, ( Faëure de bas au métier.) On appelle façon cette portion du bas qui eft figurée , & qui eft placée À l’extrémité des coïns. Il y a deux façons à chaque bas. Foyez & l'arcicle BAS, la maniere dont on les exécute. FACONNER, v. at. c’eft, ez Périflerie, faire au- deffus des bords d’une piece, quelle qu’elle foit, des agrémens avec le pouce de diftance en diflance. FACTEUR, f. m. ez Arithmérique 6 en Algebre, eft un nom que l’on donne À chacune des deux quan- tités qu'on multiplie l’une par l’autre, c’eft-à-dire au multiplicande & au multiplicateur, par la raifon qu'ils font & conftituent le produit. Voyez MULTI- PLICATION. .Engénéralonappelle, ez A/oebre , fatteurs les quan. tités qui forment un produit quelconque. Ainfi dans le produit 22cd,a,b,c, d, font les fatfeurs. Les facteurs s'appellent autrement dvifeurs, fur- tout ez Arithmétique, & lor(qu'il s’agit d’un nombre qu'on regarde comme le produit de plufeurs autres. Aïnfi 2, 3, font divifeurs de 12: & le nombre 12 peut être confidéré comnte compofé des trois faéeurs 2,2, 3, Gc. & ainf du refte. foye DIvIsEUR. Toute quantité algébrique de cette forme x" +a xt HbarT ?,.,.. +7, peut être divifée exattement par xx + px + q,p & q étant des quan- tités réelles; & par conféquent x x + px + 4 eft toûjours un fzéfeur de cette quantité. Je fins le premier qui aye démontré cette propofñtion. Foyez les mém. de l'acad. de Berlin, 1746. Voyez auff IMAGINAIRE, FRACTION RATIONNELLE, FQUATION, &c. La dificulté d'intégrer les équations différentielles à deux variables, confifte à retrouver le fx&eur qui a difparu par l'égalité à zéro. M. Fontaine eft le pre- mier qui ait fait cette remarque. F. INTÉGRAL. (O0) _FACTEUR, dans le Commerce , eft un agent qui fait les affaires & qui négocie pour un marchand par commifhion : on l’appelle auffi commiffionnaire: dans certains cas, courtier; &t dans l'Orient, coagis, com- mis. Voyez COMMISSIONNAIRE, COMMIS, Ec. La commiflion des fuéleurs eft d’acheter ou de vendre des marchandifes , & quelquefois lun & Pautre. Ceux de la premiere efpece font otdinairement établis dans.les lieux où 1l y a des manufadtures con- fidérables, ou dans les villes bien commerçantes. Leur fonction eft de faire des achats pour des mar- chands qui ne réfident pas dans le lieu, de faire em- baller les marchandifes, & de les envoyer à ceux pour qui ils les ont achetées. Les faéfeurs pour la vente font ordinairement fixés dans des endroits où on fait un grand commerce : les marchands & fabriquans leur envoyent leurs mar- chandifes, pour les vendre au prix & ne condi- z 1} 360 F À C tions dont ils les chargent dans les ordres qu'ils leur donnent. Les falaires & appointemens qu’on leur donne pour leur droit de vente, font communément af- franchis de toutes dépenfes de voiture, d'échange, des remifes , éc. excepté les ports de lettres, qui ne paflent point en compte. Voyez FACTORAGE. (G) FACTEUR fgnifie auffi celui qui tient les regiftres d’une meflagerie, qui a foin de délivrer les ballots, marchandifes, paquets atrivés par les chevaux, mu- lets, charrettes ou autres voitures d’un meflager ; a les fait décharger fur fon livre , & qui reçoit les droits de voiture , s'ils n’ont pas été acquittés au lieu de leur chargement. Voyez MEssacE € Mes- SAGERIE. Dictionn, de Commerce, de Trévoux , € Chambers, (G) L FACTEUR d’inffrumens de Mufique , eft un artifan ui fabrique des inftrumens de mufique, comme les Aéteurs d'orgues , de claveflins, &c. On appelle auffi faéfeurs, ces ouvriers qui fe tranf- portent dans les maïfons des particuliers qui les y appellent, pour accorder des inftrumens de mufique. Voyez INSTRUMENS DE MUSIQUE. . FACTICE, adje&t. (Gramm.) qui eft fait par art, qui n’eft point naturel. Les eaux diftillées font des liqueurs faéices. On diftingue le cinnabre en zaturel & en faiice. Voyez CINNABRE 6 MERCURE. FACTION, f. f. (Poliig. & Gram.) Le mot fac- tion venant du latin facere, on l’employe pour figni- fier l’état d’un foldat à fon pofte en faéon, les qua- drilles ou les troupes des combattans dans le cirque, les faélions vertes, bleues, rouges & blanches. Voyez FACTION , (if. anc.) La principale acception de ce terme fignifie #7 parti feditieux dans un étar, Le terme de parti par lui-même n’a rien d’odieux, celui de fzélion left toûjours. Un grand homme & un mé- diocre peuvent avoir aifément un parti à la cour, dans l’armée , à la ville, dans la Littérature. On peut avoir un partipar fon mérite, par la chaleur & le nom- bre de fes amus, fans être chef de parti. Le maréchal de Catinat, peu confidéré à la cour, s’étoit fait un grand parti dans l’armée , fans y prétendre. Un chef de parti eft toùjours un chef de fzéion : tels ont été le cardinal de Retz , Henri duc de Guiïfe, & tant d’autres. Un parti féditieux , quand il eft encore foible, quand il ne partage pas tout l’état , n’eft qu’une fac- tion. La faétion de Céfar devint bientôt un parti do- minant qui engloutit la république. Quand l’empe- reur Charles VI. difputoit l’'Efpagne à Philippe V. il avoit un parti dans ce royaume, & enfin il n’y eut plus qu’une faion ; cependant on peut dire toüjours Ze parti de Charles VT. Il n’en eft pas ainfi des hom- mes privés. Defcartes eut long-tems un parti en France, on ne peut dire qu'il eût une faéion. C’eft ainfi qu'il y a des mots fynonymes en plufieurs cas, qu ceffent de l'être dans d’autres. Article de M. DE VOLTAIRE, *FACTIONS, (Hiff. anc.) c’eft le nom que les Ro- mains donnoient aux différentes troupes où qua- drilles de combattans qui couroïent fur des chars dans les jeux du cirque. Voyez Cirque. Il y en avoit quatre principales , diftinguées par autant de cou- leurs, le verd, le bleu, le rouge, &le blanc ; d’où | on les appelloit /2 fadion bleue, la faition rouge, &c. L'empereur Domuitien y en ajoûta deux autres, la pourpre & la dorée; dénomination prife de l’étoffe ou de l’ornement des cafaques qu’elles portoient : mais elles ne fubffterent pas plus d’un fiecle. Le nombre des faifions fut réduit aux quatre anciennes dans les fpeétacles. La faveur des empereurs & celle du peuple fe partageoïent entre les fxéfions, chacune avoit fes partifans, Caligula fut pour la faëfoz verte, &t Vitellius pour la bleue: Il réfulta quelquefois de grands defordres de l'intérêt trop vif que les fpeéta- teurs prirent à leurs faéfions. Sous Juftinien , une guerre fanglante n’eñt pas plus fait de ravage ; il y ent quarante mille hommes de tués pour les fréons vertes & blenes. Ce terrible évenement fit fuppri- mer le nom de faéfion dans les jeux du cirque. FACTION , dans l'Art militaire; c’eft le tems qu'un foldat demeure en fentinelle : ainfi ére en faëion, fignifie étre en fentinelle. Voyez SENTINELLE. Un foldat en fentinelle eft auffi appellé f%o7- naire, Il y a des fatfionnaires pour la garde des dra- peaux, des faifceaux d’armes , des prifonniers, &c. P nee ATRE , . m. fe dit, dans un régiment. d'infanterie, du plus ancien capitaine , qui doit pafler à la place de capitaine de grenadiers lorfque cette compagnie vient à vaquer ; mais on lui ajoûte le nom de premier : ainfi le premier faéfionnaire dans un régiment d'infanterie, eft le plus ancien capitaine immédiatement après celui des grenadiers. (Q) FACTORAGE, f. m. (Comm.) Voyez FACTEUR, COURTAGE , Ec. | Le failorage ou les appointemens des faéteurs, qu’on nomme auf cormiffionnaires, varie fuivant les différens pays êc les différens voyages qu'ils font obligés de faire. Le plus commun eft fixé à 3 pour 100 de la valeur des marchandifes, fans compter la dépenfe des emballages, qu’il faut encore payer in- dépendamment de ce droit. A la Virginie, aux Barbades & à la J amaique , le faëlorage eft depuis 3 jufqu’à $ pour 100 : il en eft de même dans la plus grande partie des Indes occiden- tales. En Italie il eft de deux & demi pour cent ; en Hollande, un & demi; en Efpagne, en Portugal, en France, &c. deux pour cent. Voyez les diétionn. du Commerce, de Trévoux & de Chambers. (G FACTORERIE oz FACTORIE , f.f. (Grarmm.) lieu où réfide un faéteur, bureau dans lequel un com- nuifionnaire fait commerce pour fes maîtres ou com- mettans. Voyez FACTEUR , COMMISSIONNAIRE, COMMETTANT. On appelle ainf dans les Indes orientales & au- tres pays de l’Afie où trafiquent les Européens, les endroits où ils entretiennent des faéteurs ou commis, {oit pour l'achat des marchandifes d’Afe, foit pour la vente ou l'échange de celles qu’on y porte d’Eu- rope. La faéorie tient le milieu entre la loge 8 le comp- toir ; elle eft moins importante que celui-ci, & plus confidérable que l’autre. Voyez Comrrorr &Locs. Voyez auffi les diétionn, de Commerce, de Trévoux & de Chambers. (G) FACTUM , f. m. (Jurifprud.) Ce terme, qui eft purement latin dans fon origine, a été employé dans le ftyle judiciaire, lorfque les procédures & juge- mens fe rédigeotent en latin, pour exprimer le fait, c’elt-à-dire les circonftances d’une affaire. ; On à enfuite intitulé, & appellé failum, un mé- moire contenant l’expofñtion d’une affaire conten- tieufe. Ces fortes de mémoires furent ainfi appellés, parce que dans le tems qu’on les rédigeoïit en latin, on y meftoit en tête ce mot, fxum , à caufe qu'ils commençoient par l’expoñtion du fait, qui précede ordinairement celle des moyens. | Depuis que François I. eutordonné, en 1539, de rédiger tous les aétes en françois, on ne laffa pas de conferver encore au palais quelques termes latins, du nombre defquels fut celui de faifum, que l’onmet- toit en tête des mémoires. * Le premier faum ou mémoire imprimé, ainfi in- titulé, faëum, quoique le furplus fût en françois, fut fait par M. le premier préfident le Maitre, dans une affaire qui lui étoit perfonnelle contre fon gen- dre. II fut fait premier préfident fous Henri IT, eñ 1551, & mourut en 1562. Cette anecdote eff re marquée par M. Froland, en fon recueil des édirs € arréts concernant {a province de Normandie, page 635. Les avocats ont continué long-tems :d'intituler leurs mémoires imprimés , faéfum ; il n'y a guere que vingt ou trente ans que l’on a totalement quitté cet ufage, & que l’on à fubftitué le terme de émoire à celui de fau. L'arrêt du parlement du 11 Août 1708, défend à tous Imprimeurs & Libraires d'imprimer aucuns fc- tums , requêtes ou mémoires, fi les copies qu’on leur met en main ne font fignées d’un avocat ou d’un pro- cureur, Le même arrêt enjoint aux Imprimeurs de mettre leur nom au bas des fa&ums & mémoires qu'ils auront imprimés où fait imprimer. Un failum fignifié eft celui dont la partie ou fon procureur a fait donner copie par le miniftere d’un huiffier, Les fadums où mémoires ne font pieces du procès, qu'autant qu’ils font fignifiés ; ils n’entrent pourtant pas en taxe, quoiqu'ils foient fignifiés, ex- cepté au grand-confeil : dans les autres tribunaux on ne les compte point, à moins qu'ils ne tiennent lieu d'écritures néceflaires, Voyez Mémoires. (4) . FACTURE, f. f. (Comm.) compte, état ou mé- moire des marchandifes qu’un faéteur envoye à fon maître, un commiflionnaire à fon commettant, un aflocié à fon aflocié, un marchand à un autre mar- chand. Les faitures s’écrivent ordinairement ou à la fin des lettres d'avis, ou fur des feuilles volantes renfer- mées dans ces mêmes lettres. Elles doivent faire mention, 1°. dela date des en- vois, du nom de ceux qui les font, des perfonnes à qui ils font faits, du tems des payemens , du nom du voiturier, & des marques & numéros des balles, ballots, paquets, tonneaux, caïfles , 6e, qui con- tiennent les marchandifes. 2°. Des efpeces, quantités & qualités des mar- ‘chandifes qui font renfermées fous les emballages, comme aufh de leur numéro, poids, mefure ou au- nage. 3°. De leur prix, & des frais faits pour raifon de ces marchandifes; comme les droits d’entrée & fortie, fionena acquitté; ceux decommiflion& de courtage dont on eft convenu ; de ce qu'il en a coûté pour l'emballage , portage 8e autres menues dépenfes, On fait au pié de la faéure un total de toutes les fommes avancées, droits payés, frais faits, &c, afin d’en être rembourfé par celui à qui l’on envoye les mar- chandifes. . Vendre une marchandife fur le pié de la faêure, C’eft la vendre au prix courant. . Les marchands appellent Ziaffe de faëture , un lacet dans lequel ils enfilent les faëures , lettres d’avis ; d'envoi, de demande & autres femblables écritures, pour y recourir dans le befoin. Ils nomment auf Livre de failure, un livre fur le- quelils dreffent les faéures ou comptes des différentes fortes de marchandifes qu'ils reçoivent , qu'ils en- voyent ou qu'ils vendent. Ce livre eft du nombre de ceux qu’on appelle dans le commerce Zivres auxi- diaires, Voyez LIVRE. Voyez auffi les dictionnaires de Commerce, de Trévoux , 6 de Chambers. (G). FACULE , f. £. cermed’Aflronomie , efl un nom que Scheiner & d’autres aprés lui ont donné à des &fpeces de taches brillantes qui paroiffent fur le {o- lil, & fe difipent au bout de quelque tems. Le mot de facules eft oppofé à macules où taches : celles-ci font les endroits obfcurs du difque du foleil, & les facules font les parties du difque folaire qui paroïffent plus lumineufes que le refte du difque. Voyez So- LEIL, 5 7 on FAC 367 Ce mot eftun diminutif de fax , flambeau, lumiere, Les facules, ainf que les taches, paroïflent & difpa- roiflent tour-à-tour. Poye TACHES. (0) FACULTATIF , adj, m, (/wrifp.) feidit de ce qui donne le pouvoir 8e la faculté de faire quelque chofe. Ce terme éft fur-tout ufité par rapport à certains brefs du pape qu’on appelle brefs faculrarifs, parce qu'ils donnent pouvoir de faire quelque chofe que Von n’autoit pas pà faire fans un tel bref. (4 | FACULTÉ, {. f, (Méraphyf.) eft la puiflance & la capacité de faire quelque chofe. Foyez Purs- SANCE, Les anciens philofophes, pour expliquer l’ation de la digeftion , fuppofoient dans l’eftomac une fa= culte digeftive : pour expliquer les mouvemens du corps humain , ils fuppofoient une fzcu/ré motrice : dans les nerfs. Cela s’appelle fubftituer un mot obf- cur à un autre qui ne l’eft pas moins, Les facultés {ont ou de l’ame ou du corps. | Les faculrés ou puiflances de lame font au nombre de deux , favoir l’entendement &c la volonté. V. oyeg PUISSANCES. Voyez auffi ENTENDEMENT € Vo= LONTÉ, On diftingue ordinairement les facuirés corporel les, par rapport à leurs différentes fonions; ainf on entend par fzculrés animales , celles qui ont rap- port aux fens & au mouvement, &c. Chambers, FACULTÉ, ( Phyfique & Medecine.) en général eft Ja même chofe que puiffances, vertu, pouvoir , facili- té d'agir, où lejprincipe des forces G& des aëtions. La fcience des forces & des puiflances eft ce que les Grecs appellent dynamique, de düvaues , je peux, Poyez DYNAMIQUE. Quelques auteurs confondent mal-à-propos les forces avec les faculrés; mais elles different entr’el- les de la même façon que les caufes different des principes. La force étant la caufe de ation, entrat- ne l’exiftence a@uelle. La fzcuiré ou puiflance n’en entraîne que la poffbilité, Ainfi de ce qu’on a la fz- culté d'agir, il ne s'enfuit pas néceffairement aw’on agiffe ; maisitoute force: exiftante emporte propre. ment une aétion, comme un effet dont elle eft la caufe, Pen En Medecine, n’ayant À confidérer que l’a@tion de l'homme & celle des corps qui peuvent changer fon état en pis ou en mieux, on a toûjours traité des fa=. culrés de l’homme, & de celles des remedes, des poifons , &c. Les anciens ont divifé aflez arbitrairement les {4e culrés de l’homme, tantôt en deux, tantôt en trois genres, dont ils n’ont jamais donné des idées diftin- étes ; car les faculsés qu'ils appellent animales, {ont en même tems vitales & naturelles: les naturelles font aufli vitales 8& animales. Ils ont même {oûdivi. fé chacun de ces genres trop fcrupuleufement , en un grand nombre d’efpeces, ainf qu’on vient de le voir. Les modernes donnant dans un excès oppofé , ont voulu bannir tous ces termes confacrés par l’eme ploi qu’en ont fait tous les maîtres de l’art pendant deux mille ans; ce qui nous mettroit dans l’impoñi- bilité de profiter de leurs écrits, qui font les fources de la Medecine. | Mais fans adopter tous lesitermes des fzcu/rés que les anciens ont établis, ni vouloir les juftifier dans tous les ufages qu'ils en faïfoient , on ne peut non plus fe pañler en Medecine du terme de faculté ou de piffance , qu’on ne peut en Méchanique fe paffer des forces attra@tives, centripetes, accélératrices, pravitantes, 6, Ce n’eft pas à dire qu’on fache mieux la raifon d’un effet , comme de la chûte d’un corps, de: J’afloupiflement produit par Popium, quand on dit que la gravité eft le‘principe de lun, Ê&t la faculré ou vertu narcotique left de autre ; mais c’eft qu'on ft néceflité., ‘dans les Sciences , 302 FAC d'employer des exprefions abrégées pour éviter des S'il eft vrai que , quelque tems avant fa mort, il eût la faculté de fuf- pendre à fon gré tous les mouvemens vitaux, com- me le rapporte M. Cheyne dans fon traité the En- gush malady , pag. 307. cet exemple , dis-je, ne prouve autre chofe, finon que par l'habitude il avoit acquis un grand empire fur les organes de la refpi- ration, dont les mouvemens font en partie volon- taires & en partie involontaires ; de forte qu’en di- minuant par deotés fa refpiration,. fufpendoit pour quelques momens les battemeñs alternatifs du cœur & des arteres , & paroïfloit entierement comme un homme mort, &.qu’en reprenant peu -à-peu la refpiration , 1l remettoit en jeu tous les mouvemens qui avoient été fufpendus , & fe rappelloit de nou- veau à la vie. D'ailleurs ft l’on fait réflexion que pendant le fommeil, & dans toutes les affe@tions {o- poreufes , les mouvemens même que l'habitude à rendus mvolontaires, font fufpendus, & que les mou- Vémens vitaux non-feulement ne s'arrêtent point, mais augmentent même d’aétivité , on ne croira point que ces mouvemens ayent Jamais été arbitraires, & qu'ils ne font devenus néceflaires que par habitude & par coûtume. … En troifieme lieu, avant de difcuter le fentiment ge ceux qui placent la frcu/ré virale dans l'irritabilité * Tome FI, de À FA C 307 des fibres des corps animés, -je voudrois favoir fi cette irritabilité, qué je neconteftepas , n’eft qu'uné Propriété purement méchanique de ces fibres ou fi elle dépend d’un principea@if, fupérienranx canfes méchaniques : car l’homme n'étant compolé que d’u: ne ame & d’un corps étroitement unis enfemble par la volonté toute -puiflante duCréateur, àl fautné- ceflairement que ce qui agit en lui foit ou matiere où efprit Sion-dit que l'irritabilité n’eft qu'une fuite du méchanifme, mais d’tn méchanifme qui agitpar-des lois particulieres, &- différentes des lois :méchani- ques ordinaires , & qui le rend capable d’entretenir, &c même d'augmenter où dé diminuer les mouvez mens fpontanés , fans l'intervention d'aucune intel- ligence créée ; je demande queleft ce méchanÿfme: fi furprenant; & jufqu’à ce qu’on m’en ait prouvé: la réalité, je refufei de l’admettre, avec d’autant: plus de raifon-que je fuis perfuadé que les lois mé: chaniques qui ne mé font pas connues, ne peuvent être diamétralement oppolées à celles que je con nos ; que les unes doivent néceflairément appuyer les autres, & non les renverfer entierement; ce qu'il faudroit pourtant fuppofer, pour faire dépendre: la faculté vitale du pur méchanifme. Sion prétend au contraire que lirritabilité des fibres dépend d’un: principe hypérméchanique, c’eft l’attribuer à l'ame ; & alors on retombe dans l'opinion de ceux qui rap= portent les mouvemens vitaux à des facu/rés de cet: agent fpirituel qui nous animes | | evenons à notre idée; & pout la mieux déve: lopper, prenons la chofe d’un peu loin. Tâchons de découvrir s’il n’y auroit pasien nous un fens ir/ ow un fezforium particulier, capable de tranfmettre fes imprefhons juiqu'au Jérforium principal ; & fi à ce Jenforium ne feroit pas attachée une faculié aëtive de l'ame, qui foit capable d'opérer les mouvemens vi- taux par le moyen des inftrumens corporels, & in: dépendamment de tout aûte de la facuiré libre &c ré- fléchie qu’on connoît fous Le nom de volonté, Nous: fuppoferons néanmoins bien des chofes connues des. Phyficiens & des Métaphyficiens ; mais qui ont été ou feront expliquées dans ce Diétionnaire. Nous ob- {erverons feulement que l’ame 8e le corps s’affeétent. mutuellement en conféquence de leur union; & qu’é- tant parfaitement unis, tout le corps doit agir fur l’ame , & l’affeGer réciproquement : car il ne nous- paroît pas naturel de penfér que cette union ne foit pas parfaite, &r que ce ne foit qu’à l’épard de cer. tains organes qu'il foit.vrai de dire, aféélo uno, affi= citur alterum. Cette idée ne s’accorde point avec la fagefle &c la puiflance du Créateur, qui en alliant en- femble des fubftances qui de leur nature font inala lables, a mis dans fon ouvrage toute la perfedion. pofñble. Nous obferverons auf que cette union a dû fans doute altérer jufqu’à un certain point les pro priètés de l’ame, foit en lui occafionnant des modif: cations qu'elle n’auroit point, fi elle n’étoit pasunie à un corps orgamilé , foit en la privant d’autres modifications qu’elle n’auroit pas felle en étoit {és parée. Corme dans l’homme il n’y a que Pâme qui {oit capable de fentiment , tout fentiment confidéré dans l’ame , eft quelque chofe de fpirituel ; mais comme lame ne fent que dépendamment du corps, nous envifagerons tous Les fens comme corporels; & nous les diviferons en ceux qui n’ont leur fiége que dans le cerveau , & en ceux qui font difperfés dans tout le refte du corps. Nous ne parlerons pas ici des premiers ; mais au nombre des feconds nous mettrons non-feulement les fens reconnus de tout Je monde , tels que la vüe, l’ouie, lodorat, le goût, le toucher ; les fens de la faim & de la Loif, & celu d’où vient l’appétit commun aux deux fexes pour la . propasarion de l’efpece, mais ençore le fens d'où Âaaï 368 PF À CO naît le defir naturel de perpétuer lesmotvemenis v1- taux pour la confervation de Pindividu:defx qui agitien nous indépendamment de notre volonté. Ce dérnier fens , que j'appelle w#41, eftune efpece de toucher ; ou du moins il peut, comme tous les autres fens, être rapporté awtoucher, Joyez TOUCHER. Je ne parlerai point ici du fiége de tous les fens, je me bornerai au feñs visal ; que je place dans le cœur, dans les arteres & les veines, & dans tous les vifceres , ou dans toutes les parties intérieures qui ont des mouvemens vitaux ou fpontanés. J’ac- corde à toutes ces parties un /éz/orium particulier ; car pourquoi leur refuferoïit-on cette prérogative ? n’ont-elles pas tout ce qui eff néceflaire pour le ma- tériel d’un fens ? leurs fbrés mufculenfes où mem- braneufes ne font-elles pas entrelacées de fibrilles nerveufes? & ces fibrilles n’aboutiflent-elles pas à la moëlle alongée, qui eftun prolongement du cerveau 8 du cervelet ? c’eft de quoi l'Anatomie ne nous permet pas de douter. Cela étant ainfi, & l'union du corps avec l’ame n’étant qu'une dépendance mu- tüelle de ces deux différentes fubftances,, les fibrilles nerveufes du cœur, des atteres, 6c. ne peuvent être affeétées que lame ne le foit aufli ; ce qui fuffit pour qu’elles foient le marériel d’un fens. On oppofera peut-être que les lois de l'union de l’ame & du corps ne s'étendent pas jufqu’aux orga- nes: qui ne font point foûimis aux ordres de la volon- té ; que ces lois n’ont été établies qu'à l'égard des parties fur lefquelles la volonté a quelqu’empire , &r qu'ainfi l’ame n’eft affe@tée que lorfque ces parties à l'égard defquelles l’union a lieu , font affectées ; &c ue lorfqué des organes fur lefquels la volonté nin- ue point, font affectés, tels que le cœur, les arte- res, &c. l’ame n’eft point affeétée ; d’où l’on con- clura que ces organes ne conftituent point un /éz/o- rium particulier. Jai prévenu ci-deflus cette objedtion ; mais à ce que j'ai dit je vais ajoûter, 1°. que c’eft bien gratui- tement qu’on avance que les lois de l'union du corps avec l’ame ne s'étendent pas à toutes les parties de notre machine , & que l’ame n’eft affeétée que lorf- que les organes à l'égard defquels l'union a lieu, font affe&tés : car enfin, feroit-ce parce que Dieu ne l’a pù, ou ne l’a pas voulu ? Mais quelles raïfons at-on pour reftraindre la puiffance de Dieu, ou pour limi- ter ainfi fa volonté? Qu’eft-ce qui peut porter à croire que Dieu n’a pas donné à cette union toute la perfeétion dont elle peut être fufceptiblé? n’eft-1l pas au contraire plus naturel de penfer que Dieu a fait cette union auffi entiere & aufh parfaite que la nature des deux fubftances qu'il a unies a pü le per- mettre >? Ortoutes les parties du corps humain étant également matérielles , 1l n’a pas été plus difficile à Dieu d’unir le corps à l’ame par rapport à toutes fes parties, que par rapport à quelques-uns de fes or- ganes. Je réponds, 2°. que l'expérience nous apprend que limagination & les paflions de l’ame influent {enfblement fur nos mouvemens vitaux, & les trou- blent & les dérangent ; ce qui prouve évidemment que l’ame étant affe@ée , les organes vitaux font af- feétés à leur tour: d’où je conclus que les affeétions de ces organes affectent auf l’ame, car cela doit être réciproque à raifon de la dépendance mutuelle des deux fubftances , dans laquelle confiftent Les lois de l'union. Nous avons donc l’expérience de notre côté, & nous fommes fondés à foûtenir que puifque l’ame par fes paflions agit fenfiblement {ur nos organes vitaux, fon union avec le corps doit avoir lieu à leur ésard ; & cette umion étant réciproque, il fant que ces organes agiflent aufhi fur lame, & qu'ils confituent par conféquent un /ér/orium particulier, ou lemarériel d’un fens que nous avons appellé pisaz, Eh À C On obpolera qu'il n’y a point de fens fans fenfas tion, n1 de fenfation fans fentiment'intérieur, ot fans un témoignage fecret de notre confcience, Or, ajoûtera-t-on, il n’y a ici mi fenfation, ni fentiment intérieur d'aucune fenfation ; car lorfque nous ne fommes agités d'aucune paflion, nous ne fentons point que le /ér/orinm vital affeéte notre ame, nique ñotre ame aoifle fur ce Jez/orium , d’où l’on conchira qu'il n’y a point de fens viral. Je conviens que Dieu, qui ne fait rien d’inutile, . a'attaché un exercice à chaque faculté, & que la fenfation n'étant que l’exercice de la fuculré fenfiiive, où le fens réduit en aëte , il ne peut y avoir aucun fens qu'il n'y ait fenfation ; 8 que s’il n’y a pas de fenfation, le féxforium ou les inftrumens du fens viral deviennent inutiles. Mais je nie qu'il n°y ait pointici de fenfation ; & après avoir obfervé que toutes les fenfations ne font pas également fortes & vives, qu'il y en a de foibles & d’obfcures, j'ajoûte, 1°. qu'outre que le pur fens intime de notre exiftence, qui, felon les principes de la Métaphyfique, né nous manque jamais , n'eft dü dans bien des cas, dans l’a: pôplexie, par exemple, qu’à la fenfation excitée par le Jen/orium vital ; c’eft à ce même /ez/orium legerez ment effleure que nous devons la fenfation foible & obfcure de la bonne difpofition denotre efprit & de notre corps, de notre bien-être, ou de ce plaïifir que nous reflentons intérieurement lorfqnue tout eft en nous dans l’ordre naturel, & que le /énforium vital ne reçoit de nos humeurs qu’une legere impreffion, un doux tremouflement ou une efpece de chatouil- lement, C’eft encore à ce même fens, mais différem -ment affecté, que je rapporte les douleurs intérieu< tes ,; lesanxiétés , les mquiétudes, l'abattement, qui fans caufe manitefte fe font fentir lorfque quelque caufe intérieure & inconnue diminue ou augmente les mouvemens de nos humeurs , & dérange plus ou moins l’aétion organique de nos parties. Or K'où il y a plaïfir ou douleur, joie ou triftefe , tranquillité Ou inquiétude, vigueur ou abattement fpontané, là il y a fenfarion agréable ou defagréable, 8 par con- féquent faculté de fentir, aufli-bien que /ézforum ow organe d’un fens particulier. J'ajoûte , 2°. que quand même nous ne nous ap+ percevrions pas de cette fenfation, il ne s’enfuivroit point que l’ame ne Pait point , parce qué nous ne connoïflons pastoutes lesmodifications de notreame, &c qu'il y en a fans doute qui ne fe replient pas fur elles-mêmes, ou dont on n’a aucun fentiment inté= rieur, Mais il y a plus : fi nous faifons uné férieufe attention à tout ce qui fe pafle dans l’intérieur de no- tre ame, en quelqu’état que nous nous trouvions, nous nous appercevrons bientôt, du moins confufé- ment, qu'elle fent fon exiftence agréable ou defa- gréable, dépendamment du bon ou mauvais état de nos organes intérieurs ou vitaux ; & notre confcien- ce nous rendra un témoignage , du moins obfcur, que nous avons une fenfation qui dépend de ces mê- mes organes, & qui nous informe de leur bonne o mauvaile difpofition. > Nous croyons avoir {nfifamment établi cette fen< fation ou cette fzculre pafive de notre ame: 1l nous refte à faire voir qu'à cette fzcule fenfinve doit re- pondre une faculré appétitive; c’eft-à-dire que de limpreflion du /ezforium vital, ou de fon ation far lame, doit naître une réathion ou puiflance a@ive de l'ame, qui, par le moyen du fluide nerveux, agifle à fon tout fur les organes vitaux, qui en en- tretienne continuellement les mouvemens alterna- tifs ; & qui, fans attendre les ordres de la volonté , ou même contre fes ordres, les augmente ou les di- minue dans certains cas , fuivant les lois qu'il a pli au Créateur d'établir. Or l’on ne révoquera pointen doute cette frculié aéhve, fi l’on fait attention qu'il #eft point de féns interne patticulier, dont Patio m’excire dans l’ameun appérir ; que Paétion de l’efto- mac fait naître la faim, & celle du gofier la: foif, C’eft une fuite de la dépendance mutuelle qui regne entre l’ame & le corps, & une fuite conforme aux idées que nous avons de l’aétion & de la réaétion dé ces deux fubftances unies par la volonté du Créa- teur ; & comme:ces deux fubftances font différentes , & que la fpirituelle n’eft point foûmife aux lois mé- chaniques:, on comprend aifément d’où vient que la téaion n’eft prefque jamais exattement proportion- nelle à Paéion , & qu'ordinairement elle lui eft de beaucoup fupérieure. Voyez FACULTÉ APPÉTITIVE. Mais quoique l’objet de l’appétit vésal foit bien fenfble , que lesmouvemens fpontanés, ou les ef- fets que nous leur attribuons , ne {oient point con- teités, bien.des gens ne conviendront point de la réalité de cette puiflance attive ; ils oppoferont, 1°. que nous ne fentons point que notre ame opere ces effets ; 2°. que notre ame n’eft pas la maïtrefle de les fufpéndre quandelle veut, ni de les varier à fon gré. Pour réfoudre ces difficultés, nous avancerons , 1°, que nous n'avons pas des idées réflèchies de tou- tes les opérations de notre ame, de toutes fes faculrés aétives, & de leur exercice; & cela parce qu'il n’a pas plù au Créateur de rendre lame unie au corps humain , capable de-toutes ces fortes d'idées, ou, pour mieux dire, parce qu'ilw’a pas jugé que les idées réfléchies de toutes ces opérations nous fuffent néceflaires pour la confervation de notre individu, ou pour les befoins des deux fubftances dont nous fommes compolés; qu'il a jugé au contraire que quelques-unes de ces opérations s’exerceroient mal fi nous en avions des idées refléchies, &c que nous en abuferions f elles étoient foûmifes à notre volon- té. 2°, Nous prétendons que la faculré virale que nous reconnoiflons dans l’ame unie au corps humain , eft une puiflance non-raifonnable, un appétit aveugle &c diftinét de la volonté & de la liberté, tel que les Grecs l’ont reconnu fous le nom d’opur, qu'ils défi- nifloient pars animi rationis expers, & dans lequel, au rapport de Cicéron, les anciens philofophes pla- çoient sum motusiræ , tum cupiditatis. Au moyen de cette faculré vitale, ou de cet appétit que Dieu a im- primé dans l’ame, de cette force néceffaire, non- éclairée, & aflujettie aux lois qu’il lui a impoñées, il eft aifé de comprendre que notre ame fait jouer nos organes vitaux, fans que nous fentions qu’elle opere , & fans que nous foyons les maîtres de gou- verner leur jeu à notre gré, ou, ce qui eft prelque le même, fans que nous puflions abuler du pouvoir qu'a notre ame de les mettre en jeu. On repliquera qu’une faculté non-raifonnable eft incompatible avec une fubftance fpirituelle , dont l’eflence femble ne confifter que dans la penfée ou dans la puiffance de raifonner. A cela je réponds, 1°, que nous ne connoïfions pas parfaitement l’ef- fence de lame, non plus que fes différentes modifi- cations : 2°, que l’ame unie au corps humain, a des propriétés qu’elle n’auroit pas , fi elle n’étoit qu'un pur efprit, un efprit non uni à un corps, comme je l’ai obfervé plus haut; ainf, quoiqu’on ne conçoive pas dans un pur efprit une faculté non-raifonnable , un appétit où une tendance tout-à-fait aveugle, on n’eft pas en droit de nier une pareille propriété dans un _ €fprit uni au corps humain, fur-tout lorfque les ef- fetsnous obligent de l’'admettre , & qu’elle eft nécef- faire aux befoins de la fubftance fpirituelle & de la fubftance corporelle unies enfemble. Pour faire mieux comprendre comment l’ame peut avoir une faculté attive non-raifonnable, ur appétit différent de la volonté & de la liberté, une tendance aveugle & néceflaire, fuppofons, comme une chofe ayouée de prefque tout le monde, que FAC 369. lame réfide; ou, pour mieux diré, qu'elle exerce fes différentes facultés dans un.de nos organes inté- rieurs d’où partent tous les filets des nerfs qui fe dif- ttibuent dans toutes les patties du corps : fuppofons encore comme une chofe inconteftable, qué cet organe privilégié qu'on appelle /énforium communes a une certaine étendue, telle que l’Anatomie nous la démontre dans la fubftance médullaire du ‘cer veau, du cervelet, de la moëlle alongée & épinieré, où l’on place communément l’origine de tous les nerfs : fuppofons auf que quoiqu'il n’y ait guere de parties qui ne reçoivent des nerfs du cerveau & du cervelet, ou de Pune 8 de l’antre moëlle, cependant les nerfs qui fe repandent dans les organes des fens extérieurs , & dans toutes les partiès qui exécutent des mouyemens volontaires, viennent principale ment de la fubftance médullaire du cerveau ou du corps calleux ; que ceux qui fe diftribuent dans les organes vitaux, & dans toutes les parties qui n’ont que des mouvemens fpontanés , ne partent la plû- part que du cervelet ou de la moëlle alongée ; & qu'aux parties qui Ont des mouvemens fenfiblement mixtes, ou en partie volontaires & en partie invo- lontaires , il vient des nerfs du cerveau & du cer velet, ou de l’une & de l’autre moëlle: où fi l’on veut que la plüpart des nerfs qui fe diftribuent en organes vitaux, viennent du corps calleux. Suppo- fons que l’endroit du corps calleux d’où ils partent, eft différent de celui d’où naïflent les nerfs deftinés aux mouvemens volontaires. Suppofons enfin que Dieu, en unifant l’efprit humain à un corps, a éta- bli cette lot, que toutes les fois que l’ame auroit des perceptions claires, feroit des réflexions libres, ou exerceroit des actes de volonté & de liberté, les f- bres du corps calleux , ou d’une partie du corps cal- leux feroient affedtées; & réciproquement qu'aux affeétions de ces fibres répondroient des idées clai- res, & toutes les modifications de l’ame qui empor- tent avec elles un fentiment intérieur ; & que toutes les fois que Pame auroit des fenfations obfcures, qu’elle ne réfléchiroit point fur fes appétits, &c qu’elle agiroit néceflairement êc aveuglément, les fibres d’une autre partie du corps calleux, du cervelet ou de la moëlle alongée, feroient affeétées; & récipro- quement , que des afeétions de ces fibres naïtroient des modifications dans l’ame, qui ne feroient fuivies d'aucun fentiment intérieur. Cela pofé, on comprendra aïfément la diftiné&tion des faculrés de l’ame en libres & en néceflaires ; & toutes les difficultés qu’on pourroit faire contre lap- pétit w#al, s'évanouiront. Auwrefte ces fuppofitions ne doivent révolter per- fonne , &, à la derniere près, 1l feroit aifé d’en don- ner des preuves tirées de l’Anatomie : pour celle-ci, il nous {ufht qu'elle ne répugne ni à la puiflance de Dieu , n1 à fa volonté, ni à la nature des deux fubf- tances unies. Mais ce n’eft pas tout: je puis encore appuyer cètte derniere fuppoñition fur des obfervations qui ne paroïtront point fufpeétes ; on en trouvera deux qui ont été tirées des volumes de l'académie royale des Sciences , dans le premier tome de l’Encyclopé- die, au mot ÂME, pages 342. & 343. U réfulte de ces obfervations , que de altération du corps cal- leux, ou de l’une de fes parties, s’enfuit la perte de la raïfon, de la connoïffance , dés fens extérieurs & des mouvemens volontaires, mais non labolition des mouvemens vitaux, puifque les malades dont il eft queftion ne font pas morts brufquement, &c que l’un d’eux reprenoit connoiffance dès que le corps calleux cefloit d’être comprimé. Il falloit donc que l'ame exerçât alors dans une partie du corps calleux non comprimée, ou dans la moëlle alongée:, d’au- tres opérations qui ne fuppofent aucune 1dée réflé- 370 FAC -€hie, aucun aéte de volonté, & quirne faïfent-pas +d'entretenir‘la: dépendance mutuelle du corps &de Pame , pendant la ceffation on l'interruption de la no dlance , & de-tout ce qui dépend de l’enten- dement & de la-volonté; opératiens quine peuvent être autre chofe que l’exercice de la faculté vitale, qui doit être continuel pendant la vie. À ces-obfervations j’en ajoûterai une autre, rap- portée dans la Phyfrologie de M. Fizes, imprimée à Avignon.en 1750. Viram vegerativam, dit ce profef. feux, 22 filio paupercule mulieris Jéptemdecim annos na- 20, mermint ne obférvalfe, Is mifèr abfque ufu wllo fen- Juiim, abjque ullo motu artuum , colli, maxille , om r1710 perfechè paralyticus undequaque feptemdecim annos, velut planta a nativitate vixerat. Éjus corpus corporis infantis decem annorum vix æquabat molem, de cetero narcidum ac flaccidum : pulfus erat debilis ac langui- dus, refpiratio lentiffina: in eo nec forni nec vigilie alternationes diffingui poterant ullo figno : nulla vox, nullum fionum apperités, nullus motus unquam in ocu- LS , qui fémper clauft erant, abfque tamen palpebrarum coalitu : nulli barbe pili, nulli pubi. Mater ejus ali- nenta tmaflicabat, labiifque.in ejus os infertis, ea in fauces infufflabat : filius ea emollita ac propulfa deglu- tiebat, ut & potulenta fimiliter impul[a: egerebat autem, ut parerat, excrementa alvina ac urinam. Il paroît que cet enfant n’avoit jamais exercé , du moins depuis fa naïflance , aucune des fonétions qui dépendent de l’entendement, de la connoïfflance & de la volonté ; mais s’enfuit-il de-là que cet en- fant ait vêcu pendant dix-fept ans comme une plan- te, & qu'il n’ait point eu une ame femblable à celle des autres hommes ? point du tout : autrement il fau- droit fuppofer qu’un apopletique dont les fon&ions animales font entierement abolies pendant des trois, quatre où cinq jours ; que le payfan cité par M. de la Peyronie, à qui on Ôtoit la connoïffance en com- primant le corps calleux ; que l’enfant dont parle M. Littre, qui après avoir jou deux ans & demi de- puis fa naiflance d’une fanté parfaite, fouffrit enfuite pendant dix-huit mois une telle altération dans Pe- xercice des facultés de fon ame, qu'il vint à ne don- ner plus aucun figne de perception ni de mémoire, pas même de goût, d'odorat , ni d’ouie, & qui ne- laifla pas de vivre dans cet état pendant fix autres mois : il faudroit, dis-je, fuppofer que tous ces ma- lades n’ont eu , pendant tout le tems qu'ils étoient fan$ connoïffance & fans fentiment, qu'une vie pu- rement végétative , &c que leur ame cefloit alors «d’être unie à leur corps : ou bienil faut reconnoître ane ame dans l’enfant dont nous venons de parler, quoique cet enfant n’exerçât que les feules fonétions vitales & naturelles; & on doit le faire avec d’au- tant plus de raiïfon, que ces fonétions, comme on l’a vû ci-deflus, ne peuvent pas dépendre de la feule difpofition méchanique du corps humain. Il paroit même que les lois de l’umion de l’ame avec le corps m'ayant plus lieu à l'égard des fonétions animales dans les fujets où ces fonéhions font entierement abolies , il faut, pour que l’ame ne foit pas cenfée avoir abandonné le corps &c s’en être féparée, que ces lois ayent lieu à l'égard d’autres fonctions, tel- les que les vitales, dont l’entiere abolition emporte la ceffation de la vie ou la féparation de l’ame avec le corps. De ces obfervations il réfulte que le fiége de l’a- me ne doit pas être borné au feul corps calleux, où à la partie de ce corps où l’ame apperçoit les objets, réfléchit fur fes idées, les compare les unes aux au- tres , &c fe détermine à agir d’une façon plûtôt que d’une autre; mais qu’on doit étendre ce fiége à une autre partie du corps calleux, au cervelet, à la moël- le alongée, où nous croyons que réfide la fzcu/re gitale ; dont l'exerciçe cefle pour tohjours dès que L FA C la moclie alongée eft coupée tranfverfalement av fortement comprimée par la luxation de la premiere vertebre du cou; ce quu favotife entierement ma der: mere fuppoñtion, ; On dira que-dans les fœtus humains qui naiffent fansitête, la vie.eft entretenue pendant fix, fepr, ou neuf mois par la nourriture que leur fournit le cors don ombilical , &:qu’alors leur vie-n’eft pas-diffés rente de celle des plantes. Mais fices enfans ne font pas des mafles informes,, file refte-deleur-corps eft bien organilé, & que les mouvemens vitaux s’y exe- cutent comme dans les autres enfans., teur vie n’eft pas fimplement végétative; elle dépend de leur ame, dont le fiége dans ces cas extraordinairess’étend juf- qu'à la moëlle épiniere, ou à quelque chofe d’équi- valent. Et quoique ces enfans n’ayent jamais exercé aucune des fonétions qui caraétérifentrumefprit hu main, On ne doit pas toutefois s’imaginer qu'ils neuf {ent point d’ame ; on doit penfer feulement que leur ame n’a plrexercer ces fonétions, parce.qu’elle man- quoit des organes nécefaires à l'exercice & à lamas nifeftation de fes principales facu/rés. On doit dire la même chofe des enfans , dans le crane defquels or ne trouve point de cerveau après lamort, ou. dont le cerveau s’eft fondu on petrifiéy; car alors ou la molle alongée ou la moëlle épiniere y fuppléent. La faculté virale une fois établie dans le principe intelligent qui nous anime, on conçoit aifément que cette faculré excitée par les imprefñions que le /£2/o- rium Vital tranfmet à la partie du /ezforium commun à laquelle fon exercice eft attaché, détermine nécef fairement l'influx du fuc nerveux dans les fibres mo- trices des organes vitaux ; & qu'étant excitée alter- nativement par les impreffons de ce férforium quife fuccedent continuellement pendant la vie, elle dé- termine un influx tohjours alternatif, & tel qu’il eft néceffaire pour faire contratter alternativement ces organes tant que l’homme vit, On conçoit auf que lorfque ces impreflions font plus fortes qu’à l’ordi- naire , comme il arrive lorfque les organes vitanx trouvent quelqu’obftacle à leurs mouvemens, la f#- culté vitale eft alors plus irritée, & détermine un plus: grand influx pour vaincre, s’il eft pofible, les réfif- tances qui lui font oppofées ; & tout cela en confé- quence des lois de l'union de lame avec le corps: Mais comment la fzculre vitale détermine-t-elle cet influx ? c’eft un myftere pour nous, comme la ma- mere dont la volonté fait couler le fuc nerveux dans. les organes foûmis à fes ordres, eft un écueil contre lequel toute la fagacité des Phyfciens modernes a échoté jufqu'ici. Tont ce qu’on peut avancer, c’eft que la faculté vitale a cela de commun avec la vo- lonté , qu’à l’occafon des impreflions qui lui font tranfmifes, elle excite des mouvemens, qu’elle les: augmente felon les lois qu'il a plù au Créateur de lui impofer , & que fa réaction furpañfe l’attion des cau- fes qui ont mife en jeu, & ne fuit point les lois mé- chaniques ordinaires ; mais qu’elle en differe en ce: que la volonté étant une faculté libre &c éclairée, elle fufpend ou fait continuer à fon gré les mouve- mens qu'elle commande, au lieu que la faculré vitale étant un agent aveugle & néceflaire., elle ne peut point arrêter ou fufpendre les monvemens qu’elle. excite , & qu’elle eft obligée d’entretemir felon les lois qui lui ont été impofees. | L’ame par fa volonté n’a aucun pouvoir immédiat fur la faculié vitale ; car comme l'ame ne peut empê- cher les fenfations qui font occafonnées parles cau- fes de la faim & de la foif, elle ne peut aufi empé- cher les fenfations qui lui font communiquéespar les organes vitaux, ni par conféquent fufpendre l’exer- cice de la faculié virale : elle n’a qu'un pouvoir éloi-. gné fur cette fzculié, qui confifte à empêcher les of ganes du fentiment & du mouvement volontaire de FAD fatisfoire à la faim &c à la foif. Ce ‘n’eft qu’en s’abf. tenant volontairement detoute nourriture , & en fe laïiffant mourir de faim, qu'onpeut arrêter l’exercice de la faculté vitale ; on le peut auf en lui oppofant des'obftacles invincibles. Voyez MORT. Obfervons avant quede finir, que comme les fens extérieurs, principalement le goût, l’odorat, & le toucher font fubordonnés à la faculté de l'ame qui agit à l'occañon de la faim êr de la foif, de même la faim & la foif font fubordonnées à l'appétit vital ou à la faculré qui dirige & entretient nos monvemens vitaux, Obfervons encore que comme la faim &c la {oif font des fenfations obfcures , parce qu’elles ne font excitées que par des caufes cachées qui agiffent fur nos organes intérieurs, 8 non par limprefñon d'aucun objet que notre ame ait apperçü ; de même aufi & plus obfcure encore eft la fenfation excitée par le fenforium vital, parce qu’elle n’eft occafionnée que par des caufes encore plus cachées, qui ont bien quelque liaifonavec celles de la faim &e de la foif, | mais qui ne forment dans l’ame aucune image ; en- forte que l’idée réflechie que nous avons de nos fen- fations va toüjours en diminuant de clarté, depuis l’idée des fenfations caufées par les objets extérieurs que nous appercevons, jufqu’à l'idée des fenfations de la faim & de la foif, &c de celle-ci jufqu’à Pidée de la fenfation vitale, ce qui rend cette derniere idée f confufe , que nous n’en avons prefqu’aucun fenti- ment intérieur. Îl n’étoit pas d’ailleurs nécefiaire que cette fenfation fût fuivie d'un fentiment intérieur bien clair ; parce que, comme il a été dit, à cette {enfa- tion {ont fubordonnées la faim & la foif, & à celles- ci les fenfations qui viennent des organes fur lefquels les objets extérieurs agiffent. Nous avons appellé faculté vitale, ce qu'Hippo- crate &c plufieurs medecins anciens 8 modernes ont appellé zarure. Voyez NATURE. Ces article eft de M, BoUILIET le pere. *FACULTÉ, {ubft. f. (Hif. littéraire.) il fe dit des différens corps qui compoñfent une univerfité. IL y a dans l’univèrfité de Paris quatre facultés ; celle des . Arts, celle de Medecine, celle de Jurifprudence, & celle de Theologie. Voyez les articles UNIVERSITÉ, NATION, DOCTEUR, BACHELIER, LICENTIÉ, MAÏÎTRE-ÈS-ARTS, GRADUÉ, Gc, * FADE, adj. (Gramm.) c’eft un terme qui défi- gne, au fimple, la fenfation que font fur les organes du goût, les farines de froment, d'orge, de feigle, &z autres, délayées feulement avec de l’eau. On l’a appliqué, au fiouré, aux perfonnes, aux ouvrages, | &c aux difcours : un fade perfonnage ; un fade éloge ; une ironie fade. De fade on a fait fadeur. FAENZA , ( Géog.) Velleius Paterculus, Zv. IT. chap. xxvij. Siius Italicus, 0. VIII, y. 596. & Pline, Lb. XIX, cap, J. en parlent: ancienne ville d'Italie dans l’état de l’Eglife 8 dans la Romagne, furila riviere de l'Amona, à 11 milles de Forli, & à prefqu'’autant d’Imola, fur la voie flaminienne. Elle eft célebre par la vaiflelle de terre que l’on y a in- ventée, qui porte fon nom, & qui depuis a été imi- tée, && perfetionnée en France, en Angleterre, en Hollande, & ailleurs (voyez l’art. FAYENCE) ; mais ce qui a le plus contribué à donner de la réputation à la vaifelle de terre de Faënza, qu’on nomme en Ita- lie la Majolica , c’eft que des peintres du premierwor- dre, comme Raphael, Jules Romain, le Titien, & autres, ont employé leur pinceau à peindre quelques- uns des vafes de fayence de cette ville, qui font par cette raifon d’un tres-srand prix. Faerza a encore [a gloire d’être la patrie du fameux Torricelli. Logis, 29. 28. lat. 44.18, (D.J.) *FAGARE, fm. (A4. nur. bor.) fruit des Indes : sl y a le petit & le grand ; ce dernier reflemble en forme, couleur , & épaifleur, à la coque du Levant, F A G 371 [Left couvert d’une écorce déliée, noire & tendre, qui enveloppe un corps dont la membrane eff foible & délée , & l’intérieur d’une confiftence foible ; au centre il y a un noyau affez folide. Le petit a la f- gure & la groffeur de la cubebe ; il eft brun, &c fa laveur à du piquant & de l’amertume, Ils font l’un & l’autre aromatiques ; quant à leurs propriétés mé- dicinales > 1] faut les réduire À celles de la cubebe. n FAGONE, f. (Hif£: nar, bot.) fagonia ; genre de plante, dont le nom a été dérivé de celui de M. Faz gon premier medecin de Louis XIV. Les fleurs des plantes de ce genre font faites en forme de rofe , compotées de plufñeurs pétales difpofées en rond. Il fort du milieu un piftil qui devient dans la fuite un fruit rond terminé en pointe, cannelé, compolé de plufieurs capfules & de plufieurs gaines, dont cha- cune renferme une femence atrondie, Tournefort inf. reiherb. Voyez PLANTE. (1) FAGOT , £. m. (Commerce de bois.) eft un affem- blage de menus morceaux de bois liés avec une hare, ? _au-dedans defquels on eñferme quelques broutilles appellées lame du fagor. On dit chäâtrer un fagor, quand on en Ôte quelques bâtons. On les mefure avec une petite chainette, afin de leur donner une grofleur égale & conforme à l’ufage des lieux. La falourde eft plus grofle que le fagos, & eft faite de perches coupées où de menu bois flotté. La bourrée eft plus petite ; c’eft le plus menu & le plus mauvais bois , qui prend feu promptement, te) qui dure peu : on s’en fert pour chauffer Le four. " FaAGor, (Æifé. mod.) L’ufage du fagor a fubffté en Angleterre autant de tems que la religion romai- ne. Sil arrivoit à quelque hérétique d’abjurer fon erreur & de rentrer dans le fein du catholicifme, il lui étoit impofé de notifier à tout le monde fa con- verfon par une marque qu'il portoit attachée à la manche de fon habit , jufqu’à ce qu'il eût fatisfait à une efpece de pénitence publique affez finguliere ; c’étoit de promener un fgos fur fon épaule , dans quelques-unes des grandes folennités de PEglife. Ce- lui qui avoit pris le fagor fur {a manche, & qui le quitoit, étoit regardé comme un relaps & comme un apoffat. FAGOT, terme de Fortificarion. Voyez FÂSCINE, Menage dérive ce mot du latin facorus, qui eft tiré du grec çaxos ; Nicod le fait venir de fafticulus, un faifceau, & Ducange du latin fagatum & fagotum. FAGOT ou PASSE-VOLANT, parmi les gens de Guerre, font ceux qui ne font pas réellement foldats, qui ne reçoivent point de paye, & ne font aucun fer- vice, mais qui ne font engagés que pour paroître aux revues, rendre les compagnies completes, &c empé- cher qu'on n’en voye les vuides, & pour frufirer le roi de la paye d'autant de foldats, Foyez PAssE-vo- LANT. Chambers. FAGOT de ape, eft dans La Guerre des fiëges, un fz- got de deux piés & demi ou trois piës de hauteur, & d’un pié & demi de diametre, dont on fe fert au dé- faut de facs-à-terre pour couvrir les jointures des galions dans la fappe. Foyez SAPPE. Voyez auffi la Planche XIII. de Fortification, FAGOT , (Marine.) barque en fagor, chaloupe en fagot; c’eft une barque que l’on aflemble fur Le chans tier, enfuite on la démonte pour l’embarquer & la tranfporter dans les lieux où Pon en a befoin. On: embarque aufli des futailles en fagor. Voyez FAGOT, Tonnelier. (Z) FAGOT de plumes, chez les Plumalfiers, ce {ont des plumes d’autruches qui font encore en paquets, tel- les qu’elles viennent des pays étrangers. | FAGOT,, furailles en fagot , terme de Tonnelier, qu fignifie des futailles dont toutes les pieces font tail. 372 FAI lées & préparées, mais qui ne font ni aflemblées, mi montécs, ni barrées, ni réliées de cerceaux. * FAGOTINES , f. f. (Commerce de foie.) ce font des petites parties de foie faites par des particuliers. Ces loies ne font point deftinées pour des filages fur- vis ; elles font très-inégales , parce qu’elles ont été travaillées par différentes perfonnes ; quoique ces perfonnes fe foient aflujetties {crupuleufement aux ftatuts des réglemens, il eft impofhible d’en formet un ballot qui ne foit pas très-défeétueux. Voyez l'ar- ticle SO1E. Nous n'avons en France prefque que des Jagotines. Il y a trop peu d’organfn de tirage pour fufire à la quantité d'ouvrage qu’on fabrique. * FAGUT AL, f. m. (Myrh.) ce fut un temple de Jupiter , qui fut ainfi nommé de l’arbre que les an- ciens appelloient fzgus, hêtre; cet arbre étoit con- facré à Jupiter, & le hafard voulut qu'il s’en pro- duisit un dans fon temple, qui en prit le furnom de Jagutal. D’autres prétendent que le fagutal fut un | temple de Jupiter, élevé dans le voifinage d’une fo- rêt de hètres. Ils en appottoient pour preuve que la partie du mont Efquilin qu’on appelloit auparavant mons Appius, s’appella dans la fuite fagutalis, Par la même raïon, il y en a qui conje@turent que Jupr- ter fagutal eft le mème que Jupiter de Dodone , dont 13 forèt, difent-ils, étoit plantée de hêtres, fagz. FAHLUN oz COPERBERG , (Géog.) ville de Suede en Dalécarlie, renommée par fes mines de ‘cuivre. Voy. Cuivre. Elle eft à 12 lieues O, de Gé- val. Long, 33.25. lat. Go. 30. FAIDE , 1.m. (Jurifp.) en latin faida,faidia ou fey- da , feu aperta fimultas ; figmifioit une irimitié capitale êt une guerre déclarée entre deux ou plufieurs per- fonnes. On entendoit aufli par faide en latin faidofus ou diffidatus celui qui s’étoit déclaré ennemi capital, quiavoit déclaré la guerre à un autre;quelquefois aufli faide fignifoit le droit que les lois barbares donnoient à quelqu'un de tirer vengeance de la mort d’un de {es parens, par-tout où on pourroit trouver le meur- trier : enfin ce même terme fignihoit auflila vengean- ce même que l’on tiroit , fuivant le droit de faide L’ufage de faide venoit des Germains , & autres peuples du Nord, & fingulierement des Saxons , chez lefquels on écrivoit kw/d ou kehd ; les Germains di. foient wehd , fhede & ferde ; les peuples de la partie feptentrionale d'Angleterre difent feuud ; les Francs apporterent cet ufage dans les Gaules. Comme le droit de vengeance privée avoit trop fouvent des fuites pernicieufes pour l’état, on accor- da au coupable & à fa famille la faculté de fe redi- mer, moyennant une certaine quantité de beftiaux qu’on donnoit aux parens de l’offenfe , & qui faifoit cefler pour jamais l’inimitié. On appella cela dans la fuite componere de viré, racheter fa vie; ce qui fai- foit dire fous Childebert IT. à un certain homme, Hu autre lui avoit obligation d’avoir tué tous es parens, puifque pat-là 1l avoit rendu riche par toutes Les compofitions qu’il lui avoit payées. Pour fe difpenfer de venger les querelles de fes parens,, on avoit imaginé chez les Francs d’abjurer Ja parenté du coupable , & par-là on n’étoit plus compromis dans les délits, mais auffi l’on n’avoit plus de droit à fa fucceffion : la loi falique , & autres lois de ce tems, parlent beaucoup du cérémonial de cette abjuration. Le aide étoit proprement la même chofe que ce que nous appellons def, du latin diffidare ; en effet, Thierry de Niem, dans fon sraité des droits de l'empire, qu'il publia en 1412, dit , en parlant d’un tel deffi ; imperatori græco qui tunc erat bellum indixit, eumque more faxonico diffidavit. Il eft beaucoup parlé de fuide dans les anciennes lois des Saxons, dans celles des Lombards , &'dans les capitulaires de Charlemagne , de Charles - Le - Chauve & de Carloman: le terme faida y eft pris communément pour gzerre en général ; car le roi avoit fa faide appellé farda regia , de même que les particuliers avoient leurs faides ou guerres privées. Porter la faide où jurer La faide, c'étoit déclarér la guerre ; dépofer la faide ou la pacifer , c'étoit faire la paix. | Toute inimitié n’étoit pas qualifiée de faide , il fal- loit qu'elle fût capitale, & qu'il y eût guerre décla- rée ; ce qui arrivoit ordinairement pour le cas de meurtre ; car fuivant les lois des Germains , & au- tres peuples du Nord, toute la famille du meurtrier étoit obligée d’en pourfuivre la vengeance. Ceux qui quittoient leur pays à caufe du droit de faide, ne pouvoient pas fe remarier, ni leurs fem- mes non plus. Ce terme de faide étoit encore en ufage du tems de S. Louis, comme on voit par un édit de ce prin- ce du mois d'O&tobre 1245 , où il dit: mandantes tibi quatenus de omnibus guerris € faidiis tuæ ballivie , ex: parte nofiré capias & dari facias reëtas trenges ; dans la fuite on ne fe fervit plus que du terme de gverre privée, pour defioner ces fortes d’inimitiés, & ces: guerres privées furent défendues. : | Sur le mot faide, on peut voir Spelman & Ducan- ge en leurs goffaires , & la differtation 29 de Ducan-. ge fur Joinville, touchant les guerres privées. Foyez auffi les Zestres hifforiques fur le parlement , 10m. 1. PAL. 103 & 104. (4) | | * FAILINE , f. £, (Commerce d'éroffes.) ferge dont la chaîne a 880 fils , la portée 40 fils, y compris les lifieres ; la largeur au retour du foulon, une demi-- aune , & les rots trois quarts & demi : elle fe fabri- que dans la Bourgogne, Woyez des réolemens fur le COMRINETCE, * FAILLE , ( fœur dela) Hifi. eccléf. certaines hof. pitalieres , ainfi appellées de leurs grands manteaux. Un chaperon qui tenoit par en-haut à ce long man- teau, leur couvroit le vifage, & les empêchoit d’é- tre vües : elles fervoient les malades: elles étoient vêtues de gris ; & c’étoit une colomie du tiers-ordre de S. François. | “FAILLES, f. f. (Commerce. ) taffètas à failles. C’eft une étoffe de foie à gros grain, qui fe fabriquoit en Flandre ; où elle prit fon nom de Pajuftement que les femmes en faifoient : c’eft une écharpe qu’elles appelloient failles. FAILLI , ( Jurifprud.) c’eft la perfonne qui eft en faillite. Voyez ci-après FAILLITE. (4 FarLci, adj. ez Blafon, fe dit des chevrons rom- pus en leurs montans. Maynier d'Opede en Provence , d’azur À deux chevrons d'argent , l’un fa! à dextre, l’autre à fe- neftre, c’eft-à-dire rompus fur les flancs & féparés. FAILLITE,, { £. (Jursfprud.) decoëfio bonorum , eft lorfqu'un marchand ou négociant fe trouve hors d’é- tat, par le dérangement de fes affaires , de remplir les engagemens qu'il a pris relativement à fon com- merce où négoce, comme lorfqu'il n’a pas payé à l'échéance les lettres de change qu'il a acceptées ; qu'iln’a pas rendu argent à ceux auxquelsila four- ni des lettres qui font reyenues à protêt , & lui ont été dénoncées , ou lorfqu'il n’a pas payé fes billets au terme connu ; ainf fasre faillite, cet manquer à fes créanciers. On confond quelquefois ls mot de faillite avec celui de hanqueroute ; & quand on veut exprimer qu’il y a de la mauvaïfe foi de la part du débiteur qui manque à remplir fes engasemens, on qualifie la banqueroute de frauduleufe ; mais les or- donnances diftinguent la faillire de la banqueroute. La premiere eft lorfque le dérangement du débi- teur arrive par mälheur , comme par un incendie, par la perte d’un vaiffeau , & même par l’impéritié & la négligence du débiteur, pourv qu'il n’y ait pas pas de mauvaife foi, qui forfunæ wvirio, vel Juo, | vel partim fortunæ , partim fuo vitio , non folvendo fac- 14 foro ceffit , dit Cicéron en /a féconde philippique, La banqueroute proprement dite, qui efttojours réputée frauduleufe, eft lorfque le débiteur s’abfen- te & fouftrait malicieufement fes effets, pour faire perdre à fes créanciers ce qui leur eft dû. Le dérangement des affaires du débiteur n’eft qua- lifié de faillite ou de hanqueroute ; que quand le débi- teur eft marchand ou négociant , banquier, agent de change, fermier, fous-fermier, receveur , tréforier , ayeur des deniers royaux ou publics. | La faillire eft réputée ouverte du jour que le débi- teur s’eft retiré, ou que le fcellé a êté mus fur fes ef- fets, comme il eft dit en l’ordonnance du commerce, fit, L. art, L On peut ajoûter encore deux autres circonftances qui cara@térifent la faillite ; l’une eft lorfque le débi- teur a mis fon bilan au greffe ; l’autre eft lorfque les débiteurs ont obtenu des lettres de répi ou des ar- rêts de défenfes générales : les far/lires qui éclatent de cette derniere maniere, font les plus fufpeétes & les plus dangereufes , parce qu'elles font ordinaire- ment préméditées , & que le débiteur peut, tandis que les défenfes fubfftent , achever de détournerfes effets , au préjudice de fes créanciers. Ceux qui ont fait faillite, font tenus de donner à leurs créanciers un état certifié d’eux de tout ce qu'ils pofledent & de tout ce qu'ils doivent, Ordon- nance de 1673 > £6, xJ. art, 2. L'article fuivant veut que les négocians ; mar- chands & banquiers en faillite, foient aufi tenus de repréfenter tous leurs livres & regiitres, cotés & pa- raphes, en la forme prefcrite par les arsiclesi,2,3, 4, 5,66 7.dutit. ü.delamême ordonnance, pour être remis au greffe des juges & confuls, s'ilyena, finon de l'hôtel commun des villes, ou ès mains des créanciers , à leur choix. | La déclaration du 13 Jun 1716, en expliquant ces difpofitions de l'ordonnance de 1673, veut que tous marchands , négocians , & autres, qui ont fait ou fe- xont fazllire, {voient tenus de dépoler un état exa@, détaillé & certifié véritable de tous leurs effets mo- biliers & immobiliers, & de leurs dettes, comme auf- fi leurs livres & regiftres au greffe de la jurifdi&ion confulaire du lieu, ou la plus prochaine, & que fau- te de ce, ils ne puiflent être reçüs à pañler avec leurs créanciers aucun contrat d’atermoyement, concor- dat, tranfattion, ou autre ate, n1 d’obtemir aucune _ fentence ou arrêt d’omologation d’iceux, ni fe pré- valoir d'aucun fauf-conduit accordé par leurs créan- ciers. Pour faciliter à ceux qui Ont fait faillite, le moyen de drefler cet état, la même déclaration veut qu’en cas d’appofñtion du fcellé fur leurs biens & effets, leurs livres & repiftres foient remis &c délivrés après néanmoins qu'ils auront êté paraphés par le juge ou autre officier commis par le juge , qui appofera le fcellé , & par un des créanciers qui y affifteront ; & que les feuillets blancs’, fi aucun ya , auront été bâ- tonnés par ledit juge ou autre officier ; le tout néan- moins, fans déroger aux ufages des priviléges de la confervation de Lyon. | À Florence le débiteut doit fe rendre prifonnier avec fes livres , les exmiber & rendre raifon de fa conduite; & fi la faillire eft arrivée par cas fortuit, 8t qu'il n’y ait pas de fa faute, il n’en eft point blä- mé, mais 1] faut qu’il repréfente fes livres en bonne forme. | L'ordonnance de 1673, tic. xj. art. 4. déclare nuls tous les tranfports, ceflions, ventes & donations de biens meubles ou immeubles, faits par le fzi/i en fraude de fes créanciers, & veut que le tout foit ap- porté à la mafle commune des effets. Tome FI. FAT 373 Cet article ne fixoit point où ces fortes d’aétes commencent à être prohibés; mais le reglement fait pour la ville de Lyon le 2 Juin 1667, art.13. ordon- ne que toutes ceflions & tranfports fur les effets des faillis , feront nuls , s'ils ne {ont faits dix jours au moins avant la fai//ire publiquement connue, fans y comprendre néanmoins les viremens des parties faits en bilan, lefquels font bons & valables , tant que le failli ou fon faéteur porte bilan. Cette loi a été rendue générale pour toutle royau- me par une déclaration du mois de Novembre 1702, portant que toutes les ceflions & tranfports fur les biens des marchands qui font fail/ire , feront nuls, s'ils ne font faits dix Jours au moins avant la failire publiquement connue, comme auffi que les aétes & obligations qu'ils pafferont devant notaires , enfem- ble les fentences qui feront rendues contre eux, n’ac- querront aucune hypotheque ni privilège fur les créanciers chirographaires , fi ces aétes & obliga- tions ne font pañlés, &c les fentences ne font rendues pareillement dix jours au moins avant la faillite pu- bliquement connue ; ce qui a été étendu aux tran{- ports faits par les gens d’affaires, en pareil cas de faillite , fuivant un arrêt de la cour des aides du 14 Mars 1710, | Tous les aîtes pañlés dans les dix jours qui préce- dent la fazllite, font donc nuls de plein droit , fans qu'il foit befoin de prouver fpécialement qu'il y a en fraude dans ces aûtes ; ce qui n’empêche pas que les aëtes antérieurs à ces dix jours, ne puiflent être déclarés nuls , lorfque l’on peut prouver qu’ils ont été faits en fraude des créanciers. Ceux qui ont fait faillise ne peuvent plus porter bilan fur la place des marchands ou du change : à Lyon on ne fouffre pas qu'ils montent à la loge du change. Il'yaeu plufñeurs déclarations du roi qui ont attri- bué pour un certain tems la connoiffance des fail- lires aux juges-confuls ; favoir, celles des 10 Juin & 7 Décembre 1715 , 27 Novembre 1717, ÿ Août 1721, 3 Mai 1722, 21 Juillet 1726, 7 Juillet 1727, 19 Septembre1730,8cune derniere du ; Août 1732, qui prorogeoit cette attribution jufqu'au premier Septembre 1733. Il y a encore eu depuis une autre déclaration du 13 Septembre 1739, concernant les fazllires & ban- queroutes , qui regle les formalités des affirmations des créanciers &c des contrats d’atermoyement. Voy. Bornier fur le &r. jx. de l'ordonnance de 1673 , & les 701$ AFFIRMATION , ATERMOYEMENT , BANQUE- Cr > CRÉANCIERS , D'ÉLIBÉRATION, UNION. (4 * FAIM, APPÉTIT , (Gram. Syn.) l'un & l’autre défignent une fenfation qui nous porte à manger. Mais la faim n’a rapport qu’au befoin, foit qu'il naïfle d’une longue abftinence, foit qu'il naïfle de voracité naturelle, ou de quelque autre caufe, L’ap- pétie a plus de rapport au goût & au plaifir qu'on fe promet des alimens qu’on va prendre. La fzim prefle plus que lappéris ; elle eft plus vorace ; tout mets lappaife. L’appérit plus patient eft plus délicat ; cer- tain mets le réveille. Lorfque le peuple meurt de faim, ce n’eft jamais la faute de la providence ; c’eft toïjours celle de l’adminiftration. Il eft également ‘dangereux pour la fanté de fouffrir de la faim, &c de tout accorder à fon appéris. La faim ne fe dit que des alimens ; appétit a quelquefois une acception plus étendue; & la morale s’en fert pour défigner en gé- néral la pente de l’ame vers un objet qu’elle s’eft re- préfentée comme un bien, quoiqu'il narrive que trop fouvent que ce foit un grand mal. Faim, f. f. (Phyfiol.) en grec Aus, œuwn; par les auteurs latins e/#ririo, cibi cupiditas, cibi appetentia : fenfation plus ou moins importune, qui nous folli- 374 FAI cite, nous preffe de prendre des alimens , & qni cefle quand on a fatisfait au befoin aëtuel qui l’excite. - Quelle fenfation finguliere ! quel merveilleux fens que la faim ! Ce n'eft point précifément de la dou- leur , c’eft un fentiment qui ne caufe d’abord qu'un - petit chatowillement, un ébranlement leper; mais qui fe rend infenfiblement plus importun, & non moins difficile à fupporter que la douleur même: en- fin il devient quelquefois fi terrible & f cruel, qu'on a vi armer les meres contre les propres enrrailles de leurs eénfans, pour s’en faire malgré elles d’affreux feftins. Nos hiftoires parlent de ces horreurs, com- mifes au fiège des villes de Sancerre & de Paris, dans le trifte tems dé nos guerres civiles, Lifez-en la peinture dans la Merzriade de M. de Voltaire, & ne croyez point que ce foit une fiétion poétique. Vous trouverez dans l’Ecriture-fainte de pareils exemples decettebarbarie : manus mulierum mifericordium coxe- rune filios fuos ; faëli funt cibus earum , dit Ezéchiel , ch, v. ÿr. 10. Et Jofephe,au div. V, ch. xxy. de la guer- ré des Juifs, raconte un trait fameux de cette inhu- manité , qu'une mefe exerça contre {on fils pendant le dermer fiége de Jérufalem par les Romains. On recherche avec empreflement quelles font les caufes.de la fxirr , fans qu’il foit poffible de rien trou- ver qui fatisfafle pleinement la curiofité des Phyfio- logiftes. Il eft cependant vraifflemblable qu’on ne peut guete foupçonner d’autres caufes de linqunié- tude qui nous porte à defirer & à rechercher les ali- mens,que la ftruéture de l’organe de cette fenfation, l'adion du fang qui circule dans les vaiffeaux de Pef- tomac, celle des liqueurs qui s’y filtrent , celle dela falive , du fuc gaftrique , pancréatique, & finale- ment l’aétion des nerfs lymphatiques. Mais il ne faut point perdre ici de vüe que la fen- fation de la faim , celle de la foif, & celle du goût, ônt enfemble la liafon la plus étroite, & ñe font, à proprement parler, qu'un organe continu. C’eft ce que nous prouverons au 710£ GOUT (Phyftolog.). Continuons à préfent à établir les diverfes caufes de la faim que nous venons d'indiquer. Le ventricule vuide eft froiffé par un mouve- ment continuel ; ée qui occafionne un frotement dans les rides’ & les houpes nerveufes de cette par- tie. Il paroït fi vrai que le frotement des houpes &c des rides nerveufes de l’eftomac eft une des caufes de la faim , que les poiffons &c les ferpens qui man- quent de ces organes, ont peu de faim, & jouiflent de la faculté de pouvoirjeüner long-tems, Mais d’où naît ce froifflement ? Il vient principalement de ceque lé fang ne pouvant circuler aufir hbrement dans un eftomac flafque, que lorfque les membranes de ce fac font tendues , 11 s’y ramaïñle & fait gonfler les vaifleaux : ainf les vaifleaux gonflés ont plus d’ac- tion, parce que leurs battemens font plus forts; or ce furcroit d'action doit chatouiller tout le tif ner- Yeux du vifcere, & l’irriter enfuite en rapprochant les rides les unes des autres. Joignez à cela laétion des mufcles propres & étrangers à l’eftomac, & vous concevrez encore mieux la méceflité de ces frote- mens, à l’occafon defquels la fair eft excitée. Il ne faut pas douter que la falive & le fuc ftoma- cal ne produifent une fenfation & une forte d'irrita- tion dans les houpes nerveufes du ventricule ; on l’épronve à chaque moment en avalant fa falive, puifque l’on fent alofs un picotement agréable f Von fe porte bien: d’ailleurs l'expérience nous ap- prend que dès qué la falive ef viciée où manque de couler, l'appétit cefle. Les foldats émouffent leur faim en fumiant du tabac, qui les fait beaucoup cra- cher. Quand Verheyen, pour démontrer que la fal- ve ne contribuoit point à la jam, nous dit qu'il fe coucha fans fouper, cracha toute fa fahive le lende- main matin , &c n'eut pas moins d’appétit à diner, il FAI né fait que prouver une chofe qu'on n'aura point de peine à croire, je veux dire qu'un homme dine bien quand il n’a pas loupé la veille. La falive & le _ fuc gaftrique font donc de grands agens de la faim, & d'autant plus grands , qu'ils contribuent beaucoup à la trituration des alimens dans l’eftomac, & à leur chylification. ; Cependant pour que la falive excite Pappétit, 11 ne faut pas qu'elle foit trop abondante jufqu’à mon. der l’effomac ; il ne faut pas aufli qu’elle le foit trop peu; car dans le premmer cas, le frotement ne fe fait point fentir, 1l ne porte que fur l’humeur falivaire; & dans le fecond, les papilles nerveufes ne font point aflez picotées par les {els de la falive: d’où il réfulte que ces deux caufes pouflées trop loin, Ôtent la faim. Maïs puiiqu’à force de cracher, on n’a point d’appétit , faut-il faire diette jufqu'à ce qu'il revien- ne ? Tout au contraire, il faut prendre des alimens pour remédier à Pépuifement oùon fe trouveroit, & réparer les fucs falivaires par la boïflon, D'ailleurs la mañftication attire toùjours une nouvelle falive, qui defcend avec les alimens, & qui fervant à leur digeftion , redonne Pappétit. Il eft encore certain que le fuc du pancréas & la bile contribuent à exciter la fm ; on trouve beau- coup de bile dans le ventricule des animaux qui font motts de faim ; le pylore relâché, laïfle facilement remonter la bile du duodenum, lorfque cet inteftin en regorge : fi cependant elle étoit trop-abondante ou putride, appétit feroit détruit, il faudroit vui der l’eftomac pour le renouveller, & prendre des boiffons acidules pour émoufler lacrimonie bilieufe. Enfin limagination étend ici fes droits avec em- pire. Comme on fait par l'expérience que les ali- mens font le remede de cette inquiétude que nous appellons la faim , on les defire 8 on les recherche. L’imagination qu eft maîtrifée par cette impreflion, fe porte fur tous les objets qui ont diminué ce fen. timent, ou qui l’ont rendu plus agréable ::mais fi elle. eft maitrifée quelquefois par ce fentiment, elle le maitrife à fon tour, elle le forme , elle produit Le dé- goût & le goût, fuivant fes caprices, ou fuivant les impreffions que font les nerfs lympathiques dans le cerveau. Par exemple, dès que l’utérus eft dérangé, l'appétit s'émoufle , des goûts bifarres lui fuccedent : au contraire dès que cette partie rentre dans fes fon- &ions , appétit fait reflentir fon impreffion ordinai- re, Cet appètit bifarre s'appelle walacie, Voyez Ma LACIE. Voilà, ce me femble, les caufes les plus vraif- femblables de la faim. Celles de l'amour , c’eft-à-dire de linftinét qui porte les deux fexes l’un vers l’au- tre, feroient-elles les mêmes ? Comme de la ftru&u- re de Peftomac, du gonflement des vaifleaux, du mouvement du fang & des nerfs dans ce vifcere , de la filtration du fuc gaftrique , de Pempire de l’imagi- nation fur le soût, il s'enfuit un {entiment dont les alimens font le remede ; de même de la ftru@ture des parties naturelles , de leur plénitude, de la filtration abondante d’une certaine liqueur, n’en réfulte-1l pas un mouvement dans ces organes ; mouveinent qui agit enfuite par les nerfs fympathiques fur Pimagina- tion, caufe une vive inquiétude dans l’efptit, un de- fir violent de finir cette impreflion, enfin un pen- chant prefque invincible qui y entraîne. Tout cela pourroit être. Mais il ne s’agit point 1ci d’entrer dans ces recherches délicates; c’eftaflez, fi les caufes de la faim que nous avons établies ; fépondent géné- ralement aux phénomenes de cette fenfation. M. Senac lé prétend dans fa phyfologie: le leftenr en jugera par notre analy{e. 1°, Quand on a été un peu plus long -tems que de coûtume fans manger, l'appétit s'évanouit : cela fe conçoit, parce que le ventricule fe reflérre par Pabitinénce, donne moins de prife au chatouiflement du fuc gaftrique ; & parce que le cours du fang dans £e vifcere fe fait moins affément quand il eft flaf- que, que quand il eft faifonnablement diftendn, 2°. On ne fent pas de faim lorique les parois de Tleftomac font couvertes d’une pituite épaifle : cela Vient de deux raïfons. La premiere, de ce que le wentricule étant relâche par cette abondance de pi- tuite, fon fentiment doit être émouflé. La feconde confifte en ce que les filtres font remplis, & cette plénitude produit une compreflion qui émoufle en- core davantage la fenfbilité de l’eflomac. 3°, La faim feroit prefque continuelle dañs là bonne fanté , fi l’eftomac, le duodenum , & les in- teftins fe vuidoient promptement. Or c’eft ce qui arrive dans cértaines perfonnes, lor{qu'il y a chez elles une grande abondance de bile qui coule du foie dans les inteftins ; car comme elle diffout par: faitement les alimens , elle fait que le chyle entre promptement dans les veines laétées, & par con- féquent elle eft caufe que les inteftins & l’eftomac fe vuident : enfin c’eft un purgatif qui par fon im- “preffion précipite les alimens &c les excrémens hors du corps. Il y a quelquefois d’autres caufes parti- culieres d’une faim vorace, même fans maladie ; c'eft cette faim qu'on appelle orexie, Voyez ORE- XIE. | 4°. On peut donner de l'appétit par lufage de certaines drogues : telles font les amers qui tiennent lieu de bile, raniment l’a@ion de l’effomac, & em- pêchent qu'il ne fe relâche ; tel eft auf l’efprit de el, parce qu'il picote le tiflu nerveux du ventricu- le. Enfin il y a une infinité de chofes qui excitent appétit, parce qiw'elles flatent le goût, piquent le palais, & mettent en jeu toutes les parties qui ont ane liaifon intime avec le ventricule. 5. Dans les maladies aiguës, on n’a pas d’appé- tit; foit parce que les humeurs font viciées ; foit par linflammation des vifceres, dont les nerfs commu- niquant à ceux de l’eftomac, en refferrent le tiflu, ou éxcitent un fentiment douloureux dans cet or- ane. 6°. Les jeunes gens reffentent la 7: plus vive- ment que les autres ; cela doit être, parce que chez les jeunes gens 1l fe fait une plus grande diffipation d'humeurs, le fang circule chez eux avec plus de promptitude, les papilles nerveufes de leur eftomac font plus fenfbles. 7°. Si les tuniques du ventricule étoient fort re- lâchées, les nerfs le feroient auf, le féntiment {e- roit moindre, & par conféquent l’appétit diminue- roit: de-là vient, comme je l'ai dit ci-deflus, que lorfqu’il fe filtre trop de pituité ou de fuc ftoma- cal, on ne fent plus de far. 8°. Dès que l’eflomac eft plein, la fenfation de lPappétit ceflé jufqw’à ce qu’il foit vuide : c’eft parce que dans la plénitude , les membranes du ventricule font toutes fort tendues, & cette tenfion émouffe la fenfation ; d’ailleurs le fucfalivaire & le fuc gaftri- que étant alors mêlés avec les alimens , ils ne font plus d’impreffion fur l’eftomac. Si même ce vifcere eft trop plein , cette diftenfion produit une douleur Ou une inquiétude fatigante. 9°. Quand le ventricule ne fe vuide pas fuffifam- ment, le dégoût fuccede, En voici les raifons. 1°; Dans ce cas, l'air qui fe fépare des alimens & qui le fac qui les renferme, produit une fenfation atigante : or dès qu'il y a dans ce vifcere une fen- fation fatigante, elle fait difparoitre la {enfation agréable, celle qui caufe l'appétit ; c’eft- à une de ces lois qu’a établi la nature par la néceflité de la confiruétion, 2°, Le mauvais soût aigre, rancide ; alkalin, que contraétent les alimens par leur féjour dans le ventricule’, donne de la répugnance pour Tome VI, | FRSD «573 toutes fortes d’alimens femblables à céux qui fe font altérés dans cet organe de la digeftion. 3°. Il faut remarquer que dès qu'il y a quelque aliment qui fait une impreflion defagréable fur la langue où fur le palais, auffi-tôt le dégoût nous faifit, & imagination fe révolte. 10° Elle fuffit feule pour jetter dans le dégoût, &t peut même faire defirer des matieres pernicieu* fes, ou des chofes qui n’ont rien qui foit alimen= taire, C’eft en partie limagmation qui donne un goût fi capricieux aux filles attaquées de pâles cou- leurs : ces filles mangent de la terre, du plâtre , de la craie ; de la farine, des charbons , &c, & il ny a qu’ une imagination bleffée qui puiffe s'attacher À de tels objets. On doit fegarder cette forte de goût ridicule comme le délire des mélancoliques ; lefquels fixent leur éfprit fur un objet extravagant : mais il eft cer- tain que limpreflion que font ces matieres eft agréa: le , car elles ne rebutent point les filles qui ont de telles fantaifies. Voyez PALES COULEURS. De plus, qui ne fait que les femmes enceintes de- firent, mangent quelquefois avec plaifir du poiffon crud, des fruits verds, de vieux harengs, & autres mauvaifes drogues, &c que même elles les digerent fans peine? Voilà néanmoins des matieres defagréa- bles & nuifibles, qui flatent le goût des femmes grof. {es fans altérer leur fanté, ou fans produire d'effets mauvais qui foient bien marqués. Il eft donc certain que dans ces cas les nerfs ne font plus affe@és com- me ils l’étoient dans la fanté, &z que des chofes def: agréables à ceux qui fe portent bien, font des im- preflions flateufes lorfque l’économie animale eft dé: rangée: c’eft pour cela que les chates & d’autres fe: melles font quelquefois expofées aux mêmes capri- ces que les filles par rapport au goût. Souvent les medecins induftrieux ont éloigné ces idées extravaz gantes, en aftachant l’efprit malade À d’autres ob- jets : il eft donc évident qu’en plufeurs cas, l’imagis nation conferve fes droits fur l’eftomac ; elle peut même lui donner une force qu’il n’a pas naturelle: ment. Ajoütons que dans certains dégoûts les mala- des dont l’imagination eft pour ainf dire ingénieufé à rechercher ce qui pourroit faire quelque impreffion agréable, s’attachent comme par une efpece de dé- lire à des alimens bifarres, & quelquefois par un in: ftüiné de la nature, à dés alimens falutaires. On pourroit fans doute propofer plufeurs autres phénomenes de la faim , à l'explication defquels nos principes ne fauroient fuffre, & nous fommes bien éloignésade le nier: mais la phyfologie la plus fa: vantesne left point aflez pour porter la lumiere dans les détours obfcurs du labyrinthe des fenfa- tions ; il s’y trouve une infinité de faits inexplica- bles, plufieurs autres encore qui dépendent du tem- pérament particulier, de l'habitude, & des jeux in- connus de la ftruéture de notre machine. Après ces réflexions , il ne nôus refte qu’à dire en deux mots comment la faire diflipe,même fans man: ger, moyen que tout le monde fait, & que l’inftin& fait fentir aux bêtes : elle fe diflipe outre cela, 1° en dé- trempant trop les fucs diflolvans , & en relâchant les fibres à force de boire des liqueurs aqueufes chaudes, telles que le thé: 2°. en büvant trop de liquides hui- leux, qui verniflent & émouffent les nerfs, ou même en refpirant continuellement des exhalaifons de ma- tieres grafles, comme font par exemple les faifeurs de chandelle : 3€, lorfquel’ame éft occupée de quel- que pañlion qui fixe fon attention, comme la mélan- cohe, le chagrin, &c, la faim s’évanouit, tant lima> gination agit fur l’eflomac : 4°. les matieres putri- des Ôtent la fair fut le champ, comme un feul grain d'œuf pourri, dont Bellini eut des rapports nidoreux pendant trois jours, 6. 5°. l'horreur ou la répu- gnance naturelle qu’on a pour certains “at ie 1] 376 F AI certaines odeurs, pour la vüe d'objets extrèmement dégoûtans, ou pour entendre certains difcours à ta- ‘ble, qui affectent l'imagination d’une maniere defa- gréable. De cette horreur naît encore quelquefois le vomiflement , qui Ôte à l’effomac l’humeur utile qui picotoit auparavant fes nerfs. Tirons maintenant une conclufon toute fimple de ce difcours. Nous ayons déjà remarqué en le com- mençant, que la as eft un des plus forts inftinéts qui nous maïtrife : ajoütons que fi l’homme fe trouvoit hors d’état d’en fuivre les mouvemens , elle produi- roit entr'autres accidens l’hémorrhagie du nez, la rupture de quelques vaifleaux , la putréfation des liquides, la férocité , la fureur, & finalement la mort au fept, huit ou neuvieme jour, dans les per- fonnes d’un tempérament robufte ; car il ef difficile de croire que Charles XI. ait été fans défaillance au fort de fon âge & de fa vigueur, cinq jours à ne boire nimanger, ainf.que M. de Voltaire le dit dans la vie fi bien écrite qu'il nous a donnée dece monar- que. À plus forte raifon devons-nous regarder com- me un conte le fait rapporté par M. Maraldi, de la- cadémie des Sciences (an. 1706. p. 6.), que dans un tremblement de terre arrivé à Naples, un jeune homme étoit refté vivant quinze jours entiers fous des ruines, fans prendre d’alimens ni de boiïffon. Il ne faudroit jamais tranfcrire des fables de cet ordre dans des recueils d’obfervations de compagnies fa- vantes. La vie d’un homme en fanté ne fe foûtient fans alimens qu’un petit nombre de jours ; la nutri- tion, la réparation des humeurs, celle de la tranf- piration, l'adouciflement du frotement des folides, en un mot la confervation de la machine, ne peut s’exécuter que par un perpétuel renouvellement du chyle. La nature pour porter l’homme fréquemment 8t invinciblement à cette ation, y a mis un fenti- ment de plaifir qui ne s’altere jamais dans la fanté ; &c de ce fentiment qu'il a reçu pour la confervation de fon être, il en a fait par fon intempérance un art des plus exquis, dont 1l devient fouvent la viétime, Voyez ce que nous avons dit de cet art 44 mot CuI- SINE. Voyez GOURMANDISE , INTEMPÉRANCE, &c. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FAIM , (Séméiorique.) Ce fentiment qui fait defirer de prendre des alimens, l'appétit proprement dit, doit être confidéré par les medecins, non-feulement entant qu’il efëune des fonétions naturelles qui inté- refle le plus l’économie animale, & dont les léfions font de très-grande importance (attendu que ce defir difpofe à pourvoir au premier & au plus grand des befoins de l’animal , qui eft de fe nourrir, 824 y pour- voir d’une maniere proportionnée), mais encore en- tant que ce fentiment, bien ou mal réglé, peur four- nir différens fignes qui font de grande conféquence pour juger des fuites de l’état préfent du fujet d’oùils font tant dans la fanté que dans la maladie. On ne peut juger du bon ordre dans l’économie animale , que par la maniere dont fe fait l’exercice . des fon@ions : lorfqu’il fe foûtientavec facilité &c fans aucun fentiment d’incommodité, il annonce l’état de bonne fanté, Mais de ces conditions requifes , celle dont il eft le plus difficile de s’aflürer, eft la durée de cet exercice ainfi réglé ; on ne peut y parvenir que par les indices d’une longue vie, qui font en même tems des fignes d’une fanté bien établie, On doit cher- cher ces indices dans les effets qui réfultent d’une telle difpoñition dañs les folides & les fluides de la machine animale, qu'il s’enfuive la confervation de toutes fes parties dans l’état qui leur eft naturel. Cette difpofition confifte principalement dans la faculté qui eft dans cette machine, de convertir les alimens en une fubftance femblable à celle dont elle eft déjà compofée dans fon état naturel ; ainf.un des principaux fignes que l’obfervationait fournis jufqu’à FAI préfent pou faire connoître cette difpofition, ef le * bon appétit des alimens qui fe renouvelle fouvent, & que l’on peut fatisfaire abondamment, fans que la digeftion s’en fafle avec moins de facilité &c de promptitude, | À Il fuit de-là que cet appérir doit être une fonrce de fignes propres à faire juger des fuites dans l’état de léfion des fonétions , entant que ce fentiment fubfifte convenablement, ouqu'ileft déréglé, foit par ex- cès, foit par défaut. Cette conféquence , aufli-bien que fon principe, n’ayant pas échappé aux plus an- ciens obfervateurs des phénomenes que préfente l’é- conomie animale, tant dans la fanté que dans la ma- ladie, ils ont recueilli un grand nombre de ceux qui font relatifs à l'appétit des alimens : il fuffira d’en rapporter quelques-uns des principaux, d’après Lom- mius (obfery. medic. lib. III.) , & d'indiquer où on pourra en trouver une expoftion plus étendue. C’eft un figne falutaire dans toutes les maladies, que les malades n’ayent point de dégoût pour les ali- mens qui leur font préfentés convenablement ; la difpofition contraire eft d’un mauvais préfage. Voyez DÉGOûT. S'il arrive qu'un malade ayant pris des alimensde mauvaife qualité , ou qui ne conviennent pas à fon état, n’en foit cependant pas incommodé, c’eft une marque de bonne difpofition au rétabliffement de-la fanté : on doit tirer une conféquence oppofée, files alimens les plus propres & les mieux adminiftrés, bien loin de produire de bons effets, en produifent de mauvais. Lorfque les convalefcens ont appéris 8 mangent beaucoup, fans que les forces & lembonpoint re- viennent, c’eft un mal, parce qu’alors ils prennent plus de nourriture qu’ils n’en peuvent bien digérer: il en faut retrancher. Si la même chofe arrive à ceux même qui ne mangent que modérément , c’eft une preuve qu’ils ont encore befoin d’abftinence ; & s'ils tardent de la faire , 1l y a tout lieu pour eux decrain- dre la rechûte : car ils yont de la difpofition tant qu’il refte encore quelque chofe de morbifique à détnuire, quoïque la maladie foit décidée, Ceux qui ayant fait diete rigoureufément pendant le cours de leur maladie , fe fentent enfuite preflés par la faim , font beaucoup efpérer pour leur réta- bliflement. Pour un plus grand détail de fignes diagnoffics & prognoftics tirés de l’appétit des alimens & de fes léfions , voyez Hippocrate & fes commentateurs, tels fur-tout qne Duret, ir Coacas. Voyez auffi Galien, Sennert , Riviere, & les différens auteurs d'inftitu- tions de medecine , tant anciens que modernes: em les parcourant tous, &e en les comparant les uns aux autres, on peut aifément fe convaincre que ceux-ci, moins obfervateurs, n’ont pris pour la plüpart d’au- tre peine que de répeter & de mal expliquer ce que ceux-là ont tranfmis à la poftérité fur le fujet dontal s’agit, comme fur tout autre de ce genre. (d) FAIM CANINE, ( Med.) En terme de l’art, cyzore- xie, c’eft une faim demefurée qui porte à prendre beaucoup de nourriture, quoique l’eftomac larejette peu de tems après. La faim canine eft donc une vraie maladie, qu’il ne faut pas confondre, comme on fait dans le difcours ordinaire, avec le grand & fréquent appétit; état que les gens de l’art appellent orexie, Il ne faut pas non plus confondre la faim canine avec la Boulimie, comme nous le dirons dans la fuite. Aïinf les medecins éclairés diftinguent avec raï- fon, d’après l'exemple des Grecs , par des termes confacrés,les différentes affections du ventricule dans la fenfation de la faim , & voici comment. Ils nom- ment faim, le fimple appétit, le befoin de manger commun à tous les hommes: ils appellent orexies une fair dévorante qui requiért une nourritureplus abondante, & qu’on répete plus fouvent que dans l’état naturel, fans néanmoins que la fanté en foit dérangée : ils nomment p/eudorexie, une fauffe faim , telle qu'on en a quelquefois dans les maladies aiguës & chroniques : ils appellent prca ou malacie, le goût dépravé des femmes enceintes, des filles attaquées des pâles couleurs, &c. pour des alimens bifarres, Voyez FAIM, OREXIE , PSEUDOREXIE, MALACIE. Mais la cynorexie , ou la faim canine, eft cette maladie dans laquelle on éprouve une fa vorace, &t néanmoins l’on vomit les alimens qu’on prend pour la fatisfaire ; ainfi qu'il arrive aux chiens qui onttrop mangé. C’eft en cela d’abord que la faim cas * ainediffere de la #oulimie, qui n’eft point fuivie de vomiflemens , mais d’oppreflion de l’eftomac , de difficulté de refpirer , de foibleffe de pouls, de froid & de défaillances. | Erafiftrate eft le premier qui ait employé lé môt de boulimie , & {on étymologie indique le caraétere de cette affection , qui vient proprement du grand froid qui reflerre l’eftomac , fuivant la remarque de Jofeph Scaliger; car &ë, dit-il, apud Græcos intendir ; at PEnuos & Ce, ingens fames à refrigeratione vert- triculi contratta; fic apud Latinos particula ve intendir, at in yoce vehemens, & alüs. En effet, la foulimie arrive principalement aux voyageurs dans les pays froids , & par conféquent elle eft occafonnée par la froideur de l’air qui les fai- fit, ou plûtôt par les corpufcules frigorifiques qui reflerrent les poumons &c le ventricule. Cette idée s’accotde avec le rapport des perfonnes qui ont éprouvé les effets de cette maladie dans la nouvelle Zemble & autres régions feptentrionales. Fromun- dus quien a été attaqué lui-même , croit que le meil- leur remede feroit de fe procurer une forte toux, * pour décharger l’eftomac &c les poumons des efprits dela neige, qui ont été attirés dans ces organes par la refpiration , ou qui s’y font infinués d’une autre maniere. C’eft dommage que le confeil de ce me- decin tende à procurer un mal pouf en guérir un autre; car d’ailleurs fon idée de la cure eft très-in- gémeufe. Le plus für, ce me femble, feroit de bon: nes friétions, la boiflon abondante des liquides chauds & aromatiques , propres à exciter une grande tranfpiration ; & de recourir en mêmetems aux cho- {es dont l’odeur eft propre à rappeller & à raflem- bler les efprits vitaux difipés, tel qu’eft en particu- lier le pain chaud trempé dans du vin, & autres re- medesfemblables. Il réfulte de cet expofé, que la boulimie doit être un accident fort rare dans nos cli- mats tempérés, & qu’elle differe eflentiellement de la faim canine par les caufes & les fymptomes. . Dans la faim canine les alimens furchargeant bien- tôt l’eftomac, le malade 2 n’a pü s'empêcher de les prendre, eft contraint de les rejetter. Comme ce vomiflement apporte quelque foulagement , l’appé- tit revient ; & cet appétit n’eft pas plütôt fatisfait que le vomifflement fe renouvelle : ainf l'appétit fuccede au vomiflement, & le vomiflement à l’ap- pétit. | | nr . Entre plufieurs exemples de cette maladie, je n’en ai point Iù de plus incroyable que celui qui eft rap- porté dans les Tranf. philof. n°. 476. pag. 366. & 381. Ün jeune homme , à la fuite de la fievre, eut cette far portée à un tel degré, qu’ellerle fit dévo- rer plus de deux cents livres d’alimens en fix jours; mais il n’en-fut pas mieux nourri, car il les réjetta perpétuellement , fans qu’il en paflât rien dans les inteftins : deforte qu’il perdit l’ufage de fes jambes, &t mourut peu de mois après dans une maïgreur ef. froyable. | | Les autres malades de fzèm canine dont il eft parlé dans les annales de la Medecine , ne font pas de cette voracité ; mais ils nous offrent des caufes fi diverf- F A Ï 377. fiées de la maladie, qu'il eft très-important ; quand le cas fe préfente, de tâcher, pour la cure, de les découvrir par les fymptomes qui précedent ce mal, qui l’accompagnent & qui lui fuccedent.. Or la faire canine tire fa naïflance de plufieurs caufes elle peut provenir de vers, & en particulier du ver nommé Ze Jolitaire ; d'humeuts vicieufes, acides, acres, mu- riatiques , qui picotent le ventricule; d’une bile ron- geante.qui s’y jette ; du relâchement de l’eftomac, de fon échauffement , de la trop grande fenfibilité des nerfs &c des efprits, On foupçonne qu’il y a des vers, par les fymptomes qui leur font propres: la vüe des évacuations fert à indiquer la nature des humeurs viciées ; l'abondance de la bile paroît par la jaunifle répandue dans tout le corps ; la mobilité des efprits fe rencontre toûjours dans les perfonnes faméliqués , qui font attaquées en même tems d’hyf= térifme ou qui font hypocondres ; le défaut de nutri- tion fe manifefte par la maigreur du malade, & ce fymptome rend fon état vraiment dangereux : car lorfque le vomiflement ou le flux de ventre font ob- ftinés , la cachexie , l’hydropifie, la lienterie, l’atro- phie, & finalement la mort, en font les fuites, La méthode curative doit fe varier fuivant les di- verfes caufes connues du mal, Si la faim canine eft produite par une humeur aére quelconque qui irrite l’eftomac, il faut l’évacuer, en cortiger l’acrimonie, & rétablir enfuite par les fortifians.le ton de l’efto- mac, & des organes qui fervent à la digeftion, Les vers fe détruiront par des vermifuges , & principa- lement par les mercuriels. Dans la chaleur des vif- ceres on confeillera les adouciffans & les hume@ans ; dans le cas de la mobilité des efprits, on employera les narcotiques, On pourroit appliquer extétieure- ment fur toute la région de l’eftomac , lés linimens . & les émplâtres oppofés aux caufes du mal. La faim canine qui procede du défaut de conformation dans les organes, comme de la trop grande capacité de leftomac , de l’infertion du canal cholidoque dans ce vifcere, de la briéveté des inteftins , en un mot, de quelque vice de conformation, ne peut être dé- truite par aucune méthode medicinale : maïs ce font des cas rares, & qui n’ont ordinairement aucune fâcheufe fuite. Article de M. le Chevalier DE Ja u- COURT. FAIM CANINE, (Maréchall.) Ce fentiment intime ê fecret qui nous avertit de nos befoins, ce vif pen chant à les fatisfaire ; cet inftinét qui, quoiqu’aveu- gle , nous détermine précilément au choix des chofes qui nous conviennent ; toutes ces perceptions , en un mot, agréables ou fâcheufes qui nous portent à fuir ou à rechercher machinalement ce-qui tend à la confervation de notre être, ou ce qui peut en hâter la deftruétron , font abfolument communes à l’hom- me & à l'animal : la Nature a accordé à lun & à l’autre des fens internes & externes; elle les a éga- lement aflujettis à la faim , à la foif, aux mêmes né- cefités. | pe L’eftomac étant vuide d’alimens , les membranes qui conftituent ce fac, {ont affaiflées & replies en fens divers : dans cet état , elles oppofent un obftacle à la liberté du couts du fang dans les vaiffeaux qui les parcourent. De la lenteur de la marche de ce fluide réfulte le gonflement des canaux, qui dès-lors font follicités à des ofcillations plus fortes ; & de ces of cillations augmentées naïflent une irritation dans les houppes nerveufes, un fentiment d'inquiétude qui ne cefle que lorfque le ventricule diftendu , les tuyaux fanguins fe trouvent dans une direétion pro- pre à favorifer la circulation du fluide qu'ils char rient. Les reftes acrimonieux des matieres diffoutes dans ce vifcere , ainfi que l’aétion des liqueurs qui Y font filtrées , contribuent & peuvent même donner lieu à une fenfation femblable, Dès que leurs {els 379 FAÏ s’exerceront fur les membranes feules, les papilles fubiront une imprefion telle, que l’animal fera en proie-à une perception plus ou moins approchante de la douleur, jufqu’à ce qu'une certaine quantité d’alimens s’offrant, pour anf dire, à leurs coups, & les occupant en partie, fauve l'organe de l’abon- quelles il eftexpoté. Nous n’appercevons donc point de différence dans les moyens choïfis & mis en ufage pour inviter l’homme & le cheval à réparer d’une part des déper- ditions qui font une fuite inévitable du jeu redoublé des reflorts; & à prévenir de l’autre cette falure al- kalefcente que contraétent néceflairement des hu- meurs qui circulent fans de nouveaux rafraîchiffe- mens, &t qui ne peuvent être adoucies que par un nouveau chyle. Nous n’en trouvons encore aucune dans les caufes de cette voracité , de cette fziminfatiablé & contre nature dont ils font quelquefois affeétés. Suppofons dans les fibres du ventricule une rigidité confidéra- ble , une forte élafticité ; il eft certain que les digef- tions feront précipitées, l'évacuation du fac confé: quemment très-prompte , & les replis qui forment les obftacles dont j’ai parlé, beaucoup plus fenfibles, vü l’aétion fyftaltique de ces mêmes fibres. Imagi- nons de plus une grande acidité dans les fucs diffol- Vans, ils picoteront fans cefle les membranes : en un mot, tout ce qui pourra les irriter fufcitera in- failliblement cet appétit dévorant dont il s’agit, & dont nous avons des exemples fréquens dans l’hom- me &t dans l’animal , que de longues maladies ont précipités dans le marafme. Alors les fucs glaireux qui tapiflent la furface intérieure des parois de l’ef- tomac , n'étant point aflez abondans pour mettre À couvert la tunique veloutée, & leur acrimonie ré- pondant à l’appauvriflement de la mañle, ils agiflent avec tant d'énergie fur le tiffu cotonneux des houp- pes nerveufes, que ce fentiment exceffif fe renous velle à chaque inftant, & ne peut être modifié que par des alimens nouveaux, & pris modérément. Il faut convenir néanmoins que relativement à la plüpart des chevaux faméliques que nous voyons, nous ne pouvons pas toljours acculer Les unes & Les autres de ces caules ; il en eft une étrangere , qui le plus fouvent produit tous ces effets, Je veux parler 1ci de ces vers qui n’occupent que trop fréquemment l’effomac de l’animal. Si le ventricule eft dépourvû de fourrage, & s'ils n’y font enveloppés en quelque façon, les papilles fe reffentent vivement de leur ac- tion. En fecond lieu , leur agitation fufcite celle du vifcere , & le vifcere agité fe délivre & fe débar- tafle des alimens dont la digeftion lui eft confiée, ayant que le fuc propre à s’aflimiler aux parties, en ait été parfaitement extrait, Enfin ces infeétes dévo- rent une portion de ce même fuc, & en privent l’a- nimal ; ce qui joint à l’acrimonie dont le fang fe charge nécefairement , les digeftions étant vicieu- fes, occafñonne un amaigriflement, une exténua- tion que l’on peut envifager comme un fymptome conftant & aflüré de la maladie dont il eft queftion, de quelque fource qu’elle provienne. La voracité du cheval qui fe gorge d’une quantité exceflive de fourrage, fa triftefle, fon poil hériffé & Javé, des déjettions qui ne préfentent que des ali- mens prefqu’en nature, mêlés de certaines férofités en quelque façon indépendantes de la fiente ; l’odeur aigre qui frappe l’odorat , & qui s’éleve des excré- mens ; le marafme enfin, font les fignes auxquels il eft aifé de la reconnoitre. Lorfqu’elle eft le réfultat de la préfence des vers dans l’eftomac, elle s’annon- ce par tous les fymptomes qui indiquent leur féjour dans cet organe, & elle ne demande que les mêmes temedes, Voyez VER. dance funefte des particules falines, à l’a@tivité def. Ceux par le fecours defquels nous devons com battre & détruire les autres caufes, font les éva- cuans, les abforbans, les médicamens âmers, On peut, après avoir purgé le cheval, le mettre à l’nfage des pilules abforbantes, compofées avec de la craie de Briançon , à la dofe de demi-once, enveloppée dans une fufifante quantité de miel commun. L’aloës: macété dans du fuc d’abfynthe ; Les trofchifques d’a: garic, à pareille dofe de demi-once, feront très- falutaires : la thériaque de Venife, l’ambre gris, le: fafran adminiftrés féparément , émoufferont encore le fentiment trop vif de leftomac, corrigeront la qualité maligne des humeurs, & rétabliront le ton des organes digeftifs: Du refte il eft bon de donner de tems en tems à l’animal atteint de la faim canine, une certaine quantité de pain trempé dans du vin, & de ne lui préfenter d’ailleurs que des alimens d’u- ne digeftion aflez dificile , tels que la paille, par exemple , afin que l’eftomac ne fe vuide point auffr aifément que fi on ne lui offroit que des matieres qu'il difout fans peine, 8 qu'il n’élabore pointalors pour le profit du corps. L’opium dans l’eau froide, calme les douleurs que caufe quelquefois dans ce même cas linflammation de ce vifcere. (e - FAIM-FAUSSE , (Medecine) Voyez, pour la fazffe: faim ; au mot PSEUDOREXIE, FAIM-VALE, (Maréchallerie.) L’explication que nous avons donnée des caufes & des fymptomes de la maladie connue fous le nom de faim canine, 8 Pexpofition que nous ferons de celle que nous appel- lons fzim-vale, prouveront que l’une & l’autre ne doivent point être confondues ; & que les auteurs qui n’ont établi aucune différence entr'elles, n’ont pas moins erré que ceux qui ont envifagé celle ci dut même œil que l’épilepfe. | Il feroit fuperflu fans doute d'interroger les anciens fur Pétymologie du terme faim-vale, & de remonter à la premiere impofition de ce mot, pour découvrir la raifon véritable & originaire des notions & des idées qu’on y a attachées. Je dirai fimplement que la: faëm-vale n’eft point une maladie habituelle : elle ne fe manifefte qu’une feule fois , & par un feul accès, dans le même cheval ; & s’il en eft qui en ontefluyé plufieurs dans le cours de leur vie, on doit convenir que le cas eft fort rare. Il arrive dans les grandes chaleurs , dans les grands froids & après de longues marches, & non dans les autres tems & dans d’au- tres circonftances. Nous voyons encore que es che- vaux vifs y font plus fujets que ceux quisne le font point, & que les chevaux de tirage en font plûtôt frappés que les autres. Le cheval tombe comme s’il étoit mort : alors on lui jette plufieurs feaux d’eau fraiche fur la tête, on lui en fait entrer dans Les oreil. les, on lui en fouffle dans la bouche & dans les na feaux ; & fur le champ il fe releve, boit, mange, & continue fa route. On ne peut attribuer cet accident qu’à l'interrup- tion du cours des efprits animaux, produite dans les grandes chaleurs par la diffipation trop confidérable des humeurs, & par le relâchement des folides; & enhyver par l’épaififlement & une forte de conden- fation de ces mêmes humeurs. Souvent auff les che- vaux vifs, & quiont beaucoup d’ardeur, fe donnent à peine le tems de prendre une aflez grande quantité de nourriture ; ils s’agitent, & difipent plus. Si à ces difpofitionson joint la longue diete, les fatignes exceffives , l’adtivité & la plus grande force des fucs difolvans , un défaut d’alimens proportionnément aux befoins de l’animal , la circulation du fang & des efprits animaux fera inconteftablement rallentie. _ De-là une foibleffe dans le fyftème nerveux, qui eft telle, qu’elle provoque la chûte du cheval. Les af- perfions d’eau froide caufent une émotion fubite, & remettent fur le champ les nerfs dans leur premier F & état; &c les fubftances alimentaires qu’on donne en. fnte à l'animal , les y confirment. Quant au maraf- mé, que quelques écrivains préfentent comme un ligne aflüré & non équivoque de la fam-vale, on peut leur objeéter que la maïgreur des chevaux qui en ont été atteints, eft telle que celle que nous re- prochons à ceux que nous difons être étroits de boyau , & qui ont ordinairement trop de feu & trop de vivacité. Ileft vrai que fi les accidens dont il s’a- git étoient répetés & fréquens, ils appauvriroient la mañle , & rendroient les fucs regénérans acres &c in- capables de nourrir, & donnéroient enfin lieu à l’a- trophie ; mais il eft facile de les prévenir en ména- eantlanimal, en ne l’outrant point par des travaux as » &c en le maintenant danstoute fa vigueur par des alimens capables de réparer les pertescontinuel- les qu'il peut faire. (e) | . Faim, (La) Mythol. divinité des poëtes du Paga- nifme , à laquelle on ne s’adrefloit que pour l’éloi- gner; & c'étoit-là la conduite qu’on tenoit fagement avec les divinités malfaifantes, Les Poëtes plaçent Zz faim à la porte de l’enfer, de même que Les mala- dies , les chagrins , les foins rongeans , l’indigence & autres maux, dont ils ont fait autant de divinités. Les Lacédémoniens avoient à Chalcioëque, dans le temple de Minerve, un tableau de /a faim, dont la vûe feulé étoit effrayante. Elle étoit repréfentée dans ce temple fous: la figure d’une femme have, pâle, abattue jd’une maïigreur effroyable, ayant les tempes creufes , la peau du front feche & retirée ; . les yeux éteints , enfoncés dans la tête ; les joues plombées:, les levres livides’; enfin les bras & les mains décharnées , liées derriere le dos. Quel trifte tableau! Il devroit être dans le palais de tous les defpotes , pour leur mettre-fans cefle fous les yeux le fpectacle du malheureux état de leurs peuples ; & dans le fallon des Apicius, qui, infenfbles à la mi- fere d'autrui, dévorent en un repas la nourriture de cent familles. Ærsicle de M. le Chevalier DE Jau- COURT. | | FAINE, ff. (Jardinage. ) eft le fruit d’un arbre appellé hérre, que l’on mange, & qui a le goût d’u- ne noïfette: dans les famines on en fait du pain. (X) . FAINOCANTRATON , f. m. (ff. nat.) efpece de léfard de l’île de Madagafcar, qui eft d’une gran- deur médiocre. Il s'attache fi fortement aux arbres, qu'on croiroit qu'il y eft collé. Il tient toüjours fa gueule ouverte, afin d'attraper des mouches & au- tres infettes dont 1l fe nourrit. Les habitans du pays en ont grande peur, parce qu'on prétend qu'il faute | au cou de ceux qui en approchent, & s’y applique fi fortement | qu'on a beaucoup de peine à s’en dé- barrafler. Hubner,, défionn. univ. | * FAIRE, v. a&. (Gramm.)Excepté les auxiliaires être &t avoir, il n’y a peut-être aucun autre verbe dont l’ufage foit plus étendu dans notre langue que celui du verbe faire. Etre défigne l’exiftence &c l’é- tat ; avoir, la pofleffion; & faire, l’attion. Nous n’entrerons point dans la multitude infime des ap- plications de cemot; on les trouvera aux a@ions auxquelles elles fe rapportent. | FAIRE, verbe qui, dans le Commerce , a différen- tes acceptions, déterminées parles divers termes qu'on y joint, & dont voici les principales. | … Faire prix d’'unechofe ; c’eft convenir entre le ven- deur & l’acheteur, de la fomme pour laquellele pre- mier la livrera à autre. a bé, Faire trop chere une marchandife ; c’eft la prifer au delà de fawaleur. cédente ; on l’effaye même -quelques jours aupara- vant fur des œufs ordinaites, L’incubation doit.fe faire dans une chambre enterrée, aflez femblable à un cellier, afin que la chaleut y foit modérée, & que l’impreflion du tonnerre s’y faffe moins fentir.à Les œufs de faifan font couvés pendant vingt-quatre &t quelquefois vingt-cinq jours, avant que les fai- fandeaux viennent à éclore, Lorfqu'ils font éclos , on les laiffe encote fous la poule pendant vingt-qua- tre heures fans leur donner à manger, Une caiffe de trois piés de long fur un pié & demi de large, eft d’abord le feul efpace qu'on leur permette de par- courir ; la poule y eft avec eux, mais retenue par une grille qui n'empêche pas la communication que les faifandeaux doivent avoir avec elle. Cet endroit de la caïfle que la poule habite, eft fermé par lehaut; le refte eft ouvert ; & comme il eft fouvent nécef- faire de mettre le jeune gibier à l'abri, foit de la pluie, {oit d’un foleil trop ardent, on y ajufte au befoin un toit de planches legeres , au moyen duquel on leu* ménage le degré d’air qui leur convient. De jour en jour on donne plus d’étendue de terrein aux faifan- deaux, & après quinze jours, on les laiffe tout-à-fait libres ; feulement la poule qui refté toüjours enfer- mée dans la caïfle, leur fert de point de ralliement; & en les rappellant fans ceffe , elle les empêche de s'écatter. = 4 pesé 4 Les œufs de fourmis de pré devroient être, pen- dant le premier mois, la principale nourriture des faifandeaux. Il eft dangereux de vouloir s’en pañler tout-à-fait ; mais la difficulté de s’en procurer en aflez grande abondance, contraint ordinairement à cher- cher des moyens d'y fuppléer. On fe fert pour cela d'œufs durs hachés & mêlés avec de la mie de pain & un peu de laitue, Les repas ne fanfoiént être trop frèquens pendant ces premiers tems; on ne peut aufli mettre trop d'attention à ne donner que peu à la fois: c’eft le feul moyen d'éviter aux faifandeaux des maladies qui deviennent contagieufes, & qui font incurables. Cette méthode , outre que Pex: périence lui eft favorable, a encore cet avantage qu’elle eft limitation de la nature. La poule faifan- de, dans la campagne, promene fes petits pendant prefque tout le jour, quand ils font jeunes, & ce continuel changement de lieu leur offre à tous mo mens de quoi manger , fans qu'ils foient jamais raf= fañés. Les faifandeaux étant âgés d’un mois, on hange un peu leur nourriture, & ôn en augmente là quantité. On leur donne des œufs de fourmis de bois, qui font plus gros & plus folides ; on y ajoûte du blé, mais très-peu d’abord: on met auf plus de diftance entre les repas. | … Ils font fujets alors à être attaqués par une efpecë de poux qui leur eft commune avec la volaille, & qui les met en danger. Ils maigriflent ; 1ls meurent à la fin, fi l'on n'y remédie. On le fait en nettoyant avec grand foin leur caïfle , dans laquelle ils paflent ordinairement la nuit. Souvent on eft obligé de leur retirer cette caïlle même qui recele une partie de cette vermine ; on leur laifie feulement ce toit leger dont nous avons parlé, fous lequel ils paffent la nuit, & on attache la couveufe à côté, expofée à l’air & à la rofée. YA. A mefure que les faifandeaux SAREGTE en âge, | LC 382 FAT es dangers diminuent pour eux, Hslont pourtant un moment aflez critique à pañler, torfqu’ils ont un peu plus:de-deux mois : les plumes deleur queue tom- bent alors, & ilen poufle de nouvelles, Les œufs de fourmis hâtent ce moment, & le rendent moins dangereux. Il ne faudroit'pas leur donner dé ces œufs dé fourmis de bois ; fans y'ajotiter au moins deux répas d'œufs durs, hachés. L’excès dés pre- miers feroit auf fâcheux que l’ufageten eff nécef- faire. 9 EG Sn nil 1 : Maïs de tous les foins , celui far léquelon doit le moins fe relâcher, regarde l’eau qu’oñ donne à boire aux fafandeaux ; elle doit être inceflamment rènou- vellée &rafraichie: l’inattention à cét ésardexpofe le jeune gibier à une maladie aflez commune parmi les poulets, appellée Zz pépie, 8 à laquelle il n'y a guere de reméde. Nôtüs avons dit qu'il falloit éloigner les unes des autres les bandes de faifans, aflez pour qu’elles ne püflent pas fe mêler ; mais comme une poule fufit pour en fixer un grand nombre , on ümit enfemble trois où quatre couvées d'âge à-peu-près pareil, pour en former une bande. Les plus âgés n’exigeant as des foins continuels , on les éloigne aux extré- mités de là faifanderie, & les plus jeunes doivent toù- jours être fous la main du faifandier. Par ce moyen la confufñon, s’il en arrive, n’eft jamaïs qu'entre des âges moins difproportionnés, & devierit moins dan- gereufe. | >. ” Voilà les faifandeaux élevés. La même niéthode convient aux perdrix: il faut obferver feulement qu’en général les perdrix rouges font plus délicates que les faifans mème ; & que les œufs de fourmis de pré leur font plus néceffäires. Lorfqu’elles ont'atteint fix femaines , & que leur tête eftentierément couverte de plumes , 1l'eft dan- gereux de les tenir enfermées dans la faz/anderie. Ce gibier, naturellement fauvage, devient fujet alors à une maladie contagieufe, qu’on ne prévient qu’en le Jaiffant libre dans la campagne. Cetté maladie s’an- nonce par une enflure confidérable à la tête & aux piés ; & elle eft accompagnée d’une foif qui hâte la mort, quand on la fatisfait. | À légard des perdrix grifes ; elles demandent : beaucoup moins de foin & d'attention dans Le choix de la nourriture : on les éleve très-fürement par la méthode que nous avons donnée pour les faifans ; mais on peut en élever aufi fans œufs de fourmis, avec de la mie de pain, des œufs durs, du chénevi écraié , & la nourriture que l’on donne ordinaire- ment aux poulets. Il eft rare qu’elles foient fujettes à des maladies, ou ce ne feroit que pour avoir trop mangé, & cela eft aifé à prévenir. L'objet de l'éducation domeftique du gibier étant d’en peupler la campagne, 1l faut, lorfqu’il eft éle- vé, le répandre dans les lieux où l’on veut le fixer. Nous dirons dans un autre article, comment ces lieux doivent être difpofés pour chaque efpece, & ce que l'art peut à cet égard ajoûter à la nature. Voyez GIBIER. On peut donner la liberté aux faïfans lorfqw'ils ont deux mois & demi ; & on doit la donner aux perdrix , fur-tout aux rouges , lorfqu’elles ont at- teint fix femaines. Pour les fxer on tranfporte avec eux leur caifle, & la poule qui les a élevés. La né- ceffité ne leur ayant pas appris les moyens de {e pro- curer de la nourriture, il faut encore leur en porter pendant quelque tems : chaque jour On leur en donne un peu moins, chaque jour aufñ ils s’accoûtument à en chercher eux-mêmes. Infenfblement ils perdent de leur familiarité, mais fans jamais perdre la mémoire du lieu où ils ont été dépolés & nourris. On les abandonne enfin, lerf- qu'on voit qu'ils n’ont plus befoin de fecours. FAI : Nous ne devonsipas finir cet article fans avertie ‘qu'on tenteroit inutilement d’avoir des ‘œufs de pet drix, fur-tout des rouges, en nourriffant des paires dans des parquets; elles ne pondent point, ou du moins pondent très-peu lorfqu'elles font enfermées : on ne peut en élévér qu’en faifant ramafler des œufs däns là campagne: On donne à üne poule vinet+ quatre de ces œufs, & elle les conve deux jours de moins que ceux de faifan. Pour ceux-ci on doit re nouveller les poules des parquets, lorfqu’elles ont quatre ans; à cet âge ellés commencent à pondre beaucoup moins , & les œufs en font fouvent clairs, La durée ordinaire dé la vie d’un faifan eft de fix à fept ans; celle d’une perdrix paroît être moins lon- gue à-peu-près d’une añnée. Ces ärricle eft de M. LE L'ROY, lieutenant des chafles du parc de Verfailles. FAISCEAUX , f. m. pl. (Hiff. rom.) Les faifceanx étoient compofés de branches d’ormes, au milieu defquelles 1l y-avoit une hache dont le fer fortoit par en-haut ; le tout attaché & lié enfemble, Plu- tarque , dans fes problèmes, donne des raïfons de cet arrangement , que je ne crois pas néceflaire de tranf- ctire. + MR 2E TARN - Florus, Silius Italicus & la plüpart des hiftoriens nous apprennent que c’eft le vieux Tarquin qui ap- porta le premier de Tofcane à Rome l’ufige des #7 ceaux , avec celui des anneaux, des chäifés d'ivoire, des habits de pourpre , & femblables fymboles de la grandeur de l’Empire, Quelques autres écrivains pré- tendent néanmoins que Romulus fut l’auteur de cette’ infüitution ; qu'il l’emprunta des Etruriens ; 8e que le nombre de douze faifteaux qu’il faifoit-porter de- vant lui, répondoit au nombre des oïfeaux qui Imi prognoftiquerent fon règne; ou des douze peuples d’Etrurie qui, en le créant roi, lui donnerent cha- cun un officier pour lui fervir de porte-faifceaux. 1 Quoi qu'il enfoit | cet ufage fubfifta non -feule- ment fous les rois, mais auffi fous les confuls & fous les premmers empereurs. Horace appelle les faifceaux Jüperbos, parce qu’ils étoient les marques de la fou- véraine dignité. Les confuls fe les arrogerent après l’expulfion des rois; de-là vient que fzrere fafces, prendre Les fai/ceaux , & ponere fafces, quitter les faife ceaux, {ont les propres termes dont on fe fervoit quand on étoit recü dans la charge de conful, ou quand on en fortoit. Il y avoit vingt-quatre fa/ceaux portés par autant d’huiffiers devant les diétateurs, & douze devant les confuls : les préteurs des provin- cés & les proconfuls en avoient fix, & les préteurs de ville, deux ; mais les décemvirs, peu de tems après être entrés en exercice, prirent chacun douze faifceaux & douze liéteurs, avec un fafte & un or- gueil infupportable. Voyez DÉCEMVIR. | Ceux qui portoient ces fuifceaux, étoient les exé- cuteurs de la juftice ; parce que, fuivant les ancien nes lois de Rome, les coupables étoient battus de verges avant que d’avoir la tête tranchée, lorfqu'ils méritoient la mort : de-là vient encore cette formu- le: TJ, liélor, expedi virgas, Quand les magiftrats, qui de droit étoient précédés par des liéteurs por- tant les faifteaux, vouloïent marquer de la déférence pour le peuple, ils renvoyoient leurs liéteurs, où faifoient baiffer devant lui leurs fai/ceaux; ce qu’on appelloit fafces fubmitrere, C’eft ainfi qu’en ufa Pu- blius Valérius après être refté feul dans le confulat ;. il ordonna, pendant qu'il joiifloit de toute l’auto- tité, qu’on féparât les haches des faifceaux que les liéteurs portoient devant les confuls, pour faire en- tendre que ces magiftrats n’avoient point le droit de glaive, fymbole de la fouveraine puiffance ; & dans une aflemblée publique la multitude apperçut avec plaifir qu'il avoit fait baïfler les fzrfceaux de fes lic- teurs, comme un hommage tacite qu'il rendoit à [a fouveraineté du peuple romain: Fafces, dit Tite- FAI Live, majetati populi romani fubmifi. Ce fut cette fage conduite ;-que {es fucceffeurs ne fuivirent pas toyjours , qui fit donnier à ce grand homme le nom de Publicola ; mais cé fit moins pour mériter ce titre: |, glorieux que pour attacher plus étroitement le pen- plé à la défenfe dela liberté: rqu'il telâcha de fon autorité, Nous lifons dans Pline, Z FIT, que lorfque Pompée entra dans la-maïfonide Pofidomus , fa/ces Litrérarum janie fubrifit, pourfaire honneur au phi-: lofophe, aux talens 8canx fciencess ne 0! 1 / à ! Ces généralités qu'on trouvé par-tout ; peuvent: ici fufire ; voye Couvreur. ) c’eft aïnf qu’on appelle des tuiles cintrées dont on fait le faitage des combles : on les fcelle en plâtre en forme de crête de coq. On s’en fert aufi {ur les combles couverts en ardoifes , lorfqu’on ne veut pas faire la dépenfe de faitage de plomb. Las FAITIERE, e7% termes de Porier de terre , c’eft la matiere applatie dans le moule dont on fait le car- reau, Voyez POTIER DE TERRE. 1 4 FAIX , voyez l'article CHARGE. | FAIX DE PONT, (Marine. ) ce font des planches épaifles & étroites, qui font entaillées pour mettre fur les baux, dans la longueur du vaiffeau depuis l'avant jufqu'à l'arriere de chaque côté, à-peu-près au tiers de la largeur du bâtiment ; les barrots y {ont auffi entés pour affermir le pont qui repofe deflus. Il y a auffi des faix de pont qui viennent jufqu’à la largeur des écoutilles, 8 qui fervent à les borner : ceux qui font pofés derriere les mâts, avancent plus vers le milieu du vaifleau que ceux qui font le long des écoutilles. Leurs entailles fous les baux doivent être de la moitié de leur épaïfleur, & il doit yavoir aufli un pouce d’entaille dans le deflus de bau pour les y loger & les entretenir enfemble. On donne fouvent aux faix de pont , le quart de lépaiffeur de l'étrave, & de largeur un quart plus que l’épaiffeur de l’étrave. (Z) FAKIR oz FAQUIR , f. m,. (Æf, mod.) efpece de dervis ou religieux mahométan, qui court le pays & vit d’aumônes. Le mot fakir eft arabe, & fignifie #2 pauvre ou une perfonne qui eff dans l'indigence ; il vient du‘verbe fzr Kara, qui fignifie ére pauvre. M. d'Herbelot prétend que fakir & derviche {ont des termes fynonymes. Les Perfans & les Turcs ap- pellent derviche un pauvre en général, tant celui qui l’eft par néceflité, que celui qui l’eft par choix & par profeflion. Les Arabes difent fzkir dans le même fens. De-là vient que dans quelques pays mahomérans les religieux font nommés derviches, &t qu’il y en a d’au- tres où on les nomme fakirs , comme l’on fait parti culierement dans les états du Mogol. Foyez DERvIs, Les fakirs vont quelquefois feuls 8 quelquefois en troupe. Quandils vont en troupe, ils Ont un chef oy fupérieur que l'on diftingue par fon habit. Chaque fakir porte un cor, dont il fonne quand il arrive en quelque lieu & quand il en fort. Ils ont auffi une ef- pece de racloir ou truelle pour racler la terre de Pen- droit où ils s’affeyent & où ils fe couchent, Quand ils font en bande, ils partagent les aumônes qu'ils ont eues pat égales parties, donnent tous les foirs le refte aux pauvres, & ne reférvent rien pour le len- demain, Jus cp | Il y a uné autre efpece de fakirs idolitres, qui me- ment lemême genre de vie. M. d'Herbelot rapporte qu'il y à dans'lés Indes huït cents mille fzkirs maho- métans, & douze cents mille idolatres , fans comp- ter un grand nombre d’autres fakirs , dont la péni- gence & la mortification confiftent dans des obfer- vances très-pénibles. Quelquesuns, par exemple, seftent jour & nuit pendant plufeuts années dans des pofturés extrèmement cénantes, D’autres ne s’af feyent ni ne fe couchent jamais pour dormir , & de- meurent fufpendus à une corde placée pour cet ef fet. D’autres s’enferment neuf ou dix jours dans une foffe ou puits, fans manger ni boire : les uns levent les bras au ciel f long-tems , qu'ils ne peuvent plus les baifler lorfqu'ils le veulent ; les autres fé brülent fes piés jufqu'aux os; d’autres fe roulent tout nuds fur lesépines. Tavernier, &c. O muiferas.homirum rer tes! On fe rappelle ici ce beau paflage de faint Au- guflin: Tazius eff perturbatt mentis € Jédibus fuis Pulle furor, ut fic di placentir quemadiodum ne ho. nines quidem Jævinnt | .:# Une autre efpece de fakers dans les Indes font des jeunes gens pauvres, qui, pour devenir moulas ou doéteurs, & avoir de quoi fubffter, fe retirent dans les mofquées où ils vivent d’aumône, & pañlent le tems à l'étude de feur loi, à lire lalcoran, à l’ap- prendre par cœur, & à acquérir quelque connoif- #ance des chofes naturelles, Les fakirs mahométans confervent quelque refte de pudeur ; mais les idolatres vont tout nuds com- sme les anciens gymnofophiftes, & menent une vie très-débordée. Le chef des premiers n’eft diftingué de fes difciples , que par une robe compofée de plus de pieces de différentes couleurs, & par une chaî- ne de fer de la longueur de deux aunes qu’il traîne attachée à fa jambe, Dès qu'il eft arrivé en quel- que lieu, il fait étendre quelques tapis à terre, s’af- fied deflus, & donne audience à ceux qui veulent le confulter : le peuple l'écoute comme un prophete, ê fes difciples ne manquent pas de le préconifer. Il y a aufli des fakirs qui marchent avec un étendart, des lances, & d’autres armes ; & fur-tout les nobles qui prennent le parti de la retraite, abandonnent ra- rement ces anciennes marques de leur premier état. D'’Herbelot, biblioth. orient. & Chambers. (G) | FALACA , f. £. (if. mod.) baflonnade que l’on donne aux chrétiens captifs dans Alver, Le faluca ef proprement une piece de bois d'environ cinq piés de long, trouée ou entaillée en deux endroits, par où l’on fait pañler les piés du patient, qui eft couché à terre fur le dos, & lié de cordes parles bras. Deux hommes le frappent avec un bâton ou un nerf de bœuf fous la plante des piés, lui donnent quelque- fois jufqu’à $o ou 100 coups de ce nerf de bœuf a felon ordonnance du patron & du juge, & fouvent pourune faute très-legere. La rigueur des châtimens s'exerce dans tous pays en raifon du defpotifme, 4r. de M, le Chevalier DE JAUCOURT. * FALACER,, (Myrhol.) dieu des Romains, dont Varron ne nous a tran{mis que le nom, La feule cho- fe que nous en fachions, c’eft aw’entre les Flamens il Y En avoit un qui étoit furnommé F/emen Falacer, de ce dieu paffé de mode. | FALAISE, f.f. ( Marine.) c’eft ainf qu’on appelle (2 pt de la mer qui font élevées & efcarpées, FAL 337 . FatAISE, (Geog:) Falefia , ville de France dans la bafle Normandie , fituée fur le riufleai. d'Ante, entre Caën & Seez, & bâtie par les Normans,, fus vant l'abbé de Longuerue. Elle eft renommée dans le pays par fon commerce de ferges , dé toiles, 6c par la foire de Guibray l’un de fes fauxbourys. Elle étoit déjà connue fous Guillanine le Conquérant, & elle eft remarquable par la naïffance de ce prince, par celle deRoch le Ballif fitnommé 7 Rivière, me- decin du roi, qui a publiéles antiquités de la Breta onè afmorique, & encore par la naïflance de Gui le Fe= vie fieur de la Boderie, ptécepteur du duc d’Alen çon frere d'Henti IIL, très-favant dans les langues _ Ofientales. Long. felon Caffini, 174, rof, 230, Janin, 494, 537.281, (D, JT.) | | FALAISER, v. n. /a mer falaife , terme peu ufité ; pour dite que la mer vient frapper & {e brifer contre une falaife ou une côte efcarpée. (Z FALARIQUE, 1. f. (Ars mile) c’étoit une efpece de dard compolé d'artifice , qu’on tiroit avec l’are contre les tours des afiégés pour y mettre le feu. La falarique étoit beaucoup plus grôffe que le ral. leolus, autre efpece de dard enflammé, qui {ervoir à mettre le feu aux maïfons ; lequel feu ne pouvoit s’éteindre avec de l’eau, mais feulement en létouf- : fant avec de la pouflicre. Tite-Live en parlant du fiége de Sagonte en Efpa- gne, donne trois piés de long à la falarique ; mais Si lius Italicus, en racontant le même ficge, fait men- tion d'une fa/arique beaucoup plus terrible ; c’étoit une poutre ferrée à plufieurs pointes,chargée de feux d'artifice, qui étoit jettée par la catapulte ou par la balifte. Daniel , ff, de la milice franc. (Q) FALBALA , f. m. bandes d’étofte plifiées & fefto nées, qui s’appliquent fur les robes &c juporis des femmes. C’eft la garniture des jupons qui eft parti= culierement appellée fa/hala ; elle eft connue auf fous le nom de vo/ans; celle des robes s’appelle com- munément pretintaille, Les falbalas font placés par étages autour du jupon; cette mode ef, dit-on, fort ancienne , mais le mot eft nouveau, | On conte que deux de ces hommes chargés de modes & de ridicules, & qui fe ruinent pour être aimables, traverfoient les falles du palais ; les peti- tes marchandes leur offrirent de tout felon l’'ufage : _iln'exifte rien, dit l'un, que l’on ne trouve ici; vous ÿ tfouverez même, répondit l’autre, ce qui n’exifte pas : inventez un mot qui ne {oit qu’un fon fans idée 3 toutes ces femmes y en attacheront une ; fx/bala fut le mot qui s'offrit, & des garnitures de robes furent préfentées avec affürance fous ce nom qui venoit d'être fait, & qu’elles porterent depuis. Foyez 'ar- ticle ÉTYMOLOGIE. Les favans amateurs de l'antiquité feroient remon- ter, s'ils pouvoient, l’origine des fa/balas juiqu'au déluge ; c’eft bien affez pour l'honneur de cette mo- de, qu’elle ait pañlé des Perfes aux Romains : divers légiflateurs ennemis du luxe l'ont, dit-on, condam- née; mais les graces &r le goût ne reçoivent de lois que de l'amour & du plaïfir. Cette grande roue du monde qui ramene tous les évenemens, ramene auf toutes les modes, & fait reparoitre aujourd'hui les f:/balas avec plus d'éclat que jamais ; les plus riches étofes en font ornées ; les plus communes en reçoivent du relief, & toutes les femmes, les belles, les laides , les coquettes , 8e. les prudes, ont des fa/balas jufque fur leurs jupons les plus intimes : les déyotes même en portent fous le nom de proprété recherchée : on renonce plus fa- cilement au plaifr d'aimer qu’au defir de plaire, FALBALA , en terme de Boutonnier, eft une lonsueur de bouillon , attaché en demi-cercle à côté de la zo- ne fur le rofte, dans les efpaces où le cerceau feul paroït, 388 FAL - FALCADE, ff. (Manége.) a@ionprovoquée-par : la fubtilité avec laquelle, dans une allure ptompte 6 preflée, le cavalier retenant le devant & diligen- tant le derriere, oblige. ce même derriere à des tems fi courts, fi fubits, & fi près deterre,-que les han- ches:coulent en quelque façon enfemble, les piés qui terminent l’extrémité poftérieure parvenant jufqu'à la ligne de dire@ion du centre de gravité du cheval. Rien n’eft plus capable d’en ruiner les reins & les jarrets. Ces parties vivement & fortement employées dans les fa/cades , ne doivent point être follicitées & affujetties à des mouvemens de cette nature, qu’elles mayent acquis le jeu, la fouplefle, & la facilité qu'ils exigent. Quand on fuppoferoit même dans l’animal une grande legereté d'épaule & de tête , une obéïf- fance exatte, beaucoup de fenfibilité, toute Paifan- ce & toute la franchife qu'il eft pofible de defirer,, il feroit toûjours très-dangereux de le foûmettre fré- quemment à de pareilles épreuves ; on l’aviliroït in- conteftablement , ou on le détermineroit enfin à for- cer la main & à fuir. - Les effets que produifent les fz/cades multiphiées fur des chevaux nerveux, faits, & confirmés, nous indiquent tout ce que nous aurions à redouter de ces lecons hafardées de des chevaux qui n’auroient ni vigueur , ni reflource, qui pécheroiïent par l’incapa- cité de leurs membres, que l’âge n’auroit point en- core fortifiés, & auxquels le travail & l’exercice n’auroient point fugoéré l’intelligence des diffétens mouvemens de la main, du trot uni, du galop foù- tenu, de l'arrêt, du reculer, du partir, &c. Elles ne peuvent être aufli que très-préjudiciables à ceux qui montrent de la fougue & de l’appréhen- fion, comme à ceux qui tiennent du ramingue, qui retiennent leurs forces en courant, qui font difpofés à parer fans y être invités, qui parent coutt & fur les épaules , quoïqu’ils foient naturellement relevés & legers à la main à toute autre attion; car fouvent l’imperfetion des reins & des jarrets occafñonne des fautes contraires ; c’eft ainfi qu’un cheval dont ces patties font foibles n’ofe confentir à l'arrêt , tandis qu’un autre cheval dans lequel nous obfervons la même foibleffe , mais plus de vivacité &c plus d'ar- deur, pare en employant tout-à-coup toute la réfo- lution dont il eft doué, comme s’il cherchoit à hâter la fin de la douleur que lui canfe la violence du parer. Celui-ci ne fe raflemble que trop. Bien loin de lui demander de fa/quer en parant, on doit exiger qu’il forme fon arrêt lentement, en trainant, pour ainfi dire , en rallentiffant infenfiblement fon ation, & en évitant que le derriere fe précipite. Du refte l’arrêt du galop précédé de deux ou trois falcades appropriées à la nature de l’animal , & pro- portionnées à fa vigueur & à fa force, allegerit fon devant, rend les mouvemens de l’arriere-main inf- niment libres, accoûtume les hanches à accompa- gner les épaules, affüre la tête & la queue, & per- fetionne enfin l'appui. Communément on prévient le moment de l’arrêt par l'accélération ou l’accroif- fement de la viteffe de cette allure. La fa/cade après une courfe violente , eft d’autant moins pénible qu'elle eft prefque naturelle; le derriere embraffant beaucoup de terrein à chaque tems, il ne s’agit que de rabattre les hanches, en les contraignant par le ort réitère de la main à foi dans l’inftant où elles fe détachent de terre ; fi l’a@ion de la main eft en rai- fon des effets qu’elle doit opérer, & que les aides des jambes du cavalier viennent au fecours de la croupe que les aides peu mefurées de la main pourroient trop rallentir, le cheval fa/quera inévitablement. Je. dois ajoûter que l’inftant précis de l'arrêt, eft celui de la foulée du devant; fondain les piés de derriere s’approchent , &z le mouvement naturel qui fuivra gette ation étant la rélevée de ce même devant, FAL l'animal aflujetti déjà par les fz/cades ne pourra qué: parer entierement fur les hanches. | On peut encore faire falquer un cheval, fans pré- méditer de l'arrêter. Si du petit. galop je pañe à un galop plus preflé , & que j'augmente ou que je for- tifie de plus en plus cette alluré, je fentrerai dans le premier mouvement , & j'appailerai la vivacité de. la derniere ation par deux ou trois falcades, qui dif. poferont mon cheval à une allure plus foûtenue, plus. cadencée , plus lente, & plus fonore,. Auñffi voyons: nous que dans les paffades, & lorfque nous. parve-. nons à leurs extrémités, nous demandons deux où, trois falcades à l’animal , pour le préparer à fournir, tout de fuite la volte, fes forces étant unies. Je ne me rappelle pas, au furplus, quel eft l’au-, teur qui recommande des pefades au bout de la li- gne droite & avant d'entamer cette volte : je fus afsüré d’avoir lù cette maxime dans Fréderic Grifone ou dans CæfarFiafchi, Le fait n’eft point affez impor- tant pour que je me livre à l'ennui de parcourir de nouveau leur ouvrage ; j’obferverai feulement que cette action ef fuperflue, puifqu’on peut fans y avoir. recours afleoir le cheval, &c le difpofer par confé- quent à l’accomplifflement parfait de la volte. En fe- cond lieu, celui que l’on auroit habitué à des pefa- des avant d’effeûtuer l’aétion de tourner, pour peu. qu'il füt renfermé s’éleveroit fimplement du devant & feroit fujet à s’arrêter. Enfin cette habitude feroit d'autant plus dangereufe, que f l’on confidere que les paffades conflituent toute la manœuvre que des’ cavaliers pratiquent dans un combat fingulier, on féra forcé d’avouer que les pefades feroient perdre un tems confidérable au cheval, & pourroient dans une circonftance où tous Les inftans font prétieux , coûter la vie à quiconque fe conformeroit à ce prin- cipe. (e) » FALCIDIE, fub, f. (Jurifprud,) Voyez QUARTE FALCIDIE. it. FALCKENBERG, (Géog.) petite ville maritime de Suede, dans le Halland fur la mer Baltique. Log. 29.55. lat. 56. 54. * FALERNE , ( Géog. anc. & mod.) c'étoit uñe montagne de l'Italie, que les anciens appelloient auffi le mont Maffique. Elle étoit proche de Sinueñe ; les vins en étoient excellens. Cette montagne s’ap- pelle aujourd’hui Rocca di mondragone, monte Maj co. L’endroit où elle s’éleve, eft une partie de ce que nous comprenons dans la terre de Labour. FALLOURDE,, f. f, rerme de Commerce, amas de bois fait des perches qui ont fervi à conftruire les trains , & qu’on a coupées de la longueur d’une bu che de bois de moule. | FALMOUTH , (Géog.) c’eft peut-être la FoZiba de Ptolomée : bourg & port de mer fur la côte mé- ridionale de Cornouailles. Fzimourk fignifie l’ersbou- chure de la Fale, parce que ce havre eft l'embouchure de cette riviere. C’eft un des meilleurs ports d’An- gleterre, fortifié par le château de Mandai & le fort de Pindennis bâtis par Henri VIIT. C’eft de Fa/mouth que partent les paquebots pour Lisbonne. Lozg. 12. 36. lar. So. 15. (D. J.) FALQUER , v. aût. faire falquer un cheval; ce cheval a très-bien marqué fon arrêt après avoir fa/- qué; ce cheval n’a falqué que pour pañler à une allure plus lente & plus foûtenue. Voyez FALCADE. (e) FALSIFICATEUR , {. m. (Jurifp.) Voyez ci-après FAUSSAIRE. | l FALSIFICATION , f.f. (Jurifprud.) eft lation par laquelle quelqu'un faififie une piece qui étoit vé= ritable en elle-même. Il y a de la différence entre fa. briquer une piece faufle &r fzlfifier une piece. Fabri- quer une piece faufle , c’eft fabriquer une piece qui n’exiftoit pas, &c lui donner un caraétere fuppoié; au lieu que ja/féfer une piece, c’eft retrancher où ; ajoûtex HA ajoûfer quelque chofe à une piece véritable en elle- même, pour en induire autre chofe que ce qu’elle contenoit : du refte l’une & l’autre aélion eft égale- ment un faux, Voyez ci-après FAUX, (4) FALSTER , (Géog.) petite île de la mer Baltique, auroyaume de Danemark, & abondante en grains; Nicopingue en eft la capitale. Long. 28, 50-29: 26. dat. 35. $0-56.50. (D. JT.) FALTRANCK , (Medecine. ) mot allemand que nous avons adopté, & qui fignifie 4o/ffor contre les chûtes : c’eft ce que nous appellons vx/réraires fuiffes. Le faltranck et un mélange des principales herbes &c fleurs vulnéraires que l’on a ramafñlées, choïfies, & fait fecher pour s’en fervir en infufon : ces her- bes font les feuilles de pervenche , de fanicle, de vé- tonique, de bugle , de pié-de-lion, de mille pertus, de lanoue de cerf , de capillaire , de pulmonaire, d’armoïle, de bétoine, de verveme , de fcrophulai- re, d'aigre-moine, de petite centaurée , de pilofel- Le, 6c. On y ajoûte des fleurs de pié-de-chat , d’o- tigantum , de vulnéraire ruftique , de brunelle, &c, Chacun peut le faire à fa volonté : la clafle des her- bes vulnéraires eft immenfe. ï Ce faltranck nous vient de Suifle, d'Auvergne, des Alpes. Il eft eftimé bon dans les chûtes, dans l’afthme & la phthyfe , pour les fievres intermitten- tes, pour les obftruétions , pour les regles fuppri- mées , pour les rhumes invétérés, pour la jaunifle: on y ajoûte de l’abfinthe, de la racine de gentiane pour exciter l’appétit , de la petite fauge, de la pri- mevere pour le rendre céphalique ; enfin on peut templir avec ce remede mulle indications : on peut couper l’infufon des herbes vulnéraires avec du lait, & le prendre à la façon du thé avec du fucre : cette änfufñon, lorfque les herbes ont été bien choifies , eft fort agréable au goût, & bien des perfonnes la pré- ferent au thé, fi-tôt qu’elles y font habituées, (4) *FALUNIERES , f. m.(Æif£. nar. Minéralog. )c'eft un amas confidérable formé, ou de coquilles entie- ses, quiont feulement perdu leur luifant & leur ver- mis, ou de coquilles brifées par fragmens & réduites en poufliere , ou de débris de fubftances marines; de : madrépores , de champignons de mer , &c...,.. & l’on donne le nom de falun à la portion dés co- quilles qui eft la plus divifée, &c à celle qui n’eft plus qu’une poufñere. Les falurieres de Touraine ont trois grandes lieues & demie de longueur fur une largeur moins confideérable , mais dent les limites ne {ont pas fi précifément connues: cette etendue comprend depuis la petite ville de Sainte-Maure , jufqu’au Man- telan , 8 renferme Îes paroïfles circonvoifines de Sainte-Catherine de Fierbois, de Louan, de Boffée, … Le falur n’eft point une matiere épaïfle ; c’eft un mafhf, dont l’épaifleur n’eft pas déterminée +: on fait feulement qu'il a plus de vingt piés de profondeur. Voilà donc un banc de coquilles d’environ neuf lieues quarrées de furface, fur une épaiffeur au moins de vingt piés. D’où viént ce prodigieux amas dans un pays éloigné de la mer de plus de trente-fix lieues ? comment s’eft-il formé ? Les payfans, dont les terres font en ce pays na: turellement ftériles , exploitent les fa/umieres | ou creufent leurs propres terres, .enlevent Le fz/un , & le répandent fur leurs champs : cet engrais les rend fertiles, comme aïlieurs la marne & le fumier. Mais on n’exploite d’entre les fa/unieres , que cel- les qu’on peut travailler avec profit. On commence donc à chercher à quelle profondeur eft Le falun : il fe montre quelquefois à la furface ; mais ordinaire- ment , 1l eft recouvert d’une couche deterre de qua- tre piés d’épaifleur. Si la couche de terre a plus de huit à neuf piés, 1l eft rare qu’on faffe la fouille : les endroits bas , aquatiques, peu couverts d'herbes ; promettent du falur proche de la terre. dome VI, F À £L 389 Quand ôn a percé un trou; on en tire dans le jour tout ce qu'on en peut tirer. Le travail demande de la célérité , l’eau fe préfentant de tout côté pour rémplir le trou à mefure qu’on le rend profond ; of lPépuife , à mefuré qu’on travaille, Il eft rare qu’on employe moins de quatre-vingts Ouvriers à la fois ; on en aflemble fouvent plus de cerit cinquante. ft | … Ees trous font à-peu-près quarrés ; les côtés en‘ont jufqu’à trois on quatre toiles de longueur: la premie: re couche de terre enlevée, & le fz/ur qui peutêtre tiré, jetté fur les bords dutrou, Le travail fe parta ge; une partie des travailleurs creufe, l’autre épuis {e l’eau. . À mefure qu'on creufe ; on laïfle des retraïtes er gradins, pour placer les ouvriers : on répand des ou: vriers fur ces gradins ; dépuis le bord du troû ju qu'au fond de la mniere, où les uns puifent l’eau à {eau , & d’autres le fa/un. L'eau & le falun montent de main en main: l’eau eft jettée d’un côté du trou; & le falun d’un autre. À On commence le travail de grand matin : on eft forcé communément de l'abandonner fur les trois-ou quatre heures après-midi. On ne revient plus à un trou abandonné : on trou: ve moins pénible ou plus avantageux d’en percer un fecond , que d’épuifer le premier de l’eau qui le remplit, Cette eau filtrée ä-travers Les lits de coquil: le eftclaire, & n’a point de mauvais goût, Jamais on n’a abandonné un trou faute de fa/un , quoiqu'on ait pénétré Jufqu'à vingt piés, | Le lit de falun n’eft mêlé d'aucune matiere étfan: gere : on n’y trouve nifable, ni pierre , ni terre. IL {eroit fans doute très -intéreffant de creufer en plus d’endroits, & le plus bas qu'il feroit poffible ‘afin de connoître la profondeur de la faluniere. Onouvrecommunémentles fz/znieres vers le com- mencement d'Oëtobre : on craint moins l’affluence des eaux ; & c’eft le tems des labours. On fouille quelquefois au printems ; mais cela eft rare, Quand le falun a été tiré , & qu’il eft écoutté on létend dans les champs. Il y a des terres qui en de- mandent jufqu'à trente à trente-cinq charretées par arpent : il y en a d’autres pour lefquelles quinze à vingt fufifent, On ne donne aux terres aucune pré= paration particuliere : on laboure comme à l’ordinai- re , & l’on étend le fz/ur comme le fumier + Il y a de la marne dans les environs des falurie- res; mais elle ne vaut rien pour les terres auxquelles le falur eft bon. Ces dernieres ne produifént naturellement que des brieres ; les herbes y naïflent à peine : on les appelle dans le pays des bornaïs ; la moïndte pluie les bat &c les affaïfle ; le fz/un répandu les foûtient. Voilà le principe de la fertiifation qu’elles en recoi- vent. | Sur lobfervation que le fz/ur & la matne ne fer. tilifoient pas également les terres, M. de Reaumura conclu que la nature de ces engrais étoit entierement différente. Mais il en dévoit feulement conclure qu’il y avoit desterres qui s’affaiflant plus ou moins facis lement, demandoient un engrais qui écartât plus ou moins leurs molécules ; &, c’eft l'effet que doivent produire des débris de coquilles plus ou moins divi: fées & détruites, comme elles le font dans le fz/u, dans la marne & dans la craie, qui n’ont , felon tou te apparence , que cette {eule différence relative à leur aëtion fur les terres qu’elles fertilifent ou ne fer: tiifent point. Une terre une fois falunée , left pour trente ans : fon effet eft moins fenfible la premiere année, que dans les fuivantes ; alors le faluz eft répandu plus uniformément, Les terres falunées deviennent très. fertiles, 14 D dd 399 FAM Le falun tiré après les premieres couches , eft ex- trèmement blanc : les coquilles entieres qu’on y re- marque , font toutes placées horifontalement & fur le plat. D'où il eft évident qu’on ne peut en expli- quer l’amas par un mouvement violent & troublé, qui offriroit nn fpeétacle d'irrégularités qu’on ne remarque point dans les fz/urieres. Les bancs des falunieres ont des couches diffinétes ; autre preuve que la faluniere eft le réfultat de plu- fieurs dépôts fucceffifs , & qu’elle eft l'ouvrage du féjour conftant & durable d’une mer affife & tranquil- le, ou du moins fe mouvant d’un mouvement très- lent. On y trouve les coquilles les plus communes du Poitou, comme les palourdes , lavignans , huîtres ; mais elles abondent aufli en efpeces inconnues fur les côtes ; telles que les meres-perles, la corcha im- Bricata, des huîtres différentes des nôtres , la plu- part des coquilles contournées en fpirales , foit ra- res, foit communes , desmadrépores, des rétipores, des champignons de mer, 6. Ces corps s’étant amañlés fucceflivement, & ayant féjournés un tems infini fous les eaux, ils ont eu ce- lui de fe divifer , & de former un mañfif unifor- me , fans inégalité, fans vuide, fans rupture , &c. Voyez les mémoires & l’hift. de l'académie, année 1720. FAMAGOUSTE,, £. f. (Géog.) anciennement 47- frnoë , ville de l’Afe, fur la côte orientale de l’ile de Chypre , défendue par deux forts, & prife par les Turcs fur les Vénitiens en 1571 , après un fiège de dix mois, dont tous les hiftoriens ont parlé. Voyez de Thou, y. XLIX, le Pelletier, 21/8. de la guerre de Chypre ; liv. TIT. Tavernier , voyage de Perfe ; Juf- tinian, Æff, Véner, &c. Elle eft à 12 lieues nord- eft de Nicofe. Long. 524. 40!, la. 354, Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FAME,, ( Jurifprud.) en ftyle de Palais , eft fyno- nyme de réputation. On rétablit un homme en fa bonne fame & renommée , lorfqu’ayant été noté de quelque jugement qui emportoit ignominie , il par- vient dans la fuite à fe purger des faits qui lui étoient imputés , & qu’on le remet dans tous fes honneurs, FAMILIARITÉ , ( Morale.) c’eft une liberté dans les difcours & dans les manieres , qui fuppofe entre les hommes de la confiance &c de légalité. Comme on n’a pas dans l'enfance de raïfon de fe défier de fon femblable , comme alors le$ diflinétions de rang & d'état ou ne font pas , ou font imperceptibles , on n’apperçoit rien de contraint dans le commerce des enfans. Ils s’appuient fans crainte fur tout ce qui eft homme : ils dépofent leurs fecrets dans les cœurs fenfibles de leurs compagnons : 1ls laïffent échapper leurs goûts, leurs efpérances, leur carac- tere, Mais les compagnons deviennent concurrents, & enfin rivaux; on ne court plus enfemble la même carriere; on s’y rencontre, on s’y prefle, on s’y heurte; & bien-tôt on n’y marche plus qu'à couvert êc avec précaution, Mais ce font fur - tout les diftin@tions de rangs & d'état, plus que la concurrence dans le chemin de la fortune , ou la rivalité dans les plaifirs, qui font difparoïtre dans l’âge mûr la fzmiliurité du premier âge. | Elle refte toujours dans le peuple : il la conferve même avec fes fupérieurs , parce qu’alors par une fotte illufion de l’'amour-propre , il croit s’égaler à eux. Le peuple ne cefle d'être familier que par dé- fiance, & les grands que par la crainte de l'égalité. Ce qu’on appelle maintien, noblefle dans les manieres , dignité , repréfentation , font des barrieres que les grands favent mettre entr’eux & l'humanité. Ils {ont ennemis de la fariliariré , & quelques-uns même la graignent avec leurs égaux. Les uns qui prétendent FAM à ue confidération qu'on ne peut accorder qu’à leu rang , & qu'on refuféroit à leur perfonne, s’élevent par leur état au-deffus de tout ce qui les entoure , à proportion qu'ils prétendent plus, & qu'ils méritent moins. D’autres qui ont cette dureté de cœur, qu’on n'a que trop fouvent quand on n’à point en befoin des hommes , gênent les fentimens qu'ils infpitent , parcequ'ils ne pourroïent les rendre. [ls aiment mieux qu’on leur marque du refpe@& & des égards , parce qu'ils rendront des procédés & des attentions. Ils {ont à plaindre de peu fentir , mais à admirer s'ils font juftes, TUE Il y a dans tous les états des hommes modeftes & vertueux, qui fe couvrent toùjours de quelques hua- ges ; 1ls femblent qu'ils veulent dérober leurs ver: tus à la profanation des louanges ; dans l'amitié mê- me , 1ls ne fe montrent pas, mais 1ls fe laiflent voir. La familiarité eft le charme le plus féduifant & le lien le plus doux de Pamitié : elle nous fait connoître à nous-mêmes ; elle développe les hommes à nosyeux; c’eft par elle que nous apprenons à traiter avec eux: elle donne de l'étendue & du reflort au cara@tere : elle lui aflüre fa forme diftintive : elle aide un na- tutel aimable à fortir des entraves de la coûtume, & à méprifer les détails minutieux de l’ufage : elle répand, fur tout ce que nous fommes , l'énergie & les graces (voyez GRACE ) : elle accelere la marche des talens , qui s’animent & s’éclairent par les con- feils libres de l’amitié : elle perfe&ionne la raïfon, parce qu’elle en exerce les forces : elle nous fait rou- gir : elle nous guérit des petiteffes de l’amour-pro- pre: elle nous aide à nous relever de nos fautes : elle nous les rend utiles. Hé ! comment des ames ver tueufes pourroient-elles regretter de frivoles dé- monftrations de refpeét, quand on les en dédomma- ge par l'amour & par l’eftime ? Voyez EGARDS. FAMILIERS , f. m. pl. ( Æiff. mod. ) nom que l’on donne en Efpagne &c en Portugal aux officiers de l’in- quifition , dont la fonétion eft de faire arrêter les ac- cufés. Il y a des grands, & d’autres perfonnes con- fidérables , qui, à la honte de l'humanité, fe font gloire de ce titre odieux, & vont même jufqu’à en exercer les fonétions. Foyez INQUISITION. (G) * FAMILISTES , f. m. pl. (Æiff. ecclef.) héréti- ques qui eurent pour chef David-George Delft. Cette feéte s’appella /a famille d’amour ou de chariré, & leur doëtrine eut pour bafe deux principes qu’on ne peut trop recommander aux hommes en général ; c’eft de s'aimer réciproquement , quelque différence qul puiffe y avoir entre leurs fentimens fur la religion, & d’obéir à toutes les puiflances temporelles, quel- que tyranniques qu'elles foient. Delfr fe croyoit ve- nu pour rétablir le royaume d'Ifraëel : il faifoit affez peu de cas de Moyfe, des Prophetes , & de Jefus- Chbrift : il prétendoit que le culte qu'ils avoient prê- - ché furlaterre, étoit incapable de conduire les hom- mes à la béatitude ; que ce privilège étoit réfervé à fa morale ; qu’il étoit le vrai meflie ; & qu'il ne mouoit point, ou qu'il reflufciteroit : 1l eut des dif ciples qui ajoüterent à fon fyftème d’autres opinions de cette nature : 1ls foûtinrent que toutes les aétions de l’impie font néceflairement autant de péchés, & que les fautes font remifes à celui qui a recouvré l’amour de Dieu. | FAMILLE de courbes, {. £, (Géom.) Voyez l'article COURBE. | FAMILLE , ( Droit nat.) en latin , familia, Société domeftique qui conftituele premier des états accef- foires & naturels de l’homme. | En effet, une faille eft une fociété civile, établie par la nature : cette fociété eff la plus naturelle &r la plus ancienne de toutes : elle fert de fondement à la fociété nationale ; car un peuple ou une nation, n’eft qu'un compofé de plufieurs familles, * Les familles commencent par lé mariage , & c’eft la nature elle-même qui invite les hommes à cette union ; de-là naiflent les enfans , qui en perpétuant les familles | entretiennent la fociété humaine, & ré- parent les pertes que la mort y caufe chaque jour. Lorfqu'on prend le mot de famille dans un fens étroit ,elle n’eft compofée, 1°. que du pere de famil- Le: 2°. de la mere de famille, qui fuivant l’idée reçue prefque par-tout, pafle dans la famille du mari : 3°. des enfans qui étant , fi l’on peut parler ainfi, formés de la fubftance de leur pere & mere, appartiennent néceflairement à la fille. Mais lorfqu’on prend le mot de famille dans un fens plus étendu, on y com- prend alors tous les parens; car quoiqu'après la mort du pere de famille , chaque enfant établifie une famille particuliere , cependant tous ceux qui defcen- dent d’une même tige , & qui font par conféquent if- fus d’un même fang , font regardés comme membres d’une même faille, Comme tous les hommes naïflent dans une faril- Le, & tiennent leur état de la nature même , 1l s’en- fuit que cet état, cette qualité on condition des hom- mes , non-feulement ne peut leur être Ôtée , mais qu’elle lesrend participans des avantages , des biens, &c des prérogatives attachées à la faille dans la- quelle ils font nés: cependant l’état de famille fe perd ‘dans la fociété par la profcription , en vertu de la- uelle un homme eft condamné à mort , & déclaré déchü de tous les droits de citoyen, Il eft fi vrai que la famille eft une forte de pro- priété , qu'un homme qui a des enfans du fexe qui ne la perpêtue pas , n’eft jamais content a n’en ait de celui qui la perpétue : ainfi la loi qui fixe la far le dans une fuite de perfonnes de même fexe , cori- tribue beaucoup , indépendamment des premiers mo- tifs, à la propagation de Pefpece humaine ; ajoltons que les noms qui donnent atix hommes l'idée d’une chofe qui femble ne devoir pas périr , font très-pro- pres à mipirer à chaque faille le defir d'étendre fa durée ; c’eft pourquoi nous approuverions davanta- ge l'ufage des peuples chez qui les noms même dif- tinguent Les familles , que de ceux chez lefquels ils ne diftinguent que les perfonnes. Au refte, l’état de famille produit diverfes rela- tions très-importantes ; celle de mari & de femme, de pere, de mere & d’enfans , de freres &c de fœurs, & de tous les autres degrés de parenté , qui font le premier lien des hommes entr'eux. Nous ne parle- rons donc pas de ces diverfes relations. Voyez-en les articles dans leur ordre, MaR1, FEMME, G'c. Arti- cle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. * FAMILLE, ( Hiff. anc.) Le mot latin ferilia ne - répondoit pas toûjours à notre mot famille. Familia étoit fait de famulia, &c 1l embrafloit dans fon accep- tion.tous les domeftiques d’une maïfon, où il y en avoit au moins quinze. On entendoit encore par fa- milia , un corps d'ouvriers conduits &c commandés par Le préfet des eaux. Il y avoit deux de ces corps; Pun public, qu'Agrippa avoit inffitué ; & l’autre privé , qui fut formé fous Claude. La troupe des gla- diateurs , qui faifoient leurs exercices fous un chef commun, s’appelloit aufli familia : ce chef portoit le nom de Zarifla. Les familles romaines, familie, étoient des divi- _fions de ce qu’on appelloit gezs : elles avoient‘un ayeul commun; ainfi Cæcilius fut Le chef qui donna lenom àla gezs Cecilia, & la gens Cecilia comprit les familles des Balearici, Calvi, Caprarii, Celeres , Cretici, Dalmatici, Denrrices, Macedonict, Merell, Nepotes, Numidici, Pii, Scipiones, Flacci, &t Virta- cores. Il y avoit des farzilles patriciennes &c des plé- béiennes, de même qu'il y avoit des genes patriciæ & pleberz : 1l y en avoit même qui étoient en partie patriciennes & en partie plébéiennes, partim mobiles, Tome FI, pa FAM 301 Partim n0ve , felon qu’elles avoient eu de tout tems le /15 imaginum , ou qu’elles l’avoient nouvellement acquis. On pounvoit {ortir d’une faille patricienne, &t tomber dans une plébéïenne par dégénération ; & monter d’une famille plébéienne dans une patri= cienne , fur-tout par adoption. De-Ià cette ion qui nee dans les généalogies romaines ; confufion qui efl encore augmentée par l'identité des noms dans les patriciennes & dans les plébéiennes : ainfi quand le patricien Q. Cæpio adopta le plébéien M. Brutus, ce M. Brutus & fes defcendans devinrent patriciens , & le refte de la famille des Brutus reftà plébéten. Au contraire , lorfque le plébéien Q. Me- tellus adopta le patricien P. Scipio, celui-ci & tous fes defcendans devinrent plébéïens, & le refte de la famille des Scipions refta patricien. Les affranchis prirent les noms de leurs maîtres, & refterent plé- béiens ; autre fource d’obfcurités. Ajoûtez à cela que les auteurs ont fouvent employé indiftinétement les mots gezs & familia ; les uns défignant par gens ce que d’autres défignent par fzmilia , &t réciproques ment : mais ce que nous venons d’obferver fuffit pour prévenir contre des erreurs dans lefquelles 1l feroit facile de tomber. . FAMILLE, (Jurifpr.) Ce terme a dans cette mas tiere plufeurs fignifications différentes, ee Famille fe prend ordinairement pour l’aflemblage de plufieurs perfonnes unies par les liens du fang ou de Paffinité, On diftinguoit chez les Romains deux fortes de familles; favoir celle qui l’étoit 7ure proprio des per= fonnes de étoient foûmifes à la puiffance d’un mê- me chef ou pere de famille, foit par la nature, com: me les enfans naturels & légitimes ; foit de droit comme les enfans adoptifs. L'autre forte de famille comprenoit Jure communi tous les agnats, & géné- ralement toute la cognation ; car quoiqu’après la mort du pere de faille chacun des enfans qui étoient en fa puiflance , devint lui-même pere dé faille, cependant on les confidéroit toûjours comme étant de la même famille, attendu qu'ils procédoient de la même race, Voyez les lois 40, 195.6 196, au ff, de verb. fignif. On entend en Droit par pere de famille, toute per- fonne, foit majeure ou mineure , qui jotit de fes droits, c’eft-à -dire qui n’eft point en la puiflance d'autrui ; & par f/s ou fille de famille, on entend pa- reillement un enfant majeur ou mineur, qui eft en la puifflance paternelle. Voyez ci-après FiLs DE Fa- MILLE, PERE DE FAMILLE, & PUISSANCE PATER- NELLE. Les enfans fuivent la famille du pere, & non celle de la mere ; c’eft-à-dire qu'ils portent le nom du pere, & fuivent fa condition. Demeurer dans la famille , c’eft refter fous la puif. fance paternelle. | Un homme eft cenfé avoir fon domicile où il a fa famille. ff, 32. tir, j.L 33. En matiere de fubfltution , le terme de famille comprend la lignité collatérale auffi-bien que la di- reéte. Fufarius, de fidei-comm. quefl. 351. | Celui qui eft chargé par le teftateur de rendre fa fuccefion à un de la faille, fans autre défignation, la peut rendre à qui bon lui femble , pourvû que ce foit à quelqu'un de la famille, fans être aftraint à fuivre l’ordre de proximité, Voyez la Peyrere, lesr, F.7,1. (4) FAMILLE, dans le Droit romain , fe prend quel- quefois pour la fucceffion & pour les biens qui la compofent, comme quand la loi des douze tables dit, proximus agnatus familiam habeto, L. 195. #, de verb. fignif. C’eft auffi en ce même fens que l’on difoit partage de la famille, familie ercifeundæ ; pour exprimer le di 392 F AM partage des biens de la fuccefion. Voyez digeff, lib. À, tit. 17, G cod. lib. IT. rit, xxxvj. (4) FAMILLE DES ESCLAVES, étoit ÿ chez les Romains, le corps général de tous les efclaves, où quelque corps particulier de certains efclaves deftinés à des fonétions qui leur étoient propres, comme la faille des publicaires ; c’eft-à-dire de ceux qui étoient em- ployés à la levée des tributs, Woyez la loi 19. dig. de werb. Jignif. $. 3. (4) FAMILLE DE L'ÉVÊQUE, dans les anciens titres, s'entend de tous ceux qui compofent {a maifon, foit officiers, domeftiques, commenfaux , & générale- ment tous ceux qui font ordinairement auprès de hu, appellés familiares. (4) | FAMILLE DU PATRON, c’étoit l’aflemblage des efclaves qui étoient fous fa puiflance, & même de ceux qu'il avoit affranchis. Voyez la loi 195. digefl. de verb. figrif. (A) FAMILLE DES PUBLICAIRES, voyez ce qui en ef dit ci-devant à l’article FAMILLE DES ESCLAVES. FAMILLE, MAISON, fynon, on dit la maifon de France & la famille royale, une maifon fouveraine &c une famille eftimable, C’eft la vanité qui a ima- giné le mot de wai/on , pour marquer encore davan- tage Les diftinétions de la fortune & du hafard. L’or- gueil a donc établi dans notre langue, comme autre- fois parmi les Romains , que les titres, les hautes dignités & les grands emplois continués aux pa- rens du même nom , formeroient ce qu’on nomme les rai/ons de gens de qualité, tandis qu’on appel- leroit familles celles des citoyens qui, diftingues de la ie du peuple, fe perpétuent dans un Etat, & pañlent de pere en fils par des emplois honnêtes, des charges utiles, des alliances bien aflorties, une édu- cation convenable , des mœurs douces & cultivées; ainfi, tout calcul fait, les fzmilles valent bien les maifons : il n’y a guere que les Naïros de la côte de Malabar qui peuvent penfer différemment. Arcicle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FAMILLE, (Æiff. nat.) ce terme eft employé par les auteurs, pour exprimer un certain ordre d’ani- maux, de plantes ou d’autres produétions naturelles, qui s'accordent dans leurs principaux caraéteres, & renferment des individus nombreux , différens les uns des autres à certains égards ; mais qui réunis, ont (fi l’on peut parler ainf.) un caraétere diftinét de famille, lequel ne fe trouve pas dans ceux d’au- cun autre genre. Il n’a été que trop commun de confondre dans l’hiftoire naturelle , les termes de c/affe, famille, or- dre, &c. maintenant le fens déterminé du mot f4- mille, défigne cet ordre vafte de créatures fous le- quel les clafles & les genres ont des diftin@ions fub- ordonnées. Parmi les quadrupedes , les divers gen- res de créatures munies d'ongles , conviennent en- femble dans plufeurs caraëteres généraux communs à toutes ; mais elles different des autres animaux on- glés, qui ont des caratteres particuliers qui les diftin- guent ; de cette maniere on ne met point le chat & Je cheval dans une même famille. Pareillement dans l’Ihyologie il y a plufieurs genres de poiffons qui s'accordent parfaitement dans certains caraéteres communs, & qui different detous les autres genres par ces mêmes carateres. La breme & le hareng, quoique différens pour le genre, peu- vent être placés dans une même fmille, parce que un & l’autre ont des caraéteres généraux communs ; mais d'un autre côté perfonne ne s’avifera de met- tre le hareng & la baleine dans une même famille. L’arrangement des corps naturels en familles eft d’un ufage infini, quand cette difiribution eft bien faite, & que les divifons font véritables & juftes ; mais 1l eft fans doute nuifible quand on fe conduit autrement, parce qu'il n’entraine que l'erreur & la confuñon, Voyez MÉTHODE. | Les divifions des regnes en failles, peuvent être Ou artificielles ou naturelles, Les familles font artificielles chez tous les anciens naturaliftes ; telles font les diftinions & divifons qu'ils ont faites des plantes, en les fondant fur le lieu de la naïfflance de ces plantes, fur le tems qu’elles produifent des fleurs ; ou, en fait d'animaux, fur le terme de leur portée , leur maniere de mettre bas, leur nourriture & leur grandeur. Telles font encore les divifions générales prifes du nombre variable de certaines parties des corps naturels. L’abfurdité de la premiere de ces méthodes fante aux yeux, puifqu’elle requiert une connoiffance an- técédente des objets avant que de les avoir vûs, Lor£ qu'une plante inconnue , un animal, un minéral, eft offert à un naturalifte; comment peut-il favoir par lui-même le tems auquel cette plante vient à fleurir, ou la maniere dont l’animal fait fes petits ? par con- féquent il eft impoffible qu’il puifle le rapporter à fa famille, ou le découvrir parmi les individus de cette famille, Pour ce qui regarde la derniere méthode de pren- dre le nombre de certaines parties externes pour conftituer le cara@ere d’une famille, il eft aifé d’en prouver l’infuffifance ; car, par exemple, à l'égard des poiflons , fi l’on prend les nageoires pour regle, ces nageoires ne font pas toüjours les mêmes, pour le nombre, dans les diverfes efpeces qui appartien- nent véritablement & proprement à un gente ; ainf la perche, Ze gadus, & autres poiflons d’un même enre, ont plus ou moins de nageoires, Voilà donc es erreurs des méthodes artificielles 8 fyflémati- ques. Mais les familles naturelles, c’eft-à-dire tirées de la nature même des êtres, ne font point fujetes à de tels inconvéniens. Ici tous les genres fe rapportent à la même famille, & s'accordent parfaitement dans leurs parties principales. Les divers individus dont ces familles font compotées , fe peuvent réduire fous divers genres : enfuite ceux-ci peuvent être arran= ges dans leur clafle propre; & plus le nombre des claffes fera petit, plus la méthode entiere fera nette & facile. Ces familles naturelles ne doivent être uniquement fondées que fur des caraéteres effentiels ; ainfi chez les quadrupedes, il faut lestirer feulement de la f- gure de leurs piés ou de leurs dents ; dans les oi- feaux, la forme ou la proportion du bec pourra for- mer leur caraétere; dans les poiflons, la figure de la tête & la fituation de la queue feront très-confidé- rées, parce que ce font des cara@teres ftables & ef- fentiels. | Enfin, après bien des recherches , il femble que tout le monde animal, minéral, végétal & foffile, peut être ainfi réduit à des fzmulles, à des clafles, des genres & des efpeces ; & par ces fecours l’étude de la nature deviendra facile & réguliere. Je ne dis pas que les méthodes de Hill, d’Artedi, de Linnæus, éc. loient telles fur cette matiere, qu'on ne puiffe à Pavenirles reétifier & les perfe@ionner ; mais jecroi que fans de femblables méthodes l’hiftoire naturelle ne fera que chaos & que confufñon, une fcience va- gue, fans ordre & fans principe, telle qu’elle a été juiqu’à ce jour. ‘4rricle de M. le Chevalier DE Jau- COURT. * FAMIS, drap d’or famis, (Commerce) c’eft ainfi qu’on appelle à Smyrne certaines étoffes où il y a de la dorure. Ces étoffes font fabriquées en Europe. FAMNE , (Hifi. mod.) mefure fuivant laquelle on compte en Suede : c’eft la même chofe qu’une brafe, Voyez BRASSE. FANAL , f. m. TOUR À FEU, £. f. ( Marine.) c’eft un feu allumé fur le haut d’une tour élevée {ur la çôte ou à l'entrée des ports & des rivieres, pour FAN éclairer & guider pendant la nuit les vaifleaux dans leur route : c’eft ce qu’on nomme plus communé- ment phare, Voyez PHARE. (Z) FANAL, (Marine,) c'eft une grofle lanterne que Von met fur le plus haut de la poupe d’un vaifleau. Voyez Marine, PL IIT. fig. r. Les fanaux d’un vaif- feau de guerre, cottés P. les vaiffeaux commandans, comme vice-amiral , heutenant général, chef d’el- cadre, portent trois faraux à la poupe, les autres n'en peuvent porter qu’un. | Le vaiffleau commandant , outre les trois f2zaux de poupe, en porte un quatrieme à la grande hune, foit pour faire des fignaux, foit pour d’autres be- foins. L: On nomme auffi faraux, toutes les lanternes dont on fe fert dans le vaifleau pour y mettre les lumieres dont on a befoin. Faral de combar, c’eft une lanterne plate d’un côté, qui eft formée de forte qu’on peut l'appliquer contre les côtés d’un vaifleau en-dedans, pour éclairer lor£ qu'il faut donner un combat dans la nuit. Fanal,de foutre, c’eft un gros falet qui fert à renfer- mer la lumiere pendant le combat, pour éclairer dans les foutes aux poudres. On fe fert aufli de faraux placés différemment, pour faire les fignaux dont on eft convenu. (Z) FANATISME , . m. (Philofophie.) c’eft un zele aveugle & pañlonné, qui naît des opinions fuper- fütieufes , &c fait commettre des aëtions ridicules, anquftes , & cruelles ; non-feulement fans honte & fans remords, mais encore avec une forte de joie &t de confolation. Le faratifine n’eft donc que la fuperftition mife en aétion. Woyez SUPERSTITION. Imaginez une immenfe rotonde , un panthéon à mille autels ; & placé au milieu du dôme, figurez- vous un dévot de chaque feûe éteinte ou fubff- tante, aux piés de la divinité qu’il honore à fa fa- çon, fous toutes les formes bifarres que l'imagina- tion a pü créer. À droite , c’eft un contemplatif éten- du fur une natte, qui attend, le nombril en l'air, que la lumiere célefte vienne inveftir fon ame ; à gau- che, c’eft un énergumene profterné qui frappe du front contre la terre, pour en faire fortir l’'abon- dance : là, c’eft un see qui danfe fur la tombe de celui qu’il invoque; ici c’eft un pénitent immobile & muet, comme la ftatue devant laquelle il s’humilie : l’un étale ce que la pudeur cache, pat- ce que Dieune rougit pas de fa reflemblance ; l’autre voile jufqu’à fon vifage , comme fi l’ouvrier avoit horreur de fon ouvrage : un autre tourne le dos au midi, parce que c’eft-là Le vent du démon; un autre tend les bras vers l’orient , où Dieu montre fa face rayonnante : de jeunes filles en pleurs meurtriflent leur chair encore innocente, pour appaifer le démon de la concupifcence par des moyens capables de l'ir- ritér; d’autres dans une pofture toute oppofée, folli- citent les approches de la divinité : un jeune homme, pour amortir l'inftrument de la virilité, y attache des anneaux de fer d’un poids proportionné à fes for- ces ; un autre arrête la tentation dès fa fource, par une amputation tout-à-fait inhumaine, & fufpend à l’autel les dépouilles de fon facrifice. Voyez-les tous fortir dutemple, & pleins du dieu hi les agite, répandre la frayeur & lillufion fur la ace de la terre. [ls fe partagent le monde, & bien- tôt le feu s'allume aux quatre extrémités ; les peuples écoutent, & les rois tremblent. Cet empire que l’en- thoufiafme d’un {eul exerce fur la multitude qui le voitou lentend, la chaleur que les efprits raflemblés fe communiquent ; fous ces mouvemens tumultueux augmentés par le trouble de chaque particulier ,ren- dent en peu detems le vertige général, Pouflez-les dans le defert , la folitude entretiendra Je zele : ils defcendront des montagnes plus redouta- FAN 393 bles qu'auparavant ; & 1a crainte, Ce premier fen- timent de l’hômme, préparera la foûmiffion des au- diteurs. Plus ils diront de chofes effrayantes, plus on les croira ; l'exemple ajoûtant {à force à limpref- fion de leurs difcours , opérera la perfuafon: des bacchantes & des corybantes feront des millions d'in- {enfés : c’eft affez d’un feul peuple enchanté à la fuite de quelques impofteurs, la féduétion multipliera les prodiges ; & voilà tout le monde À jamais égaré. L’efprit humain une fois forti des rontes Iumineufes de la nature, n’y rentre plus ; il erre autour de la vé- rité, fans en rencontrer autre chofe que des lueurs, qui fe mêlant aux faufles clartés dont la fuperftition l’environne,;achevent de l’enfoncer dans lesténebres. La peur des êtres invifbles ayant troublé Pimapgi- nation, il fe forme un mélange COrrompu des faits de la nature avec les dogmes de la religion, qui mettant l’homme dans une contradiétion éternelle avec lui- même, en font un monftre aflorti de toutes les hor reurs dont l’efpece eft capable: je dis Zz peur, car l'a- mour de la divinité n’a jamais infpiré des chofes in- humaines, Le fanatifime a donc pris naïflance dans les bois, au milieu des ombres de la nuit ; & lester- reurs paniques ont élevé Les premiers temples du Pa- ganifme. Plutarque dit qu'un roi d'Egypte connoiffant l’in- conftance de fes peuples prompts à changer de joug , pour fe les affervir fans retour, fema la divifion ex: treux, & leur fit adorer pour cela, parmi les ani- maux, les efpeces les plus antipathiques. Chacun, pour honorer fon dieu, fit la guerre aux adorateurs du dieu oppofé, & les nations fe jurerent entr’elles la même haine qui régnoit entre leurs divinités : ainfi le loup & le mouton virent des hommes traînés en facrifice au pié de leurs autels. Mais fans examiner fi la cruauté eft une des pañfions primitives de l’hom- me, & s’il eft par fa nature un animal deftrudeur ; fi la faim ou la méchanceté ) la force ou la crainte, l’ont rendu l’ennemi de toutes les efpeces vivantes ; fi c’eft la jaloufie ou l'intérêt qui a introduit lhomi- cide für la terre ; f c’eft la politique ou la fuperfti- tion qui + emandé des victimes ; fi l’une n’a pas pris le mafque de l’autre, pour combattre la nature & fur. monter la force; fi les facrifices fanglans du paganif. me viennent de l'enfer, c’eft-à-dire de la férocité des pafñons noires & turbulentes, ou de légarement de limagination, qui fe perd À force de s'élever; enfin, de quelque part que vienne l’idée de fatisfaire à la di, vinité par l’effufion du fang , il eft certain que , dès qu'il a commencé de couler fur les autels , il n’a pas été poffible de l'arrêter; & qu'après l’ufage de l'ex piation, qui fe faifoit d’abord par le lait & le vin ; on en vint de l’immolation du bouc ou de la chez ve, au facrifice des enfans, Il n’a fallu qu’un exem- ple mal interpreté pour autorifer les horreurs les plus révoltantes. Les nations impies à qui l’on repro- choit le culte homicide de Moloch, ne répondoient- elles pas au peuple qui alloit les exterminer de la part de dieu, à caufe de ces mêmes abominations, qu’un de fes patriarches avoit conduit fon fils fur le bûcher ? comme fi une main invifible wavoit pas dé- tourné le plaive facrilege, pour montrer que les or dres du ciel ne font pas toijours irrévocables. Avant d'aller plus loin, écartons de nous toutes les faufles applications, les allufions injurieufes , 8 les conféquences malignes dont l'impiété pourroit S’applaudir, & qu’un zele trop prompt à s’alarmer nous attribueroït peut-être. Si quelque leéteur avoit lnjuftice de confondre les abus de la vraie religion avec les principes monftrueux de la fuperftition, nous rejettons {ur lui d'avance tout l’odieux de fa pernicieufe logique. Malheur à l'écrivain téméraire & fcandaleux, qui profanant le nom & l'ufage dela liberté, peut avoir d’autres vûes que celles de dire 394 F A N la vérité par-amour pour elle , 8: de détromper les hommes des préjugés funeftes qui les détruifent, Re- prenons. Il eft affreux de voir comment cette opinion d’ap- paifer le ciel par le maflacre , une fois introduite, s’eft univerfellement répandue dans prefque toutes les religions ; & combien on a multiplié les raifons de ce facrifice , afin que perfonne ne pût échapper au couteau. Tantôt ce font des ennemis qu'il faut immoler à Mars exterminateur : les Scythes égor- gent à fes autels le centieme de leurs prifonniers ; & par cet ufage de la viétoire, on peut juger de la juf- tice de la guerre : aufi chez d’autres peuples ne la faifoit-on que pour avoir de quoi fournir aux facri- fices ; deforte qu'ayant d’abord été inflitués , ce Yemble , pour en expier les horreurs, ils fervirent enfin à les juftifier, Tantôt ce font des hommes juftes qu'un dieu bar- bare demande pour viétimes : les Getes fe difputent 4’honneur d’aller porter à Zamolxis les vœux de la patrie. Celui qu’un heureux fort deftine au facrifice, eft lancé à force de bras fur des javelots dreflés: s’il reçoit un coup mortel en tombant fur les piques, c’eft de bon augure pour le fuccès de la négociation & pour le mérite du député ; mais s’il furvit à fa blef- fure, C’eft un méchant dont le dieu n’a point affaire. Tantôt ce font des enfans à qui les dieux rede- ‘mandent une vie qu'ils viennent de leur donner; Juflice affamée du fang de l'innocence , dit Montagne. Tantôt c’eft le fang le plus cher : les Carthaginois immolent leurs propres fils à Saturne , comme fi le tems ne les dévoroit pas aflez tôt. Tantôt c’eft le fang le plus beau : cette même Ameftris qui avoit fait enfouir douze hommes vivans dans la terre, pour obtenir de Pluton, par cette offrande, une plus longue vie ; cette Ameftris facrifie encore à cette in- fatiable divinité quatorze jeunes enfans des premie- res maifons de la Perfe, parce que les facrificateurs ont toûjours fait entendre aux hommes qu'ils de- voient offrir à l’autel ce qu’ils ayoient de plus pré- cieux. C’eft fur ce principe que chez quelques nations on immoloit les prenuers nés, 8c que ... . Heureux ceux qüi pleurent & qui fouffrent; que tous mes pas foienti FAN donc hériflés de ronces. Ajoûtons peine fr peine pour multiplier ma joie 8 ma félicité À + : ; Que répondre à ce fararique Pme, + qu'ilufe très-mal des chofes, parce qu'il ne prend pas bien les patoles, ét qu'il recoit dela main gauche ce qu'on lui a donné de la main droite, Relâchement que routes ces miti- gations , vous dira-t-il: quand Dieu parle, les con- feils font des préceptes ; ainfi je vais de ce pas m'en- foncer dans un defett inaccefible aux homines, Et :l partavecun bâton, un lac, & une haire, fans argent &t fans provifion, pour pratiquer la loi qu'il men- tend pas. - | 1 At fécond rans font les vifionnaires.-Qnand'à for. te de jeûnes & de macerations, on nee éroit rempli que de l’efprit de Diéu ; qu'on ne vit plis, dit-on, que de fa préfence ; qu'on eff transformé par la con- templation en Dieu ème , dans une indépendante des jèns tont-a-fait merveilleufe , qui loin d'exclure la jotiffance, en faitur droit acquis à la raifon ; la vertu Viäorieufe des palfions s’en fert quelquefois comme un Foi de fes efélaves. Tel eft le jargon myftique, dont Voici à-peu-prés la caufe phyfique. Lés efprits rap- péllés au cerveau par la vivacité & la continuité de la méditation, laifient les fens dans une efpéce dé langucur & d’inaGtion. C’eft fur-tout au fort du fom- mel que les phantômes fe précipitant tumultueute- iment dans le fiége dé limagination, ce mélange de traits informes produit un mouvement convulfif, pa- reil au choc brifé de mille rayons oppolés qui coïn- cident & fe croifent ; de-là viennent lesébloiifflemens &t les tranfports extatiques, qu'on devroit traiter comme un délire, tantôt par des bains froids, tantôt par de violentes faignées, felon le tempérament & les autres fituations du malade. Le troiieme fymptome eft la pfeudoprophétie, lorfqu’on eff tellement entêté de fes chimeres phän- taftiques, qu'on ne peut plus les contenir en foi-mé- me : telles étoient les fibylles aiguilloninées par Apol- Ton. Il nef point d'homme d’une imagination un peu vivé, qui ne fente en lui les germes dé cette exalta- ton méchanique ; & tel qui ne croit pas aux fibyl- fes, ne voudroit pas fe hafarder À s’afleoir fur leurs trépiés, fur-tout s’il avoit quelque intérêt à débiter des oracles, ou qu'il eût à craindre une populace pré- te à le lapider au cas qu'il reftât muet. Il faut donc parler'alors, & propoler des énigmes qui féront ref. pedées jufqu'à l’évenement, comme des myfteres fur lefquels il ne plait pas encore à la Divinité de s'expliquer. | Le . Le quatrième degré du ne à eft limpafibilité. Par un progrès de mouvemensul fe trouve que les vafleaux font tendus d’une roideur incomptéhenfi- ble; on diroit que l’ame eft refugiée dans là tête où qu’elle eft abfente de tout le corps: c’eft alors qué les épreuves de l’eau, du fér, & du feu ne coûtent rien; que des bleflures toutes céleftes s'impriment fans douleur, Mais il faut fe méfier de tout ce qui fe fait dans les ténebres & devant des témoins fufpeéts. Hé, quel eft l’incrédule qui oferoit rire à la face d’u- ne foule de fanatiques ? Quel eft l’homme aflez maï- tre de {es fens pour examiner d’un œil fec des con- torfons effrayantes, & pour en pénétrer la caufe ? Ne fait-on pas qu'on n’admet au fararifme que des gens préparés par la fuperftition ? Toutefois comme ces énersumenes ne parviennent à l’état d'infenfbilie té , que par les agitations les plus violéntés,1l eftaifé de conclure que c’eft une phrénéfie dont l'accès finit par la léthargie. pr Si tous ces hommes aliénés que vous avez vüs dans . Ce vafte panthéon étoient tranfportés à leur demeure convenable, il feroit plaifant de les éntendré parler. Je fuis le monarque de toute la terre, diroit un tail- leur, l’Efpritfaint me la dit. Non, diroit fon voifin, je dois favoir le contraire, car je fuis fon fils. Taifez- Tome VI, | F A N 399 VOUS , que j'enténde la mufique des globes céleftes, roit un doéteur : ne voyez-vous pas cet efprit qui pafñe par ma fenêtre P 1l vient me révéler tout ce qui fut 82 qui fera, , . , , Pai recu l’épée dé Gédéon : allons, enfans de Dieu; fuivez-moi, je fais invul= nérable , ., ;. Et moi, je n'ai befoin que d’uncan- tique pour mettre les armées-en déroute. 4. N'êtes- vous pas cet apôtre qui doit venir de la Tranfylva=, mic? Nous nous promenons depuis longitems ur les rivages de la mer pour le recevoir. ., Je fuis venu, moi, pour la rédemption des femmes, que ls Meffié avoit oubliées, . . . Et moi je tiens école de prophé- tie: approchez, petits enfans. Si ces divers caratteres de folie, qui ne font point tracés d'imagination , avoïient par malheur attas qué le peuple ; quels ravages n'auroientils pas fait ? dés hommes éronnés (gens atromitum }auroient grim: pé les rochérs & percé les forêts : là par mille bonds Sc dés fants périlleux 6û eût évoqué l'efprit de révé- lation ; un prophete bercé fur les genoux des croyan- tes les plus timorées, feroit tombé dans une épilep: fie toute célefte, l'Efprit divin l’auroit faifi par la éuffe , elle fe feroit roidie comme du fer, dés friflons tels que d’un amour violent auroient couru par tout fon cotps ; il auroit perluadé à laffemblée qu’elle étoit une troupe imprenable ; des foldats feroient ve- nus à main armée, & on ne leur auroit oppofé que des grimaces & des cris. Cependant ces miférables traîhés dans les prifons , euflent été traités en rebel- les. C’eft à la Medecine qu'il faut renvoyer de pareils malades, Mais pañlons aux grands remedes qui font ceux de la politique. Ou le gouvernement eft abfolument fondé fur la religion, comme chez les Mahométans; alors le /2: riatifnie {e tourne principalement au-dehors, & rend ce peuple efinemi du gente humain par un principe de zele: ou la religion entre dans le gouvernement, comme le Chriftianifme defcendu du ciel pour fau- ver tous les peuples; alors le zele, quand 1l eft mal- entendu , peut quelquefois divifer les citoyens par des guerres inteftines. L’oppofition qui fe trouve en- tre les mœurs de la nation & les dogmes de la réli- gion, entre certains ufases du monde & les prati- ques du culte, entre les lois civiles & les préceptes divins, fomente ce germe de trouble, Il doit atriver alors qu’un peuple ne pouvant allier le devoir de ci- toyen avec celui de croyant, ébranle tour-à-tour Pautorité du Prince &rcelle de l’Eglife. L’inutile dif- tinétion des deux puiflances a beau vouloir s’entres mettre pour fixer des limites, il faudroit être neutre, Mas lempire & le facerdoce, au mépris de la rai- on, empietent mutuellement fur leurs droits ; & le péuple qui fe trouve entre ces deux marteaux fup- porte feul tous les coups,, jufqu'à ce que mutiné par fes prêtres contre fes magiüitrats, il prenne le fer en mäin pour la gloire de Dieu, comme on la vû fi fouvent en Angleterre. Pouf détourner cette fource intariffable de defor- dres,, 1l fe préfente à la vérité trois moyens; mais quel eft le meilleur ? Faut-il rendré la religion def- potique, ou le monarque indépendant , ou le peuple libre ? 19, On pourra dire que le tribunal de l’inquifi- tion, quelque odieux qu'il dût être à tout peuple qui conerveroit encore le noïn de quelque liberté, pré- viendroït les fchifmes & les querelles de religion, en ne tolérant qu'une façon de penier : qu’à la vérité une chambre toûjours ardente btüleroitd’avance les vic- times de l'éternité, & que la. vie desparticuhersferoit continuellement en proie à des foupçons d’héréfie on d’impiété ; mais que l’état feroit tranquille &e Le prin- ce en fürété: qu'au heu de ces violentes maladies qui épuifent tont-à-coup les Veines du corps politique, le fang ñe couleroit que goutte à goutte ; & que fes Eee - 409 FAN fujets dans un état d'infirmité habituelle ne £e plain- ‘droient pas des brufques fermentations qu'éprouvent les gouvernemens d'une conftitution vigoureufe. 2°, Que f vous préferiez les périls inféparables de la liberté, à l’oppreffion continuelle , {eroit -il mieux de mettre votre fouyerain à l'abri de toute do- mination étrangere, & qu'il n’y eût qu’un feul chef dans l’état ? Mais s’il n'y a point de barriere au pouvoir du fouverain. ,...Hé quoi! ne nous refte-t-1l pas des lois fondamentales & des corps intermédiaires ? TL s’enfuivroit donc une réforme générale dans le corps dévoiie au culte religieux. Mais feroït-ce un malheur qu'un corps trop puiflant perdit quelque chofe, fi tant d’autres devoient y gagner ? Tandis qu'il refte- toit une extrème confidération pour Les richefes, le commerce tiendroit les autres états en équilibre; la nobleffe ne prévaudroit pas ; les tribunaux {e rempli- toient d’excellens fujets , qui ne font pas toüjours tels dans l’ordre eccléfiaftique : au lieu de ces difcufions théologiques, qui tourmentent les efprits fans affer- mit la religion, l'application fe tourneroit vers les maticres de droit public ; on s’éclaireroit fur Les véri- tables intérêts de la nation: cette fourmiliere, qui fe jette dans les bas emplois de la Magiftrature & de lE- glfe, peupleroit les campagnes & les atteliers ; on s'occuperoit du travail des mains, beaucoup plus na- turel à l’homme que les travaux de lefprit. Il ne faudroit qu'adoucir la condition du peuple, pour l’accoïtuiner infenfiblement à cette amélioration. °. Lesrois ont tant d'intérêt à arrêter les progrès du fanatifme ; s’il leur fut quelquefois utile, ils ont eu tant de raïfons de s’en plaindre, qu’on ne peut aflez demander comment ils ofent traiter avec un ennemi fi dangereux. Tous ceux qui s’occupent à le détruire , de quelque nom odieux qu’on les appelle, font les vrais citoyens qui travaillent pour l’intérêt du prince & la tranquillité du peuple. L’efprit phi- lofophique eft le grand pacificateur des états ; c’eft peut-être dommage qu'on ne lui donne pas de tems- en-tems un plein pouvoir. Les Sintoiftes, fete du Naturalifme au Japon, regardent le fang comme la plus grande de toutes les fouillures ; cependant les prêtres du pays les déteftent & les décrient, parce qu'ils ne prêchent que la raifon & la vertu, fans cé- rémonies. Un peu de tolérance & de modération; fur-tout ne confondez jamais un malheur (tel que l’incréduli- té) avec un crime qui eft toüjours volontaire. Toute l’'amertume du zele devroit fé tourner contre ceux qui croyent, & n’agiflent pas; les incrédules refte- roient dans l'oubli qu’ils méritent, & qu'ils doivent fouhaiter. Puniflez à la bonne heure ces libertins qui ne fecouent la religion, que parce qu'ils font révol- tés contre toute efpece de joug, qui attaquent les mœurs & les lois en fecret & en public: puniflez-les, parce qu'ils deshonorent & la religion où ils font nés , & la pmlofophie dont ils font profeffion : pour- fuivez-les comme les ennemis de l’ordre & de la fo- cièté ; mais plaignez ceux qui regrettent de n’être pas perfuadés. Eh, n’eft-ce pas une aflez grande perte pour eux que celle de la foi, fans qu’on y ajoûte la calomnie &e les tribulations ? Qu'il ne foit donc pas permisà lacanalle d’infulter la maifon d’un honnête homme à coups de pierre, parce qu’il eft excommu- nie : qu'il joiifle encore de l’eau & du feu, quand on lui a interdit le pain des fideles: qu’on ne prive pas fon corps de la fépulture, fous prétexte qu'il n’eft point mort dans le fein des élus ; en un moi, que les tribunaux de la juftice puiffent fervir d’afyle au dé- faut des autels . . .. Quelle indigne licence , dites-vous, va faire tomber la religion dans le mépris? . , . .. Eft-ce qu’elle fe foûtient fur des bras de chair ? Vou- driez-vous la faire regarder comme un inftrument de politique? N’en appellez donc plus des decrets FAN des hommes à l’antorité divine, & foïmettez-vours le premier à une puiflance de qui vous tenez la v6- tre; mais plütôt faites aimer la religion ‘en laiffant à chacun la liberté de la fuivre. Prouvez la vérité par vos œuvres, & non par un étalage de faits étran- gers à la Morale, & moins conféquensque vos exem- ples ; foyez doux & pacifiques; voilà le triomphe af- fûré à la religion, & le chemin coupé an fazarifme. Ajoûterons-nous , d’après nn auteur anglois, que & le faratifne eft très-contraire à l’autorité du facer- » doce ? En effet portés dans leurs extafes à la fource » même de la lumiere , loin de reconnoître les lois » de l’Eglife, les fanatiques s’érigent eux-mêmes en » légiflateurs, & publient tout haut les fecrets de la » Divinité, au mépris des traditions & des formes » reçues ». Comme un favori du prince, qui n’at- tend n1 fon rang ni l’expérience pour commander & qui ne pouvant être à la tête des affaires, faute d’habileté, fe plaît à renverfer par fon crédit les difpoñitions du miniftere ; « le fanatique, fans tece- » voir l’onétion, fe confacre lui-même ; & n'ayant » pas befoin de médiateur pour aller à Dieu, il fub- » Îlitue fes vifions à la révélation & fes srimaces aux » Cérémonies, » En général nous avons vù en Angleterre nos » enthoufiaftes en fait de religion, paffionnés pour le » gouvernement républicain, tandis queles plus fu- » perflitieux étoientles partifans de la prérogatiye, De » même, continue le même auteur , nous voyons » ailleurs deux partis, dont l’un efclave & tyran de » la cour eft dévoué à l'autorité, & l’autre peu foù- » nus conferve quelques étincelles de l'amour pour » la liberté », | | - S1 la fuperftition fubjugue &c dégrade les hom- mes, le farasifine les releve : lune & l’autre font de mauvais politiques ; mais celui- ci fait les bons {ol- dats. Mahomet n'eut prefque jamais qu’un croyant contre dix infideles dans la plüpart de fes combats : avec trois cents hommes, il étoit en état d’en vain< cre dix mille, tant la confiance en des légions célef£ tes & l’efpérance d’une couronne immortelle don- noient de force à fa petite troupe. Un général d’ar- mée, un mimitre d'état, peuvent tirer grand parti de ces ames de feu. Mais auffi quels dangereux inftru= mens en demauvaifes mains ! Unenthoufiafte eftfou- vent plus redoutable avec fes armes invifbles, qu'un, prince avec toute fon artillerie. Que faire à des gens qui mettent leur falut dans la mort; qui fe multiplient à mefure qu’on les moiffonne , & dont un feul fufit pour réparer les plus nombreufes per- tes ? Semblables auMpolype, partagez tout le corps en mille pieces , chaque membre coupé forme un nouveau corps. Exilez ces efprits ardens au fond des provinces , ils mettront toutes les villes en feu. Il ne refteroit donc qu’à les enfermer çà & là dans les prifons , où ils fe confumeroient comme des ti- {ons embrafés , jufqu’à ce qu'ils fuffent réduits en: cendres, On ne fait guere quel parti prendre avec un corps de fanatiques ; ménagez-les , ils vous foulent aux piés ; fi vous les perfécutez, ils fe foûlevent.Lemeil. leur moyen de leur impofer filence, eft de détour ner adroitement l’attention publique fur d’autres ob« jets; mais ne forcez jamais. Il ny a que le mépris &z le ridicule qui puifent les décréditer & les affoiblir. On dit qu’un chef de police, pour faire cefler les preftiges du farzarifine, avoit réfolu, de concert avec ün chimifte célebre, de les faire parodier à la foire par des charlatans. Le remede étoit fpécifique, # lon pouvoit defabufer les hommes fans de grands rifques ; mais pour peu qu’on leve le voile, il eft bien-tôt déchiré. Ménagez la religion & le peuple, parce qu'ils font redoutables Pun pat l’autre. Le fananfme a fait beauçoup plus de mal au mor: de que l’impiété. Que préténdent les impiés ? fe dé: livrer d’un joug , au lieu que les farariques veulent étendre leurs fers fur toute la terre. Zélotypieinfer- nale ! Ait-on vù des feétes d’incrédules s’attrouper, 8c marcher en armes contre la divinité ? Ce font des ames trop foibles pour prodiguer le fang humain : cependant il faut quelque force pour pratiquer le bien fans motif, fans efpoir , & fans intérêt. Il ya de la jaloufie & de la méchanceté à troubler des ames en poñfleflion d’elles-mêmes, parce qu’elles'n’ont ni les prétentions , ni les moyens que vous avez... ; Onfe garde bien au refte d'adopter de femblables raifonnemens, qui ont fait le tourment de tant d’hom- mes auf célebres par leurs difpgraces ,.que par les écrits qui les leur ontatiirées. | Mais s’il étoit permis d'emprunter un moment, en faveur de l'humanité, le {tyle enthoufiafte, tant de fois employé contr’elle, voici unique priere qu’on oppoferoit aux fanatiques 1 «Doi qui veux le bien de tous les hommes , & »qu'aucunne périfle; puifque tu ne prensaucun plai- » fir à la mort du méchant, délivre nous, non pasdes » ravages de la guerre & des tremblemensdeterre, » ce font des maux pañagers,, limités | & d’ailleurs » inévitables , mais de la fureur des perfécuteurs qui # invoquent ton faint nom. Enfeigne-leur que twhais » le fang, que l’odeur des viandes immoléesne mon- » te point jufqu'à toi, &c qu'elle n’a point la vertu de » diffiper la foudre dans les airs, ni de faire defcendré » la rofée du ciel. Éclaire tes zélateurs, afin qu'ils fe » gardent au-moins de confondre l’holocaufte avec » Phonucide, Remplis-les tellement de amour d’eux- »# mêmes , qu'ils puiflent oublier leur prochain, puif: » que leur pitié n’eft qu’une vertu deftruétive. Hé ! » quebeft l’homme que tu as chargé du foin de tes » vengeances, qui ne les mérite cent fois plus queles »-viétimes qu'il timmole ? Fais entendre que ce n’eft » ni la raïfon ni la force ; maïs ta lumiere & ta bon- #té, quiconduifent les ames dans tes voies, & que » C’éftinfulter à ton pouvoir, que dy mêler le bras » de l’homme. Quand tu voulus former Univers, » l’appellas-tu à ton fecours ? &z s’il te plaît de m'in- » troduire à ton banquet, n’es-tu pas infini dans tes » merveilles ? maïs tu ne Veux pas nous fauver mal- » gré nous, Pourquoi n’imite-t-on pas la douceur de » ta grace, & prétend-t-on m'inviter par la crainte à » t'aimer ? Répands l’efprit d'humanité furla terre, &c » cette bienveillance univerfelle , qui nous remplit » de vénération pour tous les êtres avec qui nous » partageons le don précieux du fentiment , & qui » fait que l'or & les émeraudes fondus enfemble # ne fauroient jamais égaler devant toi le vœu d’un » cœur tendre & compatiflant, encore moins expier » l'horreur d’un homicide », Fanatifme du patriote, I:y a une forte de faranif- me dans l’amour de la patrie , qu’on peut appeller le culte des foyers. Il tient aux mœurs , aux lois, à Ja religion , & c’eft par-là fur-tout qu'il mérite da- vantage ce nom. On ne peut rien produire de grand fans ce zele ontré , qui groffiffant les objets, enfle auf lés efpérances , & met au jour des prodiges in- croyables de valeur & de conftance. Tel étoit le patriorifme des Romains. Ce fut ce princige d’héroif- me qui donna à tous les fiecies le fpeétacle unique d’un peuple conquérant & vertueux. On peut regar- derle vieux Brutus, Caton, les Decius pere & fils, Ct les trois cents Fabius dans l’hiftoire civile ,com- me les lions & les baleines dans l’hiftoire naturel- le, 6t leurs a@ions prodigieufes | comme ces vol- cans inattendus, qui defolant en partie la furface du globe ; affermiflent fes fondemens , & caufent l’ad- miration après l’effroi. Mais ne mettez pas au même rang les Vains déclamateurs, qui s’enthoufiafment indifféremment de tous les préjugés d'état, & qui pré- F AN 40i ferent tohjours leur pays, uniquement patce qu'ils y font nés, Il eft fans doute-beaude mourir pour fa pa: trie; & quelle eft la chofe pout laquelle on ne meurt pas ? Donc la naturein’a pasmis de bornes à.ces ma: ximes ; : . 44 Écoutez les plus beaux vers , ou l'idée la plusneuve & la plus fublime d’un de nos grands poëtes dans ces derniers jours; Voyez comme une mere parle à fon époux, qui veut lui arracher {on fils, pour le facrifier au fils de {es rois: Va , le nom de fujet n’efl pas plus grand pour nous ÿ Que ces noms [1 Jacrés & de-pere & d’époux. | La nature & l'hymeñ, voila les lois premieres ; Les devoirs , Les liens des nations éhtierés *! Ces lois vienneñt des dieux, le refle ef? des humains: Cet article eff de M. DELEYRE ; auteur de l'analyfè de la philofophie du chancelier Bacon. FANATISME, (maladie) voyez D'ÉMONOMANIE ; MÉLANCOLIE , & Particle précédent: | FANEGOS, £. m.( Commerce. ) mefure dés grains dont on fe fert en Portugal ; quinze fanegos font lé muid ; quatre alquiers font le, fazegos;, quatre muids de Lisbonne font le laft d’Amfterdam. Voyez Muip, ALQUIER , LAST. Ditfhionn, de Comm. de Trév, 6 dé Chamb. (G) | FANEQUE , £ mm. (Comm. ) mefure des grains dont on fe fert dans quelques villes d'Efpagne , com- me à Cadix, S. Sébaftien, & Bilbao. Il faut vingt- trois à Vingt- quatre ferzeques de S, Sébaflien , pour le tonneau de Nantes , de la Rochelle & d’Avray, c'eft-à-dire pour neuf feptiets.& demi de Paris. La mefure de Bilbao étant un peu plus grande, vingt à vingt-un fareques fufifent pour un tonneau de Nan- tes, Avray , & la Rochelle: Cinquante faneques de Cadix & de Séville, font le laft d’Amfterdam ; cha: que faneque pele 93 + livres de Marfalle ; quatre chays font la faneque , & douze anegras le catus, Voyez MuiD , LAsT , ANEGRAS, &c, Dichionn, de Comm, de Trév. & de Chamb, (G) * FANER , v. a@.( Eco. ruflig.) c'eft, lorfque le foin a été fauché , qu’il a repoté fur le pré , & que le deffus en eft fec, le retourner avec des fourches & l’agiter un peu en l’air : cette façon fe réitere plu fieurs fois , & elle rend le foin meilleur, Foyez Les ar= ticles FOIN € PRÉ. | FANFARE, f. f, forte d’air militaire, pour l’ordi< naire court & brillant, qui s’exécute par des trom= pettes, & qu'on wnite fur d’autres inftrumens. La fanfare eft communément à deux deflus de trompet: tes , accompagnées de tymballes ; & bien exécutée, elle a quelque chofe de martial & de gai , qui con- vient fort à fon ufage. De toutes les troupes de lEu- rope , les allemandes font celles qui ont les meilleurs inftrumens militaires ; aufli leurs marches & farfa- res font -elles un effet admirable. C’eft une chofe à remarquer, que dans tout le royaume de France , il n'y a pas un feul trompette qui fonne jufte, &c que les meilleures troupes de l’Europe , font celles qui ont le moins d’inftrumens militaires & les plus dif- cordans ; ce qui n’eft pas fans inconvénient. Durant les dernieres guerres , les payfans de Baviere & d'Autriche , tous muficiens nés, ne pouvant croire que des troupesreglées euffent des inftrumens fi faux &c fi déteftables , prirent tous ces vieux corps pour de nouvelles levées, qu'ils commencerent à mépri- fer, & l’on ne fautoit. dire à combien de braves gens dés tons faux ont coûté la vie. Tant il vrai que dans l’appareïl de la guerre , ilne faut rien négliger de ce qui frappe les fens. (S) * FANFARON, f. m. celui qui affeéte une bra- voure qu'il n’a point : un vrai fazfaron fait qu’il n’eft qu'un lâche. L’ufagea un peu étendu l’acceptiondece mot; on l’applique à celui même qui exagere ou qui montre avec trop d’affeétation & de confiance La 402 F AN bravoure qu'ila; & plus généralement à celui qui fe vante d’une vertu, quelle qu’elle foit, autdelà-de la bienféance ; mais les lois de la bienféance varient felon Les tems & les lieux-1Ainfi tel hommeseît pour nous un fanfaron, quine l’étoit point pour fon fiecle, & qui ne le feroit point aujourd’hui pour fa nation. Il y a des peuples fanfarons, La fanfaronade eft auf dans le ron: Il y a tel difcours héroïque , qu'un mot ajoûté ou changé, feroit dégénérer en fanfaronade ; & réciproquement , il y a tel propos fanfaror , qu'- uñe pareille correétion rendroit héroïque. Il ya plus, le même difcours dans la bouche de deux hommes différens ,.eft un difeours élevé, ou une fan/farona- de. On tolere, on admire mème dans celui qui a par- devers foi de grandes aétions , un ton qu’on ne fouf- friroit point dans un homme qui n’a rien fait encore qui garantifle & qui juftifie fes promefles. Je trouve en général fous nos héros de théatre un peu farfa- rons.C'’eit un mauvais goût qui paflera difficilement ; il a pour la multitude un faux éclat qui l’éblouit ; 8c il eft difficile de rentrer dans les bornes delanature, de lä vérité, & de la fimplicité , lorfqu'une fois on s’en eft écarté. Il eft bien plus facile d’entaffer des fentences lés unes fur les autres , que de:con- verfer. FANION, f. m. (Art milie. ) c’eft une efpece d'é- tendard qui fért À la conduite des menus bagages des tégimens de cavalerie & d'infanterie. La banderole du fanion doit être d’un pié quarré, & d’étoife de lai- ne des couleurs affeétées aux régimens. Le nom du régiment auquel le farion appartient , eft écrit def- fus. Le fanion eft porté par un des valets des plus fa- ges du régiment , lequel eft choïfi par le major. I eft conduit pat un officier fubalierne ; auquel on don- ne le nom de waquemelire. Le devoir de cet ofhicier confifte à veiller à la con- duite des menus bagages du régiment , 8 de conte- nir les valets tous enfemble à la fuite du farion , à l'exception néanmoins de ceux qui marchent avec leurs maîtres dans les divifions. Îl eft défendu aux valets de quitter le fzior de leur régiment, à peine de fouet. (Q) FANNASHIBA , £. m. ( Hiff. nar, bor.) c’eftun grand arbre qui croît au Japon ; fes feuilles {ont d’un verd foncé, & forment une efpece de couronne ; {es fleuts font en bouquets, étant attachées les unes aux autres ; elles répandent une odeur très-agréa- ble & f forte, qu’on la peut fentir à une lieue, quand le vent donne. Les dames les font fecher, & s’en fervent à parfumer leurs appartemens. On plante cet arbre dans le voifinage des temples & pagodes ; &c quand il eft vieux , on le brûle dans les funérail- les des morts. Hubner , délionn. univerfel. FANNE d’une graine, (Jardinage. ) eft la même chofe qne féxille. On fe fert de ce mot, particuliere- ment en parlant des anémones êt des renoncules. (Æ) FANNER , FANNÉ , (Jardinage. ) le trop de {o- leil, la ceffation du motivement de la feve,, alterent tellement les feuilles d’un arbre ou d’une plante, qu’au lieu d’être fermes &c élevées , elles baïffent & fefétriffent ; ce qui fait dire qu’elles font faznées. (K) FANO , (Géograph.) fanum fortune, à caufe d'un temple de la fortune qui y fut bâti par les Romains, en mémoire d’une viétoire fignalée qu'ils remporte- rent fur Afdrubal frere d’Anmbal, dans la feconde guerre punique , Van de Rome 547 ; jolie petite ville matitime d'Italie, dans l’état de l’Eglife, au duché d'Urbin , avec un évêché qi releve du pape, & un ancien arc de triomphe dont les infcriptions font prefque toutes effacées: L’églife cathédrale y pof- fede de beaux tableaux du Guide. Cette ville eit la patrie de deux papes ; favoir de Marcel If. qui mou- &ut vingt-quatre heures après fon éleétion, Le 9 Avrilrsss, non fans foupcon d’avoir été émpoifon. né; & de Clément VIIL. élu pape en 1592, mort en 160$, fi connu par l’abfolution d'Henri, IV. & la création dé plus de cinquante cardinaux pendant {on pontificat. Faro eft fur le-golfe de Venife;.àtrois lièues fud-eft de Péfaro , huit nord-eft d’Urbin ; elle eft la patrie de Taurellus (Lælius) , connu par fes Pandecle Florentine , en trois-volumes 14-fo., Long. god, 40/. Jar, 434 531. (DJ) n FANO , (Comm.) petit poids.dont on fe fert à Goa & dans quelques autres lieux des Indes orientales, pour pefer les rubis : 1l eft de deux karats de Vénife. Diéfionn. de Comm. de Trév. & de Chamb. (G), FANON,, f. m. ( Marine.) Prendre le fanon de L’ar- simon, c’eft le raccourciffement du point de.la voile que l’ontroufle & ramafle avec des garcettes, pour . prendre moins de vent ; ce qui ne fe fait que dans.de très-grostems. Ce mot eft particulierement-pour la voile d’artimon, & quelquefois pour la mifene. (Z;) FANON, ferme de Chirurgie, piece d’appareilpour la fraîture des extrémités, inférieures... On fait les fanons avec deux baguettes où petits bâtons de la groffeur du doigt: chaque baguette eft. parnie de paille, qu'on maintient autour du bâton avec un fil qui l'entortille d’un bout à l'autre. La longueur des fanons eft différente , fuivant la grandeur des fujets, 8e fuivant la partie fra@urée. Les farors qui fervent pour la jambe doivent être d’égale longueur, 8 s’é- tendre depuis le deflus.du genou jufqu'à quatre :tra- vers de doigts au-delà du pié. Ceux qui doivent maintenir la cuifle font inéyaux ; externe doit aller depuis le deflus du pié jufqu'au-delà de l'os des-iles; l’interne eft plus court , & doit fe terminer fupérieu- rement au pli de la cuiffe,, & ne point bleffer les par- ties naturelles. Le mot de f2z107 fignifie zx béton de corche, Pour s’en fervir on les roule un-de chaque côté dans les parties latérales d’un piece de linge d’une longueur & d'une largeur fufifantes, fur le plein de laquelle la partie puifle être placée avec tout l'appareil qui y eftappliqué. Voyez Planche IF, de Chirurgie, figure 1. On ferre les fanons des deux côtés du membre ; mais avant de les attacher parle moyen de trois ou quatre liens ou rubans de fil qu’on. a eu foin de pafler par-deffous, on a l'attention de mettre des comprefles aflez épaifles pour remplir les vuides ,, comme au-deflous du genou ,.& au-deffus des malléoles ou chevilles, afin que les fanons fat fent une compreffion égale dans toute la longueur du membre, & qu'ils ne bleffent point les parties fur lefquelles ils porteroient fi elles n’étoïient point gar- nies. Dans quelques hôpitaux on à pour cet ufage des petits fachets remplis de paille d'avoine. On noue extérieurement les rubans qui ferrent les fzz0o75.con- tre lemembre , & on met ordinairement une petite comprefle quarrée au milieu de la partie antérieure de la partie, fous chacun de-ces rubans pour Les foû- tenir, & remplir le vuide qu'il y auroit entre le ru- ban &c l'appareil. On voit aflez par cette defcrip- tion, quel eft lufage des fanons; ils maintiennent la partie fraéturée dans la direétion qu’on lui a donnée, & s’oppofent à tous les mouvemens volontaires 6€ involontaires, plus que toute autre partie de’appa- reil : ils fervent auffi à éviter le dérangement dans le tranfport qu’on eft quelquefois obligé de faire d’un bleffé d’un lit dans un autre. Lorfque les fanors font appliqués, on doit pofer le membre fur un couffin ou oreiller, dans-une fi- tuation un peu oblique, enforte que le pié foit plus élevé que le genou , & le genou plus quela eurfle: cette poñition favorife le retour du fang des extrémi- tés vers le centre. Dans les hôpitaux militaires, où lon n’a point d’oreillers, on met la partie dans des faux-fanons. On donne ce nom à un drap plié de fa- çon, qu'il n'ait de large qué la hauteur des fanous; on le foule par les deux extrémités, & on place le membre entre ces deux rouleaux, qui fervent à foû- tenir les farzons, & même à foûlever la partie, &c à donner un peu d'air par-deflous, quand on le juge à propos. Voyez FLABELLATION. On met quelquefois les faux-fanons doubles, pour élever le mémbre da- Vantage. Quand au lieu de drap on n’a que des alai- fes ou des nappes, 1l faut s’accommoder aux cir- conftances : alors on roule féparément les pieces de linge qu’on à , & on met les unes d’un côté & les au- tres de l’autre, pour remplir l’intention marquée. Les anciens mettoient tout fimplement le membre dansune efpece de caïfle qui contenoit fort bien tout l'appareil. M. Petit a perfeionné cette pratique: la boîte qu'il a imaginée, contient avantageufement les jambes fraéturées, &c elle eft fur-tout très-utile dans les fraétures compliquées de plaie qui exige des panfemens fréquens. Voyæ Boire. M. de la Faye a inventé aufli une machine pour contenir les fraétures, tant fimples que compliquées ; elle eff compofée de plufieurs lames de fer-blanc umes par des charnieres : il fuffit de garnir la partie de comprefles, & l’on roule cette machine par-def- fus, comme une bande, Cette machine, qui peut être de grande utilité à l’armée dans le tranfport des bleflés, pour empêcher les accidens fâcheux qui ré- fultent du froiffement des pieces fra@urées, eft dé- crite dans le fecond volume des mémoires de l’aca- démie royale de Chirurgie. M. Coutayoz, membre de la même fociété académique , a fait à cette ma- : chine des additions très- importantes pour un cas particulier, dont il a donné l’obfervation dans le mé- me volume. | Dans une campagne où l’on n’auroit aucun de ces fecours, où l’on manqueroïit même de linge, un chi- rurgien intelligent ne feroit pas excufable, f fon ef. prit ne lui fuggéroit quelque moyen pour maintenir les pieces d'os fraturées dans l’état convenable ; on peut faire une boite ou caifle avecde l'écorce d’abre, ët remplir Les mégalités dela partie avec quelque ma- tiere molle, comme feroit de lamoufle, &c. oyez FRACTURE. (7) FANON, (Manëge, Maréchal.) On appelle de ce nom cet aflemblage de crins qui tombent fur la par- tie poftérieure des boulets, & cachent celle que nous nommons l'ergos. Leur trop grande quantité décele des chevaux épais, groffiers & chargés d’hu- meurs ; elle eft d’autant plus nuifible, qu’elle ne fert qu'a réceler la crafle, la boue & toutes les matieres irritantes, que nous regardons avec raïfon comme les caufes externes d’une foule de maux qui atta- quent les jambes de l’animal. On employe des ci- failles ou pinces à poil, pour dégarnir le fanon. Voyez PANSER. (e) FANTAISIE , 1. £. (Gramm.) fignifioit autrefois l'imagination, 8&c on ne fe fervoit guere de ce mot que pour exprimer cette faculté de lame qui reçoit les objets fenfibles. Defcartes, Gaflendi, & tous les philofophes de leur tems, difent que Les efpeces, Les drmages des chofes fe pagnent en La fantailie ; & c’eft de-là que vient le mot fazrôme, Mais la plüpart des termes abftraits font reçûs à la longue dans un fens différent de leur origine , comme desinftrumens que linduftrie employe à des ufages nouveaux. Fantaifie veut dire aujourd’hui 7 defir Jingulier, un goÂs paf= Jager : il a eu la fanraifie d’aller à la Chine: la fan- taifie du jeu, du bal, lui a pañlé. Un peintre fait un portrait de fansaifte , qui neft d’après aucun modele. Avoir des fantaifies, c’eftavoir des goûts extraordi- aires quine font pas de durée. Voyez l'article fui- vant. Fantaifie en ce fens.eft moins que Pifarrerie &x que caprice, Le caprice peut fignifier #7 dégoir fubit € déraifonnable. I] a eu la fantailie de la mufique, & il s’en eft dégoûté par caprice, La bifarrerie donne + FAN 493 liñé idée d'inconféquénce & de mauvais goût, qué la fantaifée n'exprité pas : il aeu la Jantarfre de bâtir, mais il a conftruit fa maifon dans un goût bifarte. Il ÿ a encore des nuances entre avoir des fantaifies ët Être fantafque : le fantafqne approche beaucoup plus du bifarre. Ce mot défigne un cara@tere inégal & brufque, L’idée d'agrément eft exclue du môt Jar tafque , au lieu qu'il y a des fantaiftes agréables. On dit quelquefois en converfation familiere, des fanr= taifies mufquées ; mais jamais on n’a entendu paï ce mot, des bifarreries d'hommes d’un rang fupérieur qu'or n'ofe condamner, comme le ditle didionnaire de Tré- Voux: au contraire , c’eft en les condamnant qu'on s'exprime ainf ; &c mufquée en cette occafion eft une explétive qui ajoûte à la force du mot, comme on dit fortifé pommée , folie feffée , pour dire fosrife & fo: lie complete, Article de M. DE VOLTAIRE. FANTAISIE, ( Morale.) c’eft une pafion d’un mo: ment ; qui n’a fa fource que dans limagination : ellé promet à ceux qu’elle occupe, non un grand bien, mais une jouiance agréable : elle s’exagere moins le mérite que l’agrément de fon objet ; elle en defire moins la pofleffion que l’ufage : elle eft contre l’en- mu la reflource d’un inftant : elle fuf pend les pafions fans les détruite : elle fe mêle aux penchans d’habi- tude, & ne fait qu’en diftraire. Quelquefois elle eft l'effet de la paffion même ; c’eft une bulle d’eau qui s’éleve fur la furface d’un liquide , & qui retourne S'y confondre ; c’eft une volonté d'enfant, & qui nous ramene pendant facourte durée, à l’'imbécillité du premier âge. Les hommes qui ont plus d'imagination que de bon-fens , font efclaves de mille fanraifies; elles naïf: {ent du defœuvrement, dans un état où la fortu- ne a donné plus qu’il ne faut à la nature, où les de- firs ont été fatisfaits auffi-tôt que conçûs : elles ty rannifent les hommes indécis fur le genre d’occupa- tions, de devoirs, d’amufemens qui conviennent à leur état & à leur caraétere : elles tyranmifent fur- tout les ames foibles, qui fentent par imitation. U ÿ a des fantaifies de mode , qui pendant quelque tems font les fartaifies de tout un peuple; jen ai vû de ce genre, d’extravagantes, d’utiles, de frivoles, d’hé- roiques ; &c. Je vois le patriotifme & l'humanité des venir dans beaucoup de têtes des funraifies aflez vi- ves, & qui peut-être fe répandroient, fans la crainte du ridicule. | La fantai/ffe fufpend la paffion par une volonté d’un moment , &c le caprice interrompt le cara@tere, Dans la fantaifie on néglige les objets de fes pañlions & fes principes, & dans le caprice on les change. Les hommes fenfbles & lesers ont des Jantaifies ; les ef- prits de travers font fertiles en caprices. FANTAISIE, (Mufique.) piece de mufique inftru= mentale qu’on exécute en la compofant. Il y a cette différence du caprice à la fantaiffe, que le caprice eff. un recueil d'idées fingulieres & fans liaïfon, que taf: femble une imagination échauffée , & qu'on peuf même compofer à loïfir ; au lieu que la fantaifre peut être une piece très-réguliere, qui ne differe des au< tres qu'en ce qu’on l’invente en l’exécutant, & qu’: elle n’exifte plus quand elleeftachevée: ainfi le caz price eft dans lefpece & l’aflortiment des idées, & la fantaifie dans leur promptitude à fe préfenter. If fuit de-là qu’un caprice peur fort bien s’écrire, mais Jamais une fantaifre ; car fi-tôt qu’elle eft écrite ou répetée, ce n’eft plus une fantaifte, mais une piece ordinaire. (S) À + FANTAISIE , ( Manége.) On doit nommer fantaifie dans le cheval, une aétion quelconque fuggérée par une volonté tellement opimâtre & rebelle ,qw'elle répuigne à toute autre dénomination; êt appeller du nom de défenfe , la réfiftance plus ou moins forte que l'animal oppofe à toute puiflance émanant d’une vez 404 FAN lonté étrangere. Voyez METTRE UN CHEvaL. (é) FANTAISIE, (Peinture.) Peindre, deffiner de fz7- raifre, n’eft autre chofe que faire d'invention, de gé- ne : quelquefois cependant frtaifre fignifie une com- pofition qui tient du grotefque. #oyez PITTORES- QUE. FANTASSIN , f. m. foldatqui combat à pié feu- lement, & qui eft partie d’une compagnie d’infans terie. Poyez INFANTERIE. (Q) FANTI, £. m, (Commzrce.) nom qu’on donne à Vienne aux clercs ou fa@eurs du collége de Com- merce, & dont les marchands fe fervent pour faire les protèts des billets & lettres de change. foyez Pro- TÊT, Diélionn, de Commerce, de Trévoux € de Cham- bers. (G) FANTIN, (Géogr.) petit état d'Afrique, fur la Côte d’orde Guinée, Il eft peuplé, riche en or, en efclaves &c en grains. Il eft gouverné par un chef ap- pellé érafo, & par le confeil des vieillards, qui a beaucoup d'autorité. Les Anglois & les Hollandois y ont des forts. Voyez Bofman, voyage de Guinée; la Croix , relation d'Afrique. Fantin & Annamabo font ies lieux principaux du pays. Long. 154, 25!, ar, duo. (D.:J.) FANTINE , 1. f. (Manufaülure.en foie.) partie du chevaler à tirer la foie de deflus les cocons. Foyez l'araicle SOTE. * FANTOME,, . m. (Gramm.) Nous donnons le nom de fantome à toutes les images qui nous font imaginer hors de nous des êtres corporels qui n’y font point. Ces images peuvent être occafionnées par des caufes phyfiques extérieures, de la lumie- re, des ombres diverfement modifiées , qui affeétent nos yeux , & qui leur offrent des figures qui font réelles : alors notre erreur ne confifte pas à voir une figure hors de nous, car en effet il yen aune, mais à prendre cette figure pour l’objet corporel qu’elle repréfente. Des objets, des bruits, des circonftances particulieres, des mouvemens de pañlion , peuvent aujhi mettre notre imagination & nes organes en mouvement ; & ces organes müs, agités, fans qu'il y ait aucun objet prélent , mais précifément com- me s'ils avoient été affeétés par la préfence de quel- qu'objet, nous le montrent, fans qu’il y ait feule- ment de figure hors de nous. Quelquefois les orga- nes fe meuvent & s’agitent d'eux-mêmes, comme il nous arrive dans le fommeil ; alors nous voyons pañler au-dedans de nous une fcene compofée d’ob- Jets plus ou moins découfus, plus ou moins liés, fe- lon qu'il y a plus ou moins d’irrégularité ou d’ana- logie entre les mouvemens des organes de nos fen- fations. Voilà lorigine de nos fonges. Voyez Les ar- ticles SENS , SENSATION, SONGE. On a appliqué le mot de fantôme à toutes les idées faufles qui nous impriment de la frayeur, du refpe@®, &c. qui nous tourmentent', 8 qui font le malheur de notre vie : c’eft la mauvaife éducation qui produit ces fzntômes, c’eft l'expérience &c la philofophie qui les diffipent. * FANTON oz FENTON , f. m.(Serrur.) c'eftune forte de ferrure deftinée à fervir dechaîneauxtuyaux de cheminées : il y en a de deux fortes. Ceux dont on fe fert pour les tuyaux de cheminée en plâtre, font faits de petites tringles de fer fendues, d’environ fix lignes d'épaiffeur {ur dix-huit pouces de lon- gueur, terminées à chaqueextrémité par un crochet. Ces crochets s’embraffent réciproquement, & for- ment la:chaine qu'on voit dans nos Planches de la fer- rurerie des bâtimens. Le maçon pofe cette chaîne en élevant le tuyau de la cheminée. Onemploye la feconde efpece de fantons dans les cheminées de brique sils font d’un fer plat, d’envi- ron deux pouces de large, & d'une longueur qui va- tie felon les dimenfons de la cheminée. Ces mor- ceaux de fer plat fontfendus {ur le plat par chacune F À O de léurs extrémités, d'environ fix pouces de long: On coude les parties fendues, en équérre fur leut plat, Pune de ces parties en-deflus, & l’autre en- deflous ; enforte que ces parties coudées forment une efpece de T : on les expofe dans les épaiffeurs du tuyau de la cheminée, comme on le voit auffi dans nôs Planches de Serrurerie, Cette ferrure contient, lie & fortifie les parties de la cheminée. Il eft évident ue le tuyau fera d'au- tant plus folide, qu’en les multipliera davantage fur fa longueur. FANUM , (Litrérar.) temple ou monument qu’on élevoit aux empereurs après leur apothéofe, C’eft un mot grec yo, ayor, AVEC un digamma éolique ça- rèv, farnum ; temple, Cette origine eft manifefte dans le diminutif hazulum pour farulum , petit temple. Cicéron inconfolable de la mort de fa fille Tullia, réfolut de lui bâtir un temple; je dis un temple, 8 non pas un £o7rbeau , parce qu'il vouloit que le mo- nument qu'il lui érigeroit s’appellât farm , dénomi- nation confacrée aux temples, & aux feuls monu- mens qu'on élevoit aux empereurs après leur apo- théofe. En effet, quelque magnifique qu’un tombeau pût être, il ne paroïloit point à Cicéron digne d’une perfonne telle que Tullie,& qw’il croyoit mériter des honneuts divins, Ceft pourquoi, après avoir fait marché pour des colonnes de marbre de Chio, un des plus beaux marbres de la Grece, il infinue que lemploi qu'il en vouloit faire pour fa fille, étoit quel- que chofe d’extraordinaire. Il parle en même temsde fon deffein comme d’une foibleffe qu’il faut que {es anus luipardonnent ; mais il conclud que, puifque les Grecs de qui les Romains renoient leurs lois, avoient mis des hommes au nombre des dieux, il pouvoit bien fuivre leur exemple, & que fon admirable fille ne méritoit pas moins cet honneur, que les enfans de Cadmus , d’Amphion, & de Tindare: en un mot il compte que les dieux la recevront avec plaifir au milieu d'eux, & qu'ils approuveront d'autant plus volontiers fon apothéofe, qu’elle n’étoit point une nouveauté, Voyez APOTHÉOSE & CONSÉCRATION. [left vrai qu'on trouve plufieurs exemples de ces apothéofes ou confécrations domeftiques dans les inf- criptions fépulcrales greques, où les parens du mort déclarent que c’eft de leur propre autorité qu’il a été mis au nombre des dieux. Spon. £nféripr. cxjv. page 368. Reinefius, irféripe. cxl. claffig. 17. On à lieu de croire cependant que Cicéron n’e- xécuta pas le deffein dont il avoit par fi fort oc- cupé, parce qu'il n’en parle plus dans fes ouvra- ges, & que les auteurs qui l’ont fuivi n’en ont fait aucune mention, La mort de Céfar qui arriva dans cette conjon@ure, jetta Cicéron dans d’autres af faires, qui vraiflemblablement ne lui laifferent pas le loifir de fonger à celle-ci. Peut-être aufñ que lor{- que le tems eut diminué fa douleur , il ouvrit les yeux, & reconnut que fi on lavoit blâmé de s’y être trop abandonné , on le condamneroit encore davan- tage d'en laifler un monument fi extraordinaire. Mais voyez {ur le fzrum de Tullia, Pabbé Montgault dans les mé. des Belles-Lertres , & Middleton dans la vie de Cicéron. Art. de M. le Chevalier DE JAUCOURT. * FANUS, f. m. (Mythologie) dieu des anciens : c’étoit le protetteur des voyageurs, & la divinité de l’année. Les Phéniciens le repréfentoient fous la fi- gure d’un ferpent replié fur lui-même, qui mord fa queue. FAON, f. m, (Pérerie:) petit d’une biche. Foyez l’article CEre. * FAPESMO , ( Logique.) un des termes dont on fe fert pour reprélenter par la différente poñition de fes voyelles la qualité des propofitions qui doivent former une efpece déterminée de fyllogifme ; # mar | que : que que la mäjeure en doit être univerfelle afirmas tive; e la mineure univerfelle négative, o la conclu- fion particuhere négative. Voyez l'article SYLLO- GISME. DUR - FAQUIN, f. m. (Manége.) courir Ou courre Le fa- quin, rompre des lances, jetter des dards contre la quin- saint ; efpece de jeu fort en ufage chez les Romains _ Qui y exerçoient avec fain la jeuneffe qu'ils defti- noient à la guerre. Il fut du nombre de ceux que l’empereur Juftinien diftingua des jeux dehafard qu’il défendit, @ idem ludere liceat quintanam hafta fine cuf- pide, 1. TL. tit. xlüj. cod. de alcat. Suivant cette mê- me loi, il paroît que Quintus en fut l’inventeur, & de-là l’origine du mot quintaine, à quodam Quinto, êta nominaté häc lufus fpecie. Balfamon dans {es no- tes fur le Vomocanon de Photius , a embraflé ce fen- timent, d’ailleurs contraire à l'opinion de Pancirole, de Ducange, & de Borel. Le premier , 7. var. cap. jv. eftime que cèt exercice a tiré fon nom à quintané vid quæ à caffris romanis in quintanam porta exibat* le fecond, differr. fur Joinville, des banlieues dans lefquelles on fe rendoit à cet effet, ces banlieues . étant appellées quintes on quintaines: Borel enfin * avance qu'il n’eft ainfi nommé, qu’attendu que l’on a imité ce jeu de ceux des anciens qui avoient lieu de cinq en cinq ans. Quant au terme de faguin , qui dans cette circonf tance eft le fynonymede celuide ginraine ,fafource n’eft point obfcure. On pent y remonter, fans crain- dre de prendre une conjeëäure bifarre & imaginaire pour une analogie répuliere. En effet ce mot n’a été appliqué ici, que parce que l’on fubftitue au pal ou au pilier, contre lequel on rompoit des lances, un homme fort & vigoureux, ou un porte-faix, en ita- lien facchino, armé de toutes pieces. Ce porte -faix étoit tantôt habillé en turc, tantôt en maure ou en farrafin ; aufli les Italiens nommerent-ils ce jeu /4 courfe à l’homme arme, la courfe du farrafin , l’huomo armato, il faraceno ; ül flafermo. À notre égard nous Tavons appellé Za courfe du faquin ; terme qui peut à la vérité dans Le fens figuré défigner nombre de per- fonnes, mais qui dans fon acception naturelle figni- fie proprement ur crocheteur, ur homme de la lie du peuple. | À Dans la fuite, & principalement dans les mané- _ ges, on plaça, au lieu du pal & de l’homme, un bufte mobile fur un pivot, tenant un bouclier de la main gauche, & de la droite une épée, ou un fabre, ou un bâton, ou un fac rempli de fable ou de fon. Ii s’agifleit de lancer des dards &c de te des lan- ces contre le bufte, qui, atteint pat l’aflaïllant muni de la lance , au front, entre les yeux, dans l’œil, fur Île nez, au menton, demeuroit ferme &c inébranla- ble; mais qui frappé par-tout ailleurs, tournoit avec une telle rapidité, que le cavalier efquivoit avec une peine extrème le coup auquel la mobilité du bufte, dont la main droite étoit armée, l’expoloit, dès qu'il avoit mal ajufté: on conferve à ce bufte le nom de faquin. Cette courfe &c celle des bagues font de toutes celles qui ont été pratiquées à cheval, les plus agréables &c les moins dangereufes. On ne peut difconvenir qu’il n’y ait beaucoup d’adreffe à faire les dedans, & à rompre de bonne grace; on acquiert dans ces fortes de jeux une grande aifance, beau- coup de facilité, beaucoup de liberté; mais on ne me perfuadera point qu'ils doivent être préférés à la fcience du maniement des armes dont nous nous fer- vons aujourd’hui, & que celle de mefurer des-coups de lance foit affez utile, pour négliger & pour aban- donner totalement la premiere. Voyez EXERCICES. Du refte la conrfe du fzguir eft déjà en quelque ma- niere délaiflée; il n’en eft plus queftion dans nos éco- les. En ce qui concerne celle de la quintaine, nous dirons qu’elle a lieu encore dans quelques coûtumes Tome FI, FAR 40$ locales, foit à l'égard des meñniers, bateliérs, &c, foit à l'égard des nouveaux mariés, qui, s'ils n’ont point eu d’énfans dans l’année, font obligés derom- pre en trois coups, fots peine d’une amende, une perche contre uf pilièr planté dans la rivière: le tout en ptélence du feigneur, tandis que les femmes font tenues de préfenter au procureur du roi un chapeau de rofes, ou d’autres fleurs, & de donner à goûter au grefher du juge. Il eft fait mention de ce droit dans le Zy, III. du recueil des arrérs du paflément de Bretagne. Nous y lifons qu’un certain prieur de Li- vré , foûtenant que ce droit lui appartenoit, préten= doit en ufer dès le lendemain de pâques; ce qui lui fut fpécialement défendu, au moins dans Je cours de ces fêtes folennelles. (e) FARAB, (Géogr.) petite ville d’Afe fituce fur le bord feptentrional du Chefel, environ à 1$ lieues de la mer Cafpienne, Sa Longir. varie depuis 87 à 89 degrés; fa Jante, eff fixée à 38 degrés. (D. J.) | FARAÏLLON, fm. (Marine.) c’eft un perit bane de fable ou de roche, qui eft féparé d’un banc plus EE par un petit canal. Ce terme n’elt guere ufité, " FARAIS & HERBAGES, ( Péche.) on appelle farais les ficelles neuves dont on travaille les rets pour la pêche des coraux; & herbages les vieilles ficelles qu’on tire des rets ufés, & qu’on remet en ou pour les chevrons qui fervent à la même êche. . FARATELLE, {. m. (Commerce.) poids dont on fe fert dans quelques lieux du continent des grandes Indes. Il eft égal à deux livres de Lisbonne > Où la lie vre éft de 14 onces poids de marc, ce qui revient a une livre trois quarts de Paris. Voy. Livre, Pos, Didtionn. de Comm. de Trév. & de Chambers. (G) FARCE,, f. f. (Belles-Lertres.) efpece de comique grofñer où toutes les regles de la bienféance, de la vraiflemblance, & du bon fens, font également vios lées. L’abfurde & l’obfcene font à la farce ce que le ridicule eft à la comédie. Or on demande s’il eft bon que ce genre de fpecs tacle ait dans un état bien policé des théatres régus liers & décens. Ceux qui protegent la farce en don- nent pour raifon, que, puifqu’on y va, on s’y amu- fe , que tout le monde n’eft pas en état de goûter le bon comique, &c qu'il faut laiffer au public le choix de fes amufemens. .… Que l’on s’amufe äu fpeétacle de là farce, c’eft un fait qu'on ne peut nier. Le peuple romain defertoit le théatre de Térence pour courir aux bateleurs ; & de nos jouts Mérope & le Méchant dans leur nou veauté ont à peine attiré la multitude pendant deux mois, tandis que la farce la plus monftrueufe a foûi- tenu fon fpettacle pendant deux faifons entieres. I eft donc certain que la partie du public, dont le goût eft invariablement décidé pour le vrai, l’u- tile, & le beau, n’a fait dans tous lés tems que le très-petit nombre, & que la foule fe décide pour l’extravagant & l’abfurde. Ainfi, loin de difputer à la farce les fuccès dont elle joüit, nous ajoûterons que dès qu’on aime ce fpeétacle, on n’aime plus que ces lui-là, & qu'il feroit auf furprenant-qu’un homme qui fait {es délices journalieres de ces groflieres ab- furdités , fût vivement touché des beautés du Mifan- trope 6 d’Athalie, qu’il Le feroit de voir un homme nourri dans la débauche fe plaire à la fociété d’une femme vertueufe. | On va, dit-on, fe délaffer à la farce ; un fpe&tacle raifonnable applique & fatigue l’efprit ; la farce amus fe , fait rire, & n’occupe point. Nous avoüons qu'il eft des efprits, qu’une chaîne réguliere d'idées & de fentimens doit fatiguer. L’efprit a fon libertinage & * {on defordre où il eft plus à fon aife; & le plaïfir ma: Ff£ 406 FAR chinal & grofier qu'il y ‘prend fans véflexion, émoufe en luile goût de l’honnête & de lutile; on perd-l’habitudede refléchir comme cellede marcher, & l’ame s'engourdit & s'énerve comme le corps’, dans une,oïfive indolence. La farce n’exerce , ni le goût nilaraifon: de-là vient qu’elle plaît à des ames parefleufes ; & c’eft pour cela même que ce fpeéta- cle eft pernicieux. S’1l n’avoitrien d’attrayant , ilne feroit que mauvais. Mais qu'importe, dit-on encore, que le public ait taifon de s’amufer ? Ne fufit-il pas qu’il s’'amufe ? C’eft ainfi que tranchent fur tout ceux qui n’ont te- fléchi fur rien. C’eft comme fi on difoit: Qu'importe la qualité des alimens dont on nourrit un enfant, pourvûü qu'il mange avec plaifir? Le public com- prend trois clafles; Le bas peuple, dont le goût & l’efprit ne font point cultivés, & n’ont pas befoin de l'être ; le monde honnête & poli, qui joint à la dé- cence des mœurs une intelligence épurée & un fen- timent délicat des bonnes chofes; l’état mitoyen, plus étendu qu’on ne penfe, qui tâche de s’appro- cher par vanité de la claffe des honnêtes gens , mais qui eft entraîné vers le bas peuple par une pente naturelle, Il ne s’agit donc plus que de favoir de quel côté il eft le plus avantageux de décider cette clafle moyenne & mixte. Sous les tyrans & parmi les ef- claves la queftion n’eft pas douteufe ; il eft de la po- litique de rapprocher l’homme des bêtes, puifque leur condition doit être la même, & qu’elle exige également une patiente flupidité. Maïs dans une confütution de chofes fondée fur la juftice & la rai- fon, pourquoi craindte d'étendre les lumieres, & d’ennoblir les fentimens d’une multitude de citoyens, dont la profeflion même exige Le plus fouvent des vües nobles, un fentiment & un efprit cultivé ? On n'a donc nul intérêt politique à entretenir dans cette clafle du public l'amour dépravé des mauvaifes cho- fes. | La farce eft le fpeétacle de la groffiere populace; & c’eft un plaifir qu'il faut lui laifler, mais dans la forme qui luiconvient, c’eft-à-dire avec des treteaux pour théatres, & pour falles des carrefours; par-là fe trouve à la bienféance des feuls fpeétateurs qu'il convienne d'y attirer. Lui donner des falles décen- tes & une forme régulière, l’orner de mufque, de danfes, de décorations agréables, c’eft dorer les - bords de la coupe où le public va boire le poifon du mauvais got, Article de M. MARMONTEL. FARCE , er Cuifine, eft une efpece de garniture ou mêlange de différentes viandes hachées -bien me- nues, affaifonnées d'épices & de fines herbes. FARCE, fe dit encore, parmi les Cuifiniers, d’un metsfaitavec plufñeurs fortes d’herbes , commeofeil- le, laitue, porée, 6c. hachées enfemble, & brouil- lées avec des œufs; avant de la fervir, outre ceux qu’on y a brouillés, on y met encore des quartiers d'œufs durs, tant pour orner le plat de farce, que pour adoucir la trop grande aïgreur des herbes. FARCIN, f. m. (Manége, Maréchal.) De toutes les affle@ions cutanées, le fzrcin eft celle qui a été envifagée comme la plus formidable, Vanhelmont, à l’afpeët de fes fymptomes & de fes progrès, le déclara d’abord la fource & l'origine de la vérole. Cette décifion honore peu fans doute les. inquifiteurs qui attenterent pieufement à fa liberté , fous prétexte que fes fuccès, dans le traitement des maladies du corps humain, étoient au-deffus des for- ces de la nature. Soleyfel, ceroracle encore confulté de nosjours, en donne une définition qui perfuaderoit que la cé- lébrité de fon nom eft moins un témoignage de fon favoir que de notre ignorance. Æ/f aura venenata, dit-il, ce font des efprits corrompus, qui pénetrent les Farties du corps du cheval avec la même facilité que la FAR | umiere du Joleil pafe au.trasiers d’unverre, L'ôbfcurité. . d’un. femblable texte exigeroit méceflairement ut commentaire; mais nous-n’aurons-pas Ja hardiefle & la témérité d'entreprendre d'expliquer ce -que nous n’entendons pas, & ce que vraiffemblable- ment l’auteur n’a pas compris lui-même, e Confidérons le farcis dans fes fignes, dans fes au fes ,&t danses regles thérapeutiques, auxquels nôus fommes forcés de nous afiettirrelativementautrais . tement de cette maladie. + Elle s'annonce & fe manifefle toûjouts par une éruption. Il importe néanmoins d’obferver que les boutons qui la caraétérifent, n’ont pas conftamment le même afpeét & le même fiége. Il en eft qui fe montrent indiftinétement fur toutes les parties quelconques du corps de l'animal ; leur volume n’eft pas confidérable ; ils abfcedent quel- quefois. D'autres à-peu-près femblables, maïs plus muiti- pliés, n’occupent communément que le dos, & ne {ont répandus qu’en petit nombre fur lencolure & fur la tête ; à mefure qu’il en eft parmi ceux-ci qui fe defléchent & s’évanotiffent , les autres fe repro- duifent & reparoifent. Souvent nous n’appercevons que des tumeurs pro: longées , fortement adhérentes & immobiles, avec des éminences très-dures à leurs extrémités & dans leur milieu: lorfque ces duretés fuppurent, elles four- niflent une matiere blanchâtre &7 bourbeufe. Souvent aufh ces mêmes tumeurs prolongées fui- vent & accompagnent exaétement quelques-unes des principales ramifications veineufes, telles que les ju- gulaires, les maxillaires , les axillaires, les huméra- les, les céphaliques, les aurales, Les faphenes ; & les fortes de nœuds qui coupent d’efpace en efpace ces efpeces de cordes, dégénérant en ulceres dont les bords calieux femblent fe reflerrer & feretrécir, don: nent un pus ichoreux, fanieux, & fétide. Il arrive encore que les ulceres farcineux tiennent de la nature des ulceres vermineux, des ulceres fecs, des ulceres chancreux ; & c’eft ce que nous remar- quons principalement dans ceux qui réfultent de l’é- clat des boutons qui furviennent d’abord près du ta- lon, ou fur le derriere du boulet dans les extrémités poftérieures. Ces extrémités exhalent dès-lors une odeur infupportable; elles deviennent ordinairement d'un volume monftrueux , & font en quelque façon éléphantiafées. | Enfin ces fymptomes font quelquefois unis à l’en- orgement des glandes maxillaires & fublinguales , à un flux par les nafaux d’une matiere jaunâtre, ver. dâtre, fanguinolente, &c très-différente de celle qui s'écoule par la même voie à l’occafion de quelques boutons élevés dans les cavités nafales, & d’une le- gere inflammation dans la membrane pituitaire , à une grande foiblefle, au marafme, & à tous les f- gnes qui indiquent un dépériflement total & pro- chain. | C’eft fans doute à toutes ces variations & à toutes ces différences fenfbles, que nous devons cette fou. le de noms imaginés pour défigner plufieurs fortes de farcin, tels que le volant, le farizi oculus, le cordé L le cul de poule, le chancreux, l’intérieur, le taupin, le bifurque, &c. Elles ont auffi fuggeré le prognoftic que l’on a porté relativementau farciz qui attaque la tête, les épaules, Le dos, le poitrail, & qui a parw très-facile à vaincre, tandis que celui qui occupe le train de derriere, qui préfente un appareil d’ulceres {ordides, a été déclaré très-rebelle, & même incu- rable , lorfqu’il eft accompagné de l'écoulement par les nafaux. | Les caufes évidentes de cette maladie font des exercices trop violens dans les grandes chaleurs, une nourriture £rop abondante donnée à des chevaux FAR maigres 8 échauffés, où qui ne font que très-peu d'exercice ; des alimens tels que le foin nouveau, Vavoine nouvelle, le foin rafé, une quantité confi- dérable de grains, l'impreffion d’un air froid, humi- de, chargé de vapeurs nuifibles , l’obfiruétion , le teflerrement des pores cutanés, &c. tout ce qui peut accumuler dans Les premieres voies des crudités aci- des, falines, & vifqueufes , changer l’état du fang y porter de nouvelles particules hétérogenes peu propres à s’aflimiler & à fe dépurer dans les couloirs, $z dont l’abord continuel & fucceffif augmentera de plus en plus l’épaififlement, l’acrimonie & la dépra- vation des humeurs, tout ce qui embarraflera la cir- culation , tout ce qui foûlevera la maffe, tout ce qui influera fur le ton de la peau & s’oppoñfera à l’excré- tion de la matiere peripirable , fera donc capable de produire tous Les phénomenes dont nous avons parlé. PAT Selon le degré d’épaififfement & d’acrimonie, ils {eront plus ou moins effrayans ; des boutons fimple- ment épars çà & là, ou raflemblés fur une partie, des tumeurs prolongées qui ne s’étendront pas con- _ fidérablement , une fuppuration loüable, caraétéri- feront le farcin bénin : mais des tumeurs fuivies ré- fultant du plus grand engorgement des canaux lym- phatiques ; des duretés très-éminentes qui marque- ront, pour ain dire, chacun des nœuds ou chacune des dilatations valvulaires de ces mêmes vaifleaux, & dont la terminaifon annoncera des fucs extrème-. ment acres, plus ou moins difficiles à délayer , à cor- tiger, à emporter, défigneront un farcér dont la ma- lignité eft redoutable , & qui provoquant, sil n’eft arrêté dans fes progrès, & fi l'on ne remédie à la per- verfon primitive, la tenacité, la vifcofité , la coa- gulation de toute la mafle du fang & des fumeurs, l’anéantiflement du principe fpiritueux des fucs vi- taux, l’impofhbilité des fécrétions & des excrétions falutaires , & conduira inévitablement l’animal à la mort, La preuve de la corruption puttide des liqueurs, fe tire non-feulement de tous les ravages dont un farcin , fur-tount de ce genre &c de ce caraëtere, nous rend les témoins, mais de fa fétidité & de la facilité avec laquelle il fe répand &c s'étend d’un corps à lVautre, de proche en proche, par l’attouchement immédiat, &: même quelquefois à une certaine dif- tance; aufli le danger de cette communication nous engage-t-il à éloigner l'animal atteint d’un farcir qui a de la malignité, 8 à le féparer de ceux qui font fains , &c la crainte d’une réproduétion continuelle du levain dans un cheval qui auroit la faculté de lé- cher lui-même la matiere ichoreufe , fordide, fa- nieufe, corrofve, qui échappe de fes ulceres, nous oblige-t-elle à profiter des moyens que nous offre le chapelet pour l’en priver. Nous appellons de ce nom l’aflemblage de plufeurs bâtons taillés en forme d’é- chelon, à-peu-près également efpacés; paralleles entr’eux dans le fens de la longueur de l’encolure, &c attachés à chacune de leurs extrémités au moyen d’une corde & des encoches faites pour affermur la ligature. Nous les plaçons & les fixons fur le cou de l’animal,de maniere qu’en contre-buttant du poitrail & des épaules à la mâchoire, ils s’oppofent aux mou- vemens de flexion de cette partie. Ne feroit-ce point trop hafarder que de fuppofer que l’origine de cette dénomination eft dûe à la reflemblance de cette forte particuliere de collier, avec la corde fans fin qui foù- tient les sodets ou les clapets d’un chapelet hydrau- lque? Quoi qu'il en foit , dans le traïtement de cette maladie, dont je n’ai prétendu donner ici que des idées très-générales , on doit fe propofer d’atténuer, d’incifer, de fondre les humeurs tenaces & vifqueu- des, de les délayer, de les évaçuer, d’adoucix leurs Tome F 1 a FAR 407 fels , de corriger leur acrimonie, de faciliter la cir2 culation des ne dans les vaifleaux les plus dé liés, &c, - 4 On débutera par la faignée ; on tiendra l’animal à un régime très-doux, au fon, à l’eau blanche; on lui adminiftrera des lavemens émolliens, des breu- vages purgatifs dans lefquels on n’oubliéra point de faire entrer laguila alba ; quelques diaphorétiques À l’'ufage defquels on le mettra, acheveront dé diffi= per les boutons & les tumeurs qui fe montrent dans le farcin benin, 8 d'amener à un defféchement total ceux qui auront fupputé, Le farcin invétéré & malin'eft infiniment plus opi- niâtre, [l importe alors de multiplier les faignées, les lavemens émolliens ; de mêler à la boiffon ordinaire de l'animal quelques pintes d’une décoëtion de mau- ves, guimauves, pariétaires, Gc. d’humééter le fon qu’on lui donne avec une tifanne apéritive & rafrat chiffante faite avec les racines de patiénce, d’aunée, de {corfonere, de bardane, de fraifier , & de chico- rée fauvage ; de le maintenir long-tems à ce régime ; de ne pas recourir trop-tôt à des évacuans capables d'irriter encore davantage les folides , d’agiter la malle & d'augmenter l’acreté ; de faire füccéder aux purgatifs adminiftrés, les délayans & les relâchans qui les auront précédés; de ne pas réitérer coup fur coup ces purgatifs ; d’ordonner, avant de les pref- crire denouveau, une faignée felon le befoin. Enfui- te de ces évacuations, dont le nombre doit êire fixé par les circonftances, & après le révime humectant & rafraichiflant obfervé pendant un certain inter- valle de tems, on prefcrira la tifanne des bois, & on en mouillera tous les matins le fon que l’on donnera à l’animal : f. les boutons ne s’éteignent point, fi les tumeurs prolongées ont la même adhérence &c la même immobilité, on recourra de nouveau à la fai: gnée, aux lavemens, aux purgatifs, pour en reve= fur à-propos à la même tifanne, & pour pañler de-là aux préparations mercurielles , telles que l’éthiops minéral, le cinnabre , 6c. dont l'énergie & la vertu font fenfibles dans toutes les maladies cutanées. Tous ces remedes intérieurs font d’une merveilleufe efficacité, & operent le plus fouvent la guérifon de l'animal lorfqu'ils font adminiftrés felon l’art & avec méthode : on eft néanmoins quelquefois obligé d’em- ployer des médicamens externes. Les plus convena> bles dans le cas de la dureté & de l’immobilité des tus meurs, font d’abord l’onguent d’althæa ; & s’il eft des boutons qui ne viennent point à fuppuration, & que l’animal ait té fufifamment évacué, on pourra, en ufant de la plus grande circonfpe@ion, les froter lé- gerement avec l’onguent napolitain. Leslotions adouciffantes faites avec les décoftions de plantes mucilagineufes , font indiquées dans les circonftances d’une fitppuration que l’on aidera par des remedes onétueux & réfineux, tels que les on guens de baflicum & d’althæa ; & l’on aura attention de s’abfenir detousremedes defficatifs lorfqu'il y âu- ra dureté , inflammation, & que la fuppuration fera confidérable : on pourra , quand la partie fera exac- tement dégorgée, laver les ulceres avec du vin chaud dans lequel on délayera du miel commun. Des ulceres du genre de ceux que nous nommons vermineux , demanderont un liniment fait avec l’on: guent napolitain, à la dofe d’une"once ; le baume d’arceus, à la dofe de demi:once; le ftaphifaigre & Valoës fuccotrin, à la dofe d’une dragme; la myrrhe, à la dofe d’une demi-dragme ; le tout dans fuffifante quantité d’huile d’abfynthe : ce liniment eft non-feu- lement capable de détruire les vers, mais de déterger &t de fondre les callofités, & l’on y ajoûtera le bau: me de Fioraventi fi l’ulcere eft véritablement difpofé à la corruption. | L’alun calçiné mêlé avec de Fes d’aui 1] 408 F A R tres cathérétiques , feront mis en ufage eu égard à des ulceres qui tiendront du caractere des ulceres chancreux ; On pourra même employer le cautere aûtuel, mais avec prudence : êc quant à l'écoulement par les nafeaux, de quelque caufe qu’il provienne,on pouflera plufeurs fois par jour dans lés cavités na- fales une injetion faite avec de l’eau commune, dans laquelle on aura fait bouillir légerement de l’orge en grain & difloudre du miel. Il eft encore très-utile de garantir les jambes élé- phantialées des impreffions de l'air; & l’on doit d’au- tant moins s’en difpenfer , qu'il n’eft pas difficile d’af- fujettir fur cette partie un linge groffier propre à la couvrir, J'ai obfervé très-fouvent au moment de la difpa- sition de tous les fymptomes du farcin , une fuppu- ration dans l’un des pies de l’animal, & quelquefois dans les quatre piés enfemble. On doit alors faire ouverture à l'endroit d’où elle femble partir, y jet- ter, lorfque le mal eft découvert, de la teinture de myrrhe & d’aloès, & placer des plumaceaux mouil- lès & baignés de cette même teinture. J’ai remarqué encore plufieurs fois dans l’intérieur de l’ongle, en- tre la fole & Îes parties qu’elles nous dérobent, un vuide confidérable annoncé par le fon que rend le fabot lorfqu’on le heurte ; j’ai rempli cette cavité, de l’exiftence de laquelle je me fuisaflüré, lorfqu’elle n’a pas été une fuite de la fuppuration, parle moyen du boutoir, avec des bourdonnets chargés d’un di- geftif dans lequel j’ai fait entrer l’huile d’hypericum, la terebenthine en réfine , les jaunes d'œufs, & une fufhfante quantité d'eau-de-vie. Perfonne n’ignore au-furplus utilité de la poudre de vipere , par laquelle on doit terminer la cure de: la maladie qui fait l'objet de cet article ; & comme on ne doute point auf des falutaires effets d’un exer- cice modéré , il eft impoñhble qu’on ne fe rende pas à la néceflité d'y folliciter régulierement l’animal pendant le traitement, & lorfque le virus montrera moins d’aûivité. | Il faut de plus ne remettre le cheval guéri du 4r- cin à fa nourriture & à fon régime ordinaire, que peu-à-peu , & que dans la circonffance d’un réta- bliffement entier & parfait, 21 Du refte c’en eft aflez, ce me femble, de ces faits de pratique conftatés dans une forte d'hôpital de che- vaux que je dirige depuis fept ou huit années, & dans lequel j’en ai guéri plus de quatre-vingt du mal dont il s’agit, pour donner au moins fur les fecours qu'il exige, des notions infiniment plus certaines que les connoïffances que l’on imagine puifer, À cet égard, dans la plüpart de nos auteurs, connoiffances qui ne nous préfentent rien de plus avantageux, que tous ces fecrets merveilleux débités myftérieufement & à un très-hant prix par un peuple de charlatansauffi nombreux que celui qui de nos jours infette la Me- decine des hommes, (e) FARCINEUX , adj. (Maréchall.) adje@tif mis en ufage pour qualifier un cheval attaqué du farcin, comme nous employons ceux de orveux 8t de pouf: ff, pour défigner l'animal atteint de la morve & de la poule. Ce) FARD, fm. (Arecofmétique.) fucus, pigmentum ; fe dit de toute compofition foit de blanc, foit de rouge, dont les femmes , & quelques hommes mé- mes , fe fervent pour embeilir leur teint, imiter les couleurs de la jeunefle, ou les réparer par artifice. Le nom de fard, fzcus, étoit encore plus étendu autrefois qu’il ne l’eft aujourd’hui, & faifoit un art particulier qu’on appellaCommotique, rowmorin,ceft- à-dire l’arc de farder, qui comprenoit non-feulement toutes les efpeces de fard, mais encore tous les mé- dicamens qui fervoient à ôter, à cacher; à retifier les diformités corporelles ; & c’eft cette derniere FAR partie de l’ancienne Corrmotique que nous nommons Orthopédie. Voyez ORTHOPÉDIE. L'amour de la beauté a fait imaginer de tems im mémorial tous les moyens qu’on a crû propres à em augmenter léclat, à en perpétuer la durée, ouà en rétablir les breches; & les femmes, chez qui le goût de plaire eft très-étendu, ont cru trouver ces moyens dans les fardemens , fi je puis me fervir de ce vieux terme colleétif, plus énergique que celui de fard. L'auteur du livre d'Enoc affüre qw’avant le délu- ge, l'ange Azaliel apprit aux filles l’art de fe fzrder, d'où lon peut du moins inférer l’antiquité de cette pratique. L’antimoine eft le plus ancien 44 dont il {oit fait mention dans l’hifloire, & en même tems celu: qui a eu le plus de faveur. Job, chap. xl. v. 14. marque aflez le cas qu’on en faifoit, lorfqu'il donne à une de fes filles le nom de vafé d’antimoine, ou de boite a mettre du fard, corn fécbrx. | Comme dans l'Orient les yeux noirs, grands & fendus pafloient , ainf qu’en France aujourd’hui : pour les plus beaux, les femmes qui avoient envie de plaire, fe frotoient Le tour de l'œil avec une ai- grulle frempée dans du fzr4 d’antimoine pour éten- dre la paupiere, ou plütôt pour la replier, afin que l'œil en parût plus grand, Auffi Ifaie, ch. üij. y. 224 dans le dénombrement qu’il fait des parures des filles de Sion, n’oublie pas les aiguilles dont élles fe fer voient pour peindre leurs yeux & leurs paupieres. La mode en étoit fi reçue, que nous lifons dans un des livres des rois, Liv. IF, ch. jx.w, 30. que Jéfabel ayant appris l’arrivée de Jehu à Samarie, {e mit les yeux dans l’antimoine, ou les plongea dans Le fard 3 comme s'exprime l’Ecriture, pour parler à cet ufur. pateur , & pour fe montrer à lui, Jéremie, chap. jy. y. 50. ne cefloit de crier aux filles de Judée : £z paire vous vous reyétirez de pourpre & vous mettrez vos colliers d’or; en vain vous vous peindrez les yeux avec l'antimois ne, vos amans vous mépriferonr. Les filles de Judée ne crurent point le prophete , elles penferent toujours qu’il fe trompoit dans fes oracles ; en un mot, rien ne fut capable de les dégoûter de leur fard : c’eft pour cela qu'Ezéchiel, chap. xxiij, v, 404 dévoilant les déréglemens de la nation juive, fous l’idée d’une femme débauchée , dit, gwelle s’efl baignée, qu'elle s’eff parfumée, qu’elle a peint fes yeux d’antimoine , qu'elle s’eft affife fur un très-beau lit 6 devant une table bien couverte , &c. L Cet ufage du fard tiré de l’antimoine ne finit pas dans les filles de Sion ; il fe gliffa, s’étendit, fe pet« pétua par-tout. Nous trouvons que Tertullien 8e: S, Cyprien déclamerent à leur tour très-vivement. contre cette coûtume uftée de leur tems en Afri- que, de fe peindre les yeux & les fourcils avec du fard d'antimoine : 2runge oculos tu0s, non ftäibio diaz boli, Jéd collyrio Chrifi, s’écrioit S. Cyprien. Ce qu'il y a de fingulier, c’eft qu'aujourd'hui les femmes Syriennes , Babyloniennes, & Arabes, fe noirciflent du même fard le tour de l’œil, & que les hommes en font autant dans les deferts de l’Atabie he pour fe conferver les yeux contre l’ardeur du foleil. Voyez Tavernier, voyage de Perfe, liv. IL. ch. vis. & Gabriel Sionita, de moribus orienr, cap, xj. M. d’Ar- vieux, dans fes voyages imprimés à Paris en 171 73 li vre XIT, pag. 27, remarque, en parlant des femmes Arabes , qu’elles bordent leurs yeux d’une couleur noire compofée avec de la tuthie, & qu’elles tirent une ligne de ce noir en-dehors du coin de l'œil, pou le faire paroître plus fendu. Depuis les voyages de M. d'Arvieux, le favant M. Shaw rapporte dans ceux qu’il a faïts en Barbarie à loccafon des femmes de ces contrées, qu'elles croiroient qu’il manqueroit quelque chofe d’effentiel à leur parure, fi elles n’avoient pas teint le poil de FAR leurs paupierés & leurs yeux de ce qu'on nomme al-co-hol, qui eft la poudre de mine de plomb. Cette opération fe fait en trempant dans cette poudre un petit poinçon de bois de la groffeur d’une plume, & “en le paffant enfuite entre les paupieres : elles fe per- fuadent que la couleur fombre, que l’on parvient de cette façon à donner aux yeux, eft un grand agré- ment au vifage de toutes fortes de perfonnes, Entr'autres cohfichets des femmes d'Egypte, ajoù- te le‘voyageur anglois , j'ai vû tirer des catacombes de Sakara , un bout de rofeau ordinaire renfermant unpoinçon de la même efpece de ceux des Barbaref- ques, & une once de la même poudre dont on fe fert encore attuellement (1740) dans ce pays-là, pour le même ufage. Les femmes greques & romaines emprunterent des Afiatiques , la coûtume de fe peindre les yeux avec de lantimoine ; mais pour étendre encore plus loin l'empire de la beauté, & réparer les couleurs flétries, elles imaginerent deux nouveaux fards ins | connus auparavant dans le monde , 8c qui ont pañlé qufqu'à nous : je veux dire le blanc & le rouge, De- là vient que les Poëtes feignirent que la blancheur d'Europe ne lui venoit que parce qu’une des filles de Junon avoit dérobé le petit pot de fard blanc de cette déefle, & en avoit fait préfent à la fille d’A- geénor, Quand les richefles affluerent dansRome , el- les y porterent un luxe affreux ; la galanterie intro- duïfit les recherches les plus rafinées dans cegenre, & la corruption générale y mit le fceau, . Ce que Juvénal nous dit des bapfes d'Athènes, de ces prêtres efléminés qu'il admet aux myfteres de la toilette, {e doit entendre des dames romaïi- nes, fur l’exemple defquelles, ceux dont le poëte veut parler, mettoient du blanc & du rouge, at- tachoient leurs longs cheveux d’un cordon d’or, & fe noircifloient le fourcil, en le tournant en demi- rond avec une aiguille de tête. Ule fupercilium madidé fuligine fatfum , Obliqué producit ac, pingitque trementes ; Attollens oculos. Juvên. Sas, 2. Nos dames, dit Pline le naturalifte, fe fardent par air jufqu'aux yeux, santa eff decoris affettatio , ut tin- gartur oculi quoque; mais ce m’étoit- là qu'un leger crayon de leur molleife, Elles pañoient de leurs lits dans des bains magni- fiques | &z là elles {e fervoient de pierres -ponces pour fe polir & s’adoucir la peau, &c elles avoient vingt fortes d’efclaves en titre pour cet ufage. A cette propreté luxurieufe , fuccéda l’onétion & les parfums d'Aflyrie : enfin le vifage ne reçut pas moins de façons &c d’ornemens que le refte du corps. Nous avons dans Ovide des recettes détaullées de fards , qu'il confeilloit de fon tems aux dames romai- nes ; je dis aux dames romaines, car le fard du blanc &c du rouge étoit refervé aux femmes de qualité fous le regne d’Augufte ; les courtifanes & les affranchies n'ofoient point encore en mettre.Prenez doncde l’or- ge, leur difoit-il,qu'envoyent ici les laboureurs de Li- bye ; Ôtez-en la paulle & la robe ; prenez une pareille quantité d’ers ou d’orobe, détrempés l’un & l’autre dans des œufs, avec proportion; faites fécher & broyer le tout; jettez-y de la poudre de core de cerf; ajoûtez-y quelques oignons de narcifle ; pilez le tout dans le mortier ; vons y admettrez enfin la gom- me 6t la farine de froment de Tofcane ; que Le tout {oit lié par une quantité de miel convenable : celle qui fe fervira de ce fard, ajoûte- il, aura le teint plus net que la glace de fon miroir. 4 Quecumque afficier tali médicamine vultum Fulgebis Jpeculo levior ipfa fuo. Maïs on inventa bien -tôt une recette plus fimple FAR 409 que Celle d'Ovide, & qui eut la plué grande vogue: c'étoit un fard compofé de la terre de Chio, ou de Samos, que l’on fafoit difloudre dans du vinaigre. Horace l'appelle Azmida creta. Pline nous apprend que les dames s’en fervoient pour fe blanchir la peau, de même que de la terre de Selinufe, qui eft, dit-il, d’un blanc de lait,8r qui fe diffout promptement dans Veau. Fabula, felon Martial, craignoit la pluie, à caufe de la craie qui étoit fur fon vifage; c’étoit une des terres dont nous venons de parler. Et Pétro- he, en peignant un efféminé , s'exprime ainf : Per- fluebant per frontem fudantis acaciæ rivi, © inver ru gas malarum, tantim erat crètæ , ut putares detratumt Partetem rimbo laborare: » Des ruifleanx de gomme » couloient fur fon front avec la fueur, & la craie » Étoit fi épaifle dans les rides de fes'joues , qu’on » auroit dit que c’étoit un mur que la pluie avoit dés » blanchi ». Poppée, cette célebre courtifane, doüée de tous les avantages de fon fexe, hors de la chafteté, ufoit pour fon vifage d’une efpece de fard onêtueux, qui formoit une croûte durable, & qui ne tomboit qu’a- près avoir été lavée avec une grande quantité de lait, lequel en détachoit les parties, & découvroit une extrème blancheur : Poppée, dis-je, mit ce nou- veau fard à la mode, lui donna fon nom, Poppæana Pingicia, & s’en fervit dans fon éxil même, où elle fit mener avec elle un troupeau d’ânefles, & fe {e- roit montrée avec ce cortége, dit Juvénal, jufqu’au _ pole hyperborée. Cette pâte de linvention de Poppée qui couvroit tout le vifage, formoit un mafque , avec léquel les femmes alloient dans l’intérieur de leur maïfon: c’é- toit-là, pour ainfi dire, le vifage domeftique, & lé feul qui étoit connu du mari. Ses levres, fi nous écou- tons Juvénal, s’y prenoient à la slu: Finc miferi vifcantur labre mariri, Ce teint tout neuf, cette fleur de peau, n’étoit faite que pour les amans ; & fur ce pié-là, ajoûte l'abbé Nadal, [a nature ne donnoit rien ni aux uns ni aux autres. Les dames romaines fe fervoient pour le rouge ; au rapport de Pline , d’une efpece de fucus qui étoit une racine de Syrie avec laqueile on teignoit les lai: nes. Mais Théophrafte eft ici plus exaét que le natu- ralifte romain : les Grecs, felon lui, appelloient /#- cuis, tout Ce qui pouvoit peindre la chair ; tandis que {a fubftance particuliere dont les femmes fe fervoient pour peindre leurs joues de rouge, étoit diftinguéé par le nom de rizion , racine qu'on apportoït de Sy- rie en Grece à ce fiyet, Les Latins, à limitation du terme grec , appellerent cette plante radicula ; & Pline la confondue avec la racine dont on teignoit les laines, : [left fi vrai que le mot fzcus étoit un terme géné: ral pour défigner Le fard, que les Grecs & les Ro- mains avoient un fucus métallique qu'ils employoient pour le blanc, \& qui n’étoit autre chofe que la cé- rufe ou le blanc de plomb de nos revendeufes à la toilette. Leur fucus rouge fe tiroit de la racine rizion, &t toit uniquement deftiné pour rougir les joues : ils fe fervirent aufli dans la fuite pour leur blanc, d’un fucus compolé d’une efpece de craie argentine ; &t pour le rouge du pzrpuriflum , préparation qu'ils faifoient de l’écume de la pourpre, lorfqu’elle étoit encore toute chaude. Vüyez POuRPRE , (Coquille). C’en eff aflez fur les dames greques & romaines. Pourfuivons à-préfent l’hiftoire du fard jufqu’à nos jours , & prouvons que la plûpart des peuples de VPAfe & de l’Afrique font encore dans l'ufage de fe colorier diverfes parties du corps de noir, de blanc, de rouge, de bleu, de jaune, de verd, en un mot de toutes fortes de couleurs , fuivant les idées qu’ils fe 410 FAR font formées de la beauté.L’amour-propre & Îa vani- té ont également leur recherche dans tous les pays du monde ; l’exemple, les tems, & les lieux, ny mettent que le plus ou le moins d'entente, de goût, &c de perteétion. | En commençant par le Nord, nous apprenons qu'avant que les Mofcovites euflent été Roses par le czar Pierre premier, les femmes Rufes favoient déjà fe mettre du rouge, s’arracher les fourcils, fe Îles peindre ou s’en former d’artificiels. Nous voyons auff que les Groenlandoifes fe bariolent le vifage de blanc & de jaune; & que les Zembliennes, pour fe donner des graces, fe font des raies bleues au front & au menton. Les Mingreliennes, fur le retour, fe peignent tout le vifage, les fourcils, le front, le nez, &c les joues. Les Japonoifes de Jédo fe colorent de bleu les fourcils & les levres. Les Infulaires de Som- bréo au nord de Nicobar, fe plâtrent le vifage de verd & de jaune. Quelques femmes du royaume de Décan fe font découper la chair en fleurs, &c teignent les fleurs de diverfes couleurs, avec des jus de ra- cines de leur pays. à Les Arabes, outre ce que j’en ai dit ci-deflus, font dans l’ufage de s’appliquer une couleur bleue aux . bras, aux levres, & aux parties les plus apparentes du corps ; ils mettent hommes & femmes cette cou- leur par petits points, & la font pénétrer dans la chair avec une aiguille faite exprès : la marque en eft inaltérable, Les Turquefles africaines s’injeétent de la tuthie préparée dans Les yeux, pour les rendre plus noits, & 1e teignent les cheveux, les mains, & les prés en couleur jaune & rouge. Les femmes maures fuivent la mode des Turquefles; mais elles ne teignent que Jes fourcils & les paupieres avec de la poudre de mine de plomb. Les fiiles qui demeurent fur Les fron- tieres de Tunis fe barbouillent de couleur bleue le menton & les levres ; quelques-unes impriment une petite fleur, dans quelque autre partie du vifage,- avec de la fumée de noix de galle & du fafran. Les femmes du royaume de Tripoli font confifter les agrémens dans des piquüres fur la face, qu’elles poin- tillent de vermillon ; elles peignent leurs cheveux de même, La plüpart des filles Negres du Sénégal, avant que de fe marier, fe font broder la peau de différentes figures d'animaux & de fleurs de toutes couleurs. Les Néprefles de Serra-Liona fe colorent le tour des yeux de blanc, de jaune, & de rouge. Les Floridiennes de l'Amérique feptentrionale fe peignent le corps, le vifage, les bras , & les jambes de toutes fortes de couleurs ineffaçables ; parce qu’- elles ont été imprimées dans les chairs par le moyen de plufieurs piquûres. Enfin les femmes fauvages Ca raïbes fe barbouillent toute la face de rocou. Si nous revenons en Europe, nous trouverons que le blanc & le rouge ont fait fortune en France. Nous en avons l'obligation aux Italiens, qui paffe- rent à la cour de Catherine de Medicis : mais ce n’eft que fur la fin du fiecle pañlé , que l’ufage du rou- ge eft devenu général parmi les femmes de condi- tion. Callimaque , dans l’hymne intitulée Zes bains de Pallas , a parlé d’un fard bien plus fimple. Les deux déefles Vénus & Pallas fe difputoient le prix & la gloire de la beauté: Vénus fut long-tems à fa toilette ; elle ne ceffa point de confulter fon miroir, retou- cha plus d’une fois à fes cheveux, regla la vivacité de {on teint ; au lieu que Minerve ne fe mira ni dans le métal, ni dans la glace des eaux, & ne trouva point d’autre fecret pour fe donner du rouge , que de courir un long efpace chemin, à l'exemple des filles de Lacédémone qui avoient accoûtumé de s’e- xercer à la courfe fur le bord de l'Eurotas. Si le fuc- cès alors juftifia les précautions de Vénus, ne fut-çe FAR pas la faute du juge, plûrôt que celle de a nature À Quoi qu'il en foit, je ne penfe point qu’on puiffe réparer par la force de l’art les injures du tems, ni rétablir fur les rides du vifage la beauté qui s’eft -évanoine. Je fens bien la jufteffe des réflexions de Rica dans fa lettre à Usbek : « Les femmes qui fe » fentent finir d’avance par la perte de leurs agré- » mens, voudroient reculer vers la jeunefle; eh » comment ne chercheroïent-elles pas à tromper les » autres ! elles font tous leurs efforts pour fe tromper » elles-mêmes , & pour fe dérober la plus afligeante » de toutes les idées ». Mais comme le dit Lafon- taine : LE | Les fards re peuvent faire Que l’on échappe au tems , cet infigne larron ÿ Les ruines d’une maifon \ Se peuvent réparer ; que nef? ces avantage Pour les ruines du vifage? … Cependant loïn que Les fards ptoduifent cet effet ; j'ofe affürer au contraire qu'ils gâtent la peau, qu’ils la rident, qu’ils alterent & ruinent la couleur natu= telle du vifage : j’ajoûte qu'il y a peu de fards dans le genre du blanc, qui ne foit dangereux. Aufñ les fem- mes qui fe fervent de l’huile de talc comme d’un fard excellent, s’abufent beaucoup ; celles qui employent la cérufe , le blanc de plomb, ou le blanc d'Efpagne, n’entendent pas mieux leurs intérêts ; celles qui fe fervent de préparations de fublimé , font encore plus de tort à leur fanté : enfin l’ufage continuel du rou- ge, fur-tout de ce vermillon terrible qui jaunit tout ce qui l’environne, n’eft pas fans inconvénient pour la peau. Voyez RoUGE. Afranius répétoit fouvent & avec raifoñ à ce fujetz « des graces fimples & naturelles, le rouge de la pu= » deur, l’enjoüement, & la complaifance, voilà le » fard le plus féduifant de la jeunefle ; pour la vieil. » leffe ; 1l n’eft point de fard qui puifle l’embellir , » que l’efprit & les connoiffances ». Je ne fache aucun ouvrage fur les fards ; j'ai Iù feu- lement que Michel Noftradamus, ce medecin fi céle- bre par les vifites & les préfens qu'il reçut des rois & des reines , & par fes centuries qui l’ont fait pafler pour un vifionnaire, un fou, un magicien, un impie, a donné en 1552 un traité des fardemens & des fen- teurs, que je n’ai jamais pü trouver, & qui peut être n’eft pas fort à repretter. Arricle de M, le Chevaz lier DEJAUCOURT. | FARDAGE, f. m. (Marine.) ce font des fagots qu’on met au fond de cale, quand on charge en gre- mer, (Z) FARDER , v. neut. serre de riviere; un bateau farde fur un autre , lorfqu’il ferre trop. FARE , (Marine.) Voyez PHARE. FARE DE MESSINE , ( ) Géog. fretum ficulum y détroit de la mer Méditerranée en Italie, entre la Sicile & la Calabre ultérieure. On l'appelle fouvent le Fare, à caufe de la tour du Fare placée à fon en- trée, dans l'endroit où 1l eff le plus étroit ; & le Fare de Meffine, à caufe de la ville de Meffine, qui eft f- tuée fur la côte occidentale, & où on le traverfe d'ordinaire. Ce canal eft aflez connu par fon flux & reflux qui s’y fait de fix heures en fix heures, avec une extrème rapidité; comme aufli par fes courans qui allant tantôt dans la mer de Tofcane, & tantôt dans la mer de Sicile, ont donné lieu à tout ce que les anciens ont dit de Scylle & de Charybde. Ce dernier eft un tournant d’eau, que les matelots crai- gnoient beaucoup autrefois, & qu'on affronte au- jourd’hui fans péril par le moyen des barques plates. Article de M, le Chevalier DE JAUCOURT. | FARE LA FARE, (Péche.) étoit une fête du mois de Mai; les-pêcheurs s’aflembloient avec les offi- çiers des eaux & forêts, pour faire à grand bruit FAR une pêche folenhelle, & une réjouiflance de plu- fieurs jouts , qui dépeuploit les rivieres. Par l'or. | donnance de 1669, cette pêche a été défendue. FARELLONS, (ILE DES) Géog. île fituée à eme bouchure de la Selbole, riviere de là côte de Mala- | guete dans la haute Guinée, abondante en fruits & ; en éléphans. Élle a environ fix lieues de long , au rapport de Dapper; fon extrémité occidentale eft nommée par les Portugais, cabo di S. Anna, Elle eft bordée dé rochers, & au-devant, c’eft-à-dire à lé- gard de ceux qui viennent du nord-oùeft, 1l y a un grand banc de fable nommé Baixos di S. Anna. Long. 5. lat, 6. 48. Suivant M. de Lifle, ce géo- graphe la nomme Mafacoye avec les Hollandois, ou Farellons , 8 marque exaétement le cap & le : banc de S'e Anne. rsicle de M. le Chevalier DE J4v- LOURT, FARFONTÉ , voyez ROITELET. | FARGANAH , (Géog.) ville du Zagathay dans la grande Tartarie, fituée au nord de Chéfer, & capi- tale d’une province qui porte le même nom. Le pays | . de Farganak s'étend le long du Chéfer, quoiqu'il ne {oit qu'à 924 de longitude , & à 424 20/ de latitude feptentrionale. Selon les tables d’Abulfeda, Vlug- Beigh met la ville de Farganah à 429 25' de latitude. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT, FARGOT , f. m. (Comm. )terme flamand en ufage principalement du côté de Life; 1l fignifie un ballot ou perite balle de marchandifes, du poids de 150 à 160 livres. Deux fargois font la charge d’un mulet, où cheval de bât. Quelques Flamands difent auf frangotre, qui fignifñie la même chofe. Di, de Comm, de Trév. & Chamb. (G) FARGUES ox FARDES, f. f. (Marine. ) ce font des planches ou bordages qu’on éleve fur l’endroit du plat-bord appellé /abelle , pout tenir lieu de gar- des-corps, afin de défendre Le pont & d’ôter à l’en- nemi la vüe de ce qui s’y pañle. On couvre les far- gues d’une baftingure bleue ou rouge. Les fargues fervent à clore le vaïfleau par l’em- belle : on les Ôte & on les remet, felon le befoin ; on y fait des meurtrieres rondes, & de petites portes pour defcendre à la mer , ou pañler ce qu’on veut. Dans un vaifleau du premier rang , les bordages des fargues doivent avoir cinq pouces de large, & trois pouces d’épais ; les montans doivent être au nombre de cinquante-fix de chaque côté, & doivent avoir deux pouces & demi d’épais. Les furgues doivent être élevées de quinze pouces au-deflus de la life de vibord ; & par le haut, elles doivent être au niveau du haut de la plus bafle life. Elles font jointes aux montans, avec de petites che- villes de fer. (Z) * FARILLON, f. m. serme de Péche ufité dans le reflort de l’amirauté de Poitou , ou des fables d’O- lonne: c’eft le nom qu’on donne à la pêche au feu, dont voici la defcription telle qu’elle fe pratiqué par les pêcheurs du cap Breton. On y prend des éguilles ou orphies. Elle commence en même tems que celle des mêmes poiflons, aux rets nommés ve/res, c’eft- à-dire au mois de Mars, & elle finit à la fin de Juil- let. Elle ne fe peut faire que de nuit. Ce font les ba- teaux ou chaloupes des barques qui font dans le port qui sy occupent. La chaloupe eft armée de fix per: fonnes, cinq hommes & un moufle. Un des hommes de l'équipage entretient le furillon , qui eft placé avant. Le farillon eft une efpece de ces anciens ré- chauts portatifs, que l’on mettoit aux coins des rues pour éclairer la nuit. Le foyer a une douille de fer d'environ douze pouces de long, & un manche de quatre piés de long. Le feu eff compo d’éclats de vieilles douves de barriques, vuidanges de brai ou de gaudron, coupées de demi-coudée de long. Deux hommes nagenr, & trois lançent la foianne, FAR 4Tr le falèt ; où falin, dans les lits où bouillons d'or phies, qui font attirées par la lurmière du far#llon qui frappe & éclaire la furface de l’eau. Quelquefois ces poiflons s’attroupent en f grande quantité, que l’on en prend cinq à fix d’un feul coup ; & comme le ba teau avance toljours doucement à la rame, Le poif fon n’eft point effarouché pat le jet des fouannes qué les pêcheurs dardent. ê La pêche la plus forte eft de douze ou quinze cents pendant la marée de la nuit ; il faut pour y réuflir, qu'elle foit noire, fombre, & calme, Les orphies qui proviennent de cette pêche, fé confomment fur les lieux. Ons’en fert pout la boîté des hameçons des pêcheurs à la ligne ; on en fale auf, mais c’eft une mauvaife falaïlon. Les otphies annoncent à cette côte l’arrivée des fardines, com= me elles annoncent celle des maquereaux, dans là manche britannique, aux côtes de la haute Norman: die. Voyez la repréfentation de cette pêche dans ro. Planches de Pêche. FARINE, f f. rerme de Boulanger, et du grain moulu & réduit en poudre, dont on a féparé le fon avec des bluteaux. | Les farines propres à faire du pain, font celles de froment ou de blé, de feigle , de méteiïl, de farrafin &t demais. Ces farines {ont de différentes fortes, felon lés blu teaux différens par où elles ont été pañlées. On les divife ordinairement en ffezr de farine, farine blanche, en gruaux fins &t gros, & en recoupettes. Voyez cha= cun de ces termes à fon article, La plüpart des farines qui s’employent à Paris, & qui ne font point moulues dans cette ville ou aux environs, viennent de Picardie, de Meulan, de Pon- toife, de Mantes, de Saint-Germain en Laie, & de Poiffy. Les meilleures font celles de Pontoife & de Meulan , les moindres font celles de Picardie : celles de Saint-Germain & de Poïfly tiennent le milieu. On reconnoït qu’une farine eft bonne , lorfqu’elle. eft feche, qu’elle fe conferve long-tems, qu’elle rend beaucoup en un pain, qui boive bien l’eau , & au quel il faut le four bien chaud. _ FARINE BLANCHE, ez terme de Boulanger, eft une farine tirée au bluteau, d’après la fleur de farine. FARINE-FOLLE, er serme de Boulanger, eft ce qu'il y a de plus fin &c de plus leger dans la farine, ce que le vent emporte, & qui s'attache aux parois du moulin, FARINE, (Jardinage) eft une matiere blanche contenue dans la graine , qui fert à la nourrir jufqu’à ce qu’elle tire fa fubftance des fels de la terre par Paccroiflement de fes racines. FARINE G FARINEUX, (Chimie, Diere, & Mar. medic.) Le nom de farine pris dans fon acception la plus commune, défigne une poudre fubtile, douce, & pour ainf dire moëlleufe , rzo//is. Le chimifte, qui définit les corps par leurs pro- priétés intérieures, appelle farine, à corps farineux , fubftance farineufe, une matiere végétale feche, capable d’être réduite en poudre, mifcible à l’eau, alimenteufe, & fufceptible de la fermenta- tion panaire &t vinaire. Voyez PAIN & Vin. Nous fondons la qualité de mifeible à l’eau, que nous venons de donner à la farine proprement dite, fur l’efpece de combinaïfon vraiment chimique qu’- elle contraéte avec l’eau , lorfqu’après l'avoir dé- layée dans ce liquide, on l’a réduite par une cuite convenable , en une confiftence de gelée , en cette matiere connue de tout le monde fous le nom de colle de farine ou d’empois. Le corps entier de la f4. rine ne {ubit point d’autreunionavec l’eau; cemenf. true ne le diflout point pleinement ; 1l en opere feu- lement, lorfqw’il eft appliqué en grande mañle, une diflolution partiale, une extraétion. Onipeut voir à AZ FAR article BtERRE , un exemple de cette dermereattion de l’eau fur la farine. Le corps farineux eft formé par da combinaïfon du “corps muqueux végétal, & d’une terre qui a été peu examinée jufqu'à préfent,, & qu’on peut regarder ce- pendant comme analogue à la fécule qu’on retire de certaines racines, de la bryone, par exemple, Voyez FÉCULE, On peut concevoir encore le corps fari- eux Comme une efpece de corps muqueux dans la compofition duquel le principe terreux furabonde. Voyez SURABONDANT,, (Chunie), La fubftance fari- neufe poffede en effet toutes les propriétés commu- nes.au corps muqueux., êt fes propriétés {pécifiques fe déduifent toutes de cette terre étrangere ou fur- abondante. La diftillation par le feu feul, qui eft unique voie.par laquelle on a procédé jufqu’à pré- {ent à l'examen de cette fubftance, concourt aufli à démontrer {a nature. Les farineux fourniflent dans cette diftillation, tous les produits communs des corps muqueux, Plufeurs de ces fubftances, favoir quelques femences des plantes céréales, donnent de lus une petite quantité de matiere phofphorique fur La fin de la difhillation; mais ce produit eft dû à un principe étranger à leur compoñtion, favoir à un {el marin qui fe trouve dans ces femences. Voyez PHOS- PHORE , SEL MARIN, 6 ANALYSE VÉGÉTALE , @4 #i0t VÉGÉTAL. La fubftance farineufe eft abondamment répandue dans le regne végétal, la nature nous la préfente dans un grand nombre de plantes, Les femences de toutes les graminées & de toutes les légumineufes, font fz- rineufes : les fruits du maronnier, du châtaignier, le gland ou fruit de toutes les efpeces de chêne, la faine ou fruit du hêtre, font furireux. Les racines de plu- fieurs plantes de diveries clafles, fourniffent de la farine. Nous connoïflons une moëlle qui contient cette fubftance ; celle du fagoutier, fzgu arbor, feu palma farinaria herbarii amboïnenfis, qu'on nous ap- porte des Moluques fous le nom de /2gou. Onretire une fubftance vraiflemblablement furireufe de l’é- corce tendre d’une efpece de pin, puifqu’on prépare du pain avec cette écorce , felon ce qui eft rapporté dans le Flora laporica. Les farines des femences céréales pofledent au plus haut degré toutes les qualités rapportées dans la dé- finition générale du corps farireux : les femences lé- gumineufes ne poffedent les mêmes qualités qu'en un degré inférieur. Voyez LÉGUMES. Les racines furi- neufes & les fruits fzrireux font plus éloignés encore de cette efpece d'état de perfe@ion. Toutes ces dif- férences, & celles qui diftinguent entr’elles les di- verfes efpeces de chacune de ces clafles, dépendent premierement de la différente proportion de la terre furabondante : fecondement , d’une variété dans la nature du corps muqueux, qui eft très-indéfinie juf- qu’à préfent , ou qu’on n’a déterminé que d’une ma- niere fort vague, en difant avec l’auteur de l’Effai fur les alimens , que fa fubftance eft plus ou moins groffiere ; que {es parties ont plus ou moins certe éga- lité qui caraëlérife une Jubflance mucilagineufe, une at- ténuasion plus ou moins grande; qu’elles s’approchent ou s’éloignent de l’état de mucilage le plus parfait, le plus atrénué, le plus condenfe, &cc. &, troifieme- ment enfin, dans quelques corps furineux , du mé- Jange d’un principe étranger, tel que celui qui conf- titue l’acerbicé du gland ou du marron d'inde, le fuc yenénenx du manioc, &c, Ce font des fubftances frireufes qui fourniflent J’aliment principal , le fond de la nourriture de tous les peuples de ja terre, & d’un grand nombre d’ani- maux tant domeftiques que fauvages. Les hommes ont multiplié , & vraiflemblablement amélioré par la culture, celles des plantes graminées qui portent les plus grofles femençes, & dont on peut par con- FAR féquent retirer la Jurire plus abondamment & plus facilement. Le froment, le feigle, orge, l'avoine, le ris, font les principales de ces femences: nous les appellons céréales ou fromentacées : le maïs où blé de Turquie leur a êté fubititué avec avantage, dans les pays ftériles où les fromens croifloient dificilement.: Les peuples de plufieurs contrées de l’Europe, une grande partie de ceux de l'Amérique &c de l'Afrique, font leur nourriture ordinaire de la farine de mais celle de petit millet eft mangée dans plufieurs con trées , mais beaucoup moins généralement. On prés | pare de la bouillie dans divers pays, avec celle du Pamis, paricam vulgare germanicum ; celle du gros mul où forpho ; celle du petit mil, paricum fpicé ob tufä cærnleé; la larme de Job ; les grains d’un ché- nopodium, appellé guirva ou quinoa, du P.Feuillée, éc. Les paylans de certains cantons très-pauvres, font du pain avec la femence du blé farrafin : on en fait dans plufieurs pays avec les châtaignes: on en fit il y 4 quelques années en Allemagne, avec la ra- cine de la perite fcrophulaire. On envoya à Paris de Savoie, à-peu-près dans le même tems, du pain préparé avec la truffe rouge où pomme de terre. Il eft rapporté dans le Flora laponica , qu’on en fait en Laponie avec la farine de l’arum palufre arundinas ce radice, La racine d’afphodele eft encote propre à cet ufagé. On voit aflez communément ici des gâ- teaux ou galettes préparés en Amérique avec la ra- cine du manioc, ou avec celle du camanioc. On fait un aliment dela même efpece au Bréfil & au Pérou, avec la farine de la vtaie caflave, farina de palo, qua eft la racine d’un yuce. Voyez tous ces articles. La poudre alimenteufe propofée par M. Boueb } chirurgien major du régiment de Salis, qui nourrit un adulte, &z le met en état de foûtenir des travaux pénibles , à la dofe de fix onces par jour, felon les épreuves authentiques qui en ont été faites à l’hôtel royal des Invalides , dans le mois d'Oétobre 17543 cette poudre , dis-je, n’eft ou ne doit être qu’un fz- rineux pur & fimple, fans autre préparation que d’é- tre réduit en poudre plus ou moins grofliere, Je dis doit être; car s’ileftroti, commele foupçonne l’auteur de la lettre inférée à ce fujet dans le journal économi- que, OË. 1754, c’efttant pis , la qualité nourriflante eft détruite en partie par cette opération. Au refte fix onces d’une farine quelconque , entends de cel- les dont on fait communément ufage, nourriflent “très-bien un manœuvre, un payfan, un voyageur pendant vingt-quatre heures. Il ne faut pas fix onces de ris ou de farine de maïs , pour vivre pendant une journée entiere, & être en état de faire un certain exercice, Voyez Ris, Mais, & NOURRISSANT. On a tenté fans fuccès de faire du pain avec la ra cine de fougere ; elle n’eft pas farineufe. L'idée de ré- duire en poudre les os humains, & de les convertir en aliment à titre de corps farireux, quifut conçûe en effet & exécutée, felon nos hiftoriens, pendant le fiège de Paris, au tems de la ligue , ne peut être tome bée que dans une tête eflentiellement ignorante, & bouleverfée par la faim & par le defefpoir. Les os ne font pas farineux ; & Lorfqu’ils font épuifés par um long féjour dans une tetre humide , ils ne contien nent aucune matiere alimenteufe. Propriétés médicinales des farineux. Les farineux {e mangent après avoir été altérés par la fermentation, ou fans avoir éprouvé ce changement. Les fzrineux levés ou fermentés , fourniflent par une cuite con- venable, cet aliment journalier qui eft connu de tout le monde fous le nom de pain. Voyez PAIN. Les farineux non fermentés dont nous fafons ufa: e le plus ordinaitèment pour notre nourriture , ont,1°.les femences légumineufes en fubftance, & cuites dans l’eau, le bouillon, ou le jus des viandes. Voyez SEMENCE LÉGUMINEUSE, 2°, Des sus Es FAR des plantes graminées diverfement préparées ; telles | que le ris, le gruau, Porge mondé; la farine de fro- ment , celle de mais ; les pâtes d'Italie , comme fé- moule , vermicelli, macarons, &c. dont on fait des . cremes, des bouillies, des potages. Nous employons le fagou de la même maniere. Quelques medecins ont propofé un chocolat de chätaignes, en titre d’a- liment médicamenteux. Poy. Ris ;, GRUAU, ORGE, FROMENT, Mais, PATE D'ITALIE, SAGOU , CHA- TAIGNE, | C’eft fous cette forme que les Medecins prefcri- “vent les farireux dans le traitement de plufeurs ma- ladies chroniques : le fyftèmé de medecine domi- nant leur attribue une qualité adouciffante, incraf fante; corrigeant l’acrimonié alkaline ; émouflant ou embaïraflantles fels exaltés, acres, corrofifs, & les huiles atténuées, dépouillées de leur terre, rendues acres, volatiles, fétides , &c. Le grand Boerhaave, qua conçû fous cette idée le vice des humeurs , qu'il attribue à un alkali fpontanée, propofe les farineux contre les maladies qui dépendent de cette caufe. Voyez Boerhaave, aphorifm, chap. morbi ex alkalino Jpontaneo. Le même auteur met les farineux au nom. bre des caufes qui produifent les conftitutions des Humeurs, qu'il appelle acide fpontance & glutineufe Jpontanée. Les farineux non fermentés font regardés aflez généralement comme fouverains dans le ma- rafme , l’hémophthyfe, la phthyfie pulmonaire, les ulceres des autres vifceres , Le fcorbut de mer, 6. 6 leut ufage eft en effet aflez falutaire dans ces cas; ce qui ne prouvé cependant rien en faveur des qua- lités adouciffantes, incraflantes, &c. dont nous ve-: nons de parier. Voyez INCRASSANT. Leur véritable utilité dans ces maladies, peut très-bien fe borner à 1a maniere dont elles afféétent les organes de la di- geftion, du moins cette a@tion peut-elle fe compren- dre facilement ; au lieu que la nullité de leur préten- due opération fur le corps même des humeurs, eft à-peu-près démontrable, Voyez INCRASSANT. La pente à fe convertir en acide, ou à engendrer dans les humeuts l’acide fpontanée & le olutineux, glutinofürn pingue, attribuéeaux farineux, etune qua- lité vague, au moins trop peu définie; qu'on pourroir même abfolument nier, d’après les connoiffances af- fez poñitives que nous avons, qu'un acide fpontanée ne prédomine jamais dans les humeurs animales, & qu'elles ne font jamais véritablement glutineufes On ayvanceroit une chofe plus vraie, f on fe bornoit À dire que les furieux font plus propres à produire des acides däns les premieres voies, que Lx plûpart des alimens tirés des animaux. En général, on ne fauroit admettre dans les farizeux aucune qualité vé- ritablement médicamenteufe, altérante , éxerçant uneathon prompte fur les humeurs ou fur les folides ; nous né leur connoiffons que cette-opération lente, manifeftée par un ufage long & continu qui eft pro- » pre aux alimens: | On a reproché aux farireux noû fermentés d’être pefans fur Peftomac , c’eft-à-dite de réfifter à ladtion. des organes digeftifs, & au mélangé des humeurs di- geftives ; aux farimeux non fermentés, dis-je, car ‘on penfe que la fermentation a détruit cette qualité dans les farireux réduits en pain. M.Roïüelle , qui eft dans cette opinion, propofe dans fes lecons de Chi- mie, de fubtituer à la farize de froment ordinaire, : dont on fait à Paris la bouillie pour les enfans, la farine du malt ou grain germé; car la germination équivaut à la fermentation panaire. Voyez Paix. Cette vüe eft d’un efprit plein de fagacité, & tourné aux recherches utiles. Cependant la bouillie de fa- rire non fermentée, ne produit chez les enfans aucun mal bien conftaté ; la panade qu’on leur donne dans plufieurs provinces du ro yaume,, au lieu de la bouil- _ lie, qui y eft abfolument inconnue, n’a fur ce der- Tome VI, FAR 413 mer aliment ancun avantage obfervé : or la panade eft abfolument analogue à la bouillie de prain permé ÿ & dans le cas où l’on viendroit à découvrir par des obfervations nouvelles, qu’elle eft préférable à la botallie ordinaire, il fetoit beaucoup plus commodé d’y avoir recours qu’à la bouillie de grain germé, qui eftune matiere affrément moins cominune que le pain. | Voici ce que nous connoiflons de plus pofitif {ur l’'ufage des alimens farireux non fermentés, Les peu- ples qui en font leur principale nourriture , Ont l’aif fain, Le teint frais & fleuri ; ils font gras, lourds, parefleux, peu propres aux exercices & aux travaux pénibles ; fans vivacité, fans efprit , fans defirs & fans inquiétude. Les farirzeux ont donc la propriété d'enpraffer ou d’empdrer par un long ufage; lesMede- cinspourrotent les employer à ce titre dans plufeurs cas. Ce corollaire pratique fe peut déduire facilement des effets connus que nous venons de rapporter ; mais la vûe d’engraifler n’a pas encofe été comptée parmi les indications médicinales : plufieurs {ubitan- ces farineufes {ont émployées extérieurement fous la forme de cataplafme. Voyez plus bas FARINES RÉ SOLUTIVES. (4) | FARINE DE BRIQUE, (Chimie.) on appelle ainfi la brique réduite en poudre fubtile. FARINE , ( Matiere médicale & Dicte.) On fe fert en Médecine d’un grand nombre de farines : celles que l’on retire de l'orge , dé l’avoine , du feigle, de la fémence de lin , s’employent fort fouvent en cata- plafme. On leur attribue la vertu de ramollir & de réloudre. Voyez EMOLLIENT &RÉSOLUTIF. La fa rine de ris, d'avoine, font d’un fréquent ufage par= mi nous : on les fait prendre cuites avec de l'eau, ou du lait, & du fucre. Voyez Ris, Avoine, La farine de froment eft d’un ufage trop connu dans l’économie ordinaire de la vié ; il {uit que l’on fafle attention que c’eft avec elle que nous préparons la meilleure 8 la plus faine de toutes nos nourritu= res, le pain : mais nous ferons ici une remarque d’as près M. Roüelle, célebre apoticaire & favant chi= mille, qui dans fes excellentés lecons , dit que lu- fage où lon eft de faire la bouillie ( aliment ordinai- re des enfans ) avec la fzrise de froment , eft perni= cieux; & 1l s'appuie fur une vérité reconnue de tout le monde. Perfonne, dit ce éélebre académicien ,né voudroit manger de pain non lévé ; l'expérience appreñd qu'il ft alors très -indigefte ; cependant, ajoûte-t-1l, nous en faifons tous les jours prendre à nos énfans ; car qu’eft-ce que de la bouillie, finon du pain non levé, non ferinenté à Il voudroit doné qu'on préparât cet aliment des enfans avec du pair leger , que l’on féroit bouillir avec le lait , c’eft-à- dire qu’on leur fit de la panade, ou bien qué l’on fit fermenter le grain avant que de le moudtre, commé il fe pratique pour la bierre , c’eft-à-dire que cette bouillie feroit préparée avec la farine du malt de fro: ment : On auroït {element la précaution de la faire moudre plus fine que pour la bierre ; cette farine étant tanufée , feroit , felon M. Roïelle, une excel lente nourriture pourles enfans ; la vifcofité ordinai: re de la farire feroit rompue par la germination du grain; le corps muqueux, qui eft la partie nutritive, feroit développé par la fermentation que le pain 4 éprouvé dans la germination ; en un mot, les enfans prendroient un aliment de facile -digeftion. Nous croyons que l'on ñe fauroit trop faire d’attention à la remarque judicieufe de M. Rôüélle ; elle eft digné d’un phyficien, ami de {a fociété, en un mot, d’un bon citoyen. (2) S FARINES RÉSOLUTIVES ( /es quatre) , Pharmacie, On entend fous cette feule dénomination les farines d'orge, de lupins , d’orobe , & de féves ; non qu’el- les {oient les feules qui pofledent la vertu réfoluaive k ufdtés Ggg 414 * FAR celles de lin, de fénugrec, & bien d’autres, le font également : mais l’ufage a prévalu; & les quatre que nous ayons nommées, ont été repardées comme pof- fédant éminemment cette vertu. Voyez RÉSO LU- TIF. ufage : on les fait entrer dans prefque tous les cata- plafmes, même dans ceux dont on n’attend qu’un ef- fet émollient ; on les mêle avec la pulpe des plan- tes émollientes ou réfolutives. 7oyez CATAPLAS- ME. (6) FARINE MINÉRALE, (Hiff. nat. minéral.) Cenom a été donné par quelques auteurs, à une efpece de terre marneufe ou crétacée, en poudre fort legere, douce au toucher, très-friable, d’une couleur.blen- che, & par conféquent femblable à de la farire de froment. Piufñeurs hiftoriens allemands font mention de cet- te fubftance, & difent qu’en plufeurs endroits d’AI- lemagne , dans des tems de famine & de difette, cau- fées par de grandes fécherefles , des pauvres gens, trompés par la reflemblance , ayant découvert par hafard cette efpece de craie ou de marne, ont cru que la providence leur offroit un moyen de fuppléer à la nourriture qui leur manquoit ; en conféquence, ils fe font fervi de cette prétendue farire pour faire du pain, & la mêloient avec de lasÿurire ordinaire : mais cette nourriture , peu analogue à l’homme , en fit périr un grand nombre , & caufa des maladies très- dangereufes à beaucoup d’autres. Cela n’eft pas fur- prenant, attendu que cette fubftance pouvoit conte- nir une portion d’arfenic , ou de quelqu’autre matie- te nuifible : d’ailleurs une femblable nourritute ne pouvoit être que très-incommode & fatigante pour l’eftomac. La farine minérale ne doit être regardée ue comme une efpece de craie fort divifée, tout à- Li femblable à celle qu'on nomme Zac lune , ou lait de lune. Voyez la minéralogie de Wallerius, tom. I. & Bruckmann , epiffolæ itinerarie centuria, I, epiftol, xv. FARINE EMPOISONNÉE , ( Chimie métallurg. ) ex- preffion par laquelle les Allemands defignent l’arfe- nic fublimé dans les travaux en grand , fous la for- me d’une poudre , que la fumée qui pañle par le mé- me canal, rend grife. Voyez ARSENIC , 6 SUBLI- MATOIRE EN GRAND. Article de M. DE VILIERS. FARINÉ, FARINEUX, ez Peinture, fe dit d’un ou- vrage où l’artifte a employé des couleurs claires &c fades , & dont les carnations font trop blanches & les ombres trop grifes ; les Peintres appelient ce co- loris farineux, FARINER FFARINEUX, (Jardinage.) fe dit d’un fruit qui manque d’eau , 8 qui en rend le goût très- mauvais. (X) | FARLOUSÉ, £. f. (Hif. nat. Ornitholog. ) alauda pratorum , alouette des prés ; elle eft prefque de moi- tié plus petite que l’alouette ordinaire ; elle a plus de verd fur fon plumage , dont Les couleurs {ont ce- pendant moins belles : la farloufe fait {on nid dans les prés, & fe cache quelquefois fur les arbres. Il eft difficile de l’élever , mais lorfqu’on y eft parvenu, elle chante très-agréablement. Ray , fyz0p. avium meth. Voyez O1SEAU. (1)! FARO , f. m. (Géog.) ville de Portugal, au royau- me d’Algarve, avec un port fur la côte du golphe de Cadix, & un évêché fuffragant d’'Evora. Alphonfe roi.de Portugal la prit fur les Maures en 1249 : elle eft à fix milles fud de T'avira , quatorze eft de Lagos, quarante fud-oueft d’'Evora , neuf de l'embouchure de la Guadiana. Long. 09. 48/. lat. 364. 54", Ari. cle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. * FAROUCHE } adj. (Gremm.) épithete que nous donnons aux animaux fauvages, pour exprimer cet éxcès de timidité qui les éloigne de notre préfence; Les quatre farines réfolutives {ont d’un fréquent . qui les tetient dans les anttes au fond des forèts & dans les lieux deferts, & qui les arme contre nous & contr'eux-mêmes , lorfque nous en voulons à leur liberté, Le correlatif de farouche eft apprivoife, On a tranfporté cette épithete des animaux à l’homme , ou de l’homme aux animaux. FAROUCHE , (Manége.) Un cheval fzroucheeft ce= lui que la préfence de l’homme étonne ; que fon ap: proche effraye , & qui peu fenfible à fes cärefles , le fuit & fe dérobe à fes foins. Eft:il faifi ? eft-il arrêté par les liens , qui font les marques ordinaires de fà dépendance &c de fa captivité ? Il fe rend inaccefi- ble ; le plus leger attouchement le pénetre d’épou vante ; 1l s’en défend, foit avec les dents, foit avec les piés | jufqu'à ce que vaincu par la patience, la douceur, & l'habitude de ne recevoir que de nos mains les alimens qui peuvent [e fatisfaire, il s’ap- privoile, nous defire, & s'attache à nous. Tels font en général les chevaux fauvages , nés dans les forêts ou dans lés deferts ; tels font les pou: lains que nous avons long -tems délaiflés & aban- donnés dans les paturages ; telles font certaines ras ces de chevaux indociles , &c moins portés à la fa= miliarité & à la domefticité , que Le réfte de l’efpeces tels étoient fans doute ceux des Aflyriens , felon le rapport de Xénophon , ilsétoient toujours entravés; le tems que demandoit Pa@ion de les détacher & de les harnacher , étoit ficonfidérable, que ces peuples, dans la crainte du defordre où les auroit Jettés la moindre furprife de là part des ennemis , pat l’impof- fibilité où1ls fe voyoient de les équiper avec promp- titude, étoient toùjours obligés de fe retrancher dans leur camp. | Il en eft encore, dont une éducation mal enten- due a perverti, pour ainf dire, le caraétere ; que les châtimens & la rigueur ont aliénés , & qui ayant contracté une forte de férocité , haïfent l’homme plütôt qu’ils ne le redoutent, Ceux ci, qu’un fembla- ble traitement auroit avilis , s'ils n’euflent apporté en naïffant la fierté , la générofité , & le courage , que communément on obferve en eux, n’en fontque plus indomptables. Il eft extrèmement dificile de trouver une voie de les adoucir ; notre unique ref fource eft , en nous en défiant fans ceffe, de les pré« venir par des menaces , de leur imprimer la plus grande crainte, de les châtier & de les punir de leurs moindres excès, Quant aux premiers , fi notre attention à ne les jamais furprendre en les abordant, & à ne les abor- der qu’en les flatant, & en leur offrant quelques ali- mens ; fi des careffes repétées, fi l’afiduité la plus exacte à les fervir & à leur parler , ne peuvent fur- monter leur timidité naturelle , & captiver leur in- clination , le moyen le plus für d'y parvenir , eft de leur fupprimer d’abord, pendant l’efpace de vingt- quatre heures, toute efpece de nourriture, &t de leur faire éprouver la faim & la foif même. En les pri- vant ainfi d’un bien dont il leur eft impofñble de fe , _pafler , & de jouir fans notre {ecours, nous conver- tiffons le befoin en néceflité, & nous irritons le fen- timent le plus capable de remuer l'animal. I fuñit de les approcher enfuite plufieurs fois ; de leur offrir du fourage , poignée par poignée ; de le leur faire fou- haiter , en éloignant d’eux la main qui en eft pour- vue, & en les contraignant d'étendre le cou pour le faïfir : infenfiblement ils céderont ; ils s’habitueront ; ils fe plieront à nos volontés, & chériront en quel- que façon leur efclavage. EN | On a mis en ufage , pour les apprivoifer, la mé- thode pratiquée en Fauconnerie , lorfqu’on fe propo- fe de priver un oïfeau nouvellement pris, & qu'on eft dans le deflein de dreffer au vol. On a placé le cheval fzrouche , de maniere que dans l'écurie fon derriere étoit tourné du côté de la mangeowe, Un hotte prépolé pour le veiller nuit & jour ; s’eft conftamment oppolé à fon fommeil ; il a été atten- tif à lui donner de tems en tems une poignée de foin , & à l'empêcher de fe coucher , & ce moyen a parfaitement réufi. Il me femble néanmoins que le fuccès doit être plätôt attribué au foin que l'on a eu d’aiguillonner fonappétit par des poignées de fourra- ge, qu'à celui de lui dérober le dormir , & de tenter de l’abattre par la veille. Les chevaux dorment peu ; 1l en eft qui ne fe couchent jamais ; leur fommeil ef rarement un afloupifflement profond , dans lequel tous les mufcles qui fervent aux mouvemensvolon- taires ; font totalement flafques & affaiflés ; parmi ceux qui fe couchent , il en eft même plufieurs qui dorment fouvent debout & fur leurs piés ; & deux ou trois heures d’un leger repos fuffilent à ces ani- maux, pour la réparation des pertes occafonnées par la veille & par le travail : or il n’eft pas À pré- ‘fumer que de tous Les befoins auxquels la vie anima- le eft aflujettie, le moins preffant foit plus propre à dominer un naturel rebelle , que celui qui fufcite le plus d’impatience, & qui fuggere le defir le plus ar- dent, Pour fubjuguer les animaux , pour les ame- ner à la fociété de l’homme , pour les affervir en un mot, la premiere loi que nous devons nous impo- fer , eft de leur être agréables & utiles ; agréables par la douceur que nous fommes néceffités d'oppo- 1er d’abord à leurs fougues & à leur violence ; utiles par notre application à étudier leurs penchans, & à les fervir dans les chofes auxquelles ils inclinent le plus : c’eft ainfi que fe forme cette forte d’engage- ment mutuel qui nous unit à eux, qui les unit à nous: il n’a rien d’humiliant pour celui qui, bien loin d'imaginer orgueilleufement que tout l'univers eft créé pour lui , & qu'il n’eft point fait pour Punivers, fe perfuade au contraire, qu'il n’eft point réellement de fervitude & d’efclavage, qui ne foit réciproque, depuis le defpote le plus abfolu jufqu’à l'être le plus fubordonné. (e FARRÉATION , voyez CONFARRÉATION. FARTACH, (Géog.) royaume ou principauté de PArabie heureufe, qui s’étend depuis le 14 degré de latitude, jufqu’an 16 degré trente minutes ; & pour da longitude, depuis foixante-fept degrés trente mi- nutes , jufqu'au foixante - treizieme depré. Voyez les mémoires de Thomas Rhoë, ambaffadeur d’Angleter- re au Mogol. Le cap de Fartach eft une pointe de terre qui s’ayance dans la mer vers le quatorzieme degré de latitude nord, entre Aden à l’oueft, & le cap Falcalhad à left, Arsicle de M, le Chevalier de Jay- COURT. | * FARTEURS, FARTORES , o2 ENGRAIS- SEURS, f. m. pl. (Hiff. anc.) valets deftinés à engraif- fer de la volaille. Il y en avoit auffi d’employsés dans Ja cuifine fous le même nom : c’étoient ceux qui fai- foient les boudins , les faucifles , & autres mets de la même forte. On appelloit encore farteurs , fzro- res , Ceux qui, mieux connus fous le nom de nomen- clateurs , zomenclatores , difoient à l’oreille de leurs maîtres , les noms des bourgeois qu'ils rencontroient dans les rues, lorfque leurs maîtres briguoient dans la république quelque place importante, qui étoit à la nomination du peuple. Ces orgueilleux patrio- tes étoient alors obligés de lui faire leur cour, & ils s’en acquittoient aflez communément de la ma- miere la plus honteufe & la plus vile. Je n’en vou- drois pour preuve que l’inftitution de ces farseurs, quiindiquoient à l’afpirant à quelque dignité, lenom &t la qualité d’un inconnu qui fe trouvoit fur fa rou- te, &qu'il alloitfamilierement appeller par fon nom, & cajoler baffement , comme s’il eût été fon pro- teéteur de tout tems. On donnoit à ces domeftiques le nom de fartores, farteurs, pafce que velur inferci- rent nOmina in autem candidati : on les comparoit par Tome VI, | FAS 413 cette dénomination aux farreurs de cuifine ; ceux-ci rémplifloient des boudins, & ceux-làfembloient être gagés pour remplir & farcir de noms l'oreille de leur maître. FASCE , f. f. rerme de Blafon ; piece honorable, { qui occupe le tiers de l’écu horifontalement par le . milieu, & qui fépare le chef de la pointe. FASCÉ, adj. er terme de Blafon , fe dit d’un écu couvert de fafces & de pieces, divifées par longues Hfes. Fafcé d'argent & d'azur, On dit fafcé, COTLTTE= fafcé , lorfque l’écu fafcé ef parti par un trait qui change l'émail des fafces , enforte que le métal foit Oppofé à la couleur, & la couleur au métal. On dit aufli , fafcé, denché , lorfque toutes les fafces font dentées , de telle façon que l’écu en foit auf plein que vuide, Voyez Le P, Ménérrier. FASCEAUX , f. m. pl. ere de Pêche : ce font de vieilles favates garnies de pierres , poux faire caler le bas du fac du chalut, Voyez CHALUT. FASCITA-LAT A, (Anatomie, ) un des mufcles de le cuiffe & de la jambe : fon nom latin s’eft confervé dans notre langue , & eft beaucoup plus ufité que celui de membraneux , qui lui eft donné par un petit nombre de nos auteurs. Il a fon attache fixe antérieurement à la levre ex. terne de la crête de los des îles, par un principe en partie charnu & en partie aponévrotique. Le corps charnu de ce mufcle , qui n’a guere plus de cinq tra- vers de doigt de longueur fur deux ou trois de lar- geur, eff logé entre les deux lames d’uneaponévrofe, dans laquelle ce mufcle fe perd par un grand nombre de fibres tendinenfes très-courtes. C’eft la grande étendue de cette aponévrofe qui a fait donner À ce mufcle le nom de fafcia-lata, c’eft-à-dire bande large, quoique ce nom femble plütôt devoir appartenir À laponévrofe qu’au mufcle même : M. Winflow le nomme le ufcle du fafcia lat. Cette aponévrofe eft attachée antérieurement à la levre externe de la crête des os desîles, depuis Pépine antérieure & fupérieure de cet os, jufqu’en- viron le milieu de cette crête ; elle s'attache enfuite au grand trochanter, & poftérieurement vers le mi- lieu du fémur 8 à la partie fupérieure du péroné ; après quoi elle fe continue tont le long du tibia, en s’attachant à fa crête, & fe termine enfin à la partie inférieure du péroné. Dans ce trajet, cette aponé- vrofe couvre les mufcles qui lui répondent ; favoir, une portion confidérable du grand & du moyen fef- fier, tous les mufcles qui font couchés le long de la cuiife , principalement ceux de fa partie latérale ex- terne , & ceux qui font couchés antérieurement Le long de la jambe entre le tibia & le péroné. Cette aponévrofe reçoit encore un très- grand nombre de fibres des mufcles qu’elle couvre; mais fur-tout du grand & du moyen feflier, de la courte tête du biceps mufcle de la jambe, des péroniers, du jambier antérieur , & du long extenfeur des or- teils, avec tous lefquels mufcles cette aponévrofe fe trouve comme confondue. Il eft même à remarquer, à l’égard de la plüpart de ces mufcles, que cette apo- névrofe leur fournit des cloïfons qui les féparent les uns des autres. La même chofe s’obferve à Paponé- vrofe qui couvre les mufcles de l'ayant-bras, & prin- cipalement ceux qui font couchés extérieurement entre fes deux os. Nous venons de donner la defcription du fz/cia- lata d’après les plus grands maîtres ; mais il faut con- venir que cette enveloppe tendineufe , qui embrafe les mufcles de la partie antérieure de la ciufle, &e qui communique avec plufeurs autres, eft auffi dif- ficile à décrire qu’à démontrer, parce qu’il n’eft pas aifé d’en reconnoître les bornes ; de forte qu'il ne faut pas s'étonner que les Anatomiftes ne s’accordent point fur {on étendue, Quoïque tous les mufcles qui Gesi 416 FAS compofent la cuifle foient recouverts par une enve- loppe qui paroît être continue , on peut cependant dire que le fafcia-lata n’embrafle que les quatre an- térieurs, & que tout ce qui eft poftérieurement ne ui appartient point. En effet, les cloifons tendineu- fes qui féparent les mufcles vaftes des mufcles pofté- rieurs , femblent être formées du concours de deux membranes , paroïflant plus fortes 8 plus épaifles que les parties qui les produifent prifes féparément. Le fa/cia-lata et donc une partie aponévrotique, qui enveloppe les quatre mufcles qui font l’extenfion de la jambe, appellés droit , crural, vafle interne, 6 vale externe. Cette membrane a plufeurs ufages; car outre qu’elle forme une gaine très-folide qui contient les quatre mufcles que nous venons de nommer , elle reçoit le tendon de l’épineux, & une partie de ce- lui du grand & du moyen fefier : elle fournit de plus une attache folide à une partie du petit feñier, du vaîfte externe , 87 de la petite tête du biceps. La membrane qui recouvre le grand feffier, & qui pro- duit des cloïfons particulieres pour les'trouffeaux des fibres dont ce mufcle eft compofé , peut être regar- dée comme une produ@ion du fa/cia-lata, qui com- munique encore avec le ligament inguinal & l’apo- névrofe de l’oblique externe. Les Chirurgiens doivent foigneufement obferver que lor{qu'il fe forme un abcès fous le f/cia-lata, le pus s'échappe aifément dans l’interftice des mufcles qui font au-deflous, parce que la matiere de labcès a plus de facilité à fe glifler dans lefpace de ces chairs flexibles , qu'à pénétrer le tiflu de la membrane qui forme le fa/cia-lata lequel ef fort ferré. Il faut alors, pour prévenir cet épanchement du pus entre ces muf- cles, faire une grande incifion felon la longueur de cette membrane, afin de donneruneiflue fufifanteau pus contenu dans le fac de l’abcès, & empêcher qu’il n'y fafle un long féjour : pour cet effet, après l’inci- fion faite, 1l faut ghffer le doigt indice fous la mem- brane, & en rompre & détacher toutes les adhéren- ces, afin que le pus forte librement de toutes parts. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FASCINATION , f. f. (HLf. & Philo[.) Raouavia ; maléfce produit par une imagination forte, qui agit fur un efprit ou un corps foible, Linder, dans fon sraité des poifons, pag. 166-8. croit qu’un corps peut en jz/cirer un autre fans le concours de l’imagination ; par exemple , que les émanations qui fortent pat la tranfpirationinfenfble du corps d’une vieille femme peuvent, fans qu’elle le veuille, blefler les organes délicats d’un enfant. - Mais ce cas, que quelques auteurs appellent fa/cira- tion naturelle, préfente feulement une forte antipa- thie, & n’a qu’un rapport éloigné avec la fafcination proprement dite. Guillaume Perkins, dans fa afcanologie, définit Part des fafcinations magiques , un artimpie , qui fait voir des prodiges par le fecours du démon, & avec la permiflion de Dieu. Cette définition paroît trop vague; elle embraffe toutes les parties de la Magie, du moins fuivant beaucoup de phi1lofophes, qui n’ad- mettent rien de réel dans cet art, que les apparences qu'il fait naître. Frommann a donné un recueil très-prolixe en for- me de traité de faftinatione , dans lequel, Zy. 111. part. IV. feë. 2. il étend la ffCiration, non-{eulement aux animaux, Comme avoient fait Les anciens, mais encore aux véettaux aux minéraux, aux vents, & aux ouvrages de l’art des hommes. Outre les défauts ordinaires des compilations, on peut reprocher à cet auteur fon extrème crédulité, fes contes ridicules fur les moines , &c fa calomnie srofliere contre S. Ignace de Loyola, qu’il ofe dire avoir été forcier. Le 7°, 4, de lappendix de ce livre,où Frommann veut prouve que le diable eft le finge de Dieu, eft affez remar- quable. | Frommann diftingue , après Delrio, trois efpeces de fafcination ; l'une vulgaire & poétique, la fecon- de naturelle, la troifieme magique. Ilcombatla pre- miere, quoiqu'il admette les deux autres : mais les Poëtes ont-1ls pù concevoir de fafcinarion , qu’en la rappellant à la Phyfique ou à la Magie? On conçoit que l'imagination d'un homme peut le féduire ; que trop vivement frappée elle change les idées des objets; qu’elle produit fes erreurs dans la morale, &c {es faufles démarches: mais qu’elle in- flue, fans manifefter fon aétion,, fur les opinions & la volonté d’un autre homme, c’eft ce qu’on a dela peine à {e perfuader. Le chancelier Bacon, de aug- mento fcientiar, div. IV. c, ti. m. 130. croit qu'on a conjeturé que les efprits étant plus aétifs & plus mo- biles que les corps, devoient être plus fufceptibles d'impreffions analogues aux vertus magnétiques , aux maladies contagieufes , & autres phénomenes femblables. ‘ Il n’y a peut-être pas de preuve plus fenfble de la communication dangereufe des imaginations for- tes, que celles qu'on tire des hiftoires. des loups:ga- roux, fi communes chez les démonographes : c’eft une remarque du P. Malebranche , der. ch. du Liv. IL. Recherche de la vérité, F, Claude prieur religieux de l’ordre des FF. mineurs de l’obfervance , dans fon Dialogue de la Lycanthropie, imprimé à Louvain l’an 1596,prétend , fo, 20, que les hommes ne fauroient fe tranfmuer finon par la puiffance divine, mais bien qu'ils peuvent apparoître extérieurement autres qu’- ils ne font , & fe le perfuader eux-mêmes, f02. 71°. J. de Nynauld doéteur en Medecine, dans fon écris Jur la lycanthropie 6 extafe des forciers , imprimé à Pa- ris l’an 1615, en combat la réalité contre Bodin,, & attribue les vifions des forciers à la manie, à la mé- lancolie, & aux vertus des fimples qu’ils employent, parmi lefquels il en eft, dit-il, p.25. qui font voir les bons & les mauvais anges. Les peres de l’Eglife &z les commentateurs ex- pliquent la métamorphofe de Nabuchodonofor en bœuf par un accès de manie, dontDieu fe fervit à la vérité pour punir ce prince. Il eft parlé d’un au- tre changement de forme , d’un homme changé en ? mulet, dans l’évangile de l'enfance de Jefus-Chrift, . pag. 183. I. part, des pieces apocryphes concernant le nouveau Teftament, données par Fabricius, Plutarque raconte qu'Eutelidas Le fafcira lui-mé- me, & devint f amoureux defes charmes, qu'ilen tomba malade ; voyez Sympos. Z. F,p.m. 682. (c’eft ainf qu'il faut expliquer vraiflemblablement la fable de Narciffe) : le même auteur nous apprend combien les anciens craignoient pour l’état floriflant de ceux qui étoient trop loués ou trop enviés. Hippocrate a obfervé, mepi mapheyius ; que les ap- paritions des efprits avoient plus fait perir de fem- mes que d'hommes ; & il en donne cette raïfon, que les femmes ont moins de courage & de force. Mer- curialis a penfé que les corps des enfans & des fem- mes font plus expofés à la fafcination, parce que les corps des enfans ne font point défendus par leurs ames, & que ceux des femmes le font par des ames foibles 8 timides. Voyez fes opufcules, p.m. 276. de morbis puer. L, I, cu. . Mercurialis, £hid, 277. dit qu’on attribue à la f4f° cination, cette maïgreur incurable des enfans à la mammelle , dont on ne peut accufer leur conftitu- tion ni celle de leurs nourrices. Sennert, /, WT. prax. med, part. IX, p. m. 1077.tom. IV. regarde comme produites par des fortileges ces maladies que les Me- decins ne connoïfient pas, & qu'ils traitent {ans fuc- cès ; celles, pag. 1086", qui, fans caufe apparente, parviennent rapidement au période le plus dange- reux, qui excitent des douleurs vagues & des mou- vemens convulffs. Willis, de #orb. convulf. c. vi. p.72. 44. met hots de doute que toutes les convul- fions qu’un homme en fanté ne pourroit imiter, & i demandent une force furnaturelle, font diaboli- ques. Il fe réunit ayec Frommann, L, cr. p. 916. &c plufieurs autres, pour expliquer par Popération du démon, les excrétions de chofes qui ne peuvent fe former dans le corps de l’homme. Ainfi fuivant la maxime d’'Hippocrate, œ+p} ispe vsoou, les hommes ont recours à un pouvoir furnaturel dans les chofes dont ils n’ont aucune connoïffance : mais le font-ils toûjours avec fondement ? Dans les anciennes éphémérides des curieux de la Nature, on voit plufeurs exemples de maladies cau- fées par la fafcination, On trouve aufi des obferva- tions de maladies pareilles dans les nouveaux aétes de cette académie, mais elles y font rapportées plus philofophiquement, Weftphalus, dans fa pathologie démoniaque, p. 50. n’admet point de fafcination qui ne foit magique. Cette pathologie a été imprimée en 1707. Il femble que depuis ce tems la Magie a beaucoup perdu de {on crédit en Allemagne. Frommann, 46. cir. p, 59. croit que le taét peut être fafciné, de forte qu’il réfifte à l’aétion du feu &c des corps tranchans , & même aux balles de monf quet. Cet auteur fe donne beaucoup de peine , shid. pag. 815-6. pour expliquer comment le démon peut produire cet endurciflement de la peau. Il auroit été bien éloigné d'employer dans une maladie fembla- ble les bains & le mercure, comme a fait avec fuc- cès un medecinitalien, qui a publié récemment l’hif toire de cette guérifon, que M. Vandermonde à tra- duite. La fanté des hommes eft donc intéreflée à la deftruétion des préjugés, & aux progrès de la bonne Phyfque. Onne voit point dans le texte hébreu de Ecriture de veftige de la fafciration proprement dite, fi ce n’eft peut-être dans le ch, xx. des Proverb. n. 7. au lieu de lenvieux dont'parle la vulgate en cet endroit, lhébreu dit, l’œil malin, ré aun, (Don Ramirez de Prado a cité ces mots en caraéteres hébreux, qu'il faudroit lire oué tin, ce qui ne fait aucun fens). Gro- tius explique cependant avec beaucoup de vraïffem- blance ce mauvais œil, de celui de l’avare, dans fes notes fur le ch. xx. y. 15. évang. de S, Matthieu, Les Romains crurent qu’il falloit oppofer des dieux à ces puiflances mal-faïfantes qui fa/crnenr les hommes : ils créerent le dieu Fafcinus & la déefle Curiza. Nous apprenons de Varron, que les fymboles du dieu Faf cinus étoient infames,, & qu’on les fufpendoit au cou des enfans, ce qui eft confirmé par Pline, 5/2. nas. 2 XX VIII. c. y. Le P. Hardouin, tom. II. p. 454. col. 1. apprend que les amuletes des enfans dont parle Pline, n’avoient rien d’obfcene. Il a reproché aux commentateurs de s'être trompés ; maïs 1l étoit bien à plaindre, sl fe croyoit obligé de foùtenir ce pa- radoxe. Voyez ci-après FASCINUS. Le culte que les Grecs rendoient à Priape, étoit fans doute honteux ; mais ce culte-naquit peut- être de refléxions profondes. Ils l’avoient reçu des Egyptiens, dont on fait que les hiéroglyphes pré- fentent fouvent les attributs de ce dieu. Ils étoient une image fenfible de la fécondité, & apprenoient aux peuples groffiers que la nature n’eft qu'une fuite de générations : unis fur les monumens égyptiens , avec l'œil fymbole de la prudence (voyez Pignorius, men. ifiac. pag. 32.), ils infinuoient aux hommes, qu'une intelligence fuprème reproduit fans cefle Pu- nivers. ; - Les allégories furent perdues pour les Grecs, les Etrufques , & les Romains ; ils continuerent néan- moins à regarder l’image de Priape comme un puif- fant préfervatifs Ils n’y virent plus qu'un objet ridi- FAS 417 cule qui defarmeroit les envieux, & en partageant leur attention , affoibliroit leurs regards funeftes. M. Gori, dans fon Mufèxm Etrufc. p.143. nous affüre que les cabinets des curieux, en Tofcane, font rem- plis de ces amuletes que les femmes Etrufques por- toient , & atrachoient au cou de leurs enfans, Tho- mas Bartholin, de puerperio vet. p.161. a donné un de ces infames amuletes, avec ceux que Pignorius avoit déjà donnés, Ceux-ci repréfentent feulement une main fermée, dont le pouce eft inféré entre le doigt index & le doigt du milieu, Delrio, Vallefius & Gutierrius, cités par Frommann, Z. c, p. 66. aflñ rent que l’ufage de cette main fermée s’eft confervé en Efpagne : on en fait de jayet, d'argent, d'ivoire $ qu’on fufpend au cou des enfans , &c les femmes Et pagnoles obligent à toucher cette main, ceux dont elles craignent les yeux malins. Voyez les mém, du chey, d'Arvieux, som. III. p.249. Don Ramirez de Prado, dans fon Perrecontarche, c XXXJ. p. 247-8. ajoûte que l’on appelle cette main higa , &il en tire l’origine du grec ivyé, qui fait à l’ac- cufatif Hyfe ; il doit cette étymologie au doûteur François Penna Caftellon ; mais ce medecin , dans fes vers, dit que l’iynx eft un oifeau qui garantit de la faftination ; c’eft le roracella ou hoche-queue, Son opinion fur le mot Aiga , n’a point de fondement, mais elle a quelque rapport ayec ce qu’on lit dans Suidas, que lé eft une petite machine, opydsav m1, dont les Magiciennes fe fervent pour rappeller leurs amans. Bifer a tranfcrit ce pañlage de Suidas, dans fes notes greques fur le v. 1112. de la Lyfiffrata d'A riftophane. Pfellus, dans fes fcholies fur les oracles chaldaiques, p. 74. donne la defcription de ces ma- chines : elle eft aflez vague, & l’on pourroit fort bien foupçonner qu'il y avoit parmi ces machines des ne- vrofpaftes ou pantins dont parlent Hérodote, Lu- cien, Ge. Don Ramirez de Prado a été copié par Balthafar de Vias noble Marfeillois, dans fes Sylve regie, pag. 233-4. (Notez que Mencken dans fa diflertation fur la faftination attribuée aux louanges , a mal cité Zz Via regia de cet auteur au lieu de Sy/yæ regiæ). Ra- mirez nous apprend, au même endroit, qu’une vieil- le qui regarde un enfant, eft obligée de lui préfenter fes doigts dans cette difpoftion qu’on appelle Aiga. Nous appellons cela faire la figue , & les Allemans lappellent feige ; ces dermers ont un proverbe fort fingulier : RE veulent préferver quelqu'un de la fefcination, \s fouhaitent : er hat ihmeine feige bewie- Jer , que le Seignèur d’en-haut lui montre la figue. Frommann, /.c.p. 335. Perkins, Zb. cir, c. vi. qu, 3. & plufeurs autres, fe déchainent contre les préfervatifs des catholiques romains, les Agrus Dei, &ec. Ces auteurs n’ont pas fait attention que de femblables amuletes étoient uf- tés parmi les premiers Chrétiens. Voyez Cafalé, de R. ver. chriffian. p.267. Le chancelier Bacon regarde comme illicites les amuletes, qu’il confond avec les autres cérémonies magiques, quand on les employe- roit feulement comme des remedes phyfiques ; parce que, dit-1l, cette efpece de magie tend à faire jouir l’homme avec fort peu de peine, de ce qui doit être la récompenfe d’un travail péruible : 27 fudore vultus comedes panem tuum, De augm. fcient. p. m7. 130. Goropius Becanus rapporte dans fes Origines d’An- vers , p.m. 26. que les femmes les plus refpeétables deïcette ville, appelloient Priape à leur fecours au moindre accident. Cette fuperftition fubfiftoit enco- re de fon tems , quoique Godefroi de Bouillon mar- quis d'Anvers, dès qu'il fe fut rendu maître de Jéru- falem, leur eût envoyé le prépuce de Jefus-Chrift ; mais les femmes ne purent renoncer à leur premiere habitude. À Quoique les conciles ayent fait plufieurs canons 418 FAS contre les phylaéteres, on fe fervoit il n’y a pas long- tems dans les pays catholiques, d’enfalmes ou for- mules tirées des livres facrés pour empêcher Les fz/- cinations. On peut voir fur les formules l’opufculum rimum.de incantationibus Jeu enfalmis , d'Emmanuel de Valle de Moura doëteur en théologie & inquifi- teur portugais ; livre rare, où entr’autres chofes plai- fantes, de ce que l’auteur compare les Juifs à des ronces qui fe piquent elles-mêmes , il conclut qu'il faut les brüler. La faftination eft le plus univerfel de tous lesmaux, & l'on peut bien diré que ce monde eft enchanté ; non pas dans le fens de Beker, mais parce que les hom- mes féduits par leurs paflions & leur imagination, font enir'eux un commerce perpétuel d’erreurs. Jules-Céfar Vanini, fameux athée brûlé à Tou- loufe, a cru fans doute que fon fyftème le menoit à mer qu'un homme fain pût en faiciner un autre, &/ credere e cortefta , dit-il, parce qu'il penfe qu’il fau- droit attribuer cet effet à la magie. Or l’exiftence des démons ne lui eft connue que par la révélation; il la combat même fous les noms de Cardan &c de Pom- ponace; d’ailleurs , il ne veut pas que les démons ayent du pouvoir fur des enfans exempts de péché : il aime donc mieux avoir recours à des facultés na- turelles, mais il n’eft pas heureux dans fes explica- tions. Il penfe que quand une forciere fe livre à des mouvemens de colere, de haine, ou d'envie, le de- fr de nuire formé dans fon imagination, excite les efprits & leur donne une teinte de couleur trifte, ce qu'il prouve parce que le fang devient livide, (#riff illa nocendi fpecie, que in illius imaginativé refidet , commoventur fpiritus, ind & mœflum induunt colorem , ram fanguis fit lividus. De admirandis naturæ regi- næ., deæque mortalium arcams, dialog. 59. p. 73.) les efprits ramaflent une matiere pernicieufe, qu'ils dardent par les yeux de la forciere. En conféquence de cette hypothèfe, Vanini aflüre très-férieutement qu'il a confeillé à ceux qui craignoient la fafcination, s'ils avoient honte de détourner la tête pour l’éviter, de raflembler leurs efprits vers les yeux & de les di- riger contre la magicienne , dont ils choqueroient par-là & affoibliroient les efprits nuifbles. Enfin, 1l prétend que les coraux en pâliffant découvrent la Jafcination comme la fievre, & que c’eft par cette raifon qu’on les fufpend au cou des enfans comme des préfervatifs. (g) FASCINATION, {. f. (Medecine. ) on appelle de ce mom lexercice du pouvoir prétendu de ceux qui caufent des maladies aux hommes, aux enfans fur- tout, & aux beftiaux , par l’effet de certaines paro- les magiques, & même par le regard. C’eft une forte d’enchantement. | Les fymptomes dominans des maladies produites par cette caufe, font la fievre heétique, le maraf- me, le plus fouvent fiivis de la mort. Les anciens mettoient la fafcination au nombre des caufes oc- cultes des maladies. Voyez MEDECINE MAGIQUE, ENCHANTEMENT , CHARME, SORCELERIE. (4) FASCINES, {. f, (Are militaire.) ce {ont dans la guerre des fiéges, des efpeces de fagots faits de me- nus branchages , dont on fe fert pour former des tranchées & des lopgemens , & pour le comblement du foflé. Voyez la PI. XIII, de Fortification. Les fafünes ont environ fix piés de longueur, & huit ponces de diametre, c’eft-à - dire environ 24 pouces de circonférence ; elles ont deux liens pla- cés à-peu-près à un pié de diftance des extrémités. Trois ou quatre jours avant l’ouverture de la tranchée, lorfque Les troupes ont achevé de camper & de fe munir de fourrage, on commande à chaque bataillon & à chaque efcadron de l’armée, de faire un certain nombre de fafcines , qui eft ordinairement de deux ou trois mille par bataillon , & de douze ou quinze cents par efcadron. FAS Les fafcines font des ouvrages de corvée, c’eft-3- dire qui ne font point payés aux troupes, Tous les corps de l’armée en font des amas à la tête de leur camp, &c ils y pofent des fentinelles, pour veiller à ce qu'elles ne foient point enlevées. On fait ufage des faftines en les couchant horifon- talement felon leur longueur ; c’eft pourquoi on ne dit point planter des fafcines , maïs pofer des faftines, Ou /etter des fafcines, parce qu’on les jette dans les foflés pour les combler, On employe encore des fafcines dans la conftruc- tion des batteries & la réparation des breches après un fiége: mais ces fafcines font beaucoup plus lon- gues que les autres, ayant depuis dix piés jufqu’à douze, Voyez SAUCISSONS, BATTERIES 6 EPAU- LEMENT. (Q) FASCINE GOUDRONNÉE, eft une faféine trempée dans de la poix, ou du goudron, On s’en fert dans la guerre des fiéses, pour brûler les losemens 6 les au- tres ouvrages de l'ennemi. (Q) FASCINE , (Jard.) Voyez CLAYONAGE. *FASCINUS , {. m. divinité adorée chez les Ro- mains. [ls en fufpendoient l’image au cou de leurs petits enfans, pour les garantir du maléfice qu'ils ap- _ pelloient fufcinum, Ce dieu fufpendu au cou des pe- tits enfans, étoit repréfenté fingulierement, fous la forme du membre viril, Le don de l’amulete préfer- vative étoit accompagné de quelques cérémonies. Une de ces cérémomes, c’étoit de cracher trois fois fur le giron de l’enfant. Quoique le fymbole du dieu Fafcinus ne füt pas fort honnête, c’étoit cependant les veftales qui lui facrifioient, On en attachoït en- core la figure aux chars des triomphateurs. FASIER,, (Marine. ) on dit les voiles fafens , c’eft- a-dire que le vent n’y donne pas bien, & que la ra- lingue vacilletoûjours. (Z FASSEN , (Géog.) pays d'Afrique dans la Numi- die, fitué entre les deferts de Mibye, le pays des Ne- gres, & l'Egypte. Sa capitale eff à 44% de longitude & 264 de latitude, felon Dapper, dont le premier méridien pañe à la pointe du cap Verd. (D. J.) * FASSURE,, f. f. (Manuf. en foie.) partie de l’é- toffe fabriquée entre l’enfuple & le peigne, fur la= quelle les efpolins font rangés, quand la nature de l’étoffe en exige. On donne le même nom à cette portion de l’étoffe, lorfquon n’employe point d’ef. polins. FASTE ,f. m, (Gram.) vient originairement dû la- tin faffi, jours de fêtes. C’eften ce fens qu'Ovide l’en- tend dans fon poëme intitulé /es faffes. Godeau a fait fur ce modele Les fafles de l'églife, mais avec moins de fuccès, la religion des romains payens étant plus pro- pre à la poéfie que celle des chrétiens ;à quoi on peut ajoûter qu'Ovide étoit un meilleur poëte que Go- deau, Les faffes confulaires n’étoient que la lifte des confuls. Voyez ci-après les articles FASTES (Hifoire). Les fafles des magiftrats étoient les jours oùilétoit permis de plaider; & ceux auxquels on ne plaidoit pas s’appelloient nefaftes , ne/fxfh , parce qu’alors on ne pouvoit parler, fari ,enjuitice. Ce mot rcfaffus en ce fens ne fignifioit pas malheureux ; au contraire , nefaflus & nefandus furent l’attribut des jours in- fortunés en un autre fens , qui figniñoit, jours dont on ne doit pas parler, jours dignes de l’oubli ; :4e 6 nefaflo te pofuir die. Il y avoit chez les Romains d’autres faffes enco- re, fafhi urbis, faffi ruflici; c’étoit un calendrier à lufage de la ville & de la campagne. E On a toùjours cherché dans ces Jours de folennité à étaler quelque appareil dans fes vêtemens, dans fa fuite, dans les feftins. Cet appareil étalé dans d’au- tres jours s’eit appellé faffe: Il n’exprime que la ma- gnificence dans ceux qui par leur état doivent re=. préfenter ; 1l exprime la vanité dans les autres, Quoi: quéle mot dé fafe ne foit pas tobjours injurieux, fafiueux left toüjours. Il'&t fon entrée avec beau- coup de faffe : c’eft un homme faffteux : un religieux Qui fait parade de {a vertu, met du 4/2 jufque dans Phumilité même. Foyez l'article Juivanr. . Le fafle n’eft pas le luxe. On peut vivre avec lu- xe dans fa maïfon fans fafie, e’eft-à-dire fans {e parer en public d’ane opulence révoltante. On ne peut avoir de fafie fans luxe. Le fufle eft l’étalage des dé- penfes que le luxe coûte. dre, de M. be VorTAIRE, FASTE, (Morale. ) c’eft l’'affeétation de répan- dre, par des marques extérieures , l’idée de fon mé- rite, de fa ptuflance, de fa grandeur, &c. Il en- troit du faffe dans la vertu des Stoïciens. Il y en.a prefque toujours dans les a&ions éclatantes. C’eft le Jafre qui éleve quelquefois jufqu'à l’héroïfme, des hommes , à qui il en coûteroit d'être honnêtes. C’eft Le fafle qui rend la générofité moins rate que l’équi- té ; & de belles aétions, plus faciles que l’habitude d'une vertucommune, Il entre du faffe dans la dévo- tion, quand elle infpire plus de zele que de mœurs, &c moins l’attachement à fes devoirs comme homme êt comme citoyen, que Le goût des pratiques extra- ordinaires. | On fe fert plus communément du mot faffe , pout exprimer cet appareil de magnificence ; ce luxe d’ap- parence, & non de commodité, par lequel les grands rétendent annoncer leur rang au reffe des hommes, Îls ont prefque tous du f4/fe dans les manieres : c’eft un des fignes par lefquels ils font reconnoître leur état. Dans les pays où ils ont part au gouvernement, ils ont de la morgue & du dédain: dans les pays où ils ont moins de crédit que de prétentions, ils ont une politeffe qui a fon fafte , 8 par laquelle ils cher- chent à plaire fans commettre leur rang. On demande fi dans ce fiecle éclairé il eft encore utile que les hommes qui commandent aux nations, annoncent la grandeur & la puiflance des nations par des dépenfes exceflives, & par le luxe le plus faftueux? Les peuples de l’Europe font aflez inftruits de leurs forces mutuelles , pour diftinguer chez leurs voifins un vain luxe d’une véritable opulence. Une nation auroit plus de refpeët pour des chefs qui l’en- #ichiroient, que pour des chefs qui voudroient la faire pafler pour riche. Des provinces peuplées, des armées difciplinées , des finances en bon ordre, impoferoient plus aux étrangers & aux citoyens, que la magnificence de la cour. Le feul f4ffe qui con- vienne à de grands peuples, ce font les monumens, les grands ouvrages , &c ces prodiges de l’art qui font admirer le génie autant qu'ils ajoûtent à l’idée de la puiffance. FASTES, {. m. pl. (Hif.) calendrier des Romains, dans lequel étoient marqués jour par jour leurs fêtes, leurs jeux, leurs cérémonies , & tout cela fous La di- -Mifion générale de jours fuffes & néfafles , permis & défendus, c’eft-à-dire de jours deftinés aux affaires, & de jours deftinés au repos. Varron dans un endroit dérive le nom de fzffes de fers, parler, quia jus fari licebar : & en un autre en- droit 1l le fait venir de as , terme qui fignifie pro- prement oi divine, &t eft différent de 7us, qui figni- fie feulement /oi humaine, Mais les faffes, quelle qu’en foit l’étymolosie , & dans quelque fignification qu’on les prenne, m’étoient point connus des Romains fous Romulus. Les jours leur étoient tous indifférens, & leur année compo- fée de dix mois felon quelques-uns, ou de douze fe- lon d’autres , bien loin d’avoir aucune diftinétion certaine pour les jours, n’en avoit pas même pour lessfaifons , puifqu'il devoit arriver néceffairement plütôt ou plütard que les grandes chaleurs fe fiflent quelquefois fentir au milieu de Mars, & qu'il gelât À glace au milieu de Juin: en un mot Romulus étoit FAS 419 mieux inftruit dans le métier de là guerte, que dans la fcience des aftres. _ Fout changea fous Numa: cé prince établit un ordré conftant dans les Chofes. Après s'être concilié lautorité, que la grandeur de fon mérite & la fon . dé fon commerce avec les dieux pouvoient lui atti: rer ,al fit plufieurs réslemens, tant pour Ja rcugion, que pour la politique ; mais avant tout, il ajufta fon année de douze mois au couts & aux phafes de la Lune; & des jours qui compofoient chaque mois , il déftina les uns aux affaires, & les autres au repos. Les premiers furent appellés des fafh , les derniers dies nefafli ; comme qui diroit jours permis, 8r jours défendus. Voilà la premiere origine des faftes. Ïl paroït que lé deffein de Numa fut feutement d'empêcher qu’on ne püt quand on voudroit, cons - voquer les tribus & les cuïies, pour établir de nou= _Velles lois, ou pour faire de nouveaux magiftrats : mais pat une pratique conflamment obfervée depuis ce prince jufqu’à l’empereur Auguite, c’eft-à-diré pendant l’efpace d'environ 660 ans, ces jours per- nus & défendus, fa/fi & nefaffi, furent entendus des Romains, aufk bien pour l’adminiftration de la jufti- ce entre les particuliers, que pour le maniment des affaires entre les magiftrats, Quoi qu'il en foit, Nu- ma voulut faire fentir à fes peuples que l’obfervation réguliere de ces jours permis & non-permis, étoient pour eux un point de religion, qu'ils ne pouvoient négliger fans crime : de-là vient que fus & z:f4s dans les bons auteurs, figniñie ce qui eft conforme ou con- traire à la volonté des dieux. | | On fit donc un livre où tous les mois de l’année, à commencer par Janvier, furent placés dans leu ordre , ainfi que les jours, avec la qualité que Numa léur avoit afignée. Ce livre fut appellé fz/%, du nom des principaux jours qu'il contenoit. Dans le même livre fe trouvoit une autre divifion des jours nom- més fefli, prefeffi, inrercif: ; auxquels furent ajoürés dans la fuite, dies fénatorit , dies comitiales, dies pre liares , dies fauffi , dies atri, c’eit-à-dire des jours def: tinés au culte religieux des divinités, au travail ma- nuel des hommes, des jours partagés entre les uns & les autres , des jours indiqués pour les affemblées du fénat, des jours pour lPéleétion des magiftrats, des jours propres à livrer bataille, des jours marqués par quelque heureux évenement, ou par quelqué calamité publique, Mais toutes ces différentes efpe- ces fe trouvoient dans la premiere fubdivifon de dies fafli & nefaffi. Cette divifion des joufs étant un point de reli- gion , Numa en dépofa le livre entre les mains des pontifes , lefquels jouiffant d’une autorité fouverai- ne dans les chofes qui n’avoient point été reglées par le monarque, pouvoient ajoûter aux fêtes ce qu'ils jugeoient à-propos : mais quand ils vouloient apporter quelque changement à ce qui avoit été une fois établi & confirmé par un long ufage, il falloit que leur projet füt autorifé par un decrèt du fénat: par exemple, le 1; de devant les ides du mois Sex- tilis , c’eft-à-dire le 17 de Juin, étoit un jour de fête _& de réjoüiffance dans Rome ; mais la perte déplora- ble des 300 Fabius auprès du fleuve de Crémera l’an de Rome 276, & la défaite honteufe de l’armée ro- maine auprès du fleuve Allia par les Gaulois l’an 372, firent convertir ce jour de fête en jour de trif- tefle. | Les pontifes furent déclarés les dépofñtaires uni- ques & perpétuels des fafles ; & ce privilège de pof- iéder le livre des faffes à l’exclufion de toutes autres perfonnes , leur donna une autorité finguliere. Îls pouvoient fous prétexte des fafées ou zcfafles , avan. cer ou reculer le jugement des affaires les plus im- portantes , & traverier les deffleins les mieux con- certés des magiftrats 8e des particuliers, Enfin, com- 429 FAS meily avoit parmi les Romains des fêtes & des fe- ries fixées à certains jours , il y en avoit auffi dont le jour dépendoit uniquement de la volonté des pon- tifes. fé S'il eft vrai que le contenu du livre des faffes étoit fort reflerré quand 1l fut dépofé entre les mains des prêtres de la religion, il n’eft pas moins vrai que de jour en jour les faffes devinrent plus-étendus. Ce ne fut plus dans la fuite des tems un fimple calendrier, ce fut un journal immenfe de divers évenemens que le hafard ou le cours ordinaire des choies produifoit. S'il s’élevoit une nouvelle guerre, fi le peuple ro- main gagnoit ou perdoit une bataille ; fi quelque ma- giftrat recevoit un honneur extraordinaire , comme le triomphe ou le privilége de faire la dédicace*d'un temple ; fi l’on inftituoit quelque fête ; en un mot quelque nouveauté, quelque fingularité qu'il pût ar- river dans l’état en matiere de politique & de reli- gion, tout s’écrivit dans les fafles , qui par-là devin- rent les mémoires les plus fideles, fur lelquels on compofa l’hiftoire de Rome. Voyez, dans les mem. de l'acad. des B. L. le difcours favant & élégant de M. l’abbé Sallier, fur les #onumens hiflorig. des Romains. Mais les pontifes qui difpofotent des fafles , ne les communiquoient pas à tout le monde ; ce qui defef- péroit ceux qui n’étoient pas de leurs amis , on ponti- fes eux-mêmes , & qui travailloient à l’hiftoire du : peuple romain. Cependant éette autorité des ponti- fes dura environ 400 ans, pendant lefquels ils triom- pherent de la patience des paruculiers , des magif- trats, & fur-tout des préteurs, qui ne pouvoient que fous leur bon plaifir marquer äux parties les jours qu'ils pourroient leur faire droit. | Enfin l’an de Rome 450, fous le confulat de Pu- blius Sulpitius Averrion , & de Publius Sempronius Sophus, les pontifes eurent le déplaifir de fe voir enlever ce précieux threfor, qui juiqu’alors les avoit rendus fi fiers. Un certain Cneius Flavius trouva le moyen de tranfcrire de leurs livres la partie des fz/fes* ui concernoit la jurifprudence romaine, & de s’en faire un mérite auprès du peuple, qui le récompen- {a pat l'emploi d’édile curule : alors pour donner un nouveau luftre à fon premier bienfait, 1l fit graver pendant fon édilité ces mêmes faffes fur une colonne d’airain, dans la place même où la juftice fe ren- doit. Dès que les fufles de Numa furent rendus pu- blics , on y joignit de nouveaux détails fur les dieux, la religion, &c les magiftrats ; enfuite on y mit les empereurs, Le jour de leur naïffance , leuts charges, les jours qui leur étoient confacrés, les fêtes, & les facrifices établis à leur honneur, ou pour leur prof- périté : c’eft ainf que la flaterie changea & corrompit . les fafles de l’état, On alla même jufqu’à nommer ces derniers, grands faftes, pour les diflinguer des ff2es purement calendaires, qu’on appella perirs fafles. Pour ce qui regarde les fautes rufliques,. on fait qu'ils ne marquoient que les fêtes des gens de la cam- pagne, qui étoient en moindre nombre que celles des habitans des villes ; les cérémomes des calendes, des nones, & des ides; les fignes du zodiaque, les dieux tutélaires de chaque mois, laccroïflement ou le décroiflement des jours, &c. ainf c’étoit propre ment des efpeces d’almanacs ruftiques , aflez fem- blables à ceux que nous appellons 4/manacs du ber- ger du laboureur , &tc. * Enfinil arriva qu’on donna le nom de faffes à des regiftres de moindre importance. 1°, À de fimples éphémerides , où année étoit diftribuée en diverfes partiés, fuivant le cours du foleil & des planetes: ainfi ce que les Grecs appel- loient commpidts, fut appellé par les Latins ca/enda. rium € fafii. C’eft pour cette raïon qu'Ovide nom- me fafles , fon ouvrage qui contient les caufes hifto- riques ou fabuleufes de toutes les fêtes qu’il attribué à chaque mois, le lever & le coucher de chaque cor fellation, &c. fujet fur lequel il a trouvé le moyen de répandre des fleurs d'une maniere à faire regretter aux favyans la perte des fix derniers livres qu'il avoit compofés pour compléter fon année. 2°. Toutes les hiftoires fuccinétes , où les faits étoient rangés fuivant l’ordre des tems , s’appelle- rent aufli faîtes , faffi ; c'eft pourquoi Servius & Por- phyrion difent que fafà funt annales dierum , & re- run 1NdICES. : 3°. On nomma faffes , des regiftres publics où chaque année l’on marquoit tout ce qui concernoit la police particuliere de Rome ; & ces années étoient diftinguées par les noms des corifuls. C’eft pour cela qu'Horace dit à Lycé: « Vous vicilliffez, Lycé; la » richefle des habits &c des pierrefies ne fauroit vous » ramener ces rapides années qui fe font écoulées » depuis le jour de votre naïiflance, dont la date n’eft » pas inconnue. | Tempora Noffis condita faftis. Od. 13. by. IF. En effet dès qu'on favoit fous quel conful Lycé étoit née, 1l étoit facile de favoir fon âge ; parce que lon avoit coûtume d’infcrire dans les regiftres pu- blics ceux qui naïfloient & ceux qui mouroient : coù- tume fort ancienne, pour le dire en pafflant , puifque nous voyons Platon ordonner qu'elle foit exécutée dans les chapelles de chaque tribu. Liv. WI, des Rois. Mais au lieu de pourfuivre les abus d’un mor, Je dois confeiller au leéteur de s’inftruire des faits, c’eft-à dire d'étudier les meilleurs ouvrages qu’on a donnés fur les faffes des Romains ; car de tant de choles curieufes qu'ils contiennent, je n’ai ph jetter: ici que quelques parcelles, écrivant dans une langue étrangere à l’érudition. On trouvera de grands dé- tails dans les émoires de l'académie des Bel'es- Lertres > le diéfionnaire de Rofinus , Ultra. 1701 , in-4°. celui de Pitifcus , 2- fol. & dans quelques auteurs hollan- dois, tels que Junius, Siccama, & fur-tout Pighius, qui méritent d'être nommés préférablement à d’au- tres. | Jumius (Adrianus) , né à Hoornen 1515, & mort en 1575 de la douleur du pillage de fa bibliotheque par les Éfpagnols, a publié un hvre fur Les faffes fous le titre de fafforum calendarium , Bafileæ 1553 ,in-8°, Siccama (Sibrand Térard), Frifon d’origine, a traité le même fujet en deux livres imprimés à Bols= wWert en 1599, 27-47. , Mais Pighius (Etienne Vinant}), né à Campenen 1519, & mort en 1604, eft un auteur tout autre- ment diftingué dans ces matieres. Après s'être 1n= ftruit completement des antiquités romaines, par un long féjour fur les lieux , il fe fit la plus haute réputa- tion en publiant fes annales de la ville de Rome, & accrut fa célébrité par fes commentaires fur les fafles. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FASTES CONSULAIRES, (Lirtérar.) c’eft le nom que les modernes ont donné au catalogue ou à l’hif- toire chronologique de la fuite des confuls & autres magiftrats de Rome ; telle eft la table des confuls, que Ricçioli a inférée dans fa chronologie réformée, revûe par le P. Pagi,; tel eft encore, fi lon veut, le calendrier confulaire, faffi confulares, imprimé par Alméloveen avec de courtes notes. Mais, pour dire la vérité, c’eft aux Italiens que nous fommes Le plus redevables en ce genre : aufli ne peut-on fe pañler. d’avoir les beaux ouvrages de Panvini, de Sigo- mius, & de quelques autres. | Onuphre Panvini, né à Vérone en 1529, & mort à Palerme en 1568, à l’âge de trente-neuf ans, nous a laiflé d’excellens commentaires fur les fes confu- laires, divifés en quatre livres , & mis au jour à Vé:, rone, FAS rone, Charles Sigonius, né à Modené en 1529, & mort en 1584, s’eft tellement diftingué par fes écrits fur les faffes confulaires, les triomphes, les magiftrats romains ,confuls, diétateurs, cenfeurs, &c. qu'il pa- toit fupérieur À tous les écrivains qui ont précé- dé. Cependant les curieux feront bien de joindre aux livres qu’on vient de citer, celui de Reland, Hollandois, fur les faffes confulaires , parce que ce petit ouvrage méthodique a été donné pour l’éclair- ciflement des Codes Juftinien & Théodofien, & cet ouvrage manquoit dans la république des Lettres. Au refte, la connoïffance des fafles confulaires in- térefle les favans, parce que dans toute l’hiftoire d'Occident 1l y a peu d’époques plus fûres que celles qui font tirées des confuls, foit que l’on confidere l'état de la république romaine avant Augufte , foit que l’on fuive les révolutions de ce grand empire juf- qu'au tems de l’empereur Juftinien. Arricle de M, Le Chevalier DE JAUCOURT. FASTIDIEUX, DÉGOUTANT, adj.fyron. De- goätant fe dit plus à l'égard du corps qu’à l’égard de lefprit ; faflidieux au contraire va plus à lefprit qu'au corps. Dégodtant fe dit au propre & au figuré ; il applique aux perfonnes, aux viandes, & à d’au- tres chofes. La laideur eft dégoérante, lamal-propreté eft dégoñrante; il y a des gens dégottans avec du mé- rite, & d’autres qui plaïfent avec des défauts. Fa/4- dieux ne s'employe qu'au figuré. Un homme f2/4- , dieux eft un homme ennuyeux , importun , fatigant par fes difcours, par fes manieres , ou par fes ac- tions. Il y a des ouvrages faffidieux. Ce qui rend les entretiens ordinaires fi fa/#idieux , c’eft l’applaudif- fement qu’on donne à des {ottiles. Enfin le mot de fa/idieux eft également beau en profe & en poëfie ; & l’ufage a tellement adouci ce qu'il a eu d’étranger dans le dernier fiecle, qu’on en a fait un terme de mode. Il commence (& c’eft dom- mage) à être aujourd'hui un de ces mots dx bel air, qui à force d’être employés mal-à-propos dans la converfation:, finiront par être bannis du ftyle fé- rieux. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FASTIGIUM , (Lirrérar.) ornement particulier que les Romaïns mettoient au faîte des temples des dieux ; on en voit fur les anciennes médailles, Les : Grecs appelloient cet ornement confacré aux tem- ples 5 GéTOe, déropa ; &c les Romains fa/figium. Cette idée de décoration réfervée pour les {euls temples, étoit digne de la Grece & de Rome, les Chrétiens auroient dû limiter. Pendant que Tarquin regnoit encore, dit l’'Hiftoi- re, dès qu'il eut bâti fur le capitole le temple de Ju- piter, 1l voulut y placer des fa/ligix, qui confiftoient dans un char à quatre chevaux, fait de terre; mais peu de tems après avoir donné le deffein à exécuter à quelques ouvriers tofcans , il fut chañé, dit Plu- tarque. Tite-Live rapporte que le fénat voulant faire hon- neur à Céfar, lui accorda de mettre un ornement, fafigium , au-deflus de fa maïfon, pour la diftinguer de toutes les autres. C’étoit cet ornement là que Calpurnia fongeoit qu'elle voyoït arracher ; ce qui luicaufa des foupirs, des gémifflemens confus, & des mots entre - coupés auxquels Céfar ne comprenoit rien, quoique , fuivant le récit de Plutarque, ilfüt cou- ché cette nuit avec fa femme, fuivant fa coûtume. Il s’en falloit bien qu’il dépendir des citoyens, mé- me de ceux du plus hautrang, de mettre des fa/igia . fur leurs maïfons ; c’étoit une grace extraordinaire qu'il falloït obtenir du fénat, comme tout ce qui fe prenoïit fur le public; & Céfar fut le premier à qui on l’accorda, par une diftind@ion d’autant plus gran- de, qu’elle marquoit que fon palais devoit être regar- dé comme un temple. Ainfi le fénat, pour honorer Pu- hlicola, lui permit de faire que la porte de fa maifon Tome VI, | FAT 421 s'ouvrit dans la rue , au lieu de s’ouvrir en-dedans ; fuivant l’ufage. Ce fafligium des hôtels des grandsfeigneurs , ce. pinacle (qu’on me pañle cette expreflion) étoit dé- core de quelque ffatue des dieux ou de quelque f- gure de la viétoire , où d’autres ornemens , felon le rang Ou la qualité de ceux à qui ce privilége fut ac= cordé. Le mot faffigium vint enfuite à fignifier un rofr éle- Vé par le imilieu, car les maïfons ordinaires étoient couvertes en plate-forme, Pline remarque que la partie des édifices appellée de fon tems fafhigium » étoit faite pour placer des ftatues ; & qu’on la nom- ma pla/la, parce qu'on avoit coûtume de enrichir de fculpture. Le mot fa/figium fe prend auf dans Vitruve, pour un fronton : tel eft celui du porche de la Rotonde. Il réfulte de ce détail, que fafligium fignifie prin- cipalement trois chofes dans les auteurs ; les orne- mens que l’on mettoit au faite des temples des dieux ; enfuite ceux qu’on mit aux maifons des princes ; en- fin les frontons , & les toits qu'ils foûtiennent : mais les preuves de tout cela ne fauroient entrer dans un Ouvrage tel que celui-ci. Arricle de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FAT, f. m. (Morale. ) c’eft unhomme dont la vanité feule forme le caraëtere, qui ne fait rien par goût, qui n'agit que par oftentation ; & qui voulant s'élever au-deflus des autres, eft defcendu au-deflous de lui- même. Familier avec fes fupérieurs, important avec fes égaux, impertinent avecfesinférieurs, il tutoye, il protege, il méprife. Vous le faluez, & il ne vous voit pas ; vous lui parlez, & il ne vous écoute pass vous parlez à un autre, & il vous interrompt. Il lorgne, il perfiffle au milieu de la fociété la plus ref= pectable & de la converfation la plus férieufe ; une femme le regarde , & il s’en croit aimé ; une autre ne le regarde pas, & il s’en croit encore aimé. Soit. qu'on le fouffre , foit qu'on le chafle , il en tire éga- lement avantage. Il dit à l’homme vertueux de venir, le voir, &c il lui indique l'heure du brodeur & dur bijoutier, Il offre à l’homme libre une place dans fa voiture, & il lui laïfle prendre la moins commode. Il n’a aucune connoifflance , il donne des avis aux favans & aux artiftes ; il en eût donné à Vauban fur, les Fortifications , à le Brun fur la Peinture, à Ra- cine fur la Poéfie. Sort:l du fpeétacle? il parle à l’o- reille de fes gens. Il part, vous croyez qu’il vole à un rendez-vous ; 1l va fouper feul chez lui. Il fe fait rendre myftérieufement en public desbillets vrais ow fuppolés ; on croiroit qu'il a fixé une coquette, ou déterminé une prude, Il fait un long calcul de fes re- venus ; 1l n'a que 60 milie livres de rente, il.ne peut vivre. Il confulte la mode pour fes travers comme pour fes habits, pour {es indifpofitions comme pour, fes voitures, pour fon medecin comme pour {on tailleur. Vrai perfonnage de théatre, à le voir vous croiriez qu'il a un mafque ; à l'entendre vous diriez qu'il joue un rôle: fes paroles font vaines , fes ac- tions font des menfonges, {on filence même eft men- teur. Il manque aux engagemens qu’il a, il en feint quand iln’en a pas. Il ne va point où on l’attend, 1l arrive tard où il n’eft pas attendu. ILn’ofe avoier. un parent pauvre , ou peu connu. Il fe glorifie de Vamitié d’un grand à qui il n’a jamais parlé, ou qui ne lui a jamais répondu. Il a du bel efprit la fufifan- ce êt les mots fatyriques, de l’homme de qualité les talons rouges ; le coureur & les créanciers; de l’homme à bonnes fortunes la petite maïfon , ambre êt les grifons. Pour peu qu'il füt fripon , il feroit en tout le contrafte de l’honnête-homme. En un mot, c’eftun homme d’efprit pour les {ots qui l’admirent c'eftun fot pour les gens fenfés qui l’évitent. Mais f vous connoïffez bien cet homme, ce n’eft ni un homs Hhh 422 FAT. me d’efprit ni un fot, c’eft un fz2; c’eft le modele d’une infinité de jeunes fots mal élevés, Ces article eft de M. DESMAHIS. FATALITÉ, £ f. (Méraph.) c’eft lacaufe cachée des évenemens imprévès, relatifs au bien ou au mal des êtres fenfbles. | L’évenement faral eft imprévû ; ainfi on n’attri- bue point à la faralite les phénomenes réguliers de la nature, lors même que les caufes en font cachées, la mort qui fuit une maladie chronique & inconnue. L’évenement fatal tient à des caufes cachées, ou eft confidéré dans fes rapports avec celles d’entre fes caufes qui nous font inconnues. Si dans la difpo- fition d'une bataille je vois un homme placé vis-à- vis de la bouche d’un canon prêt à tirer, fa fituation étant donnée , & l’ation du canon étant prévüe, je ne regarderai plus fa mort comme farale par rapport À ces deux caufes que je connois ; mais je retrouve- rai la fatalité dans cette multitude de caufes éloi- gnées, cachées & compliquées, qui ont fait qu'entre une infinité d’autres parties de Pefpace qu'il pouvoit occuper également, il occupât précifément celle qui eft dans la dire&ion du canon. Enfin un évenement, quoiqu’imprévû & tenant à des caufes cachées, n’eft appellé fatal que lor{qw'il a quelqu’influence fur le bien ou le mal des êtres fen- fibles: car fi je parie ma vie ou ma fortune que je n’amenerai pas fix fois de fuite le même point de dés, &t que je l’amene, on s’en prendra à la fasalire; mais f en remuant des dés fans deflein & fans intérêt, la même chofe m'arrive, on attribuera ce phénomene au hafard. Mais remontons à l’origine du mot fztaliré, pour fixer plus fürement nos idées fur l’ufage qu’on en fait. | | Fatalité vient de farum, latin. Fatum a été fait de fari, & il a fignifié d’abord , d’après fon origine, le decret par lequel la caufe premiere a déterminé l’exif- tence des évenemens relatifs au bien ou au mal des êtres fenfbles ; car quoique ce decret ait dû déter- miner également l’exiftence de tous les effets, les hommes rapportant tout à eux, ne l’ont confidèré que du côté par lequel al Les intérefloit. À ce decret on a fubftitué enfuite dans la fignifi- cation du mot farum une idée plus générale, les cau- fes cachées des évenemens ; & comme on a penfé que ces caufes étoient liées & enchaïînées les unes aux autres, on a entendu par le mot de fzum, la laïfon & l’enchaïînement de ces caufes. En ce fens le mot fafum a répondu exaétement à l’éuepuern des Grecs, que Chryfippe définit dans Aulugelle, 2. FT. l’ordre & l'enchaïnement naturel des chofes, guorry ouv- TaËly Tv GAwy. Le mot farum a fubi encore quelques changemens dans fa fignification en paflant dans notre langue, &z en formant faralité; car nous avons employé parti- culierement le mot faraliré pour défigner les évene- mens fâcheux ; au lieu que dans fon origimeil a figni- fé indifféremment la caufe des évenemens heureux & malheureux : il a même gardé cette double figni- fication dans le langage philofophique, 8 nous la lui conferverons. Quoique Pabus des termes géné- faux ait enfanté mille erreurs , ils font toûjonrs pré- cieux, parce qu'on ne peut pas fans leur fecours s’é- lever aux abftrattions de la Métaphyfique. Deflin & deflinée font fynonymes de fatalité, pris dans le fens général que nous venons de lui donner. Ils le font aufi dans leur origine, puifqu’ils vien- nent de defhnatum, ce qui eft arrêté, déterminé, deftiné. Voyez DESTIN, DESTINÉE. On ne peut pas employer lun pour l’autre, les mots de hafard & de fatalité ; on peut s’en convain- cre par l’éxemple que nous avons donné plus haut de l'emploi du mot hafard, & parles remarques fiu- vantese | +! Dans l’ufage qu’on fait du mot hgfard, 1] arrive fouyent, & même en Philofophie, qu’on femble vou- loir exclure d'un évenement l’aétion d’une caufe dé- terminée ; au lieu qu’en employant le mot de fara- lité, on a ces caufes en vüe, quoiqu'on les regarde comme cachées : or comme il n’y a point d'évene- ment qui n’ait des caufes déterminées , il fuit de-là que le mot de kafard eft fouvent employé dans un lens faux, | Onentend auf parune aétion faite par le ka/ard, une ation faite fans deflein formé ; & on voit en- core que cette fignification n’a rien de commun avec celle de faraliré, puifque ce hafard eft aveugle, au lieu que la faralité a un but auquel elle conduit les êtres qui font fons fon empire. De plus, on imagine que les évenemens qu'on at- tribue au hafard, pouvoient arriver tont autrement, ou ne point arriver du-tout ; au lieu qu’on fe repré- fente ceux que la faralité amene, comme infaillibles ou même néceflaires. Les anciens ont aufli diftingué le Agfard de la fa- talire, à-peu-près de la même maniere ; leur cafus eft très-différent de leur forum , & répondoit aux mê- mes idées que le mot kafzrd parmi nous. La fortune n’eft autre chofe que la fasalité, entant qu’elle amene la poffeffion ou la privation des ri- cheffes & des honneurs : d’où l’on peut voir que for- tune dans notre langue eft moins général que faraliré ou defir , puifque ces derniers mots défignent tous les évenemens qui font relatifs aux êtres fenfibless au lieu que celui-là ne s’applique qu'aux évenemens ui amenent la poifeflion ou la privation des richef À & des honneurs. C’eft pourquoi fi un homme perd la vie par un évenement imprévü, on attribue cet évenement au deftin, à la fzraliré; s’il perd fes biens, on accufe la fortune. Voyez FORTUNE, La fortune eft bonne où mauvaife , le deftin eft favorable ou contraire, on eft heureux ou malheu< reux. La faralire eft la derniere ratfon qu’on apporte des faveurs ou des rigueurs de la fortune, du bon= heut ou du malheur, Pour remonter aux idées les plus générales, nous allons donc traiter de la faralisé ; & d’après la notion: _que nous en ayons donnée, nous examinerons les. queftions fuivantes. 1°. Ÿ at-il une caufe qui détermine l’exiftence de: l’'évenement fatal, & quelle eft cette caufe ? 2°. La liaifon de cette caufe avec l’évenement fatal eft-elle néceffaire ? ; 3°. Cette liaifon eft-elle infaillible ? peut-elle être rompue ? l’évenement f25z/ peutil ne point arriver à 4°. En fuppofant cette infaillibilité de lévene- ment, les êtres a@ifs & libres peuvent-ils la. faire entrer pour quelque chofe dans les motifs de leurs déterminations ? | | PREMIERE QUESTION. Y'a-r-il une caufe de l’évensment fatal, 6 quelle ef . cette caufe ? Pour réfoudre cette queftion, il eft néceffaire de remonter à des principes généraux. Tout fait a une raifon fufifante de fon aétualité. La raifon fuffifante d’un fait, eft la raifon fufhifante de lation de fa caufe fur lui; mais la raifon fufi- fante de l'aétion de cette caufe eft elle-même un: effet qui a fa raïfon fufifante, & cette derniere rai fon fuppofe 8x explique encore laétion d’une fecon= de caufe, &c ainfi de fuite en remontant, &c. | Un fait quelconque tient donc à une caufe pro chaine & à des caufes éloignées, & ces caufes pro- chaines &c éloignées tiennent les unes aux autres. Nous ne connoïflons guere que les caufes les plus prochaines des faits, des évenemens, parce que la. multitude des çaufes éloignées , & la maniere fes FAT erete dont elles agiflent , ne nous permettent pas de : faifir leur ation ; mais par le principe de la raïfon fufifante nous favons qu’elles tiennent toutes à une caufe générale, c’efl-à-dire à la force qui fait dé- pendre dans la nature un évenement d’un autre éve- nement, & qui unit les évenemens aëtuels & futurs aux évenemens pañlés : enforte que l’état a@uel d’un être quelconque dépend de fon état antécedent , & qu'il n’y a point de fait folé, & qui ne tienne, je ne dis pas à quelqu’autre fait, mais à tous les autres faits. Ce principe, c’eft-à -dire lexiftence d’une force in lie tous les faits & qui 'enchaine toutes les cau- ee , ne fauroit être contefté pour ce qui regarde l’or- dre phyfique où nous voyons chaque phénomene naître des phénomenes antérieurs , & en amener d’autres à fa fuite. Mais en fuppofant l’exiftence d’un ordre moral qui entre dans Le fyftème de l'Univers, la même loi de continuité d’aétion doit sy obferver que dans le monde phyfique : dans Pun & dans l’au- tre toute caufe doit être mife en mouvement pour agir, & toute modification en amener une autre. Il y a plus: ce monde moral & intelligible, & le monde matériel & phyfique , ne peuvent pas être deux régions à part, fans commerce & fans com- munication , puifqu'ils entrent tous les deux dans la compofition d’un même fyftème. Les aétions phy- fiques ameneront donc d’abord des modifications, des fenfations, &:c. dans les êtres intelligens ; & ces modifications, ces fenfations, &c. des aétions de ces mêmes êtres ; & réciproquement les aétions des êtres intelligens ameneront à leur fuite des mouvemens phyfiques. Cette communication , ce commerce du monde fenfible & du monde intelleduel , eft une vérité re- connue par la plus grande partie des Philofophes. Leibnitz feulement , en admettant l’enchaînement des caufes phyfiques avec les caufes phyfiques , & des caufes intelligentes avec les caufes de même ef- pece , a penfé qu'il n’y avoit aucune liaïfon, aucun enchaînement des caufes phyfiques avec les caufes intelligentes ou morales , mais feulement une har- monie préétablie entre tous les mouvemens qui s’e- xécutent dans l’ordre phyfque, & les modifications &c attions qui ont lieu dans lemoñdeintelligent ; idée trop ingénieufe, trop recherchée pour être vraie, à laquelle on ne peut pas peut-être oppofer de démonf- tration rigoureufe, mais qui eft tellement combattue pat le fentiment intérieur, qu’on ne peut pas la dé- fendre férieufement ; & je croirois aflez que c’eft de cette partie de fon bel ouvrage de la Théodicée, qu’il dit dans fa lettre à M. Pfaf, inférée dans les ates des Savans , mois de Mars 1728 : zeque Philofopho- rurn eft rem feriù femper agere, qui in fingendis hypothe- fibus, uti bene mones , ingenii [ui vires experiuntur. On pourra voir au mot HARMONIE lexpofition de cette opinion, êc les raïfons par lefquelles on la combat ; mais nous la fuppoferons ici réfutée, & nous dirons que l’enchaïnement des caufes embraffe non-feule- ment les monvemens qui s’exécutent dans le monde phyfique , mais encore les aétions des êtres intelli- gens; & en effet nous voyons la plus grande partie des évenemens tenir à ces deux efpeces de caufes réunies. Un avate ébranle une muraille en voulant fe pendre ; un thréfor tombe , notre homme l’em- porte ; le maître du thréfor arrive, & fe pend: ne Voit-on pas que les caufes phyfiques & les caufes mo- rales font ic1 mêlées & déterminées les unes par les autres ? Je neregarde pointle fyftème des caufes occafion- nelles comme interceptant la communication des deux ordres, 8 comme rompant l’enchaînement des caufes phyfiques avec les caufes morales, parce que dans cette opinion le pouvoir de Dieu lie ces deux Tome VI. | F | FAT 423 efpeces de caufes , comme le pourtoit faire l’influen- ce phyfique ; & les aëtions des êtres intelligens y amenent tolours les mouyemens phyfiques, & ré- ciproquement. | Mais quoi qu'il en foit de la communication des deux ordres , du moins.dans chaque ordre en patti= culier les caufes font liées , & cela nous fuffit pour avancer ce principe général , que /4 force qui lie Les caufes particulieres les unes aux autres > & qui enchaïne tous les faits, eff la caufe générale des évenemens, @ par confèquent de l'évenement fatal, C’eft cela même que le peuple & les philofophes ont connu fous le nor de fatalité, D’après ce que nous avons prouvé , on conçoit que ce principe de l’enchaînement des caufes doit être commun à tous les fyftèmes des Philofophes 3 car que l’univers foit ou non l’ouvrage d’une caufe intelligente ; qu’il foit compofé en partie d’êtres in- teligens & libres, ou que tout y foit matiere, les états divers des êtres y dépendront toûüjours de l’en chaînement des caufes : avec cette différence que l’athée & le matérialifte font obligés, 1°. de fe jetter dans les abfurdités du progrès à l'infini, ne pouvant pas expliquer l’origine du mouvement & de lation dans la fuite des caufes. 2°. Ils font contraints de re- garder la faralié comme entraînant après elle une néceflité irréfiftible, parce que dans leur opinion les caufes font enchaïinées par Les lois d’un rigide mé- chanifme. Telle a été l’opinion d’une grande partie des Philofophes ; car fans compter la plüpart des Stoiciens, Cicéron, au livre de Faro, attribue ce fentiment à Démocrite, Empédocle, Héraclide 8 Ariftote. Mais ces conféquences abfurdes ne fuivent du principe de l’enchainement des caufes, que dans le fyftème de l’athée & du matérialifte ; & le théifte en admettant cette notion de la faralisé, trouve le principe du mouvement & de l’aétion dans une pre- miere caule, & ne donne point atteinte à la liberté 5 comme nous le prouverons en répondant à la deu- xierhe queftion. D’autres preuves plus fortes encore , s’il eft poffi- ble, établifient la réalité de cet enchaînement des caufes, & la jufteffe de la notion que nous avons donnée de la fzralite, Le philofophe chrétien doit établir & défendre contre les difficultés des incrédules , la puiflan- ce, la prefcience, la providence, & tous les attri= buts moraux de l’Être fuprème. Or il ne peut pas combattre {es adverfaires ayec quelque fuccès , fans avoit recours à ce même principe, C’eft ce que nous allons faire voir en peu de mots , & fans {ortir des bornes de cet article, = Et d’abord, pour ce qui regarde la puiflance de Dieu, je dis que le decret par lequel il a donné l’e- xiftence au monde , a fans doute déterminé l’exif- tence de tous les évenemens qui entrent dans le fyftème du monde, dès l'inftant où ce decret a été porté. Or j'avance que ce decret n’a pù déterminer lexiftence des évenemens qui devoient fuivre dans les différens points de la durée , qu’au moyen de l’enchaïnement des caufes, qu’au moyen de ce que ces évenemens devoient être amenés à l’exiftence par la fuite des évenemens intermédiaires entr'eux & le decret émané de Dieu dès le commencement : de forte que Dieu connoïffant la liaifon qui étoit en- tre les premiers effets auxquels il donnoit l’exiften- ce, & les effets poftérisurs qui devoient en fuivre, a déterminé l’exiftence de ceux-ci, en ordonnant l’e. xiftence de ceux-là. Syftème fimple, & auquel on ne peut {e refufer fans être réduit à dire, que Dieu détermine dans chaque inftant de la durée l’exiften. .ce des évenemens qui y répondent, &c cela re des volontés particulieres, des aftes FR É6, opi= 1] - 414 FAT nions cent fois renverfées, & dont on trouvera la réfutation aux 20/5 PROVIDENCE, PRÉMOTION, "Éc. En fecond lieu , la providence entraîne, com- ‘me la création, l’enchaînement des caufes. En effet Ja providence ne peut être autre chofe que la difpo- fition:, l’ordre préetablr, la coordination des caufes entr’elles, on n’en peut pas avoir d’autre notion, fans s’écarter de la vérité. Ce n’eft qu’au moyen de cette coordination & de cet ordre général, qu'on peut venir à-bout de juftifier la providence des maux particuliers qui fe trouvent dans Le fyftème. Si l’on fuppofe une fois les phénomenes ifolés &z fans liai- fon, & Dieu déterminant l’exiftence de chacun d’eux én particulier, je défie qu'on concilie l’exiftence d’un feul Dieu, bon , jufte, faint, avec les maux phyfiques & moraux qui font dans le monde. Aufli perfonne n’a tenté de juftifier la providence, que d’après ce grand principe de la liaifon des caufes. Malebranche , Léibnitz, &c. ont tous fuivi cette ronte; &r avant eux les philofophes anciens, qui fe font faits les apo- logiftes de la Providence. Aulugelle nous a confervé à ce fujet l'opinion de Chryfppe, cet homme qui adoucit la férocité des opinions du portique : Ex1f- timat autem non fuiffe hoc principale nature confilium , ut faceret homines morbis obnoxios : numquam enim hoc convenifle naturæ autori parentique rerum omnium bo- narum , fed cum multa atque magna gigneret , pareret- que aptiflima € utiliffima, alia quoque fimul agnata funt incommoda, tis ipfis , que faciebat , cohærentia. Mais, dira-t-on, cet enchainement des caufes ne jufbifie point Dieu des défauts particuliers du fyfte- me, par exemple du mal que fouffre dans l'Univers un être fenfible, Qu'avois-je à faire, peut dire un hom- me malheureux, d’être placé dans cet ordre de cau- {es ? Dieu n’avoit qu'à me laïfler dans l’état de poffi- ble, & mettre un autre homme à ma place: ces cau- fes font fort bien arrangées, fi l’on veut; maïs je fuis fort mal. Et que me fert tout l’ordre de l'Univers, fi je n’y entre que pour être malheureux ? Cette difficulté devient encore plus forte lorf- qu’on la fait à un théologien, & qu'on fuppofe les myfteres de la grace, de la prédeftination , & les peines d’une autre vie. Mais.je remarque d’abord que cette objection at- fadque au moins auf fortement celui qui regarde tous les faits, tous les évenemens comme 1folés & fans liaifon avec le fyflème entier , que celui qui s’eflotce de jufhifier la providence par l’enchaine- ment des caufes : ainf cette difficulté ne nous eff pas particuliere. Secondement, quand cet homme malheureux dit, qu’i/ voudroit bien n'étre pas entré dans le fÿffème de l'Univers, C’eft comme s'il difoit, qu’! voudroir bien que l'Univers entier fut reffé dans le néant ; car f lui feul, & non pas un autre, pouvoit occuper la place qu'il remplit dans le fyftème aûtuel, èc fi le fyftème aëtuel exigeoit néceflairement qu'il y oc- cupât cette même place dont il eft mécontent, 1l de- fire que le fyffème entier nait pas lieu, en defirant de n'y point entrer. Or je puis lui dire: Pour vous Dieu devoit-1l s’abftenir de‘donner l’exiftence au Tyftème aêtuel, dans lequel il ya d’ailleurs tant de bonnes chofes, tant d'êtres heureux ? oferiez-vous affürer que fa juitice &c fa bonté exigeoient cela de lui? Si vous l’ofiez, la nature entiere qui jouit du bien de l’exiftence s’éleveroit contre vous, & mé- tite bien plus que vous d’être écoutée. On voit bien que cette liaifon étroite d’un être quelconque avec le fyftème entier de l'Univers , qui ‘fait que lun ne peut pas exifter fans l’autre, nous fert ici de principe pour refoudre la difficulté propo- fée : or cette liaïfon eft une conféquence immédiate "8z néceflaire du fyflème de l’enchainement des cau- FAT fes ; puifque dans cette doûtrine , un être quelconque avec fes états divers, tient tellement à tout le fyftè- me des chofes, que l’exiftence du monde entraîne & exige fon exiftence & fes états divers , & réciproque- ment. . On fait qu'avec les principes de lOrigénifme on, réfout facilement cette obieétion ; parce que dans cette opinion tous les hommes devant être heureux après un tems déterminé de peines & de malheurs, il #’y en a point qui ne doive fe loüer de fon exi- ftence , & remercier l’auteur de la nature de l’avoir placé dans l'Univers. Cependant pour donner une réponfe tout-à-fait fatisfaifante , 1l faut toùjours que lOrigénifte lui-même explique pourquoi les hommes font malheureux, même pendant une petite partie de la durée. | Pour cela 1f eft néceffaire | & dañs fon fyflème & dans toute philofophie, de dire que cette objec- tion prend fa fource dans l'ignorance où nous fom- mes des raïfons pour lefquelles Dieu a créé le mon- de ; que nous favons certainement que ces raïfons, quelles qu’elles foient, tiennent au fyftème entier, qu’elles ont empêché que les chofes ne fnffent au- trement ; &c que fi nous les connoiïffons, la provi- dence feroit juilifiée. Réponfe qui, comme on le voit , eft toüjours d’après le principe de l’enchaï- nement des caufes. En troifieme lieu , la prefcience de l’Être fuprème fuppofe cet enchaïînement des caufes; car Dieu ne peut prévoir les évenemens futurs, tant libres que néceflaires, que dans la fuite des caufes qui doivent les amener ; parce que l’infaillibité de la prefcience de Dieu ne peut avoir d'autre fondement que Pin- faillibilité de l’influence des caufes fur les évene- mens. Nous ne pourrions pas entrer dans quelques détails à ce fujet, fans fortir des bornes de cet arti- cle: c’eft pourquoi nous renvoyons les leéteurs au mot PRESCIENCE, Où nous traiterons cette quel- tion. Nous concluons que la puiffance de Dieu, fa pro: vidence, fa prefcience , êc tous fes attributs moraux, exigent qu'on reconnoïffe entre les caufes fecondes , cette liaifon & cet enchaînement, que nous difons être la caufe des évenemens , & par conféquent de tout évenement fazal. Je ne vois que deux fortes de perfonnes qui com- battent cet enchainement des caufes; les défenfeurs du hafard d’Epicure , & les philofophes qui foûtien- nent dans la volonté l'indifférence d'équilibre. Les premiers ont prétendu qu’il y avoit des effets fans caufe; & nous voyons dans Cicéron, de fato, que les Epicuriens preflés d'expliquer d’où venoit cette déclinaifon des atomes , en quoi ils faifoient confifter la liberté, difoient qu’elle furvenoit par hafard,, cafu , & que c’étoit cette déclinaifon qui af franchifloit les actes de la volonté de la loi du f2- Cum. On peut s’en convaincre par ces vers de Lucrece, div, IE verf. 251, 6 fuiv. Denique ft femper motus connetlitur omnis , Et vetere exoritur femper novus ordine certo à Nec declinando faciunt primordia mots Principium quoddam , quod fati fœdera rumpat Ex infinito ne caufam caufa fequatur : Libera per terras unde hec animantibus extat, Unde eft hec, inquam , fatis avolfa voluntas Per quam progredimur qud ducit quemque volup= tas ? Ilneft pas néceffaire de nous arrêter ici à réfuter de pareilles chimeres; il fufira de rapporter ici ces paroles d’Abbadie ( Fériré de la Relig. rom. I. c. v.)< « Le hafard n’eft, à proprement parler , que notre » ignorance , laquelle fait qu'une chofe qui a «en foi # des caufes déterminées de fon exiftence , ne nous » paroit pas en avoir, & que nous ne faurions dire # pourquoi elle eft de cette maniere , plütôt que d’u- # ne autre ». | Les déterminations de la volonté ne peuvent pas être exceptées de cette loi ; & les attribuer au ha- fard avec les Epicuriens, c’eft dire une abfurdité. Or les défenfeurs de l'indifférence d'équilibre , en voulant les foufiraire à l’enchaînement des caufes, fe {ont rapprochés de cette opinion des Epicuriens , puifqu’ils prétendent qu’il n’y a point de caufes des déterminations de la volonté. Is difent donc que dans l'exercice de la liberté, tout eft parfaitement égal de part & d’autre, fans qu'il y ait plus d'inclination vers un côté, fans qu'il y ait de raifon déterminante de caufes qui nous incli- “ment à prendre un parti préférablement à l’autre : d’où 1l fuit que les a@ions libres des êtres intelli- gens doivent être tirées de cet enchaïînement des caufes que nous avons fuppofées. Mais cette opinion eft infoûtenable. On trouvera à l’arcicle LIBERTÉ , les principales raïfons par lef- quelles les Philofophes & les Théologiens combat- tent cette indifférence d'équilibre. D’après leur au- torité, & plus encore d’après la force de leurs rar- fons , nous nous croyons en droit de conclure avec Léibmtz, gu'ly a toñjours une raifon prévalente qui porte la volonté a fon choix, € qu’il fuffit que cette rai[on incline fans néceffirer ; mais qu'il n'y a jamais d'indifférerice d'équilibre , c’eft-a-dire où tout [oir parfai- ement égal de part & d'autre. Dieu, dit-il encore, pour- roit conjours rendre raifon du parti que l’homme a pris, en affignant une caufè ou une raifon inclinante qui l’a porté véritablement à le prendre ; quoique cette raifon Jéroit fouvent bien compofée & inconcevable à nous-mé. nes , parce que l’enchaïnement dès caufes liées les unes avec les autres ,'va plus loin. : Les aëtes libres des êtres intelligens ayant ’eux- mêmes des raïfons fufhfantes de leur exiftence, ne rompent donc point [a chaine immenfe des caufes ; êt fi ün évenement quelconque eft amené à l’exif- tence par les aétions combinées des êtres, tant libres que néceflaires, cet évenement eft faral'; puifqu’on trouve la rarfon fufifante de cet évenément dans l’ordre & l’enchaînement des caufes, & que la fa- talité qu’un philofophé ne peut fe difpenfer d’ad- mettre, n’eft autre chofe que cet ordre &c cet en chaïnement , en tant qu'il a été préétabli par l'Ë- tre fuprème. Je dis La fatalité qu'un philofophe ne peut fe difpen- fer d'admettre : en effet il y en a de deux fortes ; la fatalisé des athées établie fur les ruinés de la liberté ; la fatalité chrétienne, fasum chriflianum ; comme lappelle Léibnitz, c’eft-à - dire l’ordre des évene- mens établi par la providence. Aflez communément on entend les mots fzralifine, fatalifte , fatalité, Dans le premier de ces fens , on ne peut lui donner la deuxieme fignification qu’en Plulofophie, en regardant tous ces mots comme des genres qui renferment fous eux, comme efpeces, le fatalifme néceffitant , 8 celui qui laifle fubfifter la liberté, la fusaliré des athées, & la faraliré chrétien ne, Il appartient aux Philofophes, je ne dis pas de former , mais de corriger & de fixer le langage. Qu'on prenne garde que faraliré , {elon la force de ce mot, ne fignifie que la caufe de l’évenement fz- tal: or comme on eft obligé de reconnoïître qu'un évenement fza/ a des caufes, tout le monde en ce fens général eft donc faralifle. . Maïs fi la caufe de l’évenement faral n’eft, felon vous,que lation d’un rigide méchanifme, votre far4- lire eftnéceffitante, votre fatalifme eft affreux : que fi cette caufe n’eft que l’aétion puiffante & douce de l'Ë- tre fuprème, quia fait entrer tous Les évenemens dans FAT 425 l’ordre & dans les vües de fa providence, nous ne condamnerons point lexpreffion dont vous vous fer- vés. C’eft précifément ce que dit faint Auguftin, au lv. W. de la cité de Dieu , chap. viij. « Ceux, dit-il, » qui appellent du nom de fatalité, l’enchainement # des caufes qui amenent l’exiftence de tout ce qui » fe fait, ne peuvent être ni repris, ni combattus » dans l'ufage qu'ils font de ce mot ; puifque cet or- » dre & cet enchaïînement eft, felon eux, l'ouvrage » de la volonté &r de la puiffance de l’Être fuprème » qui connoit tous les évenemens avant qu’ils arti- » vent, & qui les fait tous entrer dans l’ordre géné- » tal », Qui omnium connexionem feriemque caufarums qua fit omne quod fit, fati nomine appellant , non mul- tm cum eis de verbi controverft@ laborandum atque cer- tandum eff ; quandÔ quidem ipfum caufarum ordinem € quamdam connexionem Der furmmi tribuunt voluntati & poteflati, qui optimè & veraciffimè creditur , 6 cunc- ta cire antequam fiant , & nihil inordinatum relinquere. Nous terminerons l’examen de la premiere quef- tion par ce pañlage , qui renferme l'apologie com- plete des principes que nous ayonsétablis ; & en fup- pofant démontrée l’exiftence de cette facaliré impro- prement dite, prife pour l’ordre des caufes établi par la providence, nous paflerons à la deuxieme queftion. DEUXIEME QUESTION. L'enchainement des caufes qui amenent l’évenement fatal , rend-il nécef[aire l'évenements fatal ? On fent aflez que la difficulté en cette matiere vient de ce que, felon la remarque que nous avons faite plus haut, il y a des caufes libres parmi celles qui amenent lévenement faral: & fi ces caufes font enchainées, ou entre elles dans un même ordre, où avec les caufes phyfiques ; dès-1à même ne font- elles pas néceflitées , & l’évenement faa/ n’eft-il pas néceffaire ? S1 c’eft l’enchainement des caufes qui me fait pafler dans une rue où je dois être écra- fé par la chüte d’une maïfon, pendant que j’avois d’autres chemins à prendre, ma détermination à paf fer dans cette malheureufe re, a donc été elle-mê- me une fuite de l’enchaïnement des caufes, puif- qu’elle entre parmi celles de l’évenement fare/. Mais fi cela eft, cette détermination eft-elle libre, & lé- venement fatal n’eft-il pas néceffaire ? Nous avons vü plus haut, que parmi les philofo- phes qui ont traité cette queftion , & qui ont'recon- nu-cet enchaînement des caufes, la plüpart ont re- garde la faraliré comme entraînant après elle une né- ceffité abfolue ; & nous ayons remarqué que c’étoit une fuite naturelle de cette opinion dans tout fyftè- me d’athéifme & de matérialifme. Mais Cicéron nous apprend que Chryfippé en admettant la faraliré prife pour l’enchaînement des caufes, rejettoit pout- tant la néceffité. Or Carnéades, cet homme à qui Cicéron accorde l’art de tout réfuter, argumentoit ainfi contre Chry- fippe. Si omnia antecedentibus caufis fiunt ; omnia na. curali colligatione contextè confertèque funr : quod JE ita ef? , omnia neceffitas efficie : id [£ verum eff, nihil ef? in noffré poteflate : et autem aliquod in nofiré po- ceffate: non igitur fato fouintquecumque fiunr.« Sitous » les évenemens font lesfuités de caufes antérieures, » tout arrive par une liaifon naturelle & très-étroi- » te: fi cela eft, tout eft néceffaire, & rien n’eft en » notre pouvoir », Cic. de fato. #4 Voilà l’état de la queftion bien établi, & la diffi= culté qu'il faut refoudre. Voyons la réponfe de Chry: fippe. Selon Cicéron, ce philofophe voulant éviter la néceffité , & retenir l’opinion que rien ne fe fait que par l’enchaînement des caufes, diftinguoit dif. férens genres de caufes ; les unes parfaites & prin- cipales , les autres voïfines & auxiliaires; ae pers 426 FAT fete & principales, alie adjuvantes & ptoxime. Wpré- tendoit qu'il n’y a que l’aétion des caufes parfaites & principales, diftinguées de la wolonté, qui puiffe en- traîner la ruine de la liberté; & il foûtenoit que l’ac- tion de la volonté, qu'il appelloit affemfio, n’a pas de caufes parfaites & principales diftinguées de la vo- lonté elle-même.ll ajoûtoitque les impreffions des ob- jets extérieurs , fans lefquelles cet affentimentne peut pas fe faire (zeceffe ef? enim affenfionem vifo commove- ri) que ces imprefhons , dis-je, ne font que des cau- {es voifines & auxiliaires, d’après lefquelles la volon- té fe meut par fes propres forces, mais toüjours confé- quemment à l’impreflion reçue, extrinfecis pulfafuäp- te vi ac naturé movebitur ; ce qu'il expliquoit par la comparaïfon d’un cylindre, qui recevant une impul- fion d’une caufe étrangere, ne tient que de fa nature le mouvement déterminé de rotation, de volubilité, qui fuit cette impulfon. Cette réponfe n’eft pas fans difficulté ; elle eft éta- blie fur de fauffes notions des fenfations & des opé- rations de l’ame ; la comparaïfon du cylindre n’eft pas exacte, Cependant elle a quelque chofe de vrai, c’eft que l’a@ion des canfes qui amenent le confen- tement de la volonté, ne s’exerçant pas immédiate- ment fur ce confentement | mais {ur la volonté, l’ac- tivité de l’ame &c fon influence libre fur le confente- ment qu’elle forme, ne font léfées en aucune maniere. C’eft du moins la réponfe de S. Auguftin, de civir, Dei, lib. V. cap. x. qui, après avoir rapporté cette même difficulté de Carneades contre Chryfppe, la réfout à-peu-près de la même maniere : ordinem cau- Jfarum , dit-il, zon regamus , non efl autem confequens ut fe certus eff ordo caufarum , ided nihil [it in noffræ vo- luntatis arbitrio , ipl& quippe voluntates in caufarum or- dine funr. Voilà le principe de Chryfppe : la volonté elle-même entre dans l’ordre des caufes , felon faint Aupguftin ; & comme elle produit immédiatement fon ation, quoiqu'’elle y foit portée par des caufes étran- geres , elle n’en eft pas moins libre, parce que ces caufes étrangeres l’inclinent fans la néceffiter. Mais reprenons nous-mêmes la difficulté; elle fe réduit à ceci : fi la volonté eft mûe à donner fon con- fentement par quelque caufe que ce foit , étrangere à elle & liée avec fa détermination , elle n’eft pas libre : fi elle n’eft pas libre , toutes les caufes qui amenent l’évenement fzral font donc nécefflaires, & l'évenement faral eft néceffaire. Je répons, En premier lieu , lorfqu’on regarde cette liaifon des caufes avec la détermination de la volonté com- me deftruétive de la liberté , on doit prétendre que toute liaifon d’une caufe avec fon effet eft néceffai- re, puifqu'on foûtient que la caufe qui influe fur Le confentement de la volonté, par cela feul qu’elle in- flue {ur ce confentement, le rend nécefaire : or cela eft infoûtenable , & les réflexions fuivantes vont nous en convaincre. Dieu peut faire un fyftème de caufes libres, Qu'’eft- ce qu'un fyftème quelconque ? la fuite & l’enchaîne- ment des aétions qui doivent s’exercer dans ce fyf- tème. Dieu ne peut-il pas enchaîner les adtions des caufes libres entr’elles , de forte que la premiere amene la feconde, & que la feconde fuppofe la pre- micre; que la premiere & la feconde amenentlatroi- fieme ,-& que la troifieme fuppofe la premiere & la feconde, & ainfi de fuite? Ces caufes, dès-là qu'elles feront coordonnées entr’elles de forte que les modi- fications êc les a@tions de l’une amenent Les modif- cations & les aétions de l’autre, feront-elles néceffi- tées ? non fans doute. Un pere tendrement aimé me- nace, exhorte, prie un fils bien-né: fes menaces, fes exhoftations, {es prieres faites dans des circonftan- ces favorables, produiront infailliblement leur effet, & feront caufes des déterminations de la volonté de ce fils; voilà l'influençed’une çaufe libre fur une cau- FAT fe hibre : voilà des caufes dont les aétions font liées enfemble, & qui n’en font pas moins libres. ! Mais dira-t-on: que les caufes intelligentes foient coordonnées &r liées entr'elles, peut-être que cet enchainement ne fera pas incompatible avec leur li- berté : mais fi des caufes phyfiques agiflent fur des caufes intelligentes, cette aétion n’emportera-t-elle pas une néceflité dans les caufes intelligentes ? Oril paroït que felon notre opinion ces deux efpeces de caufes font liées les unes aux autres, de forte que les aétions des caufes phyfiques entrainent les aétions des êtres intelligens , & réciproquement. | Je répons 1°. que la néceffité, s’il en réfultoit quel- qu'une de limpulfion d’une caufe phyfique fur une caufe intelligente , s’enfuivroit de même de l’im- pulfion d’une caufe intelligente &c libre fur une caufe intelligente, parce que laétion de la caufe phyfique n’emporteroit la néceflité qu'à raïfon de la maniere d'agir, ou à raifon de ce qu’elle feroit étrangere à la volonté ; or la caufe intelligente & libre qui influe- roit fur l’aétion d’une caufe intelligente, feroit éga- lement étrangere à celle-ci & agiroit d’une maniere auf contraire à la liberté, 2°, Ceci n’a befoin que d’une petite explication. Si l’aétion de la caufe phyfique que nous difons ame- ner l’a@tion d’une caufe libre, telle que la volonté, s’exerçoit immédiatement fur la détermination, {ur le confentement de la volonté (à-peu-près comme les Théologiens favent que les Thomiftes font agir leur prémotion), nous convenons que la liberté fe- roit en danger ; mais 1l n’en eft pas ainf. L’aétion des caufes phyfiques amene dans l'être intelligent ( foit par le moyen de l'influence phyfique , foit dans le fyftème des caufes occafonnelles ) amene, dis-je, d’abord des modifications, des fenfations, des mou- vemens indélibérés ; & à la fuite de tels & tels mou- vemens, de telles & telles modifications reçues dans l’ame naïflent infaïlliblement , mais non néceflaire- ment, telles aétions dont ces mouvemens & ces mo- difications font la caufe ou la raifon fuffifante ; c’eft cette caufe ou raifon fuflfante qui unit le monde phyfique avec le monde intelleétuel : or que les ac- tions qui s’exercent dans l’ordre phyfique entraînent des modifications , des fenfations , des mouvemens dans les caufes intelligentes, & que ces modifica- tions , ces fenfations, 6. amenent des aétions de ces caufes intelligentes , 1l n’y a rien là de contraire à l’activité &c à la hberté de ces êtres intelligens. Il fuit de-là, que Dieu a pù coordonner & lier entr’elles les aétions qui s’exercent dans un monde phyfique & celles des êtres intelligens & libres, fans nuire à la liberté de ces mêmes êtres; que dans cette hypothèfe,l’enchainement des caufes établi par Dieu amenant les aétions des êtres intelligens, ne rend pas ces attions néceflaires ; que parmi les caufes enchat- nées de l’évenement face! il y en a de libres, & par conféquent que évenement faral n’eft pas lui-même néceflaire. En fecond lieu, pour foûtenir que cette liaifon des caufes avec la détermination de la volonté eft incom- patible avec la liberté, il faut partir de ce principe, que toute liaïfon infaillible d’une caufe avec fon ef- fet eft néceflaire, & que tout enchainement de cau- fes eft incompatible avec la liberté : f ommia naturali colligatione fiunt, omnia neceffitas efficir, Or cette pré- tention eft abfolument faufle, & voici les raifons qui la combattent : 1°. rien ne fe fait fans raïfon fuffifan- te , & un effet qui a une raïfon fufhfante , n’eft pas pour cela néceflaire ; or un effet qui a une raïfon fuf- fifante eft par cela même infaillible ; car fi un effet ui a une raïifon fuffifante n’étoit pas infailhble , on pourroit fuppofer qu’étant donnée la raïfon fufifante d’un tel effer, il en eft arrivé un autre. Or cette fup- pofñtion eft abfurde ; çar dans çe ças la raifon quifait qu'un effet eff tel, pourtoit faire qu'il eft tout autré, _ (Marine, ) vent favorable, c’eft un vent qui porte vers l'endroit où l’on veut aller, ou à la route qu’on veut faire. Voy. VENT, ALISÉ, &c, FAVORT, FAVORITE, adjet. m. & f. (Æif. & Morale.) Voyez FAVEUR. Ces mots ont un fenstantôt plus reflerré tantôt plus étendu. Quelquefois favori emporte idée de puifflance, quelquefois feulement il fignifie un homme qui plaît à fon maître, . Henni III, eut des favoris qui n’étoient que des mignons ; 1l en eut qui gouvernerent l’état, comme le duc de Joyeufe 8 d’Épernon : on peut comparer un favori à une piece d'or, qui vaut ce que veut le prince. Un ancien a dit: qui doit étre le favori d'un ro? c'eff le peuple. On appelle les bons poëtes 4s favoris des Mujfes , comme les gens heureux /es fzvo- is de la fortune , parce qu’on fuppofe que les uns & les autres ont reçu ces dons fans travail. C’eft ainf qu’on appelle un terrain fertile & bien fitué le favori de la nature. La femme qui plaît le plus au fultan s’appelle par. mi nous la fultane favorite ; on a fait l’hiftoire des f2- vorites , c’eft-à-dire des maîtrefles des plus grands princes. Plufieurs princes en Allemagne ont des mai- {ons de campagne qu’on äppelle /a favorite, Favori d’une dame , ne fe trouve plus que dans les romans & les hifiorietes du fiecle pañlé, Foyez Faveur. Article de M. DE VOLTAIRE. FAU-PERDRIEUX , (Penerie,) c’eft-à-dire faucon perdrieux faucon qui prend des perdrix. Ÿ. FAUCON. FAUSSAIRE, fub. m. (Juri/prud.) eft celui qui a commis quelque faufleté, foit en fabriquant une pie- ce fuppoñée , {oït en altérant une piece qui étoit vé- ritable. Voyez ci-après FAUx. (4) FAUSSER LA COUR 04 LE JUGEMENT, (Jurifpr.) falfare judicium, ainfi que l’on s’exprimoit dans la bafle & moyenne latinité ; c’étoit foûtenir qu’un ju- gement avoit été rendu méchamment par des juges corrompus ou par haine , que le jugement étoit faux & déloval. | Pour bien entendre ce que c’étoit que cette ma- niere de procéder, il faut obferver qw’anciennement en France on ne qualifioit pas d’appel la maniere dont on attaquoit un jugement ; on appelloit cela fuuffer Le jugement ou accufation de faufleté de juge- ment , ce qui fe faifoit par la bataille ou le duel, fui- vant le chap. ïij. des aflifes de Jérufalem qu’on tient avoir été rédigées l’an 1099. | Dans les chartes de commune du tems de Philippe Augufte, fous lequel Les baïllis & fénéchaux étoient tépandus dans les provinces , on ne trouve point qu'il y foït mention de la voie d’appel, mais feule- ment d’accufation de faufferé de jugemens & de duel ou gages de bataille pour prouver cette accufation: enforte que fi les baïllis s’entremettoient de la jufti- ce En parcourant les provinces, c’étoit offcio judicis. Il eft parlé de l’accufation de fauffeté du Jugement dans une ordonnance de $. Louis, faite au parlement de la chandeleur en 1260, & inférée en fes établi femens , lv. L. ch. y. qui porte are, 8, que fi aucun veut faufler le jugement au pays où il appartient, que Jugement foit fauf[é (ce pays étoit fans doute le pays coütumier ), 1l n’y aura point de bataille; mais que les clains ou a@ions, les refpons, c’eft-à-dire les dé- fenfes & les autres deftrains de plet, feront apportés en la cour, que felon les erremens du plet on fera dépecter le jugement ou tenir, & que celui qui fera trouvé en {on tort , l’amendera felon la coûtume de la terre. Selon Beaumanoïr, dans le chap. Ixvij. de fes co. sumes de Beauvaifis, pag. 337, à la fin U étoit deux Tome FI, FAU 437 manieres de faute le jugément, defquels lieux dès ap. piaux, c’eft-à-dire appels fé devorent mener par gages } C'étoit quand l’on ajoétoit avec l'appel FILAIN CAS: l'autre fe devoir demener par ERREMENS » Jur quot là Jugement avoit été fait. Ne Pourquanñt [e ler appelloit de faux jugemens des hommes qui Jugeoierir en la cour lé comte, & li appellieres (Pappellant) re mertoit en for appel FILAIN CAS, il éroit au choix de cheluy contre qui l'on vouloit faufler jugement, de faire Le Jugement Par gages devant le comte & devant fon confeil, &c. On voit par ce que dit cet auteur, que les juges mens {e fauffoient, où par défaut de droir ou deni dé Juffice , c’et-à-dire lorfqu'ils n’étoient pas rendus ju+ ridiquement, ou parte qu'ils étoient fauflement ren dus. Celui qui prenoit cette derniere voie devoit; comme dit Pierre de Fontaines en fon confeil, chap, Xx1}, art. 19. prendre le féigneur à partie en lui difanrt à Je fauffe le mauvais jugement que vozs m'avez fait paf loyer que vous en avez eu ou promeffe, &c. Beaumanoir dit encore à ce fujet, pag. 314. qué les appels qui étoient faits par défaut de droit , ne de: voient être demenés par gages de bataille, mais par montrer refons, parquoi le défaute de droit fut clair, & que ces raifons convenoit il averer par tefmoins loyaux fi elles étoient niées de celui qui étoit appellé de defaute de droit : mais que quand les tefmoins vez noient pour témoignef en tel cas, de quelque partié que ils vinflent , ou pour l’appellant ou pour celui qui étoit appellé, celui contre qui ils vouloient té- motgner pouvoit, fi il lui plaifoit, lever le fecond temoin &e lui mettre fus que il étoit faux & parjure, & qu'ainfi pouvoient bien naître gages de l'appel qui étoit fait fur défaut de droit, &c. L’accufation de fauffèté contre Le Jugement, étoit une efpece d’appellation interjettée devers le fei- _ gneur lorfque le jugement étoit fauflé contre les Jus geurs ; & dans ce cas le feigneur étoit tenu de nom mer d’autres juges : maïs fi le feigneur lui-même étoit pris à partie , alors c’étoit une appellation à la cour fupétieure. : On ne pouvoit fauffer le jugement rendu dans les juftices royales. À l'égard de ceux qui étoiént émas nés des juftices feigneuriales , il falloit fauffer Le juge. ment le jour même qu'il avoit été rendu. C’eft fans doute par une fuite de cet ufage que l’on étoit au- trefois obligé d’appeller i//co. Celui qui étoit noble devoir faulfer le jugement où le reconnoître bon; s’il le fazffoir contre le feigneur, il devoit demander à le combattre & renoncer à fon hommage, S'il étoit vaincu, il perdoit fon fief : f au contraire 1l avoit l’avantage , il étoit mis hors de l’obéiffance de fon feigneur, Il n’étoit pas pérmis au roturier de fauffer Le jugez ment de fon feigneur; s’il le fzzffoir, il payoit l'amen- de de fa loi; &c fi le jugement étoit reconnu bon il payoit en outre l'amende de 60 fous au feigneur , & une pareille amende à chacun des nobles où poflef- feurs des fiefs qui avoient rendu le jugement. Les regles que l’on fuivoit dans cette accufation ; font ainfi expliquées dans différens chapitres des éta- _ blifemens de $. Louis. Defontaines , c4. xl]. 6 xx. dit, que fr aucun eft qui a fais faux Jugement en court, il a perdu re= pous. Voyez M. Ducange, fur les-éabliffemens de S. Louis, p.162. (4) FAUSSET , {. m. (Mufique.) eft cetté efpece de Vox, par laquelle un homme fortant, à l’aigu, du diapafon de fa voix naturelle, imite celle de femme: Un homme fait à-peu-près, quandil chantele fauffer, ce que fait un tuyau d'orgue quand il oûtavie. (S) FAUSSET, f. m: eft un terme d’Ecriture; il {e dit du bec d’une plume lorfqu’il fe termine à-peu-près en pointe ; cette forte de plume eft excellente dans l’exz pédition, Kkk 438 PF AU FAUSSETÉ, £. f. (Morale. le contraire de la vé- rité. Ce n’eft pas proprement le menfonge, dans le- quel il entre toûjours du deflein, On dit qu'il ya eu cent mille hommes écrafés dans le tremblement de terre de Lisbonne, ce n’eft pas un menfonge, c’eft une fauffece. La un eft prefque toûjours encore plus qu'erreur. La faufferé tombe plus fur les faits ; l'erreur fur les opinions. C’eft une erreur de croire que le foleil tourne autour de la terre; c’eft une faf! feté d'avancer que Louis XIV. dia le teftament de Charles]. La faufferé d’un aëte eft un crime plus grand que le fimple menfonge; elle defigne une impoñture juridique, un larcin fait avec la plume. Un homme a de la fzufleré dans l'efprit, quand il prend prefque toûjours à gauche ; quand ne confidé- rant pas l’objet entier , 1! attribue à un côté de l’ob- Jet ce qui appartient à l’autre, & que ce vice de ju- gement eft tourné chez lui en habitude. Il a de la faufleté dans le cœur, quand il s’eft accoûtumé à fla- ter 8 à fe parer des fentimens qu’il n’a pas ; cette fauffecé eft pire que la diffimulation , & c’eft ce que les Latins appelloient f£ralatio. Il y a beaucoup de faulfeté dans les Hiftoriens, des erreurs chez les Phi- lofophes , des menfonges dans prefque tous les écrits polémiques, & encore plus dans les fatyriques. Foy. CRITIQUE. Les efprits faux font infupportables, &c les cœurs faux font en hofreur, Arricle de M. DE VOLTAIRE. * FAUSSURES, f. f. serme de Fondeur ; c’eft ainf qu’on appelle l'endroit de la furface extérieure & inférieure d’une cloche où elle ceffe de fuivre la mê- me convexite. Les fauflures d’une cloche ont ordi- nairement un corps d’épaifleur, ou le tiers du bord de la cloche. _: On les appelle fauffures, parce que c’eft fur cette circonférence de la cloche que fe réuniffent les arcs de différens cercles dont la courbure extérieure de la cloche eft formée; courbure qui par cette raifon n’eft pas une ligne homogene & continue. FAUTE, (Jurifprud.) en Droit, eft une aétion ou omiflion faite mal-à-propos, foit par ignorance, ou pat impéritie, ou par négligence. La faute differe du do!, en ce que celui-ci eft une ation commife de mauvaife foi, au lieu que la faure confifte le plus fouvent dans quelqu’omiflion & peut être commife fans dol : il y a cependant des aétions ui font confidérées comme des fautes; & il y a telle Fe qui eft fi grofliere qu’elle approche du dol, com- me on le dira dans un moment. IL y a des contrats où les parties font feulement refponfables de leur dol, comme dans le déport vo- lontaire & dans le précaire : il y en a d’autres où les contratans font aufli refponfables de leurs faures , comme dans le mandat, dans le commodat ou prêt à ufage, dans le prêt appellé zutuum ; la vente, le gage , le louage, la dotation, la tutelle, l’adminif- tration des affaires d'autrui, C’eftune faute de ne pas apporter dans une affaire tout le foin & la diligence qu’on devoit, de faire une chofe qui ne convenoïit pas, ou de n’en pas faire une qui étoit néceflaire, ou de ne la pas faire en tems & lieu; c’eft pareillement une faute d'ignorer ce que tout le monde fait ou que l’on doit favoir, de forte qu’une ignorance de cette efpece, & une impéritie carattérifée, eft mife au nombre des foures. Mais ce n’eft pas par le bon ou le mauvais fuccès d’une affaire , que l’on juge s’il y a faure de la part des contra@tans ; & l’on ne doit pas imputer 4 faute ce qui n’eft arrivé que par cas fortuit, pourvû néan- moins que la faute n’ait pas précédé le cas fortuit. On ne peut pareillement taxer de fause , celui qui n’a fait que ce que l’on a coûtume de faire, &c qui a apporté tout Le foin qu’auroit eu le pere de famille le plus diligent. FAU . L’omiffion de cé que l’on pouvoit faire n’eft pas toüjours réputée une faute, mais {eulement l’omif- fion de ce que la loi ordonne de faire, & que l’on a négligé volontairement ; de forte que fi l’on a été em pêché de faire quelque chofe, foit par force majeure ou par cas fortuit, on ne peut être accufé de faure. On divife les fautes , en faute grofiere, legere , & très-legere, Lara, levis, 6 leviffima culpa. La faure grofliere, lata culpa , confifte À ne pas ob- ferver à l'égard d'autrui, ce que l’homme le moins attentif a coûtume d’obferver dans fes propres af- faires , comme de ne pas prévoir les évenemens na- turels qui arrivent communément , de s’embarquer par un vent contraire, de furcharger un cheval de loüage ou de lui faire faire une courfe forcée, de fer- rer ou moïflonner en tems non opportun. Cette fa- ce où négligence groffiere ef comparée au dol, parce qu’elle eft dolo proxima , c’eft-à-dire qu’elle contient en foi une préfomption de fraude , parce que celui qui ne fait pas ce qu'il peut faire, eft reputé agir par un efprit de dol. | Cependant celui qui commet une faure groffiere n’eft pas toûjours de mauvaife foi; car il peut agir ainfi par une erreur de droit croyant bien faire ; c’eft pourquoi on fait prêter ferment en juftice {ur le dol, & non pas fur la fzure, Dans les matieres civiles, on applique communé- ment à la faure grofliere la même peine qu’au dol; mais 1l n’en eft pas de même en matiere criminelle, fur-tout lorfqu'1l s’agit de peine corporelle. La faute legere qu’on appelle auffi quelquefois faute fimplement , eft l’'omiffion des éhofes qu’un pere de famille diligent a coûtume d’obferver dans fes af. faires. La faute très-legere, eft l'onuffion du foin le plus exat, tel que l’auroit eu Le pere de famille le plus diligent. | 4 La peine de la faure legere & de la faute très- lesere ne confifte qu’en dommages &£ intérêts ; encore y a- t-il des cas où ces fortes de fzuses ne font pas punies, par exemple, dans le prêt à ufage appellé commoda- um , lorfqu’il n’eft fait que pour faire plaïfir à celui qui prête : on ne les confidere pas non plus dans le précaire, & dans le gage on n’eft pas tenu de [a fzure très-legere. On impute néanmoins la faure très-lesere à celui qui a été diligent pour fes propres affaires, 8 qui pouvoit apporter le même foin pour celles d'autrui. En matiere de dépôt on diftingue. S’il a été fait en faveur de celui auquel appartient le dépôt, alors par lation de dépôt appellée cozraire, le dépofant eft tenu de la faute la plus legere ; & file dépofitaire s’eft offert volontairement de fe charger du dépôt, il eft pareïllement tenu de la faute la plus legere : mais s’il ne s’eft pas offert , 1l eft feulement tenu de la faute groffiere &c de la faute legere : fi le dépôt a été fait en faveur du dépofitaire feulement , alors le dépoñtaire contre lequel il y a a&tion direéte eft tenu de la faure la plus legere ; s’il n’y a contre lui que lation appel- lée contraire, il eft feulement tenu de la faute grof- fiere ; fi le dépôt a été fait en faveur des deux parties, le dépoñitaire n’eft tenu que de la faure legere. Dans le mandat qui eft fait en faveur dumandant, lorfqu’il s’agit de l’action direéte, & que le mandat n’exigeoit aucune induftrie, ou du moins fort peu, en ce cas on n’impute au mandataire que Le doi & la faute groffiere , de même qu’au dépoñitaire. Si le man- dat demande quelqu'indufirie , comme d’acheter ou vendre, &c. alors le mandataire eft tenu non-feule- ment du dol & de la faute groffiere, maïs aufli de la faute legere. Enfin file mandat exige le foin le plus diligent , le mandataire étant cenfé s’y être engagé eft tenu de la faute la plus legere, comme cela s’ob- ferve pour un procureur ad lites ; & par l’aétion con- FAU traire le mandant eft auffi tenu de la faure la plus le- gere. k | Le tuteur & celui qui fait Les affaires d’autrut, font tenus feulement du dol de la faute groffiere & legere. Dans le précaire on diftingue ; celui qui tient la chofe, n’eft tenu que du dol & de la faute groffere jufqu’à ce qu'il ait été mis en demeure de rendre la chofe ; mais depuis qu'il a été mis en demeure de rendre la chofe, il eft tenu de la face legere. Pour ce qui eft des contrats innommés , pour fa- voir de quelle forte de faure les parties font tenues, on fe regle eu égard à ce qui s’obferve pour les con- trats nommés, auxquels ces fortes de contrats ont le plus de rapport. En fait d'exécution des dernieres volontés d’un défunt, fi l'héritier teflamentaire retire moins d’a- vantage du teftament que les légataires ou fideicom- miflaires, en ce cas il n’eft tenu envers eux que du dol & de la faute grofliere : fi au contraire il retire un grand avantage du teftament, & que les autres en ayent peu, il eft tenu envers eux de la fawse très- légere ; fi l'avantage eft égal, il n’eft tenu que des fautes legeres. En matiere derevendication,le poflefleur de bonne foi n’eft pas refponfable de fa négligence, au lieu que le pofleffeur de mauvaife foi en eft tenu. Dans l’aétion perfonnelle intentée contre un dé- biteur qui eft en demeure de rendre ce qu'il doit, 1l eft tenu de fa négligence, foit par rapport à la chofe ou par rapport aux fruits. Voyez L. contrait, jf. de reg. jur. L. 213.223. 6226. ff. de verb. fignif. L, focius. ff. pro foco ; & Gregor. Tolof. in fyntagm. Juris univ. &b, XXI, cap. x]. (4) Be | FAUTE , ( Hydr.) Les fautes font inévitables , foit dans les conduites ou tuyaux qui amenent les eaux, oit dans les baflins & pieces d’eau, & il n’eft fou- vent pas aïfé d’y remédier. Quand les tuyaux con- duifent des eaux forcées , la faure fe découvre d’elle- même par la violence de l’eau; mais dans les eaux roulantes ou de décharge , il faut quelquefois dé- couvrir toute une conduite pour connoître la fase : on remet alors de nouveaux tuyaux ; on les foude, on les maftique, fuivant leur nature. Le moyen de connoitre une faute dans un baflin de glaife , eft de mettre fur l’eau une feuille d'arbre, de la paille, ou du papier, & de fuivre le côté où elle fe rend. On y fait ouvrir Le corroiï ; on remanie les glaifes, & pour les raccorder avec les autres , on les coupe en marches ou par étages, & jamais en ligne droite, ce qui feroit perdre l’eau. (X) FAUTEUIL, f. m. chaïfe à bras avec un doflier. Voy. Particle CHAïsE. Les fimples chaïfes font beau- coup moins d’ufage dans les appartemens que les fauteuils. On a relégué les chaifes dans les jardins, les antichambres, les églifes, &c. FAUTEUIL, ( droit de ) Police mil. C’étoit un droit arbitraire & d’ufage, plus ou moins fort fuivant les lieux, que les états - majors des places de guerre en France s’arrogeoient à titre d’émolumensfur chacun des régimens ou bataillons qui compofoientleurs gar- nifons, pour raïfon de l'entretien des faureuils dans le corps-de-garde des officiers : les capitaines de cha- que corps y contribuoient également , &c la fomme s’en repartiAoit entre tous les officiers de l'état-ma- j0r , fuivant leurs grades ; mais Le Roï ayant jugé ce droit , & plufieurs autres de même nature , abufif & trop onéreux aux capitaines, dont ils chargeoïent les appointemens., en défendit l’exa&ion par fon ordon- nance du 25 Juin 1750, concernant le fervice des places. | Cette difpoñition efluie le fort de beaucoup d’au- tres de la même ordonnance ; on s’y foûmet dans quelques places , on y contrevient dans d’autres. La France eft le pays du monde qui poflede les Tome VI. FAU 439 plus beaux teglemens & les plus fages , fhr toutes les parties d’adminiftrarion ; ils annoncent le zele, l'équité , & les lumieres des miniftres & magiftrats qui les ont conçus & rédigés ; tous les cas y font pré- vus, toutes les difficultés réfolues : il ne leur man- que que l'exécution. Ces article eff de M. DURIV AL le jeune. FAUVE , BÊTE-FAUVE , ( Véserie,) On com- prend fous cette détermination le cerf, le daim ,; SE le chevreuil. Foyez l’arcicle GiBtER. FAUVETTE,, . £. CHE. nar. Ornitholog.) curru- ca. Cet oïfeaureft prefque auf gros que la farloufe ou la gorge rouge ; fon bec eft mince, alongé & noir ; fa langue eft fourchue , dure , tendineufe & noire à l’extrémité ; les narines font oblongues ; li. ris des yeux eft couleur de noïfette ; les oreilles font grandes & couvertes ; les plumes des épaules & du deflus du dos font noires dans le milieu autour du tuyau, & de couleur rouffe fur les bords : la tête & le cou font un peu cendrés avec des taches au milieu des plumes qui font plus foncées; le bas du dos & le croupion font de couleur jaunätre avec une teinte de verd fans aucune tache noire ; les grandes plu- mes des aîles font brunes, à l'exception des bords ex- térieurs qui font rouffâtres ; les plumes intérieures du fecond rang, ont chacune à la pointe deux peti- tes taches de couleur blanchâtre ; les plus petites plumes des ailes font de la même couleur que les plumes du dos ; la premiere grande plume eft très courte ; la queue a environ deux pouces de longueur ; elle eft entierement brune ; Le deflous de l’oïteau eft de couleur cendrée , cependant le ventre éft un peu blanchâtre ; & dans quelques individus , cette cou- leur eft plus grife , &: même plombée ; les jambes & les pattes font de couleur de chair jaunâtre ; les on- gles font bruns ; le doigt de derriere eft le plus gros & le plus long ; le doigt extérieur tient au doigt du milieu à fa naiflance,comme dans les autres petitsoi- feaux. Celui-ci niche dans les haies ; il donne aïfé- ment dans toute forte de pièges. Willugb. Ori. FAUVETTE À TÊTE NOIRE , arricapilla feu ficedu- la , Ald. oïfeau qui eft très-petit, & qui a le fommet de la tête noir, comme fon nom le défigne. Le cou eft de couleur cendrée , & le dos d’un vert foncé ; la poitrine a une couleur cendrée pâle ; le ventre eft d’un blanc jaunâtre ; le bec noir, & plus mince que celui de la mefange ; les piés font d’une couleur li- vide. Ray, fyrop. meth. avium. pag. 79. Voyez O1- SEAU. (1) FAUX, adj. serme d’Arithmétique 6 d’Algebre, I] a, en Arithmétique , une regle appellée regle de nue pofition, qui confifte à calculer, pour la réfolution d'une queltion, des nombres faux pris à volonté, comme fi c’étoit des nombres propres à la réfoudre, & à déterminer enfuite, par les différences qui en réfultent , les vrais nombres cherchés. Les regles de fzuffe pofition, où l’on ne fait qu’une feule fuppoñition, font appellées regles de fauffe poft- tion fimple , & celles dans lefquelles on fait deux fauffes fuppofirions, s’appellent regles de fauffe pof- tion double ou compote. Exemple d’une regle de faufle pofiion fimple. Trouver un nombre dont la moitié, le tiers, & le quart, faflent 26. | Suivant l’efprit de la regle de fzuffe pofition , pre- nons au hafard un nombre quelconque, tel cepen- dant que l’on puiffe en avoir exaétement la moitié, le tiers, & le quart: par exemple 12, dont la moitié eft 6, le tiers 4, & le quart 3, lefquelles quantités additionnées ne font que 13 fort différent dé 26; mais dites par une regle de trois: Sit3 font prove- nus de 12, d’où 26 doivent-ils provenir ? En faifant la regle, vous trouverez 24, dont effeétivement la kk ij 440 F A U moitié 12, le tiers 8 , & le quart 6, donnent 26 pour {omme. Ce problème peut évidemment fe réfoudre encore par l’Algebre, en faifant cette équation = + + + + | 3 4 p + 1272 +8x+6% = 26 (voyez EQUATION). D'où lon tire —— ‘= 16, & 2 = 26,oux = 24. Mais alors il ny a plus de fauffe pofition. du. Pour les regles de faufle pofition compofée , il ef beaucoup plus fimple de réfoudre par l'Alsebre les problèmes qui s’y rapportent. Exemple, Un particulier a pris un ouvrier pour trente jours, à condition de lui donner 30 fous cha- que jour qu'il travailleroit, & de rabattre fur le gain de fon travail autant de fois 10 fous, qu'il feroit de jours fans travailler, Au bout du mois l’ouvrier a reçu 25 liv. ou $oo fous. On demande combien il a tra- vaillé de jours? Réfolution. Appellons x le nombre des jours de travail, 30 — x exprimera le nombre des jours de re- pos. Ainfi, comme l’ouvrier eft fuppofé gagner 30 fous par jour, 30x fera le revenu des jours de fon travail; & 30 —x X 10 où 300— 10 x fera la quan- tité de fous que doit perdre l’ouvrier pour Les jours où il n’aura pas travaillé ; il faut donc la retrancher de la quantité de fous qu'il devroit recevoir pour fes jours de travail; &€ cette fouftraétion doit lui laïffer 25 Liv. ou 500 fous, fuivant une des conditions du problème: c’eft donc à dire qu'il faut ôter 300 — 10x de 30 x pour avoir $0o fous; on a donc cette équa- tion 30 x — 300 + 10 x, OÙ 40% — 300 — 500 ; ain 40 x = 800; doncx = 2 — 20: ce qui figniñie que l’ouvrier a travaillé vingt jours, & qu'il n’a rien fait les dix autres. En effet vingt jours de travail à 30 fous par jour font 30 liv. delquelles êtant s liv, pour les dix jours où il n’a point travaillé, il refte 25 li. Les nombres 20 & 10 fatisfont donc aux condi- tions propofées ; ainf le problème eft réfolu. Foyez PosiTION. Il y a auf, en Algebre, des racines fauffes que Von appelle autrement zéparives ; ce font celles qui font affeétées du figne —. Voyez NÉGATIF, RACINE, é EQUATION. (Æ) FAUX , adj. pris fubft. ( Jurifprud.) ce terme pris comme adjeétif, fe dit de quelque chofe qui eft con- traire à la vérité; par exemple, un fait faux , une écriture fauffe ; ou bien de ce qui eft contraire à la loi, comme un fzux poids , une fauffe mefure. Lorfque ce même terme eft pris pour fubffantif, comme quand on dit un faux , on entend par-là le crime de faux ; lequel pris dans fa fignification la plus étendue , comprend toute fuppoñtion fraudu- leufe , qui eft faite pour cacher ou altérer la vérité au préjudice d'autrui. | Le crime de faux fe commet en trois manieres ; favoir, par paroles, par des écritures, & par des faits fans paroles n1 écritures. | 1°. Il fe commet par paroles, par les parjures, qui font de faux fermens en juftice , & autres qui font fciemment de fauffes déclarations , tels que les ftel- lionataires , les témoins qui dépofent contre la vé- rité , foit dans une enquête, information, teftament, contrat, ou autre alle, & les calomniateurs quiex- pofent faux dans les requêtes qu'ils préfentent aux juges , ou dans les lettres qu'ils obtiennent du prince. vue: L L’expoñition qui eft faite fciemment de faits faux, ou la réticence de faits véritables, eft ce qu’on appel- le en ftyle de chancellerie obreption & fubreption ; cette’ forte de fauffeté eft mile au nombre de celles qui fe commettent par paroles, quoique les faits foient avancés dans des requêtes où dans des lettres duprince, qui font des écritures, parce que ces re- FAU _ quêtes ou lettres, enelles-mêmes, ne font pas fauffess mais feulement les paroles qui y font écrites, c’eft pourquoi l’on ne s’infcrit pas en fa4x contre une en- quête, quoiqu'il s’y trouve quelque dépoñition qui contienne des faits contraires à la vérité , on s’inf crit feulement en fezx contre la dépofition , c’eft-à- dire contre les faits qwelle contient. Voyez Arrir- MATION, CALOMNIATEUR, FAUX TÉMOIN, Dé: POSITION ; PARJURE, SERMENT, STELLIONATAI- RE, TÉMOIN. | On doit auffi bien diftinguer le feux qui fe com- met par paroles d'avec le faux énoncé ; le premier fuppofe qu'il y a mauvaife foi, & eft un crime puni fable ; au lieu qu’un fimple faux énoncé , peut être commis par erreur & fans mauvaife foi. 2°. Le crime de faux fe commet par le moyen de l'écriture , par ceux qui fabriquent de faux juge mens , contrats , teftamens , obligations, promeñles, quftances, & autres pieces , foit qu’on leur donne la forme d’aûes authentiques, ou qu’elles foient feu- lement fous feing-privé, en contrefaifant les écri- tures & fignatures des juges, greffiers , notaires, & autres perfonnes publiques, & celles des témoins & des parties. Les perfonnes publiques où privées qui fuppri= ment Les aétes étant dans un dépôt public , tels que les jugemens, des contrats, teftamens , &x. pour en ôter la connoïffance aux parties intéreflées , font coupables du même crime de faux. . Ceux qui alterent une piece véritable, foit en y ajoûtant après coup quelques mots ou quelques clau- {es , ou en effaçant quelques mots on des lignes en- tieres, ou en faifant quelqu’autre changement , foit dans le corps dela piece, foit dans fa date, commet- tent aufli un fzwx de même efpece, Enfin ceux qui, en paflant des aétes véritables , les antidatent au préjudice d’un tiers, commettent encore un faux par écrit. 3°. Le crime de fzux fe commet par faitoua@ion en plufieurs manieres , fans que la parole ni Pécri- ture foient employées à cet effet; favoir, par ceux qui vendent ou achetent à fzux poids ou à fauffe me. fure (voyez Porns & MESURES ) ; ceux qui alterent & diminuent la valeur de l'or & de l'argent par le mélange d’autres métaux ; ceux qui fabriquent de la fauffe monnoie , ou qui alterent la véritable (voyez MONNOYER ); ceux qui contrefont les fceaux du prince, ou quelqu’antre fcel public 8& authentique. Voyez SCEAUX. Ceux qui par divers contrats vendent une même chofe à différentes perfonnes, étoient resardés com- me fauffaires , fuivant la loi 22 ff. ad Leg, cornel. mais parmi nous ce crime eft puni comme ftellionat, & non comme un faux proprement dit. Les femmes & autres perfonnes qui fuppofent des enfans , &c généralement tous ceux qui fuppofent une perfonnié pour une autre; Ceux qui prennent le nom & les armes d'autrui, des titres, 8 autres mar- ques d'honneur qui ne leur appartiennent point, commettent un fzux. els furent chez les anciens un certain Equitinus qui s’annonçoit comme fils de Graccus, & cet autre qui chez les Parthes fe faifoit pafler pour Néron : tels furent auffi certains impof- teurs fameux , dont il eft fait mention dans notre hi toire, Pun qui fe faifoit pañler pour Fréderic II. un autre qui fe donnoit pour Baudouin de Flandre em- pereur Grec ; le nommé /a Ramée qui fe dijoit fils naturel de Charles IX, qui avoit été à Reims pour fe faire facrer rot, & qui fut pendu à Paris en 1506, &c. La fabrication des faujfes clés eft anffi une efpece de faux , & mêmetun crime capital. Voyez CLÉ SERRURIER. | Quoique toutes ces différentes fortes de délits _ foient comprifes fous le terme de faux, pris dans un FAU fensétendu, néanmoins quand on parle de faux fim- plement , ou du crime de faux , on n’entend ordinai- rement que celui qui fe commet en fabriquant des “pieces faufles, ou en fupprimant ou altérant des pie- ces véritables ; dans ces deux cas, le faux fe pour- fuit par la voiede linfcription de fawx , foit princt. pal ou incident ( voyez INSCRIPTION DE FAUX ) : pour ce qui eft de la fuppreflion des pieces véritas bles , la pourfuite de ce crime fe fait comme d’un vol ou larcin: ; sen " IL:eft plus aifé de contrefaire des écritures privées, que des écritures authentiques, parce que dans les remieres , 1l ne s’agit que d’imiter l’écriture d’un feul homme, & quelquefois fa fignature feulement ; au lieu que pour les aétes authentiques , 1l faut fou- vent contrefaire la fignature de plufieurs perfonnes, comme celle des deux notaires, où d’un notaire & deux témoins , & de la partie qui s’oblige: d’ailleurs il y a ordinairement des minutes de ces fortes d’ac- tes, auxquelles on peut avoir recours. On peut fabriquer une piece fazffe , fans contre- faire Pécriture m1 la fignature de perfonne, en écri- vant une promelle où une quittance au-deflus d’un blanc figné qui auroit été furpris, ou qui étoit defti- né à quelqu'autre ufage. Il y a des fauffaires qui ont l’art d’enlever l’écri- ture fans endommager le papier, au moyen de quoi, ne laiflant fubffter d’un ae véritable que les figna- tures , ils écrivent au-deflus ce qu'ils jugent à-pro- pos; ce qui peut arriver pour des aétes authenti- ques , comme pour des écrits fous feing-privé. Le fzux qui le commet en altérant des pieces qui {ont véritables dans leur fubftance , fe fait en avan- çant ou reculant frauduleufement la date des aëtes , ou en y ajoûtant après coup quelque chofe, foit au bout des lignes , on par interligne, ou par apof- tille & renvoi, ou deffus des paraphes & fignatures, où avec des paraphes contrefaits, ou en rayant après coup quelque chofe, & furchargeant quelques mots, fans que ces changemens ayent été approuvés de ceux qui ont figné l’aête. Voyez APOSTILLE , REN- VOI, PARAPHE , SIGNATURE , INTERLIGNE. La preuve du faux fe fait tant par titres que par témoins ; & fi C'eft une écriture ou fignature qui eft arguée de faufferé, on peut aufli avoir recours à la vérification par experts , & à la preuve par comparaifon d’écritures. Les indices qui fervent à reconnoitre la faufferé d'une écriture , font lorfqu'il paroît quelque mot ajoûté au bout des lignes , ou quelque ligne ajoû- tée entre les autres ; lorfque les ratures font char- gées de trop d'encre , de maniere que l’on ne peut bre ce que contenoient les mots rayés ; lorfque les additions font d'encre & de caractere diférens du refte de l’aéte ; & autres circonftances femblables. La loi Cornelia de falfis , qui fait le fujet d’un ti- tre au digefte , fut publiée à l’occafñon des tefta- mens : c’eft pourquoi Cicéron & Ulpien, en quel- ques endroits de leurs ouvrages , l’appellent auf la loi teflamentaire. La premiere partie de cette loi concernoit les teftamens de ceux qui font prifon- niers chez les ennemis ; la feconde partie avoit pour objet de mettre ordre à toutes les faufetés qui pou- voient être commifes par rapport aux teftamens ; foit en les tenant cachés , ou en les fupprimant ; foit en les altérant par des additions ou ratures, Qu autrement. Cette même loi s'applique auffi à toutes les au- tres fortes de fauffetés qui peuvent être commifes, des aétes publics & privés dans la fonction de juge, dans celle de témoin ; foit par la falfification des métaux, & fingulierement de la monnoie; foit enfin F AU 44 . par la fuppoñition de noms, furnoms, &c.atmes, 83 autres titres & marques ufurpés indüement. On regardoit auffi comme une contravention à cêtte loi, le crime de ceux qui fur un même fait ren- dent deux témoignages contraires , ou qui vendent la même chofe à deux perfonnes différentes; de ceux qui reçoivent de l'argent pour intenter un procès ins jufte à quelqu'un. La peine du faux , fuivant la loi Cornelia, étoit la déportation qui étoit une efpece de bannifflement, pat lequel on affignoit à quelqu'un une île ou autre lieu pour fa demeure, avec défenfe d’en fortir à peine de la vie, On condamnoit même le fauflaire À mort, files circonftances du crime étoient fi. graves, qu'elles paruflent mériter le dernier fapplice. Quelquefois on condamnoit le fauflaire aux mi- nes, comme on en ufa envers un certain Atchip- pus. | Ceux quifalfifioient les poids & lesmefuresétoient relégués dans une île. | Les efclaves convaineus de fzux étoient condame nés à mort. En France, fuivant l’édit de François premier du mois de Mars 1531, tous ceux qui étoient convain- cus d’avoir fabriqué de faux contrats, ou porté faux témoignage , devoient être punis de mort: mais Louis XIV. par fon édit du mois de Mars 1680, re- giftré au parlement le 24 Mai fuivant, a établi une diftinétion entre ceux qui ont commis un faux. dans l'exercice de quelque fonétion publique, & ceux qui n'ont point de fonétion femblable, ou qui Ont cQm= mis le faux hors les fonétions de leur oMice ou em- ploi. Les premiers doivent être condamnés À mort, telle que les juges Parbitreront, felon l'exigence des cas. À l’égard des autres , la peine eft arbitraire ; ils peuvent néanmoins aufh être condamnés à mort, felon la qualité du crime. Ceux qui imitent, contre- : font , ou fuppofent quelqu'un des fceaux de la gran- de ou petite chancellerie doivent être punis de mort. Pour la punition du crime de fz4/fè monnoie , voy. MONNOIE. Faux incidenr, eft linfcription de fzux qui eft for- mée contre quelque piece, incidemment à une au- tre conteftation où cette piece eft oppofée ; foit que la caufe fe traite à l’audience, ou que Pafaire {oit appointée. L'objet du faux incidenreft de détruire & faire dé. clarer fauffe ou falfñfiée une piece que la partie ad- verfe a fait fignifier, communiquée ou produite. Cette infcription de faux eft appellée faux incidens, pour la difinguer du faux principal, qui eft intenté direétement contre quelqu'un avec qui l’on n’étoit point encore en procès, pour aucun objet qui eût rapport à la piece qui eft arguée de faux. La pourfuite du faux incident peut être faite de- . vant toutes fortes de juges, foit royaux, feigneu riaux, ou d'églife, qui fe trouvent faifis du fond de la conteftation ; & l’infcription de faux doit être in- firuite avant de juger le fond. L'infcription de fax peut être recûe, quand mê- me les pieces auroient déjA été vérifiés avec le de- mandeur en feux , &c qu'il feroit intervenu un juge- ment fur le fondement de ces pieces, pourvû qu’il ne füt pas alors queftion du faux principal ou inçi- dent de ces mêmes pieces. La requête en faux incidens ne peut être recûe, qu'elle ne foit fignée du demandeur, ou de fon fon- dé de procuration fpéciale, Il faut auffi attacher à la requête la quittance de l’amende , que le demandeur doit configner. Cette amende eft de foixante livres dans les cours & autres fiéges reflortiffans nuement aux cours, & de 20 livres dans les antres fiéges. : Quand la requête eft admile , Le demandeur doit 442 FAU Former fon oppoñition de faux au sréffe dans trois Jours, & fommer le défendeur de déclarer s’il entend fe fervir de la piece arguée de fuux, Si le défendeur refufe de faire fa déclaration. le demandeur peut fe pourvoir pour faire rejetter la piece du procès; fi au contraire le défendeur dé- clare qu'il entend fe fervir.de la piece , elle doit être mife au gréffe ; & sl y en a minute, on peut en or- donner l'apport ; & trois jours après la remife des pieces , on‘drefle procès - verbal de l’état de ces pieces. Le rejet de la piece atguée de faux , ne peut être ordonné que fur les conclufions du miniftere public ; ë lorfqu’elle eft rejettée par le fait du défendeur , le demandeur peut prendre la voie du fx principal, fans néanmoins retarder le jugement de la contefta- tion à laquelle le faux étoit incident. Les moyens de faux doivent être mis au greffe trois jours après Le procès-verbal. Si les moyens font trouvés pertinens & admifi- bles , le jugement qui intervient porte qu’il en fera informé tant par titres que par témoins, comme auff par experts & par comparaïlon d’écritures &c figna- tures , felon que le cas le requiert. Au cas que le demandeur en faux fuccombe, il doit être condamné en une amende, applicable les deux tiers au roi ou au feigneur, l’autre tiers à la par- tie; êc cette amende, y compris les fommes confi- gnées lors de linfcription de faux, eft de 300 livres dans les cours & aux requêtes de l’hôtel & du palais ; de xroo livres aux fiéges qui reflortiflent nuement aux de fotte qu'il faut, felon notre grammairien , qu’on ait dit par abus fécialis pour férialis. Paflons à Phif- toire. | Les féciaux furent inflitués au nombre de vingt : on les choiïfiffoit des meilleures familles, êc ils com- pofoient un collése fort confidérable à Rome, Denys d'Halicarnaffe ajoûte que leur charge, qu’il nomme Jacerdoce , ne finifloit qu'avec la vie; que leur per= fonne étoit facrée comine celle des autres prêtres que c’étoit à eux à écouter les plaintes des peuples qui foûtenoient avoir reçu quelque injure des Ro- mains, & qu'ils devoient, fi les plaintes étoient ré- putées juftes, fe faifir des coupables & les hvrer à ceux qui avoient été léfés ; qu'ils connoïfloient du droit des ambafladeurs & des envoyés ; qu'ils fai- {oient les traités de paix &c d'alliance ; & quentin ils veilloient à Leur obfervation. Ce détail eft très-inftruétif, & de plus prouve deux chofes : la premiére, qu’il y avoit quelque rap- poit entre les féciaux de Rome & les officiers que les Grecs appelloient érérophylaques, c’eft-à-dire confer- Vateurs de la paix : la feconde, que nos anciens hé. raûts d’armes ne répondent point à la disrüte dont joiufloient les féciaux. Voyez HÉRAUT D’ÂRMES. L'an de Rome 114, dit Tite-Live, Rome vit fes frontieres rayagées par les incurfions des Latins , & Ancus Martius connut par fa propre expérience, que le throne exige encore d’autres vertus que la piété >; cependant pour foùtemr toljours fon carattere , avant que de prendre les armes , 1l envoya aux en- nemis un héraur ou officier qu'on appelloit fécralien. Ce hérant tenoïit en main une javeline ferrée pour preuve de fa commifiion. Arme de cette javeline,, 1l fetranfportoit fur les frontieres du peuple dont les Romams croyoient avoir droit de fe plaindre. Dès qu'il y étoit arrivé, il reclamoit à haute voix l’objet que Rome préten- doit qu'on avoit nfufpé fur elle, où bien 11 expofoit d’autres griefs , & la fatisfaétion que Rome deman- doït pour les torts qu'elle avoit reçàs : 1l en prenoit fermoient » dieux! fi c’éft contre l'équité & la juftice que je » viens ici au nom du peuple romain demander fa- » tisfation, ne fouffrez pointique je fEvoye jamais » ma patrie ». [Il repétoit les mêmes termes à l'entrée de la ville & dans la place publique. Eorfqu'au bout de 33 jours Rome ne recevoït point la fatisfaétion qu’elle avoit demandée, le fécia/alloit | FE C finefeconde fois vers le même peuple, & pronoïçoit publiquement les paroles fuivantes : « Ecoutez, Ju- # piter, & vous Junon ; écoutez Quuirinus, écoutez » dieux du ciel, dela terre, & des enfers: je vous » prens à témoin qu'un tel peuple (1l le nommoit } » refufe à tort de nous rendre juftice ; nous délibé- » rerons à Rome dans le fénat fur les moyens de l'ob- » tenir ». En arrivant à Rome il prenvit avéc lui {es colle- gues, & à la tête de fon corps il alloit faire fon rap- port au {énat. Alors on mgttoit la chofe en délibé- . ration; & fi le plus grand nombre de fuffrages étoit pour déclarer la guerre, le fécial retournoit une troi- fieme fois fur les frontieres du même pays, ayant la tête couverte d’un voile de lin, avec une couronne de verveme par-deflus ; là il prononçoit en préfence au moins de trois témoins , la formule fuivante de : déclaration de guerre. « Ecoutez Jupiter , & vous » Junon ; écoutez Quirinus , écoutez dieux du ciel, » de la terre, & des enfers: comme ce peuple a ou- » tragé le peuple romain, le peuple romain & moi, » duconfentement du fénat, lui déclarons la guerre ». Après ces mots, il jettoit fur les terres de l’ennemi un javelot enfanglanté &c brûlé par le bout , qui mar- quoit que la guerre étoit déclarée ; &r cette cérémo-. nie fe conferva long-tems chez les Romains. On voit par cette derniere formule que nous a confervé Tite-Live, que le roi n’y eft pointnommé, & que tout fe faifoit au nom & par l’autorité du peu- ple , c’eft-à-dire de tout le corps de la nation, Les hiftoriens ne s’accordent point fur l’infüitution des fécraux ; mais {oit qu’on ladonne à Numa, com- me le prétendent Denys d’Halicarnaffe & Plutarque, foit qu’on aime mieux l’attribuer à Ancus Martius, conformément à l'opinion de Tite-Live & d’Aulu- gelle, il eft toûjours très-vraiflemblable que l’un ou l'autre de ces deux princes ont tiré l’idée de cet éta- bliflement des anciens peuples du Latium ou de ceux d’Ardée; & l’on ne peut guere douter qu'il n’ait été porté en. Italie par les Pélafges , dont les armées étoient précédées par des hommes facrés, qui n’a- voient pour armes qu'un caducée avec des bande- léttes. Au refte, Varron remarque que de fon tems les fonétions des féczaliens étoient entierement aboles , comme celles des hérauts d'armes le font parmi nous, Celui qui fera curieux de recourir fur ce fujet. aux fources mêmes, peut fe fatisfaire dans Tite-Live, déc.s, div. I, ce, xxjv. Cicéron, Liv. II. des lois; Aulu- gelle, Ziv. XFT. ch.jv. Denys d'Halicarnafle, Z, II. Plutarque , vie de Numa; Amnuen Marcellin, /, XIX. ch. 7: Diodore de Sicile, Zy. VII. ch. 1j. 8 parmi les modernes, Rofinus Ant. Rom. Z6. III, c. xx. Stru- vius Ant. Rom. /yre. chap. xiiy. Pitifci, lexicon, &c. “riicle de M. le Chevalier de JAUCOURT. FÉCOND , adj. (Lirtérature.) ef le fynonyme de fertile quandil s’agit de la culture des terres : on peut dire également wr cerrein fécond & ferrile; fereilifer & féconder un champ. La maxime qu'il n’y a point de {y- nonymes, veut dire feulement qu’on ne peut fe fer- vir dans toutes les occafions des mêmes mots. Voyez DicTIONNATRE, ENCYCLOPÉDIE, 6 SYNONYME. Ainfi une femelle de quelqu’efpece qu’elle foit n’eft point fertile, elle eft féconde. On féconde des œufs, on ne les ferrilife pas. La nature.n’eft pas fertile, elle eft féconde. Ces deux expreffions font quelquefois également employées au figuré & au propre: Un ef- prit eft fersile ou fécord'en grandes idées. Cependant les nuances font fi délicates qu’on dit un orateur fe- cond, 8t non pas un orateur fertile ; fécondité, & non fertilité de paroles; cette méthode, ce principe, ce fujet eft, d’une grande fécondité, & non pas d’une grande feréilité. Larraifon en.eft.qu’un principe, un Tome VI, , TS D 403 fujet , ne néthode , produifent des idées qui naïf fent les unes des autres comme des êtres fucceflive- ment enfantés , ce qui a rapport à la génération: Bienheureux S'cuderi , dont La fertile plume ; le mot fer: rile eft-là bien placé, parce que cette plume s’exer- çoit , fe répandoit fur toutes {ortes de fujets. Le mot fécond convient plus au génie qu’à la plume. Ily a des tems féconds en crimes, & non pas ferziles en cri mes. L’ufage enfeigne toutes ces petites différences. Article de M. DE VOLTAIRE, | FÉCONDATION, f. f, (Économie animale.) on appelle aïnfi la faculté prolifique , la fécondité ré- duite en atte, le moment de la conception, celui où toutes les conditions requifes de la part de l’animal mâle &c de la femelle, refpeétivement , concourent dans celle-ci & commencent à y opérer les change mens , les mouvemens, en un mot, les effeté nécef- faires pour la génération. Voyez GÉNÉRATION. Ainfi la fécondation regarde proprement l’animal femelle, dans lequel fe fait la conception, la forma: tion du f&zus, du petit animal ordinairement de la même efpece que celle du mâle &de la femelle qui ont coopéré pour fa génération. Voyez GROSSESSE; pour les femmes, IMPRÉGNATION, pour les autres ani- maux, Voyez auff F&TUS. (d FÉCONDITÉ, 1. f. (Mychol, Médaill. Lirrérar.) divinité romaine, qui n’étoit autre que Junon : les femmes l’invoquoient pour avoir des enfans , & fe foûmettoient volontiers pour en obtenir, à une pra- tique également ridicule & obfcene. Lorfqu’elles al- loient à ce deflein dans le temple de la déefle , les prêtres du temple les faifoient deshabiller | & les frappoient fur le ventre avec un fouet qui étoit fait de lanieres de peau de bouc. .Quelquefois on confond la fécondise avec la déefle Tellus , & alors elle eft repréfentée nue jufqu’à la ceinture, & à demi-couchée par terre, s'appuyant du bras gauche fur un panier plein d’épis & autres fruits , auprès d’un arbre ou fep de vigne qui l’om- brage, & de fon bras droit elle embrafle un globe ceint du zodiaque , orné de quelques étoiles ; c’eft ainfi qu’elle eft repréfentée dans quelques médailles de Julia Domna ; dans d’autres, c’eft feulement une femme aflile, tenant de la main gauche une corne d’abondance , &c tendant la droite à un enfant qui eft à fes genoux ; enfin, dans d’autres médailles c’eft une femme qui a quatre enfans, deux entre fes bras &c deux debout à fes côtés : voilà fans doute le vrai fymbole de la fécondité. : Au refte, Tacite rapporte que les Romains pouf- fetent la flaterie envers Néron jufqu’à ériger un tem: ple à la fécondité de Poppée ; mais cet hiftorien nous raconte lui-même bien d’autres traits de flaterie ; c’eft un vice qui n’a point de bornes fous les tyrans &c les defpotes. Voyez FLATERIE. Arricle de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FÉCONDITÉ, f. f. (Économ. anim.) c’eft la faculté prolifique , la difpoftion dans l’homme & dans les animaux mâles &c femelles à fatisfaire à toutes les conditions requifes (refpettivement au fexe de cha- que individu) pour l'ouvrage de la génération, pour. la produ@tion de fon femblable, | Comme il éft néceflaire en traitant de cette dif. pofirion eritant que léfée, d’expofer en quor elle confifte dans l’état de perfeétion’; il eft jugé conve- nable, pour éviter la répétition, de renvoyer aux articles oùil fera queftion du défaut de fécondité, ce qu'il y a àdire fur cette faculté , & les conditions qu’elle exige pour êtreréduite en ae : ainfivoyez IMPUISSANCE, pour ce qui regarde le {exe mafcu lin : STÉRILITÉ , pour ce qui eft du féminin. Foyes Jurtout GÉNÉRATION. (4). Zu ia 25 FÉCULE,, f. f. (Pharmacie) On appelle) fécule y une poudre blançhe affez femblable à Fe ydoni, qui nn i] 464 FETE fe fepare du fuc exprimé de certaines racines, & fe précipite à la maniere des feces, | Les racines dont on tire communément les fécules, font la bryone, liris moftras, & le pié-de-veau. Voyez ces differens articles. | On attribuoit autrefois à ces fécules les vertus mé- dicinales des racines dont on les retiroit. Zwelfer a le prenner combattu cette erreur : 1l dit dans {es no- tes fur la pharmacopée d’Augsboure , que les fécules ne font rien autre chofe que des poudres fnbtiles fa- rineufes, privées du fuc végétal, qui n’ont confé- sd oi aucune efhicacité, aucune vertu. Dans On appendix ad animadyerfiones, 1 appelle les fécules un médicament inutile & épuifé , sruvile & effetum medicarnenti genus. Qui pourra croire, ajoûte-t-il , qu'une racine que l’on a épuifée de fon fuc par l’ex- prefhot, ait encore les vertus qu’elle avoit aupara- vant? of les fécules font dans ce cas ; elles ne different oint du refte de la racine que l’on rejette comme inutile, & conféquemment on doit les bannir de l’u- fage médicinal, Nous penfons aujourd’hui comme Zwelfer : on ne garde plus les fécules dans les boutiques, &c les Me- decins ne les demandent plus. On donne auffñi quelquefois le nom de fécules, à ces feces vertes qui feféparent des fucs exprimés des plantes lorfqu’on les purifie. Voyez Partie colorante verte des plantes, au mot VÉGÉTAL. (b FÉCULENCE, f. f. (Medecine.) Les Médecins fe fervent quelquefois de ce terme, pour défigner la matiere fédimenteufe des urines. foyez URINE , SÉ- DIMENT. (4 | FÉES , f. £. (Belles-Lertr.) termes qu’on rencontre fréquemment dans les vieux romans &c les anciennes traditions ; 1l figmifie une efpece de génies ou de divi- rités imaginaires qui habitoient fur la terre, & s’y diflinguoient par quantité d’a@ions & de fonétions merveilleufes, tantôt bonnes , tantôt mauvaifes. Les fées étoient une efpece particuliere de divinités qui n’avoient guere de rapport avec aucune de celles des anciens Grecs & Romains , f ce n’eft avec les larves. Voyez LARVES. Cependant d’autres préten- dent avec raifon qu’on ne doit pas les mettre au rang des dieux; mais 1ls fuppofent qu’elles étoient une efpece d'êtres mitoyens qui n’étoient ni dieux ni an- ges, ni hommes m démons. Leur origine vient d'Orient , & il femble que les Perfans & les Arabes en {ont les inventeurs, leur hif- toire &z leur religion étant remplies d’hiftoires de fées &t de dragons. Les Perfes les appellent peri, & les Arabes ginn, parce qu’ils ont une province particu- here qu'ils prétendent habitée par les fées ; ils Pap- pellent Gimniflan, 8 nous la nommons pays des fées, La reine des fées, qui eff Le chef-d'œuvre du poëte anglois Spencer, eft un poëme épique, dont les per- Pré & les caraéteres font tirés des hiftoires des fées. Naudé, dans fon Mafiurar, tire l’origine des con- tes des fées, des traditions fabuleufes fur les parques des anciens , &c fuppofe que les unes & les autres ont été des députés & des interpretes des volontés des dieux fur les hommes ; mais enfuite il entend par fées, une efpece de forcieres qui fe rendirent céle- bres en prédifant l'avenir, par quelque communica- tion qu’elles avoientavec les génies, Les idées re- ligieutes-des anciens, obferve-t-1l, n’étoient pas à beauconp près aufii effrayantes que les nôtres, & leur enfer 8 leurs furies n’avoient rien qui püût être comparé à nos démons. Selon lui, au lieu de nos for- cieres:& de nos magiciènnes, qui ne font que du mal, 8 qui font employées aux fonéhons les plus viles & les plus bafes , les anciens admettoient.une efpece de déefles moins:malfaifantes,, que les auteurs latins appelloient 4/bés dominas : rarement elles faifoient du mai , elles fe plaifoient davantage auxa@ions uti- les & favorables. Telle étoit leur nymphe Eperie, d'où font forties fans doute les dernieres reines fées, Morgane , Alcine , la fée Manto de l’Ariofte, la Glo. riane de Spencer, & d’autres qu’on trouve dans les romans anglois & françois, quelques-unes préfi- doient à la naïflance des jeunes princes & des ca- valiers, pour leur annoncer leur deftinée, ainfi que faifoient autrefois les parques, comme le prétend Hygin, ch. clxxy. & clxxyv. Quoiqu'endife Naudéyles anciens ne manquoient point de forcieres auffi méchantes qu’on fuppofe les nôtres, témoin la Canidie d’Horace, ode F. & fatyre J. 5. Les fées ne fuccéderent pointaux parques ni aux forcieres des anciens, mais plûtôt aux nymphes ; car telle étoit Egerie, Voyez NYMPHESs, PARQUES , ci Les fées de nos romans modernes font des êtres imaginaires que les auteurs de ces fortes d'ouvrages ont employés pour opérer le merveilleux ou le ridi- cule qu'ils y fement, comme autrefois les poëtes fai. foient intervenir dans l’épopée, dans la tragédie, & quelquefois dans la comédie, les divinités du Paga- nifme: avec ce fecours, il n’y a point d'idée folle & bifarre qu’on ne puifle hafarder. Foy. l'article MER- VEILLEUX. Dicionn. de Chambers. (G FÉERIE, {. f. On a introduit la férie à opéra; comme un nouveau moyen de produire le merveil- leux , feul vrai fond de ce fpeétacle. Foyez Mer- VEILLEUX , OPÉRA, On s’eft fervi d’abord de la magie. Voyez MAG1E. Quinault traça d’un pinceau mâle & visoureux les grands tableaux desMedée, des Me , des Armide, 6:c. les Argines, les Zoradies, les Phéano, ne font que des copies de ces brillans originaux. Mais ce grand poëte n’introduifit la féerte dans es opéra, qu’en fous-ordre, Urgande dans Amadis, & Logiftille dans Rolland, ne font que des perfonnages fans intérêt , & tels qu’on les apperçoit à peine. De nos jours le fond de la Serie, dont nous nous fommes formés une idée vive, legere & riante, a paru propre à produire une illufion agréable, & des aétions aufli intéreflfantes que merveilleufes. On avoit tenté ce genre autrefois ; mais le peu de fuccès de Manto La fée, & de La Reine des Peris , fem- bloit lavoir décrédité. Un auteur moderne , en le maniant d'une maniere ingénieufe, a montré que le malheur de cette premiere tentative ne devoit être imputé ni à l’art ni au genre. En 1733, M. de Moncrif mit une entrée de féerie dans fon ballet de l'empire de l'Amour ; & il acheva de faire goûter ce genre, en donnant Zelindor roi dessSilphes. | Get ouvrage qui fut repréfenté à la cour, fit partie des fêtes qui y furent données après la vi@toire de Fontenoy. Voyez FÊTES DE LA Cour. MM. Rebel & Francœur quiven ont fait la muf- | que, ont répandu dans le chant une expreflion ai- mable, & dans la plüpart des fymphonies un ton d’enchantement qui fait illufion: e’eft prefque par- tout une mufique qui peint, & il n’y a quecelle-1à qui prouve le talent, & qui mérite des éloges. (B) FÉEZ, L. f pl. (Jurifp.) dans la coûtume d’Amjou, article 359 ; {ont les faix ou charges féodales & fon- ta) ëc toutes autres charges réelles des héritages, FEILLETTE, FEUILLETTE o FILLETTE, f. (Comm. ) forte de tonneau deftiné à mettre du vin; il fignifie auf une perire mefure de liqueurs. Foyez FEUILLETTE. Didionn. de Commerce, de Tréyonx … E Chambers. (G) | * FEINDRE,, c’eft en général fe fervir, pour trome per les hommes, & leur en impofer, dé toutes les démonfirations extérieures qui defignent ce qui fe pañle dans lame. .Qn fins des pafñons, des defleins,, &c. Feindre aune acception propre à la Poéle, Poyer l’article FICTION. FEINDRE, BOITER , ( Mancge, Maréchallerie.) ces deux mots ne font pas exaétement fynonymes; le _ premier n’eft d’ufage que dans le cas d’une claudica- tion legere, -& en quelque forte imperceptible. Si nombre de perfonnes ont une peine extrème à dif- cerner la partie quidans l’animal qui boire eft affeétée, quelle dificulté n’auront-elles pas à la reconnoître dans l’animal qui fer ? Un cheval voifin de fa chûté, à chaque pas qu'il fait boire tout bas. Feindre le dit encore lorfqu’en frappant fur le pié de l'animal, ou encomprimant quelque partie de fon corps, il nous donne par le mouvement auquel cette compreflion ou ce heurt l’engage, des fignes de douleur. On doit d’abord fonder le pié de tout cheval qui féire ou qui boite ; en frappant avec le brochoir fur la tête des clous quimaintiennent le fer. VoyeEcaART. Lorfque le clou frappé occafonne la douleur, & par confé- quent l’aëtion de féirdre ou de boiter, on obferve un mouvement très-fenfible dans l’avant-bras, & nous exprimons ce mouvement par le terme de féizdre tis dans le dernier fens. (e) FEINTE , 1, f. ez Mufique , eft l’altération d’une note ou d’un ton, par dièle ou par bémol, C’eft pro- prement le nom générique du dièfe & du bémol mé- me. Ce mot n’eft plus guere en ufage, C’eft de-là qu’on appelloit auffi frres les touches chromatiques du clavier, que nous appellons au- jourd’hui souches blanches , & qu’autrefois on faifoit noires plus ordinairement. Voyez CHROMATIQUE, & l'article fuivanr. (S) | FEINTE COUPÉE des cépinettes & des claveffins qui re font pas à ravalement, eft la touche du demi-ton de l’ur X de l’otave des baffes que l’on coupe en deux, enforte que cela forme deux touches que l’on accorde en -fa-/? & en a-mi-la ; lorfqu’elles font fui- vies d’un g-ré-/ol, qui eft la touche noire qui pré- cede les quatriemes oftaves. Voyez La fivure de l’épi- nette à l'italienne , PZ. WT, de Lurherie, fig. 6. & fon article. : FEINTE, (Efcrime.) eft une attaque qui a l’appa- rence d’unebotte, &c qui détermine l’ennemi à parer d’un côté, tandis qu’on le frappe d’un autre. Pour bien faire une fente, 1l faut, 1°. dégager (voyez DÉGAGEMENT VOLONTAIRE), & faire le mouvement de porter une botte fans avancer le pié droit : 2°. dans l'inftant que l'ennemi pare cette fauffe botte, vous évitez la rencontre de fon épée (voyez l’article DÉGAGEMENT FORCÉ), & incon- tinent on alonge l’eftocade, pour faifir le tems que | {on bras eft occupé.à parer. Double feinte ; elle fe fait lotfqu’on attaque l’en- nemi par deux fentes. Fernte droite ; c'eft faire une ferrée fans dégager, FEINTE , dans l’ufage del Imprimerie, s'entend d’un manque de couleur qui fe trouve à certains endroits d’une feuille imprimée, par comparaifon au refte de la feuille. Un ouvrier fait une féizce, pour le peu qu'il manque à la juftefle qu’il faut avoir pour ap- puyer également la balle fur la forme dans toute l’é- tendue de fa furface, | * FEINTIERS oz ALOSIERES, VERGUES, . VERGUEUX o4RETS VERGUANS, CAHUYAU- TIERS , rermes de Péche qui font fynonymes , &qui défignent une forte de filet propre à prendre des alo- fes ; ce qui leur a fait donner aufli le nom d’alofieres : en voici la defcription. | ’ Ce filet, quiéfttravaillé ,eft femblable Aceux dont | on faitla dreige dans la mer:(voy.DREIGE ), 8 fabri- qué de même, à cette différence près, qu'il court 3 cordes le long du filet ; celle:de la tête , que les P&- | cheurs nomment /z corde-du liège; celle du milieu, qu'ils nomment a corde di parmi; & celle du pié, | FEL 465$ qu’ils appellent da corde du plomb, parce qu’elle en eft garnie, comme les tramaux de la dreige : elle fé- pare la nappe & les tramaux en deux. La corde du parmi, qui ne fe trouve point dans les filets de mer, fert à mieux foûtenir le filet, dont la nappe eft for- mée d’un fil très-fin, & que les alofes, les faumons & autres gros poiflons creveroient aifément fans cette précaution. Pour faire cette pêche on jette le filet dans l’eau; après avoir mis une bouée au bout forain. Il y a dans chaque bateau quatre hommes d’équipage, deux qui rament, un qui gouverne, &C un quatrième qui pate ou tend le filet, dont la pofition eft en-travers de la riviere, pour que le poiflon qui s’abandonne au cou- rant de l’eau, puifle s’y prendre, On pêche de flot & de jufant. - Cette pêche des alofes dure depuis le mois de Fé- vrier jufqu’à la fin de Mar. Les aloferes ont les mailles des hamaux, qui font les deux rets extérieurs du tramail, de huit pouces en quarré. La toile, nappe ou flue a les mailles de deux pouces quatre lignes en quarré. Ces filets ne font pas chargés de beaucoup de plomb par bas ; en- forte qu’étant confidérés comme une dreïge, ils ne caufent point fur le fond de la riviere Le même defor- dre que la dreige dans la mer, puifqu’ils ne font pref. que que rouler fur le fable. * FELAPTON, (Logique, ) terme technique où les voyelles défignenpla qualité des propoñtions qui en- trent dans un fyllogtfme particulier ; aïnfila voyelle £ marque que la majeure doit être univerfelle né- gative ; la voyelle 4, la mineure univerfelle afir- mative ; la voyelle O , la conclufion particuliere né- gative. Voyez SYLLOGISME. FELD , (Géog.) Ce mot qui en allemand fignifie une plaine, une campagne, entre dans la compofñtion de plufieurs noms géographiques , & fe met dans quelques-uns au commencement, & dans quelques autres à la fin du mot, felon le caprice de l’ufage, (C. D. J. | FELDKIRCH oz VELDKIRCH , felcurium , (Géogr.) ville d'Allemagne, capitale du comté de même nom, au Tirol, fur l’Il, à deux milles d’Ap- penzell , entre le lac de Conftance au feptentrion, & Coire au midi; elle eft marchande, &c a de beaux priviléges. Long. 27 24. lat, 47. 14. C’eft à Feldkirch que naquit Bernhardi, (Barthé:- lei ) fameux pour avoir été le premier miniftre lu- thérien qui fe foit marié publiquement, & qui ait foûtenu par fes écrits la condamnation du célibat desprêtrés. Son mariage étonna Luther même, quoi- qu’il approuvât {on opinion ; mais il fcandalifa tel- lement les Catholiques , qu'ils chercherent à s’en venger: de-là vint que des foldats efpagnols étant entrés chez lui, le pendirent dans {on cabinet ; heu- reufement fa femme accourut affez tôt pour le déta: cher & lui fauver la vie, Ilmourut naturellement en 1551, âgé de foixante-quatre ans, ( C.D.J.) ., * FÊLER , v. ad. (Gram, & Art méch.) Ce terme n'eft applicable qu'aux ouvrages de terre ,.de ver- re, &c, qu'aux vaifleaux de porcelaine, 6c. Ils font félés, lotfque la continuité de leurs parties eft rom- pue d’une maniere apparente Ounon apparente; fans qu'il y ait une féparation totale : fi la féparation étoitientiere , alors le vaifleau feroit ou caflé ou:bri- fé. De féler on a fait le fubftantif félure. Un valet dit de lui:smême, dans l’Andrienne, à proposid’un fe- l cret quon lurrecommande : Péezus rimarum [terre , bec illac perfluo ; ce qu’on rendroit très-bien de cette ma- niere: Comment voulez-vous que je le gardt £ je fuis ” fêlé de tous ‘côtés ? FÉLICITÉ, £ €. (Gramm, & Morale.) ef. l'état permanent, du moins pour quelque tems ; d'uneame contente, &c cet érat eft bien rare, Le borheur vient 466 FEL du dehofs, c’eft originairement une bonne heure. Un bonheur vient, on a un bonheur; mais on ne peut dire, é/ m'eft venu une félicité, J'ai eu une félicite : & quand on dit, ces homme jouit d’une félicité parfaite, une alors n’eft pas prife numériquement, & fignifie feulement qu'on croit que fa féliciré eft parfaite. On peutavoirun bonheur fans être heureux. Un homme a eu le bonheur d'échapper à un piége, & n’en eft uelquefois que plus malheureux ; on ne pent pas dre de lui qu'il a éprouvé la féliciré. Il y a encore de la différence entre uz bonheur & Ze bonheur, diffé- rence que le mot féliciré n’admet point. Un bonheur eft un évenement heureux. Le bonheur pris indéfi- nitivement , fignifie une /zite de ces évenemens. Le plaifir eft un fentiment agréable & paflager, le bon- heur confidéré comme fentiment , eft une fuite de plaifits, la profpérité une fuite d’heureux évene- mens , la félicité une joiiflance intime de {a profpé- rité. L'auteur des fyzonymes dit que Ze bonheur eft pour les-riches , la félicité pour les [ages , la béatitude pour les paivres d’eprit ; mais le bonheur paroît plü- tôt le partage des riches qu'il ne l’eft en effet, &c la féliciré eft un état dont on parle plus qu’on ne l’é- prouve. Ce mot ne fe dit guere en profe au plu- . tiel, par la raifon que c'eft un état de lame, com- me tranquillité, fageffe, repos; cependant la poéfie qui s’éleve au-deflus de la profe, permet qu’on dife dans Polieuéte : Ou leurs félicités doivent être iffintes. Que vos félicirés, s’il fe peut, foient parfaites. Les mots , n paflfant du fubftantif au verbe, ont rarement la même fignification. Félicirer, qu’on em- ploye au lieu de congratuler, ne veut pas dire rezdre heureux ; 1 ne dit pas même fe réjoir avec quelqu'un de fa félicité, 1l veut dire fimplement faire compliment fur un fuccès , fur un évenement agréable, Il a pris la place de congratuler, parce qu’il eft d’une pronon- ciation plus douce & plus fonore. Article de M. DE VOLTAIRE. FÉLICITÉ , (Mychol.).c’étoit une déeffe chez les Romains , aufli-bien que chez les Grecs, qui la nom: moient Eudomonie , Evd'aiuonæ, Voflius , de Tdololar. lib, PTIT, c. xvüij, ne la croit point différenté' de la déefle S'alus ; mais il eft prefque le feul de fon opi- nion. Quoi qu'il en foit, on affüre que Lucullus, après avoir eu le bonheur dans fes premieres campagnes de conquérir l'Arménie, de remporter des vidtoires fignalées contre Mithridate , de le chaffer de fon royaume , & de finir par fe rendre maître de Sinope, crut à fon retour à Rome devoir par reconnoiffance une ftatue magnifique à la Féliciré, Il fit dônc avec le {culpteur Archéfilas le marché de cette ffatue pour la fomme de 60 mulle fefterces ; mais ils moururent lun & l’autre avant que la flatue fût achevée: c’eft Pline qui rapporte ce fait, 46. XX XP. c, xi. On conçoit fans peinié qu’il ne convenoïit pas à Céfar d’ériger à la Féliciséune fimple ftatue, lui qui en avoit une dans Rome qui marchoit à côté de la Viétoire ; il falloit qu'un homme de cet ordre fit plus que Lucullus pour la déeffe qui l’avoit élevé au com- ble de fes vœux: aufi Dion, Z4. XLIF. raconte que dès que Céfar fe vit maître de la république , il forma le projet de bâtir à la Féliciré un temple fuper- be dans la place du palais, appellée curiz hoffilia : mais fafmort prématurée fitencore échoïer ce def- fein , & Lépide le triumvir eut l'honneur de l'exé- çuter, + (APE * Alors les prêtres ; toüjours avides de nouveaux cultes qui augmentoient leurs richeffes & leur cré- dit, ne manquerent pas de vanter la gloire du tem- ple fondé par Lépide , précédemment leur fouverain pontife , & d’exagérer les avantages qu’auroient FEL ceux qui feroient fumer de l’encens fur fes autels: On dit à ce fujet que l'un de ces prêtres, facrifica- teur de Cérès, promettant un bonheur éternel x ceux qui fe feroient initier dans les myfteres de [a déefle Félicié, quelqu'un lui répondit aflez plaifam- ment : « Que ne te laiffes-tu donc mourir, pour aller » Jotür de ce bonheur que tu prometsaux autresayec » tant d’affürance » ? Fa S. Auguftin , dans fon ouvrage de La cité de Dieu; div, IT, ch, xxuy. 6 div. IV. th. xvii. parlant de la Féliciré, que les Romains n’admirent que fort tard dans leur culte, s'étonne avec raïfon que Romulus qui vouloit fonder le bonheur de fa ville naiflante , êc que Tatius, auffi-bien que Numa , entre tant de dieux & de déefles qu’ils avoient établis, euffent ou- blié la Féficiré ; & il ajoûte à ce fujet, que fi Tullus Hoftilius avoit connu la déeffe ; il ne fe feroit pas avilé de s’adrefler à la Peur & à la Pâleur pour ert faire de nouvelles divinités, puifque quand on a la Félicité pour foi, l’on a tout, & l’on ne doit plus rien appréhender. Mais les Payens auroient pûù répondre deux chofes à faint Auguftin fur fa derniere remarque : 1°. que Tullus n’avoit bâti des temples à la Peur & à la Pâleur, que pour prévenir la terreur panique dans fon armée, & porter l’épouvante chez les en- nemis ; c’eft pourquoi Héfiode , dans fa deféription du bouclier d’ Hercule, y repréfente Mars accompagné de la Peur & de la Crainte. 2°. L’on pouvoit répon- dre à S. Auguftin, que les Romains penfoient qu'il étoit abfolument néceflaire d'imprimer dans l’efprit des méchans la crainte d’être féverement punis, & que c’étoit par cette raïfon qu'ils avoient confacré des temples & des autels à la peur, à la fraude & à la difcorde, &c. Au refte, l’hiftoire ne nous apprend point f la déefle Félicité avoit beaucoup de temples à Rome ; mais nous fayons qu’elle fe trouve fouvent repré- fentée fur les médailles antiques , quelquefois avec figure humaine , & le plus fouvent par des fymboles. En figure humaine, c’eftune femme qui tient la cor- ne d’abondance de la main gauche , & le caducée de la droite. Les fymboles ordinaires repréfentent-la Félicité fous deux cornes d’abondance quife croifent. &c un épi qui s’éleve entre les deux. Arsicle de M. Le Chevalier DE JAUCOURT, | FELIN , £. f. (Comm.) petit poids dont fe fervent les Orfévres & les Monnoyeurs, qui pee fept grains 8t un cinquieme de grain. Les deux feZrs font la maille. Le marc eft compofé de fix cents quarante félins. Voyez ONCE, MaRC , GRAIN, Poips , &c Didionn. de Comm. de Trév. & Chamb. (G) FELIX, FELICISSIMUS, FELICITAS, (Littérature.) en françois heureux, très-heureux , &c. titres fréquens dans les‘monumens publics des Ro- mains, adoptés d’abord par Sylla, prodignés enfuite aux empereurs, & qu'enfin les villes, les provinces & les colonies les plus malheureufes, dépendantes ‘de lempire , eurent la baffeffe de s'appliquer, pour -ne pas déplaire aux fouverains de Rome. Ajoùtons même qu'entre les différens titres qui fe lifent fur les monumens antiques , celui.de felix ou felicitas , eft un de ceux qui s’y trouvent le plus fou- vent. Sylla, le barbare Sylla , que la fortune com- ‘bla de {és faveursjufqu’à la mort, quoiqueda cruauté l'en eût rendu très-indigne, fut le premier des Ro- mains qui prit Le nom de félix, heureux. . Mais à qui ou à quoi dans la fuite ne prodigrra-t- on pas fauflementce glorieux titre de f:/1x ou de j£- dicitas Il fut attribué au trifte tems prélent , féliciras temporis, felix temporum reparatio ; aurfecle infor- tuné , fæculi felicitas : au fénat abattu , au peuple ro- main aflervi, félicitas populi romani ; à Rome mal- heureule;, rome félict; à l'empire confterné fous Ma- ernn, cé vil gladiateur & chaffeur de bêtes fauvages, félicitas imperit ; à toute la terre gémiffante, féliciras orbis; mais fur-tout aux plus infimes empereurs, de- + s L4 1 { puis que Commode prince déteftable, & detefté de tout l’Univers , fe le fut approprié. On donna même à fes fuccefleurs le titre de fe- ciflimus, dans le bas-empire ; la mode s’étoit alors introduite de porter au {uperlatif la plüpart des ti- tres, à proportion qu'ils étoient le moins mérités, beatiffimus , nobiliffimus , priffimus. A l'exemple de l’état romain & des empereurs, quantité de colonies fe piquerent de fe dire heureu- fes fur leurs monnoies, par adulation pour les prin- ces regnans dont elles vouloient tâcher de gagner. les bonnes sraces, en fe vantant de jouir d’une féli- cité qu'elles éroient bien éloignées de pofléder. II fufit pour s’en convaincre de fe rappeller qu'entre les colonies qui prirent le titre de feix, les médaïl- les nomment Carthage & Jérufalem. Les provinces, à limitation des villes, affe@erent auf fur leurs monumens publics, de fe proclamer heureufes, La Dace publie qu’elle eft heureufe fous Marc-Jules-Philippe : où, Dacia felix fe trouve fur les médailles frappées fous le regne de cet arabe, qui parvint au throne par le brigandage &c le poifon. Enfin pour abréger , l’on pouffa la baffle fous Commode, jufqu’à faire graver fur les médailles de ce monftre dont j'ai déjà parlé, que le monde étoit heureux d’être fous fon empire : Kouuod'ou Bacinevouros Ô LOGUOc eUTUVER. C’en eft aflez pour qu’on prufle apprécier dans loccafion les monumens de ce genre à leur jufte valeur ; car les excès de la flaterie font & feront toûüjours en raifon de la fervitude. Cicéron a fi bien connu cette vérité, quand il nous peint les Afiati- ques en ces mots, Zururna férvitute ad nimiam after- lafionem eruditi. Article de M, le Chevalier DE JAU- COURT. FELENIE , £. £. (Jurifp.) fe difoit anciennement pour félonie ou infidelire. Voyez Beaumanoir , chap. 7. Defontaines, ur. xv7. Liv, IV, & ci-après FELONIE. + ELLE , f. £. (Verrerie.) morceau de fer en forme de canne, creufée dans toute fa longueur , qui eft d'environ quatre piés & demi; elle eft armée par un bout d’une poignée de bois, pour empêcher lou- vrier de fe brûler, ayant l’autre bout un peu plus gros. La fele fert à cueillir la matiere dans les pots our en faire le verre à vitre. FELON , f. m. (Juri/prudence.) figniñe en général traitre, cruel, & inhumain. En matiere féodale, il fe dit du vaflal qui a ofenfé grievement fon feigneur, ouqui a été déloyal envers lui. Le feigneur peut auff être félon envers fon vaflal, lorfqu’il commet contre lui quelque forfait & déloyauté notable, Voyez c- après FÉLONIE. (4) FELONIE, {. £. (Jurifprud.) dans un fens étendu fe prend pour toute forte de crimes, autre que celui de léfe-majefté, tels que l’incendie, le rapt, l’homi- cide, le vol, 8 autres délits par lefquels on attente à la perfonne d’autrui. Mais dans le fens propre & le plus ordinaire, le terme de féorie eft le crime que commet le vaflal Qui offenfe grievement fon feigneur. La diftinéion de ce crime d'avec les autres délits fire, comme on voit, fon origine des lois des fiefs. Le yaffal {e rend coupable de félomie lorfqu’il met la main fur fon feigneur pour l’outrager, lorfqu'l le | maltraite en effet lui, fa femme, ou fes enfans, foit . de coups où de paroles injurieufes ; lorfqu'il a des- honoré la femme ou la fille de fon feigneur , ou qu'il a attente à la vae de fon feigneur, de fa femme, ou _defes enfans. | Boniface, rom, P liy. IIT tr. j. ch. x7x, rappotte ! Er EE 467 un arrêt du parlement de Provence du mois de Dé- cembre 1675, qui condamna un vaflal à une amende honorable , & déclara fes biens confifqués , pour avoir dépouillé fon feigneur dans le cercueil, & lui avoit dérobe fes habits. Le roi Henri If. déclara, en 1556, coupables de felonie tous les vaflaux des {cigneurs qui lui devoient apporter la foi & hommage, & ne le faifoient pas, tels que les vaflaux de la Franche-Comté, de Flan- dres, Artois, Hainaut, &c. Le démenti donné au feigneur eft auffi réputé f#- lonie ; 11 ÿ a deux exemples de confifcation du fief prononcée dans ce cas contre le vafal , par arrêts des 31 Décembre 1556 & Mai 1574, rapportés par Papon, 4v. XIII, #ie,7, 7, 11, & par Bouchel, &iblos. verbo félorre, Le defaveu eft différent de la félonie, quoique la commuife ait lieu en l’un & l’autre cas. Le crime de é/onie ne fe peut commettre qu’envers le propriétaire du fief dominant, & non envers luftui- fruitier , fi ce n’eft à l'égard d'un bénéficier, lequel tient lieu de propriétaire, auquel cas le fief fervant n'eft pas confifqué au profit du bénéficier, mais de fon églife. | La peine ordinaïte de la félomie eft la confifcation du fief au profit du feigneur dominant ; un des plus anciens & des plus mémorables exemples de cet ufa- ge, eft la conffcation qui fut prononcée pour félonie commife par le feigneur de Craon contre le roi de Sicile 8 de Jérufalem. Par arrêt du parlement de Pa- ris, de lan 1394, feStbiens furent déclarés acquis & confifqués à la reine , avec tous les fiefs qu’il tenoit de ladite dame , tant en fon nom que de fes enfans ; & comme traître à fon feigneur & roi, il fut condam- né en 100000 ducats & banni hors du royaume ; mais l'exécution de cet arrêt fut empêchée par le roi fon oncle & par le duc d'Orléans. Papon, 4y. XII, sir, 7e LANTE Les bénéficiers coupables de fé/onie ne confifquent pas la propriété du fief dépendant de leur bénéfice , mais feulement leur droit d'ufufruit. Forget, ch.xxup, La flonie & rebellion de l’évêque donnent ouver- ture au droit de regale, ainfi qu’il fut jugé par un at- rêt du parlement de Paris, du mois d'Août 1508. Fils leau, part. IF. quefl. 1. Celui qui tient un héritage à cens, doit aufi être privé de ce fonds ponfélonie, Lapeyrere, les. f. n. Gr, Gé 114. | Mais [a confifcation pour fé/onte , foït contre le vaflal ou contre le cenfitaire , n’a pas lieu de plein droit ; il faut qu'il foit intervenu un jugément qui ordonne {ur les pourfiites du feigneur dominant. Voyez Andr. Gaïl. 4h. FE obferv: $r, Outre la peine de la commife , le vaffal peut être condamné à mort naturelle ;ouaux galeres au ban- niflement, en l’amende honorable ; ou en une fimple amende, felon latrocité du délit qui dépend des cit- conftances. | DE Si le feigncur dominant ne s’eft pas plaint de fon vivant de la fé/orie commife envers lui par fon vaffal, il eft cenfé Ini avoir remis l'offenle | & ne peut pas intenter d'aétion contre fes héritiers, à moins qw’elle n’elt été commencée du vivant du-feigneur domi- nant & du vaflal qui a commis l'offenfe, FoyéBalde fur La loi derniere cod. de révoc. Donat; Mynfhger , cent. Dj. obferv. 97. Wourmier, rit. 1j, défend-obferv. 36. 7,2. & 3. Decianus, rp23.n; 18:v0l, 1 Wu. teius, de feudis, c. xj. n.13. Obrecht, de jure fétdor. Lib. IV. cap. vaj. p. 574. Foyer aufi le manifefte fait en 1703, parle comte Paul Pérront pour le duc de ‘Mantoue, cité au ban de l'Empire, qui fôfme un traité complet dun droit féodal-par rapport à la fé/0. nie, (AY ONE D Sa | HQE N PEER pan du feigneur «envers fon vaflal eff lorfque 468 FEL le feigneur commet contre lui quelque forfait &e dé- À Joyauté notable, | # Cette efpece de. félonie fait perdre au feigneur do- minant l'hommage & la mouvance du fief fervant, qi retourne au feigneur fuzerain de celui quiacom- mis la félonie , & le vaffal outragé par fon feigneur eft exempt, & fes fuccefleurs, pour toùjours de la jurifdiétron du feigneur dominant , & de lui payer aucuns droits feigneuriaux , ce qui eft fondé fur ce que les devoirs du feipneur & du vaffal font récipro- ques ; le vaffal doit honneur & fidélité à fon feigneur, & celui-ci doit pretettion & amitié à fon vaflal. Le plus ancien & le plus fameux exemple que l’on rapporte de la confifcation qui a lieu en ce cas con- tre Le feigneur dominant, eft celui de Clotaire I. le- quel, au rapport dé Guaguin, du Haillan, & quel- ques autres hiftoriens, fut privé de la mouvance de da feigneurie d'Yvétot en Normandie, pour avoir tué dans l’églife , le jour du vendredi faint, Gauthier féigneur de ce lieu, lequel ayant été exilé par ce prince, étoit revenu près de lui muni de lettres du pape Agapet. On prétend que Clotaire pour réparer fon crime , érigea Yvetot en royaume ; mais cette huftoire, dont on n’a parlé pour la premiere fois que 900 ans après la mort de ceux qui y avoient quelque part, eft regardée comme fabuleufe par tous les bons hiftoriens. | Chopin , fur la coûtume d’Anjou , 2. IT. part. IT, tir.jv. ch.1], 7,2, rapporte un arrêt du 13 Mars 1562, par lequel un feigneur fut privé de la foi, hommage, & fervice que fon vaffal lui devwit pourlut avoir don- néunfoufflet dansune chambre du parlementdeParis. Voyez les coûtumes de Laon, arsicles 196, € 19 7. Chalons, arc. 197. 6 198. Reims, art. 129. 6 130. Ribemont , ærr. 34. Saint-Pol, art. 32. & Billecoq, tr. des fiefs, liv. XI. ch.1j.jv, G x. (4) FELOUQUE, 1. f. (Marine. ) c’eft un petit bâti- ment de la mer Méditerranée , en forme de chalou- pe, qui va à la voile & à la rame, Ce bâtiment a ce- À de particulier, qu’il peut porter fon gouvernail à l’avant ou à l’arriere felon fon befoin, à caufe que {on étrave & fon étambort font également garnis de penture pour le foûtenir. Ce bâtiment a d'ordinaire fx ou fept rameurs, & va très-vite. (Z) M FELOURS , . m,. (Corm.) monnoie de cuivre; c’eft le liard de Maroc; il en faut huit pour la blan- quette, & la blanquette fix blancs de notre monnoie. FELTRI, Feria; (Géog.) ancienne ville d'Italie, dans la marche Trévilane , capitale d’un petit pays de même nom, avec un évêque fuffragant d’Aquilée. Les Vénitiens poffedent le Feltrin , 8x Fe/sri depuis 1404. Elle eft fur l’Arona, à 12 lieues N.de Padoue, 7 S. O. de Belluno, 16 N. O. de Venife, C’eft la pa- trie de Viétorin, l’un des premiers reftaurateurs de l’ancienne latinité. Long, 29.26, lat. 46.3. (D.J.) FEMELLE, f. f. (Æiff. nar.) c’eft le correlatif de mâle. C’eit celui qui conçoit & met au monde le petit. Voyez SEXE. . FEMELLES, f. f. (Marine) ce font des anneaux qui portent le gouvernail : on appelle #41es, les fers quisentrent dans ces anneaux. Voyez FERRURE DE GOUVERNAIL. (Z ) FEMELLE. Les Ki/affiers appellent de ce nom une -efpece de chanvre menu & fin, qui ne produit point _de graine;,:mais dont la filaffe eft beaucoup plus belle _que le mâle, qui n'eft propre qu’à faire des cordages ou des grofles toiles. à vil prix. Voyez CORDERIE. FEMELLE CLAIRE,ye7Z terme de Plumaffiers ce {ont des plumes d’une autruche ferselle, blanches & noi- tes, mais,où le blanc donune fur le noir. FEMELLE OBSCURE!, .e7 Plumaferie , ce font des .plumes.d’une autruche femelle, noires & blanches, mais où 1l y a plus de noir que de blanc. et FEMEREN 94 FEMERN, (Géog.) Cimbrie ; dont FEM énfuite on a fait Simbrie, eftune petiteile de Dane3 mark, dans la mer Baltique, à deux milles du duché d'Holftein. Elle eff fort fertile en grains & en pâtu- rages. Voyez Audrifret, Maty, Deshayes, voyage dé Danemark , &c. Long. 28. 50-29. lat. 54. 40-4, 2. … Kortholt (Chriftian) profefleur en Théologie à Kiel, né dans l’ile de Fénerer en 1633, mort en 1604, enrichit PAllemagne d’un grand nombre de livres , & laïfla des fils qui marcherent fur fes traces. (D. FEMININ , ÎNE , adj. (Gram.) c’eft un qualif- catif qui marque que l’on joint à fon fubftantif une idée accefoire de femelle : par exemple, on dit d’un homme qu'il a un vifage féminin , une mine féminines une Voix féminine, &c. On doit obferver que ce mot a une terminaifon mafculine &t une féminine, Si le fubftantif eit du genre mafculin, alors la Grammaire exige que l’on énonce l’adjeétif avec la terminaifon malculine : ainf l’on dit , #7 air féminin , felon la for: me grammaticale de l’élocution; ce qui ne fait rien perdre du fens, qui eft que l’homme dont on parle a une configuration , un teint , un coloris, une voix, 6, qui reflemblent à l’air & aux manieres des fem- mes, on qui réveillent une idée de femme. On dit au contraire, 47e voix féminine , parce que voix eft du genre féminin : ainf il faut bien diftinguer la for- me grammaticale, & le fens ou fignification ; enforte qu'un mot peut avoir une forme grammaticale maf- culine , felon lPufage de l’élocution, & réveiller en même tems un lens férzinin. En Poëfie on dit , rime féminine, vers féminins, quoi- que ces rimes & ces vers ne réveillent par eux-mê- mes aucune idée de femme. Il a plû aux maîtres de l’art d’appeller ainfi, par extenfion où imitation, les vers qui finiflent par un e muet; ce qui a donné liew à cette dénomination, c’eft que la terminailon fér:i- nine de nos adjeétifs finit toüjours par un e muet bon, bon-ne ; un, u-ne; faënt, fain-te ; pur, pu-re: hor- loger, horloge-re, &c. Il y a différentes obfervations à faire fur la rime féminine ; on les trouvera dans les divers traités que nous avons de la poëfie françoife. Nous en parlons au not RIME. Le peuple de Paris fait du genre fémirin certains mots que les perfonnes qui parlent bien font, fans conteftation, mafculins; le peuple dit : urie belle évers. taille, au lieu d'u bel éventail ; & de même ve belle hôrel, au lieu d’un bel hôtel, Je crois que le / qui finit le mot #e/, &c qui fe joint à la voyelle qui commence. le mot a donné lieu à cette méprife. Ils difent enfin, la premiere âge, la belle âge ; cependant pe eft mafcu- lin, l’âge viril, l’âge mûr , un âge avancé. Voyez GENRE. (F) FEMME, f, f. (Anthropologie) femina , sui, ifchæ en hébreu; c’eft la femelle de l’homme. Yoyez Hom- ME , FEMELLE, & SEXE. Je ne parlerai point dés différences du fquelette de l’homme &c de la femme : on peut confulter là- deflus M. Daubenton, defcriprion du cabinet du Roi, tome III. hifi. natur. pag. 29 & 30 ; Monro, apper- dix de fon Ofléologie ; & Ruyfch qui a obfervé quel- que chofe de particulier fur la comparaifon dés cô- tes dans les deux fexes. Voyez SQUELETTE. Je ne ferai point une defcription des organes de la génération ; ce fujet appartient plus diretement à d’autres articles. Mais 1l femble qu'il faut rappor- ter 1c1 un fyftème ingénieux fur la différence de ces organes dans l’homme &c dans la ferme. M. Daubenton , som, III. kiff. nat. pag. 200. après avoir remarqué la plus grande analogie entre les deux fexes pour la fecrétion & l’émiflion de la fe- mence, croit que toute la différence que l’on peut trouver dans la grandeur & la pofition de certaines patties, dépend de la matrice qui eft de plus dans les femmes que dans les hommes, & que ce vifcere 5 droit les drganes dela génération dans les-homimes abfolument {emblables à ceux des férmes , s’il en faifoit partie, | Le " M:Daubenton appuie ce fyftème fur la defcrip- tion de quelques fœtus peu avancés, que Ruyfch a fait connoître, ou qui font au cabinet du Roï. Ces fœtus, quoique du fexe féminin , partoiffent mâles au premier coup-d'œil, & Ruyfch en a fait une regle génétale.pour les fœtus femelles de quatre mois environ, dans un paflage qu’on peut ajoûter à ceux que M. Daubenton a cités , thef. jv. n°. 42. fœtus humanus quatuor pr@ter propter menfum ; quam- vis prié. fronte vifus mafculint videatur fèxus ; ta- men fequioris eft, id quod in omnibus fœtibus humanis ; fèxus femininr ed ætate reperitur. M. Daubenton s’eft rencontré jufqu’à un certain pointavec Galien, qui dans le fecond livre epi cœcp- maroc, chap. y. nermet d'autre différence entre les parties génitales de l’homme & de la femme , que celle de la fituation ou du développement. Pour prouver que ces parties, d’abord ébauchées dans le {ac du péritoine , y reftent renfermées , ou en for- tent fuivant les forces ou l’imperfeétion de l’animal ; il a auf recours aux diffeétions de femelles pleines, & aux fœtus nés avant terme. Onretrouve la même hypothèfe dans le traité de Galien , de 4fu partium , 1. XIV. c. vi. & Avicenne l’a entierement adoptée dans Le troifieme livre de fon canon, fez. 21, sraif. I, Cap. J Mais Galien ne croit pas que les hommes man- quent de matrice ; il croit qu’en fe renverfant , elle forme le ferotum , & renfermeles tefticules , quifont extérieurs à la matrice. Il fait naître la verge d’un prolapfus du vagin, aulieu de la chercher dans Le clitoris, Piccolhomini & Paré avoient embraflé l’opinion de Galien ; Dulaurent, Kyper , & plufeurs autres anatomiftes, n’y ont trouvé qu'un faux air de vraif- femblance. Cette queftion paroît intimement liée avec celle des hermaphrodites , d'autant plus que nous n'avons que des exemples fabuleux & poéti- ques d'hommes devenus fémmes ; au lieu qu’on trou- ve plufeurs femmes changées en hommes , dont les métamorphofes font atteftées férieufement. Cette remarque finguliere , avec les preuves dont elle eft fufceptible , fe trouve dans Frommann, de fufcina- sione mapicé ; pag. 866. Voyez HERMAPHRODITE. Hippocrate, aphor. 43. div. VIT. dit poñitivement qu’une férme ne devient point ambidextre. Galien le confirme , & ajoûte que c’eft à caufe de la foi- blefle qui lui eft naturelle ; cependant on voit des dames de charité qui faignent fort bien avec l’une & l’autre main. Je fai que cet aphorifme a été ex- pliqué pat Sextus Empiricus, p. #7. 380. des fœtus femelles qui ne font jamais conçus dans le côté droit de la matrice. 3. Albert Fabricius a fort bien remar- qué que cette interprétation a été indiquée par Ga- lien dans fon cormentaire ; mais 1l devoit ajoûter que Galien la defapprouve au même endroit. Les Anatomiftes ne font pas les feuls qui ayent regardé en quelque maniere la fémme comme un hom- me manqué ; des philofophes platoniciens ont eu une idée femblable. Marfile Ficin dans fon commen- taire fut le fecond livre de la troifieme ezreade de Plotin ( qui eftle premier mepl œporciac ), chap, xJ. aflüre que la vertu générative dans chaque animal, s'efforce de produire un mâle , comme étant ce qu'il y a de plus parfait dans fon genre ; mais que la natu- re univerfelle veut quelquefois une femelle, afin que la propagation , dûe au concours des deux fe- xes, perfettionne l’umivers, Voyez. tom, II, des œu- vres de Marfile Ficin., pag. 1693. Les divers préjugés fur Le rapport d'excellence de l'homme à la femme , ont été produits par les coûtu- Tome VI, É CE FEM 409 mes des anciens peuples , les fyftèmes de politique & les religions qu'ils ont modifiés à leur tour. J'en excepte la religion chrétienne, qui a établi, comme je le dirai plus bas , une fupériorité réelle dans l’hom- me, en confervant néanmoins à la fée les droits de légalité, | On a fi fort négligé l'éducation des fées chez tous les peuples policés , qu'il eft furprenant qu'on en compte un auf grand nombre d'illuftres par leur érudition & leurs ouvrages. M. Chrétien Wolf a don- né un catalogue de femmes célebres , à la fuite des fragmens des illuftres greques, qui ont écrit en pro- {e. IL a publié féparément les fragmens de Sappho, ëc les éloges qu’elle areçus. Les Romains , les Juifs, &c tous les peuples de l'Europe, qui connoiffent Les lettres, ont eu des fémmes favantes. À: Marie de Schurman a propofé ce problème : l'étude des lettres convient-elle à une ferme chré- tienne ? Elle foûtient l’afirmative ; elle veut même qué les dames chrétiennes n’en exceptent aucune, & qu’elles embraflent la fcience univerfelle. Son deu- xieme argument eft fondé fur ce que l'étude des let- tres éclaire, & donne unefagefle qu’on n’achetepoint par les fecours dangereux de l’expérience. Maïs on pourroit douter fi cette prudence précoce ne coûte point un peu d’innocence. Ce qu’on peut dire de plus avantageux, pour porter à l’étude des Sciences &des Lettres , c’eft qu’il paroït certain que cette étude cau: fe des diftraétions qui affoibliffent les penchans vi- cieux. | Un proverbe hébreu borne prefque toute l’habi- leté des femmes à leur quenouille , 8 Sophocle a. dit que le filence étoit leur plus grand ornement. Par un excès oppofé, Platon veut qu’elles ayent les mêmes occupations que les hommes. Voyez le cinquieme dialogue TOIT EL Ce grand philofophe veut au même endroit qué les femmes & les enfans foient en commun dans fa république. Ce réglemént paroît abfurde ; auf a-tl donné lieu aux déclamations de Jean de Serres , qui font fort vives: La fervitude domeftique des femmes ; &z la poly- gamie, ont fait méprifer le beau fexe en Orient, & l’y ont enfin rendu méprifable. La répudiation & le divorce ont été interdits au fexe qui en avoit Le plus de befoin , & qui en pouvoit le moins abufer. La loi des Bourguignons condamnoit à être étonfée dans la fange , une ferme qui auroit renvoyé fon lé- gitime époux. On peut voir fur tous ces fuets l’ex- cellent ouvrage de l’Æfprit des lois, liv. XVI. Tous les Poëtes grecs depuis Orphée , jufqu’à S. Grégoi- re de Nazianze, ont dit beaucoup de mal des f- mes, Euripide s’eft acharné à les infulter , & 1l ne nous refte prefque de Simonide , qu’une violente in- veétive contr’elles. L’on trouvera un grand nombre de citations de poëtes greçs , injurieufes aux fermes, dans le commentaire de Samuel Clarke, fur les vers 426 &c 455, Liv. XI. de l'Odyffée. Clarke a pris cere- cueil de la Grzomologia Homerica de Duport, page 208 , qu'il n’a point cité. Le galant Anacréon , en même tems qu'il attribue aux fermes une beauté qui triomphe du fer & de la flamme, dit que la nature leur a refufé [a prudence , gporau« , qui eft le parta- ge des hommes, Les poëtes latins ne font pas plus favorables au fexe ; 8 fans parler de la fameufe furyre de Juvé- nal, fans compiler des paffages d’Ovide, & de plu- fieurs autres , je me contenterai de citer cette fen- tence de Publius Syrus : mulier qua fola cogitat , male cogitat , qu'un de nos poëtes a ainfi rendue : femme qui penfe, à coup sûr penfe mal. Platon dans {on dia. logue, Nouur , com. II. pag. 909. E. attribue princi- palement aux femmes l’origine de la fuperfätion, des vœux , & des facrifices, Strabon eff as même fentis exe 470 FEM ment , Lv: WII. de Ja géographie ; les Juifs qui ne croyent pas leurs cérémonies fuperfäitieufes, accu- {ent les fermes de magie , & difent que plus il ya de femmes , plus il y a de forcieres, Peut-être n’a-t-on attribué aux fermes , des arts d’une vertu occulte, tels que la fuperftition & la ma- gie , que parce qu’on leur a reconnu plus de reffour- ces dans l’efprit qu'on ne vouloit leur en accorder ; c’eft ce qui a fait dire à Tite-Live , que la femme eft an animal impuiflant &7 indomptable. Le principe de la foibleffe & de l’infériorité des férmes , leur {e- roit avantageux, fi tout le monde en concluoitayec Ariftote, que c’eft un plus grand crime de tuer une Jemme qu'un homme. Woyez les problèmes d'Ariftote, Jfeét. 29. 11. C’eft une chofe remarquable , qu’on a cru être fouillé par le commerce lésitime des fermes, & qu'- on s’eneft abftenu la veille des facrifices chez les Ba- byloniens , les Arabes ; les Egyptiens , les Grecs, & les Romains. Les Hébreux pénfent qu’on perd l’ef- prit de prophétie par un commerce même légitime; ce qui me rappelle la maxime orgueilleufe d’un an- cien philofophe , qui difoit qu'il ne falloit habiter avec les fémmes ,; que quand on vouloit devenir pire. Les rabbins ne croyent pas que la femme fût créée à l’image de Dieu ; ils aflürent qu’elle fut moins par- faite que homme , parce que Dieu ne l’avoit for- mée que pour lui être un aide. Un théologien chré- tien ( Lambert Danæus , 27 antiquiratibus , pag: 42.) a enfeigné que l’image de Dieu étoit beaucoup plus vive dans l’homme que dans la femme. On trouve un paflage curieux dans l’hiftoire des Juifs de M, Bafnage, vol. VII. pag, 301 & 302. « Dieu ne vou- » lut point former la femme de la tête, ni des yeux, » nm, &c. ( de peur qu’elle n’eût les vices attachés à # ces parties }; mais on a eu beau choïfir une partie » honnète & dure de l’homme , d’où il femble qu'il # ne pouvoit fortir aucun défaut (une côte), la fem- » me n'a pas laiflé de les avoir tous ». C’eft la def- cription que les auteurs Juifs nous en donnent. On la trouvera peut-être fi jufte , ajoûte M. Bafnage, qu’on ne voudra point la mettre au rang de leurs vifions , & on s'imaginera qu'ils ont voulu renfer- mer une vérité connue fous des termes figurés. D’autres rabbins ont traduit par céré le mot hé- breu J/elah , qu’on expliqué vulgairement côte : ils ra- content que le premier homme étoit double & an- drogyne, & qu’on n'eut befoin que d’un coup de hache pour féparer les deux corps. On:lit la même fable dans Platon , de qui les rabbins l'ont emprun- tée , s’il faut en croire M. le Clerc dans fon commen- taire fur le pentateuque. Heidegger a obfervé , exercitat. 4. de hifloria pa- criarcharum , n°, 30. que Moyfe ne parle point de lame d’Eve, & qu’on doute quelle en eft la raïfon. Il eft certain que les fémmes étoient à plaindre dans la loi juive, comme M. le Clerc l’a remarqué , Zi. cie. pag. 309. col, 2. Jefus-Chriit lui-même nous a ap- pris que la répudiation fut permife aux Hébreux, à caufe de la dureté de leur cœur ; mais lorfqu'il n’a pas voulu que l’homme pût defunir ce que Dieu avoit joint , {es difciples fe font récriés, & ont trou- vé que le mariage devenoit onéreux. Th, Crenius dans fes arimadverfiones philologice, & hufloricæ, part. XV. pag. 61, x. remarque que perfonne n’a plus mal- traité les fermes , & n’a plus recommandé de s’en garder, que Salomon, qui néanmoins s’y eft aban- donné ; au lieu que Jefus - Chriit a été plus doux à leur égard , & en a converti un grand nombre; c’eft pourquoi, dit-il, il en eft qui penfent que Jefus- Chrift a eu de la prédile&tion pour ce fexe. En effet, il a eu une mere fur la terre, & n’a point eu de pere; la premiere perfonne à qui il s’eft montré après fa réfurreétion, a été Marie-Madeleine, &c, Les perfonnes quirenoncent aumatiage , font cenfées approcher davantage de la peérfeéon , de- puis l’établiffement de la religion chrétienne ; les Juifs au contraire, regardent le célibat comme un état de malédiétion. #oyez Pirke Aboth , chap. y, RS LS : S. Pierre dans fa premiere épitre, chap. ii]. verf. 7. ordonne aux maris de traiter leurs férmes avec hon- neur, parce qu'elles font des vafes plus fragiles. Les Juifs difent que la férme eft un vafe imparfait ; que l'époux, acheve l’hébreu , a encore plus de force; car 1l peut fignifier que la férrme, fans le fecours du mari, n'eft qu'un embryon. Voyez Gemare fur le si- tre Jarhedrin du ralmud , chap. 1j. fegm. 15. Petrus Calanna , dans un livre rare intitulé, p4z- lofophia feniorum facerdotia & platonica, pag. 173 , ofe dire que Dieu eft mâle & femelleen mêmetems. Godofredus Arnoldus , dans fon livre de fophié , a foûtenu cette opinion monftrueufe, dérivée du plato- nifme , qui a aufli donné le jour aux éons, ou divi- nités hermaphrodites des Valentiniens. M. de Beaufo- bre, hifloire du Manichéifne, tom. Il. pag, 584. veut que ces éons fuffent allégoriques ; & il fe fonde fur ce que Synefius évêque chrétien , attribue À Dieu les deux fexes, quoiqu'il nignorât pas que Dieu n’a point d'organes corporels, bien loin d’avoir ceux de la génération. Mais on lit feulement dans Synefus, pag. 140. édition du P, Petau , que le corps de la Divinité n’eft point formé de la lie de la matiere ; ce qui n'eft pas dire que Dieu n'ait aucun organe corporel. D'ailleurs on peut prouver aifément, & Nicephore Grégoras dans fon commentaire fur Syne- fus, nous avertit en plufieurs endroits, que Syne- fius étoit imitateur & feétateur de Platon. Les Manichéens penfoient que lorfque Dieu créa l’homme , 1l ne le forma ni mâle ni femelle , mais que la diftinétion des fexes eft l'ouvrage dn diable. On dit aflez communément qué Mahomet a ex- clu les femmes du paradis ; le verfès 30. de lafura 33. de fon alcoran , infinue le contraire, C’eft pourtant une tradition fur laquelle deux auteurs mufulmans ont écrit , Comme on peut voir dans la Pikliockeque orientale de M. d’'Herbelot. Mahomet condamne à quatre-vingts conps de fouet ceux qui accuferont les femmes , fans pou- voir produire quatre témoins contr’elles ; & il char- ge les calomniateurs de malédi@ions en çe monde &c en l’autre, Le mari peut , fans avoir des témoins, accufer fa femme, pourvû qu'il jure quatre fois qu'il dit vrai, & qu'il joigne l’imprécation au ferment à la cinquieme fois. La féme peut fe difculper de la même maniere. Sura 24. verf. 4. & 6. Mahomet re- commande la chaîfteté aux fermes en des termes très- peu chaftes (36. verf. 32.) ; mais il n’eft pas bien clair qu'il promette la miféricorde divine aux fémmes qui font forcées de fe proffituer , comme l’a préten- du le favant Louis Maracci dans fa réfuration de lat. COTAIZS Le prophete arabe, dans le Jura 4. veut qu’un m4- le ait une part d’héritage double de celle de la fe- melle. Il décide formellement (verf. 33. ) la fupé- riorité des hommes, auxquels il veut que les férrmes obéiffent. Si elles font indociles , il confeille aux maris de les faire coucher à part, & même de les battre. Il a établi de grandes peines contre les fm- nes coupables de fornication ou d’adultere ; mais quoique Maracci l’accufe de ne pas punir les hom- mes coupables de ces crimes, 1l eft certain qu'il les condamne à cent coups de fouet, comme Selden Pa remarqué, zxor ebraica , pag. 392. On verra auffi avec plaïfir dans ce livre de Selden (p. 467 &fuiv.), l’origine des Hullas parmi Les Mahométans. | Tout le monde a entendu parler d’une différrarion anonyme , où l’on prétend que les fermes ne font “point pattie du genre humain, wwlieres homines non effe. Dans cet ouvrage, Acidalins explique tous les textes qui parlent du falnt des fées , de leur bien- être temporel. Il s'appuie far cinquante témoignages tirés de l’Ecriture ; finit par demanderaux femmes leur ancienne bienveillance pour lui; god j£ noluerint, dit-1l ; pereans beffie in fecula feculorum. Il en veut à la maniere d'expliquer l’Ecriture des Anabaptiftes & des autres hérétiques ; mais fon badinage ef indé- cent. tr | Simon Gediccus., après Pavoir réfuté aufli maut- fadement qu'il foit poffible de le faire , après lavoir chargé d’injures théologiques, lui reproche enfin qu’il eft un être bâtard , formé de l’accouplement monf trueux de fatan avec l’efpece humaine, & lui fou- haite la perdition éternelle. (g) FEMME, ( Droit nas.) en latin zxor, femelle de l’homme, confidérée en tant qu’elle lui eft unie par les liens du mariage. Voyez donc MARIAGE €& MAR. L’Etre fuprème ayant jugé qu'il n’étoit pas bon que l’homme füt feul , lui a infpiré le defir de fe join- äre en focièté très-étroite avec une compagne, & cette focièté fe forme par un accord volontaire entre les parties. Comme cette fociété à pour but princi- pal la procréation & la confervation des enfans qui naïtront , elle exige que le pere & la mere confa- crent tous leurs foins à nourrir & à bien élever ces gages de leur amour, jufqu’à ce qu’ils foient en état de s’entretenir & de fe conduire eux-mêmes. Mais quoique Le mari & la ferme ayent au fond les mêmes intérêts dans leur fociété , il eft pourtant ef- fentiel que l’autorité du gouvernement appartienne à l’un ou à l’autre : or le droit poñitif des nations po- _licées, les lois & les coûtumes de l’Europe donnent cette autorité unanimement & définitivement au mâ- le, comme à celui qui étant doûé d’une plus grande force d’efprit & de corps, contribue davantage au bien commun, en matiere de chofes humaines & facrées ; enforte que la ferme doit néceffairement être fubordonnée à fon mari & obéir àfes ordres dans toutes les affaires domeftiques. C’eft-là le fentiment des jurifconfultes anciens & modernes, & la déci- fion formelle des lésiflateurs. Auff le code Frédéric qui a paru en 1750 , & qui femble avoir tenté d'introduire un droit certain & univerfel, déclare que le mari eft par la nature mê- _ me le maitre de la maiïfon, le chef de la famille ; & que dès que la femme y entre de fon bon gré , elle eft en quelque forte fous la puiffance du mari, d’où dé- coulent diverfes prérogatives qui le regardent per- fonnellement. Enfin l’Écriture - fainte prefcrit à la ferme de lui être foûmife comme à fon maitre. Cependant les raifons qu’on vient d’alléguer pour le pouvoir marital, ne font pas fans replique, hu- mainement parlant ; & le caraëtere de cet ouvrage nous permet de le dire hardiment. Il paroît d’abord 1°. qu'il feroit difficile de démon- trer que l'autorité du mari vienne de la nature; par- ce que ce principe eft contraire à légalité naturelle des hommes; & de cela feul que l’on eft propre à commander, 1l ne s’enfuit pas qu’on en ait atuelle- ment le droit: 2°. homme n’a pas toûjours plus de force de corps, de fagefle, d’efprit, & de conduite, que la femme : 3°. le précepte de l’Ecriture étant éta- bli en forme de peine, indique affez qu’il n’eft que de droit pofitif. On peut donc foûtenir qu’il n’y a point d'autre fubordination dans la fociété conjugale, que celle de Ja loi civile, & par conféquent rien n’empê- che que des conventions particulieres ne puiflent changer la loi civile, dès que la loi naturelle & la religion ne déterminent rien au contraire. Nous ne nions pas que dans une fociété compo- fée de deux perfonnes, il ne faille néceffairement que la loi délibérative de l’une ou de l’autre l’em- Tome FI, £. FEM 471 Porte; & puifque ordinairement les hommes {ont plus capables que les fmmes'de bien gouverner les affaires particuliers, il eft très-judicieux d'établir pour regle générale, que la voix de l’homme l’ém- portera tant que les parties n’auront point fait en- femble d'accord contraire » parce que la loi générale découle de l’inflitution Humaine, &c non pas du droit naturel. De cette maniere , une /émme qui fait quel eft le précepte de la loi civile, & qui a contradé fon mariage purement & fimplement , s’eft par-là foûmife tacitement à cette loi civile. Mais fi quelque ferme , perfuadée qu'elle a plus de jugement & de conduite, ou fachant qu’elle eft d’une fortune on d’une condition plus relevée que celle de Fhomme qui fe préfente pour fon époux, ftipule le contraire de ce que potte la loi, & cela du confentemént de cet époux, ne doit-elle pas avoir, en vertu de la loi naturelle, le même pou- voir qu'a le mari en vertu de la loi du prince? Le cas d’une reine qui, étant fouveraine de fon chef, époufe un prince au-deffous de fon rang, ou, fi l’on veut, un de fes fujets, fuffit pour montrer que l’au- torité d’une ferme fur fon mari, en matiere même de chofes qui concernent le gouvernement de la fa- mille, n’a rien d’incompatible avec la nature de la fociété conjugale. En effet on a vû chez les nations les plus civili- fées , des mariages qui foûmettent le mari à l'empire de la femme ; on a vû uné princefle, héritiere d’un royaume, conferver elle feule, en fe mariant, la puiflance fouveraine dans l’état. Perfonne n’ignore les conventions de mariage qui fe firent entre Phi- lippe II. & Marie reine d'Angleterre ; celles de Ma- rie reine d'Ecofle, & celles de Ferdinand & d’Ifa- belle, pout gouverner en commun le royaume de Caftille, Le leéteur en peut lite les détails dans M. de Thou, Zv. XII. ann. 1533 , 1354. liv. XX. an. 1558 #Mariana, X1f?. d'Efpagne, liv. XXIV. ch. v. Guicciardin, 4v. VI, pag. 346. Et pour citer quel- que chofe de plus fort , nous le renvoyons à la cu- rieufe differtation de Palthénius, de Mariro Regine, imprimée à Gripfwald en 1707, in-4°. L'exemple de l’Angleterre & de la Mofcovie fait bien voir que les femmes peuvent réufir également, &t dans le gouvernement modéré, & dans le gouver- nement defpotique; & s’il n’eft pas contre la raïfon & contre la nature qu’elles régiflent un empire, il femble qu’il n’eft pas plus contradiétoire qu’elles foient maîtreffes dans une famille. Lorfque le mariage des Lacédémoniens étoit prêt à fe confommer, la femme prenoit l’habit d’un hom- me ; 8e c’étoit-là le fymbole du pouvoir égal qu’elle alloit partager avec fon mari. On fait à ce fujet ce que dit Gorgone, femme de Léonidas roi de Sparte, à une femme étrangere qui étoit fort furprife de cette égalité : Zgnorez-vous , répondit la reine, que nous mettons des hommes au monde? Autrefois même em Egypte, les contrats de mariage entre particuliers, auffi-bien que ceux du roi &c de la reine | donnoient à la femme l'autorité fur le mari. Diodore de Sicile, Liv, I. ch. xxviy. Rien n'empêche au moins (car il ne s’agit pas ici de fe prévaloir d'exemples uniques & qui prouvent trop) ; rien n'empêche, dis-je, que l’autorité d’une femme dans le mariage ne puifle avoir lieu en vertu des conventions, entre des perfonnes d’une condi- tion égale, à moins que le légiflateur ne défendetou- te exception à la loi, malgré le libre confentement des parties. Le mariage eft de fa nature un contrat; & par con- féquent dans tout ce qui n'eft point défendu-par la loi naturelle, les engagemens contraëtés entre le mari & la fémme en déterminent les droits récipro- ques. 4 Oo ij 472 FE M Enfin, pourquoi l’ancienne maxime, provifio ko- |] gninus Lollit provifianem legis, ne pourroit-elle pas être reçûe dans cette occafon, ainfi qu’en l’autorife dans les douaires, dans le partage desibiens, &.en plufieursautres chofes., où la loi ne regne que quand les parties n’ont pas.cru devoir ftipuler différemment de ce que la loi prefcrit? z4rsicle de M. le Chevalier DE JAUCOURT, FEMME, (Merale:Ÿ ce nom feul touche l'ame, mais il ne l’éleve pas toüjours ; 1l ne fait naître que des idées agréables, qui deviennent un moment apres.dés/fenfations inquietes, ou des fentimensten- res ; & le philofophe qui croit contempler, n’eft bien -tôt qu’un homme:qui defire, ou qu'un amant quisrève, , Une ferme fe faifoit peindre; ce qui lui manquoit pour<être belle, étoit précifément ce qui la rendoit jolie. Elle vouloit qu’on ajoûtât à fa beauté , fans rien ter à fes igraces ; elle vouloit tout-à-la-fois, & que le peintre tüt infidele, 8 que le portrait füt refflem- blant : voilà ce qu’elles feront toutes pour l'écrivain qui doit parler d’elles. Cette moitié du genre humain, comparée phyf- quement à l’autre, lui eft fupérieure en agrémens, inférieureen force. La rondeur des formes, la finefle des traits, l’éclat du teint , voilà fes attributs diftinc- tifs. | Les femmes ne different pas moins des hommes par le cœur & par l’efprit, que par la taille & par la fieu- re ; mais l'éducation a modifié leurs difpofitions na- turelles en tant de manieres, la diffimulation qui fem- ble être pour elles un devoir d'état, a rendu leur ame fi fecrete, les exceptions font en fi grand nombre, fi confondues avec les généralités, que plus on fait d’obfervations, moins on trouve de réfultats. Il en eft de l’ame des fermes comme de leur beau- té s1lfemblequ’elles ne faffent appercevoir que pour laïfler imaginer. Il en.eft des caraéteres en général, comme des couleurs ; 1l y en a de primitives, il y en a de changeantes ; 1l y a-des nuances à l'infini, pour pañler de l’une à l’autre. Les femmes n’ont guere que des carateres mixtes , intermédiaires ou variables; foitque l'éducation altere plus leur naturel que le nô- tre ; foit que la délicatefle de leur organifation fafle de leur ame une glace qui reçoit tous les objets, les rend vivement, & n’en conferve aucun. Quipeut définir les femmes? Tout à la vérité parle en elles, mais un langage équivoque. Celle qui pa- roît la plus indifférente, eft quelquefois la plus fenfi- ble ; la plus indifcrete pafle fouvent pour la plus faufle : toûjours prévenus, l’amour ou le dépit diéte les jigemens que nous.en portons ; 8e l’efprit le plus libre, cel: qui les a le mieux étudiées, en croyant refoudre des problèmes, ne fait qu'en propofer de nouveaux. Îl y a trois chofes, difoit un bel efprit, que j'ai toûjours beaucoup aimées fans jamais y rien comprendre, la peinture, lamufque, &r les fées. S'il eft vrai que de la foiblefle nait la timidité, de la timidité la finefle, 8 de la finefle la faufleté , 1l faut conclure que la vérité eft une vertu bien efti- mable dans les femmes, Si cette même délicateffe d’organes quirend l’ima- gination des femmes plus vive, rend leur efprit moins capable d'attention, on peut dire qu’elles apperçoi- vent plus vite, peuvent voir aufli bien, regardent moins long-tems. Que j’admire les femmes vertueufes, fi elles font auf fermes dans'la vertu, que les femmes vicieufes me paroiflent intrépides dans le vice ! La jeuneffe des fermes eit plus courte &c plus bril- lante que celle des hommes; leur vieilleffe eft plus fâcheute & plus longue. : Les femmes font vindicatives, La vengeance qui eft l’afte d’une puiflance momentanée, eft une preu- f FEM ve defoibleffe. Les plus foibles 8e les plus timides doïvent être cruelles : c’eft la loi générale de la na- ture:, qui dans tous les êtres fenfibles-proportionne le reffentiment au danger. tu Re _… Comment feroïent-elles difcretes ? elles font cu- rieufes; 8 commentne feroient elles pas'curieufes ? on.leur fait myftere de tout: elles ne font appellées niauw confeil, ni à l'exécution. [Il ya moins d'union entre les fermes qu'entre les hommes, parce qu’elles n’ont qu'un objet, Diftingués par desinégalités, les deux fexes ont des avantages prefque égaux. La nature a mis d’un côté la force & la majefté, le courage &c la raifon:; de Pautre, les graces & la beauté , la finefle & le fenti- | ment. Ces avantages ne font pas toïjours incompa- tibles ; ce font quelquefois des attributs différens qui fe fervent de contre-poids; ce font quelquefois les mêmes qualités, mais dans un degré différent, Ce qui eft agrément ou vertu dans un fexe,, eft défaut ou difformité dans l’autre. Les différences de la na- ture devoient en mettre dans l'éducation; c’eft la main du ftatuaire qui pouvoit donner tant de prix à un morceau d'argile. Pour les hommes qui partagent entre eux les em- plois dela vie civile, l’état auquel ils font deftinés dé- cide l'éducation & la diférencie.Ponr les fermes , lé: ducationeft d'autant plus mauvaife qu’elle eft plus générale, & d’autant plus népligée qu’elle eft plus utile. On doit être furpris que des ames fi incultes puiflent produire tant de vertus, & qu’il n’y germe pas plus de vices. | | Des femmes qui ont renoncé au monde avant que de le connoître, font chargées de donner des:princi- pes à celles qui doivent y vivre. C’eft de-là que fou- vent une fille eft menée devant un autel, pour s'im- pofer par ferment des devoirs qu’elle ne connoît point, &c s’umr pour toûjours à un homme qu’elle n’a jamais vü. Plus fouvent elle eft rappellée dans fa famille, pour y recevoir une feconde éducation qui renverfe toutes les idées de la premiere , & qui por- tant plus fur les manieres que fur les mœurs, échange continuellement des diamans mal-taillésoumal-afor. tis, contre des pierres de compoñtion. C’eft alors , c’eft après avoir pañlé Les trois quarts du jour devant un miroir & devant un clavecin, que Chloé entre avec fa mere dans le labyrinthe du mon- de: là fon efprit errant s’égare dans mille détours, dont on ne peut fortir qu'avec le fil de expérience : là toûjours droite & filentieufe, fans aneune connoif- fance de ce qui eft digne d’eftime ou de mépris, elle ne fait que penfer, elle craint de fentir , elle n’ofe ni voir. ni entendre ; ou plütôt obfervant tout avec au- tant de curiofité que d’ignorance, voit fouvent plus qu'il n’y en a, entend plus qu’on ne dit, rougit indé- cemment, foürit à contre-fens, &c sûre d’être égale- ment reprife de ce qu’elle a paru favoir & dece qu’el- leignore, attend avec impatience dans la contrainte & dans l'ennui , qu’un changement de nomlamene à l'indépendance & au plafir. | Où ne l’entretient que de fa beauté, qui eft un moyen fimple &: naturel de plaire, quand on n’en eft point occupé ; & de la parure , qui eftun fyftème de moyens artificiels pour augmenter l'effet du pre- mier, ou pour en tenir lieu, &c qui Le plus fouvent ne fait n1 l’un ni l'autre. L’éloge ducaraétere ou de Pefprit d’une fémme eft prefque toûjours une preuve de laidenr ; il femble que le fentiment & la raifon ne foient que le fupplément de fa beauté. Après avoir formé Chloé pour l'amour, on a foin de lui en dé- fendre l’ufage. La nature femble avoit conféré aux hommes le droit de souverner. Les fémmes ont eu recours à l’art pour s'affranchir. Les deux fexes ont abufé récipro- quement de leurs avantages , de la force &c de la A beauté; ces deux moyens de faire des malheureux. Les hommes ont augmenté. leur puiflance naturelle par les lois qu'ils ont diétées ; les fémmes ont: aug menté le prix de leur pofleffion par la difficulté de l'obtenir. [l ne feroit pas difficile de dire de quel côté eft aujourd’huila fervitude. Quoi qu'il en {oit , l’au- torité eft le but oùtendent les fémumes : l'amour qu'el- les donnent les y-conduit ; celui qu'elles prennent les en éloigne têcher d’en infpirer, s’efforcer de n’en point fentir, où de cacher du moins celui qu’elles {entent: voilà toute leur politique & toute leur mo- tale. | Get art de plaire , ce defir de plaire à tous, cette enyiede plaire plus qu'une autre, ce filence du cœur, ce déréglement de l’efprit, ce menfonge continuel” 8 Pr, 8 appellé coquerrerie, femble être dans les fermes un caractere primitif, qui né de leur condition natutel- lement fubordonnée, injuftement fervile, étendu, êt fortifié par l'éducation, ne peut être affoibli que par un effort deraifon,, & détruit que par une grande chaleur.de fentiment : on a même comparé ce carac- tere au feu facré qui ne s'éteint jamais, | … Voyez entrer Chloé fur. la fcene du monde ; ce- lui qui vient de-lui donner le droit d’aller feule, trop aimable pour aimer fa femme, ou trop difgracié de la nature, trop défigné parle devoir pour en être aimé, femble lui donner encore Le droit d’en aimer un au- tre, Vaine êc legere, moins empreflée de voir que de fe montrer, Chloé vole à tous les fpeétacles, à tou- tes les fêtes : à peine y paroît-elle, qu’elle eft entou- rée de ces hommes, qui confians & dédaigneux, fans vertus & fans talens , {éduifent les férrmes par des travers, mettent leur gloire à les deshonorer, fe font un plaifir de leur defefpoir, & qui par les indif- crétions, les infidélités & les ruptures, femblent aug- menter chaque jour le nombre de leurs bonnes for- tunes ; efpece d'oifeleurs qui font crier les oïfeaux qu'ils ont pris pour en appeller d’autres. Suivez Chloë au milieu de cette foule emprefée ; c’eft la coquette venue de File de Crete au temple de Gnide ; elle foûrit à l’un, parle à l'oreille à au- tre, foûtient fon bras fur un troifieme, fait figne À deux autres de la fuivre : l’un d'eux lui parle-t-il de fon amour? c’eft Armide, elle le quitte en ce mo- ment , elle Île rejoint un moment après, & puis le quitre encore : font-ils jaloux les uns des autres? c’eft 12 Célimene du Mifantrope, elle les raffñre tour-à- tour par le mal qu’elle dit à chacun d’eux de fes ri- vaux; ainf mêlant artificieufement les dédains & les préférences, elle reprime la témérité par un regard févere, elle ranime l’efpérance avec un {oûris ten- dre: c’eft la ferme rrompeufe d’Archiloque, qui tient l’eau d’une main & Le feu de l’autre. Mais plus les femmes ont perfethionné l’art de faire defirer, efpérer, pourfuivre ce qu’elles ont réfolu de ne point accorder ; plus les hommes ont multiplié les moyens d’en obtenir la poffefion : l’art d’infpirer des defirs qu’on ne veut point fatisfaire , a tout-au-plus produit l’art de feindre des fentimens qu’on n’a pas, Chloë ne veut fe cacher qu'après avoir été vüe; Da- mis fait l’arrèter en feignant de ne la point voir: l’un & l’autre, après avoir parcouru tous les détours de Part, fe retrouvent enfin où lanature les avoit placés. Îl y a dans tousles cœurs un principe fecret d’u- sion. Il yaun feu qui, caché plus ou moins long- tems, s'allume à notre inf, s’étend d’autant plus qu'on fait plus d'efforts pour l’éteindre, &qui en- fuite s'éteint malgré nous. Il y a un germe où font renfermés la crainte & l’efpérance, la peine & le plaïfr, le myftere & l’indiferétion ; qui contient les querelles & les raccommodemens, les plaintes & les ris , les larmes douces & ameres: répandu par- tout , 1 eft plus où moins prompt à développer, felon les fecours qu'on lui prête, & les obftacles qu'on lui oppofe, FE M 473 : Comme un foiblé enfant qu'elle protege , Chloé prend l’Amout fur fes genoux, badine avec fon arc, le Joueéavec festraits, coupe l'extrémité de fes ailes e lui Le, les mains avec des fleurs; & déjà prife elle- même dans des liens qu'elle ne voit pas, fe croit encore en liberté, Tandis qu’elle l’approche de fon fein ,'qu’elle l'écoute » qu'elle lui fourit, qu’ellers’a- mule également & de ceux qui s’en plaignent & de celles quisen ont peur, un charme involontaire la fait tout -à -coup le preflér dans fes bras , &C déjà l'amour eft dans fon cœur: elle n’ofe encore s’avouer qu’elle-aime ,-elle commence À penfer qu'il et doux d’aimer.-Tous.ces amans qu'elle traîne en triomphe à fa fuite, elle fent plus d’envie.de les écarter qu’elle n'eut de plaïfir des attirer. Il eneft un fur qui. fes yeux fe portent fans cefle ; dont ils fe détournent toüjours. On diroit quelquefois qu’elle s’apperçoit à peine de fa préfence,, mais il n'asrien fait qu'elle n'ait vü. S'ilparle, elle ne paroît point l'écouter ; mais il n’a rien dit qu’elle n’ait entendu : lui parle-t-elle au contraire ? {a voix devientiplus timide, {es.ex- preffions font plus animées. Va-t-elle au fpe&tacle , eft-il moins en vüûe ? ileft pourtant le premier qu’elle y voit, fon nom eft tobjours le dernier qu'elle pro- nonce. Si le fentiment de fon cœur eft encoreignoré, ce n’eft plus que d’elle feule ; il a été dévoilé par tout ce qu'elle a fait pour le cacher; il s’eftirrité par tout ce qu’elle a fait pour l’éteindre : elle eft trifle , mais fa triftefle eftun des charmes de l'amour, Elle ceffe enfin d’être coquette à mefure, qu’elle devient fenf- _ ble, & femble n'avoir tendu perpétuellement des pièges que pour y tomber elle-même. | Jar lù que de toutes les paflions,, l’amour eft celle qui fied le mieux aux femmes ; il eft du moins vrai qu’elles portent ce fentiment ;. qui eft le plus tendre caraëtere de l'humanité , à un deoré de délicateffe ët de vivacité où il ÿ a bien peu d'hommes qui puif- fent atteindre, Leur ame femble n’avoir été faite que pour fentir, elles femblent n'avoir été formées que pour le doux emploi d’aimer..A.cette paflion qui leur eft fi naturelle, on donne pour antagonifte une pri- vation qu’on appelle l’Aozrezr ; mais on a dit, & il n’eft que trop: vrai, que l’honneur femble n’avoir été imaginé que pour être facrifié. À peine Chloé a-t-elle prononcé le mot fatal à fa liberté , qu’elle fait de fon amant l’objet de‘toutes fes vües, le but de toutes fes a&tions, l’arbitre de fa vie. Elle ne connoïfloit que l’amufement & l’ennui, elle ignoroit la peine & le. plaifir. Tous {es jours font pleins, toutes fes heures {ont vivantes, plus d'inter- valles languiffans ; le tems toüjours trop lent ou trop rapide pour elle , coule cependant à fon infû ; tous ces noms fivains, fi chers, ce doux commerce de regards &c de foûtires , ce filence plus éloquent que la parole, mille fouvenirs, mille projets mille idées, mille fentimens | viennent À tous les inftans renouveller fon ame &c étendre fon exiftence ; mais la derniere preuve de fa fenfbilité eft la premiere époque de linconftance de fon amant. Les nœuds de l’amour ne peuvent-ils donc jamais fe refferrer d’un côté, qu'ils ne fe reélâchent de Pautre ? S'il eft parmi Les hommes quelques ames privilé- giées en qui l’amour, loin d’être affoibli par les plai- firs, femble emprunter d'eux de nouvelles forces , pour la plüpart c’eft une faufle joüiffance qui , pré- cédée d’un defirincertain, .eft immédiatement fnivie d'un dégoût marqué , qu’accompagne encote trop fouvent la haine ou le mépris. On dit qu’il croît fur. le rivage d'une mer, des fruits-d’une beauté rare, qui, dès qu’on ytouche , tombent en pouffere :1c’eft. l’image de cet amour-éphémere , vaine faillie de Pi: magination , fragile ouvrage des fens ; foible:tribut: qu'on paye à la beauté. Quand la fource.des plaifrs eft dans le cœur, elle netarit point ; l'amour fondé: 47% FEM fur l’eftime eftinaltérable , ileft le chatine de la vie êtle prix de la vertu. | Uniquement occupée'de fon amant, Chloé s'ap- perçoit d’abord qu'ileft moins tendre, elle foupçonne bientôt qu'il eft infidele ; elle fe plaint, il la raffüre ; il continue d’avoir des torts, elle recommence à fe plaindre ; Les infidélités fe fuccedent d’un côté, les reproches fe multiplient de l’antre : les querelles font vives & fréquentes , les browilléries longues, les raccommodemens froids; les rendez vous s’'éloi- gnent , les têtes-à-têtes s’abregent, toutes les larmes font ameres. Chloé demande juftice à l'Amour. Qu’eft devenue, dit-elle, la foi des fermens . .. .? Mais c’en eft fait, Chloé eft quittée ; elle-eft quittée pour une autre , elle eft quittée avec éclat. Livrée à la honte & à la douleur, elle fait autant de fermens de n’aimer jamais, qu’elle en avoit fait d'aimer toûjours ; mais quand une fois on a vécu pour l'amour, on ne peut plus vivre que pour lui. Quand il s'établit dans une ame, il y répand je ne fai quel charme qui altere la fource de tous les au- tres plaïfirs; quandil s'envole, il y laiffe toute l'hor- eur du defert & de la folitude : c’eft fans doute ce qui a fait dire qu'il eft plus facile de trouver une fem- me qui n’ait point eu d'engagement, que d'en trou- ver qui n'en ait eu qu'un. Le défefpoir de Chloé fe change infenfiblement en une langueur qui fait de tous fes jours un tiflu d’énnuis ; accablée du poids de fon exiftence, elle ne fait plus que faire de la vie, c’eft un rocher aride auquel elle eft attachée. Maïs d'anciens amans ren- trent chez elle avec l’efpérance, de nouveaux fe dé- clarent, des femmes arrangent des foupers ; elle con- fent à fe diftraire , elle finit par fe confoler. Elle a fait un nouveau choix qui ne fera guere plus heu- reux que le premier, quoique plus volontaire, & qui bientôt fera fuivi d'un autre. Elle appartenoit à l'amour, la voilà qui appartient au plaifir; fes fens étoient à l'ufage de fon cœur , fon efprit eft à l’ufage de fes fens : l’art, fi facile à diftinguer par-tout ail- leurs de la nature, n’en eft ici féparé que par une nuance imperceptible : Chloé s’y méprend quelque- fois elle-même; eh qu'importe que fon amant y foit trompé, s’il eft heureux ! Il en eft des menfonges de la galanterie comme des fiétions de théatre, où la vraflemblance a fouvent plus d’attraits que la vérité. Horace fait ainfi la peinture des mœurs de fon tems, od. wj. L. III, « À peine une fille eft-elle fortie # des jeux innocens de la tendre enfance , qu’elle fe #» plaît à étudier des danfes voluptueulfes , &c tous les » arts & tous les myfteres de l'amour. À peine une » femme eft-elle afñife à la table de fon mari, que » d’un regard inquiet elle y cherche un amant ; bien- » tôt elle ne choiïfit plus, elle croit que dans l’obfcu- » rité tous les plaifirs font légitimes ». Bientôt aufli Chloé arrivera à ce dernier période de la galanterie, Déjà elle fait donner à La volupté toutes les appa- rences du fentiment , à la complaifance tous Les char- mes de la volupté. Elle fait également & diffimuler des defirs & feindre des fentimens , & compofer des ris & verfer des larmes. Elle a rarement dans l’ame ce qu'elle a dans les yeux ; elle n’a prefque jamais fur les levres, ni ce qu’elle a dans les yeux, ni ce w’elle a dans l'ame: ce qu’elle a fait en fecret, elle pere ne l'avoir point fait ; ce qu’on lui a vù faire, elle fait perfuader qu’on ne la point vû; & cé que l’artifice des paroles ne peut juflifier, fes lar- mes le font excufer, fes carefles le font oublier. Les fémmes galantes ont auf leur morale. Chloé S’eft fait un code où elle a dit qu'il eft malhonnête à une fémme, quelque goût qu'on ait pour elle, quel- que pafion qu’on lui témoigne , de prendre l’amant d’une femme de fa fociété. IL y eft dit encore qu’il n’y a point d’amours éternels ; mais qu'on ne doit jamais former nn engagement, quand on en prévoit la fin. Elle à ajoûté qu'entre une rupture & un nouveau nœud , il faut un intervalle de fix mois’, & tout de fuite elle a établi qu'il ne faut jamais quitter un amant fans lui avoir défigné un fucceffeur. Chloé vient enfin à penfer qu'il n’y a qu’un engaz gement folide, où ce qu’elle appelle vne affaire Jui= vie, qi perde une femme. Elle fe conduit en confé- quence; elle n’a plus que de ces goûts paflagers qw°- elle appelle fanraifies , qui peuvent bien laiffer for- mer un foupçon, mais qui ne lui donnent jamais le tems de fe changer en certitude, Le public porte # peine la vûe fur un objet, qu'il lui échappe , déjà remplacé par un autre; je n'ofe dire que fouvent il s’en préfente pluñeurs tout-à-la-fois: Dans les far taifies de Chloé, lefprit eft d’abord fubordonné à la figure, bientôt la figure eft fubordonnée à la for- tune ; elle néglige à la cour ceux qu’elle a recher- chés à la ville, méconnoit à la ville ceux qu’elle a prévenus à la campagne ; & oublie fi parfaitement le foir la fartaifse du matin, qu’elle en fait prefque douter celui qui en a été l’objet. Dans {on dépit il fe croit difpenfé de taire cequ’on l’a difpenfé de mé- riter, oubliant à fon tour qu'une femme à toùjours le droit de nier ce qu'un homme n’a jamais le droit de dire. Il eft bien plus für de montrer des defirs à Chloé , que de lui déclarer des fentimens : quelque- fois elle permet encore des fermens de conftance &c de fidélité ; mais qui la-perluade eft mal-adroit, qui lui tient parole eft perfide. Le feul moyen qu'il y au- .roit de la rendre conftante , feroit peut-être de lux pardonner d’être infideile ; elle craint plus la jaloufie que le parjure, l’importunité que labandon. Elle pardonne tout à fes amans , & fe permettout à elle- même , excepté l'amour. | Plus que galante, elle croit cependant n'être que coquette. C’eft dans cette perfuafion qu’à une table de jeu, alternativement attentive & diftraite, elle répond du genou à lun, ferre la main à l’autre en loüant fes dentelles, & jette en même tems quelques mots convenus à untroifieme. Elle fe dit fans préju- gés, parce qu’elle eft fans principes ; elles’arroge le titre d'hornéte homme, parce qu’elle a renoncé à celui d’honnéte fennme ; & ce qui pourra vous furprendre, c’eft que dans toute la variété de fes fansaifres le plai- fr lui ferviroit rarement d’excufe. Elle a un grand nom, & un mari facile : tant qu’- elle aura de la beauté ou des praces, ou du moins les agrémens de la jeunefle, les defirs des hommes, la jaloufie des fémmes, lui tiendront lien de confidé- ration. Ses travers ne l’exileront de la fociété, que lorfqu’ils feront confirmés par le ridicule. Il arrive enfin ce ridicule, plus cruel que le deshonneur. Chloé cefle de plaire, & ne veut point ceffer d’ai- mer ; elle veut toûjouts paroître, & perfonne ne veut fe montrer avec elle. Dans cette poñtion, fæ vie eft un fommeil inquiet & pémible, un accable- ment profond , mêlé d’agitations ; elle n’a guere que l'alternative du bel-efprit ou de la dévotion. La vé- ritable dévotion eft Pafyle le plus honnête pour les femmes galantes; mais il en eft peu qui puiffent pañler de l'amour des hommes à l’amour de Dieu: 1l en eft peu qui pleutant de regrer, fachent fe perfuader que c’eft derepentir ; il en eft peu même qui, après avoit affiché le vice, puiflent fe déterminer à feindre du moins la vertu. Il en eft beaucoup moins qui puiffent pañler du temple de l'amour dans le fanétuaire des mufes, & qui gagnent à fe faire entendre, ce qu'elles perdent à le laifler voir. Quoiqu'il en foit, Chloé qu s'eft | tant de fois égarée, courant toùjours après de vains plaïfirs, & s’éloignant toùjours du bonheur, s’égare encore en prenant une nouvelle route. Après avoir . perdu quinze ou vingt ans à lorgner, à perfifler, à FEM Minauder, difae des nœuds &! des tracaflériés is après avoir rendu quelque Hônnète-homme malheu reux, s'être livrée À'unfat, s'être prètée à une foule de fots,, cette follé change de rôle, päfle d un théatre fur un autre ; & ne pouvant plus être Phryné, croit pouvoir être Æj/pafe. te des TE 2. fe SUMRRE … Je fuis süfqu'aricune fermé ne feréconnoitra dans lé portrait de Chloé; en effer 11} en a peu dont la vie ait eu fes périodes laufhi marques." CRE QU Il eft une férme qui à de l'effrit pour fe faire ait mer, non pour fe faire craindre, de la vertu pour fe faire eftimer, non pour méprifer les autres ; aflez de béauté pour donner du prix à fa vertu. Egalémérit éloignée dela honte d’aimer fans retenue, du tour: ment de n’ofer!aimer, & de l'ennui de vivre! fans amour , elle a tant d’indulgence pour les foiblèffes defonfexe, que la fêmme la plus plante lui pardonne d’être fidele ; elle a tant de refpet pour les bient féances, que la plus prude lui pardonne d’être ten- dfe. Laïiffant aux folles dont elle eft entourée ; la co: quetterié, la frivolité ; les caprices, les’ jaloufies 5 toutes ces petites pañlions , toutes ces bagatelles qui tendent leur vie nulle ou contentieufe ; ‘au milieu de ces commerces contagieux, elle éonfulte toù- jours fon cœur quieft pur, & fa raifôn qui ef faine, préférablement à l’opinion, cette réine du monde, qui gouverne fi defpotiquément les infenfes & les {ots. Heureufe la femme qui poffede ces avantages, plus heureux cèlui qui poffede le cœur d’une telle femme ! = do Enfin 1l en eft une autre plus folidement heureufe encore ; fon bonheur eft d'ignorer ce que le mondé appelle Zes plaifirs, fa gloire éft de vivre ignorée. Renfermée dans les devoirs de fèrme & de mere, elle confacre fes jours à la pratique des vertus obfcu: res : occupée du gouvernement de fa famille , elle regne fur fon mari par la complaïifance , fur fes enfans par la douceur, fur fes domeftiques par la bonté : {a maifon eft la demeure des fentimens reli- gieux , de la piété filiale, de l'amour conjugal, de la tendrefle maternelle, de l’ordre, de la paix inté- rieure, du doux fommeil, & de la fanté : économe & fédentaire, elle en écarte les paffions & les be- foins ; l’indigent qui fe préfente à fa porte, n’en eft jamais repouñlé ; l’homme licentieux ne s’y préfente point. Elle a un caraëtere de referve & de dignité qui la fait réfpetter, d’indulgence & de fenfibilité ui la fait aimer, de prudence & de fermeté qui la fait craindre; elle répand autour d'elle une douce chaleur, une lumiere pure quiéclaire & vivifietont ce qui l'environne. Eff-ce la nature qui l’a placée, où la rafon qui l'a conduite au rang fuprème où je la vois ? Cet article ef? de M. DESMAHIS. FEMME, (Jarifp.) on comprend en général fous ce terme, toutes les perfonnes du fexe féminin, foit filles, femmes mariées ou veuves ; mais à certains égards les fèmmes font diftinguées des filles, & les veuves des femmes mariées. Toutes les fermes & filles font quelquefois com- prifes fous le terme d'hommes. L. 1. 142. ff..de verb, Jigrif. | La condition des fémmes en général eff néanmoins différente en plufieurs chofes de celle des hommes proprement dits. Les femmes {ont plütôt nubiles que les hommes, l’âge de puberté eft fixé pour elles à douze ans ; leur efprit eft communément formé plûtôt que celui des hommes, elles font aufi plûtôt hors d’état d’avoir des enfans : citits pubefcunt , citins Jenefcurr. Les hommes , par la prérogative de leur fexe & par la force de leur tempérament , font naturelle- ment capables de toutes fortes d'emplois & d’enga- gemens ; au lieu que les femmes, {oit À caufe de la fragilité de leur fexe & de leur délicateffe naturelle, F'EM - D'abord. pour ce qui répärde l’état cecléfaftique,. les fériés peuvent être chäinoinefes , Telgieutess dbbellés d'une abbaye de-fillés 3! mais elles ne peu- véatpôfléder d’évêché ni d’autres bénéfices ;niêtre admifes aux ordres eccléfiaftiques » foit majeurs où mifielrs.: [ls avoit néanmoins des diaconetles dans la pérhitive Eglife , Maäis cet ufage he fubffte plus. : Dans ‘cértains états’ monarchiqmes , comme en | France%les femmes ; foit/filles : mariées où veuves, | ne fuccedent point à la couronné, | | ” Les femmes'ne font. pasnon plus admifes aux em plis militaireshni aux ordres de chevalerie )fice Fieres, 01 : F2 “_ Suivañt le droit romain, quieftien ce point fuivi dans toutile roÿaume les femmes ne font point ad Miles aûx charges publiques ; ainfi ëlles ne péuvent faire l'office de juge, ni exercer auctüine magiftrature, ni faite la fonétion d'avocat où de procurent! Z: 2! | n’eft quelques-unes, par dés confidérations particu= ff: de regul, jur. * Elles faïoient autrefois lofice de pair, &, en cette qualité, fiégeoient au parlemént. Préféntement elles peuvent bien pofléder un duché-fémelle & er prendre lé titte , mais elles ne font plus l'office de pair. Voyez PAIR € PArRIE, Autrefois en France les femmes’ pouvoiént être arbitres , elles rendoient même en perfonne la jufti-. ce dans leurs terres ; mais depuis que les feisneurs he font plus admis à rendre la juftice en pérfonne 5 les femmes ne peuvent plus être juges ni arbitres. Elles peuvent néanmoiïns faire la fontion d’ex: perts, en ce qui eft de leur connoïflance, dans quel- qu'art ou profeffion qui eft propre à leur fexe. On voit dans les anciennes ordonnances , que c’é- toit autrefois une ferme qui faïfoit la fonction de bourreau pour les femmes, comme lorfqu’il s’agit d'en fuftiger quelqu’une Voyez ci-dev, au mot Exk= CUTEUR DE LA HAUTE-JusTicE. pren On ne les peut nommer tutrices ou curatrices que de leurs propres enfans ou petits-enfans ; il ÿ a néan- moins des exemples qu'une fémme a été nommée cux ratrice de fon mari prodigue, furieux & interdit. Les fermes {ont exemptes de la colleéte des tailles & autres impoñtions. | | Mais elles ne font point exemptes des impofitions;. ni des corvées ou autres charges, foit réelles on per= {onnelles. La corvée d’une fémme ef évaluée à 6 de- niers par la coûtume de Troyes, article 192. &r celle d’un homme à 12 deniers. Quelques fémmes &c filles ont été admifes dañs les académies littéraires; il y en a même eu plufieurs qui ont reçü le bonnet de dofteur dans les univerfités. Hélene-Lucrece Pifcopia Cornara demanda le doc- torat en Théologie dans luniverfité de Padoue : le cardinal Barbarigo, évêque de Padoue, s’y oppofa : elle fut réduite à fe contenter du do@orat en Pkilo- fophie, qui lui fut conféré avec l’applaudiffement de tout le monde, le 25 Juin 1678. Bayle, œuvres, rome I. p. 361. La demoïfelle Patin y recut auffi le même grade; & le 10 Mai 1732, Laure Baff » bourgeoife de la ville de Boulogne, y recut le doftorat en Me- decine en préfence du fénat, du cardinal de Poli- gnac, de deux évêques, de la principale nobleffe , 6 du corps des doéteurs de Puniverfité. Enfin en 1750, la fignora Maria-Gaetana Agnefi fut nom- mée pour remplir publiquement les fonétions de pro: fefleur de Mathématique à Boulogne en Italie. On ne peut prendre des fermes pour témoins dans des teflamens , ni dans des aétes devant notaires: mais On les peut entendre en dépoñition, tant en matiere civile qug criminelle. Voyez l’édir du 15 No= , vembre 1 324 3 Joly, aux addir, t, II, p. 20.Fontanon . Cu 475 | font exclufestde plufieurs fonéions à incapables +" Parks, ; gr — 4 . F hi A /: " | l \ \ * 1 \4 FF # 21. vexkfairtomeT. page G18, le Prêtre, carte HIL chi On dit vulgairement qu'il faut deux femmes pour, fire in témoin: cé n'elt pas néanmoins que.les dé- poñitions des femmes fe-comptent dans cette.propors| tionatithmétique, relativement aux.dépoñtions des hommes , cela eff feulement.fondé fur ce.que le té- moignage des fermes engénéral.eftJeger.& füjet: à: variation; c’eftpourquoiFon.yamoins d'égard.qu'- aux dépoñtions.des. hommes: 11 dépend-déila;, prus dence du juge d’ajoûter plus ou moins, de. foi aux dé- pofñtions des femmes, felon:la qualité de-celles qui dépofent, &c les autres,circonftances,. :,,1:,, Il ya des maifons religieufes., communautés & hô- pitaux pour.les férimes 6z.filles,,, dent.le gouverne ment eit confié à.des femmes. anji-seuolan {1 On ne reçoit point de fermes dans les corps,.êz communautés d'hommes, tels.que les communautés de marchands &artifans ; car les femmes qui. fe mè- lent du commerce &. métier de leur mari ,; ne. font pas pour.cela réputées marchandes, publiques :mais ansplufieurs de.ces communautés , les filles de mai: tres ont le privilége de communiquer lamaïtrife à ce- Le lui qu’elles époufent; & les veuves de maitre.ont Le droit de continuer le commerce & métier de leur ma- ti, tant qu'elles reftent en viduité; ou.fi c’eftun art qu'une ferme ne pile exercer, elles peuvent louer leur privilége, comme font les veuves de chirurgien. + I ya certains commerces & métiers affectés aux femmes & filles , lefquellesformententr’elles des corps &. communautés qui leur.font propres, comme les Matrones ou Sages-fémmes, les marchandes Linge- res, les marchandes de Marée , les marchandes Grai: nieres, les Couturieres, Bouquetieres, &c. Les femmes ne font point contraignables par corps pour dettes civiles, f,ce n’eft qu’elles foient mar- chandes publiques, ou pour ftellionat procédant de leur fait. Voyez CONTRAINTE PAR CORPS. On a fait en divers tems des lois pour réprimer le luxe des femmes, dont la plus ancienne eff la loi Op- pia. Voyez Lo: OPPIA 6 LUXE. | . Ilya auffi quelques reglemens particuliers pour la fépulture des femmes ; dans l’abbaye de S. Bertin on n’en inhumoit aucuné. Voyez la chronologie des fouverains d'Artois , dans le commentaire de Maillart, article des propriétaires, n. 3. de l’édit. de 1704. (4) FEMME AMOUREUSE, eft le nom que l’on don- noit anciennement aux fermes publiques, comme on le voit dans deux comptes du receveur du domaine de Paris, des années 1428 & 1446, rapportés dans les antiquités de Sauval : on trouve aufli dans un an- cien ftyle du châtelet, imprimé en gothique, une or- donnance de l’an 1483, laquelle défend, arr. 3. au prevôt de Paris de prendre pour lui les ceintures, joyaux, habits, ou autres paremens défendus aux fillettes &c fémmes amoureufès ou diflolues. (4) . FEMME AUTHENTIQUÉE, eft celle qui pour caufe d’adultere , a étécondamnée aux peines portées par Vauthentique /éd hodie , au code ad legem Juliam , de adulreriis. Ces peines font, que la femme après avoir été foiettée , doit être enfermée dans un monaftere pen- dant deux ans. Dans cet efpace de tems il eft permis au mari de la reprendre ; ce tems écoulé, ou le mari étant décedé fans avoir repris fa femme, elle doit être rafée & voilée, &c demeurer cloîtrée fa vie durant. ‘Si elle a-des enfans,, on leur accorde les deux tiers du “bien de la mere, & l’autre tiers au monaftere. S'il ny a point d’enfans, en ce cas les pere & mere ont un tiers de la dot, & le monaftere les deuxautres tiers; s’il nya nienfans, nipere &c mere, toute la dot eft appliquée au profit du monaftere ; mais dans tous les cas on réferve au mari les droits qu'il avoit fur la dot, (4) F FEMME AUTORISÉE, «eff celle à laquelle Pauto- En MS na om tifatiomouhabilitationnéceflare ,foit pour contrac: ter,ou-pour efter en jugement], 4.été accordée , foit. pardon:mari ; foit par juffice au refus de. fon mari. Une ferme quiplaideen-féparation, fe fait autorifer, parguitice à la pouruite de fes droitss Voyez AUTO+ RISATION, FEMME SÉPARÉE ; SÉPARATION. (4) xFÉMME-COMMUNE EN BIENS 04, COMMUNE fim- plemenr,, eft.celle qui, foit.en vertu de,fon contrat de mariage ouù,en vertu de la coûtume ,.eften com munaute de biens, avec fon mari, 2, .) Ferme, non commune, eft celle qui. fuivantune coûtumé ou loi qui admet point la com- munanté de biens entre conjoints, on par le contrat de mariage, delaquellelacommunauté a été exclufe, .….H ya différence entre une ferme féparée de biens. &cune femme non commune; la premiere jouit de fon bien à part. &c divis de fon mari, au Hieu'que le mari jouit du bien.de la ferme non commune; mais iln’y.a point de communauté.entreux. Voyez COM: MUNAUTÉ DE BIENS ;/RÉNONCIATION, À LA COM= MUNAUTÉ, SÉPARATION, DE BIENS. (4) :,. FEMME CONVOLANT EN SECONDES NOCESs, eff celle qui fe remarie. Voyez MARIAGE & SECONDES NOGES CA, ones Mit "+ 4 FEMME DE.corps , eft celle qui eft de condition ferve. Voyez la coûtume de Meaux, art. 31. celle de Bar art. 72. 8 au mot GENS DE CORPS. (4) FEMME.COTTIERE 04 COÛTUMIERE, c'eitune femme de condition roturiete, Voyez la coûtume d’Ar- fOIS, art. 1. À | Re - FEMME, COÛTUMIERE. Voyez cisdevant FEMME COTTIERE, Pau: + out: ste LT spa SIL se a, été mariée, FEMME DÉLAISSÉE, fe dit en quelques provinces pour mme veuve; femme délaiffée d’untel; en d’autres pays on dit reliéle , quaf? derelitla. (A ) c: , FEMME DIVORCÉE, dans la coûtume de Haïnaut fignifie femme féparée d'avec on mari, ce quieft con- forme au droit canon où le mot dvorsium eff fonvent employé pour exprimer la féparation, foit de corps & de biens, foit de biens feulement, (4). FEMME DOUAIRIBRE, eft celle qui joit d'un douaire. Voyez DOUAIRE 6: l’article fuivanr. (A) FEMME DOUAIRÉE, comme il eft dit dans quel ques coûtumes, eft celle à laquelle la coûtume ou le contrat de mariage accorde un douaire , foit coûtu- mier ou préfix, au lieu que la femme dotairiere et cel- le qui joïut a@tuellement de fon douaite, (4) FEMME FRANCHE, fignifie ordinairement une femme qui eft de condition libre & non ferve; mais dans la coûtume de Cambray , #22, 7. art, 6, une fem me franche eft celle qui poflede un fief qu’elle a acquis avant {on mariage, ou qu’elle a eu par fucceffion héréditaire depuis qu’elle eft mariée, & qui parle moyen de la franchife de ce fief, fuccede en tous biens meubles à fon mari prédécédé fans enfans. (4) FEMME JOUISSANTE DE SES DROITS, eft celle qui eft féparée de biens d'avec fon mari, foit par contrat de mariage foit par juftice, de maniere qu’el- le eft maitrefle de fes droits, & qu’elle en peut dif- pofer fans le confentement & l’autorifation de fon mari. (4) FEMME Li1GE, eft celle qui poffede un fief qui eft chargé du fervice militaire. Voyez ci-après FIEF LIGE, HOMME LIGE, & LIGE. (4) | FEMME Mariée, eft celle qui eft umie avec un ‘homme par les liens facrés du mariage. Pour connoître de quelle maniere la femme doit être confidérée dans l’état du mariage, nous n’au- rons point recours à ce que certains critiques Ont écrit contre les femmes ; nous confulterons une {our- ce plus pure, qui eft l’Ecriture même. Le Créateur ayant déclaré qu’il n’étoit pas bon à l’homme d’être feul, réfolut de li donner une com- pagne & une aide, ad/utortu fmile fibi, Adam ayant vi vû Eve; dit que c’étoit l’os de fes os & la chair de fa chair; & l’Ecriture ajoûte que l’homme quittera fon pere & fa mere pour demeurer avec fa femme, & qu'ils ne feront plus qu'une même chair. _ Adam interrogé parle Créateur, qualifioit Eve de fa compagne, mulier quam dediffi mi fociam. Dieu dit à Eve, que pour peine de fon péché elle feroit fous la puiflance de fon mari, qui domineroit fur elle: € /ub viri poteflate eris, G ipfe dominabitur ur. Les autres textes de l’ancien T'eftament ont tous fur ce point le même efprit. S. Paul s'explique aufli à-peu-près de même dans fon épitre aux Si , ch. v. il veut que les férmmes foient foûmifes à leur mari comme à leur feigneur & maitre, parce que, dit-il, le mari eft le chef de la femme, de même que J. C. ef le chef de l’Eglife ; & que comme l’Eglife eft foùmife à J. C. de mème les femmes doivent l’être en toutes chofes à leurs maris: il ordonne aux maris d’aimer leurs fermes, & aux femmes de craindre leurs maris. Auf, fuivant les lois anciennes & nouvelles, la femme mariée eft foûmife à fon mari ; elle eft 27 facris mariti , c’eft-à-dire en fa puiflance, de forte qu’elle doit Lui obéir ; & fi elle manque aux devoirs de fon état, il peut la corriger modérément. | Ce droit de correttion étoit déjà bien reftreint par les lois du code, qui ne veulent pas qu’un mari puife frapper fa femme. Les anciennes lois des Ffancs rendoïent les maris beaucoup plus abfolus ; mais les femmes obtinrent des privilèges pour n’être point battues : c’eft ainfi que les ducs de Bourgogne en ordonnerent dans leur pays ; les ftatuts de Ville-Franche en Beaujolois font la même défenfe de battre les fermes. Préfentement en France un mari ne peut guere im- punément châtier fa femme, vü que les févices & les mauvais traitemens forment pour la fermeun moyen de féparation. | Le principal effet de la puiffance que le mari a fur {a Jérmme, eft qu’elle ne peut s’obliger, elle ni fes biens, fans le confentement & l’autorifation de fon mari, fi, ce n’eft pour fes biens paraphernaux dont elle eft mai- trefle. Elle ne peut auffi efter en jugement en matiere ci- vile, fans être autorifée de fon mari, ou par juftice à fon refus. , Mais elle peut tefter fans autorifation, parce que: le teftament ne doit avoir fon effet que dans un tems où la femme cefle d’être en la puiffance de fon mari. La ferme doit garder fidélité à fon mari, celle qui commet adultere, encourt les peines de l’authenti- que /éd hodie. Voyez ADULTERE, AUTHENTIQUE, 6 FEMME AUTHENTIQUÉE. Chez les Romains, une femme mariée qui {e livroit à unefclave, devenoit elle-même efclave, & leurs enfans étoient réputés affranchis, fuivant un édit de Fempereur Claude; cette loi fut renouvellée par Vef. pañen, & fubfifta long-tems dans les Gaules. Une femme dont le mari eft abfent, ne doit pas fe remarier qu'il n’y ait nouvelle certaine de la mort de fonimari. Il y a cependant une bulle d’un pape, pour la Pologne, qui permet aux femmes de ce royau- me de fe remarier en cas de longue abfence de leur mari, quoiqu'on n'ait point de certitude de leur mort, ce qui eft regardé comme un privilège particulier à la Pologne. %. Un homme ne peut avoir à la fois qu’une feule femme lésitime, le mariage ayantété ainf reglé d'inf- titution divine , #afculum 6 fæmiram creayir eos , À _quor les lois.de l’Eglife font conformes. La pluralité des fémmes qui étoit autrefois tolérée chez les Juifs, navoit pas lieu de la même maniere _chez les Romains & dans les Gaules.Un homme pou- -voit avoir à la fois plufeurs conçubines, mais il ne Tome FI,” - FEM 477 pouvoit avoir qu’une femme; ces concubines étoient cependant différentes des maîtrefles , c’étoient des fermes époufées moins folennellement. Quant à la communauté des fémmes, qui avoit lieu à Rome, cette coûitume barbare commença long- terms après Numa : elle n’étoit pas générale. Caton d'Utique prêta fa férme Martia À Hortenfus pour en avoir des enfans ; il en eut en effet d’elle plufeurs ; &T après fa mort, Martia, qu'il avoit fait {on héri- here, retourna avec Caton qui la reprit pour fémme 2 ce qui donna occafion à Céfar dé reprocher à Caton qu'il Pavoit donnée pauvre, avec deflein de la re= prendre quand elle feroit devenue riche, Parmi nous les fémmes mariées portent le nom de leurs maris ; elles ne perdent pourtant pas abfolu- ment le leur, il fert toùjours à les défigner dans tous les aëtes qu’elles paflent, en y ajoûtant leur qualité de femme d’un tel; & elles fignent leurs noms de bap- teme & de famille auxquels elles ajoûtent ordinairez ment celui de leur mari, La ferme fuit la condition de fon mari, tant pour la qualité que pour le rang & les honneurs & Privi- LA + . “ léges ; c’eft ce que la Zoi 21. au code de donat. inter vir. G'ux. exprime par ces mots, #xor radiis maritalibus corufcar, . Celle qui étant roturiere époufe un noble, parti- cipe au titre & aux privilèges de noblefle, non-feu- lement tant que le mariage fubfifte, mais même après la mort de fon mari tant qu’elle refte en viduité. Les titres de dignité du mari fe communiquent à la femme : on appelle ducheffe, marquife, comreffe, la femme d’un duc, d’un marquis, d’un comte; la femme d’un maréchal de France prend le titre de raréchale; la ferme de chancelier, premier préfident, préfidens, avocats, & procureurs généraux, & autres princi- paux officiers de judicature , prennent de même les titres de chanceliere, premiere préfidente , &c. Au contraire celle qui étant noble époufe un rotu- nier , eft déchue des priviléges de nobleffe tant que ce mariage fubfifte ; mais elle devient veuve, elle rentre dans fes privilèges, pourvû qu’elle vive no- blement. | La femme du patron êc du feigneur haut -jufticier participe aux droits honorifiques dont ils jouiflent ; elle eft recommandée aux prieres nominales, & re- çoit après eux l’encens, l’eau-benite, le pain-beni; elle fuit fon mari à la procefion, elle a droit d’être inhumée au chœur. Le mari étant le chef de fa fémme, & le maître de toutes les affaires, c’eft à lui à choifir le domicile : on dit néanmoins communément que Le domicile de la femme eft celui du mari ; ce qui ne fignifie pas qué la femme foit la maîtrefle de choifir {on domicile, mais que le lieu. où la férme demeure du confente- ment de fon mari eft réputé le domicile de l’un & de l'autre; ce qui a lieu principalement lorfque le mari, par fon état, n’a pas de réfidence fixe. Au refte la ferme eft obligée de fuivre fon mari partout où il juge à-propos d'aller, On trouve dans le code Frédéric, pars. I. Ly. Le sir, vi. 3. trois exceptions à cette regle: la premiere eft pour le cas où l’on auroit ftipulé par contrat de mariage , que la femme ne feroit pas tenue de fuivre fon mari s’il vou- loit s'établir ailleurs ; mais cette exception n’eft pas de notre ufage : les deux autres font, fi c’étoit pour crime que le mari fût obligé de changer de domicile, ou qu'il fût banni du pays. - : dk 2 Chezles Romains, les féremes mariées avoient trois fortes de biens ; favoir, les biens dotaux, les para phernaux , & un troifieme genre de bien que l’on appelloit res recepririas ; c’étoient les chofes que la femme avoit apportées dans la maiïfon de fon mari pour fon ufage particulier , la femme en tenoit un petit regiitre fur lequel le mari ER EE que & PP | 478 FEM femme, oûtre fa dot, lui avoït apporté tous les effets couchés fur ce regiftre, afin que la ferme, après la diflolution du mariage, püt les reprendre. La fémme avoit droit de reprendre fur les biens de fon mari prédécédé, une donation à caufe de nôces égale à fa dot. L’anciénne façon des Francs étoit d'acheter leurs femmes, tant veuves que filles ; le prix étoit pour les parens, & à leur défaut au roi,fuivant le #r. lxvy. de La loi fatique. La mème chofe avoit été ordonnée par Licurgue à Lacédemone , & par Frothon roi de Danemark. Sous la premiere & la feconde race de nos rois, les maris ne tecevoient point de dot de leurs fermes, elles leur donnoïent feulement quelques armes, mais ils ne recevoïent d’elles ni terres n1 argent. Voyez ce qui a été dir az mor Dot. Préfentement on diftineue fuiyant quelle loi la femme a été mariée. Si c’eft fuivant la loi des pays de droit écrit, la femme {e conftitue ordinairement en dot fes biens en tout ou partie, & quelquefois elle fe les referve en paraphernal aufi en tout ou partie. En pays coûtunnier tous les biens d’une femme ma- riée font réputés dotaux ; mais elle ne les met pas toû- jours tous en communauté , elle en ftipule une partie propre à elle & aux fiens de fon côté & ligne. On dit qu’une ferme et mariée fuivant la coûtume de Paris, ou fuivant quelqu’autre coûtume, lorfque par le contrat de marrage les contraétans ont adopté les difpofitions de cette coûtume, par rapport aux droits appartenans à gens mariés, ou qu'ils font con- venus de s’en rapporter à cette coùtume ; ou s'il n’y a point de contrat ou qu'on ne s’y foit pas expliqué fur ce point, c’eft La loi du domicile que les conjoints avoient au tems du mariage, fuivant laquelle 1ls font cenfés mariés. Les lois &c les coûtumes de chaque pays font dif- férentes fur les droits qu’elles accordent aux fermes mariées ; mais elles s'accordent en ce que la plüpart accordent à la femme quelque avantage pour la faire fubffter après le décès de fon mari. En pays de droit écrit, la femme, outre fa dot & fes paraphernaux qu’elle retire, prend fur les biens de {on mari un gain de furvie qu’on appelle azgment de dot ; on lui accorde aufi un droit de bagues &c joyaux , & même en certaines provinces il a lieu fans fipulation. | Le mari de fa part prend fur la dot de fa femme, en cas de predécès , un droit de contre-augment ; mais dans la plüpart des pays de droit écrit ce droit dépend du contrat. Dans d’autres provinces au lieu d’augment & de contre-augment, les futurs conjoints fe font l’un à l’autre une donation de furvie. En pays coûtumier la frme, outre fes propres, fa part de la communauté de biens, & fon préciput, a un doûaire, foit coûtumier ou préfix : on ftipule encore quelquefois pour elle.d’autres avantages. #, CONVENTIONS MATRIMONIALES ; COMMUNAU- TÉ, DOT, DouaIRE, PRÉCIPUT. Lorfqu'il s’agit de favoir fi la prefcñption a coutu contre une ferme mariée & en puiflance de mari, on diftingue fi l’aétion a dû être dirigée contré le mari &c fur fes biens, on f-c’eft contre un tiers; au pre- mer cas la prefcription n’a pas lieu ; au fécond cas elle court nonobftant le mariage fubfiftant , & la crainte maritale n’eft pas un moyen Valable pour fe | défendre de la prefcription, Ïl en eft de même des dix ans accordés par l’or- dônnance dé Y$ ro, pour fe pourvoir contre les aétes ! faits en majorité ; ces-dix àns courent contre là femme | Mariée, de mème que contre toute autre perfonne,, | l’ordonnance ne diftingue point, Poyez PRESCRIP* TION. (4) FEMME EN PUISSANCE DE MARI, eft toute fer me mariée qui n’eft point féparée d’avec fon mari, foit de corps & de biens, ou de biens feulement, pour favoir quel eft l'effet plus ou moins étendu de ces diverfes fortes de féparations. Foyer PuIssANcE MARITALE @ SÉPARATION. (4) FEMME RELICTE, fe dit en quelques provinces pour veuye d'un tel. (4) FEMME REMARIÉE, eft celle qui a pañlé à de fe- condes, troifiemes, oufautres nôces. Les fermes re- mariées n’ont pas communément les mêmes droits que celles qui fe marient pour la premiere fois, & elles font fujettes à certaines lois qu'on appelle peine des fecondes nôces. Voyez EDIT DES SECONDES No- CES , PEINE DES SECONDES NOCES, G SECONDES Noces. (4), FEMME RÉPUDIÉE, eft celle avec qui fon mari a fait divorce. Voyez Divorce. (4) FEMME SÉPARÉE, eft celle qui ne demeure pas avec fon mari, ou qui eft maïtrefle de fes biens. Une femme peut être féparée de fon mari en cinq mamieres différentes ; favoir, de fait, c’eft-à-dire lorfqw’elle a une demeure à part de fon mari fans y être autorifée par juflice ; éparée volontairement , lorfque fon mari y à confenti; /éparée par contrat de mariage, ce quine s'entend que de la féparation de biens; féparée de corps où d’habiration & de bieñs , ce qui doit être ordonné par juftice en cas de févices & mauvais traitemens ; & enfin elle peut être féparée de biens feulement, ce qui a lieu en cas de diffipation de fon mari, & lorf- que la doteft en péril. Ÿ.DOoT & SÉPARATION. (4) FEMME EN VIDUITÉ , eft celle qui ayant furvécu à fon premier, fecond, ou autre mari, n’a point pañlé depuis à d’autres nôces. Voyez ANNÉE DE VIDUITÉ, Deurz, ViDUITÉ, @ SECONDES Noces. (4) FEMME USANTE & JOUISSANTE DE SES DROITS, eft celle qui n’eft point en la puiffance de fon mari pour l’adminifiration de fes biens , telles que font les femmes en pays de droit écrit pour les paraphernaux, & les firmes {éparées de biens en pays coùtumier. A LUE ADULTERE, (/a) Théol. critig. mots con- facrés pour défigner celle que Jefus-Chrift renvoya . fans la condamner. L’hiftoire de la femme adulrere (j'ai prefque dit comme les Latins, les Anglois, & comme Bayle, de l’aduliéreffle) que S. Jean rapporte dans le chapitre vip. de fon évangile, eft reconnue pour authentique par l’Eglife : cependant {on authenticité a été combat- tue par plufieuts critiques qui ont travaillé fur l’E- criture-fainte ; elle fait mème le fujet d’un grand par- tage dans les avis. Plufeuts de ceux qui doutent de Pauthenticité de cette hiftoire, foupçonnent que c’eft une intérpola- tion du texte faite par Papias; foit qu’il l'ait prife de l’évangile des Nafaréens , dans lequel feul on la trou- voit du tems d’Eufebe; foit tout-au- plus qu'il Pait tirée d’une tradition apoftolique. Les raïfons de ce foupcon font 1° que cette hiftoire n’étoit point dans le texte facré du tems d'Eufebe; 2° qu’elle manque encore dans plufeurs'anciens manufcrits grecs, par- ticulierement dans celui d’Alexandrie & dans les ver- fions fyriaque & éopthe, quoiqu’on la trouve dans les verfons latine & arabe; 3°. qu’elle étoit incon- nue à l’ancienne églife greque,quoiqu’ellefüt avoïée par la latine, & qu’on la life dans S.Trenée; 4. qu’- lle ét obmife par les PP. grecs dans leurs commen- taies fur S. Jean, comme par S. Chryfoftome, S.Cy- rille, Éc. quoique les PP. latins ; comme $.Jérôme, S. Auguftin, en parlent comme étant authentique ; 5°, qu Euthymuus eft le feul grec qui En fafle mer- tion ,& même avec cette remarque fportante, que Phiftoire dont il s’agit n’exiftoit point dans Les meil- Îleures copies. HR. Beze femble la-rejetter; Calvin l’adopte ; M. Si- mon en doute; Grotius la rebute; le P. Saint-Ho- noré & autres la défendent & la foûtiennent ; M. Le- clerc infinue qu’elle pourroit bien avoir été emprun- tée de l’avanture obfcene de Menedemus , rapportée dans Diogene de Laërce: infinuation qui a fufcité à notre critique moderne des reproches très-vifs & trop 1éveres. Enfin quelques-uns prétendent que c’eft Oni- gene qui a rayé l'hiftoire de la ferme adulrere de plu- fieurs manufcrits ; mais 1ls le difent fans preuves. Quoi qu'il en foit, nous renvoyons le leéteur à un favant traité, publié fur cette matiere par Schertzer (Jean Adam), théologien de Leipfic du xvi. fiecle, dont Bayle a fait l’article fans avoir connu l’ouvra- ge dont je veux parler ; il eff intitulé, Hifforia adul- tere ; Lipfie, 1671, in-4°, Mais comme le fujet ef _ très-intéreffant, il faur que les curieux joignent À la le&ure du livre de Schertzer, celle des ouvrages qui fuivent, & qui leur apprendront mille chofes fur la route. Ouvrages des Say, Sept. ann. 1706, p. 404. G feg. Nouv. de la répub. des Lett. tom. XV. p. 245. Idem ; tom. X XIII. p. 176. Id, tom. XLIV. pag. 56, Bibl. anc. & mod. tom, VII. p. 202. Journ. des Sav. tom. XXIL, p. 580. Bibl. choïf. tom. XVI. p. 294. Ho- noré de Sainte-Marie, Réflex. fur Les regl. de criria. dif]. . p. 119. Mackenz Scot. Writ. som. IT. p. 313. Mém. de Trév. ann. 1710, p. 802. Bibl. univ, tom. XII, p.436. Dupin, B:61. eccléf: tom. XXIX. pag. 319. Id. Dife. prélim. Liv. IT, chap. y. $. 6. Simon, Notes Jur le nouv, Teff, rom. II. pag 54. Aë&a erud. Lipf. ann. 1704, p. 82. Id. ann, 1708 , p. 5. Le- clerc, Nor. ad Hammond, in Loc, La Croze, Dif. hiflor. p. 56. Hifi, critig. de la républ. des Let. tom, IX, p. 342. Journ. listér, rom, XII. p. 136. Gro- us, i7 evang. Joh, cap. vu. Calmet, Di&, de la Bi- ble, tom.l,p. 54. Je tire cet article de l'Encyclopédie angloife (fup- plément) ;1l eft court, précis, & met en état de con- noître les raifons des uns & des autres, en indiquant les fources où l’on peut s’en inftruire à fond. Arricle de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FEMME EN COUCHE, ( Med.) état de la femme qui vient d’être délivrée de fon fruit. Cet état mérite toute notre attention par humanité , par devoir, & par fentiment. Les meres de nos enfans nous font revivre dans ces précieux gages de leur amour ; né- gligerions-nous de foulager avec zele les propaga- trices du genre humain dans le tems critique où elles ont le plus de befoin des fecours éclairés de la Me- decine? Non fans doute, Aïnfi d’abord que la ferme fera délivrée de {on en- fant & de fon arriere-faix, il faut commencer par lui mettre au-devant de l'entrée de la vulve un linge aflez épais, doux, maniable, & un peu chaud, pour éviter l’air froid du dehors , & prévenir la fuppref- fion des vuidanges. Après cela fi la fèmme n’a pas été accouchée dans fon lit ordinaire, on ne manquera pas de l'y porter incefflamment; bien entendu qu'il fe trouvera tout fait, tout prêt, chauffé attentivement, & garni de linges néceflaires pour l'écoulement des vuidanges. Mais fi la fémme a été accouchée dans fon propre lit, pratique qui femble être la meilleure & la plus sûre Pour parer l'inconvénient du tranfport , on Ôtera de ce Hit les linges & garnitures qu’on y avoit mifes pour recevoir les eaux , le fang , & les autres humeurs qui proviennent de l'accouchement. Enfuite on placera l’accouchée dans la fituation propre à lui procurer le repos & le rétabliflement dont elle a befoin. Cette fituation demande une poñition égale & horifontale fur le milieu du dos, la tête & le corps néanmoins Tome VI, | FEM 479 un peu élevés, les cuifles abaiïflées,, les jambes join- tes l’une contre l’autre, & par-deflous les jartets un petit oreiller, fur lequel elles puiflent être appuyées. Noire fémme étant ainfi couchée, & un peu re- mife de l'émotion de fon travail précédent, on en- tourera lâchement fon ventre d’une large bande de maillot, ou d’une longue ferviette pliée en deux ou trois doubles, de la lärsèur de dix à douze pouces ; on garantira fon fein du froid, & on panfera fes par- ties externes quiont fouffert dans la délivrance. Alors il ef à-propos de lui donner quelque reffaurant, com- me peut être un bon bouillon, & finalement de la laifler dormir, les rideaux de fon lit , les portes, & les fenêtres de fa chambre fermées , afin que ne voyant aucune clarté , elle s’afloupifle plus aifé- ment. On garantira foigneufement les nouvelles accou- chées du froid extérieur; parce que les fueurs qui naïflent de leur foiblefle, & l'écoulement des vui- danges, les rendent extrèmement {enfbles À cette impreflion, qui pourroit produire de fÂcheux acci- dens ; mais il ne faut pas non plus tomber dans l’au- tre extrémité, La chaleur de la chambre doit être toïjours aufñ égale qu'il eft poffible, & on y réufi- ra fans peine par le moyen des thermometres, Pour prévenir l’inflammation des parties qui ont fouffert une violente diftenfion dans l’enfantement : il faut, après les avoir nettoyé des srumeaux de fang qui peuvent y être reftés, appliquer à l'entrée de ces parties un cataplafme mollet, anodyn, & médio- crement chaud ; on renouvellera ce cataplafme de trois en trois heures. On fe fervira d’une décoétion d'orge, de graine de fin, & de cerfeuil, ou autre femblable, pour laver, nettoyer, & étuver deux fois dans la journée les levres de la vulve pendant les fx prenuers jours de la couche. Au bout d’une quinzaine on ufera d’une décoétion un peu plus aftringente, & bien-tôt après d’une lotion encore plus propre À for- tifier, à raffermur, & à reflerrer les parties relâchées. À l'égard du bandage dont j’ai parlé ci-deflus, on le fera très-lâche le premierjour, & fimplement con- tentif, pendant que les vuidanges coulent. IL n’eft pas mal de joindre au bandage une bonne grande comprefle quarrée fur tout le ventre ; & fi cette par- tie eft douloureufe, on l’oindra de tems en tems avec une huile adouciffante, Je penfe qu’au bout des douze premiers jours de | la couche, on doit ferrer plus fortement & infenfi- blement le bandage, pour ramener peu-à-peu, raf- fembler, & foûrenir les diverfes parties qui ont été étrangement diftendues durant le cours de la grof- fefe. Si 'accouchée ne peut ou, ce qui n’eft que trop ordinaire, ne veut pas être nourrice, il faudra bien mettre fur fon fein & contre l'intention de la natu- re, des remedes' propres à faire évader le lait : mais fi l’accouchée eft aflez fage pour vouloir nourrir fon fruit, on fe contentera de lui tenir la gorge cou- verte avec des Linges doux & mollets : alors la mcre nourrice obfervera feulement d’attendre quatre ou cinq jours, avant que de donner le teton à fon en< fant, Voyez Nourrice. Ajoûtons un mot fur le régime de vie de la mme en couche, Sa boiffon doit être toûjours chaude dans le commencement ; & fa nourriture compofée de annades, de creme de ris, d'orge, de gruau, de Rain legers de veau & de volaille, ou autres alimens femblables. Au bout du quatrieme jour, &e quand la flevre de lait fera pañlée, on lui permettra un régime moins févere ; mais ici, comme dans plus fleurs autres cas , il faut fe prêter au tems, au pays, à l’âge , à la coûtume, à la délicatefle, ou à la force de la conftitution de l’accouchée. Pour çe qui regarde la conduite qu’elle doit avoir Pppyi 459 FEM dans fon lit, c’eft de s'y tenir en repos, d'éviter les paffions tumultueufes, le trop grand jour, le bruit, la converfation , le babillage , en un mot tout ce qui pourroit l’émouvoir , l’'agiter, ou lui caufer du trouble: | Ces préceptes me paroïflent fuffifans pour le cours ordinaire dés chofes ; maïs 1l faut réunir des vües plus favaates pour la cure d’un grand nombre d’acci- dens, d’indifpofñtions , & de maladies qui n'arrivent que trop fouvent aux femmes ex couche. 1°, Uné des principales maladies dont le traite- ment s'offre communément aux obfervations cli- niques, eft la fupprefion ou le flux immodéré des vidanges ; fur quoi je renvoye le leéteur au 107 VUIDANGES, me contentant 1ci d’obferver feule- ment qu'il ne faut ni trop augmenter leur écoule- ment par des remedes chauds, mi les fupprimer par un régime frojd. 2°. L’hémorrhagie confidérable qui furvient à lacconchée , foit parce que le délivre a été détaché avec trop de hâte & de violence, foit parce qu'il en eft refté quelque portion dans lutérus, foit par quelque efpéce de faux-germe, conduit [a malade au tombeau, fi on n’a pas le tems d’y porter du fecouts, On fera donc de prompts efforts pour arré- ter la perte de fang ; & pour la détourner, on pro- curera par quelque moyen l’expulfion du faux-ger- me, de la portion de l’arriere-faix, ou des caillots de fang reftés dans la matrice. La faignée du bras fera pratiquée & répétée, felon les forces de la ma- Jade. Après avoir relâché fes bandages, on la cou- chera plus également, plus fraîchement, & même fur de la paille fans matelas, fi la perte de fang con- tinue ; on lui mettra le long des lombes, des ferviet- tes frempées dans de l’oxicrat froid: en même tems onranimera la région du cœur avec des linges chauds aromatifés , & on foûütiendra fes forces par des ref- taurans. 3°. On voit les nouvelles accouchées tomber en fyncope, 1° par la perte de leur fang, 2° lorfque eur corps demeure trop long-tems élevé, 3° lorfque les hypochondres font trop ferrés : rétabliflez alors les efprits par la nourriture ; mettez le corps dansune poñition horifontale ; relâchez les hypochondres, & foûtenez le bas-ventre. 4°. Les fievres inflammatoires des fémnes en cou- che peuvent être produites par la retenue d’une par- tie du délivre, par le froid, par de violentes paffons, lorfque les vuidanges n’en {ont pas la caufe : de tel- les fevres deviennent fouvent fatales , fi on ignore la maniere de les traiter. Il me femble que la métho- de confifte dans l’ufage de doux alexipharmaques &c d’abforbans , joints aux acides &c aux poudres tem- pérées de nitre ; dans de legers fuppoñtoires, des la- vemens émolliens, & de fimples écçoprotiques. Ces remedes feront précédés de la faignée dans les fe mes fanguines & pléthoriques : à la fin dé la cure on employera quelques legeres dofes de rhubarbe, 5°. La diarrhée fuccede ici quelquefois à la fup- preffion des vuidanges, & fait un fymptome très- dangereux quand elle accompagne une fievre aiguë pendant quelques jours ; 1l faut la traiter avec beau- coup de précaution par les adouciflans, les poudres teftacées, les extraits ffomachiques & corroborans, tels que ceux de gentiane donnés de tems à autre; un peu de rhubarbe, & même s’il eft befoin des äno- dyns adminiftrés prudemment: mais il eft toüjours néceflaire d’ordonner à la malade des diluans nitrés & acidulés. On tempérera lacrimonie des matieres ui font dans les gros boyaux, par des lavemens. 6°. Enéchange la confhipation ne doit pas effrayer durant les deux ou trois premiers jours de la couche; parce que le principe vital eft alors tellement enga- gé dans la fecrétion des vuidanges êc du lait, qu'il éft naturel que les entrailles ne foient pas fhmuléess mais on pourra dans la fuite employer des clyftèrés êc dès alimens propres à oindre les inteftins, & à les dégager. _ 7°. Les vents &z les flatuofités font trés-ordinai- nes aux femmes en couche. On y portera remedeexté- rieuremént par les bandagés &c l'application de fa. chèts carminatifs fur le bas-ventre ; on employera intérieurement les abforbans mêlés avec de la chaux d’antimoine , l'huile d'amandes douces fraîchement exprimée, de l’efprit anïfé de {el ammoniac, des gouttes de l’effence d’écorce de citron, &c. Pour les perfonnes d’un tempérament chaud, on mêlera de l’efprit de nitre dulcifñé dans leurs boiffons carmina: tives. 8°. Les tranchées font les plaintes fes plus ordi naires des nouvelles acconchées. Ce nom vulgaire & général de sranchées, défigne des douleurs qu’el- les reflentent quelquefois vers les reins, aux lombes &c aux aînes, quelquefois dans la matrice feulement, quelquefois vers le nombril 8 par-tout le ventre, foit continuellement , foit par intervalle, foit en un lieu fixe, foit vaguement, tantôt d’un côté, tantôt de l’autre. Ces tranchées, ou douletirs de ventre ; procedent de différentes caules ; 1°. de l'évacuation defordonnée des vuidanges, ou de leur fuppreffion fubite ; 2°. de quelque partie de l’arriere-faix, de fang coagulé , ou de quelque autre corps étranger refté dans la matrice ; 3°. du froid, de lomiffion du bandage après la couche ; 4°. de la grande extenfion des ligamens de la matrice, arrivée par un rude & fâcheux travail; $°. enfin de la conftriion fpafmos dique , ou de la fympathie des nerfs de Putérus. On oppoñera les remedes aux caufes connues. Ce mal finira en modérant ou rétabliffant l’éva= cuation des vuidanges, par lés moyens qu’on indi- quera au 10 VUIDANGES. La deuxieme canfe des douleurs de ventre ne fe diffipera que lorfque les corps étrangers auront été expuliés de la matrice. On diminuera les tranchées par un bandage, f on. lavoit obmis ; on tiendra le ventre chaudement, on y fera des oigremens aromatiques, des friétions ner- vines, & des fomentations de décoétions de romarin; de menthe, defleurs de camomille, & autres fembla- bles. Dans la diftenfion des ligamens de la matrice, le repos, le tems, & la bonne fituation du corps, fuf: firont pour les raffermir. La derniere caufe des tran- chées requiert les remedes nervins, les balfamiques, les anti-hyftériques , & les calmans. 9°. L’enflüre du ventre dans la fémme en couche nait fréquemment de l’omiffion des bandages nécef- faires après [a délivrance : on doit donc recourir à ces bandages, auxquels on peut joindre les friétions . l’ufage interne des plantes aromatiques, conjointe ment avec les pilules de Stahl & de Becker, mais feulement pendant quelque tems. 10°. L’inflammation de la matrice furvient quel quefois par la fuppreflion des vuidanges , par la cor- ruption d’un corps étranger, par quelque contufon, bleflure , chûte, ou violente compreffion qu’a fonf- fert ce vifcere, foit dans le travail, foit après le tra- vail, par des gens mal-habiles, Il en réfulte l’enflûre ;; la douléur de cette partie, une pefanteur au bas-ven. tre, une grande tenfon, la difficulté de refpirer, d’u- riner, d'aller à la felle, la fievre, le hoquet, le yo miflement, les convulfions, le délire, la mort ; if fant y porter de prompts remedes, tirer les corps étrangers, détourner & évacuer les humeurs par la faignée du bras, & enfuite du pié, faire des embro- cations fur le ventre, prefcrire à la malade un grand repos, une diete humeétante, adouciffante, 8e lege- re, de fimples lavemens anodyns, & s’abftenir de tout purgatif. Si par malheur l’inflammation {e con: vertit en apoñlème, en ulcere, en skirrhe, äl n’eff plus d’autres remedes que des palliatifs pour ces triftessmaladies.. _ à : on fait monter la vis., qui tirant à {oi le tenon , re- # tient fortement la vis 12 contre les côtés de la pie- # ce 11 qu'elle traverfe : on évite par-là le balotage # des: vis dans leurs écroux. La figure 114 eft un des » baffins qui reçoit la limaiïlle , à mefure que l’on » ferid la roue, | » De cette conftruétion il réfulte plufeurs avan- #tages. 1°, La maniere d'employer les vis pour évi- # ter le jeu dans leurs écroux , fi petit qu'il foit, eft # toijours nuifible dans la denture, # 2°, La maniere de diriger la fraife au centre eft # d’une utilité infinie, puiique par ce moyen on ne + fauroit faire de denture qu’elle ne foit droite. . #3°. La maniere d’aflujettir la roue à fendre fur y fon centre, eft très-bien employée ; les vis fur lef- # quelles eft porte le coq, étant aufli bien retenues # qu’elles le font, ne fauroient faire reflort. # 4°. L’alidade de la plate-forme, quoiqu’elle pa- v roïfle compoiée, doit être confidérée comme une # piece bien conftruite, ayant un reflort qui agit # avec beaucoup de douceur ; ce qui donnele moyen # de changer cette alidade plus facilement que d’au- “tres, qui font leur reflort directement. » La plus grande partie des perfeétions que l’on # reconnoitra dans la pratique de cette machine, lui # ont été données par M, de la Fautriere, à qui elle # appattenoit ». De la machine à fendre toutes fortes de nombres. Pierre Fardoil horloger à Paris, &c très-bon ma- chinifte , auquel nous fommes redevables de plu- fieurs outils compofés, lefquels on peut voir dans le traité d' Horlogerie de M. Thiout , eft l’auteur de lin- génieufe machine a fendre toutes fortes de nombres ; elle peut s'adapter à une machine à ferdre ordinaire dont toutes les pieces reftent lesanêmes, & fervent éca- Âement à fezdre, à l'exception de lalidade que l’on fupprime, & du divifeur qui eft denté comme une roue ; ce qui tient lieu des points de divifion. . Le divifeur eft fendu à vis fans fin fur le nombre 420 (il a choifi ce nombre à caufe des aliquotes qu'il contient). Dans les dents du divifeur engrene une vis fans fin fimple , qui eft attachée par des pieces quelconques fur le chafis de la #achine à féndre or- dinaire: ainfi en faifant faire un tour à la vis fans fin, la roue fera avancée d’une dent. Or fi on férd à chaque tour de la vis fans fin une dent de la roue mile fur le tafleau , comme nous avons vû ci-de- vant, il eft évident que l’on fera une roue qui aura 420 dents : mais fi au lieu de faire faire un tour à la: vis, on ne lui en fait faire que la moitié, & qu’on fende une dent, & ainf de fuite à chaque derni-ré- volution, la roue fera de 840; & fi on ne fait tour- ner la vis que d’un quart de tour, 8 qu’à chaque quart qu’on fezde une dent, la roue fera de 1680: ainf de fuite, & le nombre deviendra d'autant plus grand, que la vis fera une plus petite partie de révo- lufion, Si au çontraire on fait faire deux tours à Ja vis pour chaque dent que l’on férdra 3 on fera une roue de 210 dents ; f. on fait faire quatre tours s la roue fera de 105, &c. Me © à Tel eft le principe de cette machine , de laquelle on peut fe former une idée par ce que je viens de dite : mais pour voir mieux tout ce méchanifme, on peut recourir au traité de M. Thiout , page 46. où il €ft bien décrit, Cependant pour en donner ici une idée , je tâcherai de faire entendre les moyens dont s’eft fervi M. Fardoil pour fézdre toutes fortes de nombres, ou, ce quirevient au même , pour regler les parties de révolution de la vis fans fin. Le prolongement de la tige de lawis fans fin porte quarrément une aflette, fur laquelle eft 4xé un-ro- chet fort nombré & à volonté. Sur la piece qui porte la vis {ans fin, eft placé un cliquet & un reflort qui agiffent fur le rocher en queftion; ce qui l'empêche de rétrograder , ainf que la vis fans fin, Sur Paffiette qui porte ce rochet, eft fixé un autre rochet (lequel fe change fuivant le nombre des roues), dont le nombre eft relatif à celui de la roue que l’on vent fendre ; ce que l’on verra ci-après. Enfin fur le bout de cette même tige de vis fans fin, fé ment une mani- velle ; elle porte un reflort & un cliquet qui agiffent fur le fecond rochet; de forte qu’en tournant la ma- nivelle en arriere , la vis fans fin refte immobile : ce n’eft qu’en tournant la manivelle à droite, que la vis fans fin fe meut. C’eft par ce mouvement de rétro- gradation que l’on détermine la quantité dont on doit avancer la vis pour chaque dent de la roue à fendre, lequel eft reglé par le nombre des dents du rochet : ce que l’on verra par l’exemple füivant. » Soit donné le nombre 249 qu'il faut fezdre fur cette » machine, dont le divifeur eft fendu en 420; pour » trouver le nombre de dents du rochet, il faut divi- » fer 420 &T 249 par trois, qui eft Le feul divifeur » convenable aux deux nombres: les quotients fe- » ront 140 & 83. On prendra doncun rochet de 83; » & à chaque dent qu'on voudra féndre, on fera avan » cer 140 dents de ce rochet, c’eft-à-dire qu’on fera » d’abord faire une révolution entiere qui eft de 83 » dents, &qu'onenferaencore pañler 50: ce qui fera » les 140 dents. Ce qui fe détermine de la façon fui » vante », À chaque tout de la manivelle elle rencontre une piece qui arrête fon mouvement, de forte qu’elle ne peut aller plus loin fans qu’on leve cette piece. On fait rétrograder la manivelle du nombre de dents du rochet, qu'il faut faire pañler après avoir fait faire un tour, Dans l'exemple propofé, c’eft 57 dents du rochet. Pour empêcher la manivelle de rétrograder | plus que pour faire tourner 57 dents, elle porte un fecond bras que lon fixe au point que Pon vent: Dans cet exemple, 1l faut qu'entre les deux bras de la manivelle 1l y ait un intervalle de $7 dents du ro= chet. Ce bras va appuyer contre cette même piece qui empêche d'avancer la manivelle, laquelle em pêche aufli de rétrogader plus de 57 dents. On fait pour lors tourner la manivelle à droite , quiqu'à ce qu’elle rencontre la piece qui l'empêche de tourner. On fait faire un tour à la mamivelle, & la fait rétro- grader de la quantité fufdite. On fzd une feconde dent, & ainf de fuite jufqu'à ce que la roue foit fendue. On trouvera avec le plan & la defcription de cette | machine dans le traité de M. Thiout, une table des différens nombres que l’on peut y fézdre, depuis 102 jufqu’à 800 ; les rochets différens dont on a befoim pour telles roues ; les nombres de tours ou parties de tours qu’il faut faire, Grc. Or comme il y a une difficulté confidérable dans cette conftruétion, qui eft des différens rochets dont. 1} faut fe fervir , ilfaut chercher à la fupprimer; car |, ny a pas moins de difficulté à fexdreun rochet fus FEN tin nômbre-qu'on n’a pas, qu'à rare unerroué fr | une autre qui nous manque, F- .… Mais d’ailleurs ce principe des parties de mouve- ment de la vis {ans fin, eft très-bon, &t on peutentirer un meilléut parti; ce qué l’on pourra voir à l'arc. Ma- ÆHINE A FENDRE TOUTES SORTES DE NOMBRES, . Onpourra voir dans le traité de M. Thiout, Le plan d’une machine a fendre toutes fortes denombres, ont les rochets font fupprimés; elle eft de la com- pofition de M. Varinge , qui étoit horloger du duc de ï ofcane. - Comme à celle de M. Fardoil, c’eft une vis fans ‘fin qui fait mouvoir le divifeur, lequel il a fezdu fur le nombre 360. La vis fans fin porte une roue de champ de6o , laquelle engrene dans un pignondeïo, La tige de ce pignon porte une aiguille qui fe meut au centre-d’un cadran divifé en 60 : cette aiguille eft de-deux pieces, dont l’une d'acier, &t l’autre de cui- yre ; elles tournent à frotement lune fur l’autre.’ Il y a au-deffous-du cadran , une plaque qui y tourne à frotement : elle fert à porter un index qui vient ré- pondre à l'aiguille d'acier; ce qui fert à marquer le point d’où on part lorfqu’on fezd. Il y a aufñ derriere la roue de champ , une platine quipeut y tourner à frotement : elle fert à porter un bouton qui donne un coup contre un reflort à chaque tour que fait la soue de champ ; ce qui fert à compter lestoursqu’elle fait. Si on fait faire un tour à cette roue de champ , au moyen de la manivelle quientre quarrément fur l’ar- bre de la vis fans fin, & qu’à chaque tour on ferde une dent, on fera une roue.de 360; or, dans ce cas, à chaque tour de la manivelle la roue de champ aura fait faire fix tours à l'aiguille dont j'aiparlé, laquelle auroit parcouru fix fois 60 degrés du cadran, égale 360 degrés. Pour avoir un nombre aï-deflous de 360 , il faut, comme dans celle dufieur Fardoil , que la vis fans fin fafle plus d’un tour pour chaque dent ; ainfi pour une roue de 90 , il faut qu’elle fafle 4tours, Éc. - | | | Et fi on veut avoir un nombre plus grand que 360, il faut qu’elle fafle moins d’un tour: c’eft pour exprimer les parties de la révolution dans ces deux cas, que fervent l'aiguille & le cadran ; ainfi on peut voir une 360° partie de la révolution de la roue de champ ; deforte que l’on pourroit fézdre par ce moyen me roue quiauroit 129600 dents, en ne faifant tour- ner la roue de champ que pour qu’elle fit faire un degré à l'aiguille pour chaque dent. S1 on fait faire un tour à l'aiguille à chaque dent que l'on fendra, on fera une roue de 2160 dents, 6c. - En fupprimant le rochet de Fardoil ; M. Varinge aa pas évité un défaut , qui eft celui des balotages, d’engrenages , d’inégalités , rc. maïs c’eft toùjours un pas de fait pour arriver à la perfeétion de cette machine ; & celle de M. Varinge eft préférable à celle qui lui en a donné l’idée, qui eft celle de Far- doil. - Pour remédier aux défauts que l’on apperçoit dans ces deux machines, & pour les fimplifier encore, voici le moyen que je veux faire exécuter. Je ferai fendre le divifeur de ma wachine à fendre, für le nombre 720. Il fera mù par une vis fans fin fimple , laquelle tournera au centre d’une grande pla- que que l’on fixeta avec deux vis fur le chaffis de la machine. Cette plaque fera divifée en 720. La tige de la vis fans fin portera quartément une aiguille & une mamivelle ; ainfi en tournant la manivelle, on féra tourner l’aiguille fuivant le nombre de dents fur lequel on veut férdre une roue. La preffion d’une efpece de pince fervira à fixer l’aïguille fur les de- grés, ce qui empêchera qu'en fézdant elle ne puifle : tourner, Je donnerai une table d’une partie des nom- a 2 A res qu'on pourra férdre, & du nombre de degrés + qu'il faudra faire parcourir à laignille, & une regle pour les trouver. Voyez MACHINE À FENDRE TOU= TES SORTES DE NOMBRES, | | Dans le cas où le nombre 726 ne contiendroit pas aflez d’ahquots pour tous lés nombres, on peut en- core en marquer d’autres fur la plaque où eft divifé le 7204 lefquels feroient divifés {ur d’autres cercles concentriques : paf ce moyen on pourra férdre tous les nombres dont on pourra avoir befoin, & fervira pathculierément pour des machines compotées comme fpheres » Planifpheres, inffrumens , &c. : De l'exécution des machines a fendre, jé me fuis engagé de términer cet article par parler des foins qu'exige une #achine a féndre pour être bien exécus tée 8c juite: on n’attendra pas de moi que je le fafle avec toute l'étendue que demanderoit cette partie; cet article, déjà trop long, ne permet de m’arrêter que fur Les parties les plus effentielles. Pour avoir l'application de tous les foins , déliz catefles d'opérations, raifonnemens, &c, ilne faut que voir la machine a féndre que j’ai décrite, laquellé eft de M. Hullot; cet habile artifte l’a mile au point qu'il ne refte rien à defirer pour la perfeétion : je ne ferai donc que le fuivre dans ces opérations. Une des principales parties d’un outil à fézdre, eft le divi- {eur ; c’eft en partie de lui que dépend la jufteffe des roues. Il faut qul foit le plus grand poñfible, 1l n°’eft fimplé que dans ce cas ; s’il y a des inégahiés , elles . font où apparentes , alors on les corrige ; ou très-pe- tites, 8: dans ce cas elles deviennent moins fenfbles pour des roues qui font infiniment plus petites. Par des raifons femblables, ces divileurs deman- dent d’être divifés fur d’autres beaucoup plus grands, C’eft pour approcher autant qu'il eft pofible du point de perfeétion , que M, Hullot a fait un divileurpout pointer les plates-formes, lequel a fix piés de dia- metre ; il eftfolidement fait, divité avéc exa@titude: les ajuftemens des pieces qui fervent à former les. points fur les plates-formes ou divifeurs, fon: conf truits & exécutés avec beaucoup dé loin; ainft on doit attendre toute la juitefie poffible des platess formes piquées fur le divifeur : jen juge par expé- rience, Comme cette partie intérefle également l’Aftro- nomie , l'Hotlogerie , & différens inffrumens de Ma- thématique , je crois qu’il ne faut rien négliger pour la porter à fa perfection ; & c’eft en donnant à ceux qui ont du talent, les moyens de profirer de ce que lon a fait, qu’on peut y travailler : pour cet effet il faut leur faire part de l’état où tel art ef porté. Je pourrai donc donner la defcription du divifeur de M. Hullot , à Particle zachine a fendre routes fortes de zombres. Voyez MACHINE A FENDRE TOUTES SOR+ TES DE NOMBRES. Les arbres qui portent les divifeurs ou plates-for. mes, exigent une infnité de foins. Pour les ftire par- faitement , M. Hullot les perce d’un bout à Pautre : &c non content de les tourner fur des arbres lifles, il les fait tourner fur larbre life, fans que ce dernier tourne : il s’affüre par-là que le trou à le même cen- tre que l’extérieur de l'arbre ; & que les tafleaux & leurs roues étant bien tournés, ont auf le même centre. Après que l’arbre eft ainf tourné , on fait en: trer à frotement dans la partie inférieure du trou de cet arbre, un cylindre d'acier trempé, long d’envi- ron trois pouces , lequel fe termine en pointe, ce qui fait la partie p qui porté fur le point o de la vis, & fait le point d'appui inférieur de l’arbre. La plate-forme eft tournée fur fon arbre ; &êc les traits fur lefquels font pointés les différens nombres, font faits en faifant tourner ce divifeur & {on arbre dans le chaflis. La partie conique du trou de l'arbre, qui eft au . haut de cet arbre, eft faite en faifant toutner cet ar= bre dans le chaffis, 490 FEN | Le chaffis doit être folide, &-proportionné à fa | .Srandeur des roues que-l’on veut fezdre, Pour en don- ner une idée, je joints ici-les dimenfons de la 774- chine a fendre de M. Hullot, fur laquelle on peut fer- “dre des.roues.très-fortes, &gde 18 pouces de diame- tre ; elle peut très-bien fervir de regle, car elle eft aïfonnée, Le divifeur a 17.pouces & demi de diametre. La Tongueur des parties EC (PL, XXI.) du chafisn’eft depuis le centre 7, que de la longueur néceffaire pour ‘laïffer pafler le divifeur. La partie 4x du chaffis à 13 Pouces de long , 2 pouces + de large , & 9 lignes d’é- paifleur. Les autres parties du chafis ont les mêmes largeurs & épaifleurs. L’affiette de l’arbre O pq (PL XX.) a 4 pouces de diametre ; le corps de l'arbre, 1 pouce & demi de groffeur ; la longueur depuis le -point d’appui ou de mouvement 0, jufqu’au », eft de 8 pouces ; l’élevation des tafleaux au-deflus du plan A x, eft d'environ 2 pouces 2 lignes ; la hauteur du -» ches horifontales. De quelque maniere que ce def. » féchement foit arrivé, il a dû produire des fenres » perpendiculaires ; les inatieres qui compofent les » couches n’ont pas dû diminuer de volume, fans fe » fendre de diftance.en diftance dans une diredtion » perpendiculaire à ces mêmes couches, Je com- # prends fous ce nom de fees perpendiculaires , tou- » tes les féparations naturelles des rochers, foit qu’ils # fe trouvent dans leur pofition originaire, foit qu’ils # ayent un peu gliflé fur leur bafe, & que par confé- # quent ils fe foient un peu éloignés les uns des au- » tres. Lorfqu'il éft arrivé quelque mouvement Con » fidérable à des mafles de rochers ,: cés fentes 1e * trouvent quelquefois pofées obliquement , mais » c'eft parce:que:la mafle eft elle-même oblique; & » avec un peu d'attention il eft toûjouts fort-aifé de » reconnoître que ces fénres font en général perpendi- » culatres aux couches horifontales, für-tout dansles ».catrieres de marbre, de pierre à chaux, &dans » toutes les grandes chaînes de rochers ». Vs: Tel eft l’expofé général du fyftème de M. de Bu£. fon fur les feztes ; on en peut voir le détail & les con: féquences dans lendroit cité, p.553. € fuiv. nous nous contenterons de recueillir ici les principaux faits qu’il rapporte. On trouve fouvent entre les lits horifontaux des montagnes, de petites couches d’une matiere moins dure que la pierre, &cles fentes perpendiculaires foi remplies de fables, de cryftaux, de minéraux OLA Les lits fupérieurs des montagnes font ordinairement divifés par des fetes perpendiculaires très-fréquentes , qui reflemblent à des gerfures d’une terre defféchée 2 & qui ne parviennent pas jufqu’au pié de la monta gne , mais difparoïflent pour la plûpart à mefure qu'elles defcendent. Les fentes perpendiculaires cou pent encore plus à-plomb les bancs inférieurs que les fupérieurs. Quelquefois entre la premiere couche de terre yé- gétale & celle de gravier, on en tronveunede mar. ne; alôrs les fentes perpendiculaires inférieures font remplies de cette marne , qui.s’amollit & fe gerce à l'air. | rt | Les fentes perpendiculaires des carrieres &les joints des its de pierre, font incruftés de concrétions tan- t0t régulieres & tranfparentes , tantôt opaques & terreufes. C’eft par ces fentes qué l’eau coule dans l'intérieur des montagnes, dans les grottes & les ca- vités des rochers, qu’on doit regarder comme: les baffins & les égouts des fées perpendiculaires. On trouve les fentes pernendiculaires dans leroc & dans les lits de caillou en grande mañle , auffi-bien que dans les lits de marbre & de pierre dure. On peut obferver dans la plüpart des rochers dé- couverts, que les parois des fértes perpendiculaires , foit larges, foitétroites , fe correfpondent auffi exac- tement que celles d’un bois fendu. Dans les srandes carrieres de l'Arabie , qui font prefque toutes de gra- nit, ces feres font très-fréquentes , très-fenfbles, ët quelquefois larges de 20 à 30 aunes ; cependant la correfpondance s’y remarque toñjours. Affez fouvent,on tronve dans les fnces perpendi culaires, des coquilles rompues en deux, de maniere que chaque morceau demeure attaché à la pierre de chaque côtéide la fente; ce qui prouve que ces CO= quilles étoient placées dans le folide de la courbe horifontale, avant qu’elle fe fendér. Les fentes {ont fort étroites dans la marne, dans Pargille, dans la craie; elles font plus larges dans les marbres & dans les pierres dures, Yoyez hiflenats p. 552-568. (0) | FENTE, {. f. (Ænatom,) On donne ce nom à la ca- vité d’un os, qui eff étroite , longue & profonde. Se ENTE, e2 Chirurgie, e dit auffi d’une efpece de fracture fort étroite, &c quelquefois fi ne qu’on a de la peine à la découvrir : elle fe nomme Jére capillai. re, Voyez FISSURE. (7) a Ë FENTE, (Hydraul.) fe dit dans une gerbe d’eau ; de plufeurs fenses circulaires oppofées l’une à l’au- tre, que l’on appelle portions de couronnes, Ce font fouvent des ouvertures en long, formant de petits parallélogrammes. Foyez GERBE. (K) FENTE, (Greffer en) Jardinage, Voyez GREFFER: FENTE , e7 cerme de Cornetier, e dit de l’opération par laquelle on fépare un ergot fur une partie de fa fuperficie ; F E°O fuperficie , fans le defunir entierement. Poyez FEN- DRE. | FENU-GREC, £. m. fœnum-grecum, (Hifi. nur. bor.) genre de plante à fleur papilionacée; il fort du caliceun piftil qui devient dans la fuite une filique un peu applatie, & faite comme une corne, Elle renfer- me des femences qui font pour l'ordinaire de forme rhomboïdale , on de la forme d’un rein. Ajoûtez aux caratteres de ce genre, qu'il y a trois feuilles fuir un feul pédicule. Tournef, 27/2, rei herb. Voy. PLANTE, CS gens me _ Boerhaave compte fept efpeces de fénu-grec, mais nous ne décrirons que la principale. Ellefe nomme dans les auteurs fezum-gprecum, Of. J. B, 2. 263. Ra, iffor. 054. Fœnum-græcum fativum , C. B. P. 248. J. R, H. 409. Sa racine eft menue, blanche, fimple, ligneufe, & périt tous les ans. Sa tige eft unique, haute d’u- ne demi-coudée, grêle, verte , creufe, partagée en des branches & en des rameaux. Ses feuilles font aunombre de trois fur une même queue, femblables à celles du trefle des prés, plus petites cependant; dentelées legerement tout-autour, tantôt oblongues, tantôt plus larges que longues; vertes en-deffus, #tendrées en- deflous. Ses fleurs naïflent de l’aiffelle des feuilles; ellesfontlégumineufes,blanchâtres,papt- fionacées, plus petites que celles du pois. Ses filiques Tont longues d’une palme ou d’une palme & demie, un peu applaties, courbées , foibles, grêles, étroi- tes, terminées en une longue pointe, remplies de graines dures, jaunâtres , à-peu-près rhomboides, avecune échancrure; fillonnées, d’une odeur un peu forte, & qui porte à la tête. On feme cette plante dans les champs en Provence, en Languedoc, en Italie & autres pays chauds. Sa graine eft employée par les Medecins. Voyez FÉNU-GREC , (Mar, méd.) Article de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FENU-GREC, (Pharm, & Mat. méd.) on n’employe de cette plante que la femence qui eft connue dansles boutiques fous le nom de /émence de fenu-grec , ou de fenu-grec fimplement ; & on ne l’employe que pour ‘des ufages extérieurs. . Cette femence eft très-mucilagineufe. Foyez Mu- CILAGE. Elle eft recommandée pour amollir les tu- meurs, les faire mürir, les refoudre, & appaifer les douleurs. On la réduit en farine, que l’on employe dans les cataplafmes émolliens & réfolutifs ; ou bien onrextrait de la femence entiere le mucilage, avec Îequel on fait des fomentations. On en prelcrit utr- lement la déco@ion pour des lavemens émolliens, carminatifs, & anodyns, contre la colique, le flux de ventre, & la dyflenterie, On vante beaucoup le mucilage que l’on retire de cette graine, pour diffiper la meurtriflure des yeux. Simon Pauli & Riviere difent que c’eft un excellent remede contre l’ophtalmie, : Le fénu-grec a une odeur très-forte, qui n’eft point defagréable, mais qui porte facilement à la tête. Cette femence entre dans plufieurs préparations officinales, par exemple dans l’huile de mucilage, l’onguent martiatum: fon mucilage eft uni des in- grédiens de l’emplâtre diachylon, de Pemplâtre de mucilage , & de l’onguent de guimauve ou a/hæa. ‘ kéopar » adj. (Jurifpr.) fe dit de tout ce qui ap- partient à un fief. … Bien ou héritage féodal, eft celui qui eft tenu en fn | Seigneur féodal , eft le feigneur d’un fief. Droit féodal, eft un droit feigneurial qui appar- fient à caufe du fief, comme les cens, lods & ven- tes, droits de quint, 6:c. On entend aufñ quelque- fois par droit féodal , le droit des fiefs , c’eft-à-dire des lois féodales. Tome FL, FEO 493 Retrait féodal, eft le droit quele fergneurta de re- tenir par puiffance de fief l'héritage noble, vendu par {on vaflal, Foyez RETRAIT FÉODAL, Saiffe féodale, eft la main mie dont le feigneur dominant ufe fur le fief de fon vaffal par faute d’hom- me , droits, & devoirs non-faits & non-payés. V’oye SAISIE FÉODALE. Voyez ci-après F1rt. (4) FEODALEMENT, adv. (Jurifpr.) fe ditdece qui eft fait en la maniere-qui convient pour les féfs : ainfi cerir un héritage féodalement , c’eft le pofléder à titre de fief ; rerirer féodalemenr, Ceft évincer l’ac- quéreur par puiffance de fief ; faif£r féodalemenr , c’eft de la part du feigneur dominant, mettre en {a mainle fief fervant par faute d’homme, droits, & devoirs non-faits & non-payés. Foyez FIEF, RETRAIT FÉO- DAL, SAISIE FÉODALE. (4) FÉODALITÉ, {. f. (Jurifprud:) c’eft la qualité de fief, la tenure d’un héritage à titre de fief, Quelque- fois le terme de féodaliré fe prend pour la foi & hom- mage, laquelle conftitue leflence du fief: c’eft en ce fens qu’on dit, que la féodaliré ne {e prefcrit point, ce qui fignifie que la foi eft imprefcriptible dela part du vaffal contre fon feigneur dominant ; au lieu que les autres droits & devoirs peuvent être prefcrits. Voyez CENs, CENSIVE, FIEF, PRESCRIPTION, (4) FÉODER , f. m.( Comm.) mefure des liquides en Allemagne. Le f£oder eft eftimé la charge d’une char- rette tirée par deux chevaux. Deux féoders 8 demi font le roder ; fix ames, Le {oder ; vinet fertels,, l'a+ me ; & quatre maflins ou mafles, le fertel: enforte que le féoder contient 480 mafles, l’ame 80, & le fer- tel 41. Quoique Le féoder foit comme la mefure com: mune d'Allemagne , fes divifions ou diminutions ne font pas pourtant les mêmes par - tout ; & l’on peut prefque dire qu'il n’y a que le nom qui foit fembla- ble. À Nuremberg, le féoder eft de 12 heemers, &r le heemer de 64 mañles ; ce qui fait 768 mafles au /éo- der, A Vienne, le foder eft de 32 heemers, le heemer de 32%chtelings, & l’achteling de 4 feiltens ; lame y eftde 80 mañles, le fertel, qu’on nomme aufhifchre- ve, de quatre mafles, & Le driclink, mefure qui eft propfe à cette capitale d'Autriche, de 14 heemers. À Ausbourg, le féoder eft de 8 jés, & le jé de deux muids on douze befons, le befon de 8 maîles; ce qui fait 768 mafles au féoder, comme à celui de Nurem- berg. À Heidelbers, le féoder eft de 10 ames, l'ame de 12 vertels, le vertel de 4'mafles : ainfi le féoder n’eft que de 480 mafles. Dans le Virtemberg , Le féo- der eft de 6 ames, l’ame de 16 yunes, Pyune de ra mañles , & par conféquent il y a 960 mañles dans le | féoder. Voyez RODER, FERTEL, MASSE , HEEMER, ACHTELING , SEILTEN , SCHRENE, DRICIINK, JÉ, BESON, VERTEL, YUNE , &c. Diéfionn, duCom- merce, de Trév. & Chamb. (G) FER , f. m. (AifE nat, Minéral. Mérsall, & Chim.} ferrum , mars. Le fer eft un métal imparfait, d’un gris tirant fur le noir à l'extérieur, mais d’un eris clair & brillant à l’intérieur. C’eft le plus dur, le plus élaftique , mais le moins duétile des métaux. Il n’y en a point qui entre auf difficilement en fufon: cela ne lui arrive qu'après qu'il a roupi pendant fort long- tems. La principale propriété à laquelle on le recon- noît, c'eft d’être attiré par l’aimant. La pefanteur fpécifique du fer eft à celle de l’eau, à-peu-près com- me fept &c demi eft à un; mais cela doit néceflaire- ment varier à proportion du plus ou du moins de pu- reté de ce métal. | - Le fer étant le plusutile des métaux, la providen- ce la fort abondamment répandu dans toutes les parties de notre globe. I y en a des mines très-riches en France, en Allemagne, en Angleterre, en Nor- wege ; mais il n’y a point de pays en Europe qui en fournifle une aufii grande quantité , de la meilleure efpece, que la Suede, {oit par la bonté ce la nature r£ 494 FER de fes mines , foit par les foins que l’on fe donne pour le travail de ce métal. Ona été long-tems dansl’idée qu'il n’y avoit point de mines de fer en Amérique; mais c’eft uné erreur dont on eft revenu depuis long-tems ; & des obfer- vations plus exaétes nous aflürent que cette partie du monde ne le cede en rien aux autres pour fes ri- chefles en ce genre. (y Les mines de fer varient & pour la figure & pour la couleur. Les principales font : 1°. Le fer natif, On entend par-là du fer qui fe trouve tout formé dans la nature, 8 qui eft dégagé detoute matiere étrangere, au point de pouvoir être travaillé & traité au marteau fans avoir éprouvé lation du feu. Les Minéralogiftes ont été très-par- tagés fur l’exiftence du fer zauf, que plufeurs d’en- tre eux ont abfolument niée : mais cette queftion eft aujourd’hui pleinement décidée. En effet M. Rouelle de l'académie royale des Sciences, a reçu par la voie de la compagnie des Indes, des morceaux de fér #a- tif, apportés du Sénégal où il s’en trouve des mañles & des roches très-confidérables. Ce favant chimifte les a forgés , & il en a fait au:marteau des barres fans qu'il ait été néceflaire de traiter ce fer par aucun tra- vail préliminaire. 2°. La mine de fer cryflallifée. Elle eft d’une figure ou oétahedre, on cubique, ayant la couleur de fér même. La fameufe mine de fer de l’île d'Elbe, con- nue du tems des Romains, eft de cette efpece, 3°. La mine de fer blanche. Elle eft en rameaux, ou elle eft en cryftaux, ou bien ellereffemble à du fpath rhomboïdal , étant formée comme le lin d’un aflemblage de feuillets ou de lames étroitement unies les unes aux autres. Celle d’Alvare en Dauphiné ef de cette efpece: au coup-d’œil on n’y foupçonneroit point de fer, cependant elle eft très-riche , &c fournit 70 à 80 livres de fer au quintal. Pour diftinguer la mine de fer blanche du fpath, il n’y a qu’à la faire rou- gir dans Le feu ; fi elle devient notre, ce fera ufe mar- que qui annoncera la préfence du fer. 4°. La mine de fer noirâtre. Elle eft très-riche, at- tirable par l’aimant, d’un tiffu compa& ; ou bienelle eft parfemée de petits points brillans , ou formée par un aflemblage de petits grains ou paillettes de diffé- rentes figures & grandeurs. ÿ°. La mine de fer d'un gris de cendre, Elle eft un peu arfénicale, & n’éft point attirable par Païmant. 6°. La mine de fer bleue, Elle n’eft point attirable par l’aimant ; {a couleur eft d’un bleu plus ou moins foncé ; elle eft ou en grains, ou en petites lames, &c. 7°. La mine de fer fpéculaire. Elle eft formée par un amas de lames ou de feuilles luifantes, d’un gris obfeur; laimant l’attire. © 8°. L’hémarite ou fanguine. Sa couleur eft ou rou- ge, ou jaune, ou pourpre, ou reflemble ä de l'acier poli, c’eft-à-dire eft d’un noir luifant ; elle varie auf quant à la figure, étant ou fphérique, ou demi-fphé- rique, ou pyramidale, ou en mamellons. Quand on cafle cette mine, on la trouve intérieurement ftriée. Quand on l’écrafe, elle fe réduit en une poudre ou rouge , ou jaune. Cette mine fe trouve fouvent en petits globules bruns ou jaunes, femblables à des pois, des feves, ou des noifettes, Il y a des pays où 1l s’en trouve des amas immenfes: ce font autant de petites hématites dont on peut tirer de très-bon fer. 9°. L’aimant. C’eft une mine de fer qui eft ou d’un tiflu compa&, ou compofée de petits grains, ou par- femée de points brillans ; la couleur eft ou rougeä- tre, ou bleuâtre, c’eft-à-dire de la couleur de l’ar- doife ; elle a la propriété d’attirer le fer. Voyez l’ar- cicle AIMANT. 10°. La mine de fer fabloneufe. I paroït que cette mine ne devroit point faire une efpece particuliere; en effet elle ne differe des autres qui précedent , que FSEXR: par la petiteffe de fes parties, qui font détachées les unes des autres. C’eft ordinairement dans un fable de cetteefpece que fe trouve lor en paillettes , ou l’or de lavage. 11°, La mine de fer limoneufe, ( palufiris), Elle eft d’un brun plus ou moins foncé à l'extérieur, & d’un gris bleuâtre, on d’un gris de fer à l'intérieur quand on la brife, C’eft de toutes les mines de fr la plus ordinaire ; elle n’affeéte point de figure déterminée, mais fe trouve par couches & par lits dans le fein de la terre , ou au fond de quelques marais ou lacs. 12°, L'ochre. C’eft une terre , ou plûtôt du fer décompofé par la nature; il y en a de brune, de jau- ne, & de rouge : c’eft à la décompofition des pyri- tes &c du vitriol, qu’on doitattribuer la formation de l’ochre, | Toutes ces mines de fer font décrites en détail dans la Minéralogie de Wallerius, 0. I. pag. 450. & fiv, de la traduétion françoife , que l’on pourra confulter, ainfi que l’Incroduction à la Minéralogie de Henckel,, pag. 131.6 fuiv. de la premiere partie dans la traduétion. | | Quelques auteurs ont parlé de mines d'acier ; mais ces mines ne doivent être regardées que comme des mines de fer qui donnent de l'acier dès la premiere fu- fion, parce qu’elles font très-pures & dégagées de fubftances étrangeres nuifbles à la perfeétion du fér. Peut-être aufli que des voyageurs peu inftruits ont appellé zrines d'acier, des fubitances qui n’ont rien de commun avec l’acier qu’une reffemblance exté- rieure fouvent trompeufe. On voit par ce qui vient d’être dit, que parmi les mines de fer il y en a qui font attirables par l’ai- mant, tandis que d’autres ne le font point; ce qui prouve que ce n’eft pas à ce caractere feul qu’on peut reconnoitre la préfence du fer dans un morceau de mine. On verra même dans la fuite de cet article, que le fér peut être allié avec une portion confidé- rable d’autres fubfiances métalliques, fans perdre pour cela la propriëèté d’être attiré par l’aimant. On a lieu de croire que cette propriété dépend du phlo- giftique. Voyez la Minéralogie de Wallerius, to. L Pag. 493. 6 fuiv. | M. Henckel penfe que la divifion la plus commo- de des mines de fer, {e fait en tonfultant leur cou- leur. Suivant ce principe, 1l les divife en #/anches, en grifes, en roires , en Jaunes , en rouges , en bru- nes, &c. Voyez l’introduüfion à la Minéralogie, pars tie I. Il eft certain que la couleur peut fervir beau- coup à nous faire reconnoître les fubftances qui con- tiennent du jér; mais ce figne feul ne peut toüjours fufire : il eft donc à-propos pour plus de sûreté d’a- voir recours à l’effai. La meilleure maniere de faire l’eflai d’une mine de er, fuivant M. Henckel, c’eft de commencer par griller & pulvérifer la mine , d’en prendre un quin- tal docimaftique , deux quintaux de flux noir, un -demi-quintal de verre, de borax, de fel ammonmiac, & de charbon en poudre, de chacun un quart de quintal ; on fait fondre le tout à grand feu dans un creufet, [l ajoûte qu’il y a de l'avantage à y joindre de l'huile de lin. Foyez Introduition à la Minéralogie, partie IT, liv. IX, chap. ij. fe, 7. Les mines de fer que nous avons décrites, ne font pas les feules fubftances qui contiénnent ce mé- tal ; il eff fi univerfellement répandu dans la nature, qu’il n’y a prefque point de terres ou de pierres dans lefquelles il ne s’en trouve une portion plus ou moins grande, fans que pour cela on puifle l'en retirer avec avantage.Un grand nombre de pierresprécieutes, tel- lesquelesrubis, les jafpes,l’amétifte,la cornaline, &c, lui doivent leurs couleurs, finon en tout, du moins en grande partie, Prefque toutes les pierres & terres colorées font ferrugigeufes, & il y en a très-peu qui TRE Me foient entierement exemptes de quelque portion de ce métal : mais il fe trouve fur-tout d’une façon {en- fble, fans cependant pouvoit en être tiré avec pro- £t, dans l’émeril, la manganefe , les mines de fer ar- fenicales, que les Allemands nomment Schir/, Wol. fram , Eifènram ; dans la calamine , Les étites ou pièr: res d’aigle ; dans l'argile des potiers, &c. Ilen entre ane portion plus où moins srande dans les différen- tes pyrites, C’eff le fer qui fait la bafe du vitriol mar- tal, ou de la couperofe ; il fe trouve dans un grand nombre d'eanx minérales, &r 1l eft joint avec pret. Que toutes les mines des autres métaux êc demi-mé- taux , au pont que-l’on pent regarder la terre mat tiale comme une matrice de ces fubftances. Cepen- dant le /er {e trouve uni par préférence aux mines de cuivre ; il ef très-rare de le voit joint avec les mi- nes de plomb: mais on a obfervé qu'il {e trouve in- Æparablement uni avec les mines d'or; & il n’y à point, fuivant les plus célebres naturaliftes, de mi- nes de fer qui ne contiennent un veftige de ce métal précieux. Fondés fur cette analogie, quelques - uns ont penfé que le fer pouvoit bien contribuer en quel- que chofe à [a formation de l'or; d'autant plus que Becher, Kunckel, & quelques autres chimiftes du premier ordre, ont aflüré qu’on pouvoit tirer de l'or du fer: mais c’eft dans une quantité fi petite, qu’elle ne doit point tenter les adeptes qui voudroient réi- térer leurs expériences, ? x Les mines de fer fe trouvent dans {a terfé, Ou par flons , ou par lits & en couches fuivies > Ou par frag- mens détachés que l’on nomme rogrons ; on les ttou- vefouvent dès la premiere couthe de la terre :il gen rencontre aufh au fond de quelques lacs & marais. On ne donnera point ici la deferiprion des tra- Vaux, par lefquels on fait pañler les mines pour en tire le er ; on en trouvera les détails à l’arsicle For- GE qui a été fourni par un homme intelligent & expé- zimenté. On fe contentera donc d’obferver que ce travail n’eft point parstout le même. En effet quels quefois,lorfque la mine defér a été tirée de la terre,on peut aprés l'avoir écrafée & layée pour en féparer ies fubitances étrangeres, la traiter fur le champ dans la forge , tandis qu'il y én à d’autres qu'il faut com- imeéncer par griller préalablement avant que de les laver: la mine deférblanche d’Alvaredu numéro 3 eft dans ce cas ; on la fait griller pour que la pierre fe ger- ce ; enfuite on la laïfle expofée à l’air pendant quel- Que tems, & pluselle y refte, plus le fer qu'onentire eft doux, On eft encore obligé de griller les mines de fer argilleufes qui portent des empreintes de poif: fons & de végétaux, comme il s’en trouve en plu- fieurs endroits de l'Allemagne : mais il faut fur-tout avoir foin de griller fuffifamment, avant que de faire fondre les mes de fér qui font mêlées d’arfenic j parce que l’arfenic a la propriété de s’unir fi étroite: ment avec le er dans la fufñon, qu’il eft impoñible enluite de l’en féparer, ce qui rend le fer aigre & caf fant: on ne fauroit donc apporter trop d'attention à griller les mines de f#r arfénicales. Il en eff de même de celles qui font chargées de foufre. On trouvera à la fin de cet ärticle, la maniere de remédier à ces inconvéniens. Il y a des mines de fr qui pour être traitées dans le fourneau, demandent qu'on leur joi- gne des additions ou fondans analogues à leur natu- te, & propres à faciliter leur fufon, ce qui exige beaucoup d'expérience & de connoïffances ; & cela vane felon Les différentes mines que l'on a à traiter, & felon les différentes fubftances qui les accompa- gnent: d’où l’on voit qu’il eft impoffible de donner la-deflus des regles invariables, & qui puiffent s’ap- pliquer à tous les cas. Ceux qui exigeront un plus grand détail, pourront confulter Emanuel Sweden- borg, de ferro, Ouvrage dans lequel l’auteur a com= pilé prefque toutes les manieres de traiter le fer» Tome VI, PR FER 493 Qui fé pratiquent dans les différentes parties de l'Ena EU De AATI EEN 10" QE 4. , Le fer qui vierit de la Breñueté fonté de là mire ; s'appelle fer de gueufe ; 1] ft rarement ptir &c propré à Ôtre traité ali matteau : Cependant on peut s’én fers vir à différens nfages, comme pour faire dés pläcttes dé cheminées, des chaudieres, &c, Mais pour liu don: ner la duétilité & la pureté qui conviennent, il fauf le fairé fondre à plufeurs reprifes, & le frapper à grands coups de rnarteau : c’eft ce qu'on nomnie 4° Jinrer, Ce n’eft qu’à force de forger le fer, qu’on lui donne de la duétilité, la tenacité & la douceur ; Qua< lités qui lui font néceftaires pour qu'il pafle par les autres opérations de la forge, Voyez FORGE, Gt. L’acier n’éft autre chofe qu'un fe très-pur, & dans lequel, par différens moyens, Où a fait entrer le plus de phlosiftique qu'il eft poffible, F7 Actek » TRÉM: PE, 6c. Ainf pour convertir le fér en acier, il n’eff queftion que d'augmenter le phlogiftique qu’il con- tient déjà, en lui joignant, dans des vaifleaux fers mes, des fubftances qui contiennent béaucoup dé matiere grafle; telles que de la corne » des poils ; & d’autres fubflances animales ou végétales , fort chargéés du principe inflammable. Voyez l'article DYCTPRMEINT ; Of à crû fort loñg-tems qu'on né potivoit ém< ployer que du charbon de bois pour l'exploitation des minés de fer, & que lé charbon de terre n'y ÉtOIÉ point propre ; mais il n’y a pas long-tems qu'en An- gleterre on a trouvé le moyen de fe fervir avec aflez de fuccès di charbon dé téfre däris le traitement des mines de Jér. Il faut pour cela qu'il ñé contienne qué trés-peu, où même point de parties fulphüreufes ee beaucotip de matiere bitümineufe, Voyez Wright, differt. de ferro, page 4. k pu Nous avons dit plus haut que le /er eft fi abondams ment répandu dans le regne minéral, qu'il y 4 très: peu dé terres & de pierres qui n’en contienrerit une portioh. C’eft ici Le lieu de rapporter la fañiente ex: périence de Becher. Ce chitnifte prit de largille où terre à potier ordinaire , dont on fe fert pou faire les briques. Après l’avoif féchée & pulvérifée, 11 là méêla avec de l'huile de lin, & en forma des boules qu'il mit dans une cornue : & ayant donné uh degré de fu qui alloit en augmentant pendant quelques heures , l'huile païfa à là diftillatioi, & les boules reiterent au fond de la cornue: elles étoient devez nues noires. Après les avoir pulvérifées, tamiléeg & lavées, elles dépoferent un fédiment noir, dont; après lavoir {éché, il tira du ér en poudre au moyen d’un aimant, LA Cette expéñence dé Bécher donna lieu à beau: coup d’autres , & l’on trouva que non-failertent l’argille | mais encore toutes les fubffancés Végéta- les ; donnoient, après avoir été réduites en cendres, une certaine quantité d’une matiere attirable Par l’aimant. C’eft-là ce qui donna lieu à la farneute queftion de M. Geoffroy, de l'académie rôyale des Sciences de Pafis : $°:/ éroir poffible de tronver des Cert= dres des plantes fans fer? fur quoi il s'éleva tüne difs pute très-vivé, pour favoir f le fer qu’on trouvoit dans les cendres des végétaux, y exiftoit réellement avant qu'elles euflent été brülées ; ouf ce métal n’y avoit été formé que par lércirération & la con buftion du végétai, | M. Lemery le jeune foûtint le premier fentithent contre M. Geoffroy qui maintenoit le dernier, & la difpüte dira pendant plufeurs années etre ces deux académiciens, comme on peut le voir dans les mé= moires de lacadémie royale des Sciences , des an nées 1704, 1705, 1706, 1707, 1708 & 1769, où lon trouvera les raifons fur lefquelles chacun des adverfaires établifoit fon fentiment. | Ces deux avis ont eu chacun leurs partifañs. M4 Rrr 1j 496 FER Henckel, dans fa pyrisologie, femble pencher pour celui de M. Lemery ; mais il trouve qu'il n'avoit pas toutes les connoïflances néceffaires pour bien déten- dre fa caufe. M. Neumann au contraire penie que le fern’eft compofé que de deux principes ; favoir d’une terre propre à ce métal, qu'il appelle zerre martiale, & du phlosiftique; & que c’eff de la combinæfon de ces deux principes que réfulte le fer. Il fe fonde fur ce qu'il feroit inutile de traiter à la forge la minerde fer la plus riche au plus grand feu, dont jamais on n'obtiendra du fe, fi l'onn’y joint pas:du phlogifti- que. Voyez la chimie de Neumann. | Quoi qu'il en foit, ileft certain querle fer étant fi généralement répandu dans le regne minéral, &c ce métal étant difpofé à fe diffoudre & à être décom- pofé par tous les acides, par l’eau, &t même par l'air, il n’eft pas furprenant qu'il foit porte dans les végétaux, pour fervir à leur accroïffement êc en- trer dans leur compofition, Il y a même lieu de croire que c’eft le fer diverfement modifie, qui eft le prin- cipe des différentes couleurs que lon y remarque. Cela pofé , il n’y a pas non plus à s'étonner sil fe trouve du jér dans les cendres des fubftances anima= les ; il eft aïfé de voir qu'il a dû néceflairement paf- fer dans le corps des animaux, au moyen des végé- taux qui leur ont fervi d’alimens. Des expériences réirérées prouvent ce que nous avançons. En effet, il fe trouve plus où moins de fer dans le fang de tous les animaux : c’eft la chair & le fang des hommes qui en contiennent une plus grande quantité; les qua- drupedes, les poiflons, & enfin les oifeaux, vien- nent enluite, Il faut pour cela que les parties des animaux foient réduites en cendres, & alers on trou- veta que dans les os & les graiffes 1l n’y æpoint du tout de fer; qu'il n’y en a que très-peu dans la chair, mais que le fang en contient beaucoup. Ces parties ferrugineufes ne fe trouvent point dans la partie fe- reufe, mais dans les globules rouges, qui donnent la couleur & la confiftence au fang. M. Menghini, favant Italien, a cherché à calculer la quantité de fer contenue dans chaque animal , & il a trouvé que deux onces de la partie rouge du fang humain don- noïent vinet grains d'une cendre afttirable par l’ai- mant ; d’où il conclut qu’en fuppofant qu’il yait dans Le corps d’un adulte 25 livres de fang, dont la moitié eft rouge dans la plüpart des animaux, on doit y trouver 70 {crupules de particules de /er attirables par laimant. M. Gefner, auteut d’un ouvrage allemand quia ourtitre, félecla phyfico-æconomica, tome I, p.244. imprimé à Stutgard , rapporte ces expériences ; il y joint fes conjeétures, qui font que les parti- cules de fer qui fe trouvent dans le fang , doivent contribuer à fa chaleur, en ce qu’elles doivent s’é- chauffer par le frotement que le mouvement doit caufer entrelles; êc il infinue que ces phénomenes étant examinés avec foin, peuvent éclairer la Mede- cine, & jetter du jour fur le traitement des maladies inflammatoires : d’ailleurs on fait que les remedes martiaux excitent au commencement un mouve- ment de fievre dans ceux qui en font ufage, Le fér, fuivant les meilleurs chimifles, eft com- pofé d’une portion confidérable de phlosiftique , du principe mercuriel ou métallique, & d’une grande quantité de terre grofere ; à quoi quelques-uns ajoû- tent qu'il entre un fel vitriolique dans fa compofi- tion. Nous allons examiner ce métal, eu égard aux fubftances dont la Chimie fe fert pour le décom- ofer. Le fer à l'air perd une partie de Ton phlogiftique , ce qui fait qu'il fe convertit en rouille , qui eft une chaux martiale : fur quoi 1l faur obferver que l'acier, qui, comme nous l'avons déjà remarqué, n’eft que du fer très-chargé de phlogiftique, nefe rouille pas dus enfemble , fontune compoñtion qui reflem FER Si prompterent à Pair quelle /2r ordinaire. : 1 L'eau agit dur le fer MAS, fuivant M'Réelles ceneftipas comme diflolvant : cependant'elle le dé gage de fon phlopiftique , & le change en rouille. Quant aux différens effets du frallié avec les ane tres fubftances métalliques , on n'a crû pouvoir mieuxfaire que de rapporter ici les expériences qué M: Brandt , celebre chimifte fuédois, à commun quéesà l'académie de Stockolm, dont ileft membre: dans un mémoire inféré dans le tome XII. des He moires de Pacadémie royale de Suede, arné 1351, dont nous donnons ici l'extrait. | Le fer & l'or fondus es parties évales, donnent un alliage d'une couleur grife, un peu aigre, &c attiras ble par aimant: : | Parties égales-de.fér &r d’argerit donnentine cord pofition dont la couleur eft à peu de chofe près auffi blanche quecelle de l’argent ; mais elle eft plus dure, quoiqu'aflez duétile elle eft attirable par limant 1: Sron fait fondre une partie de /ér avec deux Dar ties d'étain , on aura une compoñtion qui fera d’un gris obfcur dans l'endroit de la fradure, malléable &x.attitable par Paimant. Le Le cuivre s’unit avec le fer par la fufion, & act quiért/par-là de la dureté. Cette compoñtion eft or fe, aigre, 8 peu duétile : elle eft attirable par Pas mant. { Une partie de fer &c trois parties de plomb fondus à l’aide du flux noir & de la poufiere de charbon donnent une compofñtion qui reflemble à du plorth : & qui eft attirable par aimant. On peut douter de cette expérience de M} Brandt, Le fer peut être amalgamé avec le mercure, fi pen. dant qu’ontriture enfemble ces deux fübfances. on verfe defus une diffolution de vitriol ; mais l'union wi fe fait pour lors m’eft point durable, & le mer cure an bout de quelque tems fe fépare du fer, qui et réduit en rouille ou en faffran de Mars. Le: Parties égales de fer & de révule d’antimoine fon. % du fer de gueuft, & qui n’eft point attirable F4 mantf, à Le fer fondu avec l’arfenic & le flux noir, forme une compoñtion femblable au fer de oueufe, qi met point attirable par l’aimant. | Le régule du cobalt s’unit avec le er, fans qu'il arrive aucun déchet de leur poids. Quand la féon s’opere à l’aide d’un alkali & d’une matiere LMP mable, la compofition qui en réfulte eftattirable par l’aimant. | \ Pe Le fer & le bifmuth s’aniflent par la fufon, &c le tout qui s’eft formé eit attirable par l’aimant Le fer &cle zinc ne peuvent point former dons parce que le zinc fe brûle &c fe diffipe à un degré 1e chaleur aufli violent que celuiqu’il faut pour mettre le fer en fufon. Le fer feul expofé à la flamme ; 16 rédtit en une chaux ou fafran de Mars ; phénomene qui n'arrive point dans les vaifleaux fermés, quelle que ft la violence du feu : pour lors ce métal ne fait que fe puriñer & fe perfe“tionner. Le fer fe diflout avec une effervefcencé confidéra- ble dans l'acide nitreux ; mais lorfque cet acide eft très-concentré, la difiolution n’eft jamais claire & tranfparente. Quand on veut qu'elle foit claire, il faut affoiblir l'acide nitreux avec une grande re tité d’eau, & n’y mettre qu’un peu de fer. CRE moyen d’avoir de l’efprit de nitre fumant , très-fort que de le diftiller fur du fer. à L’acide du fel marin diffout le fr aufi-bien que Pacide végétal. L'eau régale, foit qu’elle ait éré Fe avec du fel ammoniac, foit avec du {el marin, agit auf fur le fer. L'açgide viriolique diffout le fer, & forme avec Ini FER un {el que l’on nomme v/rr201; mais pout que la diffo- Aution fe fafle promptement, il faut que l'acide vitrio- lique ne foit pas concentré, Pendant que cette diflo- lution s’opere, il s’en dégage des vapeurs qui s’en- flamment avecexplofion. La même chofe arrivé avec Vacide dufel marin. l | ; Le fer, quand il a été mis dans l’état de chaux mé- tallique, n’eft plus foluble, ni dans l’acidé nitreux, ni dans Pacide végétal: celui du fel marih agit un peu fur la chaux martiale, & la diflolution devient d’un roupé très-vif : celle qui fe fait dans l'acide vi- ériolique, eft verte. | … Parties égales de limaille de fer & de nitre triti- rées enfémble , s'enflamment & détonnent quand on met ce mélange dans un creufet rougi : par-là Le £r €ft mis dans l’état de chaux ; phénomene qui prouve évidemment que le #7 contient du phlogiftique. Cette vérité eft encore confirmée par l'expérience que rap- porte M. Brandt, qui dit que lorique pour dégager | l'argent du plomb on fe fert d’un têtou d’une grande coupelle entourée d’un cercle de fr, la litharge O1 le verte de plomb qui fe fait dans cette opération, fe réduit en plomb, lorfqu’il vient à toucher le cer- cle de fer qui entoure la coupelle, Le On peut encore ajoûter une expérience qui prou- Ve cette vérité : c’eft qu'on peut enlever à du fér fon phlogifique , pour le faire pafler dans d’autre fer. C’eft ainfi qu'en trempant une barre de fer dans du fer de gueufe en fufion, la barre fe change en acier. Le fer mêlé avec du foufre, & mis à rougir dans les vaifleaux fermés, {e change en une chaux mé- tallique ou en fafran de Mars ; mais fi l’on applique du foufre à du fer qui a été rougi ju{qu'à blancheur ou jufqu’au point de la foudure , le Jér & le foufre fe combinent , & forment une union femblable à celle qu'ils font dans la pyrite martiale, &c le corps qui en téfulte fe décompofe à Pair & y tombe en eéfflorefcence, comme cela arrive à quelques pyrites. Si l’ontriture une chaux martiale, ou de la mine de fer qui a été orillée avec du felammioniac, le tout devient fufceptible de là fublimation. Le foie de foufre, le {el de Glauber, le fel de 440: bus , &c les autres fels formés par l’union de l’alkali fixe &z de l’acide vitriolique, diffolvent le fer, comme les autres métaux, à l’aide de la fufion , & forment des fels avec lui, fur-tout f l’on joint aux deux der: niers fels une quantité fufffante de matiere inflam- mable. | Lorfque le fer eft dans l’état d’uñe chaux métalli _que, ou de ce qu’on nomme fzfran de Mars, il entre aifémenten fufionavecles matieres vitrifiables ; c’eft ce qui fait que l’on peut s’en fervir avec fuccès dans les émaux, la peinture fur la porcelaine &z fur la fayence, Ge. | Un phénomene digne d'attention, que nous de: vons à M. Brandt, c’eft que les chaux martiales mé- lées avec des matieres virrifiables, demandent un degré de feu moins violent pour être vitrifiées, que celui qu'elles exigent pour être réduites, c’eft4 dire remies dans l’état métallique, tandis que les autres métaux demandent un feu plus fort pour leur vitri- fication que pour Leur réduêtion: fur quoi ce favant chinufte oblerve qu'il éft important de faire atten- tion à cette propriété du fer dans le tfaitement de cé métal, & lorfqu'il eft queflion de Le féparer d’avec lès métaux parfaits. N1 la mine de fer, âprès qu’elle à été grillée, ni là pierre à chaux, traitées féparémerit dans un creu- {et Couvert au fourneau de fufon, ne fe changent en VEIré, quand même on donneroït un feu très- violent pendant une demi-heure ; mais f on mêle enfemble ces deux fubftances en parties égales, en donnant le même degré de feu, en beaucoup moinsde . fems elles feront entierement vitrifiées , &é changées RER #97 Énun Vérré hoir. M, Brandt ajoûte que fi l’on joint du fpath fufible à la pièrre calcaire, la vitfification fa fera encoré plus promptement: ur NUE. |: [y à du er qui a la proprièté d'êtré caffant lorfs qu'il eft froid : c’eft à l’arfenic que M, Brandt attri. bue cétte mauvaife qualité. En effet, comnié on là déjà remarqué, ce deinismétal s'unit trésintimemont avec le jer par la fuñon, délorte qu'il eft enfnite tres- difficile de l’en fépater, Ce qui prouve le fentimeñt de M. Brandt, c’eft que le jér caffant à froid ef très- fuñble, & que de toutes les fubftances minérales il n'y en a point qui facilite plus la fufion que l’arfenics LE moyen le plus für de prévenir cette uHiOn du fer êx de larfeme, c’eft de griller foisneufementla mine avant que de la faire fondre ; car il ef plus facile de faire partir ainf la pattie arfénicale, qu'à l’aide des additions,telles que les'alkals, les pierres calcaires; le foufre, &c. d'autant plus que Parfenic s’en va on fumée quand il ne rencontie point de fubllance À la quelle 1ks'attache & qu'il meité en fufion. Pons que ce grillage foit plus exa&, M. Brandt confeille de mêler du charbon pilé groflierement, avec la mine qu'on veut griller, afin que la chaleur foit allez forté pour en expulfer la plus grande partie de l’arfenic. =. Quant à la propriété que le er a quelquefois de fe cafler quand il eft rougi, M, Brandt l’aftribue à l'acide du foufre , qui n’en a pas été fufifamment dé: gagé par le grillage: c’eft auf la raifon pourquoi lé fer de cette eipece eft plus difficile à mettre en fafion. Pour remédier à cet inconvénient , il faut faire ef fuyer an fer un grand feu dans les premierés opérd- tions ; & pour que la mafle de fér fondu foit mieux pénétrée dans le fourneau, il faut faire enforte que le {ol n’en foit point trop profond. Voyez les mémoires de l'académie royale des Sciences de Sucde , vol, XIII, année 17514 Le /er expolé au miroir ardent , fe vitrife , & fé change en un verre qui reflemble à de la poixtéfine, $1 l’on mêle enfemble partie égale de limaille de fer & de foufre en poudre, & qu’on les humeëte avec de l’eau, an bout de quelque tems il part des vas peurs &r fumées de ce mélange, qui à la fn s’enflam. me. M, Lemery, à qui on doit cette expérience ; prétend expliquer par-là la formation des volcans & des embrafemens foûterréins. Perlonne n'ignore qu’un caillou frappé avec du fer, donne des étincelles. Quoique cette expérience loit très-commune, elle préfente un phénomene très-digne de remarque. En eïfet, le jér eff de tous les métaux le plus dificile À faïre entrer en fufon ; cependant dans l’expérience dont il s’agit, il y entre en un chn-d’œil, puifque chaque étincelle qi part, n'eft autre chofe que du er fondu & réduit en une {corie, comme on peut s’en affürer à l’aide du mix crofcope: Voyez FEU. | Le fer a plus de difpofition à s’unir avec le foufre i Que les autres fubftances métalliques ; c’eft pourquoi On peut s'en fervir pour Les dévager de leur foufre. C'eft cette propriété du fer qui a donné lieu à la phra- fe dont fe fervent les métallurgeiftes allémands ; JU difent que Le fer ef? le miaitre dans le fournean. | S1 la feule utilité décidoit du prix des chofes, if eft certain que le fer devroit être regardé comme le plüs précieux dés métaux ; il n’y a point de profef= fion, d’aft ou de métier dans lefquels on m'en ait un befoin indifpenfable , &il faudroit des volumes pour indiquet feulement fes différens ufages : tout le mon- de fait que la Medecine en tire des avantages très- réels dansun grand nombre de maladies, on les trous vera à Particle ReMepEs MARTIAUX. (—) Al _ FER CASSANT À rRoïD; il fe connoît en ce qu'il à le grain gros & clair à la caflure, comme l’étain de place: Quand on manie la barre, on le trouve . rüde à la mais ; il eft tendre au feu ; il ne peut endus . f Y 498 FER rer une grande chaleur fans fe brüler, Il y a de ces fortes de fèrs qui deviennent plus caflans en les for- peant, & ne peuvent être mu dreflés ni tournés à froid. | Fer DOUX, Le fer doux {e connoît à la caflure, qui doit être noire tout-en-travers de la barre: alors il eft malléable à froid, & tendre àtla lime: maisil eft plus fujet à être cendreux, c’eft - à - dire moins clair & moiñs lurfant après qu'il eft poli ; il s’y trou- ve des taches grifes : ce eft pas qu’il ne fe trouve des baïres de ce jér qui n’ont point ces défauts, li y a d’autres fers qui à la caflure paroïffent gris, oirs, & tirant fur le blanc, qui font beaucoup plus roides que le précédent ; ils font très - bons pour les Maréchaux, les Serruriers, les Taillandiers, &c en géncral tous les ouvriers en gros ouvrages noirs; car à la lime on lui remarque des grains qu'on ne peut emporter. | A Il y a d’autres fers mêlés à la caMure ; 118 ont une partie blanche, 6 l’autre grife ou noire ; le grain en ft un peu plus gros qu'aux fers ci-deflus; ils font réputés les meilleurs ; 1ls fe forgent facilement ; ils fe liment bien prenant un beau poli, & ne font fu- jets ni à des grains, ni à des cendrures, parce qu'ils s’afinent à mefure qu’on les travaille, | Il y a une autre forte de fer qui a le grain fort pe- tit, comme l'acier ; il eft pliant à froid, & bouillant à la forge ; ce qui Le rend difficile à forger & à li- mer. 11 eft bon pour les outils & les travaux de la £erre, FER ROUVERAIN, il fe connoït à des serçures où découpures qu’on voit traverfer les quarrés des bar- ses ; 1l eft pliant, malléable à froid, & caffant à chaud; il rend une odeur de foufre à la forge; fon le frappe, il en fort des étincelles femblables à de petites flammes en étoiles. Quand on le chauffe un peu plus blanc que couleur de cerife rouge, il s’ou- vre à chaud, & quelquefois prefque tout-en-travers de la barre, fur-tout lorfqu’on le bat, ou qu'on le ploye. Il eft fujet à avoir des pailles &c des grains: c’eft le défaut du fer d'Efpagne. Les vieux fers qui ont été expoñés long-tems à l'air, font fugets à devenir rouverains. FLEUR DE FER ,, voyez FLos MaRrTIs. FER, (Marque des Fers.) droit domanial de la cou: sonne , faifant partie de la ferme générale des aides, confiftant au dixieme qui fe devoit prendre fur tout ce qui fe tiroit des mines & minieres du royaume, dont Charles VI. ordonna la lévée à fon profit par lettres patentes du 30 Mai 1413 , comme lui appar- tenant de plein droit en qualité de roi, &c non aux feigneurs qui le prétendoient. Ïl fut rendu par la fuite plufieurs édits & arrêts, pour créer divers officiers, remédier aux abus, & empêcher les inconvéniens qui n’arrivoient que trop fréquemment par la rupture des ouvrages. En 1602, la charge de fur-intendant des mines fut créée en fa- veur de Roger de Bellegarde, & Beringhen en eut le contrôle général. Le meilleur moyen qui fut eim- ployé, fut de rétablir l’ufage du fer doux, & de ne permettre celui du fer aigre qu'aux ouvrages dont la rupture ne pouvoit caufer aucun accident ; il fut créé à cette occafñon de nouveaux officiers, pour connoiître, marquer , & diftinguer le fér doux d’avec le fer aigre ; il fut attribué à tous ces officiers divers droits. En 1628 , le fér mis en œuvre & apporté des pays étrangers, fut déclaré fujet, ainfi que ce- lui des forges du royaume, & aflujettis à être con- duits & déchargés aux bureaux pour y payer les droits. | La quincaillerie étant un compofé de fer & d’a- çier, fut déclarée fujette en 1636. La mine de fer eft fujette auxdits droits , fauf l’é- valuation que lon a fixée au quart; & sl eft réduit FER en quintal de gueufes , 1] paye comme fer parfait, parce que les fontes ne font plus fujettes à aucun déchet. Ces droits font fixés par lordonnance de 1680 ; fur le fait des aides & entrées, à raxfon de 1 3 {ous 6 den. par quintal de fer, 18 fous par quintal de quincaillerie groffle & menue, 20 fous par quintal d'acier, &t 3 fous 4 den.par quintal de mine de fe, fur le pié de 100 1. poids de marc par quintal , pour diftinguer le poids de forges qui eft beaucoup plus fort. Il n’y a nulle exemptiôn de ces droits, ni aucun privilège; les fermiers du domaine, les propriétai- res des fotses de quelque qualité qu'ils foient , même les eccléfiaftiques pour celles qui font du temporel de leurs bénéfices , encore qu'ils les faffent valoir pat les mains de leurs domeftiques, tous indiftinéte- ment y font aflujettis, Les boulets de canon, bom- bes , & grenades, quoique pour Le fervice de S, M. y ont été déclarés fujets. | ANA Ces droits font partie de la férme générale , & font foûfermés pour tout le royaume à ure feule compagnie. Les baux font de fix ans, comme ceux des autres droits d’aides. La règie eft la même. Ces article ef? de M. DurouUR. * FER-BLANC. M. Colbert appella en France les premiers manufaéturiers en fer blanc qu'on y ait vüs. Les uns s'établirent à Chenefey en Franche-Comté, les autres à Beaumont-la-Ferriere en Nivernois 5. mais ces ouvriers précieux ne trouvant pour les foù- tenir ni une intelligence n1 une proteétion telles que celles quiles avoient attirés, n’eurent aucun fuccès, & {e retirerent. Il s’en éleva une manufaure à Strasbourg fur la fin de la régence. IL y a attuelle- ment quatre manufactures de fer-blanc en France: 1° celle de Manfvaux en Alface, établie il y a qua- rante-deux ans: 2° celle de Bain en Lorraine, éta- blie en 1733, fur des lettres-patentes du duc Fran- çois LIT, confirmées en 1745 par le roi Staniflas de Poloone : 3° celle de Moramber en Franche-Comté, établie depuis cinq années : 4° une établie depuis trois ans à une lieue de Nevers. On y porte le fer en petits barreaux : le meilleur eft celui qui s'étend fa cilement, qui eft ductile & doux, &c qui fe forge bien à-froid ; mais ilne faut pas qu'il ait ces qualités avec excès, Onle chauffe en 4; on l’applatit d’abord un peu en 2, & dés le premier voyage fous le gros marteau. C, onle coupe en petits morceaux qu'on appelle /e- mnelles. La femelle peut fournir deux feuilles de /er- blanc, d dd, On chauffe ces morceaux jufqu’à étin- celer violemment, dans l’efpece de forge À ; on les applatit grofierement. On rechauffe une troifieme fois, & on les étend fous le même gros marteau C, jufqu'’à doubler à-peu-près leurs dimenfions ; puis on. les plie en deux, fuivant la longueur, Onles trempe dans une eau trouble qui contient une terre fabuleu- fe , à laquelle il feroit peut-être très-à-propos d’a- joûter du charbon en poudre, les femelles en feroient moins brûlées. L'effet de cette immerfon eft d’empê- cher les plis de fouder. Quand on aune grande quan- tité de ces feuilles pliées en deux, on les tranfporte à la forge S'; on les y range à côté les unes des au- tres verticalement, fur deux barres de fer qui les tiennent élevées, & l’on en forme une file plus ou moins grande, felon leur épaifieur : on appelle cette fille, une trouffe, Un levier de fér qu’on leve où qu’on abaïfle quand il en eft tems , fert à tenir la troufle ferrée : on met enfuite deffous & deflus du plus gros charbon, & l’on chauffe. Quand on s’appercoit que la file eft bien rouge, un ouvrier prend un paquet on une troufle de quarante de ces feuilles doubles, & le porte fous le marteau. Ce fecond marteau eft plus gros que Le précédent ; 1l pefe 700, & n’eft point acéré. Là ce paquet eft battu jufqu’à ce que les feuil- les ayent açquis à-peu-prés leur dimenfion; mais 1l FER faut obferver que les feuilles extérieures, celles qui . touchent immédiatement à l’enclume & au marteau, ne s'étendent pas autant que celles qui font renfer- mées entrelles, celles-ci confervant la chaleur plus long-tems, & cedant pat conféquent aux coups plü- tôt 8 plus long-tems. Après cette premiere façon, parmi ces feuilles on en entre-larde quelques-unes qui dans. le travail pré- cédent n’avoient pas été aflez étendues ; puis on fait la même opération fur tous les paquets ou troufles. On remet au feu chaque paquet entre-lardé , on chauffe. Quand le tout eft aflez chaud,, on retire les feuilles du feu par paquets d'environ cent feuilles chacun. On divife un paquet en deux parties égales, & l'on applique ces deux parties de maniere que ce quiétoit en-dedans fe trouve en-dehors. On les porte en cet état fous le gros marteau, on bat, on éprufe la troufle : on entre-larde encore des feuilles de re- but, on remet au feu, on retire du feu : on divife en- core en deux parties chaque paquet , remettant le dedans en - dehors, & l’on bat pour la troifieme fois fous le marteau. Il faut obferver que dans les deux dernieres opérations on ne remet plus en trouf- 1e, on fe contente {eulement de rechauffer par pa- quet. Dans la fucceffion de cetravail,, chaque feuille a eu un côté tourné vers le dedans de la troufle ou du paquet, & un côté tourné vers le marteau, &t ex- pofé à l’aétion immédiate du feu, Ce dernier côté a néceffairement été mieux plané que l’autre, plus net, moins chargé de crafle ; ce qui produit auf quelque | änégalité dans le fuccès de l’étamage. Tandis qu'on forme une nouvelle troufle dans la forge À, & que des feuilles s’y préparent à être mi- {es dans l’état où nous avons conduit celles-ci, les mêmes ouvriers rognent ; 1ls fe fervent pour cet effet d’une cifaille , & d’un chaffis qui détermine l’é- tendue de la feuille. Chaque feuille eff rognée fépa- rément. Quand les feuilles font rognées &c équar- ries, opération dans laquelle chaque feuille pliée fe trouve coupée en deux, la cifaille emportant le pli, on prend toutes ces feuilles, on en forme des piles fur deux groffes barres de ferrouge qu’on met à terre; on contient ces piles par une ou deux autres groffes barres de fer rouges qu’on pofe deflus. Cependant les feuilles de la troufle en travail, du paquet qui fuit, s’avancent jufqu'à l'état d'être équar- tes ; mais. dans la chaude qui précède immédiate- ment leur équarriflage, on divife chaque paquet en deux, & l’on metentre ces deux portions égales de feuilles non-équarries, une certaine quantité de feul- les équatries : on porte le tout fous le gros marteau ; on bat, & les feuilles équarries reçoivent ainf leur dernier poli. Après cette opération, les feuilles équar- riés des paquets iront à la cave, & les non-équarries, à la cifaille. De ces fenilles prêtes à aller à la cave, les unes font gardées en tôle, ce font les moins parfaites ; les autres {ont deftinées à être miles en fér-blanc. Avant que de les y porter, on les décape groffierement au grès, puis elles defcendent à la cave ou étuve, où elles font mifes dans des tonneaux pleins d'eaux fù- res, c’eft-à-dire dans un mélange d’eau & de farine de feigle , à laquelle on a excité une fermentation acéteufe, par l’aétion d’une grande chaleur répandue & entretenue par des fourneaux F dans ces caves, où il put fort , & où il fait très-chaud. C’eft-là qu'el- lesachevent de fe décaper, c’eft-à-dire que la crafle de forge qui les couvre encore, en eft tout-aà-fait enlevée. Peut-être feroit-on bien d'enlever en partie cette crafle des feuilles avant que de les mettre dans l’eau füre ; cette eau en agiroit fürement d’autant . mieux. Les feuilles paffent trois fois vingt - quatre heures dans ces eaux, où on les tourne &€ retourne de tems enftems, pourles expofer à l’aétion du fluide FER 499 en tout fens ; puis on les retite, &c on les donne à des femmes &, qui {e fervent pour cet effet de fable, d’eau, de liége,, &z d’un chiffon: cela s'appelle #/ar- chir, & les ouvriers &c ouvrieres occupés à ce tra- val, blanchiffeurs. Après l’écurage ou blanchiment des feuilles, on les jette à l’eau pourles préferver de la groffe rouille ; la rouille fine qui s’y forme, tombe d'elle-même: c’eft de-R- qu’elles pañlent à l’étamage. L’attelier d'étamage £ confifte en une chaudiere de fer fondu , Æ, placée dans le milieu d’une efpece de table.de plaques de fer inclinées legerement vers la chaudiere qu'elles continuent proprement. Cette chaudiere a beaucoup plus de profondeur que n’a de hauteur la feuille qui s’y plonge toüjours verticale- ment, &c jamais à plat ; elle contiént 1500 à 2000 d’é- tain. Dans le maflif qui foûtient ceci, eft pratiqué un four, comme de boulanger, dont la cheminée eft fur la gueule, & qui n’a d'autre ouverture que cette gueule, qui eft oppofée au côté de l’étameur, Ce four fe chauffe avec du bois. L’étamage doit commencer à fix heures du matin. La veille de ce jour, l’étameur met fon étain à fon- dre en Æ'à dix heures du foir ; 1l fait feu, fon étain eft bientôt fondu : il le laifle fix heures en fufon, puis il y introduit l’arcane , qu’on ignore ; il eft à préfumer que c’eft du cuivre, &r ce foupçon eft fondé fur ce que la chofe qu’on ajoûte doit fervir à la fondu re : or le cuivre peut avoircette qualité, puifqu'ileft d’une fufibilité moyenne entre le fer & l’étain. Peut- être faudroit-1l employer celui qui a été enlevé des vaifleaux de cuivre étamés , & qui a déjà avec lui une partie d’étain. Îl ne faut nitrop nitrop peu d’ar- cane, L’arcane eft en fi petite quantité dans l’étain, qu’en enlevant l’étamage d’un grand nombre de pla- ques de fer étamées, & faifant leflai de cet étain, on ne peut tendre l'addition fenfible : 11 faut donc très-peu d’addition. Nous pouvons affürer que c’eft un alliage ; mais s’il en faut peu, il ne faut non plus ni trop ni trop peu de feu. Mais ces chofes ne fe.dé- crivent point , & font l'ouvrier ; elles confiftent dans un degré qui ne s’apprécie que par lPufage. On fait fondre létain fons un sum de fuif de qua- tre Acinq pouces d’épaifleur, parçe que l’étain fondu fe calcine facilement quand il eft en fufon, & qu'il a communication avec l'air. Cette précaution empê- che la communication, & peut même réduire quel- que petite portion d’étain qui pourroit fe calcimner; {ecret que n’ignorent point Les fondeurs de cuilleres d’étain. [ls favent bien que la prétendue craffe qui fe forme à la furface de l’étain qu'ils fondent, eft une véritable chaux d’étain qu’ils pourront réduire en la fondant avec du fuif ou autre matiere grafle. Ce rec sum de fuif eft de fuif brûlé, & c'eft-là ce qui lui donne fa couleur noire. Dès les fix heures du matin, lorfque l’étain a le degré de chaleur convenable (car s'il n’eft pas aflez chaud, il ne s’attaché point au fer; trop chaud, l'é- tamage eft trop mince & inégal), on commence à travailler. On trempe dans l’étain, en F, les feuilles retirées de l’eau ; l’ouvrier les jette enfuite à côté, fans sembarrafler de les féparer les unes des autres, & en effet elles font prefque toutes prifes enfemble. Ce premier travail fait fur toutes les feuilles , l’ou- vrier en reprend une partie qu'il trempe toutes en- femble dans fon étain fondu : il les y tourne , re- tourne entout fens, divifant, foüdivifant fon pa- quet fans le fortir de la chaudiere ; puis il les prend une à une, & les trempe féparément dans un efpace féparé par une plaque de fr qui forme dans la chau- diere même un retranchement. Il les tire donc de la grande partie dela chaudiere, pour les plonger une À une dans ce retranchement. Cela fait, il les met à égoutter fur deux petites barres de fér aflemblées parallelement , & hériflées d’autres petites barres de 500 FER fer fixées perpendiculairement fur chacune, comme en 7. Les feuilles font placées far les barres de fer paralleles qui les foütiennent, & entre lesharres ver- ticales qui les confervent verticales. re Une petite fille o prend chaque feuille de deflus légouttoir ; & s'il y ade petites places qui n’ayent pas pris l’étain, elle lesracle fortement avec une ef pece de gratoir , 8t Les remet à côté de l’attelier, d’où elles retourneront à l’étamage. Quant à celles qui font parfaites , elles font diftribuées à des filles qui avec de la fiüre de bois & de la moufle, les frotent long-tems pour les dégraifler ; après quoi il ne s’agit plus que d'emporter une fpece de lifiere on reborde qui s’eft formé à l’un des côtés de la feuille tandis qu'on les mettoit à égoutter. Pour cet effeton trempe exattement ce rebord dans l’étain fondu , eng. Il ya un point à obferver, c’eft qu'il ne faut tremper ni trop ni trop peu long-tems , fans quoi un des étains, en coulant, feroit couler l’autre, & la plaque refte- roit noire & imparfaite. Les défauts principaux de cette lifiere font de fe calciner, ronger, détruire, fur-tout dans les ouvrages qui doivent fouffrir le feu, où elle ne devroit jamais fe trouver. Après cette im- merfon, un ouvrier frote fortement des deux côtés Vendroittrempé, avec de la moufle , emporte l’étain fuperflu, & les feuilles font faites. On fait des plaques de différentes largeur, lon- . gueur & épaifleur : les ouvriers difent que le profit eft immenfe. La fabrique eft à Manfvaux, en Alface. ? > chaudiere où l’on fait fondre le fuif. 4, four- neau d’étain fondu pour les rebords. FER A CHEVAL, férrum equinum , gente de plante à fleurs papilionacées. Il fort du calice un piftil qui devient dans la fuite une filique applatie, compoiée de plufieurs pieces courbées en forme de croiflant, ou de er 4 cheval, Cette filique renferme des femen- ces qui ont la même forme. Tournefort , {nf?. rei herb. Voyez PLANTE. (1) Les Botaniftes comptent trois efpeces générales de fer à cheval, & la plus commune , ou la germanique, qui fe trouve dans les boutiques, eft mife au rang des plantes aftringentes ; elle vient dans les terres à mar- ne, fleurit en Juin & Juillet, & perfeétionne fa fe- mence en Août & Septembre. Il feroit aifé de multiplier le fér à cheval, en femant fes graines au mois de Mars dans un terrein fec, fans les porter ailleurs ; car elles ne fouffrent pas la tranf plantation: alors il faudroit les efpacer à un grand pié de diffance, parce que cette plante trace fur le terrein, & couvre cet efpace en s’étendant. ÆArricle de M. le Chevalier DE JA COURT. FER, (Age de) Myth, L'âge de fer eft le dernier des quatre âges que les Poëtes ont imaginé. Je m’expri- me mal, cet âge n’eft point le fruit de leur imagina- tion, c’eft le tableau du fpeêtacle de la nature hu- maine. Voici comme Dryden le dépeint, | Hard fleel fucceeded then , And flubborn as the metal, were the men. Truth , modefly , and shame ; the world forfook ; Fraud , avarice , and force, their places took ; Then land-marks limised 10 cach his righe, For all before was common as the lighe : Nor was the ground alone requir'd to bear Her annual income 10 the crooked share : Bus greedy mortals , rummaging her flore , Dig'd from her entraïls frff the precious ore : Which next to hell the prudent gods had laid, And that alluring ill 1o fight difplay d : And double death did wretched men invade By flecl affaulted, and by gold betray'd, | Now brandish d weapons glite, ring in their hands, Markind is broken loofe from mortal bands, No righis of hofpirality remain: The guet, by him that harbour'd him , is flair : The Jon-in laws purfues the fathers life : The wife her husband murthers, he the wifèz The fepdame poifon for the fon preparess The Jon enquires into his fathers years : Faith flies, and Piety in exile mourns : And juffice, here opprefs’d, to heav'n returns: « L'âge de fer, digne de la race des mortels, vint » à fuccéder ; alors la bonne-foi & la vérité bannies » du monde, firent place à la violence, à la trahi- » fon, à l’infatiable avarice: rien ne refta de com- * mun parmi les hommes que l’ufage de la lumiere, » qu'ils ne purent fe ravir les uns aux autres. On » fouilla dans les mines pour en tirer ces métaux, » que la fagefle des dieux avoit enfoüis près du T'ar- » tare : Por fervit à trahir, & le fer à porter la mort » & le carnage, L’hofpitalité ne fut plus un afile af- » furé ; la paix ne régna que rarement entre les fre- » res ; les enfans compterent les années deleur pere; » la cruelle marâtre émploya le poifon; le mari at- » tenta fur la vie de fa femme , la femme fur celle de » fon mari; Aftrée tout en larmes abandonna le fé- » jour de la terre, qu’elle vit couverte de fang ; & » la Piété defolée fe retira dans le ciel ». Je fens bien que j’affoiblis les images du poëte an- glois, mais j’ai donné l'original. Voulez-vous, peut- être, quelque chofe de mieux encore ? voyez la pein- ture qu'Héfode a faite de cet ge de fer dans fon poë- me intitulé, Opera & Dies. Je ne dis rien de la pein- ture d'Ovide (Méramorph. lib. 1.) ; elle eft connue de tout le monde, & il femble s’y être furpañlé lui- même, Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FER D'OR, (Chevalier du) Hiff. mod, Les cheva- liers du fer d’or & écuyers du fer d'argent (car ils réunifloient ces deux titres), étoient une fociété de feize gentilshommes , en partie chevaliers, & en par- tie écuyers. | Cette fociéré fut établie dans l’églife de Notre- Dame de Paris en 1414, par Jean duc de Bourbon, qui s’y propofa, comme il le dit lui-même, d’acqué- rir de la gloire & les bonnes graces d’une dame qu'il fervoit. Ceux qui entrerent dans cette fociété, fe propoferent aufh de fe rendre par -là recommanda- bles à leurs maîtrefes. On ne fauroit concevoir un plan plus extravagant d’aétions de piété & de fureur romanefque , que celui qui fut imaginé par le duc de Bourbon. | Les chevaliers de fa fociété devoient porter, auf. bien que lui, à la jambe gauche, un j£r d’or de pri- fonnier pendant à une chaîne; les écuyers en de- voient porter un femblable d'argent. Le duc de Bour- bon eut foin d’unir étroitement tous les membres de fon ordre; & pour cet effet 1l leur fit promettre de l'accompagner, dans deux ans au plütard, en Angle- terre, pour s'y battre en l’honneur de leurs dames, armés de haches, de lances, d’épées, de poignards, ou même de bâtons, au choix des adverfaires. Ils s’obligerent pareillement de faire peindre leurs ar- mes dans la chapelle où ils firent ce vœu, qui eft la chapelle de Notre-Dame de Grace, & d’y mettre un fer d’or femblable à celui qu’ils portoient , avec la feule différence qu’il feroit fait en chandelier, pour brûler continuellement un cierge allumé juiqu’au jour du combat. , Ils réglerent encore qu’il y auroit tous les jours une mefle en l'honneur de la Vierge, & que s'ils re- venoient vidtorieux, chacun d’eux fonderoit une fe- conde mefle, feroit brüler un cierge à perpetuité, & de plus fe feroit repréfenter revêtu de fa cotte d'armes, avec toutes fes armes de combattant ; que . fi par malheur quelqu'un d’eux étoit tué, chacun des furvivans, outre un fervice digne du mort, lui fe- roit dire dix-fept mefles, où il affteroit en habit de deuil. Cette FER Cette fociété pour comble d’extravayance, fut _inflituée au nom de la fainte Trinité & de faint Mi- chel, & elle eut le fuccès qu’elle méritoit. Le duc de Bourbon alla véritablement en Angleterre, à-peu- près dans le tems qu'il avoit marqué ; maïs il y alla en qualité de prifonnier de guerre, & il y mourut au bout de 19 ans fans avoir pu obtenirfa liberté. Poy. fi vous êtes curieux de plus grands détails, l’Aÿffoire des ordres de chevalerie du P. Héliot, com. VIII. ch, v. c'eft-à-dire le recueil des folies de l’efprit humain en ce genre bifarre, depuis l’origine du Chriftianifme jufqu'au commencement de notre fiecle, Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FER, e7 termes de Blafon, fe dit de plufieurs {or- tes de fers dont on charge les écus, tels que font les fers de lame, de javelot, de pique, de fleche, & de cheval: ces derniers font ordinairement repréfentés la pince en-haut ; & lorfque les places des clous font d’une couleur ou d’un métal différens, on les blafon- ne cloués. Voyez CLOUÉ. Ménérr, & Trév. : FER DE FOURCHETTE, Croix a fer de fourcherte, (B/afon.) eft une croix qui a à chacune de {es extré- mités un fer recourbé, tel que celui dont les foldats fe fervent ordinairement pour attacher leurs mouf- quets. Elle differe de la croix fourchée, en ce que les extrénutés de celle-ci font recourbées en tournant; au lieu que dans la premiere, la fourchette eft placée au quatre de l’extrémité. Voyez-ez la figure dans Les Planches hérald, où du Blafon, fig. 20. . FER DE MOULIN, eft une piece qui entre dans le Blajon , & qu’on fuppofe répréfenter l'ancre de fér qui foûtient la meule d’un moulin; il eft repréfenté dans /es Planc, herald, FER, (L'ile de) Géog, L’fle de Fer, autrement Fer- ro ,; Ou comme les Efpagnols à qui elle appartient la nomment, /a i{la de Hierro, eft une île d'Afrique la plus occidentale des Canaries , d'environ fept lieues de lonp, fix de large, & vingt-deux de tour. Elle n’eft guere remarquable que parce que les géographes françois placent leur premier méridien à l'extrémité occidentale de cette ile | par ordonnance de Louis XIII. Les Hollandoïis placent le leur-d’ordinaire au pie de l’île T'énériffe, l’une des Canaries. Le P. Ric- cioh met le fien à l’ile de Palma : il eft fâcheux qu’on ne foit pas généralement convenu de prendre le mê- me méridien, quoiqu'on remédie à cette diverfité par une conciliation des divers méridiens, f’oyez Mé- RIDIEN. L/e de Fer eft à environ dix-huit lieues de Ténériffe. Sa différence du méridien de Paris, eft, fuivant M. Cafini, 1 heu. 1 9° 26". Sa latitude 274, 47 ST Le Bb _. FER À CHEVAL, (Architeët.) terrafle circulaire à deux rampes en pente douce , comme celles du bout du jardin du palais des Tuileries, & du parterre de Latone à Verfailles : toutes deux du deffein de M. le Nôtre. (P) FER À CHEVAL, (Fortific.) c’eft dans la Fortifi- cation un ouvrage de figure à-peu-près ronde ou ovale, formé d’un rempart & d’un parapet, qu’on conftruit quelquefois dans les environs d’une place de guerre, pour en empêcher l'accès à l'ennemi. La figure de ces fortes d'ouvrages n’eft point dé- terminée. On en conftnut auff dans les places mari- times , à l’extrémité des jettées, ou dans les lieux où ils peuvent fervir à défendre l'entrée du port aux Vaïfleaux ennemis. (Q) PER, ( Marine. ) on fe fert de.ce mot pour figni- fier grapin ou ériffon. I] n’eft guere en ufage que fur les galeres, où l’on dit ére fur Le fer, pour dire &re à d’aricre. (Z) | FERS D'ARC-BOUTANS , oz BOUTE DEHORS, (Marine.) ce font des fers à trois pointes, qu’on met au bout d'un arc-boutant avec un pitonà grille. (Z) FER DE CHANDELIER DE PIERRIER, (Marine,) Tome VI, FER So c’eft une bande de fr qui eft troüe par le haut , & que lon applique fur un chandelier de bois , par où pañle le pivot du chandelier de fer, fur lequel Le pier- rer tourne. (Z) | FER DE PIROUETTE , ( Marine, ) c’eftune verge de fer qu’on met au bout du plus haut mât, où la girouette eft pañlée, (Z) FER, (Maréch.) on appelle de ce nom en général l'efpece de femelle que l’on fixe par clous fous le pié du cheval, du mulet, &c. à l'effet d’en défendre l’on gle de l’ufure & de la deftrudion ; à laquelle il feroit expolé fans cette précaution, Communément cette femelle eft formée par une bande de ce métal, Cette bande applatie & plus ou moins large, eft courbée fur fon épaifleur, de ma nicre qu’elle repréfente un croiffant alongé. On peut y confidérer deux faces & plufieurs par= ties, La face inférieure porte & repofe dire&ement fur le terrein. La face fupérieure touche immedia- tement le deffous du fabot, dont lé fer fuit exate- ment le contour. La voûte eft le champ compris en- tre la rive extérieure & la rive intérieure » à l'en- droit où la courbure du fr eft le plus fenfible, On nomme ainfi cette partie, parce qu'ordinairement le fer eft dans ce même lieu relevé plus ou moins en ba- teau, La pince répond précifément à la pince du pié; les branches aux mammelles ou aux quartiers , elles regnent depuis la voûte jufqu’aux éponges ; les épon- ges répondent aux talons, & font proprement les extrémités de chaque branche : enfin les trous dont ‘ le fr eff percé pour livrer paflage aux clous, & pour en noyer en partie la tête, font ce que nous appellons étampures, Ces trous nous indiquent le pié auquel le fer eft defliné ; les étampures d’un fer de devant étant placées en pince, & celles d’un fér de derriere en ta- lon, &c ces mêmes étampures étant toüjours plus mai. gres ou plus rapprochées du bord extérieur du fér, dans là branche qui doit garantir & couvrir le quat- fier de dedans. I! feroit inutile de fixer & d’affigner ici des propor- tions, relativement à laconftruétion de chacune des parties que je viens de défigner ; elles varient & doi- vent varier dans leur longueur, dans leur épaiffeur, &c dans leur contour, felon la difpoñition & la forme des différens piés auxquels Le fer doit être adapté : jobferverai donc fimplement & en général, qu'il doit être façonné de telle forte , que la largeur des bran- ches décroifle toûjouts infenfiblement jufqu’aux éponges ; que la face intérieure d’épaiffeur diminue imperceptiblement de hauteur , depuis une éponge jufqu’à l’autre; que la face extérieure s’accorde en hauteur avec elle à ces mêmes éponges, & dans tout le contour du fer, excepté la pince ; où on lui en donne communément un peu plus ; que la face fupé- rieure foit legerement concave , à commencer de- puis la premiere étampure jufqu’à celle qui dans l’an- tte branche répond à celle-ci; que la face inférieure de chaque branche refte dans le même plan; que la pattie antérieure du fer foit foiblement relevée en ba- | teau; que les éponges foient proportionnées au pié pat leur longueur, &ec. Quant aux différentes efpeces de fer, il en eft une multitude , & on peut les multiplier encore relative- ment aux différens befoins des piés des chevaux , & même des 'défe@tuofités de leurs membres ; mais je me Contenterai de décrire ici celles qui font les plus connues ; & dont l’ufage eft le plus familier. Fer ordinaire de devant , de derriere , du pié gauche & du pié droit, Le fer ordinaire n’eft autre chofe que ce- lui dont l’ajufture eft telle que je lai prefcrit ci-def. lus ; & ce que j’ai dit plus haut de l’étampure, fuffit pour déterminer le pié pour lequel il a été forgé. Fer couvert, On entend par couvere, si qui par CES so2 FER la largeur de fes branches, aïnfi que de fa voûte, oc- cupe une grande partie du deflous du pie. Fer mi-couvert. Le fèr mi-couvert-eft celui dont une feule des branches eft plus large qu’à l'ordinaire. Fer à l’angloife. On appelle fer à l’angloife, un fer abfolument plat. Le champ en eft tellement étroit, qu'il anticipe à peine fur la fole ; fes branches per- dent de plus en plus de leur largeur, ainfi que de leur éparfleur , jufqu’aux éponges qui fe terminent prefque en pointe. Il n’y a que fix étampures. Autre efpece de fer a l'angloife. Quelques -uns ont encore nomme ainfi un fer dont les branches aug- mentent intérieurement de largeur entre l’éponge &c | leur naiffance. L’étampure n’en eft point quarrée &z féparée ; elle eft pour chaque branche une rainure au fond de laquelle font percés quatre trous : Les té- tes des clous dont on fe tert alors ne fe noyent dans cette rainure , que parce qu’elles ne débordent les lames que latéralement. Cette maniere d’étampure affoiblit le fer plus que l’étampure ordinaire, dont les interftices tiennent liées Les rives que defunit la rainure. Fer à pantoufle. Ce fer ne differe d’un fer ordinaï- re, qu’en ce que fon épaifleur intérieure augmente uniformément depuis la voûte jufqu’aux éponges ; enforte que le deflus de chaque branche préfente un glacis incliné de dedans en-dehors, commençant à rien au milieu de cette même branche, & augmen-: tant infenfblement jufqu’aux éponges. Fer demi-pantoufle. Ce fer elt proprement un fer ordinaire dont on a fimplement tordu les branches, afin que la face fupérieure imite le glacis des fers 4 pantoufle. Le point d’appui du pie fur ce fer eft fixé à l'intérieur des branches , mais l’extérieur feul eft chargé de tout le fardeau du corps ; de maniere que le fer peut plier, porter, ou entrer dans lestalons, & rendre l’animal boiteux ; d’où l’on doit juger de la néceflité de n’en faire aucun ufage dans la pratique. Fer à lunette, Le fer à lunette eft celui dontona fupprimé les éponges & une partie des branches. _ Æèr a deu - lunette. Dans celui - ci il n’eft qu'une éponge, & une partie d’une feule des branches qui ayent été coupées. Fer voëré. Le fer votre eft un fer plus couvert qu’à l'ordinaire, & dont la rive intérieure plus épaiffe que l’extérieure , doit chercher la fole &z la contrain- dre legerement. Nombre de maréchaux obfervent très-mal à-propos le contraire. Fer geneté. On appelle ainf celui dont les épon- ges font courbées fur plat en contre-haut. Fer à crampon. On ajoûte quelquefois au fer ordi- naire un ou deux, & même en quelque pays jufqu’à trois crampons. Le crampon eft une {orte de crochet formé par le retour d’équerre en-deflous de l’extré- mité prolongée, élargie, & fortifiée de l'éponge. Le Jer à crampon eft celui quia un crampon place à l’ex- trémité de la branche extérieure. On dit fer & deux crampons , fi les branches portent chacune le leur; êt à crois crampons, fi, outre ces deux premiers, 1l en part un de la pince en contre-bas. Fer a pinçon. On tire dans de certains cas de la ri- ve fupérieure de la pinceune petite griffe, que l’on rabat fur la pince du pié: c’eft cette griffe que l’on appelle pérçon, : Fer a tous piés. I] en eft de plufieurs {ortes. 1°, Le fer à tous piés frmple n’eft différent d’un er ordinaire, qu’en ce que fes deux branches font plus larges , & qu’elles font percées fur deux rangs d’é- tampures diftribuées tout autour du fer, Pour que les trous percés {ur ces deux rangs près l’un de l’autre, w’affoibliflent point le fer, le rang extérieur n’en contient que huit, &c le rang intérieur fépt, & cha- que étampure d’un rang répond à Pefpace qui fépare çelles de l’autre, si FER »°. Le Prifé a un feul rang. Les branches en font réunies à la voûte par entaille, & font mobiles fur un clou rond rivé deffus & deflous. 3°. Le brifé a deux rangs. I] eft femblable à ce der: nier par la brifure , & au premier par l'étampure. 4°. Le fer à sous pies fans étampures. Ikeft brifé en voûte comme les précédens ; & le long de fa rive extérieure s’éleve une efpece de fertiflure tirée de la piece, qui reçoit l'extrémité de l’onÿle comme celle d’un chaton reçoit le bifeau de la pierre dont il eft la monture. L’une & l’autre éponge eft terminée en empatement vertical, lequeleft percé pour recevoir une aiguille à tête refendue , dont le bout eff taillé en vis. Cete aiguille enfile librement ces empate= mens, & recoit en-dehors un écrou, au moyen dus quel on ferre le fer jufqu’à ce qu'il tienne fermement. au pié. On peut avec le brochoir incliner plus où moins la fertiflure pour l’ajufter au fabot. 5°. Le fer a double brifure. Ses branches font br fées comme la voûte de ces derniers , & leurs par= ties mobiles font taillées fur champ & en-dedans de pluñeurs crans, depuis le clou jufqu’aux éponges ; élles font percées de trois étampures , dont deux font au long de la rive extérieure, êc la troifieme en-de- dans & vis-à-vis l’efpace qui les fépare. Un petit étré= filon de fer dont les bouts fourchus entrent & s’en- gagent dans les crans des branches mobiles , entr’ou- vre de plus en plus le vuide du /ér ,; à mefure qu'on l’engage dans les crans les plus éloignés des brifu- res : aufli ce fér eft-il d’une grande reflource poux ouvrir les talons. Fer 4 patin. Il en eft aufñi de plufieurs fortes. La premiere efpece préfente un fer à trois cram= pons ; celii de la pince étant plus long que les autres. Comme ce fer n’eft point deftiné à un cheval qui doit cheminer, on fe contente ordinairement de prolon- ger les éponges, & d’en enrouler les extrémités pour former les crampons de derriere, & l’on foude fur plat à la voûte une bande, qu’on enroule auffi en forme d’anneau jetté en-avant. La feconde offre encore un fer ordinaire, fous le- quel on foude quatre tiges , une à chaque éponge, & une à la naiflance de chaque branche: ces tiges font égales & tirées des quatre angles d’une petite plati= ne de fer quarré long , dont l'affietteeft parallele à celle du fer à deux pouces de diftance plus ou moins; & répond à la direétion de l’appui du pié. La troifieme enfin eft un fer ordinaire de la pince, duquel on a tiré une lame de cinq ou fix pouces delon- gueur, prolongéefur plat dans un:plan parallele à ce- lui de l’affiette du fer, &c fuivant fa ligne de foi. Cet- te lame eft quelquefois terminée par un petit enrou- lement en-deflous. | Fer à la turque. Nous en connoïffons auf plua fieurs efpeces. | à : — Nous nommons ainfi 1°. un fer dont la branche ins térieure dénuée d’étampure depuis la voute, aug- mente uniformément d'épaifieur en-déffous jufqu'& fon extrémité, oùelle fe trouve portée jufqu’À en- viron neuf ou dix lignes, diminnant en même tems de largeur jufqu’au point d’en avoir à peine une lignée à l'éponge. :: | 2 2°. Un autre fer fous le milieu de la branche in térieure , duquel s’éleve dans la longueur d'environ un pouce une forté de bouton tiré de la-piece , le- quel n’en excede pas la largeur, & qui faillant de trois ou quatre lignes, eft bombé feulement dans le fens de fa longueur. Sa largeur eft partagée en deux éminences longitudinales par une cannelure peupro- fonde ; il n’eft aucune étampure dans toute étendue dé ce bouton, maïs il en eft une qui eft portée en-ar- ricre éntre.ce bouton & l'éponge. 3°. Il en eftun troïfieme dont il eff rare que nous fafions ufage, Ce fer n’eft autre chofe qu'une platine FER -tontournée pour le pié de l'animal, & percée dans Æon milieu d’un trou fort petit, eu égard au vuide des fers ordinaires, Fer prolongé en pince. Nous ajoûtons aux piés des chevaux rampins un fé dont la pince déborde d’un pouce, plus ou moins, celle du fabot. Cet excédent eft relevé en bateau par une courbure plus où moins fenfible, ” Fers à muler, Ces fers ne different de ceux qui font deflinés aux chevaux, qu’autant que la fruéture & la forme du pié de cet animal different de celles du pié du cheval. Le vuide en eft moins large pour l’or- dinaire ; les branches en font plus longues, & débor- dent communément Le fabot, &c. On doit adapter fouvent aux piés des mulets des fers de chevaux. Voyez FERRURE. Ceux qui font dans la pratique particuliere à ces animaux, font la planche &c la florentine. La planche eft une large platine de figure à-peu- près ovalaire , ouverte d’un trou de la même for- me, relatif aux proportions de la folle. La partie de cette platine qui fait office de la branche intérieure du fer ordinaire, n’eft large qu’autant qu'il le faut pour faillir de quelques lignes hors du quartier, Celle qui recouvre & défend Le talon eft un peu plus large &t déborde à proportion. La portion qui tient lieu de la branche extérieure , a encore plus de largeur ; fon bord extérieur eft relevé d’environ trois ou quatre lignes, par une courbure très - précipitée, dont la naiffance n’eft éloignée de la rive que d'environ qua- tre lignes. Cette courbure regne depuis le talon juf- qu'à la pointe du fér. La partie antérieure qui s’étend au-delà de la pince d'environ trois pouces, eft elle- même relevée en bateau par une courbure fort préci- pitée, qui commence dès le deffous de la pince de l’a- nimal. Les étampures font femblables à celle de fers ordinaires de derriere, Outre ces étampures, on per- -ce encore deux trous plus larges, un de chaque côté de la pince & hors de fon affiette, pour recevoir de forts clous à glace quand le cas le requiert. Fer a la florentine. Ce fer eft proprement une plan- che dont l’ouverture eft telle, qw’elle le divife en deux branches, comme les fers ordinaires. L’extré- mité des éponges en eft legerement relevée: on y perce également des trous en pince pour les clous à glace. La bordure de ceux qu’on deftine aux piés de derriere n’eft pas relevée, & la courbure de la partie antérieure n'eft point auf précipitée. Les éponges prolongées à deffein font rejettées en-deflous, & tot- dues de dehors en-dedans pour former des crampons, tels que ceux que l’on nomme à oreille de levre ou de chat. Voyez FORGER. Outre les deux trous percés pour les clous à glace, on en perce untroïfieme, en- viron au milieu de la portion antérieure & relevée de ee fer pour le même ufage. (e) Fer à Lampas, (Maréchall.)tige de fer dont une extrémité portée par fon applatifiement à une lar: geur de cinq ou fix lignes environ , eft relevée pour former une forte de crochet tranchant, & en fens croifé à la longueur de la tige. Voyez FEvE. (e) FERS A CAHIERS, e rerme d’Aipuillecier, {ont des fers attachés au bout d’un petit ruban de fil, à Pufage -des gens de pratique. * FERs (ardoifieres), ce font des inftrumens quifer: ventdans lesmines d’ardoife à en détacher des mor- ceaux; 1l y en a de grands & de moyens. Foyez-ce que nous en ayons dit à l’arsicle ARDOISE. FER A:FORGER 0% FER A CREUSER, parmi les Barteurs d'or 6t\autres ouvriers; c’eft une lame de fer courbe, aflez femblable à-un fer à cheval, quel’on met devantele creufet pour ralentir & modérer la chaleur ,:& rendre l’aétion du feu fur le creufettoû- jours égale. | FER AUREPASSER, eft un outil dont fe fervent les Tome VI, VE aan gi, À FAENR s03 Blanchiffeufes E: autres ouvrieres, pour unir la furface du linge, des dentelles & des étoffes, & leur donnér de la confiftance au fortir du blanchiffage. Le fer à repaljer elt quarré par le bas, & rond par la tête ; fa longueur eft double de fa largeur : fon épaïfleur eft ordinairement de quatre lignes, fuivant la otandeut des fers fa face doit être polie. À la partie oppofée à cette face, et une poignée auffi de fr, & foudée fur ledit fer. Il y a des fers & repaller pour les Chape- liers ; ils ne different des précédens » qu’en ce qu'ils Ont un pouce d’épaifleur, & font prefqu’aufh larges que longs, mais toûjours ronds par latête. Pour faire un fer a repalfer, le taillandier prend une barre de fèr plat, qu’il courbe pour en former la table du fèr à repaffer, comme on le voit dans nos P/anches. Cela fait, il coupe les angles du côté de la tête, il les ar rondit enfüite ; il forge la poignée, il enleve & la tourne. Cette poignée eft creufe , afin qu’elle ne prenne point trop de chaleur; cela fait, il tourne les piés de la poignée, Cette partie eftordinairement de la longueur de la täble du fér, & foudée deflus au mi lieu de la tête & du pié. On a repréfenté dansla P/an: che, un taillandier qui tient avéc des tenailles un fer & repafler, pour le dreffer fur une meule d'acier. Cette façon de dreffer n’eft pas ufitée de tous les ouvriers = il y en a qui dreffent les fers À la lime, & les finiflent fur la meule de grès ; d’autres les finiffent tout à 1x lime. | On voit ailleurs un autre compagnon qui polit ur fer à repalfer avec une arbalête, Pour appuyer plus fort l’arbalête contre le Jer, on s’eft fervi d’un b4-= ton d’épine ou d'érable, courbé en arc, comme à Ix manufaéture des glaces. On appelle ce bâton ainft courbe, fleche. Il y a des férs à repalfer pointus. Le fer 4 repalfer en cage, eft une efpece de fer rond Ou pointu, compofé de la femelle fur laquelle eff montée une cloïfon, comme la cloifon d’une ferrure, avec une couverture à charniere montée fur la cloi- fon, & une poignée fixée fur la couverture. Au lieu de faire chauffer ce fer devant le feu, on met dans la cavité de ce fer un morcéau de fer chaud, Voyez dans nos Planches de Taillanderie ce fer, fon ouvertu- re, fa femelle, fa cloifon montée fur la femelle la couverture garme de fa poignée & charniere, FER A ROULER , serre de Bouronnier; c’eft une efpéx ce de poinçon long de trois pouces & demi ou quatre pouces ; qui fe termine en vis par la pointé. On fe fett de cet inftruiment pour aflujettir les moules , lorfqu'’on veut travailler les boutons à Paiguille. Pour cet effet on enfonce la pointe ou vis du poin= çon dans le trou où le moule eft percé au centre. Voyez la figure K, PI. TI, M repréfente le même fer a rouler, {ur lequel eft monté un moule de boutons Les figures 1.6 2.de la vignette travaillent avec cet inftrument ; qui fert à tenir les moules dé boutons pour les revêtir de foie ou de trait d’or & d'argent. FERS’, outils de Cartiers ;'ce font des efpeces de poinçons ou emporte-pièces, au bout defquels font gravées les marques diftinéives des cartes, comme le carreau , le cœur, le pique &'le trefle. Ces fers» qui font coupans par en-bas | fervent à marquer {ur les patrons , les endroits où doivent être empreintes ces marques différentés: 7’oye? EMPORTE-PIECE. FER À SOUDER , (Chatderonniers, Ferblantiers, € autres ouvriers.) [ls en ont de deux fortes ; les uns pour l’érain,.&'les autres pour le cuivre : ces der- niers font de cuivre, &c les autres de fer. Des uns &* des'autres il y en a de ronds & de quarrés :’ceux:ci {ont pour fouder dans le milieu de la piece. Il y en’ aufh-de plats, pour foûdér dans la quarre des chau- derons & äutrès ouvrages de cuivre. Ils font prefque tous fans manche de bois’; mais au lieu de moufflét- tes.on les 'tient par une longue queue dé fer. Leur longueur eft depuis 12 jufqu'à 18 di pouces, Le SS ij 304 FER côté qui fert à fouder, eft un peu recourbé'en croif- ant à ceux qui font ronds: aux quarrés c’eft un mor- ceau de fer en forme de cube, d'environ 18 lignes, qui eft rivé au bout de la queue. FER , serme de Corderie, eft un morceau de fer plat, large de trois à quatre pouces, épais de deux lignes, long de deux piés & demi, folidement attaché dans une fituation verticale à un poteau ou à une muraille par deux barreaux de fer foudés à fes extrémités ; en- fin le bord intérieur du fer plat forme un tranchant moufle. Woyez les Planches de Corderie. | Le peigneur tient fa poignée de chanvre, comme s’il vouloit la paffer fur le peigne ,excepté qu'il prend dans fa main le gros bout, & qu'il laiffe pendre le plus de chanvre qu'il lui eft poffible , afin de faire pañler le milieu fur le tranchant du fer : tenant donc la poignée de chanvre , comme nous venons de le dire, 1l la pafe dans le fer; & retenant le petit bout de la main gauche, il appuie le chanvre fur Le tran- chant moufle du fr; &c tirant fortement de la main droite , le chanvre frote fur le tranchant ; ce qui étant répeté plufeurs fois, le chanvre a recû la pré- paration qu'on vouloit lui donner, & on l'acheve en le preflant legerement fur le peigne à finir. Voyez l'article CORDERIE, 6: Les figures. FERS À DÉCOUPER, en terme de Découpeur, font des emporte-pieces modelés felon le goût & la fantaifie, dont on fe fert pour découper divers defleins fur les étoifes, Voyez Les figures de la Planche du Découpeur, qui repréfentent ces fortes d'outils. On frappe {ur la tête avec un maillet de bois, comme fur un cifeau, & le fér a découper tranche l’étoffe mife en plufeurs doubles fur une planche, FERS A GAUFFRER , e terme de Découpeur, ce font des planches de cuivre qu’on applique fur les étoffes, pour y imprimer les caraéteres qui font gravés fur ces fers. Voyez Planche du Découpeur, une épreuve de ce fer. FERS À REPARER, ez terme de Doreur fur bois, eft un terme général qui fignifie tous les owsils fans dif- tinéhion , dont on fe fert pour reparer les pieces déjà blanchies. Chacun de ces fers a {on nom particulier; Lun eft une fparule, l’autre un fèr à refendre; celui-ci un er à coups fins, celui-là un fér 4 gros coups. Voyez cestermes ci-après, & la figure 5. de la Planche du Doreur. . FER À GROS COUPS, en rerme de Doreur fur bois, eft un outil dont la tranche, moins fine que celle du fer à coups fins, prépare la piece , & la met en état d’être achevée de reparer par ce dernier. Voyez Les figures, Planche du Doreur. _ FER A cours FINS, ex verme de Doreur, fe dit d’un outil qui ne differe des autres qui font néceflaires au reparage , que parce que fa tranche eft fort petite, & qu'on s’en fert pour reparer en derniere facon. Voyez Planche du Doreur. ra , FER A REFENDRE , en terme de Doreur fur bois; eft un outil dont la tranche fe termine en demi-lofange : al-fert à dégager les coups de cifeau couverts par le blanc. Voyez la Planche du Doreur. a | FER QUARRÉ, en terme d’Eperonnier, eft le nom d’un outil.de jer dont la forme eft quarrée, fur-tout vers fa pointe ; l’autre bout ,. plus large & prefque plat, fe replie plufeurs fois fur lui-même, ce qui lui {ert de poignée. Son ufage eft de donner à des trous de la grandeur à diferétion. Foyez Les fioures de la PL, de L’Eperonnier, . Ed FER A. SOUDER , outil de Ferblantier; c’eftun mor- ceau de fer long d’un pié &.demi, quarré, de la grof. {eur d’un doigt, qui.eft emmanché dans un morceau de bois de la longueur de,trois à quatre pouces , rond, &.gros à proportion. A'côté &r dans le bas de ce fer, eft un œil dans lequelHe rive un morceau de çuivre rouge, qui eft.de l’épaiffeur d'environ deux FER Hignes par en-bas ; & du côté où il eft tivé , Left en- viron de la groffeur d’un ponce en quarré. Les Fer- blantiers font chauffer cet outil, & pofent leur fou- dure deflus les pieces à fouder ; & la chaleur de ce fer faifant fondre la foudure , l’attache deflus Le fer- blanc, & aflujettit plufieurs pieces enfemble, Foyez les figures, Planche du Ferblantier, | FER , e7 terme de Filaffier : c’eft un inffrument de fer attaché à un mur ou contre quelque chofe de {6- lide, dont le ventre large & obtus brife la flaffe qu'on y frote, & en fait tomber les chenevottes qui y font reftées. Voyez Planche du Cordier. FER A SOUDER , outil de Fontainier: cet inftru- ment ne differe pas des fers à fouder ordinaires. FER A FILETER, outil de Gaënier; c’eft un petit morceau de fer plat, quarré, de la largeur d’un bon pouce, qui eit arrondi par en-bas , 87 qui a une pe- tite meche qui s’emmanche dans un morceau de bois de la longueur de deux pouces, & gros à proportion. Les Gaïniers s’en fervent, après l'avoir fait chauffer, pour marquer des filets fur leurs ouvrages. Voyez La figure, Planche du Gaïinier. FERS, outils de Luthier; 1l y en a de plufieurs for tes, & ils fervent à divers ufages. Fer pour les écliffes des baffes, baffons, violons, &cc. c’eft un fer d’une forme prifmatique, dont la bafe eft une ellipfe. Ce prifme eft terminé pat un manche aflez long. Voyez la figure 32. Planche XII, de Lu- therie, I] fert à plier les éclifles des inftrumens nom- més ci-deflus, Pour s’en fervir, on le fait chauffer modérément: on le pofe enfuite horifontalerñent fur un établi de menuifier, enforte que la partie prifmatique déborde en-dehors : on l’affüre par Le moyen d’un valet, dont la patte s’applique fur la tige qui forme le manche de cet inftrument. On place enfute les planches minces dont les éclifles doivent être faites, fur le corps de cet outil, & on les comprime pour les plier jufqu’à ce qu'elles ayent acquis la courbure requife, qu’el- les confervent à cauie de l’efpece d’uffion dont le côté appliqué au fer, qui eft le concave , a été affec- té, On fe {ert du côté plat de cet outil, c’eft-à-dire du côté où il eft moins courbé , lorfqu’on vent plier les grands contours des éclifles ; & de l’autre côté, lorfqu’on veut plier de petits contours. FERS RONDS, FERS PLATS, outils de Luthier, re- préfentés figures 26.27. & 30. PL, XIT. de Lutherie; ce font des férs qui chauffés modérément , aident à recoller les fentes qui arrivent aux inftrumens. Sion veut, par exemple, recoller enfemble les deux par- ties d’une table de violon, après avoir mis dela colle- forte entre les parties à rejoindre, on colle des deux côtés une bande de fort papier ; & fe fervant de l’un ou de l’autre des /£rs chauffés au degré convenable, felon que les parties planes ou concaves de la table l'exigent , & frotant legerement , on rechauffe la colle, que l’on parvient par ce moyen à faire fortir en partie d’entre les côtés de la fente , qui eft d’au- tant mieux collée qu’il y refte moins de colle. D’ait- leurs la chaleur communiquée au bois, en ouvre les pores, dans lefquels la prefion de l’air force la colie rendue très-fluide , d'entrer :,c’eft la raifon phyfique de toutes Les foudures, dont le collage peut être re gardé comme uné efpece. (D) | FERS CROCHUS, ( Marqueterie.) outils dont les Ebéniftes {e fervent pour creufer dans les: bois de leurs ouvrages, les places où les pênes de leurs fer- rurés doivent fe loger ; 8 aufli pour creuferles mor- toifes dans lefquelles les pattes des fiches des gonds des portes doivent entrer. Cet outil a deux tranchans À & D. Voyez lufigure, Planche de Marqueterie: Le premier eft rournésen-ttavers de la tige BC de l’ow- til, & l’autre, D, lui eft parallele, On fe fert de l’un où l’autre, félon que l’ouvrage ou la commodité de l’ouvriet l'exige, Cet outil eft pouffé dans le bois au moyen des coups de marteau que l’on frappe fur Les talons B & C ; & la tige fert comme de levier pour retirer le tranchant, lorfqu'il eft engagé trop forte- ment dans le bois. (D) | FERS DE VARLOPE, DE DEMI-VARLOPE, VAR- LOPE À ONGLET, & DERABOT : ils ont tous la mé- me forme , & fe font de même; ils ne different que fur la largeur : ils font à un bifeau, comme les ci- feaux du Menuifier. Pour les faire, l’ouvrier prend une barre de fer, la corroye, enleve un fér de varlope ouautre, comme on le démontre dans la Planche du Taillandier, où l’on voit l’acérure ou la mife d’acier; enfuite il place l’acérure à la piece enlevée, il cor- roye les deux enfemble ; il repare & forme le bi- feau, deforte que l’acier foit du côté qui forme le tranchant. Voyez dans la même Planche un fer de var. dope vû du côté du bifeau. FER, (Menuferie.) Donner du fer à une varlope, demi-varlope, rabot, 6 généralement à toutes fortes d'outils de Menuiferie, s'ils font montés dans des futs ; c’eft, lorfqu’ils ne mordent pas aflez, frapper deflus la tête doucement pour les faire mordre davantage, en en faifant fortir le tranchant. FER, (a /a Monnoie.) il fe dit de l’exaét équilibre du métal au poids lors de la pefée, comme une once d’or tenant un parfait équilibre avec le talon, les deux plateaux ne trébuchant point. FER A FRISER, ( Perruquier,) eft un inftrument dont les Perrnquiers fe fervent pour deflécher les cheveux renfermés dans des papillotes, & leur faire tenir la frifure. Cet inftrumenteft une efpece de pince dont les deux branches font faites à-peu-près comme celles des cifeaux du côté des anneaux, & fe termi- nent par deux plaques unies & difpofées de maniere, que quand on ferme la pince , elles fe ferrent l’une contre l’autre. On fait chaufter ce fer au feu; & quand il eft chaud , on pince les papillotes entre ces deux plaques. ayez la Planche. FER A TOUPET , (Perruquier.) eft une efpece de pince dont les deux branches font alongées, & conf- truites de maniere que l’une eft ronde comme un cy- lindre, & l’autre a une rainure creufée, & propre à recevoir la branche ronde. On s’en fert pour frifer le toupet, ou les cheveux qui bordent le front : pour cet effet on le fait chauffer ; on pince entre les deux branches la pointe des cheveux, & on roule les che- veux autour du fer, de façon que la chaleur leur fait conferver le pli que le tortillement leur a imprimé avec le fer. FER ROND A SOUDER , de Plombier; c’eft un cône tronqué arrondi par la tête, avec une queue pour le prendre. … Ftr pointu, quarré, a fonder; il a la forme pyra- midale, . , Fer rond, pointu, à fouder, des Vitriers; 1 a la for- me de la pointe d’un œuf, fa queue eft plus longue qu’au fer du Plombier ; 1l eft terminé par un crochet, Pour faire ces fortes de fers, le forgeron prend une barre de fer, comme on voit dans nos Planches de Taillanderie; enfuite une virole qu’il foude au bout de la barre, ce qui forme la tête du fer : il repare, lime & drefle. FER À POLIR, (Relire,) Pour polir on fe fert d’un fer de la longueur d’un pié, fur lequel il doit y avoir une platine de cinq pouces de long fur deux de large. Il faut que cette platine foit très-égale ; le refte eft en queue , pour être emmanché. Voyez les Plan- ches de la Reliére. Voyez POLIR. . Quand le livre eftglairé fur la couverture, & que le blanc-d'œufeft fec, on fe fert du fer 4 polir chaud, qu’on pale legerement une fois ou deux fur tout le livre, pour lui donner du luftre. FERS A DORER; (Réligre.) LesRelieurs ufent de | |! ar, 53, 3. (CG Did.) FER 503 différens fers pour doret les livres: Foy, ALPHABET, ARME, CoIN, BOUQUET, DENTELLE, PALETTE, ROULETTE, FLEURON. FERS, (Rubanier.) Voyez DENT DE RAT. FER DE VELOURS A CANNELURE, ( {r/ffrument du métier de l'éroffe de foie.) Le fèr de velours eft une petite broche de cuivre qui eft applatie plus d’un côté que d’un autre, & qui a fur un des dos une pe- tite cannelure dans laquelle la taïllerole entre pour couper le poil. FER DE VELOURS FRISÉ : les fers de velours frifé font parfaitement ronds, & font de fr, au lieu que les autres fort de léton, & non de cuivre, & d’ail- leurs n’ont point de cannelure, FER DE PELUCHE : les fers de peluche ont une can- nelure, comme les fers à velours, mais font de beau: coup plus hauts : il y a des fers de peluche qui font de bois, quoiqu'ils foient nommés fers. FERABATH, ( Géogr.) ville agréable de Perfe, dans les montagnes qui bornent la Mer Cafpienne au midi, dans ïe Méfenderan, à cinq lieues de 1a mer : le grand Chah-Abas y pafloit fouvent l’hyver. Long. 76°, 12. lat. 39. 46. (C. D. JT.) FERALES , (Æiff. anc.) nom d’une fête que les an- ciens Romains célébroïent le 12 Février à l'honneur des morts. Voyez FERBRUA & MANES. Varron dérive ce mot de inferi ou de fero, parce qu'on portoit un repas au fépulcre de ceux auxquels on rendoit ce jour-là les dermiers devoirs. Feftus le dérive de féro , par la même raifon, ou de ferio, parce qu'on immoloit des viétimes. Voffius obferve que les Romains appelloïent la mort féra, cruelle, & que de- là peut venir feralia. Diéfionn. érymol, Macrobe, Sarurn. L. I, c, xüj. en rapporte l’ori- gine à Numa Pompilius. Ovide, dans fes Fafles, re- monte jufqu'à Enée pour en trouver l’origine, & les décrit. Il dit encore qu’en ce jour on faifoit aufli un facrifice à la déefle Mure, ou muette, 8 que c’étoit une vieille femme accompagnée de jeunes filles, qui faifoit ce facrifice. Difionn. de Trév. & Chambers. Cette fête ayant été long -tems négligée à Rome depuis fa premiere inftitution , à caufe des guerres continuelles ,Ovide raconte au Jécond livre des Fafles, que cette ville fut defolée par la pefte, & qu'on jugea que ce fléau étoit un effet de la vengeance des dieux Manes. Les efprits étant aufli malades que les corps, on vit, dit-on, les ombres des morts fortir de leurs tombeaux, fe promener dans les campagnes & dans les rues de la ville avec des hurlemens affreux, On ne trouva point d’autre remede à cette defolation, que de rétablir les cérémonies négligées, feralia : la pefte ceffa , & les Manes appaifés retournerent dans leurs tombeaux ; il falloit bien que cela arrivât, (G) FERBLANTIER , f. m. ouvrier qui travaille à di- vers ouvrages de fer-blanc, comme plats, affettes, lampes, lanternes, G'c, La véritable qualité des Ferblantiers eft Taillar diers, Ouvriers en fer-blanc & noir: ils font de la com- munauté des Taïllandiers. Voyez T'AILLANDIER. * . Les Ferblantiers & les Vitriers n’ont befoïin que de fers à fouder, mais plus petits que ceux des Plom- biers. Les uns êc les autres fe fervent de poix réfine pour mieux faire prendre la foudure. Loriqu’on veut au contraire qu’elle ne prenne pas dans de certains endroits, on les falit avec la:main ou de la craie. FERDEN oz VERDEN , (Géog.) ville du cercle de la baffle Saxe en Allemagne; capitale de la pro- vince du même nom, autrefois épifcopale & impé- _riale, mais à-préfent fujette à l’éleéteur d'Hannovre, auquel les Danois la cederent, après l'avoir prife en 1712, Elle ft fur l’Aller proche le Wéfer, à ro lieues S, E. de Breme ; 20 S. de Hambourg, 22 S: O. de Lunebourg , 20 N, O. d’Hannovre, Long, 26, 38, LS 506 FER FERDINANDINE , (Géog.) petite ville de la côte occidentale de lile de Luçon, près de l'embouchure : de la riviere de Bigan : Gemelli Gareri fixe l'époque de fa fondation en 1574. Elle eft par les 138 4 de longir, & par les 174 30/ de /aritude feptentrionale. FERE , (LA) Géog. petite ville de France dans le eomté de Thiérache en Picardie , entre Noyon & Saint-Quentin, fur l’Oïfe, remarquable par un mou- lin à poudre, où l’on en fabrique quelquefois 120 milliers par an, Le roi Eudes mourut à la Fere en 898. Long, 21.2. lat, 49. 40. Le mot de Fere eft originairement Franc, & figni- fie l'habitation de plufieurs perfonnes d’un même pays ; de-là vient que le nom de Fere, tiré de Fura, eft refté dans beaucoup de noms de villes & bourgs. FERENTAIRES 07 FERENDAIRES, (if. anc.) étoient chez les Romains des troupes auxiliaires ar- mées à la legere : leurs armes étoient l’épée, les fle- ches ; la fronde , qui font des armes plus legeres & moins embarraflantes que le bouclier, la hache, la pique, &c. - Le nom de Ferenraires vient de ce que ces foldats étoient troupes auxiliaires, à ferendo auxilio, quoi- que Varron prétende que ce nom leur fut donné par- ce que la fronde & les pierres fe portent, & ne s’em- poignent pas ; feruntur, non terentur. Il y avoit une autre efpece de Ferentaires, dont l’emploi étoit de porter des armes à La fuite des ar- mées, afin d'en fournir aux foldats dans les com- bats. Quelques auteurs nomment Ferentaires, des cava- liers armés de pié-en-cap , armés pefamment, casa- phraîli equites. Diülionn. de Trév. & Chamb. (G) FERENTINO , (Géog.) ou FIORENTINO, com- me difent les Italiens, Ferentium, petite ville d'Italie & de l’état de l’Eglife, dans la campagne de Rome, avec un évèche qui ne releve que du pape: elle eft fur une montagne à 3 li. N.E. d’Anagny, 15 S. E. de Rome. Long. 30.52. lat. 41.43. FERIN , INE, adje&. ( Medecine.) C’eft un terme employé par les anciens , pour défigner des maladies ou des caufes de maladie d’une nature très-mauvai- {e, qui portent un caraétere de malignité , qui fup- pofent une altération très-confidérable & très-per- nicieufe dans la mafle des humeurs. C’eft dans ce fens qu'Hippocrate fait ufage de ce terme dans fes épidémies, lib, VI. il appelle férins, les vers, la toux, qui font produits par une caufe de corruption extraordinaire. Le délire eft aufli férin, felon cet auteur dans fes prorhétiques, dans fes cou- ques, lorfqu’il eft accompagné de fymptomes de ma- lignité. Voyez DÉLIRE, MALIGNITÉ. Erotion avertit que quelques auteurs appellent fé- rins, cheriomata, des ulcères de mauvaife qualité, même ceux des poumons , qui forment l’efpece de phthifie, qu'ils nomment auf férine. Voyez Parui- SIE. On trouve encore que les malades eux-mêmes atteints de maladies férines , {ont appellés férins ;: en grec Snpodvic, dans les épidémies du pere de la Medecine. Caftelli Zexicon medic, (d) * FERETRE , £. mi. (ff. anc.) nom commun qui renfermoit fous fon acception le leétique & la fanda- pile, deux efpeces différentes de brancards ou de lits dont on fefervoit pour porter les corps morts au lieu de leur fépulture, Ils défignent auffi les brancards fur lefquels des hommes qui accompagnoient les triom- phateurs, portoient par oftentation.8z pour ajoûter à l’éclat de la pompe, des vafes d’or & d'argent, des: rechauds ardens, des ornemens fomptueux, les ima- ges des rois, &c. On lit : feresra dicebantur ea quibus fercula & fpolia in triumphis & pompis ferebantur. On a quelquefois étendu lacception dé cemot à toute: pompe en général; & l’on a dit gsperpétesbgs pour ére FER conduit en pompe, Il y a eu des occafions où le triom- phateur étoit porté par les prêtres mêmes : facerdotes graviffimi & perfetliffimi geflatores erant qui geftabant & portabant ipfum (Waphrem) : « Vaphris yenoit én- » fuite, porté par de graves. pontifes, qui étoient » aufh des porteurs excellens ». | * FERETRIUS , (Mych.) Jupiter fut ainfi appellé du verbe féro, je porte. Jupiter-Fererrius eft la même chofe que Jupiter-porte-paix : vod pacem ferre pu taretur, ex cujus templo fumebant fceptrum , per quod Jurarent, & lapidem filicem, quo fœdus ferirenr, La pre- miere loi de Numa Pompilius ordonnoit des facrif- ces à Jupiter - Feretrius après une viétoire : gzojus aufpicio, claffe procinité, opima fpolia capiuntur , Jovi- Feretrio bovem cædito, Martinius. FÉRIES , (Hif£. anc.) c’étoient chez lès Romains des jours pendant lefquels on s’abftenoit de travail ler. Voyez Jour. Le mot ferie eft ordinairement dérivé d’4 ferendis vitlimis , parce que l’on tuoit des viétimes ce jour- là. Martinius dit que les féries, férie , font ainf ap- pellées , ve/ut ispas fuepar , dies facri, jours de fêtes. D'autres obfervent que les jonrs en général, & quoi- qu'ils ne fuffent point jours de fêtes, ont été autrefois: appellés féffæ, ou, comme Vofius veut qu’on life, fefie ; d'où s’eft formé, fuivant cet auteur, le mot feriæ. Ces jours-là étoient principalement marqués par le repos; au lieu que les jours de fêtes érôient célé- brés par des facrifices ou des jeux , auffi-bien que par la ceffation du travail. Il y a cependant des auteurs qui confondent les jours de fêtes avec les féries, fe- riæ, Voyez FÊTES & JOURS ®E FÊTES. D’autres confondent les féries, férie, avec les jours de vacation, dies nefafhi. Voyez FAsTes. Le mot de férie revient au mot de /44bar, dont les Ifraélites fe fervoient. Voyez SABBAT. Les Romains avoient plufeurs efpeces de féries. Voici leurs noms, au moins des principales : flv a- les , ou féries d'été ; anniverfarie , les féries anniver- faires ; compitalitie , les compitalices, ou fêtes & fé. ries des rues, ou des carrefours ; conceprive!, les fe- ries votives que les magiftrats promettoient chaque année ; denicales , pour l’expiation des familles pol- luées par un mort; imperative où inditlive , celles que le magiftrat ordonnoit; latine ; lés féries latines inftuées par Tarquin le Superbe pour tous les peu- ples , voyez FÉRIÉS LATINES ; meffis feriæ, les féries de la moiflon; les pasanales, paganales ferie où pa= ganalia, voyez PAGANALES ; præcidanee , qui étoient proprement ce que nous appellons Za vipile d'une fé. te ; les féries particulières ou propres, privatæ où pro- prie , celles qui étoient propres à diverfes familles , comme à la famille claudienne, æmilienne, julien- ne, Gc. les publiques, puélicæ , celles que tout le: monde gardoit, ou que l’on obfervoit pour le bien: &t le falut public ; Jémertinæ , celles que l’on célé- broïit pour les femailles ; ffarive , les féries fixes CR qui fe célébroient roûjours au même jour; fzrurne- . es , les faturnales, voyez ce mot ; flulrorum feriæ ou guirinalie, les féries des fous & des fots, qui fe célé- : broient le 17 dé Février, & qu’on nommoit auffi qxz. rinales ; viétoriæ ferie , celles de la vidtoiré, au mois. . d'Août ; virdemiales, celles des vendanges, qui du- roient depuis le 20 d’Août jufqu'au 15 d’Oétobre 2 les féries de Vulcain, fre Fulcani , quitomboient le , 22 de Mar; les fériés mobiles, feriæ conceprive ; les fe. riés de commandement, 22perativeæ. |) . Férie fe difoit auffi chez les Romains pour un jour: de foire, parce’qu’on tenoit les foires les jours de férre ou jours de fêtes. Struv. Synr. antig, rom, chape PE pag 2252, 443 5 &c. Voyez FOIRES. J FÉRIE , (Æiff. eccl,) Cé mot'en ce fens eft dérivé, felontoute apparence ; de /eriz.; qui fignifioit autre- Fois féce où Jolennite, où l’on étoit obligé À la ceffa- tion de tout travail ; d’où vient que le dimanche eft la premiere férie , car autrefois toute la femaine de pâques étoit fêtée par une ordonnance de l’empe- reur Conftantin : ainf l’on appella ces fept jours. f£- ries. Le dimanche étoit la premiere, le lundi la fe- conde, &c. & comme cette femaine étoit alors la premiere de l’année eccléfaftique, on s’accotuma à appeller les jours des autres femaines, 2, 3, & 4 Jéries, D’autres difent que les jours de la femaine n’ont point été appellés jéries de ce qu’on les fêtoit, ou qu'on les chommoit, c’eft-à-dire parce qu’on étoit obligé de s’abftenir d'œuvres ferviles , mais pour avertir les fideles qu'ils devoient s’abftenir de pé- cher. Voyez Durand, de Offc. div. li. VTIT, ch. 7. On a confervé ce mot dans Le breviaire romain, mais dans un fens un peu différent de celui que les anciens lui donnoient ; car c’eft ainfi qu’on nomme les jours de la femaine qui fuivent le dimanche, fans aucune célébration de fête ni d’odave ; le lundi eft la feconde férie , le mardi la troïfieme, &c, Ce font-là les féries ordinaires ; maïs il y a encore des féries extraordinaires où majeures , favoir les trois derniers jours de la femaine fainte, les deux jours d’après pâques, la pentecôte , & la feconde férie des rogations. Voyez le diétionnaire de Trévoux & Cham- bers. (G) FÉRIES LATINES, (Lirtérat.) dans Horace indicæ latine , fête publique & folennelle des peuples du Latium, imaginée politiquement par Tarquin, & que les confuls de Rome qui y préfidoient de droit, ne devoient pas manquer de fêter fur le mont d’Albe un jour de chaque année à leur choïx. Développons, d’après M. l'abbé Couture (Mérm. des Belles-Lerrres, zom. VIII.) , l’art de l’inftitution de cette fête, & la fcrupuleufe exaétitude que les Romains porterent à la célébrer relisieufement, & quelquefois même ex- traordinairement. Tarquin le Superbe, que Denis d'Halicarnaffe nous tepréfente comme un adroit politique, après avoir, par la plus infigne de toutes les impoftures , opprimé Turnus chef des Latins , projetta d’afljettir infenfi- blement tous les peuples du voifinage , en Les accoû- tumant peu-àa-peu à reconnoître la fupériorité des Romains. Il commença par leur envoyer des ambaf- fadeurs, pour demander leur alliance & leur amitié. Il n’y eut que quelques villes des Volfques qui firent les difficiles ; la propoftion fut agréablement recûe de toutes les autres ; & afin que cette confédération fût durable; 11Ja fcella, pour ainfidire, du fceau de la religion. ILimagina une fête commune à tous ceux qui feroiententrés dans l'alliance. Ils devoient tous les ans fe trouver au même lieu ,aflifter aux mêmes facrifices ; & manger enfemble, en témoignage d’u- ne union parfaite. La chofe: ayant été approuvée, il affigna pour cette aflemblée, lathaute montagne aujourd'hui Monte-Cavallo , quiétoit au miliew du pays, & qui commandoit la ville d'Albe, La premiere condition.deice traité fut, que quel: que guerre: qui püt malheureufement arriver à ces peuples aflocés, il y auroit une fufpenfon d'armes tant que dureroitla cérémonie de la fête. La deuxie- me condition, que chaque ville: contribueroit À la dépenfe, & que les unes fourniroient desagnéatix, lesautres du lait , du fromage, 8cfemblables efpeces de libation ; indépendamment de la libertéqu'auroit chacun des-affiftans d’y porter fon ofrandel particus ere ; mais la principale viétime devoit être un-bœuf dont chaque ville auroi®fa part. La troifieme condi- tion, querleidieu‘en l'honnenr duquel ‘on: célébroit lafète., feroit:principalemént Jupiter latiaris, c'éft- | à-dire Jupiter protetteurdu Latium ; & c’eften par he pour cela que les féesifurent appellés Zariness on demanderaït à ce dieulaconfervation & laiprof [ea de à FER 507 périté dé tous Îles peuples confédérés en général, & celle de chacun en particulier, Toutes ces claufes parurent juites, & 1l fut pour cet effet dréfé une ef- pece de rituel, qui devoit être fcrupuleutement ob- fervé. Quarante-fept peuples , dit Denis d'Halicarnafle, fe trouverent par lèurs députés à la célébration des premieres féries latines, & tout fut égal entre eux; excepté que le préfident étoit romain , & le fut toû= Jours depuis. Les féries latines étoient otdinaires ou extraordi- naires ; les féries ordinaires étoient annuelles , fans néanmoins être fixées à certains jours. Le conful ro- main pouvoit les publier pour tel jout qu’il jugeroit 4-propos ; mais en même tems il ne pouvoit y man- quer qu'on n’attribuât à fa négligence tous les mal- heurs qui arrivoient dans fon armée : c’eft ainfi qu'a» près la défaite des Romains au lac de Trafimene , l'an de Rome 536, le prodiftateur remontra que ce n’é- toit point par l’incapacité de Flaminius que larépubli que avoitreçü cette grande plaie, mais feulement par le mépris qu'il avoit eù de la religion, n’ayant fait ni les féries latines {ur le mont Albain, niles vœux ac- cohtumés fur le capitole : le prodiétateur ajoûta qu’il falloit confulter Les dieux mêmes pat l’infpeétion des livres fybillins, pour favoir quelles réparations ils exigeoient. En conféquence il fut arrêté qu’on dou- bleroit la dépenfe, pour remplir avec plus de folen- nité ce qui avoit été obmis par Flaminius, favoir des facrifices, des temples, des le@ifternes, & par deflus tout cela un printems facré, c’eft-à-dire qu’on immoleroit tout ce qui naîtroit dans les troupeaux depuis le premier Mars jufqu’au dernier jour d’A- vril. I eft aifé de juger par ce feul trait, jufqu’à quel point alloit le fcrupule des Romains fur l’omifion des Jéries latines. | Je dis plus, le moindre défaut dans les circonftan- ces étoit capable de troubler la fête. Tite-L'ive nous apprend que parce qu'on avoit reconnu que pen- dant le facrifice d’une des vidimes le magiftrar de Lanuvium rw’avoit point prié Jupiter pour le peuple romain, On en fut fi fcandalifé, que la chofe ayant été mife en délibération dans le fénat, & par le fénat renvoyée au jugement des pontifés ; ceux-ci ordon- nerent que les jéries feroit recommencées tout de nouveau, & que les Lanuviens feuls en feroient les frais, On fait qu’on immoloit plufieurs viétimes dans les féries , &t qu'il y avoit auf plufieurs autels, fur lefquels on immoloit fucceffivement. Au refte fi l’exatitude devoit être infinie pour l'exécution, le fcrupule r’alla pas fi loin pour le nombre des jours, ou pour mieux dire, on les aug- menta par de nouveaux fcrupules ; on crut qu’au lieu d’offenfer les dieux en redoublant les ofrandes qu’on leur faifoit, on fe les rendroit par cé moyen encore plus favorables. Les féries latines dans leur inflitution n’étoient que d’un feul jour, on y en ajoû- ta un fecond après l’expulfon de Farquin, & un troi- fieme après la réconciliation‘dés plébéiens avec les patriciens : deux évenemens trop intéreflans pour ne pas mériter les aétions de graces‘les plus folen- nelles. | Enfin long-tems après!, on les prolongea jufqu’à | quatre jours ; mais à parler jufté, ce quatriéme jour n'étoit qu'une addition étrangére ; puifque la céré- monie de ce jour ne fe faifoit point dans le lieu mar: . qué par la loi, & que c’étoit au capitole, &-nonfur le mont Albain,, où le principalide cette fête du qua- . trieme jour, /confiftoit en couffes de quadriges , atla | fin defquelles le vainqueur recevoit un prix aflez fin- . gulier; on lui donnoit du jus d’abfynthe à boire, les anciens étant perfuadés, dif Pline, que la fanté eff | unedes plus honorables récompenfes di mérite, Les féries latines extraordinaires impératives ; $08 FER étoient firares , que dans toute l’hiffôite romameon ! n'en.trouve que deux exemples ; Le premier fous la diétature deValérius Publicola,&c le fecond fous celle de Q. Ogulnius Gallus, lan de Rome 696: encôre ce fecond exemple nous feroit-il abfolument incon- nu, fi la mémoire ne s’en étoit conféryée dans les tables capitolines: ce n’eft pas qu’il n’arrivât de tems entems dans lair, & dans les autres élémens, cent prodiges qui réveilloient la fuperftition , & pour lef- quels prodiges on faifoit des fupplications extraor- dinaires , qui étoient de véritables féries ; mais com- me elles fe pafloient dans Rome , nous ne les comp- tons point parmi les latines, où Les peuples voifins fuffent obligés de fe trouver , & euflent droit de par- ticiper aux facrifices. Le tems que duroit les expia- tions des autres prodiges , étoit aflez borné ; un jour fufifoit, & on y en employa rarement un deuxième, ou un troifièeme : cependant dans des cas extraordi- naires où les arufpices jugecient qu’il étoit befoin de grandes fupplications pour détourner le fléau dont on étoit menacé, alors, foit que les facrifices & les fupplications fe fiflent feulement dans la ville & en- tre les citoyens, foit qu’il fallüt aller fur le mont d’Albe & y appeller les peuples qui étoient compris dans l’ancien traité , Les Jéries étoientimmuablement de neuf jours. On voit préfentement que les féries latines ordi- naires étoient du nombre de celles qu’on nommoit indilæ ou conceptivæ , c’eft-à- dire mobiles, parce qu'on ne les célébroit qu’au jour marqué par le con- ul. On voit aufli qu’on poufla au plus haut point le {crupule fur leur omifion & leur rituel, 87 que ce fut même par principe de religion qu’on étendit leur durée. Nous ajoûterons feulement que lorfque ces fêtes vinrent à fe célébrer pendant trois ou 4 jours, Rome étoit prefque deferte: c’eft pourquoi de peur que les voifns n’entreptiflent alors quelque chofe contre elle, on créoit un gouverneur dans cette vil. le, feulement pour le tems de la célébration des je- res, Nous en avons [a preuve dans Les paroles d’une lettre qu’Augufte écrivoit à Livie, au fujet de fon fils le jeune Tibere , qui fut enfuite empereur. 12 A1. banur: montem ire eum non placer nobis , aut ele Rome datinarum diebus : cur enim non præficitur urbs , fe potef? fratrem fuum fequi in montem ? « Nous ne trouvons + pas à-propos qu'il aille au mont d’Albe, ni quil # foit à Rome pendant les fêtes latines : car pourquoi s» ne le fait-on pas gouverneur de Rome, s’il eft ca- # pable de fuivre fon frere au mont d’Albe pour cette » folennité »? On trouvera tous ces faits dans Tite- Live, Liv. X. dec. v. Denis d'Haliearnañle, Livre IF. Aulugelle, Zy. LX, & X, Macrobe, faturn, liv. I. ch, xvj. &t fi l’on veut parminoscompilateurs modernes, dans Struvius, Rofinus, &c Pitifcus. Nous croyons cependant n'avoir rien omis d’intérefMant. Arsicle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. * FERISON , ( Logique, ) terme technique où les voyelles défignent la qualité des propofñitions qui entrent dans une efpece particuliere de fyllogifme : ainfila voyelle e de frfo7 marque que la majeure doit étre univerfelle afirmative ; l’?, que la mineure doit être particuliere affirmative ; & l’o, que la con- clufion doit être particuliere négative. FERLER 07 SERRER LES VOILES, (Marine.) c’eft les plier & tronffer en fagot ; car loriqu’on ne les troufle qu'en partie, cela s'appelle cargxer. Voyez Voies. (Z) Lee We Re FERMAGES, 1. m: pl (Jurifprud.) fontle prix & la redevance que le fermier ou locataire d’un bien de campagne, efttenu de payerannuellement au pro- priétaire pendant la durée du bail. On donne auffi ce nom à la redevance annuelle que payent les fermiers des droits du roi, ou de quel- ques droits {eigneuriaux, x ini FER On confond quelquefois les loyers des biens dé campagne, avec les fermages ; les uns & les autres ont cependant un caraëtere différent, Les loyers font pour des maïfons, foit de ville ou de campagne ; les fermages proprement dits, font pour les terrés, prés, vignes, bois, & pour les bâtimens qui fervent à lex ploitation de ces fortes d’héritages, On peut ftipuler la contrainte par corps pour férmages ; au lieu qu’on ne le peut pas pour des loyers proprement dits. Le propriétaire d’une métairie a un privilége fur Les fruits pour les fermages ; de même que le propriétai- re d’une maïfon a un privilége fur les meubles pour les loyers. Le droit romain ne donne point de privi- lége pour Les fermages fur les meubles du fermier. L'article 171 de la coûtume de Paris donne privilége pour les férmages, tant fur les fruits que fur les meu- bles; mais cette difpofition eft particuliere à cette coûtume. | Le propriétaire pour les fermages à lui dûs, eft préféré à tous autres fimples créanciers, quoique leur faifie fût antérieure à la fenne. Son privilége.a lieu non-feulement pour l’année courante, mais auf pour les fermages précédens ; il eft même préféré à la taille ; mais quand il fe trouve en concurrence avec cette créance, il n’eft préféré que pour l’année cou- rante. Voyez LOYER, PROPRIÉTAIRE, PRIVILÉGE. 4 | nes f. mm. & FERMAUX,, au pl, (Bafon.) ce vieux mot fignife les agrafes, crochets, boucles garnies de leurs ardillons, & autres fermoirs de ce genre, dont on s’eft fervi anciennement pour fer- mer des livres, & dont l’ufage a été tranfporté aux manteaux, aux chapes, aux baudriers ou ceintures, _pour les attacher. On les a aufli nommé férmalers ow fermaillets ; & ils faifoient alors une efpece de paru- re tant pour les hommes que pour les femmes. Les fermaux {ont ordinairement repréfentés ronds & quelquefois en lofange ; ce qu’alors il faut fpéci- fier en blafonnant. Quelques - uns appellent un écw fermaille, quand il eft chargé de plufeurs férmauxs Stuard comté de Buchan, portoit de France à la bor- dure de gueule férmarllée d’or : on dit maintenanrfe- née de boucles d’or. 2] Jai avancé tout-àl’heure que X férmailétoir au trefois une efpece de parure. Joinville décrivant une grande fête, qu'il appelle une grand’court & maifor ouverte; dit : Et une autre table mangeoit le roi » de Navarre, qui moult eftoit paré de drap d’or, en » cotte & mantel, la ceinture , ferait 6c chapel d’or » fin, devant lequel je tranchoie ». Selon Borel, le fermail étoit un crochet, ‘une boucle, un carquant, & autre atifet de femme. Mais on voit par cet endroit de Phiftoire de Joinville ,queles hommes &e les fem- mes fe fervoient de cette parure, que:les hommes mettoient tantôt fur le devant du chapeau jt tan- tôt fur l'épaule en l’'aflémblage du manteauAuifi lie fons-nous ces paroles dans Amadis, Liv. ITlEt lai » fant pendre fes cheveux qui étoient les plus beaux | # que nature produit ,.oncn’avoit furfon chefqu'unr » fermailles d'or enrichi de maintes pierres: préciew= » {es ». Sur quoi Nicod ajoûte :Etil'a ce nom, par- ce qu'il ferme avec unepetite bande , laquelle eft ap pellée fermeille ou fermarlle. Et quant aux femmes ,- elles -plaçoient leur fermail fur le fein. I eft dit dans Froiffard, 21, vol.:ch:cljv.«Eit fr eut pour le prix un » fermail à pierres précieufes, que madame de Bour- » gogne prit en fa poitrine ». Voyez Ducange: Arri- clede M. le Chevalier DÉTAUCOURTS: ou j FERME, adj. ( Phyfq. ) On appelle corps ferme , . celui dont.les parties ne {e déplacent pas par le tou- cher. Les corps de cette -efpece font:oppofés aux corps fluides, dont les ‘parties cedent à-la: moindre: : preffion ; & aux corps mous, dont les parties fe dé- | plaçent aifément par une force très-médiocre. Foy. FLUIDE, FER > Rés rio Se F | ‘ vw fe FEUIDE. Les Corps fermes font appellés plus ordinai- rémént corps folides : cependant ce mot /olidene mé UT LT re FL Ayo 2 ps te pri ee + NRA paroit pas exprimer auf précifément la propriété dont il s’agit, pour plufieurs rafons : 1°, parce que le mot fo/4e fe Prend'encore en d’autres accéptions ; {oit pour défigner les corps géométriques, c’eft-à-dire Pétendue Confidérée avec fes trois dimenfions ; foit res pour l’exploitation des héritages qui en dépen- dent. | MZ Quelquefois Le terme de ferme eft pris pour là lo- cation du domaine ; c’eft en ce fens que l’on dit 4oz- ner un bien a ferme , prendre un héritage ou quelque droit a ferme ; car on peut donner & prendre 4 ferme non-feulement des héritages, mais aufñi toutes fortes de droits produifant des fruits, comme dixmes, cham- parts, &t autres droits feigneuriaux,des amendes, un ‘bac , un péage, &c. Quelquefois auf par le terme de ferme, on entend feulement lenclos de bâtimens deftinés pour le loge- ment du fermier & l’exploitation des héritages. Les uns penfent que ce terme ferme vient de fra, qui dans la baffle latinité fignifie 47 lieuclos ou fermé: c'eft pourquoi M, Ménage obferve que dans quelques provinces on appelle ezclos, clôture, ou cloferie , ce que dans d’autres pays on appelle ferme. D’autres tiennent que donner à ferme, /ocare ad Jirmam ; fgmfoit afférer au locataire la joiiffance d'un domaine pendant quelque tems, à la différence d’un fimple poflefleur précaire, qui n’en joit qu’au- tant qu'il plait au propriétaire. On difoit aufi don- ner à main-ferme , dare ad mantm firmam ; parce que le pale frmabarur manu donatorum , c’eft-à-dire des bailleurs : mais la wain-ferme attribuoit aux preneurs un droit plus étendu que la fimple férme, ou ferme snuable. La main-ferme étoit à-peu-près la même cho- de que le baïl à cens, ou baïl emphitéotique. Voyez MaAin-FERME € FIEF-FERME. | Spelman & Skinner dérivent le mot ferme du fa- xon fearme ou feorme, c’eft-à-dire yiéus ou provi- fons ; parce que les fermiers & autres habitans de la Campagne payoient anciennement leurs redevances en vivres & autres denrées ou provifions. Ce ne fut que par la fuite qu’elles furent converties en argent; d'où eft venue la diftinétion qui eft encore ufirée en Normandie, des f£mples fermes d’avec les fermes blan- ches. Les prémieres font celles dont la redevance fe paye en denrées: les autres , celles qui fe payent en monnoie blanche ou argent, Tome VI FEI 50 Spelman fait voir que le mot frma-fienhott au trefois non-feülément ce qué'nous appelons fé#e MAIS UV UN repas où érrésièr de bouche que e'fèr. mier fournifoit à fon fcigneur:ou propriétaire-per- dant un ceffäin fems'êc 4'ün certain paxsren Eon- fidération desterres & autréshéntages qu'u fénoifde! lui. : CLTER l'encilen 11 tes PS Tr MIO Ainfi M. Lambard traduit le mOt fear qui FO - ve dans les lois du roi Canut par vidus, 8e ces éxprèf. fons redderé firmam nniis nos @edebas anim dierr de firma ; fignifient 185 Provifions pou DO! G une nuit. Dans le tems dela conquêterdé l'Anglez terre par le roi Guilliumétt toutes les lrédevancés! qu'on férefervoit étoient' des provifions. On prétend | que -ce fut fous le'regne d'Henri premier que:cette! coûtume commença à changer. fu noie Une férñe peut être loüée'verbalemeut ou par écrit, foit {ousfeing privé, otsdevant notaire. Ty a aufi cérfaines fermes qui s’adjusent en juftice; com- me les baux judiciaires 8e lés feñrnes du roi. L’aête par lequel une-fo#e eft donnée à otage , s'appelle communément bar! à ferire: Ce baïliné peut. être fait pour plus de neufanfiées; maison peut.le renouvéller quelque tém$'avant l'expiration d’ice- lui. Voyez BAIL. QURErEE ange Cehii qui loue fa ferme s'appelle GarHenr ;\proprié- taire ; Où rraftre’; 8c celui qui la prend à loyer, de5re- neur Où fermier. La redevance que paye lé fermier s'appelle férmuge, pour làdiftinguer deslloyers qui fe payent pour les autres biens. ROBE 2£ Les’ gentilhommes laïcs”peuvent fans déroger fe rendre adjudicatäires Gu'cautions des fermes du rO1. Voyez ci-après FERMES DO Roï. ls petivénr aufh tenir 2fèrme les terfes &{Eipneuries apparteñnañe tes aux princes & princefles du fang. ! 12 n0 2 Mais il eft défendu aux géntilshommes &c à eux qui fervent dans les troupes du roi, de tenir aucu- ne ferme, à peine de dérogeance pour ceux qui font nobles , & d’être impofés à la taille. PSE © Les eccléfiatiques ne peuvent auffi fans déroger à leurs'priviléges! tenir aucune ferme, fi ce n’eftcélle des dixmes , lorfqu’ils ont déjà quelque droit aux dix- mes, parce qu'en ce Cas on prélume qu'ils n'ont pris la ferme du furplus des dixmes ; que ponr prévenir les difficultés qui arrivent fouvent entre les co-décima- teurs & leurs fermiers. Voyez DixMes. En Droit, le propriétaire des fermes des champs n’a point de privilège fur les meubles de fon fer- nier appellés 2nvela 6 illate , à caufe que les fruits lui fervent de gage. Mais la coûtume de Paris, arricle r 713 &tiquel ques autres coûtumes femblables, donnent au pro- priétaire un privilège fur les meubles pour les fermes comme pour les maifons. Le privilège du propriétaire fur les fruits prove- nant de fa ferme, a lieu non-feulement pour l’année courante, mais aufli pour les arrérages précédens : néanmoins il n’eft préféré aux colleéteurs que pour 1 une année. | L’héritier du propriétaire ou autre fuccefleur à titre univerfel , eft obligé d’entretenir le baïl 4 fer me pañlé par {on auteur ; le fermier, fon héritier ou légataire univerfel, la veuve du fermier comme commune, font aufhi obligés d'entretenir le baïl de leur part : ainfi le vieux proverbe françois qui dit que mort & mariage rompent tout lotiage, eft abfolument faux. | La vente de l'héritage affermé rompt le bail 4 fer. me; à moins que l'acquéreur ne fe foit obligé de laif- fer jouir le fermier, on qu'il n’ait approuvétacite- ment le baïl; mais en cas de dépoffeffion du fermier, il a fon recours contré le propriétaire pour fes.dom- mages &c intérêts. La contrainte par çorps pent être Hors pour - Lit 310 FER les fermes des champs, mais elle.ne fe fupplée/point fi elle-n’y eft pas exprimée ; & les femmes veuves ou filles ne peuvent point S'obliger par corps, même dans-ces fortes de baux. | | | Un fermier n’eft pas reçû à faire ceffion de biens, parce.que c'eft une efpece de larcin de fa part, de confumer les fruits qui naïffent fur le fondsfans payer le propriétaire. É die On peut faire réfilier le bail quand le fermiereft deux ans fans payer : il dépend néanmoins de la pru- dence.du. juge de donner encore quelque tems. Le fermier peut aufli être expulfé, lorfqu'’il dégrade les _Heux &"les.héritages : mais Le propriétaire ne peut pas expulfer le fermier pour faire valoir fa férmepar les mains; «comme il peut expulfer un locataire de maifon pour occuper en-petfonne. | Le fermier doit joiur en bon pere de famille, cul- tiver lestterres dans les tems & faifons convenables, les fumer & enfemencer, ne Les point defloler, & les entretenir en bon état, chacune felon la nature dont elles font ; il doit pareillement faire les réparations portées par fon bail. Il ne peut pas demander de diminution fur le prix du bail, fous prétexte que la récolte n’a pas été fi abondante que les autres, quand même les fruits ne füfiroient pas pour payet tout le prix du bail; car comme il profite feul des fertilités extraordinaires, fans que le propriétaire puifle demanderaucune aug- mentation fur le prix du baïl ; il doit aufi fupporter les années flériles. .Ilfupporte pareillement feul la perte qui peut fur- venir fur les fruits après qu'ils ont été recueillis. Mais fi les fruits qui font encore fur pié {ont en- tierement perdus par une force majeure, où que la terre en ait produit fi peu qu'ils n’excedent pas la valeur dés labours & femences ; en ce cas le fermier peut demander pour cette année une diminution fur le prix defon bail, à moins que la perte qu'il fouffre cette année ne puifle être compenfée par l’abondan- ee des précédentes ; ou bien, sil refte encore plu- leurs années à écouler du bail, on peut en attendre l’évenement pour voir fi les fruits de ces dernieres années ne le dédommageront pas de la ftérilité pré- cédente ; & en ce cason peut fufpendre le payement du prix de Pannée ftérile, ou du moins d’une partie, ce qui dépend de la prudence du juge & des circon- ffances. S’il étoit dit par le bail que le fermier ne pourra prétendre aucune diminution pour quelque caufe que ce foit, cela n’empêcheroit pas qu'il ne püt en * demander pour raïfon des vimaires ou forces ma- jeures; parce qu'on préfume que ce cas n’a pas été prévà par les parties : mais fi le bail portoit expreñé- ment que le fermier ne pourra prétendre aucune di- minution, même pour force majeure êt autres cas prévûs ou non-prévis, alors 1l faudroit fuivre la claufe du bail. Dans les baux à moïfon, c’eft-à-dire où le fermier au lieu d'argent rend une certaine portion des fruits, comme la moitié ou le tiers, ilne peut prétendre de diminution fous prétexte de ftérilité , n’étant tenu de donner des fruits qu’à proportion de ce qu’il en a recueilli : mais s’il étoit obligé de fournir une certai- ne quantité fixe de fruits, & qu’il n’en eît pas re- cueilli fuffifamment pour acquitter la redevance , alors 1l pourroit obtenir une diminution, en obfer- vant néanmoins Les mêmes regles que l’on a expli- quées ci-devant par rapport aux baux en argent. Suivant l’erricle 142 de l'ordonnance de 1629, les fermiers ne peuvent être recherchés pour le prix de leur ferme cinq années après Le baïl échü : mais cette loi eft peu obfervée, fur-tout au parlement de Paris ; & il paroît plus naturel de s’en tenir au principe oé- néral, que laétion perfonnelle réfultante d’un bail 4 dérme dure 30 ans. :La tacite reconduétion pour les baux 2 frme, ef: ordinairement de trois ans, afin que le fermier ait le tems de recueillir de chaque efpece de fruits que . doit porter chaque fole ou faifon des terres; ce qui dépend néanmoins de l’ufage du pays pour la difis:. bution des terres des fermes. NE se .… Le premier bail 4 ferme étant fini, la caution ne demeure point obligée, foit au nouveau bail faitauw même fermier, foit pour la tacite recondudtion s’il continue de joiur à ce titre. Perezius, ad cod. de lac. cond, n. 14. Voyez au ff. le titre locati.conduch, & au code celui de locato condutto ; les rnflic. d’Argou, rom. IT. Liv. AI. ch. xxviy. les maximes journalieres , au mot Ferrmier, (A). 4 FERME, dans quelques coftumes , fignifie V’affrma- tion Ou ferment que le demandeur fait en juftice pour affürer fon bon droit, en touchant dans La main du baïle ou du juge; c’eft proprement /#ramentum ca- lumniæ preflare, afirmèer la vérité de fes faits. Le ferment que le demandeur fait de fa part pour attefter la vérité de fa demande, eft appellé corse ferme. hu | Il eft parlé de ces fermes & contre-fermes dans les coûtumes d’Âcqs, 4. xvj. art, 3. 4.6 5. &de Saint- Sever, dir, J. art, 2.8, 9.10, 12.13.1$.18. M. de Lauriere en fa note fur le mot ferme (gloff. de Ragueau), dit que ces fermens fe faifoient prefque dans chaque interlocutoire ; que le baiïle prenoit pour chaque ferme & contre-ferme 1 x {ous 3 den. tour- nois, ce qui eft aboli. (4) | FERME DES AMENDES, eff un baïl que le Roï ou quelque feigneur ayant droit de juftice , fait à quel- qu'un de la perception des amendes qui peuvent être prononcées dans le courant du baïl. Voyez AMEN- DES & FERMES DU Ro1. (4) ;. FERME BLANCHE, alba firma ou album ; c’eftune ferme dont le loyer fe paye en monnoie blanche ou argent , à la différence de celles dont les fermages fe payent en blé, ou autres provifions en nature , qu’on appelle fimplement fermes. Cette diftindion eft en- core ufitée en Normandie. En Angleterre, ferme blanche étoit une rente an- nuelle qui fe payoit au feigneur fuzerain d’une 2u- dred : on lappelloit ainfi, parce qu’elle fe payoit en argent ou monnoie blanche, & nonpasenblé, com- mé d’autres rentes qu'on appelloit par oppoñtion aux premmeres , le demer noir, klack-maul, (4) FERME d’une, deux, ou trois charrues, eft celle dont es terres ne compofent que la quantité que l’on peut labourer annuellement avec une, deux, ou trois charrues. Cette quantité de terre eft plus où moins confidérable , felon que les terres font plus ou moins fortes à labourer. Voyez CHARRUE. (4) FERME DE DROIT, Juris firma ; c’étoit le ferment décifoire que l’on déféroit à laccufé ou défendeur; il en eft parlé dans l’ancien for d’Arragon, Zv. XIE, fol. 16. où il eft appellé fra juris , & la réception de ce ferment, receptio Juris firmæ, (A) FERME-FIEF ox FiEFFE. Voyez ci-après aux mots Fier & FIRFre. (4) FERME GÉNÉRALE, eft celle qui comprend luni« verfalité des terres, héritages, & droits de .quel- qu’un ; elle eft fouvent compofée de plufeurs fermes particulieres, 8 quelquefois de plufeurs /ous-férmes, Voyez ci-après FERMES (Finances). (4) - FERME-MAIN, voyez au mot MAIN. (4 | FERME À Moison, eff celle dont le baïl eft à moi- fon, c’eft-à-dire qu’au lieu d'argent pour prix de la ferme, le fermier doit donner annuellement une cer- taine quantité de grains, où autres fruits. Voyez Bat À Moison & Moison. (4) | FERME À MOITIÉ FRUITS, eft celle dont le fer- mier rend au propriétaire la moitié des fruits en na- ture, au lieu de redevance en argent. Voy. gi-devart, FER FERME À MoISON, & ci-après FERME AU TIERS FRANC. (4) FERME PARTICULIERE, eftcelle qui ne comprend qu'un feul objet, comme une feule métairie » Ou les droits d’une feule feigneurie, ou même quelquefois feulement les droits d’une feule efpece, comme lés amendes, &c. elle eft oppoiée à fêrme générale, qui comprend ordinairement exploitation de tous les héritages ou droits de quelqu'un, du moins dans une certaine étendue de pays. (4) | FERME, (sOUS-) eft un bail que le fermier fait à une autre perfonne, foit de la totalité de ce qui eft compris au premier bail, ou de quelqu'un des objets qui en font partie. Foy. ci-apr. FERMES DU RoI. (4) FERME AU TIERS FRANC, eff celle pour laquelle le fermier rend au propriétaire, au lieu de loyer en argent, le tiers des fruits en nature franc de tous frais de labour, femence, récolte, & autres frais d’ex- ploitation, Voyez ci-dev. FERME À MOITIÉ FRUITS. 4 : Re GÉNÉRALES DES POSTES & MESSAGE- RIES DE FRANCE. Voyez au mot POSTES. FERME, (Economie rufhig.) Ce mot défigne un af- femblage de terres labourables, de prés, &c. unis à une maifon compoiée de tous les bâtimens nécef- faires pour le labourage. On donne auffi le nom de ferme à la maïfon des champs, indépendamment des terres qui y font attachées. C’eft le dégoût des foins pénibles de l'Agriculture qui a rendu ce mot fynonyme avec celui de raifon ruflique, Prefque toutes nos terres font affermées ; & cette forte d'abandon vaut encore mieux que les foïns peu fuivis, &c les demi-connoïffances que pour- roient y apporter la plüpart des propriétaires. Les détails de la culture doivent être réfervés à ceux qui en font leur unique occupation. L’habitude feule ap- -prend à fentir toutes les convenances particulieres ; mais 1l y en a de générales dont il eft également hon- mête & avantageux au propriétaire d’être inftruit. Qui peut avec plus d'intérêt décider de la propor- tion qui doit être entre les bâtimens & les terres de la ferme , raflembler ou féparer cesterres, choifir un fermier, mefurer le degré de confiance & les égards qu'il mérite ? L’ignorance fur tous ces points expofe à être groflierement trompé, ou même à devenir in- jufte. Voyez FERMIER. | On n’eft que très-rarement dans le cas de bâtir une ferme entiere ; les terres que l’on acquiert font pref- que toüjours attachées à quelques bâtimens déjà faits. Cependant il peut arriver qu’il n’y en aitpoint, _ou qu'ils tombent en ruine, & que l’on foit contraint à une nouvelle conttruétion. Alofs la place naturelle de la maïfon eft au milieu des terres qui en dépen- -dent ; leur éloignement angmente les dépenfes de la culture ; il y a plus de fatigue 8 de tems perdu. Cette pofition n’eft cependant à rechercher que dans une plaine où il ya peu d’inégalités. Si les terres font dif- pofées en côteaux, la maifon doir être placée au bas, afin que les voitures chargées de la récolte nayent qu’à defcendre pour arriver aux granges. Il faut profcrire tout'ce qui eft inutile dans les bâti- mens d’une ferme ; mais fe garder encore plus de rien retrancher qui foit néceflaire, Si les granges ne peu- vent pas contenir toute la récolte ; s’il n’y a pas af- fez d'érables pour la quantité de bétail que les terres -Peuvent nourrir ; fi l’on manque de greniers où l’on puifle conferver le grain, lorfqu’il eft à vil prix, un -bon laboureur ne fe chargera pas d’une ferme dans laquelle fon induftrie feroit contrainte. On n’établira cette proportion entre les bâtimens &c les terres, -qu’en Sinftruifant parfaitement de la nature & de la quantité des récoltes qui varient dans les différens pays. Ce qui eft néceflaire par-tout, c’eft une cour fpacieufe, & dans cette cour un lieu defliné au dé- Tone VI, FER Sii pôt des fumièrs, C’eft-Jà que fe préparé la fécondité des terres & la richefle du laboureur. Il eft effentiel que la cour d’une ferme foit déféndué des brigands & enfermée de murs ; mais ilne l’eft pas moins que les différens bâtimens dont elle eft com poiée foient ifolés entr’eux, pour ernpéchér la com- munication du feu, en cas d'accident, Cette crainte de l'incendie, & beaucoup d’autres raifons d'utilité doivent engager à placer une maifon ruftique dans un lieu voifin de l’eau. Il y a même peu d’autres avantages, qui ne doivent être facrifiés À celui-là: Chôïfir un fermier, feroit une chofe affez diffci- le, s’il falloit entrer dans le détail des connoiflances qui lui fontnéceffaites ; mais il y a des traits marqués auxquels oh peut reconnoître celui qui eft bon : par exemple, là richefle. Elle dépofe en faveur des ta- lens d’un laboureur, & ellé répond d’une culture, qui fans elle ne peut être qu'imiparfaite, On regarde affez généralement Agriculture com. me un art feulement pénible, qui peut être exercé par quiconque a du courage & des forces. On feroit plus de cas des laboureurs, vû le refpe& qu’on a pour l’opulence, fi l’on favoit qu'ils ne peuvent rien fans elle, Pour s’en convaincré, on n’a qu'à regar- der ce qu'un homme qui fe charge d’une férme eft contraint de dépenfer avant de recueillir. Qu'on prenne pour exemple une férme de cinq cents arpens de terres labourables. Il faut d’abord monter la ferme en chevaux, en beftiaux , en inftrumens 3 en équipages ; & voici ce qu'il en doit coûter. Pour quatorze chevaux au moins... 4soo livs Pour fix cents moutons . . , ; , , : 5000 Pour vingt vaches . . . . . . . . . 1800 Pour monter le ménage en uftenfiles & en inftrumens, . . ...,...,.. 3000 Pour la dépenfe du maréchal, du bourrelier, du cordier, &e, . , : , , . 000 16300 liv. Nous ñe parlons ici que du néceffaire le plus exaét, Sans ce préalable la culture feroit impofñble, Ou tout-à-fait infru@ueufe, Après cela, voici le dé- tail des frais annuels, Il s’en faut de beaucoup que nous ne les portions au prix auquel on fixe ordinaiï- rement les labours, les fumiers, &c. Nous les éva- luons fur les facilités qu’a un fermier de nourrir fes chevaux & fon bétail. On fait que les terres fe divi: fent en trois foles égales. Voyez AGRICULTURE, Pour quatre labouts donnés à 133 ar- pens dé terre deflinés à être femés en blé, chaque labour à s$ liv. . . . . : : 2660 liv: Pour fumer cette même quantité d’ar- pens , à 15 iv. pour chacun . . : . . 2000 Pour 120 feptiers de blé à femer :.: 1800 Pour farcler le blé .. . . : . . ; .. 200 Pout frais de récolte, de tranfport, | & d’entrée dans la grange , . . . . . , 1200 Pour labourer deux fois 133 arpens deftinés aux menus grains . . . . . . . 1330 Pour la femence . ...,,..,,.. Soo Pour farclert. es si. Too Pour frais de récolte, 6. . . . ; . 700 10990 liv. Il faut donc au moïns 17000 liv. d'argent dépenfé dans une férme, telle que nous l’avons dite, avantfa premiere récolte, & elle n'arrive que dix-huit mois après le premier labour ; fonuvent même elle ne ré- pond pas aux foïins du fermier, Quelque habileté qu’ait un laboureur, il n’apprend à exciter toute la fécondité de fes terres, qu'en fe familiarifant avec elles. Ainfi il ne doit pas attendre d’abord un dé- dommagement proportionné à fes Gene 3 & il ne tt $S12 FER peut raifonnablement l’efpérér , qu'après de nouvel les dépenfes 87 de nouveaux foins. On voit que le labourage eft une éntreprife qui demande une fortune déjà commencée. Si le fermiet n’eft pas aflez riche, 1l deviendra plus pauvre d’an- née en année, & fes terres s’'appauvriront avec lui. Que le propriétaire examine donc quelle eft la for- tune du fermier qui fepréfente ; mais qu'il ne néelige pas non plus de s’afürer de fes talens. Il eft effentiel qu'ils foient proportionnés à l’étendue de la ferrze dont on lui remet le foin, Un homme ordinaire peut être chargé fans em- barras de l'emploi dé quatre voitures. Une voiture fufit à cent vingt-cinq arpens de terre d’une qualité moyenne ; & la voiture eft compolée pour ces ter- res de trois ou quatre chevaux, felon les circonftan- ces, & la profondeur qu’on veut donner au labour. Nous parlerons ailleurs de la culture à laquelle on employe des bœufs. Voyez LABOUR. Une ferme qui n’eft compofée que de terres labou- tables, peut fouvent tromper, ou du moins ne pas remplir entierement les efpérances du fermier. Il eft très-avantageux d’y joindre des prés , des pâturages, des arbres fruitiers, de ces bois plantés dans les haies, dont on élagne les branches ; le fourrage & les fruits peuvent fervir de dédommagement dans les années médiocres. Le produit des haïes difpenfe le . laboureur d'acheter du bois; & pou le plus grand nombre d’entr’eux, épargner, c’eft plus que gagner. Une férmede cette étendue , & ainfi compofée, four- nit à un homme intelligent les moyens de dévelop- pet une induftrie qui eft toïjours plus aétive en grand, parce qu’elle eft plus intéreflée. Il réfulte de- là, que fi l’on a deux petites fermes, dont les terres foient contigues , il eft toüjours avantageux de les réunir. Elles auront .enfemble plus de valeur ; il y aura moins de bâtimens à entretenir, & un fermier vivra feul avec aifance, où deux fe feroient peut- être ruinés. Pour fixer le prix d’une ferme, 1l faut qu’un pro- priétaire connoïffe bien la nature de fes terres, & qu'il juge des avantages ou des defavantages qui peuvent réfulter de leur quantité combinée avec leur mélange. On regarde ordinairement comme une chofe fâcheufe d’avoir une telle quantité de terres, qu’elle ne foit pas entierement proportionnée à un certain nombre de voitures : par exemple, d’en avoir plus que trois voitures n’en peuvent cultiver, & pas aflez pour en occuper quatre. Et moi je dis, heu- reux le bon laboureur qui eft dans ce cas-là ! Il aura quatre voitures ; fes labours,, fes femailles, le tranf port de fes fumiers, tout fera fait plus promptement. Si quelques-uns de fes chevaux deviennent malades, tien n’en fera retardé ; & la néceffité le rendant in- duftrieux , 1l trouvera mille moyens avantageux d'employer le tems fuperflu de fa voiture. La nature & l’aflembiage des terres ne font pas les feules chofes à confidérer avant de fe décider fur le prix. Il varie encore dans les différens lieux en pro- portion de la rareté de l'argent, dela confommation des denrées, de la commodité des chemins, & de lincertitude des récoltes qui n’eft pas égale par-tout. Nous ne pouvons donc rien dire de précis là-deflus, &t nous devons nous borner à montrer les objets fur Jefquels il faut être attentif. Les redevances en denrées font celles qui coû. tent le moins à la plüpart des fermiers. Ils font plus attachés à Pargent, parce qu'ils en ont moins, que tous les jours ils font dans le cas d’en dépenfer né- ceffairement, & que d’ailleurs cette forte de richefle n’eft point embarraffante. Les autrés réalifent leur argent; pour eux acquérir de l'argent, c’eft réalifer. Si le propriétaire eften doute fur la valeur jufte de {es terres, 1l eft de fon intérêt de laïffer l'avantage . FER | du côté du fermier. L’avarice laplas füujette à man. quer fon but, eft celle qui fait outrer le prix d’une fèrme, Elle expofe à ne trouver pour fermiers que de ces malheureux qui rifquent tout, parce qu’ils n’ont tien à perdre, qui épuitent les terres par demauvai- fes récoltes, & font contraints de les abandonner, après les avoir perdues. L’Agriculture eft trop pémi- ble, pour que ceux qui la profeflent, ne retirent pas un profit honnête de leurattention fuivie & de leurs travaux conftans. Auf les fermiers habiles &c déjà riches ne fe chargent-ils pas d’un emploi fâns une éfpece de certitude d’y amafler de quoi établir leur famille, & s’aflürer une retraite dans la vieilleffe, IL n'ya guere que les imprudens auxquels lagricultute né procure pas cet avantage, à moins que des acci- dens extraordinaires & répétés n’alterent confidéra… blement les récoltes :telles font une grêle, une rouille généralement répandue fur Les blés, 6. C’eft alors que le propriétaire eft contraint de partager la perte avec fon fermier ; mais pour remplir à cet égard ce qu'on doit aux autres &c à foi-même, 1l eft néceffaire de bien diftinguer ce qu'on ne peut attribuer qu’au malheur d’avec ce qui pourroit venir de la négligen- ce, Il faut des lumieres pour être jufte & bon. Ileft des fermiers pour qui une indulgence pouflée trop loin deviendroit ruineufe, fur qui la crainte d’être forcés au payement eft plus puiflante que l'intérêt même ; race lâche & pareffeufe june exigence dure les oblige à des efforts qui les menent quelquefois à la fortune, | Il m’eft que trop vrai, que dans toute convention faite avec des hommés , on a befoin de précautions contre l’avidité & la mauvaife foi ; il faur donc que le propriétaire prévienne dans les claufes d’un bail, & empêche pendant fa durée l’abus qu’on pourroit faire de fa confiance. Par exemple, dans les lieux où la marne eft en ufage, le fermier s’oblige ordi airement à marner chaque année un certain nom bre d’arpens de terre ; mais fi l’on n’y veille pas, il. ‘épargnera peut-être fur la quantité de cet engrais du- rable , & la terre n’en recevra qu'une fécondation momentanée. On ftipule fouvent, & avec raïfon, que les pailles ne foient point vendues, mais qu’el- les foient confommées par les beftiaux , & au profit des fumiers. Cela s'exécute fans difficulté dans tous les lieux éloignés des villes ; mais par-tout où la paille fe vend cher, c’eft une convention quele plus grand nombre des fermiers cherche à éluder, Ce n’eft pas qu'il n’y ait réellement un plus grand avantage à multiplier les engrais, fans lefquels on ne doit point attendre de grandes récoltes ; mais l’avarice eft aveu- gle, ou ne voit qe ce qui eft près d’elle. La vente actuelle des pailles touche plus ces laboureurs, que lefpérance bien fondée d’une fuite de bonnes récol- tes. Il faut donc qu’un propriétaire ait toùjours les yeux ouverts fur cet objet : 1l n’en eft point de plus intéreflant pour lui, puifque la confervation du fonds même de fa terre en dépend ; cependant dans les années &c dans les lieux où la paille eff à un très- haut prix, on peut procurer à fon fermier l’avan- tage d’en vendre ; mais il faut exiger que la voiture qui porte ce fourrage à la ville, revienne à la fêrme chargee de fumier. Cette condition eft une de celles fur lefquelles on ne doit jamais fe relâcher. On voit par-là qu’un propriétaire qui a donné fes terres à bal, feroit imprudent s’il lesregardoit comi- me pañlées dans des mains étrangeres. Une diftrac- tion totale l’expoferoit à les retrouver après quel- ques années dans une dégradation ruineufe, L’atten- tion devient moins néceffaire, lorfqu’on a pù faflü- rer d’un fermier riche & intelligent ; alors fon inté- rt répond de fes foins, La mauvaife foi, en Agri- culture, eft prefque toüjours un effet de la pauvreté ou du défaut de lumieres. Cet homme étant tronvé, FER on né peut lé conferver avec trop de foin, ni Île mettre trop tt dans le cas de compter fur un lono fermage; en prolongeant fes efpérances, on lui inf- pire prefque le goût de propriété; goût plus af que tout autre, parce qu'il unit la vanité à l’intérêt, Il ne faut que connoître l'effet naturel de Phabi- tude, pour fentir qu'une ferme devient chere à un laboureur, à proportion du tems qu'il en jouit, & de ce qu’elle s'améliore entre fes mains. On s’atta- che à fes propres foins, à fes inquiétudes, aux dé. penfes qu'on a faites, Tout ce qui a été pour nous l’objet d’une occupation conftante, devient celui d’un intérêt vif. Lorfque par toutes ces raifons une ferme eft devenue en quelque forte le patrimoine d’un laboureur , il eft certain que le propriétaire pourroit en attendre des augmentations confidérables, s'il vouloit ufer tyfanniquement de fon droit ; mais ou- tre qu’il feroit mal d’abufer d’un fentiment honnête imprimé par la nature, on doit encore par intérêt être très-rélervé fur les augmentations. Quoique le fermier paroifle fe prêter à ce qu’on exige, il eft à craindre qu'il ne {e décourage; fa langueut amene- toit la rune de la ferme. Le véritabléintérêt fe trouve ici d'accord avec l'équité naturelle; peut-être ce concours eft-1l plus fréquent qu'on ne croit. Loin de décourager un fermier par des augmen- tations rigoureufes, un propriétaire éclairé doit en- trer dans des vûes d'amélioration , & ne point fe re- fufer aux dépenfes qui y contribuent. S'il voit, par exemple, que fon fermier veuille augmenter fon bé- tail, qu'il n’héfite pas à lui en faciliter les moyens. C’eft ainfi qu'il pourra acquérir le droit d’exiger dans la fuite des augmentations qui ne feront point onéreufes au fermier, & qui feront même offertes ‘par lui. | Nous ne faurions trop le répéter, l'Agriculture ne peut avoir des fuccès étendus , & généralement intéreflans, que par la multiplication des beftiaux. Ce qu'ils rendent à la terre par l’engrais, eft infi- mment au-deflus de ce qu’elle leur fournit pour leur fubfiftance. | J'ai aétuellement fous les yeux une ferme, dont les terres font bonnes, fans être du premier ordre. El- les étoient 1l y a quatre ans entre lés maïns d’un fer- mier qui leslabouroit aflez bien, mais qui les fumoit très-mal, parce qu'il vendoit fes pailles, & nourri. foit peu de bétail. Ces terres ne rapportoïent que trois à quatre feptiers de blé par arpent dans les meilleures années, Il s’eftruiné, 8 on l’a contraint de remettre fa ferme à un cultivateur plus induftrieux. Tout a changé de face; la-dépenfe n’a point été épargnée; les terres encore mieux labourées qi’el- les n’étoient , ont de plus été couvertes de troupeaux êt de fumier. En deux ans elles ont été améliorées au point derappoñfter dix feptiers de blé par atpent, ec d'en faire-efpérer plus encore pour la fuite. Ce luccès fera répété tontes les fois qu'il fera tenté. Multiphons nos troupeaux, nous doublerons pref- que nos récoltes en tout genre. Puifle cette utile perfuafionfrapper également les fermiers 8 les pro- priétaires | Siélle devenoitadtive &rigénérale, frélle toit encouragée nous vertions bientôt VAgricul- ture faire des progrès rapides; nous lui devrions l’a- bondance avec tous-fes effets.(Onverroit la matiere du Commerce augmentée, le payfan plus robufte St plus courageux, la population-rétablie , les im- pôts payés. fans peine, l’état plus riche, & le peu- plewplus henteux. Ces arricle eff de M. Le Roy, lieu. _éenant des chaffes du parc de Verfailles, MSA FERMES pu Ro1, (Bail des) Finances. En géné- ral , une ferme eft un £ai/ ou loiage.que l’on fait d’un fonds, d’un héritage, d’un droit quelconque, moyen- nent un,certain prix, line certaine. redevance que Jon paye tous Îles: ans au propriétaire, qui, pour FER 513 éviter le-dañger de recevoir beaucoup moins, äbans donne l’efpérance de toucher davantage, préférant, par une compenfation qui s'accorde aufli bien avec la juftice qu'avec la railon, une fomme fixe & bor: née, mais dégagée dé tout embarras, à des fommes plus confidérables achetées par les foins de la manu: tention, & par l'incertitude des évenemens, Il ne s’agit dans cet article que des droits du Roi, que l’on eft dans lufage d’affermer ; & fur ce fujet on a fouvent demandé laquelle des deux méthodes eff préférable, d’afférmer les revenus publics, on de les mettre en Régie: le célebre auteur de l’efpris des loisen a même fait un chapitrede fon ouvrage; &cquoiqu'il ait eu la modeftie de le mettre en queftion, on n’ap> perçoit pas moins de quel côté panche laffirmative par les principes qu’il pofe en faveur de la régie, On va les reprendre ici fucceffivement, pour fe mettre en état de s’en convaincre ou de s’en éloigner ; &c fi l’on fe permet de les combattre, ce ne fera qu'avec tout le refpeët que l’on doit an fentiment d’un G grand homme : un philofophe n’eft point fubjugué par les grandes réputations , mais il honore les gé.. nes fublimes & les vrais talens. Premier principe de M. le préfident de Monrefyuieu, &« La régie eftlPadminiftration d’uz bon pere de fa » rnille, qui leve lui-même avec économie & avet or- » dre fes revenus ». Obférvarions, Tout fe rédiut à favoir fi dans fa re. ge il'en coûte moins au peuple que dans la férme; & 1 le peuple payant tout autant d’une façon que de l’autre, le prince reçoit autant des régiffeurs que des fermiers : car s’il arrive dans l’un ou dans l’autre cas (quoique par un inconvénient différent)que le peuple foit furcharge, pourfuivi, tourmenté, {ans que le fouveraïn réçoive plus dans une hypothèfe que dans l’autre ; fi lé régiffeur fait perdre par fa négligence, ce que l’on prétend que le ferzier gagne par exation, la ferme 6€ la régie ne feront-elles pas également propres à produire l'avantage de l’état, dès que l’on voudra & que l’on faura bien les gouverner ? Peut-être néan- moins pourroit-on penfer avec quelque fondement , que dans le'cas d’une bonne adminiftration il feroit plus facile encore d'arrêter la vivacité. du férmr, ue de hâter la lenteur de ceux qui régiffens, eft-à: dre qui prennent foin des intérêts d’autru. Quant à l'ordre & à l’économie, ne peut-on pas avec faifonimapiner qu'ils font moins bien obfervés - dans les régies que dans les férmes, puifqu'ils font con- fiés , favoir, l'ordre à des gens qui n’ont aucun intérêt de le garder dans la perception ; l'économie À ceux qui W’ont aucune raïon perfonnellé d’épargner les frais du recouvrement : C’eft une vérité dont l'expérience a fourni plus d’une fois la démonftration. 3 | Lefouverainquipourroit percevoir par {ui-même, feroit fans contredit 4% bon pere de famille, puiqu’en exigeant ce quu lui feroit dû, il feroit bien für ne prendre rien de trop. Mais cette perception, prati= cable pour un fimple particulier 8 pour un domaine de peu détendue, eft impôffible pour un roi ; & dès qu'il agit, comme il ÿ eft obligé , par un tiers, inter- médiaire entre le peuple & lui, cetiers, quel qu'il foit, régifleur où fermier, peut intervertir l’ordre ad- mirablé dont on vient de parler, & les grands prin- cipes du gouvernement peuvent feuls le rétablir & le réhabiliter. Mais ce bon ordre qui dépend de la bonne ädminiftration , ne peut-il pas avoir lieu pour la ferme comme pour la régie, en réformanit dans l’une &t dans’aütre.les àbus dont Chacune eft fufceptible en particulier ? | s Second principe de M, de Monrefquien, » + « Par la répie le prince eft le maître de preffér où ».de-retarder\la levée des tibuts.lou fuivant fes be. #{oins, ou fuivant ceux de fes peuples», à: : S14 FER Obfervarions. 1 left également quand fès revenus font affermés, lorfque par l'amélioration de certaines parties de la recette, &c par la diminution de la dé- penfe, 1l fe met en état ou de fe relâcher du prix de baïilconvenu, ou d'accorder des indemnités. Les fa- crifices qu'il fait alors en faveur de l’Aericulture, du Commerce & de linduftrie , fe retrouvent dans un produit plus confidérable des droits d’une autre ef- pece. Mais ces louables opérations ne font ni parti- culieres à la régie, ni étrangeres à la férme; elles dé- pendent, dans l’un & dans l’autre cas, d’une admi- niftration qui mette à portée de foulager le peuple & d'encourager la nation, Et n’a-t-on pas và dans des tems d’ailleurs difficiles en France, où les prin- cipaux revenus du Roi font affermés , facrifier au bien du commerce & de l'état, le produit des droits d'entrée fur les matieres premieres , & de fortie fur les chofes fabriquées ? Troifieme principe de M. de Montefquien, « Par la régie le prince épargne à l’état les profits » immenfes des fermiers, qui l’appauvriflent d’une » infinité de manieres ». Obfervations. Ce que la ferme abforbe en profits, la regie le perden frais ; enforte que ce que l’état dans le dernier cas gagne d’un côté, il Le perd de l’autre, Qui ne voit un objet que fous un feul afpe&, n’a pas tout vù, n’a pas bien và ; il faut l’envifager fous toutes les faces. On verra que le fermier n’exigera trop, que parce qu'il ne fera pas furveillé ; que le répiffeur ne fera des frais immenfes, que parce qu’il ne fera point arrêté : mais l’un ne peut-il pas être excité ? ne peut- on pas contenir l’autre? C’eft aux hommes d’état à juger des obftacles &r des facilités, des inconvéniens &t des avantages qui peuvent fe trouver dans l’une êt dans l’autre de ces opérations ; maïs on né voit point les raifons de fe décider en faveur de la régie, auf p'omptement , auf poftivement que le fait l’auteur de l’efpris des lois, Quarrieme principe de M. de Montefquieu, « Par la régie le prince épargne au peuple un fpec- # tacle de fortunes fubites qui l’affligent ». Obervations. C’eft moins le fpeétacle de la fortune de quelques particuliers qu’il faut épargner au peu- ple, que l’appauvriffement de provinces entieres ; ce font moins aufh les fortunes fubites qui frappent le peuple, qui l’éronnent & qui l’afigent, que les moyens d'y parvenir, & les abus que l’on en fait. Le gouvernement peut en purifier les moyens | & l’on eft puni des abus par le ridicule auquel ils expo- fent, fouvent même par une chûte qui tient moins du malheur que de l’humiliation. Ce. ne font pas là des raifons de louer ou de blâmer, de rejetter ou d'admettre la régie ni la ferme. Une intelligence, une induftrie aétive, mais louable, & renfermée dans les bornes de la juftice & de l'humanité, peut don- ner au fermier des produits honnêtes, quoique con- fidérables. La négligence & le défaut d'économie rendent le régiffleur d'autant plus coupable de l’affoi- bliflement de la recette & de l'augmentation de la . dépenfe, que l’on ne peut alors remplir le vuide de Pune & pourvoir à l’excédent de l’autre, qu’en char- geant le peuple de nouvelles impoñitions ; au lieu que l’enrichiffement des fermiers laifle au moins la reflource de mettre à contribution leur opulence & leur crédit. | Cinquieme principe de M, de Montefquieu, « Par la régie argent levé pafle par peu de mains; # 11 va direétement au prince, &' par conféquent re- # vient.plus promptement au peuple ».. Oëfervations. L'auteur de l'efprisdes loss appuie tout ce qu'il dit, fur la fuppoñtion que Le réguffeur, ÉO EE qui n’eft que trôp communément avare de peines &c prodigue de frais, gagne & produit à l’état autant que le fermier, qu'un intérêt perfonnel &c des enga- gemens confidérables excitent fans cefle à fuivre de près la perception. Maïs cette préfomption eft- elle bien fondée ? eft-elle bieñ conforme à la con- noifflance que l’on a du cœur & de l’efprit humain, & de tout ce qui détermine les hommes ? Eft-il bien vrai d’ailleurs que les grandes fortunes des fermiers interceptent la circulation ? tout ne prouve-t-il pas le contraire ? Sixieme principe de M. de Monrefquieu. & Par la régie le prince épargne au peuple unie ins » finité de mauvaifes loïsqu'exige toijours de lui l’a- » varice importune des fermiers, qui montrent un » avantage préfent pour des réglemens funeftes pour » l'avenir ». Oëfervations. On ne connoît en finances, comme en d’autres matieres, que deux fortes de lois, les Zois Jaites & les lois à faire ; il faut être exa@ À faire exé- cuter les unes, il faut être réfervé pour accorder les autres. Ces principes font inconteftables; mais con- viennent-ils à la régie plus qu'à la ferme? Le fer- mier, dit-on, va trop loin fur les lois à faire ; maïs le régiffeur ne fe relâche-t-il pas trop fur les lois qui font faites ? On craint que l'ennemi ne s’introdunife par la breche , & l’on ne s’apperçoït pas que l’on à laifé la porte ouverte, Septieme principe de M. de Montefquieu. « Comme celui qui a l'argent eft totjours le maî- » tre de l’autre, le traitant fe rend defpotique {ur lé » prince même ; il n’eft pas légiflateur, mais il le »# force à donner des lois ». Obfèrvations. Le prince a tout l'argent qu’il doit avoir, quand il fait un bail raifonnable & bien en- tendu : 1l laiflera fans doute aux férriers qui fe char- gent d’une fomme confidérable, fixe, indépendante des évenemens par rapport au Roi, un profit pro- portionné aux fruits qu’ils doivent équitablement at- tendre & recueillir de leurs frais, de leurs avances, de leurs rifques &r de leurs travaux. Le prétendu defpotifme dx fermier n’a point de réalité. La dénomination de traitant manque de juf- teffe : on s’eft fait illufon fur l’efpece de crédit dont il joïit effe@ivement ; il a celui des reflources, & le gouvernement fait en profiter, Il ne fera jamais defpotique quand il fera queftion de faire des lois; mais 1l reconnoitra toûjours un maître, quand il s’a- gira de venir au fecours de la nation avec la fortune même qu’il aura acquile légitimement. Huitieme principe de M. de Montefquieu. « Dans les républiques, les revenus de l’état font pupaques, . # prefque toïjoursen régie: l’établiffement contraire » fut un grand vice du gouvernement de Rome. Dans » les états defpotiques où la régie eft établie, les peu: » ples font infiniment plus heureux, témoin la Perfe » &c la Chine, Les plus malheureux font ceux où le # prince donne à ferme fes ports de mer &fes villes » de commerce. L’hiftoire des monarchies eft pleine » de maux faits par les traitans ». | Obfervations. Ce feroit un examen fort long , très- difficile, & peut-être aflez inutile à faire dans l’ef- pece préfente , que de difcuter & d’approfondir la queftion de favoir ce qui convient le mieux de la ferme ou de la régie, relativement aux différentes fot- tes de gouvernemens. Il eff certain qu’en touttems, en tous lieux, & chez toutes les nations , il faudra dans l’établiflement des impoñtions, {e tenir extrè- mement en referve fur les nouveautés ; & qu'il fau- dra-veiller dans la perception, à ce que tout rentre exaftement dans le thréfor publie; ou, f l'on veut, dans celui. du fonverain. L | … Refte à favoir quel eft le moyen le plus convena- toyens eénrichis. Neuvieme réflexion de M. de Montefquieu. « Néron indigné des vexations des publicains, # forma le projet impofñlible & magnanime d’abolir >» les impôts. Il n’imagina point la régie : 1l fitquatre # ordonnances ; que les-lois faites contre les publi » cains , qui avoient été jnique-là tenues fecretes , » feroient publiées ; qu'ils ne pourroient plus exiger # ce qu'ils avoient négligé de demander dans l’année ; s qu'il y auroit un préteuf établi pour juger leurs # prétentions, fans formalité ; que les marchands ne » payeroient rien pour les navires. Voilà les beaux » Jours de cet empereur », Obfervations. Il paroït par ce trait de Néron, que cet empereur avoit dans fes beaux jours le fanatifme des vertus, comme il eft depuis tombé dans l'excès des vices. L'idée de l’entiere abolition des impôts n’a jamais pù entrer dans une tête bien faine, dans quelques circonftances qu'on la fuppofe, detems, d'hommes, & de lieux. Les quatre ordonnances qu'il fubffitua fagement à cette magnanime extravagance, approchoient du moins des bons principes de Padminiftration. Nous avons fur les mêmes objets plufieurs lois rendues dans le même efprit, 8 que l’en pourroit comparer à celles-là. S'il arrive fouvent que les réolemens de- viennent illuloires, & que les abus leur réfftent, c’eft que le {ort de la fagefle humaine eft de pécher par le principe , par le moyen, par l’objet, ou par l’évenement. Arricle de M. PESSELIER. L’impartialité dont nous faifons profeffion, & le defir que nous avons d'occafionner la difeuffion & l’éclaircif- fèmenct d'une queffion importante, nous a engagés à 17- férer ici cet article, L'Encyclopédie ayant pour but prin- cipal l'utilité © l’infirution publiques, nous inférerons & l'article RÉGIE, fans prendre ausun parti, routes les raifons pour & contre qu’on voudra nous faire parvenir fur l’objet de cet article, pourvé qu’elles foient expoées avec la fagefle & la modération convenables. ._ FERMES, (Cinq groffes), Finances, Lorfque‘M. Colbert eut formé le projet, bien digne d’un auf stand génie, & d’un miniftre aufh bien intentionné pour le Commerce, d’affranchir Pintérieur du royau- me de tous ies droits locaux qui donnent des entra- ves à la circulation, & de porter fur les frontieres tout ce qui devoit charger ou favonfer, étendre ou reftreindre, accélérer ouretarder le commerce avec l'étranger, 1l trouva dans un plan auffi grand, auf beau, auf bien concü, les obftacles que rencontrent ordinairement dans leur exécution , les entreprifes qui contredifent les opinions reçües; &, ce qui n’eft pas moins ordinaire dans ces fortes de cas , il eut à furmonter les oppofñtions de ceux même qu'il vou- loit favonfer le plus, en les débarrafant par luni- FER S1$ | formité du-droit & par la fimplicité de la perception, de tout ce qui|peut retarder lexprogrès d’un com- merce fait pour les enrichir, par la facilité de leur communication avec les autres nations. La plüpart des provinces frontieres fucceffivement réunies à la couronne ; voulurent garder leurs an ciennes lois fur l’article des doïares, commefur plu fieurs autres.objets. Leurs anciens tarifs, tout em- barraffans , tout compliqués , tout arbitraires qu'ils font, leur-devinrent chers dès que l’on voulut les anéantir : elles ne voulurent point recevoir celui qui leur fut-propofé; & par-une condefcendance auffi fage que tout Je refte, M. Colbert ne voulut-rien forcer, parce qu'il efpéroït tout-gagner par degrés. Le tarif de 1664 n'eut donc lieu,que dans les pro vinces de l’intérieur, qui confentirent à l’admettre d'autant plus volontiers, qu'étant de tous les tems fous notre domination , elles tenoient moins à des opinions étrangeres au plan général de l’adminiftra- tion. Ces provinces que l’on défigne &r que l’on con- noît en finances fous la dénomination de provinces de cing groffes fermes, {ont la Normandie, la Picaräie, la Champagne, la Bourgogne, la Breffe, le Poitou, le pays d’Aunis, le Berri, le Bourbonnois, Anjou, le Maine, Thouars & la châtellenie de Chantoceaux, & leurs dépendances. On perçoit, tant à l’entrée de ces provinces qu’à la fortie , 1°. les droits du tarif de 1664, général pour toutes les marchandifes : 2°. ceux du tarif de 1667, qui portent fur certains objets dans lefquelson a crû devoir, depuis le tarif de 1664, faire différens changemens ; & les réglemens poftérieurs , qui ont confirmé, ou interpreté, ou détruit Les difpoñrions des premieres lois, Aux provinces de cinq groffes fermes on oppofe celles qui font connues fous lemom de provinces ré. putées étrangeres, parce qu'en effet ellesle font par rapport aux droits dont il s’agit dans ces articles, quoique d’ailleurs foûmifes au même fouverain. Ces provinces font la Bretagne, la Saintonge, la Guienne, la Gafcogne , le Languedoc , la Provence, le Dauphiné, le Lyonnois, la Franche-Comté , la Flandre, le Hainault, & les lieux en dépendans, Dans ces provinces on perçoit les droits, 1°, des tarifs propres à chacune en particulier ; car toutes en ont un, quoique la dénomination & la quotité du droit varient, ainfi que la forme de la perception: 2°. les droits du tarif de 1667, qui portent fur des objets fi intéreffans pour notre commerce, que M. Colbert , lors même qu'il déféra fur tout le refte aux préjugés de ces provinces pour leurs anciens tarifs, ne jusea pas à-propos de les laïffer libres fur les ar- ticles dont il s’agit dans le tarif de 1667, & dans les réglemens qui font intervenus dans le même efprit. En faifant topographiquement la comparaifon des provinces de c7q groffes fermes & de celles répurées étrangeres, on s’appercevra que celles de czg groffes fermes forment dans l’intérieur du royaume une pref- qu’ile dont les provinces réputées étrangeres font le continent ; & que fans la Normandie, qui a reçù le tarif de 1664, elles formeroient une île toute entiere ifolée par rapport aux droits du Roi, quoique com- prife fous la même dénomination. Voyez TRAÎTES, où cette matiere fe trouvera développée d’une façon plus détaillée. Arricle de M, PESSELIER. FERME, (4 l'Opera.) c’eft la partie de la décora- tion qui férme le théatre , &c’eft de-là qu’elle a pris fon nom. La ferme au théatre de l'opéra de Paris, fe place pour l'ordinaire après le fixieme chaflis: elle eft partagée en deux. On poule à la main chacune de fes deux parties fur deux chevrons de bois qui ont une rainure, & qui font placés horifontalement {ur un plan cher du théatre, Des cordes qui font atta= S16 FER chées à l'un des côtés du mur, 8 qu'on bande par le moyen dun tourniquet qui eft placé du côté oppolé, #oütiennent la ferme par.en-haut. On donne à cescor: des le nom de baridape, a Cette maniere de {oûtenirla ferre, qui a d'abord parufacile, entraine plufieurs inconvéniens ; & ôte une partie du plaifir que feroit le fpe@acle. 12. Les cordes d’un changement à l’autre font jettées à la main , 6e troublent prefque toûjours la répréfenta- tion, 2°, Elles reftent quelquefois après que la férme a été retirée , & cette vüe coupe la perfpe@ive &. Ôte l'illufion, 3°. Le bandage étant d’une très-srande longueur, il ne fauroit jamais être aflez fort pour que la ferme foit bien flable; enforte que pour peu qw'on-la touche en paffant , elle remue, & paroît prête à tomber. Il feroit très-aifé de remédier à tous ces inconvéniens , & les moyens font trouvés depuis long-tems. Une multitude de petites parties détcette efpece trop négligées, diminuent beaucoupile char- me du fpeétacle; mieux foignées, elles le rendroient infiniment plus agréable. La beauté d’un enfemble dépend toñjours'de lattention qu'on donne à {es moindres parties. Voyez MACHINE, DÉCORATION ; &c. (B) FERME-A-FERME, ( Manége.) expreffion par la- quelle nous défignons l’a@ion d’un cheval qui manie ou qui faute en une feule & même place ; ainfi nous dilons , demi-air de férme-2-ferme, balotades de ferme- a-ferme, cabrioles de ferme-a-fèrme, 8cc. (e FERME , (Charpenrerie.) eft un aflemblage de plu- fieurs pieces de bois, dont les principales font les arbalétriers, le poinçon , les effeliers & antrairs ; elle fait partie du comble des édifices. Voyez La figure, Planche du Charpentier. FERME, jeu de la férme avec des dés, (Jex de ha- fard.) On fe fert dans ce jeu de fix dés, dont chacun n'eft marqué que d’un côté, depuis un point jufqu’à fix; enforte que le plus grand coup qu’on prie faire après avoir jetté les fix dés dehors du cornet, eft de vingt-un points, Chaque joueur met d’abord {on en- jeu, ce qui forme une poule on maffe plus ou moins grofle, fuvant la volonté des joueurs, dont le nom- bre n’eft point fixé. Enfuite ontire au fort à qui aura le dé, qui pañfe fucceffivement aux autres joïeurs, en commençant à la droite de celui qui a joué le pre- mier, & de-là en-avant. Ontire autant de jettons qu’on a amené de points , maïs il faut pour cela que la poule les puifle fournir ; car s’il yen a moins que le joueur n’en a amené ; 1l eft obligé de fuppléer ce qui manque. Si, par exemple, il amene fix, & qu'il n'y en ait que deux à la poule, il faut qu'il y en mette quatre; c'eft pourquoi il eft avantageux de joüer des premiers, quand la poule eft bien grafle. Si on fait un coup-blanc, c’eft-à-dire fi aucun des fix dés ne marque, ce qui eftaffez ordinaire, on metun jetton à la mafle, & le dé paffe au voïfin à droite. Le jeu init lorfqu’on amene autant de points qu'il y a de jettons à la poule. Quelque rare que {oit le conp de vingt-un, je ne laïflerai pas d’obferver qu'il feroit gagner toute la poule à celui qui auroit eu affez de bonheur pour le faire. Il y a d’autres manieres de jouer ce jeu, comme quand un des joüeurs devient fermier, c’éft-à-dire fe charge de la ferme ou poule, quieft pour lors à part. Tréy. di, Mais pour favoir quel eft le nombre qu'il y a le plus à parier qu’on amenera avec les x dés, appliquez ici les principes de calcul expofés au 101 DÉ (analyfe des hafards). Voyez auffi RAFLE. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FERME, (Jez.) jeu de cartes qui fe joue jufqu’à ‘dix ou douze perionnes, & avec le jeu complet de 32 cartes, excepté qu'on en Ôte les huit &c les fix, à la referve du fix de cœur, à caufe que par les huit x lesfix on feroit trop facilement feize , qui eft le nômbre fatal pat lequel on gagne le prix de [a ferme ë l’on dépoffede le fermier. Le fix de cœurqui refte, s'appelle Ze brillant, par excellence , & gagne par préférence à caîtes égales , tous les autres joueurs , & même celui qui à la primauté, Arscle de M le Chevalier DE JAUCOURT. * FERMENT 04 LEVAIN, (Chimie. ) on appelle ainfi un corps a@uellement fermentant, qi Ctant mêlé exaétement & en petite quantité dans une mafle confidérable de matiere fermentable détermine dans cette matiere le mouvement de fermentation. Foyez la théorie de l'aîtion des férmens ; aux articles FER MENTATION , PAIN, VIN, VINAIGRE , PUTRÉ- FACTION. (b) #2 : FERMENT, (Econ. anim. Med.) Les anciens chi- imiftes défignoïent par le nom de ferment; tout ce qui a la propriété, par fon mélange avec une matiere de différente nature, de convertir, de changer cette matiere en fa propre nature, | Un grain de blé femé dans un terroir bien fertile, peut produire cent grains de fon efpece: chacun de Ceux-ci peut en produire cent autres, par la même vertu de fécondité ; enforte que du feul premner grain il en réfulte une multiplication de dix mille, dont chacun a les mêmes qualités que celui qui en a été le germe. Chacun a la même quantité de farine, la même difpofition à former un très-bon aliment ; cependant il a été produit dans le même terrein, en même tems, paru les plantes du blé, des plantes d’une qualité bien différente, telles que celles de ty- timale, d’euphorbe, de moutarde. Il y a donc quel- que chofe dans le grain de blé , qui a la faculté de changer en une fubftance qui lui eftpropre, Le fue que là terre li fournit; pour peu qu'il manquât à cette faculté , il ne fe formeroit point de nouveau grain de blé. Ce même fuc reçû dans un germe dif- ferent, feroit changé en une toute autre fubftance, jamais en celle du blé : aïinfi dans un grain de cette efpece , dont la matiere produ@rice n’a guere plus de volume qu’un grain de fable, fi on la dépouille de fes enveloppes, de fes cellules, fe trouve renfermée cette puiflance, quu fait la tranfmutation du fuc de la terre en dix mille plantes deblé; par conféquent cette puiflance confifte à convertir en la fubftance propre à cette forte de grain , un fuc qui lui eft abfo- lument étranger avant la tranfmutation. C’eft à cette puiflance que les anciens chimiftes avoient donné le nom de fermenr. Ils avoient confé- quemment tranfporté cette idée aux changemens qui {e font dans le corps humain , quelque grande que {oit la différence; mais ils font excufables, parce qu'ils navoient pas encore connoïflance de la véri- table ftruêture des parties de la méchanique par la- quelle s’operent les fonétions dans l’économie ani- male ; parce qu’ils ignoroïent qu'il exifte dans cette économie , une faculté par laquelle il n’eft prefque ‘aucun germe de matiere qui ne puifle être converti en notre propre fubftance, qui ne puifie fournir les élémens du corps humain. Qui efl-ce qui pourroit imaginer de premier abord, qu'il peut être produit, ce corps animal, de farine êt d’eau ? cependant un grand nombre d’enfans ne fe nourriflent que de cela, & ils ne laïflent pas de croître, & par conféquent d’augmenter le volume & le poids de leur corps. L’homme adulte peut éga- lement fe borner à cette nourriture, enforte que de farine & d’eau 1l peut être produit encore dans les organes propres au fexe mafculin , par la faculté at- tachée aux aétions de la vie, une véritable liqueur féminale, qui étant reche dans les organes propres à la femme, peut fervir à former, à reproduire un individu du même genre, mâle où femelle, en un mot un autre homme. Cette liqueur eft ainf confi- dérée comme un ferment: on peut dans ce cas tie e FER fe terme, quelque peu convenable qu'il foit à Fidée qu'il doit exprimer. " Mais fi on entend par férmenr, avec plufieurs au- teurs modernes, ce qui étant mêlé avec une autre fubftance, a la propriété d'y faire naître un mouve- ment inteftin quelconque, & de changer par cet effet la nature de cette fubftance, ou fi on ne veut appeller fermer que ce qui peut donner lieu au com- bat qui femible fe faire entre des fels de nature oppo- fée mêlés enfemble ; alors ilne peut que s’enfuivre des erreurs d’un terme employé d’une maniere auffi impropre : 1l convient donc d'en bannir abfolument lufage pour tout ce qui a rapport à l expofition de l’e- conomie animale, dans tous les cas où1l peut être pris dans l’un des deux fens qui viennent d’être mention- nés, attendu que ce n’eft pas feulement à la théorie de l’art qu’eft nuifible l'abus des comparaifors tirées de la Chimie , à l’égard des différentes opérations du corps humain ; cet abus porte effentiellement fu la pratique de la Medecine , entant qu'il lui fournit des regles, qu'il dirige les indications & les moyens de les remplir. Ainfi Vanhelmont qui fuppofoit différens férmens, auxquels 1l attribuoïit cela de commun, de contenir un principe ayant la faculté de produire une chofe d’une autre, generandi rem ex re ({mago ferm. impræg: mai]. femin. $. 23. 8. 12.) ; qui établifloit un ferment de ce genre particulier à chaque efpece d’animal & à l’homme, pour changer en fa nature les liquides qu’on lui affocioit par la voie des alimens ou de tou- te autre maniere ; qui plaçoit dans la rate un acide digefüf d’une nature finguliere, fufceptible d’être porté dans l’eflomac par les vaifleaux courts, pour donner de l’aétion au ventricule, & la vitalité aux alimens : calor effic. non diger. $. 30. Vanhelmont, par cette hypothèfe, donnoït lieu à ce qu'on en ti- rât la conféquence, que les acides font les feuls moyens propres à exciter, à favorifer la digeftion. Voyez ce fentiment réfuté à larricle FAIM. Voyez-en une réfutation plus étendue dans /es œuvres de Bohn, Circ. anat. phyfiol. progymn. x, & dans l’arcicle fuiv. FERMENTATION, (ÆEcon. anim. Med.). Sylvius (Prax. med.) attribuoit la caufe des fie- vres au fuc pancréatique ; conféquemment il em- ployoit pour les détruire un fel volatil huileux , for- mé de l’efprit de fel ammomiac & d’aromates :1l1m- putoit aufü à l'acide la caufe de la petite vérole, prax. med, app. d’où il s’enfuivoit qu'il traitoit ces mala- dies avec des alkalis abforbans , 6. Dans l'idée que la pleuréfie eft canfée par un ferment acide qui coa- gule le fang, Vanhelmont fit fur lui-même une fu nefte expérience, en fe traitant pour cette maladie avec les oppofés des acides. C’eft ce que rapporte fon fils dans la préface des ouvrages de cet auteur. Aïnf il eft arrivé de-là que les opinions de ces fa- meux maîtres ayant été tranfmifes à un grand nom- bre de difciples, s’acquirent pour ainf dire le droit de vie & de mort fur le genre humain. Les fermens de toute efpece, falins, acides, alkalis, neutres, de- vinrent la bafe de la théorie & de la pratique mé- dicinale. Defcartes (de homine) ; & Vieuflens (de corde) , les adopterent pour rendre raïfon du mou- vement du cœur & de la circulation du fang ; & fur la fin du fiecle dernier , on en étendit Le domaine jufque fur l’opération des fecrétions: ces différens fermens placés dans les divers collatoires » parurent fuffifans pour expliquer toute la différence des hu- meurs féparées du fang. Voyez CHYLE, Dices- TION , CIRCULATION, CŒUR, SANG, SECRÉ- TION. Ainfiles férmens introduits dans toutes les par- ties du corps pour toutes Les fonétions , détermine- rent les moyens relatifs, propres à en corriger les vices ; par conféquent ce qui n’étoit que le fruit de limagination fans aucune preuve bien déterminée ; Tome VI. FER 517 ne laïffa pas d’être recû comme tin principe, d'après léquel on fixoit les moyens de contribuer à la cons fervation dés hommes. | | Maïs l'amour de la nouveauté ne laiffe pas fubf£s ter long-tems l'illufion en faveurd’une Opinion; nous” ferionStrop heureux, f l’éxpérience n’avOit pds appris qu'on né renonce le plus fouvent À une erreur; que pour pañler & une autre quelquefois plus dangéreute. La lumiere de la vérité peut feule fixer l'efprit bu main, lorfqu’elle eft connue ; mais le voile éjui la dé-’ robe à nos yeux ef fi épais, qu’il eff très-rare que no+ tre foible-vüe foit frappée du petit nombre de raifons qui le traverfent: Voyez, pour l’hiftoire dés férmèns dans l’économie animale} les commentaires de Boër2 haave für fes inftitutions, avec les notes de Haller, palfim : les effais de Phyfique fur l'anatomie d'Heifter par M. Senac. Woyez auf FERMENTATION (Eco. nornie animale, ), où 1l eft traité aflez aû long des. effets prétendus des différens /érrsezs dans la plüpart des fonétions du corps humain, (d) FERMENTAIRES , f. m: plur. (Af£. éccléf.) fera mentarii Où férmentacei , nom que lés Catholiques d'Occident ont quelquefois donné aux Grets dans leurs difputes réciproques fur la matiere de l’eucha= rifie ; parce que ceux-ci dans la confécration fe fer- vent de pain férmenté, ou avec du levain. On croit que les Latins n’ont donné ce nôm aux Grecs, que parce que les premiers les avoient äppellés par déri- fon azyrnites. Voyez AZYMITES. (G) | FERMENTATION , f. f. (Chämie.) ce mot tiré du latin férvere, bouillir , à été pris par les chimiftes poftérieurs à Paracelfe, dans un fens beaucoup plus étendu que celui que lui ont donné les anciens phi- lofophes, Ces derniers ne l’ont employé que pour exprimer l’altération qu'éprouve la farine pétrie avec de l’eau, celle qui conffituela pâte levée. Foy. PAIN. Les modernes, au contraire, ont fait de ce mot une dénomination générique, fous laquelle ils ont compris tout bouillonnement ou tout gonflement excité dans un corps naturel par la diverfe apita tion de fes parties, Willis , de fermentarione, la définit ainfi. La fermentation a été dans la do&trine chimique & médicinale du fiecle dernier, ce qu’a été dans la: Phyfique la matiere fubtile, & ce qi’eft aujourd’hui l'aftrattion : elle eut auffi le même fort que agent cartéfien, que la quäliténewtonienne , & en général que tous les principes philofophiques les plus folide- ment établis, La foule des demi-chimiftes , la Tourbe entendit mal la doëtrine de la férmentarion, lemploya: detravers , l’altéra, la défigura ; les Medecins en f- rent fur-tout l’'ufage le plus ridicule pour expliquer Péconomie animale. Voyez FERMENTATION (Mea,) 6 MEDECINE. L Les notions que nous ont donné dé la férmenra= tion {es premiers promoteurs, Vanhelmont, Dele- boë, Billich, Willis, Tachenius, & fur-tout notre célebre Becher, n’ont eu befoin que d’être expli= quées, mieux ordonnées ; rendues plus diftinétes,' plus philofophiques , pour nous fournir un principe auf fécond qu'évident, d’un grand nombre de phé-= nomenes chimiques, de l’efflorefcence des pyrites sf de la décompofition de certaines mines, & peut- être de leur génération ; de la putréfa@tion de l’eau commune , des diverfes altérations de tous les fucs animaux hors du corps vivant, & vraïflemblable- ment de leur formation & de leurs différens vices dans l’amimal vivant; de la germination des grains, de la maturation des fruits, du changement des fub- ftances muqueules en vin, de celui des matieres acelcibles en vinaigre, de la putréfaion , de la moïfiflure , de la vappidité des liqueurs fpirituenfes, de leur gtaiffer, de leur tourner ; de la rancidité des huiles, &c. J’omets à deffein le mouvement violent: Vvy 518 FER & tüumultuenx, occafonñé dans un fiquide par lu nion de deux fubftances mifcibles | opérée dans le fein de ce liquide. Les chimiftes exaéts ont diffingué ce phénomene fous le nom d’efervefcence, Voyez Er- FERVESGENCE. | Is ont confacté le-mot de fermentarion, pour ex- primer lation réciproque de divets principes pré- exutans.énfemble dans un feul & même corps natu- rel fenfiblement homogene, y étant d’abord cachés, oïfifs., inerts, & enfuite développés, réveillés, mis en jeu, | Le monvement qu'uñe pareille réaétion oécafion- ne eft infenfible , comme celui qui conftitue la liqui- dité. Il ne faut pas le confondre avec le bouillonne- ment fenfible, qui accompagne quelquefois les fer- mentations ; ce dernier n’eft qu’accidentel, il ne con- tribue vraiflemblablement en rien à l'ouvrage de la fermentation, . Les fujets fermentables font dés corps de l’ordre des compofés, ou des furcompolés (voyez MIXTION) dont le tu eft lâche , Zaxæ compagis, & à la compo- fition defquels concourt le principe aqueux. La fin.ou l'effet principal & eflentiel de la fermer tation, C’eft la décompofñtion du corps fermentant, la féparation & l’atténuation de fes principes. Becher & Stahl ont penfé que les principaux produits des Jermentations lemieux connues, étoient dûs à une ré- compofition, Nous expoferons ailleurs les raifons de doute que nous ayons contre cette opinion, Voyez FERMENTATION VINEUSE ax mor VIN. - I paroît clair à-préfent que l’effervefcence, qu'il eùt été toûjours utile de diffinguer de la fermentation, ne füt-ce que pour la précifion de l’idiome chimique, eneft réellement diftinéte par le fond même des cho- fes; car l’effence , le caraétere diftindif de leffervef- cence, confifte précifément dans le bouillonnement d’une liqueur, occafonné par une éruption rapide de bulles d’air: ce phénomene extérieur eft au con- traire accidentel à la fermentation, enforte qu'on s’ex- primeroit d’une façon affez exaéte, en difant que cer- taines férmentations , celle des fucs doux par exem- ple, fe font avec effervefcence, & que quelques au- tres, telles que la plüpart des putréfa@tions, fe font fans effervefcence. La férmentation du chimifte qui confidere les ob- jets qui lui font propres, srfus € in cute, eft donc ab- folument &r effentiellement diftinéte de leffervefcen- ce ; on ne peut les confondre, les identifier, que lorf- qu’on ne les confidere que comme mouvement intef- tin fenfible. Sous cet afpeét, le phénomence eft en effet le même; c’eft proprement une effervefcence dans les deux cas. Cette difcuffion nous a paru néceflaire pour fixer la véritable valeur du mot férmencation, employé dans un grand nombre d'ouvrages modernes où 1l eft pris indifféremment, foit danse fens ordinaire que nous donnons à celui d’effervefcence (F. EFFERVESCEN- CE), foit dans celui que nous attachons nous-mêmes au mot fermentation, {oit enfin pour exprimer le phé- nomene accidentel à notre fermentation , que nous venons de regarder comme une véritable effervef- cence. Il eft évident d’après les mêmes notions, qu'il ne faut pas comprendre dans l’ordre des férmentarions lébullition ou le mouvement inteftin fenfible, qu’é- prouve'un liquide par la plus grande intenfité de cha- leur dont il foit fufceptible, comme plufieurs auteurs l'ont fait, & comme on feroit en droit de le faire d’a- près la définition de Willis; car ébullition differe fi eflentiellement des autres efpeces de mouvement in- teftin, qu’elle n’eft pas même un phénomene chimi- que: en effet l’ébullition n’eft que le degré extrème de la liquidité ; or la liquidité n’eft pas une propriété ghunique, Voyez l'article CHIMIE, page 412. col, pre- miere ; pag. 414; col, féconde , & page 418. col. prém) D'ailleurs l’ébullition comme telle ne produifant pas néceflairement dans le corps bouillant une alté- ration intérieure ou chimique , puifqu’elle eft aufi bien propre aux corps fimples ou inaltérables qu’= aux corps compofés, il eff clair qu’elle n’a de com: mun avec la fermentation qu’un phénomene extérieur & purement accidentel, Revenons à la férmentarion proprement dite. Les différentes altérations fpontanées dont nous avons donné la lifle au commencement de cet article, en font féellement des efpeces ; & tout ce que nous avons dit jufqu’a préfent de la frmentarion en géné. ral , convient également à chacun de ces phénome- nes en particulier: mais il n’eft qu'un petit nombre de fermentations qui ayent été {oignenfement étu. diées, & qui foient fufifamment connues ; favoir, celles qui produifent le vin, le vinaigre, & l’alkali volatil fermenté, qui portent les noms de férmenta- tion vineufe , de fermentation acéreufé, & de purréfac- tion, & celle des farines pétries avec de l’eau , qui n’eft qu'une branche ou variété de la premiere. Ce {ont-là les férmentations par excellence, les feules même qui ayent été examinées ex profeffo , les uni- ques efpeces qui rempliffent toute l’extenfion qu’on donne communément au phénomene général énon- cé fous le nom de férmentarion. Les autres efpeces ne s'y rapportent que par'une analogie qui paroît à la vérité bien naturelle, mais qui n’eft pas encore éta- blie démonftrativement. On a fur les premieres e£ peces des connoiffances pofitives; & {ur les autres ieulement des vérités entrevûes, des prétentions. Nous croyons que c’eft en traitant des trois ef- peces de fermentations généralement reconnues par les Chimiftes, que nous devons examiner toutes les queflions particulieres qui appartiennent à ce fujet, ë&t dont l’éclairciflement eft néceflaire pour l’expo- fer d’une mamiere fatisfaifante, En nous en tenant à des confidérations générales, qui feules convien- droient à cet article , nous refterions dans un vague qui r’apprendroit rien ; car les généralités vagues n'apprennent rien, non-feulement parce que les vé- rités abftraites ne trouvent accès que dans peu de têtes, même prifes dans l’ordre de celles qui s’occu- pent par état des faits particuliers dont ces vérités {ont formées, mais encore parce que la précifion qu’elles exigent, retranche & châtre beaucoup d’1- dées qui porteroïent le plus grand jour fur le fujet traité, mais qui ne repréfentent pas des propriétés exaétement communes à la totalité des objets, em- braflés par une contemplation générale, Nous nous propolons donc de répandre tout ce qui nous refte à dire fur le fajet très-curieux que nous venons d’ébaucher, dans les arvicles particuliers Vin, PAIN, VINAIGRE, PUTRÉFACTION, Voyez ces arti-. cles. (b) À FERMENTATION, ( Econ. amim.) la fignification de ce mot a été reftrainte fur la fin du fiecle dernier feulement ; il n’eft employé aujourd’hui, parmi les Chimiftes , les Phyficiens, & les Medecins inftruits, que pour exprimer un mouvement inteftin, qui peut être produit , fans aucune caufe externe fenfble, dans {a plüpart des végétaux & dans les feuls corps de ce genre, dont les parties intégrantes étoient au- paravant dans un état de repos ; mouvement par le moyen duquel il s’opere un changement dans la fub- ftance de ces corps, qui rend leur nature différente de ce qu’elle étoit , enforte qu'il leur donne une pro- prièté qu'ils n’avoient pas auparavant , de fournirun efprit ardent, où un efprit acide: d’où s’enfuit la di- fnétion de la fermentation en vineufe &r en acétenfe. Voyez FERMENTATION (Chimie). Îl n’eft plus queftion de fermentation dans la théo- tie de la Medecine, que relativement à l’idée qui “viéht d'en être donnée, & à ce qui en fera dit à la “fin de cet article: on évite ainf la confufion, qui ne “pourroit manquer de fuivre de l'abus de ce terme "dont on faifoit ufage indiftinétement (depuis Vanhel- “mont jufqu’à l’extinéhion de la fete des medecins, ue l’on appelloit chimique), pour exprimer toute ST de mouvement inteftin, excité par un principe quelconque , dans les parties intéprantes de deux corps de nature hétérogene telle qu’elle foit, avec tendance à la perfe@ion des corps fermentans, ou à Leur transformation en des fubffances différentes de ce qu'ils étoient ; enforte que la raréfation, l’effer- vefcence , la putréfatton, n'étoient aucunement diftingués de la férrertrarion ; & étoient prifes affez indifféremment les unes pour les autres. C’eft ainfi que Willis tepréfente la férmentarion ; dans la défini tion que l’on en trouve dans le traité de cet auteur fur cefuet, defermentat. cap. uj. définition aufli vague, auf peu approprice , que le fyftème auquel elle fer< voit de principe pour rendre raifon de tous les phé- nomenes de l’économie animale, Les différentes férmentations qué l’on imaginoit dans les différens fluides du corps humain; les fer- mens, c’eft-à-dire les fubftances auxquelles on attri- buoït la propriété de produire des mouvemens intef- tins, par leur mélangée dans nos humeurs, étoient en effet les grands agens auxquels on attribuoit toutes les opérations du corps humain, tant dans l’état de fanté que dans celui de maladie. Voyez FERMENT. Telle étoit la bafe de la théorie de Vanhelmont, dé Sylvius Deleboë, de Viridetus, & de toute la fete chimique, qui varioient dans les combinaïlons des fermens & de leur a@ion: mais ils fe réumifloient tous en ce point principal, qui confiftoit à ne raifon- ner en Medecine que d’après l’idée des mouvemens inteftins dans les humeurs, à ne faire contribuer pour “ainf dire en rien l’aétion des parties organiques dans les diverfes fonétions du corps humain. C’eft pourquoi ces medecins ont été mis au nom- bre des humoriftes. Voyez HUMORISTES. Et pour les diftinguer parmi ceux-là qui font partagés en diffé- rentes fetes, on a donné le nom de /érmentareurs à ceux dont il s’agit ici: €’eft au moins ainfi qu'ils ont ‘été défignés dans plufñeurs ouvrages modérnes, tels que ceux de M. Senac, célui de M. Quefnay fur les fievres continues, é°c. L’hifoire des erreurs n’eft peut-être pas moins utile, & ne fournit pas moins d'inftruétion que celle : des vérités les plus reconnues ; ainfi il eft à-proposde ne pas fe borner ici à donrier une idée générale des “opimions des fermentateurs qui ont joué un fi grand ‘rôle fur le théatre de la Medecine moderne, il côn- vient encore d’y joindre une expofition particuliere de ce qui peut fervir à faire connoître l’effentiel dé leur dotrine , & de la maniere dont elle a été réfu- ‘tée, pour ne rien laifler à defirer fur ce fujet, dans un ouvrage fait pour tranfmettre à la poftérité tou- tes les produétions de l’efprit humain connues de nos jours, toutes les opinions, tous les fyftèmes fcienti- fiques qui font jugés dignes par eux-mêmes ou par la réputation de leurs auteurs d’être relevés, & que Ton peut regarder comme des vérités à cultiver, ou comme des écueils à éviter : ainfi après avoir rap- pellé combien on a abulé, par rapport à la fermer tation , & du terme & de la chofe, 1l féra à - propos de terminer ce qu'il y a à dire fur ce fujet concer- nant la phyfique du corps humain, en indiquant la véritable &c la fenle acception fous laquelle on em- ploye & on reftréint aujourd’hui le mot de férmenta- #07 dans les ouvrages de Medecine. . C’eft principalement à l'égard de l'élaboration des alimens dans les premieres voies , & de leur conver- fon en un fluide animal, que les partifans de la fer- mentation mal-conçüe fe font d’abord exercés à lui Tome FI, FER $19 attribuer toute l'efficacité imaginable ; c’eft confé: quémment dans l’eftomac & dans les inteftins qu'ils commencerent à en établir les opérations: d’où ils étencirent enfuite fon domaine dans les voies du fang &c dans celles de toutes les humeurs du corps humain, par un enchaînement de conféquences qui réfultoient de leurs principes, toûjours ajuftés à fe prêter à tout ce que peut fuggérer l'imagination , lorfqu’elle n’eft pas reglée par le frein de l'expé- rience, C’eft une opinion fort ancienne, qtie l’acide fert à la chylification. Galien fait mention d’un acide pour cet ufagé,, dans fon traité de 4fu partium, lib: IP. cap. vi. 1 conjeéture qu'il eft porté de la rate dans l’eftomac une forte d’excrémment mélancholique Où d'humeur atrabilaire, qui pat fa nature acide & âpre , a la faculté d’exciter les contraétions de ce vif: cere. Avicenne paroît avoir poñtivement adopté ce fentiment: 26.1. can. feu. 1. doër, 4. cap. j, C’eft auf dans le même fens que l’on trouve que Riolan (47- cropogr. L. IT. c. xx.) attribue à l’acide la chylifica- tion. Caftellus, medecin de l'étôle de Meffiñe ; alla plus loin; ne trouvantpas (felon ce qui eft rapporté dans fa lettre à Severinus) que la co@tion des alimens puille s’opérer par le feul effet de la chaleur , puif: qu'on né pent pas faire du chyle, dans une marmite {ur le feu, parla le premier de férméntarion comme d’un moyen propre à fuppléer à ce défaut. Il préten- dit que cette puiflance phyfique eft néceffaire, eff employée par la nature pour ouvrir, dilater les po- tes dés alimens dans l’effomac, pour les faire enfler ëc les rendre perméables comme une éponge, afin que la chaleur puiffe énfüite les pénétrer d’une ma niete plus efficace qu’elle ne feroit fans cette prépas ration ; afin qu’elle en opere mieux la diflolution & les rende plus mifcibles entr’eux. Telle fut l'opinion de celui que l’on pourroit regarder à jufte titre com- me le chef des fermentateurs (qui n’en eft certaine: ment paslé moins raifonnable), c’efl-à-dire de ceux qui ont introduit la fermentation dans la phyfique du corps humain. | Mais perfonne avant le fameux Vanhelinont ne s'étoit avifé, pour expliquer l’œuvre de la digeftion, de foûtenir l’exiftence d’une humeut acide en quali- té de férmenr , qui foit produite & inhétente dans le corps humain ; perfonne avant cet auteur n’avoit enfeigné qu'ün ferment peut difloudre les alimens de la même maniere que fe font les diflolutions chi- miques par l'effet d’un menftrue. Vanhelmont conçut cette idée avant qu'il pût avoir connoiflance de La découverte de la circulation du fang; & quoique cette découverte ait été faite de fon rems, il s’étoit trop acquis de réputation par fon fyffème, & il en étoit trop prévenu, peut-être même trop perfuadé , pour y renoncer, Ainfi tant que la circulation n’étoit pas admife, on étoit fort embartaflé de trouver une éaufe à la quelle on püt folidemernit attribuer la chaleur ant: male : cependañt on voyoit que les alimens Les plits froids de leur nature, & qui n’ont aucun principe de vie par eux-mêmes, contratent dans le corps hu= main la chaleur vitale, qu'ils femblent poiter & re- nouvellet continuellement dans toutes fes parties; chaleur abfolument femblable à celle qui les animoit avant que ces aliméns fufleñt pris, digérés, & mê- lés avec les différentes humeurs añimales. On obfer- voit par les expériences convenables , que les fub- ftances acides émployées pour la nourriture, font changées par l'effet de la digeftion & dé la co&tion des humeurs; en un fluide d’une nature fi différente, qu’on peut fans aucune altération en tirer un {el vo- latil ; changement dont il eft cértainement bien dif. ficile de rendre raifon. Helmont, qui étoit tellement pafionné pour la Yv i $20 FER Chimie qu’il ne croyoitpas qu'il yelit d'autre moyen d'étudier la nature que ceux que! pouvoit fournir cette fcience, s’appliqua à chercher la caufe d’un phénomene fi admirable. Il ne crut pas qu’on püt la trouver ailleurs que dans la férmentation, dans l’effet du mouvement inteftin qui réfulte du mélange de principes hétérogenes, d’où s'enfuit une chaleur fuf- ceptible de fe communiquer, de s'étendre dans tou- tes les parties de la machine, & d’y rendre fluide êg mobile tout ce qui doit l’être pour l’entretien de la vie: iltiroit cette derniereconféquence des expérien- ces qui lui étoient connues, par lefquelles 1l eft prou- vé quil peut être produit une chaleur confidérable de l’effervefcence excitée entre des corps très-froids par eux-mêmes, ainfi qu'if arrive à l'égard du mé- lange de l’huile de vitriol, avec le fel fixe de tartre. Cela pofé , il forma {on fyftème ; il crut qu'il étoit hors de doute que la tranfmutation des alimens en chyle devoit être attribuée à l'efficacité d’un ferment acide, fexeupl. digeff. $.2,3,4311512,13 5 il fup- pofoit ce ferment d’une nature abfolument différen- te de celle d’un ferlent végétal ou de tout autre acide chimique: ce ferment ayoit, felon lui, un ca- raétere fpécifique ; ce qu'il etablifoit par des com- paraïfons, en le regardant comme l'efprit-de-fel qui peut difloudre l'or, ce que ne peut faire aucun au- tre efprit acide; tandis que ce même efprit-de-fel n’a aucune ation fur l'argent: en un mot ce ferment étoit un acide propre au corps humain, doué de qua- lités convenables, pour changer les alimens en une humeur vitale par {on melange avec eux, & par la fermentation qui s’enfuivoit ; en quoi 1l penfoit moins mal encore que ceux qui foütenoient que le chyle ne pouvoit être préparé que par l'efficacité d’un efprit de nitre. Lowthorp. abrigdam. ü. Helmont croyoit cependant fon ferment ftomacal d’une nature plus fubtile encore que cet efprit; il regardoit cet acide comme une exhalaifon, qu’il comparoit à ce qui s’é- vapore des corps odoriférans; 1l les défignoit fou- vent, fub nomine fraudinis, odoris fermentativi , im- pregnantis : il ne penfoit pas par conféquent qu'il exiftât fous la forme d’un liquide bien fenfible &r bien abondant ; encore moiïns, qu'il formät un ferment grofier , tel que le levain du pain, quoique celui-là excite la fermentation dans les matieres alimentaires, à-peu-près de la même maniere que celui-ci dans la pâte. Voyez un plus grand détail fur tout ceci dans les propres ouvrages d'Helmont, dans ceux d'Ettmul- der, G'c.. Helmont donnoit la même origine que Galien & Avicenne, au prétendu acide digeftif; 1l fuppofoit également avec eux, qu'il étoit porté de la rate dans l’eftomac par les vaifleaux courts. Pylor. reétor. . 26: | Sylvius, l’un des plns zélés des feétateurs d'Hel- mont, après avoir connu la circulation du fang , moins obftiné que fon maitre, crut devoir s’écarter de fon fentiment au fujet de cette origine du ferment acide ; il fut convaincu , d’après les expériences ana- tomiques , que les vaifleaux courts font des veines qui portent le fang du ventricule à larate, & qui ne fourniflent rien au ventricule; que la rate pouvant être emportée fans que la digeftion cefle de fe faire, ce vifcere n’y contribue donc immédiatement en rien : ces raifons étoient fans replique. Il cherchaune autre fource à ce ferment ; 1l Imagina la trouver dans les glandes falivaires, parce qu'il arrive quelquefois que l’on a dans la bouche une humeur regorgée f aigre, que les dents en font agacées ; ce qu'il penfa ne pouvoir être attribué qu’à la falive même. Quant à la nature du fermer digeftif, confidéré pat rapport à fon a@ion dansleventricule, Helmont ë& toute la feéte chimique cartéfienne, prétendoient établir fon açidité par différentes preuves ; les prin- cipales qu'ils alléguoient , font, 1°. qu'il a été obfer: vé que le gofer des moineaux exhale üne odeur ai- gre ; 2°. que plufeurs oïfeaux avalent des grains de fable, pour corriger, difent les fermentateurs, la@i- vité de l’acide de leur eftomac, &c que l’on y trouve fouvent de petits graviers qui paroïffent rongés par l'effet du ferment acide ; 3°. qu'il arrive fouvent que les alimens aigriflent très-peu de tems après avoir été avalés ; 4°. que le lait pris à jeûn, & rejette bien- tôt après par le vomiflement, fent fortement l’aigre, & fe trouve fouvent caillé; 5°. que les acides font propres à exciter l’appetit ; 6°. queles rapports d’un goût aigre font regardés, felon Hippocrate, fe“. vy. aphor. 1, 8 par expérience, comme un'bon figne à la fuite des longues inappétences , des flux de ventre, des lienteries invétérées, parce qu'ils annoncent, felon les partifans de la fermentation, que lemenftrue digeftif recouvre l’aétivité qu'il avoit perdue ; 7°, que les préparations martiales produifent, pendant qu’elles font retenues dans l’eflomac , des rapports d’une odeur fulphureufe , empyreumatique; 8°. que le ventricule des animaux ouvert peu de tems après, répand de fortes exhalaïfons de nature fpiritueufe & véritablement acide. Telles font les raïfons les plus fortes dont fe fervoient les férmentateurs pour donner un fondement à leur opinion fur le ferment acide, par le moyen duquel ils prétendoient que la digeftion s’opere dans l’eflomac. Mais toutes ces raifons n’ont pù tenir contre les expériences plus éclairées , faites fans préjugé , & dans lefquelles on ne cherchoit à voir que ce qui fe préfentoit, & non pas ce que l’on fouhaitoit être con: forme au fyftème préétabli. Les Anatomifles , les Phyficiens , fcrutateurs de la feule vérité, fe font donc convaincus qu'il n'y a jamais de fuc acide dans l’eftomac, qui foit propre à ce vifcere ; que qui que ce foit n’y en a jamais trouvé, ni ne peut y en trou- ver ; que toutes les humeurs du corps humain font infipides , & ne font chargées d’autre principe falin que d’une forte de fel neutre, qui approche de la na- ture du {el ammoniac ; & qui, fi on veut le rappor- ter à une des deux clafles de fel acide & de fel alkah, auroit plus d’afiinité avec la derniere. Mais le fang tiré d’un animal à jen, dit M, Se- nac, ne préfente au goût ni un acide, ni un alkali; il n’a qu’un goût de {el marin : fi on le mêle même tout chaud avec des acides ou avec des alkalis , il ne s’y excite aucun bouillonnement. De ces deux ré- fultats on peut conclure évidemmentque le fang n’eft ni acide ni alkali ; il n’a certainement pas plus d’a- cidité ou d’alkahnité que les fels concrets. On peut ajoûter à tout cela, que la difillation du fang ne don- ne ni des acides n1 des alkalis. Helmont lui-même a été forcé de convenir qu'il n’y a point d’acide dans le fang d’un homme fain ( plevra furens, .xjv. fegq.)s & que s’il s'y en trouve, c’eft contre nature, puit qu'il produit alors des pleuréfies : ainfi puifqu’il'ac- corde le fait, que le fang , dans les vaifleaux qui por- tent lesthumeurs aux glandes falivaires, aux glandes du ventricule , ne contient qu’un fel muriatique., fans goût,fans piquant,comment peut-limaginer que d’un fluide que l’on pourroit tout au plus regarder comme étant de nature prefqu’alkalefcente, il puifle par une métamorphofe fubite, en être féparé un ferment de nature acide ? D'ailleurs, felon lui , la lymphe n’eft pas acide. Il eft prouvé que la falive & le {uc gañtri- que ne different en rien de cette partie de nos hu- meurs, & que ces deux fortes de fucs digeftifs con= tiennent les mêmes principes qu’elle. Pour ce qui eft des preuves détaillées ci-devant en faveur du ferment acide , voici commentcnena détruit le fpécieux. 1°. L’exhalaïfon aigre que rendle gofer des moineaux, n’a rien qui doive tirer à con- iéquence , fi l’on fait attention que ces oïfeaux qui ont fourni cette expérience, ayoient certainement été nourris avec du pain fermenté , qui contraéte d'autant plus facilement l’ace/cence, que leftomac de ces animaux eft extrèmement chaud. 2°, Quant aux grains de fable , aux graviers qu'avalent certains oi- feaux, ce n’eft pas pour tempérer l’aétivité du fer- ment acide de l’eftomac, mais pour contribuer à la divifion des grains de blé ou autres, par le mélange & l'application qu’en fait l'aétion des parois de Pef- tomac, quifont extrèmement fortes, Ces petits corps durs font comme autant de dents mobiles en tout fens, qui fervent à broyer des corps moins durs par- mi lefquels elles roulent : c’eft un fupplément au dé- faut de la maflication. Ces mêmes graviers, qui pa- roiflent rongés , ne prouvent.rien en faveur de l’a- cide digeftif, puifqu’un menfttue alkalin peut pro- duire le même effet ; mais l'humidité feule de l’efto- mac, en ramollifant ces fubftances pierreufes avec le frotement , fufiit pour cela. 3°. L’acidité que con- tractent certains alimens peu de tems après avoir été reçüs dans le ventricule, ne provient pas du ferment acide auquel ils font mêlés , mais de la difpofition particuliere qu'ils ont par leur nature à s’aigrir, at- tendu que fi ce changement dépendoit de ce ferment, toutes fortes d’alimens léprouveroient de la même maniere, ce qui eft contre l'expérience, &z que n’a- vancent pas les fermentareurs. 4°. C’eft par la même rafon que le lait s’aigrit afément dans l’eflomac, c’eft-à-dire par fa tendance naturelle à l’acefcence. Outre cela, l’ufage d’alimensacefcens, & ce qui en refte dans l’eftomac de la digeftion précédente, fur- tout lorfqu’elle fe fait lentement, & que les matieres alimentaires font trop long - tems retenues dans ce vifcere , font des caufes qui font que bien des per- {onnes ne peuvent pas prendre du lait fans qu'il s’ai- grifle & qu'il fe caille. D'ailleurs, qui ignore que Îa feule chaleur fufit pour faire aigrir & cailler le lait, fans le moyen d'aucun acide, fur -tout lorfque le lait n’eft pas récemment tiré ? 5°. ILeftvrai queles acides font quelquefois employésutilement pour ex- citer l’appéut, mais ce n'eft que dans certains cas. Voyez FA1m. Il fuit que l'expérience prouve qu'ils ne produifent pas toüjours cet effet , pour que l’on ne puifle rien en conclure en faveur du ferment aci- de. 6°. Les rapports d’un goût aigre ne font un bon figne que dans les longues inappétences , dans les cours. de ventre, les lienteries invétérées par caufe de relâchement ; & ce n'eft qu’autant qu'ils annon- cent que les alimens font retenus dans l’eftomac & dans les inteftins plus qu'ilsne l’étoient auparavant, fans y être fuffifamment travaillés pour être bien di- gérés, enforte qu'ils commencent à s’y corrompre de la maniere à laquelle ils ont le plus de difpofition : ainfi c’eft juger de [a diminution d’un vice par un au- tre, mais qui eft moins confidérable, qui peut être corrigé plus facilement. C’eft une preuve que la di- geftion commence à fe faire, mais qu’elle fe fait im- parfaitement : on en tire une conféquence avanta- geufe , dans la fuppoñition que cette fonétion ne fe faifoit auparavant prefque pas du-tout. Des rapports nidoreux , d'un goût pourri, annoncent la même chofe que les rapports aigres, dans ce cas, lorfqu'ils Viennent après que l’on a mangé de la viande ou d’au- tres alimens fufceptibles de putréfaétion.7°. Les rap- ports d’une odeur fulphureufe ne fuivent pasdanstous les fujets l’ufage des préparations martiales,, ce font principalement les hypocondriaques qui éprouvent cet effet : d’ailleurs il ne faut pastoüjours les attribuer aux acides, puifque le fimple mélange de limaïlle de fer avec de l’eau pure, fuffit pour produire des ex- halaïfons de la même nature. 8°. Pour que les exha- laifons acides qui fortent du ventricule ouvert d’un animal, prouvaffent quelque chofe en faveur du fer- ment acide , il faudroit que cette expérience fe fit FER ÿ2r dans le tems où ce vifcere eft abfolument vuide d’a- limens ; au contraire elle-eft alléguée comme ayant été faite peu de tems après que l'animal a mange : c'eft alors à la nature des alimens qu'il a pris, qu’il fautattribuer ces vapeurs acides, parcequ'ilsétoient vraiflemblablement fufceptibles de corruption aci- de. On n’ignote pas que le lait caillé dans le ventri- cule d'un veau, fait un puiffant ferment acide que l’on employe pour féparer la partie caféeufe des au- tres parties du lait ; mais les férmentateurs ne {e font Jamais avifés de dire que l’animal employé pour l’ex- périence dont 1l s’agit ici, n’eût été nourri que de viande , parce qu'avec cette condition l'expérience n’auroit pas fourni le même réfultat. C’eft ainfi qu'a été détruit par les fondemens l’édi- fice du fyftème chimique , quant à la maniere dont ils prétendoient expliquer l’œuvre de la digeftion dans le ventricule ; mais comme ils ne fe bornoient pas à établir dans ce vifcere les merveilles de la fer- mentation ; 1] faut les fuivre dans le canal inteftinal , où 1ls font encore jouer bien dés rôles à ce même principe , pour lui attribuer l’entiere perfeétion du chyle. Helmont fuppofant que le chyle a été rendu acide par l'effet du ferment de même nature qu’il a établi dans l’eftomac, faifoit opérer une précipitation parle moyen de cetteaciditédu fucalimentaire, lorfqw'il eft porté dans les inteftins, & d’une forte de qualité de la bile qui équivaloit à l’alkalinité. Quoiqu'il ne s’en expliquät-pas bien clairement, il lui attribuoit ce- pendant de contenir beaucoup de fel lixiviel & d’ef- prit huileux, Il penfoit qu'après cette précipitation le chyle n’avoit plus qu’une falure douce, & plus convenable au caraétere de nos humeurs en général, ê 1l fe repréfentoit cette tranfmutation de la ma niere fuivante. Le concours de ces deux fluides don- nant lieu à leur mélange, ils devoient s’unir intime- ment lui à l’autre par leurs parties intégrantes, fe fondre lun dans l’autre par l’affinité qui fe trouve | entr'eux; enforte que le fel acide du chyle pénétrant l’alkali dela bile, devoit exciter une effervefcence, une douce fermentation d’où réfultât un tout d’une. nature différente de ce qu’étoit le double ingrédient avant le mélange; favoir un fluide falin, acide, ce- pendant volatil. | Pour réfuter toutes cesnouvelles idées d’Helmont , on n’a eu d’abord qu’à nier que le ferment du ventricu- le foit acide, & à le prouver ainfi qu’il a été fait ci-de- vant. Enfuite on a démontré que la bile dans l’état na- turel, c’eft-à-dire tirée d’un animal fain, n’a fermenté, m'a produit aucune effervefcence ( pour parler plus correctement) avec aucune forte d'acide. La chofe a été tentée de différentes manieres. Bohn rapporte, cireul, anat. phyf. progymn. x. qu'il a mêlé de l’efprit de vitriol, de celui de nitre, de celui de fel, avec une certaine quantité de bile de bœuf récemment tirée de fa fource, fans qu'il y ait Jamais apperçû au- cune marque d’agitation inteftine ; le mélange fe changeoit feulement en une fubftance coagulée, de différente couleur & de différente confiftence. Cet auteur fait même obferver que les acides ne produi- fent pas cette coagulation avec toute forte de bile : celle du chien mêlée avec de l’efprit de fel, nefit que prendre une couleur verte, fans changer de con- fiftence, D'autres ne conviennent pas qu'il ne fe fafle point d’effervefcence dans un pareïl mélange; mais on a obfervé un mouvement de cette efpece dans l’eau pure, qui s’échauffe par l’huile de vitriol (Boerh. élém. chem.ij) : ainfi on ne pent tirer de-là aucune conféquence pour l’alkalinité de la bile, Foy. BILE. Sylvius fit quelques changemens au fyftème de fon * maître: il crut trouver de lacidité dans le fuc pan- créatique ; & ayant à-peu-près la même idée de la 522 FER bile qu'Helmont , puifqu'il la trouvoit fort appro- chante du {el volatil alkalin, joint à unethuile vo- latile, il n’eut pas de peine à tirer de cesiprincipes la conféquence, que ces deux fortes d’humeurs étant mêlces l’une avec l’autre, & toutes les deux avecle chyle déjà fuppofé acide, elles doivent produire une fermentation. Il imagina outre ce, qu'il s’enfuivroit de-là une précipitation des partiés groflieres de ce mélange, qui n’avoient pas de l’affinité avec les par- tres intéorantes de ces différens fluides ; d’ou réful- toit la féparation des matieres fécales, tandis que les plus homogenes & les plus atténuées; compolées du fnc des alimens, des deux fermens dépurés, & de la pituite inteftinale , rendue auffi plus fluide par la mème caufe , pénétroïient dans les veines ladées fous le nom de chyle, où étoient abforbées dans ces vaifleaux , pour être portées à leur deftination. Cette derniere opinion eut un grand nombre de partifans, parmi lefquels il y en avoit de célebres, tels que Schuyl, de Graaf,, Swalve, Harder, Die- merbroek, &c. qui la foûtinrent avec autant d’obfti- nation qu'ils l’avoient embraflée avec peu de fon- dement. Il fufiroit, pour le prouver, de rappeller ce qui a êté dit ci-devant au fujet du fans, dont la nature ne comporte aucunement qu'il fournifle dans l’état de fanté n1 acide ni alkali, foit par lui-même, foit par les fluides qui en font féparés ; mais il ne‘faut rien omettre de ce quia été dit de plus important pour renverfer cette partie fi fameufe du {yftème chimique. . On a démontré que dans toute cette hypothèfe il n’y a rien qui foit conforme à la nature. 1°. Il exifte une définition , une idée précife du caraétere qui dif tingue les fubftances acides de toute autre fubftance. Sylvius n'ignoroit pas quels en font les fignes dif- tinchfs ; cependant de toutes Les propriétés de l’acide il n’en eft aucune qui fe trouve dans le fuc pancréa- tique : on ne l’a jamais vû former aucune effervef- cence avec un fel alkal ; 1l ne donne pasla couleur rouge au firop violat ou à celui de tournefol , il ne caille pas le lait, &c. 1l n’a aucune forte d’aigreur dans un animal fain : fi on en a trouvé quelqu’indice, on a dü l’attribuer ou à quelque portion de fuc d’ali- mens de nature acefcente imparfaitement digérés, qui s'eft mêlée avec le fuc pancréatique fur lequel on à fait l'expérience , on à quelque changement produit par maladie. Graaf lui-même n’a pas pù manquer de fincérité en faveur de fon préjugé, au point de foûtenir qu'il ait toûjours trouvé au fuc pancréatique un goût acide : il eft convenu (de fücco pañcr. in operib.) en préfence de Sylvius fon maître, qu'il eft le plus fouvent feulement d’un goût falé ; qu'il n’a quelquefois aucun goût ; qu’il eft infpide, quelquefois d’une falure acide, & qu'il ne l’a trouvé que rarement ayant un goût acide bien décidé. L’ex- périence qu'il cite entr’autres , faite fur le cadavre d’un matelot d'Angers, ouvert dans le moment de fa mort arrivée fubitement par accident, dans le- quel on trouva ce fuc digeftif bien acide, eftregar- dée comme faite avec peu de foin ; le fait en a été contefté par Pechlin (meram, apotr, & æfe.) qui allé- guoit le témoignage d’une perfonne préfente à l’ou- verture du cadavre ; lequel témoin nioit le réfultat de Graaf, & rapportoit la chofe d’un maniere toute différente. 1°. Le goût le plus ordinaire du fuc pancréatique eft d’être falé dans l’homme, & infipide dans les ani- maux , qui n’ufent pas du fel commun, felon ce qw- enfeigne Brunner, & ce dont chacun peut s’affürer par foi-même en le goûtant. Ilne peut être acide que par l’effet des maladies dans lefquelles 1l y a dans les humeurs uneacidité dominante, 2°. Lefubterfuge de Sylvius, qui objeétoit que le fuc pançréatique étant EME Te fourmi par les nerfs, devoit participer à la nature du fhtidé nerveux, qu'il fuppoloit acide, ne lui rénfit: pas mieux que fes autres prétentions. On n'eut qu’à lui demander comment il avoit pù s'affürér dePaci- dité du fluide nerveux, qui jufqu’à préfentta été 4: peu fufceptible de tomber fous les fens, qu'on aerà conféquemment être autorifé à douter defon exif= tence. D'ailleurs la difficulté déjà rébattue fe pré- fente encore. Comment le fang de nature alkalef= cente, felon cet auteur même , peut-il fournir de fæ mafle un fluide d’une nature oppofée? Sylvins fe retrancha enfuite à dire que l’acide du fuc parcréa: tique n’y eft pas développé ; mais s’il ne peut pas donner des indices de fa préfence, s’il n’eft pas fen- fible , comment peut-on s’affürer qu'il exifte , qu'il peut produire une effervefcence fenfible ? Sylvius W’avoit donc pas d'autre raïfon de vouloir que ce fuc pancréatique füt acide, que le befoin d’avoir un principe à oppofer à la bile , pour établir là férmer- ration dans les inteftins, comme il l’avoit déjà éta- blie dans l’eftomac. 3°. La fameufe expérience de’ Schuyl , rapportée dans fon ouvrage de medicina ve= rum, avec laquelle 1} venoit à l’appui du 1yffème ébranlé de Sylvius, & que toute la feéte chimique re=" garda comme invincible, n’eft pas moins facile à ré: futer que toutes les preuves alléguées précédem- ment. Cette expérience confiftoit en ce que Le duo- dénum étant lié au-deflus 8 au-deflous des conduits pancréatique & cholidoque dans un animal vivant, l'efpace entre les deux ligatures s’enfle confidérable- ment, avec une tenfon & une chaleur bien noôta- bles; & le boyau étant enfuite ouvert en cet en- droit, répandoit une liqueur écumeufe , avec une odeur très-forte : d’où on concluoit que l'effet de la fermentation du fuc pancréatique avéc la bile, étoit ainfi mis fous les yeux, & rendu inconteftable. On croyoit cette derniere preuve fufifante pour fup- pléer à toutes celles qui avoient été rejettées, & on la préfentoit avec l’affñrance qu’elle devoit impofer filence à tous les adverfaires de l’école hollandoïife; cependant elle ne coûta pas plus à détruire que les autres : 1] n’y eut qu'à répéter la même expérience fur une autre portion du canal inteftinal, où il ne fe faifoitaucun mélange du fuc pancréatique 8 de bile ; les ligatures faites, les mêmes effets s’enfuivirent que ceux rapportés ci-devant. On trouve dans les œuvres de Verheyen, Zb. IL. #r, j. c. xviiy. qu'ayant lié de même le duodénum d’un lapin, dans lequel le conduit biliaire s’infere à quinze pouces de diftance du conduit pancréatique , enforte qu’il n’y avoit que ce dernier qui fût compris entre les ligatures, les mêmes phénomenes fe montrerent que dans l’expé- rience de Schuyl. Mais il n’y a rien de bien fingulier dans toutes les différentes circonftances de ces diffé- rentes expériences, une caufe commune produit Les mêmes effets dans les trois cas: c’eft l’air enfermé dans la portion de boyau liée, mêlé avec de la pâte alimentaire, qui étant échauffé par la chaleur de l’a- nimal, fe rarefie, fort des matieres qui le contien- nent, dilate, diftend les parois du canal où il eft ref ferré ; & lorfqu’on lui donne une iflué, il s'échappe encore de l’écume qu’il a formée dansles fluides avec lefquels il étoit confondu. Voilà l'explication bien fimple & vraiment fans replique de ces merveilleux effets d’où on tiroit des conféquences fi importantes, qui font par-là réduites à ne prouver rien du tout pour ce que l’on vouloit prouver, puifque la fameufe expérience de Schuyl réuflit aufi-bien là où il my a ni bile ni fuc pancréatique, que s’il n’exiftoit dans la nature aucun de ces deux fluides digeftifs. On peut. ajoûter à tout cela, qu'il n’y a pas même bien de l’accord entre les auteurs, fur la vérité de cette ex- périence; ayant été tentée fix fois par le très-véri- dique phyfologifte Bonh, elle ne lui réuffit prefque pas une feule fois. Enfin, dans la fuppoñition mème de Schuyl, Peffervefcence fermentative qui fe fait en- tre les deux ligatures du boyau, ne prouve pas qu’- elle fe fafle fans ligature ; 1l eft démontré au con: traire qu'il n’en paroît pas le moindre indice dans les animaux vivans, pas même dans le cas où le fue pancréatique , par l'infettion de fon canal dans le cholidoque , fe trouve mêlé avec la bile dans un lieu f reflerré, avant que de couler dans linteftin : ce mélange fe fait avec aufli peu d’agitation que celui de l'eau avec de l’éau, Il y a plufieurs animaux dont le fuc pancréatique & la bile coulent à de très-gran- des diftances dans le canal inteflinal , enforte qu'ils font mêlés avec d’autres fluides, avec les alimens , & ont aïnfi perdu beaucoup de leur énergie avant de s'unir lun à l’autre. Ces animaux ne font pas moins bien Leurs fonétions, relativement à la chylifi- cation ; ils n'en vivent pas moins fainement. Voyez PANCRÉATIQUE ( Juc), BILE, DIGESTION, pour y trouver l’expofñition des véritables ufages de ces fluides digeftifs dans l’économie animale, connue d’après la nature feule, & non d’après les préjugés, les fruits de l'imagination. Celle des férmentareurs étoit fi féconde en ce gen- re, qu'il n’y avoit aucune circonftance de la chyli- fication à laquelle ils ne fiffent l’application de leur principe , que tour s’opere dans le corps humain par fermentation. Il paroît d’abord aflez fingulier que les alimens dont nons ufons pour la plüpart , qui font de nature & de couleur fi différentes, étant pris fé- parément ou mêlés dans les premieres voies, four- niflent également un extrait toùjours uniforme, toi- jours de couleur laiteufe: Willis, avec d’autres par- tifans de la férmentation, ne trouverent pas la moin- dre difficulté à lui attribuer encore ce phénomene. Ils penferent que ce ne pouvoit être que l'effet de la combinaifon du foufre & du fel volatil des ali- mens avec l'acide du ventricule &z des inteftins, de la même maniere, par exemple, que l’efprit de cor- ne de cerf, ou une diflolution de foufre faite avec un fluide lixiviel , ou l'extrait réfineux des végétaux, blanchiflent , deviennent laiteux par l’affufon d’un acide : mais l’erreur eft manifefte dans cette expli- cation ; car ces fortes de mélanges qui forment ce qu'on appelle des laits virginaux , n’operent ce changement qu’autant qu’ils difpofent à une préci- pitation de la partie réfineufe , qui étant d’abord fuf- endue dans fon véhicule comme un fable fin, qui le rend d’un blanc opaque , ce véhicule perd bientôt après fa blancheur, fe clarifie enfuite, la poudre ré- fineufe tombant au fond du vafe qui contient le mé- lange : mais il n'arrive rien de pareil à l'égard du chyle , qui conferve conftamment fa couleur laiteu- fe jufqu’à ce qu’il foit intimement mêlé avec le fang, &c peut-être même jufqu'à ce qu'il foit décompolé pat l’attion des organes qui le convertifient en fang. Voyez SANGUIFICATION. D'ailleurs , l’exiftence du ferment acide dans les premieres voies étant démon- trée fauflement fuppofée , joint à ce que les parties fulphureufes & falines ne font pas toûjours en mê- me proportion dans les alimens , quoique le chyle ait totjours le même degré de blancheur, les fon demens de l’explication dont il s’agit manquent de tous les côtés. ; Cependant non-feulement la couleur du chyle, mais encore l'odeur des matieres fécales a paru à certains férentateurs devoir être attribuée à l’effet de quelque ferment. Vanhelmont ne fe contentant pas de la précipitation ci-deflus mentionnée pour la féparation des parties excrémenteufes des ali- mens &c des fucs digeftifs, parce qu’il ne la trouvoit pas fufiifante pour rendre raifon de la puanteur que contraëtent aflez promptement ces excrémens lorf- qu’ils font parvenus dans les gros inteflins , crut FER 524 devoir attribuer ce changement à un férment fterco ral, c’eft-à-dire, deftiné à exciter la putréfa@ion dans les matieres fécales, en fe mêlant avec elles, &c y fai- fant naître une fermenration corruptive pour les fai te dégénérer en matieres abfolument ftercorales. Il faifoit réfider ce ferment dans l’appendice vermifor- me qui le fournifoit continuellement à la cavité du boyau cæcum ; Voyez fes œuvres , féxtupl, digeff. Paragr, 81. mais 1l ne donne aucune preuve de l’e= xiftence d’un tel ferment ; il tépugne d’ailleurs à ce qu'exige l'économie animale faine , qui eft fi enne- nue de toute forte de pourriture, que la Nature ait fournie elle-même, dans une partie du corps , une caufe toùjours exiftante de putréfa@ion. I étoit ce- pendant bien peu néceflaire, ce me femble, d'y avoir recours, fur-tout pour celle des excrémens. La difpoftion qu'ont toutes les humeurs animales à contracter ce genre de corruption, lorfqu’elles font retenues dans un lieu chaud & humide ; les parties groffieres des différens fucs digeftifs, & fur-tout de la bile alkalefcente de fa nature , mêlées avec le marc des alimens aufli putrefcibles pour la plüpart, fufifent pour y produire le genre de corruption & la puanteur qu'ils ont dans les gros boyaux. Foyez DéyecTion. Les différentes combinaïfons , dans le concours des puiffances tant phyfiques qué mécha- niques , qui coopérant à tout l’ouvragé de la di- geftion dans les différens animaux , établiffent les différences effentielles que lon obferve dans les ma- tieres fécales de chaque efpece d’animal, fans re- courir à autant de fortes de fermens. | Il ne refte plus rien à dire de la férmentarion con= cernant les premieres voies. Si les difciples n’é- toient pas tojours exceflifs dans le parti qu'ils prennent en faveur d’un maître fameux par quelque nouveauté , lorfquelle eft attaquée ; fi les fe&taires ne fe faifoient pas un devoir, une gloire d'enchérir fur les écarts de leur chef, en quelque genre que ce foit , les fermentateurs {e feroient bornés avec Van- helmont , à faire ufage de leur grand principe de l’effervefcence fermentative des acides avec les al- kalis , pour la feule chylification ; car cet auteur dit expreflément que tout acide eft ennemi du corps. humain, dans quelque partie qu'il fe trouve, excèp- té l’eftomac &c le duodenum, attendu qu'il fuppofe que fon ferment acide mêlé avec le chyle, a changé de nature par fon union avec la bile. S'il n’y a point, felon lui, d’acide naturellement dans le fang, il ne peut y avoir de férmentation , dans le fens de ce chimifte. Mais Sylvius, Differt. VIII. C3, X. 58. & toute fa feéte , trouverent que l’idée de cetté puiffance phyfique étoit trop féconde en moyensde rendre rai- fon de tout dans l’économie animale, pour qu'ils ne s’'empreflañent pas à l’introduire dans les fecondes voies , pour étendre fon influence fur toutes les fon@ions. Ils imaginerent donc que le chyle étant imprégné d’acides par fon mélange avec le ferment ftomachal & le fuc pancréatique, & par fon union à la lymphe des glandes conglobées du méfentere, fuppofée acide &c rendue telle par fon féjour dans les glandes, avec la propriété conféquente de con- tinuer, dans toutes les voies du chyle, la férmenta- tion commencée entre tous les fermens digeflifs devoit, étant portée dans toute la mafle du fang avec fon acidité dominante, néceflairement fomen- ter ou produite une effervefcence avec ce fluide al- kalefcent de fa nature ; ce qui formoit le mouve- ment inteftin qui étoit attribué au fang pour confers ver fa fluidité. | Voici quelques obfervations tirées de PÆffa de Phyfique fur l’ufage des parties du corps humain, at- tribué à M. Senac, qui pourront faire juger com- bien les expériences font contraires à cette opinion, 524 FER | à°. Le chyle d’un animal bien fain , nourri d’ali- mens qui ne foient pas pour la plüpart acefcens ou alkalefcens, étant mêlés avec.des acides ou des al- kalis, ne bouillonne pas: s'il eft arrivé quelquefois qu’il ait paru bouillonner , c’eft à caufe de la grande quantité des fubftances.de l’une ou de l’autre natu- re, qui ont fourni le chyle; il n’eft pas furprenant qu'il arrive quelque ébullition par le mélange des fels acides ou alkalis. 2°. Quand on reçoit le. chyle dans un vaiffeau,, on ne remarque pas d’ébullition: cependant, felon les ferrentateurs, cela devroit ar- xiver quand le chyle eft tiré du canal torachique: car c’eft alors que les fels de nature oppofée qu'il renferme, doivent agir les uns fur les autres; mais on a beau examiner le chyle dans le canal même avec le microfcope, on n’y obferve pas le moindre mouvement. Ces deux raifons font fufifantes pour prouver qu'ilne doit pas fermenter avec le fang ; car il ne peut pas trouver dans le fang quelque cau- e de fermentation plus forte que le mélange des aci- des avec les alkalis: mais voici encore des raifons plus preffantes. 3°. S1 on lie la veine où le chyle fe décharge, on n’y remarque aucune efferveicence dans le tems qu'il fe mêle avec le fang: quelque chofe qu’on dife , on ne fauroit l’établir. 4°. Les matieres qui compofent le {ang font huileufes en bonne partie: or on fait par la Chymie., que les huiles grafles empêchent les férmentations, Les aci- des du vinaigre qui ont diflous le plomb, & qui font mêlés ayec beaucoup d'huile, comme lanaly- fe nous l’apprend, ne bouillonnent point avec les alkalis. Il y a plufñeurs autres exemples quil feroit trop long de rapporter ici. 5°. Jamais il n’y a eu de fermentation fans repos dans les fubftances fermen- tefcibles, c’eft-à-dire, qu'elles ne doivent être agi- tées par aucune caufe externe. Or comment trou- ver ce repos dans le fang, qui eft porté par tout le corps avec une aflez grande rapidité ? Mais, dira-t-on , d’où vient la chaleur animale ? Îa fermentarion n’eft-elle pas abfolument néceffaire pour la produire ? Woyez ce qui a été dit à ce fujet dans l'excellent article fourni par M. Venel , fur la chaleur animale, Les Chymiftes ont auffi crü trouver la caufe de la rougeur du fang dans divers mélanges , comme de l’aikali avec des matieres fulphureufes, avec le nitre de l'air. Voyez SANG. Les opinions ayant été fort partagées au fujet du mouvement du cœur, de ce qui caufe fa dilata- tion & fa contraétion, de ce qui lui donne la force de pouffer le fang dans toutes les parties du corps, êt de ce qui le force à recevoir enfuite le fang qui eft rapporté de toutes ces parties ; les anciens & quelques auteurs du fiecle paflé croyoïent déjà qu'il y avoit un feu concentré qui étoit la caufe du mou- vement de cet organe. Lorfque Defcartes, qui por- toit fes vües fur tout, produuifit un fentiment qui ne différoit pas beaucoup de celui-là , comme on ne parloit de fon tems que de ferment & de fermenta- tion dans les écoles de Medecine, il en prit le ton, lui qui le donnoit alors à toutes les écoles de Philo- ophie. Selon lui, il y a un ferment dans le cœur, qui-donne aux humeurs une grande expanfon : dès qu’une goutte de fang tombe dans cet organe, elle fe raréfie, éleve les parois du cœur par l’augmenta- tion de fon volume, ouvre au fang qui fuit un paf- age ; les ventricules fe trouvant ainfi remplis , le fang par fa raréfaéhon s’élance dans les arteres, & alors les parois du cœur retombent par elles-mêmes. On omettra ici les expériences qui renverfent lopinion de Defcartes, en tant qu’elles prouvent qu'iln’y a pas plus de chaleur dans le cœur, que dans toutes Les parties internes du corps humain ; que le ang ne fort pas du cœur durant fa dilatation, mais . durant fa contra@tion ;.que le battement du cœur & des arteres qui fe fait en même tems, l’a induit er erreur, parce qu'il croyoit que lecœur, äinfi que les arteres, ne pouvoit battre qu’en fe rempliflant. On peut trouver, par la raifon feule, des difficultés con- tre cette caufe prétendue du mouvement du cœur, qu'il eft impoffble de réfoudre. Une goutte de fang qui entre dans le cœur fe raréñe, & ouvre les ven- tricules au fang qui fuit; mais ce fang qui fuit ne doit-1l pas de même tenirles cavités du cœur ouver- tes à celui qu'il précede ? & fi cela eft ainf, n’eft-1l pas impofhble que les paroïs du cœur fe refferrent jamais? D'ailleurs comment peut-on rendre raifon de la natute, de l’origine, de la reprodu@ion conti= nuelle du ferment, auquel on attribue des effets fr merveilleux ? Comment peut-on concevoir que dans moins d’une feconde ce ferment puifle échauffer & changer fi fort le fang veineux, qu’il lui donne {a force de furmonter la réfiftance de toutes les arteres, de tout le poids de l’atmofphere ? C’en eft aflez pour fe convainére que cette opinion, qui n’avoit coûté qu'un inftant à l'imagination, a pü être détruite par un inftant de réflexion. Ainfi la feéte chimique , après avoir fait dépendre de la fermentation , ou de quelque purffance phyfique analogue, les principaux changemens qui fe font dans les humeurs primitives, voulut encore tran£ porter dans tous les organes où font préparées cel- les qui en dérivent, les fermens des laboratoires, pour leur faire opérer toute la variété des fecrétions; On imagina donc que dans chaque couloir 1l y a des levains particuliers qui changent les fluides qui y abondent par le mélange qui fe fait entre eux, & par les effets qui s’enfuivent, c’eft à-dire toüjours par une fermentation où une effervefcence : mais rien ne prouve ce fentiment, qui eft d’ailleurs combattu par une raifon d'expérience fans replique. Chaque orga- ne fecrétoire ne devroit jamais filtrer que le fluide qux a du rapport avec le ferment dont il eft imbu; ou lor{- qu'il arrive que quelqu’autre fluide y pénetre, celui ui eft étranger devroit participer de la nature que le en de cet organe a la propriété de donner, ou au moins perdre quelque chofe de fa nature par l’effet d’un mélange qui doit lui être bien hétérogene : ce- pendant dans l’iétere la bile comme bile fe répand dans toutes les parties du corps, & par conféquent dans tous les couloirs des fecrétions ; elle fe mêle donc avec tous les fermens fans en changer de qua- lité. D’ailleurs , d’où viennent les fermens fuppotés > où eft l'organe particulier qui les fournit, qui les re- nouvelle continuellement ? Il n’a pas encore été fait une réponfe folidement aflirmative à ces queftions. Voyez SECRÉTION. Après avoir parcouru toutes les parties du corps; ‘pour y voir tous les différens ufages que les fermen- tateuts ont fait de leur principe, pour en tirer l’expli- cation de prefque tous les phénomenes de l’économie animale faine, ce feroit ici le lieu de voir comment ils fe font encore fervis de la fermentation pourrendre raifon des principales caufes prochaines des mala. des, telles que celles de la fievre, de l’inflammation; pour faire connoître à quoi doivent être attribués les grands effets de ces caufes, tels que la coétion, la crife : mais outre que cela meneroit trop loin pour cetarticle-ci, on s’expoferoit à des répétitions ; d’ail- leurs il n’eft pas difficile d'imaginer le rôle que l’on a fait jouer à la férmenctation pour la fievre , la coétion, la crife, voyez les articles où il eff traité de ces cho- fes. Ainf voyez FIEVRE, COCTION, CRISE. Tout ce qui a été dit jufqu'ici au fujet de la free tation ,n’eft, ainfi qu'il a été annoncé, que l’hiftoire des erreurs qu’a produites l’abus du terme & de la chofe ; du terme, parce qu’on n’avoit point détermi- né fa fignification cara@tériflique , parce qu’on con- - _ fondait | FER + … “ foniloit a fermentation avec toute {oite de MOVE» ment inteftin; de la chofe, parce qu’on employoit cette puifiance phyfique pour rendre raifon de tou- tes les opérations de la nature dans le corps humain. On n’entreprend prefque Jamais de corriger Lun ex- cès que par un autre excès. Les adverfaires des fer- mentateurs eurent autant à cœur de bannir la fer- mnentation de toute l’économie animale , non-feule- ment quant à l'effet, mais encore quant au nom, que ceux-ci cherchoient à l’établir par-tout : ils ont eu tort de part & d'autre. Il n’exifte point de fermenta- tion dans Île corps humain, dans un fens aufli étendu, aufli vague que celui que donnoit à ce terme la fete chimique : mais la fermentation a lieu dans le corps humain,,en tant qu’on en reftraint la fignification au mouvement inteftin produit dans les matières vége- tales feules, &c dans celles qui en font fufceptibles, par lequel elles changent de nature, & fourniflent un efprit ardent, ou un efprit acide, ce qu’elles n’au- roient pas fait avant ce changement ; en tant qu’elle s’opere feulement dans des fubftances deflinées à être converties en humeurs animales, & non dans la fubftance de ces humeurs même, qui lorfqu’elles font formées ont perdu toute difpofition à fermenter, _ Cela pofé, toutes les fois qu’une fubftance fer- mentefcible fe trouve contenue dans un lieu conve- nablement chaud avec de l'air & de l’humidité fuf- fante , il ne peut pas fe faire qu’elle ne fermente pas: par exemple, le pain eft une matiere fufceptible par fa nature de [a férmentarion acéteufe ( ayant déjà éprouvé la fermentation vineufe, pour que la farine dont il eft formé ait été convertie en pain); le mé- lange qui fe fait lorfqu’on lemange, de la falive dans la bouche, du fuc gaftrique dans l’eftomac, fournit l'humidité ; l'air s’y mêle auffi librement, la bouche ët Peftomac ont la chaleur néceffaire ; il doit s’exci- ter inévitablement un mouvement inteftin fermen- tatif dans cette matiere alimentaire, & il eft prouvé eneffetquela chofes’opere ainfipar les portions d’air qui en fortént avec effort, quelque tems après que l'on a mangé; ce qui forme les rapports (c’eft-à-dire les vents qui s’élevent de l’eftomac}, & les borbo- rygmes, qui ne font autre chofe que d’autres por- tons d'air des ventofités qui defcendent & roulent dans les boyaux. De femblables phénomenes s’ob- fervent lorfqu'une matiere fermente fous les yeux : ainfi On ne peut attribuer qu’à la même caufe ceux qui viennent d’être mentionnés. Mais cette férmentarion ne fait que cornmencer dans un corps bien conftitué dont leftomac éft agi fant; elle ne fubffte pas affez long-tems pour que la matiere qui fermente vienne véritablement au terme de fa tendance naturelle. Plufieurs chofes concou- rent à s’oppofer à ce que le changement que pour- toit produire la férmenration , devienne complet ; c’eftque cette matiere eft continuellement agitée par Pa@ion dé leftomac, & qu'elle y féjourne trop peu, puifqu'il faudroit que la férmentation-continuât pen- dant quatre ou cinq jours, pour que fes effets fuflent entiers ; c’eft qu'il {e mêle à cette matiere une trop grande quantité de fluide; c’eft que le vafe qui la renferme n’eft pas aflez bien fermé pour retenir l’air, êt que celui-ci fe renouvelle trop aifément ; c’eft que le pain & les autres matieres fermentefcibles ne font pas mangées ordinairement fans être mêlées avec des matieres fufceptibles d’autre forte de dégénéra- tion, comme les putréfcibles, c’eft-à-dire les vian- des : ainf le mélange des fubftances alimentaires de différente nature, empêche que chacune en particu- Lier ne dégénere felon fa difpofition: parce que les mouvemens oppolés qui réfultent de cette difpofi- tion propre, s'arrêtent, fe fixent, {e corrigent les uns les autres. Le laït, par exemple, que l’on laiffe ‘expofé à la chaleur de Pair pendant l'été, s’aigrit en Tome VI, | FER 5; _moins de la moitié d’un jour; le fang laiflé de même {e corrompt, tombe en putréfaétion en auff peu de tems : cependant f on les mêle enfemble,ilne{e fait aucune de ces deux dégénérations ; par conféquent elles font fufpendues par l'effet du mélange, pourvû toutefois qu'avant le mélange la putréfadion n’ait pas commencé dans les fubitances animales ; cat alots, bien loïn d'empêcher, d’arrêter la fermentation; elles deviennent propres à lexciter, À l’accélérer ; felon le réfultat des expériences du dofteur Pringle, Payez fon traité fur Les fubftances feptiques & anti- feptiques, Mémoire IF, & V, dans la traduétion de fes œuvres, Paris, 1755. ayez PUTRÉFAGTION. Mais dans le cas où les dégénérations font arrêz tées , il ne s’enfuit pas moins qu’elles ont commencé à {e faire: or comme les mouvemens inteflins qui tendent à les produire ont cela de commun, qu'ils ne peuvent opérer ces effets fans altérer la force de cohéfion des fubftances dans lefquelles ils ont lieu i il réfulte de-là qu’ils difpofent ces fubftances à la dif. {olution ; par conféquent ils concourent à l’élabora- tion des alimens , qui tend à enyextraire le fuc propre à former le chyle. La férmenvation, dans le fens au quel le terme a été reftreint, eft donc réellement uñ agent dans l’économie animale : la férmentarion com- me la putréfaétion commençantes fervent donc à la digeftion dans l’état le plus naturel ; maisellesne font jamais pouflées dans cet état jufqu’à produire refpec: tivement un efprit ardent où acide, un alkali vola- til ; la confe@ion du chyle eft entierement finie, 8 ce fluide eft admis dans le fang avant que les alimens puiflent fouffrir une altération fi confidérable, | . Mais 1l n’en eft pas de même dans l’état de mala- die, les effets de ces puiffances phyfiques font plus fenfibles dans les perfonnes d’une foible conftitution, dont les fibres mufculaires de leftomac agiflant peu, laiffent féjoutner long-tems, à proportion de l’état de fanté, les alimens dans ce vifcere, & leur permettent d’éprouver d’une maniere plus étendue les change- mens auxquels 1ls ont de la difpoñition : alors la fer- mentation comme la putréfaction étant pouflée trop loin, eft un vice dont les fuites font très-nuifibles à l’économie animale, Voyez RÉGIME. Ainf puifqu'il eft utile & néceffaire même que la fermentation foitexcitée jufqu’à un certain point dans les matieres alimentaires qui en font fufceptibles ; puifqu'il eft aufi important pour la confervation ou pour le rétabliflement de la fanté, d'empêcher que cette efpece dé dégénération ne {oit trop confidéra- ble ; il eft donc très-intéreffant de rechercher les moyens de fuppléer au défaut de férmentation com- mençante, de la procurer, ou de corriger l’excès de la fermentation trop continuée, de la retenir dans les bornes qu’elle doit avoir, Le C’eft l’objet que s’eft propofé le doéteut anglois dont 1l vient d’être fait mention, par Les expérien- ces fingulieres qu'il a faites & préfentées à la fociété royale des Sciences de Londres, dont on trouve le détail dans fon traité déjà cité fur les fubftances fep- tiques & anti-feptiques ; expériences dont les diffé: rens réfultats font d’une.fi grande conféquence pour la théorie & la pratique de la Medecine, qu’on ne fautoit trop répéter & étendre les procédés qui ont fourni ces réfultats pour confirmer ceux-ci, ou pour les changer, ou enfin pour Les fixer de la maniere la plus sûte. Le nombre des expériences de M, Pringle & leurs circonftances ne permettent pas de les rapporter ici + on ne peut que fe borner à donner une idée générale des procédés & des principales conclufions qui ont été tirées de leurs effets. Les expériences de ce medecin confiftent donc ; _10. à faire des mélanges de différentes fubftances ali. mentaires, végétales, & apimales, conjointement X xx 526. FER &c féparément entr’elles, avec de l’eau &r différens autres liquides, avec des humeurs animales, parti- culierement de la falive pour ce qui concerne la fermentation ; avec différentes préparations , analo- gues à celles qu'éptouvent les alimens par l'effet des puiffances méchaniques & phyfiques de la digeftion ; le tout diverfement combiné , expofé dans des vales appropriés au degré de chaleur du corps humain: 2°. à obferver les changemens, les dégénérations différentes qui fuivent de ces différentes opérations. Lès conciufions principales qu'il tire des effets de fes procédés concernant la férmenrarion alimentaire, font, 1°, que fi la falive eft bien préparée, qu'il yen ait une quantité fuffifante , qu’elle foit bien mélangée avec les alimens, elle arrête la putréfaétion, pré- vient la fermentation immodérée, les vents, & laci- dité dans les premieres voies ; ce qui eft contraire au fentiment de Stahl, furdam. chim. pare. 11. qui met la falive faine au nombre des fubftances propres à exciter la fermentation végétale. Selon M. Pringle, l’auteur allemand a été induit en erreur par des ex- périencés faites dans des pays chauds, où la falive n’eft prefque jamais exempte de corruption: ainfi lorfque ce récrément manque, qu'il eft vicié, cor- rompu, ou qu’il ne fe trouve pas bien mêlé avec Les alimens , ces derniers fe putréfient promptement s'ils font du regne animal, ou ils fermentent violemment fice font des végétaux, ils engendrent beaucoup d’air dans l’eftomac & les inteftins ; d’où s’enfuivent les ai- greurs, les chaleurs d’entrailles. Les mélancoliques quifont de grands cracheurs,quiavalent fansmâcher, éprouvent ordinairement tous ces effets d’une manie- re bien marquée : aufli trouve-t-on dans la pratique, que tout ce qui provoqueune plus grandefecrétion de cette humeur,ou quiaide à la mêleravec nos alimens, et le meilleur remede pour de pareilles indigeftions. 2°.Que la plüpart desfubftances animales qui tendent à la putréfa@tion, font douées de la faculté d’exciter une fermentation dans les farineux, & même de la renouveler dans ceux qui ont fermenté auparavant. 3°. Que lés mélanges qui fe font aigris dans Pefto- mac, ne reviennent jamais à un état putride, 4°: Que toutes les fubftances animales putrides ont la force d’exciter, proportionnellement à leur degré de cor- ruption, une férmentarion dans les farineux ordinai- res, dans la plüpart des végétaux , & même dans le lait, quoique déjà un peu affimilé en une fubftance animale ; d’où on peut inférer qu'iln”y a pas de doute que la férmentarion commence dans leftomac, dès qu'il s'y trouve quelque fubftance animale qui agit comme un levain, & des végétaux difpofés à fer- menter. $°. Que quoique la viande paroïfle bien éloignée de s’aigrir, & fa corruption direétement oppofée à l'acidité ; il eft néanmoins certain que bien des perfonnes font forr incommodées d'aigreurs , quoiqu’elles ne vivent que de viande avec du pain &c de l’eau ; effet dont on peut à peine rendre raifon par les idées ordinaires de la digeftion, & on le fait aifément par le principe de la fermentation, tel qu'il vient d’être établi. 6°, Que les efprits, les acides, les amers , les'aromatiques, & les plantes anti-fcorbuti- ques chaudes, retardent la férmentarion par la qualité qu'ils ont de retarder la putréfaétion ; d’où il fuit que la férmenration & la putréfaétion commençantes étant néceflaires dans la diseftion, tout ce qui s’oppofe à ces deux chofes lui doit être totalement contraire, 7°. Que dans le cas où la falive manque , où ce ré- crément eft putride , occafionne une férzentation trop violente ; dans le cas où l'eftomac eft fi foible que les alimens y féjournent trop long-tems, y fer- mentent trop, les acides, les amers, les aromati- ques, Le vin, &c. ont alors leurs diverfes utilités , les uns arrétant la fermentation immodérée, & les autres fortifant l’eftomac & le mettant en état de fe débar- | rafler à-propos de ce qu'il contient, 8°, Que puif- qu'un des plus grands effets utiles de la five eft de modérer la fermentation , 1l eft probable que les fub- ftances qui approchent davantage de cette qualité font les meilleurs ftomachiques, quand cette humeur AR ; tels font Les acides &c les amers : orcomme non-feulement ils moderent la fermentation , mais en- core ils la retardent beaucoup , ils conviennent fou- vent moins que quelques anti-fcorbutiques qui retar- dent fort peu la fermentation, & la tiennent cepen- dant-dans de juftes bornes ; tels que la moutarde, le cochléaria des jardins. 9°. Qw’à l’évard des aromati- ques, quoiqu'ils aident la digeftion-par leur fémzlus, êt la chaleur qui en réfulte, ils annoncent moins de vertu carminative que les amers & les anti{corbu- tiques ; parce qu'ils ont plus de difpofition à augmen- ter, qu’à modéter la fermentation, & à engendrer de V’air, qu’à le fupprimer. 10°. Que contre l'opinion commune, il n’y a point de conformité entre un amer animal , 8 un amer végétal ; puifque celui-là excite puiffamment la fermentation, 6 que les amers au con- traire la retardent &c la moderent : d’où s'enfuit que ceux-ci doivent par conféquent influer fur la digef- tion d’une maniere fort différente de la bile, qui pof- fedetoutes les qualités oppofées. 1 1°, Que le fel ma- rin, qui a été contre toute attente trouvé feptiqué lorfqw'il eft employé à petite dole, telle que celle qui eft en ufage pour manger les viandes, comme de 20 grains pour chaque demi-once , a aufli été trouvé propre à exciter la fermentation lorfqu’il eft employé à la même quantité ; mais le fel d’abfynthe & la lef- ve detartre, comme ils font toùjours anti-feptiques, ils retardent toûjours anf la férmertation , &t cela à proportion de leur quantité. 12°. Enfin que les œufs font du nombre des fubftances animales qui {e cor- rompent le plus dificilement, & par conféquent de celles qui font les plus lentes à exciter la fermentation; d’où doit s’enfuivre que l'œuf doit être ; eu égard à fon volume, la plus pefante des fubftances animales tendres, quoiqu'il puifle être confidéré d’un autre côté comme l'aliment le plus leger, relativement à la nutrition du poulet, 4 Tel eft le précis de prefque tous les corollaires que tire de fes expériences le dotteur Pringle , concer- nant la férmentation des matieres alimentaires, Ceux qui regardent la putréfaétion de ces mêmes matie- res , ne font pasmoins intéreffans. Voyez PUTRÉFA C- TION, (Econ. anim.) Mais il y a plus encore à pro- fiter, de chercher à s’inftruire fur tous ces fujets d’a- près l’ouvrage même, dont on ne peut trouver que l'extrait dans un diétionnaire. (4) di *FERMER , v. a@. terme relatif à tout.corps ok- vert ou creux; ce corps eft fermé, fi l’on a appliqué - & fixé à l'entrée de la cavité ou du trou un autre corps qui empêcheroit les fubftances extérieures de s'y porter, & les intérieures d'en fortir fans dépla- cer ce corps: ainfi on dit, fermer une fenêtre, fermer une bouteille , fermer une porte, &é. Voïlà un de ces termes dont la définition en contient d’autres plus obfcurs que lui, & qu’il ne faudroit point définir. FERMER LES PORTS o4 METTRE UN EÉMBARGO, en termes de commerce de Mer; c'eft empêcher qu'il n’entre ou forte aucun bâtiment dans les ports d’un état. : On ferme les ports de deux manieres ; Où par une défenfe générale qui regarde tous les navires, ce qui. fe pratique fouvent en Anglererre lorfqw’on y veut tenir quelque entreprife ou quelque nouvelle fe- crete ; où pat une défenfe particuliere qui ne tombe que fur les vaifleaux marchands, pour obliger les | matelots qui en forment les équipages, à fervir fur les vaifleaux de guerre. Voyez EMBARGO. Diéionn. . de Comm. de Trév. & de Chamb. (G) FERMER UN COMPTE, ç'eft la même chofe que le folder, Voyez SOLDER, Fermer sA Boutique; fe ditéféziermes de Com imérces d’un marchand qui a quittélercommerce ou fait banqueroute. Voyez BANQUEROUTE.": | On dit auffi dans le Commerceiqueles bourfes font fermées; pour fignifier que l'argent effrare; qu'on en ‘trouvé difficilement àemptunter.s Dif.ide Comm, de -Trév. &Chamb. (Gÿ. Lee mr c | FERMER UN BATEAU, rerme derriviere 5:c'eft-à-dire le lier; legarer, l’atrêter. Défermerieft le-contraire. » FERMER UNE VOLE, (Manege:) unchangement de main. Voyez VOLTE. : neor I bare FERMER, (Coupe des pierres.) Kermefune voére, c’eftymettre le dernier rang de voufloirs, qu’on ap- pelle colleétivement /ac/é par larmêmemétaphore ; le dernier élaveau s'appelle claufoir; du mot latin claudere , fermer. Voyez VOOTE: (D), : + FERMETÉ, {.f..(Gramm, © Littér:) vient de fer- ne, êt fignifie autre chofe que Jo/idiré &'dnreré, Une toile ferrée, un fable battu, ont de la férmeré fans être durs/ni folides. Il faut toùjours fe fouvenir que les modifications de l'ame ne peuvent s’éxprimerque par des images phyfiques: on dit /a.fermeté: de l'ame, de l'ejpries cè quine fignife pas plus Jo/idisé ou dure- té qu’au propre. La fermeré eft l'exercice du coura- ge de l’efprit;; elle fuppofe une réfolution éclairée: l’opinitreté au contraire fuppofe de ’aveuglement: Ceux qui ont loüé la fermeré du ftyle de Tacite, n’ont pas tant de tort que le prétend le P.Bouhours: c’eft un terme hafardé, mais placé, qui exprime l’énergié & la force des penfées & du ftyle. On peut dire que la Bruycre a un /fyle ferme, & que d’autres écrivains n’ont qu'un ftyle dur. 4rzicle de M. DE VOLTAIRE: FERMETÉ 6 CONSTANCE, fynon. La fermeté eft le courage de fuivre fes. defleins &c fa raifon ; & la conflance eft une perfévérance dans fes goûts. L’hom- me ferme réfifte à la féduétion, aux forces étrange- res, à lui-même: l’homme conffant n’eft point ému par de nouveaux objets , & 1l fuit le même penchant ui l’entraîne toûjours également. On peut être con- flant-en condamnant fo-même fa conftance ; celui- là feuleft ferme, que la crainte des difgraces, de la douleur , & de la mort même, l’efpérance de la gloi- re, de la fortune, ou des plaïfirs, ne peuvent écar- ter du parti qu'il a jugé le plus raifonnable & le plus honnête. Dans les difficultés & les obftacles, l’hom- me ferme eft foûtenu par fon courage, & conduit par fa raifon; il va toûjours au même but, l’homme coz- ffanr eft conduit par fon cœur ; il a toûjours les mê- mes befoins. On peut être con/lans avec une ame pu- fillanime, un efprit borné : mais la fermeré ne peut être que dans un caractere plein de force, d’éleva- tion, & de raïfon. La Zegereré &c la facilité {ont oppo- fées à la conffance ; la fragilité &c la foibleffe font 6p- pofées à la fermeté, Voyez CONSTANT, (Syz07.) FERMETÉ , (Phyfcol.) ftabilité du corps, de fes rembres , fe dit de lattitude dans laquelle on fe tient ferme, c’eft-à-dire dans laquelle l’aétion con- tinuée des mufcles retient le corps ouquelque mem- bre dans une fituation , dans un état où il ne cede pas aïfément aux puiflances qui tendent à le faire changer, foit que cette attitude confifte à être de- bout, ou aflis, ou couché ; foit qu'il foit queftion d’avoir les bras où les jambes etendus ou fléchis d’u- ne maniere fixe, appuyant, foûütenant quelque far- deau, preffant quelque levier ; foit qu'il s’'agifle de s'empêcher de tomber, d’être renverfé par un coup de vent, d’être terraflé par un adverfaire dans un combat de lutte, &c. | La fermeté, dans ce fens, confifte donc à confer- ver fans relâche la pofition dans laquelle on s’eft mis ; à faire cefler tont mouvement, fans cefler de foûtenir Les efforts contraires à cette pofition. Foyez MuscLe, Desour. (4) | FERMETURE DE CHEMINÉE; { fn Archicec- Tome VI, k ER FER 57 rire; c'eft une dale de pierre percée d’un troù quarré long, qui ferfipour fermer & couronnerle haut d’uné fouche de cheminée de pierre ou de brique. (2) FERMETURE DE PORTES DE GUERRE, (Porrifez cation.) Voyez OUVERTURE, ? 22 10 FERMETURE DE Ports , (Marine!) c’eftun ter- me dont l’ordonnance fe fert. Foyez PORT. | FERMETURE, (Barre de):terme de Bijourier ; c’eftla partie fupérieureide la Aerrelquela moulure du deflus de la boîte recouvre, quandla boîté eft fermée. FERMETURES ven. serme de Serrurier: ce ont les ouvertures dans lefquelles entrent:lés aubrons aux. {errures appellées férrures er bord : ‘elles font faites fur la tête du palatre. Il en eftide même des ouvet= tures faites au palatre des ferrures à aubronier 8 ent bofle, dans lefquelles entrent les aubrons des au! broniers, | ral al Dep rÉLAp Lu Fermeture eftla mêmè chofe que pére; & lorfque l’on dit ne fèrrure dune, deux ou trois, &c. fermetu res, on défigne une: ferrure: à un, deux ou trois pênes. Voyez PÊNE & SERRURE. FERMETURE Du: COQ 04 DE LA COQUE ; (Sèér- rurerte.) c’'eftila partie où l’aubron entre dans le coq! loriqu'il eft ouvert ; & où il fe trouve retenu, lorf que le coq eft fermé. C’eft la même chofe pour les: lerrures en boffes. FERMIER , {. m.(Æcorom. ruff.) celui qui cultive des terres dont un-autre eft- propriétaire, & qui em recueille le fruit à des conditions fixes: c’eftce qu£ diftingue Le férmier du métayer. Ce que-le férmier rend: au propriétaire, foitien.argent, foit en denrées, eft: indépendant de la variété des:récoltes. Le métayer! partage la récolte même, bonne ou mauvaife, dans une certaine proportion. Voyez MÉTAYER: | Les fermiers font ordinairement dans les pays ris ches, & Les métayers dans ceux où l'argent eft rare. Les uns & les autres font connus auffi fous le nom: de laboureurs, Voyez FERMIERS, (Economie politig.}. Les devoirs d’un fermier à l'égard de fon proprié=: taire, font ceux. de tout homme qui fait une conven- tion avec unautre : il ne doit point l’éluder par mau+ vaife foi, ni fe mettre par négligence dans le cas d’y manquer. Îl fant donc qu'avant de prendre un enga= gement, 1len examine mûrement la nature, & qu'il en méfure l’étendue avec fes forces. ‘ L’afliduité & l’attivité font les qualités effentielles d’un fermier. L’Agriculture demande une attention fuivie, & des détails d'intelligence qui fuffifent pour occuper un homme tout entier. Chaque faifon, cha- que mois amene de nouveaux foins pour tous les cultivateurs. Voyez l'article AGRICULTURE. Poyez auffe l'arc. CULTURE DES TERRES. Chaque jour & prefque chaque inftant font naître pour le: cuitiva= teur aflidu, des variations 8 des circonftances par- ticulieres. Parmi les fermiers, ceux qui, fous pré texte de joindre le commerce au labourage, fe ré pandent fouvent dans les marchés publics, n’en tap< portent que le goût de la difipation, 8c perdent de vüe la feule affaire qui leur foit importante. Que peu- vent-1ls attendre de La part des ruftres qui manient la charrue ? ces hommes fontpour la plûpart commedes automates qui ont befoin à tous les momens d’être animés & conduits; le privilège de ne guere penfér eft pour eux le dédommagement d’un travail affidu: D'ailleurs ils font privés de l'inftinét qui produit l’ac- tivité & les lumieres. S'ils font abandonnés à eux- mêmes, ona toûjours à craindre ou de leur maladreffe ou de leur inaétion. Telle piece de terre a befoin d’être inceflamment labourée ; telle autre, quoique voifine, ne peut l’être avec fruit que plufeurs jours apres. Ici 1l eff néceflaire de doubler, là il peut être utile de diminuer l’engrais. Différentes raifons peu- vent demander que cette année le grain foit enterrré avec la charrue , dans une terre où l’on n’a coûtume MORE Se 528 FER de fe fervir que de la herfe. Quelle étrange dimi- mution dans la récolte, fi les fautes fe multiplient fur tous ces. points ! La même: ferme qhi enrichira fon fermier, fi elle eft bien conduite , Inifournira à peine les moyens de vivres, f elleine l’eft que mé- diocrement. Onne peut donetropinfifter {ur la né- ceffité dela préfence du fermier à toutes les opéra- tions de la culture ; ce foin extérieur lui appartient, &c n'appartient qu’à lui. A l'égard de l’ordre intérieur de la maïfon, du foin des beftiaux, du détail de la bafle-cour, la férmiere doit en être chargée. Ces ob- jets demandent une-vigilance plus.reflerrée , une économie exaéte 8 minutieufe, qu'il feroit dange- reux d'appliquer aux grandes parties de l’agriculture. Dans la maïfon on ne gagne qu’en épargnant , dans le ehamp.une grande hardiefle à dépenier eft fou- ventnéceflaire pour gagner beaucoup. Il arrive très: fouvent que les fermieres.qui-deviennent veuves, fe ruinent , parce qu’elles conduifent toute la ferme par les principes qui re conviennent qw’à la bafle- cour, | On ne peut pas entreprendre de détailler tout ce qu'un fermier doit favoir pour diriger fon labourage le mieux qu'il eft poffible, La théorie de l’agriculture eft fimple , les principes font en petit nombre; maïs les circonftances obligent à les modifier de tant de manieres, que les regles échappent à-travers la foule des exceptions: La vraie fcience ne peut être enfei- gnée que par la-pratique , qui eft la grande maîtreffe des arts; & elle n’eft donnée danstoute fon étendue, qu'à ceux qui font nés avec du fens & de l’efprit. Pour ceux-là, nous pouvons aflürer qu'ils favent beaucoup ; nous oferions prefque dire qu’on n’en faura pas plus qu'eux, sil n’étoit pas plus utile & plus doux d’efpérer toûjours des progrès. Pourquoi les Philofophes, amis de l'humanité, qui ont tente d'ouvrir des routes nouvelles dans l’a- griculture, n’ont:ils pas eu cette opinion raifonnable de nos bons férmiers ? en fe familiarifant avec eux, ils auroient trouvé dansdes faits conftans la folution de leurs problèmes ; ils fe feroient épargné beau- coup d'expériences, en s’inftruifant de celles qui font déjà faites : faute de ce foin, ils ont quelquefois marché à tâtons dans un lieu quin’étoit pointobfcur. Cependant le tems s’écoule, l’efprit s’'appefantit ; on s'attache à des puérilités, & l’on perd de vüele grand objet , qui à la vérité demande un coup - d'œil plus étendu. Les cultivateurs philofophes ont encore eu quel- quefois un autre tort. Lorfqu’en propofant leurs dé- couvertes 1ls ont trouvé dans les praticiens de la froi- deur oude la répugnance , une vanité peu philofo- phique leur a fait envifager comme un effet de ftupi- dité ou de mauvaife volonté , une difpoñition née d’une connoiffance intime &e profonde quiproduit un preffentiment für. Les bons fermiers ne font ni ftupi- des ni mal-intentionnés; une vraie fcience qu'ils doi- vent à une pratique réfléchie, les défend contre l’en- thoufiafme des nouveautés. Ce qu'ils favent les met dans le cas de juger promptement & fürement des chofes qui en font voifines. Ils ne font point féduits par les préjugés qui fe perpétuent dans les livres : ils lifent peu , 1ls cultivent beaucoup ; &la nature qu'ils obfervent avec intérêt , mais fans pañlion, ne les trompe point fur des faits fimples. On voit combien les véritables connoïffances en agriculture, dépendent de la pratique, par l’exem- ple d’un grand nombre. de perfonnes qui ont effayé fans fuccès de faire valoir leurs terres ; cependant parmi ceux qui ont fait ces tentatives malheureufes, al s’en eft trouvé qui ne manquoient ni de fens ni d’efprit, & qui n’avoient pas négligé de s’infiruire. Mais où puifer des inftruétions vraiment utiles, finon dans la nature ? On fe plaint avec raifon des livres FER qui traitent delagriculture ; ils: né font-pas bons; mais 1l eft plus-aifé de les trouver mauvais que d’en faire de meilleurs: Quelque bien fait que fütunlivre en ce genre ; 1lneparviendroit jamais à donné une forme conftante à l’art, parce que:la nature nes’ prête pas. Il faut donc, lorfqu’on porte {es vües fur les progrès de l’agriculture, voir beaucoup'en détail &t d’une maniere fuivie ;: la pratique des fermiers; faut fouvent leur demander, plus fouvent deviner les raifons qui‘les. font agir? Quand on aura mis à cette Étude le tems & l'attention néceffaires, on verra peut-être que la fcience del’économieruftique eft portée très-loin par les bons férmiers ; qu'ellen’en exifte pas moins, parce qu'il y'a beaucoup d’isnc- rans ; maisiqu'en général le courage & l’argént mate quent plus que les Inmieres. SEEN Bla SET he Nous difons le courage 8e l'argent ; il faut beaucoup de lun & de l’autre pour réuflir à un certain point dans le labourage. La culture la plus ordinairetexige des avances aflez grandes, la bonne cultute en-de- mande de plus grandes encore ; & ce n’eft qu’en multipliant les dépenfes de toute efpece, qu'on par: vient à des fuccès intéreffans, Voyez FERME. Il ne faut pas moins de courage pour ne pas fere- buter d’une afiduité auf laborieute, fans être fotiz tenu par la confidération qui conronne les efforts dans prefque toutes les occupations frivoles. | Quelqu'habileté qu’ait un fermier , ill eft tobjours ignoré , fouvent il eft méprifé. Bien des gens méttent peu de différence entre cette clafle d'hommes, & les animaux dont ils fe fervent pour cultiver nos'terres. Cette façon de penfer eft très-ancienne, & vraiflem- blablement elle fubfiftera long -tems. Quelques aus teurs , 1l eft vrai, Caton, par exemple, dent que les Romains voulant loüer un citoyen vertueux, Pappelloient w7 bon laboureur; mais c’étoit dans les premiers tems de la république. D’autres écrivains envifagent l’agriculture comme une fonéion facrée, ui ne doit être confiée qu’à des mains pures. [ls di- is qu'elle eft voifine de la fagefle , & alliée de‘près à la vertu. Mais il en eft de ce goût refpe&able com- me de l'intégrité précieufe, à laquelle les Latins ajoûtoient l’épithete d’ansique. L’un & l’autre font relégués enfemble dans les premiers âges, toñjours diftingués par des regrets, jamais par des égards : aufh les auteurs qui font habitans des villes, ne par- lent que des vertus anciennes & des vices préfens. Maïs en pénétrant dans les maïfons des laboureurs, on retrouve, de nos jours même, les mœurs que le luxe a chaflées des grandes villes ; on peut y admirer encore la droiture, l'humanité, la foi conjugale, une religienfe fimplicité. Les fermiers par leur état n’éprouvent nt le dégoût des befoins preffans de la vie, ni l'inquiétude de ceux de la vanité ; leurs de- firs ne font point exaltés par cette fermentation de chimeres & d'intérêts qui agitent les citoyens des villes : ils n’ont point de craintes outrées, leurs efpée rances font modérées & lévitimes: une honnête : abondance eft le fruit de leurs foins , ils n’en jouif- fent pas fans la partager : leurs maifons font l’afyle de ceux qui n’ont point de demeure, & leurs tra- vaux la reflource de ceux qui ne vivent que par le travail. À tant de motifs d’eftime fi l’on joint lim portance de l’objet dont s’occupent les fermiers, on verra qu'ils méritent d’être encouragés par le sou verneèment & par l’opinion publique; mais en les garantiflant de lavilffement, en leur accordant des. diftinétions , 1l faudroit fe conduire de maniere à ne pas leur enlever un bien infiniment plus précieux, leur fimplicité ; elle eft peut-être la fauve-sarde de leur vertu. Ces article eff de M. LE ROY, lieutenant des chaffes du parc de Verfailles. FERMIERS , (Ecoz. polir.) {ont ceux qui afferment & font valoir les biens des campagnes, & qui pro= eutentiés richefles 8x les reflonices les -pin$ Eflen: tielles pour le foûtien-delétatsranfilemplor du:fér mierelt un: objet très important danëile royaue , &mérite uneigrande attention de lopart: du gouver: nement: : \ : | _ api 1 Si on ne confidete l’agriculture en France que fous un afpelt général, on: ne peutrs’en :formet: queldes idéés vagues 80 imparfaites. On voitivulgairement que la culture ne manque que dans les éndroirs:ioù lestterresreftent en fiche ; or imaginerque lestia- vaux) du pauvre culävateut font anfi avantageux que ceux.du riche férnier. Les moiflonsiqui couvrent lesterres nousien impofent ; nos regards qui les par: courent tapidement, nous aflürent à lavérité que: cesterres font cultivées; mais ce coup-d’œilne nous inftruit pas du produit des récoltes m de-létat deila, culture), ét encore moins des profits qu'on peutire- tirer desibeftiaux & des autres parties néceflaireside: l'agriculture: on ne peut connoïtre ces:objets .que: par unexamen fort étendu 8 fort approfondi. Les différentes manieres de traiter lesterres:que l’on cul: tive ,.8c les caufes:qui y contribuent , décident des: produits de l’agriculture; ce fontles différentes for-: tes detcultures, qu'il faut bien connoïître pour juger _ de l’état a@lueltde l’agriculture dans-le-royaume. - Les terres font:communément cultivées par: des Jermiers-avec deschevaux, ou par desmétayers ayec desbœufs: Il s'en faut peu qu'on ne croye que lu- fagedes chevaux éc l’ufage des bœufsne foient éga- Liane \ y a nat sr rl pbs EE ER En pe N'ASTE RSS CLRAJCI lement avantageux: Confultez les cultivateurs mp. mes, vous lestrouverez.décidés en faveur du genre: de-culture qui domine dans leur province. Il faudroit qu'ils fuflent également inftruits des avantages & des; defavantages de l’un & de l’autre, pour les évaluer: & les comparer; mais cet examen leur eft mutile, car les caufes qui obligent de cultiver avec: des bœufs, ne permettent pas de cultiver avec des che-: Vaux. 8 290 ill x Il n’y à que des fermiers riches qui puifent fe {er- vir de chevaux pour labourer les terres. Il faut qu'un fermier qui s'établit avec une charrue.de quatre,che vaux , fafle des dépenfes confidérables avant que d'obtenir une premiere récolte : 1l cultive perdant un anles terres qu'il doit enfemenceren blé ; & après: qu'il a enfemencé, il ne recueiïlle.qu’au mois d Août de l’année fuivante :ainfi il attend près de deux ans lesfruits de fes travaux 8 de fes:dépenfes. Ila faitles frais des chevaux & des autres beffiaux qui lui font: néceffaires ; 1l fournit les grains pourenfemencer les terres, 1l nourrit les chevaux, 1l paye les gages &c la nourriture des domeftiques : toutes ces dépenfes quil eft obligé d’avancer pour les deux premieres années de culture d’un domaine d’une charrue de; quatre chevaux, font eftimés à 10 ou r2 mille li- vres; & pour deux ou trois charrues,, 20 où 30 mille: livres. ME À Dans les provinces où il n’y a pas de férmier.en: état de fe procurer de tels établifflemens , les pro priétaires des terres n’ont d’autres reflources pour * retirer quelques produits de leurs biens, que de:les faire cultiver avec des bœufs, par des payfans.qui leur rendent la moitié de la récolte. Cette forte de: culture exige très-peu de frais de la: part du métayer; le propriétaire lui fournit les bœufs & la femence,! || msceu | fervent guere qu'à guider les bœufs. Ces chevaux || aflujettis à la lenteur des bœufs, tirent très-peu, les bœufs vont après leur travail prendre leur nour- riture dans les pâturages ; tous les frais du métayer fe réduifent auxinftrumens du labourage & aux:dés penfes pour fa nourriture jufqu’au tems de la pre miere récolte , fouvent même le propriétaire eft obli- gé de lui faire les avances de ces frais: Dans quelques pays les propriétaires aflujettis à toutes ces dépenfes , ne partagent pas les récoltes:;: les métayers leur payent un revenuen argent pour de fermage des terres, & lesintérêts du prix des be l arrangement, rfi FER 529 tätixy Maïs'ordinairement ce revenitiéft foft!modis que: cependant beaucoup, dérpropriétaires qui ne téfidént pas dans leurs terres, &quinepéuvéntipas étre préfens du partage dés récoltes ; préferent cet Les propriétaires qui fé chargéroient eux-mêmes de la culture de leurs terres dans les provincesroù Pon:ne cultive qu'avec des bœufs: feroient. obligés de: fuivre 1e même: ufage; parce:qu'ils ne-trouves roientidans césiprovincesni métayers ni charretiaré en état de-gouverner & derconduire des chevaux ILfaudroit qu'ils ên fflentevenir de pays éloignés} ce qui. eff fujet:àbéaucoup d'inconvéniens ; car fun | charretier fe/rerire, on siltombe malade, de trayäail | cefle., Ces évenemens font forb préjudiciables!, fnra tout dans les faifons preffantes : d'ailleurs le maître | efttfop dépendant de ces. domeffiques ; qu'il né:pèut || pas remplacer facilement lorfqu'ils veulent le:quita ter, ou lorfqu'ils fervent-mals | Dans tous les tems & dans tous les pays on à culs | tivé les tertes avec dés bœuf ; cet ufage aiété-plus où moins fuivi,, felon que la néceffité Parexigé:.car | lés'caufés quisont fixé les hommes à ce senre:deicul: | ture, font de tout tems.& de tout pays; mais «elles | augmentent ou diminuent, felonla puiffance & lé gouvernement des nations, 1e er Hart: : Le travail des bœufs éft beaucoup plus-lent:que celui des chèvaux: d’ailleurslesbœufs pañfeñt beaus coup de tems dans les pâturages pour prendre léur nourriture; c’eft pourquoi onemployé ordinaire ment douze bœufs,, & quelquefois jufqu’à dix-huit; . dans un domaine qui peut être cultivé par.quatreiches : vaux. Îl yen a qui laiflentles bœufs moins de tems | au pâturage, & qui les nourriflent en partie avec du fourrage fec ; par cet arrangement ils ritent plus de | travail de leurs bœufs ; mais cet ufage eft peu fuivis : On croit vulgairement que-les bœufs ont plus de | force que les chevaux, qu'ils font néceffairés. pour | la culture des terres fortes, que les chevaux; dit-on; | ne pourroient pas labourer:; mais:ce préjugé ne.s’ac- corde pasavec l'expérience: Dansiles charrois., fix bœufs voiturent deux ou trois mülliers pefant, au lieu que fix chevaux voiturent fix à fept milliers. . Les bœufs retiennent plus fortement aux monta | gnes, que les chevaux ; maisils tirentavec moins de . force. [lfemble que les charroisfe tirent mieux dans | les mauvais chemins par les bœufs'que par les che- vaux; mais leur charge étant: moins pefante, elle s'engage beaucoup moins dans les terres molles: ce qui a fait croire que les, bœufs tirent plus forte- ment que les chevaux, qui à la vérité n’appuyent | pas fermement quand le terrein n’eft pas folide. On peut labourer les terres fort legeres avec deux boœufs, on lès laboure auffi avec deux petits chevaux. | Dans les terres qui ont plus de corps, on met quatre . bœufs à chaque charrue , ou bien trois chevaux. | Il faut fix bœufs par charrue dans les teïrés uni. | peu pefantes : quatre bons chevaux fufifent pour H ces terres. On met huit bœufs pour labouret les terres for- |! tes: on les laboure auffi avec quatre forts chevaux. … Quand on met beaucoup de bœufs à une charrue, on y ajoüte.un ou deux petits chevaux; mais ils ne 114 \ | ainfi ce n'eft qu'un furcroït de dépenfe. k Une charrue menée par des bœufs ; laboure.dans | les grands Jours environ trois quartiers de terre: | une charrue tirée par des chevaux ,enlaborre envi: ron un arpent. & demi: ainf lorfqu'il faut: quatre | bœufs à une charrue, il en faudrait douze pour trois : charrues , léfqunelles laboureroient environ deux:ar< | pens deterre parjour; au lieu quetroischarrues mes, 430 FER méeschacune par trois chevaux , en labouréroient “environ quatre arpens &s demi. * es «Si on met fix bœufs chaque ‘charme, douze bœufs-quitireroïent deux charrues!, Haboureroient qui meneroient deux charrues , laboureroient envi- ronitrois arpens. Le RU : Saut c2Sil fant huit bœufs par icharrue, -vingt- quatre bœufs ou trois charrues labourent deux arpens ; au lieu que quatre forts:chevaux étant fufifans pour ‘une charrue, vingt-quatrechevaux4ou fix charrues, Jabourent neuf arpenstaïnf en réduifant ces diffé- rens cas à tm état moyen, on voitique les chevaux , labourent trois fois autant! de terre queles bœufs. Il: faut donc au:MOIns douze bœufs où 1l ne faudroit que quatre chevaux. | | | 1 Lufage des bœufs ne paroît préférable à celui des: ehevauxque dans des pays montagneux ou dans: desterreinsingrats, oùiliy a que de petites portions de:terres labourables difperfées , parce queiles che- vaux-perdroient trop. de tems à fe tranfportér à tou-: tesices petites portions de terre, & qu’on ne profi- téroit pas aflez de leur travail ; au lieu que emploi d'une charrue tirée par des bœufs ,: eft borné à: une petite quantité de terre, & par conféquent à un terrein beaucoup moins étendu que cehu'queles che- vaux parcourroiént pour labourer une plus grande quantité de terres fi difperfées. | ‘Les bœufs peuvent conveni gle, ou fort legeres, peu propres à produire de l’avoi- ne; cependant commeilne faut que deux petits che- vaux pour ces terres, 1lleur faut peu d'avoine, & il y a toùjours quelques parties de terres qui peuvent en produire fufifamment. Comme on ne laboure les terres avec:les bœufs qu’au défaut de férmiers en état de cultiver avec des chevaux, les propriétaires qui fourniflent des bœufs aux payfans pour labourer les terres, n’ofent pas or- dinairement leur confier des troupeaux de moutons, qui ferviroient à faire des fumiers & à parquer les terres ; on craint que ces troupeaux ne foient mal gouvernés, &c qu'ils ne périffent. Les bœufs qui pañlent la nuit &une partie du jour dans les pâturages, ne donnent point de fumier; ils n’en produifent que lorfqu'on les nourrit pendant l'hyver dans les étables. Ïl s'enfuit de-là que les terres qu’on läboure avec des bœufs, produifent beaucoup moins que celles ui font cultivées avec des chevaux par des riches Fes En effet, dans le premier cas les bonnes ter- res ne produifent qu'environ quatre feptiers de blé mefure de Paris; & dans le fecond elles en produi- {ent fept ou huit. Cette même différence dans le pro- duit fe trouve dans les fourrages, qui ferviroient à nourrir des beftiaux , & qui procureroient des fu- miers, Il y a même un autre inconvénient qui n’eft pas moins préjudiciable : les métayers qui partagent la récolte avec le propriétaire, occupent, autant qu'ils peuvent , les bœufs qui leur font confiés, à tirer des charrois pour leur profit, ce qui les intérefle plus que le labourage des terres ; ainfi ils en négligent tellement la culture, que f le propriétaire n’y ap- porte pas d'attention, la plus grande partie des ter- res refte’en friche. EU Quand les terres reftent en friche & qu’elles s’en- buiflonnent,c’eftungrandinconvénient dans les pays où l’onicultive avec des bœufs, c’eft-à-dire où l’on cultive mal, car lesterres y font à tres-bas prix; en! forte qu'un arpent de terre qu’on efferteroit & dé- fricheroit,coûteroit deux fois plus.de frais que le prix que l’on acheteroït un arpent de terre qui feroit en culture: ainf on aime mieux acquérir que de faire ces frais ainf les terres tombées en fiche reflent pour r pour les terres à fei-: toijouts en vdine.pâture, ce qui dégradé effentielle: mènt les fonds Ides:propriétaites.. * arr zoita ét « “On:croit vulgairement qu'il y a beaucoup plus dé | profit, par rapport la dépenfe à labourer avec des, environ un arpent & dem ; mais huit bons-chevaux: | timer en détanln sue 136 Estate LORS # Nous avons remarqué-qu'il ne faut que quatre ches: bœufs , qu'avec des chevaux: c’eft ce qu’il fautexas | Vaux pour cultiver ur domaine où l’on‘employe doi | zéhbæœnfs:ts 2h ereb en AT 4 ; ME 1! Les chevaux êcles bœufs font de différens prix. Lel | prixdes chevaux:de labour eftdepuis 60 liv.: jufqu'àr 460 div. celui des bœufs: eft depuis100 livres -la> | paire, jufqu'à 500 liv:1êc au-deflus;-mais en fuppo-! fant de bons'attelages, il faut.eftimer chaque cheval: | 3oo livres, &la-paire de gros bœufs 400 livres» pour comparèr les frais d'achat desns & des autrés.: Un cheval employé au labour, que l'on garde tant> . qu'il pent travailler ;:peut fervif pendant douze ans: nées. Mais on varie:beanconp par apport au tems! qu'on retientles bœufs au labour; lesuns les renoue véllent au bout de quatre années, lesiautres au bout de fix années, d’autres après huit-années : aïnfi en: réduifant ces différens ufages à untems mitoyen, : on le fixera à fix années, Après que les bœufs: ont: travaillé au labour; on les engraiffe pour là bouche» rie ; mais ordinairement ce n’eftpas ceux qui Les em- ployent au labour, qui les engraiffent:; ils les ven. dent maigres à d’autres, qui ont des pâturages con: venables pour cet engrais, Ainf l’engrais eftunobjet* à part, qu'il faut diftinguer ce qui découvre une dégradation énôrme de lagri- culture en France, par le défaut de fermiers. Ce defaftre peut être attribué à trois caufes, r°à la defertion des enfans des laboureurs qui font forcés à fe réfugier dans les grandes villes, où ils portent les richefles que leurs peres employent à la culture des terres : 2° aux impoñtions arbitraires, qui nelaïflent aucune sûreté dans l’emploi des fonds nécéffaires pour les dépenfes de l’agriculture : 3°à la gêne, à la quelle on s’eft trouvé aflujetti dansle commerce des grains. On a cru que la politique regardoit lindigence des habitans de la campagne , comme un aiguillon nécef- faire pour les exciter au travail: maïs il n’y a point d'homme quine fache que les richefles font le grand reflort de l’agriculture, & qu'il en faut beaucoup pour bien cultiver. Woyez l’article précédens FER- MIER , (Econ. rufl.). Ceux qui en ont ne veulent pas être ruinés: ceux qui n’en ont pas travailleroient intt« tilement, & les hommes ne font point excités au tra- vail, quand ils n’ont rien à efpérer pour leur fortune ; leur a@tivité eft toùjours proportionnée à leurs fuc- cès, On ne peut donc pas attribuer à la politique des. vüûes fi contraires au bien de l’état, fi préjudiciables au fonverain, & fi defayantageufes aux propriétaires des biens du royaume. Le territoire du royaume contient environ cent millions d’arpens. On fuppôfe qu'il y en a la moitié en montagnes, bois, prés, vignes, chemins, terres ingrates , emplacemens d'habitations, jardins, her- bages , ou prés artificiels, étangs, & rivieres ; & que le refte peut être employé à la culture des grains. Oneftime donc qu'il y a cinquante millions d’ar- pens de terres boutbles dans le royaume ; fi on y comprend la Lorraine, on peut croire que cette efimation n’eft pas forcée. Mais, de ces cinquante millions d’arpens, il eft à préfumer qu’il y en a plus d’un quart qui font négligés ou en friche. Il n’y en a donc qu’environtrente-fix millions qui font cultivés, dont fix ou fept millions font traités par la grande culture, & environ trente millions cul- . tivés avec des bœufs. Les fept millions cultivés avec des chevaux, font aflolés par tiers : il y en a un tiers chaque année qui produit du blé, & qui année commune peut donner : par arpent environ fix feptiers, femence prélevée. La fole donnera quatorze millions de feptiers. Les trente millions traités par la petite culture, {ont aflolés par moitié. La moitié qui produit la ré. colte FER tolte n’eft pas toute enfemencée en blé, il y én à : ordinairement le quart en menus grains ; ainf il ny auroit chaque année qu'environ onze millions d’ar- pens enfemencés en blé. Chaque arpent, année com- mune, peut produire par.cette culture environ trois {eptiers de blé, dont 1l faut retrancher la femence ; . ainfi la fole donnera 28 mullions de feptiers. Le produit total des deux parties eft 42 millions. | On eftime, felon M. Dupré de Saint-Maur, qu'il : va environ feize millions d’habitans dans le royau- | me. Si chaque habitant confommoit trois feptiers de blé, la confommation totale feroit de quarante- : huit millions de feptiers : mais defeize millions d’ha- bitans, ilen meurt moitié avant l’âge de quinze ans. : Aïnf de feize millions il n’y en a que huit millions” qui paflent l’âge de 15 ans, & leur confommation : annuelle en blé ne pafle pas vingt-quatre millions de feptiers. Suppofez-en la moitié encore pour les : enfans au-deflous de l’âge de 1 $ ans, la confomma- tion totale fera trente-fix millions de feptiets. M. Du- pré de Saint-Maur eftime nos récoltes en blé, année | commune, à trente-{ept millions de feptiers ; d’où 1l paroït qu'il n’y auroit pas d’excédent dans nos récol- tes en blé. Mais il y a d’autres grains & des fruits dont les payfans font ufage pour leur nourriture : d’ail- leurs je crois qu’en eftimant le produit de nos récol- tes par les deux fortes de cultures dont nous venons de parler , elles peuvent produire, année commune, quarante-deux millions de feptiers. 4 AT Si les ÿo millions d’arpens de terres labourables(a) qu'il y a pour le moins dans le royaume, étoient tous traités par la grande culture, chaque arpent deterre, tant bonneque médiocre, donneroit, année commu- ne, au moins cinq feptiers, femence prélevée: le produit du tiers chaque année, feroit 8$ millions de feptiers de blé; mais il y auroit au moins unhuitieme de ces terres employé à la culture des légumes, du in, du chanvre, &c. qui exigent de bonnes terres & une bonne culture ; 1l n’y auroit donc par an qu’en- viron quatorze millions d’arpens qui porteroient du blé, & dont le produit feroit 70 millions de feptiers. Ainf l'augmentation de récolte feroit chaque an- née, de vingt-fix millions de feptiers, Ces vingt-fix millions de feptiers feroient furabon. dans dans le royaume, puifque les récoltes a@uelles font plus que fufifantes pour nourrir les habitans : car on préfume avec raifon qu’elles excedent , année commune, d'environ neuf millions de feptiers, Ainf quand on fuppoñferoit à l'avenir un furcroît d’habitans fort confidérable, il y auroit encore plus de 26 millions de feptiers à vendre à l'étranger. Mais il n’eft pas vraiflemblable qu’on pût en ven- dre à bonprix une fi grande quantité. Les Anglois n’en exportent pas plus d’un million chaque année ; la Barbarie n’en exporte pas un million de feptiers. Leurs colonies , fur-tout la Penfylvanie qui eft extrè- mement fertile, en exportent à-peu-près autant. Il en fort aufñ de la Pologne environ huit cents mille tonneaux, ou fept millions de feptiers ; ce qui four- nit les nations qui en achetent, Elles ne Le payent pas même fort cherement, à en juger par le prix que les Anglois le vendent; mais on peut totjours conclure de-là que nous ne pourrions pas leur vendre vinget- fix millions de feptiers de blé, du moins à un prix qui püt dédommager le laboureur de fes frais. Ilfaut donc envifager par d’autres côtés les pro- duits de l’agriculture, portée au degré le plus avan- tageux. | Les profits fur les beftiaux en forment la partie la plus confidérable. La culture du blé exige beaucoup de dépenfes, La vente de ce grain eft fort inégale ; fi (4) Selon la carte de M. de Cafini, il y a en tout environ cent vingt-cinq millions d’arpens ; la moitié pourroit être cul- tivée en blé. Torse VI, FER 533 le fabourenr eft forcé de le vendre à bas prix, ou de le garder , ilne peut fe foûtenir que par les profits qu'il fait fur les beftiaux. Mais la culture des grains n'en eft pas moins le fondement & l’effence de fon état: ce n’eftque par ellequAl peut nourrir beaucoup de beftiaux ; car il ne fufit pas pour les beftiaux d’a- voir des pâturages pendant l'été, il leur faut des four- rages pendant Phyver, & il faut aufli des grains à la plüpatt pour leur nourriture, Cefont les riches moif- {ons qui les procurent: c’eft donc fous ces deux points de vüe qu’on doit envifager la régie de l’agriculture. Dans un royaume comme la France dont le terri- toire eff fi étendu ; & qui produiroit beaucoup plus de blé que lon n’en pourroit vendre, on ne doit s’at- tacher qu’à la culture des bonnes terres pour la pro- duétion du blé ; les terres fort médiocres qu’on cul- tive pour le blé , ne dédommagent pas fuflifamment des frais de cette culture. Nous ne parlons pas ici des améliorations de ces terres; il s’en faut beaucoup qu'on puifle en faire les frais en Francé, où l’on ne peut pas même, à beaucoup près, fubyenir aux dé- pens de la fimple agriculture. Mais ces mêmes terres peuvent être plus profitables , fi on les fait valoir par la culture de menus grains , de racines, d’herba« ges, ou de prés artificiels, pour la nourriture desbefs taux ; plus on peut par le moyen de cette culture nourrir les beftiaux dans leurs étables, plus ils four- niflent de fumier pour l’engrais des terres, plus les récoltes font abondantes en grains & en fourrages , &c plus on peut multiplier les beftiaux. Les bois, les vignes qui font des objets importans, peuvent auñi occuper beaucoup de tetres fans préjudicier à la cul ture des grains. On a prétendu qu'il falloit reftrein- dre la culture des vignes, pour étendre davantage la culture du blé : mais ce feroitencore priverleroyau« me d’un produit confidérable fans néceflité, & fans remédier aux empêchemens qui s’oppofent à la cul= ture des terres. Le vigneron trouve apparemment plus d'avantage à cultiver des vignes ; ou bien il lui faut moins de richefles pour foûtenir cette culture, que pour préparer des terres à produire du blé. Cha- cun confulte fes facultés ; fi on reftreint par des lois des ufages établis par des taïfons invincibles, ces lois ne font que de nouveaux obftacles qu’on oppofe à l’agriculture : cette légiflation eft d’autant plus dé- placée à l’égard des vignes, que ce ne font pas les terres qui manquent pour la culture du blé; ce font - les moyens de les mettre en valeur. En Angleterre , on réferve beaucoup de terres pour procurer de la nourriture aux beftiaux. Il y a une quantité prodigieufe de beftiaux dans cette île ; & le profit en eft fi confidérable , que le feul produit des laines eft evalué à plus de cent foixante millions. Il n’y a aucune branche de commerce qui puifle être comparée à cette feule partie du produit des beftiaux ; la traite des negres, qui eft l’objet capital du commerce extérieur de cette nation, ne monte qu'environ à foixante millions : ainfi la partie du cultivateur excede infiniment celle du négociant, La vente des grains forme le quart du commerce in- térieur de l'Angleterre, & le produit des beftiaux eft bien fupérieur à celui des grains. Cette abondance eft dûe aux richefles du cultivateur. En Angleterre, l’état de fermier eft un état fort riche & fort efti. mé ; un état fingulierement protégé par le gouver- nement. Le cultivateur y fait valoir fes richefles à découvert, fans craindre que fon gain attire fa rui- ne par des impofitions arbitraires & indéterminées, Plus les laboureurs font riches, plus ils augmen- tent par leurs facultés le produit des terres, & la puiffance de la nation. Un fermier pauvre ne peut cultiver qu’au defavantage de l’état, parce qu’il ne peut obtenir par fon travail les produtions que la terre n’açcorde qu'à une çulture opulente. ‘, FYyy 534 FER ‘Cependant il faut convenir que dans un royaume fort étendu, les bonnes terres doivent être préférées pour la culture du blé, parce que cette culture eft fort difpendieufe ; plus les terres font ingrates, plus elles exigent de dépenfes , & moins elles peuvent par Icur propre valeur dédommager le laboureur. En fuppofant donc qu’on bornâten France la cul- ture du blé aux bonnes terres, cette culture pour- roit fe réduire à trente millions d’arpens, dont dix feroient chaque année enfemencés en blé, dix en avoine, & dix en jachere. Dix millions d’arpens de bonnes terres bien cul- tivées enfemencées en blé, produiroient, année com- mune, au moins fix feptiers par arpent, femence pré- levée ; ainfi les dix millions d’arpens donneroient foïxante nullions de feptiers. | Cette quantité furpañleroit de dix-huit mullions de feptiers le produit de nos récoltes aftuelles de blé. Ce furçroit vendu à l'étranger dix-fept livres le feptier feulement, à caufe de l'abondance, les dix-huit mil- lions de feptiers produiroient plus de troïs cents mil- lions ; & il refteroit encore 20 ou 30 millions d’ar- pens de nos terres, non compris les vignes, qui {e- roient employés à d’autres cultures. Le furcroît de la récolte en avoine & menus grains qui fuivent le blé, feroit dans la même proportion ; il ferviroit avec Le produit de la culture desterres mé- diocres, à l'augmentation du profit fur les befhaux. On pourroit même préfumer que le blé qu’on por- teroit à l'étranger fe vendroit environ vingt livres lé feptier prix commun, le commerce du blé étant libre; car depuis Charles IX. jufqu’à la fin du regne e Louis XI V. les prix communs, formés par dixai- nes d'années, ont varié depuis 20 jufqu’à 30 livres de notre monnoïe d’aujourd’hui ; c’eft-à-dire environ depuis le tiers jufqu’à la moitié de la valeur du mare d'argent monnoyé; la livre de blé qui produit une livre de gros pain, valoit environ un fou, c’eft-à-dire deux fous de notre monnoye aétuelle. En Angleterre le blé fe vend environ vingt-deux livres, prix commun; mais, à caufe de la liberté du commerce ,iln’y a point eu de variations excefhives dans Le prix des différentes années ; la nation n’efluie ni difettes ni non-valeurs. Cette régularité dans les prix des grains eftun grand avantage pour le foù- tien de l’agriculture ; parce que le laboureur n'étant point obligé de garder fes grains, il peut toûjours par le produit annuel des récoltes , faire les dépen- fes néceffaires pour la culture. Ileftétonnant qu’en France dans ces derniers tems le blé foit tombé fi fort au-deflous de fon prix ordi- maire, & qu’on y éprouve fi fouvent des difettes : car depuis plus de 30 ans le prix commun du blé n’a monté qu’à 17 liv. dans ce cas le bas prix du blé eft de onze à treize livres. Alors les difettes arrivent fa- cilement à la fuite d’un prix fi bas, dans un royaume où il y a tant de cultivateurs pauvres ; car ils ne peu- vent pas attendre les tems favorables pour vendre Jeur grain ; ils font même obligés, faute de débit , de faire confommer une partie de leur blé par les beftiaux pour en tirer quelques profits. Ces mauvais fuccès les découragent ; la culture &c la quantité du blé diminuent en même tems, & la difette furvient. C’eft un ufage fort commun parmi les labonreurs, quand le blé eft à bas prix, de ne pas faire battre les | serbes entierement , afin qu'il refte beaucoup de grain dans le fourrage qu’ils donnent aux moutons ; par cette pratique ils les entretiennent gras pendant l’hyver & au printems, &c ils tirent plus de profit de la vente de ces moutons que de la vente du blé. Ainf il eft facile de comprendre , par cet ufage, pourquoi les difettes furviennent lor{qu’il arrive de mauvailes années. | On eftime, année commune, que les récoltes pro. FER duifent du blé environ pour deux mois plus que la confommation d’une année: mais l’eftimation d’une année commune eft établie fur les bonnes & les mauvailes récoltes , & on fuppofe la confervation des grains que produifent de trop les bonnes ré- coltes. Cette fuppofñtion étant fauffe, il s’enfuit que le blé doit revenir fort cher quand il arrive une mauvaife récolte ; parce que le bas prix du blé dans les années précédentes, à déterminé le cultivateur à l’employer pour l’engrais des beftiaux, & lui a fait négliger la culture: auffi a-t-on remarqué que les années abondantes, où le blé a été à bas prix, &c qui font fuivies d’une mauvaise année, ne préfervent pas dela difette. Mais la cherté du blé ne dédom- mage pas alors le pauvre laboureur, parce qu'il en a peu à vendre dans les mauvaifes années. Le prix commun qu'on forme des prix de plufieurs années n’eft pas une regle pour lui ; il ne participe point à cette compenfation qui n’exifte que dans le calcul à on égard. Pour mieux comprendre le dépériflement indif- penfable de l’agriculture , par linégalité exceflive des prix du blé, il ne faut par perdre de vüe les dé- penfes qu’exige la culture du blé. Une charrue de quatre forts chevaux cultive qua- tante arpens de blé, & quarante arpens de menus grains qui fe fement au mois de Mars. Un fort cheval bien occupé au travail confom- mera, étant nourri convenablement, quinze feptiers d'avoine par an; le feptier à dix livres , les quinze feptiers valent cent cinquante livres : ainfi la dé- penfe en avoine pour quatre chevaux eft 600 liv. On ne compte point les fourrages , la ré- colte les fournit , & ils doivent être con- fommés à la ferme pour fournirles fumiers. Les frais de charron, de bourrelier , de cordages , de toile, du maréchal, pour les focs , le ferrage , les eflieux de char- rette, les bandes des roues , &c. . . . . 250 Un charretier pour nourriture &c ga- DES 3 Cle « eee on + + + + ee + + + 300 Un valet manouvrier, ci . . . . . , 200 On ne compte pas les autres domeffi- ques occupés aux beftiaux & à la bafle- cour , parce que leurs occupations ne concernent pas précifément le laboura= ge , & que leur dépenfe doit fe trouver fur les objets de leur travail, On donne aux chevaux du foin de pré, ou du foin de prairies artificielles ; mais les récoltes que produit la culture des grains fourniffent du fourrage à d’au- tres beftiaux ; ce qui dédommage de la dépenfe de ces foins. : Le loyer desterres, pour la récolte des blés, eft de deux années ; l’arpent deterre étant affermé huit livres , le fermage de deux années pour quarante arpens ef Lataille, gabelle, & autres impoñtions montant à la moitié du loyer, eft . . . . 320 Les frais de moïflon , 4 liv. & d’en- grangemens, 1 liv. 10 f. font 5 1. of. par arpeñt de blé; c’eft pour quarante arpens 220 Pour le battage , quinze fols par fep- tier de blé ; l’arpent produifant fix fep- tiers, c’eft pour quarante arpens . . . . 189 Pour les intérêts du fonds des dépen- fes d’achat de chevaux, charrues, char- rettes, & autres avances foncieres qui périflent, lefquelles, difiraétion faite de beftiaux , peuvent être eftinées trois mille livres, les intérêts font au moins 300 Faux frais & petits accidens, . . .« . 200 Total pour la culture de 40 arpens, 32 20 Hv.. 649 « C’eft par arpent de blé environ quatre-vingt liv. de dépenfe, & chaque arpent de blé peut être eftimé porter fix feptiers & demi, mefure de Paris: c’eftune récolte paflable , eu égard à la diverfité des terres bonnes & mauvaifes d’une ferme , aux accidens, aux années plus ou moins avantageufes. De fix feptiers & demi que rapporte un arpent de terre , il faut en déduire la femence ; ainfil ne refte que cinq feptiers & dix boifleaux pour le fermier. La fole de quarante arpens produit des blés de différente valeur; car elle produit du feigle, du méteil , & du froment pur. Si le prix du froment pur étoit à feize livres le feptier, il faudroit réduire le prix commun de ces cifférens bles à quatorze livres : le produit d’un arpent feroit donc quatre-vingt-une liv. treize fols; ainf quand la têre du bié eft à {eize livres le feptier, le cultivateur retire à peine fes frais, & il eft expofé aux triftes évenemens de la grêle, des années ftériles , de ia mortalité des chevaux, &c. Pour eftimer les frais & le produit des menus grains qu'on feme au mois de Mars, nous les rédui- rons tous fur le pié de l’avoine ; ainfi en fuppofant une fole de quarante arpens d'avoine, & en obfer- vant qu'une grande partie des dépenfes faites pour le blé, fert pour la culture de cette fole, il n’y a à compter de plus que Le loyer d’une année de quarante ar- pens, quieft . . ..... .., . . .. La part de la taille, gabelle, & autres impofitions qui retombent fur cette fole, 160 1ésfras de récoltes AN ent ten1 80 LODATALO TEE Esther sel 80 Fat US EME NE nt us 0 320 liv, ——_—_— LEONE ed gr hr en DA 690 ._ . Ces frais partagés à quarante arpens, font pour chaque arpent 18 Liv. $ f Un arpent produit environ deux feptiers , fe- mence prélevée ; le feptier, mefure d’a- yoine, à 10 liv. c’eft 20 Liv. par arpent, Les frais du blé pour quarante arpens, SRE M Rte 20 Les frais des menus grains font . . . . 690 ——— POREE RE AENRET A F Oro ———_— Le produit du blé eft ERE ERrA | 3266 Le produit des menus grains eft . . . 800 PORT RC RAM N reLtAOGDG Aïnfi le produit total du blé & de l’avoine n’exce- de alors que de 150 liv. les frais dans lefquels on n’a point compris fa nourriture ni fon entretien pour fa famille & pour lui. Il ne pourroit fatisfaire à ces be- {oins effentiels que par le produit.de quelques bef- taux, & il refteroit toûjours pauvre, & en danger d'être ruiné par Les pertes : il faut donc que les grains foient à plus haut prix, pour qu'il puifle fe foûtenir & établir fes -enfans. é Le métayer qui cultive avec des bœufs, ne re- cueille communément que fur le pié du grain cinq ; c’eft trois feptiers & un tiers par arpent: il faut en retrancher un cinquieme pour la femence. Ilpartage cette recolte par moitié avec le propriétaire, qui lui fournit les bœufs , les friches, les prairies pour la nourriture des bœufs, le décharge du loyer des terres, lui fournit d’ailleurs quelques autres be£ | tiaux dont il partage le profit. Ce métayer avec fa famille cultive lui-même , & évite les frais des do- meftiques , une partie des frais de la moiflon , & les frais de battage : il fait peu de dépenfe pour le bour- relier & le maréchal, &c. Si ce métayer cultive trente arpens de blé chaque année, il recueille com- munément pour {a part environ trente ou trente-cinq Æpuers, dont 1l confomme la plus grande partie Tome VI, FER 535 Pour fa nourriture & celle de fa famille : le refte eft employé à payer fa taille, les frais d'ouvriers qu'il ne peut pas éviter, & la dépenfe qu'il eft obligé de faire pour fes befoins 8 ceux de fa famille. Il refte tobjours très-pauvre ; & même quand les terres font médiocres , il ne peut fe foûtenir que par les charrois qu'il fait à fon profit. La taille qu’on lui impofe eftpeu de chofe en comparaifon de celle du férmier, parce qu'il recueille peu, & qu'il n’a point d'effets à lui qui aflürent l’impofition : {es recoltes étant très-foi- bles, il a peu de fourrages pour la nourriture des beftiaux pendant l’hyver; enforte que fes profits font fort bornés fur cette partie, qui dépend effentielle- ment d’une bonne culture. La condition du propriétaire n°eft pas plus avan- tageufe ; il retire environ 1; boifleaux par atpent , au lieu d’un loyer de deux années que lui payeroit un férmrier : il perd les intérêts du fonds des avances qu'il fournit au métayer pour les bœufs. Ces bœufs confomment les foinis de fes prairies, & une grande partie des terres de fes domaines refte en friche pour leur pâturage ; ainfi fon bien eft mal cultivé & pref- qu'en non-valeur. Mais quelle diminution de pro- duit, & quelle perte:pour l’état ! | Le fermier eft toûjours plus avantageux à l’état, dans les tems mêmes où il ne gagne pas fur fes recol- tes, à caufe du bas prix des grains ; le produit de fes dépenfes procure du moins dans le royaume un accroïflement annuel de richeffes réelles. A la véri- té cet accroïfflement de richefles ne peut pas conti- nuer, lorfque les particuliers qui en font les frais n'en retirent point de profit, & fouffrent même des pertes qui diminuent leurs facultés. Si on tend à fa- vorifer par le bon: marché du blé les habitans des villes, les ouvriers des manufa@ures , & les arti- fans , on defole les campagnes, qui font la fource des vraies richefles de l’état : d’ailleurs ce deffein réuffit mal. Le pain n’eft pas la feule nourriture des hommes ; & c’eft encore l’agriculture , lorfqu’elle eft protégée , qui procure les autres alimens avec abondance, | Les citoyens, en achetant la livre de pain quel- quesliards plus cher, dépenferoient beaucoup moins pour fatisfaire à leurs befoins. La police n’a de pou- voir que pour la diminution du prix du blé, en empé- chant l'exportation; mais le prix des autres denrées n’eft pas de même à fa difpoñtion, & elle nuit beau- coup à l’aifance des habitans des villes, en leur pro- curant quelque légere épargne fur le blé, & en dé- truifant l'agriculture. Le beurre , le fromage, les œufs , les légumes , 6. font à des prix exorbitans, ce qui enchérit à proportion les vêtemens & les au- tres ouvrages des artifans dont le bas peuple a befoin. La cherté de ces denrées augmente le falaire des ou- vriers. La dépenfe inévitable & journaliere de ces mêmes ouvriers deviendroit moins onéreufe, files campagnes étoient peuplées d’habitans occupés à élever des volaïlles, à nourrir des vaches , à cultiver des feves, des haricots, des pois, &cc, Le riche fermier occupe & foûtient le payfan; le payfan procure au pauvre citoyen la plüpart des denrées néceffaires aux befoins de la vie. Par-tout où le fermier manque & où les bœufs labourent la terre, Les payfans languiflent dans la mifere ; le mé- tayer qui eft pauvre ne peut les occuper : ils aban- donnent la campagne , ou bien ils y font réduits à {e nourrir d'avoine, d'orge, de blé noir, de pommes deterre, & d’autres productions de vil prix qu'ils cultivent eux-mêmes , & dont la récolte fe fait peu attendre. La culture du blé exige trop de tems & de travail ; ils ne peuvent attendre deux années pour obtenir une récolte. Cette culture eft réfervée au fermier qui en peut faire les frais, ou au métayer qui eft aidé par le propriétaire, & qui d’ailleurs.eft une "Yyyi 536 FER foible reffource pour l’agriculture ; maïs c’eft la feule pour les propriétaires dépourvûs de férmiers. Les fermiers eux-mêmes ne peuvent profiter que par la fupériorité de leur-culture , & par la bonne qualité des terres qu'ils cultivent; car ils ne peu- vent gagner qu'autant que leurs récoltes furpaflent leurs dépenfes. Si, la femence &r les frais prélevés, un férmier a un feptier de plus par arpent, c’eft ce ‘qui fait fon avantage ; car quarante arpens enfe- mencés en blé, lui forment alors un bénéfice de quarante feptiers, qui valent environ 600 livres ; & sl cultive & bien qu'il puifle avoir pour lui deux feptiers par arpent, {on profiteft doublé. Il faut pour que quandils ont douze ou treizeans; alors ils font moins bons, & on les vend moins cher qu'ils ne valoient avant que de les mettre au labour. Ces bœufs occu- pent pendant long-tems des pâturages dont onsne tire aucun profit; au lieu que fi on ne faifoit ufage de ces pâturages que pour élever fimplement des bœufs juf- qu’au temsoiils feroient en état d’être mis à l’engrais pour la boucherie, ces bœufs feroient renouvellés tous les cinq ou fix ans. Par la grande culture les chevaux laïffent les pâ- turages libres ; ils fe procurent eux-mêmes leur nour- titure fans préjudicier au profit du laboureur, qui tire encore.un plus grand. produit de leur travail que de celui des bœufs ; ainfi par cette culture on met- troit à profit les pâturages qui fervent en pure perte à nourrir 4 ou ÿ millions de bœufs que la petite cul- ture retient au labour, & qui occupent, pris tous en- femble, au moins pendant fix ans, les päturages qui pourroient fervir à élever pour la boucherie 4 ou 5 autres millions de bœufs. | Les bœufs, avant que d’être mis à l’engrais pour la boucherie, fe vendent différens prix, felon leur groffeur: le prix moyen, peut être réduit à 100 liv. ainfi 4 millions 500 mille bœufs qu’il y auroit de fur- croit en fix ans, produiroient 450 millions de plus tous les fx ans. Ajoûtez un tiers de plus que produi- roit l’engrais ; le total feroit de Goo millions, qui, divifés par fix années, fourniroient un profit annuel de-100 millions. Nous ne confidérons ce produit que relativement à la perte des pâturages ou des friches abandonnés aux bœufs qu’on retient au labour ; mais ces pâturages pourroient pour la plûüpart être remis en culture, du moins en une culture qui fourniroit plus de nourriture aux beftiaux : alors le produit en feroit beaucoup plus grand. Les troupeaux de moutons préfentent encore un avantage qui feroit plus confidérable, par l’accroif- fement du produit des laines & de la vente annuelle quantité eft zéro dans nos armées : mais 4000 qui fünt ef- frayés & qui abandonnent les campagnes chaque fois qu'on tire la milice, font un grand objet pour la culture des ter- res. Nous ne parlerons ici que des laboureurs.qui cultivent avec des chevaux ; car ( felon l’auteur de cet article } les autres n’en méritent pas le nom. Or il ya environ fix ou fept millions d’arpenside terre cultivée par des chevaux, ce qui peut être l'emploide 30000 charrues, à 120 arpens par chacune. Une grande païtie des férméers ont deux char- rues: beaucoup en ont trois. Aïinfi le nombre des fermiers qui cultivent par des chevaux , ne va guere qu à 30000: fur- tout fi on ne les confond pas avec les propriétaires nobles & privilégiés qui exercent la même culture, La moitié de ces fermiers n'ont pas des enfans en âge de tirer à lamili- ce; car ce ne peut être qu'après dix-huit ou vingt ans de leur mariage qu'ils peuvent avoir un enfant à cet âge, & il ÿ aautant defemelles que de mâles. Aïnfi il ne peut pas y avoir 10000 fils de férmiers en état de tirer à la milice: une partie s'enfuit dans les villes : ceux qui reftent expofés au fort, tirent avec les autres payfans ; il n'y en a donc pas mille, peut-être pas cinq cents, qui échoient à la milice. Quand le nombre des fermiers augmenteroit autant qu'il eft ofhble, l'état devroit encore les protéger pour le foûtien de * Agriculture, & en faveur des contributions confidérables qu'il en retireroit, Noe des Editeurs, 2.6 FER 537 de cés beftiaux. Dans les 375 mille domaines culti= vés par des bœufs, il!n’y a pas le tiers des troupeaux qui pourroient y être nourris, fi ces teires étoient mieux cultivées, & produifoient une plus, grande quantité de fourrages. Chacun de ces domaines ayéc ! {es friches nourriroit un troupeau de 250 moutons; ainfi une augmentation des deux:tiers feroit environ de 250 mille troupeaux, ou de 60 millions. de mou- tons, qui partagés en brebis, agneaux , & moutons proprement dits, il: auroit 3omillions de brebis qui produiroient 30 millions d’'agneaux, dont moitié fe- roient mâles ; on garderoit ces mâles, qui forment des: moutons.que l’on vend pour la boucherie quand ils ont deux ow trois ans. On vend les agneaux fe- mélles:, à lareferve.d’une-pantie que l’on garde pour renouveller les brebis, IlLy auroit 15. millions d’a- gneaux femelles ; on en vendroit 10 millions, qui, à 3 liv. piece, produiroient 30 nullions. IL y auroit 1$ millions de moutons qui fe fuccé- deroïent tous les ans; ainfi ce feroit tous les ans 15 millions de moutons à vendre pour la boucherie, qui étant fuppofés pour le prix commun à huit livres la piece , produiroient 120 millions, On vendroit par an cinq millions, de vieilles brebis, qui , à 3 livres piece, produiroient 15 millions de livres. Il yauroit chaque année 60 millions de toifons (non compris celles des agneaux) , qui réduites les unes avec les autres à un prix commun de 40 fous la toifon, pro- duiroient 120 millions ; l’accroiflement du produit annuel des troupeaux monteroit donc à plus de 28$ millions ; ainfi le furcroit total en blé, en bœufs & en moutons, feroit un objet de 68$ millions, Peut-être objeétera-t-on que l’on n’obtiendroit pas ces produits fans de grandes dépenfes. Il eft vrai que fi on examinoit fimplement le profit du laboureur ilfaudroit en foufirairelesfrais; mais en envifageant ces objets relativement à l’état , on apperçoit que l’argent employé pour.ces frais refte dans le royau- me, & tout le produit fe trouve de plus. Les obfervations qu’onvient de faire fur l’accroif: fement du produit des. bœufs & des troupeaux, doi- vent s'étendre fur les, chevaux, fur les vaches, fur les veaux, fur les porcs, fur les volailles, fur les vers à foie, G:c. car par le rétabliflement de.la gtan- de culture on auroit de riches moiflons, qui procu- reroient beaucoup de grains , de légumes & de four- rages. Mas en faifant valoir les terres médiocres par Ja culture des menus grains, desracines, desherba- ges, des prés artificiels, des müriers,, &c. on multi- pheroit beaucoup plus encore la nourriture des bef- tiaux, des volaulles , & des vers à foie, dont il réful- teroit un furcroît de revenu qui feroit aufli confidé- rable que celui qu’on tireroit des beftiaux que nous avons évalués ; ainfi1l y auroit par le rétabliflement total de la grande culture, une augmentation conti- nuelle de richeffes de plus d’un milliard. Cesricheffes ferépandroient fur tous Les habitans ; elles leur procureroïent de meilleurs alimens, elles fatisferoient à leurs befoins, elles les rendroïent heu- reux, elles augmenteroient la population. elles ac- croîtroient les revenus des propriétaires & ceux de Pétat. Les frais de la culture n’en feroïent guere plus con- fidérables , il faudroit feulement de plus grands fonds pour en former létabliflement ; mais ces fonds man- quent dans les campagnes, parce qu’on les a attirés dans les grandes villes. Le gouvernement qui fait mouvoir les reflorts de la fociété , qui difpofe de l’ordre général, peut trouver les expédiens conve- nables & intéreflans pour Les faire retourner d’eux- mêmes à l’agriculture, où ils feroient beaucoup plus profitables aux particuliers , & beaucoup plus avan- tageux à l’état. Le bn, le chanvre, les laines, la foie, Gr. feroient les matieres.premieres de nos ma € 539 FER nufa@tures ; le blé, les vins, l’eau-de-vie, les cuirs, des viandes falées, le beurre, le fromage, les graif- fes, le fuif, les toiles, les cordages, les draps, les étoffes, formeroient le principal objet de notre com- merce avec l'étranger, Ces marchandifes feroient indépendantes du luxe, les befoins des hommes leur affürent une valeur réelle; elles naîtroient de notre propre fonds, & feroient en pur profit pour l’état : ce feroit des richeffes toûjouxs renaiffantes, & toù- jours fupérieures à celles des autres nations. Ces avantages , f eflentiels au bonheur & à la profpérité des fujets , en procureroient un autre qui ne contribue pas moins à la force & aux richeffes de l’état ; ils favoriferoient la propagation &c la confer- vation des hommes, fur-tout l'augmentation des ha- “bitans de la campagne. Les fermiers riches occupent les payfans , que l'attrait de l'argent détermine au travail : ils deviennent laborieux, leur gain leur pro- curetune aifance qui les fixe dans les provinces, & qui-les met en état d'alimenter leurs enfans, de les retemir auprès d'eux, & de les établir dans leur pro- vince. Les ‘habitans des campagnes fe multiplient donc à proportion que les richefles y foûtiennent l'agriculture, & que l’agriculture augmente les ri- chefles. Dans les provinces où la culture fe fait avec des bœufs, l’agriculteur eft pauvre , il ne peut occuper le payfan : celui-ci n’étant point excité au travail par l’appât du gain, devient parefleux, & languit dans la mifere; fa feule reflource eft de cultiver un peu de terre pour fe procurer de quoi vivre. Mais quelle eft la nourriture qu’il obtient par cette cul- ture ? Trop pauvre pour préparer la terre à produire du blé & pour en attendre la récolte, il fe borne, nous Favons déjà dit, à une culture moins pénible, moins longue , qui peut en quelques mois procurer la moiflon: l'orge , l’avoine, le blé noir, les pom- mes de terre, le blé de Turquie ou d’autres produc- tions de vil prix, font les fruits de fes travaux; voi- 1à la nourriture qu’il fe procure, & avec laquelle il éleve fes enfans. Ces alimens , qui à peine foûtien- nent la vie en ruinant le corps, font périr une partie des hommes dès l'enfance ; ceux qui réfiftent à une telle nourriture, qui confervent de la fanté & des forces , &t qui ont de l'intelligence , fe délivrent de cet état malheureux en fe refugiant dans les villes : les plus débiles & les plus ineptes reftent dans les campagnes, où ils font auf inutiles à l’état qu'à chérge à eux-mêmes. _ Les habitans des villes croyent ingénument que ce font les bras des payfans qui cultivent la terre, & que l’agriculture ne dépérit que parce que les hommes manquent dans les campagnes. Il faut, dit- on, en chafler les maitres d'école, qui par les inf tfu@ions qu’ils donnent aux payfans , facilitent leur défertion : on imagine ainfi des petits moyens , aufñ ridicules que defavantageux ; on regarde les payfans comme les efclaves de l’état ; la vie ruftique paroït fa plus dure , la plus pénible, & la plus méprifable, parce qu’on deftine les habitans des campagnes aux travaux qui font réfervés aux animaux, Quand le payfan laboure lui-même la terre, c’eft une preuve de fa mifere & de fon inutilité. Quatre chevaux cul- tivent plus de cent arpens de terre ; quatre hommes n’encultiveroient pas 8. À la referve du vigneron, du jardinier, qui fe livrent à cette efpece de travail, les payfans font employés par les riches fermiers à d’autres ouvrages plus avantageux pour eux, & plus utiles à l’agriculture. Dans les provinces riches où la culture eft bien entretenue, les payfans ont beau- coup de reflources ; ils enfemencentquelquesarpens de terre en blé & autres grains: ce font les fermiers pour lefquels ils travaillent qui en font les labours, ê& c’eft la femme & les enfans qui en recueillentles produits: ces petites moïflons qui lent donnent une partie de leur nourriture , leur produifent des four- rages & des fumiers. Ils cultivent du lin, du chan- vre , des herbes potageres, des légumes de toute efpece ; ils ont des beftiaux & des volailles qui leur fourniffent de bons alimens, & fur lefquels ils reti- rent des profits ; ils fe procurent par Le travail de la moiflon du laboureur, d’autres grains pour le refte de lannée; ils font toûjours employés aux travaux de la campagne ; ils vivent fans contrainte &c fans inquiétude ; ils méprifent la fervitude des do- mefhiques, valets, efclaves des autres hommes AIS n'envient pas le fort du bas peuple qui habite les vil- les, qui loge au fommet des maïfons » qui eft borné 4 un gain à peine fufffant au befoin préfent, qui étant obligé de vivre fans aucune prévoyance &fans aucune provifion pour les befoins à venir, eft conti= nuellement expofé à languir dans Pindigence. Les payfans ne tombent dans la mifere & n’aban- donnent la province , que quand ils font trop inquié- tés par les vexations auxquelles ils font expolés, où quand il n’y a pas de fermiers qui leur procurent du travail, & que la campagne ef cultivée par de pau- vres métayers bornés à une petite culture , qu'ils exécutent eux-mêmes fort imparfaitement. La por- tion que ces métayers retirent de leur petite récolte qui eft partagée avec le propriétaire, ne peut fuffre que pour leurs propres befoins ; ils ne peuvent ré- parer ni améliorer les biens. | Ces pauvres cultivateurs , fi peu utiles à l’état ; ne repréfentent point le vrai laboureur, le riche fermier qui cultive en grand, qui gouverne, qui com- mande, qui multiplie les dépenfes pour augmenter les profits; qui ne négliseant aucun moyen, aucun avantage particulier , fait le bien général ; qui em- ploye utilement les habitans de la campagne, qui peut choïfir & attendre les tems favorables pour le débit de fes grains, pour l’achat & pour la vente de fes beftiaux. Ce font les richefles des fermiers qui fertilifent les terres, qui multiplient les beftiaux, qui attirent, qui fixent les habitans des campagnes , & qui font la force &z la profpérité de la nation. Les manufaétures & le commerce entretenus:par les defordres du luxe, accumulent les hommes & les richeffes dans les grandes villes, s’oppofent à l'amélioration des biens, dévañtent les campagnes, infpirent du mépris pour l’agriculture, augmentent exceflivement les dépenfes des particuliers, nuifent au foûtien des familles, s’oppofent à la propagation . des hommes, & affoibliffent l’état. La décadence des empires a fouvent fuivi de près un commerce florlant. Quand une nation dépenfe par Le luxe ce qu’elle gagne par le commerce, il n’en réfulte qu’un mouvement d’argent fans augmenta- tion réelle de richeffes. C’eft la vente du fuperflu qui enrichit les fujets & le fouverain. Les produ&tions de nos terres doivent être la matiere premiere des manu- faëtures & l’objet du commercestout autre commer- ce qui n’eft pas établi fur ces fondemens , eft peu affüré ; plus il eft brillant dans an royaume, plus il excite l’émulation des nations voifines , & plus ik fe partage. Un royaume riche en terres fertiles , ne peut être imité dans l’agriculture par un autre qui n’a pas le même avantage. Mais pour en profiter, il faut éloigner les caufes qui font abandonner les cam- pagnes, qui raflemblent & retiennent les richeffes dans les grandes villes. Tous les feigneurs, tous les gens riches , tous ceux qui ont des rentes ou des pen- lions fufifantes pour vivre commodément, fixent leur féjour à Paris ou dans quelqu’autre grande ville, où ils dépenfent prefque tous les revenus des fonds du royaume, Ces dépenfes attirent une multitude de marchands, d’artifans , de domeftiques, &.de ma- nouvriers : cette mauvaife diffribution des hommes êe des richeffes efl inévitable, maïs elle s’étend beau- coup trop loin; peut-être y aura-t-0on d’abord beaucoup contribué, en protégeant plus les citoyens que les habitans des campagnes. Les hommes font at- trés par l'intérêt 8z par la tranquillité. Qu'on pro- cure ces avantages à la campagne, elle ne fera pas moins peuplée à proportion que les villes. Tous les habitans des villes ne font pas riches, ni dans l’ai- fance, La campagne a fes richefles & fes agrémens : on ne l’abandonne que pour éviter les vexations aux- quelles on y eftexpofé; mais le gouvernement peut remédier à ces inconvéniens.Le commerce paroit flo- riffant dans les villes, parce qu’elles font remplies de riches marchands, Mais qu’en réfulte-t-il, finon que prefque tout largent du royaume eft employé à un commerce qui n'angmente point Les richeffes de la nation? Locke le compare au jeu , où après le gain & la perte des joueurs, la fomme d’argent refte la même qu’elle étoit auparavant. Le commerce inté- rieur eft néceflaire pour procurer les befoins, pour entretenir le luxe, & pour faciliter la confomma- ton; maisil contribue peu à-la force & à la profpé- rité de l’état. Si une partie des richefles immenfes qu'il retient, & dont l'emploi produit fi peurau royau- me, étoit diftribuée à l’agriculture, elle procureroit des revenus bien plus réels & plus confidérables. L'agriculture eft le patrimoine du fouverain : toutes fes produdions font vifibles ; on peut les aflujettir convenablement aux impofñtions ; les richeffes pé- cuniaires échappent à la répartition des fubfides, le gouvernement n y peut prendre que par dés moyens onéreux à l’état. | Cependant la répartition des impoftions fur les laboureurs, préfente auf de grandès difficultés. Les taxes arbitraires font trop effrayantes & trop injuf- tes pour ne pas s’oppofer toùjours puiflamment au rétabliffement de l’agriculture. La répartition pro- portionnelle n’eft guere pofñlible; il ne paroït pas qu'on puifle la régler par l'évaluation & par la taxe des terres : car les deux fortes d'agriculture ‘dont nous avons parlé, emportent beaucoup dedifféren- ce dans les produits des terres d’une même valeur ; ainf tant que ces deux fortes de culture fubffteront & varieront , les terres ne pourront pas fervir de mefure proportionnelle pour l’impofition de la taille. Si l’on taxoit les terres felon l’état a@uel, le tableau deviendroit défeétueux à mefure que la grande cul- ture s’accroitroit : d’ailleurs 1l y a des provinces où le profit fur les beftiaux eft bien plus confidérable que le produitdes récoltes, & d’autres où le produit des récoltes furpañle le profit que l’on retire des bef- traux ; de plus cette diverfité de circonftances eft fort fufceptible de changemens. Il n’eft donc guere pof- fible d'imaginer aucun plan général, pour établir une répartition proportionnelle des impoñitions. Maus il's’agit moins pour la sûreté des fonds du cultivateur d’une répartition: exatte, que d'établir un frein à l’eftimation arbitraire de la fortune du la- boureur. I fufiroit d’aflujettir Les impoñitions à des regles invariables & judicieufes, qui affüreroient le payement de l’impofition, & qui garantiroient celui qui la fupporte , des mauvaifes intentions ou des faufles conjeétures de ceux qui l’impofent. Il ne fau- droit fe régler que fur les effets vifbles ; Les eftima- tions de la fortune fecrete des particuliers font trom- peuies, & c’eft toûjours le prétexte-qui autorife les abus qu'on veut éviter, Leseffets vifibles font pour tous les laboureursdes moyens COMmmuns pour procurer les mêmes profits ; s'il y a des hommes plus laborieux, plus intelligens, plus économes, qui en tirent un plus grand avanta- ge, ils méritent de jouir en paix des fruits de leurs épargnes &e de leurs talens. IHfufiroit donc d'obli- FER 539 ger le laboureur de donner tons les ans aux collec teurs une déclaration fidelle de la quantité & de la nature des biens dont il eft propriétaire ou fermier, &t un dénombrement de fes récoltes, de fes beftiaux, Gt, fous les peines d’être impoté arbitrairement s’il eft convaincu de fraude, Tous les habitans d’un vil. lage connoïffent exattement les richefles vifibles de chacun d'eux ; les déclarations frauduleufes feroient facilement apperçhes. On aflujettiroit de même riz goureufement les colleéteurs à régler la répartition des impoñtions » relativement & proportionnielle- ment à ces déclarations. Quant aux fimples manouz vriers & attifans, leur état ferviroit de reples pour les uns & pour les autres, ayant égard à leurs enfans en bas âge, & à ceux qui font en état de travailler, Quoiqu'il y eût de la difproportion entre ces habi_ tans , la modicité de la taxe impofée à ces fortes d'ouvriers dans les villages, rendtoit les inconvé- miens peu confidérables. Les impofñtions à répartir fur les commerçans éta- blis dans les villages , font les plus difficiles à régler; mais leur déclaration für l'étendue & les objets de leur commerce, pourroit être admife où conteflée par les colleéteurs ; & dans le dernier cas elle {etoit approuvée ou réformée dans une affemblée des ha= bitans de la paroiffe. La décifion formée par la noto- riété, reprimeroit la fraude du taillable, & les abus de l’impofition arbitraire des colleéteurs, Les com- merçans font en petit nombre dans les villages: ainf ces précautions pourroient fuffre à leur égard. Nous n’envifageons ici que les campagnes, & fur: tout relativement à la sûreté du laboureur. Quant aux villes des provinces qui payent la taille, ce {e2 roit à elles-mêmes à former les arrangemens qui leur conviendroient pour éviter l’impoftion arbitraire. Si ces regles n’obvient pas à tousles inconvéniens, ceux qui refteroient, & ceux même qu’elles pour- roient occafionner , ne feroient point comparables à celui d’être expofé tous les ans À la difcrétion deg colleéteurs ; chacun fe dévoueroït fans peine à une impofition reglée par la loi. Cet avantage fi efféntiel ët fi defité , difiperoït les inquiétudes exceflives que caufent dans les campagnes la répartition arbitraire " de la taille. On objeétera peut-être que les déclarations exac- tes que l’on exigeroit , & qui régleroient la taxe de chaque laboureur, pourroient le déterminer À ref: treindre fa culture &c fes beftiaux pour moins payer de taille ; ce qui feroit encore un obftacle à l’accroif: fement de l’agriculture: Mais foyez aflüré que le la= boureur ne s’y trompetoit pas; car fes récoltes, fes beftiaux, &c fes autres effets, ne pourroient plus fer vir de prétexte pour le furcharger d'impoñtions ; if fe décideroit alors pour le profit. On pourroit dire auf que cette répartition pro= portionnelle feroit fort compotée, & par conféquent difficile à exécuter par des colleéteurs qui ne font pas verfés dans le calcul : ce feroit l'ouvrage de lécri- vain, que les colleéteurs chargent de la confedion du rôle. La communauté formeroit d’abord un tarif fondamental, conformément à l’eflimation du pro- duit des objets dans Le pays : elle pourroit être aidée dans cette premiere opération par le curé, ou par le feigneur, où pat {Oh régifleur, ou par d’autres per- fonnes capables & bienfaifantes.Ce tarifétant décidé &c admis par leshabitans, il déviendroit bientôt fami- lier à tous lésparticuliers ; parce que chacun autoit intérêt de connoître la cote qu'il doit payér : ainf en peu de téms cette impofñtion proportionnelle leur deviendroit très-facile. Si les habitans des campagnes étoïent délivrés de’ limpofñition arbitraire de la taille, ils vivroient dans la même fécurité que les habitans des grandes villes + _ beaucoup de ‘propriétaires iroïient faire valoir eux= = d 540 FER mêmes leurs biens ; on n’abandonneroït plus les cam- pagnes ; les richefles & la population s’y retabli- rotent : ainfi en éloignant d’ailleurs toutes les autres caufes préjudiciables aux progrès de lagriculture, les forces du royaume fe répareroïent peu-à-peu par l'augmentation des hommes, & par l’accroiflement des revenus de l’état. Arr. de M. QuESNAY, Le fils. FERMIER , (Jurifpr.) eft celui qui tient quelque chofe à ferme, foit un bien de campagne, ou quel- que droit royal ou feigneurial. Quand on dit Z fermier fimplement, on entend quelquefois par-là le fermier du roi, foit l’adjudica- taire des fermes générales, ou l’adjudicataire de quelque ferme particuliere, telle que celle du tabac. Poyez ci-devant FERME. (4) FERMIER CONVENTIONNEL, eft celui qui jouit. en vertu d’un bail volontaire. Cette qualification ef oppofee à celle de fermier judiciaire. Voy. BAIL CON- VENTIONNEL 6 FERMIER JUDICIAIRE. (4) FERMIER GÉNÉRAL, eft celui qui tient toutes les fermes du roi ou de quelqu’autre perfonne. On don- ne quelquefois ce titre à celui qui a toutes les fermes d’une certaine nature de droits, ou du moins dans l’étendue d’une province, en le diftinguant par le titre de fermier général de telle chofe ou de telle pro- vince. Cette qualification de férmier général eft oppofée à celle de fermier particulier, par où l’on entend un fermier qui ne tient qu’une feule ferme. Sous le nom de fermier général du roi, pris dans fon étroite fignification, on entend l’adjudicataire des fermes générales du roi ; mais dans lufage com- mun on entend l’une des cautions de l’adjudicataire, que l’on regarde comme les vrais fermiers généraux, J'adjudicataire n'étant que leur prête-nom. Voyez ci- devant FERMES GÉNÉRALES. (4) … Le fermier général eft celui qui tient à Haï/ les re- venus du fouverain ou de l’état, quelle que foit la nature du gouvernement: c’eft ce que l’on oppofe à la régie, comme on l’a vû dans l’article précédent. Dans la régie le propriétaire accorde une certaine rétribution pour faire valoir fon fonds & lui en re- mettre le produit, quel qu'il foit, fans qu’il y ait de la part du régiffeur aucune garantie des évenemens, fans aucun partage des frais de l’adminiftration. Dans le bail à ferme , au contraire, le férmier don- ne au propriétaire une fomme fixe, aux conditions qu'il le laiffera jouir du produit , fans que le proprié- taire garantifle Les évenemens , fans qu’il entre pour rien dans les dépenfes de la manutention. Le réprffeur eft donc obligé de tirer du fonds tout ce qu'il peut produire, d’en foûtenir la valeur, de lauomenter même, sil eft poñlible ; d’en remettre exattement le produit , d’économifer fur la dépenfe, ae tenir la recette en bon ordre, & d’agir, en un mot, comme pour lui-même. * Le fermier doit acquitter exa@tement Le prix de fon bail, & ne rien excéder dans la perception ; fouvent mème oublier fes propres intérêts, pour fe rappeller qu'il n’eft que le dépoñtaire d’un fonds qu'ilne peut équitablement ni laifler en friche ni détériorer. Si dans cet état, autrefois exercé par les cheva- liers romains, & fuiceptible, comme tous les au- tres, d'honneur & de confidération , il s’eft trouvé des citoyens fort éloignés d’en mériter, doit-on regarder avec une forte d’indignation, 8c avilir en quelque maniere fous ceux qui exercent la même profeffion ? Rien n’eft plus contraire à la juftice, au- tant qu'à la véritable Philofophie, quand il eft quef- tion de prononcer fur les mœurs, que de condamner luniverfalité d’après les fautes des particuliers. Foyez au mot FINANCIER ce que l’on dit fur ce fujet, à. locçafion d’un pafñlage de l'efprit des lois. K oyex au(fe FERMES (Bail dés). Arsicle de M. PessgLrEr. FERMIER JUDICIAIRE, eft celui auquel le bail d'une maifon ou autre héritage faïf réellement, a été adjugé par autorité de juftice. | Il eft défendu à certaines perfonnes d’être fermiers Judiciaires ; favoir aux mineurs & aux feptuagénai- res , fuivant l’arrêt de réglement du 3 Septembre 1690, | L’ordonnance de Blois, arricle 1 32 > défend à tous avocats, procureurs , folliciteurs, greffiers, de fe rendre fermiers judiciaires, ni cautions d’iceux. Le réglement du 27 Avril 1722, article 35, défend la même chofe aux commiflaires aux faïfies réelles, & à leurs commis. Les femmes ne peuventsauffi prendre un bail judi. ciaire, ni en être cautions. Le pourfuivant criées ne peut pas non plus être fermier judiciaire ni caution du baïl, parce que l'ayant à bas prix, il ne pourfuivroit pas l’adjudication par decret : d’ailleurs c’eft à lui à veiller aux dégrada- tions, &c à empêcher que l’on ne confume tout le prix du bail judiciaire en réparations; car le fermier Judiciatre ne peut régulierement y employer annuel. lement que le tiers du prix du bail, à moins qu'il n'y ait une nécefhté urgente d’en employer davantage, &t que cela ne foit ordonné par juftice. Avant d'entrer en Joïiffance des lieux , le férmier Judiciaire doit donner caution du prix du bail, f ce neft lorfque le bail conventionnel eft converti en judiciaire. Le fermier judiciaire & fa caution font contraigna- bles par Ce excepté dans le cas dont on vient de parler, c’eft-à-dire lorfque Le bail conventionnel a été converti en judiciaire. Il peut percevoir tous les droits utiles, maïs il ne peut prétendre les droits honorifiques attachés à la perfonne du patron ou à celle du haut-jufticier, ou à celle du feigneur féodal ; ainf il ne peut nommer aux bénéfices ni aux offices, recevoir la foi & hom- mage, n1 chaffer ou faire chafler fur les terres com- prifes dans fon bail : il peut feulement , s’il y a nne garenne, y fureter. À l'égard des charges réelles, il n’eft tenu que de celles qui font exprimées dans fon bail ; s’il fe trouve contraint d'en acquitter quelqu’autre, il doit en être indemnié fur le prix de fon bail. En ças de main-levée de la faifie réelle ou d’adju- dication par decret, le fermier judiciaire doit jouir des layers de la maïfon faifie, & des revenus des terres qu'il a labourées ou enfemencées, en payant le prix du bail au propriétaire, fuivant un arrêt de réple- ment du parlement de Paris, du 12 Août 1664. Voyez le réglement du 22 Juilles 1690 ; le Maïftre, sraicé des criées, chap. vil, £ aux mots ADIUDICATION PAR DECcRET, BAIL JUDICIAIRE, DECRET, SAISIE RÉELLE. (4) FERMIER PARTIAIRE, eft un métayer qui prend des terres à exploiter, à condition d’en rendre au propriétaire une portion des fruits, telle qu'il en eft. convenu avec le bailleur, comme la moitié, ou au- tre portion plus ou moins forte. Voyez ADMODIA« TEUR, MÉTAYER. (4) FERMIER PARTICULIER, eft celui qui ne tient u’une feule ferme ou le bail d’un feul objet, à ladif. érence d’un fermier général, qui tienttoutes lesfer- mes du roi ou de quelqu'autre perfonne. Foyez ci- devant FERMIER GÉNÉRAL & FERMES GÉNÉRA- LES, (4) | fé PE. FERMIER, au jeu de la Ferme, eft celui des joüeurs qui a pris la ferme au plus haut prix, foit à 10, 15, ou 20 fols, éeus, &c. plus ou moins, felon que l’on évalue les jettons, | Le FERMIERE , {. f, ex terme de Marchand de bois, eit un outil fait d'un gros chantier, garni:par chacune de de fes extrémités d’une -groffe houpliere :6ns’en fert à fermer les trains en route. Voyez TRAIN. : rE FERMO oz FIRMO, Firmium , ( Géog.) ville de l’état de l’Eglife, dans la Marche d’Ancone, avecun archevêché érigé en 1580 par Sixte V. remarquable par la naïflance de La@tance , & du P. Annibal Ada- mi, jéfuiteitalien, né en 1626, connu par des OUvra- es de poéfie & d’éloquence. Elle eft auff la patrie du cardinal Phil. Ant, Gualtério , qui y naquit en 1660, & quicultiva fans ceffe les Arts & les Sciences avec une efpece de paflion. Déux fois il perdit fes livres & fes manu{crits, entr'autres une hiftoire univer- felle qu'il avoit compofée , dont les matériaux for. moient quinze grandes caifles ; fes médailles , fes re- cueils. de toutes fortes de raretés : & réparant toû.- jours fes pertes, 1l laïfla après fa mort, arrivée en 1727, une nouvelle bibliotheque de 32 mille volu- mes imprimés ou manufcrits » Outre une dixaine de cabinets remplis de curiofités de l’art & de la na- ture. | Je reviens à Fermo : elle eff fituée proche du golfe de Venife , à 7 lieues S. £. de Macérata , 9 N.E, d’Afcoli, 13 S. E. d’Ancone , 40 N. E. de Rome. Long, 31.28. lat, 43. 8. (C. D.J.) D | *FERMOIR, f. m.(Tailland.) c’eft nn cifeau qui a deux bifeaux. Il a différentes formes, Les ouvriers en bois, comme les Menuifiers , les Ebéniftes, les Sculpteurs , les Charpentiers , les Charrons , font ceux qui s’en fervent le plus. Pour faire cet outil , le forgeron prend une barre de fer, la plie en deux, met une acérure entre deux, corroye le tout enfem- ble, & enleve le férmoir, La partie, qui n’eft point acérée , forme latipe & l’embae : la tige eft la pointe qui. entre dans le manche de bois : l'embafe eft cette faillie qui arrête le manche , & qui empêche que la tige ne dépañle plus où moins. Le frmoir, en cette partie , eft femblable au cifeau de menuifier. Foyez Les Planches de la Taillanderie, . FERMOIR, (Bourr. & autres ouvriers) celui des Ton neliers eftun inftrument de fer dont les Bourreliers fe fervent pour tracer fur des bandes de cuir des raies pointées. Ileft rond, un peu courbé, de la longueur d’un pié, garni d’un manche de fix pouces. Ce man- che s’applatit par le bout, & fe fépare en deux par tes , entre lefquelles eft placée une petite roue den- telée, fort mince , dont le centre ef traverfé par un clourivé, dont les extrémités font foûtenues dans les plaques du manche ; en conféquence cette roue tourne fur fon axe , & marque fur le cuir une raie pointée, lorfqu'on gliffe cet inftrument deflus, Voyez les figures , PL, du Bourrelier. HRREa FERMOIR , ( Charpenterie. ) c’eft un cifean à deux bifeaux , qui fert aux Charpentiers & aux Menuifiers à ébaucher & hacher leur bois avant de pañler la demi-varlope deflus. ÊrRe FERMOIR , (Jardinage. ) voyez l'art, JARDiNIER ; où nous donnerons le détail de fes principaux outils. FERMOIR , ( Menuiférie. ) eft un cifeau à deux bi- eaux, qui fertaux Menuifiers à ébaucher ou hacher le bois : 1l y en a de différentes largeurs ; il a un man- che de bois. Voyez Les figures des Planches ds Menui- Jerie. 1e * FERMOIRS , (Relitre.) ce font des affemblages de pieces de cuivre, d'argent, ou d’un autre métal, L'une de ces pieces eft une plaque, fur laquelle un crochet fe meut à charniere. Cette plaque s’attache avec de petits clous fur un des côtés de la couver. ture du livre; fur l’antre côté, & à un endroit cor- refpondant à ce crochet, eft attachée une autre pla- que qui fait la fonétion d’agraffe : le crochet entre dans cette agraffe, & tient le livre fermé. Quelque- fois l’extrémité du crochet , au lieu d’être recourbée pour faifir l’agrafle, eft percée d’un trou > 8& l’agraffe eft alors terminée par un hqut | Tome Fi “a on; 6e houton ptrant | F EF Sat avec force dans l’œil du crochet , tient le livié fer: mé. On appelle les premiers fermoirs, férmoirs à croz chet ; &t Îles feconds, férmoirs à bouton. Les férmoirs ne {ont plus guere d’ufage qu’à ces livres d’églife de peu de volume, qu’on appelle des heures, Ils fe font de cuivre jaune, avec des emporte-pieces qui TOu« pent d’un coup une des plaques , d’un antre cop l’autre plaque , enfuite le crochet, Nous donneron s dans nos Planches la figure de ces emporte-pieces; Voyez ces Planches & leur explication, CAL FERMorR, (Srriccateur, ).c'eft une efpece de cts feaux dont les Artiftes fe fervent Pour travailler erk ftuc. Voyez la Planche de Sruc, | FERMURES, £. f. pl. (Marine. ) ce font dés bora dagés quife mettent par couples entre les préceintes $ ils s'appellent auff couples, F. 07e BORDAGES & CouPLEs. (Z) | FERMURE , serre de Riviere, perche Qui à aux ea trémités une roüette pour attacher un bout au train ÿ ëc l’autre à la rive , avec des pieux. | FERNANDO, (Géog.)île de la mer du Sud, d'en: viron douze lieues de tour , à quelque diftance dut Chily, découverte par Jean Fernando, mais qui efé encore deferte. Longir, 302, 40. lat. mérid. 36,304 D. J. | on OU FARE , én latin Ghofférie, ( Géog. ) île de Océan feptentrional , au nord des Wefternes & de l'Irlande, en allant vers l’Hlande ; elles dépendent du roi de Danemark. Il y en a vingt-quatre, douze grandes & douze petites. M. d’Audifret fe trompé en les mettant entre le $ 1 &c le 61° degré de latitude, puifque la plus méridionale eft au-delà du 61° degré ôt qu'elles occupent tout le 62° de latitude dans leu longueur. Elles font au nord N, O. fous le même mé ridien d’Armagh en Irlande , pout les plus orientas les, c’eft-à-dire par les ro désrés de longitude pouf la pointe boréale de Suidro, (D: J.) *FÉROCE , adj. épithete que l’hoïnme a invén2 tée pour defigner dans quelques animaux qui parta= gent la terre avec lui, une difpoñition naturelle À l’attaquer , & que tous les animaux lui réndioient à jufte titre, s'ils avoierit une langue ; car quel anima . dans la nature eft plus féroce que l'homme ? L’hommé a tranfporté cette dénomination à l’homme qui porté contre fes femblables la même violence & la même cruauté que l’efpece humaine entiete exerce {ur tous les êtres fenfibles & vivans. Mais f l’homme eft un animal féroce qui s’immole lés animaux , quélle bête eft-ce que le tyran qui dévore les hommes ? Il ya, cé me femble , etre la férocité & la criauré cétte dif: férence que, la cruauté étant d’un être quiraifonne , elle eft particuliere à l’homme; au lieu que [a féro cité étant d’un être qui fent, elle peut être communæ à l’homme & à l'animal. É | FERONIA , (Myrhol.) divinité célebte à laquelle. on donnoït l’intendänce des bois , des jardins , des. vergers. Les affranchis la regardoient aufñ comme. leur patrone , parce que c’étoit fur fes autels qu'ils: prenoient le chapeau ou le bonnet qui marquoit leur nouvelle condition, VA | Feronia avoit dans toute l'Italie des témples , des facrifices , des fêtes & des fatues. Un defes temples étoit bâti 22 campis Pometinis , dans le territoire de Sueflia-Pométia , à 24 milles du marché d’Appius. C'eft-là qu'Horace décrivant fon voyage de Rome à Brindes, ajoûte en plaïfantant qu’il ne manqua pas de s’ärrêter pour rendre fes hommages à Féronie à « Ô déefle, s’écrie-t1l, nous nous lavämes les mains » & le vifage dans la fontaine qui vous eft confas »# crée ». Ora, manufque , tué lavimus , Feroñia, lymphé. Sas, F. lv Liv, 24: Mais le temple principal de cette divinité chan h #54 542 FER pêtre étoit fur lé Mont-Soraéte (aujourd’hui Mone- eriflo) , dans le pays des Falifques , à 24 milles de Rome, entre le Tibre & le chemin de Flaminius , près de la ville Feronia , d’où la déefe avoit pris fon nom. Les habitans de Capene , dit Tite-Live , & ceux des environs , qui alloïent offrir dans ce temple les prémices de leurs fruits , & y confacrer des of- frandes à proportion de leurs biens, ’'avoient enrichi de beaucoup de dons d’or & d’argent, quand Anni- bal le ravagea & emporta toutes fes richeffes. | Auprès de ce temple, que les Romains rebâtirent étoit un petit bois dans lequel on célébroït la fête de la déeffe par un grand concours de monde qui s’y rendoit aflidüment. Ovide fe plait à nous affürer que ce boïs ayant té brülé une fois par hafard , on vou- lut tranfporter ailleurs la ftatue de Féronie ; mais que le bois ayant aufi-tôt reverdi, on changea de def- fein , & on y laïffa la flatue. Strabon parlant de ce bois, rapporte une autre particularité très-curieufe : c’eft que tous les ans on y faifoit un grand facrifice, où les prêtres de la déefle, animés par fon efprit, marchoient nuds piés fur des brafiers , fans en reflen- tir aucun mal. Voyez EPREUVES. I] ne faut pas oublier de remarquer ici que les prêtres d’Apollon, leurs voifins, avoient auff le mé- me privilége, du moins Virgile le prétend. Ilraconte dans fon Enérde, liv. XI. qu’Arons , avant que d’at- taquer Chlorée , fit cette priere : & Grand Apollon 4 + qui tenez un rang fi. confidérable parmi les dieux ; » vous qui protégez le facré Mont.Soraéte ; vous qui # êtes le digne objet de notre vénération; vous pour # qui nous entretenons un feu perpétuel de pins ; # vous enfin qui nous accordez la grace de marcher # fur les charbons ardens au-travers du feu , fans # nous brûler, pour récompenfer les foins que nous # prenons d’encenfer vos autels..,..» Voilà donc : divers prêtres qui , dans un même lieu , faifoient à l'envi , fans difputes &t avec le même fuccès , l’é- preuve du fer chaud , quoique, fuivant Pline &c Var- ron, ils ne marchoïent impunément für les charbons ardens, qu'après s’être frotés en fecret d’un certain onguent la plante des piés ; mais le vulgaire attri- buoit toùjours à la puiflance des divinités dont ils étoient les miniftres , ce qui n’étoit que l’effet de leur fupercherie. Maintenant perfonne ne fera furpris que pendant la folennité des fêtes de Férome les peuples voifins de Rome y accouruflént de toutes parts, & qu’on eût dreflé à cette déefle quantité d’autels &c de mo- numens dont il nous refte encore quelques infcrip- tions : voyez-en des exemples dans Feretti , zzfcripr. p. 443, Gruter, inféripr. tom. IIL. p. 308, & Spon, antiq. feél, ti], 1°, 23 Nous avons auf des médailles d’Augufte qui re- préfentent la tête de Feronia avec une couronne, & c’eft fans doute par cette rarfon qu’on la nommoit giaocbiqarcs , qui aime les couronnes. On l’appelloit en- COre avrnpopos , porte-fleurs. Au refte Servius à tra- vefti Feronie en Junon , & le fcholiafte d'Horace en a fait une maîtreffe de Jupiter. Virgile lui donne pour fils Hérilus , roi de Prénefte. Confultez fur tout cela nos Antiquaires , nos Mytholosiftes , nos Littéra- teurs , & en particulier Struvius , azig. rom. fyre. cap. j. Article de M. le Chevalier DE JAU COURT. FERRA, £. f. (ff. nar. Ichtiolog. ) boiflon du lac de Laufanne ; il eft aufñ appellé par les gens du pays farra & pala : ce poiflon reflemble au lavaret , il a une coudée de longueur , & une couleur cendrée ; le corps eft large &c applati, & la bouche petite {ans aucunes dents. Il a la chaïr blanche & aufli bon- ne au goût que celle du lavaret & de la truite. On le pêche en été & en automne, on le fale pour l’hy- ver; dans cette faifon il refte au fond du lac. Ronde- let, Hifloire des poiffons des lacs; chap, xvij, Voyez Poisson, (7) | FERRAGE, f:m. (Commerce. ) droit qu’on paye aux efgards ou jurés de la fajetterie d'Amiens pour marquer les étofles & leur appofer le plomb. Voyez ESGARDS,JURÉS, PLOM8. Diéfionn, de Cormimerce de Trèv. & de Chambers (G) FERRAGES , ancien terme de monnoie ; droit qu'on avoit établi pour remplir les frais des tailleurs parti culiers qui étoient obligés de fournir les fers nécef- faires pour monnoyér les efpeces. Ce droit de /ére rage étoit de feize deniers par marc d’or, & de huit 2. par marc d'argent , que Le direéteur payoït en con féquence de la quanttité de marcs d’or, d'argent, paf. fés en délivrance. | FERRAILLE, f, f. (Chauderonnerie) Les Chaude- tonniers appellent ainf les fers qui fervent à monter les réchaux de tôle , comme font les piés, la orille &£ ja fourchette. | FERRAILLEUR, f. m. (Chauderonnerie. ) Les Chauderonniers nomment aïnfi des maîtres Serrue riers, qui ne travaillent que pour eux , & dont tout l'ouvrage confifte à faire les grilles , les piés & les fourchettes des réchaux detôle. Diéion. de Trév. * FERRANDINES , £ m. pl. menufatture en Joie, étoffes dont la chaîne eft de foie & la trame de laine, de fleuret , ou de coton ; elles font ordonnées par les replemens à demi-aulne de largeur fur vingt-une aulnes de longueur ; & dans un autre endroit des mê- mes reglemens , il eft permis de les faire de quatre largeurs ; ou d’un quattier & demi , ou de demi- aulne moins un feize ; où de demi-aulne entiere, ou de demi-aulne &c un feize, fans quelles puiffent être. plus larges ou plus étroites que de deux dents de peigne. Il eft ordonné enfin 1°. que ces étoffes & d’autres feront de foie cuite en chaîne, poil, trame, ou brochée , on toutes de foie crue, fans aucun mé- lange de foie crue avec la foie cuite, 2°. Qu'elles fe fabriqueront à vingt-huit buhots;z & trente portées , & qu’elles auront delargeur, en- tre deux gardes , un pié & demi de roi, & de lon- gueur vingt & une aulne & demie de roi hors de l’'é- tille, pour revenir apprêtées à vingt aulnes un quart; ou vingt aulnes & demie. Il eft de la derniere impor- tance que les hommes qui donnent desréglemens aux manufactures , foient très-verfés dans les Arts; qu'ils. ayent de juftes notions du commerce & des avanta- ges de fa liberté; qu'ils ne s’en laïflent point impofer par les apparences, & qu’ils fachent que ceux qui leur propofent des réformes d’abus, font quelquefois des gens qui cherchent ou à fe faire valoir auprès de leurs fupérieurs par une févérité mal-entendue, afin d’en obtenir des récompenfes , ou à jetter le manu- fa&tnrier dans une contrainte à laquelle il ne parvient à fe fouftraire , qu’en fe foûmettant à des exa@ions. FERRANDINE, ( Géog, ) petite ville d'Italie au royaume de Naples dans la Balizicate, fur le Bafen- to, avec titre de duché. Long, 43. 10. lat, 41, 40 D. J. FERRANT » adj. ( Maréchal.) Maréchal férranr ; ouvrier ,'artifan dont la profeffion devroit être bor- née à l'emploi de ferrer les chevaux, &c. Voyez H1p- PIATRIQUE. Voyez auf MARÉCHAL. (e) FERRANT ,{. m. ( Manéoe, ) vieille expreffion ufi= tée par nos anciens romanciers, pour defiener, {elon Ducange, un cheval gris pommelé ; felon Ménage, un cheval d’une robe femblable à celle que les Latins appelloiïent color ferrugineus ; & felon Beffi , avocat du Roï de Fontenai-le-Comte, un cheval de guerre. Ménage a prétendu que dans le cas où fa conje@ure feroit bien fondée, leterme dont il s’agit dériveroit de férrum. Beffi avance qu’il eft tiré de celui de #2- ranus , lequel a été dit pour waranio | mot, qui dans la loi falique fignifie 7 cheval ou un étalon, Si quis Waranionem homini franco furaverit ; CHIPARL lis JUAÏCe= cur , tome IV, pag, 2, nn < é + Nous trouvons dans la vie-de Philippe-Augufte par Rigord, & dans la Philippide de Guillaume le Breton, une anecdote fur l'infulte que le penple de Paris fit à Ferrand comte de Flandre, après qu’il eut été fait prifonnier à la bataille de Bovines.- | Nec verecumdabantur , dit le premier , é//udere éomi- ti Ferrando ruflici, vaulæ , & pueri , naël& occafione ab æquivocatione nominis ; quia nOMEN jus tamr quo » qua homini, erat œquivocum ; 6 caf mirabili | duo qui ejus coloris ; qui hoc noinen equis tmponit ; 1pfume in lechcé vehebant. Unde € ei improperabant , ‘quod modo ipfe errat ferratus , quod recalcitrare non porerat, qui prius impinguatus ; dilatatus, recalcitrayit 6 cal- caneum in dominum [uum elevavir. Le Breton rapporte ainfi ce fait, At Ferrandus , equis eveëlus forte duobns , Lectica , dupliti Temone , vehentibus ipfum s Nomine quos ill: color æquivocabat , ut effet Nomen idem comius , & equorum , parifianis Civibus offertur , luparä claudendus in arce, Un femblable jeu de mots peut-il dédommager dé la honte d’avoir ofé infulter au vaincu? (e) FERRARE , ( Géog. ) ville d'Italie, qui n’a porté ce titre que dans le vu. fiecle | capitale du duché de même nom, dans l’état eccléfiaftique, avec un évé- ché qui ne releve que du pape. Elle a de belles égli- fes, & une bonne citadelle que Clement VII, a fait bâtir, & qui lui coûta , dit-on, deux millions d’écus d’or. Ferrare autrefois floriflante, ainfi que tout le Ferrarois , eft entierement déchue de fa fplendeur, depuis qu’elle a pañlé avec le duché en 1597 fous la domination du faint fiége, qui n’y entretient qu’un légat, chef de la police & de la juftice du pays. En effet cette ville eft aujourd’hui fi pauvre, qu’elle a plus de maifons que d’habitans. Elle ef fituée fur la plus petite branche du P6 , à dix lieues nord-eft de Bologne, quinze nord-oueft de Ravenne, vingt- huit nord-eft de Florence, foixante-feize nord-oueft de Rome. Long. 294, 11°. 30. lar, 444, 54! o!. Entre les illuftres perfonnages , dont elle a été la patrie avant la fin de fes beaux jours, on compte avec raïfon Giraldi, Guarini, Riccioli, &le cardinal Bentivogho. Lilio Gregorio Giraldiné en 1478 ,mortenr$52, s’eft diftingué par {on hiftoire des dieux des payens, par celle des poëtes de fon téms, & par fon inven- tion des trente nombres épañtaux; mais ce favant éprouva toutes fortes de malheurs pendant le cours de fa vie, & fon mérite le rendoit digne d’une plus heureufe deftinée. | Baptifte Guarini né en 1537, mort en 1612, pafla fes jours dans le trouble des négociations & des changemens de maitres, après avoir immortalifé fon nom par fa tragi-comédie pañtorale, le Paflor Fido qui fut repréfenté en 1570 pour la premiere fois À la cour de Philippe IT. roi d'Efpagne, avec une gran- de magnificence. Jean-Baptifte Riccioli jéfuite, né en 1598 , mort en 1671, s'eft fait connoître par fes ouvrages aftro- nomiques & chronologiques. Guy Bentivoglio cardinal, né en 1579, mort en 1644,au moment qu'il alloit être élevé fur le throne pontifical, a rendu fa plume célebre par fon hiftoire des guerres civiles de Flandre , fes lettres, & fes mé- moires qui font des modeles de diétion. (D. J.) * FERRE , . £. ( Verrerie, ) inftrument de fer, c’eft une efpece de pince dont on fe fert dans les verreries à bouteilles, pour façonner la cordeline , & faire l'embouchure de la bouteille. Foyez Cor- DELINE. Voyez auffr l'article VERRERIE. FERRER une piece d'éroffe, ( Commerce. ) c’eft y. appofer un plomb de vifite & le marquer avec un coin d'acier. Voyez PLOMB, Tome FI, FER 54 Ce terme eft particulierement ufité dans la fabris que de la fajetterie d’Amiens : dans les-autres manu faétures de lainage , on dit p/omber on marquer: Voyeg PLOMBER € MARQUER, (G). | FERRER, v. a@. 7 Archiredure s c'e mettre les garnitures en fer néceflaires aux portes &e dux crois fées d'un bâtiment, comme équerrés, gonds , fiches, vérroux, targettes , loquets , ferrures, &c. Voyez ces mots, & les planches & les articles de la Serrurerie, FERRER ,1e7 rerme d’Aiguillerier; ©’eft gatnir Un ruban de fil , où de foie, ou une trefle, d’un ferrer de quelqu’efpece qu'il puife être. | FERRER , c’eft parmi les f/affieres , frotter la flaflé contre un fer obtus qui la broye , pour ainf dire, & en fait tomber les chénevotes. Voyez FER, | FERRER UN CHEVAL , ( Maréchallerie, ) Éxprefs fion qui carattérife non-feuletient laétiori d’attacher des fers aux piés du cheval , maïs celle de Coupe* Pongle en le parant ou le rognant. Voyez FERRURE. Le premier foin que doit avoir le maréchal , que l’on charge de ferrer un cheval, doit être d'en exa- miner attentivement les prés , à l’effet de fe confor- mer enfiute dans fon opération aux principes que l’on trouvera difcurés an mot férrure, Cet examen fait, il prendra la mefure de la longueur & de la lar- | geur de cette partie, & forgera fur le champ des fers convenables aux piés fur lefquels il doit travailler x ou s’il En a qui puiflent y être appliqués & ajuftés, il les appropriera de maniere à en faire ufage. 7. oyex FORGER 6 FER. Je fuis toûjours étonné de voir dans les boutiques de maréchaux un appareil de fers tous étampés, & que quelques coups de ferrétier difpofent après un moment de féjour dans la forge, à être placés fur le pié du premier animal qu’on leur confie, Que de va4 riétés ! que de différences n’obferve-t-on pas dans les piés des chevaux, & fouvent dans les piés d’un même cheval ! Quiconque les confidérera avec des yeux éclairés, partagera fans doute ma furprife, &ne fe perfuadera jamais que des fers faits &c forgés pref que tous fur un même modele, puiffent recevoir dans un feulinftantles changemens que demanderoientles piès auxquels on les deftine, D'ailleurs il n°eft affüré: ment pas poffible de remédier aflez parfaitement aux étampures qui dôivent être ou plus graffes on plus maigres. Voyez FERRURE. Et il réfulte de l’attention du maréchal à fe précautionner ainfi contre la difette . des fers, des inconvéniens qui tendent à ruiner réel lement les piés de l’animal , & à le rendre totale ment inutile, Ces fortes d'ouvriers cherchent Ajuftifier cet abus; &t à s’excufer fur la longueur du tems qu’il faudroit employer pour la ferrure de chaque cheval, fi leurs boutiques détoient pas meublées de fers ainf prépa- rés ; on fe contente de cette raifon fpécieufe , & l’a< bus fubfifte ; mais rien ne fauroit l’autorifer, lorfque l’on envifage l'importance de cette opération. D’ail- leurs il n’eft pas difficile de fe convaincre de l’illue fion du prétexte fur lequel ils fe fondent : ou les che- vaux qu'ils doivent férrer , font en effet des chevaux qu'ils ferrens ordinairement ; ou ce font des chevaux étrangers, & quipaflent. Dans le premier cas, il eft inconteftable qu'ils peuvent prévoir l’efpece de fers qui conviendront, & l’inftant où il faudra les renou- veller | & dès- lors ils ne feront pas contraints d’at- tendre celui où les chevaux dont ils connoïffent les piés , leur feront amenés, pour fe mettre à un ou- vrage auquel ils pourront fe livrer la veille du jour pris & choifi pour les ferrer. Dans le fecond cas, ils confommeront plus de tems ; mais ce tems ne {era pas confidérable , dès qu'ils auront une quantité de fers auxquels ils auront donné d'avance une forte de contours ; qu'ils auront dégroffis , & qu'il ne s’as | Liz $44 FER gira que d’étamper & de perfectionner; iln’eft donc aucune circonftance qui puifle engager’à tolérer ces approvifñionnemens fuggérés par le defir immodéré du gain ; defir qui l'emporte dans la plus grande par- tie de cesartifans furcelui de pratiquer d’une manie- re qui foit avantageufe au public , bien loin de lui être onéreufe & préjudiciable. . Quoi qu’il en foit, le fer étant forgé ou préparé, le maréchal, mumi de fontablier (voyez TABLIER), ordonnera au palefrenier ou à un aide, de lever un desipiés de l'animal. Ceux de devant feront tenus fimplement avec les deux mains ; à l'égard de ceux de derriere , le canon & le boulet appuyeront &-re- poferont fur la cuuffe du palefrenier, qui paffera, pour mieux s’en, aflurer , fon.bras gauche , S'il s’agit du 1é gauche , & {on bras droit, s’il s’agit du pié droit, fe le yarret du cheval. k . Il eft une multitude de chevaux qui ne fuppor- tent que très-impatiemment l’aétion du maréchal fer- fant, & qui fe défendent violemment lorfqw’on en- treprend de leur lever les piés. Ce vice provient dans les uns & dans les autres du peu de foin que lon a eu dans le tems qu’ils n’étoient que poulains, de les habituer à donner & à préfenter cette partie fur laquelle on devoit frapper, & que l’on devoit alors lever très-fouvent en les flatant. Il peut enco- reteconnoitre pour caufe la brutalité des maréchaux & des palefreniers, qui bien loin de careffer l’ani- mal & d’en agir avec douceur, le maltraitent & le ehâtient au moindre mouvement qu'il fait ; & il eft quelquefois occafionné par la contrainte dans la- äuelle ils le mettent, & dans laquelle ils lé tiennent pendant un intervalle trop long. Quelle qu’en puife être la fource, on doit le placer au rang des défauts les plus eflentiels, foit à raïfon de l'embarras dans lequel il jette inévitablement lorfque le cheval fe deferre dans une route ; foit par rapport aux confé- quences funeftes dés efforts qu'il peut faire , lorfque pour pratiquer cette opération on eft obligé de le placer dans Le travail, ou d’avoir recours à la plate- longe: foit par le danger continuel auquel font ex- pofés les maréchaux & leurs aides quand il eft quef- tion de le férrer. On ne doit prendre les voies de Ia rigueur qu'après avoit vainement épuifé toutes les autres. Si celles-ci ne produifent point relativement à de certains chevaux tout l'effet qu’on s’en promet- toit, on eft toüjouts à tems d’en revenir aux pre- iieres, & du moins n’eft-on pas dans le cas de fe reprocher d’avoir donné lieu à la répugnance de l’a- himal, ou d’avoir contribue à le confirmer dans tou- tes les défenfes auxquelles 1l a recours pour fe fouf- traire à la main du maréchal. J’avoue que la longue habitude de ces mêmes défenfes préfente des obfta- cles très-difficiles à furmonter ; mais enfin la patien- ce ne nuit point, & ne fauroit augmenter un vice contre lequel les reffources que l’on efpere de trou- ver dans les châtimens font toûjeurs impuiffantes, Souvent elle a ramené à la tranquillité des chevaux que les coups auroientprécipités dans les plus grands defordres. On ne court donc aucun rifque de recom- mander aux palefreniers de tâcher d’adoucir la fou- gue de l’animal, & de l’accoûtumer infenfiblement à fe prêter à cette opération. Ils lui manieront pour cet effet les jambes en le careflant, en lui parlant, & -en lui donnant du pain ; ils nelui diftribueront jamais le fon, l’avoine, le fourrage en un mot, que cette :diftribution ne foit précédée & fuivie de cette at- -tention de leur part. Si le cheval ne fe révolte point, ils tenteront en en ufant toùjours de même, de lui oulever peu-à-peu les piés , & de leur faire d’abord “eulement perdre terre. Ils obferveront de débuter “par l’un d'eux , ils en viendront par gradation aux «trois autres, & enfin ils conduiront d’une maniere -infenfible ces mêmes piés au degré d’élévation né- « FER ceflaire pour être à la portée de la main de l’ouvtiera À mefure que le palefrenier vaincra la réfiftance de lanimal, il frappera legerement fur le pié; les coups qu'il donnera feront {ucceflivement plus forts, & cette conduite pourra peut-être dans la fuite corris ger un défaut dans lequel le cheval eût perfévéré, s'il eût été pris autrement, & qui l’auroit mêmeten- du inaccefhble fi l’on eût en recours à la force & à la violence. : | eh Il en eft qui fe laifent tranquillement ferrer à Pé- Curie, pourvû qu'on ne les mette point hors de leurs places: les attentions que je viens de prefcrire, ope- _rent fouvent cet effet. D’autres exigent fimplement un torchené, voye TORCHENÉ ; ou les morailles, voyez MORAILLES: Les uns ne remuent point lor{- qu’ils font montés; la plate-longe, le travail foûmet les autfes. Voyez PLATE-LONGE , TRAVAIL. Mais ces dernieres précautions effarouchent l'animal, if eft à craindre qu’elles ne lui foient muifibles , fuf-tout s’il eft contraint & maintenu de façon que les efforts qu’il peut faire pour fe dégager, puiffent s'étendre & répondre à des parties eflentielles. | Le parti de le renverfer eft encore le moins sûr à tous égards, outre que la fituation de l'animal cou- ché n’eft point favorable au maréchal qui travaille, & qu'il weft pas pofñble dans cet état de n’omettre aucun des points que l’on doit confidérer pour la per: feétion de cette opération. Celui que quelques maréchaux prennent d’étour- dir le cheval en le faifant troter fur des cercles, après lui avoir mis des lunettes (Voyez LunerrEs), &en choififfant pour cet effet un terrein difficile, eft le dernier auquel on doive s'arrêter. La chûte provo- quée du cheval fur un pareil terrein, peut être dan- gereufe : d’ailleurs un étourdiflement ainf occafñon- né, excite toüjours le defordre & le trouble dans économie animale , & peut fufciter beaucoup de maux; tels que les vives douleurs dans la tête, le vertige, 6c. on ne doit par conféquent mettre en pratique ces deux dernieres voies , que dans l’im- poffibilité de réuflir au moyen de celles dont nous avons parlé. -ILen.eft une autre qui paroïît d’abord finguliere : c’eft d'abandonner totalement le cheval, de lui ôter jufqu’à don licol, ou de ne le tenir que par le bout de longe de ce même licol , fans l’attacher en aucu- ne façon. Plufieurs chevaux ne fe livrent qu’à ces conditions. Ceux- ci ont été gênés & contraints au= trement dans les premiers tems où ils ont été férres ; & la contrainte &r la gêne font l’unique objet de leur crainte & de leur appréhenfon. J'en aivû un de cette efpece, qu’un maréchal tentoit inutilement de ré- duire après l'avoir renverfé, & qui auroit peut-être été la viétime de cet ouvrier, fi je n’avois indiqué cette route ; 1l la fuivit, le cheval ceffa de fe défen+ dre, & préfentoit lui-même fes piés. Suppofons donc que l’aide ou le palefrenier foit faif du pié de l’animal, le maréchal Ôtera d’abord le vieux fer. Pour y parvenir, il appuyera un coin du tranchant du rogne-pié fur les uns & les autres de rivets, & frappera avec fon brochoïr fur ce mê- me rogne-pié, à l'effet de détacher les rivets. Ces rivets détachés, il prendra avec fes triquoïfes Le fer par l’une des éponges, & le foûlevera ; dès-lors il en- traînera les lames brochées ; & en donnant avec fes mêmes triquoifes un coup fur le fer pour le rabattre fur longle, les clous fe trouveront dans une fitua- tion telle qu'il pourra les pincer par leurs têtes, &z les arracher entierement. D’une éponge il paffera à l’au= tre, & des deux éponges à la pince ; & c’eft ainfi qu'il déferrera l’animal. Il eft bon d'examiner les lames que l’on retire ;une portion de clou reftée dans le pié du cheval, forme ce que nous appellons we retraite. Voyez RETRAITE, Le plus grand inconvénient qui FER puiffé en arriver , n’eft pas de gâter & d’ébrecher le boutoir du maréchal; mais f malheureufement la: nouvelle lame que l’on brochera, chafle & dérermi. ne cette retraite contre le vif ou dans le vif, l’ani- mal boitera , le pié fera ferré; où il en réfultera une plaie compliquée, | Le fer étant enlevé, il s’agira de nettoyer le pié dé toutes les ordures qui peuvent fouftraire la fole, la fourchette 8&c les mammelles, ou le bras des quartiers (foyer FERRURE) aux yeux de Popérateur, C’eft ce qu'il fera en partie avec fon brochoir, & en partie avec fon-rogne-pié. Il s’armera enfuite de fon bou- toir pour couper l’ongle, & pour parer Le pié. Il doit tenir cet nftrimemes forme dans fa main droite, en en appuyant le manche contre lui, & en mainte- nant continuellement cet appui , qui lui donne la force de faire à l’ongle tous les retranchemens qu'il juge convenables , voy. FERRURE : car ce n’eftqu'en pouflant avec le corps, qu'il pourra les opérer & aflürer fes coups; autrement il ne pourtoit l’empor- ter fur la dureté de l’ongle, & il rifqueroit s’il agif foit avec la main feule de donner le coup à l’aide ou au cheval, &d’eftropier ou de blefler l’un ou l’autre. Il importe auf, pour prévenir ces accidens cruels, de tenir toûjours les piés de l’animal dans un certain degré d'humidité: ce degré d'humidité s’oppofera d'ailleurs au defléchement, fource de mille maux, & on pourra les humeéter davantage quelques jours avant la ferrure, Voyez PANSER , PALEFRENIER. Dès que la corne fera ramollie, la parure en coûtera moins au maréchal. La plûüpart d’entr'eux pour hâter la befogne, pour fatisfaire leur avidité, & pour s’épargner une peine qu'ils redoutent, appliquent le fer rouge fur l’ongle, & confument par ce moyen la partie qu'ils devroient fupprimer uniquement avec le boutoir. Rien n’eft plus dangereux que cette façon de pratiquer elle tend à l’alrération entiere du fabot, & doit leur être abfolument interdite. J’ai été témoin oculaire d’éve- nemens encore plus finiftres, caufés par application du fer brûlant fur la fole. La chaleur racornit cette partie, & fufcite une longue claudication, & fou- vent les chevaux meurent après une pareille épreu- ve. Ce fait attefté par quelques-uns de nos écrivains &: par un auteur moderne , auroit au moins dû être accompagné de leur part de quelques détails fur la maniere de remédier à cet accident; leur filence ne fauve point le maréchal de l'embarras dans lequel il eft plongé , lorfqu’il a le malheur de fe trouver dans ce cas affligeant pour le propriétaire du che- val, & humiliant pour lui. J’ai été confulté dans une femblable occafion. Le feu avoit voûté la fole, de maniere qu'extérieurement & principalement dans {on milieu , elle paroïfloit entierement concave : fa convexité prefloit donc intérieurement toutes les parties qu’elle recouvre, & la douleur que reflentoit l’animal étoit fi vive, qu’elle étoit fivie de la fievre &t d'un battement de flanc confidérable. Si le maré- chal avoit eu la plus legere théorie, fon inquiétude auroit êté bien-tôt diffipée ; maïs les circonftances les moins dificiles , effrayent & arrêtent les artiftes qui marchent aveuglément dans les chemins qui leur ont été tracés, & qui font incapables de s’en écarter pour s’en frayer d’autres. Je lui confeillai de deffoler fur le champ le cheval; & à l’aide de cette opération, il lui conferva la vie : on doit par conféquent s'op- poler à des manœuvres qui mettent l'animal dans des rifques évidens ; & fi l’on permet au maréchal . d'approcher le fer, & de le placer fur le pié en le reti- rant de la forge , il faut faire attention que ce même fer ne foit point rouge, n’affe@e &c ne touche en au- cune façon la fole, & qu'il ne foit appliqué que pen- dant un inftant très-court, & pour marquer feule- ment les inégalités qui fubfftent après la parure 5 & FER ÿ45 qui doivent être applamies avec le boutoir. On peut rapporter encore à la parefle des où: vriers, l'inégalité fréquente des quartiers; outre qu'en coupant l’ongle ils n’oblervent point à cet égard de jufteffe & de précifion, le moins de facilité qu'ils ont dans le maniement dé cet inftrument lorf- qu'il s’agit de retrancher du quartier de dehors du pié du montoir, 8 du quartier de dedans du pié hors du montoir ( Voyez MONTOIR ), fait que ces quar- tiers {Ont toûjours plus hauts que les autres ) LES piés font conféquemment de travers, & une ferrure ainf continuée fufht pour donner naïflance À une difor- mité incurable. Que l’on examine les piés de pref- que tous les chevaux, on fe convaincra par foi-mê: me de la juftice de ce reproche, Le refferrement des quartiers, leur élargiflement, le retréciflement des talons, l’encaftelure, font de plus très-fouvent un effet de leur ignorance, Voyez FERRURE. À défaut par eux de parer à plat Les talons, ils les refferrent plütôt qu'ils ne les ouvrent. Voyez Ibid. | Après qu’on a retranché de l’ongle tout ce qui en a été envifagé comme fuperflu , que l’on a donné au pié la forme qu'il doit avoir, que l’on a re@ifié les imperfetions, & que le maréchal ayant fait pofer le pié à terre, s’eft aflüré que relativement à la hauteur des quartiers il n’eft point tombé dans l'erreur com- mune, Car il ne peut juger fainement de leur égalité que par ce moyen, le palefrenier levera de nouveau le pié , & le maréchal préfentera le fer fur longle : ce fer y portera juftement & également, fans repofér fur la fole; s’il vacilloit fur Les mammelles , l'animal ne marcheroït point sûrement, les lames brochées feroient bien-tôt ébranlées par le mouvement que recevroïit le fer à chaque pas du cheval, dés que ce fer n’appuyeroit pas également par-tout ; & fi fon appui s’étendoit jufque fur La fole, l'animal en fouf- friroit aflez ou pour boiter rout bas, ou du moins pour feindre. La preuve que le fer a porté fur cette partie, {e tire encore de l’infpedtion du fer même qui dans la portion même fur laquelle a été fxé l'appui dont 1l s'agit, eft beaucoup plus life, plus brillant ; &t plus unique dans toutes les autres.Il eft néanmoins des exceptions & des cas où la fole doit être con- trainte; mais alors lé maréchal n’en diminue pas la force, & lui conferve toute celle dont elle a befoin. Voye FERRURE. Lorfque je dis au refte gw’il ef important que le fer porte par - tout également , je n’en- tends pas donner atteinte à la regle & au principe auquel on fe conforme, en éloignant le fer du pié depuis la premiere étampure en-dedans & en talon jufqu’au bout de l'éponge, enforte qu’il y aitunin- tervalle fenfible entre l'ongle & cette partie de la branche: cet intervalle qui peut regner fans occa- fionner le chancellement de fer eft néceffaire, & par lui le quartier de dedans toûüjours & dans tous les chevaux plus foible que celui de dehors, fe trouve extrèmement foulagé. Auffi-tôt que l'appui du fer eft tel qu'on eften droit de l’exiger, le maréchal doit l’aflujettir; il broche d’abord deux clous, un de chaque côté, après quoë le pié étant à terre, il confidere fi le fer eft dans une jufte poñtion : il fait enfuite reprendre le pié par le palefrenier, & il broche les autres. La lame de ces clous doit être déliée & proportionnée à la fineffe du cheval & à l’épaïffeur de l’ongle ; il faut cependant toljours bannir, tant à l'égard des chevaux de lege- re taille que par rapport aux chevaux plus épais, célles qui par leur grofleur & par les ouvertures énormes qu’elles font, détruifent l’onglé & peuvent éncore prefler le vif & ferrer le pié. Le maréchal brochera d’abord à petits coups, & en maintenant avec le pouce & l'index de la main gauche, la [âme fur laquelle il frappe. Lorfqu’elle aura fait un certain chemin dans l’ongle ,. &c qu'il pourra reconnoitre le: 540 FER lieu de fa fortie, il reculera fa main droïte pour tenir fon brochoir par le bout du manche ; il foûtiendra la lame avec un des côtés du manche de festricoifes, & la chaflera hardiment jufqu’à ce qu’elle ait entiere- ment pénétré, &c que l’afilure {e montre totalement en-dehors. Il eft 1c1 plufieurs chofes à obferver atten- tivement, La premiere eft que la lame ne foit point coudée, c’eft-à-dire qu’elle n’ait point fléchi en con- féquence d’un coup de-brochoiïr donné à faux ; alors la coudure eft extérieure & s’apperçoit aifément: ou en conféquence d’une refiftancetrop forte que lapoin- te de la lame aura rencontrée, & qu’elle n’aura pu vaincre ; & {fouvent alors lacoudureeftintérieure, & ne peut Être foupçonnée que parla claudication de la- mmal dont elle prefle & ferre le pié. La feconde cen- fidération à faire eft de ne point cafler cette même lame dans le pié en retirant ou en pouflantle clou; de l'extraire fur le champ, ainf que les pailles ou les brins de lame qui peuvent s’être féparés de la lame même (Voyez RETRAITE), & de chaffer la retraite avec le repoufloir, fi cela fe peut. Voyez TABLIER, Repoussoir. On ne fauroit encore fe difpenfer de prendre garde de brocher trop haut; en brochant bas, on ne court point le hafard d’enclouer. Le quar- tier de dedans demande, attendu fa foibleffe natu- relle, une brochure plus bafle que celui de dehors : c’eft un précepte que les Maréchaux ont confacré par ce proverbe miférable & trivial , adopté par tous les écuyers qui ont écrit: madame ne doit pas commander a monfieur. Les lames doivent être chaf- fées, de façon qu’elles ne pénetrent point de côté, &t que leur fortie réponde à leur étampure. Il fant de plus qu’elles foient fur une même ligne, c’eft-à-dire qu’elles regnent également autour des parois du fa- bot, les rivets fe trouvant tous à une même hau- teur, & l’un n'étant pas plus bas que l’autre ; ce qui eft encore recommandé dans les boutiques, & ce que l’on y enfeigne en débitant cet autre proverbe, il ne faut pas brocher en mufique. Les étampures fixant Le lieu où l’on doit brocher, 3l feroit fans doute inutile de rapporter ici celui que tenferment ces expreflions, pince devant, talon der- riere, & qui ne fignifient autre chofe, fi ce n’eft que les fers de devant doivent être aflujettis en pince, &c les fers de derriere en talon. La routine feule fufit pour graver de tels principes dans l’efprit des maréchaux: il en eft cependant plufieurs dans les campagnes qui n’adoptent point celui-ci ou qui l’ignorent, & qui fans égard à la foiblefle.de la pince des piés de der- riere & des talons des piés de devant, brocherit in- différemment par-tout, après avoir indifféremment étampé leurs fers felon leur caprice & leurs idées. Il eft facile de prévoir les malheurs qui peuvent en arriver. Revenons à notre opération. Dès que chaque la- me eft brochée, l'opérateur doit par un coup de bro- choir fur l’afilure, abattre la portion de la lame qui {aillit en - dehors le long dè l’ongle, enforte que la pointe foit tournée en-deflous ; & tous les clousétant pofés , il doit avec fes triquoifes rompre & couper toutes les afilures qui ont été pliées 8 qui excedent les parois du fabot. Il coupe enfuite avec le rogne- pié toute la portion de l’ongle qui outrepañfe les fers, ainfi que les éclats que les clous ont pû occafionner: mais 1l ne frappe pour cet effet avec fon brochoir fur le rogne-pié,que modérément & à petits coups. De-là il rive les clous en en adrefant d’autres moins ména- gés, fur ce qui paroït encore des aflilures coupées ou rompues : mais comme ces mêmes coups fur les afi- lures pourroient rechaffer les clous par la tête, il op- pofe les triquoifes fur chaque caboche, à l'effet de maintenir & d’afürer les lames dont la tête s’éleve- toit au - deflus du fer, & s’éloigneroit de létampu- re fans cette précaution, Il en prend ençore une au- tre; les afilurés frappées, ou, quoi qu'il en foit, cé qu'il en refte fe trouve feulement émouflé, Il enlevé donc avec le coin tranchant du rogne-pié , une le- gere partie de la corne qui environne chaque clou ; & alors au lieu de cogner fur la pointe des afilures, il cogne fur les parties latérales, 8c infere cette mê: me porte dans l’ongle , de façon qu’elle ne furmon- te point, & que les rivets font tels qu'ils ne peuvent point bleffer animal, 8 occafñonner ce que nous nommons eztretaillure, Voyez FERRURE. Ilne refte plus enfuite au maréchal qu’à uniravee la râpe (Voyez RaPe, TABLIER) tout le tour du fa- bot , lorfque le palefrenier a remis le pié à terre; & quelques coups legers redonrese fur les rivets, ter- minent toute l’opération. Il feroit fuperflu de parler des clous à glace & des clous à groffe tête, que l’on employe pour empêcher les chevaux de gliffer ; il n’eft perfonne qui ne con- noïfle la forme de ces fortes de clous: maïsje ne puis en finiflant cet article, trop faire fentir la néceffité de ferrer les chevaux un peu plus fouvent que l’on ne fait communément, Il eft nombre de perfonnes qui fe perfuadent qu’il eft bon d'attendre que les fers {oient entierement ufés pour en mettre de nouveaux; &c ilen eft d'autres qui veulent épargner les relevées ou les raffis (Voyez RELEVÉES, RASS1S), convain- cus que l’aétion de parer ou de rafraïchir l’ongle , n'eft nullement utile 8& ne profite qu'au maréchal : ce préjugé nuit à ceux qu'il aveugle & qu'il féduit, car infenfiblement les piés de l’animal fe ruinent & dépériffent s'ils font ainfi négligés, Il feroit à-propos de les vifiter & d’y retoucher au moins tonsles mois, ce qui n'arrive point aux maréchaux avec lefquels on a traité pour l’année entiere ; ils attendent en effet la derniere extrémité pour réparer des piés qu’ils en-. dommagent la plüpart & par leur ignorance & par l'abandon dans lequel ils les laïiffent. (e) FERRER, (Serrurerie. ) c’eft pofer toutes les pieces de fer dont les ouvrages, tant en bois que d’une au- tre matiere, excepté le fer, doivent être garnis. Quand on dit férrer une porte de bois de pieces de fer, ce mot enferme les fiches, verrouils, pentures, fer- rures, boutons, élons, 6:c. dont elle doit être gar- mie. Il en eft de même d’une croifée ; la férrer, c'eft la garnir de fes fiches, épagnolettes, 6&c. FERRET , f. m. ex termes d’Aiguilletier , c’eft une petite plaque de laiton ou de cuivre, mince, taillée en triangle ifocele, tronqué, dans laquelle on em- brafle & ferre, fur les crénelures d’un petit enclu- meau & avec le marteau, un bout ou même les deux bouts d’un cordon, d’un lacet, 6:c, pour en faciliter le paffage dans les trous ou oeillets qui lui font defti- nés, Il ya des férrers fimples, à clavier, & à embraf- fer, | Les /imples prennent un ruban fur fa longueur, le ferrent , & vont en diminuant vers leur extrémité. Les ferrets 4 embraffer font des efpeces de fers fort courts, aflez femblables à l’anneau dont on fe fert pour retenir la trefle des aiguillettes & à autres ufa- ges. | Ceux 4 bandages {ont des fers montés fur des ru- bans de fil, fervant dans les bandages pour les def. centes. Les férrets de caparaffon {ont montés fur des gances de fil ou de foie, dont one fert pour attacher un har- nois. Îl y a uneinfinité d’autres férrers. FERRET, er rermes de Cirier , c’eit un petit tuyau de fer-blanc, dans lequel on introduit la tête d’une meche de bougie, pour l’empêcher de prendre de La cire, ce qui la rendroit difficile à allumer. Il s'appelle ferret, parce qu’en effet il reflemble parfaitement au ferret d’un lacet. * FERRET,, (Verrerie. ) canne de fer plus menue que la fele, & moins longue, armée de même d’une FER poignée de bois. Elle n’eft point creufe, l’ouvrier ne s’endervant que pour prendre dans'un potun peu de matiere, qu'il attache à la bofle par la boudine pour Pouvrir & en faire un plat de verre. Voyez Parsicle VERRERIE. | | | FERRET 04 FERRETTO, ( Verrerie.) c’eft le nom que donne Antoine Neri, dans fon art de la Verre- tie à ducuivre brülé ou dé læs v/lum, dont on peut fe fervir pour donner une couleur verte au verre, afin de contrefaire les émeraudes. Voyez l’article Æs vsTumr, &c l’art de la Verrerie de Neri, Metret, & Kunckel, pag. 59. & 61. Il ne faut pas confondre ce mot avec le mot férreses d'Efpagne. (—) FERRETE, (Géog.) par les Allemands Pfrch, en latin Fierrum ; petite ville d’Alface fur la riviere S'IL, chef-lieu d'un comté de même nom, dans le Sundgaw- propre, fujette à la France depuis 1648. Ferrerre teflortit du confeil de Colmar, & eft dans un terroir très-fertile , à 4 lieues S. O. de Bâle, 9 E: de Montbelliard. Long. 254.1 0/. lar. 474. 40! (D.J.) FERRETES D'ESPAGNE, (Hiff. rar. Minéralogie.) Quelques auteurs, entrautres Lémery dans fon dic- tionnaire des drogues, nomment ainfi une efpece d’hé- matite qui eft une vraie mine de fer, d’une figure réguliere & déterminée, que l’on trouve dans quel ques endroits d'Éfpagne. On dit auffi qu’il s’en ren- contre une grande quantité en France, à Bagneres au pié des pyrenées & aux environs. Ce fontide pe: ts corps folides qui n’excedent guere la groffleur du pouce , d’une couleur d’ochre ow de fer rouillé ; qui ontiou la forme d’un parallélépipede à fix côtés iné- gaux, & dont les angles font inclinés ; on bien ils formeroient des cubes parfaits, & reflembleroient à des dés à jouer, 1 leurs furfaces n’étoient point un peu inclinées les unes fur les autres. On trouve ces pierres ou férreres feules & détachées ; mais fouvent elles font grouppées enfemble, & l’on en rencontre quelquefois une centaine attachées les unes aux au- ires : 1l y en a qui ont une efpece d’écorce luifante, qui reflemble à une fubftance métallique. On les trouve par couches dans une efpece d’ardoife bleuâ- tre, enveloppées d’une matiere tranfparente & fi- breufe. Voyez le fupplément de Chambers, & Les Tran. Ja. philofoph. n°. 472. p. 30. (—) FERRETIER , f. m. (Maréchall.) marteau dont le maréchal fe fert d’une feule main, pour forger le fer qu’il tient de l’autre main avec la tenaille. Sa lon- gueur n’excede pas ciñq pouces : il n’a ni panne ni oreille : fon œil, d'environ quinze lignes de longueur fur douze de largeur, eft percé précifément au haut du front. Cette face diminue de largeur évalement par l’un & l’autre de fes bords , depuis fa fommité juiqu'à la bouche , où elle fe trouve réduite à moins de deux pouces dans les plus gros férretiers. Il n’en eft pas de même des joues ; elles s’élargiflent à me- {ure qu’elles en approchent, mais un peu plus du coté du bout du manche que de l’autre, & leur lar- geur en cet endroit eft portée jufqu’à trois pouces. Quant aux angles, ils font fi fortement abattus, que la bouche éft circonfcrite par un oétogone très-alon- ge ; elle eft de plus très-bombée, & convexe par l'arrondiflement de tous ces angles , jufqu’au point qu'il ne refte aucun méplat dans le milieu. Sa lon- gueur doit concoûtir avec celle du manche, de ma- niere que fon grand axe prolongé idéalement, rez mOnteroit à environ deux pouces près de ce même manche, dont là longueur totale n’en excede pas dix. | Loft On donne à cette forte de marteau depuis quatre juiqu'à huit ou neuflivres de poids, felon le volume Gt la force des fers à forgér, Voyez FORGER. (e) FERREUR , £. m,. (Com”.) celui qui plombe & qui marque avec un coin d'acier les étoffes de laine, À Amiens 1l ya firefgards.ôu jurés de la fayetterie, que l’onappelle erreurs en blanc; d’autres qu’on nome me férreursier noir, &c d’autres:encore:qu'on nomme ferreurside gueldes. Didionn, de Comm. de Trévoux & Charnbers, (G) Ltrts FERRIERE , 1 £. (Mandge, Maréchal.) forte de valife placée communément dans le train d’une voi- ture deftinée au voyage: Foyez CHAISE DE POSTEe Quelques-uns donnent très-mal-à-propos ce nom au tablier à ferrer du maréchal, Foyez TABLIER: (e) -FERRONNERIE,, ff ouvrage de ferronnerie: ce, terme comprend tous les petits ouvrages de ferique les Cloutiers & autres artifans qui travaillent en ie. ont droit de forger & fabriquer. FERRONNIER,, fm, artifan qui fair G vend des ouvrages de ferronnerie, Lies maîtres Cloutiers de Paris prennent la qualité de maîtres Marchands - Cloutiérs= Ferronniers. Voyez CLOUTIER. FERRUGINEUX,, adj. (Medecine.) ce qui partis cipe de la nature du fer, ou qui contient des parti- cules de ce métal. Voyez FER. On applique particulierement ce mot à de certai. nes fources minérales dont l’eau, en paffant par les entrailles de la terre, s’impregne des principes de ce métal. Ces eaux font encore appellées ferrées & martiales. Voyez FER & MARTIAUX. | FERRURE, £. f. (Archireët, & Serrurerie.) s'entend de tout Le fer qui s’employe à un bâtiment, pour les gonds, les ferrures, les gaches, les efles, &e: (P) FERRURES d’un vaiffeau, ( Marine.) c’eft tout l’ou- vrage de fer qui s’employe dans la conftruétion d’un vaifleau; clous, pentures , férrures de fabords , de gouvernail, 6tc. garnitures de poulies, &c. & même les ancres. (Z) FERRURE, ( Maréchall,) La ferrure eft une a@ion méthodique de la main du maréchal fur le pié du che- val, c'eft-à-dire une opération qui confifte à parer, à couper l’ongle, & à y ajufter des fers convenables, Par elle le pié doit être entretenu dans Pétat où ileft, fi fa conformation eft belle &c réguliere; ou les dé- feétuofités en être réparées, fi elle fe trouve vicieufe &z difforme. d À la vüe d’un paffage qui fe trouve dans Xéno+ phon, de re equeffri , & par lequelles moyens de don. ner à l’ongle une confiftence dure & compaëe, nous font tracés , on a fur le champ conclu que l’opéra- tion dont il s’agit n’éroit point en ufage chez les Grecs. Hômere & Appien cependant parlent & font mention d’un fer à cheval; le premier dans le 41° vers du fecond livre de l’Iliade, l’autre dans {on livre de bello mitkridatico. La conféquence que l’on a tirée, en fe fondant fur l’autorité de Xénophon, me paroît donc très-hafardée, On pourroit en effet avancer, fur-tout après ce que nous lifons dans les deux autres auteurs grecs, que ce même Xénophon ne prefcrit une recette pour durcir & refferrer le fabot , que dans le cas où les chevaux auroient les piés extrè- mement mous 6 foibles ; & dès-lors cette prétendue preuve que les chevaux n’étoient pas ferrés de fon tems, s'évanoiit avec d'autant plus de raïfon, que quoique nous nous fervions nous-mêmes de tropiques aftringens dans de femblables circonftances , il n’en eff pas moins certain que la férrure eft en ufage parmi nous. On ne fait fi cette pratique étoit générale chez les Romains. Fabretti, qui prétend avoir examiné tous les chevaux repréfentés fur les anciens monu- mens, fur les colonnes & fur les marbres, déclare n’en avoir jamais và qu’un qui foit ferré. Quant-aux mules 8 aux mulets, nous ne pouvons avoir aucun doute à cet égard. Suétone , #2 Nerone , cap, xxx, nous apprend que le luxe de Néron étoit tel, qu'il ne voyageoit jamais qu'il n’eût à {a fuite mille voitu- res au moins, dont les mules étoient ferrées d'argent : Pline aflüre que les fersde celles de Poppée, femme de 548 FER cet empereur, étoient.d’ors& Catulle compare un T homme indolent &-parefleux, à une mule dont les fers font arrêtés dans une boue épaifle & profonde, enforte qu’elle ne peut en fortir. Or fila ae ; Te- lativement'aux mules,, étoitfi fort en vigueur, pour- quoi ne l’auroit-elle pas été relativement aux che- vaux, & pourquoi s’'éleveroit-on contre ceux qui feroient remonter cette opération jufqu’à des fiecles très-reculés? Ces queftions ne nous intéreflent pas aflez pournous livrer ici à la difcuffion qu’elles exi- geroient de nous, dès que nous entreprendrions de les éclaircir: La fixation de l’époque & du tems au- quel Les hommes ont imaginé É ferrer les chevaux, ne fauroit nous être denquelqu'utilité, qu'autant que nous pourrions , en partant de ce fait, comparer des idées des anciens :8c les nôtres , en établir en quelque façon la généalogie, & découvrir, en reve- nant fur nos pas, &c à la faveur d’un enchainement & d’une fucceffon conftante de lumieres, des prin- cipes oubliés, & peut-être enfevelis dans des écrits délaiflés ; mais en ce point, ainfque dans tous ceux : qui concernent l’'Hippiatriques, 1l n’eft pas poflible d’efpérer de tirer de pareils avantages de l’étude des ouvrages qui nous ont êté tranfmuis. Sacrifions dorc fans balancer, des recherches qui concourroient plû- tôt à flater notre curiofité qu'à nous inftruire , & ne nous expofons point au reproche d’avoir dans une indigence telle que la nôtre, & dans les befoins les plus preffans , abandonné le néceflaire & l’utile pour ne nous attacher qu’au fuperflu. De toutes les opérations pratiquées fur l’animal, il en eft peu d’aufhi commune & d’auffi répetée que celle-ci ; or l'ignorance de la plüpart des artifans aux- quels elle eft confiée , & qui, pour preuve de leur dre atteftent fans cefle une longue pratique, nous démontre affez que le travail des mains ne peut con- duire à rien, s'il n’eft foûtenu par l'étude & par la réflexion. Toute opération demande en effet de la part de celui qui l’entreprend, une connoïffance en- tiere de la partie fur laquelle elle doit être faite : dès que le maréchal-ferrant ignorera la ftruéture, la for- mation, & les moyens de laccroiflement & de la régénération de l’ongle, il ne remplira jamais les dif férentes vües qu’il doit fe propofer, & il courra toû- jours rifque de l’endommager & d’en augmenter les imperfeétions, bien loin d'y remédier. Le fabot ou le pié n’eft autre chofe que ce même “ongle dont les quatre extrémités inférieures du che- val font garnies. La partie qui regne direétement au- tout de fa portion fupérieure, eft ce que nous nom- mons précifément /a couronne ; fa confiftence eft plus compaéte que celle de la peau par-tout ailleurs : Les parties latérales internes &r externes en forment les quartiers (voyez QUARTIERS) ; la portion antérieu- re, la pince (voyez PINCE) ; la portion poftérieure, les talons (voyez TALONS) ; la portion inférieure en- fin contient la fourchette & la fole (voyez Four- CHETTE, voyez SOLE) : celle-ci tapifie tout le def- fous du pié. La forme naturelle du fabot & de l’ongle entier, eft la même que celle de l'os qui compofe le petit pié; elle nous préfente un ovale tronqué , ouvert fur les talons, & tirant fur Le rond en pince. Dans le pou- lain qui naît, l’ongle a moins de force & de foûtien ; la fole eft molle & comme charnue ; la fourchette n’a ni failhe ni forme; elle n’eft exatement vifble &c faillante en-dehors, qu'à mefure que la fole par- vient à une certaine confftence, & fe durcit. Il en eft à cer égard comme des os mêmes, c’eft-à-dire qu'ici l’ongle eft plus mou que dansle cheval, parce qu'il ya plus d'humidité, & que les parties n’ont pû acquérir leur force &c leur fohdité. | À Quelque compaéte que foit dans l'animal fait la fubitance dufabot, ileft conftant que l’ongle dépend des pèrties molles. & reconnoît lé méme!principe: I neft réellement dans fon origine ; ainfi que nous Pobfervons dans le foetus & dans le poulain naïffant , qu'une fuite & une prodution du fyflème généra} des fibres & des vaifleaux cutanés, & n’eft formé quepar la continuité de ces fibres 8 par l'extrémité de-ces mêmes vaifleaux. Ces fibres à l'endroit de la couronne font infiniment plus rapprochées les unes des autres ; qu’elles ne l’étoient en formant le tiffix des tégumens ; & elles fe reflerrent & s’unifflent toû- Jours davantage à mefure qu’elles fe prolongent , & qu’elles parviennent à la pince & aux extrémités du pié : de-là la dureté & la confftence de l’ongle. Quant aux vaffeaux , leur union plus étroite & plus intime: contribue à cette folidité ; maisilsne s’éten- dent pas auffi loin que les fibres : arrivés à une cer- taime portion du fabot , leur diametre eft tellement diminué que leurs liqueurs ne circulent-plus, & ne peuvent s'échapper que par des porofités formées par l'extrémité de ces tuyaux. La liqueur échappée par ces poroftés, nourrit. la portion qui en eft im bue ; mais comme elle n’eft plus foùmife à l’aétion fyftaltique , elle ne peut être portée jufqu’à la partie inférieure de l’ongle , aufñi cette partie ne feçoit-elle point de nourriture. Diftinguons donc trois parties dans le fabot; la partie fupérieure fera la partie vive; lapartiemoyen- ne fera la partie demi-vive, fi je peux m’exprimer anfi; & la portion inférieure fera la partie morte, La partie fupérieure, ou la partievive, fera aufi la partie la plus molle, parce qu’eile fera tiflue de vaifleaux & de fibres qui feront moins ferrés à lori- gine de longle qu’à fon milieu 8 à fa-fin: aufz voyons-nous que le fabot, à la couronne & à fon commencement, eft moins compaéte qu'il ne left dans le refte de fon étendue, foit par le moindre rap- prochement des fibres, foit parce que les liqueurs y circulent &c l’abreuvent, malgré l’étroitefle des ca- naux , dont le diametre, quelque petit qu'il foit laiffe un paflage à l'humeur dont il tire & dont il re- çoit fa nourriture. La partie moyenne, ou la partie demi-vive, fera d’une confiftance plus dure que la partie fupérieure ;; parce que les fibres y feront plus unies; & que d’ail- lèurs les vaifleaux s’y terminant, ce n’eft que par des filieres extrèmement tenues, on par des porofi- tés imperceptibles, que la partie la plus fubtile de la Iymphe qui fert à fon entretien & à fa nutrition, pourra y être tranfmife & y pénétrer. Enfin la partie inférieure, que j’ai crû devoir ap- peller a partie morte, {era d’une fubftance encore plus folide que les autres, parce que la réunion des fibres fera plus intime ; & que quand même on pour- roit y fuppofer des vaifleaux, ils feroient tellement oblitérés qu’ils n'admettroient aucun liquide, ce qui eft pleinement démontré par l’expérience. En effet, lorfqu’on coupe l’ongle en cet endroit, & que l’on pare un pié, les premieres couches que lon enleve ne laifent pas entrevoir feulement des veftiges d’hu- midité ; or dès que les liqueurs ne peuvent être cfar- riées jufqu’à cette partie, elle ne peut être envifagée que comme une portion morte, & non comme une portion jouiflante de la vie. Le méchanifme de la formation & de l’entretien du fabot , eft le même que celui de fon accroiïflement. Nous avons reconnu dans la couronne & dans la par tie vive, des vaifleaux deftinés à y porter la nourri- ture, de maniere que les lois de la circulation s’y exécutent comme dans toutes les autres parties du corps ; c’eft-à-dire que la liqueur apportée par les arteres ; eft rapportée par des veines qui leur répon< dent. Nous avons obfervé, en fecond lieu , que les extrémités de ces mêmes vaifleaux qui donnent la vie à la partie fupérieure, font direétement à la par- | te tiemoyenne ; & que conféquemment Île fué nourrie cier fuintant dans cette partie, & y tranfludant par les porofités que forment les extrémités de ces ca- naux, Sy ciftribue, fans que cette humeur puife être repompée & rentrer dans la mafle. Enfin nous avonsenvifagé la partie inférieure, comme une par- tie abfolument morte ; or fi la partie fupérieure eft la feule dans laquelle nous admettions des vaifleaux, elle eft aufli fans conteftation la feule qui foit expo- fée à limpulñon des liquides , & c’eft conféquem- ment en elle que s’exécutera l’œuvre de la nutrition & de l’accroiffement. | L'ongle ne s'accroît & ne fe prolonge pas en effet par fon extrémité ; elle ne tire fon accroiflement que depuis la couronne, -de même que dans la végéta- tion la tige ne fe prolonge qu’à commencer par la racine. Cette partie & la portion fupérieure du fa- bot, {ont , ainfi que je viens de le remarquer, les feules expofées à l’impulfion des liquides. Cette im- pulfon wa lieu que par la contra@ion du cœur, & pat le battement continuel des arteres ; la force de Pun êc laétion conftante des autres , fufifent pour opérer non-feulement la nutrition, mais encore l’ac- croiffement : car le fluide qu'ils y pouffent fans cefle, y aborde avec affez de vélocité pour furmonter ë pour vaincre infenfiblement l’obftacle que lui pré- ientent & la portion moyenne & la portion infé- rieure de Pongle , de maniere que l’une & l’autre font chaflées par la portionfupérieure. À mefure que celle-ci defcend , & qu’elle s'éloigne du centre de la circulation , 1l fe fait une régénération; & cette mê- me portion étant alors hors du jeu des vaiffleaux, & n'étant plus entretenue que par la tranfludation dont j'ai parlé, elle devient portion moyenne & demi- vive : eft-elle preflée & chaffée encore plus loin ? elle ceffe d’être portion demi-vive, & elle devient portion morte. Cen’eft pas que la portion demi-vive chaffe la por- tion morte. Ds que la portion fupérieure, en fe régé- nérant, poufle, an moyen de l'effort des liqueurs qui y abordent, la portion moyenne, elle chaffe confé- quemment la partie inférieure , qui en eft une fuite, & de-là le prolongement du fabot ; car la portion demi-vive n'étant plus foûmife aux lois du mouve- ment circulaire, on ne peut fuppofer en elle la fa- culté & la puiffance d'exercer aucune ation : ce n’eft donc qu'autant qu’elle eft un corps continu à la par- tie inférieure, qu’elle paroïît le chafler devant elle, tandis qu’elle eft elle-même chaflée par la portion fupérieure, à laquelle on doit attribuer tout l’ouvra- ge de la nutrition & de l’accroiflement. J'avoue que peut-être on fera furpris que la force du cœur & celle du jeu des arteres foient telles, qu°- ellespuiffent poufler Les liquides avec une véhémen- ce capable de forcer la réfiftance de deux corps auffi folides que cenx de la portion moyenne & de la por- tion inférieure ; mais 1l faut ajoûter à ces caufes mo- trices, la puiffance qui réfulte de l’a@ion des mufcles & de la preffon de l'air, qui font autant d’agens au- xiliaires qui pouflent les fluides. Une fimple obfervation vient à l'appui de toutes ces vérités. Si l’on demeure un long intervalle de tems fans parer Le pic d’un cheval, l’ongle croît peu, &t croit moins vite : pourquoi? parce que la partie motte ou [a partie inférieure ayant acquis dès-lors une étendue & un volume plus confidérable, Oppo- fera une plus grande réfiftance , & contre-balancera en quelque façon la force par le moyen de laquelle les liqueurs font portées à la partie vive ou à la par- tie fupérieure. Si au contraire le pié de l’animal eft fouvent paré, l’accroiflement fera moins difficile, parce qu'une-portion de l’ongle mort étant enlevée, d’obftacle fera moindre , & pourra être plus aifément Tome VI, | FELR 549 furmonté par d'abord, l’impulfion & le choc de ces mêmes liqueurs. Un autre fait nôn moins certain nous prouve que l’ongle ne fe prolonge point par fon extrémité, Lorf: que, par exemple, dans l'intention de reflerrer une feyme (voyez SEYME), &c de réunir les parties divis fées du fabot, nous avons appliqué à la naïffance de la fente & de la divifion, c’eft-A-dire très-près de la couronne, de feu (voyez FEU), cette lettre formée par l'application du cautere a@uel fur lequel elle étoit imprimée, defcendra peu-à-peu & plus ou moins promptement , felon que le pié fera plus ou mOins fouvent paré, & s’évanoüira enfin prompte- ment. Ileft donc parfaitement démontré que lac- croiflement ne fe fait & ne pent avoir lieu que dans la couronne & dans la partie vive. | Dès que cette portion change , pour ainfi dire, &e qu'elle devient demi-vive , il eft inconteftable qu'il {e fait une régénération. Tâchons donc de déve lopper, s’il eft poffible, les moyens dont la nature {e fert pour renouveler cette partie, Ilne s’agit pas ici, comme dans les plaies, de la réparation d’une fubftance abfolument détruite & perdue ; elle eft néanmoins produite felon les lois du même méchanifme : elle eft en effet opérée & par le fuc nourricier, & par le prolorigement des vaif. feaux qui y ont une part confidérable. J’ai dit que la circulation s'exécute dans la couronne & dès l'ori- gine de Pongle ; il eft par conféquent dans l’une 8 dans l’autre de cés parties, des tuyaux deftinés à ap- porter & à rapporter les liqueurs : mais comme nous fommes forcés d’avoter que ceux qui font à la cou- ronne , font, à raifon de leur union plus intime, d’u- ne plus grande exilité que ceux qui font au-deffus & à la peau, nous fommes auf contraints de conclure que le diametre de ceux qui feront au-deffous & À l’origine du fabot ,. fera encote bien moindre no qu'il admettra moins de liquide. Difons encore que la folidité de cette partie ne permet pas de pen- {er que la plus grande quantité des fibres dont elle eft formée, foit vafculeufe , principalement celles qui font les plus extérieures , & que le contadt de l'air tend toüjours à deflécher ; ou fi nous leur fup= polons une cavité, elles ne feront que lextrémiré d’une partie des vaifleaux qui fe diftribuent à la cou- ronne : or le fuc nourricier étant parvenu dans ces extrémités, s’y arrête; & étant continuellement pouffé par la liqueur qui le fit, il s’engage dans les porofités , & prend lui-même une confiftance folide. qui commence à avoir moins de fentiment!: Cette fubftance compa@te eft toûjours chaflée devant elle par le nouvel abord des liqueurs ; les vaifleaux eux= mêmes fe prolongent, & c’eft ainfi qu’elle eft régé- ! Pl nérée, En parlant de l'extrémité de l’ongle , je n’ai enco- re entendu parler que de la partie inférieure de fes parois ; & non de la fole, Celle-ci de même que la fourchette qui en eft le milieu, eft'une fuite & une continuation des fibres &c des vaïfleaux d’une portion de la peau qui fe pro- page autour du petit pié ; & qui eft tellement adhé- rente à l’intérieur des parois du fabot , qw’elle y ef intimement unie par des crénelures, de maniere qu’elle eft comme enclavée dans des fillons formés à l’ongle même. Son milieu, c’eft-à-dire, la four- chette que l’on nomme ainf, attendu la bifürcation que l’on y remarque, tire fa forme d’une efpece de corps.charnu d’une fubftance fpongieufe , lequel ef direétement fitué au-deffous de l’aponévrofe du muf- cle profond qui tapifle & qui revêt la portion inf rieure de l'os du petit pié. Il eft à-peu-près fembla- bleà celui que l’on apperçoit à l'extrémité des doigts de l’homme lorfqu’on en a enlevé la peau, excepté qu'il eft plus compaéte &.plus De Sa figure eft a à 550 FER célle d’un cône dort la pointe eft tournée en-devant, &c dont la bafe échancrée répond aux deux talons. C’eft à ce corps fpongieux que la fourchette adhere par de petites fibres & des vaifleaux de communica- tion. Que fi elle eft d’une confiftance moindre que le fabot, & même que la fole, c’eft que les fibres & les vaifleaux qui la compofent font plus lâches. Que fi elle acquiert enfin plus de folidité à fa partie exté- sieure que dans le refte de fon étendue , ce ne fera que parce que le liquide n’y affluera pas, êr que ces mêmes fibres & ces mêmes vaifleaux fe refferreront toùjours de plus en plus. Venons à l'application de ces principes ; eux feuls peuvent mettre le maréchal ferrant en état de don- ner à chaque portion du pié la configuration qu’elle doit avoir, & de remplir par conféquent les deux intentions qu'il doit fe propofer dans cette opéra- tion. La premiere de ces intentions eft, ainfi que je l’ai dit, d'entretenir le pié dans l’état où il eft quand il ef régulierement beau; & la feconde confiite à en réparer les défeduofités lorfqu’il peche dans fa for- me, &c dans quelques-unes de fes parties, Un pié qui n’eft ni trop gros, nitrop grand, mi trop large, ni trop petit, dont la corne eft douce, unie, liante, haute, épaifle &c ferme fans être caf- fante, voyez P1É; dont les quartiers font parfaite- ment égaux, voyez QUARTIERS ; dont les talons ne feront ni trop hauts ni trop bas, & feront égaux, larges, & ouverts, voyez TALON; dont la fole fera d’une confiftance folide , & laifera au-deflus du pié une cavité proportionnée, voyez SOLE; dont la four- chetté enfin ne fera ni trop grafle, ni trop maigre, voyez FOURCHETTE; & qui d’ailleurs aura la forme de cet ovale tronqué dont J'ai parlé, fera toüjours envifagé comme un beau pié. Ceux dans lefquels on obfervera un quartier plus haut que l’autre, voyez QUARTIER, & qui feront conféquemment de travers, ou dans lefquels un des uartiers fe jettera en-dehors ou en-dedans ; ceux dans lefquels les talons feront bas, voyez TALON, feront flexibles , feront hauts, non fujets ou fujets à l’encaftelure, voyez ibid. PIE; qui feront encaftelés, qui feront plats, voyez PIÉ, SOLE, TALON ; qui auront acquis cette difformité à la fuite d’une four- bure, & dans lefquels on entreverra des croiffans, #0yez FOURBURE , SOLE ; qui auront un Ou deux o1- gnons, voyez SOLE ; qui feront comblés, affeétés par des bleymes, voyez ibid. PIE ; qui feront gras ou foi- bles , voyez PIÉ ; qui auront des foies, des feymes, v0yez QUARTIERS, SEYMES, SOIES ; quiferont trop petits, trop longs en pince & en talon, voyez PrÉ, feront des piés défeétueux : ils demanderont toute l'attention du maréchal, qui travaillant avec fuccès d’après les connoïflances que nous avons dévelop- pées , en corrigera inévitablement les vices, & qui pourra encore remédier aux défauts qu’entrainent celui d’être argué, brafficourt, droit fur fes mem- bres, voyez BOUTÉ, RAMPIN , JAMBES, & ceux de fe couper, de forger , voyez FORGER , &c, Ferrure d’un pic naturellement beau. Blanchiflez fim- plementla fole, c’eft-à-dire, n’en coupez que cequ’il en faut pour découvrit la blancheur naturelle ; en- levez le fuperflu des quartiers ; obfervant d'y laïfler dequoi brocher ; ouvrez les talons en penchant le boutoir en-dehors, & non en creufant ; abattez-les de maniere que le pié étant en terre, l'animal {oit dans une jufte pofition ; coupez le fuperflu de la fourchette ; ouvrez labifurcation jufqu'à l’épanche- ment d’une efpece de férofité, & non jufqu’au fang, 8t maintenez par le fer comme par la parure le fabot dans la configuration qu'il avoit. Ajuftez à ce pié un fer qui l'accompagne dans FER _ toute fa forme , qui ne foit ni trop hitrop peu cou- Vert, ni trop leger ni trop pefant, qui ait la même épaiffeur aux éponges qu’à la pince, voyez FER, & qui en ait quelques lignes de plus à la voûte qu’à cette derniere partie. Erampez un peu plus gras: en-dehors qu’en-dedans ; qu’il y ait quatre étampu- res de chaque côté avec une diftance marquée à la pince pour féparer celles de chaque branche; que ces étampures ne foient ni trop grafles ni trop mai- gres. Voyez FORGER UN FER ; que le fer au talon ne foit point trop féparé du pié ; que les éponges ne débordent que proportionnément à fa forme; & que: l’on apperçoive enfin pour la grace du contour &c de l’ajufture une fimple élévation tout-antour de ce fer depuis la premiere étampure jufqu’à la derniere, en paflant fur la pince. | L’attion de pancher le boutoir en-dehors pour ou-. vrir les talons ou de les parer à plat, eft totalement contraire à la pratique ordinaire de prefque tous les. maréchaux. Toûjours guidés par une faufle routine, & jamais par le raifonnement, ils ne ceffent de creu- fer au lieu d’abattre, c’eft - à-dire qu'ils coupent continuellement la portion de l’ongle qui fe trouve enite la fourchette &e talon, enforte qu’au mo- ment où ils croyent ouvrir cette partie, ils la reffer- rent de plus en plus : dès qu'ils enlevent eneffet laps _ pui qui étaye & qui fépare letalon & la fourchette, les parois extérieures de l’ongle n’étant plus gênées, contenues, & n'ayant plus de foûtien, fe jettent & fe portent en-dedans d'autant plus aifément , que le tiflu de la corne eft tel qu’il tend toüjours à fe con traéter ; de-là une des caufes fréquentes de l’encaf- telure, & c’eft ainfi que le plus beau pié devient dif: forme quand il eft livré à des mains ignorantes, Mais voyons fi la méthode que nous prefcrivons eff réellement établie fur les fondemens inébranlables que nous avons jettés, on en fera toñjours de plus en plus convaincu ; car nous expliquerons dans tous les différens genres de ferrure les raifons qui nous infpirent &c qui nous déterminent. Ici, c’eft-à-dire, dans le cas où il s’agit d’un beaw pié, nous ne changeons rien à la configuration de l’ongle ; les retranchemens que nous faifons à cha= que partie font tels que chacune d’elle fubffte dans le même état où elle étoit auparavant; tout l'effet qui en réfulte fe borne à en diminuer le volume & l'étendue. Le fer que nous y plaçons accompagne le pié dans toute fa forme, parce que fi l’on ne faifoit pas certe attention, il en réfulreroit une difformité lots de lac- croiflement felon le défaut du fer même. D'ailleurs, fi le fer débordoit trop, l'animal fe déferreroit ; & s’il ne débordoit pas ou ne couvroit pas aflez, les mammelles croîtroient beaucoup plus que ce qui portéroit fur le fer, qui n’appuyant que fur la fole fe- roit inconteftablement boiter le cheval. Ce même fer ne fera nitrop leger ni trop pefant: dans le premier cas il ne réfifteroit pas; dans le fe- cond il ruineroit les jambes de l’animal, & par fon propre poids dériveroit & entraineroit les lames. Voyez FER. | Îl y aura même épaifleur aux éponges qu’à la pin- ce, afin que le pié foit toüjours égal par-tout, & qu’une de fes parties n'étant pas plus contrainte que l’autre, les liqueurs ne trouvent pas une réfiftance plus forte , ce qui les détermineroit à fe jetter & à refluer fur les parties moins gênées. La force de la voûte excédera celle de la pince ; parce que lPanimal ufe toûjours p ütôt le fer {ur les extrémités de cette portion, &c que fi la voûte étoit auf foible , le fer plieroit &t porteroit fur la fole, : Il fera étampé plus gras en-dehors qu’en-dédans, parce qu’il doit toùjours plus garnir de ce côté que de l’autre, S'il étoit aufli garni en-dedans, l'animal FER Le conpetoit, s’attraperoit , voyez ferrure du cheval ‘| qui Je coupe , ou fe déferreroit en marchant fur fon fer. D'ailleurs, le quartier de dehors s’ufant otdi- nairement davantage, il eft bon qu'il foit plus gant; & l’étampure y fera plusgrafle, parce queeehu de “dedans efttoûjours plus foible, Voyez QUARTIERS. Ferrure d'un pié de travers, un quartier ‘étant plus ‘haut que l'anrra Abattez d’abord le quartier plus haut prefque jufqu'au fang ; creufez le talon , fans ‘cependant trop pancher le boutoir. Coupez enfuite aflez de l’autre quartier pour enlever une portion de la partie morte , contentez-vous d'ouvrir le ta- lon de ce même côté ; ajuftez enfin à ce pié un fer beaucoup plus mince du côté du quartier qui fera trop haut, plus couvert du côté du quartier plus bas. Etampez plus gras de ce même côté, &c plus maigre de l’atitre. Le fer garnira & débordera du côte bas ; 1l fera fi jufte du côté haut, qu'il y aura à ‘rogner en fuppofant que ce quartier fe renverle, ce qui arrive communément à tous les quartiers trop hauts qui fe jettent & qui fe portent le plus fouvent en-dehors. L’éponge du quartier plus bas fera pro- portionnée à la force de la branche, & par confé- quent plus épaifle que celle du quartier plus haut. Elle garnira fur le talon, afin que l’ongle ne s’ufe point & s’y étende ; à l’égard de celle du quartier haut, elle ne débordera point , & fera jufte à la for- me du pié. Vous abattrez le quartier plus haut, parce que par fa hauteur exceflive non-feulement le pié eft difor- me, mais l’animal n’eft pas dans fon point de force & d'appui, Vous en creuferez le talon; c’eft-à-dire que votre intention étant de le reflerrer, vous pare- rez comme le commun des maréchaux quand ils veulent les ouvrir, & vous aurez intention de les reflerrer pour éviter qu'il fe porte en-dehors ; or en diminuant la force de l’ongle qui eft entre le talon & la fourchette, la paroi extérieure fe portera en- dedans, | Vous ouvrirez le talon quieft plus bas, en renver- fant le boutoir en-dehors pour lui laïfler toute fa force, & vous en abattrez une partie ainfi qu’une portion du quartier; car fi vous n’y touchiez pas, & fi vous laifliez fubffter l’ongle mort dans fon en- tier, les liqueurs trouveroient lors de leur impul- ion une trop grande réfiflance; elles auroient plus de corps à chañler, & ce quartier recevroit moins de nourriture. La maniere d'ouvrir ce talon produira un effet oppolé & contraire à l’autre , c’eft-à-dire qu'il s'ouvrira toùjours de plus en plus, attendu là force quifera confervée dans le dedans, force qui {era fupérieure à celle du dehors. . D'une autre part, le fer fera plus mince du côté du quartier haut par rapport à cette hauteur excel. five même. Il fera étampé plus maigre de ce même côté, vü le défaut de l’ongle que vous avez coupé, & dont vous avez diminué la force en-dedans, tan- dis qu'il fera plus couvert & étampé plus gras du côté du quartier bas, parce que le fer débordant, longle pourra s'étendre en-dehors. Vous gênerez enfin, vous contiendrez le quartier haut , & le fer y fera extrèmement jufte, parce que la nourriture n’eft jamais aufli abondante dans une “partie contrainte & gènée. Le fuc nourricier ne pou- vant dès-lors forcer & furmonter l’obftacle qui lui eft préfenté , eft obligé de fe détourner & de fe dé- terminer fur les autres. Voyez QUARTIERS. Ferrure d’un pié de travers, un des quartiers fe jettant en-dehors ou en-dedans. Je n’entends pas parlerici d’un pié dont un des quartiers fe jettant en-dedans, & pouvant reflerrer & entrainer le talon, tendroit à l’encaftelure ; je ne confidere que celui dont la for- me feroit irréguliere dans l’un ou dans l'autre des €as que je fuppofe. Parez done le pié également par- Tome VI, | FER EL: tout ; ouvrez les talons , la fourchette: & ajuftez-y un fer ordinaire qui fera plus couvert & étampé pliis gras du côté du quartier qui rentrera, qui garnira également au talon de ce même côté, & qui fera juite du côté fain. Si la difformité du pié & l'inégalité des quartiers provient de ce que l’un d'eux fe portera en-dehots, que l’étampure de ce côté foit alors ex- trèmement maigre, placez le fér de maniere qu'il réponde à la ligne de la couronne; après quoi avec le rogne-pié ( voyez ROGNE-P1É. ) coupez tout l’on- gle qui excédera le fer. Que fi enfin le pié eft de tra= vers à raïfon de la défeduofité des deux quartiers. patez-le de même, & mettez-y un fer figuré felon ces principes. Vous parerez le pié égalèment par- tout, parce qu'enfuite de cette parure la configura- tion du fer dirigera l’ongle dans fon accroiflement. . I fera étampé plus gras, il fera plus couvert du côté du quartier qui rentrera, parce qu'il débordera de cecôté, & qu'en débordant il foulagera l’ongle au quartier, & le laifera croître fur-tout n’ayant pas de bordure, D'ailleurs, le fer devant déborder,, fi la branche n’étoit pas plus couverte , célle du quar- tier fain feroit contrainte de gêner la fotirchetre. Quant à l’étampure, quoiqu’elle paroïfle plus graffe, elle ne le fera réellement pas ; car elle ne feratelle, que parce que la branche fera plus couverte. Dans le cas où lun des quartiers fe porteroit en: dehors , vous placeriez le fer, enforte qu'il répon: droit à la ligne de la couronne, & vous rogneriez tout l'onglé qui excéderoit le fer ; or en le coupant anf, vous répareriez la difformité, & cette diffor- mité ne fe reproduiroit point, parce que la branche feroit jufte au quartier. Au furplus, vous n’étampe- riez maigre, que parce qu’autrement le clou broché fe trouveroit dans le . Voyez QUARTIERS. Ferrure d'ur pié dont les talons font bas. Parez le pié à l'ordinaire ; ouvrez par conféquent le peu de talon que vous rencontrez, diminuez le volume de la four- chette , & ne coupez point en pince avec le boutoir: que les éponges de fer foient fort épaifles , étampez- le en pincé le plus qu’il vous fera poffible, placez-le dé façon que cette partie l’excede beaucoup, & après avoir broché, coupez cer excédent avec le rogne-pié. Par le plus de force & la plus grande épaiffeur des éponges, vous réleverez le pié du cheval, & vous obvierez à fon défaut naturel, Vous le rognerez en pince, parce que le pié étant plus court, la pince portera davantage ; dès-lors le talon fera donc fou- lagé, & la nourriture y affluera avec plus d’aifance, Enfin l’étampure en pince n’aura lieu que pour né pas gêner les talons, qui dans ces fortes de circonf- tances, font très-délicats, &c fi foibles, qu'ils ne peu: vent pas réfifter à la latie, & qui en éclatant fe dé- truifent toùjours davantage. Foyez TALON: — Ferrure d'un pié dont les talons font féexibles. Foyez TALON, N'ouvrez pas les talons, laiflez-leur toute leut force. Sinéanmoins ils font trop hauts; abattez- les, mais en parant à plat; s'ils font trop bas, blan- chiffez-les ; mettez un fer ordinaire étampé en pince autant qu'il fe pourra, & qui garnira beaucoup fur les talons à l’effet de les renforcer , de les foûrenir, & de les foulager. CA | Ferrure d’un pié dont les talons font rop hauts, mais qui cependant font trop ouverts pour qu’on puilfe redou- ter lencaftelure. Voyez TALON. Parez le talon pref- que jufqu'au vif & à plat, c’eft-à-dire que vous des vez dégager la fourchette en tenant votre boutoït renverié, parez-la enfuite, & ayez attention de ne pas diminuer beaucoup en pince. Mettez à ce pié ur fer ordinaire, dont l’épaifleur {era égale à la pince &t aux éponges, qui fera relevé comme de coûtume, qui garnira tout le tour du Pié, qui portera égale- ment partout, & dont les étampures fefont plus e AÂAaaÿ ss? FER graffes en pmce qu’elles ne le font communément. Je confeille d’abattre le talon jufqu'au vif, pour en diminuer la hauteur, & à plat, parce que fi l'on creufoit, on encafteléroit le pie. Vous ne diminuerez pas beaucoup de la piñce, parce que Le défaut cominun à ces'piés , eft de mañ- quer par cette partie, 132 Votre fer fera auffi épais aux épongés qi’en pince ; la raifon en eft que s'il avoit plus d’épaifleur aux éponges, vous entretiendriez le défaut par vorre fer, tandis que vous auriez fait des efforts pour le réparer par la férrure, Le fer portera fur les talons ; parce que , comme vous devez le favoir, des talons gênés reçoivent moins de nourriture, & le fuc nourricier fe diftri- buera ailleurs. | Il garnira tout-autour du pié’, & dès-lofs la pince ne s’uléra pas; cé qui arrive prefque toüjours à ces fortes de piés. | Je demande, en un mot, une étampute plus graf- {e, parce que l’étampure étant ordinaire, & le fer devant garnir, Le pié feroit broché trop maigre. Ferrure d'un pie dont les talons feroient trop hauts, G qui tendroient à l’encaflelure. Voyez au mot TALON. Abattez confidérablement les talons ; mais parez toûjours à plat, & n’affoibliffez jamais l'appui qui eft entre cette partie & la fourchette : parez celle-ci fans l'ouvrir, & diminuez de la pince proportionnément au talon, par le moyen du togne-pié. Ajuftez à ce pié un fer à pantoufle. Voyez FER, Ce fer fera étampé à l'ordinaire , mais plütôt en pince qu’en talon ; 1l garnira beaucoup à cètre derniere par- tie, & portera également par-tout. Ferrure d'un pié encaftelé. Voyez TALON. Parez-le & ferrez-le, de même que celui qui tend à Pencañte- lure , en augmentant néanmoins l'épaifeur de la pan- toufle, felon la défeétuofité du pié. Vous abattrez le talon à plat, & je crois qu'il eft fuperflu de répeter ici les raifons de parer ainfi. Vous ne diminuerez point l'appui qui eft entre la fourchet. te & cette partie, parce que le fer doit y porter. Vous n’ouvrirez point la fourchette ; dès-lors vous lui conferverez la force néceffaire pour s’oppofer au reflerrement du talon. Vous rognerez enfin la pince, foit pour recouvrir le pié , foit pour que la nourri- tute fe diftribue aux talons ; parce que la longueur du pié étant diminuée , l'animal ne travaillera pas tant fur eux; & la contrainte étant moindre; Les li- queurs s’y détermineront avec plus d’aifance & plus de facilité. La néceffité du fer à pantoufle eft évidente, L’in- térieur de cette pantoufle portant aux talons, & les génant én-dedans , ils s’ouvriront par eux-mêmes, vüû que dès-lors le fuc nourricier gagnera la partie de dehors , & que l’ongle de ce côté naura rien qui uiffe le gêner dans fon accroïflement, puifqu’étant d’ailleurs chaffé par l’épaifleur intérieure de la pan- toufle, le talus qui eft obfervé depuis cette épaif- feur intérieure jufqu’à l'extérieur de la branche, fa- cilitera fon extenfion de ce même côté. L’étampure en pince eft enfin préférable, attendu que les quartiers affoiblis par la parure, ne féroient pas'en état de fupporter les lames; & vous garnirez beaucoup en talons , parce que des qu’ils feront fou- lagés, non-feulement 1ls reviendront fur la ligne de la couronne, maïs ils s’élargiront toûjours davanta- ge, à l’aide & par le fecours du fer propoé. Ferrure du pié plat. Voyez PIE, SOLE. Parez & di- minuez l’ongle le moins qu’il vous fera poffble ; ajuftez un fer plus couvert qu’un fer ordinaire, étam- pez-le plütôt maigre que gras: que la voûte foit très- près de la fole ; placez-le fur le pié, de maniere en- core que vous puifhiez couper avec lé rogne-pié le fuperflu de l'ongle qui déborde : que les éponges en foieñt fortes &r épaifles, & qu’elles fe débordent pas extraofdinairement en talons. Parez & diminuez très-peu l’ongle ; en eñ ibattant trop, vous pénétreriez bientôt jufqu'au vif: l'animal n’auroit pour ainf dire plus de pié, & il ne poutroït fe foûtenir, par la douleur que lui cauferoit & cetté diminution & ce retranchement trop confidérable. Que le fer foit plus couvert , & que la voûte foit très-pres de la fole ; par ce moyen cette partie fera génée & contenue ; la nourriture ne pouvant plus s’y porter en aufli grande quantité, {e déterminera fur les autres ; ce Qui, en femontant à la fource & à la caufe de la difformité du pié , en arrétera les pro- grès. | | Le fer fera ajufté de façon que vous pourrez cou per avec le rogne-pié le fupertlu de l'ongle ; & vous couperez ce fuperfli , parce que fi vous ne l’enlevicz pas , le pié paroïtroit toüjours évaié. L'étampure fera maigre, parce qu’en rôgnant tout le tour du pié, vous approcheriez plus du vif que f vous ne rogniez point. Enfin ce n’eft que parce que ces fortes de piés por- tent {ur les talons , que je prefcris des éponges plus fortes & qui ne débordent pas extraordinairement s carune férrure trop longue feroit infailliblement ufer cette partie. | Ferrure du pié plat enfuite d'une fourbure, l'ongle s'étendant vers la pince, € La fole laifant apparoître des croiffans. Voyez P1É, FOURBURE. Ouvrez d’abord les talons ; abattez les , s'ils font trop hauts; blanchi fez-les, s'ils font trop bas ; étampez le fer fur les ta- lons, & non en pince ; mettez-y un pinçon aflez large (voyez FER) ; & lorfque.les clous feront bro- chés , rognez l’ongle excédant le fer, & râpez la pince. Abattez les talons, pour parer à l'inconvénient de ces fortes de piés , qu eft-de travailler toüjours {ur les talons , la pince ayant rarement de l’appui; ce qui fait que quand l’animal ne boiteroït pas enfuite des croiflans , 1l boiteroit par le raccourciffement du tendon, vû que le talon étant trop élevé, ce même tendon n’a pas {on extenfon naturelle, &c ce qui peus bouter l’animal. Voyez JAMBE. Etampez le fer fur les talons, & non en pince, parce que cette partie ne fupporteroit pas la brochu- re. D'ailleurs, tout cheval dans lequel on entrevoit des croiflans, eft rarement encloüé fur la premiere, pourvû néanmoins que le fer ne foit pas étampé trop gras. Mettez-y un pinçon affez large pour tenir le fer, parce que fi le pinçon étoit trop petit, il entreroit dans ongle, & le fer fe déplaceroit. Du refte, lori- qu’en râpant la pince vous diminuez la force de l’on- ele en cet endroit, c’eft pour moins contraindre le pié, & pour que les croiïffans ne foient pas fi dou- loureux. A l'écard du pié plat, large & étendu , vous ne couperez la fole que le moins que vous pourrez; vous vous contenterez de la nettoyer fimplemenr, après quoi vous ÿ ajufterez un fer femblable à celui que vous avez employé en ferrant le pié plat, dont j'ai parlé précédemment à ce dernier. Ne coupez la fole que le moins que vous pourrez, & ne faites que la blanchir ; caren retranchant une portion de la partie morte, le fue nourricier trouve- roit moins d’obftacle , & vous y attirériez conféquem- ment plus de nourriture; ce qui ne feroit qu’entre= tenir, & ce qui pourroit même augmenter la difor- mité du pié dont il s’apit. à À Ferrure d’un pié qui aura un ou deux oignons. Voyez SoLë. En parant le pié, laïflez autant d’ongle qu'il fera poffible fur les oignons ; mettez un fer aflez fort & aflez couvert, du côté des oignons mêmes : que l’étampure {oit ordinaire , &c ne differe que par une FER moindre quantité de ce même côté : le tôut pour gé- ner & pour contraindre la partie tuméfiée, & pour ne pas l’offenfer par la brochure ; ce qui réuffit quel- quefois, pouryû que les oignons ne proviennent pas d’une tumeur formée dans les parties molles. Ferture di pié comble. Voyez SOLE. Laïflez, en pa: rant le pié, autant de talon que vous le pourrez, & tachez de confervér à cette partie toute {a force: blanchiffez la fole : ne coupez point avec le boutoir, la pince ni les quartiers ; mais fervez-vous à cet ef- fet du rogne-pié : forgez un fer extrèmement fort, À commencer depuis la voûte jufqu’à la partie interne des deux éponges , le dehors en étant extrèmement mince; qu'il foit très-couvert, fans néanmoins que les éponges puiffent gêner la fourchette : étampez-le affez maigre, & fur-tout en pince : voûtez-le à pro- portion du pié, de maniere qu’il ne porte pas abfo- Jument fur la fole, mais qu'il la contraigne un peu: placez-le en talon le plus qu’il vous fera pofhble, fans qu’il y gatnifle trop, & qu’il s’avance : brochez au furplus affez ayant. Taïllez autant de talon que vous le pourrez, parce que ces piés marquent ofdinairement par cette par- tie. On ne doit que blanchir la fole, parce que dès que toute fa force fera confervée, elle réfiftera da- vantage, non-fenlement à celle de l’impulfon des liqueurs , mais encore à l'imprefion du fer. qui doit la gêner & la contraindre : vous le forgerez très-fort fur la voûte, dès-lors il ne pliera point. Cette pré- caution eft d'autant meilleure , que ces fortes de piés travaillent beaucoup fur cette partie ; & que fi le fer plioit, il les élargiroit, & en emporteroit tout l’on- gle. Il ne fera pas auffi épais en-dehors , parce qu'il {eroit trop pefant. Les étampures feront maigres 8 bien en pince , attendu qu’il faut néceffairement ro- gner pour donner la forme au pié. Vous placerez le ter beaucoup en talon, autrement le pié {eroit trop long : vous brocherez avant, pour que l’ongle, que vous devez d’ailleurs rogner, puifle foûtenir le fer : vous ferrerez plus court que long, dans la crainte que le talon ne s’ufe davantage, & le cheval en mar: chera plus à fon aife : enfin voûrez proportionnément le fer, parce que la fole étant contrainte, elle ceffeta d'avoir une nourriture aufli abondante ; & que celle qui s’ÿ portoit y affluant en moindre quantité, & fe diftribuant fur les autres parties, la difformité fera réparée infenfiblement & avec le tems. Tel ef le jufte milieu que l’on doit prendre. Je ne profcris point entierement la méthode des fers voi tés, pourvü que la contournure ne foit point celle que les Maréchaux leur donnent ordinairement ; con- tournure fi défedtueufe, qu’elle met enfin le cheval hors de fervice : car ces fortes de fers gênant l’onole par leur bord extérieur, renvoyent toute la nourri- ture à la fole, dont le volume augmente fans cefle ; & qui croit & faillit en-dehors de plus en plus, par- ce que d’ailleurs elle n’eft en aucune facon contrainte & reflerrée. Ferrure d'un pié gras ou foible, d'un pié trop long en pince & en talon ; 6 d’un pie trop petit. Patez le pié gras à l'ordinaire ; que le fer que vous y ajufterez n'ait rien de particulier, & qu'lfoit étampé plus mai- ré, dans la crainte de ferrer ou de pénétrer le vifen STE Quant au pié trop long en pince, rognez-le : à l'égard du pié trop long en talon, abattez cette par- tie, & queles fers n'y avancent point trop : pour les piës trop petits, votre fer débordera tout-autour 4 l'effet de faciliter l’extenfion de longle, | Ferrure d’un cheval arqué , brafficourt, droit Jar fes membres, bouté, rampin. Voyez JAMB&. Pour obvier à ces défauts eflentiels, on doit confidérablement abattre les talons ; & outre ce grand retranchement ; vous y ajufterez un fer dont les éponges feront beau- FER 553 Coup plus minces que la pince : étamipéz-le encore plus en cette partie qu’en talon, 8 fertez extrème- ment court, . Par Je fort abattement dés talons » VOUS parere# aù vice principal qui réfulte du défaut d’extenfion, & dé la retraétion même du tendon. Le fer fera beau: COUp moins épais en talon qu’en pince, tohjours dañë la même intention ; & pour ne pas détruire par le fer les effets qui doivent fuivre la parure, vous étam: perez, plus en pince qu’en talon, patce que le taloñ étañt fort abättu , les limes pourtoient intérefler les païties molles ; & vous férrerez extrèmement court ; afin que le talon porte toùjours plus bas. Si l'animal eft bouté , vous lui méttrez enfuite de la mêtne pa ture, un fer de mulet (voyez FERRURE pes Mu LETS), relevant plus où moins en pince pour l’af feoir toûjours davantage fur les talons > Pour con traindre la partie à rentrer fur la ligne qu'elle a quit- tée dans ce cas, & pour remettre le cheval dans {à poftion naturelle. | Il eft cependant impottant d’obferver qu'une éx- tenfion trop fubite des tendons retirés » Cauferoit des douleurs inévitables à l’animal, & Occafñionneroit infailliblement une claudication: auf ne doit-on lafleoir ainfi qu'infenfiblement , par deprés, & en facilitant le jeu de cette partie par des applications d'herbes émollientes, telles que les feuilles de mau- ve, guimauve, & de bouillon-blanc, que l’on fait bouillir jufqu’à ce qu’elles acquierent me confiftance palpeufe. On les place fur la partie poflérieure du canon, depuis le genou jufqu’au boulet : on les Ÿ arrête par le moyen d’une ligature ou d'un bandage (voyez LIGATURE, PANSEMENT,, EXTENSION), & On les humeéte plufeurs fois par Jour avec cé qui refte de la décoétion de ces mêmes Plantes. Ferrure des chevaux qui fe coupent, G qui forsenr, Voyez; FORGER. Nous difons qu'un cheval s’entre taille ou fe coupe, lorfqu’en cheminant il touche fans cefle &c à chaque pas avec le pié qu’il meut , lé bou: let de la jambe qui eft à terre ; de maniere qu’à l’en- droit frappé le poil patoïît totalement enlevé , qu'il réfulte fouvent de ce heurt ou de ce ftotement continuel , une plaie plus ou moins profonde, que l’on apperçoït aifément à la partie latérale interne du boulet , &z d’autres fois derriere le boulet même , lur- tout Jorfque l'animal a été vivement troté fur des cercles ou à la longe. Foyez Trot 6 Loner. Il s’entre-taille plus communément des piés de der. riere que de ceux de devant ; fouvent il ne fe. coupé que d’un pié, quelquefois de deux , d’autres fois en. core de tous les quatre enfemble. Quelle que foit la caufe du défaut dont if ef quef- tion , on peut {e flater de le détruire par la voie de la ferrure , à moins que la foibleffe de l'animal né foit telle, qu'il foit abfolument à réjétter, Ce n’eft pas que je prétende que la férrure donne de la force 4; change la conformation du cheval, s’oppoie à fa laf- fitude , diminue fa parefle, & lui foime habitude de cheminer ; mais elle loblise & le Contfraint à une ftuation &c à une a@ion qui éloignent le poft de fon pié du boulet qui feroit atteint & heurté, Les chevaux peuvent fe couper aux talons ou eñ pince : dans le premier cas, fi après avoir abattu le quartier de dehors jufqu’au vif, & laïflé fubftter le quartier de dedans dans fon entier, vous n'avez pi remplir votre objet , ajuftez un ferà la turque, c’eft- à-dire un fer dont la branche de dedans ait le triple ou le quadruple d’épaifleur de plus que celle de dez hors (voyez FER), & n’étampez point à cette bran- che : alors le quartier de dedans étant beaucoup re- levé , & l'animal repofant beaucoup plus fur celut de dehors, ce qui change la fituation de fa jambe & le port de fon pié, ilnefe coupe plus. J’ai au con traire éprouve plufeurs fois auf > Qu'en mettant là $54 FER branche à laturqne en-dehors, & en fuivant une mé: thode diamérralement oppofée, je parvenois au but auquel il ne m’avoit pas été pofhble d'arriver par le fecours de la premiere. | Dans le fecond cas, c’eft-à-dire dans celui où le cheval fe coupera en pince, que votre fer à la turque ne foit pas d’une égale épaiffeur dans toute l'étendue de la branche de dedans ; qu’il y ait feulement une élevation,, un croïffant, & point de clous à endroit où il fe coupera. Si vous en brochez à côté du croif- fant , rivez-les avec le feu; brûlez l’ongle au-deffous de la fortie des lames , pour y-faire entrer les rivets : & comme le fer à la turque, dans toute l’étendue de la branche de dedans, n’eft point arrêté, mettez-y un pinçon capable de le maintenir en place, Quant au cheval qui forge, ou il forge fur les éponges, ou1l forge fur la voûte. Mettez à celui qui forge fur les éponges, un fer ordinaire dont les éponges ne déborderont point, &c feront comme genetées (voyez FER) : abattez beau- coup les talons des piés de devant; que ceux de der- riere foient très-courts & très-relevés en pince ; que leurs talons foient néanmoins abattus, dans la crainte que le cheval ne devienne rampin: & sil forge à la voüte, ajuftez un fer anglois (voyez; FER) en-devant, dont la voûte fera extrèmement étroite. Ferrure des chevaux qui ont des feymes. Voyez SEY- MES, QUARTIERS. Parez le pié à l’ordinaire; abat- tez les talons, & ajuftez un fer à lunette ou un fer à demi- lunette (voyez FER). Le quartier, à endroit où eft la feyme, ne repofant point fur un corps dur, fera infiniment foulagé , & la feyme pourra fe re- prendre plus aifément. Subftituez enfuite à ce fer à lunette ou à demi-lunette , un fer à pantoufle , à l’ef- fet d'ouvrir les talons qui n’auront pas èté mainte- nus, les éponges des premiers fers ayant été coupées jufqu’à la premiere étampure. Ferrure des chevaux qui ont des foies ou des pies de bœuf. Voyez SO1E, QUARTIER. Mettez un fer or- dinaïre ; mais pour empêcher que la partie affeétée porte & repofe fur le fer, pratiquez un fifflet; en- taillez l’ongle au bas de la pince, au -deflous de la fente & de la divifion ; & que votre fer ait deux pin- çons répondant aux deux côtés du fiflet, afin qu'il {oit plus fürement maintenu. Ferrure des chevaux qui ont des bleymes. Voyez SOLE. Découvrez, en parant, la bleyme autant quil eft poffble ; abattez le talon fain au niveau de l’autre, pour que le pié foit égal ; ferrez à demi-lunette, pour ue la bleyme non contrainte de porter fur un corps so fe guérifle plus aifément, & pour parer à l’en- caftelure : ferrez enfuite à pantoufle. Ferrure des chevaux qui butent. Les termes de burer & de roncher font ceux dont nous nous fervons pour exprimer en général l’aûtion d’un cheval qui fait un faux-pas : il bute, lorfque ce faux-pas eft occafñonné par le heurt de l’un de fes piés contre un corps quel- conque plus ou moins haut, & qu’il auroit franchi, fi le mouvement de fa jambe eût été plus releve : il bronche , lorfque le pié qu'il met à terre eft mal afü- ré & porte à faux. Ces deux vices font eflentiels, fi les faux-pas font fouvent répetés ; car l’animal peut enfin tomber & eftropier le cavalier, qui d’ailleurs doit être dans une appréhenfon continuelle, & fans ceffe occupé du foin de foûtenir fon cheval. Foyez SouTEnIR. Ils proviennent ordinairement d’une foibleffe naturelle ou d’une foiblefle acquife, & quelquefois auf de la froideur de l'allure de certains chevaux , ou de leur parefe. J’ai remarqué que dans des chemins difficiles , l'animal fujet à broncher ou à buter, étoit plus ferme que fur un terrein bon & uni, pourvû que celui qui le monte ne le prefle point & le foûtienne , en lui laiffant néanmoins la liberté de choïfir, pour ain parler, fes pas, Sans doute que l'attention du cheval, dans de paréilies circonftañs ces, eft fixée par la crainte où il eft de buter, de broncher, .& de faire une chûüte. Du refte il eft rare que des chevaux chargés d’épaules, abandonnés fur leur devant , & non aflis, & qui ne font montre d’au- cune liberté & d'aucune fouplefle en maniant leurs: membres, ne butent ou ne bronchent, puifqu'ils ras fent néceffairement toùjours le tapis, L | On conçoit que des jambes fortement ufées, des épaules froides, chevillées, foibles, engourdies & pareffeufes , ne pourront acquérir plus de perfeétion dans leur jeu au moyen de la férrure ; mais on peut du moins par la parure & par Pajufture du fer, don- ner à leurs piés une forme telle, qu’elle diminuera la facilité qu'ils auroient à heurter, & à rencontrer les obftacles qui fe trouvent fur leur pañlage. Pour cet effet, abattez beaucoup le talon ; que le fer garnifle fort en pince, & releve legerement : étampez-y gras, puifque le fer doit garnir ; 8 genetez un peu en ta- lon , parce que n’ayant pas, étant geneté,, le mé- me point d'appui, l’animal fera forcé de porter beaw- coup moins en pince ; & l’extenfion du tendon étant plus grande, le mouvement fera beaucoup plus fa- ciles F Ferrure contre Les clous de rue & contre les chicors, Voyez Sors. Il femble que le plus court moyen de défendre cette partie des accidens dont 1l s’agit, fe- roit d'employer des fers couverts, tels que ceux que l’on met aux piés des mulets; maïs la différence des piés du cheval &c de ceux de ces animaux, ne per- met pas d’en ufer ainfñ. La force des piés de devant du cheval réfide dans la pince ; celle des piés des mu- lets dans les talons: or les fers couverts demandent néceffairement que l’on pratique un.fifflet pour l’é- coulement des eaux qui pénetrent entre l’ongle & le fer; & cette méthode eft abfolument impraticable aux chevaux, par la raifon que le fifflet fait en pince affoibliroit cette partie, qui eft la plus folide : d’ail- leurs le pié du cheval naturellement moins fec & plus humide que celui du mulet, fe corromproit dans les tems froids, & fe deflécheroit danse tems des chaleurs par la privation de l’air. Le parti que quel- ques-uns prennent à cet égard, c’eft-à-dire pour ob- vier aux inconvéniens des clous de rue & des chi- cots, eft de ne jamais parer ni la fole ni la fourchet- te, à moins que la fole ne s’écaille avec le tems; cag alors on en enleve la portion qui fe détache : on pro- cede ainfi, fous le prétexte que la fole par fon épaif- feur fera capable de réfifter à la piquûre des corps qui pourroient pénétrer dans le pié, & en empé- chera l’introduétion. Mais d’une autre part, cette maniere de ferrure peut endommager le pié, 8 y fuf citer d’autres maux plus dangereux quelquefois que ceux dont on veut les préferver. Ferrure des chevaux fujets à fe déferrer.Les chevauxfu- jets à fe déferrer font ceux dont les piésfonttropgras, trop grands ou trop larges; ceux qui forgent & ceux dont les piés font dérobés, c’eft-à dire dont l’ongle eff fi caffant que la lame la plus déliée y fait des breches confidérables près du fer,& laïfle entrevoir des éclats à l’endroit où Les clous font rivés. Les premiers ex1- gent que le maréchal broche le plus haut qu'il eft poffible , l’aflilure étant exaétement droite ; il eft con. féquemment obligé malgré lui de rifquer de ferrer ou d’encloüer. Quant aux feconds, les fers doivent être genetés, & la ferrure ne différera en rien de celle que j'ai prefcrit pour les chevaux qui forgent. À l'égard des derniers, on cherchera à contenir le fer par um pinçon:; on l’étampera, & on le percera fans aucune attention aux regles ordinaires, puifqu'l n’eft plus de prife aux lieux où devroient être broches les clous. «414 Ferrure des mulets. Rarement le pié de ces fortes d'animaux eft-il ençaftelé , vû la force dont fort FER pourvus en eux les talons, On doit en généralén pa- rer l’ongle , de façon qu’on en refferre les talons s'ils ne fe refferrent pas d'eux-mêmes ; mais en les abat- tant, 1l ne faut néanmoins pas lestrop affoiblir, Ajuf- tez-y un fer à la florentiné, c’eft-à-dire un fer dont là branche de dehors foit fort couverte, éelle dé de: dans extrèmement étroite & dégorgée ; que la pince en {6it couverte & longue ; que l’étampure foit près du bord inférieur du fer à [à branche de dehors, & le plus en talon qu'il fera poffible ; & quant à la bran- che de dedans, étampeztrès-maigre, & que les trous foient au nombre de quatre à chaque branche. Dans le cas où l’on feroit contraint d’en préparet pour le pañlage des clous à glace, faites-en un de chaque cô- té de la voûte entre les quatre étampures du dedans & du dehors; que le fer, fi c’eft pour le pié de de- Vant , releve beaucoup en pince, &c qu'il releve moins, fi c’eft pour un pié de derriere ; que les épon: gesen foïent très-minces , que la voûte foittrès-forte dans toût fon contour, que la branche de dedans én égale l’épaiffeur en pince , & que l’excédent du fer en-dehors & en pince en ait très-peu. Du tefte n’ou- bliez pas en parant de pratiquer un filet: coupez donc l’ongle en pince en forme d'arc, pour faciliter le nettoyement du pié & l’écoulement de l'eau qui fert à ce nettoyement. Obfervez encore que le fer à la florentine eft infiniment préférable aux planches que lon ajufte communément. Foyez FER. Je con- viens que le premier n’eft adapté qu'aux bons piés, ë8c que les feconds ne s’employent que pour les piés foibles ; maïs dans tous les cas il vaut mieux ufer de la florentine, Au furplus, lorfque le mulet s’encaftele ou eft encaftelé , on peut donner à ce même fer la figure de la pantoufle, comme on le donne aux plan- ches. Voyez FER. Ferrure des mulets qui pofent le pie a terre à la maniere du cheval. La plüpart des mulets heurtent en pofant le pié a terre, la pince y atteint plûütôt que le talon. 11 en eft néanmoins qui y pofent le pié comme le che- val: ceux-ci demandent des fers à cheval dont l’éz tampure foit tres-graffe en-dehors, c’eft-à-dite pref- que dans Le bord intérieur du fer, & un peu plus mai- gre en-dedans; ce fer aura une égale forte, foit dans a voûte, foit dans fon rebord extérieur, & relevera beaucoup plus en pince que le fer du cheval. Ferrure des muleës dont le talon eft bas. Partez beau- coup en pince, ouvrez & blanchiflez les talons ; met: tez un fer à cheval dont les étampures rogneront au- tour de la voûte, Si l’on étampoit les fers des mulets comme ceux des chevaux, c’eft-à-dire en-delà de la voûte du côté extérieur, ils couvriroient dès-lors tout le pié 8 ne déborderoient point aflez ; &c ils doivent déborder, parce que le mulet a ofdinairement le pié frop petit proportionnément à {oh corps : que ce mê- ‘me fer garmifle en-dehors &c en-arriere du talon, qu'il foit relevé en pince, que les deux branches foient égales, afin que les talons pottent également; & faites, fi vous le voulez, de chaque côté deux pe- tits crampons, ou en oreille de lievre (Voyez FER), ou fuivant la ligne direéte de la branche. Ferrure des mulets dont la fourchette eff graffe & Les talons bas. Parez la fourchette prefque jufqu’au vif, & ferrez - le ainfi que je viens de le prefcrire pour le talon bas ; l’éponge étant plus étroite, ne portera pas fur la fourchette. Ferrure des mulers qui ont des foies. Voyez QuaRr= TIERS, SOIE, SEYME. Les piés de derriere font plus fréquemment atteints de ce mal que ceux de devant, fur-tout s'ils font courts en pince. Faites ufage de l’o- pération indiquée dans ces fortes de cas , mais rela- tivement à la férrure ; pratiquez en pince un fiflet plus grand qu’à l'ordinaire , parce que l’animal por- tant dès-lors fur les quartiers, la foie fe refferrera plus aifément : que ce même fer déborde beaucoup, FER 355$ &t que les talons foient au furplus confidérablement abattus. . Ferruré des niilers qi ont des feyins. Voy. SEYMES, QuarTIERS, Les feymes exigent la même opération que les {oies : pratiquez-là conféquerimentt. Ménage ün filet aû quartier endommagé par la feymé ; abats tei beaucoup de talon, & mettez un fér ordinaire. Férrure des mulets panards & qui fe coupent. Voyef PAnarDs. Abattez les quattiers de dehors autant qu'il eft poffible, afin de faciliter l’appui de la pins ce ; & maintenez le quattiér de dedans en pince plus haut que le talon, pour que ce même talon fe touts né plus aifément en-dehors : que le fer foit couvert én-déhors dépuis le bout de la pince en:dedans jufs qu'au talon, & que la branche de dedans foit À La turque. Voyez FER. Etampez gtas, parce que Le fer doit déborder en-dehors ; qu'il garnifle beäucoupen talon, fans outrepaffer en-arrieré en:dedans, & pou: vant outrepañler én-arrière en-dehors. On ne peut remédier à cette défe&uofté, que pat la parure & par le fer, puifque la petiteffe du pié de l'animal ex: clut totalement l’ufage du rogne-pié, / TABLiER.Oa ne doit pasdu refte oublier Le fifflet ; & quant à l’aju£ ture du fer,il fera toûjours également relevé en pince, Ferrure des mulecs qui fe compenten pince. Pare le pié droit, & à l'ordinaire: qué la branche de déhots du fér foit très:couverte; ne changez tien à celle de de: dans: que la pince fuive la rondeur du pié en-des dans , & la forme de la branche bien conrté en-des hors : laiflez vis-à-vis endroit où vous vous apper- cevez que le mulet fe coupe; une épaiffeur plus où moins confidérable ; qu’il n’y ait point d’étampure à cette épaifleur: percez un ou deux trous fur le ta- lon, étampez en-dehors comme de éofûtume, On doit cépendant avotier, mälgré ces précautions ; qu'un fer à cheval conviendroit beaucoup mieux. Ferrure des mulets qui fe coupent par Joibleffe de reins & enfuite de quelque effort. Les mulets qui ont fait quel- que efort par quelque caufe que ce foit, fe coupent tous du derriere, & d'autant plus aifément, qu'ils font ordinairement ferrés de maniere que la pince eft beaucoup trop longue : faites-la donc plus courte & plus épaifle, & que la branche de dedans foit à la turque ; ou bien faités à l'éponge un bouton à la tur: que, qiu diminue imperceptiblement à {on extrémi: té, Ce bouton eft une forte de crampon, Que cette mème branche foit érampée maigre, pour qu’elle puifle accompagner la rondeur du pié, & que celle de dehors, à laquelle vous laifferez un leger crame pon, foit étampée plus gras. Ferrure des mulets de charretté, Ajuftez aux piés des mulets deftinés à tirer, un fer à cheyal débordant en-dedans, en-dehors, en pince, & relevé à cette dérmere pattie ; qu'il y ait deux crampons à chaque fer: on ne peut s’en difpenfer ; car fans crampon &e avec un fer à la florentine , le mulet ne pourroit ni tirer ni retenir. | Ferrure des mulèts de charreite qui font bourès. Fer réz-les de même quie ces derniers, mais n’ajoûtez point de crampons : eux-ci retiendront de la pinces Quelque long que paroiffe cet article , il ne ren- ferme pas néanmoins tous les as qui peuvent fe prés fenter relativement à la férrure des chevaux, & relas tivement à celle des mulets : mais nous avons afez difcuté les principes, pour! que ces cas ceflent de jetter dans l'embarras ceux auxquels ils peuvent s’ofs fuir ; car lorfqu'ils allieront la théorie & la pratique ; ils furmontéront tous les obftacles, & leurs progrès feront aflürés, Qui n’admirera pas néanmoins après tous les détails dans lefquels jai été contraint d’en- trer , la fécurité des maréchaux qui dans la plûpart de leur communauté, & avant d’admettie un afpi- rant au nombre des maîtres, l’obligent à faire un chef-d'œuvre de ferrure ? La forme de l'épreuve et 5 56 FER finguliere. On choifit un cheval, on le fait pañler trois fois en préfence de l’afpirant, qui eft cenfé en examiner les piés, & en avoir connu toutes les im- perfe&ions & tous les défauts, quoique ces défauts échappent prefque tobjours aux yeux des maïtres même. Si la communaute lui eft favorable, on lui permet feulement de prendre la mefure des pies : après quoi on renvoye l’afpitant forger les fers né- ceffaires. Le jour pris & fixé pour le chef-d'œuvre, l’afpirant pare le pié d’après la routine qu’il s’eft fait en errant de boutiqué en boutique, & 1l attache les fers forgés tels qu'ils font; car il eft expreflément défendu de les porter de nouveau à la forge, il doit ferrer à froid : 1l eft donc obligé de fe conduire en cette occafion, comme la plus grande partie de ceux qui compofent la communauté fe conduifent en opé- rant, c’eftà-dire qu'il prépare & qu’il accommode à leut imitation le pié au fer, plûtôt qu'il n’ajuite le fer pour le pié. Je laïfle aux lecteurs le foin de juger des fuites d’une opération ainf pratiquée : mais j'ai de Ja peine à croire qu'ils puiffent concilier d’une part : les plaintes qu’excite l'ignorance de ces fortes d’ou- vriers, & dont retentiflent unanimement toutes les villes du royaume, & de l’autre le peu d'attention que l’on a d’yremédier en leur fourniffantles moyens de s’inftruire. Voyez MARÉCHAL, Voyez au furplus FER, FERRER, TABLIER, FORGER. (e) FERSE de roile , (Marine. ) On appelle fer/e, un lé de toile; & dans ce fens on dit qu'uxe voile a tant de ferfes ; pour défigner fa hauteur & fa largeur. C’eft la même chofe que celle, Voyez CUEILLE. (Z) FERTÉ-ALAIS, (LA) Géog. petite ville de l’île de France dans Le Gatinois, fur le ruiffeau de Juine, à 7 lieues S.de Paris. Long. 20, 2”, lat, 484, 267, Le nom de Ferré, commun à plufieurs places de France, fignifie un Zeu fort bâti fur quelque roche ferme. En effet on voit dans Phuftoire de notre nation, que les François avotent des places fortes, plütôt deftinées à fe mettre à couvert de l’incurfion des en- nemis, qu'à loger des habitans. L'auteur des anna- les de Mets les appelle Æirmirates. Nous lifons dans l’hiftoire eccléfiaftique d'Orderic. Vital. page 738. Tales tantique hofles ad pontem ferreum caffra meta füunt , € firmitatem illam confeflim expugnaverunt, Brompton, hiftorien anglois, s’eft fervi deceterme, que Somner explique ainfi dans fon gloffarre : « Un » lieu, dit-1l, fortifié, un donjon, une efpece de ci- # tadelle » ; & il le dérive du faxon. Nos anciens poëtes ont dit férmere dans le fens de firmitas, Li ont tolu par la guerre Et fès cafliaux , 6 Jes cités, Et fes bourgs, G Jes fermeres. dit Philippe Mouskes. Et dans la vie de Bertrand du Guefclin, pag. 18. « Et n’y avoit audit chaftel guere » de gens qui puflent garder la férmeré ». De fermeté on a fait ferté, pour fignifier re forterefle , une place de guerre, Dans Le roman de Garin, Le fiëge a mis environ la Ferté, Ce terme fubfifte encore: car il y a plufeurs villes & châteaux que lon appelle La Férié , en y ajoûtant un furnom pour les diftinguer ; comme la Ferré. Alais qui a donné lieuà laremarque qu’on vient de tranf- crire, la Ferté-Bernard, la Ferté-Milon, & tant d’au- tres qu'ontrouvera dans les diétionnaires géographi- ques, ainfi que dans Trévoux. — Dans le cartulaire de Philippe-Augufte, fo1. 23, on joint le nom de celui qui a fait bâtir la forterefle; comme dans la Ferré-Milon, la Ferté-Baudouin. La Ferré- Alais, en latin Firmitas Adelaïdis , tire {on nom, fuivant Adrien de Valois , de la comteffe Adelaide femme de Gui le Rouge, ou de la reine Adelaide époufe:de Louis VIT. & mere de Philippe- FER" Augufte. Voyez {ur tout ce détail ce favant écrivain ; Noir, Gall, pag. 194. Pafquier, recherch, Liv. VIIT, chap. xxxviy. &c, (D. I.) | FERTÉ-BERNARD, (Géog.) petite ville de France dans le Maine fur l’'Hune,, à fix lieues du Mans: Elle eft la patrie de Robert Garnier poëte françois, né en 1534, mort vers l’an 1595 , & dont les tragédies ont été admirées avant Le regne du bon goût. Lonp, fuivant Caffini, 184, 10!. 5", laris, 484, 11!, ro, (D, J.) : FERTÉ-MILON, (la) Géog. petite ville de l’île de France fur lOurque, uniquement remarquable par la naiflance du célebre Racine, qui après avoir partagé le fceptre dramatique avec Corneille, eft mort à Pa- ris le 22 Avril 1699, âgé de 60 ans, & combié de gloire dans la carriere qu'il a courue. Heureux sl eût êté auffi philofophe que grand poëte ! Loz. 204, 407. lat, 491, 8, (D,1.) FERTEL ox SCHREVE, f. m. (Comm.) mefure d'Allemagne pour les liquides. Le /erce/ eft de qua- tre mafles, & il faut vingt fercels pour une ame. Le fertel {e nomme vercel à Heidelberg. Voyez lesarricles FÉODER, Masse, Gc, Dit, de Comm, de Trév, & de Chambers. (G) ” FERTEL o4 FERTELLE, ( Commerce. ) mefure des grains qui contient le quart d’un boifleau. Elle n’eft guere en ufage que dans le pays de Brabant. On fe fert aufi du Pvrel au Fort-Louis du Rhin, pour me- furer les orains. Quelques-uns l’appellent fac. Le fer- tel ou fac de froment de cette ville, pefe 161 livres poids de marc, le méteil 156, & le feigle 150. Foy. Mesure, Murp, Dit, de Comm. de Trévoux, & de Chambers. (G) FERTILE, FERTILITÉ, (Jard,) fe dit d’une terre qui répondant aux foins du jardimer, du vigneron, du laboureur, rapporte abondamment. (K) FERULE,, ferula, {. f. (Hiff, nat. bor.) senre de plante à fleurs en rofe , difpofées en ombelle & coms pofées de plufieurs pétales, rangées en rond & foû- tenues par un calice, qui devient dans la fuite un fruit, dans lequel 1l y a deux femences fort grandes de forme ovoide, applaties 8 minces, qui quittent fouvent leur enveloppe. Ajoûtez aux caraéteres de ce genre, que les feuilles de la férzle font à-peu-près femblables à celles du fenouil & du perfil. Tourne fort, {nf?, rei herb, Voyez PLANTE. (7) _FÉRULE, (Jard.) La férule vient dans les pays chauds, en Languedoc , en Provence, en Italie, en Sicile, en Efpagne, en Grece, en Afrique, à Tan- ger, &c. On la cultive dans les jardins de quelques curieux. On en compte quatorze à quinze efpeces, parmi lefquelles il faut diftinguer les fé-x/es de Fran- ce ou d'Italie, de celles de la Grece; & la férule de Grece, de celle d'Afrique. La férule ordinaire {e nomme férula ; offic. ferula major , feu femina Plini, Boerh. a. 64. C. B. P. 148. Tourn. /nff, 321. Ses racines font longues, un peu branchues, vivaces; elle pouffe des tiges moel- leufes, legeres, hautes de fept à huit piés, garnies de leur bas de feuilles fort grandes, branchues, dé- coupées en une infinité de lamieres. Ses feuilles em= braflent la tige par leur queue, qui eft creufée en. forme de gouttiere : elles font d’un verd foncé &c plombé. L'extrémité de la tige eft garnie de bran- ches, qui font foûtenues par de petites feuilles cou pées en oe lanieres. Ses branches portent des ombelles de fleurs, compofées chacune de cinq pe- tits pétales jaunâtres , foûtenus par un fruit quicon- tient deux femences applaties, longues d’un demi- pouce fur quatre lignes de largeur. C’eft des tiges de cette efpece de férule qui vient en Italie, en France, en Fipagne, fur les côtes de la Méditerranée, dont Martial parloit quand il a dit qu'elle étoit Le fceptre des pédagogues, à caufe qu. ils ils s’en fervorent à châtier les écoliers, feruleque ri. fées Jceptra pædagogorum celfent, lib. X. epigram. & c’eft de-là que le mot de férue eft demeuré à l’inftru- ment, foit de bois, foit de cuir, dont on ufe encore aujourd’hui dans les colléges. C’eft encore de-là, fuivant les apparences , que férule , en termes de Li- turgie, fignihoit dans l’églife orientale un lieu fépa- ré de l’éshfe,, dans lequel s’affembloient les pénitens du fecond ordre, & où ils fe tenoient en pénitence : TB: flabant Jub ferula ecclefie. Comme le bois de la férule eft très-leser, & néan- moins aflez ferme, les auteurs racontent que les vieillards s’en fervoient ordinairement en guife de canne. On lattribuoit à Pluton, apparemment , dit Triftan (comment. lift. tom. I, pp. 46 € 47. où l'on trouvera plufieurs remarques fur la féru/e, en partie bonnes, en partie mauvaifes), pour conduire les morts ; ou parce que Pluton étoit repréfenté fous la figure d’un vieillard; ou plütôt, felon mon idée, parce qu'il étoit le roi des enfers, car la férule étoit, comme nous le dirons tout - à -l’heure , la marque du commandement. Pline (Zv. 157 chap. xij.) rapporte que les ânes mangent cette plante avec beaucoup d’avidité & fans aucun accident , quoïqu’elle foit un poiton aux autres bêtes de fomme, La vérité de cette obfervation n’eft pas juftifiée par l'expérience, du moins en ltahie, &c ne le feroit pas vraiflemblable- ment davantage en Grece. On cultive cette efpece de férule aflez communé- ment dans les jardins ; elle y vient fort bien : plantée dans un bon terroir, elle s’éleve à plus de douze piés de haut, &t 1e partage en plufieurs branches qui s’é- tendent beaucoup ; de forte que fi on la met trop près d’autres plantes , elle les fuffoque & les détruit. Elle meurt l'automne dans le bas, & poufle cependant au printems furvant. Elle fleurit en Juin, & fes graines {ont mûres en Septembre. La férule de Grece nommée par Tournefort , fe- rula glauco folio , caule craffiffimo , ad fndlilos 20405 ramofo 6 ombellifero. Coroll. In/ff. rei herb, xxij. mé- rite 1c1 fa place. Elle croît en abondance dans l’ifle de Skinofa, où elle y a même confervé fon ancien nom parmi les Grecs d'aujourd'hui , qui Pappellent Zartheca , du grec littéral zarthex , dit Tournefort. Voyez Hifi. du Levant, tome I. Elle porte une tige de cinq piés de haut, de lé- païfleur d'environ trois pouces , noïeufe ordinaire- ment de dix pouces en dix pouces, branchue à cha- que nœud , couverte d’une écorce aflez dure de deux lignes d’épaifleur. Le creux de cette tige eft rempli d’une moëlle blanche, qui étant bien feche , prend feu tout comme la meche: ce feu sy con- ferve parfaitement bien, & ne confume que peu-à- peu la moëlle, fans endommager l’écorce ; ce qui fait qu'on fe ferr de cette plante pour porter du feu d’un lieu à un autre. Cet ufage eit de la premie- re antiquité , & nous explique le paflage de Mar- tial, où 1l fait dire aux férwles , Epis, Lib, XIF. « Nous éclairons par les bienfaits de Prométhée », Clara, Promether munere, Ligna fumus. Cet ufage peut aufli fervir par la même raifon à expliquer l'endroit où Héfiode parlant du feu que Prométhée vola dans le ciel, dit qu'il l’emporta dans une férule, y none Napdxs. Le fondement de cette fable vient fans doute de ce que Prométhée , felon Diodore de Sicile, Bibl. Hiff. Lib, V. fut l’inventeur du fufl d'acier, ro #upélo , avec lequel on tire , comme l’on dit, du feu des cailloux : Prométhée fe fervit vraifflembla- blement de moëlle de férule au lieu de meche, & ap- prit aux hommes à conferver le feu dans les tiges de cette plante. Ces tiges font affez fortes pour fervir d’appui, & Tome FI, il FER 557 trop legeres pour bleffer ceux que l’on frappe : c’eft pourquoi Bacchus , l’un des grands légiflateurs de l'antiquité , ordonna fagement aux hommes qui boiroient du vin, de porter des cannes de férules ; crc y ap d'h Napdropopor, Plato in Phœd, parce que fou- vent , dans la fureur du vin, ils fe cafloient la tête avec des bâtons ordinaires. Les prêtres du mê- mé dieu s’appuyoient fur des tiges de férule : elle étoit auf le fceptre des Empereurs dans le bas em pire; car on ne peut guere douter que la tige, dont le haut eft plat & quarré, & qui eft empreinte fur | les médailles de ce tems-là, ne défigne la férule, L’u- fage en étoit fort commun parmi les Grecs, qui appelloient leurs princes Nopdixc@opor , c’eft-à-dire pôrte-ferules. La férule des Grecs, qui étoit autrefois la marque de l’autorité des rois, & qu’on employoit alors ayec art en particulier, pour faire les ouvrages d’ébéni(- tes Les plus précieux , fe brûle à - préfent dans la Pouille ‘en guife d'autre bois , & ne fert plus en Grece qu'à faire des tabourets. On applique alter- nativéement en long & en large les tiges feches de cette plante, pour en former des cubes arrêtés aux quatre Coins avec des chevilles: ces cubes font les placets des dames d’Amorgos. Quelle différence, dit M. de Tournefort , deices placets aux ouvrages auxquels les anciens employoient la férule ! Plutarque & Strabon remarquent qu’Alexandre tenoit Les œuvres d'Homere dans une caflette de £- rule : on en formoit le corps de la caflette ; que l’on couvroït de quelque riche étoffe | ou de quelque peau relevée de plaques d’or, de perles , & de pier- reries: celle d'Alexandre étoit d’un prix ineftima- ble ; il la trouva parmi les bijoux de Darius qui tomberent entre fes mains. Ce prince, après l’avoir examinée , la deftina, felon Pline, à renfermer les poëmes d'Homere , afin que l'ouvrage le plus par- fait de lefprit humain fût enfermé dans la plus précieufe caflette. Dans la fuite, on appella zarrhex toute boîte dans laquelle on gardoit des onguens de prix. Enfin les anciens médecins donnerent ce titre aux livres impottans qu’ils compoferent fur leur art: je pourrois prouver tout cela par beau- coup de traits d’érudition, fi c’en étoit ici le lieu ; mais je renvoye le leéteur à Saumaife, & je pañe à la férule d'Arménie. La férule d'Arménie, ferula orientalis , cachryos fo= lio & facte. Coroll. Zaf£. rei herb. xxiy. eft décrite par M. de Tournefort dans fon voyage du Levant, ler. jx. t, TI. où il en donne la figure. Sa racine eff groffe comme le bras , longue de deux piés & demi, branchue, peu chevelue, blanche, couverte d’une écorce jaunâtre , & qui rend du lait de la même couleur. La tige s’éleve jufqu’à trois piés, eft épait- fe de demi-pouce , life , ferme, rougeâtre, pleine de moëlle blanche, garnie de feuilles femblables à cel- les du fenouil, longues d’un pié & demi ou deux, dont la côte fe divife & fubdivife en brins auffi me- nus que ceux des feuilles de la cachrys ferule folio , Jerine fungofo, lævi, de Morifon, à laquelle cette plante reflemble fi fort, qu’on fe tromperoit fi on ne voyoit pas les graines. Les feuilles qui accompagnent les tiges font beaucoup plus courtes & plus éloi- gnées les unes des autres : elles commencent par une étamine longue de trois pouces , large de deux, li fe , rouflâtre , terminée par une feuille d'environ: deux pouces de long, découpée aufli menu que les ‘autres. | - Au-delà de la moitié de la tige, naïflent plu- _ fieurs branches des aiffelles des feuilles ; ces bran- ches n’ont guere plus d’un empan de long , & foû- tiennent des ombelles chargées de fleurs jaunes - compofées depuis cingjuiqu'à fept ou huit pétales longs de demi-ligne, Les graines font tout-à-fait fem- BBbb 558 FES blables à celles de la férule ordinaire. longues! d’en- viron demi-pouce, fur deux lignes & demu de large , minces vers le bord, rouffâtres, leserement raÿées fur le dos , ameres , & huileufes, th: | Diofcoride & Pline ont attribué à la férwle de Gre- ce & d'Italie de grandes vertus. Ils ont dit, entrau: tres chofes,que la moëlle decette plante étoit benne pour guérir le crachement de fang &c la pañlon ce- liaque ; que fa graine foulageoit la colique venteu- fe, & excitoit la fueur; que fa racine féchée déter- geoit les ulceres, provoquoit l’urine & les regles. Nos médecins font détrompés de toutes ces fadai- {es, &c vraiflemblablement pour toùjours. L’efpece de férule à laquelle la Medecine s’inté- refle uniquement aujourd’hui, eft celle d'Afrique, de Syrie, de Perfe, des grandes Indes, non pas par rapport aux propriétés de fa moëlle, de fa racine, de fes feuilles, ou de fes graines, mais parce que c’eft d’elle que découle le galbanum, ou dont il fe tire : on en donnera la defcription 44 mot GALBA: NUM. En vain l’on incife les diverfes tiges des au- tres efpeces de férules, le lait qui en fort, de mê- me que les grumeaux qui fe forment naturellement fut d’autres tiges, ne reflemblent point à cette {ub- ftance grafle , duétile , & d’une odeur forte , qui par- ticipe. de la gomme & de la réfine , 87 que nous nommons galbanum, Voyez GALBANUM. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FÉRULE, (Hifi. anc. 6 mod.) petite palette de bois affez épaïfle , fceptre de pédant , dont il fe fert pour frapper dans la main des écoliers qui ont man- qué à leur devoir. Ce mot eft latin, & l’on s’en eft fervi pour fignifier la croffe & le bâton des prélats: il vient, à ce qu’on prétend, de ferire, frapper; car anciennement on châtioit les enfans avec les tiges de ces fortes de plantes ; & c’eft delà que le mot de féruleeft demeuré à l’inftrument dont on fe fert pour châtier les enfans. Voyez l’article précédent. En termes de Lithurgie, férule-fignifie dans lé- glife d'Orient, un lieu féparé de l’églife, où les péni- tens ou cathécumenes du fecond ordre appellés auf cultantes, fe tenoient, & n’avoient pas permiflion d'entrer dans l’églife. Le nom de férwle fut donné à ce lieu, parce que ceux qui s’y tenoient étoient en pénitence par ordre de léglife , Jub ferulé erant eecle- fiæ. Voyez PÉNITENCE, CATHÉCUMENE, &c, Di, de Trévoux &t Chambers. (G) FéruLe , (Hiff. eccléf.) bâton paftoral que les La- fins appelloient pedum 8 caniboce , marque de digni- té que portoient non-feulement les évêques &z les abbés, mais même quelquefois Les papes. Luitprand, kif. Liv. VI. chap. xj.raconte que le pape Benoît ayant été dégradé, fe jetta aux piés du pape Léon & de l’empereur, & que rendant au premier la férule ou bâton pañtoral , celui-ci le rompit & le montra au peuple. Voyez CROSSE. (G) FESCAMP , (Géog.) Fifcamnum , petite ville de France en Normandie au pays de Caux, aflez com- merçante, avec un port défendu par une tour, & une ancienne abbaye royale de Bénédiétins. Foy. fur cette abbaye dom Dupleflis, defcr. géog. & hiff. de La haute Normandie. Fefcamp eft proche la mer, entre le Havre de Grace &c Dieppe, fur une petite rivie- re à’ huit lieues du Havre de Grace, 12 fud-oùeft de Dieppe, 45 nord-eft de Paris. Long. 18, 1. 45, lar, 49.46. 0.(D.J. "d | FESCENNIN (vers) adj. m. (Lirtérar.) en latin fefcennini verfus , vers libres & groflers qu’on chan- toit à Rome dans les fêtes, dans les divertiflemens ordinaires , & principalement dans les nôces. Les vers féfcennins où faturnins (car on leur a donné cette feconde épithete }, étoient rudes, fans aucune mefure jufte , 8&c ten@ient plus de la profe ca- dencée que des vers, comme étant nés {ur le champ & faits pour un peuple encore fauvage, quine con noïfloit d’autres maitres que la joie.& les vapeurs duivin, Ces vers étoient fouvent remplis de ralle- ties aroflieres , & accompagnées de poftures libres & de danfes deshonnêtes. On n’a qu’à fe repréfen- ter des. payfans qui danfent lourdement, qui fe rail- lent par des impromptus ruftiques ; 8 dans ces mo- mens, .ou avec une malignité naturelle à l’homme, & de plus aiguifée parle vin, on les voit fe reprocher tour-à-tour tout ce qu'ils favent les uns des autres : c'eft.ce qu'Horace nous apprend dans une épitre qu'il adrefle à Auoufte: Féfcennina per hunc inventa licentia morerz Verfibus alternis, opprobria ruflica fudis. à Epiit. 1, Lib. II, v. 148. Les vers libres & obfcenes prirent le nom de f£/£ cennins , parce qu'ils furent inventés par les habi- tans de Fefcennie, ville de Tofcane, dont les ruines fe voyent encore à un bon quart de lieue de Ga- lèfe. | Les peuples de Fefcenmie accompagnoient leurs fêtes & leurs réjouiffances publiques, de repréfen- tations champêtres , où des baladins déclamoient des efpeces de vers fort groffiers, & faifoient mille bouffonneries dans le même goût. Ils gardoient en- core moins de mefure dans la célébration des nô- ces, où 1ls ne rougifloient point de falir leurs poé- fies par la licence des expreffons : c’eft de-là que les Latins ont dit , féfcerzrana licentia, &t fefcennina locutio, pour marquer principalement les vers fales & deshonnèêtes que l’on:chantoit aux nôces. Ces fortes de vers parurent fur le théatre, & tin- rent lieu aux Romains de drame régulier pendant pres de fix vinpts ans. La fatyre mordante à laquel- le on les employa , les décrédita encore plus que leur groffiereté primitive ; & pour lors ils devin- rent vraiment redoutables. On rapporte qu'Ausuite, pendantd® Triumvirat, fit des vers fe/cennins con- tre Pollion, mais que celui-ci, avec tout l’efprit propre pour y bien répondre , eut la prudence de nen tien faire ; « parce que, ditoit -1l, il y avoit # trop à rifquer d'écrire contre un homme qui # pouvoit profcrire ». Enfin Catulle voyant que les vers fe/cennins em- ployés pour la fatyre étoient profenits par lautori- té publique , & que leur grofñerete dans les épitha- lames n’étoit plus du goût de fon fiecle , il les per- fettionna & les châtia en apparence du côté de l’ex- preffion : mais s’il les rendit plus chaftes par le flyle, en profcrivant les termes grofñers, ils ne furent pas moins obfcenes pour le fens , & bien plus dan gereux pour les mœurs. Les termes libres d’un fol- dat gâtent moins le cœur, que les difcouts fins , in-. génieux, & délicatement tournés d’un homme qui fait métier de la galanterie. Pétrone eft moins à craindre dans fes ordures groflieres que ne le font des expreffons voilées femblables à celles dont le comte de Bufly Rabutin a revêtu fes Amours des Gaules, Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FESOLI ox FIESOLI, (H/f, ecle[.) congrégation de religieux, qu'on nomme aufl les freres mendians de faint Jérôme. Elle a eu pour fondateur le B. Char- les, fils du comte de Montgranello, qui s'étant retiré dans une folitude au milieu des montagnes voifines de Fiéfole , ville épifcopale de Tofcane, fut fuivi de quelques autres perfonnes pieufes , & donna ain naiflance à cette congrégation. Le pape Innocent VII. l'approuva , e’eft pourquoi Onuphre en met la fondation {ous fon pontficat ; mais elle avoit com- mencé du tems du fchifmed’Avignon, vers l’an 1386. Les papes Grégoire XII. êc Eugene IV, la confirme- rent auf fous la regle de S. Augufin. (G) FESSEN ou FISEN , (Gcos.) contrée de Numidie FES qui confine avec les deferts de la Libye, & dans la- quelle font les ruines d'Eléocat , à 6o journées du Caire. Cette contrée comprend plufeurs villages & villes, dont la capitale eft à 44d de long. & à 26 de datir, Voyez Marmol, & de la Croix fur L'Afrique. (2. J.) FESSER , v. a@. er terme d’'Epinglier: c’eft lation le battre un paguet ou botte de fil de laiton à force de bras fur un billot, en le tenant d’un côté, & le tournant de l’autre à mefure qu’on le feffe. Par-là la rouille en tombe, & il devient d’un jaune plus ou moins vif, felon qu'il a été /efé plus ou moins long- tems, & par de meilleurs bras. Voyez les Planches de l'Epinglier. FESSES , f. f. pl. (Arzar.) font deux parties char- nues , inférieures & poftérieures du tronc, fur lef- quelles l'homme s’afhed. Trois mufcles compofent principalement les feffes, favoir le grand , le moyen, & le petit feffier. 7 oyez-en Les art, au mot FESSIER, Le grand feffier cache, outre le petit feffier, une portion .du moyen, & s'étend jufqu’au tiers fupé- rieur de l’os de la cuifle. On apperçoit , après les avoir détachés, d’autres mufcles difpofés en maniere de rayons, & qui viennent {e terminer aux environs du grand trochanter. Ces mufcles font le pyaeRes! . qui fort du baflin par l’échancrure ifchiaftique ; en- fuite le cannelé , qui eft creufé pour donner paflage aux tendons de lobturateut interne ; enfin le quarré, qui eft au niveau de la tubérofité de l’os ifchium. Quoique tous ces mufcles ayent un ufage relatif à la cuifle, ils paroïffent par leur fituation ne lui point appartenir. Aucun des animaux quadrupedes n’a de feffes, à proprement parler ; ce que l’on prend pour cette par- tie, appartient proprement à leurs cuifles. L'homme eft le feul qui fe foûtienne dans une poñtion droite & perpendiculaire, C’eft en conféquence de cette poltion des parties inférieures du corps humain, qu'eft relatif ce renflement au haut des cuifles qui forme les feffes, & d'où dépend l'équilibre. En effet, comme la mafle du ventre s’étend en - devant d’un vôté à l’autre dans l’efpece humaine, cette mafle fe trouve balancée en-arriere par une autre mañle, qui font les feffes ; fans quoi le corps pencheroit trop en-avant: aufli les femmes ont natureilement les fees plos groffes que les hommes, parce qu’elles ont le ventre plus gros. Les perfonnes qui, fans avoir de groffes foffes, ont un gros ventre, fe penchent en-arriere ; celles au contraire quu ont les féffes trop groffes , fans avoir le ventre gros, fe penchenten-devant. Les femmesen- ceintes fe penchent toutes en-arriere, ce qui fait le contre-poids de leur gros ventre: par la même rai- fon, les femmes qui ont la gorge sroffe & avancée, . fe tiennent ; chofes épales, plus droites que celles qui l'ont maigre & plate. En un mot le corps ne man- que Jamais, fans même que nous y penfons, de fe potter de la maniere la plus convenable pour fe foù- tenir en équilibre ; & il n’eft perfonne qui ne prenne cet équilibre, comme s’il en favoit parfaitement les regles. + 1 S1 cependant un enfant contraétoit l’habitude d’a- vancer trop le derriere , on demande quel eft le moyen de corriger cet enfant : je réponds que ce fe- toit, au cas qu'il n’eût point les jambes trop foibles, de lui mettre un plomb fur le ventre ; ce poids obli- geroit bientôt cette partie à revenir en-devant, & le derriere à s’applatir. Un fecond moyen feroit de -donnéer à l'enfant un corps piqué qui repoufle les feffes : par la raifon contraire , le moyen de l’empé- cher d'avancer le ventre, eft de lui donner un corps dont la pointe de devant foit affez longue pour re- pouffer le ventre, Arricle de M, le Chevalier DE JAUy- €OURT. | Tome PL, hé FES 559 FESSES D'UN VAissEAU, ( Marine.) Ce mot, qui n'eft guere en ufage, fe dit particulierement de la rondeur ou des façons qui font à l'arriere d’une flûte {ous les trepots. (Z' ; FESSES, (Manége.) Nous appellons de ce nom dans le cheval, la partie de l’arniere-main qui com mence direétement à la queue , & qui dans les extrés mités poftérieures defcend & fe termine au pli que l’on apperçoit à l’oppoñite du graffet, FESSES LAVÉES, voye FEU, marque de, (e) FESSIER , £. m. (4zatom.) nom de trois mufeles confidérables , extenfeurs de la cuifle, & qui ont en« core d’autres ufages. Le grand feffer S’attache au coccyx, aux apophy- fes épineufes de l’os facrum , à la face externe de l'os des 1les. Il adhere très-fortement à la gaîne tendia neufe, qui le recouvre extérieurement, & à deux lgamens , qui partant de l'os facrum , {e rendent , lun à la crête des iles, & l’autre à l’ifchium. Le ten- don de ce mufcle fe fléchit vers le dos du grand tro- chanter, fur lequel eft fixé en partie au-deffous dé l'extrémité du moyen feféer, un bourrelet délié qui facilite le jeu de ce tendon fur le grand trochanter. On obferve de femblables bourrelets dans les infer- tions du moyen & du petit feffer. Le tendon du grand feffrer fe termine dans une ou deux foffes inéoales qu'on voit à la partie fupérieure de la ligne âpte. Ce mufcle éleve le fémur poftérieurement vers lé pine du dos, & tourne en même tems un peu en-ar2 riere fa partie extérieure. Lorfqu’un fémur eftfléchi en-avant, 1l l’écarte aufli de l’autre. Le moyen feffier vient de toute la larseur de la face externe de l’os des iles, & d’une aponévrofe dont il eft extérieurement enveloppé : il fe retrécit enfuite, jufqu'à ce qu’il n’ait plus qu'une largeur égale À la hauteur du grand trochanter, auquel 1l s’attache obli- quement depuis fa racine jufqu'à fon extrémité la plus élevée. Ce mufcle éloigne un fémur de l’autre : le fémur étant porté en-haut & en-avant , 1 le tourne de maniere qu'il dirige un peu véts le fémur la par- tie qui ef alors fupérieure. : Le petit feffrer occupe la face éxterne de l'os des iles : d'abord affez délié, il eft groffi enfuite par des fibres qui viennent de l'os ; il commence à devenir tendineux vers le milieu de fa partie extérieure. Ce mufcle finit vets la partie antérieure du grand tro chanter, qui s'étend le long de fon côté externe, depuis fa racine jufqu’au haut ; il s'attache, avant que de finir, à la capfule de l’articulation de la cuit le ; 1l meut la cuifle , de même que le moyen feffer. On appelle auf arteres &c veines feffieres, les bran- ches des hypogaftriques qui fe diftribuent dans les: fefes. ( a) * FESTAGE , {. m. (Jurifp.) dans quelques anciens titres, eft dit pour droër de feffin ou féte que certains chapitres ou bénéficiers doivent à leur fupérieur ec- cléfaftique, ou au feigneur à fon avenement. Voyez le gloffaire de Lauriere, au mot FESTIN. (A) FESTAGE fe trouve auff écrit dans quelques an= ciens titres , au lieu de faiffage, droit feigneurial dû pour le faite de chaque maïfon; mais on doit dire & écrire faiflage. Voyez ci-devant FAISTAGE. (4) FESTIN , (Lisrér.) voyez REPAS. FESTINS ROYAUX. On n’a point dans cet article le vafte deffein de traiter des fé/lins royaux que l’hif- toire ancienne nous a décrits, encore moins de ceux de tant de princes d'Europe qui, pendant les fiecles obfcurs qui ont fuivi la chûte de l’Empire, ne fe font montrés magnifiques dans les occafions éclatantes, que parune profufon déplacée, une pompe oivan- tefque, une morgue infultante. Ces aflemblées tu multueufes, prefque toùjours la fource des vaines difputes fur le rang, ne finifloient guere que par la grofliereté des injures , & par l’effufion du fang des b ï 560 FES convives. Ÿ., kiff. de France de Daniel, € Mezeray, &:c. Les feffins, dégoûtans pour les fiecles où la poli- tefle &c le goût nous ont enfin liés par Les mœurs ai- imables d’une fociété douce, n’offrent rien qui mé- rite qu'on les rappelle au fouvenir des hommes ; il fufit de leur faire appercevoir en pañlant que, c'eft le charme &c le progrès des arts qui {eul en a fuccef- fivement délivré l'humanité Par le titre de cet article nous défignons ces ban- quets extraordinaires que nos Rois daignent quelque- fois accepter dans le fein de leur capitale ou en d’au- tres lieux, à la fuite des grandes cérémonies, telle que fut celle du facre à Reims en 1722, le mariage deS. M. en 1725, &c. C’eft un doux fpettacle pour un peuple auffi ten- drement attaché à fon Roi, de le voir au milieu de fes magiftrats s’entretenir avec bonté dans Le fein de la capitale, avec les perfonnages établis pour repré- fenter le monarque & pour gouverner les fujets. Ces occafons font toûüjours l’objet d’une réjoiif- fance générale, & l’hôtel-de-ville de Paris y déploye, pour fignaler fon zele, fa joie & fa reconnoïflance, le goût le plus exquis, les foins les plus élégans, les dépenfes les mieux ordonnées. Tels furent les arrangemens magnifiques quife dé- ployerent le 15 Novembre 1744, jour folennel où le Roi, à fon retour de Metz, vint joiür des tranf- ports d’amour & de joie d’un peuple qui venoit de trembler pour fes jours. - Nous donnons le détail de ces féffins, 1°. parce qu'ils ont été occafonnés par les évenemensles plus intéreffans ; 2°, parce que les décorations qui les ont accompagnés appartiennent à l’hiftoire des Arts; 3°, enfin parce qu’il eft bon de conferver le cérémonial obfervé dans ces fortes d’occafons, Décoration générale pour le feflin royal du 15 Novembre 1744. La décoration de la place devant l’hôtel-de-ville, étoit | Un arc de triomphe placé entre la maïfon appellée le coin du roi, & la maïfon qui fait encoignure fur la place du côté du quai. Cet arc de triomphe avoit 70 piés de face fur 87 piés d’élevation, & d’un ordre d’architeture régu- Her, repréfentant un grand portique. Il étoit orné de quatre colonnes grouppées, d'ordre ionique , fur la principale face : & de quatre colonnes ifolées fur les deux retours, un grand attique au-deflus de l’en- tablement, fur lequel étoit un grouppe de relief de 48 piés de face fur 28 piés de haut, repréfentoit le Roi couronné de laurier par une renommée placée debout dans un char tiré par quatre chevaux , dont le Roi tenoit les rênes d’une main , & un bâton de commandant de l’autre. Plufieurs trophées de guerre & de viétoire ornoient la face & le retour de cet at- tique. Fi Quatre figures allégoriques étoient placées furles pié-d’eftaux , entre les colonnes. Les deux fur la face principale, repréfentoient la paix &c la viétoire ayant ces mots écrits au-deffous , aut hæc, aut illa, Le grand édifice étoit conftruit en relief, &e peint de différens marbres. Au - devant de l’attique & au-deffous du Roi ; étoient écrits en lettres d’or fur un fond de marbre, en deux lignes , Ludovico redivivo, Ludovico trium- Phatort. ( Le pourtour de la place de l’hôtel-de-ville étoit dé- coté par une colonnade divifée en quinze grouppes d'ordre ionique & de relief, montés fur des focles & pié-d’eftaux , 8 couronnés de leur entablement : au- deflus de ces grouppes étoient dreflés des trophées dorés, repréfentant différens.attributs de guerre & de viétoire, FES Cette colonnade étoit peinte de différens marbres, dont les bafes & chapiteaux étoient dorés. Les fûts des colonnes étoient ornés de guirlandes de lauriers. D'un grouppe à l’autre de cette colonnade partoient des guirlandes pareilles, qui formoient un entable- ment à l’autre. Les fonds des pié-d’eftanx étoient ornés de tro- phées peints en bronze doré, & repréfentoient dife férens attributs de viétoire. * La face extérieure de l’hôtel-de-ville avoitété net- toyée & reblanchie en toute fa hauteur, y compris les pavillons & les cheminées ; le cadran peint à neuf & redoré , ainfi que lesinfcriptions ; la flatue équef- tre d'Henri IV. rebronzée , & la porte principale peinte & redorée. Au-deflus & au-dehors de Ia croïfée du milieu ; étoit placée une grande couronne royale en verre tranfparent & de couleur, ornée de pentes de gaze d'or & de taffetas cramoifi, qui defcendoient jufque fur l’appui de cette croifée. : Au milieu de la place ordinaire aux canons, au bas du quai Pelletier, étoit repréfenté par des déco- rations un corps de fontaine dont l’archite@ure étoit traitée en pierre, & d’une conftruétion ruftique. La calote & le deffus de l’entablement étoient or- nés de trophées & attributs convenables à la fontaine & à l’objet de la fête. Dans l’intérieur de cette fontaine étoit placée une grande cuve qui avoit été remplie de douze muids de vin, qui fut diftribué au peuple par trois faces de cette fontaine : elle commença à couler au moment de l’arrivée du Roi à l’hôtel-de-ville, & ne cefla qu’a- près fon départ. À côté de cette fontaine, & adoflé au mur du quai, étoit dreflé un amphithéatre par gradins, orné de décorations , fur lequel étoient placés des muf- ciens qui joïerent de toutes efpeces d’inftrumens tou- te la journée & bien avant dans la nuit. | Aux deux côtés de cet amphithéatre étoient dif pofés deux efpeces de balcons ornés de décorations 3 & c’étoit par-là que fe faifoit la diftribution au peu- ple, du pain &c des viandes. ù La place au centre de laquelle étoit cette fontaine, étoit entourée de plufeurs poteaux qui formoient un parc de toute l'étendue de la place, fur lefquels étoient des girandoles dorées, garnies de forts lam= pions. Ces poteaux étoient ornés & entourésde laurier, dont l'effet formoit un coup-d’œil agréable, pour re- préfenter des arbres lumineux. D'une tête de poteau àune autre étoientfufpendus _en feftons à double rang, une quantité confidérable de lampes de Surene *, qui fe continuoient au pour- tour de la place. Le pourtour de la barriere de lhôtel-de-ville étoit | fermé de cloïfons de planches peintes en pierres, pour empêcher le peuple d'entrer dans l’intérieur du per- ron. Les murs de face de la cour, les infcriptions & ar moiries ont été blanchis , 'ainfi que le pourtour du périftile, les murs, voûtes, efcaliers, corridors & pañlages de dégagement. Sur le pallier du milieu du grand efcalier étoient deux luftres de eryftal, & plufieurs girandoles en cire le Tong des murs des deux rampes. La grande falle n’avoit point de piece qui la pré: cédat : on conftruifit une antichambre ou falle des gardes , de plain-pié à la grande falle ; on la prit fur la cour, &c le deffous forma par cet ordre un périfti- le au rez de chauffée de la cour. Cette falle des gardes étoit conftruite d’une {olide * Ce nom leur a été donné du lieu où elles furent inven- tées pendant le cours des fêres que l'électeur de Bayiere dot na à Surene. Voyez LAMPES & SURENE, . , ét = charpente & maçonnerie, elle procuroit une entrée à la grande falle par fon milieu; & loin de gâter la fymmétrie & l'ordonnance de la cour, elle la rendoit plus réguliere. Les fept fenêtres de la grande falle furent garnies de prandes croifées neuves à grands carreaux & à . deux battans, avec des efpagnolettes bronzées. Le pourtour de la falle étoit décoré d’un lambris d'appui : les cadres & les panneaux en étoient dorés, Les murs, trumeaux, embrafemens & plafonds des croïfées de cette falle, amnf que le pourtour des tableaux , étoient recouverts de damas cramoifi en toute la hauteur, bordé d’un double galon d’or. Le deflus de la nouvelle porte d'entrée étoit orné d’un grand panneau d’éroffe cramoifi , enrichi d’un grand cartouche qui renfermoit le chiffre du Roi. Toutes les croifées étoient garnies de rideaux de taffetas cramoïfi, bordé d’un galon d’or, avec frange au pourtour. Les portieres ouvertes & feintes étoient de damas cramoïf, & garnies d’un double galon d’or. La peinture & dorure de ces portes avoient été renouvellées , & toutes les ferrures des portes &c des croifées étoient bronzées. La falle étoit garnie de banquettes cramoïf : fur la cheminée, du côté de la chambre qui étoit defti- née au Roi, étoit placé un riche dais, fur la queue duquel étoit le portrait de S. M. Ce dais étoit de damas cramoif, chargé de galons d'or, & des aigrettes de plumes blanches au-deflus. Le bufte du Roi, en marbre blanc, étoit placé au- deflous de ce tableau, fur une confole dorée. Les trumeaux des fenêtres étoient garnis chacun de trois girandoles de cryftal , polées fur des confo- les richement fculptées & dorées. Le mur oppofé aux trumeaux étoit pareillement garni de girandoles difpofées avec fymmétrie. Dans la longueur de la grande falle pendoiïent quatorze beaux luftres de forts cryftaux difpofés en rangs en des difpofitions variées, mais relatives en- tr'eux , & d’une fymmétrie fort élégante. © Dans cette grande falle étoit dreflé, dans l'angle à côté de la cheminée , un amphithéatre en gradins, fur lequel étoient placés foixante muficiens qui de- voient exécuter des morceaux de mufique pendant le fefir du Roi. Cet amphithéatre étoit couvert tout-autour de da- mas cramoifi galonné d’or. . Le grand buffet de vermeil de la ville étoit dreffé dans l’angle de l’autre cheminée, vis-à-vis de l’am- phithéatre où étoit la fymphonie. Les deux cheminées étoient garnies de grandes grilles neuves, ornées de belles & grandes figures de bronze doré. Le plancher de la falle étoit couvert de tapis de Turquie, & d’un double tapis de Perfe à l'endroit où le Roi devoit fe mettre à table. La table pour le fe/fz du Roi, que S. M. avoit permis que l’on drefsât avant fon arrivée , étoit pla- cée dans cette grande falle, Elle avoit trente piés de longueur fur huit piés de large; elle étoitcompofée de neuf parties , fur quatre piés brifés en forme de piés de biche : elle avoit été faite pour trente-deux cou- verts. Les appartemens deftinés pour le Roi , pour la Reine, pour monfeigneur le Dauphin, pour Mefda- mes, étoient décorés avec la plus grande magnif- cence ; mais la Reine & Mefdames ne vinrent point à l’hôtel-de-ville. Décoration de la cour de l’Hôtel-de-Ville, Aux deux côtés de la ftatue de Louis XIV. étoient deux grands lis de fer-blanc , sarnis d’un grand nom- bre de forts lampions, | 2 0% FES 561 . Au- devant de chaque colonne.du premier ordre étorent des torches dorées, portant chacune des pi. randoles dorées à nenf branches, garnies de bou- gies. Le furplus de ces colonnes, jufqu’à leurs chapi. teaux , toit garni de deux panneaux de lampions,, dont le fupérieur formoit un cœur. | Au centre de chaque arcade étoit fufpendu un luftre de cryftal, au-deffus duquel étoit une agrafte dorée , d’où fortoient des feftons & chûtes de fleurs d'Italie, | Les embrafemens de chaque arcade étoient garnis de girandoles dorées à cinq branches. L’atchiretute de ce premier ordre étoit garnie d’un fil de lampions au pourtour. Le deflus de l’entablement étoit garni de falots. Les colonnes du fecond ordre étoient décorées & garmies chacune d’un génie de ronde boffe d’or, por- tant d'une main une girandole dorée à fept branches, & de l’autre main tenant unebtranche de laurier qui montoit en tournant autour du füt de la colonne jufqu'’au chapiteau : cette branche de laurier étoit dorée. Dans la frife de lentablement, au-deffus des co- lonnes, étoient des médaillons d’or à fond d'azur, avec fleurs-de-lis & chiffres alternativement rehauf. {és d’or. | Au centre de chacune des croifées ceintrées étoit placé un luftre de cryftal, fufpendu par un nœud doré. Au-deflus de chaque luftre étoitune grande agraffe dorée, d’où fortoient des feftons auñi dorés, Au-deflus de lentablement du fecond ordre étoient placées des lanternes de verre, formant pavillons au- deffus des colonnes, & feftons au - deflus des croifées ceintrées. Au-devant de la lucarne , au-deflus de la ftatue du roi, étoit un tableau tranfparent , avec une infcrip- tion portant ces mots : Recepro Caœfare félix. Le nouveau périftle étoit orné de luftres de cryftal , & de girandoles dorées fur les colonnes & les em- brafemens des arcades. L'ancien périfhle étoit orné de cinq luftres de cryftal, dont celui du milieu en face du premier ef- calier ,.étoit à vingt-quatre branches, avec feftons &t chûtes de fleurs d'Italie qui formoient un pavil. lon. Sur le pallier du milieu du grand efcalier étoit un luftre, auf bien que dans le veftibule & dans tous les corridors. Marche du Roï. Sur les deux heures le Roi partit du château des Tuileries, ayant devant & derriere fes carroffes les gendarmes, chevaux-legers, les deux compagnies des moufquetaires, & fes gardes-du-corps. Comme la route de fa Majefté étoit par la rue S. Honoré, celle du Roule, & celle de la Monnoie, la ville avoit fait élever pour fon paflage une fon- taine de vin à la croix du Trahoiïr, & on y diftri- buoit au peuple du vin & de la viande. Sa Majefté étant au commencement du quaide Gefvres, les boi- tes &c les canons de la ville firent une décharge, & le conduifirent à ce bruit jufque dans l’hôtel-de-ville. . Sa Majefté étant arrivée dans la place, y trouva les gardes françoifes &c fuifles ; les gendarmes &+ les chevaux-legers filerent du côté de la rue du Mou- ton , & les moufquetaires allerent par-deffus le port pour fe pofter à la place aux Veaux. Lorfque le Roi fut arrivé près la barriere de l'hô- tel-de-ville avec fes gardes-du-corps , il fut reçu à la defcente'de fon carrofle par le prevôt des mar- chands & les échevins, quimirent un genou à terre : ils furent préfentés par M. le duc de Gefvres comme $62 FES gouverneur, & conduit par M. Defgranges maitre des cérémonies, … M. le prevôt des marchands complimenta fa Ma- jefté , laquelle répondit avec fa bonté naturelle ; & fa Majefté s'étant mife en marche pour monter l’ef- calier ; les prevôt des marchands & échevins paf- ferent avant fa Majefté , laquelle trouva fur le haut de l’efcalier les gardes-du-corps en haie & fous les armes. Elle fut conduite dans la grande falle en pañlant par la falle des gardes, & de-là dans fon apparte- ment, dont la porte étoit gardée par les huifliers de la chambre , & qui avoient fous leurs ordres des gar- çons, que la ville avoit fait habiller de drap bleu ga- lonné en argent, pour fervir de garçons de la cham- bre, tant chez le Roi que dans l'appartement de mon- feigneur le Dauphin. Monfeigneur le Dauphin qui étoit arrivé avec le Roi, de même que les princes &c autres feigneurs, le fuivirent dans fon appartement. Les prevôt des marchands & échevins s’étoient tenus dans la grande falle ; le Roi ordonna de les faire entrer, & M. le gouverneur les préfenta à fa Majefté tous enfemble , & chacun en particulier. Quelque tems après M. le prevôt des marchands eut l’honneur de préfenter un livre relié en maro- quin bleu fur vélin & en lettres d’or, à fa Majefté, à monfeigneur le Dauphin, & aux princes. Il conte- noit une ode faite pour la circonftance, & qui fut exécutée en mufque pendant le f/7 de fa Majefté. Sur lés trois heures M. le prevôt des marchands, qui étoit {orti un inftant de l’appartement du Roi, entra, & eut l’honneur de dire à fa Majefté qu’elle étoit fervie. Le Roï fortit de fon appartement, pafla dans la grande falle, & fe mit à table. Pendant le feffin , l’ode qui avoit été préfentée au Roi fut exécutée; & il y eut d’autres morceaux de mufique exécutés par la fymphonie. Pendant le fe/- tin, M. le prevôt des marchands eut l’honneur de fervir le Roi. Outre la table de fa Majefté, il y avoit plufieurs tables pour les feigneurs & les perfonnes de confidé- sation, quin’avoient pas été nommées pour la table du Roi. Il y avoit aufh des tables pour les perfonnes de la fuite du Roi, pour les gardes-du-corps, les pa- ges, &ci VU © re Après Le feffin , le Roï & monfeigneur le Dauphin pañlerent dans leur appartement. Le Roi regarda par fes croifées l’illumination de la place. Toutes les parties principales de Parchiteéture de l’arc de triomphe étoient deffinées &c repréfentées en sllumination êc en relief, fuivant leurs faillies & con- tours; ce qui compofoit environ quatorze mille lu- mueres , tant en falots qu’en lampes à plaque. Les entablemens de la colonade autour de la pla- ce, étoient garnis de falots; les füts des colonnes étoient couverts de tringles, portant un grand nom- bre de lampes à plaque; les couronnemens des pié- d’eftaux étoient pareillement garnis de falots. Le corps de la fontaine qui étoit dans Le milieu de la place ordinaire des canons,étoit décoré d’un grand nombre de lumieres en falots ou lampes à plaque, qui traçoient la principale partie de la décoration & {es faillies. Tout le pourtour de cette fontaine qui formoit une falle de lumieres, & les poteaux, étoient illu- minés par des luftres de fil-de-fer , avec lampes de Surene ; & les doubles guirlandes de lampes qui joi- gnoient chaque poteau ou pié d'arbre, faifoient un effet admirable. Au-dehors & fur les retours de la barriere de l’hô- tel-de-ville, étoient quatre grands 1fs de fer en con- foles bronfées, portant chacun cent cnquante for- ges lampes, — FES La face extérieure de l’hôtel-de-ville étoit ilumis née de cette maniere. 2\ Les deux lanternes du clocher étoient garnies de lampes à plaque, qui figuroient les ceintres des ar- cades , avec feftons de lumieres au -devant des ap- puis. | Le pourtour du pié-d’eftal & du grand focle étoit orné de forts luftres de fil-de-fer , garnis de lampes de Surene , & leurs corniches avec des falots. Le grand comble du milieu étoit orné à fes extré- mités, de deux grandes pyramides circulaires, gar- nies de lampes de Surene. Le faite & les arêtiers étoient bordés de falots, La face principale de ce comble & celle des deux pavil- lons , étoit garnie en plein de lampes à plaque. Les entablemens de deux pavillons, Pacrotaire du milieu, & le grand entablement , étoient bordés de falots. L’illumination de la cour étoit telle qu’elle eft dé< crite ci-devant. Après avoir confidéré quelque tems l’illumination de la place, le Roi fortit de fon appartement avec monfeigneur le Dauphin, defcendit dans la cour; 1l regarda quelque tems l’illumination , & monta dans fon carroffe. On croit devoir ajoûter à ces premiers détails, la defcription du fouper du Roï à lhôtel-de-ville , Le & Septembre 1745, après les mémorables viétoires de la France. Le cérémonial de tous ces féfins eft toûjours le même; mais les préparatifs changent, & forment des tableaux nouveaux qui peuvent ranimer lin- duftrie des Arts : les articles de cegenre ne peuvent donc être faits dans l'Encyclopédie avec trop de zele & de foin. Puiffent-ils y devenir des archives durables de la magnificence & du goût d’une ville illuftre, dont le bon ordre & l’opulence attirent dans fon fein tous Les Arts, & qui par le concoursimmenfe des plus excellens artiftes de l’Europe, eft unanime# ment regardée comme l’école de l'Univers! Souper du Roi en banquet royal dans lhôtel-de-ville j le & Septembre 1745. Sur les fept heures du foir, leurs Majeflés, avec toute la famille royale, entrerent dans la place de Phôtel-de-ville , précédées des détachemens des deux compagnies des moufquetaires, des chevaux- legers , des gardes-du-corps, & des gendarmes. Les gardes françoifes & fuifles bordoient la place des deux côtés. Le carroffle de fa Majefté étant devant la barriere de l’hôtel-de-ville, MM. de la ville s’avancerent de dix pas au-dehors de la barriere de Phôtel-de-ville. M. le duc de Gefvres les ayant préfentés aufli-tôt. que fa Majefté fut defcendue de carrofe, ils mirent un genou à terre, & M. le prevôt des marchands fit un difcours au Roi. . Ces mefeurs qui étoient vêtus de leurs robes de velours, prirent auffi-tôt le devant, & conduifirent le Roi, la Reine ymonfeigneur le Dauphin, madame la Dauphine, & Mefdames, dans la grande falle, & de-là à Pappartementdu Roi, oùils eurent l'honneur d’être encore préfentés au Roi par M. le duc de Gef- MECS So Sur les huit heures & demie du foir, M. le prevôt des marchands demanda l’ordre du Roï pour faire tirer le feu d'artifice, On commença par faire une décharge des boîtes & des canons; enfuite on tira les fufées volantes, & différentes pieces d’artificequi parurent d’une forme très-nouvelle. Le feu d’abord forma une brillante illumunation, & au haut de l’ar- tifice étoit un 7ive Ze Roï, dont le brillant & la nou- . veauté frappa d’admiration tous les fpeétateurs. L’ar tiiçe étoit difpoié de façon qu'il s’embrafa tout-às FES coup}, 8 que les defleins ne perdiréntrien à fa rapi- dité. Le Roi qui parut fort fatisfair, vit tirer ce fen à la croïfée du milieu de la grande falle ; les deux croilées à côté étoient diftinguées & renfermées: dans une eftrade de la hauteur d’une marche, entou- rée d’une baluftrade dorée : elle étoit couverte, aïnfi que toute l'étendue de la falle, d’un tapis. Il y avoit un dais au - deflus de ladite croïfée du milieu, fans queue ni aigrette; & au-dehors de cette croifée fur la place , étoit un autre dais très-riche avec aigrette ët queue. 7 La Reine y étoit auf. Il y avoit deux fauteuils pour leurs Majeftés ; & la famille royale &c toute la cour, étoient {ur cette eftrade fur des banquettes, Après le feu , leurs Majeftés pafferent dans la falle des gouverneurs, qui avoit été décorée en falle de concert. On y exécuta une ode fur le rerour de fa Majefté. Les vers étoient de M. Roy; MM. Rebel & Frascœur en avoient fait la mufique. Pendant le concert, on avoit Ôté l’eftrade de la grande falle & les tapis, pour dreffer la table. Le Roi, après le concert, rentra dans fon apparte- ment ; la Reine & la famille royale l’y fuivirent , & M. le prevôt des marchands eut l'honneur de dire au Roi que fa Majefté étoit fervie : alors le Roï,, la Reine & toute la famille royale , allerent fe mettre à table. La table contenoit quarante-deux couverts. Le Roi & la Reine fe mirent à table au bout du côté de l'appartement du Roi, dans deux fauteuils ; & fur le retour à droite, étoit fur un plant monfeigneur le Dauphin ; à gauche fur le retour, madame la Dau- phine ; à droite, après monfeigneur le Dauphin, étoit madame premiere ; à gauche , après madame la Dauphine , étoit madame feconde ; à droite, après madame premiere, étoit madame la ducheffe de Mo- dene, & tout de fuite après elle étoit mademoïifelle de la Roche-fur- Von; & de l’autre côté, après ma- dame feconde, étoit madame la princefle de Conti, “êc enfuite toutes les dames de la cour. Le Roi &c la Reine &r la famille royale furent fer- vis en vaïflelle d’or, & les princeffes en vaiffelle de vermeil. M. le prevôt des marchands eut l’honneur de fervir le Roi. La falle étoit remplie de perfonnes de la premiere confidération qui étoient entrées par des billets, des officiers des gardes -du- corps, du premier gentil- homme de la chambre de M. le duc de Gefvres. La décoration de la grand falle étoit telle, Etant d’ufage d’appuyer les planchers lorfque le Roi honore de fa préfence l’hôtei-de-ville, il avoit été mis quatorze forts poteaux fous la portée des poutres, au-devant des trumeaux des croifées fur la place, & à l’oppofé, & deux autres près des an- gles. Ces feize poteaux étoient recouverts & ornés de thermes ou cariathides, fur des piés-d’eftaux ; 1ls repréfentoient les dieux & déefles de la Viétoire, avec leurs attributs. Le corps des figures étoit.en blanc, pour imiter le marbre, &iles gaines étoient en marbre de couleur reéhauflé d’or, ainfi que les piés-d’eftaux. Le plafond étoit tendu d’une toile blan- che au-deflous des poutres, encadrée d’une bordure dorée , faifant reflaut au-defls des cariathides, Les embrafemens des croifées fur la place étoient ornés de chambranles dorés , & les traverfes ceintrées em- bellies de guirlandes fur les montans & au-deffous des traverfes. La face oppofée aux croifées étoit répétée de fym- métrie, & figuroit des croïfées feintes. Les portes ouvrantes & feintes étoient pareïillement ornées de chambranles. Les fonds & les embrafemens étoient garnis de taffetas cramoifi, enrichi de galons d’or, &t 1ls formoient des panneaux & des compartimens deflinés avec goût. Les deux cheminées avoient été repeintes, les otnemens redorés, ainf que les dra- peries des figures. FIÈTS 563 Cette falle , à laquelle la décoration donnoit la forme d’une galerie , étoit ornée &c éclairée par quatorze beaux luftres qui pendoient du plafond, difpofés à quatre rangs , d'une pofition variée, pour l'alignement & la hauteur. Les retours de chacua des feize pié-d’eftaux étoient ornés de deux giran- doles à cinq branches , formant des bouquets de liss Au - devant de chacune des gaînes des cariathides étoit une guirlande à fept branches, compofée de branches de fleurs. Au-devant de la cheminée, du côté de la chambre du Roi, étoit dreflé un riche dais avec une queue, fur laquelle étoit le portrait du Roi. Le bufte de marbre du Roi étoit au - def: {ous , fur une confole dorée, pofée fur le chame branle de la cheminée. La cheminée oppofée du côté de la chambre de la Reine, avoit été de même répeinte & redorée ; & pour l'éclairer, il avoit été fait deux confoles dorées, qui paroïfloient être te- nues par les deux figures couchées fur le chambranle pour porter deux girandoles de cryftal. L’orcheftre où s’exécutoit le concert pendant le fouper, étoit à un des côtés de cette cheminée ; il étoit compofé de cinquante inftrumens, & recou- vert de taffetas cramoifñ galonné d’or. Le buffet de la ville étoit dreflé dès le matin dans la partie de cette falle, auprès-de la cheminée du côté de la chambre du Roi. Au bas, pour le fouper, il ÿ avoit un petit buffet particulier pour le Roi &c la Reine, & la famille royale. Après le fouper, qui dura deux heures , le Roi pañla avec la Reine & la famille royale dans fon ap- partement, Îls virent par les fenêtres l’illumination de la place. Tlluminarion de la Place. Le poürtour de la place étoit décoré par quinze pié-d’eftaux quarrés, qui portoient des drapeaux en- trelacés de lauriers,8 entouroient le pié d’un group- pe de lumieres ; treize autres piés triangulaires por- toient des pyramides ou ifs de lunieres , & chacune de ces vingt-huit pieces portoit quatre-vingt & cent grofles bougies, ce qui faifoit environ trois mille lu- mieres. Le contour du feu d'artifice étoit illuminé, enforte que cela faifoit tableau pour les quatre faces. Après avoir examiné l’illumination de la place, leurs Majeftés & la famille royale quitterent les ap- partemens , & defcendirent dans la cour. L’enceinte de la cour étoit ornée d’une chaîne de guirlandes de fleurs, qui formoient des feftons d’u- ne colonne à l’autre, avec de belles chûtes au-de- vant des colonnes, &r fur les luftres des croifées du fecond ordre. Au -deffus de ces luftres étoient des couronnes de feuilles de laurier, Au-devant du bas de chaque colonne du fecond ordre, étoit une giran. dole formant des branches de rofeau. Au-devant des piés-droits des croifées ceintréés , étoient d’autres oirandoles qui figuroient des bouquets de rofes. Au rei-de-chauffée les arcades étoient ornées de luftres courônnées d’un trefle de fleurs, avec des cordons foie &c or, chüûtes ; d’où les luftres pendoient. Au- devant du bas de chaque colonne étoitune girandole dorée à fleurs-de-lis. Les embrafemens étoient gar- us de filets de terrines. Aux côtés de la ftatue de Louis XIV. étoient deux grands lis de fer-blanc, garnis de forts lampions. La grande couronne royale tranfparente étoit placée fur lentablement fupérieur, au-deflus de la croifée du milieu de la nouvelle falle des gardes : au-deffous de cette couronne étoient des pentes de rideaux de taffetas bleu, avec galons & franges d’or, retrouflés en forme de pavillon , fous lequel étoit Le chiffre du Roï en fleurs : au-deflous & fur l’entablement du premier ordre, étoient les ar- mes de France & de Navarre, foûtennes par des gé. = $64 FES nies aux deux côtés de la couronne. Sur l’entable- ment étoient pofés des grouppes d’enfans , badinant avec des guirlandes qui fe joignoient à la couronne êc aux'guirlandes du pourtour de la cour. Le grand efcalier, le veftibule du premier & du rez-de-chauflée étoient ornés de luftres & de giran- doles de fer-blanc: le tout garni de groffes bougies. Le clocher de lhôtel-de-ville étoit entierement illuminé, ainfi que le comble de la grande falle. Leurs Majeftés regarderent quelque tems cette illumination, & enfuite defcendirent le grand efca- lier pour monter dans leurs carrofles, avec monfei- gneurle Dauphin, madame la Dauphine, & Mef- dames. MM. de la ville les avoient reconduits juf- qu’à leurs carrofles, | Il a êté donné par la ville de Paris plufieurs autres feflins au Roi, à la Reïne, à la famille royale. Jamais monarque n’a gouverné fes peuples avec autant de douceur ; jamais peuples auffi n’ont été fi tendrement attachés à leur roi, (B) FESTON, £. m.(Architeëlure.) Les feflons font des cordons ou faifceaux de fleurs, de fruits, & de feuilles, liés enfemble plus gros par le milieu, & fufpendus par les extrémités d’où 1lsretombent. Les anciens mettoient autrefois ces ornemens aux portes des temples ou des:lieux où l’on célebroit quelque fête : on les employe aujourd’hui dans les frifes le long des bordures & autres lieux vuides que l’on veut orner. On appelle feffons pofhiches ceux qui font compo- fés de feuilles, de fleurs, 8 de fruuts fabriqués de carton, clinquant, & papier de couleur , qui fer- went à la décoration momentanée des arcs de triom- phe, &c. & quelquefois dans les églifes à des fêtes particulieres, ainfñ que les feftaroles ou les décora- teurs le pratiquent en Italie. (P) * FÉTATION oz FŒTATION, f. f. (Œcon. anim.) c’eft l’aûte par lequel eft formé le fœtus dans le corps de l’animal femelle, c’eft-à-dire par lequel 1l eft don- né un principe de vie aux rudimens de lanimal con- tenus dans l'œuf, un principe de mouvement qui leur eft propre : au lieu qu'auparavant ils ne faifoient que participer à celui de l'animal dans le corps duquel fe trouve renfermé l’œuf qui les contient. | Il n’y a d'autre différence entre la fération & la fécondation, f. ce n’eft que le premier terme regar- ‘de l'embryon qui eft vivifié, &r le fecond n’a rap- port qu'à l'animal femelle dans lequel fe fait ce changement, qui eftla conception. Voyez F&@TUS, EMBRYON, GÉNÉRATION, GROSSESSE , IMPRÉ- GNATION, ŒUF. (4) FÊTES pes HÉBREUX. On ne fait s’il y avoit des jours de féres marqués &c reglés avant la loi de Moy- de : cependant l'opinion la plus commune eft que le jour du fabbat a été de tout tems un jour de fére. C’eft la raifon pour laquelle Moyfe en ordonna la fanification , non comme une inftution nouvelle, mais comme la confirmation d’un ancien ufage, Sou- venez-vous, dit-il, de fanchifier le jour du fabbat, Aïnf depuis la loi donnée , outre le facrifice qu’on faifoit tous les jours parmi les Juifs, aux dépens du pu- blic, on en faifoit encore une toutes les femaines le jour du fabbat qui étoit leur fére ordinaire, en mé- moire de ce que le Seigneur fe repofa au feptieme jour après avoir créé le monde, Le premier jour de chacun de leurs mois, qui étoient lunaires, étoit auffi parmi eux une fé qu'on appelloit zéoménie. Voyez NÉOMÉNIE. ., d Leurs autres féses principales étoient celles de Ia Pâque, de la Pentecôte , des trompettes, de l’expia- tion, des tabernacles, de la dédicace du temple, de fa purification par Judas Macchabée nommée exce- nies, celle qu'ils appelloient puriz. Voyez PAQUES , .PENTECÔTE, TROMPETTES, EXPIATION , ENCE- NIES, PURIN, Ge. … Les Juifs modernes font encore quelques autres fétes marquées dans leur calendrier, mais dont la plü- part font d’une inftitution récente, & étoient in- connues aux anciens. Il faut ajoûter deux obferva- tions générales fur toutes les féres des Juifs: la pre- miere , qu'elles commençoient toutes le foir, & f- nifloient le lendemain au foir ; la feconde , qu'ils s’abftenoient en ces jours-là de toute œuvre fervile, & qu'ils poufloient même quelquefois cette abfti- nence, à l'égard du fabbat, jufqu’à la fuperftition , en demeurant dans le repos & l’inaétion pour les chofes néceffaires à la vie, & même pour leur défen- « , lorfqu’ils étoient attaqués par leurs ennemis. G FÊTES DES PAYENS , (Æiff. anc.) Numa partagea les jours de l’année en fe/# , profefti ; & intercifi : les premiers étoient confacrés aux dieux , les feconds étoient accordés aux hommes, pour vacquer à leurs propres affaires , & les derniers étoient partagés en- tre les dieux &c les hommes. Les jours de fête, dies fefli, étoient encore divi- {és , fuivant Macrobe , faturn. c. xvj. en facrifices , épulæ ou banquets , /udi ou jeux, &c feriæ, féries. Voyez FÉRIES , &c. Dies profeffi étoient partagés en fafli, cormitiales , comperendint , flati, & praliarss. Voyez FASTES, Ge. ï Les jours de féres on ne rendoit point la juitice, c’eft-à-dire que les tribunaux étoient fermés ; le né- goce &c le travail des mains cefloit , & le peuple les pañloit en réjouiffances. On offroit des facrifices; on faifoit des feftins ; on célebroit des jeux : il y en avoit de fixes appellées annales ou flativi, & de mo- biles. Les premieres féres chez les Grecs étoient ces aflemblées folennelles de toute la nation où l’on cé- lebroit des jeux , comme les olympiques, les py- thiens , les ifthmiens , & les néméens. À limitation des Grecs, les Romains donnoient les jours de fées des jeux ou dans le cirque , /udi circenfes | ou des fpeétacles fur le théatre , /4di fcenici; c’étoit aux dé- pens de l’état pour l’ordinaire, & le foin en rouloit fur les principaux magiftrats, qui , dans certaines occafñons , en fafoient eux-mêmes les frais, Parmi les fêtes, 1l y en avoit de fixées qui revenoient tous les mois, les néoménies chez les Grecs, c’eft-à-dire les jours de la nouvelle lune, les calendes, ou le premier jour du mois chez les Latins , les nones qui fe célebroient le 3 ou le 7 du mois, & les idesle 13 ou le 15. Ces fêtes étoient confacrées à Jupiter & à Junon. Sans entrer ici dans un détail d'autant plus inuti- le du nom & des cérémonies propres à chacune de ces fêtes chez les anciens , qu’on les trouvera dans -ce Didionnaire chacune à leur article, qu’il nous fuf- fife de remarquer que quoique ces fétes paroïffent occuper la plus confidérable partie de l’année, ilne faut cependant pas s’imaginer que tous les jours fuf- fent employés en folennités qui empêchaffent Parti- fan de travailler , ni perfonne de vacquer à fes affai- res ; car de ces fées un très-petit nombre obligeoit généralement tout le monde ; la plüpart des autres n'étoient, s’il eft permis de s'exprimer ainfi, que des dévotions particulieres affeétées à certaines commu- nautés ou fociétés, tantôt aux prêtres de Jupiter, tantôt à ceux de Mars, un jour aux facrificateurs de Minerve, un autre aux Veftales: ainf le public ny étoit pas régulierement obligé ; dans la piüpart, on ne s’abftenoit ni de travailler ni de rendre la juftice dans les tribunaux; & Jules Capitolin remarque que l’empereur Antonin regla qu'il y auroit trois cents trente jours dans l’année où l’on pourroit vacquer librement à {es affaires : en forte qu’il n’en reftoit plus que trente-cinq qui fnflent univerfellement fé- tés. Il y ayoit outre cela des fées qui ne revenoient qu'après qu'après un certain nombre d'années févoliies , comme les jeux capitolins qui ne fe célebfoient que: tous les cinq ans, lés jeux féculairés qu'on ne re- nouvelloit qu’au bout de cent ans, & d’autres.fétes qui recommençoient tous les dix, vingt, ou trente ans, &C qui étorent géncralement obfervées: (G) FÊTES DESMAHOMÉTANS. La fére des: Maho- métans par chaque femaine eft le vendredi: ce jour eft pour eux ce qu'eft pour nous le dimanche , & ce qu'étot pour les Juifs Le fabbat, c’eft-à-dire le jour de la prière publique. Ils ont outre cela deux féres folennelles : la premiere appellée la fére.des viéirres, qui fe fait le dixieme jour du dernier mois de leur an- née ; la feconde eft celle du Pairam ; qui termine le ramadhanoucarème. Foy, BAIRAM & RAMADHAN. Fêtes pes CHinois. Ces peuples, célebrent deux féres folennelles dans l’année, en mémoire de, Confucius, & d’autres moins folennelles en, d’au- tres jours de l’année. Ils offrent auffi deux fois l’an des facrifices folennels aux efprits de leurs ancè- tres défunts , & d’autres moins folennels chaque mois dans la nouvelle & dans la pleine lune , le premier jour de l'an, & dans les folftices.. Le quin- zieme jour de la premiere lune de leur année, ils a lument, en figne de fée, un grand nombre de feux & de lanternes: Le cinquieme jour de la cinquiemé lune, & le quinzieme jour de la huitieme , font en- core pour eux des jours deféres, Voyez CHINOIS. Les Indiens orientaux font aufli des folennités , tant en autonne que dans les autres faifons ,.en l’hon- neur de leurs idoles, Les fauvages d'Amérique ont auf les leuts, oyez FÊTES Des Morts. Enfin il n'eft point de peuple qui n'ait eu {es féres , pour peu qu'il ait profeflé quelque religion. (G) _ Fêtes pes CHRÉTIENS, (Æf. ecclef.) Les fêtes prifes en général & danseur inftitution, font pro- prement des jours de réjouiflance établis dans les premiers tems pour honorer les princes & les hé: rOS , Ou pout remercier les dieux de quelque éve- nement favorable, Telles étoient les fées chez les peuples policés du paganifme, & telle eft à:peu- près l'origine des féces parmi les Chrétiens ; avec cet- te différence néanmoins, que, dans l’inftitution de nos féres , les paîteurs ont eu principalement en vüe le bien de la religion & le maintien de la piété, __ En révérant par des féres des hommes qu’une vié fainte & mortifiée a rendus recommandables , ils ont voulu nous propofer leur exemple, & nous rap: peller le fouvenir de leurs vertus ; mais fur-tout en inftituant leurs fétes , ils ont voulu confacter les grands évenemens de la religion; évenemens par lefquels Dieu nous a manifefté {es deffeins , fa bon: té, {a puiflance. Telles font dans le Chriftianifme la naïflance du Sauveur, & fa réfurretion; telles {ont encote lafcenfon, la defcente du S. Efprit, &c. Les féres | qui n’étoient pas d’abord en grand nombre , fe multiplierent dans la fuite à l’exces ; à la fin tout le monde en a fenti l’abus. Ce fut l’un des premiers objets de réforme parmi les Proteftans. Où a de même fupprimé bien des fées parmi les Catholiques ; êc il femble que l’ufage foit aujour- d’hui de les retrancher prefque partout. Ces chan- gemens au refte fe font tous les jours par les évé- ques, fans que l’églife ni le gouvernement ayent rien déterminé là-deflus ; ce qui feroit néanmoins beau- coup plus convenable, pour établir l’uniformité du | Culte dans les différens diocèfes. Quand Pefprit de piété n’anime point les fideles dans la célébration des féres, ce qui n’eft que trop ordinaire aujourd’hui parmi nous, il eft certain qu”- elles nuifent fenfiblement à la religion ; e’eft une vérité que Dieu a pris foin d'annoncer lui-mêmepar la bouche d’Ifaïe, & que M, Thiers, entr’antres modernes, a bien développée de nos jours. Tome VI, 565 jy : On h'a pat démontré demême sdüañt à l'intérêt ñational, à quel point le public-étoit léfé dans là ceflation des trivaux, prefcrite.aux jours. ‘de fées: C'eft là néanmoins uné difeufiontdes plusintéref- fantes ; 8c c’et à quoi cet article eft principalement deftiné: 0! | Lésbiens phyfiques 8e réels, je veux dire les fruits de la terre & toutes les produétions fenfibles--devla nature-8e.de l'art, en unimot les biens: néceflaites pour notre fubfftance & nôtre entretien, ne fe pro= duifent point.d’eux-mêmes, fur-tout dans.ces clis | mats ; la: providence lesa comme attachés & même | Prôportionnés au travail éfe@if des. hommes: Ileft .Vifible que fi nous travaillons davantage, nous aug Imenterons par cela même la quantité de:nos hiens ; êt cette, augmentation fera plus fenfble ençcore:,, fi nous fafons beaucoup moins de-dépenfe. Or Je trou- Ve qu'én diminuant le nombre des jétes., on rempli= roit tout-à-la-fois ces deux objets ; puifque. multi- phant par-là les jours ouvrables, & par conféquent les produits ordinaires. du travail, on multiplhiroit à proportion toutes lesefpeces debiens ; 8 dexplus on fauveroit des dépenfes confidérables, qui font une fuite naturelle de nos féfes; furquoi je fais les obfer- vations-fuivantes. . … Oncompte-environ trente-feptfitesA Paris, mais il y en.a beaucoup moins en plufieurs provinces. Apres une fupprefion qui s’eft faite dans quelques diocèfes , il s'y en trouve-éncore vingt-quatre : pat= tons de ce point-à, &c fuppofons vingt-quatre fêres attuellement chomméesdans tout Le royaume.Main= tenant jé fuppofe aqw’on ne réferve que le lundi.de Pâque, l’Afcenfon , la Notre-dame d’Août, la Touf: faint, & le jour de Noël, je fuppofe ; dis-je, qu’on laïfle ces cinq féresttelles: à-peu-près qu'elles font à préfent, & qu'on tranfporte lesautres au dimanches On fait qu’il eft confacré par-tout aux plus gran des fétes de Pannée, telles que Pâque , la Pentecôte, la Trinité : les autres féres les plus folennelles, coma me Noel, la Circoncifion, lEpiphanie, l'Aflomp- tion, la Touflaint ; fe chomment également le di- manche, quand elles tombent ce jour-là, fans qu’on y trouve aucunäinconvénient. | Je m’imagine donc que les plus teligieux né dé- fapprouveront pas l’arrangement propofé , fur-tout fi l’on fe rappelle que là lot d’un travail-häbituel & pémble fut lapremiere & prefque la feule-impoiée à l'homme prévaricateur , & qu’elle entre ainfi beau coup mieux que les féres dans le fyftème dé la vraie piété. Malediéfatèrra in opere trio ; 1n laboribus.come= des ex cé cunélis diebus vire tu, in fudore vuliks tu vefceris pare, Genele, 3:17. 19. Eneflet, l’éta- bliffement arbitraire de nos fées n’eft:il pas une vio: latioñ de la loïdivine qui nous aflujettit à travailler durant fix jours, ex diehus operaberis à Exod. 20. 94 Etpeut-1l être permis à l’homme de renverfer un ordre que Dieu a prefcrit lui-même, ordre d’ailleurs qui tienteflentiellement à l’économie nationale ? ce quieft aurefte finotoire & fi conftant, quefiles fu- périeurs eccléfiaftiques inftituoient de nos jours de : nouvelles féres , de même que desjeñnes ; des abfti- nences, Gr: le miniftere public, plus éclairé qu’au- trefois’, he manqueroit pas d'arrêter cesentreprifes, qui ne peuvent avoir lieu qu'après une difcufion politique , 8e de aveu du gouvernement; & qui ne fe font formées pour la pläpartque dans les premiers accès d’une ferveur fouvent mal.ordonnée, ou dans ces fiecles d’ignorance &de batbarie, quin’avoient pas de juftes notions de la piété. Aufurplus, 1l eft certain qu’en confidérant [es abus inféparables des fes, la tranfpoñtion que je propofeeft à defirer pour le bien de la religion; at: tendu que ces faints jours confacrés par PEglife à la piété, deviennent dans la pratique des Re af de € € 566 FET trapule & de libertinage , fouvent même de bat- teries & de meurtres; excès déplorables.qui font dire à Dieu par Ifaie , & cela fur le même fujet : « À *# quoi bon tant de viétimes ? Que fert de répandre ».pour moi le fang des animaux ? Ce n’eft point-là » ce que j’exige de vous; J’abhorre vos facrifices , #vos cérémonies, vos Jéres , le fabbat même tel que » vous l’obfervez; je ne vois dans toit céla que de # l'abus & du defordre capable d’exciter mon indi- ï » gnation. Envain vouséleverez les mains vers moi, » ces mains font fouillées de fang, je n’écouterai # point vos prieres ; mais purifiez votre Cœur, ne » méditez plus de projets iniques, cefez d’être mé- » chans&c pervers, obfervez:la juftice, pratiquez la » bienfaifance ; fecourez Les opprimés:, défendez La » veuve & l’orphelin ; après cela venez à moi, ve- “nez entoute affürance , & quand vous feriez totit » noitcis de crimes, je vous rendtai plus blancs que » la neige ». Qud m1ki multitudinem viélimarum veftra- rum.,dicit Dominus ….? Quis quæfivit hec demanibus vefiris .…. ? incenfum abominatio eft mili. Neomeniam & Jabbatum E feflivitates alias non feram ; iniqui funt cœtus veftri ; calendas vefiras & folemnitates veftras odi- vit anima mea. ...Cum extenderitis manus veffras, aver- cam oculos meos à vobis ; cum multiplicaveritis oratio- kem., non éxaudiam ; mmanus enim veffre fJanguine ple- : aœ funt. Lavamini,mundi eflote, auferte malum cogita- sionum-veftrariwm ab oculis meis, quiefcite agere perversès difcite benefacere | quærite:judicium., fubvenite oppreflo, judicate pupillo , deféndite viduam ; 6 venite & ‘arguite me , dicit Dominus. Si fuerint peccata veflra ut cocci- num ,.quafi nix dealbabuntur s & fi fuerintrubra quafi : vermiculum,velut Lana alba erunt. Sivolueritis & audie- ritis me , bona terre comedetis, Quod ff noluerisis & me ad iracundiam provocaveritis , gladius devorabit vos quia.os-Domini locutum efl. Maie, ch. J. v. 11, 12. 13 » 14380. Quine voit par-là que nos féres, dès-là qu’elles font profanées par Le grand nombre, nous éloignent véritablement du but qu’on.s’eft propofé dans leur inflitution à . Mais du refte en les portant comme ©n a ditaux . dimanches , les ames pieufes s’en ‘occuperoient come anparavant, & comme elles s’en occupent dès-à-préfent toutes les fois qu’elles tombent ces jours-là. Rien ne convient mieux en effet pour fanc- tifier le jour du Seigneur, que d’y faire mémoire des Saints, deles invoquer, chanter leurs louanges ; leur gloire eft celle de Dienmême :-mirabilis Deus in Sanilis fuis. P{. 67. On peut donc remplir.ces pieux devoirs au jour du dimanche, fans perdre æivile- ment des jours que Dieu a deftinés au travail, Sex diebus operaberis, Revenons à notre calcul. Suppofant comme on a dit, vingt-quatre fêtes pour tout le royaume, &c les chommant deformais le di- manche, à l’exception des:cinq des plus folennelles, c’eft dix-neuf fêtes épargnées en faveur de-nos tra- vaux ; cependant comme il en tombe toüjours quel- ques-unes ‘au dimanche, ce-qui les diminue d’au- tant, ne comptons que fur feize journées acquites par la tranfpoñition:des f£tes. Nous pouvons évaluer les journées pour-hommes &x pour femmes dans les campagnes éloignées à fix fous prix commun pour toutes les faifons, & c’eft mettre les chofes fort au-deflous du vrai. Mais, la bonne-moitié de nos travailleurs, je veux dire tous ceux qui fontemployés dans les villes confidérables &c dans les campagnes qui en font voifines, tous ceux-là, dis-je, gagñent au moins du fort au foible auatorze fous par jour. Mettons donc quatorze fous pour:la plus forte journée, & fix fous pour la plus foible, c’eft-à-dire dix fous pour la jéurnée com- mIiune, Nous pouvons mettre aumoins cinq fousdeperte | réelle pour un travailleur, en ce awil dépenfe de plus aux jours de fées, pour la parure, pour la bonne chere & la boiflons article important , &€ qui ponr- roit être porté plus haut, puufqu'une fée outre la | perte &cles dépenfes duJour, entraine bien fouvent fon lendemain. Voilà donc du plus au moins à toute fête quinze fous de vraie perte pour chaque travail- leur ; or quinze fous multipliés par feize fêtes qu'on fuppofetranfportées au dimanche, font pourlui une perte aétuelle de douze francs toutes les années. Je conviens qu'il peut y avoir quelques-ouvriers & autres petites gens , fur-tout dans les campagnes, qui en non-travail & furcroit de dépenfes, ne per- dent pas quinze fous par jour de fêre ; mais combien en trouvera-t-on d’autres qui perdent infiniment da- vantage ? Un bon ‘ouvrier dans les grandes villes, un homme qui travaille avec des compagnons, un chef, un maître de manufaéture, un-voiturier que-le refpett d’une fére arrête avec fes chevaux, un labou- reur qui perd une belle jonrnée, & qui, au miliew de l'ouvrage demeure à rien faire lui & tout fon monde, un maître maçon ,unmaïître charpentier, éc4 tous ces gens-là , dis-je, comptant le non-travail & l'augmentation de dépenfe ne perdent-ils que quinze fous par jour de fête? D'autre côtéles négocians. les gens de plume & d’affaires, qui tous profitent moins pendant les Jéres , & qui font eux & leur fa mille beaucoup plus de dépenfe, ne perdent-ils auf que quinze fous chacun? On en jugera fans peine. pour peu qu'on connoïffe leur façon de vivre. Maintenant fur dix-huit à vingt-millions d’ames que l’on compte ‘dans le royaume, fuippofons huit millions de travailieurs, y compris les artifans, ma- nufaûturiers, laboureurs, vignerons, voituriers. marchands , praticiens, gens d’affaires, Gc. y com- pris encore un grand nombre de femmes tant mar chandes qu’ouvrieres , ‘qui toutes perdent aux fêtes à-peu-près coïnme les hommés. Or sil ya huit mil lions de travailleufs en France à qui l’on puiffe pro- curér de plus tous les ans feize jours de travail & d'épargne, à quinze fous par jour, ou‘ comme on æ vû à douze francs par année, c’eft tout d’un coup quatre-vingt-feize millions de livres que les fées nous-enlevent, & que nous gagnerions annuellez ment fi l’on exécuitoit ce que je propofe. En eflet, l’argent n’entrant dans le royaume, &£ fur-tout lesbiens phyfiques ne s’y multipliant qu'à proportion du travail & de l'épargne, nousles ver- rons-croître fenfñblement dès que nous travaillerens davantage, & que nous dépenferons moins. Confé- quemment tous nos Ouvrages, toutes nos marchan- difes & denrées deviendront plus abondantes & à meilleur compte, & nos manufadures-ne feront pas moins fruétueufes que celles des Anglois, des Alle- mands, & des Hollandois, à qui la fuppreffion des fêtes eft devenue extrèmement profitable. Au refte, outre la perte du tems& les frais fu- perflus qui s’enfuivent de nos fêtes , -élles dérangent tellement les foires &:les marchés, que les commer- çans voituriers & autres ne favént bien fouvent à quoi s’en tenir R-deflus ; ce qui caufe immanqua- blement de l'inquiétude & du dommage ; au lieu que fisnos féres étoient fupprimées ou mifes a diman- che, les marchés ordinaires ne feroient plus déran- gés. À l'égard des foires qui fuivroient les fêtes tranf- pofées, on pourroitles fixer au lundi d’après chaque fête, elles y feroient beaucoup mieux qu'aux jours maigres qui ne fontjamais commodes pour la tenue des foires. Quoi qw'il-en foit, il eft certain que les Jéres nui- fent plus qu'on ne fauroit dire à toutes fortes d’en- treprifes & de travaux, &c qu'elles contribuent mé- me à débaucher les ouvriers : elles leur fourniffent de fréquentes occafons de s’enivrer ; & l'habitude de la crapule une fois contraétée, fe réveille malheu- reufement au milieu même deleur occupation ;on ne: l'éprouve que trop tous les jours, pour peu qu'on fafle travailler, On voit avec chagrin que les ouvra- ges languiflent , & que rien ne fe finit qu'avec beau- coup de lenteur; le tout au grand dommage du pu- bc, fur qui tombent ces retardemens & ces pertes. On peut dire encore que la décifion des procès & l'expédition des autres affaires fouffrent beaucoup des féres, & 1l n'eft pas jufqu'aux études clafiques qui n’en foient fort dérangées. | . Les Armémens, en partie catholiques, & tous né- gocians des plus habiles, fentant le préjudice que leur caufoient les féres, les ont toutes mifes au di- manche , à l’exceprion de quatre. Voyez état préfent de l'Empire ottoman, page 406. Une difpofition fem- blable fut propofée à Rome en 1741 ou 1742; & après une difcufñion de plufieurs années fur cette ma- tiere importante, le pape Benoît XIV, à-préfent regnant , a laiflé toute hberté en Italie de retrancher ou de modifier le nombre des fêtes : c’eft pourquoi , difent des journaliftes non fufpeéts en cette ma- tiere, « plufieurs évêques de ce pays-là ont con- » fidéré que les dimanches & quatre ou cinq grandes » lolennités fufifoient au peuple, & qu'il ne falloit » pas lui laifler dans une multitude d’autres fées, » le prétexte ou l’occafon de perdre fon tems, {on » argent, fon innocence, & le fruit de l’inftruétion » des pañteurs. En conféquence , nous dit-on, Les » retranchemens ont été faits ; & après quelques _# petites contradiétions , qui étoient le cri de la coù- # tume plütôt que de la piété , tout le monde a été # content ». Journ. de Trév. I, vol. de Mai 1754. Pareilretranchement s’eft fait dans les états du roi de Prufle &c dans les Pays-Bas catholiques (Guazerre deFrance, 21 Aoët 1751) : un autre enfin tout récem- ment dans l’Autriche & pays héréditaires, où l’on a fupprimé tout-d’un-coup vingt-quatre fêtes ( Mer- cure d'Avril 1754) ; deforte que dans tout le monde chrétien nous fommes aujourd’hui prefque les feuls efclaves fur cela de l'ignorance &c dela coûtume ; & qu'anfi nos voifins, fi glorieux autrefois de nous imiter, ne veulent plus nous laïfler que l'honneur de marcher fur leurs traces. - Suppoñé donc l’abus des féres une fois bien recon- nu, je crois, fauf meilleur avis, que la diftribution fuivante feroit tout enfemble commode & raifonna- ble; & pour commencer par la Circoncifion, elle fera fixée au premier dimanche de Janvier ; les Rois feront fêtés le fecond dimanche du même mois ; fainte Génevieve fera mife au dimanche fuivant. .… La Purification viendra toûjours le premier diman- che de Février, S. Matthias le dernier dimanche du même mois. L’Annonciation fera chommée le pre- mier dimanche ou tel autre que l’on voudra du mois de Mars. Au furplus on férera le lundi de Pâque , afin de pro- curer du loïfir aux peuples pour fatisfaire au devoir pañcal: c’eft ainfi qu’en ont ufé quelques évêques, Mais pour ce qui eft de la Pentecôte, il n°y aura pas plus de féces qu'à la Trinité; & cela , comme on la cit, parce que ce tems, fi propre pour toutes fortes de travaux, devient, au moyen des féres, ün tems de plaïfir, d’excès & de libertinage:; ce qui nuit éva- lement aux bonnes mœurs & à l’économie publique : Neomeniam & fabbatum, & feféivitates alias zon fe- Fam ; imiqui funt cetus veflri. WMaïe j. HE . La féredeS. Jacques & S.Philippe tombera au pre- mier dimanche de Mai. On ne touchera point à AL cenfon; mais la Féce- Dieu fera tran{portée au di- manche d’après la Trinité, & la petite Fére-Dies au dimanche fuivant. ç« La S. Jean viendra le dernier dimanche de Juin \ Tome VI, | | FET 567 * & la S. Pierre le premier dimanche de Juillet: S, Jacques & S. Chriftophe le dernier dimanche du mê- me mois. La fére de S, Laurent fe chommera le premier di- manche du mois d’Août : P'Affomption fera mife au famedi fuivant ; & le vendredi » Veille de la fére, fera jeûne à l'ordinaire. S. Barthelemi & S, Louis feront fêtes les deux derniers dimanches du même mois. La Nativité vient naturellement le premier diman- che de Septembre; S. Matthien & S. Michel les deux derniers dimanches du même mois. $. Denis & S. Simon feront chommés en deux dimanches d’'O&obre. La fére de tous les Saints fera fixée au famedi qui précédera le premier dimanche de Novembre > & les Trépañlés au lendemain, ou, fi l’on veut , au lundi fubféquent ; mais avec ordre de la police d'ouvrir de bonne-heure les atteliers & les boutiques. Saint Marcçel, S. Martin & S. André fe chommeront auf le dimanche, & dans le mois de Novembre. La Con- ception, S. Thomas, S. Etienne & S. Jean Occupe- ront les dimanches du mois de Décembre, Les Innocens feront fupprimés par-tout, comme ils le font déjà dans plufieurs diocèfes ; mais le jour de Noël fera féréféparément le famedi, veille du der- nier dimanche de l’année. Au refte la raifon de con- venañce pour fixer les plus grandes féres au famedi, c’eft pour en augmenter la folennité en les rappro= chant du dimanche, & fur-tout pour faire tomber le jetine au vendredi. Les fées de patron peuvent aufi être chommées le dimanche ; & feu M. Lanouet, curé deS, Sulpice, en a donné l’exemple à tout Paris. Plût au ciel que les curés & autres fupérieurs eccléfiaftiques vouluf- ent bien établir partout la même pratique ! Du refte plufieurs paroïffes ont deux patrons, & conféquem- ment deux féces : mais, en bonne foi , c’eneft trop, & rien n’eft plus nuifible pour les gens laborieux : on pourroit en épargner une, indépendamment de toute autre nouveauté, en féran: les deux patrons dans un feul jour. Je ne dois pas oublier un abus qui mériteroit bien l'attention de la police : c’eft que les communautés des arts & du négoce ne manquent point de fermer boutique le jour de leur prétendue fe > il ya même des communautés qui en ont deux par an ; & quoi- qu'il n’y ait rien de plus arbitraire que de pareilles inflitutions , elles font payer une amende à ceux de leur corps qui vendent où qui travaillent ces Jours- là. Si ce n’eft pas [à de l'abus, avoue que je n'y connoïis rien. Je voudrois donc rejetter ces fortes de fêtes au dimanche , où mieux encore les fupprimer tout-à-fait, attendu qu’elles font toñjours moins fa. vorables à la piété qu’à la fainéantife & à l’ivrogne rie : Zriqui funt cœtus vefirt , calendas veflras &: folem- ritates veftras odivit anima mea. Vaïe j. 1 ge ON On me permettra bien de dire un mot des fêtes de palais, & fur-tout des fées de collége, du landi ,des procefhons du recteur, 6:c. Tout cela n’eft appuyé, ce me femble:, que fur le penchant que nous avons à la pareffe ; mais tout cela n’entre point dans l’ef- prit des fondateurs, & ne s'accorde point avec le fer- vice du public. Il vaudroit mieux faire fon devoir &t fon métier, veiller, inftruire & former la jeunefle,. que de s’'amufer, comme des enfans, à faire des pro- ceffions & des tournées qui embarraflent la voie pu blique, &c, qui ne font d’aucune utilité. Encore fe roit-ce demi-mal, fi lon y employoit des féres où des congés ordinaires ; mais on s’en donne bien de garde :4la tournée ne feroit pas complette, fi l'on ne perdoit un jour entier à lafaire , fans préjudice ds tant d’autres congés qui emportent la meilleure par. tie de l’année, & qui nuifent infiniment au bien des études & à l'inflitution des mœurs, | CCcci s68 FET Au tefte, l’afrangement qu’on a và ci-devanñt, ef relatif aux fées chommées à Paris; mais s’il fe fait là-deflus un réglement pour tout le royaume, il fera aifé d’arranger lé tout pour le mieux & d’une raniere umforme. En général, il eft certain que moins il y aura de fêtes, plus on aura de refpeét pour les dimanches & pour les fées reftantes, & fur-tout moins il y aura de miférables. Une grande commo- dité qui s’enfuivroit pour le public, c’eft que les jeü- nes qui précedent les fêtes , tomberoient toüjours le vendredi où le famedi, & conféquemment s’obfer- vétoient avec moins de répugnance que lorfqw'ils viennent à la traverfe au milieu des jours gras : ou- tre que ce nouvel ordre fixant la fuite du gras & du maigre, ce feroit, en confidérant les choles civile- mént, un avañtage fenfble pour le ménage & pour le commerce, qui feroient en cela moins dérangés. J’obférverai à cette occafion, qu’au lieu d’entre- mêler, comme on fait, les jours gras & les jours mar- ares, il conviendroit, pour l’économie générale &c particuliere, de reftraindre aux vendredis &t famedis tous les jours de jelñne & d’abftinence, non compris le carême. On pourroit donc, dans cette vüe de commodité publique , fupprimer Pabftinence dés Rogations, aufli-bien que celle de S. Marc. Quant aux procef- fions que l’on fait ces jours-là, on devroit, pour le bien des travailleurs, les rejeter fur autant de di- manches, dont le loifir, après tout, ne fauroit être mieux rempli que par ces exercices de piéte. A l'égard du maigre qu’on nous épargneroit, Je trouve , fi l’on veut, une compeniation facile ; ce feroit de rétablir dans tout le royaume l’abftinence des cinq ou fix famedis qu’il y a de Noël à la Purifi- cation. Quant aux jeûnes , 1l me femble, vü le relàche- ment des Chrétiens , qu'il y en a trop aujourd’hui, & qu'il en faudroit fupprimer quelques-uns; par éxemple, ceux de S. Laurent, S. Matthieu, S. Simon & S. André, aufi-bien que les trois mercredis des quatre-tems de la Trinité, de la S. Michel & de Noël : pour lors il n’y auroit plus, outre le carème, que douze jours de jeûne par année ; favoir fix Jours pour les quatre-tems, & fix autrès jours pour les vigiles de la Pentecôte, de la S. Jean, de la S. Pierre, de PAffomption, de la Touffaint, & de Noël. Ainf, hors le carême qui demeure en fon entier, on ñe verroit que les vendredis & famedis fujers au jeûne & au maigre; arrangement beaucoup plus fup- portable , & qui nous expoñeroit moins à la tranf- sreflion du précepte , ce qui éft fort à confidérer pour le bien de la religion & la tranquillité des conf: ciences. Jajoûte enfin que pour procurer quelque douceur aux pauvres peuples, & pour lès foulagér, autant qu'il eft poffible, en ce qui eft d'infitution arbitraï- te, nos masiftrats 8 nosévèques , loin d’appefantir le joug de Jefus- Chrift, devroient concourir une bonne fois pour aflürer l’ufage des œufs en tout tems : jy voudrois même joindre Pufagé de la graïfle, le- quel pourroït être permis en France, comme il l’efr, à ce qu'on dit, en Efpagne & ailleuts. Et, pouf par- ler en chrétien rigide , il vaudroit mieux défendre dans le jeûne toutes les liqueurs vineufes , de même que le cafe, le thé, le chocolat ; interdire alors les cabarets aux peuples, hors les cas dé néceffité, que de leur envier dela graifle & des œufs. Hs ont com- munément ces denrées pour un prix afféz modique, au lieu qu'ils ne peuvent guere atteindre au beurre, ‘encore moins au poiflon, & que les moindres lépu- mes font fouvent rares & fort chers; ce qui feroit peut-être une raifon pour fixer la fére de Pâque au premier dimanche de Mai, dans là vüe de rappro- cher le carême des herbes & légumes duprintems. À l'égard des grands & des riches de toutes cons ditions & de toutés robes, ces fortes de loïs ne font pas proprement faites pour eux ; &c fi quelques-uns fe ptivent de certains mets , xls favent bien d’aïl- leurs s’en procurer d’excéllens : a//igant onera gravia, Matth. xx, 4. Gi N’en difons pas davantage ; & concluons que pour diminuer le fcandale des tranfgreflions., pour tranquillifer les ames timorées, & fur-tout pour Paifance &c la doucéur d’une vie d’ailleurs rem- plie d’amertume, le libre ufage de la graiffe & des œufs doit être établi par-tout , & pour tous des tems de l’année. , Je dois encote remarquer ici que la tranfpof- tion des fées feroit un objet d'économie pour la fabrique des éghifes , puifqu'il y auroit moins de dé- penfe à faire en cire, ornemens, fervice, &c. Il s’enftuvroit encore uñ autre avantage confidérable , en cé que ce feroit un moyen de rendre fimple &uni- forme l'office divin. Eneïfet, comme il n’y a pas d’ap- parence que pour une fée ainfi tran{pofée on chan- geat fenfiblement l’office ordinaire du dimanche, il eft à croire qu’on y laifferoit les mêmes pfeaumes & autres prieres qu'on y fait entrer, & qu'il n’y auroit de changement que pour les oraifons &c les hymnes appropriées aux fêres. | Ce feroit pareillement une occañon favorable pour réformer le bréviaire, le chant , & les cérémo- nies , tant des paroïffes que des communautés & col- légiales, Tout cela auroit befoïin de revifion, & pourrôit devenir plus fimple & plus uniforme ; d'autant mieux que les arrangemens propofés fe faifant de Pautorité duroï&r des évêques, feroienten conféquence moins confus 8 moins variables. Il n’eft pas douteux que ces chansemens n'infpiraflent plus de refpeët, & ne donnaffent plus de goût pour le fervice divins au lieu que les variétés bifarres qu’on y voit aujoure d’hui, formant une efpece de fcience peu connuedes fideles , je dis même des gens inftruits, plufeurs fe dégoûtent de l’office paroïflial , & perdent les pré cieux fruits qu'ils en pourroient tirer. À quoi contri- bue bien encore le peu de commodité"qu'il y a dans nos églifes ; 1l y manque prefque toûjours ce qui des vroit s’y trouver graiis pour tout le monde, je veux dire le moyen d’y être à l’aife , & proprement afñs ou à genoux. | En effet n’eft-on pas un peu fcandalifé de voir l'attention de nos pafleurs à fe procurer leurs aïfes & leurs commodités dans les églifes, & de voir en même tems leur quiétude &c leur indifférence fur la ofition incommode & peu décente où s’y trouvent la plüpart des fideles, ordinairement preflés & cou- doyés dans la foule, étourdis par le bruit des clo= ches & des orgues, importunés par des mendians, interpellés pour des chaïfes, enfin mis à contribue tion par des quêteufes jeunes & brillantes ? Qui pour: roit compter avec cela fur quelques momens d’at- tention ? J'ajoûterai à ces réflexions, que les mefles en plu fieuts éplifes ne font point aflez bien difiribuées ; 18 arrivé fouvent qu’on en commence deux ou trois à- la-fois, & qu’enfuite il fe pafle un tems confidérable fans qu'on endife : de forte qu'un voyageur, une femme occupée de fon ménage, & autres gens fem= blables , ne trouvent que trop de difficulté pour fa+ tisfaire au précepte. tr : On diroit à voir certains célébrans, qu'ils regars dent la mefle comme une tâche rebutante & pémi- ble dont il faut fe libérer au plus vite, êr fans égard pour la commodité des fideles. Quelqu'un s'étant plaint de ce peu d’attention dans une communauté près de Paris, on lui répon- dit honnêtement, que la communauté n'étoir pas faite por le public. Il ne s’attendoit pas à cette réponfe, & il en fut fort fcandalifé : mais c’eft tout ce qu'il en arriva , & les chofes allerent leur train à l'ordinaire. Une conduite fi peu religieufe & fi peu chrétienne nuit infiniment à la piété. Une derméere obfervation que je fais fur les ar- rangemens expolés ci-deflus, c’eft qu'ils ôteroient tout prétexte, ce me femble, à la plüpart des rail- leries & desreproches que font les Déiftes & les Pro- teftans fur la religion. On fait que s'ils attaquent cette religion fainte, c’eft moins dans fes fondemens iné- branlables, que dans fa forme & dans fes ufages in- différens: or toutes les propofñitions de ce mémoire tendent à leur ôter les occafons de plainte & de murmure. Aufli bien convaincu que les pratiques ar- bitraires , ufitées dans l’églife romaine, lui ont plus attiré d’ennenus que tous les articles de la créance catholique, je penfe, à l'égard des Proteftans, que fi l’on {e rapprochoit un peu d’eux fur la difcipline, ils pourroient bien fe rapprocher de nous fur le dog- me. Premiere objettion. Le grand avantage que vous envifagez dans la fuppreflion des fêtes, c’eft l’épar- gne des dépenfes fuperflues qui fe font ces jours-là, &t que l’on éviteroit , dites-vous, en rejettant les Jétes au dimanche : mais cette épargne prétendue eft indifrérente à la fociété , d'autant que l'argent dé- bourfé par les uns, va néceffairement au profit des autres , je veux dire à tous ceux qui travaillent pour la bonne chere & la parure, pour les amufemens, les jeux , & les plaïfirs. L’un gagne ce que Pautre eft cenfé perdre, &c par-là tout rentre dans la mafle. Ainfi le dommage que vous imaginez dans certaines dépenfes, & le gain que vous croyez appercevoir dans certaines épargnes, font ab{olument chiméri- ques. RÉPONSE. La grande utilité que j’envifage dans l'exécution de mon projet, n’eft point l’épargne qu'on gagne par la fupprefhon des féres, puifque je . ne la porte qu’au tiers du gain total que je démontre, En effetJ'eftime à dix fous par jour de fése la perte que fait chaque travailleur par la ceffation des travaux, & je ne mets qu’à cinq fous l’augmentation de dé- penfe : ainf l'épargne dont il s’agit n’eft que la moin- dre partie des avantages qu’on trouveroit dans la di- minution des fêtes, La principale utilité d’un tel re- tranchement, confifte dans l'augmentation des tra- vaux, & conféquemment des fruits qu'un travail continu ne peut manquer de produire. Maïs indépen- damment de ce défaut dans l’objetion, je foûtiens quant au fond, que le raifonnement qu’on oppofe là- deflus eft frivole & mal fondé : car enfin la queftion dont il s’agit ne roule point fur l’argent qui fe dépen- fe durant les féres, & que je veuille épargner en fa- veur du public. Il eft bien certain que l’argenr circule &t qu'il pafle d’une main à l’autre dans le commerce des amufemens & des plaïfirs ; mais tout cela ne pro- duit rien de phyfique, & n’empèche point la perte générale & particuliere qu’entraîne toûjours le di- vertiflement & l’oifiveté. Si chacun pouvoit fe ré- joiuir & dépenfer à fon gré, fans que la mafle des biens diminuät, ce feroit une pratique des plus com- modes : malheureufement cela n’eft pas poffible; on voit au contraire que des dépenfes inutiles & mal- placées, loin de foûtenir le commerce & l’opulence générale, ne produifent au vrai que des anéantif- femens & de la ruine: le tout indépendamment de l'eipece, qui ne fert en tout cela que de véhicule. Et qu'on ne dife point, comme c’eft ordinaire, que les amufemens , les jeux, les feftins, &c. occu- pent & font vivre bien du monde, & qu'ils produi- fent par conféquent une heureufe circulation: car c’eft uneraïfon pitoyable. Avec ceraifonnement, on va montrer que la plüpart des pertes & des calamités 5 rm PÉ FET 569 publiques & particuliéres , font de vraïs biens poli. tiques. La guerre qu’on reparde comme un fléau , neft plus un malheur pour l’état , puifqu’enfin elle oc- cupe & fait vivre bien du monde, Une maladie cons tapieufe qui defole une ville ou une province, n’eft pouit encore un grand mal, vû qw’elle occupe avec : fruit tous les fuppôts de la Medecine, 6e. & fuivant le même rafonnement , celui qui fe ruine par les pros cés ou par a débauche, le rend par-là fort utile aw pubhe, d'autant qu'il fait le profit de ceux qui fers vent fes excès ou fes folies ; que dis-je, un incendiaire en brülant nos maifons mérite des técompénfes, ata tendu qu’il nous met dans l’henreufe néceflité d’ern- ployer bien du monde pour les rétablir? & un ma chimifle , au contraire , en produifant des facilités nouvelles pour diminuer le travail & la peine dans les gros ouvrages, ne peut mériter que du blâme pour une malheureufe découverte qui doit faire con: gédier plufieurs ouvriers. Pour moi je penfe que Fenrichifflement d’une na tion eft de même nature que celui d’une famille, Comment devient-on riche pour l'ordinaire ? Par le travail &c par l’économie ; travail qui enfante de now: veaux biens; économie qui fait les conferver & les employer ä-propos, Ce n’eft pas aflez pour enrichir un peuple, de lux procurer de Poccupation. La gner- re, les procès, les maladies, les jeux, & les feftins occupent aufli réellement que les travaux de l’agriss culture, des fabriques, où du commerce: mais dé ces occupations les unes font fruétueufes & prodni- fent de nouveaux biens , les autres font flériles & deffruétives. Je dis plus, quand même le goût du luxe & des fuperfhuités feroit entrer de largent dans le royau- me , cela ne prouveroit point du tout l’accroïfleinent de nos richeffes , & n’empécheroit pas les dommages qui fuivent toûjours la diffipation & la prodigalité, Voilà fur cela mon raifonnement. L'Europe entière poffede au moins trois fois plus d'efpeces qu’elle n’en avoit il ÿ a troïs cents ans; elle a même pour en faciliter là circulation bien des moyens qu'on n’avoit pas encore trouvés. L’Euro- pe eft-elle à proportion plus riche qi’elle n’étoit dans ces tems-là ? [s’en faut certainement beaucoup. Les divers états, royaumes , où républiques , ne con- notfoient point alors les dettes nationales ; prefque tous aujourd’him font obérés à ne pouvoir s’en rele- ver de long-tems. On ne connoïfloit point aufi pour lors ce grand nombre d’impofitions dont les peuples d'Europe font chargés de nos jours. Les arts, les métiers, les négoces étoient pour tout le monde d’un abord libre & gratuit ; au lieu qu’on n’y entre à-préfent qu'en débourfant des fommes confidérables. Les offices & les charges de judicatu- re , les emplois civils & nnliraires éroient le fruit de la faveur ou du mérite; maintenant 1l fant les ache- ter, fi l’on y veut parvenir : par conféquent il étoit plus facile de fe donner un état, & de vivre à fom aife en travaillant ; & dès-là il étoit plus facile de fe marier & d'élever une famille, On fent qu’il ne fal- loit qu'être laborieux & rangé, Qu'il s’en faut aujour- d’hui que cela fufffe ! Je conclus de ces triftes différences,que nous fom- mes réellement plus agités, plus pauvres, plus ex- pofés aux chagrins 87 anx miferes, en un mot moins heureux & moins opulens, maleré les riches buffets &c lés tas d’or & d’argent fi communs de nos jours. L’acquifition des métaux précieux, n1 la circula= tion des efpeces ne font donc pas la jufte mefure de la richeffe nationale ; & comme je l’ai dit, ce n’eff point fur cela que doit rouler la queftion préfente. I s’agit fimplement de favoir fi Le furcroït de dé- penfe qui fe fait toûjours pendant les Jézes , n’occa- / 570 FET fionne pas quelque diminution des biens réels ; &c fi les excès, les feftins, & autres fuperfluités com- munes en ces fortes de jours, bien que profitables à quelques particuliers,ne font pas véritablement dom- mageables à la fociété : fur quoi l’on peut établir comme un.axiome de gouvernement, que l’augmen- tation ou la diminution des biens phyfiques, ef la mefure infaillible de l’enrichiflement ou de lappau- vriflement des états; & qu'ainfi un travail continu de la part des fujets augmentant à coup sûr la quan- tité de ces biens, doit être beaucoup plus avanta- geux à la nation, que les fuperfluités &c les dépenfes qui accompagnent les féres parmi nous, __ Ileft vifible en effet qu'une portion confidérable des biens les plus folides fe prodigant chez nous du- rant les féres , la mañfle entiere de ces vrais biens eft néceflairement diminuée d'autant; perte qui fe ré- pand enfuite fur le public & fur les particuliers: car il n’eft pas vrai, comme on le dit, que l’un gagne tout ce que l’autre dépenfe. Le büveur , l'homme de bonne-chere 8c de plaifir qui difipe un louis mal-à- propos, perd à la vérité fon loius à pur & à plein; mais le cabaretier, le traiteur qui le reçoit, ne le gagne pas également : à peine y fait-1l un quart ou un cinquieme de profit, Le refte eft en pure perte pour la fociété. En un mot toute confommation de vivres ou d’autres biens dont on ufe à contretems & dont on prive fouvent fa famille, devient une véri- table perte que l’argent ne répare point en pañlant une main à l’autre : argent refte, il eff vrai; mais le bien s’anéantit. Ii en réfulte que fi par la fuppref- fion des fétes nous étions tout-à-coup délivrés des folles dépenfes qui en font la fuite inévitable, ce fe- roit fans contredit une épargne fruétueufe & une augmentation fenfible de notre opulence ; outre que les trayaux utiles, alors beaucoup mieux fuivis qu’à préfent, produiroient chez nous une abondance gé- nérale. Pour mieux développer cette vérité, fuppofons que la nation françoife dépensät durant une année moitié moins de tonte forte de biens; que néan- moins Les chofes fuflent arrangées de façon que cha- cun travaillât moitié davantage ou moitié plus fruc- tueufement, & qu’en conféquence toutes les pro- duétions de nos terres, fabriques, &: manufaures, devinflent deux ou trois fois plus abondantes ; n’eft- 11 pas vifible qu’à la fin d’une telle année la nation {e trouveroit infiniment plus à l’aife, où pour mieux dire, dans l’afluence de tous biens, quand même il n’y auroit pas un fou de plus dans le royaume ? Si cet accroiflement de richefles eft conftant pour une année entiere, 1l left à proportion pour fix mois, pour quatre, où pour deux; & 1l l’eft enfin à pro- portion pour tant de.féres qu'il s’agit de fupprimer , & qui nous Ôtent à Paris un douzieme des jours ou- vrables. En un mot, il eft également vrai dans la politique & dans l’économie, également vrai pour le public & pour les particuliers , que le grand moyen de s'élever & de s'enrichir eft de travailler beaucoup, & d'éviter la dépenfe : c’eft par ce loua- ble moyen que des nations entieres fe font aggran- dies, & c’eft par la même voie que tant de familles s’élevent encore tous les jours. Voyez EPARGNE. Mais, pourfuit-on, qu'on dife & qu’on fafle tout ce que l'on voudra , il eft toüjours vrai que fi le pu- blic gagnoit à la fupprefion des fêtes , certaines pro- fefons y perdroïent infailliblement, comme les Ca- baretiers , les Traiteurs, &c les autres artifans du luxe &c des plaifrs. | À cela je pourrois dire: foit, que quelques pro- feffions perdent, pourvü que la totalité gagne fen- fiblement. Plufieurs gagnent aux maladies populai- tes ; s’avife-t-on de les plaindre parce que leur gain diminue avec le mal épidémique ? Le bien & le plus grand bien national ne doit-il pas l'emporter fur ces confidérations particulieres à Aurefte ,Je veux répondre plus pofitivement, en montrant que les profeffions que l’on croit devoir être léfées dans la fuppreflion des fées , n’y per- dront ou rien ou prefque rien. Quine voit en effet que fi les moindres particuliers gagnent à cette fup- preflion , tant par l’angmentation de leurs gains que par la ceffation des folles dépenfes ,ils pourront fai- te alors & feront communément une dépenfe plus forte & plus raifonnable ? Tel, par exemple , què diffipe 30 fous pour s’enivrer un jour de fére,&r qui en contéquence fait maigre chere & boit de l’eau Le refte du tems; aulieu de faire cette dépenfe ruineufe pour le ménage & pour la fanté, fera la même dé- penfe dans le cours de la femaine, & boira du vin tous les jours de travail; ce qui fera pour lui une nourriture Journaliere, & une fource de joie ; d’u- mon, & de paix dans fa famille. Remarquez que les raifonnemens qui font voir en: ceci l’avantage des particuliers, prouvent en même tems une augmentation de gain pour les fermiers des aides: ainfi l’on fe perfuade qu'ils ne feront point alarmés des arrangemens que nous propo- fons. | Au furplus , ce que nous difons du vin fe peut di- re Également de la viande & des autres denrées. Le furcroît d’aifance où fera chaque travailleur influe- ra bien-tôt fur fa table ; il fera beaucoup moins d’excès à la vérité, mais fera meilleure chere tous les jours ; & les profeffions qui travaillent pour la bouche, loin de perdre à ce changement verront augmenter leur commerce. J'en dis autant de la dépenfe des habits. Quand une fois les fées feront rejettées au dimanche , on aura moins de frais à faire pour l'élégance & la pa- ture fuperflue ; & c’eft pourquoi l’on. s’accordera plus volontiers le néceflaire 8 le commode : & non- feulement chaque ménage , mais encore chaque branche de commerce y trouvera des utilités fen- fibles. | J'ajoûte enfin que fi ces nouveaux arrangemens faifoient tort à quelques profeflions, c’eft un fi pe- tit objet, comparé à l’économie publique & particu- liere , qu'il ne mérite pas qu’on y fafle attention. D'ailleurs ces pretendus torts, s’il en eft, ne fe font pas fentir tout d’un coup. Les habitudes vicieufes ne font que trop difficiles à déraciner, & les réfor- mes dont 1l s’agit iront toüjours avec aflez de len- teur: de forte que la profeflion qui {era moins em- ployée fe tournera infenfiblement d’un autre côté, & chacun trouvera fa place comme auparavant. IT, Objeition. Vous ne prenez pas garde que vous donnez dans un relâchement dangereux ; & que dans un tems_ où les fideles ne font déjà que trop portés à fecouer le joug de l’auftérité chrétienne, vous faites des propoñtions qui ne refpirent que l’aifance & la douceur de la vie. | RÉPONSE. Je ne vois pas fur quoi fondé l’on m'accufe de tendre au relâchement par les diverfes propofñtions que Je fais dans cet écrit: ce n’eftpoint fans doute fur ce que je propofe de fupprimer la plü- part de nos fêtes ; c’eit là une propofñtion rebattue,, qui n’eft pas plus de moi que de mille autres. Plu- fieurs de nos évêques ont déjà commencé la ré- forme; & , comme on l’a dit ci-devant , prefque tou- tes les nations chrétiennes nous ont donné l’exem- ple, enltalie, en Allemagne, dans les Pays-Bas, & jufqu’en Arménie. En un mot, ce qu'il y a de moi proprement dans ce plan de la tranfpofition des fé- tes , c’eft la fimple expoñrion des avantages qui en réfulteroient & pour la religion &c pour l’économie publique; avantages au refte que je n’ai point vüs démontrés ailleurs. Onvous pale bien cela, dira-t-oh; mais ne pro- pofez-vous pas l’ufage perpétuel de la graifle &r des œufs ? N’infinuez-vous pas encore la fuppreffion de certains jours d’abftinence, & même de quelques jeûnes prefcrits par l’églife ? A Pégard de la sraifle & des œufs, c’eft une efpe- ce decondefcendance autorifée en plufieurs endroits, & qui fe doit par juftice & par humanité, à la trifte fituation du peuple & des pauvres: car, je l’ai dit & je le répete, cela ne fait rien aux riches de tous états & de tousordres ; ils fe mettent au-deflus de la regle pour la plüpart; & au pis aller, la mer & lesrivieres leur fourniflent pour le maigre des mets délicats & fucculens. Il eft vrai que les arrangemens indiqués ci-deflus emportent l'abolition de quatre jours d’abftinence, & de fix ou fept jours de jeûne : mais premierement cela vaut-il la peine d’en parler ? d’ailleurs n’ai-je pas propofé le rétabliffement du maigre pour les cinq ou fix famedis que l’on compte de Noël à la Chandeleur, & dans lefquels on permet le gras en plufeurs endroits du royaume ? N’ai-je pas encore propofé un jeûne plus rigide & plus édifiant , lorf- que j'ai fuggéré l’interdiétion du vin & de mille au- tres délicatefles peu conformes à l’efprit du jeûne? Je ne vois donc pas que la faine Morale rifque beau- coup avec moi: & fi quelques-uns me trouvent trop relâché, combien d’autres me trouveront trop {é- were C’eft en vain que Jefus- Chrift nous apprend à négliger les traditions humaines , pour nous atta- cher à l’obfervation de la loi; nous voulons toüjours tenir, comme les Juifs, à des obfervances & à des inflitutions arbitraires. Cependant les auftérités ,les mortifications , & les autres pratiques de notre choix, nous font bien moins néceffaires que la pa- tience & la réfignation dans nos maux. En effet, la vie n’eft-elle point aflez traverfée ,afez malheureu- fe? & n’eft1l point en ce monde aflez d’occafons de fouffrir, fans nous aflujettir fans cefle à des em- barras & des peines de créatien libre ? Notre far- deau eft-1il trop leger, pour que nous y ajoûtions de nous-mêmes? & le chemin du ciel eft-il trop large, pour que nous travaillions à le retrécir ? On dira fans doute que les abftinences multipliées & prefcrites par l’églife font autant de moyens fa- gement établis pour modérer la fougue de nos paf- fons, pour nous contenit dans la crainte du Sei- gneur, & pour nous faciliter l’obfervation de fes commandemens. | Toutes ces raifons pouvoient être bonnes dans ces fiecles heureux où les peuples fervens & foûte- nus pat de grands exemples, étoient parfaitement dociles à la voix des pafteurs : mais aujourd’huique lindépendance &c la tiédeur font générales , au- jourd’hui que lirréligion & le fcandale font montés à leur comble , telle obfervance qui fut jadis un moyen de falut , n’eft le plus fouvent pour nous qu'une occafion de chûte: 2zvezsum eff mihi manda- tum quod erat ad vitam ; hoc effe ad mortem. Rom. viÿ. chap, x. Par conféquent, vü l’état languiffant où le Chri- ftanifme fe trouve de nos jours, on ne fauroit mul- tiplier nos devoirs fans nous expofer à des tranf- greflions prefque inévitables, qui attirent de plus en plus la colere de Dieu fur nous. C’eft donc plütôt fagefle que relâchement d’adoucir la rigueur des préceptes humains , & de diminuer, autant qu'il eft pofible, le poids des abftinences qui paroît trop oné- _reux au commun des fideles , & qui ne fait plus que des prévaricateurs. _ Durefte, obligés que nous fommes de conferver our Dieu, dans tous les rems, cet amour de pré- férence que nous hu devons, & qu eft fi puiflam- | Le : 571 ment difputé par les créatures ; obligés d'aimer nos ennemis, de prier pour nos perfécuteurs, & de fouf- frir fans murmure les afli@ions & les chagrins de la vie; obligés enfin de combattre fans relâche nos pafions & nos penchans, pour méprifer le monde & fes plaïfirs, pour ne ravir ni ne defirer le bien ou la femme du prochain , & pour détefterconftamment & de bonne foi tout ce qui n’eft pas légitimé par le facrement, n’ayons-nous point en ce peu de pré- ceptes diétés par Jefus-Chrift lui-même, de quoi foû- tenir notre vigilance & de quoi exercer notre ver tu ; fans être furchargés tous les jours par des tradi- tions humaines ? | Enfin, de quoi s'agit-il dans tout ce que je pros pofe? de quelques adouciflemens fort fimples , & qui, à le bien prendre, ne valent pas les frais de la contradiétion ; adouciflemens néanmoins qui ap- planiroient bien des difficultés | & qui rendroient l’obfervation du refte beaucoup plus facile : au liew que des inffitutions arbitraires, mais en même tems génantes & répétées à tout moment, font capables de contrifter des gens d’ailleurs réglés & vertueux. 11 femble qu’elles atiédiflent lecourage , &c qu’elles énervent une piété qui fe doit toute entiere à de plus grands objets. Auffi, que de chrétiens qui pren- nent le change, qui fideles à ces pratiques minutieu- fes , négligent l’obfervation des préceptes , & à qua l’on pourroit appliquer ce que le Seigneur difoitaux Pharifiens : relinquentes mandatum dei , tenetis tradi- tiones homirnum | Marc. ch, vig, 8, | J’ajoûte enfin | comme je l’ai déjà dit, que ces pratiques peu néceflaires indifpofent non - feule- ment les Proteftans , mais encore tous ceux qui ont de la pente au libertinage du cœur & de l’efprit ; êt qu'elles les révoltent d'ordinaire fans efpérançe de retour. Tout cela mûrement confidéré , on ne peut, ce me femble , mieux faire que de tranfporter prefque toutes nos féces au dimanche, réduire À quelque eho- fe de plus fimple & de plus uniforme nos offices, nos chants, nos cérémonies, 6:c. accorder pour tous les tems lufage libre de la graifle & des œufs ; & fans toucher au carême pour le refte, déclarer les ven- dredis &famedis feuls fujets au maigre ; fupprimer à cette fin lPabftinence des Rogations & celle de S. Marc ; à l'égard des jeünes paflagers annexés à tel- les faifons ou telles féces , les reftraindre à deux jours pour les quatre-tems ; plus aux vigiles de la Pente- côte, de la 5. Jean, de laS. Pierre, de l’Afomption, de la Touflaint, & de Noël. Pour lors ce petit nombre de jeñnes tombant aux _jours maigres ordinaires s’obferveroit plus facile- ment, & ne dérangeroit plus ni le ménage ni le com- merce ; & Je crois enfin que tous ces changemens font fort à fouhaiter , tant pour l’enrichiflement de . e [2 1 . la nation &r l’aifance générale des petits & des mé- diocres , que pour empêcher une infinité de préva- rications & de murmures. Je me flate que les gens . éclairés ne penferont pas autrement; & que loin d’appercevoir dans ces propofitions aucun rifque pour la difcipline ou pour les mœurs, ils y trouve- ront de grands avantages pour la religion & pour la politique : en un mot, on éviteroit par là des fcandales & des tranfgreffions fans nombre qui nui- fent infiniment à la piété ; & de plus, on augmen- teroit les richeffes du royaume de cent millions par an, comme je l’ai prouvé. Si cela n’eft pas raifonna- ble, qu'on me dife ce que c’eft que raïfon. Voyez DIMANCHE. Article de M. FAIGUET. FÊTES MOBILES, ( Chronologie.) on appelle ainf celles qui ne font point fixement attachées à un cer- tain jour du même mois, mais qui changent de place chaque année : il yena quatre, Pâque, l’Afcenfion k la Pentecôte, la #ére- Dieu. Les trois dernieres dé: s72 FET pendent de la premiere, &c en font tohjouts à la mê- ne diffance ; d’où il s'enfuit que Pâque changeant de place, elles doivent en changer aufh. Pâque ne peut être plütôt,/que le 22 Mars, &c plütard que le 25 Avril, Voyez PASQUE. L’Afcenfon, qui vient qua- rante jours après, ne peut être plutôt que le 30 Avril, & plütard que le 3 Juin, La Pentecôte, qui vient dix jours apres l’Afcenfion, ne peut être plü- tôt que le ro Mai, & plütard que le 13 Juin. Et en- fin la Fére-Dieu, qui vient dix jours après la Pente- côte, ne peut être plütôt que le 21 Mai, & plütard que le 24 Juin. , La mobilité de la féxe de Pâque entraine celle de beaucoup d’autres Jours, entr'autres du mercredi des Cendres, premier jourde carême , de la Septua- geñime, Ge. Le mercredi des Cendres , qui eft le premier jour de carême, ne peut être plütôt que le 4 Février dans les années communes , & que le ÿ dans les biffexti- les; &'il ne peut être , dans quelqu’année que ce foit, plûtard que le 10 Mars. La Septuagefime ne peut être plütôt que le r8 Janvier dans les années communes , & que le 19 dans les biffextiles; & elle ne peut être plûtard que le 21 Février dans les an- nées communes, &c que le.22 dans les biffextiles. Il y a dans l’année un autre jour mobile qui ne dé- pend point de la fére de Pâque , c’eft le premier di- manche de l'Avent. Il doit y avoir quatre dimanches de l'Avent avant Noël ; ainf quand la lettre domini- cale eft B, & que par conféquent Noël tombe un di: manche (car B'eft la lettre du 25 Décembre), le qua- trieme dimanche de l’Avent doit être le dimanche d’auparavant : alors le premier dimanche de l’Avent tombe le 27 Novembre, c’eft le plütôt qu'il puiffe arriver. Au contraire quand la lettre dominicale eft A, & que par conféquent Noël tombe un lundi, le dimanche précédent eft le quatrieme dimanche de PAvent : alors le premier dimanche tombe le 3 Dé: cembre : c’eft le plütard qu’il puifle tomber. Il y a encore des fêres qui n'étant pas mobiles par elles-mêmes , le deviennent par les circonftances. Par exemple, l’Annonciation , qui eft le 25 Mars, quand elle tombe dans la quinzaine dé Pâque, fe re- met après la quinzaine, le lendemain de Quañimodo; ce qui arrive toutes les fois que Pâque tombe au-def- fus du 2 Avril. Les anciens computiftes, pour trouver les féres mobiles, fe fervoient de certains chiffres qu’ils appel- loient claves terminorum (voyez TERME PAScaAL), &c que les modernes ont appellés clés des fêtes mobles. On peut voir l’ufage de ces chiffres dans l’art de vérz- fier les dates, page xlij. de la préface. Xs font aujour- d’hui devenus inutiles, ou du moins on ne s’en fert plus. Pour les avoir, on ajoûte r9 au chiffre de l’an- née précédente ; & fi la fomme furpañle 39 jours, on Ôôte 30: ainfi le cycle de ces clés eft de dix-neuf ans. Elles font marquées pour chaque année dans Vars de vérifier les dares, jufqw'en 1582, année de la réformation du calendrier. On pourroit auf mettre parmi les féres mobiles les Quatre-tems , quitombent le premier mercrediaprès les Cendres , le premier après la Pentecôte, le pre- mer après le 14 Septembre , & le premier après le 13 Décembre (voyez QUATRE-TEMS) : mais cette dénomination de féfes mobiles n'eft point en nfage our les Quatre-tems. (0) - FêTE-Dieu, (Théol.\) fête très-folennelle inftituée pour rendre un culte particulier à Jéfus-Chrift dans le facrement de l’euchariftie. L’Eplife a toüjours cé- lébré la mémoire de l’inftitution de ce facrement le jeudi de la femaine-fainte, qui en eft comme l’anni- verfaire; mais parce que les longs offices &r les cé- sémonies lugubres de cette femaine ne lui permet- tent pas d’honorer çe myftere avec toute la folen- nitérequife, elle a jugé à propos d’enétablir une fée particuliere le jeudi d’après l’oftave de la Pentecô- té c’eit-à-dire après le dimanche de la Trinité. Ce füt le pape Urbain IV. françois de nation, né au dio+ cèfe de Troyes, qui inftitua cette folennité par toute PEglife l’an 12643 car elle l’étoit déjà auparavant dans celle de Liege, dont Urbain avoit été archi- diacre avant que d’être élevé au fouvyerain pontifi= cat. Il fit compofer pont cette fé£e, par faint Thomas d'Aquin , un office qui eff très-beau, & très-propré à infpirer la piété. Les vües de ce pape n'eurent pas d’abord tout le fuccès qu'il en attendoit, parce que l'Italie étoit alors violemment agitée par les faétions des Guelphes & des Gibelins ; maisau concile géné- fal de Vienne, tenu én 13171 fous le pape Clément V. en préfence des rois de France, d'Angleterre & d’Ars ragon , la bulle d'Urbain IV. fut confirmée ; & l’on. en ordonna l’exécution partoute l’Eghife, L'an 1316, le pape Jean XXIL.:y ajoütaune oftave pour en aug- menter la folennité, avec ofdre de porter publique- mentle S. Sacrementen proceflion; ce qui s’exécuté ordinairement avec beaucoup de pompe & dedécens ce, lesrues étanttapiffées & jonchées de fleurs, le cler: gé en bel ordre , & revêtu des plus richesornemens ; le faint Sacrement eft porté fous un dais, & d’efpace en efpace dans les rues &cles places publiques font des chapelles ou repofoirs fort ornés, où l’on fait une ftation que le célébrant termine par la bénédics tion du faint-facrement : dn la donne auffi tous les jours à là grande mefle &c le foir au falut pendant Poë&ave. Dans la plûpart des diocèfes de France il y à pendant cette même oétave des prédications, pour entretenir la foi du peuple fur le myftere de l’euchariftie. Cette fére fe célebre à Angers avec une magnificence extraordinaire ; & la proceflion, qu’on y nomme le facre, facrum , eft célébre par le con cours des peuples & des étrangers. On prétend qu’= elle y fut inftituée dès l’an 1019, pour faire amende honorable à Jefus-Chrift des erreurs de Berenger , ar- chidiacre de cette ville, & chef des facramentairess Voyez BERENGARIENS, (G) | FêTE pes MORTS o4 FESTIN DES MORTS, (Æ/F mod.) cérémonie de religion très-folennelle en l’hon« neur des morts, ufitée parmi les Sauvages d’Améri- que, qui fe renouvelle tous les huit ans parmi quel- ques nations, & tous les dix ans chez les Hurons 6£ les Iroquois. Voici la defcription qu’en donne le P. de Charles voix, dans fon journal d'ur voyage d'Amérique, pi 377, « Oncommence, dit cet auteur, par convenir » du lieu où fe fera l’aflemblée ; puis on choufit le » roi de la jére, dont le devoir eft de tout ordonner, » & de faire les invitations aux villages voifins. Le » jour marqué étant venu, les Sauvages s’aflemblent, » & vont proceflionnellement deux à deux au cime- »tiere. Là chacun travaille à découvrir les corps, » enfuite on demeure quelque tems à confiderer en » filence un fpeftacle fi capable de fournir les plus » férieufes réflexions. Les femmes interrompent les » premieres ce religieux filence, en jettant des cris » lamentables qui augmentent encore l’horreur dont » tout le monde eft pénétré, » Ce premier aûe fini, on prend ces cadavres, » on ramafle les offemens fecs & détachés, on les » met en paquets; & ceux qui font marqués pour » les porter, les chargent fur les épaules. S'il y a des » corps qui ne foient pas entierement corrompus, » on en détache les chairs pourries &c toutes les or- » dures ; on les lave, & on les enveloppe dans des » robes de caftors toutes neuves. Enfuite on s’en re. » tourne dans le même ordre qu’on avoit gardé en » venant ; & quand la proceffion eft rentrée dans Le » village, chacun dépofe dans fa cabane le dépôt » dont il étoit chargé, Pendant la marche, les fem s nes FET # més continuent leurs éjaculations , 8 les-hommes » donnent les mêmes marques de douleur qu’au jour ‘» de la mort de ceux dont ils viennent dé lever les » triftes refles : & ce fecond aûte eft fuivi d’un feftin # dans chaque cabane, eñ l'honneur des moïts de # fa famille. EU, » Les jours fuivans on eñ fait de publics, accom- » pagnés de danfes, de jeux » de combats, pour let » quels 1l y a des prix propoiés. De tems en tems on # jette de certains.cris, qu s'appellent 4s cris des » ames, On fait des préfens aux étrangets, parmi lef- » quels il y en a quelquefois qui font envoyés à 150 » lieues, & on en reçoit d’eux. On profite même de » ces occafons pour traiter des affaires communes, » ou de léleétion d’un chef... Tout, jufqu'’aux dan- » fes, y refpire je ne fai quoi de lugubre, & on y {ent » des cœurs percés de la plus vive douleur. ... Au » bout de quelques jours on fe rend encore procef: » fionnellement dans une grande falle du conleil, » dreflée exprès ; on y fufpend contre les patois, » les offemens &z les cadavres, dans le même état où » on les a tirés du cimetiere ; on y étale les préfens # deftinés pour les morts. Si parmi ces triftes reftes # 1] fe trouve ceux d’un chef, fon fuccefleur donne » un grand repas en fon nom, & chante {a chanfon. » En plufeurs endroits les corps font promenés de # bourgade en bourgade, & reçûs par-tout avec de » grandes démonftrations de douleur &z de tendrefle, » Par-tout on leur fait des préfens, 8 on les porte » enfin à l’endroit où ils doivent être dépofés pour #tobjours. . .. Toutes ces marches fe font au {on » des inftrumens, accompagné des plus belles voix, » & chacun y marche en cadence. ERA » La derniere & commune fépulture eft uné oran- #» de fofle qu'on tapifle des plus belles pelleteries & » de ce qu’on a de plus précieux. Les préfens deffinés » pour les morts, font placés à part. À mefuré que » la proceflion arrive , chaque famille s'arrange {ur » des efpeces d’échafauds dreflés autour de la fofie; #» & au moment que les corps font dépofés, les fem- # mes recommiencent à crier & à pleurer; enfuite # tous les affiftans defcendent dans la foie, &ül n’eft E" pérfonne qui n’en prenne ün peu de terre, qui fe # conferve précieufement. Ils s'imaginent qué cette » terre porte bonheur au jeu. Les corps & les offe- » mens font arrangés par Ordre, couverts de fonrru- # res toutes neuves, & par-deflus d'écorces, fur lef » quelles on jêtte des pierres, du bois & de la terre. # Chacun fe retire enfuite chez foi, Ge. ». | * Fêre pe L'Oon Es O, (Théo!) que l’on appelle autrement 4 fête de l'attente des couches de La Vierge. Elle fut établie en Efpagne au dixieme concile de _Tolede, tenu en 656 fous ie regne de Recefuinde, roi des Wifigoths alors maîtres de l’Efpagne, & du tems de S. Eugene Ilf, évêque de Tolede, On y or- donna que la fére de l’Annonciation de N. D, & de Flncarnation du Verbe divin, fe célébreroit huit _jours avant Noël ; parce que le 25 de Mars, auquel ces myfteres ont été accomplis , arrive ordinaire- “ment en carème, & aflez fouvent dans la femaine ‘dela Pañfion & dans la folennité de Pâque , où L’'E- glife eft occupée d’autres objets & de cérémomiés différentes, Saint Iidephonfe, fuccefleur d'Eugene, confirma cet établiffement , & ordonna que cette fée feroit aufh appellée de l’artente des couches de N, D, On lui donna encore le nom de féte des O ou de PO, * _ parce que durant cette oftave on chante après lé can- “tique Magnificar, chaque jour, une antienne folen- "nelle qui commence par ©, quieft une exclamation | _de joie & de defñr, comme O Adorai ! O rex gen- aium ! © radix Jeffe ! O clavis David ! &c. Dans léglife de Rome & dans celle dé France Fi | L n’y a point de fére particuliere fous ce nom ; mais de- _puis le 15 Décembre jufqu'au 23 inclufivement, on | Tome FL FET ss ÿ chante tous les jours À vêpres, au fon des cloches; une de ces antiennes. | ( . FÊTE DES An£s, ( if. mod.) cérémonie qu'on failoit anciénnement dans l’éghie cathédrale de Roüen le jour de Noël. C’étoit une proceflion où certains éccléfiaftiques choifis repréfentoient les pro phetes de l’ancien Teftament qui avoient prédit la naïflance du Meffie, Balaäm y paroifloit monté fur une énefle, & c’eft ce qui avoit donnélenomäla fêtes On ÿ voyoit aufli Zacharie, fainte Elifabeth., faint Jean-Baptifte, Siméon, la fybillé Erythiée, Virgile, à caufe de fon églogue, Sicelides Mufe, &ce. Na buchodonofor, & les trois enfans dans la fournaife: La proceflion; qui fortoit du cloître , étant entrée dans l’églife, s’arrêtoit entre un nombre de Perfon- nes qui étoient rangées des deux côtés pour marquer les Juifs & les Gentils, auxquels les chantres difoient quelques paroles ; puis ils appelloieñt Les prophetes l’un après l’autre , qui prononçoient chacun un paf fage touchant le Meflie. Ceux qui faifoient les autres perfonnages, s’avançoient en leurrang, les chantres leur farfant la demande, & chantantenfuiteles verfets quiié rapportoient aux Juifs & aux Gentils ; & après avoir répréfenté le miracle dé la fournaife, & fait parler Nabuchodonofor, la fybille paroifloit la der mere, puis tous les prophetes & les chœurs chan toient un motet qui terminoit la cérémonie. Ducan- ge, glof. (G) LTSHREDE à eee FÊTE DES FOUS , (Hiff. mod.) féjouiflance pleine de defordres, de groffieretés 8z d'impiétés, que les fous-diacres, les diacres & les prêtres même farfoient dans la plüpart des églifes durant l’ofice divin, prin: cipalement depuis les es de Noël jufqu'à l’Épi= phanie. | QE Et | . Ducäñge, dans fon gloflarre , en parle au mot ka: lende , & rematque qu'on la nommoit encore la fête des Jous-diacres.;-non pas qu'il n’y-eût qu'eux qui la fétaflent, mais par un mauvais jeu de mots tombant fur la débauche des diacres, & cette pointe figrifoit la fête des diacres faculs & LVres, m0 ni Cette fére étoit réellement d’une telle exfravagan-< ce, que le leftèur auroit peine à y ajoûter foi, sl n'étoit inftruit de l'ignorance & de la barbarie des fiecles qui ont précédé la renaïflance des Lettres en ÉFODE NE +Oÿ Qi re | Nos dévots ancêtres ne c'ovyoient pas deshonoret Dieu par les cérémonies boufonnes & groflieres que je vais décrire, dérivées prefque toutes du.-Pa- ganifme, introduites en des téms peu éclairés, & contre lefquelles lEglife à fouvent lancé fes foudres fans aucun fuccès. | 7. | Par la connoiffance des Saturnales on peut {e for- mer une idée de la fée des fous, ellé en étoit une imi- tation; &t les puérilités qui regnent encore dans quelques-unes de nos églifes le jour des-Innocens, ne font que des veitiges de la fête dont il s’agit ici. Comme dans les Satutnales les valets futoientles fonétions de leurs maîtres, de même dans la fére des fous les jeunes clercs 8 les autres miniftres intérieurs offcioient publiquement pendant certains Joufs cons facrés aux myfteres du Chriffianifime. . ” Il eft très difficile de fixer l’époque de la fre des fous, qui dégénéra fi promptement en abus mon£ trueux. Il fuffra de remarquer fur fon ancienneté que le concile de Tolede , tenu en 633, fi limpoffi- ble pour l’abolir ; &e que S. Anoultin, long-tems aus paravant , aVOit recommande qu'on châtiât ceux qui feroient convaincus de cette.impiéré. -Cedrenus, hifl. pag. 639. nous apprend que dans le dixieme fie. cle Fhéophylaéte, patriarche de Conftantinople, avoit introduit cette fére dans fon diocèfe ; d’où l'on peut juger fans peine qu’elle s’érendit de tous côtés dans l’églife greque comme dans la latine, nt, On élifoit dans les églhifes cathédrales, un évêque 574 F EUR ou un archevêque des fous, & fon éle&ion étoit confirmée par beaucoup de bouffonneries qui fer- voient de facre. Cet évêque élu officioit pontificale- ment , & donnoit la bénédiétion publique & folen- nelle au peuple , devant lequel il pottoit la mitre, la croffe, & même la croix archiépufcopale. Dans les églifes qui relevoient immédiatement du faint fiège, on élifoit un pape des fous, à qui l’on accordoit les ornemens de la papauté , afin qu'il pût agir &c officier folennellement, comme le faint pere. Des pontifes de cette efpece étoientaccompagnés d’un clergé aufi licentieux. Tous affftoient ces jours-là au fervice divin en habits de mafcarade ëc de comédie. Ceux-ci prenoient des habits de panto- mimes ; ceux-là fe mafquoient , fe barbouilloient le vifage, à deflein de faire peur ou defairerire. Quand la mefle étoit dite, ils couroïent, fautoient & dan- foient dans l’églife avec tant d'impudence, que quel- _Ques-uns n’avoient pas honte de fe mettre preique nuds : enfuite 1ls fe en trainer par les rues dans des tombereaux pleins d’ordures, pour en jetter à la populace qui s’aflembloit autour d'eux. Les plus h- bertins d’entre les féculiers fe mêloient parmi le cler- gé, pour jouer auff quelque perfonnage de fou en habit eccléfaftique. Ces abus vinrent jufqu’à {e glif- fer également dans les monafteres de moines &c de religieufes. En un mot, dit un favantauteur, c’étoit labomination de la defolation dans le lieu faint, & dans les perfonnes qui par leur état devoient avoir la conduite la plus fainte. | | Le portrait que nous venons de tracer des defor- dres de la fête des fous , loin d’être chargé, eft extrè- mement adouci ; le lecteur pourra s’en convaincre en lifant la lettre circulaire du 12 Mars 1444, adref fée au clergé du royaume par l’univerfité de Paris. On trouve cette lettre à la fuite des ouvrages de Pierre de Blois ; & Sauval, om. T1. pag. C24. en donne un extrait qui ne fufñt que trop fur cette ma- tiere. Cette lettre porte que pendant l'office divin les prêtres & les clercs étoient vêtus, les uns comme des bouffons , les autres en habits de femme , ou maf- qués d’une façon monftrueufe. Non contens de chan- ter dans le chœur des chanfons deshonnèêtes, 1ls man- geoient & joüoient aux. dés fur l’autel, à côte du prêtre qui célébroit la mefle. Ils mettoient des ordu- res dans les encenfoirs, & couroiïent autour de l’e- glife, fautant, riant, chantant , proférant des paro- les fales, & faifant mille poftures indécentes. Ils al- loient enfuite par toute la ville fe faire voir {ur des chariots. Quelquefois, comme on l’a dit, ils facroient un évêque ou pape des fous, qui célébroit l'office , & qui revêtu d’habits pontificaux, donnoit la bénédic- tion au peuple. Ces folies leur plaïfoient tant, & pa- roifloient à leurs yeux fi bien penfées & f. chrétien- nes, qu'ils regardoient comme excommunmiés ceux qui vouloient les profcrire. _ Dans le regiftre de 1404 de l’églife de S. Etienne de Dijon, on lit qu’à la fête des "n on faifoit une efpece de farce fur un théatre devant une églife, où on rafoit la barbe au préchantre des fous, & qu’on y difoit plufieurs obfcénités. Dans les regiftres dèrs2r, ibid, on voit que les vicaires couroient par les rues avec fifres, tambours & autres inftrumens, & por- toient des lanternes devant le préchantre des fous, à qui l'honneur de la fée appartenoit principale- ment. | Dans le fecond resiftre de l’églife cathédrale d’Au- tun, du fecréraire Rorarii, qui commence ên 1411 & finit en 1416, il eft dit qu'à la ére des fous, fo/lo- rum ,; on conduifoit un âne, & que lon chantoit, hé, fire âne, he, hé, & que plufieurs alloient à l'égiie déguifés en habits grotefques ; ce qui fut alors abro- gé, Cet âne étoit honoré d’une chape qu'on lui met- ; toit fur le dos. On nous a confervé la rnbrique qué l’on chantoit alors, & le P. Théophile Raynaud té- moigne l'avoir vü dans le rituel d’une de nos églifes métropolitaines, à Il y à un ancien manufcnit de l’églife de Sens, où l’on trouve l'office des fous tout entier, Enfin, pour abreger, prefque toutes les églifes de France ont célébré la féte des fous fans interruption pendant plufeurs fiecles durant l’oftavé des Rois, On l’a marquée de ce nom dans les livres des offices divins : feffum fatuorum in Epiphanié & ejus oüavis, Mais ce n’eft pas feulement en France que s’éten- dirent les abus de cette fée; 1ls paflerent la mer, & 1ls regnotent peut-être encore en Angleterre vers lan 1530: du moins dans un inventaire des orne: mens de l’églife d’Yorck, fait eh ce tems-là , 1l eff parlé d’une petite mitre &c d’un anneau pour l’évégue des fous. Ajoûtons ici que cette fére n'étoit pas célébrée moins ridiculement dans les autres parties fepten- trionales & méridionales de l’Europe, en Allemagne, en Efpagne , en Italie, & qu'il en refte encore çà &z là des traces que Le tems n’a point effacées. | Outre les jours de la Nativité de Notre Seigneur, de $. Etienne, de S. Jean l'Evangelifte , des Inno- cens, de la Circoncifion, de l'Epiphanie, ou de l’oc- tave des Innocens, que fe célébroit La fère des fous, il fe pratiquoit quelque chofe de femblable le jour de S. Nicolas & le jour de fainte Catherine dans di- vers diocèles , & particulierement dans cehu de Chartres. Tout le monde fait, dit M. Lancelor, 1/2. de l'acad. des Infeript. tome IV. qu'il s’étoit introduit pendant les fiecles d’ignorance, des fêtes différem= ment appellées des fous, des ânes , des innocens , des calendes. Cette différence venoit des jours &c des lieux où elles fe faifoient ; le plus fouvent c'étoit dans les féres de Noël, à la Circoncifion ou à l’'Epi- phanie. Quoique cette fére eût été taxée de paganifine & d’idolatrie par la Sorbonne en 1444, elle trouva des apologiftes qui en défendirent l'innocence par des raïfonnemens dignes de ces tems-là. Nos prédécef- feurs, difoientils, graves & faints perfonnages, ont toijours célébré cette fére ; pouvons-nous iuivre de meilleurs exemples ? D'ailleurs la folie qui nous eft naturelle, & qui femble née avec nous, fe difipe du moins une fois chaque année par cette douce ré- création; les tonneaux de vin creveroient , f onne leur ouvroit la bonde pour leur donner de l'air : nous fommes des tonneaux mal reliés, que le puiffant vin de la fagefle feroit rompre, fi nous le laifions bouillir par une dévotion continuelle. Il faut donc donner quelquefois de l'air à ce vin, de peur qu'il ne fe per- de & ne fe répande fans profit. ls L'auteur du curieux sraité contre le paganifine du roi-boit, prétend même qu'un doéteur de Théologie foûtint publiquement à Auxerre furla fin du xy. fie- cle, que la fére des fous n’étoit pas moins approuvée de Dieu que la fére de la Conception immaculée de Notre-Dame, outre qu’elle étoit d’une tout autre an- cienneté dans l’Epglife. z 2 4 Aufñ les cenfures des évêques des xiij. & xjv. fie- cles eurent fi peu d’efficace confre la pratique de {a fête des fous , que le concile de Sens, fenu en 1460 &en1485, en parle comme d’un abus pernicieux qu'il falloit néceflairement retrancher. # Ce fut feulement alors que les évêques , les papes & les conciles fe réunirent plus étroitement dans toute l’Europe, pour abroger les-extravagantes cé- rémonies de cette fée. Les conflitutions fynodales du diocète de Chartres, publiées en1550, ordon- nerent que l’on bannit des églifes les habits des fozs qui font de perionnages de théatre. Les ftatuts {y- nodaux de Lyon, en 1566 & 1577, défendirent ton- : FET tes les farces de la fére des fous dans les églifes, Lé | concile de Tolede , en 1566, entra dans le fentiment des autres conciles. Le concile provincial d'Aix, en 1585, ordonna que l’on.fit cefler dans les églifes, le jour de la fére des Innocens , tous les divertifle- mens, tous les jeux d’enfans &c de théatre qui y avoient fubffté jufqu’alors. Enfin le concile provin- cial de Bordeaux, tenu à Cognac en 1620, condam- na feverement les danfes & les autres pratiques ri- dicules qui fe faifoient encore dans ce diocèfe le jour de la fére des fous. | Les féculiers concourutrent avec le clergé pour faire cefler à jamais la fére des fous, comme le prouve l’atrêt du parlement de Dijon du 19 Janvier 1552: mais malgré tant de forces réunies, l’on peut dire que la renaïflance des Lettres contribua plus dans l’efpace dé cinquante ans à l’abolition de cette an- cienne & honteufe fére, que la puiffance eccléfiafti- que & féculiere dans le cours de mulle ans, Article de M, le Chevalier DE JA UCOURT. Nous allons joindre à ce mémoire , en faveur de plufieurs leteurs, la defcription de la féce des fous , telle qu’elle fe célébroit à Viviers, & cette defcrip- tion fera tirée du vieux rituel manufcrit dé cette églife. | Hat Fry: Elle commençoit par l'élection d’un abbé du cler- gé; c’étoit le bas-chœur, les jeunes chanoines, les clercs & enfans-de-chœur qui le faifoient. L’abbé élù &c le Te Deum chanté, on le portoit fur Les épau- les dans la maiïfon où tout le refte du chapitre étoit aflemblé. Tout le monde fe levoit à fon arrivée, l’é- vêque luimême,, sil y étoit préfent. Cela étoit fuivi d’une ample colation, après laquelle lé haut-chœur d'un côté & le bas-chœur de Pautre, commençoient à chanter certaines paroles qui n’avoient aucune fuite : Jéd dum éarum cantus fœpius 6 frequentius per partes continuando cañtatur, tanto amplius afcendendo rani- me, l’habitude le {oûtient:,.& l’opiniätreté defes travaux devient la fource intariffable deleuts.for- ces, deleur pouvoirs; de leurgrandeur, Tls:doivient donc lui donner une grande. part auxréjouiflances folennelles , ‘puifqu’il a été l’infframentifécret des avantragesglorieux qui les caufent: Foyes RÊ DES DE LA COUR,DE LA VILLE, DES PRINCES DE FRaN- “GE; &c, FESTINS ROYAUX, ILLUMINATIONS, 6x, FEU D'ARTIFICE, (B) 0: PAST à n € ‘580 F ET Fêres pe La Cour DE FRANCE: Les toutnois & les carroufels, ces féres guerrieres &c'magmifiques, avoient produit à la cour de France en lannée ïsso"un évenement trop tragique pour qu'on püt | fonger à les y faire fervir fouvent dans les réjotif- fances folennelles. Aïnfi'les bals, les mafcarades, &c fur- tout les ballets qui n’entraînoient après eux aucun-danger , & que la reine Catherine de Médicis avoit connus à Florence, furent pendant plus de 50 ans la reflource de la galanterie & de la magniñi- cence francoiïfe, L’aîné des enfans de Henri IL. ne repna que dix- fept mois ; il en coûta :peu de foins à fa mere pour le diftraire du gouvernement , que fon imbéaillité 4 le mettoit hors d'état de lui difputer ; mais le carae- tere de Charles IX. prince fougueux, qui joignoit . à quelque efpritun penchant naturel pourles Beaux- | Arts , tint dans un mouvement continuel l’adrefle ; les reflources, la politique dela reine: elle imagi- na fêtes fur fétes pour lui faire perdre de vüe fans cefle le feul objet dont elle auroit dû toijours l'oc- cuper, Henri III. devoit tout à fa mere ; il n’étoit point naturellement ingrat ; il avoit la pente la plus forte au libertinage , un goût exceflif pour le plaifir, l'efprit leger , le cœur gâté, lame foible. Catherine profita de cette vertu &z de ces vices pour arriver à {es fins : elle mitenjeulesfeftins, les bals, les maf- carades , les balets , les femmes les plusbelles , les courtifans les plus libertins. Elle endormit ainfi ce prince malheureux fur unthrone entouré de préci- pices : fa vie ne fut qu'un long fommeil embelli quel- quefois par des images riantes, & troublé plus fou- vent par des fonges funeftes, TO Pour remplir l’objet que je me propofe ici, je crois devoir choïfir parmi Le grand nombre de féres qui furent imaginées durant ce regne, celles qu'on donna en 1581 pour le mariage du duc de Joyeufe & de Marguerite de Lorraine , belle-fœur du roi. Je ne fais au refte que.copier d’un hiftorien contem- porain les détails que je vais écrire. à 5 «Le lundi 18 Septembre 1581, le duc de Joyeufe # & Marguerite de Lorraine, fille de Nicolas de Vau- 5 démont ; fœur de la reine , furent fancés en la # chambre. de la reine, & le dimanche fnvant fu- # rent mariés à trois heures après-midi. en Jaiparoïf- » fe de S. Germain de l’Auxerrois. À » Le roi mena la mariée au moûtier ,fuivie de la Le mardi 18 Oétobre:, le: cardinal de, Bourbon wcefles, 8 les mariés devoient paffer dulouvre au : FET » ce bean char tomphant deveit êtte tire par-def- » {us l’eau par d'autres bateaux déguifés “en che- » vaux marins, tritons, dauphins, baleines, & au # tres monflres marins, en nombre de vingt-quatre, » en aucun defquels étoient portés àcouvert au ven: » tre defdits monftres, trompettes, clairons, cor- » nets, violons, haut-bois, & plufieurs muficiens » d'excellence, même quelques tireurs de feux artis wficiels , qui pendant le trajet devoient donner, » maints pañle-tems, tant au roi qu'à 50000 perfon- “nes qui étoient fut le rivage ; mais le myftere ne » fut pas bien joué , & ne put-on faire marcher les #animaux, ainfi qu’on l’avoit projetté ; de façon # que le roi ayant attendu depuis quatre heures du » foir jufqu’à fept, aux Tuileries, le mouvement & # acheminement de ces animaux, fans en apperce- »voir aucun effet, dépité , dit, qu'il voyoit bien » que c’étoient des bêtes qui commandoient à d’au- »tres bêtes: & étant montéen coche, s’entalla avec » la reine & toute la fuite, au feftin qui fut le plus » magnifique de tous, nommément en ce que ledit # cardinal fit repréfenter un jardin artificiel garni de » fleurs 6c de fruits, comme fi c’eût été en Mai ow » en Juillet & Août. » Le dimanche 15 Oëtobre, feftin de la reine dans » le Louvre; &c après le feftin, le ballet de Circé » Gt de fes nymphes ». | PAT - Letriomphe de Jupiter & de Minerve étoit le fu= jet de ce ballet, qui fut donné fous le titre! de ba//er comique \de la reine; il fut repréfenté dans la grande falle de Bourbon par la reine , les princefles., les princes, & les plus srands féigneurs dela cour. Balthazar de Boïsjoyenx , qui étoit'dans ce tems un des meilleurs jotieurs de violon del’Eñropé, fut l’inventeur du fujet , &c°en difpofa touté l’ordon- nance. L'ouvrage eft imprimé, & il eff plein d’in- ventions d’efprit; il en communiqua le plan à la rei- ne , qui lapprouva: enfin tout ce qui peut démon- trer la propriété d’une compofition {e trouve pour lui dans l’hiftoire. D’Aubioné cependant, dans fa vie qui eft àla tête du baron de Fœnefte., fe prétend . bardiment auteur de ce ballet. Nous datons de loir pouf les vols littéraires, I - .& Le lundi 16 , en la belle & grande lice dreflée » &c bâtie au jardin du Louvre , fe fit un combat de » quatorze blancs contre quatorze jaunes, à huit # heures du foir ,aux!flambeaux». Ep eT # Le mardi 17, autre combat à la pique, à l’eftoc; #au tronçon de la lance, à pie & àcheval; & le » jeudi 19, fut fait le bället des chevaux; auquel » les chevaux d’Efpagne ; courfiers , 6c autres en » combattant s’avançoient , {e retournoient , con- » tournoient au fonrês à la cadence des trompettes » & clairons, y ayant ëté dreflés cinq mois aupas # ravant, +4 us | » Tout cela fut beau &c plaifant : maïs là srande # excellence qui fe vitlés jours de mardi &'jeudi, ». fut la mufique de voix êc d'inftrumens la plus harz » monieufe & la-plus déliée qu'on ait jamais owie » (onla devoit au.goût & aux foins-de Baif); furent 55 auf les feux artificiels qui brillerent aveceffroya- #.ble épouvantement :êc contentement de toutes wperfonnes, fans qu'aucun en fût offenfé.»e . “La partie éclitanterde cette fée, quitarétéfarfie ipar l'hiftorien que j'ai copié, n'eftipas celle qui mé- ritoit lé plus d’éloges : 1ly en eut une-qului-fut très-fupérieure, 82 quiine la pasifräppe.t c314 115 eluba reine êc les princefles qui repréfentoient dans le ballet les nayades &zles néréides ,:terminerent ce fpeétacle par des préfens ingémeux| qu'elles :of- frirent aux princes &c feisneurs, qui, fous la feure de tritons , avoient danfé avec elles. C’étoient des ‘médailles d’or gravées avec aflez de finefle pour le tems: peut-être ne fera-t-on pas fâché d’én trouver ici FET ici quelqués-unes, Celle que la reine offrit au roi repréfentoit un dauphin qui nageoït fur les flots ; ces mots étoient gravés fur les revers: delphinum , ut rendoit admira- bles, jufqu’au 13 Février 1669, où il danfa pour la * ÉEee 582 FET ‘Sa grande ame fut frappée de ces quatre vers du ? Britannicus de Racine : Pour touteambition, pour vertu finguliere. Il excelle a conduire un char dans la carriere , _A difputer des prix 1ndignes de fes mains, _A Je donner lui-même en fpeëtacle aux Romains. ‘On:ne s’attachera point àrapporter les féres fi con- nues de ce regne éclatant; on fait dans les royaumes voïfins,comme enFrance, qu’elles furent l’époque de la grandeur de cetétat, de la gloire desArts, & dela fplendeur de l’Europe : elles font d’ailleurs mpri- mées dans tant de recueils différens ; nos peres nous les ont tant de fois retracées, & avec des tranfports d'amour & d’admiration fi exprefñifs, que le fouve- nir eneft refté gravé pour jamais dans les cœurs de tous les François. On fe contente donc de préfenter aux leéteurs une réflexion qu’ils ont peut - être déjà faite ; mais au moins n’eft-elle , fi l'on ne fe trompe, écrite encore nulle part. Louis XIV. qui porta jufqu’au plus haut degré le gare 8 noble talent de la repréfentation, eutla bon- té-conftante dans toutes les fêxes fuperbes, qui char- merent fa cour & qui étonnerent l’Europe, de faire inviter les femmes de la ville les plus diftinguées , & de les y faire placer fans les féparer des femmes de la cour. Il honoroit ainf, dans la plus belle moitié d'eux-mêmes, ces hommes fages, qui gouvernoient fous fes yeux une nation heureufe. Que ces magnifi- ques fpeétacles doivent charmer un bon citoyen, quand ils lui offrent ainf entre-mêlés dans le mêmé tableau, ces nomsilluftres qui lui rappellent à la fois 8£ nos jours de viétoire, &c les fources heureufes du doux calme dont nous jouiflons ! Voyez les mémoires du tems , & les diverfes relations des fêtes de Louis XIF, jur-cout de celle de 1668. La minorité de Louis XV. fournit peu d’occafions de fêtes : mais la cérémonie augufte de fon facre à Rheims, fit renaître la magnificence qu'on avoit vûe dans tout fon éclat, fous le regne floriffant de Louis XIV. Voy. FÊTES DES PRINCES DE LA COUR DE FRANCE, &c. Elle s’eft ainfi foûtenue dans toutes les circonf- tances pareïlles ; mais celles où elle offrit ce que la connoiïffance & l’amour des Arts peuvent faire ima- giner de plusutile & de plus agréable, femblent avoir été réfervées au fuccefleur du nom & des qualités brillantes du cardinal de Richelieu. En hu mille traits annonçoient à la cour l’homme aimable du fiecle, aux Arts un protecteur , à la France un géné- ral. En attendant ces tems de trouble, où l’ordre & la paix le fuivirent dans Geres, & ces jours de vengeance, Où une forterefle qu’on croyoit zmpré- nable devoit céder à fes efforts ,fon génie s’embellif- oit fans s’'amollir, par les jeux rians des Mufes & des Graces. Il éleva dans le grand manége la plus belle, la plus élégante, la plus commode falle de fpeétacle, dont la France eût encore joûi, Le théatre étoit vafte; le cadre aui le bordoit, de la plus élégante richeffe, & la découpure de la falle, d’une adrefle affez fingu- liere, pour que le Roi & toute la cour puffent voir d’un coup-d’œil le nombre incroyable de fpeétateurs qui s’empreflerent d’accourir aux divers fpeétacles qu'on y donna pendant tout l’hyver, C’eft-là qu’on pouvoit faire voir fucceflivement & avec dignité les chefs-d’œuvre immortels qui ont illuftré la France, autant que l'étendue de fon pou- voir, & plus, peut-être, que fes viétoires. C'étoit fans doute le projet honorable de M. le maréchal de Richelieu. Une falle de théatre une fois élevée le fuppole. La fére du moment n’étoit qu'un prétexte xefpettable, pour procurer à jamais aux Beaux-Arts un afyle digne d'eux, dans une çour qui les çonnoit & qui les aime, Une impulfon de goût & de génie déterrmina d’a= bord lilluftre ordonnateur de cette fre, à raflem- bler , par un enchaînement théatral, tous Les geñ- res dramatiques. | D: Il eft beau d’avoir imaginé un enfemble compoié de différentes parties, qui, féparées les unes des au- tres, forment pout l'ordinaire toutes les efpeces con: nues, L'idée vafte d’un pareil fpeétacle, ne pouvoit naître que dans l’efprit d’un homme capable des plus gtandes chofes : & fi, à quelques égards, exécution. ne fut pas auffi admirable qu’on pouvoit l’attendre, fi les efforts redoublés des deux plus beaux génies de notre fiecle, qui furent employés à cetouvrage, ont épuifé leurs reflources fans pouvoir porter ce grand |: projet jufqu’à la derniere perfeétion, cet évenement a du moins cet avantase pour les Arts, qu'il leur 8e p » q annonce limpofhbilité d’une pareille entreprife pour l'avenir. dd La nouvelle falle dé fpeétacle, conftruite avec Ia rapidité la plus furprenante, par un eflor inattendu de méchanique, fe métamorphofoit à la volonté en une falle étendue & magnifique de bal. Peu de mo= mens après y avoir vù la repréfentation pompeufé & touchante d’Armide, on y trouvoit un bal Le plus nombreux & lé mieux ordonné. Les amufemens va- riés & choifis fe fuccédoient ainf tous les jours; & la lumiere éclatante des illuminations , imaginées avec goût , embellies par mille nouveaux defleins , relatifs à la circonftance, & dont la riche &c promp- te exécution paroïfloit être un enchantement, pré- toit aux nuits Les plus fombres tous les charmes des plus beaux jours. Foyez SALLE DE SPECTACLE, IL- LUMINATION , FEU D'ARTIFICE , G:c. Le ton de magnificence étoit pris, & les fuccef- feurs de M. le maréchal de Richelieu avotent dans leur cœur le même defir dé plaire, dans leur efprit un fonds de connoïffances capables de le bien foùte: nir, & cette portion rare de goût, qui dans ces oc: cafions devient toïjours comme une éfpece de miné abondante de moyens & de reflources. M. le duc d’'Aumont, premier gentilhommme de la chambre, qui fuccéda à M. le maréchal de Ri- chelieu, tenta une grande partie de ce que celui-ci avoit courageufement imaginé ; mais il eut l’adrefle de recourir au feul moyen qui pouvoit lui procurer le fuccès , & il fut éviter l’obftacle qui devoit le fai- re échoüer, Dans un grand théatre , avec d’excel-. lens artiftes, des aéteurs pleins de zele & detalens, que ne peut-on pas efpérer du fecours du merveil- Jeux, pourvû qu’on fache s’abitenir de le gâter par le mélange burlefque du comique? Sur ce principe, M. le duc d’Aumont fit travailler à un ouvrage, dont il n’y avoit point de modele. Un combat continuel de l’art & de la nature en étoit le fond, l’amour en étoit l'ame, & le triomphe de la nature en fut le dés nouement, | On n’a point yù à la fois fur les théatres de l'Eu- rope un pareil affemblage de mouvemens & de ma- chines , fi capables de répandre une aimable iliu- fion , ni des décorations d’un deffein plus brillant , plus agréable & plus fufceptible d'expreffion. Les meilleurs chanteurs de l’opéra ; les aéteurs de no- tre théatre les plus frs de plaire; tous ceux qui brilloient dans la danfe françoife , la feule que le génie ait inventée, & que le goût puifle adopter, furent entre-mêlés avec choix dans le cours de ce fuperbe fpeîacle, Auf vit-on Z ulifea amufer leroi, plaire à la cour, mériter les fuffrages de tous les: amateurs des Arts, &C captiver ceux de nos meil= leurs artiftes. Le zele de M. le duc de Gefvres fut éclairé, ar dent, & foûtenu, comme l’avoit été celui de fes pré- déceffeurs ; il fembloit que le Roi ne fe fervit que de la même main pour faire éclater aux yeux de l’Eu- rope fon amour pour les Arts, & fa magnificence. à Le 24 mariage de M. le Dauphin en 1747 ouvrit une carriere nouvelle à M. le duc de Gefvres , & il la remplit de la maniere la plus glorieufe. Les bals parès & mafqués donnés avec l’ordre le plus defira- ble, de brillantes illuminations , voyez ILLUMINA- TION ; les feux d’artifice embellis par des deffeins nouveaux , voyez FEU D’ARTIFICE; tout cela pré- paré fans embarras, fans confufon , confervant dans l'exécution cet air enchanteur d’aifance, qui fait toûjours le charme de ces pompeux amunfemens, ne furent pas les feuls plaifirs qui animerent le cours de ces fêtes, Le théatre du manege fournir encore à M. le duc de Gefvres des reflources dignes defon goût & de celui d’une cour éclairée. Outre les chefs-d’œuvre duthéatre françois, qu’on vit fe fuccéder fur un autre théatre moins vafte d’une maniere capable de rendre leurs beautés en- core plus féduifantes , les opéra de la plus grande réputation firentrevivre fur le théatre du manége l’an- cienne gloire de Quinault, créateur de ce beau gen- re, 6 de Lulli, qui lui prêta tous ces embelliffe- mens nobles & fimples qui annoncent le génie ëc la fupériorité qu’il avoit acquife fur tous les muficiens de fon tems. M. le duc de Gefvres fit plus; il voulut montrer combien il defiroit d'encourager les beaux Arts mo- dernes,, & il fit repréfenter deux grands ballets nou- Veaux, relatifs à la ére augufte qu'on célebroit, avec toute la dépenfe, l’habileté , & le goût dont ces deux ouvrages étoient fufceptibles. L'année galante fit l'ouverture des féres & du théatre ; les féres de l’hy- men & de l’âmour furent choïfies pour en faire la clôture. Ainfi ce théatre, fuperbe édifice du goût de M. le maréchal de Richelieu, étoit devenu l’objet des ef. forts & du zele de nos divers talens ; on y jouit tour- à-tour des charmes variés du beau chant françois, de {a pompe de fonfopéra, de toutes les graces de la danfe , du feu, de l’harmonieux accord de fes fymphonies » des prodiges des machines, de l’imita- tion habile de la nature dans toutes les décorations. On ne s’en tint point. aux ouvrages choïfis pour annoncer par de nobles allégories les fées qu’on vou- loit célebrer ; on prit tous ceux qu’on crut capables de varier les plaïfirs. M. le maréchal de Richelieu avoit fait fuccéder à la Princefle de Navarre , Le Tem= ple de la Gloire, & Jupiter vainqueur des T Hans ÿ fpeétacle magnifique, digne en tout de l’auteur in- gémeux & modefte (M. de Bonneval , pour lors intendant des menus-plaifrs du Roi), qui avoit eu la plus grande part à l’exécution des belles idées de M. le maréchal de Richelieu. Il eft honorable pour les gens du monde, qu'il fetrouve quelquefois parmi eux ,; des hommes auffi éclairés fur les Arts. On vit avec la fatisfaétion la plus vive ZeZindor, petit opéra dont les paroles & la mufque ont éré infpirées par les graces, & dont toutes les parties forment une foule de jolis tableaux de la plus douce volupté. | C'eft-là que parut pour la premiere fois Plarée, ce compoié extraordinaire de la plus noble & de la plus puiflante mufique , affemblage nouveau en France de grandes images & de tableaux ridicules, ouvrage produit par la gaieté, enfant de la faillie, & notre chef-d'œuvre de génie mufical qui n’eut pas alors tout le fuccès qu’il méritoit. Le ballet de La Félicité, allégorie ingénieufe de celle dont jouifloit la France , parut enfuite fous l’ad- miniftration de M. le duc d’Aumont, & Zulifca , dont nous avons parlé, couronna la beauté des fpe&a- cles de l’hyver 1746. On a détaillé l’année 1747. Les machines nouvelles qui, pendant le long cours CS de ces fêtes magnifiques, parurent les plus dignes de . Tome VI, FET 583 loïiange, furent, 1°, celle qui d’un coup-d’œil chan- geoit une belle falle de fpe&tacle en une magnifique! falle de bal: 2°, celle qui fervit aux travaux & à la chûte des Titans, dans l’opéra de M. de Bonneval » mis en mufique par M. de Blamont fur-inténdant de: celle:du Roi, auteur célebre des fêtes greques!êc ro- maines : 3°. les cataradtes du Nil & le débordement: de ce fleuve, Le vol rapide & furprenant du dieu qui pattoit dur haut des catarattes , & fe précipitoit aw milieu des flots irrités en maître fuprèmedétous ces torrens réunis pour {ervir fa colere, excita la fur- prife, & mérita le fuffrage de l’affemblée la: plus nombreufe & la plus auguite de l'univers. Cette mä= chine formoit le nœud du fécond âde des fêtes de l’'Hymen & de l'Amour, opéra de MM, de: Cahufae: &t Rameau , qui fit la clôture dés /éres de cette année. Elles furent fufpendues dans l'attente d’un bon. heur qui intérefloit tous les François. La groffeffé enfin de madame la dauphine:ranima leur Joie ; & M. le duc d’Aumont, pour lors premier gentilhom- me de la chambre de fervicel, eut ordre de faire les préparatifs des plaifirs éclatans , où la cour efpéroit de pouvoir fe livrer. FR Je vais tracer ici une forte d’efquifle de tous ces préparatifs, parce qu'ils peuvent donner une idée jufte des reffources du génie françois, & du-bon ca- rattere d’efprit de nos grands feigneurs dans les oc- cafions éclatantes. | On a vüune partie de ce qu’exécuta le goût ingé- meux de M. le duc d’Anmont dans fon année précé- dente. Voyons en peu de mots ce qu'il avoit déter- miné d'offrir au roi, dans l’efpéränce où l’on étoit: de la naïflance d’un duc de Bourgogne. L’hiftoire, les relations, les mémoires, nous apprennent ce que les hommes célebres ont fait. La Philofophie va plus loin; elle les examine les peint, & les juge fur ce qu'ils ont voulu faire, te » | M. le duc d'Aumont avoit choifi pour fervir de: théatre aux différens fpedacles qu'il avoit projettés,, le terrein le plus vafte du parc de Verfailles, & le pluspropre à la fois à fournir les agréables points de vie qu'il vouloit y ménager pour la cour, & pour la curiofité dés Françoisque l’amour national & la curiofité naturelle font courir à ces beaux fpec- tacles, D .74 La pièce immenfe des Suiffes étoit le premier lo cal où les yeux devoient être amufés pendant: plu fieurs heures par mille objets différens. Sur les bords de la piece des Suifles, en face de l’orangetie, on avoit placé une ville édifiée avec art, & fortifiée fuivant les regles antiques. Plufieurs fermes joignant les bords du baffin ; êle= vées de diftance en diftance fur les deux côtés , for- moient des amphithéatres furmontés pàt des terraf- fes ; elles portoient & foûtenoientles décorations qu’on avoit imaginées en beaux payfages coupés de palais, de maïfons , de cabanes même. Les parties iolées de ces décorations étoient des percées im- menfes que la difpofition des clairs ; des obfcurs CE des pofitions ingenieufes des lumieres devoient faire paroître à perte de vûe. Tous ces beaux préparatifs avoient pour objet lamufement du Roi, de la famille royale, & de la cour, qui devoient être placés dans l'orangerie, & de là multitude qui auroit occupé les terrafles fupé- rieures, tous les bas côtés de la piece des Suifles ; Éc. Voici Pingénieux , l’élégant, & magnifique atran< gement qui avoit été fait dans l’orangerie. En peripeétive de la piece des Suifles & de tou- te l'étendue de l’orangerie , on avoit élevé une grande galerie terminée par deux beaux fallons de chaque côté, & fuivie dans fes derrieres de toutes les pieces néceflaires pour le fervice. Un grand fal: FEee ÿ 534 FET Jon-dé forte ronde étoit au milieu de cette fuper- be galerie: l’intérieur des fallons, de la galerie, &c de toutes les parties accefloires, étoit décoré d’ar- chiteéture d'ordres compofés. Les pilaftres éroient peintsenlapis ; les chapiteaux, les bafes!, les-corni- ches’étoientrehauflés d’or ; & la frife peinte.en la- pisétoit ornée dé guirlandes de fleurs. : Dañslesparties accefloires, les panneaux étoient peints eñ breche violetre, & les bords d’architec- ture en blanc veiné. Les moulures étoient dorées , af queiles ornemens &c les accefloires. On avoit tafflemblé dans les plafonds les fujets les plus rianside l'Hifiôire & de la Fable: ils étoient comme encadiés par des chaînes de fleurs peintes en colorisy portéesipar des grouppes d’amours &r de génies joüans , avec leurs divers attributs. Lesntrumeaux & les panneaux étoient couverts des glaces les plus-belles ; & on y avoit multiplié les girandoles & les luftres, autant que la fymmé- trie &c les places l’avoient permis. C’eft dans le fallon du milieu descette galerie que devoit être dreflée la table du banquet royal. L’extérieur de ces édifices orné d’une noble ar- chite@ure } étoit décoré: deriches pentes à la tur- que, avec portiques, pilaftres, bandeaux, architra- ves, corniches, & plufieurs grouppes de figures allé- goriques à la fée. Tous les ornemensenfleurs étoient peints en coloris ; tous les autres étoient rehauflés d’or: au tout intérieur de l’orangerie, en face de la galerie , on avoit conftruit un portique élégant dont les colonnes féparées éroient fermées par des cloi- fons peintes des attributs ‘des .diverfes nations de l'Europe. Lesryoûtes repréfentoient l'air, & des gé- nies en grouppes variés & galans , qui portoient les fleurs & les fruits que ces divers climats produifent. Dans les côtés étoient une immenfe quantité de gi- sandoles cachées par la bâtifle ingénieufe, à diffé- rens étages, fur lefquelsétoient étalés des marchan- difes, bijoux, tableaux , étoffes, é:c. des pays aux- quels elles étoient cenfées appartenir. . Dans le fond étoit élevé ün théatre ; 1l y en avoit encore un dans le milieu & àchacun des côtés : aux quatre coins étoient des amphithéatres remplis de mufciens habillés richement , avec des habits des quatre parties de l’Europe. Tout le refte étoit defti- né aux différens objets de modes , d’induftrie, de magnificence, & dé luxé,qui caraétérifent les mœurs &c les ufages des divers habitans de cette belle par- tie de l'univers. Au moment que le roi feroit arrivé, cinquante vaifleaux équipés richement à l’antique, de gran- deurs & de formes différentes ; vingt frégates &c au- | tant de galeres portant des troupes innombrables de guerriers répandus fur les ponts & armés a la gre- que, auroient paru courir à pleines voiles contre la ville bâtie : le feu de ces vaifleaux & celui de la ville étoit compofé par un artifice fingulier ,.que la fumée ne devoit point obfeurcir, & qui auroit lai fé voir fans confufion tous fes deffeins & tous fes effets. Les affaillans après les plus grands efforts, &c malgré la défenfe opiniâtre de la ville , étoient ce- pendant vainqueurs ; la ville étoit prife , faccagée , détruite; & fur fes débris s’élevoit tout-à-coup un riche palais à jour. Voyez FEU D’ARTIFICE. Le feftin alors devoit être fervi; & comme un chan- gement rapide de théatre, toutes les différentes parties de l’orangerie, telles qu'on les a dépeintes, fe trou- voient frappées de lumiere ; le palais magique du fond de la piece des Suifles , les fermes qui repréfen- toient à fes côtés les divers payfages, la fuite de- maïfons , les coupures de campagne , &c. quon a expliquées plus haut, fe trouvoient éclairés fur les divers deffeins de cette conftruétion , ou fuivant les différentes formes des arbres dont la campagne étoit couverte. \ Les déux côtés du château, toute [a partie des jardins qui aboutifloit en angle fur l’orangerie & fur la piece des Suifles , étoient remplis de lumieres qu deffinoient les attributs de l’amour & ceux de l’hymen, Des guches couvertes d’abeilles figurées par des lampions du pluspetit calibre &c multipliées à l'infini, offroient une allégorie ingénieufe êc fail- Jante de la fére qu'on célébroit , & de l’abondance des biens qui devoient la fuivre. Les trompettes, les tymbales, & les corps de mufque des quatre coins de lorangerie, devorent faireretentir les airs pendant que le Roi, la Reine, & Îa famille royale, dans le fallon du milieu , & toute la cour, à vingt autres ta- bles: différentes , jouiroient du fervice le plus ex- quis. Après le foupé, le premier coup-d’œilauroit fait voir cette immenfité de deffeins formés au loin par la lumiere , & cette foule de perfonnages répandus dans l’enceinte de l’orangerie repréfentant les diffé- rentes nations de l’Europe, & placés avec ordre dans les cafes brillantes où ils avoient été diftribués. On devoit trouver , au fortir de la galerie, en jotuffant de la vüe de toutes les richefles étrangeres, qui avoient été raflemblées fous les beaux porti- ques, un magnifique opéra, qui, au moment de l’at- rivée du roi, auroit commencé fon fpeétacle. Au fortir du grandthéatre, la cour auroit fuivi le Roi fous tous les portiques : les étoffes, le goût , les meubles élégans,les bijoux de prix, auroient été dif= tribués par une lotterie amufante & pleine de galan- terie, à toutes les dames & à rous les feigneurs de la cour. Le magnifique fpeétacle de ce féjour , après qu’- on auroit remonté le grandefcalier, & qu’on auroit apperçà lillumination du baflin , de l'orangerie , des deux faces du château , & des deux parties des jar- dins qui y répondent , auroit fervi de clôture aux fêtes furprenantes de ce jour tant defiré. L’attente de la nation fut retardée d’une année: &c alors des circonftances qui mous font inconnues lierent fans doute les mains zélées des ordonna- teurs. Sans autre fére qu’un grand feu d'artifice, ils laiflerent la cour & la ville fe livrer aux vifs tranf- ports de joie que la naïflance d’un prince avoit fait pafler dans les cœurs de tous les François. Voyez FÊTES DE LA VILLE DE PARIS. Les douceurs de la paix & un accroiflement de bonheur, par la naiflance de Monfeigneur le duc de Berry, firent renaître le goût pour les plaifirs. M. le duc d’Aumont fut chargé en 1754 des prépara- tifs des fpeétacles. Le théatre de Fontainebleau fut repris fous œuvre , & exerça l’adrefle féconde du fieur Arnoult , machinifte du roi , aidée des fois a@tifs de l’ordonnateur & du zele infatigable des exécutans. On vit repréfenter avec la plus grande magnificence, fix différens opéra françois qui étoient entremêlés les jours qu'ils laifloient libres des plus excellentes tragédies 8 comédies de notre théatre, L'ouverture de ce théatre fut faite par la naïf[an- ce d’Oftris , prologue allégorique à.la naïffance de monfeigneur le duc de Berry ; on en avoit chargé les auteurs du ballet des fétes de l’hymen & de la- mour , qui avoient fait la clôture des féses du maria- ge : ainf les talens modernes furent appellés dans les lieux même où les anciens étoient f glorieufe- ment applaudis. Le petit opéra d’Aracréon, ou- vrage de ces deux auteurs; A/cimadure, opéra en trois actes précédé d’un prologue, &t en langue languedocienne , de M. Mondonville, eurent lhon- neur de {e trouver à la fuite de Théfée, cet ouvra= ge fi fort d’adion; d’A4/cefte , le chef-d'œuvre du merveilleux & du pathétique; enfin de Théris, opé- ra renommé du célebre M. de Fontenelle. On a vû ce poëte philofophe emprunter la main des graces pour offrir la lumiere au dernier fiecle, IL jouit à la fois de l'honneur de lavoir éclairé, & des pro- grès rapides que doivent à fes efforts les Lettres, les Arts, & les Sciences dans le nôtre. M. Blondel de Gagny, Intendant pour lors des me- nus-plaifirs du Roi, feconda tout le zele de ordonna: teur. Par malheur pour les Arts & les talens, qu'il fait difcerner & qu'il aime , 1l a préféré le repos aux agrémens dont il étoit für de jouir dans l'exercice d'une charge à laquelle il étoit propre. Tous les fu: jets différens qui pendant cinquante jours avoient déployé leurs talens & leurs efforts pour contribuer au grand fuccès de tant d'ouvrages , fe retirerent comblés d’éloges , encouragés par mille attentions, récompenfés avec libéralité. (83) i FÊTES DE LA VILLE DE PARIS. On a vû dans tous les tems le zele & la magnificence fournir à la capitale de ce royaume des moyens éclatans de fignaler fon zele & {on amour pour nos rois. L’h1f- toire de tous les regnes rappelle aux Parifiens quel- que heureufe circonftance que leurs magiftrats ont célébrée par des, féres. Notre objet nous borne à ne parler que de celles qui peuvent honorer ou éclairer les Arts. Le mariage de Madame, infante , offrit à feu M. Turgotune occafon d’en donner une de ce genre; on croit devoir la décrire avec quelque détail. L’adminiftration de ce magïftrat fera toûjours trop chere aux vrais citoyens, pour qu’on puifle crain- dre à fon égard d’en trop dire. ” Le Roi, toute la famille royale lui firent efpérer d’honorer {es fêtes de leur préfence; il crut devoir ne leur offrir que des objets dignes d’eux. On étoit en ufage de prendre l’hôtel-de-ville pour le centre des réjouiflances publiques. Les an- Ciennes rubriques , que les efprits médiocres réve- rent comme des lois facrées, ne font pour les têtes fortes que des abus ; leur deftruction eft le premier degré par lequel ils montent bientôt aux plus gran- des chofes. Telle fut la maniere conftante dont M, Turgot fe peignit aux François, pendant le cours de {es brillantes prevôtés. IL penfa qu'une belle fére ne pouvoit être placée fur un terrein trop beau, & il choïfit l’éperon du pont-neuf fur lequel la ftatue d'Henri IV. eft élevée, pour former le point de vûe principal de fon plan. Ce lieu , par fon étendue, par la riche décora- tion de divers édifices qu'il domine & qui l’envi- ronnent , fur-tout par le baflin régulier fur lequel il eftéleve , pouvoit faire naître à un ordonnateur de la trempe de celui-ci, les riantes idées des plus fin- guhers fpeétacles. Voici celles qu'il déploya aux yeux les plus dignes de les admirer. On vit d’abord s'élever rapidement fur cette efpece d’efplanade un temple confacré à l’hymen ; il étoit dans le ton antique ; fes portiques étoientde cent-vingt piés de face, & de quatre-vingt piés de haut , fans y comprendre la hauteur de l'appui & de la terrafle de l'éperon , qui fervoit de bafe à tout édifice, & qui avoit quarante piés de hauteur. Le prenuer ordre du temple étoit compofé de trente-deux colonnes d'ordre dorique, de quatre piés de diametre & trente-trois piés de fu, formant un quarré long de huit colonnes de face, fur quatre de retour. Elles fervoient d’appui à une galerie en terrafle de cent cinq piés de long , ornée de diftance en dif- tance de belles ftatues fur leurs piés-d’eftaux. Au deflus de la terrafle , & à l’à-plomb des colonnes du milieu, s’élevoitun focle antique formé de divers compartimens ornés de bas-reliefs | & couronné de douze vafes. Deux maflifs étoient bâtis dans l’intérieur, afin d’y pratiquer des efcaliers commodes. Le focle au -xefte formoit une feconde terrafle de retour avec F ET 585 lés bafes , chapiteaux, entablemens , & baluftrades, fervans d'appui à une galerie en terrafle de cent cinq piés de long, divifée par des pié-d’eftaux. Au de. fus de cetteterraffe , & àl’A-plomb des colonnes du milieu, s’'élevoit un focle en attique, formé de com partimens ornés de bas-reliefs, & couronné de dou- ze vales ; deux corps folides étoient conftruits dans l’intérieur, dans léfquels on avoit pratiqué des ef- cahiers. Et ET: Toute la conftrution de cet édifice étoit en re- lief, ainfi que les plafonds: enrichis de cOmparti= mens en mofaique, guillochés, rofettes, feftons, &e.à limitation des anciens temples , & tels qu’on le voit au panthéon, dont on avoit imité les ornemens ; à la referve cependant des bafes ‘que l’on jugea à pro- pos de donner aux colonnes, pour s’accommoder à l’ufage du fiecle: elles y furent élevées fur des fo- cles. d'environ quatre piés: de haut, fervans comme dé repos aux baluftrades de même hauteur qui étoient entre: les entre-colonnemens. C’eft la feule différence que le nouvel édifice eût avec ceux de l'antiquité, où les colonnes d’ordre dorique étoient LS toûjours pofées fur le rez-de-chauflée, quoi- que fans bafe. A cela près , toutes les proportions y furent très-bien gardées. Ces colonnes avoient huit diametres un quart de longueur , qui eft la vérita- ble proportion que l’efpace des entre-colonnemens exige de cette ordonnance : il devoit y avoir un fe- cond ordre ionique; mais le tems trop court pour lexécution!, força de s’en tenir au premier ordre do- rique, qui fe grouppant avec le mañif, pour monter au haut de Pédifice , formoit un très - beau quarré long. | Ving-huit ftatues ifolées ; de ronde boffe , de dix piés de proportion, repréfentant diverfes divinités avec leurs fymboles & attributs, étoient pofées fur les pié-d’eftaux de la baluftrade, à l’à-plomb des co- lonnes. On préféra pour tout cet édifice & pour fes orne- mens , la couleur de pierre blanche à celle des diffé- rens marbres qu’on auroit pà imiter ; outre que la couleur blanche a toûjours plus de relief, {ur-tout aux lumieres & dans les ténebres, la vraifemblance eft aufli plus naturelle & lillufion plus certaine : auf ce temple faifoit-il l’effet d’un édifice réel ,conf- truit depuis long-tems dans la plus noble: fimplicité de l'antique fans ornement poftiche, & fans mélange d’aucun faux brillant. Telle renaîtra de nos jours la belle & noble Architeëture ; nous la revetrons fortir des mains d’un moderne qui manquoit à la gloire de la nation: le choix éclairé de M. le marquis de Ma- rigny à fü le mettre à fa place. C’eft-là le vrai coup de maître dans l’ordonnateur. Le talent une fois pla- cé , les beautés de l’art pour éclore en foule n’ont befoin que du tems. La terraffe en faillie qui portoit le temple, étoit décorée en face d’une architeéture qui formoit trois arcades 87 deux pilaftres en avant-corps dans les an- gles: on voyoit aufli dans chacun des deux côtés, une arcade accompagnée de fes pilaftres. Toute cette décoration étoit formée par des refends & boffages ruftiques , & elle étoit parfaitement d’accord avec le temple. Tous les membres de l’architeéture étoient deffinés par des lampions; & l’intérieur des arcades, à la hauteur de l’impofte , étoient préparées pour donner dans le tems une libre iffuë à des cafcades, des nappes, des torrens de feu, qui firent un effet aufh agréable que furprenant. Sur la terrafle du temple s’élevoit un attique porté. par des colonnes intérieures , & orné de panneaux chargés de bas-reliefs : des vafes ornés de fculpture étoient pofés au haut de l’attique , à l’à-plomb des colonnes. Les corps folides des efcaliers étoient ornés d’ar- 556 FET chitedure & de bas-réliefs, de niches, dedtatues, Êc, x à Aux deux côtés deicetédifice s’élevoient, le long des parapets du pont-neuf, trenre-fixipyramides , dont dix-huit de quarante piés de haut, & dix-huit de vingt-fix, qui fe joignoient par de grandes con- foles | & qui portoient des vafes fur leur fommet: Cette décoration ,:préparée particulierement pour lillumination, accompagnoit le bâtiment du milieu; elle étoit du deffein de feu M. Gabriel; premier ar- chite@te du Roi : la premiere étoit du chevalier Ser- vandoni, Décoration de la Riviere, iluminarion, 8cc. Dans le milieu du.canalque forme la Seine, &c vis-à-vis le balcon préparé-pour leurs Majeftés , s’élevoit un temple tranfparent, compofé de huit portiques en arcades & pilaftres, avec des figures relatives au fujet de la féze. Il formoit un fallon à huit pans , du milieu defquels s’élevoit une colonne tranf- parente qui avoit le-double de la hauteur-du. porti- que, & qui étoit terminée par un globe auff tranf- parent, femé de fleurs-de: lis & de tours. Tous les chaflis de ce temple , qui fembloit confacré à Apol- lon, étoient peints, & préfentoient aux yeux mille divers ornemens : 4l paroïfloit conftruit {ur.des ro- chers, entre lefquels on avoit pratiqué des efcaliers qui-y conduifoient. Ce fallon difpofé en gradins, & deftiné pour la mufque, étoit rempli d’un. très-grand nombre des plus habiles fymphoniftes. Le-concert commença d’u- ne maniere vive & bruyante, aumoment que le Roi parut fur {on balcon ; 1l fe fit entendre tant que dura la fére, & ne fut interrompu que par les acclamations réitérées du peuple. Entre le temple & Île pont-neuf étoient quatre grands bateaux en monflres marins ; 1l y en avoit quatre autres dans la même pofition entre le temple & le pont-royal, & tout-à-coup on jouit du fpeéta- cle de divers combats des uns contre les autres: Ces monftres vomifloient de leurs gueules &t de leurs na- rines , des feux étincelans d’un volume prodigieux &t de diverfes couleurs : les-uns traçoient en l'air des figures fingulieres ; les autres tombant comme épuifés dans les eaux, y reprenoient une nouvelle force , & y formoient des pyramides &c des gerbes , de feu, des foleils, &c. Une joûte commença la fée, Il y avoit deux trou- pes de joûteurs, l’une à la droite, & l’autre à la gauche du temple. Chacune étoit compofée de vingt oûteurs & de trente-fix rameurs. Les maitres de la joûte étoient dans des bateaux particuliers. Tous les joûteurs étoient habillés de blanc uniformément, & à la legere ; leurs vêtemens , leurs bonnets & leurs jarretieres étoient ornés de touffes de rubans de dif- férentes couleurs, avec des écharpes de taffetas, &c. Ïls joûterent avec beaucoup d’adrefle, de force & de réfolution , & avec un zele & une ardeur admi- rables. La ville récompenfa les deux joûteurs viéto- tieux par un prix de la valeur de vingt piftoles cha- cun, & d’une médaille, A la premiere obfcurité de la nuit on vit paroïtre l’illumination ; elle embellifloit les mouvemens de la multitude , en éclairant les flots de ce peuple innom- brable répandu fur les quais. On joüifloit à-la - fois des lumieres qui éclairoient les échafauds, de celles qui brilloient aux fenêtres , aux balcons, & fur des terrafles richement & ingémieufement ornées ; ce qui fe joignant à la variété des couleurs des habits, & à la parure recherchée & brillante des hommes & des femmes , dont la clarté des lumieres relevoit en- core l'éclat, faïfoit un coup-d’oœ1l &c divers points de perfpe@ive dont la vûe étoit éblouie & féduite. L'illumination commença par le temple de Phy- FET men, dont toût l’entablement étoit profilé de lumie: res , ainfi que les baluftrades , fur lefquelles s’éle- voient de grands luftres ou girandoles enifs dans les entre-colonnés, formés par plus de cent lumieres chacun. Toute la fuite des pyramides & pilaftres Chantournés , avec leuts pié-d’eftaux réunis par des confoles ; dont ona parlé, élevés fur les parapets du pont à droite & à gauche, étoit couverte d'illumi- nations , ainfi que toute la décoration de la terrafle en faillie , dont Les refends & les ceintres étoient pro- filés, & chargés de gros lampions & de terrines. - Ce qui répondoit parfaitement à la magnificence de cette illumination, c’étoit de voir Le long des deux quais , fur le pont-neuf & le pont-royal, des luftres compofés chacun:d’environ quatre-vingt groffes lu- ñeres , fufpendus aux mêmes endroits où l’on met ordinairement les lanternes de nuit. Mais voici uneillumination toute nouvelle. Qua- tre-vingts petits bâtimens de différentes formes, dont la mâture, les vergues, les agrès & les cordages étoient deffinés par de petites lanternes de verre, & mouvantes , au nombre de plus de dix mille, entre- rent dans le grand canal du côté du pont-neuf; & après diverfes marches figurées , elles fe diviferent en quatre quadrilles, & borderent les rivages de La Seine entre le pont-néuf & le pont-royal. Un même nombre de bateaux de formes fingulie- res, & chargés de divers artifices, fe mêlerent avec {ymmétrie aux premiers ; le fallon oétogone , tranf parent, paroïfloit comme au centre de cette brillante ê&c galante fée, & fembloit fortir du fein des feux & des eaux, On ne s’appercut point de la fuite du jour; la nuit qui lui fuccéda , étoit environnée de la plus brillante lumiere. | Le fignal fut donné, &c dans le même inftant le temple de l’hymen, tous les édifices qui bordent des deux côtés les quais fuperbes qui fervoient de cadre à ce fpeétacle éclatant, le pont-royal & le pont- neuf, les échafauds qui étoient élevés pour porter cette foule de fpeëtateurs, les amphithéatres qui rém- plifloient les terreins depuis les bords de la Seine juf- qu’à fleur des parapets, tout fut illuminé prefqu’au même moment : On ne vit plus que des torrens de lumiere foûmis à l’art du deflein, &c formant mille figures nouvelles , embellies par des contraftes, dé- tachées avec adrefle les unes des autres, ou par les formes de larchite@ture fur lefquelles elles étoient placées, ou par l’ingénieufe variété des couleurs dont on avoit eu l’habileté d'embellir les feux divers de la lumiere. Feu d'artifice. Le bruit de l’artillerie, le fon éclatant des trom- pettes, annoncerent tout-à-coup un fpeétacle nou- veau. On vit s’élancer dans les airs de chaque côté du temple de lhymen , un nombre immenfe de fu- fées qui partirent douze à douze des huit tourelles du pont-neuf ; cent quatre-vingts pots à aigrette & plu- fieurs gerbes de feu leur fuccéderent. Dans le même tems on vit briller une fuite de gerbes fur la tablette de la corniche du pont; & le grand foleil fixe, de foixante piés de diametre, parut dans toute fa fplen- deur au milieu de l’entablement. Direétement au- deflous on avoit placé un grand chiffre d’illumina- tion de couleurs différentes, imitant l’éclat des pier- reries, lequel , avec la couronne dont il étoit fur- monté, avoit trente piés de haut ; & aux côtés, vis- à-vis les entre-colonnes du temple , on voyoit deux autres chiffres d’artifice de dix piés de haut, formant les-noms des 1lluftres époux , en feu bleu, qui con- traftoit avec les feux différens dont'ils étoient en- tourés. On avoit placé fur les deux trotoirs du pont-neuf, à la droite &c à la gauche du temple, au-delà de lil- lumination des pyramides, deux cents caïfles de fu- fées de cinq à fix douzaines chacune, Ces caifles ti rées cinq à la fois, fuccéderent à celles qu’on avoit Và partir des tourelles, àcommencer de chaque côté, depuis Les premieres, auprès du temple, êc fuccef- fivement jufqu’aux extrémités à droite & à gauche. Alors les cafcades ou nappes de feu rouge fortirent des cinq arcades de léperon du pont-neuf ; elles fem- bloient percer l'illumination dont les trois façades étoientrevêtues, & dont les yeux pouvoient à peine foûtenir l'éclat. Dans le même tems un combat de plufeurs dragons commença fur la Seine, & le feu d’eau couvrit prefque toute la furface de la tiviere. Au combat des dragons fuccéderent les artifices dont les huit bateaux de lumierés éroient chargés, Au même endroit, dans un ordre différent, étoient trente-fix cafcades ou fontaines d’artifice d'environ trente piés de haut, dans de petits bateaux, mais qui paroïfloient fortir de la riviere. Cefpettacle des cafcades, dont le fignal avoit été donné par un foleil tournant , avoit été précédé d’un berceau d'étoiles produit par cent foixante pots à aigrettes, placés au bas de la terrafle de Péperon. Quatre grands bateaux fervant de magafn à l’ar- tifice d’eau , étoient amarrés près des arches du pont- neuf, au courant de la riviere, & quatre autres pa- reils du côté du pont-royal. L’artifice qu’on tiroit de ces bateaux , confiftoit dans un grand nombre de gros & petits barrils chargés de gerbes & de pots, qui remplifloient l’air de ferpenteaux , d'étoiles & de genouillieres. Il y avoit aufli un nombre confidéra- ble de gerbes à jetter à la main, & de foleils tour- nant fur l’eau. La fin des cafcades fut le fignal de la grande giran- de fur l’attique du temple, qui étoit compofée de près de fix mille fufées. On y mit le feu parles deux extrémités au même inftant ; & au moment qu’elle parut, les deux petites grandes d'accompagnement, placées fur le milieu des trotoirs du pont-neuf, de chaque côté, compofées chacune d'environ cinq cents fufées , partirent, & une derniere falve de ca- non termina cette magnifique jére. Tout l’artifice étoit de la compoñtion de M. Elric, faxon , capitaine d’Artillerie dans les troupes du roi de Prufle. Le lendemain, 30 Août, M. Turgot voulut en- core donner un nouveau témoignage de zele au Roi, à madame lÏnfante , & à la famille royale. Il étoit un de ces hommes rares qui ont l’art de rajeunir lesxob- jets ; 1ls les mettent dans un jour dont on ne s’étoit pas avifé avant eux, ils ne font plus reconnoiffables.. Telle füt la magie dont fe fervit alors feu M. Tur- got. Il trouva le fecret de donner un bal magnifique qui amufa la Cour & Paris toute la nuit, dans le local le moins difpofé peut-être pour une pareille entreprife. M..le maréchal de Richelieu parut en 174$ avoir hérité du fecret de ce magiftrat célebre, Voyez FÊTES DE LA COUR DE FRANCE. Bal de la ville de Paris, donné dans fon hôtel la nuit du 30 Août 1730. . Trois grandes falles dans lefquelles on danfa, avoient été préparées avec le plus de foin, & dé- corées avec autant d’adrefle que d'élégance. L’archi- teéture noble de la premiere, qu’on avoit placée dans la cour, étoit compofée d’arcades & d’une dou- ble colonnade à deux étages , qui contribuoïentsà lingénienfe & riche décoration dont cette falle fut ornée. Pour la rendre plus magnifique & plus bril- lante par la variété des couleurs, toute l’architequre fut peinte en marbre de différentes efpeces ; on y préféra ceux dont les couleurs étoient les plus vives, les mieux aflorties , & les plus convenables à la FET. 587 clarté des Iumierés & aux divers ornements de relief rehauñés d’or, qui repréfentoient Les fujets les plus agréables de la fable, émbellis encore par des pofi- tions & des attributs relatifs à l’objet de la féres Au fond de cette cour changée en falle de bal, on avoit conftruit un magnifique balcon en amphithéas tre , qui étoit rempli d’un grand nombre de {ympho- niftes. L'intérieur de toutes ces arcades étoit en gra= dins, couverts de tapis en forme de loges , d’une très -belle difpofition , & d’une grande commodité pour les mafques, auxquels on pouvoit férvir des tafraichiffemens par les derrieres. Elle étoit couverte d’un plafond de niveau, & éclairée d’un très-grand nombre de luftres , de gitandoles & de bras à plu- fieurs branches, dont l'ordonnance déceloit le soût éxquis qui ordonnoit tous ces arrangemens. La grande falle de l’hôtel-de-ville, qui s’étend fur toute la façade , fervoit de feconde falle ; elle étoit décorée de damas jaune, enrichi de fleurs en argent : où y avoit élévé un grand amphithéatre pour la fym- phonie. Les embrafures & les croifées éroiént difpo: fées en eftrades &z en gradins, & la falle étoit éclai- rée par un grand nombre de bougies. La troifieme falle étoit difpolée dans celle qu’on nomme des gouverneurs ; on l’avoit décorée d’étoffe bleue, ornée de galons & gaze d’or, ainfi que l’am- phithéatre pour la fymphonie : elle étoit éclairée par une infinité de lunueres placées avec art. On voyoit par les croïfées de ces deux falles; tout ce qui fe pafloit dans la premiere : c’étoit une perfpeétive ingénieufe qu'on avoit ménagée pour multiplier les plaïfirs. On communiquoit d’une falle à l’autre paf un grand appartement éclairé avec un art extrème. Auprès de ces trois falles on avoit dreffé des buf- fets décorés avec beaucoup d'art , & munis de toutes fortes de rafraichiflemens , qui furent offerts & diftribués avec autant d’ordre & d’abondance que de politeffe. | On compte que le concours des mafques a monté à plus de 12000 depuis les huit heures du foir, que le bal commença, jufqu’à huitheures du matin. Fou te cettefèête fe pafla avec tout l’amufement , l’ordre & la tranquillité qu’on pouvoitdefirer, & avec une fatisfaétion & un applaudiflement général. Les ordres avoient été fi bien donnés, que rien de ce qu’on auroit pù defirer n’y avoit été oublié. Les précautions avoient été portées jufqu'à lextrème , & tous les accidens quelconques avoient dans des endroits fecrets, les remedes , les fecours, les expé- diens qui peuvent les prévenir ou les réparer. La place de Greve & toutes les avenues furent toùjours libres, enforte qu’on abordoit à l’hôtel-de-ville com- modément , fans accidens & fans tumulte. Des fal- lots fur des poteaux, éclairoient la place &z le port de la Greve , jufque vers le Pont-Marie , où l’on avoit foin de faire défiler & ranger les carrofles ; il y avoit des barrieres fur le rivage , pour prévenir les accidens. Toutes les difpofitions de cette grande fe ont été confervées dans leur état parfait pendant huit jours, pour donner au peuple la liberté de les voir. Les grands effets que produifit cette merveilleufe fête, fur plus de 600000 fpetateurs , font reftés gra vés pour jamais dans le fouvenir detouslesFrançois, Auf le nom desTurgots fera-t-il toujours cher à une nation fenfble à la gloire, & qui mérite plus qu'une autre de voir éclore dans fon {ein les grandes idées des hommes. Voyez ILLUMINATION, FEU d’ARTr- FICE , &c. Ily a eu depuis des occafions multipliées, où {a ville de Paris a fait éclater fon zèle & fa magnif: cence ; ainfi la convalefcenee du plus chéri de nos Rois,fon retour de Metz (voyez FESTINS RoYyAUx), | 558 FET ños vidtoires, les deux mariages de monfeigneur le Dauphin , ont été célébrés par des féres, des illumi- nations, des bals, des feux d'artifice ; maïs un trait éclatant , fupérieur à tous ceux que peuvent pro- duire les arts, un trait qui fait honneur à l'humanité, & digne éntout d’être éternife dans les faftes de l’Eu- rope , eft lation généreufe qui tint lieu de fée à la naiflance de monfeigneur le duc de Bourgogne. Six cents mariages faits &c célébrésaux dépens de la ville’, furent le témoignage de fon amour pour l’état, de fon ardeur pour laccroiflement de fes for- ces , de l’humanité tendre qui guide fes opérations dans l’adminiftration des biens publics. Dans tous les tems cette aétion auroit mérité les loüanges de tous les gens de bien, & les tranfports de reconnoiflance de la nation entiere. Une cir- conftance doit ia rendre encore plus chere aux con- temporains , & plus refpectable à la poftérité, Au moment que le projet fut propofé à la ville, les préparatifs de la plus belle féze étoient au point de l’exécution. C’eft à l'hôtel de Conty que devoit être donné le fpeétacle le plus ingénieux , le plus noble , le moins reffemblant qu’on eût imaginé en- core. Prefque toutes les dépenfes étoient faites, J’ai vi, j'ai admiré cent fois tous ces magnifiques pré- paratifs. On avoit pris des précautions infaillibles contre les caprices du tems , l’évenement auroit il- luftré pour jamais & l’ordonnateur , & nos meilleurs artiftes occupés à ce fuperbe ouvrage. Le fuccès paroïfloit für. La gloire qui devoit le fuivre ft fa- crifiée , fans balancer, au bien plus folide de donner à la patrie de nouveaux citoyens. Quel eft le vrai françois qui ne fente la grandeur, l'utilité , la géné- rofité noble de cette réfolution glorieufe ? Quelle admirable leçon pour ces hommes fuperficiels , qui croyent fe faire honneur de leurs richeffes en fe li- vrant à mille goûts frivoles ! Quel exemple pour nos riches modernes, qui ne reftituent au public les biens immenfes qu'ils lui ont ravis , que par les dé- penfes fuperflues d’un luxe mal entendu, qui, enles déplaçant , les rend ridicules ! Toutes les villes confidérables du royaume umi- terent un exemple auf refpeëtable ; &c l’état doit ainfi à l’hôtel-de-ville de fa capitale , une foule d'hommes nés pour l’aimer , le fervir , 8 le défen- dre. (B) FÊTES DES GRANDES VILLES DU ROYAUME DE FRANCE. C’efticiqu'ondoit craindre les dangers d’u- ne matiere trop vafte. Rien ne feroit plus agréable pour nous, que de nous livrer à décrire par des exem- ples auffi honorables que multipliés les reflources du zêle de nos compatriotes, dans les circonftances , où leur amour pour le fang de leurs rois a la liberté d’é- clater. On verroit dans le même tableau la magni- ficence conftante de la ville de Lyon embellie par le goût des hommes choifis qui la gouvernent, toù- jours marquée au coin de cet amour national , qui fait le caraétere diftinétif de fes citoyens. À côté des fêtes brillantes, qui ont illuftré cette ville opulente, on feroit frappé des reflources des habitans de nos beaux ports de mer , dans les circonftances où le bonheur de nos rois, ou la gloire de la patrie , leur ont fourni les occafions de montrer leur adrefle & leur amour. On trouveroit dans le cœur de la Fran- ce, fousles yeuxtoüjours ouvertsde nos Parlemens, des villes plus tranquilles, mais moins opulentes, fuppléer dans cesmomens de joie, à tous les moyens faciles qu'offre aux autres la fortune par l’'a@ivité, l'élégance, les nouveautés heureufes , les prodiges imprévûs que fournit à linduftrie & au bon efprit la fécondité des talens & des arts. Telles feroient les fêtes de Touloufe , de Rennes , de Rouen, de Di- jon, de Mets , &c, que nous pourrions décrire ; mais FET on s'attache ici au néceflaire. Les foïnsqu’on a pris à Bordeaux , lors du paffage de notre premiere dau- phine dans cette ville , font un précis de‘tout ce qui s’eft jamais pratiqué de plus riche , de plus élégant dans les différentes villes du royaume ; & les arts différens , qui fe font unis pour embelir ces jours de gloire , ont laïffé dans cette occafion aux artiftes plufieurs modeles à méditer & à firivre, On commence cette relation du jour que madame la dauphine arriva à Bayonne;parce que les moyens qu'on prit pour lui rendre fon voyage agréable & facile méritent d’être connus des leteurs qui favent apprécier les efforts &c les inventions desrarts. Madame la dauphine arriva le 15 Janvier 1745 à Bayonne. Elle paña fous un arc de triomphe de qua- rante piés de hauteur, au-deffus duquel étoient ac- collées les armes de France & celles d’Efpagne , foûitemnes par deux dauphins, avec cette infcription : Quam bene perpetuis fociantur nexibus ambo ! De chaque côté de Parc de triomphe régnoient deux ga- leries , dont la fupérieure étoit remplie par les da- mes les plus diftinguées de la ville, & l’autre l’étoit par cinquante-deux jeunes demoïfellés habillées à l’efpagnole. Toutes les rues par lefquelles madame la danphine pafla , étoient jonchées de verdure , tendues de tapifleries de haute-liffe, & bordées de troupes fons les armes. Une compagnie de bafques qui étoit allée au-de- vant de cette princefle à une lieue de la ville , l’ac- compagna en danfant au fon des flûtes & des tam- bours jufqu’au palais épifcopal, où elle logea pen- dant fon féjour à Bayonne, Dès que le jour fut baïflé , les places publiques ; l’hôtel-de-ville & toutes les rues furent illuminées ; le 17 madame la dauphine partit de Bayonne, & continua fa route. En venant de Bayonne, on entre dans la généra- lité de Bordeaux par les landes de caprioux , qui con- tiennent une grande étendue de pays plat , où on n'apperçoit que trois ou quatre habitations difper- fées at loin, avec quelques arbres aux environs. L’année précédente , lintendant de Guienne prévoyant le paflage de l’augufte princefle que la France attendoit, fit au-traversde ceslandes aligner &t mettre en état un chemin large de quarante-deux piés , bordé de foflés de fix piés. Vers le commencement du chemin, dans une par- tie tout-à-fait unie & horifontale, les pâtres du payss huit jours avant l’arrivée de madame la dauphine, avoient fait planter de chaque côté, à fix piés des bords extérieurs des foflés , 300 pins efpacés de 24 piés entr'eux ; 1ls formoient une allée de 1200 toi- fes de longueur , d'autant plus agréable à la vûe , que tous ce$ pins étoient entierement femblables les uns aux autres , de 8 à 9 piés de tige , de 4 piés de tête , & d’une groffeur proportionnée. On fait la propriété qu'ont ces arbres, d’être. naturellement droits & toùjours verds. Au milieu de l’allée on avoit élevé un arc de triomphe de verdure, préfentant au chemin trois portiques. Celurdu milieu avoit 24 piés de hant fr 16 de large, & ceux des côtés en avoiïent 17 de haut fur quatre de large. Cestrois portiques étoient répètés fur les flancs, mais tous trois de hauteur feu lement de 17 piés, &.de 9 de largeur: le tout for- mant un quarré long fur la largeur du chemin, par l’arrangement de 16 gros pins, dont les têtes s’éle- vôient dans une jufte proportion au-deflus des por tiques. Les ceintres de ces portiques étoient formés avec des branchages d’autres pins, de chênes verds, de herres , de lauriers & de myrtes, & il en pen- doit des guirlandes de même efpece faites avec foin, foit pour leurs formes, foit pour lesnuances des dif férens verds, Les tiges des pins, par le moyen de parçils pareils branchages , étoient préprément ajuftées en colonnes ee : de la voûte centrale de cet arc de triomphe champêtre, defcendoit une coufonne de verdure, & au-deflus du portique du côté que venoit madame la dauphiné ; étoit ur grand cartous che verd, où on lifoit en gros caraterés : 4 la bon- ne arribado de nofte dauphino. Ÿ On voyoit fur la même façade cette autre infcrip- tion latine; les fix mots dont elle étoit compoiée fus rent rangés ainfis Juber amor ; Fortuna negat ; Natura juvat, _ Lés pâtrés, au nombre de thois cents, étoienträn- gés en haie entre lés arbtes, À commencer de l'arc de triomphe du côté que venoit madare la dauphi- ne; ils avoient tous un bâton, dont lé grôs bout fe perdoit dans uné touffe de verdure. Ils étoiéht habil: és unifofmément comme ils ont coûtume d’être en hyver , avec une efpece de fur:tout de peau dé mori- ton, fourmie de fa laine, des guêtres de même, & fur la tête, une toque appellée vulgairément barres, qui étoit garnie d’une cocarde de rubans de foie blanche êt rouge. 2. Outre ces trois cents pâtrès à pié, il y en avoit À leur tête cinquante habillés'de même, montés fur dés échafles d'environ 4 piés. Ils étoient comman: dés par un d’entr’eux , qui éut l'honneur de préfen- ter par écrit à madame la dauphine, leur compli- ment eh vers dans leuï langage. Le compliment fut terminé paf mille & mille cris de vive le Ror , vive la Reine, vive monfeigneur le Dauphin, vive madame la dauphine. . Les députés du corps de ville de Bordeaux vinrent à Caftres le 26. Ils furent préfentés à madäme la dau- phine, &c le lendemain elle arriva à Bordeaux fur les trois heufes & demie du foir, au bruit du canon de la ville & de celui des trois forts. La princéffe trou: va à la porte S. Julien un arcde triomphe très-beau, que la ville avoit fait élever. | . Le plan que formoit la bafe de cet édifice, étoit un rectangle de 60 piés de longueur & de 18 piés de largeur , élevé de foixante piés de hauteur, non com: pris le couronnement, Ses deux grandes faces étoient retournées d’équerre fur le grand chemin , ornées d’archite@ure d'ordre dorique,enrichies de {culpture & d’infcriptions. Il étoit ouvert dans fon milieu par une arcade de plein ceintre , en chacune de fes deux fâces, qui étoient réunies entr'elles par une voûte en berceau , dont les naïffances portoient ur quatrè colonnes ifolées , avec leurs arriere-pilaftres, ce qui formoit un portique de 14 piés de largeur fur 36 piés de hauteur. | Les deux côtés de cet édifice en avant-corps for- moient deux quarrés, dont les Angles étoient ornés par des pilaftres corniérs 8e en retour, avec leurs ba- fes & chapiteaux portant un entablement quire- gnoit fur les quatre faces de l’are de triomphe, La frife étoit ornée de fes triglifes & métopes, enrichis alternativement de fleurs-de- lis & de tours en bas relief. La corniche l’étoit de fes mutules, & de tou: tes lés moulures que cet ordre prefcrit. Au-deflus de cet entablement s’élevoit un atti- que, où étoient les compattimens qui renfermoient des infcriptions que nous rapporterons plus bas, À l’à-plomb de huit pilaftres, &c au-deflüs de l’at- tique, étoient pofés huit vafes, quatre fur chaque face, au milieu defquelles étoient deux grandes volutés en adoucifflement , qui fervoient de fupport aux afmes de l’allance, dont l’enfemble formoit un fronton , au fommet duquel étoit un étendart de 17 piés de hauteur fur 36 de largeur , avec les armes de France &c d’Efpaone, Tome FL F ET 589 Les entre-pilafttes au pourtour étoient énrichis de fhédaillons , avec leurs feftons en fculpture : au bas défquels & à leur à-plomb étoient destables refoiil. lées entourées de moulurés ; limpolte qui regnoit entre deux, fervoit d’architrave aux quatre colons nes & aux quatre pilaftres, portant le ceintré avec TAEC VOIES je EN UN … Cet édifice, qui étoit dé relief en tôutes fes par< ties, étoit feint de marbre blanc. Il étoit exécuté avec toute la févérité des regles attachées à l’ordre doriqué. , Sur le compattiment de l’attique, tañt du côté de là campagne que de celui de la ville, étoit linfcrip- tioh fuivante : Aragrañma hnumericum. Unigeñito rez gis filio Ludoviéo, & augufle principi Hifpanie , con nubio junéis, civitas Burdegalenfis & [ex viri erexez runt, * rnÈe ; M Au-deffous de cette infcription & dans la frife de l’entablement, étoit ce vers tiré de Virgile, Ingredere, & votis jam nunc affuefce vocari, * # Les médaillons en bas-telief des entre-pilafites ; placés au-deffus des tables refouillées & impoftes ci: deflus décrits , renfermoient les emblêmes fuivans. Dans lun, vers la campagne , on voyoit la Frans ce tenant d’une main uñe fleur-de-lis , & de Pautre une corne d’abondance. Elle étoit habillée à l’antique, avee un diadème fur la tête 8 un écuflon des armes de France à fes piés. L’Efpagne étoit à la gauche, en habit militai= re, comme on la voit dans les médailles antiques ; avec ces mots pour ame, corcordia ærernz, union éternelle ; dans l’exergue étoit écrir, Æifpania , Gallia ; l'Efpagne, la France: Dans l’autre, aufli vers la campagne, la ville de Bordeaux étoit repréfentée par une figure, tenant une corne d’abondancé d’une main, & faifant re> marquer de l’autre fon port. Derriere elle on voyoit fon ancien amphithéatre , vis-A-vis la Garonne ) Qui étoit reconnoïflable par un vaifleau qui paroïfloit arriver: l’infcription, Burdigalenffum gaudium, & dans l’exergue ces mots, adventus Delphine 1 TA4$ 5 Tarrivée de madame la dauphine remplit de Joie la ville de Bordeaux. Du côté de la ville, l'emblème de la droite repré: féntoit un miroir ardent qui recoit les rayons du {o- leil, & qui les refléchit fur un flambeau qu'il allume 5 & pour légende, cœ/effi accenditur igne, le feu qui l’a allumé vient du ciel, Dans l’autre, on voyoit la déeffe Cybele affife ens tre deux lions, couronnée de tours, ténant dans fa main droite les armes de France, & dans fa gauche une tige de lis. Pourlégende , ditabis olympum nova Cybeles, cette nouvelle Cybele enrichita lolympe de nouveaux dieux, Sur les côtés de cetarc de triomphe, étoient deux médaillons fans emblème, Au premier , félici adven: tui, à l’heureufe arrivée. Au fecond, veis expectas ta dies ; le jour fi attendu eft arrivé. Madame la dauphine trouva auprès de cet arc de triomphe le corps de ville qui l’attendoit. Le comte de Segur étoit à la tête. Le corps de ville eut lhon neur d'être préfenté à madame la dauphine par M, Defgranges, & de la complimenter: le comte de Se: gur porta la parole, Le compliment fini, le carrofle de madame la dau- phine pafla lentement fous l’arc de triomphe , & en tra dans la rue Bouhaut, Toutes les maifons de cete. té rue, qu a plus de deux cents toifes de long en * Anagrarmme numérique. La ville & les jurats de Bordeaux ont érigé cet arc de triomphe en l'nonneur du mariage de monféigneur le Dauphin, fils unique du Roï, & de madame infante d'Efpagne: , ** Atrivez , augufte Princefle, & recevez avec bonté l’'hom- mage de nos cœurs. | FF£f 590 F ETF ligne prefque droite, &c que l’Intendant avoit eu foin de faire paver de neuf, pour que la marche y für plus douce, étorent couvertes dés plus belles ta- ifleries. ; Au Bout de la rire madame la dauphinetvit la perf- peive du palais que Pon y avoit peint. De la porte de S. Julien on découvre du fond de la rue Bonhaut, à la diftance d'environ deux cénts toifes, les faces des deux premières maifons qui forment l’embou- chute de la rué du Cahernan, qui eft à la fuite &c fur la même dire@ion que la précédente. Celle de la droite, qui eft d’un goût moderne & fort enrichie d’architedute, préfentoit un point de vüe agréable, bien différent de celle de la gauche, qui n’etoit qu’- une mafure informe. Pour éviter cette difformité & corriger le défaut de fymmétrie,.on y éleva en peinture le pendant de la maïfon de la droite; & entre les deux on forma une arandé atcade, au-deffus de laquelle les derniers étages de ces deux maïfons étoient prolongés, de façon qu'ilss’y réunifloient, & que par leur enfem- ble elles préfentoient un palais de marbre lapis &c bronze, richement orné de peintures & dorures, avec les armes de France & d’Efpagne accompa- gnées de plufieurs trophées &c attributs relatifs à la fête. Ce bâtiment, dont le portique ou arcade faifoit l'entrée de la rue du Cahernan, produifoit un heu- reunx effet ; le carrofle de madame la dauphine tour- na à droite pour entrer fur les foffés où étoit le corps des fx régimens des troupes bourgeoifes. Elle paffa fous un nouvel arc de triomphe, placé vis-à-vis les fenêtres de fon appartement. La rue des Fofléseft très-confidérable, tant par fa longueur, qui eft de plus de 400 toifes, que par fa largeur, d'environ 80 piés : on s’y replie fur la droi- te dans une allée d’ormeaux, qui regne au milieu &c fur toute la longueur de la rue. On avoit élevé dans cette allée un fuperbe corps de bâtiment ifolé , de 32 piés en quarré, fur 48 piés de hauteur, qui répondoit exaétement aux fenêtres de l’appartement préparé pour madame la dauphine. L'avantage de cette fituation avoit animé l’archi- tee à rendre ce morceau d’architeéture digne des regards de l’augufte princefle pour laquelle 1l étoit deftiné. Cet ouvrage, qui formoit unare de triomphe , étoit ouvert en quatre faces par quatre arcades, cha- cune de 32 piés de hauteur fur 16 piés de largeur , dont les oppofées étoient réunies par deux berceaux qui perçoient totalement l'édifice, & formoient par leur rencontre une voûte d’arête dans le milieu. Ce bâtiment, quoique fans colonnes & fans pi- Jaftres, étoit aufli riche qu’élégant. Les ornemens yÿ étoient en abondance; & fans confufion; le tout en {culpture de relief & en dorure, fur un fond de mar- bre de différentes couleurs. Ces ornemens confiftoient en feize tables faillan- tes, couronnées de leurs corniches, &c accompa- gnées de leurs chûtes de feftons. Seize médailles entourées de palmes, avec Îles chiffresen bas-rélief de monfeigneur le Dauphin & de madame la dauphine. Quatre impoñtes avec leurs frifes couronnoient les quatre corps folides fur léfquels repofoit Pédif- ce, & entres lefquels étoient les arcades ou porti- ques, dont les voûtes étoient enrichies de compar- timens de mofaique, parfemés de fleurs-de-lis, &e de tours de Caftille dorées. On avoit fufpendu fous la clé de la voûte d’arête une couronne de fix piés de diametre, &c de hauteur proportionnée, garme de lauriers & de fleurs, avec des guirlandes dans le même goût : ouvrage que ma- dame la dauphine pouvoit appercevoir fans cefle de fes fenêtres. FET Au-deffus des impoñtes & à côté de chaque arche volte, étoient deux panneaux refouillés &enrichis' de moulures. | L | L’entablement qui couronnoït cet édifice, étoit d'ordre compoñite, avec architrave, frife & corni- che!, enrichie de fes médaillons & rofettes, dontles profils & faillies étoient d’une élégante proportions: Quatre écuflons aux armies de France 6 d'Efpa- gne étoient polés aux quatre clés des ceintres, 8x! s’élevoient jufqu'au haut de l’entablement. Ces are mes étoient accompagnées de feftons & chûtes de fleurs. L'édifice étoit terminé par des acroteres ou pié- d’eftaux couronnés de leurs vafes, pofés à l’à-plomb des quatre angles , dont les intervalles étoient rem- plis de baluftrades qui renfermoient une terrafle de 30 piés en quarré, fur quoi étoit élevée une pyra- mide de 40 piés de hauteur, pour recevoir l’appa- reil d’un feu d'artifice qui devoit être exécuté le foir de l’arrivée de madame la dauphine. Cet édifice avoit environ 86 piés d’élevation, y compris la pyramide, Madame la dauphine entra enfin dans la cour de lhôtel-de-ville deftiné pour fon palais, pendant le féjour qu’elle feroit à Bordeaux. À l'entrée de la cour, étoit l'élite d’un régiment. des troupes bourgeoïfes, dont les jurats avoient compofé la garde de jour & de nuit. Les gardes de la porte & ceux de la prevôté oc= cupoient la premiere falle de l’hôtel-de-ville ; la por te de cette {alle étoit gardée au-dehors par les trou- pes bourgeoifes. Les cent-fuifles occupoient la feconde falle ; les gardes-du-corps la troïfieme. Dans la quatrieme, il y avoit un dais garni de ves lours cramoifi, avec des galons & des franges d’or; le ciel & Le doflier étoient ornés dans leurs milieux des écuflons des armes de France & d’Efpagne , d’u- ne magnifique broderie en or & argent; fous ce dais, un fauteiil doré fur un tapis de pié, avec un car- reau, le tout de même velours, garni de salons, glands, & crépines d’or. La chambre de madame la dauphine étoit meu- blée d’une belle tapifferie, avec plufeurs trumeaux de glace, tables en confoles, luftres & girandoles;, on n'y avoit pas oublié , non plus que dans la piece précédente, le portrait de monféigneur le Dauphin. Les jurats revêtus de leurs robes de cérémonie, vinrent recevoir les ordres de madame la dauphine, & lui offrir les préfens de la ville, À l'entrée de la nuit il fut fait une 1llumination générale, tant dans la ville que dans les fauxbourgs x & fur les huit heures on tira un feu d'artifice. On {er- vit enfuite le fouper de madame la dauphine , pen= dant lequel plufeurs mufciens placés dans une cham- bre voifine, exécuterent des fymphonies italiennes. Le 28 la ville offrit des préfens aux dames & aux feigneurs de la cour dé madame la dauphine, &c aux principaux officiers de fa maïfon. A midi madame la dauphine fe rendit à l’églife métropolitaine , accompagnée des dames &z fei- gneurs de fa cour, & des principaux officiers de fa malfon. Elle éntra dans cette églife par la porte royale, : dont le parvis étoit jonché de fleurs naturelles. On avoit auff fait orner cette porte de guirlandes de fleurs femblables, & on y avoit mis les armes de France & d’Efpagne , & de monfeigneur le Dau- phin , celles du chapitre au-deflous. Cette princeffe fut haranguée par le doyen du chapitre , & conduite proceflionnellement jufqu’aw milieu du chœur ; & quand la meffe fut finie, le cha- . pitre qui s’étoit placé dans les ftalles, en fortit pour F ET aller ati milieu du:chœur prendre madaïne la dau- phine, & la précéder procefhionnellement jufqu’à la porte royale. +00 Strat æT j Ce jour elle reçut les complimens de toutes les cours: elle alla enfuite à l’opéra ; l’amphithéatre étoit refervé pour cette princefle & fa cour, L _ On avoit fait au milieu de la baluftrade, fur la longueur de huit piés, un avancemént en portion de cercle de trois piés dé faillie ; madame la dau- phine fe plaça dans un fauteuil de velours cramoif,. fur un tapis de pié.vis-à-vis cette faillie circulaire, qui étoit aufhi couverte d’un tapis de pareil velours | bordé d’un galon d'or. 2 Il y eut d’abord un prologue à l’honneut de mon feigneur le Dauphin & de madame la dauphine *: enfuite on Joua deux actes des Indes galantes, celui des Incas, & celui des Fleurs , & on y joignit deux ballets pantomimes ; & cette princefle fortant de l’opéra & rentrant pat la principale potte de l'hôtel. de-ville, trouva un nouveau fpeétacle : c’étoit un palais de lhymen illuminé. | Dans le fond de lhôtel-de-ville, en face de là principale entrée qui elt fur la tue des Foflés, on avoit conftruit un temple d'ordre ionique. Ge tem- ple qui QE le palais de l’hymen, avoit 90 piés de largeur fur 45 piés de hauteur, non compris le fommet du fronton. Le porche étoit ouvert par fix colonnés ifolées, Qui formoient un exaftile. __ Aux deux extrémités fe trouvoient detix corps {o- lides, flanqués par deux pilaftres de chaque côté, Les fix colonnes &@c les quatre pilaftrés avec leurs entablemens, étoient couronnés pat un fron- xon de 71 piés de long. | On montoit dans ce-porche de 61 piés 6 pouces de long , fur 9 piés de large, par fept marches de $9 pis de lonp. ee | Les colonnes avoient 27 piés de hauteur, 4 piés Je , & 6 piés d’entre-colonné, appellé /y- Les La porte & les croifées à deux étages étoient en face des autres colonnes. | Le plafond du porche que poïtoient les colonnes , étoit un compartiment régulier de cafles quaïrées, coupées par des plate-bandes, ornées de moulures dans le goût antique. | Cet ouvrage étoit exécuté avec toute la févérité & l’exaétitude des regles de l’ordre ionique. Les co- lonnés , leurs bafes , leurs chapiteaux , l’entable: ment, le fronton & le tympan enrichi dé fculpture ; repréfentoient les armes de France & d’Efpagne or- nées de feftons : le tout en général étoit de relief, avec une fimple couleur de pierre fur tous les bois & autres matieres employées à la conftruétion de ce palais. Les chambtanles des croïfées & de la porte, leurs plate-bandes & appuis ornés de leurs moulures, imitoient parfaitement la réalité ; les chaflis des mé- mes croifées étoient à petit bois, garnies de leurs carreaux de verre effeéhif, avec des rideanx couleur de feu qui paroïfloient au derriere. Les deux ven taux de la porte étoient d’aflemblage , avec pan- neaux en faillie fur leurs bâtis, les cadres avec leurs moulures de relief, pour recevoir des emblèmes qui furent peints en camayeu. Tout étoit fi bien con- certé, que cet ouvrage pouvoif paffer pour un chef: d'œuvre. Au milieu dé l’entablement dé ce palais étoit une table avec un cadre doré , qui occupoit en hauteur celle de l’architravé & de la frife, & en largeur celle de quatre colonnes. Elle renfermoit en lettres dorées, l’infeription fuivante : 44 konorem corinubii augufh{fimi & féliciffimi Ludovici Delphini Francie . Ë er paroles font de Fugelier, la mufque eft de M,Ra- meau. Tone VI, PEUT. os & Marie, Therefa Hifpanie , hoc ædifcium.erexis € dedicavit civicas Burdigalenfis *. à à . En face de l'édifice fur chacun des deux corps fo: lides, étoit un médaillon renfeftmant un emblème, Celui de, la droite repréfentoit deux lis, qui fleurif fent d'eux-mêmes &c fans culture étrangete; ce qu: faifoit allufon au prince &r à la princefle, en qu le fang a réuni toutes les graces & toutes les vertus Cela étoit exprimé par linfcription, raviyo culeu flos , refcunts L’emblème de là gauche repréfentoir deux amours qui foûtenoient.les armes de France & d’Efpagne , avec ces mots, Propagini inperit gallicani, à la gloi- re de l'empire françois. ; ; ,: PP te — Un troifieme médaillon qui couronnoit:la porté d'entrée du palais, renfermoit un emblème qui re- préfentoit deux mains jointes tenant un flambeau als lumé , avec l'infeription, ffdes € ardor mutuus, l’u= nion & la tendrefle mutuelle de deux époux. . Sur.les retours des corps folides, dans l’intérieur du porche 'étoient deux autrés médaillons.fans em blème : au premier, amor agäitanicus : au fecond ; de [a Guienne, | A PRO lt La façade fous le porche étoit éclairée d’un grand nombre de pots-à-feu non-apparens , & attachés prés -4- près au derriere des colonnes , depuis leur afe jufqu'à leur chapiteaii; cé qui lui donnoit un éclat très-brillant, Les corniches du fronton & cel- les de tout l’entablement, étoient auf illuminées, de quantité de terrines, dont les lumieres produis … Jideliras aquatanica : l'amour &c la fidélité inviolables {oient un fort bel effet. . 14 " Loffque la princeffe fut dans fon àppartèmhent 3 elle vit l'illumination de l’arc de triomphe, placé vis-à-vis {es fenêtres. On fit les mêmes illuminations les vendredi, famedi ; & dimanche fuivans, & chas que fois dans un goût différent, | Après le fouper de madaïne la dauphin ; il ÿ eut Un bal dans la falle de fpetacle ; & comme cette falle fait partie de l’hôtel-de-ville, elle s’y rendif par la porte de lintérieur, , Le 29 fnadame la dauphiné , luivie de toute fa cour, fortit de l’hôtel-de-ville en cafrofie à huit che: Vaux, pour fe rendre fur le port de Bordeaux, & y: voir mettre à l’eau un, vaifleau percé pour 22 cas non$, du port d'environ 350 tonneaux, SR Sur le chemin que cétte princefle devoit fairé pour aller au port, à l'extrémité de la rué des Foflés, à quelque diftance de la porte de la villé, on avoit élevé une colônne d'ordre dorique de 6 piés de dias metre, de $o piés de hauteur compris fa bafe & fon chapiteau SO. Le prié - d’eftal qui avoit 18 prés de hauteur, étoit orné, fur les quatre angles de fa corniche, de qua< tre dauphins &e autres attributs ; fes quatre faces étoient décorées de tables avec moulures, qui ren- fermoient quatre infcriptions ; la premiere éïi fran- çois , la féconde en efpagnol, la troifieme en italien, Ôt la quatrieme én latin. Au-fhaut du chapiteau , ün amortiflement de $ piés de haut, fur lequel étoit pofé un globe de 6 piés de diarnètre : ce globe étôit d’azur, parfemé de fleurss de-lis & de touts de Caftille. a On avoit placé au-deflus de ce globe un étendard de 20 piés dé hauteur, fur 30 piés de largeur, où étoiénit les armes de France & d’Efpagne. Cétte colonne étoit féinte de marbre blañc vei- né, ainfi que le pié-d’eftal ; les moulures, ornemens ; vafes, & chapiteaux, éroient en dorure, & toutes ces hauteurs réunies formoient une élevatiori de 192 pis. * La ville de Bordeaux à élevé cé palais en l'hofnèur dà très-augulte & très-heureux mariage de Louis dauphin de . France, & de Marie Thérefe infante d'Efpagne. e VA, FFf£i 59% FET Madame fa dauphine s'arrêta auprès de cette co= fonne, tant pour la confidèrer que pour lire les qua: tre infcriptions compolées en quatre différentes lan- nes. “ IS PEUR Elle alla énfuite fur le port, & fut placée dans un fauteuil fous une efpece dé pavillon tapifé,, couvert d’un voile, dont les bords étoïient garnis d’une guir- lande de laurier. Se Von LE 9e Ve torie-Ci ” Le vaifleau ayant été bémi , madame là dauphine lui donna fon nom, & fur,le champ il fut lancé à l'eau. | Madame la dauphine , après avoir admiré quel- e terms ce point de vüe, fut conduite dans une alle où les officiers de la bouche avoient préparé FT CONSO ET | À ‘La princefle fe retira enfuite aux flambeaux , & fé rendit à l'hôtel des fermes du ro Cet hôtel compofe une des façades latérales de a place royale, conftruite fur le bord de la Garonne; il avoit été fait pour en illaminer les façades exté- rieures & intérieures; de grands préparatifs ne pu- rent réuflir ce jour-là, quant à la façade extérieure, parce qu’un vent dé nofd violent qui y donnoit di- rettement, éteignoit une partie des lampions &z des pots-à-feu à mefure qu’on les allumoit. La même rai- {on émpêcha que Pillumination des vaifleaux que les jurats avoient ordonnée, & que madame la dauphi- ne devoit voir de cet hôtel, ne püt être exécutée. . Quant à la façade intérieure , comme elle fe trou- voit à l'abri du vent, lillumination y eut un fuccès entiér. | _Les préparatifs n’avoient pas été moindres pour le dedans de la maifon ; on avoit garni les piliers des voûtes, les efcahers , les plafonds, &c {es corridors d’une infinité de placards à double rang, portant chacun deux bougies. Les appartemens du premier étage deftinés pout recevoir madame la dauphiné &c toute fa cour, étoient richement meublés & éclairés par quantité de luf- tres qui fe répétoient dans les glaces, Dans une chambre à côté de celle de la princeffe ; étoient les plus habiles muficiens de la ville, qui exé- cuterent un concert dont madame la dauphine parut fatisfaite. On avoit fervi une collation avec des rafraïchif- femens, dans une autre chambre de l'appartement. La princefle qui étoit arrivée vers Les fix heures à l'hôtel des fermes, y refta jufqu’à huit heures, Le foir madame la dauphine alla au bal , habillée en domino bleu ; elle fe plaça dans la même loge & en même compagnie que le jour précédent, & ho- nora l’affemblée de fa préfence pendant plus de deux heures. Le même jour la princeffe honora pour la feconde fois de fa préfence l'opéra ; elle étoit placée comme la premiere fois , & les mêmes perfonnes eurent honneur d’être admifes à l’amphithéatre : on joua Fopera d’1ffe fans prologue , & à cette repréfenta- tion parut une décoration qui venoit d’être achevée fur les defleins & par les foins du ch°’ Servandoni. Le 3# Janvier elle y alla pour la troifieme fois, & l’on repréfenta l’opera d’Hipolyte & Aricie. Le foir il fut déclaré qu’elle partiroit sûrement le fendemain à 6 heures 8 demie précifes du matin. ” Le lendemain, au moment que madame la dau- phine fortoit de {on appartement, les jurats revêtus de leurs robes de cérémonie, eurent l'honneur de lui rendre leurs refpeëts, & de la fupplier d’accepter la maifon navale, que la ville avoit fait préparer pour fon voyage, & que cette princefle eut la bonté d’ac- cepter. Cette waifon navale étoit en forme de char de triomphe ; le corps de la barque, du port de quaran- fe tonneaux, étoit enrichi de bas-reliéfs er dorure FET ! für'tout fon pourtour ; la proue létoit d’un magnifi- ! que épéron, repréfentant une renommée d’une atti= . tude élégante; les porte-vergues étoient ôrnées de- . fleurs-de-lis & de tours ; le haut de l’étrave términé * par ün dauphin; la poupe décorée fur toute la hau- | teur & la largeur,des armes de France & d'Efpagne, avec une grande couronne en relief; les bouteilles L CR : c 7 : ; étoient en forme de grands écuflons aux armes de France, dont les trois fleurs-de-lis étoient d’or fur . un fond d’azur, le tout de relief; les préceintes for- * moient comme de gros cordons de feuilles de lau- rier, auf en bas-relief en dorure; le reftant de la barque jufqu’à la flotaifon, étoit doré en plein &c chargé de fleurs-de-lis &c de tours en relief. - La chambre de 10 piés de longueur fur 10 piés de largeur, étoit percée dé huit croifées garnies de leurs chaffis à verre, à deux rangs de montans ; il y avoit trois portes aufli avec leurs chafis, pareils à ceux des croifées; tout l’intérieur , ainfñ que le deflous de l’impériale , étoit garni de velours cramoifi enrichi : de. galons & de crêpines d’or, avec un dais placé fut l’arriere, fur une eftrade de 8 piés de profondeur & de la largeur de la chambre, du fufplus de laquelle elle étoit féparée par une baluftrade dorée en plein, ouverte dans fon milieu pour le paffage, Le ciel & le doffiér du dais étoient enrichis dang leur.milieu de broderie; il y avoit fous cé daïs urë fauteuil & un carreau aufi de velours cramoif, : avec des glands & galons d’or. | Le deflus de l’impériale étoit d’ün fond ronge par. femé de fleurs-de-lis & de tours de relief, toutes do rées ; ce qui formoit une mofaique d’une beauté fin guliere. | Les deux. épis étoient ornés d’amortiflemens en fculpture, & les quatre arêtiers l’étoient de quatre datiphins, dont les têtes paroïfloient fur l’à-plomh des quatre angles de l’entablement, & leurs queues fe réunifloient aux deux épis : le tout de relief &c do- rure, Les trumeaux d’entre les croifées & portes étoient ornés extérieurement de chûtes de feftons ; le deflus des linteaux , tant des croifées que des portes, ornés aufñ d’autres feftons, le tout de relief & dorés en plein ; une galerie de 2 piés 6 pouces de largeur, bordée d’une baluftrade , dont les baluftrades, le focle, & l'appui étoient égalernent dorés en plein, entouroit la chambre qui étoit ifolée ; ce qui ajoû- toit une nouvelle grace à ce bâtiment naval, dont læ décoration ayoït été ménagée avec prudence & fans confufion. | | ” Ilétoit remorqué par quatre chaloupes peintes ; le fond bleu, les préceintes, &c les carreaux dorés. Dans chaque chaloupe étoient vingt matelots , un maître de chaloupe, & un pilote, habillés d’un uni- forme bleu, garni d’un galon d'argent, ainfi que les bonnets qui étoient de même couleur. Les rames étoient peintes, le fond bleu, avec des fleurs-de-lis en or & des croiflans en argent , qui font partie des armes de la ville. _ {l y avoit auffi une chaloupe pour la fymphonie ; qui étoit armée comme celles de remorque. Enfin dans la maïfon navale il y avoit deux pre= miers pilotes, quatre autres pour faire pañler la voix, & fix matelots pour la manœuvre. Avant fept heures madame la dauphine fe rendit fur le port dans fa chaïfe ; elle fut portée jufque fur un pont préparé pour faciliter l’embarquement. Les jurats y étoient en robes de cérémonie , avec ur corps de troupes hourgeoïfes.. Cette princefle étant fortie de fa chaife , le comte de Rubempré, alors malade, prit fa main gauche, & élle donna fa main droite à M. de Ségur fous-maire de Bordeaux. Elle entra ainf fuivie de toute fa cour dans la maïfon navale, dans laquelle étoient l'inten- dant de ta province & fa fuite, le cotps-de-ville, l’or- donnateur de la mariné, &6., 2, Au départ de la princefle, l'air retentit des vœux que faifoit pour elle une multitude prodigieufe de peuple , répandu fur le rivage , dans les vaiffeaux & dans les bateaux du port: Une battérie de canon, que lés jurats avoient fait placer environ cent pas au-deffous du lieu de lembar- quement , fit une falve qui fervit de fignal pour celle du premier vaifleau ; celle-ci pour celle du fecond, & fucceffivement jufqu’au dernier : ces vaiféaux, tant françois qu’étrangers ; tous payvoilés , pavil- ons & flammes dehors ; étoient rangés fur deux lignes : ces falves différentes furent réitérées, aufli- bien que celles des trois châteaux , qui furent faites chacune en fontems, . Une chaloupe remplie de fymphoniites, tournoit fans cefle autour de la maïfon navale ; mais ce n’é- toit pas le feul bateau qui voltigeoit ; 1l y en avoit autour d'elle quantité d’autres de toute efpece , & différemment ornés, qui faifoient de tems en tems des falves de petits canons, Dans la diftance qu’il y a du bout des chartreux à la traverfe de Lormont , le tems étoit fi calme & la marée fi belle , qu’on fe détermina à continuer la route de la même maniere jufqu’à Blaye. La navigation continua ainfñ par Le plus beau tems du monde : on arriva infenfiblement au lieu appellé le Bec-d'Ambés , où les deux rivieres , de Garonne & Dordogne , fe réuniflent, & où corimence la Gi- tonde ; l’eau étoit très-calme , madame la dauphine alla fur la galerie, & y demeura près d’un quart d'heure à confidérer les différens tableaux dont la nature a embelli cet admirable point-de-vâe. Lorfque madame la dauphine fut rentrée, Les dé- putés du corps-de-ville de Bordeaux lui demande- rent la permiffion de lui préfenter un diner que la Ville avoit fait préparer , & d’avoir l'honneur de Py fervir ; ce que madame la dauphine ayant eu la bon- té d’agréer , fuivant ce qui s’étoit pratiqué lors du paflage de fa Majefté catholique , pere de cette prin- ceffe , la cuifine de la ville aborda la maïfon navale, &t celle de la bouche quiavoit fuividepuis Bordeaux, fe retira. | Au fignal qui fut donné , les chaloüpes de re- morque leverent les rames, foûtenant feulement de la chaloupe de devant , pour tenir les autres en li- NE | | M. Cazalet eut l'honneur d'entrer dans l’intérieur de la chambre de madame la dauphine , féparée du refte par une baluftrade , de mettre le couvert , & de prefenter le pain ; les deux autres députés fe joi- grurent à lui, & 1ls eurent l'honneur de fervir en- 1emble madame la dauphine , & de lui verfer à boire. On fe trouva au port à la fin du diner , après Pa- bordage la princefle fortit fur un pont que les jurats de Bordeaux avoient fait conftruire ; le comte de Rubempré tenant fa main gauche , M. Cazalet ayant l’honneur de tenir la droite , elle fe mit dans fa chaife pour fe rendre à l’hôtel qui lui étoit préparé. On voit par ces détails ce que le génie & le zele peuvent unis enfemble. On ne vit à Bordeaux ; pen- dant le féjour de madame la dauphine , que des ré- joiuffances & des acclamations de joie ; ce n’étoit que fêtes continuelles dans la plüpart des maïfons. Le premier préfident du parlement & lintendant donnerent l’exemple ; ils tinrént foir & matin des tables aufli délicatement que magnifiquement fer- vies. Le corps-de-ville de Bordeaux tint auffi matin & foir des tables très-délicates, & tout s’y pafla avec cette élégance aimable , dont le goût fait embellir les efforts de la richeffe. (3) FÊTES DES PRINCES DE FRANCE, Nos princes » E 1 FET 593 dans leë circonftances du bonheut dé la natioñ , f= gnalent fouvent paï leur magnificence leur amour pour la maifon aüguite dont ils ont la gloire de def- cendre , & fe plaifent à faire éclater leur zele aux yeux du peuple heureux qu’elle gouverne, ” C’eft cet efprit dont tous les Bourbons font äni- més , qui produifit lors du face du Roi en 1725; ces féres éclatantes à Villers: Coterets , 8 À Chan- tilly, dont l’idée, l'exécution & le fuccès furent lé chef-d'œuvre du zele & du génie, On croit devoir en rapporter quelques détails qu’on a raflemblés d’a- près les mémoires du tems. ù Le Roi après fon facre partit de Soiffons 18 4 dé Novembre 1722 à dix heurés du matin, & il arriva à Villers-Coterets fur les trois heures & demie, par la grande avenue de Soiffons. On l’avoit ornée dans tous les intervalles des arbres, de torcheres de feuila lée portant des pots à feu. L’avenue de Paris, qui fe joint à celle-ci dans le même alignement, faifart enfemble une étendue de près d’une lieue, étoit dé- corée de la même maniere. | Premiere journée. Après que Sa Majefté fe fut re- pofée un peu de tems, elle parut fur le balcon qui donne fur l’avant-cour du château. Cette avant-courefttrès-vafte ,tous les apparte- mens bas étoient autant de cuifines , offices & falles à manger ; ainfi pour la dérober à la vûe , & à trois toifes de diftance, on avoit élevé deux amphitéatres longs de feize toifes fur vingt piés de hauteur; dif- tribués par arcades, fur un plan à pan coupé & ifo: lé. Les gradins couverts de tapis , étoient placés dans l'intervalle des avant-corps ; les paroïs des am= phithéatres étoient revêtus de feuillées , qui con- tournoient toutes les architectures des arcades, or- nées de feftons & de guirlandes , & éclairées de luf: tres ; chargés de longs flambeaux de cire blanche. Des lumieres arrangées ingénieufement fous diffé- tentes formes , terminoient ces amphithéätres. Au milieu de l’avant-cour on avoit élevé entreles deux amplhithéatrés une efpece de terrafle fortyaite, qui devoit fervir à plufieurs exercices , & on avoit menagé tout-autout des efpaces très-larges pour le paflage des carroffés., qui pouvoient y tourner par: tout avec une grande facihité. A fix toifes des qua tre encognures , on avoit établi quatre tourniquets à courir la bague , peints & décorés d’une maniere uniforme. | Pour former une liaifon agréable entre toutes ces parties , on avoit pofé des guéridons de feuillées chargées de lumieres , qui conduifoient la vûe d’un objet à l’autre par des lignes droites & circulaires. Ces guéridons lumineux étoient placés dans un tel ordre , qu'ils laifloient toute la liberté du paflage. Quand le Roi fut fur fon balcon , ayant auprès de fa perfonne une partie de fa cour , le refte alla occuper les fenêtres du corps du château, qui, auflis bien que les ailes , étoit illuminé avec une grande quantité de lampions & de flambeaux de cire blan- che : ces lumieres rangées avec art fur les diféren- tes parties de l’architeéture , produifoient diverfes formes agréables & une vatiété infime. L’arrivée de Sa Majefté fur fon balcon , fut célé= brée par l'harmonie bruyante de toute la fympho-= nie, placée fur les amphithéatres , 8 compofée des inftrumens les plus champêtres & les plus éclatans : cat dans cet orqueftre , qui réunifloit un très-grand nombre de violons, de haut-bois & de trompettes- marines , on comptoit plus de quarante cors-de- chaffe. Les tourniquets à courir la bague , OCCUPÉS par des dames fuppofées des campagnes &e des chäs teaux voifins, & par des cavaliërs du même ordre, divertirent d’abord le Roi. Les danfeurs de corde commencerent enfuite leursexercicés,au fondes vio- lons & des haut-bois; dans les vuidesde ce fpedacle, 394 F E À Îles trompéttes-marines 8x les cots-de-chañle fe joi- gnoiènt aux violons &c aux haut-bois , & jouotent Pers de la plis noble gäiete, La joie regnoit fouve- rainement dans toute l’aflémblée , & les fauteurs pendant ce tems l’éntiétenoient par [eur foupleffe &t par les Mouvenñrens variés de là plus furprenante ARTE NELSON al | Aprèsce divertiflement, le Roi voulut voir courir labagüe de plus près; alots les tourniquets furent templis de jeunes princes@r feigneurs,qui briguerent lémplor d’amuferSaMajefté, parti lefquels léduc de Chartres, le comtede Clermont, le grand-Prieur & le prince de Valdeik., le‘ due de Retz , le marquis d'Alincourt , le chevalierde Pelé, fe diftinguerent.. Aprés avoir ête témoin dé leur adreflé , le Roi femonta &t fe mit au jeu, Dès que fa partie du Roi fut finie, les comédiens Italiens dénnerent un im- promptu comique , compolé des plus plaifantes fce- ñes dé leur théatre, que Lelio avoit raflemblées, & Qui réjoiirent fort Sa Majeité, HN) ; Tous lés gens de goût font d’accotd fur la beauté de l’ordonnance du.parc 6 des jardins de Villers- Coterets : le parterte, la grandeallée du parc, & les deux quifont à droite & à gauche du château, furent illuminées parune quantité prodigieuife dé pots-à-fen. Tous les compartimens , deflinés par les limieres , he laifloient rien échapper de leurs agrémens parti- Culiers. #7 | Sa Mayéfté défcenidit pour voir de plus près l’ef- fet de cette maghiñqueillumination. Tout-d’un-coup attention générale fut interrompue pat le fon des haut-bois & des mufettes ; les yeux fe porterent auffi-tôt où les oreilles avertifloient qu'il fe préfen: toit un plaifir nouveau. On appercut au fond du parterre, à la clarté de cent flambéaux , portés pat dés faunes & des fatyres, unénôce de village, qui avançoit en danfant vers la térrafle , für laquelle le Roi étoit ; Thevenàärd marchoït à la têté de la trou- pe, portañt un drapeau. La nôcé ruftique étoitcom- pofée de danfeurs & de danfeufes de opéra. Dz- rroulin & la Prevôr repréfentoient le marié & la ma- ice. Cé petit baller fut fiuvi du {ouper du Roi & de fon coucher. | M. le régent, M, le duc de Chartrés, & les grañds officiers de leurs îmaifons , tiñrent lés différentes tables néceflaires à la foule de grands feigneurs & d'officiers qui formoient la cour de Sa Majefté ; il y eut pendant tout {on féjour quatre tables de trente couverts , vingt-une de vingt-cinq , douze de douze, toutes fervies en même téms & avec la plus exquife délicatefle, On calcula dans le tems, que l’on fervoit à chaque repas, ÿo16 plats. . Seconde journée ; chafle du fanglier. Le mardi 3 Novembre , une tripie falve de l'artillerie & des boîtes annonça le léver de Sa Majefté ; après la mefz Te, elle defcendit pour fe tendre à l’amphithéatre Qui avoit été dreflé dans le parc, où S. M. devoit prendre le plaifif d’uné chafle de fanglier dans les zoiles. Les princes du fang & les principaux offi- ciets de S. M. le fuivirent : équipage du Roi pour le fanglier , commandé par le matquis d'Ecquevil- ly, qui en eft capitaine » dévoit faire entrer plufieurs die dans l’énceinte qu’on avoit formée près du jardin de l’orangerie. D: Pour placer le Roi & toute fa cour, on avoit conftruit trois galeries découvertes dans la partie intérieure de avenue, & für fon alignement, À come méncer depuis la grille jufqu’à la contre:allée du parterre. La galerie du milieu préparée pour le Roi avoit douze toifes de longueur & trois de largeur ; son y montoit fept marches par un efcalier à double rampe, qui conduifoit à un repos , d’où l’on montoit Sept autres marches de front, qui conduifoient fur FE T le plancher. Cette galerie.étoit ornée de colonnes dé verdure, dont les entablemens s’unifloient aux . branches des arbres de l’avénue, & formoient uné * archite@ureruftique plus convenable à la fée, que le marbre &les lambris dorés. Cette union des entables , Méns & dés atbfés reflembloit aflez à un dais qui: fervoit de couronnement à la place du Roï. Le plan- cher étoit couveït detapis de T'urquié, ainfi que les . baluffrades ; un tapis de velours cramôifi, brodé de’ grandes crépines d’or , diftinguoit la place dé S. M. Tout le pourtour de cet édifice, &z les rampes des. cfcaliers , étoiént revêtus de feullées, Aux detix côtés, & à neuf piés de diffance de cet-- te grande galerié, on en avoit conftruit deux autres. plus étroites & moins élevées pour le réfte des: fpettateuts, qui ne pouvoient pas tous avoir place : fur la galerie du Roi. Cés deux galeries étoient dé- | corées de feuillagés comme la grande , & toutes les, trois étoient d’une charpente très-fohide, & dont. l’aflemblage avoit té fait avec des précautions in- . fimes, pour prévenir les moindres dangers. Dés que le Roi fut placé , on lâcha l’un apres l’au- tre cinq fangliers dans les toiles, Cette chafle fut par- faitement belle. Le comte de Saxe, le prince dé Val-, deik, & quelques autres feigneurs françois y firent. éclater leur adrefle & leur intrépidité ; 1ls entre- rent dans les toiles armés féulemient d'in. couteau de chafle & d’un épieu, tres Le comte de Saxe fe diftingua béaucoup dans cette chafle. Le Roi ayant bleflé un fangliér d’un dard qu'il lui fänçä, le comte de Saxe l’arracha d'u ne main du corps de l’animal , que {a bleflure ren doit plus redoutable, tandis que de l'autre main il en arrêta la fureur & les efforts.Il en pourfivit enfut-. te un aütte qu'il irrita de cent facons différentes £ lorfqu'il erut avoir pouffé fa rage juiqu’au dernier excès, 1l féignit de fuir ; le fanglier courut fur lui il fé rétourna & l’attendit ; appuyé d’une main fur fon épieu, il tenoit de l’autre {on couteau dé chaf- fe, Le fangliet furieux s’élance fur lui; dans le mo- ment lintrépide chaffeur lui enfonce fon couteau de chaffe au milieu du front, l’arrête ainfi & le ren- verfe, | | Cette chafle, qui divértit beaucoup $. M. &ton- té ia Couf, dufa.jufqu'à une heure après midi, qué le RGi rentra pour diner, : | Chaffe du cerf. Après le dîné, S. M. monta en cale- che au bas de la terraffe; les princes, toute la cour, le fuivirent à cheval. Le cerf fut chaflé peridänt plus de deux heures par la meute du Roi; le comte de Touloufé , gtand- veneur de France, en habit uniforme, pidhänt à la tête. S. M. parcourut toutes les routes du parc : la Chaflé pañla plufeurs fois devant fa caleche ; & le cerf, après avoir tent très-long-tems devant les chiens, alla donner de la tête contre une grille , & {e tua. | Le Roi revint fur les cinq heures daris fon appar- tement , &c changea d’habit pour aller à la foire. Salle de la foire, La foire que M. le duc d'Orléans avoit fait préparer avec magnificence, étoit établie dans la cout intérieure du château ; elle eft quar- rée & bâtie fur un deffein femblable à lavart-cour. Le leéteur ne fera peut-être pas fâché de trouver ici quelque détail de cette foire galante ; l'idée en eft riante & magnifique, & peut lui peindre quel- ques-uns de ces traits fallans du génie auffi vaite qu'aimable du grand prince qui avoit imaginée. On avoit laiffe de grands efpaces qui avoient la forme de rues, tout-au-tour de la cour, entre les boutiques & le milieu du terrein, qu’on avoit par: queté & élevé feulement d’une marche: ce miliewt étoit deftiné à une falle de bal; & on avoit rien oublié de ce qui pouvoït la rendre auf magnifique que commode | sun La falle n’étoit féparée de ces efpeces de rue que par une banquette continue , couverte de velours cramoifi: Toute la cour qui renfermoit cette foire. étoit couverte de fortes bannes foûtenues par des travées folides , qui fervoient encore à fufpendre vingt-quatre luftres. Toutes les différentes, parties de cette foire étoient ornées d’une très-grande quantité de luftres ; & ces lumieres réfléchies fur de grands miroirs & trumeaux de glaces , étoient mul- tiphéesà l'infini. On entroit dans cette foire par quatre pañlages qui répondoient aux efcaliers. du château; ce lieu f’étant point quarré , & fe trouvant plus long que large , les deux faces plus étroites étoient remplies par deux édifices élégans, & les deux autres faces étoient fubdivifées en boutiques, féparées au mi- lieu par deux petits théatres, En entrant de l’avant-cour dans la foire, on ren- controit à droite le théatre de la comédie italienne, qui remplifloit feul. une des. faces-moins larges. de la cour. Il étoit ouvert: par quatre pilaftres peints en matbre blanc, cantonnés de demi-colonnes d’a- rabefque & de cariatides de bronze doré, qui por- toient une corniche dorée, d’où pendoit une pente de velours à crépines d’or, chargée de feftons de fleurs : au-deflus regnoit un pié-d’eftal en baluftrade de marbre blanc à moulure d’or, orné de comparti- mens , de rinceaux de feuilles entrelacées & liées avec des girandoles chargées de bougies. On voyoit au haut de ce théatre les armes du Roi grouppées avec des guirlandes de fleurs ; le chiffre de S. M. figuré par deux L L entrelacées , pa- roifloit dans deux cartouches qui couronnoient les deux ouvertures faites aux deux côtés du théatre pour le paffage-des aéteurs; ces deux paffages étoient doublés d’une double portiere de damas cramoif à crépines d’or, feftonnant fur le haut.Ce théatre éle- vé feulement de trois piés durez-de-chauflée repré- fentoit un temple de Bacchus dans un jardin à treil- lages d’or, couvert de vignes & de raifins. On voyoit la ftatue du dieu en marbre blanc, qu’envi- ronnoient les fatyres en lui préfentant leurs hom- mages. ei AN Le théatre italien étoit occupé par deux aéteurs & un aûrice, Arlequin, Pantalon, & Silvia, qui, par des faillies italiennes & des fcènes réjoiffan- tes , commençoient les plaïfirs qu’on avoit répandus à chaque pas dans ce féjour. Toutes les boutiques de cette foire brillante étoient féparées par deux pilaftres de marbre blanc, de l’entre-deux defquels fortoient trois bras en hau- teur, à plufñeurs branches, garnis de bougies juf- qu’au bas de la baluftrade. Ces pilaftres étoient can- tonnés de colonnes arabefques, portans des vañfes de bronze doré, d’où paroifloient fortir des oran- gers chargés d’une quantité prodigieufe de fruits & de fleurs ; ils étoient alignés fur les galeries qui re- noient fur tout l’édifice autour de la foire. Immédiatement au-deflus des boutiques , qui avoient environ huit piés de profondeur & quinze à feize de hauteur , regnoit tout-au-tour la baluftra- de dont il a été parlé : à chaque côté des orangers, qui étoient deux à deux, 1l y avoit une girandole garnie de bougies en pyramide ; & entre chaque grouppe d’orangers & de girandoles, il y avoit un ou plufieurs aéteurs &c a@rices de l’opéra, appuyés fur la baluftrade, mafqués en domino ou autre ha- bit de bal, dont les couleurs étoient très-éclatan- tes ; ce qui formoit le tableau en même tems le plus furprenant &c le plus agréable. : Chaque boutique étoit éclairée par quantité de bras à plufieursbranches & par deux luftres à huit bougies, qui fe répétoient dans les glaces. À celles qui étoient deftinées pour la bouche, il y avoit de F' EVE 595 plus des buffets rangésavec art & garnis. de giran- doles. Toutes les boutiques avoient pour couron- nement un cartouche qui contenoit en. lettres d’or le nom. du marchand le plus connu de la cour, par rapport à la marchandife de la boutique. Les fup: ports des cartouches étoient ornés des attributs qui pouvoient caraétérifer chaque négoce dans un goût noble. Les mufciens & muficiennes, danfeurs 8€ danfeufes de l'opéra , vêtus d’habits galans faits d’é- toffes brillantes | 8 cependant convenables aux marchands qu’ils repréfentoient , y diftribuoient gé- néreufement &c à tous venans leur marchandife, La premiere boutique étoit celle du pâtifier , fous le nom de Godart ; elle étoit meublée d’un cuir argen- té : le fond féparé au milieu par un trumeau de gla- ce, laifloit voir dans fes côtés le lieu deftiné au tra- vail du métier, avec tous les uftenfiles néceffaires ; la Thierry , danfeufe , repréfentoit la pâtifiere ; elle avoit pour garçons Malrerre 8 Javilliers,, qui ha- billés de toile d’argent, & portant desclayons char- gés de ratons tout chauds ,couroient vite les débi- ter dans la foire. Cette boutique étoit garnie de tou- te forte de pâtiflerie fine. La boutique fuivante avoit pour infcription Per- drigeon ; elle étoit meublée d’une tenture de broca- telle de Venife, & de glaces, & garnie de dragon- nes brodées en or & en argent, nœuds d’épée & de cannes, ceinturons & bonnets brodés richement ; les rubans de toutes fortes de couleurs & d’or & d'argent , les plus à la mode & du meilleur goût, y pendoient en féftons de tous côtés : le maître & la maitrefle de la boutique étoient repréfentés par Dx- “wnoulin: danfeur, & par /a Rey , danfeufe, La troifieme boutique étoit un café ; on lifoit dans le cartouche le nom de Bezachi. Elle étoit ten- due d’un beau cuir doré avec des buffets chargés de tafles , foucoupes , &c cabarets du Japon & des In- des , & de girandoles de lumieres qui fe répétoient dans les trumeaux. Corbie & Julie, chanteur & chanteufe, déguifés en turc & turquefle, ainfi que Deshayes, chanteur , qui leur fervoit de garçon , diftribuoient le caffé , le thé, & le chocolat. La quatrieme boutique élevée en théatre d'opéra teur, étoitinfcrite, Ze do&eur Barry. La forme de ce théatre repréfentoit une place publique & les rues adjacentes. Scapir en opérateur, Triveliz fon gar- çon, Paquet: en, aveugle , & Faminia femme de opérateur, remplifloient ce théatre, & contrefai- foient parfaitement le manège & l’éloquence des ar- racheurs de dents. La cinquieme boutique repréfentoit un rdorro de Venife. Le meuble étoit de velours ; les trumeaux & les bougies y étoient répandus avec profufion. On voyoit pluñeurs tables de baflette & de pharaon, tenues par des banquiers bien en fonds, & tous mal- qués à la vénitienne : c’étoient des courtifans, qui fe démafquerent d’abord que le Roi parut. | La fixieme, intitulée Ducreux € Baraillon , avoit pour marchande /a Duval, danfeufe ; & pour mar- chandife, des mafques, des habits de bal, & des do- minos de toutes les couleurs & de toutes les tailles. Dans la feptieme, où étoient Sazzr- Martin & la Souris la cadette, habillés à l’allemande, on mon- troit un tableau changeant, d’une invention & d’une variété très-ingénieufe ; & un veau vivant ayant huit jambes. Cette loge étoit meublée de damas, & s’appelloit cader. | On fe trouvoit, en tournant, en face de la cour oppofée à celle que remplifoit le theatre de la ce- médie italienne, Elle étoit décorée de la même or= donnance dans Les dehors ; le dedans figuroit une fu. perbe boutique de fayencier, meublée de damas cra- moifi, & remplie de tablettes chargées de cryftaux rares &c finguhers , & de porcelaines fines, dés plus 596 FET belles formes, de la Chine, du Japon &r des Indes, qui faifoient partie des lots que le Roi devoit tirer. avilliers pere, &c la Mango, en hollandois & hol- Jandoïfe , occupoient cette riche boutique, quiavoit pour infcription, Meflager. La premiere boutique après le magafn de porce- laine, en tournant toüjours à droite, étoit la loge des joueurs de gobelets, habitée par eux-mêmes, &t meublée de drap d’or, avec des glaces. Dans le cartouche étoient les noms de Bapufle & de Diman- che, fameux alors par leurs tours d’adreffe. La feconde, intitulée Le/gu 6 la Frenaye, & dont les officiers de M. le duc d'Orléans faifoient les hon- ñeurs, étoit la bijouterie ; elle étoit meublée de moi- re d’or, avec une pente autour, relevée en broderie d’or & ornée de glaces. Cette boutique étoit remplie de tout ce que l’on peut imaginer en bijoux précieux, expofés fur des tablettes ; d’autres étoient renfermés dans des coffres de vernis de la Chine, mêlés de cu- riofités indiennes. La troifieme, portant le nom de Fredoc, étoit l’a- cadémie des jeux de dés, du biribi & du hoca , meu- blée d’un gros damas galonné d’or. La quatrieme , faïfant face au théatre de l’opéra- teur, étoit un jeu de marionnettes qui avoit pour ti- tre, Brioche. La cinquieme , nommée Procope , étoit meublée d’un cuir argenté, & ornée de buffets, de trumeaux, de glaces & de girandoles ; elle étoit deftinée pour la diftribution de toutes les liqueurs fraîches , & des glaces. Buzeau en arménien, & la Perignon en armé- nienne , préfidoient à cette diftribution. La fixieme, tendue de brocatelle , s’appelloit Bréard ; Dumirail, danfeur, en étoit le maître, & 3 débitoit les rataña, rofloli, & liqueurs chaudes de toutes fes fortes. La derniere, qui fe trouvoit dans lencoignure, près du théatre italien , étoit enfin intitulée, M. Blanche, & occupée par le Souris l’aînée, & La du Coudray, marchandes de dragées 8e de toutes fortes de confitures fines. s Un grand amphithéatre paré de tapis &c bien illu- miné, regnoit tout Le long & au-deffus du théatre de la comédie italienne : il étoit rempli par une quantité prodigieufe d’excellens fymphoniftes. Le deflus de la loge intitulée Meflager, fituée en face, étoit aufli couronné par un femblable amphi- théatre , où étoient placés les muficiens & muficien- ñes, danfeurs & danfeufes qui n’avoient point d’em- ploi dans les boutiques de la foire , déguifés en dif- férens caraéteres férieux, galans & comiques, La galerie ornée d’orangers & de girandoles, qui avoit bien plus de profondeur aux faces qu'aux ai- les, fervoit comme de bafe & d'accompagnement à ces deux amphithéatres, & rendoit le point de vüe d’une beauté & d’une fingularité inexprimables, Tel eft totjours l’effet des beaux contraftes. Le Roi fuivi de fa cour, entrant dans ce lieu en- chanté , s’arrêta d’abord au théatre de la comédie italienne, où Arlequin, Pantalon & Silvia ne firent as des efforts inutiles pour divertir Sa Majefté : elle fe rendit de-là aux marionnettes, &c enfuite aux jeux; s’y amufa quelque tems, & joùa au hoca & au biribi, Après le jeu , leRoï alla au théatre du doc- teur Barry : Scapin commença fa harangue, que Tr:- yelin expliquoït en françois , pendant que Flaminia préfentoit au Roi, dans un mouchoir de foie, les ra- retés que lui offroit l'opérateur. Des tablettes gar- nies d’or, & d’un travail fini, furent le premier bijou qui lui fut offert ; Scapinl’accompagna de ce difcours qu'il adreffa au Roi : ” Voilà des tablettes qui renferment le thréfor de tous Les thréfors, Sa Majefté y trouvera l’abregé de tous mes fecress; le papier qui les contient eft incorruptible, G des feras impayables. FET + Flaminia eut encore l'honneur depréfenter deux autres bijoux au Roi ; un cachet précieux & d’une gravüre-parfaite, compofé d’une groffe perle ; & d’une antique, avec un petit vafe d’une pierre rare, & garni d'or. Scapin fit à chaque préfent un com- mentaire, à la maniere des vendeurs d’orviétan. On diftribua ainfi aux princes & aux feigneurs dela cour, des bijoux d’or de toute efpece. Sa Majefté continua fa promenade & fit plufeurs tours dans la foire , pour jouir des.divers tours & propos dont les marchands & les marchandes fe fer- vent à Paris pour attirer les chalans dans leurs bou- tiques. Leurs cris, en effet , & leurs empreflemens à étaler & à faire accepter leurs marchandifes, im toïent parfaitement , quoiqu’en beau, le tumulte , le bruit & l’efpece de confufion qu'on trouve dans les foires S. Germain & S. Laurent, dans les tems où elles font belles, Enfin le Roi, après avoirété long- tems diverti par la variété des fpeftacles & des amu- femens de la foire, entra dans la boutique de Le/ox & laFrenaye, & tira lui-même une loterie qui, en terminant [a fée, furpafla toute la magnificence qu’- elle avoit étalée jufqu’à ce moment, en faifant voir . l'élégance , la quantité & la richeffe des bijoux qui furent donnés par le fort à toute la cour, &c à toute la fuite qu’elle avoit attirée à Villers-Coterets, Cette loterie, la plus fidele qu’on ait jamais tirée, occupa Sa Majefté jufqu'à près de neuf heures du foir. Alors le Roï pafla fur le parquet de la falle du bal, fituée au milieu de la foire, & fe plaça dans un fauteuil vers le théatre de la comédie italienne : les princes fe rangerent auprès de Sa Majefté. Les ban- quettes couvertes de velours cramoïfi, qui entou- roïent cette falle, fervoient de barriere aux fpeéta- teurs. La fymphonie placée fur l’amphithéatre, com- mença le divertiflement parune ritournelle. La Jude repréfentant Terpfcore, accompagnée de Pecourt , compofiteur de toutes les danfes gracieufes & va- riées exécutées à Villers-Coterets; & de Moures, quiavoit compofe tous les airs de ces danfes, chanta un récit au Roï. Après ce récit la fuite de Terpfcore fe montra di- gne d’être amenée par une mufe. Deux tambourins bafques fe mirent à la tête de la danfe ; un tambourin provençal fe rangea au fond de la falle , & on com- mença un petit ballet , fans chant ,très-diverfifié par les pas & les caraëteres, qui fut exécuté par les meil- leur danfeurs de l'opéra. Dès que la danfe cefla, on entendit tout-d’un- coup un magnifique chœur en acclamations , mêlé de fanfares, & chanté par tous les aéteurs & aétrices mafqués, placés fur les deux amphithéatres & les deux galeries qui les accompagnoient ; ce qui caufa une furprife très-agréable. Après ce chœur le Roï alla fouper, & les mafques s’'emparerent de la falle du bal. Enfuite on diftribua à ceux qui fe trouvoient alors dans la foire, tout ce qui étoit refté dans les boutiques des marchands, qua étoient fi abondamment fournies, qu'après que toute la cour fut fatisfaite, il s’en trouva encore une aflez grande quantité pour contenter tous les curieux. Ce feroit ici le lieu de parler de la fre de Chan- tilly, donnée dans le même tems ; & de celle donnée à Saint-Cloud par S. A.S. Mer. le duc d'Orléans pour la Naïffance de Monfeigneur le duc de Bourgogne ; mais On entrouveraun précis aflez détaillé dans quel- ques autres articles. Voyez SACRE DES ROIS DE FRAN- CE , ILLUMINATION, FEU D'ARTIFICE, 6c. On terminera donc celui-ci, déjà peut-être trop long , par le récit d’une féte d’un genre aufli neuf qu'élégant , dont on n’a parlé dans aucun des mé- moires du tems, qui mérite à tous égards d’être mieux connue, & qui rappellera à la cour de France le {ouvenir d’une aimable princefle, qui en étoit adorée. | . On On doit preffentir à ce peu de mots , que l'on veut parler de S. A. S. mademoifelle de Clermont, fur- intendante de la maifon de la Reine, Ce futelle, en effet, qui donna à S. M.cette marque publique de l'attachement tendre & refpeueux qu’elle infpire à tous ceux qui ont le bonheur de lapprocher. Cette princefle, douée des dons les plusrares, & les mieux faits pour être bientôt démêlés, malgré la douceur modefte qui, en s’efforçant de les cacher, fembloit encore les embellr, fit préparer en fecret le fpeëta- cle élégant dont elle vouloit furprendre la Reine. Ainfi le foi du 12 Juillet 1729, en fe promenant avec ellefur la térrafle du château de Verfailles , elle l’engagea à defcendre aux lambeaux jufqu'an laby- rinthe. | L'entrée de ce bois charmant {e trouva tout-à- coup.éclairée par une illumination ingénieufe, & dont les lumieres qui la formoient, étoient cachées par des tranfparens de feuillées. | E Jope & l Amour font les deux ffatues qu’on:voit aux deux côtés de la grille. Dès que la Reine parut, . une fymphonieharmonieufe fe fit entendre ; & l’on vit tout-à-coup la fée des plaifirs champêtres, qui en étoit fuivie. Elle adrefla les chants les plus doux à la Reine, en {a preffant de goûter quelques mo- mens les innocens plaïfrs qu’elle alloit lui offrir. Les vers qu'elle chantoit, étoient des loïanges délica. tes, mais fans flaterie ; ils avoient été dictés par le cœur de mademoiïfelle de Clermont : cette princefle ne flata jamais, & mérita de n’être jamais flatée. La fée ; après fon récit, toucha de fa baguette les deux ffatues dont on a parlé, Au fon touchant d’une Îymphonie mélodieufe elles s’animerent, & joue- rent avec la fée une jolie fcene , dont les traits le- gers amuferent la Reine & la cour. Après ce début, les trois ateurs conduifirent la Reine dans les allées du labyrinthe ; l’'illumination en Ctoit f brillante, qu’on y lifoit les fables qui y {ont répandues en infcriptions , auffi aifément qu’en plein jour. Au premier carrefour, la Reine trouva une troupe de jardiniers qui formerent un joli ballet mêlé de chants & de danfes. Cette troupe précéda la Reine en danfant, & l’engagea à venir à la fontaine qu’on trouve avant le grand berceau des oifeaux. Là plufieurs bergers & bergeres divifés par qua- drilles, coururent en danfant au-devant de S. M. & ils repréfenterent un ballet très-counrt & fort ingé- nieux, dont Z charme des plaifirs champêtres étoit le fujet. On peut juger die les eaux admirables de tous ces jolis bofquets joüierent pendant tout le tems que la Reine voulut bien y refter ; & la réflexion des coups de lumiere qui partoiént du nombre immenfe des lu- mieres qu'on y avoit répandues, augmentoit & va- rioit à tous les inftans les charmes de cet agréable féjour. | Ea Rene, après le ballet , paffa dans le berceau couvert ; 1l étoit embelli par mille guirlandes de fleurs naturelles, qui entrelacées avec une quantité immenfe de luftres de cryftal & de girandoles dorées, formoient des efpeces de berceaux auffi riches que galans. "1 Douze jeunes bouquetierés galamment ‘ajuftées, Parurent.en danfant. Une encore mieux parée, & qui fe diffinguoit de fa troupe par les graces de fes mouvemens & l'élégance de fes pas , préfenta un bouquet,de fleurs les plus belles à la Réine: lesau- îres en offrirent à toutes les dames de la cour. Il : avoit autour duberceau-un grand nombre de tables de gazon , fur lefquelles on voyoit des Corbeilles do- rées , remplies de toutes les fortes de:fleurs ; &:dont tout le monde avoit la liberté de fe parer. On pañfa d’allée en.allée. ju{qu’au carrefour ; on _ Tome VI, : FET 97 y trouva fur un banc élevé en forme de théatre, deux femmes qui paroïfloient en grande querelle. Une {ÿmphonie aflez longue pour donner à la courletems de s'approcher, finit lorfqu’on eut fait un grand de+ mi-cercle autour de ce banc oùelles étoient placées : On connut bientôt à leurs difcours que l’une étoit la flaterie, & l’autre la critique. Celle-ci, après quel- ques courtes difcufions qui avoient pour objet le bien qu'on avoit à dire d’une fi brillante cour ,-fit convenir la flaterie qu’on n’avoit que faire d’elle pour célébrer les vertus d’une Reine adorée, qui comptoit tous {es momens par quelque nouvelle marque de bonté. Cette fcene fut interrompue par une efpece d’al lemand, qui perça la foule pour dire , à demi-ivre s que c’étoit bien la peine de tant dépenfer en lumie- res, pour ne faire voir que de l’eau. Un gafcon qui pafla d’un autre côté, dit : hé / fandis, je meurs de faim ; on vit dont de l'air à la cour des rois de France ? À ces deux originaux, en fuccéderent quelques au- tres. Ils s’unirent tous À la fn pour chanter leurs plaintes ; & ce chœur comique , finit d’une manie: re plaifante cette partie de la fête. . La reine & la cour arriverent dans la grande allée qui fépare le Zabyrinthe de l’Âle d'amour : on ÿ avoit formé une falle de fpe&tacle de toute la larsèur de l'allée , & d’une longueur proportionnée. La falle 8 le théatre étaient ornés avec autant de magnificence que de goût. Les comédiens françois y repréfente- rent une piece en cinq aétes : elle avoit été compo: fée par feu Coypel , quieft mort premier peintre du Ror, &c qui a laiflé après lui la réputation la plus de- firable pour les hommes qui, comme lui , ont conf. tamment aimé la vertu. Cette piece, dont je n’ai pu trouver ni le fujet ni _letitre, fut ornée de cinq intermedes de danfe, qui furent exécutés par les meilleurs danfeurs de l’o- péra. | La reine, après la comédie, rentra dans le laby- rinthe , &.le parcourut par des routes nouvelles , qu'elle trouva coupées par de jolis amphithéatres, occupés par des orcheftres brillans. Elle fé rendit enfuite à l’orangerie , qu’on avoit ornée pour un bal paré : il commença & dura juf- qu’à l'heure du feftin , qui fut donné chez mademoi- felle de Clermont, avec toute l'élégance qui lui étoit naturelle. Toute la cour y affifta. Les tables, cachées par de riches rideaux, parurent tout -à- coup dans toutes les falles ; elles fembloient fe multiplier, com- me la multitude des plaifirs dont on avoit joit dans la fée. - Croiroit-on que tous ces aprêts , l’idée , la con- duite, l’enchaîneñent des diverfes parties de cette ëte, furent l’ouvrage de trois jours? C’eft un fait certain qui, vérifié dans le tems., fit donner à tous ces amuiemens le nom d’mprompti du labyrinthe. La Reine ignoroit tout ce qui devoit l’amufer pen- dant cette agréable foirée ; la cour m’étoit pas mieux inftruite : hors le feftin chez mademoïfelle de Cler- mont , qui avoit été annoncé fans myftere , tout le refte demeura caché, & fut fucceflivement embellé du charme de la furprife. pates Les courtifans louerent beaucoup l'invention, l& conduite , l'exécution de cette fére mpémeufe, 8 toute la cour s’intrigual pourten découvrir l'inven- teur: Après bien des proposi, dés contradi@ions , des conjeltures , les foupcons &les vœux fe réurirent fur M. le duc de Saint:Aignan: > ONLINE Le caraétere des hommesfe peint prefquetoüjours dans lestraits faillans de leurs ouvrages.Ce fecretpro: fond , gardé par tant de monde ; la prévoyancezitoirs jours fi rare dans la diftribution des différens emplois s le choix:& linftruétion des Artiftes ; lenchaînement ingénieux des plaïfirs, déceloient, malgré fa modef, GGgg 598 F° EUT tie, l’efprit fage & délicat, qui avoit fait tous ces beaux arrangemens. Ces jeux legers, qu’une imagination auf réglée que riante répandoit fur les pas de la Reine la plus refpettable, n’étoient que les prémices de ce que M. le duc de Saint-Aignan devoit faire un jour pour fer vir l’état & pour plaire à fon Roi. M. de Blamont , chevalier de l’ordre de S. Mi chel , & furintendant de la mufique de S. M. compo- fa toutes les fymphonies &c tes chants de cette féce. Il étoit déjà depuis long-tems en poffeffion de la bien- veillance de la cour , que fa conduite &r fes talens lui ont toùjours confervée. (B) | FÊTE , eft le nom à l'opéra de prefque tous les di- Vertiflemens. La fête que Neptune donne à Thétis ; dans le premier aéte , eft infiniment plus agréable que celle que Jupiter lui donne dans le fecond. Un des grands défauts de l’opéra de Thétis , eft d’avoir deux aétes de fuite fans féres ; 1l étoit peut-être moins {enfble autrefois, mais il a paru très-frappant de nos jours, parce que le goût du public eft décidé pour les féres. | L'art d'amener les féres , de les animer, de les faire fervir à Paétion principale , eft fort rare: cependant, fans cet art, les plus belles fées ne font qu'un orne- ment poftiche. Voyez BALLET, COUPE, COUPER, DIivERTISSEMENT. Il femble qu’on fe ferve plus communément du terme de fée pour les divertiflemens des tragédies en mufque, que pour ceux des ballets. C’eft un plus grand mot confacré au genre, que l’opinion , Phabi- tude & le préjugé paroïffent avoir décidé le plus grand, Voyez OPÉRA. (B) . FÉTEUR , f. £. (Medecine. ) fe dit de la mauvaife odeur, de la puanteur qu'exhalent certaines parties du corps humain , par un vice qui leur eft particu- lier, ou par celui des matieres qu’elles contiennent, des humeurs qui y font féparées , qui s’évacuent ac- tuellement. | Il n’eft produit aucune mauvaïfe odeur dans au- cun endroit du corps d’un homme qui fe porte bien, excepté dans les gros inteftins , & fur-tout dans lin- teftin redum, par l’amas & le féjour qui s’y font des matieres fécales : l'odeur de Purine, dans le moment qu’elle eft rendue , eft fans puanteur ; 1l s’en répand tout-au-plus une odeur un peu forte lixiviele. Ce font des matieres ou humeurs odorantes, con- tenues dans le bas-ventre, qui font caufe qu'il s’ex- hale de cette cavité , lors de l’ouverture des corps des animaux les plus fains, une certaine odeur de- fagréable , que la tranfpiration de toutes Les parties contenues emporte avec elle : une odeur de fembla- ble nature, cependant beaucoup moins fenfible , fe fait fentir à l’ouverture de la poitrine ; mais on ne fent prefque rien du tout à ouverture du crane. Ainfi, lorfqu'il eft produit quelque mauvaife odeur dans quelque partie du corps , qui n’en rend point dans l’état de fanté , c’eft un figne qu'il y a des hu- meuts dans cette partie qui fe corrompent , que les {els s’y alkalifent , que les huiles s’y rancifient. La puanteur de la bouche, parexemple, provient le plus ordinairement ou des ordures qu’on laïffe fe ramafler entre les dents , &:par conféquent de ce qu’on n’a pas attention de fe laver cette cavité, ou des exhalaifons despoumons remplis de matieres mu: | queufes corrompues ;. ou despoumonsulcérés, ou des exhalaïfons de l’eftomac, dans lequel les digeftions (e font habituellement mal, les alimens féjournent trop long :tems & fe corrompent différemment, foit par acefcence, par alkalefcence , foit par tendance à a rancidité. | LR | On peut corriger ce vice, loffqw'il dépend de la mal-propreté de la bouche , en fe lavant fouvent L FE avec de l’eau , dans laquelle on a ajoûüté une dixie- me pattie de vin, & diflous une huïtieme partie de fel marin : lorfque la mauvaife odeur , rendue par la bouche , vient des poumons, l'exercice à cheval eft un moyen très-propre à en difiiper lacaufe ; lorfque l'odeur forte vient de l’eftomac , rien n’eft plus propre à la faire cefler , que l’ufage des eaux miné- rales. ARE 1 Les animaux qui ne vivent que de végétaux, ren- dent leurs excrémens prefque fans féreur : l’homme tendroit les fiens de même , s’il ne fe nourrifloit que de pain &c d’eau ; mais tous les animaux qui font leur principale nourriture de viandes ; de poiflons, d'œufs, ont leurs matieres fécales très-puantes. Il eft des perfonnes qui font incommodées par la mauvaife odeur de leur déjeétion: elles peuvent cor- riger ce vice ; en faifant ufage d’alimens aqueux , acides , falés ; on peut confeiller avec fuccès ce ré- gime , toutes les fois que les excrémens font plus jaunes que la couleur naturelle de la paille. Lorfque les déje&tions font fort puantes dans la phthife, 1l eft de la plus grande importance de s’ab- ftenir de l’ufage des viandes , & d'employer beau- coup le fuc de limon : on doit obferver la même, chofe , quand les urines récentes font de mauvaife odeur : on peut regarder comme une regle, pour les hydropiques , qu'ils ne fe trouvent pas mal de faire ufage de viande pour leur nourriture ; tant que les excrémens ne font pas extraordinairement puans ; il faut renoncer bien-tôt à ce genre d’aliment , & re- courir aux acides , dès que les déjeétions deviennent d’une odeur plus fétide. Æxtrair de Boerhaave , comment, infhtut. pathol. fymptomatolog. $. 970. Galien, dans fon commentaire fur le troifieme livre des épidémies , reparde la féreur extraordinaire de tou- te forte d’excrémens , comme un figne certain de pourriture : la mauvaife odeur dans les ulceres an- nonce qu'ils font de mauvais caraétere, Pour la caufe phyfique des mauvaifes odeurs en général , voyez ODEUR , PUANTEUR. Quant au dé- tail concernant les parties du corps, où il s'établit des caufes de puanteur, voyez les articles de ces par- ties même , telles que le Nez , les OREILLES , les AISSELLES, les AÎNES, les PIÉS ; & pour les hu- meurs , v0yeæ D'ÉJECTION , URINE ; TRANSPIRA- TION , SUEUR , CRACHAT , ULCERE , OZÈNE, &c. (d) FETFA, { m. (ff. mod. ) nom que les Turcs donnent aux jugemens ou décifions que le muphti rend par écrit, Ce mot , en langage turc, fignifie /er- tence , & en arabe, /4 réponfe ou le jugement d'un homme fage ; & 1ls appellent ainfi, par excellence, Jes jugemens du muphti. (G) 1 FÉTICHE,, £. f. (Hif£. mod.) nom que les peuples de Guinée en Afrique donnent à leurs divinités. Ils ont une féiche pour toute une province, & des fé- siches particulieres pour chaque famille. Cette idole eft un arbre , une tête de finge, un ofeau, ou quel- que chofe de femblable, fuivant leur fantaifie. Dap- per, defcription de l'Afrique, (G) FÉTIDE , adj. (Medecine. ) Voyez FÉTEUR: Féripes,(Picures ) Pharm. & Mariere médicale, On trouve dans les difpenfaires deux fortes de pilu- les , qui portent le nom de férides ; favoir , les pilu- les férides majeures, & les pilules férides mineures. Elles font l’une & l’autre de Mefué. Pilules férides majeures de Mefuë. Prenez du faga- penum,de la gomme ammoniac;opopanax,bdelliumi, de la coloquinte , de l’aloès fuccotrin , de la femer- ce de rue, de l’épithyme, de chacun cinq dragmes; de la fcammonée , trois dragmes ; de l’éfule prépa- rée dans le vinaigre , & des heérmoda@es , de cha- cun deux dragmes ; du meilleur turbith , demi-once; dwginmgembre, une dragme & demie ; de la eannelle ; du {pica indica , du faffran , du caftoreum , de cha- cun une dragme; de l’euphorbe , deux fcrupules. Fdites-én une mafle avec le fuc de poireau , felon l’art, On trouve dans la pharmacopée univerfelle de Lé- mery, des pilules fütides majeures réformées. Elles different de celles de Mefué, en ce qu’on enaretran- ché l’épithyme, le fpicanard, la cannelle, le gingem- bre , le bdeillium & l’euphorbe, & qu’il a employé le firop de pomme compofé du roi Sapor ou Sabor, à la place du fuc de poireau. Les pilules fécides majeures de la pharmacopée de Paris, different de celles de Mefué , en ce qu’on en a retranché l’euphorbe, & qu’on y a ajoûté la myr- the & l’afla fœtida , & qu'on a fubftitué avec Lème- ry Le firop de pomme au fuc de poireau. Ces pilules font hydragogues, fondantes , hyfté- riques, emmenagogues : elles ont été recomman- dées par les anciens medecins, quiofoient employer des remedes héroïques, beaucoup célebrés contre les obftru@ions, les fupprefions de regles & les vui- danges, les vapeurs hyftériques, la goutte, l’hydro- . pifie, le rhumatifme, certaines coliques, &c. Mais la medecine moderne profcrit, fans doute trop gé- néralement, les remedes de cette clafle. Voyez Hk- ROIQUE (éraitement.) Les pilules fécides mineures font abfolument hors d’ufage parmi nous. La faculté de Medecine de Pa- ris ne les a pas fait entrer dans fa pharmacopée. (4) FÉTIDE , ( Chimie.) On donne ce nom à quelques huiles tirées des végétaux & des animaux par la vio- lence du feu. Voyez Huize. (2) FETMENT , f. m. ( Commerce.) monnoïe d’Alle- magne ; c’eft la moitié du petriment , ou le demi- albs ou fou , ou la vingt-quatrieme partie du kopf- ftuck , ou fix fous huit deniers de France. FÊTU, f. m. (Æiff. nat. bor.) en latin , feffua ave- nacea fierilis elatior. C. B. forte d'avoine fauvage, qui dans le fyftème de Linnœus , conftitue un gen- re diftinéif de plante. Voici fes cara@teres. Le cali- ce eft un tuyau bivalve, droit, portant des fleurs rangées enfemble fur un frêle épic. La fleur eft à deux levres, dont l’inférieure a la forme du calice, & eft en quelque maniere cylindrique, fe terminant néanmoins par un barbillon pointu. Les étamines font trois filamens capillaires, plus courts que lafleur. Cette fleur entoure étroitement la graine qui eftuni- que, oblongue, même très-aigué aux deux extrémi- tés, convexe d’un côté, & fillonnée de l’autre. Arr, de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FÉTU , ( Géogr.) petit royaume de l’Afrique, fur la côte d’or de Guinée, d'environ quatre lieues de long, fur quatre de large; 1l abonde en fruits, bé- tail, huile, & palmiers qui fourniflent du vin. Les Hollandois y ont eu un fort. (D. J.) FÉTU EN CUL, {. m. ( Æif£. nat ornitol, ) oïfeau ainfi nommé, parce qu'il a dans la queue déux plu- mes longues d’un pié & plus, qui font fi bien jointes lune à l’autre, qu’elles paroïffent n’en faire qu’une ; on l’appelle auffi l’oiféau du tropique, parce qu'il ne fe trouve qu'entre les deux tropiques. Le P. du Ter- tre croit que c’eft un oifeau de paradis; onne le voit | prefque jamais à terre, que pour couver & nourrir fes petits. Il a le corps gros comme un pigeonneau ; la tête petite ; le bec gros & long comme le petit doigt, pointu & rouge comme du corail; les piés {ont de la même couleur ; celle des plumes eft blan- che comme la neige. Cet orfeau vole très - haut & fort loin des terres ; 1l a un cri perçant. Les Sauva- ges font grand cas des deux longues plumes de la queue, ils les mettent dans leurs cheveux, & les paflent dans l’entre-deux de leurs narines en grufe | Tome VI, LE mé FET 599 de mouftaches. A7/8, rar. des antilles, Tom. II. pag. AM E à) FEU, {. m. (Phyfig.) Le caraûtere le plus effen- tiel du fx, celui que tout le monde lui reconnoït, eft de donner de la chaleur, Ainfi on peut définir en énéralle feu, la matiere qui par fon aétion produit immédiatement la chaleur en nous. Mais le ex eft-il une matiere particuliere ? ou n’eft-ce que la matiere des corps mifé en mouvement? c’eft fur quoi les Phi- lofophes font partagés. Les fcholaftiques regardent le fé comme un des quatre élémens ou principes des corps, en quoi ils ne font pas fort éloignés des principes de la chimie moderne, Voyez plus bas FEU, ( Chimie.) . Le fez, felon Ariftote, raflemble les parties ho- mogenes, êc fépare les hétérogenes, ce qui n’eft pas vrai, du moins en général; puifque fi l’on fait fondre dans un même vafe, du fuit, de la cire, de la poix, de la réfine , le tout s’incorpore enfemble. Selon les Cartéfiens , Le 4 n’eft autre chofe que le mouvement excité dans les particules des corps par la matiere du premier élément dans laquelle ils nagent. Voyez CARTÉSIANISME 6 MATIERE SUB- TILE. Selon Newton, le feu n’eft qu’un corps échauf- fé. Voyez CHALEUR, Enfin felon un grand nombre de philofophes modernes, c’eft une matiere particu- here. Voyez CHALEUR, 6 la fuite de cet article. Comme le feu échappe à nos fens, & qu'il fe ren- contre dans tous les corps & dans tous les lieux où il eft pofible de faire des expériences, il eft très-dif- ficile de diftinguer les vrais caraëteres qui lui font propres. M. Muflchenbroek lui en donne deux , fa- voir la lumiere & la raréfa@tion. Voyez LUMIERE G RARÉFACTION. Ce phyficien prétend que par- tout Où1l y a lumiere, même fans chaleur, 1l y a fez. Il le prouve par la lumiere de la lune, qui raflem- blée au foyer d’un verre ardent, éclaire beaucoup fans brüler. Mais il femble qu’on peut contefter que cette lumiere , en ce cas, foit du fé. Il n’eft pas dé montré que la matiere qui produit la lumiere, foit la même que celle qui produit la chaleur. Il eft vrai que la lumiere de la lune ef refléchie de celle du fo- leil, & que la lumiere du foleil eft accompagnée de chaleur. Mais encore une fois, 1l faudroit avoir prouvé inconteftablement que la lumiere & la cha- leur du foleil font abfolument produites par Le mê- me principe & par la même matiere. D'ailleurs , fuppofons même qu'il n’y ait d’autre différence entre la lumiere du foleil & celle de la lune, finon que celle-ci n’échauffe pas parce qu’elle eft produite par un mouvement trop rallent: ; on pourroit dire en ce cas, que la lumiere de la lune ne feroit point proprement du fe, puifqu’elle manqueroit du mou- vement néceflaire pour être un féz véritable. De la raréfaition des corps par le feu. Tous les corps, fion en excepte un petit nombre dont nous parlerons plus bas, fe raréfent ou fe dilatent ez sous | fèrs par le moyen du fes. Cette raréfattion continue aufi long-tems que le f£z refte appliqué à ces corps. Elle eft d’autant plus grande-que le fez eft plus ar- dent ; cependant elle ne va pas à l'infini, & ne paf- fe pas une certaine étendue déterminée. C’eft au moyen du pyrometre (Voyez PYROMETRE. ), qu'on mefure la raréfaétion des corps par le fez. La raré- faétion d’un corps expolé au feu fe fait d’abord len- tement, puis s’accélere jufqu'à un certain 724x/mum d'accélération, au-delà duquel la raréfaëtion fe fait encore, & continue toûjours, mais moins vite, ju qu'à ce que le corps foit arrivé à fa plus grande di- latation. Le même fé qui raréñe divers corps, ne les dilate ni en raïfon inverfe de leur pefanteur, ni en raifon inverfe de leur force ou réfiftance à être: divifés, ni en raifon compofée de ces deux-là, mais fuivant un autre rapport tout-à-fait inconnu. GGgg if 6où FEU L'étain (à un même degré de fx) eft celui de tous les métaux qui fe raréfie le plus vite; enluite le plomb, puis l'argent, lé cuivre jaune, le rouge, & le fer. Non-feulement le fes raréfie les métaux, mais il les fond; les uns ont befoin pour cela d’un desré de feu beaucoup plus grand que les autres. L’étain, d’abord froid comme la glace, enfuite fondu , fait raréfier au pyrometre un lingot de fer, jufqu'à 109 degrés; le plomb, dans les mêmes circonftances, fait raréfier le même lingot de 217 degrés. Les mé- taux qui fe fondent avant que d’être rougis, n’ont pas encore acquis leur plus grand degré de chaleur dans l’inftant de la fufon; car après cet inftant, ils continuent à raréfier encore confidérablement les mé- taux plus durs qu’on plonge dans ces métaux fon- dus. Cela eft au moïns vrai du plomb, comme M. Muffchenbroek s’en eft aflüré par des expériences, & il eft porté à croire qu'il en eft de même de l'or , de l'argent, du cuivre & du fer. Voyez l'article Fu- SION. Lorfque le fez volatilife les parties du corps, on dit que ces parties fe réduifent en vapeurs, & on donne à cette aétion le nom d’évaporation. Voyez ÉVAPORATION , FUMÉE, &c. Après que le feu a difipé les particules les plus fubtiles des corps, il ne refte plus que les plus grof- fieres , qui par lation du fx, ont ceflé d’être ad- hérentes les unes aux autres. Voyez CENDRES. Dès que les corps ceffent d’être échauffés ou en- tretenus dans la chaleur qu’ils ont acquife, ils fe condenfent, & fe condenfent d’autant plus vite que le fluide dans lequel ils nagent , contient moins de feu. C’eft pour cela que Les corps chauds quisfe re- froidiffent, fe condenfent plus vite, toutes chofes d’ailleurs égales, que ceux qui font moins chauds, parce que le fluide où ces corps nagent, eft plus froïd par rapport aux premiers. Les corps qui fe raréfient le plus vite par la préfence du fe, font auffi ceux qui fe condenfent le plus vite dès que le féz celle d'agir. Les fluides, ainf que les folides, fe dilatent par le feu, & fe condenfent par le froid. Le fluide qui fe dilate le plus & le plus prompte- ment, eft l'air; enfuite l’efprit-de-vin, huile de pé- trole , celle de térebenthine, celle de navet, le vinai- gre diftillé, l’eau douce, l’eau falée, Peau-forte, l’huile de vitriol, l’efprit-de- nitre, le vif-argent. C’eft fur la dilatation des fluides par le fez, qu’eft fondée la conftruétion des thermometres. #. THER- MOMETRE. 11 réfulte de ces différens faits, que les corps doi- ventferaréfier de plus en plus aux approches de l'été, êt fe condenfer à celles de l’hyver; que les corps doivent fe dilater davantage dans les pays plus chauds ( c’eft pour cela que le pendule d’un horloge fe dila- te davantage fous l'équateur que près des poles ); qu'enfin les corps doivent fe dilater le jour, & fe condenfer la nuit. Au refte il y a des corps folides que le fé conden- fe au lieu de les dilâter, comme les bois, Les os, les membranes, les cordes-à-boyau, &. Un verre épais & vuide que l’on approche fubite- ment du ex, fe caffe & éclate en pieces, parce que la facilité du verre à être dilaté par le /ez, fait que les parties extérieures font d’abord violemment di- latées à l'approche du fe, tandis que les parties ex- térieures ne le font pas encore, ce qui caufe la fépa- ration de ces parties. Au contraire quand le verre eft mince , il ne fe cafle pas, parce que la dilatation fe fait en même tems à l’intérieur & à l’extérieur. De l'augmentation du poids des corps par le feu. Le feu en s’introduifant dans les corps, augmente leur poids ; c’eft ce que M. Muffchenbroek prouve, arr. 954-957 de fes Effais de Phyfique, par différentes expériences; on fent combienelles font aïfées à faire, puifqu'il ne s’agit que de pefer un corps avant qu'il foit pénétré par le feu, 8 immédiatement après qu'il Va été. Nous y renvoyons donc, & nous avertirons feulement que quand même on trouveroit dans cer- tains cas un corps moins pefant après qu'il a été ex- pofé au fer, qu'après qu'il a été refroidi, où avant qu'il y fût expolé, il ne faudroit pas fe flater d’en rien conclure contre le principe général que nous avançons ici. Car les corps fe dilatent par le fe; ê&c par conféquent par les lois de Phydroftatique , its doivent perdre dans l'air une plus grande partie de leur poids, que quandils ne font pas dilatés. Si donc ce furplus qu'ils perdent de leur poids eft plus grand que le poids que le féz leur ajoûte, ils paroïtront moins pefans, quoiqu’en effet 1ls le foient davanta- ge. Mais fi on fait l'expérience dans le vuide, alors l'augmentation du poids par le fez fera fenfible. Conféquences [ur la matiere du feu, tirées des farss precèdens. M. Muflchenbroek conclut de-là avec M. Lemery & plufeurs autres (Voyez CHALEUR.) que le feu eft un corps particulier qui s’infinue dans les autres; que ce corps eft pefant, qu’il eft impénétra- ble, puifqu'il eft refléchi par le nuroir ardent, que fes parties font très-fubtiles, par conféquent fort folides & fort poreules ; qu’elles font fort lifles & à reflort; qu’enfin elles peuvent être ou mües avec beaucoup de rapidité (mouvement néceflaire pour produire la chaleur ), ou en repos dans les potes des corps , comme dans ceux de la chaux. Nous paflons legerement fur ces conclufñons conjetturales. li n’y a, dit Boerhaaye, aucune expérience par laquelle on a prouvé que le fèu eût changé d’au- tres corps en véritable fe, quoique ces corps fuffent la nourriture même du fèz. Si donc le fez n’eft pas en état de produire du /ex de quelqu’autre matiere étrangere, il ne fe trouvera non plus aucune matie- re qui puifle le produire ; car il n’y a en effet que le feu qui ait la vertu de produire du fé. Mais tout le jeu eft-l donc d’une feule & même matiere, ou y en a-t-il de diverfes fortes ? nous lignorons. Si les écoulemens éleétriques ne font que du feu, ya, felon M. Muffchenbroek, différentes fortes de feu. Ileftdificile, felon quelques philofophes, de pen- fer que le feu ne foit autre chofe que du mouvement, puifque le mouvement fe perd en fe communiquant, &t que le fe s’augmente au contraire à mefure qu'ilie communique, Cette preuve ne nous paroït pas fans réplique ; car 1°. [2 mouvement peut s’augmen- ter par la communication, comme 1l arrive dans le choc des corps élaftiques &c dans les fluides. 2°. [1 ne feroit pas moins difücile d'expliquer , en regat- dant le fex comme une matière particuliere, com- ment une petite portion de cette matiere mife en ‘mouvement, communique fon mouvement avec tant de force & de rapidité à un beaucoup plus grand nombre d’autres parties de la même matiere. Quelques phyficiens ont penfé que le fez étoit plus approchant de la nature de l’efprit que de celle du corps; ils ont nié que ce füt une matiere, Cette opinion foütenue avec efprit dans une differtation moderne, et trop erronée pour mériter d’être re- futée. D’autres ont crû que la nature du féz étoit de n’avoir point de pefanteur ; les expériences dont nous venons de parler femblent prouver le contrai- re : & Boyle a, comme l’onfait, écrit un livre de ponderabilicate flamme. Il eft vrai (car pourquoi ne le pas avouer ? ) que ces expériences ne font pas ri- goureufement démonitratives. Car l'excès de pefan- teur qu'acquierent les corps calcinés, pourroït ve- nir à la rigueur , non du fez qui eft entré dans leurs pores, mais de quelque matière étrangere qu'il a en- traînée &e qui s’y Eft jointe ; mais comme on n’a point non plus de preuves de la jon&tion de cette matiere FEU étrangere au fex, il eft plus naturel de croire que Paugmentation de poids vient du fez même. _ Au refte, il n’eft pas inutile d’obferver que de grands phyficiens font là-deflus peu d'accord entr”- eux: Lemery & Homberg tiennent pour le poids, & Boerhaave le nie; il prétend qu'ayant pefé une barre de fer embrafée, il ne Pa pas trouvée plus pe- fante; mais, comme on l’a déjà infinué, cette barre en augmentant de volume par le fèz, pourroit avoir autant perdu de poids par cette augmentation, qu’- elle pouvoit en avoir gagné par la quantité de ex in- troduite dans fes pores ; ainfi cette expérience bien entendue feroit contre Boerhaave. Le feu eftilun fluide, comme plufieuts phyficiens le prétendent? Il eff certain qu’il a üne des proprié- tés des fluides, la mobilité &la ténuité des parties ; mais les fluides ont d’autres propriétés qui ne les ca- raétérifent pas moins, & qu'on n’a point encore re- connus dans le fez, comme la propriété de preffer également en tons fens, celle de fe mettre de ni- veau, Gc,. Voyez FLUIDE. | Au refte, après-avoir examiné & comparé les différentes Opinions des Philofophes fur la matiere du feu, ce qu'il en réfulte de plus certain, ou du moins de plus vraiflemblable, c’eft que le {x eftune matiere particuliere &zipréfente dans tous les corps. Les expériences de léleûricité ne laiflent prefque aucun lieu d’en douter. Poyez ÉLECTRICITÉ, 6 plus | bas FEU ÉLECTRIQUE. Divers phénomenes phyliques du feu. L'eau chaude fe refroidit bien plus vite dans le vuide que dans Pair; c’eft le contraire du fer. M. Mufichenbroek tente d’exphiquer ce fait, en difant que l’eau man- quant d'huile, 6 le fer au contraire en ayant beau- coup , 1l doit nourrir le fez plus long-tems que l’eau; que de plus, le fez fort plus facilement de Peau dans le vuide que dans l'air, au lieu qu'il fort plus difici- lement du fer : explication que nous donnons pour ce qu'elle eff, Le bois luifant vermoulu, perd toute {a lumiere dans le vuide, & ne la reprend plus ; au contraire lès mouches fuifantes la perdent dans le vuide, & la reprennent à l’air. . S1 on met dans nn lieu fpacieux plufieurs corps, tant folides que fluides de différente efpece, & qu’on les y laifle pendant quelques heures fans donner'au- cune chaleur à l’endroit où ils font, on trouvera pa Japplication du thermometre à ces corps, qu’ils font tous devenus également chauds. On obferve que dans les maïfons à plufieurs éta- ges, l'étage fupérieur eft le plus chaud pendant le jour, & le plus froid pendant la nuit; parce que le feu qui a pénétré létage fupérieur pendant le jour, defcend pendant la nuit aux étages inférieurs. Les obférvations du thermometre que M. Coffi. gny a faites dans {on voyage aux Indes orientales, nous appreonent que la chaleur n’avoit pas été plus grande en aucun endroit pendant ce voyage, que celle qui fut obfervée en même tems à Paris. M. _Muffchenbroek paroît porté À conclure delà, que la chaleur de Pété eft à-peu-près égale dans tous les pays ; on expliqueroit même ce phénomence en cas de béfoin, par la plus longue on la plus courte durée des jours qui compenfe le plus ou le moins d’obli- quitédes rayons du foleil. Sur quoi voyez CHALEUR. Mais malheureufement le faitn’eft pas vrai, & il eft certain qu'il y a des pays , tel que le Sénégal & plu- fieuts autres, où il fait beaucoup plus chand en été que dans nos climats. Voyez Les mém. de l'Acad, de SO à | | Un même corps échauffé, appliqué fur un Corps dur & denfe, fe refroidit beaucoup plus vite qu’- appliqué fur un corps mou & poreux, quoique le corps dur paroïffe devenir moins chaud que le corps FEU 601 mou ; il en eft de même d’un corps chaud appliqué à des fluides de différente denfité. La main appliquée fur de la laine auffi chaude que du métal, trouve le métal plus froid, parce qu’ellé le touche en un plus grand nombre de points. Voyez FRoib, DÉGEL, & Grace. Si on frote des corps durs & fecs les uns contre les autres, ils s'échauffent & s’enflamment. Le feul fro- tement met le bois en fé; c’eft pour cela que des forêts entieres fe comfument lorfque les branches des arbres font agitées par un vent violent. Le fro- tement produit quelquefois non-feulement de la cha- leur, mais de la lumiere, Voyez ÉLEcrRIciTÉ & FEU ÉLECTRIQUE. Lorfque l’on bat un caillou en plein air avec un fufil d'acier, ilen fort des étincelles brillantes & éclatantes, qui ne font autre chofe, du moins en grande partie, que des globules de métal fondu, puifque l’aimant Les attire, Maïs fi l’on bat le caillou dans le vuide, les mêmes globules fortent fans faire d’étincellés, parce que l’huile qui eft dans l'air ne prend pas flamme dans le vuide. Sur la na- ture des étincelles tirées de l'acier pat la pierre À fu= fil, on peut voir #2 mém. de M. de Reaumur, dans le volume de L'Acad, pour l'année 1736. On n’obferve pas en général, que le ffotement des fluides contre Les corps folides, produite dans ces derniers du feu, ou même de la chaleur. On pré- tend cependant qu’un boulet de canon devient chaud entraverfant l’air. S1 ce fait eft vrai, il me paroît diffi- cile de Pattribuer à d’autres caufes qu’au frotement, qu'eprouve le boulet en traverfant l'air, En effet, ceîte chaleur ne pourroit guere vénir, ni dela pou- dre qui s’enflamme & fe diffipe trop vîte, ni du fro- tement du boulet contre les parois de la piece, qui n’eft pas aflez longue pour cet cffet, & que le bou- let parcourt d’ailleurs en trop peu de tems, ni des bonds que fait le boulet avant fon repos, & qui par leur rapidité & leur peu dé durée, ne paroïflent guere propres à produire cet effet. Les corps élaftiques paroïffent les plus propres à contenir on à raflembler Le z ; c’eft en partie pour cela que l’acier trempé eft meilleur que Le fer fouple pour faire {ortir d’un caillou des étincelles; c’eft aufl pour cette raifon que les animaux les plus chauds font ceux dont les vaifleaux ont beaucoup de folidité & d’élafticité. Comme on ne peut guere douter ni que les corps ne contiennent du /ez , niqu’ils ne Pattirent il ya ap- parence que les corps qu'on échauffe en les frotant, deviennent chauds, tant par le mouvement que ce frotement excite dans les parties du fêx qu'ils con- tiennent , que par un nouveau feu qu’ils attirent dans leurs pores à laide du frotement. Si on enduit de quelque liqueur les corps que l’on frote, ils ne de- viendront prefque pas chauds, parce que l’on dé- truit par-là l’afpérité de leur furfaces, & par confé- quent la vivacité du frotement. Les corps blancs s’échauffent le plus difficilement, ë les corps noirs le plus facilement; parce que les corps blancs refléchiflent plus de rayons que les au- tres, & que les noirs au contraire en abforbent plus que les autres. Voyez COULEUR, BLANCHEUR, Norr, &c. Cela eft fi vrai, que fi on enduit de noir, où qu'on fafle avec une matiere noire un miroir ar- dent concave, il ne brülera plus, ou brûlera heau- coup moins qu'un autre. Dans les pays où la terre eft blanche, l’air eft beaucoup plus chaud, & la ter. re plus fraîche qu'ailleurs, parce que les rayons font refléchis en plus grand nombre. Les miroirs ardens de reflexion brülent mieux en hyvér qu’en été, ap- paremment parce qu’en Été les pores étant plus lar- _ges, abforbent plus de rayons. Voyez MIROIR AR- DENT, VERRE, LENTILLE & FOYER, 6o2 F E Ü On a déjà dit que la lumiere de [a lune ne pro- duifoit aucune chaleur, étant raflemblée au foyer d’un miroir ardent. Suivant le calcul de M. Bou- guer , la lumiere de la lune dans fon plein eft 3000000 fois moins denfe que celle du foleil : or la lumiere du foleil raflemblée au foyer du miroir du jardin du Roi, n’eft que 300 fois environ plus denfe qu'auparavant: ainfi la lumiere de la lune raflem- blée au foyer eft encore 1000 fois moins denfe que la lumiere direéte du foleil. Faut-il s'étonner qu'elle ne produife aucune chaleur ? On raflemble le fe dans les corps en les laïffant pourrir & fermenter en plein-air ; on le voit parles cadavres des animaux, qui s’échauffent & fe cor- rompent. Le foin humide que l’on entafle s’échauffe auffi & même s’enflamme, Éc. les raifons phyfiques de ces faits font inconnues. Enfin on peut exciter le feu par le mélange de différens fluides, par exem- ple , de l’efprit de nitre avec le fel des plantes. Voyez EFFERVESCENCE 6 FERMENTATION ; ÔC fur les raifons bonnes ou mauvaifes qu’on a données de ce phénomene, voyez ATTRACTION. On a vû au mor DicestTEUR l'effet que produit fur les corps durs, tels que les os des animaux , la vapeur de l’eau élevée par le fe ; on a vü auf ax mot ÉOLYPILE , l’effet du féx fur l’eau renfermée dans cet inftrument. Nous ajoûterons à ce qui a été dit dans cet ar- ticle, que fi on met l’éolypile fur des charbons ar- dens, comme il eft repréfenté dans la fig. 28. de Phyf. la compreffion de la vapeur fur l’eau qui eft contenue dans l’éolypile, fait fortir l’eau du tuyau B C, fous la forme d’une fontaine, jufqu'à la hauteur de vingt piés : au contraire , fi on retourne l’éolypi- le (toüjours rempli d'eau & placé fur le feu), en forte que la partie À foit deffous , & par conféquent dans une fituation oppofée à celle qui eft repréfen- tée dans la figure, alors il ne fort plus d’eau en for- me de jet, mais la vapeur fort, comme nous Pavons dit, avec bruit, & en formant un vent violent. Enfin nous avons parlé dans l’arsicle EAU , des ef- fets du fes dans les machines hydrauliques pour éle- ver l’eau. Voyez aufli POMPE, MACHINE HYDRAU- LIQUE , & à l’art, fuivant, l'explication de la pompe à feu. Je me contenterai d’expofer ici l’effet du fe pour élever de l’eau dans une machine aflez fimple, dont M. Muffchenbroek fait la defcription dans fon E/- fai de Phyfig. paragr. 872, À , fig. 22 Pneumar. eft un vafe pofé fur un fourneau DE , dont les ouver- tures f, f,f, font pour laïffer échapper la fumée : ce vale eft rempli d’eau jufqu’au robinet B ;-en for- te que depuis B jufqu’à À il eft vuide: le fez étant allumé, la vapeur de l’eau monte par le tuyau GG, &z de-là dans le vafe À , en fuppofant que l’on tour- ne le robinet Ÿ, qui forme ou ferme la communi- cation entre G G & H; cette vapeur chafle l’air de tout l’efpace HI M À OO: fermons enfuite le robi- net YŸ , alors la foupape qui.eft en N, & qui s’ouvre de bas en haut , n’eft plus preffée par l’air fupérieur que le tuyau © O contenoit auparavant ; & l'air ex- térieur pefant fur la furface de l’eau À, le fait mon- ter par le tuyau À N ; elle ouvre la foupape N, & remplit l’efpace NX MI H ; qu'on ouvre alors une {econde fois le robinet F, une nouvelle vapeur ren- trera dans 7, prefera l’eau, & la fera monter par la foupape M (qui s'ouvre aufhi de bas en haut), dansde tuyau © O,; elle remplira le bacquet F, d’où elle retombera par le tuyau 2 R, Voy. un plus grand détail dans l'endroit cité de M, Muffchenbroek. Au refte, en renvoyant 4 Particle fuivant, & à MACHINES HYDRAULIQUES, pour le détail & l’ex- plicarion de la pompe à fe, nous ne pouvons trop nous prefler d’obferver que cette idée appartient FEU primitivement aux François. En 1695, M. Papin propofa dans un petit ouvrage qu'il publia, la conf- truétion d’une nouvelle pompe , dont les piftons fe roient mis en mouvement par la vapeur de l’eau bouillante , alternativement condenfée & raréfiée. Cette idée fut exécutée en 1705 par M. Dalefme, de l'académie des Sciences. Voyez l’hifloire de certe année-là p.137. enfin les Anglois l’exécuterent en grand, C’eft par le moyen de cette machine qu’on deflécha les mines de Condé en Flandres ; les An- glois s’en fervent auffi dans leurs mines de char- bon ; mais ils ne s’en fervent plus pour élever les eaux de la Tamife , & cela par deux raïfons , par- ce qu’elle confume trop de matiere, & qu'elle en- fume toute la valle. | De l'aliment du feu. On appelle ainfi les corps qui fervent à augmenter ou à entretenir le féx , & qui diminuant par fon ation s’évaporent infenfiblement, comme les huiles que l’on tire ou de la terre, ou des végétaux, où des animaux, ou de certains fluides, Voyez HUILE , PHOSPHORE, &c fur-tout ce dernier article, où l’on trouvera les propriétés des corps qu'on appelle de ce nom , & qui contiennent en + plus grande abondance que les autres la matiere du feu. L'eau, ni les fels, ni la terre pure, ne peuvent nourrir le fez. Lorfque le feu fépare du refte de la maffe les autres parties Les plus groflieres de cette nourriture, favoir les parties aqueufes, falines, & terreftres, & mème quelques parties oléagineufes , elles s’échappent fous la forme de fumée ; & certe fumée attachée aux parois des cheminées, prend le nom de füie. Mais fi les parties oléagineufes abon- dent dans la fumée, & fe trouvent imprégnées de beaucoup de feu, alors la fumée fe change en flam- me. Voyez FLAMME 6 FUMÉE, Nous renvoyons à ces articles , & fur-tout au premier, pour ne pas tendre celui-ci trop long. Outre cette nourriture, pour aïnfi dire terreftre dont le feu a befoin pour fe conferver, ileft enco- re néceffaire que l’air y ait un accès libre, & que les parties groffieres de Paliment , comme la fumée, foient détournées du fx. En effet, l'expérience prou- ve que le feu s'éteint très-promptement dans la ma- chine du vuide; & d'autant plus vite qu’on pompera Pair plus vite, & que le récipient fera plus petit 8 mieux fermé. On voit auf qu'un corps refte d’autant plus long-tems allumé , qu'il jette moins de fumée, comme cela fe voit dans la meche & les charbons de tourbes. Le fez s'éteint aufli très-promptement dans de longs vaifleaux ouverts & d’un diametre peu confidérable , quoique l’on ne pompe pas l'air qu’- ils renferment. Le fez ordinaire brûle mieux en hy- ver qu'en été, parce l’air étant plus condenfé par le froid , retient plus long-tems dans les corps ignés les particules qui font l’aliment du fes : c’eft aufñ par cette raifon que le foleil éteint un charbon dé tourbe quand il y darde fes rayons avec force, parce que la chaleur du foleil raréfie l'air environ-. nant. Au refte ,1l y a des corps qui n’ont pas be- foin d’air pour prüler, comme le phofphore d'urine renfermé dans une phiole vuide d’air, Pefprit de ni- tre verfé dans le vuide fur l'huile de carvi, le mi- nium brûlé dans le vuide avec un vetre ardent. Voilà l'extrait des principaux faits que M. Muf- chenbroek a rafflemblés fur le ex, dans fon Æffai de Phyfig. & auquel nous avons ajoûté quelques réfle- xions. Îl termine ces faits par l'explication de plu- fieurs queftions fur les effers du fez ; mais ces expli- cations nous ayant paru purement conjecturales, êc pour la plûpart peu fatisfafantes & afflez vagues , nous prenons le parti dy renvoyer le leéteur, sil en eft curieux. Foyez auil les arsicles FROID , CHA: LEUR, Grec. | FRERE Ceux qui voudront s’'inftruire plus à fond fut tet- te matiere, pourront lire ce que M. Boerhaave a écrit {ur le feu dans fa Chimie, & les differtations couronnées ou approuvées par l’académie des Scien- ces de Paris en 1738, fur la nature du feu &c fa pro- pagation. Parmi les diflertations couronnées ,1l y en a une du célebre M. Euler, dans laquelle 1l expli- que d’une maniere ingénieufe la propagation du feu; on peut voir l’extrait de cette differtation dans les leçons de Phyfique de M. l'abbé Nollet, rome IF. p. 190 & fuiv. Aux trois differtationscouronnées l’aca- démie en a joint deux autres qu’elle a jugées dignes de limpreflion, parce qu’elles fuppofent (ce font les termes des commiflaires du prix) la leéture de plufieurs bons livres de Phyfique , & qu’elles font remplis de vües & de faits très-bien expofés. Une de ces diflertations eft de feue madame la marquufe du Châtelet, & l’autre eft du célebre M. de Voltai- re ; il a mis à fa piece cette belle devife , qui con: tient & rappelle en deux vers toutes le propriétés du feu. | Tonis ubique latet , naturam ampleititur omnem ; Cunita parit , renovat , dividit, urit , alit, (O) Avant que de pañler à l'examen du fez envifagé chimiquement, donnons le détail de la pompe a feu. * Feu, (Pompe a) Hydraul, & Arts méchaniques : la premiere a été conftruite en Angleterre ; plufñeurs auteurs fe font occupés fucceflivement à la perfec- tionner & à la fimplifier. On en peut regarder Papin comme l'inventeur: car que fait celui qui conftruit une porpe a feu ? il adapte un corps de pompe ordi- naire à la machiné de Papin. Voyez Jon ouvrage, l’ar- zicle DiGESTEUR , & fur-tout larricle précédent. Tout ce que nous allons dire de cette pompe, eft tité d’un mémoire quinous a été communiqué avec les figures qui y font relatives, par M. P... homme d’un mérite diftingué , qui a bief voulu s’intérefler à la perfettion de notre ouvrage. Détail explicatif de la machine du bois de Boffu proche Saint-Gulain, en la province -du Hainaut antri- chien , pour élever les eaux par l’aüion du feu. ARTICLE 1. Du balancier qui eff la principale partie de la machine ; des" jantes qui l’accompagnent , € de leurs dimenfions. Le balancier eft éompofé d’une grofe poutre ab, de 26 piés 8 pouces, fur 20 & 13 pou- ces de grofleur ( PZ, III. & I V.), foûtenue dans le milieu par deux tourillons c, d, de trois pouces de diametre , dont les paliers portent fur un des pignons du bâtiment qui renferme [a machine. Les extrémi- tés de cette poutre font accompagnées de deux jan- tes cannelées e, f, de 8 piés 2 pouces de longueur, fur 20 & 22 pouces de groffeur, dont la courbe a pour centre le point d’appui g. Les chaînes qui y font fufpendues , font toüjouts dans la même direétion : la premiere À porte le pifton du cylindre ; & la fe- conde : le grand chevron, qui meut les pompes af. pirantes pour enlever l’eau du puits, laquelle fe dé- charge dans la bafche XÀ, où elle eft toûjours entre- tenue. Sur une des faces de la même poutre, eft attachée une autre jante / de 6 piés de longueur fur 5 pouces par les deux bouts, & dans le milieu rx pouces fur 3 pouces d’épaifleur, femblable aux pré- cédentes , qui fait agir le régulateur avec le robinet d’imehon; elle foûtient une chaîne 7, à laquelle aboutit une coulifie #7 2, fervant à ouvfir & fermer le robinet d’injeion, & à mouvoir le diaphragme nommé révulateur , qui regle Paétion de la vapeur de l’eau chaude. DUT ART. 2. D'une pompe refoulante ; avec fon tire-boure E fes nue Le tire-boute 7 a 9 piés 3 pouces de Jongueur fur : pouce de diametre (PZ. 1F.), eftatta- ché avec des écrous &étriers de fer,au grand chevron aboutiffant au pifton O, d’une pompe refoulante de 4 F EU 603 pouc. à ig, de diamette, qui éleve à 36 piés une par: tie de l’eau dé la bafche X provenant du puits ,mon: tant par un tuyau p dé $ pouces 5 lig. de diame- tre, fe déchargeant dans une cuvette g (Plan. III, fig. 6. qui repféfente le plan du troifieme étage ré: duit, ainfi que tous les autres plans de cette ma chine , à une échelle fous-double de celle des conpes verticales, contenues dans les Planches 1. 6 V.). Cette cuvette fert à entretenir le robinet d’injeétion dont on expliquera l'effet, Le pifton de cette pompé eft de 4 pouces 2 lig. de diametre ; il eft femblable à celui du plan 7. | ARTICLE 3. Des pompes afpirantes qui élevent l’eau Jucceffivement duvpuits, avec les dimenfions, l’ouver- ture du puits XF (PI. L, fig. 1.), qui eft le plan di rez-de-chauflée, eft de 6 piés en quarré, fur 244 piés de profondeur, & de 60 piés en 6o piés, il y a deux bafches K , r, vifñibles dans la PZnc, IS, dont on peut connoître les dimenfions par l'échelle de cette Planche. Dans la bafche 7 eft un corps de pom- pe afpirante de 9 pouces de diametre ; & dans ce: lui À, trempe le tuyau d’afpiration dé la pompe fu: périeure de 4 pouces 6 lignes de diametre. Tous les piftons de ces pompes ont 8 pouces 3 lignes de dia metre ,fur 6 piés de levée. Poyez leur confttuétion, PL, TTL, fig. 23 > 243 25, 26. Les chevrons qui foû- tiennent les piftons ont 3 pouces quarrés, & font: fufpendus à un autre 20 de 6 pouces en quarré , compofé de plufeurs pieces liées les nnes aux aus tres, comme on les voit par le profil £g. 22. PL FT, Ils compofent un train fufpendu à la jante du balan- cier qui eft au-deflus du centre du puits, & au fond duquel eft un puufart où viennent fe raflembler les eaux de tous les rameaux de la mine. Dans ce pui- fart ttempe le premier tuyau d’afpiration d’une pom- pe qui afpire l’eau à 28 piés de hauteur, & remonte par le tuyau au-deffus du pifton de 32 piés, pour fe décharger dans les bafches ; d’où elle eft reprife par " une feconde pompe, qui l’éleve encore à 28 piés plus haut, 87 32 piés plus haut que le pifton, & fuc- ceflivement par d’autres qui la font mônter de bafe che en bafche, parce que tous les piftons de ces pom: pes jouent tous enfemble. Au-refte on voit, Plan: che IF, la manœuvre d’un relai; il y en a encore trois femblables avant d'arriver au puifart: on ob- {ervera que le puits dont nous parlons, n’a lieu que pour puifer les eaux de la mine. ARTICLE 4, De la fituarion du balancier ; lorfque La machine ne joue pas, La charge que foûtient la chaï- neo (P7, IF.), & le tire-boute z, eft beaucoup plus grande que celle que portent les chaines 4, 77, lorfque le poids de la colonne d'a n’agit pas fur le piton z ; ainf la fituation naturelle du balancief eft de s’incliner du côté du puits, au lieu que la PZ, F. le repréfente dans un fens contraire, c’eft-à-dire dans celui où il fe trouve lorfque l’injeétion d’eau froide ayant condenfé la vapeur renfermée dans le cylindre , le poids de la colonne d’air fait baïfler le pifton : alors l’eau dupuits eft afpirée, & celle de la bafche X eft refoulée dans la cuvette 4. Mais quand la vapeur vient à s’'introduire dans le cylin- dre, fa force étant fupérieure au poids de la colonne d’air , foùleve le pifton, laifle agir le poids des atti- rails que porte la chaîne ;60%, & le tire-boute 20, : &c le balancier s'incline du côté du puits, qui eft la fituation oùvil refte lorfque la machine ne joue pas, parce qu'il s'introduit de l'air dans le cylindre au deflous du pifton , qui fe met en équilibre par fon reflort avec Je poids de celui qui eft au-deflus. | ART. ÿ. Le mouvement du balancier eff limité par des chevrons à refforr. Pour limiter le mouvement du ba- lancier.8c amortir fa violence, pour que la machine n’en recoive point de trop grandes fecoufles, l’on fait fortir en-dehors du bâtiment les deux extrémités 4 604 F EE I des deux poutres, pour foûtenir deux chevrons à seflort recevant les boulons A (PZ, III, GIF), qui traverfent le fommet des jantes du balancier ; & c’eft la même chofe du côté du cylindre pour le foulager dans fa chûte. ARTICLE 6. Defcription du cylindre avec [ès dimen- fions. Le cylindre y Z (PI. IF, & PV.) eft accompa- gné des tüyaux qui contribuent au jeu de la machi- ne ; al eft de fer coulé bien alaïfé ; il a intérieure- ment 2 piés 6 pouces 6 lignes, fur 8 piés 6 pouces de hauteur en- dedans œuvre, & un pouce d’épaif- eur, À fix pouces au-deflous de fon fommet, &c, re- gne tout autour un bord Æy, fur lequel eft attaché une coupe de plomb 4 8, de 12 pouces de hauteur; &t à trois piés fix pouces plus bas, il y a un fecond re- bord C, fervant à Le foûtenir fur les deux poutres D, où il eft arrêté par deux traverfes de bois £. ART. 7. Le cylindre eff percé de deux trous oppo- fès pour deux caufès effentielles. À trois pouces au- deflus de la bafe, le cylindre-eft percé de deux trous oppofés l’un à l’autre, chacun accompagné d’un col- let F; ils ont intérieurement 3 pouces 10 lig. de dia- metre. Le premier fert à introduire le tuyau d’injec- tion G : & le fecond aboutit à un godet de cuivre Æ, dans le fond duquel eft une foupape chargée de plomb fufpendue à un reffort de fer, pour la maintenir toû- jours dans la même direétion : cette foupape que l’on nomme reniflante , fert à évacuer l'air que la vapeur chaffe du cylindre, lorfqu’on commence à faire jouer la machine, & enfuite celui qui y eft porté par l’eau d'injeêtion, & qui empêcheroit fon effet, sil n’avoit aucune 1ffue. ARTICLE 8. Deftription du fond du cylindre. Le fond Z I du cylindre eft une plaque de fer poftiche, attachée avec des vis à écrous ; il efttraverié par un tuyau Z d’un pié de hauteur, ayant intérieurement 6 pouces de diametre , Pun &c l’autre coulés enfemble de maniere qu'une moitié fe trouve dans le cylindre, pour empêcher que l’eau qui tombe fur le fond n’en- tre dans l’alembic, & l'autre moitié en-dehors, pour faciliter la jon@ion du cylindre avec le régulateur & Palembic. ART. o. L'eau provenant d'injection, s’évacue par Ze fond du cylindre. Le fond du cylindre eft encore percé vers fa circonférence , d’un trou N de 4 pou- ces 4 lignes de diametre, avec un collet CZ de 6 pou- ces de hauteur. Il a pour objet de faciliter lévacua- tion de l’eau d’injeétion par un tuyau de cuivre 47z L, PA ge LE ART. 10. Deftription du pifion qui joue dans Le cy- lindre, avec fes dimenfrons, Le pifton x dans les mê- mes Planches, & dont la conftruétion eft repréfen- tée en grand , fg: 27,18, & 19, PL. VI, dontlatige dea 4 piés de hauteur, eft un plateau de fer RS de 2 piés 6 pouces 4 lignes de diametre, fur un pouce d’épaifleur. Aux extrémités font appliquées deux ou trois bandes d’un cuir 444 fort épais, faillant d’une ligne fur le pourtour du pifton. L’on maintient ce cuir inébranlable, en Lé chargeant d’un anneau de plomb de 2 pouces 6 lignes de largeur, divilés en trois parties égales, chacune accompagnée d’une queue C. Le centre de ce pifton eft percé d’un trou qui reçoit le bout de la tige de, par le moyen d’un tenon arrêté avec une clavette, &cette tige eft {uf- pendue à da chaîne du balancier. > <-tART 11. De quelle maniere l’eau de l'aicuvette d'in- jebion s’introduit dans le cylindre. Au fond de la cu: vette 4 (PL IV: 6V.)'qui fournit l'eau d'injeétion, ‘aboutitun tuyau de plomb G P de 2 pouces 2 lignes de diametre #qui s’introduit dans le cylindreen paf- faint au-travers du collet F (art. 7.). Cetuyaueft terminé par un ajutage plat, dont l'œil a 2 pouces2 dignes de diametre réduit, d’où fortent environ 8 pin- %es d’eau froide pour chaque inje@ion, fuivant l'ex- périence que jen ai fait, & qui fe fait par le moyen du jeu de la clé d’un robinet P (PZ, FI.), qui s'ouvre êc fe ferme alternativement, comme :l fera expliqué à l’arricle 28, | ART. 12. De quelle maniere l’eau S’introduis au- déffus du piflon. 1] y a un robinet R (PZ. F.), dont l'œil a 14 lignes de diametre réduit. Le tuyau Q a z pouces 2 lignes de diametre, par lequel on fait couler fans ceffe de l’eau au-deflus du pifton , provenant de la cuvette 7: cette eau fert à en humeéter le cuir, & empêcher l’air extérieur de s’infinuer dans le cylin- dre, & pour que cette eau ne déborde pas la coupe lorfque le pifton Vient à remonter; & pour évacuer . le fuperflu , on a joint le tuyau S S S de 4 pouces 4 h- gnes de diametre, qui va {e rendre dans le réfervoir ptovifonnel }7(Plan. IF.), placé en-dehors du bâti- ment, La partie fupérieure $ N fert au même effet, c’eft - à - dire à décharger le fuperflu de la cuvette 7, provenant d’une pompe refoulante (arr, 2.). ART. 13. Defcription de la chaudiere qui compofe le fond de l’alembic , avec [es dimenfrons. L’alembic (PLIF, & F.) eft compofé d’une chaudiere XF76, évafée de 3 pouces par le haut, ayant un diametre de 7 piés 8 pouces par le haut, & 7 piés 3 pouces par le bas, fur 3 piés 6 pouces de profondeur, fans y com- prendre 3 pouces de bombage dans le milieu ; elle eft accompagnée d’un plat-bord a a de 1 1 pouces de fail- lie , qui s’appuie fur une retraite X 6: de 2 pouces mé- nagés dans la maçonnerie qui entoure cette chaudie- re, dont la furface extérieure eft ifolée par une petite galerie X Y 7 & & ImnolK, fig. 2. PI, I. de 9 pou- ces de largeur par le haut, & 12 par le bas, qui regne tout autour, & dans laquelle circule la fumée du four: neau Ÿhcz, pour entretenir la chaleur &c l’eau bouil- lante. ARTICLE 14. Défcription du chapiteau de lalembic: Le chapiteau Xd6 (PL. IF. & V. où Pon voitle plan, ê&c différentes parties du régulateur), a 4 piés de hau- teur, fur 9 piés 6 pouces de diametre ; il a la forme d’un dôme compofé de-plufieurs plaques de civre liées enfemble par des rivetes, & revêtues dema- connefie fur la hauteur de 2 piés 3 pouces, pour le fortifier contre la force de la vapeur, & le garantir des atteintes de tout ce qui pourroit l'endommager. Son fommet eft terminé par une piece de cuivre bat- tu, percée d’un trou de 6 pouces 6 lignes de diame- tre ; le fommet eft accompagné d’un collet de 3 pou- ces 1 ligne de faillie, pour fe raccorder avec Je tuyau de communication £ qui joint le cylindre. Le régu- lateur eft le fommet du chapiteau de l’alembic. ART. 14. Explication des parties qui appartiennent au régulateur ou diaphragme, avec fes dimenfions. Les lettres aaa( fig. 12. PL, III.) repréfentent un anneau de fer , dont le diametre intérieur eft de 11 pouces 8 lignes, fur un pouce 6 lignes de largeur, & 6 lignes d'épaifleur. Les quatre fupports cotés des lettres 2, b,b,b, qui fufpendent l’anneau «ca, ont 4 pouces 6 lignes de hauteur, fur 9 lignes en quarré ; à l’an- neau eft attaché un reflort de fer GcH du profil (fig. 15.) &.N O du plan (fg: 12.), de 2 pouces de largeur, fur 3 lignes d’épafleur, fervant à folñtenir le régulateur 4, dont le diametre eft de 7 pouces , &c eft accompagné d’un manche dont l'extrémité e eft ercée. quarrément , pour recevoir l’effieu vertical Fe (fg. 16.); ayant fon centre de mouvement éloi- gné-de 6 potces,7 lignes du centre du régulateur : le pivot inférieur de cet effieu joue dans un trou f pra- tiqué dans l'anneau aa , ou GA, fig. 16. La partie e ou zk (fig. 16.) du régulateur, eft liée par une clavette à l’effieu vertical fg & la partie z / de cet eflieu qui eft arrondie, joue exaétement dans un ca: non-/7, adapté à la plaque NO, fig. 13. & 16, La partie fupérieure /g de l’effieu vertical, reçoit une clé qui communique le mouvement au régulateur, cont dontle bouton # (fe. 15.) gliffe fur le reflort Ge A, qui eft fort poli, en defcendant de c en 7: ce mou vement ouvre l’onifice 20 , qui a intérieurement pouces 6 lignes de diametre,fur 13 pouces 6 lignes de hauteur. La figure 13, qui eft la pad dont on a parlé, eft plombée au fommet de l’alembic, pour que l'air ne s’introduife pas. La figure 14. repré- {ente en plan la partie fupérieure du tuyau L, défi- gnée par L M (Jig. 15 6 16.), par laquelle ce tuyau e raccorde avec celui qui eft au centre de la bafe du cylindre, avec des vis & écroux (arr. 8.). ART. 16, Situation de l'alembic 6 du fourneau dans le bätimént qui renferme la machine. L’on voit l'emplacement de l’alembic dans les bâtimens où il eft renfermé , par les figures qui repréfentent les plans des différens étages , dont le premier eft élevé de 7 piés au-deflus du niveau des terres ; & à trois piés fix pouces plus bas, eft le niveau du cendrier : l’on y verra une coupe horifontale du fond de l’a- lembic (PZ. II. fig. 3.)., accompagnée d’un revête- ment de maçonnerie qui en foûtient le chapiteau; de cet étage l’on peut defcendre par un efcalier 44, dans l’endroit où eft le fourneau, fig, : & 2, Le fond dudit fourneau eft une grille €, élevée de 4 piés au- deffus du niveau du cendrier d ( Voyez les profils, PI. 17, 6 V.), fervant de foyer , & on introduit le charbon de terre ou de bois par une ouverture e, vis-à-vis de laquelle eft une porte f qui répond au rez-de-chauflée. On.a pratiqué une ventoufe g f dans l’épaiffeur du maffif de la maçonnerie , afin que l'air extérieur puiffe aïfément s’introduire dans le cendrier {ous la grille, pour animer le feu dont la fumée ne peut échapper par la cheminée 1 X oppo-. fée à l'entrée du fourneau, qu'après avoir circulé autour de la chaudiere dans la galerie Z#7101K , fig. 2 P Lil, ART. 17. Au-deffus du chapiteau de lalembic ef? une ventoufe, pour laiffer échapper la vapeur quand elle ef crop forte. Sur la furface du chapiteau de l’alem- bic, il y a un bout de tuyau f (PL. 7.) de 4 pouces de hauteur, fur 3 pouces 3 lignes de diametre, fou- dé verticalement fur lechapiteau, Au fommet de ce tuyau eft adapté une foupape chargée de plomb, que l’on nommera ventoufe , dont l’objet eft de don- ner iflue à la vapeur de Palembic lorfqu’elle devient par trop forte : cette foupape fe leve aflez fouvent quand le régulateur eft fermé, & que le pifton def- cend. | ART. 18. Ufages des deux tuyaux pour éprouver la hauteur de Veau dans l'alembic. L'on remarquera l’el- lipfe z,.b, fig, 5 , PL. IT. dont le grand axe a 18 pou- ces & le petit 12. C’eft une plaque de cuivre qui fe détache quand on veut entrer dedans l’alembic lorf- qu'il y a quelques réparations à y faire, À cette pla- que fontattachés aux endroits cg, deux tuyaux de 11 lignes de diametre , dont le premier c eft plus court que le fecond g. Celui g defcend jufqu’au ni- veau 4,4, du plat-bord de la chaudiere, comme on peut voir PZ, F, Cestuyaux ont au fommet chacun une clé de. robinet fervant à éprouver à quelle hau- teur eff la furface de l’eau dans l’alembic ; parexem- ple., fi en les ouvrant , on s’apperçoit qu'ils donnent tous deux de la vapeur , c’eft une marque que l’eau efttrop bafle ; & au contraire , s'ils donnent tous deux de eau, c'en eft une qu’elle eft trop haute : mais fi l’un donne de l’eau & l’autre de la vapeur, alors la furface de l’eau eft à une hauteur convena- ble , ce qui arrive quand elle fe rencontre à 4 & j pouces au-deflus du plat-bord, 4, 4, de la chaudie- re : fi l’eau fort par les tuyaux d’épreuve, cela vient de ce que la vapeur faifant effort detoutes parts pour s’échapper, preffe la furface de l’eau dans laquelle Le tuyau trempe & l’oblige À monter comme dans les pompesfoulantes, | Tome VI, FEU 60; ART. 19. De quelle maniere on évacue la Vapeur dé l'élembic pour arrêter la machine, Au chapiteau de l’a» lembic, P/,17, eft adapté un tuyau de plomb r, f, 4, que l’on nomme cheminée | dont l'extrémité s, qui aboutit hors du bâtiment , eft fermée d’une foupape chargée de plomb, attachée à une corde qui pafle fur une poulie M. Ce tuyau qui a 4 pouces 4 lignés de diametre , fert à évacuer la vapeur en ouvrant la foupape lorfqu’on veut arrêter la machine , & à lut donner une échappée lorfqw’elle acquiert aflez de force pour lever la foupape ; autrement l’alembic feroit en danger de crever. ' ART, 20. Ufage d’un référvoir provifionnel pour fournir de l’eau à l'alembic. Il y a en-dehors du bâti- ment deux murs, & b, fig.1,2, 3, PL I. & II, de maçonnerie , fur lefquels eft placé un réfer- voir provifonnel , fg. 3,6 PL, IF, fait de ma- driers doublés de plomb; il contient 339 piés cubes où 42 + muids d’eau , que l’on entretient ordinaire ment à cette quantité. Cette eau provient du fus perilu de la cuvette,g d'injeétion , quidefcend par les tuyaux cotés des lettres NS; ce réfervoir eft ac- compagné d'un tuyau À T de 2 pouces 2. lignes de diametre ; il fert à introduire de l’eau dans l’alem- bic par le moyen d’un robinet #1 , dont l’œil a 2 pou- ces 2 lignes de diametre réduit ; & on vuide ledit alembic par le moyen d’un autre tuyau de cuivre W Q de 3 pouces 3 lignes de diametre, accompa- gné du robinet W, dont l’œil a 2 pouces de diame- tre réduit. Ce tuyau pañle fous le réfervoir provis fionnel. | 12 ART. 21. De quelle maniere l’eau d'injeition fort dut cylindre. On a dit ( arr. 9.) que le collet CN, PI, IF. faite Pévacuation de l’eau d'injeétion qui tom- boit dansle cylindre ; pour cela le collet eft racordé avec un tuyau de cuivre 4, Z, m,P1. F,nommé ra- mean d'évacuation de 4 pouces 4 lignes de diametre, qui va aboutir au fond d’une petite citerne 2, dont on voit le plan fg. 2, P1, I, dans laquelle {e dé- charge environ les À de l’eau tiede d’injeéion : à ce rameau il y a une foupape P dans la citerne fufpen- due à un reflort de fer ; cette foupape , qui eft fer- mée quand le pifton defcend, & qui eft toûjours bai- gnée d'eau afin que l'air extérieur ne puñle y en« trer , eft chargée de plomb , de maniere que le poids de l’eau qui remplit le rameau d'évacuation ne pruffe lever à chaque injeétion la foupape, qu'il ne {oit aidé par la force de la vapeur. À la citerne il y a une décharge P 4, de fuperfcie , repréfentée fe. 23 PL, TI, n 7 | ART, 29, Une partie de l'eau d'injeélion paffè dans lalembic pour fuppléer au déchet que caufe la vapeur. L'on remarquera que le sodet z, PL. F, communique par un tuyau horifontal à un autre tuyau de cuivre 4 k, nommé suyau nourricier, de 2 pouces 2 lignes de diametre fur 8 piés 6 pouces de hauteur, dont une partie trempe dans l’eau de l’alembicjufqu'à 15 pou- ces du fond, & l’autre partie faillie de 2 piés 10 pou ces en-dehors ; l’on faura que + qui nous refte de l’eau d'injeétion, & qui fort tiede du cylindre , vient remplacer par ce tuyau le déchet que caufe la va- peut à l’eau de l’alembic, qui fe trouve par là toû- jours entretenue à la même hauteur. | ART. 23. Defcription du tuyau nourricier. Ayant dit (arr, 18.) que la force de la vapeur faifoit mon ter l’eau bouillante dans des tuyaux d’épreuves lorf- qu'ils y trempoient , l’on voit que la même caufe doit auff la faire monter dans le tuyau nourricier 2 k, puifqu'il eft ouvert par les deux bouts ; & à un pouce au-deflus du plat-borda ; 4, 1l y a un trou à l'endroit , par où monte l’eau bouillante , qui fait voir qu'il faut en remettre dans, la chaudiere pour conferver le plat-bord : l’eau monte jufqu'à un certain point où la vapeur [a RUE père 606 FEU avec lé poids de la colonne d’air qui eft oppoic. ART. 24. De quelle-maniere fe font les operations des articles 22 & 23.L’a@tion de la vapeur ne pouvant pouiler de bas en haut le piflon avec une force €a- pable de furmonter le poids de la colonne d’air dont il eft chargé, fans prefler de haut en bas avec la même force , la futface de l’éau qui eft tombée dans le fond du cylindre ; cette eau qui eft refoulée dans les deux rameaux, de maniere que celui d’évacua- tionk,/,#,enreçoit les 3( arr, 21 )&c l’autre pañle + par le collèt Z, à, & le tuyau horifontal dans le tuyau nourricier , où elle contraint l’eau chaude qui s'y trouve dé défcendre pour en occuper la place ; jufqu'à linftant querenouvellantles opérations, elle l’obligera de pañler à fon tour au fond de Palembic. ART. 25. Détail des pieces qui font joiter le régula= sur. Ces pieces font repréfentées au plan fig. Fr PL. TI. &en perfpedive, fig. 20, PL, FT. où l'on voit deux poteaux dd, foûtenant un effieu ,e, #, fur le- quel pañent les anneaux d’un étrier 1,2,3; 4. Cet étrier eft traverfé par un boulon 4, autour duquel joué une fourche 55, dont la queue 4 aboutit à la clé B du régulateur (arc. 13. ), Au même eflieu eft fixé une patte ce 6 à deux griffes , & dont la partie e fert de manche au marteau ou poids 6. Les 2 griffes embtaffent le boulon 4 de l’étrier : fur le même axe font encore deux branches de fer 7, 8, o. Dans la fituation que l’on voit ces attirails , le régulateur eft ouvert; 1l produit des vapeurs dans le cylindre fous le pifton , & le robinet P d’injeétion eff fermé. ART. 26. De quelle maniere le chevron pendant fait agir le régulateur & le robinet d'injeüion. On à dit ( arr. 1.) que la chaîne / rattachée à une des jantes du balancier, portoit une coulifle #7 4,qui n’eft autre chofe qu’un chevron pendant de 16 piés 6 pouces de longueur , ayantune fente dans le milieu. Cette cou- life dont on voit une portion X F, fig. 20. joue de même fens que le pifton, & fert à communiquer le mouvement au régulateur êcau robinet d'injection, elle enfile {ur le rez-de-chauflée du premier étage un bout de madrier z de 3 piés6 pouc. de longueur , fur 14 pouces de large & 4 d’épaifleur, qui la maïnfient toujours verticale en montant ou en defcendant dans le trou C, pratiqué au-deflous de fa direétion , com- me on peut voir dans la Planche IF. ART. 27. De quelle maniere lei mouvement Je com- munique au régulateur. La fente dela couliffe fig. 20, PL, VI. efttraverfée d’un boulon revêtu de plufieurs morceaux de cuir ,au-deflus duquel vient fe rendre par. intervalle la branche 8, 9. À l’inftant que le pifton étant parvenu au bas du cylindre , le régula- teur ouvre pour laiffer pañler la vapeur ; alors le balancier éleve la coulifle XF, le boulon fait mon- ter l'extrémité 9 dé cette branche , par conféquent fait tourner l’effieu quireleve le poids 6 , &t pendant ce tems-là l’étrier refte immobile , à caufe de l’inter- valle quieft entre les griffes ; mais aufh-tôt que le oids 6 a pañé le vertical , il imprime en tombant du côté du cylindre une force à une desgniffes qui frappé le boulon 4, le chafñle, & l’étrier en arriere, & par conféquent la manivelle 3 ferme alorsle régu: lateur, quand la couliffe monte , elle entraîne avec elle la branche 8 , 9 , qui faittourner l’eflieu. L’effieu en tournant & la chûte du poids 6, font monter auffi l’autre branche 8, 7. Peu après cette coulifle ve- nant à defcendre, uné cheville « attachée à une de Tes faces , ramène la branché 8, 9, qui fait tonrner Peficu & releve le poids 6, qui tombe enfuite de la gauche à la droite ; l’autre griffe pouñle en avant l’é- trier qui étoit reftéimmobile pendant la defcente de la coulifie , alors la manivelle ouvre le régulateur : les chûtes du marteau 6 font limitées de part & d’au- tres par des cordes attachées aux parties fixes du ba: timent dans lequel la machine eft renfermée. ART. 28. Dérail des pièces qui appaftiennent au ÿoa binet d’injeition. La clé du robinet d’injetion P, fig. 20, PI, VI. & PI. IF. eft en forme d'une patte d’écrevifle ou de fourche, dans laquelle agitune bro- che dé fér "2, qui la frappe par un mouvement de “vibration , tantôt d’un fens &ctantôt de l’'autre,pour ouvrir & fermer le pafflage de l’eau de la cuvétte 4 dont on à parlé. Cette broche M attachée à Péflieu d’un levier 20, fur lequel fe meut un marteau À échancré par-deflus , pour s’accrocher par intervalle dans une coche pratiquée à unmorceau de bois T F, nommé déclig , qui pañle au-travers d’une fente pra- tiquée au poteau pendant, l’extrémité T eft mobile autour d’un boulon, & l’autre /’baïfle &c haufle fui: vant le mouvement de la coulifle XF. : ART, 29. Explication du mouvement qui fait agir le robinet d'ingeition, On faura qu’à l’une des faces de la couliffe oppofée à celle dont on vient de parler (arr, 27.), eft auffi attachée une cheville qui foùleve le décliq TP, lorfque la couliffe eft parvenue à fa plus haute élevation ; alots le marteau R ceffant d’être foûtent, tombe avec violence fur Le levier ou bro- che m , & agit contre une des branches de la fourche qui forme la clé; ce qui ouvre lé robinet P d’injec- tion. Pendant que l’eau jaillit dans le cylindre coutt (fig. 4.) , le marteau repofe fur une prece de bois , après avoir décrit une courbe RP. Après cette opé- ration, la coulifle X Y redefcend; & la cheville qui a levé le décliq, rencontrant en chemin le levier 2 $, l’oblige de defcendre pour relever le marteau R , & le remettre dans fa premiere fituation. Cela ne fe peut faire fans que la broche # ne pouflé en- avant l’autre patte de la clé du robinet, pour la ra= mener d’où elle étoit partie. Le robinet d'injection fe referme donc jufqu’au moment où la coulifié re- montant de nouveau, recommence la premiere ma- nœuvre pour faire ouvrir ledit robinet d'injeétion. ART. 30. Conclufion fur le jeu du régulateur, 6 ce- lui du robinet d'injection. I fut de ce qu'on vient d’expofér, que la couhffe defcendant, elle ferme le robinet d’injedtion immédiatement après le régula= teur, dans l’inftant qu’elle eft parvenue au plus bas ; & qu'au contraire lorfqw’elle eft montée an plus haut , le robinet d’injeétion s'ouvre , & le régulateur fe ferme : ainfi ces deux effets, quoique contraires, entretiennent toùjours la machine dans un mouve- ment régulier, lorfque la chaleur du fourneau eff uniforme , & que toutes les autres pieces de la ma- chine agifflent comme il faut. Il faut rémarquer que l’on rend le jeu du régula- teur & celui du robinet d'injection plus ou moins prompts, felon que les chevilles qui accompagnent la coulifle XY font placées plus où moins hautes. Dans la fituation où eft la machine aujourd’hui, elle a fix piés de levée (arz. 3.) ; & fi on vouloit lui en donner moins , il faudroit placer une autre cheville plus haut que celle qui fait agir le régulateur, & la charger de cuir (art. 27.) : alors la machine auroit moins de levée; &ié régulateur étantouvert produi- toit plus de vapeur. La raifon en eft claire, car alors le mouvement feroit moins accéleré; & qh'auwcon- traire fi on lui donne plus d’injeétion, il faudroit pla- cer une autre cheville plus haut que celle qui leve le déclig: alors lé mouvement de la machine feroit plus accéleré, & par conféquent produiroit plus d’ineétion. "ART. 31. Explication de la manæuvre que l’on exé- cure pour commencer & faire jolier la machine, Pour donner le premier mouvement à la machiné, l’on commence par remplir d’eau la chaudrere (ar, 20.) 5 enfuite on ‘allume le feu, & on laïfle couler Feau dans la coupe (arr. 11.) Immédiatement après , celui qui dirigela machine , vient.voir dans quelle fitua- . tion eft le régulateur, afin de l'ouvrir s’il étoit fers mé; ayant la facilité, à l'aide d’une manivelle, de donner à l’effieu le même mouvement que lui impri- sne la couliffe. La vapeur entre dans le cylmdre, en chafle l'air, & échauffe l’eau qui efttau -deflus du pifton , que l’on fait couler dans le godet, pour rem- phir les tuyaux par léfquels fe décharge l’eau d’in- jeétion (art, 21.) Pendant cette manœuvre , la ma- chine refte en repos jufqu’au moment qu’elle donne le fignal pour avertir qu'il eft tems de la faire joiier ; ce qui s'éprouve lorfque la vapeur ayant aequis aflez de force pour ouvrir la foupape qui fermoit fa che- minée (arc. 19.) , en fort avec détonation. Aufli-tôt le direéteur de la machine, qui attend ce moment, prend de la main droite la queue du marteau (arr. 29.) de la gauche la branche (arr. 27.) ; ferme le régulateur, & uninftant après ouvre le robinet d’in- jeétion qui fait defcendre le pifton, Enfuite le régu- lateur s'ouvre de lui-même, & la machine continue de jouer, fans qu’on y touche, par un effet alternatif de vapeur & d’injeétion d’eau froide , fecondé du poids de l’atmofphere. * . ART. 32. Le mouvement de la machine doit être réglé de maniere qu’elle produifé quatorze impulfions par mi- nute. Quand le mouvement de la machine eft bien réglé, elle produit ordinairement quatorze impul- fions par minute, ainf qu’on l’a obfervé ; & dans un cas forcé, on peut en donner jufqu’à 16 & 17. On a aufñfi obfervé que le pifton mettoit un peu plus de tems à monter qu’à defcendre. ART. 33. Conjeiture [ur la maniere dont fe forme la | vapeur. I faut confidérer que le feu, qui eft une ma- tiere fubtile , pénetre le fond de l’alembic , pafle au- travers de fes pores, met les parties de l’eau dans une.extrème agitation; & comme cette matiere ne cherche qu’à s'étendre pou fe mouvoir avec plusde liberté, elle s’éleve au-deflus de l’eau , dont elle en- traine les parcelles les plus déliées en une quantité prodigieufe , qui font effort de toutes parts pour s’é- chapper, avec une force qui devient fupérieure à celle du poids de l’air ; & quand le régulateur vient à s'ouvrir, elle entre avec impétuofité dans le cy- lindre, pouffe le pifton devant elle, jufqu'à l’inftant où l’injeétion d’eau froide condenfe cette vapeur & anéantifle fa force : alors elle retombe en eau. Ainfi lon voit que le jeu de cette machine dépend de l’ef- fet alternatif de l’eau chaude & de l’eau froide, joint à l’aétion de l’atmofphere ; le cylindre refte vuide, & donne lieu au poids de l’atmofphere de ramener le pifton : ainf l’on voit que dans l’efpace d’environ deux fecondes que dure l’ingeétion des huit pintes d’eau froide(ars.11.), 11fe condenfe environ 45 muid de vapeur ; & pendant ce tems-là 1l s’en forme une affez grande quantité pour relever le pifton denou- veau, aufi-tôt que le régulateur lui en laïffe la li- berté. On a dit (arr. 24.) que quand la vapeur entre dans le cylindre, elle refoule l’eau qui fe trouve au fond, & en fait pafler environ fix pintes dans le ra- meau d'évacuation (arr, 21.) , & deux dans l’alcm- bic par le tuyau nourricier (arc, 22,), fuivant l’ex- périence que j'en ai faite. ART. 34. Expérience de M. Defaguliers fur La force de la vapeur de l’eau bouillante. M. Defaguliers, qui a fait beaucoup d'expériences fur la machine à féx, dit que la force de la vapeur dans le cylindre, ne: furpañloit jamais d’un-Llaréfiftance de l’airextérieur, & n'y étoit jamais d’un -+ plus foible ; maisentreces: deux termes cette force change continuellement, felon que Le pifton eft plus ou moins élevé, c’eft-à- dire felon que l’efpace eft plus ou moins grand. Il prétend aufli que la vapeur de l’eau bouillante ef environ 14000 fois plus rare que l’eau froide ; & qu’a- lors elle eft auffi forte par fon reflorr que l’air com- mun , quoique 16 fois plus rare. Foyez EAU. ART. 35. Expérience faite [ur La quantité de charbon Tome FI, FEU 607 de terre ou de bois néteflaire pour l'entretien du fourneau pendant 24 heures, Le fourneau confumeen 24 heures 6 muids de charbon de terre, contenant chacun 13 piés cubes, ou deux cordes de bois chacune de 7 piés 7 pouces de longueur fur autant de hauteur, & 3 piés 3 pouces de largeur. 19y On obferve que deux hommes fufifent pourveil- ler autour de la machine. Il y a un chef qui fait ma- nœuvrer ladite machine, & un fecond qui a foin de faire le fex au fourneau, ART. 36. Quand la machine produir 141impülfions par minute, elle épuife 255 muids d’eau par heure, éle= vée 4 242 piés de hauteur, On a dit (art. 321) que la machine produifoit 14 impulfions par minute , lor{- que le mouvement eft bien réglé. L'on voit que dans le même tems elle épuife une colonne d’eau de 1 ra: piés de hauteur fur 8 pouces 3 lig. de diametre, ow 85 pintes pat chaque impulfon ; & qu’à caufe de 14 qu'elle donne dansune minute, elle produit rr90 pin< tes d’eau: pattant dansune heure elle produit 71400 pintes, ou25 $ muids d’eau, le muid contenant 8 piés cubes , ou 280 pintes mefure de Paris. ART. 37. Calcul de la puiflance qui fait agir cetre machine, Pour infinuer de quelle maniere l’on doit faire le calcul de cette machine , il faut confidérer ue le diametre du pifton étant de: 30 pouces 6 lig. 6.) ; fa fuperficie {era d’environ $ £ pié quar- ré, qu'il faut multiplier par 2205 lignes, pefanteur d’une colonne d’air d’un pié quarré de bafe, fur 3x: + Piés de hauteur. Il viendra 11392. iv. pour l’ac- tion de lair extérieur fur le pifton , 8& par conféquent pour la force de la puiffance motrice. ART. 38. Remarque effentielle pour calcuber l'effort de La puiffancequi fair agir les pompes. La force de la puif- fance qui afpire l’eau dans une pompe, doit être au moins égale au poids de la colonne d’eau qui auroit pour bafe le cercle du pifton, & pour hauteur læ diffance du puifart au pifton, lofqu’il eft parvenu dans fa plus haute élevation. A quoi il faut ajoûter. le poids de Peau dont le pifton eft furmonté lor{qw'il, s’éleve au-deflus du terme dé l’afpiration pour la dégorger dans les bâches. Si l’on confidere les chofes avec attention , on verra que quelle que foit la grof- {eur du tuyau d’afpiration, la puiffance qui éleve le piton, foûtiendra toüjours le même poids, dans quel- ques difpofitions que foient fes parties , pofées con- tre un plan vertical, ou fur un plan incliné ; que la puiflance appliquée au pifton d’un diametre égal, plus grand ou plus petit que le fond du tuyau, il fera toüjours chargé du poids d’une colonne d’eau qui auroit pour bafe le cercle du pifton , & pour hauteur celui du niveau de l’eau au-deflus du même pifton. | ART. 39. Calculer la puiffance ou le poids de la co= lonne d'eau des pompes afpirantes, Les pompes afpi- rantes levant enfemble une colonne d’eau de 242 piés de hauteur fur 8 pouces 3 lig. de diametre, l’on trouvera que cette colonne pefe 6290 + 1, La pompe de la bâche faifant monter l’eau à 36 piés de hauteur (art, 2.) , le diametre de fon pifton n’eft que de 4 pouces 2 Î. Le poids de la colonne d’eau qu’elle re- foule , eft de 237 1. qui étant ajoûtés à 6290 4 L. il viendra 6527 1, à quoi il faut encore ajoûter le poids des attirails qui répond au puits, que j’efti- me d'environ 3000 |. ainfi la puiflance aura à fur- monter une réfiftance d'environ 95 27-21. 8& comme cette puuflance a ététrouvée de 1139221. (art,37.), elle fera donc fupérieure de 1864 :% 1. au poids qu’- elle doit enlever. ' ART. #0. La puiffance doit étre au, poids comme 6 4, $, pour prévenir tout inconvénient. On remarquera. que cette fupériorité de la puiflance fur le poids, doit être au moins dans le rapport de 6° à 5; elle eft néceffaire, non-feulement pour rompre l'équilibre HHhh 1] 608 FEU mais encote parce que le pifton n’eft point chañé tout-à-fait par la pefanteur abfolue de Pair, puifqu'il fuit & fe dérobe en partie à fon impreffion ; & que d’ailleurs 1l ne faut pas compter que quand le pifton defcend, le cylindre foit entierement privé d’air groffier, puifque l’eau d’injeétion enentraîne toüjours une certaine quantité, qui fe trouvant renfermée dans un plus petit efpace à mefure que le pifton def cend,, pourroit acquérir une force de reflort aflez fenfible pour lui réfifter, ART. 41. Cette machine: peut auffi fervir à élever l'eau auffr haut que l’on voudra au- def[us de l’honfon. On remarquera que fi l’on avoit à élever l’eau d’une fource à une hauteur confidérable au-deflus de Pho- tifon dans des tuyaux pofés verticalement, ou fur un plan incliné, on pourroit fe fervir de la même machine, en difpofant des pompes afpirantes & re- foulantes, de la maniere la plus convenable, fuivant la fituation des lieux. ART. 42. La théorie des machines à feu, a l'égard de leurs effets, ef? la même que celle des pompes mes par un courant. Il faut remarquer que lorfqu’un fluide fait mouvoir des pompes à l’aide d’une machine où le bras du levier du poids eft égal à celui de la puif- fance, il arrivera totijours que la fuperficie du pif- ton, celle d’une des aubes, la chûte capable de la vitelle refpeîive du fluide, & la hauteur où l’on veut élever l’eau, compoferont quatre termes ré- ciproquement proportionnels. L’on verra que cette regle pourroit s’appliquer aux machines à fez, fi Jon pouvoit faire abftraétion du poids des attirails &c de la pompe refoulante qui eft dans la bâche fupérieure ; car l’on peut regarder la fuperficie du pifton qui joue dans le cylindre, comme celle d’une aube,, c’eft-à-dire le poids de la colonne d’air, ou celui d’une colonne d’eau de 3 r + piés de hauteur (arzicle 37.), comme la force abfolue du fluide , qu'il faut multiplier par£ pour avoir la force relative (ar- cicle 40.) : alors le produit du quarré du diametre du grand pifton , par la hauteur réduite de la colonne équivalente au poids de l’atmofphere , feroit égal au produit du quarré du diametre du petit pifton qui doit afpirer ou refouler l’eau ; & par la hauteur où _elle doit être élevée, il arriveroit que file tourillon n’étoit pas au centre, c’eft-à-dire dans le milieu du balancier, il faudroit que ces deux produits fuflent dans la raifon réciproque du bras du levier du grand & du petit pifton ; fuivant le principe de la mécha- nique. Nous fuppoferons que la valeur de toutes les lignes que nous allons défigner par des lettres, fe- ront exprimées en piés ou fraétions de piés. ART. 43. Formule générale pour dérerminer les di. menfions des principales parties des machines a feu. Je nomme Pile poids du grand pifton , D fon diametre ou celui du cylindre , & a fon bras de levier , p le poids des attirails qui répondent au petit pifton , d fon diametre, & & fon bras de levier, À hauteur où Peau doit être élevée , ou profondeur du puits, € poids de la colonne d’eau que la pompe de la bâche fupérieure doit refouler , y compris le poids des at- tirails de fon pifton, e fon bras de levier , f poids de la couliffe , & : fon bras de levier. On prendra la fuperficie du cercle du grand pifton ; on la multi- pliera par 2205 (arr. 37.), & l’on aura l’aéhon de l'air extérieur fur le pifton , ou la force de la puif- fance motrice qu'il faut multiplier par À, y ajoûter enfuite P, & multiplier le tout par le bras de levier &, puis ajoïter au produit le poids de la coulifle multiplié par fon bras de levier , Pon aura une expreffion de l’aétion de la puiflance autour du cylindre; enfuite on cherchera la fuperficie du cer- cle du petit pifton qu’on mulupliera par la hauteur du puits, & l’on aura l’expreffion du volume de la colonne d'eau qu'il faut afpirer on refouler ; êc pour en avoir le poids , on multipliera par % livs pefanteur d’un pié cube d’eau ; on ajoûtera au pros duit le poids des attirails, multipliant cette quantité par fon bras de levier # , à quoi il faudra encore ajoûter le produit du poids de la colonne d’eau de fa bâche fupérieure ou de la pompe refoulante par fon bras de levier, & l’on aura l’aétion de la puiffance autour du puits ; égalant les deux aétions , on aura la formule générale pour la machine 4 feu. À l'égard des frotemens,, comme leur réfiffance dans cette ma- chine eft prefque infenfible, n’ayant guere lieu qu’- aux tourillons du balancier, dont le rayon eft extrè- mement petit par rapport au bras du levier de la puiffance ; on les regarde comme nuls, pour ne point trop compofer la formule. ART. 44. L’on peut rendre la formule plus fonpie dans le cas où l'on veur en faire ufage. Je confidere que parmi les grandeurs qui compofent la formule ci-deflus,, 1l y en a plufeurs qui font dérerminées par la difpofition qu'il faudra donner à la machine : par exemple , l’on connoîtra toëjours le bras du le- vier & le poids de la colonne d’eau qu'il faudra éle- ver dans la cuvette d’injeëtion, par la difpofition des tourillons du balancier , & par conféquent le rap- port des deux bras du levier, le poids des attirais . des pompes afpirantes ayant déterminé la profon- deur du puits , la pefanteur du grand piflon & celle de la couliffe ; c’eft-à-dire qu'il faut fupprimer de la formule ci- deflus la pefanteur du grand pifton, le produit du poids de la coulifle par fon bras de le- vier : fion fouftrait d’abord le poids des attirails pour avantager la puiffance apifante , il eft auf naturel de placer les tourillons dans le milieu du balancier, à moins qu’on ne foit contraint d’en ufer autrement pour rendre le bras de lévier de la puiffance plus grande que celui du poids, &z il ne reftera plus dans la formule que les trois grandeurs D , 4 & k, qui font fujettes à varier. ART. 45. Connoïffant le diametre du piffon des pom- pes, 6 la haureur où l’on veut enlever l'eau, c'efla-dire la profondeur du puits , trouver le diametre du cylindre. On a déterminé le diametre des pompes (arz. 43.), afin que la machine puifle fournir une certaine quan- tité d’eau proportionnée à la relevée du pifton, & au nombre des impulfions par minute. Par le même article, on a aufli déterminé la profondeur du puits; il ne s’agit, pour connoître le diametre du cylindre, qu’à fuppofer D = x & D ? = x?, & dégager cette inconnue. Poyez ÉQUATION. ART. 46. Connoiflant la hauteur où l’on doit élever l’eau, ou la profondeur du puits, © le diametre du cy- lindre , trouver le diametre du piflon des pompes. Pour connoître le diametre du pifton des pompes , on fup- pofe que le diametre du cylindre eft déterminé de même que la profondeur du puits où l’on veut faire monter l’eau , ou larefoulant fur une éminence. Pour cela , il faut fuppofer d= x & d?=x? en la place de d?, &c réfoudre l'équation, ART. 47. Connoiffant le diametre du cylindre & ce- lui des pompes, trouver la hauteur où l’on veut enlever l’eau , on la profondeur du puits. Pour connoître la profondeur du puits, on fuppofe que le diametre du cylindre eft déterminé de même que celui du piton des pompes , qui doit afpirer ou refouler l’eau ; 1l “faut fuppofer = x, & en la place de 4, 1l faut met- tre fa valeur qui eft x dans la formule générale, Dépenfe de la machine a feu , telle qu'elle eff durs nos Planches. La machine à fé du bois de Boflu ; eft la plus parfaite que nous ayons dans les environs, Ceux qui en ont fait la dépenie, m'ont dit qu’elle leur avoit coûté, y compris le bâtiment dans lequel cette machmne doit être renfermée, environ trente mille Hvyres ei. 4,1, 300001. ! Le puits dans lequel doivent être mon: tés les pompes , Les bois pour garnir les parois , & ceux pour foûteniw & entre- tenir les pompes , y compris la main- d'œuvre ; a coûté environ vingt-cinq mille livres ci 42m 41, 26000 TOP te Onvobferve que la dépenfe d’une femblable machi- ne à fez, paroit coûter environ cinquante-cinq mille livres, & c’eft fivant que le puits eft plus on moins profond ,& que la nature du terrein peut permet- tre de creufer le puits de la profondeur propofée. Le jeu de cette machine eft très -extraordinaire, & sl falloit ajoûter foi au fyftème de Defcartes , qu regarde les machines comme des animaux , 1l faudtoit convenir que l'homme auroit imité de fort près le Créateur, dans la confiruétion de la pompe a feu, qui doit être aux yeux de tout cartéfien con{é- quent, une efpece d'animal vivant, afpirant, agiflant, le mouvant de lui-même par le moyen de air, &c tant qu'il y a de la chaleur. . FEU , (Chimie. ) Le chimufte , du moins le chimif- te Stahlien, confidere le ex fous deux afpeéts bien différens. E Premierement , comme un des matériaux ou prin- cipes de la compoñition des corps ; car, felon la doc- trine de Stahl bien réfumée , le principe que les Chi- muftes ont defigné par les noms de foufre, principe fulphureux, foufre principe, principe huileux , princi- pe inflammable , terre inflammable & colorante , & par quelques autres noms moins connus, que nous rap- porterons ailleurs, voyez PHLOGISTIQUE ; ce prin- cipe, dis-je, n’eft autre chofe que le fx même, qu'une fubftance particuhere , pure & élémentaire, la vraie matiere, l'être propre du fez, le feu de Dé- mocrite & de quelques phyficiens modernes. Stahl a defigné cette matiere par le mot grec pklo- gifion , qui fignifie combuffible , inflammable ; expref- fion que nous avons traduite par celle de pAlogifii- que, qui eft devenue technique | & qui n’eft pour nous , malgré fa fignification littérale , qu’une de ces dénominations indéterminées qu’on doit toûüjours fa- gement donner aux fubftances, fur l’effence defquel- les regnent diverfes opinions très - oppofées : or les dogmes de Becher & de Stahl , fur le principe du feu , qui paroiflent démontrables à quelques chimif- tes, {ont au contraire , pour quelques autres &c pour un certain ordre de phyfciens , incompréhenfbles & abfolument paradoxes, & par conféquent faux ; conféquence que les premiers trouveront, pour l’ob- ferver en paflant , auffi peu modefte que légitime. Quoi qu'il en foit , ce fera fous ce nom de pAlogifti- que que nous traiterons du principe de la compofi- tion des corps, que nous croyons être le feu. Voyez PHLOGISTIQUE. Les phénomenes de la combuftion, de la calcina- . 55000 iv. e L] e tion, de la rédu@ion , de la détonation , en un mot, de tous les moyens chimiques , dans lefquels le fex combiné éprouve quelque changement chimique ; tous ces phénomenes, dis-je, appartiennent au fé, confidéré fous ce premier point de vüe. Voyez Com- BUSTION , CALCINATION , DÉTONATION , RÉ- DUCTION , PHLOGISTIQUE. Secondement , les Chimiftes confiderent le fx comme principe de la chaleur, Le mot fe, pris dans ce fens , eft abfolument fynonyme dans le langage chimique, à celui de chaleur. Aïnfi nous difons in- différemment le doré de chaleur de l’eau bouillante, Ou le depré de feu de l’eau bouillante. Nous avons dit ailleurs (article CHIMIE, pag. 414. col. 2.) que le fu, confidéré comme principe de la chaleur . étoit vx inffrument ou agent univer- fel que le chimifle employoit dans l'opération de Part | ou FEU 609 dont 1] contemploir Les effers dans le laboratoire de la na- ture, Nous allons nous occuper dans cet article de fes effets chimiques , dirigés par Part. | Toutes les opérations chimiques s’exécutent par deux agens généraux , la chaleur & les menftrues. Mais cette derniere caufe elie- même, quelque gé- nérale & eflentielle que foit fon influence dans les changemens chimiques , ef entierement fubordon- née à la chaleur, puifque le feu produit abfolument & indépendamment du concours derout autre agent, un grand nombre de changemens chimiques , au lieu que Pa@tion des menftrues fuppofe nécefairement la chaleur (voyez l’arricle CHIMIE , pag. 417. col, 2. le mot MENSTRUE , & la füire de cet article ) ; enforte que le fez doit être regardé comme le moyen pre- mier & univerfel de la chimie pratique. Auf le feu a-t-1l mérité de donner fon nom à l’art ; la Chimie s’appelle dès long-tems pyrorechaie , l’art du feu. Les Chimiftes ont exalté les propriétés du fez avec un enthoufiafme également digne du fujet & de l’art. Le paffage de Vigenere, cité à l'arricle CHIMIE, pag. 422. col. 1. eft fur-tout remarquable à cet égard. Un célebre chimifte de nos jours , l'illuftre M. Pott , fait cet éloge magnifique du fe , dans fon traité du feu € de la lumiere. « La dignité & l’excel- » lence de cet être , dit M. Pott , eft publiée dans » Ecriture-fainte, où Dieu même fe fait appeller » du nom de la Zrmiere ou du fé , quand il y eft dit, » que Dieu eft une lumiere , qu’il demeure dans la » lumiere, que la lumiere eft fon habit...... que » Dieu eft un fx dévorant, qu'il fait fes anges de » flamme de feu, &c. » Le feu eft appellé dans la même diflertation /e vicaire ou Le lieurenant de Dieu dans là nature, c’eft-à-dire, comme on l’a fage- ment exprime dans la traduétion françoife, le pre- mier infirument que Dieu met en œuvre dans la na- ture, Vanhelmont avoit déjà fait honneur au feu, de image fublime tracée par David (pf18.), en repréfentant le fouverain moteur dela nature , com- me ayant pofé fon tabernacle dans le Soleil. Van- helmont , formarum ortus , &, 38. j D’unautre côté, c’eft principalement fur les chan- gemens opérés par Le ex dans les fujets chimiques , que les détraéteurs de la Chimie , foit philofophes, {oit medecins’, ont fondé leurs déclamations contre cette fcience. Ils ont prétendu que le ex boulever- foit, confondoit, dénaturoit la compofñition intérieu- te dans les corps ; qu’il difipoit, détruifoit, anéan- tifloit leurs principes naturels ou hypoftatiques ; que ceux qu'il mamifeftoit étoient fes ouvrages, fes créa- tures, &c. &c. Gc. Ces imputations font exaftement évaluées dans plufieurs articles de ce Diétionnaire, & nous les croyons fur-tout folidement réfutées par les notions claires & poñtives fur l’ation du fe, que nous croyons avoir expolée dans les différens articles où 1l s’agit des effets de ce premier agent, v0y. CHIMIE , pag. 417. 418. & CENDRE; v0y. auff MENSTRUE, MENSTRUELLE , ANALYSE , Sups- TANCES ANIMALES, VÉGÉTAL, @ les articles de plufieurs opérations dont nous allons donner la lifte fous le titre fuivant , & particulierement dans celui- ci. Ufage chimique du feu ou de la chaleur. Le feu eft employé par le chimifte dans les diftillations , les fu- blimations, les évaporations , les deffications , l’ef- pece de grillage que nous appellons en latin difflalio, les liquefaétions , les füfions , les précipitations par la fonte, les liquations , les diffolutions , les digef- tions, les cémentations, 8& même les fermenrations. Il faut remarquer que le principe igné, le phlogifti- que n'éprouve dans aucune de ces opérations ni combinaïfon ni précipitation. , d La façon d'appliquer le /ez aux différens fujets de toutes ces opérations, &c la théorie de fon aétion 610 FEU dans ces divers cas, font expofées dans les articles : particuliers. Voyez ces articles, & fur - tout l’arsicée DisTILLATION. Effers généraux du feu. Les effets chimiques du feu dans toutes ces opérations , fe réduifent à trois ; ou le feu relâche , laxat, l’aggrégation de certaines {ub- ftances juiqu'à les réduire en liqueur & même en vapeur , fans altérer en aucune façon la conftitu- tion intérieure du fujet ainf difpofé (voyez l’article CHIMIE, pag. 415, col, 1, pag, 417. col. 2. & Part. DisTILLATION ) ; ou il produit des diacrefes pures (voyez au mot DISTILLATION ce qui ef? dit de ces ef- Jets fur la feconde claffe des fujets de cette opération, & le mot DiACRESE à Perrata du W. volume);ou enfin il difpofe à la combinaifon chimique les fubftances mifibles ; il divife , fo/vit, ces corps qui n’agiflent qu'étant anfi divilés, z2/ foluta; & il favorife cette ation réciproque , foit que les principes qu’il met en jeu fe rencontrent dans un compofénaturel, com-, me dans les fermentations & dans Fanalyfe par le Jeu feul des matieres dont j'ai formé la troifieme claffe des fujets de la diftillation (voyez l'article Dis- TILLATION ;, & l’art. FFRMENTATION }, foit qu'ils fe trouvent dans des mélanges artificiels , comme dans toutes les opérations de l’analyfe menftruelle (voyez MENSTRUE 6 MENSTRUELLE , ( Analyfe.) & le mot CHIMIE ). Remarquez pourtant que ce troifieme effet ne differe pas eflentiellement du pre- mier ; car l’aétion direéte & réelle de la chaleur fe borne dans les deux cas au relâchement de l’agoré- gation ; il a été utile néanmoins de les diftinguer ici, parce qu’il auroit été révoltant , pour la plü- part des leéteurs, de voir identifier l'effet de la cha- leur confidéré dans la fufion ou l’évaporation , & dans la diflolution ou la fermentation ; car que la chaleur n’ait qu’une influence pañive dans l'exercice de lation menftruelle, ce n’eft pas une vérité re- çue, mais fimplement démontrable , & propofée dans plufieuts endroits de ce Diétionnaire. Voyez l'article CHIMIE, pag. 417. col, 2, le même art, pag. 415. col. 2. & les articles MENSTRUE & MENS- TRUELLE, ( Analyfe. Les divers effets généraux que nous venons de rapporter font düs S une feule & même caufe, fa- voir à la propriété de raréfier du fêz , exercée dans une très-orande latitude, depuis le terme où com- mence la liquidité de l’eau jufqu’à celui que l’on a crû fufhfant pour volatilifer les métaux parfaits, {e- lon les fameufes expériences exécutées au foyer de la lentille du palais-royal , & rapportées dans les Mém. de l'académie royale des Sciences , année 1702. Sources & application du feu, Nous trouvons ce principe de chaleur dans la température même de notre atmofphere: nous nous le procurons en ex- pofant les fujets de nos opérations aux rayons di- res du foleil. Nous mettons à profit quelquefois la chaleur excitée dans certaines matieres fermentan- tes ou pourriffantes , telles que le marc de raifin & le fumier; ou enfin, ce qui eft notre reflource la plus ordinaire & la plus commode, nous appliquons aux matieres que nous voulons échauffer, des corps inflammables a@tuellement brülans, tels que le char- bon, le bois, la tourbe, Le charbon de terre , l’ef- prit-de-vin, les huiles par expreffion dans le four- neau à lampe, 6’, de tous ces alimens du féx, celui que nous employons généralement & avec le plus d'avantage, c’eftle charbon. Foyez CHARBON, Es- PRIT-DE-VIN, & LAMPE. | Cette application du féx varie felon qu’elle eft plus ou moins immédiate ; car ou on expoie la ma- tiere à traiter au conta@t immédiat du corps dont on employe la chaleur , comme dans la deffication au {oleil,la diftillation par le premier fourneau deGlau- ber, la fublimation gébériene, la réverbération de | | | | | | | | la flamme , &c. voy. ces articles ; ou on place les ma: tieres dans des vaifleaux , voyez VAISSEAUX ; & ces vaifleaux ou on les expofe au contaét immédiat du principe de la chaleur, c’eft-à-dire au fx nud, {e- lon l’expreflion technique ; ou on interpofe entre le feu & les vaifleaux, différens corps connus fous le nom d’intermede ou de bain, Voyez BAIN en Chimie, 6 INTERMEDE. Degrés du feu. La latitude entiere de la chaleur employée aux ufages chimiques, a été divifée en différentes portions ou degrés déterminés par divers moyens; premierement par efpece de matieré échauffée ou brûülante qui fourmifloit la chaleur : ainfi le fe chimique a été diftingué en infolation, ventre de cheval, bain de marc deraïfin, feu de lampe, feu de bois, feu de charbon, &c. feconde= ment par la circonftance de l’application plus ou moins immédiate , & par les différens milieux inter- pofés entre le corps & le fez : le feu a êté divifé fous ce point de vüe en fez nud, bain-marie, bain de fa- ble, de cendres , de limaille | &c. Voyez BAIN er Chimie, Le feu nud , felon qu'il a été placé fous le corps à traiter, fur ce corps, autour de ce corps, qu'il a été couvert ou hibre, &c. s’eft appellé fu de roue , feu de fuppreffion , feu de reverbere , feu ouverr Gr, Toutes ces diftinétions font entierement aban- données , & avec raifon fans doute, puifque la plü- part font inutiles, relativement à la détermination de lintenfité du feu. Ceux qui avoient partagé la la- titude du fez chimique par degrés qu'ils appelloient premier , fecond , troifieme , quatrieme , avoient déter- miné chacun de ces degrés d’une mamiere fi vague, que linfuffifance ou plütôt l’inutilité de cette diftinc- tion eft auffi ab{olument reconnue. | Les chimiftes modernes ont reétifié toutes ces di- vifions , & les ont réduites à la plus grande fimpli- cité, en ne retenant qu'un petit nombre de termes fixes, établis fur la connoiflance réfléchie des effets du feu , &c très-fuffifans dans la pratique. Ces chimiftes ont obfervé premierementque Pa- nalyfe ou folution réelle de la combinaifon chimi- que , ne s’opéroit dans tous les fujets que par le fe- cours d’une chaleur fupérieure à celle qui faifoit bouillir l’eau commune ; fecondement que plufieurs unions beaucoup moins intimes, celles dont j’ai fair la premiere clafle des fujets de la diftillation , voyez cet article, cédoient à l’aétion d’une chaleur capable de faire bouillir l’eau, 8 quelques-unes même à une: chaleur plus foible ; troifiemement que la plüpart des menftrues appellés communément Zquides, du nom de leur état ordinaire, agifloient fous un degré de chaleur inférieur à celui de l’eau bouillante ; qua- triemement que quelques évaporatiors, deffications, & un très-grand nombre de combinaifons , s’opé- roient fous la température ordinaire de l’air qus nous environne , lors même qu'il n’eft échauffé que par les rayons réfléchis du foleil , c’eft-à-dire {ans feu & à l'ombre. Ils ont, en conféquence de ces obfervations, di- vifé le feu chimique en quatre degrés ; le premierow le plus foible commence à la liquidité de l’eau, & s'étend jJufqu’au degré qui nous fait éprouverun fen- timent de chaleur ; nous appellons ce degré froid. C’eft à ce degré que s’exécutent un très-grand nom- bre d’opérations telles que les diffolutions à froid , les macérations ou extraétions à froid, les calcina- tions à l’air, les deffications à l’ombre , les évapo- rations infenfibles , la plüpart des fermentations . &c. Voyez ces articles particuliers. Rien n’eft fi aifé que de fe procurer exa@tement _ce degré de feu dans la pratique, puifqu’il ne s’agit que d’éloigner les fubftances traitées , de toute four- ce de chaleur fenfble, Quant au plus ou au moins de chaleur dans la latitude qu'embrafle ce degré, LS le plus haut térme n’eft, dañs aucun cas, aflez côn- fidérable pour nuire à la perfe&tion abfolue de l’o- pération; & le trop foible n’a jamais d’autre in- convénient que de la fufpendre : les feules férmenta- tions vineufes méritent d'être exécutées à un dégré plus conftant. #üÿez FERMENTATION, | Le fecond degré commence à la chaleut fenfible pour nos corps, & s'étend jufqu’à la chaleur pref- que fufifanté pour faire bouillir l’eau : c’eft à ce de- gré que s’exécutent les digeftions , les infufons, la plûpart des difflolutions aidées par un fx fenfible, les deflications des plantes & des fubftances anima- les, les évaporations, diftillations , & toutes les cui- tés pharmaceutiques exécutées au bain-marie, les fermentations faites à l’étuve, quelques diftillations à feu nud, télle que celle du vinaigre, &c, voyez ces articles, Le bam-tarie fournit un moyen aufi sûr que commode d’obtenir ce degré de fez , dont le plus ou lé moins d’intenfité n’eft pas d’une plus grandé con- féquence que les variations du même genre du de- _gré précédent. Le troifieme degré eft celui de l’eau bouillante ; celui-ci eft fixe & invariable: on exécute à ce de- gré toutes lés deco@tions des fubftances végétales & animales, la diftillation des plantes avec l’eau, la cuite des emplâtres dans lefquelles entrent des chaux de plomb qu’on ne veut pas brüler. On peut compter encore parmi les opérations exécutées à cé degré, la diftillation du lait, & celle du vin; par- ce que la chaleur qui fait bouillir le lait & le vin, he differe pas beaucoup de celle qui fait bouillir l’eau. L'application de l’eau bouillante ou de la vapeur de l’eau bouillante à un vaifleau, ne communique jamais aux matières contentes dans ce vaifleau une chaleur égale à celle de cette eat ou de cette va eut ; C’eltun faitobfervé, & dont la faïfon fe déduit Fa fimplement des lois de la communication de la chaleur sénétalément connues : c’eft en confequen- ce de ces Gbfervations qué nous avons rangé le bain-marie parmi les moyens d'appliquer aux fuiets chimiqués un degré de chaleur inférieur à cehn de léati bouillante. Ce n’eft pas ici une obférvation de pute précifion ; elle eft au contraire immédiate: ment applicable à la pratique, & d'autant plus né- céflaire que les auteurs ne s'expliquent pas afez clairement für la détermination de ce degré. La cha- leur du bain-marie bouillant eftcommunément défi: once par lé nom de chaleur de l’eau bouillante. Cependant f quelqu'un, après avoir vh dans un Hvte qu'au degré de l’eau bouillante les huiles ef fentielles s’élévent, que les fucs des viandes en font extraits par l’eau , &r. fi cet homme, dis-je, s'avi- foit en conféquence de ces connoïffances, de diftil- ler au bain-matie une plante aromatique, pour en féparer l'huile effentielle, où de mettre fon pot au bain-marie , & non pas au fez , il n’obtiendroit point d’huile , & il feroit un très-mauvais bouillon. _ Nous avons déjà obfervé que ce troifieme degré étoit fixe & invariable ; il devient par-là extrème- ment commode dans la pratiqué , comme nous la- | vons déjà dit du bain -marie ; & il left d’autant plus que c’eft heureufement à ce degré de chalèur que fe fait la féparation & la combinaifon de certai- nes fubftances que leurs ufages pharmaceutiques ou économiques nous obligent de traiter en grand ; & qiu'un féz moins conftant , & qui pourroit devenir quelquefois trop fort, altereroït la perfettion dé'ces matières, procuteroit, par exemple, des eaux dif- tillées. qui fentiroient l’empyréume , des emplâttes DÉRLÉESR ET AR ps A & Le quatrième degré de fe chimique eft plus‘éren: du 3 il comprend tout le réfte de fx latitude depuis FEU 61t la chaleür de lea botillante jufqu'à l'extrème vio: lencé du féz , toutes les vräies altéfations chimiques opérées fur les fubftances métalliques, für les rer: tes, fur les pierres, fur les féls par le moyen du f£x feul : les diffolutions pat les menfirues falins, li: quides , bouillans, où par les menftries ordinaire- ment confiflans mis en fufion ; & enfin la décom: pofitiôn dés fubftances végétales & animales ,'par lé moyen du jéz feul, demandent ce dérnier de: gré. La latitude immenfe de ce degré doit laïfler un {ujet d'inquiétude au chimifte apprentif fur des fubz divifions qu'il defireroit, & dont , fi par hafatd il a quelque teinture de Phyfique expérimentale ;, äl pourra bien imaginer fur le champ des mefures exates , différéns thermômetres & pyrometres bien gradués , bien fürs ; mais cés moyens lui paroïtront aufli inutiles qu'impraticables , dès qu'il aura appris pat fa propre éxpériencé combienileft facile, fur ce point important de mañtiel chimique, comme fur tant d’autres de la même claffe , d'acquérir par l’e- xercice le coup-d’œil ou Pinftinét d'ouviier ; com bien l’aptitude que ce coup-d’œil donne eft fupé- rieure, même pour la précifion ; à l'emploi des moyens phyfiques, & enfin combien la lenteur & la minutie de ces derniers moyens les rendent peu pro: pres à diriger l'emploi journalier du principal inf- trument d’un art. Je renvoyée encore fur ce point à l'expérience ; car vraiflemblablement on ne per- fuadera jamais par raïfons à un favant , tel que je fuppofe notre éleve , que les moyens de déterni- ner rigoureufement les variations d’un agent phyf- que ,mis en œuvre dans un art quelconque, puflent être détrop, & que lés défcriptions exa@tes, & pour ainfi dire notées, des opérations de cet art qu’on pourroit fe procurer par à, foient un bien abfo- lument 1lluforre, Foyez l'art, CHIMIE , pag, 4204 col, 2, … Ce que nous venons dé dire de l’inutilité pratique des mefures phyfiques de ‘la chaleur , n’emipêche point qu'on ne fût très - fage d’y avoir recours, # dans un procédé nouveau & extrèmement délicat, la nécefité d’avoir des degrés de feu déterminés ri- goureufément , Conflans , invariables , l’emportoit fur limcommodité de cés mefures. Les bains bouil- lans d'huile, de leflive plus ou'moins chargée, de mercure, & même de diverfes fubftances métalli- ques tenues nt fufion paï Papplication dé la plus grande chaleur dont elles ferotent fufceptibles ; ces bains, dis-je, fourniroient un grand nombre de divers degrés fixes & conftans, & qu’on pourroit varier avec la plus grande-précifion: mais les cas où il feroit néceflaite de recourir à ces expédiens font très-rares, fimême ils ne font pas de puré fpécula- tion, & par conféquent ils ne conftituent pas Le fond de Part, rara non Junr artis, | Gouvernement du feu. Lé gouvernement ou le réeï. me du jez, qui fait le grand'art du chimifte prati- cien , porte fur deux points généraux: {avoir le Choix du degré ou des diverfes variations méthodi- ques des degrés propres à chaque opération, & au traitement de chaque fubftance particuliere ; & la connoïflance des moyens dé produire ces divers de- grés. dE Nous avons répandu dans divers articles chimiques de ce Di&ionriaire, les connoïffances de détail que expérience a fournies fur le premier point. On trou. vera, par ex. az mot MENSTRUE, & dans tous les articles où 1l fera queftion de l’aétion de quelque menftrue particulier , par quel degré de chaleur il faut favorifer fon attion ; 4 mor DIGESTION, Crr: CULATION, CÉMENTATION, 6. quelle chaleur eft propre à ces diverfes opérations, awx articles Vin, VÉGÉTAL , LAIT , HUILE ESSENTIELLE, MUQUEUXx , ÉTHER, SUBSTANCE MÉTALLIQUE, 612 FEU VERRE MÉTALLIQUE , NITRE , SEL MARIN, Vi: TRIOL, &c. &c. Ec. à quel. degré de far 1l faut expo- fer chacune de ces fubftances, on celles dont elles font retirées, pour les altérer diverfement. D'ailleurs il n’exifte dans l’art que peu de précep- tes généraux fur cette matiere: celui qui prefcrit, par ex. de commencer toüjours par le degré le plus foible , d'élever le fezinfenfiblement, de le foùte- nir pendant un certain. tems à un degré uniforme, & de le laifler enfuite tomber peu-à-peu; celui-là , dis-je, fouffre un grandnombre d’exceptions', quoi- qu'il foit établi dans la plüpart des hvres de Chi mie comme la premiere loi de manuel, & qu'il foit en effet néceflaire de l’obferver dans les cas les plus ordinaires , & fur-tout dans toute analyfe ,.par la chaleur feule des fubftances végétales ou animales. Voyez SUBSTANCES ANIMALES , & VÉGÉTAL, (Chimie) , & qu’il faillemême y avoir toùjours égard jufqu’à un certain point, ne füt-ce que pour ména- ger des vaiffleaux fragiles : mais un /éx trop foible ou élevé trop lentement, eft aufli nuifible dans cer: tains cas à la perfeftion & même au fuccès de quel- ques opérations , que le {x trop fort ou pouñfe trop brufquement, l’eft dans le plus grand nombre. Un feu trop foible long-tems foûtenu rendroitimpoffble la vitrification de certaines fubftances métalliques {voyez VERRE MÉTALLIQUE), & difhperoit des ma- tieres qu’un fez plus fort retient en les fondant. Foyez Fusion, &c. On ne fait point d’éther vitriolique à un.fes trop foible. Voyez ÊTHER. Quant aux moyens de produire & de varier les degrés du fez , ils fe rédiufent à ces quatre chefs gé- néraux : On fait efluyer à un fujet chimique une chaleur plus ou moins grande ; 1°. en variant la qua- lité de laliment du f2z; car les divers corps brülans fourniflent, tout étant d’ailleurs égal , des degrés de feu bien différens : ainfi un bon charbon dur & pe- fant donne bien plus:de chaleur que le charbon rare & léger qui eft connu à Paris fous le nom de braife ; la flamme d’un bon bois plus que celle de la pail- le ou de l’efprit de vin ; une flamme vive & claire plus que le brafier le plus ardent : 2°. en en va- riant la quantité; perfonne n'ignore qu’on fait un meilleur fe avec beaucoup de bois où de. charbon qu'avec peu : 3°..en excitant le fez par un courant plus où moins rapide d’air plus ou moins denfe ou froid , plus ou moins humide : 4°. enfin. en, plaçant le vaifleau ou le corpsà traiter dans un eu telle- ment difpofé , que l’artifte puifle à volonté diriger, autant qu'il eft poffible, fur fa matiere, la chaleur entiere du corps brülant, fans la laifler diffiper par une communication trop libre avec latmofphere; ou au contraire de ménager ou de favorifer cette difipation. vdyf: La machine ( s’il eft permis d’appeller ainfi avec Boerhaave la chofe dont il s’agit), .à l’aide de la- quelle nous graduons le feu avec le plus grand avan tage par ces divers moyens, & {ur-tout par le der- nier, eft généralement connue fous le nom ..de four- mea Voyez FOURNEAU. e C’eft dans les diverfes combinaifons de tous ces moyens, que confifte l’art du fe chimique, fur les quelles préceptes écrits font abfolument infuffifans. Les véritables Livres dercette fcience font les labo- ratoires des Chimiftes,, Les différentes ufnes.où l’on travaille les mines, les métaux, les fels, les pierres, les terres, &c. par le moyen du fe; les boutiques de tous les ouvriers qui exercent des arts chimiques, comme teinturier, émailleur , difüllateur, &c. l’offi- ce.& la cuifine peuvent fournir fur ce point plufieurs leçons utiles. On trouvera cependant dans les arti- cles de ce Diétionnaire, où il eft expreflément traité des-diverfes opérations qui s’exécutent par lemoyen du feu, lesregles fondamentales propres.à chacune, 5 E U | Voyez Jur-tout CALCINATION, DISTIELATION ; SUBLIMATION , FUSION, &c. | L’artifte , & fur-tout l’artifte pen expérimenté, qui traite par Le fecours du féx certaines matieres inflam- mables, fingulierement rarefcibles ou fulminantes , doit procéder avec beaucoup de circonfpeétion ; où. mème 1l ne doit entreprendre aucune opération fans s'être fait inftruire auparavant de tous les dangers auxquels 1} peut s’expofer, & même expoler les af- fiftans , en maniant certaines matieres. Les fubftances inflammables réduites en vapeur, prennent fez avec une facilité finguliere; ain on tifque d’allumer ces vapeurs, fi l’on approche im prudemment la flamme d’une bougie du petit tou d’un balon, ou des jointures mal lutées d’un appa- reil de diftillation, fourniffant aétuellement des pro- duits huileux, comme dans la diftillation à la violen- ce du. fes des fubftances végétales & animales ; dans celle du vin, des eaux fpiritueufes. Les plantes mucilagineufes & aqueufes, les corps doux proprement dits, peuvent, comme fujets à être fingulierement gonflés par le fx , faire fauter en éclats les vaifleaux dans lefquels on les chauffe frop brufquement ; les précautions à prendre contre cet inconvénient, font de traiter ces matieres dans des vaifleaux hauts, & qu'on laïffe vuides aux trois quarts, & d'augmenter le fx infenfiblement. Le re- fidu du mélange qui a fourni l’éther vitriolique lorf- qu'il commence à s’épaifüir , eft fingulierement {ujet à cet accident. Voyez ÊTHER. L'air dégagé en abon- dance par le feu de certains corps , tels que les bois frès-durs, les os des animaux, la pierre de la vefie, le tartre du vin, &c. feroit fauter avec un effort pro- digieux des vaifleaux. fermés exaétement. L’unique moyen de prévenir cet inconvénient, c’eit de mé- nager une 1flue à ce principe incoercible dans les ap- pareils ordinaires. Enfin, non-feulement les poudres explofives séné- ralement connues, telles que la poudre à canon, la poudre fulminante & l’or fulminant, mais même plu- fieurs mélanges liquides, tels que celui de l’efprit- de-vin & de l'acide nitreux, le baume de foufre, &c. peuvent produire , lorfque leur aétion eft excitée dans des vaiffeaux fermés, la plûpart même en plein ait , peuvent produire, dis-je, dans l’air qui les en- vironne, une commotion dont les redoutables effets ne font connus que par trop d'exemples, Poyez Pou- DRE À CANON, FULMINATION, ETHER NITREUX, SOUFRE : l’eau mife foudainement en expanfon par un corps très-chaud qui l’entoure exaétement, tel que l’huile bouillante ou le cuivre en fufñon, lance avec force ces corps brülans de toute part; elle fait éclater avec plus de violence que Pair le plus con- denfé, un vaiffeau exattement fermé, dans lequel on l’a fait bouillir. On trouvera un plus grand détaik fur ces matieres dans les articles particuliers. Voyez Jur-tout a l’article SOUFRE, l’hiftoire abregée de lac- cident rapporté par Fr. Hoffmann, Off. Phyf. Chi- mic: Seleit, Lib, 3°, ob. 15, Au refte, on fe rend fi fa- milieres par l’ufage les précautions à prendre con= tre ces divers accidens, qu’on ne peut les ranger rai- fonnablement qu'avec les évenemens les plus for- tuits, & dont on doit le moins s’allarmer. (4) FEU CENTRAL 6 FEUX SOÛTERRAINS. (P#y/iq.) Quelques phyfciens avoient placé au centre de la terre un fex perpétuel, nommé ceztral, à caufe de {a fituation prétendue ; ils le regardoiïent comme la caufe efficiente des végétaux, des minéraux & des animaux. Étienne de Clave employe les premiers chapitres du XI. livre de festraités philofophiques, à établir l’exiftence de ce fé. René Bary en parle au long dans fa phyfique, & s’en fert à expliquer entr'autre chofe, la maniere dont l’hyver dépouille les arbres de leur verdure, Comme la FRA de | À": \ oleil. {oleilne pénetre jamais plus de ropiésen-avant dans terre, ils attribuoient à ce fes toutes les fermenta- tions & produétions qui font hors de la portée de l’attion de cet aftre. Le féx central qu'ils appelloient le Joleil de la terre, concouroit dans leur fyftème avec le foleil du ciel, à la formation des végétaux. M. Gaflendi à chañé ce feu du pofte qu’on lui avoit af figné , en faifant voir qu’on l’avoit placé fans raifon dans un lieu où l’air & l’aliment lui manquoient; & que tout ce qu'on pouvoit conclure des feux qui fe manifeftent par diverfes éruptions & autres fignes, c’eft qu'il y a effettivement des feux foûüterreins ren- fermés dans diverfes cavernes, où des matieres graf- fes, fulphureufes & oléagineufes les entretiennent: L'exiftence de ces feux eft inconteftable, 1°. Ils fe font-fentir dans les bains chauds & dans les fontai- nes qui brülent. tb, 2°. Ils fe manifeftent par une‘foule de volcans, qui font répandus dans toutes les parties du monde ; on trouve près de cinq cents de ces volcans ou monta: gnes brûlantes , dans les relations des voyageurs. Voyez VOLCANS. 3°. Ils font atteftés par le témoignage de ceux qui travaillent aux mines métalliques. Les mineurs aflie rent que plus on creufe avant en terre, plus on éprouve une,chaleur très-incommode, & qui s’aug- mente toujoùrs à mefure qu'on defcend, fur-tout ‘au-deffous de 480 piés de profondeur. Les fourneaux foûterreins fervent à fondre & purifier les métaux dans le fein des minieres, comme dans autant de creufets fabriqués par laterre. Ils diftillent aufi dans les parties creufes de l’intérieur de la terre, comme dans autant d’alembics, les matieres minérales, afin d'élever vers la furface de la terre, des vapeurs chaudes & des efprits lumineux, fulphureux, falins, vitrioliques , nitreux, &ec. pour communiquer des vertus medicinales aux plantes & aux eaux minéra- les. Quand Pair manque à ces feux renfermés, 1ls ouvrent le haut des montagnes, & déchirent les en- trailles de la terre, qui en fouffre une grande agita- tion, Voyez VOLCAN 6 TREMBLEMENT DE TER- RE. Quelquefois quand le foyer eft fous la mer, il en agite les eaux avec une violence qui fait remon- ter les fleuves, 8 qui caufe des inondations. Foy. INONDATIONS. C’eft à cette caufe qu’on doit attri- buer les tremblemens de terre & une partie des inon- dations qu'on a efluyés dans plufieurs endroits de l’Europe en 1755; année qui fera triftement fameufe dans l’hiftoire. Voyez LISBONNE, &c. IL paroït par les hiftoriens, que l’année 1531 ou 1530, felon d’autres manieres de compter , fut auf funefte à l’Europe & à Lisbonne en particulier ; que les trem- blemens de terre & les inondations y furent confi- dérables. Des féux foûterreis, 1l y en a qui s’allu- ment par l’effervefcence fortuite de quelques mélan- ges propres à exciter du fu; mais il eft probable que d’autres ont êté placés de tous tems dans les en- trailles de la terre ; pourquoi n’y auroit-1il pas des ré- {ervoirs de fe comme il y a des réfervoirs d’eau ? Lifez le mémoire fur La théorie de la terre, inféré à la fin des lettres philofophiques fur la formation des fels & des cryflaux, &c. par M. Bourguet. Cet au- teur prétend, » que le feu confume actuellement [a # terre ; que l'effet de ce fez va infenfiblement en » augmentant, & qu'il continuera de même jufqu’à » ce qu'il caufe l’embrafement dont les anciens phi- » lofphes ont parlé, &c, » Ces article ef} tiré des pas piers de M. FORMEY. LI FEUX FOLLETS, ( Ambulones.) ce font de petites flammes foibles ; quu volent dans l’air à peu de dif: tance de la terre, & qui paroïffent-aller çà & là à aventure. On en trouve ordinairement dans les lieux gras, marécageux, & dans ceux d'où l’on tire les tourbes. Onen voit auffi dans les cimerieres, près Tome VI, ; : F E Ü 6i3 dés gibets & dés fmiérs ; ils paroïflent fur-tout er été 8 au commencement de l’autonne, & il s’en rencontre davantage dans les pays chauds que dans les pays froids. De-là vient qu'ils font communs en Ethiopie & en Efpagne, mais ils font rares en Alle: magne. Ils paroïffent fuivre ceux qui les évitent, 8 fuir ceux qui les pourfnivent. Voici pourquoi. Le moin: dre mouvement fait avancer ces petites flamimes , de forte que lorfqu’on vient à leur rencontre, on les chafle devant foi, à l’aide de l’air que Pon pouflé en avant, ce qui donne lieu de croire qu’elles fuient ceux qui vont à leur rencontre. Lorfqu’on les a à4 dos, on laiffle comme un vuide derriere foï, de forté que l’air qui fe trouve derriere ce vuide, venant à s’y jetter dans l’inftant & à le remplir, emporte en même tems ces petites flammes, qui paroïflent fui vie l’homme qui marche devant elles. | Lorfqu’on les faifit, on trouve que ce n’eft autré chofe qu’une matiere lumineufe, vifqueufe & glais reufe, comme le frai de grenoüilles. Cette matiere n'eft ni brûlante ni chaude. Il paroît que c’eft une matière comme lé phofphore, laquelle doit fon ori- gine aux plantes pourries & aux cadavrés, &c, comme elle vient à être enfuite élevée dans l’air pat la chaleur du foleil, elle sy épaiflit & s’y condenfe par le froid qui furvient lé foir. Le foleil fait ici le iiême effet que le fez artificiel; & la vapeur de l’eau ne produit dans air qu’une légere éondenfation. Tous les poiflons pourris luifent la nuit, comme fi c’étoit du feu, & on a aufh obfervé la même chofe en été à l'égard de quelques cadavres: Le peuple de lacam- pagne croit que ces petites flammes font de malins efprits où des ames damnées ; qui vontrodér par-tout, & qui étant mortes excommuniées, confervent tou: te leur alice. IL y a encore.üne autre efpece de 2x foiles, appellé en latin ignis lambens. Ce n'’eft au- tre chofe qu’une petite flamme ou lumiere , qué l’on voit quelquefois fur la tête des enfans & fur les cheveux des hommes. On en remarque auf de fem- blables fur la criniere des chevaux quand on la pei: gne. Ces petites flammes n’appartiennént point aux météotes aériens, quoique les anciens philofophes les ayent mifes dans cette clafle, C’eft une efpece de phofphore produit pat la nature du corps, & que l’on pourroit imiter. L’exhalaifon onétueufe de la tête s'attache aux cheveux, & s’enflamme auffi: tôt qu'on les frote ou qu’on les peigne: Les anciens regardoient comme un fez facré les petites flammes qui paroïfloient fur la tête des enfans, & en tiroient d’heureux préfages. Joy. ceque Ciceron, Tite-Live, Florus, & Valere-Maxime difent de Servius Tullius encore enfant. Joignez-y le récit de Virgile dans 'E- néide, livre IT. y, 680, &c. Les étincelles qui fortent dans l’obfcurité du dos des chats en le frotant à con tre-poil , font de même nature que l’ignis lamibens. Article de M. FORMEY , qui l’atiré de l’Æffai de Phy: fique de M. Muffchenbroek; som. II, p. 855 & Juive Il eft évident, par ce qui fera dit plus bas au mot FEU ÉLECTRIQUE, que la matiere des féux follers n’eft autre chofe que la matiere même de l’éle&ri= cité, : D DEN FEU S,ELME. On appelle aïnfi de petites flammes que l’on voit fur mer dans les tems d’orage aux pa- villons, aux cordages, aux mâts, & à toutesles par< ties faillantes & fupérieures du vaifleau. Ce fex qu’- on à auf nommé caflor € pollux , n’eftencore au< tre chofe quele fez éle@trique. Voyez l’article fuivanrs On peut voir un plus long détail fur 2 feu S, Elme dans M. Muflch. Effai de Phyfique, $. 1684 € fuis vans. On y trouvera fes conjeétures fur la caufe de ce phénomene , & ce que les anciens enontraconté, Plutarque, dit-il, rapporte dans la vie de Lyfanäre, que ces flammes fe tenoient aux deux côtés de form ‘k4 614 FEU Vaïfleau , & qu’on les vit aufli luire autour du gou- vernail. Fréfier remarque dans fon voyage à la mer du Sud, qu'après une tempête de 23 heures, il parut la nuit une lumiere aux vergues du vaiflean, d’où elle s’élança comme une fleche jufqu’au milieu du hauban, d’où elle difparut en un clin-d’œil, La tradition des anciens au fujet de ces petites flammes, eft fort fabuleufe. Ils difoient qu’une feule de ces petites flammes étoit un mauvais prognoftic, & préfageoit de l’orage ; au lieu que deux étoient un préfage heureux , & un figne que le calme alloit fuccéder à la tempête, Pline dit en effet, que lorf- qu'il vient une petite flammeou. étoile, elle coule le navire à fond., & qu’elle y met le feu lorfqu’elle def- eend vers la quille du vaifleau. Cardan rapporte, que lorfqu’on en voit une pro- che dumât du vaifleau, & qu’elle vient à tomber, elle fond les bafins de cuivre, & ne manque pas de faire périr le vaifleau. Mais.fi ce que dit cet auteur étoit Vrai, on ne verroit prefque jamais revenir au- cun vaifleau des Indes, puifqu'il ne fe fait guere de voyage, fans que les mariniers apperçoivent pen- dant la tempête ces petites. flammes, qui tombent çà & là fur le vaifleau, Voyez Muflchenbr. /oco cirato. Voyez auffi MÉTÉORE, &c. (0) FEU ÉLECTRIQUE , phénomene de l’éleûricité, Nous appercevons le feu éleülrique, lorfque la ma- tiere de l’éleétricité étant fufkfamment raflemblée & dirigée d’une maniere convenable, éclate & brille à nos yeux, s’élance comme un éclair, embrafe, fond, 8c confume les corps capables d’être confu- més., & produit dans ces corps plufieurs effets du feu ordinaire. Onentend auf par le fe. éleéfrique ; ce fluide très- délié & très-a@if, qui eft répandu. dans tous les corps. qui les pénetre, & les fait mouvoir fuivant de certaines lois d’attrattion & de répulfion., & qui opere en un mot tous les phénomenes de l’éle&ri- cité. On a donné à ce fluide le nom de fé , à caufe des propriétés qui lui font communes avec le feu élémentaire, entr’autres celle de luire à nos yeux au moment qu'il s’élance avec impétuofité pour en- trer ou {ortir des différens corps, d’allumer les ma- tieres-inflammables, &c. Voyez FEU. | Nous devons donc confidérer le few électrique fous deux points. de vûe différens: premierement comme phénomene de l'électricité ; nous examinerons fa produétion, fa force, fa propagation, &c. Enfuite nous, le confidérerons comme caufe des effets de léleétricité , & nous rapporterons les fentimens des principaux phyficiens , fur fa nature & fur la ma- siere dont il produit les phénomenes éle&riqnes. Otto Guericke & Boyle ant remarqué qu’en: fro: tant vivement de certains corps éleétriques , ils ré- pandoïent une lumiere plus ou moinsvive dans ob fcurité que quelques-uns; comme les. diamans, con- fervoient pendant un: tems affez confidérable. On trouve dans le recueil des expériences d'Hauksbée, une fuite d’obfervations très-curieufes fur la lumie- re que répandent plufeurs corps frotés contre diffé- rentes matieres , tant en.plein air que dans le:vuide de la machine pneumatique: mais alors les Phyf- siens regardoient cette lumiere plûtôt: comme un phofphore, que comme le fluide élettrique rendw fenfble: à nos yeux par l'effet du frotement. Ce fut à l’occañon:de la douleur que reffentit M. Dufay , en tirant par hafard une-étincelle de la jam- be d’uneperfonne fufpendue fur des cordons de foie, qu’il penfa que:la matiere -élé@rique étroit univérita- ble feu, capable de brûler aufli bien que le feu ordi- aire, & ,que:la piquüre-douloureufe qu’il avoit ref- fentie, étoit une vraie brûlure. Enfin pluñeursfavans d'Allemagne ayant répété:les-expériences de M. Du- ay, & pourfuivifesrecherches, M. Ludol£vintàbout d’enflammer l’efprit-de-vin par une étincelle éle&ri- que qu’il tira du pommeau d’une épée, & confirma par cette belle expérience, la vérité de ce qu’avoit avancé M. Dufay, fur la reflemblance du fez & de la matiere élettrique. On fait aujourd’hui que tous les corps fufceptibles d’éledricité , c’eft-à-dire prefque tous les corps de la nature, font appercevoir le feu életfrique d’une maniere plus où moins fenfble , dès qu’on les élec- trife à un certain degré. Dans les corps naturelle- ment électriques, on ne manque guere de produire ce feu en les frotant un peu vivement , après les avoir bien dépouillés de toute leur humidité : la lu- miere qu'ils répandent eft plus ou moins vive, fui- vant la nature de ces corps; celle du diamant, des pierres précieufes, du verre , &c. eft plus blanche, plus vive, & a’bien plus d'éclat que celle qui fort de l’ambre , du foufre, de la cire d'Efpagne, des matie- res réfineufes , ou de la foie, Les uns & les autres brillent encore davantage, lorfqu’ils font frotés avec des fubftances peu éleétriques , comme du papier doré, la main, un morceau d’étoffe de laine, que lorfqu’on employe une étoffe de foie, la peau d’un animal garnie de poil, ou même du cuir ; mais quel- les que foient les matieres que l’on employe pour froter les corps éle@triques’, ils ne rendent prefque point de lumiere, fi les corps avec lefquels on Les frote n’ont quelque communication avec la terre, _ foit immédiatement , foit par une fuite de corps non éleétriques. Par exemple, fi une perfonne étant fur le plancher frote vivement un tube de verre, elle en verra bien-tôt fortir des éclats de lumiere: mais fi cette perfonne fait la même opération étant mon- tée fur un pain de réfine, avec quelque vivacité qu°- elle frote Le tube, la lumiere s’affoiblit, s'éteint, & ne reparoît que lorfque la perfonne fe remet fur Le plancher, owlorfqu’on approche d'elle quelquecorps non éleétrique qui communique avec la terre. Cette lumiere eft plus abondante & a encore plus d'éclat, lorfque les frotemens fe font dans le vuide:, ou fur quelque vaifleau dont on a épuifé air inté- rieur par la machine pneumatique ; on peut dire en général, quele feu éleétriquefe manifefte bien plus aï- fément dansun efpace vuide, ou prefque vuide , que dans celui quieftrempli d'air : en voici les preuves. Lorfqu’on frote contre un couflin un globe plein d'air , l'un & l’autre enfermés fous le récipient de la machine pneumatique ; ce globe, après qu’on a épuifé l’air intermédiaire, répand continuellement &t tant que dure le frotement, une lumiere très-vive &c très-abondante : cette lumiere s’affoiblit à mefure qu’on laïffe rentrer l'air , quoique l’on continue de froter le globe avec la même force, Il en eft de même d'un globe vuide d’air que l’on frote dans l’air libre ; leplus leger frotémentexcite dans fon intérieur beau- coup de lumiere, dont l'éclat diminue graduellement à mefute que l’onintroduit de Pair dans le globe.C’eft une obfervation affez générale , que la lumiere que l’on'excite dans un vaifleau épuifé d'air, paroît totr- jours plus dans fon intérieur , & y prend fa direétion de tous les points de la furface : elle ne s’attache pas aux doigts, lorfqu’on les approche à une petite dif- tance, comme dans le cas ordinaire ; elle s’anime feulement & devient plus vive à l'approche du doigt, même quelque tems après qu’on a ceflé de froter. Cependant tous les traits de lumiere tendent toû- jours vers l’intérieur du: globe. Le feu éleérique fe répand avec tant de facilitéau- travers d’un efpace vuide d’air, qu’on l’excite fur le champ dans un récipient, ou dans tout autre vaïft feau bien vuidé , par la fimple approche du tube ou de tout autre corps éleëtrifé; & on a obfervé que cette lumiere étoit encore plus vive , lorfque les vaifleaux vuides d’air tournoient fur leur axe, où » FEU étoient agités d’un mouvement quelconque. Lorfque les deux corps font en repos, la lumiere s’éreint par degrés; mais fi on touche le corps froté avant qu'il ait entierement perdu fon éle@ricité, la lumiere fe ranime aufl-tôt dans celui qui eft vide d’air. C’eft fans doute à cette facilité qu’a le féx éleétri- que de fe manifefter dans un efpace vuide d'air, qu'on doit rapporter la lamiere qu’on apperçoit au-haut du barometre, en éle&rifant cette partie du tuyau par le balancement du mercure ; celle d’une bouteille mince & bien purgée d’air,qui contient quelques on- ces de mercure bien fec, &c que l’on fecoue dans l’obifcurité ; enfin celle d’une femblable bouteille bien feche & purgée d’air, que l’on frappe fimplement à l’extérieur avec le plat de la main. Mais de toutes ces expériences faites dans le vui- de, il n’y en a pas de plus curieufe que celle que fit M.Hauksbée, avec un globe de verre de 6 pouces de diametre , enduit intérieurement vers fon équateur d’une large bande de cire à cacheter fondue : ce glo- be ayant été bien exaétement vuidé d’air, & appli- qué à la machine de rotation , fit voir le phantôme lumineux de la main avec laquelle onle frotoit,peint très-diftinétement dans la partie concave du globe, malgré le défaut de tranfparence de la bande de cire d’Efpagne. Ce phénomene fut vù par les endroits des poles que l’on avoit confervés tranfparens. Le feu qui fort des animaux, des métaux, & au- : tres corps élettnifés par communication, eft beau- coup plus vif, plus impétueux, 8 mieux raflemblé que celui qui fort immédiatement d’un vafe de ver- re, d’un morceau d’ambre, où d’un canon de foufre, Par exemple, on tirera d’une barre de fer pofée fur des cordons de foie,& éleétrifée par le moyen d’un tu- be, une étincelle plus brillante & qui éciatera avec beaucoup plus de bruit que celle que Pon tiréroitim- : médiatement de ce tube; & plus on augmentera le volume & l'étendue de ces corps éleêtrifés par com- munication , en joignant à cette barre de larges fur- faces métalliques ifolées comme elle, plus l’étincelle que l’on en tirera en approchant le tube éle@rifé au même degré, fera vive & pétillera avec force. En général ce feu eft d’autant plus brillant , que l’explofion fe fait avec plus d'impétuofté ; & l’ex- plofon eft d'autant plus grande, qu'il s’échappe une lus grande quantité de matiere éle@rique, accumu- fée précédemment fur un corps : c’eft pourquoi fi à des tuyaux de fer-blanc, d’une très-grande longueur & d’un très-grand diametre, on applique l’éledrici- té d’un ou de plufieurs globes de verre bien frotés, on aura les étincelles les plus vives, qui femblables à de véritables éclairs , s’élanceront d’une très-gran- de diftance avec bruit vers le doigt, & qui occañon- neront une vive douleur. Lorfqu'un corps métallique , ou autre de même nature, a acquis par Communication une atmofphe- re d’une certaine denfité, la matiere éleétrique que l'on continue de lui appliquer, s’en échappe à la fin & répand de la lumiere ; quelquefois elle fort en for- me d’étincelles, femblables à celles que l’on éxcite avec le doigt; fur-tout fi le conduéteur n’a que des angles obtus, 8 qu'il ne foit pas fort éloigné de quel- que corps non eleétrique : mais plus communément le feu s'échappe par les angles & par les pointes du conduéteur, fous la forme d’une aigrette ou pinceau lumineux dont la pointe eft un corps éledrifé, & les rayons vont en divergeant à mefure qu'ils s’éloi- gnent. Ces rayons font d’autant plus divergens, que la vertu éle@rique eft plus forte dans le condu- éteur : leur fortie eft accompagnée d’un foufle & d'un murmure qui expriment l'effet avec lequel ils écartent les parties de l’air, Les matieres qu’on plon- ge Le. ces ANR > retiennent une odeur fulphureu- ome VI, : FEU C1$ fe, &t les rofes rouges qu’on y expofe pendant quel. que tems y pâlifent. En préfentant le doigt, où tout autre corps non éleétrique un peu pointu, à Paigrette qui fort d’un conduéteur éleétrifé, on en voit paroître une autre, mais dansun fens oppolé, à l'extrémité de ces Corps qui regarde le conduéteur, La diflance à laquelle cette nouvelle aigrette paroît, varie non-feulement fuivant la denfité de Patmofphere du condudteur , mais encore fuivant fa forme & celle du corps que l'on préfente ; plus le conducteur eft vafte & moins 1} a d’angles, plus cette diftance eft confidérable : plus le corps que l’on approche eft mince, tranchant, où pointu , plus cette diftance eft encore grande, À me- fure que l’on approche le doigt du conduéteur, ou quelque métal terminé en pointe, les aigrettes de- viennent de part & d’autre plus fortes & plus bril- lantes ; elles fe condenfent bien-tôt quand la diftan- ce eft peu confidérable, & elles formentenfin ce trait de feu fi vif, fi fubit, & fi impétueux, qui caraétérife fi bien les éclairs : la perfonne qui préfente fon doigt reflent à chaque étincelle une vive douleur, & l’en- droit où fe fait explofion eft marqué parune piquü- 1e , accompagnée d’une échymofe, comme feroit l'effet d’une lesere brülure: C’eft avec un pareil trait de lumiere, que l’on en- flamme de l’efprit-de-vin un peu tiede, en le préfen- tant, dans une cuillere de métal, à quelque angle émoufté du conduéteur éle@rifé : on a allumé par le même moyenide la poudre à canon, & d’autres ma- tieres comblitibles. Mais le fèx éleülrique dont nous avons parlé jufqu’æ préfent, n’eft qu'une bluette en comparaifon de celut qu'on peut exciter, en faifant l’expérience de Leyde : on a fubftitué à la bouteille dont on fe fervoit pour cetteexpérience,un large carreau de verre étamé des deux côtés, à la referve d’une bande large d'environ deux pouces, qu’on a confervé tout-autour fans étain, On placé ce carreau fur un guéridon de mé- tal, enforte que la lame d’étaininférienr ait une com. munication libre avec la terre; on fait communi- quer, par le moyen d’une chaîne, la lame fupérieu- re avec le conduéteur qni recoit l’éle@ricité dur glo- de: tout étant dans cet état, & le globe vigoureufe< ment froté, le carreau s’éleétrife, comme la bouteille dans lexpérience de Leyde; & fiavecun gros fil-de- fer courbé, émouflé par les bouts ; & emmanché l'extrémité d’une canne de verre, On Ouvre une com mumication entre les deux furfaces étamées, ilen fort: un éclair terrible dont les yeux ne fauroient foûte- nir l’éclat, & dont le bruit fe fait entendre de fort loin. Cette étincelle perceune main entiere de papier que l’on pofe fur la lame d’étain fupérieure, & dont on approche le fil-de-fer conrhé selle fond une feuil- le d’or ferrée entre deux plaques de verre, & arran- gée de maniere que l’étincelle de l’exploñon pafle au-travers, en faifant Le circuit qui communique d'u ne lame à l’autre: la fufion eft fi complete, que le métal fe trouve incorporé au verre àtel point, qu’ik élude l’aétion des plus puiffans menftrues. Cette étincelle relemble fi fort par fes effets aux éclairs & aux tonnerres, que plufeurs phyficiens n’ont pas fait difficulté d’aflürer qu’un éclat de ton= nerre n’étoit autre chofe qu’une très- violente étin= celle éle@trique. Nous examinerons plus particulie- rement cette analogie aux arricles MÉTÉORES € Tonnerre, Nous ne pouvons cependant pas nous difpenfer d’avancer ici, que les nuages orageux qui pailent affez près de la terre , éle@trifent fi fort nos barres de ferifolées fur des gâteaux de cire, qu'el- les rendent des étincelles beaucoup plus fortes que celles que nous pouvons produre par nos machines : que c’eft cette matiere éleétrique des nuages qui OC cafñonne le feu 5, Elme, les trombes de mer, & quan [iii 616 FEU tité d’autres phénomenes, dont les caufés étoient ignorées avant qu'on eût connowlance de l’éle&trici- té des nuages. Voyez ÉLECTRICITÉ. FEU ÉLECTRIQUE , FLUIDE ÉLECTRIQUE , 04 MATIERE ÉLECTRIQUE; on entend fous ces diffé- rentes dénominations, ce fluide très-fubtil, très-mo- bile, qui fe trouve répandu dans tous les corps, qui pénetre avec la plus grande facilité la plüpart des milieux; enfin qui caufe immédiatement tous les phénomenes de l’éleétricité, comme lattra@ion & la répulfion des corps legers, l’explofon de l’étin- celle, les émanations lumineufes, &c, | Les Phyficiens font partagés fur la nature du fluide éleétrique : les uns confidérant fes propriétés fingulie- res & différentes decellesde tousles autresfluides con- aus, le diflinguent abfolument des autres, 8 en font une efpece particuliere ; ainfi que les propriétés de laimant , qui paroïflent bornées à cette pierre &t aux corps aimantés , ont fait donner le nom de magnéri- que au fhude fubtil qui les produit : d’autres trouvent dans le fu éleërique beaucoup des propriétés du feu élémentaire, dont la préfence échauffe, agite, & ra- réfie les corps, qui les pénetre tous par fa grande fubtilité, dans lefquels 1l éprouve cependant diffé- rens degrés de réfiftance ; qui fe fixe & {e concentre dans quelques-uns, d’où il ne cefle de lancer pen- dant quelque tems des émanations lumineufes : d’au- tres enfin veulent que le fé életrique doit l’éther des anciens; cet agent univerfel , que les philofophes grecs regardoient comme l'inftrument de toutes les epérations de la nature, & dont le mottvement va- riable à l’infini leur paroïfloit agiter tout le refte de la matiere. Ces derniers commencent donc par éta- blir l’exiftence d’un fluide fubtil & répandu partout, ui reçoit le mouvement immédiatement des mains +4 Dieu, & le communique à tous les corps folides & fluides , fuiyant des lois que fa Sageffe infinie a établies pour entretenir l’ordre dans PUnivers; &cils rapportent à la diverfité de ces lois, la variété des opérations de la nature. Ainfi les effets de gravité,de reflort, de dureté, de chaleur, de magnétifme, & d’é- leétricité, leur paroïffent produits par les mouvemens de cet éther, dirigés par le Créateur fuivant de cer- taines lois, qui fuffifent pour différencier tous ces effets d’une même caufe. Voyez ÊETHER, &c. I eft vrai qu'il n’eft pas facile de comprendre au premier abord, comment les mouvemens de léther peuvent être aflez variés dans un même corps, par exemple dans une barre d’acier, pour produire à la fois & fans le moindre trouble, les effets de gravité, _ de reflort, de magnétifme,, & d’éledricité. Car pour nous borner feulement aux effets de chaleur & d’é- le@ricité, il eft inconteftable qu’ils exiftent fouvent enfemble dans les mêmes corps, & qu'ils y font fuf. ceptibles d’accroïflement &t de diminution indépen- damment l’un de l’autre. . On fait, par exemple, qu’une barre de fer peut être échaufiée jufqu'au blanc dans une de fes par- ties, ou refroïidie par le plus grand froid , agitée, di- latée , ou condenfée aux plus grands degrés auxquels nous puiflions parvenir , fans que tous ces différens effets apportent de changement fenfble À fon état d’éleétricité ; &c réciproquement un corps rempli de matiere élettrique, attire & repouffe de très-loin les corps legers, contraéte une atmofphere très-fenfi- ble, étincelle même de toute part , fans qu’il en pa- roifle plus échauffé,, ni le moindrement augmenté de volume. Or on peut demander comment l’éther ap- pliquéen figrande abondance à des corps très-échauf- és ou très-éleétrifés, ne produit-1l pas quelque cha- leur, quelque dilatation fenfble dans ceux-ci, ou quelques effets d'attraction & de répulfion dans ceux- la ? comment le milieu de cette barre, entouré ou pé- nétré de l’éther igné , n’arrête-t-1l pas, n’abforbe-tAl EE OR pas, ne difipe, ne raréfie-t:il pas l’éther éleQrique que l’on a communiqué à la barre ? enfin comment la matiere éle@rique , loin de fe confondre avec lat- mofphere du fer embrafé , La pénetre-r-elle, s’étend- elle, fe conferve-t-elle dans une denfité uniforme, aufi bien fur la partié la plus échauffée de la barre que fur celles qui font demeurées froides ? Il faut ayoüer que ces différens mouvemiens d’un même fluide qui s’exécutent à-la-fois dans un corps, ne fe préfentent pas bien clairement à l’efprit ; cepen- dant ce fyftème eft encore le plus fimple : car fi on faifoit dépendre ces mêmes effets de chaleur 8x d’é- leétricité, de deux différens fluides qui exerçafñlent en même tems & fans confufion chacun leurs mou vemens particuliers, ileft clair que cette explication ne feroit pas plus heureufe, & deviendroit fujette à des difficultés d'autant plus grandes, qu’on auroit à rendre raïfon d’un plus grand nombre d'effets, com- me dans l'exemple d’une barre d’acier, dans laquelle on confidéreroit les effets de pefanteur, de reflort, de dureté, d’éledricité, de magnétifme , de chaleur, Gc. & gd On peut citer en faveur de ceux qui n’admiettent que Péther pour caufe de la plüpart des phénomenes, des exemples de plufieurs effets différens qui font produits par des movemens variés d’un même fluides Par exemple , le vent 6c le fon font deux effets très- différens , qui dépendent certainement de deux mous vemens bien diffin@s excités dans l'air ; & l’on eft très-aflliré que ces deux fortes de mouvemens peu vent exifter enfemble ou féparément dans ce fluide, fans que la violence de l’un puiffe jamais nuire à lus niformité de l’autre. Le feu différemment modifié dans un même corps, produit les effets de chaleur, de dilatation , de co: rufcarion, La lumiere du foleu réfléchie par un miroir concave, échauffe des particules de fable expofées au foyer, & les difipe par une répulfion femblable à celle qu'elles éprouveroient , fi elles étoient pla= cées fur l'extrémité d’une barre de fer éle&rifée. Or, pour nous rapprocher de notre objet, le fluide élec- frique produit, quand nous voulons, deseffets d’at= traétion, des étincelles & du magnétifme. En effet, lexplofion d’une violente étincelle éle@rique alrere quelquefois la bouffole ou aimante de petites aïguil- les, fuivant la direion que l’on donne à cette érin= celle : or il y a long-tems que l’on a obfervé qu'un éclat de tonnerre (qui n’eft qu'une groffle étincelle éleétrique) eft capable d’aimanter toute forte d’ou- tils de fer & d'acier enfermés dans des caifles ; de donner aux clous d’un vaiffeau affez de vertu magné- tique pour faire varier d’aflez loin les boufloles ; en un mot, de changer en véritables aimans les croix de fer des anciens clochers, qui ont été plufieurs fois expofés aux vives impreflions de ce terrible fluides Voyez MAGNÉTIQUE, où nous détaillerons plus am: plement ces effets. | Ces exemples, & plufeurs autres qu’il feroit fa- cile de rapporter, prouvent qu’il n’eft pas impoñfible qu'’umfluide dont les parties font agitées par différen- tes fortes demouvemens, ne puifle produire des effets quinousparoiflent fipeutenir enfemble,quenousfoms mes portés à les attribuer à des caufes abfolument dif. férentes ; que finous découvrions les lois fuivant lef quelles le Créateur a réglé ces fortes demouvemens, nous ferions en état d'expliquer beaucoup de phéno- menes qui nous paroïflent incompréhenfibles, C’eft à la recherche que d’habiles phyficiens ont faite de ces lois , que nous devons les explications les plus fatisfaifantes que nous ayons des phénomenes de l’'éledricité ; & l’on peut dire que fi ces explications ne font pas entierement conformes à la nature, où nous paroïflent infufhfantes pour expliquer certains phénomenes , elles n’ont pas mois fervi à étendre: > F'EIU infiniment nos connôiffances fur cetté fnâtiere, . M. Wilfon a fait une heureufeapplication des pro: priétés de l’éther, découvertes pat M. Newton, pour expliquer les phénomenes déféleétricité, par la con- formité qu’il trouve entre les propriétés connues de ce fluide & celles du flnide éleétrique, qu'il a dédui- tes d’une infinité d'expériences, Il ne doute pas que le fluide éle@rique ne loit le même que celui qui cau- fe la réfration & la téflexion de la lumiere, la gravi- tation & toutes les grandes opérations de la nature, Nous allons expofer d’abord les propriétés générales du fluide éleëtrique établies fur des expériences , &c nous vetrons enuite quel ufage il fait de l’éther pour rendre raifon de tous ces phénomenes, Eorfqu’on fait tourner rapidement pat le moyen d’une roue, & que l’on frote un globe de verre dans le voifinagé duquel eft une batre de fer fufpendue par des cordons de foie, on excite aufhtôt le fluide éleétrique; & on peut reconnoître fa préfence par une ctincelle qui fort de cette barre quand on en ap- proche le doigt, par le bruit qu’elle fait entendre, &t par la douleur qu’elle fait reffentir au bout du doigt ; enfin par les mouvemens d’attraétion & de répulfion qu’on apperçoit dans tous les corps legers qui font proche de la barre ou du globe. Comme aucun de ces effets n’arriveroit fi on n’a- voit pas froté lé globe , 1l eft naturel de conclure que le frotement eft néceflaire pour exciter le fluide élec- trique , & nous faire appercevoir fes effets. - Quand la barre eft ainfi éleétrifée , fi on y porte le doigt, un morceau de métal, ou tout autre corps non-éleétrique., on tire par l’explofion de Pétincelle prefque tout ie fluide dont elle a été chargée ; car on ne fauroit réitérer cette expérience fans froter de nouveau le globe : au lieu qu’en touchant à la barre avec du verre, de l’ambre, de la cire d'Efpagne, dé ja réfine ou de la foie, il ne fe fait aucune explo- fion, qui cependant arrive enfuite , dès qu'on y por: te le doigt. De mèmeune ou plufieurs perfonnes étant montées fur des gâteaux de réfine, & communiquant avec des métaux d’une grande étendue en furface, fufpen- dus par des cordons de foie ; fi une de ces perfonnes touche & tient la barre dans fa main, tous ces corps recevront, comme la barre, le fluide éleétri- que qu’élance le globe , & acquerront autour d’eux une atmofphere d’une denfité uniforme ; elles atti- reront d’une égale diftance des corps legers, & on pourra tirer des étincelles également fortes de tous les points de leur furface. Si les gâteaux de réfine font très-minces , les effets feront moins fenfbles ; &ln’en arrivera aucun, s’il n’y a pas quelque corps paturellement éleétrique entre leurs piés &c le plan- cher : d’où il eft naturel de conclure que la matiere qui s'étend fi uniformément fur tous ces corps, eft vraiment fluide ; qu’elle pafle bien plus difficilement au-travers du verre , dela réfine & de la foie , quand ces corps ont une certaine épaifleur, que quand ils font très- minces ; mais que ce fluide pafle avec la plus grande facilité dans les métaux , dans les ani- inaux, &c & que par leur moyen il fe répand dans la terre, à moins qu'il ne foit arrêté par quelque corps naturellement éleétrique. * Quand tout l'appareil , ainfi que l’homme qui tour- ne la roue , font placés fur des gâteaux de réfine, ou bien quand on met une plaque de verre bien épaiffe entre le couffin & la table , les effets d’éleétricité font prefqu'infenfbles , quoique lon continue de tourner le slobe & de le froter vivement ; au con- traire ils ont lieu quand l’homme qui tourne pofe feu- lement le bout du pié par terre : d’où l’on conclut facilement que le Auide éleétrique n’eft pas produit par la machine ni par le globe, mais qu'il eft pompé de la terre, ê répandu dans la barre par le moyen de ces inftrumens, : FEU A) L'expérience a fait connoître' qu'il fe trouve na: turellement dans rous les corps une quantité déter- minée de fliide éleétrique , laquelle nous fommes les maîtres d'augmenter où de diminuer à volonté, Ce n'eft mêmé que lorfque nous avons augmenté ou di- minué dans un corps fa quañtité naturelle de fluide éleétrique, que nous le jugeons éleëtrifé ; &z fans ces chängemens , 1l n’attire ni ne repoufle point les corps legers, On a une preuve de cette accumulation dans lPécartement qui arrive éntre deux fils d'argent. égaux, & fufpendus à une barïe de fer éleûtrifée. Si le fluide que ces fils reçoivent de la barre, en fortoit à mefure qu'il y eft apporté, 1ls devroient tefter im- mobiles & ne jamais s’écarter ; & fi ce fluide entré dans ces fils plus facilement qu'il n’en fort, il doit s'y accumuler : or on obferve que ces fils s’écartent dès qu'ils ont recû le fluide éleétrique ; & que cet écçartement eft plus ou moins confidérable , fuivant que le fluide eft plusou moins condenfé dans la barre, &t par conféquent dans les fils : énforte que cet écar- tement peut aflez bien nous repreéfenter la denfité du fluide éleétrique dans la barre & dans les corps qui lui communiquent. Car il faut femarquér que les effets d’attrattion & de répulfion dépendent plus de la denfité du fluide éleétrique, que de la quantité de ce même flude : en voici la preuve. Soient deux globes de métal 4 & B, dont À ait trois piés de dia metre, & B feulement trois pouces ; qu'ils foient po- {és chacun fur un gâteau de cire d’une épaiffeur fu fante , & qu'ils reçoivent en même tems l’élericité d’une barre de fer fufpendue par des foies, & que l’on puiffe haufler ou baïffer par le moyen des poulies ; la barte étant pofée fur les globes , & ayant été élec: ttifée , ces deux globes & la barre attireront les corps legers à-peu-près d’une égale diftance, Enle- vez promptément la barre, cette égalité de force at- traétive paroitra encore en cet inftant dans les deux globes, qui n’ont plus maintenant de communica- tion ; mais peu-à-peu elle s’affoiblit dans le globe de trois pouces, tandis qu'elle refte long-tems fenfble dans celui de trois piés : or au moment que la barre eft enlevée, le fluide éleétrique fe trouve d’une égale denfité dans les deux globes , aufi opere-t-il des ef- fèts égaux ; cependant les quantités de matiere élec« trique répandues dans ces deux corps, font bien inés gales. Quand on életrife le globe de métal de trois piés de diametre , fufpendu à des cordons de foie, on éprouve que plus on introduit de fluide éleétrique dans ce corps, plus il réfifte à en recevoir une nou- velle quantité, plus il s'échappe de ce corps avec impétuofté , lorfqu’on en approche le doigt ou tout autre corps non-éleétrique ; au lieu que cette quan- tité furabondante fort & fe diffipe dans l'air d’une maniere infenfñble, & dans un efpace de tems aflez long , lorfque ce corps refte parfaitement ifolé, Le même globe étant éleétrifé & amené en con- ta avec un autre de même nature, de telle gran- deur qu'on voudra , & qui ne foit point élettrifé , partagera avec celui-ci le fluide éleétrique qu’il con tient , de maniere qu'il fe trouve d’une égale denfité dans l’un & dans l’autre ; enforte que fi ce nouveau corps eft infiniment grand par rapport au premier, les effets d’éleftricité feront prefqu'infenfibles dans tous les deux : c’eft le cas des corps éleétrifés qu'on fait communiquer avec la terre. Lorfqu'on élerife un fil-de-fer très-long , fupporté par des cordons de foie , le fluide éledrique s’élance d’une extrémité à l’autre avec une viteñe fi grande, qu’elle n’a point encore de mefure. En touchant à ce fil-de-fer avec le doigt aufli-tôt qu'il vient d’être éle- &trifé, on retire avec la même vitefle le fluide éle@ris que accumulé dans toute fon étendue ; &z plus le fil: de-fer eft long , plus l’explofon qui accompagne lé: tinçelle paroit forte. li 613 FEU A tous ces caraéteres on ne fauroit douter que le fluide de l’éledricité ne foit très-élaftique ; & fi fa prodigieufe propagation le long d’un fil-de-fer, eft, comme il eft vraiflemblable, un effet de fon reflort, on peut cire que ce fluide eft le plus élaftique que nous connoiflions. C’eft une fuite néceflaire de l’é- lafticité de ce fluide, qu'il puifle fe raréfier dans les corps, ainfi qu'il y eft quelquefois condenfé. On par- vient en effet à le raréñer, foit qu’il ait été condenfé précédemment dans un corps, foit qu’il n’y ait que fa denfité ordinaire ; mais en quelqu’érat qu'il fe trouve de raréfaétion ou de condenfation par rap- port à fon état ordinaire , fes effets d’attraétion & de répulfon font fenfiblement les mêmes. Dans le der- nier cas, les corps legers gagnent &c partagent ayec le corps éle@rifé , Le fluide condenfé dans celui-ci; dans le premier, ils perdent & partagent avec ce mê- me corps, la petite portion du fluide qu'ils contien- nent naturellement. S1 la machine & l’homme qui tourne la roue font pofés fur de bons gâteaux de réfine , & qu’on éta- bliffe au bout du conduéteur une communication avec la terre par le moyen d’une chaîne ; après quel- ques tours de roue , l’homme & la machine atrire- ront des corps legers , & donneront des étincelles, lorfqu’une autre perfonne pofée fur le plancher en approchera le doigt. Dans ce cas le fluide naturelle- ment répandu dans l’homme &c dans la machine , eft pompé par le globe , tranfmis à la barre, & difipé dans la terre parle moyen de la chaïne;car fi on appro- che de l’homme ou dela machine un vafte conduéteur de métal bien éleétrifé par un autre globe, &fufpendu par des foies , l’homme qui tourne la roue en tirera une étinceile très-vive, & diffipera prefque tout-à- fait la vertu éleétrique de ce conduéteur, fans paroi- tre après cela davantage éleétrique ; effet qui ne de- vroit pas arriver, fi ce fluide étoit condenfé dans cet homme, comme 1l l’eft fur le conduéteur. L'homme qui tourne reftant toùjours fur des pâ- teaux de réfine, & ayant Ôté la chaine qui pendoit de l'extrémité de la barre jufqu’à terre; après quel- ques tours deroue, la machine , l’homme & la barre paroïffent éleétriques , & une perfonne polée fur le plancher en peut tirer des étincelles ; mais bientôt elle ceffera d’en tirer de la barre, quelque long-tems qu’on tourne la roue : alors fi l’homme qui tourne touche d’une main le grand conduéteur métallique, qui dans ce cas ne doit point être éle@rifé , on pourra encore tirer de la barre quelques legeres étincelles, mais qui s’affoibliront & s’évanoiiront bientôt. En- fin fi on attache la chaine à ce large conduéteur, pour qu'il puifle communiquer avec la terre, & que l’hom- me qui tourne ne cefle d’y avoir la main, on tirera fans fin des étincelles de la barre , la barre fournif- fant continuellement à ce que le globe pompe de la machine, de Phomme & du conduéteur, & qu'iltranf- met à la barre. Dans ce dernier cas, lorfque la ma- chine, l’homme qui tourne, & la barre, font parfai- tement ifolés, & paroiflent éleétriques à une per- fonne pofée fur le plancher, quoique leffet foit le même, la condition du fluide éleétrique eft cepen- dant bien différente ; car il eft raréfié dans l’homme quitourne, ainfi que dans lamachine, & la perfonne leur rend ce qu’ils ont perdu, & qui a été tranfmis À la barre : au lieu que dans celle-ci le fluide éle&rique eft condenfé aux dépens de celui de l’homme & de la machine , & cette quantité furabondante pañle dans la perfonne qui en approche le doigt. Il efttrès- facile de s’aflürer de cette vérité, fi la perfonne, au lieu de toucher à ces corps avec fon doigt, tient à fa main une canne de verre à laquelle foit fixé un fl- de-fer en demi-cercle, & forme avec ce fil-de-fer une communication entre la barre & la machine ; car après une explofon aflez forte , Le fluide açcumulé dans la barre repaflera dans lamachine & dans f'hom: me d'où 1l eft forti ; & chacun ayant repris fa quan- tité naturelle de fluideéleétrique , tout paroîtra com- me s'il fût toûjours demeuré dans un parfait repos, fans donner davantage de fignes d’éleûricité. 1l y a dans tous les corps un terme au-delà duquel on ne fauroit accumuler ni raréfier le fluide éleGr- que : après in certain nombre de tours de roue, les corps {ont attirés par la machine owpar la barre d’u- ne certaine diftance qui n’augmente point , quelque long -tems que l’on continue de tourner. Ce terme dépend non-feulement de la nature des corps dans lefquels on accumule ou on raréfie ce fluide, mais principalement de leur figure ; car ayant remis la machine & l’homme qui tourne, fur le plancher, f On attache un poinçon bien aigu à chaque extrémité de la barre, de maniere que ces pointes débordent d’un pouce ou deux, dès qu’on aura froté le globe, le fluide éle@rique fortira fous la forme d’une aï- grette lumineufe par chacun de ces poinçons, &c ia barre fera très-peu éleûrique , comme on pourra s'en aflürer en préfentant une balle de liége fufpen- due à un fil. S1on répete expérience en ne mettant qu’un feuf poinçon, l’autre extrémité de la barre étant bien-ar- rondie, l’aigrette paroïtra feulement au poinçon , & l’éleétricité de la barre fera plus forte. Enfin f la barre eft arrondie par les deux extrémités, il ne pas roîtra aucune aigrette : l’éleétricité fera la plus for- te, & continuera d’attirer la balle de liége , même afez long-tems après qu’on aura ceflé de froter le globe; mais elle ne deviendra jamais plus forte, quelque tems qu’on employe à froter le globe & à tourner la roue. Il paroïît donc par ces expériences, que les pointes réfiftent moins que les furfaces arrondies À la fortie du fluide éleürique ; & que dans les différentes cir- conftances de ces expériences, la barre n’a jamais pà recevoir n1 garder qu’une quantité déterminée de ce fluide, après un certain nombre de tours de roue : d’où l’on voit que les quantités de fluide éleärique a peuvent s’accumuler fur les corps éle&triques . ont extrèmement variables à proportion de la Le & des angles. | Cetteaccumulation du fluide éleétrique dans labar- re, varie encore infiniment, fuivant qu'on en appros che de plus où moins près une aiguille bien pointue: enforte que cette aiguille préfentée à une petite dif- tance, enleve prefque tout le fluide que la barre re- çoit du globe, & le tranfmettant aufñi promptement à la terre, empêche qu'ilne s’accuimule. Entre deux corps pointus que l’on approche de la barre à une égale diftance, celui qui eft Le plus aigu enleve da- vantage de matiere éleétrique ; 8c.fi ce corps eft émouilé au point d’être terminé par une large fur- face bien arrondie , on pourra l’approcher de très- près, fans que la barre paroïffe perdre fenfiblement de fon électricité. Tout ceci prouve que le fluide éleétrique éprouve moins de réfiftance, tant à entrer qu’à fortir, dans des corps terminés en pointe, que dans ceux dont les angles font émouffés , & qui préfentent de lar- ges furfaces ; par conféquent que l'accumulation ds fluide électrique eff, dans ces circonflances, en raifon di- reile de la réfiflance que ce fluide éprouve à s'échapper des corps dans lefquels on l’accumule. Dans d’autres circonftances l'accumulation du fluide éleütrique fe faie en raifon réciproque de la réfrffance qu'il crouve à Jorrir du corps dans lequel on l’introduit, comme ontva le voir par les expériences fuivantes, Quand on fufpend à la barre la bouteille de Leyde par le moyen de fon crochet, quelque tems qu’on tourne la roue , il ne s’accumule prefque pas de flui- de élé@rique dans l’intérieur de cette honteille, tant FEU qu’elle refte ainf ifolée ; au lie que fi on a tient à la main tandis qu’elle pend à la barre par fon cro- chet , elle fe charge intérieurement de beaucoup de fluide élettriqué : or ce fluide éprouve moins de réfiftance pour s'échapper de la bouteille lorfqu’une perfonne la tient dans fa main, que lorfqwelle eft fufpendue à la barre, où pofée fur un gâteau de cire ; car quand elle eft éle&trifée par la barre lorfqu’elle eft abfolument ifolée, elle prend au premier tour de roue toute la quantité de fluide qu’elle peut retenir, & fa furface extérieure attire les corps légers, mais bien plus foiblement que ne fait la barre; & cette différence d’attraétion ne change point, pour quel: que téms qu’on tourne la roue : d’obr-1l paroît que la matiere életrique fort plus hbrément de la bouteille que de la barre, & par conféquent que la réfiftance eft moins grande à l'extérieur de la bouteille qu’à la furface de la barre. Si on préfente à la bouteille fufpendue à la barre, üne aiguille bien pointue à la diftance d’un pié, la bouteille deviendra plus éleétrique que la barre ; maïs elle le féra encore moins que lorfqu’on la tient dans la main: en approchant l'aiguille de plus près, elle le deviendra davantage ; enfin en la touchant avec la pointe de l'aiguille , elle devient peu-à-peu auffi élettrique que lorfqu’on la tient dans la main: d’où il paroit qu'il entre plus de matiere élé@rique dans la bouteille, qu’il n’en fort dans un tems donné ; & que les trois différens degrés de condenfation du flui- de éle@rique répondent aux trois différens degrés de réfiftance que ce fluide éprouve à fortir de la bou- teille, mais que la moindre réfiftance produit la plus grande condenfation, La même chofe arrive dans des corps émouflés, Où terminés par de larges furfaces arrondies, avec cette différence | qu’étant approchés de la bouteille aux mêmes diftances que l’aiguille , ils produifent dans cette bouteille diférens degrés de condenfa- tion, d'autant moindre , que les furfaces font plus larges &c plus fphériques. Cependant lorfque tous ces cofps viennent à toucher la bouteïlle, ils pro- duifent tous un égal degré de condenfation, c’eft-à- dire Le plus grand que la bouteïlle puifle acquérir : or puifqu'en préfentant à une égale diftance de la bouteille une aiguillé bien pointue , un fer émoufé, ou une large furface bien polie & bien arrondie, on accumule dans cette bouteille le fluide éleétrique à différens degrés, l’air qui réfifte dans tous ces cas par différentes épaifleurs à la fortie du fluide, ne feroit- il pas la caufe de toutes ces différences ? Lorfqw'une bouteille eft fufpendue à la barre pat fon crochet ; tandis qu’une perfonne qui communi- que avéc fa terre la tient dans fa main, fi l’on éxa- mine les mouvemens d’une balle de liége fufpendne auprès de labarre, on verra qu’elle n’eft attirée qu’au bout de cinq où fix tours de roue, c’eft:à-dire quand bouteille eft chargée ; au lieu que firien ne touche à la bouteille ; là balle eft attirée dès le premier tour de roue : d’où l’on voit que la réfiftance eft moindre dans la bärre vers la bouteille, que vers l’air qui en- vironne la barre, jufqu’à ce que la bouteille foit plei- nément chargée ; au lieu qu’elle eft à-peu-près égale, quand une fois la bouteille eft chargée. Lorfque la bouteille eft trop-épaïfle ou trop mince, élle nefe charge pas : dans le premier cas, la réfiftan- ce que lé fluide éprouve efttrop glande, & trop pe- tite dans le fecond. Il paroït donc que pour qu'il fe fafle: la plus grande condenfation poffible dans la bouteille, il faut que le fluide trouve un certain de- gré de réfiflance, & fur-tout qu'elle foit égale & uniforme. | Voici dénc à quoi fe réduifent toutes les vérités qui réfultent des expériences précédentes, pour cé qui concerne la-réfiftance qu'éprouvé le fluide élec- FEU 619 | tique, foit én entrant, foit en fortant, dans Ls corps. | Il. Le verre, lPambre, la cire, la réfine, le fou- fre, &c. s’oppofent plus que tous les autres corps aux écoulemens du fluide éleétrique, & même plus que l’air, pourvû que ces corps ne foïent pas trop minces: If. Une couche d’air d’un pouce d’épaiffeut, té- fiffe moins qu'une autre d’un pié d’épaifleur, 8e celle-ct moins qu'une de trois prés, &c. IT. L'air en général réfifte plus que les furfaces des corps non-éleétriques, IV. De larges furfaces arrondies des fubftances métalliques, réfiftent plus que les pointes émou£ fées, & que les angles obtus. V. Cés derniers réfiftent plus que les angles aigus, les tranchans & les pointes, & que celles-ci réfiftent le moins de toutes. Les plus célebres phyficiens , eñtr’autres l'illuftre M. Newton , s'accordent à regardér l’éther comme un flude très-fubtil & très-élaftique , qui pénetre p'omptement tous les corps, & qui par La forcé de fon reflort remplit prefque tout l’efpace de l’Uni- vers. Sa force élaftique eft immenfe én proportion de fa denfité, &c dans une bien plus grande propor- tion que celle de Pair : ce fluide eft inégalement dif- tribué dans les différens corps à proportion de leur denfité : plus ils font denfes , moins ils ont dé pores, & plus l’éther qu'ils contiennent eft rare ; plus ils font rares au contraire , plus il eft condenfé. En- forte qu'il eft le plus denfe qu’il puiffe être dans l’ef- pace le plus approchant du vuide, & le plus rare dans l'or qui eft le corps le plus denfe que nous con- noiffions. | à bte M. Newton a découvert qu'il exifte autoir dé tous les corps une atmofphere très-denfe , qui s'étend à un très-petite diftance de leur furface elle eft for mée par l’aétion réciproque de Péthet , répandu au- tour de ces corps fur celui qu’ils contiennent dans leurs pores,& fur la lumiere qui entre dans leur com- pofition. La denfité de cette atmofphete varie fui- vant la nature des corps ; elle dépend de la denfité de ces mêmes corps,& de a quantité de lumiere qui entre dans leur compofition : en général les corps qui ont le plus de denfité font ceux qui ont les at. mofpheres les plus denfes. On excepte les corps ré- fineux & fulphureux, & tous ceux qui contiennent beaucoup de lumiere , qui ont des atmofpheres très- denfes, quoiqu’ils foient eux-mêmes la plûpart afez rares, C’eft à ce milieu éthéré queM. Newton attri- bue les effets de réflexion, de réfraîion,& de l’infle: xion de la lumiere ( Voyez les preuves de fon exif- tence à l’article RÉFRACTION ) & c’eit ce même milieu qui paroît aufii opérer les effets de l’éle&tricité. À mefure donc qu’un corps fe raréfie, l’éther qu’il contient dans fes pores doit devenir plus denfe & plusrare à mefure que le corps fe reflerre:or le frote- ment & la chaleur raréfient les corps , tant qe leur ation continue ; & dès que ces aétions ceflent , les corps fe remettent en leur premuér étaf : donc par Peffet dé la chaleur & du frotément ; l’éthér doit s’accumuler dans leur intériéur , y affluer des au- tres corps qui les énvironnent ; &c le contraire doit arrivér par le froid où quand le frotement cefle. Ces propriétés de l'éther font conformes à celles du fluide éleétrique ; rien n'empêche de croire que ce fluidenefoitl’éthér lni-même,charsé quelquefois des particules groflieres des corps par lefquels il pale. . Tous les corps ayant autour d’eux des atmofphe- tés de différente denfité , il eft facile de concevoir comment l’éther introduit dans leur intérieur, ÿ éft retenu plus où moins fortement , fuivant la denfité de cetté atmpfphere : on conçoit auffi quelle difpo- fition cés mêmes corps ont à admettre un éther 620 F E U étrañget , qui doit traverfer leuts atmofpheres : ain- fi les corps les plus denfes , & qui ont le plus de lu- miere dans leur compofition , ayant des atmofphe- res de la plus grande denfité , tels que les diamans, le verre, l’ambre, la cire, x. doivent retenir bien lus fortement l’éther admis dans leur intérieur , le Pie échapper avec plus de réfiftance , enfin l’ad- mettre plus difficilementique les métaux, les ani< maux êc les autres corps nonéleétriques qui n’ont pas tant de denfité. Ainf donc, le verre , l’'ambre , la cire. la réfine, 6c. étant une fois remplis d’éther éleétrique, agiflent bien plus long-tems fur Les corps legers, que.le:fer &c les autres métaux, rendus élec- triques par communication; & par la même raifon , ceux-ci , dont les atmofpheres réfiftent peu , reçoi- vent mieux l’éleétricité par communication , que le verre, la cire, la réfine , l’ambre, &c. Or, voici comment léther extérieur pénetre l’atmofphere très-denfe d’un corps éledrique , par exemple d’un cylindre de verre, pour fe condenfer dans fon in- térieur, | Quand les parties de fa furface {ont raréfiées par le frotement , Les particules d’éther qui les environ- nent font aufli raréfiées : la réfiftance de cette at- mofphere diminue donc fur là partie frotée ; & fi l’éther extérieur tend à s’introduire dans le cylindre par cet endroit, 1l eft évident que fon paffage en fera plus facile. Voyons maintenant ce qui caufe ce flux d’éther qui arrive des corps du voifinage , comment 11 s'échappe du globe pour paffer dans Les corps qu’on éleétrife par communication, & pourquoi le fro- tement feul peut produire tous ces effets. Suppofons que la machine & tout ce qui tient au couffin foient d’une denfité uniforme, d’une grandeur déterminée, &x que l’éther s’y trouve répandu uniformément ; enfin que ces corps foient parfaitement ifolés fur des gâteaux de réfine : lorfqu’on raréfie par le fro. tement une partie du couffin & du verre , l’éther doit devenir plus denfe dans ces parties qui vien- nent d’être raréfiées : il doit donc fe faire un flux d’éther des parties qui ne font pas raréfiées , vers celles-qui l’ont été ; & la machine contenant beau- coup plus de matiere que le cylindre de verre, doit fournir plus d’éther que ce cylindre , pour que ce fluide refte également raréfié dansla machine & dans” le cylindre après l'opération: par conféquent il y au- ra un flux du couffin & de la machine enfemble vers le verre. Quoique l’éther foit plus denfe dans les par- ties rarefiées du cylindre & du couffin, qu'il n’étoit dans ces parties avant le frotement ; cependant la réfiftance que lui oppofe l’atmofphere qui environne ces parties raréfiées , eft diminuée par la raréfaétion qu’elle éprouve aufh par le frotement ; c’eft pour- quoi l’éther peut s’échapper par cette voie, & paf fer dans une barre de fer ifolée , qui fera proche du cylindre , & diminue d’autant la quantité du fluide éthéré qui étoit contenu d’abord dans tout l’appa- reil. Cette diminution au refte eft bornée ; & quand la machine eft fur de la cire , on ne peut faire pafler qu'une très-petite quantité d’éther dans la barre , quelque long-tems que l’on continue le frotement. _ En faifant communiquer à la machine d’autres corps non éleétriques auffi pofés fur des gâteaux de cire , la quantité d’éther contenue dans tout ce raf- femblage dela machine & du couffinfera augmentée; il en coulera donc vers le globe une plus grande quantité , qui feratranfmife à la barre : c’eft auf ce que l’expérience confirme. | | De-là on voit pourquoi quand la machine com- munique avec la terre,vü l’immenfité de cette maffe, nous ne faurions parvenir à raréfier fenfiblement l’é- ther dans la machine : c’eft aufh le cas où1l en pañle davantage dans la barre , où les effets d'éleéricité {ont les plus fenfibles , & dans lequel le frotement FEU continué , aufli longtems qu’on votdra , produira toljours les mêmes effets, Le flux d’éther doit continuer auff long-tems que le frotement ; carla {urface du verre-en léloignant à chaque inftant du couffin , fe refroidit & fe ref. ferre , de forte que l’éther qui a pañlé du couffin dans les parties raréfiées du verre , y trouvant mainte- nant de la réfiftance , fortira par la barre où ilen rencontre moins : car l’intérieur du cylindre avec l’air qu'il renferme , réfifte plus à la fortie de l’éther , que la barre qui touche à fa furface exté- rieure : le fluide ne fauroit retourner par le couffin, parce que les parties du verre les plus proches du couffin font toüjours plus raréfiées que celles qui en font les plus éloignées ; enfin une infinité d’expé- ‘ riences prouvent que ce fluide a plus de facilité à pailer dans les corps métalliques pofés proche du: cy- lndre, qu'à s'échapper dans l'air extérieur. D'où l'on voit qu'il n’y a quele frotement qui puiffe pro- duire ces effets , la chaleur du feu ni celle du {oleil ne produifant point cette alternative de raréfadion & de condenfation dans les mêmes parties : onvoit encore pourquoi le flux d’éther diminue fenfble- ment, &c cefle enfin quand on a fini de froter; pour- quoi les effets éleétriques du verre s’affoiblif{fent à me- lure qu’il fe refroidit & qu'il reprend fon premier état ; pourquoi deux corps éle@riques épais & #o- tés l’un contre lautte , ne produifent que de foibles effets ; pourquoi quand la machine eft pofée fur des corps non éleétriques , & le couffin couvert d’un cuir doré ,le cylindre produit les plus grands effets; pourquoi le verre, l’ambre, la réfine, la foie , &c. qui s’oppofent à l'entrée on à la fortie de l’éther plus que ne font les métaux, les animaux &c lès autres corps non éleétriques , font abfolument néceflaires pour fupporter ceux que nous voulons éle&rifer par communication ; enfin pourquoi ces corps doivent Être exempts de toute vapeur & de toute humidité. M. l'abbé Nollet penfe que la matiere éleQrique eft la même que celle du feu élementaire, qu’elle eft très-fubtile, capable de fe mettre en mouvement avec la plus grandefacilité : qu’elle eft répandue-par- tout, dans l'air qui nous environne , dans nous-mé- mes, & dans tous les corps liquides & folides quel- que durs qu'ils foient , qu’elle les pénetre en tous fens , la plüpart avec une grande facilité , les autres plus difficilement : enfin, qu’elle entraîne avec elle des particules des corps au-travers defquels elle pañte. | Eleütrifer un corps, c'eft, felon lui , mettre en mouvement le fluide éleëtrique qui en remplit les pores , ce fluidereçoit le mouvement des parties pro- pres , qui font agitées par l’effet du frotement ; & les parties propres des corps, que nous nommons élettriques , font plus fufceptibles que les autres de ce mouvement de vibration quinfpire le frotément, & par conféquent plus capables d’agiter le fluide élec- trique. Ce fluide une fois mis en mouvement dans les corps éleétriques peut agiter de même un pareil fluide lorfqu'ilfe rencontrera ,nommément celuiqui fe trouve dans les pores dés corps métalliques, qui ne s’éleétrifent que par cette communication. Or, comme cette matiere , toute fubtile qu’elle eft , ne pénetre pas tous les corps indiftinétement avec la même facilité , il enréfulte qu’il y en a quelques-uns qui doivent s’élefrifer plus facilement que les au- tres. s Les corps gras, réfineux , fulphureux , & en gé- nétal ceux qui peuvent acquérir de l’eleétricité par le fimple frotement , contiennent dans leurs pores moins de matiere éledtrique , que les métaux, les animaux, Gc ; mais leurs parties propres font plus fufceptibles du mouvement central pour agiter le fluide eledrique , que celles des métaux, des ani- maux FEU shaux @ des autrès corps, qui ne fauroient devenir éleûriques par la voie du frotement : une des con- féquences de ce mouvement, eft que la matiere élec- triques’élance fenfiblement du dedans au-dehors des corps jufqu'à une certaine diftance ; & les faits prou- vent que ces émanations fe font en formed aigrettes, ou de rayons divergens. Mais le corps ne s’épuife point par cette opération,parce que ce fluide ef con- tinuellement remplacé par un autre de mémenature qui arrivenon-feulement de l’air environnant , mais auff de tous les corps du voifinage : enforte que ces ._ deux courans de matiere éleétrique exercent leurs mouvemens en fens contraire & pendant le même rems: cette circulation continue quelquefois pendant plufieurs heures après quele corps a ceffé d’être fraté. M. l'abbé Nollet définit donc l’éleûricité, l’état d’un corps. qui reçoit continuellement de dehors les rayons d'une matiere fubtile, tandis qu’il élance an- dehors des rayons divergens d’une femblable matie- se. L'auteur appelle efffuente la matiere qui s’élance des corps éle@rifés , & affluente celle qui vient de V’air & de la plüpart des corps du voifinage, Ce principe des effluences & affluences fimulta- nées ,que M. l’abbé Nollet appuie fur quantité d’ex- périences , eft le principal fondement de fon fyftè- me fur l’éleétricité. Voici comme il applique à quel- ques-uns des principaux phénomenes, _ Lorfqu’une feuille de métal, ou tout autre corps leger , fe trouve plongée dans la fphere d’aivité d’un corps attuellement éle@rique , on doit la con- fidérer comme agitée par deux puiflances direéte- ment oppofées l’une à l’autre ; favoir la matiere effluente qui tend à l’éloigner du corpséleärique , & la matiere affluenre qui l'entraîne vers ce corps : elle refte quelquefois immobile quand ces deux forces oppofées font en équilibre , mais elle cede ordinai- rement à lamatiere affluente , dont l’aétivité eft pref- que toujours fupérieure, Cette fupériorité de la ma- tiere affuente dépend principalement de la conver- gence de fes rayons vers le corps éleétrifé ; au lieu .que les rayons effluens qui tendent à l’écarter de ce Lan=. grene & mortification ; ce que j'ai vû, dit Paré, à mon grand regret : toutefois nous fommes fouvent obligés d’en ufer par l'horreur que les malades ont du fer ardent. Cette, horreur eft un préjugé, car Glandorp qui a fait untraité dans lequel il rapporte tout ce qui a été dit fur la matiere des cauteres par les anciens &c par les modernes, affüre , après avoir éprouvé lui:même la différence du cautere aétuel & du potentiel, qu'il aimeroit mieux qu’on lui en ap- pliquât fix de la premiere efpece , qu'un .de la fe- conde. Le cautere aûuel fait plus de peur que de mal 5 Taj orem ITLELILITL quarr dolorer ZILCHELE, Fabrice d’Aquapendente tient un rang diftingué parmi les auteurs de Chirurgie ; il avoit étudié les anciens avec le plus grand {oin , mais il ne fuit pas k ij 0o4 FEU avenglément leurs préceptes : if rejette l’ufage du fiuen beaucoup de cas où les anciens l’employoient. En général , ileft le partifan déclarédes moyens les plus doux ; il confeille néanmoins de cautérifer les articulationsabreuvées de fucs pituiteux:il rapporte à cette occafion les préceptes des anciens , mais il fe décide d’après fa propre expérience. Ilavoiteflayé fans fuccès l’application des remedes capables d’a- mollir & de difcuter la matiere que rendoit un genou fort gonflé & très-dur : le malade guérit par l’appli- cation de cinq ou fix cauteres a@uels, ronds, & affez. larges, Il cite un autre cas qui lui fera encore plus d'honneur dans l’efprit des gens de bien. Un homme de confidération avoit le genou fi gonflé & fi dur, qu'il ne pouvoit le faire mouvoir. Fabrice, appellé avec Capivaccius, jugea que cette maladie étoit 1n- curable. Un empyrique qu’on appela, mit un rmédi- cament irritant fur la partie, qui y excita une grande inflammation , ayec chaleur, rougeur & douleur. Dès ce moment même le genou acquit un peu de mouvement, & les chofes ont toujours été de mieux en mieux jufqu’à la parfaite guerifon. L'amour de la vérité & du bien public fait dire à notre auteur que cet empyrique a fait une cure qu’il n’a pas ofé en- treprendre , & ilen prend occafion d'expliquer fé fait, en difant que le cauftique a échauffé &c atténué la matiere froide & épaifle qui formoit la tumeur. Fabrice d’Aquapendente appliquoit quelquefois le feu de façon qu'il n’avoit point d’aétion immédiate fur la partie. Pour la guérifon d’un ozeme ou ulcere de l’intérieur du nez, 1l mit une cannule dans la na- rine , & porta le fer ardent dans cette cannule, dans la vûe d’échaufter la partie, & d’en deflécher l’hu- midité. Le cautere aétuel paroït n’être refté dans la Chi- rurgie, que lorfqu'il s’agit de détruire les caries & de hâter les exfoliations ; encore n’eft-ce que dans le cas où l’on ne peut être für d’enlever exaétement le vice local par le tranchant de la gouge ou du cifeau. Il eft certain que l’inftrument tranchant eft en géné- ral préférable pour l’ouverture ou pour l’extirpation des tumeurs ; mais dans les abcès gangréneux on ne retirera pas Le même effet de l’inftrument tranchant, que du cautere aëtuel. Dans les tumeurs dures qui ne font pas fufceptibles d’être fimplement ouvertes, fi l'indication exige qu'on y attire de l’inflammation pour les faire fuppurer plus promptement , les cau- teres potentiels peuvent être employés ; ils font naî- tre & attirent la putréfattion. Mais fi la tumeur eft déjà difpofée à la pourriture, le cautere potentiel ne convient point , Le feu aëtuel eft préférable, L’in- cifion néceflaire pour donner ifluë aux matieres, a fouvent douné lieu à une plus grande corruption dans certains anthrax. L’excès de l’air rend la pour- riture contagieufe , & lui fait faire des progrès. L’ap- plication du fez n’a pas cet inconvénient; ilaugmen- te la force vitale dans les vaifleaux circonvoifins, &z il forme à l'extrémité divifée des vaifleaux, une efcarre folide qui tient lieu des tégumens naturels. Que pouvoit-on faire de mieux que de porter le /ez fur ces maux de gorge gangréneux qui ces années dermieres ont fait périr tant de monde ? C’étoit une efpece de charbon placé dans un lieu chaud & hu- mide, difpofé par conféquent à une prompte putré- faétion par da fituation même, indépendamment de fa nature. Les fcarifications n’ont fait aucun bien, &c la cautérifation auroit probablement arrêté les progrès du mal, fr on l’eñt employée à tems, (7) Feu, (Jurifprud.) Ce terme a dans cette matiere plufieurs figmifications différentes. Feu figniñie fort fouvent menage. Chaque féz, dans certains endroits, paye au feigneur un droit appellé foiage: foragium, à foro. (A) Feu eft pris quelquefois pour domicile ; c’eft en ce fens que lon dit que les mandians & vagabonds n'ont n1 fe m1 Leu, Voyez MANDIANS & VAGA- BONDS. (4) à | Fer, dans d’autres occafons, eft pris pour irce- die, Les regles que l’on fuit, dans ce cas, pour fa- voir qui eft garant du dommage caufé par le feu, fe- ront expliquées au mot INCENDIE. (4) Feu du ciel, c’eft le tonnerre. Perfonne n’eft ga- rant du feu du ciel, c’eft-à-dire du dommage caufé par le tonnerre, qui eft un cas fortuit & une caufe majeute, Voyez INCENDIE. (4) Feu fe dit auf , par abréviation, pour exprimer La peine du feu: on dit condamner au feu, où 4 étre bräle vif, &c. On condamne au fes ceux quiont com- mis quelque facrilege, les empoifonneurs, les incen- diaires, Gc. Voyez PEINES. (4) Feu ou défunt, faro fun&us. Feu fignifie auffi quelquefois les chandelles ou bou- gies dont on fe fert pour certaines adjudications. On compte le premier Au » le fécond feu, le croifieme feu, c’eft-à-dire [a premiere, feconde, troifieme bougie, &c. On adjuge à l’extinétion des feux. Voyez CHAN- DELLE ÉTEINTE. (4) Feu , (Couvre-) voyez COUVRE-FEU. Feu croifflant & vacant, en Brefle, figniñie 4 vie d’un homme. Il eft dû chaque année au feigneur d’At- temare par fes hommes de main-morte ou affranchis, une gerbe de froment pour le fez croiffant & vacant, ou une bicherée dé froment mefure de Châteauneuf. Collet , fur les flatuts de Savoie, livre III, vitre 7. des droits fecgneuriaux , p. 37. eft d'avis que ces termes, feu croiffant & vacant , fignifient la vie d'un homme, parce qu'il eft fujet à ce devoir dès fa naïflance juf- qu'à fa mort ; ou dès qu'il fait fon habitation à part, & qu’il devient chef de famille, jufqu'à ce qu'il cefle de demeurer dans cet état. Collet penfe aufli que ces termes, feu croiffant 6 vacant, veulent dire que ceux qui vont s'établir dans cette terre d’Artemare, 6c font feu croiflant & augmentant le nombre des feux du lieu , deviennent fujets à la redevance dont on a parlé ; & que ceux qui quittent ce lieu pour aller de- meurer ailleurs, & par-là font feu vacans, n’en font . pour cela exempts. Voyez MAIN-MORTE 6 fuire. A) FEU, dans l'Art militaire, exprime les coups qu’- on tire avec les armes à fez, comme les canons, les mottiers, les fufils, les moufquetons, &c. Ainfi faire feu fur une troupe, c’eft tirer fur elle avec des armes à fex. Le terme de fez s’'employe plus ordinairement pour exprimer les coups qu'on tire avec le fufl, qu'avec les autres armes à fex. | Le feu de l'infanterie ne confifte que dans les dé- charges fucceflives du fufil ; & celui de la cavalerie, dans celles du moufqueton & du piftolet , dont les cavaliers font armés. Le fe d’une place eft formé des décharges que lon fait de la place, avec leslärmes à /éz dont on la défend ; mais on entend néanmoins ordinairement par ce feu, celui du canon de la place : c’eit pour- quoi on dit qu’oz a fair taire le feu d’une place, lorf. qu’on en a démonté les batteries. On diftingue plufieurs fortes de feux dans l’infan- terie , fuivant l’ordre dans lequel on fait tirer les foldats. “E | L’ordonnance du 6 Mai 175$, fur l’exercice de l'infanterie , en établit cinq; favoir le ex par fétfion, par peloton, par deux pelotons , par demi-rang & par bataillorz. | I{ faut obferver que , fuivant cetté ordonnance, la fe@ion eff formée d’une compagnie, & le peloton de deux ; ainf les deux pelotons font quatre com- pagnies, c’eft-à-dire le tiers du bataillon, lorfqu'il eft de douze, non compris çelle des grenadiers, FEU On voit par-là que le fz de feétion confie À tirer par compagnie ; celui de peloton, par deux; celui de deux pelotons, par quatre ; & celui de trois pélo- tons, par fix compagnies. À l'égard du fe par ba- tallon, c'eft celui qui eft exécuté par toutes les compagnies du bataillon qui tirent enfemble dans le même tems. | À ces différens feux 1l faut encore ajoûter le fx par rangs, qui s'exécute fuccefivement par chacun des rangs du bataillon ; & le féx roulant ou de rem- part, qui fe fait ordinairement dans les falves & les réjouiflances, Pour exécuter ce dernier fx, fi les troupes font fur plufeurs rangs , l'aile droite du premier com- mence à tirer au fignal qui lui en eft donné ; le fez va jufqu’à l’autre aile, enfuite il commence par la gauche du fecond rang, & il vient à la droite ; puis de la droite du troifieme il va à la gauche de ce mé- me rang, & ainfi de fuite des autres rangs fans in- ferruption. Ces différens feux peuvent être appellés réguliers, parce qu'ils s’exécutent avec reple. Îl y en a un au- tre qu'on nomme feu de billebaude ou fans ordre, que les foldats exécutent en tirant enfemble ou féparé- ment , à leur volonté. Le feu de peloton, que l’ordonnance du 6 Mai 1755 Établit en France, eft en ufage depuis long- tems parmi les Hollandois : il y a quelqu’apparence que l'invention leur en eft dûe, & que ce font eux qui en ont fourni le modele aux autres nations de l’Europe qui l’ont adoptée. Quoi qu'il en foit, ob- fervons qu'on a cependant tiré autrefois en France par différentes divifions ou différentes petites parties du bataillon, qu'on appelloit pelotons ; mais {eule- ment dans des cas particuliers de retraite, d'attaques . de poñtes, de chauflées, &c. R L'ancien fez le plus ordinaire & le plus commun , Étoit le fes par rangs ; c’eft en effet celui qui paroît le plus fimple & d’une exécution plus aifée : il a lin- convénient que lestirs n’en peuvent être que perpen- diculaires au front du bataillon. On prétend encore qu'ils'exécute rarement avec ordre, quelques précau- 21075 qu'on puiffe prendre; mais c’eft querienne fe fait avec ordre à la guerre, qu’autant que les troupes y ont été long-tems exercées : car il eft évident qu’on peut parvenir aflez promptement à faire tirer fans confufion Les troupes par rangs, fur-tout à trois on quatre de hauteur, puifqu’on l’a fait autrefois fans inconvénient fur un plus grand nombre de rangs. FEU 625 Le bataillon étant rangé fur cinq ou fur fix rangs Chacun tiroit fucceffivement ; où bien on en faifoit tirér deux ou trois à-la-fois, on cinq en même terms. Voyez EMBOÎTEMENT. , Mais on à remarqué depuis, que lorfqu'il y a feu- lement quatre rangs, le feu du dernier devient très- dangereux pour le premier; c’eft par cette raifon que l'ordre fur trois rangs a été propofé, comme le plus convenable pour le fz. Foyez ÉvorLurrons. Un autre inconvénient du fx par rangs, c’eft qu'on ne peut que très-difficilement le rendre con= tinuel. En effet, fi l’on fuppofe une troupe rangée {ur quatre rangs, & que le dernier rang tire le premier, les autres étant genou en terre, le troifieme peut, enfe levant, tirer enfuite, puis le fecond, & le pre- mir qui, aufli-tôt après {a décharge, doit remettre genou à terre, ainfi que le fecond & le troifieme, pour laïffer tirer le detmier, qui a eu le tems de re- charger pendant la durée du fx des trois autres rangs. Mais ces derniers ne peuvent guere recharger leurs fufils le genou à terre ; parce que cette manœu- vre, à laquelle M. le maréchal de Puyfegur dit qu’on devroit exercer les troupes, ne leur eft pas enfei- gnée (4). Voyez EXERCICE. Il faut par conféquent, pour recharger, qu’ils fe tiennent debout , & qu’ils interrompent la continuité de l’aétion du fe. En tirant par feétion ou par peloton, on peut fe procurer des tirs perpendiculaires ou obliques, fui- vant le befoin : on a d’ailleurs un fé continuel, par- ce que le premier peut avoir rechargé lorfque le der- mer a tiré. D'ailleurs ce fez s’exécutant {ur un front beaucoup plus petit que celui du bataillon, paroît devoir être plus aifément réglé: ilen parcourt rapi- dement toutes les parties, comme le féz, par rangs ; mais chaque partie eft fucceflivement expofée au fèx de l’ennemi pendant le tems qu’elle recharge fes ar- mes. - Il eff vrai que le front du bataillon n’y eft jamais expofé tout entier, comme en tirant par rangs ; mais il faut convenir qu'en revanche le 4 par peloton peut être fujet, à moins qu'on n’y foit extrèmement exercé , à plus de confufion que celui des rangs. Pour donner une idée plus parfaite du fx par pe- loton, nous mettrons fous les yeux un bataillon di- vifé dans fes fix pelotons , rangé fuivant l’ordonnan- ce du 6 Mai 1755. (d) Il feroit fort difficile de le faire, à caufe de la lon. gueur du fufil , & de la preffion des files. GAUCHE. TÊTE DU BATAILLON. DRoïTE, ——— — mmpicrg D'or mn cou NN | 8° feu. 4° feu. 6° feu. 24 feu. | 1 feu. | s° feu. 3° feu. A | Piquer, | ze C. | 8 C. | 4e C. |roe C. | 6° C. |r2e C. se C, | seC. | gc C. rere C. | Grenad, B 2° pelor. | A$ pelor. | | G° pelor, | A 5° pelor, | 3° pelor. | 1° pelor. | Sr ie mme mec Soit 4 B le bataillon ainfi divifé : chaque peloton eft défigné par un chiffre qui en indique le rang , & par la lettre P, renfermés l’un & l’autre dans des ac- colades qui joignent les extrémités des deux com- pagnies dont ils font formés. Ces pelotons font divifés dans les deux compa- gries qui les compofent, & qui les partagent en deux {e&tions.. : . Les chiffres renfermés dans chaque peloton, ex: priment les différentes compagnies du bataillon qu'il contient, On fuppofe que le bataïllon eff à trois de hauteur, 6 que les rangs font ferrés à la pointe de l'épée. Cela pofé , obfervons d’abord que le féx de fec- tion & celui de peloton. doivent commencer par le centre, Pour exécuter ce dernier fes, le commandant du bataillon ordonne d’abord au cinquieme peloton de faire feu : alors les foldats du premier rang mettent genou.en têtre, ceux des deux derniers s’arrangent pour pouvoir tirer en même tems que le premier ; 626 FEU “8T au commandement fé, is tirenttous enfemble (a). Lorfque-ce peloton a fait 2x, le fxieme s'arrange pour en faire de même immédiatement après ; pus le troifieme & le quatrième, deux cems (b}aprèsque le cinquieme & le fixiemeont fait fez, Le premier & le deuxieme-font également /èz deux tems après que de troifieme & le quatrieme ont tiré. À l’ésard des grenadiers & du piquet, ils exécutent leur fx deux tems après celui du premier & du fecond peloton. On voit par-là que le x par peloton ayant com- mencé par le centre, fe porte enfuite fucceflivement du centre aux ailes ; mais de maniere que les pelo- tons à côté les uns des autres, excepté les deux du centre, ne tirent pas de fuite, mais fucceflivement un peloton dela droite 87 un de la gauche. | [Left bien difficile qu’une manœuvre aufli compo- fée & aufi variée, & qui demande autant d’atten- tion, puifle s’exécuter fans defordre ou confufon un jour d’aétion : aufhi prétend-on avoir remarqué, ‘comme on le verra bientôt, que ce fu, dont l’exé- cution eff fi brillante dans les exercices, eft peu dan- gereux un jour de combat (c) Le feu par feétion s'exécute de la même maniere que celui par peloton, ilcommence également par le Qui ne voudroit que combattre de loin n'en eft jamais le ,. maître : fon ennemi lui donne l’ordre ; s’il refufe d'y obéir il ut céder. S'il obéit fans étre préparé il efl maltraité: » enun mot, d'une maniere ou d'autre il eft puni, foit pour 5 Caufe de defobéiffance > foït pour caufe d'imprudence : & 5 ille mérite ». 628 FEU confidération elles en feront moins 'effrayées ; & moins difpoiées à fuir. D'ailleurs il eft alors plus aifé de les contenir , que fil’ennemi paroifloit prêt à tomberfurelles. De cette maniere en général, pour accoûtumer _infenfiblement de nouvelles troupes à envifager l'ennemi avec moins de crainte lorfqu’elles y fe- ront une fois parvenues, 1l fera fort aifé de leur faire comprendre qu’en marchant réfolument à l'ennemi pour le charger la bayonnette au bout du fufil, le danger durera bien moins de tems qu’en reftant ex- poié à fon ex , & en tiraillant les uns contre les au- tres. Car lorfqu’on marche avec fermeté pour tom- ber fur une troupe, il arrive rarement qu’elle at- tende pour fe retirer , qu’elle foit chargée la bayon- nette au bout du fufil. On prétend au moins qu'il y a peu d'exemple du contraire. Il y a même des off. ciers qui ont beaucoup de pratique de la guerre, & qui doutent qu'il y en ait aucun; M. le maréchal de Puyféguraffäroit cependant l'avoir vü une fois. On peut conclure de-là que le choc de. pié ferme de deux troupes d'infanterie dans. un combat eft un évenement fi peu commun à la guerre, qu'on peut prefque affürer qu'il n'arrive jamais. C’eft aufh ce ue dit fur ce fujet l’auteur des Sentimens d’un hom- re de guerre fur la colonne de M. de Folard: « lotfqu’un » bataillon voit qu'un autre s’avance pour l’atta- # quer, le foldat étonné de l’intrépidité avec laquelle » {on ennemi lui vient au-devant, le tiraille , ajufte >» mal fon coup, & tire, pour la plüpart, en l'air. » Le feu auquel il avoit mis fa principale confiance » n'arrête pas fon ennemi, & qui pis eft , il n’eft » plus tems de recharger. Labayonnette qui luirefte » ne fauroit le raflürer ; le trouble augmente , il » fait volte-face , & quitte ainf la partie. S’i/ er ar- » rive autrement , C'eff chofé rare , Ë peut-être méme » hors d'exemple. Lorfqu’un bataillon marche pour en attaquer un autre, doit-il eAuyer le. /ez du bataillon ennemi, & le joindre, où, pour mieux dire, chercher à le join- dre fans tirer ? Cette queftion n’eft pas un problème à refoudre dans la milice françoile. L’ufage conftant des troupes de France eft def fuyer le feu de l’ennemi, & de tomber enfuite deflus fans tirer. Les évenemens heureux qui fuivent pref- que tobjours cette pratique, comme on vient de le voir précédemment, femblent en démontrer la bon- té, Cependant les autres peuples de l'Europe ne l'ont point encore adoptée 1 c’eft apparemment que leurs tfoupes ne vont point à l’abordage avec la même impétuofité & la même ardeur que le François ; car fitout étoit égal de part & d'autre, il eft certain qu’il y auroit un defavantage confidérable à efluyer les décharges de l’ennemi en s’approchant pour le combattre, fans faire ufage de fon fez. En effet, fuppofons deux troupes d'infanterie, on. deux bataillons, compofés chacun de foldats égale- ment braves & difciplinés, & que l’un arrive fiere- ment fur l’autre fans tirer, tandis que celui-ci lui fait fucceffivement efluyer:,.dès qu'il eft à portée, Le {ex de fes differens rangs, & cela avec fermeté, fans fe troubler & en ajuftant bien; peut-on douter que le bataillon affaillant qui a fouffert plufieuts déchar- ges, ne foit dans un plus grand defordre, & un plus rand état de foiblefle que l’autre? Comme on fup- pofe queles foldats de ce dernier bataillon ne s’éton- nent point, qu'ils favent les pertes que leur /ez a dû faire {ouffrir à l'ennemi, & la fupériorité qu'il a dû pat conféquent leur donner; 1l paroït évident que dans ces circonftances le bataillon qui a tité, doit l'emporter fur celui qui a été plus ménagé de fon feu: s'il en arrive autrement , c’eft que les foldats ne font point aflez exercées, qu'on ne leur fait pas fentir, comme on le devroit, le dommage que des FEU décharges faites avec attention & jufteffe doivent caufer à l’ennemi. Dans cet état 1l n’eft pas éton- nant que la frayeur s'empare de leur efprit, & qu'- elle les porte à faire volte- face, comme on vient de le dire ci-devant. C’eft pourquoi les fuccès de la méthode d’aborderl’ennemifanstirer,ne prouvent point que cette méthode foit la meilleure; mais feu- lement que les troupes contre lefquelles elle a réuf- f. avoient peu de fermeté, qu’elles mettoient uni- quement leur confiance dans leur fx , & qu’elles n’étoient point fufifamment exercées. Il fuit de-là que fi lon attaquoit des troupes éga- lement fermes & aguerries, il feroit très-important de fe fervir de fon féz en allant à l’abordage. C’eft le fentiment de M. le marquis de Santa-Crux. Si dès que vous êtes à portée de tirer fur Les en= nemis, vous ne le faites pas, dit ce favant auteur, “ vous vous privez de l’avantage d’en tuer plufieurs » &t d’en intimider plufeurs autres par le ffflement » des balles & par le fpetacle de leurs camarades » morts ou bleflés: vous ne profitez pas de l'effet, » continue-t-1l, que cette frayeur &c ce fpe@acle au- » roient fait fur les ennemis, & principalement {ur » leurs hommes de recrue &c leurs nouveaux foldats » qui font plus troublés par le danger , & ayant leurs » mains & leurs armes aufi tremblantes que leur » pouls eft agité, tireront aufli-tôt vers le ciel que » vers la terre ; au lieu que n'étant point encore ef- » frayés par aucune perte, ils coucheront en joue » avec moins de trouble, & vous aborderont enfuite » avec l'arme blanche, lorfque par leur fez votre ar- » mée fera déjà beaucoup diminuée & intimidée ». M. de Santa-Crux confirme ce raïfonnement par un exemple qu'il rapporte de l’attaque des lignes de Turin, au dernier fige de cette ville en 1706. Lorfque les Impériauxvoulurent forcer ces lignes, ils furent d’abord repouftés par les décharges qu’on leur fit efluyer : « mais lorfque peu après Viétor Âme- » dée roi de Sardaigne, le prince Eugene de Savoie, » &c le prince d'Anhalt, eurent par leurs paroles & # par leurs exemples rallié cès mêmes troupes , on » donna ordre aux troupes françoifes (qui défen- » doient les lignes) de referver leur feu, & de ne ti- » rer qu'à brüle-pourpoint. Dans cette feconde atta- » que , les Allemands n'ayant eu que ce feul feu à.ef- » fuyer, aborderent avec toutes leurs forces, & fans » avoir le tems de refléchir fur le danger, ils fran- » chirent en un inftant le retranchement ». Cet exemple, quoique d’une efpece un.peu diffé- rente de celle de deux troupes d'infanterie qui fe chargent en plaine ou en terrein uni, prouve au moins l'impreflion que fait fur les troupes le 24 qui précede le moment où elles peuvent fe joindre ou s’aborder ; car à l’égard de celles qui font derriere des lignes ou des retranchemens, perfonne n’ignore qu'elles doivent faire le plus grand ex qu’il eft poñfi- ble , lorfque l’ennemi eft une fois parvenu à la por- tée du fufil; c’eft même pour l’y expofer plus long- tems qu’on fait des avant-foflés, des puits, &c, Poy. LIGNES. ï En fuppofant les troupes d'infanterie à quatre de hauteur , comme elles l’étoient dans la guerre de 1701, & dans les deux dernieres guerres, M. de Santa-Crux propofe de les faire tirer par rang , mais en faifant une efpece de fez roulant par demi-rang de compagnie. Le premier demi-rang de la premiere compagnie à droite ou à gauche, doit d’abord com- mencer à faire fez ; les premiers demi-rangs de cha- que compagnie en font fucceflivement de même, en fuivant tout le front de la ligne ; le fecond rang fait enfuite la même manœuvre, puis le troifieme & le quatrieme. Cet auteur penfe aufli, comme beaucoup d’au- tres habiles militaires, qu’il faut dans un combat | placer placer les meilleurs tireurs au premier rang, & [eur ordonner de tirer fur les officiers ; parce que lor{qu’- une troupe eft une fois privée de {es commandans, il eff ordinairement fort aifé de la rompre. Lorfqu’il s’agit de faire fx , les officiers doivént » S'incorporer dans le premier rang, & mettre un # genou à terre lorfque ce rang le met; autrement » dans peu de minutes, il n’y aura plus d’officiers, » 1oit par leurs propres foldats qui involontairement » tireront fur eux, {oit par les ennemis qui ajufteront * leurs coups contre ceux qu'ils diftingueroient ainfi » pour officiers ». Réflex, miliraires de M, de Santa- Crux. | C’eft pour éviter cet inconvénient , que les rangs pour tirer doivent s’emboîter, pour ainfi dire, les uns dans les autres. Poyez EMBOÎTEMENT. Le favant militaire que nous venons de citer, pro- pofe pour rendre le féx des ennemis moins dange- reux, de faire mettre genou à terre À toute la troupe qui eft à portée de l’efluyer, & cela lorfqu'on voit qu'ils mettent en joue. Cet expédient peut rendre inutile un grand nombre de leurs coups, parcé qu'il n'y a plus guere que la moitié du corps qui y foit ex- pofée, & que d’ailleurs le défaut des foldats eft de tirer prefque tojours trop haut. Il eft clair que pour 1e placer ainfi, 1l faut que les ennemis foient aflez éloïgnés , pour qu’on ait le tems de fe relever avant de pouvoir en être joint. Cet auteur rapporte à ce fujét , que le chevalier d’Alsfeld ayant attaqué au- près de Saint-Etienne de Liter « un détachement » d'infanterie angloife, qui mit genou à terre at mo- # ment qu'elle vit les Ffançois en pofture de faire » leur décharge,elle fe releva auffi-tôt fans en avoir » reçu aucun mal ». Ce même expédient a été pratiqué dans plufeurs autres occafons, ayec le même fuccès, | Au lieu de faite mettre genou en terre aux trou- pes, on pourroit les garantir encore davantage du feu de l'ennemi, en leur faifant mettre ventre À ter: re : mais il ne feroit pas sûr de l’ordonner à celles dont la bravoure ne feroit pas parfaitement recon- nue; parce qu'il pourroit arriver qu’on eût enfuite quelque difficulté à les faire relever. Lorfqu'un bataillon fait ufage de fon feu fur un bataïllon ennemi, & que les deux troupes ne font au plus qu’à la demi-portée du fufl, les foldats doivent s'appliquer à tirer au ventre de ceux qui leur font oppoiés ; & fi on les fait tirer fur une troupe de ca- valerie, au poitral des chevaux. | M. de Santa-Crux prétend que les Hollandois , pour tirer, appuient la croffe du fufl au milieu de l'eftomac , afin d’être forcés par cette pofture à tirer bas; & il obferve que cette maniere de tirer, quine doïtpoint être imitée parce qu’elle eft très-incommo. de, & qu'elle ne permet guere d’ajufter le coup, fait Voir au MOINS que cesré nation a parfaitement compris que le défaut ordinaire des foldats eff de tirer trop haut , & qu'elle a cherché le moyen d'y remédier, Si elle ne l’a point fait avec fuccès, les autres nations peu- vent le faire plus heureufement. Cette découverte paroît mériter l'attention des militaires les plus ap- pliqués à leur métier. Jufqu’ici nous n’avons parlé que du /ez de l'infan- tefie : 1l s’agit de dire à-préfent un mot de celui de la cavalerie. Suivant M. de Folard, le fèx de Ja cavalerie efmoins que rien, l'avantage du cavalier ne corfifiant que dans Jon épée de bonne longueur. _ Cette décifion de habile commentateur de Poly- be eft fans doute trop rigoureule: car il y a beau- coup d'occafons où le 2 de la cavalerie eft très- utile. Ieft vraique les coups tirés à cheval ne s’ajuf tent pas avec la même facilité que ceux que l’ontire à pié ; mais dans des marches où la çavalerie fe trou- Tome VI, ; FEU 629 VE quelquefois fans infanterie.elle peut fe fervir très- avantageulement de fon feu, foit pour franchir un paflage défendu par des payfans, ou pour éloigner des troupes legeres qui veulent l’harceler dans fa : marche, Elle peut encore fe fervir de fon feu très- avantageufement dans les fourrages & dans beau- coup d’autres occafons. Mais la cavalerie doit-elle fe fervir de fon /ez dans une bataille rangée? M. de Santa-Crux prétend que non, fur-tout fi » Comme la cavalerie efpagnole, elle eft montée fur des chevaux d’'Efpagne , qui par leur vivacité & leur ardeur > Met= tent le defordre dans les eféadrons au bruir des coups de fufels de ceux qui les montent. M: le maréchal de Puyfégur penfe fur ce fujet au trement que le favant auteur efpagnol : «Mon Opi= # non, dit-il (dans for livre de l’art de La guerre) , eft » que les efcadrons qui marchent l’un à l’autre pour » charger l'épée à la main, peuvent avant de fe {er » vir de l'épée, tirer de fort près, & ce an moindre fi » gnal ou parole du commandant de l’efcadron , » charger aufi-tôt l'épée à la main». À l'égard de la maniere de charger, voici, dit cet illufire auteur, ce que j'ai vû & ce que j’ai reconnz être très-facile À pratiquer. « La ligne des efcadrons de l’ennemi voyoit no= “tre ligne de cavalerie marcher au pas, pour la » charger l'épée à la main, fans fe fervir d'aucune # arme à feu, foit officiers ou cavaliers, Quand no- » tre ligne fut environ à huit toifes de diflance (cet- » te cavalerie avoit fon épée pendue au poignet ; » officiers & cavaliers avoient leurs moufquetons » pendans à la bandouliere), les officiers & cava- » liers prirent le moufqueton de la main droite , & » de cette féule main coucherent en joue, chacun » Choïfiffant celui qu'il vouloit tirer : dès que lé coup » fut parti, ils laiflerent romber le moufqueton qui » étoit attaché à la bandouliere ; & empoignant leur » épée, ils reçurent notre cavalerie l’épée À la main : » & combattirent très-bien. Par ce fé tiré de près, » il tomba bien de nos gens ; néanmoins malpré ce- » la, comme notre corps de cavalerie étoit tout ce » que nous avions de meilleur, celle de l’ennemi, » quoiqu'elle fût encore plus nombreufe que la nô- »tre, fut battue. Mais ce ne fur pas Les armes à fer » dont Us fe férvirent , qui en furent caufe ; car s'ils » n'avoienf pas tiré & tué des hommes de notre pre- » ter rang, ils en auroïent été plütôtrenverfés. J’ai # reconnu même, continue M. de Puyfégur, que f » notre cavalerie qui renverfa cette ligne des enne » mis, avoit tiré, celle -ci n’auroit pas tiré avec la » même aflürance qu’elle a pû faire ; 8 comme nos » troupes étoient un corps diftingué, il auroit com- » mencé par mettre bien des hommes hots de com- » bat. Ainfi quand on dit que des efcadrons pour » avoir tiré ont été battus, je répons que quand ils » n’auroient pas tiré , ils ne l’euffent pas été moins. » De pareilles raifons font Jouvent un prétexte pour ne » pas avoñer qu'on a mal combattu. Cela peut encore » venir de ce que les officiers & les cavaliers ne font » n1 infttuits ni exercés. Or l'o7 doit avoir pour priri= » cpe de ne jamais rien demander à des {TOUpes dans » lation , à quoi elles n'auront pas été exercées d’a- » vance ». C’eft pourquoi lorfqu’on eft sûr des trou- pes de cavalerie qu’on fait combattre, Z #°y à pas à balancer de Les faire tirer | & même les autres , dit- il, quand on les aura inffruirs. Art de la guerre de M, le maréchal de Puyfégur, som. I. pag. 253. Quant à l'inconvénient qu’on prétend qui réfulte du bruit des armes à féz , par rapport au mouvement qu'il caufe parmi les chevaux de l’efcadron, M. de Puyfégur y répond, en faifant obferver « qu'il n’eft »# point prouvé que fi votre ennemi tire {ur vous , » Êt que vous ne tiriez pas, vos chevaux ayent » moins de peur que les fiens, puifque le fx va LLIi 630 FEU » droit aux yeux des vôtres , & qu'ils entendent » auf le fiflement de la balle qui leur fait peur ». De toutes ces raifons, 1l s'enfuit que conformé- ment à ce qui a déjà té remarqué fur Le fe de l’in- fanterie, toutes les fois qu'on approche de l’enne- mi pour le combattre, 1l faut toûjours lui faire tout le mal poffible avant de le joindre ; comme lorfque la cavalerie s’avance pour charger , il n’y a que le premier rang qui puifle tirer ; il ne doit faire fa dé- charge, comme M. de Puyfégur l’a vûù pratiquer, que lorfqu'il eft au moment de tomber fur l’enne- mi : mais fi les troupes de cavalerie ne peuvent fe joindre , chaque rang peut alors tirer fucceflivement en défilant à droite & à gauche de l’efcadron , après avoir tiré, pour aller fe reformer derriere les autres rangs. Les cavaliers & les dragons armés de carabines , &t que pour cet effet on appelle carabiniers , ayant des armes dont la portée di plus grande que celle du fufil & du moufqueton, doivent en faire ufage fur l'ennemi dès qu’il pent être atteint: c’eft-à-dire , fuivant M. de Santa-Crux , depuis que les ennemis font à la diftance d'environ douze cents piés ou deux cents toifes , jufqu'à ce qu'ils arrivent à la portée des fufils ordinaires qu’il évalue à huit cents piés : pendant que l’ennemi parcourt cet efpace, les ca- rabiniers de cavalerie & de dragons ont le tems, dit cet auteur, de pouvoir à l’aife affürer leurs ar- mes dans le porte-fufl ou porte-moufqueton. La diftance de huit cents piés où de cent trente toiles , que M. de Santa-Crux donne à la portée du fufil, paroît être tirée des auteurs qui ont écrit fur la fortification , lefquels prefque tous fixent leur l:- gne de défenfe de cette quantité, pour la rendre égale à la portée du fufil de but en blanc. Dans la guerre des fiéges on ne peut guere faire ufage que de cette portée , au moins dans le fez des flancs ; parce qu’autrement l'effet en feroit trop in- certain : mais feroit-ce la même chofe dans la guerre de campagne ? C’eft un point qui n’a pas encore été examiné, & qui femble néanmoins mériter de l’é- re, Il eft évident que fi le fufl porte cent vingt où cent trente toifes de but en blanc , tiré à-peu-près horifontalement, fa portée fera plus grande fous un angle d’élévation, comme de douze ou quinze de- grés , & qu’elle augmentera jufqu'à ce que cet angle foit de quarante-cinq degrés. Le canon dont la portée de but en blanc n’eft gue- re que de trois cents toifes , porte fon boulet, étant tiré à toute volée, depuis 1500 toifes jufqu’à deux mille & plus. On convient que l'effet du fufil tiré de cette maniere ne feroit nullement dangereux , par- ce que la balle, eu égard à fon peu de groffeur, perd plûtôt fon mouvement que le boulet de canon : mais on pourroit éprouver la force & la portée de Ia bal- le fous des angles au-deflous de quatante-cinq de- grés, comme de douze , quinze, ou vingt degrés; &z alors on verroit fi l’on peut faire ufage du fufil à une plus grande diftance que celle de cent vingt ou cent trente toiles. Comme toutes les chofes qui peuvent nous pro- curer des connoïffances fur les effets & les proprié- tés des armes dont nous nous fervons à la guerre, ne peuvent être regardées comme indifférentes ; on croit que les expériences qu’on vient de propofer, qui ne font ni difficiles ni difpendieufes , méritent d’être exécutées. En fuppofant qu’elles faffent voir , comme il y a beaucoup d’apparence , que le fufil tiré à-peu-près fous un angle de quinze desrés , peut endommager l'ennemi à la diftance de trois cents toifes, &t au-de- là , on pourra dire qu'il fera fort difficile de faire ti- rer Le foldat de cette maniere : d'autant plus qu’au- jourd’hui on a beaucoup de peine à le faire tirer horifontalement ; que d’ailleurs fi lon pouvoit y par- venir, il feroit à craindre qu'il ne contraétât l’habi- tude de tirer de même lorfque l’ennemi feroit plus près, ce qui feroit un très-prand'inconvénient. Mais on peut répondre à ces difficultés que dans le cas d’un éloignement , comme de trois cents toifes, le foldat feroit averti de tirer vers le fommet de laté- te de l’ennenu; & lorfqu’il en feroit plus prêt, de tirer au milieu du corps , comme on le fait ordinaï- rement. Mais quand il y auroit. des dificultés infurmonta- bles à faire tirer le foldat à la diftance de trois cents toifes, lorfqu'il s’avance vers l'ennemi pour le com- battre, ne {eroit-1l pas toüjours très-avantageux de pouvoir faire ufage de la moufqueterie à cette dif tance, lorfqw’on eft derriere des retranchemens dans un chemin-couvert? &c, C’eft aux maitres de l’art à le décider. Nous n'avons parlé jufque ici que du fe de la. moufqueterie ; il s’agiroit d'entrer dans quelques détails fur celui de l'artillerie, c’eft-à-dire fur celui du canon & des bombes : mais pour ne pas trop alonger cet article, nous obferverons feulement à cet égard que ce fex qui inquiete toùjours beaucoup le foldat ne doit point être négligé ; qu'une armée ou un détachement ne fauroit exécuter aucune opé- ration importante fans canon ; & qu'il feroit peut- être fort utile qu’à limitation de plufeurs nations de l'Europe , chaque bataillon eût toüjours avec lux quelques petites pieces d’artillerie dont 1l püût fe fer- vir dans toutes les occafons, Comme le féz du canon agit de très-loin, per- fonne n’a penfé qu'il fallût l’efluyer fans y répondre: le feul moyen d’en diminuer l’attivité eff d’en faire un plus grand, fi l’on peut. Les tirs dans une ba- taille doivent être toüjours obliques au front de l’armée ennemie, afin d’en parcourir une plus gran- de partie. Les plus avantageux font ceux qui font perpendiculaires aux ailes ou aux flancs de l’armée; mais un ennemi un peu intelligent a grand foin d’e- viter que fes flancs foient ainfi expolés au canon de fon adverfaire. La maniere la plus convenable de tirer le canon, lorfque l’on n’eft guere qu’à la diftance de cinq ou fix cents toifes de l’ennemi, eft à ricochet. Voyez Ri- COCHET, Le boulet fait alors beaucoup plus d’eñfet que lorfque le canon eft tiré avec plus de violence, ou avec de plus fortes charges que n’en exige le ri- cochet. M. de Folard prétend que le fx du canon n’eft re- doutable que contre les corps qui reftent fixes, fans mouvement & ation; ce qu'il dit avoir obfervé dans plufeurs affaires, « où les deux partis fe paf- » foient réciproquement par les armes , fans que » l’un ni l’autre penfât , ou pour mieux dire, ofât en » venir auxmains dans un terrein libre. Une canon- » nade réciproque , felon cet auteur, marque une » grande fermeté dans les troupes qui l’effuient » fans branler , mais trop de circonfpeétion ; d’incet- » titude, ou de timidité dans le général : car le fe- » cret de s’en délivrer n’eft pas, dit-il, la magie noi- » re. Il n’y a qu’à joindre l'ennemi ; on évite par ce » moyen la perte d’une infinité de braves gens; & » le général fe garantit du blâme qui fuit ordinai- » rement ces fortes de manœuvres ». Traité dela co- lonne , p. 48. (Q) FEU eft auffi un serme de guerre quu fignifie les fèux qu'on allume dans un camp pendant la nuit. Cha: bers. FEU DE COURTINE , voyez SECOND FLANG. FEU FICHANT , voyez FICHANT. FEU RASANT, C’eft dans la Fortificaiion celui qui eft fait par des armes à /ex dont les coups {ont tirés — FE Ü parallelement à l’horifon, &c un peu au-deffus ; on bien c’eft celui qui eft tiré parallelement aux par- ties de la fortification que l’on défend. Ainfi lorfque les lignes de défenfes font rafantes ; le feu du flanc eft rafant ; celui du chemin-couvert & des autres dehors dont le terre-plein eft au ni- veau de la campagne, eft aufft un fes rafant, (Q) Feu, (Marine.) Donner Le feu aux bâtimens ,c eft- à-dire mettre le vaiffeau en état d’être braié: cela fe fait par les calfateurs, qui après avoir rempli d'é- toupes les jointures du bordage, allument de petits fagots faits de branches de fapin , &c emmanchés au bout d’un bâton ; ils Les portent tous flambans fur la partie du bordage qui a befoin d’être carénée 5 ÊC quand elle eft bien chaude par le fez qu'on y a mis, ils appliquent le brai deflus. Voyez CHAUFFER UN VAISSEAU. Donner le feu à une planche, c’eft la mettre fur Le feu & la chauffer pour la courber. Voyez CHAUFFER UN BORDAGE. (Z) FEU, ( Marine. ) On donne ce nom au fanal ou lanterne que l’on allume de nuit fur la poupe des vaïfleaux , lorfque l’on marche en flotte. Quand 1l fait un gros tems & nuit obfcure, & que l’on craint _ que les vaiffeaux ne s’abordent les uns les autres, ils mettent tous des féux à l'arriere, on fe fert des feux ou fanaux pour fignaux des différentes manœu- vtes dont on veut avertir l’efcadre, ou pour indi- quer les befoins qu’on peut avoir. La fituation & le nombre des féux de chaque vaifleau de guerre fe regle fur le rang des comman- dans : le roi de France, par fon ordonnance de 1670 , veut que l’amiral porte quatre fanaux ; que le vice-amiral, le contre-amiral, & le chef d’efca- dre, en portent chacun trois en poupe ; les autres vaifleaux n’en doivent porter qu'un. | On porte des feux de diverfes manieres , foit à la grande hune, foit à celle d’artimon , foit aux hau- bans, felon que le commandant l’a reglé pour mdi- quer certains fignaux dont on eft convenu. (Z) FEU, (Marine.) terme de commandement fur un vaïffeau pour dire aux canonniers de tirer. Faire feu des deux bords , c’eft tirer le canon des deux côtés du vaifleau en même tems. (Z) Feu, CAUTERE, (Manège & Maréchal.) termes fynonymes. Le premier eft particulierement ufité parmi les Maréchaux dans le fens des cauteres attuels: quelques-uns de nos auteurs l'ont auffi employé dans le fens des caureres potentiels qu’ils ont-appellés feux morts, & quelquefois rétoires , du mot italien rerorio, cautere. Voyez CAUTERE. Le feu aêtuel ou le cautere aëtuel n’eft à propre- ment parler que le fez même uni & communiqué à tels corps ou à telles matieres folides capables de le retenir en plus ou moins grande quantité, & pen- dant unefpace de tems plus où moins long. _ Ses effets fur le corps de l’animal varient felon Ja différence de fes degrés. | 1°, L'irritation des folides, la raréfaétion des hu- meurs, font le réfultat d’une legere brûlure. 2°. Cette brûlure eft-elle moins foible ? La féro- fité s’extravafe ; les liens qui unifloient l’épiderme à la peau font détruits ; & cette cuticule foülevée, nous appercevons des phlitenes. 3°. Üne impreffion plus violente altere & confu- me le tiflu des folides : par elle les fludes font ab- forbés ; leurs particules les plus fubtiles s’exaltent &c s'évaporent ; de maniere que dans le lieu qui a fubi le contatt du fx , on n’entrevoit qu’une mafle noirâtre qué nous nommons e/carre , & qui n’eft au- tre chofe qu’un débris informe des folides brûlés & des liquides deflechés ou concrets. C’eft cette efcarre que nous nous propofons toù- jours de folliciter dans l’ufage & dans l’emploi que Tome VI, \ FEU 631 nous faifons du caurere, On doit l’envifager comme une portion qui privée de la vie eft devenue totale ment étrangere : elle eft de plus nuifible en. ce qu’- elle s’oppofe à la circulation ; mais bientôt la natu- re elle-même fait fes efforts pour s’en délivrer. Les liqueurs contenues dans les tuyaux dont les extré- mutés ont cédé à l’aétion du fer brûlant , arrivent jufqu’à l’obflacle que leur préfente ce corps dur & pour ainfi dire folé ; elles le heurtent conféquem- ment a chaque pulfation , foit du cœur, foit des ar= teres ; elles s’y accumulent, elles produifent dans les canaux voifins un engorgement tel que leurs f+ bres diftendues & irritées donnent lieu à un gon- flement , à une douleur pulfative ; & les ofcillations redoublées des vaifleaux operent enfin un déchire ment. Un fuintement des fucs que renfermoient ces mêmes vaifleaux oblitérés annonce cette rupture 3 & ce fuintement eft infenfblement fuivi d’une dif- {olution véritable des liqueurs mêlées avec une por- tion dés canaux qui ont fouflert; diflolution qui anéantiflant toute communication , & détruifant ab- folument tous points d’union entre Le vif & le mort, provoque la chûte entiere du fequeftre , & ne nous montre dans la partie cautérifée qu'un ulcere dans lequel la fuppuration eft plus ou moins abondante, felon le nombre des canaux ouverts, De la nature des fucs qui s’écoulent 8 qui for« ment la matiere fuppurée, dépendent une heureufe réunion & une prompte cicatrice : des liqueurs qui font le fruit d’une fermentation tumultueufe, & dont l’acreté, ainfi que l’exaltation de leurs princi- pes , démontrent plütôt en elles une faculté deftruc- tive qu'une faculté régénérante , ne nous prouvent que le retardement de l’accroiflement que nous de- firons ; elles le favorifent , il eft vrai, mais indirec- tement, c’eft-à-dire en difipant les engorgemens qui s’oppofent à l’épanchement de cette lymphe douce & balfamique , qui, parfaitement analogue à toutes les parties du corps de l’animal , & répandue fur les chairs, en hâte la reproduéion par une affi- milation inévitable. Tant que ces matieres qui ont leur fource dans les humeurs qui gorgent les cavi- tés & les interflices des vaifleaux , fubfiftent &c fluent : toute régénération eft donc impoffibie. Dès qu'elles font place à ce fuc, dont toutes les qualités extérieures nous atteftent l’étroite affinité qui re- gne entre fes molécules & les parties qui confti- tuent le fond même fur lequel 1l doit.être verfé , & que ce même fuc peut fuinter des tuyaux lymphati- ques dans la plaie , fans aucune contrainte & fans aucun mélange d’un fluide étranger capable de le vicier & de combattre fes effets , la réunion que nous attendons eft prochaine. Elle fera dûe non-feulement à la juxta-pofition & à l’exfication de la feve nourriciere charriée vers les extrémités des capillaires dégagés , conféquem- ment aux mêmes mouvemens des folides & des flui- des, qui dans la fubftance engorgée formoient le pus, mais encore à un leger prolongement des canaux. Pobferve d’une part que le jour que les liquides fe font frayés n’eft pas tel que le diametre des vaif- feaux dilacérés foit dans un état naturel : l’iflue des li- queurs n’eft donc pas abfolument libre, Or la réfftan- ce qu’elles eprouvent, quelque foible qu’elle puifle être, les oblige de heurter contre les parois de ces mê- mes vaifleaux, qui, và la déperdition de fubftance ; ont ceflé d’être gènés, comprimés , & foûtenus par les parties qui les avoifinoient : ainfi leurs fibres cé- dant aux chocs & aux coups multipliés & réitérés qu'elles efluient, fe trouvent néceflairement & fa. cilement diftendues dans le vuide : cette augmenta- tion de longueur ne peut être telle néanmoins qu’ elle procure l’entiere réunion ; aufhi je remarque d’un autre côté que les liquides confomment l’ouvra- LLITHg 632 FEU ge. La plus grande partie de ceux qui s’évacuent par les orifices des vaifleaux legerement ouverts , fournit la matiere fuppurée : mais là portion la plus onftueufe de la Iymphe pouflée vers l’extrémité des canaux des bords de l’ulcere , en fuinte goutte- à-coutte. Chaque molécule qui excede l’aire du ca- libre tronqué , s'arrête à l'embouchure, s’y conge- le, s’y épaiflit, & s’y range circulairement, de ma- niere qu'elle offre un paflage à celles qui la fuivent, &t qui fe figent & fe placent de même, jufqu'à ce que le progrès des couches foit à un tel degré que les capillaires n’admettant que les parties vaporeu- fes, & contraignant les liqueurs qui fe préfentent & qu'ils rejettent , d’enfler les veines qui les rappor- tent à la maïle, la cavité de l’ulcere foit remplie & la cicatrice parfaite. : Les moyens de cette reproduétion nous indiquent 1°. comment les cicatrices, fur-tout celles qui font confidérables, forment toùjours des brides; 1ls nous apprennent 2°, pourquoi elles font plus bafles que le niveau de la peau ; 3°. par eux nous pouvons ex- pliquer comment, dans cette fubftance régénérée , onne voit au lieu d’un enfemble de tuyaux exaéte- ment cylindriques & parfaitement difinéts , qu'un amas de petites cavités dont les parois, irréguliere- ment adhérentes les unes aux autres, ne préfentent, pour ainfi dire, qu’un corps fpongieux, mais aflez denfe, dont la folidité accroït à mefure qu'il s’éloi- gne du fond, & que les fluides y font plus rares, ce qui rend la cicatrice extérieurement plus dure & plus compacte ; 4°. enfin ils nous dévoilent fenfiblement les effets des cicatrices multipliées. Les fuites de la cautérifation des parties dutes font à-peu-près les mêmes que celles qui ont fixé no- tre attention relativement aux parties molles. Le fe appliqué fur les os , deffeche en un inftant les fibres offeules, il crifpe, il oblitere les vaifleaux qui rampent entr’elles ; les fucs néceffaires que ces vaifleaux charrient, font auffñ-tôt exaités & difipés, &c toute la portion foûmife à linffrument brûlant, jaunit, noircit; elle cefle d’être vivante, & répond precifément à ce que nous venons de nommer e/- carre. Ici elle n’eft jamais aufi profonde. La chüte en-eft plus lente & plus tardive, parce que les vaif- feaux de la fubftance offeufe ne font point en auffi grande quantité , & que les fucs y font moins abon- dans. Quoi qu'il en foit , les bornes de l’exfication font celles de la partie ruinée qui doit être détachée de la partie faine, & non morte. C’eft à la furface de celle-ci que les ofcillations redoublées qui com- mencent à ébranler la premiere, fe font fentir. Ces ofcillations font fuivies de la rupture des canaux à leurs extrémités , la féparation defirée {e trouve alors ébauchée ; mais ces canaux dilacérés , qui laiflent échapper une humeur qui s’extravafe, végétant, pul- lulant eux-mêmes, fe propageant & s'uniffant infen- fiblement , fourniflent-ils une chair véritable? l’ex- foliation fera bien-tôtaccomplie, vû l’accroiffement de cette même chair qui foûlevera & détachera en- tierement enfin le corps étranger, & qui acquierra une confiftance aufli ferme &c aufi folide que celle dont jouifloit le corps auquel elle fuccede. Ces effets divers que je ne pouvois me difpenfer de détailler, parce qu’ils ont été jufqu’ici également inconnus aux écuyers qui ont écrit, aux maréchaux qui pratiquent, 8 aux demi-favans qui dogmatifent, font la bafe fur laquelle nous devons afleoir tous les principes en matiere de cautérifation. Il eft des cas où elle eft falutaire, 1l en eft où elle eft nuifible , il en eft où elle eft inutile. * Ceux dans lefquels l'énergie du fez eft évidente, font, quant aux parties dures, les caries , puifque l'exfoliation qu’il procure n’eft autre chôfe que la ghüûte de la portion viciée de l'os ; & quant aux par- FEU ties molles; fes buboris peftilentielss; les ulceres . chancreux qui n’avoifinent point, ainfi que le fc , connu fous le nom de crapaud, des parties délica- tes, telles, par exemple, que lexpanfion aponévro- tique fur laquelle il eft quelquefois fitué ; les morfu- res des animaux venimeux ; celles des animaux enra- gés ; les gangrenes humides, qui fans être précédées d'inflammation, font tomber les parties en fonte; les gangrenes avancées ; les ulceres avec hyporfar- cofe ; les engorgemens ædémateux accidentels, & même les engorgemens tendans au skirrhe , qui oc- cupent une grande étendue ; lés tumeurs dures, skirrheufes , circonfcrites ; les hémorrhagies qui n’ont pas lieu par des vaifleaux d’un diametre :b{o- lument confidérable, pourvû que les vaifleaux puif fent être atteints fans danger ; les folutions de conti- nuité de Pongle, teiles que les feymes, les legeres excroiflances que nous appellons fc, verres ou poireaux, &c. en un mot, dans toutes les circonf- tances où 1l importe de frayer une ifue à une matie- re ennemie, dont le féjour dans la partie, on dont le retour dans les routes circulaires feroit funefte, & qu'il feroit extrèmement dangereux de laïfler pé- nétrer dans la maffe des liqueurs ; de conffituer une humeur morbifique & maligne dans une entiere im- puiffance , foit par l’évaporation de fes parties les plus fubtiles, foit par la fixation ou la coagulation de fes parties les plus groffieres; de deflécher puif= famment, & de produire dans les vaifleaux dont l’af- faiflement ne s’étend pas au-delà dela partieaffetée, une irritation abfolument néceflaire; d'interrompre toute communication entre des parties faines & une partie mortifiée ; d’en hâter la féparation ; dedifiper une humidité furabondante, & de procurer à des f- bres dont le relâchement donne lieu à des chairs fongueufes & fuperflues , la fermeté &c la folidité dont: elles ont befoin; d’abforber la férofité arrêtée & in- filtrée dans les tégumens, lorfque nul topique n’a pû atténuer & la réfoudre; de l’évacuer & de faire rentrer par une fuppuration convenable les vaif= feaux dans leur ton & dans leur état naturel, ce qui demande beaucoup de fagacité & de prudence ; de mettre en mouvement une humeur ftagnante & en- durcie, & d’en faciliter le dégorgement; d’accéle- rer par l’explofion une diflolution & une fonte heu- reufe dé la matiere épaifie quiformelestumeursskir- rheufes, ce qui fe pratique plus communément que dans le cas précédent, pourvû que l’on n’appercoiï- ve aucune difpofition inflammatoire; de crifper & de contraéter dans l’infant l’orifice d’un vaifleau coupé, & de réduire le fang en une maffe épaifle qui bouche ce même orifice; de faire une plaie à l'effet de folliciter la végétation de plufeurs petits vaifleaux qui par leur régénération procureront la réunion de l’ongle dont ils acquierront la confiftan- ce ; de détruire &c de confumer en entier des tuber: cules legers ou des corps végétaux contre nature, qui s’élevent fur la fuperficie de la peau ; de préve- nir les enflures &c les engorgemens auxquels Les par- ties déclives peuvent paroïtre difpofées, en foûte- nant par des cicatrices fortes & multipliées, la foi- bleffe & l’inertie des vaifleaux : dans routes ces cir- conftances, dis-je , l'application du caurere ardent eft d’une efficacité véritable, Elle eftinconteftablement nuifible,, lorfque l’œde-: me reconnoît pour caufe une cachexie Ou une mau= vaife difpoñtion intérieure; elle eft toùjours perni- cieufe dans tous les cas où l’inflammation eft mar- quée fenfiblement. Tout habile praticien la rejette, quandil prévoit qu’elle peut offenfer des vaifleaux confidérables; &êc il la bannit à jamais relativement aux parties tendinenfes ; aponévrotiques & nerveu- fes, attendu les accidens mortels qui peuvent en être les fuites, Son infuffance enfin eft réelle, & fon imutilité manifefte , dès que lation du /éx n'a pas lieu immé:- diatement fur la partie malade. Elle ne produit 8&ne peut donc rien produire d’avantageux , par exem- ple, dans les luxations, dans les entorfes, dans tou- tes les extenfions forcées des tendons, des mufcles, des ligamens , & des fibres nerveufes, dans les cour- bes , dans les éparvins, dans les furos, dans les fu- * fées, dans les offelets, Gc. dans de femblables oc- cafions en effet, nous ne portons jamais le cawrere {ur le fiége du mal. J’ajoûterai que dans la plüpart d’en- tr’elles nous ne pourrions outre-percer le cuir & par- venir à ce fiége , fans un péril certain & éminent , & fans rendre l'animal la viétime d’une opération non moins préjudiciable & non moins fuperflue dans une multitude d’autrescas que je ne fpécifierai point, la doëtrine que j’ai établie & les vérités que je con- facreuci, fufifant fans doute à la révélation de tou- tes les erreurs de la Chirurgie vétérinaire à cet égard. Parmi les matieres propres à l’œuvre de la cauté- rifation , les métaux nous ont patù mériter la préfé- rence. Nos inftrumens font ou de fer, ou de cuivre,ou d'argent. Les efcarres qui réfultent de l'application des cauteres formés de ce dernier métal, font moins confidérables : mais la dépenfe que ces cauteres oc- cafñonneroient, oblige nos maréchaux à employer plus généralementle cuivre & le fer. Nous donnons à ces métaux des formes diverfes. Il eft des caureres plats; ilen eft à nœud ou à bouton; il en eft de cu- tellaires ; il en eft dont l'extrémité fe termineenS, &c, Ceux dont on fait fréquemment ufage, font les cutellaires, les effiformes, & les caureres à boutons. Le caurere curellaire eft un demi-croiflant , dont le contour intérieur tient lieu de côte au tranchant non affilé , formé par le contour extérieur. Cette portion de métal efttoûjours emmanchée par fa partie la plus large & près de la côte, d’une tige, ou poftiche , ou de même métal, à laquelle on donne plus ou moins de longueur. Ce manche eft dans Le même plan que la lame, & dans la même direétion que Le commen- cement de la courbure au départ du manche. Le cautere effiforme eft fait d’une lame de métal contournée & enroulée de telle forte, qu’en la pré- fentant de champ fur une furface , elle y imprime le caractere cn. Cette lame enroulée a environ une de- mu-ligne d’épaifieur, & VS qu’elle trace eft d’envi- ron huit ou neuf lignes. Elle eft ordinairement tirée d’une longue tige qui lui fert de manche, & dans le cas où elle feroit d’un autre métal, on lui en adap- teroit une d’environ un pié de longueur. Le caurere a bouton n’eft proprement qu'une tige de fer terminée en une pointe courte, à quatre pans ä-peu-près égaux: quelquefois ce bouton eft de f- gure conoïde, & tel que celui que les Chirurgiens appellent bouton à olive. Il eft encore des cauteres deftinés à pafler des fé- tons. Voyez SÉTON. Les Maréchaux fe fervent du couteau pour donner le feu en croix, en étoile, en maniere de raies plus ou moins étendues , différemment difpofées, & qui repréfentent tantôt une patte d’oie, tantôt des feuil- les de fougere ou de palme, tantôt la barbe d’une plume. Quelquefois ils appliquent en forme de roue, ils impriment alors très-léeerement des efpeces de raies dans l’intérieur du cercle qu’ils ont marqué. Il en eft qui au lieu de ces raies, y deffinentavecun cauiere terminé en pointe, un pot de fleur : les ar- moiries du maître auquel appartiennent l'animal, une Couronne, un oifeau, une rofe ou autres fleurs quelconques, &c. foins inutiles, qui ne fufifent que trop fouvent pour élever ‘un afpirant an grade de maître, & qui, relativement à l’art, feront totjours envifagés par ceux qui en connoîtront les vrais prin- FEU 633 cipes, comme le chef-d'œuvre de l'ignorance. Les caureres à bouton font employés dans Les cas où le maréchal veut donner quelques grains d'orge, ou femences defez , c’eft-à-dire, quand il fe propofe d’en introduire, par exemple , quelques pointes fur des lignes déjà tracées avec le cautere cutellaire. Ces boutons lui font encore d’un grand fecours, lorf- qu'il s’agit d'ouvrir un abcès, de percer une tumeur, mais 1] eft blâämable de ne pas confidérer avec aflez d'attention les circonftances dans lefquelles linftru= ment tranchant feroit préférable, Voyez TUMEUR. Quant aux caureres efliformes, ils font véritables ment efficaces, eu égard aux feymes , en les appli quant tranfverfalement, & de façon que VS placée à l’origine de la folution de continuité, y réponde par fon milieu; fes deux extrémités s'étendent Éga= lement fur chaque portion de l’ongle disjoint & 16- paré. Voyez SEYME. Je ne peux me refufer ici à l’obligation de ne pas omettre quelques maximes qui ontrapport au ma- nuel de la cautérifation. La néceflité de s’affürer parfaitement du cheval fur lequel on doit opérer, ne peut être révoquée en doute, Les uns le renverfent & le couchent à terre, les autres l’aflujettiffent dans le travail ; il en eft qui fe contentent de fe mettre, par le moyen des entraves &t des longes, à l’abrides atteintes qu'ils pourroient enrecevoir. Toutes cesprécautions différentes dépens dent du plus ou du moins de fenfbilité & de docilité de l'animal, du tems que demande l'opération, & des douleurs plus ou moins vives qu’elle peut fufciter. C'eft aufli par la grandeur, la figure, la nature & le fige du mal, que nous devons nous repler & nous décider fur le choix des caureres, qui d’ailleurs ne doivent point être chauffés au féz de la forge , mais à un fé de charbon de bois, toûjours moins acre que celui des charbons foffiles. S'il s’agit de cauté- rifer à l'effet de procurer une exfoliation , il faut ga= rantir avec foin les parties qui avoifinent lorfque nous nous difpofons à brüler: nous méditons, par exemple, de porter un bouton de fx fur l’os angu<. laïre, voyez FISTULE LACRYMALE; alors par le moyen de l’entonnoir ou de la cannule, inftrumens accefloires au ceurere, nous rempliflons cette inten- tion. Dans d’autres cas où ces inftrumens ne {au- roient être d’ufage, nous garniflons les chairs de com- prefles ou plumaceaux 1mbibés de quelque liqueur froide , 8e nous les préfervons ainfi de l'impreffion de la chaleur & du feu. Il doit être en un degré plus ou moins confidérable dans le caurere, & le caurere doit être plus où moins fortement & lonz-tems ap- pliqué, felon l’effet que nous en attendons , felonla profondeur de la carie, felon que l’os eft fpongieux où compaët, felon enfin que lanimal eft plus ou moins avancé en âge; on peut dire néanmoins en général , que relativement à la cautérifation des par- ties dures, l’inftrument brûlant doit être plus chaud que relativement à la cautérifation des parties mol- les. Eft-il queftion , eû égard à celles-ci, de remé= dier à une enflüre accidentelle ædémateufe, ou à un engorgement des jambes de la nature de celui qui tend au skirrhe ? le maréchal doit s’armer de cautere cutellaire chauffé, & tracer de haut en-bas fur les faces latérales de la partie ergorgée, une ligne vet. ticale direétement pofée fur l'intervalle qui fépare l'os & le tendon, & des lignes obliques qui partent de la premiere qui a été imprimée, & qui {e répon- dent par leurs extrémités fupérieures. Ici le caurere ne doit point outre-percer le cuir, la main qui opere doit être extrèmement levere ; il fuffit d’abord d’in- diquer feulement par une premiere application la direétion de ces lignes ou de ces raies; on y intro- duit enfuite d’autres couteaux de la même forme & de la même épaifleur,, difpofés exprès dans le fx & 634 FEU rougis de maniere qu'ils enflamment point le bois far lequel on les pañle ; foit pour juger du degré de chaleur, foit pour en enlever la crafle ou les efpe- ces de fcories que l’on y obferve; & la cautérifa- tion doit être réiteree juiqu’à ce que le fond desraies marquées ait acquis & préfente une couleur vive, qui approche de celle que nous nommons couleur de certfe. Une des conditions de cette opération, eft d'appuyer fans force, mais également, le causere dans toute l’étendue qu'ilparcourt ; les couteaux dont {fe fervent ordinairement lesmaréchaux, font moins commodes & moins propres à cet effet que Les cou- teaux à roulette, avec lefquels je pratique. Ceux- ci font formés d’une plaque circulaire d’environ un pouce. & demi de diametre, & de trois quarts de li- gne d’épaifleur, percée dans fon centre pour rece- voir un clou rond qui l’affemble mobilement dans fa tige refendue par le bout, & en chappe. L’impreflion de cette plaque rougie & qui roule fur la partie que je cautérife , par le feul mouvement &c par la feule action de ma main & de mon poignet, eft toùjours plus douce, moins vive & plus égale. Les cicatrices font encore très-apparentes lorfque l’opérateur n’a as eu attention à la direétion des poils, il ne peut De fe difpenfer de la finvre, pour ne pas détruire entierement ceux qui bordent l’endroit cautérilé, & qui peuvent le recouvrir après la réunion dela plaie. J'en ménage les oignons ou les bulbes , au moyen d’une incifion que je fais à la fuperficie de a peau, incifion qui précede l’application du cautere , &c par laquelle je fais avec le biftouri le chemin que doit décrire l’inftrument brûlant que j'infinue dans les ou- vertures longitudinales que j'ai pratiquées, & dont l’ativité eft telle alors, que je fus rarement obligé de cautérifer à plufñeurs reprifes. Cette maniere d'o- pérer femble exiger plus de foins, vü Pemploi du fer tranchant; mais les cicatrices qui enréfultent, font à peine fenfibles au taét, & ne font en aucune façon viñbles. Leur difformité eft moins fouvent occafion- née par le fez, que par la négligence des palefre- niers ou du maréchal , qui ont abandonné l’animal à lui-mème, fans penfer aux moyens de l’empêcher de mordre, de lécher, d’écorcher, de déchirer avec les dents les endroits fur lefquels on a nusle carrere, ou de froter avec le pied voifin ces mêmes endroits brûlés; ils pouvoient facilement y obvier pat le {e- cours du chapelet, voyez FARCIN, ou par celui des entraves dégagées de leurs entrayons, auxquels on fubftitue alors un bâton d’une longuéur proportion- née, qui ne permettant pas l’approche de la jambe faine, met celle qui a été cautérifée à Pabri de tout contatt, de toute infulte & de tout frotement perni- cieux. M. de Soleyfel fixe à vingt-fept jours la durée de leffet du fez; il en compte neufpour augmentation, neuf pour l’état, & neuf pour le déclin. On pour- roit demander à fes feftateurs, ou à ceux de fes co- piftes qui exiftent encore, ce qu'ils entendent véri- tablement par ce terme d’effes , & ce à quoi ils le bor- nent. Le reftreignent-ils, comme ils le devroient, à la fimple brülure, c’eft-à-dire à la fimple produc- tion de l’efcarre ? l’étendent-ils à tous les accidens qui doivent préceder la fuppuration qui occafonne la chûte du fequeftre ? comprennent-ils dans ces mê- mes effets , l’établiflement de cette fuppuration loua- ble qui nous annonce une prompte régénération, & la terminaïfon de la cure? Dans les uns ou dans les autres de ces fens, ils ne peuvent raifonnablement rien déterminer de certain. Le fes eit appliqué fur des parties malades , tuméfñées , dont l'état differe toûjours ; les difpofitions intérieures de chaque che- val fur lequel on opere, varient à infini: or com- ment afligner un terme précis aux. changemens qui doivent arriver, & décider poñtivement du tems FEU du tétabliffement entier de l’animal? Ce n’eft, au refte, que quelques jours après que l’efcarre eft tom- bée, qu'on doit le promener au pas & en man, pourvû que la fituation aëtuelle de la plaie prudem- ment examinée ayant de le folliciter à cetexercice, ne nous fournifle aucune indication contraire. Quant à l’ufage des caureres à bouton, relative- ment aux tumeurs, nous devons, dans les circonf- tances où nous le croyons néceflaire, l’apphiquer de maniere que nous puifions faire évanoiur toute du- reté, tout engorgement, & que rien ne puifle s’oppo- fer à la fuppuration régénérante qui part des tuyaux fains, & de laquelle nous attendons de bonnes chairs, & une cicatrice folide & parfaite. Il eft effentiel néanmoins de ne pénétrer jufqu’à la bafe de la tu- meur, que lorfque cette même tumeur n’eft pas fi- tuée fur des parties auxquelles on doit redouter de porter atteinte. S’il en étoit autrement, je ne cauté- riferois point auf profondément ; & dans le cas, par exemple, d’une tumeur skirrheufe placée furune partie tendineufe , offeufe, 6:c. je me contenterois d'introduire le bouton de féz moins avant, fauf, lorfque le féqueftre feroit abfolument détaché, à dé- truire le refte des duretés, fi j’en apperçevois, par des panfemens méthodiques & avec des cathérétiques convenables, c’eft-à-dire avec des médicamens du genre de ceux dont je vais parler, Feu mort, rétoire, cautere potentiel, caufliques, ter- mes fynonymes. Nous appellons en général des uns &c des autres de ces noms, tonte fubftance qui ap- pliquée en maniere de topique fur le corps vivant, & fondue par la lymphe dont elle s’imbibe, ronge. brûle , confume , détruit les folides &z les fluides, & les change, ainfi que le fez même, en une matiere noirâtre , qui n’eft autre chofe qu’une véritable ef, carre. C’eft par les divers degrés d’afivité de ces mixtes, que nous en diflinguons les efpeces. Les uns agiflent feulement {ur la peau, les autres n’agiflent que fur les chairs dépouillées des tégu- mens ; 1l en eft enfin qui operentfur la peau & fur les chars enfemble. Les premiers de ces topiques comprennent les mé- dicamens que nous appellons proprement rétoires, & qui dans la Chirurgie font particulierement défignés pat le terme de véfcatoires. Les feconds renferment les cathéretiques ; & ceux de la troifieme efpece, Les efcarrotiques ou les ruptoires. Le pouvoir des unes & des autres de ces fubftan- ces réfulte uniquement, quand elles font fimples des fels acres qu’elles contiennent; & quand elles font compofées , des particules ignées qui les ont pé- nétrées, ou de ces particules ignées.&c de leurs par- ticules falines en même tems. Les fuites de l’application des cauftiques naturels. & non-préparés, doivent donc fe rapporter à l’ac- tion ffimulante de ces remedes, c’eft-à-dire à l’irri- tation qu'ils fufcitent dans les folides, & à la vio- lence desmouvemensofcillatoires qu'ilsprovoquents mouvemens en conféquence defquels les fibres aga- cées follicitent & hâtent elles-mêmes leur propre deftruétion , en heurtant avec force & à coups re- doublés contre les angles & les pointes des fels dont ces mixtes font pourvûs , & qui ont été diflous par l’humidité de la partie vivante. À l’égard des cauftiques compofés, c’eft-à-dire de ceux qui, par Le moyen des préparations galéniques &c chimiques, ont fubi quelqu'alrération, non-feu- lement ils occafionneront lesmêmes dilacérations & les mêmes ruptures enfuite dela diffolution de leurs fels, s’il en eft en eux, mais ils confumeront le tiflu des corps fur lefquels on leur propofera de s'exercer immédiatement ; leurs particules ignées fufifam- 1 4 . ment développées, & d’ailleurs raréñées par la cha= F EU leur, joinffant de toute l’adivité du Jè4, & fe ma- nifeftant par les mêmes troubles & par les mêmes effets. 3 Les véficatoires , de la clafle de ceux que l’on dif- tingue par la dénomination de rubéfians ou de phé- nigmes, n’excitant qu'une legere inflammation dans les tégumens du corps humain , feroient totalement impurfans fur le cuir du cheval; mais limpreffion des épifpaftiques , auxquels on accorderoit un cer- tain intervalle de tems pour agir, feroit très-fenfible, Les particules acres & falines de ceux-ci font douces d’une telle fubtilité , qu’elles enfilent fans peine les pores, quelle que foit leur ténuité : elles s’infinuent dans les vaiffeaux fudorifiques , elles y fermentent avec la férofité qu'ils contiennent ; & les tuniques de ces canaux cedant enfin à leurs efforts, & à un en- gorgement qui augmente fans cefle par la raréfac- tion & par le nouvel abord des liqueurs , laïffent échapper une humeur lymphatique qui foüleve lé- piderme, & forme un plus où moins grand nombre de veflies qui fe montrent à la fuperficie de la peau. Les alongemens par lefquels cette membrane déliée fe trouvoit unie aux vaifleaux qui ont été dilacérés , demeurentflottans, & s’oppofent à lafortie de la féro- fité dans laquelle ils nagent; mais cette humeur triom- phe néanmoins de cesobftacles après un certaintems, puifqu’elle fe fait jour, & qu’elle fuinte fous la for- me d’une eau roufle & plus ou moins limpide. À la vûe de l’inertie des cathérétiques appliqués fur les tégumens, & de leur aétivité fur les chars vi- ves , on ne fauroit douter de la difficulté que leurs principes falins ont de fe dégager, puifqu'il ne faut pas moins qu'une humidité aufli confidérable que celle dont les chairs font abreuvées, pour les mettre en fonte, pour brifer leurs entraves , pour les ex- traire, & pour les faire joiur de cette liberté fans la- quelle ils ne peuvent confumer & détruire toutes les fansofités qui leur font offertes. | Ceux qui compofent une partie de la fubftance des ruptoires , {ont fans doute moins enveloppés, plus acres, plus grofliers, plus divifés & plus fufcepti- bles de diflolution , dès qu’ils corrodent la peau mê- me, & que de concertavec lesparticulesignées qu'ils renferment, 1ls privent de la vie la partie fur laquelle leur ation eft imprimée; ce que nous obfervons auf dans les cathérétiques, qui, de même que les rup- toires, ne peuvent jamais être envifagés comme des cauftiques fimples , & qui brülent plus où moins vi- vement toutes celles que la peau ne garantit pas de leurs atteintes. Les ouvrages qui ont eu pour objet la medecine des chevaux, contiennent plufeurs formules des mé- dicamens rétoires : celui qui a été le plus ufité, eft un onguent décrit par M. de Soleyfel. L’infecte qui en fait la bafe, eft le méloël; 11 eft défigné dans le fÿflème de la Nature, par ces mots, antenne fiifor- mes, elytra dimidiata, ale nulle. Linnæus, Fauna [ue- cica;, n°, 596. l'appelle encore /carabeus majalis unüuofus. Quelques auteurs le nomment profcara- bœus, cantharus unüluofus; le fcarabé des Maréchaux. Ileft mou, & d’un noir-foncé ; il a les piés, les an- tennes, le ventre, un peu violets, &les fourreaux coriaces. On le trouve dans les mois d'Avril & de Mai, dans les terreins humides & labourés , ou dans les blés. On en prend un certain nombre que l’on broye dans fufiifante quantité d'huile de laurier, & au bout de trois mois on fait fondre le tout : on cou- le, on jette le marc, & on garde le refte commeun remede tres-précieux, & qui doit, felon Soleyfel, diffiper des furos, des molettes, des veffigons , &c. mais quiefttrès-inutile &c très-impuiflant, {elon moi, dans de pareïlles ciréonftances. | Il eft encore d’autres rétoires fairs avec le foufre en poudre, du keutre vieux , de l'huile de laurier, 1 FEU 635 des poudres d’euphorbe & de cantharides. J'ai re- connu que la qualité draftiqué de ces infectes n’eft pas moins nuifible à animal qu’à l’homme, & qu'ils ne font pas en lui des impreffions moins fâcheufes fur la veflie & fur les conduits urinaires; mais quoique ces véficatoires mayent réufli dans une paralyfe fu- bite de la cuiffe , il faut convenir que dans la pratique nous pouvons nous difpenfer en général d’en faire ufage; le féton brûlant opérant avec beaucoup plus de fuccès dans les cas où 1ls femblent indiqués, c’eft- à-dire dans l’épilepfie, Papoplexie, la léthargie, la paralyfe, les affections foporeufes , les maladies des yeux , en un mot dans toutes celles où il s’agit d’é- branler fortement le genre nerveux , d’exciter des fecoufles favorables, & de produire des révulfions falutaires. Les cathérétiques que nos émployons le plus communément , font l’alun brûlé , le cuivre brûlé, le verdet, l'iris de Florence , la fabine, l’arfenic blanc, le fublimé corrofif, l’arfenic cauftique, le précipité blanc, l’onguent brun , l’onguent égyptiac, le baume d’acier ou le baume d’aiguille, &c. Les ruptoires, que nous ne mettons prefque toû- jours en œuvre que comme cathérétiques, font l’eau ou la diflolution mercurielle , lefprit de vitriol , l’ef- prit de fel, l’efprit de nitre, le beurre d’antimoine, l’huile de vitriol, l’eau-forte, la pierre imfernale. Je dis que nous ne les appliquons communément que fur les chairs découvertes de la peau : il eftrare en effet que dans les cas où il eft queftion d'ouvrir des tumeurs, nous ne préférions pas le cautere aîuel , dont les opérations font toüjours plus promptes, & dont les malades que nous traitons ne font point ef- frayés, à ces médicamens potentiels , qui peuvent d’ailleurs porter le poifon dans le fang par l’introduc- tion de leurs corpufcules, & qui demandent, eu égard à ce danger, beaucoup de circonfpetion & de fagacité dans le choix, dans les préparations, & dans l’application que l’on en fait. (e) FEU , (Manège. cheval qui a du feu, cheval qui à de la vivacité, exprefions fynonymés. Il y a une très - grande différence entre Le fez ou la vivaciré du cheval, & ce que nous nommons en lui proprement ardeur. Le feu ou la vivacité s’appaifent, l’ardeur ne s'éteint point. Trop de féz, trop de vivacité forme- ront, fi onle veut, cé que l’on doit entendre parle mot ardeur, & conféquemment ce terme préfentera toüjours à l’efprit l’idée de quelque chofe de plus que celle que nous attachons à ceux de v/yaciré & de feu Le chevalqui a de lardeut, quelque vigoureux, quel- que nerveux qu'il puiffe être , doit être peu eftimé. Le defir violent & immodéré qu’il a d’aller en-avant, & de devancer les chevaux qui matchent on qui ga< lopent devant:lui ; fon inquiétude continuelle, foæ action toùjours tutbulente , fon trépignement , les différens mouvemens auxquels il fe livre en fe tra- vetfant fans ceffe, & en fe jettant indiflinétement tantôt fur un talon, tantôt fur un autré? {à difpof- tion à forcer la main , font autant de raïfons de lé re- jetter. Non-feulement il eft très-incommode & 1rès- fatigant pour le cavalier qui le monte, mais il fe lafle & s’épuife lui-même ;: la fueur dont il eft cou- vert dans le moment, en éft une preuve. Ces che- vaux, dont le naturel eft à-jamais invincible, font d’ailleurs bientôt ruinés ; s'ils manquent de corps , la nourriture la meilleure 8 la plus abondante, Pap- pétit le plus fort, ne peuvent en réparer les flancs = ils demeurent toüjours étroits de boyau, & très-fou- vent la poufle termine leur vie. Tous ces vices ne fe rencontrent point dans le‘cheval qui n’a que du feux fi fon éducation eft confiéé à des mains habiles , (& vivacité ne le fouftraira point à l’obéiffance ; elle fera le garant de fa fenfbilité & de {on courage , elle: ne fe montrera que lorfque Papimal fera recherché : 636 FEU il n’en répondra que plus promptement aux aides, il n'en aura que plus de finefle ; & lorfaw’elle le déter- minera à hâter, fans en être follicité, {es mouvemens € fa marche, elle ne fera jamais telle qu’elle lui fug- gere des defordres, & qu’elle l'empêche de recon- noïtre le pouvoir de la main qui le guude. En un mot , la vivacité ou le fx du cheval peut être tem- pété, fon ardeur ne peut être amortie. Pourquoi donc a-t-0on jufqu'à préfent confondu ces expref- fions ? Il n’eft pas étonnant que l’on abufe des ter- mes dans un art où l’on n’a point encore médité fur les chofes. (e) FEU, (Manége.) Accoétumer Le cheval au feu. Si la perte de la vie, &c fi, dans de certaines circonftan- ces, la perte de l'honneur même du cavalier, peu- vent être les fuites funeftes de l’'emportement & de la fougue d’un animal qui , frappé de l'impreffion fubite 8 fâcheufe de quelqu’objet, méconnoit auffi- tôt l’empire de toutes les puiffances extérieures qui le maîtrifent , il eft d’une importance extrème de ne négliger aucune des voies qui font propres à donner de l’affirance à des chevaux timides & peureux. M. de la Porterie, meftre de camp de dragons, dans fes inffitutions militaires, ouvrage qui n’a paru minutieux qu’à des perfonnes peut-être plus bornées que les petits détails qu’elles méprifent & qu’elles dé- daignent , propofe des moyens d'autant plus fûrs d’ac- coûtumer l’animal au fx , que l’expérience à démon- tré l’excellence de fa méthode. Il recommande d’abord d’en ufer avec beaucoup de fagefle & de patience : Le fuccès dépend en effet de ces deux points. Il ne s’agit pas ici de vaincre & de dominer par la force un tempérament naturelle- ment porté à leffroi ; une terreur réitérée ne pour- roit que donner aux fibres un nouveau degré de pro- penfion à celle qu’elles ont déjà ; il ne faut que les obliger infenfiblement à céder & à fe prêter au pli &c aux déterminations qu’il eft effentiel de leur fug- gérer. La route que tient M. de la Porterie, eft entiere- ment conforme à ces vües. Le bruit qui réfulte du jeu des reflorts différens des.armes à fez , eft le pre- muer auquel il tente d’habituer le cheval. Il fait mou- voir ces reflorts dès le matin à la porte & aux fené- tres de l'écurie, & enfuite dans l'écurie même avant la difiribütion de l’avoine ou du fourrage, qui eft aufh précédée de l’a@tion de flater, de career l’a- mimal, & de s’en approcher avec circonfpettion, de maniere qu'il puifle flairer ou fentir le bafinet. Cette manœuvre répetée & continnée chaque fois qu'on dôit lui préfenter la ration de grain qui lui eft deftinée, appaife & familiarife peu-à-peu ceux qui femblent être les plus farouches, fur-tout fi l’on a encore, &C tandis qu'ils mangent, le foin de laïfler les piftolets devant eux & dans l’auge..Alors on brûle des amorces, en obfervant les mêmes gradations ; &c fans oublier qu’il eft d’une néceffité indifpenfable d’accoûtumer le cheval à l’odeur de la poudre, & de le mettre par conféquent à portée de la recevoir... Des amorces on en vient aux coups à poudre; on n’employe que la demi-charge, & les armes ne font point bourrées. Enfin M, de la Porterie confeille de frapper de grands coups de bâtons fur les portes, pour fuppléer au défaut de la quantité de munition dont les régimens auroïent befoin à cet effet; & la fréquente répetition du mot fx, pour habituer la- nimal à ce commandement, qu’il redoute fouvent autant que le fez même. . : re Telles font les opérations qui fe pratiquent dans l'écurie : celles quil preferit enfuite dans le dehors, concourent au même but, &-ne tendént qu’à con- firmer le cheval , & à le guérir de toute appréhen- fion, On place & l’on aflüte dans un lieu convena- ble, des efpeces d'auges volantes, à l'effet d'y dé- pofer différentes portions d’avoine. On monte quel- ques chevaux que l’on mene à ces auges, & devant lefquels marchent des hommes à pié qui font joïer & mouvoir les reflorts des armes dont ils font munis; &t qui arrivés dans endroit fixé , les portent aux na- feaux de ces animaux. Tandis qu’ils commencent à manger leur avoine, un ou deux de ces hommes à pié tournent autour deux, & leur font entendre de nouveau &t par intervalle Le bruit des reflorts. On les fait reculer encore à dix ou douze pas. Quand ils font éloignés ainf de l’auge, les hommes à pié S'en approchent , meuvent les chiens & les platines, pendant qu’on follicite & qu’on prefle les chevaux de fe porter en-avant, & dé revenir au lieu qu'ils ont abandonné ; après quoi on leur permet de man- ger : & on les interrompt de même plufieurs fois, jufqu’à ce qu’il ne refte plus rien de leur ration. On les reconduit dans l'écurie & à leur place avec le même appareil ; onles y flate, on leur parle, & on leur fait fentir les armes. C’eft avec de femblables précautions & de tels procédés plus où moins long-tems mis en ufage, que l’on parvient à leur ôter entierement la crainte ëc l’effroi que peuvent leur infpirer les amorces & le bruit des piftolets, moufquetons ou fufls que l’on décharge. Dans la lecon qui fuit immédiatement celle que nous venons de détailler, il faut feulement obferver qu'aucun grain de poudre & qu'aucun éclat de la pierre n’atteignent le nez du cheval, ce qui le révolteroit, & le rendroit infiniment plus difficile à réduire & à apprivoifer ; & dans la manœuvre QUE confifte à tirer des coups à poudre, les armes étant bourrées, on doit faire attention, 1° dene point les adrefler direétement fous les anges, afin de ne cha fer ni terre ni gravier contre fes jambes ; 2° de tenir en-haut le bout des piftolets lorfqu’on lestirera, les chevaux ayant reculé, pour que les bourres ne les offenfent point & ne foient point dirigées vers eux, &r à l'effet de les accoûtumer à les voir enflammées, fuppofé qu’elles tombent fur le chemin qu'ils ont à faire pour fe rapprocher de leur avoine. Dans les exercices, M..de la Porterie ne s’écarre point de cet ordre; mais foit qu’il fafle tirer des pif. tolets non-amorcés, foit qu'il fafle brûler des amor: ces, foit qu'il s’agifle d’une véritable décharge de Ja part de deux troupes vis-à-vis l’une de l’autre , il faut toüjours faire halte pour tirer, & marcher en- fuite en-avant, au lieu de faire demi-tour À droite fur le conp ; mouvement pernicieux , & auquel les chevaux ne font que trop difpofés au moindre objet qui les épouvante. Du refte nous avons fimplement ici rendu {es idées & développé fes principes | nous ne faurions en propofer de meilleurs ; & nous ofons affürer qu’il. fufira de-les appliquer ä-propos , de s’armer de la patience qu'exige la réitération de ces leçons, & de faifir & de fuivre exatement l'efprit dans lequel il pratique, pour réuflir pleinement dans cette partie eflentielle-de-léducation des chevaux. (e)°"1% Feu, (marque de) Manéve ; Maréchal. Nous'ap: pellons dé cenom le roux éclatant quoiqu’obfeur, dont eft teint & coloré naturellément le poil de cer: tains chevaux bais- brun, à l’endroit des flancs, du bout du nez &z des fefles. Ce cheval, difons nous, a des marques de feu ; ces) marques font dire@tement oppofées à celle du cheval bar-brun, feflés lavées, quiefbnommé ainfi, lorfque ces mêmes parties font couvertes d’un poil jaune , mais mort , éteint & blanchâtre. (e), | FEU, (mal de feu) Maréchal. Je ne fai pourquoi les auteurs qui‘ont écrit fur l’'Hippiatrique nomment ainfi la fievre ardente dans le:cheval ; il me femble que les chofes devroient tirer & prendre leur déno- mination dece qu’elles font en.effet, 7: 0yez FIÈVRE» (:) Fa FEU FEU DE JOIE, (Lirrérar.) illumination no@urne donnée au peuple pour fpedacle public dans des occafons de réjoüiflances réelles ou fuppofées. C’eft une queftion encore indécife de favoir fi les anciens , dans les fêtes publiques, allumoient des feux par un autre motif que par efprit de religion. Un membre de l’académie des Belles-Lettres de Pa- ris foûtient la négative: ce n’eft pas qu'il mie que les anciens ne fiflent comme nous des réjoiuiflances aux publications de paix, aux nouvelles des viétoires remportées fur leurs ennemis , aux jours de naïflan- ce, de proclamation, de mariage de leurs princes, & dans leur convalefcence apres des maladies dan- gereufes ; mais, felon M. Mahudel, le f£z dans tou- tes ces occafions ne fervoit qu'à brûler les viétimes ou l’encens ; :& comme la plüpart de ces facrifices fe faoient la nuit, les illuminations n’étoient em- ployées que pour éclairer la cérémonie , & non pour divertir le peuple. 27}, Quant aux buchers qu'on élevoit après la mort des empereurs, quelque magnifiques qu’ils fuffent, on conçoit bien que ce fpeétacle lugubre n’avoit au- cun rapport avec des feux de joie, D'un autre côté, quoique la pompe de la marche des trromphes fe ter- muinat toujours par un facrifice au capitole, où un Jeu allumé pour la confécration de la vi@ime lat- tendoit ; ce feu ne peut point pafler pour un fez de Joie : enfin par rapport aux feux d'artifices qui étoient en ufage parmi les anciens , & qu’on pourtoit pré- fumer avoir fait partie des réjoinflances publiques, M. Mahudel prétend qu’on n’en voit d'autre emploi que dans les feules machines de guerre, propres à porter l'incendie dans les villes & dans les bâtimens ennemis. Mais toutes ces raifons ne prouvent point que les anciens n’allumaflent aufli des feux de Joie en figne de réjotiffances publiques, En effet, il eft difficile de fe perfuader que dans toutes les fêtes des Grecs & des Romains , & dans toutes les célébrations de leurs jeux, les fzux & les illuminations publiques fe rapportaffent toüjours uniquement à la religion, fans que le peuplen’y prit part à-peu-près comme parmi nous. Dans les lampadophories des Grecs , où l’on fe _ fervoit de lampes pour les facrifices, on y célébroit pour le peuple différens jeux à la lueur des lampes ; 8: comme ces jeux étoient accompagnés de danfes & de divertiflemens , on voit que ces for. es d’illu- minations étoient en même tems prophanes & {a crées. L'appareil d’une autre fête nommée Zampre- ries , qui fe faifoit à Pallene , & qui éroir dédiée à Bacchus, confiftoit en une grande illumination noc- turne & dans une profufon de vin qu’on verfoit aux paflans. Il faut dire la même chofe des illuminations qui entroient dans la folennité de plufieurs fêtes des Ro- mains , & entr'autres dans celle des jeux féculaires qui duroient trois nuits, pendant lefquelles il fem- bloit que les empereurs & les édiles qui en faifoient la dépente , vouluflent , par un excès de fomptuofi- té , dédommager le peuple de la rareté de leur célé- bration. Capitolin obferve que lillumination que donna Philippe, dans les jeux qu'il célébra à ce fu- jet , fut fi magnifique , que ces trois nuits n’eurent point d’obfcurité. On n’a pas d’exemple de fèu de joie plus remarqua- ble que celui que Paul Emile , après la conquête de la Macédoine , alluma lui-même à Amphipolis , en prélence de tous les princes de la Grece qu’il y avoit invités. La décoration lui coûta une année entiere de préparatifs ; & quoique l'appareil en eût été com- poié pour rendre hommage aux dieux qui préfi- doïent à la viêoire, cette fête fut accompagnée de tous les fpeétacles auxquels le peuple eft fenfble, Tome FL, EEU 637 Enfin depuis les derniers fiecles du paganifme, On pourroit citer plufeurs exemples de feux allumés pour d’autres fujets que pour des cérémonies facrées. Saint Bernard remarque que le fez de la veille de S. Jean-Baptifte continué jufqu’à nos jours, fe prati- quoit déja chezles Sarrafins & chezles Turcs. Il fem- ble réfulter de ce détail, qu’on peut dater lufage des feux de joie de la premiere antiquité , & par confé- quent long-tems avant la découverte de la poudre, qui feulement y a joint les agrémens des feux d’arti- Jice ; qu'on y employe avec grand fuccès dans nos feux de joie , maloré le vent, la pluie, les eaux cou- rantes & profondes. Au furplus , quel que foit le mérite de nos illumi- nations modernes , il ne s’en eft point fait dans le monde qui ait procrté de plaifir pareil à celui du fimple fez d’Hadrien. Ce prince ordonna qu’on le préparât dans la place de Trajan , & que le peu- ple romain fût invité de s’y rendre. Là, dit Dion, (äv. LXXIX, ) l’empereur , en préfence de la ville entiere, annula toutes fes créances fur Les provin- ces, en brüla, dans Le fe qu'il avoit commandé, les obligations & les mémoires, afin qu'on ne püt craindre d’enêtre un jour recherché, & enfuite il fe retira pour laiffer le peuple libre de célébrer fes bienfaits. [ls montoient à une fomme immenfe, que des perfon- nes habiles à réduire la valeur des monnoies de ce tems-là , évaluent à environ 133 millions $oo mul- les livres argent de France (1756). Auf la mémoire de cette belle action ne périra jamais , puifqu’elle s’eft confervée dans les hiftoriens , les infcriptions, & les médailles, Foyez Mabillon, azaleët. tom. IP. pag. 484 & 486. Onuphre, fn faflis, pag. 220. Spa- nheim de zumifmat. pag. 811.8cc. Mais comme cette libéralité n’avoit point eu d'exemple jufqu’alors dans aucun fouverain , 1l faut ajoûter à la honte des fou- verains de la terre , qu’elle n’a point eu depuis d’imi- tateurs. Aréicle de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FEU SACRÉ, ( Lisrérar. ) brafier qu’on confervoit totjours allumé dans les temples , & dont le foin étoit confié aux prêtres ou aux prêtrefles de la reli- gion. Il n’eft pas furprenant que des hommes, qui ne con- fultoient que les effets qui s’operent dans la nature, ayent adore le Soleil comme le créateur & le maître de Punivers. Le culte du fez fuivit de près celui qu’- on rendit au Soleil; vive image de cet aftre lumi- neux & le plus pur des élémens , il s’attira des ef- peces d’adorations de tous les peuples du monde, & devint pour eux un grand objet de refpeét, ou pour mieux dire , un inftrument de terreur. L’Ecriture nous enféigne que Dieu s’en eft {ervi de ces deux manières. Tantôt le Seigneur {e compare à un féx ardent pour defigner {a fainteté; tantôt il fe rend vi- fible fous apparence d'un buiflon enflammé , ou formidable par des menaces d’un féx dévorant, & par des pluies de foufre ; quelquefois avant que de parler aux Juifs, 1l faïfit leur attention pardes éclairs ; & d’autres fois marchant , pour ainfñ dire ,avec{on peuple , il fe fait précéder d’une colonne de fz. Les rois d’Afe, au rapport d'Hérodote, faroient toûjours porter du fx devant eux : Ammien Mar- cellin, parlant de cette coûtume , la re d’une tra- dition qu’avoient ces rois, que le fx qu'ils confer- voient pour cet ufage, étoit defcendu du ciel: Quin- te-Curce ajoûte que ce fex facré & éternel étoit auffs porté dans la marche de leurs armées à la tête des troupes fur de petits autels d'argent , au milieu des mages quu chantoient les cantiques de leur pays. Ainfi la vénération pour le fe fe répandit chez toutes les nations, qui toutes l’envifagerent comme une chofe facrée , parce que le même efprit de la nature reonoit dans leurs rites & leur culte exté- rieur, On ne voyoit alors aucun facrifice , aucune M M m m 68 FEU cérémonie religieufe où il n’entrât du fez; & celui ‘qui fervoit à parer les autels & à confumer les vic- orand times, étoit fur-tout regardé avec le plus g ‘refpeét. C’eft par cette raïfon que l’on gardoit du fez perpétuellement allumé dans les temples des Pertes, des Chaldéens , des Grecs, des Romains & des Eeyp- tiens. Moyfe, établi de Dieu le conduéteur des Hé- breux, en fit de la part du Seigneur une loi pour ce . peuple.«Le feu, dit-il , brülera fans cefle fur l'autel, #» &t le prêtre aura foin de l’entretenir, en y met- # tant le matin de chaque jour du bois, {ur lequel # ayant pofe l’holocaufte , il fera brûler par-deflus » la graïfle des hofties pacifiques , & c’eft-là le fez +» qui brülera toüjours fans qu’on le puiffe éteindre ». Lévitig. ch. yj. Il femble toutefois que le lieu du monde où l’on révéra davantage cet élément, étoit la Perfe : on y trouvoit par-tout des enclos fermés de murailles & fans toîts, où l’on faifoit afidüment du féz, & où le peuple dévot venoit en foule à certaines heures pour prier. Les grands feigneurs fe ruinoient à y jetter des effences précieufes & des fleurs odoriférantes ; pri- vilége qu’ils regardoient comme un des plus beaux droits de la noblefle. Ces enclos ou ces temples dé- couverts , ont été connus des Grecs fous le nom de mupa Scie , & ce font les plus anciens monumens qui nous reftent de l’idolatrie du fez. Strabon qui avoit eu la curiofité de les examiner , raconte qu'il y avoit un autel au milieu de ces fortes de temples, avec beaucoup de cendres, fur lefquelles les mages en- tretenoient un fez perpétuel. Quand lés rois de Perfe étoient à l’agonie, on éteignoit le fez dans les villes principales du royau- me ; & pour le rallumer, il falloit que fon fucceffeur fût couronné. Ces peuples s’imaginoient que le fez avoit été apporté du ciel, & mis fur l’autel du pre- mier temple que Zoroaftre avoit fait bätit dans la ville de Xis en Médie. Il étoit défendu d’y jetter rien de gras ni d’impur; on n’ofoit pas même le re- garder fixement. Enfin pour en impofer davantage, les prêtres entretenoient ce feu fecretement, &c fai- foient accroire au peuple qu'il étoit inaltérable, & fe nourrifloit de lui-même. Voyez Th. Hyde , de relig. Perfarum. Cette folie du culte du fe pafla chez les Grecs; un feu facré brüloit dans le temple d’Apollon à Athe- nes, & dans celui de Delphes, où des veuves char- gées de ce foin, devoient avoir une attention vigi- lante pour que le brafer füt toûjours ardent. Un fez femblable brûüloit dans le temple de Cérès à Manti- née, ville de Péloponefe: Sétenus commit un nom- bre de filles à la garde du fez facré, & du fimulacre de Pallas dans le temple de Minerve. Plitarque parle d’une lampe qui brûüloit continuellement dans le tem- ple de Jupiter Hammon , Adyvov dobeçur, & l’on y met- toit de l’huile en cachette une feule fois l’année. Mais dans l’antiquité payenne, nul ex facré n’eft plus célebre que le fe de Vefta , la divinité du Fey, ou le fez même. Son culte confiftoit à veiller à la con- fervation du fez qui lui étoit confacré, & à prendre bien garde qu'il ne s’éteignit; ce qui failoit le prin- cipal devoir des veftales, c’eft-à-dire des prétrefles vierges attachées au fervice de la déefle, 7. VESTA & VESTALES. L’extintion du feu facré de Vefta , dont la durée pañloit pour le type de la grandeur de empire, étoit regardé conféquemment comme un préfage des plus funeftes ; & la négligence des veftales à cet égard, étoit punie du fouet. D’éclatans & de malheureux évenemens que la fortune avoit placés à - peu - près dans les tems où le fex Jacré s'étoit éteint,avoient fait naître une fuperftition qui s'étendit jufque fur les gens les plus fenfés. Le fe Jacré s'éteignit dans la conjonture de la guerre de Mithnidate; Romesvit encere confumer le fex & l'autel de Vefta, pendant fes troubles inteftins, C’eft à cette occafion que Plu- tarque remarque que la lampe facrée finit À Athenes durant la tyrannie d’Ariftion, & qu’on éprouva la même chofe à Delphes, peu de tems après l’incen- die du temple d’Apollon : l’évenémentnéanmoins ne juflifia pas toûjours la foiblefle d’efprit, & le fcru= pule des Romains. Dans la feconde guerre punique , parmi tous les prodiges vüs à Rome ou rapportés du dehors, felon Tite-Live, la confternation ne fut jamais plus gran- de que lorfqu’on apprit que le féu facré venoit de sé teindre au temple de Vefla : m1, felon cet hiftorien, les épis devenus fanglans entre les mains des moif- fonneurs , ni deux foleils apperçûüs à-la-fois dans la ville d'Albe, ni la foudre tombée fur plufieurs tem ples des dieux, ne firentpoint fur le peuple la même imprefhon qu'un accident arrivé de nuit par une pu- re négligence humaine. On en fit une punition exem- plaire ; le pontife n’eut d'épard qu’à la loi cæ/x fla- gro ef? veflalis ; toutes les affaires cefferent , tant pu- bliques que particulières ; on alla en proceflion au temple de Vefta, & on expia le crime de la veftale par l’immolation des grandes vi@times. L’appréhen- fion du peuple romain portoit cependant à faux dans cette occafon; &t cet accident qui avoit mis tout Rome en mouvement, fut précédé du triomphe de Marcus Livius & de Claudius Néron, & fuivi des grands avantages par lefquels Scipion finit la guer- re d’Efpagne contre les Carthaginois. Quoi qu'il en foit, quand le fez facré venoit à s’é- teindre par malheur, on ne fongeoit qu'à le rallumer le plütôt poffible: mais comment s’y prenoit-on à car il ne falloit pas ufer pour cela d’un fx matériel , comme fi ce fé nouveau ne pouvoit être qu’un pré- fent du ciel? du moins, felon Plutarque, il n’étoit permis de le tirer que des rayons même du Soleil : à l’aide d’un vafe d’airain les rayons venant à fe réu- nir , la matiere feche &c aride fur laquelle tomboient ces rayons , S’allumoit aufi-tôt; ce vafe d’airaim étoit, comme l’on voit, une efpece de miroir ar- dent. Voyez ARDENT. On fait que Feftus n’eft point d’accord avec Plu- tarque fur ce fujet ; car il affüre que pour rallumer le feu facré, on prenoit une table de bois qu’on per- çoit avec un vilbrequin, jufqu'à ce que l’attrition produisit du fe qu’une veftale recevoit dans un eri- ble d’airain, & le portoit en hâte au temple de Vef- ta, bâti par Numa Pompilius ; & alors elle jettoit ce feu dans des réchauds où vaiffleaux de terre , qui étoient placés fur l’autel de la déeffe, Lipfe adopte ce dermer fentiment de Feflus , & foûrient que le paflage de Plutarque cité ci-deflus, fe doit entendre des Grecs & non des Romains, d’an- tant mieux que les vafes creux dont il parle , & qui n’étoient autre chofe que les miroirs paraboliques , ontété inventés par Archimede, lequel eft poftérieur à Numa de plus de 500 ans. | Cependant, outre qu’on ne peut guere appliquer les paroles de Plutarque à la coûtume des Grecs fans leur faire une grande violence, il feroit aifé de con- cilier Feftus & Plutarque, en ayant égard aux divers tems de la république. Je croirois donc que depuis Numa jufqu'à Archimede, les Romains ignorant l’u- fage des miroirs ardens, ont pû fe fervir de l’inven. tion de produire du féz qui eft décrite par Feftus : mais depuis qu'Archimede eut fait des épreuves merveilieufes avec fes miroirs, & fur-tout depuis qu’il en eut écrit un livre exprès, comme Pappus le rapporte , cette inyention fut connue de tout le mon- de, & pour lors les Romains s’en fervirent fans dou- te comme d’un moyer plus noble & plus facile que tout autre pour rallumer le fex facré, Aréicle de M. le Chevalier DE JAUÇOURT. | _ FEU FEUX D'ARTIFICE, compofñtion de matieres combuftibles , faite dans les regles de l’art (7ayez PyROTECHNIE), pour fervir ou dans les grandes occafions de joie, ou dans la guerre, pour être em- ployée comme arme offenfive, où comme moyen brillant de réjoiuflance. Le méchanifme d’un féx d'artifice dans les deux genres ; la partie phyfique qui guide fa compofition ; la géométrique qui là diftribue, font des objets dejà traités dans Particle ARTIFICE ; dans les favans écrits de M. Frezier; &, en 1750, dans un traité des feux d'artifice de M. Perrinet d’Orval, où la clarté, mulle chofes nouvelles, le defir d’en trouver encore beau- coup d’autres, l'indication des moyens pour y par- venir, montrent cette fagacité fi utile aux progres des Arts, cette étude affidue des caufes & des effets, cette opimatreté dans les expériences , qui caraété- rifent à-la-fois une théorie profonde & une prati- que sûre. Voyez l'article fuivanr. | Je ne crois point devoir toucher à ces objets; je n'ai cherché à les connoître qu’autant qu'ils m'ont paru liés aux grands fpectacles que les rois , les vil- les, les provinces, Gr. offrent aux peuples dans les occafons folennelles : 1ls m'ont paru dans ce cas te- nir & devoir être foûmis à des lois générales, qui fu- rent toùjours la regle de tous les Arts. L’artificier doit donc, par exemple, avoir devant les yeux fans cefle, en formant le plän de différens feux qu'il fait entrer dans fa compoñtion, nôn-feu- lement de les afortir les uns avec les autres’, de fäire reflortir leurs effets par des contraftes , d’animer les couleurs par les mouvemens , & de donner à leur ra- pidité la plus grande ou lä moindre vitefle ; 6c. mais encore de combiner toutes ces parties avec le plan général du fpeétacle que la décoration indique. Cette loi primitive fait aflez preflentir Le point fixe où l’art a toùjours voulu atteindre. Il eft dans la nature de la chofe même, que tout fpeétacle re- préfente quelque chofe : or on ne repréfente rien dans tes occafñons, lorfqu’on ne peint que des objets fans aion ; Le mouvement de la fufée la plus brillante, f elle n’a point de but fixe, ne montre qu'une trainéée de feu qui fe perd dans les airs. | Ces feux d'artifice qui repréfentent feulement & comme en répétition, parles différens effets des cou- leurs, des mouvemens , des brillans du /ex , la déco- ration fur laquelle ils font pofés, füt-elle du plus in- génieux deflein, n'auront jamais que le frivole mé- rite des découpures. Il faut peindre dans tous lès "Arts; & dans ce qu'on nomme /peéfacle ; il faut pein- dre par les aétions. Les exemples dé ce genre de feux d'artifice {ont répandus dans les différens arti: cles de l'Encyclopédie qui y ont quelque rapport. Voyez FÊTES, FÊTES DE LA VILLE DE PARIS; Gc. Les Chinois ont pouflé l’art pour la variété’des formes, dés couleurs, des effets, jufqu’au dernier période. Les Mofcovites font fupérieurs au réftede lEurope , dans les combinaïfons des figures, des mouvemens, des contraftes-du. fez artificiel : pour- quoi , dans le fein de la France ,:ne pourrions -nous pas, en adoptant touf cé que ces nations étrange- res ont déjà trouvé, inventer des moyens, des fe: cours nouveaux, pour étendre les bornes:dun. art dont les effets font déjà fort agréables , & qui pour- roient devenir aufli honorables pour les inventeurs, qu'honorables pour la nation ? | d'A Y a-tal ei encore rién-d’auffiimpofant.en.fezd'ar. cifice ; que Le feroit le combat des bons añges.contre les méchans? Les airs font le lieu-delafcene;: indi- qué par lation même? Les détails font. offerts par le fublime Milton. Deflinez à votre, imagination, échauffée par cette grande image, attaque le com- bat, la chûte,; peignez-vous le fpeétaclé magnifique de ce moment de triomphe des bonsanges ; calçu.- Tome VI, pl | £ 4, FEU 639 lez les coups d’un effet sûr, qui naïffent en foule dé ce grand fujet, Mais il faudroit donc émployér à tous ces fpec: tacles des machines ? Et pourquoi non? A quoi def: tinera-t-on ces ingénieufes reflources de l’art, fon les laiffe oifives dans les plus belles occafions ? Sans doute qu'il faudroit donner à l’artifice du 4, dans ces repréfentations furprenantes, le fecours des bel: les machines, qui en ranimant Padion, entretien: droient lillufion qui eft le charme le plus néceffaires Les Arts ne font-ils pas deftinés à s’entre-aider & à s’unit enfemble ? | On vit à Paris, le 24 Janvier 1730 , üne fête auf _belle-que toutes celles qu’on y avoit données dans les occafons d'éclat. J’en vais donner l’efquifle, par: ce qu'elle fervira de preuve à la propofition que j’at avancée fur laétion que je fouhaite dans les feux d'artifice, taux principes que je propofe plus haut fur leur compoñtion. Voyez FÊTES DE LA Cour. La naïflance de{monfeigneur le Dauphin fut le fujet de cette fête. MM. de Santa-Crux & de Barea nechea, ambaffadeurs du roi d’Efpagne , en avoient été chargés par S. M. Catholique. L'hôtel de Bouillon fitué fur le quai des Théatins vis-à-vis le Louvre, fervit d'emplacement àla icené principale ; il fut comme le centre de la fête & du fpettacle. | Le 24 Janvier 1730, à 6 heures du foir , les il= luminations préparées avec un art extrème ; & dont On trouvera ailleurs la defcription ( Foyez ILLUMI- NATION), commencerent avec la plus grande célé- rité, & la furface de la riviere offrit tout-à-coup un fpettacle enchanteur; c’éroit un vafte jardin de l’un à l’autre rivage du fleuve qui à cet endroit a environ 90 toifes de large ; fur un efpace de 70 dans fa lon gueur! La fituation étoit des plus magnifiques 8 des plus avantageufes, étant naturellement bien déco réeparle quai du collège des Quatre - Nations d’un côté, par celui des galeries du Louvre de l’autre, & aux: deux bouts par le Pont-Neuf & par le: Pont: Roväl. Dr}: ln 1 Deux rochers 1folés on montagnes efcarpées, fym: bole des monts Pyrénées, qui féparent la France de l’Efpagne , formoient le principal objet de cette pom= peufe décoration au milieu de la riviere: Les deux monts étoient Joints par leurs bafes fur un plan d’ens viron 140 piés de long, fur Go de large, 8&c iéparés par leur cime de près de 40 piés, ayantchacun 82 piés d’élevation au-deflus de la furface de l’eau, & dés deux grands batéaux fur lefquels tout l'édifice étôit conftruit. à Kule | On voyoit:üné agréable variété fur és monta: gnes , Où la nature étoit imitée'avec beancoup-d’art dans-tout ce qu'elle a d’agrefte &c:de fauvage: Dans un endroit ic'étoient des: érevañles, avec des quars tiers de rochers en faillie : dans d’autres, des plantes: &;des arbuftes ; des cafcades , des:nappes & chûtes d'eatramitées: par des gafes d'argent , des antres, des cavernes, &c, IL yavoittorit awpourtour ; à fleur: d’eau, des firenes';'des:tritoné::des néréides , & au tres-monftres marins! 180 osé, il n als À une certäine diftance; au-déflus: &c-ati-deffous des rochers;:on voyoit àifleur:d’eau deux parrerres de lummeresriqui occupoient chacun un efpace de 18 toifes fur15;-dont, les bordures étoient ornées als ternativement.d'ifs &c: d'orangers ; avec leurs fruitss de 12 piés de haut, chargés dé lumieres. Le deféin desparterres étoit tracé & figuré d’une mäniere va- riée 8c-agréable partdesterrines , par du gazon & du.fable.de diverfes couleurss:t 24 0 \ Ducmilieu de chacun dé ces parterres s’élevoien des,efpeceside rochers julqu'&la hauteur de’ spiés}, lur un plan;de 330: piés {uf..22. «Onavoit placé aus deflus une figure coloffale, bronzée en ronde bofie, M 2011000 MM 4 648 FEU de 16 piés de proportion. A lun v’étoit lefleuye du Guadalquivir, avec un lion au bas; on lifoit en let- tres d’or, fur l’urne de ce fleuve ces deux vers d’O- vide : Non illo melior guifquam , nec amantior æqui Rex fuit , aut 1ll& reverentior ulla derum. & à l’autre parterre c’étoit la riviere dé Seine avec un coq. On voyoit fur l’urne, d’où l’eau du fleuve paroïfloit fortir en gaze d'argent, ces vers de Ti- bulle : Et longè ante alias omnes mitiffima mater, Tfque pater, quo non alter amabilior. Aux deux côtés des parterres &c des deux monts segnoient fix plate-bandes fur deux lignes auffi à fleur d’eau, ornées & décorées dans le même goût des parterres. Les trois de chaque côté occupoient un efpace de plus de cent piés de long fur 15 de large. Deux terrafles de charpente, à doubles rampes de 20 piés de haut , étoient adoflées aux quais des deux côtés, & fe rerminoient en gradins jufque fur le ri- vage. Elles regnoient fur toute la longueur du jar- din , & occupoient un terrein de 408 piés fur la mé- me ligne , en y comprenant une fuite de décorations tuftiques ; qui fembloient fervir d'appui à ces deux grands perrons ; le tout étoit garni d’une fi grande quantité de terrines, que les yeux en étoient ébloiis, & les ténebres de la nuit entierement diffipées. Le mouvement des lumieres, quienles confondant leut. donnoit encore plus d'éclat, faifoit un tel effet à une certaine diftance, qu'on croyoit voir des nap- pes & des cafcades de feu. Entre ces terrafles lumineufes & le brillant jardin, à la bauteur des deux montagnes , on avoit placé deux bateaux de 70 piés de long, fur 24 de large, d’une forme finguliere &c agréable, ornés de fcul- pture & dorés, Du milieu de chacun de ces bateaux, s’élevoit une efpece de temple oétogone , couvert en maniere de baldaquin', foûtenu par huit palmiers avec des guirlandes, des feftons de fleurs ,-& des luftres de cryftal. Les bateaux étoient remplis de muficiens pour les fanfares qu’on entendoit:alterna- tivement. | int Sur la partie la plus élevée du temple, placé du côté de l’hôtel de Bouillon, on hfoit ce vers de Tibulle. | Orinibus ille‘dies femper natalis agatur, Pour infcription, fur l’autre temple du côté du Louvre, On lifoit cet autre vers du même Poëte : O quantèm) fèlix, rerque quaterque: dies L Le fommet deces deux magnifiques gondoles étoit terminé par de gros fanaux 62 par des étendarts:; fur lefquels on avoit repréfenté des dauphins &r des amours. ; | Les quatre coins de ce vafte , lumineux , 8: ma- gnifique jardin, étoient terminés/par quatre tbrillan- tes tours, couvertes de lämpions à plaque de fer: blanc ,. qui augmentoient confidérablément l'éclat des lumieres, & qui pendant le jour faifoient parof: tre les tours comme argentées, Elles fembloient/s’é- lever fur quatre terrafles de lumiéresinayant 18:piés de diametre, fur 70 de haut, en ÿ comprenant les étendarts aux armes de France & d’Efpagne,, qu'on y avoit arborés à un petit mât chargé d'un gros fallot. TAMRE SE get , Hit 25 a 9 C’eft du haut de ces tours que commençar une partie de l’artifice de ce grand fpeétacle ;'après que le fignal en eut été donné par une décharge de: bof- tes & de canons, placés fur lequai du côté des Fui- leries, &c après que les princes & princeffes du fang, les ambafladeurs & -miniftres étrancers! &c les fei- gneurs & dames de: la cour, invités a (816; furent arrivés à l'hôtel de Bouillon, Onvit partir en même tems derces tours les frs fées d'honneur, & enfuite quantité d’autres artif. ces, foleils fixes & tournans, gerbes, Ex, après quoi commença le fpeétacle d’un combat fur la ri viere, dans les intervalles & les allées du jardin, de douze monftres marins, tous différens, fleurés fur autant de bateaux de plus de 20 piés de long, d'où on vit fortir une grande quantité de ferpenteaux, de grenades , balons d’eau, & autres artifices qui plongeoïient dans la riviere, &c qui en reffortoient avec une extrème vitefle, prenant différentes for mes , comme de ferpens, &c. : Pour troifieme aéte de cet agréable fpeétacle , on fit partir d’abord du bas des deux montagnes, &en- fuite par gradation, des faillies, des crevañles, des cavités, & enfin du fommet des deux monts, une très-prande quantité d’artifice fuivi & diverfifié, ce qui formoit comme deux montagnes de feu dont l’aétion n’étoit interrompue que par des volcans clairs & brillans, qui fortoient à plufieurs reprifes de tous côtés & du fommet dés rochers. Les inter. valles des différens tems auxquels les volcans par- toient , étoient remplis par des fousades très-vives par le grand nombre & par la fingularité des fufées. La fn fut marquée par plufeurs girandes. (B) FEUX D’ARTIFICE , ( Artificier.) on comprend. fous ce nom tout ce qui s’exécute en général dans les fêtes de nuit, par le moyen de la poudre, du falpetre , du foufre, du charbon, du fer, & autres matieres inflammables & lumineufes. Nous traite- rons d’abord de ces différentes matieres. De la préparation des matieres ; G de l'outillage! Article I, Des matieres dont on compofe, les feux: Le falpetre, le foufre, le charbon, & le fer , font prefque les feules matieres dont on fafle ufage dans Varcifice ; leurs différentes combinaïfons varient leg effets &c la couleur des feux : ces couleurs confiftent en une dégradation de nuances du rouge au blanc, le brillant , & un petit bleu clair. On a fait beau- coup d'expériences pour trouver d’autres couleurs 5 mais aucune n’a réufli : les matieres les plus pros pres à en donner, & qui en produifent naturelle- ment lorfqu'on les fond ; comme le zink, la matte de cuivre, & autres minéraux, n’ont aucun effet, dès qu’elles font mêlées avec le foufre & le falpe- tre; leur fez trop vif détruit dans ces matieres le phlogiftique qui donnoit de la couleur: Il y a bien.une compoñtion qui produit une bel- le flamme verte, lorfque l’on brûle quelque matie- re, telle que du papier , du linge, ow de minces . coupeaux de bois qui ont trempé dedans ; elle fe fait avec demi-once de fel ammoniac & démi-once de verd-de-gris, que l’on met diffoudre dans un ver- re de vinaigre: mais comme elle ne réfifte point aw feu du falpetre & du foufre, on n’en fait aucunufa- ge dans Pariifice, rh Ait, IT, Du falpetre, Le falpetre pour lartifice; comme pour la poudre, doit être de la troifieme cuite ; la premiere cuite le forme, & les deux au- tres le purifient : on lé pile, ou, ce qui eft encore plus cominode , on le broye fur une table de bois duravec une molette de bois, & on le pañle auta- mis de foie; plus il eft fin & plus foneffet eft rand. | T2 € falpeire par lui-même incombuftible ne:brûle que lorfqu'il eft mêlé avec des matieres qui contien- nent un fouffe principe , ou ce que les Chimuftes nomment phlogifiique | propre à divifer fes parties & à les mettre en mouvement; tels font le foufre com- mun, la. limaille de fer, l’antimoine , le charbonide bois, Ge, Cette derniere matiere y convientmieux | qué toute autre; puifqu'il fufit pour enflammer le falperre, de lé toucher avec un charbon ardent ; le phlogiftique du charbon qui le pénetre, développe, 8 met en ation l'air & la matiere ignée que le /a/- petre contient , d’où fuit inflammation; elle eft plus ou moins fubite, à proportion qué les, parties de falpetre font pénétrées par plus de côtés à la fois de ce principe inflammable qui les fond & les réduit en vapeurs, & que les reflorts de l'air qu'elles ren- ferment peuvent fe débander & agir en même tems : c’eft leur ation fimultanée qui fait l’explofion ; elle eft l'effet du mélange intime du charbon avec le fa/- petre. La trituration rend ce mélange plus parfait ; & le grainage de la poudre que l'on en-cornpoie en accélere l’inflammation, en multipliantfes furfaces; &c c’eft de la force de l’air fubitement dilaté, unie à celle du fluide réduit en vapeurs, que réfulte la for- ce de là poudre. ; Le charbon de boïs eft la feule matiere que lon connoiïfle qui mêlée au fa/petre puifle produire l’ex- plofion : un fer rouge fond le falperre. fans enflam- met ; il contient cependant ce foufre principe qui dans la limaïlle fait brûler le /a/perre mis en fufon ; mais il eff trap enveloppé pour agir : il faudroit un. |. degré de /2z aflez fort pour opérer comme dans la li- maille, un commencement de calcination néceffaire à {on développement, Art, III, Du foufre. Le foufre le plus jaune eft le . meilleur ; il eft communément bon tel qu'il fe trou- ve chez les marchands: s'il étoit trop gras, ou s’il contenoit quelques impuretés , 1l faudroit le faire fondre & 1e pañler par un gros linge. Le foufre ajoûte de la force au mélange du falpe- tre avec le charbon, jufqu’à un certain point , qui fera indiqué à l’article ci-après ; & pañlé ce point, il affoiblit les compofñitions dans lefquelles on le fait entrer , &ne fert que pour les faire brûler lente- ment, & pour donner au f£4 une couleur claire &c lumineufe. Il n’eft pas d’une néceflité indifpenfable de faire entrer le foufre dans la compoñition de la poudre ; on peut en faire fans cette matiere , mais elle a moins de force, quoiqu'également inflammable. Les fufées volantes &c les jets compofés fans Joufre & feulement de falpetre & de charbon, réuf- fiflent très-bien. Apr Article IV. Du charbon. Tout charbon de bois eft propre à l’arsifice; & s'il y a quelque différence pour les effets entre les diverfes efpeces, elle n’eft guere fenfble que par la couleur que certains bois, comme le chêne, donnent un peu plus rouge ; ce- pendant on préfere communément lé bois tendre & leger , tel que le faule. On doit feulement obferver que comme le bois tendre donne un charboz plus leger, qui fait, à poids égal , un volume de près du double , étant au charbon de bois dur dans la pro- portion de 16 à 9!, il en faut diminuer le poids, non dans cette proportion , mais feulement d’un hui- tieme. Celui dont on s’eft fervi pour les compofi- tions d'artifice données dans ce mémoire, étoit fait de bois de hêtre, qui eft du nombre des:bois durs, Le bois que l’on deftine à faite du charbon doit être bien fec & dépouillé de fon écorce; on le brüle foit dans la cheminée, foit dehors; & à mefure qu'il fe fait de la braïfe, on létouffe daus un vaifleau fermé, comme font les Boulañgers. Lorfqu’elle eft entiere- ment éteinte, on Ôte la cendre qui y eft attachée, en la remuant dans un crible jufqu’à ce qu’elle de- vienne noire. La dofe de charbon & de foufre qui doit donner le plus de force au falpetre , n’eft pas la même pour l’artifice que pour la poudres, Dans la poudte, la trituration tient lieu d’une partie de cette dofe de charbon & dé foufre ; c’eft- à-diress qu'il en faut moins que dans les compofi- tions d'artifice | pour lefquelles 1l fufit de-méler les _matigress hulseattra # F EU Cat Pout l’artifice , la plus grande force que le charbon feul & fans foufre puiffe donner au falpetre, eft fix onces de charbon de bois dur, ou cinq onces deux gros de charbon de bois tendre, fur la livre de falpe- tre, en le fuppofant d’une sroffeur moyenne ; car sil étoit fort gros ou fort fin , il en faudroit une plus grande où une moindre quantité ; il en eft dé même des autres matieres. Du foufre etant ajoûté à cette dofe en augmente la force jufqu’à la quantité de deux onces : mais elle augmentera davantage fi en ajoûtant cés deux onces de foufre, on réduit la dole du charbon de bois dur à cinq onces. Ainf la dofe qui fait la compoñition la plus forte eft de cinq onces de charbon & de deux onces dé foufre, fur la livre de falpetre, poids de feize onces. Pour la poudre , on trouvera à l’article qui fuit la dofe de charbon & de foufre qui peut donner le plus de force au falpetre , dans la trituration & le etai- nage de ces matieres, qui en les divifant en plus pe- tites parties qu’elles ne peuvent l’être dans larsfice, les multiplient en quelque forte, & obligent d’en di- münuer la quantité. On broye le charbon fur une table, comme il a été dit pour le falpetre, & on le pañle par le tamis qui lui eft propre. Le foufre fé prépare de même. Art. V. De la poudre. La poudre s’'employe dans l’'artifice ;ou grainée , pour faire crever avec bruit le. cartouche qui la renferme ; ou réduite en poudre qu’on nomme pouffier, dont l'effet eft de fufer , lorf= qu'il eft comprimé dans un cartouche. On lemploye encore en pâte; pour faire de la: morce & de l’étoupille. Pour la réduiré en pouffer, on la broye fur une table avec une molette de bois’, 8 on la pañle par le tamis de foie le plus fin; on met à part ce qui n’a pü pañler, pour s’en fervir à faire les chafles des pots à feu, c’eft ce qu'on nomme reliez. Cette pou- dre à moitié écrafée eft plus propre à cet ufage que la poudre entiere, dont l'effet eft trop prompt pour que la garniture que la chaffe doit jetter puif- fe bien prendre feu. | L'auteur dé ce mémoire voulant connoître la meilleure proportion des matieres pour compofer la poudre, a fait des éffais graduels, où partant du pre- mier degré de force que le charbon feul & le char- bon joint au foufre peuveñt donner au falpetre, juf- qu’au terme où la force de la poudre commence a diminuer par la trop grande quantité de ces matie: res, ces eflais lui ont donné les réfultats ci-après. 1°, Lé charbon feul & fans foufre étant joint au falpetre, en augmente la force jufqu’à quatre onces de charbon de bois tendre ; fur une livre de falpe- tre ; & la poudre faite dans cette proportion don- he à l’éprouvette neuf degrés. Elle s’enflamme af- fez fubitement dans le baflinet du fufñl, pour faire juger que le foufre ne contribue point ou contribue très-peu à l'inflammation dans la poudÿe ordinaire. Si cette poudre, comme on le préfume,avoit aflez de force pour l’ufage de l’artillerie , elle auroit l’avan- tage de donner beaucoup moins de fumée quela poz- dre ordinaire, & de ne caufer aucune altération à la lumiere des canons ; le foufre étant ce qui pro- duit ces deuxmauvaiseffets, la fumée & lévafement des lumieres. 2°, Du foufre ayant été ajoûté ‘par degrés aux dofes de falpetre & de charbon ci-deflus , les eflais qui ont été faits ont augmenté en force jufqu’à une once; &c à cefte dofe, la podrea donné quinze degrés. 3°, La dofe du charbon:ayant eté diminuée d’au- tant pefant qu’on y a ajouté de foufre, cefl-à-dire GEEe ? CHE Sr 0e ée ; Liys OnciGrs Salpetre.. .. ane Wbrs alor 6-00 5-12 SRE" er Charbon, + + + + # # + + « Q 3 ©& F NTI A 642 E U Soufre ;, 1: QUES a donné dix-fept degrés. | 4°. Ayant comparé cette poudre à dix-fept degrés avec des poudres faites dans les proportions qui en approchent Le plus, elle les a furpañées en force, & de même les poudres faites , fuivant les proportions les plus en ufage en Europe &c en Chine. Celle d'Europe compolée de 2 on. $ gr. 1. tiers charbon & 2 on. $ er. 1. tiers foufre fur une livre de falpetre, n'ayant que 11 degrés. Et celle de Chine, compofée de trois onces dé 2 We RTIOrNeT TABLE DES ESSAIS Qui ont indiqué la meilleure Proportion pour compo/er la poudre. NUMEROS DES ESSAIS. Eflais pour connoitre f l’on peut faire de la poudre fans foutre, & quelle eft la quantiié qui peut donner le plus de force de charbon au falpetre. Liv. onc. s lis. onc. g ni TO NON FORT D IMIO1 MORE 4 n I O © (@) 3 F4 LUDO MONDE CRRA I Ô Ô (@) 4 jé ut DANONE O NRC Et TABNE Ï O O (®) 5 (e} © + OR O O©O © : MAUT LCR S) Dont on a compofé les poudres d’effai. SALPETRE. | CHARBON. | SOUFRE. | Charbon & de deux onces de foufre, fur la livre de falpetre, que 14 degrés. Ù Ces eflais fur la poudre ont été faits avec du char- bon de bois de coudre, dont on fait ufage en Alle- magne. En France, on préfere le charbon de bois de bourdaine, & en Chine le charbon de faule. Ces trois efpeces different peu entr’elles pour la qualité, & c’eft moins à l’efpece de charbon qu’à la dofe de cetté matiere que lon doit attribuer Le plus ou le “moins de force des différentes poudres, | DEGRÉS DE FORCE A L'ÉPROUVETE. Liv, onc gr. o o pe = y Fufe fans ex« L2 e L] e. [2 ® ee plofion. O O O 5 + eo 3 se ; Fait exple OMINONUO RARE EU ‘ fion. O Ô O ® ® 7 (e] (@) [e) L L2 L 2 9 (eh [®) © e é C2 é 8 . OMREOMRO je PAS (ES Le numero $. ayant donné le degré le plus fort, on a ajoûté du foufre à la dote de ce n°, pour connoître fi cette matiere peut en aug- menter la force, & juiqu’à quelle quantité. Sn LA UI owMRor NO hd ide NO MONA PRISES 9 . Ï (e] O O À. © O Îî : [®) o &. F5. . 10 À I O © O 4 1e) © I À 8 = » 14 + EI LUN TRS 1 O©O o O0 4 oO ONE + +. 12 | d Le numero 9. ayant donné le degté le plus fort, on a effayé de retrancher du charbon fans diminuer le foufre, jugeant que la poudre en feroit plus forte, & il s’eft trouvé qu’elle à augmenté de force jufqu’au numero 13. ToNE RE LE RO OL L'ODMS EAN SEONTE EC de MelRO Ep en | tag SON OT NN O RES RE DROLE Enr rt SP UNE an? ai C A NS Sp SE 7e PROPRES MR Pa Dr Rata AC 20 LPTO Me © ONLINE Ge ES) + + + 10 Comparaifon du numero 13. avec les propor- tons qui en approchent le plus, pour s’af- rer que la dofe de ce n°. eft la plus forte. LÉ bu O0: JOB Lo CN A MN dors RAM TM O M TO TO mur 0 | OMMO TUE EE TSH NE LnO asO dunO eue LORS ANA Ltée ft TOME I Oo oO Ohnrtyest td OU SH 4 ah 4 Autre comparaifon du numero 13. avec les poudres faites fuivant les proportions les plus en ufage en Europe & en Chine. POUDRE D'EUROPE, PAC VRP COQ SE © ON DE D ne 5 REC RCE PRE : PouDrE DE CHINE£. PINS Ouro" tros 3er 00 CO AE 7 11 a été fait le 12 Février 1756 au moulin à pou- dre d'Effaune , des épreuves fur les poxdres numéros 513, & 20, qui y avoient été fabriquées la veille, Cesépreuves ontété faites avec l’éprouvete d’or4 donnance qui eft un mortier deiept pouces, lequel avec trois ones de poxdre doit jetier à 50 roïles ug globe de cuivre de 6o:livres:pour que la poudre foit recevable ; & leur produit moyen a été, favoir A trois onces. , Toifes. Prés, Poudreordinaire de guerre prife dans le magäfin. . .u um: . 4... 76 N°. 20. fait dans la même propor- tion de matieres que la poddre ci-déffus. 74 4 NORME ER RTE 1 78 NS EEE PEN ER UTD ï À deux onces. NÉE ee eee sols dv 93 2 NORD ete nisdals de tnt ut M 39 I NRA US ocatiieres Eure 3 11 réfulte de ces épreuves, que la poudre n°. 13 {'quieft celle que les effais mentionnés en Îa table ci-deflus ont indiqué pour être la meilleure propor- tion des matierés ) eft plus forte que celle n°. 20. dont on fait ufage en France. Et que la poudre fans foufre n°. 5. augmente de force à proportion qu’on en augmente la quantité par comparaifon à une pareille quantité d'autre pou- dre , puifqu’à trois onces elle a furpañfé Les poudres de comparaifon auxquelles à deux onces & au-deflous elle étoit inférieure. A juger de ces poudres par les épreuves ci-deffus ; il paroît que celle n°. 13. qui a confervé dans les épreuves en petit comme en grand la fupériorité fur le n°. 20. fera très propre pour le fuñi, &t que celle n°. $. qui gagne dans les épreuves en grand, conviendra mieux pour l’artilerie que la poudre or- dinaïre, puifqu'avec une plus grande force elie don- ne moins de fumée, & qu’elle ne caufera point, ou très-peu d’altération à la lumiere des canons. Comme il y a aufli un maximum à atteindre pour le tems que la poudre doit être battue relativement à la pefanteur de matieres que contient le mortier, & à la pefanteur du pilon au-deffus & au-deflous du- quel la poudre eft moins forte, 1l eft très-néceflaire dele connoître, & de porter fes-attentions fur beau- coup d’autres objets qui, quelque petits qu'ils pa- roiflent, ne laïflent pas de contribuer à la bonté & erfedion de la poudre. Art. VI. Du fer. La limaille de fer, & encore mieux celle d'acier, parce qu’elle contient plus de {oufre, donne un feu très-brillant dans l’artifice, On en trouve communément de toute faite chez les ou- vriers qui travaillent le fer, II ne faut prendre que la plus nouvelle , celle qui feroït rouillée ne donne- roit que peu ou point de brillant. L’artifice dans le- quel il en entre ne peut guere fe conferver que fix jours ; le falpetre qui la ronge & la détruit, lui fait perdre chaque jour de fon brillant. On eft redevable au pere d’Incarville, jéfuite de Pekin, d’une préparation de fer dont les Chinois fe fervent pour former leur feu brillant, & pour re- préfenter des fleurs. Cette préparation, dont jufqu’à préfent on avoit Z fait un fecret, confifte à réduire la fonte de fer en : affez petites parties, pour que le feu de la compofñi- tion dans laquelle on fait entrer cette matiere puife la mettre en fufion. Chaque partie, en fe fondant, quoiqu’elle ne foit guere plus grofle qu'une graine de pavot, donne une fleur large de douze à quinze lignes, d'un feu très-brillant , & la forme des fleurs ett variée, fuivant la qualité de la fonte, & fuivant la figure & la groffeur des grains, qui, s'ils font ronds, plats, oblongs, triangulaires, &c. donnent des fleurs d'autant d’efpeces différentes. Cette matiere, que le pere d’Incarville nomme fable de fer, fe fait avec des vieilles marmites ou tels autres ouvrages de fonte, aflez mince pour pouvoir être caflés & réduits en fable fur une enclume; & . -à FEU 643 comme, malgré leur peu d’épaifleur, on auroit en- core beaucoup de peine à les écrafer, on facilite cette opération, en faifant rougir la fonte à un feu de forge, & en la trempant toute rouge dans un bacquet d’eau fraîche; cette trempe la rend plus caflante. Elle fe cafle mieux auffi lorfque l’enclume & le marteau font de fonte : on étend des draps au- tour de lenclume pour quelefablene fe perde point, ët l’on a foin qu'il ne s’y mêle aucune ordure, Quand On a une certaine quantité de fable, on le pañle d’a- bord par un tamis très-fin pour en ôter une poufliere inutile , on le pafñle enfuite par des tamis de différen- tes groffeurs pour en faire fix ordres différens , de- puis le plus fin jufqwu'à la groffeur d’une graine de rave. On met à part chaque efpece , & on les con- ferve dans un endroit bien fec, pour les garantir de la rouille. Si la trempe donne de la facilité à réduire la fonte en fable, ce n’eft pas fans y caufer quelque altération, & l’on remarque une différence fenfble entre les fleurs que donne celle-ci avec celle de la fonte neuve non trempée, qui font beaucoup plus groffes & plus brillantes ; elle fe conferve auf pius long-tems fans être altérée par la rouille, la dificul- té eft de la caffer ; cependant lorfqu’eile eft fort min- ce l’on en vient à bout, & même on pourroit s’en épargner la peine, en la faifant écrafer fous un mar- teau de forge. | La petite grenaille de fer , dont on fe fert pour ti- rer avec le fufil, fe cafle aifément fans être trem- pée , & donne un très-beau feu; il s’en trouve même d’aflez petite pour être employée en grain. Comme cette matiere n’a d'effet qu’autant qu’elle fe met en fuñon, & qu'il faut un plus grañd feu pour fondre le gros fable que pour le fin , on obfer- vera d'y proportionner la groffeur des cartouches & même la dofe des matierés , qui forment le feu, dont il faut ralentir l'effet , en augmentant la dofe du foufre , à proportion que l’on l’employe de plus gros fable , pour que le feu agiffe plus long - tems deflus. On trouvera ces proportions dans les recet- tes des différentes compofñitions de feu chinois, qu’- on trouvera ailleurs. On peut connoître l'effet du fable fin fans aucune préparation d'artifice. ILne s’agit que d’en jetterune pincée fur la flamme d’une chandelle; il fe fond en la traverfant & donne des fleurs. On eflaye la li- maille de la même maniere ; comme elle contient moins de foufre que la fonte , elle ne donne que des étincelles femblables à celles que rend Pacier , lorf- qu’on le frappe avec un caïllou. L’artifice dans lequel il entre du fable de fer , ne fe conferve que depuis huit jours pour le petit, juf- qu’à quinze jours pour le plus gros, à caufe du fal- petre qui le ronge & le détruit. El feroit à fouhaiter que l’on trouvât quelque moyen pour le préferver de fon aétion. ART. VII, Du carton. Le carton propre à l’arti- fice , fe nomme carte de moulage. Ileft fait de plu- fieurs feuilles de bon papier gris pour le milieu , & blanc pour l'extérieur , collées enfemble avec de la colle de farine ; il doit être affez mince pour que l’on ptufle le rouler commodément pour en former le cartouche. Il fufiit d’en avoir de trois épaiffeurs , favoir de trois feuilles pour les petites fufées, juf- que & compris celles de dix-huit lignes de diametre ; de cinq feuilles pour celle d’au-deflus , & de hit feuilles pour les pots à aigrettes.. On fe fert de gran- des brofles de poil de porc pour faire ce collage ; quand on a deux cents cartons de collés ,.on les met en preffe entre deux planches bien unies , &c au dé- faut de prefle on charge les planches avec quelque chofe de pefant. Après que les cartons ont été fix heures en prefle , On les met fécher , en les fufpen- dant à des cordes avec des crochets de fil.de laiton, 644 F EU ‘On perce avec un poinçon chaque feuille dans deux de fes coins pour pañler lescrochets qui doivent la _fufpendre ; &c quandies feuilles font bien feches , on les remet encore en prefle pour ôter la courbure qu’elles ont pà prendre en féchant. La colle pour le carson & pour le moulage fe fait avec de la fleur de farine de froment : ilfaut la bien détremper dans de l’eau, & l'ayant mife fur le feu, ‘on la fait bouillir jufqu’à ce qu'elle ait perdu fon Odeur de farine ; on la pafle enfuite par un tamis de crin , dans lequel on la manie pour divifer les grumeaux & Ôter tout ce qui pourroit faire quelque bofle au carton dans le collage. Le pere d’Incarville , ci-devant cité pour la ma- mere de faire des fleurs dans l’artifice , nous a auf appris que les Chinois , pour obvier aux accidens du feu , mettent dans la colle des cartouches , de Paroille & du fel commun , ce qui les empêche de prendre feu : ce procédé dont on a fait l’eflai eft fort bon; on a feulement trouvé que l’alun convient mieux que le fel marin, en ce qu'il n’attire pas l’hu- midité comme fait ce fel , & qu'il eft également in- combuftible ; le carcon doit être fait avec la même colle. Sur une livre de farine , il faut mettre une poignée d’alun en poudre : quand la colle eft faite, on la retire du feu & on y mêle à-peu-près autant d’argile détrempée qu’il y a de colle, & auffi claire. ART. VIII. De l’étoupille. On fe fert d’éroupille pour amorcer Les fufées & pour conduire le feu d’une piece à une autre. La matiere de léroupille eft du coton filé ; on lui donne la groffeur que l’on veut en le mettant en plufieurs doubles. Il faut le faire tremper pendant quelques heures dans du vinaigre, ou pour le mieux dans de leau-de-vie ; après qu'ilen eft fuffifamment imbibé , on répand deflus du pouflier, & on manie le coton dans le plat où il a trempé , pour qu'il {e pénetre & fe couvre de cette pâte de poudre; lorf- qu'il en eft fufifamment couvert, on le retire du plat , en le paffant legerement dans les doigts pour étendre la pâte ; de maniere qu'il en foit par-tout également couvert, & on le met fécher à l’ombre fur des cordes. Quand l’érouprlle eft feche , on la coupe pat mor- ceaux de deux piés & demi de longueur , on en forme des bottes ou paquets , & onles conferve dans un endroit bien fec. La groffeur commune de l’éroupille pour les com- munications de feu & pour les fufées de moyenne grofleur, eft d’une ligne & demie de diametre ; pour les ferpenteaux, d’uneligne, & pour les plus groffes fufées , de deux lignes. ART. IX, De l’amorce, On prend de [a poudre en grain , que l’on humeëte d’un peu d’eau , & on la broye fur une table avec une molette de bois, juf- qu’à ce qu’elle foit réduite en pâte bien fine. On s’en fert comme d’un maftic, pour coller & retenir l'étoupille dans la gorge des fufées. ART. X. Ourils les plus néceffaires. Une table de bois dur & une molette pour broyer les matieres ; au défaut de molette,on fe fert d’un maillet à charger les fufées. Quelques écremoires pour amafler & mélanger les compofitions ; ce font des feuilles de laiton fort mince, de quatre à cinq pouces de longueur fur en- viron trois pouces de largeur. Quelques pattes de lievre pour fervir avec l’écre- moire à amafñler les compofitions. Une table pour faire le moulage. Trois ou quatre broffes de différentes grandeurs, faites de poil de porc, pour coller à la colle de fa- rine. Quelques pinceaux de poil de porc pour coller à la colle forte & pour graifler l’artifice d’eau: Une fcie à man pour rogner les gros cartou- ches. Un grand couteau pour rogner les moyens car- touches & pour couper le carton. De grands & de petits cifeaux , pour rogner les pots & les petits cartouches. Un tambour de parfumeur garni de fix tamis , {a- voir , Trois tamis de gaze defoie, Le premier , d’un tiflu fort ferré pour pañler le poujfier , & pour Ôter la poufere inutile du fable de er. | Le deuxieme un peu-plus clair, pour pañfer le fou- fre, le falpetre , & le fable le plus fin où du premier ordre. Le troifieme encore plus clair , pour pañer la fa- ble du deuxieme ordre. Trois tamis de crin. Le premier d’un tiflu ferré,pour pafler du charbon fin pour le petit artifice, & pour le fable dutroifieme ordre. Le deuxieme moins ferré,pour pafler du gros char- bon pour les fufées volantes, & pour le fable du quatrieme ordre. | Le troifieme plus clair, pour mélanger les ma- tieres dont on fait les compoñtions , & pourle fable du fixieme ordre. Le fable du cinquieme ordre fe fait en mettant à part ce qui pañle Le dernier du quatrie- me ordre qui eft le plus gros , avec ce qui pañfe le premier du fixieme ordre qui eft le plus fin. Des balances aflez grandes pour tenir deux livres de compofition. Un poids dé marc depuis le demi gros jufqu’à deux livres. Quelques boites fermantes à coulifle , comme celles des épiciers , pour ferrer les matieres tamifées & les compoñitions. Deux cuilleres de bois ou de fer-blanc pour prendre les matieres dans les boîtes. Trois petits tonnelets pour mettre féparément le falpetre, le foufre & le charbon non brovés. Un barril pour la poudre , de la contenance de dix à douze livres. Des moules de fufées volantes de différentes grof- feurs garnis de leur culot , portant fa broche & des pieces ci-après, La baguette à rouler. Les trois baguettes creufes. La baguette à charger le mañif. La baguette à rezdoubler le carton. Le maillet. La cornée ou cuillere à charger , qui eft la mefure de chaque charge de compoñtion. Et le moule à former le pot. Quelques culots à pointe , pour charger des fer- penteaux & jets, garnis de leurs baguettes à rouler &t à charger. Quelques culots fans pointe pour charger les fu- fées de table &c autres , qui doivent prendre feu par des trous que l’on perce fur la circonférence de leur cylindre. | Un outillage pour les lances à feu, qui confifte en une baguette à rouler , quatre baguettes à charger, & une palette pour frapper. Un boïffeau pour charger les petits ferpenteaux qu'on nomme verille. | Deux moules de différentes groffeurs pour former des étoiles. Trois poinçons à arrêt ,de différentes groffeurs, pour percer la communication du maffif à la chafe des fuféés volantes. Un long poinçon fans arrêt pour piquer les sr es * fes dés pots à feu, & un autre plus petit pott per- cer lès marons & fauciflons. À et . Des vrilles de différentes groffeurs pour percer les fufées de table & autres. Un compas & un pié de roi pour mefurer le dia- metre & la longueur des fufées. | Un gros piton à vis que Pon place dans un potéau de bois pour étrangler les cartouches. Un rabot pour diminuer la groffeur des baguettes des fufées volantes lorfqu’ellés font trop pefantes. Du filide fer & des pinces plates, pour attacher les baguettes aux fufées de tablé. AU NS JS EE -Une petite marmite de fér blanc pout faire chauf- fer la colle-forteau bain-marie, 4 hi »Uné enclume de fonte, & deux gros. marteaux dela même nature, pour faire le fable de fer. - Un aflortiment de cordes & ficelles de différentes groffeurs , pour étrangler & lier les fufées. Un afloitiment de carton & de papier dé diffé- rentes qualités, { * + ‘Une planchette pou tracer les cartouches cubi- ques des marons. | An -- Un chevalet pour ténir les fufées volantes. - Un étaude ferrurier, un marteau, une rape-ä-bois, & quelques limes. | . VE Ces outils n’ont point d’ufage particulier dans, lartifice ; maïs ils fervent dans beauconp d’occa- ions , & il feroit difficile de s’en pañler. ie de Les différentes efpeces de fx d'artifice peuvent fe diftribuer , | | 1°. En jézx qui s’élevent ou qui font portés dans Pair ; tels que les fufées de plufieurs fortes , léser- penteaux, les pluies de fx, les marons , les faucif- ions , les étoiles, &c. Voyez ces articles. + à 2°, En féeux.qui brûlent {ur terre, tels que leslan ces a feu, les jets de-fiz , 1és foléils, les gwrandolés, c. Voyez ces articles | NU É 3°. En feux préparés pout l’eau , tels que lefge2 nouillers ; les trompes, lesjattes, &c. ÿ ces articles. Les effets de ces derniers articles qui, brülent fur Veau & dansl’eau , paroïffent fi contraires À la na- ture du fx, qu’il n’eft pas étonnant que des charla- tans, pour rendre la chofe plus merveilleufe 8 en ti- rer plus de lucte, ayent fait croire qu'il y entroit des drogues fort cheres | comme le vif-argent , l’'ambre jaune, le camphre, les huiles de foufre, de falpetre, le petrole , l'huile de térebenthine, l’antimoine, la fcrûre d'ivoire & de bois , & d’autres ingrédiens - quiprodiifent pouf la plûpart un mauvaïs effet , qui eft de donner beaucoup de fumée. “ai _ Toutes les fufées d'air & de terre brülent dans Veau ; il ne s’agit que de les mettre en état de fur- nager. 7 PE | Art. XT, Dela maniere dé: communiquer le feu d'un artifice mobile à un artifice fixe. Le fecret de cette corn. Muñication de fx a été apporté de Bolôgne en France, en 1743 , par les: fieurs Rupoïeri, aduel- lement artificiers du Roi & de la ville. On admira dansiles fpeétales pyriques qu'ils donnerent fur le théatre de la comédie italienne » l’art avec lequel ils fafoient communiquer le {x fuccefivement & à 3 - tems, d’un foleil tournant à un foleil fixe, 8 de fuite à plufieurs autres pieces mobiles & fixes placées fur un même axe de fer, | L'auteur de ce mémoire ayant trouvé ce fecret, -ils’eft/fait un plaifir de lerendre public dans fon trai- té d'artifice imprimé à Berne en 1 750.U confifte dans une-chofe fort fimple , c’eft d'approcher deux étou- pilles l'une de l’autre, afez près, fans cependant qu'elles fe touchent , pour que l’une ne puifle brû- ler fans donner fx à l’autre : voici la matiere dont il faut opérer. - On fuppofe un foleil fixe, placé entre deux foleils tournans fur un axe de fer; le premier eft fixé deffus Tome VI, | fon moyeu, jufqu FEU 643 pat une cheville qui traverfé fon moyeu & l'axe ; les deux autres font rerenus par des écrous. viflés fur l'axe, au moyen défquels on leur donne pour tourner autant & fi peu.de jeu que l’on veut. | . L'efpace éntre le premier folcil tournant & le {o: léil fixe , eft de fix pouces quatre lignes, On le rem: plit par deux cylindres de chacun trois pouces de lon- guéur 8 de deux pouces de diametre, aufhi enfilés fur l’axe ; ils font collés de colle forte , l'un fur le moyeu du foleil fxe, & l’autre fur le moyeu du {os leil tournant, OE | Entre ces deux cylindres, doit être enfilé fur l'axe ün bouton de quatre lignes d’épaifleur, fur un pouce de diametre : 1l {ert à les tenir dans un écartement de quatre lignes l’un de l'autre; & pouf ne pas mul: tiplier les pieces, on prend ordinairement ce bouton fur l’un dés cylindres dont il fait partie, ou bien on l’yajoûte en le collant deflus, Sur la furface plane de. chaque cylindie un peu at deflus du bouton, doit être creuféé une rainute .cira culaire de deux lignes & demie de largeur,& d’autant dé profondeur, dans lefquelles on colle une étoupil+ le avec de l’amorce; c’eft par ces étoupilles que fe doit faire la communication du 8x, celle d’un cylin« dre ne pouvant brûler qu’elle ne donne /ex à celle dé autre vis-à-vis, n°y ayant que quatre lignes. de, diffance entr’elles, Le /z eft apporté à l’une par une : étoupille, qui partant de l’extrémité du dernier des jets du foleil tournant, vient rendre À létoupille de ladite fainure circulaire, y étant conduite dans une rainure creufée fur le rayon qui porte le jet d’où elle part, fur le moyeu & fur le cylindre, d’où s'étant communiqué par fon extenfion à l’étoupille de la rai- nure circulaire oppofée , il eft conduit de -1à à la gorge de l’un dés jets du foleil fixe >-Par une étoupille, | Souéhée dans un rainure faite {ur fon cylindre 8 fin, 5 AU pié du jet d'où elle va fe rendre, ll | à fa gorge. Ces étoupilles doivent être. bien couver« tes avec du papier collé deflus, excepté, celles qui, | font placées dans les rainures cireulaires ; On les ga+ | rantit des .étincelles de feu avec un tuyau de cartori ou de laiton bien mince, dans lequel on place les: deux cylindres : ce tuyau doit lescouvrir prefqu’en, entier; & pour qu'il ne gêné pas leur mouvement, on lui donne dediametre deux lignes de plus qu'aux, CHARGES UNE UE CNE DEEE Ur 0 A La longueur que l’ondorine aux cylindres, à deux . objets: le premier eft d’éloigner les étoupilles cireu- laires des bords du tuyau qui les couvre, par où les | étincelles pourroient s’introduire : le {econd eft de: tenir les {oleils fixes & tournans dans un écartement: aflez grand pour que le féx ne puife {e communiquer, de l’un à l’autre; ce qui arriveroit s’ils étoient plus proches , quoique les communications {oient. bien. couvertes. : BA Nue #91 . L'efpace, entre le foleil fxe & le fecond foleil tournant, étant garni d’une pareille communication entre deux cylindres, le fx fe portera à ce fecond fo- leil par une étoupille qui tirera fon feu du pié de Pun des jets du foleil fixe; on y percera un trou pour y faire communiquer l’étoupille, & à laquelle il don= nera fez en finiflant, \ De ce fecond foleil tournant, le fx peut de mêa me être conduit à un fecond fixe, & ainf fucceflives ment à plufeurs pieces. | Cette piece d'artifice qu’on nomme rrachine PYTis que, Îe términe ordinairement par une étoile ; elle €ft formée par fix barres de trois à quatre piés de longueur, on les vifle fur un moyeu pareil à-celux d’un foleil fixe, il y a deux jets attachés au bout de chacune fur une traverfe qui croife la barre, leurs gorges fe croifent, & l’ouverture de l'angle qu'on leur donne eft mefurée pour former une étoile ; une étoupille couchée dans une rainure fur chacune des nn 646 FEU barres, qui communique d’un bout. à la gorge des jets, & de l’autre à une étoupille circularre qui en- toure le moyeurau pié des barres, leur communique à tous le fes en même tems. | En place des jets qui forment l'étoile, on peut gar- air les barres de fix foleils tournans’; 1ls doivent être compofés, quoique plus petits, comme ceux décrits ci-deflus , favoir , d’une communication de fes entre deux cylindres, féparés par un bouton, & couverts d'un tuyau de laiton; le tout ne doit avoir au plus que quätre pouces de lonpueur: l'axe fur lequelils doivent tourner, eft une cheville de fer qui trayerfe la roue & les deux cylindres. Elle ‘eft viflée par le bout ; &'affez longue pour traverfer la barre fur la- quelle on veut la placer; on l’arrête avec un écrou derriere la barre qui eft percée pour y donner pafla- ge, lreçoitle féz par l’étoupille couchée fur la barre à laquelle on joint celle du cylindre qui eft appliqué deflus. ge | C’eft avec de pareïls foléils que l’on éclaire les décorations en découpures &t les berceaux en treil- lages ; on les fait ordinairement à trois jets qui pren nent fez fuccefivement. T Arë-XIT, D'une pâté dont les Chinois Je fervent pour repréfenter en feu des figurès d'animaux & des devifes. Noûs devons encore au pere d'Incarville, cette ma: niére de former des figures. Elle confifte en une pä- te faiede foufre en poudre impalpable & de colle de’farine ; dont on couvre des figures d’ozier, de carton où de bois’: ces figures doivent être prenue=- tement enduites d’argille ou terre grafle, pour les empêcher de brülèr ; après que la couche de pâte de foutre efFpotée, & pendant aw’elle eft encore humi- de, on la poudre de pouflier quis”y attache; lorfqu’- elle eft bien feche, on colle des étoupilles fur fes prinéipales parties, pour que 1e feu fe porte par-tout en méme tems, & on Id couvre en entier de papier collé :1és Chinois peignent ces figures de la couleur des anfindux qu'elles repréfentent ; leur durée en fez eft propottionnée à l’épaiffeur de la couche de pâte, uiles couvre. odlr-mtée 4 2 Lorfque lés figures font petites, on peut les mou- let oules: modeler mañives; comme cette pâte ne coufe point en brûlant, elles confervent leurs for- mes jutqu'à çe quelles foient entierement confu- do dolls RS -ais rnbdt ttes Je he On peut auffi en faire ufage pour former dés devi- fes & ‘autres defleins. "3 “Lés Chinois s'en fervent encore pour repréfenter. des raifins; ils leur donnent la couleur pourprée en fubftituant à la colle de farine de la chair de jujubes ; ils les font cuire, & en féparent la peau & le noyau. Cet article eff tiré du Manuel de l'aruficter de M. PzR- RINET D'OR AL, ouvrage excellent, qui nousfour- fira de plus tous les autres articles que nous avons cités plus haut. | FEU GRÉGEO1S, { Hiff. du moyen âge.) efpece de feu d'artifice qui étoit compofé denaphte, de poix, de réfine, de bitume , &c autres corps inflammables, Feu grégeois fignifie feu grec, parce qu’ancienne- nent nous nommions les Grecs Grégeois ; que ce fu- tent eux qui s’en fervirent les premiers, vers lan 660, au rapport de Nicétas , Théophane , Cédrenus & autres; & qu’enfin ils furent en pofleffion pendant trois fiecles, de brûler par le fecret de ce fx, les flottes de leuts ennemis. L'inventeur du feu grégeois , fuivant les hiftoriens du tems, fut un ingémeur d’Héliopolis en Syrie, nommé Callinicus qui lemploya pour la premiere fois dans le éombat naval que Conftantin Pogonat livra contre les Sarrafins,proche de Cizique fur l’Hel- lefpont. Son effet fut fi terrible, ajoûtent les mêmes écrivains, qu'il brûla toute la flotte compofée d’une trentaine de nulle hommes. F E U: Il eft vrai que quelques modernes , & Scaliger em- tr’autres, donnent une date plus ancienne À cette dé- couverte, & l’attribuent à Marcus Gracchus : mais les paffages des auteurs grecs & latins qu'on cité pour favorifer cette opinion, n’en prouvent point la vérité. à Ce qu'on fait plus poñitivement, c’eftque les fuc- ceffeurs de Conftantin fe fervirent du fu grégeois en différentes occafons, prefqu’avec autant de fuccès que lui; & ce qu'il y a de remarquable, c’eft qu'ils eurent le bonheur de garder pour eux feuls le fecret de cette compofition, jufque vers milieu du x, fie: cle, tems auquel il paroït qu'aucun autré peuple ne le favoit encore. | Auffi le feu grégeois fut mis au rang des fecrets de . l’état par Conftantin Porphyrogenete ; enconféquen- ce dans fon ouvrage dédié àRomain fon fils ; furlad- miniftration de l’empite, il l’avertit que lorfque les Batbares lui demanderont du fez grégeois, il doit ré- . pondre qu'il ñe lui eft pas permis de leur en donner, parce qu'un ange quil’apporta à l’empereur Conftan- tin, défendit de le communiquer aux autres nations, & que ceux qui avoient ofé le faire, avoient été dé- vorés par le feu du,ciel, dès qu'ils éroient entrés dans léglhiie. : | | . Cependant malgré les précautions de Conftantin Porphyrogenete , la compofition du fx grégeois vint à être connue ou découverte parles ennemis. Le P, Daniel, dans fon hifloire du fiege de Damietteten 1249, fous S, Louis, rapporte que les Turcs:en fi- rent alors un.terrible ufage. Ils le lançoïent, dit:1l, avec un efpece de mortier, & quelquefois avecune . forte d’arbalête finguhere , qui étoit tendue forte- , ment par lé moyen d’une machine, fupérieure en force à celle des bras & des mains, Celui qu'on ti | roit avec un efpece de mortier, paroïfloit quelque | fois en l’air de la groffeur d’un tonneau, jettant une | longue queue:, & faifant un bruit femblable à celui du tonnerre. Mais voici les propres paroles de Join- ville, qui étoit préfent. » Les Turcs emmenerentun » engin, qu'ils appelloient Za perriere, un terrible en- » gin à mal-faire, & les mifdrent vis à-vis des chats ».chateils, que meflire Gaultier, de Curel & |moi, » guettions de nuit; par lequel enginils nous jette- » rent le fez grégeois à planté, qui étoit la plustterri- » ble chofe que onques jamais je veifle. » Au refte M. du Cange a fait une ample note fur cet endroit, dans laquelle 1l explique la compoñtion & l’ufage de ce feu; jy renvoye le.leéteur pour abréger. On croit communément que le feu grégeois brû- Joit dans Peau, & même avec, plus de violence que dehors, opinion qui eft hors de toute yraiffemblan- ce. Il eft vrai qu’Albert d'Aix (Zv. VII. ch. v.), a écrit qu'on ne pouvoit point éteindre ce fx avec de l’eau; mais en accordant même qu'il ne s’eft pas trompé, fes paroles ne veulent point dire que le fèx grégeois brülât dans l’eau. Encore moins faut-1l penfer que ce feu füt inex= tinguible ; puifque felon Matthieu Paris enl’an 127 on pouvoit l’éteindre avec du vinaigre &c du fable. Les François y parvinrent plufeurs fois en l'étouf- fant avec adrefle, & en empêchant la communica- tion de l’air extérieur, par des peaux humides d’ani- maux nouvellement écorchés, qu'on jettoit deflus. Auf lit-on dans la même hiftoire de Joinville, «Et » incontinent fut éteint le fex grégeois par cinqhom- » mes que avions propres à cefaire. » “23 Enfin l'invention du fex grégeois s’eft perdue au moyen de la poudre à canon qui lui a fuccèdé, 8e qui fait, par le {ecours de l'artillerie, bien d’autres ra- vages que ceux que produfoit le feu grégeois par le foufle dans des tuyaux de cuivre, par des arbalêtes. à-tour, ou autres machines à reflort.Repofons-nous= en fur les hommes policés; ils ne manquerontjamais des arts les plus propres à fe détruire, & à joncher la face de la terre de morts & de mourans. 4rricle de M. le Chevalier DE JaucOURT. FEU, (Théolop.) terme ufité en Théologie pour ex- primer la punition éternelle refervéc aux méchans, Foyez ce qu'on doit penfer dela réalité de ce fèu, au 210j ENFER. On croit communément qu’à la fin des fiecles & avant le jugement dernier,ce monde vifible fera détruit & confumé par le feu. Dieu s’eft manifefté lui-même plufieurs fois fous Papparence du fex. C’eft ainfi qu'il apparut à Moyfe dans le defert, dans un buiflon ardent ; fur le mont Sinai, au milieu des feux & des éclairs: le camp des Ifraëlites étoit conduit pendant la nuit par une co- Jonne de ex; & le S. Efprit defcendit fur les apôtres le jour de la Pentecôte, fous la forme de langues de feu. Auf effl appellé dans les Ecritures & dans les peres, few, ignis, pour marquer l’ardeur de l’amout divin, C'eft dans le même fens que la charité eft ap- pellée 7 feu Jacré, un feu divin, & qu’on la repré- fente fous le fymbole d’ur cœur enflammé, Les Perfans adoroient leur dieu fous l'image & la repréfentation dur fex, parce qu'ils croyoient que cet élément eft le premier mobile de la nature. Eux, les Hebreux & les Romains confervoient religieufe- ment le Jéx facré. Voyez FEU SACRÉ. Vulcain étoit honoré chez les anciens, & particu- Tierement chez les Egygtiens, comme l'inventeur du feu. Bocrhaave prétend qu'il eft fort probable que le Vulcain des Payens étoit le Tubal-cain des Hébreux, qui femble avoir connule premier l’ufage du fez pour la fonte des métaux & pour d’autres préparations chimiques. Voyez CHIMIE. (G) , FEU, (Mychol. Lirér.) Ce fut Prométhée , fuivant {a fable, qui déroba le ex du ciel, &c qui en fitun préfent aux hommes ; ce n’eft pas à dire cependant, qu'illeur en aïtfait connoître Le premier l’ufage & les effets : cette connoiïffance eft fans doute prefque auf. f ancienne que le monde, foit que la foudre ait por- té le futur terre, foit qu'on ait fait du féz par ha- fard en frappant des cailloux, ou de tonteautre ma- niere qui en peut produire artificiellement ; mais Prométhee qui étoit un prince éclairé, découvrit aux habitans de la Scythie, gens barbares & grof- fiers , la maniere d’appliquer le fez à leurs befoins , êc à plufeurs opérations des arts manuels. Voilà ce que defigne Le fez qu'il emprunta du ciel, Ainf Vulcain , premier roi d'Egypte , ayant éta- bli des forges dans l’ile de Lemnos, & appris aux in- fulaires l’art de rendre les métaux fufñbles ou mal- léables , par le moyen du fe, il arriva que tous ceux qui profiterent dans la fuite de fes inventions, nom- merent Vulcain le dieu du fez, & offrirent à ce dieu des facrifices , en reconnoiflance de fes bienfaits. Ce dieu eut plufeurs temples à Rome, &un en- tr4utres dans lequel le peuple traitoit fonvent les affaires les plus graves dela république, parce que les Romains ne croyoient pas pouvoir rien invo- quer de plus facré , pour affürer les décifions qui s'y prenoient, quele ex vengeur dont ce dieuétoit le fymbole ; & dans les facrifices qw'on:lui offroit , on confumoit par Le feu toute la viétimes; c’étoient ‘de véritables holocauftes. Mais pourquoi les Romains préfentoient -ils aux nouvelles mariées du fez 8 de l’eau , lorfqu’elles entroient dans la maïfon de leurs époux ? Denis d'Halycarnafle nous apprend (Zv. 11.) que Romu- Jus inftitua cette cérémonie , lorfqu’il unit les Sa- Bines à leurs raviffeurs ; & ce qu'il y a de plus fin- gulier,, c’eft qwelle fe perpétua d'âge en âge : les Poëtes nons en fourniflent la preuve. . Stace feint agréablement dans fon épithalame de Stella & de Violentilla , que les Mules defcendent Tomé VI, : - FEU 647 du Parnaflé, pour venir préfenter lé feu & l'eau aux nouveaux mariés, Procul ecce canore ni] 7 Q Ê Demigrant Helicone Dee, guafiuntque Over Lampade, folemnent thalamis coeuntibus LOnEML y Et de pieriis vocalem fontibus undam. Valerius Flaccus a orné de la même image {on poëme des Argonautes. | Trde ubi Jaccificas cum conjuge venit ad aras Æ/fonides , unäque adeunt, Paritèrque precari Incipiunt ; ignem Pollux undamque Jugalem Prerulir, Plutarque épuile en vain fon efprit À chercher dez taifons allégoriques du fondement de cet ufage, qui de fon tems étoit encore à la mode. De pareilles coû- tumes n'ont guere d’autres fources que la fuperfti- tion des peuples qui les imaginent, ou qui les em- pruntent de leurs voifins. Article de M, le Chevalier DE JAUCOURT. | A oi! FEU S. ANTOINE , ( Medecine.) On a donné le nom de fe S. Antoine à deux maladies bien différen- tes, &t qui n’ont que quelques fignes fembiables , en quoi l’on a fait comme le petit peuple du royaume, qui dans la derniere guerre appelloit pardours tous les corps de cavalerie des ennemis, Nos anciens hiftorièns parlent brievement & très- obfcurément de l'une de ces deux maladies » & nos joutnaux des favans ont caratérifé l’autre fort au long & fort nettement. , La premiere maladie , connue fous le nom de fx. S. Antoine, fit de grands ravages en France dans le x]. & xi. fiecle, Elle caufoit, dit l’hifloire , la perte des membres du corps , auxquels elle s’attachoit ; elle les deffechoit , les rendoit livides , noirs & gan- grenés ; ce mal épidémique & contagieux attaquoit. les partiesexternes & internes, & s’étendoit {ur tout le monde: c’étoit une vraie maladie peftilentielle. On mettoit les malades dans des lieux écartés 3 & pour empêcher qu’on eût avec eux quelque commu- nication, on peienoit du fez fur les mutailles des en- droits où on les avoit renfermés. On trouvera dans la fatyre Ménippée & dans Rabelais ( deux livres uniques en leur genre }, des preuves de cet ufage, Les gens au fait de linftitution des ordres monaf- tiques , favent que ce fut pour ceux qui étoient at- teints de cette efpece de pefte, qu'Urbain Il. ce pa- pe fi connu dans l’'Hiftoire par les guerres des croi- fades (voyez Particle CROISADE ), fonda deux ans auparavant, l’an 1003 , l'ordre religieux de S. Antoi- ne de Viënnoïs ; & l’on dit qu’on montre encore au- jourd’hui des membres defféchés de perfonnes mor- tes de la maladie en queftion , dans l’hôpital de S. Antoine en Dauphiné , qui eft l’abbaye chef-d’ordre de la congrégation des religieux dont nous venons d'indiquer l’origine. | La feconde maladie qui porte le nom de fx S. An: toine,eft d’un tout autre genre. Ellene paroit que dans quelques pays 8 dans certaines années» elle n’eft point contagieufe, & ne régne guere que parmi le petit peuple : elle provient d’une caufe connue » de la nourriture de pain fait d’une efpece de feigle , qui a dégénéré par des caufes particulieres. Foyez ER- GOT. Pour ce qui regarde quelques maladies éréfipéla. teufes , auxquelles le vulgaire a donné le nom de fx S. Antoine, voyez ces maladies fous leur véritable dénomination, Article de M. le Chevalier DE Jav- COURT. Mis FEU PERSIQUE, ( Medecine.) efpece particulisre d'éréfipele , à laquelle les anciens ont fait quelque attention, Pline l'appelle fofer ; il paroît qu'elle étoit alors moins rare qu’aujourd’hui ; mais comme elle | NNani 648 FEV demande le même traitement que l’éréfipele mali- } gne , nous renvoyons le leéteur.à larsicle ERÉSI- PE LE: Le feu perfique fe manifefte fouvent au-deflus du nombril par une grande tache qui s'étend enfuite, &c forme autour du corps une efpece de ceinture, large de quelques pouces, accompagnée d’une ar- deur violente &c de puftules acres & corrofives , qui brûlent comme le fez. Cette éréfipele eft fort dange- reufe dans les vieillards cacochymes ; elle left en- core davantage, lorfqu'elle fe manifefte dans les fie- vres peftilentielles fous les mammelles, les aiflelles, fur le bas-ventre, le nombril, les aines, la région du cœur , & fur les autres parties glanduleufes du corps. Si la tache ou ceinture qui caraëtérife le fe perlique, au lieu d’être rouge , fe trouve de couleur livide & plombée , on remarque que cette lividité dégénere aflez promptement en une gangrene mor- telle. J'en ai vü le trifte exemple une feule fois , &c le malade déjà fexagénaire , périt en 24 heures, fans prefque aucune fouffrance. Platérus a décrit cette maladie fous le nom de rzacula lata | mais 1l n’en a pas indiqué les caufes ; & par malheur les remedes ne font que trop communément inutiles , fi la natu- re ne fait par fa vigueur le principal de la guérifon. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FEU, (serrz de) Géogr. Voyez TERRE DE FEU, ou TERRA DEL FUEGO. Feu ,(Lirérat, ) Après avoir parcouru les diffé- rentes acceptions de fes au phyfique , il faut pañler au moral, Le feu , fur-tout en poéfie, fignifie fou- vent l’amour, & on l’employe plus élégamment au pluriel qu’au fingulier. Corneille dit fouvent un beau feu ; pour un amour vertueux & noble : un homme a du feu dans la converfation, cela ne veut pas dire qu'il a des idées brillantes &c lumineufes, mais des expreflions vives, animées par les geftes. Le fez dans les écrits ne fuppofe pas non plus néceffaire- ment de la lumiere & de là beauté , maïs de la vi- vacité , des figures multiphiées , des idées preffées. Le fez n’eft un mérite dans le difcours & dans les ou- vrages que quand il eft bien conduit. On à dit que les Poëtes éroient animés d’un fêz divin, quand ils étoient fublimes : on n’a point de génie fans feu, mais on peut avoir du fix fans génie. Article de M. DE VOLTAIRE. FEUDAL , (Jurifprud. ) eft le même que féodal, Woyez ci-devant FÉODAL. (4) FEUDATAIRE , (Jurifpr.) eft celui qui tient un héritage en fief de quelqu'un ; le vañlal ou fergneur du fief fervant eft féudaraire du feioneur dominant. Voyez Fier & VASsAL. (4) | . FEUDE,, (Vurifpr.) du latin feudum, {e difoit an- ciennement pour fief. Voyez ci-après FIEF. (4) FEUDISTE , ( Jurifpr.) c’eft une perfonne verfée dans la matiere des fiefs : on dit quelquefois un ax- teur Où doûeur feudifle , ou fimplement un fedifle, A FÂVE » {. Ê. faba( Hiff. nat. bor, ) ; genre de plan- tés à fleurs papihionacées ; le piftil fort du calice, & devient dans la fuite une gouffe longue, qui renfer- me des femences applaties, & faites À-peu-près en forme de’reih : ajoïtez aux caraéteres de ce genre, que les tiges font fermes & garnies de feuilles rau- gées par paires fur une côte terminée par une petite porte. Tournétort, Tnfi. re herb. Voyez PLANTE, PET se Boërhaave compte fix efpeces de ce genre de plante, & Tournefort huit ; mais il fufira de décrire la principale, que les Botaniftes ap. pellent febä major, & les François feve de Jardin ou de marais. Voyez donc FEVE de jardin , ( Botan.) ‘ Dodonée donne le nom de 40072 à la graine de FEV cette plante; les Allemands difent 200 , jes Anpglois bear, & les habitans de la Lombardie btjana. Ce fruit légumineux eft un de ceux qui peuvent le mieux fervir à découvrir la nature & la ftruêure des graines en général. On diftingue dans celle-ci, outre fes deux peaux , trois parties qui la compo fent ; de plus fon corps eft partagé en deux lobes, dont l’un.eft appellé la radicale, &z l’autre la plume ; la radicule devient la racine de la plante, & la plu- me forme fa tige , portant feuilles & fleurs : c’eft dans la plume qu’exiftent Les feuilles de la féve déli- catement roulées, & déjà formées dans le même état où elles doivent fe déployer hors de terre. Les parties organiques & fimilaires de la feve font, 1°. la cuticule qui fe nourrit, croît avec la féve , & s'étend fur toute fa furface ; 2°, lé parenchyme qui eft le même dans les lobes, la radicule , la plume, & le corps de la fève ; 3°. le corps intérieur , diftri- bué partout le parenchyme , & que Grew nomme la racine féminale, & diftingue de la radicule. Dans la racine qui eft compofée d’une pellicule , d’une partie corticale , & d’une partie ligneufe, fe trouve fouvent une efpece de moëlle douce & pulpeufe. Voyez ici l’anatornie des plantes du célebre auteur an- glois ; cat comme il n’eft pas poffible d’entrer dans les détails, nous ajoüterons feulement , que fuivant les obfervations de Boyle, l’expanfon de la féve dans fa croïflance , eft fi confidérable , qu’elle peut élever un corps chargé de cent livres de poids, Article de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FÊVE de jardin, (Botaniq.) faba, Raï hift, 000. | faba major hortenfis | Of. faba flore candido lisuris 21: gris confpicuo | C..B. P. 338. faba cyamos , J. B. 2. 278. faba major recentiorum , Lob. Icon. 57. &:c. La racine de fêve de jardin où de marais, comme on dit à Paris, eft en partie droite &z en partie rem- pante, garnie de tubercules & de fibres : fes tiges {ont hautes de deux coudées & plus, quadrangulai- res, creufes, couvertes de plufeurs côtes qui nai {ent par intervalles, terminées en pointe, auxquel- les font attachées des paires de feuilles fans fymmé- trie , au nombre de trois , de quatre, de cinq, ou. davantage, oblongues, arrondies , un peu épaiñes, bleuâtres , veinées, &c liffes. Ses feuilles naiffent plufñeurs en nombre des aïf- felles des côtes fur un même pédicule , rangées par ordre & du'même côté : elles font lécumineufes ; la feuille fupérieure ou l’étendard eft blanc, panna- ché de veines purpurines, & pourpré à fa bafe ; les feuilles latérales ou les ailes, font noires au milieu, &c blanches à leur bord ; la feuille inférieure ou La carine , carine, eft verdâtre. Leur calice eft verd, partagé en cinq quartiers ; il en fort un piftil qui fe change dans la fuite en une goufle longue, épaifle , charnue, velue, rele- vée , remplie de graines ou de feves , au nombre de trois , de quatre, de cinq, & rarement d’un plus grand nombre : elles font oblongues , larges, appla- ties, en forme de rein , grofles , & pefant quelque fois une demm-dragme ; ordinairement elles{ont blan- ches, quelquefois rouges; elles ont une marque lon- gue.êt noire à l'endroit où elles font attachées à leur gouffe. L’écorce de cette fée elt épaifle , 8 comme: coriace,, fa fubftance intérieure étant defféchée , eft dure, folide , & fe partage aïfément en deux par- ties , entre lefquelles fe trouve à une des extrémités, la plontale, quieft très-apparente, f Après.que cette plante a donné {a graine , êlle fe ! deffeche entierement. Les féves vertes & mûres font des léoumes dont on mange fonvent ; on les cultive, beaucoup dans toute l'Europe. ip Mais il tegne une grande difpute parmi les Bota- nifles , pour favoir fi notre feve où le boozz de quel , ques modernes (4007 par les" Allemands, & Seam par les Anglois }, eft la féve des anciens. On trouvera cette queftion traitée dans Tragus, Dodonce, J. Bau- hin, C. Hoffman, Melchior Sebizius | &c. Ce qui eft certain, c’eft que la /£ve des anciens étoit petite & ronde, comme on le peut voir dans plufeurs en- droits de Théophraîfte, de Diofcoride , & autres. D'un autre côté , on a bien de la peine à croire qu-- un légume qui étoit fi commun , & que l’on em- ployoit tous les jours, ne foit plus en ufage à pré- dent , ou qu'il ait changé de nom , &t que le hooma aît pris fa place &c fon nom, fans que perfonne s’en foit appetçu ; car ce h0oz2 nous eft donné d’un con- fentement unanime pour la feve, & le mot faba des Latins, répond au zveuos des Grecs ; ce changement de nom n’eft cependant pas fans exemples. Les feves vertes contiennent un fel effentiel am- moniacal, tellement mêlé de foufre, de terre , & de fleome , qu'il en réfuite un mucilage ; mais lort- qu'elles font mûres , un peu gardées & defléchées, 1l fe fait une certaine fermentation intérieure , qui diflout ce mucilage, 8 qui développe de plus en plus les principes. Les fels acides, par un nouveau mélange avec le foufre &c la terre , fe changent en des fels urineux volatils , ou en alkalis fixes : c’eft pourquoi on trouve une plus grande quantité de ces {els volatils dans les févesmüres, & elles ne donnent prefqu'aucun fel acide dans la difilation, Ces re- marques font de M. Geoffroy. __ Pour ce qui regarde la nature & les vertus de la feve, voyez FEVE de jardin, (Matiere médic. & Diese.) Article de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FEVE DE JARDIN, (Mar. méd, & Diere.) nous fai- fons beaucoup plus d’ufage aujourd’hui de la féve de | jardin ou marais, dans nos cuifines, que dans nos boutiques : on les mange vertes & fraiches dans les meilleures tables, après les avoir fait cuire avec des herbes aromatiques, la farriette , par exemple, & les autres aflaifonnemens ordinaires; entieres, lorf- qu’elles font tendres ; & écorcées, lorfqu’elles com- - mencent à durcir en müriflant ; lorfqu’elles font {e- ches, on en fait de la purée : en général on en man- ge peu de féchées à Paris. Mais 1l y a certaines pro- vinces où elles font une nourriture fort ordinaire : fur mer les matelots en font un ufage journalier, L’o- pinion commune eft que nos feves font venteufes & || difficiles à digérer : mais en général on peut dire que ÿc’eft un mets fort bon pour les gens de la campagne, qui font accoûtumés à des travaux durs, auffi-bien que pour les gens de mer ; au lieu qu'il ne convient point aux perfonnes délicates , ni à celles qui ne s’oc- cupent point de travaux pénibles. Ifidore aflüre que les feves ont été le premier légu- me dont les hommes ayent fait ufage. Pline rapporte que les feves étoient de tous les légumes ceux qu’on révéroit le plus ; parceque, dit cet auteur, on avoit tenté d'en faire du pain. Il ajoûte que la farine de fe- yves s’appelloit lomerrum qu’on la vendoit publique- ment, & que l’ufage en étoit fort commun tant pour les hommes que pour les beftiaux. Il y avoit, felon le même Pline, des nations qui mêloient cette fari- ne avec celle de froment. | e | Quant à l’ufage médicinal, on peut dire en géné- ral que nous employons rarement les feves ; leur fa- rineveft une des quatre farines réfolutives. Foy.Fa- RINES (Zes quatre). Riviere & Etmuler recomman- .| dent celle de féve:en particulier comme unexcellent difcufhféc réfolutif, appliquée en cataplafme ; dans les inflammations'des teficules. | = DATA On diftille quelquefois, chezles Apothicaires, les fleurs de féves, & cette eau eft.eflimée bonne pour tenir le teint frais, & blanchir la peau: on fait avec cette eau, &t la farine de féve!, un cataplafme très-li- quide, qui, appliqué fur le vifage, alle pour en ôter les taches de roufleur. | | FEW 649 . On tenoit autrefois dans les boutiques une eau difllée de gouttes de fêves, & un {el fixe tiré des cendres de toute la plante ; on regatdoir cette eau ë ce fel comme de puiffans diurétiques, & même comme des fpécifiques dans la néphrétique : mais on et revenu de cette niaiferie ; on ne ptépare plus cer- te eau, & fort rarement ce fel. (4 FEVE DE BENGALE, (Mar, méd.) fruit étranger, quon trouve fouvent avec le myrobolan citrin, & qui nous vient des Indes orientales par les vailleaux de nos compagnies, Myrobolani fpecies à nonrullis credita , Rau Dendrol. 134. Faba Bengalenjrs, Anol, C'eft une excroïflance compate, ridée, ronde, ap- platie, creufée en maniere de nombril, large d’envi- ron un pouce, brune en-dehors, noirâtre en-dedans, d’un goût fiptique & aftringent fans odeur, Le doéteur Marloë medecin anglois, eftle premier, dit Samuel Dale, qui ait fait connoître & mis en ufas ge ce remede étranger fous le nom énigmarique de fève de Bengale : c’eft pourquoi quelques-uns ont cru que c’étoit le fruit de Bengale de Clufus, £xor. dir. TL ch, xxjv. d’autres, que c’eft une efpece de myro= bolans ; d’autres enfin, que c’eft la fleur du myrobo- lan citrin, parce qu’il fe trouve fouvent avec ces fruits. Mais Dale croît que c’eft une excroiffance qui s’eft formée par la piquûre de quelque infete, ou plütôt que c’eft le myrobolan citrin lui-même, qui bleffé par cette piquûre, a pris une forme monftrueu- {e. On obferve fouvent que les prunes étant piquées par quelque infeéte, perdent leur figure naturelle & deviennent creufes en- dedans fans contenir aucun offelet. * Ce fruit n’eft pas d’un grand ufage en France: ce. pendant comme il eft fort aftringent , on peut l’em- ployer avec urilité feul , ou joint aux myrobolans, & autres remedes de mème efpece, dans les diar- rhées, les dyfenteries, les hémorrhagies, & tout cas où1l s’agit d’incraffer modérément le fang, de refler- rer les orifices des veines & artérioles, & d’adoucir les humeurs acres, #rricle de M. le Chevalier DE Jau- COURT, | | FEVE D'ÉGYPTE, (Bor. exofig.) cette plante cu- rieufe par fa beauté, eft la zymphæa affinis malaba- rica , folio & fore amplo ; colore candido , Hort. Mal. 11. 30. fab. 30. Breyz Nelumbo Zeylonenfium. Tour. int. 261, Nelumbo nymphæea alba indica, maxima , Jiore albo, fabifera , Herm. Muf. Zeyl, 66. Nymphæa indica , glandifera , indiæ paludum , gaudens foliis ur bilicatis , amplis , pediculis fpinofës, flore rofeo, purpu- Treo, &.albo, Pluk. Almag. 267. . Ainfi nos meilleurs botaniftes connoïffent la fève d'Egypte pour une efpece de nymphée à fleurs blan- ches, pourpres , & incarnates; idée qu'Hérodote femble en avoir eue, lorfqw’il a parlé d’un lis d’eau, couleur de rofe, & d’un lis blanc, qui naiffent dans le Nil. Sa fleur eft peut-être la même qu’un certain poëte préfenta comme une merveille à Hadrien, fous le nom. de lotus antinoier , fuivant le témoignage d’A- thénée, Ly. XV. & Plutarquel’appelle Z crépufcute, par rapport la couleur de ce beau moment du jour. Son fruit, qui a la forme d’une coupe de ciboire, en: portoit Le nom chez les Grecs; dansles bas-reliefs, fur. les médailles, & fur les pierres gravées , 1l fert fouvent de fiége à un enfant. ° e La tige de la feye d'Egypte a une coudée de haut; fes feuilles font très-larses, creufées en forme de nombril, & attachées à des pédicules hérifés de pi. quans. Voyez les figures de la plante entiere dans les auteurs que nous avons cités, Plucknet, Breynius, 82: Commelin. Arricle de M; le Chevalier. DE Ja U= COURT, . 2 Re _FEVE DE S.IGNACE, (Bor. 6 Mar. med.) .en latin faba fanitr Ignatii, off, Ieafur , feu nux vomica legi- 69 FEV tima ferap, G.Camelhk, Mananaag, Indor. Catholo- gan, Gr Pepita de Bifayas, Hifpanor. Cette eve eït un noyau arrondi, inégal, en quel- que-manière noueux, très-durs à demi-tranfparent, & d’une fubftance comme de-corne, très-dificile à rompre, facile à raper, femblable à la noix vomi- que, de la groffeur d’une aveline, du goût d’un pe- pin de citron, maisbeaucoup plus amer; d’une cou- . leur prife, verdäâtre, ou rougeâtre en-dehors, & blanchâtre en-dedans, Voyez Hills, Aif. mar. med. pag. 509. Les PP. Jéfuites portugais - miflionnaires nous ont apporté vers le commencement de ce fiecle, des îles Philippines, cette efpece de noyau qui'étoit inconnu qufqu'alors en Europe. La plante qui le produit s’appelle catalongay, & cantara ; G. Camelli, aë. philof. Lond. 2°. 250. Cu- curbitifera Malabathri folis fcandens ; catalongay 6 cantara Philippinis orientalibus ditla , cujus nuclei Pe- pitas de Bifayas, ant catalogan , & fabæ fantti Ignati ab Hifpanis, Igafur, 6 Mananaag infulanis nuncu- spati , Pluck. Mant. | Cette plante qui vient dans l'ile de Luzone & dans les autres Philippines, eft de la clafle des grimpan- tes, &-monte même en ferpentant jufqu’au haut des plus grands atbres. Son tronc eft ligneux, life, po- reux , quelquefois de la groffeur du bras, couvert d’une écorce raboteufe , épaifle , & cendrée, Ses feurlles font grandes, garnies de nervures, ameres, prelque femblables à celles du malabathrum, mais plus larges. Sa fleur reffemble à celle du grenadier. H lui fuccede un fruit plus gros qu’un melon ; cou- vert d’une peau fort mince, inifante, life, & d’un vera fale, ou de couleur d’albâtre : fous cette petite peau eft une autre écorce d’une fubftance dure, & comme pierreufe. L'intérieur de ce fruit eft rempli d'une chair un peu amere, jaune & molle, dans la- quelle font renfermés Îe plus fouvent vingt-quatre noyaux de la groffeur d’une noix , lorfqu'ils font frais, couverts d’un duvet argenté, & de différentes & inégales figures : ces noyaux en féchant diminuent & n’ont plus que la groffeur d’une noïfette ou ave- line. Voilà cetteavelime connue en matiere médicale fous le nomde fève de S, Ignace. Ceux qui en font ufage, la donnent aux adultes, réduite en poudre par le moyen d’une fine rape, à la dofe de 24 grains, & à celle de 4 grains pour les pe- tits enfans : d’autres la font macérer pendant douze heures dans du vin,ou quelque eau diftillée convena- ble, & en prefcrivent linfuñon. L'huile de ces feves eft un puiflant émétique , à la dofe d’once j. La tein- ture jaunâtre de cette nokx, par Le fecouts de lefprit- de-vin, fe prefcrit intérieurement depuis fcrupulej. juiqu’à demi-dragme , & efl recommandée extérieu- remernt contre la fciatique & autres douleurs des articulations. Quelques-uns vantent les vertus de ces noyaux & leurs diverfes préparations dans les affeétions coma- teufes , la léthargie, lapoplexie, la paralyfe, l’épi- lepfe, les porfons, & même dans d’autres maladies plus communes, comme le catarrhe , les vers, la co- lique, la fuppreffion des mois & des vuidanges. We- dehus prétend avoir heuteufement employé la féve de S, Ignace dans les fievres continues, Michel Ber- nard Valentm, qui a le premier publié une differta- tion fur cette fève, dans fon traité des polychreftes exotiques, & depuis dans fon liftoire réformée!des fimples, n’en fait pds de moindres éloges que {on compatriote , pour la cure des maladies chroniques invétérées. | :* Le P. Georges Camelli jéfuite, dans fa defcription des plantes de l'ile de Luzone, la principale des Phi. lippines, croit que ce noyau eft la noix vomique de “Sérapion. Poyer la lettre de ce curieux jéfuuite, adref- 2 e FEV fée à Raï 8 à Petiver, dans les Tranf! Philefop, ani 1699 ; pag. 87 , 8t dans les aifa eruditor , an, 1700 y pag. 552. Î| rapporte dans cette lettre plufieurs dé- tails, que nous ne tranfcrirons pas , fur l’eflime fin- guliere qu'en font les Indiens ; mais il ajoûte à fon récit des obfervations qui prouvent clairement com- bien la féve de S, Ignace eft dangereufe, puifqu’elle produit dans les Efpagnols des mouvermñens fpafmo- diques, le vertige, la fyncope, & des fueurs froides. C’en eft trop pour juftifier que les qualités de ce noyau ne font guere différentes de celles de la noix vomique : aufh ce remede n’eft point ufité par tout ce qu'il y a de medecins éclairés, fages & prudens; peut-être même feroit-on bien de le bannir entiere- ment de la Medecine. En effet qu'avons-nous befoin de drogues étrangeres , plus capables d’infpirer des alarmes que de la confiance, dans le fuccès de leurs opérations ? Article de M, le Chevalier DE JAau- COURT. | FEVE, (Æiff, anc.) La feve, je dirai mieux le vas pos des Grecs, & le faba des Latins , étoit refpedée ou tepardéé comme impure par plufeurs peuples de l'antiquité, & en particulier par les Egyptiens ; car leurs prêtres s’en abftenoient, felon le témoignage d’Hérodote. Les Romains les employoient dans les funérailles, & autres cérémonies funebres. Voyez LÉMURALES. Le vulgäaité croyoit que ce monde étoit rempli de démons, /emures , les uns bons qu'ils appelloient Z4- res , les autres mauvais qu’ils nommoient fpeûtres, larvæ , fpeütra. I étoit perfuadé de apparition de ces dermers ; opinion foile dont il n’eft pas encore re- venu, & dont 1l ne reviendra jamais. Ce fut pour appaifer ces malins génies, qu’on jet- toit fur les tombeaux quantité de féves , qui pafloient pour le fymbole de la mort. Ces idées ridicules don- nerent naïflance à la Nécromantie, que l’avidité du gain fit embrafler à plufieurs impofteurs, Ils mirent à profit l’ignorante crédulité du peuple, en s’attri- buant le pouvoir d'évoquer les ames, de les inter- roger, & d’en apprendre l'avenir. 7oy. EvocATIoN & NÉCROMANTIE. On peut lire dans les faftes d'Ovide, la maniere dont ils‘évoquoient les mauvais efprits, en leur of- frant des feves. N’eft-ce point-là l’origine de l’ufage qui regne encore en plufeurs pays catholiques, d’en manger & d’en diftribuer le jour de la commémora- tion des morts à | | Maïs qu’a voulu dire Pythagore par la célébre or- donnance qu'il fit à fes difciples de s’abfténir des fe- VES » ruapoy amtxs? Les anciens eux-mêmes exphi- quent diverfement ce précepte, & par conféquent en ignorent le véritable fens. Quelques-uns lenten- dent des féves au propre ; parce que leur nourriture eft nuifible à la fanté des Gens de Lettres, qu’elle caufe des vents, des obftruétions dans les vifccres, appefantit la tête, trouble Pefprit, & obfcureit la vüe: c’eft le fentiment de Cicéron, de divinas. 15h. F, cap. xxx. D’autres, comme Pline le raconte, lattri buent à ce que les féves contiennent les àmes des moïts, & qu'on trouve fur leurs fleurs des Lettres hr- gubres. D’autres prennent le mot de +0ayos énigma tiquement , pour l’mpuresé 8 la luxure. Le Il y en a qui interpretent, avec Plutarque, cette défenfe des charges de la république; car on fiitque piufieurs peuples de la Grece fe fervorent des fèves au lieu de petites pierres, pour l'élection de leurs “magiftrats. À Athenes, la /éve blanche défisnoit là réception, l’abfolution, la réfection, la condamna- tion, & la noire. Ainf, felon Plutarque, Pythagore recommandoit ici figurément à fes difeiples, de pré- férer une vie privée totjours sûre & tranquille, aux “magiftratures pleines de troubles & de dangers. - "1 Enfin pluñeurs anciens & modernes cherchent FEV danse philofophie de Pythagore, l'explication na- turelle de fon précepte ; & ces derniers me femblent approcher le plus près de la vérité. En effet Pytha- gore avoit enfeigné que la féve étoit née en même tems que l’homme, & formée de la même corrup- tion: orcomme il trouvoit dans la féve je ne fai quelle feflemblance avec les corps animés, il ne doutoit point qu’elle n’eût aufi une ame fujetté comme les autres aux vicifitudes de la tranfmigration, & par conféquent que quelques-uns de fes parens ne fuf- fent devenus féves ; de-là le refpett qu'il avoit pour ce légume, & l’interdi@ion de fon ufage à tous fes difciples. | Cette opinion de Pythagore que nous venons d’ex- pofer, n’eft point un fentiment qu’on lui prete; elle fe trouve détaillée dans la vie que Porphyre a faite dece philofophe. Auf Horace , qui long-tems avant Porphyre ne doutoit'point que cette idée de tranf- migration ne füt celle de Pythagore, s'en eft moqué plaifamment dans une dé fes fatyres: 0 quando faba Pythagore cognata , fimulque _Unüta Jatis pingui ponentur olufcula lardo ? F: Sat. y. lib, IT, F. 63. & Quand pourrai-je, dit-il, dans mes repas tufti- » ques, en dépit de Pythagore, me régaler d’un plat » de fèves ; & manger à difcrétion de mes légumes, » nourries de petit-lard » à Au refte le leéteur eft maître de confulter fur cette matiere Voflius, de Idolo!, lib, III, cap, xxxv. 1, IV. caps %xcviy. lib, V, cap. xj. xÿ, xxv. @ xljx. & quel- ques auteurs qui ont développé le fyftème de Pytha- gore. Voyez auffi PYTHAGORICIENS. Article de M. de Chevalier DE JAUCOURT. FEVE , (Manége, Maréchall.) maladie de la bou- che; elle eft encore connue fous le nom de Zampas. Elle confifte dans un tel degré d’épaifleur de la mem- brane qui tapifle intérieurement la mâchoire fupé. rieure , & qui revêt le palais, que cette membrane excede confidérablement la hauteur des pinces ; fou- vent aufli elle fe propage de maniere qu’elle anticipe fur ces mêmes dents. Je ne fai pourquoi les auteurs qui ontitraité de l’art vétérinaire , n’ont point parlé de ce dernier cas. Ce prolongement ou ce volume contre nature n’a rien qui doive étonner, lorfque l’on confidere que la mucofité filtrée & féparée dans la membrane de Schucider, fe répandant fur celle dont il s’agit, par les ouvertures que lui préfentent les fentes incifives , l’humete & l’abreuve fans cefle. C’eftprécifément dans le lieu de ces ouvertu- res qu’elle s'étend ou s’épaifit au point de rendre Pation de manger difficile à l'animal; & celle de tirer le fourrage encore plus laborieufe 8:même im- poffible , vü la douleur qu'il reflent à chaque inftant où fe joignent les extrémités des dents antérieures, entre lefquelles cette membrane fe trouve prife & ferrée. Dans la pratique, on remédie par le moyen du cautere aëtuel à cette maladie. Le maréchal, après avoir mis un pas-d’âne dans la bouche du che- val, & s’être armé d’un fer chaud, tranchant & re- courbé à l’une de fes extrémités (voyez FER À LAm- PAS), confume cette partie gonflée précifément en- tre les deux premiers de ces fillons tranfverfes qui, très-évidens dans l'animal & fort obfcurs dans hom- me, s'étendent d’un bord de la mâchoire à l’autre. On obferve que le fer ne foit point trop brûlant, & ne porte atteinte à la portion offeufe de la voûte pa- latine ; ce qui néceffairement occafionneroit une ex- foliation & de véritables accidens, Quelqw’ancienne, quelque commune que foit cette opération, je ne la crois point indifpenfable. S'il n’eft queftion que du gonflement de la membrane, gonflement qui ne fur- vient ordinairement que dans la bouche des jeunes chevaux, & qui fouvent ne les incommode point, FEU 6st il fuflirä , pour le diffiper, d'ouvrir là veine palatine avec la lancette ou avec la corne. Voyez PHLÉBO- TOMIE, Si la membrane s’eft prolongée juique fur les pinces, on pratiquera la même Hate ; après avoir Coupé avec des cifeaux ou avec un biflouri cette partie éxcédante ; & lorfque l’animal aura ré» pandu une fufifante quantité de fang, orflui lavera _ Ja bouche avec du vinaigre, du poivre & du fel » À on lui fera manger énfuite du fon fec. Ces précaus tions réufliflent toûjouts , ainfi on peut envifager l'application du cautere comme une reffouree con. facrée plütôt par l’ufage que par la néceffité. (e FEVE, (Germe de) Manége, Maréchal, Ceft inf -que nous nommons l’efpece de tache on de marque noire que nous obfervons dans le milieu des douze dents antérieures des poulains , Jufqu'à un certain tems; des chevaux, jufqw'à ce qu'ils ayent rafé; 8e de ceux qui font béents ou faux -béouts, pendant toute leur vie. Voyez FAUX-MARQUE. (e) FEVE , (Péche.) Comme les féves procurent un des meilleurs appâts connus pour attraper le poiflon, on peut indiquer ici la maniere dont les Anglois les pré: parent à ce déffein. Prenez un pot de terre neuf, vers mé en-dedans ; faites- y cuire dans de l’eau de ti- viere une certaine quantité de féves (fuppofons qua» tre litrons de fèves) , qui auront été auparavant ma- cérées dans de l’eau chaude pendant fix heures. Lorf. qu'elles feront à demi-cuites, ajoûtez-y quatte onces de miel & quatre grains de mufc ; donnez au tout en- core quelques bouillons, & retirez votre pot du feu. Maintenant , pour employer votre amorce avec fuc- cès, choïfiflez un endroit clair, net & propre de la riviere, afin que le poiffon puifle voir au fond de l’eau fa pâture : mettez dans cet endroit une douzai- ne de fèves foir & matin pendant quelques jours. Dès que le poiflon aura goûté de vos féves, ilne manquera pas d’accourir en foule dans le même lieu pour enre- chercher de nouvelles, & pour lors il vous fera fa- cilé de prendre une grande quantité de ce poiffon avec le filet qu’on nomme épervier, Article de M, le Chevalier DE JAUCOURT. | FEVERSHAM, (Géogr.) petite ville à marché d'Angleterre , avec titre de comté , dans la province de Kent , entre Cantorberi & Rochefter, fur un petit golfe. Elle eft remarquable dans l’hifloire eccléfiafti. que d'Angleterre, par un monaftere de l’abbaye de l’ordre de Clugny, que le roi Etienne y fonda, & où la reine fa femme, le prince Euftache fon fils, & lui, furent inhumés. Foyez Rappin Thoyras, tome IT. p. 140. Feversham eft à 5 lieues E. de Rochefter, 12 lieues de Londres. Longir, 18.25. latis, 51. i 9e (D. J.) FEUILLAGE , ( Jardinage.) eft Vaflemblage des branches & des feuilles que l’on voit fur les arbres, & qui donnent de Pombre. Le châtaignier, par exem- ple , eff dit avoir un beau feuillage qui porte une gran. de ombre. | FEUILLANS, f. m. pl. (Æf£. eccléf.) ordre de re- ligieux vêtus de blanc, qui vivent fous l’éttoite ob- fervance de la regle de S. Bernard. Voyez BERNAR- DINS. Ce nom eft venu d’une réferme de cet ordre qui a été premierement faite dans l’abbaye de Fexillans, à cinq lieues de Touloufe, par le bienheureux Jean de la Barriere qui en étoit abbé commendataire ; & qui ayant pris l’habit de Ciîteaux, travailla à la ré» forme, qu'il établit, après plufieurs coutradiéions, vers lan 1580. | Le pape Sixte V. l’approuva, & les papes Clément VIT. & Paul V. lui accorderent des fupérieurs par: ticuliers. Le roi Henri IIT. fonda un couvent de cet ordre au fauxbourg de S. Honoré à Paris en\1587: Jean de la Barriere vint lui-même s’y établir avec foixante de fes religieux. Les Feuillans ont plufieurs Gs2 FEU autres maifons en France fous un général particulier. Il y a auffi des religieufes appellées Feuillanrines, qui Rat la même réforme, & dont le premier couvent fut établi près de Touloufe en 1500, & de- puis transféré au fauxbourg de faint Cyprien de la même ville. (G) : | FEUIBLANTINE , {. f. ex terme de Péuiffier, eft une efpece de chauflon qui fe fert aux entre-mets. FEUILLE , {. f. (Bocan.) en latin, folium ; lorf- qu’on parle de feuilles des plantes; & pétale, pera- Zlum , quand on parle de feuilles des fleurs. C’eft Co- lumna qui le premier a fixé Le mot pérale à fignifier la feuille des fleurs , & nous avions befoin de ce nou- veau terme.(voyez donc PÉTALE) ; Car nous ne pat- lons ici que des feuilles des plantes, d’après la mé- thode de M. de Tournefort, que nous fuivons affez volontiers dans cet ouvrage. Tout le monde connoît de vûe cette partie des plantes nommée fézilles, qui vient ordinairement au printems, & qui tombe au commencement de lau- tonne. Tout le monde fait encore qu’il y a des plan- tes qui les confervent, & d’autres quin’en ont point, comme lestrufles, &c quelques efpeces de champi- gnons. | On peut confidérer les feuilles des plantes par rap- portà leur ffru@ure, à leur fuperficie , à leur figure, à leur confiftance , à leurs découpures, à leur fitua- tion & à leur grandeur. Par rapport à leur ftruêture , les feuilles font ou fimples ou compofées. Les feuilles fimples font celles qui naïffent feules fur la même queue , ou qui font attachées immédia- tement à la tige & aux branches, fans être fubdivi- fées en d’autres feuilles; telles font les feuilles du poi- trier, du pommier, du giroflier, de l’œillet. Les feuilles compofées font rangées plufieurs en- femble fur la même queue ou fur la même côte, ou bien elles font divifées en plufieurs autres, feuilles ; enforte que le tout enfemble fe prend pour une feule feuille : telles font les feuilles du rofier, du perfil, de l’angélique, du chanvre ,.&c. Par rapport à la fuperficie, les fezilles font plates, creufes, en boffe, lifles, rares, velues, &c. Les feuilles plates, confidérées par rapport à leur figure, font rondes, comme celles de la nummulai- re ; rondes à oreillons, comme celles du cabaret ; en fer de pique, comme celles de l’origan ; oblon- gues, comme celles de l’axdrofæmum ; à pans, com- me celles de la bryone du Canada; pointues par les deux bouts & larges vers le milieu , comme celles du laurier-rofe ; étroites & longues, comme celles de l’œillet & du chien-dent ; prefqu'ovales, terminées en pointe, comme celles du chanvre Jaune fertile. Les fèuilles creufes font ou fiftuleufes, comme cel- les du petit afphodele, de l'oignon, &c. ou pliées en gouttiere, comme celles de l’afphodele commun, qui font aufli relevées en côtes par-deflous. Les feuilles en bofle font cylindriques dans quel- ues plantes , comme celles de plufeurs fortes de D , de falicot & de joubarbe. Elles font quelque- fois à trois coins, comme on le voit dans quelques efpeces de jcoides. Il y en a quelques-unes qui font anguleufes & irrégulieres ; fayoir celles de la fritil- laire épañle ,ritillaria craf[a. Par rapport à la confiftence , les feuilles font on minces ou deliées, comme celles du mille-pertuis ; ou épaifles, comme celles du pourpier; ou char- nues, comme celles de plufieurs fortes de joubarbe ; ou drapées, comme celles du bouillon-blanc. Par rapport aux découpures, les féxi/les font dé- coupées legerement ou profondement. Les feuilles découpéesleserement, font crenelées, dentelées, frifées & plifées. ._Les feuilles crenelées ont les découpures à anfe à FE Ù panier , ou en tiers-point, comme celles des efpeces d’egeur. | Les feuilles dentelées font découpées à dent de {cie plus ou moins réguherement , Comme celles du rofer ou du chanvre jaune fertile. Les feuilles découpées profondément, font décou- -pées jufqu’à la tête ou juiqu’à la bafe , ou d’unema- mere particuliere ; favoir en trefle ou fleche, &c. Celles qui font découpées jufqu’à la côte, le font en différentes manieres. [l y en a quelques-unes qui font découpées irrégulierement jufqu’à la côte, com- me celles de l’armoife ; quelques autres le font en feuilles d’acanthe, en feuilles de céterac, en feuilles de méliante. Cette derniere découpure eft finguliere, & l’on peut la propofer, quoique la méliante foit une plante aflez rare, .Y Les feuilles compofées font foûtenues par une queue, ou rangées fur une côte fimple , ou fur une côte branchue. Les feuilles foûtenues fur une queue, font ou deux à deux, comme celles du fabago ; ou trois à trois, comme celles du trefle & de l’ellébore noir trifolié: ou fur la même queue , comme celles de lagnus cafe tus; Où en plus grand nombre, difpofées en éventail ouvert ; favoir celles de la plüpart des efpeces d’el- lébore noir. | | Les feuilles rangées fur une côte, font ou rangées par paires, ou elles naïfent alternativement fur une côte, , La côte de celles qui font rangées par paires, eft terminée par une feule feuille, comme celle de la re- gliffe ; ou terminée par une paire de feuilles, comme celle de la fophera, de l’orobe, &c.Les feuilles qui font fur ces côtes, font à-peu-près égales, comme on le voit dans celles dont on vient de parler; maisils’en. trouve auf quelques-unes qui font entre-femées de plufeurs autres feuilles plus petites. Les feuilles compofées de plufeurs feuilles, ran- gées fur une côte branchue, font ou à grandes feuilles ou à petites feuilles, ou bien elles font laciniées, c’eft-à-dire compofées de feuilles étroites &c longues comme des lamieres. Celles de l’argelica alpina ad nodos florida , {ont à grandes feuilles; celles du perfil ou de la ciguë, font à petites feuilles ; celles du fe- nouil & du #eum {ont laciniées ou découpées en la- nieres fort étroites. Par rapport à la fituation, les feuilles font ou al- ternes, c’eft-à-dire rangées alternativement le long des tiges & des branches, comme celles de l’alater- ne ; ou oppolées deux à deux, comme celles de la phillyria ; ou oppolées en plus grand nombre, & dif- pofées en rayon ou en fraife, comme celle des efpe- ces de rubia. Par rapport à la grandeur, les fezzlles font ou très- grandes, comme celles de co/ocafia , de fphondylium, &tc. ou médiocres, comme celles du pié-de-veau, de la biftorte, du figuier , &c. ou petites, comme celles du pommier, du poirier, du pêcher, &c. ow enfin très-menues , comme celles du mille-pertuis, de la renouée, du coris, & de plufeuts autres plan- tes. Voyez les élemens de Botanique, 6 Pexplication de nos Planches d’Hifloire naturelle. M. Linnæus eft entré dans un plus orand détail pour divifer les feuilles en clafles, en genres êc en efpeces. IL en fait trois clafles, dont la premiere comprendiles feuilles fimples, la feconde les feux/les compofées , & la troifieme les feuilles déterminées. Les feuilles fimples font feules, chacune fur un pé- dicule ou petiole. On les diffingue en fept ordres, par des caracteres tirés de la circonférence, des an- oles , des finus , de la bordure, de la furface, du lommet & des côtés de ces feuilles : tes fept ordres {ont {ous-divilés en 78 genres. M. Linnæus diftingue trois fortes de feuslles com polées ; FEU pofées ; favoïr les compofées proprement dites, les recompofées , decompofira ; & les fur-compofces, /x- pra-decompofita, On à donné le nom de foliole, fo/io- in, à chacune des petites feui/les qui compofent la grande. Les féilles compofées proprement dites, font celles qui fe trouvent plufieurs enfemble fur un mé- me pédicule fimple où branchu ; les recompofées font celles dont le‘ pédicule commun fe divife & fe fubdivife avant de former le pédicule particulier à chaque foliole. Dans les feuilles {ur-compofées, le pédicule commun fe divife plus de deux fois avant d'arriver aux folioles, Il y a quatorze genres de feux! les compofées. Les feuilles déterminées font celles que l’on diftin- gue des autres par leur direétion, leur pofition fur la plante, leur infertion , & leur fituation refpeétive, fans avoir égard à leur forme ni à leur ftrudture. Ces feuilles déterminées font divifés en 34 genres; ce qui fait en tout 126 genres de Jézi/les, dont on peut faire un beaucoup plus grand nombre d’efpeces, en em- ployant leurs caraéteres pour la defcription dés plan- tes. Voyez floræ pariftenfis prodrom, par M. Dalhbard. Paris, 1749. (1) | Obféervations [ur la diffribution, les ufages, l’urilite, La multiplication , la direttion , le retournement des feuil- les, leur infpetion au mücrofcope, l’art de les difequer , 6: d'en prendre l'empreinte. Les Botaniftes fe font déjà beaucoup exercés à chercher dans les feur//es, des carateres propres à diftinguer les plantes, à les ran- ger en clafles & en genres; & fi cette ingénieufe idée ne réuflit pas, du moins peut -elle"fourmir,des vües &c des avantages affez importans. Les mèmes Botaniftes ont tâché de ramener toutes les diftribu- tions différentes des feuilles à des clafles fixes. M. Bonnet, f. diftingué par fes connoiffances en PHif- toire naturelle, a établi cinq ordres principaux de cette difribution dans fon bel ouvrage fur les feuilles, publié à Leyde en 1754, 7-4°. avec figures; & quoiqu'on puifle fans doute découvrir de nouveaux genres de difiribution , fa méthode ne mérite pas moins nos éloges. Le premier ordre, que ce curieux obfervateur ap- pelle alterne, & qu'il faut regarder comme le plus fimple, eft celui dans lequel les feuxlles font diftri- buées le long des branches , fur deux lignes paral- leles à ces mêmes branches, & diamétralement oppo- fées l’une à l’autre ; enforte qu’une feuille placée fur la ligne droite, eft fuivie immédiatement d’une au- tre fituée fur la ligne gauche : celle-ci left d’une 3° placée fur la ligne droite , & ainfialternativement. Le fecond ordre, que l’on peut nommer & paires croifees, eft compolé de feuilles diftribuées par paires vis-à-vis l’une de l’autre, de façon que celles d’une paire croifent à angles droits celles de la paire qui fuit. | Le troifieme ordre, que les Botaniftes connoiffent fous le nom de feuilles verticillées , eft celui dans le- quel les fézilles {ont diftibuées autour des tiges ou des branches, à-peu-près comme les rayons d’une roue le font autour du moyeu. Cet ordre peut être fous-divifé par le nombre des feuilles, fuivant qu’el- les font diffribuées de trois en trois, de quatre en quatre, &c. Le quatrieme ordre peut fe nommer en quincon- ce, & et compoié de feurlles diftribuées de cinq en cinq. | Le cinquieme ordre, qui eftle plus compofé , peut fe nommer a fpirales redoublées; il eft formé de feuilles arrangées fur plufeurs fpirales paralleles. Le nom- bre de ces fpirales, & celui des feuilles dont chaque tour eft compofé, peuvent donner naïffance à des fous-divifions ; traçons fur un bâton trois où cinq fpirales paralleles ; fur chaque tour de ces fpirales piquons à une diftançe à-peu-près égale les unes Tome VI, Fr ESS 653 des autres , fept ou onze épingles, & nous aurons une idée très-nette de cet arrangement. Le pin & le fapin font de ce cinquieme ordre qui eft extrème- ment rare. On ne peut voir ces divers ordres de diftributions de femlles, fans fe livrer aux fentimens d’admita- tion pour les lois éternelles, qui ont merveilleufe- ment approprié les moyens à la fin, | On eff pénétré des mêmes fentimens', quand on confidere la régularité avec laquelle les fexi/les font couchées &c pliées avant que de fortir du bouton, êt la prévoyance de laNature pour les mettre À l’a- bri de tout accident. La pofition réguliere des fuit les eft telle , qu’elle embraffe la fixieme partie d’un cercle , comme dans le fyringa , ou Ja: huitième comme dans la mauve , & généralement la douxie- me comme dans le houx. | | Le foin que la nature a pris de la confervation des feuilles , n’eft pas moins digne d’attention ; en effet, autant que leur figure le permét , elles font toüjours défendues par les autres parties du bouton , ou fe fervent de défenfe refpedive. Lorfqwelles {ont en trop petit nombre & trop minces pour for- mer enfemble un corps élevé en furface convexe , alors elles fe déployent ou fe roulent en tant de ma- mieres, qu'il a fallu inventer des mots pour pouvoir les exprimer. À ces différens rouleaux, établis pour la défenfe des feurlles ; nous pouvons ajoûter celle que procure l’interpofñtion de diverfes membranes fines qui fervent au même but. Le doûteur Grew em compte jufqu'à fix, qu'il défigne par les noms de feuilles, de furfeuilles, d’entre-feuilles, de wiges des feuilles ; dechaperons , &t de petits manteaux ou voiles qui les couvrent. Voy. l’anat. des plantes de ce curieux phyficien , y, I. tab, 41, 42. Voyez aufli Malpi- _gh1 de gemmis ; nous ne pouvonspas entrer dans ces détails. Les feuilles f bien diftribuées, f variées dans leurs formes, fi réguliérement couchées & pliées, fi {a- vamment défendues contre les accidens , n’ont pas été données aux plantés uniquement pourlesorner; elles ont des ufages plus importans, & qui répondent mieux aux grandes idées que nous ayons de l’ordre général. | Entre ces ufages’, celui d'élever le fluide nourri- cier , eft un des principaux & des mieux conftatés par les belles expériences de M. Hales ; mais la pré. paration de ce fluide , l’introduétion de lair dans le corps de la plante, & la fucceffion des particules aqueufes répandues dans l’atmofphere, ont d’autres fonéhions , qui demandent encore d’être approfon- dies. | | On diftingue deux furfaces dans les fésilles des plantes ; la furface fupérieure , ou celle qui regarz de le ciel , &r la furface inférieure , ou celle qui re- garde la terre ; ces deux furfaces different {enfiblez ment l’une de l’autre dans prefque toutes les plantes terreftres. La furface fupérieure eft ordinairement life & luftrée, fesnervûres ne fontpas faillantes : la furface inférieure eff pleine de petites afpérités, où garnie de poils courts, fes nervûres ont du relief, & fa couleur toujours plus pâle que celle de la fur- face fupérieure n’a que peu ou point de luftre. Ces différences aflez frappañtes ont fans doute une fin. L'expérience démontre que la rofée s’éleve de la terre ; la furface des feuilles auroit-elle été princi- palement deftinée à pomper cette vapeur , & à la tranfmettre dans l’intérieur de la plante ? La pointe des feuilles relativement à la terre, & le tiflu de leur furface inférieure , femblent indiquer. Il y a une étroite communication entre toutes les parties de la feuille ; lès vaiffeaux en s’abouchant les uns avec les autres', fe communiquent récipro= quement les fucs qu'ils reçoivent des pores ab{or. Ooo 654 FEU bans Les plus voifins ; une médiocre attention fufit, pour découvrir à l’œil cette communication ; elle forme fur les deux côtés de la feuille, une efpece de réfeau qu’on ne fe lafle point d’admirer,, lort- qu'il eft dévenu plus fenfible par une longue macc- ration, ou que de petits infeétes ont confumé la fub- ftance délicate qui en remplifloit les moelles ; mais cette correfpondance réciproque jufqu'où s’é- tend-elle.? Les fezilles fe tranfmettent-elles mutuel- lement les fucs qu’elles ont pomipés ? Il eft bien prouvé que les plantes tirent leur hu- midité par leurs filles ; il ne left pas moins, qu'il y a uné, étroite communication entre ces feuilles, &z que cette communication s'étend à tout le corps de la planté. Ainfi on peut dire que les végétaux font plantés.dans air, a peu près comme ils le font dans la terre. Les feuilles {ont aux branches , ce que le éhevelu eft aux racines. L'air eft un terrain fer- tile , où les fézilles puifent abondamment des nour- ritures de toute efpece. La nature a donné beau- coup dé furface à ces racines aériennes , afin de les mettre en. état de raflembler plus de vapeurs & d’ex- halaifons :les poils dontelle lesa pourvües , arrêtent ces fucs ; de petits tuyaux , toujours ouverts , Les reçoivent, & les tranfmettent à l’intérieur. Onpeut même douter frles poils ne font pas eux-mêmes des efpeces de fuçoirs. Danses féuilles des herbes ,.les deux furfaces ont une difpoñition à-peu-près égale à pomper l'humi- dité ; au lieu que dans les filles des arbres , la fur- face inférieure eft ordinairement plus propre à cette fonétion que la furface fupérieure : la raïon de ces différences vient vraiflemblablement de la nature du tiflu. Les bulles qui s’élevent en fi grand nombre fur les feuilles qu’on tient plongées dans Peau, prouvent que l'air adhere fortement à ces parties de la: plan- te ; on peut eéninférer que les féuziles ne fervent pas feulement à pomper l’humidité ; mais qu’elles {ont encore deftinées-à introduire dans Le corps des vé- gétaux beaucoup d’air frais & élaftique. - Les expériences de M. Hales démontrent que les feuilles font le principal agent de l’afcenfon de la {éve , & de fa tranfpiration hors de la plante. Mais la furfacé fupérieure étant la plus expofée à lation du foleil &. de l'air (caufes premieres de ces deux effets); on pourroit inféren que cette furface eft celle qui doit avoir ici le plus d'influence : elle eft d’ailleurs très-propre par fon extrème poli , à facili- ter le départ du fuc ; il ne fe trouve ordinairement ni poils , ni afpérités qui puiffent Le retenir &c l’em- pêcher de céder à limpreflion de Pair qui tend à Le détacher. Ainf lé principal ufage de la furface fu- périeure des feuilles çonfifte peut-être à fervir de défenfe ou d’abri à la furface inférieure , à fournir un filtre plus fin, qui ne laifle pañler que les matieres les plus fubtiles. | | Dès que les feuilles fervent à la fois à élever le fuc nourricier & à en augmenter lamafle, nous avons un moyentrès-fimple d'augmenter ou de diminuer la force d’une branche dans un arbre fruitier : nous l'ausmenterons en laiffant à cette branche toutes {es Jexzlles ; nous le diminuerons par le pro- cédé contraire. Nous comprendrons par le mème moyen , que le vrai tems d’effeuiller n'eft pas ce-. lui où.le fruit eft dans fon plein accroïflément ; 1l a befoin alors de toutes fes racines : les feuilles qui l’environnent immédiatement, {ont fes racines. Si l’on dépouille une plante de toutes fes féur/les à mefure qu’elles paroïffent , cette plante périra, L’herbe commune de nos prairies & celle de nos pa- turages ; femble d’abord une exception à cette regle générale ; mais il faut confidérer , que quoique nos beftiaux, mangentles feuilles à melure qu'elles croif- fent , néanmoins ils n’emportent qu’une très -petite partie de la feuzlle qui s'éleve pour lors én tige. D'ailleurs ily a une fuccefion conftante de nou- velles feurlles | qui pouffent à la place des vieilles, & comme elles font enfoncées en terre , & très- courtes , elles fippléent à celles qui ont été dévo- rées. De plus ,1left certain que l’on fait tort au fain- foin , aux luzernes , aux trefles , quand on les fait paître de trop près par les beftiaux, Quoique la ra- cine vivace du fainfoin, le fafle pouffer plufeuts an- nées , la récolte de cette denrée, qui eft un objet de conféquence , eft fouvent détruite de bonne heure, lorfqu'on fouffre que le bétail s’en nourrifle à dif- crétion. On ne peut donc approuver la pratique des fermiers, qui mettent leurs troupeaux fur leurs blés quand 1ls lés trouvent trop forts. Perfonne n’ignore que pluñeurs efpeces de plan- tes ont. pour leur confervation des fezilles printan- nieres , & des feuilles automnales, Ces dernieres rendent un fervice infini à quelques arbres, par exemple, au mürier, & lui fanvent la vie quand tou- tes les feuilles printannieres ont été mangées parles vers à foie, Fe IL eft des feuilles dontiles principales fon&ions font moins de pomper l'humidité , & d'aider à Péva- poration des humeurs fuperflues , que de prépa- rer le fuc nourricier , & de fournir peut-être de leur ptoprefubftance , une nourriture convenable à la petite tige qu’elles renferment ; la pomme du chou en eft un exemple extrèmement remarquable : con- cluons que les fexr/les, de quelque façon qu’on les confidere , fourniflent aux plantes de tels avanta- ges , que leur vie dépend de leurs feuilles ,. de ma- mere ou d'autre. Ainf Pétroite communication qui eft entre les parties d’un arbre, & fur-tout entre les feuilles & les branches , doit rendre très-attentif à l’état des feuilles ; & s'il leur furvient quelquefois des maladies qu’elles communiquent aux branches, on en préviendra l’effet en retranchant les fezilles altérées ou mal-faines, | On ne peut douter de la vérité des expériences d’Agricola furla multiplication des plantes par leurs feuilles ; M. Bonnet ;a répété ces expériences avec un fuccès égal, fur-tout dans Les plantes herbacées. Voyez fon excellent ouvrage cité ci-deflus. La direëtion des feuilles eft un autre objet qui mé- rite notre confidération. M. Linnæus parle de la di- reétion des feuilles comme d’un caraétere, mais elle n'eft qu'un pur accident. On a beaucoup adnuré le retournement de la radicule dans les graines femées à contre-fens ; on n’a pas moins admiré le mouve- ment des racines qui fuit ceux d’une éponge im- bibée d’eau. Les feuilles fi femblables aux racines dans une de leurs principales fonétions , leur refflem- bleroient-elles encore par la fingulhiere propriété de fe retourner, ou de changer de direction ? M. Bonnet s’eft aflüré de la vérité de cette conjeéture par di- verfes expériences très-curieufes, Toutes chofes éga- les, les jeunes feuilles fe retournent plus prompte- ment que les vieilles , celles des herbes , que celles des arbres ; & ce retournement eft plus prompt dans un tems chaud & ferain, que dans un tems froid & pluvieux, Les feuilles qui ont fubi plufeurs inverfions, pa- roiflent s’amincir ; leur furface inférieure fe defle- che, & femble s’écailler. Le Soleil par fon ation fut la furface fupérieure des feuilles, change fou- vent leur direétion , &c les détermine à fe tourner de fon côté ; il rend encore la furface fupérieure des feuilles concave en maniere d’entonnoir ou de sout- tiere, dont la profondeur varie fuivant l’efpece ou le degré de chaleur; la rofée produit un effet con- traire. Quoique le retournement des feuilles s'exécute fur FEU le pédicule, ce retournement /s’opere encore fou- | vent fans que le pédicule:y aitaucune part. Enfin les fézilles ont la propriété de fe retourner, quoi- qu'elles foient féparées de la plante ; cette même propriété fe manifefte aufli dans des portions de feuilles coupées à volonté ; eft-ce la lumiere, la chà- leur, la communication de l’air extérieur qui opere ‘Ce retournement? on ne peut encore offrir là-deflus que des conjeétures ; & d’autant mieux que les Jeuilles feretournent dans l’eau.comme dans l'air. _ L'infpeétion des fexillesau microfcope nous offre Je fpeétacle de mille autres beautés frappantes que l'œil nud ne peut appercevoir : vous en.ferez con- vaincu par la le@ure.des obfervations microfcopi- ques de Bakker. La feuifle de rofe, par exemple, en particulier de certaines rofes, eft toute diaprée d’ar- gent fur fa furface externe. Celle de fauge offre une étoffe raboteufe, mais entierement formée de touf- fes & de nœuds auffi brillans que le cryftal. La fur- face fupérieure de la mercurielle eft un vrai parque- tage argentin, & fes côtes un tiflu de perles rondes & tranfparentes, attachées en mamiere de grappes, ‘par des queues très-fines & très-déliées, Les féxilles de rue font criblées de trous femblables À ceux d’un rayon de nuel; d’autres feuilles préfentent comme autant d’étoffes ou de velours raz de diverfes cou- leurs. Mais que diraï-je de la quantité prefque 1n- nombrable de pores de certaines fézilles ? Leuwen- koek en a compté plus de 162 mille fur un feul côté d’une feuille de buis. Quant aux fingularités de la feuille d'ortie piquante dont nous devons la connoif. lance au microfcope , voyez ORTIE. L'indufirie des hommes eft parvenue à difféquer les fezilles fupérieurement, L’on fait aujourd’hui par att des fqueléttes de fexilles beaucoup plus parfaits que ceux que nous fourniflent les infe@es, fi vantés dans ce travail par quelques naturaliftes. Severinus eft un des prémiers qui ait montré l'exemple, quoi- que feulement fur un petit nombre de féwilles. Mais de nos jours Muffchenbroek, Kundman, & autres, ont pouffé le fuccès jufquw’à faire des fquelettes de toutes fortes de feuilles, Voyez aufñi les:obfervations & expériences de Thummingius fwr l’anatomie des ferulles dans le journal de Leipfick , ann. 1722. pa- ge 24. Enfin Boyle, car il faut finir, a indiqué un moyen de prendre l'empreinte groffiere de la figure des feuilles de toutes fortes de plantes. Noircifiez une feuille quelconque à la fumée de quelque réfine,.du camphre, d’une chandelle, &c, Enfuite après avoir noirci cette feuille fufifamment, mettez-la en prefle entre deux papiers brouillards, par exemple deux papiers de la Chine , & vous aurez l’exaûe étendue, figure, & ramifications des fibres de votre feuille. Voyez Boyle’s Works Abridg’d, vo/. I. page 132. Cette méthode néanmoins ne peut guere être d’u- fage qu'à ceux qui ne favent pas deffiner, & l’em- preinte s’efface très-aifément en tout ou en partie. Au refte, on s’appercevra par les détails qu'on vient de lire, qu’un fujet de Phyfique, quelque fté- rile qu'il paroïfle, devient fécond en découvertes à mefure qu’on l’approfondit ; mais ce n’eft pas à moi qu'appartient cet honneur; ileft dû fur cette matie- re aux Grew , aux Malpighi, aux Hales, aux Bon- net, & à ceux qui les imiteront, Arricle de M, le Che- valier DE JAUCOURT. FEUILLES, ( Econom. ruffique. ) On tire dans l’é- conomie ruftique d’afflez grands avantages des exil. les d'arbres ou d’arbrifleaux ; par exemple, les fil. les d’ormes & de vignes cueillies vertes , fe donnent en nourriture aux bêtes à cornes dans les pays où les pâturages manquent. Les feuilles de müûrier {er- vent à nourrir les vers à foie, mais il faut prendre garde de ne pas trop effeuiller cet arbre; car fi l'on Tome FI, FEU 65$ dépouilloit fa tige par le bas, on rifqueroit de 1e faire périr. Les févilles tombées & rafflemblées en monceaux, fourniflent un excellent fumier pour fer: tilfer les terres. Enfin on pourra dans la fuite tour= ner les fezilles d'arbres; du moins celles de certains arbres étrangers; à plufieurs ufages quinous font encore inconnus, & dont on devra la découverte au tems,, au hafard; à la nécefité , ou fi lon veut à linduftrie, Article de M, Le Chevalier DE J 4 U= COURT. | FEUILLE AMBULANTE; ( Æ/f4, des Infèctes. ) nom d’un infeéte aîlé des Indes, fur lequel par malheur les obfervations fideles nous manquent encore. Les ailes de cet infeéte reffemblent aflez bien par leur forme , leurs nervüres, & leur couleur , àdesi foui/2 les d'arbres. Quelqués-uns ont les aîlés d’un verd naïflant, d’autres d’un verd foncé, & d’autres les Ont feuille morte, Mais on affüre de plus, que leurs aîles font de la premiere couleur au printems , de la’ feconde en été , & de latroifieme vers la fin de l’au- tonne ; qu’enfuite elles tombent, que l’infeéte refte: fans aîles pendant tout l’hyver, & qu’elles repouf- fent au printems fuivant. Si tous ces faits étoient: véritables, cet infeéte feroit bien fingulier, & peut- être unique en fon genre, car on n’en connoît point dont les aîles foient fujettes à de pareilles vicifitu des; mais il eft très-permis de fe défier d’un rapport fi fingulierement marqué , & vraiflemblablement imaginé , entre les aîles d’un infete étranger & les feuilles de la plûpart de nos arbres. Arricle de Me Chevalier DE JAUCOURT. - FEUILLES SÉMINALES, ( Bocan. ) en latin foie Jeminalia, On entend par feuilles féminales, deux feuil. les fimples , douces, non partagées , qui fortent les premueres de la plus grande partie de toutes les gral= nes qu’on a femées. En effet, quand le germe de la plante a percé air de fa pointe , les deux bouts de la fine pellicule qui couvre la pulpe de la graine , étant d’un tiflu moins nourri que la tige, s’abaiflent peu-à-peu de côté & d'autre, {ous la forme de deux petites féuilles ver tes, nommées feuilles féminales , ou farffes feuilles, ‘ qui font différentes en grofleur, figure, furface, & poñtion, de celles de la plante qui leur fuccéderont. Il faut donc les bien diftinguer du feuillage que la plante produira par la fuite ; car l’épiderme des deux lobes venant à fe fécher , fes deux premieres feuilles qui ne font que les deux bouts de l’épiderme , fe fe- chent de même par une fuite néceflaire, tombent : & difparoiflent. -4rsicle de M, le Chevalier DE Jau- COURT. FEUILLE-INDIENNE , ( Mar. med, € Pharmacie, ) Voyez; MALABATRE, | FEUILLE DE MYRTE, inffrument de Chirurgie, ef pece de fpatule, dont l'extrémité terminée en poin= te, le fait reflembler à la feuille de l’arbriffeau dont il porte le nom. L’ufage de cet inftrament eft de net- toyer les bords des plaies & des ulceres, & d’en ôter les ordures que le pus, les onguens, les emplâtres ou. autres topiques peuvent y laiffer. Cet inftrument eft ordinairement double ; parce qu’on fait de l’extrémi- té qui fert de manche , une pince propre à difléquer & à panfer les plaies & les ulceres ; ou une petite cuillere pour tirer les balles & autres petits corps étrangers ; ou elle eft creufée en gouttiere, & forme une fonde cannelée, Comme la féxi/le de myrte dont le manche eft terminé par une pincette, eft la plus dif- ficile à conftruire & la plus recherchée, c’eft celle dont je vais faire la defcription d’après M. de Garen- geot, dans Jon traité des inffrumens de Chirurgie, Pour fabriquer cet inftrument, les ouvriers pren nent deux morceaux de fer plat, longs d'environ fix pouces, & larges d’un travers de doigt; ils les fan çonnent un peu, & les ayant ajuftés l’un fur l’autre À 9000 ji 656 FEU ils en mettent un bout dans le feu, afin de le fouder de la longueur de deux pouces & quelques lignes ; cet endroit foudé reçoit fous lemarteau la figure d’une feuille de myrte, en le rendant comme elle large par {on milieu, & le diminuant par fes deux extrémités, Il eft plat d’un côté , 8 de lautre il a une vive-arrê- te faite à la lime, qui de fabafefe continue jufqu’à la pointe. Les côtés de la vive-atrête vont en arron- diflant {e terminer à deux tranchans fort moufles , qui font les parties latérales de la feuille de myrte. Onobferve que la longueur de cette prémieré partie de l’inftrument n’excede pas deux pouces, ni falar: geur cinq hgnes; & on lui donneune douce courbure, dont la convexité regarde le côté plane, & la cavité preique infenfible, le côté de la vive-arrête. La feconde partie de la feuille de myrte, 8 qui lui fert de manche, eft une pincette formée par les deux morceaux de fer appliqués lun contre Pautre , & qui ne font foudés qu'a l'endroit qui caraétérife la feuille de myrée. Ces deux morceaux: de fer vont en dimi- nuant jufqu’à leur extrémité, & font limés d’une ma- niere à lesrendre élaftiques : ilss’écartent l’un de l’au- tre par leur propre reflort, qui eft encore augmenté par une courbure qu’on donne à chaque branche de la pincette, à l'extrémité intérieure defquelles on à fait des rainures tranfverfales, pour que linftrument ferre plus exaétement. Cet inftrument eft gravé à la Planche I, fig. 3.11 doit avoir cinq pouces quatre ot cinq lignes de long, & les branches, deux à trois li- gnes de large. (F) D A FEUILLE DE SAUGE, ( Manege, Maréch, ) inftrus ment de maréchallerie. Sorte de biftouri dont la for- me indique les ufages, & auquel nous avons recours lorfqu’il s’agit dans des parties caves & profondes, de couper & d'enlever des chaïrs fuperflues, de quel- que efpece qu’elles puifent être. - … La longueur de la lame eft d’environ trois pouces. Celle du manche qui lui eft adapté par foie ou par quelqu’autre monture fixe, eft à-peu-près la même. Cette mème lame eft pointue ; elle a deux tranchans bombés également en-dedans &z en-dehors ;elle eftre- courbée fur plat, dès le tiers de falongueur, à comp: ter depuis le manche, fuivant la même courbe que celle du bombement defes tranchans. Cette courbe eft l’arc d’un cercle d'environ cinq pouces de rayon. La plus grande largeur de la lame fe rencontre à la naïflance de la courbure, & ne pañle pas huit lignes. Sa furface concave, relativement à fa courbure {ur plat, eft divifée en deux pans égaux & femblables, depuis le manche jufqu’à la pointe, par une arrête formée par la naïffance des deux bifeaux qui confii: tuent les tranchans de droite & de gauche. Cette ar- rête près du manche, a un peu plus d’une ligne de hauteur perpendiculaire , & là fe rencontre la plus grande épaïfleur de la lame, qui va conftamment en décroiffant infenfiblement jufqu’à fa pointe. Sa fur- face convexe, toûjours relativement à fa courbure fur plat, eft droite dans le fens de fa largeur, où plütôt un peu creufée par la rondeur de la meule. Quant aux côtés, ce n’eft que depuis le milieu juf- qu’à d’extrémité de la lame , qu'ils font ordinaire- ment afflés &c réellement tranchans. (e | . FEUILLE DE SCIE, e7 Blafon, fignifie une piece de l’écuflon, comme fafce, pal, on autre femblable 3 qui eft édentée feulement d’un côté ; ainfi nommée, parce qu’elle reffemble à une fcie, comme Pexplique le mot françois. FEUILLE, (Commerce. ) fignifie en termes de mef. fageries & de voitures publiques , l'extrait ou du- plicata des répiftres de voyage, que portent avec eux les Cochers, Charretiers & Voituriers, & qui leur tient lieu de lettres de voiture. On les appelle feuilles, parce que ces extraits font écrits fur des feilles volantes de papier. Elles doivent êtretoutes FEU conformes aux regiftres, & porterla quantité, poids & qualité des marchandifes , le nom &c la qualité des perlonnes qui font voiturées par les coches , carrof- 1es, 6c. C’eft ordinairement fur ces févilles que ceux à qui les ballots, marchandifes & denrées font adref- {és , mettent leur décharge au bas des articles quiles concernent, Ce qu'on appelle décharger la feuille, Didionn, de Comm. de Tréy. & dé Chambers. (G) FEUILLES , {. f, er Architeure, ornement de fculp: ture, imité de celle de chêne, de laurier, d’acanthes de perfil, &c. qui fervent à la décoration des bâti- “mens tant intérieurs qu'extérieurs. Ces fézi/es font connues en général fons le nom de #4, parce qu'elles font refendues & différentes de celles qu'on appelle feuilles d’eat, parce que ces dernieres ne font qu'ondulées, Voyez l’article SCULPTURE. (P) FEUILLE À DOS, exrerme de Brodeur a mérier, ce font des feuilles que le deffein repréfente à demi- pliées, & dont on ne voit que le deflous. Ces fézilles {ont brodées pour l'ordinaire, d’un point fendu en commençant la nervure, comme dans les autres féuil- Les , & formant les nuances de là même maniere. . POINT FENDU. TS FEUILLE ; er terme d’Eventaillifle, c'eft une feuille de papier préparée pour recevoir la peinture & les autres ornemens dont on a coûtume de la décorer. Cette feuille eft coupée de façon qu’elle forme un de- mi-cercle régulier. Voyez l’article EVENTAIL, & les figures de l’éventaillifle, Let FEUILLE DE FER BLANC, ( Ferblantier. ) c’eit du fer réduit en feuille, & blanchi avec Pétain. Feuille de fer noir, c’eft le même fer, qui n’a point été étame. On l'appelle auffi de Zx 61e, quand on lüi a laiflé une certaine épaifleur. FEUILLE DE REFEND , (Jardinage. ) eft un double bec de corbin que l’on refend dans le milieu pour la variété, imitant les feuilles d’achante & de perfil. (X) FEUILLE ; (Marqueterie.) fe dit de ces menues pie- ces de bois précieux & de diverfes couleurs, que les Ebéniftes où Menuifiers de placage ont réduites en lames d'environ d’une ligne d'épaiffeur , avec la fcie à refendre. Voyez MARQUETERIE. : FEUILLE 4 mettre fous les pierres, (Merteur-en-œu- vre.) C’eft une fille d'argent battu, mince à-peu- près comme une feuille de papier, & brunie enfuite d’un bruniextrèmement doux & vif: on met de cette feuille blanche fous les pierres blanches, pour y don- ner du brillant, & on teint cette même feui//e de tou= tes couleurs, pour mettre fous les pierres de couleur: il ÿ a un art à bien couper fa feuille, & à la bien dif pofer dans le chaton ; car il y a des pierres, & fur- tout des pierres de couleur, qui perdent beaucoup à n'être pas bien mifes fur la fexi/le. FEUILLE, en terme de Miroirier , c’eft ne couche d’étain, de vifargent, &c. que on applique fur le derrière d’un miroir, afin qu'il refléchifie les tayons de lumiere avec plus d'abondance. Voyez ErAMER. FEUILLE, rerme d'Orfévre, {e dit de toutornement repréfentant fezille de perfil, de choux ou autres ;que l’on applique fur divers ouvrages d’orfévrerie, com- me chandelier, éguiere , écuelle & autres. On fe fert auf de ce térme pour exprimer en gravüre de certains ornemens délicats, qui ont quelque fimili- tude avec les feuilles de la nature, par Les rouleaux, les revers & les refeñtes dont elles font remplies. FEUILLE DE PAPIER, (Paperier.) c’eft du papier qui après être forti du moule & avoir été collé & {e- ché, fe plie en deux feuillets, Il faut vingt-cinq feuil- les pour compofér une main de papier. 7. PAPIER. " FEUILLE D'EAU, (Serrurerie.) c’eft une pieced’or- nement qui fe place fur les rouleaux où dedans, aux grands ouvrages de ferrurerie (par grands ouvrages, on entend les balcons, les grilles ornées, &:c.). Cette forte de feuille eft la plus fimple dans tout lorne- ment. Pour la faire, le forgeron étire du fér de fa largeur & longueur convenables, & lorfqu’il a une épaifleur plus forte que celle de la taule dont on fe fert pour les autres ornemens, il l’enboutit dans un tafleau avec un poinçon qui forme la contre-partie; de forte que le bout de la feuille qui eft renverfé, paroîït avoir une côte par-deflous avec une rainure, femblable à lafente d’un abricot : & par-deflus, le refte de la fille eft concave, & les côtes: ont une arrête. Voyez Planch, de Serrurerie, la feuille d'éar en: levée, étampée par le bout; vûe par-deflus; vûe par-derriere & par-deffous; tournée de côté ; puis cintrée & vüe aufi de côté; enfin, prête à être montée. - La feuille de palmier fe découpe comme les autres ornemens , & fe fait avec de la taule ou fer battu , fmivant la grandeur & la force que doit avoir la branche. Voyez dans Les Planches | une feuille de pal- mer, enlevée ; découpée , relevée , une branche de’ palmier commencée, vêtue, garnie, la branche a: chevée. - La feuille de laurier {e fait comme les précédentes, & fe voit dans les planches , avant que d’être mon- tée. On y trouvera le même détail furla fexille de vigne. - La feuille de revers, eft un ornement qui fe met fur les rouleaux, felon que ledeffein courant le requiert ; elle fe fait & fe releve comme dans les autres ou- vrages d’ornemens. Voyez dans les Planches La feuille évidée & relevée. FEUILLE, en serme de Blafon, fe dit d’une plante qui a des feuilles. Thumery à Paris, d’or à la croix engrelée de fa- ble, accompagnée de quatre tulipes tigées & feuil- dées de fynople. : FEUILLÉE,, f. f, ( Architeët, ) efpece de berceau couvert 6 orné par compartiment de plufieurs bran- ches d'arbres garnies de leurs fezi/les. (P) FEUILLÉES , c’eft dans /’ Ars milir, des efpeces de petits bâtimens de feuillages que lés troupes font or- dinairement dans le camp, lorfqu’elles doivent y ref- ter plufieurs jours. (Q - FEUILLERET, {. m. (Menuiférie.) outil qui fert aux Charpentiers & aux Menuifiers, à dégauchir les bois, & à former une feuillure fur les rives fuivant . Je gauche, en la rendant plus profonde d’un bout que de l'autre; & cela fe connoît en pofant les reglets à piés deflus lefdites feuillures Foyez Les figures de Me- ruiferie, - Iya le feuilleres à petit bois, c’eft celui qui fert pour faire les feuillures pour les vitres des croifées. Le feuilleres eft fait d’un morceau de bois dur de 18 à 20 pouces de long fur $ à 6 pouces de large , & épais d’un pouce, plus ou moins, Dans le milieu il ÿ a une entaille qu'on nomme /wmiere , pour mettre le fer & un coin pour les ferrer dedans : au bas , du eôté du tranchant , eft la joue qui fert à le conduire, lorfqu’on veut faire une feuillure, Voyez les figures de Menuiferie. FEUILLET , £. m. (Commerce) moitié d’une feuil- le pliée en deux. :- L’ordonnance de 1673 , concernant le commerce ÿ art. 3. 6 4. du titre üj. veut que les livres des Négo- cians 8 Marchands , aufli-bien que ceux des agens de change & de banques , foient cottés , fignés , & paraphés , les uns fur le premier & dernier féxifles k &t les autres fur tous les feuillers , pat les confuls où maires des villes , s’il n’y a point de jurifdidion con. fulaire ; & de plus , qu'à ceux des agens de ban- que ; il fera fait mention au premier feuille: du nom de celui qui doit s’en fervir, de la qualité du livre, & fi c’eft le premier où fecond. Difionn. de Comm, de Chamb. & de Tréy. (G) ( FEUILLETS , ep terme de Cardeur ; ce font dés rou- leaux de laine préparés pour être filés, E V 57 FEUILLET , ex rerme de Cardier ; Cell ne peau de Veau qui fert d’affiette aux pointes de la carde (voyez CARDE) ; quand elle n’eft pas aflez épaifle, on la récouvre en-deflous de papier ou de parchemin. FEUILLETTE , f. f. (Comm.) que l’on écrit auffi FEILLETTE , & que quelques-uns appellent f{{/erce : forte de futaille où moyen tonneau , fervant à met- tre du vin ou d’autres liqueurs, La feuillerte eft la MOItIé du muid de Paris, auf l’appelle-t-on le plus fouvent dermi-muid, Ce tèrme eft particulierement en ufage en Bourgogne. Voyez Muip. he En quelques provinces de France > fur-tout vers Lyon, la feuillérte eft aufi une petite mefure de li- queurs qui révient à une chopine dé Paris. On prétend que nous avons emprunté ce terme des Italiens | qui nomment foglietta une petite me- fure ; d’autres au contraire foûtiennent que c’eft de notre mot Jezillerre , que les Italiens ont fait leur fo= gletta. Dit. de Comm. de Trév, & de Cham. (G) FEUILLETTI oz FILETI , {. m. (Jotaillier.) c’eft proprement l'angle qui fépare la partie fupérienré d'une pierre d'avec l’inférieure : Jérrer Le feuillet, c’eft frapper au poinçon la partie d'argent ou d’ot qui enveloppe cette pierre vers fon Jeuillesi ; juf- qu’à ce qu'on foit aflüré qu’ils fe touchent exadte- ment lun & l’autre ; c’eft l'opération la plus déli- cate & la plus néceflaire du ferti. FEUILLETIER , {. m. c’eft une des qualités que les maitres Cartiers , faifeurs de cartes à jouer , pren- nent dans leurs ftatuts : on les nomme rraitres Cur- tiers-Taroriers-Feuilleriers & Cartonniers. F. oyez CAR TIER. : * FEUILLETIS , {: m. ( Ardoifier,) c’eft le nom que les ouvriers donnent à Pendroit où ils travail. leñt dans la carriere , lorfque l’ardoife y eft tendre & facile à divifer : ils appellent cela ére en feusil= leurs, FEUILLUZE,, . f. en Architeëture ; C’eft l’éntaille en angle droit qui eft entre le tableau & l’embrafure d'une porte ou d’une croifée, pour y loger la me- nuiferie., (P FEUR-MARIAGE, (Jurifprud.) eft la même cho- fe que fo“ mariage ; maïs on dit plus communément | for-mariage, Voyez ci-après FOR-MARTAGE, (A _ FEURRE,, £ f. serme de Riviere ; paille longue qui fert à empailler les chaifes : celle qui vient par eau paye un droit de furre. FEURS ox FEUR , ( Géog. ) forum Segufienorum $ ancienne ville de France, capitale du’ haut- Forêt x fur la Loire, à 10 lieues fud - eft de Roïiane 5 10 fud-oûeft dé Lyon, 95 fud-eft de Paris. Long.21,53. 33: lat, 45. 44. 43. Jofeph Guichard du Verney , célebre anatomifte, naquit à Fezrs en 1648 , & eft mort à Paris en 1730. (D. J.) * FEVRES, £. m. pl. (Fontaines Jelantes) efpece de maréchaux chargés de l'entretien des chaudieres 3 en léur fourniffant les fers. Ils font affe@és aux fa. lines par des finances payées au roi , ce qui n’eft pas tout-à-fait du bien du fervice , parce qu'ils font à couvert de la révocation. Au lieu de fers , on leur donne une fomme fixe pour chaque remandure ,avec une autre fomme qui les indemnife des vieux fers. Il y a en tout deux févres dans les falines de Moyen vic, qui avoient chacun deux demi - chandietes : mais On En a fupprimé une, & il y a un de ces deux fevres qui n’a qu’une demi-chaudiere ; inégalité qui caufe de l’altercation. Les fvres ont un infpeéteur, FÉVRIER , {. m. ( Aif. rom.) c’eft parmi nous, comme tout le monde le fait , le nom du fecond mois de l’année , à commencer par Janvier, Il n’a que 28 jours dans les années ordinaires, & 39 dans les biffextiles, à caufe d’un jour intercalaire qu’on ÿ ajoûte. Foyez BISSEXTILE, | 653 FEV - On écrivoit autrefois fchyrier , c:cette orthogra- phe approchoit davantage du mot latin fébruarius , à qui Feftus donne les deux origines fivantes. Februarius , dit-il, en/is diffus , qudd tum , id eft extremo menfe anni, populus februaretur, id ef? luftra- rétur , ac purgaretur. Cette étymologie paroïît natu- relle. Le peuple romain faifoit des facrifices pendant les douze derniers jours dedl’année, pour fe purifier &t pour demander aux dieux le repos des ames de ceux qui étoient décédés ; & comme ces facrifices & ces purifñcations étoient appellés februa, onnom- ma le mois où l’on faifoit ces facrifices & ces puri- fications februarius. Ovide aflüre la même chofe : tout ce qui fervoit, dit-il, à nous purifier , étoit appellé februa par nos ancêtres ; d’où il conclut, menfs ab his didtus. | | La feconde étymologie du mot février , peut ve- ir, felon Feftus, de ce que ce mois étoit confacré à Junon, que les Romains appelloient februata ou fe- braalis ; c’eft pourquoi ils l’honoroient d’un culte particulier pendant le mois de Æévrier, Enfin Ovide nous donne une derniere étymolo- gie du mot fébruarius : elle peut encore venir, dit-1l, de ce que dans ce mois on faifoit des facrifices fur Îles tombeaux!, & que par lé moyen de ces folenni- tés funebres, lon purifioit le tems ; mais je m'en tiens toùjours à la premiere étymologie de Feftus. Le mois de Février n'étoit point dans le calendrier de Romulus ; il fut'ajoûté par Numa Pompilius ; de- là vient que dans les premiers fiecles de Rome, Fé- yrier étoit le deraier mois de:l’année | comme 1l pa= roît par le paflage de Feflus, que nous avons cité. Février précéda Janvier jufqu’au tems où les Décem- virs ordonnerent qu'il deviendroit le fecond mois de l’année , & fuivroit Janvier immédiatement. Le Soleil, durant la plus grande partie de cemois, parcourt Le figne du Verfeau, & vers la fin il entre au figne des Poiflons. Voyez SIGNE. Arcicle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FEUTRAITTE, (Commerce) droit que l’on paye aux feigneurs en quelques endroits de France, pour avoir permifhon de tirer fur leurs terres la mine de fer , qui fert à entretenir les fourneaux dés forges & fonderies. Dictionnaire de Commerce , de Trév. & de Chamb. (G) FEUTRE ,, f. m. (Chapelerie. ) eft une efpece d’é- toffe de laine, ou de laine & de poil , qui n’eft ni croifée m tiflue, mais qui tire toute fa confiftance de ce qu’elle a été travaillée & foulée avec de la lie & de la colle, & enfuite façonnée dans un moule par le moyen du feu & de l’eau. Le poil de caftor , de chameau & de lapin , la laine des agneaux & des moutons , font les matieres qui entrent communément dans la compofition du feutre , & les différentes fortes de chapeaux font les ‘ouvrages à quoi on Pemploye: Le feutre qu’on deftine pour un chapeau, étant fuffifamment foulé & préparé , on le réduit en une -piece qui eft à-peu-près de la figure d’un large enton- noir ; dans cet état on le met en forme , & on en fait un chapeau. Voyez CHAPEAU. FEUTRE , (Chimie & Pharmacie. ) c’eft un mor- ceau de drap de flanelle ou d’étamine , & quelque- fois de coton, que l’on employoit beaucoup autre- fois en guife de filtre , avant l’ufage du papier gris. Il y a toute apparence que ce mot n’a pañlé au drap & à la flanelle, que parce qu'ils ont été fubftitués à l’étoffe de poils foules , qu’on nomme féurre (voyez CHAPEAU ) : car Ménage dérive ce mot de pail- srum. qui, Chez les auteurs de la baffe latinité , fi- gnifie l’éroffe en queftion, & vient de l'allemand fx, qui a la même fignification , felon du Cange , lequel ajoûte qu’elle a été nommée aufh f/érus, filtra, phel- srumi , philtrum & viltrum. On fe {ert encore de féx- tres Ou blanches dans quelques opérations, Ils prete nent différentes formes, felon l’ufage auquelon veut les appliquer. Ils font quarrés quand ils doivent aller fur le carrelet , voyez ce mot ; en laniere , quand on veut leur faire faire l'office d’un fyphon. FoyezLan- GUETTE. Enfin la chaufle ou la manche d’'Hippo- crate , n’eft elle-même qu’un févtre en capuchon, Voyez FILTRATION. Article de M. DE VILLIERS. FEUTRE , rerme de Draperie. Voyez l'article LaAï- NE ( manufaülure en). | FEUTRE,. Les Poriersid'étain ‘appellent ainfides morceaux de vieux chapeaux, quileur fervent à ma- mer les moules chauds, lorfqu'ils jettent-dedans ,: foit pour les former, foit pour les ouvrir 8 dépouil-: ler les pièces-jettées toutes chaudes , craïnte.de fe brüler. Ils appellent auf feurre un morceau de la for- me du chapeau, coupé comme une bande , qu'ils mettent dans les pots en-dedans dans l'endroit oùils les fondent. Voyez FONDRE L’ÉTAIN & SOUDER LES POTS D’ÉTAIN. , maitriser FEUTRES , ‘erme de Papeterie ; ce font des mor- ceaux de revefche ,ou autre étoffe de laine, fur lef- A des ouvriers:, qui travaillent dans les manu- attures de papier, mettent les feuilles de papier au fortir du moule , à mefure qu’on les fabrique. On: les appelle auffi ffosres. Voyez PAPrER:, &c les Plan- ches de Papeterre, | FEUTRER , serme de Chapelier, qui fignifie ma- nier l’étoffe d’un chapeau réduite en capade ; pour lui donner du corps. On feutre d’abord à froid ; 8x enfuite à chaud fur le baflin. Yoyez CHAPEAU. FEUTRER UNE SELLE, erme de Sellier ;:ceft lan remplir de bourre. nuril FEUTRIERE, £. £. erme de Chapelier ; c’eftun morceau de toile forte & neuve , dans laquelle on* enveloppe les capades, le lambeau entre deux , afin de les marcher, ou feutrer à chaud fur:le bafin, pour les difpofer à en former un chapeau. Voyez CHAPEAU. FEZ , (Géog.) royaume confidérable de l’Afri- que, fur la côte de Barbarie, enfermé entre le royau- me d'Alger au levant, de Maroc au midi , & lamer partout ailleurs. Il fait une partie de l’ancienne Mau- ritanie Tangitane. Le pays eft plein de montagnes, principalement vers le couchant & le midi , où eft le mont-Atlas. Il eft arrofé de plufeurs rivieres, On le divife en fept provinces. Il eft bien peuplé, ferti- le , & abonde en grains , beftiaux, légumes , fruits & cire. Le fleuve de Sébou le traverfe, & va fe dé charger par la Mancmore dans l'Océan, Ce royau- me a eu autrefois fes rois particuliers ; mais il eft à préfent uni à celui de Maroc , & n’a qu'un même fouverain , qui fait fa réfidence à Miquenez, Il ne faut pas confondre:le royaume de Fez avec la pro- vince de Fez, qui n’en fait qu’une partie , & dont la fertilité eft prodigiente. Voyez S. Olon, écat de l'emn- pire de Maroc ; Marmol, Mouette , hiffoire du royau- me de Maroc ; de la Croix , Aiff. del’ Afrique; hifoire des Chérifs par Diégo de Torrès, & autres. (2, J.). FEZ, (Geéog.) ville affez forte, & l’une des plus belles d'Afrique, dans la province & fur la riviere de même nom , en Barbarie, capitale du royaume de Fez. Elle eft compofée comme de trois villes ; elle a des mofquées magnifiques, & plufeurs écoles de la fee de Mahomet, où l’on apprend pour toure fcience l’arabe de l’alcoran. Les Juifs y font en grand nombre, & y ont des fynagogues. Il y a un muphti, Les dames riches y portent des chaînes d’or & d’ar- gent autour de leurs jambes. Fe7 eft à cent lieues fud-eft de Maroc , trente-cinq fud de Salé. Longirs felon les tables arabiques 18. & ar, 32. 3. mais fe- lon Harris, la long. eft 11. 34. 45. lar, 33. 10. os Voyez les auteurs cités ci-def[us. Je parçourois pour faire cet arc, ( le 2 Janv. 1756) FI ce qué quelques géographes rapportent de la ville de Fex, de fa poñtion , de fon étendue , de fes mof quées, des fynagogues que les Juifs ont dans cette capitale , 6:c, lorfqu'onm'a communiqué copie d’une lettre des miffionnaites de faint François établis en Barbarie. Cette lettre maintenantimprimée, racon- te entr'autres détails des ravages caufés en Afrique par le tremblement de terre du 1,18 & 19 No- vembre 1755, que la plus grande partie de la ville de Fey en a été renverfée , qu'il y a péri trois mille perlonnes, que Miquenez a été entierement détrui- te ,& quun corps de cavalerie de mille hommes a été englouti par ce même temblement. , Jene prétends point révoquer en doute tous les effets extraordinaires qua pû produire ce finguliér phénomene de la nature fur une partie de notre glo- be : comme 1l yaune fotte fimplicité qui croit tout, il y a de même une fotte préfomption ; qui rejette tout ce qui ne frappe pas communément nos yeux ; maisje dis que plus le tremblement de terre dont il s’agit, efl unique dans l’hiftoire du monde , plus on doit fe défier de la fidélité des relations qu’on en a répandues de toutes parts, principalement decelles qui nous viennent des pays éloignés ; ces relations nc toùjours fufpeltes par le petit nombre d’obfer- vateurs incapables de nous tromper , ou d’êtretrom- pés eux-mêmes. Si l’on fait-mille faux rapports des évenemens les plus communs, que doit-ce être dans les cas affreux oùtous les efprits font glacés d’effroi ? Voyez donc TREMBLEMENT DE TERRE, Arricle de A1. le Chevalier DE JAUCOURT. F I FIACRE, f. m. ( Police ) C’eft ainf qu’on appelle tous les carroffes de place ; ce nom leur vient de l’i- mage de faint Æiacre , enfeigne d’un logis de la rue faint Antoine , où on loua les premieres voitures publiques de cette efpece. Elles ont totjours été fi mauvailes & fi mal entretenues , qu’on a donné par mépris le nom de facre à tout mauvais équipage. Il feroit aifé de remédier à cet inconvénient, Qui, à ce qu'on aflüre, n’a pas lieu à Londres. En revan- che, la police de nos favres eft très-bien enténdue; 11 y a au derriere dés numeros & des lettres , Qui in- diquent la voiture dont on s’eft fervi; & l’on peut toüjours la retrouver , foit qu’on ait été infulté par le cocher de place, ( ce qui n’arrive que trop fou: vent , ) foit qu'on ait oublié quelque chofe dans la voiture. Les fzcres font même obligés de déclarer, Tous peine affli@ive , ce qu’ils y ont trouvé. On leur doit en courfe dans la ville, vingt-cinq fous pour la premiere heure, & vingt fous pour les autres, - FTANCÇAILLES, ff pl. (Æf. anc. € mod.) Pro: mefle réciproque de mariage futur qui fe fait en face d'églife. Mais en général ce mot défigne les cé- rémonies qui fe pratiquent folennellement avant la célébration du mariage, & où les deux petfonnes qui doivent s’époufer, fe promettent mutuellement de fe prendre pour mari & pour femme. Le terme de fancer, defpondere, eft ancien sil f- gnifioit promettre, engager fa foi , comme dans le roman de la Rofe : & promers , & france | 6 jure. Et dans l’hifloire de Bertrand du Guefclin : wau partir, » lui &fes gens prindrent quatre chevaliers anglois, # qui fancerenr de la main, lefquels fe rendirent tant » feulement à Bertrand »,Enfn il eft dit dansles oran- des chroniques de France » que Clotilde ayant re- commandé le fecret à » Aurélien > 1] li jura & Jan # ga , que james onc ne Le fçauroit ». Nous avons confervé ce terme fancé, d’où nous avons fait fan- gailles ; pour exprimer l'engagement que l’on con- traûe avant que d’époufer. Les latins ont employé des mots fpondeo , Jponfalia , dans le même fens, F I À 659 Plaute s’en eft férvi plufeurs fois : on lit datis PAwe lulaire : | M, Quid nuñc etiam del pondes #1 flidm ? E., LUlik legibus, cum illd dote quam tibi dixi. M. Spondert ergo, E. Spondeo. De même, Térence ; dans fa premiere fcène de PAndrienne: Häc famé impulfus Chremes Ültrd ad me venir ; unicam gratam fuarit Cum dote fummé filio uxorem ut dares : Placuic , defpondi , hic nupriis diélus ef dies: Les fançailles font prefque auf anciennes que lé iariage ; elles ont été de tout tems des préliminais res d’une union fi importante dans la fociété ci vile ; & quoiqu'il femble que M. Fleury ait crû qué les mariages dés Ifraélites n’étoient aécompagnés d'aucune cérémonie de religion , il paroït par les exemples qu'il cité , que le mariage étôit précédé ou par des préfens , où par des démarches, que l'on peut regarder comme des fançailles, dont la forme a changé dans la fuite felon le génie des peuples ; en effet, l'écriture remarque dans 2 chap: xxjv, dé la Genèfè, que« Laban & Batuel ayant confenti au » mariage de Rebecca avec Ifaac , le férviteur d'A: » brahaïa fe profterna contre terre, & adora le Seiz » gneur ; il'tira enfuite des vafes d’or & d'argent, » &t de riches vêtemens , dont il fit préient à Res » becca ; & il donna auffi des préfens à fes freres ; » 8 à fa mere ; ils firent enfuite le feffin { ils man » gerent & burent ce jour-là. » N’eft-ce pas là ce que nous appéllons farçailles ? | Le mariage du jeune Tobie eftencore uné preuve de l’ancienneté des fançailles ; on lit dans le chap.vir. que » Raguel prit la main droite de fa file, la mit » dans la main droite de Tobie, & lui dit : que le » Dieu d'Abraham , le Dieu d’'Ifaac, & le Dieu de » Jacob foit avec vous; que lui-même vous unifle ; » 6t qu'il accomplie fa bénédiétion en vous 3 » ayant pris du papier , ils dreflerent le contrat de » mariage ; après cela ils firent le feftin en béniflant » Dieu.» Nous pratiquoñs encôre aujourd’hui la même chofe ; l’on s’engage l’un à l’autre , en fe donnant la ain ; On écrit les conventions , & fouvent la cé: rémonie finit par un feftin : les fuccefleurs des pre- auers hommes dont ileft parlé , ont fuivi léur exem: ple ; par une tradition fubfiftante encore parmi ceux qui profeflent le Judaifme. Selden en a recueilli les preuves , & à même rap: porté dans le ch, du deuxieme livre de fon traité ,intis tulé , uxor hebraïca ; la formule du contrat de fan- gailles des Juifs ; l’on ne peut guere douter que les autres nations n’ayent fait précéder la folennité du mariage par des fançailles ; plufieurs auteurs en ont publié des traités exprès, où l’on trouvera un détail hiftorique des particularités obfervées dans cette premiere fête nuptiale. Mais nous allons laïffer les cérémonies des frari- çailles du paganifme & du judaïfme , pour dire un mot de leur ufage parmi les chrétiens. _L'églife greque & léglife latine ont en des fenz timens différens fur la nature des fançailles , 8 fur les effets qu’elles doivent produire. L'empereur Ale: xis Comnene fit une loi, par laquelle il donnoit aux fançailles la même force qu’au mariage éleëtif ; enforte que fur ce principe , les peres du fixiemé concile tenu #7 Trullo, l'an 98 , déclarerent que celui qui épouferoït une fille fiancée à un autre , Le: toit puni comme adultete , fi le fiancé Vivoit dans lé tems du mariage. | Cette décifion du concile parut injufte à plufieuts pérfônnes ; les uns difoient ( au rapport de Balfa- mon ) que la fille fançée n’étant point fous [a pui 660 FPA fance de fon fiancé , celui qui Pépoufoit ne pouvoit être accufé ni d’adultere , ni même de fornication : les autres trouvoient injufte de punir le mari , qui pouvoit même être dans la bonne-foi , & ignorer les fançailles de fa femme, & de ne prononcer au- cune peine contre cette femme, dont la faute ne pouvoit être juftifiée par aucune raïfon : mais pour éviter cet inconvénient , les Grecs ne mirent point d'intervalle entre les farçailles & le mariage ; ils ac- complifloient l’un & l’autre dans le même jour. L'églife latine a toûjours regardée les farçailles comme de fimples promefles de s’umir par le ma- triage contraété felon les lois de l’églife ; & quoi- qu’elles ayent été autorifées par la préfence d’un prêtre , elles ne font pas indiffolubles. C’eft donc une maxime certaine dans tous les tribunaux , que fille fiancée n’efl pas mariée, & que par conféquent elle peut difpofer de fa perfonne & de fon bien, pendant les fançailles, fans bleffer la foiconjugale , &c fans avoir befoin de l’autorité de fon fiancé, par- ce qu’enfin elle n’eft point fa femme , &c il n’eft point fon mari. Elle eft f. peu fa femme, que sil vient à décéder avant la célébration du mariage, ê qu’elle fe trouve groffe du fait de fon fiancé, elle ne peut prendre la qualité de veuve , ni l’enfant être cenfé légitime , & habile à fuccéder. Di&, de R- cheler, édit. de Lyon, enrichie des notes de M. Au- bert. Auffi la donation faite par un fiancé à fa fiancée entre le contrat de mariage & la confommation, eft nulle , & la répétition des préfens a lieu ; lorfque les nôces ne s’enfuivent point. Il y a, ce me fem- ble , beaucoup d'équité dans un paflage de l’alco- ran fur ce fujet ; 1l dit que fi le fiancé répudie fa fancée avant la confommation du mariage , elle peut garder la moitié des préfens qu’il lui avoit faits, fi le flancé ne veut pas les lui laïffer tous entiers. Nous ne paflons point en revüe toutes les diver- fités d’ufages qui fe font fuccédés dans la célé- bration des fiançailles , tant en France qu'ailleurs , c’eft aflez de remarquer ici, qu'autrefois dans notre royaume, onne marioit les grands, comme les pe- tits , qu'à la porte de l’églife. En 1559 , lorfqw'Eli- fabeth de France, fille d'HenriIl , époufa PhilippeIl roi d'Efpagne, Euftache du Bellay , évêque de Pa- ris , alla à la porte de Notre-Dame, & /e fr ( pour me fervir des termes du cérémonial françois ) 4 célébration des fiançailles audit portail, [elon la cot- sume de notre mere fainte Eglife. Quand le cardinal de Bourbon eut fiancé au Louvre en 1572 Henri de Bourbon roi de Navarre, & Marguerite de Valois, il les époufa fur un échafaut, pofé pareïllement de- vant Notre-Dame ; la difcipline eft différente à cet égard aujourd’hui; c’eft dans l’églife que fe fait la célébration des fiançailles, ainfi que du facrement de mariage. Arricle de M. le Chevalier D£ Jav- COURT. FIANÇAILLES , (Jwrifpr.) du latin fdo , qui figni- fie fe fier à quelqu'un ; {ont les promefles de mariage futur que deux perfonnes font publiquement & en face de l’Eglife, qui reçoit ces promefles & Les au- torife. Elles font de bienféance, & non de néceffité, Elles fe peuvent contraéter par toutes fortes de perfonnes qui peuvent exprimer leur volonté &c leur confentement, c’eft-à-dire faines d’entendement, & âgées de fept ans au moins, & du confentement de ceux qui les ont en leur puifflance , &c entre perfon- nes qui pourroient contratter mariage enfemble, lorf- qu’elles feront en âge; de forte que s’il y a quelque autre empêchement au mariage, Les farçarlles ne font pas valables. | L'ufage des fiançailles eft fort ancien. Il en eft par- FI A lé dans le digefte, au titre de fponfalibus ; dans le coë de théodofien, dans celui de Juftinien, dans le de- cret de Gratien & les decrétales, & dans les novel- les 18,093, & 109 de l’empereur Léon. Cet ufage a été imtroduit, afin que les futurs cons joints s’aflürent de leurs difpofitions mutuelles, par rapport au mariage, avant de fe préfenter pour re- cevoir la bénédiétion nuptiale; & afin qu’ils ne s’en- gagent pas avec trop de précipitation, dans ure 1o= ciété dont les fuites ne peuvent être que très-fâächeu- fes, quand les efprits fort mal aflortis. Il y avoit autrefois des fançailles par paroles de préfent, appellées /ponfalia de prefenti, qui ne diffe- toient du mariage qu’en ce qu'elles n’étoient point accompagnées de la bénédition facerdotale: mais ces fortes de fiançailles ont été entierement défendues pat l’article 44 de ordonnance de Blois, comme le concile de Trente lavoit déjà fait, ordonnant que aucuns mariages ne feroient valables, qu'ils ne fuf- fent précédés de publication de bans, & faits en pré- fence du propre curé, ou autre par lui commis, & des témoins; enforte qu'il n'y a plus d’autres f27- çailles valables , que celles appellées en droit /par/z- lia de futuro , c’eft-à-dire la promefle de fe prendre pour mari & femme. ia L'effet des fançailles eft : 1°. Quelles produifent une obligation récipre- que de contraéter mariage enfemble : mais fi l’un des. fiancés refufe d'accomplir fa promefle, le juge d’é- glife ni le juge laïc ne peuvent pas l’y contraindre, & l'obligation fe réfout en dommages & intérèts, fur lefquels le juge laic peut feul flatuer, & non le juge d’églife. Ces dommages & intérêts s’efliment, eu égard au préjudice réel que Pautre fancé a pù fouf- Le &t non pas eu égard à l’avantage qu'il peut per: re. | 2°, Il fe forme par les fançailles une efpece d’af: nité réciproque, appellée en droit canon ;afhiria pu- blicæ honeftatis , entre chacun des fiancés & les pa- rens de l’autre; de maniere que les parens du fiancé ne peuvent pas époufer la fiancée ; & vice versé, les parentes de la fiancée ne peuvent pas époufer Le fian- cé: mais le concile de Trente a reftraint cet empê- chement au premier degré , & a décidé que cette aff: nité, & conféquemment que l’empêchement qui en réfulte, n’ont point lieu lorfque les farçailles font nulles, La fiancée n’eft point en la puiffance du fiancé 3 & conféquemment elle n’a pas befoin de fon autori- fation, foit pour contraëter avec lui on avec quel- qu'autre , foit pour efter en jugement. L Les fiancés peuvent fe faire toutes fortes d’avan= tages permis par les lois, & qui font feulement dé- fendus aux conjoints, pourvi que ce foit par con- trat de mariage, ou que l’aête foit fait en préfence de tous les parens qui ont aflifté au contrat. L'engagement réfultant des farçailles peut être téfolu de plufieurs manieres : 1°, Par le confentement mutuel des parties. 2°. Par la longue abfence de l’un des fiancés: mais fi le fiancé s’abfente pour une caufe néceflai- re, & que ce foit dans la même province, la fiancée doit attendre deux ans; & fi c’eft dans une autre province, trois ans. ÿ 3°. Par la profeffion monaftique des fiancés, ow de l’un d'eux; mais le fimple vœu de chafteté ne diflout pas les farçailles, 4°. Lorfque le fiancé prend les ordres facrés. 5°. Si l’un des deux fiancés contratte mariage avec une autre perfonne ; auquel cas il ne refte à l’autre fiancé que l’aftion en dommages & intérêts, fuppofé qu'il y ait lieu. 6°. Par la fornication commife par l’un des fian- cés, ou par tous les deux , avec une autre perfonne depuis F TI A depuis les fançailles, & mème atparavant é f c’eft de la part de la fiancée, &c que Le fiancé n’en eût pas connoïflance lors des fiançailles, Voyez Fevret, traité de l'abus, lib. V. ch. j. n.12. Il faut encore obfervér à cet égard, que fi (3 eft la fiancée qui commet une telle faute , elle peut être accufée d’adultere, parce que les fiançailles {ont Vi- mage du mariage: L, fe uxor $. divus, 6: L, penulr, : ad leg. jui. de adult, | pen Si c’eft le fiancé qui a abufé {a fiancée , 1l doit être puni, pæna ffupri, quoique la fiancée fût proche de l'âge de puberté, & qu’elle ait confenti à fes defirs : mais s'il y a eu de la violence de la part du fiancé, il doit être puni comme ravifleur. Voyez Franc, Marc, part. I. queff. 70. Chorier ; jurifprud. de Guipape, ag, 270. f f La EM jaétance publique vraie on fauffe de la part du fiancé d’avoir eu commerce avec fa fiancée, eft un moyen pour rompre les fançailles. | Si le fiancé a rendu fa fiancée enceinte, & quil décede avant le mariage, la fiancée ne peut fe dire fa veuve , & l’enfant qui en provient n'eft point cen- fé légitime, n1 habile à fuccéder. D’Olive, aë, for. part, III. ait. 13. : 7°. Si lun des fancés avoit quelque vice confi- dérable, dont l’autre n’avoit pas connoïffance lors des fiançailles , c’eft encore un moyen de difolution. Par exemple, fi la fiancée apprend que fon fiancé eft totalement adonné au vin, ou qu'il foit brutal & violent à l'excès; ou fi l’un des fancés apprend que Vautre ait en lui quelque caufe d'impuiflance , {oit qu'elle ait précédé ou fuivi les fançarlles. 89. Si lun des fiancés étoit fujet au mal caduc, ou à quelque infirmité confidérable, dont l’autre net pasconnoïlances pli à. 9°. Si depuis les farçarlles 11 étoit furvenu à Pun des fiancés quelque difformité confidérable ; comme sil avoit perdu la vûe, ou feulement un:œil, s’il étoit eftropie de quelque membre. 10°. L’infamie furvenues. | | Les dons & avantages faits de part &-antre en= ire fiancés en contemplation du futur mariage , ne font point réalifés par les fiançailles , fille mariage ne fuit pas. M : La loi f£ 4 fponfo , cod. de donat. ant. TIUpL, décide que le fiancé venant à décéder pof ofeulum c'eft-à- dire après le baïfer que la fiancée lui accorde ordi- naitement , elle eft bien fondée à retenir la moitié des bagues & joyaux, & autres chofes qu'elle a reçûs de fon fiancé. Le motif de cette loi étoit, que o/czo _délibata cenfebatur virginitas. Mais en France où ces fortes de baïfers ne font confidérés que comme une fimple civilité, la flancée en pareil cas n°eft point en droit de-rien retenir; & Godefroi , Mornac:, Loïüet, &t Automne, difent que cette loi n’eft. point fuivie en France. | L'e 4 M. de Catelan rapporte cependant, Z. W, chi. un arrêt du parlement deTouloufe du 11 Avril1656, qui permit à la fiancée de garder des habits & linge que fon fiancé lui avoit donnés ; mais on l’obligea de rapporter les perles, les diamans , & l'argent, ëc des habits qu’elle avoit retirés du tailleur depuis le décès du fiancé. Voyez ONSELAGE. Foyez Cujas, ad cap. j. de Jponfalibus ; Florent , de fponfal, pag. 114 ; Cironius, #7 paratit. Covarru- vias, de fponfal. Franc. Marc. om. II, queff, 709 ; Papon, 4v. XXII, ue, y. n.6.Louet, kz.F., 7°, 18. Cambolas, iv. V.ch. xvi. (A4). | * FIARNAUX , f. m. pl. (Æi/£. mod.) M. de Ver. tot dit, dans fes ftatuts de l’ordre de Maithe ; qu'on appelloit ainf, durant les guerres de la Paleftine ; les chevaliers qui arrivoient dans cette contrée, d’au-delà de la mer; & po/ars, ceux qui y avoient pris naïflance. Les farnaux font maintenant dans le Tome VI, . FIA GG mème orde, les derniers ou nouveaux profes. FIASCONÉ , (Géogr.) ox MONTE-FIASCONE , Falifcorum mons.; petite ville d'Italie dans l’état de l'Eglife, avec un évêché qui ne relève que du pape, remarquable par fes bons vins mufcats. Elle eft fur une montagne proche du lac de Bolfena, à s lieues. N. E. de Viterbe. Longir, 294, 407, latir, 44, 34’ (2. J.) | FIASQUE, f. m. (Com.) en italien fafco, mefu- re des liqueurs dont on fe fert en quelques villes d’'I> talie: elle revient à-peu-près à la bouteille ou pinte de Paris. À Florencé, vingt fiafques font le baril, & foixante fafques le tar ou ftaro. Voyez BARRIL STAR ; PINTE » MESURE, Dit, de Comm. de Tréy. ê& Chamb, ; : ETAT, f. m. (Jurifpr.) en matiere bénéficiale fi gnifie une réponfe du pape à la fupplique qui lui eff: préfentée pour avoir {a fignature : certe réponfe fe met entre la fupplique & les claufes ; elle eft conçue en ces termes , fat ur perirur, Ces mots font écrits de la main du pape, lequel y ajoûte la lettre initiale dix nom qu'il portoit avant d’être pape. Pour mieux entendre quel eft l’'ufage du fer, il faut Obferver qu’il fe fait deux fortes d’expéditions em cour de Rome, Les unes regardées comme matieres ordinaires ds lefquelles font fignées par le préfet de la fignature de grace qui y met le cozceffum ; c’eft à-dire la réponie 5° il écrit entre la fupplique & les claufes, ces mots conceÎfum ur peritur, & il figne. Les autres fignatures ou expéditions de cour de: Rome qui portent quelque difpenfe importante, les provifions des dignités 27 cathedrali vel collegiaii, cel: les des prieurés conventuels, des canonicats :2 ca thedrali, doivent être fignées par le pape: c’eft ce que l’on appelle pafer par le far. Cette réponfe dix pape tient la place du conceffum dans les autres figna= tures. | Suivant les tegles dé la chancellerie romaine , ni concurrence de deux provifons du même jour > l’uü- ne expédiée par la voie du f4, l’autre par concef- Jim ; la premiere eft préférée, le préfet qui donne _ le conceffum n'étant à l’épard du pape, que ce que le grand-vicaire eft à l'égard de l’évêque. Mais la diftin- ton du far d'avec le conceffum , n'eft pas recûe dans ce royaume ; le conceffum y a la même autorité que le _ far. Voyez le traité fomm. de 1 ‘ufage de cour de Rome > tom. Î. pag, 320. € fuiy. avec les remarques, (4) FIATOLE, f. £. (A, nas. Ichchiol,) fiarola , poit- fon de mer fort commun à Rome 3 1l a le dos &e les côtés de couleur bleue, le ventre blanc » & les le vres rouges ; 1l eft prefque rond & applati. On voit auffi à Rome un autre poiflon, auquel on donne le nom de farola , parce qu'il reffemble au précédent pour la figure : c’eft le ffromateus des anciens ; ilne différe de la faupe, qu’en ce que les bandes de cou leur d’or qui font fur fon,corps, ne s'étendent pas juiqu'à la queue. Rondelet, 41f. des poiffons, 1, FI11. chap. xx. & iv. V. chap. xx. Voyez Poisson. (1) FIBRE LIGNEUSE, f. f. (Bor.) on nomme, en Botanique, fibre lipneufe, les vaifleaux fibreux defti- nés principalement à conduire le fuc nourticier dans toutes les parties.de la plante; maison diftingue dans les arbres & les arbrifleaux les fibres ligneufes de lé- corce, d'avec celles du bois ; quoique leur compos: fition foit à-peu-près la:même, Les fibres ligneufes de l'écorce font certains corps tubulaires , compofés-de quantité d’autres fibres qui communiquent enfemble :ils font ramaflés pour l'or: dinaire.en paquets ou faifceaux, qui en s'étendant & fe féparant les uns des autrés,-formentune ef pece de tinique réticulaire qui émbraffe lebois. M. Grew les appellé des corduits lymphatiques; parce qu'ils con PPpp 662 FIB tiennent un fluide aqueux, lympide, & pour l’ordi- faire fans faveur. ; Les f£bres ligneufes du bois font les mêmes que dans l'écorce; avec cette différence feulement, que fi l’on coupe le tronc en-travers, la feve découle de celles de l'écorce, & rarement de celles du bois ; elles for- ment la plus confidérable partie du bois , & fervent à le rendre plus fort & plus compaët, Les fibres ligneufes {emblent être aux plantes ce que les fibres offeufes {ont aux animaux. D’habiles gens prétendent que c’eft fur-tout par les fbres ligneufes de la racine, que le fuc nourricier s’éleve dans la plante, &c que c’eft à leur extrémité que font les principales bouches qui donnent entrée dans l’intérieur : mais que cettehypothèfe foit vraiffemblable à l'égard e plufieurs plantes, il eft abfolument befoin de l'é- tablir par des expériences, parce qu'il n'appartient qu'aux expériences de confacrer les hypotheles. 4r- ticle de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FIBRE, ( Anas.) on en diftingue d’offeufes, de nerveufes, ligamenteufes, &c. mais celle qui a le plus occupé les Anatomiftes méchaniciens, c'eft la fibre muiculaire. Borelli obferva dans les fres mufculaires, une fubftance fpongieufe (peut-être analogue à celle qu’on trouve dans les tuyaux de plume); il en con- clut que ces fibres étoient creufes, conjeéture qui a été prefque généralement adoptée. Mais comme ces fibr:s devenoient par-là des membranes roulées , 1l teftoit à déterminer quels plis recevoient les filamens de ces membranes dans le mouvement des mufcles. On fuppote qu’alors les fibrilles tranfverfales qui for- ment dans l’état de repos des réfeaux lâches &c paral- leles autour des grofles fibres, fe tendent, reflerrent ces fibres en différens points , & y produifent des véfi- cules qu’enflent les efprits animaux, Rien n’eft plus incertain que la courbure des fibres de ces véficules. Si on n’a égard qu'à Paëtion des ef- prits animaux, on trouvera toûjours (à caufe de la preffion perpendiculaire des fludes) que dans cha- que point le rayon du cercle ofculateureft en raifon réciproque de la preffion dufluide en ce même point; comme l'ont démontré M. Jean Bernoulli, chap. xvy. de fa théorie de la manœuvre des vaifleaux ; & apres lui M. Michelotti, p. Go-1. de fa differtation de fe- paratione fluidorum. Maïs fi l’on a auf égard à la pe- fanteur des molécules de la fire muiculaire, les vé- ficules prendront toutes les courbures comprifes fous l'équation générale des courbes produites par deux puiflances , dont l’une eft perpendiculaire à la cour- be, & l’autre tohjours parallele à une ligne donnée quelconque ; équation que M. Daniel Bernoulli a donnée dans le r. III. des mémoires de Petersbourg. Je ne parle point encore de l’extenfibilité de la fpre mufculaire. On éluderoit ces difficultés, fi l’on pouvoit démon- trer la fuppoñition fur laquelle raifonne M. Mead dans fon mémoire fur le mouvement mufculaire, im- primé à la tête de la Myoromia reformata de Cowper. M. Mead , ou pli:ôt M. Pemberton, prétend que la courbe qui convient aux fbres des véficules mufcu- laires,, eft entre les cou: bes ifopérimetres, celle dont la révolution autour de fon axe produit le plus grand {olide. Il détermine cette courbe par lés quadratures d’aires curvilignes, fuivant la méthode de M.New- ton; mais il ne dit point quelcetté courbe eft l'Elafti- que, ce que M. Jacques Bernoulli avoit démontré long-tems auparavant. Woyez ELASTIQUE. Ce filen- ce eft d'autant plus furprénant, que la confiruétion que donne M: Pemberton:de la courbe ifopérimetre cherchée, eft'abiolument la même que celle de Ja lintearia qu'l.a pù voir dans la phoronomie d'Her- man, div. 11, pag.16 7-8: mais cette confiruétion mé- me fuppole lesdémonftrations de M. Bernoulli, FIB M. Daniel Bernoulli (rzém. acad. de Petershourg, tom. 1. pag. 306.) croit auffi que chaque filament du petit cylindre creux, qui forme une fbre mufcu- laire, fe courbe en élaftique : mais comme on ne peut déterminer la reification de cette courbe, & le fo- lide formé par fa révolution autour de fon axe, que par des approximations pénibles , M. Damiel Ber- noulli lui fubftitue une parabole, dont le parametre eft fort grand, & les branches de côté & d'autre du fommet, fort petites. | M. Jean Bernoulli, qui a le premier appliqué les nouvéaux calculs à la recherche de la courbure des fibres de la véficule mufculaire, a penfé avec beau- coup de vraiffemblance que cette courbure eft cir- culaire. Lorfque le mouvement du mufcle cefle, quelle eft la direétion des filamens qui compofent une fibre muf- culaire , creufe & cylindrique? M. le marquis Po- leni répond, & tous les auteurs paroiïffent lavoir fuppoté, que ces filamens reprennent leur premiere longueur, & fe couchent les uns fur les autres en ligne droite. Voyez fa lettre de causé motës mufculo= rum , à l'abbé Guido Grandi, p. 5. Il femble que ces auteurs n’ont pas fait aflez d’at- tention au mouvement tonique des fibres, que d’au- tres phyfologiftes ont très- bien diftingué de leur mouvement mufculaire. Ce mouvement tonique fup- pofe un influx continuel des efprits animaux , qui les fait pafler librement & fucceflivement d’une véficule dans une autre , lorfque les fibrilles tranfverfales font relâchées : on voit que la courbure desfilamens des véficules eft alors la même que la courbure de la voile, ou la chaînette. Voyez CHAINETTE. | On fait qu'entre toutes les furfaces égales produis tes par la révolution des courbes quelconques, la chaïnette eft celle qui a la moindre périmétrie. L’a- vantage de cette courbure eft donc de raflembler fous la furface donnée d’un mufcle en repos, le plus grand nombre poffble de machines mufculaires. S'il eft quelque fujet dans la Phyfologie qu'on puiffe ramener à la nouvelle Géométrie, c'eft affü- rément celui-ci, fur-tout après les théories de MM. Bernoulli. Par lincertirude attachée à cette recher- che, qu’on juge du fuccès des autres applications du calcul pour éclaircir les points importans de l’éco- nomie animale. Voyez APPLICATION de la Géomérrie a la Phyfique. (g) FIBRE, (Economie anim. Medecine.) On entend.en général par fibres, dans la phyfique du corps animal, & par contéquent du corps humain , les filamens les pius fimples qui entrentrdans la compoñtion , la ftrudture des parties folides dont il eft formé. Les anciens ne font jamais entrés dans un fi grand détail fur cette compofñtion, ils ne cherchoient pas à y voir au-delà de ce qu'ils pouvoient découvrir à l’aide des fens ; ils n’avoient pas même poufé bien loin leurs recherches par ce moyen : ils étoient par conféquent bien éloignés d’employer le railonne- ment analytique pour parvenir à fe faire une idée des parties élémentaires du corps humain qu’on ap- pelle fibres ; ils faifoient pourtant ufage de ce mot. Les auteurs grecs qui ont écrit touchant les plantes, ont appellé de ce nom les nerfs ou les filets qui pa- roiflent au dos des feuilles, & les filamens qui font à l'extrémité des racines. Ceux qui ont traité de la | compofition des parties des animaux, ont nommé de même les filets qui font dans les chairs &t en d’autres parties ; c’eft ce qu'ils expriment par le mot grec &, dont leplurieleft es, que lesLarins ont rendu par ce- lui de fbra , par lequel on prétend quw’Hippôcrare ait | marqué également une fbre &t un nerf. Perionne ne nie qu'il n'ait auffi employé le mot fibre pour fignifier un filet charnu; 1 a même fait mention des fhresiqué font dans le {ang , 6. de carn, & princip, &t db. IT, de morb. Voyez SANG. Galien, lib. P. de fu part. res garde auff les fibres comme des filets déliés & fubtils qui entrent dans la compofition des nerfs, des liga- mens, des mufcles ; mais il n’avoit même point d'i- dée des filamens élémentaites, non plus que tous les autèurs qui l’ont fuivi, jufqu’au fiecle dernier, où PAnatomie perfettionnée a pouflé la décompofition du corps animal jufqu’à fes parties les plus fimples par la pénétration de lefprit , pour fuppléer à la groficreté à cet égard de tous les infirumens poffi- bles. | On fe repréfente donc aujourd’hui ces ffhres ani- males comme des filamens d’une petitefle indéfinie par rapport à leut largeur & leur épaifleur, & d’une étendue différente, felon les différentes parties à qui elles appartiennent. On conçoit qu’elles font comme unaflemblage de particules élémentaires , unies l’une à l’autre felon l« direétion d’une ligne. C’eft confé- Qquemment ce que l’on ne peut favoir que par le rai- lonnement, l'expérience apprenant feulement que les chaits, les os, &c. peuvent être divifés plus ou MOINS aifément en parties linéaires extrèmement dé- hées, & qu'il n’eft aucun organe qui n’en foit com- pofé. L’infufifance de nos inftrumens , & même de nos fens, ne nous permet pas de parvenir à les divi- {er méchaniquement jufqu’à leurs élémens. Ce qui va être expofé fur les fhres élémentaires, ne peut par conféquent être préfenté que comme une fuite de conjeëtures ; mais outre que les conjeûures de- viennent des raïons , quand elles font les plus pro- bables qu’on puifle tirer de la nature des chofes, & lésfeuls moyens qu’on puifle avoir de découvrir la “vérité, les conféquences que l’on fe propofe de dé- dure de celles qui fuivent, ne feront point pour cela conjeéturales, puifque fur Les principes qui feront établis, il ne paroît pas que l’on puifle former aucun autre fyftème fur ce fujet, qui ne fournifle les mé- mes réfultats , & dont on ne puifle tirer les mêmes ‘conclufions. Généralités phyfiques ‘prircipes des fibres. Ce n’eft donc aufli que par Le raifénnement que l’on peut fa- voir que chaque partie élémentaire proprement dite des fibres, confidèrée féparément , eft formée de particules de matiere unies entr’elles d’un lien in- difloluble ; qu’elle eft imfifbable ; qu'aucun agent dans la nature ne peut aufer aucune altération, foit pour fa forme intéffleque, foit pour fa figufe, {oit pour la cohéfionfdes particules dont elle eft#for- mée : c’eft la conféquence qu’on peut tirer de l fâce conftante de l’Univers, qui eft toùjours la même, & qui ne préfente jamais des corps eflentiellement nou- veaux, mais feulement des combinaifons variées de la matiere élémentaire, abfolument roüjours la mê- me en qualité, en quantité, & feulement différente refpetivement aux différens aggrégats qui en font formés par les puiffances de la nature ou par celles de Part. Les atomes ou principes de la matiere qui confti- tuent les corps, de quelque genre que ce foit, font donc de vrais folides d’une dureté à toute épreuve, & vraiflemblablement d’une denfité égale entr’eux, qui ne different que par la forme extérieure & par le volume, ou feulement par les différentes manieres d’être unis & mèlés entr'eux. Ce font les feuls folides parfaits qui réfftent à la divifion de leurs parties avec une force infurmontable, prufqu'il n’eft aucun corps compolé qui oppofe une pareille réfiftance. Ils font véritablement tels, étant confidérés féparément; mais aflemblés en maffe, la différente maniere dont ils le font, forme la différence qui conftitue la folidité ou la fluidité dans les mañles qui réfultent de Paflem- blage ; & ces deux qualités des corps compofés va- rient même indéfiniment chacune en particulier, par les différentes combinaifons qui les déterminent : en Tome FI, | FIB 663 fofte que le paffage de la folidité À la fluidité fe fait pour ainfi dire par une infihité de nuances graduées imperceptiblement ; d'où réfulte par cofféquent une infinité > OU, poux parler plus exaétement, une indé: finité de fortes de corps, tant folides qüe fluides, La différence eflentielle de ces deux gentes de corps ne confifte cependant qu'en ce que dans les folides la force de cohéfion oppofe une réfiftance totours bien fenfible, quoique plus où moins, à la divifion de leurs parties ; Gt dans les fluides cette réfiftance né fe fait point ou prefque point fentir, Les contacts entre les élémens des corps , ou entre les pétites maf- fes de ces élémens , par des furfaces d’une étendue plus ou moins confidérable, qualité à laquelle eft at- tachée la force de cohéfion (voyez Conésro N); forment la folidité. Les contaëts par des points {eules ment , en plus ou moins petit nombre , mais toñjours fi bornés qu'ils ne donnent prefque point où très-peu de prife à la force de cohéfion , fotment la fluidité : de-là toute la diffétence des corps entr’eux, c’eft-à- dite des corps folides comparés aux fluides , des foli: des comparés entr'eux, & des fluides auf comparés les uns aux autres, Le folide le plus fimple eft donc celui que l’on peut fe repréfenter compofé d’un certain nombre d’élé- mens, c’eft-à-dire de corpufcules féparément india vifibles affemiblés, de maniere qu'après leur union ils réfiflent fenfiblement, par quelque caufe que ce foit, à la force qui tendoit à les féparer. Ces cor- puicules, qui fott du genre des corps que l’on peut concevoir comme conftituant chacun féparément un folide parfait, qti font par conféquent, comme il a été dit, les feuls dans la nature qui réfiftent avec une force infurmontable à la divifion de leur matiere pro- pre; ces corpufcules où atomes qui n’appartenoient auparavant ni à un agorégé folide, nià un aggrégé fluide , forment par l’aflemblage qui vient d’être fup- poié, un agprégé du premier genre. Cette connea xlOn, quoique très-fimple, fait toute la différence entre les folides & les fluides, Elle manque dans ceux-ci, parce que Reurs parties élémentaires n'op+ pofent point de réfiftance à celles du feu qui péne- trent tous les corps , &c tendent à détruire toute con- fiftence.On peut regarder l’état des fluides commeun état de fufion , au lieu que la force de cohéfion entre les pañties intégrantes des folides, eft fupérieure à la force defuniffante du plus aëtif des élémens; par con: féquent la connexion fubfifte tant qu'il n’y a pas ex« cès de cette force-ci fur celle-là, C’éft aïnf que la cire, qui a tous les caraéteres de la folidité en hyver, devient prefque fluide par l'augmentation de l’idion du feu univerfel en été ; & au contraire l’eau, qui eft prefque toûjouxs fous forme fluide, devient un corps folide par une grande diminution de cette aca tion. Voyez GLACE. l II eft cependant à-propos d'obferver ici qu'il y a quelque différence dans la fignification des termes de Jolide & de fluide, par rapport à l’économie animale, Les Phyfiologiftes ne les adoptent pas dans le {ens abfolu qui vient d’être établi ; ainfi, felon eux, pour qu'une partie du corps humain foit regardée comme folide , il fafiit qu’elle ait affez de force de cohéfion pour éprouver fans folution de continuité, les alonge- mens, les diftenfions , les efforts répetés qui réfultent des différensmouvemens, tant ordinaires qw’extraor- dinaires, en quoi confiftent Les ations de la vie fai ne, & même léfée, proportionnées à la conftitution naturelle du fujet dans lequel elles s’exercent, en- forte que cette cohéfion foit fupérieure à tout ce qui tend à la détruire par un effet néceflaite de ces ac- tions. Les parties fluides propres au côrps animal, font compofées de molécules qui n’ont prefque point d’adhérence entr’elles, quifont féparables & mobiles en tous fens, quais feulement par accident, c’eft-às Pppi 6GA FIB dire entant qu’elles font fufifamment agitées par les îMouvemens des organes qui les contiennént ; fans quoi elles cefleroient d’avoir ces qualités. — Ilfuit de ces principes pofés, que dans l'embryon (qui, aux yeux du phyficien dans les premiers tems après la génération, ne paroît être pour ainf dire qu'une goutte de liquide, ie en a les caraëteres, fe- lo lui, pat le peu de cohéfion de fes parties, le peu de réfiftance qu’elles oppofent à leur divifion), le phyfologifte conçoit, par le raifonnement & par analogie, des parties aflez folides pour contenir des fluides, pour les mettre en mouvement , & réfifter aux efforts de ce mouvement ; aflez liées entr’elles pour former dès-lors une véritable machine hydrau- lique, un corps organifé, par un afflemblage de dif férens inftrumens dont les effets font aufii parfaits à proportion & plus admirables encore que ceux qui font produits dans le corps d’un adulte. De mé- me le fang &c'plufieurs autres humeurs du corps hu- main, que le medecin regarde comme fluides , laïfés à eux-mêmes hors de leurs conduits, perdent entie- rement, pour la plus grande partie, la propriété en quoi confifte la fluidité, c’eft-à-dire la difpofition à ce que les particules qui les compofent fe féparent entr’elles par le moindre effort. Ces humeurs anima- les forment bientôt une mañle coagulée, qui oppofe une réfiftance marquée à la divifion de fes parties ; cependant tant qu’elles étoient contenues dans le corps de l’animal , elles étoient fufceptibles de cou- ler, & couloient en effet fous forme liquide dans les plus petits canaux du corps. La folidité des rudimens de l’animal, contenus dans l’œuf, & la fluidité dela plüpart des humeurs, ne font donc que des proprié- tés feulement refpeétives, accidentelles , entant qu’elles font confidérées fous le point de vüe qui vient d’être préfenté. L’obfervation des Medecins à cet égard eft donc néceflaire, & n’eft pas déplacée ci, lorfqu'l s’agit des principes qui conftituent les parties folides du corps humain. Formation des fibres. Un élement féparé peut être confideré comme un point mathématique, qui n’a ni longueur, ni largeur, ni profondeur; mais dès qu'il eft uni à d’autres , felon la direétion d’une li- gne, avec quelque forte de réfiftance à la divifion des parties du tout qui en eft formé , il en réfulte une des trois fortes de dimenfions, qui eft la lon- oueur ; C'eft un corps compoié, étendu feulement felon cette direétion; c’eft un corps divifible feule- ment en ce fens-là : c’eft ainf que peut être concüe la formation de la fbre fimple, qui, par rapport à la divifñbilité, eft cenfée n’avoir ni longueur, ni épaif- feur; puifqu'elle n’eft fufceptible de féparation de fes parties, dans aucune de ces deux dimenfions, mais feuiement dans fa longueur, parce qu’elle n’eft formée que de parties élémentaires difpofées felon cette dimenfion. Cette fbre eft donc très-fimple, puifqu'aucune partie diviñble en foi, aucune partie compofée n'entre dans fa formation; elle n’a rien d'organifé, quoiqu’elle puiffe entrer dans la com- poñtion desorganes, ou qu’elle en ait fait partie. Ses principes font tels, que ni l’eau, ni l’air, ni le feu, ne peuvent les pénétrer, divifer leur fubftance; ils ne font fufceptibles d’altération que relativement à leur union extrinfeque entre eux, qui forme la production que nous avons appellée fibre ; union qui peut par conféquent ceffer d’avoir lieu. Les qualités de cètte fibre ou de fes élémens con- viennent parfaitement à la vrale terre, à la terre pure, qui eft un corps fimple, folide ; formé de par- ties fimilaires , le feul que nous puifions faifir, &- xer ; mais les parties terreftres , telles qu’elles tom- bent fous nos fens, n’ont guere de force de cohé- fion, fans quelqu’autre moyen que le contaët, qui n'eft vraiflemblablement fufifant que pour former des agprégés des plus fimples, c’eft-à-dire des amas de parties élémentaires fisurées de maniete à pou- voir fe toucher & s'unir par des fuxfaces, Les cen- dres des animaux, comme des végétaux, fe féparent aifément entrelles par l'agitation du moindre fouf. Île. Donc les aggrépés primitifs de corpufcules fim- ples ont prefque tous befoin pour former des foli- des, de quelque moyen intermédiaire, dé quelque efpece de glu, de colle, quiles retienne dans l’état de cohéfion , en étendant leur {urface contigué, en multipliant par conféquent les points de conta@. Dès que ce moyen, quel qw'il foit, eft enlevé, les petites parties qui compofent les folides fe diffipent aifément en poufñere. L'expérience nous engage à penfer que ce qui conftitue cette colle eft de nature aqueufe ou huileufe ; la chofe peut être rendue fen- fible par un exemple. Que l’on prenne des cendres bien lavées, pourles dépouiller de tout fel, que l’on en fafle un creufet ; il faut pour ceteffet paitrir ces cendres avec de l’eau : la pâte étant formée & féchée, elles reftent unies en un corps folide, mais qui eft percé comme un filtre. Si on paitrit les mêmes cendres avec de l’huile, en- core fous forme de vafe , & que l’on les fafle fécher dans un four afin que l’huile fe cuife, c’eft-à-dire que les parties aqueufes s’en féparent, alors ces cen- dres auront une très-prande force de cohéfion, & ce vafe ainfi formé fera très-ferme. Si cependant à force de feu , on vient à expulfer de fa fubftance toute l’huile qui y étoit incorporée , les cendres re- tourneront en poufliere comme auparavant. C’eft ainfi qu’une fécherefle de tems de longue durée, fait que la terre qui formoit de la boue , tant qu’elle étoit mêlée avec de l’eau, fe réduit en poudre vola- tile que le vent agite, enleve fous forme de nuée. Si-tôt qu'il vient à pleuvoir, cette même poudre ve: nant à être détrempée de nouveau, retourne en boue &t forme une pâte fi tenace, fi gluante, qu’elle peut par fon adhérence aux roues des voitures en arrêter: le mouvement, en les retenant avec plus de force qu’elles ne font tirées. Il fuit de ces raifonnemens appuyés fur des com paraïfons de faits, qu’il doit entrer quelque fubftance glutineufe dans la compoñtion des fbres animales; mais ce qui femble prouver invinciblement que la chofe eft ainfi, c’eft l’expérience faite fur les fibres même, c’eft-à-dire fur des parties qui en font com- pofées. 1°. Si l’on prend de ces parties, comme quel que portion charnue, bien lavée pour en féparer le fang, enforte qu’elle foit devenue bien blanche, & que lon la fafle enfuite bouillir dans de l’eau pen- - dant long-tems; elle fe change en une matiere infor- me, qui n'eft que gélatineufe: ce que favent bien ceux qui font [a colle forte, pour laquelle ils n’em- ployent que des morceaux de peaux, de tendons, de membranes cartilagineufes de diférens animaux, dont ils font de fortes décoéions; la diffipation des. parties aqueufes laifle un réfidu fous forme de ge- lée, qui, étant defléchée, devient extrèmement fer- me & compaëte comme de la corne. 2°. Les parties les plus dures, les os peuvent être réduits par la coc- tion en fubftance de gelée, comme on le prouve par les effets de la machine de Papin, & par l'expérience de Clopton Havers rapportée dans fon ouvrage in- titulé zova ofcologia. , Dicesreur. 3°. La partie mucilagineufe du fang féparée de la partie rouge par l'agitation, la conquaffation, étendue en forme de lame, & ainf féchée, paroît être une membrane fibreufe , qui imite celles qui font véritablement or- ganifées ; de maniere qu'on peut la conferver long- tems dans cet état, felon ce qui eft rapporté dans le thréfor anatomique de Ruyfch. 4°. Cette même par- tie gélatineufe féparée du fang, de laquelle il vient d'être fait mention, étant fraiche & mile en mañle ; comprimée par quelque moyen que ce foit, & ren- due un peu compaéte, a fouvent été prife pour de la vraie chair fibreufe, comme il arrive fur-tout à l’é. gard des concrétions qui {e forment dans le cœur, dans la matrice, que l’on prend pour des polybes : pour des moles, & qui en ont fouvent impofé, mê- me à des medecins éclairés, mais trop peu fur leur garde, 5°. Dans les premiers tems de la génération, les rudimens qui forment l’embryon, tout organité qu'il eft, fe préfentent fous forme de gelée; ils ne prennent de la confiftance que par les fuites de l’ac- croiflement ; & cependant peu de temis avant l’ex- clufonnaturelle du fœtus, les os même reflemblent encore à une fubftance gélatineufe, fur-tout entre la partie la plus folide &le périofte , comme l’a obfervé dans fon offeologie, l’auteur déjà cité. Ces dernieres confidérations fur la nature de la fibre, conduilent à traiter de fes propriétés. Propriétés de la fibre en général, Toute fibre, telle même que nous pouvons l'avoir par une divifion grofliere ( qui eft bien éloignée de parvenir à nous donner la fibre élémentaire, la fibre fimple), par une divifion qui ne peut nous fournir rien de plus fin, de plus menu, qu’un fafcicule de fibres fimples, dont le nombre eft auf petit qu'il eft poffible , en confervant nnvolume fufifant, pour tomber fous les fens ; toute fibre eft tranfparente, c’eft-à-dire qu’elle tranfmet en tous fens les rayons de lumiere, comme tous les corps\homogenesléduits en filets bienfubtils ou en lames très-minces. Lorfqu’une ffhre eft feche, qu’elle eft par conféquent dépouillée des parties hétéroge- nes des fluides dont elle étoit pénétrée, elle a en- core cette propriété plus marquée ; elle peut pro- duire alors les effets d’un prifme, c’eft-à-dire qu’elle peut décompofer un rayon de lumiere, & en exhi- ber les couleurs primitives, en les féparant ; c’eft une propriété que l’on peut auf obferver dans un cheveu, dans un poil. Toutes les fbres du corps humain ont de la flexi- bilité; cette proprièté eft fenfible dans toutes les parties molles, fansqu’ellesfoient décompofées ; elle m'eft pas moins dans les parties les plus dures, lorf- qu’elles font divifées en petites lames, qui {ont alors fufceptibles d’être pliées, courbées aifément , fans -qu'il s’y fafle de folurion de continuité. Les parties élémentaires qui forment les fibres ainfi flexibles, ne font donc pas umes entr’elles par des furfaces fi étendues & fi. pleines, qu’elles fe tonchent exaéte- ment dans tous leurs points ; parce qu'il réfulteroit d’untel arrangement des corps auf folides que leurs élémens même, qui n’auroient ni flexibilité ni divi- fibilité : les fibres étant fufceptibles de l’une & de l’au- tre de ces propriétés, font par conféquent compo- fées de parties qui ne fe touchent que par des por- tions de furfaces interrompues ; c’eft-à-dire , que les élémens des fibres & les fibres elles-mêmes unies pour former les organes, laïffent des points, des efpaces entfeux, c’eft-à-dire des pores, felon l’étendue de£ quels 1l n’y a point de contaét; qui font plus où moins petits, à proportion de la denfité propre à ces orga- nes; &t ceux-ci font conféquemment plus ou moins comprefhbles , ce qui contribue beaucoup à déter- miner les différens degrés de dureté & de mollefle ui les différencie, _ Toutefére, dans quelque partie du corps humain que ce foit, eft douée plus ou moins d’une force élaf tique : c’eft ce qui eft prouvé, par ce que l’on voit ‘conflamment arriver dansles parties molles coupées, dont chaque portion fe retire fur elle-même, fe rac- courcit fenfiblement vers la partie fixe : en quelque fens que foient coupées des chairs, des membranes, des vaifleaux, des ffhres de toutes ces fortes d’orga- nes, la même retraétion des portions féparées fe fait goûjours ,- & elles reftent dans cet état jufqu'à ce FIB 66$ qu’on les rapproche de force l’une de l’autre ; ce qui ne fe fait qu'avec beaucoup de peine dans les mu cles, les tendons. Ce raccourciflerent n’a pas lieu d’une maniere fenfible dans les nerfs , mais S'ils font fufceptibles de vibratilité, ils doivent avoir de lé. lafticité : cette force contradile ne fe montre pas non plus dans les fibres offeufes coupées ; cependant le fon qui réfulte des os lorfquw'on les frappe, dénote aflez que la fubftance offeufe eft élaftique ; mais il n’y à guere lieu à ce qu’elle s’exerce dans le Corps humain, parce qu'il ne s’y fait naturellement aucun effort fufifant pour mettre les os dans un état d’élon- gation : cependant les os des enfans réfiftent plus à être cafés, rompus, que ceux des vicillards : c’eft parce qu'il y a plus de flexibilité dans ceux-là que dans ceux-ci. Mais alors même les os font abfolu- ment moins élaftiques, quoiqu'ils foient en difpofi- tion de paroître tels moins difficilement: l’élaftici- té, dans toutes les parties du corps humain compa- rées entr’elles à cet ésard, paroît être en raïfon in verfe de leur flexibilité : car les fubftances nerveu- {es qui font les plus flexibles, femblent, comme on a dit ci-devant , n'être point du tout élaftiques : mais par oppofition, quelle n’eft pas l’élafticité des os, à en juger (proportion gardée de leur plus ou moins grande dureté) par l’élafticité de l’yvoire ? on ne peut cependant entirer aucune conféquence pour le corps vivant ; ainfi l’élafticité de fes fibres ne regarde pref- que que les parties molles, attendu que ces feules parties font véritablement fufceptibles d’être alon- gées , pliées , fléchies : cette force, en vertu dela: quelle les fibres de ces parties tendent À fe raccour- cit, leur eft tellement inhérente, que non-feulement pendant la vie, de quelque maniere qu’elles {oient tirées, elles font effort pour fe raccourcir, eh fe con traétant en effet dès qu’elles ceflent d’être tendues & qu’elles font livrées à elles-mêmes par folution de continuité ou autrement ; mais encore après la mort, elles ne font pas privées de cette force élaftique , comme on peut en juger par les peaux des animaux Ôc pat les cordes que l’on fait de leurs boyaux & de différentes autres de leurs parties, qui conférvent toutes beaucoup d’élafticité. Maïs cette propriété fuppofe dans la fre une au- tre propriété, qui, bien qu’elle confifte dans un ef- fet oppofé, en eft cependant une difpoñition nécef. faire ; c’eft la faculté de pouvoir être alongée, c’eft la diftradilité : car puifque l’élafticité confilte dans la faculté qu'a un corps qui a fouffert un changement dans la fituation intrinfeque de fes parties intégran- tes fans {olution de continuité, de les remettre dans leur premier état ( par une force qui lui eft propre); dès que la caufe de ce changement ceffe, il faut ab- folument que ce corps foit fufceptible de ce premier effet dans fes parties ; qu’elles foient mifes dans une forte d’éloignement, les unes par rappoxtaux autres; en un mot, que le contaë cefle entr'elles (fans qir'el- les fe féparent les unes des autres ; AU point de faire folution de continuité pour le tout qu’elles compo- fent ) avant de leur faire récouvrer leur précéden- te fituation refpettive , & de les ramener à leur pre- mier état : c’elt donc, ce me femble , fort à propos que l’on diftingue deux effets bien différens, qui s’o- perent toutes les fois que la faculté élaftique eft ré. duite en aéte dans les corps qui en font fufceptibles : d'autant plus que ces deux effets dépendent l’un & l’autre d’une puiffance réellement aufi a@ive pour lun que pour l’autre : l’une fert autant À retenir les parties qui tendent à être écartées les unes des au- tres, & entierement defunies , que l’autre {ert à les rapprocher &c rétablir entr’elles le contaët d’union L au point où il étoit ; l’élafticité tend à raccoureir les fibres plus alongées que ne lé comporte lenrtendan- ce naturelle; cet effet s’opere de la même maniere 666 FIB qu'un pifton rentre avec force dans une pompe dont il a été tiré en paîtie ; c’eft-à-dire, fans fortir du tuyau, fans cefler d’afpirer. La diftra@ilité permet l’alongement des fibres, en faifant néanmoins conti- nuellement effort pôur retenir leurs parties dans la fphere de cohéfion ; en empêchant qu’elles n’en for- tent; en confervant ainf la continuité, ou au moins la contiguité entr'elles: ce qui prouvé, pour l’obfer- ver en pañlant, que la force de cohéfion dans lescorps élaftiques , ne confifte pas dans le conta@ immédiat, puifqu'il peut être diminué très-confidérablement, fans que cette force perde fon aûtivité : d’où on peut tirer la conféquence, que c’eft cette force unique qui opere pour la même fin dans la diftraétilité , dans l’é- lafticité & dans Le repos des corps, c’eft-à-dire qu’- elle agit toljours dans ces différens cas, pour confer- ver l’affemblage des parties qui forment les aggrée- gats. Il fuit donc de ce qui vient d’être dit concernant la difira@tilité , qu’elle doit avoir lieu dans la fre, pour que celle-ci puifle exercer fon élafticité : ce qui arrive toljours, foit que la caufe qui tend la fhre la tire felon fa longueur, foit que la fibre de droite qu’- elle eft entre deux points fixés, foit forcée à fe cour- ber, ou que de courbe qu’elle eft, elle le devienne davantage ; foit qu'étant courbe fans avoir d’attache fixe, elle foit forcée à prendre une courbure plus étendue, quoique de la même modification (car ce font-[à les combinaifons générales felon lefquelles la fibre peut être alongée , tirée , forcée en différens, {ens) : mais puifque la fre entiere fe laifle ainf dif- tendre, & qu'il s’enfuit que les particules élémentai- res dont elle eft formée, fe féparent alors les unes des autres felon fa longueur, fans que pour cela il y ait diffociation complette, attendu qu’il n’y a point de folution de continuité apparente ; comment cela peut-il fe faire ? eff-ce, felon l’idée de Bellini, parce que les élémens des fhres font difpofés.de maniere que le milieu de leurs furfaces répond au joint de deux autres contiguës, felon ce que l’on obferve dans la conftruétion des murs de brique ou de pierre de tail- le, ce qui fait dépendre la propriété dont il s’agit, non des élémens de chaque fre entr’eux, mais de la totalité des f£bres entr’elles, en tant qu’elles concou- rent à former un organe quelconque ? eff-ce par la raiïfon, que les fibres ont des parties rameufes, qui s’entrelacent &fe lient enfemble, felon l’idée de quel- ques autres phyfologiftes? eft-ce par la force d’at- traétion newtomienne, qui conferve la continuité, quoique le contaét immédiat foit diminué jufqu’à un certain point ? Cette derniere opinion paroît la plus probable ; mais de quelque maniere que la chofe fe fafle , c’eft tout un ; peu importe : cette recherche appartient abfolument à la Phyfique générale , ainf que ce qui regarde l’élafticité, la diftra@ilité ; ce n’eft donc pas ici le lieu d’examiner quelle peut être la caufe de ces phénomenes : d’ailleurs, il vaudroit mieux les admettre eux-mêmes, comme des cau- fes dont il n’eft intéreffant de favoir que les lois conftantes, que de fe rendre le joïet de l’imagina- tion, en travaillant à donner des explications qui au- roient le fort de toutes celles qui ont paru jufqu’à préfent ; dont on peut dire qu’elles fe font détruites les unes les autres, au point de s’être prefque fait. oublier, Voyez ATTRACTION, COHÉSION, ELAS- TICITÉ , Éc. Ce fur quoi il importe le plus d’infifter, eft l’effet des deux propriétés dont il vient d’être queftion, bien avérées dans toutes les fres animales ; d’où il réfulte que tant qu’elles font entieres, de quelque maniere qu’elles foient difpofées dans le corps vi- vant, elles font abfolument dans un état de diften- fion ; par conféquent elles ne {ont jamais laiflées À glles-mêmes; elles font toujours dans un état vio- lent ; elles font continuellement effort pour fe raci courcir felon toute l'étendue de leur puiffance élaf: tique, & elles ne parviennent jamais entierement à l'état qu’elles affeétent, même dans le plus grand re- lâchement que puiffent produire les caufes morbif- ques. C’eft cette tendance, cet effort continuel des f- bres, qui font les principaux moyens par lefquels la vie fe maintient : car étant toüjours diftendues, elles font dans une difpofition continuelle à agir poux fe raccourcir, dès que la force qui les alonge vient à diminuer ; elles réfiftent à être intérieurement dif : tendues, tant que leur force de reflort eft fupérieu- re ou même égale à celle qui tend à les alonger da- vantage. [1 y a plufieurs raifons d'empêchement à ce que les fibres ne puiflent pas fe raccourcir autant que: leur élafticité le comporteroit: Les raifons particulie- res à chaque agorégé de fibres , font tirées de leurs différentes poñitions méchaniques : ainfi p. e. dans celles qui font antagoniftes les unes des autres réci- proquement, quoiqu’elles paroïflent dans certains cas, comme le relâchement des mufcles, n’être plus dans un état violent; cependant fi on vient à couper un des agorégés antagoniftes, il fe fait toùjours um raccourciflement dans chacune des portions{éparéess elles s’écartent l’une de l’autre, fe retirent vers leur point fixe ; & l’antagonifte, qui refte entier, fe con- traéte tout autant à proportion que celuiqu a été coupé fe retire : ce qui prouve dfien que toutes ces fibres de part & d’autre , n’étoient pas fans tenfon 3 qu’elles faifoient encore effort pour{e raccourcir dae Vantage; & par conféquént, qu'elles ne cefloient pas d’être en ation, quoique fans effet fenfible. Quant à l’obftacle général au relâchement entier des fibres , la eaufe en eft facile à trouver ; c’eft la mafle des fluides contenus dans les vaifleaux, qu tient les fres dont ils font compolés, dans un état de diftenfion continuelle, plus où moins forte cepen- dant , felon que le volume des fluides augmente ow diminue : dans le premier cas, les fbres font tendues ultérieurement en quelque fens qu’elles foient poféesz dans le fecond cas, elles fe détendent de même en tous fens ; mais ce relâchement n’eft jamais parfait, tant qu'il refte des fluides dans Les parties contenan= tes ; 1l n’eft que refpe@tif ; il n’eft qu'un état de moin- dre diftenfion ; Les fibres font toùjours diftendues en tous fens ; dans le premier cas, c’eft la diftrailité des fibres qui eft exercée, & l’élafticité dans le fe- cond; changemens qui ne ceflent de fe fuccéder tant que dure la vie, enforte qu’elle femble dépen= dre d’un perpétuel inéquilibre. Mais cet inéquilibre ne peut être connu que par rapport aux folides comparés aux fluides, &c réci- proquement ; car pour ce qui eft des folides entr’eux ët des fluides entr’eux refpetivement , on peut au contraire fe les repréfenrer comme dans un perpé- tuel équilibre de forces, d’a@ion, de réa@ion pro- portionnées, au moins dans l’état de fanté, qui eft la vie la plus parfaite; équilibre dont les maladies ne font que des léfions, Voyez EQUILIBRE , (Econom. anim. ) 11 fe trouve fous ce mot bien des chofes;'qui ont rapport aux ffhres en général ; voyez auffé CIR= CULATION DU SANG, SANTÉ. Une autre propriété des fbres, qui dérive bien na- turellement de la force élaftique , c’eft la vibratili- té; ce feroit ici le lieu d’en traiter aufli; mais elle appartient de trop près au méchanifme de loue, pour en féparer ce qu'il y a à dire de cette propriété confeétaire. Voyez SON, OUIE, OREILLE. Quant à l’irritabilité obfervée particulierement par M. Haller, dans quelques - unes des parties du corps humain, 1lfuffit qu'elle ne foit pas une proprié- té commune à toutes les fbres, pour qu'il ae doive pasenêtre fait icimention d’une mäniefe détaillée. Voyez IRRITABILITÉ. Compofës des fibres. Après avoir traité de la fbre, de fa nature & de fes propriétés , en tant qu’elle eft fimple & confidérée féparément des organes qui ne font qu'un compofé de fibres; il refte à rechercher comment on peut concevoir que fe forme ce compo- fé, puifque.c’eft des fébres premieres, que font conf- truites toutes les parties confiftantes du corps hu- main difpofées à contenir, à transférer, à diftribuer, à préparer, à féparer , à évacuer les différens flui- des qui font néceffaires, utiles ou inutiles à l’écono- mie animale. Deftinées à des ations purement mé: . chaniques, les fbres par leurunion différemment com- binée, compofent des folides, des machines & des infttumens de toute efpecc ; on trouve en effet dans Pinfpettion des parties , des filets, des cordons, des cordes ; des poulies, des leviers, des colonnes, des folives, des foufflets, des canaux, des refervoirs , des facs, des foupapes, desfiltres, &plufieursautres chofes diverfementfigurées, qui entrent dans la conf: truétion du corps humain, & quiconcourent à l’exer- cice de fes fonétions, à leur perfeétion & à fon orne- mnt. C’eft fous la forme de s4yau principalement, que les fibres unies font employées à contenir les fluides, qui eft l’ufage le plus général, commun à tous les org a- ñes, à quelques fonétions qu'ils foient deftinés. Les tuyaux, qui font auffi communément appellés coz- duits ; canaux, font fpécialement défignés par les Anatomiftes fous le nom de vaiffeaux ; ils les diftin- guent enfuite fous quatre genres principaux, favoir,, d’arteres, de veines, de fécrétoires 8& d’excrétoires, qui comprennent les vaifleaux de toutes les efpeces connues ; voyez VAISSEAUX. De tous ces différens vaifleaux , les uns font facilement apperçüs par les fens, les autres le font difficilement, ou ne le peu- vent être que par les fecours de l’art, ou né le peu- vent pas être du tout, à caufe de leur extrème peti- tele ; enforte qu'il n’en eft qu'un certain nombre de ceux qui échappent à la vüe, même aidée des mi- crofcopes, qui ont pù être démontrés parles travaux finguliers & les foins induftrienux de quelques céle- bres anatomiftes, & entr’autres, par l’art admirable des injeétions du grand Ruyfch; on juge par ana- logie de ceux qui ne font pas fufceptibles d’être ren- dus fenfibles. Il eft par conféquent reçû à. préfent af. fez généralement, que toutes les parties folides du corps font chacune formées d’un tiflu de vaifleaux , depuis fur-tout qu'il a été démontré que toutes les fubftances des parties qui n’avoient été que groffie- rement anatomifées par les anciens, & que: l’on avoit crû en conféquence fpongieufes, parenchyma- teufes, ou de telle autre ftruéture aufi éloignée de la véritable , font réellement un compofé de vaifleaux, & pour la plüpart de toutes les efpeces. Cette multiplicité de vaifleaux extrèmement fub- tils, a donné lieu à quelques auteurs de penfer , que l’on n’eft pas encore parvenu à connoiïtre tous les différens vaiffeaux qui entrent dans la compoñition des parties du corps humain, & enfuite, que le dé- croiffement des vaifleaux va à l'infini : mais quoi- que lon accorde la premiere propofñition , parce qu'il paroit en eflet , que la fcience de l’anatomie n'eft pas portée à fa perfedion , & qu’il eft proba- ble qu’elle n’y atteindra jamais, bien qu’elle puiffe acquérir de plus en plus de nouvelles connoiffances; Onnepeut pas, fur une fimple conjeéture , fe dé- terminer à admettre que la petitefle des vaifleaux n'ait point de bornes ; pendant que la raïfon indi- que au contraire qu'il y a des derniers vaifleaux, des varffeaux au-delà defquels il n’y a pas de divi- fion extérieure en plus petites parties contenantes : ce qui fuit peut fervir de démonftration pour cette aflertion. FIB 667 Les fofces méchaniques, dans qüelqtié machine que ce foit , & par conféquent dans lé corps hu: main ; ne font pas infinies ; l'expérience prouve toi ours qu’elles ont un terme : la divifion des pars ties , dont font compofés les fluides ; doit aufli con- féquemment avoir des bornes : il y a donc desmo: lécules dé ces fluides , qui toutes petites qu’elles font, doivent cependant être conçues d’un volume déterminé , & non pas diminué à l'infini : elles rez tiennent auffi un certain degréde côhéfionentr’elless enforte qué le vaifléau déftiné à les recevoir doit avoir une capacité déterminée ; propoftionnée à éhacune de ces molécules , & non pas d’un diame- tre infiniment petit : d’après cette idée, on eft fon- dé à conclure , avec jufte raifon ; donc il exifte un dernier vaifleau d’une petitefle indéfinie , mais bors née. | hs Mais, puifque l’exifteñce de ce dérnier vaifleau eft établie, on ne peut fe le repréfenter que très fims ple ; donc la tunique ou membrane quide compofe, de la maniere qui fera bien-tôt décrite , ne doit pas être faite d’autres vaifleaux : on doit donc la con: cevoit conftruite de filamens fimples , c’eft-à-diré de fibrés premieres, telles que l’idée en a été donnée dans cêt article : il exifte donc une fre , qui n’eft point vafculeufe, qui n’a point de cavité ; par cons féquent ce n’eft qu'un filet, fans largeur ni épaif- feur divifbles , mais étendu en longueur par uné fuite des parties élementaires , unies les unes aux autres , felon cette dernieré dimenfon ; c’eft ce qu’il falloit établir, pour ne laïfler aucun doute fur lé: xiftence de la ffbre élementaire ; avant de confidé: rer comment elle eft [a bafe de la ftruéture du corps humain. Ce n’eft que par les yeux de la raïfon , que l’on peut fuivre la compoftion de cet ouvrage admira- ble , comme il vient d’être pratiqué pour en faire l’analyfe phyfique : on peut donc fe repréfenter ainfi Cette compoñtion des parties ; qui réfulte de l’u- nion différemment combinée des fbres fimples. Un certain nombre de ces fibres fimilaires applis quées les unes à côté des autres par leurs furfaces longitudinaires , felon toute leur étendue, adhéren« tes les unes aux autres par le conta@ auquel eft at- tachée la force de cohéfion, & par quelque forte de colle qu’on a dit avoir raifon de croire de na- ture glutineufe, forme ainfi une efpece d’étoffe fans qu'il foit befoin d’entrelacement pour fes fla mens : & la preuvé que cet entrelacement n’exifte pas dans l’aflemblage des fibres ; fe trouve dans la différence que l’on obferve à l'égard des effets de lhumidité fur les tifus de filets fimples ou de fl de quelque nature que ce foit , comme les toiles , les cordes , & fut les organes compofés de fres ani- males : elle donne une forte dé rigidité à ceux-là, tandis qu’elle ramollit ceux-ci : les anatomiftes don: nentà ce compoié ainfi conçu le nomde yrembranes nom qu'ils donnent à toute fubftance fibreufe où vafculeufe ; très-mince , à proportion de fon étendue en longueur 8 en largeur, Celle dont on vient de dire qu’elle eft formée de fhres élemen- taires , eft elle-même la membrane la plus fimple. Si on fe la repréfente figurée en parallelogramme ou apptochant, repliée fur elle-même, & foudée par les deux bords longitudinaux ; elle a fous cette forme le nom de tunique , & elleeft dès-lors tournée en ca nal fermé de tous côtés , par des parois , excepté par fes deux extrémités : c’eft un véritable vaïffeau, prôpre à contenir un fluide ; mais c’eft un vaifleau très-fimple, dont la tunique n’eft formée que de par ties élementaires , unies entr’elles, fous la fotmede fibres & de membranes. Si l’on fe repréfente après cela plufeurs vaifleaux de cette efpece unis enfem- ble , felon leur longueur , pour ne former qu'un 668 F 15 corpsétenduen largeur, fansautreépaifleutque celle de chacun de cesvatffeaux ; on a l’idée de la premiere rnembrane vafculeufe , la moins compofée de cette efpece , que l’on puifle imaginer; cette même mem- brane rephiée fur elle-même , pour former un canal cylindrique ou conique , fait le premier vaifleau dont la tunique foit vafculeufe : plufieurs vaifleaux de cette efpece, unis entr'eux, pour former des membranes toûjours plus compofées , font les ma- tériaux des tuniques de vaifleaux toûjours plus con- fidérables ; 8 ainfi en remontant de ceux-ci à de plus grands encore, jufqu'aux principales ramufica- tions & aux troncs des vaifleaux fanguins qui tien- nent au centre commun de tous les canaux du corps humain, qui en eft formé dans {on tout & dans fes diférentes parties , & d’où réfulte la fabrique de ce chef-d'œuvre de [a nature, Mais cette conftruétion , telle qu’elle vient d’être repréfentée , par rapport à la formation des f£bres, des membranes, quine font qu’un aflemblage def- bres , des vaifleaux#formés de ces membranes , fim- ples & compofées ; & de tous les organes conftruits de l'union de ces vaifleaux différens entr’eux & diffé- remment afociés ; cette conftruttion ne peut être tendue, que par parties êc par opérations fuccefh- ves ; mais la nature travaille différemment , elle jette, pour ainf dire , fon ouvrage au moule ; tout fe forme en même tems, fbres, tuniques, vaifleaux, organes de toute efpece ; tout fort achevé de fes mains , conformément à fon archètype ; l'embryon eftauff parfait dans fon état que l’adulte ; l’accroif- fement n’eft qu’une perfeétion refpe@ive , en tant qu’elle eft une tendance au terme que fe propofe la nature, qui eft de donner une confftence à Punion des pafties qui forment cet embryon ; confiftence qui puifle en conferver & faire durer l'édifice, juf qu'à ce que cette caufeconfervatrice devienne elle- même, par une fuite néceflaire de fes effets, la cau- fe deftruétive de ce même édifice par le mécha- nifme qui commence la vie & qui la maintient ; méchanifme dont l’expoftion ne fera pas déplacée tci. Le corps humain, quelque grand & quelque volu- ineux qu'il puiffe être ; quelque fermes ‘8: com-. paëtes que loient la plüpart des organes dont il eft compolé , lorfqu’il a atteint le dernier degré d’in- crement, a été forme d’un affemblage de parties de la matiere infiniment plus petit que le plus petit grain de fable , qui n’a commencé à tomber jous les lens que fous la forme d’une goutte de liquide ; cet aflemblage renfermoit cependant proportioné- ment le même nombre d'organes , la même diftribu tion de vaifleaux & d’humeurs diverfement élaborés que l’on trouve enfuite dans adulte : ce n’eft pas par une addition extérieure de nouvelles parties , que ces rudimens de l’homme ainfi conçus s’éten- dent & groffiflent, mais par une intus -fufception des fluides , dont les parties intégrantes font pro- pres à produire cet effet ; fluides qui ne peuvent être ainfi préparés que dans le petit individu , tel qu'il vient d’être repréfenté , tout impuiflant qu'il paroît pour cela ; tout informe qu’il fepréfente à nos fens : ces changemens admirables font produits par une double caufe , qui ne cefle d’agir tant que la vie fubfifte , c’efl-à dire parle méchanifme de l’accroif- ferment êc par celui de la folidefcence. - Les effets du premuer confiftent en ce que quel- ques particules des fluides qui ont été élaborées , af finées , & rendues homogènes au point de pouvoir pénétrer dans les vaïfleaux les plus fimples , s’appli- quent aux parois de ces vaifleaux , s’infinuent dans l'intervalle des élémens de la fibre dont ils font com- potés, à mefure que les élémens font écartés les uns des autres par la caufe de la diftenfion , de Palonge- FIB ment des folides, de l’accroiflement, & laïffent entr: eux des vuides, des fcrobicules à remplir ; enforte que l'embryon acquiert ainfi toüjours plus d’étendue. Voyez ACCROISSEMENT ; NUTRITION. Quant à la force & à la fermeté de la fibre, c’eft la folidefcence qui les lui donne par le méchanifme qui va être expofé : il confifte dans la force de pref= fon des vaifleaux les uns fur les autres , dansle tems de leur diaftole : il eft für , d’après Les principes d’Hydroftatique , que les liquides qui font mûs dans des canaux, agiflent, font effort contre les parois : or une pareille impulfion fe faifant de l’axe vers les parties latérales dans chacun des vaïffeaux qui font tous flexibles dans les premiers tems de la vie , al doit s’enfuivre qu'ils fe dilatent tous. Et plufieurs vaifleaux qui {e trouvent contigus,, qui forment une mafle entr’eux , étant conçus agir ainf les uns fur les autres, par la dilatation fyncrone qu’ils éprou- venttous ; mais cette dilatation nefe faifant pas dans tous avec une égale force , parce qu’ils n’ont pas tous le même diametre , parce qu'ils font plus ow moins grands, parce qu'il y en a de compofés &cde fimples ; ceux qui font les plus petits , dont les flui- des contenus fe meuvent par conféquent avec plus de lenteur , non-feulement ne peuvent pas fe dila- ter comme les grands , mais encore ils ne peuvent pas conferver la cavité quu leureft propre ; ils font preflés, comprimés de tous côtés par les vaifleaux qui Les éenvironnent , dont la dilatation fe fait avec une force fupérieure ; ils cedent à ces forces réunies contr'eux , jufqu'à ce que les parois de ces petits vaifleaux étant de plus en plus portées les unes con- tre les autres , leur cavité fe perd, s’oblitere peu-à- peu ; elles viennent à fe toucher à l’oppofñite, à être fortement appliquées les unes contre les autres , & ceflent de former un vaifleau pour n'être plus qu'un agerégé ou un fafcicule de fbres intimement unies entrelles, & par le contaét réciproque , & peut-être auffi par la concrésion du peu de fluides propres qui reftent dans leurs cavités, qui a parcon- féquent beaucoup plus de force qu'il n’y en avoit auparavant dans ces mêmes fres , lorfqu’elles fe touchoient entr’elles par moins de côtés : la cohé- fion ainfiaugmentée, les rend plus fermes, plus com- paétes, & par conféquent plus propres à conferver leur continuité, à réfifter à tout effort , qui tend à en opérer la folution. \ Si l'on connoïit qu’un femblable effet foit produit dans un grand nombre de vaifleaux fimples des dif- férentes parties du corps , on doit en conclure que la fermeté , la folidité doit augmenter dans toutes fes parties : or comme , par le méchanifme général du corps humain, cette force de preflion des varf- feaux les uns fur les autres, qui tend ainf à conver- tir les vaifleaux fimples en fhres compolées, produit fes effets par degrés pendant tout le cours dela vie, enles augmentant continuellement à mefure qu’el- le augmente elle-même ; :il s'enfuit que toutes.les païties du corps tendent continuellement à devenir plus folides , plus dures jufqu’à perdre leur flexibi- lité , être defléchées prefqu'entierement ; c’eft cette confidération qui a fait dire aux anciens que vivere eff continuo rigefcere , que Pattion de vie eftune ten- dance continuelle à priver de leur flexibilité toutes les parties folides de l’animal, à détruire par confé- quent la qualité la plus néceflaire pour Pexercice de cette ation : enforte que ce qui conftitue la caufe effentielle de la vie & l’entretient , tend de plus en plus à devenir la caufe de la ceffation de la vie: c’eft une loi commune, non-feulement à tout cequi eft animé , mais même à ce qui végete ; un chêne naif- fant eft auffi mou , auf flexible que l’herbefraïîche: quelle dureté ; quelle roideur n’acquiert- il pas par {on accroïfflement & par la durée de fa végétation ! Les. . FIB Les parties de l'embryon, qui ne font que pulpeufes dans les premiers tems de la vie, prennent peu-à- peu & de plus en plus une confiftence qui augmente fenfiblement d'âge en âge dans Padulte, & quiparve- nue à {on dernier degré de rigidité, conftitue la caufe de la vieilleffe & de la fin des a@ions de la vie, parce qu'elles dépendent de la flexibilité des organes, quu ne fubfifte plus dans le cas dont il s’agit, les fébres étant dures & defléchées par le long exercice de ces aétions mêmes. L'expérience démontre ces effets, puifque non- feulementils ont lieu d’une maniere bien fenfible dans la peau, les mufcles , les tendons , mais encore dans des fubitances des plus molles refpettivement (telles que les membranes, comme la plevre, la dure-mere, les tuniques des vaïfleaux, le tronc de l’aorte même, des portions du foie, de la rate), qui ont été trou- vées dans des vieillards véritablement offifiées ; ce qui arrive en général, principalement dans les par- ties expofées à des fortes preffions. À Quoique dans l'embryon les parties paroïflent tou- tes également molles & pulpeufes, & ne femblent pas avoit plus de confiftence les unes que les autres ; Les progrès de la folidité ne fe font pas en même pro- portion dans toutes ; elle parvient à une très-gran- de fermeté dans les os ; elle eft toïjours moindre dans les cartilages | & beaucoup moindré encore dans les membranes , les chairs, que dans ces der- nieres : elle acquiert même des degrés différens dans les différentes parties molles, felon que le fage au- teur de l'édifice l’a jugé néceflaire pour les ufages auxquels elles font deftinées , pour le rapport qw’el- les ont entr’elles, en un mot pour la dire&ion & la confervation de l’économie animale, Cette différen- ce remarquable , il faut l’attribuer toûjours à la cau- fe générale, ci-devant afignée , c’eft-à-dire à l’iné- galité de preflion entre les vaiffleaux des uns fur les autres , des plus forts fur les plus foibles : cette cau- fe agit par conféquent plus ou moins, felon la diffé- rence des parties ; ainñ dans celles où il fe trouve untrès- grand nombre de petits vaiffeaux contigus, expofés tout-à-la-fois à la compreffion d’un nombre fufifant de grands vaifleaux ambians ; ceux-là font également changés en fbres groffieres, c’eft-à- dire formées de vaifleaux oblitérés , qui unis les uns aux autres, forment des mafles de fibres toüjours plus épaifles, fans cavité ; d’où réfulte la dureté des fubftances ofeufes, cartilagineufes, ce qui ne fe fait que peu-à-peu , & à proportion que les petits vaif- eaux font ainfi convertis en fgres compofées : car, comme nous l’enfeigne la formation des os, l’os dur a été d’abord un compofé de plufeurs membranes valculeufes très-fines, difpofées en lames appliquées les unes aux autres, quiayant perdu peu-à-peu de fa flexibilité , a acquis la confiftence d’un cartila ge avant que de parvenir à l’état de dureté, propre à la fubfance offeufe : 11 s’enfuit donc que les parties de l'embryon , deftinées à former les os, font compo- fées de maniere qu’elles ont , fous un volume don- né, un plus grand nombre de petits vaifleaux que les autres parties , lefquelles foient fufceptibles de. {e laiffer comprimer librement par les vaiffeaux qui les environnent : conféquemment , la folidité ne dif. continuant d'augmenter dans toutes les parties pen- dant toute la vie, eft cependant différente quant aux efets , par la différence de proportion qui exifte dans les différentes partiesentre les vaifleaux qui compri- ment & ceux qui font comprimés au point d’en perdre leur cavité ; enforte que cette folidefcence , qui s’o- pere par le changement des petits vaifleaux en fibres compofées , ne peut être attribuée qu’à l'inégalité de prefion des vaifleaux entr’eux. | C’eft pourquoi , puifque le cerveau eft toüjouts une partie fimolle, même dans l’âge avancé , il y a Tome VI, FIB 669 leu de croire que cette égalité de confiftence dans toutes les parties de ce vifcere, fubfitte ainf la mé- me À-peu+près, parce qu'il n’y a point ou prefque point d’inégalité de preffion dans les vaiffeaux dont ileft compoté , qu’ils fe dilatent avec une égale for- ce, & qu'aucun ne cede aflez à d’autres pour être comprimé, perdre fa cavité, & être changé en f- brecompofée. Cette égalité de confiftence étoit ab- folument néceffaire à un organe, dont les fon@tions exigent une flexibilité conftante, & refpettivement égale dans les parties auxquelles il appartient de les opérer. Différences des compofés de la fibre, Après avoir vi en quoi confifte la différence entre la fgre fimple & la fibre compolée, il refte à défigner les différentes ef peces de celle-ci : on la divife otdinairement en of. feufe, en charnue , & en nerveule. La premiere efpece ef celle qui concourt À former les parties les plus dures, les plus compactes du corps humain , c’eft-à-dire les os : les fibres offeufes font difpofées en long dans les os figurés felon cette di- menfon , & du centre À la circonférence dans les os plats ; elles forment dans les uns & les autres des la- mes, des couches appliquées les unes aux autres, &t différemment graduées, contournées felon la def. tination des os ( voyez Os ); elles font unies entr’el- les en beaucoup plus grand nombre , fous un volu- me donné,que celles des autres efpeces ; elles fe rou- chent par conféquent par un plus grand nombre de points ; d’où réfulte dans les fubftances offeufes plus de denfité, de force, de cohéfion, de folidité , de du- reté, que dans toutes les autres parties du corps; ce- pendant ces qualités varient encore du plus au moins Par rapport aux os compofés entr’eux : on peut com- prendre fous cette efpece les fubftances cornées comme les ongles , dont les qualités approchent beaucoup de celles des os. Voyez ONGLE, CORNE. La fibre charnue eft un affemblage de plufieurs faf- cicules ou petits paquets de fibres fimples, ou de vaifleaux fimples dégénérés en fbres compofées, qui ne font pas unis entt’eux d’une maniere bien inti- me ; 1ls forment une mafle très-peu compaéte, aifé- ment compreflible, molle ; ils contiennent dans leurs _interftices des vaifleaux de différens genres, fanguins, lymphatiques , nerveux ; ils font auff féparés par de fines membranes qui forment comme des cloifons : ces fafcicules de fibres charnues font de différentes lon- gueurs & de différentes poñtions:ils s’étendent d’unos à un autre os, ou d’un os à un autre point fixe quelcon- que;ou ils fontrepliés fur eux-mêmes, & foudés parles extrémités de maniere à former une ffbre circulaire, un anneau Charnu comme dans les mufcles fpkinéfer ; où ils font difpofés en fpirale différemment combinée : comme dans la firuêure du cœur. Les fibres char- nues font rouges , lorfqu’il y a du fang dans les in- terftices des fafcicules fibreux., qui étant lavés, ou confidérés féparément , font blancs, comme dans les tendons qui ne font qu’une extenfon des fhres char- nues dont font formés les mufcles , mais plus refler- rées dans ceux-là que dans ceux-ci; de manieré qu’= elles ne reçoivent point entr’elles de vaifleaux fan- guins: 1l en eft de même des aponévrofes & des meme branes qui font comme des lames, des toiles plus ou moins approchantes de la nature du tendon. La fibre nerveufe eft un compofé de filets pal. peux blancs , qui entrent dans la compoñtion. du cerveau, du cervelet, de la moelle alongée & épi: niere, des ganglions & des produéions de toutes ce: parties : ces produétions font appellées #erfs., lor(: qu’elles font difpofées en forme de cordons étendus . en ligne droite ou approchant , & qu’elles font.re. vêtues d’une gaine membraneufe , prolongement de la dure-mere qui accompagne leurs diftributions dans toutes les parties du corps. | | QQgqs 670 FIiB Onpeutrapporter à ces trois efpeces de fibres com- potes, toutes celles qui fe trouvent dans le corps hmmain : elles font toutes très-flexibles (fans en ex- ceprer les offeufes ) prifes féparément ; maïs unies en mafle , elles different à cet égard : les os, les cor- nes n'ont pretque point de flexibilité , fur-tout dans les adultes ; les ongles en ont un peu, lorfqu’elles {ont en lames ; les cartilages en ont davantage que les ongles , tout étant égal ; les chairs , les tendons, les membranes, les mafles nerveufes & les nerfs, font des parties toutes très-flexibles. Voyez ce qui a été dit ci-devant des propriétés des fibres. Les efpeces de fibres, dont on vient de faire men- tion, quoique bien différentes entr’elles par leurs qualités fenfibles , ne font néanmoins qu’un compo- {6 de fibres fimples , fous forme de vaifleaux infini- ment petits, ou des vaifleaux oblitérés , plus ou moins fortement adhérentes les unes aux autres, qui ne different entr’elles que par les diverfes com- binaïfons de leur union : les parties élémentaires qui forment les fibres , font les mêmes , c’eft-à - dire de même nature , de même figure, de même volume, felon Lewenhoek , & vraiflemblablement elles ont auffi , à l'égard de chaque individu, la même force de cohéfion pour leur union , fous forme de fières fimples, à la compoñtion de quelque partie qu'elles puiflent être deftinées : ainfi c’eft avec raïfon que l’on a retenu des anciens, pour les élémens des fbres, & pour les fitres même en tant que fimples, le nom des parties frmilaires , afin de les diftinguer des par- ties qui en font compofées, des inftrumens dont laf- femblage forme lPindividu, qui fervent aux différen- tes attions de la machine animale , qui font par con- féquent d’une grande différence entr'eux par leur ftruture, & qui font ainfi réellement difimilaires : on a aufli confervé à ces dernieres parties leur an- cienne dénomination ; elles font encore appellées or- ganiques. Il exifte donc de cette maniere deux gen- res de parties folides ; dont les différences ne font que les efpeces : tous les animaux (& les végétaux même ) font compolés de parties fimilaites primiti- ves, & dé parties qui en font formées , c’eft-à-dire de parties fecondaires ; organiques , inftrumentai- res : voilà ce qu'ils ont de commun ; nrais par quoi ils different, c’eft par la difpofition de toutes ces dif- férentes parties’, tant fimples que compofées, par le plus ou moins de force de cohéfion de celles-là, & par l’organifme , le méchanifme de celles-c1 ; non- {eulement chaque claffe d'animaux poffede ces trois qualités d’une maniere qui lui eft propre , mais en- core chaque ordre ; chaque -efpece , chaque indivi- du a une forte de cohéfion dans les fibres dont il eft formé, une forte d’organifation, qui ne font commu nes qu’à une même clafle; qui deviennent particulie- res à un même ordre, qui font plus particulières encore à une même efpece , & qui examinées avec plus d’attention , font abfolument propres & diffé- rentes dans chaque individu : on peut même pouffer cette confidération jufqu’aux différentes parties, dont * Vafflémblage forme individu , comparées entr’elles, - qui font aufli difpofées ; par rapport à leurs prinei- pes & à leur mafle, d’une maniere qui leur eft par- : ticuliere ; proportionnément au tout: | La différente combinaïfon des fibres produit donc -feule la différence caraëtériftique entre les animaux, entre les parties quiles forment & les individus qui réfultent de ces parties, comparés les: uns aux au- tres , en tant que ces fibres font réunies entr’elles de différentes mamieres , forment en conféquence des organes plus ou moins confiftans, plus où moins den- es, plus ou moins fermes , élaftiques, diftra@iles, flexibles ; & en un mot plus ou moins forts, & dif- potés à exercer lés fonétions auxquelles ils font defti.. pés : toutes çes qualités dépendent donc du conta@! FIB des fibres entrelles, plus ou moins étendu , c’eft-4= dire felon qu’elles font unies par des furfaces ou par des points avec des modifications indéfinies , qui rendent plus où moins robuftes on foibles les vaif- feaux formées de ces fibres , & les difpofent à con- vertir en plus ou moins grand nombre, plus ou moins promptement les petits vaifleaux en fibres , formées de celles qui ne font que des vaifleaux fimples obli térés par la compreffion des compofés , par les cau- fes de la vie , conféquemment plus puiflantes dans certains fujets que dans d’autres : de-là s'enfuit, par la comparaïfon de ces différentes qualités des par- tes folides & de leurs effets dans chaque individu, la différence de ce qu’on entend par rermpéramenr, par confhitution | complexion particuliere ; c'eit li diofyncrafe des anciens : des auteurs diffinguent même encore le tempérament de la conftitution, en ce que cehu-ci1 eft tiré des principes phyfiques , des caufes primordiales de la ftruéture du corps humain, & la conflitution dépend de fes principes méchani- qués, du jeu, de l’aétion des organes. Voyez TEMP£- RAMENT. En voilà affez fur les fbres , tant fimples que com- pofées, confidérées phyfiologiquement ; cependant quelqu’étendu que foit le détail dans lequel on vient d'entrer à ce fujet , la matiere en eft f abondante, qu’il laiffe encore bien des chofes à defirer par rap- port à ce qui ena été dit: pour fuppléer à ce défaut, il faut avoir recours aux différens ouvrages fur lé- conomie animale , dont ce fiecle a enrichi la Mede- cine , tels que ceux de Lewenhoek , de Baglivi, d’Hoffman ; les commentaires de Boerhaave par MM. ‘Haller & Wanfwieten ; le mot fibre du difionnaire de Medecine , d’après ce dernier ; la phyftologie de M. de Sauvages, & particulierement la differtation de M. Fizes , célebre profefleur praticien de Mont- pellier , intitulée confpeilus anafomico - mechanicus partium humani corporis folidarum ; dans laquelle la phyfique des fibres | & des parties qui en font for- mées , paroît être mile dans tout fon jour. Foyez aufñ les arsicles F@TUS, NUTRITION, MUSCLE, Os. Après avoir examiné la fre en général, relative- ment à l’état naturel , à l’état de conformation, tel que exige la fanté de chaque individu , il refle à voir à quels changemens elle eft expofée dans l’état que l’on appelle dans les écoles coztre-nature ; c'eit- a-dire dans celui de léfion, de maladie, Nous venons de voir ci-devant , que le corps hn- main; par rapport à fes fibres & à leur afflemblage , eft un compofe de parties filaires ou fimples, & de parties diffémilaires ou organiques : de cette diftinc- tion des parties folides en deux efpeces principales , qui peuvent avoir chacune leurs vices, leurs mala- dies propres, il en réfulte auffi deux efpeces de lé- fions principales , dont font fufceptibles les parties folides ; la premiere regarde les parties fimples, l’au- tre les parties compofées: les anciens n’ont prefque point fait mention de celle-là, fi l’on en excepte Ga- lien, comme on le prouvera ci-après. Les méthodi- ques même , quine cherchoïent les caufes des mala- dies abfolument que dansles folides, dont la do&r:i- ne-éftordinairement appellée de ffriélo Gtaxo ,c’eft- à-dire, de la confiriétion ou roideur 82 du relâche- ment Ou de la débilité des parties, n’ont point con- fidéré ces vices dans les ffkres premieres, maïs feu- lement dans les parties organiques; ils n’ont rien dit dés maladies des fhres proprement dites: Medici faune "fenfuales artificès ; les Medecins ne doivent recher- “cher leur objet que dans ce qui tombe fous les fens, -pourroit-on dire, pour approuver la conduite des anciens à cèt égard; mais on ne feroit pas attention, qu'il ne s’agit dans cette maxime que des effets, & - non pas des caufes ; on ne doït raifonner & tirer des FIB conféquences de celles-ci, que a les phénome- nes qui s’enfuivent. Querces caufes foient fenfibles ou non, les effets doivent tolours l’être pour déter- -miner les Medecins à s’yintérefler: c’eft ce que Ga- lien paroît avoir très-bien obfervé , même pour le fujet dont il s'agit (méch. L, Il. caps jw. }: il établit d’abord les deux vices dont peuvent être principale: ment affectés les folides : Jane autern duesprime paf> Jéores, dit-il; alcera anguffatio feu conffriéhioneatuum altera ampliatio feu relaxario, « Les léfions radicales » des canaux, c’eft-à-dire par conféquent des-foli- » des engénéral, ne peuvent être que leur refletre- >» ment ou leurrelâchement ». Nam f£ prima elementa fupponantur impoffibilia , continue le même auteur , nulle etunt alie, preterquam in compofitione ; paffio= nes; fola autem compofitio ea quæ dicimus diferimina recrpie, & Car fionfuppofeles premiers élémensinal- »# térables, il ne peut yavoir de léfions:que dans les + parties qui en {ont compofées ; cesléfions n’ad- » mettent d'autre différence, que celle qui vient d’ê- » tre mentionnée »,; gare necelle ef? femilarium quar- dibet partiumitunc fuum habere robur, ajoûte-t-il; cum meatuurm moderationem obtinet , qu& moderatione cor- ruptà, à natural difpofitione digrediatur oportersu C'eft # pourquoi il eft néceflaire que chacune des parties » fimilaires ait une force qui lui foit propre, tant » que les canaux font dans l’état convenable; mais » lorfque cet état vient à fouffrir quelque dérange- # ment, il s'enfuit que les parties nereftent plus dans » leur difpofition naturelle », Et pour ne laifler au- cun doute fur ce qu'il entend par parties fémilaires 1l finit par cette confidération, dont onne-peut cer- tainement faire l’apphcation qu'aux fbres primitives, Sed quoniam una queque nediocritas duplicem-paricur corruptionemn , alteram exuperantiam , alceram defe&lum; dique, quod primæ paffiones corporum fimplicium .du- plices erunt, quarum alieræ ex ampliationt, alceræ ex anguflationc meatuum confifunt, « Mais parce que l’é- » tat moyen, qui eft l'état naturel, eft fufceptible » d’être vicié de deux manieres, favoir par excès # ou par défaut, 1l paroïît évident qu’il, ne -peut y # avoir d'autre maladie des corps fimples, que le » reflerrement & le relâchement des conduits qui en » font formés ». | C’eft ainfi que le fameux auteur dont il s’agit, jette le fondement de la théorie des maladies des fo- lides, fans s’'appercevoir que c’eft celui de la doc- trine des méthodiques , qu'il a tant combattu ; mais ils n’ont jamais fi bien pofé leurs principes , que Ga- lien le fait pour eux; 1ls vouloient reduire toutes les maladies à celles des folides, au lieu que Galien, re- des honneurs, des fzfs, c’eft-à-dire , dons ou poffef- Jions, du mot teutonique, fe/d ou foeld , qui a cette fignifiçation ; dans la langue angloife on les appella 59 FID On ne peut pas douter que les ffs ne fuffent d’abord amovibles. Les hiftoriens , les formules, les codes des diférens peuples baïbares , tous les monumens qui nous reftent , font unanimes fur ce fait. Enfin , ceux qui ont écrit le livre des fiefs , nous apprennent que d'abord les feigneurs pu- rent les ôter à leur volonté , qu’enfuite ils les afñlü- rerènt pour un am, & enfuite les donnerent pour la vie. _ Deux fortes de gens étoient tenus au fervice mi- Btaire ; les leudes vaflaux qui y étoient obligés en conféquence de leur fef.; & les hommes libresfrancs, romains & gaulois, qui. fervoient fous le comte, & étoient menés par lui & fes officiets. On äppelloit Lommes libres, ceux qui d’un côté n'aVoient point de bénéfices ou ff, & qui de l’au- tre n’étoient point foûmis à la fervitude de la gle- be ; ces terres qu'ils poffédoient , Étoient ce qu'on appelloit des serres allodiales. | Il y avoit un principe fondamental , que ceux qui étoient fous la puiflance militaire de quelqu'un , étoient auffi fous fa jurifdiétion civile. Une des rai- fons qui attachoit ce droit de juftice, au droit de mener à la guerre , faifoit en même tems payer les droits du fic, qui confiftoient uniquement en quel- ques fervices de voiture dûs par les hommes libres, & en général en de certains profits judiciaires très- Emités. Les feigneurs eurent le droit de rendre la juftice dans leurs fes, par le même principe qui fit que les comtes eurent le droit de la rendre dans leur comté. | Les fs comprenoient de stands territoires ; com- me les rois ne levoient rien furles terres qui étoient du partage des francs , encore moins pouvoient-ils fe réferver des droits fur les ffs ; ceux qui les ob- tinrent eurent à cet égard la jouiffance la plus éten- due : la juftice fut donc un droit inhérent au fef même. On ne peut pas, 1l eft vrai, prouver par des contrats originaires, queles jufticés dans les com- mencemens ayent été attachées aux fefs, puifqu'ils furent établis par le partage qu’en firent les vain- queurs ; mais comme dans les formules des confir- mations de ces fiefs , on trouve que la juftice y étoit établie , 1l réfulte que ce droit de juftice étoit de la nature du fef , & une de fes préropatives. On fait bien que dans la fuite , la juftice a été fé- parée d’avec le ff, d’où s’eft formée la regle des ju- rifconfultes francois , autre chofe eff le fief, autre chofè ef la juftice : mais voici une des grandes caufes de cette féparation ; c’eft que y ayant une infinité d'hommes de ff5, qui n’avoient point d'hommes fous eux ,1ls ne furent pas en état de tenir leurs cours : toutes les affaires furent donc portées à la cour de leur feigneur fuzerain, & les hommes de fe perdi- rent le droit de juftice, parce qu’ils n’eurent ni le pouvoir ni la volonté de le réclamer. Préfentement nous pouvons nous former une idée de la nature des gouyernemens établis en Europe, par les nations du nord. Nous voyons de-là l’ori- gine des principautés , duchés , comtés, dans lef- quels les royaumes de l'Europe ont été partagés ; de-là nous pouvons remarquer , que la propriété, le domaine ( direélum dominium ) du pays, réfidoit dans le corps politique ; que les tenanciers en fefétoient feulement revêtus du domaineutile, domriumurile ; êtque par conféquent les stands tenoient leurs fei- gneuries du public, du royaume & non du roi. C’eft ainfi que les princes d'Allemagne tiennent leurs prin- cipautés de l’Empire & non de l’empereur ; & c’eft aufh pourquoi les feigneurs anglois font nommés pairs du royaume | quoiqu’on croye communément qu'ils tiennent leur titre du roi. C’eft encore par la même raïon qu'en Angleterre... Mais laiffons aux particuliers des diverfes nations , les remarques FID 6x intéreflantes qui les concernent , & hâtôns-nous dé parler des principaux changemens , qui par fuccef- fon de tems, font arrivés dans le gouyernement féodal & politique de notre royaume, Changemens arrivés dans Le gouvernement féodal € politique de France, Quoique par la loi, les fefs faf- fent amovibles, ils né fe donnoient pourtant, nine S'Ôtoient d'une maniere arbitraire , & c’étoit ofdi= nairement une des principales chofes qui {e traitoit dans les aflemblées de la nation ; on peut bien pen- fer que la corruption fe gliffa parmi nous fur ce point, l’on continua la pofleffiondes Jeefs pour de l’ar- gent, comme on fit pour la poffeffion des comtés. Ceux qui tenoient des fefs avoient de très-prands avantages. La compofñtion pour les torts qu’on leur faifoit, étoit plus forte que celle des hommes libres. On ne pouvoit obliger un vaffal du roi de jurer par lui-même , mais CR par la bouche de fes pro- pres vaflaux, Il ne pouvoit être.contraint de jurer en juflice contre un autre vañlal. Ces avantages firent que lon vint à changer fon aleu en ff. c’eft-A-dire qu'on donnoiït fa terre au roi, qui la donnoit aux da- nateurs en ufufruit ou bénéfice, & celui-ci défignoit au roi fes hériters. Comme il arriva fous Charles Martel, que les fefs furent changés en biens d’églife, & lesbiens d’églife en fiefs, lesfefs &cles biens d’églife prirent réciproques ment quelque chofe dela nature de l’un & de law tre. Ainfi les biens d’éplife eurent les privilèges des fiefs , & les fiefs eurent le privilége des biens d'églife, Voilà l’origine des droits honorifiques dans les églifes. Les hommes libres ne pouvoient point dans les commencemens {e recommander pour un fef; mais ils le purent dans la fuité, &°ce changement fe fit dans le tems qui s’écoula depuis le regne de Gon- trand jufqu’à celui de Charlemagne, Ce princé dans le partage fait à fes enfans , déclara que tout hom- me libre pourroit après la mort de fon feigneur , fe recommander pour un fef dans les trois royaumes, à qui il voudroit, de même que celui qui n’ayoit Ja- mais eu de feigneur. Enfuite tout homme libre put choiïfir pour fon feigneur qui il voulut, du roi ou des autres leigneurs. Ainfi ceux qui étoient autrefois nuement fous la puiffance du roi , en qualité d’hom- mes libres fous la puiffance du comte, devinrent in- fenfiblement vaffaux des uns des autres à caufe de cette liberté, Voici d’autres changemens qui arriverent en Fran- ce dans les fefs depuis Charlesle Chauve. Il ordonna dans fes capitulaires , que Les comtés feroient don- nés aux enfans du comte, & il voulut que ce régle- ment eût encore lieu pour les fé/$. Ainfi les #ef5 paf ferent aux enfans par droit de fucceffion & par droit d'éleétion. L'Empire étoit forti de la maïfon de Charlemagne dans le tems que Phérédité des fefs ne s’établifloit que par condefcendance ; au - contraire , quand la couronne de France fortit de la maifon de Charle: magne , les fefs étoient réellement héréditaires dans ce royaume ; la couronne , commeun grand ff, le fut auf. Après que les fs , d’annuels qu'ils étoient, fu- rent devenus héréditaires, il s’éleya plufieurs con- teftations entre les feigneurs & leurs vaflaux, & ens tre les vafñlaux eux-mêmes ; dans ces conteftations il fallut faire des réglemens concernant les droirs & les fonétions réciproques de chacun. Ces réglemens ramaflés peu-à-peu des décifions particulieres, fu- rent appellés /a Loi des fefs, & on s’en fervit en Eu- rope pendant plufeurs fiecles, Cette loi eft diftinguée par le doéteur Nicholfon, un des plus favans prélats d'Angleterre en matiere d’antiquités, dans les périodes fuiyantes: 19, fa naïf 692 FID fance depuis l'rruption des nations feptentrionales juiqu’à l'an 650: 2%. fon enfance depuis ce tems-là jufqu’en 800 : en 3° lieu , fa jeunefle depuis le même tems jufqu’en 1027 : enfin 4°, {on état de perfeétion peu de tems après. Les princes de l’Europe & leurs fujets fe trou-. vant unis mutuellement par des titres de poffeffions en fief (cé qui étant dûement confidéré , montre la vraie nature du pouvoir de la royauté ); cette union fubfifta long-tems dans un heureux état , pendant le- quel, aucun prince de l’Europe ne s’imagina être revêtu d’un pouvoir atbitraire, jufqu’à ce que la loi civile ayant été enfevélie dans loubli, après léta- bliflement des nations du nord dans occident de l'Empire ,cétte nouvelle idée parut au jour. Alors quelques princes fe fervirent de la loi Regia pour s’at- tribuer un,pouvoir defpotique, & introduire dans leurs royaumes la loi civile , uniquement par ce mo- tif. Cette entfeprife n’eut point de fuccès en Anpgle- tèrre, mais elle gagna le deffus dans d’autres parties de l'Europe ;'en Efpagne, par exemple, où la lec- ture de cette loi fut pour cette raifon défendue fur peine de la vie. R © . Effèts qui ont réfulré de l’hérédiré des fefs. Une in- finité de conféquences ont réfulté de la perpétuité des fefs. Il arriva de cette perpétuité des fes, que le droit d’aïneffe ou de primogéniture s'établit dans l’Europe ; chez les François, les Efpagnols , les Ita- liens , les Anglois , les Allemands. Cependant on ne connoifloit point en France cet injuite droit d’ai- nefle dans la premiere race ; la couronne fe parta- geoït entre les freres , les aleus fe divifoient de même , & les fefs amovibles ou à vie n'étant pass un objet de fucceflion , ne pouvoient être un objet de partage. Dans la feconde race, le titre d’empe- reur qu'avoit Louis le Débonnaire , & dont il ho- nora Lothaire fon fils aîné , lui fit imaginer de donner à ce prince une efpece de primauté fur fes cadets. | On juge bien que le droit d’ainefle établi dans la fucceflion des fefs , le fut de même dans celle de la couronne , qui étoit le grand fef. La loi ancienne qui-formoit des partages, ne fubfifta plus : les fiefs étant chargés d'un fervice , il falloit que le potlef- feur fût en érat de le remplir : la raïfon de la loi féo- dale força celle de la loi politique ou civile. Dès que les fefs furent devenus héréditaires , les ducs ou gouverneurs des provinces , les comtes ou gouverneurs des villes , non contens de perpétuer ces fefs dans leurs maïifons , S'érigerent eux-mêmes en feigneuts propriétaires des lieux’, dont ils n’e- toient que les magiftrats, foit militaires , foit civi- les , foit tous les deux enfemble, Par-là fut intro- duit un nouveau genre d'autorité dans l’état , auquel on donna le nom de égeraëneté ; mot, dit Loyfeau, qui eft auffi étrange que cette efpece de feigneurieeft abfurde. À l'égard des fefs qui étoient dans leurs gouver- nemens , & qu’ils ne purent pas s'approprier , parce qu'ils pafloient par hérédité aux enfans du pofieffeur, ils inventerent , pour s’en dédommager , un droit qu'on‘ appella le droit de rachat , qui fe paya d'a- bord en ligne direéte , & qui par ufage, vint à ne fe payer plus qu’en ligne collatérale. Voilà Porigine du droit de rachat reçu par nos coûtumes. Bien-tôt les fefs pürent être tranfportés aux étran- gers comme un-bien patrimonial; c’eft à quoi l’on attribue en général l’origine du droit de lods & vez ses : mais confultez là-deffus ceux qui ont traité de cette matiere , relativement aux différentes coûtu- mes du royaume. | Lorfque les fefs étoient à vie, on ne pouvoit pas donner une partie de fon ff, pour Le tenir à toüjours en arriere-fef ; il eût été abfurde qu'un fimple ufu= fruitier eût difpofé de la propriété de la chofe ; mais lorfqu'ils devinrent perpétuels , cela fut permis avec de certaines reftriétions ; que nos coïtumes Ont en partie adoptées ; c’eft-là ce qu’on a nommé /& Joëer de fon fief. | | La perpétuité des fefs ayant établi le droit de ra- chat, comme nous l’avons dit, il arriva queles filles purent fuccéder à un fefau défaut des mâles ; car le feigneur donnant le fef à la fille , il multiphoit les cas de fon droit de rachat ; parce que le mari devoit le payer comme la femme : mais cette difpofition ne pouvoit avoir lieu pour la couronne ; car comme elle ne relevoit de perfonne , il ne pouvoit y avoir: de droit de rachat fur elle. * Eléonore fuccéda à l’Aquitaine, & Mathilde à la Normandie. Le droit des filles à la fuccefñion des fefs parut dans ce tems-là fi bien établi, que Louis VIL. dit Ze Jeune, après la diffolution de fon mariage avec Eléonore, ne fit aucune difficulté de lui rendre la Guienne en 1150. Quand les fefs étoient amovibles, on les donnoïit à des géns qui pouvoient les fervir ; &c il métoit point queftion de mineut: mais quandils furent per- pétuels, les feigneurs prirent le ff jufqw’à la majo= rité , foit pour augmenter leur profit, foit pour fai- re élever le pupille dans l’exercice des armes. Ce: fut, je penfe, vêrs l’an 877, que les rois firent admi- niftrer les fiefs ; pour les conferver aux mineurs >. exemple qui fut fuivi par les feigneurs, 8 qui don- na l’origine à.ce que nous appellons la garde-noble ; laquelle eft fondée fur d’autres principes que ceux de la tutelle , & en eft entierement diftinéte. Quand les fefs étoient à vie, on fe recommandoit pour un fef; & la tradition réelle qui fe faifoit par le fceptre , conftatoit le ff, comme fait aujour- d’hui ce que nous nommons l'hommage. Lorfque les fefs paflerent aux héritiers , la recon- noïflance du vaflal , qui n’étoit dans les premiers tems qu’une chofe occafñonnelle, devint une ation réglée ; elle fut faite d’une maniere plus éclatante ; elle fut remplie de plus de formalités , parce qw’elle devoit porter la mémoire des devoirs du feigneur &z du vafal, dans tous les âges. Quand les fefs étoient amovibles ou à vie , ils n’appartenoient guere qu'aux lois politiques ; c’eft pour cela que dans les lois civiles de ce tems-là 1l eft fait fi peu mention des lois des {fs : mais lorf- qu'ils devinrent héréditaires , qu'ils purent fe don- ner, fe vendre, fe léguer, ils appartinrent & aux lois politiques & aux lois civiles. Le fefconfidéré com- me une obligation au fervice militaire, tenoit au droit politique; confidéré comme un genre de bien qui étoit dans le commerce, il tenoit au droit Ci= vil: cela donna naïffance aux lois civiles fur les ff. | Les fefs étant devenus héréditaires, les lois con- cernant l’ordre des fucceffions dûrent être relatives à la loi de la perpétuité des fefs : ainfi s'établit , malgré la difpofition du droit romain & de la loi falique , cette regle du droit françois, propres ne re= montent point. Il falloir que le ff ft fervi; mais un ayeul , un grand oncle, auroient été de mauvais vaffaux à donner au feigneur:auff cette regle n’eut- elle d’abord lieu que pour Les f2f$, comme nous l’ap- prenons de Boutillier. Les fef étant devenus héréditaires, les feigneurs foigneux de veiller à ce que le ff füt fervi, exige- rent que les filles qui devoient fuccéder aux fiefs ne pufent fe marier fans leur confentement ; de forte que les contrats de mariage devinrent pour les no- bles une difpoñition féodale , & une difpofition civi- le. Dans un ade pareil fait fous les yeux du fer- gneur , . gneut, On faifoit des difpofitions pout [a fuéceffon future, dans la vèe que le fef pt être fervi par Les héritiers, En un mot, les fefs étant devenus héréditaires , à les arriere-fefs s'étant étendus , il s’introduifit beaucoup d’ufages en France, auxquels les lois fali- ques , ripuaires, bourgwignones, & viñigothes n’é- toient plus applicables : on en retint bien pendant quelque tems lefprit, qui étoit de regler la plüpart des affaires par des amendes ; mais les valeurs ayant changé, les amendes changerent auf. L'on fuivit lefprit de la loi , fans fuivre la loi même. D'ailleurs la France fe trouvant divifée en une infinité de pe- tites feigneuries qui reconnoifloient plütôt une dé- pendance féodale , qu’une dépendance politique, il n'y eut plus de loi commune. Lesloisfaliques, bour- guignones , & vifigothes , furent donc extrèmement népligées à la fin de la feconde race ; &'au commen- cement de la troifieme on n’en entendit prefque plus parier. C’eft ainfi que les codes des lois des barbares &g les capitulaires {e perdirent. Enfin le gouvernement féodal comiienca entre le douzieme & tréizieme fiecle, à déplaire également aux, MOnaïques qui gouvernoient la France, l'An gleterre, & l’Allemagne: ils s’y prirent tous à-peu- près de même, & prefque en même tems, pour le faire évanotur , & former fur fes ruines une efpece de gouvernement municipal de villes & de bourgs. Pour cet effet , ils accordetent aux villes & aux bouts de leur domination plufeurs priviléges. Quelques ferfs devinfent citoyens; & les citoyens acquirent pour de l’argent le droit d’élire leurs offi- ciers mumicipaux. C’eft vers le milieu du douziéme fecle qu’on peut fixer en France l’époque de l’éta- bliflement municipal des cités & des bourgs. Henri IF. roi d'Angleterre donna des prérogatives fembla- bles aux villes de fon royaume ; les empereurs fiu- virent les mêmes principes en Allemagne : Spire, par exemple, acheta en 1166 le droit de fe choïfir des bourguemeftres, malgré l’évêque qui s’y oppofoit : ainf la liberté naturelle aux hommes fembla vouloit renaître de la conjonéture des tems & du befoin d’at- gent où fe trouvoient les princes. Maïs cette liberté n’étoit encore qu’une fervitude réelle , en compa- raïfon de celle de plufieurs villes d'Italie qui s’éri- gerent alorsen république , au grand étonnement de toute l’Europe. Il arriva cependant qu'infenfiblement les villes & les bourgs de divers royaumes s’accrurent en nom- bre, & devinrent de plus en plus confidérables: en- fuite la néceffité, mere de Pinduftrie, obligea quan- tité de perfonnes à imaginer des moyens de contri- buer auxcommodités des gens riches , pour avoir de quoi fubfifter : de-là, invention de divers métiers en divers lieux & en divers pays. Enfin parut en Eu- ropele commerce qui fruétifie tout, le retour aima- ble,des Lettres, des Arts , des Sciences , leur encou- ragement &c leur progrès : mais comme rien n’eft pux-1ici bas, de-là vint la renaiffance odieufe de la maltôte romaine ; f. nufible & fi cruelle, inconnue dans la monarchie des Francs , 8 malheureufement remife en pratique parmi nous, lorfque les hommes commencerent à jouir des Arts & du Commerce. Auteurs théoriques fur les fiefs. C’eft précifé- ment Jorfque les fefs furent rendus héréditaires , que prefque tous les auteurs ont! commencé leurs traités fur ce fujet en appliquant communé- ment aux tems éloignés des idées générales de leur fiècle; fource d'erreurs intariffable. Ceux qui ont remonté plus haut ont bâti des fyftèmes fur leurs préjugés. Peu de gens ont.fù porter leur efprit fans prévention aux vraies fources des lois féodales ; de ces lois qu'on vit paroître inopinément en Europe, Tome VI, .FIE 693 fans qu'elles tinffent à celles qu’on avoit jufqu'alors connues ; de ces loïs qui ont fait des biens &c des maux infinis ; de ces lois enfin qui ont produit la re- gle avec une inclination à l’anarchie , & l’anagchie avec une tendance à la regle. M. dé Montefquieu te- nant le bout du fil eft entré dans ce labyrinthe, l'a tout vi, en a peint le commencement, les routes, ët les détours , dans un tableau lumineux dont jé viens de donner l’éfquifle, en empruntant perpétuel lement fon crayon, jé ne dis pas /on coloris. Ceux qui feront curieux de comparer fon excel, lent ouvrage avec d’autres fur la même matiere, peu- vent lire, pat exemple, de Hauteferre, Origines feu dorurz pro moribus Gallie , liber fengularis ; il {e trou- ve à la fin de fes trois livres de ducibus & comiribus Provincialibus Galliz ; Touloufe, 1643, in-4°, LeFe- vre de Chantereau, de l’origine des fiefs ; Loyfeau j Boutillier, Pafquier; quelques-uns dé nos hiftoriens; Cambden , dans fa Brisannia ; Spelman; & Saint Amand, dans fon Æ fai fur le pouvoir légiflatifde l'An: gleterre, Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. Fier, (Jurifprud.) en latin feuxdum , &c quelquefois anciennement féodum , eft un immeuble ou droit réel qui eft tenu & mouvant d’un feigneur, à læ charge de lui faire la foi & hommage, quand il y a mutation & changement de perfonne , foit de la part du fetgneur dont releve le fef, foit de la part du vaflal, qui eft le poffefleur du fef, Il eft auffi ordinairement dû des droits en argent au feigneur, pour certaines mutations ; maïs il n’y a que la foi & hommage qui foit de leflence du fef's c’eft ce qui le diftingue des autresbiens. Les auteurs font foft partagés fur l’étymolosiedu mot fief : les uns le font venir de fœdus, À caufe de l'alliance qui fe fait entre le feigneur & le vaffal x d’autres, comme Cujas, le font venir de fides , ou du mot gaulois / ou fé, qui fignifie foi, parce que læ foi eft ce qui conflitue l’effence du fef; d’autres, dur mot faxon 4, gages. Bodin prétend que le mot la- tin fœdus eft formé des lettres initiales de ces mots 8 fidelis efo domino vero mco , qui étoient une ancienne |° formule de la foi & hommage : Hottmand le fait ve- nir du mot allemand qui fignifie guerre : Pontanus lé tire du mot danois fxd, fervice militaire : d’autres , du mot hongrois foe/d, terre: d’autres, de foder, nourrir; mais l'opinion de Selden , qui paroît la plus fuivie, eft que ce mot ff tire {on étymologie de l'ancien faxôn feod , qui fignifie joäiffance ou pofef- Jion de la folde ; parce qu’en effet les ff, dans leur Origine, ont été donnés pour récompenfe du fervicé militaire, &c à la charge de faire ce fervice gratuite- ment : de maniere que le fef tenoit lieu dé {olde. De feod on a fait en latin féodum, & par corruption fez- dum : auffi les termes de féodal & de féodaliré font: ils plus ufités dans nos coûtumes,que celui de fezdaL. Tous les héritages & droits réels réputés immeu- bles , font tenus en jf, ou en cenfive ,ou en franc- aleu. | Les fefs fontoppofés auxrotures, qui font les bieris tenus en cenfive ; ils font aufi différens des franc: aleux , qui ne relevent d’aucun feigneur. Dans le doute , une terre eft préfumée foture, s’il n’appert du contraire. La qualité de fef doit être prouvée par des altes de foi & hommage, par des aveux & dénombre- mens’, par des partages , ou par des jugemens con- tradiétoires , 8 autres aîes authentiques, Un feul dénombrement ne fuft pas pour la preus ve du fef, à moins qu’il ne foit foûütenu d’autres ad minicules: la preuve par témoins n’eft point 4dmife en cette matiere. à … On peut tenir en fef toutes {ortes d’irnmeubles ; tels que les maïfons &c autres bâtimens, cours |bañle- cours, jardins, & autres dépendances ie tetres la: Las 694 FIE bourables, prés, vignes, bois, étangs, riviéres, 6*c. M. le Laboureur , fur les Mafures de l’ifle Barbe , p.181. dit, à l’occafion d’un titre de l'an 1341, que l’éretion d'un ff ne fe pouvoit faire qu'il n'y eût to liv. de rente ; ce qui fuiifoit alors pour l’entre- tien d’un gentilhomme. On peut aufi tenir en fftoutes fortes de droits réels à prendre {ur des immeubles tels que le cens, rentes foncieres , dixmes, champarts, éc. les pro- priétaires de ces droits font obligés d’en faire la foi au feigneur dont ils les tiennent. | Les juftices feigneuriales font aufh toutes tenues en fefdu roi, & attachées à quelque fefcorporeldont elles ne peuvent être féparées par le poffefleur. L'origine des ff eft un des points les plus obfcurs & les plus embrouillés de notre hiftoire ; elle paroït venir de l’ancienne coûtume de toutes les nations, d’impofer un hommage & un tribut au plus foible, Plufeurs tiennent que lesfefs étoient abfolument inconnus aux Romains ; parce qu’en effet il n’en eft point parlé dans leurs lois : il eft néanmoins certain que les empereurs romains donnerent à leurs capr- taines & à leurs foldats des terres conquifes fur les énnemis, avec desefclaves &c des animaux pour les cultiver ; cesconceffions furent faites à la charge de l'hommage ou teconnoïffance envers celui dont ils tenoient ces bienfaits ; & à condition de ne pañfer aux enfans mâles qu’au cas qu'ils portaffent les ar- mes. S'il n’y avoit que des filles, ou que les garçons ne portaflent pas les armes, l’empereur donnoit les terres à d’autres officiers ou foldats ; ce qu’il faifoit , dit Lampride en la vie de Sévere, pour les engager à mieux défendre les frontieres qui étoient devenues leur propre bien. On trouve plufieurs exemples de ces concefhions fous les empereurs Alexandre Seve- re & Probus, l’un mort l’an 211; Pautre, en 282. On trouve donc dès Le tems des Romains le pre- mier modele des fes, & l'obligation du fervice m1- litaire impofée aux pofleffeurs ; & comme c’étoient principalement les terres des frontieres que lon ac- cordoit ainfi aux officiers, on peut rapporter à cet- te époque la premiere origine de nos marquis , qui , dans leur inflitution, étoient deftinés à garder les marches ou frontieres du royaume. Comme les empereurs faifoient ces fortes de con- ceffions dans les pays qu'ils avoient conquis, on con- çoit qu'ils ne manquerent pas d'en faire dans Les Gau- les, qué Jules Céfar avoit réduites en province ro- maine. | Quelquesauteurs croyent entrevoir des traces des devoirs réciproques du feigneur & du vaffal, dans l’ancienne relation qu'il y avoit entre le patron & le client. | Il faut néanmoins convenir que les Romains n’a- voient point dans leurs états de fefs tels qu'ils ont été pratiqués en France, fur-tont depuis le tems de la fe- conde race de nos rois. Mezeray prétend que la donation des fefsä la no- blefle de France commença fous Charles-Martel. D’autres tiennent que l’ufage des ffsnous eft ve- nu des Lombards, & que Charlemagne Pemprunta d'eux. Ileft certain en effet que les Lombards furent lès premiers qui érigerent des duchés, pour relever en ff de leur état. Ces peuples voyant en ÿ84 que l'empereur Mau- rice vouloit faire les derniers efforts pour les exter- miner , remirent leur État en royaume : néanmoins les trente-fix ducs qui gouvernoient leurs villes, les garderent en propre & à titre héréditaire; mais 1ls demeurerent obligés envers le roi à certains devoirs, particulierement de lui obéir & le fuivre en guerre. Spolette & Benevent furent fous les Lombards des duchés héréditaires avant Charlemagne. FIL . Ce qui a pi accréditer cette Gpinion, eft que les livres des fefs que l’on a joints au corps de droit, font principalement l’ouvrage de deux jurifconful- tes lombards nommés Gérard le Noir 6 Obert de Horto , qui étoient confuls de Milan en 1158: ce font les jutifeonfultes lombards qui ont embrouillé le droit des fefs des fubtilités du digefte ; celui de France étoit auparavant fort fimple D’autres encorepenfent que Charlemagne prit Pi- dée des fefs chez les peuples du nord: en effet, com- me on l’a déjà obfervé, le mot fef paroït venir du mot faxon feod, qui fignifie /ayotiffance ou la pojfef- Jion de la Jolde; & de feod on a fait feodum, &c en françois féodal. Quelques-uns pour concilier ces deux dernieres opinions, difent que Charlemagne, après avoir pris l’idée des fefs chez les peuples du nord, s’y confir- ma par l'exemple des Lombards; & qu'après en avoir fait expérience enltalie, il eftima tant cette police, qu'il Pintroduifit dans tous les pays où il le put faire fans détruire Les lois qui y étoient d'ancienneté. C’eft ainfi que Tafillon poffédoit le duché de Baviere, à condition d’un hommage ; & ce duché eüt ap- partenu à fes defcendans , fi Charlemagne ayant vaincu ce prince n’eüt dépouillé le pere & les en- fans. | Il y a auffi des hiftoriens qui rapportent l’établif- fement des fefs en France au roiRaoul, lequel , pour gagner laffettion des grands, fut obligé de leur don- ner plufieurs domaines. * D’autres enfin fixent cette époque au tems de Hu- gues Capet. Mais nonobftant ces diverfes opinions, 1Î paroît conftant que l’ufage des fefs eft venu en France du nord ; qu’il y fut apporté par les Francs lorfqw’ils f- rent la conquête des Gaules. M. Schilter, en fes notes fur le traité. des fefs de Struvius remarque que ce n’eft point aux feuls Lom- bards qu’on doit l’origine des fefs ; qu'ils étoient en ufage en Allemagne, avant que le droit des Lombards y eût été reçû ; que les François ont beaucoup plus contribué que les Lombards à introduire l’ufage des fiefs ; que c’eft par eux que les f:fs ont pañlé en Alle- magne, Il obferve encore que les fefs font inconnus en Ef- pagne , quoique les Vifigoths s’y foient établis : d’où il infere que cet ufage n’étoit pas commun à tous les peuples de Germanie ; qu'il s’eft introduit peu après chez les François & les Lombards , depuis que les uns &c les autres furent fortis de Germanie: il y a lieu de croire que les Francs avoient emprunté cet ufage des Saxons. Il eft vrai que le terme de fefétoit totalement in- connu fous la premuere race de nos rois : auffi n’en eft-il rien dit dans la loi falique n1 dans celle des Ri- puariens : 11 n’y eft parlé que des terres faliques & : des aleux. Les aleux étoient les biens libres qui étoient demeurés aux anciens propriétaires: les ter- res faliques étoient celles qui étoient données aux . officiers & foldats , jure beneficir | c’eft-à-dire à titre de bienfait & de récompenfe, & à la charge du fer- vice militaire. Ce fut à ce titre que Clovis donna Melun à Aurélien, jure beneficit conceffit : ainfi ces bé- néfices qui font les premiers fondemens des fes, font aufhi anciens que la monarchie. Dumoulin ne doute point queces diftributions de terres appellées bénéfices, dont l'ufage avoit com- mencé chez les Romains, ne foient la premiere ori- gine de nos fefs; c’eft pourquoi il fe fert indifférem- ment des mots Bénéfice 8 fef, quoiqu'il y ait une dif: férence effentielle entre Pénéfice 8 fref. Eft-ce que ces bénéfices n’obligeoïent point à la foi & homma- ge, ni aux autres devoirs féodaux ? d’ailleurs ces bé- néfices n’étoient point héréditaires, L’ufage que l’on obfervoit, par rapport à ces bé- nélices, éprouva plufieurs changemens. Dans le premier état , le feigneur en pouvoit dé- pouiller arbitrairement le vaflal. Ils furent enfuite annals, comme étoient toutesles commifons , puis on les concéda pour la/vie du vaffal. Les feigneurs accorderent après , que le ff pafleroit à cehüi des ils du vaflal qu'ils voudroient choïfir ; & comme on choïfifloit ordinairement l'aîné, c’eft peut-être de-là que viennent les prérogatives que les aînés mâles ont confervées dans les fefs: les autres filsobtinrent, par fucceflion de tems, le droitde partager avec l’ai- né. Ce droit de fuccéder fut étendu aux petits-fls, & même à défaut de defcendans, au frere, fi c’é- doit un ff ancien. Les femmes ne fuccédoient pas d’abord aux fefs,. ni les collatéraux au-delà. des coufins-germains; dans la fuite les collatéraux fuccéderent jufqu’au. feptieme degré , & préfentement ils faccedent à l’in- fini. En Françe les femelles concourent avec les mâ- les en direéte, & fuccedent en coilatérale à défaut. de mâles ; mais en Allemagne & en Italie, elles font €ncore excinfes des fes. | : IE On ne peut pas fixer précifément le tems auquel, ces changemens arriverent , car les fiefs n’ont pas été Établis tous à la fois fur le pié qu'ils font préfente-. ment : ces changemens s’introduifirent peu-à-peu en. divers lieux &c en divers tems, & d’une maniere dif- férente. slt ÆATGE Les ducs & les comtes , établis d’abord parles Ro- mains & confervés enfuite par les François, de fimx ples officiers qu’ils étoient , fe rendirent peu-à -peu feigneurs de leur gouvernement : les comtes étoient vaflaux des ducs , & ces comtes fe firent eux-mêmes des vaflaux : de-là virent les arriere-fiefs ; & comme tout le royaume étoit partagé en fefs & arriere-frefs, qui tous {e rapportoient médiatement ou immédia- tement au roi, la France fe trouva infenfiblement gouvernée comme un grand fef, plûtôt que comme une monarchie. | Ce gouvernement féodal fut fondé par Charle- magne en Allemagne, où:1l fubffte encore dans tou- te {on autorité, &c même en Septimanie , qui for- moit la partie méridionale des Gaules. Depuis le. regne de ce prince , le terme de v4ffal fe trouve commun dans les chartres 8: ordonnances, pour ex- primer un homme engagé au fervice d’un autre , par 1a poffeffion de quelques terres. Charles-le-Chauve étendit le progrés des fefs en France, par le démembrement du duché de France & du comte de Flandxe,, qui furent donnés en ff, Fun à Robert-le-Fort , tige de Hugues Capet, l’autre à Baudouin : l’ordonnance que ce princefit au parle- ment de Chierzy , avant fon fecond voyaged’ltalie, afüra plemement la fucceffion des enfans à leur pere dans tous les bénéfices ou fefs du royaume. Louis-le-Begue, roi & empereur , pour regagner les mécontens , fut forcé de démembrer vers l'an 879 une grande partie de fon domaine , ce qui mul- tiplia beaucoup les duchés & comtés. Les ufurpations des feigneurs augmenterént en- core ces démembremens. Charles-le-Simple, prince trop foible, perdit la couronne impériale; ce fut de fon tems, & vers l’an 24 À 900, que les bénéfices prirent le nom de ff, & qu'ils commencerent à devenir héréditaires. Il y eut encore d’autres démembremens, de forte qu'ilne reftoit plus à Lothaire quetrois villes, Laon, Soiffons &c la Fere; & quelques-uns croyent que ce fut par cette raïfon que l’on cefla alors de partager Île royaume. Raoul fut auffi obligé, comme on la dit , de don- ner aux grands plufieurs domaines. Ce qui eft de plus certain , eft que la plüpart des Tome VI e , \ grands fine fe formerent, on du moins. ne devin- rent héréditaires, que lors.de l’ayenement d'Hugues Capet à la couronne : les ducs: &. les comtes ferên-. dirent propriétaires de leurs gouvernemens, & Hu- gues Capet ayant trop peu d'autorité pour s’oppo-. fer à ces ufurpations , fe contenta d'exiger dés fei-. gneurs qu'ils lui fiffent la foi 8: hommage des terres * en feigneuries dont ils s’étoientainfi emparés. L'origine des fefs en Angleterre remonte, fuivant Cambden., jufqw'au tems d'Alexandre Severe;:ce prince ayant fait bâtir une muraille dans le nord de l'Angleterre pour empêcher lesincurfions des Piâtes, commença quelque tems, après, à en négliger la dé- fenfe , & donna , au rapport de Lampride; les terres qu'il avoit conquifes fur l'ennemi à fes capitaines &c à fes foldats , que cet auteur appelle Zmirarios duces G milites ,.c'et-à-dire capitaines & foldats des fron- teres son pouvoit auf tirer de-là l’origine des mar-, quis. Ces conceffons furent faites à condition que les héritiers de ces officiers gardiens des frontieres refteroient toûjours au fervice, & que ces terres ne pourroient jamais parvenir à des perfonnes privées, c’eftä-dire à des. perfonnes qui ne porteroient pas les.armes. Le motif de ce prince étoit que ceux qui en fervant défendent leur propre bien, feryentavec beaucoup plus de zele que d’autres. Toutes les ter- res en Angleterre font dé la nature des fefs, éxcep- té le domaine de la couronne , c’eft-à-dire que per. fonne ne peut pofléder des terres , foit par fuccef- fon ou par acquifition, qu'avec les charges qui ont été impofées au premier poffeffeur du bénéfice. Au refte, ce qui vient d’être.dit des fefs d’Anple- terre, ne doit pas faire croire que leur origine {oit plus ancienne que celle des fefs de France ; il en ré- | fuite feulement qu'ils peuvent également tirer leur origine des bénéfices romains , dont on trouve des traces dés le tems: d'Alexandre Severe ; mais il y a toute apparence que Les fefs d’Angleterfe n’ont pris la véritable forme de fef qu’à limitation des f£efs de | France, & que ces ufages ont été portés de Nor- mandie en Angleterre par Guillaume le Conqué- tant. TEUTTEMERTLE _Les principales divifons des f2fs font : 1°, Qu'il y a des fefs de dignité &c des fefs fim- _ ples ; les premiers font les principautés , duchés, marquifats, comtés, vicomtés & baronies ; les fefs fimples font ceux qui n’ont aucun titre de dignité. 2°. La qualité de ff fimple eft auf quelquefois oppofée à celle de ff lige, lequel eft ainfi appellé aligando:, parce qu'il oblige le vañal plus étroite- ment qu'un fef fimple & ordinaire : le vaflal en fai- fant la foi pour un tel ff, promet à {on feigneur de le fervir envers & contre tous, & y oblige tous fes biens. Voyez ci-après FIEF LIGE. 3°. Les fefs font fuzerains, dominans, ou fervans. Le fief qui releve d’un autre eft appellé fef fervans » & celui dont il releve ff dominant ; & lorfque ce- lui-ci eft lui-même mouvant d’un autre fef, le plus élevé s'appelle fef fuxerain : le fef qui tient le mi- lieu entre les deux autres, eft fef fervant à l’écard du fuzerain , êc fief dominant à l'égard du troifieme qu'on appelle auffi arriere-fef par rapport au ff {u- zerain. Les feigneurs prennent chacun le titre convena- ble à leur fef : le feigneur d’un fimple ff qui re- leve d’un autre, s’appelle éigxeur de fief ou vaffal ; ce- lui dont ce fef releve, eft appellé Jéigreur féodal ou féigneur dominant ; celui-ci a auf fon feigneur domi- nant, qu'on appelle fuzerain par rappoñt au fief in- férieur qui releve de lui en arriere-fief. Voyez ARRIE- RE-FIEF , FIEF DOMINANT , FIEF SERVANT ; FIER SUZERAIN. | Il y a encore plufieurs autres divifions des fefs, & plufieurs autres quahñçcations que l’on leur donne à TTtti Gd6 FETE mais comme elles font moinstordinaires , on les ex- pliquéra chacune en leur rang dans les fubdivifions des fefs ; qui {uivront les notions génerales. On appelle vaffal'céluï qui poffede un fef en pro- priété , & arriere-vallel, celui qui poflede un arriere- Les vaffaux font auffi quelquefois appellés 4om- mes de fief, pairs de fief, hommes du feigneur. Ariciennement les vaflaux étoient tous obligés d’affter dux audiences du jüge de leur feigneurdo-" minant, & de lui donner confeil , comme cela fe pratique encore dans lés coùtumes de Picardie, Ar- tois , & autres coûtumes voifines : on les appelle hommes de fiefs ST pars. | Lotfquée les vaffaux avoient quelque procès entre eux , ils aVoïént droit d’être jugés par leuts pairs , 6e le féigneur du fef dominant y préfidoit : ce droit d'é- tre jugé par es pairs , fubfiite encore à l'égard des pairs de France. | $ | ‘Comme les fersneuts fe faifoient fouvent la guer- re, leurs vaflauxétoient obligés de les accompagner &t de mener avec eux leurs arriere-vaflaux. Le tems de ce fervice n’étoit que de 40 jours , à compter du” moment que l’on étoit arrivé au camp ; celui qui vouloit fervir pour deux perfonnes , reftoit 8ojours. Depuis qué les guerres privées ont été abolies , il n’y à plus que le roi qui puifle faire marcher {es vaflaux à la guerre , ce qu'il fait quelquefois par la convocation du ban & de l’arriere-ban. Foyez AR- RIERE-BAN & BAN. | ) | Le feigneur féodal où dominant a une nue direéte &t feignéurie du ff férvant qui eft mouvant-de lui : le vaffal en a la direéte immédiate avéc le do- maine utile. La mouvance eft la fupériorité d’un fef fur un au: tre ; il y a dés fefs qui ont beaucoup d’autres fiefs qui en relevent ; mais il y en a aufli qui n’ont aucune mouvance ni cenfive. Voyez MOUVANCE, Les fefs fervans relevent du roi ou de quélques autres feigneuts, foit particulier, ou corps & com- munauté auxquels appartient le fef dominant. Tous les fefs de France relevent du roi , ou en pleins fefs, c’eft-à-dire immédiatement, comme font les fefs de dignité ; où médiatement en arriere-fiefs , comme font les fiefs fimples , qui font mouvans d’au- tres fiefs qui relevent du roi immédiatement. Un ff, foit fuzerain , dominant ou fervant, peut appartenir à plufieurs feigneurs ; mais un même fef ne peut pas relever en même degré de plufieurs fei- gneurs ; il peut néanmoins relever immédiatement d’un ou de plufeurs co-feigneurs ; 8 en arriere-fief, d’un ou plufñeurs co-feigneurs fuzerains. Lorfque deux feigneurs prétendent refpe@tive- ment la mouvance d’un ff, le vaffal, pour ne point reconnoître lun au préjudice de l’autre, doit fe faire recevoir par main fouveraine. Voyez For 6 Hom- MAGE, & MAIN SOUVERAINE. Toutes fortes de perfonnes peuvent préfentement pofléder des fefs , les roturiers comme les nobles , hommes & femmes , eccléfiaftiques & laïques. Sous les derniers rois de la feconde race , & au commencement de la troifieme , tout homme libre qui faÿfoit profeflion des armes , pouvoit acquérir & pofléder un fef , où faire convertir en fef fon aleu. Du tems des croifades , les roturiers même pof- fédoient déjà des fs, quoiqu'ils ne fiffent pas pro- feffion des armes ; mais comme la principale obli- sation des vaflaux étoit le fervice militaire , & que la plüpart des roturiers ne deffervoient pas leurs fiefs , faint Louis, ou felon d’autres , Philippe IT. dit /e Hardi , défendit aux roturiers de pofféder des fiefs » à moins qu'ils ne leur échuffent par fucceflion, ou qu'ils ne les euflent açquis 20 ans auparavant, Beaumanoir parle de ce reglement comme d’une dif. pofition nouvelle ; il paroït en effet que c’eft la pre- müere ordonnance qui ait exclu les roturiers de la pofleffion des fiefs ; dans la fuite les befoinside l’état ont obligé nos rois à permettre peu-à-peu aux rotu- riers de pofléder des fef$, en payant au roi une cer- taine finance. "7 Philippe-le-Hardi , par une ordonnance de 1275, & Philippe-le-Bel, par une autre de r297, taxerent: les roturiers pour les ffs qu'ils poffédoient hors les : terres des barons. Philippe V. dit /e Long , les taxa même pour les: fefs qu'ils poffédoient dans fes terres , à l'exception des fefs tenus de lui en quart - degré. A ” Enfinles roturiers ont été aflujettis , pour tontes! fortes de fefs ; à payer tous les 20 ans au roi une finance qu’on appelle droir de francs- fiefs. Voyez ci- après FRANCS-FIEFS. = | Les gens d’églife & autres gens de main-morte; ne peuvent acquérir ni pofléder aucun fef ou autre héritage; fans payer au roile droit d’amortiflement, : &c aux feigneurs le droit d’indemnité ; ce qui futainf établi par S. Louis. Voyez AMORTISSEMENT ‘& IN- DEMNITÉ. Il ya des fefs auxquels fe trouve attaché un droit: dejuftice, foit haute, moyenne & bañle, foitmoyen- ne ou baflé feulément; d’autres fs n’ont point droit de juftice, c’eft pourquoi l’on dit que fief &r juf- tice n’ont rien de commun, c’eft-à-dire que le ff peut être fans droit de juftice & la juftice fans Le ff. Quand on dit que la juftice peut être fans le fcf, on entend que le feigneur qui a la juftice dans un liew, n’y a pas toûjours la feigneurie direéte ou féodale ; mais ce droit de juftice eft toüjours attaché à quel- que fef. | Il faut auffi obferver qu'il y a quelques coùtumes où le fief & la juftice font réciproques , c’eft-à-dire que tout feigneut direét a , par fa qualité , droit de juftice dans fa feigneurie : telles font les coûtumes d'Artois, Anjou & Maine. Voy. JUSTICE SELGNEU- : RIACE, Anciennement l’inveftiture des fefs de dignité, donnée par le roi, annoblifloit le poffeffeur ; mais depuis l'ordonnance de Blois, les fefs nannoblifent plus: Le feigneur qui jouit du fef de fon vaffal, en con féquence de la faïfie féodale qu'il en a faite, ne peut le prefcrire par quelque laps de tems que ce foit, parce qu’il n’en joiit que comme d’une efpece de dé- pôt , jufqu’à ce qu’on lui aït porté la foi & payé les droits : les héritiers du feigneur , &c fes autres fuc- cefleurs à titre univerfel , ne peuvent pas non plus preferire dans ce cas. Les conteftations qui s’élevent au fujet des fefs foit pour leur qualité ou pour leur droit , doivent être reglées par le titre d'inveftiture , par Les fois & hommages, aveux & dénombremens , par la coû- tume du lieu du ff dominant, pour ce qui con- cerne la forme de la foi 8: hommage ; & par la coùû- tume du fef fervant , pour les droits qui peuvent être düs. | | Au défaut de la coûtume du lieu, on a recours à la coûtume de Paris, aux coûtumes voifines, on au droit le plus général, & à ce qui paroïit le plus équi- table, La connoiffance des matieres féodales appartient - aux baillis & fénéchaux royaux, privativement aux prevôts, , Le feigneur plaide devant fon juge au nom de fon procureur fifcal , lorfqu'il s’agit du domaine &c des droits & revenus ordinaires ou cafuels de fon f&/, comme relief, quint, requint, lods &c ventes ,amen- des, cens &crentes, baux, fons-baux, &c, Le vaflal eft obligé de plaider devant le juge de - fon feigneur , quand il's’agit des droits prétendus par le feigneur, quoique le fef {ervant foit fitué dans une autre juridiction. Voyez JUSTICE SEIGNEURIALE , SEIGNEUR, 6& PROCUREUR-FISCAL. La propriété d’un ff oblige en outre le vaffal à quatre chofes envers le feigneur. 1°. À lui faite la foi &c hommage dans le tems de - Ja coûtume, à moins qu'il n’ait obtenu fouffrance, c'eft-à-dire un délai, lequel ne s’accorde que pour quelque empêchement légitime, comme pour mino- nité. Voyez c-après FO1 6 SOUFFRANCE. 2°. À payer au feigneur les droits utiles qui lui font dûs', comme quint, requint, relief, & autres, felon l’ufage du lieu & les différentes mutations. 3°. À donner l’aveu & dénombrement de fon ff. Voyez; DÉNOMBREMENT. + 4°. A comparoître aux plaids du feigneur par-de- vant fes officiers, quandil eftaffigné à cette fin. Poy. PLAIDS ; SERVICE DE PLAIDS. | Les fefs peuvent avoir deux fortes de droits qui y foient attachés ; favoir des droits honorifiques , 6c des droits utiles. Les droits honorifiques des fefs font, 1°. la juftice pour ceux auxquels ce droit eft attaché, & les droits de deshérence &c de bâtardife , qui font une fuite de la haute juftice. | 2°, Le droit de patronage, attaché à certaines fei- gneuries. 3°. Les droits honorifiques proprement dits, ou grands honneurs de l’eglife qui peuvent appartenir au feigneur, foit commepatron , foit comme feigneur haut-jufticier. Voyez DROITS HONORIFIQUES. 4°. Les feigneurs moyens & bas-jufticiers , &c les . fimples feigneurs de fef jotifient, après le patron & le haut-uflicier , des moindres honneurs de léglife, & autres préféances {ur les perfonnes qui leur font inférieures en dignité. | _ &°, Le droit de colombier à pié. 6°, La chafle & la pêche, droit de garenne & d’é- tang. 7°. Le droit de retrait féodal. 8°, Le droit de commile, Les droits utiles des fefs font les droits de quint, requint & relief, dûs pour les fiefs qui font mouvans d’un autre, lorfqu’il y a mutation fujette aux droits, & pour les rotures les lods & ventes. | Il y a auffi des redevances dûes annuellement fur: les rotures au feigneur de ffs, tels que les droits de cens, champart , terrage , dixmes inféodées , & plu- fieurs autres droits extraordinaires , tels que corvées &z bannalités, qui dépendent des titres de la poffef- fion & de l’ufage des lieux. Les droits cafuels des fiefs étoient inconnus jufqu’au tems de latroifieme ra- ce, auparavant les fes n'étoient que d'honneur fim- plement. Voyez DROITS SEIGNEURIAUX , Lops 6 VENTES, QUINT,REQUINT,CENS,CHAMPART, &c, Les feigneurs qui ont des cenfives , peuvent obli- ger leurs cenfitaires de pafler déclaration à leur ter- tier. Voyez DÉCLARATION , RECONNOISSANCE , LETTRES DE TERRIER , TERRIER. Il fe forme quelquefois un combat de fefentre deux feigneurs ; on appelle combat de fef une conteftation qui furvient entre deux feigneurs qui prétendent ref petivement la mouvance d’un héritage, foit en fef ou en cenfive. Si c’eft un fef qui forme l’objet de ce combat, les feigneurs contendans peuvent faire faïfir le ef pour la confervation de leurs droits ; & le nouveau vaf _ {al doit fe faire recevoir par main fouveraine , & con- figner les droits. | Quand le fef eft ouvert par le changement de vaf fal, ou qu'il y a mutation de feigneur, & que le vaf- | {al n’a pas fait la for & paye les droits qui peuvent être dùs, le feigneur peut faire faifir féodalement ou FIE 697 procéder par voie d’a@ion ; lorfqu'il prend cette der - niere voie, 1lne gagne point les fruits. Voyez SAISIE FÉODALE, Le fef étant faifi féodalement , le vaflal, pour en avoir main-levée, doit avant toute chofe avouer ou defavoüer le feigneur ; avoñer , c’eft fe reconnoître " vañal ; défavoier | c’eft nier qu’on releve de ul. La peine du defayveu téméraire , eft que le vaffal perd fon fef, qui demeure confifqué au profit du fei- gneur. Voyez AVEU 6 DESAVEU. La commife ou confifcation du fef a auffilieu pour crime de félonie , c’eft-à-dire lorfque le vaffal offenfe grievement {on feigneur, Voyez FÉLONIE. Le démembrement de ff en général eft défendu, c’eft-à-dire qu’il n’eft pas permis au vaffal de faire d’un même fef plufeurs fefs féparés & indépendans les uns des autres, à moins que ce ne foit du confente- ment du feigneur dominant, ou que ce ne foit dans quelques coûtumes qui le permettent on lé tolerent expreflément , comme Artois & Boulogne, Péronne &t Amiens, qui le permettent dans tous les aétes 8 dans toutes les aliénations ; celle de Vermandois le permet pour le partage fucceflif ; mais il faut dans toutes ces coûtumes , que la volonté de démembrer foit conftante. Voyez DÉMEMBREMENT. | Le jeu de fef, même excefhf , eft différent du dé- membrement ; c’eft une aliénation des parties du corps matériel du ff, fans divifion/de la foi dûe pour Fatotalite du ff: l’on peut fe jouer de fon ff, foit en faifant des fous-inféodations, ou en donnant quelque portion du domaine du fef à cens ou à rente; ou en la vendant. Le jeu de fefeit permis pour la totalité dans les pays de droit écrit ; mais dans les pays coûtu- miers ,1left regardé comme exceffif, lorfqu'il excede la portion dont la coûtume permet de fe jouer. La plüpart des coûtumes veulent que le vaflal réferve du moins le tiers des domaines en fonds, comme celle de Paris , article 31, qui permet au vaflal de fe joüer de fon ff, & faire fon profit des héritages , rentes ou cens étant du f£f, fans payer aucun pro- fit au feigneur dominant ,.pourvû que l’aliénation n’excede pas les deux tiers , & que l’on retienne la foi entiere & quelque droit feigneurial 8 doma- mal fur ce qu'il aliene. Ce que les coutumes d'Anjou , du Maine & de Touraine appellent depié de fief , n’eft pas le dé- membrement du fef, mais plütôt le jeu exceflif du Jef. La peine du depié de fef & du jeu excefif, eft que tour ce qui eft aliéné releve dorénavant, im- médiatement du feigneur dominant du vafal qui à fait Palénation excefive ; au lieu que toute la peine du démembrement , eft que le feigneur dominant n’eft pas obligé de reconnoître la divifion que l’on a voulu faire du fef. Voyez DEPIÉ DE F1Er € JEu DE FIEF. Lorfque le propriétaire d’un fef acquiert un au- tre ff mouvant de lui, ou quelque héritage qui étoit tenu de lu à cens,, ce ff ou autre héritage eft réuni au fef de l'acquéreur, à moins que par le contrat 1l ne déclare qu'il entend tenir féparément ce qu'il acquiert. Cette déclaration doit être renou- vellée par chaque pofeffeur qui fe trouve proprié- taire du fef & des portions acquiles. La fucceffion des fiefs fe regle en pays de droit écrit comme celle des autres biens ; mais il n’en eft pas de même en pays coûtumier ; on trouve pref- que dans chaque coûtume des regles particulieres pour Le partage des fefs : de forte qu’il n’eft pas pof- fible d’afleoir fur cette matiere des principes qui conviennent par- tout : Voici néanmoins les ufages les plus généraux, 698 FIE L’aîné mâle a dans le partage des fefs en lipne di- ele le droit d’ainefle, qui confifte dans le préci- put & la part avantageufe, Le préciput confifte dans le principal manoir, cour, bafle-cour & bâtimens en dépendans, avec un arpent de jardin, qui eff ce que quelques coûtumes appellent le vo! du chapon. Il a aufi la faculté de retenir le furplus de l’enclos, en récompenfant les puinés. Voyez PRÉCIPUT , & Vo pu CHAPON. La part avantageulfe, lorfqu’il n’y a que deux en- fans, eft de deux tiers pour l'aîné , & de moitié {eu- lement lorfqu’il y a plus de deux enfans. Coétume de Paris, art. 15. G 16, . Quelques coûtumes, comme Tours, Angoumois & Poitou, accordent un droit d’ainefle en collaté- tale ; & dans quelques-unes de ces coùtumes, le plus âgé des mâles extans ors de la fucceffion, ef confidéré comme l’ainé, quoiqu'il ne foit pas def- cendant de l’ainé. Les coûtumes de Picardie & Artois donnent tous ces fiefs al’ainé ,même en collatérale, fauf le quint hérédital aux puinés ; encore l'aîné a-t:il un tems pour retirer ce quint. En Anjou & Maine, les roturiers partagent les fefs roturierement jufqu’à ce qu’ils foient tombés en tierce foi ; entre nobles l’ainé a tout ; les puinés sont leur portion qu’en bienfait, c’eft-à-dire à vie : cependant les pere & mere , oncle, frere, peuvent donner aux puinés leurs portions par héritage, c’eft- à-dire en propriété. Pour ce qui eft des femelles, elles ont toïjours par héritage. En collatérale , le mâle exclut la femelle en pa- rité de degré ; il n’y a d'exception à cet égard que dans les coûtumes où la repréfentation a lieu à l'infini, même en collatérale, comme dans la coû- tume du grand Perche, Dans quelques coûtumes , il y a une maniere particuhiere de partager les fefs entre freres & fœurs, qui eft ce que l’on appelle parage; c’éroit anciennement le feul partage ufité pour Les ffefs dans toutes les coûtumes. Tenir en parage, c’eft pofléder une portion d’un fief avec les mêmes droits que l’aîné a pour la fien- ne ; l’aîné fait la foi pour tous. Dans quelques coù- tumes on l’appelle chemier ou parageur , & les pui- nés parageaux Où paragers ; en Angoumois les pui- nés font nommés parageurs, en Bretagne /uveigneurs. Il y a deux fortes de parage, le légal & le con- ventionnel ; ce dernier n’eft connu qu’en Poitou, Saintonge & Angoumois, & n’a lieu qu'avec per- miflion du roi ou du feigneur dominant. Voyez PARAGE & FRERAGE. Il eft permis à celui qui poffede un fef de le con- vertir en roture, fans qu'il ait befoin du confen- tement de fes enfans ou autres héritiers, pourvû que cela foit convenu avec le feigneur dominant. Sur les fefs en général on peut voir Struvius, Frecias, Oneronus, Julius Clarus, Flornius, Schil- ter, Dumoulin, Dargentré , & lesautres commen- tateurs des coûtumes fur le tre des£efs ; Salvaing, Chantereau, le Fevret, Bruffelles, Billecoq, Po- quet de Livonieres, Guyot. (4 Fier ABONNÉ , eft celui dont le relief ou rachat, les droits de quunt , requint , & autres auxquels il étoit naturellement fujet, & quelquefois l'hommage même, font changés & convertis en rentes ou rede- vances annuelles. Voyez LOYSEL, Infht, cotum. By, IV. tir, y. n. 23. 6 les notes. FIEF ABREGÉ, ou comme on difoit ancienne- ment abregié, & qu’on appelle aufli f&ef reffraint, & dans quelques coûtumes ff n07 noële, c'eft celui pour lequel il eft dû des fervices qui ont été limités & diminués. Beaumanoir fur les coùûtumes de Beau- vaifis, « æxviiy. p.142. dit qu'il y a des fefs que l’on appelle fefs abregiés ; que quand on eft femons pour le fervice de tels ff5s , l’on doit offir à fon fei- gneur ce qui eft dû pour raifon de l’abregement ; que le feigneur ne peut pas demander autre chofe, fi l’abregement eft prouvé ou connu, & s'il eftfuf- ffamment oftroyé par le comte ; car je ne puis, dit-1l, fouffrir que l'on abrege le plein fervice que l’on tient de moi fans l’oûroi du comte, encore qu'il y ait plufieurs feigneurs au-deflous du comte l’un après l’autre , & qu'ils {e foient tous accordés à l’abregement ; & s'ils fe font tous ainfi accordés, 6t que le comte le fache, il gagne l'hommage de celui qui tient la chofe, & l'hommage revient en nature de plein fervice ; &c file doit amender ce- lui qui l’abregea à fon homme de 60 livres au comte, | Dans la coûtume d'Amiens le fief abregé ou reffraine & non noble, eft un fief dont le relief eft abonné à une fomme au-deffousde 6o fous parifis & le chame bellage,à moins de 20 fous. Voyez les art. 25. 71, 84. & 132. de cette coûtume , voyez auñffi Parr. 4, de celle de Ponthieu , & la coûtume d'Anjou, att. 258. FIEF D’ACQUÊT, dans certaines coûtumes figni fie un ff acquis pendant le mariage. Par exemple, dans la coûtume de Haynault, on diftingue les ffs d'acquêts , des fiefs patrimoniaux ; les enfans du fe- cond lit fuccedent avec ceux du premier aux #f# patrimoniaux de leurs pere & mere ; maïs les enfans du fecond lit ne fuccedent point aux ff d'acquérs faits pendant le premier mariage ou pendantle veu- vage ; ils fuccedent feuilement aux fefs d'acquérs faits pendant le fecond mariage. Foyez Le ch. Ixxwvy. FIEF EN L'AIR, 04 FIEF INCORPOREL, eft celui qui n'a ni fonds ni domaine, & qui ne confifte qu’en mouvances & en cenfives, rentes ou autres droits, quelquefois en cenfives feules. On l’appelle fef ex Pair par oppoñtion au fef corporel, qui conffté en domaines réels. Ces fortes de f2f5 fe font formés depuis la patrimonalité des fefs &e par la liberté que les coûrumes donnoient autrefois de fe joüer de fon Jef > Jufqu'a mettre la main au béton, ce qu'on appelle au parlement de Bordeaux , Je joier de fon fief, uf- que ad minimam glebam. Le jf en l'air, eft continu ou volant; continu, lorfqu'il a un territoire circonfcrit & limiré; volant, lorfque fes mouvances & cenfives font éparfes. Avant la réformation de la coûtume de Paris, le vaflal, pouvoit aliéner tout le domaine de fon Jef, en retenant feulement quelque droit domanial & leigneurial fur ce qu'il aliénoit. Mais afin de maintenir l’honneur & la confiffance du ff, & que le vaffal foit en état de fatisfaire dans l’occafon aux charges du fef, les réformateurs ont décidé en l'es, 57, de la nouvelle coûtume, que le vaflal ne peut alièner plus des deux tiers de {on fef, fans démflion de foi. Cependant les fiefs er l'air font ufités encore dans quelques coûtumes ; il y en a même plufeurs dans Paris qui ne confiftent qu’en cenfives. Ces ffs ne peuvent être faifis que par main mife fur lessarriere-fefs. Voyez Peleus, gu. 75. & Caron" das, y. 11, rep, 6, (4) FIEF AMETÉ, dont il eft parlé à la fin de l’art. cle 23. dela coûtume de Mantes, eff la même chofe que le ff abonné , c’eft-à-dire un ff pour lequel le feigneur eft convenu avec le vaflal de ce que ce dernier doit payer au feigneur pour les droits de mutation. ( 4) 75 FiEF D'AMITIÉ , qu'on appelloit aufli DRUERIE, étoit celui que le prince donnoït à un de fes druds ou fideles , qui étoient les grands du royaume, aux- quels on donnoit auf le nom de deudes. Il eft parlé. AE de ces drueries on ffs d'arnisié dans les anciens au- teurs. Voyez Drups & LEUDES. (4) | FIEF ANCIEN 04 PATERNEL, antiquum feu pater- rum : quelques-uns appellent ainfi un jf concédé d'ancienneté à une certaine famulle, de maniere qu’il ne pue être poflédé que parles mäles , à moins que les femelles n’ayent aufli la capacité d’y fuccéder par le titre d’inféodation, & à la charge que la li- gne des ainés venant à manquer , les puînés y fuc- cedent, fans que ce ff puifle jamais être aliéné. Voyez ci-après FIEF NOUVEAU, (4) FIEF ANNUEL, feudum annuum feu féipendium , étoit lajouiflance d’un fonds qui étoit donnée à titre de ff pendant l’efpace d’une année pour tenir lieu de folde & récompenfe à quelqu'un par rapport à {on office, dignité ou autre mimiftere ; ce fut le fe- cond état des ffs ; car dans le premier, Le feigneur pouvoit arbitrairement dépoiuller fon vafal de ce qu’il lui avoit donné en ff, enfuite Les f2fs devin- rent annals ,comme l’étoient toutesles commiflions. Voyez les notes de Godefroy fur le premier titre du livre des fefs de Gerard le Noir, & le gloflaire de Ducange au mot féxdum annuum, ( 4) FIEF EN ARGENT, fézdum nummorum , c'étoit une fomme d'argent affignée à titre de ff par le feigneur , fur fon tréfor, en attendant qu'il l’eût a£ fignée fur quelque terre, On trouve un exemple d’un tel ff créé par l’empereur pour le feigneur de Beaujeu en 1245 de 100, marcs d'argent fur la chambre impériale, jufqu’à ce qu'il Peût affigné fur quelque terre. Ces fortes de fefs étoient alors fré- quens. Voyez les mémoires manufcrits de M. Aubert, pour Jérvir à l'hifloire de Dombes. ( 4) FIEF AROTURÉ, c’eft un bien féodal que l’on a mis en roture ; cela s'appelle proprement commuer le fief en cenfive. ( 4) | FIEF ARRIERE , eft un ff qui releve d’un autre, lequel eft lui-même mouvant d’un autre fef fupé- rieur. | Il eft appellé arriere-fef à l'égard du feigneur fu- zerain, dont 1l ne releve pas immédiatement, mais en arriere-fief, Ainf le vaffal tient en plein ff du feigneur féo- dal ou dominant, dont il releve immédiatement , & il tient ce même ff en arriere-fef du feigneur fu- zerain qui eft le feigneur féodal où dominant de fon feigneur féodal immédiat. Celui qui poffede un arriere-fef eft appellé arriere. vallal , par rapport au feigneur fuzerain, c’eft le vaflal du vaffal. FRA Les premiers f&f5 furent érigés par les fouverains en faveur des ducs, marquis, comtes, vicomtes, barons & autres vaflaux mouvans immédiatement de la couronne. Ceux-ci, à limitation du fouverain, voulurent aufli avoir deswvaflaux; & pour cet effet, ils fous- inféoderent une partie de leurs #45 à ceux qui les avoient accompagnés à la guerre, on qui étoient attachés à eux par quelque emploi qui les rendoit commençaux de leur maïfon ; ces fous-inféodations formerent les premiers arriere-frefs, Les arriere-vaflaux firent auf des fous-inféo- dations, ce qui forma encore d’autres arriere-fiefs, plus éloignés d’un degré que les premiers , & ces arriere-fiefs ont été ainf multipliés de degré en degré. _ Le parage a auffi formé des arriere-fefs, puifque par la fin du parage les portions des cadets devien- nent féfs tenant de la portion de l’ainé, eriam invito domino. Enfin, les fefs de protection & les fefs de reprife ont encore produit des arriere. fiefs, de forte qu'ils ne procedent pas tous de la même fource. Voyez les infhir. feod. de Guyot, chap. j. n, 8. Quand le feigneur trouve des arriere-fefs ouverts | FIEF 699 pendant la faifie féodale qu'il a faite du ff mouvant immédiatement de hui, foit que l'ouverture de ces arriere-fefs foit arrivée avant ou depuis fa faifie féo- dale ; il a droit de les faifir auffi & de faire les fruits flens, jufqu'à ce que les arriere-vaffaux ayent fatis- fait aux caufes de la faifie; parce que le feigneur entre dans tous les droits du vaflal pendant la fai fie, & le dépoflede entierement!, & que les arriere- fiefs auf bien,que le fef fupérieur procedent du. même feigneur ou de fes prédéceffeurs qui ont don- né l’un &c l’autre à leur vaffal. Le feigneur fuzerain peut auf accorder {ouf. france. Les arriere-vaflaux peuvent avoir main-levée de la faifie, en faifant la foi & hommage & payant les droits qui font dûs au feigneur fuzerain. _ Siles arriere-vaflaux avoient fait la foi & hom- mage à leur feigneur , il n’ÿ auroit point de lieu à la faifie. Quand le feigneur fuzerain n’a pas faifi les arriere- fafs, les arriere-vaflaux peuvent faire la foi &hom- mage & payer les droits à leur feigneur. Lorique la faife du fxf du vaflal eft faite faute de dénombrement , le feigneur ne peut pas faifir les arriere-frefs , parce qu'il ne fait pas Les fruits fiens. … La faïfie des arriere-frefs fe fait avec les mêmes for- malités que celle des fcf5. Voyez SAISIE FÉODALE. Le fuzerain ne peut pas faifir les arriere-fefs, qu'il da n'ait auparavant faïfi le Jef de fon vaflal. Pendant la faifie des axriere-fiefs, lé feigneur fuze- rain a les mêmes droits qu'y aufoit eu le vaffal; il peut en faire payer les,cenfives & droits feigneu- riaux , même faifir pour iceux, obliger les arriere- vaflaux de communiquer leuts papiérs de recette & de donner une déclaration du revenu de leurs ff. | | Les arrriere-vaflaux font obligés de faire la foi & hommage, & payer les droits düs pour leur mu- tation,au feigneur fuzerain lorfqu’ila faifi les arriere. fefs 3 1 peut feul leur donner main-levée de faifie, 1l peut auf les obliger de donner leur aveu, le- quel ne préjudicie pas au vaflal, n’étant pas fait avec lui. ; LT Après la main-lévée, le féigneur fuzerain eft obli- géderendre au vafalles originaux des fois & hom- mages 6 aveux ; mais il en peut tirer des copies à fes dépens. | - Quand lerriere-fef elt vendu pendant la faifie ,le feigneur fuzerain peut [e retirer par retrait féodal, ou recevoir le droit de mutation. Mais fi l4 Vente avoit été faite avant la faifie, les droits appartien- droient au vaffal, & le fuzerain ne pourroit pas re- tirer féodalement. (4) : . FIEF-AUMOÔNE 0% AUMÔNE FIEFFÉE, eft celui que le feigneur a donné à l’églife par forme d’aumo- ne, pour quelque fondation. Voy. AUMÔNE, FRAN- CHE AUMÔNE ; PURE AUMÔNE, FONDATION. (4) FiEF D'AVOUERIE, (féxdum advocatie.) étoit ce- lui dont le poffefeur étoit l’avoiié du fignéur domi- nant, c’eft-à-dire chargé de le défendre en jugement. Voyez AVOUË & AVOUERIE, (4) | FIEF BANDERET 04 BANNERET, on dit commu nément bannerer, Voyez FIEF BANNERET. (4) FIEF BANNERET 04 BANDERET , C’eft-à-dire ff de banniere , feudum vexilli ; c’eft'un ff de chevalier banneret, lequel doit à fon feigneur dominant le{er- vice de banniere, c’éft-à-dire de vénir ât-comman- dement de fon feigneur, en armés & avec fa ban- niere, fufhfamment accompagné dé ceux qui doi- vent fervit fous fa banniere. Foyez ARRIERE-BAN, BAN, BANNERET, BANNIERE, CHEVALIER BAN- NERET, SERVICE DE BANNIERE. (4) FIEF BOURGEOIS, feudum burgenfe feu ionobile ; ef rural ou roturier, ou ñon noble, font termes fy- es OC Fi Ë Jo mp nonymes. Voyez ci-après FIEF NOBLE, FIEF ROTU- RIER , F1Er RURAL, & le gloffaire de du Cange, verbo feudur burgenfe, (4) FIEF DE BOURSE -COÛTUMIERE, n’eft pas la mèê- me chofe que ff bourfal ou bourfer; c’eft un fef acquis de bour/e coétumiere, c’eft-à-dire par une per- lonne roturiere & non noble, que dans quelques colûtumes on appelle les hommes cottumiers. (A) FIEF 3OURSAL 04 DE BOURSE, o4 BOURSIER, felon quelques -uns eff une portion'du revenu d’un jief que Paîné donne à fes puinés, ou une rente par hu créée en leur faveur, pour les remplir de leurs droits dans la fucceflion paternelle ; ce qui eft confor- me à ce que dit Braéton Zv. IV. tir, üij. cap. jx.. 6. Jeudum eff 14 quod quis tenet ex quäcurique causé fibi & hæredibus fuis , five fit tenementum, fève fit reditus,, ira quod reditus non accipiatur fub nomine ejus, quod Vent ex carmeré alicujus. M. Henin, dans Jés obfervarions fur Le. 1, de l’af- fe du comte Geoffroy, rome II.vdes arrêts de Frain, p. 322, dit qu'un fef bour/fer eft une rente que l’ainé conflitue à fes puinés , pour leur tenir lieu de leur part & portion {ur un fefcommun, afin que ce ff ne foit point démembré ; les coûtumes du grand Per- che, art. 77. & 78. & de Chartres, art. 17. font connoître, dit-il, que l’ainé conftituoit aux puinés une rente fur la feigheurie , pour leur tenir lieu de partage, ce qui fe faifoit pour empêcher le démem- brement aétuel de la feigneurie : à raïfon de quoi les puinés ainf partagés en vente, font appellés bour- Jaux où bourfiers ; & tel affignat eft dit fef bourfrer, tonfiftant en-deniers. Loyfeau avoit déjà dit là même chofe en fn sr. des offices , liv, IT, ch, 1j. n. 56. Du Cange en fon gloffaire , au mot feudum burfe Jeu burfale, eft aufñi de ce féntiment; 1l cite les coû- tumes du Perche & de Chartres, & celle du Maine, art, 282, | Mais M, de Lauriere en fes notes fur le gloire, ou au dire de Ragueau au mot fef hourfal, fait con- coître que ces auteurs fe font trompés & ont mal en- tendu les termes de coûtumes qu'ils citent; il fait voir que dans ces coûtumes les fefs qui ne fe par- tagent entre roturiers, font appellés fefs bourfaux Ou bourfrers, 8 que les puinés copaftageans entre roturiers , font de même appeilés hourfaux ou boar- J£ers : que cette dénomination vient de ce qu'entre roturiers qui partagent un fef, tous les enfans font obligés de contribuer aux rachats qui doivent être préfentés au feigneur féodal, par l’aîné ou par celui qui eft poflefleur du lieu tenu en fef, fuivant ler. 59. de lacoûtume du Perche, & que comme tous les enfans tirent chacun en particulier de l’argent de leur bourfe pour:compofer les rachats, les fes échüs à des routuriers ont été par.cette raïon nommés bour- Jiers ou bourfaux , ce qui .eft conforme à ce que dit Bodreau fur l’arsicle 282. de la coûtume du Maine: au lieu que dans ces coûtumes, quand les fefs fe par- tagent entre nobles, l’ainé eft feul tenu du rachat de l2 maniere dont l’expliquent ces coûtumes. Cette opinion paroïît en effet la mieux fondée & la plus conforme aux textes des coûtumes du Maine, de Chartres & du Perche. (4) FIEF DE BOURSE , feudum burfæ , feu de camerd vel canevé , aut cavenä, eft une rente réputée immeuble, affignée fur la chambre Ou thréfor du roi, ou fur le fifc du feigneur , & concédée en ff. On l'appelle fef de bourfe, parce que le terme bourfe e prend quel- quefois pour le ff, de même que chambre fe prenoit autrefois pour le domaine outhréfor du roi. C’eft ainfi que ces termes s'entendent fuivant les regles des fefs, & telle eft l’éxplication qu’en donne Rafius, parc. IT. de feudis. Voyez auf le gloffaire de du Cange, au mot feudum burle, Voy, cr-devart FARF BOURSAL, &c. (4) | FLE FIEF BOURSIER 04 BOURSAL, voyez ci-deyant FIEF BOURSAL,. | \ FIEF DE CAMERA Jet CANEV Æ ant CAVENEX,, voyez après FIEF DE CHAMBRE. Fier DE CAHIER, feudum quaternatum, eft un grand fef qui fe trouve infcrit dans le dénombrement des fiefs mouvans du prince, fur les cahiers ou resif.. tres de la douane, 27 quaternionibus , commeil paroïît pat les conftitutions des rois de Sicile, Zb. I. we, xxxvi, aoxjx. Lo. lxjv. Lxviy, dif. lxxxvy. & lib. LIT. dir. xxtiy. 6 xxviy. Voyez le gloflaire de Lauriere au mot fef en chef. (A) j FIEF CAPITAL, feudum capitale, eft celui qui re- leve immédiatement du roi, comme les duchés, les comtés, les baronnies. Foyez Le glof[. de du Cange, au mot féudum capitale, (A) FIEF CASTRENSE, féudum caffrenfe, c’eft lorfque le feigneur dominant donne à fon vaflal une certai- ne fomme d’argent ou un tenement, à condition de garder & défendre le château que le feigneur lui a donné, Woyez le gloffaire de du Cange, au mot feudum caftrenfe. (A) FIEF CENSUEL, eft la même chofe que fef roru- rier Ou 207 noble, ou pour parler plus exa@tement , c’eft un héritage tenu à cens, que l’on appelloit aufit fief, quoique improprement & pour Le diftinguer des véritables fefs qui font francs, c’eft-à-dire nobles & libres de toute redevance; on appelloit celui-ci cez- J'uel ; à caufe du cens dont iléroit chargé. Ileft par- lé de ces fortes de ff dans les lettres de Charles VL du mois d'Avril 1303, arc. 2. où l’on voit que ces fiefs étoient oppolés aux fefs francs. L'abbé & couvent de S. André aflocient Le roi 22 omnibus feo- dis, retrofeodis , franchis 6 cénfualibus , &c. (A) FIEF DE CHAMBRE, féndum cameræ , fèu cavene > au canevæ , C’eit une rente tenue en ff, aflignée fur le thréfor du roi, qu’on appelloit autrefois 22 cham- bre du toi. Voyez CHAMBRE pu Roï, CHAMBRE DE LA COURONNE, DOMAINE & THRÉSOR, Le gloffaire de du Cange, au mot féudum camere, (4) FIEF CHEVANT & LEVANT , en Bretagne, eft de telle nature, que tout teneur doit par an quatre boif- feaux d'avoine, poule & corvée. Mais fi un teneur. retire par promefle l’héritage vendu, il n’eft point rechargé de la vente que devoit le vendeur ; elle s'éteint en diminution du devoir du feigneur, & cela s’appelle faire abattne, Si au contraire il acquiert fans moyen de promefle, il doit le même devoir que de- voit le bailleur. Voyez Dargentré ur Parr. 418. de l’anc, coût. glof]. y. n. 9. (A) FIEF EN CHEF, 04 CHEVEL, feudum capitale, eft un ff noble en titre, ayant juftice comme les com- tés, baronmes, les fef$ de haubert, à la différence des vavaflouries qui font tenues par fommage, par fervice de cheval, paracres, & des autres fefs vilains ou roturiers ; on le définit auf févdum magnum & qguaternatum, id efl in quaternionibus doanæ infcriprum, quelques-uns ajoûtent god a principe tantum tenetur : & c’eft ainfi que l’ont penfé Ragueau & du Cange, mais M. de Lauriere , ez fes notes fur le gloffaire de Ragueau, au mot fefer chef, prouve par la glofe de l’ancienne coùtume de Normandie, ch xxx7v. vers la fin, que le fefez chef n’eft pas toûjours tenu im médiatement du roi; qu'un fef relevant d’un autre feigneur, peut auf être fef en chef, mais que ces fortes de fefs font féefs nobles, & non pas tenus à aucun ff de haubert, comme vilain ff. Voyez l’art. 166. de la nouvelle coûtume de Normandie, & zer- rier fut le mot fefou membre de haubert , avec les mots chef feigneur & vavaffouerie. (4) d FIEF DE CHEVALIER, 04 FIEF DE HAUBERT, feudum loricæ, eff celui qui ne pouvoit être poflédé que pat un, chevalier, lequel devoit à fon feigneur dominant le fervice de chevalier ; celui qui le poñlé- +7 L | doit FTE doit étoit obligé à 21 ans de fe faite chevalier ; c’eft- à-dire de vêtir le haubers ou la cote de maille, qui étoit une efpece d’armure dont il n’y avoit que les chevaliers qui puflent fe fervir. Le vaffal devoit fervir à cheval avec le haubert, l'écu, l’épée 8zle héaume ; la qualité de ff de chevalier ne faïfoit pas néanmoins que lewaflal dût abfolument fervir en perfonne, mais feulement qu'il devoit le fervice d’un homme. de cheval. Quelquefois par le partage d’un fef de cette-efpece , onne devoit qu'un demi-che- valier, comme le remarque M. Boulainvilliers , en fon srairé dedapairie, tom. IT, p. 110. Voyez FIEF DE HAUBERT. (4) | Fier coMMis, cell le fief tombé en commife ou confifeation, pour caufe de defaveu ou félonnie de la part du vaflal. Voyez CoMMIsE, CONFISCATION, DEsAVEU , FÉLONNIE. (4) FIEF DE CONDITION FEUDALE; quelques coùtu- mes donnent cette qualité aux fefs proprement dits, qui fe tranfmettent par fucceflion, à la différence de certains fefs auxquels on ne fuccede point, comme on voit dans les livres des fe/5. Voyez le gloffaire de Lauriere, au mot ff. (4). FIEF CONDITIONNEL, eft un ff temporaire qui ne doit fubffter que jufqu’à l’évenement de la condi- tion portée par le titre de conceflion; tels font les fefconfiftans en rente créée fur des fs dont lecréan- cier fe fait recevoir en foi; ces fiefs ne font créés que conditionnellement , tant que la rente fubfiftera, tant que le vaflal ne rembourfera pas, & s’éteignent totalement par lerembourfement. Voyez Guyot er fes obfervat. [ur les droits honorifiques , ch. y. p. 187. &c ci-après FIEF TEMPORAIRE. (4) FIEF CONTINU, eft celui qui a un territoire cir- confcrit & limité, dont les mouvances & cenfives font tenantes l’une à l’autre ; ce jf jouit du privilé- ge de Penclave, qui forme un moyen puiffant, tant contre un feigneur voifin, que contre un cenfitaire. Voyez ENCLAVE. Un ff incorporel ou en lair, peut être continu pour fes mouvances & cenfves, de même qu’un fef corporel. Voyez Guyot, inflit. feodales. cap. j. n. 6. Le ff continu eft oppoié au ff volant. Voyez c:i- après FIEF VOLANT. (4) FIEF CORPOREL, eft celui qui eff compofé d’un domaine utile & d’un domaine dirett : le domaine utile, ce font les fonds de terre, maïfons ou hérita- ges tenus en ff, dont le feigneur jouit par lui-mé- me ou par {on fermier; le domainé direct, ce font les f:fs mouvans de celui dont il s’agit, les cenfives &t autres devoirs retenus fur les héritages dont le fei- gneur s’eft joué. Voyez Dumoulin, . om 35, de l’ancienne , & 31. de la nouvelle, glof. 7.7. 1. Le fief corporel eft oppoié au ff incorporel ou fief en l'air. Voyez ci-devant FIEF EN L'AIR. (4) FIEF DE CORPS, c’eft un ff lige, c’eft-à-dire dont le poflefleur, outre la foi & hommage, entr’autres devoirs perfonnels, eft obligé d’aller lui-même à la guerre, ou de s'acquitter des autres fervices militai- res qu’il doit au feigneur dominant; 1l a été ainfinom- mé féef de corps, à la différence des ffs dont les pof- fefleurs ne font tenus de rendre aufeigneur dominant, ue certaines redevances ou preftations, au lieu de es perfonnels &c militaires, tels que font les fiefs oubliaux dont 1l eft parlé dans la coûtume de Touloufe, ou de fournir & entretenir un ou deux hommes de guerre, plus ou moins. Le fervice du fef de corps eft ainfi expliqué dans le ch. cexxx. des aflifes de Jérufalem, p. 156. iisdoi- - vent fervice d'aller à cheval & à armes (à la femon- ce de leur feigneur), dans tous les lieux du royaume où il les femondra ou fera femondre, à tel fervice, comme ils doivent, & y demeurer tant comme il Les. Tome VI, FTE 7oi femôndra lou féra femondre jufqu’à un an. Par l’af- fie & ufage de Jérufalem, la femonce ne doit pas accueillir hommé pour plus d’un an; celui qui doit {ervice de fon corps, de chevalier on de fergent, en doit faite par tout le royaume le fervice avec le fei- gneur, oùfans lui sil en femond , commeil le doit quand 1l eft à coutt d’aller à confeil de celui ou dé cellé à qui le feigneur le donnera, fi ce n’eft au con- feil de fon adverfaire, ou fi la querelle eft contre liuizmême, Nulne doit plaidoyer par commandement du féigneur ni d'autre; ils doivent faire égard ou cons noiflance & recort de court, fi le feisneur leur com mande de le faire ; ils doivent aller voir meurtre ou homicide, file feigneur leur commande d’aller voir comme court, &c ils doivent par commandement du feigneut, voir les chofes dont on fe clame dé lui, & que lon veut montrer à court. Ils doivent, quand lé {eignéur leur commandera, aller par tout le royau- me femondre comme court, aller faire devife de terre & d'eaux entre gens qui ont contention, faire en quêtes quand on le demande au feigneur & qu'il l’or- donne, voir les monftrées de terres & autres chofes telles qu’elles foient, que le feigneur leur comman- de de voir comme court. Ils doivent faire toutes les autres chofes que les hommes de court doivent faire comme court quand le feigneur le commande ; ils lux doivent ce fervice pat tout le royaume ; ils lui doi- vent même fervice hors du royaume, en tous les lieux où le feigneur ne va pas, pour trois chofes, l’une pour fon mariage ou pour celui de quelqu'un de fes enfans, Pautre pour garder & défendre fa fos ou fon honneur, la troifieme pour le befoin appa- rent de fa feigneurie , ou le commun profit de fa ter- re; & celui ou ceux que le feigneur femond ou fait femondre , comme il doit, de lune defdites trois chofes, & s'ils acquiefcent à la femonce & vont au fervice du feigneur , 1l doit donner à chacun fes ef- touviers, c’eft-à-dire fonnéceffaire, fuffifamménttant qu'ils feront à fon fervice , 6c. & celui ou ceux que le feigneur a femond ou fait femondre dudit fervice, &T qui n’acquiefcent pas à la femonce ou ne difent pas la raifon pour quoi, & telle que court y ait égard , le feigneur en peutavoir droit comme de dé- faut de fervice. Le fervice des trois chofes deffus di- tes , eft dû hors le royaume à celui à qui les poflef- feurs doivent fervice de leur corps & au chef fer- gneur ; ils doivent tous les autres fervices comme 1l a été dit ci-deflus ; & fi une femme tient fef qui doi- ve fervice de corps au feigneur , elle lui doit tel fer- vice que fi elle étoit mariée, & quand elle fera ma- riée, fon baron (c’eft-à-dire fon mari), devra au feigneur tous les fervices ci-deflus expliqués. Voyez Littietons, chap. 7v. of. Knights fervice fect. 103. fol, 74. v°.& Bouteiller dans fa fomme rurale, liv, I, ch, lxxxuy, p. 486. | | FIEF-COTTIER, c’eft le nom que l’on donne dans quelques coùtumes aux héritages roturiers, & qui font de la nature des main-fermes ; le terme de fef ne fignifie pas en cette occafion un cer zoble, mais feulement la conceffion à perpétuité d’un héritage à titre de cenfive. Voyez la coûtume de Cambrai, tit, J. art, 74. (4) | | FIEF EN LA COURT DU SEIGNEUR , fétdum 17 curia feu in curte , c’eft lorfque le feigneur dominant donne à titre d’inféodation une partie de fon châ- teau ou village, ou de fon fifc ou de fes recettes, & que la portion inféodée eft moindre que celle qui refte aufeigneur dominant, C’eft ainfi que l'explique Rofentalius, cap. ij. $. 40. Voye FIEF HORS LA COURT. Baron, de bencfciis, lib. T,8& Loyfeau, des feign. ch. xij. n. 47. dit que les fefs mouvans d’un feigneur haut-jufticier qui font hors les limites de fa juflice, {ont appellés fefs extra curtem ; ainf ff en la court YVVvy 702 FIE peut auffi s'entendre de cehn qui eft enclavé dans Ja juftice du feigneur. (4) FIEF HORS LA COURT DU SEIGNEUR DOMI- NANT, c’eft lorfque le feisneur d’un château ou vil- lage donne à titre d’inféodation à quelqu'un la jurif- diétion & le reflort dans fon château ou village avec un modique domaine, le furplus des fonds apparte- nant à d’autres. C’eft ainf que le définit Rafius, part. IT. de feud. K, 1. On entend aufli par-là celui qui eft fitué hors les limites de la juftice du feigneur, Voyez ce qui eft dit en l’article précédent fur Les f/$ en la court du fei- gneur, vers la fin. (4) FIEF COUVERT, eft celui dont l'ouverture a été fermée, c’effà-dire pour lequel on a fait la foi & hommage, & payé les droits de mutation. En cou- vrant ainfi le ff, on prévient la faifie féodale ; ou fi elle eft déja faite, on en obtient main-levée : il ÿ a ouverture au fief jufqu'à ce qu'il foit couvert. Voyez FIEF OUVERT , & OUVERTURE DE FIEF. ( 4) FIEF IN CURIA feu IN CURTE. Voyez FIEF EN LA COURT. , FIEF DE DANGER , eft celui dont on ne peut pren- dre poffeffion ou faire aucune difpofñition, fans le congé du feigneur, autrement le feftombe en com- mile ; ce qui fait appeller ces fortes de fiefs de dan- ger, ed guod periculo Junt obnoxia 6 domino committun- sur, Il en eft parlé dans la coût. de Troyes, art. 37. Chaumont, art. 36, Bar-le-Duc, art. 2. enl’ancien- ne coûtume du bailliage de Bar, arr. 1. & en l’article 31. de l’ancienne coûtume d'Amiens. Suivant ces coûtumes, quand le fefeft ouvert ou fans homme, le nouveau vaflal ne doit point y entrer , nien pren- dre poffeffion fans premierement en faire foi & hom- mage au feigneur dominant, fans quoi 1l encourre- roit la commife. Anciennement en Bourgogne le fef de danger tomboit en commife s'il étoit aliéné fans le congé du feigneur, comme il paroît par un arrêt du parlement de Paris du 20 Décembre 1393, cité par du Tillet. Mais par la coûtume du duché c. y. & du comté ck. j. rédigées l’une & l’autre en 1549, le danger de commife eft aboli en plufieurs cas, fui- vant les lois des Lombards, fi le vaffal eft en demeu- re pendant an & jour à demander Pinveftiture, il perd fon fef, comme il eft dit dans les livres des fefs, Lib, I. sie, xxy.& lib, IV. rir.lxxvy. Cette caufe de dan- ger fut auffi autorifée par les conflitutions des empe- reurs Lothaire & Frédéric; mais par les ftatuts de Milan, la commife n’a point lieu dans ce cas non plus qu’en France. Voyez Commise. (4) FIEF DEMI-LIGE, dont il eft parlé dans l’ars. 21, de la coûtume du comté de S. Pol rédigée en 1507, eft celui pour lequel le vaffal promet la fidélité con- tre tous à l’exception des fupérieurs , à la différence du fefclige où le vaflal promet fidélité à fon feigneur envers & contre tous. Les fiefs demi-liges different encore des jefs-liges, en ce que le relief des ffs-liges dans cette même coûtume eft de dix livres ; au lieu que celui des æe- mni-liges eft feulement de 60 fous, & de moitié de chambellage, pourvû que le contraire n'ait pas été reglé, ou par convention ou par prefcription. La coûtume de S. Pol réformée en 1631, neparle point de fef-lige. Voyez FIEF-L1GE. (4) FIÉFS DE DÉVOTION O4 DE PIÉTÉ , font ceux que les feigneurs reconnoïfloient autrefois par hu- milité tenir de Dieu ou de quelque faint, églife ou monaftere , à la charge de l’hommage & de quelques redevances d'honneur , comme de cire & autres chofes femblables. Plufieurs fouverains ont ainfi fait hommage de leurs états à certaines églifes ; ce qui n’a point donné pour cela atteinte à leur fouverai- neté , ni attribué à ces églifes aucune puiffance tem- porelle fur les états & autres feigneuries dont on FITE leur a rendu un hommage de dévotion. Yoyez S: Julien dans fes mélanges ; p. 657. Doublet, dans fes antiquités de S. Deris , liv. Ich. xxiv, & xxviiy. Liv. LIT. ch. 1j. & v]. Brodeau fur Paris, art, 63. Voyez HOMMAGE DE DÉVOTION. (4) FIEF DIGNITAIRE 04 DE DIGNITÉ, eft celui au- quel il y a quelque dignité annexée, tels que les principautés, duchés, marquifats, comtés, vicom- tés, baronies. Voyez chacun de ces termes en leur lieu. … Le fef de digniré eft oppofé au fef fimple , auquel il n’y a aucune dignité annexée. On a toûjours pris foin de conferver ces fortes de fefs dans leur entier autant qu'il eft poffible; c’eft pourquoi ils font de leur nature indivifibles, & ap- partiennent en entier à l’aîné, fauf à lui à récom- penfer les puinés pour les droits qu'ils peuvent y avoir. Chopin, fur la coûtume d'Anjou, 46. III. nr, y. nr, 6.8 Salvaing , de Pufage des fefs. On étoit même obligé anciennement, lorfqu’on vouloit partager un fefde cette qualité, d'obtenir la permiffion du roi. L’hiftoire en fournit plufieurs exemples, entr'autres celui du feigneur d’Authoüin, lequel en l’année 1486 obtint du roi Charles VIIL que fa pairie de Dombes & Domnat près d’Abbe- ville, mouvante du roi à une feule foi, füt divifée en deux, afin qu'il pût pourvoir plus facilement à lPétabliffement de fes enfans. Duranti, dec. xxx. n. 10. Graverol & la Rochefñl. Zy. VI. tir. lxüiy. art. 1. . On ne peut encore démembrer ces féefs, ni s’en jouer & difpofer de quelque partie que cefoit, fans le confentement du roi, fuivant un arrêt du parle- ment du 18 Juillet 1654. Les lettres d’éreétion des terres en digniré ne fe vérifient dans les cours que pour le nom & le titre feulement, c’eft-à-dire que les fefs ainfi érigés n’ac- quierent pas pour cela toutes les prérogatives attri- buées par les coûtumes aux anciennes digrirés. Cho- pin de doman. & fur la coûtume d'Anjou. Aïnfi le parlement de Paris ne vérifia l’éreétion en marqui- fat de laterre de Maigneley en Vermandois, de Su- fes au Maine, & de Dureftal en Anjou en comté, que pour le titre feulement, fuivant fes arrêts des 14 Août, 19 Oëftobre, & 12 Décembre 1566. Le parlement de Grenoble procédant à l’enresif- trement des lettres-patentes portant éreétion de la terre d’Ornacieu en marquifat, arrêta le 19 Juin 1646 , les chambres confultées, que dorénavant il ne procéderoit à la vérification d’aucunes lettres, portant érection des terres en marquifat, comté, vicomté, & baronie, que l’impétrant ne fût préfent & pourfuivant la vérification; de quoi il ne poutroit être difpenfé que pour des caufes très-juftes &c légi- times concernant le fervice deS. M. qu'avant la vé- tification , il fera informé par un commiffaire de la” cour, de l'étendue, revenus , & mouvance defdites terres, pour favoir fi elles feront capables du titre qui leur fera impolé ; que les impétrans ne pourront unir aux marquifats, comtés, vicomtés, & baronies, aucunes terres fe mouvant pleinement du ff de S. M. qu'ils ne pourront auffi démembrer, vendre, donner , nialiéner, pour quelque caufe que ce foit, aucunes dépendances des terres qui compoferont le corps de la qualité qui fera fur elle impoñée, faute de quoi la terre reprendra fa premiere qualité ; que la vérification fera faite fans préjudice des droits des quatre barons anciens de la province, & fans que pour raifon defdites qualités , les impétrans puiffent prétendre d’avoir leurs caufes commifes en premiere inftance pardevant la cour , fice n’eft qu’il s’agît des droits feigneuriaux en général ,des marquifats, com- tés, vicomtés, & baronies, de la totalité de la terre & feigneurie, mais qu'ils fe pourvoiront tant en de- mandant que défendant pardevant les juges ordinai- res & royaux , & que les appellations des juges des marquifats, comtés, vicomtés, &e baronies , reffor- tront pardevant les vice-baillifs & juges royaux, ainfi qu’elles faifoient auparavant. hi. *. La chambre des comptes par un arrêté du 28 Juil- let 1645, déclara que les fonds &z héritages de franc- aleu compofant le revenu des marquifats ou comtés, fortiront nature de fef, pour être inférés & compris aux aveux & dénombremens quien feront donnés. Le feigneur féodal ne perd pas fon droit de féo- dalité par l’éreétion en dignité de la terre de fon vaf fal ; c’eft pourquoi les lettres portent communément la claufe que c’eft fans rien innover aux droits de juftice, for & hommage appartenans à autres qu’au roi; c’eft pourquoi le feigneur dominant du fief ne peut s’oppolfer à l’éredion pour la confervation des droits de féodalité feulement, parce que le roi peut honorer fon arriere-fief de telle dignité que bon lui femble, fans préjudice de la mouvance des autres feigneurs. Chopin fur Anjou, Liv. I. art, 48. n.8. Salvaing, de l’uiage des fefs , ch, , Bodin, 4v. I. de fa républ, ch. vi. (A) | FIEF DOMINANT, eft celui duquel un autre rele- ve immédiatement. La qualité de fef dominant eft oppofée à celle de fef Jervans, qui eft celui qui rele- ve direétement du fief dominant ; & ce dernier eft dif- férent du ff {uzeraim, dont le fef fervant ne releve que médiatement, , Un même ff peut être dominant à l'égard d'un autre, & fervant à l'égard d’un troifieme : ainfi fi le feigneur dominant a un fuzerain, fon fef eft domi- nant à l'égard de l’arniere-fief, & fervant à l'égard du feigneur fuferain. Voyez ci-après FIEF SERVANT & SEIGNEUR DOMINANT. Il eft parlé du fef dominant dans plufieurs coùtu- mes, notamment dans celles de Melun, artic. 24 & 3.7; Eftampes, arf, 12, 16,20, 38 ; Mantes, art. 443 Laon, art. 186,187, 188, 202, 219, 224 Châlons, arc. 177, 189 , 190 , 219, 224 ; Reims, art, 120; 138 ; Ribemont, arr. 19 ; Montargis, ch. prem. art. 11, GC, 85 ; Grand-Perche, arr, 35, 38; 445 46 » 47 » 48 » GS ; Châteauneuf, arc, 16 ; Poi- tou , art. 23 ; Péronne, art. 30, 52, 56, 81 ; Ber- ri, tie. y, art, 20 3 Dourdan, arc, 25. (4) FIEF DROIT, feudum reülum , feu cujus poffeffio reéla ef ; c’eit celui qui pafle aux héritiers à perpé- tuité. Voyez Razius, de feud, part. XII, Fier DE DROIT FRANÇOIS, feudum jur, francifti, eft celui qui fe regle par les lois de France au fujet des fefs. Schilter, en fon sraité du parage & de l'apa- zage, obferve qu'il ne faut pas confondre les fefs du droit françois, Juris francifci, avec les francs-fiefs, feuda franca, ni avec les f:fs de France, feuda Fran- cie : en effet 1l y a beaucoup de fefs fitués hors les limites de la France, qui ne laiffent pas d’être fefs de droir françois ; & il y a bien des fefs de droit françois qui ne font pas pour cela des francs-fiefs. (4) FIEF ÉCHÉANT ET LEVANT ; voyez ci-après FIEF REVANCHABLE. FIEF D'ÉCUYER , feudum feuriferi , feurarii , Jeu armigert ; C’étoit celui qui pouvoit être poflédé par un fimple écuyer, & pour lequel il n’étoit dû au fei- gneur dominant que le fervice d’écuyer ou d’écuya- ge, fervitium feuti, fcutagtum. L’écuyer n’avoit point de cotte d'armes m de cafque, mais feulement un écu, une épée, & un bonnet où chapeau de fer. Ce fef étoit différent du ff de haubert ou haubergeon, feu. dum loricæ, pour lequel il falloit être chevalier. Voyez l'hiffoire de la parie pat Boulaïnvilliers, som. ÎT. pag. 117, & aux mots ÉCUYER , F1EF DE HAU- BERT & HAUBERT , FIEF DE CHEVALIER, F1EF BANNERET, (4) _ FIEF ÉGALABLE, voyez FIEF REVANCHABLE. FIEF ENTIER 07 PLEIN FIEF, c’eft un ff non di- vil, que le vaffal doit deffervir par pleines armes ; Tome FL, FITE 703 au lieu que les membres ou portions d’un ffde hau< bert, ne doivent quelquefois chacun qu’une portion d’un chevalier, Voyez Fier DE CHEVALIER, FIEF DE HAUBERT, { ; Fief entier dans la coûtume de Charttés, art, 163 &t dans celle de Châteauneuf en Thimerais ACL AIO eft celui qui vaut trente livres tournois de revenu par an, ce qui fufifoit apparemment autrefois dans ces coûtumes, pour l'entretien d’un noble ou fei= gneur de ff portant les armes. Suivant article ra & 21 de la coûtume de Châteauneuf , & le 5 de celle de Chartres, le feféntier doit pout ratfon d’un cheval de fervice, {oixante fous de rachat. Voyez ci-apr. FIEF SOLIDE € PLEIN Fier. (4) FIEF ÉPISCOPAL, étoit celui qu’un vaffal laïc te- noit d’un évêque, qui étoit fon feigneur dominant à ou plütôt c’étoit le fef même que tenoit l'évêque, ou ce que fon vaflal tenoit de lui comme étant une por: tion du fefépifcopal, On en trouve un exemple dans les preuves de l’hiftoire de Montmorency, pag. 373 à la fin. Ego Girbertus , Dei gratié Parifenfis epifco- pus; &C, Affenfu domini Stephani archidiaconi ; ec- clefiam € altare Bullarie de Moncellis monällerio B. Martini de Pontifaré concefft , annuente Burcardo de monte Morenciaco , qui eum de epifcopali feudo poffide- bat ; &c, AGum publice Parifius in capitulo B, Ma- ri& , anno Încarnationis dominice 1122. Voyez auf les preuves du pénitentiel de Théodore, pag. 411 , & Marlot dans fa smésropole de Reims , tome IL. Peil4. Les fefs épifcopaux 8 presbytéraux commence- rent Vers la fin de la feconde race, lorfque les fei- gneurs laïques s’emparerent de la plüpart des biens eccléfiaftiques, des dixmes, offrandes, &:c. Voyez le gloffaire de Lauriere, au mot Fief épifcopal ; & ci- après FIEF PRESBYTÉRAL. (4) FIEF EXTRA CURIAM , voyez FIEF HORS LA COURT DU SEIGNEUR DOMINANT. FIEF FÉMININ, dans {on étroite fignification, eft celui qui par la premiere invefiture a été accordé à une femme ou fille, & à la fucceffion duquel Les fem mes & filles font admifes à défaut de mâles. Dans un fens plus étendu, on entend par fefs fé- mirins , tous les fefs à la fucceffion defquels les fem- mes & filles font admifes à défaut de mâles, quoique la premiere inveftiture de ef n’ait pas été accordée à une femme ou fille ; & pour diftinguer ceux-ci des premiers, on les appelle ordinairement ff féminins héréditaires. Enfin on entend auf par fefs féminins, ceux qui peuvent être poflédés par des femmes ou filles à quel- que titre qu'ils leur foient échàs, foit par fucceflion, donation, legs, ou acquifition. Le fef féminin eft oppofé au fef mafeulin | qui ne peut être poflédé que par un mâle ; comme le royau- me de France, lequel ne tombe point en quenouille ; le duché de Bourgogne & celui de Normandie étoient aufli des fiefs mafculins. Suivant la coùtume de chaque province, il ÿ avoit de grands fiefs féminins , tels que le duché de Guienne , &c le comté d’Artois. Mahaut comtefle d'Artois, paire de France, au facre de Philippe-le- Long foûtint la couronne du roi avec les autres pairs : cependant c’étoit elle-même qui étoit exclufe de la couronne, Mais celle-ci eft un ff mafculin fui- vant la loi falique; au lieu que lArtois eft un fef fé. minin. Voyez Struvius, fyrtagm. juris feud. cap. jv. 7, 17 ; M. le préfident Henault, en fon abregé chrono logique. (4) FIEF-FERME, feudo firma , vel feudi firma , étoit un tenement ou certaine étendue de terres, accordé à quelqu'un &x à fes héritiers, moyennant une rede- vance annuelle qui égaloit le tiers, où au moins le quart du revenu, fans aucune autre charge que cel- les qui étoient exprimées dans la charte d'inféodas VVvvi A 704 FIE tion. Ces fortes de concefions étoient telles, que file téhancier étoit deux années fans payer la redevan- ce, le bailleur avoit une aétion pour rentrer dans fon fonds. Ces feefs-fermes reflemblent beaucoup à nos baux à rente, & aux bauxemphythéotiques. Voyez Britton , pag. 164 ; Cowel, Lb. IT. inflie. vit. 1j. . 16, & ur. jy, Sr, üb, II, rit. xxvi . 25 Leges Henrici I. regis Angle cap. lvj. Matth. Paris, à l’an 1250. Charte de Philippe-le-Bel, de lan 13 84, au thréfor des chartes, reg. 49. Gloff, de Ducange,, an mot feido firma. (4) FIEF. FERME, au pays de Normandie eft encore une conceflion d’héritage faite à perpétuité, & qui eft oppotée à ferme muable: mais on doit plütôt écri- re & dire fieffe-ferme, que fef-ferme ; c’elt pourquoi voyez ci-après FIEFFE-FERME @ MAIN-FERME. (4) FIEF FINI, féudum finitum , eft celui dont le cas de reverfon au feigneur eff arrivé, foit par quelque claufe du premier aéte d’inféodation , foit par quel- que caufe poftérieure, comme pour félonnie ou def- aveu. Le ff fini eft différent du ff ouverr, que le feigneur dominant peut bien aufli mettre en fa main, mais non pas irrévocablement : c’eft pourquoi le fef en ce cas n’eft pas fini, c’eft-à-dire éteint. Foy. Loi- feau, #r. des off. Liv. IL. ch. vi. n. 51. (4) | FIEF FORAIN , féudum forinfecum, eftune penfion annuelle affignée fur le fifc, & que le thréforier du roi eft chargé de payer à quelqu'un qui n’eft pas de l'hôtel du roi. Voyez Le gloffaire de Ducange au mot feudum forinfecum , & ci-devant au mot FIEF EN LA COURT DU SEIGNEUR. Les fefs forains font oppofés à ces fefs en la cour. Foyez auffi F1EF HORS LA COURT DU SEIGNEUR. A c 2 LEF FRANC o4 FRANC Fier, feudum francale [eu francum ; c’eft ainfi que tous fs étoienf autrefois appellés, à caufe de la franchife ou des prérogati- ves qui y étoient annexées, & dont joiifloient ceux qui les poffédoient. Ce nom convient fingulierement aux fefs nobles & militaires. Voyez ci-après FRANCS Fiers , FIEF MILITAIRE, 6 FIEF VILAIN , ROTU- RIER, RURAL. (4) vu | Fiers , (francs) dans fa fignification propre doit s'entendre de tous fes tenus franchement &c noble- ment, c’eft-à-dire fans aucune charge de devoir ou preftation annuelle, comme les biens roturiers que l’on qualifoit auffi quelquefois de fefs ; mais au leu de les appeller frazcs-frefs, on les appelloit fefs ro- suriers , fiefs non nobles ; &tc. On entend plus communément par le terme de francs-fefs, la taxe que les roturiers poflédant quel- que fef, payent au roi tous les vingt ans pour la permiflion de garder leurs fefs. Ce droit eft royal & domanial ; Les feigneurs n’y ont plus aucune part. : L'origine de ce droit vient de ce qu'anciennement les nobles étoient les feuls auxquels on concédoit les ffs. Il étoit défendu aux roturiers d’en acquérir ; comme il paroït par deux anciens arrêts , l’un de 1265, l'autre de 1282; & comme il eft porté dans les coùtumes de Meaux, arr. 144 3 Artois, 1237: ce ui s’obferve aufli en Bretagne. Ce ne fut qu’à l’occafon des croifades, lefquelles commencerent l’an 1095 , que lesroturiers commen- cerent à pofléder des fiefs. Les nobles qui s’empref- foient prefque tous à faire paroïtre leur zele dans ces expéditions, pour en foûtenir la dépenfe fe trouve- rent obligés de vendre une partie de leurs féefs & fei- neuries ; & comme ilfe trouvoit peu de nobles pour les acheter, parce que la plüpart s’engageoïent dans ces croïfades, ils furent contraints de les vendre à des roturiers, auxquels nos rois permirent de poffé- der ces fefs en leur payant une certaine finance, qui fut dans la fuite appellée.droër de franc:-fief. Ce droit fut regardé comme un rachat dela peine encourue par les roturiers, pour avoir acquis des fefs contre la prohibition des anciennes ordonnant ces; 8 comme il n'appartient qu’au fouverain de difpenfer des lois &t d’en faire de nouvelles, le roi eft auffi le feul qui puifle permettre aux roturiers de pofléder des ffs, & exiger d’eux pour cette per= nuflion la taxe appellée droir de franc-fref. La pernuffion accordée aux roturiers depofléder des fefs , étoit d'autant plus importante, que la pof- feffion de ces fortes de biens avoit le privilège d’af- franchir les roturiers qui demeuroient dans leur fef, tant qu'ils y étoient levans & couchans. M. de Bou- lainvilliers, en fon hufloire de la pairie , prétend même que le roturier qui acquéroit un ff & vouloit bien en faire le fervice militaire , devenoit noble, & qu'il ne payoit le droit de franc-fief que comme une indem- nité, lorfqu’il ne vouloit pas vivre faliquement ou noblement, c’eft-à-dire faire le fervice militaire. Il paroît du moins certain, que les roturiers poffef feurs de fefs étoient reputés nobles, lorfque leurs fiefs étoient tombés en tierce-foi ;/ c’eft-à-dire que lorfqu'ils avoient déjà été partagés deux fois entre roturiers, à la troifieme fois ils les partageoïent no- blement & de même que les nobles. | Nos rois n’approuvoient pourtant pas ces ufurpa- tions de noblefle ; & pour en interrompre la poffef- fion , iis faifoient de tems en tems payer aux rotu- riers une taxe pour leurs fefs. Cependant les rotu- riers poflefleurs de ffs ayant toüjours continué de prendre le titre d’écuyers, l'ordonnance de Blois fta- tua enfin par l’article 258 , que les roturiers & non- nobles achetant fefs nobles, ne feroient pour ce an- noblis de quelque revenu que fuffent les fefs par eux acquis, Et tel eft l’ufage que l’on fuit préfentement, Anciennement les roturiers ne pouvoient acqué- rir un fef fans le confentement du feigneur immédiat dont le fefrelevoit. Il étoit permis aux feigneurs par- ticulhiers de recevoir des roturiers pour vaflaux, pourv que les droits du roi ne fuflent point dimi- nués , c’eft-à-dire que les roturiers s’obligeaffent de faire le fervice du fef, ce qui intérefloit le roi en re- montant jufqu'à lui de degré en degré, Mais comme ordinairement les roturiers qui ache- toient des fs ne s’engageoient pas à faire le fervice militaire , on appelloit cela abreper Le fef, c’eft-à-dire que le fervice du ff étoit abregé ou perdu. Il arrivoit de-là que le ff étoit dévolu au fei- gneur fupérieur immédiat, au même état que ce ff étoit avant l’abregement; & comme ce feigneur di- minuoit lui-même fon ff en approuvant cequiavoit été fait par fon vaffal , le £ef de ce feigneur fupérieur immédiat étoit à fon tour dévolu à fon feigneur fupé- rieur, 8 ainf de feigneur fupérieur en feigneut fu périeur jufqu’au roi; de maniere que pour definté- refler tous ces feigneurs, 1l falloit leur payer à cha- cun une finance ou indemnité. Philippe III. dit Z Hardi abolit cet ancien droit par fon ordonnance de 127$, par laquelle il ordon- ne que les perfonnes non-nobles qui auroient acquis des fefs & les tiendroient par hommage à fervice compétent, ne pourroient être inquiétés par fes ju- ges , lefquels les laïifleroient jour paifiblement de ces biens; qu’au cas où ces perfonnes non-nobles auroient fait de telles acquifitions de ffs ou arriere- fiefs, hors les terres des barons, fi entre le roi &c ce- lui qui avoit fait l’aliénationil ne fe trouvoit pastrois feigneurs, & s’ils poflédoient les f2f$ acquis avec abregement de fervice, 1ls feroient contraints de les mettre hors de leurs mains, ou de payer la valeur des fruits de deux années ; &c que fi un ff étoit com- mué en roture , les chofes feroient remifes en leur premier état, à moins que le poffeffeur ne payât au roi l’eftimation des fruits de quatre années. Cependant depuis, en quelques lieux, l’ancien droit fut fuivi par rapport à l’abresement de fef; comme 1{ fe voit dans l’ancienne coûtume de Bour- ges, qui porte, que 4t o% aucune perfonne non-noble acquiert de noble, telle perfonne acquérant ne peut tenir l'acquêt fe elle ne fait finance au fergneur de fief, € auffi de Jeigneur en fecgneur jufqu’au roi. Philippe-le-Bel par fon ordonnance dé 1207, dé- rogea en quelque chofe à celle de Philippe-le-Har- di, ayant ordonné que ; quant aux perfonnes non- nobles qui acquerroient des terres en fe/$ ou arriere- fiefs du rot, hors les terres des barons, fans fon con- fentement, s’il n’y avoit pas entre le roi & celui qui avoitfait Pahiénation trois feigneurs intermédiaires, foit que les acquéreurs tinffent à la charge de deffer- vir les fs ou non , ils payeroient au roi la valeur dés fruits de trois années; & que s’il y avoit abrege- ment de ff, ils en payeroient le dédommagement au dire de prudhommes, Le droit de francs-frefs fut auffi levé par Philippe V. dit Ze Long , lequel par fon ordonnance du mois de Mats 1320, renouvella celle de Philippe-le:Bel, ex- cepté qu’au lieu du dire de prudhommes, que les ro- turiers devoient payer en cas d’abregement de fer- vice, 1l ordonna qu'ils payeroient l’eftimation des fruits de quatre années. Charles-le-Bel fit deux ordonnances touchant les francs-frfs. L'une en 1322, portant que les perfonnes non- nobles qui avoient acquis depuis trente ans fans ia permiffion du roi des fefs & arriere-fiefs & des aleux, feroient obligés de mettre ces acquifitions hors de leurs mains fous peine de confifcation, avec dé- fenfe de faire dans la fuite de femblables acquifi- tions. L'autre ordonnance du même prince, qui eft du 18 Juillet 1326, eft conforme à celles de Philippe- le-Bel & de Philippe-le-Long, & qui porte que dans le cas expliqué par ces précédentes ordonnances, les roturiers payeroient feulement la valeur des fruits de deux années, &c qu'ils en payeroïent quatre pour la converfon d’un fæf en roture. | On trouve aufli une déclaration dela même an- née, portant que les roturiers ne payeroient pas de finance pour les biens qu'ils auroient acquis à titre d’emphytéofe, moyennant un certain cens ou pen- fion, pourvû que ce füt fans jurifdiétion , & que la valeur du fef ne fût pas diminuée. Il eft auffi ordonné que les roturiers defcendant d’un pere non-noble & d’une mere noble, ne paye- tont aucune finance pour Les biens qui leur vien- droient par fucceffion de leur mere, ou de fes colla- téraux nobles. Du tems de Philippe-de-Valois, on fit une recher- che du droit de frenc-fef. Ce prince fit le 18 Juin 1328 une ordonnance latine à ce fujet, portant en- tr’autres chofes , que pour les chofes & poffeffions que les perfonnes non-nobles avoient acquifes de- pus trente ans en-çà dans les fefs ou arriere-fiefs du roi, fans le confentement de lui ou de fes devan- ciers , poié qu'il n’y eût pas entre Le roi &c la perfon- ne qui avoit fait cette aliénation , trois feigneurs intermédiares ou plus , ils payeroient pour finance - léflimation des fruits de trois ans. | Que fi aucune perfonne non-noble acquéroit d’u- ne autre perfonne non-noble quelque fef, & que le vendeur l’eût tenu plus anciennement que depuis trente ans, ou qu'au bout de trente ans il eût payé une finance, l’acquéreur ne feroit point contraint de | payer une nouvelle finance, ou de mettre le fefhors de fes mains. | _ Suivant cette même ordonnance, dans le cas où une perfonne non-noble devoit payer quelque fi- nance pour {0n affignation , les commiflares dépu- FIE 705 tés pont demander & lever lefdites fitancess ne de: voient. point aflignet ni mettre la main, fi cen’eft fur les biens acquis, avant que la finance füt accor- dée entre le commiflaire & l'acquéreur. On yoit par un mandement qui fut adrefle à cette occafion aux commiflaires députés pour la recherche | des franes-fiefs, que quand un noble vendoit fon. ff à un non-noble moyennant une fomme d’argenty & en outre une certaine rente ou penfon annuelle, on ne devoit avoir égard qu'au prix payé en argent pour eftimer la finance qui étoit dûe , fans compter: la rente ou pénfon retenue par le vendeur. . Philippe-de-Valois fenouvella fon ordonnance du 6 Juin 1328, le 23 Novembre fuivant ; avec cette différence qu'au lieu de trois années que l’on devoit payer pour Le droit de franc-fref, il en mit quatre par cette derniere ordonnance. Comme les nobles outre leurs fefs poflédoient auf quelquefois des biens roturiers , il expliqua par: un mandement adreflé le: 10 Juin r33r au fénéchal de Beaucaire , que les roturiers qui acquéroïent des nobles de tels biens, auxquels il n’y avoit ni ff, nf hommage, ni juftice attachée, ne devoient pour cette acquifition aucune finance au roi. . Le droit de franc - ff étoit dû par les non-nobles ; quoiqu'ils euffent acquis d’un noble ; comme il pa- roît par des lettres du même prince du 24 Août 1338. Mais ce qui eft encore plus remarquable, c’eft que dutems de Philippe de Valois & de fes prédécefleurs, Paffranchiflement d’un fefoù l’acquittement du droit de franc-fief étoit réputé réel, de maniere qu'un non noble pouvoit, fans payer au roi aucune nouvelle finance, acheter le fef d’un autre non noble qui l’a voit acquis , & qui avoit payé au roi le droït de franc-fef, pour obtenir de Sa Majefté l’abregement & affranchifflement de fervice ; ce qui fut changé environ deux cents ans après, en établiffant que ces fortes d’affranchiffemens ne feroient plus que per- fonnels à chaque poflefleur ,& non réels, L’ordonnance de 1302, donnée par Chaïles IV- dont on a parlé ci-devant eut quelques fuites, non- feulement , mais même fous les reunes fuivans. En conféquence de cette ordonnance , on envoya plu- fieurs commiflaires dans [a fénéchauflée de Beau- caire, pour faire faifir & confifquer au profit du rof : les acquifitions de biens nobles faites depuis 3oans par des roturiers ; il y eut en effet quelques-uns de ces biens faifis : quelques acquéreurs payerent des finances pour conferver leurs acquifitions ; les com- miflaires ne tirerent pourtant pas de-là les finances infinies qu'ils auroient pù, dit-on , en tirer. Ceux dont les acquifitions avoient été fervies , continue- tent depuis d’en percevoir les fruits & revenus. Le duc de Berry & d'Auvergne, & comte de Poi- tiers , fils & lieutenant du roi Jean dans le Langue- doc , donna des lettres pour continuer à exécuter l'ordonnance de 1322 , & l’on fit en conféquence quelques pourfuites qui furent interrompues lorf- qu’il fortit du Languedoc. Mais le maréchal Daudenehami, lieutenant du roi dans ce pays, envoya des commiflaires dans la fé- néchauflée de Beaucaire avec ordre de s'informer de ces nouvelles acquifitions , foit par témoins ow par titres , d’obliger même à cet effet les notaires de donner des copies des aétes qui feroient dans leurs protocoles & dans ceux de leurs prédéceffeurs con- tenant ces fortes d’acquifitions , & après cette infor= mation faite, de faire faifir toutes ces nouvelles acquifitions , d’en faire percevoir tous les revenus , de faire défenfes à ceux qui Les poflédoient deles recevoir , & même de les vendre , de les donner à cens où moyennant quelque redevance annuelle , "& enfin de faire rendre compte à ceux qui ayoient “06 FIE petçu les revenus de cés biéns au préjudice de la fai- fie qui en avoit été faite au nom du roi. Le maréchal Daudeneham donna néanmoins pou: voir à ces commifaires de compofer avec ceux qui avoient fait de telles acquifitions , où qui avoient perçu les fruits de celles qui étoient faifies, & de leur permettre moyennant une finance qu'ils paye- roient, de les garder, fans qu’ils puflent être con- traints à s’en défaifir dans la fuite. Le détail que l’on vient de faire fur l’exécutionde l'ordonnance de 1322, fe trouve dans les lettres du maréchal de Daudeneham du 15 Août 1363. On fuivit toñjours les mêmes principes au fujet des francs-fiefs du tems du roi Jean, comme il paroît pat des lettres de ce prince du mois d'O&ocbre 1354, confirmatives d’autres lettres du 4 Mai 1324, por- tant conceflion aux citoyens 8chabitans de T'oulou- fe, d'acquérir des perfonnes nobles des biens-fonds, pourvû que ces biens fuflent fans juftice, 6 qu'il n’en füt pas dû d'hommage. Louis duc d'Anjou, lieutenant de Charles V. dans le Languedoc , ordonna par des lettres données à Nifmes le 16 Février 1367, qu'il ne feroit point payé de finances par les roturiers pour les acquifitions d’a- leux non nobles , & ne relevant point du roi ni en fief nien arriere-fief, quoique faites de perfonnes no- bles, & que ceux qui n’auroient point payé la f- nance des francs-fiefs , n’y pourroient être contraints par emprifonnement de leur perfonne , mais feule- ment par faifie & vente de leurs biens. Charles V. ordonna depuis en 1370 , que ceux qui auroient refufé de payer le droit de franc-fref, &t auroient fatigué les commiffaires par des tours & des chicanes, feroient contraints de payer une dou- ble finance. De tems immémorial , les bourgeois de Parisont été exemptés des droits de franc - ff, tant pour les biens nobles par eux acquis dans les fefs du toi & dans ceux des feigneurs, que pour les francs-aleux ; on publia à Paris vers l’année 1371 une ordonnance, portant que les non nobles qui avoient acquis de- puis 1324 des biens nobles, en fiflent dans un mois leur déclaration au receveur de Paris, qui mettroit ces biens dans la main du roi jufqu’à ce que ces ac- quéreurs euflent payé finance ; mais Charles V.par des lettres du 9 Août 1371, confirma les bourgeois de Paris dans leur exemption des droits de franc - fef dans toute l’étendue du royaume ; ils ont en con- féquence joui de ce privilège fans aucun trouble, f ce n’eft depuis quelque tems qu’on les a inquiétés à ce fujet , pour raifon de quoi il y a une inflance pen- dante & indécife au confeil , où les prévôt des mar- chands & échevins de la ville de Paris font interve- nus pour foûtenir le droit des bourgeois de Paris, Jlefquels néanmoins font contraints par provifon de payer le droit de franc-fref. Les bourgeois de Paris ne font pas les feuls aux- quels lexemption du droit de franc-fef eût été ac- corde ; ce privilège fut communiqué par Charles V. aux habitans de plufeurs autres villes ; mais tous ne l’eurent pas avec la même étendue. On croit que ce privilége fut accordé aux habi- tans de Montpellier , fuivant des lettres du mois de Juillet 1369 , qui leur permettent d'acheter toutes fortes de biens ; mais l’exemption des francs-fefs n°y eft pas exprimée clairement. Elle fut accordée purement & fimplement aux ha- bitans de la ville de Caylus-de-Bonnette en Langue- doc, par Charles V. en 1370. Ceux de Ville-Franche & Rouergue obtinrent la même exception pour le pañlé , & pour les acquifi- tions qu'ils feroient pendant dix ans Par d’autres lettres de 1370 , les habitans de la ville de Cauflade en Languedoc ; furent déclarés exempts du droit de franc-fef pour les fefs qu'ils ac= querroient , pourvû que ce ne füt pasdes fe/s de chevalerie ou des aleux d’un prix confidérable, Le 19 Juillet de la même année, les habitans de la ville de Milhaud furent déclarés exempts -des Jranès-fiefs pour les biens nobles qu’ils avoient ac quis , &c qu'ils acquerroient dans la fuite, La même chofe fut ordonnée en faveur des habi- tans de Puy-la-Roque, par d’autres lettres des mé- mes mois & an. Les privilèges accordés en la rnême année à la ville de Cahors , portent entre autres chofes que les habitans de cette ville feroient exempts du droit de franc-fef, pour les biens nobles qu'ils acquer- roient dans la fuite, quand même ces biens feroient fitués dans des ff ou arricre-fiefs duroi, & quand même ils les auroient acquis de perfonnes nobles ou eccléfaftiques. Les habitans de Puy-Mirol dans l’Agenoïs , ob- tinrent aufi au mois de Juin de la même année des privilèges , portant qu'ils joïiroient des fefs & au tres droits nobles qu'ils poflédcient depuis 30 ans: qu'ils Joiroient pareillement des fe/5 & autres droits nobles qu'ils pourroient acquerir pendant lefpace de dix ans dans le duché d'Aquitaine , pourvû ce- pendant qu'il n’y eût point de forterefle fur ces fefs m d’arriere-fiefs qui relevaffent de ces frefs. Les habitans de Saint-Antonin obtinrent le même privilège pour dix ans , pourvû qu’il n’y eût pas de Juftice attachée aux fefs qu’ils acheteroient ; on leur remit feulement les droits pour le pañé, Les mêmes conditions furent impofées aux habi- tans de Moiflac. La ville de Fleurence obtint aufli en 1371 pour fes habitans , le privilége d’acquerir pendant cinq ans des ffs nobles & nulitaires | pourvü qu'iln'y eût point de juftice attachée , & à condition qu'ils ne rendroient point hommage de ces fefs. Ce ter- me de cinq ans fut enfiite prorogé jufqu’à huit, Charles V. accorda aufñ en 1371 des lettres aux habitans de Rhodès, portant qu'ils feroient exempts du droit de franc-fef pour les biens nobles rele- vans du roi, qu’ils acquerroient hors du comté de Rouergue , & des terres appartenantes au comte d’Armagnac. Il exempta pareillement des francs-fefs les bour- geois de la Rochelle, mais feulement ceux qui au- roient 500 iv. de rente. | L'exemption fut accordée pour 20 ans en 1369 aux habitans de Lauferte, à condition qu'ils n’aquer- roient point des hommages , des forterefles & des aleux d’un grand prix, Charles VI. exempta des francs-fiefs les habitans de Condom. Ceux de Bourges en furent exemptés en 1438 ; & ceux d'Angers & du Mans en 1483. Plufieurs autres villes obtinrent en divers tems de femblables exemptions. II fut nommé par Charles VI. en 1388 deux com- _miflaires dans chaque prévôté, furle fait des acqui- fitions faites par les gens d’églife & perfonnes non nobles , avec des receveurs fur les lieux ; & depuis par des lettres du 8 Juillet 1394, il confirma ce qui avoit été fait par ces commiflaires touchant les francs-fiefs ; & depuis nos rois ont de tems en tems nommé de femblables commiffaires pour la recher- che des francs-fiefs. | Par des lettres patentes de 1445, Charles VIL or- donna que les thréforiers de France pourroient con- traindre toutes perfonnes non nobles, ou qui ne vi- voient pas noblement, de mettre hors de leurs mains tous les fefs qu’ils poflédoient par fucceffion ou au- trement , fans en avoir fuffifante provifion du roi, FIEF ou de les en laiffer joüir en payant la finance au roi, telle que lefdits thréforiers aviferoient. Louis XI. donna deslettres patentes en forme d’a- mortiflement général pour tous les pays de Norman- die , pour les nouveaux acquêts faits par les gens de main-morte & pour les fefs & biens nobles acquis par les roturiers , portant qu'après 40 ans tous féefs nobles acquis par des roturiers feroient réputés amortis, & que les détenteurs ne feroient contraints d'en vuider leurs mains ni d’en payer finance : ces lettres portoient même , que tous roturiers ayant acquis des héritages nobles en Normandie , étoient anoblis & leur poftérité. François I. par fes lettres du 6 Septembre 1520, défendit à tous roturiers de tenir des héritages féo- daux. Henri IT. enjoignit le 7 Janvier 1547 à toutes per- fonnes non nobles poflédant fefs , d’en fournir dé- claration pour en payer le droit. Charles IX. par des lettres patentes du ÿ Septem- bre 1571 ,; nomma des commuiffaires pour procéder à la liquidation de la finance dûe à caufe des droits de franc - fief & nouveaux acquêts , & ordonna que tous les roturiers & non nobles fourniroient leur déclaration de tous les fefs, atriere-fiefs , héritages, tentes & poñleflions nobles qu’ilstenoient dans cha- que bailliage & fénéchauffée. Henri IV. nomma aufli des commiflaires pour la liquidation des droits de franc - fef, par des lettres du mois d'Avril 1609 , dont Louis XIIL. ordonna l'exécution par d’autres lettres du 20 O&tobre 1613: il ordonna encore en 1633 la levée du droit de franc- fef fur le pié du revenu d’une année, & il en fut fait un traité en forme de bail, à commencer depuis le 21 Février 1609, jufqu’au dernier Décembre 1633. _ La levée du droit de franc-fef fut encore ordonnée au mois de Janvier 1648 , quoiqu'il n’y eût alors que 14 ans depuis la derniere recherche : mais l’e- xécution de cet édit fut furfife jufqu’a la déclaration du 29 Décembre 1652 , qui ordonna la levée du droit pour les 20 années qui avoient couru depuis 1638. On voit donc que letems au bout duquel fe fit la techerche des francs-fiefs, a été réglé différemment ; qu’anciennement elle ne fe faifoitque tousles 3oou 40 ans ; que quelquefois elle s’eft faite plütôt:par exemple, fousFrançois I. elle fe fitpourles 33 années que dura fon regne : fous Charles IX. on la fit au bout de 25 ans, & depuis ce tems, elle fe fait ordi- naïrement tous les 20 ans, au bout duquel tems les roturiers payent pour le droit de franc-fefune année du revenu. | Cet ordre fut obfervé jufquw’en 1655,où par l’édit du mois de Mars de ladite année , on ordonna que le droit de franc-fef, qui jufqu’alors ne s’étoit levé que de 20 ans en 20 ans au moins,& pour la jouiffance de 20 années,une année de revenu des fefs & biens no- bles , feroit dorénavant payée par tous les roturiers poflédant fef fur le pié de la 20° partie d’une année du revenu. Mais fur ce qui fut repréfenté , que les frais du tecouvrement de ces fommes qui fe trouveroient pour la plüpart très-modiques , feroient plus à char- ge aux fujets du roi que le payement du principal, l'éditde 165; futrévoqué par un autre édit du mois de Novembre 1656 , qui ordonna que les roturiers qui poflédoient alors des fefs & biens nobles , fe- roient à l'avenir , eux & leurs fucceffeurs & ayans caufe à perpétuité , exempts du droit de francs-frefs en payant au roi une certaine finance. Depuis par un autre édit du mois de Mars 1672, la même exemption fut accordée aux roturiers qui poflédoient alors des fefs &c biens nobles : en payant FIE TOT au roi trois années de revenu defdits biens ; {avoir une année pour la jouiffance qu'ils avoient eue pour les 20 années commencées en 1652 & finies en1672, & la valeur de deux autres années pour joiür à l’a- venir dudit affranchiflement. On recônnut depuis que le droit de franc-fief étant domanial &c inaliénable, il étoit contraire aux prin- cipes d'avoir accordé un tel affranchifflement à per- pétuité ; c’eft pourquoi le roi par un édit du mois d'Avril 1692 , le reftraignità la vie de ceux qui pof- fédoient alors des fefs , & qui avoient financé en conféquence de l’édit de 1672. La recherche des francs-fefs fut ordonnée par une déclaration du 9 Mars 1700, fur tous ceux dont l’a£ franchiffement étoit expiré depuis 1692 jufqu’au pre: muier Janvier 1700. Par deux autres édits des mois de Mai 1708 , & Septembre 1710, Louis XIV.ordonna la recherche des francs-fefs fur tous ceux qui s’en trouveroient redevables , foit par l'expiration des 20 années d’af- franchiflement , foit par acquifition , donation ou autre mutation quelconque : ces droits furent mis en partie pour 7 années, &cenfuite affermés, Il fut établien 1633 une chambre fouveraine pour connoitre des droits de franc - fief dûs dans toute Pétendue du parlement de Paris depuis le 21 Février 1609 jufqu’au dernier Décembre 1633 : la déclara- tion du 29 Décembre 1652 établit une femblable chambre , qui fubfiftoit encore en 1660 : il en avoit auffi été établi quelques autres , & notamment une en Bourgogne , qui fut fupprimée par une déclara tion du mois d’Août 1669. Préfentement les conteftations qui s’élevent fur cette matiere , font portées devantles intendans, & par appel au confeil. F’oyez Z gloff. de Lauriere au mot francs-fefs ; le traité des amortiflemens & francs- fefs de M.le Maître ; Le sraité des francs-fefs de Bac- quet ; Le rraité des amortiffemens du fieur Jarry. FIEF FURCAL, feudum furcale, eft celui qui a droit de haute juftice , & conféquemment d’avoir des fourches patibulaires qui en font le figne public ex- térieur. (4) FIEF FUTUR , feudum futurum , feu de futuro , eft celui que le feigneur dominant accorde à quelqu'un pour en être invefhi feulement après la mort du pof- fefleur aûuel. (4) FIEF DE GARDE, 04 ANNAL, feudum guardie , c'étoit lorfque la garde d’un château ou d’une mai- fon étoit confiée à quelqu'un pour un an, moyen- nant une récompenfe annuelle, promife à titre de fief. Voyez Fier DE GUET & GARDE. (4) Fier, dit FEUDUM GASTALDIÆ SEU GUAS- TALDIÆ, étoit lorfqu’un feigneur donnoit à titre de fref à quelqu'un la charge d’intendant ou agent de fa maifon, ou de quelqu’une de fes terres. Voyez Le gloffaire de Ducange , au mot ga/laldus. FiEFs GENTILS , en Bretagne font les baronies & chevaleries & autres fefs de dignité encore plus élevée, lefquels fe gouvernent & fe font gouvernés par les auteurs des co-partageans, felon l’affife du comte Geoffroy III. fils d'Henri IL. roi d'Angleterre, qui devint duc de Bretagne par le mariage de Conf- tance fille de Conan le petit, duc de Bretagne. On diftingue ces fiefs gentils des autres fefs qui ne fe oou- vernent pas {elon l’affife dans les premiers ; les pui- nés mâles n’ont leur tiers qu’en bienfait , c’eft-à-dire à viage, comme en Anjou & au Maine. (4) FIEF GRAND, féndum magnum G quaternatum , n’eft pas toûjours celui qui a le plus d’étendue, mais celui qui eft le plus qualifié ; c’eit un fref royal ou de dignité. Voyez le gloffaire de Lauriere , au mot fefer chef. (Æ) Ne - FIEF appellé GUASTALDIÆ FEUDUM, VOYEZ Chr devant F1EF dit FEUDUM GASTALDIZÆ. . 708 FIE FIEF D’HABITATIONeft celui qui n’eft concedé que pour le vaflal pérfonnel. Il en.eft parlé dans les coûtumes des fiefs Lib. I, rev, & par Razius, parr. ÎII. de feudis. (4) | FIEF DE HAUBERT 0% DE HAUBERGEON , feudum loricæ', v'eft un ff de chevalier, c’eft-A-dite dont le poflefleur étoit obligé à 2x ans de fe faire armer che- valer , & de fervir avec le hauberr , haubergeon ou çotte de maille, qui étoit une efpece d’armure dont il n’y avoit que les chevaliers qui puffent fe fervir. , Ce fief eft le même que les Anglois appellent fez- dum militare. . Quelques-uns écrivent fef de haubert, comme qui droit ff de haut baron ; car dans tous les anciens li- vtes de pratique, her 8c baron, haubert & haut-baron, font termes fynonymes. | | - Comme le Hauberr ou feigneur du fef de haubert etoit obligé de fervir le roi avec armes pleines, c’eft-à- dire armé detoutes pieces, & conféquemment avec l’arme du corps, qui étoit la cotte de maille ; cette armure fut appellée haubers ou haubergeon , & par fucceflion de tems le fef de haubert a été pris pour toute efpece de fef dont le feisneur eft tenu de fer- vir le roi avec le haubert ou haubergeon , ce qui a fait croire à quelques-uns que le fef de haubert étoit ainfi appellé à caufe du haubergeoz, comme le dit Cujas fur less. jx. du liv. I. des fiefs quoique ce foit au con- traire le terme de haubergeon qui vienne de haubert, &t que haubergeon füt l'arme du kauberr, Cette erreur eft cependant caufe aujourd’hui qu’en la coûtume reformée de Normandie, fief de haubert eft moins que Paronie. Les art. 153. & 156. taxent le relief de baronie à 100 liv. & celui du fref de haubert entier, à 15 liv. feulement. Bouteiller , Ragueau & Charondas fuppofent que le fief de haubert releve toùjours immédiatement du roi, ce qui eft une erreur. Terrien qui favoit très-bien l’ufage de fon pays , remarque fur le chap. y. du liv. W. p. 171. de Pédition de 1654, qu'un ff de haubert peut être tenu de baronié , la baronie de la comté, la comté de la duché, & la duché du roi. Suivant l’ancienne & la nouvelle coûtume de Nor- mandie , le fef de haubers eft un plein fef ou fief en- tier ; le poflefleur le deffert par pleines armes qu'il doit porter au commandement du roi. Ce fervice fe fait par le cheval, le haubert, l’écu, l'épée & le heaume; ce ff ne peut être partagé entre mâles, mais quand 1l n’y a que des filles pour héritieres,, il peut être divifé jufqu’en huit parties, chacune def- quelles parties peut avoir droit de court & ufage, jurifdiétion & gage plége ; & chacune de ces huit portions eft appellée membre de haubert. Maïs fi le fef eft divifé en plus de huit parts, en ce cas chaque portion eft tenue féparément comme fef vilain , & dans ce cas aucune de ces portions n’a court ni ufa- ge. Ces droits reviennent au feigneur fupérieur dont le ff étoit tenu. Il en eft de même lorfqu'une des huitièmes eft fubdivifée en plufieurs portions, cha- cune perd fa court & ufage. Voyez Couvel, 6. LT, Inflit. tit. ny. See Loyfeau, des feigneur, ch. vij, n. 45. & fuiv. (A) | FIEF HÉRÉDITAIRE, eft celui qui pafle aux héri- tiers du vañal, à la différence des fefs qui n’étoient anciennement concédés que pour la vie du vafal. Vers la fin de la feconderace de nos rois, & au com- mencement de la troifieme, les fefs devinrent héré- ditatres. Voyez ce qui ef dit ci-devant des fefs en gé- néral. (4) FIEF HÉRÉDITAIRE , eft auf celui qui non-feu- lement fe tranfmet par fucceffion, mais quine peut être recueilli à la mort du dernier poffeffeur que par une perfonne qui foit véritablement fon héritiere , «de maniere qu'en renonçant à la fuccefñon , elle ne FITE | puifleplusle vendre. Lafuccefiondecesfefseft pour4 tant reglée parle droit féodal, en'ce quelles femel- les n’y concourentipoint avec lesmäâles, du moins dansdes pays où ce. droit eft obfervé, commen Al: lemagne ; mais du reftele fefhérédisaire eftregié par le droit civil, en ce que l’on y fuccede fuivant le droit civil, z/timo poffeflori, de même que dans la fucceffion des alodes, … Le fief héréditaire eft oppofé au fief ex paito & proz videntié, ou fef propre. Voyez ci-après FIEF EX PA4C- TO 6: FIEF PROPRE. TU . Les feudiftes diftinguent quatre fortes de fefs hére. ditaires, La premiere eft celle -où le vaffal eft invefti, de maniere que l’inveftiture lui donne le pouvoir non: feulement de tranfmettre le fefpar fucceffion à tou tes fortes d’héritiers fansexception, mais fiême d’en difpofer par aétes entre-vifs ou de dérniere volonté. Un tel fef, dit Struvius, eft moinsun ff qu'un alo: de ; &il eftconfidéré comme tel; c’eft ce que les feu- diftés appellent un fef purement héréditaire. Les fem- mes y peuvent fuccéder à défaut de mâles, & en ce fens , on peut auffi l’appeller fef féminin héréditaire : mas fiivant le droit féodal, les femmes n’y concou- rent jamais avec les mâles. La feconde efpece de fef héréditaire eft celle où le: fef eft concédé par l’invefliture, pour être tenu pan le vaffal & fes héritiers en ff héréditaire ;& dans ce cas, il n’y a que les héritiers mâles du vaflal qui y fuccedent , c’eft pourquoi on l’appelle anffi fef af. culin héréditaire : dans tout le refte, ce fif.conferve toûjouts la vraie nature de fef, enforte que le vaflal n’en fauroit difpofer fans le confentement du fei- gneur , 8 qu'il n’y a que les mâles qui y puiflent fuc+ céder. | La troifieme efpece de ff héréditaire eft celle où linveftiture permet au vaflal de tränfmettre le fef parfucceffion à fes héritiers quelconques. Dans cette troifieme efpece quelques auteurs penfent que la fem- me eft admife à la fucceffion du fef, d’autres penfent le contraire : mais ceux qui tiennent que la femme a droit d’y fuccéder , conviennent qu’elle n’y fuccede jamais concurremment avec les mâles, mais feule- ment à défaut de mâles. Enfin la quatrieme efpece de ff héréditaire eft celle où l’inveftiture porte expreflément cette clau- fe extraordinaire , que les femmes feront admifes à la fuccefion du fef, concurremment avec les mâles, comme dans la fucceffion des alodes ; il eft conftant que c’eft-là le feul cas où elles ne font point exclufes par les mâles en parité de degré , & où elles recueil- lent le fef héréditaire conjointement avec eux; telles font les divifons des frefs héréditaires | fuivant le droit féodal. Voyez Struvius fyrragm. Juris feud. & Schil- ter ez fes notes, ibid. Rofenthal, c. ÿ. concluf. 26. Gail. 46. IT. obfervar, cliy. n. ul, Suivant l’état préfent de notre droit coûitumier , par rapport aux ffs, les femelles y concourent avec les mâles en parité de degré dans les fucceffions di- rectes, mais en fucceffon collatérale le mâle exclud la femelle en parité de degré. (4) FIEF D'HONNEUR 0% FIEF LIBRE, féudum honora- um , ft celui qui ne confifte que dans la mouvance & la foi & hommage , fans aucun profit pécuniaire pour le feigneur dominant. | Dans les provinces de Lyonnoïs, Forêt, Beaujo- lois, Maconnois, Auvergne, les #ef$ font nobles, mais fimplement fefs d'honneur ; ils ne produifent au- cun profit pour quelque mutation que ce foit, en di- rete ou collatérale, ni même en cas de vente. C’eft pourquoi l’on eft peu exaét à y faire pafler des aveux. Voyez les abfervar. de M. Bretonnier fur Henrys, com. I, Liv. III. chap. ui, quefl. 38. Ils font aufi de même qualité dans les deux Bour- gognes ÿôgnes 87 dans l’Armagnac, ainf que l’attefte Sal- vaing en fon £r. de l'ufage des fiefs , ch. 1j. Il en eft de même dans le Bugei, fuivant Faber en oz code de Jure emphit, defin. xljv. | Il y a quelques coûtumes qui en difpofent de mê- me. Celle de Metz, arr 1. des fefs, dit que les fes au pays meflin font patrimoniaux &c héréditaires, & que le vañfal ne doit pour hommage quela bouche & les mains, s’il n’appert par l’inveftiture que le feffoit d'autre condition. La coûtume de Thionville, arr, 3- des fiefs , dit la même chofe. (4) FIEF IMMÉDIAT , eft celui qui releve diretement d’un feigneur, à la différence du ff médiat ou fief fubalterne qui releve direétement de fon vaflal, & quiforme à légard du feigneur fuzerain, ce que l’on appelle un arriere-fef. Voyez ARRIERE-FIEF. (4) FIEF IMPÉRIAL, en Allemagne, eft celui qui re- leve immédiatement de l’empereur, à caufe de fa di- gnité impériale. (4) FIEF IMPROPRE, c’eft un fefroturier & non no- ble. Voyez ci-après FIEF PROPRE. (4) FIEF INCORPOREL ox FIEF EN L'AIR, eft un fief impropre qui ne confifte qu’en mouvances & cenfi. ves , Ou en mouvances feules ou en cenfives feules, & plus ordinairement en cenfives qu’en mouvances; il eftoppoté au fef corporel. Voyez ci-devant FIEF EN L'AIR & FIEF CORPOREL. (4) FIEF INFÉRIEUR, s'entend de tout ff qui releve d’un autre médiatement ou immédiatement. Il eft Op- pofé à fef fupérieur. Le fef fervant eft un fef inférieur par rapport au fief dominant. Un même fef peut être inférieur par rapport à un autre , & fupérieur pat rapport à un arriere-fef. Pour favoir quand le fef inférieur eft confondu avec le ff fupérieur lorfqu’ils font tous deux en la même man, Voyez ci devant au mot FIEF, & ci-après RÉUNION, FIEF DOMINANT 6 FIEF SERVANT.( A) FIEF INFINI, Voyez ci-devant FIEF FINI. FIEF JURABLE,, feudum jurabile, eft chez les ultra. montains celui pour lequel le vaffal doit à fon fei- gneur le ferment de fidélité. Jacobinus de fan@o Geor- g10, de feudis y°. in feudum n°. 20. dit: Decima divifio eff quia feudim quoddam eff jurabile, quoddam non Ju» rabile : feudum jurabile ef? pro quo juratur Jfidelitas do- * zIN0 ; NON jurabile, quando conceditur eo pailo ut fide. Zitas non juretur. cap. j.. null, in citulo, Per quos fat 2nveffitura 1n lib. feud, Voyez Wenher p. 3 32. col, 1. in fine, & Lucium $. Zb, I. placirorum tir. HSE. 201. Dans la coûtume de Bar, le fefjurable & renda- ble étoit celui que le vaflal étoit obligé de livrer à fonfeigneur. Coût. de Bar , arc, 1, Pa OYeZ ci-après FIEF RENDABLE. (4) FIEF LAICAL, eft celui quine releve d’ancun ec- cléfiaftique , mais eft dépendant d’un fief purement temporel. (4) FIEF LEVANT 6 CHEANT > VOyez FIEF CHEANT © FIEF REVANCHABLE, FIEF LIBRE oz FIEF D'HONNEUR » Jeudum liberum Jeu honoratum, il en eft parlé dans plufieurs ancien- nes chartes, entr’autres dans la charte de commune d'Abbeville, c. xxjv. Voyez le gloff. de Ducange, au mOt féudum liberum, & ci-devant FLEF D'HONNEUR. (4) FIEF LIEGE, eft la même chofe que ff lige. Il eft ainfi appellé dans quelques coûtumes, comme dans celle de Hainaut, c, xxjx, & dans celle de Cam- brai, tie, j. arr. lv), xl. xx. L D. Voyez Fire LIGE , HOMME € FEMME LIGE, LIGE For & Hom- MAGE LIGE, (4) FIEF LIGE, eft celui pour lequel le vaflal en fai- {ant la foi & hommage à {On feigneur dominant , pro- Tome VI, | Hit 506 et de le fervir envers & contre tous, & ÿ obligé tous fes biens. Le pofeffeur d’un ff lige eft appellé vaffal lige, Où homme lige de {on feigneur ; l’hommage qu'il lui rendeft appellé kommage lige, & l'obligation fpéciale quiattache ce vaflal à fon feigneur , eft appellée dans les anciens titres ligence ou ligeité, Le fief lige eft oppolé au fef fimple. | La différence que les feudiftes françois font entre ces deuxfortes de fefs, eftque l'hommage fimple que le vaflal vend pour un fef fimple, n’eft nullement perfonnel., mais purement réel : il n’eft rendu que pour raïfon du fonds érigé en ff, auquel fonds il eft tellement attaché, que dès que le vaflal le quitte, ce qu'il peut faire en tont téms, eram irvito domino , il demeure dès cet inftant libre de l'obligation qu'il avoit contraétée, laquelle pafle avec le fonds à celui qui y fuccede. L'hommage ge au contraire magis coh&ret perfonæ guam patrimontio ; & quoique la ligence affeéte lé fonds, qui par la premiere éredion ya été aflujetti, le poffeffeur qui s’en eft fait inveftir, fe charge per- fonnellement du devoir de vaflal ligé; 1l y affeété tous fes autres biens fans jamais pouvoir s’en affran- chir, non pas même en quittant le fef /ige, ne pou- Vant jamais le faire fans le confentement de fon feis gneur, 4 Il y a auffi cela de païticulier dans l'hommage que l’on rend pour un ff. lige, que cet hommage , à cha- que fois qu’il eft rendu, doit être qualifié d’Aonmage lige; c’eft pourquoi à chaque nouvelle reception en foi, le vaffal devoit en figne de fujétion mettre fes mains jointes en celles de fon feigneur, & enfuite être admis par lui au baifer. Les auteurs ne font pas trop d’accord fur l’étymo- logie de ce mot Zige. , Les uns ont écrit que le fef étoit appellé Zge a li- gando, parce que le vaflal étoit lié à fon feigneur féodal , lui jurant & promettant une fidélité toute fn. gulere. Jafon, de ufib. fèud. n. 108. D’autres tels que Matheus, fur Ze décif, 309. de Guypape, ont avancé que le fef lige avoit pris ce nom de l'effet & de la fuite des obligations fous lef- quelles il avoit été originairement donné > én ce que ceux quis’en faifoient inveftir, étoient foûmis & en gagés à des conditions plus onéreufes que celles qui étoient attachées aux fefs fimples. ; D’autres encore ont tenu que ce terme lige venoit de la forme particuliere qui fe rendoit pour ces fortes de fefs, favoir, que les pouces du vaflal étoient liés &t fes mains jointes entre celles de fon feigneur ; opi: nion que Ragueau, au mot hommage lige, traite avec raifon de ridicule, Quelques-uns ont foûtenu que le mot lige tiroit {on origine delaligne & confédération que quelques perfonnes font enfemble, en ce que les feigneurs & les vaffaux fe liguoient & confédéroient par ferment les uns aux autres ; & fur ce fondement les feudiftes allemands prétendent que les fefs liges ontcommencé en ltalie , & qu’ils ont été ainf appellés 4 Ziga, mot italien, qui felon eux fipnifie Zone ; Opimon que Dar- gentré paroît avoir adoptée après Albert Krantz= mais Brodeau fur Paris, arr. /xiij. dit que Zga eft un ancien mot françois, qui fignifie co//igationem, pacemt € conféderationem, une ligue. | AL Mais il eft conftant que Zga n’eft niitalien ni fran- çois ; une ligue en italien, c’eft /ega, D'ailleurs l’ori- gine des fefs liges ne peut venir d'Italie, puifque les conftitutions napolitaines, quoique poftérieures en partie aux ufages des ff, ne parlent point de fefs Liges. 4 Le mot Zgz n’eft pasnon plus gaulois ; car les frefs liges n'ayant commencé à être connus que bien avant dans le x, fiecle, comme on le prouveta dans un mas KXXxx 710 FIE ment, il eft aifé de connoitre par les anteurs de ce tems, que leur langage n’étoit point thiois. | Quelques-uns ont encore voulu tirer le mot Zge du grec éudAoyos, à quoi il n’y a aucune apparence, la langue greque n'étant pas alors aflez familiere pour éntirer cette dénomination. S. Antonin, fous l'an 1224, écrivant la maniere dontS. Jean d’Angely fe réndit à Louis VIIT. dit que l'abbé & les bourgeois rendirént la ville au rot, ez /- gam exhibentes fidelitatem, Le jéfuite Maturus expli- que ce mot ga par obfequium: mais S. Antonin qui vivoit jufqw’au milieu du x. fiecle, n’a parlé quefur la foi de Vincent de Beauvais, en fon miroir hiftorial ou fous l’an 1224; il dit en parlant du même fait , /e- gitimam facientes ei fidelisatem ; ainfi ou le texte a été RAS . 1,1 corrompu, ou c’eit une abréviation qui a été mal - rendue, Parmi tant d'opinions controverfées, la premiere qui fait venir le mot lige a ligando, paroit la plus na- turelle. Pour ce qui eft de l’origine des fefs liges, ou du moins du tems où ilsont commencé à être qualifiés du furnom de Ziges, l’époque n’en remonte guere plus haut que dans le xi. fiecle , vers l'an 1130. En effet , il n’en eft fait aucune mention dans les monumens qui nous reftent du tems des deux pre- mieres races de nos rois , tels que la loi falique, les formules de Marculphe , & celles des auteurs ano- nymes ; ni dans les ouvrages de Gregoire de Tours, Frédégaire, Nitard, Thegan, Frodoard , Aymoin, Flodoard ; ni même dans les capitulaires de Charle- magne , de Louis lé Débonnaire & de Charles le Chauve, quoique les ufages des fes, tant fimples que de dignité, qui fe pratiquoient alors en France, & les devoirs réciproques des feigneurs &r des vaf- faux, y foient aflez détaillés, On ne voit même point que les termes de Zge, ligeance & ligeité, fuflent encore ufités fous les qua- tre premiers rois de la troifieme race, dont le der- nier, qui fut Philippe I. mourut en 1108. Fulbert, chancelier de France, élevé à l'évêché de Chartres en 1007, & que l’on a regardé comme un homme confommé dans la jurifprudence féodale de fon fiecle , ne parle point des Jefs liges dans fes épitres, quoique dans plufieurs 1l traite des ff, & notamment dans la 101°. qui comprend én abregé les devoirs réciproques du vaflal & du feigneur. Les fragmens des auteurs qui ont écrit fous Henri I. & fous Philippe I. n’en difent pas davantage, non plus que Yves évêque de Chartres fous Phihppe I. & fous Louis-le-Gros. Sugger, abbé de Saint-Denis, n’en ditrien dans la vie de Louis-le-Gros , n1 dans les mémoires qu'ila laïifés des chofes les plus :mpor- tantes qui fe font paflées de fon tems, quoiqu'il y donne plufieurs éclairciflemens fur les ufages des ff. | On trouve danslelivre des fefs un chapitre exprès de feudo ligio ; mais il eft effentiel d’obferver que ce chapitre n’eft point de Gerard Le Noir, mi de Oerrus de Horto. Ces deux jurifconfultes, qui vivoient vers le milieu du xÿ. fiecle, ne font auteurs que des trois premiers livres des fes, dans lefquelsil n’eft rien dit du ff lige. Le chapitre dont on vient de parler, fait partie du uatrieme livre, dans lequel on a ramaflé les écrits de plufieurs feudiftes anonymes ; &c par les conftitu- tions qui y font citées de Frédéric I. dit Barberouffe, qui tint l’Empire jufqu’en 1190, il paroït que ces au- teurs ne peuvent être au plütôt que de la fin du xij, fiecle, où du commencement du x]. aufh Dumolin fur l’ancienne coûtume de Paris, $. 1. gl 5. 2. 12. dit que ce mot Zige eft barbarius feudos qu’il étoit en- core inconnu du tems des livres des féefs, &c qu'il fut enfuire introduit pour exprimer qu'on fe rendoit homme d’un autre, FIE Il y a lieu de croire que la dénomination & les de- voirs du ff lige furent mtroduits d’abord en France; que ce fut fous le regne de Louis VI. dit £-Gros, le quel regna depuis l’an 1108 jufqu’en 1137. Ce prince fut obligé de réprimer linfolence des principaux vaflaux de la couronne , lefquels refu- foient abfolument de lui faire hommage de leurs terres; où s'ils lui prêtorent ferment de fidélité , ils fe mettoient peu en peine de l’enfraindre , s'imagi- nant être libres de s’en dépaïtir, felon que leurs in- térêts particuliers ou ceux de leurs alliés fembloient le demander. Ce fut fans doute le motif qui porta Louis-le-Gros à revêtir l'hommage de folennités plus rigoureufes que celles qui ayoient été pratiquées jufqu’alors, & d'obliger fes vaflaux de fe reconnoître fes hommes liges; d’où leurs fefs furent appellés fefs Ziges, pour les diftinguer des fefs fmples fubordonnés à ceux-ci, dont aucun n’avoit encore la qualité ni Les attributs de fief lige. | C’eft auffi probablement ce que Pabbé Sugger a eu. en vüe, lorfqu’il a parié des précautions fingulieres que Louis-le-Gros prit pour s’aflürer de la fidéhté de Foulques , comte d'Anjou: l’hommage fut fuivi de fermens réitérés, on donna au roi plufieurs ôtages ; & dans l’hommage lige fait en 1190 par Thibaut, comte de Champagne, à Philippe-Augufte, le fer- ment fut fait fur l’hoftie &c fur l’'évangile : plufeurs perlonnes qualifiées fe rendirent aufi avec ferment, cautions de la fidélité du vaffal, jufqu’à promettre de fe rendre prifonniers dans les lieux fpécifiés, aw cas que dans le tems convenu le vaflal n’amendât pas fon manque de fidélité, & d’y garder prifon juf- qu’à ce qu'il l’eût réparé. Enfin le comte fe foûmit à la puiffance eccléfiaftique , afin que fa terre pûüt être mile en interdit fi-tôt que le délai feroit expiré, s’il n’avoit amende fa faute. Cette formule d'hommage étant toute nouvelle ; &c beaucoup plus onéreufe que la formule ordinaire, 11 fallut un nom.particulier pour la défigner ; on l’ap- pella hommage lige. | Le continuateur d’Aymoin, dont l'ouvrage fut parachevé en 1165, rapporte linveftiture lige du duché de Normandie , accordée par Louis VII. dit Ze Jeune, à Henri fils de Geoffroi comte d’Anjou; ce qui arriva vers l’an 1160. Il dit en propres termes, G eum pro eadem terra in hominem ligium accepit, L’ufage des fes Liges fut introduit à-peu près dans le même tems dans le patrimoine du faint fiége, en Angleterre & en Ecofle, & dans les autres fouverai- netés qui avoient le plus de liaifons avec la France. On voit pour l'Italie , que l’anti-pape Pierre de Léon étant mort en 1138, fes freres reprirent d’In- nocent I. les {fs qu'ils tenotent de l’églife, & lui en firent l’hommage lige, & faéfi homines ejus ligii Juraverunt ei ligiam fidelitatem : c’eft ainf que faint Bérnard le rapporte dans fon épitre 320. adreflée à Geoffroi lors prieur de Clairvaux. Le même pape Innocent II. ayant en 1139 invefti le comte Roger du royaume de Sicile & autres ter- res, la charte d’inveftiture fait mention que Roger lui ft l'hommage lige, quinobis & fuccefforibus noffris ligium homagium fecerint ; termes qui ne fe trouvent point dans l’inveftiture des mêmes terres, accordée en 1130: ce qui fuppofe que l’ufage dés féfs Ziges n’a- voit été introduit en Italie qu'entre l’année 1130 & Pannée 1137. On trouve auf dans le feptieme tome des conci- les, part. IL, la fentence d’excommunication fulmi- née l’an 1245 par Innocent VI. au concile de Lyon contre l’empereur Frédéric fecond qui fait mention exprefle d'hommage lige. Une partie de cette fen- tence eft rapportée dans le fexte, Un des crimes dont Frédéric étoit prévenu, étoit qu’en perfécutant VEglife il avoit violé le ferment folennel dont il s’é- toit lié envers elle, loffqu’en recevant du pape In- nocent III. linvefliture du royaume de Sicile, il s’étoit reconnu vafal lige du faint fiége. ME Les fiefs liges {ont de deux fortes ; lesuns primitifs immédiats ; les autres fubordinés , médiats & fubalternes, | | Les prenuérs, qui font les plus anciens, relevent nuement du roi; les autres relevent des vaflaux de. la couronne ou autres feignéurs particuliers , lef- quels eutent auf l'ambition d’avoir des vañaux /- ges, cé qui n'appartenoit pourtant répulierement qu'aux fouverains : aufli les fiefs liges médiats & fubalternes ne furent-ils point d’abord recûs en Ita- ke, & c’eft fans doute la raifon pour laquelle les au- teurs des livres des fefs n’en ont point parlé. L'origine des fes liges, médiats & fubordinés, n'eft que de la fin du regne de Louis VII. dit Ze Jeune, & voici à quelle occafon l’ufage en fut introduit, Henri Il. toi d'Angleterre, prétendoit, du chef d’E- léonor de Guienne fa femme , que le comté de Tou- loufe Ru appartenoit. Après de longues guerres, Raymond , comte de Touloufe, s'accorda avec Henri , ro1 d'Angleterre, en fe rendant fon valfal lige pour le duché de Guienne. Louis-le-Jeune ne put fupporter qu'un duc de Guienne eût des vaflaux i- ges, ce qu'il favoit n’appartenir qu'aux fouverains. On apprend ces faits par l’épérre 133. de Pierre de Blois. Le tempérament que l’on trouva pour termi- ner ce différend, fut que le comte de Touloufe de meureroit vaffal lige du roi d'Angleterre, comme duc de Guienne, fauf & excepté néanmoins l'hommage Lige qu'il devoit au roi de France. Voyez Catel, Aïe, de Touloufe , liv. IT. ch. y. Deux chofes font requifes, fuivant Dumolin, pour donner à un ff le caraétere de ff dige; favoir que dans la premiere inveftiture le fef foit qualifié 1ige ; 6e que le ferment de fidélité foit fait au feigneur, pour le fervir envers & contre tous, fans exception d'aucune perfonne. Cette définition de Dumolin n’eft pourtant pas bien exacte ; car les fefs tenus immédiatement de la éouronne , n'ont pas été d’abord qualifiés de: f£efs G- ges par les premiers aëtes d’inveftiture ; & à l'égard des fiefs liges médiats & fubordinés , le va{fal ne doit pas y promettre au feigneur de le fervir contre tous ans exception, le fouverain doit toüjours être ex- cepté. | | L'obligation perfonnelle du vafal de fervir {on feigneur envers & contre tous, ne fut pas l'effet de Thommage Upe à l’égard des fefs ligesimmédiats: car les vañlauxde la couronne avoient toîjours été obli- gés racitement à {ervir leur fouverain, avant que la formule de l'hommage Zge fût introduite; & les forma lités ajoûtées à cer hommage, quile firent qualifier de lige, ne furent que des précautions établies pour af fürer &c faciliter l'exécution de-cette obligation per- fonnelle, tant fur la perfonne du vafal & fur fon feef,.que fur tous fes autres biens. | Pour ce qui eft des fefs liges médiats & fubordi- nés , auxquels l'obligation perfonnelle de fervir le {eigneur n'étoit pas de droit attachée, on eut foin de l’exprimer dans les premieres inveftitures ; s’en trouve des exemples dans le livre des fefs de l’évê- ché de Langres, dans plufeurs conceflions de la fin du xii. fiecle : mais les hommages fubféquens à la premiere inveftiture, ne reprenoient point nommé- ment l’obligation perfonnelle de tous biens, étant fufffamment fous-entendue par la qualité de ff lige ou d'hommage lige. F5 Les obligations de l'hommage fige furent dans la fuite des tems trouvées fionéreufes, que nombre de _Vaflaux Uges firent tous leurs efforts pour fe fouftrajre à ces obligations. Tore VT, FIE 712 C’eft ainfi que malgré lés hommages rés rendus pôurle duché de Bretagne par Arthus L. à Philippe Augufte, au mois de Juillet 1202 ; par Pierre. de Dreux, dit Marclerc, tant aü même Philippe-Au- gufte , le dimanche avant la Chandeleur 1212, qu'au roi S: Louis par le traité d'Angers de lan 123% ; & parJean, dit /e Roux, aumêmeroiS, Louis en 1 230} leurs fuccefileurs au duché de’Breta gne-prétendirent ne devoir que l'hommage fimple, &c ne‘purent ja- maus étreréduits à s’avouer kormmes C Vaflaux ligesie nos rois fe contenterent que l'hommage fût rendu tel qu'il avoit été fait par(les \précédens dues -de: Bre- tagne, Les chanceliers de France firent des protefta- tions à ce fwjet ; les ducs énfirent de leur part dans le même aûte, comme on voit dans les fois & homz= mages des ducs de Bretagne ; de 1366, 1387 5 14033 1445 &t 1458. pl ss Les hiftoriens ont auf remarqué gwen 1329 EdouardTI. roi d'Angleterre, s'étant rendu en Frart- ce pour porter l'hommage qu'il devoit à Philippe de Valois pour le duché de Guieñne & comté de Pon- thieu , refufa de le faire en qualité d’komme lige, allé- guant qu'il ne devoit pas s’obliger plus. étroitement que fes prédécefleurs. On reçut pour lors {on hom- mage conçü en termes généraux, avec ferment qu'il feroit dans là fuite la foi en la même forme que {es prédéceffeurs. Etant enfuite retourné en Angle: terre, & ayant été informé qu'il devoit l'hommage lige, l'en donna fes lettres, datées du 30 Mars 1 337) par lefquelles il s’avoüoit: Aommte lige du roi de Fran- ce, en qualité de dué de Guienne, de pair de France, & de comte de Ponthieu, RENTE Le jurifconfulte Jafon ,. qui enfeignoit à Padoue en 1486, dans fon traité fuper ufib. feudor. & Sain-- xon fur l’ancienne coûtume de Tours , remarquent tous deux n'avoir trouvé dans tout le droit. qu’un feul texte touchant l'hommage ge; favoir en la élé- mentine, appellée vuloairement pafloralis, qui eft une fentence du pape Clément V. rendue enr 313% par laquelle il caffa & annulla le jugement que Henri VIT. empereur, avoit prononcé contre Robert ; TOÏ de Sicile, fondée entr’autres moyens fur ce que Ro- bert étant vaflal Zige de l’'Eglife & du faint fiège, à caufe du royaume de Sicile, Henri n’avoit pû s’at- tribuer de jurifdi&ion fur lui, comme s’ileût été vaf {al de l’Empire, ni conféquemment le priver, come me 1l avoit fait, de fon royaume. loc, Les livres des fefs, ajoûtés au corps.de Droit, contiennent auf, comme on l’a déjà obfervé , un chapitre de feudo ligio. | Il faut encore joindre à ces textes, ceux des coù- tumes qui parlent de ef liges, d'hommage lige, & de vaflaux liges. Il y avoit autrefois deux fortes d'hommage Zige ; lun où le vaflal promettoit de fervir {on feigneut envers & contre tous, fans exception même du fou- verain, comme l’a remarqué Cujas, 6, II. feudor. tir, y. & Lib, IP. sit. xxx. xe. G xO%,. &t fuivant l'article 50. des établiffemens de France, publiés par Chantereau ; & en fon origine des fiefs, p.164 6 17; L'autre forte d'hommage Zseétoit celui où le vaflal, en s’obligeant de fervir fon feigneur contre tous, en exceptoit les autres feigneurs dont il étoit déjà-hom- me Zige. Il Y en a plufieurs exemples dans les preuves. des hifloires des grandes maifons. Voyez auffi Chante- reau, des fiefs, p.15, & 16, Les guerres privées que fe faifoient autrefois les feigneursentr’eux, dont quelques-uns Ofoient même faire la guerre à leur fouverain , donnerent lieu aux arriere-ftefs liges &c aux hommages lies dûs à d’au- tres feigneurs qu’au roi; mais les guerres privées ayant été peu-à-peu abolies, l'hommage /pe ne peut régulierement être dû qu’au roi: quand il et rendu aux ducs &c autres grands feigneuts, on doit EXCep« ter le roi. | 0 RER 712 F IE La foi & hommage dûe pour les fef Zigexs doit toüjours être faite par le vaflal en perfonne | de quelque condition qu'il foit, mème dans les coûtu- mes où le vañlal fimple eft admis à faire la foi par procureur comme dans celle de Peronne, Montdi- dier & Roye, arr. 53. Voyez les traites des fiefs , © Les commentateurs des coftumes, {ur le sitre des frefs; le premier faëtim de M. Hufon, qui eff dans les œuvres de Dupleffiss & HOMMAGE LIGE , HOMME LIGE, VASSAL LIGE. Voyez auffi ci-dev. FIEF DEMI-LIGE, & ci-après FIEF À SIMPLE HOMMAGE LIGE, FIEF TENU A PLEIN LIGE. (4) Frer DE MAÎTRE o4 OFFICIER , 04 FIEF D'OFFI- ce, eft celui qui confifte dans un office inféodé, Voyez OFFICE INFÉODÉ. ( 4) FIEF MASCULIN, eft celui qui eft affeûté aux mâ- les à l’exclufion des femelles. 7: Dans Porigine tous les fefs étoient maféulins ; Les femmes n’y fuccédoient point, & elles ne pouvoient en acquérir, Dans la fuite on a admis les femelles à concourir ayec les mâles en pareil degré dans la fuc- ceffion dirette, & en collatérale à défaut de mâles. Mais il y a certains grands fefs qui font toûjours demeurés zafculins, tels que le royaume de France ; c’eft pourquoi on dit gv1/ ne tombe point en quenouille. Les duchés-pairies font aufli des fefs maftulins, à l'exception des duchés qu’on appelle fémelles, à cau- fe que les femmes y fuccedent. Voyez DUuCHÉ. Voyez ci-dévant FIEF FÉMININ. (4) Fier MÉDIAT, eft celui qui forme un arriere-fief par rapport au feigneur fuzerain, Voyez ARRIERE- FIEF, Il eft oppofé au fefimmédiat. (4) FIEF MEMBRE DE HAUBERT, eft une portion d’un fef de haubert en Normandie. Un fef de cette qualité peut être partagé entre filles jufqu’en huit parties, & alors chaque partie eft appellée wembre de hauberc ; mais s’il y a plus de huit parties, en ce cas aucune n’a court ni ufage; elles font tenues comme fief vilain. Voyez FIEF DE HAUBERT , F1EF VILAIN, & le gloff. de Lauriere au mot ff. (4) FIEF MENU au pays de Liége, eft celui qui n’a aucune jurifdiétion ; 1l eft oppofé au plein fief. Voyez ci-après PLEIN FIEF. (4) FIEF DE MEUBLES, on donne quelquefois cenom à un fef abonné, c’eftà-dire celui dont les reliefs ourachats, quints &requints , & quelquefois l’'hom- mage même, font changés & convertis enrentes ou redevances annuelles, payables en deniers ou en grains. Voyez Loyfel, div: I. rie. j. regle 72. avec l’obfervation de M. de Lauriere, ( 4) FIEF MILITAIRE, feudum militare , feu francale milirare, fignifioit un ff qui ne pouvoit être poflédé que par des nobles & non par desroturiers. On Pap- pelloit fef militaire, parce qu'il obligeoit le vailal au fervice militaire ; tous les feigneurs de fiefs & ar- riere-fefs font encore fujets à la convocation du ban ou arriere-ban. Voyez Le gloff. de Ducange au mot feudum francale & feudum militare. Les Anglois appellent fef milraire, ce que nous appellons fef de haubert ou de chevalier , feudum lori- ce. Ce fef oblige en effet le vaflal de rendre'le fer- vice militaire à fon féigneur dominant. Voyez F1EF DE CHEVALIER, & Fi£F DE HAUBERT. ( 4) FieFs DE MIROIR, dans les coùtumes de para- ge font les fefs ou portions de fef des puinés garan- tis fous l'hommage de l'aîné. [ls ont été ainfi appel- ‘lés, parcé que dans les coûtumes de parage l'aîné et par rapport au feipneur dominant le feul homme de fef, & par rapport aux puînés une efpece d’hom- me vivant & mourant , fur léquel le feigneur féodal fe regle & mire, pour ainfi parler, pour regler fes droits feigneuriaux ; c’eft auffi de-là que dans le Ve- xin françois le parage eft appellé mirouer de ff. Foyez des nores de M. de Lauriere {ur le gloflaire de Ra- FIE gueau au mot fef bourfal vers la fin, 8 aux mots FRÉRAGE 6 PARAGE. ( 4) | Figr MorrT, quieft oppoié à ff vif, eft propte- ment un fous-acafement & un héritage tenu à rente feche , non à cens ou rente fonciere ; c’eft lorfque le fef ne porte aucun profit à fon feigneur. Voyez la coûtume d’Acqs, tir, vi. art, 2.5. 6. 7. 6 8. Voyez FIEF VIF. (4) 7% FIEF MOUVANT D'UN AUTRE, c'eft-à-dire qui en dépend & en releve à charge de foi & hommage & autres droits & devoirs, felon que cela eft porté par l’aéte d’inféodation. (4) FIEF NOBLE, eft entendu de diverfes manieres « felon Balde , le ff roble eft celui quianoblir le pof : feffeur ; définition qui ne convient plus aux f45 même de dignité, car la poffeflion des fefs mano- blit plus. Selon Jacob de Delvis , 27 prælud, feudor. & Jean André, 22 addit. ad [peculator. rubric. de præ- fcripr. le fief roble eft proprement celui qui eft con- cedé par le fouverain, comme font les duchés , mar- quifats, & comtés: le ef moins noble eft celui qui eft concedé par Les ducs, les marquis, &t les com- tes : le médiocrement-noble, eft celui qui eft con- cedé parles vaffaux qui relevent immédiatement des ducs, desmarquis, & des comtes. Enfin le ff non noble eft celui quieft concedé par ceux quirelevent de ces derniers vaflaux, c’efl-à-dire qui eft tenu du fouverainen quart degré & au-defous. En Norman- die on appelloit ff noble, celui qui étoit pofledé à charge de foi &c hommage & de fervice militaire, &c auquel il y avoit court & ufage ; au lieu que s'il étoit pofedé à la charge de payer destailles, des corvées, & autres vilains fervices, c’étoit un f2f roturier. Voyez ancienne coûtume de Normandie, ch. lu. à la fin, & ch. Ixxxvij. &c la nouvelle, art. 2. 6 336. Terrier, Liv. F. ch. clxxj. Berault, fur l’art, 2. 6100. Bafnage, p. 164. com. I. Voyez ct-deyant FIEF COT- TIER, G ci-après FIEF ROTURIER, FIEF VILAIN. (4) FIEF NON NOBLE 04 ROTURIER , O4 FIEF ABR£- GÉ & RESTRAINT. Voyez ci-devant FIEF ABRÉGÉ, & FIEF NOBLE. (4) FIEF DE NU À NU ; on donne quelquefois ce nom aux fefs qui relevent nuëment & fans moyen du prince. (4) FIEF EN NUËSSE, dans les coûtumes d'Anjou & du Maine, fignifie celui dans l'étendue duquel fe trouvent les héritages auxquels le feigneur peut pré- tendre quelque droit; car zweffe eft l’étendune de la feieneurie féodale ou cenfuelle dont les chofes font tenues fans moyen & nuement. Voyez la coûtume d'Anjou, art. 10. 12.13.29. 61. 221. 351. Maine, art. 9.11. 13.34 236,6 362. &t Brodeau, fur Par- siclerz. (A) FIEF OUBLIAL , eft celui qui eft chargé envers le feigneur dominant d’une redevance annuelle d’ou- blies ou pains ronds appellés pains d’hotelage &t ou- blies , obliræ quaft oblate , parce que ces oublies doi- vent être préfentées au feigneur. ] Cette charge ne peut guere fe trouver que fur des fefs cottiers ou roturiers, & non fur des ff no- bles. Voyez le sloff. de M. de Lauriere au mor o//4- ge. (A4 FIEF OUVERT, eft celui quin’eft point rempli, & dont le feigneur dominant n’eft point fervi par faute d'homme, droits & devoirs non faits & non payés. “ | Le fef eft ouvert quand ily à mutation de vaflal, jufqu'à ce qu'il ait fait la foi &t hommage, &t payé les droits. La mort civile du vaflal fait ouverture au ff, à moins quele vaflal ne fût un homme vivant & mou- rant donné par des gens de main-morte; parce que métant pas propriétaire du ef, 1ln°y a que fa mort naturelle qui puifle former une mutation, Quand le vaffal'eft abfent, & qu'on n’a point de les nouvelles, le ffn’eft point ouvert, finon après que l’abfent auroït ätteint l’âge de cent ans. Toute forte d'ouverture du fef ne donne pas lieu aux droits feigneuriaux ; les mutations par vente ou autre contrat équipollent produifentdes droits de quint , les fucceffions , & les donations en direéte ne produifent aucuns droits; tontes les autres muta- tions produifent communément un droit de relief, Voyez MUTATIONS , QUINT ,RACHAT , RELIEF. Tant que le fefeft ouvert, le feigneur peut faifr féodalement ; pour prévenir cette faifie , ou pour en avoir main-levée lorfqu’elle eff faite, il faut couvrir le fief, c’eft-à-dire faire la foi 8 hommage, & payer les droits. Voyez FIER COUVERT, OUVERTURE DE FIEF, SAISIE FÉODALE. ( 4) FIEF EX PACTO ET PROVIDENTIA, Ou FIEF PROPRE, eft celui dont la conceflion a été faite à un mâle purement & fimplement, fans aucune claufe qui exprime quel ordre de fuccéder fera obfervé en- tre les héritiers de l’invefti, de manière que la fuc- ceffion à ce ff eft reolée par les lois féodales qui n'admettent que les mäles defcendus de l’invefti & jamais les filles ; c’eft pourquoi on l’appelle auf fief mafculin. X] eft oppoié au fef héréditaire que l’on ne peut recueillir fans être héritier du dernier pof- lefleur, au lieu que le ff ex patto où proprement dit peut être recueilli en vertu du titre d’inveftitu- re, mème en renonçant à la fucceflion du dernier poñlefleur. Voyez Struvius, fyrtagm. jurifpr. feud. €ap.]v. 7.12. 6 ci-dévant FIEF HÉRÉDITAIRE. (4) FIEF TENU EN PAIRIE, eft celui dont les hom- mes ou les pofleffeurs font tenus de juger ou d’être jugés à la femonce de leur feigneur, fuivant les ter- mes de Bouteiller dans fa fomme rurale , Zv. I. vir. 2. p.13. Voyez l’art. GG. de la coûtume de Pon- thieu, &c /es mots CONJURE , HOMMES DE FIEFS, PaïR1E, PaiRrs. Il eft parlé de ces fefs dans Parsicle x. de la coù- tume de S. Pol, où l’on voit qu’ils doivent dix li- vres de relief, & qu'ils font différens des f/s tenus à plein lige. Voyez FIEF TENU À PLEIN LIGE. ( 4) FIEF DE PAISSE, fezdum procurationis ; c’eit un fief chargé tous les ans d’un ou de plufeurs repas en- vers une communauté eccléfiaftique. Joy. Salvaine, zraité de Vufage des fiefs , chap. lxxjv ; Ducange, glof. gerbo procuratio., & GISTE. (4) | * Fier PARAGER , dont il eit parlé dans la coûtu- me de Normandie , arc. 134. & 135. eft la portion d’un fef qui eft tenue en parage , c’eft-à-dire avec. pareil droit que font tenues les autres portions du même fef. Voyez PARAGE. (4) FIEF PATERNEL, ANCIEN 04 PATRIMONIAL. Voyez ci-devant FIEF ANCIEN, 6 ci-après FIEF PA- TRIMONIAL. (4) FIEF PATRIMONIAL , eft celui qui eft provenu au vaffal par fucceflion , donation ou legs de fa famil- le , à la différence des fefs acquis pendant le maria- ge ou pendant le veuvage , qui dans certaines coû- tumes font appelés fefs d’acquêts , & fe partagent différemment. Voyez la coûtume de Haïnault, chap. Irxvy. &c ce qui eft dit ci-devant ax mot FI£F D’AC- QUÊT. (4) FIEF PERPÉTUEL , eft celui qui eft concédé au vaf. fal pour en jouir à perpétuité lui & les fiens & fes ayans caufe ; 1l eft oppolé au fef annal , au ff à vie "ou antre fe/f temporaire : prélentement tous les fefs font perpétuels , fuivant le droit commun. Foyez FIEF ANNAL, ANNUEL , À VIE, DERENTE, TEMPO- -RAIRE, (4) . FIEF PERSONNEL , eft celui qui n’a été concédé que pour celui que le feigneur dominant en a invef- Fi Ë 713 ti, &t qui ne pañle point à fes héritiers. Razius parle de ces fortes de fiefs, pare, III, de feudis : 1 paroit que le fef perfonnel eft le même que l’on appelle aufü fef d'habitation. Ibid, (4) FIEF DE PIÈTÉ, Voyez ci-dev. FIEF DE DÉVOTION. FIEF PLAIN, Ou comme on l'écrit communément, quoique par erreur, fef plein où plûtôt plein fief ; c’eft celui qui eft monvant d’un autre dire&tement & fans moyen , à la différence de l’arriere - feef qui ne relève que médiatement, Voyez les coûtumes de Ni- VErnoOIS , i£, xxx vi, art, 9. 618. Montargis, ch, 7. art. 44, 45. 67. 68. Orléans , chap. 1. art. 47. 48. 67. 68. Chartres, 63. Dunois , 15. & 21, Bourbon- nois , 373. 388. Auxerre, 52. 67. 72. Bar, 21. © 24, & au procès-verbal de la coûtume de Berry ; Me- lun, 74. 6: 75. Clermont , 199. Troyes, 45. 190. Laon , 260. Reims, 222, Plein - fief, en quelques pays, fignifie #7 grand fief qui a juftice annexée à la différence du menu fef qui n'eft de pareille valeur & n’a aucune jurifdic- tion. Voyez le flyle du pays de Liège , ch. xxv. art, 21. & le ch, xxvj, (4) _ Figr pe PLÉTURE, eft celui qui oblige le vaflal de ferendre plége & caution de fon feigneur dans cer- tains cas: il refte encore des veftiges de ces fortes de fefs dans les coûtumes de Normandie , art, 204. de Bretagne, arr. 87. & en Dauphiné, fuivant la remarque de M. Salvaing , ch, xx. (A) FIEF PRESBYTÉRAL, étoit de deux fortes ; l’un étoit un fef poflédé par un laïc, confiftant en reve- nus eccléfiaftiques , tenus en fefd’un curé on autre prêtre; l’autreforte de fefpresbytéral avoit lieu , lorf- que les feigneurs laïcs, qui avoient ufurpé des cha- pelles , bénéfices , offrandes & revenus eccléfiafti- ques , les vendoient aux prêtres , à la charge de les tenir d'eux en ef; mais comme il étoit indécent que des eccléfiaftiques tinffent en f:f$ leurs propres of- frandes & leurs propres revenus de feigneurs , ces fortes de fefs preshytéraux furent défendus par un concile tenu à Bourges en 1031 , can. 21. en ces ter- mes: w£ feculares viri ecclefaflica bencficia quos te- vos presbyterales vocanr | nor habeant fuper pres- byteros, &tc. Voyez Belium , 27 epiftopis pi&avini, pag. 73.85. & in comit, pag. 384. 407. & Gerva- fium , 7 obronico , col. 1387. art, 11. tom. III. h1f£. Francor, Voyez auf l’'Otbandalle, tom. IT. pag. Fe au trait, de la jurifd. de l’évég. de Chälons ; M. de Mar- ca, en fon hiff. de Bearn , pag. 219. Voyez ci-devant Fier ÉPISCOPAL. (4) ° FIEF PRIN , g4aft feudum primum ; c’eft le fef du feigneur fupérieur : 1l eftainfi appellé dans la coû- tume de Bayonne. (4) FIEF DE PROCURATION , fédum procurationis, étoit un ff chargé de quelque repas par chaque an- née envers le feigneur dominant & fa famille : cette dénomination vient du latin procurare qui fignifie fé bien traïter , faire bonne chere, Voyez Poquet de Livo- nières , srairé des fiefs, chap. tij. Voyez ci-devansFier DE PAISSE. (4) FIEFS DE PROFIT , font ceux qui produifent des droits en cas de mutation des héritages qui en rele vent, au profit du feigneur dominant : ils font oppo- {és aux fefs d'honneur , pour lefquels il n°’eft dû que la foi & hommage. Les fefs de Dauphiné font de dan- ger & de profit. Voyez Salvaing , par. L. ch, ÿ. € üy. & ct-devant FIEF D'HONNEUR. (4) FIEF PROPRE , s’entend fouvent de celui qui a fait fouche dans une famille. Foyez FIEF ANCIEN. Mais le terme de ff propre eft auf quelquefois Oppofé à fef impropre; de maniere que fef propre et celui qui a véritablement le caraétere de fefqui eft tenu noblement , &c chargé feulement de la foi & hommage & des droits de quint ou de relief, aux mu- tations qui y font fujettes,, à la différence du fefim- 714 FIÉE propre ou improprement dit , tel que le £e/rofurier } Ou non noble. Voyez F1EF ex.paito & providentia, FIEF COTTIER, COÛTUMIER, NON NOBLE, RO- TURIER , RURAL, (4) 1 FIiEFS PROPRIÉTAIRES, font ceux que le vaïfal poflede en propriété, &c qui font patrimoniaux, êc pañlent à fes héritiers 8 ayans caufe , à la différen- ce des bénéfices qui n’étoient qu'à tems ou à vie. Il y avoit de ces fs dès le tems de la premiere ‘ace de nos rois ; mais ils ne devinrent communs que vers la fin de la feconde race & au commencement de la troifieme, Voyez FIEFS PATRIMONIAUX. (:4)) FIEF DE PROTECTION, On donna ce nom à des aleux ou francs-aleux, dont les poffeffeurs fe voyant “oppriméspar des feigneurs puiflans , mettoient leurs aleux fous la protetfion de quelques grands ; dans la fuite ces fiefs de proteétion {ont devenus des fiefs fer- yans de ces grands, & par ce moyen arriere-fefs de la couronne. Voyez les zrfhir. feod. de Guyot, ck. FRE ET CARE FIEF EN QUART-DEGRÉ , Voyez ci-après FIEF TE NU EN QUART-DEGRÉ. FIEF RECEVABLE & NON RENDABLE , eft celui dans le château on manoir duquel le vaffal eft obli- gé de recevoir fon feigneur dominant , lorfque ce lui-ci juge à-propos d’y venir pour fa commodité, de maniere néanmoins que le vaffal n’eit pas obligé de le céder entierement ni d’en fortir. Voyez FIEF RENDABLE. (4) FIEF EN RÉGALE ; quelques-uns ont ainfi appellé le fef royal ou de dignité , feudum magnum € quater- natum. Voyez FIEF DE DIGNITÉ 6 FIEF ROYAL ; le gloffaire de Lauriere, au mot fief ez chef. (A) FIEF RENDABLE , feudum reddibile, étoit celui que le vaflal devoit rendre à fon feigneur pour s’en fervir dans fes guerres, M. Aubret,, dans fes méroires ma- nufcrits fur l’hifloire de Dombes. dit que le fief rendable devoit être rendu au feigneur fupérieur en quelque état qu'il parût , foit avec peu ou beaucoup de trou- pes ; & en effet la coûtume de Bar, rc. 1. dit que la coùtume eff telle, que tous les fes tenus du duc de Bar, en fon baillage dudit Bar , font fefs de danger rendables à lui à grande & petite force, fous peine de commife. M. Ducange a traité fort au long des fiefs jurables & rendables dans fa trentieme differca- sion fur Joinville. Voyez aufli le for d’Arragon , fol. 430. V9, col. 1. 8 ci-devant FIEF SURABLE. (4) FIEF DERENTE , c’eft lorfqu'une rente eftaffignée fur un fef avec retention de foi : il n’y a régukiere- ment que des rentes foncieres non rachetables , que l’on puiffe ainfi ériger en ff; parce que fuivant le droit préfent des fefs, le fief eft de fa nature perpé- tuel , encore faut-il qu'il y ait retention expreffe de foi , fice n’eft dans la coûtume de Montargis, où la foi, dans ce cas, eft cenfce retenue , ce qui pa- roit répugner aux principes. Une rente rachetable , fuivant le bail à rente , ne peut être fef , parce que le débiteur eft le maître de Pamortir , & qu’il ne doit pas dépendre du vaflal d’é- teindre & abohr le fef, ce qui arriveroit néanmoins par le rachat. Les rentes conftituées à prix d’argent , ne peuvent pareillement former des fefs, ficen’eft dans les coû- tumes où le créancier eft nanti, & fe fait recevoir en foi pour la rente ; telles font celles qu’en Norman- die on appelle reztes hypotheques ; en Picardie, rentes aanties fur de fief du débiteur ; & que dans la très -an- cienne coûtume de Paris, on appelloit renres par affr- gnat , lefquellés emportoient aliénation du fonds au prorata de la rente. Ces rentes, dit-on , peuvent être tenues en fef ; le créancier fe fait recevoir en foi, comme cela fe prarique fuivant la coûtume de Cambrai, sr. j. arr. 30. & 38. Berri, sé. des frefs, .ært. 3. Ribemont, 79. Orléans, are, 5, Ces lories | de rentes forment un ef conditionnel, tant ue la reñs te fubfiftera : ef qui eft diftinét & féparé de celui du vañlal-qui s’eit chargé de la rente. Voyez Dumoulin fur Paris, $. 13. ‘hodiè 20. gl. 5. n°, 58.6 K. 28: n°. 11, &feg. Guyot, inflit. féod. & ci- devant F1Ex ‘CONDITIONNEL , & ci-après FIEF DE REVENUE. FIEF DE REPRISE, étoit lorfque le poffeffeur d’un héritage allodial & noble le remettoit à un {eisneur, non pas fimplement pour fe mettre fous fa protec- tion, moyennant une fomme convenue &c quelques autres fonds de terre que ce feigneur lui donnoit; par le même aéte le poflefleur de lPaleu reprenoit en ff cet aleu du feigneur acquéreur, à la charge de la foi & hommage. M. Bruflelles , som. I. pag. 126. en rap- porte plufñeurs exemples , tirées des cartulaires de Champagne, entr’autres un aëte du mois de Janvier 1220 , Vieux ftyle. Cet aleu devenoïit par ce moyen fef fervant de ce haut feigneur , & arriere-fef de la couronne. Voyez Salvaing , des fiefs, ch. xlyv. | Il ne faut pas confondre ces fefs de reprife avec ce que l’on appelle en Bourgogne reprife de fief, qui ef quand le nouveau vafal fait l'hommage ; il reprend ion fef des mains du feigneur. (4) FIEF RESTRAINT o4 ABREGE , Voyez ci- devane FIEF ABREGÉ. LES FIEF DE RETOUR, c’étoit lorfque le prince don- noit quelque terre , château ou feigneurie en fef à quelqu'un & à fes defcendans mâles , à l’exclufion des femelles, à condition qu'à défaut demäles, ce ff feroit retour , c’eft-à-dire reviendroit de plein droit au prince, ce qui ne fe pratiquoit guere qu'aux fef5 de haute dignité, comme duchés , comtés &c marquifats. Ceux qui étoient mieux confeillés, pour éviter ce retour, faoient inférer dans l’inféodation cette clau- fe-ci, 6 Liberis fuis five fuccefloribus in infinitum qui- bufcumque utriufque fexus, comme il fut fait en l’érec- tion du comté du Pont-de-Vaux ; ou bien ils fe fai- foient quitter du droit dererour par un contrat par- ticuhier pour récompenfe de fervice, ou moyennant quelque finance , ainf qu’il fut fait en l’éreétion de la terre de Mirebel en marquifat, | ê Depuis que les fefs font devenus patrimoniaux & héréditaires , on ne connoit plus guere de fefs de retour , fi ce n’eft les apanages , lefquels à défaut d’hoirs mâles , {ont reverfñbles à la couronne ; car les duchés-pairies dans le même cas , ne font plus re- verfbles , le titre de duché-pairie eft feulement éteint, Voyez APANAGE, D'UCHÉ 6 PArRIE, & l’Aift, de Breffe, par Guichenon, chap. xiy. des fiefs. (4) FIEF DE RETRAITE participoit de la nature du fef- lige ; mais 1l y avoit cela de particuher , que le prince qui faifoit une femblable inféodation ou con- ceflion , fe réfervoit la liberté & le pouvoir, en cas de guerre ou de néceffité,de fe fervir du château qu'il avoit donné en ff, lequel le vaflal étoit tenu de lui rendre à fa premiere demande ; c’eft pourquoi, dans les anciens titres, ce fef s’appelloit fewdum reddibile. Le fire de Thoire & de Villars inféoda fous cette con- dition la feisneurie de Mirigna en Bugei à Pierre de Chatard damoiïfeau ; cela fe pratiqua auffi au comté de Bourgogne par Jean dit / Sage, comte de Bour- gogne & feigneur de Salins, lequel donna à Jean fon lecond fils, furnommé de Chélons, Mon château de Montgeffon en Comté , 2 féudum ligium © ca[amen- tum jurabile € reddibile ; & quand le feudataire ne vouloir point s’aflujettir à cela, on en faifoit uneré- ferve exprefle, comme on voit dans hommage que le dauphin de Viennois fit à Parchevêque de Lyon au mois de Janvier 1230 , des châteaux d’Annonat & d’Argental: il eff dis que le dauphin a pris çes ter- FIE res 12 feudum francum fène redditione, Hijf. de Breffe par Guichenon , ch. x17. des fefs. (4) FIEFREVANCHABLE, ÉGALABLE, ÉCHÉANT , G LEVANT , eft ainfi appellé, parce que tous ceux qui le poffedent en général, & chacun d’eux en particu- lier, font de la même condition , & également af- traints aux mêmes devoirs & preftations envers leur feigneur. D'Argentré , fur l’ars. 277, de l’ancienne: coûtume de Bretagne, en parlant de ces fefs, leur donne ces qualifications. (4 FIEF DE REVENUE , eft celui qui eff fans terres êc fans titre d'office , qui ne confifte qu’en une rente ou penfon, tenue à la charge del’hommage, &c aflignée fur la chambre ou thréior du roi, ou fur le fifc de quelque autre feigneur : c’eft de cette efpece de fef que parle Braëton , Zv. IF. tra&. 3. cap. jx. K. 6. feodum ef? id quod quis tenet ex quécumque caufé febi € heredibus fuis, fève fit tenementum , five fit reditus : ita quod reditus non accipiatur fub nomine ejus quod venit ex camerd alicujus, Voyez Loyfeau , rraité des offices, div. IT. ch. y. n°, 57, Voyez ci-dévant FIEF CONDI- TIONNEL, FIEF DE RENTE. (4) FIEF RIERRE , eft la même chofe qu’arriere-feef ; 1l eff ainfi nommé dans l’ancienne afliete de Bourgo- gne , & en la derniere coûtume du duché, Voyez ci- devant ARRIERE-FIEF. (4) FIEF ROTURIER , feudum ignobile , eft celui qui n’a ni juftice , ni cenfive, ni fef mouvant de lui. En Artois on nomme ff rorurier celui qui n’a ni juftice ni feigneurie , c’eft-à-dire qui eft fans mou- vance. Ce fief roturier ne peut pas devenir noble, c’eft-à-dire acquérir des mouvances par le bail à cens où à rente feigneuriale du gros domaine du ff, fans le confentement du feigneur dominant ; mais fi le feigneur ou fes officiers y ont une fois confenti, les baux à cens ou à rentes feigneuriales fubfftent , & de roturier que le fef étoit auparavant , il devient fief noble ; de forte qu’en Artois 1l eft permis aux feigneurs de donner la juftice & la feigneurie au fef roturier, Voyez Maillart , fur l'arc. 17. de la coûtume d’ Artois. Le ff roturier de Bretagne n’eft pas proprement Le Jef, c’eft la terre du ff donnée à cens, ou à rente, ou autre devoir roturier ; 1l eft ainfi nommé ff ro- éurier , parce que la terre du fef eft poffédée par un roturier , où du moins roturierement ; car le devoir retenu eft toüjours' noble dans la main de celui qui le perçoit, &ilfe partage comme noble. Woyez Guyot, tnflit. féod, ch. 7. n°. 5. On entend aufli quelquefois par ff rosurier, celui qui étoit chargé de payer des tailles , des corvées, &t autres fervices de vilain , c’eft pourquoi on l’ap- pelloit aufli fef vilain. Voyez FIEF COTTIER , FIEF NOBLE , FIEF NONNOBLE , FIEF RURAL, & l’ancien- ne coûtume de Normandie, chap, li. à la fin. (A4) FIEF ROYAL, eft celui qui a été concédé par le roi avec titre de dignité , comme font les principau- tés, duchés, marquifats, comtés, baronies : ces for- tes de ffs donnent tous le titre de chevalier à celui qui en poflede un de cette efpece. Voyez Loyfeau , en fon sraité des offices ; Cowel,, Lib. IT. inflir, tie. ij. $: 7. (4) * Fier RURAL, dans quelques coûtumes eft la mê- me chofe que ff ron noble ; il en eft parlé dans la coûtume de Nivernois , #r, Jv. arr. 27. 28. 20. & dans celle d’Acqs, sir. 1. Dans ces coûtumes le ff noble eft celui auquel il y a juftice ou maifon fort notable , édifice , motte, foflés , on autres fembla- bles fignes de noblefle & d’ancienneté ; tous autres fiefs font réputés ruraux & non nobles. (4) FIEF DESERGENTERIE, c’eft un office de fersent tenu en ff; comme il y en a dans plufeurs provin- ces , & même au châtelet de Paris. Voyez Huis- SIERS-FIEFFÉS & SERGENTERIE-FIEFFÉE, (4) FIE 715 … Figr SERVANT , eft celui qui releve d’un autre ff qu'on appelle fief dominant , lequel eft lui-même: fief fervant à l'égard du fef fuzerain ; il eft ainfi ap- pellé à caufe des fervices & devoirs qu'il doit au feigneur dominant. | Le ff férvant, quant aux profits, eft régi par la coûtume du lieu où il eftaffis ; & quant à l'honneur du fervice, par la coûtume du lieu du ff dominant, Voyez Coquille, tom. IT. queft- 267. & Bouvot, sroi-. Jieme partie, au mot charge de fef. Voyez ci. devant FIEF DOMINANT & For & HOMMAGE. (4) FIEF SERV: , eft celui dont le pofleffeur a acquitté les droits & devoirs qui étoient dûs au feigneur do. minant, Quand le fef eft ouvert, il n’eft pas Jérvis ou bien on dit que le feigneur n'eft pas /érvi de fon ff. Voyez FIEF OUVERT. (4) Fier SIMPLE, eft celui qui n’a aucun titre de di- gnité. Voyez ci-devant FIEF DE DIGNITÉ, Le terme de fef /imple eit aufi oppoté à fief Lige, Voyez ci-devant FIEF LIGE. En quelques pays, comme en Dauphiné, on en- tendoit par fef fémple, celui qui étoit £re mero & . uxto imperio , c’eft-à-dire qui n’avoit ni la haute ni la moyenne juftice, mais feulement la juftice fon- ciere, qui n’attribuoit au feigneur d’un tel ff d’au- tre droit que celui de connoître des différends mûs pour raifon des fonds qui en relevoient, Cette jurif- diétion étoit fort limitée, car tous les hommes liges du dauphin pouvoient appeller à fa cour des juge- mens rendus par d’autres feigneurs, quand ils ne vouloient pas y acquiefcer. Il y a même un article du flatut delphinal , qui reftraint encore davantage la jurifdiétion attachée à ces fefs fêmples, ne leur at- tribuant la connoïffance des caufes dont on a parlé, qu'au cas exprimé par ces paroles, god querelantes de € fiper tpfis rebus velint ad eos recurrere. Voyez as de Dauphiné, par Valbonay, diféours ij. p. 5. FIEF A SIMPLE HOMMAGE LIGE, eft un fef lige qui eft fimplement chargé de l'hommage, fans aucun autre droit ni devoir feigneurial. Voyez la codtume de Cambrai , tir. j. art. 46, 47. 49. 50. 51, (A) FIEF DE SODOYER DANS LES ASSISES DE JÉRU- SALEM , eft dit pour fef de folde , feudum foldata, Jeu fipendium. C’étoit lorfqu’on donnoit à un noble, à titre de f4f, une certaine provifon alimentaire & annuelle, qui n’étoit pas néanmoins affignée fur la chambre ou thréfor, ni fur les impoñitions publiques : ce fief étoit viager. Voy. Razius, pare. XII. de feudis, $. 32. (4). FIEF DE SOLDE, voyez ci-devant FIEF DE S0- DOYER. | FIEF SOLIDE 04 ENTIER , folidum , dans les conf: titutions de Catalogne, eft la même chofe que fef lige. Voyez FIEF ENTIER, FIEF LIGE. (4) FIEF SUBALTERNE , /xbfeudum, retrofudum , eft celui qui eft d’un ordre inférieur aux f£efs émanés di- reétement du fouverain : c’eft la même chofe qu’er- riere-fef. Voyez ARRIERE-FIEF. (4) FIEF SUPÉRIEUR , eft celui dont un autre releve médiatement ou immédiatement. Voyez ci-dey. FIEF DOMINANT , FIEF INFÉRIEUR, FIEF SERVANT, FIEF SUZERAIN aw m0t SUZERAIN. (4) FIEF TAILLÉ, falliatum , en termes de Pratique, eft un héritage concédé à titre de fef, avec de cer- taines limitations & conditions ; car le terme sa/liare fignifie fixer une certaine quantité, limiter. Cela arri- veroit , par exemple, fi le fefn’étoit donné que pour le poflefleur adtuel , & fes enfans nés &c à naître en légitime mariage ; tellement que le vaffal venant à mourir fans enfans, le fef retourneroit au feigneur dominant. Le fef raillé paroît différent du fefreftraint &t abre 716 FIE ge; lequel eft ordinairement fujet à certaines charges cenfuelles. Voyez ci-devant FIEF ABREGÉ. (4) Fi£F TEMPORAIRE, eft celui dont la conceflion neft pas faite à perpétuité, mais feulement pour un certain terms fini ou indéfini : tels étoient autrefois les fiefs concédès à vie ou pour un certain nom- bre de générations. On peut mettre aufli dans cette même clañe les aliénations & engagemens du domaine du roi & des droits domaniaux, lefquelles, quoique faites comme toutes Les conceffions ordinai- res defef, à la charge de la foi & hommage, ne forment qu’un fef temporaire, tant qu'il plaira au roi de le laïfier fubffter, c’eft-à-dire jufqu’au rachat quel le roi en fera. Tels font auffi les fefs de rentes créées fur des fes, & pour lefquelles le créancier fe fait recevoir en foi. Ce font des fefs créés conditionnel- lement , tant que la rente fubfftera, tant que le vaf- falnerembourfera pas, & quis’éteignent totalement pat le rembourfement, Ces fiefs remporaires ne font même pas de vrais fiefs ; le vrai fef, la véritable fe:- gneurie demeure toùjours au roi, nonobftant l’en- gagement, à tel titre qu’il foit fait: car, à parler exaétement , l’engagifte n’a pas le ff, lorfque le roi exerce le rachat ; ces ffefs s’'évanotuflent, tons les droits qu'avoit l’engagifte font effacés ; fes héritiers ne peuvent retenir aucune des prérogatives de leur auteur, quelque longue qu’ait été fa poffeflion, par- ce que ces engagemens ou ces rentes n’étoient que des fefs conditionnels , créés pour avoir lieu tant que le roi ne racheteroit pas. Le droit de ces fefs con- ditionnels eft moindre en cela que celui des vrais fiefs temporaires qui avoient un tems limité, pendant lequel on ne pouvoit évincer le vaflal. Voyez Du- molin, $.13. hodie 20. gl. 5.n.58. & $.28.n.13. Guyot en fon sraité des fiefs, tom. IT. ch. 9. du relief: € tom. V. tr. de l'engagement du domaine ; & en fes obfervations fur les droits honorifiques, ch. v. p. 187. (4) FIEF TENU A PLEIN LIGE, paroit être celui qui doit le fervice de fef lige en plein, à la différence des fiefs demi-lige, dont il a été parlé ci-devant, quine doivent que la moitié de ce fervice. Il eft fait men- tion de ces fiefs tenus à plein lige, dans la coûtume de Saint-Pol, arr. 10. où l’on voit qu'ils doivent 6o fous parifis de relief, 30 fous parifis de chambellage , & pareille aide, quand le cas y échet. Ces fes font dif- férens des fiefs tenus enpairie. (4) FIEF TENU EN QUART DEGRÉ DU ROI, eft celui qui a été concédé par un arriere-vañlal du roi; de maniere qu'entre le roi & le poffefleur de ce fef il fe trouve trois feigneurs, c’eft-à-dire trois degrés de feigneuries : c’eft pourquoi on compte que ce ff forme un quatrieme degré par rapport au foi, qui eft le premier feigneur. Philippe-le-Long, par fon ordonnance de l’an 31320, ayant taxé le premuer les roturiers pour les fiefs qu'ils poflédoient , exempta de cette taxe les ro- turiers qui poflédoient des fiefs renus en quart degré de fui. Ils ne payoïent encore aucune finance pour ces fiefs du tems de Bouteïller, qui vivoit en 1402, fui- vant que le remarque cetauteur dans fa forme rurale, lv. IT. tt. j. p.648. Voyez Le gloffaire de Lauriere, au mot fief de danger 8 au mot francs-fiefs, aux notes. (4) _ FTEFS TERRIAUX 0% TERRIENS, font ceux qui confiftent en fonds de terre; ils font oppofés aux fiefs de revenue, qui ne confiftent qu’en rentes ou penfon, Woyez FIEF DE REVENUE. (4) FIEF EN TIERCE-FOI, o4 TOMBÉ EN TIERCE- FOI. Dans les coûtumes d'Anjou & Maine, les ro- turiers partagent également les fefs, jufqu'à ce qu’ils foient tombés en sierce- foi, Par exemple, un rotu- rier acquiert un fef, il fait la fo: ; fon fils lui fuccede, il fait auff la foi ; les petits-fils lui fuccedent, voilà le fef tombé en tierce-foi : & alors il fe partage noble: ment, quoiqu'entre roturiers. Voyez la coftume d’ An- JOu , art, 255. 6 256, Maine, 274. 6 275. (4) Fier VASSALIQUE, eft celui qui eft fujet au fer- vice ordinaire de vaflal. Voy. Le gloffaire de Ducange, au mot feudum vaflaliticum. (4) FiErs qui Je gouvernent fuivant la coñtume DU VE- XIN FRANÇOIS, font ceux qui, par le titre d'inféo- dation, {e reglent pour les profits des fzfs dûs aux mutations, fuivant les ufages du Vexin françois: ce ne font pas feulement ceux fitués dans le Vexin, mais tous ceux qui doivent en fuivre les ufages ; car 1ln°y a point de coûtume particuliere pour le Vexin ; êt ce que l’on entend ici par le terme de coétume, n’eft qu'un ufage , fuivant lequel il n’eft jamais dû de quint ni requint pour les fefs qui fe régiflent par cette coûtume du Vexin ; mais aufh il eft dû relief à toute mutation. La coûtume de Paris qui fait mention de ces fefs, art, 33 ne dit pas quels font ceux de fon territoire qui fe gouvernent fuivant cet ufage dn Vexin fran- çois : 1l paroïît, fuivant ce que dit Pauteur du grand coûtumier, que ce font les fefs du pays de Goneft (voyez liv. IT, ch. xxxij, p. 312.) ; maïs, encore une fois , cela dépend des titres & des aveux. Brodeau fur l’art. 3. de la coitume de Paris, n. 14. a la fin, cite une ordonnance du mois de Mai de Pan 1235, faite à Saint-Germain en Laye, du con- fentement du roi S. Louis, pour les chevaliers du Vexin françois, touchant les droits de relief, qui porte que le feigneur féodal aura la moitié des fruits pour une année , tant des terres labourables que des vignes ; pour les étangs, qu’il percevra la cinquie- me partie du revenu qu'ils rendent en cinq années 5 &t que pour les bois & forêts, il aura le revenu d’u- ne année, en eftimant ce qu'ils peuvent rendre du- rant fept années : & il rapporte une ordonnance in- titulée vu/caffinum gallicum , tirée du resiftre 26. du thréfor de la chambre des comptes, fo/. 291. & 3 44. qui eft conforme à ce qui vient d’être dit. Foy. auff l'article 158, de la coétume de Senlis, & le gloffaire de Lauriere , az mot fefs qui fe gouvernent fuivant la coftume du Vexin françois. (4) Fier A VIE, eft celui qui n’eft concédé que pour la vie de celui qui en eft invefti. Dans l’origine tous les fefs n’étoient qu'à vie, ils devinrent enfuite hé- réditaires. Il y a auffi des ffs temporaires différens des fiefs a vie. Voyez ci-devant FIEF TEMPORAIRE. (4) | Fier Vir, eft celui qui produit des droits au fei- gneur, en cas de mutation ; il eft oppofé au ff mort, ou héritage tenu à rente feche. Fief vif fe dit auffi quelquefois pour rente fonciere, comme dans la coûtume d’Ages , z£. viij, art. 2, 6. 8.11. & 19. Onentend auf quelquefois par-là que le poffeffeur de ce fef'eft obligé d’y entretenir un feu vif, c’eft-à- dire d’y faire une continuelle réf- dence. (4) FIEF VILAIN, eft celui qui, outre la foi 8&c hom- mage, eft encore chargé par chacun an de quelque redevance en argent, grain, volaille, ou autre ef- PÉGE en [l eft ainfi appellé , parce que ces redevances dües outre la foi & hommage, font par leurnature fervice de vilain ou roturier. Voyez FIEF COTTIER, FIEF NOBLE , FIEF NON-NOBLE, FIEF ROTURIER , FIEF RURAL. (4) | FIEF VOLANT, eft celui dont les mouvances font éparfes en différens endroits ; il eft oppofé au ff continu , qui à un territoire circon{crit & limité. Voyez FIEF EN L’AIR. (4) Fier VRAI, eft dit en certaines occafions pour fief atuellement exiftant ; il eft oppofé au fef futur, qui ne doit fe réalifer que dans un tems à venir. Cette Cette diftinétion {e trouve marquée dans le droit féodal des Saxons, cap: xaxyx. S. 12. CAR FIEFFAL , (Jurifpr.) fe dit en Normandie de ce qui appartient au feigneur féodal, comimne jurifdic- tion feffal, pofleffion feffal, Norm. chap. à, © cjx. A FIEFFE , (Juri/pr.) en Normandie, fignifie bai! à rente, La premiere fefe dont il eft parlé en Pare. 31. c’eft le titre primordial de la rente fief- ferme, que l'on écrit plus correétement feffe-férme, Il eft auf ufité en Normandie pour exprimer #7 bail à rente, ou plûtôt Phéritage même, {oit noble ou roturier, qui eft donné à rente. On l'appelle feffe:ferme, pour le diftinguer de la ferme muable, qui n’eft que pour untèms, au lieu que le‘bail à rente eft à perpétuité. Îl y avoit peu de différence entre fefè-ferme & ce que l’on appelloït main -fèrme. Voyez le gloffaire de Lauriere, ax mot fefférme, € MAIN-FERME. (4) FIEFFÉ , (Jurifp.) fe dit de ce qui eft tenu en fief. Il y a des officiers feffés, dont il eft parlé dans une ordonnance de Charles VI, de l'an 1382, dite des maillotins ; & au regiftre Æ. dela chambre des comp- tes, 64. y°. a la fin. Ces officiers font le connétable, le chambrier , le pannetier, le bouteiller. | Il ÿ'a encore préfentement quelques offices feffes, notamment des offices d’huifier & de fergens feffess qui font tenus en fief, ou qui dépendent de quelque fief, Un homme fieffé ou fiefvé . où homme de fef, eft un vaflal qui tient en foi du feigneur dominant: Les pairs feffës font les hommes de fiefs. Voyez /a coftume de Lorraine , tit, j. art, 5. | Tailleur fieffé, étoit un officier qui tenoit en fief le droit de tailler les monnoies. Voyez Lauriere, glof]. au mot ffef. | Héritiers feffès ou fefvés, font les vaffaux proprié- taires de fiefs dont ils ont été adhérités , c’eft-à-dire faifis & vêtus par le feigneur féodal, Coér. de Haï- faut; Ch. Îxxvi], ancienne coutume du Pèrche, ch. JA art. 7. Celle de Saint-Paul fous Artois, article 73. parle des héritages feffés ou fefvés. En Normandie, héritage fieffé fignifie quelquefois un héritage donné à rente, Coûr, de Normandie, art, 452: (4) | FIEL, f. m. (Vésicute DU) Anatomie. La yéfr- cule du fl eft une poche membraneufe, d'une figure approchante de celle d’uné poite, ayant un fond & un cou, & même un conduit particulier. Le volume ordinaire de cette yé/icule n'excede suere celui d’un petit œuf de poule. Elle ef fituée dans la partie concave du gtand lo- be du foie ; dans un enfoncement , affez fouvent en forme d’échancrure ; qui fe trouve à fon bord anté- rieur à deux travers de doigt environ de la fciflure ; elle déborde quelquefois le foie, mais fur-tout lorf- que fon volume ordinaire eft augmenté par la bile retenue, où par quelqu’autre caufe. : La fituation de la véficule eft telle que quand on eft debout ; elle eft dans un plan un peu incliné de derriere en-devant ; & qüand'on eft couché fur le dos , elle éft prefque toute renverfée. Son fond eft plus en- bas quand on eft'couché fur le côté-dfoit, til eft obliquement ém-Haut'quand on eft couché fur le côté gauche: Ces fituations varient encore, felon les différens déprés de ces attitudes : c’eft tine remarque de M, Winflow. On obferve que la véfieule du filne fe trouve attachée pour l’ordinaite au foie, que par le tiers de fa longueur & de {à circonféren- ce. Cette véficule touche à linteftin colon, & lui communique la couleur de la liqueur qu’elle con- tténifi) 0 Se TE À pod: - Le conduit qui eft une contiriuation dn coude la véficulé ; Le nomme cyfique, Voyez CYsTiQues. Sa longueur eft d'environ deux travers de doigt ; il Tome VI, FTE 717 vient s’ouvrit conjointement avec le conduit hépa> tique, dans le canal commu nommé cholidéque, Voyez CHOLIDOQUE. | Ces deux conduits fe rapprocheht l’un de Pantre $ & s'uniflent même par le moyen de quelques fibres membraneufes ; enforte qu’ils ne forment point un Ÿ majufcule, comme quelques-uns fe Pimaginent, Le conduit de la yéfcule n°eft point dans uñe mê-: me ligne droite avec le cou ; car on remarque que dés fon commencement il fait le coude avec le co, par le moyen d’un petit lgament membraneux qui eft attaché extérieurement à lun & à l’autre, De l'union du conduit hépatique avec le cyftique , ilen réfulte le troifieme canal appellé conduis commun OU cholz- dogue : celui-ci dont la longueur eft d'environ quatre travers de doïgt, vient gagner la partie boftérieure du duodenuin; &c après avoir percé obliquement fes différentes membranes, il s'ouvre dans fa cavité quas ire travers de doigt environ au-deflus du pylore. La véficule du feel eft compofée de plufieurs mem Branes ou tuniques, qui font dans le même ordre que celles de l’eftomac. La prémiere ou la plus extérieu- te paroît une continuation de celle qii a recouvert toute la fubftance du foie. La feconde eft mufculeu- fe ; elle eft faite de plufieurs fibres charnues > dpo= {ées en trois plans différens : de ces fibres les premie- res font longitudinales , les fecondes obliques!, &les troifiemes circulaires. Îl fe rencontre entre ces deux tuniques un tiflu cellulaire, qui pénetre même l’in- tervallé des fibres charnues. La troifieme tunique eft nerveufe, & la quatrieme veloutée. Sur la furface externe de la tunique nérveunfe, fe voït un réfeau merveilleux, formé par les vaifleaux fanguins, par les nerveux, & pat les lyÿmphatiques qui fe difiribuent à la véfcule. Les arteres & les veis nes fanguines {ont nommées cyfiques. Les arteres {ont des ramifications de l’hépatique, & les veines vont fe décharger dans la veine-perte. Les veines lymphatiques vont fe rendre au refervoir du chyle. À l’évard des nerfs , Ce font des rameaux du plexus hépatique. | On découvte dans la furface interne de la véficule du frel ; plufieuts petites foffes femblables à celles qu£ fe trouvent dans les ruches des mouches à miel: ces foffes font formées par autant de replis dé la tunique veloutée, On y découvre auffi, fuivant les obferva- tions de quelques anatomiftes modernes , Les embou- Chures de plufieurs conduits ; qui au lieu de {e ren- dre dans le conduit hépatique, fe déchargent dans la cavité de la véficule : on lés nomme coreux hépati= cyfhques. Voyez HÉPATI-CYSTIQUE. Le cou de la véfcule du fel 8 fon conduit fe trou: vent aufli garnis en-dedans de plufieurs replis, for- més pat la membrane interne! ces plis font tous en- femble, fuivant l’obfervation de M. Heriter, une ef pece de rampe fpirale en-dedans, & font paroître en-dehors, dans quelques fujets, un contour de vis fs principalement quand le cou &e conduit font rem- . plis ou gonflés. Telle ef la firuéture de la véficnles Paffons à fes ufages. Ufages de la véficule du fel, Va bile qui a êté fépa=' rée dans le foie, eft reprife par les pores biliaires ,; qui vont s’en décharger en partie dans le conduit hépatique, d’où elle coule continuellément dans le duodentim par l’entremife du canal cholidôque , & en pattie dans la véfcule du-fiel par les pores biliai- res qui y répondent, & que l’on a nommés conduits hépati-cyfliques ; maïs elle ne fort de la véficule par les conduits hépati-cyftiques , que dans certains tems, & le plus ordinairement dans le tems de la di- geftion des alimens : car la bile étant alors COMpTrI= mée par l’eftomac, s’échappe par fon conduit cyfti- que dans le cholidoque, fe mêle avec celle qui eft apportée par le conduit hépatique, & ces deux biles YYyy 718 FIEF entrent enfuite dans le duodenum. Le nïélange de ces deux biles eft peut-être utile pour la parfaite di- geftion : quoi qu'il en foit, elles font bien différen- tes l’une de l’autre ; car celle de la véffcule du frel eft plus jaune, plus épaifle , & plus amere que celle du conduit hépatique, ce qu'on ne peut vraiflembla- blement attribuer qu’au féjout de la bile dans la wé- ficule du fil. Il eft très-vraiflemblable 1° que la bile du foie coule quelquefois dans la véfcule ; 2° qu’elle ac- quiert la qualité de bile cyftique en croupiffant dans la véficule ; 3° que fon amertume vient peut - ètre aufh des glandes qui font placées dans la membrane de cette véficule | & qu’arrofent les arteres cyfti- ques , comme il arrive dans la membrane du con- duit auditif; 4° tous les canaux qui du foie & du pore hépatique fe rendent à la véfcule du fil, & y portent fans ceffe le fuc hépatique , ont été jufhfiés par les découvertes de Gliflon, de Verheyen, de Perrault, & de Bianchi. Confulrez-les. Obférvations particulieres. Il s’eft trouvé plufeurs fois des pierres ou des conérétions pierreufes dans la véficule du fil : ce font des faits très-connus, Hil- danus a vû une de ces pierres de la groffeur d’une noix. Hoffman rapporte avoir trouvé dans la véfcu- Le d’un foutbifleur , extrèmement élargie & aggran- die, trois mille fix cents quarante - fix grains de bile coagulée & pétrifiée. En effet toutes les concrétions pierreufes qu'on a remarquées par hafard dans la vé- Jicule du fel, font formées par l’épaiffiffement & le defféchement de la bile, ce qui eft prouvé par la nature de ces pierres; car elles confervent la cou- leur & le goût de la bile, & elles s’enflamment lorf- qu’on les met fur le feu : on a vü même de ces pier- res qui ayant traverfé le conduit cyftique ër le cho- lidoque, font parvenues jufqu’à l'inteftin duodenum, & le malade les a rendues par les felles. Jeux de la nature. L’anatomie nous apprend que la véficule du fel manque quelquefois dans l’homme, comme dans les animaux. L’hiftoire de l'académie des Sciences (année 170$, pag. 33) , en fournit un exemple. Dans un enfant de neuf jours, mort d’un polype qui fermoit l'embouchure du ventricule droit, comme auroit fait un bouchon de figure conique, M. Littre n’a trouvé nulle apparence de vefcule, quoique le foie füt d’ailleurs très-bien formé, inf que lés autres parties du bas-ventre. Les deux arte- res qui doivent fe diftribuer à la véficule, fe diftri- buoient au foie à l’endroit où elles auroient dû être; & le canal hépatique beaucoup plus gros que de coù- tume, fe terminoit à l’ordinaire par un feul tronc dans l’inteftin duodenum. Mais fi la ve/icule du fel manque quelquefois, ne fe trouve-t-elle point aufli d’autres fois double? Ilef vrai qu’il y a dans les ouvrages des Anatonuftes plu- fieurs obfervations, qui difent qu’on a trouvé au foie deux veficules du fiel : cependant malgré ces.attefta- tions, on doit regarder ce jeu de la nature comme un des plus rares au cas même qu'il ait exafté. Il eft certain qu’on rencontre fouvent dans les vaches êx les veaux, la vé/icule du fiel fourchue ; mais trouver dans un homme deux véficules du fiel bien diftinétes,, c’eft un phénomene qui demande des témoignages irréprochables pour pouvoir être cru. Si l’on trou- voit deux véficules, 11 ÿ auroit aufli en même tems ” deux canaux cyfliques, fans quoi lon ne pourroit foûtenir que la véficule du frel fùt entierement double. Toutes les véfcules du jrel que Ruyfch a eu occafon de voir, étoient fourchues & n’avoient qu’un feul ca- nalçyftique. Arucle de M, le Chev. DE La UCOURT. FIEL, (Æcon. anim.) c’eft l'humeur jaune , onc- tuenfe , & amere , qu’on trouve dans une petite vef fie attachée à la partie concave du foie. Foy. FOIE, € l'article précédent, C’eft une forte de bile qui, ou- tre les qualités qu'elle a contraétées par la fecré- tion qui s’en eft faite dans les vaifleanx du foie pro- pres à cet effet, en a acquis de nouvelles par fon fé- jour dans cette veflie, où elle eft retenue comme dans un refervoir, Cependant comme la bile n’eft en quantité remars quable que dans ce refervoir, qu’elle fe préfente moins dans les pores biliaires , dans les conduits hé- patiques & cholidoques , qu’elle n’eft pas fans mé- lange dans le canal inteftinal; on ne fait communé- ment point de difinétion entre le fez & la bile pro- prement dite , c’eft-à-dire telle qu’elle eft dans fes conduits excrétoires, avant d’avoir contraété aucu- ne forte d’altération étrangere à la fecrétion quu s’en eft faite du fang de la veine-porte, & à élaboration qu’elle reçoit dans fes colatoires: c’eft pourquoi les Grecs n’avoient qu’un nom commun xoAn, pour dé- figner ces deux fortes d’humeurs qu’ils confondoient une avec l’autre. TS | La diftinétion entre le fiez & la bile n’eft admife que par les Anatomiftes 8 par les Phyfologiftes, qui donnent le nom de f/ à la petite portion de la bile, qui eft continuellement portée & dépofée dans la vé: ficule , 8 qui y contraëte par fon féjour des quali- tés qui lui font propres ; {avoir la couleur jaune, l’amertume, l’acrimonie, l’alkalefcence,, & la con- fiftance , que n’a point la plus grande partie de la bi- le , c’eft-à-dire celle qui coule tont de fuite & fans interruption vers le conduit cholidoque, à mefure qu’elle eft féparée dans le foie, pour être de ce con- duit verfée dans les inteflins. Voyez BILE, FOIE, (Phyfrol.). ve 4 Ainfi ces deux biles , quoique de la même nature . dans leur origine , dans leurs vaifleaux fecrétoires , ‘étant devenues fi différentes par le cours continuel de l’une, & la ftagnation de l’autre; font conféquem- ment deftinées à opérer deseffets différens, qui déci- dent de leur ufage refpeëtif. Il eft. donc très-impor- tant de ne pas confondre ces effets, foit relative- ment aux fon@ions auxquelles ils fervent dans l’état de fanté, foit par rapport aux fymptomes qui en-font produits, &c aux fignes diagnoftics & prognoftics qu’on peut en tirer dans les maladies. Ii conviendroit encore que dans les expériences ; les analyfes chimiques, faites pour en tiret des con- féquences fur la nature de la bile , on ne fe bornât pas à n’opérer que fur la bile cyftique, ou fur fon mélange avec la bile hépatique, pris dans le canal cholidoque , ou à la fortie de ce canal. Il faudroit tächer de ramañler aflez de chacune des deux biles féparément, pour pouvoir les foûmettrelà l'examen chacune à fon tour ; en recueillir & en comparer les réfultats : ce qui feroit d’une grande utilité pour la théorie & pour la pratique de la fcience médicinale. Voyez Foie , (Pathol.) (d) | | FIEL DES ANIMAUX, (Pharm. & Mar. méd.) ce n’eft autre chofe que la bile cyftique, defféchée à Pair dans fa propre véficule. Voyez BILE.,, : Le el de bœuf a été mis autrefois au rang des mé- dicamens qu’on gardoit dans les boutiques , & qu’on faifoit entrer dans quelques préparations officinales, deftinées à l’ufage extérieur, one IL entre dans la compofition de l’onguent d’artha- rita , qui eftun de ceux.de la pharmacopée de Paris. Je ne lui. connois d’ailleurs-aucun ufage, foit exté- rieur, {oit intérieur. C’eft ici une matiere qui pour- roit bien être néghgée mal-à-propos, & dont ilieroit très-raifonnable, ce femble, d’eflayer les proprié- tés, principalement dans.certains vices de digeftion.: b).. Ds ju , (pierre de) Peinture. La pierre de feel {e trou= ve dans les amers ou fels des bœufs plus où moins grofle, ronde ou ovale ; étant hroyée fur le porphy- re trés-fine , elle fait un Jaune doré très- beau: elle peut s’employer à l'huile, quoique rarement, fon plus grand ufage étant pour laminiatureou détrempe. FIENTE, {. f (Gramm.) c’eft ainf qu’on nomme | les excrémens de plufieurs animaux, dont on fait üufage, foit en Medecine , foit ailleurs. 70, Excr£s MENS. FIENTE DES ANIMAUX, ( Mar, méd. ) on a attri- Dué des vertus médicinales à la fense de divers ani- maux, & principalement aux fuiyvantes. Fiente de bœuf ou de vache. Voyez VAcuHE. Fiente de bouc où de chevre. F. Bouc & CHEVRE; Fiente de cochon, Voyez CocHow, Fiente de pigeon. Voyez PIGEON. Fiente de poule. Voyez POULE. Fiente de cigogns. Voyez Cicocws. Fiente de vautour, Voyez VAuTOUR. Fiente ou crotres de fouris, P 0yez SOURIS. Fiente Où crotres de chiem Voyez CHIEN. Diofcoride parle de la fenre de crocodile terreftre éotnme d’un cofmétique , dont les femmes fe fer- voient pour fe rendre Le tein brillant. Les excrémens humains paffent pour vulnérai- res, cicatrifans , & maturatifs. Ÿ, MATURATIF. (4) FTENTE, CROTIN, (Manépe & Maréck.) termes fynonymes. Nous nommons ainfi les excrémens du Cheval, Voyez l’article Fumer. On obferve à l’extérieur de l’inteftin coœcum qua- tre bandes blanchâtres & ligamenteutes, très-adhé- rentes à fa membrane commune & à fa tunique char- nue. Ces bandes le partagent longitudinalement en quatre portions, & fe propagent fur la partie large du colon:elles brident principalement cet inteftin,de maniere qu'il eft alternativement enfoncé par des plis tranfverfes, & alternativement élevé en boffes très-confidérables, Ces boffes font autant de cellules . éfpacées également , dans lefquelles la fenre (éjour- ne; 6 de-là la forme maronnée qu’elle contratte, & qu'elle ne tire que de la figure même de ces efpeces de loges, L'examen de la qualité de la fente, de fa couleur, de fon odeur, de fa confiftance, eft important dans le traitement des maladies de l'animal, Voyez SÉMÉIo- TIQUE. (e) * FIER, adj. (Morale) Voyez Fierté, * FIER, FIERTÉ, FIEREMENT, (Peinr.) on appelle en Peinture une chofe feremenr faite, lor{qu’elle left avec Hberté; que les coups de pincéau ou touches font grandes & larges ; qu’elles font vives en clairs ét en bruns : quelquefois l’on n’entend parler que du coloris ou du deflein ; ferement colorié, fierement def- Jiné , &cc. Fier, adj. (Archireülure.) épithete que les ouvriers de bâtimens donnent à la pierre, au marbre & au bois qui eft fort dur, On dit auf qu'un deflein eft fer & hardi, quand il eft touché avec art & qu'il part d’une main habile, tel que feu M. Oppenord. (P) FIER , ez termes de Blafon , fe dit d’un lion dont le poil eft hériflé.' FIERLIN , f. m, (SaZine.) mefure en ufage dans nos falines de Moyenvic & autres. Seize frlins, mefure de Berne, fontévalués à quatre charges & deux tiers de charge , & la charge eft évaluée à cent trente li- vies ; cependant les {eize ferlins ne pefent qu’envi- | Ton cinq cents cinquante à cinq cents foixante livres. FIERLINER BOSSES , (Szlnes.) les boffes font des tonneaux qu’on remplit de {el en grain ou feltiré,: deftiné à fatisfaire aux engagemens dela F rance avec les cantons catholiques fuifles ; & la mefure à la quel- le on rapporte le contenu d’une bof, s'appelle un fierlin , dont on à fait le verbe ferlenir. Voyez l’arsi- cle FIERLIN. La offe contient feize ferlins, melure de! Berne. FIERTÉ, £ € (Jurfprud.) du latin ferchrum , qui fignifie cercueil, chäffe, n’eft plusenufage qu'en Nor- | Tome VI. | FIE 719 tandié, pour éxprimer la châffe de $. Romain , af: chevèque de Rouen. Le chapitre de la cathédrale qui poflede cette châfle, joïit en conféquencé du privi- lége de délivrer & abfoudre un criminel &fes com plices, à la fête de l’afcenfion, en le faifant pañler fous la féerte, ce que l’on appelle Zever a féerte, pour: vi que ce ne foit pas pour un ctime de léfe majefté , héréfie, faufle monnoie, viol, affaflinat de ouet-à: pens; es crimes ne font point ferrabes, felon lelan- gage du pays, c’eft-à-dire fufceptibles du Privilése dé la'ferte, Suivant la déclaration d'Henri IV. du 25 Jan- vier 1597, regiftrée au parlement de Rouen le 2% Avril fuivant, le chapitre nomme au roi celui qu'il defirejoïnr du privilége de la ferre, & l’accufé pour joûir de ce privilége, eft obligé d’obtenir dés lettres d’abolition, {cellées du grand fceau, n’y ayant que le prince qui puife faire grace À un criminel. Poyezg les rechérches de La France de Paquier ; &v. IX, chap. xl. les plaidoyers au fujet de la ferte. Mezeray, kif. d'Henri IV, à l'an 13593, Journ, du palais, Arrét dit 15. Septemb, 1672. Le recueil des mémoires de M. de Sacy , tom, I. p. 1. (A) | FIERTÉ , ff (Morale.) eft une de ces eéxpreffionss qui n'ayant d’abord été employées que dans un fens odieux, ont été enfuite détournées à un fens favora- ble. C’eft un blâme quand ce mot fignifie la vanité hautaine , altiere, orgueillenfe > dédaigneufe. C’eft prefque une lotange quand il fignifie la hauteur d’une ame noble. C’eft un juite éloge dans un général qui marche avec ferté À l’ennemni. Les écrivains ont loùé la ferté de la démarche de Louis XIV. Ils auroient dû fe contenter d’en remarquet la nobleffe. La fierté de l’ame fans hauteur eft un mérite compatible avec la modeftie, Il n’y a que la ferré dans l'air & dansles manieres qui choque ; elle déplaît dans les rois m8 mes. La férié dans l'extérieur, dans la fociété Let lexpreflion de l’orgueil : la ferré dans lame eft de la grandeur. Les nuances font fi délicates, qu'efprit fer eft un blâme , ame fere une loiange ; c’eft que par efprit fer, On entend un homme qui penfe avanta- geufement de foi-même : & par ame fere, on entend des fentimens élevés. La fers annoncée par l’exté= rieur eft tellement un défaut, que les petits qui louent baflément les grands de ce défaut , ont obli- gés de l’adoucir, ou plätôt de le relever par une épi thete, certe noble fierté. Elle n’eft pas fimplement la vanité qui confifte à fe faire valoir par lés petites chofes, elle n’eft pas la préfomption qui fe croit ca pable des grandes, elle n’eft pas le dédain qui ajoûte encofé le mépris des autres à l’air de la grande opi- nion de foi-même, mais elle s'allie intimement avec tous ces défauts. On s’eft fervi de ce mot dans les ro: mans & dans les vers, fur-tout dans les opéra, pour exprimer la févérité de la pudeur; on y reñcontre par-tout vaine ferré, rigoureufe frsé, Les poëtes ont eu peut-être plus dé raïfon qu'ils ne penfoient, La | ferté d’une femme n’eft pas fimplement la pudeur {£- |! vere, l’amour du devoir, maisle haut prix que fon amour propre met à fa beauté, On a dit quelquefois la fierté du pmceau, pour fignifier des touches libres & hardies. Arsicle de M, de VOLTAIRE. FIERTÉ, cerme de Blafon, qui fe dit des baleines dont on voit les dents, | FIERTON , f. m. (ancien terme de Monnoyage.){or: te de poids qui contenoit'en lui le poids du remede de poids ,enforte que le trebuchant y étoit compris. Voyez MONNOYAGE. | _ FIESOLT, (Géog.) ancienne petite ville d'Italie connue des Romains fous le nom de Fefule, dansile Florentin, fur une côte, avec un.évêché fuffragant de |. Horence, & à deux lieues de cette ville. Elle ne vaut | guere mieux aujourd'hui qu'un village. C’eft la pas trie de Jean Angelic, furnommé 4e Fiefole, religieux Bominiquain, mort en 145%, & quifeferoit dfüinz Yyy5ÿ 720 FIE gué parmi les peintres, s’il n’avoit eu l’imbécillité de faiffer dans fes plus beaux ouvrages des fautes grof- fieres,afin de modérerleslouanges qu’une trop grande perfeétion pouvoit lu attirer. Mais Varchi (Benoift) natif de cette ville, s’eft acquis de la confidération par fes poëñes italiennes & par d’autres écrits. Il mourut à Florence en 1566, âgé de 63 ans. Long. 284, 59/. Lar. 434, 44" (D.J.) | FIEVRE en général, f, f. (Medec.\ febris, mupiros; maladie univerfelle très-fréquente, qui en produit plufeurs autres, caufe la mort par fa violence & fes complications, procure aufli très-fouvent une heu- reufe guérifon, &c eft quelquefois falutaire par elle- même. Nature individuelle de la fievre. La nature de la fvre eft ficachée, qu’on doit prendre garde de fe tromper en la recherchant; ce qui peut aifément arriver, à caufe du grandnombre d’affe@tions accidentelles dont elle eft fréquemment accompagnée, & fans lefquel- les cependant elle peut exifter, 8c exifte effeétive- ment. Pouréviter l’erreur, 1l faut envifager uniquement les fymptomes qui font inféparables de toutes efpe- ces de fivres, & pourilors on pourra parvenir à con- noître lanature individueile de la fevre. Aujourd’hui qu'on a faifi cette fage méthode, en écartant les hy- pothèfes, fruits de l’intempérance de l'efprit, on eft convaincu que c’eft l’augmentation de la vitefle du jeu des arteres qui confûitue la feyre, & que la cha- leur qui accompagne cette maladie , eft l'effet de l’ac- tion accélérée des vaifleaux. La caufe prochaine de la vélocité du pouls, eft une plus fréquente contrac- tion du cœur; c’eft donc l'effort que fait la vie, tant dans le froid que dans la chaleur, pour éloigner la mort. Puifque la fevre confifte dans l’excès de l’aétion or- ganique des arteres , c'efl-à-dire dans cette aétion ac- célérée au - delà de l’état naturel , on peut, pour marquer toute l'étendue de fon méchaniime , la défi- nir avec M. Quefnay, une accélération fpafmodique du mouvement organique des arteres, qui eft exci- tée par une caufe irritante, & qui augmente la cha- leur du corps au-delà de celle de l’état naturel. Nous difons que dans la feyre l’accélération dumiouvement des arteres eft fpafmodique, pour la diftinguer de la fimple accélération du pouls & de l'augmentation de chaleur excitées par des mouvemens véhemens du corps, qui s'exercent volontairement & fans altérer la fanté, | Symptomes de la fevre, Les vrais fymptomes ou les dépendances effentielles & inféparables dans toute fevredontle méchanifme s'exerce librement , font 1°. Paccélération de la vitefle du pouls ; 2°. celle de la force du pouls ; 3°. le furcroit de chaleur; 4°, l’aug- mentation du volume du pouls; 5°, la refpiration plus prompte; 6°. le fentiment pénible de laffitude qui s’oppole aux mouvemens du corps. Les trois premiers fymptomes peuvent être regar- dés comme les fymptomes primitifs de la fevre, def quels les trois autres réfultent ; &c quant au fentiment pénible de laffitude , il n’eft fenfble qu’aux malades même, le medecin ne le connoït que par leur récit. Ajoûtons que quoiqu'il n’y ait point de feyre dans lefquelles ces fix fymptomes ne fe rencontrent, ce- pendant la vitefle du pouls eft la feule chofe qu’on obferve en tout tems dela feyre, depuis le commen-. cement jufqu’à la fin. S1le contraire arrive , c’eft que la fevre n’eft pas fimple, & qu'elle eft troublée par d’autres affections étrangeres, qui s’oppofent à {es opérations falutaires. Je n’ofe mettre Le friffon au rang des fymptomes inféparables de la feyre, parce que cettemaladie peut s’allumer &c fubfifter indépendamment d’aucun frif- fon, fans qu’elle foit alors une maladie incomplete. FIE IL eft bien vrai que la fevre exifte avec le friffon, & qu’elle naît pour ainfi dire vec lui, mais c’eft qu’a- lors la fevre n’a pas encore acquis fon état parfait, puifqu’elle eft au contraire empêchée par une autre affection fpafmodique toute oppolée ; qui fubffte juf- qu’à ce qu’elle l'ait dominée & diffipée. Cours de la fievre. Quoi qu'il en foit, voici le cours de prefque toute fevre qui procede des caufes inter- nes. Elle commence d’abord par un fentiment de froid & d’horripilation, lequel eft plus grand on plus petit, a plus ou moins de durée, eft interne ou ex- terne, felon les divers fujets, les différentes caufes & la différente nature de la fevre. Alors le pouls devient fréquent, petit, quelquefois intermittent; la pâleur, la rigidité, Le tremblement , le froid, linfenfbilité faififfent fouvent les extrémités ; on voit fuccéder enfuite une chaleur plus ou moins grande, qui dure peu ou beaucoup de tems interne, externe, univer- felle, locale, 6:c. enfin dans les feyres intermittentes, ces fymptomes fe calment & fe terminent par une parfaite apyrexie, Affeétions morbifiques accidentelles à la fevre. Plu= fieurs medecins ont entierement défiguré le caraétere eflentiel & individuel de la fevre, en y joignant di- verfes affeétions morbifiques qui fe trouvent quel- quefois, mais non toüjours, avec la fevre, & qui par conféquent ne conftituent point fon eflence. Les af- fettions morbifiques dont je veux parler , font les con- traétions, la foiblefle, les irrégularités du pouls, les angoifles, la débilité, les agitations du corps, Les douleurs vagues , la grande douleur de tête, le déli- re, la fueur, l’afloupiflement, l’infomnie, le vertige, la furdité, les yeux fixes ou hagards, le vomifflement, le hoquet , les convulfons, la tenfion du ventre, des hypochondres, l’oppreffion, les exanthèmes, les aphthes, la foif, le dégoût, les rots, le froid, le: tremblement, l’ardeur, la féchereffe, la couleur pâ- le & plombée de la peau, les mauvaifes qualités des urines, leur fupprefñon , le diabetes , les fueurs im. modérées , la diarrhée, les hémorrhagies, &c. Mais quelque nombreufes, foibles ou confidéra- bles que foient ces affettions morbifiques, elles ne naïflent point de la feyre; elles font produites par différentes caufes, qui font même oppofées au mé- chanifme de la fevre ; par conféquent on doit les re- garder comme des fymptomes étrangers à cette ma- ladie. Les medecins qui ont voulu les établir comme des fignes pathognomiques de [a févre, n’ont fait qu'introduire une multitude d'erreurs pernicienfes dans la pratique de la Medecine, Caufes de La fievre. La caufe prochaine de la fevre reconnoît elle-même une infinité d’autres caufes im- médiates, qu'on peut néanmoins divifer en caufes particulieres à chaque cas, & en caufes communes à plufeurs. Les dernieres dépendent ordinairement de l'air, des alimens , d’un genre de vie commun, & on les nomme caufes épidémiques, Les caufes particulieres peuvent fe réduire à neuf ou dix claffes capitales; 1°. aux mixtes fenfbles qui renferment naturellement des hétérogenes qui nous font pernicieux; jerapporte à cette claïfe lesremedes aétifs employés à contretems ou à trop grande dofe, cat ils peuvent exciter ouaugmenter la fevre, &t pro- duire d’autres accidens plus fâcheux; ce font même de véritables poifons entre les mains'des medecins qui fuivent de faufles routes dans la cure des mala- dies. LÉ: 2°. Aux matieres acres prifes en aliment, enboif- {ons , entelle abondance qu’elles irritent, fuffoquent, obftruent &c fe corrompent. Nos alimens font même expofés à être dépravés, lorfqu’ils font recûs dans l’eftomac & dans les inteftins. 3°. À lapplication extérieure de matieres acres qui piquent, corrodent, déchirent, brülent, enflam- ment. FIE 4°. Aux mauvaifes qualités de l'air par fon infec- tion , fon intempérie, {a pefanteur, fa legerete, fes variations fubites, &c, | 5°: Aux vices de régime’, comme font l’intempé- rance dans l’ufage des alimens, les grandes abftinen- ces, les exercices outrés, la vie trop fédentaire, le déreglement des pañions , l’incontinence , les veilles immodérées, l’application exceflive de Pefprit, &c. Le tempérament ou la complexion du corps peu ca- pable de foûtenir les excès, occafonne auf [a fievre. 6°. À la contagion, qui dans certain cas produit par Le contact, la refpiration & les exhalaïfons , des fevres putrides, rougeoliques , fcorbutiques , heéti- ques, dyflentériques, &c. 7%. Aux défauts des excrétions & des fecrétions. 8°. A la fuppreffion lente ou fubite des excrétions ouévacuations accoûtumées, par quelque caufe que ce foit. 9°. Aux maladies qui font elles-mêmes des caufes de maladies, Aïnfi les inflammations des parties ner- veufes procurent la fevre, Enfin toutes les caufes qui produifentennous quel- que léfion, & les léfions elles-mêmes,peuvent produi- re la fievre; maïs la puiffance de l’art ne s’étend pas jufqu'aux hétérogenes fébriles, lorfqu'ils font con- fondus ayec nos humeurs ; la nature feule a le pou- voir de les dompter dans les fevres continues ; la Me- decine neft capable que de remédier quelquefois aux dérangemens ou aux obftacles qui s’oppofent à la dé- fenfe de la nature, & qui peuvent la faire fuccomber. Effets généraux de la fievre, L’expulfon, la pro- pulfion plus prompte des liqueurs, l’agitation des hu- meurs qui font en ftagnation, le mélange , la confu- fion de toutes enfemble, la réfiftance vaincue, la coéion, la fecrétion de l’humeur digérée, la crife de la matiere qui en irritant & en coagulant, avoit pro- duit la fre, le changement des humeurs faines en une nature propre à fupporter ce à quoi le malade étoit le moins accoûtumé , l’expreffion du pus liqui- de, l’épaififflement du refte,, la foif, la chaleur, la douleur, l'anxiété, la foibleffe , un fentiment de laf- fitude, de pefanteur, l’anorexie, font les effets de la eyTe. | … Périodes de la fievre. On en diftingue quatre pério- des : fon commencement, fon augmentation, fon é- tat & fon déclin; mais comme ce font des chofes fort connues, paflons aux différentes manieres dont la fievre fe termine. Terminaifon de la fievre. La fevre fe termine detrois manieres différentes ; ou elle caufe la mort, ou elle dégénere en une autre maladie, ou elle fe guérit. a fievre caufe la mort, lorfque les folides fe dé- truifent par la violence qu'ils fouffrent , ou lorfque le fang ef tellement vicié , qu'il bouche les vaif- feaux vitaux , ou ceux qui doivent porter de quoi réparer la déperdition. C’eft ainfi que la fvre pro- duit dans les vifceres nobles, tels que le cœur, le poumon & le cervelet, linflammation , la fuppu- ration, la gangrene, ou des aphtes dans les prémie- res VOIES. | Elle dégénere en une autre maladie , quand elle çaufe une fi grande agitation, que les vaifeaux en font endommagés , & qu’à force de diffiper les par- ties les plus fluides des humeurs , elle épaiffit Le refte; ou quand elle n’a pas la force de réfoudre par elle- même la matiere coagulée ; ou lorfqu’elle dépofe Ja matiere critique dans certains vaifleaux obftrués , dilatés ou rompus. De-là des taches rouges ;, des puftules, des phlegmons , des bubons , la paroti- de , la fappuration , la gangrene , le fphacele, &c. La fevre {e guérit, 1°. toutes Les fois qu’elle peut d'elle-même dompter fa caufe matérielle , la rendre mobile , & l’expulfer par les voies de linfenfible tranfpiration ; 1l faut en même tems que fon mouve- FIE 727 ment fe calme, & que la circulation fe rétablife dans toute fa liberté : 212, lorfque la matiere motbi- fique , domptée & devenue mobile , n’eft pas par faitement {aine , de forte qu’elle empèche légale diftribution des fluides , &c irrite les vaifleaux , ce qui occafonne quelqu’évacuation fenfible, avecla- quelle cette matiere eft expulfée hors du corps; comme par des fueurs , des crachats , des vomifle- mens, des diarfhées , & des urines qui furviennent après la coétion : 3°. la matiere de la maladie domp:- tée, réfolue, devenue mobile par l’aétion de la fevre même , aflimilée de nouveau aux humeutfs faines , circule avecelles fans produire aucune crife , ni d’an- tres maux, | Pour bien connoître la terminaifon des fevres , il faut obferver leur nature , leur commencement , & leur progrès. Prognoftics. Plus une fevre s’écarte de fon cours or« dinaire, & moins le préfage devient favorable : d’un autrecôté,moins 1l faut de tems pour réfoudre lalen- teur , 8 pour calmer lirritation de l’accéleration du pouls, plus la fevre eft douce & falutaire, & récipro= quement au contraire. Toute feyre qui a été malgou- vernée , devient plus opiniâtre & plus difficile à guérir, que fi elle eût été abandonnée à élle-même: Le malade dont la fevre {e difipe naturellement , aï- fément & fans remede , jouit pour lors d’une mel: leure fanté qu'auparavant. On tire aufi différens préfages de toutes lés af- feétions morbifiques qui peuvent accompagner la Jievre ; par exemple , du fpafme & de fes efpeces, du coma, du délire , de la proftration des forces, de la déplutition , de la refpiration, de l’état du bas: ventre , des hypochondres , des laffitudes, des an: goifles,de la chaleur, du froid, destremblemens, des urines , du yomiflement , du flux de ventre, des dé: jeétions fanguines & putrides , des fueurs , des pufe tules inflammatoires, des douleurs locales , des aph- thes, &c. mais nous n’entrerons point dans ce dé- tail qui eft immenfe, & qui a été favamment ex poié par M. Quefnay ; le leéteur peut y avoir re- Cours. | Cure, Pour parvenir à la meilleure méthode de traiter toutes Les fevres , &z à leur cure générale, 1°. il faut pourvoir à la vie & aux forces du ma- lade : 2°. corriger & expulfer lacrimonie irritante + 3%. difloudre la lenteur & lévacuer: 42, calmer les fymptomes. On ménage la vie &c les forces du malade par des alimens & des boïflons fluides, aifés à digérer, qui réfiftent à la putréfaétion, & qui font oppoñés à la caufe connue de la fevre : on donne ces alimens dans le tems & la quantité néceffaire ; ce qu’on regle fur l’âge du malade, fon habitude, le climat qu'ilhabite, l’état 8 la véhémence du mal, On corrige l’acrimonie irritante par les remedes oppofés à cette acrimonie ; on l’expulfe pat les vo- miufs , les purgatifs , ou de fimples laxatifs, Si le corps irritant qui donne la fevre étoit étranger , on lôtera promptement , 8 on fomentera la partie lé- fée par des matieres mucilagineufes, douces , ano- dynes , un peu apéritives. | | On diflout la lenteur par divers remedes, dont le principal eft la fzvre même | modérée’, de façonà pouvoir difliper la vifcofité. On y parvientaufi en diminuant le volume du fang par la faignée ,ou en augmentant fon mouvement par des irritans. Enfin l’on rend aux matieres vifqueufes leur fluidité par les diluans ; les fels , les fondans &e les friétions. Quand'on a détruit la caufe fébrile ; les fympto- mes où accidens qui accompagnent la feyre ceflent avec elle : s'ils peuvent fubffter avec la fevre fans. danger , ils demandent à peine une cure particu- liere, Quand ils viennent des efforts de la nature. 722 FIE qui fe difpofe À une crife , ou à évacuer la matiere critique , il ne faut point les interrompre ; mais f ces fymptomes arrivent à contre-tems , où qu'ils foient trop violens , 1l faut les calmer par les reme- des qui leur foient propres, ayant toûjours égard à la caufe & à l’état de la fevre fubfftante. Semblablement la feyre trop violente , demande à tre réprimée par la faignée , par l’abftinence, pat une nourriture legere , par des médicamens doux, aqueux , glutineux , rafraîchiffans ; par des lavemens , par des anodyns , en refpirantun air un peu froid , & en calmant les paffons. Si la fevre au contraire paroît trop lente , on animera fon aëtion pat l’ufage d’alimens & de boiflons cordiales, par un air un peu chaud, par des médicamens acres, volatils, aromatiques , 8c qui ont fermenté ; par des potions plus vives, par des friétions, par la chaleur, par le mouvement mufculaire. | Après tout, comme la feyre n’eft qu'un moyen dont la nature fe {ert pour fe délivrer d’une caufe qui Popprime , l'office du medecin ne confifte qu’à prêter à cétte naturé une main fecourable dans les efforts de la fecrétion & de l’excrétion. Il peut bien tempérer quelquefois fa véhémence, mais il ne doit jamais troûbler fes opérations. Ainfi ne croyons pas avec le vulgaire , que la fevre foit un de nos plus cruels ennemis ; cette idée eft abfolument contraire à l'expérience , puifque de tant de gens attaqués de la févre qu'ils abandonnent à elle-même , il en eft peu qui y fuccombent ; & quand elle eft fatale , al faut plütôt rejetter l’'évenement fur les fautes, ou la mauvaife conftitutiondu malade , que fur la cruauté dela fevren rt 1. ILeft cependant très-vraique dans plufieurs eon- jondures, la fevre emporte beaucoup de perfonnes d’un tempérament fort & vigoureux ; mais il faut remarquer que c'eft feulement , lorfqué les afe&ions morbifiques violentes , malignes ; où nombreufes, viennent à la fois troubler le méchanifme de la fevre , le furmontant , & en empêchant les opéra- tions falutaires. Ondoiti, ou on peut dire alors, que ces gens-là font morts avec la fevre , mais non pas de la main de la fevre ; car ce font. deux -chofes fort différentes: : | Obfèrvations générales fur les divifions des fevres. La plus fimple difinétion des fevres eft de les di- vifer en deux claffes générales; celle des fevres con- tinues , & celle des fevres intermittentes ; car on peut rapporter fous-ces deux clafles toutes les efpeces de fievres connues. n 20 4 … La diffinétion la plus utile pour la pratique, con- fifte à démêler les fevres qui fe guériffent par cofion, d'avec celles:quisne procurent.pas de coétion ; car par ce moyen , les praticiens fe trouveront en état de pouvoir diriger leurs vûes pour le traitement des Hébresens 1er out SET Mais la-diftinétion la plus contraire à la connoïf- fance de ce qui conftitue eflentiellement la fevre, c'eft d’avoir fait d’une infinité d’affetions morbif- ques, de fymptomes violenis étrangers à la feyre,, ou-de maladies qui l’accompagnent, tout autant de Jievres particulieres. L’afloupiflement dominant, les fueurs continuelles , le froid-douloureux., le friflon- nement frèquent , la fyncope ,-le friflon qui per- fifte avec le fentiment de chaleur , Gc. ont établi dans la Medecineila feyre comateufe , la fevrefuda- té à la fevre même , la pourriture, les taches pour- prées, les'éruptions miliaires , l’infeétion contagieu- fe , les colliquations , la malignité , les cours de ven- tre , le flux de fang, les puftules, &c. Cependant l’ufage de toutes ces fauffes dénomi- nations a tellement prévalu$ que nous fommes obli- gés de nous y conformer dans un Diétionnaire ency- clopédique, pour que les leéteurs y puiflent trouver les articles de toutes les Sevres qu’ils connoïffent uni- quement par leurs anciens noms confacrés d’âgeen age ; mais du moins en nous pliant à la coûtume, nous tâcherons d’être attentifs à déterminer le fens. qu'on doit donner à chaque mot , pour éviter d’in- duire en erreur ; & fi nous l’oublions dans l’occa- fon , nous avertiflons ici une fois pour toutes , qu'il ne faut point confondre les fymptômes étrangers à la fevre, ou les affeétions morbifiques &t compliquées qui peuvent quelquefois Paccompagner , avec les fymptomes inféparables qui conftituent leflence de la fevre , qui ont été mentionnés au commencement de cet article. | | Auteurs recommandables fur la fievre, Ma lifte fera. courte. Sipar hafard , & je ne puis l’imaginer, quel- qu'un ignoroit le mérite de la doëétrine & des pré- {ages d’Hipocrate fur les fevres , il l’apprendra par les commentaires de Friend de febribus, & par le petit ouvrage du doéteur Glafs. Le petit livre de Lommins , qui parut pour la pre- miere fois en 1563 47-82. fera totjours loué , goûté, & lù des praticiens avec fruit. Sydenham eft jufqu’à ce jour un autenr uniquepar la vérité & l’exa@itude de fes obfervations fur les Jievres dans les conftitutions épidémiques. : Hoffman a donné fur les fevres un traité complet; & rempli d'excellentes chofes puifées dans la prati- que & dans la leéture des plus grands maîtres de l’art; c'eft dommage qu'il ait infe@é fon ouvrage d'opinions triviales,, qui rendent fa théorie diffufe , &t fa pratique très-défeêtueufe. Boerhaave au contraire, toùjours sûr de fa mar- che ; évitant tobjours les opinions & les raifonne- mens hafardés , démêlant habilement le vrai du faux, le-principal de l’accefloire , a sû Le premier fe frayer le chemin de la vérité ; c’eft lui qui a dé- couvert la caufe réelle du méchanifme de la fevre, & par conféquent,celle de la bonne méthode cura- tive. T'enant d’une main les écrits d'Hippocrate, 8 portant de l’autre le flambeau du gémie, 1l a dé- montré qué.ce.méchanime s'exécute par l’aétion accélérée des arteres , qui fait naître & entretient l'excès de Chaleut qui conftitue l’eflence de la fevre. Lifez les aphorifmes de ce grand homme , avec les beaux commentaires du doëteur Vanfwieten. Enfinen 1754 M. Quefnay a prouvé, que puif- que l’aétion accélérée des arteres & l’aétion de la chaleur conftituent enfemble le méchanifme de la Jeevre., il faut confidérer enfemble ces deux chofes, pour comprendre tonte la phyfique de cette mala- die. Voyez fon excellent sraisé des frevres en 2 vol. 17-12, | . Je me fuis particulierement nourri des écrits qu je viens de citer, & j'ai tâchai d’en faifir les vües, les idées & les principes. | FIEVRE ACRITIQUE. On entend par fevre acriri- lique Ou 707 critique , toute fevre continue qui ne fe termine point par coétion , Ou par une crife remar- quable. Il y a diverfes efpeces de maladies aiguës accompagnées de fevres non critiques ; telles font les . fievres {pafmodiques d’un mauvais caraëtere, les fe. vres compliquées d’inflammation , de fphacele, de sangrene, les fevres peftilentielles , êc autres fembla bles. dl - Les fevres acritiques, comme toutes les autres fe- vres, reconnoifient différentes caufes, entr’autres cel- le des matieres corrompues dans lespremieres voies, &t mélées dans la mafle des humeurs cirçulantes. Les prédiétions font très-infideles dans les févres acritiques ; parce qu'iln'y a point de méthode réglée, diftinéte , & précife, pour en diriger le prognoftic. Ce n’eft pas ordinairement dans les maladies que la nature dompte ellemême , que le miniftere du mede- cin eft fort néceflaire ; c’eft dans celles qu’elle ne peut vaincre en aucune maniere , où des mede- cins fuffifamment inftruits feroient fort utiles , & où les reffources de l’art feroient eflentielles : mais malheureufement de tels medecins n’ont étéque trop rares dans tous les tems. FIEVRE AIGUE , febris acuta, {e dit de toute fevre qui s'étend rarement au-delà de 14 jours, mais dont les accidens viennent promptement, & font accom- pagnées de dangers dans.leur cours ; cette fevre ef épidémique ou particuliere à tel homme. La contraétion du cœur plus fréquente, & la ré- fiffance augmentée vers les vaifleaux capillaires , donnent une idée abfolue de la nature de toute fevre aiguë : or l’une & l’autre de ces deux chofes peuvent être produites paf des caufes infinies en nombre & en variétés, &c arriver enfemble ou l’une après l’au- tre. drhst à ee) Les fymptomes de la fevre aigue particulieré, font le froid, le tremblement , l’anxiété , la foif , les nau- fées, les rots, le vomiflement, la débilité, la cha- leur , l’ardeur, la féchereffe , le délire, l’afloupifle- ment, l’infomnie , les cenvulfions , les fueurs, la diarrhée, les puftules inflammatoires. | Si ces fymptomes arrivent à contre-tems ; s'ils fe trouvent en nombre ; s'ils font fi violens qu'il y ait. lieu de craindre pour la vie du malade, ou qu’il ne puifle les fupporter; s’ils le menacent de quelque ac- cident funefte , il faut les adoucxr, les calmer chacun en particulier par les remèdes qui leur font propres, & conformément aux regles de l’art: mais comme les commencemens, les progrès, l’état, la diminu- tion, la crife, le changement, varient extrèmement dans les fievres aiguës ; ils demandent pat conféquent une méthode curative très-variée , toüjours relative aux différentes caufes & à l’état de la maladie. En général , la faignée , les antiphlogiftiques internes , conviennent. Voyez FIEVRE ARDENTE, Toutes les fevres aiguës qui affeétent de produire une inflammation particuliere dans tel ou tel orga- ne, & qui en lefent la fonétion, forment la clafle des maladies aiguës , dont chacune eft traitée à fon article particulier. Voyez MALADIE AIGUE, FIEVRE ALGIDE , fébris algida ; ce n’eft point une fevre particuliere, c’eft fimplement une affeétion morbifique qui fe trouve quelquefois avec la fevre continue, & qui confifte dans un froid perpétuel & douloureux. | ” La fevre algide exifte 1°. quand la matiere fébrile -eft tellement abondante qu’elle opprimeles forces de la vie; 2°. quand l’aétion vitale n’eft pas capable de produire la chaleur qui devroit fuivre le fron; 3°. quand les humeurs commencent à fe corrompre. . Les remedes font de diminuer l'abondance de la matiere fébrile, & de la détruire ; 2°. de ranimer les forces languifantes ; 3°. de corriger les humeurs: felles font putrides : par exemple , on ufera des an- ti-feptiques échauffans ;.en un mot, on oppofera les contraires. Au refte., le froid douloureux & conti- nuel d’une fevre aigue préfage le danger, ou du moins la longueur de la maladie. Voyez FIEVRE HORRIFIQUE, FIEVRE ARDENTE, caufus ; naüros de ral, bréler; fevre aiguë, continue, ou rémittente , ainfi nommée de la chaleur brülante , & d’une foif infatiable qui l'accompagne : c’eft l’idée générale qu’en donnent nos auteurs modernes. | 8-6 FIE 123 ces deux fymptomes comme les caufes pathognomi. ques du ceufus ; c'eft pourquoi ils l’ont auffi appellé fevre chaude & brdlante. Voyez la maniere dont en parle Hippocrate dans fon livre de afféhionibus » voyez encore ÂArétée, div. TT. des maladies aiguës , chap. jv. mais voyez fur-tout la defcription étendue & détaillée de l’exa& Lommius ; tout ce qu'il en dit dans fes obfervations eft admirable: auffi la fevre ar dente mérite-t-ellé un examen très-particulier, parce qu'elle efl fréquente, dangereufe, & difficile à gué= ir, mn. … Symptomes. Ses fymptomes principaux font une chaleur prefque brûlante au touchet , inégale en di versendroits, très-ardente aux parties vitales ; tandig qu'aux extrémités eile eft fouvent modérée , & que même quelquefois elles font froides : cette chaleur du malade fe communique à l'air qui fort par lexpi- ration. [l ÿ a une féchereffe dans route la peau , aux narines ; à la bouche, à la langue, au gofier , aux poumons, & même quelquefois autour des yeux: le Malade a une refpiration ferrée, laborieufe, fréquen: te ; une langue feche, jaune, noire, brûlée , âpre, Ou raboteule ; une foif qu'on ne peut éteindre & qui cefle fouvent tout-ä-coup; un dégoût pour les ali: mens , des naufées, le vomiflement, l'anxiété, l’in- quiétude ; un accablément extreme, une petite toux, une voix claire &c aigue ; l'urine en petite quantité , acre, très-rouge; la déglutition difficile, la conftipa- tion du ventre; le délire, la phrénéfie, l’infomnie À le coma , la convulfion, & des redoublemens aux jours impairs. Telle eff la feyre ardente dans toute {a force. Ses caufes. Ellé a pour caufes un travail exceffif , un long voyage, l’ardeur du foleil , la refpiration d’unairfec & brülant ; la foif long-tems foufferte l’abus des liqueurs fermentées, aromatiques ,acres, échauffantes , celui des plaïfirs de l'amour, dés étu- des pouflées trop loin ; en un mot, tout excès qui tend à priver le fang de falymphe, àl’épaifir, & à l’enflammer, Cette même fevre peut être caufée par des fubftances fort corrompues,, telles que la bile dé- pravée dans la véficule du fiel, & renduetrès-acre. Enfin elle eft produite par la conftitution épidémi- que de l’air dans les pays chauds, ( La févre ardente fymptomatique procede de l’in- flammation du cervéau ; des méninges, de la plevre, du poumon , du méfentere, ec. Son cours & fes effets: On en meurt fouvent le troi- fième & le quatrieme jour; on paflé rarement le feptieme, lorfque lé cazfus eft partait. 11 {e termine quelquefois par une -hémotrhagie abondante, & qui éft annoncée par uné douleur à la nuque, par la pe- fanteur & la tenfion destempes, par l'obfcurcifle- ment des yeux, par la tenfion des partiés précordia- les fans douleurs, l’écoulément involontaire des lar- mes, fans autres fignes mortels, la rougeur du vifa- ge, le prurit des nañines. La fevre ardente fe termine femblablement aux-jours critiques-par le vomife- ment , le cours de’ ventre, le flux des hémorroiïdes , les urines abondantés avec fédiment, les fueurs, les crachats épais, une forte tranfpiration univéerfelle. Prognoflics. C’eft un fächeux préfage dans la fevre | ardente, fi l'hémorrhagie fürvient le troifieme ou quatrieme jouravéctrop de médiocrité ; le redouble- ment quiarrive un jour pair avantle fixieme, éfttrès- mauvais. L’urine noire, tenue, &c qui fort en pétite quantité, menacé! la vie : le crachement & lepiffe- ment de fang font mortels. La difficulté d’avaler eft un très -mauvais figne:-le froid aux extrémités eft pernicieux. La rougeur du vifage , & là fueur qui en fort, font d’un finiftre préfage : la parotide qui ne vient point à fuppuration , eft mortelle. La diarrhée trop abondante fait périf le malade: les mouyemens Tousles ancienss’accordent également à regarder | convulffs annoncent le délire, &c enfuite la mort, 724 FIEF On peut former le même préfagefi les forces dimi- auent, fi la refpiration eft continuellement émbar- raflée, s'il y a une douleuraigue permanente l’une des oreilles , fi la foif vient à.cefler, quoique la fe- vre continue dans toute {a violence, fi le bas-ventre s’enfle, & sil fe fait une éruption de puftules gan- gréneufes par tout le corps. Voyez Lommius. # La fevre ardente qui dégenere en colliquation, pro: duit une diarrhée fétide, le pifement de fang, la _tympanite , la péripneumonie accompagnée de dé- lire, des tremblemens, des friflons, des convulfons, & des fueurs froides qui emportent le malade. Toutes ces chofes bien examinées, on peut con- noître la caufe immédiate de la fevre chaude, qui n’eft en effet qu'un fang dépouillé de fes parties les plus douces & les plus liquides : en un mot, unein- flammation univerfelle produite par la trop grande force des folides & des fluides. | r Cure, L’ardeur extrème du caufus indique l’ufage de la faignée au commencement de la maladie , & la répétition de ce remede,, s’il y a des marques de plé- thore, d’inflammation violente, d’une chaleuriniup- portable, d’une raréfaétion exceflive, & des fymp- tomes preflans qui ne cedent point aux autres {e- cours de l’art. | L’air doit être pur, froid, renouvellé;lescouver- tures legeres, le corps fouvent élevé , la boiffon abondante, aqueufe, chaude, adouciflante, anti- phlogiftique. T'elles font les aigrelets, l’efprit de fou- fre, le nitre, le cryftal minéral, le petit-lait ; car il ne faut pas des réfrigérans. qui ralentiflent Pation organique des vaifleaux. Les lavemens feront ano- dyns, délayans, laxatifs, & anti-phlosiftiques. Il faut Humeéter tout le corps , déterminer dans les narines la vapeur de l’eau chaude , gargarifer la, bouche & le gofer, laver les piés &les mains dans: l’eau tiede , fomenter.-avec des éponges trempées dans l’eau, chaude , les parties où il y a plufeurs vaifleaux qui préfentent bien leurs furfaces ; em- ployer les médicamens aqueux, doux, nitrés.,, d’u- _ne agtéable acidité, qui lâchent très - doucement le ventre, qui pouffent par les.urines & les réparent,, qui fervent de véhicule à la fueur par leur quantité, ! &êc non par aucune acrimonie, & qui enfin telâchent toute la contraétion des fibres, diflolvent lesliqueurs épaiflies , les délayent & les corrigent. Obférvations de pratique. 1°.1l-eft bon d’obferver que.les fevres ardentes ; fort aigués , & accompa- gnées de fymptomes dangereux font fouvent com-! pliquées de quelque inflammation intérieure qui dé- génere fouyent en gangrene. Alors la cure ordinaire. des inflammations réuflit rarement ; & l’art a tres- peu de reflources contre une maladie fi funefte, 29,11 ya des fevres ardentesfimples qui finiflent au premier feptenaire, & d’autres s'étendent jufqu’au fecond : les premieres n’ont pas befoin pour Leur gué- tifon d'une coétion parfaitement. purulente ; elles peuvent être terminées par.une crife, qui eft annon- cée, comme le dit Hippocrate ,parun nuage rouge dans les urines ; fouvent auff la maladie fe termine alors par unehémorrhagie du nez..Il n’en eft pas de mêmede dla fevre ardente , qui s'étend jufqu’au.qua- torzieme jour , cat elle cefle par une coftion parfai- tement purulente : dans ces dernieres, le tartre fti- bié délayé dans beaucoup d’eau, & diftribué.en-plu- fieurs. prifes, eft un des purgatifs, les plus avanta- geux.8c les plus fürs, parce. qu'il ne laiffe après lui aucune imprefhon fâchenfe à l’eftomac ni aux intef- tins smais il faut s’en abftenir lorfque les premieres voies font évacuées. 3°. La connoïffance des fievres ardentes &t de leur traitement {répand un grand jour fur routes les fée- vres aiguës particulieres ; car elles ne font que des fymptomes ou des effets d’une autre maladie aigue. _ fe font égalemént par haut &par bas. FIEVRE ASODE, fébris afodes , fievré continue ow fenuttente compliquée | accompagnée d’inquiénue des, d’agitations , d’anxictés, de désoûrts , de:nau- {ées, & de vomiflemens: 49 us mupérat défigne dans plufieurs endroits d'Hippocrate, toutes fevres ac- compagnées d’agitations & d’anxiétés extrèmes. Ga+ lien ajoûteque de tels malades font nommés code pour deux raïfons; la premiere, quand ils ont des mouvemens très-imquiets ; la feconde, quand leur ef: tomac eft picoté par des humeunrscorrompues. Caufes. Les principales caufes de la fievre afode font la dépravation de la bile, la putridité des:humeurs circulantes retenues dans les premieres voies, quel- que inflammation ou autre maladie du ventricule & des vifceres voifins, : | Prognoflic. Cette fevre eft dangereufe, parce qu’- elle trouble Le repos & le fommeil , empêche l’ufage | des médicamens , intercepte celui des alimens , ow en corrompt la qualité, enflamme le fang , abbat les forces ; & dans une longue durée, produit néceffai- rement la fécherefle, l’atrophie, le dépériflement, les convulfions, la mort. | | Cure, La méthode curative confifte à expulfer les humeurs corrompues en corriger la nature. par des nitreux, des acides agréables legerement aftringens ; dériver la matiere métaftatique, appaïfer les mou- vemens troublés de l’eflomac par des narcotiques, & appliquer fur la partie affeétée des fomentations des épithèmes, des cataplafmes relâchans, émol- lens; anodyns. | | FIÈVRE BILIEUSE , fevre aiguë qui doit fon ori- gine, foit à la furabondance , {oit aux dépravations de la bile difperfée contre nature dans la mafle des humeurs circulantes, ou extravafée dans quelqu'un | des vifceres. Les anciens appelloient fi/ieufe la fevre ardente ; cauJum ; parce qu'ils fuppofoient qu’elle étoit pro- duite par une bile chaude & vicieufe ; mais les mo- dernes: ont fagement diftingué ces deux fevres, parce qu’elles ont effeivement des différences cara&érifti- : ques, quoiqu'elles ayent des fymptomes communs. Voyez FIEVRE ARDENTE. e Ses fignes. Les fymptomes de la fevre purement bilieufe {ontitrès-nombreux ; &.ce qui eft fingulier Je les trouve prefque raffemblés dans un feul paflage. d'Hippocrate, de medicina veteri, Les voicinéanmoins encore plus exaétement: le dégoût, la naufée, de fréquentes & vives anxiétés.,. l’oppreflion , la car- dialsie, Le gonflement de l’eftomac & du bas-ventre, la conftipation, des tranchées, des tiraillèmens d’én- tralles, une chaleur douloureufe par tout le corps ,/. une foif intolérable, des urines claires & hautes en couleur, fans fédiment ; la fécherefle de la bouche &c de la langue, avec un fentiment d’amertume ; des” douleurs dans le dos , ’ardèur du gofier, le blanc des yeux & quelquefois tout le corps couvert de jau« nifle. Ajoûtez à ces marques, des toux convulfives ;' : le hoquet, dés maux de tête infupportables, Pinforme! nie, le délire, une foibleffe extrème dans tous les? membres, des tremblemens 8 dés fpafmes dans les jointures , des défaillances fréquentes, Nataifartss Mais les fymptomes câraétériftiques de cettefevre, font des efforts pour vomir, fuivis de vomiflemens® d’une bile acre, cauftique ,'qui en fortantulcere le: gofier, & qui en tombant fur Lapierre, fait fouvent : une effervefcence, comme l’eau-forte. Silevomif= fement s’arrête , 1l lui fuccedeune diarrhée Pi/ieufes avectenefme, & quelquefois les déjeétions de la bile : Caufes, L’abus immodéré des alimers gras, pus trefcens chauds, aromatifés , fur-tout dans les gran: des chaleurs, 8 dans le tems quelle fans.eft dans un: mouvement exceflif, font les caufes les plus fréquen. tes des feires de cettenature ; de-là vient. qu’elles attaquent atfaquent les perfonnes fanguines-bilieufes , celles qui fe nourriflent de mets fortement épicés, qui boi- Ventune grande quantité.de liqueurs mal fermen- tées, & qui tombent dans des paflions violentes aprés de pareils excès. Le balancement d’un vaifleau fuflit feul pour jetter tout-d’un-coup dans l’eftomac une bile étrangere, porracée & érugineue, fans qu’”- On ait guére pû jufqu’à ce jour expliquer ce phéno- mene. De plus, la jaunifle fe répand dans tout le Corps par la feule conftriétion des conduits biliaires qui aboutiflent au duodenum ; & quelquefois de grands accès de colere fuffifent pour former l’expul- fon de la bile dans cet inteftin, d’où elle pañle dans la mafle du fang, &e y produit des fÿmptomes terri- bles. La bile verdâtre éparnchée aux environs du foie, dit Hippocrate , eft la caufe fréquente des fe- pres qui naïflent dans l’intérieur du corps humain. Enfin, comme la dépravation de la bile ; les cou- leurs étrangeres de cette humeur , 6 la fevre qui en réfulte , peuvent être produites parle fpafme feul, qui eft capable de pervertir en un moment les fucs biheux les plus loüables, on doit être attentif à dé mêler fi un tel état à caufé le fpafme, ou fi le fpafme a été la caufe de cet état, afin de ne pas tirer de faufles indutions pour le prognoftic , ou par rapport à la pratique. Prognojtics. Cette fevre, foit qu’elle procede du . Mouvement excefüf, de la furabondance , ou de la qualité dépravée de la bile, menace la vie de péril, fi l’on n’entreprend pas à tems d’y remédier par le fecours de l’art; car Ceft ici que la nature en a un befoin indifpenfable, parce que la force & la durée de la fevre augmentent extrèmement les ravages de l'humeur bilieufe dont elle émane. La plus heureufe tournure que cette fevre puifle prendre, eft de {e porter à une évacuation prompte êt abondante de la matiere viciée, & d’y parvenir par le vomiflement, plütôt encore que par les felles. Quand les efforts pour vomir font exceffifs & avec peu d'effet, le malade ne manque guere d’éprouver un hoquet douloureux, des fpafmes, & des défail- lances qui en font les fuites. Quand au contraire les vomiflemens font aifés & abondans, que de plus la bile rejettée eft d’une affez bonne qualité , on a rai- {on d’efpérer favorablement de l’iflue de la maladie ; mais fi le délire fubfifte long-tems &'avec violence, le péril eft confidérable ; il eft extrème » fi les dou- leurs, l'anxiété, l’oppreffion » la chaleur brûlante, font tout-d’un-coup fuivies de l'abattement des ef. prits, du froid & des convulfions. « Cure. La méthode curative doit tendre néceffaire. ment à provoquer l'évacuation de la bile vicieufe ; à adoucir fon âcreté, à abattre la chaleur, & les {Ymptomes qui en font les effets. | On provoquera l'évacuation de la matiere morbi- fique par de doux vomitifs » tels que la camomille, le tartre ftibié en petites dofes fouvent répetées, &c l’on en continuera l’ufage tant que l’on appercevra dans les évacuations une bile fort jaune, verte, brune ou fanguinolente. Si le flux de la bile fe fait par la voie des felles , on l’aidera puiflamment par les décoë@tions laxatives de pruneaux, ou autres, jufqu'à ce que l'évacuation de la bile morbifique ait été complete. Après les évacuations fufifantés par haut ou par bas, on calmera le mouvement anti- périftaltique de l’eftomac & des inteftins > Par des Parégoriques ou des calmans. | On adoucira l’âcreté de la bile par les diluans ni- trés, les fels neutres, les lubréfians > le petit-lait, les aigrelets, les émulfions legeres, acidulées, prifes fréquemment, & modérément chaudes. Les abfor- Dans qui ne font pas aftringens , mêlés avec le nitre, peuvent Être quelquefois utiles. | -On abattra la chaleur fébrile » 6c les fymptomes Tome VI, FIE 725$ qui en dépendent, par l'ufage des mêmes remedes. On arrêtera les gonflemens du ventricule après les vomiflemens , en appliquant fur le creux de l’efto- mac des linges trempés dans de l’'efprit-de-vin cam- phré. Enfin dans les fpafmes, qui procedent unique» ment de la mobilité des efprits, on ufera d’anti-fpaf- modiques convenables. Obférvations de pratique, Suivant les obfervations des praticiens éclairés , les huileux » les acres, les volatils & tous les échauffans, changent une fevre bilieufe en inflammatoire. Les fudorifiques portent la _Matiere morbifique dans le fang , & le privent de {a lymphe. La faignée , faite même au commencement de la maladie, ne convient cependant que dans les conftitutions fanguines - pléthoriques, & lorfqu’on voit une grande raréfaction du fang qui circule dans les vaifleaux. Les fevres bilieufes regnent beaucoup plus fréquem- ment dans les pays chauds que dans les pays froids : celles qu’on voit fi communément dans les armées, ÿ font d’ordinaire épidémiques , & l’on ne doit pas s’en étonner ; la même nourriture , les mêmes mou- vemens , & le même air qu’on relpire, expliquent ce phénomene. L’on comprend par les mêmes rai- {ons que parmi des troupes perpétuellement expo- fées au foleil , à des marches forcées, & à des cam- Pemens dans toutes fortes de terreins, la bile fe trou- vant alors néceffairement en plus grande quantité, & plus acre que de coûtume » doit produire ces fe. vres bilieufes de l'automne , qui emportent plus de monde que les batailles les plus fanglantes. M, Prin- * gle en à fait un chapitre particulier dans fes obfer- . vations fur les maladies d’armées » Ty tenvoye le lec- teur. FIEVRE CACOCHYMIQUE , Jebris cacochymica | fevre lente, legere , intermittente ou remittente , d'ordinaire erratique , rarement continue quand elle eft fimple. Elle a pour caufe principale une abondance d’hu- meurs crûes, qui fe font corrompues par leur fta- . gnation fuivie de la chaleur. : Ceux que cette fevre attaque , éprouvent de fré- quens friffons , fuent beaucoup , rendent des urines jaunes, chargées, lefquelles dépofent un fédiment. confidérable qui préfage la guérifon. Il faut donc aider l’atténuation des humeurs cruës, procurer leur expulfion par les apéritifs & les laxa- tifs , enfin fortifier Le corps par l'exercice » les fto- machiques & les corroborans, Voyez CACHEXIE. FIEVRE CATARRHEUSE, fevre fecondaire on fymptomatique , par le fecours de laquelle la natu- re, en augmentant le mouvement des folides & des fluides , s'efforce de corriger la qualité viciée de la lymphe, de fe débarraffer de lafurabondancede cette lymphe, & de la chaffer hors du corps d’une maniere critique & falutaire. Ses Jymptomes, Cette fevre attaque ordinairement le foir avec continuité ou rémiffion. Ses fymptomes, quand elle eft très-grave , font des friffonnemens fui- vis de chaleur, un pouls fréquent & petit, l’enroue-’ ment , la pefanteur de tête plus foible que doulou- reufe, la laflitude par tout le cotps, la foif, la difi- culté d’avaler, le dégoût , une chaleur dans la gorge, un picotement dans le larynx ; un fommeil inter- rompu , fuivi le matin d'engourdiflement ; l’aug- mentation du pouls; les urines enflammées , trou- bles, couvertes au-deflus d’une pellicule blanchäâtre, & dépofant au fond du vaiffeau un fédiment brique: té. À ces fymptomes fuccedent l’oppreflion, des fueurs noîurnes abondantes, des douleurs dans les hypochondres & dans les reins ; Ja firangurie, qui fe termine par une évacuation critique & copieufe d'urine ; quelquefois des naufées, des vomiffemens. Z Z 726 FIE la confiipation, les tranchées, & le cours de ventre falutaire qui les accompagne. Quand lacrimonie féreute eft feulement logée dans les organes de la refpiration &c de la membrane pi- tuitaire, elle produit une fevre legere, avec alterna- tive de friflons & de petites chaleurs plus mordican- tes qu’ardentes ; l’enchiffrenement, la douleur de tête, les yeux larmoyans , gonflés ; les narines rou- ges, qui laiffent écouler une férofité acre & corrof: ve ; l’éternuement, lenflure du nez & des levres, la refpiration un peu difficile ; la toux , les crachats qui fe cuifent infenñblement , fe détachent, &c annon- cent la fin de la maladie. Caufes. La caufe immédiate, eft une lymphe abon- dante & acre qui, difperfée par tout le corps, ou logée dans Les tuniques glanduleufes, fufcite une in: flammation accompagnée de douleur, de tumeur &z de rongeur, Cette férofité eft principalement pro- duite par le défaut ou par la fuppreffñion de tranfpi- ration, quelle qu’en foit la caufe ; d’où ilarrive que cette fevre fe manifefte davantage dans les viciflitu: des confidérables de tems, & principalement aux équinoxes. Il fe trouve aufi quelquefois dans lait une ma- tiere fubtile & cauftique qui s’infinue par le moyen de l’infpiration dans le corps humain, où elle excite promptement une fevre catarrhale, qui eft d’ordi- naire épidémique, & quelquefois contagienfe. Prognoflics. Plus la quantité de lymphe acre eft grande, plus les fymptomes font violens, & plus la maladie eft longue. La fimple fevre catarrhale s’en va communément d'elle-même , fans le fecours de l’att; mais elle peut devenir fâcheufe par de mauvais trai- temens, & dans des conftitutions particulieres. Plus elle s’éloigne de fa douceur naturelle, plus linflam- mation eft confidérable, & plus on doit craindre que les vifceres n’en fouffrent. Son meilleur figne eft une réfolution journaliere & une diffipation fuccefiive de [a matiere morbifique. Cette maladie fe termine par une expeétoration abondante des bronches pulmonaires par les fueurs,, les felles, les urines, ou l’excrétion de férofité mu- queufe par le nez. | Cure. I faut fe propofer, 1°. de corriger & d’é- moufler l’acrimonie de la lymphe ; 2°. de rétablir la tranfpiration , dont l'interruption a produit la fevre; 3°. d’évacuer les humeurs vifqueufes, & d’en pré- venir la formation pour l'avenir. On corrigera l’acrimonie de la lymphe par les fubflances ontueufes , comme les émulfñons , les bouillons de navets, les gruaux, les tifannes d’orge mondé , avec de la rapure de corne de cerf, des rai- fins, & de la réglifle. On divifera la férofité gluti- neufe par les incififs, tels que la racine d’aunée , de pimprenelle & de dompte-venin infufées enfemble, ou autres femblables ; par les fels neutres, tels que: le nitre & le tartre vitriolé. On peut en particulier atténuer la lymphe qui eft en ftagnation danses ca- vités des narines, par le fel volatil ammoniac fec, imprégné de quelques gouttes d'huile de marjolaine; on feconde les excrétions par des infufons chaudes, & des poudres diaphorétiques. On procure l’éva- cuation de lalymphe vifqueufe qui féjourne dans les, glandes de la gorge, par les peétoraux. ” Oncalmera laitoux par des parégoriques, les.pi- lules de ftyrax oude cynogloffe. Le ventre doit être tenu ouvert par de fréquentes boiffons de liqueurs émollientes, par des layemens, par des décoétions de manne, de pruneaux &c de raifins. Si l’on foup- çonne quelqu’inflammation dans les parties internes, les émulfons feront nitrées.\ Un de nos modernes donne. la.cure de la fevre catarrhale en deux lignes : acre tenue concoquendum hypnoticis, condiendum ref- uofés, evacuandum diaphoreticis 6 diureticis, Obfervation de pratique. Les Medecins ont obfervé de tour tems que les perfonnes d’un tempérament phlegmatique &c fanguin,, les enfans, les filles & les femmes, font beaucoup. plus fujets aux fevres catar- rhales, que les hommes & les adultes d’un tempéra- ment fort & fec. Hippoctate avoit dir autrefois (Epz- dem. liv, KI. fé. 1.) que lenrouement , les maux de tête & les migraines, font empottés par une fevre catarrhale qui leur fuccede : c’eft aufh ce que l’expé- tience journaliere apprend tous les jours aux prati- ciens. Pour ce-qui regarde la fevre maligne catarrhale, comme elie eft plus connue fous le nom de fevre pé: téchiale, voyez FIEVRE PÉTÉCHIALE. FIEVRE CATHARTIQUE Où DIARRHÉTIQUE # | fievrecontinue., accompagnée de flux de ventre très: opiniâtre. Comme elle fait les plus grands ravages dans les villes & dansles camps , je me propofe d'en parler avec toute l’étendue qu’elle mérite. | Caufes. Il y a dans les fevres continues un grand nombre d’efpeces de flux de ventre ; tant pat rap port à la matiere & à lacaufe , que par rapport aux effets & à l’évenement , & par conféquent il en ré- fulte , que le medecin y doit donner toute fon at= tention pour. bien traiter ce genre de maladies. Le flux de ventre qui accompagne cette fevre ; vient quelquefois d’un hétérogène qui agit fur les inteftins par une forte irritation , & qui caufe à- peu-près les mêmes effets que ceux que produifent de | puiflans purgatifs. Quelquefois cet hétérogène eft répandu dans la mafle des humeurs, 8 entretientun flux de ventre, en excitant continuellement lac tion des excrétoires des inteftins ; d’autres fois il réfide, du moins en partie,dans les premieres voies, fur-tout dans la véficule du fiel ; car la bile elle- . même peut fe dépraver & devenir purgative, 8 mê- me un purgatif fort irritant : elle peut auflirrecevoir de la mafle deshumeurs un fuc vicieux &c ivritant., qui fe mêle & féjourne avec elle,& qui lui communi- que fes mauvaifes qualités,enforte qu’il entretiendra le flux de ventre, en s’écoulant continuellement dans les inteftins : fi une telle bile eft fucceflivement re- fournie à la véficule par la mafle du fang, elle perpé- tuera la diarrhée : il paroït que de pareils flux de ventre font toùjours accompagnés d’une forte de diflolution des humeurs, & que c’eft une acrimonie qui les produit par irritation , & qui eft dans le cas préfent la caufe de la diflolution. Ses effets. Si le flux de ventre fébrile dure long- tems , 11 difpofe de plus en plus les vifceres de l’ab- domen à la même maladie ; 1l Les affoiblit , les exco- rie , les enflamme , vuide, épuife le refte des vif- ceres. & des vaifleaux : d’où naïflent la maïgreur ,. l’atrophie, la débilité, la dyffenterie, ns des fluides dans toute habitude du corps, le: relä- chement des folides , la perte des parties fluides, la: leucophlegmatie , l’hydropifie, la confomption , & la mort, Cure, La cure de ce mal en: général confifte: à: adoucir l’acreté qui faitirritation; à l’évacuer par: des émétiques ,.des purgatifs , des layemens ;, à raf- fermir les parties lÂches, à calmer l’impétuoñié des: | liqueurs par des narcotiques , à déterminer là mas tiere morbifique d’un autre côté par Les fueurs ou par: les-urines, à l’expulfer après en avoir corrigé la pre. _ miere fource. Mais M. Vanfieten, mon ancien: maître: & mon: ami ( je fupprime festitres 8c fesqualités) a détaillé cette cure avec tant de favoir & d'intelligence dans: fes comment. fur Boerhaave $ 722 , que je erois en: devoir donner ici le. précis, pour n’en pas:faire uni renvoi. Lorfqu’on foupçonne qu'une diarrhée: ou dyffens terie.eft entretenue par des matieres:irnitantesi, re FIE tenues dans les premieres voies , les faignées pro- portionnées à l'irritation , les émétiques , les purga- tfs, les lavemens , & une boïflon délaÿante très- abondante , font les remedes les plus prompts & les plus sûrs pour enlever la caufe de cette maladie : fouvent on eft obligé de faire vomir & de purger: plufieurs fois , pour détacher & évacuer totalement cette matiere , qui,quoiqu'en petite quantité , peut encore caufer des irritations doulourenfes ; ainf , ce n’eft pas uniquement par a quantité des matie- res que les émétiques ou les purgatifs évacuent, qu’on doit juger de la néceflité de répéter Les pur- gations ; c’eft encore par l’irritation qui excite le flux de ventre, & qui marque la mauvaife qualité de la matiere irritante ; auf arrive-t-il fouvent , comme le dit Sydenham , que de très-petites éva- cuations , procurées par l’art , ont été fuivies d’un foulagement remarquable. | Les lavemens à demi-dofe de liquide, rendus pur- gatifs, en y doublant ou triplant la dofe des purga- tifs, à laquelle on prefcrit ces purgatifs intérieure- ment, font employées avec fuccès. On doit avoir recours aux narcotiques ou calmans , après chaque purgation ; fur-tout lorfque l’irritation eft un peu remarquable : 8 quand elle fait craindre l’inflam- mation ,on ne doit pas négliger les faignées. Lorf- que la matiere irritante réfide feulement dans les premieres voies , la méthode que nous venons d’ex- pofer , a un fuccès plus prompt que dans le cas fui- want. Si c’eft la bile retenue dans la véficule qui eft dé- pravée , & qui entretient le flux de ventre , on ne peut guere enlever cette caufe que par le fecours des émétiques , qui en excitant le vomiflement, compriment la véficule de la bile, & expulfent cette humeur dans les inteftins , d'où elle eft évacuée par le vomiflement & parla voie des felles. On doit en différens jours répéter les émétiques , foit le tartre ftibié , foit lipécacuanha , tant que l’on appercoit dans les évacuations une bile fort jaune , ou verte, ou brune , ou fanguinolente ; car elle eft par elle- même un figne manifefte de la véritable caufe de lirritauion & de la diarrhée. Si elle eft fort irritan- te , les Inbréfians , le petit-lait , la déco@ion de pru- neaux , les aigrelets , font indiqués pour en corriger À l’acrimonie , en attendant que l’on foit parvenu À Le s lévacuer totalement. On peut auf , dans la même vüe, ordonner le petit-lait pour boiïflon ordinaire. Les farineux & les abforbans qui ne font pas af tringens , telles que les poudres de coquilles d'œufs & d’yeux d’écrevifles, mêlés avec le nitre, peuvent être aufli de quelque utilité ; mais le principal objet de la cure confifte à obtenir , par les vomitifs, L’é- vVacuation complette de la bile irtitante , fur -tout * de celle qui eft dépravée dans la véficule ; il ne faut pas négliger de prefcrire , entre les purgations , l’u- fage des parégoriques , afin de modérer l’irritation de Ja caufe de la maladie , 8 de s’oppoler au fpafme, qui peut Être excité par les évacuations. Voyez FtE- VRE BILIEUSE, | Les mauvaifes déjeftions qu’on obferve dans ces diarrhées fébriles , indiquent la néceffité de réité- rer les purgations ; maïs dans ce cas, il faut pren- dre garde fi la diarrhée n’eft point fpafmodique , afin dappaifer le fpafme qui en eft la caufe ; quelque- fois encore les inflammations des vifceres du bas- Ventre produifent de pareilles diarrhées, & il faut convenir que ces différentes caufes font difficiles à dé- mêler fans beaucoup d'attention & de difcernement. Si le flux de ventre dans cette efpece de fre eft procuré par une caufe irritante , répandue dans la maîle des humeurs qui fe mêlent avec la bile filtrée par le foie , & avecles fucs qui pañfent par les cou- doirs de l’eftomac & des inteftins, les purgatifs & Tome FL, FIE 7 les vomitifs font encore indiqués, parce que la bile de la véficule du fel eft chargée de l’hétérogène qui entretient le flux de ventre , & que ce réfervoir feroit une fource intariffable qui perpétueroit la diarrhée fébrile : mais cette fource feroit difficile à détruire , fi on ne s’appliquoit pas À détourner vers d’autres voies l’hétérogène répandu dans la mafle des humeurs : ainfi , outre les émétiques & les pur gatifs, lesdiurétiques &les diaphorétiques peuvent être employés utilement avec les premieres purga- tions. L'ufage des narcotiques , mêlés aux diaphoréti- ques , eft très-avantageux , parce que les narcoti- ques facilitent par eux-mêmes la tranfpiration, & moderent l'irritation des premierës voies ; ainfi ils contribuent beaucoup avec les diaphorétiques, à procurer une diverfion favorable, On redoute les aftringens dans les premiers tems de ces diarrhées fébriles ; mais lorfqu’elles traînent en longueur , & qu’on a employé avec difcerne- ment les remedes dont nous venons de parler , ils ont fouvent un très-bon fuccès , même dans Les dyf- fenteries opimitres : le plus sûr, lorfqu’on a recours à ces remedes , eft de prefcrire d’abord les aftrin- gens abforbans , qui favorifent la tranfpiration; tels {ont le diaphorétique minéral, la corne de cetf pré- parée , Gc. ces remedes adouciffent dans les pre- mieres voies l’acrimonie des fucs qui y abordent , & y agiflent par leur aftri@tion : ainfi ils peuvent , par cette double propriété, modérer & même arrê- ter le flux de ventre : mais quand ils me réufliffent pas , on peut enfuite recourir à de plus forts aftrin- gens , comme à l’acacia noftras, le fumac, & les autres aufteres ou acerbes du regne végétal. S1 la fievre diarrhérique perfifte après que le flux de ventre eft ceflé , elle fe termine ordinairement par une efpece de coftion , qui procure la dépura- tion de la maffe des humeurs : cependant il faut être attentif au caraétere de la maladie; car fi les fymp- tomes manifeftent une malignité où une acrimo- nie capable de caufer du defordre dans les folides, on doit être circonfpe® fur l’emploi des aftringens ; : _1lya pour lors beancoup plus de sûreté après l’ufage des purgatifs & des vomitifs, de fe fixer aux autres évacuans qui peuvent terminer le flux deventre par diverfion. | ; | Obférvation de pratique. Les diarrhées fébriles cau- fées parl’inflammation des vifceres de l'abdomen, font accompagnées d’une chaleur fort ardente :le flux de ventre &r la puanteur des déjeétions peuvent fe trouver enfemble ; mais un tel flux de ventre cefle ordinairement par l’évacuation des matieres corrompues , pourvü qu'il n’y ait point de colliqua- tion putride : le flux de ventre caufé par la bile dé- pravée , eft ordinairement douloureux, & les éva- cuations moins fétides : ces évacuations {ont fort féreufes & peu fétides dans les flux de ventre occa: fionnés par un hétérogène irritant. La diarrhée pro- duite par une colliquation putride des humeurs, perfifte pour l’ordinaire fort long-tems , malgré les purgations : on comprend donc aflez par cette di- verfité de caufes des fevres diarrhésiques , que dans ce genre de maladie, on ne peut juger du danger, mi tirer des indications sûres ; qu’autant qu’on peut démêler & diftinguer ces différentes caufes : aïnfiles préfages des medecins , qui ne font établis ie fur les qualités des évacuations , doivent être fort in- certains ; mais en les réuniffant à d’autres fignes plus inftruétifs , on découvre le cas où ils font confor- mes aux décifions de ces maîtres, Voyez M. Quefnay dans fon traite des fievres. FIEVRE CHRONIQUE , voyez FIEVRE LENT&. F'EVRE COLLIQUATIVE ; fevre ainfi nommée quand'elle eft accompagnée de la colliquation des | ZL1z ij 728 F I £ humeurs & de leur évacuation fréquente & abon- dante, par les felles, les urines., la peau, & autres “munétoires du corps humain. Ses fignes. Elle fe manifefte par une petite fueur, une chaleur acre:, un pouls ferré, la laffitude, des urines ordinairement troubles, pales, 8c blanchä- tres : la partie rouge du fang tirée par la faignée na- geantedansun fluide très-abondant. Ses effets. Les effets de cette feyre font des fueurs continuelles & exceflives, ou des déjettions abon- -dantes de matieres ténues fans puanteur; l’abatte- ment des forces, la cachexie, l’hydropifie, Pémacia- tion du corps, le marafme, la corruption de toutes les humeurs faines , & la chaîne des autres maux qui en réfultent. Ses caufes. Cette fevre reconnoît plufeurs caufes, la tranfpiration empêchée après des exercices vio- lens ; l'ufage trop long-tems continué des fondans ; les poifons ; le virus fcorbutique ; l'abondance de la bile qui reflvant du foie, s’eft mêlée dans le fang ; la foibleffe des vaifleaux ; la mauvaife qualité de Pair 8z des alimens. Toutes ces caufes peuvent produire la colliquation des humeurs, qui fe trouve différente fe- lon la différente nature du vice dominant de lhu- meur qui tombe en fonte , acide , alkaline , acre, muriatique, huileufe, bilieufe, &c. Le fang eft auff fufceptible de diffolutions glaireufes, putrides, oc- cafionnées par des fubflances putrides, & des miaf- mes pernicieux. Cure, La méthode curative confifte à oppofer les remedes aux caufes du mal. On corrigera les hu- meurs corrompues ; on les évacuera modérément par l’organe convenable, on tâchera d’arrêter les progrès de la corruption par les anti-feptiques ; on tempérera les fueurs exceflives par les opiates ; on renforcera le corps par les ftomachiques , les cor- roborans , l’exercice reglé, fans lequel Pufage de la diete blanche incraflante , ou autre régime contraire au caractere de la fevre colliquative, ne produiroit au- cun effet. FIEVRE COLLIQUATIVE PUTRIDE , voyez SY- NOQUE PUTRIDE. FIEVRE COMATEUSE, affe&tion morbifique qui accompagne quelquefois la feyre ; & qui confifte dans l’afloupiflement ,ou dans une envie continuelle de dormir, foit avec effet, foit fans effet. Le comat fébrile fuppofe dans tout le cerveau cer- taine difpofition qui empêche l’exercice des fens & des mouvemens animaux, Cet empêchement peut procéder de ce qu'il ne vient pas au cerveau une af- fez grande quantité de fang artériel, ou de ce qu'il n'y circule pas librement ; ou de ce que les efprits ne peuvent fe féparer du fang dans les nerfs; ou enfin de ce que leur flux & leur reflux par les nerfs ne peut fe faire, Caufes. Plufeurs caufes différentes & fouvent con- traires, telles que font toutes les évacuations ou re- plétions confidérables ; le trop grand épaififfement du fang devenu gluant, gras, ou inflammatoire ; le défaut d’aétion des folides, la dépravation putride des alimens, la fupprefon de l'urine, une bile acre ouautre matiere retenue dans l’eftomac ; enfin tou- tes les caufes qui compriment la fubftance même du cerveau, quelles qu’elles foient, peuvent occañon- ner cette affeétion dans les fevres ; elle peut être auf f l’effet de la comprefhon des nerfs. Enfin le fpafme des membranes du cerveau eft peut-être {a caufe la plus commune. | Réflexions fur ces caufes. On comprend par ce dé- tail, qu’un medecin doit bien faire attention aux fi- gnes qui peuvent manifefter la caufe particuliere de ce mal, avant que de déterminer quels remedes conviennent , & comment il fautles employer; car on eftfouvent obligé d’avoir reçours à des chofes contraires Les unès aux autres ; & fouvént uh afott« piflement long & opiniatre , après qu’on a tout ten: té mutilement , cefle enfin de lui-même , quand lé pépafme de la feyreeftachevé. Cure. Ainfi les remedes feront dirigés & variés fui : vant la différence des caufes. Les fomentations appli. quées à la tête & au cou, le bain tiede des piés les épiipaftiques , les friétions aux parties inférieures, les boiflons délayantes , les alimens lesers, les lave- mens fimples, conviennent en général, Si l’on voit les fignes d’une grande inflammation , on traitera cet: te affeétion comme [a maladie principale. . Obférvations pratiques. Les fevres épidémiques éré- fypélateufes , malignes , pétéchiales, pourprées, qui prodiufent la corruption des humeurs, en changeant la nature des efprits, & en opprimant le cerveau ; caufent affez communément des affeétions comateu- fes accompagnées de péril. Leur méthode curative demande fouvent la faignée , les lavemens réfrigé- rans ou purgatifs , les véficatoires appliqués à la nu: que du cou, les antiphlogiftiques internes lesere.. ment aftringens, c. L’affeétion comateufe a encore un danger plus confidérable dans la feyre aiguë, ardente, inflam- matoire , s’1l ne furvient au commencement de la maladie une crife par l’hémorrhagie, le cours de ventre , des urines abondantes & qui dépofent , ou des parotides qui fuppurent. Les humeurs crues qui font dégénérées par leur corruption, & devenues infufifantes à fournir les ef- prits néceflaires , caufent quelquefois des affe@ions {oporeufes avec ou fans fevre, comme dans les fcor+ butiques, les cacochymiques, les valétudinaires , &c. Dans ce cas, la crudité doit être corrigée par les anti-fcorbutiques, les flomachiques , les fortifians : & l’on ranimera les efprits par la refpiration des fels volatils. Si l’affetion comateufe eft produite dans la fevre par une évacuation confidérable des regles, des vui- danges, 1l faut reprimer cette évacuation, foûtenis le bas-ventre par des bandages, & réparer les for- ces par des alimens convenables. Quand au contrai- re la fuppreflion des évacuations caufe une fevre co- mateufe, on la traitera par la faignée , les purgatifs , les vomitifs, 6e, Mais fi des narcotiquesimprudem- ment donnés ont produit cet accident ; il faut y remé- dier par des boiffons acides. On a remarqué que Pafloupifflement arrive quel. quefois dans le fort des redoublemens des feyres ert- tiques, 6 qu'il eft d’un préfage fâcheux dans le tems du friffon : il eft fort ordinaire dans les fevres mali- gnes, la fuette , & la pefte. Il faut toüjours bien diftinguer l’affloupifflement paflager des affoupiffemens opimâtres dans les fe- vres : les premiers font communs & ne préfagent rien de fâcheux ; les autres , au contraire, {ont {ou- vent funeftes, parce qu'ils dépendent de quelque dérangement grave de l'organe des fonétions de Pame, FIEVRE COMPLIQUÉE. On nomme ainfi toute fevre continue accompagnée de fymptomes & de defordres confidérables, qui troublent fon mécha- nifme, & embarraflent extrèmement l’efprit du me- decin, pour le traitement d’une telle feyre, On impute prefque toüjours à la fevre les funeftes effets produits par la complication des accidens qui s’y joignent. Comme la fœvre eft le mal le plus appa- rent & le plus connu dans les complications des ma- ladies aiguës, on lui attribue toutes les afetions morbifiques qu’on y remarque : on fait plus; car lorfque la fevre elle-même n’eft pas remarquable, la prévention habituelle fait fuppofer à quelques me- decins une fievre fourde , une fevre cachée & in- fidieufe , à laquelle ils imputent , fans aucune #äifon, toutes les mauvaifes difpofitions du malade. Cependant dans Les affe@ions morbifiques compli- auées, qui paroïflent avec la fevre , ce weft pas ordi- nairement elle qui eft le plus dangereufe, n1 qui pré- fente les indications les plus effentielles, ou les plus preffantes à remplir pour le foulagement &c pour la füreté du malade, Pour fe repréfenter fenfiblement cette vérité, il fuffitde fe rappeller les effets des poi- fons & des venins. Dans la morfure d’une vipere, par exemple, le venin qui s’infinue dans la playe caufe une douleur fort vive, un engorgement inflamma- toire & gangréneux à la partie bleflée , des tremble- mens, des convulfons , la fevre »des angoiffes avec cardialgie, des vomifflemens , le hoquet , la dificulté de refpirer ; l’abbattement , des fyncopes , des ébloüiflemens, des fueurs froides, des urines fangui- nolentes , la paralyfe , des extravafations, des dif- folutions de fang , des gangrenes en différentes par- ties : or, dans de telles complications, ce n’eft pas la fevre , quoique fouvent très-vive, qui eft l’objet de l'attention du medecin ; ce n’eft pas elle qui lui fournit les indications qu’il doit remplir : ilne penfe pas. à l’éteindre; il fonge à fatisfaire à d’autres indi- cations plus importantes. Aïnf lorfque la fevre eft compliquée avec d’autres affe&tions très-dangereufes, 1l eft effentiel de la dif- tinguer de toutes les affeétions qui ont êté produites avec elle par une même caufe; & c’eft la deftruc- tion de cette caufe qui demande feule les fecours de : Part. Mais lorfque dans les feyres il fe préfente diffé- sens fymptomes compliqués qui tendent à produire des effets différens, les uns avantageux &r les autres defavantageux en apparence, quelle conduite doit tenir le medecin dans cette complication? Je répons qu'il ne peut la prendre, cette conduite, que de fon génie & de fes lumieres ; elles feules lui indiqueront à diftinguer le caraétere des fymptomes que [a mala- die lui préfente; à faïfir fes indications avec difcer- nement ; à prévenir les effets funeftes, & à faciliter les effets falutaires. FIEVRE CONTINENTE. Onnomme fevre continer- ze, toute fievre dont la durée s’étend au-delà de tren- te-fix heures : c’eft cette durée qui diftingue la feyre conrinente de l’éphémere. Voyez ÉPHÉMERE. FIEVRE CONTINUE, eft celle qui eff fans interrup- tion depuis fon commencement jufqu’à fa fin; elle ‘reçoit quantité de noms d’après fa durée , fes com- plications, & les fymptomes qui l’accompagnent : delà viennent tant de divers genres & efpeces de fcevres établies par les medecins ; & pour nous con- former à leur langage, nous avons fuivi dans ce Diétionnaire les dénominations qu’ils leur ont don- nées : onen peut voir les articles; car nous n’envi- fagerons dans celui-ci que la cure de la feyre coni- nue prife en général, fimplement, & fans compli- cations : fes caufes &c fes fignes ont été expofés au mot FIEVRE, . Cure. La méthode curative des fevres continues fimples confifte principalement dans l’admuniftration de la faignée, de quelques remedes alrérans, légere- ment apéritifs, & de la purgation. La diete auftere & humeétante qui y convient ordinairement, n’eft pas même ignorée du vulgaire, Les tempérans lé- serement apéritifs, y font continuellement indiqués, pour procurer, fur-tout par les urines, lexpulfion des fucs excrémenteux , produits en abondance par Padtion accélérée des vaifleaux : auf l’ufage de ces remedes eft-1l aflez généralement reconnu. La fai- gnée eft abfolument néceflaire , pour peu que l’in- flammation prédomine. | Les medecins ne s'accordent point fur l’adminif tration de la purgation, dans la cure des fevres con- giaues, Peut-être que ceux qui en bornent trop lufa- FIEÉ #30 ge, & ceux qui letendent trop loin, ñe réufiffent pas moins bien les uns que les autres, parce qu'il {e rencontre autant de fevres où un grand ufage de ja purgation eft funefte, qu'il y en a où ileft néceffai- re. Mais quoique des méthodes fi oppofées puiffent être également falutaires, & cependant également pernicieufes , ceux qui fe fxent à l’une ou à l’au- tre, n'en font pas moins de très-mauvais medecins Ce n’eft pas par les fuccès, par les obfervations, où les fimplesrécits des cures de ces praticiens, qui ré: duifent mal les maladies &c lesindications, que l’on doit ici déterminer l’ufage de la purgation: c’eft en réuniffant aux connoïffances évidentes de la théo= rie une expérience exacte ; complette & étendue, qu’on acquérra des lumieres pour décider fûrement cette queftion importante de la Medecine. Obervations de pratique. Les fievres continues péu- vent fe divifer en fevres critiques, qui fe terminent par coËtions & par crifes, &c en feyres non-critiques, qui fe terminent fans coétions & fans crifes remar= quables. | . Les fievres continues quiont des redoublemens tous lesjours, parviennent difficilement à la coëtion,, tant que ces redoublemens journaliers perfiftent, à moins que la caufe de ces fevres ne foit entraînée par la voie des excrétoires; autremeñnt elles durent d’ordi- naire fort long-tems. Dans quelques pays, on a pref que toüjours recours à l'ufage du quinquina pour les guérir, quoique les habiles gens ayent remarqué que ce fébrifuge ne réuflit point dans les fevres vérita- blement continues. Ceux qui employent ce remede lui attribuent par erreur des guérifons qui arrivent naturellement aux périodes critiques, & auxquelles il n’a aucune part : il peut à la vérité très-bien gué: rir les fevres intermittentes fubintrantes; mais il ne faut pas les confondre avec celles qui n’ont aucune intermifion dans les tems du relâche. La plus legere fevre continue eft celle qui naît de crudités, où de la tranfpiration arrêtée , dont la matiere eft chaflée par le mouvement fébrile, On la guérit pat la boiflon abondante , un peu échauffan: te & diaphorétique. | Les humeurs naturellement corrompues ou dégé- nérantes dans les gens foibles, âgés, cacochymes , fcorbutiques , valétudinaires , produifent fouvent chez eux une fevre continue, qui d'ordinaire devient rémittente : la cure exige de legers purgatifs, lesan- ti-putrides , les ffomachiques, & les corroborans. Quelquefois au commencement de la conftitu= tion épidémique des intermittentes, il paroît des fe- vres continues quine doivent être confidérées pour la méthode curative , que comme de vraies intermit: tentes. En général , toute fevre continue épidémique &t endémique, veut être traitée d’après la connoif: fance de la conftitution de l’air, de la faifon, du cli- mat, @c. mais la fevre continue qui procede d’une maladie particuliere aiguë ou chronique, comme du rhümatifme , de la goutte, d’un abcès, d’une bleffu- ra, de la phthifie, de Phydropifie, &c. doit être re- gardée comme fymptomatique, Voyez FIEVRE SYM- PTOMATIQUE. Le medecin qui voudra s’inftruire complettement des fievres continues , étudiera fans cefle l'ouvrage de M. Quefnay. FIEVRE CONTINUE RÉMITTENTE , eft celle qui fans difcontinuer , donne de tems en tems quelqne relâche, & enfuite quelques redoublemens : comme fa cure eft la même que pour la fevre continue, Voyez FIEVRE CONTINUE. FIEVRE CRITIQUE, eft toute fevre continue qui fe termine par co@tion purulente , & par crifes. On peutadmettre trois fortes de fevres critiques : 1°, celles qui dépendent d'inflammations locales , dont. la terminaifon fe fait par réfolutions 2°, les 730 RRhE ievres humorales que les anciens appelloïent /ÿr0- ques putrides, 8t qui fe terminent par coétion puru- lente. ’oyez SYNOQUE. 3°. Les fievres que les mêmes ‘anciens nommoient bilieufes ou ardentes , parce qu’é- tant accompagnées de chaleur brûlante, & d’une {oif intolérable , ils fugeoïient qu’elles dépendoient plus d’une bile vicieufe que du fang corrompu. Voyez FIEVRE ARDENTE. Mais les fvres véritablement & régulierement critiques , font celles qui procurent une coftion pu- rulente, dont les progrès font marqués par des fi- gnes qui annoncent sûrement, & à jour préfix, des évacuations falubres. Toute fevre continue, qui ne fe termine pas avant la quatrieme exacerbation, ou avant le feptieme jour, dont la caufe n’eft pas in- domtable , & qui n’eft pas compliquée à d’autres maladies ou accidens , capables d'empêcher fes pro- pres effets, fe guérit par cette coétion & par ces évacuatioush:ritiques. FIEVRE DÉPURATOIRE, eft celle dont la nature tempere tellement Les fymptomes, qu’elle chafle la matiere fébrile bien préparée dans un certain tems, foit par tranfpiration ou par coétion, On peut compter trois fortes de féevrés dépuratoi- res, 1°. les fevres fimples dépuratoires par elles- mêmes ,-comme la fevre éphémere, la fevre fynoque fanguine ou non putride, &c. 2°. les fevres depura- roires qui cefflent heureufement par les évacuations fans coëtion nt crife ; 3°. les fevres dépuratoires dont la caufe feroit indomtable par la co&tion, &c incapa- ble d’expulfion par les excrétoires naturels, & qui fe guériffent par des dépôts, par des eruptions exté- rieures, où de telles caufes trouvent des iflues qui en procurent l'évacuation, Cette voie eft même ordinaire dans plufieurs maladies qui fe terminent par des éruptions à la peau; telles font les fevres fcarlatines, la petite vérole difcrete, la rougeole bénigne, 6c. Mais dans d’autres maladies cette voie eft fort incertaine, comme lorfque les dépôts ou les éruptions arrivent irrégulierement aux parties inté- rieures, ou aux parties extérieures, ou en même tems aux unes & aux autres ; telles font les putules ichoreufes, & les dépôts fanieux dans les petites véroles confluentes. FIEVRE DIARRHÉTIQUE, voyez FIEVRE CATHAR- TIQUE. FIEVRE DYSSENTÉRIQUE , febris dyffenterica : on nomme fevres dyflenrériques, celles qui ont jointes à des tranchées doulouréufes dans le bas-ventre, fui- vies de déjeétions muqueufes & fanglantes avec exul- cération des inteftins ; la dyflenterie eft l’'afe@&ion morbifique qui a donné le nom à cette fevre. Caufe prochaine. Uné matiere aétive , acre,tena- ce, cauftique, peut-être analogique dans fes effets, avec les parties fur lefquelles elle agit, tranfportée dans les couloirs des inteftins qu’elle irrite & qu’elle ronge, produit ce genre de fevre qu’on voit fré- quemment dans les conftitutions épidémiques.: Ses fignes. Alors la fevre dyflentérique fe fait con- noitre par un friflon fuivi de chaleur, de vives dou- leurs d’entrailles, de tenefme, de déjeétions glai- reufes & fanguinolentes , de foif, de dégoût, de lan- gueur, de défaillances , de fueurs froides , & de l’e- xolution des forces. Prognoffics. Les pellicules d’inteftins qu’on trouve dans lesfelles, l’inflammation à la langue, lesaphthes dans la gorge, les évacuations qu’on fait fans s’en appercevoir, le délire! les convulfons , le froid des extrémités, & le hoquet qui furvient alors, annon- cent une fin prochaine de cette fevre, par la deftruc- tion de la machine. Cure. La méthode curative doit tendre à diminuer l'inflammation, corriger l’acrimomie de la matiere cauftique , évacuer les humeurs morbifiques ; adon- cir les entrailles, confolider l’exulcération, &-arrê- ter le flux de ventre invétéré. On remplit ces indications par la faignée, les vo- nutifs, les purgatifs, entre lefquels l’ipécacuanha , la rhubarbe, 8c le fimarouba font les principaux; il faut les donner à petites dofes, & en calmer lesef- fets par des parégoriques. Les lavemens feront come potés de chofes grafles &c onétueufes , comme de dé- coétions de mauve, de guimauve, ou de bouillons de tripes : on fe fervira des mêmes décoëions en fomentations fur le bas-ventre; on ufera pour boif- fon &t alimens d’eau de poulet, de ris, d'orge, ou de lait de chevre coupé ; les tifannes feront émul- fionnées , & quelquefois acidulées, Enfin fi les aftrin- gens deviennent néceflaires , on les employera pru- demment, graduellement, & on y joïindra le lauda- num liquide. Corfultez ici l’article D'YSSENRERLE , & fur la dyffenterie , confulrez Degnerus. | La meilleure cure pophylaëtique dans les épidé- mies qui produifent cette feyre d’une maniere fatale, eft de fuir la contagion, fe tenir le ventre libre, ufer de régime & d’alimens adouciffans, éviter de refpirer les exhalaifons des excrémens. Obférvation. La fievre dyffentérique eft une des plus fféquentes & des plus cruelles épidémies des camps ; on en trouvera la diagnofe , la prognofe, &c le trai- tement dans l'ouvrage anglois du do@teur Pringle, Jur les maladies d’armées. Je remarquerai feulement, que les principaux moyens pour en arrêter le pro- grès, font de décharger les hôpitaux autant qu'il eft poflible, de renouveller continuellement l'air des infirmeries par un ventilateur, d’en balayer toutes les ordures avec grand foin, de remettre les mala- des dans des églifes, dans des baraques, des maifons ruinées, où ils ne communiquent point enfemble , de ne point confiner au lit ceux qui en peuvent for- tir, de tenir très-propres leurs chambres , leurs har- des, leurs baflins, & tous les uftenfiles dont ils fe fervent ; enfin fur toutes chofes, de couvrir chaque jour les privés d’une nouvelle terre ; car c’eft prin- cipalement de lexhalaifon putride des latrines pu- bliques des camps, que dépend la contagion & la propagation de ce mal funefte. FIEVRE ENDÉMIQUE, ainf dite de 6, & d'uor, peuple. Les fievres endémiques font celles qui regnent tous les ans avec des fymptomes aflez femblables dans un même pays, & qui y font plus fréquentes que dans un autre, à caufe du climat, de l'air, de l’eau, de la fituation du lieu, dela maniere de vivre des habitans. Voyez ENDÈMIES. Confultez Hippocra- te de aëre, locis, & aquis ; & fi vous voulez parmi les modernes, Wintringham’s (Clifton) & sreacife of ende- mic difeafes. London, 1718. 8°. | FIEVRE ÉPHÉMERE , œphemera, la plus fimple des fevres continues , dont le commencement, l’état, & le déclin, fe font ordinairement dans l’efpace de 12, 24, où au plus de 36 heures. Voyez EPHÉMERE, FIEVRE ÉPHÉMERE BRITANNIQUE, nom vul- gaire qu’on a donné à la fuette, efpece de pefte qi pafla en Angleterre en 1485, & qui emportoit les malades en 24 heures. Voyez SUETTE. FIEVRE ÉPIALE ; epialrs febris, n7Iæ 06, AT d'ece : fevre, dit Galien, dans laquelle le malade réflent une chaleur extraordinaire, & friflonne en même tems, Les anciens latins lui donnent le nom de gquer- cerz , C’eft-à-dire qui produit de violens friffons. C’eft, fuivant nous, cette affection morbifique de la fievre qui confifte dans le friflon, lequel perffte avec le fentiment de chaleur. On en peut indiquer pour caufe générale une acrimonie irritante que les forces vitales ne peuvent pas chaffer. L’acrimonie de la caufe de la fevre produit fou- vent un genre de chaleur, ou plütôt une-fenfation de chaleur , qu’il ne faut pas confondre avec la cha: leur même de la fevre; celle-ci dépend dé laugmen- tation de la circulation du fang. Celle-là eft caufée pat l’impreffion que fait l’acrimonie de fubftances acrés qui agiflent rarement fur les filets nerveux; telle eft la chaleur brûlante que les malades reflen- tent intérieurement dans la feyre épiale. Cette fevre eft en même terms accompagnée d’un froid violent & douloureux dans les parties exté- rieures du corps; ce froid eft peut-être occafionné par la même acñmonie qui éxcite dans les mufcles de ces parties un fpafme capable de reflerrer les vaifleaux, & de n’y laifler pafler que fort peu de fang. Par-là,, 1l prive non-feulement les parties ex- térieures de chaleur, mais il y caufe une forte d’hor- ripilation, & d’érétifme douloureux , quife joigient au fentiment dé froid, &2 qui Le rendent plus iñfup= portable: Len L Quoi qu'il en foit, cette afeétion morbifiqte de la fevre demande la defiruétion du vice irritant , @ re- quiért en même tems les antifepriques cardiaques , propres à'ranimer les forces & la circulation lan- eiffante du fang & des humeurs. Les friétions faites avec des liqueurs fpiritueufes, chaudes , fouvent ré- pétées partout le corps, contribueront efficacement * au même but. Voyez FIEVRE HORRIFIQUE. FIEVRE ÉPIDÉMIQUE , de sai, fur, & d'os, peuple. On nomme fevres epidémiques ; populaires, ou communes, les fievres dé même efpece, qui chan- gent néanmoins fouvent de caraétere & de nature, attaquent indifféremment dans certains tems toutes fortes de perfonnes de l’un & de l’autre fexe, de tout âge , de tout ordre, & comme par une efpecé de Con- tagion. Voyez EPIDÉMIES. On ne peut trop lire Les auteurs qui ont traité ce fujet; Hippocrate, epidemior. Baillou , Sydenham ; les obfervations des medecins de Breflaw, d’Edim- bourg ; Roger, dans fon effai on épidémical difeafes; Cleghorn, oz epidemical difeafes of minorca, &tc. Et pour les fevres épidémiques des armées, des camps, des hôpitaux , fvres bien différentes de celles qui regnent ailleurs, voyez l'excellent livre du doéteur Pringle , intitulé obfervations on the diféafes of the ar- my. London, 1753, 21-8°. FIEVRE ÉRÉSYPÉLATEUSE, eft celle qui eft ac- compagnée d’éréfypele, ou qui en eft l'effet. Voyez ERÉSYPELE. . La caufe prochaine de léréfypele eft le paffage des globules rouges du fang dans les vaiffeaux lym- phatiques de la peau, fur-tout dans ceux qui compo- {ent le lacis lymphatique. | Caufes de certe fevre. Cette fievre procede ordinai- tement, 1°. d’un fang charge d’une humeur acre & fubtile de la bile , de l’humeur de la tranfpiration, ou de celle de la fueur, qui ont été arrêtées : 2°. de Pufage d’alimens gras, & de boiflons échauffantes & fpiritueufes: 3°. dans les perfonnes cacochymes, foibles, {corbutiques, ou dans celles-1là même qui jouiflent d’une bonne fanté, de la corruption fpon- tanée des humeurs excrémenteufes, mifes en mou- vement par quelque faute ou abus des chofes non- naturelles : 40. de la conffitution particuliere du ma- lade. * Effers. L’humeur éréfypélateufe ne produit aucun figne critique dans les urinés; mais quand elle eft difperfée dans la maffe des humeurs par la circula- tion, elle excite une fevre plus ou moins forte, la nature tendant à fe décharger de l’hétérogene mor- bifique par une éruption fur la peau. _ Cure. Lorfque la fevreréré[ypélareufe eft confidéra- ble, accompagnée de fâcheux fymptomes, &c que l’é- réfypele eft malin, il faut recourir à la faignée, la ré- péter à proportion de la conftitution du malade, & de la violence des fymptomes. On doit joindre à ce remede les délayans , les calmans, les évacuans , & ee FIE 731 les diaphorétiques. Les délayans. donnent at hu- meurs plus de fluidité ; les calmans appaitent la dou- leur; & les diaphorétiques conviennent lor{que la maladie eft occafionnée par la fuppreflion de la tranf- piration. Les purgatifs font néceffaires dans les fe vres éréfypélateufes, produites par des humeurs qui Ont enflammé le fang , & qui l'ont déterminé à paf- fer dans les vaifleaux lymphatiques. On cortigera les humeurs pourriffantes par les anti-feptiques, le= gerément aftringens. | Quant à l’érélypele même qui produit cette fevre, on en peut tirer le prognoftic de fon éfpece, de fa cafe, de la partie que l’éréfypele attaque, & des accidens. L’éréfypele qui eft accompagné de dou- leurs violentes , de fievré confidérable, de diarrhée’, eft beaucoup plus fâcheux qué celui qui eft fans au- cun'dé ces accidens : maïs l'éréfypele qui eft fimple, benin, leger, fe diffipe promptement, & céfle avec la fevre , avant, ou peu de tems après, FIEVRE ERRATIQUE , febris erratica ; a&rakloc mu= pires. On nomme fevre erratique , vague, irrégulie- re, intercurrente, toute ffeyre intermittenité Où ré- mittente, qui a fes viciffitudes , fes exacerbations , fon cours, &c fa durée dans dés tems incertäins. De telles fevres fe préfentent fouvent aux obfer: vations des Medecins, dans les commencemens des intermittentes, fur-tout des quartes de Pautonine, & elles font pour lors très-irrégulieres: dé plus, fon remarque que les intermittentes long-tems prolon- gées , deviennent fréquemment erraiques, & que quelquefois les errariques {e changent en intefmitten- tés régulieres ; mais la méthode curative eft conf tamment la même, ou doit être, pour les fevres er- ratiques , comme pour les diverfes intérmittentes, Auf nous ne nous y arrêterons pas àci, Voyez l’arti- cle FIEVRE INTERMITTENTE. On nomme encore fevre erratique , celle qui fur: vient aux femmes par la fuppreffion du flux men- | ftruel: La curé de cette éfpece de fevré errdrique, confifte à procurer l'écoulement des regles par la Û 72 - e \ v Da! faïgnée du pié, l’ufage des vapeurs, des liimens, | des fumugations , des purgatifs utérins, les emména- gogues, les ffomachiques , les corrobotans , lés Cha lybés , l'exercice, FIEVRE ÉTIQUE : dans l’ufige ordinaire on écrit étique, & on le prononce de même ; mais comme lés | Latins difent heëfica febris | & les Grecs éxrikoe mupe- rôs , de 6; qui répond au mot habirus, qualité qu’on | a peine à féparer du fujet ; il en réfulte que laïffant à _ part la prononciation , il faut totjours écrire Aeé&igre dans un diétionnaire d'Arts, qui doit confervér l’o- | rigine des mots autant qu'il eft poffible. Foyez donc | FIEVRE HECTIQUE. FIEVRE EXANTHÉMATEUSE, C’efl une fzyre dc- compagnée fur tout le corps, où fur une partie du corps , de boutons inflammatoires nommés exarrhe- mes. | On fait que ce font de petites taches ou tubercu- les rouges, plus ou moins larges, avec où fans élé- vation , d’une bonne où d’une mauvaife qualité, Voyez EXANTHEME, | Caufes. Ces taches ou tubercules inflammatoires ont le plus fouvent 1°. pout matiere celle qui ne pouvant circuler dans les petits vaifleaux de la peau, s’y arrête; & 2°. pour caufes, la fuppreffion de la tranfpiration , la dépravation des humeurs, la force de la circulation des fecrétions, des exctétions, &c, De ces différentes caufes proviennent bien des for- tes de puftules, qui donnent aux ffevres qui les! ac- compagnent, les divers noms d’exarthémarenfe, d’e. réfypélateufe , de fcarlatine’, de pérechiale TOU9e ;, de pétéchiale pourpre, de railiaire blanche & rouge, de, rougeole, & de petite vérole, Voyez toiis ces mors. -Prognoflics. La nature. des exanthemes, 1er ca= 732 FTE raétere | & les fÿmptomeskqui les accompagnent dans cette fevre, prognoftiquent le bien ou le mal qu'on en peut attendre. La plüpert des feyres exan- thémateufes {e terminent prefque toüjours sûrement par des éruptions benignes à la peau, & de telles éruptions calmeént fouvent les fâcheux fymptomes des fevres aiguës ; maïs les humeurs corrompues dans le corps , qui s’arrêtent fur les parties extérieures par un tranfport imparfait, & fe dépofent en mê. me tems fur les parties intérieures, où elles produi- fent des opprefions, des anxiétés, &c autres defor- dres, font d’un fâcheux préfage, furtout quand elles Iont fnivies de déjedions putrides fans aucun fou- lagement, L’hétérogene qui forme une éruption im- parfaite, menace les malades d’un plus grand dan« ger dans les fevres pourpreufes, pétéchiales , & mi- liaires, que dans les exanchémateufes , fcarlatines, & rougeoliques. Les fevres exanthémareufes épidémi- ques font ordinairement contagieufes & d’une mau- vaife efpece. Cure. La méthode curative exige en général les boiffons legeres, diluantes, apéritives, pour don- ner de la mobilité à la matiere , & pour que la force de la vie perfévere toüjours dans une jufte modéra- tion ; car par ce moyen les exanthemes fe diffipent, en faifant tomber l’épiderme par écailles. La cure particuliere doit fe rapporter aux diverfes caufes de la frevre. Par exemple, Les fevres exanthémateufes occafionnées par la tranf- piration ou par la fueur, dont la matiere retenue eft devenue plus acre dans les gens foibles, valétudi- naires, cacochymes, bilieux , demandent pour re- medes de legers diaphorétiques internes, & quel- ques anti-putrides. … Lorfque les fevres exanthémateufes procedent de mauvailes humeurs, afflemblées dans le yentricule & dans les inteftins, de bile corrompue, de la nour- titure de moules, ou autres cruftacés vénimeux…, il faut commencer par les purgatifs ou vomitifs, pour chaïfer du corps la matiere morbifique. Dans les fevres exanthémateufes produites par de violens exercices , l’abus des échau#ans & des acres, onufera de diluans, de réfrigérans , &c de relâchans, mais les fevres exanthématenfes épidémiques, qui ont été animées par des échauffans, ou par des cardia- ques ftimulans, veulent une diete legere , des laxa- tifs, & des anti-phlogiftiques, pour éviter la métaf tafe dans les parties internes. Obférvations de pratique. Le préjugé trop teçu fur la mamiere d’agir des remedes échauffans, a fait ima- giner qu’ils poufloient l’hétérogene morbifique vers la peau, & qu'ils le détournoient des parties inter- nes, parce qu'on a vü que quelquefois l’éruption ef accélérée par leur fecours , que les puftules font fort vives, & qu’elles croiffent promptement ; mais bien des raifons nous empêchent d’avoir une opimon avantageufe de ces fortes de remedes. En effet lorf- que l’éruption extérieure eft d’un mauvais caraîte- re, que les accidens de la maladie font formidables, les remedes échauffans augmentant la fevre & l’acri- monie des humeurs, portent la violence de l’éruption intérieurement comme extérieurement, & par con- féquent aggravent la maladie : de plus ils n’ont au- cune vertu pour dompter la malignité du venin & du délétere ; auffi les bons praticiens n’ofentles pref- crire que lorfqu'ilsfont indiqués par l’abattement des forces & la débilité du pouls, que l’on ne peut attri- buer à la pléthore fanguine : hors de ce cas, leur.cir- confpetion les engage à les fupprimer entierement. Il eft vrai que lafeyre précede &c accompagne tof jours les éruptions Les plus favorables ; il ef vrai en- core qu’elle n’eft point fufpeéte aux grands maîtres, quand elle eft fimple; mais le rapport des remedes échauffans avec celui de la fœyre , n’eft point le mê- PTE. me, on ne doit pas les comparer enfemble, & leur attribuer les mêmes avantages. L’a@ion que les re- medes échauffans excitent , n’eft pas comme la fevres. un effet du propre mécharifme de la maladie, c’eft l'effet d’une caufe étrangere à cette maladie: ainf laétion des remedes échauffans peut altérer l’ordre de ce méchanifme, & produire quelques accidens fpafmodiques , capables de s’oppoler & à la dépura- tion & à l’éruption. Il faut donc les regarder prefque tolijours,ou comme nuifibles, ou du moins comme inutiles. | L'idée qu’on s’eft formée de l’opération des grands diaphorétiques & des fudorifiques dans les éruptions cutanées, ne paroît pas moins chimérique. L'effet propre de ces remedes eft d’exciter l’a&tion des filtres de la peau, & de provoquer une plus srande excré- tion par la voie de la tranfpiration ; maïs ils ne ponf- {ent point, comme plufeurs medecinsfe l’imaginent, du centre à la circonférence (pour me fervir des ter- mes vulgaires), 1ls ne conduifent point à la peau les humeurs dont ils provoquent l’excrétion ; elles y font entraînées par le cours ordinaire de la circula- tion, & ce n’eft que là où les diaphorétiques & les fudorifiques agiflent;, en, provoquant l’évacuation de ces humeurs: mais dans les éruptions, ilne s’agit nullement de cette évacuation ; ainfi ces remedes ne font encore d’aucun avantage à cet égard; ils ne peuvent pas même alors produire leur effet ordinai- re, parce que les organes de la tranfpiration font d'autant plus léfés, & leurs fonétions d’autant plus empêchées, que l’éruprion eft confidérable , & qu’= elle dérange le tiflu de la peau. Enfin les éruptions fe font par l’affinité du délétere ou du venin, avec la partie qui eft plus fufceptible que les autres de fon impreflion. | Concluons, avec M. Quefnay, que les idées com- munes fur la dépuration des humeurs par l’évacua- tion, & fur la maniere de la procurer par les échauf. fans, les diaphorétiques & les fudorifiques ,ne pré- fentent à l’efprit que des erreurs, qui deviennent pernicieufes par les fauffes indications qu’elles fug- gerent dans la pratique de la Medecine. Voyez auffr Huxham, 22 Fevers. £ FIEVRE HECTIQUE, febris tabida , & par les mo- dernes heéfica ; fievre chronique, continue, ou rémit- tente, qui dans la durée de fon cours croit en vio- lence & en nombre de fâcheux fymptomes, mine peu - à- peu tout le corps, confume les fucs, détruit les forces, & conduit ordinairement le malade au tombeau. | Signes de cette fievre. Cette fsvre fe manifefte par un pouls foible, dur, petit, & fréquent ; la rougeur des levres, de la bouche, des joues , qui s’augmente dans le tems qu’il entre de nouveau chyle dans le fang ; une chaleur inquiétante, une aridité brûlante dans la peau, qui eft fur-tout fenfible aux mains après les repas; une urine nidoreufe, écumeufe, qui dé- pofe un fédiment & porte fur fa furface un nuage leger, gras, de couleur foncée ; le defir de toute nour- riture froide, la fécherefle de la bouche, une foif continuelle, Le fommeil de la nuit fans foulagement, & la langueur répandue par-tout le corps. À cet état fuccedent des crachats glutineux &écu- meux , un fentiment de poids & de douleur dans les hypochondres, une grande fenfibilité aux moindres changemens de tems, un état qui empire dans les équinoxes , & principalement dans celui de l’autom- ne ;une tête étourdie au reveil, des évacuations d’hu- meurs ténues & férides par les fueurs, les urines , les felles ; Pabattement de toutesles forces, & cette éma- ciation univerfelle qu’on nomme warafme. Le mal croiffant roûjours, produit de nouveaux fymptomes encore plus funeftes , des tremblemens, des taches , des puftules, une couleur livide & plom + | bées ee bée , le vifage cadavéreux quine fe voit dans aucu- ne autre maladie aufli completement que dans celle- ci &c dans la confomption. > Enfin la fcene fe termine par des aphthes de mau- vais préfages , le vertige, le délire, la fuffocation, l’enflûre des piés, des fueurs perpétuelles & exceffi- ves , des diarrhées colliquatives, le hoquet , les con- vulfons, la mort. Gaufe prochaine. La fievre hectique fuppofe la corrup- tion dans la mafle générale des humeurs ; corruption par laquelle les fucs albumineux, gélatineux, tom- bés en colliquation, fourniflent un aliment perpétuel à cette maladie. C’eft cette même putridité qui pro- cure la chaleur dont cette feyre eft accompagnée; en même tems l'humeur putride nuit aux fluides ner- veux & aux parties nerveufes, & les jette dans une violente contra&tion. Plus la quantité des humeurs cofrompues produites par la maladie incurable des vifceres eft grande, plus auffi les fymptomes de la févre font terribles. | Prognoffics. Les jeunes gens font promptement emportés, & plus expofés à la fevre heblique que les adultes, Dans le premier commencement de l’ulcé- ration de quelque vifcere , cette ffeyre fufcitée par la nature , eft quelquefois le remede du mal au moyen d’une heureufe crife : mais fi la caufe ne peut être détruite, la fevre hedique fubffte fans cefle. Le flux hémorrhoïdal ou autre quelconque, avance commu- nément la mort dans le dernier période de la fevre heëlique ; au lieu qu’au commencement il en produit quelquefois la cure. Une fevre heétique confirmée & parvenue à fon dernier période, n’admet jamais de guérifon ; tout l’art humain confifte à adoucir les fymptomes de la maladie , & à éloigner fon pério- de fatal. Méthode curative. La fevre heëlique procede nécef- fairement des mêmes caufes que la feyre lente; ainf voyez l’article FIEVRE LENTE. Mais comme ici les mêmes caufés ont déjà fait de plus grands ravages, les reflources de l’art & de la nature donnent de beaucoup plus foibles efpéran- ces ; les corps font plus épuifés , & les fucs font plus éloignés de leur homogénéité ; le mouvement périf- taltique de l’eftomac & des inteffins fe trouvant plus affo1bli, le chyle qui paffe comme crud & épais dans la mafle du fang , détruit par fa qualité hétérogene la crafle des fluides, & interrompt le mouvement uni- forme des folides, S1 la frevre hectique paroït après la fuppreflion des évacuations ordinaires d’un flux hémorrhoïdal , des menftrues, des vuidanges, du lait, ou après la fup- preflion d’une gonorrhée arrêtée, de l’écoulement d’un ulcere, d’une fiftule, d’un cautere, ou en con- féquence de la rentrée de puftules cutanées, exanthé- mateufes, dartreufes, &c. on comprend fans peine qu'il faut ramener prudemment les évacuations fup- primées , regénérer des fucs louables , & garantir les humeurs d’une nouvelle éruption par le fecours des anti-putrides & des doux balfamiques. La fievre heëtique qui fe manifefte après l’hémopty- fie, la pleuréfie, la péripneumonie, & autres mala- dies aiguës, en conféquence de quelque ulcere dont le pus s’eft porté dans la mafle du fang , demande tous les foins poflibles pour corriger cette infection, la diete analeptique, le lait de femme, d’ânefle, les tifanes préparées avec l’avoine, la racine de chico- rée fauvage, les fleurs de pavot, & quelque peu de nitre antimonié ; les fubftances gélatineufes acidu- lées, les parégoriques après de douces évacuations, les balfamiques , les corroborans, dont le plus im- portant eff l’exercice modéré du cheval. Lorfque cette ffevre émane de fucs vifqueux dans les premieres voies, le bur de la cure doit tendre à atténuer ces fucs, les expulfer par les fels neutres Tome FI, | FIE 73 donnés en petites dofes & fouvent répétées ; enfuite à employer les analeptiques & les flomachiques, tels que font l’eflence de cafcarilles , avec un peu d’efprit de nitre dulcifié. Si lon foupçonne que la fevre hétlique vienne de l’obfiruétion des vifceres, & fur-tout de l’obftruc- tion du méfentere , ce qui arrive fréquemment , il faut lever ces obftruétions par les remedes capables d'y parvenir, comme par exemple, par la teintute martiale jointe au fuc de pomme , fecondée des eaux minérales chaudes, & de l’exercice. Les fymptomes de la fevre heélique ne fouffrent que de legers palliatifs, On adoucit la chaleur fébrile par la boiffon des émulfions de femences froides, prépa rées avec une décoétion de corne de cerf & d’eau- rofe; par les gouttes anodynes d’Hoffman, ou par celles d'efprit de foufre & de vitriol. L’acrimonie de la matiere ulcéreufe peut être émouflée par les in2 craflans, les adouciffans , & les balfamiques, On re. prime la toux par les mêmes remedes , auxquels on joint les parégoriques prudemment employés, les pilules de fforax, le laudanum liquide en petite dofe , le blanc de baleine mêlé avec le firop de pa- vot, &c. Dans la diarrhée, on peut joindre la con- ferve de rofe au lait chalybé, & la gomme arabique aux émulfions calmantes. Les fueurs colliquatives ne doivent pas être fupprimées violemment , mais modérées par les opiates, par l'écorce de cafcarille mife en électuaire , avec le firop de jus de citron & Ta conferve de rofe, En général , plus la fevre he&i- gue auosmente, moins elle demande de remedes mul- tipliés. Pour ce qui regarde la fevre hectique des veillards nommée arafme , voyez MARASME. Obférvations, Hippocrate a décrit fort exaftement la fevre hettique fous le nom de confomption du corps, tabes, dans fon traité de internis affeéhionibus. L’ouver- ture des fujets morts de cette maladie offre tantôt des abcès dans quelqu'un des vifceres, &c tantôt des tu- meurs skirrheufes ou ftéatomateufes. FIEVRE HÉMITRITÉE. Voyez HÉMITRITÉE, | FIEVRE HOMOTONE: on nomme feyres homoro= nes , toutes f£evres continentes qui reftent pendant leur durée à-peu-près dans le même degré de force, fans augmenter ni diminuer ; mais l’exiftence de ces prétendues fevres eft fort douteufe, comme le remar- que M. Quefnay. On en trouve très-peu d'exemples dans les obfervations des praticiens ; & ces obferva- tions mêmes ne pourroient mériter de créance, qu’au tant qu’elles feroient données par plufeurs obferva- teurs véridiques , qui auroient pañlé affidument les nuits & les jours auprés des fébricitans. FIEVRE HONGROISE, fébris hungarica , efpece de frevre endémique, maligne, contagieufe, & fpéciale- ment caratérifée par une douleur intolérable vers l’orifice de l’eftomac ; mais comme on connoît davan- tage cette fvre fous le nom particulier de raladie hongroife, voyez; MALADIE HONGROISE. FIEVRE D'HÔPITAL, efpece de fevre continue, contagieufe 8 de mauvais caraétere, qui regne dans les hôpitaux des villes & d’armées, dansles prifons, dans les vaiffeaux de tranfport pleins de pañlagers , qui y ont été long-tems renfermés, en un mot dans tous les lieux fales, mal aérés, & expofés aux exha- laifons putrides animales, de gens mal-fains, blelés, malades, preflés enfemble, & retenus dans le même endroit. Symptomes. Cette fievre commence lentement par des alternatives de froid & de chaud, de petits trem- blemens, un engourdiflement dans les bras & dans les jambes, le dégoût, une douleur de tête fourde s un pouls fréquent, la langue blanche & humide. À ces fymptomes fuccedent de grandes laftudes, des naufées, des douleurs dans lé dos, la ffupeur AÂaaa 734 FETE dans la tête, l’altération dans la voix, l'inégalité de : la fréquence du pouls, la fécherefte d’une peau brü- Jante, l’abattement des efprits, les tremblemens de mains, fouvent des taches pétéchiales, quelquefois des fueurs froides & des diarrhées non critiques. Enfin l’infomnie , le coma vigil arrivent, le vifage devient blème, le regard fombre, les yeux font en- flammés & boueux , le délire s’allume, l’oiie fe perd, la langue tremble , Les tendons font attaqués de fou- brefauts, /xbfuliibus , la vûe fe trouble, les déje&tions . font colliquatives & d’une odeur cadavéreufe, le froid s’empare des extrénutés, les convulfñons empor- tent le malade. _ La durée de cette fcène eff fort incertaine, car elle finit quelquefois en s ou 6 jours, d’autres fois en 14 ou 21 ; quelquefois cette fevre fe transforme en hec- tique, & d’autres fois elle fe termine en fuppuration des parotides. Prognoftics. Ceux qui ont été affoiblis par des ma- ladies précédentes , ou qui ont été guéris par la fali- vation, font plus fufceptibles d’infeétion que d’autres, Les femmes ÿ font moins expofées que les hommes, &c en échappent plus aifément, mais la guérifon ne préferve perfonne de la rechûte. Les plus mauvais fi- gnes font ceux du troifieme période de cette mala- die, 1ls annoncent prefque toüjours la mort. Cure, La cure demande d’être variée fuivant l’état & les périodes de la fevre. On peut employer dans le commencement avec fuccès les atténuans, les fudo- tiques & les anti-putrides ; la faignée devient feule- ment néceffaire file malade eft pléthorique. La tranf- piration veut être toùjours entretenue. Dans le fe- cond état, la faignée eft pernicicufe, & les vomitifs inutiles, Les diaphorétiques legers font toûjours con- venables ; les tifanes doivent être acidulées d’ef- prit-de-foufre ou de vitriol; le vin de Canarie mêlé dans du petit-lait, fournit une des meilleures boif- fons, & des plus propres à procurer une heureufe crife. Dans le troifieme état, la medecine n’ofre prefque d’autre fecours, que de tâcher de ranimer & de foù- tenir les forces de la nature , ce qu’on peut effayer par des liquides vifqueux, aromatiques ; l’efprit-de- corne de cerf donné de tems en tems, & par la pou- dre de contrayerva , réunie à une legere teinture de l'écorce du Pérou ; la diarrhée doit être modérée & non fupprimée. Le délire demande lapplication des vélicatoires &c des finapifmes. Dans la fuppuration des parotides, on ouvrira l’abcès aufli-tôt qu’il fera formé. En cas du rétabliffement du malade, après avoir nettoyé les premieres voies, on employera les corroborans, les ftomachiques, le quinquina, l’exer- cice, & fur-tout le changement d’air. La partie fondamentale de la méthode curative, eft d’éloigner le malade du mauvais air. Quand cela n’eft pas poffible, il faut purifier l’air qu’il refpire par le feu, la fumée de vinaigre, les bayes de genievre, & autres femblables, enfuite renouveller cet air très- fouvent jour & nuit, tenir les rideaux des lits ou- verts, & féparer les malades ; fans ces moyens pré- liminaires, il y a peu d’efpérance de parvenir à leur rétabliflement. Voyez lexcellent chapitre que M. Prin- gle a fait de cette f£eyre maligne, dans {es ob/érvations Jur les maladies d'armées. FIEVRE HORRIFIQUE, phricodes febris, fievre ac- compagnée de friflons & de tremblemens plus ou moins longs, lefquels friffons & tremblemens font une affeétion morbifique rarement féparée de la fe- yre. Leur caufe prochaine. Les frffons montrent qu'il y a une ftagnation des fluides.dans les extrémités, avec une moindre contra&ion du cœur; le tremblement marque une alternative de tenfion & de relâchement dans les mufcles en peu de tems & involontairement, de forte que la circulation du liquide artériel & du fuc nerveux eft tantôt continuée & tantôt interrom= pue. Quelquefois ces deux fymptomes font caufés par l’engorgement fpafmodique du cerveau, qui por- te le defordre dans tout le genre nerveux. Si le froid &c le tremblement font violens &c de longue durée, ils forment des obftacles à la circulation des humeurs, & produmfent les vices qui en font les fuites. Cure, La méthode curative confifte à rétablir l’é- galité de la circulation & celle de la preffion du fang artériel & des efprits, de l’un contre les parois des arteres , & des autres fur les fibres motrices : c’eft ce qu'on peut faire au commencement de la fevre dans laquelle ces deux fymptomes de friflons & de trem- blement fe trouvent trop violens,, en employant les remedes qui difipent la lenteur ,tels que font des boif fons d’eau chaude nitrée, avec un peu de miel & de vin, les lotions des liqueurs fpiritueufes & nervines, les fomentations faites avec ces mêmes liqueurs, & les legeres fritions par tout le corps. On y joinéra les corroborans & les fortifians. Oëfervations de pratique. On doït regarder en géné- ral les friflons , les horripulations , les tremblemens fouvent répétés , comme des états convulfifs fort de- favantageux dans le cours des fevres continues, par ce qu'ils affeétent beaucoup l’aétion du cœur & des arteres, & dérangent le méchanifme de la coftion, comme on le remarque aifément par le changement qui arrive alors dans les urines. Les friflons &r les tremblemens qui fuccedent à la fueur, font d'autant plus dangereux, qu'ils marquent que la fueur elle= même n'eft qu'un mauvais fymptome de la maladie. Enfin les tremblemens convulfifs font de mauvais préfage dans le temsdufrifloncritique des fevres con- tinues, lorfqw’ils font fuivis de chaleurs paflageres qui s’entre-fuccedent alternativement, Voyez Hippo- crate. FIEVRE HUMORALE, fievre caufée &c entretenue par une matiere hétérogene quelconque, difperfée dans la maffe des humeurs circulantes. On eff porté à admettre ces fortes de fevres, fi l’on confidere qu'une matiere acre introduite dans nos humeurs, & qui circule avec elles dans les ar teres, peut irriter immédiatement les membranes de ces vaifleaux, & y produire la fréquence de vibra- tions que nous nommons fevre. La caufe des fevres humorales eft évidente par les effets mêmes des matieres irritantes qui paflent dans les voies de la circulation. Les infpeétions anatomi- ques de cadavres où l’on ne découvre aueun vice des parties, donnent lieu de croire que la fevre & autres accidens qui pouvoient l’accompagner, ne furve- noient pas d’uneirritation locale ; d’où l’onjuge qu’il faut les attribuer à une caufe errante, difperfée dans la mafle des humeurs. Le déletere de la petite véro- le, ce principe de la fevre dans cette maladie , & fou- vent de beaucoup de defordres avant l’éruption, eft certainement errant & difperfé ; éruption qui en ré- fulte par toutle corps, & qui apporte enfuite le cal- me, en eft une preuve manifefte. Cet exemple, & plufeurs autres qu’il feroit inutile d’alléguer, ne permettent pas de douter de l’exiften- ce des caufes humorales, qui, livrées au torrent de la circulation , peuvent fufcitet la fevre. C’eft aufli ce qu'on voit arriver tous les jours dans les fevres qui commencent par des friflons & des tremblemens con- _ fidérables, car alors le premier effet de l’hétérogene erranteft d’exciteravec la fevre,unfpafme quidomine fut elle, & qui en fufpend prefque tous les phénome- nes. Ce fpafme mérite notre attention, 1°. parce qu'il dénoteun caraétere irritant ; 2°. parce qu'il s’oppofe fouvent aux opérations falutaires de la fevre, qui tend à la guérifon du malade ; 3°. parce qu'il arrête FIE les fectétions des fucs excrémenteux qui fe forment continuellement, & qui doivent être chaflés hors du corps. Ainfi l'indication curative dans de telles fevres , eft de chercher à connoître le caraétere de l’hétérogene irtitant, pour le corriger &t le détruire par les rème- des convenables FIEVRE INFLAMMATOIRE, fevre aigue ou ffevre ardente dont l’inflammation eft répandue générale- ment {ur tout Le corps , lorfqu’elle n’eft pas fixéepar- ticulierement dans telou telorgane. Elle confifte dans la vitefle de la circulation rendue plus forte & plus fréquente par la contration du cœur, en même tems que la réfiftance eft augmentée vers les vaiffeaux ca- pillaires. Ainfi fon fiége eft toute partie du corps où {e diftribuent des arteres fanguines, & où les lympha- tiques prennent leur origine. Voyez FIEVRE AIGUE, FIEVRE ARDENTE , INFLAMMATION. FIEVRE INTERMITTENTE, fébrisintermittens , C’eit celle dont l’intermiffion périodique produit toûjours une entiere apyrexie entre deux no Ses diftinions en différentes clafles font faciles à faire , n'étant fondées que fur la feule différence du tems que ce mal dure; & c’eft d’après la différente durée de ces fevres, qu’on les nomme quotidienne, tierce , demi-tierce, quarte , double-quarte, &e. Il y en a quelquefois de quintes, mepñraioy , & même Boer- haave en a vù de /eprenaires exquifes. Diffinétion des fevres du printems & d'automne. Maïs une diftinétion eflentielle, c’eft celle des fevres inter- mittentes de printems & d'automne. On appelle en gé- néral fevres sncermittentes de printems, celles qui re- gnent depuis Le mois de Février jufqu’à celui d’Août: & fievres intermireentes d'auromne , celles qui commen- . Cent au mois d’Août & finiflent en Février. Cette dif- tinétioneft très-néceflaire à caufe de la différence qui {e trouve, tant dans la nature &cles fymptomes de ces deux fortes de fevres, que dans leur fin, leur du- rée & leur traitement; d’ailleurs une fe change en l’autre. Souvent même au commencement de l’au- tomne , elles imitent exaétement les fevres continues à caufe de la longueur & du redoublement des accès; cependant leur caractere & leur cure different extrè- mement. | Cours © caracteres de la fievre intermittente. Elle com- mence avec des bällemens, des alongemens, avec lafitude , débilité, froid, friflon, tremblement, pâ- leur aux extrémités, refpiration difficile, anxiété, naufée, vonuflement, célérité, foiblefle & petitefle de pouls. Plus ces accidens font confidérables & plus il s’en trouve de réunis enfemble, plus la feyre, la chaleur & les autres fymptomes qui la fuivent, font mauvais ; tel eft le premier état de la fevre intermit- sente, & cet état qui répond à l’augment des fevres continues, eft aufh le plus dangereux de tous : alors Purine eft ordinairement crûe &c ténue. Harvée enouvrant des cadavres de gensmorts dans ce premier degré de fevre incermirtente, après des op- preffions, des foûpirs , des anxiétés, des langueurs qu’ils avoient fouflert, a trouvé le poumon farci de fang épais. Harv. exercir. anar., ch, xvj. Au premier état il en fuccede un fecond, qui com- mence avec chaleur, rougeur, refpiration forte, étendue, libre, moins d’anxiété , un pouls plus élevé plus fort, une grande foif, de la douleur aux articu- lations &c à la tête, le plus fouvent avec des urines rouges & enflammées. Enfin 3°. la maladie finit d’ordinaire par des fueurs plus ou moins abondantes : tous les fymptomes fe calment, les urines font épaifles, & dépofent un fé- fliment reflemblant à de la brique broyée; le fom- meil , Papyrexie & la laffitude furviennent. Ses effets. La fievre intermittente qui eft de longue -gugée, endommage les fibres des petits vaifleaux & Tome VI, LA FVDE 735 des vifceres par la ftagnation, l’obftru&tion , la coa- gulation, l’atténuation qu’elle caufe; de-là non-feu- lement les vaiffeaux s’affoibliffent, mais les liquides dégénerent principalement, en ce que leurs parties font moins homogenes & moins également mêlées ; de ces vices naît l’acrimonie des liqueurs, & detou- tes ces chofes enfemble, fuit une difpofition aux fueurs, qui débilite beaucoup par la perte de la vif cofité même du fang qui fort avec elles ; l’urine eft alors trouble, grafle & épaifle : telle eft auf la {ali ve : ainf le fang étant affoiïbli, diflous, privé de fa meilleure partie, celle qui refte devient acre &te- nace ; c’eft conféquemment par le relâchement des vaïfleaux , Pépaifliflement & l’acreté des liqusurs, que ces fevres, lorfqu’elles durent long-tems, dégé- nerent quelquefois en maladies chroniques, telles que le fcorbut , l’hydropifie, l’iétere, la leucophles- matie, les tumeurs skirrheufes du bas-ventre, & au. tres maux qui en réfultent, Caufe prochaine des frevres intermittentes. Après cette exaête difcuffion du cours des fevres intermittentes , on établit pour leur canfe prochaine la vifcofité du liquide artériel, & peut-être linaétion des efprits , tant du cerveau que du cervelet, qui font deftinés pour le cœur,quand par quelque caufe que ce foit,la contraétion du cœur devient enfuite plus prompte 8ë plus forte, & quand la réfolution des humeurs QUE {ont en flagnation, vient à fe faire. Par conféquent comme il n'eft point de fevre intermittente qui ne gar= de cet ordre, il paroît que celui qui a pû furmonter le premier tems & la premiere caufe , aura la force de fupporter entierement le paroxyfme. Maïs comme le premier état d’une fevre intermit- tente & {a caufe prochaine peuvent venir d’une in- finité de caufes , même aflez peu confidérables, le£- quelles peuvent plufieurs à la fois, prendre naiffance au-dedans du corps, & y faire des progrès dans un état déterminé ; nos foibles lumieres ne fauroient diftinguer cette caufe attuelle d’une infinité d’autres poflibles , encore moins donner la raifon du retour périodique des fevres, fuivant les lois de l’économie animale. Ce font des fecrets que la nature fe plaît à cacher à l'intelligence humaine. Cure. Dans le.tems de l’apyrexie, où même dans le premier état de la fevreintermistente, on doit avoir recours aux apéritifs falins , aux alkalis, aux aroma tiques , aux fels minéraux, aux délayans, aux ma- tieres douces & balfamiques ; la chaleur, le mouve- ment & les friétions conviennent auf. De plus, s’il s’eft fait dans les premieres voies un grand amas de mauvaifes humeurs , on les évacue pat un purgatifou fouvent par un vomitif, pourvû qu’on le prenne dans un tems affez éloigné du paroxyfme, pourvû qu'il faffe fon effet avant {on retour. Ce re= mede eft indiqué par le régime qu’on a obfervé, par les maladies &c les fymptomes qui ont précédé , par les naufées, le vomiflement , les rapports, le gonfle ment, par l’haleine, par les faletés qui paroiïflent {ur la langue, au gofer , au palais, par l’anorexie, par l’amertume de la bouche, par le vertige ténébreux ; après l'opération du purgatif ou du vomitif, il faut avant le retour de l’accès fuivant, appaifer Le trouble qu’il a pù caufer, par le fecours d’un opiat, d’un cal- mant, d’un narçotique, On diffipe auf & le froid de la fevre, 8 la fievre même, par un fudorifique ; & voici comment. Quel- ques heures avant le retour de l’accès, on donne au malade une grande quantité de tifane apéritive, délayante, un peu narcotique : enfuite une heure avant le paroxyfme, on le fait fuer, & on ne cefle que deux heures après le tems que Faccès a recom- mencé, ou qu’il auroit dù reparoître. Le fecond état de la fevre intermirsente indique Ja néceflité d’une boifon aqueufe, chaude, nitrée, un Aaaa 736 FIE peuacide, avec de la chicorée &c de femblables apé- ritifs doux, Le malade doit d’ailleurs fe tenir en repos, & dans une chaleur modérée. Quand la crife met fin à l’accès, on répare les fueurs & les urines par des tifanes vineules, des bouillons de viande, des déco@tions tiedes; ainfi loin d’exciter la fueur par la chaleur, par des médicamens ou à force de couvertures, il fufit de l’entretenir dou- cement, en augmentant feulement la quantité des fluides qui doivent lui fervir de matiere. Enfin on re- médie aux fymptomes preflans, felon les regles de Fart. La fevre étant tout-à-fait difipée, on reftaure le malade par un régime analeptique , par des corrobo- rans: on le purge enfuite quand fes forces le permet- tent. S'il s’agit d’une violente fevre d'automne , fi le corps eft affoibli par la maladie, fi elle eft déjà mvé- térée, s’il n’y a aucun figne d’inflammation, de fup- puration interne , ni d'aucune obftruétion confidéra- ble dans quelque vifcere, c’eft alors que le quinquina donné dans l’apyrexie eft effentiel , en poudre, en1n- fufon, en extrait, en décoËtion, en fyrop, avec les remedes convenables, en obfervant la méthode, {a dofe & le régime néceflaire. De plus les épithèmes, l’onétion de l’épine du dos , 8e Les boifons aftringen- tes font de quelque utilité. Obférvations de pratique, Pour traiter chaque feyre d’une maniere qui lui foit particuliere , il faut remar- quer, 1°. que les fevres intermittentes , vraies, finif- fent d'autant plütôt, qu’elles ont moins de remife, & réciproquement au contraire; 2°. qu'alors elles approchent plus de la nature des fevres aiguës, & ont plus de difpofition à fe convertir en elles ; 3°. qu’el- les naïflent d’un plus grand nombre de caufes, êz peut-être de caufes plus mobiles; 4°. que confé- quemment les fevres de printems fe diffipent d’elles- mêmes par la chaleur qui furvient; 5°. qu’au con- traire en automne le froid fuccédant au chaud, rend les fevres inrermistenres plus violentes & plus opinià- tres ; 6°. que de-là il eft facile de juger quelles font les fevres qui demandent à être traitées, & comment elles le doivent être ; 7°. quelles font au contraire les fevres dont il faut abandonner le traitementau ré- gime , au tems, à la nature; par exemple la plüpart des fevres intermitrentes de printems, qui n’açcablent ni ne débilitent point le malade , font dans ce der- nier cas. L’ancien proverbe anglois, az ague in the Jpring, is a phyfick for a king , la fevre du printems eft un remede pour un roi; ce proverbe, dis-je, eft fondé en lumieres & en expériences, & M. Ray n’a pas dédaigné de prouver qu’on pouvoit le réduire à des principes inconteftables d’une favante mede- cine. En effet, la fevre bénigne intermittente eft un des moyens dont fe {ert la nature pour fe rétablir elle- même d’un état qui l’opprime , opérer la coétion des crudités qui la furchargent , ouvrir les obftruétions, tarir les humeurs furabondantes, dénoüer les articu- lations , &t difpofer les corps des jeunes gens à pren- dre tout l’accroiffement, la force 8 la vigueur dont ils font fufceptibles. Foyer FIEVRE SALUBRE. Jai lù quelque part (Zeser. édif. om. VIL.) que l’em- pereur qui regnoit à la Chine en 1689,envoya trois de fes medecins en exil, pour ne lui avoir point don- né de remedes dans une fievre intermittente, On diroit que quelques-uns de nos praticiens appréhendent d’é- prouver le fort de ces trois medecins chinois, par l’attention qu'ils ont de ne les point imiter ; cepen- dant la hiberté de leur profefion, nos mœurs & nos ufages doivent les raflürer : 1ls peuvent laïfler pafler le cours de la fievre intermirrente d’un monarque , fans danger pour leurs perfonnes, & fans crainte pour la vie du malade, | | dE FILE Mais la fevre intermittente fe change en remittente continue, aigue, lente , heétique ; c’eft alors fans doute qu’elle demande les fecours de l’art. Efauttoù- jours obferver en même tems, fi cette fevre eft pure où fymptomatique , ce qu’on découvrira en confidé- rant attentivement les divers fymptomes quil’accom- pagnent , la chaleur , le froid , la qualité du pouls, les déjeétions, les urines, les fueurs, la foibleffe, la durée, les redoublemens, les rechûtes. La fevre fim- ple obéit naturellement aux remedes ordinaires; mais la fevre fymptomatique accompagne toûjours la cau- fe dont elle émane , & ne cefle que par la deftruétion de cette caule, FIEVRELENTE,, fébris chronica, lenta. Febricula leni ta , Celf. Fieyre continue ou remittente, pat laquel- le la nature s'efforce lentement de fe débarrafler de lamas croupiflant du fang ou des humeurs dans quel- qu'un des principaux vifceres, & de préferver cette partie du danger qui la menace, Différence de la frevre lente 6 de la fevre heïtique. La Jievre lente proprement & diftintement ainfi nom- mée , differe à plufieuts égards de la fieyre he@ique, avec laquelle on la confond fouvent, D’abord elle differe de la feyre heétique dans fon ofigine ; car elle eft aflez généralement produite par la dégénération de fevres intermittentes mal traitées, ou violemment fupprimées par des aftringens ; mais la feyre hettique procede ordinairement de caufes plus graves , & eit liée aux terribles accidens des abcès , des vomiques & des empyemes, Dans la fevre Lente les vifceres ne {ont point encore grievement attaqués ; mais dans la fevreheétique , ils le {ont déjà par quelque ulceres apoftume, ou skirrhe. Ces deux maladies different auffi beaucoup par le caraëtere de leurs fymptomes ; dans la fevre lente, ils font fi lecers , que les malades doutent au commen- cement de l’exiftence de leur fievre ; mais ils font vio- lens dans la feyre heëtique. Ces mêmes fymptomes diminuent quelquefois dans la continuité d’une feyre lente ; ls empirent dans la fevre heétique. Dans la fe- vre lente , les fueurs font d’abord abondantes ; & dans la fevre heétique , les fueurs n’abondent que quand cette fevre eft parvenue à fon dernier période. La fs- vre lente eft fujette à dégénérer en d’autres maladiess la fevre hectique ne fouffre aucun changement. Enfin la fevre lente fe termine fouvent & heureufement d’el- le-même par les feuls fueurs de la nature ; La fierre heétique au contraire n’amende point , & devient prefque toûjours fatale, Signes de La fevre lente. La fievre lente fe manifefte par une chaleur non naturelle , à peine fenfble aw taët & aux yeux du medecin ; le pouls foible, fré- quent, inégal ; des urines troubles qui dépofent en s’éclairciffant , un froid interne avec de legers trem- blemens, de la pefanteur dans les membres , de la laffitude fans travail, une langue blanche , une bou- che feche , le manque d’appétit: ces fymptomes font fuccédés par des fueurs abondantes pendant la nuit, une foif continuelle , l'abattement des forces , le dé- périflement, la maigreur , la cacochymie, & autres maux qui en réfultent. Ses caufes, La fevre lente {e forme infenfiblement dans la fanté par la deftru@ion de l’équilibre , par les pafñionstriftes de l’ame par l'habitation des pays marécageux , par la corruption fpontanée des hu- meurs dans les fcorbutiques 8 dans les femmes atta- quées de fleurs blanches. Elle tire aufli fon origine de lobftruétion des vifceres, de quelque maladie aï- gue qui a précédé , de fevres intermittentes de toute efpece qui ont été mal gouvernées , de la fuppreffion des évacuations accoütumées, ou au contraire de lé- puifement des forces par de trop grandes évacua- tions , foit de fang , foit des humeurs. Prognoflies, Quand la fevre lente fuccede à une ins termittente, & revient de nouveau dans fon ancien état, elle n’eft point dangereufe; mais elle l’eft beau- coup quand elle refte la même , ou qu’elle dégénere dans une maladie aiguë, & fur-tout dans une fevre hectique : on pourra la foupçonner vraiment heéti- que, fi l'appétit reparoît , & que tous les mêmes fymptomes continuent ; s'il s’y joint une petite toux, une refpiration difficile , une pefanteur dans le bas- ventre , une douleur dans la maniere d’être couché, une chaleur feche , un pouls plus fréquent & plus agité. : Cure. On tâchera d’adoucir les paffions triftes par les réflexions & les moyens les plus propres à y par- venir : On changera de demeure , sl eft poffible. La corruption fpontanée des humeurs doit être trai- tée par les antifeptiques , les infufions de quinquina & l'ufage des corroborans. On tentera de lever les obftruétions par les atténuans , les incififs sommeux, ou les fels neutres ; enfuite on raffermira les vifceres par lesftomachiques & les chalybésles plus doux. Si la fievre lente provient d’une maladie aigue, le tartre vitriolé & l’antimoine diaphorétique , avec de legers cathartiques dans les jours intermédiaires , peuvent opérer la guérifon. Quand la fevre lente procede d’u- ne intermittente , il faut- tenter de la ramener à fon ancien état. Stahl propofe , pour y parvenir , une boiflon habituelle d’une infufion d’aunée, de pimpre- nelle, de centaurée , d’écorce d'orange & de féné, avec une petite quantité de rhubarbe dans quelque liqueur appropriée. Les évacuations fupprimées en demandent le cours pour la guérifon dela fevre lente ; mais au contraire, fi cette maladie eft l'effet de trop grandes évacuations du fang ou des humeurs, il con- _ vient de recourir aux alimens analeptiques pour ré- parer les forces , aux legeres teintures d'acier pour rétablir le ton des vifceres, & aux corroborans pour diminuer les fueurs noéturnes. Obférvations de pratique. Les Medecins ont obfer- vé que les enfans font fujets à une efpece particu- liere de fevre lente , qui eft accompagnée d’une en- flûre confidérable de bas - ventre, de l’exténuation des parties fupérieures, d’une chaleur vague , d’une toux feche, & d’une grande foibleffe. Cette efpece de fievre lente provient d'ordinaire de la vifcofité du chyle & dela lymphe, qui obftrue les glandes du mé- fentere. La méthode curative confifte dans les atré- nuans , les réfolutifs, les fondans, les favonneux, & les apéritifs. Hoffman confeille ici les fels de tartre, de nitre , d’arcanum duplicatum en parties égales, avec du felammoniac par moitié, le tout diflous dans une liqueur convenables Les bains, la chaleur, exercice , les fri@ions , les vefcatoires , méritent encore d’être recommandés. | C’eft Celfe qui a le premier indiqué la cure de la fievre lente , confultez-le, FIEVRE LIPYRIE, /pyria. On nomme ainfi la fevre qui eft accompagnée de froid extérieur du corps, & de Pardeur intérieure des entrailles : c’eftune efpece de ffevre épiale. Foyez EPIALE & LiPYRIE. FIEVRE MALIGNE, voyez MALIGNE. FIÈVRE MILIAIRE ox VÉSICULAIRE , voyez Mi- LAIRE. FIEVRE PESTILENTIELLE, eft celle qui eft produi- te par une caufe funefte , qui n’a aucune affinité avec nos excrétoires, qui eft indomptable à la coûion, & qui ordinairement ne fouffre pas d’iflues à l’exté- rieur. Lorfque cette caufe eft extrèmement pernicieufe, fpafmodique , colliquative, fphacélique , cauftique, on donne le nom de pe/fe à la maladie qu’elle procu- re. Voyez PESTE. Toute fievre quife termine par la gangrene de quel- que partie intérieure , a par-là le caractere des feyres qu'on appelle pefhilenrielles, Si la diflolution putride FIE 737 des humeurs eff exceflive, lesa@ions organiques font fi déréglées, & la corruption qu’elle communique aux folides eft fi rapide , qu’elle caufe promptement la mort ; éfpece de pefte , & même de pefte terrible & itremédiable, L’acrimonie de [a pourriture fe manifefte dans les Jfievres pefhlentielles par des tumeurs brûlantes, où les humeurs qui s’y fixent cautérifent , pour ainf dire, les chairs de la même maniere que Le font les caufti- ques. Cependant ces feyres ne fe terminent pas toû- jours fürement & heureufement parles bubons, char- bons, & gangrenes. Tous ces dépôts extérieurs font infufifans , quand il n’y a qu'une partie de la caufe de la maladie qui fe fixé au-dehors, & qu’il en refte affez dans la mafle des humeurs , pour produire dans l’économie animale des defordres mortels. IL faut : donc trouver le fecret de procurer des ouvertures & des fuppurations par lefquelles le délétere entier piufle être entrainé. Ainfi tant que les Medecins ne connoitront pas d’antidote capable de dompter ces délèteres, ou de s’oppofer à fes effets, ils manque- ront la vraie cute des fevres peflilentielles, Au refte, comme on a fouvent caraétérifé de frevres pefiilenrielles de fimples maladies épidémiques putrt- des, d’un mauvais caraétere, on a pareillement don- né le nom de pure pefte à des épidémiques peftilen- tielles ; c’eft ce qui eft arrivé à Plater; mais comme il a eu occafñon de voir dans le cours de fa vie, de- puis 1539 jufquà 1611, les regnes différens de fept fortes de fevres peflilenrielles | fes obfervations en ce genre méritent d'être lües ; voyez aufh Riverius , de febribus peflilentialibus ; & Vander-Mye , de morbis po- pularibus bredanis tempore peflis | Antuerp. 1627 , n- 4°. & fur-tout Diverfus (Petrus Salius) dans {on ex- cellent traité de febre pefhlenri, Bonon. 1584, 27-4°: ed. prim. Amftel. 1681, 27-8°. ed. opt. FIEVRE PÉTÉCHIALE, voyez PÉTÉCHIALE 6 Pé- TÉCHIES. FIEVRE POURPRÉE, voyez POURPRE. FIÈVRE PUTRIDE , eft fuivant les modernes cette fievre dont la colliquation putréfaétive des humeurs, forme le caraëtere diftin@hif. Voyez FIEVRE COLLI- QUATIVE & SYNOQUE PUTRIDE. : Je n’ajoûte ici qu’une feule remarque qui pourroit m'échapper dans le tems , & qui regarde une erreur très-commune & très-funefte dans la pratique dela Medecine. Lorfqu'une caufe quelconque portant la corruption dans nos humeurs , vient à exciter la fe- vre, l’on ne manque guere d’imputer la putréfation à la fevre qu’elle a fufcitée , & l’on penfe que cette fevre eft réellement une fevre purride. Pareillement quand une caufe maligne quelconque , produit outre la fevre d’autres accidens confidérables qui l’accom- pagnent, on croit que c’eft la f£yre elle - même qui eft maligne, & on la regarde comme le principe de toutes les ficheufes affeétions morbifiques qui fetrou- vent avec elle. Dans cette idée, la ferre devient feu- le Pobjet de l’attention du medecin, & pour lors ïl Patraque avec tant de hâte &c de violence , confécu- tivement par les vomitifs, les cathartiques , les fai- gnées abondantes repétées coup-fur-coup, qu’en peu de jours il n’eft plus queftion de la fevre ni du malade. Ædepol amice Jugulafii febrem ! FIEVRE QUARTE, 70Ye? QUARTE. FIEVRE QUOTIDIENNE , voyez QUOTIDIENNE. FIEVRE RÉMITTENTE ,eft cette efpece de fievre qui afoncours , de maniere que l’accès fuivant come mence avant que le précédent ait entierement ceflé, Obfervations fur les fievres rémittentes, 1°. Il n’eft point de fevre intermittente qui ne foit expofée à dé- générer en rémirtente , avec des redoublemens fixes ou inconftans, plus ou moins preflés, plus ou moins forts. 2°. De telles févres deviennent ordinairement longues , dangereufés, & produifent rarement une 739 FIEF bonne crife parce que leurs caufes inconnues font : difficiles à furmonter par les forces de la nature. 3°, Quelquefois les fevresendémiques , épidémiques , & peftilentielles, revêtent la nature des fievres rémitren- ces, 4°. La même chofe arrive fréquemment aux ma- ladies chroniques, dans la fonte de la graifle , dans la corruption accidentelle des fucs albumineux &c gélatineux, ainfi que dans la fuppuration de quel- que abcès interne des divers ulceres du corps hu- main. 5°. La feyre inflammatoire, ardente , aiguë, continue, qui par fes exacerbations fe change en fée- vre rémittente, en cara@érife-un des genres de la plus mauvaife efpece. Méthode curative, Cependant on ne connoït point de méthode curative particuliere pour le traitement des fievres rémirtentes ; il faut fe conduire ici fuivant les regles prefcrites pour la guérifon des fevres en gé- néral ; 8 quand la fevre rémirtente eft lymptomati- que, fa cure dépend uniquement de la maladie dont elle émane. FIEVRE SALUBRE : les fevres falubres font celles qui procurent la dépuration & Rexpulfon de la cau- Le qui les produit , & qui par ces heureux effets ré- tabliffent parfaitement la fanté. On peut diftinguer deux efpeces de fevres falubres,; celles qui font fimplement dépuratoires, & celles qui régulierement critiques , fe guériflent à jour préfix, par coftion ou par évacuation purulente, Foyez F1E- VRE DÉPURATOIRE 6 FIEVRE CRITIQUE- Maisil ya, felon moi, des fevres falubres , ou pouf mieux dire, falutaires , relativement à elles-mêmes & à leurs effets avantageux; car quoique la fevrefoit | fouvent funefte aux hommes, elle n’eft pas toüjours le férgent de la mort, comme l’appelle un de nos poë- tes, qui avoit puifé cette idée dans la doétrine des medecins de fon tems & de fon pays. Aujourd’huion ne peut ignorer que plufieurs feyres intermittentes , & fur-tout la fievre tierce & la fevrequarte, ne foient des fevres plus communément fa/uraires que muifbles: eneffet, toutesles fois que ces fortes de fyres parcou- rent leurs périodes fans trop de violence ; toutes les fois qu’elles n’attaquent point des gens d’un âge dé- crépit & dont les forces foient épuifées , elles puri- fient merveillenfement le fang , réfolvent puiffam- ment les engorgemens des vifceres, atténuent &c mettent dehors les matieres morbifiques, deffechent les nerfs trop humedtés, & raffermiflent ceux qui {ont trop relâchés. C’eft la feule ation du mouvement fébrile, excité dans le genre mufculaire , qui chaffe par les excré- toires deflinés à telles outelles évacuations, la quan- tité furabondante deférofité acre, circulante dans les humeurs ou dans quelque organe , comme on le voit dans les fevres catarrheufes & fcarlatines. La fievre eft encore faluraire par elle-même dans des maux inacceflibles aux fecrets de la Medecine, Elle appaife, par exemple , les douleurs des hypo- chondres, quand elles ne font point accompagnées d'inflammation , & elle foulage la pañlion iliaque caufée par la difficulté d’uriner. Les maladies produites par des obftruétions & par la vifcofté des humeurs, fe guériflent heureufement par le fecours de la feyre , qui fait divifer & réfou- dre les liqueurs épaiflies ou croupiffantes , les prépa- rer&z les difpofer à l’excrétion plus falutairement que ne le peut faire le plus habile praticien. Voilà pour- quoi dans les obftruétions confidérables , c’eft un mauvais figne , lorfque le mouvement fébrile n’eft point proportionné à fa caufe. Si donc le génie du medecin confifte à arrêter une fievre pernicieufe , il ne confifte pas moins à {oûtenir une fevre falutaire. I] doit faire plus, 1l doit l’alluimer quand elle eft trop lente , afin qu’elle travaille enco- ge mieux à délivrer le corps des atteintes qui lui de- FIEF Viéndroïient funetes. Telle eft la doûtrine des an ciens ; telle eft celle des modernes véritablement éclairés. L'ordre que la divine Providence a établi dans le méchanifme des êtres corporels , eft fi beau, êt es vües fi bienfaifantes , que ce que le premier coup-d’œil préfente comme nuifible, et fouventinfti- tué pour notre confervation. Nous mettons la fevre de ce nombre , puifque tout calculé , elle eft en géné- ral plus faluraire que préjudiciable aux hommes. Sy- denham, Boerhaave, MM. Vanfwieten, Quefnay » Tronchin,êg autres maîtresde l’art,la regardent com- me un eflort de la nature , & comme une arme dont elle fe fert pour remporter la vidoire dans plufeurs maladies qui menacent fa deftruétion. FIEVRE SCARLATINE , affection morbifique con- fiftante dans des taches d’un rouge d’écarlate qui ac- compagnent quelquefois la feyre, & qui lui ont donné le nom de fCarlatine. ue Ces taches, plus fréquentes dans l’âge tendre que dans aucun tems de la vie, ont coûtume de paroître fur le vifage, & quelquefois même couvrent tout le corps. Elles commencent d’ordinaire lé trois ou le quatrieme jour d’une petite fevre, deviennent in{en- fiblement plus larges, fubfiftent peu de tems, & s’é- vanoiuflent en ne laiffant fur la peau que quelques écailles farineufes. | Cette maladie paroït avoir fon fiége dans les vaif- feaux de la tranfpiration, & pour caufe une dépra- vation bilieufe dépofée fur la peau par un mouve- ment fébrile , en conféquence de la chaleur de la fai- fon ou du tempérament. Alors cette matiere difper- fée dans la circulation avant l’éruption, & portée au- dehors par le fecours de la fevre, produit exté- nieurement fur la peau un leger {entiment de douleur : & de chaleur, & intérieurement quelqu’anxiété, jointe à une petite toux aflez fréquente. Si dans cet état l’on faifoit rentrer la matiere morbifique, le mal ne feroit pas fans danger ; mais la nature montre le : : chemin de la guérifon : elle ne demande que les di- luens, de legers diaphorétiques , un répime conve- nable , une chaleur moderée, & l’abftinence des re- medes échauffans. Au reïte, les fevres fcarlarines {ont. les plus douces de toutes les fevres exanthémateu- fes ; il eft très-rare qu’elles foient fuivies de dépôts intérieurs. | FIEVRE SCORBUTIQUE, ivre anomale , vague, périodique, communément intermittente, prenant toute la forme des autres feyres, mais qui eft parti- culiere aux fcorbutiques , & ne cede point à lufage du quinquina. S'es fignes. Dans cette fevre les urines dépofent un fédiment briqueté, dont les molécules ronges, adhé- rentes à l’urinal en forme de cryftaux ,: y tiennent _ fortement, tandis qu’il fe forme fur Purine une pel- licule qui s'attache au bord du vaiffeau , quand on lincline. C’eft à cet indice & aux antres fymptomes du fcorbut, qu’on reconnoît l’efpece de fevre dont il s’agit ici, laquelle eft ordinairement plus fatigante que dangereulfe, Mais 1l y a néanmoins des fevres Jéorbutiques con= tinues, malignes, contagieufes & cruelles. De telles . fevres produifent des vomiflemens , des diarrhées , . des dyflenteries , des anxiétés, des taches noires, l'abattement des forces ; la putréfattion du foie , de. la rate, du pancréas, du méfentere ; l’atrophie , la phthife, la mort. | Cure. Cependant , quelle que foit la nature de ces fortes de fievres, on doit toûjours les traiter par les anti-fcorbutiques oppolés à l’efpece particuliere de fcorbut dont le malade eft attaqué, & à l’acrimonie dominante, faline, muriatique, acide, alkaline, fé- tide , huileufe ou rancide, Voyez SCORBUT. FIEVRE SEPTIMANE, C'eft une feyre continue qui s’étendyquiqu'an feptieme jour, & que termine la fime ple défécarion. ( | Par le fecours de cette défécation, la fovre s’afoi- blit à mefure que la dépuration fe fait ; & cette dé- puration fe manifefte dans les urines , qui font ici fort chargées , troubles & épaifles : car cette fevre n’a m la violence ni le tems convenable pour pro- duire d'autre codtion. Îl n’y a même ni jour indicatif ni Jour confitmatif qui marque régulierement le tems où ces fortes de fevres doivent finir : quelquefois c’eft à la premie:e, d’autres fois, à la feconde, & d’autres fois à la troifieme exacerbation ; rarement elles s'étendent jufqu'à la quatrieme, & par confé- quent elles fe terminent dans la femaine où elles ont commencé, ce qui leur a fait donner le nom de /ép- IMATE, À ue à FIEVRE SPASMODIQUE.,, febris [pafinodica. Cen’eft pointune fevre particuliere, c’eft une affeétionfymp- tomatique & très-efrayante , qui fe rencontre quel- quefois jointe à la fevre. , Caufe prochaine. Elle eft produite par un vice du cerveau , lequel provient ou d’une writation qui fe communique au cerveau par le moyen des nerfs ou du mouvement irrégulier & déréglé des liqueurs qui circulent dans ce vifcere ; & cette irrégularité peut avoir pour caufes toutes celles du délire, du coma, de l’infomnie. Effers, Si le fpafme dure long-tems, 1l affeéte tout le genre nerveux, par la communication réciproque que les nerfs ont enfemble, d’où naïfflent tant.de _triftes maux. s | Prognoffics, L’affe@tion fébrile convulfive eft plus ou moins dangereufe, fuivant fa violence, fes répé- titions , & les caufes dont elle émane. Les convul- fions qui fuccedent dans la feyre à de grandes éva- cuations, font pour l'ordinaire mortelles, ainfi que celles qui font accompagnées d’un délire perpétuel. Cure. On reglera toûjours la méthode curative fur la variété des caufes. En général, on tentera d’a- doucir l’acreté dominante, de réfoudre la matiere engagée, de relâcher les parties qui font en contrac- tion , de fortifer celles qui font foibles, de procurer une révulfñon, éc. Si la fevre fpafmodique eft occa- fionnée par une irritation locale, on portera les re- medes fur la partieirritée. En un mot, por abreger ce vafte fujet felon les indications différentes , les caufes , les parties affectées, les fonétions dérangées ou fufpendues , on combattra le mal par des remedes différens.; par la faignée, les purgatifs , Les éméti- ques, les bains, les véficatoires , les épifpaftiques, les fomentations, les friions, les relâchans, les cal- mans, les cordiaux, les aromatiques, les nervins, les fétides, &c. d’où l’on voit aflez combien font ri- dicules les prétendus fpécifiques anti-fpafmodiques, auxquels le vulgaire , & principalement les grands feigneurs, donnent fottement leur confiance. FIEVRE SPORADIQUE , ainfi dite de cœelpo , je dif. perfs. Ce font des fievres de différentes efpeces , fe- mées çà &t là fur certaines perfonnes feulement qu’- elles attaquent en divers tems & lieux, parce qu’el- les procedent d’une caufe qui leur eft propre & par- ticuhere. Voyez SPORADIQUE. Je connois un ancien auteumqui a traité exprès ce fujet ; c’eft Amicus ( Diomedes) , dont louvrage écrit en latin, parut à Venife en 160$, 27-4°, Mais l'ouvrage de Ramazzini, de morbis aruificum , fournit encore plus de connoïffances fur les maladies /porz- diques particuleres. FIEVRE STATIONNAIRE , 9oyez FIEVRE HOMO- TONE. Mais Sydenham appelle fievres ftationnaires, febres flationarias , les fevres continues épidémiques, qui dépendant d’une confitution particuliere & in- connue de l’air, regnent pendant tout le tems de la durée de cette conititution , & ne paroïflent jamais autrement. FIEVRE STERCORALE, Je donne, avec M. Que. FOIE | #5 naÿ, le nor de févres flercorales à celles qui font cau- {es par des matieres viciées retenues dans les pre nüeres voies | & qui fe terminent par l'évacuation de ces matieres, lorfqu’on a recours à la. purgation avantque ces mêmes matieres ayent infecté la mafle des humeurs. | Nous comprenons ici fous le nom de wrieres ffer= corales, non-feulement les matieres fécales dépravées dans les inteflins, mais les matieres perverties con- tenues dans l’eflomac, la bile dépravée qui eft ver- fée dans les inteftins , les fucs vicieux qui féjournent dans les premieres voies en un mot toutes les ma= teres qui font immédiatement én prife À la purga- tion , & dont l'évacuation termine la maladie. Il ut par conféquent diftinguer cette fevre de la fèvre pu- tride, qui dépend réellement de la dépravation pus tride des humeuts. Voyez FIEVRE PUTRIDE. Caratière de cecte fievre. La fievre flercorale n’a aucun caraétere diftin® ; c’eft une fevre plus où moins com- pliquée, felon le degré d’érétifme que caufent dans les premieres voies les matieres nuifibles qui y font retenues; enforte que ce genre de maladie eft fuf- ceptible de plufieurs {yÿmptomes fpafmodiques plus où moins confidérables. Signes. Les fignes que peut fournir cette fevre ; font un grand dégoût, les rapports defagréables &c de mauvaife odeur, l’amertume de la bouche, la langue chargée, la liberté du ventre, la fluidité & la puanteur des déje&tions, les angoïfles ou le mal- aile des premieres voies, les borboryemes doulou- reux, les gonflemens , les contra@tions de l’abdo- men, les débilités ou les défaillances qui précedent les évacuations. Quand ces fignes manquent , 8 qu’: on redoute néanmoins des matieres dépravées dans les premieres voies, on tentera d’exciter des éva- cuations par le moyen de lavemens un peu purga- tifs, comme de cryftal minéral, dans une décoion _émolliente, afin de s’aflürer des qualités des déjec= tions. Caufes. Parmi les caufes qui occafionnent les fe vres Jlercorales, fouvent épidémiques , la mauyaife confhtution de l’air eft la plus imperceptible, mais la plus fréquente, & la plus capable de pervertir les alimens dans l’eftomac. Cure, L’effentiel dela cure confifte, comme il eft aif& de le comprendre, dans l'évacuation des matieres dé- pravées, par le vomifflement ou par la voie des felles, telon les difpoñtions favorables à l’un ou à l’autre gen- re d'évacuation. Leshumeétans, lesrelâchans font né- ceflaires, & doivent y être joints pour faciliter ef fet des purgatifs, & prévenir l'irritation qu’ils peu vent caufer. Sila fevre eft violente, le pouis dur & fort, on commencera par la faignée ; on la répetera promptement, & on recourra aux lavemens adou- ciflans &c laxatifs , au petit-lait pris en abondance, aux huileux , aux cataplafmes émolliens , pour pou- voir fatisfaire au plütôt à la principale indication par les purgatifs les plus convenables , adminiftrés alter- nativement avec les parégoriques & les autres re- medes relâchans. Si la feyre eft accompagnée d’ar- deur & de foif preflante , on doit donner au malade pour boiflon ordinaire, & en quantité, le petit-lait chargé de creme detartre, parce qu’il relâche, tempe- re & évacue fans irritation.On peutencoreconfeiller la décottion legere de tamarins, ou celle de pruneaux avec le cryftal minéral, Voyez Ballonius, epid. Gb, IT, qui eft excellent {ur ce fujet. FIEVRE SUBINTRANTE, eft celle dont l’intermif- fion n’eft point fenfible : on la nomme autrement cor: tnue-rémitiente Voyez FIEVRE RÉMITTENTE, 6 FIE- VRE CONTINUE-RÉMITTENTE, | FIEVRE SUDATOIRE, helodes febris. La fievre fa datoire eft une affeétion morbifique , laquelle confifte en fueurs immoderées qui aççompagnent les fevres aiguës, ds 740 FIE Cañfès. La fueur fébrile eft produite par le rel- chement 8 la foibleffe des petits vaifleaux, par la violence de la circulation du fang , par la facilité avec laquelle Peau fe dégage des autres principes du fang, par la dépravation des humeurs , par leur dif- folution putride. Enfin les fueurs continuelles font uelquefois caufées par une fimple acrimonie ; car fier que cette acrimonie a une affinité particu- liere avec les organes de quelques-unes des voies ex- crétoires , elle excite, de même que celle des reme- des évacuans, l’aétion de ces organes , & provoque les évacuations qui fe font par cès mêmes organes, Effess. La fueur fébrile qui dure long-tems & im- modérément , prive le fang de fon liquide délayant; épaiflit le refte, excepté dans les feyres colliquatives ; enleve la partie la plus fubtile des humeurs, produit des obfiruions , des foiblefles , l’exténuation du corps, l’abatrement des forces. Cure. I ne faut ni provoquer la fueur , ni l'arrêter par le froid , mais la modérer en fe couvrant moins, en s’abftenant de tout ce quieft échauffant, enrépa- rant les pertes par des boiflons douces & délayantes, en émouflant l’acreté, quelle qu’elle foit ; én corris geant la colliquation des humeurs par les boiflons anti-feptiques & legerement aftringentes: mais quand les fueurs colliquatives jettent les malades dans une foiblefle extrème , elles peuvent être fupprimées avec fuccès. Il eft facile de remarquer dans de telles maladies, que le fang ou la partie la plus groffiere des humeurs tombe en diffolution ; & que malgré les fueurs copieufes, la partie fluide domine encore dans le fang , comme il paroït par celui qu’on tire alors des veines. OBfervations de pratique, Les praticiens obfervent, 1°. que les évacuations critiques fe font fonvent tout-à-coup par le fecours des fueurs, fur-tont dans les crifes des inflammations & des fevres aiguës ; mais Les fevres qui durent plufieurs femaines , fe ter- muinent rarement par des fueurs critiques remarqua- bles. 2°. Les fueurs critiques abondantes s’annoncent d'ordinaire par un pouls véhément , gros, fouple, mou & ondulent, 3°. Une grande fueur termine com- munément les accès de fevres intermittentes ; mais les fueurs qui font legeres , fréquentes ou continuel- les, annoncent la lenteur de la cotion, ou la lon- gueur de la maladie, Woyez Hippocrate 6 fes com- meritateurs p FIEVRE SYMPATHIQUE, fevre excitée par la com- munication & la correfpondance des nerfs du corps humain avec la partie où la caufe irritante fe trouve fixée. | On a mille exemples de ces fortes de fevres ; car toutes celles qui font occafionnées par des plaies, celles qui font produites par une inflammation lo- cale, celles qui font caufées par des douleurs ou des irrifations dans une partie nerveufe, comme au bout du doigt lorfqu’il eft attaqué d’un panaris , font au- tant de fes Jÿmpathiques, qui cefleront feulement par la guérifon de la plaie , de l’inflammation & de Pirritation locale , ou par l’amputation de la partie malade. FIEVRE SYMPTOMATIQUE; c’eft ainfi qu’on ap- pelle toute fieyre excitée par quelque maladie géné- rale ou particuliere, & qui loin d’adoucir ou de dé- truire cette premiere maladie , ne fait au contraire que laggraver. | Caufès. Sa caufe prochaine eft donc totjours une maladie précédente, qui par fon accroïffement ou fa ficheufe métamorphole, excite envain les forces de : la nature pour en opérer la guérifon par le fecours de la fevre. Signes, On juge qu’une fevre eft Jymptomatique , 1°. quand elle ne paroît qu'après une autre maladie qui a précédé; 29. quand cette premiere maladie ve- nant à s’augmenter, la feyre s'allume auf davanta- ge ; 3°. quand le fédiment briqueté des urines ne marque plus les paroxyfmes de la fevre précédente ; 4°. quand on fait par le tems de l’année ou de la conf- titution épidémique , que la même nature de fevre ne regne point, 5°. quand cette feyre ne cede pas aux meilleurs fébrifuges, 7. | Cure. Sa re dépend uniquement de celle dés maladies aiguës ou chroniques dont elle eft l'effet , comme, par exemple, quandelle furvientà la soute, au rhümatifme, au fcorbut, à l’hydropifie, &c. Il faut donc bien diftinguer la fevre fymptomatique de celle qui fe guérit naturellement par cottion on par crife : autre chofe eft la feyre qui fe manifefte avant l’éruption de la petite vérole, autre chofe eft celle qui paroït fymptomatiquement après cette éruption. FIEVRE SYNCOPALE , affletion morbifique qui confifte dans de fréquentes fyncopes , lefquelles fur- viennent au retour de l’accès on du redoublement de la fevre, Voyez SYNCOPE. Comme ce fymptome eft effrayant par la päleur qu'il produit , la petitefle du pouls, la collabefcence des vaifleaux, la flaccidité des mufcles; que d’ailleurs il n’eft pas fans danger, parce qu'il arrête le cours du fuc nerveux , & fufpend le mouvement de la cir- culation du fang , il faut tâcher d’en découvrir les di- vérfes caufes, pour y diriger les remedes. Si la fyncope furvient dans la fevre, de la foibleffe de la circulation, on la ranimera par des alimens li- quides, analogues, doux, gélatineux, artificiellement digérés , agréables, vineux, cardiaques, aromati- ques, tirés du regne animal & végétal , donnés fou- vent en petite quantité, & aidés dans leurs effets par de legeres fri&tions aux parties extérieures du corps. La fyncope fébrile qui procede d’humeurs dépra- vées dans Le ventricule, & quelquefois de vers qui s’y rencontrent , fe diffipera par des vomutifs & par les vermifuges, &c l’on en préviendra le retour par les ffomachiques. Quand la fyncope procede de la mobilité des ef- prits , il faut les rappeller par les volatils portés fré- quemment aux narines, les anti-hyftériques , les car- diaques , les corroborans , & fortifier enfuite le corps par les ffomachiques nervins. La défaillance qui eft occafionnée par des concré- tions du fang qui commencent à fe former, demande les délayans, les atténuans, les fayonneux, l’action dés mufcles, L On connoît que la comprefñion du cerveau & du cervelet eft la caufe des défaillances , par la léfion des fonétions qui dépendent de leurs bonnes difpof- tions, lorfque, par exemple, la fyncope eft accom- pagnée de délire , de vertiges, de tremblemens, &c. On relâchera les vaifleaux, en hume@ant par de douces fomentations la tête, le vifage, les narines, la bouche, le cou , & en appliquant aux piés les épif paftiques. | | FIEVRE TIERCE , v0ÿe? TIERCE. FIEVRE TRITÆOPHIE, TRITÆOPHÉS, de rprraloc, tierce , &t que, être de même nature 6 de méme origine. Cette fievre vient le ttoïfieme jour, & arrive alors prefqu’à fon plus haut période ; ce qui la diffingue de la tierce proprement dite, de la tierce alongée, & de la demi-tierce. Du refte fon nom eft une épithete commune à toutes les fzvres qui ont leur accès ow leur retour périodique le troifieme jour; elle ne for- . me jamais de crife parfaite par les urines ou par les fueurs , mais les évacuations bilieufes naturelles l’appaifent, Comme fes caufes & fon prognoftic font les mêmes que de la fevre tierce ou intermittente pro- longée, elle demande lemêmetraitement : voyez donc FIEVRE TIERCE. FIEVRE TROPIQUE, ropica febris, Les anciens ap- pelloient fvres sropiques, les colliquatives putrides qui FIE qui s'étendent jufqu’au quarantieme jour : on leur a donné vraiflemblablement ce nom, parce que le qua- rantieme jour eft le terme des révolutions fepte- naires. ! Les crifes font bien moins violentes 8: moins re- matquables dans les fevres tropiques que dans les fe- vres aiguës de toute efpece : apparemment que pen- dant un période fi long, la coëtion quu fe fait ne pro- cure qu'une médiocre dépuration à chaque exacet- bation; c’eft-à-dire que les crifes s’operent feulement en détail & à différentes fois, jufqu'à ce que la ma- ladie foit parfaitement terminée. Il faut donc diftinguer ces fortes de fvres chroni- ques des fievres hettiques , lefquelles dépendent d’u- ne caufe qui perpétue ou renouvelle continuellement celle qui les entretient , enforte qu’elles ne peuvent produire m1 coétion ni crife qui les confume. Foyez FIEVRE HECTIQUE. Toutes les fevres dont la durée pañle quarante Jours, font envifagées comme des maladies entrete- nues d'ordinaire par quelque vice des organes, ou même encore par l’impéritie du medecin. Tous ces ar- zicles du motF1EVRE, font de M. le Chevalier DE JAU- COURT. | , FIEVRE,, (Mytholog.) nom propre d’une divinité payenne, Febris. Les Romains firent de la Feyreune déefle, & l’honorerent feulement pour l’engager à moins nuire, fuivant la remarque deValere-Maxime, lv. Tl.och.v..n. GC. Cette déeffe avoit à Rome plufeurs temples ; & du tems de l’auteut que nous venons de citer, trois de ces temples fubfiftoient encore, l’un fur le mont Palatin, l’autre dans la place des monumens de Ma- rius, & le troifieme au haut de la rue longue. On apportoit dans ces temples les remedes contre la Æïe- vre, avant de les donner aux malades, & on les ex- pofoit quelque tems fur l'autel de la divinité. Ce moyen {ervoit plus à guérir l’efprit que le corps, dit Valere-Maxime lui-même ; & les anciens Romains ui mirent la Fieyre au rang des dieux, dûrent leur Pie bien plus à leur frugalité qu’à la proteétion de la déeffe. Nousignorons comment ils la repréfentoient ; mais nous avons la formule d’une priere ou d’un vœu qui lui a été fait, & qui s’eft confervé dans une infcrip- tion trouvée en Tranfylvanie. Cette infcription pu- bliée par Gruter, donne à la Fievre les noms de &- vine, de faënte, 8 de grande, La voici: FEBRI D1- V Æ ; FEBRI SANCTÆ, FEBRI MAGNÆ, CAMILLA AMATA, PRO FILIO MALE AFFECTO, P. « Ca- » nulla Amata offre fes vœux pour fon fils malade, » à la divine Feyre, à la fainte Æieyre, à la grande » Fievre». Au refte les Romains avoient recû cette divinité des Grecs , avec cette différence que ces derniers en faifoient un dieu, parce que le mot wperoc, fevre, eft mafculin, & que febris eft féminin ; mais c’eft tot- jours le même être qu'ils ont divinifé dans chaque pays, pour fatisfaire aux préjugés du peuple, Arricle de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FTEVRE , (Manepe, Maréchall.) maladie commune à l’homme & à l’animal. Le medecin profond & éclai- ré en recherche encore la nature individuelle; l’i- gnorant toüjours préfomptueux fe flate de l'avoir faifie: la fage timidité de l’un la précipitation har- die de l’autre, doivent infpirer la plus grande réfer- ve. Je ne joindrai donc point témérairement ici mes foibles efforts à ceux du premier; & je ne me liyre- rai pas d’une autre part, à l’inutile foin de reprimer le ton impérieux & décifif du fecond. Les divifions que fuggerent les différences que l’on remarque dans les fevres dont le cheval eft atteint ; les caufes évi- dentes de ces fevres , leurs fymptomes, les juftes in- dications qui peuvent déterminer le maréchal dans Tome VI, FIE 743 le choix & dans l'application des remedes, font les uniques points dans lefquels je me propole de me renfermer. Si je ne lui préfente que les faits que j'ai fcrupuleufement obfervés ; & fi de ces faits préfen- tés & certains je netente pas de m’éleyer pat la voie des induétions & des conféquences, À la découverte d'un principe ou d’une caufe prochaine jufqu’à pré- fent enfevelie dans les ténebres de la nature, qu'il fache que la nuit profonde qui nous dérobe une fou- le innombrable d'objets & de vérités, eft préférable aux yaines & faufles lueurs que nous ne prenons que trop fouvent pour de véritables Iumieres ; qu’il ap- prenne que les fyftèmes les hypothèfes, & toutes les bifarres produétions d’une imagination ou d’unef. prit qui fe perd, peuvent d’autant plus aifément lé. garer, qu'elles ont fait de la Medecine des hommes, c’eft-à-dire de l’art le plus utile & le plus falutaire, un art funefte & dangereux ; & que qui méconnoit le doute & ne craint point l’erreur, eft inévitable- ment fujet à des écarts également indignes de la rai- fon & du favoir, qui ne fauroient en être la fource. … Toute fevre qui ne fubfifte pas par elle-même , & qui n'eft que l'effet d’une maladie quelconque qui af feéte quelque partie du corps de l’animal, eft dite frevre Jécondaire ou fymptomatique. Toute fevre qui forme principalement la maladie, &t qui ne peut en être regardée comme une dépen- dance, un accident, on une fuite, eft appellée fevre abfolue , ou fevre idiopathique, ou fievre effentielle. Celle-ci eft intermittente ou continue. On nomme fevres incermittentes celles qui ceflent par intervalles , & qui reprennent par accès /foit que leurs périodes foient reglées, foit qu’elles fe montrent erratiques ou confufes. Dans Ia diftintion que M. de la Guériniere a faite des fevres confidérées par rapport à l’animal, il ad- met la fevre tierce & la fevre quarte. La définition triviale qu’il nous en donne, & à laquelle il fe bor- ne, ne difpofe point à croire qu'il les ait réellement apperçües dans le cheval : fon témoignage ne peut donc être de quelque poids qu’autant qu'il fe trouve appuyé de l'autorité de Ruini. Ce dernier eft de tous lès auteurs qui méritent quelque confiance & que j'ai confultés, le feul qui en fafle mention: il parle même d’une forte de févre intermittente fubintrante qu'il appelle, d’après les Medecins, fsvre quarte con- tinue, Je ne nie point, relativement à l’animal dont 1l s’agit , la poflibilité de leur exiftence, de leur re- tour , & de leurs redonblemens périodiques ; mais je me fuis impofé la loi de ne rien avancer qui ne {oït généralement avoué , ou qui ne foit établi fur mes obfervations particulieres ; 8 cette même loi m'interdit toute difcuflion à cet égard. Il n'en eft pas ainfi des fevres continues, je veux dire de celles qui font fans intermiffion : l’expérien- ce m'a appris qu'il en eft qui ne lui font que trop fouvent funeftes. | Les unes m'ont paru fimples , & les autres com- pofées. Celles-c1 different effentiellement de celles qui font fimples, par les accès, les invañons, les redou- blemens, l'augmentation des fymptomes qui pen- dant leur durée , prouvent & annoncent de plus grands efforts de la part de la caufe morbifique : j’a- Joûterai que ces paroxyfmes ou ces redoublemens n’ont jamais à mes yeux évidemment gardé aucun ordre. De toutes les fevres continues, l’éphémere eff [a plus fimple ; elle fe termine ordinairement dans l'ef- pace de vingt-quatre heures, quelquefois dans Pef- ce de trente-fix. Si la durée s’étend au-delà de ce tems, elle eft dite fevre éphémere étendue, où, pour me fervir du langage de l’école, févre fynoque [im- ple: c’eft cette même fevre dont le cours eff plus ou BBbbb 742 FIEF moins long , que l’on ne fuppofe point fomentée par V’amas & la corruption des humeurs , qui eft égale dépuis fon commencement jufque à fa fn, & qui tant qu'elle fubffte, ne laiffe entrevoir aucune dimi- nution & aucune augmentation fenfbles. | On peut encore envifager les fevres continues par leur violence, par leur qualité, par leur conftance, par leurs caufes, &c par leurs {ymptomes. 1°. Selon la rapidité de leurs progrès & felon la promptitude avec laquelle elles fe terminent; elles font ou fimplement aiguës , ou fort aiguës , ou ex- trèmement aiguës. 2°. La dificulté avec laquelle elles cedent aux temedes , leur conftance , la lenteur de leurs mou- vemens, dénotent des fevres chroniques, femblables à celles que fufcitent des dépôts internes, & telles, par exemple, que la feyre colliquative qui accompa- gne la morve, quand elle eff parvenue à un certain degré. Ces fevres lentes font toùjours fymptomati- ques: on ne peut conféquemment en triompher qu’- en attaquant & en domptant la maladie qui les oc- cafñonne. Il arrive auff dans le cheval, comme dans homme , que des ffevres aiguës dégénerent en ffevres de ce caractere. 3°. Dès qu’on fe croit en droit d’accufer de la maladie préfente une matiere fébrile confidérable, êt que l’on fuppofe cachée dans le fang ou dans les premieres voies , la fevre continue ou fynoque pu- tride ; & fila perverfon prétendue des humeurs eft exceflive ou entiere, elle eft ardente ou maligne. Les maréchaux la nomment alors feu, mal defeu, mal d'Efpagne ; & elle eft diretement oppofée par fa qualité aux fevres fynoques fimples , & aux fievres éphémeres, qui font des fevres bénignes. 4°. Enfin fi à tous les fignes de la fevre maligne fe joignent une grande proftration des forces, des exan- thèmes , des bubons, des anthrax, 6c. la maladie fe manifeftera par des fymptomes trop 'poñitifs pour qu'il foit permis d’y méconnoitre La fevre peftilen- tielle. Ces détails que je n’éténdrai pas plus loin , fuf- fent à quiconque prétend fe former une idée des fievres qui peuvent furvenir à l'animal ; elles font tou- tes renfermées dans les divifions que j'en ai faites : celles dont le traitement m’a été confié, fe réduifent à des ffevres continues , ou lentes, ou aigués, ou éphémeres, ou non putrides, ou putrides, ou pefti- lentielles , ou malignes. Un travail immodéré & trop violent , un refroi- diflement, un repos trop conftant & trop long, un défaut dans le régime , une nourriture abondante ca- pable de furcharger l’eftomac, à la fuite d’un exercice pénible & forcé; la faim, la foif même ; des eaux croupies, corrompues, indigeftes ; une boiflon froi- de donnée à un cheval échauffé ou qui eft en fueur; des alimens trop chauds , des fourrages aigres , le foin vafé & qui a été mouillé , le foin nou- veau, de mauvais grains ; les vicifitudes de Pair ambiant ; des chaleurs exceffives, des froids deme- furés, des tranfitions fubites & répétées des premie- res à ceux-ci; des tems humides & pluvieux, des tems de fécherefle & d’aridité ; l’ardeur d’un foleil brûlant , des exhalaifons putrides qui infeétent quel- quefois tout un pays, tout un camp, &c. telles font en général les caufes évidentes des unes & des au- tres ; à exception de la fevre lente qui n’eft point ef fentielle , ainfi que je lai déjà remarqué , qui n’eft que le produit de la léfion de quelques vifceres, ou d’une maladie chronique quelconque. Les autres fevres fymptomatiques que le cheval éprouve, & qui peuvent être placées an rang des fievres aiguës, procedent communément de la dou- leur plus ou moins vive que fufcitent en lui de for- tes tranchées, l’éréfypele, l'étranguillon , la four- bure, des tumeurs phleomoneufes , des abcès, des plaies , &c. Les médicamens propres à calmer & à détruire ces maux, font aufli les feuls qu'ilconvient d'employer pour en abréger le cours. LR Il eft des fignes généraux des fevres ; ilen eft de particuliers à chacuné d'elles. em Les fignès généraux font une refbiration plus où moins dificile , plus ou moins labôrieufe , plus ou moins fréquente, & une accélération plus ou moins confidérable des mouvemens ordinaires du diaphrag- me & des mufcles abdominaux ; mouvemens très- fenfbles dans les flancs, & accélérés felon la fré- quence des infpirations que l’añimal eft machinale- ment obligé de faire pour faciliter & pour fubvenir au paflage du fang que le cœur avité chafle dans les poumons avec plus d'impétuofité & en plus gran- de abondance que ces organes ne peuvent en ädmet- tre dans l’état naturel. Éd Dans la plus nombreufe partie des chevaux, vai- nement tenterions-nous de confulter le pouls, cette regle dés grands medecins, cet oracle qui leur dé- voile la force du cœur &c des vaifleaux, la quantité du fang, fa rapidité, la liberté de fon cours , les ob- ftacles qui s’y oppofent , l’aétivité de Pefpnit vital, {on inaétion, le fiege, les caufes, le danger d’une foule dé maladies ; mais qui ceffe d’être intelligible, & qui dévient ambigu, obfcur, & captieux pour ces doéteurs frivoles, fourbes, ou ignorans , qui, fans égard à l’inégalité de la force de ce mufcle, des canaux êc du fluide fanguin dans les divers fujets, & aux variètés dé cette même force dans un mêmein- dividu , & fans la plus legere connoiflance de la conf titution & du tempérament du malade, pronon- cent au premier abord, &c tirent enfuite du taét & de l’examen le moins réfléchi, des indications & des conféquences faufles & fouvent meurtrieres. Il'faut convenif néanmoins que ce figne ou cette mefure de Paétion & des mouvemens qui conftituent la vie, ne nous abandonne pas toûjours. J’aivû quel- ques chevaux dont l’artere du larmier étoit afez {u- perficielle & le cuir aflez fin pour permettre de dif- tinguer les pulfations, & même de juger de leur du- reté, de leur molleffe, de leur fréquence, de leur rareté , de leur intermittence, de leur uniformité, de leur grandeur , de leur petitefle, de leur conti- nuitée, 6 de leur interruption. J’ai vérifié fur eux les obfervations rapportées dans l’Hæmaffarique de M. Hales , en ce quiconcerne le nombre des battemens , & j'en ai fuivi la propreflion dans les divers âges : jen ai compté quarante-deux par minute dans le cheval fait & tranquille ; foixante-cimq dans un pou- lain extrèmement jeune; cinquante-cinqdans un pou- lain de trois ans ; quarante-huit dans un cheval de cinq ans , mais limofin , & par conféquent d’un pays où cesfortes d'animaux font long-tems attendus; trente dans un cheval qui préfentoit des marques évidentes de vieillefle ; cinquante-cinq, foixante, & même cent dans le même cheval dont j’avois ou vert les arteres crurales , & que je facrifois à ma cu- riofité ; la fréquence des pulfations augmentant à mefure qu'il approchoit de fa fin: enfin dans des ju- mens faites J'en ai comptétrente-quatre & trente-fix; ce qui prouve que dans les femelles des animaux, le pouls eft plus lent que dans les mâles ; & ce qui dé- montre , lorfque cette différence nous frappe dans les perfonnes des deux fexes, que la marche , les lois & les opérations de la nature font à-peu-près les mêmes dans le corps de l’homme & de animal. Du refte, & les battemens des arteres de la machine hu- maine font en raïon double de ceux des arteres du cheval, on ne doit point imaginer avec M. de Gar- fault que la confiftence naturellement plus épaife du fang de l’animal , foit en lui une des caufes prin- cipales de l'éloignement des contraétions du cœur ; elles font tohjours moins diffantes les unes des atia tres dans les grands animaux, & elles font toùjours plus fréquentes dans les plus petits : on pourroit mê- me S'en convaincre par leur variété dans un bidet & éans un grand cheval de éarrofle ; non que la force du fang artériel ne l'emporte dans les animaux les plus grands, ainf qu’on peur s’en affürer dans lesta- bles de Hales, en comparant les hauteurs perpendi- culaires du fang dans les tubes fixés aux arteres, mais parce que te liquide ayant en eux un plusgrand nom. bre de ramifications, & des vaifleaux d’une bien plus grande étendue à parcourir, éprouve dans fon cours beaucoup plus d’obftacle & de réfiftance, Il eft encore des chevaux dans lefquels les pulfa- tions du tronc des carotides font appercevables À la vie, précifément à l'infertion de l’encolure dans le poitrail, quand ils font atteints de la feyre: commu- nément aufli dans la plüpart de ceux qui fébricitent, le battement du cœur n’eft point obfcur; mais ceux de toutes lés arteres font abfolument inacceffibles au taêt: nous ne pouvons donc juger alors avec cer- titude de la liberté de l’aétion de ces canaux, de leur reflerrement, de leurtenfon, de leurdureté, de leur fécherefle, &c. ni faïfir avec précifion une multitude de différences très - capables de guider des efprits éclairés; & ces battemens ne nous apprennent rien de plus pofitifque ce dont nous inftruitent les fymp- tomes généraux dont j'ai parlé, c’eft-à-dire la ref- _piration fréquente, & l’accélération du mouvement des flancs. Les fignes particuliers à la fevre éphémere font Paccès fubit de cette fevre, qui n’eft annoncée par aucun dégoût, & qui fe montre tout-ä-coup dans tou- te {a force , la chaleur modérément ausmentée de l'animal, le défaut des accidens graves qui accompa- gnent les autres fevres, & la promptitude de fa ter- Iminaïfon. Ceux qui font propres à la fevre éphémere éten- due, ou à la feyre continue fimple, different de ceux- ci par leur durée, & par la triftefle plus grande du cheval, Des friflons qui s’obfervent, fur-tout aux mou- vemens convulfifs du dos & des reins ; la chaleur vi- ve qui leur fuccede; la véhémence du battement du flanc, fa tenfion, l’excefive difficulté de la refpira- tion ; l’aridité de la bouche ; une foif ardente , l’en- flure des parties de la génération ; la pofition bafle de la têre; beaucoup de peine à la relever ; la froïdeur extrème des oreilles & des extrémités ; des yeux mor- nes, troubles, & larmoyans ; une foiblefle confidé- fable , une marche chancelante ; un dégotit conf- tant; la fétidité d’une fente quelquefois dure , quel quefois peu liée , quelquefois graiffeufe ; une urine crue &t aqueufe ; la chüûte du membre; la couleur fa- née du poil; une dorte de ftrangurie , qui n’a lieu que quand lanimal chemine ; la perfévérance avec laquelle 1l demeure debout & fans fe coucher , font autant de fymptomes qui appartiennent à la fevre putride, La plüpart de ces mêmes fymptomes font auf communs aux fevres ardentes; mais ils fe préfen- tent avec un appareil plus effrayant. La chaleur d’ailleurs inégale en divers endroits , eft telle qu'elle eft brûlante, fur-tout au front, autour des yeux, à la bouche, à la langue qui eft âpre &r noire , raboteufe, & à laquelle il fur- vient fouvent des efpeces d’ulceres. L'air qui fort pat l'expiration n’eft pas plus tempéré; l’accable- ent eft encore plus grand ; la foif eft inextinguible; une toux feche fe fait entendre ; la refpiration eft accompagnée d’un râlement ; la tête eft bafle & irm- mobile ; l’haleine eft puante ; une matiere jaunätre, verdâtre, noïrâtre, flne quelquefois des nafaux:; les gxcrémens font defléchés, ou bien ils font fembla- Tome VI, FIEF 743 bles à cètix qui caradérifent le flux difentérique + { l’yfchurie n’a pas lieu, Purine qui coule eft noire ë très-fouvent fanguinolente : enfin le cheval peut à peine avaler la boiflon quil prend & qu'il rend alors pat les nafaux dans lefquels elle remonte par larriere-bouche. . Dans la fevre peflilentielle , tous ces fignes d’une inflammation funefte s’offrent également; les tumeurs critiques qui paroïflent au - dehors , ainf que je l’ai déjà dit, la défignent fpécialement & d’une maniere non équivoque, Quant à la fevre lente, dès que les lumieres que NOUS pourrions acquérir par le pouls nous font en général & prefque toûjours interdites , Le feul fymp- tome univoque qui nous refte eftle marafme , la con lomption, 8 un dépériflement infenfible. De toutes ces fevres, celles qui portent avec el: les un caraëtere de putridité, de malignité , & de con: tagion, font les feules qui foient vraiment dange- reufes ; la feyre lente ne l’eft pas paf elle-même elle n’eft que Peffet des progrès fâcheux d’une ma- ladie chronique, qui conduit le cheval pas-à-pas à fa perte. Les fuites de l’éphémere qui s'étend ou fe prolonge ne font redoutables qu'autant qu'elle dé- génere en fynoque putride: mais dans celle-ci com- ne dans les autres , la violence des fignes que j’ai dé« crits, doit tout faire craindre : l’obfcurciflement des yeux, leur immobilité , l’affaiflement des paupie- res , le larmoyement involontaire, la difficulté de la déglutition , la füeur froide des parties génitales le relâchement de la peau des tempes, la féchereffe de celle du front, la froideur & la puanteur de l’ha- line, le refus obftiné de toute boifion & de tout ali ment, inquiétude continuelle de l’animal qui fe cou che, fe jette à terre, fe releve, retombe » {e roidit, s’agite, & fe débat ; fes plaintes , fon infenfibilité totale, la pâleur & la lividité de fes levres , le grins cement de fes dents , Pauementation du râlement, la difparition fubite des bubons & des charbons que s’étoient montrés & qui ne reparoiflent plus, &c.tels font les préfages prefque affürés d’une mort plus ou moins prochaine, La route des fuccès dansletraitement de ces maux feroit bien incertaine , fi pour ÿ parvenir il étoit queftion de remonter À la connoiffance intime des degrés par lefquels les humeurs dégénerent, de tous les changemens & de tous les defordres que cette dégénération produit dans l’économie animale , des fources & de la tranfmiffion de toutes les impuretés qui les pervertiffent , de la véritable a@ion , des di- verfes combinaïfons , de la forme , & des autres dif. pofñtions méchaniques de ces fubftances nuifibles A de leur affinité & de leurs rapports cachés avec les différentes parties qui compofent la machine : pour MOI , j'aVOUE que je n'aurai jamais aflez d’audace & aflez d'amour-propre pour entreprendre de péné- trer jufque à ces agens & à ces êtres impercepti- bles & pernicieux ; content de m’oppofer aux effets dont mes fens font témoins , je n’ai garde de voue loir m'adrefler à la caufe efficiènte qui m’eft voilée. Le foin de guérir la fevre éphémere doit être aban< donné aux mouvemens fpontanés des vaifleaux & du fans ; tout l’art confifte à ne point troubler l’ouvra- ge de la nature, le repos, la diette , l’eau blanche À l’ufage des délayans concourront avec elles, Si cette fsvre outre-pafle Le tems ordinaire de fa durée, on examinera attentivement les fignes qui laccompa- gnent, à l'effet de diftinguer fi elle fera continue « fimple, ou continue putride: dans le premier cas ï on faionera l'animal, on lui adminiftrera des lave mens émolliens,; on jettera dans fon eau blanchie quelques pintes de la décoétion émolliente faite avec la mauve, la guimauve , la pariétaire ; on le tiendra au fon, & on ne lui dennera point de fourage, pour 2 BBbbE ji 744 FIE éviter que des mauvais fucs formés dans les premie- res voies, vû le trouble des fonétions des organes de la digeftion dans cette circonftance , ne follicitent des accidens plus graves : dans le fecond cas, les mêmes remedes feront falutaires ; les faignées fe- ront réitérées felon la véhémence des fignes, les la- vemens émolliens multipliës; on y ajoûtera le cryf- tal minéral ; on en jettera dans fa boiffon. Lorfque les principaux fymptomes feront évanoiis ou calmés , on rendra purgatifs les lavemens émolliens , en y dé- layant du miel mercuriel de nymphéa ou de violet- tes, environ quatre onces , & deux onces de pulpe de caffe : on fera enfin obferver à l’animal un régime totjours exaét; &c s’il eft encore befoin d’évacuer , on pourra terminer la cure par un purgatif: car ces fortes de médicamens ne font funeftes qu’autant qu”- ils font très-mal compotés par les maréchaux,on don- nés avant que l’irritation foit appaifée. Une écurie dans laquelle l'air fera pur, froid, &c fouvent renouvellé , fera très-convenable au cheval attaqué de la fevre ardente. Elle demande dansles commencemens, fur-tout fi elle eft avec tou- tes les marques d’inflammation que j'ai défignées, les fecours de la faignée. La boïflon de lanimal fera tiede, abondante ; on aura attention d’y jetter du cryftal minéral. Si on peut lui faire avaler quelque chofe avec la corne, on lui donnera de la déco&ion émolliente dans laquelle on aura ajoûté des gouttes d’eau de rabel, jufqu’à ce qu’elle ait acquis une cer- taine acidité. On coupera avec cette même décoc- tion émolliente, le lait de vache écremé dont on compofera des lavemenseny mêlant deux ou trois jaunes d'œufs : s’il en eft befoin,on pourra employer en mêmetems le firop de pavot blanc, à la dofe de trois onces ; Les indications devant nous diriger dans le choix des clyfteres. La vapeur de l’eau chaude déterminée dans fes nafaux, des injeétions pouffées par la même voie dans l’arriere-bouche, &c faites avec une déco@ion de feuilles d’afléluya , & quel- ques gouttes d’efprit de foufre ou d’eau de rabel, fe- ront encore très-utiles : 1] s'agira en un mot de met- tre fin à la contrattion des fibres , par tous les moyens poflbles , de délayer exattement les li- queurs, & d’évacuer infenfiblement par les urines, par l’infenfible tranfpiration, tout ce qui peut entre- tenir la maladie. | La faignée , les purgatifs doivent être profcrits dans la feyre peftilentielle : il en eft de même de la boifion nitrée , attendu l’abattement confidérable des forces. Sinéanmoins l’animal n’eft pas beaucoup affaiflé , & fi l’on remarque une agitation très-vive dans les folides & dans les fluides, ainfi que tous les fymptomes qui annoncent, on poutra tenter avec la plus grande circonfpettion, de l’appaifer par des lavemens, & en lui ouvrant la veine. Cet objet rem. ‘pl,on aura recours à des cordiaux tempérés, tels que les eaux de chardon benit, de fcorfonere & de fcabicufe,qu’on lui donnera avec la corne : peu-à-peu _on paffera de ces cordiaux tempérés à des cordiaux plus chauds &z plus a@ifs, tels que le diaphoretique minéral , le bèzoard , La poudre de viperes, le fel vo- latil de corné de cerf, la thériaque, &c. dont l’effet eft de chaffer &c de pouffer à l’habitude du corps la “matiere morbifique, & par lefquels il eft à propos de débuter, lorfque le cheval eft, pour ainf dire, anéanti. _ À l'égard des tumeurs critiques , notre but prin- cipal doit être d'attirer le venin au-dehors , en favo- ifant la fuppuration, pour rendre la crife parfaite. ‘On employera pour y parvenir Le cataplafme matu- ‘tatif fait avec le levain , l’ofeille , le haficum , la “fente de pigeon:mais on appliquera, s’il eft néceffai- re , les ventoufes fur le bubon qui dès que nous ap- percevrons de la fluéuation, fera onvert avec un FIF bouton de feu. Nous entretiendrons la fuppuration jufqu'à ce que toute la dureté foit confumée : après quoi nous détergerons Pulcere, nous le mondifie- rons, & nous le conduirons à une parfaite cicatri- ce ; fauf à mettre enfuite en ufage les purgatifs pour terminer entierement la cure. (e) FIFE ( Géog. ) Orholinia , province méridionale d'Ecofle , bornée au nord par le golfe de Faï ; à l'orient, par la mer; au midi, par le golfe de Forth ; & à l’oûeft , par les monts Orchell ( Ochell- hills ) : elle fe divife fort communément en orient & occident. L'air y eft bon, & fes bords font fertiles en blé & en pâturages. Saint-André en eft la capi- tale. Cette province fut d’abord nommée Ro/f, c’eft- a-dire prefqu'ifle ; & en effet, c’en eft une, qui fut réunie à la couronne fous le regne de Jacques I. M. de Lifle met la pointe la plus orientale de la pro- vince de Fife , dite Fife-nefs, à 16 deg. 20 min. de long. &t a latir, à 56 deg. 27 min. ( D.J.) * FIFRE , /th. inftrument à vent , de la nature des petites flûtes : il y en a de deux efpeces, l’une qui s’embouche comme la flûte allemande , & l’autre qui eftà bec : voyez ces deux fifres dans nos Plan- ches. Le ffre s'accompagne ordinairement du tam- bour. Son étendue commune n’eft que d’une quin- zieme. Il eft percé de fix trous , fans compter celui du bout ni celui de lembouchure. Son canal eft court &r étroit, & fes fons vifs & éclatans : voici fa tablature. Pour faire bien parler cet inftrument , il faut que la langue & la levre agiffent de concert ; c’eft, ce mouvement compolé qui articule les fons, Le fre eft une efpece de flûte qui fert au bruit militaire , &r qui rend un fon fort aigu : il yen avoit autrefois dans toutes les compagnies d'infanterie ; mais il n’y en a prefque plus aujourd’hui que dans les compagnies de Suifles ; ce font eux qui ont ap- porté cet inftrument en France : il y étoit en ufage dès le tems de François I. FIGALE, f. f. ( Marine ) C’eft un bâtiment donton fe fert dans l’inde, qui ne porte qu’un mât qui eft placé au milieu ; il y a une dunette qui eft toute ou- verte , & qui fait une petite faillie fur l’eau ; il va totours à la rame , quoique la voile foit déployée: à l’avent il n’y a qu'une piece de bois en pointe qui fert d’épéron. (Z) FIGEAC, (Géog. )bourg de France dans le Quer- cy, avec une ancienne abbaye de lordre.de faint Benoït , fondée parle roi Pepin , où dont le monaf- tere fut rebâti par ce prince l’an 755 : elle fut fécu- larifée par le pape Paul HIT. Figeac eft fur la Selle, à 9 heues N. E, de Cahors, & 19 lieues N. O, d’Albx Long. 191. 40. latis, 44% 40!. ( D. J.) FIGEN ( Géog. ) province du Japon dans Pifle de Ximo : c’eit dans cette province que fe fait toute la porcelaine du Japon : la matiere dont on la forme eft un argille blanchätre qui fe tire en grande quan- tité du voifinage d'Urifano & de Suwota ; fur des montagnes qui n’en font pas fort éloignées. ( D.J.) * FIGER , (Je) verbe paf. c’eft prendreune confi- ftence molle par lévaporation, le refroidiffement ou une autre caufe : on fait que la chaleur mettantles parties des corps en mouvement, les écarte les unes desautres ; qu’à mefure que la chaleur çceffe, le moux FIG vement cefle , que la dilatation ou expanfon dimi- nue, que les parties fe rapprochent & qu’elles peu- vent s'appliquer les unes aux autres , de maniere que le corps perde fon état de fluidité: l’évaporation produit auffi les mêmes effets ; mais on ne dit guere que des cires, des huiles, des graifles , & des li- queuts animales , qu’elles fe figent, Voyez GLACE. FIGUERIE, f. f. (Jardinage) lieu où on éleve des figuiers. Dans les grands potagers , 1l y a toù- jours un petit jardin féparé pour ces arbres, de même qu’une melonniere, (Æ) | FIGUIER , fm, ( Æff. nat. bor, ) ficus , genre de plantesdont lesfleurs,aurapport deValerius-Cordus, naiflent dans la cavité du fruit en forme de petits fi- lets qui tiennent à une forte d’enveloppe qui ren- ferme une femence ordinairement arrondie : le fruit eftle plus fouvent en forme de poire ou arrondi on ovoide ; iheft charnu , mol, & n’a prefque point de Un Tournefort , :nff. rei herb, Voyez PLANTE. I ‘ Les caraëteres du fguier ont été parfaitement éta- blis par nos botaniftes modernes, par Tournefort, Müller , Boerhaave , & fur-tout par Linnæus. Ses fleurs, dit Miller, toûjours renfermées au mi- lieu du fruit , font monopétales, males & femelles. Les fleurs mâles font fituées autour de la couronne du fruit ; les femelles croiffent près du pédicule , & font fuccédées par de petites graines dures : le fuit entier eft de figure de poire, ronde ou ovale, char- nu, fucculent, & d’une faveur douce. Boerhaave caratterife ainf le fguer : de l’extré- mité du pédicule, part un petit calice à trois pieces, d’où naît le péricarpe , enfermé dans une membra- ne tant-{oit-peu épineufe, & retrécie au fommet du fruit ; il y forme un ombilic , & s’infere dans plu- fieurs petites feuilles écailleufes & pointues par le bout , couchées fucceflivement les unes fur les au- tres , & couvrant prefque entierement la cavité du péricarpe. Les feuilles extérieures foûtenues par des pédicules forts, s'appliquent étroitement enfemble, & celles qui font les plus avancées en-dedans , n’ont . point de pédicule : de la cavité du péricarpe , par- tent circulairement des fleurs longues , tubuleufes, à plufieurs pétales, hermaphrodites, avec des ovai- res qui font autant de caplules teftacées, croiffant les unes dansles autres , rudes , & formant des gouf- fes pulpeufes. Notre illuftre botanifte fait mention de huit ef- pecesde figuiers communs, Miller de quinze, Tour- nefort de dix-fept ; mais de ce grand nombre d’ef- peces , nous ne parlerons que du fgzier domeftique, &c du figuier fauvage ordinaire ; car iln’y a pas un moindre nombre d’efpeces de figuiers fauvages , & de feuers exotiques , qu'il y en a de cultivés. Le fexier commun cultivé , s'appelle en grec ouxn Auspor, &c par les botaniftes ficus , ficus commu- ais , ficus fariva , &cc. c’eft un arbre d’une hauteur médiocre , branchu , toufu ; fon tronc n’eft pastout- à-fait droit ; fon écorce n’eft pas unie , mais un peu raboteufe , fur-tout lorfqu'il eft vieux : fon bois eft blanchâtre, mou , moëlleux, iln’eft pas employé : fes feuilles font amples , découpées en maniere de main ouverte, partagées en cinq parties , & ayant cinq angles ; elles font rudes , dures, &c d’un verd foncé : les fruits naïflent auprès de l’origine des feruilles , fans aucune fleur apparente qui ait précé- dé : ils font petits dans le commencement, groffif- fent peu-à-peu , verds d’abord, enfuite pâles, rou- geûtres, ou tirant {ur le violer ; ils font tous moël- leux , mous, 6 remplis d’uneinfinité de petits grains; ‘{i l’on blefle ces fruits avant leur maturité, ou la queue des fewilies , ou l'écorce nouvelle du fezier , - ilen fort un fuc laiteux, acre & amer. Cette plante n’eft pas privée defleurs, comme plu- FIG 745 fieuts lont crû ; mais elles font cachées dans le fruit même , comme Tournefort l’avoit foupçonné après Valerius-Cordus ; quoique ni lui niles autres bota- niftes n'ayent connu les vraies parties effentielles de cesfleurs , jufqu’à l’année 1712 , que M. dela Hire, medecin , & membre de l’académie des Sciences, a découvert & démontré publiquement dans cette cé- lebre académie , les étamines des figues , 87 leurs fommets couverts d’une poufliere très-fine ; car M. Tournefort avoit pris pour les fleurs, de certains filamens extrèmement fins , qui fortent desenvelop- pes qui renferment la graine , 8& même les piftiles de ces mêmes graines ; mais comme les parties na- turelles des fleurs font , fur - tout les étamines & les fommets, pleines d’une poufliere très-fine,& que les filamens de Tournefort ne font point garnis de ces fommets , ils ne doivent pas être appellés fleurs, fur-tout fi l'on trouve de ces étamines ailleurs gar- nies de leurs fommets, La fleur dans cette plante eft donc renfermée dans le fruit lui-même ; ou plûtôt _ le fruit eff le calice , dans lequel la fleur & les grai- nes font cachées. \ Voici quelle eft la difpofition &c la forme des dif- férentes fleurs du figzier | felon M. Linnæus ( Ge- nera Plant, 776). Le calice des fleurs eft commun, ou plütôt c’eff la figue elle-même ; il eft en forme de poire , très-gros , charnu , creux , fermé à fa partie fupérieure par beaucoup d’écailles triangulaires, pointues , dentelées & recourbées. Sa furface inter- ne eft toute couverte de petites fleurs, dont les ex- térieurs, ou les plus proches de ces écailles font les fleurs mâles , qui font en petit nombre; & au- deflous de celles-là , font les fleurs femelles entrès- grand nombre. Chaque fleur mâle a fon pédicule ; & fon propre calice partagé en trois, quatre & cinq parties, dont les découpures font en forme de lance , droites, égales, fans pétales : elle a trois étamines ou cinq. Selon Ponthedera, ce font des filets déliés de la lon- gueur du calice , qui portent chacun un fommet à deux loges ,'& entre ces étamines eft une apparen- ce de piftiles. Les fleurs femelles ont chacune leur pédicule , & leur calice propre partagé en cinq par- ties , dont les découpures font pointues en forme de lance, droites, prefqu’égales,mais fans pétales. L’em- bryon eft ovalaire , & de la longueur du calice pro- pre ; il eft furmonté d’un ftile en forme d’alêne qui fort de l'embryon , à côté de fon fommet : ce flile eft terminé par deux fligmates pointus & refléchis , dont l’un eft plus court que l’autre : Le calice eft pla- cé obliquement & contient une feule graine aflez grofle , arrondie & applatie. | Le fuc du fouier tiré de l’arbre par incifion , ou exprimé des feuilles , eft clair , laiteux , amer , acre & chaud. IL enleve la peau & l’excorie ; on s’en fert même pour extirper les porreaux appellés 7yrme- cie ; quelques-uns le préparent , & en font un dé- terfif , pour appliquer extérieurement dans les ma- ladies cutanées ; mais nousavons de beaucoup meil- leurs remedes. L’acidité du même fuc fait coaguler le lait , & le met en fromage ; cela doit être. Il entre encore dans la claffe de ces écritures fym- pathiques , qui ne {ont vifbles qu’en les chauffant ; c’eft-à-dire que fi l’on trace des lettres fur un pa- piér avec le lait , ou le fuc des jeunes branches de figurer , elles difparoïtront ; pour les lire il faut ap- procher le papier du feu ; lorfque ce papier fera fort échauffé , alors les caraéteres deviendront difi- bles ; c’eft une expérience fort connue ;.& l’on fait que lefuc du fgzier la partage non-feulement avec le vinaigre , le fuc du limon , & les autres acides, mais de plus, toutes les infufions , & toutes les dif- folutions , dont la matiere diffoute , peut fe brüler à très-petit feu , & fe réduire en une efpece de char: 746 FIG bon , produifent le même effet. Voyez ENERE sYM- PATHIQUE. | Le figuer eft un arbre très-connu dans les régions chaudes ; on n'y en rencontre pas de plus com- muns , {oit dans les jardins domeftiques , foit dans la campagne, On le cultive beaucoup dans les climats tempérés. La culture en eft facile , les progrès aflez prompts , le fruit exquis , & la récolte revient deux fois par an ; ayantages qui ne fe trouvent peut -être pas dans aucune autre plante. La Quintinie , Brad- ley & Miller , ont déployé tout leur art pour la per- fettion de cette culture, & pour celle dés figueries ; mais outre qu’on n’y peut parvenir qu'à grands frais, il eft certain que toutes fortes de figues ne peuvent réuflir dans nos climats : c’eft en Languedoc , en Pro- vence , en Italie, en Efpagne , en Portugal, & au- tres pays chauds, qu'il fautles aller chercher. Voyez cependant les recherches faites en ce genre par Brad- ley, Miller & la Quintinie, au mor FIGUIER ( Agric.). Le figuier fauvage, appellé par les Grecs spvoc , &Z par nos Botamiftes caprificus , ficus Jylveftris | &c. eft emblable en toutes fes parties au fouier ordinaire ; mais 1l porte des figues qui ne müriflent pas, &c qui fervent par art à la caprification dont les anciens ont tant parlé : je dis Les anciens , car rien n’eft plus antique que la caprification. Amos étant repris par Amafñas, prêtre de Béthel , de ce qu’il prophérifoit des chofes fâcheufes contre Ifraël, répondit à Ama- fias : « Je ne fus ni prophete , ni fils de prophete, » mon occupation eft de conduire mes troupeaux, » & de piquer des figues fauvages », Amos, chap. viiy, verf. 14. D'un autre côté , Théophrafte, Zv. II. de hiftor. plantar, cap. xÿ. Diofcoride , & Pline, Zv. XVT, cap. xxviy. ) nous entretiennent de ces figues fauvages, & de la maniere de les piquer avec des crochets de fer, pour faire mürir les figuiers domef- tiques : ce qu'il nous en difent n’eft point imaginaire, c’eft un fait très-vrai & très-curieux, dont M. de Tournefort nous a inftruit fort au long dans fes voya- ges, &t dans les mé. de Pacadémie des Sciences, ann. 1705. On trouvera ce détail ax mor CAPRIFICA- TION ; & fans cette connoiflance , il n’eft guere pof- fible de bien entendre les auteurs grecs & latins qui en ont parlé. Voyez donc CAPRIFICATION, Ariicle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FIGUIER , ( Agriculture.) On cultive ce petit ar- bre fruitier trés-communément dans les pays méri- dionaux de l’Europe ; maïs il n’eft pas aflez robufte pour réfifter en plein air aux grands hyvers dans nos contrées feptentrionales , fans des précautions qui très-fouvent ne le garantiflent pas, On voit rare- ment des figuiers d’une belle tige & d’une forme ré- guliere : cet arbre eft trop fujet à jetter du pié quan- tité de rejettons, qui l’affoibliflent & y mettent la confufion, Il fait de copieufes racines qui font me- nues, jaunâtres , tortueufes , & qui ne s'étendent qu’à fleur de terre. Son bois eft blanc, leger, fpon- gieux, caflant , & n’eft d'aucun ufage : l’écorce en eft unie , & d’une couleur cendrée fort claite : fes feuilles viennent tard, & tombent de bonne heure ; elles ont pour la plûpart quatre échancrures profon- des, qui les divifent en cinq parties, & ce font les plus grandes feuilles de tous les arbres fruitiers de ce climat. Son fruit eft de différentes formes , cou- leurs & grofleurs , felon les différentes efpeces ; mais il eft bien meilleur qu'il n’eft beau. Le fouier fe mul- tiplie fort aifément, croit très-promptement , réuf- fit dans les plus mauvais terreins , produit d’excel- lent fruit, & donne deuxrécoltes par an ; mais il eft de courte durée , & il ne s’éleve guere qu’à quinze piés. On peut multiplier cet arbre, foit en enlevant les rejettons qui fe trouvent communément au pié ;1oit £n couchant fes brançhes qui font de bonnes raçines efiun an, ou bien en faifant des boututes avec les jeunes branches & un peu de vieux bois, on même en greffant une efpece fur une autre, ou enfin en fc- mant les graines que renferme la figue. Le premier moyen eft le plus fimple & le plus court; le fecond fupplée à fon défaut ; on fe {ert du troïfieme, quand on ne peut faire autrement ; le quatrieme n’eft pra- tiqué que par quelques curieux, qui veulent perfec- tionner le fruit ; & le dernier n’eft point en ufage, parce que c’eft Ja voie la plus longue , & que la plû- part des plants qui en proviennent, font des efpeces bâtardes ou dégénérées. Quoique le fguier puifle venir dans prefque tous les terreins & à toutes les expofñitions , il fe plaît pourtant nueux dans les terres legeres, où il donne plus de fruit que dans celles qui font fermes &z humi- des, où il jette beaucoup de bois & fait pen de rap- port. Il y auroit même inconvénient à mettre cet arbre à une mauvaife expoñition : celles où il réuffit le mieux, font le midi, le fud-eft, &c le fud-oùeft. On ne fauroit trop prendre de mefures pour lui procurer en été toute la chaleur pofhble, & pour le garantir en hyver contre les diverfes intempéries que cette faifon amene , & qui obligent à mettre cet arbre dans les endroits les mieux abrités. On fait quelquefois la tentative de mettre le figurer à plein-vent ; 1l eft vrai qu'il ÿ produit de meilleur fruit & en une plus grande quantité : mais quelques précautions que l’on puifle prendre pour le défendre contre les gelées, 1l y réfifle rarement aux hyvers un peu rigoureux. Tout au moins doit-on Îui donner l’a bri des murailles de bonne expoñtion, où on le for- me en efpalier autant qu'il eft poffible d’y aftraindre cet arbre, dont le bois n’eft pas affez fouple pour être aflujetti régulierement contre une paliflade , en- core n’eft-on pas certain de le voir garanti par-là de l'atteinte des grandes gelées. Il n’y à donc de parti für, que celui d'avoir ces arbres dans des caïfles , ue l’on peut mettre dans la ferre pendant l’hyver : c’eft d’ailleurs le moyen d’avoir des figues plus pré coces, en plus grande abondance & de meilleur goût. Le figuier | comme tous les autres arbres frui- tiers , a befoin d’être taillé pour une plus longue durée 8 un meilleur rapport. Cette taille doit avoir pour objet de couper tout le bois mort ; de fupprimer les parties de l'arbre qui, en s’élançant irréauliere- ment , contrarient la figure qu’on lui veut faire pren- dre ; de retrancher les branches menues & confufes, car ce font celles qui ne donnent point de fruit ; d’ac- courcit les branches de faux bois , que l’on recon- noît à ce que les yeux en font plats & fort écartés. Mais 1l faut fe garder, autant que l’on peut, derien couper des branches à fruit, parce que c’eft fur-tout à leur extrémité que viennent les figues , & que le bois en étant fort fpongieux & plein de moëlle, la’ moindre entamure peut faire périr la branche. Par la même raifon, on doit avoir attention de tailier le figuier avant que la feve foit en mouvement , par- ce que l’arbre s’affoibliroit en perdant de ce fuc lai- teux , dont il abonde alors, & qui eft fi acre, f brû- lant, & fi corroff, qu’il fait prendre le lait comme la prefure , qu’il dffout celui qui eft caillé comme le vinaigre , & qu'il enleve la peau lorfqu’on lap- plique deffus : cependant cette feve, avec def étran- ges qualités, produit les fruits les plus doux, les plus fains , & les plus agréables au goût : tels font les pro- cédés, ou plütôt les miracles de la nature. On connoït plus de quarante efpeces de fouier que l’on fe difpenfera de rapporter ici, parce que le plus grand nombre ne profite pas dans ce climat. Celles qui y réuffifent le mieux, font les figues blan- ches, la ronde &c la longue, celle - ci eft plus abon- dante, l’autre eft plus précoce, toutes deux font exe cellentes, (c) | ErxGurer 6 Fiçue, ( Diere & Mar, med. )La figue fraîche & parfaitement mûre eft regardée comme humeétante, adouciflante, tempérante , comme fe disérant facilement, produifant un fuc lotiable , [à- chant doucement le ventre, nettoyantiles voies ufi- naires , chaffant ou fondant les graviers & le calcul, & fur-tout comme très-amie de la poitrine. Cette derniere qualité eft principalement &c plus éminemment attribuée aux -fozes feches , defignces chez les pharmacolopifies latins par le nom de cari- ce ou ficus pale. Ces figues feches tiennent donc un rang diflingué parmi les.fruits peétoraux, Voyez BE- CHIQUE 6 PECTORAL. Ce n'eit que dans cet état ‘qu'onl’employe à titredé médicament. Plufieurs me- decins, tant anciens que modérnes ; leur ont attri- buéun grand nombre d’autres propriétés, foitutiles, foit nuifibles : celles, par exemple, de faciliter l’ac- éouchément, de provoquer Les fuéurs jufqu’au point de caufer des exanthemes ou échauboulures:, de ré- fifter au poifon, d’engéndrer des poux, de rendre la chair molafle & boufiie, decaufer des obftruétions, &c. Ces vertus & ces qualités nuifibles: ne nous pa- roïffent fondées que fur des préténtions : on croit af- fez généralement aujourd’hui , que les figues; foit nouvelles, foitfechées , font un aliment très-falu- taire, pourvû qu'on en üfe modérément. On re- médie à une certaine vifcofité incommode dela fali- ve qu’elles procurent eñ avalant abondamment de Peau fraiche. tit CRUE | On a obfervé dans'lés provinces méridionales du royaume , où les fgzes font un aliment tres-commun & très-ordinaire pendant cinq mois confécunifs ; qu'”- elles ne produifoient aucun mauvais effet avec quel- que excès qu’on en mangcât, pourvà qu'on eütioin de les choiïfir bien mûres; mais que célles qui na- voient pas acquis une maturité parfaite , qui Conte- noïent encore un fuc laiteux dans leur pédicule & dans leur peau , caufoient très: communément des dyffenteries &c des fievres. no à ” Galien dit que depuis l’âge de vingt-hüit ans , 1l s’eft abftenu de toute forte de fruits d'été, horæ:, fu- gaces, excepté des figues bien mûres & des rarfins ; & il attribue à ce fage régime, la fanté dont 1l a jo jufque dans un âgé avance, | L'emploi des figues feches à titre de remede , eft borné dans l’ufage ordinaire, à être un desingrédiens des déco&tions peétorales , des gargarifmes adoucif- fans & maturatifs quelquefois , mais plus rarement des lavémens adouciffans ,.& à être appliquées ex- térieurement fur les tumeurs inflammatoires à titre de maturatif, Voyez MATURATIF. On s’en fert pour corriger efficacement la faveur defagréable du féné. Foy CORRECTIF. Sylvius Deleboé dit que lenr décoétion excite le Vomiflement aufi bien que l’eau tiède, fcubus prins comeffis fuperbibie ; quo artificio , ajoûte-l , ézrocen- tiam fuam probavit Æfopus. Plufieurs medecins anciens ontrecommandé le fuc laiteux & les feuilles de fgzier dans bien des cas. Pli- ñe (4v. XXIII. chap. vi.) parle de l'ufage ex- térieur du fuc , comme cauftique ; dépilatoire , mondificatif, utile contre la goutte, la gale, & di- verfes maladies de la peau , comme excitant les re- gles, pris intérieurement. Maïs le fuc de figurer n’eft plus un remede pour nous. Le même auteur dit qu'on employoit de fon tems les feuilles de fgzier contre les écrotelles ; 8 que les jeunes pouffes étoient bonnes contre la morfure des chiens enragés. Ces remedes {ont encore abfo-. lument inufités aujourd’hui. (2} FIGUIER D'AMÉRIQUE , grand figuier Où figuier admirable. Le didionnaire de Trévoux confond cet arbre avec le paléturier, quoique ce foit deux ar- bres diférens qui n’ont rien de commun que la façon FIG 747 dont ils fe reproduifent & s'étendent à la ronde, au moyen de leurs branches, qui en fe recourbant pren. nent racine & forment de nouveaux troncs. Le fruit du fguier eft à-peu-près dela groffeur d’u- fe noïfette, Il reMlemblé exaétement à la figue d'Eu- Tope, tant extérieurement qu'intérieurement ; il en a mème le goût : cependant il eft un peu plus fade, Gt moms fucculent, #rsicle de M. LE ROMAIN. PIGULER D'ADAM : cette grande & belle plante que l’onnomme plane en quelques contrées,né porte point cenom aux Antilles, comme le ditle diétion. de Trév. on Pappelle fmplemént fewier bananier, femblable au bananier fimple, qu'à moins d’une grande habi- tude on ne peut les diftinguer que par lé fruit, qui dans le premier eft plus petit & plus gras à propor- tionde fa longueur, la chair en étant d’ailleurs beau- coup plus délicate. Les Efpagnols les nomment p/a- Taëns. Article de MJ'LE ROMAIN. FiGUTER D'INDE , (Mar, méd, 6 Pharm.) Voyez RAQUETTE. | *FrGuier DENAVIUS, (Hift. anc.) figuier que Tarquin le vieux fit planter à Rome dans le comice, Où l’augure Accus Navius avoit coupé en deux une pierre Aaïsuiler avec un rafoir. Il y avoit un préjugé populaire, que le deftin de Rome étoit attaché à cet arbre , & que la ville dureroit autant que le feuzer. [l'y en a qui confondent le ficus Navir, ou figuier d'Accius Navius, avec le ficus ruminalis ,'ou figuier raminal ; mais celui-ci eft l’arbre fous lequel'on dé- couvrit la louve qui alaitoit Remus & Romulus, Cet arbre fut facré ; il dura très-long tems , & l’on prit fa chûte à mauvais augure. FiGuter, (Maléditlion du) Théol, Crir. La malé- diétron que J. C. donna au figurer ftérile dans un tems, dits. Marc, qui nétoit pas la faifon des figues , eft un dés endroits du Nouveau Teftament qui a le plus exercé les interprètes dé l’Ecriture. " ! &« Jefus-Chrift ayant faim au fortir de Béthanie, » appercut de loin un fexier qui avoit des feuilles: » 1ls’avança pour voir s’il ytrouveroit quelque fruit; » mais s’en étant approché, 1l n’y trouva que des » feuilles’, car ce n’étoit pas la faifon des fioues: alors » Jefus dit au figuier, ge perfonne ne mange plus de » zo1 ». Ce font les paroles de S. Marc, ch. 4y. ÿ. 13 & 14. | Ce qu vient d’être raconté par cet évangélifte , arriva quatre ou cinq jours avant la pâque, & par conféquent avant le quinzieme de la lune de Mars : or en cette faifon il paroït qu'il n’étoit pas tems de chercher des figues à manger fur un fégzier, Ainfidans cette {uppoñition, il paroîtroit qu'il y a un défaut d'équité dans la conduite de Jefus-Chrift : 1°, d’al- lèr chetcher des fruits fur un arbre dans un tems qu'il n’en doit pas porter : & 20. de maudire cet arbre, parce qu'il n’a point de fruit, comme fi c’étoit fa faute. Pour juftifier J. C. d’une a@ion qui femble d’abord emporter quelque idée d’injuftice , les interpretes, ignorans en Botanique , fe font fort tourmentés. - Hammond, Simon, le Clerc, ne paroïfent point avoir réfolu la difficulté en traduifant les termes de S. Marc , où yap hv æaipoc auxüy , par ceux-ci, car ce n’étoir point une année de figues, En effet, outre que le texte grec a de la peine à fouffrir ce {ens, J. C. qui va chercher des figues fur un arbre au milieu du mois de Mars , ne doit pas maudire ce figurer en particu- ler, par la raifon que les figues auroïent manqué cette année-là. D'autres critiques , comme Heinfius & Gataker, fraduifent, car La où il étoit c’étoit le tems des figues. Cettetraduétion eff très-ingénieufe ; mais il faut pour la foûtenir changer la ponétuation , de même que les accens ordinaires du texte ; 2°, 1l faut faire parler l’é- vangélifte avec une concifion qui eft éloignée de fon 748 FIG ftyle ordinaire; 3°. 1l ne paroît point que dans la Pa- leftine, Le dixieme ou le donzieme de la lune de Mars fût la faifon des figues ordinaires , car il eft certain qu'elles n’y müriflent pas fi-tôt, Enfin divers mterpretes, Calmet, Beaufobre, Len- fant, &c plufieurs autres anciens & modernes, regar- dent cette ation de J. C. comme une a@ion fymbo- lique de la réprobation des Juifs, une lecon qw'il leur donne s'ils viennent à ne pas porter le fruit des bon- nes œuvres. La nation judaique eft le fguier ; le ft guter dont nous patlons n’avoit que des feuilles, en quoi 1l reflémbloit aux Juifs, qui n’avoient que les apparences de la religion & de la piété. Théophrafte , kif. plans. lib. IV, cap. ij, & Pline, lb, XIII, cap. vu: & lib. XV. cap, xviÿ parlent d’une forte de figuiers toüjours verds &toûüjours char- gés de fruits; les uns mûrs & fort avancés, felon la faifon ; & les autres en fleurs ou en boutons. Dans la Paleftine où l’hyver eft fort tempéré, & où le pays eft fort chaud, Jefus-Chrift pouvoit efpérer de trou- ver quelques figues précoces à un figurer de cette ef- pece, | Suivant cette idée, S. Marc ne rend point ici la raifon pourquoi Notre Sauveur ne trouva point de figues à ce fouier , mais pourquoi il s’adrefle plütôt à ce figuier-là qu’à un figuier d’une autre efpece, à un figuier plus tardif; c’eft parce que ce n’étoit pas lafai- fon dés figues ordinaires, au lieu qu'il pouvoit fe fla- ter d’en trouver fur cette efpece de fgier. Ces paro- les donc, car ce n’étoit pas la faifon des figues , c’eft-à- dire des figues ordinaires, font une parenthefe de l’hif- torien; parenthefe que S. Matthieu (cz. xx. ÿ. 19.) n’a point nufe en rapportant le même fait de la 71a- lédiilion du figuier. Cette interprétation concilie les deux hiftoriens facrés ; & n’a rien qui bleffe dans la conduite de Jefus-Chrift, C’eft ainfi qu’au défaut de l’érudition qui laifloit encore des nuages, la connoif- fance de la Botanique eft venue pour les diffiper. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. | FIGURABILITÉ , £. f. (Pkyfig.) On appelle ainfi cet attribut eflentiel des corps, qui confifte 1°, en ce qu'ils ne peuvent exifter fans avoir une certaine f. gure ; 2°, en ce que telle ou telle figure particuliere n'eft pas néceflaire à leur exiftence, & qu’on peut leur fuppofer celle qu’on voudra. La figure ronde eft effentielle à un globe entantque globe, mais non en- rant que portion de matiere, Voyez FIGURE & CoN- FIGURATION. (0) | FIGURANT , ANTE, adj. serme. d'Opera ; c’eft le nom qu’on donne aux danfeurs qui figurent dans les corps d’entrées, parce que le corps d’entrée def- fine dans fa danfe des figures diverfes. Les maîtres de ballets ont fenti eux-mêmes com- bien les figures étoient néceffaires à leurs corps d’en- trée. N'ayant pour l’ordinaire rien à defliner dans les compofitions , ils ont recours à l'imagination, &ils font figurer leurs danfeurs trois à trois, quatre à qua- tre, &c. Quelque fertile cependant que foit Pimagi- nation d’un compoñteur en ce genre, il faut nécef- fairement qu'il fe répete. bientôt, lorfqu'il ne peut employer des danfeurs que pour danfer. Il faut des attions pour animer a danfe ; elle perd la plus gran- de partie de fon agrément , & cefle d’être dans {a na- ture, lorfqu’elle n'exprime rien & qu’elle ne fait que des pas. Voyez BALLET , DANSE, PANTOMIME. B FIGURATIF, (Juri/p.) en ftyle de Palais, fe dit de ce qui repréfente la figure de quelque chofe, comme un plan fgurarif d’une maifon , æ’eft-à-dire la figure de cette maïfon repréfentée.en relief, en petit, à la différence d’un fimple plan géométral, qui ne figure que l'emplacement de la maïfon par des lignes. Foy. PLAN & FIGURE. (4) FIGURATIVE, adj. pris fub, srme de Grammaire, &t fur-tout de Grammaire greque ; on foufentend %e- tre, La figurative eft auffi appellée caraütériflique, En grec, la fgurative eft la lettre qui précede la termi- naifon, c’eft-à-dire la voyelle qui termine one pré- {ent , ou le futur premier, ou le prétérit parfait, On garde cette lettre pour former chacun des tems qui viennent de ceux-là : car comme en latin tous les tems dépendent les uns du préfent, les autres. du pré- térit parfait, 8 enfin d’autres du fupin ; que de am on forme amabam , amabo ; que de arzavi on fait ama- Veram ; amavero, arnaverim , amaviffems 8 qu’enfin d'amatum on fait amaturus , & que par conféquent on doit remarquer le #7: dans amo, le v dans wmavi 5 & le rs dans amarum , & régarder ces trois lettres comme autant de figurarives : de même en grec, il ya des terms qui fe forment du préfent de l'indicatif; d’autres du futur premier, & d’autres du prétérit parfait : la lettre. que l’on garde pour former chacun de ces tems dérivés , eft appellée fovrarive. Telle,eft l’idée que lon doit avoir de la fgurative engrec: cependant la plüpart des Grammairiens don- nent aufli le nom de fieuratise aux confonnes quileur ont donné lieu d'imaginer fix conjugaifons différentes des verbes barytons. Dans chaque conjugaifon il y a trois fguratives , celle du préfent, celle du futur, & celle du prétérit; mais la conjugaifon a auffi {es fou- ratives,,. qui la difftingnent d’une autre conjugaifon: ainf£, 7,0, font les fgzratives des verbes de la pre- micre conjugaifon , en Bo, æv, çu, & rw, dont le ne fe compte point, parce qu'il ne fubfifte qu'au préfent & à Pimparfait, #, y, x ont les trois fourarives des verbes de la econde conjugaifon, en 10, 30, 4o, & x70, dont le + fe perd. comme à la premiere. Il en eft de même des autres quatre conjugaifons des verbes barytons ; mais puifque les terminaifons de ces verbes font les mêraes dans chacune de ces conjugaifons, c’eft avec trop peu de fondement , dit la méthode de P. R. pag. 115, qu'on a imaginé ces prétendues fix conjugai- fons. Ainfi tenons-nous à l’idée que nous avons d’a- bord donnée de la fgurative ; les perfonnes qui étu- dient la langue greque , apprendront plus de détail fur ce point dans les livres élémentaires de cette lan- & fur-tout dans la pratique de l’explication. EF, FIGURE , f. £. (Phyfique.) {e dit de la forme ex térieure des corps ; je dis exrérieure , les anciens phi- lofophes ayant diftingué par ce moyen la fgwre de la forme proprement dite, qui n’eft autre chofe que l’arrangement intérieur de leurs parties. Plufieurs philofophes modernes ont prétendu que les corps ne diféroient les uns des autres, que par l’arrangement & la figure de leurs particules. Sur quoi voyez l’arti- cle CONFIGURATION. Cette queftion eft de celles qui ne feront jamais décidées en Phyfique , parce qu’elle tient à d’autres qui ne le feront jamais , cel- les de la nature des élémens de la matiere, de la dureté, &c. Voyez ÉLÉMENS, MATIERE, PRINGI- PE, DURETÉ , &c. FIGURE , ez Géométrie ; fe prend dans deux accep- tions différentes. | | Dans la premiere, il fignifie en général wr efpace | terminé de tous côtés , foït par des furfaces, foit par des lignes. S’il eft terminé par des furfaces, c’eft un folide ; s'il eft terminé par des lignes, c’eft une fur- face : dans ce fens les lignes, les angles ne font point des figures. La ligne, foit droite, foit courbe, eft plû- tôt le terme &c la limite d’une fgure , qu’elle n°eft une figure. La ligne eft fans largeur , & n’exifte que par une abftraétion de l’efprit ; au lieu que la furface, quoique fans profondeur , exifte, puifque la furface d’un corps eft ce que nous en voyons à l'extérieur. Voy. LIGNE, POINT, SURFACE, GÉOMÉTRIE, &c. Un angle n’eft point une figure, puifque ce n’eft au- tre FIG re chofe que l'ouverture de deux lignes droites, in clinées l’une à l’autre, & que ces deux lignes droi- tes peuvent être indéfinies. L’angle n’eft pas l’efpas ce compris entre ces lignes; car la grandeur de lan- gle eft indépendante de celle de l’efpace dont 1l s’a- git; l’efpace augmente quand les lignes croiflent, & l'angle demeure le même. Au refte on applique encote plus fouvent, en Géo- métrie, le nom de figure aux furfaces qu'aux foli- des, qui confervent pour l’ordinaire ce dernier nom. Or une furface eft un efpace terminé en tout fens par des lignes droites ou courbes : ainfi on peut, fui- vant l’acception la plus ordinaire, définir la fgure, un efpace terminé en tout fens par des lignes. Si la figure eft terminée en tout fens par des lignes dtoites, on l’appelle färface plane : cette condition, ezz cour fers, eft ici abfolument néceflaire, car il faut que l’on puiffe en tout fens appliquer une ligne droite à la figure pour qu’elle foir plane ; en effet une figure pourroit tre terminée extérieurement par des li- gnes droites, fans être plane : telle feroit une voûte qui auroit un quarré pour bafe, Si on ne peut appliquer une ligne droite en tont fens à la irface , €lle fe nomme figure courbe , & plus communément /xrface courbe. Voyez COURBE 6 SUR- FACE. Si les figures planes font terminées par des lignes droites , en ce cas on les nomme figures planes reéti- lignes ; ou fimplement figures reéhiliones : tels font le triangle , le parallélogramme , &les polygones quel: conques, &c. Si les figures planes font términées par des lignes courbes, comme le cercle, lellipfe, &c. On les nomme ffoures planes curvilignes, Voy. Cour- BE & CURVILIGNE. On appelle aufñ quelquefois figures curvilignes les fürfaces courbes , comme le triangle fphérique. Enfin on appelle fgures mixrili- gres Ou mixtes , celles qui font terminées en par- tie par des lignes droites, & en partie par des lignes courbes. On appelle côrés d’une figure, les lignes qui la ter- minent : cette dénomination a lieu {ur - tout quand ces lignes font droites, Elle n’a guere lieu pour les furfaces courbes, que dans le triangle fphérique, Figure équilatere ou équilatérale, eft celle dont les côtés font égaux. Figures équilateres font celles dont les côtés font égaux, chacun à fon correfpondant, Voyez ÉQUILATÉRAL, Figure équiangle | eft celle dont les angles font tous égaux entre eux. Figures équiangles entre elles, font celles dont les angles font égaux, chacun à fon correfpondant, Figure ré- guliere, eft celle dont les côtés & les angles font égaux. Figures femblables, font celles qui ont leurs ‘ angles égaux & leurs côtés homologues proportion. nels. Voyez SEMBLABLE. Une fipure eft dite inferire dans une autre, lorfqu’elle eft renfermée au-dedans, & que fes côtés aboutiflent à la circonférence de la figure dans laquelle elle eft infcrite: en ce cas la f- gure dans laquelle la propofée eft infcrite ; eft dite circonfcrite à cette même propolée, FIGURE , (Géom.) pris dans la feconde acception, fignifie la repréfentation faite fur le papier de l’objet d’un pee , d'un problème, pour en rendte la démoñfiration ou la folution plus facile À conce- voir. En ce fens une fimple ligne, un angle, E&c. font des figures , quoiqu’elles n’en foient point dans le premier fens. | [l y a ün art à bien faire les foures de Géométrie, à éviter les points d’interfetion équivoques, & les points qui {ont trop près Pun de l’autre, & qu’on ne peut diffinguer commodément par des lettres ; à ÉVI- ter auf les pofitions de lignes qui peuvent induire le leéteur en erreur, comme de faire paralleles ou perpendiculaires les lignes qui ne le doivent pas être péceflairement ; À marquer par des lettres fembla- Tome FI, FIG 749 bles les points correfpondans ; à féparer én plufiéurs figures, celles qui feroient trop compliquées ; à défi= gner par des lignes pon@uées , les lignes qui ne fer vent qu'à la démonftration, G:c. & mille autres déz tails que l’ufage feul peut apprendre, La dificulté eft encore plus grande , fi ôn à des folides ou des plans différens à repréfenter. La dif: ficulté du relief & de la perfpetive empêche fou- vent que ces figures ne foient bien faites. On peut y remédier par des ombres, qui font fortir les di£: férentes parties, & marquent différens plans : mais les ombres ont un inconvénient, c’eft celui d’être fouvent trop noires, & de cacher les lignes qui doi- vent y être tirées, & les points qui défignent ces Bgnes, | Les figures en boïs, gravées À côté de la déthôn2 ftration , & répétées à chaque page fi la démonftra- tion en a plufeurs, font plus commodes que les f: gures placées à la fin du livre, même lorfque ces fgu- res fortent entierement. Mais d’un autre côté, leg figures en boïs ont communémént le defavantage d’ê- tre mal faites, & d’avoir peu de netteté, (O0) FIGURE, fe dit quelquefois en Arithmétique ; des chiffres qui compofent un nombre, Voyez CHIFFRE, CARACTERE, &c. | FIGURES DES SYLLOGISMÉS > VOYEz SYLLOGIS+ ME, & plus bas FIGURE, (Gramm. 6 Logiq.) FIGURE DE LA TERRE, (4ffron. Géog. Phyfig. G: Méch.) Cette importante queftion a fait tant de bruit dans ces derniers tems, les Savans s’en font telle= ment occupés ; {ur-tout en France , que nous avons crû devoir en faire l’objet d’un article particulier, fansrenvoyer ax mor TERRE » Qui nous fournira d’aïl: leurs aflez de matiere fur d’autres objets, Nous n’entrerons point dans le détail des Opinions Extravagantes que les anciens ont eues,ou qu’on leur attribue fur la figure de La Terre, On peut s’en inftruire dans PAlmagefte de Riccioli & ailleurs. Anaxima ndre, dit-on, crut la terre femblable à une colonne, Leu= cippe à un cylindre, Cléanthe à un cone » Héraclite à un efquif, Démocrite à un difque creux, Anaxia mene & Empedocle à un difque plat, enfin Xenopha- ne de Colophon s’eft imaginé awelle avoit une racia ne infinie fur laquelle elle portoit, Cette derniere Opi< nion rappelle celle des peuples indiens, qui croyent la terre portée fur quatre éléphans. Mais on nous per mettra de douter que la plüpart des philofophes qu'on vient de nommer, ayent eu des idées fi abfut= des, L’Aftronomie avoit déjà fait de leur tems de grands progrès, puifque Thales qui les précéda avoit prédit des éclipfes. Or il n°eft pas vraiflemblas ble ; ce me femble, que dans des tems où l’Aftrono mie étoit déjà fi avancée , on fût encore fi ignorant fur la foure de la Terre: car on va voir que les premie-: res obfervations aftronomiques ont dû faire connoï- tre qu’elle étoit ronde entout fens. Auffi Ariflote quE a été contemporain, ou même prédécefleur de plu- fieurs des philofophes nommés ci-deflus, établit & prouve la rondeur de la terre dans fon Jécord livre de cœlo , chap, xjv. par des raïfons très - folides , c à= peu-près femblables à celles:que nous allons en don: ner. On s’apperçut d’abord que parmi les étoiles qu’on. voyoit tourner autour de la terre, 1l y enavoit quel- ques - unes. qui reftoient toûjours dans la mêmé place, ou à-peu-près, & que par conféquent toute. la fphere des étoiles tournoit autour d’un point: fixe dans le ciel ;.:on appella ce point le pole; on re- marqua bien-tôt après, que lorfque le foleil fe tro voit chaque jour dans fa plus grande élévation Ati= deflus de notre tête, il étoit conftamment alors; dans le plan qui pañloit par le pole êc pat une ligne F3 plomb; on appella ce plan méridien: on obferva eñ« luite que quaud on voyageoit dans la dire&ion du CCcce 750 FIG méridien, les étoiles vers lefquelles on alloit, pa- roïfloient s'approcher du haut de la têre, & que les autres au contraire paroïfloient s’en éloigner ; que de plus ces dernieres étoiles, à force de s’abaïffer, difparoïfloient tout-à-fait, &c que d’autres conimen- çoient à paroître vers la partie oppofée. De-là il étoit aifé de conclure que la ligne à-plomb, c’eft-à-dire la ligne perpendiculaire à la furface de la Terre, & paf- fant par le fommet de notre tête, changeoïit de di- redion à mefure qu’on ayançoit fur le méridien, & ne demeutoit pas toüjours parallele à elle-même; que par conféquent la furface de la Terre n’étoit pas plane , mais courbe dans le fens du méridien. Or les plans de tousles méridiens concourant au pole, com- mé on vient de le remarquer, il ne faut qu'un peu de réflexion (même fans aucune teinture de Géométrie), pour voir que la terre ne fauroit être courbe dans le fens du méridien, qu’elle ne foit courbe aufli dans le fens perpendiculaire au méridien, & que par confé- quent elle eft courbe dans tous les fens. D'ailleurs d’autres obfervations aftronomiques, comme celles du lever & du coucher des aftres, & de la différence des tems où il arrivoit felon le eu de la Terre où on étoit placé, confirmoient la rondeur de la Terre dans le fens perpendiculaire au méridien. Enfin l’obferva- tion des éclipfes de Lune dans lefquelles on voyoit l’ombre de la Terre avancer furle difque de la Lune, fit connoïtre que cette ombre étoit non-feulement courbe,;mais fenfiblement circulaire ; d'où on conclut avec raïfon que la Terre avoit auf à-peu-près la f- gure fphérique; je dis a-peu-près, parce qu'il y a eu en effet quelques anciens quiont crü que la Terre n’a- voit pas exaétement cette figure ; voyez les Mém. de lAcad, des Belles-Lertres, t. XVIII. p. 97.Mais non- obftant cette opinion des anciens,lanon-fphéricité de la Terre doit être regardée comme une découverte qui apparent abfolument & uniquement à la philo- fophie moderne, par les raïfons qui ont été expoées dans l’article ERUDITION , som, W. p. 918. col. 1. Quoi qu'il en foit, il eft certain du moins qu’en gé- néral Les philofophes anciens attribuoïent à la Terre une fphéricité parfaite ; & 1l étoit naturelde le croire jufqu'à ce que l’obfervation en eût détrompé. Si la tondeur de la Terre avoit befoin d’une autre preuve encore plus à laportée detoutle monde, ceux qui ont fouvent fait le tour de la Terre nous affü- roient aufñ de fa rondeur. La premiere fois qu’on en a fait le tour, c’àétéen 1519. Ce fut Ferdinand Ma- gellan quilentreprit, &ilemploya r124jours à fai- rele tourentier; François Drake, anglois, en fit au- tant l'an 1577 en 1056 jours; Thomas Cavendishen 1586 fit le même voyage en 777 jours; Simon Cor- des de Rotterdam l’a fait en l’année 1590 ; Olivier Hoort, Hollandois, en 1077 jours. Guillaume Corn. Van Schout,enl’an 1615, en749 jours. Jacques He- remites & Jean Huyghens, l’an 1653, en 802 jouts. En dernier lieu ce voyage a été fait par amiral An- fon, dont on a imprimé la relation fi intéreflante & fi curieufe. Tous ces navigateurs alloient de Peft à l’oûeft, pour revenir enfin en Europe d’où ils étoient partis, &c les phénomenes, foit céleftes foitterreftres qu'ils obferverent pendant leur voyage, leur prou- verent que la Terre eft ronde. La fphéricité de la Terre admife, il étoit aflez faci- le de connoître la valeur d’un degré du méridien, & par conféquent la circonférence & le diametre de la Terre. On aexpliqué en général az m0 DEGRÉ, com- ment on mefure un degré du méridien, nous y ren- voyons, & cela nous fuflit quant à préfent, refervant un plus grand détail pour la fuite de cet article ; le degré du méridien s’eft trouvé par cette méthode d'environ 25 de nos lieues, & commeul ya 360 de- -grés , on concluoit que la circonférence de la terre eft par conféquent de 9000 lieues, & le rayon ou FIG demi-diametre de la Terre, de 14 à 15 cents lieues ; le tout en nombres ronds; car il ne s’agit pas encore ici de la mefure exacte & rigoureufe. La phyfique du tems fe joignoit aux obfervations pour prouver la fphéricité de la Terre ; on fuppoñoit que la pefanteur faifoit tendre tous les corps à un même centre ; on croyoit de plus prefque générale- ment la terre immobile. Or cela pofé, la furface des mers devoit être fphérique , pour que les eaux y ref- taflent en équilibre : & comme les mers couvrent une grande partie de la furface de la terre, on en concluoit que la partie folide de cette furface étoit auf fphérique ; & cette conclufion, ainf que le prin- cipe qui l’avoit produite, furent regardés comme in- conteftables , même après qu'on eut découvert le mouvement de la Terre autour de fon axe. Voyez Copernic, G'c. Voyons maintenant comment on s’eft defabufé de cette fphéricité , & quel eft l’état actuel de nos connoïffances fur Ce point : commen- çons par quelques réflexions générales. Le génie des philofophes, en cela peu différent de celui des autres hommes, les porte à ne chercher d’a- ‘bord ni uniformité ni loi dans les phénomenes qu'ils obfervent; commencent-ils à y remarquer, ou même à y foupçonner quelque marche réguliere , ils imagi- nent aufli-tôt la plus parfaite & la plus fimple ; bien- tôt une obfervation plus fuivie les détrompe, & fou- vent même les ramene à leur premieravis avec aflez de précipitation, & comme par une efpece de dépit; enfin une étude longue, aflidue , dégagée de préven- tion & defyftème , les remet dans les limites du vrai, & leur apprend que pour l’ordinaire la loi des phé- nomenes n’eft ni aflez compofée pour être apperçue tout-d’un-coup, ni auf fimple qu’on pourroit le penfer ; que chaque effet venant prefque toüjours du concours de plufieurs caufes, la maniere d’agir de cha- cune eft fimple , mais que le réfultat de leur ation réunie eft compliqué, quoique régulier, & que tout. fe réduit à décompoler ce réfultat pour en démêler les différentes parties. Parmi une infinité d'exemples qu’on pourroitapporter de ce que nous avançonsici, les orbites des planetes en fourniffent un bien frap- pant : à peine a-t-on foupçonné que les planetes fe mouvoïent circulairement , qu’on leur a fait décrire des cercles parfaits, & d’un mouvement uniforme, d’abord autour de la Terre, puis autour du Soleil, comme centres.L’obfervation ayant montré bien-tôt après que les planetes étoient tantôt plus, tantôt moins éloignées du Soleil, on a déplacé cet aftre du centre des orbites, mais fans rien changer n1 à la Æ- gure circulaire, ni à Puniformité de mouvement qu’= on avoit fuppofées; on s’eft apperçû enfuite que les orbites n’étoient ni circulaires mi décrites uniformé- ment ; on en a fait des ovales, & onieur a donné la figure elliptique, la plus fimple des ovales que nous connoïffions ; enfin on a vi que cette figure ne ré- pondoit pas encore à tout , que plufieurs des planetes, éntr'autres Saturne, Jupiter , la Terre même & fur- tout la Lune , ne s’y aflujettifloient pas exatement dans leurs cours. On a taché de trouverla loide leurs inégalités, & c’eft le grand'objet qui occupe aujour- d’hui les favans. Voyez TERRE, LUNE, JUPITER, SATURNE, Ge, Il en a été à-peu-près de même de la foure de le Terre : à peine a-t-on reconnu qu'elle étoit courbe, qu'on l’a fuppofée fphérique; enfin on a reconnu dans les derniers fiecles, par les raifonsque nous di- rons dans un moment, qu’elle n’étoit pas parfaite- ment ronde ; on l’a fuppofée elliptique, parce qu’a- près la figure fphérique, c’étoit la plus fimple qu'on püût lui donner. Aujourd’hui les obfervations & les recherches multipliées commencent à faire douter de cette figure, & quelques philofophes prétendent mé- me que la Terre eft abfolument irréguliere, Difcu- ons toutes ces différentes prétentions, & entrons dans le détail des raifons{ur lefquelles elles font fon- dées; mais voyons d’abord en détail comment on S'y prend pour connoïtre la longueur d’un degré ‘de la os | Toute réduit à deux opérations ; la mefure de Tamplitude dé late célefte, compris entre deux lieux placés fous le même méridien à différentes latitudes, & la mefure de la diftanceterreftre de ces deux lieux. En effet, fi on connoît en desrés, minutes &c fecon- des l'amplitude de l’arc célefte compris entre ces deux lieux , & qu’on connoifle outre cela leur dif- tance terreftre, on fera cette proportion ; comme le nombre de degrés, minutes & fecondes que contient amplitude, eft à un degré, ainfi la diftanceterreftre connue entre les deux lieux, eft à la longueur d’un degré de la Terre. Pour mefurer l'amplitude de l’arc célefte, on ob- ferve dans l’un des deux lieux la hauteur méridien: ne d’une étoile | & dans l’autre lieu , on obferve la hauteur méridienne de la même étoile ; la différence des deux hauteurs donne l’amplitude de Parc, c’eft- à-dire le nombre de degrés du ciel qui répond à la diffance des deux lieux terreftres. Voyez l’arricle DE- GRÉ, où l’onen a expliqué la raïfon. Il eftinutile de dire qu'on doit corriger les hauteurs obfervées par lesrétraétions, Voyez RÉFRACTION. De plus , afin que l'erreur caufée par la réfra@tion foit la moindre qu'il eft poffible , on a foin de prendre , autant qu'on le peut, une étoile près du zénith, parce que la ré- fraétion au zénith eft nulle, & prefqu’infenfible à . 4 ou 5 degrés du zénith, Il eft bon aufi que les ob- fervations de l'étoile dans les deux endroits foient fimulcanées , c’eft-ä-dire qu’elles foient faites dans Le même tems, autant qu'il eft poflible, par deux obfer- Vateurs différens placés chacun en même tems dans chacun des deux lieux ; par ce moyen on évite tou- tes les réduétions & correttions à faire eñ vertu des mouvemens apparens des étoiles, tels que la précef- fon , Paberration & la nutation. Voyez ces mors. Ce- pendant sil n’eft pas pofible de faire des ôbferva- tions fimultanées , alors il faut avoir écard aux cor- rections que ces mouvemens produifent. Ajoûtons que quand les lieux ne font pas fitués exaétement fous le même méridien, ce qui arrive prefqu’infailli- blement, l’obfervation de l'amplitude, faite avec les précautions qu'on vient d'indiquer , donne l’ampli- tude de l’arc célefte compris entre les paralleles de ces deux lieux, & cela fuffit pour faire connoître le depré qu'on cherche , au moins dans la fuppoñtion que les paralleles foient des cercles; cette fuppoñition à totjours été faite jufqu’ici dans toutes les opéra- Hons quiont été entreprifes pour déterminer la foure de la Terre; il eft vrai qu’on à cherché dans ces der- niers tems à l’ébranler; c’eft ce que nous examine- rons plus bas; nous nous contenterons de dire quant à préfent, que cette fuppoñtion des paralleles circu- laires eft abfolumentnéceffaire pour pouvoir conclu- re quelque chofe des opérations par lefquelles on mefure les degrés, puifque fi les paralleles ne font pas def cercles, il eft abfolument impoñfible, come on le verra auffi plus bas, de connoître par cette me- fure la fgure de la Terre, ni mêmed’être aflüré que ce qu'on a mefuré eft un degré de latitude. L L’amplitude de l’arc célefte étant connue, 1l s’à- git de mefurer la diftance terreftre des deux lieux, ow s'ils ne font pas placés fur le même méridien, la diftance entre les paralleles. Pour cela on choifit fur des montagnes élevées différens points , qui forment avec les deux lieux dont il s’agit, une fuite de trian- gles dont on obferve les angles le plus exaétement qu'il eft poffible, Comme la fomme des angles de chaque triangle eftégale à 180 degrés (voyez T'R1AN- GLE ), On fera certain de l’exa@titude de l’obferva- Tome VI, FIG 751 tioh, f la fofñme des angles obfervés ef égale à 185 degrés ou n’en differe pas fenfiblement. Il faut re- marquer de plus que les différens points qui forment ces triangles ne font point pour l'ordinaire placés dañs ün même plan, ni dans un même niveau, ainf il faut les y réduire, en obfervant la hauteur de ces diférens points au-deffus du niveau d’une furface concentrique à celle de la Terre, qu'on imagine paf: {et par Pun des deux lieux. Cela fait, on melure quélque part fur le terrein une bafe de quelque éten- due, comme de 6 à 7060 toifes ; on obferve les an- gles d’un triangle formé par les deux extrémités de cetté bafe, & par un des points de la fuite de trians gles. Ainfi on a ( y compris les deux extrémités de la bafe) üne fuite de triangles dans laquelle on connoît tous les angles & un côté, favoir la bafe mefurée à donc par lé calcul trigonométriqué on connoîtra les côtés de chacun de ces triangles: on connoît de plus l'élévation de chaque point au-deflus du niveau 3 ainfi on connoit les côtés de chaque triangle réduits au même niveau ; enfin on connoît encore par l’ob- fervation les angles que font les verticaux’ où font placés les côtés des trianglés , avec le méridien qu'on imagine pañler par l’un des deux lieux , &t en con- féquence on connéit par les réductions que la Géo: métrie enfeigne , les angles que les côrés des trian2 gles réduits au même niveau font avec là diredion de la méridienne pafant par ce lieu. Donc employant le calcul trigonométrique, & ayant égard, fi on le jure ge néceffaire, à la petite courbure du méridien dans l’éfpaëe compris entre Les deux lieux , on connoîtrà la longueur de arc dû méridien compris entre les paralleles des deux lieux. Enfin l’on fait à cette lon= gueur une petite réduétion, eu égard à la quantité dont s'élève au-déflus du niveau de la mer celui des deux lieux d’où l’on fait partir la méridienne. Cette réduétion faite, on a la longueur de l'arc, réduite au niveau de là mér. Pour vérifier cette longueur ; on mefure ordinairement une féconde bafe en un autre endroit que la premiere , & par cette feconde bafe liée avec les triangles, on calcule de nouveau un Ou plufieurs côtés de ces triangles ; fi le fecond téfultat s’accorde avec le premier, on eft aflüré de la bonté de l'opération. La longueur de l’are terref tre, & l’amplitude de l’arc célefte étant ainfi con- nues , on en conclut la longueur du degré, comme on l’a expliqué plus haut. | On peut voir dans les différens Guvrages qii ont été publiés fur la fgure de La Terre, & que nous in: diquerons à la fin de cet article , les Précautions qu'on doit prendre pour mefurer l’arc célefte & l'arc terreftre avec toute l’exaétitude pofble. Ces pré- cautions font fi néceflaires , & doivent être portées fi loin , que felon M. Bouguer, on ne peut répondre de 5” dans la mefure de amplitude de l'arc célefte qu'en y mettant Le plus grand fcrupule, Or une fer conde d'erreur dans la mefure de l’arc célefte donne environ 16 toiles d'erreur dans le degré terreftre ; parce qu'une feconde de degré terreftre eft d’envi= ron 16 toifes; donc on ne pourroit felon M. Bou guer répondre de 80 toifes {ur le degré , fi on n’avoit mefuté qu’un degré. Si l’on mefuroir 3 degrés, com- me on l’a fait fous l'équateur, alors l'erreur fur cha- cun ne feroit que d'environ le tiers de 80 toiles, ceft-à-dire environ 27 toiles. Il faut pourtant ajJoû- tef que fi l’iñffrument dont on fe fert pour meiuret l'arc célefte eft fait avec un foin extrème , telque le feéteur employé aux opérations du nord ; On peut compter alors fur une plus grande exactitude, {ur tout quand cet inftrument fera mis en œuvrecomme il l’a été par les plus habiles obfervateurs, : à Te ne parle point de quelques autres méthodes que les anciens ont employées pour connoître la f- gure de la Terre ; elles font trop peu exaétes pour ECecci 752 FIG | qu'on en fafle mention ici, & celle dont nous ve- nons de donner le procédé mérite à tous égards la préférence. Je ne parle point non plus, ou plütôt je ne dirai qu'un mot d’une autre méthode qu’on peut employer pour déterminer cette figure, celle de la mefure des degrés de longitude à différentes latitu- des. Quelque exa@itude qu’on puifle mettre à cette derniere mefure, elle fera toüjours beaucoup plus fufceptible d'erreur que celle de la mefure des de- grès de latitude. M. Bouguer eftime que l’erreur peut être d’une 240° partie fur la mefure d’un arc de deux degrés de longitude , &c fix ou fept fois plus grande que fur la mefure d’un arc de latitude de deux de- grés. Voici maintenant les différentes valeurs du degré de la Terre, trouvées jufqu’à M. Picard inclufive- ment, dans l’hypothèfe de la Terre fphérique. Nous n'avons pas befoin de dire que les mefures des an- ciens doivent être regardées comme très-fautives, at- tendu l’imperfe@ion des méthodes &c des inftrumens dont ils fe fervoient ; mais nous avons cru que le leéteur verroit avec plaifir le progrès des connoif- fances humaines fur cet objet. Selon Ariftote la circonférence de la Terre eft de 400000 ftades , ce qui donnera le degré de 1111 fta- des en divifant par 360. Selon Eratofthene, cette circonférence eft de 250000 ftades, ou 252000 en prenant 700 ftades pour le degré. | Selon Hipparque , la circonférence de la Terre eft de 2520 ftades plus grande que 252000 ; cepen- dant il s’en efttenu à cette derniere mefure d’'Era- tofthene. Selon Pofidomius , la circonférence de la Terre eft de 240000 ftades. Strabon, corrigeant le calcul de Pofidonius, ne donne à la circonférence de la Terre que 180000 ftades. Cette derniere mefure a été adoptée par Ptolomée, Voyez l'ouvrage de M. Caflini, qui a pouf titre de la grandeur & de la figure de la Terre, 1718. Les mathématiciens du calife Almamon dans le jx. fiecle, trouverent le degré dans les plaines de Sennaar de 56 milles , & l’eftimerent 10 mille toifes moindre que Prolomée ne l’avoit donne. Le géographe de Nubie dans le xi. fiecle , donne 25 lieues au degré. Fernel, medecin d'Henri Il. trouva le degré de 56746 toiles, mais par une mefure très-peu exaéte rapportée au mot DEGRÉ. Snellius de 57000 toifes (cette mefure a depuis été corrigée par M, Muffchen- broek, & mife à 57033) ; Riccioli, de 62650 (c’eft- à-dire plus grand de 5650 toifes que Snellius, ce qui donne — de différence fur la circonférence de la Ter- re) ; Norwood, en 1633 , de 57300. Enfin en 1670, M. Picard ayant mefuré la diftan- ce entre Paris & Amiens par la méthode expofée ci- deflus, a trouvé le degré de France de 57060 toifes à la latitude de 494 23/, moyenne entre celle de ces deux villes ; mais on ne penfoit point encore que la Terre pütavoir une autre figure que la fphérique. En 1672, M. Richer étant allé à l’ifle de Cayenne, environ à 54 de l'équateur, pour y faire des obfer- vations aftronomiques , trouva que fon horloge à pendule qu'il avoit reglée à Paris , retardoit de 2’ 28! par jour. De-là on conclut , toute déduétion faite de la quantité dont lependule devoit être alon- gé à Cayenne par la chaleur , voyez PENDULE , Er. que le même pendule fe mouvoit plus lentement à Cayenne qu’à Paris ; que par conféquent l’aétion de la pefanteur étoit moindre fous l'équateur que dans nos climats. L’académie avoit déja foupçonné ce fait (comme leremarque M. le Monmer dans /’hif£. céleffe publiée en 1741) d’après quelques expériences faites en divers lieux de l’Europe; maïs il femble, pour le dire en paffant, qu’on auroit pü s’en douter fans avoir befoin du fecours de l’expérience, puifque les corps à l'équateur étant plus éloignés de l'axe de la terre, la force centrifuge produite par la ro- tation y eft plus grande, & par conféquent, toutes chofes d’ailleurs égales, ôte davantage à la pe- | fanteur ; voyez FORCE CENTRIFUGE , Ge. C'eft ainfique par une efpece de fatalité attachée à l’a- vancement des fciences , certains faits qui ne font que des conféquences fimples & immédiates des prin- cipes connus,demeurent néanmoins fouvent ignorés avant que l’obfervation les découvre. Quoi qu'il en foit, des qu’on eut reconnu que la pefanteur étoit moindre à l'équateur qu’au pole , on fit le raifonne- ment fuivant : la terre eft en grande partie fluide à fa furface, & l’on peut fuppofer fans beaucoup d’erreur, qu’elle a à-peu-près la même figure que fi elle étoit fluide dans fon entier. Or, dans ce cas la pefanteur étant moindre à l'équateur qu’au pole,& la colonne de fluide qui iroit d’un des points de l’équateur au centre de la terre , devant néceffairement contre- balancer la colonne qui iroit du pole au même cen- tre, la premiere de ces colonnes doit être plus lon- gue que la feconde ; donc la terre doit être plus élevée fous l'équateur que fous les poles ; donc la Terre eft un fphéroïde applati vers les poles. Ce raifonnement étoit confirmé par une obferva= tion. On avoit découvert que Jupiter tournoit fort vite autour de fon axe (voyez JUPITER); cetterota- tion rapide devoit imprimer auxparties de cette pla- nette une force centrifuge confidérable , & par con- féquent l’applatir fenfiblement ; or en mefurant les diametres de Jupiter, on les avoit trouvés très-fen= fiblement inégaux ; nouvelle preuve en faveur de la Terre applatie. On alla même jufqu'à eflayer de déterminer la quantité de fon applatiflement ; mais à la vérité les réfultats différoient entr’eux, felon la nature des hy= pothefes fur lefquelles on s’appuyoit. M. Huyghens fuppofant que la pefanteur primitive, c’eft-à-dire non altérée par la force centrifuge, fût dirigée vers le cen- tre , avoit trouvé que la Terre étoit un fphéroïde elliptique , dont l’axe étoit au diametre de l’équa- teur environ comme 577 à 578. Voyez TERRE, Hy- DROSTATIQUE & SPHÉROIDE ; M. Newton étoit parti d’un autre principe , il fuppofoit que la pefan- teur primitive vint de l’attraétion de toutes les par- ties du globe, & trouvoit que la Terre étoit encore un fphéroïde elliptique , mais dont les axes étoient entr'eux comme 229 à 230; applatifflement plusque double de celui de M. Huyghens. Ces deux théories , quoique très-ingénieufes , ne réfolvoient pas fuffifamment la queftion de la figure de la Terre : premierement il falloit décider lequel des deux -réfultats étoit le plus conforme à la vé- rité , & le fyftème de M. Newton, alors dans fa naïffance , n'avoit pas fait encore aflez de progrès pour qu’on donnât l’exclufion à l’hypothefe de M. Huyghens ; en fecond lieu, dans chacune des ces _ deux théories, on fuppofoit que la Terre eût abfolu- ment la même figure que fi elle étoit entierement fluide & homogene, c’efl-à-dire évalement denfe dans toutes fes parties ; or l'on fentoit que cette fuppc- fiion gratuite renfermoit peut-être beaucoup d’ai- bitraire , & que fi elle s’écartoit un peu de la vérité (ce qui n’étoit pas impofñble), la figure réelle de la Terre pouvoit être fort différente de celle que la théorie lui donnoit. De-là on conclut avec raifon, que le moyen le plus sûr de connoïtre la vraie figure de la Terre, étoit la mefure aétuelle des degrés. | En effet, fi la Terre étoit fphérique , tous les de- grés feroient égaux , & par conféquent, comme on la prouvé au mot DEGRÉ, il faudroit faire par-tout fe même chemin fur le méridien , pout que la hau- teur d'une même étoile donnée augmentât om dimi- nuât d’un degré ; mais fi la Terre n'eft pas fphéri- “que , alors fes degrés feront inégaux , il faudra fai- re plus ou moins de chemin fur le méridien , {elon le lieu de la Terre où l’on fera, pour que la hauteur d’une étoile qu’on obferve , diminue ou augmente d’un degré. Maintenant , pour déterminer {uivant quel fens les degrés doivent croître & décroître dans cette hypothefe, fuppofons d’abord la Terre fphéri- que & d’une fubftance molle , & imaginons qu'une double puiffance appliquée aux extrémités de l'axe, comprime la Terre de dehors en dedans , fuivant la direction de cet axe : qu’arrivera-tl à certainement l'axe diminuera de longueur , & ’équateur s’éleve- ra: mais de plus la Terre fera moins courbe aux ex- trémités de l’axe qu’elle n’étoit auparavant , elle fera plus applatie vers l’axe , & au contraire elle fera plus courbe à l'équateur. Or , plus la Terre a de courbure dans la direétion du méridien, moins il faut faire de chemin dans cette même diredion , pour que la hauteur obfervée d’une étoile augmente ou diminue d’un degré ; par conféquent fi la Terre eft applatie vers les poles , il faudra faire moins de che- min fur le méridien près de l'équateur que près du pole pour gagner où pour perdre un degré de lati- tude ; par conféquent fila Terre eft applatie , les de- grés doivent aller en diminuant de l'équateur vers le pole & réciproquement ; la raifon qu'on vient d’en donner eft fuffifante Pour ceux qui ne font pas géometres ; en voici une rigoureufe pour ceux qui le font, | Soit (fig. 12 Géog. ) Cle centre de la Terre; C P Vaxe; £ C le rayon de léquateur ; £ HP une por- tion du méridien ; par le point Æ quelconque, foit “menée ÆO perpendiculaire au meridien £ HP , la- quelle ligne # O touche en O la dévelopée GOF. Voyez DÉvVELOPrÉE; HO fera le rayon ofculateur en A. F, Oscurareur : foit pris enfuite le point 4 tel que le rayon ofculateur £o fafle un angle d’un degré avec HO ;il eft aifé de voir que À À repré- fentera un degré du méridien ; c’eft-à-dire > comme il a été prouvé 47 mor DEGRÉ, qu'un obfervateur qui avanceroit de Æ en À , trouvetoit en an degré de plus où de moins qu’en A dans la hauteur detou- tes les étoiles placées fous le méridien. Or , Hh étant à très-peu près un arc de cercle décrit du rayon #0 (ou ko qui lui eft fenfiblement égal ) il faute aux yeux , que files degrés Æ A vont en aug- mentant de l'équateur £ vers le pole P, les rayons ofculateurs AO iront auffi en augmentant ; puifque le rayon d’un cercle eft d’autant plus grand que le degré on la 360° partie de ce cercle a plus d’éten- due. Donc la développée GO F fera toute entiere dans l'angle £ CF, Or, par la propriété de la dé- veloppée , voyez DÉVELOPPÉE, on a £ GO F= FCP ,&ileft vifible par les axiomes de Géometrie qu£EG OFeft CP+CF; donc E CS CP; donc La Terre eff applatie J les degrés vons en augmentant de l'équateur vers Le pole. Ceux qui après M. Picard, mefurerent les premiers degrés du méridien en France pour favoir fi la Terre étoit fphérique ou non , n’avoient pas tiré cette con- clufon ; foitinattention, foit faute de connoiflances géometriques fufifantes , ils avoient crû au confrai- ré-que fi la Terre étoit applatie , les degrés devoient aller en diminuant de l’équateur vers le pole. Voici, felon toutes les apparences , le raifonnement qu'ils faifoïent : foit tirée du centre une ligne qui faffe avec E Cun angle d’un degré , & du même centre C foit tirée une ligne qui fafle avec ? Cun angle d’un degré sil eft certain que £ C étant fuppofé plus grand que PC, la partie de la Terre interceptée en Æ entre les deux lignes qui font un angle d’un degré , us tite par elle-même), FIG 753 fera plus grande qu'en P ; donc (concluoient-ils peut-être ) le degré près de l'équateur fera plus grand qu'au pole. Le paralogifme de ce raifonnement confifte en ce que le degré de la serre n’eft pas déter- mine par deux lignes qui vont au centre, & qui font un angle d’un degré ; mais par deux lignes qui font perpendiculaires à la furface de la Terre, &qui font un angle d’un degré. C’eft par rapport ces per- pendiculaires ( déterminées par la fituation du fil à plomb)qu’on mefurela diftance des étoiles au zénith, GT par conféquent leur hauteur ; or ces perpendi- culaires ne pafferont Pas par le centre de la Terre, quand la Terre n’eft pas {phérique, Foyez DéÉveror- PÉE , OSCULATEUR » Ge, Quoi qu’il en {oit de cette conjeéture, ceux qui les Premiers mefurerent les degrés dans l'étendue dé la France, préoccupés peut-être de cette idée , que la Terre applatie donnoit les degrés vers le nord plus petits que ceux du midi , trouverent en effet que dans toute l’étendue de la France en latitude ,les de- grès alloïent en diminuant vers le nord. Mais à pei- ne eurent-1ls fait part de ce réfultat aux favans de l’Europe , qu’on leur démontra qu’en conféquence la Terre devoit être alongée. Il fallut en pañler par- là ; car comment revenir fur des mefures qu'on af- füroit très-exaêtes ? on demeura donc aflez perfna dé en France de l’alongement de la Terre, nonobf. tant les conféquences contraires tirées de là théorie, Cette conclufion fut confirmée dans le livre de La grandeur & de la figure de la Terre » Publié en 1718 par M. Caflini, que l'académie des Sciences de Paris vient de perdre, Dans cet ouvrage M. Cafini donna le réfultat de toutes les opérations faites par lui 8 par M. Dominique Cafini fon pere, pour déterminer la longueur des degrés. [l'en concluoit que le de gré moyen de France étoit de 57061 toiles, à une toife près de celui de M. Picard ; & que les degrés alloient en diminuant dans toute l'étendue de laFran- Ce du fud au nord , depuis Collioure Jufqu’à Dunker. que. Foyez DEGRÉ. D’autres opérations faites de- PuiSEn 1733, 1734, 1736, confirmoient cette cons clufion ; ainfi toutes les mefures s’accordoient, en dépit de la théorie, Aifaire la Terre alongée. Mais les partifans de Newton » tant en Angleterre que dans le refte de l’Europe » 8c les principaux géo metres de la France même, Jugerent que ces mefures ne renverfoient pas invinciblement la théorie ; 1ls oferent croire qu’elles n’étoient peut-être pas aflez exactes, D'ailleurs en les fuppofant faites avec foin, il étoit poffible, difoient-ils, que par les erreurs de l’obfervation, la différence entre des degtés immé- diatement voïfins, où peu diftans (différence très-pe- ne fût pas fufceptible d’une dé: termination bien füre. On jugea donc à-propos de mefurer deux degrés très-éloignés, afin que leur dif: férence fût aflez grande pour ne pas être imputée à l’erteur de l’obfervation, On propofa de mefurer le premier degré du méridien fous l'équateur, & le de- gré le plus près du pole qu’on pourroit, MM. Godin, Bouguer, & de la Condamine » Partirent pour le pre- mier voyage en 173$ ; & en 1736 MM. de Mauper- tuis , Clairaut, Camus, & le Monnier, partirent pour la Lapponie. Ces derniers furent de rerour en 1737. Îs avoient mefuré le degré de latitude qui pañle par le cercle polaire, à environ 234 + du pole , & l’avoient trouvé confidérablement plus grand que le degré moyen de France ; d’où ils con- clurent que la Terre étoit applatie. à Fes Le degré de Lapponie , à 664 20/, avoit ététrouvé par ces favans obfervateurs, de 57438 toiles, plus grand de 378 toifes que Le degré de 57060 toiles de M. Picard , mefuré par 494237; mals avant que d’en conclure la figure de la Terre, ils jugerent à-propos de corriger le degré de M, Picard , en ayant égard à 754 FIG Vaberration des étoiles , que M. Picard ne connoif- Loïit pas, comme aufli à la préceflion & à la réfrac- tion, que cet aftronome avoit négligées. Par ce moyen le degré de 57060 toifes, déterminé par M. Picard, fe réduifit à 56925 toifes, plus court que celui de Lapponie de 513 toifes. En fuppofant que le méridien de la Terre foit une ellipfe peu différente d’un cercle, on fait par la Géo- mêétrie que l’accroiflement des degrés, en allant de l'équateur vers le pole, doit être fenfiblement pro- portionnel aux quarrés des finus de latitude. De plus la même Géométrie démontre que fi ona dans un mé- ridien elliptique la valeur de deux degrés à des lati- tudes connues , on aura le rapport des axes de la Terre par une formule très-fimple. En effet, fon nomme £, Fla longueur de deux degrés mefurés à des latitudes dont les finus foient / & s, on aura pour E-F 3CEIJ-FSss) a donné cette formule dans les mémoires de l’A- cadémie de 1737, & dans fon livre de la figure de la Terre déterminée, &c il eft très facile de la trouver par différentes méthodes. Si le degré F eft fous l’équa- teur, ona s—0, & la formule devient plus fimple, a différence des axes . M. de Maupertuis fe réduifant à 25%. MM. les académiciens du Nord appliquant à cette formule Les mefures du degré en Lapponie & enFrance, trouverent que le rapport de l’axe de la Terre au diametre de l'équateur, étoit 173 à 1743 ce qui ne s’éloignoit pas extrèmement du rapport de 229 à 230 donné par M. Newton, fur- tout en fuppofant des erreurs inévitables dans la mefure du degré. Il n’eft pas inutile de remarquer que MM. les académiciens du Nord avoient négligé environ 1” pour la réfraétion dans l'amplitude de leur arc célefk. Cette petite correétion étant faite, le degré deLapponie devoit être diminué de 16 toifes, êt fe réduifoit à 57422; mais le rapport de l’axe au diametre de l'équateur demeuroit toûjours fenfible- ment le même, celui de 173 à 174, Suivant les me- fures de M. Cafini, la Terre étoit un fphéroïde alon- gé, dont l’axe furpañloit le diametre de Péquateur d'environ —. Le degré de Lapponiedevoit être,dans cette hypothèfe, d'environ! 1060 toifes plus petit que ne l’avoient trouvé les académiciens du Nord ; er- reur dans laquelle on ne pouvoit les foupçonner d’ê- tre tombés. Les partifans de l’alongement de la Terre firent d’abord toutes Les obje&tions qu'il étoit poflible d’i- maginer contre les opérations fur lefquelles étoit ap- puyée la mefure du Nord. On crut, dit un auteur moderne, qu'il y alloit de honneur de la nation à ne pas laïffer donner à la Terre une figure étrangere, une figure imaginée par un Anglois & un Hollandois, à-peu-près comme on a crü long-tems l'honneur de la nation intéreflé à défendre les tourbillons & la matiere fubtile , & à profcrire la gravitation Newto- mienne. Paris, & Académie même, fe.divifa entre les deux partis : enfin la mefure du Nord fut viéto- rieufe ; & fes adverfaires en furent fi convaincus,qu’- 1ls demanderent qu’on mefurât une feconde fois les degrés du méridien dans toute l'étendue de la France. L'opération fut faite plus exatement que la premiere fois , l'Aftronomie s'étant perfeétionnée beaucoup dans l'intervalle des deux mefures: on s’aflüra en 1740 que les deprés alloient en augmentant du midi au nord, & par conféquent la Terre fe retrouva ap- platie. C’eft ce qu’on peut voir dans le livre qui a pour titre, la méridienne vérifiee dans toute l'étendue du royaume , &c. par M. Cafhni de Thüry, fils de M. Caflini, & aujourd’hui penfonnaire & aftronome de l'académie des Sciences. Paris, 1744. Il faut pour- tant remarquer, pour plus d'exaéhitude dans ce récit, que les deorés de Françe n’alloient pas tous & fans FIG excéption en diminuant du nord au füd, maïs cela étoit vrai du plus grand nombre ; & dans les degrés qui s’écartoient de cette loi la différence étoit fi ex- ceflivement petite , qu’on pouvoit & qu'on devoit l’attribuer toute entiere aux erreurs inévitables de l’'obfervation. | Il eft néceffaire d'ajouter que les académiciens du Nord de retour à Paris, crurent en 1739 qu'al étoit néceffaire de faire quelques corredtions au de- oré de M. Picard , qu'ils avorent déjà réduit à 56925 torfes. Voici quelle étoit leur raifon, La mes fure de ce degré en général déperd, comme on l’a déjà dit, de deux obfervations, celle de la différence entre les hauteurs d’une étoile obfervées aux deux extrémités du degré, & celle de la diftance géogra- phique entre Les paralleles tracés aux deux extrémi- tés du degré. On ne doutoit point que cette derniere diftance n’eût été mefurée très-exaétement par M. Picard ; mais on n’étoit pas aufli für de l’obfervation célefte : quelqu'exa@ que fût cet aftronome,, il igno- roit, ainfi qu'on l’a dejà remarqué , quelques mou- vemens obiervés depuis dans les étoiles fixes ; il en avoit négligé quelques autres, ainfi que la réfrac- tion : d’ailleurs les inftrumens aftronomiques moder- nes ont êté portés à un degré de précifion qu'ils n’a- voient pas de fon tems. On recommença donc l’ob- fervation de l'amplitude de Parc célefte compris en- tre les deux extrémités du degré de Paris à Amiens ; & en conféquence au lieu de ÿ7060 toifes pour ce degré, onentrouva 57183 : ce degré nouveau, plus grand que M. Picard ne lavoit trouvé, étoittoüjours beaucoup plus petit que celui du Nord, & l’applatif fement de la Terre fubfftoit : mais cetapplatiflement étoit un peu moindre que de 173 à 174 ; 1l étoit dé 177 à 178, toùjours néanmoins dans l’hypothèle de la Terre elliptique. En 1740, ceux qui avoient foùtenu d’abord l’alon- gement de la Terre, ayant eu occafion de vérifier la bafe qui avoit fervi à la mefure de M. Picard, pré- tendirent que cette bafe étoit plus courte de près de fix toiles que M. Picard ne l’avoit trouvée ; & en conféquence admettant la corretion faite à l’ampli- tude de l’arc de M. Picard par les académiciens du Nord, 1ls fixerent le degré de M. Picard à 57074 toi- fes +, à 14 toiles près de la longueur que M. Picard lui avoit donnée ; ainfi les deux erreurs de M. Pi= card dans la mefure de la bafe & dans celle de Pare célefte, formoient, felon eux , une efpece de com= : penfation. | | Cependant plufieurs académiciens douterent en- core que M. Picard fe füt trompé fur fa bafe. M. de la Condamine nous paroït avoir très-bien traité cette matiere dans fa mefure des trois premiers degrés du mé- ridien , art. xxjx. pag. 246. Gfuiv. Il ne croit point que l’erreur de M. Picard, fi en effet il y en a une, vienne , comme le pente M. Bouguer, de ce que cet aftronome avoit peut-être fait fa toile d’un = trop courte : {a raifon eft que [a longueur du pen- dule à Paris, déterminée par M. Picard, diffère à peine de — de ligne de celle que M. de Maïran a trou- vée dans ces derniers tems. Cela pofé, onne fau- roit douter que la toife des deux obfervateurs n’ait été exatement la même ; or la toife de M. de Mairan eft aufli la même qui a fervi à la mefure des degrés fous l’équateur 8c {ous le cercle polaire , & la même qu’on a employée pour vérifier en 1740 la bafe.de M. Picard... Mais d’un autre côté M. Caffini a vérifié cette bafe jufqu’à cinq fois, & en différens tems, & l’a toùjours trouvée plus courte de 6 toifes que: M. Picard. Plufieurs autres moyens dire@s & indi= res , dont M. de la Condamine fait mention ; ont été employés pour vérifier cette bafe, & onJ’a toû« jours trouvée plus courte de 6 roifes, M. de la Con- damine fonpconne que l'erreur de M. Picard, s'il ena uné, peut vénir, 1°, de la longueur des per- ches de bois qu’il employoit, & dans laquelle il a pû fe gliffer plufieurs erreurs fur lefquelles on étoit moins en garde alors qu'on ne left aujourd’hui ; 2°. de la maniere dont on les pofoit fur le terrein. C’eft un détail qu'il faut voir dans'fon livre, & auquel nous renvoyons, ne prenant point encore de parti fur l'erreur vraie ou faufle de M. Picard, jufqu'à ce que cette erreur foit conftatée ou juftifiée pleine- ment, comme elle le fera bientôt, | Cette incertitude fur la longueur du degré de M. Picard , rendoit néceflairement très - incertaine la quantité de l’applatiflement de la Terre ; car en fup- pofant la Terre un fphéroïde elliptique, on a vû qu”- on pouvoit déterminer par la mefure de deux degrés de latitude, la quantité de fon applatiflement ; & l’on n’avoit alors que deux degrés de latitude , celni du Nord & celui de France, dont le dernier (chofe très-finguliere) étoit beaucoup moins connu que le premier après 80 ans de travail, la différence entre les deux valeurs qu’on lui donnoit, étant de près de 110 toifes. Les académiciens du Pérou , à leur retour, rendi- rent la queftion encore plus difficile à réfoudre. Ils avoient mefuré le premier deoré de latitude, & l’a- voient trouvé de 56753 toifes, c’eft-à-dire confidé- rablement plus petit que le degré de France, foit qu’on mit ce dernier à 57074 toiles, ou à 57183. Le comparaifon des degrés de l’équateur & deLapponie, donnoit , dans l’hypothèfe elliptique , le rapport des axes de 214 à 215, fort près de celui de M. Newton: or dans cette hypothèfe, & fuppofé cet applatiffe- ment, le degré de France devoit avoir néceflaire- ment une certaine valeur; cette valeur étoit aflez ” conforme à la longueur de 57183 toifes, affignée au degré de France par les académiciens du Nord, & nullement à celle de $7074 toifes qu’on lui donnoit en dermier lieu. Il n'eft pas inutile d’ajoûter qu’en 1740, lorfqu’on avoit trouvé la diminution des de- grés de France du nord au midi, telle qu’elle doit être dans la Terre applatie, on avoit mefuré un de- gré de longitude, à la latitude de 434 32/; & ce de- gré de longitude s’accordoit auffi très-bien avec ce qu'il devoit être dans l’hypothèfe de la Terre ellipti- que & de Papplatiflement égal à =. Cependant M. Bouguer, fans égard aux quatre degrés qui s’accordoient dans l’hypothefe elliptique, &t qui donnoient l’applatifflement de — , crut de- voir préférer le degré de France déterminé à 57074 toifes, à ce même degré déterminé à ÿ7183 : il Ôta donc à la Terre la figure elliptique ; 1l lui donna celle d’un fphéroide, dans lequel les accroiflemens des degrés fuivroient la proportion , non des quar- rés des finus de latitude, mais des quatriemes puif- fances de ces finus. Il trouva que le degré du Nord, celui du Pérou, celui de France fuppofé de ÿ7074 toifes , & le degré de longitude mefuré à 434 32/ de latitude, s’accordoient dans cette hypothèfe. Il en conclut donc que la Terre-étoit un fphéroïde non el- liptique, dans lequel le rapport des axes étoit de 178 à 179, prefqu'égal à celui de 177 à 178, trouvé en dernier lieu par les académiciens du Nord, mais à la vérité dans l’hypothèfe elliptique ; ce qui donnoit deux fphéroïdes fort différens, quoiqu’à-peu- près également applatis. On verra dans uninftant que les mefures faites depuis en d’autres endroits, ne fau- roïent fubfifter avec l’hypothèfe de M. Bouguer, qui à la vérité ne la pouvoit prévoir alors, & qui croyoit tout faire pour le mieux , en ajuftant à une même hypothèfe les données qu’il avoit choïfies. Les chofes en étoient là, lorfqu’en 1752M. l’abbé de la Caille, un de ceux qui avoient eu le plus de part à la mefure des degrés de France en 1740, fe trouvant au cap de Bonne-Efpérance par 334 18/ de FIG 755 latitude , où il avoit été envoyé par l'académie pour y faire des obfervations aftronomiques , principale- ment relatives à la parallaxe de la Lune, y mefura le degré du méridien, & le trouva de 57037 tois fes. Ce degré s’accordoit encore très-bien aveclhy- pothèfe elliptique & lapplatifflement de 25 CC CE qu'il fant bien remarquer, avec le degré de France fuppofé de 57183 toiles ; mais il étoit prefque égal au degré de France , fuppofé de 57074 toifes ; & fi cela étoit vrai, il en réfulteroit que non-feulement le Terre ne feroit pas elliptique , mais que les déux hémifpheres de la Terre ne {eroient pas femblables, puifque les degrés feroient prefque égaux à des lati- tudes auffi différentes que celle de France à 49%, &c celle du cap à 334, Il eft vifible au refte que le de- gré du cap nes’accorderoit plus avec l’hypothèfe de M. Bouguer , puifque le degré de France de $7074 toifes , prefque égal au degré du Cap, quoiqu'à une latitude fort différente, étoit conforme À cette hypo- thèfe. . Enfin la mefure du degré, récemment faite en Ita- lie par les PP. Maire & Bofcovich, à 434 1’ de lati- tude, produit de nouvelles dificultés. Ce degré s’eft trouvé de 6979 toifes ; ainfi non-feulement il differe beaucoup de ce qu'il doit être dans l’hypothèfe de la Terre elliptique & de lapplatifement fuppoté ——., mais encore 1l s’eft trouvé différer de plus de 70 toi- {es d’un des degrés mefurés en France en 1740, pref- qu'à la même latitude que le degré d'Italie ; car le de- gré de latitude en France, à 434 31/, a été détermi- né de 57048 toiles. Si cette derniere différence étoit réelle, il s’enfui- vroit que le méridien qui traverfe l’Italie, ne feroit pas femblable au méridien qui traverfe la France, & qu’ainfi les méridiens n'étant pas les mêmes , la Terre ne pourroit plus être regardée comme parfai- tement où même fenfiblement circulaire dans le fens de l'équateur , comme on l’avoit toûjours fuppofé jufqu'ici. Il en réfulteroit de plus d’autres conféquen- ces très-fâcheufes , que l’on verra dans la fuite de cet article. On peut remarquer en même tems que le de- gré d'Italie quadre affez bien avec l’hypothèfe de M. Bouguer , à laquelle celui du cap ne s’accorde pas; ainfi de quelque côté qu’on fe tourne, aucune hy- pothèfe ne peut s’accorder avec la longueur de tous les degrés mefurés jufqw'ici. Il ne manque plus rien, comme l’on voit, pour rendre la figure de La Terreaufti incertaine que le pyrrhonifme peut le defirer. Pour mettre en un coup-d’œil fous les yeux du leéteur les degrés mefurés jufqu’à préfent, nous les raflemblerons dans cette table. Latuudes. Degrés en toifes. Degré du Nord...., (664 20/ «7422 49 56 57084 49 23 57074 ou felon d’autres : 57183 LOS EI 7000 Degrés de France... 47 59 57071 47 AI 37057 46 Gr 57055 46 35 57049 45 45 57050 45 43 57040 44 53 57042 43 31 57048 Degré d'Italie . : : .. 43 1 56979 Degré fous l'équateur © Oo 56753 Devsré du Cap à . ... d de merde 1) 0 DMS70i7 Degré de longitude à... L434 32! 41618 soif de latitude feptentr. 75 FIG Cette table vérifie ce que nous avons remarqué plus haut, que tous les degrés mefurés en France ne vont pas exaétement en dinunuant du nord au fud ; mais le dernier degré de France vers le fud eft de 36 toifes plus petit que le dernier degré vers le nord; & cela fufit pour qu'il foit certain que les degrés vont en diminuant du nord au fud dans l’étendue de la France. À cette table j’ajoûterai la fuivante que M. l’abbé de la Caille m'a communiquée. Dans l’hypothèfe de a longueur d’un degré du méridien fous l’équateur,de 6753 toifes, comme il réfulte des mefures faites fous l'équateur, & de celle de 57422 toiles fous le parallele de 664 19/ + felon la mefure du nord, après en avoir Ôté 16 toifes pour l'effet de la réfra@tion, ainfi que l’ont pratiqué tous ceux qui ont mefuré des degrés, on a le rapport des axes. de 214 à 215 ou de 1, à 1, 00467, en fuppo- fant la Terre un fphéroïdeelliptique régulier. Et en fuppofant que les accroïflemens des degrés du méri- dien font comme les quarrés des finus des latitudes, on a les longueurs fuivantes : Latitude, Longueur Longueur du degré. mefurée. od 560753 O 56753, © fous l'équateur, 5 567594 9 10 56777; © 1$ 56806, 4 20 56846, 3 25 568959 4 39 ., 56952» 4 | 33 182 56093, ÿ 57037 au Cap: 35 37015» 4 40 57082, 6 41 57096, 3 AZ 57110, I 43 7124; O 43 30 57131, O 56979 en Italie. 44 571379 9 45 57151, 8 46 57165, 7 47 57179 6 45 371935 5 49 572073 3 | 49 22 57212, 3( 57074, 4 en France. 50 57221, O} 57183 felon d’autres. 55 57288, 1 69 573515 2 65 57408, : j GG 195 57422, O 57422 . en Lapponie, 79 374575 2 75 574975 à 80 57526, 6 85 57544, 6. 90 57550; 6 On voit par cette table; que le degré du cap eft moindre de 44 toifes feulement que le degré mefu- ré; que celui de France à 49% 22/ eft plus grand de 29 toifes feulement que le degré de France fuppofé de 57183, mais-plus grand de 138 toifes que le de- gré fuppofé de ÿ7074 ; enfin que le degré d'Italie eft plus grand de 152 toifes, que le degré mefuré. Ainf il n’y a proprement que le degré d'Italie, & le de- gré de France fuppofé de 57074 toifes (degré en- core en litige), qui ne quadrent pas avec l’hypo- thèfe elliptique & lapplatiflement de +; car les différences des autres font trop petites, pour ne pas "être mifes fur le compte de l’obfervation. Je ne parle point de laïvaleur des autres degrés de France ; elle eft encore incertaine, jufqu'à ce qu’on ait vé- rifié la correétion faite à la bafe de M. Picard. Il n’eft pas inutile d’ajoûter que le degré de longitude mefuré à 43% 32', 6 trouvé de 41618 toifes, differe auffi de très-peu de toïfes de ce qu’il doit être dans l’hypothèfe de la terre elliptique & de lappiatifie- ment fuppofé à -—. En effet M. Bouguer a trouvé que ce degré ne différoit que de 11 toifes de la lon- gueur qu'il devroit avoir, en fuppofant lapplatife- ment de —+-, qui differe peu de = De plusil n'eft pas inutile de remarquer qu'en faifant de legeres correétions aux degrés qui quadrent avec ce dernier applatiflement de -—, on retrouveroit exaétement l’applatiffement de -= , tel que Newton l’a donné. M. de la Condamine, comparant deux à deux dans l’hypothèfe elliptique les quatre desrés fuivans, celui du Pérou, celui de Lapponie , celui de France fuppofé de 57183 toifes, & le même degré fuppofé de 57074, trouve que le rapport des axes varie de- puis 5 jufqu’à =. Voyez fon ouvrage, page 261. Enfin nous devons ajoûter que l’applatiffement de la Terre a toüjours été trouvé beaucoup plus grand que celui de M. Huyghens, foit par la mefure des degrés, foit par l’obfervation du pendule ; d’où il femble qu’on peut conclureavec aflez de fondement, que la pefanteur primitive n’eft pas dirigée vers le centre dela Terre, ni même vers un feul centre, comme M. Huyghens le fuppofoit. Avant que de porter notre jugement fur l’état pré- fent de cette grande queftion de ia figure de la Terre, & fur tout ce qui a été fait pour la réfoudre , il ef néceflaire que nous parlions des expériences {ur l’a- longement & l’accourciflement du pendule, obfer- vés aux différentes latitudes ; car ces expériences tiennent immédiatement à la queftion de la figure de la Terre, Il eft certain en général, que fi la Terre eft applatie , la pefanteur doit être moindre à l'équateur qu’au pole, que par conféquent le pendule à fecon- des doit retarder en allant du pole vers l'équateur , &z que par la mêmeraifon,le pendulequibatles fecondes à l'équateur , doit être alongé en allant de l'équateur vers le pole. De plus, fi l’applatiflement <=, donné par M. Newton, avoit lieu ,1left démontré que la pe- fanteur à l'équateur fercit moindre de -+— que la pe- fanteur au pole , & de plus, que l’accroiflement de la pefanteur, de l'équateur au pole, doit fuivre la rai- fon des quarrés des finus de latitude. Or, par la loi obfervée de l’aloñsement du pendule , en allant de l'équateur vers le pole , on connoiït la loi de laugmen- tation de la pefanteur dans le même fens, & cette augmentation qui eft proportionnelle à l’alongsement du pendule (voyez PENDULE), fe trouve, par les obferyations, aflez exaétement proportionelle aux quarrés des finus de latitude. : En effet les longueurs du pendule corrigées par le barometre, & réduites à celle d’un pendule qui ofcilleroit dans un milieu non | réfiftant , font fous léqua- Zi Différenc. tEUR EE Rd a 2 ES CR ee AO LL À Portobello à 9 degrés de ÉTAT PEN à.) CON PA 4399 30 O, 09 Âu petit Goave à 18 degrés de latitude. + . . . . . ...." 1430, 47 0, 26 APATIS Se menss ne itibsres MMA AON CT APellor. tn. ss se 441,27 2, 0G Or, felon le calcul du P. Bofcovich , les différen- ces proportionnelles aux quarrés des finus de lati- tude, ou, ce qui revient au même, à la moitié du finus verfe du double de la latitude (voyez Sinus), font 7, 24, 138, 206, un peu plus-petites à la véri- té que celles de la table, comme je l’avois déjà re- marqué dans mes Recherches fur Le fyflème du monde IT, part. pag. 288 6 289. en employant un calcnk moins rigoureux que le précédent ; cependant com- me le plus grand écart entre l’obfervation & la théo- rie eft ici de — de ligne, il femble qu’on peut re- garder la proportion des quarrés des finus de latitude convue aflez exaftement obfervée dans RARE _ du FIG du pendule. Il eft à remarquer que dans la table pré- | Ÿ cédenté, on a augmenté de -& de ligne les longueurs du pendule obfervées à Paris & à Pello (ce que je n’avois pas fait dans l'endroit cité de mes Recherches fur le fyffème du mende) ; parce que les longueurs ob- fervées 440, 57, & 441, 17, font celles du pendule dans l’air, & que les longueurs 440, 67, 441, 27, Tont celles du même pendule dans un milieu non ré- Etant, ainfi que les trois autres qui les précedent. _ Mais fi d’un côté la loi de l’accourciflement du pendule eff aflez conforme à l'hypothèfe elliptique, de l’autre la quantité de Paccourciflement fous l’é- quateur ne fe trouve pas telle qu’elle devroit être , fi Papplatiffement de la Terre étoit +=; elle eft plus grande que cette frattion. Ainfi les expériences du pendule femblent aufi donner quelque échec à la théorie Newtonienne de la figure de La Terre, dans la- quelle on regarde cette planete comme fluide & ho- mogene. Ceci nous conduit naturellement à parler de tout ce qui a été fait jufqu’à nos jours, pour éten- dre & perfeétionner cette théorie. M, Huyghens avoit déterminé la figure de la Terrè dans l’hypothèfe , que la pefanteur primitive für di- rigée au centre, & que la pefanteur altérée par la force’ centrifuge fût perpendiculaire à la furface. M. Newton avoit fuppoférque la pefanteur primiti- ve réfultt de l’attraétion de toutes les parties de la Terre, & que les colonnes centrales fuflent en équi- libre, fans égard à la perpendicularité à la furface. MM. Bouguer & de Maupertuis ont fait voir de plus dans les mémoires de l'académie des Sciences de 1734, que la Terre étant fuppolée fluide avec MM. Huy- ghens & Newton, il étoit néceflaire, pour qu'il y eût équilibre entre les parties, dans une hypothèfe quel- conque de pefanteur vers un ou plufieurs centres, que les deux principes hydroftatiques de M. Huyghens & de M. Newton s’accordaflent entr’eux, c’eft-à-dire que la direétion de la pefanteur fût perpendiculaire à la furface, & que de plus les colonnes centrales fuflent en équilibre. Ils ont démontré l’un & l’autre qu'il y a une infinité de cas où les colonnes centrales peuvent être en équilibre, fans que la pefanteur foit perpendiculaire à la furface, & réciproquement ; & qu'il n’y a point d'équilibre , à moins que l’obferva- tion de ces deux principes ne s’accorde à donner la même figure. Du refte ces deux habiles séometres ont principalement envifagé la queftion de la figure de la Terre, dans la fuppoñition que la pefanteur primitive ait des direétions données vers un ou plufieurs cen- tres : l’hypothèfe newtonienne de l’attra@tion des par- ties rendoit le problème beaucoup plus difficile. [1 l’étoit d'autant plus que la maniere dont il avoit été réfolu par M. Newton pouvoit êtreregardée non- feulement comme indireéte, mais encore comme in- Tuffifante & imparfaite à certains égards : dans cette folution, M, Newton fuppofoit d’abord que la Terre fût elliptique, &1l déterminoit d’après cette hy- pothèfe l’applatiflement qu’elle devoit avoir : or quoique cette fuppofñition de la Terre elliptique fût lépitime dans l’hypothèfe de la Terre homogene, ce- pendant elle avoit befoin d’être démontrée ; fans ce- la c’étoit proprement fuppofer ce qui étoit en quef- tion. M. Sürling démontra le premier rigoureufe- ment dans les Tranfaëfions philofoph. que la fuppofñ- tion de M. Newton étoit en effet légitime , en regar- dant la Terre comme un fluide homogene, & comme très-peu applatie. Bien-tôt après M. Cairaut , dans les mêmes Trarfadions, n°. 449. étendit cette théo- rie beaucoup plus loin. Il prouva que la Terre devoit être un fphéroïde elliptique , en fuppofant non-feu- lement qu’elle füt homogene , mais qu’elle fût com- pofée de couches concentriques , dont chacune en particulier différât par fa denfité des autres couches; il eft vrai qu'il regardoit alors les couches comme Tome VI, FIG 757 femblables ; or la fimilitude des couches, ainfi que nous le verrons plus bas, & que M. Clairaut S'en eft afüré enfuite , ne peut fubffter dans l’hypothèfe que ces couches foient fluides, L , En 1740, M, Maclaurin, dans {on excellente pies ce fur le flux & reflux de la.mer, qui partagea le prix de l'académie des Sciences , démontra le pre- fier cette belle propoftion, que fi la Terre eft {up- pofée un fluide homogené, dont les parties s’atti- tent, &c foient attirées outre cela par le Soléil ou pat la Lune , fuivant les lois ordinaires de la gravita- tion , ce fluide tournant autôur de fôn axe avec uné vitefle quelconque , prendra néceffairément la for- te d’un fphéroide elliptique , quel que foit fon ap- platiflément , c’eft-à-dire très-petit ou non. De plus M. Maclaurin faifoit voir que dans ce fphéroïde, non-feulement la pefanteur étoir perpendiculaire à la furface , & les colonnes centrales en équilibre, mais encore qu’un poirt quelconque pris à volonté au- dedans du fphéroïde , étoit également preflé én tout {ens. Cette derniere condition n’étoit pas moins né- ceflaire que les deux autrés , pour qu'il y eût équili- bre ; cependant aucun de ceux qui jufqu'alors avoient traité de la figure de la Terre , n’y avoïent penfé ; on fe bornoit à la perpendicularité de la pefanteur à la furface, &c à l'équilibre dés colonnes centrales, & on ne {ongéoit pas que felon les lois de l’'Hydroftatique (voyez FLUIDE 6 HYDROSTATIQUE ), il faut qu'un Point quelconque du fluide foit également preflé en tout fens , c’eft-à-dire que les colonnes du fluide , dirigées à un point quelconque, & non pas feulement au centre , foient en équilibre entr’elles, M. Claïraut ayant médité fur cette derniere con: dition , en a déduit des conféquences profondes & curieufes , qu'il a expoñées en 1742 dans fon traité intitulé , Théorie de la figure de la Terre, tirée des prit cipes de l’Hydroflatique, Selon M.Clairaut, il faut pour qu'un fluide foit en équilibre, que les efforts de toutes les parties comprifes dans un canal de figure quelcon- que qu’on imagine traver{er la mafle entiere , {e dé- truifent mutuellement. Ce principe eft en apparence plus général que celui de M. Maclaurin ;'mais j'ai fait voir dans mon effai fur la réfiffance des fluides , 1792. art. 18. que l'équilibre des canaux curvilignes n'eft qu'un corollaire du principe plus fimple de lé quilbibre des canaux re&tilignes de M. Maclaurin; ce qui , au refte , ne diminue rien du mérite de M, Clai- raut, puifqu'il a déduit de ce ptincipe un grand nom- bre de vérités importantes que M. Macbus ner avoit pas tirées , & qu'il avoit même aflez peu con- our tomber dans quelques erreurs ; par exem: ple, dans celles de fuppofer femblables entr’ellés les couches d’un fphéroïde fluide, comme on le peut voir dans fon sraité des fluxions , art, 670, € fuir. M. Clairaut, dans l'ouvrage que nôus venons de citer, prouve ( ce que M. Maclaurin n’avoit pas fait direétement ) qu'il y a une infinité d’hypothéfes, où le fluide ne feroit pas en équilibre , quoique les co- lonnes centrales fe contre-balancaflent , & que la pe- fanteur fût perpendiculaire à la furface. Il donne une méthode pour reconnottre les hypothèfes de pefan- teur , dans lefquelles une mafle fluide peut étre ert équilibre, & pour en déterminer la fgure; il démontre de plus ; que dans le fyftème de l’attraétion des par= ties , pourvü que la pefanteur foit perpendiculaire à la furface , tous les points du fphéroïde feront égales ment preflés en tout fens, & qu’ainfi l'équilibre du fphéroïde dans l’hypothèfe de l’attra@ion , fe réduit à la fimple loi de la perpendicularité à la furface, D’après ce principe , il cherche les lois dé la figure de la Terre dans l’hypothèfe que les parties s’attirent , & qu'elle foit compofée de couches hétérogenes , foie {olides , foit fluides ; il trouve que la Terré doit avoir dans tous ces cas une fgure elliptique plus on moins v Ddd 758 FIG applatie, felon la difpofition & la denfité des cou- ches : il prouve que les couches ne doivent pas être femblables., fi elles font fluides ; que les accroifle- mens de la pefanteur de l'équateur au pole, doivent être proportionnels au quarré des finus de latitude, comme dans le fphéroide homogene; propoñitiontrès- remarquable & très-utile dans la théorie de la Terre: il prouve de plus que la Terre ne fauroit être plus ap- platie que dans le cas de l’homogénéité, favoir de —; mais cette propofition n’a lieu qu’en fuppofant que les couches de la Terre , fi elle n’eft pas homogene, vont en augmentant de denfité de la circonféren- ce vers le centre ; condition qui n’eft pas abfolument néceffaire , fur-tout fi les couches intérieures font fuppofées folides ; de plus, en fuppofant même que les couches les plus denfes foient les plus proches du centre, l’applatiflement peut être plus grand que ==, fi la T'erre a un noyau folide intérieur plus applatique 336. VW. la LIT, part. de mes Recherches fur Le [yffème du monde , p. 187. Enfin M. Clairaut démontre, par un très-beau théorème, que la diminution de la pefan- teur de l’équateur au pole, eft égale à deux fois = (applatiffementde la T'erre homogene) moins l’appla- tiflement réel de la Terre, Ce n’eft là qu’une très-le- gere efquifle de ce qui fe trouve d’excellent & de re- marquable dans cet ouvrage, très-fupérieur à toutce qui avoit été fait jufque-là fur la même matiere. V.HYDROSTATIQUE, TUYAUX CAPILLAIRES, &c. Après avoir refléchi long-tems fur cet important objet & avoir lù avec attention toutes les recher- ches qu'il a produites, il m’a paru qu’on pouvoit les poufler encore beaucoup plus loin. Jufqu'ici on avoit fuppolé que dans un fluide com- pofé de couches de différentes denfités, les couches devoient être toutes de riveau , c’eft-à- dire que la pefanteur devoit être perpendiculaire à chacune de ces couches. Dans res réflexions fur la caufe des vents 1740, article 86. j'avois déjà prouvé que cette con- dition n’étoit point abfolument néceflaire à l’équili- bre, & depuis je l’ai démontré d’une maniere plus direéte & plus générale, dans mon effai fur La réfef- tance des fluides 1732, articles 167. & 168. Dans le même ouvrage, depuis l'arc, 161. jufque & compris Part, 166, j'ai prouvé que les couches concentri- ques & non femblables de ce même fluide , ne de- voient pas non plus être néceffairement de la même denfité dans toute leur étendue,pour que le fluide füt enéquilibre ; & j'ai préfente , ce me femble, fous un point de vûe plus étendu qu’on ne l’avoit fait encore, & d’une maniere très-fimple & très-direéte, les tions qui expriment la loi de l'équilibre des fl ( Voyez a l’article HYDROSTATIQUE un plus grand détail {ur ces différens objets, & fur quelques autres qui ont rapport aux lois de l'équilibre des fluides, | & à d’autres remarques que J'ai faites par rapport à ces lois). Enfin dans l'arc. 169. du même ouvrage, j'ai déterminé l’équation des différentes couches du fphéroide , non-feulement en fuppofant, comme on l’avoit fait avant moi, que ces couches foient flui- des, qu’elles s’attirent, & qu’elles aïllent en dimi- nuant ou en augmentant de denfité, fuivant une loi quelconque, du centre à la circonférence, mais en fuppofant de plus, ce que perfonne n’avoit encore fait, que la pefanteur ne foit point perpendiculaire à ces couches, excepté à la couche fupérieure ; je trouve dans cette hypothèfe une équation générale, dont cellesqui avoient été données ayant moi, ne font qu’un cas particulier ; il eftà remarquer que dans tous les cas où ces équations limitées & particulie- res peuvent être intégrées, les équations beaucoup plus générales que j'ai données, peuvent être inté- grées auf; c’eft ce qui réfulte de quelques recher- Ches particulieres fur le calcul intégral , que j'ai pu- blices dans les rém, de L’Acad, des Sciences de Pruffe de 1750. FIG Néanmoins dans ces formules généralifées, j’avois toûjours fuppofé la Terre elliptique, ainfi que tous ceux qui m'avoient précédé , n'ayant trouvé juf- .Qqu’alors aucun moyen de déterminer l’attra@tion de la Terre dans d’autres hypothèfes; mais ayant fait de nouveaux efforts fur ce problème, j'ai enfin don- né en 1754, à la fin de mes recherches fur Le [yflème die monde, une méthode que les Géometres defiroient, ce me femble , depuis long-tems, pour trouver l’at- traétion du fphéroide terreftre dans une infinité d’au- tres fuppofitions que celle de Ja fgure elliptique. J'ai donc imaginé que l’équation du fphéroïde fût repré- fentée par celle-ci, r=r+a+bs + cr24er3 & fr4+ges, cr! étant le rayon de la Terre à un lieu quelconque, r le demi-axe de la Terre, r le fi- nus de la latitude, z, B, c, &cc. des coëefficiens conf. tans quelconques ; & j’ai trouvé l’attraétion d’un pa- reil fphéroïde. Cette équation eft infiniment plus gé- nérale que celle qu’on avoit fuppofée jufqu’alors ; car dans la Terre fuppofée elliptique, on a feule- mentr/=r+a-at? J'ai tiré de la folution de cet important problème de très-grandes conféquences dans la troifieme par- tie de mes recherches fur le [yffème du monde, qui eft fous prefle au moment que j'écris ceci (Mai 1756); & qui probablement aura paru avant la publication de ce fixieme volume de l'Encyclopédie. J'ai fait voir de plus que le problème ne feroït pas plus difi- cile, mais feulement d’un calcul plus long, dans lhy- pothèfe de l’attraétion proportionnelle non- feule- ment au quarré inverfe de la diflance, mais à une fomme quelconque depuiffances quelconques de cet- te diffance ; ce qui peut être très-utile dans la re- cherche de la figure de la Terre, lorfqu’on a égard à l’aétion que le foleil & la lune exercent fur elle, ow (ce qui revient au même) dans la recherche de l’élé- vation des eaux de la mer par l’aétion de ces deux af- tres ; voyez FLUX & REFLUX: j'ai fait voir enfin qu'en fuppofant le fphéroïde fluide & hététosene, & les couches de niveau ou non, il pourroit très-bien être en équilibre fans avoir la figure elliptique ; & j'ai donné l'équation qui exprime la figure de fes diféren- tes couches. Ce n’eft pas tout. J'ai fuppofé que dans ce fphé- roide les méridiens ne fuflent pas fembläbles, que non-feulement chaque couche y différât des autres en denfité, mais que tous les points d’une même cou che différaflent en denfité entr'eux ; & j’enfeigne la méthode de trouver lattraétion des parties du - fphéroide dans cette hypothèfe fi. générale ; métho- de qui pourroit être fort utile dans la fuite, fi la Ter- re {e trouvoit avoir en effet une figure irréguliere. ‘ne nous sêfte plus qu’à examiner cette derniere opinion, &.les raifons qu’on peut avoir pour la foû- tenir ou /po naombatrre. | ‘7 M. de”Buffon '@ft le premier (que je fache) qui aït avancé que la Terre a yraiflemblablement de gran- des irrégularités dans fa figure, & que fes méridiens ne font pas femblables, Voyez ff. nat. tom. I. p. 165 & Juiv, M. de la Condamine ne s’eft pas éloigné de cette idée dans l'ouvrage même où il rend compte de la mefure du degré à l'équateur, p.262. M. de Mau- pertuis qui l’avoit d’abord combattue dans fes élé- mens de Géographie, femble depuis lavoir adoptée dans fes Lertres [ur le progrès des Sciences ; enfin le P, Bofcovich, dans l’ouvrage qu’il a publié l’année der. niere fur la mefure du degré en Italie, non-feule= ment penche à croire que les méridiens de la Terre ne font pas femblables, mais en paroît même affez fortement convaincu, à caufe de la différence qui fe trouve entre le degré d'Italie & celui de France à la même latitude. Il eft certain premierement que les obfervations aftronomiques ne prouvent point inyinciblement la FIG régularité de la Terre & la fimilitude de fes méri- diens, On fuppofe à la vérité dans ces obfervations que la ligne du zénith ou du fil-à-plomb (ce qui eft la même chefe ) pañle par l’axe de la Terre ; qu elle eft perpendiculaire à lhorifon ; & que le méridien : c'eft-à-dire le plan où le Soleil fe trouve à midi, ë&c qui pafle par la ligne du zénith ; pañle aufli par l’axe dela Terre; mais j'ai prouvé dans la troifieme partie de mes recherches fur le fjyflème du monde (& je crois avoir fait le premier cette remarque ), qu'aucune de ces fuppoñitions n’eft démontrée rigou- reufement, qu'il eft comme impofñfible de saflürer par l’obfervation de la vérité de la premiere & de la troifieme , & qu'ileft au moins extrèmement difücile de s’affürer de la vérité de la feconde. Cependant il faut avouer en même tems que ces trois fuppofñtions étant aflez naturelles, la feule difficulté ou l'impof- fibilité même d’en conftater rigoureufement la véri- té, n'eft pas une raifon pour les profcrire, fur-tout fi les obfervations n’y font pas fenfiblement contrai- res. La queftion fe réduit donc à favoir fila mefure du degré faite récemment en Itahe, eft une preuve fufifante de la diffimilitude des méridiens. Cette dif- fimilitude une fois avouée, la Terre ne feroit plus un folide de révolution; & non-feulement 1l demeu- reroit très - incertain fi la ligne du zénith pañe par Vaxe de la Terre, & fi elle eft perpendiculaire à lho- rifon, mais le contraire feroit même beaucoup plus probable. En ce cas la direétion du fl-à-plomb n’in- diqueroit plus celle de la perpendiculaire à la furface de la Terre, nicelle du plan du méridien; l’obferva- tion-de la diftance des étoiles au zénith ne donneroit plus la vraie mefure du degré, & toutes les opéra- tions faites jufqu’à prélent pour déterminer la figure de la Terre &c la longueur du degré à différentes la- titudes, feroient en pureperte. Cette queftion , com- me l’on voit, mérite un férieux examen; envifageons- Aa d’abord par le côté phyfique. | Sila Terre avoit été particulierement fluide & ho- mogene, la gravitation mutuelle dé fes parties, com- binée avec la rotation autour de fon axe, lui eût cer- tainement donné la forme d’un fphéroïde applati, dont tous les méridiens euffent été femblables - fi la Terre eût été originairement formée de fluides de différentes denfités , cesfluides cherchant à fe mettre en équilibre entr’eux, fe feroient aufli difpofés de la même maniere dans chacun des plans qui auroient pañlé par l’axe de rotation du fphéroïde > È par con- féquent les méridiens euffent encore été femblables. Mais eft-il bien prouvé, dira-t-on , que la Terre ait été originairement flude? & quand elle 1 eût été , tuand elle eût pris la fgre que cette hypothèfe de- mandoit, eft-il bien certain qu'elle l’eûüt confervée à Pour ne point diffimuler ni diminuer la force de cette objeétion, appuyons-la encore avant que d’en appré- gier la valeur, par la réflexion fuivante. La fluidité du fphéroïde demande une certaine régularité dans la difpofition de fes parties , régularité que nous n'ob- fervons pas dans la Terre que nous habitons. La furface du fphéroide fluide devroit être bomogene ; celle de la Terre eft compofée de parties fluides & de parties folides, différentes par leur denfité, Les boulverfemens évidens que la furface de la Terre a efluyés ; boulverfemens qui ne font caches qu'à ceux qui ne veulent pas les voir (& dont nous n avons qu’une foible, maïs trifte image, dans celui que vien- nent d’éprouver Quito , le Portugal & l'Afrique), le changement évident des terres en mers êz des mers en terres, l’affaiflement du globe en certains lieux, fon exhauflement en d’autres, tout cela n’a-t-il pas dû altérer confidérablement la foure primitive?( Foy. GÉOGRAPHIE PHYSIQUE, TERRE, TÎREMBLE--: MENT DE TERRE, &c,la Géographie de Varenius, & le premier volume de l'Hifloire naturelle de M, de Tome VI, | FIG 759 Buffon). Or la fgure primitive de la Terre étant une fois alrérée, & la plus grande partie de la Terre étant folide, qui nous Abe qu’elle ait confervé aucune régularité dans la fgure ni dans la diftribn- tion de fes parties ? Il feroit d’autant plus dificile de le croire, que cette diftribution femble, pour ainfi di- re , faite au hazard dans la partie quenous pouvons connoître de l’intérieur & de la furface de la T'er- re? La circularité apparente de l'ombre de la Terre dans les éclipfes de Lune , ne prouve autre chofe fi- non que les méridiens & l’équateur font à-peu-prèsl des cercles; oril faut que l'équateur foit exademens un cercle, pour que les méridiens foient femblables. La circularité apparente de l'ombre ne prouve point que les méridiens foient des cercles exa@s » puifque les mefures ont prouvé qu'ils n’en font pas ; pour= quoi prouveroit-elle la cireularité parfaite de l'équa- teur ? Les mêmes hauteurs du pole obfervées, après avoir parcouru des diftances égales fous différens méridiens, en partant de la même latitude , ne prou- vent rien non plus, puifqu'il faudroit être certain qu'il n'y a point d’erreur commife ni dans la mefure terreftre, nidans l’obfervation aftronomique; or l’on fait que les erreurs font inévitables dans ces mefures &t dans ces opérations. Enfin les regles de La naviga- tion qui dirigent d’autant plus fûrement un vaifleau, qu'elles font mieux pratiquées, prouvent feulement que la Terre eft à-peu-près fphérique, & non que l'équateur eft un cercle. Car la pratique la plus exac- te de ces regles eft elle-même fujette à beaucoup d'erreurs. | Voilà les raifons fur lefquelles on fe fonde, pour douter de la régularité de la Terre que nous habitons, & même pour lui donner une f£oure irréguliere. Mais n'y auroit-il pas d’autres inconvéniens à admettre cette irrégularité ? Larotation uniforme & conftante de la Terre autour de fon axe, né femble-t-elle pas prouver (comme l’ont déjà remarqué d’autres philo- fophes ) que fes parties font à-peu-près également difiribuées autour de fon centre ? I eft vrai que ce phénomene pourroit abfolument avoir lieu dans lhy- pothèfe de la diffimilitude des méridiens » & de la denfité irréguliere des parties de notre globe ; mais alors l’axe de la rotation de la Terre ne pafferoit pas par fon centre de fgure, 8 le rapport entre la durée des jours & des nuits à chaque latitude, ne feroit pas tel que lobfervation & le calcul le donne ; ou fi on vouloit que l'axe de rotation paflât par le centre de la Terre, comme les obfervations femblent le prou- ver, il faudroit fuppofer dans les parties irrégulieres du globe un arrangement particulier , dont Ia fym> métrie {eroit beaucoup plus finguliere & plus furpre- nante , que la fimilitude des méridiens ne pourroit l'être, fur-tout fi cette fimilitude n’étoit que très-ap- prochée , comme on Le fuppofe dans les Opérations aftronomiques, & non abfolument rigoureufe, | . D'ailleurs les phénomenes de la préceffion des équinoxes, fi bien d’accord avec l'hypothèfe que les méridiens foient femblables | & que larrange- ment des parties de la Terre foit régulier, ne fem- blent-1ls pas prouver qu’en effet cette hypothèfe eft légitime ? Ces phénomenes auroient.ls également lieu, fi les parties extérieures de notre globe étoient difpofées fans ordre & fans loi? Car la préceffion des équinoxes venant uniquement de la non-{phéri- cité de la Terre, ces parties extérieures influeroient beaucoup fur la quantité & la loi de ce mouvement dont elles pourroient alors déranger l’uniformité. Enfin la furface de la Terre dans fa plus grande par- tie eft fluide , & par conféquent homogene; [a ma tiere folide qui couvre le refte de cette furface , eft prefque par-tout peu différente en pefanteur de l’eau commune : n’eft-1l donc pas naturel de fuppofer que cette matiere folide fait à-peu- près le même effet DDddd à 760 * FIG qu'unematiere fluide, & que la Terre eft.à-peu-près : dans le même état, que f fa furface étoit par-tont fluide & homogène ; qu’ainfi la direétion de la pefan- teur eft fenfiblement perpendiculaire à cette furfa- . ce, & daris le plan de l'axe de la Terre, & que par. conféquent tous les méridiens font femblables non à la rigueur, au moins fenfiblement ? Les inégalités de la fuirface de la Terre, les montagnes qui la cou- . vrent , font moins confidérables par rapport au dia- metre du globe , que ne le feroient de petites émi- nences d’un dixieme de ligne de hauteur, répandues -çà 6 là fur la furface d’un globe de deux piés de dia- metre. D'ailleurs le peu d’attraétion que [es monta- gnes exercent par rapport à leur mañle ( Voyez AT- TRACTION & MONTAGNES), femble prouver que | cette mafle eft très-petite par rapport à leur volume. L’attraétion des montagnes du Pérou élevées de plus d’une lieue, n’écarte le pendule de fa dire&tion que de fept fecondes: or une montagne hémifphérique d’une fieue de hauteur, devroit faire écarter le pen- . dule d'environ la 3000° partie du finus total, c’eft- _ à-dire d’une minute 18 fecondes : les montagnes pa- roïflent donc avoir très-peu de matiere propre par rapport au refte du globe terreftre ; & cette conjec- ture eft appuyée par d’autres obfervations, qui nous ont découvert dimmenfes cavités dans plufieurs de ces montagnes. Ces inégalités qui nous paroïffent fi confidérables, & qui le font fi pe, ont été produi- tes par les boulverfemens que la Terre à foufferts, : & dont vraiffemblablement l'effet ne s’eft pasétendu fort au-delà de la furface & des premieres couches. Ainfi de toutes les raifons qu’on apporte pour foû- tenir. que les méridiens font diffemblables, la feule de . quelque poids, eft la différence du degré mefuré en Italie, & du degré mefuré en France, à une latitude pareille & fous un autre méridien. Mais cette diffé- rence qui n’eft que de 7o toifes , c’eft- à - dire d’en- viron 35 pour chactin des deux degrés, eft-elle aflez confidérable pour n’étre-pas attribuée aux obferva- tions, quelque exaétes qu’on les fuppofe ? Deux {e- condes d’erreur dans la feule mefure de l’arc célefte, donnent 32 toifes d'erreur fur le degré; & quel‘ob- fervateur peut repondre de deux fecondes ? Ceux qui font tout-à-la-fois les plus exacts & les plus fin- ceres,, oferoient-ils même répondre de 60 toifes fur la melure du degré, puifque 60 toifes ne fuppofent pas une erreur de quatre fecondes dans la mefure de Varc célefte , &c aucune dans les opérations géogra- phiques ? | Rien ne nous oblige donc encore à croire les méridiens diflemblables ; 1l faudroit pour autorifer pleinement cette opinion, avoir mefuré deux ou plu- fieurs degrés à la même latitude , dans des lieux de la Terre très-éloignés, & y avoir trouvé trop de différence pour l’imputer aux obfervateurs : je dis dans des lieux très- éloignés, car quand le méridien d'Italie par exemple, 8 celui de France, feroient réellement diférens, comme ces méridiens ne font pas fort diftans l’un de l’autre, on pourroit toñjours rejetter fur les erreurs de l’obfervation, la différen- ce qu'on trouveroit entre les degrés Correfpondans de France & d'Italie à là même latitude. Il ÿ'auroit un autre moyen d'examiner la vérité de l'opinion dont il s’agit; ce feroit de faire l’obfer- vation du pendule à même latitude, & à des dif- tances très-éloignées : car fi en ayant égard aux er- reurs inévitables de l’obfervation, la longueur du pendule fe trouvoit différente dans ces deux endroits, on en pourroit conclure ( au moins vralemblable- ment) que les méridiens ne feroient pas femblables. Voilà donc deux opérations importantes qui font encore à faire pour décider la queftion, la mefure du degré, & celle du pendule, fous la même lati- tude, à des longitudes extrèmement différentes. Il FIG. eff x fouhaîter que quelque obfervateutexaét 8x in- telhgent veuille bien fe charger de cette entreprife, digne d’être encouragée par les fouverains, & fur- tout par le miniftere de France , qui a déjà fait plus qu'aucun autre pour la détermination de la figure de la Ferre. L | Au refte, en attendant que l’obfervation direéte du pendule , ou la mefure immédiate des degrésnous donne à cet égard les connoïffances qui nous man- quent ; l’analopie, quelquefois fi utile en Phyfique, : pourroit nous éclairer jufqu’à un certain point fur l’objet dont il s’agit, en y employant les obfervations de la figure de Jupiter. L’applatiflement de cette pla- nete obfervé dès l’an 1666 par M. Picard, avoit dé- jà fait foupçonner celui de la Terre long-tems avant qu'on-s’en fût invinciblement aflüré par la compa- raifon des degrés du Nord & de France. Des obfer- vations réitérées de cette même planete nous ap- prendroient aïfément fi fon équateur eft circulaire. Pour cela il fufiroit d’obferver l’applatiflement de | Jupiter dans différens tems. Comme fon axe eft à- peu-près perpendiculaire à fon orbite , & par confé- quent à l’écliptique qui ne forme qu’un angle d’un degré avec l’orbite de Jupiter, il eft évident que f: l'équateur de Jupiter eft un cercle, le méridien de cette planete, perpendiculaire au rayon vifuel tiré dela Terre , doit toûjours être le même, & qu’ainf Jupiter doit paroïtre toûjours également applati, dans quelque tems qu’on l’obferve. Ce feroit le con- traire , fi les méridiens de Jupiter étoient diffembla- bles. Je fai que cette obfervation ne fera pas dé monftrative par rapport à la fimilitude ou à 14 difii- miltude des méridiens de la Terre. Mais enfin fi les méridiens de Jupiter fe trouvoient femblables, com- .me j'ai lieu de le fonpconner par les queftions que: j'ai faites à-deflus à un très-habile aftronome, on fe- * roit, ce me femble , aflez bien fondé à croire, au dé- faut de preuves plus rigoureufes , que la Terre au- roit aufli fes méridiens femblables. Car les obfer- vations nous prouvent que la furface de Jupiter eft fujette à des altérations fans comparaïfon plus con- fidérables & plus fréquentes que celle de la Terre, voyez BANDES , Gc, or'fi ces altérations n’'influoient en rien fur la figure de l'équateur de Jupiter, pour- quoi la figure de l'équateur de la Terre feroit-elle al- térée par des mouvemens beaucoup moindres à Mais quand on s’affüreroit même par les moyens je nous venons d'indiquer , que les méridiens font enfiblement femblables,, il refteroit encore à exa- miner fi ces méridiens ont la fgure d’une ellipfe. Juf qu'ici la théorie n’a poiut donné formellement Pex- _ clufon aux autres feures selle s’eft bornée à montrer que la figure elliptique de la Terre s’accordoit ayec les lois de Hydroftatique : j’ai fait voir de plus, je le répete, dans la troifieme partie de nes recherches Jur le fÿflème du monde , qu'ily a une infinité d’au- tres figures qui s'accordent avec ces lois, fur-tout f on ne fuppofe pas la Terre homogene. Aïnfi en irna- ginant que le méridien de la Terre ne foit pas ellip- tique, J'ai donné dans cette même srozffeme partie de rues recherches, uae méthode auffi fimple qu'on peut le defirer, pour déterminer géographiquement &c af tronomiquement fans aucune hypothèle, la fewre de la Terre, par la mefure de tant de degrés qu’on vou- dra de latitude & de loncitude. Cette méthode eft d'autant plus néceffaire à pratiquer , que non-feule- ment la théorie, mais encore les mefures aétuelles , ne nous forcent pas à donner à la Terre la figure d’un fphéroïde elliptique ; car les cinq degrés du nord, du Pérou, de France, d'Italie, &c du Cap, ne s’ac- cordent point avec cette figure : d’un autre côté les expériences du pendule s'accordent affez bien à don- ner à la Terre la figure elliptique, mais elles la don- nent plus applatie que de =: enfin ce dernier applas tiflement s’accorde aflez bien âvec les cinq desrés ” _ e , AE = . fuivans, celui du Nord, celui du Pérou, celui du Cap, le degré de France fuppofé de 57183 toifes, êc le degré de longitude mefuré à 43 22! de latitu- de ; mais Le degré de France fuppolé de 7074 toifes, comme on le veut aujourd’hui , & le degré d'Italie, dérangent tout. SU A €. M. le Monnier cherchant à lever une partie de ces doutes , a entrepris de vérifier de nouveau la bafe de M. Picard, pour profcrire ou pour rétablir irrévocablément le degré de Francé , fixé parles aca- démiciens du Nord à 57183 toifes, Si ce degré eft rétabli, alors ce feroit aux Aftro- nomes à décider jufqu’à quel point l’hypothète el- liptique feroit ébranlée par le degré d'Italie, le feul ui s’éloigneroit alors de cette hypothefe , & mème Le l’applatiffement fuppofé de ——. (Ne pourroit-on pas croire que dans un pays aufli plein de hautes montagnes que l'Italie, l’attraéion de ces monta- gnes doit influer fur la direétion du fil-ä-plomb, & que par conféquent la mefure du degré doit y être moins exacte & moins sûre ? c’eft une conjedure legere que je ne fais que hafarder ici). Il fäudroit examiner de plus jufqu’à quel point les obfervations du pendule s’écarteroient de ce même applatiffe- ment de +5, déduétion faite des erreurs qu’on peut commettre dans les obfervations, Mais fi le degré de 57183 toifes eft profcrit, il faudra en ce cas difcuter foigneufement les erreurs qu’on peut commettre dans les obfervations ; tant du pendule que des degrés ; & f ces erreurs devoient être fuppofées trop grandes pour accommoder l’hy- pothèfe elliptique aux obfervations , on feroit forcé d'abandonner cette hypothèfe, & de faire ufage des nouvelles méthodes que jai propofées, pour déter- miner par la théorie &c par les obfervations, la feu re de la Terre. L’obfervarion de l’applatiflement de Jupiter pour- roit encore nous être utile ici jufqu’à un certain point. Il eft aifé de trouver par la théorie quel doit être le rapport des axes de cette planete, en la re- gardant comme homogene, Si ce rapport étoit fenf- blement égal au rapport obfervé, on pourroit en conclure avec affez de vraiflemblance que la Terre feroit aufhi\ dans le même cas, & que fon applatif- fement feroit — , le même que dans le cas de l’ho- mogénéité; mais fi le rapport obfervé des axes de Jupiter eft différent de celui que la théorie donne, alors on en pourra conclure par la même raifon que la Terre n’eft pas homogene , & peut-être même qu'elle n’a pas la figure elliptique. Cette derniere conclufion pourroit encore être confirmée ou infr- mée par l’obfervation de la figure de Jupiter; caril feroit aifé de déterminer fi le méridien de cette pla- nete eft une ellipfe, ou non, Pour cela il fufäroit . de mefurer le parallele à l'équateur de Jupiter, qui en feroit éloigné de 60 degrés; fi ce parallele fe trouvoit fenfiblement égal ou inégal à la moitié de l'équateur, le méridien de Jupiter feroit elliptique, ou ne le feroit pas. | Je ne parle point de la méthode de déterminer la figure de la Terre par les parallaxés de la Lune: cette méthode imaginée d’abord par M. Manfredi, dans les mémoires de l’académie, des Sciences de 1734, eft fujette à trop d’erreurs pour pouvoir rien donner de certain, [l eft indubitable que les parallaxes doivent être différentes fur une fphere & fur-un fphéroïde ; mais la différence eft fi petite, que quelques fecon- des d'erreur dans l’obfervation emportent touts la précifion qu’on peut defirer ici, Il eft bien plus sûr de déterminer la différence des parallaxes par la fignre de la Terre fuppofée connue , que la figure de la Terre par la différence des parallaxes ; & je me fuis attaché par cette raifon au premier de ces deux objets, dans la FI G 761 troifieme partie de mes recherches fur le fyflème du mors. de déjà citées, Voyez PARALLAXE. Il ne nous refte plus qu’un mot à dire fur Putilité de cette queftion de la foure de La Terre. On doit avouer de bonne-foi, qu’eu égard à l’état préfent de la navigation, & à l’imperfeétion des méthodes par lefquelles on peut mefurer en mer le chemin du vail. | fean , & connoître en conféquence le point de la Terre où il fe trouve, il nous ef aflez indifférent de favoir fi la Terre eft exaétement fphérique ou non. Les erreurs des eftimations nautiques font beaucoup plus grandes , que celles qui peuvent réfulter de la non-lphéricité de la Terre. Mais les méthodes de la navigation fe perfeétionneront peut-être un jour aflez pour qu'il foit alors important au pilote de favoir fur quel fphéroïde il fait fa route. D’ailleurs n’efl-ce pas une récherche bien digne de notre curiofité, que celle de la figure du globe que nous habitons? & cette recherche, outre cela, n’eft-elle pas fort importante pour la perfeétion des obfervations aftronomiques à Voyez PARALLAXE, @c. Quoi qu'il en foit, voilà l’hiftoire exaéte des pro- grès qu'on a faits jufqu’ici fur la figure de La Terre. On voit combien la folution complete de cette grande queftion, demande encore de difcuffion , d’obferva- tions, & de recherches. Aidé du travail de mes pré- décefleurs, j’ai tâché dans mon dernier ouvrage , de préparer Les matériaux de ce qui'refte à faire, & d’en faciliter les moyens. Quel parti prendre jufqu’à ce que le tems nous procure de nouvelles lumieres à favoir attendre & douter. Il eft tems de finir cet article, dont je crains qu’on ne me reproche la longueur, quoïque je l’aye abregé le plus qu’il na été poffible: je crains encore plus qu'on ne fafle aux Savans une efpece de reproche, quoique très-mal fondé, de l'incertitude où ils font encore fur la figure de La Terre, après plus de 8o ans de travaux entrepris pour la déterminer. Ce qui doit néanmoins me rafürer , c’eft que j'ai principalement deftiné l’article qu’on vient de lire, à ceux qui s’inté- | reffent vraiment au prosrès des Sciences ; qui favent que le vrai moyende le hâter eftde bien démêler tout ce qui peut le fufpendre ; qui connoïffent enfin les bornes de notre efprit & de nos efforts, & les obfta- | cles que la nature oppofe à nos recherches : efpece de leéteurs à laquelle feule les Savans doivent faire attention , & non à cette partie du public indifférente & curieufe, qui plus avide du nouveau que du vrai, ufe tout en fe contentant de tout effleurer. . Ceux qui voudront s’inftruire plus à fond, ou plus en détail, fur l’objet de cet article, doivent lire : la mefure du degré du méridien entre Paris @& Arniens ; par M. Picard, corrigée par MM. les acadé- mictens du Nord, Paris, 1740: le traité de la grandeur & de la figure de la Terre, par M. Caflini, Paris, 1718: le difcours de M. de Mäupertuis fur La figure des affres , Paris, 1732: la mefure du degré au cercle polaire, par les académiciens du Nord, 1738: la théorie de la figure de la Terre, par M. Clairaut , 1742: la méridienne de Paris vérifiée dans toute l'étendue de France, par M. Caffini de Thury, 1744: la figure de la Terre , par M. Bouguer, 1749 : la mejure des trois premiers degrés du méridien ; par M. de la Condsmine, 1751 : l’ouvrage des PP. Maire & Bofcovich , qui a pour titre, de Livre- _rarià expedisione per pontificiam ditionem , &c. Rome, 1755: réflexions fur la caufe des vents, 1746 : La Jeconde & la troifieme partie de mes recherches [ur le f[- cème du monde , 1754 & & 1756 ; & plufeurs favans _ mémoires de MM. Euler , Clairaut , Bouguer, de Maupertuis , 6c. répandus dans /es recueils des acadé- rnies des Sciences de Paris, de Perersbourg , de Berlin, &c. (0) ‘à FIGURE , ez Aftrologie, eft une defcription ou re- préfentation de l'état & de ladifpoñition du ciel à une 762 FIG certaine heure, qui contient les lieux des planetes & des étoiles, marqués dans une figure de douze triangles appellés maifons. Voyez MaïsoNs. On la nomme auffi horofcope & thème, Voyez Ho- ROSCOPE , Ce. FIGURE, ez Géomancie, s’applique aux extrémités des points, lignes ou nombres jettés auhafard, fur les combinaïlons on variations defquels ceux qui font profeflion de cet art, fondent leurs prédidions chimériques. . FIGURE , (Théolog.) eft aufMi un terme qui eft en ufage parmiles Théologiens, pour défigner les myf- teres qui nous font repréfentés & annoncés d’une maniere obfcure fous de certains types ou de cer- tains faits de l’ancien Teftament. Voyez TYPE. Ainfi la manne eft regardée comme le type &z la figure de l'Euchariftie : la mort d’Abel eft une figure des{ouffrances de Jefus-Chrift, &c. sh: Beaucoup de théologiens & de critiques foitien- nent que toutes les aétions , les hiftoires , les cérémo- nies, G’c, de l’ancien Teftament, ne font que des jf gures, des types & des prophéties de ce qui devoit atriver dans le nouveau, #. MyYSTIQUE. Chambers. M. l’abbé.de la Chambre, dans fon sraité de la re- ligion , tome IF. définit, jy. p.270. donne plufieurs regles pour lintelligence du fens figuré des Ecritures, que nous rapporterons ici, parce qu'il n'atrive que trop fouvent qu’on fe livre à cette opinion, que sour efl figure, fur-tout dans l’ancien Teflament » Ôt qu'on en abufe pour y voir des chofes qui n’y furent ja- maïs. Premiere regle, On doit donner à l'Ecriture un fens figuré & métaphorique, lorfque le fens littéral ren- ferme une doëtrine qui-met fur le compte de Dieu quelqu'imperfe&tion ou quelqu’impiété. ul Seconde regle. On doit donner un fens fguré, fpi- rituel & métaphorique aux propofitions de l’Ecriture, lorfque leur fens littéral n’a aucun rapport naturel avec les objets dont elles veulent tracer Pimage. Troifieme regle. La fimple force des exprefñons pom- peufes de l’Écriture m’établit point la néceflité de recourir au fens figuré. Lorfque les expreflions de PEcriture font trop magnifiques pour Le fujet qu'elles femblent regarder, ce n’eft pas une preuve générale & néceflaire qu’elles défignent un objet plus augufte. Quatrieme regle. On ne doit admettre de figures & d’allégories. dans l’Ecriture de l’ancien Teftament , comme étant de l'intention du S. Efpnt, que celles qui font appuyées fur l’autorité de Jefus-Chrift, fur celle des apôtres, ou fur celle d’une tradition conf- tante & uniforme de tous les fiecles. Cinquieme regle. I faut voir Jefus-Chrift &e les myfteres de la nouvelle alliance dans l’ancien Tefta- ment , par-tout où les apôtres les ont vüs ; maïs il faut ne les y voir qu'en la maniere qu'ils les y ont vüs, g | é Sixieme regle. Quand un pañlage des Livres faints a un double fens, un Ziséral & un figuratif, il faut expliquer le paflage en entier de la figure, aufli-bien que de la chofe figurée: on doit conferver , autant qu'il eft poffible , Le fens ittéral dans tout le texte. Il eft faux que la figure difparoïffe quelquefois entie- tement, pour faire place à la chofe figurée, On peut voir les preuves folides qu’apparte de toutes ces reples lemême auteur, quilestermine par ces deux oblervations importantes fur la nature des types & des fgures. ne Les a de Ja bible les moins propres à fi- gurer quelque chofe qui ait rappoït à la nouvelle al- hance, ce font ceux qui ne contiennent que des ac- tions repréhenfbles & criminelles. Ces fortes de - gures ont quelque chofe d’indécent &c de très-peu naturel. 2°. Il eft faux que les fautes des faints de l’ancien Teflament ceffent d’être fautes, parce qu’elles font figuratives. La prérogative du type & de la feure n’eft point de divinifer & de fan@ifier les aions qui font figuratives: ces aétions demeurent telles qu’el- les font en elles-mêmes & par leur nature ; felles font bonnes, elies demeurent bonnes ; & fi elles font mauvaifes, elles demeurent manvaifes. Une a@ion ne change pas de nature parce qu’elle en figure une autre , la qualité de #ype ne lui donne aucune quali- té morale ; fa bonté ou fa malice ne dépendent eflen.- tiellement que de fa conformité ou de fon oppoñition avec la loi de Dieu.S. Auguftin, quieft dans le princi- pe que les fautes des patriarches font figuratives, in peccatis magnorum virorum aliquando rerum fiouras añi- madverti & indagari poffe, ne croit pas qu’elles cef- {ent d’être fautes par cet endroit. « L’aétion de Loth » 6t de fes filles, dit-il, eft une prophétie dans l’E- # crituré qui la raconte ; mais dans la vie des per- » fonnes qui l’ontcommife,c’eftun crime» : aliquando res geffa in faëlo caufa damnationis , in fcripto propheria virturis, Lib, IT. contr, Fauff, c, xlij. (G À ces regles &c à ces obiervations de M. abbé de la Chambre, nous ajoûterons quelques remarques fur la même matiere. Figure, en Théologie, a deux acceptions très-différentes : c’eft dans deux fens di- vers qu'on dit que lexpreffion oc Domini fuper Jufios eft figurée, & qu’on dit que la narration du fa- crifice d’Ifaac dans la Genefe eft fgurée. Dans le pre- nier cas il y a une figure , au fens que les rhéteurs donnent à ce mot, une métaphore. Dans le fecond il y a une figure , c’eft-à-dire un type , une repré- fentation d'un évenement diftingué de celui qu’on raconte. La premiere des regles qu'on vient de lire , eft relative aux figures de l’Ecriture prifes dans le pre- mier fens, aux expreflions fgurées ; & on peut dire en général que toutes les regles qu’on peut prefcrire pour diftinguer dans les écrits l’expreflion naturelle de l’expreflion figurée , peuvent s'appliquer à l’Ecri- ture. Les cinq autres de M.d'abbé de la Chambre, ont pour objet les figures de l'Ecriture prifes au fecond fens, c’eft-à-dire les narrations typiques ; & c’eft fur celles-ci que nous allons nous arrêter. On peut voir au m0r ECRITURE, (Théol, )les dé- finitions des différentes fortes de fens fgurés qu’on trouve dans les Ecritures. Il nous fuffira ici de les en- vifager fous un point de vüe très-fimple, je veux dire par leur déndion du fens littéräl. En effet le fens myflique ou fpirituel, allésorique, tropologi- que, anagogique ; tous ces fens-[à, dis-je, font toû- jours unis avec un fens littéral, fous l’écorce duquel ils font ; pour ainfi dire, cachés. On a remarqué à l’arsicle ECRITURE-SAINTE, les excès dans lefquels font tombés ceux qui ont voulu voir des fens fgwrés dans tonte l’Ecriture. Selon ces interpretes, 11 n'y a point de texte où Dieu n'ait voulu renfermer fous l’enveloppe du fens litréral, les vérités de la Morale, ou les évenemens de la re- ligion chrétienne. Comme on a déjà combattu ce principe direétement, nous allons nous arrêter ici à faire connoiïtre 1°. les caufes qui ont amené l’ufage abufif des explications figurées ; 2°, les inconvéniens qu'a entraînés cette méthode d'expliquer l’Ecriture. Nous croyons que des détails & des exemples fur ces deux objets, feront de quelque utilité. La premiere caufe de l’abus des fens fgurés dans l'interprétation de l’Ecriture , a été l’ufage qu’en font les écrivains du nouveau Teftament. Les pre- miers écrivains eccléfaftiques fe font crus’en droit d'employer, comme les apôtres, ces fortes d’expli- cations ; &c 1l faut avoüer que quelques-unes des ap- plications de l’ancien Teftament faites par les évan- gélftes , fembleroient autorifer à expliquer toute FIG lEcriture figurément , parce qu’elles femblent un peu détoufnées, & ne fe préfentent pas tout de fui- te : mais felon la quatrieme regle qu'on vient de lire, Ôn ne devoit admettre de figures & d’allégories dans l'écriture de l’ancien Teftament, comme étant d'inf- titution divine, que cellesqui font appuyées fur Pau- torité de J. C. des apôtres, ou de la ttadition. La feconde caufe de l'emploi exceffif des fens f- gures, me femble avoir été pour les premiers écri- vains eccléfiaftiques, la coûtume des Juifs qui don- noient à l’Ecriture des explications fpirituelles, & ce goût a duré chez eux jufqu’au vu. fiecle. Je trouve une troifieme caufe de ces mêmes abus dans la méthode que les peres avoient d’inftruire les fideles par des homélies, qui n’étoient que des com- mentaires ftuvis fur l’Ecriture; car dans la nécefité de faire entrer dans ces commentaires les vérités de fa Morale & de la religion, ils s’efforçoient de les tron- ver là-même où elles n’étoient pas , dans des récits purement hiftoriques. Leur éloquence trouvoit fon compte à s’écarter du fens littéral, & à fecouer le joug d’une rigoureufe précifion. On peut fe convain- cre de la vérité de ce que nous difons, en ouvrant au hafard des homélies, & on verra que les expli- cations fgurées font prodiguées dans cette efpece d'ouvrages: d’ailleurs, comme ils travailloient tous leurs commentaires fur l’Ecriture, dans la vûe de les employer à linftruétion des fideles, plütôt qu’à l’é- clairciflement & à l’intelligence du texte, ils s’atta- choïent plus fortement à une maniere de l’expliquer, qui leur donnoit plus d’occafion de développer les vérités de la religion, furtout en matiere de Morale ; êt c’eft à quoi les explications figurées leur fervoient merveilleufement. Je donnerai ici un exemple de l’ufage qu’ils en fai- foient. Ce paflage du Deutéronome : 6 eris vita tua pendens ante oculos tuos, 6 non credes vite tuæ, ch. zxvig. fignifie que fi les Ifraëlites ne font pas fideles à obferver la loi de Dieu, tant de maux les accable- ront, que leur vie fera fufpendue à un filet, & qu'ils croiront la voir terminer à tous momens ; c’eft ce que la fuite démontre : #mebis noûte & die, dit Moyfe, & Aon credes vite tuæ ; manè dices quis mihi det yeperum , € vefperè quis mihi det mane. Voilà Le fens naturel du texte, c’eft afürément le feul que Moyfe ait eu en vüe. S. Auguftin la faifi fans doute ; mais quand on a donné ce fens fi fimple & fi naturel, tout eft dit ; cela ne fournit pas de cer- tains détails dans une homélie. Sur cela S. Auguftin laïffe à côté ce premier fens, & fe jettant dans une autre explication du paflage en queftion, 1l y trou- ve la pafion, le genre de mort de Jefus-Chrift, fa qualité de redempteur, d’auteur de la vie, lincrédu- lité des Juifs, Gc. Et il dit là-deflus de fort belles chofes, mais qui malheureufement ne font point-du- tout relatives au texte. Tous nos prédicateurs ont donné dans ces mêmes défauts; & je trouve dans ceux qui joiiflent de la plus grande réputation, des applications de l’Ecri- ture aufh faufles &c aufli détournées que celle que je Viens de rapporter. Une quatrieme & une cinquieme caufe de ces abus, font, felon le judicieux M. Fleury (difcours fut l'Hift. eccléf.), Ze mauvais goër qui faifoit méprifer ce qui ésoit femple G naturel, 6 la difficulté d'entendre la lettre de l'Ecriture, faute de favoir les langues origina- les, je veux dire le grec & l’hébreu, & de connoftre l’hif° toire & Les mœurs de cette anciquité [? reculée. C’étois plétôt fair de donner des Jens myflérieux a ce que l’on n'entendois pas ; & en effet, fi l’on y prend garde, S. Auguftin, S. Grégoire & la plus grande partie des peres qui ont travaillé fur l’Ecriture de cette façon, n’entendoient ni le srec ni Phébreu. Au lieu que S. Jérôme qui connoïfloitles fources , ne s’attache qu’au fens littéral. FIG 763 . Pour montrer que cette ignorance des lañgués ori- ginales a fouvent influé dans la maniere dont les pe- res ont expliqué PÉcriture, je citerai un exemple tiré encore de S. Auguftin, Au livre XIIT. de la cité de Dieu, chap. xij, il ex plique ainfi la menace faite par Dieu au c4. 4. de Là Genefe. In quocumque die comederis ex eo morte morie: ris : morte moriemini, dit-il, 207 tantum animæ mortis Partez priorem ubi anima privatur Deo, nec tantèm pofs ceriorer bi corpus privatur animé, nec [olum ipfam Lo2 tam prünam ubi anima G a Deo & à corpore feparata punitur, [ed quidquid mortis ef? ufque ad noviffimam que fecunda dicicur , € qué ef nulla pofterior commia fatio illa amplexa eff. On voit bien que dans toute cette explication S: Aupufin fe fonde fur l'énergie & l’emphafe qu'il prête à l’expreflion morte moriemini ; & c’eft l'igno- rance de la langue hébraïque qui le fait tomber dans cette erreur , felon la remarque du favant le Clerc, qui me fournit cet exemple, Arris crir, p, 11, fe. primé, ch. jv. En hebreu on joint aflez fouvent l’in- finitif au verbe, comme un nom, fans que ce re- doublement donne aucune énergie à la phrafe. Par exemple, au verfet précédent on lit dans l’hébreu & dans les Septante, comedendo comedes, mis fimple- ment pour comedes ; le même tour à-peu-près à lieu dans la dialeéte attique. On trouve dans Homere concionem concionart ; les Latins mêmes difent viveré vita, &tc. & toutes ces exprefions n’ont point lem- phafe que S. Auguftin a vûe ici. Sixieme caufe. L’opinion de l'infpirationrigouteus fe de tousles mots, de toutes les fyllabes de lEcritu- re & de tous les faits, c’eft-à-dire de ceux-là mêmes dont les écrivains facrés avoient été les témoins, & qu'ils pouvoient raconter d’après eux-mêmes, Car dans cette opinion on a regardé chaque mot del’Ecri: - ture, comme renfermant des myfteres cachés, & les citcorftances les plus minutieufes des faits les plus fimples, comme deftinées par Dieu à nous fournir des connoiffances très-relevées. Ce principe a été adopté par la plüpart des peres. Jele trouvetrès-bien developpé par le jéfuite Kir- Ker, au y. II. de fon ouvrage de arcé Noë, C’eft au ch. vij, qu'il intitute de myflico-allegorico-tropologi- cé arcæ expofitiene : il dit que puifque Dieu pouvoit d’un feul mot fauver du déluge Noë, fes enfans & les animaux, fans tout cet appareil d’arche , de pros vifons, 6c, il éft probable qu’il n’a fait conftruire ce grand bâtiment , & qu'il n’en a fait faire à l’hifto- rien facré une defcription f. exaéte, que pour nous élever à la contemplation des chofes invifibles parle moyen de ces chofes vifibles,& que cette arche cache _& renferme de grands myfteres. Les bois durs & qui ne fe corrompent point, font les gens vertueux qui font dans l'Eglife ; ces bois font polis, pour marquer la douceur & l'humilité: les bois quarrés, font les doéteurs ; les trois étages de l’arche, font les trois états qu’on voit dans l’Eglife, le féculier, l’eccléfaf- tique &c le monaftique. Il met les moines au troifie- me étage, mais 1l n’afligne point aux deux autres or: dres leurs places refpeétives, &c.. Voilà, je crotï, les principales eaufes qui ont in= troduit les explications figurées. Je vais tâcher à pré- fent de faire fentir les inconvéniens qu’a entrainés cette méthode d’intérpreter l’Ecriture. Premier inconvénient. Quoïque les explications f- gurées puiflent le plus fouvent être tejettées , par cela feul qu’elles ne font pas fondées , elles ne font pas bien dansereufes tant qu’elles ne confiftent qu’à chercher avectrop de fubtilité dans les fens figurés de l’Ecriture, les dogmes établis d’ailleurs {ur des paflages pris dans leur fens propre &r naturel, Mais le mal eft qu'on ne s’eft pas toüjours renfermé dans des bornes légitimes, & qu’on s’eft efforcé d’ériges 764 FI G des fens figurés en dogmes.Ce nouvel ufage, comme on voit, pouvoit s'introduire aflez facilement; en effet, loriqu’on fe fervoit du fens figuré pour établir un dogme déjà reçü, on n’avoit garde de nier le fens figuré, ou de dire qu’il ne prouvoit rien, parce qu’on eût pañlé pour nier le dogme; par- là le fens figuré acquit bien-tôt une autorité confidérable, & on ne craignit pas de l’apporter en preuves d’opinions nou- velles. En voici un exemple frappant, & que toutle monde connoit : t’eft l’ufage qu’on a voulu faire de l’'allégorie des deux glaives pour attribuer à l’Eglife une autorité fur les fouverains, même dans le tem- porel; & il eft à remarquer que cette méthode d’ex- pliquer l’Ecriture & l’autorité des allégories appor- tées en preuves des dogmes, étoit tellement établie dans le x. fiecle, que les défenfeurs de l’empereur Henri1V. contre Grégoire VII. ne s’avifoient pas de dire que cette figure ne prouvoit rien. Cet abus étoit monté au comble au tems dont nous parlons, & nous n’en fommes pas encore tout- a-fait corrigés ; Vivès au xvJ. fiecle s’en plaignoit amerement : g40 magis miror, dit-il fur le ch. 17. du livre XVIL de civirate Dei, flultitiam , ne dicam an tmpudentiam , an utrumque eorum, qui ex allegoris præ- cepta & leges vitæ, dogmata religionis, vincula quibus li- gemur tencamurque, colligant atque innodant, @ ea pro certiffimis in vulgum efferunt ; ac hereticum clamant ft quis diffentiat. Mais même en fuppofant que le fens figuré foit employé par les Théologiens en preuve d’un dogme bien établi d’ailleurs, c’eft toûjours un inconvénient confidérable que d'employer une auffi mauvaife rai- fon, & on doit bannir abfolument de la Théologie, l’ufage de ces fortes d'explications. Cependant les anciens théologiens(& les modernes ne font pas tout- à- fait exempts de ce reproche) ont tombé fréquem- ment dans ce défaut. Ils’en préfente à moi un exem- ple tiré de S. Thomas. Pour prouver que les fim- ples ne font pas tenus d’avoir une foi explicite de toutesles vérités de la religion, il s'appuie fur le paf- fage de Job. 1. Boves arabant & afine pafcebantur jux- £a eos ; quia feilivet minores , dit-1l, qui fignificantur per afinos debent in credendis adhærere majoribus | qui per boves fignificantur. Voilà une mauvaife preuve & une étrange explication. Il eft vrai que faint Grégoire a donné le même fens à cetexte (/6. II. Moral. ): mais on voit aflez la différence qu'il y a entre l'emploi d’une femblable explication dans un traité de Mora- le, &'celui que S. Thomas en fait dans un traité de Théologie. Cet abus eft fi grand , que je ne fais point de dou- te que fi Dieu n’eût veillé fur {on Eghfe, cette pro- digieufe quantité d'explications détournées, de {ens allégoriques, 6:c. ne fût entrée dans le corps de la doctrine chrétienne, comme la cabale des Juifs dans leur théologie : mais la Providence avoit placé dans VEglife une barriere à ces excès, l'autorité de l’Eglife elle-même , qui feule ayant le droit fuprème d’inter- prêter les Livres faints, anéantit & laifle oubliées les glofes des doéteurs particuliers, qui ne rendent point le vrai fens des Ecritures, pendant qu’elle adopte celles qui font conformes à la doûtrine qu”- £lle a recüe de J. C. Le fecond inconvénient de cette méthode eft que les incrédules en ont pris occafion de dire que ces explications précaires ont autant corrompu l’Ecri- ture parmi les Chrétiens, en en faifant perdre l’in- telligence, qu'auroit pà le faire l’altération du texte même. La liberté d'expliquer ainft l'Ecriture, dit M. Fleury, a été pouffee a un elexcès, qu’elle l'a enfin ren- due méprifable aux gens d'efprit mal inffruits de la reli- gion ; ils l’ont regardée comme un livre imintelligible qui ne fignifioit rien par lui-même, € qui étoit le jouet des 17- ferpreres, C’eft par-là, difent les Socuuens, que nous FIG en avons perdu le vrai fens fur les dogmes importans de la Trinité, de la fatisfaétion de Jefus-Chnft, du péché originel, &c. deforte que nous ne pouvons plus y rien entendre, préoccupés que nous fommes de fens fgurés qu’une longue habitude nous fait re- garder comme propres, quoique nous ayons perdu. le fens fimple & naturel que les.écrivains facrés avoient en vüe. Il eft facile de répondre à cela, que la doétrine catholique n’eft point fondée fur ces ex- phcations arbitraires & figurées de certains paflages | mais fur leur fens propre & naturel , comme le prou- vent les Théologiens en établiffant chaque dogme en particulier ; que quelle que foit l'ancienneté de ces explications figurées, nous pouvons aujourd’hui dans l’examen des dogmes, examiner &g faïfir le fens propre & naturel des paflages fur lefquels nous les établiffons , 8 que ce fens propre & naturel eft celus auquel l’Eglife catholique les entend, &c. mais c’eft toïjours , comme on yoit, fur l'abus des fens figurés dans l’interprétation de l’Ecriture , que les Sociniens fondent de pareils reproches, & c’eft ce que nous voulons faire remarquer. En troifieme lieu , d’après la perfuafion que l’Ecri- ture fainte eft infpirée, celui qui prétend trouver une vérité de morale ou un dogme dans un paflage au moyen du fens fouré qu'il y découve, donne de fon autorité privée une définition en matiere de foi. En effet, cet homme, en interprétant ainfi l’Ecriture, fuppofe fans doute que Dieu, en infpirant à l’écrir vain le paffage en queftion , avoit en vie ce {ens - guré; autrement il ne pourroit pas employeren preu- ve ce fens, qui ne feroit que dans fa tête. Il doit donc penfer que ce paflage renferme une vérité de foi, & impofer aux autres la néceflité de croire ce qu'il voit fi clairement contenu dans la parole de Dieu. De-là naïffent bien des inconvéniens, des opi- nions théologiques érigées en dogmes, les reproches d’héréfie prodigués , &c. Il eft vrai pourtant que ceux qui ont donné des explications fourées , n’ont pas toüjours prétendu qu’elles devinflent un objet de foi. C’eft ainfi que S. Auguftin, au quinzieme livre de ci. vitate Dei, où 1l fait une grande comparaifon deJ.C. & de l’arche, infinue que quelqu'un avoit propofé une autre interprétation que la fienne , de ce qu’on lit au ch. y. v. 16. de la Genefe, dans les Septante & dans l’hébreu-famaritan(voyez la poliglorre de W al- ton): zaferiora, bicamerata & tricamerata facies. IE avoit dit que picamerata fignifioit que l’Eglife renfer- moit la multitude des nations, parce que cette multi- tude étoit Pipartita, propter circumcifionem & præepu- tin; & tripartita, propter tres filios Noë Maïs il permet qu’on entende par-là la foi , l’efpérance & la charité; ou les trois abondances de ces terres, dont les unes, felon Jefus-Chrift , portent 30, d’autres 60, & d’au- tres 100 ; ou encore la pureté des femmes mariées , celle des veuves, & celle des vierges. Ce pere n’oblige pas, comme on voit , à recevoir fon explication: mais d’abord tous n’ont pas eu au- tant de modefftie ; & d’ailleurs je trouve que fon opi- nion devoit le conduire là, puifqu’en penfant , com- me il faifoit, que le faint Efprit avoit eu ce premier fens en vûe , il devoit regarder fon explication com- me un objet de foi, quoiqu’elle foit arbitraire, Je finis en obfervant un quatrieme inconvénient des explications figurées; c’eft qu’elles font tort à la majeftueufe fimplicité des Ecritures ; & on eft fâché de voir les ouvrages de beaucoup de peres gâtés par ce défaut. Souvent on y voit tout-au-travers du plus beau plan du monde une explication de cette nature qui défigure tout : par exemple, S. Auguftin, au dou- zieme livre contra Fauflum , fe propofant de montrer que J. C. avoit été figuré & annoncé par les prophe- tes, a recours à une prodigieufe quantité de figures, d’allésories , de rapports qu'il trouve entre J LE " arche FIG -Parche de Noë:1l fonde cesrapports- principalement ‘fur ce’que la longueur & la largeur de l’arche font -dans la même proportion que la longueur & la lar- geur du corps humain que J. Ca bien voulu pren- dre ; la porte de l'arche, c’eft la bleflure que J. C. reçut au côté ; les bois quarrés figmiñent la ftabilité de la vie des faints , &c. S. Ambroiïfe en fuivant à- peu-près la même idée, entre dans des détails encore plus petits : il explique le zidos facies in arcä, en di- lant que ces nids ou loges font nos yeux, nos oreil- -les, notre bouche, notre cerveau, notre poumon, la moëlle de nos os : quant à la porte de l'arche, pul- chrè autem addidir , dit-il, offium ex adyer(o facies cam partem declarans corporis per quam cibos egerere conf LLe- Vimus ,ut que putamus ionobiliora efle corporis, his ho- Aorent abundantiorem circumdaret, Lib. VII. de Noë € aTCde | Au refte, il y a ici une remarque importante à fai- re ; c’eft que les peres ont donné dans ces explica- tions figurées, d’après des principes fixes & un fyf- tème fuivi : leur concert en cela pourroit feul en four- nit la preuve; mais il y a plus ; ils ont expofé en plu- fieurs endroits ces principes & ce fyftème. Origene entre autres, dont l’autorité & la métho- de ont êté refpedées dans les deux églifes , avance quetoute l’Ecriture doit être interpretéeallégorique- ment , & 1l va même jufqu’à exclure en plufñeurs en- droits des livres faints, le fens littéral. Vxiverfam por- rÔ facram féripturam ad allevoricum fenfum effe fumen- dan admonetnos, velillud apertam in parabolis os meum. Origen, in præfat. Hifloriafcripturæ interdèm interferit quedam vel minis gefla, vel que omnind geri non pof- Junt, interdum que poflunt geri nec tamen gefla Jun. IV. de princip. S. Auguftin ; en rejettant cette opi- mon d'Origene , qu'il y avoit dans l’Ecriture des chofes qui n’étoient jamais arrivées, & qu’on ne pou- voit pas entendre à la lettre, foûtient qu’il faut pour- tant rapporter les évenemens de l’ancien Teftament à la cité de Dieu, à l'Eglife chrétienne, à moins qw- on ne veuille s’écarter beaucoup du fens de celui qui a diété les livres faints: 44 hanc de qué loquimur Dei civitatem omnia referantur , ft ab ejus fenfu qui iffa con- feripfitnonvult longe aberrare qui exponit, Lib, XV, c. xXVJ. de civitate Dei, ic L. En général, ils ont prefque tous dit que Dieu en - infpirant les Ecritures , ne feroit point entré dans les petits détails qu'on y trouve à chaque pas, sl n’a- voit eu le deffein de cacher fous ces détails les vérités de la Morale & de la religion chrétienne : d’où l’on voit que c’eft d’après des principes fixes & un fyftè- me fuivi, qu'ils ont expliqué les Ecritures de cette -façon. Je me crois obligé de terminer cet article par une remarque du favant& judicieux Fleury. Je fai, dit-il, que les fens figurés ont été de tout tems reçüs dans PEglife.….... Nous en voyons dans l’Ecriture mê- me, comme l’allégorie des deux alliances, fignifiées par les deux femmes d'Abraham; mais puifque nous favons que l’épitre de S. Paul aux Galates n’eft pas moins écrite pat infpiration divine que le livre de la Genefe, nous fommes également affürés de l’hiftoire & de l’application , & cette application eft le fens littéral du paffage de S, Paul. Il n’en eft pas de mé- me des fens figurés que nous lifons dans Origene, dans S. Ambroife, dans S. Auguftin. Nous pouvons ! les regarder comme les penfées particulieres de ces doéteurs..... êt nous ne devons fuivre ces appli- cations , qu'autant qu'elles contiennent des vérités ! conformes à celles que nous trouvons ailleurs dans VEcriture, prife en fon fens littéral, Cirquieme dif. | cours. (h) | FIGURE, (Logig. Méraphyf.) tour de mots & de penfées qui animent ou ornent le difcours. C’eft aux | Rhéteurs à indiquer toutes les efpeces de figures ; | _ Tome VI, FIG 765 nous ne cherchons ici que leur origine , & la caufe du plaifir qu’elles nous font. | Ariftote trouve l’origine des figures dans linclina- tion quinious porte À goûter tout ce quin’eft pas com- mun, Les mots fourés n’ayant plus leur fignification naturelle, nous plaifent, felon lui, par leur dégtute- ment, &c nous les admirons à.caufe de leur habille- ment étranger ; mais il s’en faut bien que les figures ayent été dans leur berceau des expreflions dégui- lées, inventées pour plaire par leur déenifement. Ce n'eft pas non plus la hardieffe des exprefhons étran- geres que nous aimons dans les figures, puifqu’elles ceflent de plaire fi-tôt qu’elles paroiffent tirées dé trop loin. Nous donnons fans aucune recherche le nom de ruée à cet amas de traits que deux armées lançoient autrefois l’une contre l’autre ; & parce que l'air en étoit obfcurci, l’image d’une nuée fe préfente tout naturellement | & le terme fuit cette image. Voici donc des idées plus philofophiques que celles d’Ariftote {ur cette matiere. Le langage, fi l’on en juge par les monumens de l'antiquité .& par le caraétere de la chofe , a été d’a» bord néceffairement foure , ftérile & groffier ; en- forte que la nature porta les hommes, pour fe faire entendre les uns des autres, à joindre le langage d’ac- tion & des images fenfibles À celui des fons articulés S en conféquence la converfation , dans les premiers fiecles du monde, fut foûtenue par un difcours entre- mêlé de mots & d’aétions. Dans la fuite » Pufage des hiéroglyphes concourut à rendre le ftyle de plus en plus fguré. Comme la nature & la néceffité, & non pas le choix & l’art, ont produit les diverfes efpeces d’écritures hiéroglyphiques , la même chofe fe arti- vée dans l’art de la parole, Ces deux manieres de communiquer nos penfées ont néceffairement in- flué l’une fur l’autre ; & pour s’en convaincre on n’a qu'à lire dans M. Warburthon le parallele ingénieux -qu'il fait entre l’apologue, la parabole, l'énigme & les figures du langage, d’une part; & d’autre part les différentes efpeces d’écritures. Il étoit auf fimple en parlant d’une chofe, de fe fervir du nom de la Je= gure hiéroglyphique , fymbole de cette chofe, qu'il avoit été naturel, lors de l’origine des hiéroplyphes, de peindre les figures auxquelles la coûtume avoir donné cours. Le langage figuré eft proprement celui des prophetes, & leur ftyle n’eft pour ainfi dire qu'un hiéroglyphe parlant. Enfin les progrès & les chan gemens du langage ont fuivi le fort de écriture : & les premiers efforts dûs à la néceflité de communi. quer fes penfées dans la converfation, font venus par la fuite des fiecles, de même que les premiers hiéroplyphes, à fe changer en myfteres, & finale : ment à s'élever jufqu’à l’art de l’éloquence & de la _perfuafon, On comprend maintenant que les expreffions figuz rées étant naturelles à des gens fimples, ignorans & .grofliers dans leurs conceptions, ont dû faire for. tune dans leurs langues pauvres & ftériles : voilà pourquoi celles des Orientaux abondent en pléonaf. mes & en métaphores. Ces deux fgures conftituent l'élégance & la beauté de leurs difcours, & l’art de leurs orateurs & de leurs poëtes confifte à y.ex= celler. Le pléonafme fe doit vifiblement aux bornes étroï. tes d’un langage fimple : Fhebreu, par exemple, où cette figure {e trouve fréquemment , eft la moins abondante de toutes les langues orientales: de-jà vient que la langue hébraïque exprime des chofes différentes par le même mot, ou une même chofe par plufeurs fynonymes. Lorfque les expreffions ne répondent pas entierement -aux idées de celui. qui parle, comme il arrive fouvent en {e fervant d’une langue qui eft pauvre, 1l cherche néceffairement à s’expliquer en repétant fa penfée en d’autres terme MCE: : EFece 766 FIG à-peu-près comme celui dont le corps eft gêné dans un endroit, cherche continuellement une place qui le fatisfaffe. La métaphore paroît dûe évidemment à la groflie- reté de la conception, de même que le pléonafme tiré fon origine du manque de mots. Les premers hommes étant fimples, groffiers & plongés dans les fens, ne pouvoient exprimer leur conception des idées abflraites , & les opérations réfléchies de l’en- tendement, qu'à l’aide des images fenfibles , qui, au moyen de cette application , devenoïient meta- phores, Telle eft l’origine des fewres, & la chôfe eft fi vraie, que quiconque voudra faire attention au peu- ple dans fon langage , il le verra prefque toùjours porté à parler fgvrément. Ces expreflions , we mal- Jon trifle, une campagne riante ; le froid d'un difcours L le feu des yeux , font dans la bouche de ceux qui cou- rent le moins après les métaphores , & qui ne favent pas même ce que c'eft qu'une métaphore. . Nous parlons naturellement un langage figuré, orfque nous fommes animés d’une violente pafñon. Quand il eft de notre intérêt de perfuader aux autres ce que nous penfons , & de faire fur eux une impref fion pareille à celle dont nous fommes frappés, la nature nous dicte & nous infpire fon langage : alors toutes les fgures de l’art oratoire , que les Rhéteurs ont revêtu de tant de noms pompeux, ne font que des façons de parler très-communes , que nous pro- diguons fans aucune connoïffance de la Rhétorique ; ainf le langage figuré n’eft que le langage de la fim- ple nature, appliqué aux circonftances où nous le devons parler. Dans le trouble d’une pañon violente , il s’'éleve en nous un nuage qui nous fait paroître les objets, non tels qu'ils font'en effet , mais tels que nous les voulons voir; c’eft-à-dire ou plus grands & plus admirables , ou plus petits & plus méprifables , fui- vant que nous fommes emportés par l'amour ou par fa haïine. Quand l'amour nous anime, tout eft mer- veilleux à nos yeux; &c tout devient horreur quand {a haine nous tranfporte. Nous voulons intérefler à notre caufe tous les êtres éloignés, préfens , abfens, fenfibles ou inanimés ; 8 comme nos connoiïffances |! ont enrichi nos langues, nous appellons ces êtres en grand nombre, nous leur parlons, & nous les com- parons enfemble , par l’habitude où nous fommes de juger de tout par comparaïfon. À ces mouvemens divers , qui fe fuccedent rapidement & fans ordre, répond un difcours plein de ces tours qu’on nomme hyperboles, fimilitudes, profopopées, hyperbates, c’eft- à-dire plein de toutes les figures , foit de mots, foit de penfées. Ce langage nous eft utile, parce qu'il eft propre à perfuader les'autres ; il eft propre à les per- fuader, parce qu'il leur plaît ; il leur plait, parce qu’il Les échauffe & les remue, en ne leur préfentant que des peintures vivantes, & leur donnant le plaïfr de juger de la vérité des images : ainf c’eft dans la nature qu’on doit chercher l’origine du fyle figure ; &c dans limitation , la fource du plaifir qu’il nous caufe. Pourquoi les mêmes penfées nous paroïffent-elles beaucoup plus vives quand elles font exprimées par une feure, que fi elles étoient enfermées dans des éxprefhons toutes fimples ? Cela vient de ce que les expreffions fgurées marquent, outre la chofe dont il s’agit, le mouvsment &la paffion de celui qui parle, & impriment ainf l’une êc l’autre idée dans l'efprit ; au lieu que l’exprefion fimple ne marque que la vé- : tité toute nue. Par exemple, fice demi-vers de Vir- | gile, ujque aded ne mori miferum ? Étoit exprimé fans figure, de cette forte, 07 eff ufque aded mort miferum, | il'auroit fans doute beaucoup moins de force. La raï- “on eftque la premiere conftra@ion fignifie beauçoup plus que la feconde ; car elle exprime non-feule: ment cette penfée , que /4 mort n'eft pas an fi grand mal que l’on s’imagine , mais elle répréfente de plus l’idée d’une perfonne qui fe roidit contre la mort, & qui l’envifage fans effroi ; image beaucoup plus vive que n’eft la penfée même à laquelle elle eft jointe : 1l n’eft donc pas étrange qu’elle frappe da- vantage, parce que l’ame s’inftruit par les images des vérités, mais elle ne s’ément guere que par l’image des mouvemens. Au refte les figures, après avoir tiré leur premiere origine de la nature, des bornes d’un langage fimple, & de la grofliereté des conceptions, ont contribué dans la fuite à l’ornement du difcours, de même que les habits, qu’on a cherché d’abord par la néceflité de fe couvrir, ont avec le tems fervi de parure. La conduite de l’homme a toüjours été de changer fes befoins & fes néceffités en parade & en luxe, toutes les fois qu'il a pù le faire. Les figures devinrent l’or- nement du difcours , quand les hommes eurent ac- quis des connoiffances aflez étendues des Arts &c des Sciences, pour en tirer des images qui, fans nuire à la clarté, étoient auf riantes, aufli nobles, auffi fublimes que la matiere le demandoit. Enfin, comme on abufe de tout, on crut trouver de srandes beautés à furcharger Le ftyle d’ornemers ; pour lors le fonds ne devint plus que l’accefloire , & l’art tomba dans la décadence. Il eft certain néanmoins que l’emploi des foures bien ménagé, décore le difcours , l’anime, le foù- tient , lui donne de l’éléfation, touche le cœur, ré- veille l’efprit, l’ébranle & le frappe vivement. La Poëéfie fur-tout eft en poffeffion de s’en fervir , elle a droit d’en étendre l’ufage plus loin que la profe; elle peut enfin perfonnifier noblement les chofes inani- mées, Ariftote, Cicéron, Quintilien , Longin; &, pour nommer encore de plus grands maîtres, le goût & le génie, vous apprendront l’art de placer les #- gures, de les diverfifier, de les multiplier à-propos, de les cacher, de les négliger, de les omettre, @c. Tout cela n’eft point de mon fujet ; je me contenterai feulement de remarquer que comme les figures figni- fient ordinairement avec les chofes, les mouvemens que nous reffentons en les recevant & en parlant, on peut juger aflez bien par cette regle générale, de l’ufage que l’on doit en faire , 87 des {ujets auxquels elles font propres. Il eit vifible qu’il eft ridicule de s’en fervir dans les matieres que l’on resarde d’un œil tranquille, & qui ne produifent aucun mouve- ment dans l’efprit ; car puifque les figures expriment les mouvemens de notre ame, celles que l’on met dans les fujets où lame ne s’ément point , font des mouvemens contre nature, & des efpeces de con- vulfions. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FIGURE, cerme de Rhétorique, de Logique & de Grammaire. Ce mot vient de frgere, dans-le fens d’ef formare, componere, former, difpofer, arranger, C’eft dans ce fens que Scaliger dit que la figure n’eft autre chofe qu’une difpofition particuliere d’un ou de plu- fieurs mots : 22h aliud ef? figura quam termini aut ter- mirorum difpofirio. Scal. exercit. lxj. c. 7. A quoi on peut ajoûter, 1°. que cette difpoñition particuliere eft relative à l’état primitif & pour ainf dire fonda- mental des mots ou des phrafes. Les différens écarts que l’on fait dans cet état primitif, &c les différentes ‘altérations qu’on y apporte, font les-différentes #- _gures de mots & de penfées. C’eft amfiqu'en Gram- maire les divers modes & les différens tems des ver- bes fuppofent toûjours le thème du verbe, c’eft-à- dire la premiere perfonne de l'indicatif; suors eft le thème de ce verbe. Ainfñ les mots & les phrafes font pris dans leur état fimple, lorfqu'on les prend felon leur premiere deftination, êt qu'on ne leur donne aucun de ces tours ou caraéteres finguliers qu s’éloi- Bhent de cette premiere deffination, & qu'on appelle figures, As | AE Te vais faire entendré ma pénée par des exem- ples : felon la conftrudion fimple & néceflaire, Pour dire en latin 5/s ont aimé, on dit amaverunt ;f au lieu d'amaveruns vous dites ararumt, vous chan- gez l’état original du mot, vous vous en écartez par une figure qu'on appelle fÿncope: c’eft ainfi qu’Hora- ce a dit eya/li pour evafiffi, IT, fasyre vis. v. 68. Au contraire, fi Vous ajoûtez une fyllabe que le mot n’a point dans fon état primitif, & qu’au lieu de dire amari, être aimé , vous difiez arzarier, Vous faites une figure qu'on appelle paragoge, el Autre exemple : ces deux mots Céres &c Bacchus font les noms propres & primitifs de deux divinités du paganifme ; ils font pris dans Le fens propre, c’et- a-dire, felon leur premiere deftination, lorfqu'ils f- gnifient fimplement l’une ou l’autre de ces divinités: mais comme Cérès étoit la déeffe du blé & Bacchus le dieu du vin, on a fouvent pris Cérès pour le pain & Bacchus pour le vin ; & alors les adjoints ou les circonftances font connoître que l’efprit confidere ces mots fous une nouvelle forme, {ous une autre figure , & lon dit qu'ils font pris dans un fens figu- ré : 1l y a un grand nombre d'exemples de cette ac- ception, fous lefquels les noms de Cérès & de Bac- chus {ont pris , fur-tout en latin ; ce que quelques- uns de nos poëtes ont imité, Madame des Houllie- res a pris pour refrein d’une ballade, L'amour languit fans Bacchus & Cérès, c’eft-à-dire, qu’on ne fonge guere à faire l'amour quand on n’a pas dequoi vivre: cette fgure s'appelle rrélorymie, . TL Les figures font diftinguées l’une de l’autre parune conformation particulière ou caratere propre qui fait leur différence; c’eft la confidération de cette différence qui leur d'fait donner à chacune un nom particulier, | Nous fommes accoûtumés à donner des noms tant aux êtres réels qu'aux êtres métaphyfques ; c’eft une fuite de la réflexion que nous faifons fur les dif- férentes vües de notre efprit : ces noms nous fervent à rendre, pour ainf dire, fenfibles les objets méta- phyfiques qu'ils fignifient , & nous aident à mettre de l’ordre &c de la précifion dans nos penfées. | IT. Le mot de figure eft pris ici dans un fens méta- phyfique & par imitation ; car comme tous les Corps, outre leur étendue , ont chacun leur figure ou con- formation particuliere , & que lorfqu'ils viennent à enchanger, ondit qu'ils ont changé de figure ; de mê- me tous les mots conftruits ont d’abord la propriété générale qui confifte à fignifier un fens, en vertu de la conftruétion grammaticale ; ce qui convient à toutes les phrafes & à tous les aflemblages de mots conf- fruits, mais de plus, les expreflions figurées ont enco- re chacune une modification finguliere qui leur eft propre, & qui les diftingue l’une de l’autre.Onne fau- roit croire Juiqu’à quel point les Grammairiens & les Rhéteurs ont multiplié leurs obfervations, & par conféquent les noms de ces feures. Il eft, ce me fem- ble, aflez inutile de charger la mémoire du détail de ces différens noms ; mais on doit connoître les diffé- rentes fortes ou efpeces de fgures, & favoir les noms de celles de chaque efpece qui font le plus en ufage. Il y a d’abord deux efpeces générales de figures ; 1°. figures de mots ; 2°. figures de penfées : la diffé- rence qui fe trouve entre ces deux fortes de figures , eft bien fenfible. « Sivous changez le mot, dit Cicéron, vous ôtez » la figure du mot, au lieu que la £gure de penfée fub- » fifte toljours, quels que foient les mots dont vous # vous ferviez pour l’énoncer : conformaric verborurm collitur , f verba mutatis ; fententiarum PErTRaTet ; qui- Tome VI, FIG 767 bnfouñgtie ÿérbis uit velis. De Orat, Eh. TL edf. Par exemple , f en parlant d’une flotte, vous ditesqu’el> le eft compofée de cent voiles, vousfaites une frs re de mots ; fubftituez vaiféaux à voiles, il n’y à plus de figure. | ncigl Les. figures de mots tiennent donc effentielleméent au matériel des mots ; au lieu que les fgvres depen> fées n’ont befoin des mots que pour être énoncéess elles font eflentiellement dans lame, & confiftent dans la forme de la penfée, & dans l’efpece du fens timent, | Lt er. À l'égard des figures de mots, il y en a de qua- tre fortes. I, par rapport au matériel du mot; c’efts à-dire par rapport aux changemens qui arrivent aux lettres où fons dont les mots font compolés : on les appelle figures de diction. | JréE IT, Ou par rapport à la conftruétion grammatica le ; on les appelle fowres de conftrulion. A IT. La troifieme clafle de figures de mots , ce font celles qu’on appelle sropes ; par rapport au changez ment qui arrive alors à la fignification du mot ; c’eft lorfqu’on donne à un mot un fens différent de celui pour lequel il a été premierement établi ; mo ; cor Verf20 ; rpére , verto. IV: La quatrieme forte de fgurede mots, ce font celles qu’on ne fauroit ranger dans la clafle des trox pes, puifque les mots y confervent leur premierefi- gnification: on ne peut pas dire non plus que ce font des figures de penfées, puifque ce n’eft que par les mots & les fyllabes , & non par la penfée, qu’elles {6nt figures, c’eft-à-dire , qu’elles ont cette confor- mation particuliere qui les diftingue des autres fa= cons de parler, Donnons des exemples de chacune de ces figures de mots, ou du moins des principales de éhaque efpece. Des figures de diction qui regardent le matériel du mot. Les altérations qui arrivent au matériel d’un mot fe font en cinq manieres différentes; 1°, ou par augmentation; 2°. Ou par diminution de quelqué let- tre, ou.du fon; 3°. par tranfpofition de lettres ou de fyllabes ; 4°, par la féparation d’une fyllabe en deux; $ - par la réunion de deux fyllabes en une. L. Par augmentation ou pléonafme; ce qui fe fait au commencement du mot, ou au milieu, ou à la fin. 1°. L'augmentation qui {e fait au commencement du mot eft appellée profthôfe, mposdeors , comme gn4- tus pour actus, vefper, du grec tomepce. 2°. Celle du milieu eft appellée éperthèfe , ém4ySes ais, relligio pout religio ; Mavors au lieu de Mars ; in- duperator Pour imperator, | 3°. Celle de la fin, paragoge , mapayoyi ; comme amarier au lieu d’arari, IT. Le retranchement fe fait de même, 1*. Au commencement , & on l’appelle aphérefe, cpaiperie, comme dans Virgile semnere pour conter Zieres À Difcite jujlitiam monisi | & non temnere divosà Æneid. VI. y. 6G20. 2°. Au milieu , & on le nomme fyncope , svynémi à amarit pour amaverit , fcuta virÂm pout virorun. 3°. À la fin du mot, on le nomme apocope , drro= koh, Zegot{ Pour Zegotii , cura peculi, pour peculii. Nec Jpes libertatis erat, nec cura peculi. | Vire. Æcl. IL. v. 34. IT. La tranfpoñition de lettres ou de fyllabes eff appellée rnerarhèfe , peralSeoie, c’eft ainfi que nous di. fons Hanovre pour Hanover. IV, La féparation d’une fyllabe en deux eft ap- pellée dierèfe , Sixipeaus | comme awlai de trois fylla- bes au lieu d’axle , vitar pour vite ; & dans Tibulle diffoluenda pour diffolvenda, En françois Lais > nom propre , eft de deux fyllabes , & dans Zes freres-lais, ce mot n’eft que d’une fyllabe ; & de même Créife, nom propre de trois fyllabes , creufe, adjeëtif femie Eece i "68 FIG nin diflyllabe ; 20%, monofyllabe; Anrinoïs, quatre | fyllabes , &c. V.La contrattion ou réunion de deux fyllabes en | une fe fait en deux mameres : 1°, lorfque deux {yl- labes fe réuniflent en une fans rien changer dans Pécriture : on appelle cette contra@iénfyrérèze ; comme lorfqu’au lieu d’axreïs en trois fyllabes , Vir- gile a dit aureis en deux fyllabes. 1 Dependent lychni laquearibus aureis. THE Æn. L 1, v. 730... 2°, Mais lorfqu'il réfulte un nouveau fon de la contraétion, /4 figure.eft appellée crafe , spaoie, C’eft- à-dire mélange, comme en:françois Oérpour Août, par au heude paoz; & en-latin 717 pour zihi-ne ? :2.Ces: diverfes altérations', dans'le matériel des mots , s'appellent d’un nom général , métaplafme, pérémAadoe , transformatio, de péränhtsce , Éranis- 077710. | IL..La feconde forte de figures qui regardent les mots, ce font les fgwres de conftruétion; quoique nous enayons parlé ax m0# CONSTRUCTION , ce que nous en dirons ici ne fera pas inutile. D'abord il faut obferver que lorfque les mots font rangés felon l’ordre fucceflif de leurs rapports dans le difcours , & que le mot qui en détermine un au- tre eft placé immédiatement & fans interruption après le mot qu’il détermine , alors il n’y a point de figure de conftruétion ; mais lorfque lon s’écarte de la fimplicité de cet ordre, 1l y a figure : voici les principales. 19, L’eZipfe, tnnudue, derelitfio , pretermiffio , defec- tus ; de Aero , linquo : ainfi quand l’empreflement de l'imagination fait fupprimer quelque mot qui fe. roit exprimé felon la conftruétion pleine, on dit qu'il y a eZlipfe. Pour rendre raïon des phrafes el- liptiques , 1l faut les réduire à la conftruéion plei- ne ; en exprimant ce qui eft fous-entendu felon l’a- nalogie commune : par exemple , accufare furti , c’eft accufare de crimine furti ; & dans Virgile , quos ego, Æn. L, I. v. 139. la conftruétion eft , vos quos ego in ditione med tenco, « Quoi ! vous que je tiens # fous mon empire ; vous , mes fujets , Vous que je » pourrois punir , vous ofez exciter de pareilles # tempêtes fans mon aveu » ? Ad Caftoris , fuppléez ad ædem; maneo Rome, fuppléez 22 urbe comme Ci- ceton a dit: 7 oppido Antochie ; & Virgile , Æn. 1. III, v. 293. Celfam Burhrori afcendimus urbem, paf- fage remarquable & bien contraire aux regles com- munes fur les queftions de lieu. Æff regis uert fubdi- cos ; fuppléez officum , &c. Il y a une forte d’ellipfe qu'on appelle zezgma , mot grec qui fignifie connexion, affemblage : c’eft lorfqu'un mot qui n’eft exprimé qu'une fois, raf- femble pour ainf dire fous lui divers autres mots énoncés en d’autres membres ou incifes de la pério- de. Donat en rapporte cet exemple du HI. lv. de l’Æneide , v. 359. Trojugena interpres divum , qui numina Phæb:, Qui cripodas , Clarii lauros , qui fidera fenris Er volucrum linguas | & preperis omina pennæ. Cetroyen, c’eft Helenus , fils de Priam & d’He- cube. Dans cet exemple, Jensis , qui n’eft-exprimé wune fois , raflemble fous lui cinq incifes où il eft ton : qui Jentis, id eft, qui cognofcis numi- -na Phebi , qui fentis tripodas , qui féntis lauros Clarii, qui fentis fidera , qui fentis hnguas volucrum , qui fentis omina penne præpetis, Voyez ce que nous avons dit du zeugma , au mot CONSTRUCTION. IT, Le pléonafme , mot grec qui fignifie frabon- dance, œhcovaouos, abundantia; Atos, plenus ; rheova, plus habeo , abundo. Cette figure eft le contraire de lellipfe; il y a pléonafme lorfqu’ily a dans la phra- fe quelque mot fuperflu , enforte quele fens n'en fe. FIG roit pas moins entendu, quand ce mot ne feroit | pas exprimé, comme quand on dit, je l'ai vi de mes yeux , je l'ai entendu de mes oreilles, j'irai moi- méme ; mes Yeux, res oreilles | moi-même ,{ont autant de pléonafmes. | Lorique ces mots fuperflus quant anfens, fervent . à donner au difcours , ou plus de grace , ou plus de netteté ; ou plus de force & d'énergie , ils font une figure appronvéecomme dansles exemples ci-deflus; mais quand le pléonafme ne produit aucun de ces avantages , C’eit un défaut du ftyle ,ou du moins une négligence qu’on doit éviter. : É IL, La /yllepfe où fynthèfe fert lorfqw’au lieu de conftruire les mots felon les regles ordinaires du nombre , des genres , des cas, on en fait la conf- truthon relativement à la penfée que l’on a dans l’efprit; en un mot , il y a fyllepfe , lorfqu’onfait la conftruétion felon le fens , & non pas felon les mots : c'eft ainfi qu'Horace Z, I. Od. 2. à dit : fatale monf. trim que ; parce que ce monftre fatal c’étoit Cléo- patre ; ainfi il a dit que relativement à Cléopatre qu'il avoit dans l’efprit, 8 non pas relativement à monftrum. C’eft ainf que nous difons , /2 plépart des hommes s'imaginent, parce que nous avons dans l’ef prit une pluralité ; & non le finsulier , 2 plépart. C’eft par la même figure que le mot de perfonne , qui grammaticalement eft du genre féminin , fe trouve jouvent fuivi de / ou de z%5, parce qu’on a dans let prit l’homme ou les hommes dont on parle. IV. La quatrieme forte de figure c’eft l’hyperbare, c'eft-à-dire confufion ; mélange de mors ; c’eft lorfque lon s’écarte de l’ordre ficceffif des rapports des mots ,; {elon la conftruétion fimple : en voici un exemple où 1l n’y a pas un feul mot qui foit placé après fon correlatif , & felon la conftruction fim- ple. ATet ager ; Virio > TnOrIens ; fitit, aeris , herba. Virg. Eccl, VII. y. 42. La confiruétion fimple eft ager arer ; herba moriens præ visio aëris finir. L’ellipfe & l'hyperbate font fort en ufage dans les langues où les mots changent de terminafons , parce que ces terminaifons indi- quent les rapports des mots, & par-là font apperce- voir l’ordre ; mais dans les langues qui n’ont point de cas, ces figures ne peuvent être admifes que lorf- que les mots fous-entendus peuvent être aifément fuppléés , & que l’on peut facilement appercevoir l’ordre des mots qui font tranfpofés : alors les ellip- fes & les tranfpoñtions donnent à l’efprit une occu- pation qui le flatte : il eft facile d’en trouver des exemples dans les dialogues , dans le ftylefoûtenu, & fur-tout dans les poëtes : par exemple, /a vérité & befoin des ornemens que lui prête l'imagination , Dif- cours fur Télémaque ; on voit aifément que l’iragi. nation eft le fujet, & que /ui eft pour à e//e. Le livre fi connu de Phiftoire de dom Quichote, commence par une tranfpoftion : das une contrée d’Efpagne , qu’on appelle la Manche, vivoit , il n'y æ pas long-tems , un gentilhomme, &c. la conftru@ion eft : #7 gentilhomme vivoit dans | &c. V. L’imitation : les relations que les peuples ont les uns avec les autres, foit par le commerce , foit pour d’autres intérêts ,introduifent réciproquement parmi eux, non-eulement des mots, mais encore des tours & des façons de parler qui ne font pas analo- gues à la langue qui les adopte ; c’eftainfique dans les auteurs latins on obferve des phrafes grèques . qu’on appelle des he/lénifines | qu’on doit pourtant toüjours réduire à la conftruétion pleine de toutes les langues. Voyez CONSTRUCTION. | VI, L’artraition : le méchanifme des organes de la parole apporte des changemens dans les lettres où dans les mots qui en fuivent ou qui en précedent d’autres : c’eft ainfi qu'une lettre forte que l’on a à prononcer , fait changer en forte la douce qui la pré- cede ; il y a en grec de fréquens exemples de ces changemens qui font amenés par le méchanifme des organes : c’eft ainfi qu’en latin on dit a//oquz au lieu d’ad-loqui ; irruere pour in-ruere , &tc. . De même la vûe de lefprit tourné vers un cer- tain mot , fait fouvent donner une terminaifon fem- blable à un autre mot qui a relation à celui-là : c’eft ainfi qu'Horace , dans l’Art poétique , a dit , zredio- cribus effe poëtis , où l’on voit que #ediocribus eft at- tiré par poëris. On peut joindre à ces figures l’archaifme, apyaruos, façon de parler à limitation des anciens ; apyauce, antiquus : C’eft ainfi que Virgile a dit , o/!) fubridens pour 2/7: ; & c’eft ainf que nos poëtes, pour plus de naiveté, imitent quelquefois Marot. . Le contraire de l’archaifme c’eft le zéoloprfme, c’eft-à-dire façon de parler nouvelle : nous avons un Diétionnaire néologique , compofé par un critique connu, contre certains auteurs modernes , qui veu- lent introduire des mots nouveaux & des façons de parler nouvelles & affeétées , qui ne font pas confa- crées par le bon ufage , & que nos bons écrivains évitent. Ce mot vient de deux mots grecs , véos , 20- VUS, & Aoyos, Jermo. Il y a quelques autres foures qu’il n’eft utile de connoïtre, que parce qu'on en trouve fouvent les noms dans les commentateuts ; mais on doit les ré- duire à celles dont nous venons de parler. En voici quelques-unes qu’on doit rapporter à l’hyperbate. L’anaffrophe, ayxspugav, convertere | spigo, verto ; l’anaftrophe eft le renverfement des mots , comme mecum, tecum , vobifcum ; au lieu de cum me, cumte, cum vobis quarn ob rem, au lieu de ob quam rem ; his ac- cenfa fuper, Virgile, Æneïd. /, I, y, 23. pour accenfa Juper his. Robert{on, dans le fupplément de fon Dic- tionnaire ,lettre À , dit ayaorpogn inverfio , præpoftera rerum feu verborurm collocario. 2. Tnefis, R+ runsw, futur premier du verbe inu- fité ruaw , feco, je coupe :1l y a tméfis lorfqu’un mot eft coupé en deux : c’eft ainfi que Virgile , au lieu de dire /zbjeita feptemtrioni , a dit feptem fubjeëta trio- ri. Georg. /. III, y. 381. & au Liv. VIII. de P'Æneïd. v. 74, il a dit guo te cunque pour guocumque te ; &c. quando confumet curque ,| Dour quando quocunque con- fumer, 1] y a plufieurs exemples pareils dans Horace &t ailleurs. 3. La parenthèfe eft auf confidérée comme cau- fant une efpece d’hyperbate , parce que la paren- thèfe eft un fens à part , inféré dans un autre dont il interrompt la fuite ; ce mot vient de œxpa qui entre en compofition, de &v, 27, & de ri%mu, pono. Il y a dans l'opéra d’Armide une parenthèfe célebre, en ce que le muficien l’a obfervée auf dans le chant. Le vainqueur de Renaud ( ft quelqu'un le peur étre) Sera digne de moi. On doit éviter les parenthèfes trop longues , & les placer de façon qu’elles ne rendent point la phra- fe louche , & qu’elles n’empêchent pas lefprit d’ap- percevoir la fuite des correlatifs. 4. Synchyfis, c’eft lorfque tout l’ordre de la conf: truétion eft confondu, comme dans ce vers de Vir- gile, que nous avons déjà cité. Aret ager ; vitio , moriens , [tit , aëris , herba. Etencore . | Saxa, vocant TIrali, mediis que in fluilibus, aras. c'eft-à- dire, Jrali vocant aras illa faxa que funt in mnediis flutibus, Il n’eft que trop aifé de trouver des exemples de cette figure, Au refte , fyrchyffs eft pu- rement grec, ouyyuoi, & figmifie confufion, cuyxco, confundo, Faber dit que Jynchyfis eff ordo ditlionum confuftor | & que Donat l'appelle kyperbate : en voici encore un exemple tiré d'Horace, Z. Jar, 5, y, 49, FIG 769 Namque pilé Hippis inimicum © ludere érndis. l'ordre eft /udere pilà eff. inimicum lippis & crudis , « le jeu de paume eft contraire à ceux qui ont mal » aux Yeux, &c à ceux qui ont mal à l’eftomac ». Voiciune cinquiemeforte d’hyperbate, qu'on ap- pelle aracholurhon, draxoawSw, quand ce qui fuit n'eftpas lié avec ce qui précede ; c’eft plûtôt un vice, dit Erafme, qu'une figure : vitium orationis quando nor redditur quod fuperioribus refpondeat, 1] doit y avoir entre.les parties d’une période , une certaine fuite & un certain rapport grammatical qui eft néceflaire pour la netteré du ftyle, & une certaine correfpon- dance que l’efprit duleéteur attend, comme entre 04 ÔT quor,, rantum & quantum , tel & quel > {UOIqRE ; Ce Pendant, 8tc. Quand ce rapport ne {e trouve point, c’eft un anacoluthon ; en voici deux exemples tirés de Virpgile, | Sed ramen idem olim curru fuccedere fueri. Æn. Z, LIL, y: 1414 C’eft un anacoluthon, dit Servius; car ramen n’eft pas précédé de guamqudm :'anacoluthon , nam quam- quam non premier ; & au L, IT. v. 331, ontrouve quoë fans cor, | Millia quot magnis nunquam venere Mycœnis. ce qui fait dire encore à Servius que c’eft un anaco- luthon, & qu'il faut fuppléer or, rot millia. Ce mot vient 1°, d’axeaoudoc, comes, dx6xauSor » conféétarium , qui fuit, qui accompagne, quieft appa- rié; 2°, à aronudoy On ajoûte le privatif, fuivi dus euphonique, qui n’eft que pour empêcher le bâille- ment entre les deux 4 ,« axoroudec, comme nous ajoû= tons le £ entre dira-on, dira-t-on. . Voici deux autres figures qui n’en méritent pas le nom, mais que nous croyons devoir expliquer, par- ce que les Commentateurs & les Grammairiens en font fouvent mention: par exemple, lorfque Virgile fait dire à Didon wrbem quam flatuo vefira ef, 1, Æn. y. 573. les Commentateurs difent que cela eft un exemple inconteftable de la figure qu’ils appellent 47: ciptofe, du grec, avr}, pro, qui entre en compoñition, de loss, cafus ; enforte que c’eft-là un cas pour un autre: Virgile, difentils, a dit vrbem pour zrbs par antiptofe; c’eftune ancienne feure, dit Servius ; c’eft ainfi, ajoûte-t-il , que Caton a dit agrum, quem vir habes tollitur ; agrum au lieu d’ager; & Terence : eunuchum quem dedifii nobis quas turbas dedir, où eu nuchum eft vifiblement au lieu d’ezzuchus. Terent, Eun. ad, IV, fc. ui. v. 11. Les jeunes gens qui apprennent le latin, ne de- vroient pas ignorer cette belle feure ; elle feroït pour eux d’une grande reflource. Quand on les blâmeroit d’avoir mis un cas pour un autre, l'autorité de Def. pautere qui dit que azipcofes ft per omnes cafus, & qui en cite des exemples dans fa Syntaxe, p. 221, cette autorité, dis-je, {eroit pour eux une excufe fans replique. Mais qui ne voit que fi ces changemens avoient été permis arbitrairement aux anciens, toutes les re- gles de la Grammaire feroient devenues inutiles? 7: la methode latine de P, R, page 562, Cet pourquoi les Grammairiens analopiftes , qui font ufage de leurraifon, rejettent l’antiptofe , & ex- pliquent plus raifonnablement les exemples qu’onen donne : ainfi à l’égard de eunuchum quem dedifhi, &cc. il faut fuppléer, dit Donat, is eunuchus ; Pythias a dit eunuchum quem, parce qu'elle avoit dans l’efprit dedifft eunuchum ;enim ad dedifs verbum retulir, dit Do- nat. Il ya deux propofitions dans tous ces exemples; il doit donc y avoir deux nominatifs : fi l’un n’eft pas exprimé , 1l faut le fuppléer , parce qu'il eft réelle. ment dans le fens ; & puifqu'il n’eft pas dans la phra- fe, il faut le tirer du dehors, dit Donat, affumendun extrinfecus, pour faire la conftruétion pleine : ainfi 77 RG dans les exemples ci-deflus, l’ordre. eft Lec wrbs, qua urbem flatuo, eff veftra. Île ager , quem agrum vir häbet, collitur, Ille eunuchuss quemn eunuchum dedifii robis, quas turbas dedit, I eneft de même de l’exem- ple tiré du prologue de l’Andrienne de Térence, po- pulo ut placerent quas feciffet fabulas, la conftruétion eft ut fabule, quas fabulas feciffet, placerent populo. Ce qui fait bien voir la vérité & la fécondité du principe que nous avons établi 44 mos CONSTRUC- TION, qu'il fauttotjours réduire à la forme de la pro- poñtion toutes les phrafes particulières & tous les membres d’une période, L'autre figure dont les Grammairiens font mention avec aufñ peu de raifon, c’eft l’énallage, éaañæyr, permuratio. Le fimple changement des cas eft une an- tiptofe ; mais s’il y a un mode pour un autre mode qui devoit y être felon l’analogie de la langue, s'il y à un tems pour un autre , Où un genre pour un au- tre genre, ou enfin s’il arrive à un mot quelque chan- gement qui paroïfle contraire aux regles communes, c’eft un énallage; par exemple, dans l’Eunuque de Térence, Thrafon qui venoit de faire un préfent à Thaïs, dit, 7agnas verd agere gratias T'haïs mihi, c’eit- 1à une énallage , difent les Commentateurs, agere eft pour agir; mais en ces occafñons on peut aifément faire la conftruétion felon lanalogie ordinaire, en fuppléant quelque verbe au mode fini, comme Thais cibi vifa eff agère , &c. où cæpit, où non ceffar. Cette façon de parler par l’infinitif, met l’aétion devant les yeux dans toute fon étendne, & en marque la Con- tinuité ; le mode fini eft plus momentane : c’eft auffi çe que la Fontaine, dans la fable des deux rats, dit: Le bruit ceffe ; one retire, Raïs en campagne auffi-161, Et Le citadin de dire, Achevons tout notre rôb, t’eft comme s’il y avoit, 64e citadin ne ceffois de dire, fe mit à dire, &c. ou pour parler grammaticalement, Le citadin fit l’aition de dire, Et dans la premiere fable du Zv. FLIL. ul dit : Ainfi, dit le Renard, € flatteurs d'applaudir. la conftruétion eft Les flatreurs ne ceflerent d’applau- dir, les flatteurs firent l’atlion d’applaudir. On doit regarder ces locutions comme autant d’i: diotifmes confacrés par l’ufage; ce font des façons de parler de la confiruétion ufuèle & élégante, mais que l’on peut réduire par imitation & par analogie à la forme de la conftrution commune, au lieu de re- courir à de prétendues figures contraires à tous les principes. | | Au refte, l’inattention des copiftes, & fouvent la négligence des auteurs mème, qui s'endorment quel- quefois, comme on le dit d'Homere, apportent des difficultés que l’on feroit mieux de reconnoître com- me autant de fautes, plütôt que de vouloir y trou- ver une régularité qui n’y eft pas. La prévention voit lés chofes comme elle voudroit qu’elles fuflent ; mais la raifon ne les voit que telles qu’elles font. Il y a des figures de mots qu’on appelle sropes, à caufe du changement qui arrive alors à la figmifica- tion propre du mot; car srope vient du grec, speri, converfio, changement ,transformation; vpsa, Verto, In tropo ef? native fignificationis commutatio, dit Mar- tinius : ainfi toutes les fois qu’on donne à un mot un fens différent de celui pour lequel 1l a été premiere- ment établi, c’eftun trope. Ces écarts de la premiere fignification du mot fe font en bien des manieres diffé- rentes, auxquelles les Rhéteurs ont donné des noms particuliers, Il y à un grand nombre de ces noms dont il eft mutile de charger la mémoire; c’eft ici une des occafions où l’on peut dire que le nomine fait rien à la chofe : mais il faut du moins connoître que d'expreffion eft figurée ; & en quoi elle eft figurce : par exemple, quand le duc d'Anjou; petit-fils de Louis XIV. fut appellé à lacouronne d’Efpagne,le roi dit, i/7°y a plus de Pyrénées ; petfonne ne prit ce mot à la lettre &c dans le fens propré : on ne crut point que le roi eùt voulu dire que les Pyrénées avoient été abyfmées ou anéanties ; tout le monde entendit le fens figuré, 27 7°y à plus de Pyrénées, c’eft-à-dire ; plus de féparation, plus de divifions, plus de guerre en- tre la France 6 l'Efpagne ; on fe contenta de faïfir le fens de ces paroles; mais les perfonnes inftruites y reconnurent une métaphore. Les principaux tropes dont on entend fouvent par: ler, font la métaphore, lallésorie, lallufion , l'iro- nie, le farcafme, qui eft une raillerie piquante & amere , #rrifio amarulenta, dit Robertfon ; la catachrè- fe , abus, extenfon ou imitation, comme quand on dit férré d'argent, aller à cheval fur un bdton; Yhyper- bole, la fynecdoque, la métonymie, l’euphémifme qui eft fort en ufage parmi les honnêtes gens, &c qui confifte à déguifer des 1dées defagréables , odieufes, triftes ou peu honnêtes, fous des termes plus conve- nables & plus décens. L’ironie eft un trope ; car puif- que l'ironie fait entendre le contraire de ce qu’on dit , il eft évident que les mots dont on fe fert dars l'ironie, ne font pas pris dans le fens propre & pri= mitif, Ainfi, quand Boileau, faryre IX. dit Je le déclare donc, Quinault ef} un Virgile, il vouloit faire entendre précifément le contraires Ontrouvera en fa place dans ce Diétionnaire, le nom de chaque trope particulier, avec une explication fufifante. Nous renvoyons aufli ax mot TROPE, pour parler de l’origine, de l’ufage & de l’abus des tropes. Il ya une derniere forte de figures de mots, qu'il ne faut point confondre avec celles dont nous ve- nons de parler; les fowres dont il s’agit ne font point des tropes , puifque les mots y confervent leur fieni- fication propre. Ce ne font point des figures de pen- fées , puifque ce n’eft que des mots qu’ellestirent ce qu’elles font; par exemple, dans la répétition ,lemot fe prend dans fa fignification ordinaire; mais fi vous ne répetez pas le mot, il n’y a plus de figure qu'on puifle appeller répétition. Il y a plufieurs fortes de répétitions auxquelles les Rhéteurs ont-pris la peine de donner aflez inuti- lement des noms particuliers. Ils appellent ermax, lorfque le mot eft répété, pour pafler comme par de- grés d’une idée à une autre : cette figure eft resardée comme une figure de mots, à caufe de la répétition des mots, & on la regarde comme une figure de pen- fée, lorfqw'on s’éleve d’une penfée à une-autre: par exemple , aux diféours il ajoëtoir les prieres, aux prie- res les foñmiffions , aux foñmiffions Les promefles , &c. La fynonymie eft un aflemblage de mots qui ont une fignification à-peu-près femblable , comme ces quatre mots de la feconde Catilinaire de Ciceron: abiit, exceffit, evafit, erupit ; « 1l s’eft en allé, il s’eft » retiré, 1l s'eft évadé , il a difpatu ». Voici quelques autres figures de mots. L’onomatopée, crouxromoiæ, C’eft la transforma- tion d’un mot qui exprime le {on de la chofe ; dvoua, nomen , & moto, facio ; C'eft une imitation du fon na turel de ce que le môt fignifie, comme le p/oug/ou dé la bouteille, & en latin Éi/bre, bilbir amphora ,la bou- teille fait glouglou ; tinnitus œris, letintement des mé- taux , le cliquetis des armes, des épées; le tridtrac , qu’on appelloit autrefois fac, forte de jeu ainfi nom- mé, du bruit que font les dames & les dès dont on fe fert. Taratantara, le bruit de la trompette, ce mot fe trouve dans un ancien vers d’Ennius, que Servius a rapporté: At tuba terribili fonitt taratantara dixir. Voyez Sérvius fur le 503, vers du IX, livre de l'ÉA FIG néide. Boubari , aboyer, fe dit des:gros chiens ; ”u- tire, fe dit des chiens qui grondent, #14 canur ef? un- de mutire, dit Chorifius. | Les noms dé plufieurs animaux font tirés de leur cfi; «papa, une hupe ; cuculus , qu'on prononçoit coucoulous , un coucou, Oifeau ; kirundo, une hiron- delle; /ula, une chouette ; éubo, un hibou ; gracu- lus , une efpece particuliere de corneille. Paranomafie, reflemblance que les mots ont en- tr'eux; c’eftune efpece de jeu de mots : arantes funt amentes, les amans font infenfés. La figure n’eft que dans le latin, comme dans cet autre exemple, cz leélum petis de letho cogita,« penfez à la mort quand »# vous entrez dans votre lit ». Les jeunes gens aiment ces fortes de Jigures ; mais il faut fe reflouvenir de ce que Moliere en dit dans le Mifantrope. Ce flyle figuré dont on fait vanité, Sort du bon caraïtere & de la vérité, Ce n'eff que jeux de mots , qu'affeitation pure , Er ce n'eft point ainft que parle la nature. Voici deux autres ffgures qui ont du rapport à celles dont nous venons de parler: une s’appelle fémiliter cadens, c’eft quand Les différens membres ouincifes d’une période finiffent par des cas ou par des tems dont la términaifon eft femblable. L'autre figure qu'on appelle fémiliter definens , n’eft différente de la précédente, que parce qu'il ne s’y agit ni d’une reflemblance de cas ou de tems : mais il fuffit que les membres ou incifes ayent une défi- nance femblable, comme facere fortirer, 6 vivere tur- piter. On trouve un grand nombre d’exemples de ces deux figures : ubi amatur, non laboratur, dit S. Au- guftin ; « quand le goût y eft, il n’y a plus de pei- » TE 5e Ilya encore l’ifocolon , c’eft-à- dire l'égalité dans les membres ou dans les incifes d’une période : ce mot vient de vo, égal, & nono, membre; lorfque les différens membres d’une période ont un nombre de fyllabes à-peu-près égal. Enfin obfervons ce qu'on appelle polyfyndeton, monuruyd eror, de monde, muUleUS, cv, CU, &T cet, l190s lorfque les membres ou incifes d’une période font joints enfemble par la même conjonétion répétée : ni les careffes , ni les menaces ; ni les fupplices , n1 les recompenfes, rien ne le fera changer de fentimens. Il eft évident qu'il nya en ces ffgéres, n1 tropes ni figures de penfées. ; Il nous refte à parler des figures de penfées ou de difcours que les maîtres de l’art appellent figures de Jertences, figure fententiarum, fchemata ; cyñux, for- me, habit , habitude, attitude ; sxtw, habeo, 8&T tx0, plus ufité. Elles confiftent dans lapenfée , dans le fentiment, dans le tour d’efprit; enforte que l’on conferve la f- gure, quelles que foient les paroles dont on fe fert pour l’exprimer. ati Les figures ow expreflions fisurées ont chacune tüne forme particuhiere qui leur eftpropre:, & quiles diftingue les unes des autres; par exemplel’antithèfe eft diftinguée des autres manieres de parler, en ce que les mots qui forment l’antithèfe ont une fignifi= cation oppofce l’une à l’autre, comme quand S: Paul dit : « on nous maudit , 8 nous béniflons;: on nous » perfécute, 8 nous fouffrons la perfécution ; on » prononce des blafphèmes contre nous, &c nous ré- » pondons par des prieres#. f, cor. c, jy. v.sr2t 4 Jefus-Chrift s’eft fait fils de l’homme , dit: S:Cy- » prien, pour nous faire ‘enfans de Dieu; il a été > bleffé pour guérir nos plaies! ils’eft fait efclave , » pour nous rendre libres; ileftimort pour nousfai- » re vivre »: Ainfi quand on!trouve des exemples de ces fortes d’oppoñtions ;oniles rapporte à l’antithèfe, pre & la périphrafe. FIG 771 L’apoftrophe eft différente des autres figures : parce que ce n'eft que dans l’apoftrophe qu’on adrefle tout- d’un-coup la parole à quelque perfonne préfente ou abfente : ce n’eft que dans la profopopée que l’on fait parler les morts, les abfens, ou les êtres inanimés. Il en eft de même des autres fgwres ; elles ont chacune leur caraétere particulier, qui les diftingue des au- tres aflemblages de mots. Les Grammairiens & les Rhéteurs ont fait des claffes particulieres de ces différentes manieres, & ont donné le nom de fgwre de penfées à celles qui énoncent les penfées fous une forme particuliere qui les difingue les unes des autres, & de tout ce qui n'eft que phrafe ou expreffion. Nous ne pouvons que recueillir ici les noms des principales de ces figures , nous refervant de parler en fon lieu de chacune en particulier : nous avons déjà fait mention de l’antithèfe, de l’apofttophe, & de la profopopée. L’exclamation ; c’eft ainfi que S. Paul, après avoir parlé defes foibleffes, s’écrie: Malheureux que je fuis, qui me délivrera de ce corps mortel ? Ad Rom. cap. vi. L’épiphoneme ou fentence courte , par laquelle on conclut un raifonnement. La defcription des perfonnes, du lieu, du tems. L'interrogation , qui confifte à s'interroger {oi- même & à fe répondre. La communication, quand l’orateur expofe ami- calement fes raifons à fes propres adverfaires ; il en délibere avec eux, il les prend pour juges , pour leur faire mieux fentir qu’ils ont tort. L’énumération ou diftribution, qui confifte à par- courir en détail divers états, diverfes circonftances & diverfes parties. On doit éviter les minuties dans l’'énumération. | La conceflion , par laquelle on accorde quelque chofe pour en tirer avantage : Vous étes riche , fervez- vous de vos richeffes ; mais faites-en de bonnes œuvres. La gradation , lorfqu’on s’éleve comme par de- grés de penfées en penfées, qui vont toujours en augmentant : nous en avons fait mention en parlant du climax, #AjuaË, échelle , degré. La fufpenfñon, qui confifte à faire attendre une penfée qui furprend. | Il y a une fgure qu’on appelle congeries , aflembla- ge; élle confifte à raffembler plufñeurs penfées & plufieurs raïfonnemens ferrés. La réticence confifte à pañler fous filence des pen- fées que l’on fait mieux connoître par cefilence , que fi on en parloit ouvertement. L'interrogation, qui confifte à faire quelques de- mandes , qui donnent enfuite lieu d’y répondre avec plus de force. L'interruption , par laquelle l’orateur interrompt tout-à-conp fon difcours , pour entrer dans quelque mouvement pathétique placé à-propos. : Il y'a une fure qu'on appelle opsatio , fouhaït; on s’y exprime ordinairement par ces paroles : Ma, plér a Dieu que, &cc. Faffe le ciel! Pare 4 L’obfécration, par laquelle on conjure fes audi teurs au nom de leurs plus chets intérêts. : La périphrafe , qui confifte à donner A une penfée, en l’éxprimant par plufieurs mots, plus de grace & plus dé force qu’elle-n’en auroit fi on l’énoñçoit fime plement.en un feul mot. Les idées accefloires que l’on fubftitue au mot propre , font moins {eches & occupent l'imagination. C’eft le goût, ce font les circonftances qui doivent décider entre de mot pro= L’hyperbole eft une exagération ,foit enangmen: tânt.Où en diminuant. - 4-1 TE On met auffi au nombre des figures l'admiration & les fentences ,.& quelques autres faciles à reémar- quer, | | 5 ot 72 FIG Les figures rendent le difcours plus infinuant, plus agréable, plus vif, plus énergique, plus pathétique ; mais elles doivent être rares & bien amenées. Il faut laïfler aux écoliers à faire des figures de commande. Les figures ne doivent être que l’effet du fentiment & des mouvemens naturels, & l’art n’y doit point pa- roitre. Voyez ELOCUTION. Quand on a cultive un heureux naturel, & qu’on s’eft rempli-de bons modeles, on fent ce qui eit dé- cent, ce qui eft à-propos, & ce que le bon 1ens adop- te ou rejette. C’eft en ce point, dit Horace, que con- fie Part d'écrire ; c’eft du bon fens que les ouvrages d’efprit doivent tirer tout leur prix. En effet pour bien écrire, 1l faut d’abord un fens droit: Scribendi recfè , fapere ef? principinm 6 fons. Hor. de arte port, y. 309. Rs ren lions al raie * De tous ces traits brillans l'éclatante fole : Tout doit tendre au bon fens . . dit Boileau. Les honnêtes gens font bleflés des figures affeêtées. Offenduntur enimquibus eff equus 6 pater 6 res ; Nec ft quid friëli ciceris probat , aut nucis emtor Æquis acciplunt animis , donant ve corond. Hor. de arte poet. v. 248. Aimez donc la raifon, ajoûte Boïlean ; gue co4- JOurs VOS ÉCTLES Eïnpruntent d'elle feule & leur lufire & leur prix. Figure eft aufi un terme de Logique. Pour bien entendre ce mot, il faut fe rappeller que tout fyllo- gifme régulier ef compoié de trois termes. Faïfons connoître par un exemple ce qu’on entend ici par zerme. Suppofons qu'il s'agifle de prouver cette pro- poñtion, wz atome ef? divifsble ; voilà déjà deux ter- mes qui font la matiere du jugement, l’un eft fujet, l’autre eft attribut : asome eft appellé le peric cerme, parce qu'il eft le moins comme je l'ai déjà dit, Il fe joint à l’os du front par le petit añgle de l’œil : il s’avance un peu en-dehors > pour former la partie la plus élevée de la joue, a future coronale, à future fagittale. € fature qui joint l'os des temples avec l'os caro? nal&x le finciput, d dents de devant, appellées éncifives. e dents latérales, appellées canines. f dents poftérieures , appellées #o/aires, Je n'ai point parlé de l'os occipital qui forme le derriere de la tête; parce qu’excepté dans l'enfance & dans la vieilleffe , il eft ordinairement orné & cou- vert par la chevelure , qui commence au haut du front & qui s'étend le-long des oreilles, jufqu’à la premiere vertebre du cou. La feconde partie du fquelette de l’homme eft le tronc ; 1l eft compofé de l’épine du dos, des côtes, des clavicules , du fternum, de lomoplate, & du baïfin ou des os innominés. Deux figures de fquelette , l’une vûe de face , & l’autre par derriere, font fuffifantes pour donnerune idée de la forme & de la place de ces os. Les lettres font communes aux deux fgures. Fig. 1 6 2 du fquelette. À eft ce qu’on appelle lépire du dos ; c’eftune colonne d’os diférens qui font arti- culés les uns avec les autres, & attachés mutuelle- ment par des cartilages , dont les uns font flexibles, les autres immobiles ; cette chaîne ou colonne d’os s'étend depuis la premiere vertebre du cou jufqu’au coccyx, & les charnieres de chaque vertebre pro= curent le mouvement du dos en différens fens. Il ya 24 Vertebres,dont les nomsferoient hors d’œuvreici. Pour la forme de l’épine du dos | comme elle inté- refle le peintre , pu‘{qu’elle forme les pieces princi- pales de la charpente du corps, je remarquerai que la partie des vertebres du cou avance en-dedans, c’elt-à-dire vers le devant delatête; celle du dosau contraire fe courbe en-dehors pour élargir la cavité de la poitrine ; celle des lombes rentre , & la dernie- re qui eft celle de l'os facrum, fe rejette encore en- dehors. Deux parties de ces os font fur-tout apparen- tes au-travers de la peau, celle du dos & celle des lombes. Ce qui oblige, en deffinant le nud, d’en faire fentir la forme, fur-tout dans les attitudes où l’hom- me fe courbe en avant , comme on le voit dans la fe gure 2 du fquelette. B, les deux clavicules, font deux os qui fe décou- vrent fenfiblement dans les hommes, fur-tout dans certains mouvemens , comme d'étendre les bras, de fe courber en arriere, &c. Ils ont à-peu-près la for- me de la lettre S ; ils font placés du côté de la face à la bafe du cou. Chacune des clavicules s'articule avec le fternum par devant, & du côté des bras avec l’omoplate. C, le fternum, eff fitué au milieu de la poitrine: cet os eft toïjours immédiatement vers la peau ; il n’eft FFfffi 776 FIG point couvert de chair , delà vient-que l'on y voit le bout des côtes qui y font appuyées, à moins que la graifle n’en empêche, comme il arrive aux fem- mes, & quelquefois aux jeunes hommes. D, l'épaule ou lomoplate, eft d’une configuration aflez compliquée, dont il faut bien connoïtreles par- ties , fi l'on veut comprendre le jeu des mufcles qui ont rapport au mouvement des bras , parce que la plüpart de ces mufcles y prenent leur origine : cet os d’arlleurs eft apparent dans un grand nombre de mouvemens ; fa forme irrévuliere eft aflez fembla- ble à celle d’un triangle fcalene ; fa furface externe eft tant foit peu convexe. Voici les principales par- ties : | a. la bafe qui regarde lépine du dos, B la côteinférieure. c la côte fupérieure. d l’angle fupérieur. e l’angle inférieur. f la partie cave ou intérieure, inutile au peintre. g la partie extérieure. h l’épine. z l’extrémté de l’épine , appellée acromion. Il y a douze côtes de chaque côté; elles font mar- quées dans la figure premiere, 1,2,3,4,5,6,7, 8,9,10, 11, 12: elles font courbes 87 à-peu-près femblables à des fegmens de cercle.; elles tiennent aux vertebres par une de leurs extrémités : les unes au nombre de fept, s'appellent vraies, & s’articu- lent avec le fternum; les cinq autres qui fuivent ces premieres, & qui ont le nom de fauffes côtes , ne tou chent point au flernum , mais à un cartilage mobile qui prête dans plufeurs mouvemens du corps ; ce qui doit faire paroitre extérieurement cet endroit moins. foûtenu & moins faillant. La bafe du tronc eft compofée de deux grands os qui fe réuniffent dans les adultes, & n’en font qu’un : ils fe nomment /es-os innomines, On y diflingue trois parties, \ E la partie fupérieure des os innominés , formée par l'os des ifles. Fla partie inférieure & antérieure , compofée des os pubis. : 0 G la troifñieme qui eft inférieure auffi , mais pofté- rieure,, fe nomme #/chium : cet o$ a une grande ca- vité qui reçoitila tête du fémur. La bafe du tronc, dont les os font plus remarqua- bles dans les hommes, defline la forme des hanches ; &c fa ftru@ure plus évafée dans les femmes, occa- «fionne des apparences qu'il faut étudier avec foin, parce qu’elles contribuent principalement à diftin- guer le caraétere différent de la figure dans l’un & l’autre fexe. Voilà les deux premieres divifions du fquelette : la derniere comprend les extrémités fupérieures & les extrémités inférieures ; dans les fupérieures, Æ7, : l'os du bras, s’appelle Aumerus: il porte à fa plus hau- teextrémité une tête ronde , qui eff reçüe dans la cavité plate du cou de l’omoplate ; l'extrémité infé- rieure.a denx apophyfesou protubérances, T1, Vos ducoude , eft accompagné d’un autre X appellé radiusiou rayon, qui eft plus gros par en bas que l’os du coude, tandis que celui-ci le furpaffe en rofleur dans la partie fupérieure : l’os du coude fert à fléchur & étendre le bras; le rayon fert à tour- ner la main, & ces deux os.enfemble s’appellent lPavant-bras. À leur extrémité inférieure fettrouvent huit offe- lets de différente figure & orofleur , fitués en deux rangs de quatre chacun ; le premier rang s'articule avec le radins, êc forme le carpe L; le 29 rang s’arti- culeavec le premier, & forme le métacarpe M: celui- ci eft comme le carpe, ileft compofé de quatre osqui gépondent aux quatre doigts N; les doigts avec le FIG pouce font formés de quinze os , dans chaque main; trois à chaque doigt nommés phalanges ; ils font un peu convexes & ronds vers le dos de la main ; mais ils font creux &c unis en-dedans. Les extrémités inférieures offrent premierement los fémur .O ou l'os de la cuiffe ; il eftle plus long de tous les os de notre corps ; fa partie antérieure eft convexe &ronde, & {a partie poftérieure un'peu creufe, L’extrémité fupérieure de cet os a trois apophy- fes. La premiere qui forme fon extrémité, eftune grof. fe tête ronde couverte d’un cartilage, qui eft recüe dans la cavité de l’ifchium, où elle eft attachée. La feconde fe nomme le grandtrochanter ; c’eft une éminence aflez grofle , fituée à la furface externe du fémur, précifément à l'extrémité du cou : elle eftiné- gale , parce qu’elle fert d’infertion à quelques muf cles. | La troifieme s'appelle le perit trochanter ; il eft f- tué dans la patie poftérieure du fémur; il eft un peu plus bas & plus petit que l’autre. L'extrémité inférieure du fémur fe divife par le milieu en deux éminences, l’une éft externe & l’au- tre interne ; elles font recües dans les cavités fuper. ficielles du tibia; & l’efpace qui fépare les parties paf térieures , donne pañlage aux nerfs de la jambe, Le genou-porteun osrond appellé rose ; il eft large en- viron de deux pouces, aflezépais, un peu convexe, couvert dans fa partie antérieure d’un cartilagepoli, & dont l'apparence extérieure eft plus marquée dans les hommes que dans les femmes , & dans les vieil- lards que dans les enfans ; dans l'enfance il eft mow, &c il acquiert une dureté d’autant plus grande qu’on avance plus'en âpe. La jambe eft compofée de deux os, ainfi que l’a- vant-bras; linterne qui eft le plus gros fe nomme le cibia P ; 1l eft'preique triangulaire, 8 fon angle an- térieur & un peu aigu, fe nomme la crére du tibia. Cette partie eft très-apparente,, & c’eft elle qui for- me le trait de la jambe , vüede profil : fon extrémité inférieure , qui eft beaucoup plus petite que la fu- périeure , a une apophyfe remarquable qui forme la cheville interne du pié. Le fecond os plus petit fe nomme le peroné Q ; ïl eft fitué dans le côté extérieur de la jambe, & {on extrémité fupérieure, qui n’eft pas fi élevée que le genoû , reçoit l'éminence latérale de lPextrémité fu- périeure du tibia , dansune petite cavité qu’il a dans le côté interne : {on extrémité inférieure eft recûe dans la petite cavité du tibia , où il a une grande apo- phyfe qui forme la cheville externe, Le tibia & le pe. roné ne fe touchent qu’à leurs extrémités. Le pié ainfi que la main , eft compofé de trois par- ties qu'on nomme le sarfe R, Sle métatarfe, 8 T'les doigts, Le tarfe eft compoié de fept os; Le premier eft 1 l’aftragale ou le talon ; Le fecond os du tarfe eft 2 le calcaneum, dont l’apophyfe forme ce que nous appellons le s4/0n, auquel s’infere le tendon d’Achi- le ; les cinq autres os du tarfe font le fcaphoïde, les trois cunéitormes , & le cuboide : tous ces os , plus ou moins intéreffans pour le peintre, fuivant la part qu'ils ont aux monvemens & aux apparences exté- rieures , fe joignent au métatarfe qui eft compofé de cinq os ; celui qui foûtient le gros doigt eft le plus gros ; celui qui foûtient le doigt fnivant eft le plus long ; les autres font tous plus petits l’un que l’autre, Ils font plus longs que les os du métacarpe : quant au refle , ils reflemblent à ceux du métacarpe, & ils font articulés de la même maniere, Enfin les doists du pié font compofés de quatorze os dans chaque pié : le gros doigt en à deux, & les autres trois ; 1ls font la même chofe que les doigtsde . la main, & font {eulement plus courts. Voilà une idée fuccin@e des os du fquelette, dont la conformation doit être connue du peintre. Je vais en faire une récapitulation en forme de lifte avec les lettres qui ont rapport aux fgures. Premiere figure de La rére. Æ. los du front, a la future du coronal. B la future fagittale, B ‘orbite ou cavité des yeux. ‘€ les os du nez. D. les os des joues. Æ la mâchoire fupérieure. F la:mâchoire inférieure. G les dents. Seconde figure de la tête, Æ os du finciput. 8. l'os temporal, € le zigoma. « future coronale. & future fagittale. € future qui joint l'os des temples avec le coronal & le finciput. d les dents de devant, nommées inciffves. ‘ e les dents latérales , appellées canines. f les dents poftérieures', appellées rofaires, Premiere & feconde figure du fquelette, Æ Vépine du dos, | B les clavicules, - € le flernum. D lomoplate. : a la bafe de l’omoplate, bla côte inférieure. c la côte fupérieure. d Vangle fupérieur. e l’angle inférieur. f la partie cave, g la partie extérieure, hk l’épine. à l’acromion, ÆE l'os des ifles. F l'os pubis. G l'os ifchinm. Æ l’humérus. I los du coude. X le radius. L le carpe. M le métacarpe, N les-doigts. O le fémur. | P le tibia. Ù Q le:peroné. R le tarfe. S$ le métatarfe. T les doists, 1 l’aftragale. 2 le calcaneum. Les côtes 1,2,3,45 556,7, 8,9,10,17,12. C’eft moins, comme je l’ai déjà dit, la ftruêture intérieure de tous ces os } ou même leur nom, qu’il eft eflentiel au peintre de connoître. Les formes ex- térieures, celles de leurs extrémités fur-tout, qui compofent les jointures, doiventêtre l’objeteflentiel de leurs recherches. Ils ne doivent point ignorer les différens moyens par lefquels la nature prévoyante a préparé les articulations desmembres, pour leurpro- curer précifément les mouvemens qui conviennent à leur deflination. Cès monvemens, en fé dévelop- pant, laiffent fouvent entrevoir la figure de l’extré- | mité des o$, parce que les jointures font toûjours moins chargées des parties charnues qui embarrafle- ! roientlejeu qu’elles doivent avoir, & que larpeauplus ! FIG 777 tendné recoit l’imprefion des charnieres qui fe meu- vent fous cette enveloppe. Si l'étude des os eft né ceflaire par les raifons que je viens d’expofer, & fi elle doit paffer la premiere, on fentira aifément que la connoïflance des mufcles, par ces mêmes raifons, doit la fuivre immédiatement , & qu'il eft abfurde de la négliger. Mais pour rendre plus facile l'explication que je vais donner , & la tourner totalement À l'utilité des Artiftes , J'ai empioyé un nombre de figures, dont je vais expliquer l’ufage. Les trois premieres repréfen- tent ce qu'on appelle en terme de Peinture l’écor- ché, c'eft-à- dire la foure humaine dépouillée de fa Peau, &c offrant aux yeux les différens mufcles plus diftinéts & plus apparens que lorfqw'ils font voilés, Pour ainfi dire, par les parties qui les couvrent dans le modele vivant : cet écorché eft fuppoté vû fous trois afpeéts différens ; de face par-dévant, figure pre- nuere ; par-derriere, fgure feconde ; & de profil , j£- guretroïfieme, Les explications des mufcles &les let- tres qui les accompagnent, ont rapport premiere= ment à ces trois foures ; mais enfuite ces mêmes let- tres fe peuvent rapporter aux ffgures antiques deffi- nées anatomiquement , qui fuivent, comme je vais le dire. On a repréfenté la fgure de l’'Hercule, qu'on nom- me Hercule Farnefe | dépouillée de fa peau, & vüe {ous trois afpeëts femblables À ceux fous lefquels eft gravé l’écorché, c’eftA-dire par-devant, par-derrie- re , & de profil, fig. 4. 5, 6 6. Le gladiateur , ftatue connue & celebre de même fg. 7. 8. & 9. Enfin le Laocoon pareillement > fS. 10,11. & 12, Les’ applications des mufcles de l’écorché fe feront facilementdes unes aux autres, & donneront une idée des changemens d'apparence que les attitudes ou les paflions occafonnenr. Cette idée approfondie parles Artiftes fur les ftatues originales, ou fur les copies en plâtre qu’on enafaites en les moulant, & qu’on a muls pliées à leur gré , leur feront trouver les principes , qu'ils doivent fe former , pour fe conduire plus fü- rement dans l'exercice de leur art. S'ils joignent Pap- plication de ces obfervations & de ces principes aux modeles vivans dont ils fe fervent , ou aux mouve- mens qu'ils peuvent remarquer dans les hommes ; il eft évident qu’ilssauront pris les meilleurs moyens pour aflürer leurs connoiflances & faciliter leur fuc- cès. Avant d'entrer dans le détail des mufcles'dont les différentes apparences doïvent former aux yeux du peintre le cara@tere jufte des a@ions de la foure, il eft nécéflaire de dire ce qu’il doit entendre par le mot nufcle, Les mufcles font des mafles charnues compotées de fibres ; ils font les inftrumens principaux des mou- vemens du corps. Voyez MuscLes. I faut favoir encore que l'extrémité du mufcle qui s'attache à un point fixe fe nomme /a sére | le milieu s’appelleZe ventre, 8 {on tendon, ou fon autre extré- mité, fe nomme /+ quene du mufele. Les fibres char- nues compofent le corps, ou le ventre du mufcle , & les fibres tendineufes forment fes extrémités. L’aëtion du mufcle confifte dans la contraétion de fon ventre qui rapproche Îles extrémités lune de Vautre , & qui en faifant ainfi mouvoir la partie où le mufcle à fon infertion, doit par une élévation plus marquée dans fon milieu, donner extérieure ment aux membres qu'ils couvrent, des apparences différentes. Ainfi ces apparences font décidées dans chaque aétion, dans chaque attitude ; & par confé- quent rien n’eft arbitraire dans les formes qu'on doit leur donner. L’artifte doit donc principalement prendre garde au ventre ,ou milieu du mufcle, &c fe fouvenir que le mouvement du mufcle fuit toûjours l’ordre des fi 778 FIG bres qui vont-de l’origine à linfertion, 8 qu font comme-autant de filets. La face , par daquelle il feroitnéceflaire de com- mencer, a une infinité de mufcles dont les effets, plus fenfibles que leurs formes ne font apparentes, inférieut , & va Sinférét Ala partie luperieute 8e exs térieure de log du bras. L’abaiffeur propre e prend fon origiñie de la côté inférieure de l’omoplate, 8 va s’inférer à l'os du bras avec le très-large , avec lequel 1l ne fait qu'un même tendon ; fon nom indique {on ufage, qui eft d’abaiffer le bras, Autefte , ces 4 derniers mufcles, le deltoïde , fus-épineux, le fous-épineux, & l’abaiffeur propre, {ont d'autant plus à remarque pour les artiftes, que Cet endroit du corps eft un des plus difficiles à imi= ter avec juftefle. On peut , pour rapporter le jeu de ces mulcles aux effets extérieurs, le remarquer fur la nature rnême , dans les attitudes dans lefquelles ils agiflent ; où, fi l’on veut confultér lantique , le gladiateur offrira la jufte image de leurs mouvemens 5 mais Ce quiferoit infiniment utile aux jeunes éleves, ce feroit de leur démontrer cette partie du bras fu# l'écorche ; enfute de faire agir le modele vivant à en le faïfant pañler fucceffivement par tous les mou- vemens qui fe rencontrent , depuis l’abaiflement du bras jufqu’à l’aétion d’élevation où le gladiateur a été compofé : c’eft aïinf qu'une inftruétion graduée: & une application des principes aux effets , luivie des preuves tirées des antiques , qui ont la réputa= tion d’être les plus parfaits, donneroit infaillibles ment une connoiflance approfondie & raifonnée. Le très-large f vient de los facrum , de la tête fit. périeure de l’os desiles, de toutes les vertebres des lombes , & des 6 où 7 vertebres inférieures du dos; il pañle d’un côté, par-deflus l'angle inférieur de l’omoplate,où il s'attache en paflant, & va retrou- ver l’os du bras, en fe joignant avec l’abaifeur pro= pre. Il tire le bras en-arriète, & én-bas obliquement du côté de fon principe inférieur. Une portion de l’oblique externe #, dont il a été quefhon dans l'explication précédente à la lettre K2. Le brachial 4 que nous avons expliqué à la lettre G de Ia fig. précédente, , Une portion & l’origine du long fupinateut du ra: dius ë. Voyez la lettre K de l'explication précédente. L’extenfeur fupérieur du carpe k. Voyez la lettre o de explication précédente, Z l’extenfeur des doigts. m l’extenfeur du pouce, 2 lextenfeur inférieur du carpe. Tous ces mufcles portent dans leur nom l’expliças tion dé leurs ufages. o le flécfeur inférieur du carpe, voyez la lettre M de la premiere explication des mufcles. | ? portion d’un fléchiffeur des doigts. q &t r les extenfeurs du coude. Voyez la lettre ÆF de l’explication prémiere, J' Vos du coude appellé oZecrane, £ le grand feffier. Il vient de l’os facrum & de {x partie latérale & poftérieure de l'os des îles Il va s'inférer par fes filets obliques, quatre doigts au-def- Jous du grand trochanter : il couvre le petit feffier & une partie du moyen. Sur quoi il fautremarquer qu'il y a trois feflers, qui tous fervent à étendre la cuifle. Le premier s’appelle Ze grand feffier, à caufe de fon étendue défignée parles chiffres. r, 2,3, 4, 5. La différence des a@ions de ce mufcle fe peuvent remarquer fur le gladiateur & l’Hercule; on pourra les voir auffi fur PAntinoïs & le Méléagre antique. 4 portion du fecond feffier : ce fecond eft en par- tie caché fous le premier. 6 æ portion du membraneux. Foyez la lettre Q de la premiere explication. | 3 le vafte externe: voyez pareillement la lettre R de la premiere explication. z le biceps: voyez la lettre Z de la premiere ex- phcation. Û & le demi-nerveux, Ce mufcle vient du même \ ®- "80 FIG lieu que le biceps , il eft long & rond ; fon corps charnu va s’inférer au-dedans de la jambe, trois doigts au-deflous de l’articulation. a2 le demi-membraneux accompagne le précé- dent à fon origine & à fon infertion. 2 le grefle vient dela partie inférieure de los pu- bis. Il eft large & délié à fon origine ; il va s’inférer avec les deux précédens. Ces quatre mufcles poftérieurs dela cuifle, favoir, le biceps z, le demi-nerveux &, le demi membra- neux 42, le srefle 27, fléchiflent la jambe, & tous quatre ne font prefque qu’une mañle. c2 portiondutriceps : voyez lalettre F,explication premiere, d? portion du mufcle droit: voyez auff la lettre S de la premiere explication. e? portion du couturier: voyez la lettre T de la premiere explication. f: portion du crural. g2 lieu par où pañle le plus gros nerf de tout le corps, & la veine poplitique. h2 & i2 les gémeaux; l’un interne, marqué #7, l’autre externe, marqué z2; ils viennent des deuxté- tes inférieures de l’os de la cuifle, & vont avec le plantaire & le folaire compofer un même tendon appellé le sezdon d'Achille. Leur nom vient de leur forme femblable ; cependant celui qui eft interne defcend un peu plus bas que l’autre. Leur office eft d'étendre le pié. k2 le peronnier vient du haut & du milieu de l’os appellé peroné ; car il eft double d’origine &c d’infer- tion ; il s’en va fous le pié qu'il fert à étendre avec les gémeaux. Figure 3 de l’écorché. Je ne mettrai icique les ren- vois des chiffres de cette figure aux deux précéden- tes, à côté des noms &c des chitfres qui fervoient à la figure de l’écorché vüe de profil, parce qu'il eft aifé de fentir que les mufcles qui fe voyent {ous cet afpett, ont déjà paru en grande partie fous les deux autres. | figure 1. fig. 2. Le mafñftoide, portion du trapeze ; deltoide , portion du brachial, biceps, & 6 les extenfeurs du coude, l'union des deux extenfeurs, long fupinateur du radius, extenfeur fupérieur du carpe, 10 extenfeur des doigts, 11 extenfeur du petit doigt, 12 extenfeur inférieur du carpe, m 0 a b k 9 CON NA R LD D 1 Oh mnobot S 7 Ne az fléchiffeur inférieur du carpe, M 14 palmaire, N 15 extenfeur du pouce, P 7 16 rond pronateur du radius, T 37 fléchiffeur fupérieur du caïpe, L 18 fous-épineux, | d 39 abaïfleur propre, € 20 très-large, a 21 grand dentelé, I2 22 oblique externe, K2 23 peétoral, E 24 portion du couturier, 3F e? 25 membraneux, Q x 26 portion du droit, H? d? 27 vafte externe, R Y 28 biceps, Z z 29 demi-nerveux, (es 30 demi-membraneux, a” 31 grefle, . 7? 32 & 32 deux portions du triceps, } c? 33 © 34gémeaux externe &interne,£?B? 4? :7 FIG 35 los de la jambe, 36 portion du folaire, F? 37 portion du fléchifleur des orteils, 38 peronnier , C2 &? 39 extenfeur des orteils, DIR 40 & 41 malléoles internes &z externes 42 grand fefher, z 43 grand trochanter, 44 portion du fecond feffier, C3 Fin de l'explication de la troifeme figure de l'écorché, . La figure, après avoir dévoilé au peintre les prin- cipes de fa conformationintérieure par la démonttra- tion des os, après lui avoir découvert les reforts qui operent fes mouvemens, a le droit d'exiger de l’artifte qu'il dérobe aux yeux des fpeétateurs dans les ouvrages qu'il compole, une partie des fecrets qui viennent de lui être révélés. Une membrane fou- ple & fenfible qui voile & défend nos reflorts, eft l'enveloppe, tout à la fois néceflaire & agréable , qui adoucit l’effet des mufcles, & d’où naïffent les gra- Ces des mouvemens. Plus le fculpteur & le peintreau- ront profondement étudié l’intérieur de la figure plus 1ls doivent d'attention à ne pas fe parer indie cretement de leurs connoïffances; plus ils doivent de foin à imiter Padrefle que la nature employe À ca- cher fon méchanifme, L’extérieur de la figure eft un objet d'étude d'autant plus eflentiel à l’artifte, que c’eft par cette voie principalement qu'il prétend aux fuccès ; contours nobles &z mâles, fans être groffiers PRET D , : : ë jou exagérés, que notre imagination exige dans l’ima- ge des héros ; enfemble doux, flexible & plein de graces, qui nous plait & nous touche dans les fem- mes ; incertitude de formes dont l’imperfeétion fait les agrémens de l’enfance ; caratere délicat & fvel- te, qui, dans la jeunefle de l’un & de l’autre fexe , rend les articulations à-peu-près femblables, Voilà les apparences charmantes fous lefquelles la nature auf agréable qu’elle eft favante , cache ces os dont l’idée nous rappelle l’image de notre deftruétion, & ces mufcles dont les développemens & la complica- tion viennent peut-être d’effrayer le leéteur. Les attitudes que font prendre à la figure humaine fes befoins, fes fenfations, fes pafions & les mou- vemens involontaires qui l’agitent, diminuent ou augmentent les graces dont fa conftruétion la rend fufceptible. J’aurois pü ajoûter la mode, car elle éta- blit des conventions d’attitudes ,.de parures & de formes, qui contredifent fouvent la nature, & qui en la déguifant, égarent les artiftes, dont le but eft de limiter: mais ces reflexions que j'indiqueme con- duiroient trop loin ; je me borne à expoler feulement les liaifons de cet article avec ceux qui enfont [a fur- te. Quelques remarques fur les attitudes trouveront leur place au mot GRACE. Les caraëteres des foures fuivant leur fexe, leur âge, leur condition, é:c. en- treront dans les divifions du mot PROPORTION DES FiGuRres. On doit fentir que toutes ces chofes y ont, un rapport plus immédiat qu'au mot FIGURE. Enfin les expreflions, les mouvemens extérieurs, ou du moins ce qui jufqu'à préfent eft connu fur cette ma- tiere, qui tient à tant de connoifflances, feront la matiere du mot PASSION, regardée comm® terme de Peinture. Ces article eff de M. WATELET. FIGURE, chez les Rubaniers, Sentend des foies de chaîne qui fervent par leurs différentes levées, toûù- jours fuivant le paflage du patron, à l'exécution de la figure qui doit {e former fur l’ouvrage. Ces foies de figure fe mettent par branches féparées fur les ro- quetins dont on a parlé à l’article ALONGES Des Po- TENCEAUX ; il y a infiniment de changemens dans la difpofition de ces foies de figure, fuivant la varié- té infimie des ouvrages. FIGURE , ez Blafon, c’eft une piece d’un écuflon qu EIG. qui repréfente une face d'homme , un foleil,, un vent, un ange, &c. FIGURE, adj. ( drithmérique & Algebre.) On ap- pelle zombres figurés des fuites de nombres formés fuivant la loi qu’on va dire. Suppofons qu'on ait la fuite dés nombres naturels 1, 2, 3, 4, 5» Ge. 8 qu'on prenne fucceffivement la fomme des nombres de cette fuite, depuis le premier jufqu'à chacun des autres, on formera la nouvelle fuite x, 3, 6, 10, 15, &c. qu'on appelle la fuite des nombres træn£tlar- res. Si on prend de même la fomme des nombres triangulaires , on formera la fuite 1, 4, 10, 20, ée, qui eft celle des nombres pyrermidaux. La fuite des nombres pyramidaux formera de même une not velle fuite de nombres.Ces différentes fuites forment les nombres qu’on appelle feurés ; les nombres na- turels font ou peuvent être regardés comme les nom- bres figurés du premier ordre, les triangulaires com me les nombres fewrés du fecond , les pyramidaux comme dutroifieme ; & les fuivans font appellés du quatrieme, du cinquieme , du fixieme ordre, Éc. & ainf de fuite. Voici pourquoi on a donné à ces nom- bres le nom de fgnres. : Imaginons un triangle que nous fuppoferons équi- latéral pour plus de commodité, & divifons-le par des ordonnées paralleles & équidiftantes. Mettons un point au fommet, deux points aux deux extré- mités de la premiere ordonnée, c’eft-à-dire de la plus proche du fommet; lafeconde ordonnée étant double de la premiere, contiendra trois points aufli diftans l'un de l’autre que les deux précédens ; la troïfiemé encontiendra quatre; &ainfi 1, 2,3, 4, 6c. feront la fomme des points que contient chaque ordonnée: maintenant il eft vifible que le premier triangle qui a pour bafe la premiere ordonnée , contient 1 +2 ou 3 de ces points ; que le fecond triangle , quadru- ple du premier, en contient r + 2 + 3 ou 6; que lé troifieme noncuple du premier en contient 1 + 2 + 3 +4ou ro, &c. & ainfi de fuite. Voilà les ñnom- bres triangulaires. Prenons à préfent une pyramide équilatérale & triangulaire, & divifons-la de même par des plans paralleles & équidiftans qui forment des triangles paralleles à fa bafe, lefquels triangles formeront entr’eux la même progreffion 1, 4,0, &c. que les triangles dont on vient de parler, 1l eft vifible que le premier de ces triangles contenant 3 points, le fecond en contiendra 6, le troïfieme ro, Éc. comme on vient de le dire, c’eft- à: dire que le nombre des points de chacun de ces triangles fera un nombre triangulaire. Donc la premiere pyrami- de, celle qui a le premier triangle pour bafe, con- tiendra r + 3 ou 4 points, la feconde 1 + 3 +6 ou 10, la troifieme 1 + 3 + 6 + 10 ou 20. Voilà les nombres pyramidaux. [Il n’y a proprement que les nombres triangulaires & les pyramidaux qui {oient de vrais nombres figures , parce qu'ils repréfentent en effet le nombre des points que contient une fieure triangulaire ou pyramidale : paffé les nombres pyra- midaux il n’y a plus de vrais nombres fourés , parce qu'il n’y a point de figure en Géométrie au-delà des {olides, ni de dimenfion au-delà de trois dans l’éten- due. Ainf c’eft par pure analogie & pour fimplifier, que l’on a appellé fgurés les nombres qui fuivent les pyramidaux. Ces nombres figurés ont cette propriété. Si on éleve a + » fucceflivement à toutes les puiffances en cette forte, a + b | aat+2ab+bb a Lsatb+3zab? +83 AL yat BE Ga b2+aabs + b4 4513 CCE: L | Tome VI FIG 781 les coëfficiens 1, 2, 3, @c. de la feconde Colônné verticale feront les nombres naturels; les coefficiens 1, 3, 6, de la troifieme feront les nombres triangu: laires ; ceux de la quatriemé, 1, 4, &e, feront les ‘pyfamidaux, & ainf de fuite, M. Pafcal dans fon ouvrage qui a pourtitre #riarr- gle arithmétique, M. de l’'Hopital dans le Zy. X, de Jes feétions coniques, & plufeurs autres, ont traité avec beaucoup de détail des propriétés de ces nom- bres. Voici la maniere de trouver un nombre figuré d’une fuite quelconque: 1°. 1 étant le premier terme de {a fuite des nom- bres naturels, on aura z pour le n° terme de cette fuite. Voyez PROGRESSION ARITHMÉTIQUE. Donc z eit le n° nombre figuré du premiér ordre, 2°, La fomme d’une progreflion arithmétique eff égale à la moitié de la fomme des deux extrèmes multipliée par le nombre des termes.Or le n° nombre triangulaire eft la fomme d’une progrefion arithmé- tique, dont 1 eft Le premier terme, z le dernier, & z le nombre des termes. Donc le n° nombre trian< gulaire eft —— Xn= , 3°. Pour trouver lé n° nombre pyramidal, voict comment 1l faut s’y prendre. Je vois que le n° nom- bre du premier ordre eft de la formé 4 2, À étant ün coeflicient conftant égal À l'unité ; que le n° nom- bre du fecond ordre eft de la forme Az4+Bñn, À & B étant égaux chacun à +: j'en conclus que le n° nombre pyramidal fera de la forme « 7 +677 +Hcni,«,6,c,étant des coefficiens inconnus que je détermine de la maniere fuivante, en raifonnant ainfi: Six 724677 +cn3 ef le n° nombre pyra- midal , le z+ 1° doit être « (7+1)+6(z+1)? +c(2+1)5. Or là différence du z + 1° nombre py- ramidal & du n° doit être égale au z + 1° nombre triangulaire, puifque par la génération des nombres figurés le n + 1° nombre pyramidal n’eft autre chofe que le z + 1° nombre triangulaire ajoûté au n° nom: bre pyramidal ; de plus le z+ 1° nombre triangu- ren 2 n +1? +n +i . . laite eft == : de-là on tirera une équation qui fervira à déterminer «, 8 & c, & or trouvera après tous les calculs que az +6nr+4cn = . Il eft à remarquer nHL.n+r lee XA21-+31+2—= que pour avoit «, 6, & c, il faut comparer féparé- ment dans chaque membre de l’équation les ter- mes où z fe trouve élévée au même degré; car la valeur de «, de 6, 8 de c, étant toüjours la même, doit être indépendante de celle de z, qui eft variable, °, Le nombre triansulaire de l’ordre 7 étant À. 8 77 , & le pyramidal correfpondant étant = DHL, 2 TI. 1/2 , la fimple analogie fait voir que le n° nombre figuré du quatrieme ordre fera —— ——— a D+3.n+Len+l. DANS f ——————— eft le n° nombre figuré d’un ordre =, & général il eft évident que quelconque, le n° nombre figuré du fuivant fera ñ + 7 de Leo... nn RNA 2 le z2-L1° nombre figuré de ce dérniet ordre {eroit RME Mr ni G rhmtr.s.#+#+t7-"—, dont la différence Re alta tes VUE CNE . Eneffet, fuivant cette expreffion, AM ET ee US RUE avec le n° eft évidemment es 5 o F4 + XL, m+> BR EMLLoe.o se 2 +T TM + 2, k ne) Dos euros +72 HE nm +2 GGgeg Xn+mælem ME 782 FIG MES. 1 : qui eft le ra Ti nombre figuré de se. MT Lesrvess l'ordre précédent, comme cela doit être. Engénéral f(4+Bn) (n+3) (2491) (n+g—2)....72,ef le n° terme d’une fuite quelconque , & qu'on prenne fucceffivement la fom- me des termes de cette fuite , le n° terme de la nou- velle fuite ainfi formée fera (a+ 672) (n+g+i) (2+g)(n+g—a) . 4, . nja 86 étant deux indéterminées :qu'on déterminera par cette condi- tion, que le n 41° terme de la nouvelle fuite moins le n° de cette même fuite foit égal au z + 1° terme de la fuite donnée. D’où l’on tire, en fupprimant de part & d’autre les fa@teurs communs (2 +941)... (a+) (a HÉn+HE)X (n+g+2) — au) KXn=A+Bn+B, & par conféquent (= RS pou +345 DB Re Gin Gen Cette formule eft beaucoup plus générale que celle qui fait trouver les nombres fourés ; car fi au lieu de fuppofer que la premiere fuite foit formée des nombres naturels, on fuppofe qu’elle forme une progreflion arithmétique quelconque , on peut par le moyen..de la formule qu'on vient de voir, trouver la fomme de toutes les autres fuites qui en feront dérivées à l'infini, & chaque terme de ces fuites. En effet le n° terme de la premiere fuite étant 4+Bz, le n° terme de la feconde fuite fera (a +6z)n; le terme de la troifieme fuite fera (> + 7) (741), & ainfi de fuite, 7 & 9 fe déterminant par « & 6, comme #.ê 6 par 4 & B, &c. À l’écard de la fom- me des termes d’une fuite quelconque, il eft vifble qu’elle eft égale au n° terme de la fuivante. M. Jacques Bernoulli dans fon traité de fériebus infinitis earumque fummé infinité, a donné une mé- thode très-ingénieufe de trouver la fomme d’une fui- te, dont Les termes ont 1 pour numérateur, & pour dénominateuts des nombres fourés d’un ordre quel- conque, à commencer aux triangulaires. Voici en deux mots l’efprit de cette méthode : Si de la fraétion a a , on retranche Hollhiee et M1 HI nt. 1 +mMm+I19 an+am+a—-anñ a(m+i) on EE Ton dre Ain+l...1Em+I* D'où left aifé de conclure que la fomme d’une fui- te, dont les dénominateurs font, par exemple, les nombres triangulaires, {e trouvera aiférñent en re- tranchant de la fuite 1,+,+,+, Gc. cette même fuite diminuée de fon premier terme, & multipliant en- fuite par 2, ce qui donnera 2. Voyez dans l’ouvrage cité Ze détail de cetie méthode, Voyez auffi l’ars. SUITE où SÉRIE. On peut regarder comme des nombres fgwrés les nombres polysones , quoiqu'on ne leur donne pas ordinairement ce nom. Ces nombres ne font autre chofe que la fomme des termes d’une progreffion arithmétique ; fi la progreflion eft des nombres na- turels, ce {ont les nombres triangulaires ; fi la pro- greflion eff 1, 3, 5, 7, éc. ce font les nombres quat- rés ; fi elle eft 1,4, 7, 10, &c, ce font les nombres pentagones. Voici la raifon de cette dénomination : Conftruifez un polygone quelconque, & mettez un point à chaque angle; enfuite d’un de ces angles ti- rez des lignes à l'extrémité de chaque côté, ces li- gnes feront en nombre égal au nombre des côtés du polygone moins deux, ou plütôt au nombre des cô- tés, en comptant deux des côtés pour deux de ces lignes ; prolongez ces lignes du double, & joignez les extrémités par des lignés droites, vous formerez un nouveau polygone, dont chaque côté étant dou- ble. de fon correfpondant parallele’, contiendra un point de plus. Donc fi eft le nombre des côtés de ce polygone, la circonférence de ce polygone aura FIG #1 points de plus que la circonférence du précédent ; &7 le polygone entier, c’eft-à-dire l’aire de ce poly- gone contiendra #— 2 points de plus que le précé- dent. Voyez POLYGONE. Une fimple figure fera voir aifément tout cela, &t montrera que pour les nombres pentagones où M ÿ, ONA 7 — 2= 3, & qu'ainfi ces nombres font la fomme de la prosrefion 1, 4, 7, éc, dont la dif férence eft trois. | On pourroit former des fomimes, des nombres po- lygones, qu’on appelleroït zombres polygones pyra- 7ridaux ; ces nombres exprimeroient le nombre des points d’une pyramide pentagone quelconque. On trouveroit ces nombres par les méthodes données dans cet article, Voyez POLYGONE, PYRAMIDAL, SUITE o4 SÉRIE, Gc. (O) FIGURÉES , ( Pierres.) ÆHiff. nat. Minéralogie. on donne ce nom dans l’Hiftoire naturelle aux pierres dans lefquelles on remarque une conformation fingu- liere, inufitée & tout-à-fait étrangere au regne mi- néral, quoiqu'on les trouve répandues dans le {ein de la terre & à fa furface, & quoique la fubftance dont elles font compofées {oit de la même nature que celle des autres pierres. On peut diftinguer deux efpeces de pierres figurées, 1°. 11 y en a qui ne doivent leur figure qu’à de purs effets du hafard, c’eft ce qu’on appelle communé- ment des Jeux de la nature. Des circonftances toutes naturelles, & qui ont pù varier à l'infini, paroïffent. avoir concouru pour faire prendre à la matiere lapi- difique molle dans fon origine , des figures fingulie- res parfaitement étrangeres au regne minéral, que cette matiere a confervées après avoir acquisun plus grand degré dedureté..Ces pierres figuréesfont entrès- grand nombre; la nature en les formant a agi fans conféquence, & fans fuivre de regles conftantes; elles ne font donc redevables qu’à de purs accidens de la figure qu’on y remarque, ou pour mieux dire, que croit fouveñt y remarquer l’œil préoccupé d’un curieux qui forme un cabinet, ou d’un naturalifte enthoufiafte, qui fouvent apperçoit dans des pier- res des chofes qu’on n’y trouveroit pas en les exa- minant de fang-froid. On peut regarder comme des pierres figurées de cette premiere efpece, les marbres de Florence fur lefquels on voit ou l’on croit voir des ruines de villes & de châteaux; les cailloux d'Egyp- te, quinous préfentent comme des payfages, des grottes, Gc. un grand nombre d’agates , les dendri- tes, les pierres herborifées, quelquespierres quiref- : femblent à des fruits, à des os, ou à quelques autres fubftances végétales ou animales. 2°. Il y a des pierres figurées qui font réellement re- devables de leurs figures à des corps étrangers au regne minéral, qui ont fervicomme de moules, dans lefquels la matiere lapidifique encore molle, ayant été reçûe peu-à-peu, s’eft durcie après avoir pris la figure du corps dans lequel elle a été moulée, tandis que le moule a été fouvent entierement détruit ; ce- pendant on en trouve quelquefois encore une partie qui eff reftée attachée à la pierre à qui il a fait pren- dre fa figure. Ces pierres font de différentes natures, fuvant la matiere lapidifique qui eft venue remplir les moules qui lui éroient préfentés. Dans ce cas il ne refte fouvent du corps qui a fervi de moule, que la figure. On doit regarder comme des pierres figurées de cette feconde efpece, un grand nombre de pierres qui reflemblent à des coquilles, des madrépores, du bois, des poiflons , des animaux, &c. ou qui portent des empreintes de ces fubftances. Voyez l'article PÉ- TRIFIGATION. Il paroïît que les deux efpeces de pierres dont nous venons de parler, méritent feules d’être appellées pierres figurées, Cependant quelques naturaliftes n’ont point fait difficulté de donner ce nom à un grand nombre de fubftances quin’ont rien de commun avec les pierres, que de fe rencontrer dans le fein de la terre; c’eft ainfiqu'ils confondent mal-à-propos quel- quefois avec les pierres figurées, des coquilles, des . madrépores, des offémens de poiffons & de quadru- _pedes, &c. qui n’ont fouffèrt aucune altération dans l’intérieur de laterre. On fent aifément que ces corps n’appartiennent point au regne minéral, & qu'ils ne s’y trouvent qu'accidentellement. Voy. l'article FOs- SILES. C’eft avec auf peu de raïfon que l’on a placé par- mi les pierres figurées des pierres qui ne font redeva- bles qu'à l’art des hommes de la figure qu'on y remar- que : telles font les prétendues pierres de foudre, qui ont ordinairement la forme d’un dard , celles quitont taillées en côins ou en haches, celles qui tont trouées, Gc, Il paroït que ces pierres {ont des armes & uftenfiles dont anciennement les hommes, & iur- tout les fauvages , fe fervoient , foit à la guerre , foit pour d’autres ufages, avant que de favoir traiter Le fer. | | | On pourroit peut-être encore avecplus de raifon, donner le nom de pierres figurees à celles qui afe@ent conflamment une forme réguliere & déterminée , telles que les différentes cryftallifations , mais com- me leur figure eft de leur eflence , & appartient au regne minéral, 1l paroît qu'on ne doit point les pla- cerici, où il n’eft queftion que des pierres qui fe font remarquer par une figure extraordinaire & étrangere au regne minéral. Voyez CRYSTALLISATIONS. (=) FIGURE , (Jéns.) Théolog.fe diten parlant de l'Ecri- ture fainte. Le fers figure eft celui qui eft caché fous l'écorce du fens httéral. Un paflage a un fens fiouré, quand fon fens littéral cache une peinture myltérieu- fe & quelqu'évenement futur, ou ce qui revient au même , quand fon fens littéral préfente à l’efprit quel- qu'autre chofe que ce qu’il offre d’abord de lui-même, Aïnf le ferpent d’airain ; élevé dans le defert par Moyfe pour guérir les Ifraëlites de la morfure des ferpens, étroit une figure de Jefus-Chrift , élevé en croix pour fauver les hommes de l’efclavage du pé- ché & de la tyrannie du démon. Jefus- Chrift étoit donc figuré par le ferpent d’airain. #. FIGURE. (G) FIGURÉ, adj. (Lirér.) exprimé en figure, On dit un ballet figuré , qui repréfente ou qu’on croit repré- fenter une aétion , une pañflon, une faïfon, où qui fimplement forme des figures par l’arrangement des danfeurs deux à deux, quatre à quatre: copie fiourée, parce qu’elle exprime précifément l'ordre & la dif- potion de l'original : vérité figurée par une fable, par une parabole: PEglife figurée par la jeuné époute du cantique des cantiques : l’ancienne Rome figurée par Babylone: /lyle figuré par les expreflions méta- phoriques qui figurent les chofes dont on parle, & qui les défigurent quand les métaphores ne font pas juftes. _ L’imagination ardente, la paflion, le defir fon- vent trompé de plaire par des images furprenantes, produifent le ftyle fguré. Nous ne ladméttons point dans Phifloire, car trop de métaphores nuifent À la clarté ; elles nuifentmême à la vérité, en difant plus où moins que la chofe même. Les ouvrages dida@i- ques reprouvent ce ftyle. Il eft bien moins à fa place dans un fermon; que dans une oraïfon funebre ; par- ce que le fermon eft une inftru@ion dans laquelle on annonce la vérité, l’oraifon funebte une déclama- tion dans laquelle on exagere. La Poéfie d’enthou- fiafme , comme l'épopée, l’ode , eft le genre qui re- çoit le plus ce ftyle. On le prodigue moins dans la tragédie, où le dialogue doit être aufhi naturel qu’é- levé; encore moins dans la comédie , dont le ftyle doit être plus fimple. C’eft le goût qui fixe les bornes qu’on doit don- ner au ftyle fouré dans chaque genre, Balthafar Gra- Tome VI, | FIG 783 tian dit, que les penfées partent des vaftes côtes de la mémoire, s’embarquent fur la mer de l’imagina- tion, arrivent au port de l’efprit pour être enrepif- trées à la douane de l’entendement. Un autre défant du ftyle figuré eft l’entaflement des figures incohérentes : un poëte , en parlant de : quelques philofophes, les a appellés d’ambitieux pio- miées , qui fur leurs piès vainement redreflès | & ur des monts d'argumens entaflés , &cc. Quand on écrit con- tre les Plulofophes, 1l faudroit mieux écrire, Les Orientaux employent prefque toûjours le ftyle f- guré , même dans l’hiftoire : ces peuples connoiffant peu la fociété, ont rarement eu le bon goût que la {ociété donne ; & que la critique éclairée épure. L'allégorie dont ils ont été les inventeurs, n’eft pas le ftyle figuré, On peut dans une allégonie ne point employer les figures, les métaphores, & dire avec fimplhicité ce qu’on a inventé avec imagination, Platon a plus d’allégories encore quede figures ; il les exprime élégamment , mais fans fafte, Prelque toutes les maximes des anciens Orienta x êt des Grecs, font dans un ftyle fgwre. Toutes ces fentences font des métaphores, de courtes allégo- ries ; &c c’eft - là que le ftyle fguré fait un tres -urand effet en ébranlant l’imagination, & en fe oravant dans la mémoire, Pythagore dit , dans la tempête ado. rez l’écho , pour fignifier, dans Les troubles civils reri- reg-vous a la campagne. N'artifez pas Le feu avec lé pée, pour dire, z'irritez pas les efpries échauffés. Il y a dans toutes les langues beaucoup de proverbes com- muns qui font dans le fiyle fouré, Article de M. DE VOLTAIRE, FIGURE , (Jurifpr.) fe dit de ce qui repréfente la figure de quelque chofe. On dit #x plan figuré ou f- guratif, voyez FIGURATIF & PLAN : une copie figu= rée. Voyez COPIE. (4) FIGURE, fe dit ez Mufique où des notes, où de l’harmonie: des notes, comme dans ce mot balle fe- gurée, pour exprimer une bafle dont les notes jont fubdiviiées en plufeurs autres de moindre valeur, pour animer le mouvement ou diverffier le chant ; voyez BASSE FIGURÉE : de Pharmonie, quand'on em- ploye par fuppoñiion & dans une marche diatoni- nique, d’autres notes que celles qui forment l’ac- cord, Foy. HARMONIE FIGURÉE 6 SUPPOSITION, (ay | FIGURÉ , serme de Blafon , fe dit non-feulement du foleil fur lequel on exprime l’image du vifage hu- main, mais encore des tourteaux , befans, & autres choies , fur leiquelles paroît la même figure. Gäucin , de gueules à trois befans d’or, fgurés d’un vifage humain d'or. FIGURER , ez Mujique’, c’eft pafler plufieurs no- tes pour une : c’eft fane des doubles , des variations ; c’eit ajoûter des notes au chant de quelque maniere que ce loit. Voyez DOUBLES, FIGURE, FLEURTIS, HARMONIE FIGURÉE, VARIATIONS. (S FIGURER , v. act. serme de Dane: 1. y a des dan- feurs qui figurent à l'opéra, Les danfeuies du corps d'entrée ne danfent point feules, elles ne font que figurer : on appelle les uns figurans , & les autres fige rantes, La plüpart des danfeurs qui fyvrerr à opéra , font de très bons maires à danier, qui favent tort bien la danfe: Qu'on concoive par-là ce qu'on pourroit leur faire faire, fi on s’appliquoit à ne donner que des ballets en aëtion. Foyez BALLET , DANSE, Fiçu- RANT, PANTOMIME. (B) FIGURINE, f. f. (Peëns.) on a quelquefois donné ce nom à des fivures remarquables par leur extrème fineffe & par leur legereté; telles qu'on en voit dans certains tableaux, furtout des peintres flamans. Di&, des Beaux Arts. FIGURIS ; (IN) Jur, F, AMENDE HONORABLE, GGpggsi 784 FIL FIGURISME,, f. m. (Théol.) On a donné ce nom à l'opinion de ceux qui penfent que tous les évene- ! mens de l’ancien Teftament font autant de figures des évenemens du nouveau. En ce fens les figures de l’ancien Teftament feroient autant de prophéties. Voyez PROPHÉTIES ; voyez auffi FIGURES , (Théol,) * FIL, {. m. (Econ. rufhiq.) on prépare avec l’e- corce du chanvre, féchée, peignée, divifée, une matiere qu'on appelle f£/affe (voy. l’article FILASSE), qui tordue au fuféau ou au rouet fur elle-même, for- me un petit corps rond, continu, flexible, & refif- tant, qu’on appelle #2. On fait aufli du 7 avec Le co- ton, la foie, la laine, le crin, 6‘. Si le f2 eff trop gtos, 1l prend le nom de ficelle, de corde, Voyez l'article CORDERIE. On file la filaffe , la feule matiere dont nous allons parler ici; parce qu’on n'entend communément par Je mot f/, que celui qui eft fait avec la filaffe ou l'é- çorce de chanvre. On file la flafle au rouet ou au fufeau; mais on difofe la filaffe fur la quenouille, pour filer au rouet comme pour filer au futeau. Voici d’abord la manie- re dont on file au fufeau. | Le fufeau eft un morceau de bois leger, rond fur toute fa longueur, terminé en pointe parles deux extrémités, renflé dans le milieu, & long d'environ cinq à fix pouces; il y a un peuau-deflus de la pointe inférieure , une petite éminence qui retient le f/ à qui l'empêche de tomber. La quenouille eft un rofeau ou bâton leger,rond, long de trois à quaire piés, percé par un bout, & arm à ce bout d’un ruban large & fort. On prend la foie, la filaile , ladaine, é'c, en un mot la matiere qu’on veut filer; on l’étend fur une table par lits minces, cependant d’une épaïfleur inégale : la partie inférieure de chaque hit doit être un peu plus fournie que la partie fupérieure, afin que quand tous ces lits feront roulés fur la quenouille, ils forment une efpece de cone , dont la pointe foit tournée vers le bout de la quenouille; fi la filafle eft courte, les brins de chaque hit ne font pas roulés, mais feule- ment appliqués fur la quenouille , &t attachés felon leur longueur; fi elle eft Jongue, alors les brins font roulés un.peu de biais fur la quenouille. On roule ces lits de filafle fur l'extrémité de la quenouille ; on les y fixe en faifant fur eux p'ufieurs tours avec le ruban, & la quenouille eft piêre à être filée, Pour cet effet on fixe la quenouiile à fon côté gau- che, on tient la filaffe embraflée de la même main ; &c de la main droite, on tire avec le pouce & l’index de la partie inférieure de la quenouille, une petite quantité de filafle. On la tourne entre fes doigts, après l'avoir mouillée ; on lui donne ainfi un com- mencement de confiftance: après quoi on lui fait faire {ur l'extrémité du fufeau un tour ou deux, & on l'y arrête par un nœud ouune boucle, formée com- me on voit ; a et le bout du fZ qui tient à la filafle, & Pc d eft fa partie attachée fur le fufeau. La partie acb pañlant deflous la partie # cd, 1l fe forme une boucle che, qui eft ferrée fur le fufeau par l’aéton de la fileufe & par le poids du fufeau. Le fil ainf attaché au fufeau, la fileufe prend en- tre fon pouce & le doigt du mieu, le fufeau par fon extrémité e, & le fait tourner fur lui-même. À mefu- re que le fuicau tourne, on tre de la filafle de la que- poule, avec le pouce & l'index de la main droite ; la filaffe fe tord, & le f/ fe forme; & afin que ce tors tienne , la fileufe avoit etil’attention de mouiller les doigts dont elle ire la filaffe de la quenouille , foit avec fa falive, foir à une éponge humeëtée d’eau, qu’on appelle mowillerte, 8 qu’elle tenoit à fa portée dans un petit vale de faÿence ou de fer-blanc. Quandil y a une aulne ou une aulne & demie de fil fait comme nous venons de le décrire ; du pouce de FIL ! Ja main gauche on pouffe la boucle c faite fur le bout du fufeau ; on la fait tomber ; l’on tranfporte le 2 d fur le milieu du fufeau g, &c on lui fait faire plufieurs tours ; enfuite on l’arrête à l’extrémité du futeau par une boucle c, qu’on reforme toute femblable à La premiere. À l’aide de cette boucle c,, le #/ roulé fur le milieu du fufeau ne fe devide point, lorfque le fufeau mis en mouvementeft abandonné à fon poids, & l’ouvrage peut fe continuer, | Cela fait, la fileute avec le pouce & l'index de fa main droite qu’eliea mouillés, tire de la filafle de fa quenouille , & remet fon fufeau en mouvement avec l'index & le doigt du milieu de fa main gauche; le fufeau tourne, la filafle tirée fe tord; le pouce & l’in- dex de la droite, tandis que le fufeau tourne, tirent de nouvelle filafle , fourniflent & aident même au fufeau à tordre, &1l fe forme de nouveau f/, qu'on envide fur le milieu du fufeau en faifant tomber la boucle c, qu’on reforme enfuite pour ar:êter Le f£/ & continuer de filer. La fileufe file de cette maniere jufqu’à ce que fon fufeau foit chargé de 7 fur toute fa longueur , & que fa quenouille foit épurfée de filaffe. Elle doit obferver 1°. de mouiller fuffifamment {a filafle tandis qu’elle travaille, fans quoi fon f/ fera fec & caffant. 2°, De ne tordre ni trop ni trop peu, & de filer égal & rond. 3°. De tirer de la filaffe la quantité qui convient à la groffeur du f/, à la qualité de la filaife , & à l’u- fage qu’on veut faire du 2. 4°. D’en tirer toïjours la même quantité, afin que fon fil foit égal. 5°. De faire gliffer tout fon f/ entre fes doigts , à mefure qu'il fe forme & avant que de l’envider fur le fufeau, afin de le rendre lifle & uni. 6°. De féparer de fa filaffe tout ce qui s’y rencon- trera de parties grofheres, mal peignées , de faletés, Éc. 7°. De faire le moins de nœuds qu'il fera poffi- ble, &c. | Paflons maintenant à la maniere de filer au rouet, Le roûet eft une machine qui nous paroït fimple & qui, expofée par-tout à nos yeux, n'arrête pas un inftant notre attention, mais quin’en eft pas moins ingénieufe. Elle-eft compofée d’un chaflis, dont la partie inférieure 1,2, 3, 4, confifte en quatre tra- verfes minces de bois, qui forment par leur affem- blage un quarré oblong ; c’eft fur ce quarré obiong que font fixées & entretenues les quatre jambes 5, 6:7,839; 10311, 12: ces quatre Jambes fe ren- dent à la partie fupérieure du chaffis, formée aufli de quatre traverfes minces de bois, & la foûtiennenten s’aflemblant avec elle aux points 6,8, 10, 12; cette partie fupérieure du chaïlis forme aufli un quarré oblong 4,8,c,d, parallele à linférieur , de même largeur , mais d’une longueur beaucoup plus grande. Sur le milieu de l'intervalle 6, 8 , & 10, 12, des tra- verfes fupérieures, font placés & fixés deux efpeces de petits piliers e, f; g, », qu’on appelle les 707. tans. Us font de même groffeur, de même hauteur; l’antérieur e, f, eft percé d’un trou; le poftérieur g, », eft fendu d’une ouverture qui traverfe {on fom- met, & qui defcend à une profondeur telle, que le bout de l’axe de la roue z étant placé dans le trou du montant €, f, & fon autre bout placé dans la fente de l’autre montant g, k, la roue foit bien verticale & fe meuve bien perpendiculairement. On a fendu le montant g # à fon fommet, afin que la roue puifle s'ôter & fe mettre à difcrétion entre ces montans. Ces montans ef, gh, fontfixés à écrous fur les tra- vetfes. L’extrémité de l’âxe de la roue, qui entre dans la fente du montant g4,'eft recourbée en ma- nivelle &; la queue / de cette manivelle pale dans une baguette percée d’un trous cette baguette / m2 fe rend à la planchette o, à l'extrémité de laquelle elle eft attachée avec un cordon qui pañle dans un trou fait au bout o de la planchette , qu’elle tient éle- vée au-deflus de la traverfe inférieure 3, 4, d’une quantité un peu plusgrande que celle à laquelle cette planchette pourroit defcendre , lorfque le coude k de la manivelle, au lieu d’être élevé comme on le voit en k, eft le plus abaiïfié qu’il eft poffible. La planche op qu’on appelle la marche du rotss, eft af- femblée en p à tourillons avec la traverie 1, 2, & peut fe mouvoir fur elle-même. 19 «cuil La piece gr compofée d’un tafleau de bois, percé de deux trous quarrés , à l’aide defquels il peut glif- fer fur la longueur destraverfes 9, 103 11,12; de deux montans s,:, & d’une vis en bois x y, qui paflé à-travers le montant #s.& le tafleau 47 qui eft taraudé, cette piece, dis-je, s’appelle la coiffe. La vis s'appelle la poignée ; les deux montans /', #, s'appellent les warionnettes. AU. Les marionnettes dont on voit une. féparément fig.S, r, portent à leur partie fupérieure un morceau de cuir a, qui eft percé d’un trou dans le milieu , & qui tient à la marionnette par deux petits tenons. Il s’agit maintenant de pañler dans les deux trous des deux cuirs des deux marionnettes, l’affemblage de pieces qu’on voit fur le roüet entier, & qu'on a repréfenté féparément en C,D,E,F,G,H,1, K,L,M,N,0,P,Q,R. C'N eft une broche de fer ; elle eft percée en C d’un trou extérieur qui va jufqu'en £ , où il y en a un autre Æ qui rencontre l'intérieur, enforte qu’un ff/ qu’on pañleroit en C, {ortiroit par Æ. Sur cette broche de fer eft fixée au point Æ, une piece de bois F G G, figuréecomme on la voit, & armée fur fes bords de petits bouts de fils- de-fer recourbés en*crochets : on appelle cette piece l’épinglier. H 1 K eft une bobine enfilée fur la broche. Cette bobine a en Æ une boffe arrondie, & en À une gouttiere. La piece LM qui contient & ferre la bobine fur ia broche s’appelle la r0/x ; elle eft à gout- tiere en L, & en hoffe en M. On ne peut enlever de deflus la broche l’épinglier FGG, mais on en peut ôter & la bobine ATK, & la nowx LM. On a pratiqué à la broche CN une petite éminen- ce D, pour contenir tout cet aflemblage fixement entreles cuirs des marionnettes, & l’on a fait la par- tie M en bofle , afin que le frotement contre un des cuirs en fût moindre, Ainfi on place tout cet afflemblage CDÆEFGI K L M entre les marionnettes , l'extrémité © pañlée dans un des trous des cuirs, & l’autre extrémité M pañlée dans Le trou de l’autre cuir. On a auparavant fait pafler une corde à boyau dans les deux gouttie- res À, L, ê dans lagoutriere de la grande roue J. Onbande fuffifamment cette corde à boyau, par le moyen de la vis ou poignéex y ; on fait approcher à difcrétion le tafleau mobile gr de la traverie immo- bile 42; & avec ce taffeau tout l’aflemblage fufpen- du entre les cuirs des marionnettes /#, fixées fur ce tafleau. H faut que la corde foït bandée de maniere qu’en faifant tourner la grande roue :, tout laffemblage CDEFGHIK LM N tourne enfemble. D'où l’on voit qu'il faut que la bobine ZT X & la noix L M , entrent avec un peu d’effort fur la bro- che, fans quoi ils tourneroient feuls, & ne feroient pas tourner la broche avec eux: or il faut que tout tourne enfemble. , Cette machine entiere qu’on appelle un roëes étant décrite, äl s’agit maintenant d'en expliquer l’ufage. On a fixé fur le milieu de la bobine en #, un bout de fi tout filé : on fait pañler ce bout de f/ fur la pre- micre dent O de l’épinglier ; on le conduit de-là au trou Æ de la broche, & on le fait fortit par le trou FIL 735 €, comme on voit en Q. On le conduit de Q À Ia quenouille, en le tenant entre l'index & le doigt du mulieu de la main droite. La fileufe eft afife devant fon rouet, vis-à-vis la marche po; elle fait tourner la roue z à la main, jufqu'à ce que la manivelle & {oit élevée comme on la voit : alors elle met le pié droit fur la marche p o; elle prefle le bout o de la marche avec le bout de ce pié: par cette adion, le bäton #22 eft tiré, il entraîne la manivelle k, la ma- mvelle fait tourner la roue ;, la roue fait tourner la broche CN avec tout ce qu’elle porte; le f/fixé d’un bout fur le milieu de la bobine, engagé fur une des dents de l’épinglier & fortant par le trou € de la bro- che, tourne aufli fur lui-même, La fileufe entretient toüjours la roue : en mouvement dans le fens de Z en 13. Quand ce f/ a pris une certaine quantité de tors , la fileufe approche du bas de la filafle de fa que- notulle, le f7 gripe de cette filafle, cette partie de f- lafe fe tord ; à mefure qu’elle fe tord & que le f/ fe fait, ilglifle par le trou C'fur épingle O , &s’entor- tille fur la bobine. La fileufe a devant elle fa mouillette#iélle humec- te fa filafle & fon £/, quand il en eft befoin. Elle fait pafier le f/ d’une épingle O à la fuivante P, & ainf de fuite, afin de répandre également fon £/ fur toute la cavité de la bobine; quandelle eft parvenue à la derniere a, elle retrograde & revient à la premiere O , en pañflant fucceflivement par chacune des inter- médiaires. Au demeurant on doit obferver pour bien filer au rouet, les mêmes regles que nous ayons prefcrites pour bien filer au fufean. Si on établit entre la viîtefle de la grande roue ;, 13 , & celle de la bobine FIX, & du fi Q, & la vi- tele avec laquelle on tire la filafle & on la fournit au mouvement, le rapport convenable, le f/ne fera n1 trop ni pas affez tors. On va vite quand on file au roûet ; mais on pré- tend communément que le f/ qu’on fait n’eft jamais mi aufli parfait, ni aufh bon que celui qu’on file au fufeau. Si vous defirez fur l’ufage du rouet quelque chofe de plus, voyez l’article COTON. Lorfqw’on a une aflez grande quantité de f/, on le met en écheveau par le moyen d’un devidoir, Le devidoir eft une roue à plufieurs aîles , foûtenu fur un axe entre deux piliers, & armé d’une manivelle, à l’aide de laquelle on la fait tourner. A mefure qu’- elle tourne, elle tire le f7/ de deflus le fufeau , & ser charge. On envoye les écheveaux à la leffive; d’où ils pañlent entre les mains du tiflerand, quand on veut mettre le f/ en toile, voyez l’article TOILE ; ou au moulin à retordre, quand on le deftine à la couture & à d’autres ouvrages. L’art de retordre le #7 a fait de grands progrès. Nous allons fuivre ces progrès & donner l'explication des machines dont on s'el fervi fucceflivement. Le premier f/ qu’on ait retordu, l’a été au fufeau ou à la quenouille. Rerordre Le fil, eft en faire une ef- pece de petite corde de plufieurs brins: pour cet ef- fet on le met en autant de pelotes qu’on veut qu'il y ait de brins au fz/ retors. On attache une clé À l’ex- trémité de la quenouille; on fait pafler les brins par l'anneau de la clé qui déborde le bout de la que- nouille ; on les conduit tous enfemble fur l'extrémité du fufeau ; on les y fixe par le moyen d’une boucle, comme s’il étoit queftion de filer ; on prend enfuite le bout du fufeau entre les deux paumes de la main, & on le fait tourner fur lui-même de gauche à droi- te, c’eft-à-dire dans un fens contraire à celui dont le fila été tors, quand on l’a filé : or il eft évident qu'il a été tors alors de droite à gauche. Pour faire fentir la raifon de cette manœuvre, il faut confidérer, 1°. qu’en quelque fens qu’on tourne 786 FIL le‘fufeau, les brins fe plieront les uns für les autres, feront des fpires, & formeront une petite corde. 3°, Qu'en faifant tourner le fufeau en fens con- trare de celui où il tournoit quand on a mis la filaffe en fil, tous ces brins def faïfant effort pour repren- dre leut premier tors, auquel ce fecond mouveinent eft contraire, chercheront à tourner fur eux-mêmes, {e ferreront fortement les uns contre les autres, &c donneront un tiflu d'autant plus ferme à la petite corde qu'ils compoferont. Re He 3°. Que ce ferrement n’auroit point eu lieu, fi on eût fait tourner le fufeau & les brins dans le fens dont ils avoient été filés, & que la petite corde eût étélâche, fans confiftence , & fes brins tohjours prêts à fe féparer. En effet, dans ce cas les brins portes au- delà de leur premier tors par un retors fait dans le même fens , auroient cherché à revenir à ce premier tors, & par conféquent à tourner fur eux - mÈmMes dans le fens contraire à ce retors, à fe féparer &c à ouvrir la corde. . J'ai vû beaucoup de perfonnes qui ne pouvoient {e faire désfidées nettes de la raifon de cette manœu- vre, & qui s’opimiatroient à prétendre qu'il falloir tetordre les brins dans le fens où le f/ avoit été tordu. LR | Quand onretord les brins en fens contraire à celui felon lequel ils ont été filés , l'effort qu'ils font pour {e reflituer à leur premier tors, pour tourner fur eux-mêmes, & pour ferrer la petite corde, eft f confdérable, que le #/ retors fe tortilleroit, &c for- meroit des boucles & des nœuds, fi le fufeau n’était chargé à {on extrémité d’un anneau de plomb, & fi la fleufe ne le tenoit tendu à chaque fois qu’elle veut envider fur fon fufeau la portion de f/ qu’elle-a re- torfe. | Maïs on ne tarda pas à s’appercevoir que cette maniere de retordre étoit trop longue, & l’on ima- gina la machine dont nous allons parier. Les différentes figures qui font contenues dans cette Planche , ne font que des détails de certe ma- chine vûe par parties & fous différens points de vüe : on a donné à leur enfemble le nom de roger. Cerotet qui eft très-fimple en comparaïfon de ceux qui {er- vent à filer l'or & l’argent, a été le premier inftru- ment dont on s’eft fervi pour retordre les laines & fils {ervant à coudre, à faire la dentelle, &e à faire des toiles brochées de laine ou foie , telles qu’on les fabrique depuis quelques années à Roüen, &t depuis une année à Pont-de-Vele en Brefle ; il eft indiqué par La figure 1. de la vignette. La figure 2. de la vignerte reprélente une fille qui fait une bobine compoee de deux f/s qu’elle joint enfemble ; ces deux fs font ti- rés de déux échevaux féparés, & poiés fur deùx tournéttes ou guindres indiqués par les lettres b, b. Ce font ces mêmes bobines qui chargées de ce f/ double, font pofées comme il eft démontré dans [a fig. 5. Elles font traverfées d’un petit arbre on d’une branche de fer très- polie qui les foûtient ; & au moyen d’une poulie qui adhere à chaque bobine ou fufée , & fur laquelle pale une corde qui le fait tour- ner très-vite, les deux brins de f/ fe tordent par le mouvement que reçoit la bobine, n'en compofent plus qu’un, & forment un parfait f/ retors, fort fi, 1oit laine ou foie. Il eft d’une conféquence infinie de faire attention de quelle façon le f/ doit être retordu, parce que fon vouloit retordre à droiteun 7 qui auroit été filé de même, il ne feroit pas pofhble d’en faire ufage, at- tendu que ce fecond tors forçant le premier, fans néanmoins qu'il fût bien tordu, le f/s’ouvriroit de fa: conqu'il feroit impofñble de l’'employer,attendu qu'il ne pourroit abfolument fe tenir retordu- Il faut donc avoir la précaution d’obferver que lorfqu'’un brin de fi! où laine eft filé ou tordu à droite, il doit être re- tordu à gauche : il en eft de même pour la foie: Le f/ préparé de cette façon recevant plus de tors; ne s'ouvre point pour cela, & ne fe raccourcit pas ; au contraire 1l acquiert plus de confiftance par cette feconde opération, qui le met en état d’être em- ployé à tous les ufages, tels que la couture, fabri- que, &c. | La figure 3. n’eft qu’une repréfentation en grand de la figure 1. de la vignette, où l’on peut diftinguer toutes les parties du rouet avec plus de facilité. À, figure 3. eft la manette ou manivelle ajuftée à l'arbre de fer B qui traverfe la grande roue C qui donne le mouvement à toute la machine. Cette grande roue eft cavée fur fa circonférence, & dans fa cavité 1l entre une corde un peu grofle, laquelle enveloppant la petite roue D placée fur l'arbre qui fupporte la roue de piece £, cavée auf très-lege- rement, & recevant la corde fine F qui pañle fur les poulies & & N adhérantes aux bobines on fulées, elle leur donne le mouvement pour retordre le f2 double qu’elles foûtiennent. H, même figure, eft une entaille faite dans une piece de bois À L, nommée /e fommier. Dans cette entaille entre une piece mobile de bois ou de fer M ; à laquelle eft attachée une petite poulie Z fous laquelle pafle la corde fine F qui donne le mouwe- ment aux bobines, Cette piece M, & les deux au- tres qui ne {ont pas marquées , s’élevent & fe baif- fent {elon le beloin , & fervent à donner l’extenfon ou le relâchement néceflaire à la corde pañlée fousla poulie Z, 8 conduifent cette corde comme onla voit; c'eft-à-dire des deux premieres bobines en-deflus, fous la premiere poulie ; de la premiere poulie en- deflous,, deflus les deux fecondes bobines; des deux fecondes bobines en-dèflus, fous la feconde poulie ; de la feconde poulie en-deflous, deflus les deux troi- fiemes bobines , & ainf de fuite : d’où il arrive que toutes les bobines tournent dans le même fens. O, méme figure, eftune fuféecavée, adhérante à la grande roue €, à laquelle elle eft attachée ; elle fert à placer dans fes cavités la corde nommée d’ar- tirage , qui pañlée en recoude fuf deux poulies lon- guesP &OQ, &c croifée à une poulie femblableR, fe. 4. enveloppelaroue marquée S', qui fait partie de l’afpe X, dont l’arbre pañlé dans les deux piliers T qui le foûtiennent , & lui donnent la liberté de tourner & recevoir la foie des huit bobines qui compofent huit écheveaux. On a pratiqué au montant où font atta= chées les poulies PR, des trous, afin de dépiacer à difcrétion les poulies, & rendre la corde qui pafle fur elles plus ou moins tendue. Cette fufée compoiée de huit cavités dont les diametres font différens, fert encore à donner à l’afpe un mouvement plus lent ou plus prompt , felon qu’on veut un tors plus où moins grand au f/ travaillé; ce qui eft opéré en pla- çant la corde d’attirage dans les cavités plus oùmoins grandes , & felon que le befoin l’exige. Feftune des grofles pieces du bâtiment du rouet. Z , même figure, eft une verge de bois bien polie, fous laquelle paffent les huit f/s tordus, & qui fetor« dent encore jufqu’à ce qu'ils foient fur l’afpe ou dé- vidoir. | La fig. 4. montre une partie du roïet vüe de côté, la fufée O, la roue de piece E, & la petite roue D, fur laquelle eft pañlée la corde de la grande roue qui donne le mouvement aux huit bobines ou fufées : elle indique encore de quelle façon eft paffée la corde qui donne le mouvement à l’afpe ou devidoir X. La figure $. repréfente le fommier marqué X &cZ êt la figure 6. la forme de l’afpe ou devidoir. Les autres figures font des-dérails qu'il eft facile de comprendre ; ainfi on voit au-deflus dela figure 5. une poulie féparée avec fonoûtien ; 6c dans la fig, 5, l'entaille qui la reçot À côté de cette feure 5. on voit les parties d’af.. femblage de la verge de bois; au-deflous de la fouré 6. le canon #c de la bobine e; & en d; une des pou: lies vuides quu fervent à conduire la corde de bobi: nes en bobines. Voici donc le mouvement de cette machine. La manivelle 4 fait tourner la grande roue CC les roues D & E , & la fuiée ©; la fufée O, les poulies PQ ; les poulies PQ , la poulie À ; la poulie À, l’afpe ST, qui tire les j£/s de deflus les bobines. Quant à la roue E , elle fait mouvoir toutes les bobines. Quant aux direétions de ces mouve- mens, elles font données par les cordes ouvertes ou croiées, Quand les cordes font ouvertes, les mou- vemens font dans le même fens ; & en {ens contrai- re, quand les cordes font croifées. Après l'invention du roüet repréfenté dans la Plan- che précédente, fuccéda celle des moulins,qu’on voit dans celle-ci. Ce n’eftpasquelesrouetsne perfeétion- naffent les matieres quiétoient préparées par leur fe- cours , mais 1ls n’en fournifloient pas encore aflez : il fallutdonc trouverle moyen de faire plus d'ouvrage. Pour yparvenironemploya lafeconde machine fous le nom de r7o1/in; & au lieu de huit bobines ou fufées que le-rouet faifoit tourner, le nouveau moulin en ftmouvoir 48, ce qui expédioit + d'ouvrage plus que le rouet, Cette machine eft plus fimple que le rouêt. Nous allons donner la defcription de toutes les parties qui la compoñfent , en obfervant néan- moins qu'il arrive très-fouvent que le f/ n'étant pas aufli tordu qu'il devroit l’être dans fon premier fila- ge, ou fuivant l’ouvrage dans lequel il doit entrer, on le remet fans le doubler fur Les moulirs à retor- dre, afin de lui donner la préparation qui lu: eft né- ceflare, obfervanttoüjours de le faire tourner dans la feconde préparation & quand il eft doublé, d’une façon différente de la premiere. | La figure r. de la vignette eft compofée d’une grande roue 4, garnie en-dedans d’une croifée B,B,C,C, au-travers de laquelle paffe un arbre D. Cette crot- fée eft foûtenue par quatre pieces Æ. Dans le bas de Parbre eft un tourillon F, qui entre dans une gre- nouille G. Le hant de l’arbre À entre dans un trou rond J, pour qu'il foit arrêté droit. La grande roue À engrene dans une lanterne X, appuyée par fon arbre fur une piece de bois L, & pañlée dans une piece de bois M, au-deflus de la- quelle, & au même arbre, eft une feconde lanterne N qui engrene avec une roue © faite comme une roue de champ, laquelle a fon arbre. De l’autre côté du pilier 15, qui en eft traverfé eft un pignon S qui donne le mouvement à la roue Ÿ, attachée à l’afpe ou devidoir 7, qui devide &7 ramañfe le #7 à mefure qu'il fe tord. | Au pignon S eft attachée une piece de bois P ap- puyée fur la partie © , au bout de laquelle eft un fe- cond. pignon T, foütenu par une feconde piece de bois À, appuyé fur une piece de bois 14. Ce fecond pignon donne le mouvement à une feconde roue F, attachée à un fecond afpe on devidoir X, qui de- vide & ramafñle le #/ dont les écheveaux font com- pofés. Les lettres aa, figure 2. font des fufeaux de fer quientrent quarrément dans les bobines fur lefquelles le f1 eft devidé ; &c ce f/ pañle par destrous très-polis marqués d & e, afin de fe trouver jufte & en droite ligne fur l’afpe ou devidoir, Tous les fufeaux font pointus, & entrent dans des efpeces de grenouilles de verre enchâflées dans les pieces marquées ;, fig, 4. qui font entaillées dans la piece longue marquée , figure 3. Chaque fufeau eft garni d’une plaque de plomb qui eft placée au-deffous de la bobine dans la partie quatrée de ce même fufeau , pour lui donner plus de poids & de facilité à tourner fur lui-même. Le haut de chaque fufeau eft rond & poli; il eft -- . NE 787 garni d’une petite piece de bois mobile appeliéé co4. ronne, marquée #, fig, 4. autour de laquelle eft un fil-de-fer , dont une extrémité qui eft relevée étant courbée , forme une petite boucle marquée y, dans laquelle ef paité le.f/ qui à déjà paflé dans une autre boucle marquée x, qui fe trouve à l’autre extrémité’ du f/-de-fer qui vient répondre au milieu de la bo- be, comme il eft repréfenté dans la feure 4. La lifiere 2, 2, même figure, eft une courroie fans fin, laquelle paffant d’un côté fur le tambour 3 Je gurez. 6 venant fur un autre tambour tournant 4 même figure; attaché à une piece 8 & 09, au moyen d'un pilier folide 10, au haut duquel éft un trou où pañle une visavec fon écrou 11 : en toufnant la piece écroiée, on fait lâcher ou tirer la courroie 2 autant que le befoin l'exige ; & au moyen du mouvement que la grande roue 4 donne à la lanterne K, le tam bour qui lui eft adhérant tournant de même , le mou- vement qu'il donne à la courroie qui frote fur chaque fufeau , & qui fait le tour du moulin, fait qu'ils tour- nent tous enfemble avec une fi grande célérité, que le f/ fe trouve retordu lorfqw’il arrive fur lafpe où devidoir, quoiqu'il ne tourne pas doucement. La courroie eft foûtenue par des bobines tournan- tes 5, 5 , fig. 4. Les bobines font placées entre les fu feaux de deux en deux, & fervent à deux fins: la premiere eft que les bobines étant cavées quärré- ment, & placées de façon qu’elles preffent la cour- roie, leur cavité foûtient cette même courroie, la- quelle , fans cette précaution , tomberoït infenfble: ment au bas des fufeaux. La feconde eft que les bo- bines placées avec une juftefle convenable, tien: nent la courroie appuyée legerement contre le bas des fufeaux , fans quorelle ne pourroit pas les faire tourner avec cette régularité qu’exige la préparation de cette matiere, La figure 3. eft le moulin yû de face , le bâtiment du moulin qui eft nn quarré long de 16 piés fur 4 de large, ajufté & mortoifé comme la figure le démon: tre ; arrêté par le haut avec deux pieces cintrées 16, Les moulins de cette efpece n’ont pas eu autant de fuccès qu'en s’en promettoit, parce que la cour- troie qui donne le mouvement aux fufeaux qui por- tent les bobines remplies de £/, tirant fur une même ligne, il falloit une extrème jufteffe pour qu’elle ap- puyât également fur chacun de ces mêmes fufeaux auxquels elle ne donne le mouyement que par le frotement qu’elle fait fur la partie élevée qui £ trou- ve dans Le bas de ces pieces , qui tontes doivent être pañlées au tour, pour être de la jufteffe requife, La figure 2. eft le moulin vû de côté, La Jig. 3. eft celle du mouvement, compofé des rouages dont il a été fait mention dans la figure 1. La figure 4. indique la façon dont les fufeaux font placés : les autres pie- ces féparées démontrent la façon dont elles doivent être compoiées en grand. Les moulins quarrés ayant pas paru propres à donner toute la perfeétion dont les f/s & les laines étoient fufceptibles, attendu lirréoularité qui fe trouvoit dans la courroie | qui , comme on l’a dé montré , tournant fur une ligne droite, caufoit des mouvemens irréguliers & indifpenfables dans quel- ques fufeaux , 1l fut queftion de remédier à ce dé- faut ; & pour y parvenir On inventa des moulins ronds, tels qu'ils font repréfentés Planche III, Ce moulin, dont le mouvement eft à-peu-près égal à cel de ceux qui font quarrés , a cette propriété dif- férente de ces derniers, que la courroie fuivant les fufeaux fur la circonférence d’un cercle , & fe refa ferrant fur le tambour, il n’eft pas poffible qu’elle ne porte jufte par-tout ; 8 au moyen de cette jufteffe, les fufeaux tournant avec une parfaite égalité, la matiere fe trouvoit mieux préparée : le mouvement étant d’ailleurs plus fimple, 1l falloit moins de peine 188 FIL ou de force pour le faire agir. Voyons la defcription. Dans la figure 1. de la vignette, les pieces À font quatre piliers qui foûtiennent toute la machine; la manivelle attachée à un arbre qui foûtient la roue à cheville marquée 4, figures 3. 6 4. & la roue à lan- terne » donnent le.mouvement à toute la piece. La roue à lanterne # donne le mouvement à la grande roue cadhérante, & garnie de l’afpe ou du devidoir 4, pour recevoir le fi retordu qui eft fur les fufées G , fig. 6. La roue à chevilles donne le mouvement au tambour $, fur lequel la courroie fans fin M fai- fant un tour & enveloppant les fufeaux, elle produit le retors par le mouvement qu’elle leur donne. Il eft néceflaire que la courroie fafle un tour fur le tambour, afin qu’elle ne gliffe pas deflus. | Vis-à-vis le tambour eft une efpece de bobine tournante marquée #, dont l’objet eft d'avancer ou de reculer, au moyen d’une vis qui donne l’exten- fion néceffaire à la courroie, autant que le befoin du moulin Pexige. Les bobines cavées marquées N, qui foûtiennent la courroie , tournent fur le pivot qui les foütient , & font placées en diftance de trois fufeaux , au lieu que dans le moulin quarré la diftance n’eft que de deux, attendu la ligne droite que décrit la courroie, qui a befoin d’être plus ferrée. Les fufeaux font fem- blables à ceux du moulin quarré ; mais les bobines qui en font fupportées, font différentes & plus fim- ples : elles font repréfentées par les figures féparées D, E, F. Celles-ci n’ont ni couronnes ni f/-de-fer pour recevoir le brin de f/ ou de laine qui doit être retordu ; un fimple trou à l'extrémité de la bobine fur laquelle le f/ eft devidé en pyramide, fuflit pour préparer la matiere, dont la confiftance n’exige ni couronne ni f/-de-fer, ces dernieres pieces n'étant enufage aujourd’hui que pour le moulinagedesfoies, dont la délicateffe exige plus de précaution qu’une matiere plus ferme, excepté néanmoïns Les f/s defti- nés pour Les dentelles de haut prix, dont la délica- teffe ne differe pas de celle des plus belles foies. Ces fils , avant que d’arriver fur l’afpe , pañlent aufli à- travers des trous qui les y dirigent. La figure 2. de la vignette eft une repétition de la premiere, tournée différemment. La fg. 3. montre la forme du moulin repréfentée dans toute fa circon- férence ; elle eft ouverte d’un côté, pour y placer le roüage repréfenté dans la figure 4. La figure 5. eft le côté oppofé de la 4°; la figure 6. la forme des deux parties qui forment la circonférence du moulin. On ne penfe pas devoir donner une defcription de toutes ces parties, qui font fuffamment repréfentées dans celle de la figure 1. + Quoique le nombre des moulins ronds foit confi- dérable , les artiftes qui fe piquent de délicatefle dans leurs opérations, y ont trouvé des défauts, en ce que l’afpe ou devidoir qui ramaffe le #7 préparé pour en former des écheveaux, eft trop éloigné des fu- feaux qui fe trouvent dans le milieu de la circonfé- rence de ces mêmes moulins, qui lui font diamétra- lement oppofés, &c trop près de ceux qui le joignent. Ils ont donc imaginé un moyen de les rapprochertous de même, fanstomberdansles défauts, foit du moulin quarré , foit du moulin rond ; l’un péchant par la dif- ficulté d'entretenir le mouvement jufte , au moyen de la courroie ; & l’autre par l’éloignement d’une partie des fs, dont la trop grande diffance de l’afpe à la fufée caufoit un ébranlement dans le f/, qui l’empêchoit d’être aufli parfait que celui qui étoit plus près. Or , comme il étoit néceflaire que cette nouvelle machine ne ft ni quarrée ni ronde , on fe propofa . de la faire ovale, nom qui eft demeuré à tous les moulins qui fe font aujourd’hui dans ce genre ; il y a des ovales fimples & des ovales doubles, les ovales AA E RE fimples font faites uniquement pour préparer la foie employée aux ouvrages de bonneterie : on ya ex- pliquer les mouvemens d’une ovale double. Le mouvement de cette ovale qui eft double , ne différe en aucune façon de celui du moulin rond; la différence qui s’y trouve, eft qu’au lieu d’une ran- gée de bobines 1l y en a deux, conféquemment au lieu d’une courroie, deux, & au lieu d’un afpe ou devidoir , deux ; 1l faut en expliquer les parties. On voit figure 2. toute la méchanique & le roua- ge du moulin, qui ne peut pas être vû dans la f- gure 1. B 6 D eft le bas de l’ovale qui porte toute la machine ; on l'appelle communément /4 sable, C eft le pilier du milieu oppofé à l’ouvrier qui tourne la machine. —Æ, figure 1. eft la table ou foufflet qui porte le pre- mier rang des bobines &êc fufeaux ; F eft celle qui porte lefecondrang. G repréfente la premiere cour- roie ; A la feconde courroie ; I une poulie longue qui refierre la premiere courroie. À, une poulie femblable , qui refferre la feconde courroie. M, un des montans ou piliers de l’ovale. N le tambour fur lequel font pañlées les deux courroies. O la roue à cheville traverfée par la manivelle , qui donne le mouvement au tambour. P , l’arbre du tambour, au bout duquel eft la lanterne Q qui donne le mouve- ment à la roue À, figure 2.traverfée par un arbre, aux extrémités duquel font deux lanternes $ qu donnent le mouvement aux deux roues T adhéran- tes-êc attachées aux deux afpes ou devidoirs , qui ramaflent le £/ préparé, & fur lefquels il fe forme en écheveaux. W, figure 1. la partie de l’afpe oppo- fée à celle de la roue. À, une figure ovale &c fixe, percée en autant de partiestqu'l y a de fufeaux , dans les trous de laquelle paffent tous les f/s qui vont fur le devidoir. C’eft au moyen! de ces trous, dont l’arrangement eft jufte,que les écheveaux fe forment, parfaitement féparés. Ÿ, figure 2. où les dents de la figure Z indiquent le paflage du f/ des deux rangées de bobines. Les figures 2. 3. 4.& 5. font différentes de la fg. r. vûe , foit de profil, de face , ou du plan ; l’explica- tion qui vient d’être faite de la figure 1. eft plus que fufifante pour donner à connoitre quelle eft la conf- truétion de cette machine. Voilà où l’on en étoit lorfque M. de Vaucanfon, en examinant ceméchanifme avec les yeux d’un mé- chanicien délicat, vit quele retorsne pouvoit jamais être égal , tant qu’il dépendroit du frotement d’une courroie ; il perfeétionna donc encore le moulin : nous parlerons de cette découverte à l’occafñon du moulin à foie , à l’arsicle SOTE ; voyez cer article. L'’ufage de ces moulins ovales ayant été deftiné pour retordre les fs , les laines & les foies, on ob- fervera que la quantité de f/5 qu'on eft obligé de re- tordre eft confidérable, fi on fait attention que celux dont on fe fert pour faire la dentelle doit être re- tors, fans quoi elle feroit de peu de durée, & nefup- porteroit pas trois ou quatre blanchiffages ; tous les fils à coudre , cordonnets de poil de chevre, doivent aufli être retordus ; on ne fe fert pas d’autres ma- chines pour leur donner cette préparation ; tous les fils qui fervent à faire des liffes , foit à deux bouts, foit à trois, doivent être préparés fur ces moulins, en obfervant néanmoins, que pour retordre un fZ ou le monter à trois bouts , il faut joindre trois bouts enfemble. La quantité de f/s à trois bouts que les manufaëtu- res d’étoffes d’or, d'argent & foie du royaume em- ployent pour faire leurs liffes, ne laifle aucun doute , fur la quantité de moulins de cette efpece qui doi- vent fe trouver dans le royaume , fur-tout en Flan- dre , d’où eft tirée la principale partie de cette mar- chandife, Si Si la quantité de fs préparés de cette façon , exi- ge qu'il y ait un grand nombre de moulins de cette elpece dans le royaume, celle de la laine pure, celle de la foie mêlée avec de la laine , celle du poil de chevre, & celle de la foie ,en doivent augmenter confidérablement le nombre. | s La longueur du 77 & fon poids étant donnés , il eft clair que fa fineffe eft d'autant plus grande qu'il y a plus de longueur & moins de poids , ou que fa fnefle eft , comme difent les Géometres, en raifon compofée de la directe de fa longueur & de l’inver- fe de fon poids. On exprime ce rapport par des nu- mero qui Vont depuis 3 jufqu’à 400. Les fs les plus connus font ceux d’Epinay en Flandres, de Flandres ; le f/à gant ; le f/à marquer; les f£is de Malines, d'Anvers & de Hollande ; celuide Malines eft fin qu’on l’apperçoit à peine, & qu'il faut le garantir de Ad de l’air ; il s'employe fur-tout én dentelles ; on parle encore du £/ de Ren- nes , de celui de Cologne, qui fe file à Morlaix, & des fs de Normandie. FIL DE LA VierGE, ( Phyf.) Le peuple ap- pelle ainf certains filamens blancs , & quelque- fois aflez épais, qu'on voit voltiger en l’air dans les jours d'été pendant les grandes chaleurs. On a crû autrefois que c’étoit une efpece de rofée d’une na- ture Re & vifqueufe, que la chaleur du foleil condenfoit pendant le jour. On croit aujourd’hui aflez communément que ce font des toiles d’arai- gnées , emportées & difperfées par Le vent : nous ne iommes ici qu’hiftoriens , & nous ne prétendons ga- tantir mi l’une ni l’autre de ces explications. Je croi- rois volontiers que les petits filamens très-fins, dont On voit les plantes couvertes en certains jours d’été, peuvent être en partie produits par les araignées des champs, appellées faucheux ; maïs je ne voudrois pas aflürer que tous ces filamens , dont le nombre eft fi confidérable, fuflent leur ouvrage ; encore moins, que tous les filamens épais que l’on voit voltiger dans l'air un beau jour d'été , ne foient produitsque par ces infeétes : quelle en eft donc la caufe ? jecrois qu’on Pignore , ou du moins qu’on n’en eft pas bien aflüré. (O0) | | Fiz DE PEUX (Hydr.) C’eft un rang de pieux équarris & couronnés d’un chapeau arrêté à tenons & mortoïfes , ou attaché avec des chevilles de fer, pour retenir les berges d’une riviere , d’un étang, ou pour conferver les turetes & chauflées des grands chemins.(X) re + FIL-DE:FER ( Chimie mérallure. ) inflrument, au moyen duquel on réfume les matieres contenues dans les tarts , coupelles , creufets : on en a de.dif férentes grofleurs ; celui , par exemple , qui fert à faire defcendre les charbons par l'œil du fourneau deflai , peut avoir trois ou quatre lignes de dia- metre, &ceft garni d’un manche : la longueur & lu- fage des autres détermine leur grofleur : il eft ce- pendant bon.d’obferver qu'il vaut mieux les pren- dre trop gros que trop petits ; parce que pour lors 1ls font reflort &font fauter les matieres des effais, -qui deviennent faux par-là, Il y en a de droits , de ul L'une & l’autre de ces deux méthodes'a fes incon- véniens. Il femble que le fl qu’on a flé à la quenouil- le doit être plus fort, par la raifon que le chanvre s'y trouve dans toute {a longueur; mais auffi cela occafionne un déchet confidérable | en ce querles brins courts tombent par terre. Cet inconvenientine fe rencontre pas quand on file à la ceinture. n à Soit que lerf/eur trävaille à la ceinture ou‘bien‘à la quenowille ; voici comment il s’y prend. "Tandis qu'un homme fe met à lamanivelle du rouetipour tourner la roue, le f/eur prend un pergnon-qu'il ajufte à fa ceinture ou à fa quenouille ; & aÿyantfait une petite boucle de chanvre, 1l l’engäge dansile crochet d’uñe miolette. Comme la moléttetourne., le chanvre qu'il y a attaché:fe tortille:; 62 le é/eur fourniffant du chanvre à mefure qu'il recule, com- mence à former un bout de.fil: poutlors il prend dans {a maindroiïteunboutdelifiere (7 CORDÉRIE) qu'on nomme we pawmelle ; & en ayant enveloppé le fil qui eft déjà fait ,il ferre fortement latmrain & tire à lui: en tirant ainf ; il empêche le fil de fetortil- ler fur lui-même & de fe gripper ; &c ‘en-ferrant la main 1l retient le tortllement qu'imprime la roue, juiqu’à jufqu'àce qu'il ait bien difpofé avecla main sauche le chanvre, qui étant tortillé, doit augmenter la lon- gueur du fil’: alorsil defferreun.peu la main droite, & le tortillement fe communique au chanvre qui avoit. été difpofé par la main gauche ; &en reculant un petit pas , il fait glifler la lifiere fur le fl qui fe tortille, atuellement. En repétant cette même ma- nœuvre, Le fil prend de la longueur ; & quand il en a aflez,, le fZeur l’accroche dans les dents d’un ratelier; ce qu'ilrepetedans la longueur de la filerie toutes. les fois qu'illle juge à propos, car il y a de ces rateliers de diftance en diftance.. Quand le fleur eft arrivé au bout de la filerie, il en avertit par un cri : alors on détache le fl de la mo- lette,, 62: on fe difpofe à. le devider fur les tourets. Voyez L'article CORDERIE, 6 Les Planches, FILEUR,, ( Drap.) ouvrier employé dans le travail des étoffes en laine. Voyez l’article MANUFACTURE EN LAINE, au mor LAINE, :FILEUSE, f. f. (Manufaëlure en foie.) ouvriere employée au travail.& à la préparation de la foie, Voyez l'article Sors. - FHEUX-07 TAQUETS, 1 m. (Marine) ce {ont des crochets de bois à deux branches courbées en façon de croiflant | que l’on attache ordinairement au vibord pour amarrer les manœuvres. (Z) FILTAL,, adj. ( Théo, ) fignifie ce qui appartient à la relation de fils ; voyez FiLs. | Les théologiens diflinguent la crainte fervile 8 la crainte flale : la crainte, qu’ils. appellent fimple- ment fervile , fmpliciter fervilis , eft bonne & loua- ble : celle qu’ils nomment fervilement fervile , /er- viliter fervilis, eft mauvaile ; elle fe trouve même dans le cœur des plus grands fcélérats: mais la crain- te, mor filialis, qui réfulte de l’amour & du refpe& flial, eft la plus parfaite, & fe rencontre dans les ames les plus juftes ; voyez CRAINTE. (G) FILIATION , f. £. ( Jurifprud. ) c’eft la defcendan- ce de pere en fils. | La maxime de droit en matiere de #/arion , eftque pater eff quem nuptiæ demonflrant ; mais cela ne s’en- tend que de la filiation légitime qui procede du ma- triage, & il peut auf y avoir une farion naturelle qui eft celle des énfans procréés hors le mariage. L’ordonnance de 1667, tit. xx. art, 7 , veut que les preuves de l’âge & du mariage foient reçües par des regiftres en bonne forme, qui font preuve en juflice. L'art. 9. ordonne que dans l’article des baptèmes, il fera fait mention du jour de la naïffance , qu’on y nomme l’enfant , le pere, la mere , le parrain & Îa marraine, | _n Il eft ordonné par l’article fuivant , que les bapté- mes feront écrits aufli-tôt qu’ils auront été faits, & fgnés par le pere, s'il eft préfent, & par les parrains & marraines , & que fi aucuns ne favent figner , ils le déclareront, étant de ce interpellés par le curé ou 4icaire, dont il fera fait mention. Si les regifires des baptêmes font perdus , ou qu’il n’y en ait jamais eu , l'art. 14, porte que la preuve en fera recüe , tant par titre que par témoins, & qu’en lun & l’autre cas, les baptêmes & mariages pourront être juftifiés , tant par les resiftres ou pa- piers domeftiques des pere & mere décédés , que par témoins , fauf à la partie de vérifier le con- traire. Il y a encore des cas où l’on eft obligé d’avoir re- cours à d’autres preuves qu'aux regiftres de bapté- mes, &t où la preuve, même teftimoniale, eft admi- fe : c’eft lorfque l’enfant n’a pas été baptifé ni on- doyé , ou que l’aéte n’a pas été porté fur les regif- ttes, Ou que l’enfant y a été déclaré fous des noms fuppofés. 7 L'éducation donnée à un enfant n’eft pasfeuleune Tome VI, hs à EE 197 preuve de flation ; mais la pofleffion d'être traité comme enfant , eft une preuve aflez forte & fuit pour faire adjuger à l’enfant une provihon .alimen: taire jufqu’à ce que le contraire foit prouvé, Poy.la loi 1, , 12, ff. de agnofc. liberis , Stlalos i4k au cod. de probat. Franc-Marc,, r, IT. queff, 4.57..Soel- Veszom. l, cent, 1.ch, xxxjv. &tiom. IT,cens, 16h ce Boniface , om.dV. Liv, IX-ris, IV. ch 17, Baflet,, tom, LE, div, IF, dix, XII, ch. j. Voyez aufi ENFANT ji ÉTAT : 6€ ci-après , FILS LÉGITIMÉ , MARIAGE j PART, SUPPOSITION-DE PART. (A4) FILIGULE , ficula (-Hiff, nas, bor.) génre dé plante, dont, les feuilles refflemblent en quelque façon à celles de la fougere. Tournefort » 2nfbs, FL. herb. voyez PLANTE. (7) | FILIERES, f. f, serme d'ouvrier de bätiment, Veiries à plomb , qui interrompent les bancs dans les cara rieres, & par où l’eau diftille.de la terre. (P) FILIERES,, erme d’ufage dans es ardoiferies Voye£ Particle ARDOISE. ! FILIERE., serme d’Aiguilliers | eft un morceau de fer plat, percé d’une grande quantité detrous, tous plus petits les uns que les autres, par lefquels es aix guilliers font pafler fucceffivement un cylindre d’a= cier , jufqu’à ce qu’il foit parvenu à former un fil de. la groffeur qu'ils veulent donner à leuts aiguilles. FILIERE, oucil d’ Arquebufier : cette filiere reflemblé à celle des horlogers , ferruriers , &c. & fert aux ar- quebufiers pour former des vis fur des morceaux de fer rond; ils en ont de plufieurs. grandeurs, & percés de trous plus grands & plus petits, FILIERE DOUBLE , outil d’Arquebufier, .c’eft une efpece de compas plat & large d'environ trois pou- ces, dont chaque branche eft coupée par en-bas , & fe termine par deux petits manches ronds ;un peu au-deffus de ces petits-manches en-dedans. , eff un: tenon. qui.eft retenu. demeure dans la branche droite , 6 qui entre dans un trou vis-à-vis le tenom. & pratiqué dans la branche gauche ; le milieu de ce compas eft percé de plufeurs.trous viflés comme les trous de fiere , & plus larges d’un côté que de l’au tre ;les arquebufers s’en fervent pour former des V1S pointues, OUR ml sh, FiLIERE, erme & outil de Chaïnetier; c’eftun mor: ceau d'acier de la longueur de fept ou huit pouces, qui eft percé de plufieurs trous de différens calibress & qui fert aux Chaînetiersà diminuer la groffeur du fil-de-fer , du cuivre & du laiton qu'ils veulent em ployer ; cela fe fait en faifant pañler leurs fils parles trous de cette f£/iere d’un plus petit calibre que n°eft le fil; pour y parvenir, ils commencent par limer en- viron un pouce de leur fil de la groffeur à:peu-près du trou de la fiere par oùils le veulent faire pañfer ; ils aflujettiflent leur f{/iere devant les coins du banc à tirer ; ils font fortir le petit boutlimé & qui excede le trou de la fiere , par La pince qui eft au bout de fa fangle , qui fe roule fur le noyau du banc à tirers après quoi l’ouvrier fait tourner le moulinet dudit banc à tirer, ce qui force le refte du fil à pañler par le trou de la ffere , & à diminuer degroffeur. Foyez BANC À TIRER. | FILIERE , outil de Charron ; cette flliere eft un mot= ceau d'acier plat percé de plufieurs trous en vis de différente groffeur;les Charrons s’en fervent pour former des pas de vis fur un morceau de fer rond. FILIERE, e7 cerme de Cirier , c’eft une plaque de cuivre ronde ou quarrée, percée de plufieurs trous dont la grandeur va toûjours en augmentant de lun à l’autre d’un degré feulement: ces trous font plus larses d’un côté que de l’autre, afin de vuider la matiere fuperflue du cirier. | | FILIERE , e7 terme d’épinglur , Ceftune plaque de fer plus ou moins longueë& large, percée de plufieurs trous, dimiguant toñjours PrOPOrHeNnE lement de LAxii 798 FIL grofleur. Ceft dans la fiere qu’on réduit le filà telle grofleur qu'on veut , en le faifant pafler à force par chacun de ces trous fucceflivément, | Fiiere, outil de Luthier, repréfentée dans os Planch: € fig. de Lutherie ; eft une machine qui fert à mettre d’épaifleur les petites planches de hêtre ou til lieul où d'ivoire , avec lefquelles on fait les filets qui entourent & bordent les tables dés infirumens, comme violons, bafles , violes, 6’, auxquels ces filets fervent d’ornemens: Pour former les filets , on prend de petites plan- ches d’un pouce environde large, & d’une longueur à difcrétion, que l’on refend comme du bois de pla- cage , & dont on égalife l'épaifleur en les pañlant plufieurs fois dans la fere. La fire éft compolée de deux parties : linfé- rieure , que l’on appellé Z4/e ; & que l’on aflujettit dans un étau par la partie 4 , lorfque l’on veuts’en fervir ,à une mortoife qui reçoit un fer de guillau- me de la forme de la lertre T, que l’on ferre dans la mortoife par le moyen dun coin de bois , enforte que le tranchant du fern’excede que très-peu la fur- face fupérieure de la bafe, dans laquelle eft encore pratiquée une ouverture latérale ; qui eft la lumiere decet outil, & par laquelle s’échappentles copeaux ouracluresque le fer emporte , en agiflant fur les pe- tites planches. Les extrémités C D de la-bafe font, l’une féndue pour recevoir l'œil d’une vis € X, qui travérfe La piece fupérieure F G , que l'on appelle la técé de la filiere : l’autre extrémité de la bale eft traverfée par une vis à laquelle cette partie fert d’e- crou , & dans laquelle cette vis peut être fixée par : Ja contre-vis ;& qui traverfe une des faces latérales. La tête de la fliere G F'eft traverfée en F par la vis C X fur laquelle pafle un écrou à oreille ; cette vis & la vis AK , terminée en X par un rivet à tête ronde , fervent à approcher ou à éloigner les deux parties de la f/iere l’une de l’autre; toutes ces pieces font de cuivre. La partie X N de la fiere, &c qui fait face au fer dé guillaume , eft doublée inférieurement d’une pla- que d'acier, fur & entre laquelle & le fer, pañlent les lames de bois que l’on veut égalifer, & que l’on égalife en effet avec cette machine en les y paflant plufieurs fois fucceflivement ; & en reflerrant la j- liere, on les réduit au degré d’épaiffeur convena- ble ; qui ‘eft d'environ une demi-ligne ; réduétion à laquelle on'ne fauroit parvenir en fe fervant feu- lement d’une varlope ; vü que des planches auf minces plieroient. fur l’établi; & d’ailleurs la patte de l’établi n’auroit pas de prife fur leur petite épaif- feut : c’eft fans doute cé qui a rendu cette machine néceffaire ; on pourfoit en faire une beaucoup plus fmple, mais moïns commode, & qui fufiroit ce- pendant pour plufieurs ufages ; telle eft celle repré- fentée dans zos Planches, qui ne confifte qu’en une fimple fourchette de bois , dans un des fourchons de laquelle on adapte un fer de varloppe que l’on af- fjettit avec un coin: l’autre fourchon eft revétu in- térieurement d’une plaque de fer , qui oppofe plus de réfiftance que ne feroit le bois aux planchettes que l’on veut égalifer , & que l’on pañle à differen- tes réprifes entre le fer de varlope & laplaque, com- me dans la filéere précédente. Après que les petites planches de bois font égali- fées , on les refend à deux ou trois lignes ‘de lar- eur, avec un trufquin, & on s’en fert pour former Les filets , ainfi que nous allons expliquer. L'inftrument auquel on veut adapter cet orne- nent étant prefque entierement achevé ,on prend le trace-filet, fig. 43 ou 48 ,n°.1. ( Woyez TRACE-FILET Ou TIRE-FILET ) qui n’eft autre chofe qu’un petit trufquin , dont on applique la joue # ou G fig. 48. contre la circonférence de la table de l’inftrument: on conduit ce trufquin , enforte que Îe fer fourchuz ou £ Dtrace fur la table deux lignesparalleles entr’- elles & au pour-tour de la table : cela fait, on évnide l'intervalle compris entre les deux traits paralleles avecde petitsbecs-d’âne & autres outils femblables aux pointes à graver des graveurs enbois:cette opé- ration achevée , on reprend les petites regles de bois ou d'ivoire que l’on a pañlées à la f£/iere, on les colle fur le champ dans la rainure que l’on a pratiquée,en leur faifant fuivre le contour de la table , à la for- me de laquelle leur flexibilité fait qu’elles fe prêtent aifément. On afleure enfuite ces regletttes à la table de l’inftrument , & les filéts font achevés. (D) FiLIERE, ex cermes d’Orfévrerie, elt un morceau de fer d’un pié de long, de deuxpouces de large, & de fix à fept lignes d’épaiffeur. Ce morceau eft moi- tié fer & moitié acier, c’eft-à-dire qu’il eft compofé de deux bandes de même longueur , largeur 8e épaif- feur, que l’on foude enfemble l’une {ur l’autre ; lon y met du fer pour qu’elle foit moins fujette à fe caf- fer, parce qu’il faut que l’acier foit trempé dans toute fa force. Les filieres font de toutes les grandeurs que l’on a befoin, elles font percées de plufieurs rangs de trous plus larges d’un côté que de Pautre, pour donner une entrée plus libre. Le côté le plus large eft dans le fer; & le plus étroit, qui eft cel qui travaille, eft dans l’acier. j Les trous fe fuivent en diminuant graduellement, & font numérotés fur la f£/iere en commençant parle . plus grand, & finiflant par le plus petit. Lorfqu’il y a plufieurs rangs de trous dans une f- liere, on obfervé de ne mettre point Les grands au- deflous des grands, ce qui diminueroit trop la force de la ffliere ; mais on les perce de maniere que les plus petits font toùjours au-deflous ou au-deflus des plus grands. Il y a des filisres rondes, demi-rondes, quarrées plates-quarrées, étoilées, 6c. felon la forme qu'on veut donner au fil en le tirant. Voyez les Planches. On pourroit rendre la f£/iere beaucoup plus folide encore, en l’enfermant entre deux plaques de fer très-épaifles , auxquelles on pratiqueroit des ouver- tures coniques , pour que le fil fortit fans réfiftance. FILIERE À Vis, en terme d'Orfevre, eft un morceau de fer revêtu d’acier, même quelquefois d’acier pur trempé, dans lequel font pratiqués des trous ronds de diverfes grandeurs, comme à une jfäere ordinai- re: ces trous font dentelès en-dedans. Chacun de ces trous eft garni d’un autre morceau d'acier rond aufñi trempé, au bout duquel on a formé une vis en la faifant entrer un peu à force dans le trou qu'il garnit : ce morceau d’acier fe nomme sara. L’ufa- ve de cette ffliere eft de fervir à faire les vis d’or ou d’argent dont on a befoin. Quand on a choïfi la groffeur de la vis que l’on veut faire, on Ôte du trou adopté le tarau ; on prépare la matiere, & on forme la vis dans le trou de la fé/iere ; enfuite on perce fur fa plaque d'or ou d'argent, un trou moins grand que le tarau d'acier qui étoit dans le- trou où on a formé fa vis; on élargit enfuite ce trou avec la pointe de ce tarau ; & par un mouvement orbiculaire on for- me fon écrou dans fa plaque: au moyen de cette opération, l’écrou & la vis fe trouvent conformes l’un à l’autre. Voyez les figures. FiLiERE, (Taillanderie.) eft un outil qui fert aux Serruriers, Taillandiers, Horlogers, Orfevres, & à toutes fortes d'ouvriers qui font obligés de faire des vis pour monter leurs ouvrages. Il y a des fé/ieres de différentes façons , de doubles , de fimples. La filiere double eft celle qui eft compoñée des pie- ces fuivantes, qu’on voit dans %05 Planches de Tail- landerte. | | 1°. 5,6, 7, 8 & 9, eftune ff/iere à charniere com- is entre deux jumelles 6 & 7; la charniete 8, fa ride 5, la vis qui fait fermer à mefure qu’on a be- foin 9; 10 montre la bride féparée de la ere 3 1 la vis qui eff à filets ou par quarrés. 12,13, 14, eft une autre efpece de ff/iere double Qui a deux vis, qui font aux extrémités des jumel- les en 13 & 14; les jumelles 12; 15, 15, eft la mê- me fliere : on voit une des jumelles {éparée de fa vis, comme la jumelle 16. Autre filiere double 17, 18, 19 ; bras de laf£liere 17, corps de la fiere 19 , vis à filets quarrés & fervant à ferrer les jumelles lorfqu’on veut faire une vis 18 ; 20 entaille faite dans le côté du corps de la fere, dans laquelle coulent les jumelles. 21, 21, jumelles ; les jumelles font les pieces qui forment les filets de la vis. 22, 23, jumelles dela même fiere. 24 un des côtés de la même f£Zere, dont la cannelure eft faite avant de la couder. 25 la même fliere, dont les cannelures & tenons font prêts à être montés fur la piece 26. 27 mandrin qui fert à pratiquer l’efpace qui eff entre les deux côtés de la fliere. 28 la même Jiliere dont un des côtés eft tourné, & l’autre droit. 29 tête de la flere, dans laquelle les bras ou côtés de la fiere s’aflemblent à tenons & mortoifes. Autre efpece de fliere double dite à l’angloife. 31 & 32 les jumelles, femblables à celles de l’efpece précédente ; à cette différence près, que les côtés de la flliere précédente font creufés en dos d’Âne: au lieu que ceux de la fiere dont il s’agit, entrent dans les rainures ou cannelures qui font dans les côtés. 33 vis qui ferre les jumelles. 34, 35, bras de la filiere. Filiere femple ; c'eft une piece de fer plat, acerée dans le milieu, où font plufeurs trous taraudés pour faire les vis. Cette forte de ffiere fait les vis du pre- mer coup ; au lieu que les doubles ne Les font qu’à plufieuts repris. +, x, y, filiere fimple;x, x, trous filetés. | | FILIERE À vis, outil de Serrurerie, de Fabrica- teurs d'inflrumens de Mathématiques , de Tourneurs , Doreurs , Horlog-rs, &c. & généralement de toutes les profeffions qui ont befoin de vis dans leurs ou- vrages. Il y en a de plufieurs fortes. L’efpece la plus fimple (telle eft celle qu’on voit . repréfentée PJ. du Loreur) & qui fert également aux Horlogers, & que l’on nomme f/iere fimple ; confifte en une plaque d'acier percée de différens trous gra- dués, taraudés intérieurement, c’eft-à dire formés en écrous par des taraux convenables,& trempée enfuite au plus dur, Il y en a qui ont deux poignées ; d’autres n’en ont qu’une ; d’autres enfin n’en ont pas du tout, & ne font que des plaques d’acier taraudées , ainfi qu'il a été dit. Ces fortes de félieres ne fervent ordi- nairement que pour faire de très-petites vis, foit en fer, acier, ou cuivre. L'autre efpece de fliere , repréfentée dans os PI. de Taïllanderie, conûfte en un chaffis ou parallélo- gramme de fer BCE D, d’une grandeur & d’une \épaifleur convenables, La largeur B Cdoit égaler au moins trois fois le diametre des plus grofles vis que Von puifle fabriquer avec cet outil. À l'extrémité DE du chafiis eft un boffage X, percé d’un trou nomme æ/, dans le même plan que le chaffis : ce trou eft taraudé pour recevoir la vis HF du man- che HG. L'autre extrémité du chaffis eft terminée par le manche X 4, de la même piece de fer que le chaffis, ou rapporte dans un œil femblable à ce- lui qui reçoit la vis FC, fi on ne veut pas l'enlever de la même piece. Chacun des longs côtés du chaffis de la fiere eft gravé d’une rainure d’un calibre convenable > & à- peu-près large du tiers de l’épaiffeur du chaffis : cette rainure reccit les languettes ed, fg pratiquées aux couflinets, fg. 2. Ces couffinets font des morceaux d'acier, aufli longs, fans y comprendre les languet- Tome VI, FIL 799 _tes, que l'ouverture du chaffs eff large, & dans las quelle ils peuvent entrer au moyen des entailles à 30, pratiquées au chafls de la fiere. Ces coufinets font entailles à-peu-près femi-circulairement en ef, ta- raudés & trempés dur, d Pour faire une vis avec cet outil ; après avoir toui£s né le cylindre fur lequel on veut tracer ou former un filet , on Le met verticalement entre les mâchoires d'un étau ; &c après avoir choifi la paire dé couffinets convenable (car une fiere doit être flortie d’un grand nombre de couffinets } Pour pouvoir faire des vis de différentes fortes de pas, & fur différentes {or- tes de groffeurs de corps), on la placé dans le chaffis & par-deflus une piece plate de fer, pour recevoir la preffon de la vis F A: en cet état on préfente la f/ie- re au cylindre qui eft dans l’étau , enforte que le cy- lindre pate entre les couflinets, que l’on ferre contre ce cylindre en faifant tourner la vis FH parle moyen d’un levier placé dans le trou , que l’on fait tourner jufqu’à ce que la preffion foit fuffifante : en cet érat & après avoir arrofé d'huile le cylindre, on fait tour- nêr le chaffis de la fire , en tirant & pouffant alter- nativement les manches, jufqu’à ce qu’elle foit def. cendue jufqu’en-bas de la partie que l’on veu tarau- der. Par cette premiere opération , la vis n’eft guere que tracée fur le cylindre. On acheve de imprimer profondément, en réitérant cette opération autant de fois qu'il eft néceffaire ; obfervant de mettre de’ l'huile à chaque fois, tant pour faciliter le mouve- ment, que pour faire fortir les copeaux que les an- gles faillans internes des couflinets enlevent , en for- mant les vuides ou intervalles qui féparent les filets de la vis. Il faut obferver qu’au lieu d'huile on {e fert de cire, lorfque l’on veut tarauder des pieces de cui- vre. Un tarau, fg. 3. n’eft autre choie qu’une vis d'acier trempé, un peu conique , dont les filets font coupés, fuivant la longueur, par trois ou quatre gra- vures. [ls fervent à former les écrous & les couflinets qui font un écrou brifé, & à leur tour les couflinets peuvent fervir à former d’autres taraux. Le tourne- ä-gauche, fg. 4. percé de divers trous quarrés , fert à tourner les taraux dans les trous que l’on veut for- mer en écrous, en adaptant la tête du tarau dans un des trous du tourne-à-ganche , que l’on fait tourner, comme il a été dit des manches de la ere. Filiere a bois, ou pour faire des vis de bois, comme celles des preffes de Relieurs ; 6 autres. Cette forte de filiere repréfentée dans /es mémes Planches , confifte en un morceau de bois CDE F, auquel on a refer- vé les deux manches ou poignées 4C, B D. Le mi- lieu eft percé d’un trou taraudé avec un tarau fem- blable à ceux que l’on a décrits ci-defus.On applique au corps de la f/iere une planche de même grandeur & g. 8. percée d'un trou qui fert de calibre au cylindre de bois que l’on veut façonner en vis. Cette planche eft fixée , non à demeure, au corps de la fliere, par trois chevilles r, f', £, qui entrent dans les trous mar- qués des mêmes lettres fur la figure 7. On adapte au corps de la f/iere la piece d’acier, fig: 9 & 10, que l’on appelle l’#, à caufe de fa reffemblance avec ce cara- étere #7, & on l’y aflujettit parle moyen de la bride, fig. 11. &e de l'écrou, fg. 12. comme on voit en am 3 fig. 7. & eng, fig. G.enforte que la pointe e des deux tranchans fe, ge, fg. o & 10. réponde exa@ement à l’arête faillante de l’hélice de la vis interne , Ou de l’é- crou de la lire : en cet état elle eft prête à {ervir. Pour en faire ufage ; après avoir arrondi la piece de bois dent la vis doit être faite, & Pavoir mife de calibre & placée verticalement dans un étau ou autre chofe équivalente,on préfente la fiere le plan en em. bas ; on la fait tourner en appuyant pour l’amorcer ë aufh -tôt [7 coupe le bois, & forme par celui qu’il épargne le filet de la vis, qui s'engage dans le filet creux de la flere, &c fert par ce moyen de guide poux di ‘ei Hi 800 FIL {a continuation de la vis, fans qu'il foit befoin d’ap- puyer davantage. Les copeaux que | coupe, for- tent par une ouverture latérale À, fig. 6. pratiquée au corps de la fé/iere vis-à-vis de la gorge de l’F; com- me on le voit en pr", fig. 7. En une feule opération la vis eft achevée. Pour faire les écrous, on fe fert de taraux d'acier , femblables à ceux dont on fe fert pour le fer & le cuivre décrits ci-deflus , lorfque les écrous font petits ou médiocres : mais lorfqu'ils exce- dent deux, trois ou quatre pouces en diametre , com- me ceux des prefles & prefloirs , dont quelques -uns ont jufqu’à dix-huit où vingt pouces de diametre ; l’ufage des taraux de fer eft impofñble , tant à caufe du grand poids dont ils feroient, que de la longueur exceffive des tourne-à-gauche , dont il faudroit alors Le fervir ; & auffi du danger qu'il y auroit d’éclater & faire fendre les pieces de bois les plus maflives, en forçant Les taraux dans les trous deftinés à devenir des écrous. C’eft un exemple entre mille autres , qui peut faire connoître combien on s’écarteroit de la VÉ- tité, en concluant qu’une opération qui réufft très- bien dans le petit & le médiocre, devroit avoir le même fuccès en grand. Pour réuflir à faire les grands écrous, & parer les inconvéniens dont il eft fait mention, on a inventé une forte de taraux fort ingénieux ,repréfentés dans la même Planche, qui confiftent en un cylindre de bois, fig. 13. de même groffeur que le corps de la vis, non compris le filet, & dont la partie fupérieure ef gravée d'une hélice concave, formée par un trait de {cie, & dont on trouve l’épure en divifant la circon- férence du cylindre, en un grand nombre de parties égales , par des fignes paralleles à l’axe , &c la lon- gueur , par des cercles paralleles aux bafes, que l’on trace {ur le tour à des diftances égales entre eux , 6 égales à la diftance des filets de la vis. On divife en- fuite l'intervalle compris entre deux cercles paralle- les, en autant de parties égales que lon a tracé de li- gnes verticales ; & portant fucceflivement, 1,2,3, 4,556 7 8, &c. parties fur les verticales , à comp- ter toûjours d’un même cercle, on a les abfciffes de lhélice , auxquelles les portions de circonférence comprifes entre les lignes verticales paralleles à l'a- xe, fervent d’ordonnées: par ce moyen, on a un très-orand nombre de points de la courbe, que l’on grave enfuite par un trait de fcie. On peut aufli tra- cer cette courbe par le moyen expofé à l'a. ETAU. On perce dans la partie inférieure une mortoife perpendiculaire à l'axe, dans laquelle on place un fer de grain d’orge , fig. 14. que l’on y aflujettit avec un coin, comme les fers des outils des Menuifiers : ce fer doit être d’une telle longueur, qu’il ny ait que fa _ pointe qui excede un peu la furface du cylindre ; &e le tarau eft achevé. La figure 14. repréfente le guide, qui n’eft antre chofe qu’une planche quarrée, percée dans le milieu d’un trou , de calibre au cylindre , fur Le bord duquel on a adapté un plan incliné de biais r f£4 , dont la hauteur y # eft égale à la hauteur ou diftance des f- lets de la vis. Ce plan incliné eft recouvert d’une pla- que de forte tole rfr, aflürée avec des vis à bois ) & dont l’arête interne faille en-dedans du trou. Pour former cette plaque, on décrit deux cercles concen- triques ; Le diametre de l'extérieur eft égal au diame- tre extérieur du plan incliné , & l’intérieur égal au diametre du tarau, figure 1,3. moins deux fois la pro- fondeur du trait de {cie qui forme l’hélice du tarau ; on perce enfuite cette plaque de tole , ne refervant que la couronne comprife entre les deux cercles con- centriques, que l’on coupe fuivant un rayon, afin de pouvoir élever.une partie env, &c abaïfler l’autre en s fur le plan incliné du guide où on la fixe , comme ona dit, par des vis. La planche 4BCD eft encore percée dans les quatre coins , pour laifler pañler des. clous qui fervent à fixer le guide fur la piece de bois - que l’on veut tarauder. Pour fe fervir de cestaraux; après avoir percéle trou qui doit devenir écrou, on fixe la piece de bois fur un établi de menuifier, par le moyen d’un valet, comme on peut voir fig. 16. &c après avoir pañlé leta- rau dans fon guide , on attache ce dernier fur la pie- ce de bois, au moyen de trois ou quatre clous ; & ayant adapté enfuite une manivelle ou un tourne-à- gauche, on fait tourner le tarau, dont le grain d’or- ge ou fer grate ou coupe le bois de la furfaceinterne du trou, & commence à y former une hélice conca- ve; puifqu'à mefure que le tarau tourne, la plaque de fer du guide qui eft engagée dans le trait de fcie du tarau , le contraint de defcendre. Par cette premiere opération, l’écrou n’eft que tracé. Pour achever de le former entierement , on releve le tarau , auquel on donne plus de fer, c’eft-à-dire que Pon fait fortir davantage le grain d'orge , qui en tournant Le tarau, élargit & approfondit le filet concave de l’écrou , que lon acheve par ce moyen, en réitérant cette opération autant de fois qu'il eft néceffaire. On peut , comme nous avons dit, avec cette ma= chine faire de très-gros écrous fans y employer une force confidérable,puifque l’oneft maître de prendre plus ou moins de bois, en donnant plus où moins de fer : d’ailleurs on ne court jamais de rifque de fendre là piece de bois que l’on taraude , & dont on doit obferver d’évafer un peu l'entrée avant d’y appli- quer le guide. (2) FILIERE , cerme de Tireur- d'Or, morceau de fer ou d’acier, percé de plufieurs trous inégaux, par où l’on tire & fait pañler l'or, l’argent , lefer, & le cui- vre, pour le réduire en fils auf déhés que l’on veut. Ces trous, qui vont toüjours en diminuant , fe nom- ment pertuis ; leur entrée eft appellée embouchure, 8& la fortie cl ; & felon leurs différens ufages on nom- me ces morceaux ou plaques de fer, calibre, ou f- liere, ou ras , Ou prégaton , ou fer-a-tirer, On fait paf. {er le lingot par environ quarante pertuis de la frere, jufqu’à ce qu’on lait réduit à la groffeur d’une plume à écrire ; après quoi on le rapporte chez le tireur-d’or pour le dégroflir , par le moyen d’un banc fcellé en plâtre qui eft en maniere d'orgue, que deux hommes font tourner : là on le réduit à la groffeur d’un ferret de lacet, en Le faifant paffer par vingt pertuis, ou en- viron , de la filiere , qu’on appelle ras. Cela fait, & le fil d’or ayant été tiré fur un banc , appellé banc 4 cirer , on le fait pafler par environ vingt pertuis de la filiere appellée prégaton , jufqu’à ce qu'il foit en état d’être paflé avec la petite fé/iere appellée fer a tirer. On ouvre alors un pertuis appellé zeufou fer a tirer, & on y pañle le fil d’or ; puis on retrécit ce même pertuis avec un petit marteau, furunras d’acier; &c enfiute non-feulement on le polit avec de petits poinçons d’acier fort fins , mais on le rabat & repolit de la même forte, jufqu'à ce que le fil d’or ne foit pas plus gros qu'un cheveu , enforte qu’on pruffe le filer fur de la foie. Lorfqu’il eft en cet état, on l’écache en- tre deux rouleaux d’un petit moulin. lis font d’acier fort polis , & fort ferrés {ur leur épäiffeur qui eft d’un bon pouce , & ils en ont trois de diametre. On met le fil d’or entre deux, & l’om en tourne un avec la ma- nivelle. Ce rouleau fait tourner l’autre ; &c c’eft ainf que le fil s’écache: après quoi il eft en état d'être filé {ur la foie, pour les différens ouvrages où lon a def: {ein de l’employer. Foyez DUCTILITÉ. Chambers. FILIERE, rerme de Fauconnerie; c’eft une ficelle d'environ dix toifes, qu’on tient attachée au pié de loifeau pendant qu’on le reclame, jufqu'à ce qu'il foit affüre. FILIERE, serme de Blafon, qui fe dit quelquefois. du dirninutif de la bordure, lorfqw’elle ne contient que la troifieme partie de la longueur de la bordure _ ordinaire, Di&, de Trévoux, FIL FILIPENDULE,, flipendula, { {. (Hif. nat. bor,) genre de plante à fleurs en rofe compofces de plu- fieurs petales difpofées en rond. Le piftil fort d’un calice qui eft d’une feule piece terminée par plufieurs pointes, Ce pifil devient dans la fuite un fruit pref- que rond, dont les femences font rafflemblées & ran- gées comme les douves d’un petit muid. Tournefort, énff. rei herb. Voyez PLANTE. (1) FiLIPENDULE, (Mar. med.) Boerhaave en comp- te deux efpeces, & Miller trois ; mais nous ne parle- rons que de celle qui eft d’ufage en Medecine, & que les Botaniftes nomment flipendula, Of. I. B. 3. P. 2. 189. Ger. 900. Emac. 1058. Raï Æiff, 1. 623. Sy- nops, 3,259. Merc, Pin, 38. Doc. Pempr, 56. Sa racine eft chatnue, noirâtre : il en fort des fi- bres menues, qui ont à leur extrémité des tubercules de la figure d’une olive, ou plus longues & moins groffes, comme dans l’afphodele , noirâtres en-de- hors , blanchâtres en-dedans , ayant de l’acrimonie mêlée d’aftriétion &c de douceur avec un peu d’amer- tume, Ses feuilles font en grand nombre près de la racine, femblables à celles du boucage , plus étroi- tes, découpées plus profondément, d’un verd foncé. | Sa tige eft ordinairement unique, droite , longue de neuf pouces, où même d’un pié & plus ,cannelée, branchue , garnie d’un petit nombre de feuilles ; elle porte à fon fommet des fleurs difpofées comme en parafol, en rofe, compolfées de fix pétales blancs, rouseâtres en-dehors, placés en rond, legerement odorans ; cesfleurs font chargées d’étamines furmon- tées de fommets jaunâtres & d’un calice d’une feule piece à plufeurs pointes, duquel fort un piftil qui s’éleve en un fruit prefque fphérique , compofé de 11, 12, ou d’un plus grand nombre de graines ru- des, applaties , de figures rhomboïdales, irrégulie- res, ramafñlées en mamere de tête, & rangées com- me les douves d’un petit tonneau. La flipendule vulgaire vient communément dans les bois, dans les terres crétacées, & fleurit en Juin & en Juillet dans nos climats. On la cultive auf dans quelques jardins de Medecine, parce qu’elle eft d’ufage. , Les feuilles & fur-toutles racines de cette plante, font d’ufage en Medecine.Les feuilles ont une faveur aftringente, un peu falée; elles font odorantes , gluantes, & elles rougiffent le papier bleu; mais la racine le rougit très-fort; elle eft ftiptique, un peu amere, & paroît contenir un fel effentiel neutre, tartareux-alumineux qui ne s’alkalife point, & qui eft mêlé avec beaucoup de foufre ; car par l’analyfe chimique on tire dela racine de la f/perdule beau- coup d’acide, de terre &c d’huile. Cette plante ouvre, incile, atténue les humeurs épaifes, & les chaffe par les urines. Auf tous les au- teurs lui donnent place parmiles plantes diurétiques & apéritives. Sa racine mérite fur-tout cet éloge, & elle convient dans tous les cas où il s’agit d’incifer les humeurs & les faire couler, en reflerrant enfuite les orifices des vaifleaux ; c’eft par cetteraifon qu’on la donne fouvent avec fuccès dans les fleurs blan- ches, les vuidanges trop abondantes, la diarrhée, la: dyflenterie & la dyfurie. La dofe de la racine pulvérifée eft d’une dragme ou deux dans une li queur appropriée. Article de M. le Chevalier DE Jau- COURT: FILLE, f. £. voyez Fixs. Les f/s & filles du Roi de France font appellés fs 8 filles. de France, parce que tous les fujets du royau- me ontunintérêt particulier à leur confervation, F, PRINCES pU SANG. | _ Friues dela Reine, (Hifi. de France.) titre d’office à la cour. C’ef par ce titre quefousle regne de Char- les VIT. en 1493, on appelloit les #//es de condition FIL 807 qu'Anne de Bretagne commença la premiere à pren: dre auprès d’elle à fon fervice, On les nommoit auffi filles d'honneur de la reine, Anne de Boulen, long-tems avant que le malheur de fon étoile l’eût appellé en Angleterre pour y périr fur un échafaud, avoit vé- cu plufeurs années en France en qualité d’une des filles de la reëne Claude, & puis en la même qualité auprès de la ducheffe d'Alençon, devenue reine de Navarre. Enfin en 1673 Louis XIV , par des raifons que J'ai dites ailleurs, réforma la chambre des ff/les d'honneur de la reine, qui n’eut plus dans Ja fuite que des dames du palais, dont létabliffement {ubfite toüjours. Voyez DAME du PALAIS, Aréicle de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FILLES D’ARTICHAUX, (Jardinage) ce {ont les œilletons qu’on prend aux piés des artichaux. FILLETTES , f. f. (coérume des fillertes.) Jurifp, Voyez au mot COUTUMES Particle Coérume des fil- lertes. FILLETTE , (Commerce, ) vaifleau que l’on nomme plus ordinairement feuillesre ou feilletre, efpece de fu- taille propre à mettre des liqueurs. On le dit auffi d’une petite mefure d’étain, quien quelque province de France, fert à les mefurer pour les vendre en dé tail. Voyez FEUILLETTE. Diéfionn. de Commerce & de Trévoux, (G) FILONS , VEINES METALLIQUES, (Æf. mar, Minéralogie.) venæ metallice. On nomme ainfi dans les mines, les cavités ou canaux foûterreins dans lef> quels on trouve des metaux, minéraux & autres fub- ftances foffiles qui fe diftinguent d’une façon fenfible de la roche ou pierre dans laquelle ces fubftances {ont renfermées. Ce n’eftcommunément que dansles montagnes qu’on doit chercher des f/ons ; cependant 1l y en a qui, après être defcendus des montagnes , ne laiflent pas que de continuer leur cours dans les val. lées. Les Naturaliftes comparent ordinairement les filons aux veines ou arteres qui fe répandent dans le corps des animaux; ou bien ils nous les repréfentent comme les branches 8 rameaux d’un grand arbre, qu partent d’un tronc qui eft profondement enfoui dans les entrailles de la terre. On peut encore avec affez de juftefle, les comparer aux rivieres que nous voyons à la furface de la terre , qui font continuelle. ment groffes dans leur cours par les ruifleaux qui vont s’y joindre, En effet les grands #/ozs {ont pref. que toûjours açcompagnés d’autres plus petits, que: l'on nomme fbres ou vérules, en allemand A/ufte ; qui venant à s’y joindre, contribuent à lesenrichir, & leur portent, pour ainf dire , de la nourriture ; c’eft pour cela que les Anglois les nomment feders, nourri. ciers. Ces fibres ou vénules font des fentes ou cre- vafles qui fe rencontrent dans les roches & bancs de pierre dont eft compolée la montagne qui eft tras verfée par un flo. Ces fibres ou fentes font rem plies ou de fubftances metalliques & minérales, ou de terres de différentes efpeces , ou de cryftallifas tions : quelquefois elles font entierement vuides, & ne fervent qu’à donner paflage aux eaux qui de la furface de la terre defcendent dans fes entrailles; il y ena qui vont aboutir jufqu’à la premiere couche de la terre en partant du f/oz, d’autres ne vont pas loin. Cependant il arrive quelquefois que ces fibres ou vénules font remplies de fubftances, qui venant à fe joindre à celles du #02, en diminuent la qualité, ou bien en donnant paflage aux eaux, elles font cau- fe de la deftruétion du f/o7; on donnant paflage à l’air, la matiere contenue dans le f/o7 mife en action par la chaleur & la fermentation foûterreine, fe dif. fipe & s'échappe. Voyez l’article EXHALAISONS Mi- NÉRALES. Les Minéralogiftes confiderent quatre chofes dans les flors ; 1°. leur direction , 2°. leur chére ou inclinas. Jon; 3°, leur force, c'eft-à-dire leurs dimenfions eg 802 F I L Tongueur, largeur & profondeur ; 4°. Ja fubflance qui les accompagne ou leur fert d’enveloppe. La dire&ion d’un for n’eft autre chofe que fa fi- tuation relativement aux quatre points cardinaux du monde; cette direction eft tantôt du feptentrion au sidi, tantôt du midi au feptentrion, tantôt de l’o- rient à l’occident, ou de l’occident à lorient, ou à- peu-près. C’eft par la direétion des différentes cou- ches de roche ou depierre, dont une montagne eft compofée, qu'on voit quelle peut être celle des f£- lons qui s’y rencontrent ; cependant comme cette re- gle n’eft point invariable, le moyen le plus sûr pour éérerminer la direétion d’un f/o7, c’eft d’avoir re- cours à une bouflole des mines, que les Allemands nomment berg-compa]s , garme d’une aiguille aiman- tée, & fur laquelle eft un cercle partagé en 24 par- ties égales, qu’on nomme heures, Voyez Part. GÉO- MÉTRIE SOUTERREINE. On obfervera cependant que les Minéralogiftes regardent comme les plus avantageux, les f/ons qui ont la même diretion que les bancs de pierre qui les environnent. Il ne faut pas s’imaginer qu’un f/o7 dans fa direétion, décri- ve exattement une ligne droite qui réponde précifé- ment à tels ou tels points de l'univers ; mais de même que les rivieres, ils font plufieurs détours, & font remplis de finuofités, & quelquefois de coudes oc- cafionnés par les fentes des montagnes, par les ro- ches fauvages 87 autres obftacles qu'ils ont rencon: " trés dans leur chemin, La feconde chofe qu'on confidere dans Les f/ons, c’eft leurchüte ou leur fituation relative à l’horifon. En effet ils font diverfement inclinés, & felon que leur inclinaifon eft plus ou moins fenfible, les Mi- neurs allemands leur donnent différens noms; on la détermine au moyen du quartde cercle. L’inclinaifon d’un for n’eft pas toûjours La même dans tout fon cours: on en voit quelquefois qui tomboient pref- que perpendiculairement , prendre tout-d’un-coup une inclinaïfon plus horifontale ; alors on dit que le filon remonte ; ou bien un filon qui marchoit prefque fuivant une ligne horifontale , defcend tout - d’un - coup plus perpendiculairement, & pour lors on dit que le fon s'enfonce. La partie du f£/o7 qui approche le plus près de la furface de la terre, fe nomme /4 téte du filon, & la partie qui s’enfonce dans le fein de la terre, s’appelle /a queue, C’eft un principe qu'on regarde comme très-conftant dans la Minéralogie , que plus les flous font perpendiculaires à l’horifon & s’enfoncent en terre, plusils font riches & abondans, fur-tout quand ls font parvenus à une profondeur aflez grande pour être toüjours environnés d’eau qui défend le minéral qui y eft contenu, du contaét de l'air & de fes vicifitudes. Cependant il en réfulte de très-orands inconvéniens ; en effet lorfqu’un f/07 eft parvenu à une grande profondeur & qu’il eft noyé dans l’eau , il eft très-difficile & quelquefois même impoflible de le fuivre, & fouvent l’on eft forcé d'abandonner le travail d’une mine au moment où le filon devient le plus abondant. A l'égard des f/ons qui marchent horifontalement & qui font proches de la furface de la terre, ils font ordinairement pauvres, & les minéraux qui y font contenus font plus expo: {és à fe détruire, s’évaporer, & fe décompofer. Quant à la force d’un flo, c’eft fa longueur , lar- geur & profondeur qui la conftituent ; elle varie in- finiment , non-feulement dans les différens f£/ons qui {e trouvent dans les entrailles de la terre, mais elle n’eft pas même conftante dans un feul & même {£/o7, Il y a des f/ons qui font d’une longueur très-confi- dérable, & qui après avoirété interrompus dansleur cours par une vallée, une riviere où un ravin, fe re. trouvent quelquefois plus riches qu'auparavant , à une lieue ou même à.deux lieues de-là. D’autres f- dons au contraire ne s'étendent pas fort loin, & fe perdent très-promptement, Pour ce qni eft de la far geur du f/o7, elle n’eft pas a même par:tout ; en cer- tains endroits elle n’aura, par exemple, qu’un pou- ce, tandis que dans d’autres elle aura plufieurs piés, 8 même plufieurs toifes. Quand un for fe renfle dans quelques-unes de fes parties, les Mineurs di. fent qu'il prezd du ventre, Il arrive quelquefois que les f/ons, au lieu de fui- vre un couts déterminé comme celui des rivieres où des ruifleaux, femblables à des étangs ou lacs, s’é- tendent confidérablement à droite & à gauche, & forment des efpeces de bancs ou de lits dans le {ein des montagnes, qui varient pour la profondeur &z l'inclinaifon ; les f/ons de cette efpece fe nomment ftlons dilatés: d’autres fois ces f£/ons formeront comme un abyfme oumafle énorme de fubftance metallique & minérale, d’une largeur & profondeur confidéra- ble ; pour lors on les appelle veze cumularæ, filons en maffes. Voyez Agricola, de re metallicä, lib. LI. Ces deux efpeces de f/ons en reçoivent d’autres, ou qui les traverfent, ou qui viennent y porter leur richefle & fe confondre avec eux, de même que les petits ruifleaux qui fe déchargent dans des lacs où des étangs. On fent aifément combien il eft avanta- geux que les mines fe trouvent ainf difpofées, Les f/ons ne font point de la même richefle dans toutes leurs parties : il y en a qui dans certains en- droits feront folides , compaëts, & parfaitement remplis de minéral, tandis que dans d’autres on trou- vera le minéral répandu dans la terre par morceaux détachés de différentes grandeurs; c’eft ce que quel- ques naturaliftes appellent zrirera ridulans ; les Alle- mands les nomment xierez, rognons : ou bien les £- dons feront remplis de pierres ftériles, poreufes & fpongicufes ; c’eft ce que les mineurs d'Allemagne appellent donner dans des drufèn. Voyez l'article Dru- SEN. Quelquefoistlans quelques endroits du f/oz, on ne rencontrera au lieu de minéral, que des f#ors ou cryftallhfations de différentes couleurs, ou même des terres blanches, jaunes, bleues, rouges, &c. qui font les débris du minéral qui a été détruit &décom- pofé, par les exhalaïfons minérales, par les eaux & les autres caufes qui agiflent dans le fein de la terre : quand ces cas arrivent, les Mineurs difent qu'ils fons Venus trop tard, Pour ce qui eft du minéral contenu dans un for, il m’eft pas par-tout de la même efpece, & ne don- ne pas les mêmes produits dans les travaux de la Do cimafie & de la Metallurgie. Souvent un f/0o7 dont le minéral eft pauvre, s'enrichit tout - d’un - coup, parce que les fibres ou vénules viennent lui appor- ter ce qui lui manquoit, ou bien parce qu'un autre j#- lon viendra fe joindre à lui; mais d'un autre côté, fouvent ces venules ou fflons qui viennent s’y join- dre, loin d'enrichir le f/o7 auquel ils s’uniffent, con- tribuent à fa deftruétion par les eaux auxquelles ils donnent paflage ; & par les fubitances arfénicales, fulphureufes & nufibles qu’ils lui viennent apporter, diminuent la qualité du minéral qu’il contenoït aupa- ravant, en le rendant plus difficile à traiter, plusaifé à fe difliper dans le feu, plus réfrataire, &e, On voit encore des fi/ons qui fourniffoient beau- coup, aller en diminuant fe partager en un grand nombre de fibres ou vénules, & enfin fe perdre 8cfe réduire à rien. | Il artive quelquefois à un floz de manquer tout- d’un-coup, pour lors il femble tranché parune roche dure & {auvage qui en interrompt entierement le cours : 1] paroit que ce phénoméne doit être attribué à l’affarffement qui a pü arriver à une portion de fa roche dont eft compofée la montagne où fe trouve le filon ; révolution qui a dû déranger le couts du f- lon , & empêcher fa continuité; dans ce cas les Mi- neurs font obligés de percer cette roche dure, pour FIE retrouver leur for qui eft de l’autre côté ; ou bien f ce traVail eft trop pémible & trop coûteux , on tâche d’aller rechercher de l’autre côté, fans percer la roche, l’autre portion du for ; maïs pour la re- trouver fans donner à faux, 1l faut beaucoup d’ufa- ge & d'expérience, &faire attention aux difiérentes couches de la montagne & aux changemens qui ont dû y arriver pour caufer la perte d’une portion du fulon. _ La rencontre d’une roche dure ne coupe pastoû- jours un #/o7 ; quelquefois elle fe contente de lui fai- re former des coudes, ou bien elle lepartage en deux ou plufieuts branches, quidans de certains cas fe réu- niflent de nouveau, & pour lors la roche forme com- me une île environnée par les deux bras du f/or. Il n’eft pas rare de trouver dans une même mon- tagne plufieurs f/ors contenant quelquefois des mi- néraux de différentes efpeces; ordinairement ils ne font pas tous de la même force, & communément il y en a un qui eftplus confidérable., que l’on nom- me f{lor principal, les autres s’appellent f/ons conco- mitans où accompagnans. Les flons principaux ont plufieurs avantages fur les moindres; en effet ils ne {ont pas fi facilement interrompus dans leurs cours par les roches dures ou autres obftacles qui fe ren- contrent, leurs dimenfions font plus confidérables , leur direétion n’eft pas f fujette à varier, & la ma- tiere qu'ils contiennent eft plus conftante. Lorfqu’il fe trouve plufeurs f/o7s dans une même montagne, ils font quelquefois paralleles les uns aux autres, & ils fuivent chacun leurs direétions fans fe troubler dans leur cours. Mais il arrive aufi fréquemment qu'ils fe croïfent &c fe coupent les uns les autres à différens angles. Plufeurs viennent quelquefois fe téunir dans un même point, {fe féparent enfuite de nouveau, & chacun continue à fuivre fa premiere direétion. Dans de certains cas on voit deux ou plu- feurs f/ons {e joindre pour n’en former qu’un feul, & les fubftances que contiennent ces différens f/o7s, fe mêlent & fe confondent : dans d’autres cas, les f- lons ne font que fe joindre fans que leurs fubftances fe confondent; par exemple, un f/o7 qui contient de la mine de plomb, s’aflociera avec un f/o7 qui con- tient de la mine de cuivre, êc tousles deux coureront à côté l’un de l’autre pendant un efpace aflez confi- dérable. ; Enfin les Mineurs font attention à la fubftance qui fert immédiatement d’enveloppe aux féons ; les mi- néralogiftes allemands la nomment fa/band ; cette écorce où enveloppe fert à contenir le minéral , & le fépare de la roche férile & non-metallique, dont la montagne eft compofée. Quelquefois cette enve- loppe eft une fubftance pierreufe, d’autres fois c’eft un limon ou gris, ou bleuâtre, ou jaunâtre, qu’on * nomme Éeffeck en allemand; les Mineurs regardent ce limon comme un bon figne , qui leur annonce un flon riche & abondant. La partie de la roche qui couvre le f/on, fe nomme Ze toit, tetum. Celle fur. laquelle le f/o7 eft foûtenu , fe nomme Ze fol , fun- . damentum. Quant à l’origine & à la formation des filons metalliques, voyez les articles EXHALAISONS MINÉRALES, MINERALISATION, MINES, METAL, GC. (— I LOUSE où QUENOUILLE , terme de Corderie. Voyez les articles, CORDERIE 6 QUENOUILLE. FILOSELLE , {.f. (rranufatture en foie,) efpece de grofle foie très-commune , qui fe fabrique avec la bourre de la bonne foie , & celle qui fe tort des co: cons de rebut. Voyez l’article SOIE. FILS, £. m.( Grammaire) qui exprime la relation qu’un enfant mâle a avec fon pere &fa mere , voyez PERE. Les enfans du roi d'Angleterre font appellés fs & filles d'Angleterre, voyez Rot. FIL 503 Le fs aîné eft en naïffant duc de Cornouaille, & Créé prince de Galle, voyez PRINCE. Les puinés font appellés caders, Les enfans des rois de France étoiént ancienne: ment appellés fs 6 félles de France ; 8 les petits enfans > Petits-fils & peïites-filles de France: mais à Préfent, les filles font appellées , Mefdames'; la fille défunte de M. le Dauphin s’appelloit auffi Madame. FILS ADOPTIF. Voye Les articles ADOPTIF © ADOPTION. | FILS DE FAMILLE, en pays de droitécrit , eflun enfant ou petit-enfant , qui eft en la puiffance de fon pere ,ouayeul paternél. Les filles qui font foûmifesà cette même puiflance, font auf appellées f{/les de famille, & compriles fous le terme général d’enfars de famille, | Les fils & filles de famille ne peuvent point s’o- bliger pour caufe de prêt, quoiqu’ils foient ma- Jeurs ; leurs obligations ne font pas valables, même après leur mort, fuivant le Senatus-confulte macé- donïien, Ils ne peuvent tefter, même avec la permiffion de leur pere ; fi ce n’eft de leur pécule caftrenfe où quafé Ca/irerife, Le pere joùit des fruits des biens du f/s de famille, excepté de ceux de fon pécule, & dans quelques au tres cas que l’on expliquera 44 mor PUISSANCE, PATERNELLE, Tout ce que le js de famille acquiert appattient au pere, tant en ufufruit qu’en propriété, Le pere ne peut faire aucune donation entre-vifs & irrévocable au fs de famille , fi ce n’eft par contrat de mariage. | Lorfque le pere marie fon fls étant en fa puif- fance , il eft refponfable de la dot de fa belle-fille, L'émancipation fait fortir le fs de famille de la puifflance paternelle ; le pere qui émancipe fon f/s, avoit autrefois pour prix de fon émancipation , le tiers des biens en propriété ; mais au lieu de cela, Juftinien lui a donné la moitié en ufufruit ; il a auffi l'ufufruit d’une portion virile des biens maternels qui échéent au f/s de famille depuis fon émancipa- tion., voyez ÉMANCIPATION. | | _ En pays coûtumier , où la puiffance paternelle n'a pas lieu , on entend par f{/s de famille les enfans mineurs quine font point mariés, & qui vivent fous la dépendance de leurs pere 8 mere. Les fils de famille mineurs de 25 ans ne peuvent; foit en pays de droit écrit , foit en pays coûtumier , contraëter mariage fans le confentement de leurs pere & mere , tuteurs & curateurs, Les majeurs de 25 ans peuvent fe marier ; maïs pour fe mettre à couvert de l’exhérédation , il faut qu'ils faflent préalablement à leurs pere & meretrois fommations refpeétueufes, & les garçons ne peuvent faire ces fommations avant l’âge de 30 ans. Poyeg MARIAGE. Voyez au Digefle & aux Inflicurs le titre de his qui Jui vel alient juris funt : le titre du digeffe, de fenatuf. confulr, macedoniano ; & aux inflit, le titre de parrié poteflate , &t de filio familias minore ; la novelle 117, ch. 7. la novelle 118, ch. 5j. (4) FiLs ( Morale, ) La relation du f/s au pere, en: traîne des devoirs qu'il doit nécefflairement rem- plir , & dont le tableau laconique tracé d'un fty- le oriental , par l’auteur du Bramine-infpiré (The in{pir d Bramin, London 1755 in - 8°. 6. édis, ) vau- dra mieux que tout ce que je poutroiïs dire d’une mas niere didaétique. » Mon fs ( dit ce bramine ) apprens à obéir, lo: » béiffance eft un bonheur ; fois modefte , on craïn- » dra de te faire rougir. | » Reconnoiffant ; la reconnoïflance attire le bien: » fait ; humain , tu recueilleras l'amour des hom: » mes, 804 FIL » Jufte, on t'eflimera ; fincere , tu feras crü ;: Lo- » bre, le fobriété écarte la maladie ; prudent, la for- » tune te fuivra. » Cours au defert, mon /s , obferve la cicogne; » qu’elle parle à ton cœur : elle porte fur fes aîles » {on pere âgé , elle lui cherche un afyle, elle four- # nit à.fes befoins. | » La piété d’un enfant pour fon pere, eft plus dou- » ce que l’encens de Perfe offert au foleil, plus dé- » licieufe que les odeurs qu’un vent chaud fait ex- » Hraler des plaines aromatiques de l'Arabie. » Ton pere t’a donnéla vie, écoute ce qu'ildit, » car il le dit pour ton bien; prête l’oreille à fes inf- » truétions., car c’eft l'amour qui les diéte. » Tu fus Punique objet de fes foins &z de fa ten- » dreffe , ilne s’eft courbé fous le travail que pour » t’applanir le chemin de la vie ; honore donc fon » âge, & fait refpetter {es cheveux blancs, » Songe de combien de fecours ton enfance a eu #befoin , dans combien d’écarts t’a précipité le feu » de ta jeunefle , tu compatiras à fes infirmités, tu » luitendras la main dans le déclin de fes jours. » Ainfi fa tête chauveentrera en paix dans le tom- # beau ; ainfi tes enfans à leur tour marcheront {ur » les mêmes pas à ton égard». Voyez aufh lerticle ENFANT ( Morale, ) où lon entre dans de plus grands détails. Article de M.ule Chevalier DE JAUCOURT. Firs( Dean.) Jurifp. & Belles-Lettres , terme d’af- finité. Le beau-fils eftle fils du mari ou de la femme forti du premier mariage de l’un ou de l’autre : nous difions autrefois f//ätres , & nous avons eu tort d’ap- pauvrir notre langue de ce terme expreflf. Il me rappelle que des interpretes d’Horace fup- pofant que l'on ne dit en latin privigrus , ou privigna, que d’un enfant du premier lit, fs ou fille dont le : pere ou la mere font décédés après avoir pañlé à de fecondes nôces , accufent le poëte latin d’un pléo- nafme ridicule dans fes deux vers de l'Ode XX1IF, div. III, où eft l’éloge des anciens Scythes, Tl{c matre carentibiis Privignis rmulier fermperat innocens. Mais les-critiques dont je veux parler, n’ont pas pris garde que fuivant les lois romaines, 1l pouvoit y avoir des privigni dont lepere ou la mere étoient encore en vie ; ce qui arrivoit dans le cas du di- vorce ; cas où Le mari s'étant féparé de fa femme, comme la loi.le lui permettoit, & ayant époufé une feconde femme , les enfans du premier mariage étoient privigni à l'égard de la feconde femme , quoique leu ANELE füt vivante. Ainfi Tibere Néron ayant cédé Livie à Augufte, Drufus fut privigrus à Ausufte. Cette remarque eft de M, Aubert dans Richelet, & elle leve une difficulté que la feule fcience de la langue latine ne peut réfoudre fans la connoiffance des lois romaines.M. Dacier, admirateur d’Horace, foûtient à la vérité , que privignis & matre carenti- bus, font deux expreffons différentes qui ne difent point Ja même chofe , mais il n’explique pas en quoi & comment ces deux expreffions different, & c’eft précifément ce qu'il falloit prouver aux cenfeurs pour leur fermer la bouche. Arcicle de M, le Cheva- yalier DE JAUCOURT. Fics des dieux ( Mythol. ) La dénomination de f/s des dieux ou enfans des dieux ,., eft auffi confufe qu’é- tendue dans l’hiftoire fabuleufe. C’eft nettoyer les étables du roi Augias , que de travailler à débroiil- ler ce cahos.. Je me bornerai donc aux principales applications de ce terme , raflemblées d’après l’ab- bé Banier dans le Diétionnaire mythologique. 1°, Tous les enfans du concubinage des princes fus enfuite au rang des dieux, comme de Jupiter êc FIL de quelques autres qui eurent plufieurs femmes pen- dant leur vie ,étoient tout autant d’enfans ou de fs, des dieux. 2°, On a donné fouvent le nomde fü/s des dieux à plufieurs perfonnages poétiques ; comme quand on dit que l’Acheron étoit f/s de Cérès, l'Amour js de la Pauvreté , l’Echo f//e de l'Air ,les Nymphes f//es d’Achelous , & une infinité d’autres. 3°. Ceux qui furent les imitateurs des belles ac- tions des dieux , & qui excellerent dans les mêmes arts, pañlerent pour leurs f/s , comme Efculape, Orphée, Linus, &c. | . 4°: Ceux. qui fe rendoïent fameux fur la mer » étoient regardés comme les enfans de Neptune ; ceux qui fe diftinguoient dans la guerre, étoient des f/s de Mars, comme Théfée, Oenomaus , &c. 5°. Ceux dont le caractere reflembloit à celui de quelque dieu, pañloient auf pour leurs fs. Etoit- on éloquent ?. on avoit Apollon pour pere ; fin & rufé ? on étoit f/s de Mercure. | 62, Ceux dont l’origine.étoit obfcure , étoient ré- putés enfans de laterre,comme les géans qui firent la guerre aux dieux, Tagès inventeur de la divination étrufque. | 7%. La plüpart des princes & des héros , qui ont été déifiés , avoient des dieux pour ancêtres, & paf- foient toñjours pour en être les fs. | 82. Ceux qu’on trouvoit expofés dans les temples ou dans les bois facrés , étoient f/s des dieux, à qui ces bois étoient confacrés:; ainfi Eritonius, pañla pour fils de Minerve & de Vulcain. 9°. Quandquelqué prince avoitintérèt de cacher un commerce icandaleux , on ne manquoit pas de donner un dieu pour pere à l’enfant qui en naifloit > ainf Perfée pafla pour f{/s de Jupiter & de Danaé ; Romulus pour f/s de Mars êc de Rhéa ; Hercule pour. fils de Jupiter & d’Alcmène. 10%. Ceux quiétoient nés du commerce des prê= tres avec les femmes qu'ils fubornoient dans les tem- ples , étoient fur le compte des dieux dont ces pré- tres étoient mimiftres. La Mythologie a tout divinifés Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. Fiis DE Dieu, (Théol.) Cette expreflion eft em- ployée fréquemment dans les Écritures ; on difpute fortement {ur le fens qu’elle y reçoit, les Cathoh- ques y attachant des fignifications que les Ariens, les Neftoriens , les Sociniens & plufeurs autres hérétis ques conteftent. | Nous allons recueillir Les divers fens dont cetre expteffion eft fufceptible, ou que lui ont donné les Théologiens des diverfes fetes & des diverfes com: munions. 1°, On trouve appellés du nom de #/s de Dieu > d'enfans de Dieu dans les Ecritures, ceux qui font la volonté de Dieu, qui le craignent &c l’aiment comme leur pere, & qu'il aime comme fes enfans , qu’il adopte par fa grace, &c. C’eft en ce fens que les anges, les faints, les juftes &c les chrétiens font appellés f/s de Dieu, enfans de Dieu. 2°. Quelques théologiens hétérodoxes prétendent que Jefus-Chrift eft appeilé Æ%/s de Dieu , parce qu'il étoit envoyé de Dieu, parce qu'il étoit le Meffie. Ils prétendent que dans la langue des écrivains facrés, & dans la croyance générale du peuple juif fur la venue du Meflie, Fils de Dieu étoit fynonyme de Meffie. On‘conçoit bien qu’en donnant ce fensà l’ex- preffion Æü/s de Dieu, par exclufion aux fignifications plus amples que les Théologiens catholiques y atta- chent, on s’écarte de la doétrine catholique ; mais fi on ne prétendoit pas exclure ces fignifications, &c fi on y met quelques reftriétions,, la propofition pour- roit fouffrir un fens favorable. En effet, il n’y a nul inconvénient à dire que les Juifs, avant la prédica- tion des apôtres ; que les malades qui s’approchoient pour pôur la premiere fois de Jefus-Chrift pour obtenir leur guérifon; que le cénturion romain qui vit mou- tir Jefus-Chrift, en lui donnant le nom de F/s de Diet, n’avoïent pas toutes les idées que nous-avons de cette qualité, & qui lui appartiennent. 3°. On pourroit appeller fs de Dien, un put homme qui auroitrect immédiatement fon'exiftence hors des voies ordinaires de la génération, parce qu'en ce cas Dieu lui-même fuppléeroit par fa puiffan- ce à l'union des deux fexés : c’eft en ce fens qu'Adam eft appellé fils de Dieu, qui fuit Dei. à Nr Il ÿ a eu des hérétiques qui ‘niant la divinité de, Jefus-Chriit, & ne refufant pas dé éroire qu'il étoit né d'une Vierge’, le regardoient comme F/s de Dieu dans ce même fens-là. Telle étoit l'opinion d’un cet- tain Théodotus dont parle Tertullien, de préferipr. versis finem : Dotlrinam introduxit , dit ce pere, qu Chriflum hominem tantèmt diceren, Detimi autem ilum negaret, ex Spriritu quidem fanilo natum ex Virgine, Jèd hominem folitariim atque nudum nullo alio pre cæteris nifr folé juflitie authoritate. l - Dans la doétrine de cet hérétique , & dans ce troi- fieme fens, Adam & Jefüis=Chrift font fs de Dieu d’une maniere bien plus parfaite que dans les deux premieres acceptions : on pourroit même dite qu’ils font fffs de Dieu naturels, par oppoñtion à ladop- tion des fäints ; mais cette acception du mot ff/s de Dieu entendue par exelufon des autres fens que nous allons rapporter , eft tout-à-fait oppoñée à la doërine catholique. 4°. Dans la doûrine catholique , le Verbe ou la feconde Perfonne de la Trinité, eft Fi4s de Dieu, fils de la premiere Perfonne , par la voie d’une généra- tion éternelle. ÿ”- Dans la doûtrine catholique , J. C. homme- Dieu eft Fisde Dieu, par l’union faite en lui de la nature humaine à la nature divine dans la feconde Perfonne de la Trinité, qui eft elle-même Fils de Dieu , & Verbe engendré de toute éternité. Nous verrons plus bas une fixieme fignification de Pexpreffion fé/s de Dieu ; mais nous allons faite en- core quelques-obfervations fur celles-ci | après que nous aurons remarqué deux autres fens plus géné- raux qu’elle peut recevoir. Le nom de f/s peut être pris dans le fens propre &t naturel, ou dans un fens impropre & métaphori- que: un enfant adopté n’eft pas fs de celui qui l’a- dopte, dans le fens propre & naturel. De -là naïiflent les conteftations entre les héréti=" ques qui nient la divinité de Jefus-Chrift, & les Ca- tholiques : ceux-là prétendant que l’expreffion Fils de Dieu appliquée à Jefus-Chrift, on même appli- quée au Verbe, ne fauroit être entendue que dans wa fens impropre & métaphorique ; & ceux-ci foû- tenant au contraire qu’elle doit être prife dans le fens propre & naturel, Dans le dogme catholique, Fefus-Chriit eft Æis de Dieu au fens propre &c naturel. Cette filiation natu- telle ne peut pas être entendue de celle que nous avons remarquée à la troifieme fignification. En ef- fet, cette troifieme fignification peut fonder une f- lation naturelle, par oppoñition à la premiere &c à la feconde, comme nous l’avons dit; mais par com- paraïfon à la quatrieme & à la cinquieme , elle ne fauroit être appellée propre & naturelle. Ces deuxdernieresfignifications del’expreffionde Fils de Dieu appliquée à J. C. dans les Ecritures , ne peuvent être nées que par les hérétiques qui refu- feroient de reconnoître la divinité du Verbe , comme les Ariens, les Sociniens; ou par ceux qui nieroient l'union hypoftatique de la nature humaine dans J. C. avec la perfonne du Verbe , comme les Nefto- riens : VOYez ces trois articles. + De-lil{uit que les Théologiens catholiques, pour Tome VI. | FIL 805 établir la légitimité de ces deux explications qu'ils dofnent à l'expreffion Fils de Dieu appliquée à J. €! font obligés d'établir la divinité du Verbe &: Punion hypoftatique, &c. Foyez fur le premier de ces | objets l'article TRINITÉ, & fur le dérnier , INCAR: NATION: | rs Ces deux renvois qué nous fommes obligés de faire pour traiter cés matieres en leur lieu > & pour éviter les rédites, nous difpenfent d’expofer ici & les raifons fur lefquelles fe fondent les Théologiens’ catholiques dans leurs affertions, & les difficultés! qu’ oppofent les hétérodoxes. Vai parlé plus haut d’un fixieme fens qué ponvoit' recevoir l’exprefion de Fi/s de Dieu: nous allons nous occuper de cet objet, Dans Cés derniers tems, le P. Betruyer, jéfuite; | dans des diflértations latinés qu'il a placées à [a fin de fon #ifoire du peuple de Dieu, depuis la naiflance du Mefie, a foûtenu que l’expreflion fs de Dieu en beancoup d’endroits du nouveau Teftiment , devoit être entendüe dans un fixiéme fens diffingué de ceux dont nous avons fait mention. Comme fon Opinion a fait du bruit, & quelle tient bien diteétement à l'objet de cet article, nous croÿons devoir nous ÿ' arrêter un peu, Nous allons donc faire un pêétit expo: {é du fyftème de cé pere, que nous aCCompagnerons, dé quelqués remarques. © © 27 Lee Cet auteur commence par établir avec les Théo- logiens Catholiqies, que le Verbe eft Fiés de Diet par la voie d’une génération éternelle, & que J. C.' eft Fils de Dieu en vertu de fon union hypoftatique avec le Verbe, c’eft-à-dire qu'il reconnoît hautement la légitimité de ces deux fens que les Théologiens ca- tholiques donnent à l’exprefion fils de Diet, éncom- battant les Ariens }lés Sociniens, les Neftoriens, &c.. C'eftla Quatrieme & là cinquieme fignification paimi celles que nous avons remarquées, + Mais il croit que dans les Ecritures là dénomina- tion de Fils de Diez appliquée à J. C! ne feçoit pas toñjours l’un ou l’autre de ces deux fens, & qu'elle fignifie quelquefois l’ur107 de La nature humaine à Læ nature divine faite dans la perfonne de J. C. par Dieu, confidéré non plus comme per, comme engendrant le- Verbe de route éternité, mais comme Jubfiflant én rrois perfonnes ; agiffant au dehors, ad extra, € zraifjant l'humanité de J.C, avec une perfonne divine. Ceci a befoin d’être éclairci ; & pour le faire; nous allons tâcher d’écarter autant qué nous pours rons les termes de l’école que le P. Berruyer a pro- digués, & qui ne préfenteroïent pas des idées aflez nettes au commun de nos lecteurs. Mais il faudra qu'on nous permette de les employer quelquefois : &t nous nous excuferons avec Melchior Canus , fur’ ce que zpfæ fcholafficæ res formas dicendi Jcholaflicas trahunt, 6 quæ vocabula Jeholarum confuetudo diutur. na trivit, ea lafini nobis condonare debent, Pour bien entendre le P. Berruyer, il fufira de faifir les différences de la fignification qu’il donne à lexpreflion Fils de Dies , d'avec la quatrieme &c la cinquieme de celles que nous ayons expliquées. Dans le quatrieme fens , le Verbe eft Fis de Diens par fa génération éternelle ; dans le cinquieme , Je- fus-Chrift eft Fils de Dieu par l’union faite en lui de’ la nature humaine avec la feconde Perfonne de la Trinité , avec le Æ%/s de Dien éternel; dans le fixie= me fens , Jefus-Chrift eft Fi/s de Dieu par l’union de la nature humaine avec une perfonne divine, confi- dérée fimplement comme divine,& non point préci- fément comme la feconde. | | Dans le quatrieme fens, la génération eft éter- nelle ; dans le cinquieme &z dans le fixieme , elle $’0-. pere dans le tems. Dans le quatrieme & dans le cinquieme fens , en appelant le Verbe Fi/s de Dieu, & Jefus-Chrift 77 KKkkk 806 FIL de Dieu, on porte fon idée fur la premiere Perfonne de la Trinité, {ur Dieu le Pere, Dans le fixieme, on applique l’idée de Pere à Dieu , à la nature.divine agiffant au. dehors & fubfftant en trois Perfonnes. _ Danslecinquieme fens, Jefus-Chriftne feroit pas Fils de Dieu, fi la perfenne divine à laquelle fon-hu- manité fe trouve unie , n’étoit pas la feconde Per- fonne de la Trinité, n’étoit.pas Æils de Dieu, Dans le fixieme, en fuppofant que cette perfonne füt le Pere ou le faint-Efprit (les Théologiens convien- nent qu'on peut faire cette fuppoñtion, & qu'il ne répugnoit pas à la nature.divine que le Pere ou le St Efprit s’'incarnaflent), Jefus-Chrift feroit encore Fils de Dieu ; parce que dans cette hypothèfe Dieu, un, fubfftant en trois perfonnes, auroit uni danse tems l'humanité de Jefus-Chrift à la nature divine, Au quatrieme & au cinquieme fens,, l'intelligence de cette propoñtion Je/us-Chriff eff Fils de Dieu ,fup- pofe laxconnoïffance de la génération éternelle -du, Verbe. de l’union-hypoffatique de ce Verbe avecla! Le ?e ITie Hwii.7 à yYP tat1q FAHIL® 1 ä À nature fumaine en la perfonne de Jefus-Chrift,, en: un mot du myftere de la Trinité: Dans le fixieme elle ne fuppofe riensautre chofe que la connoiffance d’un feul Dieu, uniffant dans le tems la nature hu- maine àla nature: divine dans la perfonne de I. C. Voilà les différences refpetives qu’eétablit le pere Berruyer entre ces trois figmifications ; elles peu- ventifervir à. faire entendre fa penfée: au refte,il faut avouer que la dificulté de la matiere jette fur tout ceci un peu d’obfcurité. Je paffe aux preuvesfurlefquelles cet auteur s’ap- puie. Voici les principales. 1°. On doit donner, dit-il, à l’expreffion Fi/s de Dieu, le fens. que je propofe (fans exclure les au- tres) ; fi l’aétion.de Dieu uniffant l'humanité de Je- fus-Chriff à une Perfonue dela Trinité, eft une vé- ritable génération, abftraftion faite de ce que, cette Perfonneferoit le Verbe engendré de toute éternité, la feconde Perfonne : or, même en faifant cette ab- ftra@ion, l’'attion de Dieu uniffant lanature humaine à la nature divine , eft une véritable génération, puifque par cette attion.eft engendré, formé , &c. l’'Homme-Dieu. “En effet fi la nature humaine étoit.uñie à une au- ire Perfonne que la feconde , ie réfultat de cette union, l’'Homme-Dieu, feroit vraiment F1/s de Dieu ; en ce cas lation de Dieu uniflant la nature humai- ne à cette Perfonne divine, feroit donc une vérita- ble génération : donc l’a&ion de Dieu uniffant la na- ture humaine à la Perfonne du Verbe, eft une vraie génération ; même alors qu’on fait abftraétion de la génération éternelle du Verbe : donc en faifant cette abftra@tion, ilrefte encore un fens vrai à la dénomi- nation de Fils de Dieu, & c’eft ce fens que je pro- pofe. 2°. On trouve très-nettement diftinguées dans les Ecritures deux générations du Æ5/s de Dieu, l’u- ne éternelle, & l’autre temporelle. Jz principio . .. ee... Verbum erat.apud Deum. à . . Er Werbum caro failum eff. . . . Dominus poffedit me initio via-, rum fuarum. . . . Ego hodie genu te... . Figura fubffantiæ ejus portans omnia Verbo virtutis fue. . … De Filio [uo qui faitus eft ei fecundum carnem. Ox la différence de ces deux générations ne peut bien s’en- tendre qu'au moyen de cette explication, puifqu'à moins qu'on ne l’admette, Jefus-Chrift n’eit Æi/s de Dieu que par la génération éternelle du Verbe. 3°, Avant la réfurretion de Jefus-Chrift, avant les inftrudions qu’il donna à fes difciples, avant de monter au ciel, avant la defcente de lEfprit-faint , fes apôtres & {es difciples ignoroient le myftere de la Trinité. Cela eft clair par les endroits où leur ignorance eft remarquée : Adhuc ne intelleilu erant, Matth. xy, & xvj. Adhuc multa habeo vobis dicere ; [ed Rd UT = FIL non potefhs. poréare modo; Joan. xvJ. 12. Tpfi nhil ho: rumintellexerunt, Luc.xvii,,34, Diciteis Jefus, tan- to tempore vobifcum fum non cognoviflisme , Joan. x. 9. Nondumierat fpiritus datuss quia Jefus ron- | dûm erat glorificatus., Joan. xvi, 29. Auff,bien que || par ceux où Jefus-Chrift promet de les inftruire:: Hac in proverbiis locutus fum vobis ; venit hora ut jam || zonin proverbüis.loquar vobis , fed palam de patre an | runtiabo vobis, Joan. xvj, 25. Et après la réfurrec-, tion: Loquebatur apoftolis fuis de regno Dei, per des, guadraginta apparens is. | ne À plus forte raifon les Juifs.n’avoient-ils aucune idée de ce myftere ; &c’eft la doétrine commune des Théologiens : bien plus les Juifs & les apôtres, étoient.bien fortement perfuadés.du dogme de l’u-, nité de Dieu ; dogme qui aux yeuxide la raifon pri- vée des, lumieres de la foi, devoit former dans leur, efpritune terrible oppoñtion. à la doétrine d’un Dieu, . en trois perfonnes. & Cela pofé.,.que.préchoit los Chr aux Juifs &. à fes apôtres avant fa réfurreétion,dit le P. Berruyerà, Ce n’étoit pasdle dogme, de.l’union hypoftatique de : fon humanité avec la fecondeiperfonne de la Trini= té, avec le Verbe.éternel. A/s du Pere , & engenûré, par lui de toute. éternité ; iln’auroit été entendu de perfonne, puifque toutes. les notions préliminaires à la connoïflance de ces myfteres manquotient à la na- tion juive , & qu’elle en avoit même de très-oppo- fées à cette doétrine : c’étoit donc l’union faite dans . le tems en fa perfonne de la nature humaine avec la nature divinesrunion par laquelle 1l étoit vraiment Fils de Dieu, & connu pour tel: myftere bien{ubli-, me à la vérité, mais dont on peut avoir quelque idée, fans connoître la Trinité des perfonnes &r:la généra- tion du Verbe, &.fans heurter aufi fortement aux yeux de la foible raifon, le dogme de l'unité de Dieu.: Je placeraiicinne remarque du P. Berruyer : c’eff, que l’empreflement louable des Théologiens à voir: . par-tout dans les Ecritures les dogmes de lafoi catho lique clairement développés, les écarte fouvent de l'intelligence du texte, lls devroient cependant con: fidérer qu'il n’eft pas néceflaire que les dogmes fe, trouvent expreflément contenus, dans tous les en- droits de l’Ecriture qui peuvent y avoir quelques rap- ports ; il fuffit pour donner un exemple tiré de la ma- tiere même que nous traitons, que la génération éter- nelle du Verbe & {on union fubftantielle.avec la natu- re humaine dans la perfonne de J. C. foit développée, dans quelques endroits ; il n’eft pas néceffaire que l’expreffion Fis de Dieu fignifie par-tout cette gèné- ration; & on voit même, fuivant ce qu’on vient de dire, qu’elle n’a point ce fens relevé & fublime, lof qu’elle eft dans la bouche des Juifs & des apôtres, avant les dernieres inftruétions qu'ils reçürent de Jefus-Chrift. 4°. Le P. Berruyer trouve cet avantage dans fon explication, qu'il réfout avec facilité quelques ob- jeétions des Sociniens , qui ont toùjours embarraflé les Théologiens catholiques. an Jefus-Chrift , difent les Sociniens,, eft appellé Fils. de Dieu par les évangéliftes, parce qu'il eft né d’une, vierge: Concipies in utero & paries filium. . ,, ,. +. Spiritus fanütus fuperveniet in te. . . . Ideoque quod nafcetur ex. te fanétum vocabitur Filius Der. Luc. I. Jefus-Chrift, ajoûtent-ils, eft dit dans S, Paul, Z.. 3 & 4. Filius faitus Deo ex femine Davit fecundim carnem. Et aux Galat. IV. 4. Mifir Deus Filium fuur faëlum ex muliere faëlum fub lege. D’où les Sociniens argumentent ainfi: J. C. eft appellé dans les Ecritures, F/s de Dieu, né dans le tems, fous la loi, fait d’une femme , &c {e- lon la chair : or s’il étoit As de Dieu par la généra- tion éternelle du Verbe , toutes ces exprefhons fe. roient fauflement appliquées à J, €, car ilfaut bien confidérer qwelles lui font appliquées entant qu'il eft Fils de Dieu ; donc elles cara@térifent fa filiation : or ce n'eft pas une filiationfondée fur la génération éternelle du Verbe ; donc c’eft une filiation d’adop- tion pure & nullement naturelle, à moins qu’on ne veuille regarder comme fils naturel un pur homme qui recevroit de Dieu l’exiftence hors des voies ordi- nares de la génération ; donc J. C. n’eft pas ils de Dieu au fens propre & naturel, comme l’entendent les Catholiques. Le P. Berruyer remarque d’abord que quelques Théologiens ont traduit fa@us , ysvoutror , dans les pañages que nous avons cités, par zatus, né, par la -rafon que faitus eft plus embarrafant. . I prétend qu’on peut entendre à la lettre ces ex- preffions que font tant valoir les Sociniens, & réfou- dre la difficulté propofée, en adoptant {on explica- tion ; parce que, felon lui, il eft vrai à la lettre que J. C. homme-Dieu a été fait dans le tems As de Dieu, par Punion que Dieu a mife dans le tems en fa per- fonne entre la nature humaine & la nature divine. Cette génération eft vraiment naturelle, dansun fens tout-à-fait différent de celle que les Sociniens nous propofent d'admettre : ellé n’eft pourtant pas la génération éternelle du Verbe, quoïqw’elle la fup- pofe ; & par conféquent en accordant, ce qu'on ne peut pas contefter, que les paffages allégués ne peu- vent pas s’appliquer à la génération éternelle du Verbe, on eft encore en droit de nier qu'ils doivent s'entendre d’une filiation non-naturelle & de pure adoption. 5°. Enfin le P. Berruyer prétend que cette expli- cation eft néceflaire pour l'intelligence de beaucoup d’endroits du nouveau Teftament : nous renvoyons le leéteur à fon ouvrage , pour ne pas augmenter trop confidérablement cet article. Le P. Berruyer prévient quelques obje@ions que pourroient lui faire les Scholaftiques, par ex. que dans fon hypothèfe J. C. feroit fils de la Trinité, fils des trois Perfonnes, fils de lui-même , fils du S. Efprit; en recourant à un principe reçû dans les éco- les, les a@tions de la Divinité au-dehors, ad exrra , ne font point attribuées aux trois Perfonnes ni à au- cune d’elles en particulier, mais à Dieu ,comme un en nature. Autre objection contre le P. Berruyer, qu'il y au- roit deux fils dans fon hypothèfe : il nie cette confé- quence, appuyé fur cetre raïfon, qu'il ne peut y avoir deux ls qu’au cas qu’il y auroit deux Perfon- nes, felon l’héréfie de Neftorius ; & que comme fon opinion laïfle fubfifter & fuppofe même l’unité de Perfonne en I. C. on ne peut pas lui faire le repro- che d'admettre deux fils, quoiqu'il admette en J, C. deux filiations. Au refte, ce fixieme fens dé l’expreffion Fi/s de Dieu , fuppofe eflentiellement les deux dogmes im- portans de la divinité du Verbe, & de lunion hy- poftatique & fubftantielle de la nature humaine en J.G. avec la nature divine ; & toute l'explication du P. Betruyer eft d’après cette fuppoñtion. Sur Popinion qu’on vient d’expofer, on a accufé le P. Berruyer de favorifer d’un côté le Neftorianifme, &z de l’autre le Socinianifme. Ils ajoûütent que l’ex- plication donnée par le P. Berruyer eft nouvelle, On ne la trouve employée, difent-ils, par aucun pere& par aucun théologien dans les difputes avec les hé- rétiques ; on ne voit pas qu'aucun concile s’en {oit fervi pour développer les dogmes fondamentaux du Chriftianifme ; les interpretes & les commentateurs ne donnent pas aux paflages allégués par le P. Bet- tuyer les fens qu’il y adapte, &c, & ce cara@tere de nouveauté eft un terrible argument contre une opi- mon dans lefprit d’un catholique : néanmoins ce pere à trouvé des défenfeurs, Nous n’entrerons pas dans Tome FI, FIE 807 les raïfons qui ont été apportées de part & d’autre, Ces détails nous meneroienttrop loin: d’ailleursnous ne pourrions pas traiter cette matiere, fans donner en quelque forte une décifion qu’il ne nous appar- tient pas de prononcer; c’eft à l’Eglife feule & aux premiers pafteurs à nous éclairer fur des matieres auf délicates , & qui touchent de fi près à la Foi. Relativement à l'article Fi/s de Dieu, il faut voir les art. TRINITÉ, INCARNATION, ARIENS , NES- TORIENS , SOCINIENS. | FILS DE L'HOMME ( Théol. ) terme ufté dans les Ecritures pour fignifier homme , & propre à expri- mer tantôt la nature humaine , & tantôt fa fragilité. .Quand ce mot eft appliqué à Jefus. Chrift , il fi- gnifie en lui la nature humaine, mais exempte des imperfeétions qui font ou la caufe on la fuite du pé- ché. Cette expreffion étoit commune chez les Juifs & les Chaldéens. Les prophetes Daniel & Ezéchiel font quelquefois défignés par cette appellation dans les livres qui portent leur nom. Quelquefois auffi {25 de homme, ou fils des hommes, défignent la corruption & la malignité de la nature humaine , & font appliqués aux méchans & aux ré- prouvés , par oppoftion aux juftes &c aux élüs qui font appellés fi/s de Dieu ; comme dans ce pañlage du Pieaume 4. fi: hominum ufquequo gravi corde ? ut quid diligins vanitatem € quæritis mendacium ? (G) FILS DE LA TERRE ( Æff. mod. ) Dans l’univer- fité d'Oxford , c’eft un écolier, qui aux aétes publics a la commiffon de railler & fatyrifer les membres de cette univerfité , de leur imputer quelque abus, ou corruption naïflante: c’eft à-peu-près la même chofe que ce qu’on nommoit paranymphe dans la fa- culté de Théologie de Paris, voyez l'article PARA. NYMPHE. (G) FiLs (/e) AVANT LE PERE , f/ius ante patrem , expreflion dont les Botaniftes & les Fleuriftes fe fer- vent verbalement &e par écrit , pour marquer qu’une plante porte fa fleur avant fes feuilles. ‘Telles font diverfes efpeces de colchique, le pas-d’âne, le péta= fite, &c. Areicle M. Le Chevalier DE JAUCOURT. FILTRATION, £. £. ( Pkyf.) On appelle ainfi le plus communément le paflage de l’eau À-trayers un corps defüiné à la purifier des immondices qu’elle renferme ; l’eau qui paffe , par exemple, à-travers le fable , y devient pure & lympide de fale qu’elle étoit auparavant. On fe fert aujourd’hui beaucoup pour cet effet de certaines pierres poreufes, voyez l'article FONTAINE. Selon Lifter, on peut deffaler l’eau de la mer , en y mettant de l’algue ( forte de plante marine ) voyez ALGUE ; & en la diftillant en- fuite à l’alembic. Selon M. des Landes, fi on forme avec de la cire-vierge des vafes qu’on rempliffe d’eau de mer , cette eau filtrée à-travers la cire eft deflalée par cemoyen. Enfin , felon M. Leutmann, fi on filtre de l’eau de puits au-travers d’un papier gns , qu'on laifle enfuite fermenter ou pourrir cette eau , & qu'on la filtre de nouveau, elle fera plus pure que fi on la difülloit. L'effet de la f/rration fe comprend aflez : il n’eft pas difficile de concevoir que l’eau en traverfant un corps folide d’un tiflu aflez ferré, y dépofe les par- ties Les plus groffieres qu’elle renferme : on a étendu lemot de f/tration à tout paflage d’un fluide à-travers un folide dans lequel il dépofe quelques-unes de fes parties ; par exemple, à la féparation des différen- tes parties du fang dans les glandes du corps humain, Si on mêle enfemble deux RS dans un vafe, & qu’on trempe dans ce vafe un linge ou un morceau de dräp imbibé d’une feule de ces deux liqueurs,ilne filtrera que cette liqueur, & ne donnera point paffa. ge à l’autre. Quelques phyfologiftes ont voulu ex. pliquer par ce moyen la f/érarion ou féparation qui KKKKK ’ 808 FIL fe fait des liqueurs animales dans les plandes, Selon eux, les reins, par exemple , font imbibés dès le commencement de leur exiftence d’une liqueur fem blable à l'urine, & par cette raifon ne laiflent pañler que les parties du fang propres à former l'urine : nous ne donnons cette explication que pour ce qw’- elle eft, pour une conjetture ingémieufe & peu fon- dée. (0) “FILTRATION( Med. phyfiol. ) On fe fert de ceter- me pour exprimer l’aétion par laquelle les humeurs qui fe féparent du fang , font comme filtrées à-tra- vers les orifices des vaïfleaux fecrétoires , voyez SE- CRÉTION. " On employe aufli le mot de f/rrarion , dans le même fens , à l'égard du chyle : en tant qu'il eft fe- paré de la mafle alimentaire dans les inteftins , en pé- nétrant dans les veines la@tées, comme à-travers un’ filtre, voyez DIGESTION , CHYLIFICATION. (4) FILTRATION € FILTRE , terme de Chimie & de Pharmacie. La filtration eft une opération fort ufitée en Pharmacie & en Chimie, qui confifte à faire paf- fer un liquide quelconque , qui contient des matie- res non difloutes,ä-travers un corps aflez denfe pour lés retenir. L'inftrument qui fert à faire la f/rration , & qu’on appelle fre, varie beaucoup : tantôt c’eft un morceau de toile , de drap plus ou moins ferré, qu'on appelle éramine ou blanchet ; tantôt c’eft un papier ; quelquefois on fe fert de fable, & c’eft ce dernier que nous employons pour clarifier l’eau de la riviere, par le moyen de nos fontaines fablées ; 1l y a même une efpece de pierre qui eft fort bonne pour cela; elle eft connue fous le nom de pierre d’éponrge. On s’en fert quelquefois en place de fontaine fablée. La manieré de fe fervir de l’éta- mine & du blanchet, qui ne different l’un de l’autre que parce que ce dernier eft beaucoup plus ferré que l'étamine , voyez ETAMINE & BLANCHET ; la ma- mere de s’en fervir, dis-je, eft de les étendre lâche- ment fur un carrelet (voyez CARRELET) , &t de les y aflujettir au moyen des quatre petites pointes qui fetrouvent aux quatre angles de cet inftrument,après quoi on pofe ce carrelet fur une terrine ou autre va- fe de terre , de fayence ou d’étain , & on verfe la li- queur que l’on veut filtrer fur l’étamine ou le blan- chet. Les infufons, les décoëtions , les potions pur- gatives oumedecines, les émulfions qui ne font trou- blées que par des parties fort grofleres, fe filtrent à-travers l’étamine : les firops au contraire, trou- blés par des parties très-fines , fur-tout fi on n’a pas employé de beau fucre , ont befoin non-feulement d'être clarifiés ayec le blanc- d'œuf, mais encore d’être filtrés à-travets le blanchet ; l’étamine n’étant pas aflez ferrée , laïfferoit pañler quelque peu d’é- cume qui gâteroit le firop. Il y a une autre forte de filtre fait de drap ferré , auquel on donne la figure d’un capuchon un peu long ; on l’appelle chauffe d’Hippocrate ou à Hippo- cras, Ce filtre eft aujourd’hui peu ufite chez les Apo- thicaires , qui aiment mieux fe fervir du blanchet, qui eft beaucoup plus commode, & qui fe lave plus facilement que la chaufle. Voyez CHAUSSE. La f{/tratron par le papier fe fait de deux façons; là premiere , qui eft celle qu’on employe communé- ment lorfqu'on a une grande quantité de liqueur à filtrer, eft d’ajufter fur un carrelet, comme il a été dit ci-deflus pour le blanchet, un morceau de toile forte &c peu ferrée, de mettre fur la toile une feuille de papier non collé, que l’on appelle chez les Pape- tiers papier jofeph où papier gris ; le carrelet étant ainfi difpofé , on le place fur une terrine ou tel autre vafe convenable , & l’on verfe deflus la liqueur que l'on veut filtrer, commençant à n’en mettre que fort : peu pour faire prendre pli tout doucement au pa- FIL trop vite, le papier pourroit fe crever : quand on s’apperçoit que le linge & le papier fe font fuffifam- ment étendus , on acheve de charger le f/rre que l’on continue de remplir à mefure que la liqueur S'écou- le ; c’eft ainfi que dans les travaux en petit, les Chi- miftes fé/rrent les lexives , les diffolutions de fels, la liqueur qui contient le kermès minéral, &c. Nous ditons plus bas comment fe fait la f/sration en grand dans les travaux de la Halothecnie. La feconde façon de fe fervir du papier pour fil- trer, eft de prendre un entonnoir de verre plus ou moins grand, de le pofer fur un bocal de verre, con- nu fous le nom de poudrier, ou tel autre vafe conve- nable , de l'y aflujettit par le moyen d’un valet (voyez ENTONNOIR & VALET ), de ranger tont-au- tour de la partie intérieure de l’entonnoir des pailles de grandeur proportionnée , & enfin de mettre fur ces pailles un morceau de papier gris ou jofeph, qu'on plie fous la forme d’un fac conique , répondant à la capacité de l’entonnoir ; c’eft dans ce papier que l’on verfe la liqueur à filtrer. On employe cette fe- conde facon toutes les fois que l’on veut filtrer des petites quantités de lexives , de diffolutions de fels, les teintures , les liqueurs, les ratafats, &c. Ces der- niers fe firent auf par le moyen d’un entonnoir, que l’on a garni à fa partie inférieure de coton, ou d’une éponge fine. | | Nous ne parlerons point ici de la f/rration à -tra- vers le fable, à-travers la pierre d’éponge, ou à-tra- vers l'éponge ordinaire, felon la méthode du fieur Ami, auteur des nouvelles fontaines , parce que ce moyen eft plus économique que chimique. Woyez FONTAINE DOMESTIQUE. Nous indiquerons cepen- dant ici, que fi on vouloit par hafard en Chimie, fil trer quelques liqueurs affez acides pour ronger le pa- pier, on pourroit utilement employer un fable fin, que l’on fauroit par expérience ne contenir aucune matiere foluble, on en mettroit au fond d’un enton- noir de verre , & on feroit pañler à-travers ce fable la liqueur en queftion, Quelques auteurs recomman- dent en ce cas du verre pilé , ce qui feroit encore plus exaét que le fable, pourvû qu’en le pilant, il ne s’y foit rien mêlé de foluble ; mais il ef très-rare qu'on foit obligé d’avoir recours à ce fi/zre. Outre les différentes manieres de filtrer que nous avons décrites , & qui font les plus ufitées , il y en a encore une dont on fe fert quelquefois , & qu’on appelle ration à la languette : elle fe fair de la ma- niere fuivante, On coupe des morcéau*tde drap pa- reil à celui dont on fait les blanchets , de la longueur d'un pié, plus ou moins, & de la largeur de deux ou trois travers de doigts : on les trempe dans de Veau pour les bien imbiber, & on les exprime forte- ment , après quoi on en fait tremper un bout dans la liqueur que l’on vent clarifier, &c on laifle pendre l’autre bout hors du vafe jufqu’à deux ou trois pou- ces au-deflous de la furface de la liqueur ; ficevarf- feau eft fort large, on met plufeurs de ces languet- tes , & on a foin qu'il y ait fous chaque bout un pe- tit vafe pour recevoir ce qui en dégouttera : la li- queur qui étoit dans le grand vaiffeau montera le long des morceaux de drap comme dans un fyphon, & torhbera claire goutte-à-soute dans les récipiens. Cette façon de filtrer eft peu ufitée , les morceaux de drap retiennent beaucoup de la hiqueur,ë par con- féquent occafonnent de la perte ; ajoutez à cela que les feces ne fe deffechent pas fibienque par les autres voies ci-deffus indiquées. Nous ne nous en fervons donc plus, fi ce n’eft pour féparer les huiles qui na- gent fur l’eau , auquel cas on fubftitue à la languet- te de drap une meche de coton trempée dans une hui: le analogue à celle qu’on veut féparer. | Ce que nous avons dit jufqu'ici des différens f= pier & au linge ; çar fi On en verfoit trop à la fois &: | res , & de la maniere de s’en fervir , n'a eu pour objet que la clarification des liqueurs , & [a fépara- tion des feces inutiles qui les troublent , & qu'il faut rejetter : mais ces f£/sres ont encore un autre avan- tage ; ils font des inftrumens propres à féparer des matieres non difloutes, d’avéc un liquide quu les dé- layoit & les tenoit fufpendues , & dont on n’a pas befoin : lorfqu’on veut, par exemple , deffécher un précipité quelconque, qui a été exaétement lavé & édulcoré, on le verfe fur un f/rre de papier, foûtenu d’un carrelet ou d’un entonnoir ; l’eau s'écoule , & la matiere précipitée refte fur le papier , s’y égoutte parfaitement, & s’y raflemble en une mañe que l’on peut facilement divifer par petits morceaux , & faire écher felon l’art. Voyez DESsiCATION. Cette efpe- ce de filtration eft prefque! toùjours préliminaire à la déffication des précipités vrais ou faux ( voyez PRÉ- CIPITÉ), des chaux métalliques , des terres, &c. qui ont eu befoin d’être lavées. Quelques auteurs ont voulu mettre la f/rrarion au nombre des diftillations : Geber étoit de ce fenti- ment ; mais qui eft-ce qui n’en fent pas la différen- ce? Voyez DISTILLATION. Filtration en grand. Dans les travaux de la Halo- thecnie ( on appelle ainfi la partie de la Chimie qui traite les fels ) , où on a des quantités immenfes de kqueurs à filtrer , on ne s’amufe pas à le faire avec les filtres | dont nous avons parlé ci-deflus , & qui ne conviennent que dans nos laboratoires, où nous n’a- vonsjamas quedes quantités médiocres de fels à cla- rifier : On a donc recouts à une autre efpece de fésre beaucoup plus commode ; beaucoup plus folide, & qu’on peut charger tout-à-la-fois d’une grande quan- tité de matiere. Tous ceux qui ont vù faire la leflive, ont vû cette filtration : en efet , celle que font Les Salpêtriers pour clarifier leur leffive , les gens qui s'occupent à faire la potafle pour clarifier la diflolution du fel alkali fixe qu'ils tirent des cendres , ne differe point de la lexive ordinaire , qui eft en ufage pour le blanchif- fage du linge. Voyez SALPÈTRE & POTASSE. Si l’on avoit, par exemple, uñe très-erande quantité de cen- dres à lexiver, c’eft-à-dire dont on voulût tirer le fel alkali fixe , 11 faudroit, d’une feule & même opé- ration, faire la diflolution & la f/rration de ce fel, &r c’eft ce que font les ouvriers dont nous parlions tout-à-l’heure. On prendra un tonneau plus ou moins grand , felon la quantité de cendre que l’on veut le- xiver ; On fera à la partie inférieure de ce tonneau, un trou d’un pouce environ de diametre ; on rempli- ra ce trou avec de la paille, que l’on aflujettira avec une petite cheville de bois ; on placera ce tonneaufur un trépié ou autre machine, pour l’élever au point d'avoir l’aifance de mettre defous un vafe propre à recevoir la liqueur qui pañlera ; on emplira ce ton- neau de cendre, ne laïffant de vuide que ce qu’il en faut pour tenir une petite quantité d’eau, parce qu” on en remet de nouvelle à mefure qu’elle s'écoule : cette eau fe charge du fel contenu dans les cendres, & vient couler claire le long de la paille qui eft au bas du tonneau, dans le récipient ; on continue de re- mettre de nouvelle eau, f on s’apperçoït que celle qui eft pañlée eft faoulée de fel , finon on la reverfe elle-même fur les cendres, continuant cette manœu- vre jufqu’à ce que les céndres foient épuifées de fel. Voyez SEL LIXIVIEL. (2 FILTRE , {. m. (Med. phyfrol.) c’eft un terme em- ployé quelquefois par rapport au méchanifmée des fe- crétions amimales , à l'égard defquelles on le repré- fente les humeurs féparées de la mafle du fang, com- me fltrées à-travers les orifices des vaifleaux fecré- toires. Woyez SECRÉTOIRE. (d) FILTRE , ( Chimie & Pharmacie.) filrrum , appareil pour filtrer une liqueur qu’on veut clarifier, Voyez FILTRATION. D”: FALL FILTRER , (Chimie € Pharm.) pañler à-travers le filtre, Voyez FILTRATION, dei FILTRER, (pierre a) Hifi, nar, Econom. Ce font des pierres dont le tiflu eft affez fpongieux pour que l’eau puïfle pafler au-travers : les plus vantées font celles qui viennent des îles Canaries ; on dit auff qu’on en tire du fond de la mer dans le volfe de Me- xique, & quelques auteurs les ont regardées comme des concrétions tophacéés ou des efpeces de cham- pignons de mer, qui s’attachent à des rochers : on dit que les pierres de cette derniere efpece font ten- dres & molles au fortir de l’eau, mais qu’elles fe durciflent après qu’elles ont été quelque tems expo- fées à l'air. Quoi qu'il en foit, on en compte de deux efpeces ; l’une éft bleuâtre & comme de l’ar- doïfe , Pautre eft grife & reflemble à du grès gro. fier, Au refte il paroît que plufieurs pierres de diffé. rente nature, & fur-tout les‘grès, dont on fait les meules à repafler les couteaux , ont la propriété de donner pañlage à l’eau au-travers de leurs pores , & peuvent par ce moyen la dégager des faletés & or- dures qu’elle peut avoir contraétées, Quand ondefii- ne les pierres a filtrer à cet ufage , on les taillé pour leur donner la forme d’un mortier ou d’un vafe pro- portionné à la quantité d’eau qui doit y être recue; à l'extérieur on leur donne la figure d’un œuf par fon côté le plus pointu; on laïfle en haut des rebords, par lefquels le mortier peut être foûtenu au moyen d’une bâtiffe de bois quarrée, fur laquelle on le place pour qu'il foit fufpendu en l’air ; on met au-deffous un vaifleau de terre; on verfe l’eau de rivière ou de pluie qu’on veut frer dans le mortier ; elle pafle au- travers de la pierre, &c les gouttes d’eau qui fe font filirées , Viennent fe réunir à la pointe de l'œuf, & tombent dans le vaifleau qu’on a placé au - deflous pour les recevoir. De cette maniere l’eau fe trouve pure & dégagée des falétés dont elle étoit chargée ayant que d’avoir été fi/srée. Les Japonois font, dit-on, nn très-orand cas de ces fortes de pierres à filtrer , aufli s’en fervent-ils très-fréquemment : us croyent que c’eft l’ufage qu’ils en font, qui rend les incommodités de la pierre & de la gravelle fi rares parmi eux. Quoi qu’il en foit, quelques perfonnes s’en fervent aufli parmi nous, comme on fait des fontaines filtrantes ; mais il ya du choix dans les pierres que l’on achette pour cet effet, &c fi l’on n’en a pas fait l’effai, on court rifque dy être trompé; d’ailleurs la filtration ne fe fait que très-lentement. Il faut aufñ avoir l'attention de faire nettoyer très-fouvent ces pierres après qu’elles ont filtré, parce que fans cela 1l s’'amañleroit des ordures &c du limon dans leurs pores, qui empêcheroïent à la fin l’eau de pañfer : on fe fert pour cela d’une broffe, dont on frote fortement l’intérieur du vafe où mor- tièr. Malgré ces précautions , il eff rare qu’au bout d’un certain temis, les pores de ces pierres ne fe bou chent, & pour lors elles prennent une odeur très- defagréable , qu’on ne peut guere leur ôter , & qu’el- les communiquent à l’eau que lon y laifle féjourner. * FIN, f. £ (Grammaire. ) terme relatif à commen- cement ; le commencement eft des parties d’une cho- fe celle qui eft ou qu'on regarde comme la premiere ; & la fin, celle qui eft ou qu’on regarde comme la derniere. Ainf on dit la fr d’un voyage, la fin d’un ouvrage , la fin de la vie, la fin d’une paffior : cètte pañlion tire à fa fr, cet ouvrage tire à fa fi. Une ouvriere diroit en devidant un peloton de fl, ou en travaillant , je souche à la fin de mon fil ; fi elle én fé- paroit une petite portion, voila un bout de fil ; fi elle confidéroit ce fil comme un continu, 7e Ze riens par le bout ; fi elle n’avoit égard qu'au bout qu’elle tient , & qu'il fût fur le point de lui échapper des doists, tant la partie qu'elle en tiendroit encore féroit pe- tite, Je n'en tiens plus que l'extrémité, 810 FIN * Fin, ( Morale. ) c’eft la derniere desraïfonsique nous avons d'agir, OU celle que nous regardons com- me telle ; ainfi l’on demande à un homme, à quelle fiz avez-vous fait cette démarche? quelle #7 vous propoñiez-vous dans cette occafion ? Preflez un hom- me de motifs en motifs, & vous trouverez que fon bonheur particulier eft toùjours la fz derniere de toutes fes aétions refléchies. FIN , (Jurifpr.) dans le ftyle judiciaire, fignifie en genéral bus & objer. md FIN civice, eft lorfque la procédure eft dirigée au civil ; on fe fert de ce terme lorfque dans un pro- cès criminel on demande que les parties foient re- cûes en procès ordinaire : on dit communément que les parties feront renvoyées à fs civiles, FINS ET CONCLUSIONS, font termes fynonymes qui fignifient /’objet d’une demande. FIN DE NULLITÉ, c’eft la demande tendante à faire déclarer nulle quelque procédure ou autre aéte. FINS DE NON PAYER; on {e fert au palais de cet- te expreflion pour fignifier des moyens par lefquels un débiteur cherche à éluder le payement de ce qu’- 1l doit. FINS DE NON PROCÉDER, font des moyens de forme à la faveur defquels on foûtient que l’on doit être difpenfé d’aller en avant fur une demande, juf- qu'à ce qu'il ait été ftatué fur cesf£zs ou conclufons; telles font les exceptions dilatoires , les exceptions déclinatoires , les moyens de nullité, & autres ex- ceptions péremptoires qui fe tirent de la forme & non du fond de la conteftation. Les fs de non procé- der doivent être propofées avant d’avoir contefté au fond, autrement on n’y eft plus recevable, excepté lorfqu'il s’agit d’un déclinatoire fondé fur l’incompé- tence du juge, ratione materiæ : comme quand une matiere temporelle eft portée devant un juge d’égli- fe; car une incompétence de cette"efpece , qui eft une #7 de non procéder, peut être propofée en tout état decaufe. L’ordonnance de 1667, sir. vj. des fins de non procéder , art. 3. veut que ces fortes de caufes foient jugées fommairement à ’audience , fans pou- voir les appointer : il y a néanmoins quelquefois des cas où les juges font obligés de le faire, comme lorf- . que la décifion d’un déclinatoire dépend defaits , & qu'il y a des enquêtes & des titres à examiner, Voyez Bornier, fur l’article 3 que l’on a cité. FINS DE NON-RECEVOIR , eft toute exception péremptoire au moyen de laquelle on eft difpenfé d'entrer dans la difcuffion du fond. Les fins de non-recevoir {e tirent 1°. de la forme; par exemple, lorfqu’une femme forme une demande fans être autorifée de fon mari, ou un mineur fans être affifté de fon tuteur ou curateur. 2°. Il y en a qui fe tirent du défaut de qualité, comme quand on oppofe au demandeur qu’il n’eft point héritier de celui dont il reclame les droits. 3°. Du laps de tems, favoir quand il y a quelque prefcription acquife. Aux termes de l’arsicle $ du tir. v. de l'ordonnance de1667 , les fins de non-recevoir doivent être em- ployées dans les défenfes, pour y être préalablement fait droit. (4) à Vs FIN DE VOILES, ( Marine.) Un vaifleau eft fr de voiles , lorfqu'il eft leger , qu’il porte bien la voi- le, & quil marche très-bien, (Z) FIN , (Chimie, Métallurgie.) {e dit fubftantivement de l’or & de l’argent , qui font des métaux parfaits, par oppofition au cuivre > à l’étain jau plomb , & au fer, qui font des métaux imparfaits. On effaie le cui- vre pour favoir fi le £z (c’eft-à-dire l'or &c Pargent) qu'il contient peut dédommager des frais du rafraï. chiflement, de la liquation , du refluage, & de l’af. nage, voyez ces articles | &t donner encore quelque bénéfice. Un bon eflayeur doit retirer tout Le f7 qui FIN peut être contenu dans un alliage, fans y laïfer La moindre matiere hétérogene. On fait des eflais des fcories , pour favoir fi elles ne contiennent point encore quelque peu de f7. Le mélange d'argent & de plomb qu’on laiffe refroidir fans le remuer , ne con- tient pas une égale quantité de fz dans toutesles dif férenres parties de fa mañle. Voyez LOTISSAGE. Ainf on leve les eflais du plomb encore en bain, pour fa- voir s'il peut être afliné avec bénéfice , ou fi le £z qu'il contient payera les frais de l’affinage :!mais ilne faut pas confondre le fx qu’on retire ainfi d’un plomb fortant du catin de réception dans les travaux en grand, pour favoir s’il peut être affiné avec bénéfice, avec le grain de fz qu'on retire d’un plomb granulé en male, affiné ou non, pour le défalquer enfuite de leflai auquel on l’employe. Foyez GRAIN DE Fix. Fin {e dit auffi adjettivement d’un métal imparfait, mais pur, par oppoñtion à fon.état d'impureté. Un quintal de cuivre maté peut donner vingt livres de cuivre fin : l’étain d'Angleterre pañle pour le plus fr que l’on connoïffe : le fer de Berry eft plus 7 que ce- lu de Champagne, ou il a le grain plus fr ; maïs cette épithete ne s’eft pas encore donnée, que je fache , au plomb, fans doute parce que quand1l eft dépouillé de toute matiere étrangere, 1l eft par-tout le même dans lanature : on dit auffi dans le même fens , cesor 6 cer argent font plus fins que tel autre, foit qu'il y ait vrai- ment de l’or &c de l'argent d’un meilleur aloi que les autres, ou, ce quieft plus vraiffemblable, parce qu’- ils font mieux dégagés de toute matiere étrangere ; conditions qui exigent des trayaux pénibles, & un grand exercice de la part de l’effayeur ou de l’af- neur. Voyez DENIER, KARAT, AFFINAGE , RAFFI- NAGE, DÉPART, INQUART, 6 Essai. #. Cramer, &le Schlurer de M. Hellot. Arr. de M. DE VILLIERS. FIN , (Manége, Maréchall.) Le cheval fr eft pro- prementun cheval de legere taille, tel qu’il doit être choifi dans le nombre des différens chevaux réfultans du produit du mélange des diverfes races , lorfqu’on le define au manége, ou à fervir en qualité dé che- val de maïtre, en voyage, à la: guerre, à la chaffe, €. Nous demandons que le cheval de manége ait de la beauté, qu'il foitnerveux, leger, vif, & brillant ; que les mouvemens en foient lians & trides ; que la bouche en foit belle ; & principalement queles reins 8e les jarrets en foient bons, &c, Dans le cheval de voyage , nous exigeons une taille raifonnable , un Âge fait, tel que celui de fix à fept années, des jambes fûres , des piés parfaitement conformés, un ongle folide , uné grande legereté de bouche, beaucoup d’allure, une aétion fouple & dou- ce, de la tranquillité, de la franchie ; & nous rejet- tons avec foin celui qui feroit ardent, parefleux , & délicat en ce qui concerne la nourriture. Le cheval de guerre doit avoirune belle bouche, la tête aflürée, une force liante & fouple , de la fen- fibilité, de l’adrefle , du courage, de la legereté; il ne doit craindre aucun des objets qui peuventfrap- per fes fens:1l importe encore extrèmement qu’il ne foit point vicieux envers les autres chevaux ; quil n'ait point d’ardeur , & qu'il foit d’un bon & facile entretien. . À l'égard du cheval de chafle, nous defirons qu'il foit doué de legereté , de vîtefle, qu'il ait du fond & de l’haleine, que les épaules en foient plates & très- hbres ; qu'il ne foit point trop raccourci de corps ; que la bouche enfoit bonne, qu’elle ne foit point trop fenfible, & qu'il foit plütôt froid qu’ardent à s’animer. La tranquillité, là docilité , l’exaéte obéiflance , la bonté de la bouche , des allures füres & douces, une taille médiocre , une franchife à l’épreuve de tous les objets capables d’effrayer & d’émouvoir, font les qualitésque l’on doitrechercher dans les chevaux d’arquebufe, dans les chevaux de promenade, & dans les chevaux de femme. Le chèval-de domeftique ou dé fuire , Le cheval de cavalier & de dragon ;, le cheval de piqueur, font dans le genre des chevaux de felle qe nous énvifa- geons comme.des chevaux communs &t qui peuvent être mis en:oppoñition avec ceux dans léfquels nous trouvons de la finefle.. Le premier doit étrebien traverfé, bien membré, biengigoté ; la bouche en doit être bonne, fans être abfolument belle; & l’onne doit pas s’attacher à l’e- xamen dela douceur ou de la-dureté de fes allures, Il eneft de même du fecond, c’eft-à-dire du che- val-de-troupe,, dans lequel'il feroit-effentiel d'exiger plus d’obéiffance, plus de foupleffe, plus de legere- té, &qui,relativementaux manœuvres qu'il doit exécuter , auroit befoin des fecoursde l’art ,ainfi que le cavalier & le dragon, dont l'ignorance m’eft pas moinspréjudiciable au.bien du fervice, que-lafienne: Enfin le cheval de piqueur.doit être vigoureux , étoffé , doué d’une grande haleine, & propre à réfif- ter au travail pémble auquel ileft-aflujetri. Quant aux bidets de pofte, on doit plütôt confidé: ter la bonté de leurs jambes&c de leurs piés que leur figure & que les qualités de leur bouche. Il faut né- ceflairement qu'ils galoppent avec aifance , & dema- miere que la force de leurs reins n’incommode point le cavalier. Trop de fenfbilité feroit eneux un défaut d’aütant plusconfidérable que l'inquiétude qui réful: teroit des mouvemens defordonnés des jambes de differens couriers quu les montent, & de lapproche indifcrete & continuelle des éperons, les rendroient inévitablement rétifs ou ramingues. Il eft encore dans le genre des chevaux qui tirent &-qui portent, des chevaux plus ou moins fs, plus ou moins communs, & plus ou moins grofñers. Des chevaux bien tournés & bien proportionnés, d’une taille de onze pouces ; jufqu’à cinq piés trois ou quatre ; qui feront parfaitement relevés du de- vant, exaétement traverfés & pleins ; dont les épau- les ne feront pointtrop chargées ; dont le poitrail ne pêchera point par un excès de largeur ; dont les jam- bes belles, plates, & larges, ne feront point garnies d’une quantité infinie de poils ; dont les jarrets feront nets, bien évuidés, & bien conformés ; dont les piés feront excellens ; qui auront dans leurs mouvémens beaucoup de grace &t de liberté, & qui feront juf- tement appareillés de poil, detalle, de marque, & de figure , d’inclination, d’allure , & de vigueur, for- meront des chevaux de carrofle qui auront de la f- nefle & qui feront préférables à tous ceux fur lef- quels on pourroit jetter les yeux, lorfqu'on fouhai- ‘tera des chevaux beaux, brillans, 8 néanmoins d’un très-bon fervice. Certains chevaux de chaïife comparés aux che- vaux peu déliés que l’on employe communément à tirer cette forte de voiture , feront dans leur efpece envifagés comme des chevaux fzs.Le cheval de bran: card fera bienétofté, d’une taille raifonnable ,& non trop élevé ; il trotera librement & diligemment, tandis que le bricolier qui fera bien traverfé, mais qui aura moins de deffous que lui, & qui fera plus voifin du genre des chevaux de felle , fera tenu à un galop raccourci auquel il fournira avec facilité. Les autres chevaux de tirage feront plus com- muns ou moins grofliers felon leur frudure , leur épaifleur , la largeur de leur poitrail, la grofleur de leurs épaules plus ou moins charnues, leur pefanteur, labondance êc la longueur des poils de leurs jam- bes,&c. Il en fera ainfi des différens chevaux de bât & dé fomme qui doivent avoir de la force & beaucoup de reins , &c. (e) FIN, er Mufique, eft un mot qui fe place quelque- fois fur la finale de la premiere reprife d’un rondeau, pour marquer que c’eff fur cette finale qu’il faut ter- æiner touf l'air. Foyez RONDEAU, (S) . FIN 2 FINAGE , (Jurifprid.) ainfi appellé de fnes agro- rum ; vel territorii, {e prend non-feulement pour les limites d’un territoire, mais pour tout le ban & ter- ritoire même ; d’une juftice & feigneurie oud’une pa- roifte. ads Poyex les coûtumes dé Melun ; arr. 302. Sens, 145. Troyes, :69.Chaumont, 103. Vitry, $& 122. Châlons ; 266 & 267. Bar, article 49 & 209. l’an- cienne coûtume d'Auxerre, art, 20 3. l’ordonnance du duc de Bouillon, articles 100 & 539. (4) FINAL, adj. (Grarmm. 6 Théol.) fe dit de ce qui termineune aétion, une opération, une difpute, &c. & en général de ce qui met fin à une chofe ; comme un jugement final, fentence finale, &c. Les Théologiens appellent l’impénitence des ré. pronvés, wapéritence finale, parce qu'ils fuppofent qu’elle continue jufqu’à la fin de leur vie, & qu'ils meurent dans ce funefte état. | _ On dit auflien Théologie, perfévérance finale; c’eft l’état de juflice & de grace dans lequel un homme {6 trouve à la mort, & quile rend digne des récom- penfes éternelles. Voyez PERSÉVÉRANCE. (G) FINAL, (Géogr.) ville d'Italie ,capitale d’un mar- quifat auquel elle donne fon nom, & qui eft encla- vé dans l’état de Gènes. Final eft fur la Méditerra= née, à 12 lieues S.E. de Coni, 13 S.O. de Gènes, 22 $. E. de Turin, 24 S. Q. de Cafal, Long. 254 52! larit, 44418, (C. D.I.). FINALE , eft, ez Mufique , la principale corde du mode qu’on appelle aufli conique , & fur laquelle Vair ou la piece doit finir. Voyez Mope, TONIQUE. Quandon compofe à plufeurs parties, & {ur-tout des chœurs, il faut toùjours. que la baffe tombe en fi- niffant fur la note même de da fénale; mais les au- tres parties peuvent s'arrêter fur fa tierce & fur fa quinte. Autrefois c’étoit une regle de faire toûjours à la fin d’une piece la tierce majeure fur la frale, même en mode mineur ; mais cet ufage a été trouvé de mauvais goût & prefque abandonné. Les Mufi- ciens appellent aujourd’hui céla par dérifion , faire la tierce de Picardie, (S) FINALE 04% FINALE DE MODENE, (Géogr.) peti- te ville du Modénois en Italie ; elle eft {ur la riviere du Panaro , à s heues N. E. de Modene , 40 S. E. de la Mirandole, Long, 28% 507, larir. 44% 367. (C.D.T.) FINANCES , f. f, (Æconom. polir.) on comprend fous ce mot les deniers publics du roi & de l’état. Qui ne juge des fizances que par l’argent , n’en voit que le réfultat, n’en apperçoit pas le principe ; ül faut, pour en avoir une idée jufte , fe la former plus noble & plus étendue. On trouvera dans les finances mieux connues, mieux développées, plus approfon- dies , le principe, l’objet & le moyen des opérations les plus intéreffantes du gouvernement ; le principe qui les occafonne, l’objet qui les fait entreprendre, le moyen qui les aflüre. Pour fe prefcrire à foi-même dans une matiere auf vafte , des points d’appui invariables & fûrs, ne pourroit-on pas envifager Les fzances dans le prin- cipe qui les produit, dans les richeftes qu’elles ren- ferment, dansles reflources qu’elles procurent, dans ladminiftration qu’elles exigent ? Point de richeffes fans principe, point de reffour- ces fans richefles, point d’adminiftration fi lon n’a rien à gouverner ; tout fe lie, tout fe touche, tout fe tient : les hommes & les chofes fe repréfentent circulairement dans routes les parties ; & rien n’eft indifférent dans aucune, puifque dans les frances, comme dans l’életricité, le moindre mouvement fe communique avec rapidité depuis celui dont la main approche le plus du globe, jufqu’à celui qui en eft le plus éloigné. Les finances confidérées dans leur principe, font produites par les hommes ; mot cher & refpeétable . 812 à tousiceux qui fentent & quipenfent ; mot qui fait profiter de leurs talens 8 ménager leurs travaux ; . mot précieux, quirappellésou qui devroit rappeller : fans ceffe à l’efprit ainfiqu’au fentiment:, cette belle : maxime de Térence , que l’on ne fauroit trop pro- fondément graver dans fa mémoire & dans fon cœur: homo fum, rulul humani a me alienum puto : «je fuis # homme, rien de ce qui touche l’humanité ne fau- # roit m'être étranger». Voiläde code du genrehu | main : voilà le plus doux lien de la fociété: voilà le germe des vüûes les plusgrandes , & des meilleures | vüûes ; idéesique le vrai fage n’a jamais féparées. Les hommes ne doivent , ne peuvent donc jamais | être oubliés ; on ne fait rien que pour eux, & c’eft par eux que tont fe fait. Le premier-de ces deux points mérite toute l’attention du gouvernement, le fecond toute {a reconnoïffance & toute fonaffeétion. À chaque inftant , dans chaque opération , les hom- mes fe repréfentent fous différentes formes ou fous diverfes dénominations ; mais le principe n’échappe point au philofophe qui gouverne , il le faïfit au mi- lieu de toutes les modifications qui le déguifent aux yeux du vulgaire. Que l’homme foit pofleffeur ou cultivateur, fabriquant ou commerçant ; qu'il foit confommateur oïfif, ou que fon aéivité fournifle à la confommation ; qu’il gouverne ou qu'il foit gou- verné, c’eft un homme : ce mot feul donne l'idée de tous les befoins, &c de tous les moyens d’y fatis- faire. | Les fizances font donc originairement produites par les hommes , que l’on fuppofe en nombre fuffi- fant pour l’état qui les renferme , & fufhfamment bien employés , relativement aux différens talens qu'ils poffedent ; double avantage que tous les écrits modernes faits fur cette matiere , nous rappellent & nous recommandent : avantages que l’on ne fauroit trop foigneufement conferver quand on les poffede, ni trop tôt fe procurer quand ils manquent. Néceffité d'encourager la population pour avoit un grand nombre d'hommes ; néceflité pour les em- ployer utilement, de favorifer Les différentes profef- fions proportionnément à leurs différens degrés de néceflité, d'utilité, de commodité. L'agriculture fe place d'elle-même an premier rang , puifqu’en nourriflant les hommes , elle peut feule les mettre en état d’avoir tout le refte. Sans l’agriculture, point de matieres premieres pour les autres profeffions. C’eft par elle que l’on fait valoir, 1°. les terres de toute efpece, quels qu’en foient l’ufage & les pro- duétions ; 2°. les fruits , les bois, les plantes , & tous les autres végétaux qui couvrent la furface de la terre ; 3°. les animaux de tout genre & de toute ef- pece qui rampent fur la terre & qui volent dans les airs, qui fervent à la fertilifer, & qu’elle nourrit à fon tour ; 4°. les métaux, les fels , les pierres, & les autres minéraux que la terre cache dans fon fein, ‘& dont nous la forçons à nous faire part; 5°. les poiflons , & généralement tout ce que renferment les eaux dont la terre eft coupée ou environnée. Voilà l’origine de ces matieres premieres fi va- riées, fi mulripliées, que l’agriculture fournit à l'in- duftrie qui les employe ; il en eft aucune que l’on ne trouve dans les airs, fur la terre ou dans les eaux. Voilà le fondement du commerce , dans lequel on ne peut jamais faire entrer que les produétions de la- griculture & de l'indufirie, confidérées enfemble ou féparément ; & le commerce ne peut que les faire circuler au-dedans, ou les porter à l'étranger. Le commerce intérieur n’en eft point un propre- ment dit, du moins pour le corps de la nation, c’eft une fimple circulation. L'état & le gouvernement ne connoïflent de commerce véritable que celui par FIN ecnrel on fe procure le nécelfaire 8e on fe débar- rafle du fuperflu , relativement à l’univerfalité des citoyens. À Mais cette exportation, mais cette importation ont des lois différentes, fuivant leurs diférens ob- jets. Le commerce qui fe fait: au -dehors w’eft pas toûjours le même; s’il intérefle les ‘colonies, lesré- glemens ont pour objet la dépendance raifonnable où l’on doit retenir cette portion de la nation; s'il regarde l'étranger , on ne s'occupe plus que des intée rêts du royaume & de ceux des colonies, qui for- ment une efpece deucorps intermédiaire entre le royaume êc l'étranger, C’eft ainfi.que le commerce bien adminiftré vivifie tout, foütienttout: s'il ef extérieur, & que la balance foit favorable ; s'il eft intérieur, & que la circulation n’ait point d’entrave, il doit néceffairèement procurer l'abondance univer- felle & durable de la nation, Confidérées comme richeffes, les fzances peu- vent confifter enricheffes naturelles ou acquifes, en richeffes réelles ou d'opinion. Parmi les richefles naturelles on doit compter le génie des habitans, développé par la nécefité , aug- menté.par l’émulation, porté plus loin encore par le luxe & par l’oftentation. Les propriétés, l'excellence & la fécondité du fol, qui bien connu, bien cultivé, procure d’abon- dantes récoltes de toutes les chofes qui peuvent être néceffaires , utiles, agréables à la vie. : L’heureufe température du climat, qui attiré, qui multiplie, qui conferve , qui fortifie ceux: qui l’habitent. | Les avantages de la fituation, par les remparts q la nature a fournis contre les ennemis, & par la fa- cilité de la communication avec les autres nations. Jufque-là nous devons tout à la nature & rien à l'art ; mais lui feul peut ajoûter aux richefles natu- relles un nouveau degré d'agrément & d'utilité. Les richeffes acqufes , que l’on doit à l’induftrie corporelle ou intelleétuelle, confiftent | Dansles Métiers, les Fabriques , les Manufaures, les Sciences & les Arts perfeétionnés par des inven- tions nouvelles, telles que celles du célebre Vaucan- fon , &raïfonnablement multipliés par les encoura- gemens. On dit raifonnablement , parce que les graces ëc les faveurs que l’on accorde , doivent être pro= portionnées au degré d'utilité de ce qui en eft l’objet: Dans les lumieres acquifes fur ce qui concerne l’a- griculture en général, & chacune de fes branches en particulier ; les engrais, les haras, la confervation des grains, la plantation des bois, leur confervation, leur amélioration, leur adminiftration, leur exploi- . tation ; la pêche des étangs, des rivieres & des mers; & généralement dans tout ce qui nous donne le ta- lent de mettre à profit les dons de la nature, de les recueillir & de les multiplier. Ungouvernement aufi fage que le nôtre, envifagera donctoûjours comme de vraies richefles & comme des acquifitions d’un grand prix, les excellens ouvrages que nous ont donnés fur ces différentes matieres MM. de Buffon & Daubenton, M. Duhamel du Monceau, l’auteur de la police des grains, & les autres écrivains eftima- bles dont la plume s’eft exercée fur des fujets fiinte- reffans pour la nation & pour le monde entier, On accordera la même eftime aux connoiffances ; aux vües, aux opérations raffemblées dans le royau- me pour la population des citoyens, pour leur con- fervation, pour l'amélioration pofñble & relative de toutes les conditions. On doit encore envifager comme richeffes acqui- fes, les progrès de la navigation intérieure , par l’é- tabliffement des canaux ; de extérieure, par l’aug- mentation du commerce maritime ; celui de terre accrû, facilité, rendu plus {ür par la no - (4 le rétabliffement, l'entretien & la perfeétion des ponts, .chauflées & grands chemins. La matiere eft par elle-même d’une fi grande éten- due ,-qu'il faut malgré foispañler rapidement fur les objets, & réfifter au defir que l’on auroit de s'arrêter fur les plusintéreflans: contentons-nous de les pré- {enter au leteurintelligent , & laiflons-lui le foin de les approfondir. er | Les richeffes de l’état, que l’on a d’abord envifa- gées comme naturelles , enfuite comme acquifes , peuvent l'être auf comme richefles réelles ou d’opi- nion. a. | | Lesréelles ne font autre chofe que les fonds où biens immeubles, les revenus & les effets mobiliers. Les immeubles (on ne parle ici que des réels, & non de ceux qui Le font par fiétion de droit) ; les im- meubles font les terres labourables , les prés, les vignes, les maifons & autres édifices , les bois & les eaux, &. généralement tous les autres fonds, de quelque nature qu'ils foient, qui compofent le do- maine foncier du fouverain & celui des particuliers. Du fouverain, comme feigneur & propriétaire particulier de certains fonds qui n'ont point encore été incorporés au domaine du roi. Comme roi, & poflédant à ce titre feulement les _héritages & les biens qui forment le domaine foncier de la couronne. TARA Des particuliers, comme citoyens , dont Les do- maines font la bafe des richefles réelles de létat de deux manieres ; par les produétions de toute efpece qu'ils font entrer dans le commerce & dans la circu- lation ; par les impoñitions , auxquelles ces mêmes produétions mettent les particuliers en état de fatis- faire. font fixes ou cafuelles; & dans l’un êr l’autre cas, elles appartiennent , comme les fonds, au fouverain où aux particuliers. l -Appartiennent-elles aux particuliers ? ce font les fruits , les produitst, Les revenus des fonds qu'ils pof- fedent ; ce font aufli les droits feigneuriaux utiles ou honorifiques qui y font attachés. Si ces revenus appartiennent au fouverain, ils font à lui à titre de {eigneur particulier, ou bien à eaufe de la couronne ; diftinétion effentielle, & qu'il ne faut pas perdre de vûe, fi l’on veut avoir la folu- tion de bien des dificultés. Le roi poflede les uns par lui-même , abftradion faite de la fouverainete: à. titre de fouverain, il compte parmi fes revenus, 1°, le produit du domaine foncier & des droits doma- niaux : 2°. les impoñtions qu'il met, comme roi, fur ce que les autres pofledent; revenu toñjours à charge à la bonté du monarque , qu'il n’augmente jamais qu'à regret, & toüjours en obfervant que l’e- tabliflement des impoñtions fe fafle relativement aux facultés de la nation, mefurées fur ce dont elle eft déjà chargée, & fur ce qu'elle peut fupporter encore; la répartition avec une proportion qui détruife les taxes arbitraires, & qui ne charge le citoyen que de ce qu'il peut naturellement & doit équitablement fupporter ; le recouvrement &c la perception avec autant d’exaditude que de modération & d’huma- mité, Paffons de fuite &z fans rien détailler, aux richeffes réelles confidérées dans les effets mobiliers, tels que Vor & l’argent, les pierreries , les marchardifes de toute efpece, & les meubles meublans, quels qu'ils foient. | Obfervons feulement, comme autant de circonf- tances qui n’échappent point à ceux qui font chargés de cette grande partie de Padminiftration, Que l'or & l'argent, qui font tour-à-tour mar- chandifes &r fiones repréfentatifs de fout ce qui peut être échangé, ne peuvent provenir que des mines, Tome PE | | Confidérées comme revenus, les richeffes réelles FIN 81% pour ceux qui en ont ; que du commerce, pour ceux ar ; qui n'Ont point de minés. Que l'or & l’argent, ainfi que les pierreries , peu- A : : | vent être confidérés commematieres premieres ou comme ouvrages fabriqués : comme matieres, lorf- que ,' par rapport aux pierreries, elles font encore brutes ; & qu'à l’égatd des métaux, ils font encore en lingots, en barres, &e, comme ouvrages, lorf- que les pierres précieufes font mifes en œuvre; 6 qu'à l'égard des méraux, ils font employés en mon- noie, en vaiflelle, en bijoux, en étoffes, 6'c. Que les marchandifes &' les meubles peuvent être l’objét d’uné circulation intérieure , ou d’un com- merce avéc l'étranger; & qu'à cet égard, & fur- tout dans le dernier cas, il éfl'important d'examiner f la matiere.premiere & la main-d'œuvre à-la-fois.; ou Puné des deux feulement, proviennent de la NATION MMS PRO Les finances confidérées, comme on vient de le voir, dans les richefes 8 les pofleffions réelles & fenfiblés, frappent tout lé monde, & par cetteraifon obtiennent fans peine le degré d’attention qu'elles méritent, En voici d’une efpece fi métaphyfique, que plufieurs-féroient tentés de ne point les regarder comme richefles, fi des titres palpables ne les ren- doient réelles pour ceux qui conçoivent le moins les effets que ces titres produifént dans le commerce ëc dans la Circulation. r Les richefles d’opimion, qui multiplient fi prodi- gieufement les réelles, font fondées fur le crédit, c'eft-à-dire fur l’idée que l’on s’eft formée de l’éxac- titude & de la folvabilité. : Mais ce crédit peut être celui de la nation, quife manifefte dans les bänques &c dans la circulation des effets publics. accrédités par une bonne adminiftra- : tion ; ou celui des particuliets confiderés fépätément Ou commé réunis. - Ai Séparément, ils peuvent devenir par leur bonne conduite .& leurs grandes vûes, les banquiers de l'état & du monde entier. On fera fans peine à Paris l’application de cet article. Confidérés enfemble , ils peuvent être réunis en corps, comme le clergé, les pays d'états, &c, en compagnies. de commerce , comme la compagnie des Indes, les chambres d’affürances, &c, d’affaires , tel- les que les fermes générales , les recettes générales, les munitionnaires généraux, &c. dont le crédit per- fonnel augmente le crédit général de la nation. Mais les avantages des richeffes naturelles ou ac- quifes, réelles ou d'opinion, ne fe bornent pas au moment préfent ; ils s'étendent jufque dans Pavenir, en préparant les reffources qui forment le troifieme afpeét fous lequel les fzances doivent être envifa- gées. | Trois fortes de reflources {e préfentent naturelle- ment pour fatisfaire aux befoins que les revenus or- dinaires ne rempliflent pas; l’aliénation, l'emprunt, l’impofñition. Les deux premieres forit en la difpofi- tion des fujets comme du fouverain, Tout le monde peut aliéner ce qu'il a, emprunter ce qui lui man- que ; le fouverain feul peut impofer fur ce que les autres ont. Parcourons ces trois fortes de reflources avec la même rapidité que les autres objets. Les aliénations fe font à perpétuité, de ce qui eut être aliéné fans retour; à tems, de ce qui eff inahénable de fa nature. On aliene les fonds ou les revenus ; les fonds de deux manieres à l’égard du fouverain, en engageant ceux qu ne font point encore {ortis de fes mains, en mettant en revente ceux qui n’avoient été vendus qu’à faculté de rachat ; les revenus provenant de l’établiffement de nouveaux droits, ou de la percep- tion des droits anciennement établis, Quant aux emprunts , qui fuppofent tonjours fa LLHI 814 FIN certitude, ou tout au moins le defir d’une prochaine libération, ils peuvent fe faire direétement ou indi- rectement. Dire@s, ils confiftent dans les créations de ren- tes, qui peuvent être perpétuelles ou viageres, qui {ont à leur tour viageres proprement dites, ou ton- tines, aflignées les unes & les autres fur les fonds ou fur les revenus. Indires , 1ls font déguifés fous diverfes formes , fous différentes dénominations ; & tels font l’ufage du crédit public ou particulier , les loteries plus ou moins compliquées , les créations d’offices avec at- tribution de gages, ou les nouvelles frarces que Pon exige des offices déjà créés, avec augmentation de gages proportionnée. | | Mais des trois objets de reffources qui font entre les mains du gouvernement, l'impofñtion eft fans contredit celle que l’on employe-toùjours le plus à regret, Les impoñtions peuvent être, comme les em- prunts, direétes ou indireétes : on peut établir denou- veaux impôts , on peut augmenter les 1mpoñitions anciennement établies ; mais dans tousles-cas, dans tous lestems , chez toutes les nations, les impofitions ne pourront jamais porter que fur les chofes, fur les hommes & fur leurs aétions , qui comprendront tou- tes les conventions, toutes les efpeces de mutations, & toutes les fortes d’aétes émanés d’une jurifdiétion libre ou forcée. Voyez pour le détail le 7102 IMPO- SITION, dont vous prendrez par avance l’idée géné- rale la plus fûre , fi vous la concevez d’après la di- vifion du droit, de rebus, de perfonis, & de atlionibus. Il en eft au furplus des reflources comme du cré- dit ; un ufage raïfonnable les multiplie, mais l’abus que l’on en fait les détruit : il ne faut ni les mécon- noïître ni s’en prévaloir ; 1l faut les rechercher com- me fi l’on ne pouvoit s’en pañler, & les économifer avec le même foin que s’il étoit deformais impoffble de fe les procurer; & c’eft à cette fage économie que conduifent les vrais principes de l’adminiftra- tion, quatrieme maniere d’envifager les firances, & que l’on a placée la derniere, parce qu’elle embraffe toutes les autres parties, & qu'elle les fuppofe & les gouverne foutes. L’adminiftration peut être publique & générale, ou perfonnelle & particuliere. L’adminiftration générale fe fubdivife en politique & économique. La politique embrafle l’univerfalité des hommes & des chofes. Des hommes, pour les apprécier ce qu'ils valent relativement à leur mérite perfonnel , à leur condi- tion, à leur profeffion ; & pour tirer parti pour le bien commun, de leurs talens, de leurs vertus, de leurs défauts même. Des chofes, afin de les bien connoître chacune en particulier & toutes enfemble ; pour juger des rapports qui fe trouvent entr’elles , & les rendre tou- tes utiles à l’univerfalité, L’adminifiration générale économique a pour ob- Jets Par rapport aux principes des f£zances, d’en con- ferver les fources ; de les rendre, s’il fe peut, plus abondantes, & d’y puifer fans les tarir ni Les deffé- cher. Par rapport auxrichefles, de conferver & d’amé- liorer les fonds , de maintenir les droits, de perce- voir les revenus ; de faire enforte que dans la recette rien ne fe perde de ce qui doit entrer dans le thréfor du fouverain ; que dans la dépenfe chaque chofe fui- ve la deftination qui hu eft affeêtée ; que le tout, s’il eft poffble, n’excede pas le revenu, & que la comptabilité foit en regle & bien conftatée. Cette même adminiftration politique & générale a pour objet, par rapport aux reflources, de bien çonnoîre celles dont on peut faire ufage relative- FIN nent aux facultés de l’état, au cara@ere de {a na- tion, à la nature du gouvernement ; de favoir juf- qu’à quel point l’on peut compter fur chacune en par- ticulier, fur toutes enfemble , & fur-tout de les ap- pliquer aux objets les plus intéréflans. de Confidérée comme perfonnelle & particuliere l’adminiftration eft peut-être d’autant plus impor- tante , qu'il arrive fouvent que plus on fe trouve par fa place éloigné des grands objets, plus on s’écarte des grandes vües, & plus auffiles fautes font dange- reules relativement au gouvernement. Mais il feroit plus qu'inutile de prévenir ici fur cette forte d’ad- miniftration , ce que l’on en dira ci-après à l’occa- fion du 104 FINANCIER, qui rentre néceflairement dans celui-ci. CF il On voit par tout ce que l’on vient delire fur les firances, que la diftribution la plus fimple:&c la plus naturelle , que la progreflion des idées les plus com- munes & les plus générales, conduifent à la véritable définition d’un mot fiintérefant pour la fociété; que dans cet article toutes les parties rentrent refpetti- vement les unes dans les autres ; qu’il n’en eft point d’indépendantes ; que leur réunion fenle peut opé- rer, confolider & perpétuer la füreté 'de l’état , le bonheur des peuples & la gloire du fouverain: & c’eft à quoi l’on doit arriver en partant du mot f- nances, comme on doit, enretrogradant, remonier à ce mot, fans que ni dans l’une ni dans l'autre de ces opérations rien puiffe interrompre la chaîne des idées & l’ordre du rafonnement. Ces arricle eff de M. PESSELIER. | FINANCE , (Caraîtere de) a l’ufage de l’Imprimerie : ce caractere eft de M. Fournier le jeune, graveur & fondeur de caraëteres à Paris , pour imiter l'écriture ordinaire, & imprimer certains ouvrages particu- liers , comme lettres circulaires, épîtres dédicatoi- res, placets , lettres-de-change, &c. Ce caractere ef fair fur deux corps différens, dont lun peut fervir fans l’autre , mais gravés & fondus de façon, qu'ils fe trouvent en ligne enfemble, & ne forment qu’un feul caractere en deux parties. La premiere qui a Poœil plus fort, & qui eft deftinée aux premieres lignes , eft appellée bérarde - srifimegifle : parce qu’elle imite l'écriture que les écrivains ap- pellent bérarde , & qu’elle eft fondue fur Le corps ap- pellé srifinégifte. La feconde qui a l'œil plus petit, eft appellée bétarde-coulée-parangon ; parce qu’elle imite l'écriture libre & coulée , & qu’elle eft fur le corps de parangon. Voyez , pour la figure, & La table des ca- raëteres ; & pour les corps, a sable des proportions. FINANCIER , f. m. (Polirig.) homme qui manie les finances, c’eft-à-dire les deniers du roi ; qui eft dans les fermes, dans les affaires de fa majefté, que: éorius ærariz, colleétor. C’eft à ce peu de mots que les meilleurs diétion- naires fe bornent fur cet article. Le peuple ( on doit entendre par ce mot le vulgaire de toute condition) ajoûte à cette définition l’idée d’un homme enrichi, & n’y voit guere autre chofe. Le philofophe, c’eft- à-dire l’homme fans prévèntion , peut ÿ Voir non- feulement la pofñbilité , mais encore la réalité d’un citoyen utile à la patrie, quand il Joint à l’intellisen- .ce, aux reflources , à la capacité qu’exigent les tra- vaux d’un férancie (confidéré dans le grand), la pro- bité indifpenfab\e dans toutes Les profeffions, & le defintéreflement plus particulierement néceflaire à celles qui font lucratives par elles-mêmes. Voici, par rapport à la définition de fzancier, les différens afpects fous'lefquels peut être envifagée cette profeflion, que les chevaliers romains ne dé- daignoient pas d'exercer. Ün financier peut être confdéré, 1°. Comme participant à l’adminiftration des f- nances, d’une maniere plus où moins direéte, plus ou moins prochaine, plus où moins décifive. 2°, Comme faifant pour fon compte en qualité de fermier ou d’aliénatsire, ou pour le compte du roi en qualité de régifleur, le recouvrement des im- poñtions, 3°. Comme chargé d’entrepriles de guerre ou de paix. 4°. Comme dépofitaire des fonds qui forment le thréfor du fouverain, ou la caifle des particuliers qui font comptables envers l’état, S1 l’on examine philofophiquement ces différentes fübdivifions d’une profeffion devenue fort impor- tante &c très-confidérable dans l’état, on demeurera convaincu qu'il n’en eft aucune qui n’exige, pour être dignement remplie, le concours des plus gran- des qualités de lefprit & du cœur ; les lnnueres de l’homme d'état, les intentions du bon citoyen, & la plus ferupuleufe exaétitude de honnête homme Vraiment tel, car ce titre refpetable eft quelque- fois legerement prodigué. On verra qu'il eft mdifpenfable, 19. Que le répifleur régifle, perçoive, admuif- tre comme pour lui-même. . 29. Que le fermier ou l’aliénataire évite égale- ment la négligence qui compromet le droit, & la rigueur qui le rend odieux. 3°. Que lentrepreneur exécute fes traités ayec une exactitude qui mérite celle des payemens. 4°. Que les thréforiers, & les autres charges ou emplois à maniement, donnent fans ceffe des preu- ves d’une probité qui réponde de tout, & d’une in- telligence qui ne prive de rien. 5°. Que tous enfin étant par leur place garans & refponfables envers l’état de tout ce qui fe fait en leur nom, ou pour le gouvernement, ne doivent employer (en fous-ordre) dans le recouvrement & dans les autres opérations dont ils font chargés, que des sens humains, folvables, intellisens, & d’une ptobité bien conftatée. C’eft ainfi que tous les fzarciers, chacun dans leur genre, & dans l’ordre des proportions de lumieres, de fonétions, de facultés, qui leur eft propre & par- ticulier, peuvent être eftimés, confidérés, chéris de la nation, écoutés, confultés, fuivis par le sou- vernement. - Ce portrait du frzancier bleflera peut-être une par- tie des idées recües : mais l’ont-elles été en connoif- fance de caufe ? & quand elles feroient juftifiées par quelques exemples, doivent-ils tirer à conféquence pour l’umiverfalité à On répondra vraiflemblablement qu'il feroit in- jufte & déraifonnable de les appliquer indiftinéte- ment à tous les fizanciers. Que penfer de cette appli- cation induftinéte & générale, dans un auteur accré- dite par fon mérite & par fa réputation? Pouvre l’efprit des lois, ce livre qui fait tant d’hon- neuraux lettres , à la raifon, à l'humanité ; & je trou- ve dans cet ouvrage célebre, cette efpece d’anathè- me lancé contre les fzanciers que l’on affeéte de con- fondre tous dans les injurieufes dénominations de traitans &t de publicains, « Il y a un lot pour chaque profeffion; le lot de » ceux qui levent les tributs, eft les richeffes, & les » récompenfes de ces richefles font les richefles mê- » mes. La gloiret& l'honneur font pour cette noblef. » fe, qui ne connoït, qui ne voit, qui ne fent de vrai » bien que Phonneur & la gloire ; le refpeét & la con- » fidération font pour ces miniftres & ces magiftrats, » qui ne trouvant que le travail après Le travail, _# veillent nuit & jour pour le bonheur de l'empire », Mais comment un philofophe, un légiflateur, un fage, a t-1l pù fuppofer dans le royaume une profef- fon qui ne gagnât, qui ne méritat que de l'argent, “ Tome VI, Al FIN 815 & qui fût exclue par état de toute antre forte de ré- compenfe ? | Onfaittout ce que mérite de la patrie, là noblefe qui donne fon fang pour la défendre ; le minifteré qui la gouverne ,. la magiftrature qui la juge: mais ne connoït-on enfin qu'une efpece de gloire & d’hon: neur, qu'une forte de refpeét & de confidération à ët n’en eft-1l point que‘la finance puifle afpiret à mé: riter ? res récompenfes doivent être proportionnées aux fervices, la gloire aux facrifices’ le refpeét aux veri ts... Un férancier ne fera fans doute ni récompenfé, nt refpeété, ni confidéré comme un Turenne, un Col- bert, un Seguier. .: : . Les fervices qu’il rend, le® facrifices qu'il fait, les vertus qu’il montre, ne font ni de la même nature, ni du même prix. Mais peut- on, mais doit-on décemment, équitablement, rai fonnablement, en conclure qu’ils n’ont aucune forte de valeur & de réalité ? Et lorfqu’un homme de f- nance, tel qu'on vient de lé peindre, & que l’on con- çoit qu'il doit être, vient juftifier l’idée que l’on en donne , fa capacité ne rend-elle pas à l’état des fer- vices effentiels ? fon defintéreflement ne fait-il pas des facrifices ? & fa vertu ne donne-t-elle pas des exemples à fuivre, à ceux mêmes qui veulent le dé- grader à Il'eft certain, & l’on doit en convenir (en ami de la vérité) ; il eft certain que l’on a vü dans cette pro- feffion des gens dont l’efprit, dont les mœurs, dont la conduite , ont mérité qu’on répandît fur eux à pleines mainslefel du farcafme & de la plaifanterie, & (ce quidevoit les toucher encore plus) l’amertu: me des reprèches les mieux fondés, Mais ce corpseft-il le feul qui préfenté dés mem bres à retrancher ? & refufera-t-on à la noblefe , au minitere , à la magiftrature, les éloges, les récom- pentes, & les diftinétions qu’ils méritent, parce que l’on a vù quelquefois en défaut dans le militaire le courage, dans le miniftere les grandes vûes , dans’ la magiftrature le favoir & l’intégrité ? -Onreclameroitavec raifon contre cette injuftice? La finance n’a-t-elle pas antant à £e plaindre de l’£f2 prit des lois ? &t ne doit-elle pas le faire avec d’au- tant plus de force , que l’auteur ayant plus de mérite &r de célébrité, eft auffi plus dangereux pour les opi- mons qu'il veut accréditer? Le moindre reproche que l’on puifle faire en cette occafion à cet écri- vain, dont la mémoire fera toûjours chere à là na tion, c'éft d’avoir donné pour afertion générale une obfervation perfonnelle & particuliere à quel- ques fizanciers , & qui n’empêche pas que le plus grand nombre ne defire, ne recherche, ne mérite, &t n'obtienne la forte de récompenfe & de gloire de refpeët &c de confidération qui lui eft propre, Ces article eft de M. PESSELIER. Nous donnons cer article par les raifons déja dites avr mot FERMIER (Finance). Bien éloignés de vouloir faire aucurz reproche odieux & 1njule à ceux de nos financiers qui font un ujage refpeclable de leur vpulence, & de Les priver du tribut d’eflème perfonnelle qui leur eff dé , nous defirons feulement préfenter aux perfonnes intelligentes en ces mmatieres, l’occafton de difeurer importante quef: non de l'utilité de la finance corfidérée en elle-même : L'illuftre auteur de L'Efprir des lois étoit incapable de penfer la-def[us autrement ; en écrivant contre la finance en général (article fur lequel nous ne prétendons point décider) , il [avoir rendre juflice aux particuliers éclaie rés & vertueux qui Je trouvent dans ce corps. FINESSE , f. f. (Gramm.) ne fignifie ni au propre ni au figuré since, leger, délié , d’une contexture rare, foible , ténue ; elle exprime quelque chofe de: délicat & de fini. Un drap leger, une toile lâche, une dentelle foible, un galon mince, ne font pas toûjours LE LIII y 816 FIN fins. Ce mot a du rapport avec finir : de-à viennent les fneffes de l’art ; ainfi l’on dit la fzeffe du pinceau deVanderwerf,de Mieris; on dit un cheval fin, de l’or fin , un diamant fn. Le cheval fin eft oppoté au cheval groffier; le diamant fin au faux; l'or fin ou affiné , à Vor , A rnélé d'alliage. La fneffe{e dit communément des cho- fes déliées, & de la legereté de la main-d'œuvre. Quoiqu’on dife un cheval fin, on ne dit guere la freffe d’un cheval, On dit la fneffe des cheveux, d’une den- telle , d’une étoffe. Quand on veut par ce mot expri- mer le défaut ou le mauvais emploi de quelque cho- fe, onajoûte l’adverbe srop. Ce fil s’eft caffé , il étoit crop fin ; cette étofle eft srop fêne pour la faïfon. La fnefle , dans le.fens figuré , s'applique à la con- duite, aux difcours , aux ouvrages d’efprit. Dans la conduite , frefle exprime toüjours, comme dans les Arts, quelque chofe de délié; elle peut quelquefois fubfifter fans l’habileté ; ileft rare qu’elle nefoit pas mêlée d’un.peu de fourberie ; la politique l’admet, & la fociété laréprouve, Le proverbe des freffes cou- Jues de fil blanc ; prouve que ce mot au fens figuré , vient du fens propre de couture fine , d’éroffe fine. La fneffe n’eft pas tout-à fait la fubtilité. On rend un piège avec fzeffe , on en échappe avec fubtilité ; on a une conduite fe , on Joue un tour fubtil; on infpire la défiance , en employant toûjours la freffe. On fe trompe prefque toujours en entendant fzeffe à tout. La fzeffe dans les ouvrages d’efprit, comme dans la converfation, confifte dans l’art de ne pas exprimer direttement fa penfée, mais de la laifler afèément appercevoir: c’eft une énigme dont les sens d’efprit devinent tout d’un coup le mot: Un chance- Ler offrant un jour fa proteétion au parlement , le premier préfident fe tournant vers fa &oOmpagnie : Meffreurs,, dit-il, remercions M. le chancelier, il nous donne plus que nous ne lui demandons ; c’eft-là une répartie srès - fine. La firefle dans la converfarion, dans les écrits, differe de la délicateffe ; la premiere s'étend également aux chofes piquantes &t agréa- bles, au blâme & à la louange même , aux chofes même indécentes, couvertes d’un voile à-travers le- quel'on les voit fans rougir. On dit des chofes har- dies ayec finefle. La délicatefle exprime des fenti- mens doux &c agréables , des louanges fres ; ainfi la fineffe convient plus à l’épigramme, la délicatefle au madrigal. Il entre de la délicatefle dans les jaloufes des amans ; il n’y entre point de freffe. Les louanges que donnoit Defpréaux à Louis XIV. ne font pas toüjours également délicates ; fes fatyres ne font pas toüjours aflez fes. Quand Iphigénie dans Racine a reçu l’ordre de fon pere de ne plus revoir Achille, elle s’écrie : dieux plus doux vous ravie? demandé que ma vie, Le véritable caraétere de ce vers eft plütôt la délicatefle que la fneffe. Arricle de M. DE Voz- TAIRE, FINESSE , ( Philofophie- Morale.) c’eft la faculté d’appercevoir dans les rapports fuperfciels des cir- conftances & des chofes, les facettes prefque infen- fibles qui fe répondent, les points indivifbles qui fe touchent , les fils déliés qui s’entrelacent & s’unif. fent. La fneffe differe de la pénétration, en ce que la pénétration fait voir en grand, & la fireffe en petit détail. L'homme pénétrant voit loin ; l’homme f voit clair, mais de près: ces deux facultés peuvent fe comparer au télefcope & au microfcope, Un hom- me pénétrant voyant Brutus immobile & penff de- vant la ftatue de Caton, & combinant le caraétere de Caton, celui de Brutus, l’état de Rome, le rang ufurpé par Céfar, le mécontentement des citoyens, &c. auroit pù dire: Brutus médite quelque chofe d'ex- traordinaire. Unhomme/fz auroit dit : Voila Brutus qui s’admire dans l’un de ces caraileres , & auroit fait une épigramme fur la vanité de Brutus, Un fz courtifan voyant le defavantage du camp de M. de Turenne ; autoit fair femblant de ne pas s’en appercevoir ; un grenadier pénétrant néglise de travailler aux retran- chemens , & répond au général: 7e vous connois , nous 71e cOMChErONS pas ici, +. La fineffe ne peut fuivre la pénétration , mais quel quefois auffi elle lui échappe. Un homme profondeeft impénétrable à un homme qui n’eft que fr ; car ce- li-ci ne combine que Les fuperficies : mais l’homme profond eft quelquefois furpris par l’homme f7 ; fa vüe hardie, vafte & rapide, dédaigne ou néglige d’appercevoir les petits moyens: c’eft Hercule qui court, êc qu’un infette pique au talon. La délicatefle eft la fzeÿfe du fentiment qui ne re- fléchit point; c’eft une perception vive & rapide du réfultat des combinaifons. Malo me Galatea petit, lafciva puella, Et fugit ad falices , & [e cupit ante videri. Si la délicateffe eft jointe à beaucoup de fenfbilité ; elle reflemble encore plus à la fagacité qu’à la freffe. La fagacité differe de la fzeffe, 1°. en ce qu’elle eft dans le taët de l’efprit, comme la délicateffe eft dans le taét de l’ame ; 2°. en ce que la freffe ef fuperficiel.- le, & la fagacité pénétrante : ce n’eft point une pé- nétration prosreflive, mais foudaine, qui franchit le milieu des idées, & touche au but dès le premier pas, C’eftle conp-d’œil du grand Condé. Bofluet l'appelle ilumirarion ; elle reflemble en effet à l’illumination dans les grandes chofes. La rufe fe diftingue de la freffe, en ce qu’elle em- ploye la faufleté. La rufe exige la freffe, pour s’en- velopper plus adroitement, & pour rendre plus fub- tils les pièges de lartifice & du menfonge. La freffe ne fert quelquefois qu’à découvrir & à rompre ces piéges ; car la rufe eft toüjours offenfive, & la fneffe peut ne pas l’être. Un honnête homme peut être £z, mais 1l ne peut être rufé. Du refte, il eft fi facile & fi dangereux de pañfer de l’un à Pautre, que peu d’hon- nètes gens fe piquent d’être fzs. Le bon homme & le grand homme ont cela de commun, qu'ils ne peuvent {e refoudre à lêtre. L’aftuce eft une fzeffe pratique dans le mal, mais en petit: c’eft la fzefle qui nuit ou qui veut nuire. Dans Pafince la freffe eft jointe à la méchanceté, comme à la faufleté dans la rufe. Ce mot qui n’eft plus d'ufage , a pourtant fa nuance ; il mériteroit dé. tre confervé. La perfidie fuppofe plus que de la £reffe ; c’eft une fauffeté notre & profonde qui employe des moyens plus puiflans, qui meut des reflorts plus cachés que l’aftuce & la rule. Celles-ci pour être dirigées n’ont befoin que de la fneffe, & la fineffe fufit pour leur échapper ; mais pour obferver & démaiquer la per- fidie, 1l faut la pénétration même. La perfidie eft un abus de la confiance, fondée fur des garans inévita- bles, tels que l’humanité, la bonne-foi, l’autorité des lois, la reconnoiffance , l’amitié, les droits du fang , 6e. plus ces droits font facrés, plus la confan- ce eft tranquille, &c plus par conféquent la perfidie eft à couvert, On fe défie moins d’un concitoyen que d’un étranger, d’un ami que d’un concitoyen, &c. ainfi par degré la perfidie eft plus atroce, à mefure que la confiance violée étoit mieux établie. Nous obfervons ces fynonymes moins pour pré- venir l'abus des termes dans la langue, que pour faire. fentir Pabus des idées dans les mœurs: car 1l n’eft pas fans exemple qu’un perfide qui a furpris ou arraché un fecret pour lé trahir , s’applaudiffe d’avoir été fr, Cet article eff de M. MARMONTEL. FINESSE , (Manege.) terme qui le plus fouvent eft employé relativement au cheval , dans le même fens que celui de Jérfibihré. Ce cheval a beaucoup de Z- neffe ; il eft extrèmement fenfible ; il eft averti, & promptement déterminé par les aides les plus legeres & les plus douces. | | Ce mot eftencoreufté, quandil s’agit de défigner la legereté de la taille d’un animal, Ce n’eft point, difons-nous , un cheval épais, lourd, pefant ; c’eft un cheval qui a de la féreffe. Rélativement au cavalier, le terme de fneffe ren- ferme tout ce qu’expriment les mots délicareffe ; pré- cifion, fubriliré, &tc. (e) FINI, FINIE, ce mot eft participe & adjetif; comme participe , il a toutes les fignifications de fon verbe :’ainfi on dit qu'un ouvrage eft fi, c'eft-à-di- re achevé, terminé, mis à fin. Telle eft la premiere fignification de ce mot, & en ce fens fix et oppofé à commencé, Fini {e dit aufi par extenfon dans le fens de per- fétionné, bien travaillé : C’eft ainfi qu'on dit d’un tableau, que c’eft un ouvrage fri; que le peintre y a mis la derniere main ; on le dit auffi d’une gravüre, d’une ftatue , des ouvrages à polir : lorfqu'il s’agit de ces fortes d'ouvrages, bien fini fignifie bien poli ; on le dit auf par figure des ouvrages d’efprit. Fini, en Grammaire eft un adjeëtif qui fignifie de- terminé, appliqué. On divife les modes des verbes en deux efpeces, en mode infinitif & en modes frs. L'infinitif énonce la fignification du verbe dans un fens abftrait, fans enfaire une application indivi- duelle, comme aimer, lire; écouter, enforte que l’in- finitif par lui-même ne dit point qu'aucun individu fafle l'a@ion qu'il fignifie. Au contraire, les modes finis appliquent lation par rapport à la perfonne , au nombre & autems. Pierre lit, al&, lira, &c. On dit auff Jéns fini, c'eft-à-dire déterminé; on op- pofe alors Jens fini à Jens vague où indéterminée. Sens fini fignifie auff fers achevé, Jens complet ; ce qui arrive quand Pefprit n'attend plus d'autre mot pour comprendre le fens de la phrafe. On met un point à la fin de la période, quand le fens eft fz: ou complet : alors l’efprit n'attend plus d'autre mot par rapport à la conftruétion de la phrafe particulere. Fini, e, adjectif qui fignifie déterminé, bornè, limi- 2, & qui fe dit fur-tout des êtres phyfiques. Les par- tifans des idées innées fe font fi fort écartés de la voie fimple de la nature & de la droite raifon, qu'ils foûtiennent que nous ne connoïflons le fini que par l’idée innée que nous avons, difent-ils, de l'infini; le fi , felon eux, fuppofe Pinfni, 6c n’eft qu'une limitation de l’idée que nous avons de l'infini, Ils pré- tendent que nous ne connoiffons les êtres particu- liers, que parce que nous avons l'idée de l'être en général. Perceptio rei fingularis nihil aliud effe videtur quam limiratio quædam luminis naturalis , quo ens Lpfum urii- versé , feu Deum novimus. I nfe. Phil. Edmundi Pur- chotii Merap. feit. ii. c. v. p. 585. Prius cognofcimus quid fit ens Jeu effe generatim . quam fenfibus noftris utamur. Id 1b. p. 567. Prius eff cognofcere ens fimpliciter quam ens tale aut entis differentias. {d. 1b. p. 568. Plus on refléchit fur cette étrange hypothèfe, plus on la trouve contraire à l'expérience & aux lumie- res du bon fens. Quand nous venons au monde, & que nos fens ont acquis une certaine confiftance , nous fommes affetés par les objets particuliers; &c ce font ces différentes affe&tions qui nous donnent les idées des êtres particaliers. Nous voyons ces êtres bornés par leurs propres limites & par l’étendue ulté- rieure qui Les environne. À la vérité, je ne puisbien entendre qu'un objet eft fi, que je n’en connoifle les bornes, & que je naye acquis par l'ufage de la vie , l'idée d’une étendue ultérieure ; mais ces deux points me fuffifent pour favoir qu'un tel corps ef f£- ni, fans que l'idée de l'infini me foit néceflaire ; puif- que ce corps fingulier n’eft point une partie inté- FIN 817 grante de l'infini, & que je puis entendre qu’on me parle de l’un , fans être obligé de penfer à l'autre. Si jobferve une île dans la mer, je vois qu'elle a une étendue circonfcrite par les eaux. Auffñi S. Paul, au lieu de nous dire que l’idée innée de l’infininons fait connoître les créatures, nous enfeigne au contraire que « les perfeétions invifibles de Dieu, fa puiffan- » ce éternelle & fa divinité, font devenues vifbles » depuis la création du monde, par la connoïffance » que fes créatures nous en donnent »..#d rom, c, Ja Y, 20. Aïnf on eft beaucoup plus conforme à la penfée de S. Paul & au langage du S. Efprit, en foütenant que les idées particulières des êtres fs dont nous pouvons toûjours écarter les limites, nous menent enfin à l'idée de l'infini, qu’en voulant que l’idée de l'infini foit néceffaire pour connoître un être fi: c’eft comme fi l’on difoit qu'il faut avoir vü la mer pour connoître une riviere que l’on voit couler dans fon lit, & qu'il fautavoir idée d’un royaume, pour voir une ville renfermée dans fes remparts. En un mot, c’eft par les idées fingulieres que nous nous élevons aux idées sénérales ; ce font les divers objets blancs dont j'ai été affeété, qui m'ont donné l’idée de la blancheur; ce font les différens animaux particuliers que j'ai vûs dès mon enfance, qui m'ont donné l’idée générale d’animal, 6e. Ce weft que de ce principe bien developpé & bien entendu, que peut naître un jour une bonne logique. Poye AB- STRACTION, ADJECTIF. (F) Fini, (Philof. & Géom.) on appelle grandeur finie, celle qui ades bornes ; zombre fini, tout nombre dont on peut affigner & exprimer la valeur ; progreffion fr- nie, celle qui n’a qu’un certain nombre de tems , par oppoñtion à la progreffion infinie, dont le nombre de termes peut être fi grand que l’on voudra. Nous n'avons d'idées difinétes &c direétes, que : des grandeurs fêzies ; nous ne connoiflons l'infini que par une abftra@ion négative & par une opération pour ainfi dire négative de notre efprit, qui ne fait point attention aux bornes de la chofe que nous con- fidérons comme infinie. Il eft fi. vrai que l'idée que nous avons de l'infini, n’eft point direéte & qu’elle eft purement négative, que la dénomination même d’infini le prouve. Cette dénomination qui fignifie négation de fini, fait voir que nous concevons d’a- bord le fi, & que nous concevons Pinfini en niant les bornes du fi, Cependant il ya eu des philofo- phes qui ont prétendu que nous avions une idée di- recte & primitive de l'infini, & que nous ne conce- vions le fri que par l'infini; mais cette idée fi ex- traordinaire, pour ne pas dire fiextravagante, n'a plus guere aujourd’hui de partifans ; encore font- ce des partifans honteux, fi on peut parler ainfi, qui ne foûtiennent cette opinion que relativement à leur fyftème des idées innées, parce que ce {yftème les conduit à une fi étrange conféquence En effet, fi nous avons une idée "innée de Dieu, comme le veulent ces philofophes , nous avons donc une idée innée primitive & direéte de l’infim; nous connoif- fons Dieu avant les créatures, & nous ne connoif- {ons les créatures que par l’idée que nous avons de Dieu, en pafant de l'infini au fr. Cetre conféquen- ce fi abfurde fufiroit, ce me femble, pour renverfer le fyftème des idées innées, fi ce fyftème wétoit pas aujourd’hui prefqu’entierement profcrit. Voy. IDÉE. Voyez auffi INFINI, 6 l’article précédent. M. Muffchenbroek dans Le fecond chapitre de fes effais de Phyfique, dit & entreprend de prouver que le fini peut être égal à l'infini ; c’eft tout au moins une mauvaife maniere de s’énoncer ; il falloit dire feulement, qu’un efpace fini en tout fers , peut être égal à un efpace ixfni en ur Jens. C’eft une vérité que les Géometres prouvent dans une infinité de cas; 818 FIN témoin la logarithmique 8 une infinité d’autres cour- bes. J’oyez LOGARITHMIQUE. M. Muffchenbroek, parmi les preuves de fon affertion, apporte l’hyper- bole : en quoiil fe trompe, du moins s’il veut parler de l’hyperbole ordinaire; car on prouve que l’efpa- ce renfermé entre l’hyperbole ordinaire & fes afymp- totes, eft non - feulement de longueur infinie, mais auf infini en furface. Voyez ASYMPTOTE. (0) FINIR , v. at. défigne er Peinture un tableau où il n'y a rien d'indécis, & dont toutes les parties font bien arrêtées. Il fe dit aufli quelquefois d’une façon de peindre, où l’on n’apperçoit pas les coups du pin- ceau ou touches qui forment les objets. Un tableau peut être extrèmement fzz, & néanmoins fort mau- vais. On dit, ce peintre feroit excellent s’il frzffois davantage fes tableaux : c’eft un grand génie, mais il ne fais rien. (R FINIR, (Barr. d’or.) voyez l’article BATTEUR D'OR. FINIR, chez les Ouvriers en fer & autres, c’eft don- ner à l'ouvrage fa derniere perfettion, y mettre I derniere main. | FINIR, ex terme d'Eventailliffe, c’eft mettre la der- mere couleur, & achever parfaitement les peintu- res d’un éventail. FINIR , en terme d’'Orfévre en grofferie, c’eft adoucir les pieces à la lime, & les mettre en état de pañler au poli, de forte qu’elles ne retournent plus à lor- févre. En serme d’'Orfévre-Bijoutier, c’eft monter les char- meres des tabatieres, & les mettre en fermeture, re- parer les charnieres, les polir , terminer les coins & les fermetures ; c’eft dans cette opération que brille particulierement l’attention d’une artifte fcrupuleux, la rondeur d’une charniere, la jonétion exacte de fes coulifles , & de l’affemblage de fes charnons : fonrou- lement ne doit être nitrop dur ni trop lâche: la dou- ceur d’une fermeture & fa belle jonétion, font les caracteres les plus effentiels du beau fr: des tabatie- res ; il eft encore d’autres chofes qui décelent fon bon goût & {on attention, comme l'égalité & le bel uni des bifeaux & carrés, ainfi que d’avoir foin que quelque vif qu’il donne à fes contours ou à fes angles, rien n’en {oit cependant coupant,& ne puiffe incom- moder les mains les plus délicates. On employe encore ce terme communément pour exprimer le beau poli & le dernier vif que l’on don- ne aux ouvrages d’orfévrerie. FINIR, terme de Planeur, fignifie l’a&tion de tein- dre les coups vifbles du marteau, & de polir au cuir, c’eft-à-dire fur le tas couvert d’un cuir en plufieurs doubles. FINISSEUR , f. m. (Horlogerie. ) nom que les Hor- logers donnent à l’ouvrier quijsrir les mouvemens des montres ou des pendules. On trouvera à l’article MOUVEMENT ce que c’eft qu'un mouvement en blanc ; que c’eft une montre ou une pendule faite, mais dont certaines parties , comme les dentures, les engrenages, les pivots , Ge. n'ont point encore recû leur perfettion, & que de plus dans ces mouvemens l’échappement n’eft pas encore fait en reflort , &c. la fufée n’eft point éga- lée; c’efttoute cette partie de l’ouvrage dont le frif° feur eft chargé ; enfin toutes les parties d’une machi- ne pouvant être bien faites fans que leurs relations foient telles qu’elles devroiïent être pour produire l'effet requis, c’eft au friffeur à difpofer toutes ces chofes , & à faire que la montre fortant de fes mains, . foit en état d'aller, & de mefurer le tems le mieux qu'il eft poffible. Par cette divifion de l'ouvrage, cha- que ouvrier n’en étant chargé que d’une partie, y de- vient plus habile, ce qui concourt à la perfeétion du tout, Cette partie de l'exécution des montres & des pendules , eft celle qui demande le plus d’adreffe & FIN d'intelligence ; aufli font-ce ordinairement les plus habiles d’entre les ouvriers qu’on y employe: (T) FINITEUR , adj. (cercle finiteur) er Afronomie, eft le nom qu’on donne à l’horifon, On l’appelleainf, parce qu'il fzir & borne la vüe ou Pafpe&t. Cepen- dant cette dénomination ne convient proprement ni à l’horifon fenfble , ni à l’horifon rationnel, Car le premier eft un plan qui touche la terre à l'endroit où nous fommes: &r le fecond eft un plan qui pañle par le centre de la terre ; or il eft évident que la partie de la terre & du ciel que nous voyons, n’eftpaster- minée par le premier plan, & qu’elle fe termine au- deflus du fecond. Pour déterminer le véritable cercle finiteur, faut fuppofer la terre parfaitement ronde , & imaginer de l'œil du fpeétateur , un cone de rayons qui touchent la terre; la bafe de ce cone formera fur la furface courbe de la terre, un cercle qui fera le vrai cercle finiteur. Voyez ABAISSEMENT. Àu refte le mot de cercle finireur n’eft plus extrèmement en ufage; on fe fert affez fouvent d’une expreffion équi- valente , cercle terminateur de l’horifon, V oyez HORI- SON. (0) FINITO ,(Jurifprud,) terme latin ufité dans la pratique du Palais & des Notaires, pour exprimer l'arrêté ou état final d’un compte. (4) FINLANDE, (Géog.) Finnonie, province de Sue- de, bornée £. par la Ruffe, O. par le golfe de Both- nie, $. par le golfe de Finlande, N. par la Lapponie Suédorle ; elle pale en général pour un pays fertile en pâturages, en beftiaux & en poiflon. Elle a titre de grand-duché, & fe divife en {ept provinces. Abo en eft la capitale, Le golfe de Finlande qui fait La partie la plus orientale de la mer Baltique, & qui s’é- tend de l’oueft à Peft, a environ 90 lieues de long; il communique au lac de Ladoga par la riviere de Nieve, fur laquelle eft la ville de S. Petersbourg. Les côtes de ce golfe font pleines de roches & de peti- tesiles, (D. J.) | FINMARCHIE , (Géog.) Chadenia, province de la Lapponie danoiïfe ou Norwégienne. Elle fait partie du golfe de Wardnus, dont M, de Lifle ne la diftin- gue nullement. C’eft un defert affreux, habité par des idolatres, fans villes ni fans bourgs. Foyez War- DHUS. (D. J. FINNE , £. f. (Ardoifier.) mauvaife qualité de l’ar: doife. Voyez l’article ARDOISE. FIOLES , (Æydr.) ce font en général de petites bouteilles d’un verre très-mince. C’eft ainfi qu’on nomme encore les trois tuyaux de verre que l’on met dans les tuyaux d’un niveau, & que l’on ajufte avec de la cire & du maftic, afin que l’eau colorée renfermée dans le gros tuyau horifontal, puifle mon- ter dans les fo/es, & découvrir la ligne de mire. (X) FIORENZO, (SAN) Géog. petite ville de Corfe, près du golfe de même nom, avec un port, Long, 27h SNL SEM ODNETE) FIRANDO, (Géog.) petit royaume du Japon, dans une île adjacente à celle de Ximo. Il ya un port fur la mer de Corée, dont le mouillage eît bon, vers le 334. 30-40". de lat. noïd. (D. J. FIRENZUOLA, (Géog.) petite ville de Lom- bardie au duché de Parme, dans une belle plaine, à 8 lieues N. O. de Parme. Long, 274, 25/, Lar, 44% SCD) FIRKIN , f. m. (Commerce) eft une mefure an- gloife qui fert à mefurer les chofes liquides, & qui contient la quatrieme partie d’un tonneau ou barril, Voyez BARRIL 6 MESURE. Le frkin d’aile contient 8 gallons : celui de bierre en contient 9 : deux frkirs de bierre font un kilder- kin : deux kilderkins font un tonneau, &c deux ton- neaux un muid. Voyez KILDERKIN , GALLON, BAR- RIL & Mui2. | Le frkir de favon & de beurre ef comme celui FITR d'aile, c’eft-à-dire un gallon moins fort que celni de bierre. Dicfionn. de Commerce. FIRMAMENT , {. m. (Afronomie.) en termes d'af- cronomie ancienne, eft le huitieme ciel, la huitieme fphere où les étoiles fixes fontattachées. V. SPHERE. . Onlappelle le huitieme ciel, par rapport aux fept cieux des planettes qu'il environne, Dans plufieurs endroits de Ecriture, le mot frma+ sent figrifie la moyenne region de Pair. Plufeurs an- ciens ont crû aufli-bien que les modernes, quelle fr- mament eft d’une matiere fluide ; mais il paroît que ceux qui lui ont donné le nom de frmaement ; le croyoient.d’ure matiere folide. Harris & Chambers. En effet c’étoit un des axiomes de la philofophie. ancienne, que les cieux devoient êtré folides ; Arif- tote prétendoit.que la folidité étoit une chofe atta- chée à la noblefle de leur nature , & néceflaire pour leur conferver l'incorruptibilité, qu'on regardoit comme une de leurs propriétes effentielles. D'un au- tre coté cependant, comme il falloit que la lumiere paflt au-travers,, cela obligeoït à faire les cieux de eryftal..Er voilà l’origine de tous les cieux de cryftal de l’aftronomie ancienne. Voyez C1EL 6 CRYSTAL. Toutes ces chimeres font aujourd’hui entierement profcrites, & biendignesde l'être; on ne donne plus le nom de frmament qu'à cette voûte célefte, & de couleur bleue , où lesétoiles nous paroiflent comme attachées. Dans la vérité les étoiles nefont attachées à aucune furface fphérique, C’eft notre imagination & nos fens qui nous trompent là-deflus. F. ÉTOILE, Vision, c. Toutesles étoiles étant àune prodigieu- fe diftance de nous, nous les jugeons à la même dif- tance, quoiqu’elles ne le foient pas: Foyez APpPA- RENT ; ainfi nous Les jugeons rangées fur une furface fphérique, abftra@ion faite de quelques caufes par- ticulieres qui nous font juger cette furface applatie, À. l'égard de la couleur bleue du frmamenr, cette cou- leur n’eft autre chofe que céllede l’atmofphere vüe à une très-grande profondeur, Elle eft la même que celle de l’eau de la mer. Apparemment l’air & Peau ont la propriété de laifer pafler à une grande pro- fondeur les rayons bleus, en plus grande quantité que les autres. Voyez BLEU 6 COULEUR. Pour . déterminer la vraie figure apparente de la voüte azu- rée du frmament, il faudroit avoir réfolu ces deux problèmes, dontonn'a jufqu'ici que des. folutions très-bornées & très-incompletes, pour ne pas dire très-peu exaétes & très-fautives, 1°. Un objet étant placé au-del: de l’atmofphere, &c envoyant à nos veux des rayons qui fe brifent à-travers de l’atmof- phere, trouver le lieu où l’on verra cet objet. 2°. Déterminer fuivant quelle loi un objet place à la mê- me diffance , nous paroït plus ou moins éloigné, à proportion qu’il eff plus loin ou plus près de notre zénith. Voilà ponr les Géometres Phyfciens une am- ple & belle matiere à s'exercer. On peut voir les ten- tatives & les conjeétures quenous ont données fur la folution de ce grand & beau problème, M. Smith, dans fon optique, & après lui M. de Mairan, dans les Mém. de l Acad. de 1740. Quelques théologiens appellent £rmament le ciel étoilé, pour le difinguer du cielempyrée, qu'ils ma- ginent être au-deflus, & dont ils font la demeure des bienheureux. Voyez EMPYRÉE. (0) FIRMAN , £. m. (Commerce. ) on appelle ainfi dans les Indes orientales, particulierement dans les états du grand Mopol, lespafleports:ou permiffions de tra- fiquer, que les princes accordent aux marchands étrangers. Diéfionnaire de Commerce, de Chambers &x de Trévoux. (G | FISC, THRÉSOR PUBLIC, ( Syzon.) en latin fous , rarium. Le premier mot fe dit proprement du thréfor du prince, parce qu’on le mettoit autrefois dans des paniers d’ofier ou de jonc, &.le fecond du thréfor de l’état, À Rome fous les premiers empereurs; on appelloit ærariume, les revenus publics, ceux de l'épargne def. tinés aux befoins & aux charges del’état ; &onnom- moit f/eus, ceux qui ne regardoient que lentretien du prince en particulier; mais bien-tôtraprès ces deux mots furent confondus chez les Romains, 8 nous avons fuivi-leur exemple. Auf le-diétionnaire de Trévoux définit le, fc par rhréfor. du roi ouldu royaume indifféremment: çat, ajoûte ce diétionnai- re ; la différence de ces deux chofes que l’on remar® quoit dans le commencement de l’empire romain, ne fe trouve point en Fränce, Iln°y a que trop d’au. tres pays où le thréfor du prince & le thréfor public font destermes fynonymes : voyez cependant THRÉ- soRPUBLI1C. Du mot ff, on afait confifquer ,co/fif care,-bona fifco addicere; par la raifon quetous-les biens que les empereursçconfifquoient ,appartenoïent à leur ic, &c non point au public: Les'biens de Sé- jan, dit Tacite (azral, li, V), furenttranfportésau chréfor public dans le ft-.de l’empereur. L’ufage des confifcations devint fi fréquent, qu'on-éft fatigué de lire dans l’hiftoire de’ ce tems-là , la life du nonibre infini de gens dont lesfucceffeurs deTibere:confit- querent les biens. Nous ne voyons rien de femblable dans nos hiftoires modernes; on n’a point à dépouil- ler des familles de fénateurs, qui: ayent ravagé lle monde. Nous tirons du moins cet avantage; dit M, de Montefquieu , de la médiocrité de nos fortunes , qu’elles font plus füres ; nous ne valons-pas la peirie qu'on confifque nos biens ; 87 Le prince-qui les ravr- Toit feroit un mauvais politique. 51 sl Le ff& des pontifes s’appelloit #rca ; &celnt qui en avoit la garde, étoit honoré du titre d'arcarius, comme 1l paroît par plufieurs infcriptions recueillies de Gruter, qu'il nes’agit:pas de tranfcriré ici. 47e. de M. le Chevalier DE JAUCOURT, : 4h ‘Fisc, (Jurifp.) en latin ffcus, fe prend en géné ral pour le domaine du prince,;oupour celui de quel- que-feigneur particulier, | | _ Ia été ainfi appellé du latin f/èus, qui dans l’ori- gine fignifie #7 panier d'ofer, parce quedu tems des Romains on fe fervoit de-fersblables pamiers pour mettre de l'argent. | 1} Du tems de la république 1l n’y avoit qu’un feul fJe » qui étoit le thréfor public; maïs du tems des empereurs , le prince avoit fon thréfor 8: domaine particulier, difiné@-de celui de l’état; & l’on donna le nom de fc au thréfor des empereurs, pour le dif- tinguer du thréfor public, qu'on appelloit ærarium , &c qui étoit deftiné pour l'entretien de l’état ; au lieu que le f/c du prince étoit deftiné pour fon entretien particuher, & celui de fa maifon, Confijquer une chofe, fignifie l’artribuer au file; ce qui eft une peine qui a lieu en certains cas. Cicéron, dans fon oraifon pro domo fua, obferve que dans l’âge d'or de la république le f/c outhréfor public n’étoit point augmenté par la confifcation ; cette peine étoit alors inconnue, | Ce ne fut que dans le tems de la tyrannie de Sylla que fut faite la loi Cornelix, de profcripe. qui déclara les biens des profcrits acquis au profit du 7%, La confifcation avoit leu du tems des empereurs, mais ils ne faifoient guere ufage de ce droit ; c’eft pourquoi Pline, dans le panégyrique qu'il a fait de Trajan, le loue principalement de ce que fous fon resne la caufe du ffc ne prévaloit point ordinaire. ment : guæ precipua tua gloria eff, dit-il, Jæpius vin citur ffeus, cujus mala caufa nunquam eft nifi fub bone PTUacIpe, L’empereur Cônftantin , par une loi du mois de Février 320, défendit de faire fouffrir à ceux qui {eroient redevables au fc, ni les prifons ordinaires, quine font, dit-il, que pour les criminels; mi les fouets & autres fupplices , nventés, dit-il, par l'in- 820 FIS folence des juges, & qui étoient néanmoins ordinat- res-enicetems-là pour la fimple queftion: il voulut qu'on'les tint feulement arrêtes en des eux où on eût la liberté de les voir. Cétte loi eft bien oppofée à ce que prétend Zofyme, que quand ilfalloit payer les impôts à Conftantm:, on ne voyoit par-tout que fouets &c que tortures; à moins que l’on ne dife-que cela fe pratiquoit ainfi de fon regne avant cette loi. Par une autre loi de la mêmeannée, concernant lesfemmes qui fe remarient dans l’année du deuil, il ordonna que les chofes dont il les privoit iroient à leurs héritiers naturels, & non au fc, à moins qu’elles ne manquaflent d’héritiers jufqu’au dixieme degré ; « ceïque nous ordonrons , dit-1l, afin que # l’on ne:puifle pas nous accufer de faire pour nous #» enrichir, ce que nous ne faifons que pouf l'intérêt » public ; & pour corriger les defordres ». | Ilnewoulut pas non:plus profiter des chofes nau- fragiées, quod'enim jus. haber fifeus in aliena calari- tate ÿ ut de re tam lu&uofa compendium feéteturs L, 1. cod.\de nanfragiis | Les empereurs Antonin le Pieux, Marc-Antonin, Adrien , Valentin & Théodofe le Grand, fe relâche- rent aufli béaucoup des droits du ffc par rapport'aux on appercçoit par-là le tendon du mufcle orbiculaire ; c’eft au-deffous de ce tendon qu'on commence l’in- cifion de XX. fig. 6.) ; elle doit avoir fx à huit lignes de longueur , & fuivre la direétion du bordde Porbite : cette ouverture pénetre dans Le fac. Le bif- touri, dont M. Perit fe fervoit, avoit une legere can- nelure fur le plat de la lame près du dos; & comme le dos doit toùjours être tourné du côté du nez , ik avoit deux biftouris cannelés , un pour chaque cô- té. La pointe du biftouri étant portée dans la partie fupérieure du canal nafal , la fonde cannelée, tail- lée en pointe comme le bont aigu d’un curedent de plume , étoit pouflée fur la cannelure du Piftour# dans le canal nafal jufque fur la voûte du palais. Er faifant faire quelques mouvemens à la fonde , on détruit tous les obftacles,& fa cannelurefavorife l’in- troduétion d’une bougie proportionnée, On change tous les jours cette bougie , qu’on charge du médi- cament qu'on juge convenable. Il y a des praticiens qui employent un ftilet de plomb pour cicatrifer la ETS furface interne du canal ; enfin lorfqu'il n’en fort plus de matierespurulentes., on ceffe l’ufage des bou- gies ou.du flilet de plomb: les larmes reprennent leur cours naturel de l’œil dans le nez, & la plaie extérieure fe réunit en peu de jours. Quelques chi- turgiens mettent une cannule d’or fort déliée dans le canal, ce qui n'empêche pointla cicatrice de la plaie extérieure. La précaution recommandée par quel- ques auteurs, de faire journellement des injeétions par les points lacrymaux pendant l'ufage de la bou- gie , eft tout-à-fait inutile. On les a propoiées dans la crainte que les conduits, dont les points lacry- maux font les orifices , ne viennent à. :s’oblitérer ; ce quioccafonneroit, dit-on, un larmoyement mal gré la hiberté du conduit nafal. Cette crainte eft dé- truite par l’obfervation de ces maladies. L’obftruc- tion fimple du conduit n'empêche jamais les larmes de pénétrer dans Le fac lacrymal , puifawaprès l’a- voir vuidé par la compreflion du doigt, 1lfe remplit de nouveau. Les larmes ne coulent jamais involon- tairement fur lesjoues que par regorgement, lorfque la plénitude du fac netlnipermet pas de recevoir le fluide : les larmes paflent naturellement dans le fac pendant la cure ; & les injeions recommandées, ouvent fatiguantes pour le malade fans aucune uti- lité. La recherche de M. Petit eft décrite dans les mémoires de l’académie royale des Sciences, année 1734. L'appareil de cette: opération confifte dans lapplication de deux comprefles foûtenues par le bandage dit morocule, voyez ce mot. Ona mis en ufage depuis quelques années une méthode de traiter les maladies des voies lacryma- Jes, en fondant le conduit des larmes parle nez , & en y plaçant à demeure un fyphon, parlequel on fait les injeétions convenables. M. de la Foreft , maître en Chirurgie à Paris ,a donné fur cette opération, qu'il pratique avec fuccès un mémoire inféré dans lefecond volume de l’académie royale de Chirur- gie. M. Bianchi avoit fondé le conduit nafal dès Vannée 1716. Il a donné à ce fujet une lettre qu’on lit dans le théatre anatomique de Manget. M. Bian- chi a de plus reconnu la pofhbilité de faire des in- je@ions par le nez dans ce conduit ; & M.Morgagni quireprend cet auteur de l’opinion qu'il avoit fur laftruéture & fur les maladies des voies lacrymales, traite cette queftion dans la foixante-fixieme remar- que de fa fixieme critique , & qu'ilintitule ainfi. De injeifionibus per finem duclés lacrymalis. M. Bianchi foûtient qu'on fonde très-facilement le conduit nafal , parce que l'orifice inférieur de ce conduit a la forme d’un entonnoir. M. Morgagni prétend aucontraire , que l’orifice du conduit nafal n'a pas plus de diametre que les points lacrymaux ; de-là il conclut, que loin qu’on puiffe rencontrer aï- fément l’orifice du conduit nafal avec une fonde in- troduite dans la narine , on le trouve avec affez de peine dans une adminiftration anatomique , lor{qu”- après les coupes néceflaires , le lieu de fon infertion eit à découvert. Jai trouvé le plus fouventles cho- fes comme M. Morgagni affüre les avoir vies ; & j'ai obfervé quelquefois lorifice inférieur du con- duit nafal évafé en forme d’entonnoir , comme M. Bianchi dit l'avoir trouvé. J’ai expérimenté fur un grand nombre de cadavres l’ufage de la fonde : 1l y en a fur lefquels je la portois avec la plus grande facilité dans le conduit nafal , & d’autres fois je n’y pouvois réufür. Or ,comme rien n'indique les varia- tions , qui font qu'on peut ou qu'on ne peut pas téuflir à l’introduétion de cette fonde, il s’enfuit que les tentatives fur le vivant peuvent être inutiles, qu’elles expofent les malades à des tatonnemens in- commodes & douloureux ; & faute de précautions & de ménagemens, on pourroit fraéturer les lames fpongieufes inférieures , ce qui feroit fuivi d’acci- Tome VI, FIS 823 dens.La méthode de M. Petit me patoît plus fimple & moins douloureufe dans les fiffules ; mais dans Ja fimple.obftruétion du canal natal , fi l’on peut in- troduire la fonde dans ce conduit fans faire de vio- Jence, la méthode de M. la Foreft guérit fans inci- fion , & c’eft un avantage; voyez les diflérens mé- moires fur la fféule lacrymale dans le fecond volume de l'académie royale de Chirurgie. La fiflule falivaire eft un écoulement de falive à l’occañon d’une plaie ou d’un ulcére: aux glandes qui fervent à la fecrétion de cette humeur, ou aux canaux excréteurs par lefquels elle paffe. On lit dans des Mémoires de l'académie royale des Sciences, année 1719, qu'un foldat à qui un coup de fabre fur la joue avoit divifé le conduit falivaire de Stenon., refta avec une petite f/fule , par laquelle chaque fois qu'il mangeoit, il fortoit une abondance prodigieufe de falive , jufqu’à moüiller plufieurs ferviettes pendant les repas, qui n’étoient pas fort longs. On obferve le même fymptome dans la #//ule de la glande parotide. Cette remarque eft de grande conféquence dans la pratique; car les moyens qui fufifent pour guéri cette feconde efpece de fffule falivaire feroient abfo- lument fans effet pour la guérifon de celle qui atta- que le canal de Stenon. Ambroife Paré , célebre chirurgien, rapporte l'hiftoire du foldat bleflé d'un coup d'épée au-travers de la mâchoire fupérieure ce font les termes de l’auteur. Quelques précautions qu'on eût prifes pour la réunion de cette plaie, 1k refta un petit trou dans lequel on auroit à peine pù mettre la tête d’une épingle | & dont il fortoit une grande quantité d’eau fort claire , lorfque le malade parloit ou mangeoït : Paréelt parvenu à guérir ra- dicalement cette f/?ule après lavoir cauterifée juf- que dans fon fond avec, de l’eau forte , & y avoir appliqué quelquefois de la poudre de viriol brûlé. La fituation de la flute. 8 le fuccès de ce traite- mênt, qui.auroit été infufifant, 8 même prèju- diciable dans la perforation du canal falivaire , mon- tre que l’écoulement de la falive venoit dans ce cas de la glande parotide. Fabrice d’Aquapendente fait mention de l'écoulement de la falive à la fuite des plaies des joues. Je ne fai , dit-il, d’où ni comment {ort cetre humeur ; mais pour tarir une humidité f copieufe , il a appliqué des comprefles trempées dans les eaux thermales d’Appone, & des cératspuif- famment deflicatifs.Ces moyens n’auroient été d’au- cune utilité pour lulcere fiftuleux du canal de Ste- non, L'expérience & la raifon nous permettent de croire que Munniches n’a jugé que par les apparen- ces trompeufes de l’écoulement de la falive fur la joue , lorfqu’il aflüre avoir guéri radicalement & en. peu de jours , la fffule de ce conduit , après en avoir détruit la callofité avec un cauftique. Comment en effet l’application d’un tel remede ; qui aggrandif- foit l’ulcere du. canal excréteur , pourroit-elle em- pècher le paflage de l'humeur , dont l'écoulement continuel eftune caufe permanente & néceffaire de Jiflule ? il eft certain que dans les cas dont je viens de donner le précis, c'étoit la glande parotide qux fournifloit la matiere féreule qui entretenoit la f//ule M. Ledran ayant ouvertun abcès dans le corps de la glande parotide , ne put parvenir à terminer la cure ; il reftoit un petit trou qui laïfloit fortir une grande quantité de falive , {ur-tout lorfque le mala- de mangeoit. M. Ledran appliqua fur lorifice de cette f/fule un petit tampon de charpie trempé dans de l’eau-de-vie ; il le foutint par quatre comprefles graduées, voyez COMPRESSES, & les maintint par un bandage aflez ferme. En levant cet appareil au bout de cinq jours , pendant lefquels le malade ne vécut que de bouillon, le trou fifluleux fe trouva ci- catrifé. La compreflion exatte avoit effacé le point glanduleux dont l’ulcération fournifloit cette grande M M m mm ij 824 FIS quantité de falive. Il fuit de ces faits, que l'écoule- ment de la falive n’eft point un fymptome particu- lierement propre à la perforation du canal falivaire; & que pour tarir cet écoulement lorfqu'il vient de laglande parotide, Papplication des remedes deflica- tifs ou des cathérétiques , & mème la fimple com- preflion, font les moyens capables de conduire à la confolidation parfaite de l’ulcere. La guétifon du canal falivaire ne s’obtient pas fi facilement ; 1l faut avoir recours à des moyens plus efficaces, Dans une plaie qui avoit ouvert le canal falivaire fupérieur, & qui étoit reftée fiftuleufe, M. le Roy , chirurgien de Paris , jugeant qu'il employe- roit inutilement les defficatifs les plus puiflans & les confomptifs les plus efficaces, imagina qu'il falloit ouvrir une nouvelle route, par laquelle la falive feroit portée dans la bouche comme dans l’état na- turel. Il fe fervit d’un cautere a@uel pour percer la joue du fond de l’ulcere dans la bouche, dans le deffein de-caufer une déperdition de fubftance, afin que la {alive pût pañler librement, fans qu’on eüit à craindre l’obftruétion de ceconduit artificiel avant la confolidation parfaite de l’ulcere extérieur. Et en éffet, l'ouverture fiftuleufe externe fut guérie en fort peu de tems & fans lamoindre difficulté. Dans cette cure, la premiere que nous connoifhions en ce gen- re, la Chirurgie a , pour ainf dire, créé unnouveau conduit , & l’on a changé la fffule externe en une interne au grand foulagement du malade. C’eft en fuivant les mêmes principes , quoique par un procédé un peu différent , que M. Monro, profeffeur de Chirurgie à Edimbourg , a guéri un ulcere de même nature. Le malade à chaque repas mouilloit entierement une ferviette en huit doubles par la falive qui fortoit d’un petit trou qu’il avoit au milieu de la joue, à la fuite de l’application d’un cauf- tique. À Pinfpeétion de cette maladie, M. Monro ju- gea qu’il falloit faire couler la falive dans la bouche par une ouverture artificielle : il pratiqua cette opé- ration en dirigeant la pointe d’une groffe alêne de cordonnier dans l'ouverture du conduit ; oblique- ment vers le dedans de la bouche & en-devant. Il pafla un cordon de foie dans cette ouverture, & en lia les deux bouts vers l’angle de la bouche , fans {errer cette anfe. Le paflage dans lequel le cordon étoit engagé devint calleux ; ce qu'on reconnut , dit M. Monro , par la liberté qu’on avoit de mouvoir le feton dans cette ouverture , fans caufer de la dou- leur au malade. Au bont de trois femaines on retira le cordon , & l’ulcere extérieur guérit en très-peu de tems. Voilà quelles ont été jufqu’à préfent les reflources connues de la chirurgie moderne contre la fiffule du canal excréteur de Stenon. L'obligation où j'ai été de répondre à des confultations fur cette maladie , m’a fait faire des réflexions qui n’ont ra- mené à une méthode plus fimple, plus douce , & beaucoup plusnaturelle, L'opération propofée, mal- oré les fuccès qu’elle a eu , me paroît fort Re de la perfettion qu'on doit chercher. L’orifice fupé- rieur de l’ouverture artificielle qu’on pratique , fe trouve plus éloignée de la fource de la falive, quela fiffule qu’on fe propofe de guérir ; l'humeur doit donc avoir plus de facilité à fortir par letrou fiftuleux ex- térieur que par l'ouverture intérieure ; & il n’y au- toit rien de furprenant , fiaprès cette opération le malade reftoit avec un trou fiftuleux à la joue , qui permettroit à la falive de fe partager également , & de-couler en partie {ur la joue & en partie dans la bouche. M. Coutavoz, membre de l'académie roya- le de Chirurgie, m’a communiqué un fait qui prouve la vérité de cette réflexion, & dont j'ai fait ufage dans une diflertation fur cette matiere dans le Z£I. vol. des mémoires del’académie. J'ai traité en l’année 1753 , un bourgeois de Paris , qui avoit un ulcere ET S fiftuleux au canal de Stenon : il en fortoit une quan- tité confidérable de falive , fur-tout lorfqu’il parioit ou qu'il prenoit fes repas : fon tempérament s’alté- roit par la perte exceffive de certe humeur. Je fon- dai le canal depuis la //ule jufqu’à la bouche , & je le trouvai parfaitement libre. La falive étoit portée dans ce conduit jufqu'’auptès de fon orifice dans fa bouche , où elle étoit arrêtée par le coude que le conduit falivaire fait à fon extrémité ; car en pref- fant legerement la joue depuis la commiflure des le- vres vers la fffule , j'en faifois fortir une certaine quantité de falive. La réfiftance de l'embouchure du canal dans la bouche, déterminoit la fortie conftan- te de la falive par l'ouverture de la fffule, qui ne préfentoit aucun obftacle. Je me dérerminai à reta- blir l’ufage naturel du conduit en le dilatant avec une meche compofée de fix brins de foie, Un fil'en anfe pañlé, au moyen d’une aiguille d’argent flexi- ble , de l’orifice de la fffule dans la bouche , me fer- vit à tirer cette meche. Cette opération ne caufa pas la moindre douleur. Dès le jour même que le feton fut placé , il fervit de filtre à la falive , 1l n’en coula plus fur la joue que quelques gouttes pendant que le malade mangeoit. Les jours fuivans je paflai legerement la pierre infernale fur les chairs de l’ulce- te, parce qu'elles étoient fort molles. Ceffant d’être abreuvées,ellesdevinrent bien-tôt fermesêrvermeil- les. Le dixieme je fupprimai deux brins de la meche à l’occafion d’un peu de tenfionle long du canal. Le len- demain j’ôtai les autres. La falive continua de pañfer pat la route naturelle , & la confolidation fut par- faite au bout de quelques jours. Le feton avoit aug- menté le diametre du canal & redreflé fon extrémi- té , & l’on fait que la feule dilatation des orifices des conduits excréteurs, fuffit pour procurer unécou- lement abondant de l’humeur au paffage de laquelle ils fervent. La leéture de cette obfervation à l’aca- démie royale de Chirurgie , a rappellé à M. Mo- rand , qu'il avoit traité il y a quinze ans , un hom- me , lequel à la fuite d’un abcès à la joue, portoit depuis un an une fffule au canal falivaire. M. Mo- rand effaya de fonder le canal depuis la fffule juf- que dans la bouche, & l’ayant trouvé libre, al y pafla quelques brins de fil déroulés en forme de fe- ton : cette pratique a eu le plus parfait fuccès. Ce fait confirme la doétrine que j’avois établie. Les frfules urinaires viennent de l'écoulement de l'urine. La perforation contre nature des parties qui fer- vent à fon féjour ou à fon pañlage; les pierres rete- nues dans les reins, occañonnent quelquefois des: abcès à la région lombaire, dont l'ouverture laifle pañler l'urine. L’extraétion de la pierre eft abfolu- ment néceflaire pour pouvoir guérir ces conduits fiftuleux. Voyez NÉPHROTOMIE. M. Verdier ancien profefleur & démonftrateur royal d’Anatomie aux écoles de Chirurgie, rapporte dans un mémoire fur les hernies de la veflie, qu'un chirurgien de campa- gne avoit ouvert la veflie dans l’aine , croyant ou- vtir un abcès. La fortie continuelle de l’urine par la plaie, ne laïifla aucun doute fur le vrai caraétere de la maladie primitive. Pour guérir une fffule de cette nature , 1l fufhit de déterminer le cours des urines par la voie naturelle, au moyen d’une algalie. L’expé- rience a montré qu’il étoit utile dans ce cas, de faire coucher le malade du côté oppofé à la plaie de l’ai- ne. Voyez le mémoire de M. Ver lier, dans le fécond vo- lume de l'académie royale de Chirurgie. L’ufage de ta fonde eft abfolument néceffaire dans les plaies du corps de la veflie, pour empêcher l’épanchement de l'urine dans la capacité du bas-ventre ; ce qui feroit une caufe de mort, Barthelemi Cabrol, chirurgien de Montpellier & anatomifte royal de la faculté de Medecine , a vù en 1550 à Beaucaire, une fille de FIS dix-huit À vinot ans, qui rendoit fes urines par lom- bilicalongé de quatre travers de doigr,, & femblable à la crête d’un coq-d'inde. L'examen des parties in- férieures fit feconnoître que cette maladié avoit été occafionnéedès la premiere conformation , par l’im- perforation du méat urinaire. L’orificé de lurethre étoitbouchée par une membrane fort mince : Cabrol Payant ouverte, lurme fortit par la voie naturelle ; il ft la hgature de l’excroiffance du nombril, & en douze jours la malade fut parfaitement guérie. Nous avons rapporté à la fin de Parsicle BOUTONNIERE, la cure d’une ff/ule trinaëre | commune à la veflie &c à l'urethre. | Lafiffule au perinée eftun ulcere au canal de l’u- rethre & à la peau qui le recouvre, qui donne iflue durer ©, | : Les plaies faites pour l’extraétion de la pierre, reftent quelquefois fiftuleufes par la mauvaife difpo- fition du malade, qui tombe dans une maigreur ex- frèmetl’embonpoint renaiflant, ces f/fules fe confo- lident facilement, quelquefois elles viennent de la mauvaife méthode de panfer, lorfqu’on fe fert indif- cretement dés bourdonnets, tentes, cannules, & d'autres dilatans. #oyez BOURDONNET. Si la ffffule viént de cette caufe, elle n’eft entretenue que par des chairs calleufes : on la guériraen confommant ces duretés contre nature , par l’ufage des trochifques de minium ou de quelque autre efcarrotique. La caufe la plus fréquente des f/fu/es au perinée, font lés dépôts gangreneux produits par la rétention des urines, à l’occafion des carnofités de lurethre. Voyez CARNOSITÉ @& RÉTENTION D'URINE. Les fffules urinaires ne fe font pas feulement au perinée, par la caufe que nous venons de citer: la érevafle qui fe fait à l'urethre entre l’obftacle èc la veflie, laiffe pafñfer l'urine qui inonde le tiflu cellu- laire ; elle produit des abcès gangréneux en différens endroits, au perinée, au fcrotum, dans les aines, vers les cuifles, & quelquefois vers le haut jufqu’au- deflus de lombilic: On eft obligé de faire l’ouvertu- re de toutes ces tumeurs qui reftent fiftuleufes. On voit beaucoup de malades qui ont échappé au dan- ger d’un pareïl accident, & dont l’urine bouillonne at toutes ces iflues toutes les fois qu'als piffent. Le point eflentiel pour la guérifon de toutes ces fiffules, eft de procurer un cours libre à l’urine par une feule iflue ; {oit en rétabliflant le conduit naturel dans fes fonétions , ce qu’on peut obtenir de lufage méthodi- que des bougies appropriées au cas, voyez BOUGIE & CARNOSITÉ ; foit en faifant une incifion au péri- née, pour porter une cannule dans la veflie , afin que l'urine forte direétement, & cefle de pañler par tous les finus fiftuleux. Foyez BOUTONNIERE. Le premier parti eft le plus doux; il eft par confé- quent-préférable , fi la difpofition des f?ules permet qu’on réufliffe par cette voie: au moins ne ie t-on pas pour modele de la conduite qu’on doit tenir en pareil cas , ces obfervations qui repréfentent un chirurgien occupé de l’ouverture de chaque finus ; qui expofent comme une belle opération , d’avoir diféqué beaucoup de parties, &t d’avoir facrifié le ligament fufpenfeur à la recherche de l'ouverture au canal de l’urethre, par laquelle l'urine s’étoit fait jour. Dès que, fuivant le principe général qui doit fervir de guide dans le traitement de toute fffule for- mée par la perforation d’un conduit excréteur, on aura procuré dans ce cas-ci une voie unique pour la fortie de l'urine, toutes les f{ffules qui n’étoient en- tretenues que par le paffage contre nature de cette liqueur, fe guériront prefque d’elles-mêmes. Les cal- lofités, s’il y en a, ne font qu'accidentelles & n’em- pêchent pas la confolidation des finus. On a même des exemples, que des malades déterminés à porter toute leur vie une cannule au périnée, Payant Ôtée FIS 825 patce qu'elle Îles incommodoit en s’afleyant , ont éprouvé que l'urine qui coula d’abord en partie par la fffnle, 8z en partie par la verge, n’a plus paffé en- fin que par la voie naturelle; parce que la fffule s’eft reflerrée peu-à-peu d'elle-même, & que le conduit artificiel s’eft enfin oblitéré fans aucun fecours. On a des exemples de fff{ules de l'abdomen à la ré- gion du foie, par l'ouverture de la véficule du fiel adhérente au péritoine. Ces fffules ne font curables que par le rétabliflement du cours de la bile , par le. canal qui la dépofe dans l’inteftin duodenum. Si les piérres formées dans la véfcule du fiel empêchent la bile ‘de couler, on peut en faire l’extraétion, Foy. fur cétté opération , Le mémoire de M. Petit , fur Les tutneurs de la véficule du fil, dans le premier volu- me de l’acadèmie royale de Chirurgie. Le fecond genre de fffules que j’ai établi par rap- port à leurs caufes, comprend celles qui font formées Où entretenues par la préfence d’un corps étranger: telles font les balles de moufquet & les morceaux d’habits qu’elles pouflent devant elles ; enfin tous les corps venus du dehors , ou bien une efquille, ne portion d’os café , de membrane, ou d’aponé- vrofe, qui doivent fe détacher, F7. Corps ÉTRAN- GER, CARIE , EXFOLIATION. Toutes ces chofes en féjournant contre l’ordre naturel dans le fond d’une plaie ou d’un ulcere , entretiennent des chaïrs mol- les 8 fongueufes ; elles fourniffent une humidité fa- nieufe,, qui empêche la confolidation extérieure & qui forme la fffule. Si l'ulcere fiffuleux vient à fe cicatrifer extérieurement, ce n’eft que pour un tems, la matiere forme des dépôts par fon accumulation, & l’ouverture de ces fortes d’abcès conduit fouvent le chirurgien au foyer de la tumeur,oùil découvre la caufe de la durée de la maladie. On ne guérira jamais les fffules produites par la préfence d’un corps étran- ber quelconque,qu’en fatfant l’extraétion de ce corps; il ne peut pas y avoir d’autre indication. Pour la rem- plir il faut faire les incifions convenables, ou des contre-ouvertures, dont on ne peut déterminer gé- néralement la dire&ion & l'étendue par aucun pré- cepte. On fent que ces incifions font foûmifes à au- tant de différences, qu’il y a d’efpeces de fffules fous ce genre, & qu'elles exigent beaucoup d’habileté de la part du chirurgien ; un jugement fain qui lui fafle difcerner la voie la plus convenable , & une grande préfence des connoïffances anatomiques, pour pé- nètrer dans le fond de ces fffules à-travers des parties délicates qu'il faut ménager. C’eft dans ces cas que l'habitude ne peut condrure la main ; les hommes qui n’ont pour tout mérite que de favoir marcher dans les routes qui leur ont été frayées , font ici d’une foi- ble reflource ; la routine qu'ils honorent du nom d'expérience, ne peut que les rendre hardis, & con- féquemment fort dangereux dans les conjond@ures délicates, où le jugement & le favoir doivent gui- der la main, 1 Sous le troifieme genre de fffules, font comprifes celles qui font produites par des chairs fongueufes, dures, & calleuies , que le féjour du pus a rendu tel- les , comme dans les fffules à l'anus; ou que la négli- gence, le mauvais traitement, l’ufage des bourdon- nets entañlés les uns fur les autres, ont fait naître dans l’ulcere : en général ces fortes de fiffules fe gué- tiflent par l’extirpation des callofités , ou avec l’inf- trument tranchant , ou par l’application des remedes cauftiques. La fiffule à l'anus eft un ulcere dont l'entrée ef étroite, fitué près de la marge du fondement, avec iffue d’un pus fétide, &c prefque toüjours accom= pagné de callofités. Cette f/fule eft toüjours la fuite d’un abcès plus ou moins confidérable dans le tiffu graifleux qui avoifine l’inteftin reétum. Les caufes de l’abcès qui produit la fféwle'; font 526 FIS internes ouexternes. L’inflammation qu'occafonne l’obftru@ion des hémorrhoïdes , eft la caufe interne la plus ordinaire : ainf tout ce qui peut produire des hémorrhoiïides, doit être mis au, nombre des.caules éléignées de la fffule à Panus. Voyez HÉMoORRHoOi- pes. Les caufes externes font les coups, les chûtes, les contufions de cette partie. Les perfonnes qui mon- tent fonuvent à chevaly font fortfujettes. L’excès des plaifirs vénériens, & enfinitout ce qui peut retarder & gêner lecours de la circulation du fang dans cette partie, y occafonne desänflammations , lefquelles le termunent facilement par fuppuration, parce qu'il n'ya pas dans le tiffu cellulaire de cette partie aflez de reflorts pour refifter à l’engorgement des humeurs : au contraire , les mouvemens du diaphragme & des mufcles du bas-ventre, & néceflaires pour les prin- cipales fonétions naturelles , font oppofès au retour des fluides ; & c’eft larcaufe principale de la dilata- tion fi fréquente des veines hémorrhoiïdales. Les #/- tules à l'anus viennent quelquefois des os ou corps étrangers qu'on a ayvalés, & qui fe font arrètés au fondement. La différence des fiffules à l'anus fe tire de leur an- cienneté , de leur étendue, de leur complication, & de leurs iflues : de leur ancienneté, en ce que les unes font vieilles, & les autres récentes : de leur étendue, en ce que leur trajet eft plus ou moins pro- fond : de leur complication, en ce qu’elles peuvent ne former qu'un feül finus, ou bien qu’elles font ac- compagnées de clapiers, de plufieurs finus, de beau- coup de callofités, d’abcès, & même de cariedes cs, de pourriture de l’inteftin, &c. Les f//ules different par leurs iflues ; & à raifon de cette différence, elles font completes ou incompletes. La f{ule complete a une ouverture dans l’inteftin , & une autre extérieu- rement. Les f/fxles incompletes ou borgnes, font in- ternes ou externes : celles - ci n’ont qu’une iflue à la marge de l’anus, & ne pénetrent point dans l’inteftin reétum : celles-là n’ont point d'ouverture extérieure, & la matiere purulente coule par l’onfice fiffuleux , ouvert dans l'extrémité du reétum. Les fignes diagnoftiques de ces fffules font faciles à appercevoir, À l’examen de la partie, on connoît par où le pus s'écoule, & l’on voit s’il y a un orifice extérieur. On né peut juger de la profondeur des fiflules qu’en les fondant , fi elles font externes; en- core le contour des finus fifluleux. peut-il empêcher le filet de pénétrer dans toute la longueur du trajet, La hauteur des fffules internes dans le retum, fe connoit en introduifant dans l’anusune tente de char- pie couverte de quelque onguent, & aflez longue: on verra dans quelle étendue elle fera tachée de la matiere qui découle du trou fiftuleux. Le prognoftic fe tire de la caufe de la maladie, de fes différences, & de la bonne ou mauvaife difpofi- tion du fujet. La cure exige d’abord un traitement préparatoi- re, relatif à cette difpoftion. La maladie locale pré- fente des indications différentes , fuivant les diverfes circonftances. Un fimple finus qui n’eft pas fort an- cien, qui n’attaque pas le re@um, n’a befoin que d’ê- tre ouvert. Dès qu'on aura changé la difpoñtion de l’ulcere, que fon entrée aura été rendue large, & qu’on aura détergé le fond par les remedes conve- nables , il fe fera une cicatrice folide. Si la fflule eft complete, il faudra fendre tout ce qui eft compris entre les deux orifices, & faire une fcarification dans le fond, pour faire une plaie récente d’un finus an- cien: mais s’il y a des duretés &.des clapiers, la cure ne peut être radicale qu’er emportant tout ce qu'il y a de calleux, foit par l’inftrument tranchant, foit par les cauftiques. On réuffit par l’une & l’autre métho- de. On donne.en général la préférence à linftrument tranchant, parce qu’on fait en une ou deux minutes FIS ce qu’on n'obtiendroit que par l’applicationtéitérée des cauftiques, qui tourmentent.cruellement le ma- lade pendant plufieurs heures à chaque fois. Un pra- ticien éclairé peut trouver des raïfons de préférence pour le choix de l’une ou de l’autre méthode. Après que le malade aura été préparé par les re- medes généraux , & par des remedes particuliers fon état en exige , 1l faut avoir la précaution dede purger la veille de l'opération, de lui ôter tout ali- ment folide, &c de lui faire préndreun lavement deux heures avant l'opération, afin.de nettoyer linteftin des matieres fécales que le malade pourroit Jâcher au nez du chirurgien dans le tems del’opération, ce qui feroit capable de l'empêcher de la fniravec la tranquillité néceflaire: ou bien ces matieres pour- roient donner au malade des envies d'aller la felle quelque tems après l'opération, cequi obligeroitide lever l'appareil, & de laver enfuite la plaie; incon= véniens qu'il eft bon de prévenir. … Pour faire opération, .on fait mettre lermalade fur le bord de fon lit, qu’on a eu le foin de faire gar- nir d’un drap plié en plufieurs doubles, dans la fitua- tion où l’on Le mettroit pour recevoir un lavement, de façon que la fefe du côté malade foit appuyée fur le lit. Un aide chirurgien à genoux fur le it, pofe un genou contre le malade dans l’angle que celui-ci for- me.par fon corps &. fes cuifles, pour qu'il ne puiffe s'éloigner de l’opérateur : cet.aide foûleve la fefle faine. On doit avoir d’autres aides pour contenir les jambes & les épaules du malade. Tout étant ainfi difpofé, & l'appareil convenable pour le panfement préalablement préparé, le chirurgien metungenou à terre, &.procede à l'opération. S1 la fflule eft complete, 1l introduit dans le fon- dement le doigt index gauche, graiflé d’huile ou de beurre; il tient avec la.main droite une ftilet d’ar- gent flexible, ou l'aiguille on fonde plate deftinée à cetufage, voyez AIGUILLE ; il poufle doucement cet infirument , Jufqu’à ce que fa pointe rencontre le doigt qui eft dans l’inteftin, ou qu’on y met feule- ment après avoir introduit le filet dans le trajet de la flute ; l'extrémité de ce doigt replie le filet, & fert à l’'amener au- dehors: on forme ainfi une anfe qui embraffe la ff/ule, & la portion du boyau qui lui répond. Poyez Planche XXII. fie, 1. Dans la ffluleincomplete externe, on recomman- de de porter l'extrémité du filet au-deflus des callo- fités, & en forçant un peu de percer l’inteftin pour former l’anie: c’eft dans cette occafion qu’il faut fe fervir par préférence de l'aiguille pointue, le filet boutonné feroit moins convenable, S1 la fiflule eft borgne & interne, il faut faire avec la lancette une ouverture extérieure fur un peñt point mollet, qui montre le fac du finus: quand cet endroit n’eft pas fenfble, on met dans l’anus, pen- dant douze ou quinze heures, ou plus long-tems, f cela étoit néceflaire, une tente, laquelle en bou- chant l'ouverture de la ff?ule, empêche le pus de s’écouler ; 1l s’en amañfe affez pour former à l’exté- rieur une tumeur qui indique le lieu où il faut faire l’incifñon. Lorfque l’anfe eft paffée dans la fffule , on prend avec les doigts de la main gauche les deux extrémi- tés du ftilet ; en les tirant à foi on tend les parties , & avec un biftouri droit qu’on tient de l’autre main, on emporte les parties que le filet a pénétrées ; enforte qu'après l’extirpation les callofités fe trouvent em- brochées. Trois ou quatre coups de biftouri donnés à-propos , fufhifent ordinairement pour cette opéra- tion. Si l’orifice extérieut de la f//u/e étoit fi éloigné du fondement , qu’en faifant l’opération comme on vient de le décrire, il fallüt faire une trop grande déperdition de fubftance , on pourroit pafler une fonde çannelée dans le conduit fiftuleux ; on l’ouvri- roit enfuite avecun biftouri. C’eft la méthode que nous avons dit convenir pour les cas les plus fim- ples, & dans lefquels on s’eft fervi avec fuccès du iyringotome. Foyez SYRINGOTOME, Mais dans les fiflules fort étendues & compliquées , il ne fufroit pas d’'avoit fendw le finus antérieurement, c’eft-à- dire du côtéextérieur, il faudroit incifer la partie poilérieure dans toute l'étendue, ayant le foin de tâteravec l’extrémité du doigt index de la main gau- che;lles parties avant de les fcarifier, pour ne pas couper des vaifleaux oujautres parties qu'il feroit à- propos de ménager: Les calloftés qu’on n’a fait que fendre par cétte incifion, doivent être emportées des deux côtés avec le biftouri ou les cifeaux ; on fcari- fie celles que la prudencerne permet pas d’extirper, ouon les attaque dansle cours du traitement, avec des remedes cauftiques. Le panfement de la plaie confifte à mettre de la charpie brute & mollette dans toute l'étendue de la plaie : on introduit enfuite une tente grofle & lon- gue comme le petit doigt, dans le reétum: le tout {era recouvertide trois ou quatre comprefles lon- guettes, étroites, & praduées, foütenues de banda- ges en T, dont la branche tranfverfale large de qua- tretravers de doigt, fait un citculaire autour du corps -au-deflus des hanches, & fert de ceinture ; & la bran- -che perpendiculaire eft fendue depuis fon extrémité jufqu’à huit travers de doigt de la ceiture. Le plein porte fur les compreffes , & les deux chefs paflent un de chaque côté des parties naturelles, pour n’en pas gêner l’attion, &vont s'attacher antérieurement à la ceinture. Si dans l'opération on avoit ouvert un vaïfleau quifournit aflez de fang pour donner quelque crainte fur la quantité que le malade pourroit en perdre, il faudroir prendre des précautions dans l'application de l'appareil ; car on a vü le fang fe porter dans l’in- tefin , pendant qu'on ne foupçonnoit point l’hémor- rhagie, parce que l’appareil n’en éroit point pénétré. ‘On peut fe mettre en garde contre cet accident, par l'application de l’agaric, & par une compreffion faite avec méthotle. Il faut d’abord reconnoitre la fitua- tion précife du vaïfleau qui fournit le fang, en ap- -puyant le doigtalternativement dans différens points de lincifion, jufqu’à ce qu'on ait comprimé la fource del’hémorrhagie. Il eft prudent de tenir le doigt aflez long-tems fur l’orifice du vaifleau, pour donner le tems au caillot de fe former : au lieu d’agaric on peut mettre avec fuccès fur cet endroit une petite com- prefle , trempée dans l’effence de Rabel ; on la foûù- tient pendant quelques minutes ; on la couvre enfuite de charpie brute, & l’on applique le refte de l’appa- reil comme je viens de le dire. On ne leve l'appareil qu’au bout de quarante-huit heures, fi rien n’oblige à le lever plütôt ; encore ne ‘doit -on pas détacher la charpie du fond, fur-tout s’il y a eu hémorrhagie: c’eft à la fuppuration à dé- coller cette charpie. Dans la fuite, les panfemens doivent être fort fimples : on fe fert d’abord des re- medes digeftufs, puis des déterfifs, & on termine la cure avec des defficatifs , fiuvant les regles géné- rales de l’art pour la cure des ulceres. Voyez ULce- RES. On diminue la tente de jour en jour, felon le progrès de la plaie vers la confolidation ; &c fur les derniers tems, On panfe avec une meche de charpie ou un plumaceau, qu’on introduit à plat dans le rec- tum. Une attention qui eft eflentielle lorfqu’on porte la tente dans l'inteftin, eft de l’introduire le long de la partie faine du fondement , du côté oppofé à lin- cifion : par ce moyen on ne fatigue pas l'angle de Fincifion du boyau , on évite de la douleur qu'on fe- roit fouffrir inutilement au malade; & fans cette pré- caution il y auroit du rfque de faire, en pouffant la tente, une faufle route dans les graifles à côté de l’in- FIS 827 teflin. Quelques perfonnes ont propofé de rejetter l'ufagé de la tente dans le reftum ; mais l’expérience a montré qu'il s’en étoit fuivi un retréciflement de lanus, fort incommode aux malades‘qui font obligés de faire enfuite beaucoup d'efforts pour rendre les matieres par une ouverture trop étroite, Je placerai ici quelques réflexions fur letraitement des abcès confidérables qui fe ferment à la marge de l'anus, foit que la j/fu/eles ait produits , ou qu'ils la précedent. On doit les ouvrir comme de fimples ab- cés, Quelques praticiens font dans l’ufage d’empor- ter une portion du reétum, après avoir évacué le pus; à quoi l’on n’eft autorifé que dans le cas de pourri- ture à linteftin. D’autres qui penfent plus fenfément fur les avantages de la confervation des parties, fe contentent de fendre l'inteftin, & ils croyent que cela eft néceflaire pour procurer fa réunion avec les parties voifines. Cependant lexpérience montre qu’on pourroit guérir radicalement quelques mala- des par la feule ouverture de l’abcès, quoiqu'il y eût fitule à linteflin. Que rifque-t-on à chercher la guë- rifon par cette voie? C’eft une tentative dont les malades doivent nous favoir gré, pufqw’elle a pour objet de leur épargner de la douleur, & d’abréger confidérablement la cure. Mais fi à la fuite de ce trai- tement il reftoit un finus fifiuleux, ce qui arrive dans le plus grand nombre de cas, il faudroit en faire Pou- vetture : & ce feroit une feconde opération ; mais on ne-rifque pas alors de faire une plus grande déper- dition de fubflance qu'il n’eft néceflaire : ce qu'il n’eft pas poffible d'éviter lorfqw’on incife l’inteftin im- médiatement après l’ouverture de labcès. En effet l’inteftin étant plus on moins à découvert felonl’éten- due & la profondeur du foyer de l’abcès , étendue qui eft relative à la quantité de la matiere contenue dans la tumeur, l’onifice de la fffule peut être fort près de la marge de l’anus , quoique la dénudation de Pinteftin s’étende fort haut. Dans ce cas en fendant linteftin depuis le fond de l’abcès, on y fait inutile- ment une grande incifion; & une grande incifion faite fans utilité, peut être regardée comme nuifible. De plus on pourroit dans les grandes dilacérations , emporter une aflez grande portion de l’inteftin, & laïfer précifément celle où feroit le point fiffuleux ; ce qui par la fuite donneroit lieu à ce qu’on appelle mal-à-propos la réproduéfion de la maladie, puifqu’elle n’auroit pas été détruite. Combien n’y a-t-il pas de perfonnes qui difent qu’elles ont été manquées de l'opération de la fffule ? L’expreffion eft bonne, puif- qu’elles ont fouffert une opération douloureufe fans aucun fruit. Si au contraire on fe contentoit de faire fimplement l'ouverture de l’abcès, l’incifion de la fiflule deviendroit, après le récollement des dilacé- rations faites par la formation du pus, une opération de petite conféquence en elle-même , & en la com- partant à la grandeur de celle dans laquelle l’inteftin feroit incifé dans toute l'étendue du foyer de lPabcès. Il y a encore quelques autres raïfons de préférence pour cette méthode, telles que d'éviter des hémor- rhagies qui ont fouvent lieu dans les incifions profon- des; & dans ce cas, la néceflité d’un tamponnement retient des matieres purulentes dans quelques vuides ou clapiers qui peuvent échapper à la diligence de l’o- pérateur;la réforption s’en fait;de-là des fevres colli- quatives, des cours de ventre, &r autres accidens qui mettent la vie du malade en danger.M. Foubert fe pro- pofe d’expofer cette doétrine dans le troïfieme volume des mémoires de l'académie royale de Chirurgie. Jen ai donné le précis, parce que je fuis perfuadé par ma propre expérience, de l'utilité des préceptes dont je viens de faire mention. (F) FisTuLe. ( Manége, Maréchall. Ÿ En adoptant la définition que les auteurs qui ont écrit fur la mede. cine du corps humain, nous donnent du terme de /f/° > 3 : 828 F IS tule, nous la regarderons ici nous-mêmes comme un ulcere profond dont les bords font durs & calieux, & dont entrée eft étroite, tandis que le fond en ef évafé. | Souvent une feule ouverture extérieure conduit à plufieurs cavités intérieures, que l’on nomme fus ou clapiers ; quelquefois il n’eft qu’une feule cavité ; il arrive encore que la carie ou quelqu’autre mala- die s’uniflent à celle-ci ; dans le premier cas la ff/xle eft compofée, & dans le fecond elle eft fmple: dans le troifieme elle eft compliquée. La vûe nous en fait difcerner l’orifice ; le taét nous affüre de fa dureté; la fonde nous en indique la direftion., la profondeur -& la complication ; enfin le pus dont la comprefion fur les parties voifines occafonne la fortie, nous en découvre l'étendue. | De quelqu’efpece que foient les f/fues, elles pro- A : 332 FIX 3917, y ft auffi de grands ravages. Voyez OMME- £ANDES. (D. J.) FIUM , (Géog.) grande ville d'Afrique, capitale de la province de même nom, dans la moyenne Egypte. Cette province eft coupée par un grand fombre de canaux artificiels, & de ponts pour la communication. C’eft la feule où il y ait des raifins. Si la ville de Fium eft l’ancienne 4bydos, elle a été fameufe dans l’antiquité. Là étoit le palais de Mem- non ; le fépulcre d'Ofiris, qui avoit aufli un temple célebre ; & les tombeaux des grands, qui aimoient à s’y faire inhumer, pour avoir leur fépulture près de celle d'Ofiris, comme Plutarque nous l’apprend. Fium eft fituée fur un canal qui communique au Nil, h 2 ne S. O. du Caire. Longir. 40. 4. latit. 29. FIXATION & FIXÉ , (Chimie.) La fixation ef une opération chimique , par laquelle un corps au- paravant volatil eft rendu fixe (voyez VOLATIL 6 Fixe) ; & le corps qui a fubi ce changement , s’ap- pelle fixe. La fixation s’opere par compofirion ou par décom- pofition. Certaines fubftances , volatiles par leur na- ture , font fixées par compoñition , c’eft-à-dire par leur union chimique, à d’autres fubftances , foit f- xes, foit volatiles. C’eft ainfi que Pacide nitreux eft fixé par l'argent, qui eft fixe; &x par le mercure, qui eft volatil ; que le mercure eft réciproquement fixé par acide nitreux; que cette même fubftance métallique left par l'acide vitriolique , &c. voyez MERCURE. D’autres fubftances font fixées par de- pouillement ou décompofition, c’eft-à-dire par la féparation chimique de certains principes à l’union defquels elles devoient leur volatilité. C’eft ainf que les fubftances métalliques, combinées fous la forme du compofé chimique , connu fous le nom de beurre & de métal corné, perdent leur volatilité, font f£xées ouréduites par la féparation de Pacide du fel marin ; que les métaux combinés avec des matieres connues dans la Métallurgie fous le nom de voleufes, rapaces, font rendues fixes par la fouftraétion de ces matieres, qui s’opere principalement par le grillage. 7oyez ACIDE DU SEL MARIN, 4 l’art, SEL MARIN. Voyez GRILLAGE. La prétendue fixation du nitre par le charbon, par le foufre, &c. ne reffemble en rien à la fixation que nous vénons de définir ; premierement, parce que le nitre n’eft pas naturellement volatil, & qu’ainfi onne fait ce que c’eft que fixer le nitre; feconde- ment , parce que le prétendu nitre fx n’eft pas du aitre, mais féulement un de fes principes, fa bafe, foit fimplement dégagée 8r laïffée nue, foit combi- née avec un nouvel acide. Foyez NiTRE. Le mercure appellé fxé ou précipité per Je, n’a pas acquis une fxiré abfolue à beaucoup près ; 1l n’a que quelques degrés de volatilité de moins que dans fon état ordinaire de mercure coulant. On ignore abfolument quelle efpece d’altération éprouve le mercure fixé per Je. La théorie de la fxarion manque abfolument à l’art, aufhi-bien que celle de la fixice & dela vo/ari- dite, Les explications méchaniques font ici éminem- ment en défaut ; voyez ce que nous avons dit de celle de Boyle, article CHIMIE, ch. 7. p. 4164 (b). * FIXE, adj. (Affronom.) On fe fert de ce mot en -Aftronomie , pour diftinguer les étoiles qui n’ont au- cunmouvement propre, d'avec les étoileserrantes:; on nomme celles-ci planetes, &t les autres, éroiles f- xes, où fimplement f£xes ; en prenant alors le mot fixe fubftantivement. Voyez ÉTOILE , PLANETE, &c. «(0 ; À ERER:,v, a@. (Gramm.) C’eftun terme relatif ‘au mouvement ; il fe prend au fimple & au figuré: «on fixe un corps dans un endroit, quand on ly rend Î L 1 FIX immobile : on fixe une coquette, quand onfafflemble {ur foi tont ce qu’elle partageoit entre plufients pet= fonnes. | FIXITÉ , . £. (4ffronom.) Quelques auteurs ont employé ce mot, qui eft commode, pour défigner la propriété qu'ont des étoiles fixes, de n’avoir aucun mouvement propre. Il eft à fouhaiter que ce mot faffe fortune. Celui d’irmobiliré rend bien à-peu-près la même idée, mais moins exaétement & moins fi- soureufement. | F L FLABELLATION , f. f. cerme de Chirurgie, dont Ambroife Paré s’eft fervi pour exprimer le rerzouvel- lement de l'air fous un membre fraëturé, ou fon rafraf- chiffément, que l’on procure en changeant la partie de place, ou en la foûlevant quelquefois, dans la crainte qu'elle ne s’échauffe & qu’il ne furvienne in- flammation, Ce mot vient de fabellum , qui fignifie éventail, ou fouffle & agitation de l'air. La cure univerfelle des fraétures comprend trois intentions principales ; la premiere, de réduire les pieces d’os dans leur état naturel; la feconde, de les maintenir dans cet état (voyez FRACTURE) ; &c la troifieme confifte à prévenir les accidens , &c à y rez médier , s’ils furviennent. Le plus commun de ces accidens, même dans les : fradures les plus fimples , eft le prurit ou deman- geaifon ; il eft quelquefois infupportable par la dou- leur qu’il caufe, laquelle eft bientôt fuivie d’inflam- mation & d’ulcération, fi l’on n’y remédie. On pré- viendroit cet accident, fi l’on avoit pris le foin de bien laver la partie avec de l’eau ou du vin tiede, avant l'application du premier appareil. Jai remar- qué que le prurit, & les accidens qui en réfultent, étoient plus fréquens dans les hôpitaux qu'ailleurs, & qu'il étoit prefque toûjours caufé par la malpro- preté précédente. La compreflion des membres, Les matieres tranfpirables retenues & échauffées , for- ment avec la crafle une acrimonie qui enflamme &e ulcere la partie ; c’eft pourquoi Paré dit qu'il faut, dans ce cas, lever l'appareil de trois en trois jours, pour donner de l’air à la partie, & faciliter la trant piration. Il prefcrit la fomentation faite avec une décoétion de fauge, de camomille, de mélilot, de rofes, &c femblables, bouillis dans de l’eau & dans du vin. S'il s’étoit formé des véficules ou phliétai- nes , il faudroit les couper, &z appliquer deffus quel- qu'onguent rafraichifant & deflicatif, comme l’on- guent blanc de rhafis camphré, « Le chirurgien doit » pareïillement prendre garde, dit Ambroïle Paré, » que la partie bleflée ait fouvent une ffabellarion; » afin qu’elle n’acquiere inflammation. La ffabella- » tion {e fera en la changeant de place, & la foûle- » vant par fois. Tel précepte n’eft feulement à noter » pour les fraétures, mais aufli pour toutes parties » bleflées & ulcerées ». (7) FLACCIDITÉ, f. f. fe dit, ez Medecine, de l’état des fibres relâchées qui ont perdu leur reflort. Ce terme peut être regardé comme fynonyme de laxité, & peut même être employé pour fignifier ce dernier vice porté à fon plus grand excès, Voyez FIBRE (Pa- chol.), DÉBILITÉ. (d) FLAGCIDITÉ fe dit auffi de l’état du membre viril qui n’eft pas en éreétion, Lorfque cet état eft habi- tuel , qu’il n’eft pas fufceptible de changer, que la nature ni l’art ne peuvent pas exciter la difpofition oppofée à la ffaccidité, celle-ci eft regardée comme le figne pathognomonique de l’efpece d’impuiflance qu’on appelle frigidité. C’eft en parlant de cette in- difpofition que Juvenal , Jar. x. dit : … . Jacerexiguus cum rarmice nervus; Et quamwis toté palpetur noûte, Jacebie, Voyez IMPUISSANCE. (4) : FLAGELLANS, f. m. pl. (Æ5f. mod.) nom qui fut donné dans le treizieme fiecle à certains pénitens qui faifoient profeflion de fe difciphner en public aux _ yeux de tout le monde. : Les auteurs s’accordent aflez à mettre le commen- cement de la feéte des Flagellans vers l'an 1260, & la premiere fcene à Péroufe. Un certain Rainier, dominicain, touché des maux de l'Italie déchirée par les fa&ions des Guelphes &e des Gibelins, ima- gina cette forte de pénitence pour defarmer la cole- re de Dieu. Les feétateurs de ce dominicain alloient en proceflion de ville en ville &r de village en villa- ge, le corps nud depuis la ceinture jufqu’à la tête, qui étoit couverte d’une efpece de capuchon. Ils portoient une croix d’une main, 6 de Pautre un foüet compofé de cordes noueufes & femées de poin- tes, dont ils fe fouettoient avec tant de rigueur, que le fang découloit fur leurs épaules. Cette troupe de gens étoit précédée de pluñeurs prêtres, montrant tous l'exemple d’une flagellation qui nétoit que trop bien imitée. _ Cependant la fougue de ce zele infenfé commen çoit à tomber entierement, quand la pefte qui parut en 1348, & quiemporta une prodigieufe quantité de perfonnes , réveilla la piété, &r fitrenaître avec violence le fanatifme des Flagellans, qui pour lors pañla de la folie jufqu’au brigandage, & fe répandit dans prefque toute l’Europe. Ceux-ci faifoient pro- feflion de fe fouetter deux fois le jour & une fois cha- que nuit ; après quoi ils fe profternoient enterre en forme de croix, & crioient miféricorde. Ils prèren- doïent que leurs flagellations unifloient fi. bien leur fang à celui de Jefus-Chrift, qu'au bout de 34 Jours ils gagnoient le pardon de tous leurs péchés, fans qu'ils euflent befoin de bonnes œuvres, ni de s’ap- procher des facremens. Ils fe porterent enfin à CXCI- ter des éditions, des meurtres & des pillages. Le roi Philippe de Valois empêcha cette feéte de s'établir en France ; Gerfon écrivit contre, & Clé- ment VI. défendit exprefflément toutes flagellations publiques: en un mot, les princes par leurs édits , & les prélats par leurs cenfures, tâcherent de répri- mer cette dangereufe & criminelle manie. Foyez Si- gonius , y. XIX. deregno ital. Sponde, anal. eccléf. A, C. 1260 , 1349 ; le continuateur de Guillaume de Nangis, Ge. RE monde connoît auffi l’hifloire latine des Flagellans , iftorta F lagellantium , imprimée à Paris en1700, & compofée par Jacques Boileau, cha- noine de la Sainte- chapelle, mort en 1716. Si ce doéteur de Sorbonne ne s’étoit attache qu’à condam- ner la fete des Flagellans, & même à juftifier que lufage de la difcipline particuliere s'eft établi dans le xj. fiecle, ou du moins qu’elle n’étoit pas connue dans les fiecles antérieurs , excepté pour punir les moines qui avoient péché, on pourroit embraffer ou défendre fon opinion ; mais on doit juftement bla- mer les defcriptions trop libres femées dans fon ou- vrage, qui né convenoient point à fon caractere, & qui ne peuvent produire aucun bon effet. Au refte on voit encore en ftalie , à Avignon, êc dans plufieurs lieux de la Provence, des ordres de énitens qui font obligés par leurs inftituts de fe fouetter en public ou en patticulier , & qui croyent honorer la divinité en exerçant fur eux-mêmes une forte de barbarie ; fanatifme pareil à celui de quel- ques prêtres parmi les Gentils, qui fe déchiroient le corps pour fe rendre les dieux favorables. Il faut ef- pérer que l’efprit de philofophie & de raifon quite- one dans ce fiecle, pourra contribuer à détruire Les reftes d'une trifte manie , qui loin d’être agréable à Dieu , fait injure à fa bonté, à fa fagefle ; à toutes fes perfeétions, & deshonore l'humanité, 4rricle de M, le Chevalier DE JAUCOURT, -- 1 F L A 83% * FLAGELLATION, f. £. (Hif. anc.) punition par le fouet, Elle fut en ufage chez les Juifs, On Pens, couroit facilement, elle ne deshonoroit pas. On la fubiffoit dans la fynagogue. Le pénitent étoit atta- ché à un pilier , les épaules nues. La loi ordonnoit quarante coups , que l’on réduifoit à treize coups, d’un fouet à trois courroies. Le pénitent étoit cenfé recevoir trois coups à-la-fois, & on lui faifoit grace du quarantieme coup, ou du quatorzieme. On ais moit mieux qu'il eüt un coup de moins que deux coups de trop. Il falloit à cette efpece de difcipline la préfence de trois juges : l’un lifoit Les paroles de la loi; le fecond comptoit les coups ; le troifieme en courageoit l’exécuteur, qui étoit communément le prêtre de la femaine, | La ffagellation fut aufli commune chez les Grecs & les Romains. C’étoit un fupplice plus cruel que la fuftigation. On fZagelloir d’abord ceux qui devoient être crucifiés ; mais on ne crucifioit pas tous ceux qui étoient fZagelles, On attachoit à une colonne dans les palais de la juftice, ou l’on promenoit dans les cirques , les patiens qui étoient condamnés à la flagellation, Il étoit plus honteux d’être fZagellé que battu de verges. Les fouets étoient quelquefois ar- més d’os de piés de mouton ; alors le patient expiroit communément fous les coups. On appelloit ces fouets, flagella talaria. dire FLAGELLATION, ( Hiff. eccléf. & Philof. ) peine du fouet ou de la difcipline que fe donnent ou que fe donnoient autrefois des pénitens. Voyez DISCIPLINE 6 FLAGELLANS, On trouve dès l’an 508 la flagellation établie com- me peine contre les religieufes indociles, dans une regle donnée par S. Céfaire d'Arles. Depuis ce tems elle a été établie comme peine dans plufeurs autres regles monaftiques ; mais on ne voit pas d'exemples de la ffagellation volontaire avant le xj, fiecle ; les premers-font de S. Gui, abbé de Pompoñie , mort en 1040; & de S. Poppon, abbé de Stavelles, mort en 1048. Les moinés du Mont-Caffin avoient em- braflé cette pratique avec le jeûne du vendredi, à l'exemple de Pierre Damien. À leur exemple cette dévotion s’étendit beaucoup ; mais comme elle trou: va quelques oppofans (ce qui n’eft pas difficile à croire), Pierre Damien écrivit en fa faveur, M: Fleury, dans fon hiffoire de l'Eglifé, nous a donné l'extrait de l’écrit de cepieux auteur; écrit dans le- quel , felon la remarque de M. Fleury lui-même, 1l ne faut pas chercher la-jufteffe du rafonnement. Celui qui s’eft le plus diftingué dans la fagellarion volontaire, a été S. Dominique l'£Excuraflé,. ainf nommé d’une chemife de mailles qu'il portoit toû- jours, & qu'il n’ôtoitque pour fe flageller à toute ou- trance, On ne fera pas étonné de ce qu’ajoûüte M. Fleury, que fa peau étoit devenue noire comme celle d'unnegre. Ce bienheureux fe foüettoit non-feulez ment pour lui, mais pour les autres.On croyoit alors que vingt pfeautiers récités en fe donnant la difcipli- ne, acquittoient cent ans de pénitence ; car trois mille coups valoient un an, & on comptoit mille coups pour dix pfeaumes. $S. Dominique acquittoit facile- ment cette dette en fix jours ; ainfi en un an il pou: voit, felon fon calcul , fauver foixante ames de l’en- fer. Mais M. Fleury ne diffimule pas combien on étoit'alors dans l’erreur fur ce fujet , & combien toute cette flagellation a contribué au relâchement des mœurs. (O0) : hu fl Flagellation fe dit plus particulièrement de la fouf- france:de J. €, lor{qu'il fut fouetté & flagellé par les Juifs. Un tableau de la flagellation, ou fimplement une flagellation ; fignifie un shleau ouune effampe-qui re- préfente ce tourment du Sauveur du monde. On dit dans ce fens, la flagellation d’un tel peintren n 834 F L A FLAGEOLLER, v. n. (Mancge, Maréchall,) L’ac- tion de fZageoller eft une forte de tremblement que lon apperçoit dans les jambes de animal aufü-tôt qu'il s'arrête, & que l’on remarque principalement dans l’avant-bras & dans le genou. Ce tremblement eft une preuve de la foiblefle des fibres mufculaires & des membres. (e) * FLAGEOLET , f. m. (Lurherie.) Il y a deux for- tes de flagcolers ; l'un qu’on appelle Le fzgeoler d’oi- feau , & l’autre, le ffageolez gros : le flageoler d’oifeau eft le plus petit; il eft compofé de deux parties qui fe féparent ; l'une qui eft proprement le JZageoler, com- pofée de la lumiere & du canal percé de trous, l’au- tre qui eft un porte-vent , formée d’un petit tuyau & d’une cavité aflez confidérable où l’on enferme une petite éponge qui laifle pañler l’air & qui retient humidité de l’haleine. Voyez dans nos Planches de Lutherie ce flageolet aflemblé , & fes parties féparées. Le gros flageoler ne differe du précédent qu’en ce qu”- il n’a point de porte-vent;qu'ileft à bec &c tout d’u- ne piece. Voyez aufli os Planches. Ces flageolers ont lun & l’autre la même tablature ; & tout ceque nous allons dire leur eftcommun, excepté que les fons du . flagcolet d'oïfeau font plus legers , plus délicats ; ont moins de corps, & s’écoutent avec plus de plaïfir : il eft appellé jZageolet d’oifeau, parce qu’on s’en fer- voit pour fiffler les ferins , les linotes , & autres oi- (D 3110) D C2 2 er, 7 C2 Le > 7 à eZ, C 7 DDODDS D'où lon voit que l’éténdue de cet inftrument eft d’une quinzieme. Les maîtres montrent d’abord à jouer en G re Jo! tierce majeure, enfuite en G ré fol iierce mineure. Il faut boucher les trous exaétement, quand on veut faire les tons naturels, & ne les boucher qu’à demi pour faire les femi-tons chromatiques ; car on peut exécuter vingt-huit femi-tons de fuite fur le jZ4- geolet. Si l’on veut faire le ton plus grave, ilfaut boucher les fix trous, & celui de la patte à demi. Il y a peu d’inftrumens à vent qui demandent au- tant de legereté de doigts, & une haleine plus habi- lement ménagée: aufl eft-il très-fatiouant pour la poitrine. On peut faire , par le feul ménagement de l’air, les fons wt, re, mi, fa, fol, la, tous les trous étant bouchés, même celui de la patte, qu’on peut dans cette expérience, laifler ouvert ou bouché: il faut commencer d’une haleine très-foible ; ces {ons font très-foibles & très-difficiles à fonner jufte. En bouchant plus ou moins la patte d’un ffegeoler de quatre pouces & cinq lignes de long , on fait mon- ter ou defcendre l’inftrument d’une tierce majeure ;, quoiqu’on ne fe ferve ordinairement de ce trou que pour le femi-ton. Ce phénomene ne réuffit pas fur +ous. Il eft difficile d'empêcher cet inftrument d'aller à foftave & detenir àfonton, malgré toute la foiblef- £e de l’haleine , fur-tout lorfqu’il n’a que trois onqua: tre pouces de long ; & quand il oétavie , les trous étant bouchés , fouvent il redefcendà fon ton natu- el en ouvrant tous les trous, au lieu de continuer #es {ons à l’odave en-haut : ainf il otavie beau- goup plus aifément les trous bouchés que débou- (D © (D feaux ; avant qu’on eût la ferinette, qui ef moins parfaite, mais qui épargne beaucoup de peine. Le fageolet a fix trous: le fecond, le troifieme, & le quatrieme & le fixieme font deflus , du même cô- té que la lumiere ; le premier & le cinquieme font deflous, ou du côté oppofé à la lumiere : le premier trouëc le dernier ont denxcaraéteres; le premier peut être confidéré comme le dernier, en paflant de l’aigu au grave ; &c Le dernier peut être confidéré comme le premier en paflant du grave à laigu. Quand les fix trous font bouchés, la main gauche bouche le premier , le fecond, & le troïfieme ; & la main droite le quatrieme , le cinquieme , & le fi- xieme. Le pouce de la main gauche bouche le premier, _ l'index le fecond » & le doigt du milieu le troïfieme ; le pouce de la main gauche bouche le cinquieme , l’index le quatrieme, & le doigt du milieu le fixieme. Il y en a d’autres qui y font fervir les quatre pre- miers doigts de la main gauche, le pouce, &lestrois fuivans, & les trois premiers de la main droite dont ils employent celui du milieu à boucher la patte, quand 1l en eft befoin. Cetinftrument fe fait avec l’yvoire, le buis, le prunier, l’ébenne, & autres bois durs. Son diapafon ne fuit ni celui des cordes, ni celui des tuyaux de l'orgue. Voici fa tablature & fon étenduecommunes. CS C7 < æÆ = & DODDÉE chés. D’où il arrive qu’on lui donne plus aifément fon ton naturel en ouvrant le demi-trou , qu’en le fermant. Il faut favoir que le fixieme trou ne doit être qu’à demi ouvert, & non tout débouché, pour donner les tons qui pañlent à Poftave naturel de l’inftrument. Il y a de très-belles induétions à tirer de ces difé- rens phénomenes pour la théorie générale des fons- des inftrumens à vent: ils fugeéreront aufñi à l’hom- me intelligent beaucoup d’expériences curieufes , dont une des plus importantes feroit de voir fi un inftrument de même conftruétion & de même lon- gueur qu'un f/ageoler, mais de différente capacité ou différent diametre , otavieroit aufli facilement : je n’en crois rien. Je fuis prefque für qu’en général moins un inftrument à vent aura de diametre, plusil oftaviera facilement. Lorfqu'un inftrument à vent a très-pen de diame- tre, la colonne d’air qu'il contient ne peut prefque ofciller fans fe diviler en deux : ainf le moindre fouf- fle le fait oétavier. Cette caufe en fera aufli une d'irrégularité dans la diftance donton perceralestrous ; & un phénomene en ce genre étant donné, il ne feroit pas impoffble de trouver la loi de cetteirrégularité pour des inftru- mens d’une capacité beaucoup moindre, depuis celui dont la longueureft fi grande & la capacité f petite, qu’il ne raifonne plus , jufqu’à tel autre inftrument poflible où l’irrégularité de la diffance des trous cefle, Mais le phénomenenéceffaire pour la folution du problème , Le fageoler le donne. On fait que fur cet inftrument , fi la diftance des trous fuivoit la propor- tion des tons. 1l faudroit que le quatrieme trou fût feulement d’une huitieme partie plus éloigné de la lumiere que le cinquieme trou; cependant il en eft EE Æ plus éloigné d’une quatrieme partie, quoiqu'il nefaf- fe defcendre le fageoles que d’un ton ; il en eft de même du troifieme trou relativement au quatrieme. Les trous trois, deux , un, fuivent un peu mieux la loi des diapafons des cordes & des autres inftrumens à vent. Il n’y a guere que la théorie où les infttumens à vent font comparés avec Les inftrumens à corde, & où l’on regarde dans les premiers la longueur de linftrument à vent comme la longueur dela corde ; la grofleur de la colonne d’air contenu dans lPinftru- ment àvent, comme la grofleur de la corde ; le poids de l’atmofphere au boutde l’inftrument à vent, com- me le poids tendant de la corde; l'inflation de l'inf- trument à vent, comme la force pulfante de la corde; l’ofcillation de la colonne d’air dans la capacité de l'inftrument à vent, comme l’ofcillationde la cotde ; les divifions de cette colonne par les trous, comme les divifions de la corde par les doigts: iln°y a guere que cette théorie, dis-je, qui prifle expliquer les bi- zarreries du ffageoler, & en annoncer d’autres dans d’autres infirumens pofhbles. FLAGRANT DÉLIT, (Jurifprid.) Voyez l’article DÉLIT. | FLAMBANT , (Æiff. nat.) Voyez FLAMMANT. FLAMBANT , adj: er termes de Blafon, fe dit des paux ondés & aiguifes en forme de flamme. Bataille en Bourgogne, d'argent à trois pals f/am- bans , ou trois flammes tortillantes de gueules, mou- vantes du bas de l’écu vers le chef. FLAMBART, {. m. rerme de Pêche , ufité dans le ref- fort de l’amirauté du Havre; c’eft une forte de petits bateaux à l’ufage des Pêcheurs. FLAMBE, rris, 1. f. (Hift. nat. Botan.) genre de plantes dont la fleur eft d’une feule piece : cette fleur commence par une efpece d’entonnoir qui ens’éva- fant {e divife en fix parties, dont trois font relevées & trois font rabattues. Le piftil fort du fond de cette fleur furmonté d’un bouquet à trois feulles ; ces ferul- les portent chacune fur une des parties de la fleur qui font rabattues & forment une efpece de gueule. Lorfque cette fleur eft pañlée , le calice devient un fruit oblong qui s'ouvre par la pointe en trois par- ties ; il eft divifé en trois loges qui renferment des femences prefque rondes en certaines efpeces, & plates en quelques autres, Ajoûtez aux caraéteres de ce genre, que la racine.eft charnue , oblongue , ram- pante, & fans aucune enveloppe. Tournefort, 17/7, rei herb. Voyez PLANTE. (1) FLAMBE, GLAYEUL, 04 ÎR1S, (Mar. med.) Voyez IRIS. FLAMB8E, (Hifi. nat. Iéfhiologie.) poiflon de mer qui a été appellé en grec rœnia, & en latin wirta, par- ce qu’ileft long 8 étroit comme une bande ou unru- ban: on lui a donné en Languedoc le nom d’efpaze, c’eft-à -dire épée , à caufe de fa figure, & celui de fambo , parce qu’il eft de couleur de feu. Le cœnia d’Anftote eft long , mince, & flexible ; fa chair a une couleur blanche, & le même goût que celle de la fole ; la tête eft applatie; les yeux font grands, & les prunelles petites ; ce poiflon a deux nageoires près des oies, & une troifieme qui s’é- tend fur le dos depuis la tête jufqu’à la queue ; il y a des poils fur cette nageoire. Rondelet donne auffi le nom de ræn1a à un autre poiflon de mer quieft fort mince, & long quelquefois de deux ou trois coudées ; il differe du précédent en ce qu'il a deux nageoires rouges au-deflous de la mâchoire inférieure ; les poils de la nageoiïre dudos, & ceux de la queue, font de la même couleur rou- ge ;1la fur le corps cinqtaches rouges; ileft blanc, fans écailles ni aigwillons. ff. des poiffons , lib. XT. chap. xviy. Gxviy. Voyez Poisson. (7) FLAMBEAU , 1. m. forte de luminaire que l’on F L À 835 fait avec des meches un peu épaïfes que l’on couvre de cire, & qui fert à éclairer la nuit dans les rnes aux enterremens & aux illuminations, &c, Les flambeaux font différens destorches & des cier- ges. Voyez CIERGE, TORCHE. Is ont une figure quarrée ; 1ls font quelquefois de cire blanche, plus fouvent de cire jaune ; ils font or- dinaïrement compofés de quatre meches d’un pouce d’épais & environ trois piés de long , d’une forte de chanvre filé & à moitié tors. Pour les former, on fe fert d’une cueillere comme pour les torches & les cierges; on verfe premiere- ment la cire fondue fur le haut des différens bâtons qui font fufpendus, & on laifle couler cette cire juf- qu’en bas: cela fe répete par deux fois : enfuite on laifle fécher ces bâtons à qui on a donné plufeurs couches de cire ; aprés on les roule fur une table, & on les joint au nombre de quatre enfemble , en les foudant avec un fer tout rouge. Quand ilsfont joints on coule deffus de la cire ,. jufqu’à ce qu'ils ayent le poids convenable ; c’eft ordinairement d’une livre & demie ou deux livres : pour les finir, on fe fert d’une forte de polifloire ou repañloire de bois qu’on promene le long des angles faits par l’union des branches. FVoyez BOUGIE. Les flambeaux des anciens étoient différens des nô- tres ; 1ls étoient de bois, fechés au feu ou autrement : ils y en employoient de différentes fortes ; celui dont on fe fervoit le plus ordinairement étoit Le pin. Pline rapporte que de fon tems on employoit aufli à cet ufage le chêne , l’orme, & le coudrier. Dans le fep- tieme livre de l’Énéide, 1l eft parlé d’un flambeau de pin ; & Servius remarque fur ce paflage, que l’on en faioit aufli de cornouiller. Chambers. Foyez l’article Jüuivant. FLAMBEAU ; on appelle ainf, ex cerme d’Artificier, une efpece de brandonde feu fait de pin ou de fapin, ou de quelque autre bois femblable, dont les anciens fe fervoient non-feulement dans leurs maïfons, pour leurs propres ufages, mais aufli à la guerre , pour mettre le feu aux machines des ennemis , quand ils en étoient aflez proches pour pouvoir les lancer avec le bras. Quoique ces flambeaux ne foient plus d’ufage, je ne laïflerai pas d’en donner ici la conftruétion. Faites fondre fur des charbons ardens dans un pot de cuivre, comme feroit un chauderon, ou bien dans un pot de terre verniflé, huit onces de falpetre, avec feize onces ou une livre de foufre, quatre onces de colophone, deux onces de poix noire, une once de cire, & deux onces de térébenthine, Mettez dans cet- te compoñition ainfi fondue , du linge bien fec &c bien net , ou à fon défaut de l’étoupe auf bien feche & bien nette : tournez ce linge jufqu’à ce qu’il foit bien imbibé de cette liqueur chaude: vous en enveloppe- rez un bâton aflez long, avant qu’elle foit refroidie , & vous le lierez fortement avec du fil d’archal, pour que la compofition s’y attache mieux, Vous aurez un flambeau , qui étant allumé ne pourra être éteint ni par le vent, ni par la pluie; il pourra même brüler dans l’eau ; 8 on ne le peut éteindre qu’en l’étouf. - fant dans du fable ou de la cendre. Chambers. FLAMBEAU, (Orfévrerie , Chauderonnerie.) Nous donnons encore ce nom à de grands chandeliers de table: il y en a d’or, d'argent, de vermeil, de cui= vre , 6c. FLAMBER , v. n. ( Gremm.) c’eft donner de la flamme. Voyez l’article FLAMME. FLAMBER , v. a@. & neut. ( Ars militaire. ) ce terme s’'employedans lArtillerie pourexprimer lac- tion de nettoyer une piece avant de la charger, en faifant brûler de la poudre dedans. (Q) FLAMBER LE CUIR , erme de Corroyeur ,; qui figni- fie le faire pafler par-deflus la flamme d’un feuclair, 3 CODEN 536 FL pour lui donner quelque façon. Les Corroyeurs flambenr deux fois leurs cuirs {ur un feu de paille; la premiere , afin de les difpofer à recevoir le fuif; la feconde , après qu'ils ontrect le fuif, afin de Le faire pénétrer davantage, Voyez CoRRoYER. FLAMBER UN CHAPEAU , serme de Chapelier , ef la même chofe que tondre le chapeau. Yoyez To x- DRE. FLAMBOYANTE., adj. pris fubft. ex rerme d’Ar- zificiers ; c’eft une efpece de fufée , dont le cartou- che eft couvert de matiere enflammée , & contigu au feu de la queue, ce qui le fait reflembler à une comète. Voyez l’article FUSÉE. * FLAMBURES , f. £. ( Teinure.) taches ou iné- galités qui fe voyent dans une étoffe , quand elie n’eit pas temte également , ou qu'elle n’a pas été éventée. FLAMINE, f. m.(Liréérature.) en latin ffamen, prêtre, facrificateur chez les Romains , chargé du culte de quelque divinité particuliere. | Les ffamines n’étoient que troisau commencement de la fondation de Rome ; celui de Jupiter, fzmer dialis ; celui de Mars , flamen martialis ; & celui de Quirinus, flamen quirinalis, Plutarque 8 Denis d’Ha- lycarnafle prétendent que Numa Pompilius créa feulement le troifieme famine en faveur de Romu- lus ; mais Tite-Live aflüre que Romulus n’avoit inf titué que le femen dialis, & que Numa y ajoûta le martial &t le quirinal : Varron parle auffi en nombre pluriel des farines établis par Numa, Quoi qu'il en foit, les ffamines furent dans la fui- te multiphés jufqu'à quinze. Comme les trois pre- muets étoient tirés du fénat , ils avoient un rang & une confidération fupérieure à celle desautres ; c’eft pour cela qu’on les appelloit ffarnines majeurs. Les douze autres nommés f/amines mineurs, étoient ordi- nairement plébéiens. Le flamine de Jupiter étoit le plus confidérable & le plus refpe&table de tous les flamines , tant à cau- fe du dieu qu'il fervoit, que parce qu'il avoit été inf titué le premier. Nous en ferons un article à part,ainf v0yez FLAMINE DIALE. On le diftinguoit par fon bonnet, qui étoit fait de la peau d’une viétime blan- che immolée à Jupiter. Le bonnet des autres farines , qui n’étoit fait que de la peau de brebis ordinaires, fe nommoit galerus , &c s’attachoit fous le menton avec des cordons, pour l’empêcher de tomber. Les famines avoient tous la dénomination du dieu qu'ils fervoient. Jai déjà parlé des trois flamines ma- jeurs : les douze mineurs étoient le flamen carmenta- lis , ou le prêtre de la déefle Carmenta, dont Cicé- ron fait mention dans fon Brutus ; le f/amen falacer, dont Varron dit que fon origine eft inconnue ; le - men floralis étoit le prêtre de la déefle Flore, On ignore l’oripine du famen furinalis, du flamen levina- Us, du ffamen lucinalis , & du flamen palatualis ; ce- pendant on trouve leurs noms dans quelques inferip- tions rapportées par Onuphrius. Le flamer pomona- {is étoit le prêtre de Pomone ; Le f/arzen virbialis, ce- lui de Virbius , qu’on prétend être le même qu’Hip- polite ; le flamer vulcanalis, celui de Vulcain; le f4- men volturnalis , celui du dieu Vulturne, Quelques auteurs parlent encore du f/amer hadria- nalis , c'eft-à-dire du prêtre d’Hadrien ; du flamen Jul Cefaris , du prètre de Jules-Céfar ; & du fre auguflalis : on trouve dansles marbres ce dernier f/z- mine enl’honneur d’Augufte, &cillui futdonné de fon vivant même, lorfque la flaterie lui éleva des tem- ples & des aurels. L'empereur Commode n’eut point de honte de créer pour luiun famine fous le titre de flamen Herculaneus Commodianus ; mais un tel facer- doce ne fubffta point après La mort d’un prince fi Juftément détefté. Malgré le même nom que portoient les flamines ils ne failoient pas corps enfemble ; chaque famine n'étoit que pour un dieu ; il ne leur étoit pas permis, comme à d’autres prêtres, de tenir plufeuts facerdo- ces à la fois. L’élettion des uns & des autres fe fai- {oit par le peuple dans les comices des curies, au rapport d’Aulu-Gelle ; mais la confécration ou l'i- naugutation appartenoïit au fouvetain pontife , au- quel ils étoient tous fubordonnés. L'inauguration veut dire la cérémonie de certains augures qu'on prenoiït, lorfqu’on les mettoit en poffeffion de cette dignité. Leurs filles étoient exemptes d’être prifes pour veftales , & leurs femmes portoient le nom de leurs maris. Leur facerdoce appellé faminatus , étoit perpé- tuel ; ils pouvoient cependant être dépofés pour cer- tains fujets ,. dont nous ne fommes pas bien inftruits, & cela s’appelloit Haminio abire, être désradé du mi- niftere de raie. | Leurs bonnets pointus , furmontés d’une groffe houpe de fil ou de laïne , les frentnommer fiamines, à filamine , dit Feftus, & la même étymologie fe trou- ve dans Varron. Suivant Denis d'Halycarnafle, ces prêtres furent appellés flzmines , du nom de leur cha- peau, lequel avec les filets, bandes & rubans, s’ap- pelloit proprement flemmeum, parce que le tout étoit couleur de feu. Ce chapeau reflembloit à un capu- chon, pointu par le haut, ayant deux côtés qui s’attachoient fous le menton par des agraffes, dites offendices ; mais pendant les grandes chaleurs les fa- mines fe couvroient la tête d’un fimple filet de laïne, parce qu'il ne leur étoit pas permis de paroître en public la tête nue. Voyez fur les flamines , Rofinus, Pitifcus, Struvius, & autres, Arricle de M, le Che- valier DE JAUCOURT. FLAMINE DIALE , flamen dialis, ( Hiff. rom.) Ce prêtre de Jupiter, le premier, le plus confidéré, & le plus refpe@té de tous les farines , étoit encore foû- mis à certaines lois , qui Le diftinguoient extrème- ment des autres prêtres. Aulu-Gelle (Zy. X. ch. xy.) a pris foin de nous conferver ces lois , & elles méri- tent que nous les rapportions ici à çcaufe de leur fin- gularité. 1°, Il étoit défendu au famine diale d’aller à che- val: 2°, de voir une armée hors de la ville , ou une armée rangée en bataille ; c’eft pour cette raifon qu'il n’étoit jamais él conful dans le tems où les con- fuls commandoient les armées: 39. il ne lui étoit ja- mais permis de jurer : 4°, ilne pouvoit fe fervir que d'une forte d’anneau, percé d’une certaine manie- re: $°. il n’étoit permis à perfonne d'emprunter du feu de la maïfon de ce famine , hors le feu facré : 6°. fi quelque homme lié ou garoté entroït chez lui, il falloit d’abord lui ôter les liens , le faire monter par la cour intérieure de la maïfon , jufque fur les tuiles , & le jetter du toit dans la rue : 7°, il ne pouvoit ayoir aucun nœud ni à fon bonnet facer- dotal , ni à fa ceinture, ni autre part : 8°. fi quel- qu'un qu'on menoit fouetter , fe jettoit à fes piés pour lui demander grace, c’eût été un crime de le fouetter ce jour là : 0°. il n’y avoit qu’un homme li- bre qui püt couper les cheveux à ce flamine : 102. il ne lui étoit pas permis de toucher ni chevre, ni chair crue, ni lierre, ni feve , ni même de proférer le nom d'aucune de ces chofes : 11°. il lui étoit dé- fendu de tailler les branches de vigne qui s’élevoient trop haut : 12°, il ne pouvoit coucher trois nuits de fuite dans un autre lit que le fien , & pour lors il n°’é- toit permis à aucun autre de coucher dans ce lit, au pié duquelil ne falloit mettre nicoffre, nifer, niau- cunes hardes : 13°. ce qu’on coupoit de fes ongles ou de fes cheveux, devoit être enterré fous un ché- ne verd : 14°. tout jour étoit jour de fête pour le ÿ/z- mine diale : 14°, il lui étoit défendu de fortir à FE ans FL A fans fon bonnet facerdotal , il pouvoit cependant le quitter dans fa maifon pour fa commodité; mais cette grace lui a été accordée depuis peu , dit Sabinus, par les pontifes qui l’ont encore difpenfé de quelques au- tres cérémonies : 16°, il ne lui étoit pas permis de toucher de la farine levée : 17°, il ne pouvoit ôter {a tuniqueintérieure qu’en un lieu couvert, de peur qu'il ne parût nud fous le ciel, & comme fous les yeux de Jupiter : 18°. dans Les feftins, perfonne n’a- voit féance au-deflus du flarnine diale , hormis le roi facrifrcateur : 19°. fi fa femme venoit à mourir, il perdoit fa dignité de famine : 20°. il ne pouvoit fai- re divorce avec fa femme ; 1l n’y avoit que la mort qui les féparât : 21°.41l lui étoit défendu d’entrer dans un lieu où il y avoit un bucher deftiné à brûler les morts : 22°. 1l lui étoit pareillement défendu de tou- cher au morts ; il pouvoit pourtant affifter à un con- MOD 1e . Voici les paroles du préteur, qui contiennent un édit perpétuel. « Je n’obligerai jamais le famine dia- # le à jurer dans ma jurifdiétion ». Enfin le f/zmine diale avoit feul droit de porter l’a/bogalérus ou le boz- net blanc , terminé en pointe, foit parce que ce bon- net eft le plus granddetous, foit parce qu'il m’appar- tient qu’à ce prêtre d’immoler à Jupiter une viétime blanche , dit Varron, 2. IT. des chofes divines. Dic- tionn. de Mychol, Arcicle de M. le Chevalier DE JAu- COURT, Fr». FLAMINE, (LA) f. £. (Lüctérar.) Les flamines ou Jirminiques , en latin famine, flaminice , étoient des prètreiles particulieres de quelque divinité , on fim- plement les femmes des ffzmines ; car ce mot fe trou- ve pris dans ces deux fens différens , fur d’anciens matbres cités par Gruter, pag. 303. n°. 3. 6 pag. 459. n°, 9. Les flaminiques qui n’étoient pas prêtrefles parti- culieres , avoient l’ornement de tête & le furnom de leur maris; cependant la femme du fferzne diale , ou du prêtre de Jupiter , étoit la famine par excellence: elle s’habilloit de couleur de flamme, & portoit fur {es habits l’image de la fondre de même couleur , 6c dans {a coëffure un rameau de chêne verd ; mais lorf- qu’elle alloit aux orgies , elle ne devoit point orner fa têre ni peigner fes cheveux. Il hui étoit défendu d’avoir des fouliers de bête morte, qui n’eût pas été tuée : il ne lui étoit pas permis de monter des échel- les plus hautes que de trois échelons. Le divorce lui étoit interdit, & fon facerdoce cefloit par la mort de fon époux ; enfin elle étoit aftreinte , dit Aulu- Gelle, aux mêmes obfervances que fon mari. Voyez donc FLAMINE DIALE. Article de M, le Chevalier DE JAUCOURT. | FLAMMANT, f. m. phænicopterus, ( Hif!. nat. Ornitholog. ) PL. X. fig. 1. Oneau très-remarquable par la hauteur des jambes & la petitefle des piés & de la queue, 8&c par la forme du bec qui eft recourbé à-peu-près comme le manche d’une charrue, c’eft pourquoi on l’a appellé £echaru. T1 a aux aïîles des plumes rouges , dont la couleur eft éclatante lorf- qu’elles font étendues au foleil, 8 que les rayons paflent au-travers de la partie membraneufe & tranf£ parente, qui eft au haut de l’œil où font les plumes rouges ; c'eft à caufe de ce rouge couleur de feu, que l’on a donné à cet oifeau le nom de phæricopte- re , flambant , flammant & flaman. Celui dont la def- cription a été rapportée par M. Perrault, dans les znémoires de l'académie royale des Sciences ; avoit cinq _piés & demi de long, depuis le bout du bec jufqu’à l'extrémité des piés ; la longueur du cou étoit d’un pié neuf pouces, & celle du bec de quatre pouces, fur un pouce & demi de largeur dans le milieu : cet oifeau avoit des plumes de trois couleurs ; celles de la tête , du cou, du ventre , des cuuifles, & de la queue, étoient blançhes ; il en avoit de noires à Pex- Tome VI, Eh 0j F L A 837 trémité des ailes ; celles du haut étoient mêlées de blanc & de rouge clair, tirant fur le couleur de rofe. Il avoit fur la tête & fur le cou des plumes courtes; celles du ventre & des côtés étoient larges , dures, &r longues detroisouquatre pouces :ilavoitlaqueue fi courte , que les plumes des côtés du ventre étoient plus longues que celles de la queue. Le haut de Læ jambe étoit charnu , & garni de plumes feulement fur près du quart de la longueur de la jambe propre- ment dite; tout lerefte des jambes & des piés avoient une couleur rougeâtre , 8& étoient recouverts d’é- cailles en lames ; 1l y avoit des membranes entre les doigts qui étoient fort courts , & fur-tout celui de derriere , en comparaïfon de la hauteur de l’oifeau, le plus long des trois doigts de devant n’avoit pas cinq pouces ; les ongles étoient larges. Ce fammant avoit le bec gros, &t d’une figure fortéxtraordinaire; car les deux pieces étoientcrochues, plus grofles dans le milieu que vers la bafe 8 l'extrémité, & courbée en-deflous , de façon que cette courbure formoit un angle au lieu d’être arrondie ; le bec avoit une cou- leur rouge pâle, excepté à l'extrémité qui étoit noi- re ; il y avoit fur les bords de la piece du deflus , de petits crochets longs , menus & mobiles, & fur la piece de deflous,de petites hachures en-travers; cet- te piece étoit aufli grofle que l’autre, fort épaïlle, & creufée en gouttiere ; 1l y avoit une groffe langue dans cette gouttiere , qui n’étoit ouverte par-deflus que de trois lignes ; mais les rebords qui entouroient la langue, avoient chacun plus de fix lignes de lar- _geur ; les yeux étoient très-petits &très-rouges, Mé- noires de l’académie royale des Sciences | tome IE. part. ITT. Le flammant eft un oïfeau aquatique, qui vit de poiflon : il en vient en hyver fur les côtes de Provence & de Languedoc : il ÿ en a auffi en Amé- rique. Voyez O1SEAU. (TI) FLAMME, f. f. (Phyfig. 6 Chim.) on appelle ainf ce corps fubtil, leger, lumineux, &c ardent, qu’on voit s'élever au-deflus de la furface des corps qui brülent, La flamme eft la partie du feu la plus brillante & la plus fubtile ; elle paroït n’être autre chofeque les va- peurs ou les parties volatiles des matières combuft:- bles extrèmement raréfiées, & enfuite enflammées ou échauffées jufqu’à être ardentes: la matiere de- vient fi legere par cette raréfa@ion, qu’elle s’éleve dans l'air avec beaucoup de vitefle; elle'eft raflem- blée, pendant quelque tems, par la preffion de l’at- moiphere environnante ; l’air formant autour de la flamme une efpece de voûte ou de calote fphérique, médiocrement réfiftante, empêche qu’elle ne s’éter+ de &t qu’elle ne fe diffipe, fans s’oppofer néanmoins. à cette efpece de raréfa@ion ofcillante , qui eft effen- tielle à la flamme. Cette propriété de l’air de l’atmo- fphere eft unique à cet égard ; la flamme ne fauroit {ubffter dans un milieu plus denfe, tout autre corps qui l’entoure la fuffoque ; tous les corps pulvéru- lens, mous & liquides, & même les plus combufti- bles jettés en mañe fur un corps enflammé, éte- gnent la flamme de la même maniere qu’un corps {o- lide qui fupprime l’abord libre de l'air. La femme ne fubfifte pas non plus dans un air rare, encore moins dans le vuide parfait. Les mouffetes & toutes les vapeurs qui détruifent l’élafticité de l'air, éteignent auf la flamme, Voyez EXHALAISON. Quant aux parties aqueufes &t terreufes qui font incombuftibles de leur nature, elles fe raréfent feu- lement & s’éleyent dans l’air fans s’enflammer. Foy. FUMÉE 6 Su1E. La flamme eft donc formée par les parties volati- les du corps brülant, lorfqu’elles font pénétiées d’u- ne quantité de feu confidérable ; elle ne differe de la fumée que par cette quantité de feu qwelle contient: OOooe 836 F L À auffi quand un feu fume beaucoup, On lui fait pren- dre flamme enun inftant, en y ajoütant un petit corps enflammé. Le feu follet eft une vapeur qui brille fans cha- leur ; il femble qu'il y a la même différence entre cette vapeur &t la flamme, qu'entre du bois pourri qui luit fans chaleur, & des charbons ardens. Lorfqu’on diftille des efprits ardens, fi l’on Ôte le chapiteau de l’alembic, la vapeur qui s’éleve prendra feu à l’ap- proche d’une chandelle allumée, & fe changera en flamme. WU y a des corps qui font échauffés par le mouvement, ou par la fermentation : fi la chaleur parvient à un degré confidérable, ces corps exha- fent quantité de fumée; & fi la chaleur eft aflez vio- lente, cette fumée fe changera en flamme. Les fub- flances métalliques embrafées ou rougies au feu, foit par la fufion, foit fans être fondues, ne jettent _ point de f/amme faute de fumée; le zinc eft excep- té à cet égard, ce demi- métal donne de la flamme combuftible. Stahl a obfervé & bien prouvé que l’eau contri- buoit effentiellement à la produétion de la flamme , & que les corps qui ne renfermoient point d’eau, étoient incapables de donner de la flamme à quelque feu qu’on les exposât, à moins qu'ils ne fuflent pro- pres à attirer de l’eau de l’atmofphere, & qu’on ne portât fur ces corps embrafés une certaine quantité d'eau convenablement divifée, Deux fubftances feu- lement, favoir le charbon & le zinc, donnent de la flamme en tirant de l’eau du dehors. Voyez CHaAR- BON, ZINC, CALCINATION; voyez les srecenta de Stahl, $. #1. 6 f2g. M. Pott a établi la même vérité par de nouvelles expériences ,'& de nouvelles con- fidérations, dans fon excellente diflertation fur le feu & fur la lumiere, qui a été traduite en françois &t imprimée avec la Lithogéognofie du même aureur. Chaque ffamme a ion atmofphere, dont les parties font furiout aqueufes, & repouflées du milieu de la ammeen en-haut par lation du feu : aufli cette atmo- fphere s'étend d'autant plus autour de la fZ:mme,que la nourriture du feu eft plus aqueufe ; & la flamme même en ce cas a plus de diametre, Cette atmofphere fe re- marque fur-tout lor{qu’on fait enforte qu’on puifle appercevoir l’image de la famme fur une muraille b'anche. La f/zmme , quand elle eft libre, prend la forme d’un cone ; mais fi on l’enferme dans un an- neau ou corps cylindrique , elle prend alors une fi- gure plus oblongue. - La raifon pour laquelle la flamme paroït bleue & ronde vers la bafe, felon M. Muflchenbroek, que nous abrégeons dans cet article, c’eft que les parties hiuleufes inférieures étant moins chaudes que les au- tres, fe raréfient moins & font chaflées plus foible- ment, & que la grandeur du volume des parties du fuif eftcaufequ'ilne pafleä-travers ces parties nonencore rarefées, que des rayons bleus. La plus grande cha- leur de la flamme cf à fon milieu, parce que c’eft l'endroit où les parties ignées ont le plus d’a@ion; plus bas les parties ne font pas aflez raréfiées ; plus haut elles le font trop, & elles Le font enfin tant que le feu cefle d'agir à nos yeux fur elles. La famme échauffe d'autant plus les corps qu’elle eft plus pure, & contient moins de matieres vifqueufes & hétéro- genes, qui peuvent fe placer entr’elles & les corps, ë& fawe obftacle à fon aëtion; c’eft pour cela que la flamme de l’efprit-de-vin échauffe plus qu'aucun au- tre. Si une famme fe trouve entourée d’une autre amme, comme celle de l’efprit-de- vin de celle de l'huile, intérieure prend la figure fphérique. La fa7- me a befoin d’air libre pour fa nourriture, mais il ne faut pas que l'air comprime trop le corps brûlant ; car le feu s'éteint plus vite fous un verre dont on a pompé l’a, ou fous un verre dans lequel on fait en- trer de l’air en trop grande quantité. Cette regle n’eft FL A cependant pas générale. Il y a des corps qui paroif- - fent n’avoir pas befoin d’air pour brûler | comme le phofphore d’urine mis dans le vuide, ainfi que Phuile de carvi, mêlée dans le vuide à l’efprit de tartre, le minium brûlé dans le vuide avec un verre ardent. Muflch. eff, de phyfiq. $. 986. € Juiv. À la fuite de ces faits, M. Muflchenbrock tente d'expliquer cer- tains phénomenes communs; par exemple, pour- quoi la flamme s'éteint à un vent violent, & s’aug- mente à un fouffle leger ; pourquoi l’eau d'fperlée en petites gouttes l’éteint aflez promptement, &c. Nous renvoyons à ces explications, qui font pure- ment conjetturales, & qui à dire vrai ne nous pa- TOïflent pas extrèmement fatisfaifantes. Nous croyons qu'il feroit plus court & plus vrai de dire, qu’on ignore la caufe de ces phénomenesfordinaires, ainfi que celle de beaucoup d’autres. Voyez FEU, FUMÉE, CHALEUR, 6c. Il y a fous la terre des matieres combuftibles, qui venant à s’en détacher & à s'élever dans l'air, pren- nent ffamme. Tacite raconte qu'une ville fut brûlée par des ffzmmes de cette efpece, forties du fein de la terre , lans aucun autre accident , comme tremble= ment, 6c. À côté d’une des montagnes de l’Apennina, entre Bologne & Florence, on trouve un terreim aflez étendu d’où il fort une haute fz7me fans bruit. & fans odeur, mais fort chaude ; la pluie la fait dif paroître , mais elle renaît enfuite avec plus de force. On connoit aufli les fontaines dont l’eau s’enflamme: lorfqu’on en approche un flambeau allumé. Z4d, $à. 1490. Voyez FONTAINE, Éc. | Tous les corps qui s’enflamment, comme l'huile, le fuif, la cire, le bois, le charbon deterre, la poix, le foufre, &c. font confumés par leur ffarme, &t fe diffipent en une fumée qui d’abord eît brillante ; à quelque diftance du corps elle ceffe de l'être, & con- tinue feulement à être chaude : dès que la flamme eft éteinte, la fumée devient fort épaifle , & répand or- dinairement une odeur très-forte ; mais dans la ffam= me elle perd fon odeur en brûlant. Selon la nature de la matiere qu’on brûle, la far me eft de différentes couleurs ; ainfi la ferme du fou- fre eft bleue ; celle du cuivre uni à l’acide du fel ma- rin, eft verte ; celle du fuif, jaune ; &c celle du cam= fre , blanche. Lorfque la poudre à canon prend feu, elle fe diffipe en fumée enflammée, Voyez NITRE. Il y a un phénomene aflez digne de remarque fur la flamme d’une chandelle, d’un flambeau, ou de quel- qu'autre chofe femblable; c’eft que dans l’obfcurité la flamme femble plus grande, lorfqu’on en eft à une certaine diffance , que quand on en eft tout proche : voici la raifon que quelques philofophes en appor- tent. À une diffance de fix piés, par exemple, l'œil peut aifément diftinguer la ffamme d’avec l’air conti= gu quieneftéclairé, & appercevoir précifément où la flamme eft terminée ; mais à un plus grand éloigne- ment , comme à celui de trente piés, quoique l’an- gle que foûrient la ffzmme dans ce dernier cas, foit beaucoup plus petit que dans le premier ; cependant comme on ne peut plus diftinguer précifément où fe termine la ffzmme, on confond avec elle une partie de l’air environnant qui en eftéclairé, &onle prend pour la flamme mème. Voyez VIstON. Au refte quelle que foit la caufe de ce phénome- ne , il eft bon de remarquer qu'il eft renfermé entre des limites: car la flamme d’une chandelle ou d’un flambeau ne paroît que comme un point äune très. rande diftance, & elle ne femble s’agerandir que orale eft aflez près de nous; après quoi cette - même flamme diminue de srandeur à mefure qu’elle s’approche. Il y a donc un point ou un terme où [a . lumiere paroït occuper le plus grand efpace pofh. ble ; il ne feroit peut-être pas inutile de fixer ce ter- me par des expériences, & peut-être cette obferva= tion fourniroit-elle des vües pour en découvrir la véritable caufe, | | | C’eft un phénomene fort fingulier & fort intéref- fant , que celui de la produétion d’une véritable fam- me parle mélange de deux liqueurs froides. L’une de ces liqueurs eft toïjours l’acide nitreux, foit pur, foit mêléravec de l’acide vitriolique ; & l’autre une huile, un baume: où un bitume, La théorie de cette inflammation qui eft de notre célebre M. Roüelle, appartient l’article ACIDE NITREUX. 9. NITRE. Les Chimiftes employent la f/zmme appliquée im- médiatement à certains fujets, dans l'opération ap- pelléereverbération, Voyez REVERBÉRATION. La flamme déterminée avecart dans des fourneaux convenables, fournit unfeu très-violent:c’eft par la flamme que s’échauffent le grand-reverbere, & le fourneau à raffiner l'argent, ou la coupelle en grand, le fourneau à cuire la porcelaine, la brique, &c. (O) (6) FLAMME 04 FEU VITAL, (Phyfcol.) c’'eftune fub- flance ignée très-fubtile , que plufeurs anciens & quelques modernes placent dans le cœur des ani- maux ; ils la regardent comme quelque chofe de né- ceflaire: à la vie, où, pour mieux dire, comme ce qui.conftitue la vie même. Voyez Vie. Ils foûtiennent que cette f/zrmme a autant befoin de l'air pour{ubfifter, que notre flamme commune ; d’où ils concluent que la refpiration eft abfolument né- ceflaire pour conferver la vie des animaux. Voyez AIR, RESPIRATION , & CHALEUR ANIMALE. | FLAMMES,FLAMMETTES, noms qui ont été don- nés à des coquilles du genre des cames. Voyez l’arti- cle COQUILLE, some IV. de cet ouvrage, pag. 189. (1) FLAMME, (Æif£. anc.) dans la mulice greque du bas empire, c’étoit un ornement & une marque qui fervoit à diftinguer les compagnies, les régrmens, les bataillons. Voyez PAVILLON , ÉTENDARD', &c. * Les Grecs l’appelloient:pk/amoulon ; onlamettoit quelquefois fur le cafque, quelquefois fur la cuiraf- fe, & quelquefois au bout d’une pique; L'empereur Maurice ordonna que les flammes de chaque divifion fuflent d’une couleur particuliere qui les diftinguäât des autres bataillons , ou des autres brigades, | Quand la famme n'étoit qu'un ornement, les fol- dats la quittoient avant le combat, de peur qu’elle ne les embarrafsât. Les cavaliers mettoient auf des flammes {ur leurs chevaux, qui fervoient à diftin- guerde quel corps de troupesils étoient. Chambers. _FLAMME, e7 Architeîture, ornement de fculpture de pierre ou de fer, qui termine les vafes & cande- labres, & dont on décore quelquefois les colonnes funéraires où il fert d’attribut. (P) _ FLAMME, (Marine.) c’eft une longue banderolle d’étoffe, & ordinairement d’étamine, qu’on arbore aux vergues & aux hunes, foit pour fervir d’orne- ment , foit pour donner un fignal. La flamme eft une marque que les officiers qui com- mandent plufieurs varffeaux, arborent au grand mât de celui qu'ils montent ; & par l’ordonnance de la _ Marine de 1689; ils ne doivent la porter que blan- che. Le rirre 1. du liv. II 1. de cette ordonnance, : dit «quelles vice-amiraux, lieutenans-généraux, & » chefs d’efcadres , qui commanderont moins de r2 » vaifleaux , porteront une fimple flame, à moins + qu'ils n’ayent permiflion par écrit de fa majefté, » de porter un pavillon ou une cornette. » Lorfque plufieurs chefs d’efcadres fe trouveront »joints-enfemble dans une même divifon ou efca- # dre particuliere, 1l n’y aura que le plus ancien qui » puifle arborer la cornette ; les autres porterontune » fimple flame. | | » Les capitaines commandant plus d’un vaiffeau, # porteront une ffamme blanche au grand mât, qui Tome VI, | ” F L A 839 # aura de guindant la moitié de la corhetté, 8 ne * pourra Être moindre que de dix aunes de battant ». Dans une flote de bâtimens marchands, celui qui commande peut porter une flamme blancheau grand mât pendant la route ; mais 1l eft obligé de l’ôter à la yüe du vaiffeau du roi. Dans les fêtes & les réjotiffances , tous vaiffeaux peuvent fe parer de flammes de diverfes couleurs ; excepté le blanc. (Z) FLAMME D'ORDRE, ( Marine.) c’eft la flamme que le commandant d’une armée ou d’uneefcadre fait. arborer au haut de la vérgue d’artimon:: c’eft le f- gnal pour avertir les officiers de chaque vaiffeau d'aller à l’ordre. (2) | ie FLAMME, (Manège & Maréchall.) infltument de maréchallerie , qui n’eft proprement qu'’unelamcerte d'acier, courte & large; elle fort, comme le pale- ton d’une clé à quelque diftance de l’une des deux extrémités d’une tige de même-métal, & ne fait avec elle qu’un feul & même tout. | | Cette définition fuffit pour en indiquer les ufages , qui fe bornent à l'ouverture des vaifleaux du cheval dans la pratique de la faignée. Je décrirai quatre efpeces de flammes. On fe fert” communément en France de la premiere; les maré- chaux allemands préferent ordinairementila fecon- de ; & la troifieme & la quatrieme m’a paru ia plus commode & la plus convenable à l'opération, à la- quelle cette forte d’inftrument eft deftiné. Flamme françoife. Elle a pourtige une lame équar- rie & bien dreffée, dont la longueur eft de cinq pou- ces, la largeur de trois lignes , l’épaifeur de trois quarts de lignes à l'extrémité la plus éloignée de la lancette, & de.demi-ligne feulement à celle qui lux éft oppofce. | L’axe de la lancette s’éleve perpendiculairement fur une des longues faces d’épaifleur de la tige, à neuf ou dix lignes du bout le plus mince. Sa bafe, qui par les quatre bifeaux qui forment les deux tranchans , revient à un lofange très-alongé , n’a pour petite diagonale que Péparffeur de cette tige , & pour gran- de diagonale environ fix ou fept lignes. Cette grande diagonale fait partie de la ligne de foi de la face, fur laquelle s’éleve cette lancette. Les deux arêtes qui partent des deux bouts de la petite diagonale, font droites & fe réuniflent à l’ex- trémité fupérieure de Paxe, pour former une pointe très-aigué, Les deux tranchans qui partent des.deux bouts de la grande diagonale, fe réunifent aufli à la même pointe; mais en fuivant l’un & l’autre non une. lignedroite, mais une courbe égale & renfermée.dans le plan commun de l’axe & de la ligne de foi. Lecen- tre de chacune de ces courbes, qu’on peut rapporter à des arcs de cercles d’un pouce de rayon, fe trotive au-delà du tranchant oppoté,êc à une ligne ou une li- gne & demie de diffance de la face qui porte la lan- cette. | | On aflemble ordinairement trois ou quatre de ces flammes , accordées fur le plat de pofition, de lon- gueur & de largeur , à cela près que les lancettes font de diverfes grandeurs. On les monte dans une châfle , au moyen d’un feul clou rond qui traverfe les tiges près de leurs bouts le plus éloigné des lan- cettes., ainf que les deux feuilles de la châffe fur lef- quelles il eft rivé. Ces feuilles de cuivre, de fer ou d’autre métal recouvert d’écaïlle , ou autrement or- né , font profilées fur le profil des tiges, mais elles débordent de quelques lignes le contour des lancet= tes. Une cloifon auffi de métal, reone entre les ri- ves intérieures de ces parties faillantes des feuilles: de la châfle ; &c par fon union avec elle par foù- dure ou par rivet, elle forme des deux feuilles un feul tout qui tient lieu de manche à ces flammes , & d’étui à leurs tranchans, Les deux extrémités de 00000 840 F L A cette petite cloifon fervent determe aux tiges quand on les pouffe dans la châffe, & s’oppofent àrce que les pointes ne s’émouflent contre le fond de l’étui. Les bouts des tiges oppofés à ceux que le clou tra- verfe, furpaflent de trois lignes environ la longueur de la châffe, pour faciliter la prife lorfqu’on veut ou- vrir l’une des farmmes, c’elt à-dire la tirer de la châffe à l'effet de la mettre en œuvre; elles ont même cha- cune, pour plus de commodité , une encocheen-def- fous , que l’ongle peut fair. Le jeu de chacune d’el- les fur le clou commun , eft aflez indépendant de ce- lui des autres, pourvû que la largeur de la cloifon tienne les feuilles de la châffe paralleles entre elles, &c que lestiges qui, comme je l’ai déjà obfervé;, di- minuent d’épaifleur à mefure qu’elles approchent de leur bout, foient applanies parallelement autour de l’œil par lequel le clou les affemble. Flamme allemande, feconde efpece. La lancette pro- prement dite eft moins large par fa bafe d’une ligne & demie, & plus longued’environ autant que la’lan- cette de la Jzrme françoife. Elle eft plate d’un côté, elle a deux bifeaux de l’autre. Son tranchant anté- rieur eft prefque droit à fon départ de la tige, mais bien-tôt après il fe courbe, & précipite de plus en plus fa courbure, à mefure qu’il approche de la poin- te. Le tranchant poftérieur eft droit , & l’arête qui tient un milieu entre la courbe de l’un & la ligne droi- u te de l’autre, part du milieu de la bafe & fuit à-peu- près un arc de cercle qui auroit pour centre le clou {ur lequel fe ment la tige. Cette tige a depuis le mé- me clou jufqu’à la lancette , deux pouces & demi, & jufqu’à fon extrémité antérieure, trois pouces &c de- mi. Elle eft prolongée poftérieurement d’un pouce huit ou dix lignes. Son épaifleur d’une ligne 8 demie fubfifte la même dans toute falongueur ;1len eftainfs de fa largeur, excepté à l'endroit du clou où elle eft dequatre lignes; on y obferve un arrondiffement for- mé pour que le trou n’affame pas cette partie. Elle eft de plus montée fur une platine quarré-long de cuivre ou d'acier, longue de trois pouces, large de quinze lignes, encloifonnée fur ces deux grands côtés feu- lement. Elle y eft attachée par un clou rond êc a tête fendue, entrant à vis dans l’épaiffeur de la platine, à deux lignes près de fon extrémité poftérieure, êc dans le milieu de fa largeur, enforte que le tranchant poftérieur de la flamme n’eft éloigné que de deux Hi- gnes à-peu-près du bord antérieur de cette platine ou de fa cloifon. Cette tige fe meut librement furce clou dans le plan de fa flamme parallele à celui de la platine ; 8 pour qu’elle ne s’en écarte pas, un guide de fer traverfe les deux cloifons à leurs extrémités du côté antérieur, & la renferme entre lui & la pla- tine, fans néanmoins la gêner. Un reflort à coude, attähé par vis à la cloïfon fupérieure , & appuyé contre elle dans toute la longueur d’une de fes bran- ches, porte par le bout de l’autre fur la tige, à huit ou neuf lignes du centre de mouvement , & la chafle avec force contre la cloïfon inférieure. Sur l’exté- rieur de la platine, à un pouce près de fon extrémité. antérieure, & un peu plus près de la rive fupérieure que de l’inférieure, s’éleve, dedeux ou trois lignes, üne chappe fixe qui reçoit un levier de la premiere efpece, lequel fe meut, dans un plan perpendiculai- re à la platine &c parallele à fes grands côtés, fur une goupille quile traverfe ainfi que Les joues de la chap- pe. Le grand bras de ce levier qui atteint prefque juf- qu’au bord poftérieur de la platine , eft fans ceffe re- pouffé loin d’elle par un reflort qui s’étend au-deffous de lui , depuis fon extrémité où il eft attaché par ri- vet, jufqu'auprès du pié de la chappe oilrepofe fur la platine. L'autre bras porte près de fon extrémité une tige de fer d’une ligne de groffeur, qui traverfe la platine par un trou aifé, & qui en outre pañfe aflez Fépaiffeur, pour fervir d'arrêt à la tige armée, lorf- que le levier eft dans fonrepos ; maïs désquw’onpreffe avec le doigt le grand bras, &r qu’on lepouffe con- tre la platine , cettesrige d'arrêt fe retire & ouvre le paflage qu’elle interrompt ; la détente du-reflort s’ef- fetue, 8&c la flamme eft chaflée avec la plus'grande impétuofté- jufqu'au pointoù fa tigerencontre la cloifon inférieure quilui fert determe, Cette mécha- nique eft recouverte par une platine dont les bords taillés'en bifeaux fe gliffent dans des rainurestentail- lées dans les cloïfons aulongde leurs rives: ba boîte encetétat, a environ quatre lignes d’épaiffeur. Cer inftrament exige abfolument un étui que l’on:conf- truit ordinairement, de mamiere qu'ilpuifle contenir outre la tige montée; une-ou deux autres flammes , pour les fubftituer au befoin à celle qua eft en place: Flamme allemande, troifieme efpece. Cette flamme differe de celle que je viens de décrire; 1°. en ce que fa tige n’eft pas prolongéeau-delà du clou, 8 que ce clou n’eft pofé qu’à feize lignes de l'extrémité poñté- rieurede la boîte, & à trois lignes de la’cloïfon in- férieure. 2°, Le reflort à coude y eft pofé,, de facon que fa branche mobile s’étend tout le long delatige, depuis le clou jufqu’au-dehors de la boite, où elle fe releve & s’élargit pour favorifer le moyen‘de la faifir quand on veut Parmer. 3°, Cette flamme a un reflort de plus néceflaire pour en relever latige, au moment où l’on arme le orand reflort, & poux lobli ger de le fuivre, lorfqw'il cefle de la preffer:.ce {e- cond reflort ne doit avoir de force que ce: qu'il en faut pour vaincre le poids & le frotement de la tige. 4°. Enfin la boîte eft encloïfonnée de trois côtés. Flamme nouvelle | quatrieme efpece, Sur l’intérieur H H H d’un palâtre encloifonné (voyez la figure dans z0s Planches de Maréchallerie), g\fle en-avant &en- arriere, comme le pêne d’une ferrure, le porte- flamme BB dont la ligne de foi répond. à celle qui diviferoit le palâtre en deux parties égales fiivant fa longueur. Ce porte-flamme eft une lame d’acier de quatre pouces de longueur, dreflée & équarrie fur fix lignes de largeur dans toute fon étendue, & fur trois quarts de ligne d’épaiffeur en général, Di- verfes partiestirées de la même piece fe montrent fur la face oppofée à celle qui glifle contre le palâtre, Teleft un petitquarré G detrois lignes, faillant d’une ligne, dont le centre eft fur la ligne de foi à cinq ou fix lignes de fon extrémité antérieure , &: dont les côtés oppoiés font paralleles aux rives de la lame dont il fait partie : tel eftencore le crochet 7 qui s’éleve de trois lignes fur le milieu de cette lame, à un pouce trois quartsde la même extrémité; tel eft enfin le renfort Z L, long d’un pouce, qui double l’épaifleur de cette même lame, à commencerà fépt lignes au-deflous du crochet. Le quarré Centre juite dans le quarré D, percé au bas de la tige de la flam- me, & recoit en fon centre ouvert en écrou, la vis E à tête refendue, large & applanieen-deffous. Cette tête débordant autour du quarré, aflujettit la fZarrz me dont l’épaifleur furpafle legerement la faillie du quarré & la fixe incébranlablement au porte-flamme. La flamme eft femblable à celle que j'ai décrite en parlant de la premiere efpece, à cela près que l'axe de fa tige ne fait qu'une feule & même ligne /droite avec l’axe de la lancette. Cette tige eft exaétement équarrie fur la même largeur que le porte-flamme, à la ligne de foi duquel fon'axe doit s’aligner, \ Depuisle talon de cette flamme mife en place jui- qu'au crochet Z, le porte-flamme eft diviféien deux jumelles égales, par une ouverture F F'de deux li- gnes & demie de largeur, & de quatorze on quinze lignes de longueur, dont la ligne.de foiteft la même que celle du porte-flamme , qu’ellé perce de parten part. Ces jumelles font exaétemement dreffées & pa- ralleles. Un petit quatré, faillant fur le palâtre dont ileft partie fixe, remplit jufte la largeur de cette ou- # F L A vertute , & fert an potte-flamme dans fon chemin qui peut être de huitlignes en-avant.ou entarriere, de guide ; de terme, & en même tems de crampo- net, au moyen de la vis À, qui entre dans le centre du quarré fixe G, & dont la tête large, fendue & applanie eï-deflous, s'étend fur le plat des deux ju- melles: Ce quarré doitêtre placé furle palâtre , de telle forte que le porte-flamme étant à fon dernier point d'avancement, les taillans de la ffarrme fe dé- gagent du palâtre jufqu’à leur naïffance. Un autre méchanifme à-peu-près femblable, mais en fens op- pofé, équivaut à un-fecond cramponet, & en fait l'office. Le palâtre porte lui-même une ouverture g. Cette ouverture eft égale & femblable.à celle du porte-flamme, & fur la même ligne de foi. Elle com: mence à environ un pouce au-deflous du premier guide G&, Un boutonà coulifle oulanguette M, ajuf té, à l’appui du doigt dont l’embafe eft capable par fa longueur & par, fa largeur de recouvrir en tout état l'ouverture du palâtre, s’éleve en quatré fur fa fuperficie inférieure & plane. Ce quarré alla longueur néceflaire pour traverfer d’une part l’épaifleur dupa- lâtre, au moyen de l’ouverture qui lui livre pañlage, ê&t à la largeur de laquelle il eft ajufté , 8 de l’autre le porte-flamme dont l’épaiffeur eft doublée en cette partie, Le trou du porte-flamme qui le reçoit, lui eft pareillement proportionné, Une vis à tête plate, fendue & noyée , quientre dans ce quarré, afflemble avec le porte-flamme le bouton. Ce bouton par ce même quarré, par la face lifle de fon embafe, par la face life du porte-flamme, & par le parallelif: me des joues de l’ouverture, tant par rapport à leur diftance que par rapport à leur épaifleur, devient un fecond-guide & un fecond terme, accordés l’un & l’autre aux premiers, & tient en même tems lieu du fecond cramponnet fans lequel la flamme eùt pû fe devoyer dans fon trajet. -C’eft ainfi que le‘porte-flamme peut fe mouvoir, il nous refte à en examiner le moteur. : Deux reflorts à boudin 4. 4. Pun à droit, l’autre à gauche, dont les lames égales entr’elles ont trois Hgnes-de largeur, jufqu’à un pouce & demi près de leur-petit bout, cinq pouces de longueur totale, & trois quarts de ligne dans leur plus grande épaifleur, font fixés. au palâtre par vis qui traverfent l’empate- ment duquel chacun d’eux prend naïfflance, & font contre-butés près de cette même origine, par des ter- mesinhérens au palâtre. Ils viennentaprès deux évo- lutions, croifer & appuyer leur pointe alorgée en jonc ou en fouet, fous le crochet Z du porte-flamme. Leur effort chaffe perpétuellement la flamme en- avant. On les arme en retirant en-arriere le bouton Mis reftent armés au moyen du cliquet S attaché par vis à tige ronde au palâtre, à côté du porte-flam- me. Ce cliquet fans cefle chaffé contre le côté de cette piece, par un reflort aufli attaché au palâtre, rencontre dans ce côté un cran T, dans lequel il en- gage fon bec qui ne peut.en fortir, & par confé- quent abandonner la flamme au jeu des reflorts, fi l’on ne prefle la détente, Cette détente confifte en une petite tige de fer terminée par un bouton F7, la- quelle traverfe la cloïfon à angle droit für la ligne de foi du porte-flamme, &c va au-delà de cette même piece s’affembler mobilement, & à-peu-près à angle droit, au bout d’un bras prolongé du cliquet. L’affem- blage en ef effeêtué par un clou rond ; porté latéra- lement par ce bras, & reçû dans un œil qui termine latige 7. Un petit écrou dans lequel s’engage l’ex- trémité de ce clou contient enfemble ces pieces. Le reflort du cliquet eft oppofé à la puiflance qui folli- cite la tige Ÿ d'entrer dans la cloifon, mais dès que cette püiffance peut vaincre le reflort, c’eft-à-dire ‘dès qu’on appuyefenfblement le doigt fur le bou- ton 7, le cliquet fort de fon cran, & livre la flam- me à la détente impétueufe des reforts. | à FIL A 84 - Le contour dupalâtre 4 Æeft auf reflerré que le permettent la liberté néceflaire au jeu de ces mêmes _réflorts, & la grace du tout enfemble, Une platine affemblée par charniere 5. s.à la cloifon, & fermée par un mentonnet qu'elle porte, & qui s'engage fur un petitreflort à pouce, lequel eff fixé fur la partie de la clorfon oppofée à celle qui foûtientia charniere, met ceméchanifmed: l'abri de toute infulte dans l’ef- pece de boîte qui réfulte du tout, La longueur totale dé cette boite dont la forme a quelquerapport à celle d’une croix plate, eftde cinq pouces fur une largeur de troïs pouces environ; fon épaifleur eftà-peu-près de quatre lignes & demie. La cloifon n’eftinterrom- pue que pour livrer paflage à la flamme, Ce pañage eft-un canal de quelques lignes de longueur, ajufté au corps de cette même flamme, & formé par l’incli- naïfon en-dedans & en amortiflement des quatre pa- rois. Cette inclinaifon, quant à la cloïfon, commen. ce dès l’extrémité des bras de cette efpece de.croix; & quant au couvercle ainft qu’au palâtre:, elle:ne commence qu'à fept.ou huit lignes de l'extrémité qui livre un paflage à la famme ; le porte-flamme s’arrê- tant à ce point dans la détente des reflorts, ainfi que la tête de la vis qui lui aflujettit la flamme. Perfonne n'ignore la maniere donton fe fert de la flamme françoie. Lorfque la pointe en eft préfentée fur la veine que l’on.fe propofe d'ouvrir, un coup fec du manche du brochoir donné fur la tige à l’en- droit où la ffamme fort en forme de peloton, la-dé- termine & la chafle dans Le vaifleau. Mais l’incerti- tude fréquente de ce coup, la frayeur qu’excite dans l'animal lation du bras qui doit frapper, le mouve- ment auquel il fe livre dès qu'll’apperçoit, mouye- ment qui s’oppofe à l’aflujettiflement exaût de la vei- ne, Pembartas enfin de l’opérateur qui tente de la comprimer avec les doigts\de la même main qui fe trouvefaifie de l’inftrument, tout m’engageroit à dons ner la préférence aux f/zrmmes à reflort. Celles dont on fait communément ufage en Alle- magne, ont néanmoins leurs inconvéniens. Premie- ment, outre qu’elles font pour l’ordinaire conftruites fans foin, fans proportion &r avec la derniere inexac- titude, il eft difficile de juger exaétement, du point précis, où la pointe de la famme s’imprimera, En fe- cond lieu, l’appui inévitable de la cloifon ou de l’ex- trémité de la boîte tenue dans un fens vertical parle maréchal contre les parties faillantes du vaiffeau quon vent percer, l'empêche fouvent d'arriver à ceux qui font profonds. Ajoûtons que .fa réa@ion n'étant contrebalancée que par le poids très-médio- cre du total de cet inftrument, auquel la main ne peut rien ajoûter de quelque façon qu’elle le faififfe, 1l peut arriver qu'un cuir d’une dureté même non confidérable, lui réfifte & s’oppofe à fon effet, en renvoyant en-arriere la boîte. La flamme nouvelle dont j'ai developpé la conftruétion, n’a été imagi- née que pour parer à tous ces défauts. L'opérateur la tient perpendiculairement à la furface du vaiffeau; ainf quelque caché qu’il foit, la lancette l’atteint toûjours: d’ailleurs le poids plus confidérable decette flamme, {a pofition dans la hgne dedireétion, la main * &le bras. du maréchal qui fe trouvent fur cette mê- me ligne, rendent le point d’appui très-für, &lere- cul très-peu fenfible, ce qui donne à cet inftrument un avantage réel fur tous les autres. : Du refte, je ne fais fi celui dont Albucañis fait men- tion, 8c que les anciensnommoient fofforium, n’étoit point une petite famme femblable à la flamme fran- çoife; on s’en fervoit dans la phlébotomie des hom- mes. Albucafñs l’a prefcrit pour ouvrir la veine fron- tale; elle pénétroit dans le vaifleau au moyen d’un coup leger que lechirurgien donnoit fur l’inffrument. On peut même croire qu’on la préféroit au phleboro- us dans l'ouverture des vaiffeaux du bras. Le terme 842 FL A de percuffron que Rhafes & Haly-Abbas; ainfi que l’auteur dont il s’agit, ont employé conftamment en parlant de la faignée, peut étayer cette conjetture. Conftantin :PAfricain s'exprime encore plus claite- hent à cet égard: fervre, vents feriendis, ne nervus péréutiatur , neos percutias ; & Juvenal lui-même fem- ble faire allufion à cette maniere de faigner: mediam Dertundire veram. Voyez l’hifloire-de la Medecine par Freind. | - En Allemagne une flammette à reflort, dont la conftruttion ne differe en aucune maniere de celle des flammes qui font entre les mains des maréchaux, éft préférée aux lancettesdontnos Chirurgiens fefer vent, (e) FLAMME , Chez les Mesteurs en œuvre, eft un mor- ceau d’orformé en flamme & émaillé en rouge , qui entre dans la compofition de quelques ordres, ou que l’on meten tête des bagues d'alliance ; ou autres: de fantaifie. | * FLAMMEUM , (Hifloire arc.) efpece de voile dont on couvroit la tête des jeunes filles le jour de leur nôce, pour dérober aux yeux du fpeétateur les mouvémens de joie qu’un prochain changement d’é- tat pouvoit occafonner dans leurs yeux &r fur leur vifage. Ce voile, fuggéré par-la modeftie, étoit purpurin. Il étoit à l’ufage Journalier de la femme des Flamines. Les marchands & teinturiers du f/ew- meum s'appellerent Jlarmmearir. FLANC , £. m. (Gremm.) il fe dit proprement des parties latérales du ventre d’un animal : on la éten- du à beaucoup d’autres acceptions. Voyez les articles fuivans. di FLANC, en terme de Guerre, fe dit par analogie du Tôté d’un bataillon, d’un efcadron ou d’une armée. Voyez AILE. Artaquer l’énnemit en flanc, c’eft le découvrir par le côté ; & faire feu deflus. Les ennemis nous pri- rent en f/anc. Il faut couvrir les fZarcs de l'infanterie par'des ailes de cavalerie, ou par quelque ouvrage qui empêche l'ennemi de tomber deffus. En général, les flancs d’une troupe ou d’une ar- mée en bataïlle , doivent toüjours être à l’abri des attaques de l’ennemi Lorfque la fituation des lieux les expofe à ce danger, il faut y remédier par des corps de troupes capables de les’ en garantir. M. de Follard veut qu'on employe'fés colonnes dans cette girconftance. Voyez ORDRE DE BATAILLE. (Q) FLANC, ex terme de Fortification, eft une ligne ti- rée de l’éxtrémité de la face d’un ouvrage, vers l’in- térieur ou la gorge de cet ouvrage : telle eft la ligne FG;, PLIT. de la Fortification, fig. r. Le flanc du baftion eft la partie qui joint la face à la courtine. Voyez BASTION. Il doit avoir au moins vingt toifes, & au plus trente ; mais fa grandeur en général doit fe regler par l'étendue des parties qu'il doit défendre, & où l'ennemi peut s’établir pour le battre. Voyez FORTIFICATION. (Q) FLANC BAS ou PLACE BASSE; c’eft ainfi qu’on appelle dans la Fortification ; des efpeces de flancs que les anciens ingénieurs conftruifoient parallele- ment au f/erc couvert de leurs places, & au pié de on revêtement. Voyez CAZEMATE. Voyer aufià la fuite du 10: FORTIFICATION, la conftruétion du chevalier de Ville, du comte de Pasan, &c. Les flancs bas fervent à augmenter la défenfe du flanc ; 8 comme ils font peu élevés, ennemi a peu de prife fur eux, & leur feu rafant lui caufe beau- “coup d’obftacles dans le paffage du foffé. Les tenaile ‘es de M: de Vauban peuvent tenir lieu de cette forte “de flanc. Voyez TENAILLE. (Q) FLANC CONCAVE, (Fortific.) eft un flaxc cou- “vert qui forme une ligne courbe, dont la convexité eft tournée vers le dedans du baftion: Foyez la con- iruétion du ffrc concaye dans le fyftème de M, de F EL À Vauban ; à la fute du mot Fortification, Quelques" auteurs donnent au ffanc concuve le nom de our crew Je, parcétqu'il'a la même figure en-dedans Le baftion:,; qu'une partie des tours dont on fe fervoit ancienne- ment'dans la fortification. (Q) Qu FLANC coUvERT , (Fortific.) eft celui dontune: païtie rentre en-dedans le baftion , laquelle effcou- verte pat l’autre partie vers l'épaule, qui eft arron-: die ‘ou en épaulernent. Voyez ORILLON € ÉPAULE- MENT. ù | Le fanc'eft auf couvert, dans plufñeurs conftruc- tions!, par le prolongement dela face dubaftion, arrondie ou en épaulement. 21 EE L'avantage du flanc couvert eft d’être moins expofé à l’ennemi; &c de conferver quelques canons’vers l'épaule du baftion , qui fervent beaucoup à la dé- fenfe du foffé &c du pié des breches. (Q) FLANC OBLIQUE 0 SECOND FLANC, (Fortific.) c’eft, lorfquié la ligne de défenfe eft fichante, la par- tie GE (PI.T. de Fortific, fig. 4.) de la courtine EF, éomprife entrele prolongement D G de la face CD du baftion , & l’angle F du baftion oppofé. On ap- pelle éétte partie fecond flanc; parceque les foldats qui y font placés, découvrentila face CD & le foffé du baftion oppofé , comme le flanc, mais cependant d’une maniere beaucoup plus oblique. Voyez Feu: DE COURTINE & LIGNE DE DÉFENSE. | La plûpart des anciens ingénieurs étoient fort par< tifans du Jécond flanc; mais l'expérience a fait remar- quer qu’il n’opéroit prefque rien d’avantageux dans la défenfe ; parce que le foldat étant dut de fe placer de côté pour découvrir la face du baftion op2 pofé’, n’eft pas dans cette fituation en état de nuire beaucoup à l'ennemi : aufli M. le comte de Pagan Pa-t-1l fupprimé dans fes conftruétions, en quoi il a été imité par M. le maréchal de Vauban, 5 Ceux qui voudront voir tout ce qu’on peut dire en faveur &c contre le fécond flanc, n'auront qu’à confulter le livre intitulé , zouve/le maniere de fortifrer. les places, tirée dés méthodes du chevalier de Ville, du comte de Pagan , & de M. de Vauban. = L'auteur de cet excellent ouvrage prétend répon- dre à toutes les obje@ions qu’on a faites contre le Jécond flanc; qu’on doit Pemployer lorfque Pangle flanqué du baftion fe trouve fort obtus, &c qu'ilne caufe aucune diminution fenfble au f/ezc. On peut encore voir dans la troifieme édition de nos é/émens de Fortification, les raifons qui peuvent déterminer à s’en procurer ou à les éviter, (Q) | | FLANC SIMPLE o4 PLAT , (Forufic.) c’eft le flanc ordinaire du baftion en ligne droite. Woyez Bas TION. (Q) | 3 FLANC DE VAISsEAU , ( Marine.) c’eft la partie qui fe préfente à la vûe de l’avant à l'arriere, ou‘de la poupe à laproue. : | Ù Lits Etre flanc à flanc, voyez PROLONGER.. 1: FLANOS , (Manége, Maréchall.) parties latérales du ventre ou de Pabdomen. HAE TT Les flancs comprennent l’efpace qui eft au-deffous des reins , entre les faufles côtes & les hanches ls doivent être pleins, 8 au niveau des côtes &c du ventre. Il eft des chevaux dont les f/ancs font cieux par vice de conformation : alors on obferve com- munément que la derniere des faufles côtes eft-en eux à une diftance confidérabledes hanches. Sou- vent aufi ces fortes de chévaux font plats; leurs côtes , bien loin de tracer un demi-cercles; font {er- rées , elles ont une forme avalée & applatie. Des flancs ainfi retrouflés ou coupés , annoncent toñjours que l’animal n’eft pas propre à une longue fatigue & à de grands travaux. Les ffzres du cheval qui a de l’ardeur, ont ordinairement cetteimperfeétion , par- ce qu’il mange peu & difipe beaucoup, Des mala- dies de longue durée qui jettent l'animal dans une 1 forte de marafme, dont les impreffons font doulou- reufes , &c qui affeétent des parties fenfbles, le ren- dent accidentellement très-étroit de boyau : s’il man- que entierement de corps, fi fes ffancs offrent aux yeux une cavité profonde, nous difons que le che- val efi coufu. Lorfque d’ailleurs fes côtes font bien tournées , fes ffanés fe rétablifent aifément. On doit attentivement examiner les flancs de tous les chevaux que lon achete, & principalement ceux des chevaux qui font vieux, non-feulement en ce qui concerne la conformation de cette partie, mais dur-tout par rapport aux mouvemens des mufcles qui concourent à la refpiration ; mouvemens qui font plus vifs, plus précipités & plus altérés, felon _ des diverfes maladies dont l'animal peut être atra- qué. Le flanc eft altéré, lorfque la dilatation ou la contration, ou, pour m'expliquer plus clairement, lorfque le foùlevement ou le reflerrement de ces mêmes mufcles font plus prompts que dans l’état na- turel. Si Panimal eft âgé, cette altération eft à crain- dre ; s’ileft jeune, elle exige de grands ménagemens & un régime particulier : car elle ne peut avoir èté occafionnée que par la mauvaïfe nourriture ou par un grand feu , & un travail exceflif & outré, Enre- tranchant l’avoine à l’animal dans ces derniers cas, en le mettant à une diete humeétante & rafraichif- fante, en lui adminiftrant quelques lavemens émol- liens, en lui faifant une legere faignée; enprefcrivant enfuite l’ufage du lierre terrefire en poudre, don- né chaque matin dans du fon à la dofe de demi-once, pendant un mois, & même pendant un efpace plus confidérable de tems, s’il en eft befoin, on fera af- fûré de calmer l’agitation de fon fZanc. © Le battement en fera beaucoup plus vif, s’il eft caufé par la fievre. Voyez FIEVRE. L’expiration en- trecoupée par une nouvelle infpiration , qui fait ap- percevoir conféquemment nn mouvement redoublé lors de la dilatation des faces latérales de l’abdomen, caratérife la poufle. Voyez PoussE, &c. (e) FLANC. Les écrivains donnent auffi ce nom aux deux lignes droites qui fe trouvent au milieu des deux côtés de la lettre O , qui font en effet comme les deux flancs. FLANC , (a la Monnoie.) Le métal ayant été fon- du en lames, & pafñle par les laminoirs avec un inf- trument appellé coupoir ou emporte-piece (voyez Ll’ar- zicle Courotr), on coupe de la lame un morcean rond comme une piece unie au palet, d’une gran- deur & d’une épaifleur conféquente à l’empreinte que doit recevoir cette efpece de palet, qu'on ap- pelle flanc, pour devenir une monnoie. Ce fac ou piece unie, avant de pañler au balancier, eft donnée aux ajufteurs , pour la rendre du poids qu’elle doit avoir ; enfuite on la recuit, on [a fait bouillir dans un fluide préparé , &c. enfin elle continue d’être ap- pellée flanc jufqu’à ce qu’on y ait empreint l'effigie, ies armes, légendes de tranches ou cordonnet. oyez. COUPER, BLANCHIR. FLANCONADE 04 FLACONADE, (ESTOCADE DE) Æ/fcrime ; c’eft une botte de quarte forcée qu’on porte dans le flanc de l’ennemi. Voici la façon de l’exécuter : 1°, du talon du tran- chant preflez le foible de l’épée ennemie : 2°. entre- lacez votre lame de façon avec la fienne , que le ta- lon de votre tranchant foit de quarte fur Le foible de fa lame , & l’autre partie de votre lame fous fon bras : 3°. de cette pofition alongez l’effocade, comme il eft enfeigne pour l’effocade de quarte. _ FLANCONADE 04 FLACONADE, (Parade de) pour parer la flaconade ; il faut faire tout ce qui fera en- cigné pour parer en tierce (voyez PARADE EN TIER- CE); Mais remarquez que la pofition de cette parade eftbien différente : car l’épéedel’ennemi, au lieu de 1e trouver du côté du vraitranchant, fe trouve du cô- F LA 843 té du faux & au-dedans du bras. Cette parade eft ap. pellée dans les falles d'armes, parade de quinte. FLANDRE , (Géog.) grande province des Pays- Bas , trop connue pour nous arrêter à la décrire ; on peut la divifer en Flandre autrichienne & en hollan- doife. Elle eft entre la mer d'Allemagne, lArtois, le Hainaut , le Brabant, la Gueldre, la province d’U- trecht, & le comté de Zélande. On entend quelque fois improprement par la Flandre, tous les Pays Bas catholiques. Voyez {ur tout ce magnifique pays , Bu- zelin, ann. Gallo-Flandrie ; Guichardin, defcripr. de Flandre ; Meyer, hifl. de Flandre; Grammaye, antig. Flandrie ; Longuerue, defcripr, de la France; Aubert le Mire, ann. de Flandre, & autres. (D. J.) * FLANELLE, f. f. (Draper, & Comm.) c’eft une efpece d’étoffe de laine, claire, peu ferrée, qui n’eft point piquée on matelaflée , mais qui eft fort chau= de, compofée d’une trame & d’une chaîne, & faite avec un métier de Tiflerand à deux pédales, de la même maniere que l’on fabrique la revèche. Foyez REVÊCHE. FLANELLES , cerme de Manufaiture de glaces, On appelle fanelles parmi les ouvriers qui mettent les glaces au teint , les pieces d’éteffe de laine, moellet- tes & peu ierrées, à-travers defquelles fe filtre le vif-argent qui coule de deffous une glace étamée. Elles fervent à purifier ce minéral des ordures qu'il a contraétées pendant le peu de tems qu'il a refté fur la feuille d’étain. On les appelle farelles, parce qu'el- les font affez fouvent de cette efpece d’étoffe ; ainf elles portent toüjours cenom, de quelqu’étoffe qu’on fe ferve. | On nomme auffi flanelle, l’étoffe qu’on met fur la glace avant de la charger de plombs ou de boulets de canon, quoiqu’on y employe auff d’autres étof- fes, comme du molleton, de la revêche & de la fer- ge. Voyez l’arcicle VERRERIE. Diéfionn, de Trév, € de Commerce. | FLANCONS , ancien terme de Monnoyage, étoit ce que l’on appelle aujourd’hui fZzrc. Voyez FLAN c. FLANQUE, f, f. (Blafon.) fe dit d’une piece de blafon formée par une ligne en voûte qui part des angles du chef, & fe termine à la bafe de l’écuflon. Il porte d’hermine aux deux ffarques vertes. Voyez les Planches de Blafon. | | Les flanques {e portent toüjours par paires ou par couples. Leigh fait deux différentes pieces de la ffanque & de la flatque , la premiere eft plus courbée que la fe- conde; mais Gibbon n’en fait qu’une, qu’il appelle anque. Chambers. | FLANQUÉ , serme de Blafon, qui fe dit des paux ; arbres & autres figures qui en ont d’autres à leurs côtés. Aux armoiries de Sicile, les paux d’Arragon font flanqués de deux aigles. Pingon én Savoie, d'azur à une fafce d’or, flanquée de deux pointes d’argent appointées vers la faice. FLANQUER , ou l’aétion de flanquer, v.a@. (For- tif.) en général , c’eft dévouvrir, défendre ou bat- tre le côté d’une place, d’un corps, d’un bataillon, Éc. Flanquer une place, c’eft difjofer un baftion ou un autre ouvrage, de maniere qu'il n’ait aucune partie qui ne puifle être défendue , ou fur laquelle on ne puifle tirer de front ou de côté. On dit, flanquer une muraille avec des tours, On dit auf, ce baftion eft f/znque par le flanc oppoté &c par une demi-lune. Cet ouvrage à corne eft flarzqué par la courtine. Toute fortification quin’a qu’une défenfe de front, eft défettueufe r pour la rendre complete , il eft né- ceffaire qu'une partie f/arque l’autre ; c’eft-pourquoi la courtine eft toüjours la partie la plus forte d’une place, à caufe qu’elle eft flarquée par les flancs qui O 44 F L A font à fes extrémités. Voyez DÉFENSE, Chambers. La défenfe directe eft défeétueufe, parce que l’é- païfleur du parapet ne permet pas au foldat de dé- couvrir le pié du mur qu'il défend, c’eft-à-dire le côté extérieur du rempart ; ainfilarriveroit, fi une place n’avoit d'autre défenfe que la direéte, que l’en- nermi ayant gagné le pié du revêtement , ne feroit vi d'aucune partie de la fortification , & qu'il pour- roit alors travailler tranquillement à la ruiner, {oit par les mines ou autrement. Tous les obftacles qu’on pourroit faire, fe réduiroient À faire tomber {ur l’en- nemi des bombes, des grenades, &c, mais il lui fe- roit aifé d’en éviter l’effet, en appuyant oblique- ment de longs & forts madriers fur le mur du revête- ment, lefquels écarteroient les bombes & les grena- des ; ils donneroïent une efpece de couvert deffous, où l'ennemi feroir en füreté : d’où l’on voit qu’une place de guerre doit avoir néceffairement fon en- ceinte difpofée de maniere quil y ait des parties plus avancées les unes que les autres, pour qu’elles puif- fent fe flanquer mutuellement. Ces parties font les baftions, Foyez BASTION. (Q) FLASQUES , f. f. pl. ez termes d’Artillerie, font deux groffes pieces de bois aflemblées par des entre- toifes qui compofent l’affüt d’une piece de canon ou d'un mortier, & entre lefquelles la piece ou le mor- tier font placés , quand on veut s’en fervir en cam- pagne ou dans une place. Voyez AFFUT. (Q) FLASQUE, branche flafque, (Manése.) nous nom- mons ainfi celles dont le touret fe trouve à plus ou moins de diftance en-arriere de la ligne droite, qui defcendroit de œil du banquet par lequel le mors eft fufpendu , & toucheroit à la partie du canon qui appuye fur les barres. Voyez Mons. (e) FLASQUE, (Blafon.) c’eft une piece de Blafon, que l’on appelle plus proprement fanque. Voy. FLAN- QUE. FLATER, voyez des articles FLATERIE @ FLA- TEUR. FLATER, v.aét, On dit ez Peinture qu’un portrait eft Jfaré , lorique le peintre l’a rendu plus beau que la perfonne d’après laquelle il eft fait. Cette façon d’embeilirefttoüjours aux dépens de la reflemblance. Il eft cependant des peintres qui favent choïfir les cô- tés avantageux d’une tête, c’eft-à-dire la tourner ë& l’éclairer de telle façon, que les défauts fe trou- vant dans les endroits les moins apparens, devien- nent plus fupportables. Portrait ffasé, Ce peintre ate {es portraits. (AR) FLATERIE, £. f. (Morale.) c’eft une profufion de louanges, faufles on exagérées, qu’infpire à celui qui les donne , fon intérêt perfonnel. Elle eft plus ou moins coupable, baffle, puérile, felon fes motifs, fon objet , & les circonftances. Elle a pris naïffance parmi des hommes , dont les uns avoient befoin de tromper , &c les autres d’être trompés. C’eft à la cour que lintérêt prodigue les louanges les plus outrées aux difpenfateurs fans mérite des emplois & des gra- ces: on cherche à leur plaire, en les rafürant fur des foibleffes dont on feroit defolé de les guérir; plus ilsenont, plus on les loue, parce qu’on les refpeîe moins , & qu'on leur connoît plus le befoin d’être loïés. On renonce pour eux à fes propres fentimens, aux privilèges de fon rang, à fa volonté, à fes mœurs. Cette complaifance fans bornes eft une Yfarerie d’aétion, plus féduifante que les éloges les mieux apprêtés. Il y a une autre j/arerie plus fine encore &t fouvent employée par des hommes fans force de caractere, qui ont des ames viles & des vües ambi- tieufes. C’eft la faterie d'imitation, qui répand dans une cour les vices & les travers de deux ou trois per- fonnes, & les vices x les travers d’une cour fur FLA toute une nation. Les fuccès de ces différens penres de ffaterie en ont fait un art qu’on cultive fous le nom d'art de plaire : il a fes difficultés, tout le monde n’eft pas propre à les vaincre ; & on n’y réufit guere, quand on eft né pour fervir fon prince & fa patrie. Il s’en faut beaucoup que la farerie ait toüjours des motifs de fortune , les hommes en place pour objet, & la cour pour afyle. Dans les pays où l’a- mour des diftinétions, fous Le nom d’hozneur, remue du plus au moins tous les hommes (voy. HONNEUR) , les louanges font l'aliment de l’amour-propre dans tous les ordres & dans tous les états: on y vit de l'opinion des autres ; tout le monde y eft inquiet de fa place dans leftime des hommes, & cette inquié- tude augmente en proportion du peu de mérite & de l'excès de la vanité. On y pourfuit la loüange avec fureur, on l’y follicite ayec baffefle ; elle y eft don- née fans ménagement , & recûe fans pudeur. Il y auroit quelquefois de la barbarie à la refufer à dés hommes fi remplis de leurs prétentions, & fi tour- mentés de la crainte d’être ridicules, ou de celle d’ê- tre ignorés. Is veulent paroitre, c’eft le defir de tous ; ils veu- leut couvrir d’un voile brillant leurs défauts ou leur nullité : les loïanges leur donnent une apparence paflagere dont ils fe contentent ; & la conftance dans le travail, l’étude de leurs devoirs, l'humanité, ne leur donneroient que du mérite & de la vertu. La galanterie, ce refte des mœurs de ancienne chevalerie, que maintiennent le goût du plaifir & la forme du gouvernement, rend la farerie indifpenfa- ble vis-à-vis les femmes ; une adulation continuelle êc de feintes foûmifons , leur font oublier leur foi- bleffe , leur dépendance & leurs devoirs : elles leur deviennent néceflaires ; ce n’eft que par la flarerie que nous les rendons contentes de nous & d’elles- mêmes , &t que nous obtenons leur appui & leurs fuffrages, Voyez GALANTERIE. De cette multitude de befoins de vanité dans une nation legere ; de la néceflité de plaire par les loïan- ges, pat la complaifance, par limitation ; de la pe- titefle des uns, de la lâcheté des autres, de la fau feté de tous , réfulte une farerie générale, infuppor- table au bon fens. Elle apprend à mettre une foule de différences dangereufes entre l'exercice des ver- tus & le favoir-vivre ; elle eft un commerce puéril, dans lequel on rend fidelement mauvaife foi pour mauvaife foi, & où tout eft bon, hors la vérité, Elle a fa langue , fes ufages, fes devoirs même, dont on ne peut s'écarter fans danger, & auxquels on ne peut fe foûmettre fans foiblefle. Des philofophes qui par leur mérite étoient faits pour corriger, ou du moins pour modérer les travers de leurs concitoyens, ont trop fouvent encouragé la flaterie par leur exemple ; & ce n’eft que dans ce fiecle que les premiers des hommes par leurs lumie- res ne s’aviliflent plus par l’adulation. FLATEUR, {. m. ( Morale.) Le flareur eft un hom- me qui tient, felon Platon, un commerce de plaifir fans honneur; & felon Théophrafte, un commerce honteux qui n’eft utile qu’à lui: j'ajoûte qu’il fait un outrage à la vérité; & pour dire encore plus, qu'il fe rend coupable d’une lâche & baffe trahifon. L'homme vrai qui tient Le milieu entre ’adulateur & le mifantrope, eft l’ami qui n’écoute avec nous que les principes de la droiture, la liberté du fenti- ment & du langage. Je fai trop que le ffareur, pour mieux féduire, emprunte le nom d’erz, en imite la voix, en ufurpe les fonétions, & lercontrefait avec tant d'art, que vous le prendriez pour tel: mais Ôtez le mafque dont il couvre fon vifage , vous verrez que ce n’eft qu'un courtifan fardé , fans pudeur, fans attachement, & qui ne cherche en vous que fon pro- pre intérêt, | | Le Le fateur peut employer la féduétion des paroles, des athons, des écrits, des geftes, & quelquefois tous ces moyens réunis : auffi Platon diftingue-t-il ces qua- tre efpeces de flateurs. Cependant Plutarque prétend que Cléopatre trouvalefecret de flater Marc-Antoine de plufieurs autres manieres, inconnues aux philofo- phes de la Grece : maïs f l’on y prend garde, toutes les diverfes manieres de flater Antoine dont ufoit cette reine d'Egypte, & qui font expofées par l’au- teur des vies des hommes illufires, tombent dans quelqu’une des quatre efpeces établies par Platon. Le ffareur qui ufe de la féduétion n’eft pas rare, & elle porte l’homme à louer les autres, & fur-tout les miniftres & les princes qui gouvernent , du bien qu’= ils ne font pas. Celui qui flate par des a@ions, va juiqu'à imiter Le mal qu’ils font ; tandis que l'écrivain proflitue fa plume à altérer les faits, & à les préfen- ter fous de fauffes couleurs. L’éloquence fertile en traits de ce genre, femble confacrée à flater les paf- lions de ceux qui commandent, à pallier leurs fau- tes, leurs vices, & leurs crimes mêmes, Enfin les Orateurs chrétiens font entrés quelquefois en fociété avec les panégyriftes profanes, & ont porté la fauf: leté de lélogé jufque dans le fanQtuaire de vérité. Après cela il n’eft pas étonnant que la flaterie con- jointement avec la fatyre,'ait empoifonné les faftes de lhiftoire. [Left vrai que la fatyre impofe plus que la flaterie aux fiecles fuivans ; mais les hiftoriens fla- teurs en tirent parti pour relever Le mérite de leurs héros; & pour déguifer avec plus d’adrefle leurs _honteufes adulations, ils répandent gratuitement fur la mémoire des morts, tout le venin d’une lâche mé- difance, parce qu'ils n’ont rien à craindre ni à efpé- rer de ceux qui {ont dans Le tombeau. S1 les hommes refléchifloient fur l’indignité du principe qui produit la flaterie, & fur la bafleffe du Fateur , celurci deviendroit auffi méprifable qu’il le mérite, Son caractere eft de renoncer à la vérité fans {crupule, de ne louer que les perfonnesdont il attend quelque bienfait, de leur vendre fes loïanges & de ne fonger qu’à fes avantages. Tous flateur vic aux dé. pens de celui qui l’écoute ; 11 n’a point de caradere particulier ; 1l fe métamorphofe en tout ce que fon intérêt demande qu'il foit ; férieux avec ceux qui le font, gai avec les perfonnes enjouées, mais jamais malheureux avec ceux qui le deviennent; il ne s’ar- rête pas à un vain titre ; il adore plus dévotement celui qui a le pouvoir fans le titre, que celui qui a le titre fans le pouvoir ; également bas & lâche, il fuit toûjours la fortune, & change toûjours avec elle ; il n’a point de honte de donner à Vatinius les: mêmes éloges qu'il accordoit précédemment à Ca- 10n ; peu embarraffé de garder aucune regle de juftice dans fes jugemens, il loue ou il blâme, fuivant que les hommes font élevés ou abaïflés , dans la faveur ou dans la difgrace. Cependant le monde n’eft rempli que de gens qu'il féduit ; parce quil n’y a point de maladie de l’efprit plus agréable &rplus étendue que l'amour de la flate- tie. La vapeur du fommeil ne coule pas plus douce- ment dans les yeux appefantis & dans les membres fatigués des corps abattus, que les paroles Jflatenfes s’infinuent pour enchanter nos ames. Quand les hu- meurs du corps font difpofées à recevoir uneinfluen- ce maligne, le mal qui en réfulte y caufe de grands ravages: ainf quand l’efprit a quelque penchant à fucer le fubtil poifon du ffaceur, toute l’économie raifonnable en eft boulverfée, Nous commençons les premiers à nous flater ; & alors la flaterie des au: îres ne fauroit manquer de fuccès, nous fommes toû- jours prêts à l’adopter : de-là vient queles gracesque nous répandons fur le f/areur , nous font repréfen- tées par le faux miroir de notre amour-propre,com- me dûes à cet homme qui fait nous réconcilier agréa- Tome VI, FL A S4$ bleinént avec nous-mêmes. Vaincus paï des infinua- tions fi douces , nous prétons volontiers l'oreille aux artifices qu'on met en ufage pour aveu glér notre rai: ion, & qui triomphent de nos foiblefles. L’erivie de pofféder certaines qualités que nous n’avons pas, Où de paroître plus que nous ne fommes, augmente nor tre affetion pour celui qui nous revêt des caradteres qui nous font étrangers, qui appartiennent à d’au- tres, & qui nous conviennent peut-être auf mal que feroïent leurs habits. Lorfquenotre vanité n’eft pas affez vive pout notis perdre, le fZzseurne manque pas de la réveiller, & de nous attribuer adroitement des vertus dont nous avons befoin, & fi fouvent, que nous croyons enfin les pofléder, En un mot le faseur corrompt fans peine notre jugement, empoifonne nos cœurs, enchante notre efprit, & le rend inhabile à découvrir la vérité. 1 y a plus, les hommes viennent promptement vis-à-vis les uns des autres à la même baflefle ,où une longue domination conduit infenfiblement les peu- ples aflervis ; c’eft pour cela que dans les grands états policés, la fociété civile n'offre guere qu’un commer- ce de fanfleté , où l’on fe prodigue mutuellement des lotanges fans fentiment, & même contre {a propre confcience : favoir vivre dans de tels pays, c’eft fa- voir flater, c’eft favoir feindre, c’eft favoir dégui- fer fes affections, | | Mais le flateur triomphe fur - tout dans les cours des monarques. J’ai entendu quelquefois comparer les flateurs aux voleurs de nuit, dont le premier foin eft d’éteindre les lumieres, 8 la comparaifon m'a paru jufte; car les ffareurs des tois ne manquent ja- mais d’éloigner de leurs perfonnes tons les moyens qui pourroient les éclairer : d’ailleurs puifqu'il y aun fi petit nombre de gens qui ofent repréfenter la véri- té à leurs fupérieuts, comment celui-là la connoîtra- t-1l, qui n’a point de fupérieur au monde ? Pour per qu'on s’appercoive qu'il ait un goût dominant, celui de la guerre par exemple, il n’y a perfonne autour de lui qui ne travaille à fortifier cette rage funefte, & qui n'aime mieux trahir le bien public, que de rif- quer de déplaire au monarque ambitieux. Carnéa- des difoit que les enfans des princes n’apprennent de droit fil (c’eft une exprefion de Montagne) qu’à ma- nier des chevaux; parce qu’en tout autre exercice chacun fléchit fous eux, & leur donne gain de cau- fe : mais un cheval qui n’eft ni courtifan ni flateur , jette le fils du roi par terre, comme il feroit le fils d’un palfrenier. Voyez COURTISAN. Antiochus , au rapport de Tite-Live (4y. XLIX, ch. Ixjv. & Ixv.), s'étant égaré dans les bois, pañla la nuit chez un payfan; & lui ayant demandé ce qu'on difoit du roi, le payfan lui répondit « que c’é- » toit un bon prince, mais qu'il fe foit trop à fes fa- » vonis, & que la paffion de la chafle lui faifoit fou- » vent négliger des chofes très-eflentielles », Le len- demain toutes les perfonnes de la fuite d’Antiochus le retrouverent, & l’aborderent avec les témoigna- ges du zele le plus vif, & du refpe& le plus empref- 1. Alors reprenant fa pourpre & fon diadème : « de- » puis la premiere fois, leur dit-il, que je vous ai » quittés, on ne m'a parlé qu'hier fincerement fur # moi-même ». On croira bien qu’il le fentoit ; &. peut-être n’y a-t-il eu qu’un Sully dans le monde qui ait ofé dire à fon maître la vérité , lorfqu’il impor- toit à Henri IV. de la connoître. La flaterie fe trouvera toüjouts venir des infé- | - rieurs aux fupérieurs : ce n'eft qu'avec l'égalité, & avec la liberté fource de l'égalité, qu’elle ne peut fubfifter, La dépendance l’a fait naître: les captifs Pemployent pour leurs geoliers., comme les fujets pour leurs fouverains, dit une femme d’efprit dans les mémoires de fa vie fi bien écrits par elle-même, PPppp 846 F L À êt tout récemment mis au jour, Mémoires de madame de Staal, Paris, 1755 , 3 vol. in-8°, Les efclaves, dit Démofthene, les lâches fareurs, voilà ceux qui ont vendu à Philippe notre liberté & qui la vendent encore maintenant à Alexandre; ce font eux qui ont détruit parmi nous cette regle, où les anciens Grecs faifoient confifter toute leur félicité, de ne point connoître de fupérieur , de ne fouffrir point de maître. Orar. de coron4. Auf l’a- dulation prend-elle fon accroiflement & fes forces, à proportion de la dépendance & de la fervitude : adulationt fœædum crimen fervitutis inef. Les Samiens ordonnerent par un-decret public, que les fêtes qu”- ils célébroient en l’honneur de Junon, & qui por- toient le nom de cette déefle, feroient appellées les fêtes de Lyfandre. Adrien ayant perdu fon mignon Antinous , defira qu’on lui bâtîit des temples & des autels ; ce qui fut exécuté avec tout le dévouement qu'on pouvoit attendre d’une nation accoûtumée depuis long-tems aux plus honteufes baffeffes. Enfin la flaterie monte à fon dernier période fous les tyrans, quand la liberté eft perdue ; & avec la erte de la liberté, celle de la honte & de l’honneur. At peint énergiquement les malheurs de fa pa- trie, lorfque parlant de Séjan , qui dans fon admini- ftration avoit été la principale idole des Romains, 1l met ces paroles dans la bouche de Térentius : « Nous avons adoré les efclaves qu'il avoit affran- » chis; nous avons vendu nos éloges à fes valets, » & nous avons regardé comme un honneur de par- » ler à fes concierges ». J On fait le trait de flaterie impudente, & fi l’on veut ingémeufe, de Vitellius à Caligula.Ce Vitellius étoit un de ces courtifans, guibus principum honefta atque ir honefla laudare mos eff, quilouent également toutes les aétions de leurs princes, bonnes ou mau- vaies. Caligula ayant mis dans fa tête d’être adoré comme un dieu, quoiqu'il ne füt qu’un monftre, penfa qu'il lui étoit permis de débaucher les femmes du premier rang, comme il avoit fait fes propres fœurs. « Parlez Vitellius , lui dit-il un jour, ne m’a- » vez-vous pas vü embrafler Diane ? C’eft un my »tere , répondit le gouverneur de Syrie; il n’y a » qu'un dieu tel que votre majefté qui puifle le re- » vêler ». Les flareurs infames allerent encore plus loïn fous le regne de Néron, que les Vitellius fous celui de Calgula : is devinrent alors des calomniateurs aff, dus , cruels, & fanguinaires. Les crimes dont ils chargerent le vertueux Thraféa Pétus, étoit de n’a- voir point applaudi Néron, ni encouragé les autres à lui applaudir ; de n'avoir pas reconnu Poppée pour une déeffe ; de n'avoir jamais voulu condamner à mort les auteurs de quelques vers fatyriques contre l’empereur, non qu'il approuvât de tels gens & leurs libelles, ajoûterent fes délateurs, mais parce quil appuyoit fon avis de ce qu’il lui fembloit qu’on ne pouvoit pas fans une efpece de cruauté, punir capi- talement une faute contre laquelle les lois avoient prononcé des châtimens plus modérés, Si Néron et régné dans le goût de Trajan, il auroit méprifé les hibelles ; comme les bons princes ne foupçonnent point de fauffeté les juftes éloges qu'ils méritent, ils n’appréhendent pas la fatyre & la calomnie. « Quand » je parle de votre humanité, de votre générofité, » de votre clémence, & de votre vigilance, difoit » Pline à Trajan, je ne crains point que votre majefté » s’imagine que Je la taxe de nourrir des vices oppo- » fés à ces fortes de vertus ». Il me femble néanmoins, malgré tant de ffareurs qui s’étudient à corrompre les rois en tout tems & en tous lieux, que ceux que la providence a éle- vés au faîte du gouvernement, pourroïient fe garan- tir du poifon d’une adulation bañle & intéreflée, en F L À faifant quelques-unes des réflexions que je vais pren- dre la liberté de leur propofer. 1°, Qu'ils daignent confidérer férieufement qu’il n'y à jamais eu un feul prince dans le monde qui n'ait été flaté , Jamais peut -être un feul qui n’ait été gâté par la flaterie, « L’honneur que nous recevons » de ceux qui nous craignent (peut fe dire un mo- » natque à lui-même) ce n’eft pas honneur ; ces ref- » peËts fe donnent à la royauté , non à moi: quel » état puis-je faire de l’humble parler & courtoife ré- » vérencede celui qui me les doit,và qu’il n’a pas en » fon pouvoir de me les refufer? . . , Nul me cher- » che prefque pour la feule amitié qui foit entre lui » c moi; carilne fe fauroit guere coudre d'amitié où » 1l y a fipeu de correfpondance. Ma hauteur m’a mis » hors de proportion; ils me fuivent par contenance, » ou plütôt que moi, ma fortune, pour en accroître » la leur: tout ce qu’ils me difent & font, ce n’eftque » fard, leur liberté étant bridée par la grande puif- » fance que j'ai fur eux. Je ne vois donc rien autour » de moi que couvert & mafqué, . . . Le bonroi, le » méchant, celui qu'on hait, celui qu’on aime, au- » tant en a l’un que l’autre. De mêmes apparences, » de mêmes cérémonies, étoit fervi mon prédécef- » feur , & le fera mon fuccefleur. Monsagne. 29. Seconde confidération contre la flaterie, queje tirerai de l’auteur immortel de Télémaque, /. X1F. C’eft aux précepteurs des rois qu'il appartient de leur parler dignement &c éloquemment. Ne voyez- vous pas, dit le fage Mentor à Idomenée,que les prin- ces gâtés par l’adulation, trouvent fec & auftere tout ce qui eft libre & ingénu ? Ils vont même jufqu'à s’i- maginer qu'on manque de zele , 8 qu’on n’aime pas leur autorité, dès qu’on n’a point l’ame fervile, & qu'on ne les flate pas dans l’ufage le plus injufte de leur puiffance : tonte parole libre leur paroïît hautai- ne ; 1ls deviennent fi délicats, que tout ce qui n’eft point bafleffe les blefle & les irrite, Cependant l’aut- térité de Philoclès ne vaut-elle pas mieux que la fla- terie pernicieufe des autres miniftres? Où trouve- rez-vous un homme fans défaut ? & ce défaut de vous repréfenter trop hardiment la vérité, n’eft-il pas ce- lui que vous devez le moins craindre ? que dis-je à n’eft-ce pas un défaut néceflaire pour corriger les vôtres, & pour vaincre le dégoût de la vérité où la flaterie fait toïjours tomber ? Il vous faut quelqu'un qui vous aime mieux que vous ne favez vous ai- mer vous-même, qui vous parle vrai, & qui force. tous vos retranchemens. Souvenez-vous qu’un prin- ce eft trop heureux, quand il naît un feul homme fous fon règne avec cette générofité qui eft le plus précieux thréfor de l’empire, & que la plus gran- de punition qu’il doit craindre des dieux, eft de per- dre un tel ami... .. Tfocrate donnoit de pareils confeils à Nicoclès. Ne prenez pas pour vos favoris des flateurs, & choïfif- {ez pour vos miniftres ceux qui font les plus capables de vous aider à bien conduire l’état : comptez fur la fidélité, non de ceux qui louent tout ce que vous di- tes où ce que vous faites, mais de ceux qui vous re- prennent lorfque vous commettez quelque faute: permettez aux perfonnes fages & prudentes de vous parler avec hardiefle, afin que quand vous ferez dans quelque embarras, vous trouviez des gens qui tra- Vaillent à vous en tirer; ainfi vous faurez bien-tôt difcerner les ffareurs artificieux, d’avec ceux qui vous fervent avec affeétion. 3°, Pline remarque judicieufement, que les empe- reurs les plus hais ont toûjours été Les plus flatés; par ce que, ditAil, la diffimulation eft plus ingénieufe & plus artificieufe que la fincérité. C’eft une troifieme confidération que les princes ne fauroïent trop faire, 4°. Is fe préferveront encore infiniment des mau- vais effets de l’adulation , en ne fe livrant jamais au plaifir de fe voir loüer, qu'après s'être aflürés què leursaétions font dignes d'éloges, & s'être convain- eus qu’ils poffedent les vertus qu’on leur accorde. L'empereur Julien difoit que pour compter, fur les loüanges qu’on donne aux rois ,1l fandroit que ceux qui les donnent fuflent.enérat de pouvoir blâmer im- punémént. LEE 22 « 11 40 5°. Enfin les princes feront fort au-deflus du pois fon della flaterie; lorfquecontens dereconnoître par des bienfaits les louanges fenfées dontils tächent de fe rendre dignes, ils auront encore un!plus grand empreflement, pour profite des:avis qu’on leur don: néra, autorier:la liberté-qu’on prendra de leurlen donner ; en mefuret le prix &c la récompen{e,par lé: quitédece à quoi onles engägera; &cparlutihité que leurs fujets'en retireront. Leprince qui agira-dercette maniere, "eft fans doute véritablement grand,très- grand, admirable; ou pour me fervir de l’exprefion de Montagne ,wileft cingeents brafles au-deflus des » royaumes ; 1l eft lui-même à foi, fon.empire »., 4 Side hafard fait jamais tomher.ce Diétionnaire en- tre les:mains:de quelque roi, ls deroi, ifluderoi, &c que leur patience s’étende jufqu'à lire cet article ,je les prie d’agréer le zele-avec.lequel jofe chercher à les préferver du poifon-de la flaterie, & prendre en même tems leurs intérêts contre des monftres qui les, trahiflent, qui les perdent,;quiles empêchent de faire le bonheur de leurs peuples, & d’être 1ci-bas les ima- ges de Dieu en lumieres & en droitute; & pour ce qui regarde les auteurs de tant de maux, Lisu Puiffe le juffe ciel dignement les payer , Æ puiffe leur exemple à jamais effrayer Ceux qui les imitant par de läches adrefles rs Des princes malheureux nourriffent les foibleffes ; Les ponffent au penchant où leur cœur eff enclin , Et leur ofenr du crime applanir le chemin ! Déteflables flateurs , préfent le plus funefte “Que puiffe faire aux rois La colere célefte. Racine, dans Phedre; Article de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FLATIR , v.aét. serme d’ancien mornoyage, c’étoit battre un quarreau fur l’enclume ou tas , avec le f/4- toir ou gros marteau , pour lui donner l’épaiffeur que l’on vouloit. | Dans la fabrication des efpeces au marteau, e’é- toit ce que l’on appelloit /4 cinquieme façon, Le quar- reau ayant été f/ari, fe nommoit flanc. : | FLATOIR , f. m. (4 /a Monnore.) marteau pefant fept à huit livres, en façon de corne de bœuf, fer- vant pour broyer ou brifer par la face circulaire & plane , & par l’autre extrémité pointu & fin pour percer. | 34 Comme le fatoir eft un marteau qui prend diffé: rentes figures felon les différens ufages, ce feroit faire un article de tous les différens marteaux, que le fuivre dans tous fes ufages. FLATRER , v. a@. (Econ. ruftia.) c’eft faire rou- gir un fer en forme de clé plate, & l’appliquer au milieu du front d’un chien qui eft mordu d’un chien enragé, pour empêcher qu'il ne le devienne. FLATRER : on dit, ez termes de Chafe, le lievre fe . fiâtre quelquefois lorfqu'il eft pourfuivi. FLATRURE, f. £. (Venerie.) c’eft le lieu où le lie- vre & le loup s’arrêtent & fe mettent fur le ventre, lorfqu’ils font chaflés des chiens courans, FLATUOSITÉ, f f. (Medec.) terme générique employé par les Medecins, pour défigner l’état ma- ladif dans lequel il fe fait une génération contre na- ture, de vents qu’on rend par haut, par bas, ou qui reftentfoit dans l’eftomac, foit dans les inteftins, & y caufent des borborygmes, des tenfions, des an- xiètés , & autres fymptomes douloureux, Foyez BORBORYGMES, ROT, VENTS, 6e . Tome VI, - E LA 84 La matiere propre des. f£rruofités, éftun-aïr élaftis que qui fe trouve fréquemment dans le ventricule ourlesinteftins,, & quelquefois dans d’autrés vifce… res; mais alors cefont des cas très-rares. Lacanfe:maz tenielle des faruo/irés eft une matiere élaitiqueque la Chaleur ;-l’efervefcence owla fermentation dilate & qui ef retenue on -pouflée hors ‘dn-corps avec quelque bruit, lorfque les obitacles quis’oppofoient äi fa fortie, viennent à cefler, Mo L’ainiles fels de différente nature, les fruits; les humeurs putrefcentes , les végétaux fermentans j fourniflent aux flaruofirés une matiere dont l’impé= tuofité &Podéur varient fuivant fa qualité ; cepena dant toutes ces :chofes fortent fans aucun effort. quand elles trouvent les: paflagés ouverts: d’où lo comprendfans peine que le fphinéter de l’éfophage-s, l’éfophage, les deux orifices de l’eflomac 8cles in= teftins, concourent enfemble ence qu'ils fecontrac tent fpafmodiquement , & fe relâchent enfuite: mais fla contraélion {pafmodique eft forte & dure long- temsalors la matiere. élaftique qui fe raréfe-par la, chalèur;parde mouvément.& par faproprevertusves nant à.être reflerrée dansune cavité que la convul= fion de fes fibres retrécit, elle diftend les membranes quila gênent, 8. comprime les lieux voifins: de-là: naiflent des anxiètés &c des douleurs très-vives ; qué ceflent à la fortié des vents. | see Doitrine des flatuofirés, Mais Ipour {e: formet une: idée plus-exaéte. dés faruofirés, nous commencerons par établir quelques principes qui peuvent nous y: conduires. fon à j 1°. Les hommes bien portans confument une gran- de quantité d’air élaftique , ou l’uniffent à leurs hu= meurs ;:0f Pair qu'on avale.avec les alimens, & qu£ n’eft pas confumé faute d’aétion, engendre un now! vel'amas d'air. | 2°. Les alimens qu’on prend, & qui fermentent. aifément , fourniffent en fermentant une grande quantité d’air dans les premieres voies, s'ils ne font pas bien broyés par l’aétion du ventricule &.des in teftins, 3°. La même chofe arrive dés alimens putrefcens;/ indépendamment qu'ils produifent cet effet en cir= culant avec nos humeurs. 1: | 4°. Le monvement vital, qui dans l’état de fanté confume beaucoup d'air, étant une fois dérangé, {é- pare lair de nos humeurs, & produit dans le corps unnouvel airélaftique, comme il paroît par quelques poifons. ICT °, Le phénomene principal de l’air caché eft le fon, lebrut, lesgrouillemens qu’on entend rarement dans le bas-ventre, quand le mouvement périftalti- que des inteftins eft uniforme, & que les pañlages {ont bien libres. j 6°. L’air retenu dans un endroit fermé ; mais agi té fortement par la partie qui lenvironne, caufe en tirallant lesfibres, une douleur confidérable de ten-. fion. Si pour lors 1l fe préfente quelque partune ou- verture, air ainfi comprimé fort d'ordinaire avec bruit, & le malade eft foulagé. Si la caufe qu pro- duit l’air ceffe , le malade eft guéri; mais cette cau- fe perfifte , il eft tourmenté de flaruofités {ans foulas gement. 7°. Quand Pair comprimé fort chargé d’odeurs, : acides, nidoreufes, putrides, fétides , il indique le caraétere des vapeurs atténuées d’alimens ou d’hu- meurs qui {e font mêlées à cet air dans le corps hu- main. L'air qui fort modérément, prouve que. Pac-= tion eft encore bonne & entiere dans les parties qui le contenoient. Celui qui fort avec beaucoup de violence après de grandes douleurs, défigne quel- qu'efpece de convulfion dans la partie qui le renfer- moit, Celui qui fort fans bruit, mais avec tüne gran- de féridité, indique la foiblefle de la partie, ou la PPpppi 348 F L À pourriture prédominante des humeurs ‘qui sy font mêlées: | ls 189, L'air difparoït fansètrerendu, lorfquelemou- vement vital fort & replé,, unit cet airänoshumeurs; ce qui marque un meilleur état de fanté que sil avoit été pouflé au-dehors. par les pañlages “qui lui font ouverts. Paflons préfentement-aux fignes des atuofetés., Signes des flatuofirés. Leurs fighes les plus ordinai- ses fontrles grouillemens des inteftins avec bruit, & à la place deices grouillemens, des diftenfions avec conftriétion du bas-ventre. De la continuation de ce fymptome, naïflent des douleurs qui font on fixes dans le même lieu, ouquichangent deplace, 8 qui ceffent'enfuite par l'éruption des: flaruofiiés, Quand une:conftpation rebelle accompagne ce mal, 1l le rendbeaucoup plus violent, &pourlors l’oppreffion de Peftomac avec la difficulté de refpirer, s’y joi- gnent d'ordinaire: QE | - Perforines fujettes à ce mal. Les flatuofités attaquent principalement les gens phlegmatiques ; dontles-vif- ceres font affoiblis, &r fufceptibles d’expanfbiité, Les gens fanguins, cholériques & mélancholiques:y font auf fujets , ou les éprouvent fouvent après des maladies chroniques. En‘général les perfonnes déli- cates ÿ font plus expofées que les gens robuftes, & par conféquent Les femmes plus que les hommes, fur- tout dans le tems de leurs regles. “Caufes. Les flatuofités font quelquefois occafon- nées par une fimple langueur ou affoibliffement du ton de l’effomac, des inteftins, auquel cas elles fe terminent par hautôu par bas fans accident. D’autres fois elles tirent leur origine d’une matiere vifqueufe &z tenace, ou d’une matiere acide piquante, qui jette le trouble dans les boyaux ,.& alorsle patient fouffre des conftritions {pafmodiques d’entrailles | fuccé- dées par des relâchemens inquiétans. Ce mal proce- de quelquefois de l’engorgement de la veine-porte, & des rameaux de cette veine, qui communiquent à l’eftomac, à la rate , au pancréas, aux inteftins, &c. Les alimens putrefcens , ceux qui font d’un fucépais & glutineux, le poiffon de mer féché, les graifles animales, toutes les boiflons nouvelles qui font fuf- ceptibles de fermentation dans l’eftomac,, le miel pris en quantité, &c. font une fource féconde de ffaruofi- tés. En outre le tempérament du patient y contribue beaucoup, fur-tout dans la fuppreffion de la tranf- piration infenfible, Enfin les f/aruofirés procedent aufli de la fympathie d’autres parties. * Prognoflcs. Les flarnofités qui ont dégénéré en habitude, font fouvent accompagnées de coliques, de cardialgies, d’anxiétés. La fuppreflion forcée de ces mêmes flatulences, excite dans les perfonnes plé- thoriques des fpafmes, des tumeurs, des duretés du bas=ventre, latympanite. Leur décharge libre dège- ere naturellement en habitude. Les faruofirés lentes caufent peu de mal au malade. Les flzruofirés impé- tueufes produiront des defordres cruels, s’il s’y joint d’autres caufes accidentelles qui les irritent. Cure. La méthode curative générale veut 1°. qu’on diflipe la matiere des fflaruofirés, par des boïflons chaudes un peu aromatiques, propres à appaifer la fermentation, l’'acrimonie ou la putréfaétion : 2°. par des anfifpafmodiques qui adouciffent l’acreté, & mo- derent le cours tumultueux des efprits : 3°: par des clyfteres, des fomentations, des épithemes chauds, añodyns, & un peu aromatiques ; comme aufñli par dés ventoufes appliquées au bas-venire fans {carif- cation: Mais pour entrer dans quelques détails plus parti- culiers, nous dirons que dans les ffacuofités fimples & directes, on doit tenirle ventredoucementouvert, afin d'éviter la conftipation. Pour cereffet, on ufera de legers eccoprotiques qui ne feront pas flatueux ; &z dans les jours intermédiaires, oh employera les fels digeftifs propres à atténuer la matierewifqueufe adhérente aux entrailles: On:yjoindra dunitre un peude cinnabré,réemedesquivalentheancoupmrieux que les carminatifs chauds qu’on donne d'ordinaire, Enfuite on renforcera leiton des parties par! des extraits amers & aromatiques, l’efprit-de-nitre duls cifié, &les fels volatilsurmeux aromatifés. Enfin on. apphquera à l’extérieur.des emplâtres-écbaures ftoi machiques. On refleriera infenfblement le ventre par un bandage, con renforcera le corps:par l’exer: cice modéré & continué 1, arr sig: Lesÿlaruoftés qui proviennent du mouvement def ordonné des efprits dans les'perfonnesmmobiles, at: taquéesd’hyftérifme, d’hypochondnie, & autres mas ladies nerveufes, ne demandent point d’évacuans, parce.qu'elles n’ont point de matiere à évacuer Aïinft le mal doit être attaqué dans{onprincipe , 8 ne peut cefler que par desanodymsantifpafmodiques, &/par la guérifon de la caufe premiere. 224 UR - Tous les alimens quiparleur abondance furpaflenr lés forces de la digeftion, ou qui par léuriténacité ne peuvent!êrre triturés!, :fubiflent une dépénération fpontanée quiproduitdes ffarzofités infetéesd’odeurs &de faveurs différentes. De telles crudités veulent êtreichaflées par delegers purgatifs aromatifés. IE faut enfuite en prévenir la fource par des, ftomachi- ques corroborans où réfolutifs. Les farmo/irés qui naiflent dé la pourriture, demandent abfolnment l'évacuation de Phumeur corrompue, fa correttionz la dépuration de la partie, & les antifeptiques pour, en empêcher les progres. L Les flatuofités provenantes de la fympathie d’une autre partie attaquée qui excite ce trouble, comme par exemple, de la douleur des lombes, de la né- phrétique, de la fuppreflion des regles, de la fievre, de la goutte, des paflions de l'ame, 6x. requierent pour remedes les feuls anodyns, tandis qu’on tâchera de guérir les maladies qui en font la caufe, La méthode générale de traiter les ffarofités par les feuls aromatiques chauds, eft communément plus propre à faire du mal que du bien. La méthodé des vomitifs tend plus à augmenter la caufedes ffaruofirés qu’à les guérir ; parce qu'ils renverfent le mouvement périftaltique des inteftins, & produifent fouvent Poppreffion, le vertige, & autres fâcheux fympto- mes. Quoique les expériences démontrent qu'ilfe forme beaucoup d’air dans l’efervefcence, ce cas eftnéan- moins aflez rare parmiles hommes, parce qu’ils man: quent communément des humeurs qui par leur mê= lange viennent à exciter une effervefcence confidé- rable; & fi ce cas arrive lorfque, par exemple, les acides font fuivis d’alkalis, alors les ffaruofités cef- fent aflez promptement. Comme les vents fe portent promptement d’un lieu à l’autre, & qu'ils produifent des douleurs vas: | gues qui courent en différentes parties du corps, om a crû que toute douleur changeante dans Le corps humain naïfloit de flatulences, & on les à nommées par cette taifon douleurs flatulences. Mais puifqu’on ne découvre aucun air élaftique dans les parties char- nues, nerveufes & membraneufes; que ces parties ne fourmilent aucun pañlage à l’air, & que les dou- leurs dont il s’agit ne {ont point appaifées par la for: tie des vents , 1l paroït que l’air n’en eftipoint la cau= fe. Ilfaut donc pour guérir ce mal, corriger les vices du fuc nerveux, tandis qu’en même tems on rétablira la tranfpiration qu fe trouve fouvent arrêtée. Auteurs: Les Praticiens feront bien d'étudier fur les flatuofirés, les commentateurs qui ont illuftré le hvre que nous ayons d'Hippocrate, en ce genre, & particulierement Fienus de farious, morbilque flatu= lentis, Antuerp. 1582,1n-8°. prima edit, Amfterdam é = #643,in-12°, Voyez aufi, parmi les modernes, M. Combalufer, Preumato-Pathologia, feu tracfarus de flatulentis humant corporis affttibus, Paris 1747,in-8°, Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FLAVIGNY, (Géog.) petite ville de France en Bourgogne dans l'Auxois, avec une abbaye de Bé- nédiétins fondée par Widrard, du téms de Charles Martel. Elle eftfurun monticule , À ÿ lieues S. de Sé- Mur,12 N. O.de Dijon, Long, 224, 12/. 511, Lar, 474, 0147 CDS," *ELÉAU, ( m.(Gramm. 6 Econ. ruflig.) ce terme pris au fimple, eftun inffrument dont on fe fert pour battre le BIÉ ; ce font deux bâtons d’un bois dur, dont l’un qui eft le plus long, fe tient À la main, & l'autre qui ef le plus Court, eft porté fur l'extrémité de la serbe qui en eft frappée avec violence. Ces deux bâtons fontaflemblés, lâchement; bout-à-bout, par une ou deux fortes courroies ; & le plus court eft mobile autour du plus long, Ce terme pris au figuré, fe dit de toutes les gran- des calamités dont il plaît à la providence d’affliger le genre humain, Aiïnf la pefte, la guerre, la fami- ne, les inondations, les mauvais princes, 6, font des fféaux de Dieu. | Fléau au fimple, n’eft jamais que d’une fyllabe; au figuré 1l eft toûjours de deux. FLÉAU, dans une balance, (Méch.) eft la partie à laquelle on fufpend les poids, & qui eft compofée de deux bras. Voyez BALANCE. | FLÉAU, façon angloife, eft-compofé des pieces fuivantes, | “1°. Le corps du f/é4z, une piece de fer d’une for- me ovale , à chaque bout de laquelle il y a un cro- chet & un œil, & un trou dans le milieu, où pañle le pivot, avec un boffage {ur le milieu. 2°. Le crochet où s’accreche les plateaux ou baf- fins, à . 3°. La chafe, efpece d’étrier de fer, dont les deux branches font quarrées, menues & longues, pour laïffer la liberté à l’aiguille, & les deux extré- tés plates & de forme ronde ou ovale, avec deux trous où font deux billes ou pattes d'acier, fur lef- quelles pofe le pivot; à la tête de la chafle eft ün trou par où pañle le touret. Voyez la Planche, du Balancier. 4°. Le touret, crochet qui a une tête ronde & plate deffous , qui pafñle dans le trou du haut de la chafle, & fert à fufpendre le ffézu en l'air. 5°. Le chef du touret, c’eft une S qui s’accroche dans le piton auquel on fufpend les balances. 6°. Le pivot, arbre ou axe qui pañle à-travers le corps du fléau, & porte fur les deux couflinets de la chafle ; 1l eft fitué dans la partie du corps du fléau & les yeux de la chafle, & fait en couteau par-deflous. _ 7°. Le brayé, ou ce qui empêche les deux bran- _Ches de la chaffe de s'éloigner. | 8°. L’aiguille qui fert à mettre le fléau de niveau, & qui eft pofée au milieu au centre du pivot. FLÉAU À DOUBLE CROCHET, façon d’Allema- gne. Voyez la Planche du Balancier. _ 1°. Corps du j£zz, eft une barre de fer à huit pans, avec boffage deflus & deflous au milieu, où - eft percé le trou du pivot, & qui a un trou à chaque bout pour recevoir les axes fur lefquels portent les couffinets des jumelles. 3°. êt 4°. Les deux jumelles 2 C qui tiennent lieu des crochets du fléau à l’angloife, font compofées chacune de deux pieces de fer plat , longs à propor- tion, dela force du fféau : deux entr etoiles , celle du baut portant bouton au milieu; fon nom, fuivant Part, eft dofus de jumelle : celle de deffous qui porte le double crochet tournant, nommé fuivant l’art def Jous de jumelle, a tenons & clavette par les bouts. 5°. Le pivot des jumelles eft un arbre on axe, comme il a été dit, quarré au milieu, où il eft arré- FLE 849 té dans les extrémités du corps du fax, & en cou- teau én-deflus, où il reçoit les couflinets qui font enclavés dans le milieu des jumelles, 6°. Le grand pivot eft l'arbre owaxe qui pañle au mileu du féau ;1l eft quarré dansila partie qui pafle par le mulieu du fZézu, Les deux extrémités de cet ar- bre font'en couteaux par la partie inférieure. dont le tranchant porte {ur les couflinets de la chafle A. _ 7°. Le brayé eff au même ufage que celui du fax à l’angloife.. 4 "7 8°. L’aiguille eftla même que celle du.fféez à l’an- gloife. | po 9°. La chafle eft compofée de deux branches dont les deux extrémités du bas font plates, de figure ronde ou ovale, dans lefquelles {ont enclavées les: deux billes oucoufinets d'acier fur quoi porte le pi- vot du corps du fax ; par le haut eft une entre-toife, nommée fuivant l’art, chef de chaffe , aflemblée dans les deux branches à tenon & clavette; au milieu de ce chef-de-chafle eft un trou pour pañler le touret. 10°. Le touret fondé & arrêté au chef de-chafñle ; avec une forte contre-rivûre. Cette forte de fZau eft pour les grands poids. FLÉAU façon d’Allemagne, à deux boîtes, eft fem- blable en toutes fes pieces à celui de:la premiere fi: gure , à l'exception qu’aux bouts des faux , qui font encrochet, font:des boîtes, comme des chappes de pouhes, & qu'il y a deux pivots pour tenir les cro- chets dans les boîtes , au lieu des deux yeux dans lefquels {ont les crochets du fféau de la premiere fi- gure, Voyez la figure 2. FLÉAU A BROCHE, eft compofé des mêmes pie- ces que le fau de la premiere figure , à l'exception du corps du f/éau. | * FLÉAU, (Serrurerie) eft la fermeture ordinaire d’une grande porte cochere. Il eft compofé de plu- fieurs pieces ; favoir une barre de fer quarrée, lon: gue environ de cinq.piés, en pince par les extrémi- tés, avec un œil percé au milieu , pour paffer le bou- lon qui le tient fur un des battans de la porte. À fx pouces des bouts font deux mains pouffées fur les venteaux de la porte, dans lefquelles il fe ferme » celle qui eft pofée au venteau du guichet, fait venir en-dedans le bout du f/éau ; & celle qui eft à l’autre bout , eft placée par-deflus, de forte que le bout de la main regarde le pavé, dans laquelle Pautre bout | du fan va fe fermer. A l’extrémité du f/éaz on a ou- vert un trou, dans lequel eft un lafferet tournant où eft la tige de l’aubronier, qui s’arrête dans la ferrure qui fert à fermer le fléau, comme il {e voit Planches de la Serrurerie. MM, mains du fféau ; N, boulon du fau ; O; contre-piece qui s’entaille de fon épaif- leur dans le bois du côté du fféau, & à-travers de laquelle pañle le boulon ; P, rondelle du boulon ; R, tige de l’aubronier ;-T,, ferrure à bofle du fZax. FLÉAUX. Les Wüirriers appellent ainfi certains cro: chets fur lefquels ils portent les panneaux de vetre lorfqu'ils vont en ville. s | FLECHE, f. £. Jagitta, (Géomér.) C’eft ainf que quelques auteurs appellent ce que l’on nomme au- trement fus verfe d’un arc. Ce nom lui eft venu de ce qu’elle reffemble à une f£che qui s'appuie fur la corde d’un arc. x étant le finus d’un arc, fon cofin. fera y/1—xx, en prenant 1 pour le finus total ; & la fleche ou finus verfe fera 1 — y/1 —x x. Voyez SINUS. | La fleche d’un arc infiniment perir, eft à Parc com- me l’arc eft au diametre. Voyez COURBURE. Quelquefois on appelle feche, en Géométrie, ce que l’on entend communément par abfüiffe (voyez ABscisse); mais cette dénomination eft peu en | ufage. (0) FLECHE , dans l’Affronomie, eft une conftellation se FLE Voïfine de l'aigle dans l’hémifphere du Nord, Foyez CONSTELLATION. “Les étoiles de cette.conftellation font, dans le ca- talogue de Tycho, ainfi que dans celui de Ptolomée, ‘au nombre de cinq. Dans cehni de Flamitéed , elles font au nombre de ‘vingt-[rois. ; as FLECHE, (Pkyf.) eît un des noms qu’on a donnés à certaines aurores boréales. Voyez AURORE B0- RÉATE. | À FLECHE , (Art mil.) c’eft une arme compofée ‘d’une verge & d’un fer pointu ,‘qui fe jette avec l'arc ou ayec l’arbalete. d .Ily en avoit de diverfesTortes parmi les François, “comme chez les Romains & chez les autres nations. ‘On n’en fera remarquer ici que deux efpeces, qui Ont un nom particulier dans nos hiftoires. La pre- miere eft celle qu’on y appelle guarreau ou garro , en latin qguadrellus, quarellus, quadrilus, quadrum. Ces sfleches S'appelloient guarreaux , parce que le fet en Suivant Raï s la fleur eft la partiè la plus tendre de la plante; partieremarquable par fa couleur, fa for- me, où par l'une & l’autre, & qui adhere commu- nément aux rudimens du fruit. M. de Juflieu dit, qu'on doit nommer proprement fr, cette partie de la plante qui eft compofée de filets & d’un piftil, & qui eft d’ufage dans la génération: mais plufieurs fleurs n'ont point de piftil, & plufeurs autres n’ont point de filets. M. de Tournefort définit la fÆwr, cette partie de la:plante qui fe diflingue ordinairement des autres parties par des couleurs particulieres, qui eft le plus fouvent attachée aux embryons des fruits, & qui dans la plûpart des plantes femble: être faite Pour préparer les fucs qui doivent fervir de premie- te nourriture à ces embryons , & commencer le dé- veloppement de leurs parties. | Enfin M, Vaillant regarde les fleurs comme les Organes qui conftutuent les différens fexes dans les plantes ; 1l prétend que les feuilles des: feurs ne font que des enveloppes qui fervent à couvrir les organes de la génération, & à les défendre; il appelle ces en- veloppes ou tuniques du nom de feurs, quelque ftru- ture & quelque couleur qu’elles ayent; foit qu'el- les entourent les organes des deux {exes réunis , {oit qu’elles ne contiennent que ceux de l’un ou de l’au- tre, ou feulement quelques parties dépendantes de lun des deux, pourvû toutefois que la figure de ces tuniques ne foit pas la même que celle des feuilles de la plante, fuppofé qu’elle en ait. Sur ce principe 1lnomme fauffes fleurs on fleurs nues , les orgares de la génération qui font dénués de tuniques; & de Sraies fleurs, ceux qui en font revêtus : aïnf il ex- clut du nombre des vraies fleurs, les fleurs à étami- nes. On diflingue dans les fZeurs, les feuilles on péta- les, les filets, les fommets, le piftil, & le:calice : fur quoi voyez l’article FLEURS DES PLANTES. J’a- joùte que les fleurs, conformément au nombre de leuts pétales, {ont nommées zonopétales , dipétales , sripétales , rerapétales , c’eft-à-dire à une, à deux, à: #ois, à quatre feuilles, 6c. AT Raï prétend que toute fÆzr parfaite a des pétales, «des étamines, des fommets, & un piftil,, qui eft:lui- même ou le plein fruit, ou l'extrémité du fruit; 8 il regarde comme fleurs imparfaites, toutes celles qui manquent de quelqu’une de ces parties... Les fleurs font diftinguées en mâles, femelles , & hermaphrodites. Les fleurs méles font celles dans lef..…. quelles 1l y a des étamines, mais qui ne portent point de fruit. Les fleurs femelles {ont celles qui contiennent un pifil, auquel le fruit fuccede. Les furs: hermaz Phrodires font celles dans lefquelles. fe tronvent les deux fexes, &r c’eft ce qui eft le plus ordinaires tel- les font le narcifle,, le lis , la tulipe , léigéramum, Ja fauge , le thym , le romarin Écrire aire 24 Ve La ftruéture des parties eft la même dans les fleurs où les fexes {ont partagés; la feule différence confifte en ce que les étamines.&c les fommets, c’eftià-dire les! parties mâles {ont féparées dans celles ci des piftils, : & 1e trouvent quelquefois fur la même plante, &: quelquefois fur des plantes différentes; entre-lesr plantes qui ont les parties mâles-& femelles ; mais aquelque diflance lès unes des autres , l’on compte: le concombre , le melon ;ila courge, le‘blé dé Tur=+ quie, le tournefol , le noyer, lechêne ;le hêtre; &c. Ærticlede M.le Chevalier DE JAucouRrT. 126€ FLEURS DES PLANTES, (Bor. fyft:) M. de Tour- nefort a préféré, dans-fa difiribution méthodique!des, plantes, les caradteres tirés des fewrs, pour établir: Tome PI, 22 Dritqgeer vrult Hs ré) oil PDE ss les claffes de fa méthode, qui eft celle que hous fai: vons dans cet ouvrage pour là dénomination & la définition des différèns genres de plantes: Cet auteur diftingue cinq parties dans les Zevrs 3 favoir les feuil: les, les filets, les fommets., le piftil, & le calice ; mais toutes ces parties ne fe trouvent pas dans tou: tes les f/eurs. ut | IAMEAKES : Les feuilles de là fewr font aufi appellées péralés pour les diftinguer des feuilles de la plante, Les péta- les font ordinairement les parties les plus appärentes &e les plus belles de la fur, mais toutes les feursn’erk. ont pas ; & 1l eft fouvent très-difiicile de-déterminer lès parties auxquelles on doit donner le nom de pé- cales , ou celui de calice. ETES Les filets font placés pour l'ordinaire das 16 rni2 leu de {a feur; ceux qui foûtiennent des fommets font appelés éramires. Il y a des filets fimples, il Y. en a de fourchus. | Lori Lesfommets font les parties qui terminent les éta: mines, quelquefois l'extrémité de l’étamine forme le filet en s’élargiffant ; mais dans le plus grand not, bre des plantes, les fommets font attachés à l’extré- mité des étamines. La plüpart des fommets font pär- tagés en deux bourfes qui renferment de petits grains de pouflier, 8 qui s'ouvrent de différentes manieres: - Le piftil eft pour l’ordinaire au centre dela fleur ÿ ya beaucoup de variété dans la fioure de cette par- tie ; elle eft pointuedans un très - grand nombre de plantes, & renflée à la bafe, Il y a auf des piftils quE font arrondis, quarrés , triangulaires, ovales, fem _ blables à un fufeau, à un chapiteau, &c. L’embryo® du fruit fe trouve le plus fouvent dans le piftil ; if eft anffi quelquefois au-deflous ou au-deflus: Dans prefque toutes les plantes; l'extrémité du piftil eft couverte de poils fiftuleux ; parfemée de petites yes nes, & ouverte-par plufeurs fentes. Le calice eft la partie extérieure de la fleur, qu£ enveloppe les autres parties, ou les foûtient, ou qu£ les enveloppe & les foitient. On doit donner auffi le | nom de calice à la partie extérieure & poftérieure qu? fe trouve dans quelques frs, & qui eft différente des femlles ; des fezrs:, &de leur pédicule. 11 y a des fleurs qui ont des feuillés qui paroïflent être un cali- ce; elles font de vraies feuilles, lorfqu’elies ne fer- vent m d’envelopperni de capfule aux femences qui , viennentiaprès la eur ; mais fi ces prétendues feuil- les reftent & fervent d’enveloppe ou de capfule aux : femences, on doit leur donner le nom de calice, M. de Tournefortne confidere pour la diftribution méthodique des plantes, qué la ftrudure des fleurs ÿ ‘iHles-divife d’abord en fleurs à feuilles, & en fleurs æ | étamines. Les premieres font celles qui ont non-{eu- lement des’filets chargés de fommets, c’eft-à-dire deg | étamines, mais encore des feuilles que l’on appelle: pétales, ffores peralodes ; les autres au contraire n’ont | que des étamines fans pétales , flores flaminei, feuca: | pillacei, & apetali : tellés font les fleurs de l’avoine, de l’arroche, de la biforte ,&c. Les chätons , ruca- . menta feu juli, font des fleurs à étamines. - Les feursà feuilles font fimples où compofées. Les | fleurs fimples fe trouvent chacune dans un calice : il | yena de plufieurs fortés ; les unes n’ont qu’une feulé feuille -coupée régulierement ou irrégulierement , telles font les fÆurs en cloche , ffores campaniformes, c’eft-à-dire Les fers qui ont la figure d’une cloche, d'une campane,, ou d’un grelot; les autres reflem- blent'àrun entonnoir,, ffores infundibuliformes ; pat | exemple/la ÿÆwr de l'oreille d'ours, Les ffezrs en {où | coupe different des précédentes ,'ence queleur par: | tiefupérieure a-la forme d’un-bafin plat, dontdes | bords fontrelevés. Les fleurs des primeveres font de | cette efpéce: Les flurs en rofette, ffores rofari )\ont la figure d’une mollette d’éperon owid'une roue. Lés: fRursenmufle , fores Zabiare, font 00 en-devant: +19 054 FLE par une forte de mafque. Les feursen gueule, fores perfonati , font terminées en-avant par deux levres, qui leur donnent l'apparence d’une sueule. Enfin les fleurs irrégulieres d’une feule feuille reWemblent à différentes chofes, & peuvent être défignées par ces reflemblances. | Parmiles fleurs fimples, 11 s’en trouve quiont qua: tre feuilles qur forment une croïx, flores cruciformes. Il y ena d’autres qui ont plufeurs feuilles difpofées, comme celles de la rofe , ffores rofalli ; ou de lœillet, Jlores cariophille: ; ou du lis , flores Hiliacei ; ou qui font placées irrégulierement., ffores polypetali anomali, Les fleurs papilionacées, ffores papilionacei, {ont ainfi appellées, parce qu’elles refemblent en quelque for- te à un papillon qui a les ailes étendues ; ce font les fleurs des plantes lésumineufes , comme les pois, les fevés , Ge. flores leouminoft; elles ont quatre ou cinq feuilles : il y en a une au-deflus de la ffeur qui eft ap- pellée l’étendard.; vexillum, 8& une autre au-deffous quieft le plus fouvent double, & que l’on nomme carina ; parce.qu'elle reffemble au fond d’un bateau; les deux autres font fur les côtés de la fleur comme des ailes, | . Les furs compofées font celles dont le calice renc ferme plufeurs fZurs que l’on appelle fleurons , lof: cul, ou demi-fleurons, /emzflofculi, Parmi les fleurs compofées on diftingue les fleurs à fleurons, jfores Jlofculofi; les fleurs à denn-fleurons , ffores fémiflofcu: Lofi , & les fleurs radiées, flores radiati, Les fleurs a Jleurons font compofées de plufeurs tuyaux que l’on appelle feurons ; ils font ordinairement fermés par le bas , ouverts par le haut, évafés, découpés le plus fouvent en laniere ou en étoile à plufieurs pointes, raflemblés en un feul bouquet, 8 renfermés dansun calice dont Je fond eftappellé la couche, ‘halamus, parce qu'il porte les embryons des femences qui ont: chacun uñ fleuron, Les fZeurs de l’abfynthe, des char- dons, de la jacée, font des feurs à fleurons. Les f/eurs a demi-fleurons font compofées de plufeurs parties! fiftuleufes par le bas, & applaties en feuilles dans le refte de leur longueur ; ce font'les demi-fleurons qui ne forment qu’un feul bouquet renfermé dans un calice, qui fert de couche aux embryons des femen- ces. La. dent de lion, la laitue, lelaitron, @c.ont des fleurs à demi-fleurons. Les fÆwrs radiées ont des fleurons & des demi-fleurons;les fleurons font raf=+ femblés dans le milieu de la:ÿfeur; 8 forment le dif- que ou-le baffin ; les demi-fleurons font rangés au- tour du difque en-forme de couronne. Ces!fléurons &t ces demi-fleurons font enveloppés d’un calice: commun, qui eft la couche des embryons des femen- ces ; 1ls pottent chacun pour l'ordinaire un fleuron, ou un-demi-fleuron: telles font les fleurs de l’after,,, de la jacobée, de la camomille 6e: Le Fleurs fleurdelifées. Les fleurs \de cette efpece fe trouvent fur, plufieurs plantes ombelliferes ; elles font:compofées.de cinq feuilles inégales,; difpofées, en.forme de:fleur-de-lis de France : telles font'les!, fleurs du cerfeuil 8 de la carotte. at us) gun > Fleurs. nonées : c’eft ainfique M: de Tournefort ap: pelleles feurs quifontjointes auxembryonsdesfruits;) comme celles des melons & destconcombres qui por- tent fur les feunes fruits; pour les difinguer des fleurs! qui fe trouvent fur ces, plantes. féparément des em: bryons:,.8c que l’on nomme fauffes fleurs. Il'y.a des» plantés, par. exemplele-buis: dontles feursdont fé, parées des fruits fur le même pré dl y'en a auffi qui: ne portent que-dés ffeurs {ur certans:piés ;:8c {eules: ment desifruits fur d’autres, piéside lamênie efpece de plante , comme l’ortie'; le:chanvie:, lefaule,:6c:: Fleursermumbelle oner parafol. On a donné ce nom aux, fleurs-foûtenues par:des filets qui partent d’un mêmecentre,; à-peu-pres comme les bâtons d’un'pa- rafol,;-elles forment un bouquet dont la furfacereft, A convexée, Les fZeurs de fenouil, de lanvélique, dus perfil, &c. font:en umbelle où en patafol, EZémens de Botanique 8 1nff.vrei herb. par M. de Tournefort, M,de Tournefort diftingue encore les fezrsen ré gulieres & irrégulières, Les fÆeurs régulieres font cel. les dont le tour paroït à-peu-prèstégalément éloïgné de cette partie, que lon peut regarder comme le centre de la fur : telles fontles fÆurs de l’œillet, les roles, &c. Les fleurs irrégulieres font celles où cette proportionine de tronive pas, comme font les f£wrs de la digitale, de l’ariftoloche, de l’aconit, du lathy< TUS , ÉC;, "Un in | Les fleurs labiées font irtégulieres, monopétales, &c divifées en deux levres; la levre fupérieure s’ap- : pelle éréte , & l’inférieure barbe, Quelquefois la crête manque; alors le piftil & les étamines tiennent fa place, comme dans la pomme de terre , le fcordium, la bugle, & d'autres: mais la plus grande partie ont deux levres: Il 3 ena en qui la levre fupérieure eft tournée à l’envers, commedans le lierre terreftre ; mais plus communémentla lévre fupérieure eft con- vexe.en-deffus, "ét tournefa partie concave en-bas vers la levre inférieure, ce qui lui donne la foure d'uneefpece de bouclieron de capuchon, d’où l’on a fait les épithetes galear, cucullati , & galericulart , qui conviennent prelque toüjours aux feurs verticil- lées, qu'il s’agit enfin de faire connoïtre. Les fleurs verticillées font donc celles qui font ran- gées par étages, & comme difpofées par anneaux ou rayons le long des tiges: telles fontles fezrs du mar- rube, de Pormin, de la fidéritis, &c. Toutes les fleurs naïffent fur des pédicules, ou el- les font attachées immédiatement par elles-mêmes. . Elles font ow difperfées le long des tiges & des bran- ches, ou ramaflées à la cime de ces mêmes parties. Celles qui font difperfées le long des tiges & des branches; fortent prefque toûjours des aïffelles des feuilles ; 8 font attachées par elles-mêmes , ou foû- tenues par des pédicules. Ces dortes de fleurs font ou clair femées & rangées fans ordre dans les aiffelles des feuilles, comme cel- les de la germandrée ; ou ellésnaiffent par bouquets dans les aiffelles des feuilles, comme celles de l’a- mandier ; ou bien elles font difpofées en rayons & comme par anneaux &c par étages dans les aïflelles | des feuilles, comme on le voit dans la fidéritis, dans . le faux diétamne, &c. Il y'en a quelques-unes dont les anneaux font firprès les uns des autres , qu'ils forment un épi au bout della tige : telles fontles fleurs de la:bétoine, de la lavande ordinaire, &c. Les fleurs qui naïffent au bout des tiges & des bran- ches fontou feules , comme'on le voit fouvent en la rofe ; owramaffées en bouquet , en parafol , en épi. ‘Les bouquets font ronds dans la rofe de gueldre Oblongs dans le ffœæchas , en grappe dans'la vigne, en pirandoles dans la valériane, en couronnes dans : la couronne impériale, en parafols dans le fenouil. Le froment, le feigle, l'orge, &c. ont les fÆurs en : épis; ramañflées par paquets rangés en écailles. On voit des épis formés par plufieurs verticilles de feurs, comme-font ceux de la lavande commune, de la-bé- toine, dela galeopfis, 6. On trouve des épis cour" ! bés en volüte,; comme ceux de l'herbe aux verrues: ilyen.a quelques - uns où l’oû ne rémarque aucun ordre; comme ceux de la verveine commune. Tour- nefortis ; 25301: TA DE e CUS : Selon M: Linnæus, les ffeurs font compofées de: quatre parties différentes, qui font le calice, la'co- rollef Fétamine, & le prtil. Il yafeptifortes de calices: 1°, le périanthe, péz ranthium ; cecalice eft lé plns commun, il eft com pofé de‘plufieurs pieces, ous’iln’en a qu'une, elle eft découpée: 2°: L’enveloppe; rvolucrum ; cette partie de lafZeur eft compofée de’plufieurs pieces dif PAL E pofées en rayons ; elle embrafle plufeurs ffeurs qui ont chacuneun périanthe. 3°. Le fpathe./patha ; c’eft ne membrane attachée à la tige de la plante , elle embraffe une ou plufieursÿÆzrs qui pour l’ordinaire n’ont point de périanthe propre ; fa figure & fa con- fiftance varient ; ily a des fpathes qu font de deux pieces. 4°. La bale, g/uma ; cette forte de calice fe trouve dans les plantes graminées ; elle eft compofée de denx ou trois valvules, dont les bords font le plus fouvent tranfparens. $°, Le chaton, amentum, julus; ileft compofé de feurs mâles , ou de fers femelles, attachées à un axe oupoinçon; lorfqu'il y a des écail- les, elles fervent de calice aux feurs. 6°. La coëffe, calypthra ; c’eft une enveloppe mince, membraneu- fe, & de figure conique pour l'ordinaire; elle cou- vre les parties de la fruéification : on la trouve aux fommités des feurs.de plufienrs moufles. 7°. La bour- 1e, volva ; ce calice eft une enveloppe de quelques champignons ; elle les renferme d’abord , & entuite al fe fait dans le haut une ouverture, par laquelle ils fortent au-dehors, La corolle, corolla ; il y en a de deux efpeces, le pétale, & le neétarinm, Le pétale eft monopétale on polypétale, c’eft-à-dire d’une feule piece ou de plu- leurs pieces, qui font les feuilles de la f£eur ; lorfqu’il n'y a qu'une feule piece; on y diftingue le tuyau & le lymbe; lorfqu'il s’y trouve plufieurs pieces, chacune a un onglet & une lame. Le nedarium contient le miel ; c’eft une foffette , une écaille , un petit tuyau, ou un tubercule. Le fleuron & le demi-fleuron dont il a déjà été fait mention, font auffi des efpeces de co- rolles. L'étamine, ffamen, eft la partie mâle de la géné- ration des plantes ; elle eft compofée du filet & du fommet anthera ; qui renferme les pouflieres fécon- dantes. Le piftileft la partie femelle de la génération; ileft compofé du germe,du ftile, & du ftigmate ; le germe renferme les embryons des femences; le ftile eft entre le germe & le fügmate, mais il ne fe trouve pas dans toutes les plantes ; le fHigmate eft ouverture qui donne entrée aux pouffieres fécondantes des étami- nes, pour arriver aux embryons des femences à-tra- ver le fhile. For parifienfisprodrom. par M. Dalibard, Paris , 1749. Voyez PLANTE. (1) 1 à FLEURS, ( Phyfique. ) Des couleurs des fleurs. Après l’expofñtion des deux principaux fyftèmes de Botanique fur cette matiere, il refte à parler des couleurs des fleurs, & de art de les conferver. L’on convient affez généralement parmi les Chi- muiftes, que les couleurs dépendent du phlogiftique, que c’eft de fa combinaïfon avec d’autres principes, que.rélulte leur différence. | L'analyfe nous a appris que les fZezrs abondent en une hiule effentielle, à laquelle, conformément À cette idée, leurs couleurs & la variété qui y regne peuvent être attribuées ; parce qu’une feule & mê- ane huile, l'huile effentielle de thym, par exemple, roduit toutes les couleurs que nous trouvons dans les différentes fleurs des plantes, depuis Le blanc juf- qu'au noir parfait ,avec toutes les ombres de rouge, «le jaune, de pourpre, de bleu, & de verd, en mé- lant cette huile avec différentes fubftances. Ainf , #elon M. Geoffroy, les huiles effentielles des plan- tes, pendant qu’elles font renfermées dans les fezrs, peuvent leur procurer différens mélanges, par cette aimable varièté de couleurs qu’elles poffedent. Les infufons des fleurs , ou de quelques parties des plantes, rougiflent par des acides, verdiffent par des alkalis ; & l’on ne doute point que ce ne foit le phlogiftique dont les teintures ou les infufions font chargées, qui, par fon union avec les fels, produit ces différentes couleurs. M. Geoffroy rapporte quel- gues expériences dans les Mémoires de l'académie des Tome FL, PL E 855 Sciences, année 1707. qui lui font conjedturer que ces combinaifons peuvent être les mêmes dans Les plan- tes où l’on remarque les mêmes couleurs. Les principales couleurs qui s’obfervent dans les fleurs {ont le verd, le jaune citron, le jaune orangé, le rouge, le pourpre, le violet, le blèu, le noir, & le tranfparent, ou le blanc : de ces couleurs diver- fement combinées, font compofées toutes les autres. Le verd feroit, fuivant ce fyftème , effet d'une huile raréfiée dans la fur, & mélée avec les {els volatils & fixes de la ieve, lefquels reftent engagés dans les parties tergenfes, pendant que la plus grañ- de partie de la portion aqueufe fe diflipe, Du moins fi l’on couvre des feuilles enforte que la partie aquer- fe de la feve ne puifle fe difliper , & qu’elle refte au contraire avec les autres principes dans les canaux des feuilles, huile fe trouve fi fort étendue dans cette grande quantité de, phiegme , qu’elle paroît tranfparente & fans couleur ; & c’eft ce qui produit apparemment la blancheur de la chicorée, du celle- ri, 6c. car cette blancheur paroït n'être dans ces plantes, & dans la plüpart des fkwrs blanches, que l'effet d’un amas de plufeurs petites parties tran{pa- rentes &c fans couleur, chacune en particulier, dont les furfaces inégales refléchiffent en une infinité de points , une fort grande quantité de rayons de Iu- miere. Quand les acides rendent aux infufons des fÆurs &c aux folutions de tournefol la couleur rouge , c’eft peut-être en détruifant l’alkali fixe, qui donnoit au phlogiftique dans ces teintures la couleur bleue ou brune. Dans les feurs, toutesles nuances jaunes, de- puis le citron jufqw’à l’orangé , ou rouge de fafran, pourroient venir d’un mélange d’acide avec l'huile, comme on voit que lhuile de thym digérée avec:le vinaigre difbillé, produit le jaune orangé ou le rou- ge de fafran. Toutes les nuances de rouge , depuis la couleur de chair jufqu’au pourpre & au violet foncé , feroient les produits d’un fel volatil urineux avec l’huile ; puifque le mélange de l'huile de thym avec l’efprit volatil de fel ammoniac, pafle par toutes les nuan- ces, depuis la couleur de chair jufqu’au pourpre & au violet foncé. Le noir , qui danses fleurs pent être regardé com- me un violet très-foncé, paroît être l’effet d’un. mé- lange d'acide par-deflus le violet pourpre du fel vo- Jatil urineux. | | Les nuances du bleu proviendroïent du mélan- ge des fels alkalis fixes avec les {els volatils uri- neux &e les huiles concentrées ; puifque l’huile de thym devenue de couleur pourpre par lefprit vola- til du fel ammoniac , digérée avec l'huile de tartre, prend une belle couleur bleue. Le verd feroit produit par les mêmes fels, & par des huiles beaucoup plus raréfiées ; du moins l’huile de thym, couleur de violet pourpre , étendue dans lefprit-de-vin re&tifié & uni à huile de tartre, don: ne une couleur verte. Teleft le fyftème de M. Geoffroy , par lequel il fuppofe que les combinaifons qui produifent les dif- férentes couleurs dans les expériences chimiques , fe trouvent les mêmes dans les fleurs des plantes, & produifent pareillement leurs différentes couleurs naturelles; mais un tel fyftème n’eft qu’une pure de- penfe d’efprit : car ontre que les expériences faites en ce genre font fort bornées, ce feroit une témé- rité de conclure du patticulier au général, & plus encore des produits de la Chimie à ceux de la natu- re. En un mot, l’art qu'employe cette nature pour former dans les fleurs l’admirable variété de leurs couleurs , furpaile toutes nos connoïffances théori- ques. De la confrrvation des fleurs. Notre pratique n’eft QQqaqi 843 FLE guere plus heureufe dans les moyens imaginés juf- qu'à ce jour pour conferver aux fleurs une partie de leur beauté. Elles fe gâtent tellement par la ma- niere ordinaire de les técher, qu’elles quittent non- feulement leurs premieres couleurs , mais les chan- gent même , & fe flétriflent au point de perdre leur forme & leur état naturel : la prime-rofe & la pri- mevere ne quittent pas feulement leur jaune, mais acquierent un verd foncé. Toutes les violettes per- dent leur beau bleu ,& deviennent d’un blanc pâle; de forte que dans les herbiers fecs, 1l n’y a point de différence entre les violettes à fleurs bleues &c les vio- lettes à fÆurs blanches. | | Le chevalier Robert Southwell a bien voulu com- -munique au public la meilleure méthodequejecon- noifle pour conferver les f£wrs dans leur état natu- rel & dans leurs propres couleurs : voici cette mé- thode. On préparera deux plaques de fer longues de huit à dix pouces, ou davantage, larges à propor- tion, & d’une épaifleur fuffifante pour n’être pas pliées : on percera ces plaques de fer à chaque coin , pour y mettre des écrous ou vis qui puiflent les te- nir {errées l’une contre l’autre à volonté. L’on cueil- lera fur le midi d’un jour bien fec la fZeur qu'on vou- dra conferver; l’oncouchera cette ffeur fur une feuil- le dé papier pliée par la moitié, en étendant délica- tement toutes les feuilles & les pétales : fi la queue de la fleur eft trop épaifle, on l’amincira , afin qu’- elle puifle être applatie ; enfuite on pofera quelques feuilles de papier deflus & deflous [a fZwr, On met- tra par-deflus le tout l’une des deux plaques de fer, fans rien déranger; on en ferrera les écrous ; l’on portera les plaques aïnfi ferrées dans un four qui ne foit pas trop chaud, & on les y laïflera pendant deux heures. Quand les furs font grofles & épaif- fes , il faut couper adroïitement les derrieres inu- tiles, 8x difpofer les pétales dans leur ordre natu- rel. | Après avoir retiré vos plaques du four , faites un mélange de parties égales d’eau-forte & d’eau-de- vie ; Ôtez vos fleurs de la prefle des plaques, &c fro- tez-les leserement avec un pinceau de poil de cha- meau trempé dans la liqueur dont on vient de par- ler : enfuite preflez délicatement vos fleurs avec un linge, pour en boire toute l’humidité : après cela , ayez en mainune eau gommeufe compofée d'un gros | de fang-de-dragon diffous dans une pinte d’eau ; trempez un fin pinceau dans cette eau gommeufe ; frotez-en toute votre fleur, & couvrez-la de papier : enfin mettez-la de nouveau fous preffe entre vos deux plaques, pour fixer votre eaugommeufe. Au bout de quelque tems, tirez votre fZur de la prefle, & toute l’opération eft finie. Auteurs. On peut confulter fur la ftru&ture des fleurs , le Diftours de Vaillant , imprimé à Leyden en 1718 in-4°. Morlandi obfervationes de ufu partibufque florum , dont j'ai lû l'extrait dans leJournal de Leipfic, année 1705. Janv. pag. 275. Voyez auf Grew, Malpighi , & Ray. Mais ceux qui par curiofité & par amour pour la Botanique, les Arts, & le Deffein, veulent 1e former une belle bibliotheque en ce genre, doi- vent connoître ou fe procurer les livres fuivans, que je vais ranger par ordre alphabétique. Boym (Michaël) , jéfuite, Flora finenfis ; Viennæ- Auftriæ , 1656, in-fol. 4 Bry (Joh. Théod. de) ; Florilegium renovatum , pars I, Francof. anno 1612. 11. anno 1614. [TL anno 1518 , fol, avec figures. Le même ouvrage a paru fous le nom de Awrhologia magna; Francof. 1626 6 1G41 , quatre tom. ordinairement reliés en‘un vol. Befleri (Bafilii ) Mortus Eyflettenfis ; Norimberge , 1613 , deux vol. in-fol. charta imp. fig. Dillenii (Joh. Jac.) Hortus Eléhamenfis ; Lond. 1732 fol, mag, tab. ante 324. Ferrari (Gio. Batt.) Flora overo culiæra di fiori ; Rome,1633 in-4°. 6 1638. Ceftle même ouvrage intitulé, Ferrarius,de florum culturé, imprimé à Amft. en 1646 & 1664in-4°. avec fig. Horris Malabaricus ; Amflelod, ab anno 1678 ad annum 169 3 ; douze tomes in-fol. avec fig. Laurembergius (Petrus) de plantis bulbofis & tube- rofis ; Francof. 1654. in-4°, avec figures. Linnæi(Caroli) Hortus Cliffortianus ; Amflelodami, 1737, 1n-fol. fig. , Munting (Abraham) Phycographia curiofa 3 Ami. 1711, in-fol. avec fig. Pajleus (Crifpian ), Hortus floridus ; Arnhemii , 1614 ,in-4°. oblong ; & à Urrecht, fous le titre de Jardin de fleurs, par Crifpian de la Pañfe. Parkinfon (John. ) , 4 choice garden of all forts of rareff flowers, &c. Lond.1656.in-fol. avecfig. Pontederæ (Jul) Anthologia ; Patavii, 1720 , in- 4°. cum fig. Recueil de plantes orientales, occidentales, & autres, au nombre de 250 planches gravées par Robert, Châtillon, & Bofle ; ce recueil de fÆurs efl'très-rare & d’un très-erand prix. Roffi (Giovanus Domenicus ), Nuova riçolta di fcori cavati di naturale; in Roma, 1645, fol. Sloane (Hans). Voyez for Voyage à la Jamaïque, en anglois ; London, 1707 6 1725, fig. S'wertius (Emmanuel), Florilegium ; Francof. 1 Cu2. Amftelod, 1647. in-fol. imp. Antuerp. 1651 6 1657; fol. avec figures qui font d’une grande beauté, Theatrum Flore, in quo ex toto orbe venufliores fla- res æri incift proferuntur ; Paris 1622 , chez de Ma- thonniere , 22-fol., On attribue ce recueil à Robert. Touloufe (Guillaume), maître brodeur de Mont- pellier, Livre de fleurs , feurlles , € oifeaux, inventé & deffiné d’après le naturel ; à Montpellier, 1636, fol. fig. Anonymes. Flower-garden difplayd’ in above 400 curious reprefentations of the moft beautiful flowers ,co- lour'd to the life; London , 1733, fol. J. H. Recueil de diverfes fleurs mifes au jour ; Paris, 1653 ,in-for. Art. de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FLEUR, (Agriculr.) Les Jardiniers-Fleuriftes ref- traignent le mot de fur à quelques plantes qu'ils cultivent à caufe de la beauté de leurs fZzrs, & qui fervent d'ornement & de décoration aux jardins; tels font les œillets, les tulipes ,les renoncules, les ané- mones , les tubéreufes, &c. ce qu’il y a de fingulier, c’eft que nous n’avons point de belles fers , excep- té les œillets, qui originairement ne viennent du Levant. Les renoncules, les anémones,, les tubéreu- fes, plufieurs efpeces d’hyacinthes, de narcifles, de lys, en font aufhi venues ; mais on les a redifiées er Europe par le fecours d’un art éclairé, Il ne faut plus aller à Conftantinople pour admirer ces feurs > c’eft dans les jardins de nos curieux qu'il faut voir leur étalage fucceffif , & en apprendre la culture. Les fleurs ont des graines qui produifent des tiges: ê& ces tiges fortent ou de racines ou d'oignons : ain« fi on peut diftinguer de deux fortes de fleurs ; celles qui viennent de racines, & celles qui viennent d’oi- gnons : mais toutes ces f£wrs peuvent fe multiplier par des cayeux, par des boututes, par des tailles, & par des marcottes. Il feroit trop long de faire venir de toutes les Jfeurs par le moyen de leurs graines ; 4l eft d’autres moyens dont nous parlerons: cependant comme il y a quelques fZeuwrs qu'il faut élever de grai- nes, nous commencerons par en indiquer la ma- niere. Detoutes les graines qui paflent l’hyver, il y en a qu’on peut femer fur des couches, pour être re- planté es en d’autres lieux, & les autres ne fe replan- rent que difhcilement, ou point-du-tout. Les Jardr- niers ordinaires fement toutes les graines des ffeurs en quatre tems ; favoir, en Février , en Mars, en Avril, & en Mai; mais onen peut femer pendant toute l’année. | On fait une couche de bon fumier; on met deflus un demi-pié de vieux terreau bien pourri : au bout de huit ou dix jours que la couche fera faite, lorfque la plus grande chaleur en fera paflée, on femera tou- tes les gtaines , chaque forte dans fon rayon; on les couVtira de terreau, de l’épaifleur de deux travers de doigt; onles arrofera avec un petit arrofoir, êc une fois tous les jours , s’il fait fec. Quand elles fe- ront grandes , on peut prendre un grand arrofoir ; & fr elles fe découvrent ,on doit les recouvrir avec un peu dé terreau. Îl ne faut pas manquer de lescou- vrir tous les foirs, de crainte de la gelée blanche. Les couvertures né doivent pas pofer fur la. couche ; on les élevera, ou on les mettra en dos d’âne fur des cerceaux ; & tout le tour de la couche fera bien bou- ché, pour que la gelée ”y entre point. On découvre ces fleurs femées de grâimes, quand le foleil eft fur la couche, & on les recouvre le foir, quand le foleil ef retiré. S'il ne geloit point , on pourroit les laïfler à l'air ; mais on y doit prendre garde, parce que deux heures de gelée peuvent tout perdre, Quand ces fleurs font de la hauteur néceffaire pour les replanter, onles replante dans les parterres, par- tout où on le juge à propos, pourvü que laterre foit bonne & bien labourée. On leur redonnera de l'eau firôt qu'elles feront replantées , & oncontinuera toû- jours , fi la terre eftfeche, &c qu'il ne pleuve point ; mais il ne faut rien arracher dans lesrayons descou- ches, que les plantes ne foient grandes , de peur de les arracher pour de l'herbe; car elles viennent de même. On plante Les oignons des. fewrs depuis le commen- cement de Septembre jufqu'à la fin d'Avril, c’eft-à- dire deux fois l’année , en automne & au printems: foit qu’on plante en pots ou en planche , il faut la même térre & la même façon à l’un qu’à l'autre. On prend un quart de bonne terre neuve, un quart de vieux terreau , & un quart de bonne terre de jardin; on pañle le tout à la claie: on fait enforte qu'il y ait un pié de cette terre furla planche; on y plante les oignons , ou on en remplit les pots. Les oignons fe plantent À la profondeur d’un demi-pié en terre. Les pots, qui doivent être creux & grands, font mis en pleine terre jufqu’aux bords ; & on ne les en retire que quand ils font prêts à fleurir: S'il ne gele point, &c que la terre foit feche, on leur donne un peu d’eau: sil geloit bien fort , on mettroit quatre doigts ’épaifleur de bon terreau fur Les planches, & on les couvriroit ; on mettroit des cerceaux deflus pour foûtenir les paillaflons , qu’on Ôôteroit quand le foleil {eroit {ur les planches , & qu’on remettroit quand il n’y feroit plus. Si fait fec au printems , 1l faut ar- rofer les oignons de feurs. Pour faire croître extrèmement une fÆwr , on l’ar- rofe quelquefois de lexive faite avec des cendres de plantes femblables, que l’on a brülées: lesfels quife trouvent dans cette lexive , contribuent merveilleu- fement à donner abondamment ce qui eft néceflai- re à la végétation des plantes, fur-tout à celles avec lefquelles ces fels ont del’analopie. Les fleurs quine viennent qu'au printems &c dans Vété patoïtront dès lhyver , dans des ferres, on en les excitant doucementpar des alimensgras, chauds, &c fubtils , tels que font le marc de raïfins, dont on aura retranché toutes les petites peaux, le marc d’o- lives, & le fumier de cheval. Les eaux de bafle-cour contribuent auffi beaucoup à hâter la floraifon : mais nous en dirons davantage 44 m0t OIGNON DE FLEURS 04 PLANTE BULBEUSE. L'intérêt & la curiofité ont fait trouver les moyens de panacher & de chamarrer de diverfes couleurs . les fleurs des jardins, comme de faire des roles ver- FLE 849 tes, jaunes, bleues, & de donnèeren très-peu de tems deux ou trois coloris à un œillet , outre {on teint na- turel. On pulvérife ,‘ par exemple , pour cela de la terregrafle cuite awfoleil ;ron are l'enfaité l’efpa- ce de vingt jours d’uneeau ronge, jaune ou d’une autre teinture, après qu'on a femé dans cette terre grafle la graine de la fleur, d'une couleur contraire à cet arrofement artificiel. Il y en a qui ont femé & greffé des œillets dans lé cœur d’une ancienne racine de cmcorée fauvages qui lont relié étroitement, & qui l’ont environné d'un fumier bien pourri; & par les grands foins du fleurifle, on a vû fortir un œillet bleu, aufli beau qu’il étoit rare. D’autres ont enfermé dans une petis te canne, bien déliée &r frêle, trois ou quatre grai- nes d’une autre fÆur , & l’ont recouverte de terre êC de bon fumier. Ces femences de diverfes tiges ne faifant qu'une feule racine, ont enfuite produit des branches admirables pour:la diverfité 8c la varièté des fleurs. Enfin quelques fleuriftes ont appliqué fur une tise divers écuflons d’œillets différens, qui ont pouffé des fleurs de leur couleur naturelle, & qui ont Charmé par la diverfité deleurs couleurs, Il y a beaucoup d’autres fecrets pour donner. de nouvelles couleurs aux fZwrs , que les Fleuriftes gardent pour eux. | Ce font les plantes des ffewrs les plus vigoureufes, que l’on réferve pour la graine , & l’on coupe les autres. Quand cette graine qu’on conferve eflmiüre, on la recueille foigneufement , & on la garde pour la planter en automne : onexcepte de cette regle les graimes de siroflées & d’anémones , qu'il faut femer prefque aufitôt qu’on les:a cueillies. Pourconnoiître les graines, on les met dans l’eau ; celles qui vont au fond'font les meilleures; & pour les empêcher d’être mangées par les animaux qui vivent en ter- re on les trempe dans une infufion de joubarbe; êc après cette infufion, on.les feme dahs de bonne ter- re, comme on l’a dit ci-deffus. du Pour les oignons qui viennent de graines , als ne fe tranfplantent qu'après deux années , au boutidef- quelles on les met dañs une terre neuve êclegere, pour leur faire avoir des ffeurs à la troifieme année. Il nous refte à dire que pour garantir les frs du froid pendant l’hyver ,il faut les mettre à couvert, mais dans un endroit aifé ;1@t dans l'été, 1hfaut les défendre de la chaleur, en les retirant dans un en- droit où le foleil ne foit pas ardent. Pendant l’hyver, les fleurs ne demandent pas d’é- tre humeétées d’une grande quantité d’eau ;1l Les faut _ arrofer médiocrement, 2 ou 3 heures après le lever du foleiïl , & jamais le foir, parce que la fraicheur de la terre & la gelée les feroient infailliblement mou- sit ; & quand on les arrofe dans cette faifon ,on doit prendre garde de ne les pas mouiller ; il faut feule- ment mettre de l’eau tout-à-l’entour, Au contraire dans l’été , il les faut arrofer le foir , après le foleil couché, & jamais le matin, parce que la chaleur du jour échaufferoit l’eau ; & cette eau échauffée brût leroit tellement la terre, que les tomberoien= dans une langueur qui les feroit flétrir & fécher. Les fleurs qui viennent au printems, & qui ornent les jardins dans le mois de Mars, d'Avril, & Mai, font les tulipes hârives de toute forte, les anémo= nes fimples & doubles à peluches, les renoncules de Tripolr, les jonquilles fimples & doubles , les ja- cinthes de toutes fortes, les baflinets ou boutons d’or, l'iris , les narcifles , la couronne impériale , l'oreille d'ours, les giroflées, les violettes de Mars, le muguet, les marguerites ou paquettes , les primer véres ou paralyfes, les penfées, &c. Celles qui viennent en été, c’eft-à-dire en Juin, Juillet , & Août, font les tulipes tardives, les lis blancs, lis orangés ou lis-flammes, les tubereufes , 859 FLE les hémérocales ou fleurs d’un jour, les pivoines , les martagons , les clochettes ou campanules , les croix de Jérufalem ou de Malte, les œillets de diverfes ef- peces, la giroflée jaune, la julienne fimple,lajulienne double ou giroflée d'Angleterre, le pié d’alouette, le pavot double, le coquelicot double , l’immortelle ou edychrifum , les bafilics fimples ou panachés, €&c. _ Les fleurs qui viennent en automne, c’eft-à-dire dans les mois de Septembre, d'Oftobre, & de No- vembre , fontle crocus ou fafran automnal, la tu- béreufe, le cyclamen automnal , le fouci double, les amaranthes de toutes fortes , le pafle- velours ou queue de renard, le tricolor blanc & noir, les œillets d'Inde , la bellefamine panachée, les rofes d'Inde, le f#ramonium ou la pomme épineufe, le gera- zium couronné , la valérienne , le talafpic vivace, le mufle de lion, l’ambrette où chardon benit, &c. Les fleurs d'hyver, qui viennent en Décembre, Janvier , & Février , font le cyclamen hyvernal, la jacinthe d’hyver , les anémones fimples , ke perce- neige ou leucoyon, les narcifles fimples , les crocus printaniers , les prime-veres, les hépatiques, &c. Entre plufieurs ouvrages fur cette matiere , on peut lire Ferrarius, de florum culturé ; Amfle, 648, 1n-4°. Morin, Traité dela culture des fleurs; Paris , 1658 ,in-12 ;, premiere édit. qui a été fouvent renou- vellée : Liger, /e Jardinier-fleurifle; Paris , 1705 : le Jardin de la Hollande ; Leyde, 1724 ,1n-12: Cho- mel; & fur-tout Miller , dans fon Diéfionnaire du Jardinage. Indépendamment de quantité de traités généraux, on ne manque pas de livres fur la culture de quelques fÆeurs particulières, comme des oeillets, des tulipes , des oreilles d'ours, des rofes, des tu- béreufes, 6:c. Enfin perfonne n'ignore que la paffien des fleurs, & leur culture, a été pouflée fi loin en Hollande dans le dernier fiecle, qu'il a, fallu des lois de l’état pour borner le prix destulipes. Ærri- cle de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FLEUR DE LA PASSION oz GRENADILLE , grana- dilla; genre deplanteà flurenrofe, compoféede plu- fieurs pétales difpofés-en rond. Le piftil eft entouré : d’une frange à fa bafe, & fort d’un calice découpé. Il porte à fon extrémité un embryon furmonté de trois corpsteffemblans en quelque façon à trois clous. Les étamines font placées au-deflous du piftil, L’em- bryon devient dans la fuite un fruit ovoide, prefque rond & charnu. Ce fruit n’a qu’une feule capfule , & renferme des femences enveloppées d’une coëffe, & attachées aux côtés du placenta, Tournefort, 22f£. rei herb. Voyez PLANTE. (1) FLEUR AU SOLEIL, corona folis. Cette plante eft différente de l’héliotrope ou tournefol. Foyez HÉ- LIOTROPE. Elle fe divife en deux efpeces: la pre- miere s’éleve d'environ de cinq à fix piés, & forme une tige droite, avec des ferulles très-larges, den- telées en leurs bords ; il naît à fa fommité une gran- de fleur radiée, dont le difqueeft compofé de plufieurs fleurons jaunes, arrangés en forme de couronne, au . milieu de laquelle font des demi-fleurons féparés par des feuilles pliées en gouttiere, & comprifes dansun calice où font des loges à femences, plus groffes que celle du melon. Cette plante fe tourne toñjours vers le foleil d’où elle a pris fon nom. Elle vient de graine fleurie en été, demande un grand air , une terre grafle, & beaucoup de foleil. La feconde efpece qui eft plus bafle , fe divife en plufeurs rameaux, for- mant une touffe , & portant chacun une fur plus petite que l’autre. ; Ces Joleils font vivaces, & fe multiplient par les racines, Ils fe plaifent dans toutes fortes de terres, & la {eule nature en prend foin, Ils ne conviennent que dans les potagers, & entre les arbres ifolés d’une grande allée d’un parc; rarement s’en fert-on dans les beaux jardins, à moins que ce ne foit à l'écart, FLE On les peut tondre en buiffons,:en retranchant aux cifeaux les branches qui s’élevent trop. (X) FLEUR DE-CARDINAL, Voyez CONSOUDE RO Y 4- LE. Freurs DE MUsCADE, (Pharmacie & Matiere me- dicale.) Voyez Mais. FLEURS , (Pharmac.) Les Apothicaires confervent dans leurs boutiques un nombre affez confidérable de fleurs. Voyez leurs nfagesitant officinaux que magif- traux aux articles particuliers. Pour que ces fleurs foient de garde, elles doivent être defléchées très-rapidement, parce que le mou- vement de fermentation qui s’excite pendant une deffication lente, détruiroit leur tiflu délicat, & al- téreroit par-là leur vertu &c leur couleur. Qu'il faille conferver la vertu des feurs qu’on defleche, on en conviendra aifément ; qu'il foit très-utile de conjer- ver leur couleur autant qu'il eft poffible , on fe le perfuadera auf lorfqu’on faura que non-feulement l'élégance de la drogue en dépend, mais même que la confervation de la couleur eft un très-bon figne pour reconnoître la perfeétion du médicament. Les fleurs qui ont une couleur délicate , telles que celles de mauve, de rofes pâles, de petite centau- rée, la violette, la perdent prefqu’entierement fi on les expofe immédiatement au foleil ; mais elles ne fouffrent pasla moindre altération dans leur couleur, fi on interpofe le papier le plus mince entre la fleur à fécher &c les rayons du foleil. Les fleurs de violette ont cependant befoin pour conferver leur couleur, d'être defléchées par une manœuvre particuliere. Voyez VIOLETTE. Le phénomene de la deftruétion de ces couleurs par l’aétion immédiate ou nue des rayons du foleil , eft bien remarquable, en ce qu’elle ne dépend pas ici du foleil comme chaud; car la chaleur que ia fleur éprouve encore à l’ombre de ce papier, fuppolé qu’elle foit diminuée bien confidérablement, peut être fupérieure à celle qu’elle éprouveroïtaux rayons immédiats d’un foleil moins ardent; & cependant : ombre plus chaude confervera la couleur, & le fo- leil nud plus foible la mangera. Au refte peut - être - faudroit-il commencer par conftater le fait par de nouvelles expériences ; l’établiflement du fait & des recherches fur la caufe fourniroient les deux parties d’un mémoire fort curieux, dont la premiere feroit phyfique &très-aifée, & la derniere chimique &ctrès- difficile. (à) FLEURS D'ARGENT , (Æff. nar, Minéralog.) nom donné par quelques auteurs:à la fubftance que l’on nomme plus communément dac lune. Voy. cet article. FLEUR DE FER, ( Hi/?. nat, Minéralogie.) Flos mar- tis, flos ferri &c, nom que l’on donne impropre- ment à une efpece de ftalaétite ou de concrétion pier- reufe, fpathique ou calcaire, qui eft fouvent d’un blanc auffi ébloïuffant que la neige, qui fe trouve at- tachée aux voûtes des foûterreins de quelques mines; ces falaétites ou concrétions font de différentes for- mes & grandeurs, & la couleur en varie fuivant que la matiere en eft plus ou moins pure. Le nom qu'on leur donne fembleroit indiquer qu’elles font martia- les ou contiennent du jér; mais lorfqu'il s’y trouve une portion de ce metal, ce n’eft qu’accidentelle- ment, & elles ne different en rien des autres ftalac- tites. On dit que le nom de flos martis a été donné à cette efpece de concrétion dans les mines de fer de Stirie, où elle fe trouve très-fréquemment. (—). FLEURS D’ASIE, ( Auf, nat. Minéralopie.) nom que quelques voyageurs ont donné à un {el qui fe trouve à la furface de la terre dans plufeurs endroits de l’Afe ; on l’appelle auf cerre favonneufe de Smyrne. C’eft la même chofe que le zatron ou ritrum des an- ciens, d’où l’on voit que c’eftun fel alkali fixe, fem- blable à la potafe; il fair effervefcence avec les aci- Folt E des, forme du favon avécleshuiles, &c eft d’un goût cauftique. Voyez NATRON 6 /eYapplément du Dilion. rare de Chambers. (=) 1 00 | Gprou FLeurs, (Cuimie.):c’eftun produit de’la fubli- mation, qui fe ramafle dans la partie fupérieure des vaifleaux fublimatoitess “ous la forme d’un corps rare ê peu lié. #oyez SUBLIMATION. FLEUR-DE-118, (Vuri/p. Franç:) fer marqué de plufeuts petites ffewrs-de-lis par ordre de la juftice , que le bourreau applique chaud pendant un anftant fur l’épaule d’un coupable qui mérite-peine affliéti- ve, mais qui ne mérite pas la mort. Coquille obfer- ve quelaflétriffure de la ffeur-de-lis n’a pas feulement été antroduite parmi nous comme une peine afilic- tive, mais de plus comme un!moyen de juftifier fi Paccufé a déjà été puni par la juftice de quelque cri- me, dont la récidive le rend encore plus criminel. Cette idée de flétriflure eft fort ancienne; les Ro- mains l’appelloient zrfcriptio, Les Samiens, au rap- port de Plutarque, imprimerentune chouette fur Les Athéniens qu'ils avoient faits prifonniers de guerre, Platon ordonha que ceux qui auroient commis quelque facrilège, feroient marqués au vifage 8 à la main , & enfuite fouettés & bannis. Eumolpe dans Pétrone , couvre le vifage de fon efclave fugitifs de plufieurs caraéteres qi faifoient connoître fes di- verfes fautes. Cette pratique eut lieu chez les Ro- mains, jufqu’au tems-de l’empereur Conftantin, qui défendit aux juges de faire imprimer fur le vifageau- cune lettre qui marquâtle crime commis par un cou- pable, permettant néanmoins d'imprimer cette let- tre fur la main ou fur la jambe, afin, dit:l, que la face de l’homme qui eft l’image de la beauté célefte, ne foit pas deshonorée. Leg. 17. cod. de pœnis. Sans examiner la folidité de la raifon qui a engagé Conf- tantin à abolir la flétriffure fur le vifage, nous dirons feulement que cette rigueur a paru trop grande par _plufieurs autres motifs aux lépiflateurs modernes, de forte qu'en France & ailleurs on ne flétrit aujour- d'hui que fur l'épaule. Poyez FLÉTRISSURE. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FLEURS D'UN VAISSEAU , ( Marine.) c’eft la ron- deur qui fe trouve dans les côtés du vaiffeau, ou bien toutes les planches qui forment cette rondeur dans le bordage extérieur, dont la plus baffe eftpofée auprès de la derniere planche du bordage de fond , & la plus haute joint lé franc bordage. Yoyez Bor- DAGE DES FLEURS, | Pour la beauté du gabarit d’un vaifleau; il faut que les fleurs montent 8 s’élevent avec une rondeur . agréableàla vüe, & bien proportionnée. Selon quel- ques charpentiers, le rétreciflement que fait la ron- deur des fleurs de-haut en-bas,, depuis le gros jufqu’au plat-fond, doit être du ‘tiers du creux du vaiffeau pris fous lembelle ; par exemple!, dix piés'de creux Co donner trois piés un tiers de retréciflement. Z PET FLEURS, ( Marine.) donner les fleurs à un vaifleau. Voyez FLORER. F FLEUR, à fleur d’eau, (Marine) c’eft-à.dire au ni- veau de la furface de l’eau. Tirer à fleur d’eau, ©'eft 3 tirer au niveau, & le plus près qu'il eft poffble de la furface de l’eau. (Z) * FLEURS , dans l’art de Peinture, Peindre les fleurs, c'eft entreprendre d'imiter un des plus agréables ou- vrages de la nature. Elle femble y prodiguer tous les charmes du: coloris. Dans les autres objets qu’elle Offre à nos regards, les teintes font rompues les ntüances confondues, les dégradations infenfibles ; l’effét particulier de chaque couleur fe dérobe pour ainfi dire aux veux; dans les fZeurs, les couleurs les plus frañches femblént concourir & difputer entr”- elles. Uni parterre peut être regardé comme la pa- lette de lanatute. Elle + préfente un affortiflement FLE 8$E complet de couleurs féparées les‘umés des autrés: 88 pour montrer fans doute combien’ lès principes aux quels nous prétendons qu’ellé séftfotimie, font au- deflous d’elle,elle permetiqu'en affemblantun group- pe de fleurs, on joigne enfemble les teintes que la phüpart des artiftes ont regardées commeles plus an- tipathiques ; fans craindre qu’elles bleffent lestois dé l'harmonie. Eft-l donc en effet des couleurs antipa- thiqués ? non fans doute, Mais la peinture & géné= talement tous les arts né fe voyent-1ls pas trop fou: ventreflerréspar des chaînes que leur ont forgées les préjugés ? Qui les brifefa ? le génie. Les artiftes enrichis de ce don célefte , ont le pris vilége de fécoier le joug dé certaines reples qui ne font faites que pour les talens médiocres. Cés attifs tes découvfiront en examinant un bouquet , des beau tés hardies dé coloris qu'ils oferont imiter. Paufias les furprit dans les guirlandes de Glycere, & en profitas … Je crois donc qu’une des meilleures études de co- loôris qu’un jeune artifte piüfle faire , eft d'affembler au hafard des grouppes de ffeurs, & de les peindre ; qu'il Joigne à cette étude celle de l'effet qu’elles pro- duifent fur différens fonds, il verra s’évanoüir cette habitude fervile d’appofer toüjours des fonds obf- curs aux couleurs brillantes qu’on veut faire éclater: Des fleurs différentes, mais toutes blanches, étalées fur du linge ; un cygne qui vient leur compater la couleur de fes plumes ; un vafe de cette porcelaine ancienne fi eftimée par la blancheur de fa pâte, & qui renferme un lait pur, formeront un aflemblagé dans lequel la nature ne fera jamais embarraflée de : diffinguer des objets , qu’elle femble avoir trop uni- formement colorés. Pourquoi donc, lorfqu'il s’agit d’imiter l’éclat du teint d’une jeune beauté, recourir a des oppoñtions forcées &c peu vraifflemblables à Pourquoi, fi lon veut éclairer une partie d’un ta- bleau, répandre fur le refte de l'ouvrage une obfcu- _rité rebutante, une nuit impénétrable? pourquoi donner ainfi du dégoût pour un art dont les moyens trop apperçüs bleffent autant que fes effets plaifent à Ce que je viens de dire a, comme on le voit, rap= port à l’art de Peinture en général. Cependant com- me le talent de peindre les feurs eft un genre parte culier quiremplit fouvent tous les foins d’unartifte il eft bon de faire quelques obfervations particulie= res. Uneextrème patience , un goût de propreté dans letravail, un gémie un peu lent, des pafions dou- ces, un caractere tranquille, femblent devoir entrat- nef un artifte à choïfir des fleurs pour l’objet de fes imitations. Cependant pour les peindre patfaite- ment, toutes ces qualités ne fufhfent pas. Les ffeurs, objets qui femblentinanimés, par conféquent froids, demandent pour intérefler dans la repréfentation qu'on en fait , une idée de mouvement, une cha- leur dansle coloris, une legéreté dans latouche, un art & un choix dans les accidens, qui les mettent pour ainfi dire au-deflus de ce qu’elles font. Ces êtres qui vivent ont toutes ces qualités aux yeux dé ceux qui les favent appercevoir ; & l’on a vû Baptifte & | Defportes avec une façon de peindre fiere, large, &{ouvent prompte, imiter le velouté des rofes, & rendre intéreffante la fymmétrie de l’anémone. Uné fieur prète d’éclore, une autre dans le moment où elle eft parfaite, une troifieme , dont les beautés com- mencent à fe flétrir, ont des mouvemens différens dans les parties qui les compofent. Celi des tiges & dés feuilles n’eft point arbitraire, c’eft l'effet de la - combinaiïfon des organes des plantes. La lumiere du foleïl qui leur convient le mieux, offre par fa varièté . des accidens de clair obfcur fans nombre. Les infec- tes , les oifeaux qui joiniffent plus immédiatement que nous de ces objets, ont droit d’en animer les repré-" fentations. Les vafes où on les conferve, les rubans’ _ avec lefquels on les affemble, doivent orner la com: \ 860 FLE poñtion du peintre:-enfin il faut qu'il s'efforce .de faire naître-par la vüe de fon ouvrage, cette fenfa- | tion douce, cette admiration tranquille, .cette vo- ; lupté.délicate qui fatisfait nos regards lorfqu'ils fe : fixent fur la nature. Maïs infenfiblement je -paroîtrois peut-être pouf fer trop loin ce que peut exiger-un genre qui-m’eft : pas un des principaux de l’art dont je parle. Je finis donc en recommandant aux Peintres de fleurs un : choix dans la nature des couleurs, &-un {oin-dans leur apprèt, qui femble leur devoir être plus eflen- tiel qu'aux autres artiftes; mais qui n’eft en.général que trop fouvent négligé dans les atteliers. Les ffezrs font un genre de peinture, comme l’hiftoire , le por- trait, Ge. On dit, ce peintre fais les fleurs ,.c’eftun pein- æ#re-fleurifte. Article de M. WATELET.. FLEUR DE PÊCHER, (Manège, Maréchal.) auber, naqu'il reçoit. » Le fleuve Oronoque a plus de ÿ75 lieues de cours, # en comptant depuis la fource de la riviere Caketa » près de Pafto, qui fe jette-en partie dans l'Orono- »que, & coule auf en partie vers la riviere des # Amazones. Voyez la carte de M. de la Condamune. » La riviere Madera qui fe jette dans celle des # Amazones , a plus de 660 ou 67o lieues. Hiff. na- # tur. tome 1, page 352 6 fuiv. Les fleuves les plus rapides de tous, font le Tigre, l’Indus, le Danube, l’Yrtis en Sibérie, le Malmi- fra en Cilicie, &c. Voyez Varenn géograph. page 178. Mais, comme nous le dirons plus bas, la me- fure de la vitefle des eaux d’un fuye dépend de deux caufes ; la premiere eft la pente, &c la fecon- de le poids & la quantité d’eau : en examinant fur le globe quels font les Zeuves qui ont le plus de pen- te, on trouvera que le Danube en a beaucoup moins que le PÔ, le Rhin & le Rhône, puifque tirant qüel- ues-unes de fes fources des mêmes montagnes, le Danube a un cours beaucoup plus long qu'aucun de ces trois autres ffwves , & qu'il tombe dans la mer Noire, qui eft plus élevée que la Méditeranée, & peut-être plus que l'Océan. J4r4. Lois du mouvement des fleuves & rivieres en général. Les philofophes modernes ont tâché de déterminer par des lois précifes le mouvement & le cours des fleuves ; pour cela ils ont appliqué la Géométrie & la méchanique à cette recherche ; de forte que la théorie du mouvement des f/euves et une des bran- ches de la phyfique moderne. : PR - Les auteurs italiens fe font diftingués dans cette partie, & c’eft principalement à eux qu’on doit les progrès qu’on y a faits ; entr'autres à Guglielmini, qui dans fontraité della natura de’ fiumi , a donnéfur cette matiereungrand nombre derecherches & d’ob- fervations. | y Les eaux des fleuves , felon la remarque de cet au- teur, ont ordinairement leuts fources dans des mon- tagnes ou endroits élevés ; en defcendant de-là elles acquierent une vitefle ou accélération qui fert à en- tretenir leur courant : à mefure qu’elles font plus de chemin , leur vitefle diminue , tant À caufe du frotement:continuel de l’eau contre le fond & Les cô: tés du lit où elles coulent ,'que par rapport aux au- tres obftacles qu’elles rencontrent , & enfin parce qu’elles arrivent après un certain téms dans les plai- nes, oùellescoulent avec moins de pente, & pref- que horifontalement. Ainf leReno , ffuve d'Italie, qui a été un de ceux que Guglielmint a le plus obfer- vé , n'a vers fon embouchure qu’une pente-très - petite. | + Sila vitefle que l’eau a acquife eft entierement détruite parles différens obftacles ; enforte que fon cours devienne horifontal, iln°y aura plus rien qui puifle produire la continuation de fon mouvement, que la hauteur de l’eau ou la preffion perpendiculai- re qui lui eft toüjours proportionnelle. Heureufe- nent cette derniere caufe devient plus forte à me- fure que la:vitefle fe ralentit-par les obftacles; car plus l'eausperd de la viteffe qu’elle a acquife, plus elle s’éleve &r fe haufle à-proportion. | . L'eau quieft à la furface d’une riviere , & qui eft éloïgnée des bords, peut tojours couler par la few | _ de & unique caufe de fa déclivité ; quelque petite qu’ellefoit : car n'étant arrêtée par aucun obffacle, la pluspetite différence dans le niveau fuffit pour la faire mouvoir, Mais l’eau du fond qui rencontre des phftacles continuels , ne doit recevoir prefqueau- . Tome FI, ELE 87£ cun movement d’une pente infenfible , & ne pour- ra être mûe qu’en vertu de la preffion de Peau qui eft au-déflus. | La vifcofité & la cohéfion naturelle des parties de l’eau,& l’union qu’elles ont les unes avec les autres, fait que les parties inférieures, mûes par la preflion des fupérieures , entraînent à leur tour celles-ci, qui autrement dans un lit horifontal n’auroient aucun mouvement , ou n’autoient qu’un mouvement pref- que nul, fi le canal n’avoit que très-peu de pente. Ainfi les parties inférieures , en ce cas, rendent anx fupérieures une partie du mouvement qu’ellesenre- çoivent par la preffion : de- là il arrive fouvent que la plus grande vitefle des eaux d’une riviere eft au milieu de la profondeur de fon lit, parce que les parties qui y font, ont l’avantage d’être accélérées par la prefion de la moitié de la hauteur, fans être retardées par le fond. | Pour favoir fi Peau d’une riviere qui n’a prefque point de pente, coule par le moyen de la vitefle qu’- elle a acquife dans fa defcente ou par la preffion per- pendiculaire de fes parties , il faut oppofer au cou- rant un obftacle qui lui foit perpendiculaire : fi l’eau s’éleve & s’enfle au - deflus de l’obftacle , fa vitefle vient de fa chûte ; fi elle ne fait que s’arrêter, fa vi- tefle vient de la preffion de fes parties. Les ffeuves, felon Guglielmini , fe creufent pref- que tous feuls leur lit. Si le fond a originairement beaucoup de pente, l’eau acquiert en conféquence une grande viteffe; elle doit par conféquent détrui- re les parties du fond les plus élevées , &x les porter dans les endroits plus bas, & applanir ainfi peu-à- peu le fond en le rendant plus horifontal. Plus l’eau auta de vitefle, plus elle creufera fon fond, & plus elle fe fera par conféquent un lit profond. Quand l’eau du Juve a rendu fon lit plushorifon- tal, elle commence alors à couler elle-même thori- fontalement , & par conféquent agit fur le‘fond de fon lit avec moins de force , jufqu’à ce qu’à la fin fa force devienne égale à la réfiftance du fond. Alors le fond demeure dans un état permanent , au moins pendant un tems confidérable , 87 ce tems eft plus ou moins long felon la qualité du fol ; car l’argille & la craie, par exemple, réfiftent plus long-tems que le fable & le limon. | D'un autre côté, l’eau ronge continuellement les bords de fon lit, & cela avec plus ou moins de for- ce felon qw’elle les frappe plus perpendiculairément. Par cet effort continuel, elle tend à rendre les bords de fon lit paralleles au courant ; & quand elle a pro- duit cet effet autant qu'il eft poffible , elle ceffe alors de changer la figure de fes bords. En même tems que fon courant devient moins tortueux, fon lit s’élar- git, c'eft-à-dire que le feuve perd de fa profondeur, & par conféquent de la force de fa preflion : ce qui continue juiqu'à ce qu'il y ait équilibre entre la for- ce de l’eau & la réfiftance des bords ; pour lors le fleuve ni les bords ne changent plus. Il eft-évident par l’expérience , qu'il y a réellement un tel équili- bre, puifque Pon'trouve que la profondeur & la lar- geur des rivieres ne pañle point certaines bornes. Le contraire de tout.ce qu’on vient de dire peut auffi quelquefois arriver. Les fleuves dont les eaux font épaifles 8 limoneufes, doivent dépofer au fond de leur lit'une partie des matieres hétérogenes que ces eaux-contiennent, & rendre par-là leur lit moins profond, Leurs bords peuvent auf fe rapprocher par la dépofition continuelle de ces:mêmes matieres. I peut même arriver que ces matieres étant jéttées Join du fl de l’eau, entre les bords.êc le courant, & n’ayant prefque point de mouvement, formentpeus à-péu'un Nouveau rivage. : Or, ceseffets contraires & oppofés femblent pref. que toüjours conçourir ; & {6 combiner différem F SSsss i 872 CE ment enfemble, felon les circonftances ; auffi.eft-1l fort difficile de juger de ce qui en doit réfulter. Il eft cependantnéceffaire de connoître fort exaétement de quelle maniere ces effets fecombinent, avant de fai- re aucun travail qui tende à produire quelque chan- gement dans une riviere, fur-tout lorfqu'il s’agit d’en détourner le cours. Le Lamone qui fe jette dans le PO, ayant été détourné de fon cours pourle faire décharger dansla mer Adriatique, a été fi fort déran- gé par ce changement, & fa force fi diminuée, que {es eaux abandonnées à elles-mêmes, ont prodigieu- fement élevé leur lit par la dépofñition continuelle de leur limon; de maniere que cette riviere eft deve- nue beaucoup plus haute que n’eft le Pô dans le tems de fa plus grande hauteur, & qu'il a fallu oppofer au Lamone, des levées & des digues très-hautes pour en empêcher le débordement. Voyez Dicus, LEVÉE. Un petit fleuve peut entrer dans un grand, fans en augmenter la largeur ni la profondeur. La raifon de ce paradoxe eft , que l’addition des eaux du petit ffeu- ve peut ne produire d’autre effet, que de mettre en mouvement les parties qui étoient auparavanten re- pos proche des bords du grand, & rendre ainfi la vi- tefle du courant plus grande, en même proportion que la quantité d’eau qui y pafle. Ainfi le bras du PÔ qui pañle à Venife, quoiqu'augmenté du bras de Fer- rare-& de celui du Panaro, ne reçoit point d’accroif- fement fenfible dans aucune de fes dimenfons. La même chofe peut fe conclure proportion gardée, de toutes les augmentations que l’eau d’un fÆeuve peut recevoir, foit par l’eau d’une riviere qui s’y jette, {oit de quelqu’autre maniere. Un fleuve qui fe.préfente pour entrer dans un au- tre, foit perpendiculairement, foit même dans une direétion oppofée au courant de celui oùil entre, eft détourné peu-à-peu.& par degrés de cette direétion, & forcé de couler dansun lit nouveau & plus favo- rable pour l’union des deux rivieres. L’union de deux rivieres en une doit les faire couler plus vite, par la raïfon, qu’au lieu du frote- ment de quatre rivages , il n’y a plus que le frote- ment de deux à furmonter, & que le courant étant plus éloigné des bords coule avec plus de facilité; outre que la quantité d’eau étant plus egrande:& cou- lant avec plus de vitefle, doit creufer davantage le lit, &même le rendre fi profond que les bords fe rap- prochent. De-là il arrive fouvent que deux rivieres étant unies, occupent moins d’efpace fur la furface de la terre, & produifent par-là un avantage dans les terreins bas, par la dépofition continuelle que ces terreins y. font des parties bourbeufes & fuperflues qu’ils renferment ; ils forment par ce moyen une ef- pece de digue à ces rivieres, qui empêche les inon- dations. Sur quoi voyez Particle CONFLUENT, où " Von fait voir que le phyfique dérange ici beaucoup le géométrique. Ces avantages font fi confidérables , que Gugliel- mini croit que la nature les a eus en vûe, en rendant la jonétion & l'union des rivieres fi fréquente. Tel-eft l’abregé de la doë@rine de Guglielmini, fur le mouvement des fleuves, dont M. de Fontenelle a fait l'extrait dans les mem. de l'acad, 1710. Pour déterminer d’une maniere plus précife les lois générales du mouvement des fleuves, nous ob- ferverons d’abord qu'un. ffuve eft dit demeurer dans le même état, ou dansun état permanent ;quand il ‘coule uniformément, de maniere qu'il eft toùjours à la même hauteur dans le même endroit. Imaginons enfuite un plan qui. coupe le fleuve perpendiculaire- ment à fon fond, & que nous appellerons féfior du | fleuve. Voyez Planche hydroflatiqg. fig. 34: Cela pofé, quand un feuve eft terminé :par. des Bords unis, paralleles l’un. à l’autre 8 perpendicu- laires à l’horifon, &c que le fond eft auffi une furface L plane, horifontale ou inclinée , la feîion fera. des angles droits avec ces trois plans , & fera un paral- lelogramme. à | | Or, lorfqu’un feuve eft dans un état permanent, la même quantité d’eau coule en même tems dans chaque feétion. Car l’état du courant ne feroit pas permanent, sil ne répafloit pas toüjours à chaque endroit autant d’eau qu'il vient de s’en écouler, Ce qui doit avoir lieu, quelle que foit l’irrégularité du lit, qui peut produire dans le mouvement du ffuve différens changemens à d’autres égards , par exem ple, un plus grand frotement, à proportion de l’iné- galité du lit. Les irrégularités qui fe rencontrent dans le mou- vement d’une riviere, peuvent varier à l'infini; &cil n’eft pas poflible de donner là-deflus des regles. Pour pouvoir déterminer la vitefle générale d’un ffeuve , il faut mettre à part toutes les irrégularités, & n’avoir égard qu’au mouvement général du courant. + Suppofons donc que l’eau coule dans un lit réeu- lier, fans aucun frotement fenfble, & que le lit foit terminé par des côtés plans , paralleles l’un à l’autre, & verticaux; enfin que le fond foit anfli une furface plane & inclinée à l’horifon. Soit 4 Elle lit, dans le- quel Peau coule, venant d’un réfervoir plus grand , ët fuppofons que l’eau du réfervoir foit toñjours à la même hauteur, enforte que le courant de la riviere foit dans un état permanent; l’eau defcend de fon lit comme fur un plan incliné, & sy accélere conti- nuellement; & comme la quantité d’eau qui pafle par chaque feétion dans le même tems, doit être la même par-tout, il s'enfuit que la hauteur de l’eau doit diminuer à mefure qu’elle s'éloigne du réfervoir, & que fa furface doit prendre la figure gs, termi- née par une ligne courbe igs, qui s’approche tou jours de plus en plus de C£. Pour déterminer la viteffe de l’eau dans les diffé- rens endroits de fon lit, fuppofons que l’origine du lit 4 B CD foit fermée par un plan: fi on fait un trou dans ce plan, l’eau jaïlira plus ou moins loin du trou, felon que le trou fera plus onu moins diftant de la fur- face de l’eau du réfervoir ki; & la vitefle avec la- quelle Peau jaillira, fera égale à celle qu’acquer- roit un corps pefant-en tombant de la furface de l’eau juiqu'au trou; ce qui vient dela preffion de l’eau qui eft an-deflus du trou : la même preffion, & par con- féquent la même force motrice fubffte quand Pobf- tacle 4 C eftôté, 8 chaque particule. de l’eau coule dans le lit avec unevitefle égale à celle qu’elle au- roit acquife en tombant de la furface de l’eau jufqu’à la profondeur où eft cette particule. Chaque parti- cule fe meut donc comme fur un plan incliné, avec un mouvement accéleré , & de la même maniere que fi, tombant verticalement, elle avoit continué {on mouvement à la même profondeur au-deflous de la furface de l’ean, à compter du réfervoir de: la ri- viere, = Donc fi on tire la ligne horifontalez:, les parti- cules de l’eau auront enr la même vitefle-qu’acquer- roit. un corps, qui tombant de la hauteur TC, par- courroit la ligne Cr ; vitefle qui eft égale celle qu’: acquerroit un corps en tombant le long de er.-Par conféquent on peut déterminer :en:quelqu’endroit que ce foit la vitefle du courant ,.entirant deceten- droit.une perpendiculaire au plan horiféntal, :que l’on conçoit pañler par la furface de l’eaudu réfer- voir de la riviere; la vitefle: qu'un-corps acquerroit en tombant de la longueur de cette perpendiculaire, eftégale à la vitefle de l’eau qu’on cherche, & cette vitefle-eft pa conféquent d'autant plus grande , que Ja perpendiculaire eft plus grande. D'un point quel- conque, comme r, tirez rs perpendiculaire au fond du lit, cette ligne mefurera la baufeur ou la profon- deur de larriviere. Puifque rs eftinchinée à lhorifons, ET Ë f des différens points de cette ligne on tire des per pendiculaires à 24, elles feront d'autant plus courtes qu'elles feront plus diftantes der, & la plus courte de toutes fera sx; par conféquent les vitefles des parties de l’eau dans la ligners, font d'autant moin- dres qu’elles font plus proches de la furface de la r1- viere, & d’autant plus grandes qu’elles en font plus éloignées. Cependant la vitefle de ces parties approche de plus en plus de l'égalité, à mefure que la riviere fait plus de chemin : car les quarrés de ces vitefles font comme r#à 54 ; or la différence de ces lignes dimi- nue continuellement, à mefure que la riviere s’éloi- gne de fon origine, parce que la profondeur rs di- minue auf continuellement à mefure que ces lignes augmentent. Donc puifque la différence des quarrés des vitefles diminue continuellement, à plus forte raïfon la différence des vitefles doit diminuer auf, puifqu'’un quarré eft toùjours en plus grand rapport avec un quarté plus petit que les racines de ces quar- rés ne le font entr’elles. Si l’inclinaifon du fond eft changée à Porigine de la riviere , que le fond, par exemple, devienne y7, & qu’une plus grande quantité d’eau coule dans le lit, le lit deviendra plus profond dans toute la lon- gueur de la riviere, mais la viîtefle de l’eau ne chan- gera point. Car cette vitefle ne dépend point de la profondeur de l’eau dans la riviere, mais de la dif- tance qu'il y a de la particule müe, au plan horifon- tal, qui paffant par l’origine, eft continué au-deffus de cette particule; & cette diftance eft mefurée par la perpendiculaire 75 ousz : or ces lignes ne {ont point changées par la quantité d’eau plus ou moins grande qui coule dans le lit, pourvü que l’eau de- meute à la même hauteur dans le réfervoir Suppofons que la partie fupérieure du lit foit fer- mée par quelau’obftacle comme X , qui defcende un peu au-deffous de la furface de Peau : comme l’eau n’a pas en cet endroit la liberté de couler à fa partie fupérieure , elle doit s’y élever; mais la viteñle de l’eau au-deflous de la cataraéte n’augmentera point ; & l’eau qui vient continuellement, doit s'élever toi jours de plusen plus, de maniere-qu'à la fin elle dé- bonde, ou au-deflus de l’obftacle, ou au-deflus de fes bords. Si on élevoit les bords auffi-bien que Pobfta- cle, l’eau s’éleveroit à une hauteur au deflus de cr; juiqu’à ce que cela arrive, la vitefle de l'eau ne peut augmenter: mais quand une fois | eawfe fera élevée au-deflus de 7, la hauteur de l’eau dans le réfervoir fetaauemenrée. Car comme on fuppofe que la riviere eft dans un état permanent, 1l faut néceffairement qu'il entre continuellement autant de nouvelle eau dans le réfervoir, qu'il s'en échappe pour couler dans le lit : fi donc il coule moins d’eau dans le lit, la hauteur de l’eau doit augmenter dans le réfervoir, jufqu’à ce que la vitefle de l'eau qui coule au-deffous de l’obftacle foit tellement augmentée, qu'il coule par-deflous l’obftacle autant d’eau qu'ilen couloit auparavant dans le lit, lorfqu'il étoit libre. Foyez ONDE. = “0 ) Voilà la théorie de Guglielmini ; fur la viteffe des rivieres, théorie purement mathématique, & que les circonftances phyfiques doivent altérer beau- coup. Avant que d'entrer là-deflus dans quelque détail, je remarquerai 1°. que dans mes réflexions fer la canfe générale des vents, Paris 1747 , J'ai dé- montré p.179, qu'un fluide quiparune caufe quel- conque fe mouvroit horifontalement ëêc umiformé-| mententré deux bords verticaux, ne devroitpas tob; jours s’accélérer dans les endroits où fon lit vien-: droit à fe retrédr, mais que fuivant le rappott de fa. profondeur avec l'efpace qu’il parcourroit dans une feconde jildevoit tantôt s’abaiffer dans ces endroits; tantôt s’y élever; que dans ce dernier cas, 1l aug-, FLE 872 menteroit plus en hauteur en s’élevant, qu’il ne per- droit en largeur, & que par conféquent au lieu d’ac- célerer fa vitefle, il devroit au contraire la ralentir, puifque l’efpace par lequel il devroit pañler, feroit augmenté réellement au lieu d’être diminué. Je remarquera 2°.que dans mon effai de La refif- tance des fluides , Paris 1752, jai donné le premuer une méthode générale pour déterminer matkémati- quement la vitefle d’un fÆzve en un endroit quelcon- que; méthode qui demande une analyfe très-com= pliquée, quand on veut faire entrer dans le problè- me toutes fes circonftances, quoiqu’on fafle même abftration du phyfique, Voyez l'ouvrage cité are 156 6 fuiv. Le mouvement des eaux dansle cours des fZuves, s’écarte confidérablement de la théorie géométrique, 1°. Non-feulement la furface d’un fÆuve n’eft pas de niveau d’un bord à l’autre , mais même le milieu eft fouvent plus élevé que les deux bords ; ce qui vient de la différence de vitefle entre l’eau du milieu du fleuve, & les bords. 2°. Lorfque les fleuves appro- chent de leur embouchure, l’eau du milieu eft au contraire fouvent plus bafle que celle des bords, parce que l’eau des bords ayant moins de vitefle, eft plus refoulée par la marée. Voyez FLux. 3°.La vitefle des eaux ne fit pas à-beaucoup-près la pro= portion de la pente; un fÆuve qui a plus de pente qu'un autre, coule plus vite dans une plus grande raifon que celle de la pente : celarvient de ce que la vitefle d’un ffuve dépend encore plus de la quantité de l’eau & du poids des eaux fupérieures, que de la pente. M, Kuhn, dans fa differtation fur origine des fontaines, s’eft donc trompé en jugeant de la pente des ffeuves par leur vitefle, & encroyant, par exem- ple fur ce principe, que la fource du Danube eftde deux milles d'Allemagne plusélévée que fon. embou- chure, &c. 4°. Les ponts, leslevées & les autres ob- ftacles qu’on établit fur les rivieres, ne diminuent pas confidérablement la vitefle totale du cours de Peau, parce que l’eau s’éleve à la rencontre de l’a- vant-bec d’un pont, ce qui fait qu’elle agit davanta- ge par fon poids pour augmenter la vitefle du cou- rant entre les piles. 5°. Le moyenle plus sûr de con- tenir un fZuve, eft en général de retrécir fon canal, parce que fa vitefle par ce moyen eft augmentée, te fe creufe un lit plus profond ; par [a même rai on on peut diminuer ou arrêter quelquefois les inondations d’une riviere, non en y faifant des fai- gnées:, mais en y faifant entrer une autre riviere , parce que l’union des deux rivieres les fait couler lune.& l'autre plus vite comme on l’a dit ci-def- fus. 6°, Lorfqu’une riviere groflit, la viteffe augmen- te jufqu’à ce.que la riviere déborde :.alors la viteffe diminue , fans doute parce que lelit eft augmenté en plus grande proportion que la quantité d’ean, C’eft par cette rafon que linondation diminue proche l'embouchure, parce que c’eft l’endroit où les’ eaux ont le plus de vitefle. ; . De la mefure de la vtefle des fleuves, Les Phyficiens & les Géometres ont imaginé pour cela différens moyens. Guglielmini en propofe un dans fes ouvra= ges, .quisnous-paroît trop compoié & trop peu cer- tain. Voyez {on traité della natura de’ fiumi , & fon aquarum fluentium menfura. Parmi les autres moyens, . un des ou fimples eft celui du pendule, On plonge un pendille. dans l’eau courante, .êc on juge de. la. v1- tefle de l’eau:par la quantité à laquelle le poids s’éles : ve, c’eft-à-dire par l'angle quele fil fait avecila ver, ——— | ticale, Mais cette méthodeparoit meilleure pour com- parer enfemble les vitefles de deux fentes ; que pour | avoir la vitefle abfolue de chacun. Les tangentes des: angles font à la vérité entr'elles, comme les quarrés des vitefles, & cette regle eft aflez sûre : maisil n'eft pas auf facile de déterminer direétement la vitefla. 874 FLE du fenve par l'angle du fil. Voyez RÉSISTANCE DES FLUIDES 6 FLUIDE. Un autre moyen eft celui que M, Pitot a propofé ans les mémoires de d'académie de 1732. Iprendun tuyau recourbé ,:dont la partie fapérieure eft ver- ticale., & linféneure horifontale. Il plonge ‘cette derniere dans l’eau, enforte que l’eau entre par la branche horifontale. Selon les lois de Hydraulique, d’eau doit s'élever dans le tuyau vertical, à une hau- teur égale à celle dont un corps pefant devroit tom- ber, pour acquérir une vitefle égale à celle de l’eau. Mais on fent encore que ce moyen eft añlez fautif: 12°, Peau fera retardée par l'angle qui forme la partie horifontale avec la verticale : 2°. elle le fera encore Je long du tuyau par le frotement , ainf elle s’éleve- ra moins qu'ellene devroitfinvant la théorie ; &ileft très-dificile de fixer le rapportentre la hauteur à la- quelle elle s’éleve, & celle à laquelle elle doit s’éle- ver, parce que la théorie des frotemens eft très-peu connue. Voyez FROTEMENT. Le moyen le plus fimple & Le plus sûr pour con- noître la vitefle de l’eau , eft de prendre un corps à- peu-près auf. pefant que l’eau, comme une boule de cire, de le jetter dans l’eau , & de juger de la vi- tefle de l’eau par celle de cette boule ;:car la boule acquiert très-promptement & prefqu’en un inftant, une vitefle à-peu-prés égale à celle de l’eau. C’eft. ainfi qu'après s’être éprufé en inventions fur des cho- {es de pratique, on eft forcé d’en revenir fouvent à ces jeux furent inftitués en l'honneur de Flora, c’eft- | à-dire de la déeffe des Fleurs, dont le culte fut éta- | bli dans Rome par Tatius roi des Sabins, & colle- | gue de Romulus. Elle avoit déjà du tems de Numa fes prêtres 8 fes facrifices ; mais on ne commença | À célébrer fes jeux que lan de Rome: 13, fous deux | édiles de la famille des Publiciens. C’eft Ovide qui | nous l’apprend, ce font les médailles qui le conñr- ! ment, & l'acite n’y donne pas peu de poids ,lorfqu' En SE 876 FEO dit que Lucius & Marcus Publicius firent rebdtir Le temple de Flore dans le couts de leur édilité. Cepen- dant on ne renouvelloit ces jeux que lorfque l'in- ‘tempérie de l’air annonçoit ou faifoit craindre la fé- rilité, ou lorfque les livres des fibylles Pordonnoient, felon la remarque de Pline. Ce ne fut que l’an de Rome 580, que les jeux fo- raux devinrent annuels à l’occafien d’une férilité qui dura plufieurs années, & qui avoit été annoncée par des printems froids & pluvieux. Le fénat pour flé- chir Flore & obtenir de meilleures récoltes à lave- mur, ordonna que les jeux de cette divinité fuffent célébrés tous les ans régulierement le 28 d'Avril ; ce qui eut lieu jufqu'au tems qu'ils furent entiere- ment profcrits, Le decrét du fénat commença d’ê- tre exécuté fous le confulat de Poftumius & de Læ- nas. Le fonds confacre aux frais des Jeux floraux, fut tiré des amendes de ceux qui s’'étoient appropriés les terres de la république. On les célébroit la nuit aux lambeaux dans la rue Patricienne ;.& quelques - uns prétendent que le cir- que dela colline kortlorum, y étoit uniquement def. tiné. On y donna au peuple la comédie entre plu- ieurs autres plaifirs de ce genre. Si l’on en croit Sué- tone dans la vie de Galba, & Vopifcus dans celle de Carin, ces princes y firent parôitre des éléphans qui danfoient fur la corde. Mais le déréglement dans Îles mœurs , Cara@érifoit proprement les /ezx floraux. C’eft aflez pour s’en convaincre, que de fe rappel- ler qu’on y raflembloit les courtifannes toutes nues au fon de la trompette; & quoique S. Auouftin ait foudroyé avec raifon un fpeacle fi honteux, Juvé- nal en dit autant que lui dans ces quatre mots: Di- griffima prorsis florali matrona tuba. Ovide fe contente de peindre les jeux floraux fous les couleurs de cette galanterie, dont il donne dans fes écrits de fi dangereufes leçons. La déefle Flore, dit:il, vouloit que les courtifannes célébraffent fa fête, parce qu'il eft jufte d’avertir les femmes qu’el- les doivent profiter de leur beauté, pendant qu’elle eft dans fa fleur ; & que fi elles laïflent pañler le bel âge, elles feront méprifées comme une rofe qui n’a plus que fes épines : morale toute femblable à celle cle nos opéra Où font les noms honteux d'erreur € de foibleffe ; Notre devoir ef? combattu , Et Pexemple des dieux y fait à la jeuneffe Un fcrupule de la vertu. Valere Maxime rapporte que Caton s'étant un jour trouvé à la célébration des jeux floraux, le peu- ple plein de confidération pour un homme fi refpec- table , eut honte de demander en fa préfence le fpec- tacle des infames nudités de ce jour-là: Favonius lui ayant repréfenté les égards extraordinaires qu’on avoit pour lui, 1l prit le parti de fe retirer pour ne point troubler la fête, & en même tems ne point voir les defordres qui s’y commettoient ; alors le peuple s'étant apperçû de la complaifance de Caton, le combla d’éloges après fon départ, & ne changea rien à fes plaifirs. Voyez l’article précédent. Au refte, je ne crois pas devoir rappeller ici les fautes dans lefquelles Laétance eft tombé fur l'infti- tution des eux floraux ; je remarquerai feulement que comme la vérité de la religion chrétienne n’a ja- mais béfoïn d’un faux appui, il ne faut pas adopter tout ce qui a été écrit par un zele erroné pour com- battre le paganifme. Il ne faut pas que nos raïfonne- mens reflemblent à ces rivieres qui charrient dans feur lit du fable d’or & de la boue mélés enfemble : enfin il ne faut pas croire que tous moyens foient in- différens , 8 même louables, pourvû qu'ils puiffent fervir à endommager l'erreur, comme s'exprime Montagne, FLO Ïl eft tems d'indiquer les fources où l'on peut s’inftruire à fond fur les jeux floraux. Voy, Oyide qui les décrit dans fes Falles , LP. v. 326 & feq, Valere Maxime, Liv, IL, c, v. Juvénal, fa. y. Pline, Zy. XVIIT, chap. xxjx. Velleius Paterculus , y. L c. #7. Suétone dans Galba , chap. j. Séneque , pif. 47. Tacire , annal, Liv. II. chap. xljx. Perle , Jar. v.S. Auguftin, epiff. 202, Arnob. iv. III. pag. 1154 & liv. VII, pag. 238. Parmi les modernes, Hofpi- nien, de origine feffor. Thomas Codwin, antholog. rom, Liv. IT, c, ij. fe, 3. Vofius, de origine idolol. Liv. I, ec, xi. Tufle- Lipfe, EL, liv. I. Struvius, Synt. antig, rom, chap. jx. p. 436. Rofinus, anriq. rom, Lib. II,c.xx. lib. TV, ©, vi. lib, XV. c. xv. &c. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FLORAUX (JEUX ), Hiff. mod. nous avons auffi en France des Jeux floraux , qui furent inftitués en 1324. On en doit le projet & l’établiflement à fept hom- mes de condition, amateuts des Belles-Lettres, qui vers la Touffaint de lan 1323, réfolurent d'inviter, par une lettre circulaire, tous les troubadours , où poëtes de Provence, à fe trouver à Touloufe le pre- mier de Mai de l’année fuivante, pour y réciter les pieces de versqu'ils auroient faites, promettant une violette d’or à celui dont la piece feroit jugée la plus belle, Les capitouls trouverent ce deflein fi utile & & beau, qu'ils firent réfoudre au confeil de ville, qu'on le continueroit aux dépens de la ville ; ce qui fe pra- tique encore. Eñ 1325, on créa un chancelier & un fecrétaire de cette nouvelle académie. Les fept inftituteurs prirent le nom de #ainteneurs, pour marquer qu'ils {e chargeoïent du foin de maintenir l'académie naif- fante. Dans la fuite, on ajoûta deux autres prix à la violette , une églantine pout fecond prix , & une: fleur de fouci pour troifieme : il fut auffi reglé que celui qui remporteroit lé premier prix, pourroit de- mander à être bachelier ; & que quiconque les rem- porteroit tous trois, feroit créé docteur en gaie-fcien- ce, S'il le vouloit, c’eft-à-dire en poëffe. Les lettres de : ces degrés étoient conçies en vers ; l’afpirant les demandoit en rime, & le chancelier lui répondoit de même. Diéionn. de Trévoux 8& Chambers. Il y a un regiftre de ces jeux à Touloufe, qui rap= porte ainf leur établifflement : d’autres difent au con traite que c’étoit une ancienne coûtume, que les poëtes de Provence s’affemblaffent à Touloufe poux. lire leurs vers, & en recevoir le prix, qui fe don- noit au jugement des anciens ; que ce ne fut que vers 1540 qu'une dame de condition nommée Clémence Ifaure , légua la meilleure partie de fon bien à la vil- le de Touloufe, pour éternifer cet ufage , & faire les frais des prix , qui feroient des fleurs d’or ou d’ar- gent de différentes efpeces. La cérémonie des eux floraux commence le pre< mier de Mai par une mefle folennelle en mufique ; le corps de ville y affifte. Le 3 du mois, on donneur diné magnifique aux perfonnes les plus confidérables de la ville : ce jour-là on juge les prix, qui font au nombre de cinq; un prix de difcours en profe, un prix de poëme, un prix d’ode, un prix d’églogue , ëêc un prix de fonnet. Arnaud Vidal de Caftelnaudarz remporta le premier en 13241la violette d’or. Les Jeux floraux ont été érigés en académie par lettres patentes en 1694 ; le nombre des académi- ciens eft de quarante, comme à l'académie françoile, FLORENCE, (Géog.) ancienne & celebre ville, déjà confidérable du tems de Sylla, aujourd’hui ca- pitale de la Tofcane, ayec un archevêché érigé par Martin V.une univerfité, une académie , éc. Cette ville où la langue italienne eft très-culti- vée pour l'élégance, eft ençore une des plus re “Li (SE bles d'Italie , pat la douceur de fon élimat , & la beauté de fon expofñition. L’Arno la partäge en deux dans une plaine délicieufe, dont la largeur eft de 500 brafles ; la brafle de #orence eft de deux piés romains. C’eft dans les montagnes de fon voifinage que fe trouvent ce marbre, Ou ces pierres aufli curieufes ; mais non pas uniques ; qui étant fciées, polies, &c artiftement difpofées ; repréfentent des efpeces de buiflons , des arbres, des ruines, des payfages, éc, Voyez MARBRE 04 PIERRE DE FLORENCE. | On compte à Florence plufeuts palais ; parmi lef- quels le palais ducal vivra toûjours dans la MÉMOI* re des hommes, avec le nom des Médicis: on fait quelles étoient fous leur empire les décorations dé ce palais, La place par laquelle on y arrivoit, étoit ornée de ftatues de la main des plus grands-maîtres, de Michel-Ange , de Donatelli, de Cellini, de J ean de Bologne, &c. En fe promenant dans la grande galerie, on y admiroit le Scipion de bronze, la Lé- da, la Julie, la Pomone , Vénus, Diane, Apollon ; Je Bacchus grec, &la copie de Michel-Ange, qui ne le cédoit point à l'original. Sous le regne des Mé- dicis, cette galerie conduifoit à plufieurs fallons dé- corés de ftatues, de buftes, de bas-reliefs, de ta- bleaux ineftimables, d’un nombre incroyable de mé- dailles , d’idoles, de lampes fépulchrales , de pier- res, de minéraux , de vafes antiques, & d’autres cu- tiofités de la nature 8e de l’art, dont les gravüres & les defcriptions abrégées forment plufeurs magnifi- ques volumes :7-folio. _ C’étoit en particulier dans Le fallon oftogone de cette fuperbe galerie, qu'on voyoit un diamant qui tenoit à jufte titre le premier rang entre les joyaux de ce cabinet ; il pefoit cent trente neuf karats & demi : on y trouvoit une tête antique de J ules-Cé- far, d’une feule turquoife; des armoires pleines de vafes d’agate, de lapis, de cryftal de roche, de cornalinés garnies d’or & de pierres fines ; une table, &c un cabinet d'ouvrages de rapport de diafpre orien- tal, de chalcédoine, de rubis, de topaze, & d’autres pierreries ; uneimmenfe quantité de tableaux , tous chefs-d'œuvre des meilleurs peintres, & une infinité de pierres gravées : enfin parmi des ftatues inefti- mables , il y avoit fix figures antiques dont on ne fe laffe point de parler ; le rotateur, le luteur, le faune , le Cupidon endormi, les deux Vénus, l'une de fix piés l’autre de cinq, & cette derniere étoit la fameufe Vénus de Médicis. Voyez ROTATEUR , & VÉNUS DE MÉDICIs , &c. Aufli , comme le dit M. de Voltaire , Forence n’oubliera jamais les Médicis, ni Cofme, né en 1389, mort regretté de fes ennemis même, & dont le tom- beau fut orné du nom de pere de La patrie , ni {on pe* tit-fils Laurent de Médicis, furnommé le pere des Mu- Jes ; titre qui ne vaut pas celui de pere de La patrie, mais qui annonce qu'il l’étoit en effet. Sa dépenfe vraiement royale lui fit donner le titre de magnifique ; &x la plus grande partie de fes profufons étoit des li- béralités qu'il diftribuoit avec difcernement à toutes fortes de vertus, pour parler comme l’abbé du Bos, Entre les hommes célebres que Florence a produits, je ne dis pas dans les Arts, dont la lifte me meneroit trop loin, (Voyez cependant pour les peintres Eco- LE FLORENTINE.) mais je dis dans Les Lettres feu- lement, on ne doit pas taire : Le Dante ( Alligeri), pere de la poéfie italienne , ne l'an 126$, & mort à Ravenne l’an 1320, après avoix été un des gouverneurs les plus diftingués de Florence , pendant les faétions des Gueilphes & des Gibelins. Machiavel (Nicolas), aflez connu par fon Hiffoire de Florence, & plus encore par fes livres de politi- que, où il a établi des maximes odicufes, trop fou- Tome VI. FLO 877 vênt fuivies dans là pratique par ceux qui les bla ment dans la fpéculation; d’ailleurs écrivain du pre: mier ordre. Voyez PRINCE. Îl mourut en 15209. Guicciardini (Francifco), contemporain de Machia- vel, né lan 1482; mort l’an 1540, fameux par fes négociations , fes ambaflades, fes talens militaires 3 fa paflion pour l'étude, & fon Æi/oire d'Italie , dont la meilleure édition françoife eft celle de : 593 à caufe des obfervations de M, de la Nonë: Galiléo (Galiléi) , immortel par fes découvertes aftronomiques , & que l’inquifition perfécuta, Voyez l'article CoPERNIC. [l mourut l’an 1642, après avoir perdu, pour me fervir de fa propre expreflion, {es yeux qui avoient découvert un nouveau ciel; Viviani (Vicengio), né en 1621, mort en 1703 à élève de Galilée, & de plusgrand géometre pour {or tems: , {, J’ajoûte ici Lulli (Jean-Baptife), né en 16 33% mort à Paris en 1687 ; parce que Lulli fit en France pour la Mufique, ce que Galilée avoit fait dans les Sciences pour l’Aftronomie : fes innovations lui ont également reuffi ; il atrouvé des mouvemens nou veaux, & juiqu'alors inconnus à tous nos maîtres s il a fait entrer dans nos concerts jufqu’aux tambours & aux tymbales ; il nous a fait connoûre les baffes les milieux , 8 les fugues ; én un mot, il a étendu dans ce royaume l'empire de l'harmonie ; & depuis Lulli, Part s’eft perfe&ionné dans certe progrefion. Florence eft fituée à 19 lieues S. de Bologne, 24 S. E. de Modene, 46 S. O. de Venife, so N, O. de Rome. Long, 284, 511, o!!, larir, 434, 46!, 301, fui= vant Caffini. (D. J.) FLORENCE , (érat de) Hifl. cet état étoit au com- mencement une république , dont la conffitutiom mal-enténdue ne manqua pas de l’expofet à des trou: bles, à des partis, & à des fa@ions fréquentes : cei pendant par Ja force de la liberté, non-féulement le peuple y étoit nombreux, mais le commerce & les Arts y fleurirent jufqu’au tems qu’elle perdit avec fa liberté, fa vigueur & {on opulence. [left vrai quel le a été guérie de ces émeutes, mais par un remede pire que le mal, par la fervirude , la mifere qui en eft le fruit, & la dépopularion qui l'accompagne d’or- dinaïre : inffrumenta fèrvitutis & reges habit. Voyez l’hifloire de Florence depuis lé commencement de cet état juiqu’à nos jours, & vous ferez convaincu de cette vérité. (D. J.) FLORENCÉ , adj. (£erme de Blafon.) il fe dit de la croix dont les quatre extrémités fe terminent eñi fleurs-dé-lis, . #}. S. Denis, à la croix fforencée de gueules, . . FLORENTIN (S4iNT-), Géog. petite ville de Champagne dans le Sénônois für lArménçon , entre Joigny & Flogny, én latin, fé Floreñtini fanum = dès le tems de S. Bernard elle portoit ce nom. Voyez dom Mabillon & M. le Bœuf. Elle eft à 6 lieues N: E. d'Auxerre, 10 S. E. de Sens. Longir, 214, 20’; latit. 474 567, (D. JT.) * FLORENTINE, £. f. (Manufait. en foie.) étoffe de foie fabriquée d’abord à Florence ; c’eft une efpe: ce de fatin façonné , blanc ou de couleur. FLORER 7 vaiffeau, où lui donner les fleurs 3 (Marine. ) c’eft lui donner le fuif:ce mot n’eft guere d'ufage. (Z) FLORES , (Géog.) île d’Afie dans la grande mer des Indes ; on l’appelle d'ordinaire evde. Elle eft par le 9%, de latitude auftrale ; & fa pointe la plus orien- tale eft par les 1404. de longitude , felon M. de lIfle. On donne auffi le nom de fores à une île de l'O: céan atlantique , & l’une des Açores, Les Porrupais l’appellent J/ha de flores ; & quelques François qui brouillent tout, & veulent donner la ne tout , la EL PS 870 FLO nomment ridiculement le des Kleurs. Long. 325%, dut. 394 25!. (D.J.) FLORITONNE , f. f. (Comm.) efpece de laine d'Efpagne. Les floritonnes de Ségovie {ont les plus ef- timées ; celles d'Arragon & de Navarre paffent pour plus communes, _. UE FLORIDE , (Géog.) grand pays de l'Amérique feptentrionale , renfermee entre le 25 & le 404 de latit, Nord ,.êc entre le 270 & le 207 de longitude, Elle comprend la Loiufane, la Foride efpagnole , la nouvelle Géorgie, & une partie de la Caroline. Elle eft bornée au couchant & au nord par une gran- de chaîne de montagnes qui la féparent du nouveau Mexique au couchant, & de la Nouvelle-France au nord : le golfe du Mexique la baigne au midi, &c la mer dù Mexique au levant. Le cap de la Floride eff la pointe méridionale de la prefqu’ile de Tigefte, vis-à-vis de Pile Cuba, dont il eft éloigné d'environ 3o lieues , & avec laquelle il forme l’entrée du gol- fe du Mexique, ou le canal de Bahama, fameux par tant de naufrages. | Jean Ponce de Léon découvrit la Æoride la pre- miere fois l’anx$12; d’autres difent qu’elle fut pre: mierement découverte en 1497 par Sébaftien Cabok portugais, qu'Henri VII. roi d'Angleterre avoit en- voyé chercher paflage du côté de l’'Oueft, pour na- viger dans l'Orient ; mais Cabok fe contenta d’avoir vü la terre, fans avoir été plus loin. Jean Ribaut eft le premier françois qui fe foit établi dans la Floride ; il y bâtit un petit fort en 1562. Les Efpagnols ne s’y font établis qu'après avoir eu bien du monde de tué par les fauvages : mais aujourd’hui même les Fran- çois, & fur-tout les Anglois, y ont beaucoup plus de pays que les Efpagnols ; les premiers y pofledent la Louifiane , & les feconds la Nouvelle-Géorgie, avec la partie méridionale de la Caroline. La Floride comprend une fi grande étendue de pays & de peuples fans nombre, qu'il n’eft pas poñli- ble de rien dire de fa nature, de fes produétions , de {on climat, du caraétere de fes habitans ; qui con- vienne à tout ce qui porte ce nom. En général , les Floridiens ont la couleur ohvâtre tirant fur le rou- ge, à caufe d’une huile dont ils fe frotent. Ils vont prefque nuds, font braves &c aflez bien faits : ils im- molent au Soleil, leur grande divinité, les hommes qu’ils prennent en guerre , 8& les mangent enfuite. : Leurs chefs nommés paraouflis , & leurs prêtres ou medecins, nommés /ozas, femblables aux jongleurs du Canada, ont un grand pouvoir fur le peuple. Il y a dans ce pays-là toutes fortes d'animaux , d’oi- feaux , & de fimples, entr’autres quantité de faffa- fras & de phatziranda. Nous avons déjà une defcrip- tion des oifeaux & des principales plantes de la Ca- roline, avec leurs couleurs naturelles , donnée par M. Catesby. Mais quand aurons-nous une defcrip- tion fidele de la Floride ? c’eft ce qu'il eft difficile d’efpérer ; & en attendant, nous ne pouvons nous confier à celles de Laët, de Corréal, de de Bry, de Calvet, de Lefcarbot, ni même à celle du P. Char- levoix. (D, J.) | FLORIENS 04 FLORINIENS, f. m. plur. (Æf. ecclef.) nom d’une fecte d’hérétiques qui paturent dans le fecond fiecle, & tirerent leur nom d’un pré- tre de l’églife romaine appellé Forez où Florin ; qui avoit été dépofé avec Blaftus , autre prêtre, à caufe des erreurs qu'ils avoient tous deux enfeignées: ce Florin avoit été difcipledeS.Polycarpe ; mais s’étant écarté de la do@trine de fon maître , il foütenoit que Dieu étoit l’auteur du mal ,ou plütôt queles chofes interdites par Dieu n’étoient point mauvaïfes enel- les-mêmes, mais feulement à caufe de fa défenfe. [1 embraïfa auffi quelques autres opinions erronées de Valentin & des Carpocratiens, Voyez CARPO- CRATIENS, Chambers, (G) | FLORILEGE,, f nn (Théolog.) eft une efpéce de breviaire qu'Arcudius a compofé & compilé pour la commodité des prêtres & des moines grecs, qui né peuvent porter en voyage tous les volumes où les offices de leur églife fe trouvent difperfés. Le florilese comprend les rubriques générales , lé pfeautier , & les cantiques de la veffion des Septan= te , l'horloge, l'office des féries, Ge. | FLORILEGE, ( Lirrérar.) eft le nom que les Latins ont donné à ce que les grecs appellent azéhologie,, c’eft-à-dire 272 recueil de pieces choiies, contenant cé qu'il y a de plus beau & de plus fleuri dans chaque genre. J’oyez? ANTHOLOGIE. Chambers, PAL FLORIPONDIO , (Botan, exo.) arbre commun dans le Chili. Le P. Feuillée:,à qui feul nous en de- vons l’exaéte defcription , le nomme en botanifte, fframonioides arboreum ,oblongo € integro folio, fruëtn Levi : il en a donné la figure dans fon Æ/£. des plan- tes del’ Amérique méridion, PI. XLVI. « C’eft un arbre à plein vent, qui s’éleve à la hau- teur de deux toifes : la grofleur de fon tronc eft à: peu-près de fix pouces ; il eft droit , compofé d’un corps blanchätre ,ayant à fon centre une aflez grofle moelle, Ce tronc eft terminé par plufieurs branches , qui forment toutes énfemble une belle tête fphéri- que ; elles font chargées de feuilles qui naïflent com- me par bouquets; les moyennes ont environ {ept à huit pouces de longueur, fur trois à quatre pouces de largeur , portées à l'extrémité d’une queue qui eft épaifle de deux lignes , &c longue de deux pouces êc demi. Ces feuilles font traver{ées d’un bout à lautre par une côte arrondie des deux côtés , laquelle don: ne plufieurs nervures qui s'étendent vers leur con: tour , fe divifent, fe fubdivifent , 8 forment fur le plan des feuilles un agréable réfeau : le deflus de leur plan eft d’un verd foncé , parfemé d’un petit du- vet blanchätre ; & le deffous eft d’un verd clair, parfemé d’un duvet femblable, Des bafes de la queue des feuilles fortun pédicus le long d’environ deux pouces, gros d’une ligne & demi, rond, d’un beau verd, & chargé d’un duvet blanc; ce pédicule porte à fon extrémité un calice en gaine, ouvert dans le haut à un pouce &z demi de fa longueur, par un angle fort aigu , & découpé à fa pointe en deux parties. a | Du fond de cette gaine fort une fleur en tuyau; lequel eft long de fix pouces, & dont la partie exté- rieure s’évafe & {e découpe en cinq lobes blancs ter- minés en une pointe un peu recourbée en-deflous : de l’intérieur du tuyau partent cinq étamines blan- ches chargées de fommets de la même couleur ;! longs d’un demi-pouce , & épais d’une ligne. Lorfque la fleur eft pañlée , le piftil qui s'emboîte dans le trou qui eft au bas de la fleur, devient un fruit rond , long de deux pouces & demi, & gros de plus de deux pouces, couvert d’une écorce d’un verd grisâtre qui couvre un corps compofé de plu- fieurs graines renfermant une amande blanche, Ce fruit partagé dans le milieu, eft divifé intérieurement en deux parties, dont chacune eft fubdivifée en fix loges, par des cloïfons qui donnent autant de p/acer- ta : ces placenta {ont chargés de petites graines de figure irréguliere. | SF. Nous n'avons en Europe-aucun arbre fupérieur en beauté au fforipondio : lorlque {es fleurs fontépa- nouies , leur odeur admirable embaume de toutes parts. Les Chiliens fe fervent des fleurs de fZripondios pour avancer la fuppuration des tumeurs ; elles font en effet adouciflantes , émollientes, & réfolutives. Article de M. le Chevalier DE JAUCOURT. FLOS MARTIS, voyez Freur DE Fer. FLOSSADE,, f. f. (Hiff: nar.) voyez RATE. FLOT, f. m. 4s FLOTS , ( Mar.) fe dit des eaux de Ta mer, lorfqu’elles font agitées ou pouflées par le vent. Etre à flor, c'eft avoir de l’eau fufifamment fous le navire, pour qu'il fe foûtienne fans toucher. N’étre pas à flot, c’eft toucher fur le fond. Mertre à flor ; c'eft relever un bâtiment lor{qu’il a touché ; ce qui arrive lorfqu'il eft échoûé à mer baf- fe, & qu’elle vient à monter, & l’eau augmenter aflez pour le faire flotter. (Z) FLOT', 1m. (Hydrogr, & Marine.) c’eft ainfi que les Marins appellent le fx dans les marées, c’eft-à- dire l'élévation des eaux de la mer; & ils appellent Jufant, Vabaïffement ou reflux de ces eaux. Voyez Frux & RerLux , MARÉE... FLOT, serme de Riviere, {e dit en matiere de bois flotté. Il y a 2000 cordes de bois à for. Le flot commencera le mois prochain, pour dire que lon jettera le boïs à for. Le flot eft fini il y a huit jours. FLOT , (SeZlier,) houppes ou flocons de laine dont on orne la têtiere des mulets. FLOTTAISON , ( Marine.) {. f, c’eft la partie du vaifleau qui eft à fleur d’eau. FLOTTANT , adj. ferme de Blafon , qui fe dit des vaifleaux & des poiflons fur les eaux. La ville de Paris, de gueules au navire équipé d'argent, flottant & voguant für des ondes de même, au chef de France. : FLOTTEMENT, £. m. dans l'Art militaire, eftun mouvement irrégulier ou d’ondulation, que font aflez iouvent les différentes parties du front d’une troupe en marchant, qui les dérange de la ligne droi- te qu'elles doivent former pour arriver enfemble & dans le même tems à l’ennemi. [left très-important de reîifier ce défaut dans la marche des tronpes, parce que plus elles fe prêtent à ce mouvement irréguher, & plus il eft aïfé de les défaire ; car alots toutes leurs partiés'ne fe foûtien- nent pas également, & d’ailleurs elles penvent fe rompre elles-mêmes en marchant. Pour y remédier, il faut accoûtumer dans les exer- cices,, les troupes à marcher enfemble & d'un pas égal, de la même maniere que fi tous Les foldats qui compofent le bataillon , faifoient un corps folide fans defunion-de parties. Plus Le front d’une troupe eft grand, & plus elle eft expofée an fortement ; c’eft ce qui a fait dire à plufeurs habiles militaires, & entr’autres à M. le chevalier de Folard, qu'il faudroiït diminuer le front de nos bataillons & augmenter leur épaïfleur, c'eft- à-dire les mettre à fix ou huit de hauteur, comme ils létoient du tems du prince de Condé & de M. de Turenne. Voyez EVOLUTION. L'auteur auquel on attribue le mémoire concer- nant l'efai fur la légion (M. de Roftaine ), prétend! que cinquante files de front font la plus srande éten- due qu'on puifle donner aux divifions des troupes, pour les faire marcher répulierement. R S1 le fortement dans une troupe qui marche én- avant pour en combattre une autre, eft très-préju- diciable à fa force & à fa fohidité ; il n’eft pas moins dangereux à l'égard des différens corps d’unearmées qui marche pour en combattre unë autre: car files! corps n'arrivent pas également & dans lemême tems fur ennemi, les plus avancés-perdront la prôtec- tion de ceux qui couvroient leurs flancs , & par-là ils s’expoferont à être aïfément battus & mis en defordre; ce qui ne peut produire qu’un très-mau- vais effet fur ceux qui les fuivent, & fur le refte de l’armée. Auf M. le maréchal de Puyfegur dit-il que’ lorfque deux armées s’approchent pour combattre, il eftaifé de juger, fuivant l’ordre & l’exa@itude avec laquelle lune onl’autre marçhe, quelleeft celle Tome VI, | FLO 379 gé battra l’autre : ce fera celle dont le mouvement: cra le plus régulier, & dont toutes les parties regle- ront le mieux leur marcheles unes für les autres pour- arriver enfemble fur l'ennemi. (Q FLOTTE , ff. ( Marine.) c'eftun corps de plu- fleurs vaifleaux qui naviguent énfemble, Les Efpagnols donnent le nom de flotte, forræ ou fotuilla, aux vaifleaux qui vont tous les ans à la Vera-Crux, qui eftun port au fond du golfe du Me. xique ; & 1ls appellent ga/ons, la flotte des vaifleaux, grands où petits, qui vont à Carthagene &c à Porto-» Bello. (Q) FLOTTES DE LA CHINE, Haye On donne ce nom à un aflémblage de plufñeurs bâtimens chinois qui s’aflemblent & naviguent enfemble, &z forment comme des villages fur les lacs & les rivieres : ils traverfent le pays de cette façon, & font un grand commerce. Le fond de la laïfon de tous ces vaifleaux eft de jonc ou de bambouc, entrelacés de liens de bois qui font entretenus par de grofles poutres fur lefquelles porte tout l'ouvrage, Pour faire avancer ces villages, on les poufle à l'avant & à l’arriere avec de grandes perches; &1l y a une grofle piece de bois debout à l'arriere, pour fervir à amarrer la flore à gué avec un cordage, lorfqu’il en eft befoin. #71 Outre ces grandes fortes, qui font comme des vil- fages , & où les maitres & propriétaires des bâtimens paflent leur vie avec toute leur famille, il y'a en- core à la Chine de fimples bateaux ou petits vaif- feaux qui fervent de demeure à une fanulle, Hsn’ont: mi rames ni voiles , 6c on ne les fait avancer qu'a- vec le croc. Les marques des marchandifes qui font à vendre dans ces bateaux, font fufpendues À une perche qu'ontient élevée, -afin:qu’oun les puifle voir afément, (Z) FLOTTE INVINCIBLE , (Hi/f. mod.) C’eftle nor: que Philippe IT. donna à la forte qu'il avoit préparée pendant trois ans en Portugal, à Naples & en Sicile, pour déthroner la reine Elifabeth. | Les Efpagnols en publierent une relation émpha. tique , non-feulement dans leur langue , maïs en la: tin, enfrançois, êc en hôllandois. M: de Thoù, qui avoit été bien-informé de l'équipement de cette fozre: par l’ambaffadeur de S. M. C. à la cour de France rapporte qu’elle-contenoit huit mille hommes d’éz- quipage!, vingt mille hommes de débarquement, fans! compter la nobleffe &z les volontaires ; 8 qu’en fait de munitions de guerre ; il: y avoit fur cette force: 12 mulle boulets, ; mille 6oo quintaux de poudre, 10 mille quintaux de balles, 7 mille arquebufes , ro? ! mille haches ; un nombre immenfe d'inftrumens pro= prés à remuer ou à tranfporter la terre, des chevaux! &t des mulets en quantité, enfin des vivres & des proviñons en abondance pour plus de fix mois. Tout: cela s'accorde aflez bien avec la relation abregée de l'équipement de cettewflorre, que Strype: a tirée des notes du grand thréforier d'Angleterre ;, mylord Burleigh, & qu’il ainférée dans l’appendice: . des mémoires originaux , n°9, 5% L’extrait de Strype fe réduit à ceci, que la flore: | invincible compoloit 130 wvaifleaux de 57868 ton- neaux 19205 foldats, 8450 matelots, 2068 efcla- | ves, & 2630 grandes pieces d'artillerie de bronze de toute efpece, fans compter 20 caravelles pour le fer-» vice de l’armée navale, 8 ro vaifleaux d'avis 4.6 | rames. Cette ffoëre, avant que-de-fortir du port del Lisbonne, coûtoit déjà auroi d'Efpagne plus dets6 | millions de France, évaluation de ce tems.làs je ne; dis pas évaluation de nos jours. 2-8 Le duc de Médina-Celi ft voile de l'embouchure du Tage avec cette belle fose en 1588, &aprit fa route verse Nord. Elle efluyarune premiere tems : TTittri 880 FL O pète qui écarta les vaifleaux les uns des autres, en- forte qu’ils ne purent fe rejoindre enfemble qu’à la Corogne. Elle en partit le 12 Juillet, & entra dans le canal à la vüe des Anglois, qui la laifferent pañler. On fait aflez quelen fut le fuccès , fans le dé- tailler de nouveau. Les Efpagnols perdirent dans le combat naval , outre fix à fept mille hommes, quinze de leurs plus gros vaifleaux ; cils en eurent un fi grand nombre qui fe briferent le long des côtes d’E:- coffe & d'Irlande, qu'en 1728 le capitaine Row en découvrit un du premier rang fur la côte occiden- tale d'Ecoffe ; & qu’en 1740 on en apperçut deux au- tres decet ordre dans le fond de la mer près d’Edim- bourg, dont on retira quelques canons de bronze, fur la culafle defquels étoit une rofe entre une F êc une À, Les. Provinces- Unies frapperent au fujet de cet évenement une médaille admirable, avec cette exer- gue, la gloire n'appartient qu'a Dieu ; & au revers étoit repréfentée la force d'Efpagne, avec ces mots : elle eff venue, elle n'eft plus. Soit que Philippe IT. reçût la nouvelle de la def- truétion de la fforte avec une fermeté héroïque, comme le dit Cambden ; foit au contraire qu'il en aitété furieux, comme. Strype le prétend fur des mé- moires de ce tems-là qui font tombés entre fes mains, left au moins sûr que le roi d'Efpagne ne s’eft ja- maïs trouvé depuis en état de faire un nouvel effort contre [a Grande-Bretagne : au contraire, l’année fuivante Elifabeth elle-même envoya une forte con- tre les Efpagnols , & remporta des avantages confi- dérables. On a fagement remarqué que ces prodigieufes ar- mées navales n’ont prefque jamais réuffi dans leurs expéditions : l’hiftoire en fournit plufieurs exemples. L'empereur Léon I. dit Æ-Grand par fes flateurs, qui avoit envoyé contre les Vandales une fosse com- pofée de tous les vaifleaux d'Orient, fur laquelle 1l avoit embarqué 100 mille hommes, ne conquit pas l'Afrique , & fut fur le point de perdre l’Empire. Les grandes ffortes & les grandes armées de terre épuifent un état ; fi l’expédition eft longue, & fi quelque malheur leur arrive, elles ne:peuvent être fecourues ni réparées : quand une partie fe perd , le refte n’eft rien, parce que les vaifleaux de guerre, ceux de tranfport , la cavalerie , l’infanterie , les munitions , les vivres , en un mot chaque partie de- pend du tout enfemble. La lenteur des entreprifes fait qu’on trouve toûjours des ennemis préparés ; outre qu'il eft rare que l'expédition ait lieu dans une faïfon commode , qu’elle ne tombe dans le tems des tempêtes, qu’elle n’en efluie d’imprévües, qu’elle ne manque des proyifions néceffaires ; & qu’enfin les maladies fe mettant dans l’équipage, ne faflent échoüer tous les projets. Arricle de M, le Chevalier DE JAUCOURT. FLOTTE D’UNE LIGNE À PÊCHER, c’eft un mor- ceau de liége ou de plume qui jforre fur l’eau, pour marquer lendroit où eft l’hameçon , & découvrir fi quelque poiffon y mord. FLOTTE, dans les Manufaëtures de foie, eft fyno- nyme à écheveau. | FLOTTER , v.n. (Æydrodyn.) {e dit d’un corps qui placé fur un fluide dans lequel il n’enfonce qu’en partie, fait des ofcillations fur ce fluide. Woyez Os- CILLATION. Pour qu’un corps foit en repos fur la furface d’un fluide, il faut, 1°.quela force avec laquelle le fluide tend à le pouffer en en-haut , foit égale à l'effort avec lequel la pefanteur du corps tend à le pouffer en em-bas. 2°. Il faut de plus que ces deux forces foïent dirigées en fens contraire & dans une même ligne droite, autrement le corps ne feroit pas en re- pos, € il lui arriveroit la même chofe qu’à un bâton dont fes deux extrémmtés font pouflées en fens con traire avec des forces égales ; car ce bâton tourne autour de fon centre , comme tout le monde fait, Si donc une de ces deux, conditions n’eft point obfer- vée, le corps ne fera pas en repos. Or pour déter- muiner fon mouvement, il faut confidérer.. 1°. que l’aétion que le fluide exerce fur lui, .eft égale à la pe- fanteur d’un volume de fluide égal à la partie plon- gée ; 2°. que cette force a pour direétion une ligne verticale qui pale parle centre de gravité de la par- tie plongée. Or, fuivant les principes donnés.44 moc CENTRE SPONTANÉ DEROTATION ,.& démontrés dans més recherches fur la préceffion des équinoxes (art. 90.), cette force doit tendre, 1°, à faire mouvoir le centre de gravité du corps verticalement de bas en-haut , de la même maniere que f cette force paf- foit par le centre de gravité du corps : ainf le cen- tre de gravité fera pouflé en en-haut verticalement par cette force , & en em-bas par la pefanteur du, corps; d’où l’on tirera une premiere équation.2°, La force du fluide tend outre cela à faire tourner le corps autour de fon centre de gravité , de la même ma- mere que fi ce centre de gravité étoit fixement atta- ché ; ce qui produira une feconde équation. Nous ne pouvons dans un ouvrage tel que celui-ci, en- trer dans un plus grand détail; mais nousrenvoyons à notre effai d’une nouvelle théorie de la réféflance des fluides, Paris, 1752, chap. vj. où nous avons traité cette matiere, que nous nous propofons de difcuter encore plus à fond dans les mémoires de l'académie des Sciences de Paris, quoique l’ouvrage qu’on vient de citer contienne abfolument tous les principes né- ceflaires pour réfoudre la queftion dans tous les cas poffbles, Dans les mémoires de Petersbourg de 1747, imprimés en 1750, & qui ne font parvenus entre mes mains que long-tems après l’impreflion de mon ouvrage, M. Daniel Bernoulli a traité auffi des ofcillations d’un corps qui pr fur un fluide + mais il n’a égard qu’au cas où les deux ofcillations {ont ifochrones, c’eft-à-dire où l’ofcillation verticale {e fait dans le même tems que l’ofcillation autour du centre de gravité ; & 1l paroït regarder comme très- difficile la folution du problème général , que je crois avoir donnée. (O) FLOTTER, £erme de Riviere, fe dit des bois que lon jette fur une riviere à bois perdu, on de ceux dont on fait un train. Voyez l’article Bots. FLOTTILLE , f. f. (Commerce) c’eft-à-dire perite flotte, nom que les Efpagnols donnent à quelques _vaiffeaux qui devancent leur flotte de la Vera-Crux au retour, 6 qui viennent donner avis en Efpagne de fon départ & de fon chargement. Voyez FLOTTE. Didionn, de Comm. de Trèv. 6 de Chamb, (G) FLOTTISTES , {. m. pl. (Commerce) On nomme ainfi en Efpagne ceux qui font le commerce de l’A- mérique par les vaifieaux de la flotte , pour les dif tinguer de ceux qui y commercent par les galions, & qu’on appelle galionifles. Voyez FLOTTE € Ga- LIONS. Dichionnaire du Commerce, de Trévoux , & de Chambers. (G) FLOU , (Panture.) vieux mot qui peut venir du terme latin f/uidus, 8€ par lequel on entend la dou- ceur, le goût moëlleux, tendre & fuave qu’un pein- tre habile met dans, fon ouvrage. On trouve ffoup dans Villon, & Borel croit qu'il fignifie floxer, c’eft- à-dire woller , délicat. Quoi qu'il en foit, peindre flou (car ce terme eft une efpece d’adverbe), c’eft noyer les teintes avec legereté, avec fuavité& avec amour ; ainf c’eft le contraire de peindre durement & féchement. Pour peindre oz, ow, fi on aime mieux que je me ferve de la périphrafe, pour noyer les teintes moëlleufement, onrepañfe foigneufement & délicatement fur les traits exécutés parle pinceau, avec une petite brofle de poils plus legers & plus: unis que ceux du pinceauordinaire ; mais le fuccès de l'exécution demande le-goñt fecondé des talens. Article de M. le Chevalier DE JA UCOURT. FLOUETTE,, f. f. (Marine) voyez GIROUETTE. FLOUR, (SAINT-) Géog. petite ville de France en Auvergne, au pié du mont Cental. Elle n’eft point lIndiciacus des anciens, ni le Ruffium de Ptolomée ; c’eft une ville toute nouvelle, créée ville & évêché par Jean XXIL fecond évêché d’Auvergne, fuffra- gant de Bourges. 7° 0Y Adrien de Valois, zotir. Gall. pag. 578. Catel , mém. de l’hiff, de Languedoc ; Liv IT. chap. x. &e. le P. Odo,, jéfuite , dans fes azrig. de Notre-Dame du Puis. Saint-Flour eft à 18 lieues, ©. de Clermont , 12 N. O. d’Aurillac. Long. 20. 45. 32. lat. 45, 1.55. (D. J.) 4, ya FLUCTUATION , f. f. serme de Chirurgie, mou- vement qu’on imprime au fluide épanché dans une tumeur, en appliquant deflus un ou deux doigts de chaque main à quelque diflance les uns des autres, & les appuyant alternativement ; de maniere que les uns preflant un peu, tandis que les autres font pofés legerement, cette prefion oblige la colonne de ma- tiere fur laquelle elle fe fait , de frapper les doigts qui font poiés legerement ; & la fenfation qui en ré- {ulte, annonce la préfence d’un fluide épanché. Lorfque le foyer d’un abcès eft fort profond, la fluifuation ne e fait fouvent point fentir. Les fignes rationels qui annoncent la formation du pus > ÔE ceux qui indiquent qu'il eft formé, peuvent déter- miner dans ce cas, Voyez SUPPURATION & ABCÈS, Il furvient affez communément un œdeme aux pat- fies extérieures qui recouvrent une fuppuration pro- fonde. Lorfque la matiere eft fous quelque aponévro- fe , on fent difficilement la ffuéuarion , & la douleur continue toüjours, par la tenfion de cette partie : mais elle change de caraëtere, elle n’eft plus pulta- tive ; ce font alors les fignes rationels qui doivent indiquer à un habile chirurgien Le parti qu'il doit prendre : l'expérience eft d’un-grand fecours dans cette circonftance. (F) FLUENTE, f. f. (Géom. tranfc.) M. Newton &c les Anglois appellent ainf ce que M. Leïbnitz ap- pelle ircégrale. Voyez INTÉGRAL 6 FLUXION. FLUIDE, adj. pris fubft. ( Phyf. €& Hydrodyn. ) eft un corps dont les parties cedent à la moindre for- ce, & en lui cédant font aifément mes entr'elles. Il faut donc pour conflituer la fluidité , que les parties fe féparent les unes des autres, & cedent à une impreflion fi petite, qu’elle foit infenfible à nos fens ; c’eft.ce que font l’eau , huile, le vin, Pair, le mercure. La réfiflance des parties des fluides dé- pend de nos fens ; c’eft pourquoi fi nous avions le ta& un million de fois plus fin qu'il n’eft , pour dé- couvrir cette réfiftance, il n’y a pas de doute que nous ne dûffions la fentir dans plufieurs cas, où nous ne pouvons à préfent la remarquer, & par confé- quent nous ne pourrions plus prendre pour ffuides un affez grand nombre de corps que nous regardons aujourd’hui comme tels. De plus, pour qu’un corps foit fluide , il faut que chaque parcelle foit fi petite, qu’elle échape à nos fens ; car tant qu’on peut tou- cher , fentir ou voir les parties d’un corps féparé- ment, onne doit pas regarder le corps comme fluide. La farine, par exemple, eft compofée de petites par- ties déliées, qui peuvent aifément être féparées les unes des autres par une impreflion quin’eftnullement fenfble : cependant tout homme qui aura une boîte remplie de farine , ne dira jamais qu'il a une boîte pleime de f/uide, parce qu'aufh-tôt qu'il y. enfonce le doigt, & qu'il commence à froter la farine entre deux doigts, il fent à l’inftant les parties dont elle eft compolée ; maïs dès que cette farine devient infini- ment plus fine comme cela arrive à l’égarddu chy- le dans nos inteftins, elle fe change alors en Jfuide. FLU 88r La cafe de la fluidité paroît confifter en ce que les parties des ffuides ont bien moins d’adhérence en- tr'elles , que n’en ont celles des corps durs, ou foli- des , & que leur mouvement n’eftpointempêche par l'inégalité de la furface des parties, comme dans un tas de pouffiere, de fable , @c, car les particules dont les fluides font compolés,, font d’ailleurs dela même nature , & ont les mêmes, propriétés que les partis cules des folides : cela s’apperçoit évidemment , quand on convertit les folides:en fluides & les fluides en fohides ; par exemple, lorfqu’on change de l’eau en glace, & qu’on met des métaux en fufon,, &c. En effet on ne peut raifonnablement révoquer en doute que les parties élémentaires de tous les corps ne foient dela même nature ; favoir,, des corpufcu- les durs , folides , impénétrables , mobiles. Voyez Corps, MATIERE. 6 PARTICULE, Si les parties d’un corps peuvent gliffer aifément les unes fur les autres ,ou être facilementagitées par la chaleur ; ces parties, quoiqu’elles ne foient pas dans un mouvement a@uel , pourront cependant conftituer un corps f{uide. Au refteles particules d’un pareil corps ont quelque adhérence entr’elles, com- me il paroît évident par le mercure bien purgé d’air qui fe foûtient dans le barometre à la hauteur de 6a ou 70 pouces ; par l’eau qui s’éleve dans les tuyaux capillaires, quoiqu'ils foient dans le vuide ; & par les gouttes des liqueurs, qui prennent dans le vui= de une figure fphérique , comme sl y avoit entre leurs parties quelque cohéfion réciproque, femblable a celle de deux marbres plans & polis. Voyez BARO- METRE © CAPILLAIRE. De plus, files fZédes font compolés de parties qui puiffent facilement s’embar- rafler les unes dans les autres, comme l’huile, ou qu’elles foient fufceptibles de s’unir enfemble parle froid, comme l’eau 8 d’autres fluides, ils fe chan- gent aifément.en des corps folides ; mais fleurs par- ücules fonttelles qu’elles ne prüffent jamais s’em= barrafler:les unes dans les autres, comme font cel- les de l’air , ni s'unir par le froid , comme celles du mercure, alors elles ne fe fixeront jamais en un corps folide. Voyez GLACE, éc, Les fluides font ou naturels comme l’eau & le met. cure, Ou animaux comme le fang, le lait, la lym= phe, l'urine, &c. ou artificiels comme les vins, les efprits, les huiles, &c. Voyez chacun à fon article, EAU, MERCURE, SANG, LAIT »BILE , VIN, Hur- LE, &c. | On peut confidérer dans les ffuides quatre chofes ; 1°, leur nature ou ce qui confitue la fluidité, c’eft l’objet de l’article FLUIDITÉ. ; 2°. les lois de leur équilibre ; 3°. celles de leur mouvement ; 4°. celles de leur réfiftance. Nous.allons entrer dans le détail de ces trois derniers objets. Nous donnerons d’abord les principes généraux , tels à-peu-près qu’on les trouve dans les auteurs de Phyfique , & nous ferons enfuite quelques réflexions fur ces principes. La théorie de l'équilibre & du mouvement des fluides eft une grande partie de la Phyfique; la préf- fion & la pefanteur des corps plongés dans les fus des, & l’aéhion des fluides fur les corps qui y {ont plongés:, {ont le fujet de l’'Hydroftatique. foyez Hy. DROSTATIQUE. Les lois hydroftatiques des fluides font , T. que les parties fupérieures de tous les f/zides, comme l'eau, &c. pefent fur les inférieures, ou comme par- lent quelques philofophes , que les f{uides pefent en eux-mêmes ou fur eux-mêmes. | | On a foûtenu dans les écoles un principe tout-à- fait contraire à celui-ci; mais la vérité de cette pref: fion eft à-préfent démontrée par mille expériences, Il fuffira d’enrapporter une bien fimple. Une. bou- teille vuide, bien bouchée, étant plongée dans l'eau, & fufpendue au bas d’une balance , qu’on mette des 892 ELU poids dans l’autre plat de la balance, jufqu’à cequ”- elle foit en équilibre ; qu'on débouche enftite la bouteille, & qu’on la remplifle d’eau , elle l’empor- tera, & fera baïfler l'extrémité de la balance où elle ft attachée. II fuit de cette péfanteur que les furfaces des JZi- des quifont.en repos, font planes & paralleles à l'ho- sifon , où plütôt que ce font des fesmens de fphere qui ont le même centre quela-tetre. Car commeon fuppofe que les parties des ffuides cedent à la moin- dre force , elles feront mûes par leur pefanteur!, juf- qu'à ce qu'aucune d’elles ne puifle plus defcendre, & quand'elles {eront parvenues à cet état, le f/zide de- meurcra en repos, à moins qu'il ne foit mis en mou- vement par quelque caufe extérieure : or ilfautpour établir ce repos , que la furface du j/vide fe difpofe comme nous venons de le dire, En effet lorfqu’un corps fluide eft difpofé de maniere que tous les points de fa furface forment un fegment de fphere concen- trique à latéerre , chaque particule eft preflée per- pendiculairement à la furface, & n'ayant pas plus de tendance à couler vers un côté que vers un au- tre, æile doit refter en repos. | I, Si un corps eft plongé dans un Jfide entout ou en partie, fa furface intérieure fera preflée de bas en haut par Peau qui fera au-deflous. Onfe convaincra de cette preffion des fzides fur la furface inférieure des corps qui y font plongés, en examinant pourquoi lescorps fpéciñiquement plus Le- gets que les fZuides , s’élevent à leur furface: cela vient évidesnment de ce qu'il y a une plus forte pref- fion fur la furface inférieure du corps.que fur fa fur- face fupérieure , c’eft-à-dire de ce que le corps eft pouilé en en-haut avec plus de force qu'il ne left enem-bas par fa pefanteur : en effet le corps’qui tend à s'élever à la furface, eft continuellement preflé par deux colonnes de fluide ; {avoir , par une qui agit fur fa partie fupérieure, & par une fecondequi'agit fur fa partie inférieure, La longueur de ces deux co- lonnes devant être prife depuis la furface fupérieure du fluide, celle qui prefle la furface inférieure du corps fera plus longue de toute l’épaifleur du corps, &c par conféquent le corps fera pouflé en eri-haut par le fluide avec une force égale au poids dé la quantité de f/uidequi feroit contenue. dans! lefpaz ce que le corps occupe. Donc, fi le JZzide eft plus pefant que le corps ; cette derniere force qui. tend a poufler le corps en en- haut , l’emportera fur la force de la pefanteur du corps qui tend à'le faire defcendre , &c le corps montera, Voyez PESANTEUR SPÉCIFIQUE. : A | Par-l:on rend'raifon pourquoi de‘très-pétits cor- pufcules ,foit qu'ils foient plus pefans ou plus legers que le fZuide dans lequel ils font mêlés , sy foûtien- dronr pendant fort long-tems fans qu'ils s’élevent à la furface du fluide ; ni ss qu'ils fe précipitent au fond. C’eft que la différence qui fe trouve entre ces deuxrcolonnes eftinfenfible, & que la force qui tend à farre monter le corpufcule:, n’eft pas aflez grande pour furmonter la réfiftance que font les parties du uide à leur divifion. | 1,254 - IL.-La preffion des parties fupérieures qui fe fait fur celles qui fontau-deflous , s'exerce également de tous côtés, & fuivant toutes les direétions imagina- bles, latéralement, horifontalement, obliquément, &crperpendiculairement..C’eftune vérité d’expérien- ce bien établie par M:Pafcal dans fomsrairé de l'équi- libre des liqueurs. Voyez lafuite de cesarticle, où:cette loi fera developpée :nousene pouvons la prouver qu'après en avoirdeduitiles conféquences:; car ce fontices conféquences qu'on démontrerpar, Pexpé- rience,.êc qui aflürent derla vérité duiprincipe. «1 Toutes les partiesides J/uides étant ainfinégale- sent preflées de tous côtés, 1l s’enfur , 1° qu'elles FEU doivent êtré en repés , &c'non pas dañs un monve- ment continuel, comme quelques philofophes l’ont fuppofé : 2°, qu'un corps étant plongé dans un /45- de en eft preflé latéralement , 8 que cette preifion eft'en raïlon de la/diftance de la furface. du fuide au corps plongé : cette prefion latérale s'exerce toù- jours fuivant une ligne perpendiculaire à la furface du jfzide ; ainf elle eft toûjours la même à même hauteur du ffuide , foit que la colonne de ffuide foit oblique ou non à la furface du corps. : : IV. Dans les tubes qui communiquentenfemble ; quelle que foit leur grandeur, foit qu'elle foit égale ouinégale, & quelle que foit leur forme; foit qu’elle foit droite, angulaire on recourbée , un même f/uide s’y élevera à la même hañteur, & réciproquement. V. Si un fluide s'éleve à la même hauteur dans deux tuyaux quicommuniquent enfemble , le ffuide qui eft dans un des tuyaux} eft en équilibre avec le fluide ui eft dans l'autre. Car ; 1°. fi les tuyaux font de même diametre, 8 que les colonnes des fluides ayent larmême bafe &z la même hauteur, elles feront égales ; conféquemment leurs pefanteurs feront auffi égales, &aufh elles agi- ront l’une fur l’autreéavec des forces égales: 22. files tuyaux font inégaux en bafe 8&r en diametre, fuppo- fons que la bafe de G 7 ( PL. d'Hydrodyns fis. 6.) foitquadruple de la bafe de HÆ, & quele fide det- cende dans le plus large tuyau de la hauteur d’un pouce, comme de Len O',1l s’élevera donc de qua- tre pouces dans l’autre tuyau, comme de M en N. Donc lavitefle du fluide qui fe meut dans.le tuyau HRK ;eftà celle du fwide qui fe meut dansile tuyau G1,comme la bafe dutuyau GJeft à la bafe du tuyau 1 K. Mais puifqu'on fuppofe que la hauteur des fluides eft Ta même dans les deux tuyaux, la quantité de fuide qui eft dans le tuyau G 1, fera à celle qui èft dans le tuyau ZX, comme la bafe du tuyau G Z eft à la bafe du tuyau Æ À : conféquemment les quantités de-mouvement de part & d’autre font éga- les, puifque les vitefles font en raifon inverfe. des mafles. Donc il yaura équilibre. Cette démonftra- tion eft aflez femblable à celle que plufñieurs auteurs ont donnée de: l'équilibre dans le levier. Sur quoi Voÿes LEVIER , la fuitelde cet article, Ori démontre aifément la même vérité fur deux tubes , dont l’un'eftincliné ,Pautreperpendiculaire, Huit encore de-lè que fidestubes fecommuniquent, le jluide pefera davantage dans celui où il fera plus élevé. LM I vi "VI, Dans lesitubes quicommuniquent,.des fzides de différentes pefanteurs:fpécifiques deront.en équu- libre fi leurs hauteurs fontien raifoninverfe de leurs pefanteurs fpécifiques: exil Nous tirons de-là unrmoyen de déterminer la gra- vité fpécifique des f/uides ;davoir jen mettantun jZxr- de dans'un des tuyaux qui fe communiquent comme. (AB, fig: 7.) & un autre fluide dans autre tuyau, CD, & en mefurant les hauteurs BG; HD, aux- quelles les fluides s’arrêteront quanduls fe feront mis en équilibre ; car la pefanteur {pécifique du f/wide contenu dans'ie tuyau 42, eft àla pefanteur fpé- cifique du f/uide duituyaw DC, comme DA eft à BG. (Sion craint quelles fluides ine fe.mélent,. on peut remplir la partie honfontale .du:tuyau 8 2 avec du mercure, pour.empêcher le mélange des li- queurs ). Lip eto no bete . Puifque les denfités/desi fluides font-comme leurs pefanteurs {pécifiques:, leurs denfités feront auf comme-les hauteurs dessffuides DH 8c0B G., Ainfr nous pouvons encore tirer.de-là une méthode pour déterminer les denfités des fuides: Voyez DENSITÉ., (VIE. Les fondsêcdes côtés des vaifleaux font pref- {és de la même maniere ;8apar la-même loi que les. | fluides qu'ils contiennept. C’eft une fuite de la pres miere & de la feconde loi ci-deffus, FE LU VIII, Dans les vaiffeaux cylindriques, fitués per- | pendiculairement, & qui ont des bafes égales, la pref- fion des fluides fur les fonds eft en raifon de leurs hauteurs ; car puifque les vaifleaux font perpendi- culaires., il eft évident que laëtion ou la tendance des fluides , en vertu de leur pefanteur, fe fera dans les lignes perpendiculaires aux fonds : les fonds fe- ront donc preflés en raifon des pefanteuts des fZui- des ; mais les pefanteurs font comme les volumes, & les volumes font ici comme les hauteurs. Donc les preffions fur les fonds feront en raifon des hau- teurs. Remarquez qu'il eft ici queftion d’un même fluide vou de deux f/uides femblables & de même nature. \ | IX. Dans des vaïfleaux cylindriques, fitués per- pendiculairement , qui ont des bafes inégales , la pref- fion fur les.fonds eft en raifon -compolée dés bafes &c des hauteurs ; car ilparoît par la démonftration précédente, que les fonds font preflés dans cette hy- pothèfe: en raifon des pefanteurs ; or les pefanteurs des fluides font comme leurs mafles:, & leurs mafles font ici en raifon compoféedes bafes 8 des hauteurs 2 par conféquent, 6:c. .. X. Si un vaifleau incliné 4BCD, (figure 8.) a même bafe & même hauteur qu'un vafe perpendicu- laire. B E F G., les fonds de ces deux vafes feront également preflés. | Car dans le vaifleau incliné 4 B CD, chaque par- te du fond CD eft preflée perpendiculairement , par la feconde loi -ci-deflus, avec une force égale à celle-d’une colonne verticale de fluide , dont la hau- teur feroit égale à la diftance qui eft entre le fond C D, & la furface 4 B du fuide: or la preffion du fond Æ F eft évidemment la même. XI. Les fluides preffent {elon leur hauteur perpen- diculaire , & non pas felon leur volume. Par exem- ple, fi un vafe a une figure conique , ou va en dimi- nuant vers le haut, c’eft-à-dire s’il n’eft pas large en haut comme en bas, cela nempêche pas que le fond ne foit preflé de la même maniere que fi le va- fe étoit parfaitement cylindrique, en confervant la même bafe inférieure : c’eft une fuite de tout ce qui a été dit ci-deflus. En général, la preffion qu’éprouve le fond d’un vaifleau, quelle que foit fa figure , eft toüjours éga- le au poids d’une colonne du J/xide , dont la bafe eft le fond du vaifleau, & dont la hauteureft la diftance verticale de la furface fupérieure de l’eau au fond de ce même vafe. Donc fi l’on a deux tubes où deux vafes de mê- me bafe 8 de même hauteur, tous deux remplis d’eau, mais dont lun aille tellement en diminuant vers le haut, qu'il ne contienne que vingt onces d’eau , au lieu que l’autre s’élargiflant vers le haut contienne deux cents onces:, les fonds de ces deux vafes feront également preflés par l’eau , c’eft-à- dire que chacun d’eux éprouvera une preflion égale au poids de l’eau renfermée dans un cylindre de mê- me bafe que ces deux bafes, & de même hauteur. M. Pafcal eft le premier qui a découvert ce para- doxe hydroftatique; 1l mérite bien que nous nous arrêtions à l’éclaircir : une multitude d'expériences le mettent hors de toute conteftation. On peut mê- me, jufqu’à un certain point, en rendre raifon dans quelques cas, par les principes de méchanique. _Suppolons, par exemple, que le fond d’un vafe CD ; (fig. 9.) {oi plus petit que fon extrémité fu- périeure À B ; comme le fluide prefle le fond CD, que nous fuppofons horifontal, dans une direétion perpendiculaire £ C, il n’y a que la partie cylin- drique intérieure £ CD F, qui puifle preffer fur le fond , les côtés de ce vafe foûtenans la preffion de tout lerefte.. Maïs cette propofition devient bien plus dificile s# FE LU 833 a démontrèer, lorfque le vafé va enfe rétréciffant de bas en haut : on peut même dire qu’elle eft alors un paradoxe que l'expérience feule peut prouver, & dont jufqu’ici on a cherché vainement la raifon. Pour prouvèr ce paradoxe par l’expérience, pré parez un vale dè métal 4 CD B( fig. 104), fait de mamere que le fond CD puifle être mobile, & que pour cette raïfon il foit retenu dans la cavité du vaifleau, moyennant une bordure de cuir humide, afin de pouvoir glifler, fans laifler pafler une feule goutte d’eau. Par un trou fait au haut du vafe 4 B appliquez fucceflivement différens tubes d’égales hauteurs , mais de différens diametres. Enfin , atta- chant une corde au bras d’une balance; & fixant l’autre extrémité de la corde au fond mobile, par un petit anneau À, mettez des poids dans l’autre baf- fin, jufqu'à ce qu'il y en ait affez pour élever le fond € D : vous trouverez alors non-feulement qu’il faut toûjours lemême poids, de quelque grandeur ou diametre que foit le tube , mais encore que le poids qui élevera le fond , lorfque ce fond eft preflé par un fluide contenu dans untrès-petit tube, l'élevera auffi quand il fera prefé par le ffzide qui feroit contenu dans tout le cylindre ACD I, Par la même raifon, fun vafe 4 BC D( fig. 11.) , de figure quelconque, eft plein de liqueur jufqu’en G Æ, par exemple, lé fond CD fera preflé par la liqueur, comme fi le vafe étoit cylindrique : mais ce qui eft bien à remar- quer ,1l ne faudra pour foûtenir le vafe, qu'unefor- ce égale an poids de la liqueur ; car la partie Ff'eft preflée perpendiculairement à HD fuivant #O, avec une force proportionnelle à la diftance de G à EF; & cet effort tend à poufler le point Ffuivant FV, avec une force repréfentée par FIX M P. Or le point X eft preflé en em-bas avec une force = FIX MN :-donc le fond C D n’eft pouflé au point K que par une force = FIXMN-FIX MP=FI X PN. Donc lorfaue le fond CD tient au vafe , if n'eft pouflé en em-bas que par une force— au poids . du fluide : mais lorfque ce fond eft mobile , ileft pouffé en em-bas par une force proportionnelle à € D.x MN, parce que la réfiftance ou réaétion du point F fuivant FF, n’a plus lieu. | XIL. Un corps fluide pefant, lequel placé vers la furface de l’eau ,{e précipiteroit en em-bas avec une grande vitefle, étant placé néanmoins à une profon: deur confidérable , ne tombera point au fond. Ainfi plongez l'extrémité inférieure d’un tube de verre dans un vafe de mercure, à la profondeur d’un demi-pouce ; & bouchant alors l'extrémité inférieu- re avec votre doigt ,vous conferverez parce moyen environ un demi-pouce de mercure {ufpendu dans Je tube : enfin tenant toûjours le doigt dans cette même difpoñtion , plongez le tube dans un long vale de verre plein d’eau , jufqu’à ce que la petite colonne de mercure foit enfoncée dans l’eau à une profondeur treize ou quatorze fois plus grande que la longueur de cette même colonne; en ce cas, fi “vous Ôtez le doigt, vous verrez que le mercure fe tiendra fufpendu dans le tube, par l’aétion de l’eau qui prefle en en-haut ; mais fi vous élevez le tube, le mercures’écoulera. Aurefte cetteexnérience eft déli- cate, &c demande de la dextérité pour être bien faite, La preffion des fuides , felon plufieurs phyficiens, nous donne la folution du phénomene de deux mar- bres polis ; qui s’attachent fortement enfemble lorf qu'on les applique l’un à l’autre. L’atmofphere, felon ces phyficiens, prefle ou gravite avec tout fon poids fur la furface inférieure & fur les côtés du marbre in- férieur : mais:elle ne fauroit exercer aucune preffion fur la furface fupérieure de ce même marbre, qui eft très-intimement contigue au marbre fupérieur, au- quel elle eft fufpendue : fur quoi voyez l’article Co- HÉSION, 6, | 884 FLU Sur lafcenfon des Jfuides dans les vaïfleaux cas pillaires , &c. voyez TUYAUX CAPILLAIRES. Voyez auf au mot HYDROSTATIQUE , d’autres obferva- tions fur l'équilibre des fluides. Paflons aux lois du mouvement des fluides : après quoi nous confidérerons fous un même point de vüe ces lois & celles de leur équilibre. Nous donnerons d’abord les lois du mouvement des fluides , fans en apporter prefque aucune raïfon , &c telles que l’ex- périence les a fait découvrir, ræ Le mouvement des f/uides, 8 particulierement de Peau, fait la matiere de l’'Hydraulique. Foyez Hy- DRAULIQUE. mi late Lois hydrauliques des fluides, 1°, La vitefe d’un fluide , tel que l’eau , mis en mouvement par l’aétion d’un fuide qui pefe deflus , eft égale à des profon- deurs égales, & inégale à des profondeurs inégales. 2°, La vitefle d’un j/vide qui vient de l’aétion d’un autre ffide qui pefe deflus, eft la même à une cer- taine profondeur, que celle qui feroit acquife par un corps, en tombant d’une hauteur égale à cette pro* fondeur , ainfi que les expériences le démontrent. 3°. Si deux tubes de diametres égaux font placés de quelque maniere que ce foit,, droits où inclinés, pourvà qu'ils foient de même hauteur, ils jetteront en tems égaux des quantités égales de fZide. ; Il eft évident que des tubes égaux en tout, fe vui- deroient également, placés dans les mêmes circonf- tances; & il a été déjà démontré que le fond d’un tube perpendiculaire eft preflé avec la même force que ‘celui d’un tube incliné, quand les hauteurs de cestubes font égales : d’où il eft aifé de conclure qu'ils doivent fournir des quantités d’eau égales. 4°. Si deux tubes de hauteurs égales, mais d’ou- vertures inégales , font conftamment entretenus pleins d’eau, les quantités d’eau qu'ils fourniront dans le même tems, feront comme les diametres de ces tubes : il n'importe que Les tubes foient droits ou inclinés. . ; Par conféquent, fi les ouvertures font circulai- res. Les quantités d’eau vuidées en même tems font “en raifon doublée des diametress 4 Mariotte obferve que cette loi n’eft pas pätfaite- ment conforme à l’expérience. On peut attribuer cette irrégularité au frotement que l’eau éprouve contre la {urface intérieure des tubes ; frotement qui doit néceflairement altérer l'effet naturel de la pefanteur. Voyez auffi HYDRODYNAMIQUE. 5°, Si les ouvertures E, F'de deux tubes 4D, CB, { fig. 12 & 13.) font égales, les quantités d’eau , qui s’écouleront dans le même tems , feront comme les vitefles de l’eau. | 6°. Si deux tubes ont des ouvertures égales E,F, & des hauteurs inégales 42, Cd, la quantité d’eau qui s’écoulera du plus grand 42 , fera à celle qui fortira de CD dans le même tems, en raifon fous- doublée des hauteurs 44, Cd. De-là il s'enfuit 1°. que les hauteurs des eaux 46, Cd, écoulées par les ouvertures égales E,F, feront en raifon doublée de l’eau quis’écoule dans le même tems : & puifque les quanrités d’eau font en ce cas comme les vitefles, les vitefles font auffi en raifon {ous-doublée de leurs hauteurs. - 2°, Que le rapport des eaux qui s’écoulent par les deux tubes AD, CB, étant donné , de même que la hauteur de l’eau dans l’un des deux, on pourra ai- fément trouver la hauteur de l’eau dans l’autre, en cherchant une quatrieme proportionnelle aux trois quantités données ; & en multipliant par elle-même cette quatrieme proportionnelle, l’on a Îa hauteur cherchée. 3°. Que le rapport des hauteurs de deux tubes d'ouvertures égales, étant donné, de même que la guantité d’eau écoulée de lun d’eux, on peut aé- ment détérminer la quantité d’eau qui s’écouleta dé : l’autre dans le même tems : car cherchant une qua- trieme proportionnelle aux hauteurs données & au quarté de la quantité d’eau écoulée par une des ou- vertures , la racine quarrée decette quatrieme pro- portionnelle fera la quantité d’eau que l’on demande. Suppofons , par exemple, que les hauteurs des tu- bes foient entre elles comme 9 eft à 25, & que la quantité d’eau écoulée de lun d’eux {oit de trois pouces, celle qui s’écoulera par l’autre fera= y” (0. 25:9)=y2; =; pouces. | ) 7°: Siles hauteurs de deux tubes 4D, CB , font | inégales; &r les ohvertures £, F'; auf inégales’, les quantités d’eau écoulées dans le même tems feront en raifon compofée du rapport desouvertutes, & du rappott fous-double des hauteurs. A 8°. Il fuit de-là que s’il y a égalité entre les quan tités d’eau écoulées dans le même tems par deux tu bes, lès ouvertures feront réciproquement commé les racines des hauteurs, & par conféquent les hau- . teurs en raifon réciproque des quarrés des ouver- tures: ! 9°. Siles hauteurs de deux tubes, de même que leurs ouvertures , font inégales, les vitefles des eaux écoulées font en raifon fous-doublée de leurs hauteurs : d’où il s’enfuit que les viteflés des eaux qui fortent par des ouvertures égales | quand les . hauteurs font inégäles , font auffi en raifon fous-dou: blée des hauteurs ; 8 comme ce rapport eft égal fr les hauteurs font égales, il s'enfuit en général que: les vitefles des eaux qui fortent des tubes, font en raifon fous-doublée des hauteurs, : 10°, Les hauteurs & les ouvertures de deux cylin- dres remplis d’eau étant les mêmes, il s’écoulera: dans le même tems une fois plus d’eau par l’un que par l’autre , fi l’on entretient le premier toüjours plein d’eau, tandis que l’antre fe vuide, : Car la vitefle de l’eau dans le vafe toûjouts pleins! fera uniforme , & celle de lautte fera continuelle- ment retardée : on peut voir 2°, 2, cr-deffus, quelle fe- ra la loi de la vitefle de chacun! La viteffe uniforme de l'eau dans le premier vafe fera égale à celle qu'un corps pefant auroïit acquife en tombant d’une hau- teur égale à celle du J/vide, & la vitefle variable de l’autre fuivra une loi analogue. Les deux fuides font donc dans le cas de deux corps , dont l’un fe meut uniformément avec une certaine vitefle ; & l’autre fe ment de bas en haut, en commençant par cette même vitefle. Foyez ACCÉLÉRATION. Or il eft dé- montré , voyez le mêrne article € l’article DESCENTE, que le premier de ces deux corps parcourt un efpace double de Pautre , dans le même tems : donc, Ex. 11°. Si deux tubes ont des hauteurs & des ouver- tures égales , les tems qu’ils employeront à {e vui- der feront dans le rapport de leurs bafes. 129, Des vafes cylindriques & prifmatiques ; comme 4 B,CD, Ce. 14.) fe vuident en fuivant cette loi, que les quantités d’eau écoulées en tems égaux, décroïflent felon les nombres impairs 1, 3, 5,79, &c. dans un ordre renverfé. Car la vitefle de la furface F G, qui defcend,, dé- croit continuellement en raïfon fous - doublée des hauteurs décroiflantes! mais la vitefle d’un corps pefant qui tombe, croit en raïfon fous-doublée des hauteurs croiflantes : ainfi le mouvement de la fur- face FG, lorfqu’elle defcend de G en D avec un mouvement retardé , eft la même que fi elle étoit venue de B en D, avec un mouvement accéléré en fens contraire : or dans ce dernier cas, les efpaces parcourus en tems égaux croitront felon la progref- fion des nombres impairs. Voyez ACCÉLÉRATION. Pariconféquent, les hauteurs de la furface FG , en tems égaux, décroiffent felon la même prosreffion > prife dans un ordre renverié. & F k ht On petit démontrer par ce principe beäuconp d’autres lois particulieres du mouvement des fZuides, ‘que nous ométtons ici, pour n'être pas trop longs. Pour divifer un vafe cylindrique en portions qui feront vuidées dans l’efpace de certaines divifñons de tems, voyez CLEPSYDRE. 13°, Si l’eau qui tombe par un tube HE, ( fo. 15.) rejaillit à l'ouverture G, dont la direétion eft verticale, elle s’élevera à la même hauteur G Z, à laquelle fe tient le niveau de Peau dans le vaifleau A BCD. Car l’eau eft chaffée de bas en haut par l’ouvertu- re, avec une vitefle égale à celle d’un corps qui tom- beroit d’une hauteur égale à celle du fc: or ce corps s’éleveroit à la même hauteur en remon- tant (Voyez ACCÉLÉRATION): donc, &c. À la vérité on pourroit objeéter qu’il paroît , par les expériences , que l’eau ne s’éleve pas tout-à-fait aufh haut que le point J ; mais cette objeétion n’em- pêche point que le théoreme ne foit vrai: elle fait voir feulement qu’il y a certains obftacles extérieurs qui diminuent l'élévation ; tels font la réfiftance de Pair, & le frotement de l’eau au-dedans du tube. 14°, L'eau quidefcend par un tube incliné ou par un tube courbé, d’une maniere quelconque, jaillira par une ouverture quelconque à la hauteur où fe tient le niveau d’eau dans le vafe : c’eftune fuite de la loi précédente , & de celle des corps pefans mûs fur des plans inclinés. Voyez PLAN INCLINÉ. 15°. Les longueurs ou les diftances D E & DF, TH & IG, (fig. 16.) à laquelle l'eau jaillira par uneouverture, foit inclinée foit horifontale , font en raifon fous-doublée des hauteurs prifes dans ie va- fe ou dans le tube 4 B,AC. Car puifque l’eau qui a jaïlli par l'ouverture D , tend à fe mouvoir dans la ligne horifontale D F, &c que dans le même tems, en vertu de la pefanteur , elle tend em-bas par une ligne perpendiculaire à l’ho- rifon (une de ces puiffances ne pouvant pas détruire l’autre, d'autant que leurs direétions ne font pas con- traires ), il s’enfuit que l’eau en tombant arrivera à da ligne / G, dans le même tems qu’elle y feroit arri- vée , quand il n’y auroit eu aucune imptäifon hori- fontale: maintenant les lignes droites 1 4 & 1G font les efpaces que la même eau auroit parcourus dans le même tems par l’impulfion horifontale ; mais les efpaces 14,1 G , font comme les vitefles , puif- que le mouvement horifontal eft uniforme; & les vitefles font «en raïfon fous-doublée des hauteurs AB, AC: c’eft pourquoi les longueurs ou les diftan- ces auxquelles l’eau jaillira par des ouvertures hori- {ontales :ou inclinées , font en raïfon fous- doublée des hauteurs 4 B, 4C. Puifque tout corps jetté horifontalement ou obli- quement dans un milieu qui ne réfifte point , décrit une parabole, il eft clair que l’eau qui fort par un jet vertical & incliné, décrira une parabole. Voyez PROJECTILE. Voyez auffi , fur le mouvement des fuides, les articles HYDRODYNAMIQUE, HYDRAU- LIQUE , ÉLASTIQUE , Éc. L'on conftruit différentes machines hydrauliques , pour l'élévation des fluides , comme les pompes , les fyphons, les fontaines , les jets , 6e. on peut en voit la defcription aux articles POMPE, SYPHON, FON- TAINE , VIS D'ARCHIMEDE. Quant aux lois du mouvement des fluides par leur propre pefanteur le long des canaux ouverts, &c. voyez FLEUVE, &c. Pour.les lois de la preffion ou du mouvement de l'air confidéré comme un fluide, voyez AIR 6 VENT. | | _Reflexions fur l'équilibre & le mouvement des fluides. Si.on connoMoit parfaitement la figure & la difpo- fition mutuelle des particules qui compofent les fu des ,ilne faudroit point d’autres principes que çeux Toge PL. L/ F LU 885 de la méchanique ordinaire, pour déterminer les lois de leur équilibre & /dejleur mouvement: çar c’eft toûjours un problèmedéterminé, que de trouver l’aétion mutuelle de plufieurs corps quifontunis entre eux,6c donton connoitla figure & l’arrangement ref- peétif, Mais comme nous ignorons la forme &c la dif poñitiondes particules fides,la détermination deslois de leur équiibre & de leur mouvement eft un pro- blème ,qui envifagé comme purement géométrique, ne contient pas aflez de données, & pour lafolution duquel on eft obligé d’avoir recours à de nouveaux principes. | Nous jugerons aifément du plan que nous devons fuivre dans cette recherche, fi nousnous appliquons à connoître d’abord quelle différence il doit y avoir entre les principes généraux du mouvement des fluides, & les principes dont.dépendent les lois de la méchanique des corps ordinaires. Ces derniers principes;comme on peut le démontrer (.MÉcHA- NIQUE 6 DYNAMIQUE), doivent fe réduire à trois; favoir, la force d'inertie , le mouvement compofé, ë l'équilibre de deux mafles égales animées en fens- contraire de deux vîtefles virtuelles égales. Nous avonc donc ici deux chofes à examiner: en premier lieu , fi ces trois principes font les mêmes pour les fluides que pour les folides ; en fecond lieu, s’ils fuf. fifent à la théorie que nous entreprenons de donner. Les particules des Zuides étant des corps, il n’eft pas douteux que le principe de la force d'inertie, & celui du mouvement compofé , ne conviennent à chacune de ces parties: il en feroit de même du prin- cipe de l'équilibre, fi on pouvoit comparer féparé-. ment les particules fuides entre elles : mais nous nd pouvons comparer enfemble que des males, dont lation mutuelle dépend de l’aéion combinée de différentes parties qui nous font inconnues ; l’expé- rience feule peut donc nous inftruire fur les lois fon- damentales de l’'Hydroftatique, L'équilibre des fluides animés par une force de di- reétion &c de quantité conftante, comme la pefan- teur,, eft celui qui fe préfente d’abord, & qui eft en effet le plus facile à examiner, Si on verfe une li- queur homogene dans un tuyau compofé de deix branches cylindriques égales & verticales , unies en- femble par une branche cylindrique horifontale, 1a premiere chofe qu’on obferve, c’eft que la liqueurne fauroit y être en équilibre , fans être à la même hau- teur dans les deux branches. Il eft facile de conclure de-là, que le f/uide contenu dans la branche horifon- tale eft preflé en fens contraire par l’aétion des ca lonnes verticales, L'expérience apprend de plus, que fi une des branches verticales, 8 même, fi l’on veut, une partie de la branche horifontale eft anéan- tie, 1l faut, pour retenir le fluide, la même force qui feroit néceffaire pour foûtenir un tuyau cylindrique égal à l’une des branches verticales, & rempli de fluide à la même hanteur; &c qu’en général, quelle que foit l’inclinaifon de la branche qui joint les deux branches verticales, le fluide eft également preffé dans le fens de cette branche &c dans le fens vertis cal. Iln’en faut pas davantage pour nous convain- cre que les parties des f{uides pefans font preflées &c preflent également en tout {ens. Cette propriété étant une fois découverte , on peut aifément recon- noitre qu’elle n’eft pas bornée aux fluides dont les'parties font animées par une force conftante & de direétion donnée , mais qu’elle appartient toù+ jours aux fluides , quelles que foient les forces qui agiflent {ur leurs différentes parties : il fufit, pour s’en aflürer , d’enfermer une liqueur dans un vafe de figure quelconque ;.& de la prefler avec un pif- ton «car @ l’on fait une ouverture en quelque point que ce foit de ce vafe,, il faudra appliquer en cet ens droit une preflion égale à celle du pifton, pour res VVyvr 886 FLU tenir la liqueut ; obfervation qui prouve incontefta- blement que la preflion des particules fe répand éga- lement en tout fens, quelle que foit la puiffance qui tend à les mouvoir. : | Cette propriété générale, conflatée par une expé- rience aufü fimple , eft le fondement de tout ce qu'on peut démontrer fur Péquilibre des furdes. Néanmoins quoiqu’elle foit connue & mife en ufage depuis fort long-tems, il eft affez furprenant que les lois princi- pales de l’Hydroftatique en ayent té fi obfcurément déduites. Parmi une foule d’auteurs dont la plüpart n’ont fait que copier ceux qui les avoient précédés, à peine de jaunes , pféudo-topafius ; de verds, plèudo-fmarag- dus ; de bleus, pféudo-faphirus, &c.Wallerius, dans {a minéralogie , regarde les fluors comme des variétés du cryftal de roche ; cependant il patoït que d’autres naturahftes ont étendu la même dénomination à des cryftaux ou à des pierres colorées qui font ou calcai- res ou gypfeufes, & qui par conféquent ne font pas de la même nature que le cryftal de roche. Il y. a lieu de croire que c’eft aux métaux mis en diffolu- tion, & atténués par les exhalaifons minérales qui régnent dans le fein de la terre, que les f/4ors font redevables de leurs couleurs, Ce qui confirme ce fentiment , c’eft que c’eft ordinairement dans le voi- finage des filons métalliques qu’on les rencontre en plus grande quantité, Il ya lieu de conjeéturer que le nom de f/zors que l’on donne à ces pierres, & celui de f/uffe par lequel on les défigne en allemand, leurvient de la propriété qu’elles ont fouvent, de fervir de fondans ou de flux aux mines que l’on exploite dans leur voifinage : alors on les regarde comme étant d’une grande utilité, en ce qu’elles contribuent à faciliter la fuñon du miné- ral. Voyez FLux, FONDANS , & FUSION. (—) FLÜTE , f. f. (Lirér.) L'invention de la fée, que les Poëtes attribuent à Apollon, à Pallas, à Mercure, à Pan, fait affez voir que fon ufage eft de la plus an- cienne antiquité. Alexandre Polihyftor affüre que Hyagnis fut le plus ancien joueur de fféte, & qu'il fut fuccédé par Marfyas, & par Olympe premier du nom , lequel apprit aux Grecs l’art de toucher les inftrumens à.cordes. Selon Athénée, un certain Sei- ritès , Numide, inventa la ff£re à une feule tige, Si- lene celle qui en a plufeurs, & Marfyas la fre de rofean, qui s’unit avec la lyre. , | Quoi qu’il en foit , la paffion de la mufique répan- due par-tout,, fur non-feulement caufe qu’on goûta beaucoup le jeu de la fre, mais de plus qu’on en multiplia fingulierement la forme. Il y en avoit de courbes:, de longues, de petites, de moyennes, de {mples,, de doubles, de gauches, de droites, Pets 65, les , d'inégales, &c, On fit de ces inftrnmens de tout bois & de tonte matiere. Enfin les mêmes fffses avoient différens noms chez divers peuples. Par exemple, la fése courbe de Phrygie étoit la même que le #iryrion des Grecs d'Italie, ou que le pheurion des Egyptiens, qu'on appelloit aufli moraule. Les flüres courbes font au rang des plus anciennes ; telles {ont celles de la table d’Ifis : la gyngtine lugu- bre ou la phénicienne , longue d’une palme mefurée dans toute fon étendue , étoit encore de ce genre. Parm les f£ces moyennes , Ariftide le muficien met la pythique &c les fféres de chœur. Paufanias parle des f{£res argiennes &c béotiennes. Il eft encore fait mention dans quelques auteurs de la f/re hermiope, qu'Anacréon appelle tendre; de la lyfade, de la cy- thariftrie ; des fféces précentoriennes, corynthien- nes, égyptiennes , virginales, milvines , & de tant d’autres dont nous ne pouvons nous former d’idée jufe , & qu'il faudroit avoir vües pour en parler pertinemment. On fait que M. le Fevre defefpérant d’y rien débrouiller, couronna fes veilles pénibles fur cette matiere, par faire des vers latins pour loûer Minerve de ce qu’elle avoit jetté la Ze dans eau , & pour maudire ceux qui l’en avoient re- tirée. Mais loin d’imiter M. le Fevre, je crois qu’on doit au moiîns tâcher d'expliquer ce que les anciens en- tendoient par les fféres égales & inégales, les fZäres droites & gauches, les ffäres farranes, phrygiennes, lydiennes, sibiæ pares 6 impares, tibiæ dextræ € f- riflre, cibie farrane , phrygie, lydicæ , &c. dont il eft fouvent fait mention dans les comiques , parce que la connoiffance de ce point de Littérature eft ne- ceflaire pour entendre les titres des pieces-dramati- ques qui fe jouoient à Rome. Voici donc ce qu’on a dit peut-être de plus vraiffemblable & de plus ingé- nieux pour éclaircir ce point d’antiquité. - Dans les comédies romaines qu’on repréfentoit fur le théatre public , les joueurs de jZ%e jouoient toüjours de deux fféres à-la-fois. Celle qu'ils tou- choient de la main droite , étoit appellée droïse par cette raifon ; & celle qu'ils touchoient de la gauche, étoit appellée gauche par conféquent, La premiere n’avoit que peu de trons , &c rendoit un fon grave ; la gauche en avoit pluñeurs, & rendoit un fon plus clair & plus aigu. Quand les muficiens jouoient de ces deux ff£res de différent fon, on difoit que la piece avoit été jouée #biis imparibus, avec les fliires inéga- les ; ou cibirs dexrris & finiffris, avec les fléres droires & sauches : 8 quand ils jouoient de deux j/£res de même fon , de deux droites ou. de deux gauches, comme cela arrivoit fouvent,, on:difoit que la piece avoit été joïée sibiis paribus dextris, avec des fféres égales droites, fi'c’étoit avec celles du fon grave; Où ribiis paribus finifiris, avec des fléres égales gau- ches, f c’étoit avec des f/£res de fon aigu. . Une même piece n’étoit pas tojours jouée avec les mêmes fféres, nr ayecles mêmes modes; cela changeoit fort fouvent. Ilarrivoit peut-être auffi que ce changement fe farfoit quelquefois dans la mê- me repréfentation, & qu’à chaque intérmede .on changeoit de 4e; qu'à lun on prenoit les res droites, & à l’autre les'gauches fucceflivement. Do- nat prétendque quand le fujet de la piece étoit grave &r férieux ,'on ne fe fervoitique des f/Zres évales droi- tes, que l’on appelloït aufi /ydiennes, & qui avoient le fon grave ; que quand'le fujet étoit fort enjoüé, on ne fe fervoit que des färes égales gauches, qui étoient appeliées syriennes ou Jarranes, qui avoient le fon aigu, & par conféquent plus propre à la joie; enfin que quand le fujetétoit mêlé de l’enjoué & du fé- rieux, On prenoit les fféves inégales, c’eft-à-dire la droite & la gauche, quon nommoit phrygiennes. _ Madame Datiereft au contraire perfuadée que ce Teme FI, | F LU 893 Wétoit point du tout Le fujet des pieces qui reoloit [a mufique, mais l’occafñon où elles étoient repréfen- tées. En effet, il auroit été impertinent qu'une piece faite pour honorer des funérailles, eût eu une mu- fique enjouée ; c’eft pourquoi quand les Adelphes de Térence furent joués la premiere fois, ils le furent cibiis lydus, avec les fféres lydiennes, c’eft-à-dire avec deux fféres droites ; & quand ils furent joués pour des occafions de joie & de divertiflement, ce fut &biis farranis, avec les deux fféres sauches. Ainñ quand une piece étoit jouée pendant les grandes fé- tes, comme la joie & la religion s’y trouvoient mê- lées,, c’étoit ordinairement avec les féres inégales ou une fois avec deux droites , & enfuite avec deux gauches, ou bien en.les prenant alternativeirent à chaque intermede. | Au refte, Ceux qui joioient de la ffére pour le théa- tre, fe mettoient autour de la bouche une efpece de ligature ou bandage compofé de plufieurs courroies qu'ils hoient derriere la tête, afin que leurs joues ne paruflent pas enflées, & qu'ils pülent mieux gou- verner leur haleine & la rendre plus douce, C’eft cette ligature que les Grecs appelloient gop£ua ; So- phocle en parle, quand il dit: F \ < a 4) 2] Dura yap y OMAKPOIGIY ŒUAICROIS TI 9 ? ! »] AAA ayplais QUoæics Eopétias ATEp. « Il ne fouffle plus dans de petites féres, mais dans » des foufflets épouvantables, & fans bandage », Ce que Cicéron applique heureufement à Pompée, pour marquer qu'il ne gardoit plus de mefures, & qu'il ne fongeoit plus à modérer fon ambition. Il eft parlé du bandage popéua,antrement appellé zeprsouor dans Plu- tarque , dans le fcholiafte d’Ariftophane & ailleurs, ëc l’on en voit la figure fur quelques anciens monu- mens: i ; La flte n’étoit pas bornée au feul théatre ,-elle entroit dans la pl part des'antres fpe@tacles &:des cérémonies publiques greques & romaines ; dans celles des nôces , des expiations, des facrifices ,-& fur-tout dans celles dés funérailles. Accoûtumée de tout tems aux fanglots:de ces femmes pagées qui poffédoient Part de pleurer {ans afliétion , elle ne pouvoit manquer deformerdaprincipalemufque des |, pompes funebres. À celle du jeune Archémore fils de Lycurpue, c’eft la fie qui donne le fignal, & ce ton des lamentations. Dans les fêtes d’Adonis on fe fervoit auffi de la fféte, 8 l'on y ajoûtoit ces mots lügubres, ai, «2 roy A'Awyw; hélas, hélas, Adonis mots qui convenoient parfaitement à la triftefle de ces fêtes. | Les Romains, en vertu d’une loi très -ancienne ; & que Cicéron nous a confervée , employerent la Jlire au même ufage. Elle fe faifoit entendre dans les pompes funebres des empereurs , des grands, & des particuliers de quelque âge & de quelque qualité qu'ils fufent ; car dans toutes leurs funérailles on chantoit de ces chants lugubres appellés zeze, qui demandoient néceflairement l'accompagnement des flises ; c’eft encore par la même raifon qu'on difoit enproverbe , Jam licet ad tibicines mittas | envoyez chercher les joueurs de ff£te, pour marquer qu'un malade étoit defefpéré, & qu'il n’avoit plus qu'un moment à vivre ; expreflion proverbiale, que Cir- cé employe aflez plaifamment dans les reproches qu’elle fait à Polyenos fur fon impuiflance. Puifque la jfése fervoit à des cérémonies de diffé. rente nature , il falloit bien qu’on eût trouvé l’art d’en ajufter les fons à ces diverfes cérémonies, & cet art fut imaginé de très-bonne heure. Nous lifons dans Plutarque que Clonas eff le premier auteur des nomes ou des airs de f/£re. Les principaux, qu'il inventa , & qui furent extrèmement perfettionnés après lui , font l’apothétos , le fchoënion , le trime- XXXXxX 594 FLU lès, Pélégiaque , le comarchios , le cépionien , & le déios. Expliquons tous ces mots énigmatiques , qu'on trouve fi fouvent dans les anciens auteurs. L'air apothétos étoit un air majeftueux,, réfervé pour les grandes fêtes & les cérémomies d'éclat. L'air fchoënion , dont Pollux & Héfychius parlent beaucoup , devoit ce nom au caraétere de mufique &c de poëñe, dans lequel il étoit compofé; carac- tere qui, felon Cafaubon , avoit quelque chofe de mou , de flexible, & pour ainfi dire d’effémine. L’air srimelès étoit partagé en trois ftrophes ou couplets : la premiere ftrophe fe jouoit fur le mode dorien ; la feconde fur le phrygien ; la troifieme fur ie lydien, & c’eft de ces trois changemens de mo- des que cet air tiroit {on nom , comme qui diroit air a trois modes : c’eft à quoi répondroit précifément dans notre mufique un air à trois couplets , dont le premier feroit compofé en c fol ut, le fecond en d {4 ré, le troifieme en e ff mi. L'air élépiaque où plaintif s'entend aflez. L’air comarchios ou bacchique avoit le premier rang parmi ceux que l’on jouoit dans les feftins & dans Les afiemblées de débauches , auxquelles préfidoit le dieu Comus. L'air cépior empruntoit fon nom de fon auteur, eleve de Terpandre, qui s’étoit fignalé dans les airs pour la ffüre &t pour la cithare ; maïs on ignore quel étoit le cara@tere diftinétif de l’air cépionien. L'air déios femble fignifier #r air craintif & timide, Outre les airs de ffére que nous venons de don- ner, Olympe phrygien d’origine, compofa fur cet inftrument, à l'honneur d’Apollon, l'air appellé po- dycéphale ou à plufieurs téres. Pindare en fait Pallas linventrice pour imiter les gémiflemens des fœurs de Médufe , après que Perfée lui eut coupé la tête. Comme les ferpens qui couvroient la tête de Mé- dufe étoient cenfés fiffler fur différens tons, la f2ice imitoit cette variété de fifflemens. Les auteurs parlent aufli de l’air pharmatios, c’eit- à-dire du char. Héfychius prétend que cet air prit ce nom de fon jeu, qui lui faifoit imiter la rapidité ou le fon aigu du mouvementdes roues d’un char. L'air orthien eft célebre dans Homere , dans Arif- tophane, dans Hérodote, dans Plutarque, êc autres. La modulation en étoit élevée , & le rythme plein de vivacité, ce qui le rendoit d’un grandufage dans la guerre, pour encourager les troupes. C’eft fur ce haut ton que crie la difcorde dans Homere, pour ex- citer les Grecs au combat. C’étoit, comme nous le dirons bien-tôt, en joüant ce même air fur la fZre, que Timothée le thébain fafoit courir Alexandre aux armes. C’étoit, au rapport d'Hérodote, le no- me orthien que chantoit Arion fur la poupe du vaif- fean , d’où 1l fe précipita danslamer. | Enfin l’on met au nombre des principaux airs de fée le cradias | c’eft-à- dire l’air du figuier , qu'on jouoit pendant la marche des viétimes expiatoires dans les thargélies d’Athenes ; il y avoit dans ces fêtes deux victimes expiatoires qu’on frappoit pen- dant la marche avec des branches de fisuier fauva- ge. Ainfi le nom de cradias eft tiré de xpadn, branche de figuier. | fi Comme il n’étoit plus permis de rien changer dans le jeu des airs de f/4e, foit pour l'harmonie , foit pour la cadence, & que les muficiens avoient grand foin de conferver à chacun de ces airs, le ton quiluiétoit propre; de-là vient qu'on appelloit leurs chants nomes , c’eft-à-dire loi, modele, parce qu'ils avoient tous différens tons qui leur étoient affectés, 87 qui fervoient de régles invariables, dont on ne devoit Point s’écarter. On eut d’autant plus de foin de s’y conformer, qu'on ne manqua pas d'attribuer à l’excellence de Guelques-uns de ces airs, des effets furprenanspour = PE animér ou calmer les paflions des hommes. L’hiftoi- re nous en fournit quelques exemples , dont nous difcuterons la valeur. ) Pythagore, felonletemoignage de Boece, voyant un Jeune étranger échauffé des vapeurs du vin,trant- porté de colere, & fur le point de mettre le feu à la maïfon de fa maïtrefle , à caufe d’un rival préféré, animé de plus par le fon d’une fre, dont on jouoit fur le mode phrygien ; Pythagore, dis-je , rendit à ce jeune homme la tranquillité 8 fon bon fens, en ordonnant feulement au mufcien de changer de mo- de, & de jouer gravement, fuivant la cadence mar- quée par Le pié appellé /pordée , comme qui diroit au- jourd’hui fur la mefure dont lon compofe dans nos opéra les fymphonies connues fous le nom de /o7:- meuls , fi propres à tranquilhfer & à endormir. Galien raconteune hiftoire prefque toute pareille, à l'honneur d’un muficien de Milet, nommé Da- mon. Ce font de jeunes gens ivres , qu’une joueufe de ffére a rendus furieux , en joüant fur le mode phrygien, & qu’elle radoucit, par Pavis de ce Da- mon, en paflant du mode phrygien au mode do- rien. Nous apprenons de S. Chryfoftome , qui Timo. thée joiant un jour de la f/£re devant Alexandre-le- Grand fur le mode orthien, ce prince courut aux armes aufli-tôt. Plutarque dit prefque la même cho- fe du joueur de fére Antigémide , qui, dans un repas, agita de telle maniere ce même prince, que s'étant levé de table comme un forcené,, 1l fe Jetta fur fes armes, & mêlant leur cliquetis au fon de.la f4re, peu s’en fallut qu’il ne chargeât les convives. Voilà ce que l’hiftoire nous a confervé de plus mé- morable en faveur de la f/£ce des anciens : mais fans vouloir ternir fa gloire ,; comme ce n’eft que fur des gens agités par les fumées du vin, que roulent pref- que tous les exemples qu'on allegue de fes eflets, ils femblent par-là déroger beaucoup au merveil- leux qu'on voudroit y trouver, Il ne faut aujour- d’hui que le fon aigu & la cadence animée d’un mau- vais hautbois, foütenu d’untambour de bafque, pour achever de rendre furieux des gens ivres , & qui commencent à {e harceler. Cependant lorfque leur premier feu eff paflé, pout peu que le hautboisjone fur un ton plus grave , & ralentifle la mefure , on les verra tomber infenfiblement dans le fommeil, auquel les vapeurs du vin ne les ont que trop difpo- fés. Quelqu'un s’aviferoit-l , pour un femblable ef. fet, de fe recrier fur le charme & fur la perfe&ion d’une telle mufique ? On me permettra de ne con- cevoir pas une idée beaucoup plus avantageufe de la féte, ou, fi lon veut, duhauthois,, dont Pytha- ore & Damon fe fervirent en pareils cas. Les effets de la fre de Timothée ou de celle d’An- tigénide fur Alexandre; qu'ont-ils de fi furprenant 2 N’eft-1l pas naturel qu’un prince jeune êc belliqueux, éxtrèmement fenfible à Pharmonie , & que le vin commence à échauffer , fe leve brufquement de ta- ble, entendant fonner un bruit de guerre , prenne fes armes & fe mette à danfer la pyrrhique, qui étoit une danfe impétueufe:, où l’on faifoit tous les mou- vemens militaires , foit pour l’attaque , foit pour la défenfe à Eft-1l néceflaire pour cela de fuppofer dans ces muficiens un art extraordinaire ,; ou dans leur Âte un fi haut deoré de perfeétion ? On voit dans le feftin de Seuthe , prince de Thrace, décrit par Xé- nophon, des Cérafontins fonner la charge avec des flites & des trompettes de cuir de bœuf crud ; & Seuthe lui-même {ortir de table en pouflant un cri de guerre , & danfer avec autant de viteflé & de le- gereté , que s’il eût été queftion d'éviter un dard, Jugera-t-on de-là que ces Cérafontins étoient d’ex- cellens maîtres en Mufique ? L'hiftoire parle d’un joueur de harpe qui vivoit FLU fous Éric IL. roi de Danemark , & qui, au rapport de Saxon le srammairien , conduxfoit fes auditeurs par degré, juiqu’à la fureur. Il s’agit maintenant d’un fiecle d’ignorance & de barbarie,où la Mufiqueextrè- ment dégénérée , ne laïfloit pas néanmoins , toute imparfaite qu’elle étoit, d’exciter les pañlions avec la mêmé vivacité que dans le fiecle d'Alexandre. Concluons que les effets attribués à la fféze des an- ciens, ne prouvent point feuls l’extrèmé fupériorité de {on jeu , parce que la mufique la plus fimple, la plus informe , & la plus barbare , comme la plus tompoice, la plus réguliere &e la mieux concertée, peut opérer dans certaines conjonétutes , lés préten- dues merveilles dont 1l s’agitici. C’eft aflez parler des ffires anciennes, de leurs dé- nominations , de la variété de leurs aïrs , de leurs ufages, & de leurs effets : on trouvera cette matiere difcutée plus à fond dans les ouvrages de Meurfius & de Gafpard Bartholin , de sibiis veterum , & dans le dialogue de Plutarque fur la Mufque , traduit en françois avec les favantes remarques de M. Burette, qui ornent les mémoires de l’acadénie royale des Inf- criptions, Article de M, le Chevalier DE JAU COURT. FLÛTE DOUBLE, (znffrum. de Mufiq.) La double Jiire ou la fläte à deux tiges étoit un inftrument do- meftique en ufage chez les anciens , & fur laquelle le muficien feul pouvoit exécuter une forte de concert. La double flüre étoit compofée de deux färes unies , de maniere qu’elles n’avoient ordinairement qu’une embouchure commune pour les deux tuyaux. Ces fléres étoient ou égales ou inégales , foit pour la lon- gueur , foit pour le diametre ou la grofleur. Les f74+ res égales rendoient un même fon : les inégales ren- doient des fons diférens , l’un grave, l’autre aigu. La fymphonie qui réfultoit de l’union des deux jZ4- ces égales, étoit ou l’uniflon , lorfque les deux mains du jotüeur touchoient en même tems les mêmes trous fur chaque fre, ou la tierce, lorfque les deux mains touchoiïent diflérens trous. La diverfité des fons , produite par l'inégalité des fférès , ne pouvoit être que de deux efpeces , fuivant que ces jfgres étoient à l’oétave , ou feulement à la tierce ; & dans l’un & l’autre cas , les mains du joüeur touchoient en même tems les mêmes trous fur chaque ffére , &x formoient par conféquent un concert ou à l’oftave ou à la tierce. . Aurefte Apulée dans fes fforides attribue à Hya- -gnis l'invention de la double flüre. Cet Hyagnis étoit pere de Marfias, & pañle généralement pour l’in- venteur de l’harmonie phrygienne. Il florifloit à Cé- lenes ville de Phrygie, la 1242° année de la chroni- que de Paros , 1506 ans avant J. C.-Arricle de M. de Chevalier DE JAUCOURT. | FLÛTE DES SACRIFICES ; il y en avoituneinfinité .de différentes fortes : on prétend qwelles étoient de bouiïs ; au lieu que celles qui fervoient aux jeux ou aux fpeétacles , étoient d’argent, d'ivoire, ou de l’os de la jambe de l’âne: Nous ne favons de ces fféres, que ce que le coup-d’œil en apprend par l’infpe&tion des monumens ançiens. Woye;-en une dans nos P/an- ches de Lutherie. a FLUTE D'ACCORDS, inftrument de Mufique com- poié de deux fées paralleles , & pratiquées dans le même morceau de bois; on touche la f/£re droite de la main droite, & la gauche de la main gauche. Voyez nos Planches de Lurherie. FLUTE ALLEMANDE o TRAVERSIERE, 2r/frument de Mufique à vent, eft un tuyau de bois de quatre pie. ces, percées & arrondiesfur le tour, quis’aflemblent les unes aux autres par le moyen des noix. Foyez Noix Des INSTRUMENS À VENT, dans lefquelles les parties menues des autres pieces doivent entrer, Voyez la figure de cet infirument, durs nos Planches de Lutherie. Tome VI, ELU 869$ À la premiere partie ou tête de la flére qui.eft com: me la ffére-à-bec, percée d’un tron rond dans toute fa longueur 4 £ , comme on peut le voir dans la fes conde feure, eft un trourond O, qu eft l’embouchus re, Cetrou , comme tous les autres decetinftrument, eltévaié en-dedans, L’extrémité 4 de la ffére eftfer: imée avec un tampon de liége «, qui s’ajufte exaéte+ ment dans le tuyau de la ffäre, Ce tampon eft re= couvert par un bouchon 4 , qui eft de la même mas tire que la ce que l’on fait de bois ou d'ivoire, o1 de tout autre bois dur & précieux, comme l’ébenes le bois de violette, 8 dont on garnit ordinairement les noïx ayec des frettes d'ivoire. Pour les empêcher de fe fendre, on met deflous l’ivoire quelques bring de filafle, que l’on enduit de colle-forte, & par-defs, lus lefquels on enfile les fretes. Foyez l'article No1x DES INSTRUMENS À VENT. Pour perforer & tour= ner les morceaux qui compofent la flére traverfiere , on fe fert des mêmes outils 8e des mêmes moyens que ceux dont On fe fert pour travailler ceux qui com: pofent la ffére douce ou à-bec. F’oyez FLUTE Douce: 04 A-BEC, On pratique une entalle dans la dérniere noix D, pour, y loger la clé 2c& fon reflort de laï- ton élaftique, par le moyen duquel fa palette ou foû« pape c qui eft garnie de peau de mouton, eft tenue appliquée fur le feptieme trou auquel le petit doigt ne fauroit atteindre, & qui fe trouve fermé par ce moyen. Cette clé eft d'argent on de cuivre, Pour bien joüer de cet inftrument, il faut com- mencer par bien pofléder l'embouchure, ce qui eft plus difficile que l’on ne penfe. Toutes fortes de per= fonnes font parler les fZises-à-bec ; mais peu peuvent fans Pavoir appris, tirer quelque fon de la ffére sas verfiere ; ainfi nommée, parce qué pour en joüer om la met en-travers du vifage, enforte que la longueur de la färe foit parallele à la longueur de la bouche avec laquelle on fouffle,, en ajuftant les levres {ur le trou O,, enforte que lalame d’air qui fort de la bou- che, entre en partie, dans la fée par cette ouver- ture. nie | | Soit que l’on joue debout ou affis, äl faut tenir le corps droit, la tête plus haute que bafe , un peu tournée vers l'épaule gauche, les mains hautes fans lever les coudes ni les épaules, le poignet gauché ployé en-dehors, 87 lé même bras près du corps. Si on eft debout, il faut être bien campé fur fesjambes le pié gauche avancé, le corps pofé fur la Hanche droite, Le tout fans aucune contrainte, On doit fur- tout obferver de ne faire aucunmouvement du corps _nide la tête, comme plufieuts font, en battant la me- fure, Cette attitude étant bien prife, eft fort agréa ble, &c ne prévient pas moins les yeux que le fon de l’inftrument flate agréablement l’oreille, À l'égard de la poñtion des mains, la gauche doit être au hant de la fre que l’on tient entre le pouce de cette main & le doigt indicateur qui doit boucher le premier trou marqué x dans la figure ; le fecond trou eft bouché parle doigt medium, & le troifieme par le doigt annulaire. La main droite tient la fe par fa partie inférieure : le pouce de cette main qui eft une peu ployée en-dedans, foûtient la fée par deflous, &r les trois doigts de cette main, favoir, l'in: dicateur, lemoyen & l’annulaire, bouchent les trous 4, 5,6; le petit doigt fert à toucher fur la clé b c faite en bafcule, enforte que lorfque l’on abaiïffe l'extrémité 2, la foüpape ou palette c débouche le feptième trou. Il faut tenir la fée prefque horifon- talement. Pour bien emboucher la fléte traverfiere & les inf- trumens femblables , il faut joindre les levres l’une contre l’autre , enforte qu’il ne refte qu’une petite ou- verture dans le milieu, large environ d’une demi-li. gne, & longue de trois ou quatre; on n’avancera point les levres en-devant, comme lorfque l’on veut XXxxx y 896 FLU fouffler une chandélle pour l’éteindre : au contraire, On les retirera vers les coins de la bouche , afin qu’el- les forent unies & applaties. Il fant placer l’embou- chure O de la lite vis-à-vis de cette petite onvertu- re, foufller d’un vent modéré, appuyer la f/£re con- tre les levres, & la tourner en-dedans où en-dehors à pufqu’à ce qu'on ait trouvé le fens dé la faire parler. Eorfqu'on fera parvenu à faire parler la ff£re, & qu'on fera bien aflüré de l'embouchure , on pofera les doigts de fa main gauche les uns après les autres, &c on reftera fur chaque ton en réitérant le fouffle juf- qu'à ce qu'on en foit bien affüré ; on placera de mé- me les doigts de la main droite, en commencant par le doigt indicateur, qui eft aufh le doigt de la main gauche , que l’on a pofé le premier. Lé ton le plus grand fe fait en bouchant tous les trous, comme on peut voir dans la tablature qui eft à la fin de cet ar- ticle. | Cette tablature contient fept rangées de zéros noirs ou blancs ; chacune de ces rangées répond au trou de la fre, qui a le même chiffre que cette rangée. Une colonne de fept zéros noirs ou blancs, reprefente les fept trous de la fZére : le zéro fupérieur répond au pre- mier trou de cet inftrument , qui eft le plus près de l’embouchare ; & les autres en defcendant, répon- dent fucceffivement aux autres trous de la fféce,felon les nombres 1,2,3,4,5,6, 7, fig. Les blancs marquent quels trous de la flite doivent être ouverts, & les noirs quels trous doivent être fermés , pour tirer de la fZéte le ton de [a note qui eftau-deflus de la co- lonne de zéro ou d'étoiles dans la portée de mufique qui eft au-deflus. L’étendue de la fäte eft de trois oftaves, qui ré- pondent aux colonnes de zéros de la tablature. Le fon le plus grave de la ffére, non compris lue X, eft le ré qui fonne l'union du ré qui fuit immé- diatement après la clé de c-fo/-ur des clavecins, lef- quels font à l’oûtave au-deflous du preftant de l’or- gue. Voyez CLAVECIN ; 6 la table du rapport & de l'étendue des inftrumens de mufique. Ce fon , de même que l’us X au-deflous, fe fait en bouchant tous les trous exaétement & foufflant très - doucement, ob- fervant par lus X de tourner l'embouchure en-de- dans. Il faut remarquer que plus on monte fur cet inftrument, plus on doit augmenter le vent: enforte que par le ré à l’oétave du plus grâve {on de la fée, il puifle la faire monter à lPoétave. Il faut obferver que lorfque l’on defcend de lue naturel de la feconde oûtave au bémol, ou que du JE b on monte à l’ur, le f 1 doit fe faire comme il eft marqué à la feconde pofition de ce f, qui outre qu’- elle eft plus jufte , conduit plus facilement à celle de lus naturel, Les fons aigus f, ut, ré de la troïfieme oftave, fe peuvent pas fe faire furtoutes les fZéres ; plus elles font bafles, plus il eft facile de les en tirer. On les obtient avec un corps d'amour, & plus facilement encore avec une bafle de f/£te traverfrere. On adapte quelquefois à une jfére jufqu’à 7 corps de la main gauche de différentes longueurs, & que l’on peut fubftituer les uns aux autres pour baïfer le fon total de la ffére avec les longs, & le hauffer avec les plus courts, La différence des {ons produits par le FLUÜ “plus long & le plus court de cés corps, eft d’envi- ron un ton, enforte que par ce moyen la ffére peut s’accorder ayec quelqu'inftrument fixe que ce foit, à l’uniffon duquel elle ne pourroit pas fe mettre, fi elle n’avoit qu’un feul corps. | Il y a d’autrès fées plus grandes ou plus petites que celles-ci, qui n’en different ni par la ftru@ture ni le doigter, mais feulement par la partie qu’elles exé- cutent ; telles font Les tierces , quintes, oftaves & bañles de fléres. nn Comme il ne fuit pas pour bien jouer de cet inf trument, de faire facilement tous les tons qu’on en peut tirer, mais qu’il faut encore pouvoir faire les cadences fur tous ces tons, c’eft pour les enfeigner que nous avons ajoûté une fuite à la tablature, par laquelle on connoït par les zéros noirs 8 blancs con- joints par une accolade, de quel trou la cadence eft prife , &c fur lequel il faut frapper avec le doigt; le premier trou compris fous l’accolade, marque où fe fait le port de voix, & la feconde de ces deux chofes qui eft fuivie d’une virgule, marque le trou fur lequel il faut trembler, On doit paffer le port de voix & la cadence d’un {eul coup de langue. Voyez la rablature. Il y a quelques cadences qui fe frappent de deux doigts, comme par exemple, celle de l’ur X, prife du ré naturel , & quelques autres finiflent en levant les doigts, ce qu’on peut connoître par les zéros blancs accompagnés de la virgule. Outre la connoïffance des tons, femi-tons, & des cadences, 1l faut encore avoir celle des conps-de= langue , des ports-de-voix, accents, doubles-caden: ces , flatemens , battemens, &c. Les coups-de-lan- gue articulés font l’explofion fubtile de l’air que l’on louffle dans la fre, en faifant le mouvemement de langue que l’on feroit pour prononcer tout bas la fyllabe sx ou r4. On donne un coup-de-langue fur chaque note, ce qui les détache les unes des autress lorfque les notes {ont coulées, on donneun coup-de- langue fur la premiere , qui fert pour toutes les au= tres que l’on pañle du même vent. Les coups-de-lan- gue qui fe font fur tous les inftrumens à-vent, doi- vent être plus ou moins marqués fur les uns que fur les autres ; par exemple, on les adoucit fur la fire trayerfiere, on les marque davantage fur la ffére-à- bec, &c on les prononce beaucoup plus fortement fur le hautbois. | Le port-de-voix eft un conp-de-langue anticipé d’un degré au-deflous de la note fur laquelle on le veut faire ; le coulement au contraire eff pris d’un ton au-deflus , & ne {e pratique guere que dans les intervalles de tierces en defcendant. L'accent eftun fon que l’on emprunte fur l’extré< mité de quelques tons, pour leur donner plus d’ex- preffon ; la double cadence eft un tremblement or dinaire, fuivi de deux doubles croches , coulées où articulées. | Pour les flatemens ou tremblemens mineurs & leg battemens, voyez les principes de la flûte traverfiere du fieur Hotterre le Romain, ff£re de la chambre du Roi, imprimées à Paris, chez J. B. Chriftophe Bal- lard ; ouvrage dont nous avons tiré une partie de cet article. ÆX 4 nr) ré rl Lo) + ee — > ë [ae En Ed + Ex © £a Le Zz <£ = réa € 4 < = = re) ce Es << 5 =) à 1 Ce a En D Fe < Ce | (+) < Ex [1 roeseses LE [| séosoeoe || Ill e8æ0ecoo | 10886800 ||zeoecoce H FÉES [[TT s8e0o0eeo 20660000 SO8086860 $8600000 8680000 r66860068 blilsoeeeeee 1 0 He Das [IQ É | ne S088&0000 3,8 0 000 0 © 8296860000 12086009 $8000000. 68068. D ee LM er MA, L pas 2 S8800000. Gus er sÈ an 8 888000 € : #| 1] S DELIT. ” & IE r…@ 866066 € . Qi. À HER “68680680 = AIT Le ie “20880000 CIE = QE Fe ER “6008000 = LS ec000co | JD 8 680868 À ( Di. 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Il'y a des hommes qui fe fervent: de cette ffäte fi habilement ; & qui en-connoïiffenr fi _ bien les différens fauts, qu'ils en tirent. fans-peine jufqu’à l'étendue d’une:vingt-deuxieme.. -:— FLUTE , (Marine) bâtiment de charge appareïllé- en Vaifleau, dont la varangue-eft plate &c. les. facons: peu taillées, pour ménager beaucoup de place däans- la cale. sum, 2Snts co ani 26) La fléte eft fort plate de varangues ; & les ceintes. vont de telle forte depuis létrave jufqu'à..l’étam., bord, qu’elle eft auffi ronde à l'arriere qu'à l'avant: ayant le ventrefi.gros qu’elle a une fois plus de bou. chin vers le franc ullac, qu'au, dernier pont. # Oÿeg : YYyyy 902 F L'U Marine, Planche XV. fig. 22. le deffein d’une Jf£re, Nous-donnons en France le nom de ÿ/£re, ou de vailfear armé en flüte, à tous les bâtimens qu’on fait Servir demagañn ou d’hôpital, à la fuite d’une armée mavale ,'ou qui font employésau tranfport des trou- pes, quoiqu'ilsfoient bâtis à poupée quarrée, & qu’- ils ayentfervi autrefois comme vaifleaux de guerre. : La grandeur [a plus ordinaire des fféres eft d’envi- : ron 130 piés de long de l’étrave à létambord ; vingt-fix piés & demi de large, & treize piés & de- | mi de creux.environ. Quelquefois on prend pour leur largeur la cinquieme partie de leur longueur. Les proportions des différentes pieces qui entrent dans la conftru@tion de ce bâtiment, varient fuivant {a grandeur , ainfi que pour les vaifleaux. (Z) FLUTE , (Tapiffier.) efpece de navette dont fe fer- vent les bafle-liffiers | & fur laquelle font devidées les laines ou autres matieres qu’ils employent à leurs tapfleries. La j/2re eft un bâton fait au tour ; enfor- me de petit cylindre , mais dont, vers le milieu, le diametre eft moins grand qu'aux deux bouts. [la or- dinairement trois ou quatre pouces de long, & qua- tre ou cinq lignes d’épaifleur. Voyez T'APISSERIE. FLUTE , (greffer en) Jardinage, voyez GREFFER. FLUX-ET REFLUX, f. m.(Phy/q. & Hydrogr.) mouvement journalier, régulier, & périodique, qu’- on obferve dans les eaux de la mer, & dont le dé- tail 8€ les caufes vont faire l’objet de cet article. Dans les mers vaftes & profondes, on remarque 1e l'Océan monte & defcend alternativement deux ds par jour. Les eaux, pendant environ fix heures, s’élevent & s'étendent fur Les rivages ; c’eft ce qu’on appelle le fux : elles reftent un très-petit efpace de tems, c’eft-à-dire quelques minutes, dans cet état derepos ; après quoi elles redefcendent durant fix autres heures, ce qui forme le reflux : au bout de ces fix heures & d’un très-petit tems de repos , elles remontent de nouveau ; & ainfi de fuite. Pendant le fx, les eaux des fleuves s’enflent & remontent près de leur embouchure ; ce qui vient évidemment de ce qu’elles font refoulées par les eaux de la mer. Voyez EMBOUCHURE 6 FLEUVE. Pendant le reflux, les eaux de ces mêmes fleuves recommencent à couler. On a défigné le flux & reflux par le feul mot de marée ; dont nous nous fervirons fouvent dans cet article. Voyez MARÉE. Le moment où finit le f/ux, lorfque les eaux font flationnaires, s'appelle la hause amer ; la fin du refux s’appelle la baffe mer. Dans tous les endroits où le mouvement des eaux n'eft pas retardé par des îles, des caps , des détroits, ou par d’autres femblables obftacles ;, on obferve trois périodes à [a marée; la période journaliere, la période menftruelle, la période annuelle. La période journaliere eft de 24 heures 49 minu- tes , pendant lefquelles le ffux arrive deux fois, & le reflux deux fois ; & cet efpace de 24 heures 49 mi- nutes , eft Le tems que la lune mét à faire fa révolu- tion journaliere autour de laterre, ou, pour parler plus exaétement , le tems qui s’écoule entre fon paf- fage par le méridien, & {on retour au même mé- ridien. | La période menftruelle confifte en ce que les ma- rées font plus grandes dans les nouvelles & pleines lunes, que quand Ia lune eft en quartier ; ou , pour ‘parler plus exaétement , les marées fontles plus gran- des dans chaque funaifon, quand la lune eft environ à 18 degrés au-delà dés pleines & nouvelles lunes, & les plus petites , quand elle eft environ à 18 desrés au-delà du premier & du dernier quartier. Les nou- velles où pleines lunes s’appellent fyzygies , les quartiers , guadratures : ces expreflions nous feront quelquefois commodes, & nous en uferons, Voyez SYZXGIES , QUADRATURES, 6. FLU La période annuelle confifte en ce qu'aux équino- xes les marées font les: plus grandes vers les nou- velles & pleines lunes, & celles des quartiers font plus grandes qu'aux autres lunaïfons ; au contraire dans les folftices, les marées des nouvelles & plei- nes lunes ne font pas fi grandes qu’aux autres lunaï- {ons ; au lieu que les marées des quartiers font plus grandes qu'aux autres lunaïfons.. ; On voit déjà par ce premier détail, que le f{ux & reflux a une connexion marquée & principale avec les mouvemens de la lune, & qu’il en a‘même ,juf- qu’à un certain point, avec lemouvyement du foleil ; ou plütôt avec celui de la terre autour. du foleil. Voyez; CorERNIC. D’où l’on peut déjà conclure en général, que la lune & le foleil, & fur-tout lé premier de ces deux aftres, {ont la caufe du fx & reflux , quoiqu’on ne fache pas encore comment cet- te caufe opere. Il ne reftera plus fur cela rien à des firer, quand nous entrerons dans Le détail de la ma- mere dont ces deux aftres agiflent fur les eaux: mais fuivons les phénomenes du flux & du reflux. Dans la période journaliere on obferve encore : 1°. que la haute mer-arriye auxrades orientales plû- tôt qu'aux rades occidentales: 2°. qu'entre les deux tropiques la mer paroît aller de l’eft à l’oùeft : 3°. que dans la zone torride , à moins de quelque obfta- cle particulier, la haute mer arrive en même tems aux endroits qui font fous le même méridien; au lieu que dans les zones tempérées, elle arrive plütôt à une moindre latitude qu’à une plus grande ; & au- delà du foixante-cinquieme degré de latitude , le flux n’eft pas fenfible. + | Dans la période menftruelle on obferve 1°, que les marées vont en croiffant des quadratures aux {y= zygies, & en décroiflant, des {yzygies aux quadra= tures : 2°. quand la lune eft aux fyzygies ou auxiqua= dratures, la haute mer arrive trois heures après le paflage de [a lune au méridien : fi la lune va des fy= zygies aux quadratures, le tems de la haute mer ar- rive plütôt que ces trois heures: c’eft le contraire fi la lune va des quadratures aux fyzygies : 3°. foit que la lune fe trouve dans lhémifphere auftral ou dans le boréal, le tems de la haute mer n'arrive pas plus tard aux plages feptentrionales. Enfin dans la période annuelle on obferve 1°. que les marées du folftice d’hyver font plus grandes que celles du folftice d’été : 2°, les marées font d’autant plus grandes que la lune eft plus près de la terre ; & elles font les plus grandes, toutes chofes d’ailleurs égales, quand la lune eft périgée , c’eft-à-dire à fa plus petite diftance de la terre : elles font auffi d’au- tant plus grandes, que la lune eft plus près de l'équa- teur ; & en général les plus grandes de toutesles ma- rées arrivent quand la lune eft à la fois dans l’équa- teur, périgée , & dans les fyzysies : 3°. enfin de les contrées feptentrionales, les marées des nouvel- les & pleines lunes font en été plus grandes le foir que le matin, & en hyver plus grarides le matin que le {oir. | Tels font les phénomenes principaux ; entrons À= préfent dans leur explication, | | Les anciens avoient déjà conclu des phénomenes du flux & reflux, que le foleil & la lune en étoient la caufe: caufa , dit Pline, 27 fole lunäque ; div. II. c. 97. Galilée jugea de plus, que le flux & reflux étoit une preuve du double mouvement de la terre parrap- port au foleil : maïs la maniere dont ce grand homme fut traité par l’odieux tribunal de l’inquifition, à l’oc- cafion de {on opinion fur le mouvement dela terre, Voyez CoPERNIc, ne l’encouragea pas à approfon- dir, d’après ce principe, les caufes du fux & reflux : ainfi on peut dire que jufqu’à Defcartes, perlonne n’avoit entrepris de donner uneexplication détaillée de ce phénomene, Ce grand homme étoit parti pour cela de fon ingénieufe théorie des toutbillohs. Foyez CARTÉSIANISME & TOURBILLON. Selon Defcar- tes, lorfque la lune pañle au méridien , le fluide qui eftentre la terre & la lune, ou plütôt entre la terre &c le tourbillon particulier de la lune, fluide qui fe meut auf en tourbillon autour de la terre, fe trouve dans un efpace plus refferré : il doit donc y couler plus vite ; 1l doit dé plus y caufer une preffion fur les eaux de là mer ; &t de-là vient le fux & le reflux. Cette explication, dont nous fupprimons le détail 6e les conféquences, a deux grands défauts; le pre- mier, d'être appuyé fur l’hypothèfe des tourbillons, aujourd’hui reconnue infoûtenable , voyez ToUR- BILLONS ; le fecond eft d’être direétement contraire aux phénomenes : car , felon Defcartes , le fluide qui pañle entre la terre & la lune, doit exercer une preflion fur lés eaux de la mer; cette preffion doit donc refouler les eaux de la mer fous la lune: ainfi ces eaux devroient s’abaifler fous la lune, lorfqw’elle pañle au méridien : or 1l arrive précifément le con- traire. On peut voir dans les ouvrages de plufieurs phyficiens modernes , d’autres difficultés contre cet- te explication : celles que nous venons de pfopofer {ont les plus frappantes , & nous paroïffent fufhre. Quelques cartéfiens mitigés attachés aux tourbil- Jons , fans l’être aux conféquences que Defcartesen a tirées, ont cherché à raccommoder de leu mieux ce qu'ils trouvoient de défe&tueux dans explication que leur maître avoit donnée du f/4x & du reflux : mais indépendamment des objections particulieres qu'on pourroit faire contre chacune de cés explica- tions , elles :ont toutes un défaut général , c’eft de fuppofer l’exiftence chimérique des tourbillons: ainfi nous ne nous y arrêterons pas davantage. Les principes que nous efpérons donner aux mots Hy- DRODYNAMIQUE, HYDROSTATIQUE, 6. RÉsis- TANGE,, fur la preflion des fluides en mouvement, ferviront à apprécier avec exatitude toutes les ex- plications qu'on donne ou qu’on prétend donner du flux & reflux , par les lois du mouvement des fluides & de leur preffion. Paflôns donc à une maniere plus fatisfaifante dé rendre raïifon de ce phénomene. La meilleure méthode de philofophet en Phÿfique, c’eft d'expliquer les faits les uns par les autres, & de réduire Les obfervations & les expériences à cer: tains phénômenés généraux dont elles foient la con- féquence. Il ne nous eft guere permis d'aller plus Join , les caufes des premiers faits nous étant incon- nues : or c’eft le cas où nous nous trouvons par rap- port au flux & reflux de la mer. Il eft cértain par tou- tes les obfervations aftronomiques , voyez Loï DE KEPLER , qu'il y a une tendance mutuelle des corps céleftes les uns vers les autres : cette force dont la caufe eft inconnue , a été nommée par M. Newton , gravitation univerfelle , où attratlion , voyez ces deux mots ; voyez auffi NEW TONIANISME : il eft certain de plus , par les obfervations ; que les planetes fe meu- vent ou dans le vuide,ouau-moins dans un milieu qui ne leur réfifte pas. 7. PLANETE, TOURBILLON,RÉ- SISTANCE, &c. Il eft donc d’un phyficien fage de faire abftraétion de tout fluide dans l’explication du flux 6 reflux de la mer, & de chercher uniquement à expliquer ce phénomene par le principe de la gra- witation univerfelle, que perfonne ne peut refufer d'admettre , quelque explication bonne ou mauvaïle qu'il entreprenne d’ailleurs d’en donner. Mettant donc à part toute hypothèfe, nous pofe- rons pour principe , que comme la lune pefe vers laterre, voyez LUNE , de même aufli la terre & tou- tes-fes parties pefent vers la lune, ou, ce qui revient au même, en font attirées ; que de même la terre & toutes fes parties pefent ou font attirées vers le fo- leil, ne donnant point ici d’autre fens au mot arerac- £07, que Cehni d’une tendançe des parties dela terre Tome FI, F LU 903 vers la lune & vers Le foleil, quelle qu’en foit la catta fe : c’eft de ce principe que nous allons déduire les phénomenes des marées; Kepler avoit conjeéturé il y a long-téms, que la pravitation des parties de la terre vers la lune 8 vers le foleil , étoit la caufe du ffux 8 reflux. « Si la terre cefloit , dit-il, d’attirer fes eaux vers » elle-même, toutes celles de l'Océan s’éleveroïient » vers la lune; car la fphere de l’attra@ion dé la lu: » ne s'étend vers notre terre, & en attire les eaux »4 C’eft ainfi que penfoit ce grand aftronome, dans fon introd. ad theor. mart. & ce foupçon, car cé n’é2 toit alors rien de plus, fe trouve aujourd’hui vérifié 6€ démontré par la théorie fuivante, déduite des ptincipés de Newton: | Théorie des marées, La furfacé de la terre & de la mêr eft fphérique , ou du moins étant à - peu - près fphérique, peut être ici regardée comme telle. Cela poié, fi l’on imagine que la lune 24 ( Planche géoa graphique , fig. 6.) eft au-deflus de quelque partie de la furface de la-mer , comme Æ, il eft évident que l’eau Æ étant le plus près de là Lune, pefera vers elle plus que ne fait aucune autre partie de la terre & de la mer, dans tout l’hémifphere FE H. Par conféquent l’eau en Æ doit s'élever vers la lune , 8 la mer doit s’enfler en Æ, Par la même raifôn , l’eaf en G étant la plus éloi- gnée de la lune , doit pefer moins vers cette pla- nete que ne fait aucune autre partie de la terre ou de la mer, dans l’hémifphere FG H. Par conféquent l’eau de cet endroit doit moins s'approcher de la lune , que toute autre pattie du globe terreître ; c’eft-à-dire qu’elle doit s'élever du côté oppofé comme étant plus légere , & par confé- quent elle doit s'enfler en G. : Par ces moyens, la furface de l'Océan doit pren: dre néceflairement une figure ovale , dont le plus long diametre eft E G, & le plus court F H; de forte que la lune venant à changer fa poñition dans fon mouvement diurne autour de la terre, cette figure ovale de l'eau doit changer avec elle : & c’eit-1A ce qui produit ces deux flux & reflux que l’on re- marque toutes les vingt-cinq heures. Telle eft d’abord en général, & pour ainf dire ent gros, l'explication du fx & reflux. Mais pour faire entendre fans figure , par le feul raifonnément, & d’une maniere encore plus précife, la caufe de l’élé- vation des eaux en G & en E , imaginons que la lu- ne foit en repos, & queïla terre foit un globe folide en répôs, couvert Jufqu’à telle hauteur qu’on vou- dra d’un fluide homogene, rare & fans reflort, dont la furface foit fphérique ; fuppofons de plus que les parties de ce fluide pefent (commeelles font en effet) vers le centre du globe, tandis qu’elles font attirées par le foleil & par la lune ; il eft certain que fi toutes les parties du fluide & du globe qu'il couvre, étoient attirées avec uné force égale & fuivant des diredions paralleles, l’aétion des deux aftres n’auroit d’autre effet, que de mouvoir ou de déplacer toute la mafle du globe & du fluide, fans caufer d’ailleurs aucun dérangement dans la fituation refpeñive de leurs parties. Mais fuivant les lois de l’attraétion , les par- ties de l’hémifphere fupérieur, c’eft-à-dire de celui qui eff le plus près de l’aftre, font attirées avec plus de force que le centre du globe; & au contraire les par- ties de l’hémifphere inférieur font attirées avec moins de force : d’où il s’enfuit que le centre du glo- be étant mû par l’aétion du foleil ou de la lune, le fluide qui couvre l’hémifphere fupérieur, & qui eft attiré plus fortement, doit tendre à fe mouvoir plus vite que le centre, & par conféquent S’élever avec une force égale à l’excès de la force qui l’attire fur celle qui attire le centre; au contraire Le fluide de XYyyyj 490 FE LU l’hémifphere inférieur étant moins attiré que le cen- tre du globe, doit fe mouvoir moins vite : il doit donc fuir le centre pour aïnfi dire, & s’en éloigner avec une force à-peu-près égale à celle de l’hémi- fphere fupérieur. Ainfi le fluide s’élevera aux deux points oppofés qui font dans la ligne par où pañle le foleil ou la lune: toutes fes parties accourront, fi on peut s’exprimer ainf, pour s'approcher de ces points, avec d'autant plus de viteffe, qu’elles en {e- ront plus proches, On explique par-là avec la derniere évidence, comment l’élévation & l’abaiflement des eaux de la mer fe fait aux mêmes inftans dans les points oppofés d’un même méridien. Quoique ce phénomene foit une conféquence néceffaire du fyftème de M. New- ton , & que ce grand géometre l’ait même expreflé- ment remarqué, cependant les Cartéfiens foûtien- nent depuis un demi-fiecle, que fi ’attraétion pro- duifoit le flux & reflux, les eaux de l'Océan, lorf- qu’elles s’élevent dans notre hémifphere, devroient s’abaifer dans l’hémifphere oppofé. La preuve fim- ple & facile que nous venons de donner du contraï- re fans figure & fans calcul, anéantira peut-être en- fin pour toûjours une objeétion auffi frivole, qui eft pourtant une des principales de cette feéte contre la théorie de la gravitation univerfelle. Le mouvement des eaux de la mer, au moins ce- lui qui nous eft fenfble & qui ne lui eft point com- mun avec toute la mafle du globe terreftre, ne pro- vient donc point de l’a&ion totale du foleil & de la lune, mais de la différence qu’il y a entre l’aétion de ées aftres fur le centre de la terre, & leur a&tion fur le fluide tant fupérieur qu'inférieur : c’eft cette dif- férence que nous appellerons dans toute la fuite de cet article, aéion , force, ou attratfion folaire ou lu- naire. M. Newton nous a appris à calculer chacune de ces deux forces, & à les comparer avec la pe- fanteur. Il a démontré par la théorie des forces cen- trifuges , & par la comparaïfon entre le mouvement annuel de la terre & fon mouvement diurne (Foyez FORCE CENTRIFUGE & PESANTEUR) , que l’a@ion folaire étoit à la pefanteur environ comme un à 128682000 : à l'égard de l’a@ion lunaire, il ne l’a pas auffi exaétement déterminée, parce qu’elle dé- pend de la maffe de la lune, qui n’eft pas encore fuf- fifamment connue ; cependant, fondé fur quelques obfervations des marées, il fuppofe l’ation lunaire environ quadruple de celle du foleil. Sur quoi voyez La fuite de cet article. Il eft au moins certain, tant par les phénomenes des marées que par d’autres obfervations ( Voyez EQUINOXE, NUTATION, 6 PRÉCESSION ),que l’ac- tion lunaire pour foûülever les eaux de POcéan, ef beaucoup plus grande que celle du foleil; & cela nous fuffit quant à préfent. Voyons maintenant com- ment on peut déduire de ce que nous avons avancé l'explication des principaux phénomenes du flux 8 reflux. Dans cette explication nous tâcherons d’a- bord de nous mettre à la portée du plus grand nom- bre de leéteurs qu'il nous fera poffble , & par cette taifon nous nous contenterons d’abord de rendre raifon des phénomenes en gros; mais nous donne- rons enfuite les calculs & les principes, par le moyen defquels on pourra donner rigoureufement les expli- cations que nous n’aurons fait qu'indiquer. Nous avons vü que les eaux doivent s'élever en même tems au-deflous de l’endroit où eft la lune, & au point de la terre diamétralement oppofé à celui- là; par conféquent à 90 degrés de ces deux points, ces eaux doivent s’abaïffer : de même l’action folai- ‘ re doit faire élever les eaux à l'endroit au -deflus duquel eft lefoleil, & au point de la terre diamétra- lement oppofé ; & par conféquent les eaux doivent s'abaïffer à 90 degrés de ces points, Combinant en- FEU femble ces deux a@ions, on verra que l'élévation des eaux en un même endroit doit être füjette à de grandes variétés, foit pour la quantité, foit pour l'heure à laquelle elle arrive, felon que l’aétion fo- laire & l’aétion lunaire fe combineront entre elles, c’eft-à-dire felon que la lune & le foleil feront dif- féremment placés par rapport à cet endroit. . En général dans les conjonétions & oppoñitions du foleil & de la lune , la force qui fait tendre l’eau vers le foleil, concourt avec la pefanteur qui la fait ten- dre vers la lune, Car dans les conjonétions du foleil &t de la lune, ces deux aftres paflent en même tems au-deffus du méridien; & dans les oppoñitions, l’un pafle au-deflus du méridien, dans le tems que l’autre pañle au-deflfous ; & par conféquent ils tendent dans ces deux cas*à élever en même tems les eaux de la mer, Dans les quadratures au contraire, l’eau éle- vée par le foleil fe trouve abaïflée par la lune ; car dans Les quadratures, la lune eft à 90 degrés du fo- leil ; donc les eaux qui fe trouvent fous la lune {ont à 90 degrés de celles au-deflus defquellesfe trouve le {oleil; donc la lune tend à élever les eaux que le fo- leil tend à abaïfler, & réciproquement ; donc dans les fyzygies l’aétion folaire confpire avec l’a@ion lu= naire à produire le même effet, & au contraire elle tend à produireun effet oppofé dans les quadratures : il faut par conféquent en général, & toutes chofes d’ailleurs égales, que les plus grandes marées arri- vent dans les fyzygies, & les plus bafles dans les quadratures. Dans le cours de chaque jour naturel, il y a deux flux & reflux qui dépendent de lPa&ion du foleil, comme dans chaque jour lunaire ik y en a deux qui dépendent de l’aétion de la lune, & toutes ces ma- rées font produites fuivant les mêmes lois; mais cel. les que caufe le foleil font beaucoup moins grandes que celles que caufe la lune : la raïfon en eft, que quoique le foleil foit beaucoup plus gros que la ter- re & la lune enfemble,l’immenfité de fa diftance fait que l’aëtion folaire eft beaucoup plus petite que l’ac- tion lunaire. | En général, plus la lune eft près de la terre, plus {on aétion pour élever les eaux doit être grande; & il en eft de même du foleil. C’eft une fuite des lois de l’attraétion,qui eft plus forte à une moindre diftance. Faifant abftra@tion pour un moment de l’ation du foleil, la haute marée devroit fe faire au moment du paffage de la lune par le méridien , fi les eaux n'avoient pas (ainfi que tous les corps en mouve- ment) une force d'inertie (Foy. FORCE D’INERTIE) par laquelle elles confervent limpreffion qu’elles ont reçüe: mais cette force doit avoir deux effets ; elle doit retarder l’heure de la haute marée, & dimi- nuer aufli en général l'élévation des eaux. Pour le prouver, fuppofons un moment la terre en repos &c la lune au-deflus d’un endroit quelconque de la ter- re; en faifant abftra@tion du foleil, dont la force pour élever les eaux eft beaucoup moindre que celle de la lune, l’eau s’élevera certainement au-deflus de l'endroit où eft la lune. Suppofons maintenant que la terre vienne à tourner ; d’un côté elle tourne fort vite par rapport au mouvement de la lune; & d’un autre côté l’eau qui a été élevée par la lune, & qui tourne avec la terre ,tend à conferver autant qu’il fe peut, par fa force d'inertie, l’élévation qu’elle a ac- quife , quoiqu'en s’éloignant de la lune, elle tende en même tems à perdre une partie. de cette éléva- tion : ainf ces deux effets contraires fe combattant, l’eau tranfportée par le mouvement de la terre, fe trouvera plus élevée à l’orient de la lune qw’elle ne devroit être fans ce mouvement ; mais cependant moins élevée qu’elle ne l'auroit été fous la lune, fi la terre étoit immobile. Donc le mouvement de la terre doit en général retarder les marées & en dimi- nuer l'élévation, | FLU Après le fZux & le reflux, la mer eft un peu de tems fans defcendre ni monter, parce qué les eaux tendent à conferver l’état de repos & d'équilibre où elles font dans le moment de la haute marée , & dans ce- lui de la marée bafle ; 87 qu’en même tems le mouve- ment de la terre déplaçant ces eaux par rapport à la lune, change l’aétion de cet aftre fur ces eaux, & tend à leur faire perdre l’équilibre : ces deux efforts fe contrebalancent mutuellement pendant quelques momens. Il faut y joindre la tenacité des eaux, & les obftacles de différentes efpeces qui doivent en géné- ral retarder leur mouvement, & empêcher qrelles ne le prennent tout-d'un-coup, à panconaqaent qu’elles ne paflent brufquement de l’état d’élévation à celui d’abaiflement. La lune pañfe au-deflus des rades orientales, avant que de pañler au - deflus des rades occidentales : le flux doit donc arriver plütôt aux premieres. Le mouvement général de la mer entre les tropi- ques de left à l’oueft, eft plus difficile à expliquer; ce mouvement fe prouve par la direétion conftante des corps qui nagent à la merci des flots. On obfer- ve de plus que, toutes chofes d’ailleurs égales, la navigation vers l’occident eft fort prompte, & le retour difiicile. J’ai démontré dans mes recherches fur la caufe des vents, qu’en effet cela doit être ainfi ; que l’aétion du foleil & celui de la lune doit mous voir les eaux de l'Océan fous l'équateur d’orient en occident. Cette même aétion doit produire dans l'air un effet femblable ; & c’eft-là, felon moi, une des principales caufes des vents alifés. Voyez ALISÉ. Maïs c’eit-là un de ces phénomenes dont on ne peut rendre la raïfon fans avoir recours au calcul. Voyez donc l'ouvrage cité; voyez auffe les articles VENT 6: COURANT. Si la lune reftoit tojours dans l'équateur , il eft évident qu’elle feroit toûjours à 90 degrés du pole, & que pat conféquent il n’y auroitau pole ni fux ni reflux : donc dans les endroits voifins des poles , le lux & le reflux feroit fort petit, & même tout-à-fait infenfible, fur - tout fi. on confidere que ces endroits oppofent beaucoup d’obftacle au mouvement des eaux, tant par les glaces énormes qui y nagent, que par la difpofition des terres. Or quoique la lune ne {oit pas toüjours dans l’équateur, elle ne s’en éloigne que de 28 degrés : 1l ne faut donc point s’étonner que près des poles & à la latitude de 65 degrés, le flux & reflux ne {oit pas fenfble. | Suppofons maintenant que la lune décrive pendant un jour un parallele à l'équateur, on voit 1°. que l’eau fera en repos au pole pendant ce jour, puifque la lu- ne demeurera toûjours à la même diftance du pole ; 2°, que fi le lendemain la lune décritun autre paral- lele, l’eau fera encore en repos au pole pendant ce jour-là, mais plus ou moins abaïflée que lé jour pré- cédent, felon que la lune fera plus près ou plus loin du zénith où du nadirdes habitans du pote;3°. que fi on prend un endroit quelconque entre la lune & le pole, la diftance de la lune à cet endroit fera plus dif férente de 90 degrés en défaut, lorfque la lune pañle- ra au méridien au-deflus de cet endroit, que la diftan- ce de la lune à ce même endroit ne différera de 00 de. grés en excès, lorfque la lune pafleraun méridien au- deflous de ce même endroit. Voilà pourquoi en géné- ral, en allant vers le pole boréal, les marées de def- fus font plus grandes quand la lune eft dans lhémi- fphere boréal, &z celles de deflous plus petites ; & en s’'avançant même plus lon vers le pole, il ne doit plus y avoir qu’un flux 8c qu’un reflux dansl’efpace de 24 heures ; parce que quand la lune eft au-deflous du : méridien, elle n’eft pas à beaucoupprès à 18o degrés de l’endroit dont il s’agit, & qu’elle fe trouve au con- traire à une diftance aflez peu différente de 90 de- grés, pour que Les eaux doivent s’abaifler alors au FE © 905 lieu de s'élever. Le calcul démontre évidemment toutes ces vérités, que nous ne pouvons ici qu'énon: cer en général, | Comme il n'arrive que deux fois par mois que le foleil & la lune répondent au même point duciel, où à des points oppolés , élévation des eaux (telle qu°- on la trouve même en négligeant l’inertie) ne doit fe faire pour l'ordinaire ni immédiatement fous la lune, ni immédiatement fous lé foleil, mais dans un point milieu entre ces points; ainfi quand la line ya des fy2 zygies aux quadratures, c’eft-à-dire lorfqu’elle n’eft pas encore à 90 degrés du foleil, l'élévation la plus grande des eaux doit fe faire plus au couchant de la lune; c’eftle contraire quand la lune va des quadra- tures aux fyzygies. Donc dans le premier cas, le tems de la haute mer doit précéder les trois heureslu- naïres ; car d’un côté l’inertie des eaux donne l’élé- vation trois heures après Le paflage de la lune au mé- ridien ; 8 d’un autre côté la pofition refpetive du foleil & de la lune donne cette élévation avant le paffage de la lune au méridien. Au contraire, & par la même raifon, dans le fecond cas, le tems de la haute marée doit arriver plûtard que les trois heu- FOS EN | Les différentes marées qui dépendent des aétions particulieres du foleil & de la lune , ne peuvent être diftinguées les unes des autres, mais elles fe confon- dent enfemble. La marée lunaire eft changée tant foit peu par l’aétion du foleil, & ce changement varie chaque jour, à caufe de l'inégalité qu’il ya éntre le journaturel & le jour lunaire. Voyez Jour. Comme il arrive quelque retard aux marées par linertie & le balancemént des eaux, qui tonier- vent quelque tems l’impreffion qu’elles ont reçüe; par la même raifonlesplus hautes marées n’arrivent pas précifément dans la conjonétion & dans l’oppofi- tion de la lune , mais deux ou trois maréés après : de même les plus petites marées ne doivent arriver qu'un peu après les quadratures. Comme dans l’hyver le foleil eft un peu plus près de la terre que dans l'été , on-obferve en général que les marées du folftice d’hyver font plus grandes, tou- tes chofes d’ailleurs égales,que celles du folfticé d'été. Voilà l'explication des principaux phénomenes du flux &c du reflux ; les autres ont befoini du calcul à ou demandent quelques reftri@ions. C’eft par le cal- cul qu’on peut prouver; 1°. que l'intervalle d’une marée à l’autre ef le plus petit dans les fyzygies, 8x le plus grand dans les quadratures: 2°. que dans les Drygies l'intervalle des marées eft dé 24h. 35 min. qu’ainfi les marées priment de 15 m. fur le mou- vement de la lune: 3°. qu’au contraire dans lés qua- dratures les marées retardent de 35 min. fur le mou vement de la lune ; voyez l'excellente piece de M. Daniel Bernoulli, fur le flux 8 reflux de la mer : 4°. que l'intervalle moyen entre deux marées confécu- tives, lequel intervalle eft de 24 h: sormin.lartive beaucoup plus près des quadratures que des fyzy- gies ; ces différentes lois fouffrent quelque altéra- tion, felon que la lune eft apogée ou périgée. 1bid, ch. vj. &t vi. 5°. Que les changemens dans la hau- teur des marées font fort petits, tant aux fyzygies qu'aux quadratures ; cela doit être en effet, car les matées font les plus grandes aux fyzygies , & les plus petites aux quadratures : or quand des quantités paflent par le maximum ou-par le minimum, elles croiflent ou décroiflent pour l'ordinaire infenfible- ment avant & après l’inftant où elles paffent par cet état. Voyez Maximum & MiNtmum. 6. Que les plus grands changemens dans la hauteur des matées fe feront plus près des quadratures que des fyzygies. À l’épard des regles qu’on a établies fur les oran- des marées des équinoxes, M. Euler dans {es favan-- tes recherches fur le {rx & reflux de la mer, Oblerve 906 FLU avec raïifon que quand la lune eft dans l’équäteur, ces regles n’ont lieu que pour les eaux fituées fous l'équateur même. C’eft ce que la théorie &z les obfer- vations confirment , comme on le peut voit dans l'ouvrage cité. Telles feroient régulierement toutes les marées, fi les mers étoient par-tout également profondes ; mais les bas=fonds qui fe trouvent en certains en- droits, & le peu de largeur de certains détroits où doivent pañler les eaux , font caufe de la grande va- riété que l’on remarque dans les hauteurs des mas rées : & l’on ne fauroit rendre compte de ces effets, fans avoir une connoiffance exaëte de toutes les par- ticularités & inégalités des côtes, c’eft-à-dire de la pofition des terres, de la largeur & de la profondeur des canaux, Grc. Ceseffets font vifibles dans les détroits entre Port- land & le cap de la Hogue en Normandie, où la ma- rée reflemble à ces eaux qui fortent d’une éclufe qu’on vient de lever ; & elle feroit encore plus ra- pide entre Douvres & Calais, fi elle n’y étoit contre- balancée par celle qui fait letour de l'ile de la Gran- de-Bretagne. L'eau de la mer, après avoir reçû l'impreflion de la force lunairé , la conferve long-tems, & continue de s'élever fort au-deflus du niveau de la hauteur ordinaire qu’elle a dans Océan, fur-tout dans les endroits où elle trouve un obftacle direét, & dans ceux où elle trouve un canal qui s'étend fort avant dans les terres, 8 qui s’étrécit vers fon extrémité, comme elle fait dans la mer de Severn , près de Chepftow & de Briftol, Les*bas-fonds de la mer, & les continens qui l’entre-coupent , font aufli caufe en partie que la haute marée n’arrive point en plein Océan dans le tems que la lune s’approche du méridien, mais toù- jours quelques heures après , comme on le remarque fur toutes les côtes occidentales de l’Europe & de l'Afrique , depuis Plrlande jufqu’au cap de Bonne- Efpérance, où la lune placée entre le midi & le cou- chant, caufe les hautes marées. On aflüre que la même chofe a lieu fur les côtes occidentales de PA- mérique. Les vents 8 les courans irréguliers contribuent aufli beaucoup à altérer les phénomenes du fx & du reflux. Voyez VENT & COURANT. On ne finiroit point , fi on vouloit entrer dans le détail de toutes les folutions ou explications parti- culieres de ces effets, qui ne font que des corollaires aifés à déduire des mêmes principes ; ainfi lorfqu’on demande, par exemple, pourquoi les mers Cafpien- ne, Méditerranée , Blanche & Baltique n’ont point de marées fenfbles , la réponfe eft que ces mers font des efpeces de lacs qui n’ont point de communica- tion réelle ou confidérable avec l'Océan : or le cal- cul montre que l’élévation des eaux doit être d’au- tant moindre , que la mer a moins d’étendué, Voyez les pieces de MM. Daniel Bernoulli & Euler. Ainfi les marées doivent être prefqu’infenfbles dans la mer Noire, dans la mer Cafpienne, & très-petites dans la Méditerranée. Elles doivent être encore moindres . dans les mers Blanche & Baltique , à caufe de leur éloignement de l'équateur, par les raifons expofées ci-deflus. Dans Le golfe de Venife la marée eft plus {enfible que dans le refte de la Méditerranée ; mais cela doit être attribué à la figure de ce golfe, qui le rend propre à élever davantage les eaux en les ref- ferrant. Nous dirons icifun mot des marées qui arrivent dans le port de Tunking à la Chine ; elles font diffé- _ rentes de toutes les autres, &c les plus extraordinai- res dont on ait jamais entendu parler. Dans ce port on ne s’apperçoit que d’un ffux & d’un reflux qui fe fait en 24 heures de tems, Quand la lune s’approche FLU de la ligne équino@iale, il n’y a point de maréé du tout & l’eau yeft immobile : mais quand la lune com- mence à avoir une déclinaifon, on commence à s’ap- percevoir d’une marée, qui arrive à fon plus haut point lorfque la lune approche des tropiques ; avec cette différence, que la lune étant au nord de la ligne équinoétiale, la marée monte pendant que la lune eft au-deflus de l’horifon, & qu’elle defcend pendant que la lune eft au-deflous de l’horifon ; de forte que la haute marée y arrive au coucher de la lune, & la bafle marée au lever de la luñe : au contraire quand la lune eft au midi de la ligne équinoëtiale, la haute marée arrive au lever de la lune, & la bafle à fon coucher ; de forte que les eaux fe retirent pendant tout le tems que la lune eft au-deflus de l’horifon. On a donné différentes explications plaufibles de ce phénomene ; M. Euler a prouvé par le calcul que cela devoit être ainfi. Voyez la fin de fon excellente piece fur le fux & reflux. Newton a infinué que la caufe de ce fait fingulier réfulte du concours de deux matées, dont l’une vient de la grande mer du Sud, le long des côtes de la Chine ; & l’autre de la mer des Indes. La premiere de ces marées venant des lieux dont la latitude eft feptentrionale, eft plus grande quand la lune fe trouve au nord de l'équateur au-deffus de Lhorifon, que quand la lune eft au-deffous, La feconde de ces deux marées: venant de la mer des Indes & des pays dont la latitude eft méridio- nale , eft plus grande quand la lune décline vers le midi, & fe trouve au-deflus de Phorifon, que quand la lune eft an-deflous ; de forte que de ces marées alternativement plus grandes & plus petites, il yen a toûjours fucceflivement deux des plus grandes & deux des plus petites qui viennent tous les jours en- femble. La lune s’approchant de la ligne équino@iale, & les fux alternatifs devenant égaux, la marée ceffe & l’eau refte fans mouvement ; mais la lune ayant pañlé de l’autre côté de l'équateur, & 5 flux; qui étoient auparavant les moindres, étant devenus les plus confidérables, le tems qui étoit auparavant ce- lui des hautes eaux, devient le tems des eaux baf- fes ; & le tems des eaux baffes devient celui des hau- tes eaux ; de forte que tout le phénomene de cette marée finguliere du port de Tunking s'explique na- turellément & fans forcer la moindre circonftance , par les principes ciédeflus , 8 {ert infiniment à con- firmer la certitude de toute la théorie des marées. Ceux de nos lefteurs qui feront aflez avancés dans la Géométrie, pourront confulter fur la caufe des marées les excellentes differtations de MM. Maclau- rin, Daniel Bernoulli & Euler, couronnées par Fa- cadémie royale des Sciences de Paris en 1740. Dans mes réflexions fur la caufe générale des verits, impri- mées à Paris en 1746 , j'ai donné aufñ quelques re- marques fur les marées, cette matiere ayanr beau- coup de rapport à celle des vents réglés,entant qu'ils font caufés par l’aétion du foleil & de la lune. Après avoir expliqué en gros les phénomenes du flux & reflux pour le commun des leéteurs ; il nous paroît jufte de mettre ceux qui font plus verfés dans les Sciences , à portée de fe rendre raïfon à eux- mêmes de ces phénomenes d’une maniere plus pré- cife. Pour cela , nous allons donner la formule algé- brique de l’élévation des eaux pour une poñtion quelconque donnée du foleil & de la lune. Si on nomme $ la mañfle du foleil, L celle de {a lunes D Ia diftance du foleil à la terre, d celle de la lune , r le rayon de la terre, les forces du foleil & de la lune, pour mouvoir les eaux de la mer, font en- trelles, toutes chofes d’ailleurs égales, comme _. L a ou plus fimplement comme © à À FT» OUP plement co DT à ÿ3e FLU Pour nous expliquer plus exaétement, foit z la di- ftance de la lune au zénith d’un lieu quelconque, on aura à très-peu-près d — r cofin, ? pour la diftance de la lune à ce lieu; & rein ci pour la force avec laquelle a lune tend à attirer l’eau de la mer en cet endroit-là ; cette force fe décompofe en deux autres : l’une tend vers le centre de.la terre ; & par le principe de la décompofition des forces (voyez DécomPosiTion 6 Composition), elle eft PT LA cg À # GT l’autre eft parallele à la hgne qui joint les centres de la terre & de la lune; & elle eft par 3 A. CEA el; pme PE Te les Ed égale à Deer = atrès peu-près 5 + EX, Voyez SUITE, APPRO- XIMATION, € BINOME, & fur-tout l’article NE- “GLIGER , €7 Algebre. I] faut retrancher de cette for- RE Nr er dE ce, fuivant ce qui a été dit plus haut, la force e qui agit également fur toutes les parties du globe terreftre, & qui tend à tranfporter toute cette mafle par un mouvement commun à toutes les parties; ainfi (le centre de la terre étant par ce moyen te- gardé comme en repos par rapport aux eaux de la f. mer ) on aura 7% pour la force avec laquelle ces eaux tendent à s'élever vers la lune fuivant une ligne parallele à celle qui joint les centres du foleil &c de la lune : cette force fe décompofe en deux au- tres : l’une dans la direéion du rayon de la terre; elle eft par le principe de la décompoñition des for- 3 Lrcof.7= de la terre. L’autre eft dirigée fuivant une perpen- diculaire au rayon, ou tangente à la terre ; & elle eit , &tend à éloigner les eaux du centre LEA, Aïnfi comme nous ayons déjà trouvé qu'il y a une force Le qui tend à poufler les eaux vers le centre de la terre, il s’enfuit que les eaux tendront à s'éloigner de ce centre avec une force : #9) L ë égale à rer & à fe mouvoir parallele- ment à la furface de la terre avec une force = EE LE I] en eft de même de l’adion du fo- leiïl ; il n’y aura qu’à mettre dans l’expreffion précé- dente S au lieu de L, & D au lieu de 4, De ces deux forces on peut même négliger en- tierement la premiere, comme Je l’ai démontré dans mes Réflexions fur la caufe des vents, & comme plu- fieurs géometres l’avoient démontré avant moi; car V’aétion de la pefanteur, pour pouffer les particules de l’eau au centre de la terre, eft comme infiniment plus grande que l’aétion qui tend à les en écarter ; nous l’avons déjà obfervé ci-deflus, & nous le prou- verons ainfñ en peu de mots. La force de la pefan- teur eft _. , en appellant T la maflede la terre; car chaque particule de la furface de la terre ef attirée vers fon centre avec une force égale à la mafle de la terre divifée par le quarré du rayon. Voy. ATTRAc- TION & GRAVITATION. Or _ eft à 5 comme T 93 à Lr®, c’eft-à-dire incomparablement plus grande, puifque T'eft plus grand que L, & que J'eft égale à environ 60 fois r. Voyez LUNE, TERRE, 6c. Ainfi l’aéton de la gravité fur les eaux de la mer, eft incomparablement plus forte que l’a&tion de la June : or on trouve par le calcul , que l’aétion du fo- leil ST eft beaucoup plus petite que l’a@ion de la lu- ne A Donc l’aétion de la gravité eft beaucoup plus grande que les ations du foleil & de la lune, | FLU 907 pour élever les eaux de la:merdañs une dire&ion perpendiculaire à là terre. Donc, &c. La force RASE à eftaufi beaucoup plus peti. te que la gravité, & par les mêmes raifons mais l’ef. fort de cette force n’étant point contraire à celui dé la pefanteur , elle doit avoir tout fon effet : or quel eft fon effet ? de mouvoir Les eaux de la mer horifon- talement & avec des vîtefles différentes ,felon la dif. férence de la diftance z de la lune au zénith :-&-ce mouvement doit évidemment faire élever Les eaux de Ja mer au-deflous de à lune, Elias ET Pour le démontrer d’une maniere plis immédiate & plus directe, fuppofons une fphere fluide , dont les parties pefent vers le centre avec une force égale à- peu-près à , & foient outre cela pouflées per= pendiculairement au rayon par une force égale à 3 Lr co. ? fin. 7 r fl fs ITU ps -—— ÿ On démontre aifément par les princi- pes de l’Hydtoftatique (voyez FIGURE DE LA TERRE, mesréflexions fur la caufe des vents, & plufienrs autres où. vrages), que cette fphere, pour conferver l'équilibre de fes parties, doit fe changer en un fphéroïde , dont r ? Lr3 rasé que la ‘différence d’un rayon quelconque au petit axe de ce fphéroïde feroit = _ XCOf. 7% | Ce nouveau fphéroïde devant être égal en male à la fphere primitive , il eft facile, par les principes de Géométrie , de déterminer la différence des rayons de ce fphéroiïde aux rayons correfpondans de la fphere , de trouver par conféquent de combien le fluide fera élevé ou abaïffé en chaque endroit , au- deffus du lieu qu’il occuperoit dans la fphere , fi La lune n’avoit point d’a@ion. Par-là on trouvera d’a- bord aifément l’élevation & l’abaiflement des eaux en chaque endroit, en fuppofant la lune en repos, & la terre fphérique & aufü en repos. Car quoique ces hypothèfes foïent bien éloignées de la vérité, cependant 1l faut commencer par-là, pour aller en- fuite du fimple au compofé. Quand la terre ne feroit pas fuppofée primitiye- ment fphérique , mais fphéroïde, pourvû qu’on la regardât comme en repos , ainf que la lune , l’élé- vation des eaux, en vertu de lation de la lune, fe- roit fénfiblement la même que fur une fphere par- faite. J'ai démontré cette propofition dans ses réfleu xions fur la caufe des vents, art. $0—62. , On trouveroit de ntême , & par les mêmes prin= cipes , l'élévation des eaux fur la fphere ou fur le fphéroide, en vertu de l’a@tion feule du foleil, & om peut démontrer ( comme je l’aifait dans l’endroit mê- me que je viens de citer ) que l'élévation des eaux, en vertu de l'aétion conjointe des deux aftres, eft fenfiblement égale à la fomme des élevations qu’el- les auroient en vertu des deux a@ions féparées. Mettons en calcul les idées que nous venons d’ex- pofer. Soit r le rayon de la fphere , r’ le demi petit axe du fphéroïde dans l’hypothèfe que la lune feule agile ; On aura pour la différence des rayons de la } ; x fphere & du fphéroïde r! + re X cofin.7?—r=— (voy. les articles SiNUS 6 NÉGLIGER) r' + ss + 4 A . , ! « ER — r° ainf la différence de la fphere & 2 LEE L la différence des axes feroit De nl . 117 « Lr4 du fphéroïde , aura pour élément [r' — r + + 4 LA + Pere at ] xrdz; Xrfin.zX 27, 27 étantle rap- port de la circonférence au rayon, L’intéorale de cette quantité qui doit être =o, lorfque ; = 0, eft see RE Lr—r+ = | * (1 cofin.z)+2yrt x Lr4 I cof. 3 cof.1 ]. : let. en les 008 FLU -degrés, & que par conféquent cofin, 7 = 0, & cof. : 3 z=0, cette quantité devient 72 7 + Lr4 3 Lr4 En F Gus du fphéroïde , qui eft le quadruple de cette derniere quantité, doit être égale à zero: donc-cette quantité x —;) ; or la différence de la fphere & ælle-même doit-être égale à zero; on aura donc+’ : RE be. ss PE TGUE X 2 439 “rence des rayons du fphéroiïde & des rayons cor- refpondans de la fphere pour chaque angle 7, fera : Ent 3 Lrt 3 Lr4cof.2z ___ ÆLrt 3 Lr# cof. 27 TIRE ad La CASA TU NAN 17.7) 0, : Donc f'on nommé Z'la diftance du foleil au ze- “hith l'élévation des eaux, én vertu des a@ions réu- mies du foleil & de la lune, fera . + 5 = a Lt all Slot à vs | AT 1 PRE LE 3 OÈTE C’eft la formule de. l’élé- | 45,1 te 4 D3; {34 | vation des eaux de lamer, en faifant abftration du mouvement de la terre & de celui des deux aftres; & cette formule a lieu généralement, de quelque maniere qu'on fuppofe le foleil & la lune placés par rapport à un point quelconque de la terre, {ans qu'il {oit néceffaire que ces aftrés foient, ni dans l’équa- teur, ni dans un même parallele à l'équateur. En faifant la quantité précédente = ©, on trou- vera l’endroit où les eaux ne font ni élevées, ni abaïflées ; en la faifant égale à un plus grand ou à un moindre (voyez Maximum & Mirimvm), on trouvera l’endroit où les marées font les plus hau- tes & les plus bafles ; on trouvera de plus l'heure des hautes & bafles marées par la même formule, en fuppofant, ce qui n’eft pas exaftement vrai, que le point des plus hautes & des plus bafles marées foit le “même que fi on confidéroit le foleil & la lune com- me en repos , mais quoique cette fuppofition ne foit pas parfaitement exaéte, cependant elle répond en général aflez bien aux phénomenes , comme on le peut voir dans les excellentes pieces de MM. Euler &c Daniel Bernoulli fur le f/ux & reflux de la mer. Voyez auffi l'article MARÉE, Au refte ces deux grands géometres, ainfi que M. Maclaurin , ont donné des méthodes d’approximation particulieres pour déter- miner le moment précis de l’élevation des éaux, en ayant égard au mouvement de la terre & à celui de a lune. La formule qu’on a donnée ci-deflus pour les hau- teurs des marées, donne les plus petites & les plus hautes, les premieres dans les quadratures, les fe- condes dans les fyzygies ; & c’eft par le rapport de ces marées que M. Newton a déterminé celui des DT À 15 S e 0 . quantités — & 33. Mais M. Daniel Bernoulli croit qu'il vaut mieux le déterminer par les intervalles en- tre les marées confécutives aux fyzygies & aux qua- dratures. Le premier de ces deux grands géometres trouve ce rapport égal à environ 4, & M. Daniel Bernoulli à Ÿ; ce qui, comme l’on voit, eft fort dif- férent, Mais il faut avouer auf qu’eu égard aux cir- conftances phyfiques , qui troublent & dérangent ici beaucoup le géométrique , la méthode d’em- ployer les marées pour découvrir un tel rapport, eft fort incertaine, Les phénomenes de la nutation & de la préceffion font bien préférables, voyez Nura- TION & PRÉCESSION , & ces phénomenes donnent ün rapport aflez approchant de celui de M. Daniel Bernoulli. Voyez mes Recherches fur la préceffion des équinoxes. Paris, 1749. Les trois pieces de MM. Bernoulli, Euler & Ma- claurin fur le flux &c reflux de la mer, dont nous avons parle plufeurs fois dans le courant de cet ar- ticle, ont chacuneun mérite particulier, & ont paru &véc raïon aux commuflaires de l'académie, dignes AR A °° ; DES —5,our =r— >, Donc la difé- | FLU de partager leurs fuffrages: ils y ont joint (apparern- ment pour ne pas paroître adopter aucun {yftème) une piece du P. Cavalleri jéfuite, qui eft toute car- téfienne , ou du moins toute fondée fur la théorie des tourbillons, & dont nous n'avons tiré rien autre chofe que le détail des principaux phénomenes. C’eft dans les trois autres pieces qu’il faut chercher les explications, fur-tout dans celles de MM. Eulér & Bernoulli, car la piece de M. Maclaurin entre dars un moindre détail ; maïs “elle eft rémarqua=- ble par un très-beau théoreme fur la figure que doit prendre la terre en vertu de lation du {oleil & de la on" id te, celui d’être faite avec beaucoup d'intelligence :& de clarté. Plus onrelit ces trois excellens ouvra- ges, plus on eft embarraflé auquel on doit donner. la préférence , &c plus on applaudit au jugement que l'académie en a porté en les couronnant tous trois. Je crois qu’on me permettra de donner auf dans cet article une idée de la maniere.dont j’ai traité la queftion dont il s’agit dans mes réffexions fur la caufe des vents , que l’académie royale des Sciences de Prufle a honorées de fon fuffrage en 1746. Comme je ne confidere guere dans cette piece que l’attrac- tion dé la line &c du foleil fur la maffe de l'air, il eft évident que les mêmes principes peuvent S'ap- pliquer au ffux &c reflux. Je commence donc, ce que perfonne n’avoit fait avant moi, par déterminer les ofcillations d’un fluide qui couvriroit la terre à une petite profondeur, 8 qui feroit attiré par le foleil ou par la lune. On peut par cette théorie comparer ces ofcillations à celles d’un pendule, dont il eft aifé de déterminer la longueur. Je fais voir enfite que le célebre M; Daniel Bernoulli s’eft trompé dans l'équation qu’il a donnée pour l'élévation des eaux, en fuppofant la terre compofée de couches diférem- ment dentes ; &c je démontre qu’il n’eft point nécef- faire pour expliquer l'élévation des eaux, d’avoir recours à ces différentes couches ; qu'il ufit feule- ment de fuppofer que la partie fluide de la terre n’ait pas la même denfité que la partie folide: enfin je donne le moyen de déterminer la viteffe & l’éléva- tion des particules du fluide, en ayant égard à liner tie, & d'une maniere, ce femble, beaucoup moins hypothétique que M. Euler. C’eft par ce moyen que je trouve qu'un fluide qui couvriroit la terre, doit avoir de left à l’oueft un mouvement continuel. L’arsicle VENT préfentera un plus grand détail {ur l'ouvrage dont 1l s’agit, | Ce mouvement de la mer d’orient en occident eft très-fenfble dans tous les détroits : par exemple, au détroit de Magellan le Zux éleye les eaux à plus dé 20 piés de hauteur, & cette intumefcence dure fix heures ; au lieu que le reflux ne dure que deux heu- res, & l’eau coule vers l'occident : ce qui prouvé que le reffux n’eft pas égal au flux, & que de tous deux il réfulte un mouvement vers l’occident, mais beaucoup plus fort dans le tems du ffux que dans ce- lui du reflux : c’eft par cette raifon que dans les han: tes mers éloignées de tonte terre, les marées ne font guere fenfbles que par le mouvement général qui en réfulte , c’eft-à-dire par ce mouvement d’orient en occident, Ce mouvement eft fur-tout remarquas ble FU ble dans certains détroits & certains golfes ; dans le : détroit des Manilles, dans le golfe du Mexique, dans celui de Paria, &c. Voyez Warenii geographia | & Vhift, nar. de M. de Bufion, some I. p.439. Les marées font plus fortes dans la Zone Torride, entre les Tropiques, que dans le refte de l'Océan, fans doute parce que la mer fous la Zone Torride eft plus libre 8 moins gênée par les terres. Elles font auf plus fenfibles dans les lieux qui s’étendent d’o- fient en occident, dans les golfes qui font longs &c étroits, &c {ur les côtes où il y a des îles & des pro- montoires. Le plus grand fx qu’on connoiffe pour ces fortes de détroits, eff à l’une des embouchures du fleuve Indus, où l’eau s’éleve de 30 piés. Il ef auf fort remarquable auprès de Malaga, dans le dé- troit de la Sonde, dans la mer Rouge ; dans la baie éeHudfon, à 55 degrés de latitude feptentrionale, ou il s’éleve à 15 piés ; à l’embouchure du fleuve Saint-Laurent, fur Les côtes de La Chine & du Japon, Éc. did | Il y a des endroits où la mer a un mouvement contraire, favoir d’occident en orient, comme dans le détroit de Gibraltar, & fur les côtes de Guinée. Ce mouvement peut être occafonné par des caufes par- ticulieres ; maïs il eft bon de remarquer en général, comme je l’aiprouvé dans mes réflexions fur la caufe des vents, qu'à une certaine diftance de l'équateur le mouvement de l’eft à l’oûeit doit fe changer en un mouvement de l’oueft à left, ou du moins enun mouvement qui participe de l’oueft, avec quelques modifications que l’on peut voir dans la piece citée art. lxx. n°,5$. mais comme le mouvement de la mer vers l'occident eft le plus conftant & le plus géné- ral, il s’enfuit que la mer doit avec le tems gagner du terrein vers l'occident. Voyez MER. Nous réfervons pour le ze MARÉE d’autres dé- tails {ur ce phénomene , fi on les juge néceflaires : : nous croyons devoir renvoyer pour le préfent nos lecteurs aux ouvrages cités, ainfi qu'aux autres re- marques que M. de Buffon a faites fur les effets du flux & reflux, dans Le premier volume de fon uftorre naturelle ; remarques-qui-pourront aufñ trouver leur place ailleurs. Mais pour rendre cet article le plus utile quil nous eft pofñble , nous allons joindre 1c1, d’après l’écer du ciel de M. Pingré, les tables fuivan- tes, avec l'explication que lui-même y a jointe, (O0) Nous donnons , dit-1l, une lifte des principaux ports & des côtes de l’Europe fur l'Océan, avec l’é- tabliffement de ces endroits, tel qu’on a pu le con- noître par les expériences réitérées. ( On appelle érabliffement ou heure d’un port, Vheure à laquelle la mer eftla plus haute au tems des nouvelles & pleï- nes lunes ). Nous y ajoûtons une note de la hauteur à laquelle la mer monte communément aux nouvel- les & pleines lunes des équinoxes, Cette table eft prefque entierement tirée du quatrieme volume de V Architetture hydraulique de M. Bélidor. PROBLEME XX, Trouver l'heure de la_pléinè mer dans un port dont l'établiffement ef? connu. Premiere méthode. Ajoûtez autant de fois 48/ qu’il {e fera écoulé de jours depuis la nouvelle ou pleine lune précédente ; & ajoûtez la fomme à l’établiffe- ment ou à l'heure du port..Si-on eff trop éloigné dela nouvelle ou pleine lune précédente, on peut pren- dre autant de fois 48/ qu'il y a de jours jufqu’à la nouvelle ou pleine lune fuivante , & retrancher la fomme de l'heure du port à laquelle on ajoûtera 12 heures, s’il eft néceffaire. Seconde méthode. Cherchez dans l’état du ciel Pheu- se du paflage de la lune au méridien, foit fur lho- rifon , foit fous l’horifon ; & ajoûtez-y l'heure du port. Tome VI, | Table pour trouver Le FLU 00û Troifieme méthode plussexatte. Cherchez dans l’état du ciel la diftance de la lune au foleil, Cette diftan: ce vous donnera, avec le fecours de la table , page 133- le nombre d’heures qu'il faut ajoûter à l’heure du port; fi vous vous fervez de la colonne qui a pour titre retarderment des marées : ou qu'il en fautretran: cher, f vous employez celle qui eft intitulée az: cipatiort, I] faut préférer celle-ci, lorfque l’on appro: che de la nouvelle ou de la pleine Lune fuivante, E X E M P L EF: On demande l'heure de la pleine rner au Havtes de-Grace le 18 Mai 1755. L'heure du port eft à heures. | , ; 1°. Le 18 Mai à 9 heures du matin, il fe fera écoulé environ 7 Jours depuis la nouvelle Lune. 7 fois 48” donrient $" 36/ qu'il faut ajoûter à oh. La haute mer fera à 2h 36/ dufoir. 2°, La Lune pañle au méridien fous l’horifon le 18 Mai matin à 5h32". Ajoûtez-y l'heure du port 9h; & vous trouvérez la pléiñe mer à 5h 32' du foir; 3°. Le 18]Mai à o* du matin la diftance de la lune au foleil eft d’environ deux fignes 214 À cette dif tance le retardement de la marée doit êtré, felon la table de la page 133. de 4h 16/, Ajoûtez donc 4h 16” à 9h; & l'heure de la pleine mer fe trouvera réduite à 1" 16’ du foir, plus de 5 quarts-d’'heure plütôt que par les deux autres méthodes, TagLeE pour le retardement ou l’anticipation diamètre de la Lune ONDES en long. ou afc. dr. 1 \ Anticipa- | Diftance de Lat.oul Millieñes Retarde- déclin.| parties ment. tion. la Dau #:. | de }. | à ajoûter. Granit CCR VOD MASRES TS H._M.|S. D. 19 | ©o o6o o 18 2 @ OO! OUT 3 Q OO o S$2z 4 Q 002 I 9 $ |o oo4 1 26 6 |o co; 44 C0 PONT £ 8 9, o10o a NC 10 9 ots If Oo o18 12 Ô Oz2 13 o a26 14 0 030 15 o 634 16 | a 039 17 9 044 18 | o49 19 Oo O$4 26 o #60 (o) (e) Oo o , ESPAGNE ET PORTUGAL, . M. o Cadix. 45 Sanlncar de Barrameda. 45 Palos & Guelva. 30 Lepe, Aimonte, T'avilla. 15 Fafao. 30 Sétuval, ht D D D À ZZzre Sn V9 Y L9 Lo y WU) 0 .R KO LU OA Er on RE U9 LS À pi ES JR LU HE LS wpl M. HEURES DE LA PLEINE MER. o Lisbonne. .-6 Surles côtes occidentales des deux royau- mes. o Sur les côtes feptentrionales d'Efpagne. 45 Dans les ports &c havres des côtes fepten- tronales. Le long des côtes de Barbarie, depuisle cap de Geer jufqu’au détroit, la mer monte de 10 piés; de 10 le long des côtes d’Ef- pagne, depuis le détroit jufqu’au cap Sain- te-Marie ; de 12 jufqu’au cap de Finifter- re ; & de 15 jufqu'à S. Jean-de-Luz, GASCOGNE ET GUIENNE. o Sur toutes les côtes en général. 15 À S. Jean-de-Luz & à Mémiflan. Bayonne & dans le bafin d’Arcaflon. Bordeaux. Au fud de la tour de Cordouan & à Royan. Au nord de cette tour, & à l’entrée de la Garonne, Le long de toutes ces côtes, lamer mon- te de 15 piés. AUM#S ET POITOU. © Sur les côtes en général, Brouage & la Rochelle, Rochefort. Chapus & Beauvoir, Dans le Pertuis Breton & dans celui d’An- tioche. L'ile de Ré & Olonne. La met monte partout de 18 piés, BRETAGNE. o Sur les côtes méridionales & dans la rade | du Conqueft. lle Noirmoutier. o Bourgneuf. A l'embouchure de la Loire , au Croific., La Roche-Bernard. À Port-Blanc. La riviere de Vilaine, Morbihan , Auray. Vannes, ile de Groa, Belle-Ifle, o Port-Louis ou Blavet , & dans le raz de Fontenay. Concarneau, & dans le port de Breft. Benaudet , Penmarck, Audierne, & dans la baie de Breft. 14 Dans lYroife. o Dans le pañflage du Four. Hors l’île d'Oueflant en mer. o Porfal. | Ile de Bas, S. Paul de Léon, Morlaix. Tréguier. o Île de Bréhat, rade de [a Frénaye, Saint- Malo , Cancale. Surles côtes méridionales , depuis l’em- bouchure de la Loire jufqu’au raz de Fon- tenay, dans l’Yroife, & au paflage du Four, la mer monte de 18 piés ; de 20 dans les rades de Douernené & de Bertaume ; de 25 à l’île de Bas ; de 30 au fept iles ; de 45 à Bréhat , Saint-Malo & Cancale. NORMANDIE. Mont S. Michel, Pontorfon , Granville, Iles de Gernefey & d’Origny. 4$ Dans le raz Blanchart. 30 Cap de la Hougue. 15 Au large de Cherbourg. 45 À Cherbourg. | 30 À Barfleur & au large de la Hougue. o À la Hougue, au port en Beffin, o [figny , Etréhan, 30 30 \O 0 m\O al ei D) À = DR #1 Pl Le 1 BR CU bBÜOÛWS% Rp OI AG bel LS V9 FLU . M. HEURES DE LA PLEINE MER, _ © Caën, Dive. 15 Rouen. 15 Honfleur. ; © L’embouchure de la Seine, le Havre-de= Grace. o Fécamp, Saint-Valeri en Caux. 15 Dieppe. | 30 Le Tréport, Quillebeuf, La mer monte de 36 à 40 piés à Gran- ville & aux îles Angloifes, & feulement de 18 depuis la Hougue jufqu’au Chef de Caux. PICARDIE. \ 30 Sur les côtes de Picardie. 45 S.Valery fur Somme, Etaples & Boulogne: o Ambleteufe, 30 Calais, = Depuis le Chef de Caux jufqu’au Pas de _* Calais , la mer monte de 18 piés, FLANDRE. o Hors les bancs en mer. © Sur les côtes près de terre. 30 Graveline. | o Nieuport, Oftende, l’Eclufe. 45 Dunkerque. En-dedans des bancs , depuis le pas de Calais jufqu’à l'embouchure de lEfcaut, la mer monte de 18 piés , & de 15 feule- ment au large des bancs. o Côtes & iles de Zélande. 30 Fleflingue, 45 Anvers, A; Armuyden. 30 Dordrecht. 43 Rotterdam. o Devant la vieille Meufe. 45 À l'embouchure de la Meufe, à la Brille 8 ._ à Bergue. o Hors le Texel, . 45 Dans le pañfage du Texel. 30 Dans la rade des Marchands, 30 Près de Medenblick. 15 Horn. o Amfterdam. 30 Sur le Wlac de Frife. o À Wrek , à Delfzy. o Dans le pañlage de Vlic. 15 Horsle Vlic. 15 Embden. Aux embouchures de l’Efcaut & de {a Meufe, & hors le Texel le long de la côte, la mer monte de 20 piés ; en rade des Mar- chands en-dedans du T'exel, de 15 ; à Am- fterdam de 7 feulement. ALLEMAGNE. 15 Hambours. o Devant le Wefer , à l’embouchure de l’'Elbe, 45 Bremen. . A5 Dans le Fade. La mer monte de 15 piés. DANEMARK. À Suyderfy. . Dole Le de Sylt. 30 Dans le Leidor. La mer monte de 15 piés. ANGLETERRE. AS Barwich. | 15 Entrée de la riviere de Rive, Newcaîtle; Hartelpole & dans la Tées. A EX ’ | + + mr O DO Au Ah LE va E 4 © b r ei A ON EX nn CO EH = Rp && Oh W FLU . M. HEURES DE LA PLEINE MER; 15 Scarborough. OAI RP Loti 15. Entrée de la riviere de Humber. 45 Lynne ou Lyn-Regis, Blanchney. 15 Devant Yarmourh hors les bancs. 3o Yarmouth. 45 Orfort, Harwich , la rade des Dunes. 30 L'entrée de la Tamife, © Londres. 30 Nord-Forland ; Sandwich, la Ry, Haf- | _ ‘tingue, 4ÿ Arundel. 30 Sur les bancs de Veenbrug & à la rade de Sainte-Hélene. 45 Portfmouth. © Southampton. 15 À l’eft de l’île de Wicht , & auhavtre de la Pole. © Aux aiguilles de l'ile de Wicht, & à Way- __ mouth. 45 Dans le raz de Portland, : 30 Exmouth. 15 Torbay, Dartmouth , Plimouth, Fawic, o Falmouth. 4ÿ Monsbaye, baïe de Saïnt-Yves. 30 Aux Sorlingues , & fur toute la côte de: puis lextrémité de l'Angleterre juf- w’à la pointe de Härland. © À Pile Londay & à l'entrée du canal de Briftol. ! 45 Dans la rade de Briftol, 15 Cardif où Glamorgan. | 45 Saint-David & Carmarthen: 30 Milfort. Aux îles Sorlingués , à l’oüeft dé PAn- gleterre jufqu’au cap Léfard , la mer mon- te de 20 piés ; de 24 depuis le cap Léfard qufqu'à Gouftard , & depuis Portland ja = ë qu’à l’île de Wicht ; de 18 dans la rade SteHélene & au nord de l'île de Wicht; de 16 le long de la côte en allant vers les Du- nes; dans la rade des Dunes, & depuis l’i- le Tanor jufque devant la Tamife, de 12 piés. Elle croît jufqu’à 15 piés depuis l’en- trée de la Tamife jufque devant Yarmouth, êt à 18 au nord d’'Yarmouth jufqu’aux cô- tes feptentrionales d'Ecofle , & aux île Orcades. Éoonu. E\Gros'S'E 30 Aux iles Féro. 45 Aux iles Schetland, © Aux Orcades. ë: DE 15 À Aberdone, | | 30 A l'embouchure de lariviered’Edimbourg. 3o À Edimbourg. | 45 Entrée orientale de Lembs. o. Entrée occidentale: fn | La mer monte de 18 à 2opiés, fur les côtes d'Irlande. : , US TR LAN DE M Esp 45 Karlingfort, | 30 Strangfort. .: ji 15 Knocfereus.. : | J 45 Lonphfoyle, 5 30 Longhfuvilly, : : 30 Dunghall. ot 213 15 Moye-Knifal,, Gallouay: : : 45 Le long des côtes occidentales: 30 Dans les baies de Beterbuy:1êc de Dingle. € © Dans la riviere de Limerik: 1$ Au havre de Smérik. - | 45 Dans la“baïe de Kilare ,'à Baltimore, -Corck, R Tome VI, S ainfi que ag à F LU OIE H. M. HEURES DE LA PLEINE MER, 15 Dans la baie de Bantry. | ’ 30 Sur les côtes méridionales, au cap de CIæ& _, re, à Kinfal | ÿ Oo ARofs, à Dungarwan. ÿ 45 Waterford. 6 15 Cap Carnaroot. e) 10 30 Sur les côtes depuis Grerord jufqu'à lil . d’Alque. \ & ÿ © Dublin, l’île de Man. ITALTE. Le mouvement dès eaux eft infenfible dans pref= que toute l'étendue de la mer Méditerranée. 1] ya divers courans, il eft vrai, mais fans flux & reflux La merne montefenfblement que dans lé fond du gol- . fe de Venife, dans l’Archipel, & au fond de la mer Noire. À Venife, elle monte de trois piés : elle monte d'autant moins qu’on s’éloigne plus du fond du golfe. L AMÉRIQUE,. No 2 J'ai peu de connoiffance de ce qui regarde le fax êx le reflux des mers d'Amérique. Voici le peu que j'en ai raflemblé dans les meilleurs livres. que J'aye pu confulter. L | Dans la Zone Torride, la mer ne monte que de 3ou4piés. | s 1 | Cependant à Panama, le fx monte à plus de 16 piés. j Dans a baie d'Hudfon, la mer monte jufqu’à 16 piés. es jh 2 | ce Au port de Saint-Julien, vers l'extrémité de {a. têèrre Magellanique, Pélévation des eaux eft de 20 lag que , à 25 piés: . bi Vs Dans le port de Chéquetan , diftant de 30 lieues à l’oûeft d’Acapulco en Mexique , la mer monte de iés. | & . A Pembouchure de {a riviere des Emeraudes, 16 1és. ut L À Guayaquil en Pérou, 16 piés : établiffement ÿ 10 heures. | ue o : À l'ile Gorgone fur {a même côte, 14 piés. Aux îles de Lobos far la même côte, 3 piés. À ile de Jean Fernandez, 7 piés. : _ À l'entrée orientale du détroit de Magellan, 2x! piés : établiflement, 11 heures. : | A l'embouchure de la riviere des Amazones , 1e, lon Orellane , l’eau monte près de 30 piés. | Aux Antilles, Peau ne monte que de 3 piés. _À Louisbourg, la mer monte de s piés 8 pouces = létabliflement eff 7h 157. + Entre l'ile Royale & l’Acadie, au détroit de Fron:. fac, 5 piés 4 pouces : heure 8h 30/. VA Au paflage dé Bacareau fur la côte de lAcadie ; la merzaux folftices monte à près de 9 piés : heure 87 15°. Au fond de la même baie, l’eau monte, à ce. qu'on aflüre, de 60 à 7opiés, + A ASSET, e SMPAUER LOI RaTNaE 2 AT Aux Canaries , la mer monte de.7 à 8 piéss. + 4 À l'ile de. Gorée,. 6 à 7 piés: sn “ Lelong: dés côtes de Guinée, elle monte aflez gér: néralement de 3 piés , &:de $ où 6 aux embouchu=.. res des-rivieres & entre les:iles... a sl fe si - À Pémbouchure de larriviere de-S. Vincent ; fur: la côte de Grain enGuinée:; elle monte de. 8 ou 9: piés au moinss.& de 6 ou7-au cap Corfe {urla-côte : d'Or. : sneluyrent Sul more ei. : |: + ABandi, fur la même côte de Guinéedansle sol: :B |, fe, l’établiffement eft des4hetres.:,. "1 1. . Entre l’île. de Loanda &. la terte ferme d’Angola : la plus grande-hauteur des:eaux eft de4 à sipiés 2, > | mais elle.eft de 8 piés à l'embouchure de la riviere, : | de Quanza… ; : | à 1 À! hauteur deseaux, 3 piéss : à . Au cap.de Bonne-Efpérance ; établiffement 2h 3! ELITE: O12 F LU A l'ile de Socotora, vis-à-vis le cap Guatdafuy, établiflement 6 heures. Au-deflous de Suaquem dans la mer Rouge , la mer monte de 10 piés, de.4 feulement dans la baie de Suaquem , & de 6 fur les côtes : mais à 7 lieues au nord de Suaquem,on nous dit que la mer monte juf- qu’à 22 coudées, & bien plus haut encore vers Suez. | ASIE. À Aden en Arabie , la hauteur des eaux eft de 6 à 7 piés. À Tamarin aux Indes orientales , établiffement 9 heures : la mer monte jufqu’à 12 piés. Aux Moluques , & fur la côte occidentale de Pile Formofe , elle ne monte que de 3 ou 4 piés. FLux, f, m. (Medec.) ce terme a plufeurs fignifi- cations, mais qui concourent toutes à exprimer un tranfport d’humeurs d’une partie dans uneautte, foit pour y être dépofées, foit pour y être évacuées ; ainfi dans le premier cas, le mot f?ux eft fynonyme à celui de fuxion. Voyez FLUXION. Dans le {econd cas , ileft employé pour défigner tout écoulement contre nature, de quelque humeur que ce foit, pa quelque partie qu’il fe fafle. On ne diftingue ordinai- rement les différentes efpeces de fux, que par des épithetes relatives à la fource immédiate dela matie- re de l'écoulement, c’eft-à-dire à la partie qui la four- nit, ou à cette matiere même, ou aux circonftances de l'écoulement. De la premiere efpece, font le fZzx heéparique , les différens flux urérins, &c. dont la matiere coule du foie , de la matrice, &c, Voyez HÉPATIQUE (FLUX), UT£ÉRIN (FLUX), &c. De la feconde efpece font les différens ffux héma- ziques , le flux céliaque, le flux falivaire, &tc. dans Tefquels la matiere de l’écoulement eft du fang, du chyle, de la falive, 6c. Voyez HÉMORRHAGIE, HÉMORRHOÏIDE, CÉLIAQUE (PASSION), SALIVA- TION, &c. De Ia troïfieme efpece, font le flux menffruel, le flux lochial, dans lefquels écoulement doit naturel- lement fe faire dans des tems reglés ou dans des cas particuliers ; le premier chaque mois, lefecond après chaque accouchement. Voyez MENSTRUES, Lo- CHIES. Le mot f{ux n’eft employé que rarement dans les écrits des Medecins, parce qu’on s’y fert le plus fou- vent de termes tirés du grec, propres à chaque forte de f{ux ; ainfi on appelle diarrhée Le flux , le cours de ventre, diabetes le flux d'urine, gonorrhée le flux de femence, &c. Voyez DIARRHÉE, DIABETES, Go- NORRHÉE , 6. | " La dyffenterie avec déje&tions fanglantes, eft ap- pellée vulgairement fx de fang, quoique cette der- niere dénomination convienne à toute hémorrhagie, dans quelque partie qu'elle fe fafle, Voyez D'YSSEN- TERIE, HÉMORRHAGIE. (4) | FLUX DYSSENTERIQUE ; ( Manège, Maréchall. ) quelques medecins l’ont nommé diarrhée fanglante. Cette maladie s’annonce par des excrèmens plai- reux, bilieux, fanieux, fanglans, féculens, mêlés à des matieres filamenteufes, G:c. Elle eft le plus fouvent'une fuite du fx de ven- tre dans lequelil ya douleur, inflammation , irrita- tion, voyez FLUX DE VENTRE, & elle reconnoit les! mêmes caufes: Ic1‘la bile eft beaucoup plus acre &c1 infiniment plus ftimulante; auffi les douleurs intefti+ nales font-elles extrèmement violentes & les fpafmes très-cruels. L’animal‘eft extrèmement fatigué, fur- tout lorfque les inteftins grêles font attaqués , ce dont on ne peut douter, quand'on s’apperçoit d’un grand dégoût & d’un grand abattement des les premiers jours de la maladie. Si les matierés chargées d'une grande quantité de mucofité font legerement teintes de fang , ain que dans la dyffentérié blanche ; l'éro- fion ,Îes exulcérations des inteftins ne font point en: core bien confidérables : mais file fang eft abondant, comme dans la dyffenterie rouge, & que les déjec- tions foient purulentes,on doit craindre la putréfac. tion fphacéleufe qui peut conduire inceffamment le cheval à la mort. La premiere intention & le premier foin du maré- chal doit être d’appaifer les accidens. La faignée eff un remede indifpen{able. Il la multiplieta felon le befoin, L'animal fera mis au fon, à l’eau blanche, à la déco@tion faite avec la rapure de corne de cerf, & dans laquelle on aura fait bouillir des têtes de pa- votblanc ; fon régime fera le même, enun mot, que celui qu'il doit obferver dans le fx de ventre qui peut dégénérer en dyffentetie, On prefcrira en méê- me tems des lavemens anodyns, faits avec le bouil- lon de tripe ou le lait de vache, trois ou quatre jaunes d'œufs, & trois onces de firop de pavot blanc, Dans le cas de la putuience des matieres, on feroit fuccé- der à ceux-ci des lavemens, des bouillons de tripe dans lefquels on délayeroit des jaunes d’œufs & deux ou trois onces de térebenthine en réfine. Le cérat de Galien ajoûté à ces lavemens , n’eft pas moins ef ficace que la térebenthine. En fuppofant que les douleurs foient diminuées ou calmées, & que les fymptomes les plus effrayans commencent à difparoitre, on pourra donner à l’a- nimal pendant quelques jours avec la corne, une dé- coftion legere d’hypecacuana , cette racine ayant été mife eninfufon fur de la cendre chaude Pefpace de douze heures dans une pinte d’eau commune, à la dofe d’une once. Infenfblement on fubftituera à l’eau commune une tifane aftringente, compofée de racines de grande confoude & de tormentille: mais le maréchal ne doit point oublier quelles ftiptiques &c les aftringens ne doivent être adminifirés qu'avec la plus grande circonfpe&tion, ainfi que les purgatifs, lors mêmeque lanimal paroît fur le point de fon réta- blffement, (e) LUX DE VENTRE, (Manége, Maréchall.) diar= rhée, dévoiement, termes fynonymes par lefquels nous défignons en général une évacuation fréquente de matieres différentes, plus ou moins ténues, plus ou moins copieufes & plus ou moins acres, felon les caufes qui y donnent lieu. Cette évacuation fe fait par la route ordinaire des déjeétions ; les matieres fe montrent quelquefois feules, & le plus fouvent elles accompagnent la fortie des excrémens , qui font dès lors plus liquides. Tout ce qui peut déterminer abondamment le cours des humeurs fur les inteftins, en occafonner le féjour & l’amas, former obftacle à la réforption des fucs digeftifs, obftruer les orifices des vaifleaux lattés, affoiblir, augmenter lemouvement périftal- tique ou l’aétion des fibres inteftinales, & troubler les puiffances digeftives, doit néceffaitement fufci- ter un {x de ventre. La tran{piration imfenfibleinter- ceptée d’une maniere quelconque ,un exercice Fee violent, unrepostrop conftant, la protrufion difficile & douloureufe des crochets , l’inflammation des in- teftins, leurirritationconféquemment à une bile acre & mordicante, des alimens pris en trop grande quan: tité, des fourrages corrompus, l'herbe gelée ; Pavoi- ne germée, la paille de feigle ,.des eaux trop crues, trop froides , des eaux de neige, une boïffon qui fuc- cede immédiatement à une portion confidérable d’a- voine , des purgatifs trop forts, &&.font doncautant de caufes que l’on peut jJuftementaccuier dans ceite circonftance. | ei d'abcs 1 3.É % Le rraitement de cette maladie demandede la part : ; A ! du maréchal une attention exa@le ,teurégard'à leurs différences. | Dans: le cas où ileft queftion de l'abondance des humeurs & de leur féjour, ainfique de leur amas, FLU ce dont il fera affüré par les borboryemes qui fe fe- ront entendre, & paï la liquidité & la blancheur des excrémens, il purgera l'animal ; il s’attachera enfuite à fortifier les fibres de leftomac & des inteftins , dont la foibleffe & le relâchement favorifent l’abord & l'accumulation dont il s’agit. Pour cet effet 1l au- ra recours aux remedes cotroborans, tels que la thé- riaque, le diafcordium, la cannelle enfermée dans un hoüet fufpendu au maftigadour, 6. La rhubarbe {e- roit très-falutaire, mais elle jetteroit dans une trop grande dépente. ne vitre, Lorfqu'il y aura inflammation, irritation, dou- leur, chaleur, tenfion des mufcles du bas-ventre, êT que lesdéje@tions feront jaunâtres, verdâtres & écu- meufes, il employera les médicamens dont l'effet eft de délayer, de détendre, de calmer & d’adoucir ; & quelque tems après que les fympromes feront dif pés , 1l terminera la cure par des purgatifs legers. Les layemens émolliens multipliés , les décoétions des plantes émollientes données en boiffon, lestêtes de pavot blanc dans les layemens &7 dans cesmêmes décoétions, fuppolé que les douleurs foient vives, la faignée même, fi l’on craint les progrés de l’in- flammation , ladéco@tion blanche de Sydenham,c’eft- à-dire la corne de cerf rapée à la dofe de quatre on- ces, que l’on fera bouillir dans environ trois pintes d’eau commune, pour jetter cette même eau dans les décottions émollientes dont j’ai parlé, produi- xont de grands changemens. Les purgatifs convena- bles après l’adminifiration de ces remedes, & enfuite de leur efficacité, pour évacuer entierement les hu- meurs viticées qui entretiennent la caufe du mal, fe- ront une décoétion de fené à la dofe d’une once & demie, dans laquelle on délayera trois onces de caf- e ou trois onces d’éleétuaire de pfillio, &c. Il importe au furplus que le maréchal foit très-cir- confpeét-&c ne fe hâte point d’arrêter trop tôt le j/ux de ventre, qui fouvent n’eft qu'une fuite des eftorts de la nature, qui fe décharge elle-même des matieres qui lui font nuifibles, & qui dès lors eft très-falutaire à l'animal. (e) FLUX D’URINE, (Manége, Maréchall,) évacuation exceflive & fréquente de cette férofité faline , qui fé- parée de la mafle du fang dans les reins 8 conduite à la veflie par la voie des ureteres, s'échappe au- dehors par celle du canal de l’urethre. Cette évacua- tion n’a lieu que conféquemment à la volonté de l’a- nimal, & le f{ux n’eft en aucune façon involontaire, comme dans l’incontinence d’urine. Dans le nombre infini de chevaux que j’aitraités, e n’en ai vù qu'un feul attaqué de cette maladie. Elle me paroït d’autant plus rare dans l’animal qui fait monobjet, que très-peu de nos écrivains en font mention, Je ne n’arrêterai point à ce qu'ils nous en ont dit ; carje ne m'occupe que du foin de me pré- ferver des erreurs répandues dans leurs ouvrages, & je me contenterai d’inférer fimplement ici l’obferva- tion que le cas dont j'ai eté témoin, m’a fuggérée. Un cheval ayant été tourmenté par des tranchées violentes, accompagnées de rétention d’urine , fut mis à un très-long ufage de diurétiques les plus puif- fans. Les remedes les plus falutaires & Les plus effi- caces ne font dans les mainsignorantes qui ont la té- mérité & l’audace de les admimiftrer, que des four- ces de nouveaux defordres 8 de nouveaux maux. L'animal fut atteint d’un f/zx tel que celui qui, réla- tivement au corps humain, conftitue la feconde ef- pece lde diabetes. Ses urines auparavant troubles , épaifles & femblables à celles que rendent les che- vaux fains , étoient crues, limpides, aqueufes , & fi abondantes qu’elles furpañloient en quantité l’eau dont on l’abreuvoit ; &c il ne fe faififloit du fourrage que dansle moment où il avoit bû. Cette derniere gwconftance fut la feule qui étonna le maréchal au- F L U 913 quel 1l étoit confié ;.il fe félicitoit d’ailleurs d’avoir follicité la forte évacuation dont il ne prévoyoit pas le danger, & vantoit ingénument fes fuccès, Le pro priétaire du cheval, alarmé de l'éloignement que le cheval témoignoit pour tous les alimens qui lxi étoient. offerts, eut recours à moi. Après quelques quefhions faites de ma part au maréchal, je crus pou- voir décider que le défaut apparent d’appétit n’avoit pour caufe qu'une grande foif, &c que l'écoulement excefñif de l'urine n'étoit occafionné que par la dila- tation & le relächement des canaux {ecrétoires des feins, enfuite de la force impulfive qui avoit déter- miné les humeurs en abondance dans ces conduits. La maladie étoit récente, je ne la jugeai point invin- cible, Je prefcrivis d’abord un régime rafraichiffant, car J'imaginai qu’il étoit important de calmer l’agi- tation que des diurétiques chauds, 8 du genre des lithontriptiques , devoient avoir fufcitée. J’ordonnai qu’on tint l’animal au fon, & qu’on lui en donnât quatre fois par jour, arrofé d’une décoftion forte de racines de nenuphar, de guimauve & de grande con= foude. Je prohibai une boiflon copienfe, & je fis bouillir dans l’eau dont on l’abreuvoit , une fufffante quantité d'orge. Ces remedes incraflans opérerent les effets que je m'en étois promis ; l’animal fut moins altére , il ne dédaïgnoit plus le fourrage, & fes uri- nes commençoient à diminuer & à fe charger. Alors je le mis à l’ufage des aftringens. J’humeétai le fon avec une décoétion de racines de biftorte, de tor- mentille & de quinte-feuille ; enfin les accidens s’éva- nouiflant toûjours , & le cheval reprenant fans ceffe fes forces, on exigea de lui un exercice, qui exci- tant de legeres fueurs, le rappella entierement à {on état naturel. (e) | FLUX, (Chimie , Merallurg.) {e dit en général de toute matiere deftinée à accélérer la fufion des fubf- tances qui n’y entrent que difficilement, ou à la pro- curer à celles qui font abfolument infufbles par elles-mêmes. Dans ce rang on a abufivement placé les corps réduétifs qui ne font que donner du princi- pe inflammable fans fondre par eux:mêmes ; les fon- dans qui procurent la fufon fans réduire, avec ceux qui, étant compolés des deux premiers & opérant leur double a@ion, méritent feuls de porter le nom de fux fimplement ,'ou de f{ux réduühifs. Nous allons entrer dans le détail de ces différentes efpeces, & af figner leurs emplois particuliers. Flux blanc. On prend une certaine quantité du fx crud , à parties égales de nitre & de tartre,, que nous décrirons ci-après. On le met dans une poefle de fer ou dans un creufet, dont les deux tiers reftent vui- des. On place ce vaiffeau fur nn feu médiocre : ou la matiere s’embrafe toute feule, ou bien on l’alume avec un charbon ardent, fans la mettre fur le feu, Elle détonne & s’enflamme rapidement. Le bruit cef- {é ; on trouve au fond du vaifleau une mafle faline rouge, qu'on pile & enferme toute chaude dans une bouteille de grès pour le befoin. Cette préparation s'appelle auffi 4/kali extemporané, On la bouche bien, parce qu’elle attire l'humidité de l'air prefqu’aufti rapidement que l’alkali fixe , dont elle ne differe qu’en ce qu'elle contient un peu de phlogiftique. Elle eft d’un blanc grisätre. Flux crud. On met en poudre fine, feparément du nitre & du tartre. On prend parties égales pour faire le flux blanc décrit ci-deflus. Si l’on veut faire du flux noïr, on met deux ou trois parties. de tartre fur une denitre; on mêle bien le tout par la trituration, & on le garde dans des vaiffeaux bien bouchés , quoi- qu'il ne fouffre pas beaucoup d’altération quana il ef. expofé à l’air hibre. Flux noir. Nous avons dit qwil contenoït plus dé tartre que le blanc. La préparation en eft la même: mais il ne détonne pas ayec autant de rapidité, La 914 FE LU raifon en eft fenfble; ce phénomeneeft dû au nitre qui eft ici empâté d’une plus grande quantité de tar- tre, Voicil’explication que donne M. Rouelle de cette inflammation. Le nitre ne s’enflamme point par lui- même dans un creufet rouge oùileft en fonte. I] {ui faut le-conta& d’un charbon ardent, Ce charbon met donc le feu au nitre, 6 le fait détonner; celui-ci brûle le tartre à fon tour & le réduiten charbon; & ce charbon dutartre fert-de porte-feu aux molécules nitreufes qui fe trouvent-auprès de lui, & ainfi fuc- ceffivement, jufqu’à ce que toute la maïle ait fubi la détonnation. Ce raïfonnement «eft fondé fur l’expé- rience qui apprend que fouvent le feu s’éteint dans la préparation du fx noir, parce qu’on n’a pas bien mêlé les ingrédiens , ou qu'il arrive, malgré cela, que deux molécules de tartre fe trouvant près l’une de Pautre, la premiere enflammée n’a pas affez de force pour réduire fa voifine en charbon , & qu’ainf 1a détonnation cefle. Quand ce petit accidentatrive, On préfente de nouveau le charbon ardent à la com- pofition, ou même on " laïffe tour-à-fait. L’alkali fixe qu'il y introduit y eft en fi petite quantité, qu'il ne mérite aucune confidération. Plufieurs artiftes préferent à ce fujet un vaifleau élevé à une poelle, parce que cet inconvénient n’y arrive pas aufñ fré- quemment, la compofition y étant plus entafée. Ils le choififfent d’étroite embouchure, & le fetment d’un couvercle. Mais cette précaution eft au-moins inutile dans la préparation du ffux blanc , & fur-tout dans celle du flux noir, pour ne pas dire qu’elle y eft même nuifble, La vapeur qui s’éleve pendant cetems, eftun c/yffus (voyez cet article) qui contient de l’eau, un peu d'acide nitreux, & d’alkali volatil du tartre, Ainfi on court rifque de ne retenir que des fubftances nuifbles aux deffeins qu’on fe propofe , qui font d’avoir un alkali bien fec, & fans le con- cours d’aucun fel neutre. ‘ Si lon n’a point recours au charbon ardent, & qu’on fafle détonner ce mélange par lui-même fur le feu , l'explication du phénomene refte toûüjours la même. C’eft toüjours le tartre mis en charbon par le contaët du nitre ou du creufet rougis au feu, Foy. La théorie de l’inflammarion des huiles & du nitre alka- Life par le charbon. Cette opération fe termine dans un inftant, & celle du 4x blanc plus rapidement que celle du f/x noir. Celle-ci donne un fel alkali noirci par la grande quantité du charbon du tartre, quiprendaufliie nom d’a/kali extemporané. Il faut le conferver ainf que le flux blanc, dans une bouteille de grès ou de verre bien bouchée, & tenue dans un lieu fec & chaud, Si, faute de ce foin, ils prenoient l'humidité de l’air, 1l les faudroit rejetter, comme incapables de remplir les vües qu’on fe propofe. La raifon en eft fenfible : l’alkali fixe retient l'humidité de air, avec autant de force qu'il l’attire avec ras :lité, Ainf on ne peut l'enlever au flux, qui ne différe de l’alkali que par le concours du phlogiftique, qu’en le calcinant àun feu vif qui difipe en même tems ce phlopiftique, dont la perte réduit le fx à un fimple alkali. Voyez ci-après l'alkali fixe en qualité de fondant, Pour préve- ni cetinconvénient, quelques chimiftes ne font leur flux noir qu’à mefure qu'ils en ont befoin. Ils mettent avant l’opération dans le creufet qui doit y fervir, la quantité de f/ux crud qui leur eft néceflaire, La dé- tonnation eft l'affaire d’un inftant, 8 l’on fait qu'il faut mettre environ le double de la quantité qu’on veut avoir, parceque la perte va à-peu-près À moitié. Lesartiftes qui font dans l’ufage de mettre le {4x crud avec leurs ingrédiens, doivent fouvent manquer leurs opérations. Et en effet, la détonnation ne peut s’en faire dans un creufet dontle couvercle eff lutté, condition requife pour la réduétion ; fans compter gue le clyflus peut enlever par trufion quelques mo-» lécules de la matiere d’un eflai, & le rendre faux; La difillation du tartre donne un réfidu quiet ua flux noïr tout fait. Voyez TARTRE. On peut l'em- ployer aux mêmes ufages. Il n’en eft pas de même de. celui dela difillarion de la lie ; il contient outre cela un tattre vitriolé qui nuiroit à l'opération pat le foie de foufre qui réfulteroit de fa préfence. Foyez Foie DE SOUFRE. Quand nous avons dit que ces fx vouloient être confervés dans des bouteilles de grès on de veire, nous avons voulu exclure en même tems les bouteil- les de terre verniffées. Cette attention ne feroit pas néceflaire pour la confervation d’un J/#x qu’on n’em- ploye qu'à des réduétions ordinaires ; maïs dans les eflais où tout doit être de la derniere exattitude , il feroit À craindre que les petites écailles détachées de la bouteille ,ne portaffent du plomb, & même de l’ar- gent dans Popération; car ce vernis n’eft que du plomb ou de la litharge vitrifiés avec le fable qui fe trouve à la furface du vafe; & l’on fait que le verre de plomb eft rédu&tible, au moinsenpartie. Nous allons pafñler aux corps fimplement rédu&tifs, enfuite à ceux qui ne font que fondans ; & nous par- lerons en dernier lieu de ceux qui font rédu@its & fondans. On réduit des chaux métalliques avec la graiffeou le fuif. À Le noir de fumée fert à la réduétion de quelques corps. C’eft le charbon de la réfine. Les Potiers-d’étain onttoûjours foin de tenir fur leur étain des charbons allumés, ou du fuif ou dela graifle, ou de l'huile, on même ils fondent leur étain {ous les charbons. | La même méthode fe trouve auf pratiquée par quelques plombiers 8c les Fondeurs en cuivre. Les ouvriers qui font le fer-blanc, ont grand foin de tenir une couche de fuif ou de graïfle de quelques doigts fut l’étain fondu , dans lequel ils plongent leur fewlle de fer préparée, pour empêcher que la chaux qui ne manqueroit pas de fe former à la furface de. leur métal en bain, ne vienne à adhérer à la furface de la feuille de fer, & ne s’oppofe par-Ià à l’adhé- rence de l’étain, Voyez FER-BLANC, CHAUX 6 SOUDURE, Les Chauderonniers jettent de tems eh tems de la _ réfine blanche ou du fuif fur l’étamage en bain, pour la même raifonque ceux qui travaillent au fer-blanc, La réfine fe convertit en charbon ou noir de fumée. Les Ferblantiers pañlent de tems en tems dé la ré: fine ou de la colophone fur leur foudure , ou l’y jet tent en poudre pour empêcher auffi la calcination. Les Chauderonniers fondent leur foudure , qui eft compofée de zinc & de cuivre, dans une poefle de fer ä-travers les charbons embrafés, pour empêcher la calcination, ou réduire les molécules metalliques que le feu auroït pû mettre en cet état. On ajoûte après la fonte de l’alliage qui doit faire le tombac, le fimilor, &c. un morceau de finf, 6e. pour réparer la perte du phlogiftique. La mine de plomb ordinaire fe fond à-travers les charbons ardens, pour reprendre le phlogiftique qu'elle a pù perdre par là calcination, & avoir un réduétif continuel qui l'empêche d’en perdre davan- tage, ou qui hu reftitue celui qu’elle peut perdre mê- me dans la fonte. Si on y ajoûte de l’écaille dé fer, c’eft pour abforber le foufre qu’elle a pû retenir, Foy. FONTE EN GRAND, | On empäte avec de la poix la mine d’étain, qu’on: réduit entre deux charbons joints par des furfaces plates & bien polies, dans l’inférieur defquels il ya deux foffetes commnniquant par une petite rigole ;: dont la premiere {ert de creufet , &lafeconde de co- ne de fer, On la firatifie encore avec les charbons, comme nous l’ayons dit de la mine de plomb, mais fans ad- dition. La mine d’antimoine fe calcine peu , fion a foin de + lui ajoûter de la poudre de charbon, & n’a guere de chaux que l'apparence. - Dansla cémentation du zinc avéc le cuivre pour en faire du laiton, on employe le pouflier de charbon. : Voyez plus bas le zinc comme fondant du cuivre. Le fourneau allemand fournit, par le conta@ im médiat des charbons ardens, aux metaux qu’on y fond , un phlogiftique continuel qui pénetre les po- res ouverts des molécules metalliques, & les réduit, Voyez FONTE EN GRAND, . -Onconvertit le fer en acier, en lui donnant un .phlogiftique furabondant par la cémentation avec la poudre de charbon, les ongles, les cornes, les poils, da graifle des animaux , & avec de l'huile. Les autres singrédiens qu’on y ajoûte, ne fervent que pour don- ner du corps au cément. Voyez AcrEer. Ce n’eft pas qu'il en devienne plus fufible, mais il fait exception parmi les autres metaux & demi - metaux, excepté l’arfenic dont la chaux eft fufible, &c, On fait encore de l’acier en plongeant l'extrémité d’une barre de fer dans la fonte en baïn. La barre enleve le phlo- gifüque à la fonte. La trempe en paquet, cetteopération qui confifte à reduire en acier les épées, les pieces des platines des fufils , & autres petits uftenfiles d’acier, fe fait avec un cément où les Ouvriers font entrer la boue des rues, l'ail, les oignons , l’urine , les excrémens, le fuif, la graifle, l'huile, la farine, les œufs, le lait, le beurre, Gc, Voyez TREMPE EN PAQUET. On fait aufli de acier en mettant une barre de fer dans un creufet fans addition, fermant le creufet & J’expofant pendant un certain tems au feu. Ce qui précede prouve donc que tout corps in- flammable, de quel regne & de quel individu des trois reenes qu’il foit tiré, produit toüjours les phé- nomenes de la réduétion. Voyez CALCINATION, CHAUX , PHLOGISTIQUE 6 RÉDUCTION. Venons- en atuellement aux fondans ou menftrues fecs. Le feu mérite la prenuere place, comme étant le fondant de tous les corps & l’inftrument fans lequel ils feroient dans une inaétion parfaite, à l’exception peut-être de l’air & du mercure. Si l’on met du cuivre fur du plomb bouillant, ce- lui-là difparoit bien-tôt, pour ne plus former avec le plomb qu’une feule & même mafle homogène en apparence. Le plomb produit encore le même phénomene avec l'or & l'argent, & les fond à un moindre degré de feu que s'ils euflent été feuls. Voyez EssAT, AFFINAGE 6 RAFFINAGE de l'argent. Ce métal diffout encore le cuivre , l'or & largent alliés enfemble. Voyez ŒUVRE 6 LIQUATION. L’étain eft aufli diflous par le plomb,au degré de feu néceflaire à tous les deux, & forme avec lui une maf- fe homogène en apparence, plus fufble que l’un & l'autre ne l’étoient avant. Voyez SOUDURE des Chau- deronniers & des Ferblantiers. Mais pour que la com- binaïfon perffte, 1l ne faut pas leur donner un plus grand degré de feu, Voyez calcination de l'étain par de plomb. Potée. Le plomb & le fer réduits en fcories, fe diffolvent aifément , ce qu'ils ne pouvoient faire avec leur me- tallicité, & forment un verre d’un roux opaque. Les demi-métaux fondent aifémentavecle plomb, mais ils lui enlevent fa malléabilité , & lui donnent une couleur noire, d’obfcure qu’elle étoit avant. Il eftbon d’avertir ic1 qu’en nous fervant de l’expref- fion générale de demi-méraux, nous ferons toûjours exception du mercure & du cobolt. Ainfi nous les fpéciñierons quand il fera néceffaire. La Htharge, ou le verre de plomb par lui-même , FLU o1$ étant mêle par latrituration à des pietres vitre(érs bles, les réduifent en verre à un feu beaucoup moins violent qu’il n’eût été néceffaire à tous les deux pour fubir cet état. Ce verte devient fi pénétrant par une quantité confidérable de litharge, qu’il perce les creus ets; à moins qu’ils ne foient d’uné compoñition par: ticuhiere, Voyez LITHARGE , VERRE DE SATURNE G CREUSET. Elle produit le même effet avec toutes les pieires calcaires; avec cette différence, qu’elles en demans ne une plus grande quantité pour devenir auf flute es. Elle diffout les apytes même les plus réfra@aires ; pourvu toutefois qu'on: ait la précaution de bien mê: ler par la trituration, & de donner un leger degré de feu long-tems continué. Le cuivre entre aifément en fonte à l’aide de la Liz tharge; mais elle en confume une très = grande pr tie, &l e change avec elle en un verre très - péné- trant. Elle réduit l’étain & fa chaux én un verre blanc dé lait brillant & opaque, avec une legere teinte de jaus ne. Voyez ÉMAIL. L'or & l’argent en font auf diflous , mais fans perte, parce qu’elle n’a pas les propriétés d’enlever leur phlogiftique. Foyez EssAr, AFFINAGE G Rar- FINAGE de l'argent. L’étain diffout aifément l'or, Pargent 8 le cuivre; mais 1l les rend très-fragiles , s’ils n’en contiennent qu'une petitequantité, Voyez BRONZE, Il difloutauffi le fer, & il fert même à le fouder. Les demi-metaux fe fondent aifément avec ce me- tal; mais il leur donne de la fragilité, s’il eft en petite quantité avec eux. Le cuivre diflout l'or & l'argent, Voyez Mon- NOIE. L'or & l'argent fe diffolvent l’un l’autre, Foyez INQUART, DÉPART, MONNOTE, EG, Ils fe mêlent intimement aufi avec le fer; 8 mê- me l’or fert à fouder le fer & l’acier, pourvu toute: fois qu’il foit bien pur. L’arfenic mêlé par une trituration exaéte aux dif. férentes terres & pierres vitrefcibles , calcaires & apyres , les difpofe ordinairement à une prompte fu- fion. . Fondu avec le cuivre, il lui donne une fufon ai- fée & affez prompte; & il le réduit en un metal d’au- tant plus aigre, qu'il eft en plus grande quantité. Avec l’étain, 1l en fait une mañle blanche, claire, par écailles, & qui imite prefque le zinc à l’infpec- tion : maïs 1l fe forme une grande quantité de chaux d’étain , mêlée d’arfenic, qui lui adhere, Le plomb mêlé à l’arfenic & expofé À un feu doux auquel 1l ne bout ni ne fume tout feul, éprouve ces deux états, & eft volatilifé, s’élevant fous la forme ’une fumée très-épaifle, &laifant après lui un ver- re jaune très-fufible. Il refte auffi du plomb qui eft fra- gile & obfcur. | L’arfenic pénetre auf l’argent, & en fait un com- pofé d’un beau rouge vif, fi on y ajoûte une petite quantité de foufre. | Il pénetre l'or aufli, & le rend terne & fragile : & fi l’on expofe alors ce mélange fubitement à un grand feu, l'or s’y diflipe en parrie. Mêlé au verre de plomb, il lui donne plus de pé- nétration & d'activité. Il fond aufü le fpath. Il fait un verre avec l’alkali fixe & les cailloux; Ce demi-metal eft enfin réfous à fon tour par dif- férens metaux, fur lefquels il produit mutuellement la même ation. | Le régule d’antimoine donne un verre qui agit beaucoup plus puiffamment fur les cotps que la li- tharge ; car il a la propriété d’atténuer les pierres de toutes lesefpeces, de les diffoudre, & de les changer même en fcories, 916 F LU L’antimoine & fonrégule caufent la même altéra- : tion à tous les metaux, les réduit même en fcories, &rdles volatilife. | 1Oeique nous avons dit de larfenic au fujet de Pu- mion qu'il fait avec les différens metaux, eft égale- ment vrai du régule d’antimoine, Carle metal qu'il fond le plus rapidement, eft le fer, & après lui le cuivre, Ge. Voyez; CARACTERES d'IMPRIMERIE. Le: bifmuth a la propriété de fondre à un degré de feu bien moins confidérable que le régule d’antimoi- ne, lesmétaux de dificile fufñon. Il s’unit facilement avec eux. Voyez cequ'on en dira dans la partie des flux. Le zinc fe mêle aifémentavec le plomb & l’étain, qu'il aigrit.en raifon de fa quantité. Sionle fond avec quatre oumême fix parties de cuivre, celui-ci eft plus fufñble, C’eft ie laiton. IL prendune bélle couleur d’or, fion lui mêle de l’étain d'Angleterre. L’alkali fixe diffout au grand feu toutes fortes de pierres &c de terres, & principalement les vitrefc1- bles ; d’oùil réfulte différens verres. Voyez la lirho- géognofse de Pott ; la verrerte de Kunckel , & les arrz- cles VERRERIE, EMAIL 6 PORCELAINE. Il fond aifément l'or & l'argent. Il facilite auffi beaucoupla fufion du fer & du cuu- vre, qu'ilconfume enfuite. L’alkali fixe eft fur-tout employé à la réduétion des précipitésmétalliques , c’eft-à-dire des chaux des métaux faites par les acides ; mais on ne l’employe guere feul que-pour l'or, Pargent ou le mercure, Voyez NITRE ALKALISÉ par les métaux. Le borax fond & vitrifie toutes les terres , & les terresiqu’on mêle avec lui. - Il facilite extrèmement la fufon de l’or, de Par- gent & du cuivre. Voyez SOUDURE. Le nitre facilite beaucoup la fufon des métaux; mais on ne l’employe feul que pour l’or 8& largent. Voyez NITRE ALKALISÉ par les métaux. Le fel marin ne s’employe feul non plus que le ni- tre, & eft pltôt regardé comme un défenff du con- taé de lair que comme un fondant. Voyez ESsAT, Fuston, & plus bas ce qui regarde les flux réduéhfs. Le fiel de verre eft d’un ufage fréquent dans la partie de la chimie qui traite des métaux ; maismal- à-propos , felon M. Rouelle. Cet illuftre chimifte ayant remarqué que ce corps eft un mélange de verre } d’alkali, de la foude , de tartre vitriolé , & de fel de Glauber , a conclu juftement que par ces deux derniers fels 1l faifoit un foie de foufre, qui, diflolvant les métaux au lieu de les réduire , ren- doit un eflai faux. Voyez FOIE DE SOUFRE & Sou- FRE ARTIFICIEL. Îl eft étonnant qu'un chimifte auffi éclairé que M. Cramer, n’ait pas aflez obfervé ce corps, & qu'il ne fafle prefque pas un effai fans y faire entrer cet abfurde ingrédient. Voyez plus bas l'article des FLUX COMPOSÉS, qui font de lur. Le fel ammoniac n’eft employé comme fondant qu’au défaut du nitre & du fel marin. Le foufre fond aifément argent , & lui donne af. {ez l’apparence du plomb. Il pénetre le cuivre & le réduit en une mafñle fria- ble &c fpongieufe. Voyez CÉMENTATION du cuivre avec Le foufre ou cuivre brélé, Il fond promptement le fer , & le réduit en une fcorie fpongieufe : 1l fuffit pour cela de rougir une barre de fer, & de la froteravec un bâton de foufre. Il facilite extrèmement la fonte du régule d’anti- moine , auquel il rend fon premier état de mine d’an- timoine. 1] fond auffi le bifmuth , mais moins aifément que le régule d’antimoine. Ii rend l’arfenic d'autant plus fufble, qu'il hu eft * uni en plus grande quantité. Voyez ARSENIC JAUNE, RQUGE, RUBIS D'ARSENIÇ, ORPIMENT, RÉALGAR. PE Ù Fond avec deux parties d’alkali fixe, 41 fitife foie de foufre, Foyez FO1E DE SOUFRE. Ce foie a la propriété , par rapport au fel alkali qu'il contient,\de.faciliter&c d'accélérer la fafionde toutes les pierres & les terres , ainfi que tous les mé- taux, même les réfractaires & les demi-métaux, ex. cepté le mercure, Voyenfx révivification. Cramet. Le {el fufible de urines mêlé à parties égales avec l’argille , entre en fonte ; mais le mélange devient compaëte & tout noir, femblable à une agate de cette couleur, Si on met deux parties de ce {el con tre une d’arpille, le mélange fe fondtrès-bien ; mais il en réfulte une mafle compade&r grisâtre , dont la caflure reflemble prefque.à une agate ou à un cail.. lou grifâtre. Quant au fel dontil eft ici queftion, v0ÿez PHOSPHORE. Six parties de craie, qui.eft un corps infufible par lui-même , & quatre parties d’argille, auffi infufible par elle-même ; donnent un corps dur & bien lié: mais fans tranfparence. Quatre parties d’argille avec une partie de fpath alkalin, donné une mafle très liée, & qui refte opa- que : mais fi l’on mêle ces deux fubffances en une certaine proportion, & qu'on expofe ce mélange à un feu fufhifant 8 long -tems continué, il fe chan- gera enfin en un corps tirant fur le jaune, & pour l'ordinaire verdâtre , tranfparent & parfaitement dur , qui peut être compté parmi les chefs-d’œuvres de l’art, Pos. Nous allons pafler aux ffux rédudifs fimples & cempofés. Le tartre crud,le réfidu de fa diftillation, le favon, le flux blanc & le fux noir , font des flux réduétifs fimples. Voyez ce que nous avons dit des deux der- mers, au commencement de cet article, & les exem- ples que nous en allons donner de chacun en parti- culier. De la limaïlle ou des lamines de fer fondues ra- pidement avec leur double d’étain , du tartre , du verre, &c des cendres gravelées, donnent un régule blanc, fragile, & attirable par l’aimant. Le cuivre facilite la fufion du fer ; mais on ne réuffit bien dans cette opération, qu’en couvrant la furface de la matiere avec un mélange de tartre & de verre. L’arfenic &c lalkali fixe,mêlés avec un corps con- tenant beaucoup de phlogiftique comme le favon, la poudre de charbon & de tartre , fondus dans un bon creufet avec de la limaille & des lamines de fer, donnent un régule de fer blanchâtre & fragile, Sion veut unir au fer une grande quantité d’arfenic par cette méthode, 1l faudra mêler enfemble égales por tions de limaille de fer & de tartre, y ajoûter le dou- ble d’arfenic, & jetter le tout dans un creufet rou- ge, afin de le fondre le plus rapidement qu'il {era poflible. On verfera cet alliage dans un cone ou une lingotiere, fi-tôt qu'on s’appercevra que la fufion eft achevée. Si l’on traite le cuivre avec l’arfenic par la même méthode , ilen réfulte un compolé qui eft blanc , & qui conferve encore aflez de malléabilité, principa- lement fi on le fait fondre une fois ou deux avec le borax , afin de difiper l’arfenic fuperflu. Si cepen- dant on mêle une grande quantité d’arfenic avec le cuivre, 1l en devient caffant &c obfcur, & fa fur- face eft fuette à fe noircir dans l’efpace de peu de jours, par le feul conta@ de l'air. Sion allie le bifmuth avec des métaux qui {e fon- dent difficilement , il faut faire cette opération dans les vaiffeaux fermés, parce qu'il fe détruit aifément; outre cela il faut augmenter le feu très-rapidement, & y faire les additions que nousavonsprefcrites en parlant de la Limaille de fers jointe avec fon double d’étain, Les Les mêmes additions doivent encore être faites à lalliage du nitre avec les métaux de difficile fufion. Pour réduire une mine fufible de plomb , on em- ploye deux parties de f{ux noïr, un quart de limaille de fer, & autant de fiel de verre, fur une partie dela mine calcinée , mais pefée avant la calcination. Foy. Essar. Si la mine eft rendue réfra@taire par la préfence des pyrites , fur deux parties de mine calcinée, pe- fée avant la calcination , on met fix parties de flux noir &z deux de fiel de verre. MEL Quandelle eftréfrattaire en conféquence dester- res & des pierres , & incapable d’être traitée par le lavage ; fur deux parties de mine, pefée avant la cal- cination , puis calcinée , on met deux parties de fiel de verre , un peu de Himaille de fer, & huit par- ties de flux noir. La mine de cuivre fufble , & exempte d’arfenic & de foufre , demande trois parties de ffux noir fur une de mine torréfée , pefée avant la rorréfattion. Nous avertiflons ici, pour éviter les repétitions, que toutes les-mines dont nous indiquons les quanti- tés, font toûjoursroties & pefées avant leur grillage. Voyez Essai. Si l’on a à réduire la mine de cuivre de Particle précédent , mêlée de terres &c de pierres , infépara- bles par l’élutriation,qui la rendent réfraétaire, à une partie de cette mine, on ajoûte quatre parties de j/ux noir, & une de fiel de verre. On traite par la même méthode 87 avec les mê- mes proportions de JZux réduéhifs , la mine de cuivre martiale. Quand elle eft jointe à des matieres fulphureufes, arfenicales & demi-métalliques , les proportions des fondans & des rédu&tifs font encore les mêmes, & pour lors elle donne deux régules, l’un groffier, & l'autre moins impur. Une mine de cuivre pyriteufe & crue peut être traitée par la ffratification avec les charbons , avec une addition de fcorie pour fondant. Voyez FONTE ÆN GRAND. Il en réfulte un régule groffier. La même mine fe peut encore traiter dans les vai #eaux fermés , & pour lors on ajoûte deux ou trois parties de verre commun ou de fcories fufibles , un tiers ou un quart de borax à une de la mine; ona un régule grofüer. Les régules groffiers des deux derniers articles, font convertis en cuivre noir, fi on les gnille à dif- férentes reprifes, & qu’on leur ajoûte du fZ4x noir : on peut encore faire cette réduction à-travers les charbons. Voyez FONTE EN GRAND. On examine la quantité de cuivre que peuvent contenir les fcories de tous les articles précédens fur le cuivre, en leur ajoütant du verre commun très- fufble , ou le 4x noir, fi elles ne font que peu ou point fulphureules, pour lestraiter dansies vaiffeaux fermés : l’on peut encore fuivre la méthode qui con- cerne la mine pyriteufe & crue, fon en a une gran- de quantité. "A La mine d’étain fe traite comme la mine fufble de plomb , excepté qu’on y ajoûte encore autant de poix que de limaille de fer, Voyez Essar. La mine de fer fe réduit, ainñ que nous l'avons dit à la fin de l’article Essar. Mais fi Le régule en eft fragile , & ne peut fuppor- ter un bon coup de marteau , {oit quand il eft froid ou quand il eft chaud, s’il wa point l'éclat métalli- que ; aux trois patties de f/4x blanc, & à une par- tie de verre pilé & de poudre de charbon , on ajoù- te une moitié de chaux du poids total de ces ingré- ciens. Voyez FER. Lamême mine, accompagnée de pierres réfra@tai- res , demande égales parties de borax, outre le fx de avant dernier article. Tome VI, F LU 917 Le fer crud ou caffänt devient dudile, G étant mis fur un catin de brafque pefante , on le couvre de fco- rie fufble ou de fable, & qu'après l'y avoir fondu {ous les charbons , on le pétrifle & l’étire fous le marteau, Voyez FER 6 ACIER. On réduit ce métal en acier par la cémentation avec les corps inflammables : on fe fert à ce fujet de différentes compofñtions Quireviennent toutes au mê- me, quand elles fourniflent un phlogiftique exempt d'acide fulphureux. Sur une partie de pouilier on met une demi-partie de cendres de bois ; ou à deux parties de poudre de charbon, & une démi-partie de cendre de bois , on ajoûte une partie d’os, de cornes, de cuir , de poils brûlés à noïrceur dans un vaifleau fermé, place fur un feu modéré. Foy. À crER 6 TREMPE EN PAQUET. On convertitencore en acier Le fer aigre ou fa mi- ne, en les fondant couvert de fcories ou de fable fous les charbons dans un catin de Brafque, & les marte- lant enfuite. Voyez ACIER & MINE D’ACIER, La mine d’antimoine calcinée feulerou avec le ni- tre , ou bien détonnée avec ce fel, fe réduit en ré- gule avec un quart de f/ux noir : dans la calcination avec le nitre, on a foin de jetter du fuif de tems en tems, Voyez RÉGULE D’ANTIMOINE. Les fleurs de zinc blanches, ou bleues & grifes, calcinées à blancheur à un feu ouvert médiocre, font irréduétibles par les f/4x réduétifs ordinaires ou les _fondans falins ; mais elles fe vitrifient avec eux. Voyez les articles NIHIL ALBUM, POMPHOLIX, LAINE PHILOSOPHIQUE, VITRIOL DE ZINC, CANNES | Mais les fleurs bleues & grifes , fonduesmêmeavec des fels privés de phlogiftique , donnent quelques grains de zinc, comme avec le fiel de verre, la pier- re à cautere. Voyez l’article fuivant ; & dans le corps de cet Ouvrage, les articles qui y font indiqués. Le zinc & la plüpart des corps qui en tirent leur origine , font les fondans du cuivre ; on cémente avec la poudre de charbon, la calamine, le zinc, la cadmie des fourneaux où l’on a traité le zinc, & la tuthie pour en faire du cuivre jaune. Voyez Lar- TON, CÉMENTATION. Onréduit en régule deux parties de chaux d’arfe- nic avec une partie de f/ux noir, une denu-partie de - fiel de verre, & autant de limaille de fer non rouil- lé ; ou bien feulement en l’empâtant d’une partie de favon , & y ajoûtant une demi-partie d’alkali fixe : le récule fe fublime au couvercle du creufet, fous la forme de pointes prifmatiques qui reflemblent à la feve du hêtre. | On réduit le cobolt avec le ffux noir. Voyez le me. ‘mmoire de M. Brandt. On n’entendra bien tout ce qui précede & ce que nous allons dire , qu’on ne joigne à cet article la connoïffance de la calcination , du phlogiftique, & de la réduétion. Voyez ces articles. | Il réfulte de ce que nous avons dit fur les corps réduétifs, qu'un métal qui a perdu par la calcination fon phlogiftique , le retrouve dans tout corps inflam- mable qui ne contiendra point d'acide vitriolique, & où la matiere du feu fera f étroitement unie à un corps fixe, qu'il n’y aura qu'un feu onvert capable de la dégager , à moins que ce corps ne fe trouve joint à un autre avec qui ce phlogiftique a rapport, Le charbon, traîté à la violence du feu dans les vaif feaux fermés , ne donne point fon phlogiftique ; le tartre, la corne de cerf, Gc. traités par la même mé- thode, confervent auffi le leur. Il n’y à donc que la préfence d’un autre corps , avec qui cette matiere de feu a analogie , qui puifle la leur enlever. Voyez CALCINATION. Quand nous avons dit que la réduétion fe faifoit AAAÂAaaa 918 FLU par l’intermede de tout corps inflammable qui ne contient point d'acide vitriolique , 1l faut entendre par ce corps inflammable le phlogiftique pur , Uni à l'acide vitriolique , tel qu'il fe trouve dans Le foufre (voyez plus bas le foufre comme fondant ): car il y a des réfines formées par l’union de l'acide vitrioli- que , comme il y en a de formées par celle de l’aci- de nitreux. Poyez RÉSINE ARTIFICIELLE. Et l’ex- périence des Chauderonniers & Ferblantiers , 6. prouvent que les réfines fervent à la réduétion. IL faut donc convenir qu’une huile effentielle , jointe à l'acide vitriolique , lui eft tellement combinée , &c l’empâte de façon qu'il ne nuit point à la réduétion, & qu’elle ne fait plus d’union avec lui, fi-tôt qu’elle et réduite en charbon ; qualité abfolumentnécefaire en pareille circonftance , & dont on peut déduire la preuve du charbon qui fe fépare de la réfine artif- cielle : ainfi cet acide vitriolique fe diffipe dans le moment qie le charbon fe fait ; ce que l’on conclura naturellement des circonftances qui accompagnent la rédufion. On fait qu’elle fe fait à l’air libre; & la réfine n’a point été encore employée, que je fache, en qualité de réduétif dans les vaifleaux fermés, où {on acide pourroit aigrir le métal réduit, en formant du loufre. Mais l’on ne doit point croire que les corps gras & huleux, avec lelquels on réduit une chaux mé- tallique , reftent dans leur état naturel , & la réta- bliffent en fon premier état par leur nature oraffe & huileute : ce n’eft qu'après que la combuftion les a réduits en charbon, que ce phénomene arrive. Nous ne nous ariêterons point à prouver que la nature charbonneufe ne fe produit que dans les vaifleaux fermés, Ce que nous avons dit fur lé tartre crud, le tartre diftillé, la corne de cerf, &c. le prouve aflez, fans compter qu’on trouvera ce phénomene éclairci aux articles CHARBON 6 PHLOGISTIQUE. La portion inflammable d’un réduétif qui, en pé- nétrant une chaux métallique & s’y uniflant , la re- tablit dans fon état de métal , eft très-peu de chofe eu égard à fa male; mais confidérée du côté de fes effets, on fentira que fa quantité numérique & la té- nuité de fes molécules fimples font prefqu’infinies. L'illuftre Stahl s’eft convaincu par fes expériences, que le phlogiftique ne conftituoit qu'une trentieme partie du foufre , conjointement avec l’acide vitrio- lique ; mais après plufñeurs expériences , il la trou- va à péine un foixantieme, Qui fait d’ailleurs s’il n’enleve pas avec lui un peu de l’acide vitriolique auquel il eft uni ? L’imagination fe perd dans les té- nebres profondes qui enveloppent ce myftere ; & l’on n’évaluera vraiflemblablement jamais au Jufte la quantité de ce corps , que nous ne connoiffons que par les phénomenes qu’il produit avec les autres ; car jufqw’ici on ne la jamais eu pur & dépouillé de toute matiere étrangere, & peut-être eft-1l incapable d’é- tre mis en male tout feul , & de fe trouver pur ail- leurs que dans l’atmofphere où il eft divifé en fes élé- mens. Au refte il n’eft pas le feul être dans la nature qui ne-puife être {omis à cette épreuve. L'air ne fe corporifie non plus qu'avec les autres corps. Voyez Le craité allemand du foufre de Srahl, 6: Les art. Sou- FRE , PHLOGISTIQUE , 6 PRINCIPE. Le but de ceux qui travaillent au fer-blanc, & de ceux qui foudent & qui étament, n’eft pas plus de réduire que d'empêcher la calcination. Tant qu’un métal fondu n’eit point expolé à l’air ( on en ex- cepte l'or & l’argent , dont la calcination exige des manipulations fingulieres ), 1l demeure dans fon état ordinaire ; mais fi-tÔt qu'il a communication avec lui , la matiere ignée qui joue à-travers, emporte avec elle celle qui conftitue {a nature métallique, 8t ne peut être réparée que par celle que lui fournira un corps qui en fera impregné. Ainfi le corps réduc- FEU tif empêchera la calcination de la partie du bain qu’il couvrira , & redura la chaux de celle qu'il waura pas défendue du contaë de l’air. | Les métaux à fouder veulent être bien avivés,, : avant que la foudure y foit appliquée. S'il y avoit quelques faletés, elles empêcheroient le contaét dur métal &c de la foudute ; on les lime donc pour obte- nir cet avantage: le fer-blanc n’a pas befoin de ce préliminaire ; feulement dans le cas où il eftoras ,on le faupoudre de borax. Voyez Les FonDans. L’éta- mage, qui n'eft que l’applicarion d’une plus grande furface de foudure, exige les mêmes précautions. Les ouvriers commencent par racler le vaifféau qui a été étamé une prémiere fois ; mais quandil eftneuf ils fe contentent d’y jetter quelques pincées de fel ammoniac ou de fel marin , qui l’écurent, &leren- dent par-là propre à s’allier avec l’étamage. Voyez les FONDANS. Par l’ufage où ils font de fe fervit en pareil cas d’un petit bâton dont l’extrénnté eft coëf- ‘fée d’étoupes, ils ont pour but non-feulement d’ap- pliquer leur foudure”, mais encore de dépouiller les parois du vaiffleau du charbon de la réfine qui adhere quelquefois | & le défend du conta& de la foudure , ainf que de [a chaux de la foudure que cet- te réfine n’a pas réduite, parce qu’elle ne couvre pas tout. | Quand une chaux eft une fois réduite, on a beau fournir de nouveau phlogiftique au métal, il n’en prend pas davantage ; 1l n’en peut plus admettre que dans le cas où 1l auroit perdu par le conta@ de l'air celui qu’on lui a fourni. C’eft ainfi que Le même mé- tal peut devenir chaux, & fe réduire un grand nom- bre de fois, fans qu’on en connoïffe les bornes, que dans l’étain, qui fe détériore réellement par toutes ces tortures : le fer aufli fait exception, maïs dans un autre genre ; 1l eft fufceptible de prendre une {ur- abondance de phlogiftique: c’eft cet excès qui le fait acier , & qui, bien loin de Le rendre plus lié & plus fufble, comme les autres métaux, ne fait que le rendre plus caffant & plus réfra@aire : il étoit af- {ez fufñible en fcories , 1l fe réduit fans fe fondre, de- vient moins fufible étant fer , & n’eft jamais plus re- belle à la fonte que quandil eff acier. La raifon en eft encore inconnue. Il eft donc évident que les métaux 8 demi-mé- taux qui font deftruéhibles à feu nud, füupporteront plus long-tems la fonte fans s’altérer , fi on a ioin de couvrir leur furface de poudre de charbon ou de tout autre corps inflammable , que s’ils y étoient expofés avec le contaét de l’air environnant : mais par cette précaution , l’on n’empêche pas feulement que ces métaux fe calcinent, c’eft-à-dire qu’ils perdent leur phlogiftique, mais encore que ce même phlosiftique ne volatilife avec luiune partie du métal non cal- ciné, F’oyez VOLATILISATION. Nous avons dit que les métaux imparfaits & les demi-métaux ne fe calcinoient guere que par le con- taét de l’air : cela eft vrai de tous , excepté du zinc. Ce demi - métal fe calcine même dans les vaiffleaux fermés , au degré de feu qui le met en fonte : on eft donc obligé, quand on l’allie avec les autres, de lui fournir un réduétif continuel. C’eft par cette raifon que les Chauderonmiefs font leur foudure forte fous les charbons embrafés ; qu’on fait le cuivre jaune, le tombac, le potin, 6c. avec une addition de char- bon ou de tout autre corps inflammable ; que dans le fourneau de Goflar on attrape Île zinc au milieu des charbons ardens , & qu’on le confüme à -travers la poudre de charbon. Jufqu’ici nous avons examiné le feu comme en- trant dans la compoftion des corps : nousavons c1- té l'exemple du fer converti en acier fans addition, dans un creufet où le feu fait la donbiefonétion d’inf- trument & de principe. Deux illufires chimiftes, MM. Stahl & Cramer, ont été embarraflés d’expli- quer pourquoi une mine de fer étoit attirable par . Vaimant après la calcination: ce phénomene cepen- dant s'explique par celui qui précede ; mais le feu inftrument & le feu principe font-ils Le même ? Le fer qui fait exception dans ce cas ‘avec tous les corps connus, femble linfinuer: font-ils différens ? c’eit ce qui paroiït par la réduétion des autres chaux mé- talliques. On a beau les tenir dans un creufet fermé toutes feules , elles ne prennent pas, comme le fer, la matiere du feu qui pañle à-travers un creufet: il leur faut le contaët d’un corps charbonneux ; & elles veulent être tenues dans les vaifleaux fermés. La confidération de ces phénomenes porteroiït à croire que le fer ne s’accommode que d’un phlogiftique pur, tandis que les autres corps métalliques femblent de- mander un phlogiftique uni à un autre corps, dont la préfencene peut être que foupçonnée. Mais fi l’on admettoit cette conjeéture, comment la concilier avec ce qui fe pale dans la calcination du plomb? La chaux de plomb pefe plus qu'ilne pefoit auparavant; & il n’y a pas d'apparence que le phlogiftique qu’on foupçonne uni à un autre corps, pefe moins que le phlogiftique pur qui paroït chafler le premier, pour s’'introduire à fa place fous une différente combinai- fon, & peut-être felon.celle qui fe fait dans le fer : car le fer converti en acier par lui-même augmente de poids ; 1l eft vrai qu'il n’a pas été préalablement calciné. Parlons du feu comme inftrument. Nous avons placé le feu à la tête des fondans; c’eft en effet l’inftrument qui divife Les corps , les ré- fout , & les rend par-là mifcibles avec les autres. Tous les fondans font des menftrues fecs, c’eft-à- dite des corps durs compofés de parties liées entre elles, & formant un tout qui réfifte à fa féparation : ils ne peuvent agir fur les autres ; tant qu'ils refte- ront fous cette forme; il leur faut donc un agent qui change cet état, & leur donne une divifion & une atténuation capables de leur faire pénétrer les pores de ceux qu'ils peuvent diffoudre; cet agent c’eft le feu : appliqué aux fels & aux métaux avec la force requife pour chacun d’eux en particulier; &c felon l’art que nous détaillerons aux articles FOURNEAU VaïssEAU ; il s’infinue à-travers leurs pores, les di- late, defunit leurs molécules intégrantes, & fouvent les principes conftituant ces molécules, ëc Les fait ron- ler les unces fur les autres, comme celles d’un fluide auquel ils reflemblent pour lors. Enpareille circonf- tance , il faut le regarder comme un fluide a@ifqui fe mêle intimement & uniformément avec les corps qu’il pénetre , & qui en eft divifé mutuellement : on ne peut mieux comparer fa préfence dans un corps qu'il rend fluide, qu'à celle d’un grain d’or qu’on a fondu avec cent mille grains d'argent pur. La Doci- maffique nous démontre que chaque grain de cet ar- gent Contient une quantité d’or proportionnelle , c'eft-à-dire un cent-millieme de grain d’or: la divi- fion de cet or fera encore plus grande , fi on le mele avecune plus grande quantité d'argent ; & l’on n’en connoît point Les bornes : il faut que le feu réduife cet or à fes molécules intégrantes ; ces molécules doivent être d’une finefle extraordinaire , pour qu”- elles puiffent fe diftribuer uniformément dans toute la mafle de l’argent. Quelle doit donc être la fineffe du corps qui a eu la faculté de les defunir , & de les orter par toute la mafle qu’il a parcourue , ébran- lée & bouleverfée? Mais il n’eft pasnéceflaire, pour que cette diftribution uniforme du feu dans le Corps le plus dur, ait lieu , que ce corps en foit diffous, c’eft-à-dire que fes élémens foient féparés les uns des autres, pour lui laïffer le pañlage libre: il eft auf uniformément diftribué dans celui qu’ilnecom- mence qu'à échauffer au-deflus du degré de la glace. Quelle prodigieufe finefle ne fuppofe pas, à plus for- Tome VI, | FLU 919 te raïfon , cètté liberté du paffage qu'il fe fraye dans les pores reflerrés de ces:corps? Cette derniere con- fidération porte à croire que rien n'échappe à fon ac- fion. | _ Heft vrai que les molécules des métaux les plus durswéfiftent à leur defunions & la preuve en elt ti- rée de la figure globuleufe qu'ils s'efforcent de gar- . der, comme le mercure, dans le tems même que le feu produit l’aétion contraire: mais l'exercice de cet- te force eft au moins diminué, pour ne pasdire ab{o- lumentinterrompu, tant que dure la mêmeviolence du.feu. Il n’eft pas poffible de méler intimement deux ou plufieurs mafles quelconques, qu’elles ne foient difloutesen leurs molécules intégrantes. Quedevient donc cetteprétendue cohérence lqw’on avoit foup- çonnéeréfiiter à la féparationdes élèmens, quandun corps divifé &c pouflé par Paétivité du feu, fe gliffe avec un autre entre des parties dans lefquelles on avoit foupçonné une réfiftance à leur féparation à C’eft donc au feu, comme feul inftrument de la divifion des corps, qu’on doit attribuer l'exercice de cette.difpoñtion qu'ils ont à fe difloudre les uns les autres: c’eft à lui qu'on doit la produétion de ces phénomenes merveilleux qui naïflent de la combi- naifon de plufieurs fubftances, Qui pourroit refufer le titre d'agent univerfel de la nature, à cet. être qui en eft le principe vivihantà | L'expérience a appris que tousou prefqué tous les {els étoient des fondans : ainfi le borax, le nitre, le fel ammoniac, le fel semme , ou le fel marin, les vitriols ,le mercure fublimé corrofif, les deux alka- lis fixes, le foufre & fon foie , le fel de Giauber, le tartre vitriolé, le fel fufble de l’urine, & enfin la plüpart des fels compofés d'acides devenus concrets par une bafe quelconque , font des fondans. Voyez SEL. Les uns ne mettent en fonte que quelques fub- ftances connues jufqu’ici; les autres y en mettent plu- fleurs : ceux-ci agiffent par un de leurs principes feu« lement, ceux-là par tous les deux. Ils exercent leurs a@ions fur les terres, les pierres, les verres, les de- mi-métaux, les métaux, leurs chaux, leurs précipi- tés, leurs verres, & toutesces matieres fur elles-mê« mes. De ce nombre prodigieux de fuübftances il naît une foule de combinaïfons dont on peut ;s’affürer qu’on ne connoit encore que le plus petit nombre, quelque grand que foit celui qui a été tenté jufqu'ici. Mais fi l’on ne connoït que la moindre partie des combinaifons qui peuvent être faites fur les fubftan- ces connues , quelle efpérance de parvenir à la con- noïffance de celles qui exiftent peut-être inconnues dans le fein de la nature, & de celles que l’art peut produire ? On trouve un grand nombre de ces com- binafons dans différens ouvrages, & particuliere- ment dans la Lithogéognofe, fi on les confidere en elles-mêmes, & par le travail qu’elles ont dû coûter. Mais fi on vient à les comparer avec ce qui refte à faire , la carriere eft immenfe; & ces ouvrages, & principalement celui deM. Pott, femblent n'exifter que pour accufer la briéveté de la vie. Quelle foule de réflexions accablantes ne doit pas offrir l’exercice de plufieurs genres , fi un feul fufit pour cela ? Ily a des corps qui fe fondent par eux-mêmes, & dont l’addition d’un autre corps ne fait qu’accélérer & faciliter la fufñon : tels font tous les métaux & demi-métaux , les métaux parfaits dont l’aggréga. tion feroit rompue en molécules, à-travers lefquel- les il n’y auroit aucune impureté, la plüpart des fels, toutes les terres & les pierres vitrefcibles ; bien en- tendu que cette addition change leur nature, fi elle s’unit avec eux : on peut conféquemment s’en pañler, D'autres n’entrent en fonte que par un interme= de abfolument néceffaire: dans ce rang on placeles métaux parfaits , dont l’aggrégation eft rompue, & dont les molécules ne peuvent avoir de conta&t mus | AAAazgau 920 FLU tuel, en conféquence de ce que leur furface eftcou: verte de quelques ordures , comme de pouflere, de cendres ; où de ce qu’elles font unies aux acides. Dans le premier cas, on employe le borax, le nitre, le fel ammoniac, & le fel marin: le vx blanc & Valkali fixe fervent dans le fecond, IL efb'à remar- quer que comme le borax donne à l’or une pâleur qu'on ne lui enleve .que par le nitre ou le fel ammo- niac, on mêle ordinairement le borax & le nitre, pour lui fervir de fondant , ou le borax & le fel am- moniac , mais jamais le nitre & le fel ammoniac, par- ce qu'ils détonnentenfemble. On employe auffi quel- quefois ces fels avec les métaux imparfaits & leurs chaux: mais ils en calcitient une partie, & même la vitrifient, commeul arrive de la part du borax, bien loin de réduire la chaux qui peut s’y trouver. Voyez Les FLUX. Ainf donc on n’en peut faire aucun ufage dans les effais , fans tomber dans l’erreur. Ces fels, le borax, Îe nitre, le {el ammoniac, le fel marin, l’alkah fixe , & le ffux blanc , nettoyent la furface des molécules des impuretés qui s’y trouvent; & fa- vorifent ainf la réunion en un régule , de celles qui font en fonte. L’alkali fixe 8e le {4x blanc, que nous regardons prefque comme les mêmes, outre ces pro- priétés, ayant prefque plus de rapport que ces mé- taux avec les acides qui leur reftent unis après la précipitation ou concentration, les leur énlevent , & favorifent par la même raïfon la réunion de leurs molécules : ainfi en pareil cas, ils ont un autre effet que celui de fondant ; c’eft celui d’abforbant. Ce premier effet, qui n’eft que de furérogation dans la conjonéture préfente, n'empêche pourtant pas qu’- ils nayent auf celuiqui y eft propre. L’expérien- ce a appris que le feu ne fe communique n1 avec Ta mème rapidité, ni avec le même degré d’intenf- té, aux corps divifés qu'aux corps continus. Les fels, par linterpoñition de leurs molécules fondues:, rem- plifent les vides, & communiquent le feu de pro- che en proche aux molécules métalliques, qu'ils ai- dent à la fufion. Mais il faut encore leur reconnoïtre une qualité particuliere par laquelle ils agiffent {ur certaines fubftances ; d’où il fuit qu’ils ont une tri- ple a&ion: c’eft par les deux dernieres que le borax eft en ufage pour fouder l’or , l'argent, & le cuivre. Les artiftes qui font occupés du travail de ces mé- taux , appliquent le plus exaétement qu'ils peuvent, les plans de contaët avivés des pieces qu'ils veulent unir. Ils mettent tout-autour des paillons de foudure pour l'or & pour l’argent, & de la foudure en gre- naïlle pour le cuivre ; ils faupoudrent cette foudure de borax, & portent leurs pieces au feu, ou fe fer- vent de la lampe de l’émailleur, Les métaux qu'ils veulent fouder étant de plus difficile fufion que la foudure , celle-ci entre en fonte la premiere à la fa- veur du borax , & fond la partie du métal à laquelle elle eft appliquée. C’eft-là le point que les bons ar- tiftes favent bien faifir pour retirer leurs pieces du feu : car fans cette attention, la partie foudée netar- de pas à tomber dans le feu en gouttes métalliques, & l’ona perdu fon tems &fes peines. On connoît que la fufon en eft à fon point, quand on voit que lafur- face de l'endroit foudé a l'éclat du miroir, & réflé- chit de même les objets. Les fcories legeres qui fe forment en même tems à la furface du métal, & qui s’oppofent à l’aétion de la foudure & du fondant, font fondues & vitrifiées par le borax : il s’enfuit que dans les circonftances où on a à eflayer un uftenfile d’or ou d'argent , on ne doit jamais en couper un ef- fai dans les endroits foudés ; parce que la foudure pour l’or étant un alliage d’or, d'argent , & quelque- fois de cuivre, celle de l’argent , un alliage de ce mé- tal avec le cuivre, l’'uftenfile effayé fe trouvera toû- jours fort au-deflous de fon titre réel. On employe aufi quelquefois les fels avecles mé- | tauximparfaits 8 leurs chaux ; mais ils en calcinent. une partie, & même la vitrifient ; fans compter que leurs particules diviféesfe calcinent biemtoutes feu les, & réfiftent par-là à leur réunion: ainf ils nedoi vent jamais être traités par ces fondans,, fur-tout dans ces eflais, où 1ls cauferoient des erreurs confi- dérables. Voyez les FLux. Le borax ne fait pas mê- me exception à cette reple, quoique céfoitle corps qui de tous accélere le pluslafufion , 8e que par-là il ait été regardé comme un f/ux réduétif, Si l'on veut dépouiller, par exemple, un alliage d’or &d’argent du cuivre qu'ils contiennent, on y ajoûte du borax: ce {el met la maffle en fonte non-feulement, mais at- taqueencore les molécules des fcories cuivreufes qui furnagent , où l’or eft niché comme dans les pores d’us ‘ne éponge ; il a la propriété de les réfoudre, de su: nir avec elles, & de les convertir en un verre qui furnage le régule compofé du culot principal & de l’accefloire des molécules qui étoient éparfes dans les fcories. | | Mais 1 y a une troifieme efpece de corps qui étant abfolument réfraétaires par eux-mêmes , {e fon- dent avec d’autres de même nature : tels font le fpath alkalin avec l’argille, la craie avec la même argille. C’eft fur la propriété qu'a la litharge , & confé- quemment le plomb , de fondre les terres & les pier- res, & tous les métaux &c demi-métaux , qu’eft fon- dé le travail des mines dont on retire l'or, Pargent , 8 le cuivre par fon moyen: quand elle eft mélée bien intimement par la vitrification avec la mafle de ces corps compofés, une addition de phlogiftique la réduit en un régule qui fe précipite au fond par fon plus grand poids fpécifique , emportant avec lui les métaux précieux dont elle a dépouillé la mafle de fcories qui la furnagent : il y en refte un peu à la vé- rité > Mais On peut le retrouver en partie. IL 0Yez les FLUX , & Les articles ŒUVRE, LIQUATION , & Essar. On n’a foin de bien fermer les vaiffeaux où l’on fond les verres tirés des métaux, que pour empêcher la chûte des charbons : onconcçoit à-préfent qu’ils ÿ porteroïent un principe inflammable qui ne manque- roit pas de réduire’ en régule une portion du métal qu'on a eu en yüe de vitrifier : cet inconvénient n’eft suere à craindre, quand la furface de la matie- re Vitnifiable eft couverte de nitre. Ce fel, qu’on employe ordinairement comme fondant , détonne avec le charbon qu'il détruit en s’alkalifant. Voyez NITRE fixé par Les charbons. Les pailles, les che- veux, les menus brins de bois, & enfin tous les corps réduétifs ou qui peuvent le devenir, dont nous avons parlé , produifent le même phénomene. Parmi les fondans, on en trouve qui fe féparent des corps après qu'ils ont exercé leur aétion für eux, On conçoit aifément encore que tel fondant qui refte uni à un corps après la fufñon, fe féparera d’un autre après cette opération, ou fous quelqu’autre condi- tion. Les corps qui ne reftent point unis enfemble; quand lun a fervi de fondant à l’autre, fontle plomb uni à l'or & à l'argent, quand le grand feu à vitrifié le premier, ou fcorifié fa litharge fur une conpellé qui la boit avec les autres métaux imparfaits, sil s’en trouve dans l’alliage ( Voyez Essar & AFFINA- GE); parce que pour lors ils ne peuvent plus faire d'union avec des métaux qui n’ont pû fubir le même état, L'étain eft obligé d’abandonnerle plomb, quand on donne à leur alliage un feu affez fort pour calciz ner le premier qui furnage. Le régule d’antimoine & fa mine fe féparent de l'or &c dé l'argent, quand on les calcine & qu'on les fait fumer. Voyeg faire fumer l'antimoine, Le zinc ne s’unit jamais au bifmuth, L’al- kali fixe, le fel marin , le nitre,.le {el ammoniac, & le borax, fe féparent de l'or & de l’argenit dont ils FLU ont accéléré la fufion. Le borax 8 ces fels fe fépa= rent auf du cuivre. L’alkali fixe fe fépare des préci- pités des métaux parfaits, & du mercure, dont il a Tavorifé la réunion en les dégageant des acides qui étoient interpofés entre leurs molécules, & empé- choiïent leur réunion. Le fiel de verre ne s’unit avec aucun des métaux, L’alkali fixe & le foufre ne s’u- miflent point à l’or féparément. D'autres fondans reftent unis aux corps qu’ils ont: diflous. On a vû que le plomb s’unifloit au cuivre, à Por, à l'argent, à l’étain, & aux/demi-métaux; que fon verre ou la litharge diflolvoit le fer fcorifé , le cuivre, la chaux d’étain, l'or, l'argent, & les pier- res calcaires, vitrefcibles, &-apyres: L’érain s’al- lie avec l'or, l'argent, le cuivre, le fer, & les demi- métaux. Le cuivre, l'or, & l'argent, fe diflolvent mutuellement. L'or & l'argent s’uniffent au fer. L’ar- fenic s’unit à toutes les terres & pierres, avec Le eui- vre, l’étain, le plomb & fon verre, l'or, & l'argent. Le verre d’antimoine s’unit aux pierres & terres de toute efpece ; fon régule & fa mine s’allient avec tous les métaux. Le-bifmuth fé fond avec tous les’ rhétaux. Le zinc fe mêle avec l’étain & le plomb, le cuivre feul & allié d’étain. L’alkali fixe diffout tou- tes les terres & les pierres. Le foufre s’unit avec le fer, le cuivre, le plomb, l'argent, le régule d’anti- moine, l’étain, le mercure (Voyez CINNABRE & ETHIOPS MINÉRAL), l’arfenic & le bifmuth. Voyez Les rapports. L’alkal fixe & le foufre ne s’'uniflent à Vor, que quand ils font préalablement unis enfemble pat la voie feche ou la voie humide. Le foie de fou- fre a encore la propriété de faciliter & d’accélérer la fufion de tous les métaux & de toutes les terres & les pierres ; il refte uni aux métaux 8 demi-métaux, & à quelques matiéres terreufes & pierreufes ; ilne fe combine avec d’autres que par fon alkali. Le {el fu- fible de l'urine fe change avec l’argille en une mafle à demi-vitrifiée. Certaines portions de fpath alkalin & d’argille donnent une mafle liée ou‘un verre. La mafle qui réfulte de ces différentes combinaiï- fons eft umiforme, fimple, & naturelle en apparen- ce. On n’y pent découvrir aucun point différent des acides, même à l’aide du microfcope. La fragilité, qui eft pour l'ordinaire la fuite de ces fortes d’allia- ges , exifte dans les moindres molécules. Il en réfulte un compofé qui n’a plus les propriétés qu’avoient ceux qui les ont formés, & qui conféquemment en a acquis de particulieres. L’on conçoit aïfément que les particules du fondant ne fe touchent plus les unes les autres, &c font féparées par celles du corps fondu, qui font conféquemment dans le même cas que celles du fondant. IL fuit que les parties du fondant s'appliquent à celles du corps fondu, & que cette union fe fait dans le tems de la fufion. Mais l’on demande pourquoi des molécules fimilaires fe defuniffent pour former une nouvelle union avec un corps , avec lequel il fem- ble qu’elles doivent avoir moins d’analogie à La mé. me queftion eft également fondée fur la caufe , qui continue de tenir liées entr’elles les particules & du fondant & du fondu, & les empêchent de fe réunir de nouveau avec leurs femblables : quelle qu’elle foit 3 elle exifte mutuellement dans tous les deux. II ya cependant des obftacles à furmonter ; ils font plus où moins confidérables , fivant la différence des corps. Nous avons fait fentir que l’analogie devoit être plus grande entre les parties d’un même cotps , qu'entre celles de deux corps différens: mais la dif. férence du poids mérite aufi d’être confidérée. Et _€n effet il faut que l’union foit bien forte entre l’or & l'étain, dont le premier le plus pefant des métaux, eft au fecond le plus leyer de tous en raïifon direéte : comme 19636 font à 7321, pour que les parties de Vor ne retombent pas au fond, & ne faflent pas fur- FLU O2 nager Pétain à leur furface, Il eft vrai que fi on n’a foin d’agiter le lingot jufqu’à ce qu'il foit froid, la partie inférieure eft plus riche quetla füpérieure : mais a différence n’eft pas exceflive, & il n’en eft | pas moins conftant que l’or eft répandu dans toute la mañle, finon bien uniformément , du moins par une umon réelle. “ Il paroît donc que cette opération fe fait fpéciale- ment par l’attraétion réciproque des particules qui diffolvent & font diffoutes. Si l’on preffe un noïet de chamoïs plein de mercure, qui eft un menftrue fluide, mais fec, dans un vaïfleau tenant du {ou- fre fondu, & qu’on renme uelque tems; alors les parties du foufre s’uniffent fi fortement à celles du mercure, qu'elles féparent les molécüles intégran- tes de ce demi- métal, & les enveloppent pour ne plus former qu'une mafle uniforme. Cependant quelle différence dans le poids ? Elle eft encore plus confidérable qu'entre l'or & l’étain, Les caufes de cette union font le feu, qui 'a divifé le foufre en fes élémens ; la divifion donnée au mercure par le filtre de chamoiïs ; l'agitation , & fur-tout cette faculté qu'ont le mercure & le foufre de s’attirer mutuellez ment par leurs furfaces multipliées ,'& d’adhérer for- tement l’un à l’autre, pour ne plus être féparés que par un corps, dont lattraétion avec le foufre fera plus forte que celle du mercure. Ce corps eft ou la li: maille de fer, ou l’alkali fixe, ou la chaux, qui étant mêlés par la trituration avec l’éthiops , ou le cinna= bre qui eft l’éthiops fublimé, attirent le foufre, & laïffent le mercure coulant comme il étoit d’abord : mais ces corps prennent la place du mercure, par rapport au foufre qui s’unit avec eux. La même ac= tion fe fait également par la trifuration, qui équi- vaut en ce cas à laétion du feu. Voyez ETHIOPS MINÉRAL. Cette aétion eft conféquemment méchanique , en même tems qu’elle tient de la nature de lattration: On a vû qu'une trituration méchanique divife les corps comme le fen. Si elle n’en tient pas lieu dans tous les cas, au moins approche-t-elle d’autant plus de fes effets, qu’elle eft plus long-tems continuée : ainfi le feu ne fait qu’enchérir fur elle , bien - loin d'en différer; en même tems il augmente la vertu attraétive, qui ne fe fait qu'en conféquence de la petitefle & de la multiplicité des furfaces. Cette at- ténuation eft occafionnée par les coups répétés des élémens d’un feu continu. Les fels & les autres corps qui fe féparent du corps diflous après la fonte, paroif. fent devoir être référés à plus jufte titre parmi des fondans méchaniques. | Mais quand nous diftinguons la divifion phyfque d'avec la méchanique, il ne faut pas croire que nous excluions ffriétement celle-ci. Une divifion phyfique eft certainement méchanique ; mais nous n’ayons pas aflez de lumieres fur fa nature, pour en pouvoir donner une explication relative aux aétions connues jufqu’ici fous le nom de méchaniques, Nous ne pou- vons la référer , par exemple , à l’a@tion du coin, du levier, du couteau, de la fcie, & de la poulie. On ne peut nier cependant que chaque molécule in- tégrante d’un menftrue ne puifle , à certains égards, avoir quelque rapport avec quelques-uns des inftru- mens mentionnés ; car La molécule en queftion a un poids , une figure , une grandeur , & une dureté par- ticulieres, qui lui donnent ces qualités méchaniques , voyez PRINCIPE ; quoiqu’on ne puifle s'empêcher d’y reconnoître une aéhon & une nature propres, com- me l’attraétion , qui conflituent peut-être plus que toute autre qualité, celle qu’elle a de faire {nbir tel ou tel changement à un corps. Mais pourquoi n’ad.. mettroit-on pas le feu inftrument comme fondant, puifque les corps de la nature de celui-ci n’agiflent prefque que méchaniquement à ; 922 FLU _Ily a cette différence entre le réduétif & le fon- dant, que celui-là donne toûjours un principe qui s’unit au corps ; au lieu que celui-ci leur enleve fou- vent ce qui nuifoit à leur fufion, fans compter que tantôt il {e fépare du corps fondu , comme quand il le dépouille de fes impuretés, & que d’autres fois il lui refte uni. Le fondant n’eft qu’un menftrue {ec , dont il diffe- re en ce que celui-ci refte toùjours uni au corps qu'il a diflous ; au lieu que le premier s’en fépare quelque- fois après fon aétion. Après tout ce que nous avons mentionné fur Les réduétifs & fur les fondans , il ne nous refte plus que quelques particularités fur les fux rédu&ifs. Le tartre crud neft point un ffux réduëéhfpar fa nature ; c’eft un acide concret qui contient beaucoup d'huile &c de terre, & qui eft uni à la partie extraëtive du vin. Il faut donc pour devenir tel, qu'il fe change dans les vaifleaux fermés en un alkali charbonneux. C’eft auf ce quiarrive. 7. TARTRE. Ce corps eft le feul dans la nature qui donne un alkali fixe tout fait dans fes vaifleaux fermés. Le favon change aufli de nature quant à la partie huileufe, qui fe convertit en char- bon. La limaille de fer n’eft un fondant que par acci- dent ; elle n’entre dans les eflais que pour fe faifir du. foufre qui peut refter encore dans les mines après la calcination, Le fel marin n’y eft pas tant employé comme un fondant, que comme un défenfif du con- taët de l’air. Voyez Essar. Il en eft de la poix comme de la réfine, & elle n’eft autre chofe quant au fond. Ce qui la rend noire & empyreumatique, c’eft une partie charbonneufe qui vient de la combuftion qui a fourni la poix. Les cendres de bois dans la cémen- tation pour réduire le fer en acier, ne fervent que comme une terre pure, & quine produit aucun autre effet dans l'opération que celui de féparer les autres ingrédiens, & les faire foifonner. La chaux ne fert que comme la limaille de fer, à abforber & donner des entraves au foufre ; elle fait aufi un fondant mé- lée avec les verres & les fondans falins. Le flux blanc n’eft guere employé que comme fon- dant ; il contient trop peu de phlosiftique pour fervir à La réduétion, On lui ajoûte, ou de la poudre de char- bon, ou tout autre corps gras, quand on veut le ren- dre réduétif: mais 1l ne faut pas croireque cette com- binaifon revienne précifément au même quant à la nature de l’alkali & aux phénomenes de la réduétion. Le phlogiftique eft fi intimement uni dans le réfidu du tartre & le flux noir, que ces deux fubftances cryftal- lifent comme l’alkali préparé felon la méthode de Tachenius. Voyez cer article, I] doit donc y avoir plus d'efficacité dans un corps dont chaque molécule inté- grante porte à la fois &c le réduétif & le fondant , que dans le mélange du charbon, & du f/ux blanc , ou de l’alkali fixe, qui ne donnent pas le même compoié. Ce mélange peut cependant être place. Il n’y a point de différence réelle , quant au fond, entre les diverfes efpeces de flux réduttifs ; c’eft toù- jours le principe inflammable, uni à un fondant ; foit dans le même corps comme dans le fx noir, le réfi- du de la difillation du tartre, le tartre crud qui lui devient femblable dans l’opération, & le favon ; foit dans deux corps différens, comme dans le mélange de la poudre de charbon, avec l’alkali fixe, ou le zx blanc. Voyez PHLOGISTIQUE. Mais il y a des corps qui encontiennent plus, d’autres moins. Ceux-c1 le lâchent plus difficilement que ceux-là, &c, & c’eft-là ce qui décide du choïx qu’on en doit faire. On fent ai- fément qu'ilen faut mêler à un métal qui eft dificile à fondre, & dont la chaux ou le verre le font encore plus, qu'un fx réduëhif qui lâche difficilement fon phlogiftique ; parce que fi le principe inflammable n’y tenoitque peu,il pourroit fe faire qu’il fe diffipe- xoit ayant que le tems de le donner fût venu, Il faut convenir cependant que cet inconvénient n’a pas lieu dans les vaifleaux fermés, dans lefquels Pinftant où un corps métallique doit attirer fon phlogiftique, eft celui qui le détermine à fe dégager de fa bafe. Quelques artiftes font des f/ux ou des réduétifs ;\ compolés de plufeurs efpeces de corps qui fournif., fent la matiere du feu; mais il eft aïfé de fenti la futilité de ces fortes de fatras. Voyez TREMPE EN, PAQUET. | Dans les circonftances où un fx eft accompagné d’autres corps , comme dans les réduétions que nous avons données pour les effais des mines, c’eft pour des raïfons particulieres qui ont été détaillées. Voyez ce que nous avons dit [ur la limaille de fer & La chaux. Le verre fimple., le verre de Saturne, &c celui d’anti- moine , font des fondans particulierement deftinés à atténuer les pierres &c terres vitrifiées par l’alkali. Le fiel de verrea été employé aufli pour remplir ces vies ; mais nous avons fait obferver que ce corps devoit entraîner des inconvéniens à fa fuite. . Le flux donc, comme compofé d’un réduétif & d’un fondant, differe de l’un & de l’autre de ces corps, parce qu’il eft tous les deux enfemble. Il ne donne ja- mais aux corps avec lefquels on l’employe, que le, principe inflammable , & il leurenleve les faletés qui nuifoient à la réunion du tout ; avantage que ne pro- duit pas le réduétif. Le fondant opere cet effet à la vé- rité, mais 1l refte fouvent uni aux corps qu’il a dif- fous. | Nous finironspar cette conclufion générale, que tout f{ux eftun corps qui a la propriété deréduire par le principe inflammable, & de fondre.par le principe fondant qu’il contient , & conféquemment d’accé- lérer & de procurer la fufon des corps avec lefquels on le mêle : d’où eft venue notre divifion, 1°. en ré- duétifs, 2°. en fondans, 3°. en rédué&tifs & fondans, ou fux. Voyez Stahl, Cramer, Boerhaave, & La Lithogéognofie de Pott. FLUXIO-DIFFÉRENTIEL , adj. (Géomérr, tranfr, cend.) M. Fontaine appelle ainfi dans les mémoires de l’acad. de1734, une méthode par laquelle on con- fidere dans certains cas , fous deux afpe&ts très-dif- tingués , la différentielle d’une quantité variable. Imaginons, par exemple, un corps qui defcend le long d’un arc de courbe ; on peut confidérer à l’ordi- naire la différentielle de cet arc comme repréfentée par une des parties infiniment petites dont il eftcom- pofé , ou dont on l’imagine compolfé ; enforte que l'arc total fera l'intégrale de cette différentielle : mais on peut confidérer de plus la différence d’un arc to- tal defcendu à un arc total defcendu qui differe infi- niment peu de celui-là; & c’eft une autre maniere d’envifager la différence : dans le premier cas, l’arc total eft regardé comme une quantité conftantedont les parties feulement font confidérées comme varia- bles & comme croïffant ou décroiflant d’une quan- tité différentielle : dans le fecond cas , l’arc total eft lui-même regardé comme variable par rapport à un arc total qui en differe infiniment peu. On peut, pour diftinguer, appeller fuxior la différence dans le fecond cas, & retenir le nom de différence dans le premier : ou bien on peut fe fervir dans le premier cas. du mot ffuxion, & de différence dans le fecond. Voyez Particle TAUTOCHRONE, & les mémoires de l'académie de 1734, où M. Fontaine a donné un fa. vant eflai de cette méthode, qu'il nomme f/uxio-difs férentielle, par lesraifons qu’on vient d’expofer, (0) FLUXION, £. f. (Géométrie tranfcend.) M. New- ton appelle ainfi dans la Géomérrie de l’infini, ce que M. Léibnitz appelle différence. Voyez DIFFÉRENCE & DIFFÉRENTIEL. M. Newton s’eft fervi de ce mot deffx102, parce qu'il confidere les quantités mathématiques comme engendrées par le mouvement ;il cherche le rapport FLU des vitefles variables avec lefquelles ces quantités font décrires ; & ce font ces vitefles qu'il appelle f4- xions des quantités : par exemple , on peut fuppofer ‘une parabole engendrée par le mouvement d’une li- gne qui fe meut umformément , parallelement à elle-même, le long de Pabfcifle, tandis qu’un point patcourt cette ligne avec une vitefle variable, telle que la partie parcourue eft toûjours une moyenne proportionnelle entre une ligne donnée quelconque & la partie correfpondante de labfcifle , voyez AB- Scisse. Le rapport quil y a entre la vitefle de ce point à chaque inftant , & la vitefle uniforme de la ligne entiere, eft celui de la fuxion de lordonnée à la fuxion de l’abfcifle ; c’eft-à-dire de y à x : car M. Newton défigne la J{uxion d’une quantité par un point mis au-deflus. : Les géometres anglois, du moins pour la pläpart, ont adopté cette idée de M. Newton, & fa caradté- riftique : cependant la caraétériftique de M. Leibnitz qui confifte à mettre un dau devant, paroît plus com- mode , & moins fujette à erreur. Un dfe voit mieux, & s’oublie moins dans l’impreflion qu'un fimple point. À l’égard de la méthode de confidérer comme des fluxions ce que M. Lébnitz appelle différences , il eft certain qu’elle eft plus jufte & plus rigoureule. Mais il eft, ce me femble, encore plus fimple & plus exa@ de confidérer les différences, ou plûtôt le rap- port des différences , comme la limite du rapport des différences finies , ainfi qu'il a été expliqué au mot DIFFÉRENTIEL. Introdure ici le mouvement , c’eft y introduire une idée étrangere, & qui n’eft point néceflaire à la démonitration: d’ailleurs on n’a pas d'idée bien nette de ce que c’eft que la vitefle dun corps à chaque inftant, lorfque cette vitefle eft variable. La viteile n’eft rien de réel, voyez Vites- se ; c’eit le rapport de l’efpace au tems, lorfque la virefle eft uniforme : fur quoi voyez l’article ÉQUA- TION , à la fin, Mais lorfque le mouvement eft va- riable, ce n’eft plus le rapport de Pefpace au tems, c’eft le rapport de la différentielle de l’efpace à celle du tems ; rapport dont on ne peut donner d'idée net- te, que par celle des ZÆmites, Ainfi il faut néceffai- rement en revenir à cette dermiere idée, pour donner une idée nette des f{uxions, Au refte, le calcul des fluxions eft abfolument le même que le calcul difé- rentiel ; voyez donc le mot DIFFÉRENTIEL, où les opérations & la métaphyfique de ce calcul font ex- pliquées de la maniere la plus fimple & la plus claire. (0) \ Hem , (Medecine, ) ce terme eft employé le plus communément dans les écrits des anciens, pour exprimer la même chofe que celui de catarrhe ; par conféquent on y trouve la fignification de l’un & de lautre également vague. En effet, Hippocrate regardoit la tête comme la fource d’une infinité de maladies ; parce que, felon lui, c’eft dans fa cavité que {e forment les matieres des catarrhes , qui peuvent fe jetter de-là fur difé- rens organes, tant éloignés que voifins : il n’en eft _prefque aucun qui foit exempt de leurs influences. Ce vénérable auteur entendoit donc par cerarrhe ou. fluxion, une chüte d’humeurs excrémentitielles, mais principalement pituiteules, de la partie fupérieure du corps vers les inférieures: aufli, felon lui (Ze. de princip.), la tête eft-elle le principal réfervoir de la pituite , pituitæ metropolis : 1l employoit donc dans ce fens le mot f{uxion , comme un mot générique. Galien ne l’adopta pas fous une acception auf étendue : on trouve dans la définition qu’il en a don- née, que cette léfion de fondion n’eft autre chofe qu'un écoulement de différentes fortes d’humeurs qui tombent du cerveau par les narines & par les ou- vertures du palais , & font un certain bruit en fe mé- lant avec l’air qui fort des poumons ; il attribuoit cet- FLU 023 te forte de catarrhe à l’intempérie froide & humide du cerveau, & à toutes les humeurs qui-rempliffent la tête. | | Selon Sennert, ily a deuxtermes principaux pour défigner les mouvemens extraordinaires les plus fen- fibles de nos humeurs: lorfque ces mouvemenscon- fiftent dans un paflage , un flux d'humeur, de quel- que nature qu’elle foit , d’une partie telle qu’elle pue être aufli , dans une autre indifféremment ; äl dit que ce tranfport eft appellé poux & péuneriomos s que cette forte de mouvément eft la plus générale : &c il attribue la fignification recñe de fon tems, du MOT xarap pos, aux feules fuxions d’humeurs portées du. cerveau vers un autre organe quelconque de la tête ou de toute autre partie voifine, feulement vers le gofier, par exemple, ou vers les mâchoires ou les poumons : éncore diftingue-t-il le catarrhe ainfi con- sû , en trois différentes efpeces , fous différens noms. Ain il dit, que le catarthe qui a fon fiége dans la partie antérieure de la tête, vers la racine du nez, avec un fentiment de pefanteur fur les yeux, eft ap- pellé gravedo ; c’eft ce qu’on nomme vulgairement rhéme de cerveau : c’efl une fluxion qui a fon fiége dans la mémbrane pituitaire , dont un des principaux {ymptomes eft l’enchifrenement, voyez ENCHIFRE- NEMENT. Si l'humeur fe jette fur la gorge, il forme, felon cet auteur, l'efpece de catarrhe nommé 8h47 xos, rancedo ; c’eft la maladie qu'on nomme ezroe- nent ; voyez ENROUEMENT. Si l’humeur engorse les poumons, la fux1o7 retient le nom de cararrhe pro- prement dit, voyez CATARRHE. Ces trois diftinc- tions font très-bien exprimées dans un dyftique fort connu, qui trouve tout naturellement fa place ici: S? fluit ad peëlus ; dicatur rheuma catarrhus ; Ad fauces branchus , ad nares efto cory[à. Mais il paroïît par ce dyftique même , que le nom commun à toutes les f{uxions catarrheufes , eft celui de rhäme , ou affeütion rhirmarifinale. Ainf il fuit de ce qui a été dit ci-devant fur la fignification du mot peux , qu'il eftle mot générique employé pour expri- mer toutes fortes de f/uxions, tant catarrheufes qu”- autres, fur quelque partie du corps que ce foit. Cependant il faut obferver que le mot latin f7x- x10 rendu en françois par celui de fuxior , n’eft pref- que pas un terme d'art: 1l ne fert aux Medecins, que pour s’exprimer avec le vulgaire fur le genre de mala- die qui confifte dans un engorgement de vaifleaux formé comme fubitement , c’eft-à-dire en très-peu de tems, ordinairement enfuite d’une fuppreflion de l'infenfible tranfpiration , qui augmente le volume des humeurs ; enforte que l'excédent, qui tend d’a- bord à fe répandre dans toute la mañle, eft jetté par un.effort de la nature, formé comme un flux fur quel- que partie, moins réfiftante , plus foible à propor- tion que toutes les autres ; idée qui répond parfai- tement à celle des anciens, qui attribuoient toutes fortes de f{uxions , {oit catarrheufes, foit rhûmatif- males , à l'excès de force de la puiffance expultrice des parties mandantes en général fur la puiflance retentrice de la partie recevante : d’où:il fuit. que le reflort de cette partie étant moindre qu'il ne doit être par rapport à la force d'équilibre dans tous les folides , n’oppofe pas une réfiftance fufifante pour empêcher qu'il ne foit porté dans cette partie avec plus grande quantité d’humeurs qu’elle s’en recoit ordinairement , lorfque la diftribution s’en fait d’u- d’une maniere proportionnée : enforte que les fZu- xions peuvent être produites, ou par la foibleffe ab- folue, ou par la foibleffe refpeétive des parties qui en font le fiége, entant qu'il y a auffi excès de force, abfolu ou refpeëtif, dans l’ation fyftaltique de tou- tes les autres parties. C’eft d’après cette confidération D24 FALL , que les anciens difoient que les fluxions fe font par attta@ion ou par impulfion, ( per wow, vel per éxËw), c’eft-à-dire parce que les parties engorgées pechent par défaut de reflort, tandis que toutes Les autres confervent celui qui leur eft naturel ; ou que celles- ci augmentent d’achonpar l'effet du fpafme,, de lé- rétifme,. par exemple, tandis que celles-la n’ont que Jeur iorce ordinaire. de Aïnf dans toute fuxion, il fe porte trop d’hu- meurs; 1l en eft trop arrêté dans la partie qui eneft le fège ; ce qui fuppofe toùjours que la congeftion fuit la fusion, voyez CONGESTION. Cependant il eft des hémorrhagies, des écoulemens de différen- tes humeurs, qui doivent être attribués à la même çaufe que celle des fuxions,, quoiqu'iln’y ait pas con- geftion : on devroit donc les reparder comme appar- tenans à ce même genre de maladie: cela eft vrai ; mais c’eit une chofe de convention purement arbi- traire , que l’on aït attaché l’idée de f/uxion aux feuls engorgemens catarrheux, avec augmentation fenfi- ble ou préfumée du volume de la partie affeétée. D’après ce qui vient d’être dit de la caufe prochai- ne des ffuxions , il paroït que la théorie qui les con-: cerne doit être tirée ablolument de celle de léquili- bre dans l’économie animale, c’eft-à-dire des léfions de cet équilibre: voyez donc ÉQUILIBRE, ( Medecine.) pour {uppléer à ce qui ne {e trouve pas ici à ce fujet, parce qu'il en a été traité dans l’article auquel il vient d'être renvoyé , afin d'éviter les répétitions : on peut voir dans cet article la raïfon de tous les fymptomes qui fe préfentent dans les fluxions , & des indications à remplir , pour y apporter remede. On peut imférer des principes qui y {ont établis, que s'il eft quelques f/uxions qui fe font fans fievre , d’autres avec fievre, c’eft que l'humeur furabondan- te qui en eft la matiere, peut être dépofée avec plus ou moins de difficulté dans la partie qui doit la recevoir. Si cette partie ne pêche quetrès-peu, par le défaut de reflort , refpettivement à celui du refte du corps , il faut de plus grands efforts de la puiflance expultrice générale, qui tend à fe déchar- ger:ces efforts font une plus grande ation dans tous les folides, qui conftitue de véritables mouvemens fébriles. Voyez EFFORT, (Econom. anim.) FIEVRE. Les fluxions chaudes , inflammatoires: fanguines , bi- lieufes, telles que les phlegmoneufes, les éréfypéla- teufes, &c. fe forment de cette mamere. Si la partie où doit fe faire le dépôt cede fans ré- fifter au concours de réfiftance formée par la force de reflort , par l’aétion & la réa@tion aftuelles des autres parties , d’où réfulte une véritable impulfion, une impulfion fufifante pour déterminer le cours des fluides vers celles en qui cette force , cette ation, &t cette réaétion font diminuées : ce dépôt fe fait fans fievre, fans aucun autre dérangement apparent dans l’ordre des fonéhons ; telles font les JZuxions froides , pituiteufes , ou œdémateufes, &c. Ainfi comme Lexpofition des caufes de toutes les différentes {ort@ de ffuxions appartient à chacune d’entre elles fpécialement , de même les différentes indications à remplir & les différens traitemens doi- vent être expolés dans les articles particuliers à cha- que efpece de ce genre de maladies : par conféquent, voyez INFLAMMATION, PHLEGMON, ÉRÉSYPELE, ŒDÈME, | Il uffit de dire ici en général, qu’on doit appor- ter une grande attention dans le traitement de toutes fortes de fuxions ; à oblerver fi elles font critiques ou fympiomatiques ; fi elles proviennent d’un vice | des humeurs, ou d’unvice borné au relächementab- folu ourefpeétif, par caufe de fpafme des folides de la partie dans laquelle eft formé le dépôt; sl con- Wient de l’y laïfler fubffter, ou de le détourner ail- leurs, où il ne produife pas des léfions auf confié. rables, &c, Il faut bien fe garder d'employer des répercufifs, ‘lorfque les humeurs dépofées font d’une nature cor- rompue, & qu'elles ne peuvent pas être reprifes dans la maffe fans y produire de plus mauvais effets qu'elles ne produifent dans la partie oùelles font jet- tées : les réfolutifs même ne doivent être mis en ufa- ge dans cecas, qu'avec beaucoup de prudence : les fuppuratifs , où tous autres moyens propres à en procurer l'évacuation felon le cara@tere dela fluxion, chaud ou froid , font les remedes préférables, On ne doit point faire ufage de remedes toniques, aftrin- gens, contre les fuxions, que dansles cas où fans au- cun vice des humeurs , elles fe jettent fur une partie feulement, à caufe de fa foibleffe abfolue ou refpec- tive; ou lorfque, fans caufer de pléthore, la matie- re du dépôt peut être ajoûtée à la mafle; & dans le -cas où 1l n’y auroit à craindre , en employant ces fecours , que l'augmentation de fon volume, la fai- gnée ou la purgation placées anparavant d’une ma- mere convenable , peuvent fufire pour prévenir & éviter ce mauvais effet. .… Ileft des circonftances dans bien des maladies, où il faut procurer des Jluxions artificielles | comme dans les fevres malignes, par des applications relà- chantes qui rompent l’équilibre, pour déterminer la nature à opérer une métaftafe falutaire ; par exem- ple, dans les parotides par des épifpaftiques, pour détourner vers la furface du corps une humeur mor- bifique qui s’eft fixée , ou qui menace de fe fixer dans quelque partie importante: ce qui a lieu, par exemple , dans la goutte qu'on appelle remontée ( Voyez FIEVRE MALIGNE, GOUTTE ); par des caw” teres, lorfqu'il s’agit de-faire diverfion d’un organe utile à une partie qui left peu , comme pour les ophthalmies, à l'égard defquelles on applique ce re- méede à la nuque ou derriere les oreilles, ou auxbras, &c. Voyez OPHTHALMIE, CAUTERE. (d) FLUXION , (Manëge, Maréchall.) fluxion qui af- fete les yeux de certains chevaux, & dont les re- tours & les périodes font reglés, de maniere qw’elle cefle pendant un certainintervalle, & qu’elle fe mon- tre enfuite de nouveau dans un tems fixe & détermi- né. L’intervalle eft le plus fouvent d'environ trois femaines ; fon tems eft d'environ quatre ou cinq jours, plus ou moins, enforte que fon retour ou fon période eft toüjours d’un mois à l’autre. Confidérons les fignes de cette maladie, eu égard à Pintervalle après lequel elle fe montre résuliere- ment, & eu égard au tems même de fa durée &c de fa préfence. Ceux qui décelent le cheval lunatique , c’eft-à-di. re le cheval atteint de cette f/uxioz, quand on l’en- vifage dans l'intervalle, font communément l’iné- galité des yeux, l’un étant ordinairement alors plus petit que l’autre, leur défaut de diaphanéité, l’en- flure de la paupiere inférieure du côté du grand an- gle, fon déchirement à l'endroit du point lachry- mal, & lefpece d'inquiétude qui apparoît par les mouvemens que fait l'animal duquel on examine cet organe, Les autres qui font très-{enfbles dans le tems même de la fuxion , font lenilure des deux paupie- res, principalement de celle que nous nommons l’in- férieure, inflammation de la conjontive, un conti- nuel écoulement de latmes, la couleur rougeâtre& obfcure de l'œil, enfin la fougue de l'animal qui fe livre alors à une multitude de défenfes confidérables ; car il femble que cette fluxion étant dansle tems , in flue fur fon caraétere, &c en change l’habirude. Tous ces fymptomes ne fe manifeftent pas néan- moins toijours dans tousles chevaux lunatiques, parce qu'une même caufe n’eft pas conftamment{ui- vie du même effet, mais l’exiftence de quelques-uns d’entreux d'entr’eux fuffit pour annoncer celle de la maladie dont il s’agit. D'ailleurs elle peut attaquer les deux yeux en mêmé tems, & dans un femblable cas, il n’eft pas queftion de rechercher s’il eft entr'eux quel- que difproportion. L’expreflion de chesal lunatique par laquelle on dé- fignetout cheval atteint de cette f/vxion | démontre affez évidemment que nous avons étéperfuadés que les mouvemens & les phafes de la lune dominoient l'animal dans cette occañon. Si ceux qui cultivent Îa fcience dont il eft l’objet , avoient mérité de par- ticiper aux lumieres qui éclairent ce fiecle, fans doute que la plûpart d’entr’eux ñe perfévereroient pas dans cette erreur quileur eft encore chere; ils ne feroient pas même forcés de parvenir à des connoïf- fances profondes, pour être détrompés. Une fimple obfervation les convaincroit qu’ils ne peuvent avec fondement accufer ici cet aftre; car dès que les im- preffions de cette ffuxion ne frappent pas dans le mé- me tes tous les chevaux qui y font fujets, & fe font entir tantôt aux uns dans le premier quartier, & aux autres tantôt dans le fecond, & tantôt dans le dé- cours, 1l s’enfuit que les influences & les différens af peëts de la lune n’y contribuent en aucune maniere. Je n’ignore pas ce qu’Aniftote & prefque tous les an- ciens ont penfé des effets des aftres fur les corps {ub- Innaires, & ce que Craanen & l’illuftre Sthal parmi les modernes, ont dit & fuppofé : mais leurs écarts ne juftifient point les nôtres, & ne nous autorifent point à chercher dans des caufes étrangeres les rai- fons de certaines révolutions uniquement produites par des caufes purement méchaniques. | Deux fortes de parties compofentle corps de l’ani- - mal: des parties folides &c des parties fluides. Les 1olides font des tiflus de vaiffeaux compofés eux-mé- mes de vaifleaux. Les fluides ne font autre chofe que les liqueurs qui circulent continuellement dans les folides qui les contiennent. L'équilibre exaë qui ré- fuite de l’aétion & de la réaétion des folides fur les fluides, & des fluides fur les folides, eft abfolument indifpenfable pour rendre l’animal capable: d’exer- cer les fonétions propres & conformes à fa nature ; car cet équilibre perdu, la machine éprouvera des dérangemens plus ou moins confidérables, &c. Orf par une caufe quelconque, fi par exemple, confé. quemment à la fuppreffion de quelques excrétions, ou par quelques obftacles qui peuvent fe rencontrer dans les vaifleaux, foit des parties internes, foit des parties externes de la tête, il y a engorgement dans ces vaifleaux, il y aura néceflairement inflamma- tion, & de-là tous les accidens dont j’ai parlé; cet engorgement parvenu à un certain point qui eft pofi- tivement celui où tous ces accidens fe montrent, la nature fait un effort ; les vaifleaux trop gonflés fe dé- gorgent, foit par l'évacuation très-abondante des larmes, foit encore par quelqu’autre des voies {er- vant aux excrétions naturelles, & les parties ren- trent enduite dans leurétat jufqu’à ce-que la même caufe fubfftant, un nouvel engorgement produife au bout du même tems les fymptomes ficheux qui _cara@térifent la fuxioz périodique, dont la pléthore doit être par conféquent envifagée comme la vérita- ble caufe. dis Le retour arrive dans un tems jufte, fixe & déter. miné , parce que les caufes font lesmêmes , que les parties font aufli les mêmes, & que: s’il a fallu un mois pour former l’engorgement , il faut un même efpace de tems pour fa réproduétion. La plénitude #e forme infenfiblement & par degrés : les tuyaux qui fe trouvoient engorgés dans letems, & qui font libres dans l'intervalle, n’ont qu’un certain diametre au-delà duquel ils ne peuvent s'étendre: or la fur- abondanced’humeurs ne peut être telle qu’elle force, qu'elle furcharge les tuyaux, qu’autant que ces hu- Tome VI, FEU os: meurs feront en telle 8 telle quantité ; & pour que ces humeurs foient en telle & telle quantité, il faut un intervalle égal ; cet intervalle expiré, le teins marqué arrive, pendant lequel, au moyen de léva. cuation, la plénitude cefle ; & le tems expiré, arrive de nouveau l’intervalle pendant lequel frvient la plénitude, & ainf fuccefiyement, le période. dé. pendant entierement de la proportion des forcestex- panfives aux forces réfiftantes, S'il n’eft pas abfolu- ment exact dans tous les chevaux attaqués, & que lon y obferve des variétés, ces divers changemens doivent être attribués à l'exercice, aux alimens , aux faifons ; & fi ces caufes ne produifent pas dans quel. ques-uns les mêmes imprefhions, &.que la quantité d’humeurs foit aflez grande dans un tems toûjours certain & limité, on peut dire qu’elles font compen- fées par d’autrescholes. Du refte, pourquoi la natu- re employe-t-elle plütôt ici vinst-ièpt ou vingt-huit Jours que quarante? La queftion eft ridicule & la {olution impofñble ; les nombres feuls de proportions s’annoncent par les effets, mais laraifonenef cachée dans toute la ftruéture de la machine. N’apirons . onc qu'à ce qu'il nous eft permis & qu'à ce qu'il nous importe eflentiellement de connoë- tre. S1 la pléthore eft la fource réelle de la fluxion périodique dont nous parlons, tous les fignes indica- tifs de cetre maladie ne pourront s'appliquer que par le même principe, Onl’œil eft attaqué , ou les deux yeuxentemble paroïffent.plus petits, attendu queles paupieres {ont enflées; cette enflure ne proyiénrique de lengorgementou dela replétion des vaiffeaux fan- guins & lymphatiques, 8e ces parties étant d’ailleurs d’un tiffu lâche par elles-mêmes, il n’eft pas étonnant qu'il y ait un gonflement emphifémateuxs L'œil eff larmoyant, parce que l’inflammation caufant un pon- flement à l’orifice des points lachrymaux , 16s larmes d’ailleurs beaucoup plus abondantes ne peuvent point être abforbées ; elles reftent à la circonfetence du globe, principalement à la partie inférieure qui en paroît plus abreuvée, qu’à l'ordinaire, & elles franchifient dès lors l’obftacle que leur prélente [a caroncule lachrymale. L’œil eft trouble & la cornée lucide moins traniparente, parce que les vaifleaux lymphatiques étant pleins de l'humeur qui y circule, la diaphanéité ne peur être telle que dans l’état natu- rel, L'œil eft rougeûtre, parce que dès-que la pléni- tude eft confidérable, les vaifleaux qui ne doivent admettre que la lymphe, admettent desglobules fan guins; enfin la fougue de animal ne naît que de l’en- gorgement des vaifleaux du cerveau, qui compri= mant le genre nerveux, changent en lui le cours des efprits animaux, & par conféquent {on habitude. Quant au prognoftic que l’on doit porter, nous ne laffeoirons point fur les idées que l’on s’eft. formé Jufqu’à préfent de cette maladie, ni fur linutilité des efforts que l’on a faits pour la vaincre. H n’eft point étonnant qu’elle air refifté à des topiques plus capa bles d'augmenter l’inflammation que de l’appaifer 5 à des barremens d’arteres & de veines dont les dif tributions n’ont lieu que dans Les parties qui entou- rent le globe, & non dans celles qui le compofent; à Popération d’énerver ; à des amulettesiplacées {ur le front ; enfin aux tentatives de M. de Soley{el, que la célébrité de fon nom nejuitifiera jamais d’avoir expreflément prohibé la faignée, & d’avoir ordon- né d’expofer le cheval malade au ferein & à l’huimi= dité de la nuit. Nous avouerons néanmoins. que les futes peuvent en êtrefâcheutes. En effet, il eft bien difficile que les évacuations qui donnenr lieu à la cé fation du paroxyfme, foient toûjours affez completes pour que l'organe recouvre toute fon intégrité, fur: tout fi les dilarations que les vaifleaux ont fouffert ont Êté réitérées ; car -des lors‘ils perdent leur ton, &t le moindre épaidiflement, la pléthore & l’acrimo- BBBbbb 926 FE Y nie la plus legere les rendront fufceptibles d'un eñ- gorgement habituel , d’où naïtra infailliblement la cécité qui ne fuccede que trop fouvent à la fréquen- ce des retours. L’œil s’atrophie par le défaut du fuc nourricier, l'orbite eftdénuée de graifles, &z jai mê- me apperçü dans le cadavre une diminution notable du volume des mufcles de cet organe, qui étoit fans doute occafionnée par le defféchement, Il eft aifé de comprendre que la maladie parvenue à fon dernier degré , tous les remedes font d’une inefficacité ab{o- lue : maisje peux certifier d’après plufieurs expérien- ces , que fi l’on en prévient les progrès & que l’on n’attende pas la multiplicité des rechütes, on ceffera d'imaginer qu’elle eft incurable. Huit jours avant le paroxyfme, lengorgement commence à être confdérable. Faites une faignée plus ou moins copieufe à l’animal, &c dès ce moment retranchez-lui l’avoine : mettez-le au fon & à l’eau blanche : le même foir admimiftrez-lui un lavement émollient, pour le difpofer au breuvage purgatif que vous lui donnerez le lendemain : réitérez ce breuvage trois jours après l'effet du premier ; il eft certain que les fymptomes ne fe montreront point les mêmes , &:que le période qui auroit dû fuivre celui-ci, fera extrèmement retardé : obfervez avec précifion le tems où 1l arrivera, à Peffet de devancer encore de huit jours celui du troifieme mois, & prati- quez les mêmes remedes : cherchez de plus à rendre la circulation plus unie & plus facile : divifez les hu- meurs, au moyen des médicamens incififs & atté- nuans : recourez à l’æthiops minéral , à la dofe de 40 grains jufqu'à 60, mêlé avec le crocus metallorurm. Vous pouvez y ajoûter la poudre de cloportes, à la dofe dé ço grains. Il eft encore quelquefois à-propos d'employer la tifane des bois. J’ai vü aufli de très- bons effets de l’ufage des fleurs de genêt données en nature, & d’une boiflon préparée que j’avois fait bouillir, & dans laquelle j’avois mis cinq onces ou environ de cendres de genêt renfermées dans un noüet. À l'égard du féton, que quelques auteurs re- commandent, & qui, felon eux, a procuré de très- rands changemens,je nefaurois penfer qu’il ne pruffe être falutaire, puifqu'il répond à l'indication; mais je crois que ce fecours feul eft infuflifant , & ils Pont éprouvé eux mêmes. (e) Fiuxion , (Manège, Marèch.) Nous nommons ainf la prompte accumulation des humeurs dans une partie quelconque où les liquides ne peuvent libre- ment fe frayer une route. Lorfque laccumulation fe fait avec lenteur, & que cette colleétion n’a lieu qu'infenfiblement , nous l’appellons congeflion. Dans le premier cas, les tumeurs font formées conféquem- ment à la vélocité du fluide qui aborde, & à la foi- bleffe de la partie qui le reçoit ; dans le fecond, cette feule foibleffe les occafñonne. Voyez TUMEUR. (e) * FLYNS, (Hifi. Juperft.) idole des anciens Van- dales-Oboliftes qui habitoient la Luface. Elle repré- fenroit la mort en long manteau, avec un bâton & une veflie de cochon à la main, & un lion fur l’é- paule gauche : elle étoit pofée fur un caillou (fZze en faxon). On prétend que c’étoit l’image de Vifa- lem ou Vitzlaw, ancien roi des Lombards, EF N FNÉ, f. m.(Mar.) c’eft une forte de bâtiment qui h'eft en ufage qu’au Japon. Il fert à tranfporter les marchandifes par tout l'empire , tant fur les rivieres que le long des côtes ; maïs ilne peñt pas s’expofer en pliane mer, & faire de grands voyages, qui font défendus aux Japonois. qu Les frés ont l'avant & le deffous fort aigus ; is coupent bien l’eau , & prennent facilement le vent: 1ls n’ont qu'un mât placé vers l'avant, & quarté ju qu'au bas où il eft rond ; on peut le mettre bas en le couchant vers l'arriere: ce qu'ils font quand le vent eft contraire ; alors on prend les rames pour nager, & le mât fert de banc pour s’afleoir : c’eft par cette raifon qu’on le fait quarré. Il y auneouverturepour mettre le pié du mât quand on l’arbore, & pour le foûtenir il y a des étais à l'avant & à l'arriere, qui font amatrés à des traverfins qui font vers ces deux bouts ; on fe fert de racages pour hifer la vergue &z la voile. | Les voiles font prefque toutes de toiles de lin tif fues,8c rarement de paille ou de rofeaux entrelacés. Comme chaque bâtiment n’a qu’un mât, il n’a auf qu'une voile, Les ancres font de bois , de la figure de deux cour- bes , auxquelles eft bien amarrée une pierre très-pe- fante ; chaque bâtiment en porte cinq ou fix, fur- tout lorfqu'ils doivent ranger la côte de bien près, & pafler entre des rochers. Is ont aufli quelquefois des srapins de fer com- me les nôtres , mais cela eft rare ; la plûpart des ca- bles font de paille broyée ; qu’on entrelace avec un artifice admirable ; ils ont vingt à trente brafles de long : il y en a aufñli de brou, qui font legers & qui nagent fur l’eau ; mais on en voit rarement de chan- vre , &c leur longueur n’eft que de so brafles. Le bois dont les fzés {ont faits eft fort blanc, & s’appelle fézux , excepté que la fale eft de bois de camfre, dont on fe fert en cette occafon, parce qu'il n’eft pas fujet à être criblé des vers, n’y ayant pas d’infeéte qui puiffe fubfifter avec lardeur de ce cam- fre, Jamais on ne les braie, mais une fois le mois on les tire à terre , où on les racle ; on leur donne le feu,& onles fuifve un peu par-deffous : ils ne font que du port de cent vingt ou cent trente tonneaux. Le mât du fré n’a pas beaucoup de hauteur : le gouvernail pafle par une ouverture qui eft à l’arrie- re ; il ne defcend pas perpendiculairement , mais tout-à-fait en biais ; il eft fort large &c plus épais que la quille ; on le fait jouer avec des cordes ou avec la main : l’étrave eft ronde. Il y a beaucoup de ces bâtimens qui font tont ouverts ; d’autres ont un pont volant qui eft plat & fans tonture , & qui s'ôte &feremet. Il y a une petite chambre à l'arriere, dont la cloi- fon eft en coulifle ; elle eft pour le maître & pour le pilote qui , par le moyen de ces couliffes, peu- vent voir tout ce qui fe paffe dans le vaiffeau. Les frés ont de largeur dans leur milieu le tiers de leur longueur ; ils font un peu plus étroits par le haut que par le bas : 1ls ont de creux environ quatre piés dans l’œuvre morte & au-deilus de l’eau , outre quelque planche ouvragée qui eft fur la life de vi- bord , & qui fait une petite faillie à côte. La cuifine qui n’eft qu’un foyer tout onvert , fe place fous le pont au milieu du bâtiment. La foffe aux cables eft fous l’éperon, quis’élance en-dehors fur l’eau. Le vaifleau eft fouvent enjolivé en-dedans de pa- pier qui y eft collé. Il a des côtes & unferrage , com- me ceux d'Europe , & les coutures font calfarées de brou. (Z) -Frn pu TomME Srx1EME. De l'Imprimerie de LE BRETON FRERE Re Lmprimeur ordinaire du ROY. PE BED RTE tb Bt qua ERRATA. Pour le troifieme Volume. x: Age 189. col, 1. lg. 47. article CHARBON, l’i- voire ordinaire des boutiques , liféz l’ivoire brülé des boutiques. | Pag. col. 176 2 258 2 296 2 696 1: 763 I 803 2 874 1 876 1! 928 2 OST 1! 998 2 1003 I 1085 1 Pag. col. 8 7: O0 2 33 2 JO 90 2 Ho0 7! “oz 2 104 2 a67 2 188 2 490 2 = AE 2.220000 920 1 Ibid, 2 Jbid, à 270 2 Pour le quatrieme Volume. lig. 29 18 6 de) 39 au mot COPIE, (Commerce. ) qu’ils re- çoivent de, Zf. qu'ils écrivent à. au m0t CORNUE, qui eft recouver- te, Zf. qui n’eft point recouverte. limitation, Zf. limitation, Voyez auffi fur cemot COSMOLOGIE, 6 l’article FORCE dans le IL, vol, mutation, Zf. nutation. au lieu de 56925, if. 57183, & voyez l'art. FIGURE DE LA TERRE, s. VI, fe dit feulement, Af: feulement fe dit. à l'art, DESCENSU M , expliqué dans cet article, /ifez expliqué dans ?’ar- ricle CREUSET. au lieu de 7. 25. lif 7x5. a l'article DIABOTANUM , cyque, lez cigue. a la fin de l’article Dr4scorDIvM , mettez un (b a la fin de l’article DiGESTEUR , Ôtez la lertre (d acidules, //ez acidules falées. les humeurs & cette excrétion, Zfez les humeurs à cette excrétion. Pour le cinquieme Volume. lip. 66 69 66 58 7 59 40 SI s’acquert, /f. s’acquiert. Botanique, /if. Matiere médicale. ajoñtex DORADE, (Conflellat.) Voyez XIPHIAS, & les inf. aftrenomiq. racine, Lf. réfine. d'Angleterre, Zf: de Londres, afin d'en accélérer la fonte, Afez afin d'empêcher qu’il ne fe détruite par la perte de fon phlogiftique qui fe trouve par-là remplacé par celui du charbon. Le bois n’échauffe que peu & fort lentement le corps fur lequel il eft pofé. grain , lfez dragme. au lieu de Les dragons ont trois prin- cipaux officiers , qui font le co/orxl général, le meffre de camp général, & le commiffaire auf général, Lifez Les dragons ont deux principaux officiers , qui font Le colonel général êc le meftre de camp général. chime, Zf. chyle. dans l’article précédent, 4f. dans lar. sicle EAU, (Phyfique.) alkali fixe de la foude, Zf. de foude. a la fin du mot ÉCARTEMENT, M. DE VILLERS, lif. M. DE VILLIERS. à la fin du mot ECARTER, (s’) M. DE VILLERS, li. M. DE VILLIERS, divifez a par b, lif, 8°, db 146: méme corretlion. de connoiïtre la vérité, que de l’en- 62; 633 | Pas. col. lp, 2 pi Et Di D dj bei lt Dj ND D + I I feigner, Zf: d’enfeigner la vérité que de la connoître. . 10 vingt-deux grands, tableaux,. 4fèz vingt-un grands, c. | 62 de Joughe, Zf de Jonghe. 26 On s’eft trompé en difant que, le tom: beau de Mignard eft de Girardon. . Left entierement de M. le Moine fils, à l’exception du bufte de Mi- gnard qui eft de Desjardins. 48 phée, Zf. pelée. 17 Socimianinifme, Af. Socinianifme. 56 Simibaldo Seorza, Zifez Sinibaldo Scorza. St cochlea mas, lif. cochleu femina, 44 au lieu des PP, Lallemant & Hardoüin, lf. les PP. Labbe & Hardoiun. 58 M. Bronzet, /ifez M. Brouzét. A effacez plus de, 7 au lieu de le fecond, Zf. le troïfieme. 20 d’Eleuffe, Zf. d’Eleufine, 36 parce, ajoërez que. 38 Voyez VERBE, /f. Voyez VERRE. 60 mattera les arbres, Zif: montera, 72 medecin chimique, #ez medecin cli- nique. 56 Ariane, Zif. Oriane. avant article ENCLOS , terme de Bla= Jon , mettez ENCLOS , f. m. (Jardinage.) il fe dit d’un terrein fermé de murs , Qui n'eft pas fi vafte qu’un parc, & qui cependant ef plus erand qu'un jardin. 13 avant qu'elle foit chargée, Z/. quand elle eft déchargée. 4 cinq efpeces de vitriol, Z;f: quatre. Ibid, verfo, col, 2. lig. $. amalgamer, Lf. mêler. 635 au ver{o s au haut de La colonne 2. au m0: ËNCYCLOPÉDIE, voyez le dernier art, de l’errata de ce V. olume. 638 verfo , col. 1. lig. 29. pofléder à, effacez a. 672 931 933 942 944 Ibid. Ibid. Ibid. 955 976 983 Ibid. Ibid. Ibid. 984 Ibid. Ibid. 985 I = e D D R Los DR D pb 32. article ENFER DE BOYLE, perle, Zf. per Je. 19 parlerons, Zf. parlons. 34 on doûne, Zf. on donne. 58 d’un jour, ajoëte chaque mois. 11 Orrith. lil. Iéfhiol. égale à 6, Zif. égale à 8, 35 878 Gfuiy. Léonard de Vincy, if. Vinci. 6o fendre, Zf. tondre, 35 ExXCES commis des perfonnes libres; re Jr 27 On ne connoït donc, fxpprimez donc. 66 ESPECES, [MPRESSES, Ocez la viroule. 23 efprit volatil, de fel ammoniac » Okez La viroule. 26 effacez par quelqu’endroit, 40 effacez où Docimafre. 26 recevoit, /f: recéloit, 66 Gelleft, Zf. Gellert, 37 engard, /f. angard. 58 qu'adopte, Zf. qu’adoptent, 61 propofa, Zif. propole, 8 centre, {f, axe, Pag. col, Jbid. Jbid, Jbid. (OT 993 100$ 635 D += ww D D 5 EEE en-deflus, Z/. en-deffous. falées, on voit, Zf. falées, On voit, chüte, Zf. fuite. caflation, Bf. ceffation. raréfiant, // torréfant. ESTINE, “if, ESTIVE, Ce) au en: au haut de 7 colonne 2. all not ENCYCLOPÉDIE , où contre notre intention, quelques perfon- -nes ont trouvé'un fens louche : ax dieu de ces mots, de la Théologie, de LH sfoire facree & des fuperfhtions, lifez la Théologie , l’Hifloire facrée ; & Chiffoire des Juperffitions, Pag. col. DORE 241 ! ser 406 !: 467 1: 600 2 GOUT ‘60% ï Ibid, x 627 2 lig. 61 Pour le fixieme Volume. au lieu de racine de oçnui, life 8e de (0722 je Ce fept autres, effacez fept. après ces mots, qu'il prend, ajoërez au procès. un fentiment, qoûtrez délicat. au lien de afenbirionen nette aÿen- Lationem. au lieu de a prouvé, dif. ait prouvé. au lieu de 17309, Li. 1738. rempli, Zf. remplies. urit, Lifez unit. de fait militaire, Zf, de Part militaire. a 14 k. # F (Ut qu ct : 3e fe à di f P. 1 Vo AA te és ; + Es là DUT TL 3 9088 00761 7467 EL 4 1: Qi J L En | |: ], 24 { n 1 \ # { } 204 lai Di | 44 1 | | | \ \ | | | 1] 4 (1H {| ON NS 7 AY À A L