fj 4 "7 Vif J h 21 77 Uy Uy, f Why DAT FRHFFEBL I LTE D fa // 9 if 7 f Yyy “Wi; “iy / Yy Uy iy 7 Uy f 7 Yh, H 1 CMM LLL Uy, H fi fj f PIII 7 f f 1, WU, LP, tf, / 7 /; 7 ty Ui), " 7 7 f LL EERIE ELIE LISI LDL ALL LI TTI ELEMENTS TERATOLO VEGETALE, ov HISTOIRE ABREGEE DES ANOMALIES DE L'ORGANISATION DANS LES VEGETAUX; PAR A. MOQUIN-TANDON, DOCT. SCIENC. ET DOCT. MED., s Professeur de botanique à la faculté des sciences et au jardin des plantes de Toulouse, directeur de ce jardin; membre de l'Académie des sciences, de la Société de médecine et de la Société d'agriculture de la méme ville, membre honoraire de Ja Société de physique et d'histoire natu- relle de Genève, correspondant des académies de Turin, de Fives d’ Orleans, de Nantes, de Falaise, de Vaucluse et de l'Aveyron; de celle des amis de la nature de Berlin, des sociétés helvétique des sciences naturelles, philomathique de Paris, polymathique du Morbihan, philo- technique de Castelnaudary, médicale de Bruxelles, agricoles d'Agen et de l'Ariége ét hin- néennes de Lyon et de Bordeaux, etc. PARIS, P.-J. LOSS, LIBRAIRE- ÉDITEUR , 10, RUE HAUTEFEUILLE. 1841. L3 Ent mm EEN P Bo mdp p po = | z, z, ELEMENTS y TERATOLOG Sa or n ig itii RR BN i eon MA t ROTE Itn ane ue : ‘ i i URN ———— E Monstra in animantibus horremus, amamus in pomis. , FERRAR., Hesperid. , lib. 1v, cap. xi. IMPRIMERIE BOUCHARD-HUZARD, 7, rue de l'Éperon. ATOLOGIE VÉGÉTALE HISTOIRE ABREGEE DES ANOMALIES DE L'ORGANISATION. DANS LES VEGHYTAUX; PAR A. MOQUIN-TANDON, DOCT. SCIENC. ET DOGT. MÉD., Professeur de botanique à la faculté des sciences et au jardin des plantes de Toulouse, directeur de ce jardin, membre de l'Académie des sciences, de la Société de médeciüe et de la Société d'agriculture de la méme ville, membre honoraire de la Société de physique et d'histoire natu- relle de Genève, correspondant des académies de Turin, de Zürich, d'Orléans, de Nantes, de Falaise, de Vaucluse et de l'Aveyron, de celle des amis de la nature de Berlin, des sociétés helvétique des sciences naturelles, philomathique de Paris, polymathique du Morbihan, philo- technique de Castelnaudar ; médicale de Bruxelles, agricoles d'Agen et de VAriége et lin- néennes de Lyon et de Bor eaux, etc. PARIS ; P.-J. LOSS, LIBRAIRE-EDITEUR, 10, RUE HAUTEFEUILLE. —À 1841. D D) "T. Z [e Ai < E Q 2- o 7 =] |à ob ad <£ Ù E RTT oane,/886. À Monsieur Michel Fils Dunal DOCT. SCIENC. ET DOCT. MED., Doyen et professeur de botanique à la faculté des sciences de Montpel- lier , chevalier dela Légion d'honneur, membre de la Société d'agri- culture de l'Hérault et de la Société de médecine pratique de Montpellier, membre honoraire de la Société de physique et d'histoire naturelle de Genève, correspondant de l'Académie des sciences , de l'Institut, des académies de Vaucluse et de PAveyron, des sociétés @horticulture de Londres, d'agriculture de Narbonne, des sociétés linnéennes de Lyon et de Bordeaux, ete. Son éléve et son ami $ A. MOQUIN-TANDON, TABLE. DES MATIERES. PREMIERE PARTIE. PROLEGOMENES. . Car. I, Idée du végétal. - Cna». II. De l'individualité végétale. Cua». IL. De la symétrie végétale. Cap. IV. Des anomalies végétales. . Cuar. V. Division des anomalies végétales. . -SECONDE PARTIE. DES VARIÉTÉS. Tableau des variétés. LIVRE I. DES VARIÉTÉS DE COLORATION. Cuar. I. Des variétés par défaut de coloration oudel'albinisme. . . $ 1. De l'albinisme complet. $2. De Valbinisme incomplet. . Cuar. IL. Des variétés par excès de coloration ou du chromisme. . ae Cuar. IT. Des variétés par changement ou alté- ration de la coloration... LIVRE II. DES VARIÉTÉS DE VILLOSITÉ. Cuar. I. Des variétés par diminution ou dispa- rition des poils, ou du glabrisme. Cua». II. Des variétés par apparition ou aug- mentation des poils , ou du pi- Tastee. +, LR . LIVRE III. DES VARIÉTÉS DE CONSISTANCE. ELA Cuar. I. Des variétés par diminution des ma- tières solides ou du ramollissement. Cuar. II. Des variétés par augmentation des matiéres solides ou de l'induration. LIVRE IV. pes VARIÉTÉS DE TAILLE. . Cuar. I. Des variétés par diminution de taille ORAN lo Vl Car. II. Des variétés par augmentation de taille ou du géantisme. . . Art. 1. Du géantisme proprement dit. . Art. 2. Du pseudo-géantisme. . . . § 1. Histoire de quelques grands ar- bres. . . ` n . . Ren ^né § 2. Remarques générales sur le pseu- do-géantisme. . . TROISIEME PARTIE. DES MONSTRUOSITES, Tableau des monstruosités. LIVRE I. DES MONSTRUOSITÉS DE VOLUME. Cuar. I. Des monstruosités par diminution de volume ou des atrophies. Art. 1. Atrophies des organes appendicu- laires. om. . Art. 2. Atrophies des organes dies. Cuar. II. Des monstruosités par aügmentation de volume ou des hypertrophies. Art. 1. Hypertrophies des organes appendi- culaires. ; Art. 2. Hypertrophies des organes dnd $ 1. Des élongations. § 2. Des renflements. $3. Des fascies. . DM 1» Histoire de quelques fascies. 2» Remarques générales. Cuar. HI. Des balancements organiques. LIVRE IL. DES MONSTRUOSITÉS DE FORME. Cuar. I. Des monstruosités par altération irré- guliere de forme ou des déforma- tions. SU Art. 1. Déformations des y ug apiid culaires.. .$ 1. Déformation crispée. § 2. Déformation rubanée. . ‘§ 3. Déformation cupulée. . Art, 2, Déformations des organes.axiles. SD TP PRE | RO NT qn cmi oae =a § 1. Des enroulements.. § 2. Des torsions. Cuar. II. Des monstruosités par altération régu- lière de forme ou des pélories. S 1. Histoire de quelques pélories. $ 2. Remarques générales sur les pé- lories,. . Cua». III. Des transformations des organes les uns dans les autres ou des méta- morphoses. "p deii o Art. 1. Métamorphoses des organes appén- SEBlaeBedeouA Jury os A. Métamorphoses en organes fonda- mentaux. . de e (t S 1. Des métamorphoses en feuilles ou des virescences. ds $2. Des métamorphoses en sépales. $3. Des métamorphoses en pétales. $4. Des métamorphoses en étamines. $5. Des métamorphoses en pistils. B. Métamorphoses en organes acces- soires. Lame ae $ 1. Des métamorphoses en vrilles. $2. Des métamorphoses en écailles. $3. Des métamorphoses en poils. : S4. Des métamorphoses en piquants. $5. Des métamorphoses en glandes. Art. 2. Métamorphoses des. individus élé: mentaires... NE aes § 1. Des métamorphoses en bourgeons ou des chloranthies, $2. Des métamorphoses en fleurs et en ins wr. LIVRE III. DES MONSTRUOSITÉS DE DISPOSITION.. . i A ect anat a mo f aii EA : Cmar. I. Des monstruosités par défaut de sépa- ration ou par exces d'union , c'est- à-dire des soudures. . . . + - Art. 1. Soudures entre les organes appen- RTE US à — MES CE $1. Des soudures entre des organes ou des verticilles similaires , ou descohérences. . . . e > $2. Des soudures entre des organes ou des verticilles dissemblables, ou des adhérences. . . . . - Art. 2. Soudures entre les individus élé- frente. t e x! $1. Des soudures entre les bourgeons ou des synophties. . . . . A. Synophties des embryons. . . . B. Synophties des bourgeons propre- ment o E E oos. e $2. Des soudures entre les fleurs ou dessynanthies. . . . . - $3. Des soudures entre les fruits ou dessyncarpies.. . + . + = Art. 3. Soudures entre les organes axiles. $1. Des soudures entre les axes d'un méme végétal. . . § 2. Dessoudures entre les axes de plu- SEULS WEGCLAUK. + + +, à Cuar. LL. Des monstruosités par exces de sépara- tion ou par défaut d’union , c'est-à- dire des disjonctions. Ec § t. Des disjonctions qui divisent les . orgemes!o:q .— ura $2. Des disjonctions qui isolent les or- Sommers she er 4 + Cumar. HE. Des monstruosités par changement de situation ou des déplacements. LIVRE IV. DES MONSTRUOSITÉS DE NOMBRE, ee Cnap. 1. Des monstruosités par diminution de nombre ou par disparition , c'est- à-dire des avortements. , . . . Art. 1. Avortement des organes appendicu- laires. P . " . S1. Desavortements des organes d'un verticille, § 2. Des avortements des range des verticilles, . . . e B Art, 2. Avortements des organes axiles. Cnr. II. Des monstruosités par augmentation de nombre ou par apparition , c'est- à-dire des multiplications. , : Art. 2. Multiplications des organes appendi- culaires ou hé simples. . § 1. Des multiplications des organes d'un verticille. A pie $2. Des multiplications des rangées des verticilles. esq Art. 2. Multiplications des individus élé- mentaires ou prolifications. Aer ieurs Drolterés; 7. Re § 1. Des prolifications médianes. . . 366 $2. Des prolificationsaxillaires. . . 379 $3. Des prolifications latérales. | 376 B. Fruits prolifères. . - . 382 $1. Histoire de quelques fruits dec feres, . . . $2. Remarques —9— sur in iue prolifères. Art. 3. Multiplications des organes axiles. —M— ERRATA. Page 23, ligne 23, Schlotterbeck, lisez Schlotterbecc. Pages 107, ligne 3, et 109, ligne 17, 4damsonia, lisez Adansonia. Pages 107, ligne 13, et 327, ligne 10, Adamson, lisez Adanson. Page 177, ligne 15, anthéres, lisez étamines. Page 237, lignes 4 et 19, Saint-Amand, lisez Amans. rt cat PREMIERE PARTIE. PROLÉGOMENES. CHAPITRE I. IDEE DU VEGETAL. w Les végétaux sont composés de deux ordres d'organes : les uns centraux ou axiles et les autres latéraux ou appenda- eulaires (Turpin). Les premiers présentent ordinairement deux parties : une . inférieure ou souterraine, la racine, et une autre supé- rieure ou aérienne, la tige. Ces deux parties offrent sou- vent des divisions ou axes secondaires, qui sont, pour la racine, les radicelles et, pour la tige, les branches. Les ra- dicelles se divisent en chevelu et les branches en rameaux, Toutes les parties aériennes constituent un système ascen » 9 PROLÉGOMENES. dant, ct toutes les parties souterraines un systéme descen - dant. Les organes appendieulaires forment des verticilles ou des spirales, autour des parties axiles du systéme aérien. Les organes appendiculaires, selon leur structure ou leur fonction, ont été appelés cotyledons, feuilles, bractées, sépa- les, pétales, étamines, pistils et carpelles (1), et les verti- cilles ou spirales , formés par eux, ont recu aussi des dénominations particuliéres. On a nommé certicille pro- prement dit, ou spirale proprement dite, la réunion des feuilles, involucre celle des bractées, calice celle des sépales, corolle celle des pétales, androcée celle des élamines, gynécée celle des pistils et fruit celle des carpelles. Ces verticilles peuvent étre simples ou composés de plu- sieurs rangs homogénes. En général, les éléments de cha- cun d'eux alternent avec ceux des verticilles précédents. Les cotylédons, les feuilles et les bractées appartiennent à la vie de nutrition. L'ensemble de plusieurs verticilles ou Spirales de feuilles trés-jeunes et très-rapprochées forme un bourgeon. Le calice, la corolle, l'androcée, le gynécée appartien- nent à la vie de reproduction ; leur ensemble constitue une fleur, dont là terminaison est un fruit. La fleur est donc composée généralement de quatre verticilles. (Wolf.) Le nombre des pièces de chaque verticille floral est le plus souvent de trois chez les monocotylédones et de cing chez les dicotylédones. (De Candolle.) Le calice et la corolle sont des organes enveloppants et (1) Le mot carpelle a été créé par M. Dunal (Monogr. Anon. , 1817, p. 13), pour désigner un fruit partiel, et non pas un ovaire partiel. Celui-ci a été nommé ovelle. PROLEGOMENES. 3 protecteurs ; l'androcée et le gynécée sont des organes pro- tégés et sexuels. La nature des organes protecteurs est tantót analogue à celle des organes foliacés (le calice) et tantót formée d'un tissu plus délicat (Ia corolle). Les organes sexuels sont aussi tantôt foliacés (ordinairement le gynécée) et tantôt péta- loïdes (l'androcée). | La forme ordinaire des organes centraux est la forme conico-cylindrique. On pourrait comparer les deux parties de l'axe principal, la racine et la tige, à deux cônes allon- 86s, trés-gréles, opposés base à base. L'endroit de leur réu- nion constitue le collet du végétal. La forme la plus générale des organes latéraux est la forme ovalaire ou ovoide. Plusieurs botanistes ont con- Sidéré ces organes comme des modifications des états par- ticuliers d'un organe unique. ( Wolf, Goëthe.) Cet organe primitif a été appelé organe appendiculaire par Turpin et euphylle par M. Dunal. L'intervalle qui sépare deux organes latéraux, ou deux Verticilles d'organes latéraux, est un mérithalle ou entre- neud. Cet espace parait généralement d'autant plus court que les organes sont plus jeunes. Les mérithalles des bourgeons foliacés, d'abord trés-peu distincts, acquièrent bientôt une extension plus ou moins considérable. Les méritballes des bourgeons floraux persé- vèrent toujours dans leur raccourcissement; ce sont des axes Contractés. (Goéthe, Petit-Thouars.) . CHAPITRE Ii. DE L’INDIVIDUALITE VÉGÉTALE. Les personnes du monde et beaucoup de botanistes re- gardent les végétaux, tels qu'ils se présentent à nos yeux , comme'autant d'individus uniques ou distincts. Les botanistes philosophes considérent le végétal comme un être collectif, comme un agrégat d'individus (1); leurs opinions ont varié seulement sur les parties qui doi- vent étre admises comme individus élémentaires. Suivant : Goéthe, ce sont les feuilles ; d'aprés Turpin, les cellules ; selon d'autres, les mérithalles ou les sépales, les étamines , les pistils, c’est-à-dire les organes appendiculaires. Darwin considére comme tels les gemmes ou bourgeons (2). Cette derniére idée parait fort ancienne: on la retrouve. (1) Planta est multitudo (Engelmann). (2) Phytologia, London, 1800, in-4?. PROLEGOMENES. 5 jusque dans les ouvrages d'Hippocrate. Ce grand homme à avancé, dans un chapitre de ses immortels écrits, que le scion est comme un petit. arbre (1). La théorie de l'individualité des bourgeons , soupconnée par Ray et par Lahire (2), entrevue par Buffon (3) et par D'ipont de Nemours (4), adoptée et défendue par du Petit- Thouars (5) , a été de nos jours renouvelée et fécondée par MM. de Tristan (6), de Candolle (7), Dunal (8), Roper (9), Gaudichand (10), Rigaud (11), Poiteau (12), Ursin (1 3) et par plusieurs autres savants botanistes (14). (1) Aan’ vrbe 6 xAadog ier omen na) To déydpoy dyer. De naturá Pueri. (2) Mém. Acad. des sciences, 1108. (3) Buffon, cherchant àétayer son systéme des molécules organiques, décide « que les arbres sont composés de petits étres organisés sem- * blables, et que l'individu total est formé par l'assemblage d'une * multitude de petits individus. » ( Disc. sur la reprod. en général.) (4) Dupont de Nemours demande, dans un de ses mémoires, « si une * plante n'est pas une famille, une république, une espéce de ruche vivante, dont les habitants, les citoyens ont en commun la nutrition et mangent au réfectoire... » Il ajoute plus bas : « On est forcé de con- venir qu'une plante est une confédération d'animaux tous parents, tous intimement unis, s'entr'aidant les uns les autres, travaillant tous au bien de la société. » (Mém. sur différents sujets, 1807, p. 66 et 75.) (5) Journ. de phys. , 1811, t. 72; p. 398. — Voyez aussi Essais Sur la végétation. (6) Journ. de phys., 1813, t. LXXV, p. 401. (7) Organ. végét. , t. 11, p. 228. (8) Consid. org. fteur. Montpellier, 1829, in-4°. (9) Obs. infloresc. Seringe, mélanges bot., 1826 , mars. (10) Observ. sur l'ascens. de la sève, Ann. scienc. nat., 1836, Septembre, (11) Rapp. sur la Théor. de du P.-Th., Montpellier, 1825, in-4°. (12) Mém. wal Acad. des Sciences, 22 aoüt 1831. (13) Lycée armoricain, t. 11, p. 187. (14) Cette théorie semble implicitement renfermée dans plusieurs DIR -— ^em SCR SER e Ree = : E. È [2 i d * PROLÉGOMENES. Il existe, dans le végétal, deux sortes de bourgeons ou deux états particuliers des individus élémentaires , les bourgeons proprement dits et les bourgeons floraux. Les bourgeons proprement dits restent toujours adhé- rents au végétal ; ils allongent indéfiniment son axe ou ses ramificalions , et produisent à leur tour d'autres géné- rations d'individus. Les bourgeons-fleurs ne sont fixés au végétal que pen- dant une durée limitée ; ils s’y épanouissent , arrêtent le développement de l'axe qui les porte et donnent des germes qui se séparent de l'individu collectif et vont produire ailleurs de nouyelles agrégations. Les bourgeons proprement dits peuvent naitre en méme temps que les bourgeons floraux (gemmae synantheæ, Viv.) ou avant eux (g. proteranthee, Viv.) ou aprés eux (g. hyste- rantheæ, Viv.) (1). Du Petit-Thouars a désigné les bourgeons proprement dits sousle nom d'embryons fixes, et les bourgeons floraux sous celui d’embryons mobiles; on les a aussi nommés, les uns embryons-gemmes , et les autres embryons-graines. n pourrait dire que les premiers embryons sont formés Par une reproduction gemmipare et les seconds par une reproduction ovipare. Les deux genres de développement des embryons fixes expressions de Linné. D'aprés ce célébre botaniste , tout végétal se propage par la racine continuée (vegetabile omne à radice propaga- tur continuando, Phil. bot., 79). Or, comme, dans l'art. 80, il nomme caudex ascendens tout le système aérien, et le considère comme une partie de la racine, il s'ensuit queles productions de ce caudex sont une propagation. Dans Particle 85, il donne le nom d'embryon au germe renfermé sous un hibernacle. Or un embryon est un individu. (De Tristan. ) (1) Les anciens botanistes appelaient precii les fleurs qui paraissent avant les feuilles ; ils disaient d'elles filius ante patrem, PROLEGOMENES. i A et des embryons mobiles ont conduit M. de Candolle à des idées trés-ingénieuses et très-justes sur la nature des végétaux Pérennes, vivaces, bisannuels et annuels (1). Quand les fleurs ne consomment que la nourriture de leurs supports immédiats , Ceux-ci périssent aprés la fleu- raison, dans les fleurs máles, ou aprés la maturation, dans les fleurs femelles. Le reste de la plante , n'ayant pas été épuisé ou fatigué, continue à vivre entretenu par les bran- ches et les feuilles produites par les bourgeons proprement dits. L'année d'aprés naissent de nouveaux bourgeons lloraux. C'est ce qui arrive dans les arbres, les arbustes et les arbrisseaux , c'est-à-dire les végétaux pérennes ou cau- locarpiens. Lorsque les fleurs sont plus nombreuses ou que la plante est plus faible , elles épuisent non-seulement la nourriture de leur pédoncule, mais encore celle des rameaux et de l'axe principal, c'est-à-dire de tout le systéme aérien ; le végétal périt jusqu'au collet ou jusqu'au voisinage du col- let. L'année suivante, cette base produira d'autres bour- geons, et il se développera un nouveau système aérien. C'est ce qui a lieu dans les végétaux vivaces ou rhizocar- piens. | Enfin, quand les fleurs sont encore plus nombreuses, et qu’elles épuisent non-seulement leur pédoncule et leur tige, mais encore leurs racines, le Système aérien et le système ` Souterrain se desséchent et la plante tout entière cesse de Vivre. C’est ce qui nous est offert par les végétaux bisan- nuels et annuels, c’est-à-dire les monocarpiens (2). (1) Flor. franç., éd. 8,t. 1, p. 322. — Organ. végét., t. 1, p. 232. (2) On peut retarder la mort de la plupart de ces plantes en les empéchant de donner des fleurs ou de mürir leurs fruits. + on” ETT 8 ; PROLEGOMENES. On a objecté, contre la théorie de l'agrégation végétale, que la nature du bourgeon ordinaire paraissait trés-éloignée de celle de l'appareil floral, et que c'était abuser de l'analo- gie que de considérer l'un et l'autre comme deux états par- ticuliers de l'individu élémentaire. On a répondu que l'ob- servation démontrait, au contraire, la plus grande liaison entre les différentes parties des bourgeons proprement dits et les diverses piéces de la fleur. (Goéthe.) il n'est personne, dit Turpin, qui n'ait été frappé de lextréme ressemblance qui se trouve entre la fleur des Camellia, avant son épanouissement, et le bourgeon de la plupart des végétaux; son calice, composé de neuf feuilles rudimentaires, disposées alternativement et en spirale au- tour de l'axe, se recouvrant les unes les autres, allant tou- jours en augmentant, et se colorant de l'extérieur à Pin- térieur, imite parfaitement les écailles embriquées des bourgeons foliacés des Æsculus (1). Les sépales et les pistils offrent, en général, une texture trés-voisine de l'organisation foliacée. Ces organes se chan- gent quelquefois en véritables feuilles, soit isolément, soit simultanément ; d'autres fois, cette méme transformation s'effectue aussi dans la corolle et l'androcée, et la fleur tout entiére est métamorphosée d'une maniére plus ou moins complète en un bourgeon foliacé. Sil'on compare, dans la Parisette à quatre feuilles (Paris quadrifolia), les étamines aux pétales, les pétales aux sé- pales, et ceux-ci aux feuilles, on reconnaitra, avec Cassini, l'extréme analogie qui unit tous ces organes. Une étamine de Paris, dit ce savant botaniste, est exactement compa- rable a-un pétale de la méme plante dans lequel les deux portions du parenchyme, occupant les bords latéraux du (1) Icon. végét., p. 112, note. PROLEGOMENES. 9 tiers moyen de la longueur, se seraient converties en pollen, et dont l'épiderme s'ouvrirait sur ces mémes bords pour li- vrer passage à la poussiére fécondante (1). Or un pétale dela méme plante ne diffère d’un sépale que par sa taille et Par sa position, et ce dernier est parfaitement organisé comme une petite feuille. Ainsi le bouton floral d'un Camellia ressemble à un bour- 8eon foliacé, avant son éclosion, et la fleur dun Parts est comparable à un bourgeon qui vient d’éclore. ` De leur côté, les feuilles, dans certaines circonstances, adoptent un aspect plus ou moins pétaloide. Tous les horti- culteurs savent que beaucoup de plantes, transportées dans Un terrain plus maigre ou dans un climat plus chaud, se reproduisent fort souvent avant l’époque habituelle. Par exemple , des espéces qui ne fleurissent qu'aprés deux ans peuvent donner des fleurs à la fin dela premiére année. Or Supposons qu'une de ces plantes produise; dans la période ordinaire de sa végétation, trente ou quarante bourgeons proprement dits, avant de présenter des bourgeons-fleurs ; si, sous de nouvelles influences, ces fleurs se montrent im- médiatement après le quinziéme ou le vin gliéme bourgeon fo- liacé, n'est.il pas évident qu'on pourra considérer ces fleurs, la premiére comme résultant de la métamorphose du sei- ziéme ou vingt et uniéme bourgeon, la seconde comme pro- duite par le dix-septième ou vin gt-deuxiéme, et ainsi de suite? Dans certaines monstruosités , On voit naître, à la place des bourgeons proprement dits, des germes (ou bulbilles) qui se séparent du végétal et jouissent des propriétés des Yéritables graines ou produits des bourgeons-fleurs. Dans d’autres monstruosités, ce sont les organes floraux qui se transforment en bulbilles, et ces bulbilles sont exac- (1) Opusc. phyt., t. 1, p. 552. FA A Ls mm Pes * RM VER E cms EE, UN qo aie » DRE - rs — XT Ru eui m com m e E- T 10 PROLEGOMENES. ` tement semblables à ceux qui naissent à la place des bour- geons proprement dits. Enfin, dans plusieurs cas anomaux , l'axe qui porte la fleur, au lieu d’être épuisé et d'avorter, s’allonge, traverse les verticilles reproducteurs, et se développe comme les ra- meaux des bourgeons foliacés. (Linné, Goëthe.) Ainsi, puisque, dans certaines circonstances, les fleurs sont susceptibles de se changer en bourgeons proprement dits , et que, dans d'autres circonstances , ceux-ci peuvent se transformer en germes ou en graines, il y a donc une trés- grande analogie entre ces deux sortes de bourgeons ou em- bryons. On a combattu encore l'idée de l'agrégation végétale en se fondant sur Ja continuité des rameaux, des branches et du tronc (1). Mais cette continuité prouve seulement, ainsi que le fait observer M. de Candolle, que les gemmes naissent à l'extrémité des fibres ou que les fibres sont pro- duites par les gemmes. D'ailleurs, on trouve une continuité tout aussi grande (au moins pour nos moyens d'investiga- tion) lorsqu'on disséque une branche provenant d’un bour- geon greffé sur un arbre de méme espéce. Or, dans ce cas 3 la pluralité des individus est manifeste et le systéme ligneux est continu (2). La théorie de l'individualité des bourgeons est confirmée par un grand nombre de faits fournis par la physiologie et la pathologie, On sait, depuis longtemps, que l’ensemble d'un végétal ne souffre pas sensiblement de l'amputation ou de la mort de plusieurs de ses parties, et que les parties, à leur tour, a (1) Cassini, Mém. sur la Phytol., Journ. phys. , 1821, 92 p. 320. (2) Organ, végét., t. 2, p. 230. PROLEGOMENES. 11 peuvent vivre, le plus souvent, indépendantes de l'en- semble. Quand les horticulteurs mutilent un Pécher , celui- ci n'en continue pas moins de pousser avec vigueur; il a méme plus d'énergie dans les parties épargnées, parce que les individus élémentaires qui restent profitent de la nour- riture destinée à ceux qu’on a soustraits. Quand on enlève des bourgeons, des scions ou des rameaux à un système pour les souder à un autre système (greffage) ou pour les placer dans le sol (bouturage), ces parties ne cessent pas de vivre malgré leur séparation; elles deviennent même le Principe de nouvelles collections. On observe quelquefois des parties d’un végétal bien vi- Soureuses à côté d'autres parties trés-languissantes. Les arbres placés entre un chemin fort sec ou bien battu, et une terre trés-meuble, très-fertile, donnent des branches plus belles, plus nombreuses du côté qui les nourrit le. mieux. Des parties d'un végétal peuvent porter des feuilles ou des fruits avant ou après tout le système. M. de Candolle a introduit une branche de Cerisier vivante dans une serre, et celle-ci se couvrit de fleurs pendant que tout le reste de Pagrégation , resté dehors, ouvrait à peine ses bourgeons. On a vu des rameaux à feuilles panachées à côté de ra- meaux sans panachures ; des fleurs simples au milieu d’une inflorescence où toutes étaient doubles; et des branches portant des fruits acides à côté d’autres branches dont les fruits étaient sucrés. Lorsque, par le moyen de la greffe , on ajoute à un indi- vidu collectif un ou plusieurs bourgeons appartenant à un autre végétal , l'association parait à peine influencée par ces nouveaux venus; et ceux-ci se développent, donnent des feuilles , des fleurs, des fruits comme s'ils faisaient encore partie de la premiére agrégation. C'est ainsi qu'on a pu 12 PROLEGOMENES, ajouter des branches à fleurs mâles à des collections qui n'en portaient que de femelles, et qu'on est parvenu à rassembler sur un seul pied plusieurs variétés ou espéces de fruits ; par exemple, on a réuni sur un Poirier toute la collection Poires cultivées. (De Candolle.) (1) d es (1) Si l'on veut ne considérer la théorie de l'individualité des bour- geons que comme une hypothése propre à lier les fails, on doit convenir que cette hypothèse est ingénieuse et importante, (De Tristan.) \ | f. Er à ca | I | 2 i Bh. i 1 m 1 i y : j ) "m ‘À n í E al = | fc E E { è E - & | MES y AI 4 d y P IE H HIER j À T ETC AN 5 g 1 £- k | R E I EI E y FA E- TR A Ld CHAPITRE III. DE LA SYMETRIE VÉGÉTALE. Les nombreux individus qui composent l'agrégation vé- gétale ne sont pas groupés au hasard; des lois particu- liéres ont présidé à leur arrangement et lui ont imposé une régularité plus ou moins grande. Chaque individu , chaque bourgeon foliacé ou bourgeon floral , présente aussi , dans les verticilles qui forment son ensemble et dans les parties qui constituent ses verticilles ; une ordonnance plus ou moins uniforme qui annonce que les étres élémentaires sont soumis, comme l'étre collectif, à des lois constantes et précises. | Cette régularité, dans l'association de l'ensemble et dans l'organisation des individus , n’est pas géométrique comme celle des cristaux ou des corps bruts; il est impossible de irouver des rapports mathématiques rigoureux entre toutes les parties d’un arbre ou tous les verticilles d’une fleur, ni — pm imer e pec "ic = pre EA À vat Ti wem: Fae 3 14 PROLÉGOMENES. entre tous les pétales d’une corolle ou les moitiés droite et gauche d'un pétale. (De Candolle.) Cependant on ne peut nier qu'à l'examen, méme le plus superficiel , on ne soit frappé de la régularité de ces parties ou de ces ensembles organiques, de ces individus ou de ces agrégalions. Cette régularité non géométrique des végétaux a recu le nom de symétrie ; du Petit-Thouars l'a souvent appelée géo- métrie vivante (1). Correa de Serra est le premier botaniste qui ait fixé Pat- tention sur la symétrie des végétaux. Les idées philoso- phiques de ce profond et ingénieux observateur ont influé beaucoup sur les progrès de la science ; malheureusement, ces idées ont été plutót émises dans l'intimité des conversa- tions que consignées dans des ouvrages. Du Petit-Thouars a cherché à démontrer que la symétrie des végétaux était constante et générale; il a signalé son importance et sa simplicité. M. de Candolle a étudié les causes qui tendent à la changer et à la faire méconnaitre; il a prouvé son utilité dans l'organographie, la physiologie et la taxonomie. Les recherches de ces savants botanistes ont été confirmées ou étendues par les travaux de MM. Robert Brown, Cassini, Auguste de Saint-Hilaire, de Tristan , Dunal, Turpin, A. Brongniart, A. de Jussieu, Gaudichaud, Martius, Roper, Steinheil, Link, Braun, Bravais , Lesti- boudois ....., auxquels il m'est peut-être permis d'ajouter mon propre nom. (1) M. Auguste de Saint-Hilaire a proposé de réserver le mot de symétrique pour indiquer l'ordre dans la disposition respective des parties des différents verticilles, et de se servir du mot régulier pour exprimer la similitude des parties d'un méme verticille-ou des deux Amoitiés d'une méme partie. ( Deuxième mém. sur les Résédacées, p. 34, note.) PROLÉGOMENES. 15 La symétrie végétale peut étre dérangée , dans certaines circonstances, Qu'on jette un coup d’œil sur les principales familles du régne végétal, on ne tardera pas à remarquer qu'il existe des espéces à organes ou ensemble d'organes réguliers, et d'autres espéces chez lesquelles ces mémes par- lies sont à l’état d'irrégularité (1). Les premiers végétaux sont plus nombreux que les seconds (2); c'est sans doute une des raisons qui ont conduit les botanistes à regarder les espéces réguliéres comme l'état normal des végétaux qui ne le sont pas , et à considérer les organes ou les individus irréguliers comme des modifications, des déviations, des dégénérescences des espéces réguliàres (3). Une autre raison de cette manière d'envisager les organes vient aussi, comme le fait trés-bien observer M. Mirbel , de ce que les types ré- Suliers sont ceux dont nous conservons le plus facilement le souvenir, et qui s'accordent le mieux avec les idées me- Surées et méthodiques que nous portons dans l'exécution de hos propres ouvrages (4). Mais , si l’on étudie séparément les familles végétales, on en trouvera chez lesquelles la régularité est l'état le plus habituel, et d'autres chez lesquelles c'est, au contraire , l'irrégularité. Ainsi, par exemple (et pour ne parler que d'un seul verticille), aucun botaniste n'ignore que , dans le groupe des Cruciféres, la corolle est presque toujours for- mée de quatre pétales égaux , munis d'un onglet , et symé- (1) Il y a aussi des organes ou des verticilles qui tiennent le milieu entre la forme régulière et la forme irrégulière ; on les appelle dere- gularés ou subregulares. (2) Sur environ cent familles phanérogames européennes, il y ena seulement vingt ou vingt-quatre qui offrent des fleurs normalement irrégulières. (Roeper, Bals., p. 25, note.) i ' (3) « Tous les êtres organisés sont réguliers dans leur nature intime. » ( De Candolle.) (4) Phys. végét., t. 1, p. 224, note. — n à aat oe ogee "cbe emer S Mcr S 9 — — adc T = Á ' will 1 * OPES : " Um D A H We | | E LES A8 a E um $ ‘4 ti bg ” f n í Es E ES 3 m Mim ^ MA \ x À E e E MM mee rent >. ee uw E E 16 PROLÉGOMÈNES. triquement disposés en croix; tandis que, dans la famille des Labiées , ce verticille , partagé en deux lèvres inégales , adopte généralement la physionomie d'une gueule plus ou moins béante. | Il y a donc , dans chaque famille, une sorte de type par- ticulier auquel on pourrait ramener tous les individus où tous les organes de ces individus. L'état irrégulier, quand il se présente chez une Cruci- fere, est une exception à la règle de la famille , tandis que c'est, au contraire, l'état régulier qui devient tel dans une fleur de Labiée. Malgré ces types particuliers ou de famille, les botanistes, toutes les fois qu'ils ont parlé de plan normal, d'ordre es- sentiel, de type primitif, ont toujours adopté, comme terme de comparaison , la forme régulière , quelle que fat sa fré- quence ou sa rareté dans la famille. Il est résulté de là que, dans certains groupes, comme celui des Cruciféres, le type primitif se confond avec le type particulier, tandis que dans d'autres , comme celui des Labiées , ces deux types sont distincts. Dans les premiéres, une corolle monstrueuse est toujours éloignée du type de la famille et du type général. Dans les secondes, une corolle monstrueuse peut étre aussi, dans certains cas, éloignée de ces deux types; mais, dans d'autres cas , elle est déviée du type de la famille et retour- née au type primitif. Dans beaucoup de familles, on rencontre les deux sortes de formes organiques , l'état régulier et Pétat irrégulier. Il peut donc arriver qu'un individu ou un organe irrégulier qui se symétrise ou se déforme acquiert, par son change- ment, l'état habituel régulier ou irrégulier d'un autre in- dividu du méme groupe. Tl y a des familles uniquement composées de genres dont tous les verticilles sont irréguliers , celle des Polygalées, par PROLEGOMENES. 17 exemple. La nature ne présente chez elles aucun ensemble à l'état de symétrie; le type primitif est alors une sorte d'être idéal, une fiction métaphysique. Enfin, outre le type primitif ou symétrique , et le type de famille régulier ou irrégulier, il existe encore un troi- Sième type qui a recu le nom de spécifique ; c'est l'ensemble des traits, la réunion des caractéres communs a la plupart des individus qui composent une espéce. Toute déviation de ce type , ou, en d'autres termes, toute particularité orga- nique gue présente un individu, comparé a la majorité de ceux du méme nom, donne naissance à une anomalie (1). (1) Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, Traité de térat., t. 1, p. 30. — TERN ETIN JVE —— oer ey RTT geiles common cS mel eem 7 H NTC 9. Er: Ulo «wo t p $ E i " si v me CHAPITRE IV. DES ANOMALIES VEGETALES. * Les anomalies végétales (abnormitates) sont des dévia- tious insolites du type spécifique. On désigne, sous ce nom, - toute différence organique accidentelle d’un individu élé- mentaire ou collectif qui s'éloigne de la structure générale des individus de son espèce. Ces différences organiques doivent être distinguées des maladies ou des effets produits par ces dernières. L’anomalie est toute modification extraordinaire dans la formation ou le développement des organes, indépendam- ment de toute influence sur la santé; d’où la possibilité d'un être anomal jouissant d'une santé parfaite. L'individu monstrucux peut méme vivre plus longtemps que l'individu normal. Les Roses doubles, par exemple, se fanent moins rapidement que les Roses ordinaires. PROLEGOMENES. 19 La maladie est tout ce qui trouble la santé, indépendam- ment de toute modification insolite; d’où la possibilité d'un individu malade, sans altération appréciable. L'anomalie survient pendant la formation ou le dévelop- \ pement des organes ; la maladie arrive aprés ce développe- ment ou cette formation ; l'une change ce qui doit se faire, l'autre modifie ce qui a été fait (1). Néanmoins il est des circonstances oit l'anomalie et la maladie peuvent étre confondues. Quand un végétal a ac- quis un certain développement et qu'il est piqué par un in- Secte ou frappé par la gelée, il éprouve une véritable ma- ladie qui peut affecter tous les individus élémentaires (bourgeons ou fleurs) dont il est composé. Si cette ma- ladie demeure permanente et que l'agrégation produise Plus tard de nouveaux individus, ceux-ci seront viciés dés les premiers instants de leur existence; ils subiront des arréts ou des excés dans leur évolution ; ils deviendront anomaux. Il est certaines anomalies extrêmement légères, comme l'altération de la couleur, l'augmentation de la taille, la disparition des poils, qui sont soumises, jusqu'à un certain point, àl'influence des agents extérieurs, et qui sont suscep- tibles de se présenter après la naissance des organes. Ces déviations paraissent faire la nuance intermédiaire entre l'état de maladie et l'état de monstruosité. _ On aurait tort de regarder les anomalies végétales, comme des jeux de la nature, comme des désordres bizarres ou aveugles, qui résultent de causes fortuites et ne laissent dans l'esprit que le souvenir confus de difformités inexpli- cables. Les anomalies sont des modifications particuliéres, qui peuvent étre ramenées à des principes communs, simples (1) Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, Traité de térat. , t. 3, p. 445. 90 PROLÉGOMENES. et précis, lesquels ne sont eux-mémes que des corollaires des lois les plus générales de l'organisation (1), L'anomalie est un autre arrangement qui a ses limites et ses règles; c'est quelquefois la transition d’un ordre ancien à un ordre nouveau et d'autres fois le mélange de ces deux ordres (2). Ce qui prouve d'une manière incontestable que l'état monstrueux est soumis à des lois tout comme l'état normal, c'est que dans la plupart des anomalies des arbres ou des herbes, les botanistes philosophes découvrent des phénomè- nes analogues ou semblables à d'autres phénomènes habi- tuels dans d'autres végétaux. | M. de Candolle est le premier qui ait montré la haute importance de ces rapprochements et qui en ait tiré des in- ductions précieuses pour l'étude des organes et des fonc- tions, et pour la théorie des classifications. Malheureuse- ment pour les progrès de la science des monstres, cet illustre botaniste a semblé, dans quelques circonstances, établir une identité trop forte non-seulement entre les phénomènes eux-mêmes ou leurs causes, mais encore entre leur valeur organographique et tératologique ; de là, le re- _ proche si souvent et si injustement adressé à son école, de confondre l’état normal avec l’état accidentel, de regarder comme anomaux la plupart des types organiques et de ne voir, dansla nature, que des organes ou des êtres monstrueux. Les anomalies sont des faits toujours accidentels. Une monstruosité habituelle. ou constante est donc un être de raison (3). ee | ee Ld (1) « Ces productions extraordinaires (les monstres) sont des écarts « qui ont aussi leurs lois, et qu'on peut ramener à des principes « certains. » ( Adanson, Fam. nat., t. 1, p. 109.) (2) Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, Traité de térat., t. t p. 18. (3) « On appelle du nom de monstres, dans les plantes, toutes eo! PROLÉGOMÈNES. 21 L'analogie a pu conduire les organographes à supposer qu'il manque habituellement une étamine dans les Linaireset trois?pistils dans les Polygala , qu'il existe, au contraire, des augmentations numériques d'étamines dans les Mille- pertuis et de pistils dans les Ranunculus; mais toutes ces organisations, quoique semblables à certains états d'anoma- lie, n'en sont pas moins l’ordre normal. Aussi, dans le cours de cet ouvrage, si je compare quelquefois la structure Monstrueuse d'un organe, dans un végétal quelconque, avec l'ordre habituel du même organe dans un autre végé- tal, je n’aurai d'autre but, dans cette comparaison, que de Montrer analogie qui se trouve entre les deux états orga- niques ou entre les phénoménes de nutrition accidentel ou habituel qui les ont produits ; mais, dans aucun cas, je ne Considérerai comme monstrueux un organe ou un verti- cille, quels qu’ils soient, dans leur état habituel. Ne peut-on pas établir, par exemple, des rapprochements plus ou moins heureux entre certaines tiges atrophiées et les plateaux amincis des Liliacées bulbeuses, entre certains rameaux fasciés €t les appendices foliacés des Fragons, sans regarder pour cela comme des monstres et les Liliacées et les Fragons? C'est ainsi que, dans la tératologie animale , le développe- ment excessif et anomal du coccyx dans un foetus humain est comparé au prolongement caudal des mammiféres, sans qu'on ait jamais eu l'idée de voir dans ce dernier prolonge- mentun état permanent d'anomalie, et qu'on assimile aussi la queue rudimentaire de certains quadrupédes anormaux au coccyx de notre propre espèce, sans désigner ce coccyx Comme un organe monstrueux ! « auxquelles il arrive d'avoir, dans quelques-unes de leurs parties, une « production contre l'ordre naturel des choses. » (Adanson, Fam, nat., t. 1, p. 109.) . 2% PROLEGOMENES, Pendant longtemps on a négligé l'étude des anomalies. On affectait pour elles un superbe dédain, et les botanistes, . méme les plus célèbres, regardaient les monstres végétaux comme des êtres qui dégradaient à la fois et la nature et la science (1). Par suite de ce dédain, on ne S'occupait guère à recueillir des faits de monstruosité. Le petit nombre de ceux qui étaient rapportés dans les ouvrages représentaient des phénoménes isolés, observés sans but, décrits sans liai- son, dont on aurait bien difficilement apprécié la valeur scientifique (2). Il est des vérités de fait qui, séparées, offrent vivement à l'esprit leur mutuelle dépendance; il semble, comme le dit Fontenelle, qu'aprés avoir été détachées, par une espéce de violence, les unes d'avec les autres, elles cherchentà se réunir en un seul corps, dont elles étaient les membres épars (3). Il est, au contraire, d'autres vérités qui, au premier abord, présentent des affinités si obscures ou des dissem- blances si notables, que l'intelligence est tentée de repous- ser leur association. Pour les rapprocher les unes des autres, pour les unir, il faut les travaux et l'influence de quelques hommes de génie, et surtout l'action du temps, action si progressive, si impartiale et si certaine. Les faits de monstruosité sont au nombre de ces derniéres vérités. Ce n'est guére que depuis le commencement de ce siécle que ces faits ont été recueillis avec avidité et rappro- chés avec discernement. Il s'est rencontré quelques esprits supérieurs qui ont frayé la route à parcourir. Des physiolo- 7 ) « Demantur è Botanica flores majores , multiplicati, pleni, pro- « liferi, et exulabit numerosa grex, quc Botanicen diù oneravit. » (Linn., Phil. bot., 271.) (2) « Istud enim , respicere pauca et pronuntiare secundùm pauca, « omnia perdidit. » (Bacon, Parasc. ad hist. nat. ) (3) Pref. de l Hist. de V Acad. des sciences, 1699. r, ` 92: PRULEGOMENES. 29 gistes habiles ont essayé de marcher sur leurs traces, et quelques années ont déjà suffi pour donner du prix à leurs travaux, On s'est ainsi élevé graduellement jusqu'à ces mé- ditations d'ensemble qui planent sur les observations de détail, comme les opérations de l'esprit sur l'exercice des organes. Dés lors l'étude s'est tournée avec empressement vers la monstruosité : on a recherché les sources de ce nouvel état , les dispositions qui le favorisent , les obstacles qui Parrétent. Si Pon n'est pas toujours arrivé à des résul- : lats satisfaisants, on a, du moins, accumulé beaucoup de faits et déduit certaines théories qui ont agrandi singulière- ment le domaine de la science botanique. On a cessé d'ap- pelercontre nature ce qui n'était que contre l'habitude (1) ; on à reconnu les immenses avantages de l’ordre monstrueux Pour la connaissance approfondie de l’ordre habituel (2); on à senti combien la Tératologie était utile, non-seulement pour bien déterminer les lois de l'organisme, mais encore pour mieux apprécier les phénoménes de la vie et pour per- fectionner les théories des classifications e Les anomalies des plantes sont plus fréquentes que les anomalies des animaux (Haller) ; les unes et les autres sui- vent des lois à peu prés similaires : il y a déjà longtemps qu'on a tenté de le prouver (Hippocrate , Schlotterbeck). (1) « Ce que nous appelons monstres ne le sont pas à Dieu, qui voit dans l'immensité de son ouvrage l'infinité de formes qu'il y a com- prises. » (Montaigne, Zssais , u , chap. 30.) (2) « Qui enim vias nature noverit, is deviationes etiam faciliüs « Observabit; at rursüs qui deviationes noverit, is accuratiüs vias * describet. » (Bacon, Nov. org., lib. 1, § 39.) (3) Correa de Serra écrivait à M. Geoffroy Saint-Hilaire : « Je me « plais et m'instruis avec vos monstres; ce sont d'aimables et franes « bavards, qui racontent savamment les merveilles de l’organisation. » ( Dict. class. hist. nat., t. xt, p. 119.) 94 PROLEGOMENES. Mais ces lois sont modifiées suivant le mode de structure suivant le genre de vie de chaque corps organise. Les physiologistes ont reconnu qu'il existe entre toutes les parties des corps vivants une synergie qui fait qu'elles conspirent vers un but commun, et une sympathie qui est telle, que chaque molécule intégrante se ressent de l'état des autres molécules; de sorte que , selon l'expression de Kant, la raison de la maniére d'étre de chaque partie @un corps organisé réside dans l'ensemble. Cette synergic et cette sympathie sont moins prononcées dans les plantes que dans les animaux (Draparnaud); ce qui tient surtout à la différence de leur individualité. On concoit, en effet, que, dans un étre collectif, l'unité vitale ne doit pas êlre aussi parfaite que dans un étre simple ou unitaire. Les individus élémentaires du végétal, quoique liés étroi. tement entre eux, quoique soumis à la vie de l'ensemble, n'en possédent pas moins une vitalité particuliére, et cette vitalité doit se montrer plus ou moins indépendante. Jai déjà rappelé que, dans la greffe et dans le marcottage, on sépare impunément de l'agrégation un ou plusieurs indivi- dus, pour les transporter sur une autre collection ou pour en créer une nouvelle. Les individus élémentaires peuvent donc subsister par leurs propres forces; par conséquent, leur vitalité particulière, dans l'association, ne doit dépen- dre que jusqu'à un certain degré de la vie générale ou de l'ensemble. Voilà pourquoi, dans un arbre, dans une herbe, une anomalie arrivée à son summum d'intensité peut affec- ier la moitié, les deux tiers du végétal, sans empécher les autres parties de vivre et méme de s’accroitre avec vigueur ; tandis que, dans un mammifére, dans un oiseau, toute ano- malie un peu grave détermine presque toujours un déran- gement notable dans la totalité de l'animal ; elle entraine la cessation des fonctions, et souvent méme la perte de la vie. et PROLÉGOMENES. 25 On a dit, avec raison, des animaux, que toute anomalie qui portait sur des organes multiples devait étre considérée comme d'une faible importance et ne constituer qu'une simple variété ou tout au plus un vice de conformation (1). La pluralité des individus dans l'étre végétal et le nombre des organes répétés dans chaque individu entraînent donc, dans leurs monstruosités, un caractère d'intensité plus Jé- gère que les anomalies des animaux : cette conclusion paai très-rationnelle. On a pu constater aussi que la répétition des individus *t des organes constitue, dans les végétaux, des relations ou homologies trés-manifestes ; d’où résultent des accidents assez marqués qu'on trouverait difficilement dans les ani- maux, méme dans ceux qui sont multiples. Les organes ou les appareils les plus nombreux, dans les étres vivants, sont généralement les plus petits. Il se formel au moins dix mille fleurs dans un beau Chéne; il n'en parait | | qu'une centaine dans un Magnolier à grandes doce Sil'on considérait ces arbres comme des individus unitaires, quand une de leurs fleurs serait atrophiée, on ne verrait la dévia- tion que dans la centiéme partie de l'individu végétal ou dans la dix-milliéme ; mais, si l'on regarde le Chéne ou le Magnolier comme des êtres collectifs, on reconnaitra que l'atrophie a porté sur un individu élémentaire , quelle a im- primé à celui-ci un caractére monstrueux, et que l'anomalie est grave et digne d’attention, quoiqu'elle n'ait affecté qu'une trés-petite partie dans chacun de ces deux arbres. Une autre différence qui existe entre les anomalies végé- tales et les anomalies des animaux, c’est que les premiers semblent dépendre davantage des circonstances extérieures. Le végétal demeure fixé toute sa vie au point du sol qui l'a (1) Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, Traité de térat., t. Y, p. 60. 26 PROLÉGOMENES. vu naitre. L'animal peut se transporter avec plus ou moins de facilité d'un endroit dans un autre ; il est locomotile ; il a la faculté de se soustraire au mal et d'aller vers le plaisir, et il échappe, jusqu'à un certain point, à toutes les causes per- turbatrices capables de vicler son organisation. Si, d'une part, dit M. Mirbel , les plantes ne vont pas au-devant des dangers, d'autre part elles n'ont en elles aucun désir de les éviter, ni aucun moyen de les fuir (1). Enfin, ce qui con- tribue encore, chez les végétaux, à rendre puissantes les actions des modificateurs qui les entourent, c’est la position de leurs divers organes. Au lieu d'étre renfermés dans des cavités plus ou moins closes et plus ou moins profondes, ceux-ci sont tous placés ala périphérie et, par conséquent , plus exposés que ceux des animaux aux influences délétéres des agents extérieurs. La différence des individualités animale et végétale influe aussi sur la durée des monstruosités. Un quadrupéde qui naît avec un pied surnuméraire conservera ce pied toute sa vie, tandis qu'un Marronnier qui produit une fleur avec un pistil alrophié n'offrira cette anomalie que pendant quatre ou cinq jours, c’est-à-dire jusqu'à la chute de la fleur. Il est vrai que, si Pon considère cette dernière aberration relativement à la fleur isolée (qui représente un individu élémentaire), la durée de l'atrophie sera exactement celle de l'individu, et le phénoméne rentrera dés lors dans la loi générale des monstruosités. Quand les axes ou parties communes aux individus élé- meníaires sont gravement viciés, l'anomalie persiste dans le végélal comme dans l'animal; mais je dois faire observer que ces axes ne sont pas rigoureusement comparables aux organes des animaux supérieurs. En général, dans les rap- (1) Phys. végét., t. 1, p. 358. PROLEGOMENES. 27 prochements qu'on cherche à établir entre l'animal et Je vé- ` gétal, on devrait se rappeler toujours l'organisation unitaire du premier et la structure multiple du second. Pour obtenir des analogies réellement fondées, il faudrait comparer le végétal, non pas à un mammifére, ni à tout autre animal élevé dans la série, mais à un de ces rayonnés multiples qui vivent , comme Jui, à l'état d'agrégation. Un corail, par exemple, entrerait en parallèle avec un arbre; ses polypes | sont groupés symétriquement sur leurs axes calcaires, comme les bourgeons sur leurs axes ligneux ; aussi le corail et l'arbre pourront offrir des anomalies plus ou moins ana- logues, tantót dans un ou plusieurs individus élémentaires Ou dans les parties de ces individus, tantót dans les axes simples ou ramifiés qui les unissent et les portent. — a Y CHAPITRE V. DIVISION DES ANOMALIES VEGETALES. Les anomalies des végétaux peuvent étre légéres ou graves. | Les premiéres paraissent, en général, simples et rarement congéniales ; elles ne produisent pas de difformité et ne mettent aucun obstacle à l'exercice des fonctions. L’usage a consacré pour elles le nom de variétés (varietates). Les anomalies graves sont plus ou moins complexes et presque toujours congéniales ; elles déterminent des diffor- mités plus ou moins grandes, et rendent difficile ou im- possible l'accomplissement des fonctions. On les a désignées sous le nom de monstruosités (monstra). Nous avons donc deux sortes d'anomalies , les variétés et les monsiruosités (1). (1) Dans la Phytographie, le mot variété a un sens plus étendu. On PROLEGOMENES, : 29 Les premières se présentent d’une manière plus ou moins uniforme sur la totalité du végétal ; rarement elles en affec- lent seulement un individu élémentaire ou une partie de cet individu. Les secondes anomalies portent tantót sur les organes appendiculaires, tantôt sur les organes centraux. Quand les premiers organes sont affectés, les parties axiles | peuvent offrir l'état normal. Il n'en est pas de móme quand | la monstruosité déforme ces derniéres parties; elle en- | traine presque toujours la déviation spécifique de tout le ` végétal. Si l'on voulait distinguer ces deux ordres de mons- truosité , on pourrait emprunter à la Tératologie animale le nom d’hémitérie pour exprimer les déviations des parties àppendieulaires ou des individus élémentaires, et conser- Ver celui de monstruosités proprement dites pour celles des axes végétaux , c'est-à-dire de l'individu collectif. Les variétés sont tantót temporaires et tantot perma- nentes. Les monstruosités du premier ordre paraissent , le plus Sénéralement, persistantes ; mais, comme elles agissent sur des individus ou des portions d'individus dont la durée est limitée, elles disparaissent avec la chute ou la métamor- phose de ceux-ci. Les monstruosités du second ordre sont toujours perma- nentes ; elles accompagnent, dans toutes ses phases, la vie du végétal. Cette distinction des anomalies en variétés et monstruosités n'est pas aussi tranchée qu'on pourrait l'imaginer. Une foule de points de contact les unissent, et on passe des unes aux autres par des nuances infinies. l'applique, par exemple, à toutes les anomalies obtenues par la culture. Un chou-fleur est une variété de chou ordinaire; les fleurs doubles sont des variétés des fleurs simples. DEUXIEME PARTIE. DES VARIETÉS. On a vu, dans le chapitre précédent, que les variétés (va~ rietates) sont des anomalies simples et légères , qui n’offrent pas de difformité et qui ne portent aucun obstacle à Pexer- cice des fonctions; elles affectent tout le végétal, les par- ties axiles et les organes appendiculaires. Dans un petit nombre de cas, elles se présentent seulement dans une por- tion de être collectif, dans un individu élémentaire ou dans un point de cet individu. On trouve des branches à feuilles glabres sur des arbrisseaux à feuilles pubescentes ; des roses panachées sur des Rosiers à fleurs unicolores , et des pétales blancs dans des corolles colorées. Les variétés sont rarement congéniales ; leurs caractères DES VARIÉTÉS. 31 se développent après la -naissance des végétaux ; quelque- fois elles ne se montrent qu'aprés plusieurs années. Les. variétés semblent dépendre beaucoup moins des dis- . positions organiques que des influences étrangéres (1); aussi peuvent-elles augmenter ou diminuer en intensité, sui- vant la persévérance ou la disparition , la puissance ou la faiblesse des agents extérieurs. - La culture exerce une trés-grande influence sur la pro- duction des variétés et sur le maintien ou l'exagération de leurs caractéres ; elle peut aussi, dans certaines circonstan- ces, les affaiblir considérablement et méme les faire dispa- tre (2), | Le croissement des plantes est encore une des causes pro- ductrices des variétés. On concoit que, dans ce dernier cas, ces anomalies sont toujours congéniales. Quelquefois les variétés subsistent pendant toute la durée , du végétal; il est même des circonstances, à la vérité bien | Tares, où elles deviennent héréditaires ; d'autres fois elles | Sont, au contraire, d'une durée trés-courte. Quand elles peuvent se transmettre par multiplication , C'est presque toujours par division , c'est-à-dire par tuber- cules , marcottes , bouture ou greffe. Celles qui se propagent par génération proprement dite donnent des produits tou- Jours írés-incertains. est, En physiologie, on a distingué trois sortes de variétés, d’après leur persévérance et leur multiplication. On a nommé variations toutes les déviations légères du type spécifique produites par le sol, Vombrage , le climat ; (1) « Varietas est planta mutata à causa accidentali. » ( Linn., Phil. dot., 158.) (2) « Cultura tot varietatum mater optima quoque variefatum est * examinatrix. » ( Linn., Phil. bot., 316.) 39 DES VARIETES. en un mot, tous les agents extérieurs et qui cessent d'exister quand ces influences disparaissent (1). On appelle variétés proprement dites toutes les déviations du type spécifique qui se conservent malgré ces circonstan- ces , et qui peuvent se transmettre par bouture ou par marcotte (2). Enfin on a désigné sous ie nom de races toutes celles qui persévérent malgré les influences étrangères, et qui se propagent par les graines (3). Le nombre des variétés est, pour ainsi dire, infini (4); aussi je ne m'attacherai pas , dans cet ouvrage, à rassem- bler tous les traits épars de leur histoire ; je chercherai seu- lement à signaler leurs types principaux. Lesanciensbotanistes confondaient assez généralement les variétés avec les espèces. (Tournefort, Boerhaave, Micheli.) L’école de Linné , par un excés contraire, les a rejetées avec dédain (5). Aujourd’hui les phytographes ont soin de les noter toutes les fois qu'elles se présentent avec des carac- teres un peu saillants , avec une sorte de fréquence ou avec une certaine fixité. Je grouperai les variétés sous quatre classes générales : 1° celles relatives à la couleur ; 2° celles relatives à la villo- sité ; 3° celles relatives à la consistance ; 4° celles relatives à Ja taille. La premiére de ces classes se composera de trois ordres caraclérisés par la diminution ou la disparition de la ma- (1) DC., Théor. élém., 1813, p. 168.—Phys. végét.,t. 11, p. 689. (2) DC., Théor. élém., loc. cit.— Phys. végét., t. 11, p. 120. (3) DC., Théor. élém., p. 169.— Phys. végét., t. 1, p. 691. (4) « Finem ludentis polymorphe natura: vix attingat Botanicus qui in varietatibus sese exercere velit. » (Linn., Phil. bot., 317.) (5) « Conspurcavit magis Botanicen varietatum introduelio , quàm « alia res ulla. » ( Linn., Phil. bot., 259.) DES VARIETES. 33 tière colorante (albinisme), par son apparition ou son aug- mentation (chromisme) et par son changement ou son alté- ration. La seconde classe présentera deux ordres: les anomalies par diminution ou disparition des poils (glabrisme), et les anomalies par apparition ou augmentation (pilosisme). a troisième classe comprendra aussi deux ordres, carac- térisés par la diminution des matières solides du paren- chyme végétal (ramollissement) ou par leur augmentation (induration). Enfin la deruiére classe embrassera encore deux ordres : les variétés par diminution de taille ou de volume général (^anisme) , et les variétés par augmentation de ce volume (géantisme). Voici le tableau de ces classes et de ces ordres : VARIÉTÉS. CLASSES. - | . ORDRES. Diminution ou disparition. . 1° Albinisme. 1° Apparition ou augmentation. 2° Chromisme. COLORATION. : Changement. . . .. . . .. 8° Altérations. 2 | Diminution ou disparition. . 4° Glabrisme. VILLOSITÉ. | Apparition ou augmentation. 5° Pilosisme. VARIÉTÉS DE v js enis 6? Ramollissement. CONSISTANCE. N Augmentation. 7° Induration. g> | Diminution. 8" Nanisme. 9° Géantisme. | ' TAILLE. LIVRE I. DES VARIÉTÉS DE COLORATION. Les animaux doivent leur coloration 4 unc matiére parti- culiére nommée pigment ou pigmentum , qui a son siège dans là peau , principalement dans le corps muqueux de Malpighi. Dans les végétaux, la coloration. est produite par de petits globules (1) enfermés dans les cellules du pa- renchyme , désignés par les botanistes sous les noms de chlorophylle ( Pelletier et Caventou) ou de chromule. ( De Candolle.) (2) (1) Les granules verts de Acer platanoides ont 1/30 de millimètre de diamètre. (Raspail.) 2 | (2) Cette matière a été aussi nommée viridine (de Candolle) et chloronite. ( Desvaux. ) DES VARIÉTÉS. 35 - La couleur la plus générale des végétaux est la couleur verte, c'estla livrée de presque tous. Il y a méme des espèces qui présentent non-seulement leurs tiges , leurs rameaux et leurs feuilles nuancés de vert ou de verdátre , mais encore tout l'appareil floral, les fruits et les organes ac- cessoires. Aussi, en phytographie , le nom de coloré n'est- B employé que pour désigner les parties qui ont une cou- leur différente de la verte (1). Comme tous les organes verts décomposent l'acide car- bonique, et que les plantes parasites (Orobanches, Cuscutes, Cytinées), qui n'ont pas la même propriété , n’offrent pas de teintes vertes, on a pensé que la présence du carbone élait la cause de la coloration ‘en vert (2). Pour étayer cette opinion, on a fait observer que le car- bone divisé parait bleu et non pas noir (Chevreul), et que le tissu végétal primitif est jaunâtre et. non pas blanc (Sénebier). Or le bleu et le jaune font du, vert. D'ailleurs, l'enere de Chine et la gomme-gutte, mêlées ensemble, pro - duisent une nuance à peu prés verte. (Sénebier.) La lumiére est un des principaux agents de la fixation du carbone et, par conséquent, une des sources de la colo- ration. | Une certaine dose d'hydrogéne semble suppléer , dans certains cas, au défaut de lumière , et donner aussi les leintes.vertes (3). Mais il existe, sans doute, bien d'autres causes capables d'amener le méme résultat. L'extrémité de Certains axes enfoncée dans le sol, la moelle de plusieurs (1) « Colorata folia dicuntur, cüm alium assumant colorem quàm * viridem. » (Linn., PAil. bot., 266.) . (2) Le pigment des animaux est aussi, en grande partie, formé de carbone. ( Blumenbach , Dawy, Coli.) ; (3) Sénebier, Phys. végét., t. 1v, p. 275. — Humboldt, Flor. freyb. aphor. ad calc. 36 DES VARIÉTÉS, tiges entourée de parench jme, l'embryon de quelques graines revétu de ses diverses enveloppes , adoptent quel- quefois la couleur verte. Or, dans ces cas , il n’y a ni fixa- tion plus forte de carbone , ni présence accidentelle d'hy- drogène. M. de Humboldt a vu retirer de 52 métres environ au-dessous du niveau de la mer Je Fucus vitifolius , et il offrait une belle couleur verte (4). Les physiciens ont calculé quà cette profondeur la lumiére du soleil est 203 fois plus faible que celle d'une chandelle vue à 32 ou 33 centimétres de distance. La nuance verte des feuilles passe habituellement au jaune, comme dans l'Oranger et le Tilleul, ou au rouge, comme dans l'Epine-vinette et le Sumac ; elle devient brune ou couleur de feuille-morte dans la plupart des végétaux. Il parait que c'est principalement à l'oxygéne que sont dus ces changements, La chromule jaunit à un premier degré d'oxydation ; elle rougit ou brunit à un second degré (2). Les bractées, les calices, les corolles, les organes sexuels doivent aussi leurs variétés de couleur à la quantité plus Où moins grande d'oxygéne qu'ils absorbent (3). Il en est de méme des fruits et de leurs graines. Cependant, comme il se produit, pendant la végétation, la fleuraison, et la maturation , beaucoup d'actions chimi- ques différentes ; il ne serait pas prudent d'attribuer toutes les diversités de coloration à la seule action de oxygène et du carbone. (De Candolle.) Dans la classification des couleurs, on a pris la teinte la plus commune, le vert, comme terme de comparaison. (1) Foy. éd. in-8°, 1, p. 173. — Plant. équinox., 11, p. 8, pl. 69. (2) Macaire, Color. automn. des feuilles. Mém. Soc. Phys. de Geneve, t. IV. (3) Schubler et Funk, Unters. uber die farben der Bluthen. Tu- binge, 1825, in-8°. Pr DES VARIETÉS. 37 Il est des fleurs dont les nuances sont plus oxygénées que le vert et des fleurs dont les teintes sont moins oxygénées. Parmi les premiéres est le jaune; parmi les secondes, le bleu. Le jaune et le bleu sout les couleurs les plus opposées. Chacune d'elles se modifie et forme une série qui commence Par le vert et se termine par le rouge. Le rouge se trouve ainsi le maximum et le minimum d’oxygénation. La série dés couleurs jaunes est appelée série oxydée ou Positive par MM. Schubler et Funk, et série xanthique Par M, de Candolle. ! La série des couleurs bleues est appelée série désoxydée Ou négative par MM. Schubler et Funk, et série cyani- que par M. de Candolle (1). On peut disposer ces deux séries de la maniére suivante: Série Vert. i > ene Xanthique. “mm. "mm CyanIque. Jaune vert. Bleu verdatre. Jaune. | Bleu. Jaune orangé. Bleu violet. Orangé. Violet. Orangé rouge. Violet rouge. a CR CR —— Rouge. Le blanc n’est qu'une des couleurs des deux séries ex- trémement légère ou dégradée. Le noir est du bleu ou du Violet trés-foncé. A la série des fleurs xanthiques appartiennent les genres Oxalis, Rosa, Verbascum , Potentilla, Tulipa, Ranunculus... Dans la série des fleurs cyaniques se trouvent les genres Campanula , Vinca, Phlox, Geranium, Scilla, Anagallis... -Il y a des genres dont les espèces peuvent étre rapportées (1) Phys. végét., 1. 11, p. 906 et 907. 38 DES VARIETES, aux deux séries; tels sont les Linum, les Gentiana, les Son- chus... ; Les fruits, comme les fleurs, ont des couleurs xanthi- ques ou cyaniques. Nous observons les premiers dans les Ce- risiers, les Groseilliers, V Epine-vinette.Nous avons les seconds dans plusieurs Lantana, le Dianella, le Viburnum Pinus (1). D’autres parties des végétaux, telles que les racines , les écorces , les bois , Offrent aussi des couleurs plus ou moins vives : Celles-ci se développent quelquefois sans l'influence : de la lumière, etsans action, du moins apparente, de la part de loxygène. (De Candolle.) Ces couleurs paraissent pro- duites, en général, par des matières sécrétées (2). Le pigment des animaux peut étre moins coloré ou moins abondant , dans certaines circonstances , que dans l'état normal > OU méme manquer entièrement; il est. susceptible, au contraire , dans d'autres cas > d’être plus coloré ou plus abondant : d’où naissent deux ordres d'a- nomalies précisément inverses, les unes par diminution ou défaut, les autres par augmentation ou excés. Il existe, en outre, d'autres aberrations qui résultent, non d'une diminution ou d'une augmentation , mais d'une simple altération de la matière colorante (3): Les mémes phénoménes nous sont offerts , dans les vé- gétaux, par la chromule ; elle peut diminuer ou disparaitre, augmenter ou se développer dans des parties oü elle n'exis- tait pas, ou bien subir des transformations plus ou moins notables sans varier en quantité. De là les trois ordres sui- vants d’anomalies : 1° Les anomalies par défaut de coloration ( diminution ou disparition de la chromule) ; (1) DC., Phys. végét., t. n, p. 208. (2) DC., l. C., t. Tr, p. 916. (3) Tsidore Geoffroy Saint-Hilaire, Traité de térat., t. 1, p. 291. DES VARIÉTÉS, 39 2" Les anomalies par excés de coloration (augmentation ou apparition de la chromule) ; | 3" Les anomalies par changement de coloration (trans- formation de la chromule). J'ai désigné le premier phénoméne sous le nom d'albi- nisme , le second sous celui de chromisme et le troisiéme sous celui d'alfération. CHAPITRE I. DES VARIETES PAR DÉFAUT DE COLORATION , OU DE L’ALBINISME. $ I. — De l'albinisme complet. Les plantes, développées à Pobscurité parfaite, sont blan- chatres ou jaunatres : on les appelle étiolées ; ce sont des es- aces d’albinos péces Aristote avait déjà observé que les parties non exposées à |’ ration ; il regardait leur teinte blanche comme une preuve de faiblesse et comparait le phénomène à celui de l'albi- msme. Les organes étiolés se montrent non-seulement sans cou- des végétaux action du soleil se présentaient sans colo- DES VARIÉTÉS. : 41 leur, mais encore plus allongés, plus gréles , plus aqueux; ils perdent leur rigidité, leur odeur et leur sapidité. L'homme a profité de la connaissance de ce nouvel état pour modifier certains végétaux et les rendre propres à son usage. Les jardiniers abritent, dés leur naissance, les es- péces dont ils veulent affaiblir la coloration , la dureté ou la Saveur ; ils lient ensemble les feuilles extérieures des choux et des salades, pour en blanchir les parties inté- rieures. Les Anglais, dans le méme but, recouvrent d'un Vase opaque les jeunes pousses du Crambe maritima. En France on enterre , en partie, les Céleris et les Cardons. Quand un végétal s'est développé sous l'influence de la lumière, il est coloré avec plus ou moins d'intensité et de diversité. Si une plante, née au soleil et revétue de sa li- Vrée habituelle, est portée dans l'obscurité , ses nuances Pâliront et deviendront de plus en plus blanchatres. Ce phé- homéne ne tient pas à la disparition réelle de la chromule déjà développée, mais à ce que la matiére colorante de toutes les parties jeunes sera délayée dans un plus grand espace, à mesure que ces parties grandiront. (De Candolle.) Des Poires couvertes d'une lame d'étain fort mince sem- blaient avoir perdu leur couleur verte au bout de trois se- maines (Sénebier). L’étiolement ou le demi-étiolement sont deux phases d'une véritable maladie, qui cesse avec la disparition des causes qui l'ont déterminée; mais la décoloration des or- Sanes peut être produite par des actions différentes de celles dont il vient d'étre question , et s'établir avec une sorte de Constance. Ce dernier mode d'albinisme ressemble davan- tage à celui des animaux ; il constitue une vraie anomalie. L'action du froid parait influer sur la livrée des parties végétales comme sur la coloration des animaux ; elle arréte la production de la chromule ou rend ses teintes impar- x f + RR caa ae ci a -— | Hd Sie nn Y poc alg Qi RS De re 42 DES VARIÉTÉS, faites : le végétal adopte alors une couleur plus ou moins blanche. — Linné a cueilli ,. en Laponie, des pieds de Polemonium ceruleum qui portaient des fleurs bleues et des fleurs déco- lorées; ila vu aussi des Pédiculaires et des Campanules à fleurs blanches; il fait observer qu'il n’a trouvé, pour ainsi dire, aucune fleür bleue ou rouge qui ne lui ait présenté des variétés sans couleur (1). Un simple abaissement de tem- pérature suffit quelquefois pour diminuer l'intensité des teintes végétales. En 1767, les vents du nord régnérent pendant longtemps aux environs de Harlem , et la saison fut froide ; les amateurs de Jacinthes remarquérent que les : variétés rouges de ces plantes offraient des nuances plus | pales que leurs nuances ordinaires (2). La décoloration peut étre amenée aussi par la station éle- : vée des végétaux. Il parait que sur les hautes montagnes les teintes rouges et bleues s’affaiblissent graduellement ou bien disparaissent en entier. Certaines Gentianes, bleues daus la plaine, deviennent blanches à une grande éléva- tion (3). L’Oxytropis montana et le T rifolium pratense passent au blanc sur les Pyrénées et sur les Alpes (4). Toutes les causes débilitantes semblent concourir à la production de l'albinisme. La nature du sol est toujours pour beaucoup dans ce phénoméne. Une terre de mauvaise qualité détermine souvent la dégénérescence des couleurs; de vives qu'elles étaient , elles passent au pàle et graduelle- ment au blanc. Un Geranium batrachioides , planté dans un fonds médiocre, a porté, l'année suivante, des fleurs variées de blanc et de bleu ; l'année d’après, toutes sont nées blan- (1) Flor. lapp. proleg., xvi, p. 52, 54 et 110. -(2) Saint-Simon, Des; Jacinthes , p. 53. (3) Sénebier, Phys. végét. , t. v, p. 64 et 168. (4) Linné, Flor. lapp., p. 218 et 221. DES VARIÉTÉS. à 43 ches; et, ce qui est plus remarquable , c’est que l'anomalie. s’est maintenue plus tard dans un bon sol (1). L'absence de couleur arrive encore par des causes autres que le manque de lumière ou de chaleur, l’élévation du ter- rain où sa nature ; d’où il est permis de conclure que la dé- coloration est un phénoméne plus complexe que ne le pen- Sent la plupart des botanistes. J'ai vu de jeunes pousses d’un Ilex Aquifolium et des ra- ‘Meaux d'un Vinca minor dont toutes les feuilles étaient d’un blanc jaunátre : ces parties ne paraissaient pas sensiblement malades; elles n'offraient ni les dimensions ni la consis- lance des individus étiolés. On sait, au reste, qu'il existe des végétaux habituellement privés de matière colorante , quoiqu'ils soient placés dans un bon sol et exposés aussi bien que les autres à l'action de la lumiére et à celle de la chaleur ( des Lichens , des Fucus , des Champignons ). Parmi les appareils des végétaux le plus facilement atteints par l’albinisme , il faut placer au premier rang la fleur, et dans la fleur citer la corolle. Il y a des Digitales blanches (2), des Hysopes blanches (3) , des Coquelicots blancs (4). Parmi les fleurs rouges , on trouve assez fréquemment les Pédicu- laires, les Bruyères, certains Tréfles ; parmi les fleurs bleues, les Campanules, les Pervenches, les Lilas, et, parmi les fleurs jaunes, les Mélilots, les Potentilles , les Molènes. En général, les fleurs rouges et rea bleues passent souvent “et facilement au blanc (5); les jaunes persistent davantage dans leur coloration. (1) Dumont de Courset, Bot. cult., t. 1, p. 336. (2) « Digitalis alba, folio aspero. » ( C. Bauh., Pin., 244.) (3) « Hyssopus gate: alba. » ( C. Bauh., Pin., 218.) (4) « Papaver erraticum majus, flore albo. » (antis Inst., p. 338.) (5) « Rubri et cærulei flores inter omnes facillime et sæpissimè in « album transeunt. » (Linn., Phil. bot. , 266.) — « Color facillime 44. DES VARIÉTÉS. On observe aussi des fruits anomaux dont les couleurs ont disparu; telles sont les Fraises (1), les Groseilles (2), les Merises (3), les baies de Genévrier (Juecs. Les Myrtilles, qui paraissent ordinairement d'un bleu foncé, prennent souvent, dans les Ardennes, une belle couleur blanche. En 1746, à Castelnau, en Médoc, un paysan coupa, au pied, un cep de Muscat rouge; l'année suivante, huit ou neuf rejetons se développèrent : il n’en laissa que deux; Pun donna du Muscat rouge et l'autre du Muscat blanc (5). $ IL. — De l'albinisme incomplet. L'albinisme est incomplet quand toutes les parties d'un méme organe n'ont pas été affectées par la décoloration ; on y voit des espaces plus ou moins blancs et des espaces co- lorés. Les parties sans couleur sont des points où la chro- mule ne s'est pas développée soit en quantité, soit en qua- lité nécessaires pour fournir la teinte du reste de l'organe. Les feuilles sont trés-sujettes à l'albinisme incomplet ; elles naissent avec un parenchyme vert dans certaines par- ties et blanc dans d'autres. Ces feuilles anomales sont dites panachées ; On les regarde comme un ornement ; aussi tous « variat presertim ex cæruleo rubrove in album. » (Ibid., Crit. bot., p. 313.) (1) Duchesne, Hist. frais., p. 12. (2) « Ribes rubrum var. album. » ( Desfontaines » Cat. bot., p. 164.) (3) Dum. Cours., Bot. cult., t. v, p. 528. (4) Rudb., Zt., 9. (5) Mélang. hist. nal., Lyon, 1765, t. i1, p. 467. . DES VARIÉTÉS. 45 les efforts de l'horticulture se sont tournés vers leur pro- . duction, leur maintien ou leur multiplication. Presque tous les végétaux paraissent susceptibles de porter des pana- chures; M. de Schlechtendal a publié une liste de ceux qui en ont le plus souvent (1). Les panachures sont blanches, jaunes, blanchátres ou jaunátres ( 2). Les unes forment des espéces de raies, de li- Shes, de rubans, les autres de véritables taches ; quelques- Unes sont réduites à des points. Dans certains cas, les raies peuvent border exactement l'organe. Ainsi, dans une variété de Myrte commun, on re- Marque une petite bande jaunatre, étroite, assez tranchée, à peu prés égale dans toute son étendue, qui entoure le limbe de la feuille. Dans I’ Agave americana (var.'8. variegata) , Sa bande est plus jaune et plus nettement tranchée (folium margine amené flavum). Dans le Houx panaché, ta bordure est jaunátre, sinueuse et disposée irréguliérement. Dans d'autres cas, les raies sont distribuées sur les di- verses parties de l'organe. Déjà, dans l’ Agave americana, on trouve quelques feuilles qui ont non-seulement la bande marginale signalée, mais encore plusieurs lignes médianes. Ce phénoméne devient plus marqué dans quelques espéces d'Aloés ; on le voit aussi, à différents degrés, dans P Arundo donaz et le Phalaris arundinacea. M. de Jussieu a trouvé , dans le parc de Meudon, un Fraisier panaché dont toutes les nervures étaient jaunes; le reste de la feuille présentait un beau vert (3). Les jardiniers cultivent un grand nombre de variétés végétales à feuilles panachées : on y voit des (1) Linnea, 1830, v, p. 494. ` (2) Chez les animaux normalement colorés en vert, par exemple la plupart des perroquets, les variétés albines sont jaunátres ou méme jaunes. (Isid. Geoff. Saint-Hilaire, Traité de térat., t. 1, p- 317.) (3) Duchesne, Hist. frais., p. 70. 46 DES VARIÉTÉS, Orangers, des Citronniers, des Sureaux, des Tilleuls, des Frénes , des Marronniers , des Hétres, des Groseilliers , des Laurier s-cerises, des Rosages, des Alaternes, des Lilas , des Ibéris, des Douces-améres, des Perve nches..,... Les taches qui ornent les feuilles sont larges ou petites , arrondies ou anguleuses ; quelquefois elles n'offrent aucune figure déterminée. M. de Candolle a observé qu'en géné- ral les feuilles des Endogénes ont des panachures en ban- des longitudinales paralléles aux nervures , et que dans les Exogènes ce sont des taches irrégulières (1). | Dans certains végétaux, les panachures sont ponctiformes et si pelites, qu’on a beaucoup de peine à les distinguer du fond; d’autres fois elles se rapprochent tellement, que Porgane finit par devenir entièrement décoloré. J'ai vu, dans l'herbier de M. de Candolle, une feuille de Marronnier moi- tié verte et moitié blanche ; la nervure médiane servait de limite à la décoloration. Il y a des végétaux dans lesquels toutes les feuilles se montrent panachées ; d'autres fois le phénomène se borne à une branche ou un rameau. Les fleurs et les fruits ont aussi leurs panachures, On a figuré des Coquelicots à pétales rouges bordés de blanc (2) et des Coquelicots à pétales blancs bordés de rouge (3). On a décrit des Tulipes, des OEillets, des Ané- mones, des Jacinthes, avec des stries, des flammes, des marbrures blanches ou jaunâtres, simples ou ramifiées , rapprochées ou divergentes. Des phénoménes semblables nous sont offerts de temps (1) Phys. végét., t. 1, p. 891. (2) « Papaver erraticum rubrum marginibus albis. » (Weinm., Phyt. ` tab., 190, e. c. tab. 788 a. (3). « Papaver erraticum majus, flore albo circulo rubro. » (Weinm., Phyt. , t. 790 b, t. 789 f.) DES VARIÉTÉS. 47 en temps par des Poires, des Pommes, des Prunes, des Courges et un grand nombre d’autres fruits. Quelquefois la décoloration est un peu plus étenduc; toute une partie de l'organe parait blanche ou presque blanche, et l'albinisme tend à devenir complet. Ainsi Linné a vu en Laponie une variété de Grassette avec des lèvres tout à fait décolorées (1). On a cité des Balsamines à lleurs rouges d’un côté et blanches de l'autre (2). Il y a des grains de raisins mi-partis de blanc et de noir , et des Haricots moitié violets et moitié jaunes, ou moitié bruns et moitié blancs. : On perpétue les plantes panachées par bouture, par greffe OU par marcotte; on les fait naître en croisant les races ou les variétés. Knight, ayant fécondé un Chasselas blanc et | un Frontignan blanc avec la vigne d’Alep, obtint des | Staines qui produisirent des pieds à feuilles panachées (3). - Les panachures peuvent devenir héréditaires, comme, par *xemple , dans la Sauge, le Buis, le Houx. La stabilité de ces anomalies varie beaucoup, suivant les espèces. On as- Sure qu'en général les panachares finissent par disparaitre dans un sol bien cultivé , et qu'elles se conservent, au con- traire, dans les terrains plus ou moins maigres. On a: ob- Servé aussi que les individus. malades se panachent avec facilité ; par exemple, les Tulipes, faibles et délicates, sont plus sujettes à ce phénomène que les variétés très-vigou- reuses. (1) Flor. lapp., p. 9. (2) « Balsamina flore partim candido , partim rubro. » (Tournefort, Lnstit., p. 418.) | (3) Trans. Linn. Soc. Lond., t. 9, p. 268. insane — Saas š TB ec er ema. mage: i Papa ee CHAPITRE IL. DES VARIETES PAR EXCÈS DE COLORATION OU DU CHROMISME. J'ai désigné sous le nom d'albinisme les anomalies par défaut de matiére colorante : ceíte dénomination est em- pruntée à la Zoologie. L'anomalie inverse nous est offerte par les plantes comme par les animaux; mais elle ne peut pas porter le méme nom, celui de mélanisme. Dans Jes animaux, l'augmentation de la matière colorante produit une nuance qui se rapproche plus ou moins de la nuance noire. Il n'en est pas de méme dans les végé- taux, chez lesquels le noir n'existe pas et où les teintes, qui en sont les plus voisines, ne se font voir que dans des cas Lrés-rares. La matière colorante peut augmenter dans un organe DES VARIÉTÉS. 49 qui en posséde une faible quantité, ou se développer dans un endroit oü il n'en existait pas; les parties affectées pren- nent alors toutes sortes de teintes ou de couleurs. Je désigne- rài ces phénoménes sous le nom de chromisme. On a vu, au commencement de ce livre, que le carbone , loxygène, Ja lumiére et la chaleur étaient les principales Sources de la coloration des végétaux. Il a été dit que, dans les plantes privées de lumière, la chromule ne se développe Pas et que la coloration est nulle. Deux lampes suffisent pour nuancer en vert pále de jeu- nes individus de Lepidium sativum. (Humboldt.) Plus d'é- Clairage artificiel augmenterait l'intensité de la coloration ; Mais la lumière du soleil seule est capable de faire éclore les teintes naturelles. Il suffit de vingt-quatre heures pour Colorer parfaitement en vert une plante étiolée. (Sénebier.) D’après cette action de la lumière, il est facile de concevoir Pourquoi les végétaux le mieux exposés à l'influence du Soleil sont ceux qui se montrent le plus vivement colorés. La partie d'un Abricot tournée vers la lumière est ornée ordi- nairement d'une teinte plus belle ou plus foncée que le reste de sa surface ; aussi les jardiniers, pour relever la teinte gé- nérale de leurs fruits, ont-ils soin d'enlever les feuilles qui leur donnent trop d'ombrage. On comprend encore pour- quoi certaines parties normalement développées à l'obscu- rité ef parfaitement incolores, telles que les écailles des bulbes enterrées ou les extrémités des tiges souterraines , deviennent vertes ou verdâtres quand elles sont placées à Une faible profondeur , et qu'une circonstance quelconque “st venue les exposer à la lumière. Les tubercules des Pom- Mes de terre, lorsqu'ils se trouvent. accidentellement sou- Mis à l'action du soleil, ne tardent pas à adopter au moins Sur leur surface une couleur verte herbacée. (Turpin.) D'autres causes influent sur Papparition ou l’excès de la í 50 ; DES VARIETÉS. coloration ; ce qui explique pourquoi , parmi plusieurs plan- tes également éclairées, artificiellement ou naturellement , Ja coloration arrive avec plus ou moins de promptitude ou d'intensité dans les unes que dans les autres. Ainsi, par exemple, Sénebier a constaté que l'abaissement de la tem- pérature, qui, dans certains cas, détermine la décoloration, pouvait, au contraire, la produire dans d'autres circons- tances; ila vu le froid peindre en violet les pétales blancs des Féves (1). i L'exagération dela couleur arrive assez souvent sans cause appréciable. Des fleurs, à teintes pales, augmentent peu à peu ou brusquement l'intensité de leurs couleurs 5 sans qu'il soit possible de découvrir la source de cette ano- malie. | L'apparition de la chromule, dans des parties qui n'en présentaient pas, se montre aussi avec assez de fréquence. Combien de fleurs, habituellement blanches, qui adoptent dans nos jardins des couleurs plus ou moins prononcées et plus ou moins brillantes! Les Pâquerettes deviennent pourpres; les Aubépines se colorent en rose; les Oxalis, certains Pois, les Datura, les Iberis passent au rouge, au brun, au lilas ou au violet: Les racines de Betteraves, blanches dans l’état sauvage, se revétent, par la culture, de teintes Jaunâtres, ou jaunes, ou rouges, ou purpurines, ou vineuses. Les Haricots deviennent jaunes, roses, rouges , violets et violet noir. Dans plusieurs anomalies des appareils floraux, les par- ties sexuelles, ordinairement incolores , adoptent la livrée des organes foliacés ; elles se remplissent de chromule d’un vert plus où moins gai. Dans les fleurs doubles ou pleines , les filets des étamines se dilatent outre mesure et se colo- (1) Phys. végét., t. v, p. 59. DES VARIETES. 51 rent comme les vrais pétales. La chromule qui se forme avec cette anomalie parait jaune dans les Populages , cou- leur de chair dans certaines Ronces, rose vif dans les Péchers, Touge dans les Grenadiers, bleue dans les Campanules, et variée de plusieurs couleurs dans les OKillets, les Anémones, les Tulipes. CHAPITRE III. DES VARIETES PAR CHANGEMENT OU ALTERATION DE LA COLORATION. Les couleurs des végétaux sont extrémement changean- tes; aussi leur peu de stabilité a-t-il engagé les phytogra- phes à ne pas les employer dans les caractéres des espéces. Linné a dit, il y a longtemps, ne vous fiex pas trop à la cou- leur (1). Les horticulteurs ont multiplié et multiplient chaque jour, sans nombre et sans nécessité, les variétés ou les espè- ces végétales, en se fondant sur les changements de la cou- leur. Tournefort a trouvé dans deux Jacinthes soixante- trois espéces et quatre-vingt-treize dans une seuleTulipe (2). (1) « Nimiüm ne crede colori. » (Phil. bot., 266.) (2) Linné, Crit. bot., p. 155. DES VARIÉTÉS. 53 Linné s’est élevé avec force contre cette manie de créer des variétés et des espéces ; il a tourné en ridicule les noms absurdes imaginés pour les désigner (le Triomphe de Flore , la Splendeur de la vie, l'Épouse d Amsterdam). Depuis Pim- mortel naturaliste suédois, les jardiniers n'ont pas cessé d'étendre leur bizarre catalogue. J'ai sous les yeux la no- Menclature des Jacinthes , cultivées àHarlem, en 1767, pu- bliée par le marquis de Saint-Simon ; on y trouve mille sept “ent cinquante-deux variétés, avec les noms les plus dérai- Sonnables qu'il soit possible de créer (Je Bouquet formidable, le Tróne des lions de Salomon, l'Evéque de Bristol, la Pu- celle amoureuse). On a vu plus haut que les feuilles , habituellement vertes, Passaient au jaune ou au rouge, et puis au brun. Ce phéno- mène a lieu quelque temps avant la chute de ces organes; mais il arrive , dans certaines. circonstances, que la modi- fication anticipe sur son époque accoutumée et que ces par- lies se présentent colorées en brun, ou en rouge, ou en jaune, suivant l'intensité du phénomène, Ce changement devient alors anomalie. Des transformations analogues arrivent dans les fleurs et leur font adopter les diverses colorations de leurs séries xanthique ou cyanique. Ces changements sont (rés-variés €t trés-inconstants (1). Certains pétales colorés se métamorphosent en organes foliacés et leur chromule devient verte ; d’autres jaunissent, Tougissent ou brunissent en tout ou en partie. Ces trans- formations ont lieu tantôt sur l’ensemble des fleurs du vé- Sétal, tantôt seulement sur quelques-unes. J’ai vu , au jar- din des plantes de Montpellier, un Chrysanthemum indicum |. dont la calathide avait la moitié de ses fleurs violette et Pau- (1) « Colore in floribus nihil inconstantius est. » (Linn., Phil. bot., 266.) | J 54 DES VARIETEs, tre moilié tout a fait rouge. Une ligne de démarcation bien tranchée séparait les deux couleurs. — | Dans la série xanthique, les fleurs du Nyctago Jalapa pas- sent du jaune au jaune-orangé, à l'orangé et au rouge; celles de l'Anthyllide, de l'Impatiente, des Onagres présen- tent des phénoménes analogues; celles du Rosa eglanteria sont jaune orange ou orange rouge; celles du Ranuncu- lus asiaticus prennent toutes les nuances de la série xan- thique jusqu'au vert. | On a observé que, toutes choses égales d'ailleurs , les teintes jaunes étaient les plus tenaces (1). Dans la série cyanique , les fleurs d'un grand nombre de Borraginées (Lithospermum purpureum, Echium vulgare, Ly- copsis arvensis) varient du bleu foncé au violet-rouge ; celles des Ancolies et des Polygala du bleu au pourpre , au rouge pale, au rose tendre; celles de P Hortensia du rouge très-lavé au rose, au gris, au lilas, au bleu-violet et au bleu. En général, dans les variétés d’une même espèce, on doit s'attendre à rencontrer toutes les couleurs d’une même série, mais non pas celles des deux. (De Candolle.) On n'a jamais vu la corolle dune Pervenche , d'une Chicorée ou d'un Bluet adopter la couleur d'un Bouton d'or, ni la fleur d'un Mille- pertuis, d'un Genét d'Espagne ou d'un Cytise se teindre en bleu, en indigo ou en violet (9). Le jaune et le bleu sont deux couleurs à peu prés incompatibles. Un petit nombre de plantes font exception néanmoins à la régle générale, en ce que leurs fleurs présentent des teintes xanthiques et des teintes cyaniques. Ainsi le bleu | devient jaunâtre dans quelques espèces de Safrans , et le (1) Dumont de Courset, Pot, cult., t.1, p. 337.—DC., Phys. végét., t. ri, p. 914. (2) Lam. , Dict. encycl. , t. 1, p. 145. DES VARIÉTÉS. 55 Jaunátre passe au bleu dans certaines Giroflées. Les Jacinthes Sont ou bleues, ou rouges, ou jaunâtres ; la Primevère-au- ricule adopte le Jaune, le fauve, le rouge-brun, le vert et Une sorte de violet-bleu ou de bleuâtre (de Candolle); la Violette éperonnée passe du violet pale au violet-pourpre, et quelquefois au rouge vineux ; elle devient aussi jaune lavé de bleu, et enfin jaune de soufre (De Gingens). C'est danslesinnombrables variétés des Dahlias de nos par- terres qu'il faut voir les nuances infinies qui peuvent briller Sur les corolles. Il y a des Dahlias rouges, rayés de violet OU jaunes et violets, mouchetés de rouge ou de ponceau. Ceux-ci sont verdátres avec le cœur lilas, ou lilas avec le Cœur yerdàtre. Ceux-là se montrent couleur de chair tendre avec le centre couleur d'or ou jaune de paille avec le bord rougeâtre. On en trouve de tigrés, de pointillés, tantôt en dessus, tantót en dessous , quelquefois des deux côtés, avec du rouge-carmin, du fauve-marron, du brun velouté, du Violet-noir. Toutes ces nuances sont distribuées sur des fonds brillants ou pales, unicolores ou mélés. Souvent elles Viennent se perdre dans des stries, des taches, des marbrures entiérement décolorées. D'autres fois, ces parties blanches restent tranchées, elles ne se mêlent point aux différentes leintes et semblent, au contraire, destinées à en rehausser l'éclat (1). Comme les fleurs, les fruits colorés paraissent s'éloigner trés-rarement des deux séries xanthique et cyanique. Les al- lérations de leur chromule s’opérent aussi dans des limites facilement appréciables. ae Dans la premiére série, il y a des Oranges avec des (1) On remarque cependant , au milieu de ces variétés, que les fleurs S'écartent difficilement de la série xanthique et qu'elles n'arrivent Jamais jusqu'au bleu pur. 56 DES VARIÉTÉS. quartiers rouges entremélés avec des quartiers jaunes. Les fruits du Cornouiller, de l'Aübépine, des Épines-vi- nettes sont tantôt rouges, tantôt jaunes ou jaunatres. Les Abricots paraissent orangés , rougeátres, jaunes et verdátres. ; Dans la série cyanique, nous trouvons les raisins qui sont bleus, bleu violet, violets, rouges ou rougeatres (1). D’un autre côté, les Prunes peuvent parcourir indis- tinctement tous les degrés des deux séries. On voit des ya- riétés bleues, d’autres bleu violet ou violettes, d’autres rouges et rougeâtres, et d'autres jaunes, jaune rouge et jaune pale. Il en est de méme des fruits de nos Figuiers; ils sont tantót violets ou violet rouge, tantót rougeatres ou rouge jaunátre, tantôt jaune foncé, jaune clair, jaune verdatre, ou bien tout à fait verts. ; Il est trés-difficile de remonter aux sources de toutes ces variations. j Dans une belle fascie d'Euphorbia Characias, trouvée par M. Delile aux environs de Montpellier, toute la partie su- périeure du rameau dilaté avait pris une teinte rouge pro- noncée, Sénebier a remarqué que les Poiriers bon-chrétien, entés sur le franc , avaient des fruits plus verts que les Poiriers greffés sur Cognassier (2); ce fait semblerait annoncer que la nature des sucs nutritifs est pour beaucoup dans le phé- noméne de la coloration. . . Turpin a eu occasion de constater que plusieurs parties de Potirons , ouvertes et exposées à la lumière , avaient verdi sensiblement : il crut d'abord que cette couleur était due à quelque parasite ; mais, par le secours du microscope, (1) Les variétés dites jaunes sont des raisins décolorés. (2) Phys. végét. , t. v, p. 58. DES VARIETES. 57 il découvrit que la chromule avait passé du jaune au vert (1). Quand les altérations de la matière colorante ne s'éten- dent pas sur tout l'organe , il en résulte des raies, des ta- ches , des points qui varient beaucoup sous le rapport de la nuance et de la distribution : ce phénoméne est analogue à l'albinisme incomplet ; les Dahlias , dont il a été question plus haut, en offrent des exemples remarquables. Ces pa- nachures colorées sont plus rares et moins constantes que les panachures blanches ; elles résultent quelquefois du croi- Sement des espéces ou des variétés ; souvent elles sont dé- terminées par des maladies partielles ou par des piqüres Winsectes. On trouve des Tulipes, des Anémones , des Pa- Vols, avec des bandes rouges sur un fond jaunatre oa Jaunes sur un fond rouge, et d'autres avec des flammes Pourpres sur un fond bleu ou bleues sur un fond pourpre. J'ai cité des Oranges partie rouges, partie jaunes. M. de Candolle a vu une Pomme qui offrait, d'un cóté, lacouleur des Pommes de Reinette ordinaire et , de l'autre, la couleur des Pommes de Reinette grise (2). | D'autres fois des raies ou des taches habituellement colo- rées et tranchées sur un fond vert , ou jaune, ou rouge per- dent leurs teintes naturelles , et adoptent la livrée de tout l'organe. En Égypte, les calices du Nymphea cerulea sont marqués de fines marbrures noires. Des bulbes de cette - plante, cultivées au jardin de Montpellier, ont donné, la Premiére année seulement, des fleurs à calices tachetés. Ces Nymphæa ont fleuri depuis avec des calices verts, uniformes, Sans aucune tache (3). (1) Mém. sur les tubercules de S. tuberosum. (Mém. mus. , t. xxix. ) (2) Phys. végét., t. mt, p. 735. (3) Delile, Ess. d'acclim. ( Bull. de la Soc. d'agric. de l'Hérault, Oct. et nov. 1836, p. 307.) 58 DES VARIÉTÉS. On sait que P'Helianthemum guttatum perd souvent la tache brune qui se trouve au bas de ses pétales ; cette partie devient alors jaune et brillante comme le resto de l'or- gane (1). Enfin les taches noires des pétales du Pavot-coquelicot | disparaissent aussi dans certaines circonstances , et la co- rolle entiére parait rouge unicolore (2). (1) « Helianthemum guttatum 2 immaculatum. » (DC., FI. fr., 4490.) (2) « Papaver erraticum, floribus absque maculis,» (Vaill., Bot. par., p. 156.) LIVRE II. DES VARIÉTÉS DE VILLOSITÉ. Les poils (pili, vill’) sont des organes extérieurs qui re- couvrent en tout ou en partie la surface du végétal : on les Observe , soit dans le systéme aérien, soit dans le systéme Souterrain ; ils couvrent, de préférence, les jeunes pousses et les nervures des organes foliacós. —— Les poils se présentent sous l'aspect de petits filets plus ou moins gréles et plus ou moins courts, ordinairement nom- breux et rapprochés ; ils varient sous le rapport de la forme, de la disposition et dela nature. Les poils sont, en général, filiformes ou subulés ; quel- 60 DES VARIÉTÉS. ques-uns offrent une dilatation à leur sommet , d’autres sont renflés vers le milieu : il y en a de simples, de bifides , de trifides , de multifides, d'étoilés et de ramifiés. Les poils se montrent souvent disposés perpendiculaire- ment à la surface des organes : plusieurs paraissent trés- obliques; d'autres sont horizontaux, couchés ou attachés par le milieu de leur longueur. Il y a des poils qui naissent d'une glande dont ils sont le conduit excréteur; d'autres portent une glende à leur sommet (1). Les poils appartiennent à l'épiderme de la plante ; les uns sont formés par l'allengement d'une cellule , d'autres par une suite de cellules disposées bout à bout > d’autres par plusieurs cellules agglomérées et plus ou moins modifiées. Suivant le nombre des poils, leur mollesse , leur direc- tion, leur entre-croisement et leur situation, les organes ou les végétaux ont été appelés séfiféres, ciliés , pubescents , velus , hispides , hérissés , cotonneux et tomenteux. Les anomalies qui affectent la villosité peuvent étre ran- gées sous deux ordres généraux. Dans certains cas, il y a diminution dans le nombre ou dans le volume des poils, ou disparition compléte de ces pe- tits organes. Dans d'autres cas, il existe augmentation du nombre ou du volume, ou bien apparition, formation de nouveaux poils. Je traiterai de la premiére anomalie sous le nom de gla- brisme et de la seconde sous celui de pilosisme. (1) Les poils et les glandes se confondent par des nuances insen- sibles. A E * T an RE. = pe 66 DES VARIETÉS. petits poils dans les sables maritimes, ct que le Plantain corne-de-cerf, privé de ces organes ou à peine pubescent dans les terrains humides, se couvre de poils plus ou moins apparents, quand il se développe dans un mauvais terrain (1). Il y a une variété du Plantago lanceolata, aux environs de Bayonne, dans les Landes, qui est revétue d'un duvet soyeux si abondant, qu'on serait tenté de la prendre pour une espèce bien tranchée. | Lorsque la villosité se montre dans une plante habituel- lement privée de poils, il y a production réelle, création de ces organes ; si elle a lieu dans une espèce pourvue d'un cer- tain nombre de poils trés-petits, écartés, imperceptibles , ceux-ci Ont simplement augmenté leur volume. Quelquefois il y a, en méme temps, apparition de nouveaux poils et grossissement des anciens. D'autres fois, la plante est restéc dans un état de rabougrissement ou de nanisme qui fait pa- f traître ces organes plus ou moins rapprochés et plus ou moins nombreux. L'action de la lumière semble influer beaucoup sur la production de la villosité. Quelques physiologistes ont pensé que celle action résultait de l'activité exercée par cet agent sur la végétation; qu'il y avait superflu de nourriture, que ce superflu se portait sur l'épiderme ct produisait des poils: ils ont expliqué, de cette maniére, pourquoi les plantes des montagnes élevées, qui sont exposées à l'action d'une vive , lumière et qui se développent assez promptement, se trou- — vent, en général, plus velues que les espèces analogues qui | leroissent dans les plaines (2); mais les végétaux des sables “brides offrent des poils plus longs ou plus nombreux que (1) Phil. bot. , 272. (2) Sénebier , Phys. végét., t. 1, p. 448. DES VARIETES. 67 ceux des plantes de montagne, et chez eux il n'y a pas cer- tainement nutrition trop abondante. L’apparition des poils semble, au contraire, résulter assez généralement d’un dé- faut de nourriture. On augmente ou diminue, dans les jardins et pour ainsi dire 4 volonté, le duvet de cer- tains individus , en les placant dans un sol plus ou moins infertile, en diminuant ou augmentant les engrais et les arrosages. La différence de taille des plantes de montagne et de Plaine suffirait presque pour expliquer la différence de leur villosité, Les espéces des lieux élevés augmentent leur Volume général, quand elles sont cultivées dans des ter- "ains trés-bas, et l'inverse se présente, quand ces der- üières sont transportées sur des montagnes élevées. Or, n supposant, sur la surface des unes et des autres, la méme quantité de poils, il est clair que ces organes se- TOnt plus écartés et moins apparents dans les individus. les plus volumineux. (De Candolle. ) IL faut convenir Cependant que les poils sont plus longs, plus forts , dans les plantes des montagnes élevées. et qu'il ne serait pas impossible que , dans certains cas, ils ne fussent aussi plus | nombreux. | L'abaissement de la température peut influer encore sur le volume, le nombre ou l'apparition des poils ; des parties _ Qui en ont peu dans un pays semblent en prendre davan- - ‘age ou en développer de plus forts dans un pays plus froid. Quelquefois, au contraire, c'est la chaleur qui fait naitre les poils ; mais ces poils sont ordinairement d'une na- ture différente des poils habituels. Les Sueda ont générale- ment des feuilles cylindriques ou vermiculaires, composées d'un parenchyme charnu et succulent, Dans une espéce de ce genre, le Sueda setigera, on remarque, à l'extrémité de 68 DES VARIÉTÉS, chaque feuille, une sorte de soie; cet appendice sétiforme est dà à une portion de l'épiderme du sommet de la feuille , qui se desséche et s'affaisse lorsque, par Veffet de l'évapo- ration, le parenchyme diminue de volume et devient moins long que l'enveloppe. (Delile.) (1) | Cette observation explique pourquoi le filet du Sueda se- tigera se rencontre principalement sur les feuilles les plus anciennes ; elle explique aussi pourquoi les individus placés dans les circonstances les plus favorables à la végétation se présentent entiérement privés de poils. L'atrophie des organes est souvent accompagnée d'un dé- veloppement de poils plus ou moins manifeste ; ce qui vient à l'appui de l'opinion que la naissance ou l'accroissement de ces organes est amené par un défaut de nutrition. Les filets des étamines du Salix triandra se cou vrent quel- quefois de poils laineux denses et entrelacés dans une par- tie des chatons; ce qui donne en quelque facon à ces der- niers l'aspect des fruits bizarres des 7 ypha (2). «M. Joseph de Caffarelli m'a communiqué une branche de Douce-amére qui portait un rameau un peu rabougri, couvert d'une si énorme quantité de petits poils, qu'il était devenu d'un blanccendré. Il arrive quelquefois dans les Saules des villosités anomales entièrement semblables. (De Candolle.) Cependant on a des exemples de poils développés en abondance par suite d’un excès de nutrition ou d'un dé- placement de la matière nutritive. Les pédoncules du Fustet, qui sont glabres ou à peine pubescents avant la fleuraison et lorsqu'ils sont chargés de fruits, s’accroissent et se hérissent de poils violets, longs et Ts SSS » IDEO AU - (1) Voy. mon Mém. Se le genre Sueda. (Ann. sc. nat. , t. 23, IOS PN. At et 2.) | (2) Seringe , Saul. swiss. , p. 78. (Salix triandra monstrosa. ) DES VARIETES. 69 nombreux , quand les fruits avortent, comme cela a lien dans les pays froids. (Deleuze.) Les filets des étamines, dans plusieurs espéces de Molénes , deviennent aussi plus ou moins velus, quand les anthéres sont frappées d’avorte - ment (1). (1) Schkuhr , Handb., pl. 42, c. LIVRE HI. DES VARIÉTÉS DE CONSISTANCE. Les cellules, et peut-être les vaisseaux des végétaux , reçoivent dans leur tissu des matières solides qui se dépo- sent sur leurs parois membrancuses , les épaississent et en augmentent la dureté, Ces parties solides sont la lignine et les matiéres terreuses. Dans les tiges et les branches des arbres et des arbris- seaux , ces éléments de la consistance végétale se trouvent abondants. | | Dans les herbes et dans les organes dits charnus, il existe moins de lignine et moins de sels : ces parties sont remplacées par des sucs de densités trés-diverses. Les quantités des matières solides et des matières liquides DES VARIÉTÉS. 71 peuvent varier à l'infini. Aussi les végétaux présentent- ils tous les degrés imaginables de consistance , depuis le champignon fugace , qui s'affaisse et se liquéfie dés qu'on le louche, jusqu'à ces bois de fer et de gaiac qui nous lonnent par une dureté pour ainsi dire métallique. (De Candolle.) D'aprés ce qui précéde , on concoit que toutes les causes accidentelles qui tendent à suspendre ou à déranger la Production de la lignine et le dépôt des éléments terreux devront entrainer avec elles un défaut plus ou moins grand de consistance , eL qu'au contraire cette consistance paraitra plus forte, si des causes inverses des premières accélérent *t augmentent la production des parties dont il s'agit. . Je diviserai donc en deux ordres les anomalies de con- 5lstance : . 4° Les anomalies par diminution des matières solides \'amollissement) ; | 2» Les anomalies par augmentation des matiéres solides (induration). ur e tie S ae ` re m ns ns gen qe À +, | PN " = CHAPITRE I. DES VARIETES PAR DIMINUTION DES MATIÈRES SOLIDES, OU DES RAMOLLISSEMENTS, Comme la quantité de carbone fixée dans un végétal est en rapport avec l'intensité de la lumière à laquelle il a élé exposé et que le carbone est l'élément principal de la lignine, on peut dire, d'une maniére générale, que les individus placés à l'ombre ou à l'obscurité sont moins durs que les individus convenablement éclairés. Davy a observé que des Chicorées élevées comparativement à la lumiére et à l'obscurité contenaient les premières 53 parties de fibres et les secondes seulement 31 parties (1). Tous les végétaux développés loin du soleil deviennent (1) Chim. agric. , t. 1, p. 283. DES VARIÉTÉS. 73 holes , ainsi que nous l'avons vu plus haut. Dans l'étio- lement , il y a non-seulement décoloration plus ou moins complète, mais aussi ramollissement plus ou moins pro- noncé. L’absence de la lumière arrête la décomposition de l'acide carbonique et, par conséquent, la production de la lignine ; d'un autre côté, elle empêche l'exhalation aqueuse, et le végétal perdant, d’une part, le principal élément de la solidité et gagnant, de l’autre, une quantité d’eau sura- bondante , son parenchyme doit acquérir une consistance de plus en plus molle et aqueuse. (De Candolle.) L'action de l’eau peut faire naître un phénomène analo- Sue au précédent. Les végétaux accidentellement inondés , eux qui sont situés dans une atmosphère trop humide ou eux qui sont trop souvent arrosés, ne développent pas la quantité de matières solides qui appartient à leur état Normal ; ils se gorgent de sucs , seramollissent et arrivent à une consistance assez rapprochée de l'état. d'étiolement. La plupart des plantes cultivées dans les jardins potagers Sont redevables de leur dilatation monstrueuse , de la mol- lesse et de la succulence de leur tissu, aux arrosemenis forcés auxquels on les soumet. Le voisinage de la mer peut influer aussi sur la densité des végétaux ; les botanistes ont observé, il v a longtemps, que certaines plantes prenaient des feuilles plus charnues quand elles croissaient sur les bords de l'Océan et de la Méditerranée , ou sur la lisière des étangs ; c’est ce qui Arrive surtout au Lotier corniculé , au grand Plantain, à P Atriplea: rosea et au Blitum polymorphum. Toutes les causes qui viennent d'étre signalées exercent leur action tantot sur la dureté de tout le végétal , tantót Seulement sur celle de quelques-unes de ses parties. Hl y a des espéces qui n'éprouvent de ramollissement que dans leurs fleurs ou dans leurs fruits. 74 DES VARIETES. J'ai vu un pied de Vicia Cracca dont jes corolles et les organes sexuels élaient devenus charnus, mous et plus ou moms aqueux. M. Seringe ma moniré, à l'état charnu, plusieurs fleurs de Diplotaxis tenuifolia. On sait jusqu’a quel degré de mollesse et de succulence la culture a fait développer les péricarpes de plusieurs va- riétés de fruits. La bonté du terrain > Pabondance des en- grais, la greffe, l'incision annulaire viennent encore aider les jardiniers dans cette production. On a méme employé avec succés les fécondations croisées, et on a réussi, par ce procédé, à rendre charnues jusqu'aux enveloppes des Aman- des. (Knight.) CHAPITRE IL. DES VARIETES PAR AUGMENTATION DES MATIERES SOLIDES OU DE L'INDURATION. Ün a constaté depuis longtemps que, parmi les individus Une méme espéce, ceux qui sont le mieux exposés à l'ac- tion de la lumiére sont ceux dont le bois est le plus dur. Les arbres deviennent généralement plus denses, plus solides, plus pesants, dans les contrées méridionales que dans les pays septentrionaux. Il en est de même des plantes de montagnes, comparées ‘Ux plantes de plaines ; car la moindre épaisseur de l'atmos- Phére laisse arriver la lumière vers les sommités avec toute ‘on intensité et donne aux individus toutes les qualités des Végétaux trés-éclairés. Les ouvriers savent fort bien que lcs 76 DES VARIETES. Sapins des montagnes ont le bois plus résineux et plus dur que les Sapins des plaines (1). | L'état d'isolement ou d'association peut agir aussi sur la quantité de la lignine. Les arbres qui vivent séparés sont mieux disposés que les - autres pour éprouver l'influence active du soleil. Les Chénes solitaires ont le bois plus dur que les Chénes placés dans les bois (2). On a remarqué aussi que, dans un bois donné, les arbres qui forment la lisiére sont plus durs que ceux du centre, parce qu'ils ne sont pas abrités comme CCUX-Cl; On assure méme que les individus du côté méridional offrent plus de densité que les individus placés au nord. Certains états pathologiques sont capables de déterminer l'induration du parenchyme végétal. On connait les ex- croissances des troncs, des branches et des feuilles. Il en est de méme des circonstances dans lesquelles les parties cen- trales de ces développements anomaux peuvent acquérir une solidité presque pierreuse. Dans certains cas d'atrophie, le tissu devient aussi plus consistant : cette induration arrive surtout dans les branches et les rameaux, lorsque, par suite d'un défaut de nutrition, ils se transforment en épines; ellese présente aussi dans des racines monstrueuses, qui perdent leur caractére mou et succulent, et s’endurcissent d'une manière plus ou moins prononcée. ( Botanopséphide Ré. ) On a vu, dans le chapitre précédent, que le voisinage de Ja mer diminuait la consistance végétale. Un phénomène in- verse se présente, quand une espèce de icrrains saumâtres est éloignée de sa station habituelle. Les Salicornes et les (1) DC., Phys: végét., t. mn, p. 1077. (2) DC., l. c., p. 1076. DES VARIETES. 77 Soudes cultivées au jardin des plantes de Montpellier ont déja un peu plus de densité que les individus développés sur à plage. Des pieds de ces deux genres, élevés au jardin de Toulouse, ont perdu presque en entier leur caractère charnu. Enfin des causes inverses de celles qui ont été énumérées Plus haut feront naitre l'induration des fleurs et surtout celle des fruits. | Marchant a vu les fleurs d'une Rave passer à l'état car- lagineux, M. de Schlechtendal a: décrit le fait curieux ! d'une Vigne dontles baies étaient remplacées par des capsu- les (1). M. Knight est parvenu, à l'aide des fécondations Croisées, à rendre fibreux le parenchyme succulent de plu- sieurs Pêches. (1) Linnea, 1830, p. 493. LIVRE IV. DES VARIÉTÉS DE TAILLE, Re C EST-A-DIRE PAR DIMINUTION OU AUGMENTATION GÉNÉRALES DE VOLUME. Lorsqu'un animal présente toutes les parties de son corps avec un volume infiniment plus petit ou une taille consi- dérablement plus grande que les dimensions habituelles, on a coutume de regarder cet animal comme un nain ou un géant. Pour déterminer ce défaut ou cet excés d'accroisse- ment, il est indispensable d'avoir des idées bien arrétées sur les limites de tailles affectées à chaque espéce et à chaque àge. On acquiert ces connaissances en examinant les ani- maux, d'une part, au moment de la reproduction, époque qui est, en général, un des signes distinctifs de Page adulte, et, de l'autre, en comparant l'individu soupçonné nain ou DES VARIÉTÉS. 79 Séant avec plusieurs autres individus de même espèce nés en méme temps. (1. Geoffroy S'-Hilaire. ) Le terme d'accroissement des végétaux n'est pas fixe comme celui des animaux, ou, pour mieux dire, il n'existe pas chez eux d'àge adulte (Darwin); il est, par conséquent, bien difficile d'apprécier les variations de taille monstrueuse qu'ils peuvent présenter. | | D’après les phytographes, certaines espèces vivent un Stand nombre d'années (végétaux vivaces), d’autres deux ans ( bisannuels), d'autres seulement une année ( an- nuels ). - Les végétaux vivaces, appelés aussi polycarpiques, sem- blent croitre indéfiniment ; ils fleurissent ordinairement Chaque année. Cette époque est accompagnée d'un retard ou arrêt de développement; mais, l'année d’après, Pindi- Vidu collectif continue à végéter et à s'étendre. Les végétaux bisannuels et annuels, nommés collective- ment monocarpiques, paraissent, au premier abord, avoir "Ine croissance limitée ; le terme de leur développement ar- tive habituellement avec l'apparition des fleurs ou des fruits. Cette époque désigne aussi la limite de leur vie; mais cette lerminaison est loin d'étre rigoureuse, comme la mort des Animaux. Dans certaines circonstances, les espèces annuelles présentent une existence plus bornée (1): plusieurs d'entre elles peuvent durer six mois ou un an, selon qu'on les sème / au printemps ou à l'automne. Dans d'autres circonstances, les plantes annuelles deviennent bisannuelles. Ainsi la Ca- Pucine, qui ne dure ordinairement qu'une année, double | Son existence quand ses fleurs sont pleines et ne donnent | Pas de fruit. Le Blé, inondé ou couvert de neige, ne fructi- | (1) « Duratio mágis ad locum quàm ad plantam pertinet. » (Linn. , Phil. bot, , 273.) 80 DES VARIETES. fie pas et vit jusqu'à deux ans. D'autres espéces peuvent acquérir une tige plus ou moins ligneuse et prolonger en- core plus leur existence. Selon M. Delile, le Zilla myagroi- des annuel, dans les endroits où sa végétation n'a pas été troublée, devient vivace quand sa tige a été coupée ou brou- tée, et qu'il ne peut donner de fleurs (1). Toutes ces plantes rentrent donc dans la loi générale qui régit les végétaux ligneux : leur accroissement et leur mort n'ont pas de terme nécessaire; aussi M. de Candolle a-t-il émis la proposition, que la durée des végétaux est infinie, et qu'ils ne meurent que d'accidents étrangers à leur dge (2). Les végétaux ont été comparés aux animaux des classes inférieures qui vivent en communauté (3). On sait que, dans les polypes à Polypiers, les individus sont groupés ensemble d’aprés certaines lois. Dans un arbre, les bour- geons sont des parties analogues à ces animalcules ; ils paraissent associés, comme eux, dans un ordre symétrique. Or les Polypiers sont susceptibles de s'accroitre jusqu'à for- mer des bancs immenses, des iles, des presqu'iles. Les vé- gétaux peuvent, de même , Saugmenter d'une manière indéfinie. Dans les uns et dans les autres, les diverses parties sont sujettes à mourir au bout d'un temps déterminé ; mais l'ensemble, qui a le pouvoir de réparer les pertes éprouvées, continue toujours son existence et son accroissement (4). (1) « Calidæ regiones, qu estate perenni gaudent, plantas alunt toto « anno vix perituras, hinc plurime in illis regionibus planta perennes et « arborescentes evadunt, que apud nos annus sunt , uli Tropæolum, « Beta, Majorana, Malva arborea... » (Linn., Phil. bot., 213.) (2) Fl. fr., t. 1, p. 222. — Phys. végét., 4. n , p. 965. — Pline ne connaissait pas , sans doute , toute la portée de son assertion , quand il a dit : Vites sine fine crescunt. (3) Foy. les Prolégomènes , chap. 1v , à la fin. (4) Foy. Darwin, Phytologie.— Ursin, Lycée armoricain , 63, Lp. 182. — DC. , Phys. végét., t. 11, p. 963. DES VARIETES. 81 On voit, d'aprés ce qui précéde, que Page adulte ou l'aecroissement complet peut étre observé dans les indi- vidus élémentaires, mais non pas dans l'individu collectif , et que, conséquemment , nous n'avons pas de terme fixe de Comparaison, dans chaque végétal , pour déduire les carac- léres particuliers des nains et des géants. Dans les plantes Monocarpiques, l'époque de la fructification est trop variable Pour étre regardée comme la régle de la taille des espéces ; et, dans les plantes polycarpiques , l'apparition des fruits Warréte pas le développement. | Pour connaitre si un végétal est resté au-dessous de ses dimensions normales ou s'il les a dépassées, nous n'avons plus que le second moyen , indiqué plus haut , celui de com- Parer l'individu avec plusieurs autres individus de méme *spéce et de méme age. Il faut convenir que cette relation West pas toujours facile à établir. J'ai emprunté à la tératologie animale les noms de na- nisme et de géantisme pour désigner les variétés par dimi- tution ou par augmentation du volume général. CHAPITRE Te. DES VARIETES PAR DIMINUTION DE TAILLE, OU DU NANISME. La plupart des Sechs, des Flores, des Hortus, présentent des variétés qualifiées de naines. Tl y a des Rosiers nains, des Müriers nains, des Pommiers nains; mais il s'en faut de beaucoup que tous les végétaux ainsi désignés méritent cette qualification. Plusieurs d'entre eux ne doivent leur apparence naine qu'à un défaut de nourriture passager ; d'autres, qu'à certaines opérations de Jardinage. On livre souvent au commerce des boutures, des mar- cottes, des plantes mutilées qui restent quelque temps avec une taille fort petite, mais qui, soumises à une culture méme ordinaire , ne tardent pas à acquérir leurs dimensions habituelles. DES VARIÉTÉS. 83 On cultive en Chine, dans les palais des grands seigneurs, des arbres nains > tels que des Pins, des Orangers, des Chénes , qui portent des fleurs et des fruits comme les ar- bres ordinaires. Ces prétendus nains n'atteignent jamais 6 décimétres et demi (environ 2 pieds) de hauteur. Staun- ton , dans sa relation du voyage de lord Macartney, nousa dévoilé que ces miniatures ne sont autre chose que de petites branches enlevées avec beaucoup d'adresse sur : différents Végétaux , plantées comme des boutures et taillées en: arbre; elles produisent des fleurs et des fruits, et plusieurs d'entre elles durent quelquefois plus d'une année. 31 Le vrai nanisme est cet état, plus ou moins: permanent, d'un végétal dont toutes les parties offrent une.diminntion Sénérale de volume ou une taille au-dessous de celle de son Âge. T NE | Les agents extérieurs influent plus puissamment sur les Plantes que sur les animaux. Cette influence peut quelque- fois prolonger l'existence de certains étais tératologiques ; Mais , dans d'autres cas , elle s'oppose à ce qu'ils deviennent Permanents. Comme les végétaux n'ont pas de terme à leur croissance, et que nous ne pouvons juger de leur Nanisme qu'en comparant les individus supposés nains ‘ec d'autres individus du même âge développés norma- lement , il suit de là que le nanisme végétal se réduit à Une sorte d’accrotssement tardif avec plus ou moins de per- Manence. ae Dans la plupart des ouvrages , on désigne sous le nom de nanus tout végétal affecté de nanisme (1). On se sert aussi (1) « Samolus Valerandi nanus. » (DC. , Flor. fr., 2381.) — * Chironia Centaurium ^ nana. » (Duby, Bot. gall. ; t. 1, p. 238.) 77 «Trifolium procumbens € nanum. » (Ser. in DC. prodr., i. i, 84 DES VARIÉTÉS. des adjectifs minor (1), minutus (2), minimus (3), parvus (4), parvulus (5), pumilus (6), pusillus(7) et pygmaus (8). Ces différentes expressions sont quelquefois employées pour les dénominations spécifiques de certaines plantes nor- males caractérisées par une taille fort petite (9); de maniere que le méme mot peut indiquer tantót un état de nanisme ou une anomalie, tantót un état habituel, selon qu'il est employé pour un nom de variété ou pour un nom d'espéce. Le manque d'humidité ou le défaut de nourriture arré- tent l’accroissement des végétaux et sont des causes de na- nisme (10) ; les plantes qui en éprouvent les effets semblent subir, avant Page , les infirmités de la vieillesse. (Mirbel.) Adanson cite des Soucis développés dans un terrain glai- seux ou sablonneux , qui n'offraient que 13 millimétres de (1) « Cistus populifolius 8 minor. » ( Dun. in DC. prod., t. 1, pr206, |» | (2) « Ranunculus sceleratus 8 minutus. » (St-Am., Flor. agen. ; pue (3) « Ranunculussceleratus B minimus. » (DC., Prodr.,t. 1, p. 34.) (4) « Ranuneulus bulbosus B parvus. » (St-Am. > Flor. agen., p. 227.) (5) « Ranunculus lanuginosus y parvulus. » ( DC. , Prodr., t.i, p. 37.) (6) « Rosa gallica + pumila. » (DC. , Flor. fr. , 3109.) (7) « Sisymbrium palustre £ pusillum. » (St-Am., Flor agen. , p. 265.) (5) « Asteriscus aquaticus @ pygmaus. » (DC., Prodr. , t. vu, p. 287.) (9) Par exemple: Ulex nanus. (Smith.) Achillea nana. (Linn.) — Seseli nanum. (Duf.) — Astrantia minor. (Linn.) — Senecio minutus. (DC.) e Myosurus minimus, ( Linn. ) — Ranunculus parvulus. ( Linn. = Carduus pumilus. ( Nutt.) — Leontonyx pusillus. ( Less. ) — Ranun- culus pygmeus. ( Vahl.) (10) « Plante omnes in terra sterili, exsucca, aridá, minores. » (Linn., Crit. bot., p. 156.) DES VARIETES. 95 hauteur (1); ila vu des rabougrissements analogues dans la Camomille vulgaire et le Chrysanthemum leucanthemum. Le Plantain à grandes feuilles (Plantago major, Linn.) devient, dans quelques circonstances, si exigu dans toutes ses pro- Portions , qu'on peut le regarder comme une véritable mi- Mature de Vespéce. La différence de taille est tellement Prononcée, que plusieurs botanistes n'ont pas hésité à faire | de cette variété naine une espèce séparée (2). Linné a vu | Cette méme plante, en Laponie , s'élever dans un bon sol à | la hauteur d'un homme, et avoir à peine la moitié de la | 9ugueur de l'ongle dans un terrain stérile (3). L'élévation sur laquelle se trouvent les végétaux peut Aussi faire naître le nanisme. | Les plantes à station très-haute sont , en général, fort Petites. On rencontre fréquemment des variétés naines sur les Alpes, sur les Pyrénées et sur d'autres montagnes, qui Re doivent leurs proportions exigués qu'à leur genre de Sation (4). Le Bon-Henri , qui croit dans diverses parties de 3 France, s’élève ordinairement à 6 ou-8 décimétres de auteur; déjà , dans les Cévennes, cette Chénopodée ne pré- ‘ente plus que 4 ou 5 décimètres. Dans les Alpes voisines du lont-Blanc, et dans les Pyrénées , tout prés du lac d'Oo , elle arrive à peine à la moitié ou au tiers de cette taille (5). Comme la plupart des variétés naines indiquées dans les lores ne doivent leur existence qu'à leur station sur des (1) Fam. Plant., i. 1, p. 115. | (2) « Plantago minima. » (DC., Flor. fr., 2297.) (3) « Plantago major in terra pingui humanam altitudinem sæpè acqui- “Tit, in sterili ver) vix dimidiam unciam sepe attingit. » ( Crit. bot. , P. 156. — Flor. lapp., p. 34.) (4) « Plantae omnes in Alpibus parva. » ( Linn. , Crit. bot. , p. 156.) : (5) « Chenopodium bonus Henricus f alpinum. » (DC. , Flor. fr., 36 DES VARIÉTÉS, montagnes élevées , plusieurs d'entre elles ont été désignées tantôt par Pépithéte de nana (1) , tantôt par celles de mon- tana , alpina et pyrenaica (2). Bonnet et Sénebier ont obtenu des pieds de Haricots nains , en privant ces plantes d'une partie de leurs cotylé- dons , ou en enlevant ces organes en entier, aprés l'appari- tion des premiers actes de la germination. Dans cette opé- ration , ils avaient soin de mastiquer la blessure pour la protéger contre l'humidité. Si l'on supprime les cotylédons avant que la semence ait recu la premiére impulsion, le germe ne se développera pas ; mais, si la graine reste quelques jours dans l'eau et si elle commence à se gonfler, on peut alors amputer les cotylé- dons sans arréter les jeunes pousses. On a observé que les proportions du végétal sont d'autant plus réduites, que l'on a retranché une plus grande partie de ces organes. Bonnet a fait cette expérience sur un Chéne qui a vécu pendant plusieurs années faible et singuliérement petit. On assure que la greffe peut aussi influer sur la produc- tion du nanisme. Le Pommier ordinaire, enté sur le Pom- nier-paradis , se transforme en arbre nain. (1) « Scrofularia canina @ nana. » ( DC., Flor. fr. , 2632.) (2) « Poa coarctata y montana. » (DC. , Flor. fr. , supp. , p. 273.) — «Menianthes trifoliata 2 alpina. » (DC., Flor. fr., 2657.) — « Linaria supina 8 pyrenaiea. » (Duby, Bot. gall., t. Y, p. 345.) CHAPITRE II. ' DES VARIETES PAR AUGMENTATION DE TAILLE, OU DU GÉANTISME. On a vu, au commencement de ce livre, que les végétaux Pouvaient vivre et s’accroitre indéfiniment. La terminaison de leur vie n’arrive que par des causes étrangères à leur or- Sanisation. Il est rare que plusieurs de ces causes ne se pré- Sentent pas dans une période donnée ; ce qui fait que, dans la pratique , on a pu , jusqu'à un certain point, déterminer la durée de la plupart des espéces cultivées: mais cette du- rée ne saurait être limitée avec rigueur ; aussi, dans plusieurs Cas, lorsque certains individus échappent aux effets de ces agents de destruction , ils continuent de végéter et peuvent arriver à un âge trés-avancé, et, par suite, à une taille co- 88 DES VARIETES. lossale. Par conséquent, les arbres gigantesques décrits dans la plupart des livres ne devraient pas étre considérés comme des géants, mais seulement comme des individus trés-vieux , OU, pour mieux dire, des associations très- vieilles : il arrive méme quelquefois que ces arbres, avancés en age, placés dans un mauvais terrain ou dans un sol qu'ils ont épuisé , se sont développés avec une lenteur excessive, et que chaque année n'a augmenté leurs dimensions que d'une trés-faible quantité ; de maniére qu'en définitive, dans ces prétendus géants , il y a plutót retard qu'excés d'évolu- tion. Quoi qu'il en soit, comme les arbres trés-àgés ou très- grands ne sont offerts par la nature que rarement, pour ainsi dire d'une maniére exceptionnelle, ils ont été consi- dérés avec raison comme des étres anomaux. Ce phénoméne ne pouvait trouver sa place que parmi les variétés par augmentation de taille ; mais j'ai cru devoir le distinguer du géantisme proprement dit et en former un ordre à part, que Je désignerai sous le nom de pseudo-géantisme. Je traiterai donc, dans ce chapitre , 1° Du géantisme par accroissement précoce ou excès d'accroissement ( géantisme proprement dit); 2° Du géantisme par âge avancé ou excès d'àge (pseudo- géantisme). ARTICLE I~, DU GÉANTISME PAR ACCROISSEMENT PRÉCOCE, OU DU GEANTISME PROPREMENT DIT. Le géantisme (1), dont je vais parler dans cet article, est cet état plus ou moins permanent d'un végétal, dont loutes les parties présentent une augmentation g générale ou Une taille au-dessus de celle de son age. On a coutume, dans les ouvrages de phytographie, de désigner les variétés géantes sous les noms de gigantea (2), Maxima (3), major (4), magna (5). Ces dénominations sont (1) Sphrygosapanthésie , Ré. (3) « Polygala paludosa » gigantea. » ( St-Hil., Polyg. belt B). (3) « Hieracium prenanthoides 8 maximum.» (Fræl. in DC. prodr., I5 p. 211. ) (4) « Lotus eornieulatus B major. » (Ser. in DC. prodr., t. 11, 214.) (5) « Glechoma hederacea & magna. » (St-Am., Flor. agen., p. 236.) 90 DES VARIÉTÉS, aussi employées pour les espèces normales d’un genre quel- conque, qui offrent naturellement de grandes dimen- sions (1). Maïs tous ces noms sont souvent des occasions de méprise (2); aussi les phytographes modernes ne les em- ploient-ils qu'avec beaucoup de circonspection. Toutes les fois que des circonstances favorables à la vé- gétation se trouvent réunies, les plantes profitent de l’excès de nourriture qui leur arrive et s’accroissent de manière à dépasser leurs Jimites ordinaires (3). Une espéce des ter- rains stériles transportée dans un bon sol, une espèce d'un sol quelconque élevée dans un jardin bien arrosé , nous of- friront ce phénomène d'une manière plus ou moins évi- dente. La plupart des plantes cultivées dans nos Jardins po- tagers , si elles étaient comparées à des individus de même espèce et de méme age observés dans la campagne , nous présenteraient autant d'exemples d’un véritable géantisme. Suivant Linné, le Plantain d’eau (Alisma Plantago), qui, ordinairement, a trois ou quatre décimètres de hauteur, peut s’élever, dans quelques circonstances, jusqu’a la taille d'un homme (4). M. Charles Desmoulins a décrit une variété gigantesque de Sagittaire commune, qui se trouve sur les bords de la Gironde, vis-à-vis Bordeaux, dans les vases consolidées, que les grandes marées peuvent atteindre. Cette variété lui a offert des feuilles de 27 à 30 centimétres de largeur sur 35 à 40 de longueur, y compris les oreillettes , et des (1) Par exemple : Scabiosa gigantea. (Led. ) — Androsace’ maxima. ( Linn Orobanche major. (Linn. ) — Pimpinella magna. ( Linn.) (2) « Erronea nomina specifica sunt omnia à magnitudine planta. » (Linn. , Phil. bot. , 260.) Ee (3) « Magnitudo mutatur à coplà alimenti in plantis non minus « quàm in animalibus. » ( Linn., Phil. Bot., 260.) (4) Flor. lapp. , p. 102. DES VARIETES, 91 pétoles d'environ trois mètres de hauteur. Cette plante formait de larges touffes dun vert admirable ou plutót des taillis trés-serrés d'une assez grande dimension. Les feuilles étaient généralement obtuses et les fleurs stériles. Un pied de cette variété, mis en pot, dans le bassin du Jardin des plantes de Bordeaux , reprit ses dimensions normales en peu de temps ; ses feuilles devinrent pointues el ses fleurs fécondes comme dans l'état habituel (1). Jai rapporté, dans le chapitre précédent , que les vé- Sétaux des plaines perdaient une partie de leur volume Sénéral , quand ils se développaient par accident sur des endroits élevés ; l'inverse a lieu quand les plantes des mon- tagnes se trouvent par hasard dans les vallons ou dans les plaines (2). Le jardin des plantes de Toulouse recoit, chaque année, uncertain nombre de végétaux des hautes Pyrénées; ily a des Saxifrages, des Aréties, des Gentianes, des Sablines. Une grande partie de ces plantes s'allongent et grossissent àu bout de quelques mois; elles finissent souvent par aban- donner le facies rabougri qui les caractérise. Pour mériter le nom de géant, il est nécessaire que l'excés d’accrois- Sement soit un peu considérable. La plupart des plantes dont il vient d'étre question ne méritent pas toujours cette qualification. : La greffe, qui améne, dans certains cas, le nanisme, peut donner, dans d'autres cas, un excés d'accroissement. Le Sorbier des oiseleurs devient beaucoup plus grand, quand il est enté sur l'Aubépine ; ce fait est trés-remarqua- - bleen ce que l'Aubépine est généralement plus petite que cette espèce de Sorbier. 1 (1) Bull. de la Soc. linn. de Bordeaux , t. 1 , p. 54. (2) « Plante alpine ad dupló majorem , extra Alpes communiter ex- * ereseunt altitudinem. » ( Linn., Flor. lapp., prolég. 3.) Sra eee mmt rts ARTICLE Il. DU GÉANTISME PAR AGE AVANCÉ , OU DU PSEUDO-GÉANTISME. S Ie. — Histoire de quelques grands arbres. Les ouvrages anciens et modernes renferment beaucoup d'exemples de végétaux trés-grands ou très-âgés. Pline parle d'un Cèdre d'environ 42 mètres et demi de hauteur sur 1 mètre 62 centimètres de diamètre, et d'un Chêne vert qui d'une seule souche avait produit dix tiges, chacune de 3 mètres 90 centimètres. Il cite un Platane d'Orient, dans la Lycie, dont le tronc, creusé par le temps, offrait une cavité si grande que le consul Licinius Mutianus y coucha avec sa suite, composée de vingt el une personnes (1). Il rapporte qu'il y avait en Allemagne des arbres, qu'il ne nomme pas , si gros, (1) Hist. nal. , lib. XI, cap. 1. DES VARIÉTÉS. 93 que leur tronc creusé formait des canots du port de trente hommes (1). Joséphe/raconte que l’on voyait, de son temps, à 6 stades de la ville d'Ebron, un Térébinthe qui existait, dit-il, de- Puis la création (2). Ray signale un Chéne d'environ 130 pieds de hauteur (42 mètres 215) qu'on voyait en Westphalie, et un Fréne de 132 pieds (42 métres 864) qui se trouvait en Angleterre. li parle d'un Orme à feuilles lisses de 5 métres 502 de dia- mètre ; sa tête était large de 32 mètres 234. Cette tête pro- ` duisit 48 chariots de bois à brüler, et le tronc, outre seize Sros billots, fournit 2814 mètres 988 de planches. Plot, dans son histoire naturelle d'Oxford, fait mention dun Chêne dont les branches avaient 17 mètres 553 de longueur et pouvaient ombrager 300 cavaliers ou 4374 pié- tons. | . Si l'on mesurait plusieurs plantes ligneuses ou certains arbustes grimpants qui serpentent autour de quelques ar- bres, on leur trouverait une longueur bien plus considé- table. Il y a des plantes marines qui sont si vieilles et si étendues, qu'on les tire par brasses du fond de la mer sans Pouvoir jamais arriver jusqu'à leurs extrémités. Je vais rapporter plusieurs exemples de végétaux deve- hus géants par longévité ; j'ai choisi ces exemples parmi Ceux qui m'ont paru mériter le plus de confiance; les per- Sonnes qui désirent des détails plus étendus peuvent consul- ler la Sylva d'Évelyn, les Mémoires de M. Berthelot et la P hysiologie de M. de Candolle. | Paruigns. D’après Cavanille et Desfontaines, les Palmiers de Barbarie atteignent jusqu'à 19 mèt. 50 cent. de hauteur ; (1) Loc. cit. , lib. xvi, cap. xi. (2) De la guerre des Juifs, liv. v , chap. 31.» aa ae pes Iac € wc ll 94 DES VARIÉTÉS. selon M. Delile, ceux de l'Égypte ne dépassent pas cette limite. Ces botanistes estiment que la plus longue vie de ces arbres est de deux à trois siécles, M. Martius, dans son bel ouvrage sur les végétaux du Brésil, cite plusieurs Palmiers très-élevés, parmi lesquels se trouvent un Euterpe edulis de 32 mèt. 50 cent. et un Euterpe oleracea de 39 mét. L'àge présumé de ces arbres est d'environ trois cents ans. | : Cercis. Il existe au jardin des plantes de Montpellier, prés de la porte d'entrée, devant la maison du recteur, un arbre de Judée, qui a été mesuré, en 1831, par M. Victor Broussonnet, et a offert 9 mét. 12 cent. de circonférence, à environ 6 décim. et demi de la surface du sol (1). Cet arbre parait antérieur à la fondation du jardin, c'est-à-dire à l'année 1598: en le supposant alors âgé de cinquante ou soixante ans, il aurait aujourd’hui environ trois cents ans. Curmosremon. Le Cheirostemon peut arriver aussi à un age très-avancé. Cet arbre est connu des Espagnols mexi- cains sous le nom d’ Arbol de manitas. Pendant longtemps on n'en a connu qu'un seul pied dans la ville de Tolucca: ce pied a été vu par MM. de Humboldt et Bonpland; il était en vénération chez les indigénes. La tradition atteste qu'il existait avant la conquéte du Mexique, c'est-à-dire avant 1553. A cette époque il était probablement assez gros, puisqu'on à rattaché son existence à cet événement. En le supposant àgé alors seulement de quarante ans, cela don- nerait aujourd’hui trois cent vingt-sept ans. Ormeau. M. A. Forel a fait connaitre à M. de Candolle un Ormeau abattu, en 1827,à la promenade de Morges, sur les bords du lac Léman, Cet arbre était parfaitement sain. Son tronc avait 17 pieds 7 pouces vaudois de diamétre au (1) DC. , Phys. végét., V. 1, p. 1015. DES VARIÉTES. 95 collet et 30 pieds de circonférence un peu au-dessus de l'em- branchement, lequel avait lieu à 12 pieds du sol : le pied vaudois égale 3 décimétres. Cinq grosses branches naissaient du tronc et formaient une téte vraiment gigantesque. La coupe annonça un age de trois cent trente-cinq ans (1). _ Cyrris. Hunter rapporte (2) qu'il existait en 1776, dans le jardin du palais de Grenade, des cyprés qui remontaient W règne d'Audéle, dernier roi des Maures. M. Webb a vu Ces Cyprés en 1831. Tout nous porte à croire qu'ils sont en- core vivants. On prétend qu'une sultane s'était rencontrée, Sous un de ces arbres, avec un Abencérage ; c'est ainsi qu'on explique pourquoi ces arbres sont appelés les Cyprés de la reine sultane (los Cupressos de la reyna sultana). On Sait que les Maures furent expulsés en 1492. On pent sup- Poser qu'à cette époque ces arbres pouvaient avoir une qua- "intaine d'années ; cela porte leur age à trois cent quatre- Vingt-huit ans (3). E Lierre. M. de Candolle a vu, en 1814, à Gigean, près de Montpellier, un Lierre, placé dans un jardin, contre un Mur, dans un terrain trés-sec ; sa tige avait 1 mét. 95 cent. de circonférence à la base, et donnait naissance à deux gros lrones de 65 à 160 cent. de tour. Ces troncs s’élevaient droit, s’appuyaient bientôt contre le mur et se ramifiaient. à cime recouvrait en entier un triangle de 72 mét. carrés (1) DC., Phys. végét., t. 11, p. 975 et 985. — M. Dunal m'a donné à mesure d'un bel Ormeau qui se trouve aux environs de Dourgne (Tarn). Le trone de cet arbre a 3 métres de haut, avec une circonfé- rence de 7 mètres à la base, et de 5 mètres à la hauteur d’un homme. Cinq grosses branches forment la téte de cet Ormeau; et celle-ci, à Midi, a donné une ombre d'environ 35 mètres de diamètre. (2) Evelyn, Sylva, éd. 2, t. m. j (3) D’après Millin, il y avait à Somma , prés de Milan, un Cyprés Qui offrait, en 1794, au moins 5 mètres 20 centimètres de circonférence, ( Foy. dans le Milan. , t. 1, p. 282.) ‘ 96 | DES VARIÉTÉS, de surface; la hauteur totale était de 5 mèt. 85 cent. On assurait que ce Lierre avait été plus grand encore, mais qu'il avait souffert d’un orage quelques années auparavant : il fut abattu en 1829. En comparant la circonférence des troncs de ce Lierre avec celle d’un autre tronc âgé de quarante cing ans, et en Supposant l'accroissement à peu prés égal dans toute la durée, M. de Candolle a trouvé que ce végétal de- vait avoir quatre cent quarante-huit ans à l'époque où il a été abattu (1). ÉnanLES. M. de Candolle a observé, en 1811, dans le département dela Haute-Loire, deux Érables faux Platanes fort gros qui avaient donné leur nom au village de Due Erabe, à l'entrée duquel ils étaient placés (2). Un autre Erable faux Platane bien célébre existe aussi à l'entrée d'un village, celui de Trons, dans les Grisons. On assure que les premiers confédérés suisses jurérent sous cet arbre, en 1424, de donner la liberté à leur pays. Bridel a signalé cet Érable comme un Tilleul (3). L'inscription placée dans la chapelle, bâtie à côté, dit aussi que le serment fut prêté sous an Tilleul; Ebel (4) et le colonel Bontemps (5) ont fait voir que cet arbre est un Erable. Ce dernier prouve, par divers arguments, que c’est bien sous son ombrage que le serment a été juré. En 1831, le tronc avait 8 mèt. 61 cent. de circonférence à 2 mét. environ du sol. Si l'on suppose qu'il était âgé de cent ans à l'époque du serment solennel, il en aurait aujourd’hui cinq cent seize. Mérëzes. Le Méléze nous offre aussi des individus gi- gantesques. (1) Phys. végét. , t. 1, p. 986. (2) Loc. cit., p. 997. (3) Conserv. Suisse, I, p. 148. : (4) Foy. iv, p. 395. (5) Bibl. univ. , août 1831. es ix DES VARIÉTÉS, e" M. de Candolle a vu, en 1832, dans le Valais, un gros Méléze dont le tronc avait 4 mèt. 78 cent. de diamétre (1) : TUR age était de deux cent ci nquante-cinq ans à cette époque; ilen a, par conséquent, deux cent soixante-trois aujourd’hui. M. Loiseleur signale un autre Méléze du Valais, qui offrait 3 mèt. 90 cent. de diamètre, ce qui donne un âge de cinq Cent soixante-seize ans. Cuaraiansers. Les Chataigniers nous présentent encore des Xemples remarquables de grandeur et de longévité. Pederlé mentionne un Châtaignier de Glocester, qui avait t mét. 62 cent. de circonférence, et que l’on croyait âgé de Plus de, 900 ans (2). Osc en cite un autre, deSancerre, qui présentait 4 mètres 22 centimètres de tour, et qui portait, il y a 600 ans, le om de gros Chátaignier ; d’où il augurait qu'il avait envi- ton 1,000 ans (3). | M. de Candolle regarde ces estimations comme un peu “Xagérées. En supposant l'accroissement du Châtaignier 9uble de celui du Chéne, on aurait 360 ans pour l'arbre * Sancerre et 626 pour celui de Glocester (4). — Oraneers. M. Galesio cite un Oranger, dans le Finalois, Tü a 9 mètres de hauteur, et qui a rapporté jusqu’a 8,000 oranges dans une seule année. —— En 1789, il existait, à Nice, sur la propriété de M. Defly, an Oranger dont l’âge était inconnu , mais dont la tige pa- laissait si grosse, qu'il fallait deux hommes pour l'embras- er. Cet arbre avait près de 16 mètres 25 centimètres de auteur, et ses branches ombrageaient une table de 40 Couverts ; il rapportait, chaque année, 5 à 6,000 oranges i (1) Phys. végét. , t. 11, p. 991. (2) Man. de l'arb. , 1, p. 182. (3) Diet. d'agricult. , t. m, p. 432. (4) Phys. végét. , t. 1, p. 993. 98 DES VARIETES. sur une moitié de sa tête, tandis que l'autre moitié n’en offrait qu'une centaine; mais, l'année suivante, cette der- niére moitié en donnait à son tour 5 à 6,000 pendant que l'autre se reposait, et ainsi de suite (1). Ce bel Oranger, qui s'élevait comme un géant au milieu de ses congénères; avait résisté aux gelées meurtriéres de 1709, 1763 et 1778, mais il succomba sous celles de 1789 (2). L’Oranger de Versailles, connu sous le nom de Grand Bourbon ou de François V, avait été acquis à la vente des biens du connétable de Bourbon, en 1523, à cause de sà beauté. Puisque cet arbre était remarquable par sa taille il y a trois siécles, on peut bien le supposer agé d'envi- ron 400 ans; c’est, au reste, Page qui lui est attribué pat la tradition, Au couvent de Sainte-Sabine, à Rome, il y avait ud autre Oranger, planté en 1200 par saint Dominique, si l'on en croit une ancienne tradition , rapportée en 1559 par Augustin Gallo. Cet arbre existe encore. M. Galesio remarque qu'en 1560 il était d'une extrême vieillesse , ou; pour mieux dire, bien malade; de sorte qu'on peut croire que le pied actuel, qui n'a que 25 centimétres de dia- mètre, est un rejeton de l'ancien, peut-être gelé en 1709 (3). Si cela était, le pied de saint Dominique aurait vécu 509 ans, D’après la tradition, l’âge de cet arbre serait de 640 ans. PrarANzs. Les voyageurs modernes rapportent qu il existe dans la vallée de Bujukderé, à 3 lieues de Constantinople; un Platane qui a 29 mètres 25 centimètres de hauteur, et (1) Foy., dans les Prolégoménes, le chapitre sur Pindividualité végétale. ; (2) Risso et Poiteau , Hist. nat. des Orangers , p. 25 et 26. (3) DC. , Phys. végét. , t. 11, p. 995. DES VARIETES. -99 Un tronc avec 48 mètres 75 centimètres de circonférence. Ce tronc est creusé intérieurement jusqu’au niveau du sol ; le vide qui s'y est formé a 26 mètres environ de circonfé- rence. M. de Candolle estime , par des calculs approximatifs, {ue cet arbre doit être âgé de plus de 720 ans (1). Ciores. Hunter raconte qu'un ouragan abattit, à Hen- don-Place , près de Londres, le 1° janvier 1779, un Cédre qui passait pour avoir été planté par la reine Élisabeth ; il avait environ deux siécles. Sa circonférence , à Ja hauteur d'un homme , élait de 16 pieds anglais, ce qui fait à peu Prés 1 métre 65 centimétres de diamétre (2). Les fameux Cédres du Liban ont été mesurés, en 1574, Par Rauwolf, et observés de nouveau, en 1787, par Labil- ardière. D’après Rauwolf, ces arbres avaient 12 yards $ pouces de circonférence. M. de Candolle, aprés avoir étudié Paccroissement de cette espèce d’arbre sur plusieurs Ndividus, et notamment sur un Cèdre du jardin de Chelsea, Planté en 1683, et sur celui du jardin des plantes de Paris, Planté en 1734, estime que les Cèdres du Liban pouvaient ‘Voir 600 ans à l'époque où Rauwolf les a mesurés, et, par ‘onséquent, 800 ans en 1787. Depuis cette dernière épo- Tue, ces arbres ont été coupés; il ne reste plus sur le Mont Liban que des Cèdres plus ou moins jeunes. Novzns. Les Noyers sont aussi des arbres qui peuvent Parvenir à une grande vieillesse. | l'architecte Scammozzi rapporte avoir vu à Saint-Nico- las; en Lorraine, une íable, d'un seul morceau de noyer, {Ui avait 8 mètres 12 centimètres de largeur et une lon- Sueur proportionnelle. On disait que l'empereur Frédéric HT *vait donné, en 1472, un splendide repas sur cette énorme (1) Loc. cit., t. 1, p. 933. (2) Evelyn, Sylv. , éd. 2 , t.11, p. 3. — Mü ( —— ips din c Sea 100 DES VARIETES. table (1). En admettant, pour le Noyer, une croissance deux fois plus grande que celle du Chêne, l'arbre qui avail fourni ce beau meuble devait avoir environ neuf siécles(2). TirrEvLs. Le Tilleul est un des arbres de PEurope les plus susceptibles d'arriver à de grandes dimensions. Ilexiste en Suisse, dans la ville de Fribourg, sur une place, un Tilleul, planté, en 1476, à l'occasion de la ba- taille de Morat. En 1831, cet arbre avait une circonfé- rence de 4 mètres 46 centimètres de diamètre. Ce Tilleul est donc âgé de 364 ans. Je l'ai vu au mois de dócem- bre 1837 , il commençait à dépérir. Évelyn parle d'un Tilleul de: Norwich qui existait en 1664 à Depeham (Tilia colossæa depehamensis , Brown). Il avait 8 yards et demi de circonférence ; dans la partie la plus mince du tronc, à environ 2 mètres du sol, 16 yards au niveau du terrain et 30 yards de hauteur (3). En calcu- lant son âge à 5 millimètres de diamètre par an, on recon- nait que ce Tilleul avait 530 ans. On trouve un autre Tilleul remarquable à Neustadt, sur le Kocher (royaume de Wurtemberg). Évelyn et M. de Candolle ont décrit cet arbre avec détail. Il appartient à l'espèce ou variété à grandes feuilles (Tilia macrophylla). Il devait être fort agé en 1229; car, selon les anciens do- cuments , aprés la destruction de la ville de Helmbundt, la nouvelle ville qui fut construite alors sur la route, auprès du grand arbre, recut le nom de Neustadt prés du gros Tilleul. Les branches de cet arbre sont soute- nues, depuis: fort longtemps, par des colonnes ou piliers en pierre. Un vieux poëme, daté de 1808, dit : Devant - (1) Evelyn, Sylva , éd. 2, t. 1, p. 186. (2) DC. , Phys. végét. , t. 1, p. 994. (3) Sylv. , éd. 2, t. 11, p. 186. DES VARIETES. 101 la porte s'élève un Tilleul soutenu par 67 colonnes. Le nombre de ces colonnes était de 82 en 1664 et de 106 en 1831. Selon Evelyn, on trouvait sur plusieurs d'entre elles des inscriptions qui remontaient à l'an 1550. Aujour- d'hui les plus anciennes sont celles des colonnes de devant, qui portent les armoiries du duc Christophe du Wurtem- erg, avec la date 1558. Sur d’autres, on voit les noms du Marcgrave Frédéric de Brandebourg (1562), du comte G. Ernest de Henneberg (1583) , de l'abbé Jean de Schonthal (1 584), etc... Le Tilleul de Neustadt se divise à son sommet en deux grosses branches, dont l'une atteint une longueur de 34 mètres 45 centimètres, et l'autre, qui a été brisée Par le vent en 1773, n'arrive qu'à 16 mètres 25 centi- mètres, La cime- occupe un espace d'environ 130 mètres. Evelyn dit qu’en 1664 la circonférence du trone était de 37 pieds 4 doigts, mesure de Wurtemberg. M. Jules Trem- bley a trouvé, en 1831, que cette circonférence, prise à la .- hauteur @un homme , avait 37 pieds 6 pouces 3 lignes de la Même mesure. Ce qui semblerait prouver que l'arbre a bien Peu accru son diamètre depuis 150 ans, ou que la mesure ÜÉvelyn a été prise à fleur de terre, vers la place où com- mence l'évasement des racines. Si on estime d’après ces données Page probable de ce Tilleul, on trouvera, en le Comparant à celui de Fribourg, 1154 années. Si Von fait Ce calcul en admettant seulement 5 millimètres en'diamétre Par année, on aura 771 ans. Ce dernier chiffre est con- firme par les documents historiques qui font remonter l'ori- Sine de la ville à 7 ou 800 ans (1). Au village de Villars-en-Moing , près de Fribourg, il y à w Tilleul encore plus ancien et plus gros. En 1831, il avait. . 22 mètres 75 centimètres de hauteur et un tronc avec (1) DC. , Phys. végét. , t. n, p. 988. 102 DES VARIÉTÉS. 11 mètres 70 centimètres de circonférence. Ce tronc se sé- pare en deux grosses branches subdivisées elles-mémes en cinq autres bien touffues. Suivant la tradition du pays , cet arbre était déjà célèbre en 1476 ; à cette époque, des tan- neurs le mutilérent pour employer son écorce. Si l'on sup- pose que cet arbre a cra comme celui de Fribourg, il aurait eu, a cette époque, 875 ans, et, par conséquent, aujourd’hui 1239 ans. M. de Candolle regarde ce chiffre comme trop exagéré. Si l'on admettait une croissance d'un tiers plus rapide , on trouverait encore 825 ans. La statistique du département des Deux-Sèvres (1) signale un Tilleul colossal, situé au chateau de Chaillé, prés Melle. Il avait, en 1804, 15 métres de circonférence; il portait six énormes branches qu'on était obligé d'étayer. Cet arbre pouvait avoir 1076 ans. Savin. M. Berthelot a mesuré un Sapin, sur la montagne de Bequé, à l'ouest de Courmayeur. Cet arbre est connu des habitants sous le nom d’écurie des chamois, parce qu’il sert d'abrià ces animaux pendant l'hiver. En 1832, il avait . 7 mètres 62 centimètres de circonférence au-dessus du collet et, par conséquent, 2 mètres 54 centimètres de diamètre. M. Berthelota comparé ce vétéran des Alpes à la coupe d'un autre Sapin , âgé de deux cent soixante ans; il est arrivé à conclure que le Sapin gigantesque de Béqué pouvait avoir 1200 ans (2). Cuèxes. Le Chêne du roi Estienne, dans la province de Northampton , était un arbre vraiment prodigieux. Suivant latradition, le prince tua autrefois un cerf près de ce Chêne, et, en mémoire de ce fait, le peuple des environs faisait, tous (1) P. 249. (2) Sur la longévité et l'accroissement des arbres, ( Bibl. univ.» décembre 1832.) + DES VARIÉTÉS. 103 les ans, une procession et renfermait, pour une heure ou deux, dans le creux de cet arbre, trente ou quarante en- fants. La tradition donnait à ce Chêne cing ou six cents ans (4). y On voyait, en 1822, au milieu du cimetière d'Allouville, à une lieue d'Yvetot (Seine-Inférieure), un Chêne qu'on Süpposait avoir au moins huit cents ans d'existence. Sa cir- conférence était de 14 mètres au-dessus des racines et de ? mètres et demi à la hauteur d'un homme. Le tronc était creux. On y avait érigé, en 1696, une chapelle soigneuse- ment lambrissée et marbrée, dédiée à Notre-Dame-de-la- Paix, Cette chapelle présentait deux métres de diamétre. Au-dessus se trouvait le logement du desservant, dans le- Quel on montait par un escalier extérieur qui tournait au- tour du tronc. La flèche de ce chêne, abattue par un coup de vent il y a plus d'un siècle, avait été remplacée, quelques années aprés, par un petit clocher surmonté d'une croix de fer. Ce clocher s’élevait du milieu du feuillage et produi- ‘ait un effet trés-pittoresque (2). Evelyn citeun Chêne de Welbeck-lane, remarquable aussi Par sa taille gigantesque. Ce Chéne devaitavoir environ huit “ent soixante ans. Il y a dans la Samogitie plusieurs vieux Chénes appelés baublis ou bamblis. On croit qu'ils remontent au temps du Paganisme. L'un d'eux, situé à Bordza, moitié incendié par Accident, fut abattu en 1812. Il avait 12 aunes et demie (12 métres 67 centimétres) de circonférence a la hase et 13 aunes et 5712 vers le milieu du tronc, à environ 6 métres : (1) J. Morton , Hist. nat. de la province de North. — Mem. de - Trév. , mai 1714 , p. 832. i Marquis, Mém. Soc. linn., Paris, 1822, t. 1, P- 495 , fasc. Dl. 12, 104 : DES VARIETES. de hauteur. On y compta 710 couches concentriques dis- tinctes et on estima à 300 les couches non distinctes, ce qui donne plus de 1000 ans pour l’âge de ce Chêne (1). En 1824, un bücheron abattit, dans les Ardennes, un autre vieux Chéne et trouya, dans son tronc, quelques débris de vases à sacrifice et des médailles ou monnaies samnites. Un journal pensa que l'origine de ce Chéne remontait à la date des monnaies, c'est-à-dire à 276 ans avant la fonda- tion de Rome, et supposant à l'arbre, au moment du dépót, 60 ou 80 ans, il conclut qu'il devait avoir, en 1824, 3600 ans (2). Cette conclusion est erronée; on peut enfouir des médailles longtemps aprés qu'elles ont été frappées. M. de Candolle a calculé que le Chêne dont il s’agit remonte à Pé- poque de l'invasion des barbares; ce qui lui donne encore 15 à 16 siécles d'antiquité (3). Otiviers. M. Picconi a mentionné un (rés-gros Olivier dans l'état de Génes, à Pescio (4). Cet arbre a 31 palmes, c'est-à-dire 7 métres 69 centimétres. Moschettini donne à cet Olivier 700 ans d'existence (5). ` Au quartier de Beaulieu, prés de Nice, M. Berthelot a mesuré, en 1832, un autreOlivier séculaire qui lui a offert un tronc de 12 mètres 42 centimétres de circonférence à la base, et 6 métres 26 centimètres, à 1 mètre 30 centimètres au-dessus du sol. La hauteur du tronc était de 2 mètres 78 centim. Cet arbre présentait un aspect imposant, mal- gré son état de décrépitude. On peut avancer qu'il est au- jourd’hui, en Europe, le vétéran de son espèce. On le dési- (1) Sylw., 1827, t. xvin. — Bull. scienc. agric. , t. xi, p. 259. (2) Journ. l'Etoile, 1824, 4 septembre. E (3) Phys. végét., t. 11, p. 1000. (4) Econ. Olear. , 0, p. 79. > 1 (5) Et non pas 7,000 ans, comme on l'a imprimé, par erreur, dans là à ` notice de M. Berthelot. (Bibl. univ. , juillet 1832.) | DES VARIÉTÉS. 105 Sne sous le nom de pignole. Cet Olivier a produit, en 1828, plus de 100 kilogrammes d'huile ; jadis il en fournissait jus- qu'à 150. Cet arbre parait àgé de plus de 1000 ans (1). Le jardin des Oliviers, situé auprés de la montagne de ce 10m, renferme encore huit de ces arbres, rendus célèbres Par le christianisme. Ces Oliviers ont au moins 6 métres de "rconférence sur 9 à 10 de hauteur; ils sont entretenus àvec soin par les chrétiens, qui ont généralementla croyance que ce sont les mêmes que ceux qui existaient du temps de Jésus-Christ. On connait lalenteur de la croissance de l'Oli- Vier. Si l'on admet que l'épaisseur de chaque couche ligneuse Soit d'un demi-millimétre, il ne serait pas déraisonnable de Penser que les arbres dont il est question remontent au Moins à 2000 ans, c'est-à-dire à la haute antiquité qui leur St attribuée (2). D’après M. de Chateaubriand, les huit Oliviers de Jérusa- lem sont au moins du temps du Bas-Empire. Voici les preu- Yes qu’il en donne : en Turquie, tout Olivier trouvé debout Par les musulmans, lorsqu'ils envahirent l'Asie, ne paye {wun médin au fisc, tandis que l’Olivier planté depuis la Conquête doit au Grand Seigneur la moitié de ses fruits. Or les Oliviers dont il s’agit ne sont taxés que huit médins. - de Chateaubriand rapporte encore qu’il existe dans la Citadelle d'Athènes un Olivier qui parait dater de la fonda- lion de la ville. LE i | lr. On voyait, dans le comté d'York, prés de Rippon, à l'ancienne abbaye de Fontaine, des Ifs qui servirent, en 1133, à abriter les moines pendant la reconstruction de - leur couvent. Ces Ifs furent mesurés par Pennant en 4770; (1) Risso, Hist. nat. Europ. mérid., 1826, t. 11, p. 34- pure. ‘OC. cit., Bibl. univ. , juillet 1832. (2) Bové, Voy. Egypt. , ann. sc. nal. , 2 ser., t- 1, pP- 173. 106 DES VARIETES. ils avaient un tronc vraiment énorme. D'aprés les lois con- nues du développement des Ifs, ils devaient étre âgés d'en- viron 1214 années (1). Un autre If, observé par Évelyn , en 1660, dans le cime- tiere de Crowhurst, au comté de Surrey, offrait alors 10 yards anglais de tour, ce qui équivaut à 9 mèt. 19 cent. (2). D’après ces données, on peut juger que l'arbre avait alors. 1287 ans. Cet If existe encore; il a, par conséquent, dans ce moment, 1466 ans. Un troisiéme If, mesuré par Evelyn, au cimetiére de Braburn, dans le comté de Kent, avait, en 1660, une taille si gigantesque, que sa réputation s'étendait dans tout le pays : Evelyn le désigne sous le nom de surannée ( superan- nuated); son age était, à cette époque, de 2880 ans. Si cet If existe encore, il doit avoir 3060 ans. CvPnks cHauves. Un Cyprés chauve, trés-àge, se trouvait dans le jardin de Chapultepec, au Mexique; son tronc of- frait 41pieds anglais de circonférence. Cet arbre était appelé Cyprès de Montézuma. On le voyait en pleine végétation, en 1520, lorsque ce prince était encore sur le trône ; il avait donc au moins trois siècles d'existence (3). On cite un autre Cyprés chauve, situé dans le cimetiére de Santa Maria de Tesla, à deux lieues et demie d’Oaxaca j ila 5 mèt. 79 cent. de circonférence, et environ 32 mét. 50 cent. de hauteur. Cortez abrita toute sa petite armée sous son ombrage. Cet arbre est en vénération chez les Mexicains indigènes. Les habitants le nomment sabino. I] y en a cinq ou six autres autour de lui, aussi gros que celui de Chapul- tepec. M. Alphonse de Candolle a calculé que l’âge de ce = EE (1) Evelyn, Sylv., éd. 2, p. 259. (2) Evelyn, loc. cit. , t. 11, p. 195. (3) Magaz. of nat. Hist., 1831, p. 31. DES VARIETES. 107 patriarche ligneux pouvait être d'environ 4000 ans (1). Cet arbre est un des plus anciens végétaux connus du globe. Baozas. Le Baobab (Adamsonia digitata) nous fournit un des exemples de longévité les plus extraordinaires. Dans son Pays natal, il porteun nom qui correspond à celui de mille-ans. Adamson aobservé,en 1749, aux iles de la Madeleine, prés du cap Vert, des Baobabs qui avaient été visités, trois siècles auparavant , par des voyageurs anglais (2). Ces voyageurs Avaient gravé des inscriptions sur leur tronc, et ces inscrip- tions furent retrouvées par le botaniste francais; recou- vertes par trois cents couches ligneuses. Certains de ces ar- bres avaient jusqu'à 9 mèt. 75 cent. de diamètre et 23 mèt. 70 cent. de hauteur. Adamson estime qu'ils pouvaient étre ‘gés d'environ 6000 ans (3). M. Perrottet a trouvé, au Séné- Sal, des Baobabs qui offraient jusqu'à 29 mét. 95 cent. de circonférence; leur écorce était encore verte et luisante. A là moindre blessure il en softait un liquide abondant, comme dans les individus bien jeunes et bien sains (4). Draconier. Le fameux Dragonier du jardin Franchi , dans la ville de l'Orotava (Canaries), est encore un exemple de longévité extrême. A l’époque de la conquête de Téné- riffe, en 1496, cet arbre, objet de la vénération des Cana- liens, était presque aussi gros qu'à présent ( Bory de Saint- Vincent) : M. Ledru, qui l'a visité en 1796, lui a trouvé 20 mét. de hauteur, 13 de circonférence vers le milieu *t 24 à la base. M. de Humboldt assure n'avoir compté que 45 pieds de circonférence, c'est-à-dire 14 mét. 62 cent. (895 M. Berthelot a constaté qu'elle avait 15 mèt. 11 cent. à la (1) Bibl. univ. , 1831, avril, t. 1, p. 387. (2) Greux en 1400 et Petivier en 1549. (3) Cav. diss. , 5, p. 298, t. xv. (4) Flore sénégamb. , 1, p. 11. (5) Etud. nat. , t. 1, p. 31 et 109. 108 DES VARIÉTÉS, base. Ce Dragonier a perdu une grande partie de sa cime le 21 juillet 1819. M. Berthelot a publié une notice détaillée sur cet arbre gigantesque ; il a comparé ce Dragonier avec d’autres jeunes arbres de la même espèce : les calculs qu'il a faits ont, plus d'une.fois, confondu son imagination (4). On peut donc, sans exagération, accorder à ce Dragonier un àge d'au moins 6000 ans. En résumé, j'ai rapporté dans ces articles plusieurs exem- ples remarquables de géantisme par longévité, savoir : Arbres, Années. Des Palmiers, ape wee ee SOU, 300 en PNG LISE SSD 300 DIPUBOBOSROH. ED PRES 327 UI OPER “PIC HSE SERRE COCR: 359 do CE & ar D a ont oe. PE sione He): octen) rotin Un Brg 550p a5 as Se Eua ee Des Mear RES P ARRA ASN Sigg a ae Des Chataigniers . Pt OO, Cae Des Orangers. . . . . . 400, 509, 640 ICONE ne ee vr I Ses vol Fe eee nM UP ENS IAS aR 900 Des Tilleuls. . . 364, 530, 800, 825, 1076 Un Sapin RA. re à he ae ee UV Des Chênes. . . 600, 800, 860, 1000, 1600 Des Oliviera: ^ ore et ws 700, 1000, 2000 Des Ifs. . . ... . 149144, 1466, 2588, 9880 Des Cyprès chauves.. . . . . 3000, 4000 Des Baobabs.. "eee ae RD Un.Dragonier. .. - “Way wee > 6000 (1) Ann. Scienc. nat. , t. XIV, p. 140. DES VARIÉTÉS. SUI ia Remarques générales sur le pseudo-géantisme. En comparant entre eux les différents exemples qui Viennent d’être rapportés, on voit que les arbres les plus anciens de l’Europe offrent une durée d'environ 3,000 ans, él que ceux des contrées étrangères ont un âge GLA 6,000 ans. Ces différences tiennent peut-étre à ce que, chez Nous, l'homme a souvent changé la face du sol et détruit les arbres pour ses besoins ou ses caprices ; tandis que, dans *$ pays étrangers, les arbres ont été mieux respectés ou plus négligés. Peut-étre méme le nouveau monde est-il plus favorable à la longévité (1). Les arbres dont le bois est trés-dur (Orangers, Cèdres , Oliviers) sont plus sujets que les autres au géantisme par "ge avancé, parce qu’ils sont moins altérables par Pair et Par l'eau que les arbres à bois mou. Il n’y a qu'un petit nom- te d’exceptions à cette règle générale. Les Chetrostemon €t les Adamsonia , par exemple, présentent un bois tendre e léger, et peuvent acquérir une vieillesse remarquable. Comme les arbres à bois dur se développent ordinaire- Ment avec lenteur, il faut beaucoup de temps pour qu'ils arrivent à une taille colossale et qu'ils soient dignes du nom de géants ; i1 semble qu'il existe une sorte de compensation entre ]a longue durée de la vie et la faiblesse de l'accroisse- Ment. Mais aussi, lorsque, par hasard, un végétal à bois mou a résisté aux causes nombreuses qui tendent à le détruire et (1) DC. , Phys. végét., t. 11, p. 1020. * 110 ; DES VARIÉTÉS. qu'il parvient à un âge un peu avancé, ses dimensions se - montrent de bonne heure colossales. Il est des espéces dans lesquelles le bois , quoique assez dur, est doué d’une nature si fragile , si cassante , qu'il est assez difficile de trouver un arbre un peu àgé qui n'ait éprouvé des dommages plus ou moins notables ; cette fragilité s'oppose à la longévité et, par conséquent, au géantisme. L'Acacia commun ( Robinia pseudo-acacia), introduit en France par Robin, vers l'année 1600, fut semé par lui dans un des massifs du jardin des plantes de Paris ; le premier pied existe encore : il a, par conséquent, 240 ans. On a été obligé de soutenir ses branches avec des rubans de fer, et tout annonce que , si des soins pleins d'intelligence ne veil- laient pas à sa conservation , ce Robinier serait détruit de- puis longtemps. La direction des branches influe aussi sur la durée des vé- gétaux ; il est telles espèces dans lesquelles les rameaux s’écartent brusquement , s’étalent et sont souvent détruits par leur propre poids. Les arbres dits pleureurs , dont les branches sont plus ou moins pendantes , offrent donc les dis- positions les plus défavorables à la longévité. Dans d'autres arbres , le tronc et les rameaux sont, au contraire, droits et rapprochés , et peuvent offrir assez de prise au vent pour se laisser rompre avec facilité. Il y a des arbres peu rameux qui souffrent beaucoup , quand une cause quelconque les prive d'une branche. D'autres arbres présentent, au contraire , des ramifications extrêmement nombreuses ; mais l'ensemble de ces ramifica-" tions offrant une grande surface aux ouragans , il est bien rare qu'à la longue ces dernières espéces ne soient pas dé- racinées ou n'éprouvent pas des cassures dangereuses accom- pagnées de la carie et de la mort. | M. de Candolle assure que les bois qui contiennent une DES VARIETES. 11i Srande quantité de silice sont moins altérables que les au- tres; ainsi les endogènes paraissent, chacun dans sa consis- lance, beaucoup moins attaquables que les exogènes. Les bois qui renferment une plus forte dose de sucs résineux sont aussi moins susceptibles d’être altérés que les autres ; ce qui lient à ce que leurs éléments insolubles dans l’eau résistent mieux à l'humidité (1). Le Sapin, par exemple, malgré sa légèreté , dure beaucoup plus que d’autres arbres d’un bois assez dur. (1) DC., Phys. végét. , t. 11, p. 952. TROISIEME PARTIE. DES MONSTRUOSITÉS. Les monstruosités (monstra) sont des déviations du type spécifique, ordinairement congéniales, plus ou moins graves et plus ou moins complexes; elles produisent des diffor- mités vicieuses et génent ou arrétent l'exercice des fonc- tions (1). 3 Les monstruosités agissent sur les parties appendiculaires ou sur les parties axiles. | Les monstruosités qui portent sur les parties appendicu- (1) M. de Candolle à défini la monstruosité tout dérangement dans l'économie végétale qui altère sensiblement la forme des organes, qui semble originel et qui n’est presque jamais dû à une cause accidentelle visible. (Théor. élém. , 1 éd., p. 406.) DES MONSTRUOSITES. 113 laires , c'est-à-dire sur les individus élémentaires ou sur les Organes de ces individus, atteignent bien rarement les axés ; et quand ceux-ci sont affectés (comme dans certains cas de Soudure, entre deux fleurs ou entre deux bourgeons), ce west jamais que dans les extrémités jeunes des rameaux , celles qui servent de support aux verticilles des individus élémentaires (tiges contractées, Goëthe ). Or ces extrémités Ou ces supports se conduisent à la manière des organes ap- Pendiculaires cux-mémes ; dans les fleurs , ils se fanent et se désarticulent comme ces derniers appareils , au lieu d’étre Persistants comme les véritables axes. Dans les bourgeons, ils ne deviennent rameaux ou axes réels qu'aprés l'évolu- lion ; avant cette époque, ils sont dans une sorte d'état ru- dimentaire; et lorsque, par une cause quelconque, le bour- Seon est arrêté dans son développement, ils se détachent * tombent comme les axes des appareils floraux. Les. monstruosités qui déforment les parties axiles , C'est-à-dire les parties communes aux individus élémentaires, *ont toujours plus prononcées, plus complexes que les pre- mières. Comme les axes ne sauraient devenir monstrueux Sans exercer une influence quelconque sur les organes ou les ensembles d'organes portés par eux, l'anomalie des par- ! lies axiles est accompagnée presque toujours de la dévia- lion des parties appendiculaires. La durée des monstruosités est tantót limitée et tantót Permanente, puisqu'elles résident tantót dans des organes Caducs , tantôt dans des organes persistants. Aprés leur lleuraison , un Grenadier ou un Cerisier à fleurs doubles ne Présenteront plus de traces qui puissent rappeler leur état Vanomalie ; mais un rameau fascié conservera a toutes les époques de sa vie Phypertrophie monstrueuse qui le dilate et Paplatit. | Certaines déviations des parties appendiculaires reparais- 8 114 DES MONSTAUOSITES. sent quelquefois, et méme d'une maniére réguliére, dans tes générations suivantes, Il y a des arbres et des arbrisseaux — qui donnent, chaque année, des étamiues dilatées ou des fruits atrophiés. Dans d'autres cas, les monstruosités se présentent une — fois , deux fois, trois fois , et disparaissent sans retour. On voit des plantes, changées de sol ou de patrie, donner, la 7 | première année, des fleurs sans corolle ou sans pistils, et re- venir, l'aunée suivante, à leur état normal. gx Les monstruosités peuvent affecter à la fois toutes les par- | ties appendiculaires, ou seulement celles d’un rameau. Ainsi, . par exemple, beaucoup de Rosiers cultivés offrent toutes — leurs fleurs pleines ou doubles ; dans d'autres Rosiers , une branche isolée est soumise au même phénomène, tandis que toutes les autres branches et toutes les autres Senna ont con- servé l'état habituel. ; L'anomalie est quelquefois encore plus bornée; elle ne porte que sur une fleur ou sur quelque partie de l'appareil: floral. Ainsi , dans les Pavots somniféres simples, on trouve tantót une fleur solitaire qui est devenue demi - double, double ou pleine, tantót une seule étamine qui s’est changée en corps pétaliforme. On peut rencontrer aussi des monstruosités dans tous les axes d'un végétal où seulement dans une branche. J'ai vu un pied d'Euphorbia exigua dont toutes les parties étaient fasciées. Dans la plupart des végétaux ligneux, ce phé- noméne arrive le plus souvent sur quelque rameau isolé. Les variétés se présentent presque toujours aprés la nais- sance, les monstruosités sont ordinairement congéniales. Les variétés changent avec les circonstances extérieures qui les ont déterminées, ou bien persévérent.et se propa- gent par division ou par graine. Les monstruosités demeu- rent les mêmes au milieu des variations extérieures ; elles DES MONSTRUOSITES. 115 peuvent augmenter avec Page, mais il est bien difficile et bien rare qu'elles deviennent moins complexes : elles ne se Propagent que irés-rarement et d’une manière pour ainsi dire exceptionnelle. | Les monstruosités végétales se présentent dans les indi- Vidus sauvages et dans les individus cultivés ; les derniéres ‘ont, sans contredit, les plus nombreuses. L'homme est Même parvenu à augmenter leur production. Dans la téra- | tologie animale , il est trés-difficile d’influencer artificiel- "ment l'apparition des monstruosités. ae Les déviations animales ont souvent fait naître chez le vulgaire un sentiment de mépris ou de terreur. Les mons- 'ruosités des végétaux sont regardées assez généralement , es unes comme des bizarreries sans intérét et sans valeur, Tuelques autres comme des objets d'utilité ou d'agrément. la l'insouciance des premiers botanistes quant à l'étude °S premières , et les efforts des horticulteurs de tous les temps pour obtenir les secondes, pour les maintenir ou pour °S varier (1). Certaines de ces anomalies sont vivement re- Cherchées pour le service de nos tables ou pour l'ornement * nos jardins; et les personnes du monde se trouvent gé- ralement bien étonnées » quand elles entendent les phy- Slologistes qualifier de monstres les objets brillants ou *Voureux de leur empressement. Les monstruosités » comme toutes les anomalies , ne con- Sistent pas dans l’apparition de caractères étrangers à l'or- Sanisation végétale, mais dans la production de caractéres étrangers à l'espéce ou à l’âge des espèces affectées. On le Verra dans le cours de cet ouvrage , presque tous les phéno- (1) Dans un article de son Cours d'agriculture, l'abbé Rozier re- Sar "de les fleurs panachées « comme une coquetterie de la nature qui Cherche à attirer nos regards. » (T. vir, p. 354.) nn MENU arde ciui votre A 116 DES MONSTRUOSITES. mónes tératologiques offerts par certains individus se ren- contrent à l'état normal dans d'autres végétaux. Les lois de la tératologie sont donc les mêmes que les lois de lor- ganographie. Entre une fleur monstrueuse et une fleur normale il n'y a souvent d'autre différence que l'état acci- dentel de la premiére et l'état habituel de la seconde. La monstruosité est donc, en général, l'application insolite, à un individu ou à un appareil , dela structure normale d'un autre appareil ou. d'un autre individu. C'est une organisation transposée , c'est une loi changée de place. On l'a dit avec raison , la monstruosité ne se trouve pas en dehors de la nature, mais seulement en dehors de la coutume. (Natura est sibi semper consona. Newton.) Je grouperai les monstruosités en quatre classes : t» celles relatives au volume ; 2° celles relatives à la forme; 3° celles relatives à la disposition ; 4^ celles relatives au nombre ou à l'existence. Les premiéres comprendront deux ordres, les mons- truosités par diminution, et celles par augmentation de volume, c’est-à-dire les atrophies et les hypertrophies. Les secondes embrasseront trois ordres, les altérations irrégulières (déformations), les altérations symétriques (pé- lories) et les changements des organes les uns dans les au- tres (métamorphoses). Les troisièmes seront composées des monstruosités paf connexion , lesquelles nous offriront les anomalies paf union insolite ( soudures) et les anomalies par désunio? (disjonctions), et les monstruosités relatives à la situation proprement dite (déplacements). Enfin la quatrième classe nous présentera les monstruo- sités par diminution du nombre des organes Ou par dispa- rition (avortements) et les monstruosités par augmentatio? de nombre ou par apparition (multiplications). DES MONSTRUOSITÉS. MONSTRUOSITES. CLASSES. ORDRES. Diminution 1° Atrophies. VOLUME. um 2° Hypertrophies. irrégulière. . 3» Déformations. Altérations . À régulière. . 4° Pélories. FORME. {Changement d’un organe dans un autre 5° Métamorphoses. j ion.. . . 6° Soudures. 3° Connexion. . | re | = i Désunion. . 7° Disjonctions. MONSTRUOSITES DE DISPOSITION. Situation Déplacements. g d Diminution ... 9° Avortements. \ NOMBRE. ) Augmentation Multiplications. LIVRE I. DES MONSTRUOSITÉS DE VOLUME. Les variétés de taille (1) nous conduisent aux monstruo- sités de volume et lient les anomalies du premier livre à celles du second. Nous avons vu les causes qui, chez les végétaux, font ac corder une faible importance au nanisme et au géantisme; c'est-à-dire aux déviations du volume général, causes parmi lesquelles il faut placer en première ligne l'état d’agréga- tion auquel ils sont soumis. Dans la tératologie animale, les variations de taille se montrent, au contraire, trés-digne d'attention. | (1) Foy. le dernier livre de la seconde partie. SR RE mm tap te eee DES MONSTRUOSITES. 119 Les anomalies par changement de volume partiel sont as- “CZ nombreuses dans les végétaux comme dans les animaux, mais elles présentent un intérêt bien plus grand. Il y a, dans le végétal, pluralité d'individus et, dans chaque indi- vidu, multiplicite d'organes; ces individus et ces organes “ont arrangés symétriquement d’après certaines lois. Or, si, dans une ou plusieurs de leurs parties élémentaires, il s'ef- fectue un accroissement anomal soit par défaut, soit par ex- cès, l'ordonnance de l'ensemble sera forcément dénaturée. Le végétal qui croit s’allonge, celui qui fleurit se con- tracte (Goéthe) ; quand ces deux actes sont exagérés ou "lervertis, il y a monstruosité de volume. Ce genre d'a- malie peut offrir tous les degrés possibles. Je traiterai d'abord isolément des monstruosités par di- Minution partielle de volume ou des atrophies, et des mons- 'ruosités par augmentation ou des hypertrophies. Je m’occuperai ensuite, dans un chapitre spécial, de la “existence de ces deux phénomènes, c’est-à-dire des balan- “ements organiques. cei i ARN e Ta uad nude C. se aai non ai ter EB RE à ~ — | CHAPITRE I. DES MONSTRUOSITES PAR DIMINUTION DE YOLUME OU DES ATROPHIES. Laplupart desobser vateurssesontaperçusdepuislongtemps que certains organes ou certaines pièces organiques qui de- vraient faire partie du plan d’un végétal ne se développent pas, dans beaucoup de circonstances, jusqu'à leur état nor- mal. (De Candolle.) On pourrait appliquer, avec vérité, à ces anomalies, ce qu'un savant anatomiste disait d'une manière trop étendue dans sa définition des monstruosités en géné- ral : elles sont l'état permanent d'une formation qui n'aurait dú étre que passagère. L'évolution d'un organe peut s'arrêter de trós-bonne heure, à une époque où l'appareil. n'est pas visible pour DES MONSTRUOSITÉS. 121 hos yeux, ou bien à une époque plus ou moins rapprochée | de sa limité de développement (1). Dans le premier cas, , la plante se montre privée de l'organe ou de la partie or- Sanique ; il n'en reste aucune trace; il y a disparition. ` Dans le second, on en voit de simples rudiments ou des | Parties plus ou moins développées suivant la précocité de ' l'arrêt d'évolution ; ily a diminution de volume et non pas disparition, | U'un et l’autre phénomène ont été désignés sousles noms Varrét de développement (2) , d'avortement (3) ou de retar- dement de développement (4). On pourrait appeler le premier Mode avortement complet ou avortement proprement dit (5) 5 *t le second avortement incomplet (6) ou atrophie (7). Pè- ladierai l'avortement complet en traitant des monstruosités relatives au nombre ou à l'existence des organes. Il ne sera Tuestion dans ce chapitre que des diminutions de volume ou ^Írophzes. Ex On peut distinguer deux sortes d'atrophies : les atro- Phies trés-faibles dans lesquelles la fonction est encore exé- "utée et les atrophies trés-puissantes dans lesquelles l'organe 3 perdu la faculté d'accomplir la fonction. Ainsi, quand l'obstacle à l'évolution s'est présenté fort lard, à une époque où l'organe avait acquis la plus grande -. (1) «In omnibus vegetabilis vite gradibus evolutio cohiberi potest. » ‘Engelmann, De anthol., p. 15.) (2) Meckel, Handb. der Path. anat. , t: 1. (1812.) (3) DC. , Théor. élém. , 1 éd., p. 94. (1813.) (4) Geoff. St-Hil. , Phil. anat. , t. 11. (1823.) á . (5) Turpin Pa nommé avortement invisible ou intérieur. (Zcon. Peget., p. 18, note.) . E Turpin Pa nommé avortement visible ou extérieur. ( Loc. cit. (7) I. Geoff. St-Hil. (Trait. de térat. y Gt p-25£J.- 122 DES MONSTRUOSITES. partie de son développement, la diminution de volume est peu sensible, et le phénomène mérite à peine le nom d'atro- phie. Ti west pas rare de trouver des feuilles, des pétales , des pistils , réduits aux deux tiers ou à la moitié de leur volume et qui, malgré cette diminution, accomplissent leur rôle physiologique à peu prés comme dans l’état habituel. Ces phénomènes anomaux doivent être regardés plutôt comme des variétés que comme des monstruosités. Quand les entraves au développement sont arrivées dans les premiers temps de l'existence des organes , ceux-ci se montrent extrémement rabougris; ils perdent la faculté d'accomplir leurs fonctions, et l'on a souvent beaucoup de peine à les reconnaitre, tellement leur volume s’est éloigné du volume habituel. Quand cette atrophie est bien grave , les organes se trouvent réduits à de petites saillies, à des corps glanduliformes, à des languettes, à des moi- gnons. L'atrophie a entrainé alors avec elle une déforma- tion (1). Tous les appareils organiques, pendant les diverses pha- ses de leur développement , ne marchent pas d'un pas égal vers le terme absolu de leur croissance. Tel organe est plus précoce, tel autre est plus tardif, et, dans deux espéces don- nées , le méme organe se développe avec plus ou moins de rapidité. Voilà pourquoi les arrêts d'évolution ne détermi- nent pas des effets analogues dans toutes les parties d’un végétal ; voilà pourquoi aussi, deux plantes étant placées sous les mémes influences , l'une d'elles pourra offrir des atrophies puissantes , tandis que l'autre n'en subira que de légères. Avant de revêtir les formes auxquelles ils arrête , un or- gane passe transiloirement par une multitude de formes (1) Foy. le chapitre sur les Déformations. DES MONSTRUOSITES. 123 passagéres ; ces formes transitoires sont d’autant plus mul- üpliées que la composition de l'organe est plus complexe (Serres) : de telle sorte que les parties d'un appareil se balan- cent alternativement jusqu'à sa composition définitive. (Geoffroy Saint-Hilaire.) Or, si un appareil est entravé ac- Cdentellement dans sa marche , il offrira la structure de * période embryonnaire dans laquelle il aura été arrété , et Si cette structure constitue l'état normal d'un autre ap- Pareil > hous aurons 3 par monstruosité , une organisation Mi nait ailleurs par habitude. Les atrophies arrivent dans les organes appendiculaires et dans les organes axiles. Les premières peuvent affecter "ne ou plusieurs parties d’un verticille ou tous les verticilles à la fois. ARTICLE Ie. ATROPHIES DES ORGANES APPENDICULAIRES, Feures. Le limbe des feuilles est souvent réduit, par atrophie, à une trés-faible portion de sa substance : les exemples en sont assez fréquents; car, dans la tératologie végétale comme dans la tératologie des animaux , les orga- nes répétés le plus de fois sont aussi ceux dont le développe- ment est le plus variable. : J'aisousles yeux un Chenopodium Vulvaria , dans lequel toutes les feuilles ont à peine le quart de leur yolume ha- bituel. J'ai vu , dans un Diplotaxis muralis, la méme ano- malie : M. A. de Jussieu Pa trouvée dans un Hypericum perforatum; MM. Cosson et Germain me l'ont montrée dans un Blitum polymorphum. DES MONSTRUOSITES. 125 Quand les Euphorbes sont attaqués par les Æcidium ou les Uredo, toutes leurs feuilles présentent des exemples d'a- trophie plus ou moins prononcée; mais ici le phénoméne ‘St plutôt une maladie qu’une monstruosité. Dans un petit nombre de cas, le limbe avorte tout entier et la feuille est réduite à son pétiole ou à une portion de Celui-ci. Cette monstruosité rappelle l'organisation normale du Lebeckia nuda et de P Indigofera juncea (1). Un phéno- mène analogue nousest offert par l'état habituel du Strelitzia Jéncea. Ce que Von appelle feuille dans cette plante n'est utre chose, suivant observation de M. de Candolle, qu'un Pétiole privé de limbe. Ce fait est. démontré par la compa- - raison des diverses Strélitzies cultivées dans les jardins : leur Pétiole est engainant à la base, puis cylindrique et un peu aminci vers le haut; à son extrémité il porte un limbe trés- Prononcé. Ce limbe est assez grand dans le S. Regine, de moitié plus petit dans le S. parviflora, et complétement nul dans le S. juncea (2). M. de Candolle a cherché à démon- trer, par cet exemple, que les organes foliacés des Monoco- Ulédones, homogènes dans toute leur longueur et dans les- quels i] est impossible de distinguer un limbe et un pétiole (Jacinthes , Tulipes, Agave), ne doivent pas étre regardés Comme des limbes sessiles ou privés de pétioles, ainsi quon ‘a fait jusqu’à ce jour, mais comme des pétioles dépourvus de limbes. M. Martius a nommé steleophyllum la feuille ha- ituellement réduite au pétiole. Carice. La rosette calicinale se présente aussi quelque- fois avec un état d'atrophie. Dans certaines plantes, où cette enveloppe se trouve ordinairement assez saillante, elle peut Prouver un arrêt dans son évolution, et se montrer aussi Courte, aussi rabougrie que dans les Ombellifères. (1) DC., Organ. végét. , pl. 14. (2) DC. , loc. cit., t. 1, p. 286. + 126 DES MONSTRUOSITES. Tont le monde sait que les fruits des Graminées sont re- vétus d'enveloppes, et que le seul Mais offre des fruits dé- couverts. On ayait soupçonné que les glumes et les glumelles (involucre et calice) des fleurs femelles étaient devenues, pat l'effet de la culture, étiolées, membraneuses, et se trou- vaient réduites à une sorte d'involucre scarieux trés-mince, visible seulement quand le grain est enlevé, On voit quel- quefois, dans des épis qui se développent mal, ces parties prendre un aspect. foliacé, s'allonger et imiter, jusqu'à un certain point, les bractées et le calice des autres Graminées : cette prétendue déformation n'est qu'un retour vers l'ordre primitif (1), i l M. Auguste de Saint-Hilaire a rapporté du Brésil une portion d'épi de Mais (2) avec des fruits couverts d'enye- loppes allongées et aigués ; ce fragment, qui présentait le$ caractères généraux de la famille, avait été cueilli sur un pied de Mais sauvage. M. Auguste de Saint-Hilaire en à semé quelques grains dans un potager, sur les bords du Loiret; ils ont germé et produit des individus élevés et vi- Soureux. Les épis ne sont pas venus à maturité; mais, ayant examiné leurs fleurs, M. Auguste de Saint-Hilaire a constaté que les enveloppes en étaient charnues et. succu- lentes, qu'elles n'avaient plus la régularité de celles des graines semées et qu'elles tendaient à un état d'avorte- ment (3). Un défaut de développement bien remarquable du verti- cille.calicinal est celui qui arrive dans certains arbres frui- (1) Elle arrive surtout sur les épis qui ont éprouvé des avortements dans les fruits voisins de ceux qui ne se sont pas développés. (2) Ce Mais est appelé, par M. l'abbé Damasio Larranhaga, Zea Mays var. tunicata, et, par M. Matthieu Bonafous, Mays eryptosperma. (3) Lettre sur une variété de Mais du Brésil. (Ann. scienc. nat.» t. 16, p. 143.) DES MONSTRUOSITÉS, 197 tiers (Poirier, Pommier, Cognassier), où ce verticille doit Saccroitre aprésla fécondation, et constituer autour du fruit le enveloppe épaisse et charnue. Quand le calice s'atrophie, les carpelles continuent leur évolution et finissent par for- ner au-dessus de lui un renflement plus ou moins grand (1); * calice est réduit à une sorte de bourrclet inférieur. L'en- ‘emble représente deux fruits qui auraient été greffés l'un iu l'autre : l'inférieur parait formé d'une seule piéce ur- Géolée ; le supérieur offre, en général, autant de parties Wil-existe de carpelles séparés. Conorrg, La corolle éprouve des atrophies bien plus sou- Vent que le calice. L'espace nécessaire à son épanouissement, à pression à laquelle elle est soumise, la délicatesse de son “Su, peuvent expliquer jusqu'à un certain point cette fré- ence, MM. Seringe et Heyland ont figuré une fleur d'Arabis ina, observée au jardin des plantes de Genève, dans la- Welle la corolle paraissait beaucoup plus courte que de cou- ume (2). Le premier de ces auteurs a décrit un phénomène lout à fait semblable, trouvé dans des fleurs de Geranium Columbinum (3). Dans un Anagallisphenicea, cueilliàPont-Sainte-Maxence Oise) , M. Gay a remarqué des corolles moitié plus petites We le calice ; leurs pétales paraissaient disjoints à différents *srés; leur couleur était d'un noir violet. — On sait que, dans les Asters et dans plusieurs autres Co- "Ymbifares , les demi-fleurons de la circonférence s'atro- Phient quelquefois d’une maniére remarquable et tendent a (1) DC., Organ. végét. , pl. 43. (3) Bull. bot. , pl. 1, f. 5, 6. 8) Mém. sur le fruit des Géraines. (Ann. science. phys. de-Lyon, ‘1, pl. xn, B.) 128 ' DES MONSTRUOSITÉS, prendre le volume des petites fleurs du disque, en conse! vant néanmoins une partie de leur irrégularité. Dans beaucoup de circonstances, le défaut de dévelop- pement, au lieu d'agir sur tout le verticille , n’affecte qu'une | portion de ses éléments. Deux pétales, ou trois, ou un seul, éprouvent l'atrophie , tandis que le reste de la corolle peut offrir l'ordre normal. ANDROCÉE. Dans la fleur anomale d'Arabis, figurée pa MM. Seringe et Heyland, toutes les étamines ont subi Je sort de la corolle; elles paraissent moins développées qué dans l'état habituel. Ces organes étaient aussi atrophiés et devenus celluleux dans une monstruosité de Valerianellé olitoria , recueillie par M. A. de Jussieu; cette méme monstruosité offrait les éléments du périanthe transfor més en organes foliacés, et un stigmate urcéolé presque trifide. Les étamines sont peut-être les parties de la fleur les plu’ sujettes aux arréts d'accroissement. Dans la plupart de c& anomalies, il y a non-seulement atrophie, mais aussi défor^ mation. L'organe est réduit à un appendice filiforme plus ou moins court, analogue à celui qu'on voit normalement à la base interne de la corolle des Linaires (1), des Chélon® ou des Mufliers. Quand le phénoméne est plus général €! que toute une rangée d'étamines parait atrophiée, ce nouv état rappelle les cinq étamines normalement stériles des Ero” dium ou les dix écailles liguliformes des Vericordia. GYNÉCÉE. Quand les organes femelles sont atrophiés, oF voit aussi, à leur place, des rudiments plus ou moins inc pables d'accomplir leurs fonctions : tantôt il reste une por tion des ovaires, tantôt une sorte de tubercule ou de saillie (1) « Rudimentum quinti staminis vix conspicuum. » ( Juss., Gén-: p. 120.) DES MONSTRUOSITES. 129 plus ou moins dense, quelquefois méme un renflement glan- duliforme. Quand I’ Arenaria tetraquetra se développe sur des monta- Shes élevées, la plante présente des fleurs à pistils imparfaits mêlées à d'autres fleurs , les unes avec des étamines atro- Phiées, et les autres avec les deux sexes normalement feconds. Cette jolie Sabline est devenue polygame (1). On sait que les ovaires des Aconits sont sujets à s’atro- Phier, et qu'ils se couvrent, dans quelques circonstances, Pun duvet plus ou moins serré (2); ils ressemblent alors au fruit du Trifolium fragiferum. ( Seringe.) D'aprés M. Adolphe Brongniart, dans la maladie des Gra- Minées, connue sous le nom de charbon, les organes fe- melles, au lieu d’être transformés en matière charbonneuse, Se trouvent dans un état rudimentaire, attachés au sommet l'une masse charnue occupée par le charbon : celui-ci ne se développe ni dans l’ovaire, ni dans les parties environ- Nantes, comme on le croyait généralement, mais dans le Pédoncule, dont il cause l'accroissement en un corps d'abord Charnu, et, plus tard , pulvérulent (3). Frurr. Dans les ovaires non fécondés comme dans ceux qui ont été piqués par un insecte, saisis par le froid ou des- Séchés par le soleil, les graines ne se développent que d’une Maniéreincomplète; elles sontincapables de propager l'indivi- du, L'atrophie des péricarpesaccompagne ordinairement celle. des semences. Ainsi, par exemple, parmi nos arbres fruitiers, il n'est pas rare de trouver des fruits dont tous les germes ou Une partie des germes sont atrophiés. C'est ce qui arrive sur- tout dans plusieurs variétés de Pommes, de Poires, de Raisins. (1) Gay, Hist. de VA. tetraquetra. (Ann. scienc. nat., t. HI, D. 44.) (2) Reichenb., tab. v, fig. B, 6. (3) Ann. scienc. nat. , t. XX, p. 111. 130 DES MONSTRUOSITÉS, J'ai compté les fruits normaux et les fruits atrophiés de quelques pieds de Balisier cultivés au jardin des plantes de Toulouse : sur cinquante-six fruits, il y en avait quarante” neuf avec les trois carpelles normaux et quatre avec deus carpelles atrophiés. Les végétaux hybrides ont généralement des défauts de développement dans leurs fruits. On l’a reconnu dans le Verbascum collinum (thapso-nigrum) (4), dans le Digitalis fuscata (purpureo-lutea) (2), dans le Tigridia aurantiaca ( conchifloro-pavonia) (3)..... Quelquefois l'atrophie. se présente sans cause appréeia- — ble. Tl n'est peut-étre pas d'arbre fruitier qui ne produise À quelques carpelles isolés ou quelques fruits entiers réduits au tiers, au quart de leur volume habituel. Ainsi, paf exemple, un Noyer de taille ordinaire a offert, sur unt récolte abondante de noix, dix-huit fruits parfaitement conformés comme les autres, mais petits comme des frai- | ses. Dans quelques-unes de ces noix , l'amande avait pres- que entièrement avorté. Si l'on compare entre elles les atrophies des différents verticilles de la fleur, on remarque qu'elles sont très-rares dans le calice et trés-communes dans le pistil ou le fruit. Il semble que leur fréquence est d'autant plus grande qué les organes sont plus élevés. Cette disposition parait tenir & ce que les parties les plus terminales sont en méme temps les plus centrales et, par conséquent, les plus exposées a là pression , ou bien à ce que les organes les plus intérieurs où les plus hauts sont ceux qui naissent les derniers, (1) Schrad. , Verbase. 35, t. vj f. 1. (2) Salvert et St-Hil. , Journ. de bot. , et Mém., soc. d' hist. Paris: a (3) Moq. , Acad. sc. Toul. , août 1839. ARTICLE II. ATROPHIES DES ORGANES AXILES, Vatrophie peut se présenter dans les organes axiles “Mme dans les organes appendiculaires. L’axe paraît alors lapetissé, rabougri, et cette anomalie est toujours accom- lignée de la déformation des organes appendiculaires , Üielquefois méme de leur déplacement. Uatrophie arrive dans l'axe principal ou bien dans les Xes secondaires. | Les atrophies de laxe principal sont tantôt faibles et antót puissantes : les premières diminuent la longueur de à tige et n'influent pas d'une manière sensible sur la tota- lé du végétal; les secondes, au contraire, raccourcissent “lement l'axe qu'elles peuvent rendre le végétal subacaule. “Ur apparition est toujours accompagnée de déviations Plus où moins profondes. | 132 DES MONSTRUOSITES. J'ai vu un jeune Camphorosma monspeliaca dont les tiges étaient réduites à plusieurs tubercules ligneux , trés-courts et trés-durs , hérissés de feuilles déformées et d’une quantité innombrable de poils, plus longs, plus durs et plus serrés que les poils habituels. Quant aux axes secondaires, ils sont remplacés, dans la plupart des cas, par des corps gréles, courts, pointus et plus ou moins spiniformes; toutes leurs parties appendicu- laires se trouvent atrophiées ou avortées. Cette anomalie arrive surtout dans les mauvais terrains. Tous les arboriculteurs savent que cette production des épines disparait par l'effet d'une bonne culture. On dit communément que les épines, méme celles des arbres qui en ont d'habituelles , se transforment en rameaux et en bran- ches , quand ces végétaux sont transplantés dans nos jar- dins. Cette assertion n'est pas rigoureusement exacte ; les épines déjà existantes conservent parfaitement leurs carac- teres; mais les parties axiles qui naitraient sous forme d'épines, si le végétal était abandonné à lui-même dans un mauvais terrain , se développent en véritables rameaux sous Pinfluence de l'excès de nourriture (1). Lesrameaux des sapins, piqués par des insectes, s'arrétent aussi dans leur développement; mais, au lieu de se présenter sous la forme d'une épine, ils adoptent quelquefois celle d’un cône imparfaitement organisé; j'en ai vu un exemple bien caractérisé dans l'herbier de M. A. de Jussieu. (1) « Spinosæ arbores cultura sæpiüs deponunt spinas in hortis. » (Linn. , Phil. bot. , 272.) CHAPITRE U. DES MONSTRUOSITÉS PAR AUGMENTATION DE VOLUME, OU DES HYPERTROPHIES. De méme que les organes, dans certaines circonstances , “prouvent un retard ou un arrêt au milieu de leur role. lion C'est-à-dire avant d'avoir atteint leurs limites norma- E , de méme aussi, dans d'autres circonstances, ces orga- nes peuvent franchir leurs bornes ordinaires. n n'est pas tare de voir cette anomalie dans des feuilles, des pétales , êS étamines qui se distinguent alors des autres organes similaires par un volume monstrueux. M. de Candolle a signalé ce phénoméne dans sa Théorie lémentaire. Aprés avoir jeté un coup d'œil rapide sur les lésultats divers produits par les avortements, ce célèbre Olaniste sépare ces derniers en deux grandes classes, SE RE ig etr m qom a x aey eq 134 DES MONSTRUOSITÉS. savoir : les avortements par defaut et les avortements par excés de nourriture (1). Ce sont les avortements de la se- conde classe que je désigne sous le nom d’hypertrophies. La dénomination d’avortement par excès qui leur a été appli- quée ne parait pas suffisamment exacte ; dans le langage ordinaire , on se sert du mot avortement pour désigner un accouchement avant terme; avorter se dit figurément des fruits qui ne parviennent pas à la grosseur et à la maturité requises (2). D'aprés ces définitions, le terme avortement ne devrait-il pas étre employé uniquement pour les arrêts où défauts de développement , et indiquer seulement les indi- vidus, les organes ou les parties d'organes qui ne sont pas arrivés à leur état normal? Pour indiquer ce phénomène , j'ai emprunté à la patholo- gie humaine l'expression. d’hypertrophie, dont M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire s'est déjà servi avec bonheur dans la Tératologie des animaux. L'hypertrophie sera donc cet état d'un organe ou d'une partie organique qui, dans son évolution > aura marché au delà du terme de grandeur réclamé par son état normal. L’hypertrophie est un phénoméne inverse de l'atrophie. L'hypertrophie peut être envisagée, comme l'atrophie ; sous deux points de vue généraux ; le cas dans lequel un organe augmente faiblement son volume , mais conserve så fonction; le cas dans lequel un organe étend considérable- ment son volume et devient incapable de remplir sa fonc- tion. Le premier exemple appartient plutót aux variétés qu'aux monstruosités. L’hypertrophie peut se montrer isolée ou se développer À la suite d'une autre monstruosité. Par exemple , les pé- (1) T'héor. élém. , éd. 1, S 65. (2) Foy. le Dictionn. de Acad. franc. DES MONSTRUOSITES. 135 tales acquièrent quelquefois un volume beaucoup plus Stand que leur volume habituel, sans avoir changé de po- ‘ition, de forme, de consistance ou de couleur. D'un autre Coté, quand les organes sexuels se transforment en corps oliacés ou en expansions pétaloides , il y a toujours dilata- tion et amplification trés-manifestes. ARTICLE 1e. HYPERTROPHIES DES ORGANES APPENDICULAIRES. Feuittes. L’Hernandia produit, en Amérique, des feuil- les qui ont à peu prés 5 centimètres de longueur. Dans les serres, leur diamétre peut arriver jusqu'à 3 décimétres (4). En général, quand on coupe l'axe d'un végétal trés-vigou- reux, et qu'il ne se développe qu'un petit nombre de bour- geons aprés l'amputation, ceux-ci produisent des feuilles avec des dimensions plus ou moins exagérées, Quelquefois Phypertrophie ne porté que sur une partie de l'organe. Ainsi, dans quelques feuilles, la nervure mé- diane se prolonge en forme de languette ou de ruban; (1) Linn., Crit. bot., p. 156. ——— € SE ee a DES MONSTRUOSITES. 137 Wautres fois ce sont les parties latérales du limbe qui éprou- vent le développement excessif. Schlotterbecc a figuré une feuille de Violier jaune, dilatée de chaque côté de la pointe | ^n une sorte de lobe assez saillant, de manière que son Sommet paraissait comme trilobé (1). | Carice. J'ai vu des fleurs anomales de Salsola Kali et de Chenopodium murale dont les premières avaient un sé- Pale (2), et les secondes deux (3), cinq ou six fois plus Stands que les sépales ordinaires. Pai observé des fleurs de Rosier dans lesquelles le calice lout entier s'était hypertrophié sans changer sa forme accou- lumée, M. de Schlechtendal a noté la méme observation sur le p apaver Rheas ; M. Reichenbach a indiqué le Campanula Persico folia , et M. Alphonse de Candolle le Campanula Punculus. M. Adolphe Brongniart a fait connaître une variété re- Marquable de Primula sinensis, cultivée au jardin des Plantes de Paris, dont le calice avait acquis un volume ex- “essif. Le tube était renflé vers son extrémité, et le limbe épassait le niveau de la corolle (4). ^ Cororre. La corolle est sujette aussi à des hypertrophies dE (flos grandiflorus ). On a cité des Galeopsis, des Brunella, des . "tabiosa , des Dipsacus. Une amplification analogue se ma- Nifeste également dans le Viola mirabilis et dans une variété (1) Sched., De monst. plant., Act. helvet.,t. n, pl. m, fig. 14. (2) Les Mussænda et les Pinckneya offrent un des lobes du calice Rormalement amplifié. (Mich. , Flor. bor. am., t. 1, pl. xur.) (3) Dans la plupart des Polygalées (Securidaca, Comesperma, Po- En). deux des cing sépales (ailes) sont plus grands que se odi res. Cette inégalité est d'autant plus remarquable que, dans d'autres Ng de la même famille ( Penœa, Muraltia , Salomonia), les cinq loles sont égales ou à peu pres égales. (4) Note sur une monstr. de P. sinensis. ( Ann. scienc. Wah. yt. T. >. 308 , pl. 1x, C, fig. 1.) 138 DES MONSTRUOSITÉS. remarquable du Viola odorata, cultivée aux environs de Toulouse. Dans une partie des Composées dites Radiées, impropre- ment appelées doubles (Matricaria, Bellis , Tagetes), tous les fleurons ont dépassé le terme normal de leur évolution, et ont pris des dimensions égales ou presque égales à celles des corolles de la périphérie du capitule. (Willdenow.) ANDROCÉE. M. Dunal a trouve, aux environs de Gaillac (Tarn), quelques pieds d’une espèce de Molène, dans lesquels l'androcée présentait un singulier exemple d'hypertrophie accidentelle, On sait que les Molénes possèdent des filets sta- minaux garnis de poils souvent colorés. Dans les fleurs infé- rieures des plantes dont il s'agit, ces filets avaient de longs poils à l'état habituel. Ceux des fleurs du sommet de la pa- nicule étaient entiérement glabres et dilatés ; ils semblaient collés à une écaille membraneuse qui s’étendait dans toute leur longueur (1). J'ai découvert, prés de Toulouse, un individu de Solanum Dulcamara, dans lequel toutes les fleurs supérieures offraient tantót deux, tantót trois étamines beaucoup plus longues et plus grosses que les autres (2). Gvnécée. Dans certaines fleurs, devenues accidentelle- ment femelles, le gynécée adopte quelquefois des dimen- sions extranormales. Les pistils deviennent ou plus longs ou plus dilatés que de coutume, et ce développement peut se montrer assez anomal pour empêcher l'organe de se laisser (1) Consid. org. fleur. Montpellier, 1829, p. 25 et et 19. (2) Dans les Solanum tridynamum (Poir.) et Amaz trois étamines prennent habituellement plus de développement que les deux autres. Dans les Solanum Vespertilio (H. Kew) et cornutum (Juss.), le phénomene est plus restreint; une étamine seulement ac- 26, pl. 11, fig. 18 > ; US. onium (Bellend.), ? quiert une taille double du volume habituel, ~~ : — OO Ra EA DES MONSTRUOSITÉS. : 139 imprégner et traverser par la matiére fécondante. J'ai re- marqué cet accroissement dans les gynécées du Suæda fru- ficosa et du Kochia Scoparia. Les fleurs de ces Chénopodées *essemblaient alors aux fleurs femelles normales de certaines Urticées. Les styles des Anémones se développent aussi accidentel- lement par l'effet de la culture et dépassent de beaucoup leur terme habituel d’accroissement. Ces styles, qui ont un aspect Pétaloïde, représentent trés-bien les styles des Iris. (Goéthe.) MM. Seringe et Heyland ont figuré des fleurs anomales € Diplotaxis tenuifolia, dans lesquelles le gynécée, plus ou Moins boursouflé et déformé , s'était considérablement allongé surtout dans la partie inférieure ; il paraissait porté Par un Jong pédoncule analogue à celui des fruits des Cleome (1). Le Pyrethrum inodorum est trés-sujet à s'hypertrophier ; *$ styles de ses demi-fleurons s'allongent sans autre alté- talion; en méme temps les petites corolles verdissent et lendent à se transformer en organes foliacés. Quelquefois - ‘hypertrophie gagne les styles des fleurons , et ceux-ci ac- TUiérent à leur tour une taille double et méme triple de la taille habituelle. (Gay.) Linné rapporte que les ovaires du Salsifis commun pren- nent un accroissement énorme ; ainsi que leur aigrette dans À variété à fleurs pleines qui croît aux environs d'Upsal; ls deviennent jusqu’à douze fois plus grands que les pistils rdinaires, | Une des causes qui contribuent le plus souvent à Phyper- lrophie des gynécées est l'action de. la piqüre des insectes. *$ piqûres semblent agir comme des stimulants. Ainsi, {and la livie des jones pique l'ovaire du Juneus artieulatus, (1) Bullet. bol. , t. 1, p. 7, pl. 1. 140 DES MONSTRUOSITES. celui-ci acquiert un volume trois ou quatre fois plus gros que son volume habituel, mais il devient en méme temps sté- rile (1). Fnurr. La plupart des fruits cultivés dans nos vergers | se trouvent dans un véritable état d'hypertrophie. L'in- fluence de l'homme a agi pendant plusieurs générations et toujours de la méme manière sur les arbres qui les portent; la force reproductrice a été troublée, et il en est résulté un accroissement excessif des chairs fondantes et des pates plus ou moins sucrées. Girod de Chantrans a réussi, par la culture, aprés plu- sieurs expériences successives, à obtenir, des Pois Michaux; des variétés à gousses doubles de celles des Pois ordinaires. Ces gousses contenaient des graines avec un volume pro- portionnel (2). Dans les exemplessignalés le grossissement estarrivé sans un changement bien notable dans la figure de l'organe; mais, dans certains cas, le phénoméne parait accompagné d'une déformation plus ou moins grande; les carpelles de certaines variétés de Légumineuses dites onguiculées sont généralement hypertrophiés et allongés en griffe ou en crochet (Medicago Lupulina , Melilotus leucantha) (3). Le fruit du Senecon vulgaire est , à l'état normal, deux ou trois fois plus court que l'involucre , presque cylindri- que et à peine aminci vers le haut. Dans une monstruosité assez commune , ce fruit atteint la longueur de l'involucre et va en s'amincissant de la base au sommet ; il est comme rostré supérieurement; c’est à peu près la différence du Bar- khausia au Crepis. (Gay.) . (1) Ré , JVosol. végét. , p. 342. \ (2) Doutes sur Inst. des formes végét. (Ann. soc. linn. Paris V. 1, p. 139.) (3) Seringe, DC. , Prodr. 2, p. 172, 187. ; 4 DES MONSTRUOSITÉS. 141 Voici maintenant une hypertrophie plus grave encore, *?ccompagnée d'une viciation complète. M. A. Richard a émontré que les corps charnus et tubériformes qu'on trouve quelquefois dans l'intérieur des capsules des Crinum, “es Amaryllis et des Agave, et que l'on a désignés sous le Dom de bulbilles charnus , ne sont que de véritables grai- "és, dont l'organisation intérieure est la méme que celle es autres organes du même genre , mais qui différent seu- "ment par leur grosseur énorme. En effet, les graines (Ui ne présentent pas cette particularité sont générale- Ment comprimées, assez minces, et n'offrent pas la cin- quiéme partie du volume des graines bulbiformes (1) (i) Obs. sur les bulbilles des Crinum. (Ann. scienc. nat. > a, P. 12, pl. 1, fig. 1-2.) ARTICLE IL. HYPERTROPHIES DES ORGANES AXILES. Le volume des axes peut augmenter de différentes ma- nières; tantôt ils s'allongent avec excès , tantot ils se di- latent outre mesure. Dans les cas de dilatation, l'axe grossit de tous les côtés ou bien s'étend de préférence dans un seul sens, et donne naissance à des expansions aplaties. Je dis- tinguerai donc trois sortes d'hypertrophies axiles , celles qui consistent dans un allongement prodigieux , celles qui sont produites par un gonflement excessif et enfin celles qui résultent d'un élargissement ou aplatissement outre mesure. Je désignerai les premiéres sous le nom d'élongations et DES MONSTRUOSITES. 143 les secondes sous celui de renflements ; je conserverai aux dernières la dénomination de fascres. $ Ier. — Des Élongations. U'elongation est une monstruosité qui consiste dans l'al- )Ugement excessif des parties axiles. Dans cette ano- malie, Paxe devient grêle; son tissu se ramollit, ses cou- “urs s'affaiblissent. Les feuilles ou les bourgeons qu'il Porte se montrent plüs écartés et plus petits; souvent même ils sont atrophiés. . Certains jets herbacés des Saules pleureurs, les Lins dits “Tamer, cultivés pour le fil le plus fin de Flandre , sont des exemples d'élongation commencante ; mais ces accrois- ‘ements anomaux ne méritent pas encore le nom de mons- ruosités. L'étiolement ou le démi-étiolement sont des sources Püissantes d’élongation. Tout le monde sait qu'une Pomme “terre placée dans une cave à une certaine distance du SOüpirai] dirige vers celui-ci des jets ordinairement très- ngs, Si Pon éloigne le tubercule du soupirail au fur et à Mesure du développement de la tige, celle-ci pourra deve- uir dune longueur démesurée. Pai vu, au jardin des plantes de Montpellier, contre la "Cade du Conservatoire, un rameau de Sueda fruticosa Tu sétait développé dans une crevasse du mur ; il était de- venu filiforme, herbacé, blanchâtre ‘et extrêmement long. es feuilles paraissaient écartées , ‘petites , rabougries et Pour ainsi dire rudimentaires, , Le séjour dans l'eau peut déterminer aussi l'élongation. Les hotanistes ont remarqué que les plantes aquatiques 144 DES MONSTRUOSITÉS. ont, en général, des proportions plus élancées que les plantes” terrestres : plusieurs d'entre elles sont susceptibles de s'élever jusqu'à la surface des eaux les plus hautes ; d'autres, entiè- rement submergées , produisent, au moment de la fécon- dation, des pédoneules d'une longueur extraordinaire: pour mettre leurs appareils floraux en rapport avec l'aif atmosphérique. Lorsqu'une cause quelconque augmente là masse de l'eau habitée par les plantes dont il s'agit, celles-ci allongent à proportion leur tige ou leurs pédoncules , afi? que leurs feuilles ou leurs fleurs soient toujours à la surface du liquide. Ces accroissements pourraient devenir asse considérables pour former des monstruosités. ! Quand une plante terrestre se trouve par hasard inondée, et qu'elle est assez robuste pour résister à l'influence dt nouveau milieu, il arrive un phénomène analogue à celu! qui vient d'étre indiqué, et il se forme souvent une véritable anomalie. Ph. de Lapeyrouse a décrit, dans son Supplément à W Flore des Pyrénées (pag. 27), sous le nom de Potamog* ton bifolium, une plante trouvée flottante dans l'étang de Barbazan, par Marchand de Saint-Béat. M. G. Bentham 4 reconnu que cette plante était un échantillon non fleuri de Vicia Faba, développé dans l’eau et déformé (1). Les axes du système souterrain sont sujets à l’élongatio® comme ceux du système aérien ; les racines, développée dans l'eau, s’allongent aussi outre mesure. Lorsque, par hasard, l'extrémité souterraine d'un végé- tal rencontre un filet d’eau, elle s'étend, se développe €? fibres capillaires, ramifiées , qui s'entre-croisent et consti- tuent cette production si bizarre que les jardiniers ont ap^ pelée queue-de-renard. (1) Cat. Plant, ind. Lang., p. 113. SU m 4.4% DES MOGNSTRUOSITES. 145 . Dans un des tuyaux qui distribuent les caux de Saint- Clement aux fontaines de Montpellier, j'ai vu une de ces Queues-de-renard qui avait au moins trois mètres et demi de long ; les radicelles, en quantité innombrable, s'étaient en- lrelacées, et, pour-ainsi dire, feutrées ; l'ensemble avait pris Une forme cylindrique comme le tuyau qui le logeait. § 11. — Des Renflements. Les axes sont sujets à certaines excroissances Où exos- loses. Ces saillies, ordinairement ligneuses, semblent formées de fibres plus ou moins flexueuses , disposées avec plus ou Moins d'irrégularité : elles sont hémisphériques ou arron- dies ; Turpin en a figuré une de Cyprés chauve, qui est de forme pyramidale et radicale (1). | Quand les exostoses sont légéres, elles paraissent dues à des blessures, surtout à des contusions; aussi les arbres si- tués aux bords des grands chemins sont-ils ceux dont les ttones offrent le plus d'exostoses. Ces difformités appar- tennent plutôt à la pathologie qu'à la tératologie. — Quand ces excroissances sont assez fortes pour entrainer la déviation de tout le tronc ou de tout le rameau, elles dé- Pendent alors d’un vice organique de conformation ; elles Sont congéniales et constituent de véritables monstruosités. Dans le Saule blanc, ces renflements acquiérent quelque- fois un diamètre deux ou trois fois plus grand que celui du lameau qui les produit. ; L’Herbier Poiret renferme un pied de Valériane officinale dont Ja tige est courte, dilatée, presque globuleuse, abso- (1) Icon. végét., tab. 5, fig. 18. 10 146 DES MONSTRUOSITÉS. lument semblable à une grosse rave. Tout le système appen- diculaire se trouve atrophié et réduit à quelques fouilles irréguliérement disposées en spirale, et à quelques fleur$ stériles portées par des rameaux singuliérement courts. Les axes radicaux présentent aussi des renflements de dif- férentes grosseurs. Ai-je besoin de rappeler la taille énorme que peuvent acquérir les Carottes, les Raves et les Betteraves cultivées? | Tout le monde connait cette variété de Radis dans laquelle la | racine a pris l'aspect d'une petite boule. Une dilatation ana- logue se manifeste dans une maladie du Chou que les An- glais appellent club. Le charancon chlore ou oscime pique quelquefois les racines de ce dernier végétal et fait dévelop” per un gonflement considérable qui est, presque toujours, la source de cette singuliére maladie. § HI. — Des Fascies. La dilatation excessive des organes caulinaires constitue une monstruosité compliquée, qui a recu le nom de fascie; M. de Candolle Ia désigne sous celui d'expansion fascice. Dans l'état de fasciation , les organes caulinaires , ordi nairement plus ou moins cylindriques, adoptent une forme aplatie et comme demi-foliacée; les fibres ou nervures p^ raissent à peu prés parallèles ou convergentes, ou diver- gentes vers le sommet, mais simples et non pas épanouie’ comme celles des organes foliacés (1). Les tiges, les branches et les rameaux sont tous sujets À cette singulière anomalie; mais elle parait surtout dans Pax" (1) DC. , Phys. végét, t. 2, p. 195. DES MONSTRUOSITÉS.: 147 Principal : on la rencontre tantót dans les végétaux herba- cés, tantôt dans les végétaux ligneux ; on observe cepen- dant qu'elle ne se présente chez ces derniers que pendant la jeunesse des organes, lorsqu'ils n'ont pas encore atteint tout leur degré de solidite. : Les tiges ou les rameaux fasciés sont d'abord presque cylindriques, puis ils deviennent aplatis et plus ou moins Striés ou cannelés dans le sens de la longueur : leur con- Sistance demeure plus ou moins herbacée ; quelquefois clle se montre presque succulente. i? Histoire de quelques Fascies. ` Les fascies constituent peut-être les monstruosités plus communes ; on les a observées depuis longtemps et dans un grand nombre de végétaux. Beaucoup d'auteurs, avant Linné, nous ont laissé des descriptions ou des figures relatives à cette anomalie. Ainsi, par exemple, Borrich a fait connaitre un Geranium, un Ranunculus, VHysope , le Lis-martagon et la Couronne im- Périale (4); Vollgnad a mentionné P Hieracium Pilosella , PEuphorbia Cyparissias et le Primula Veris (2). Jaenish a indiqué une Buglose (3); Wedel, un Saule (4); Fribe, une (1) Act. hafn., 1613, p. 162. — Foy. aussi Volignad, Ephém. nat. Cur. déc, 1, ann..6 et 7, p. 345, el Hannæus, déc. 2, ann. 8, p. 285, fig. 21. (2) Éphém. nat. cur., déc. 1, ann. 6 et 7, p. 344, fig. 1-2, et p. 345, lig. 3. (3) Loc. cit., déc. 1, p. 204. -. (4) Loc. cit. , déc. 1, ann. 3, p. 226. 148 DES MONSTRUOSITÉS, Camomille (1); Fehr, un Chrysanthème (2); Wagner, üñ Narcisse (3); Hoffmann, une Asperge (4); Gahrliep, unë Conyze (5).... La plupart de ces exemples ont été retrouvés par des botanistes modernes. : Linné a cité la Bette, la Julienne, le Salsifis, la Scorso- ` pore, et plusicuts des espèces déjà découvertes avant lui. Depuis cé célébre naturaliste, on à recueilli un grand nombre d'autres exemples de cette anomalie. Parmi les Dicotylédones herbacées , Duchéne a trouvé le Fraisier (6); M. Chavannes, le Linaria purpurea (7); M. Decaisne, le Trifolium. resupinatum ; M. Boivin, le Barkhausia taraxacifolia; M. Seringe, le Ranunculus tripartitus (8), et M. Viala de Castelnaudary, le Ranunculus bulbosus. M. Delile m'a montré un bel individu d' Euphorbia Characias découvert aux environs de Montpellier, dont les parties appendiculaires avaient adopté une vive couleur rougé. L'Herbier Poiret m'a offert une fascie encore plus remarquable de Carlina vulgaris; la dilatation de l'axe avait au moins un décimétre de largeur. Une monsiruosité ana- logue'à été décrite par M. de Schlechtendal, qui a observé aussi, dans cet état, un Apargia autumnalis. M. Jeger a signalé les fascies du Delphinium elatum, de V Ajuga pyramt- dalis et du Myosotis scorpioides; M. de Candolle a parlé de celles de ? Euphorbia Cyparissias, du Jasione montana et de quelques Stapélies. J'ai vu, dans 'Herbier de ce dernier bota- 1) Loc. cit. , p. 254, fig. 1.: ( (2) Loc. cit. , ann. 9 et 10, p. 30, tab. Iv. (3) Loc. cit. , déc. 2, ann. 9, p. 60. (4) Loc. cit. , cent. 9 et 10, ae 459. — Detharding, déc. = ann. T et 8, p. 31. (5) Loc. cit. , déc. 2, ann. 8 ; P- 64, fig. 3. (6) Hist. nat. des Fr ais. , p: 23. (7) Monograph. antirrh., p. 71. (8) Bullet. bot. , tab. ut, fig. 6. M SS RE t. nea ee — DES MONSTRUOSITÉS. 149 aiste, le Sueda maritima, le Centaurea Scabiosa, le Saxifraga nutata et lc Campanula rapunculoides; il existe, dans celui deM. Adrien de Jussieu, le Campanula medium, V Antirrhinum majus, le Buplevrum falcatum et le Saxifraga irrigua. Y'aiob- Servé moi-méme, en herborisant, ou dans diverses collections, le Cichorium I ntybus, le Chrysanthemum leucanthemum, l Eu- Phorbia exigua, le Linum usitatissimum, l Androsace maxima ct Echium pyrenaicum. Ce dernier exemple faisait partie du Cabinet de Philippede Lapeyrouse : c’estun des plus beaux qui dient été recueillis. Qu'on se figure une palette très-allongée, fortmince, large au moins comme les deux mains; couverte, Surtout vers le sommet, d’une quantilé innombrable de ra- Meaux courts chargés de fleurs. Mon ami, M. Berthelot, m’a assuré avoir cucilli, à Ténériffe, un pied d'Echium simplex, nC. fascié depuis la base, et présentant aussi une dilatation llorifere et large d’un décimètre et demi environ. — Parmi les Dicotylédones ligneuses, M. Germain a vu le Thuya orientalis, M. Boivin le Genista Scoparia, M. A. de Jussieu le Dodonæa viscosa et le Daphne indica, M. de Schlech- tendal le Prunus sylvestris, le Sambucus nigra et le Cytisus Laburnum (1), et M. de Candolle le Spartium junceum, le Daphne. Mezereum , le Frénc et le Jasmin (2). J'ai trouvé ` Moi-même plus ou moins fasciés le Suæda fruticosa, le Melia Azedarach, le Sterculia platanifolia, le Grenadier POrmeau, le Févier, le Mûrier blanc... Parmi les Monocotylédones, M. de re le a indiqué les pougères. J'ai rapporté plus haut, d'après Hoffmann, Merre, d'aprés DRE un Narcisse; et, d’après Bor- tich, le Lis-martagon et la Couronne HORAE A. ces espèces je puis ajouter le Lis blanc, le G! aigu le Mais et le à Fragon. ) Linnza, 13, p. 384. (1 (2) Loc. cil. , pl. ux; fig DES MONSTRUOSITÉS. 2° Remarques générales. On voit, d’après les exemples signalés, que les fascies sot plus habituelles dans les Dicotylédones que dans les Moné cotylédones, et qu’elles arrivent plus fréquemment dans le espéces herbacées que dans les végétaux ligneux. J'ai cru reconnaitre que, daus les plantes à tissu làch et peu consistant, la fasciation affecte toujours l'axe prin cipal, et souvent, à la suite, les rameaux; tout le systèm se trouve alors fascié. Au contraire, dans les arbres ët les arbrisseaux, ce sont les branches, les rameaux, san doute parce que ces parties sont plus tendres et moins soli des que l'axe principal. J'ai observé cependant des espèces | ligneuses à tiges fasciées ; mais, en général, celles-ci Si trouvaient jeunes et rentraient plus ou moins dans les con ditions. des plantes herbacées. Dans les tiges et les rameaux fasciés, la dilatation peu être faible ou considérable. Quand la dilatation est faible l'axe diffère trés-peu de ja structure habituelle; il paral seufétiènté plus où moins aplati. Quand. l'expansion est forte, l'organe s'élargit out mesure, les stries ou cannelures longitudinales tendent : s'écarter les unes des autres , et forment souvent au sommet autant de petits rameaux plus ou moins distincts, aplati comme l'axe principal et disposés sür un méme ptit: Dan quelques cas, ces rameaux se roulent sur eux-mêmes com les jeunes feuilles des Fougères où comme la crosse d'un évéque. Cet enroulement arrive surtout aprés le développe ment des bourgeons de l'organe fascié et il peut devenir tres fort aprés plusicurs années. i xm ee TSE TUNER — T es: VOS DES MONSTRUOSITES. tot Les bourgeons des axes fasciés ne présentent aucun ordre; dans un petit nombre de cas, ils conservent cà et là des tra- Ces de leur disposition habituelle. Quand l'axe est très- dilaté, et qu'au lieu de se terminer par de petits rameaux droits ou tortueux il parait comme tronqué, il se développe, sur les bords de son extrémité, une suite de bourgeons dis- Posés comme les dents d'un peigne et pressés les uns contre les autres. Lorsque la fascie est accompagnée de la torsion des fibres, souvent les bourgeons se trouvent rejetés d'un Seul côté et placés en série linéaire plus ou moins verticale. Dans le Bupleorum falcatum observé par M. A. de Jussieu , les spirales de feuilles. sont transformées en ver- ticilles parfaitement réguliers : ceux-ci présentent cinq, Six, sept et huit éléments, et il s'est développé un rameau llorifere dans Vaisselle de chaque feuille. Les fleurs portées par ces dilatations éprouvent des défauts où des excès dans leur évolution; quelquefois leur axe de- Vient plus ou moins fascié, et les diverses rosettes qu'il sup- Porte changent leur disposition circulaire contre un arran- Sement elliptique ou comprimé. (Ad. Brongn.) La coloration habituelle de la tige ou du rameau est sou- Yent altérée par la fasciation. Les parties affectées devien- lent vert pale (Beta vulgaris), ou vert foncé (Linum ustta- tissimum) , ou purpurines (Euphorbia Characias). Les plantes susceptibles de former ces expansions étant Souvent très-rameuses , on a pu croire que ces monslruosités tésultaient de la greffe naturelle de plusieurs petites bran- ches qui naitraient en un seul point les unes à edte des utres, Cette explication ne parait guère admissible. (Lind- ley.) On trouve des végétaux unicaules , fasciés (Androsace Maxima), ct rien n'annonce qu'il y ait, dans cecas, plusieurs individus soudés ensemble. Sur certaines tiges fasciées on marque des branches en même nombre et avec la même. 152 DES MONSTRUGSITES. disposition que dans Pétat normal, Deux branches qui 5€ soudent par hasard dans le-sens de leur longueur forment un corps dont la coupe transversale présente une figure plus ou moins semblable à celle d'un 8 de chiffre , si la cohérence est récente ou faible, et une figure elliptique ou arrondie quand elle est ancienne ou très-intime : on y trouve pres: que toujours les traces des deux canaux médullaires. Dans une tige fasciée, la coupe donne une figure allongée où l'on n'observe ordinairement qu'un seul canal comprimé. Pour avoir une fascie par soudure, il faudrait un grand nombre de branches réunies. Or la greffe peut s'établir accidentellement entre deux rameaux, entre trois; mais il est bien difficile qu'elle s'opére en méme temps entre qua- ire ou cinq, ou six. Il est bien difficile aussi que ces bran- ches se soudent toutes dans le sens de Jeur longueur, et que la greffe , au lieu de s'effectuer tout autour de l'axe prin- eipal, se manifeste dans une seule direction ; d'ailleurs; dans la plupart des fasciations des rameaux solitaires, on peut compter, je le répète, les autres rameaux qui doivent compléter la spirale : aucun ne manque , aucun n'a disparu par l'effet de l'union. 5i les fascies étaient le résultat de plusieurs greffes com- binées, on devrait en trouver dont les branches seraient incomplétement soudées ; on découvrirait toujours, en cou pant en travers ces expansions, la trace des canaux médul- laires appartenant à chaque branche; enfin on observerait sur toute leur surface une distribution de feuilles ou de bourgeons annonçant la fusion de plusieurs spirales ot verticilles partiels (1). . Quand la fasciation se présente dans une tige habituel- (1) On a vu plus haut que les spirales de feuilles, dans un Z'upievruP? falcatum, s'étaient changées en verticilles. DES MONSTRUOSITES. lement pourvue de rameaux très-nombreux ct peu ouverts, et quand ces rameaux sont soumis au même phénomène, il arrive fort souvent que ces derniers restent unis à l'axe dans leur partie inférieure et ne se montrent libres que dans un. point plus ou moins éloigné de leur point d'ori- Sine. Si l’on coupe la fascie en travers, au-dessous de ce Point, on trouvera sur la coupe les traces de plusieurs ca- naux médullaires, parce qu'il y a dans cette partie union des axes secondaires à l'axe principal : c’est cette disposi- lon, observée par Linné et un peu trop généralisée par lui (1), qui a pu faire croire que, dans tous les cas, la fas- Cation était produite par la soudure de l'axe et des rameaux. Pai vu, au reste, dans certaines espèces, par exemple, dang les Asperges, des axes soudés ensemble et des axes - Simples fasciés, et je puis assurer que les deux phénomé- Nes se trouvaient fort distincts. i Une des causes les plus habituelles de la fasciation , c'est l'abondance de la matière nutritive; aussi les végétaux Cultivés sont-ils plus sujets à cette anomalie que les végé- laux sauvages. Les Passe-velours de nos jardins et le Se- dum cristatum présentent la fasciation d'une manière si Constante , qu'on a fini par regarder la dilatation excessive de leur tige comme l'état normal de celle-ci (2). Les Drageons bien nourris sont sujets aussi à la fasciation Soit dans leur partie souterraine , soit dans Paérienne : on en a observé des exemples dans le Berberis vulgaris (A. Juss., Moretti) , le Jasminum fruticans (Decaisne), l'Olivier, le Saule, I Aylanthus. | (1) « Fasciata dici solet planta cüm plures caules connascuntur ut * unus ex plurimis instar fascia evadat et compressus fit. » (Linn., Phil. bot, , 274.) — Voy. aussi Major., de plant. monstr., Goltorp. Schleswig, 1665. — Boehmer, de plant. fasciatis. Witten). 1752. (2) Linnæa, 13, p. 384. 154 DES MONSTRUOSITES. La dilatation des filets staminaux en corps pétaloides constitue aussi une sorte d'expansion qu'on pourrait rap- procher de la fasciation , si l'on voulait étendre le sens de ce mot. On a comparé avec raison aux fascies certaines dila- tations normales développées dans quelques végétaux. Par exemple, les Cierges aphylles ont des tiges et des rameaux plus ou moins élargis, avec la consistance, la couleur e! méme les fonctions des véritables feuilles ; ce sont les analo- gues des axes fasciés des plantes herbacées. ll y a des Bauhinia et des Cissampelos (Guillemin) qui offrent des dilatations habituelles représentant parfaitement les fasciations des végétaux ligneux. Les branches florales des Xylophylla sont aplaties et étendues comme les feuilles ordinaires. Dans certaines espèces , si Von suit les différentes phases de développement, on voit ces expansions se transformer graduellement en rameaux cylindriques chargés cux- mêmes de branches dilatées. Les phytographes ont regardé ces branches florales comme de véritables feuilles, et cette inflorescence a été nommée épiphylle (1). Les rameaux des Asperges et desFragons se dilatent aussi normalement, grandissent et adoptent l'aspect foliacé (2)- Il en est de méme des Phyllanthus et des Pachynema , dont les vraies feuilles sont réduites à des écailles fort petites, ul peu embrassantes et caduques. (Link.) . On a désigné sous le nom de phyllode ( phyllodium) te dilatation habituelle des pétioles; M. Martius a proposé celui de cladodium pour l'expansion normale des rameaux. (1) Hayn., Term., pl. xxv, fig. 5. — Mirb., Elém., pl. ax, fig. 7: (2) DC. , Organ. végét. , pl. xux , fig, 1. = RES RG a pe CHAPITRE HE DES BALANCEMENTS ORGANIQUES. Les développements avec excés et les développements avec éfaut paraissent très-souvent ensemble. Une sorte d'anta- S°nisme ou de compensation s "établit entre les atrophies et €s hypertrophies ; c'est là le balancement organique. ette coexistence des développements par excès et par Cfaut est assez générale dans les corps organisés; M. Geof- lroy Saint-Hilaire en a fait une des big. jücipatis de la "ératologie animale et de POrganogénic zoologique. Nia organe placé favorablement, quant à l'action de la ére ou de la chaleur, croitra plus rapidement que ses Voisins; il prendra la nourriture qui leur ét tait destinée, il 156 . DES MONSTRUOSITÉS. “occupera leur place et les forcera à subir des arréts de dê- veloppement plus ou moins complets (4). Le phénomène inverse pourra aussi se présenter. Que là pression d'un corps, l'action du froid, le manque de lumière la piqûre d'un insecte ou toute autre cause, empêchent un organe d'arriver jusqu'à son état normal, un autre organ profitera de la. nourriture de la partie affectée et dépasser les limites de son accroissement (2). Il faut convenir que, dans le plus grand nombre de cas; il est très-difficile de reconnaitre, parmi les deux phén0- ménes, celui qui est la cause ou celui qui est l'effet; si le _/grossissement a entrainé l'atrophie ou si l'atrophie a produit | le grossissement. (De Candolle.) Le botaniste doit se borner å constater la simultanéité, la relation intime des deux ano- malies, sans hasarder aucune explication sur leurs rapport ou leur coexistence. - J’aiobservé un Faba vulgaris monstrueux dont lesstipules avalent pris un accroissement énorme : elles s'étaient chan- gées en limbes foliacés ovalaires, demi-sagittés et légéremen! sinueux ; en méme temps les limbes des feuilles ordinaires avaient disparu complétement. On sait que, dans leur étal normal, les stipules et les feuilles du Lathyrus Aphaca présen tent une inégalité d'accroissement tout à fait analogue. . Dans une monstruosité de Muscari comosum; toutes les fleurs ont avorté ; en méme temps les pédoncules sont de venus plus longs, plus nombreux et ont adopté une couleur violacée ; leur ensemble forme comme une chevelure qui n'est pas sans élégance. (A. Juss.) Ce balancement organi- que rappelle celui qui a été observé par M. Deleuze dans lc grappes florales du Rhus cotinus. (1) DC. , Zhéor. élém., éd. 1, $73. h-(9) DC. , Jor, cit. , $ 71. | \ LI 11 F pir DES MONSTRUOSITES. 197 Dans les Carex de la section Paludosa, et particulièrement dans les riparia, vesicaria, paludosa, ampullacea, Vétat ; Normal présente plusieurs épis mâles ; souvent la plupart de — tes épis avortent , et on ne trouve plus qu'un seul épi mâle avec plusieurs épis femelles (4); assez rarement l'avortement SC montre p complet; il n'existe alors, au sommet du chaume, qu'un seul épi, rempli par des utricules lequel remplace en même temps et les mâles et les femelles ; cet (pi a perdu ses étamines ordinaires ct a produit des utricules , 3tomaux, (Cosson et Germain). | Dans le Phleum Behmeri, la paillette inférieure de la tide SC dilate parfois outre mesure ; ses bords se soudent alors "htre eux vers leur base ; en méme temps la paillette Supé- |. eure et le pédicelle de la fleur rudimentaire avortent tout | à fait. On voit certains épis offrir à la fois l'état normal et P état monstrueux ; ce dernier se montre ordinairement vers *haut de l'inflorescence générale, et toujours à à l'extrémité des axes particls. ( Boivin.) Les sépales des Rosiers se développent souvent outre me - Sure quand les ovaires s'atrophient. L'inverse aussi es Woir lieu. | La Viorne-obier, vulgairement nommée Boule- M Hip, Wand elle croit naturellement dans les bois, offre des fleurs terminales disposées en forme d'ombelle ; celles de la cir- : sn férence sont plus grandes que les ratée Quand cette Pl 3nte est soumise à la culture, toutes les fleurs centrales se éveloppent outre mesure et deviennent exactement sem- blables à à celles de la circonférence; mais, en même temps; toutes ces fleurs éprouvent des avortements dans w organes ` sexuels, (i) Quand ce phénoméne arrive dans le Carex riparia, cette plante revêt les caractères qui appartiennent au Carex nutans. (Cosson et main. ) 158 DES MONSTRUOSITES, Un balancement analogue se fait remarquer dans les Ta- gètes, les Reines-Margucrites, les Soucis. - M. de Candolle a désigné, sous le nom de permutees s toutes les fleurs dans lesquelles l'atrophie des organes sexuels est liée à la dilatation des téguments floraux (1). On a communiqué dernièrement à la Société d’agricul- ture de la Haute-Garonne un épi de Blé qui présentait u” exemple fort curieux de ce dernier balancement : toutes 56 fleurs se trouvaient à l'état normal, excepté une seule, don! les organes sexuels avaient avorté et dont les enveloppe? calicinales avaient pris un accroissement presque double di volume habituel; la surface de cette fleur s'était couvert" de poils assez serrés, et son aspect ressemblait beaucoup À celui d’une fleur de folle avoine. Dans quelques fleurs, l'atrophie des étamines coincid? avec Phypertrophie des pistils. Par exemple, dans certain? individus de Lychnis dioica, les organes mâles se trouver! dilatés, tandis que les pistils sont représentés par de petites saillies. glanduliformes; mais, dans d'autres fleurs, les of ganes femelles se montrent trés-développés, tandis que l& étamines sont réduites à de simples rudiments (2). Le méme phénomène a lieu dans le Spiræa Aruncus et le Sedum Rho” diola (3). . | Un balancement organique nous est encore offert par le fruits et les graines. Dans une partie des arbres de nos vel” gers, quand le péricarpe grossit, les graines s'atrophienb comme Si la nourriture qui leur était destinée s'était portée tout entière sur l'enveloppe. L'arbre à pain est W” exemple remarquable de ce fait; dans la varieté cultivée aU* (1) Mém. soc. Arc., t. HI, p. 402. i (2) Authenrieth, Disg. de disc. sex. ( Tubinge , 1821, pl fig. 2-5. ) (3) DC. , Organ. végét., t. 1, p. 493, r K DES MONSTRUOSITES. 159 iles des Amis, le péricarpe est gros et charnu, tandis que Patrophie a gagné les graines. La même chose arrive dans Ananas ; les espèces sauvages produisent un fruit à tégu- Menis peu développés , tandis que les variétés cultivées en donnent un charnu, succulent, avec des graines avor- léeg (1). 5 Dans d’autres cas, cette relation de développement nous cst offerte en sens inverse. Dans l'exemple , rapporté plus haut , des hypertrophies des semences des Crinum et des Amaryllis , le péricarpe et les cloisons sont à peine formés et Vane ténuité extrême, tandis que les graines ont pris un - &ecroissement monstrueux. Il semble, dit M. A. Richard, Que les semences ainsi développées absorbent et détour- ‘Rent à leur profit tous les fluides nourriciers destinés à la formation et à Paccroissement des autres parties consti- Mantes de l'organe (2). (1) DC., Phys. végél. , t. 11, p. 564. 2] Loc. cit., p. 13. LIVRE II. ‘DES MONSTRUOSITES DE FORME: J'ai distingué trois sortes d'anomalies par changement de forme : Les altérations dans lesquelles a un organe ou un ensemble | organique devient plus ou moins irrégulier ; Les altérations dans lesquelles des organes ou des en” sembles organiques, habituellement irréguliers, adopten! des formes symétriques ; | Enfin les cas dans lesquels les organes ou les ensembles organiques; soit réguliers, soit irréguliers, se transforment les uns dans les autres. J'ai désigné les premières anomalies sous le nom de d formations; j'ai conservé aux secondes celui de pélortes , €! aux troisièmes celui de métamorphoses. CHAPITRE Ie. DES MONSTRUOSITES PAR ALTERATION IRRÉGULIÈRE DE FORME OU DES DEFORMATIONS. Y Les anomalies de forme doivent, le plus souvent, étre "Onsidérées comme le résultat de la présence simultanée, dans un même organe, d’un développement par excès et Vun développement par défaut agissant sur des parties dif- "rentes, M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire a insisté avec raison, US sa Tératologie animale, sur les rapporis qui unissent E anomalies de forme avec les anomalies de volume; il ait remarquer que, si toute déviation de forme peut se ra- ener à des déviations partielles de volume, une anomalie © volume, à son tour, entraîne, constamment et comme 11 162 ' DES MONSTRUOSITÉS. conséquence inévitable, un changement de forme plus ou moins manifeste (1). Ilaété question, dans le chapitreprécédent, de l'effet pro- duit par la coexistence des alrophies et des hypertrophies dams les ensembles organiques : on a vu que certaines piéces Se développaient quelquefois en moins » pendant que d'autres pièces s’accroissaient en plus, ou présentaient des aug- mentations lorsque celles-ci diminuaient de volume; qu'une sorte de balancement organique s’établissait entre elles et déterminait, dans appareil, des anomalies plus ou moins graves. Supposons que le balancement organique dont il s'agit ait lieu dans un organe isolé, que certaines parties de cet organe se développent petites, rabougries, tandis que d'autres augmentent de volume et deviennent plus ou moins dilatées et amplifiées, l'ensemble devra être nécessairement déformé. Ainsi, par exemple, on sait que l'état habituel et général des organes appendiculaires est d’être composés de deux moitiés semblables. Une feuille, un pétale, une éta mine peuvent étre partagés en deux parties égales par une ligne tirée du sommet à la base de l'organe, passant par Je milieu. Si, dans un de ces organes, une moitié quelconque se développe en moins et l'autre en plus, la symétrie ser? forcément détruite : c'est, en effet , ce qui arrive dans là plupart des cas de déformation ; les feuilles, les pétales o¥ les étamines deviennent inéquilatéraux par l'effet de em double phénoméne. ‘ D'autres fois l'inégalité de développement, au lieu d’être opérée par un balancement organique entre la moitié droite et la moitié gauche de l'organe, résulte d'un antagonism? d'accroissement entre la partie supérieure et la partie infé- rieure. Ainsi, quand les anthéres de certaines étamines s'a“ (1) Tom. 1, p. 279. Ss DES MONSTRUOSITES. 163 trophient, leurs supports se dilatent en corps pétaloides ; | quand le limbe de certaines feuilles:avorte, le pétiole s'al- - longe en vrille où s'élargit en ruban. Tl existe d'autres déformations produites par un défaut Ou un excès de développement isolés. La moitié droite ou la moitié gauche d'un organe, sa partie supérieure ou sa partie Mférieure, peuvent s’arréter dans leur développement ou Vaccroitre outre mesure et déterminer ainsi un changement de forme plus ou moins remarquable; l'organe, si c'est une feuille, présentera alors un défaut de symétrie analogue à Celui qui a lieu habituellement dans les Begonia et dans plu- . Seurs Grewia. " Il arrive méme trés-souvent que tout l'organe est soumis à l'avortement ou à Vhypertrophie, mais que le phéno- mène agit inégalement dans ses diverses parties, et la formation est une suite nécessaire de cette inégalité. Ainsi , par exemple, certaines étamines dont l'évolution | Vest arrêtée de bonne heure prennent l'aspect d'un ) Corps glanduliforme. Des pistils développés avec excès adoptent la figure des organes foliacés. L'anomalie est Produite, dans le premier cas, par atrophie, et, dans le Second, par hypertrophie, et ces phénomènes ont modifié légalement et diversement les différentes parties des deux rganes. Enfin, dans un petit nombre de déviations, il peut y avoir formation sans atrophie et sans hypertrophie : un organe est Susceptible dese courber, se chiffonner, se tordre, devenir Mus concave ou plus aplati, et n'éprouver aucune diminu- tion ni aucune augmentation bien sensibles dans son déve- loppement. J^ai vu des pétales plissés ou bosselés qui ne s’é- taient pas éloignés, du moins en apparence, de leur volume ordinaire, M. Schauer a cité un Aconitum stoerkianum qui 164 DES MONSTRUOSITES. semblait être dans le méme cas ; tous ses pétales étaient dé- formés en capuchons (1). i: Il y a des fruits diis cornus qui semblent aussi peu éloi- gnés de leur taille habituelle; mais le plus souvent, le phéno méne étant produit par une disjonction des carpelles, le vo- lume de ceux-ci ne peut étre qu'une partie plus ou moins petite du volume général. (1) Schrift. der Schlesisch. gesellsch. , 1834, p. 68. ARTICLE I*. DEFORMATIONS DES ORGANES APPENDICULAIRES. L'inégalité dans le développement des parties organiques 3 été désignée, par M. Ré, sous le nom de distrophie. | De toutes les piéces appendiculaires, les feuilles sont Peut-être les éléments les plus sujets à se déformer (hétéro- Phyllie, Ré). Le grand nombre de ces organes et souvent Même leur extrême rapprochement, soit des axes, soit entre - *ux, semblent rendre suffisammentraison decette fréquence. "ur un rameau de Chevrefeuille, qui fait partie de la collec- tion tératologique de M. A. de Jussieu, on remarque plu- Steurs modifications assez tranchées de la forme primitive ; ìl Y a des feuilles arrondies, d'autres obovées, d'autres pres- que Spathulées ; les unes sont entières, les autres sinucuses, *chanerées, lobées et méme découpées. 166 DES MONSTRUOSITES. La déformation peut arriver tantót dans le limbe, tantót dans le pétiole, quelquefois en méme temps et dans le pé tiole et dans le limbe. Les fleurs présentent aussi cette anomalie soit dans leurs supports, soit dans leurs parties constituantes. Une des dé- viations les plus remarquables de cet ordre est celle de certains Choux cultivés; leurs pédoncules s'accroissent outre mesure, Se rapprochent, s'entre-greffent; en méme tempsles. fleurs s'atrophient, et toute l'inflorescence prend Paspect d'un corymbe régulier, énorme, charnu, dont les parties sont tantôt écartées et encore distinctes (Brocoli), tantôt compactes et plus ou moins confondues (Chou-fleur). Parmi les piéces de l'appareil floral, les parties envelop- pantes (sépales, pétales) présentent moins souvent des défor-. mations que les parties enveloppées (étamines, pistils), leur position extérieure ne les exposant pas à des pressions trés-fortes. Les pétales sont plus souvent déformés que les sépales. Parmi les déformations de la corolle, il faut mentionner d'abord celle qui arrive dans les fleurs corniculées, qui per- dent par accident leur éperon (varietas anectaria). Gmelin rapporte qu’il a cultivé, pendant plusieurs années, une Linaire, originaire du grand-duché de Bade, qui se trou- vait dans ce cas. Le tube de la corolle était très-raccourci, et les graines avortaient constamment (1). Il existe. dans | Herbier de Desfontaines une plante tout à fait semblable, déjà signalée par M. Chavannes(2). La méme déformation a été recueillie encore dans la Linaire commune par M. Bernard et dans la Linaire striée par M. Decaisne (3). (1) Flor. bad., 2, p. 694. (2) Monogr. antirrh., p. 68. (3) Chavannes , loc. cit., p. 68, 69. DES MONSTRUOSITES. 167 Les corolles sont sujettes à une monstruosité tout à fait Ih verse de la précédente; MM. Monnard et Chavannes ont observé cette anomalie dans plusieurs fleurs d’ Antirrhinum Majus. Deux ou plusieurs éperons, cylindriques ou coniques, droits ou crochus, simples ou bifurqués, prennent nais- šance dans l’espèce de cavité produite par la bosselure du palais ou dans les sinus des lobes de la lèvre supérieure. Ces “Perons sont saillants hors de la fleur;ils se dirigent le Plus souvent vers la base du tube de la corolle. M. Cha- Vannes fait remarquer, avec raison , qu'il ne faut pas con- fondre ces appendices avec les véritables éperons des Li- aires ; ils ne tiennent point, comme ces derniers, à la base €s pétales, mais dans des points plus ou moins rappro- ' Chés de leur sommet (1). Dans certaines Composées corymbifères, que les jardiniers 3ppellent doubles (Helianthus, Dahlia, Anthemis), les fleurons du disque se sont développés avec excés, disjoints du cóté Intérieur, étalés et déjetés en dehors comme les demi-fleu- "ons de la périphérie. En d'autres termes, les petites fleurs. - Smétriques ont pris la forme des fleurs asymétriques, : t l’ensemble du capitule a adopté l'état normal desSemi-flos- " Culeuses ou Chicoracées (ligulifloræ). On a cité particulière- Ment dans cet état le Conyza chrysocomoides (2), le Bellis Perennis, Achillea Ptarmica, le Senecio elegans, e Pyrethrum Parthenium, le Calendula officinalis (3). J^ai cueilli au jardin des plantes de Toulouse une calathide d'Heélianthe multiflore dont le disque n'offrait ce phénomène que dans une moitié + de sa surface. Dans un Chrysanthemum grandiflorum, le ca- b Pitule présentait vers le centre une petite fleur changée en emi-fleuron, avec la forme, la taille et la couleur d'une (1) Loc. cit., p. 71, pl. 1x, fig. A. (2) Desv. , Journ. bot., 2, p. 63, pl. 3. : (3) Hopk., Fl. anom., p. 125.—Jæger, Missbild. der gewüchs. 168 DES MONSTRUOSITÉS. fleur irrégulière de la circonférence. A côté, paraissait un autre fleuron incomplétement métamorphosé. Hopkirk 2 vu, dans le Chrysanthemum leucanthemum , trois fleurons affectés de la méme anomalie (1). M. Gay a trouvé dans une inflorescence de Podolepis -" | gracilis plusieurs fleurettes voisines des demi-fleurons qui avalent revétu le caractére des corolles bilabiées, et qui réalisaient ainsi la structure des fleurons des Labiatiflores- Les transformations des fleurons semblent plus fréquentes dans les fleurs de la périphérie des Calathides que dans celles qui se trouvent vers le centre (Jeger). Les étamines sont, de tous les organes de la fleur, ceux guise déforment le plus facilement ; les végétaux où elles se trouvent en grand nombre, ceux qui les ont habituellement pressées les unes contre les autres, présentent cette anomalie communément et à différents degrés. On observe aussi des déformations dans les espèces à étamines peu nombreuses » mais beaucoup plus rarement; les fleurs mâles de certains Saules changent tellement leurs formes, soit à la suite des piqûres de quelques insectes, soit par des causes inconnues qu'on ne peut plus distinguer ni les étamines, ni méme le calice (2). Quant aux pistils, c’est surtout aprés la fécondation, lors- que les ovelles augmentent leur volume, qu'ils sont trés-su- jets à des déformations. Tous les jardiniers savent que le fruit du Piment annuel : est tantôt arrondi ou ovale, tantôt allongé, souvent droit et souvent courbé (3). Les siliques des Violiers, ordinairement comprimées, nais- (1) Fl. anom., pl. vr. (2) « Salix tomentosa, monstrosa. » (Seringe, Saul. Suiss., p. 16.) -=| (3) « Variat immense figurà baccarum. » (Linn., Hort. ups-> p.47.) DES MONSTRUOSITES. 169 Sent quelquefois avec une figure triquètre (1) ; celles des aves, piquées par les pucerons, deviennent plus ou moins lortues et hérissées de pointes (2). Ferrari a figuré un Citron digité (3) (fructus maniformes) et Plusieurs Ora nges corniculées (4) (fructus corniculati); il à représenté aussi une autre Orange dont l'enveloppe avait rossi d'un côté et formé une sorte de bourrelet demi-circu- laire (Aurantium callosum) (5). : Réaumur a observé, sur les bords de la route de Saumur 3 Thouars, des Prunelliers dont les fruits étaient déformés de toute sorte de maniéres; il y en avait méme qui res- Semblaient à de jeunes amandes (6). Dans ses mémoires sur les Légumineuses (7), M. de Can- dolle a fait représenter une branche de Prunier qui porte des fruits normaux et d'autres fruits allongés, cylindriques, Sinueux et plus ou moins pointus. Cette déformation , qui Tappelle la structure des siliques, se trouve assez souvent Sur Jes Pruniers cultivés dans la nouvelle Brunswick (8). Duhamel a fait connaitre des Prunes de mirabelle qui "laient allongées en forme de gousses ou raccourcies Comme des capsules ; les unes creuses en dedans, les autres Percées de part en part. Certaines offraient un vestige de Noyau vers leur extrémité supérieure; d'autres étaient réduites à une sorte de vessie vide au bout de laquelle on (1) Schlotterbecc, Sched. de monstr. plant., Act. helvet., 2, QE II, fig. 15. (2) Marchant, Mém. acad. scienc., 1109, p. 66. (3) ins. pl. ccxv. (4) Loc. cit., pl. CDIX, CDXV. (5) Loc. cit., pl. CDXI. (6) Mém. acad. scienc., 1113, p. 43. (1) Pl. m, fig. 1. (8) Robb, Rem. anomal. plum. Hook. journ. 3, p. 99. 170 DES MONSTRUOSITÉS. voyait une graine a l’état de rudiment; d'autres enfin ne présentaient aucune trace de semence (1). Les fruits charnus paraissent plus sujets aux déformations que les fruits secs ; ce qui vient de ce que, en général, ils grossissent davantage et qu'ils sont composés d'un paren- chyme moins résistant (de Candolle). Les obstacles les plus faibles suffisent pour changer leurs formes ordinaires; lex- pansion anomale de certaines parties dans un fruit simple ou d’un carpelle dans un fruit multiple suffit presque tou- jours pour déterminer un changement de forme plus ou moins notable dans l'ensemble. | L'homme, dans certains pays, est parvenu à produire des déformations et à rendre ainsi ordinaire l'état accidentel; à l'aide des ligatures et de différentes compressions , il a pu donner aux fruits de quelques Cucurbitacées la figure d'un vase où d'un cylindre. En Chine, on fait entrer des fruits trés-jeunes dans des bouteilles carrées , marquées, à l'intérieur, defigures et de lettres en creux. Les fruits gros” sissent , remplissent la cavité des bouteilles et se moulent contre leurs parois ; quand ils sont mürs, on casse la bou- teille et Pon a des früits de forme trés-curieuse. Les déformations varient à l'infini ; il serait impossible d'esquisser leur histoire compléte, méme à grands traits: Toutes les atrophies et les hypertrophies un peu prononcées entrainent avec elles un changement de forme plus ou moins notable. Par conséquent, tout ce qui a été dit dans les cha- pitres précédents , sur les développements par défaut et les développements par excés, se rapporte, jusqu'à un certain point, au sujet dont il s’agit. Parmi les aberrations de forme, trois sont plus impor- (1) Phys. arb., t. 1, p. 303, pl. xit, f. 309-312 , et pl. xim, fig. 313; 314, DES MONSTRUOSITES. 171 tantes et plus communes que les autres ; elles méritent une attention particulière : ce sont la déformation crispée , la deformation rubanée et la déformation cupulée. S Ier. — Déformation crispée. La plupart des organes appendiculaires représentent , Comme on sait, des espèces de lames plus ou moins minces et plus ou moins dilatées. Lorsque certaines parties cen- trales de ces lames se développent un peu plus que d'autres Parties et surtout que la périphérie, le limbe se bosselle *t devient ondulé ou bulle (1). Si le phénomène est un peu Plus fort, si en méme temps le contour du limbe se dilate Outre mesure, et qu'une sorte de pression dans plusieurs Sens vienne à agir sur la lame, celle-ci se plisse, se chif- Onne et prend l'aspect crispé ou crépu (2); elle peut méme e tortiller et devenir à peu prés méconnaissable. ( Phyllo- “Ystrophie, Ré.) Cest surtout parmi les feuilles qu'on rencontre les dé- mations ondulée ou crispée. On trouve dans les pépiniéres certaines variétés de Ro- Mier faux acacia, dont toutes les feuilles naissent crépucs. *$ Pommes de terre sont sujettes à une frisure que les An- Blais désignent sous le nom de curl (3). Š 4 Bullata folia fiunt ex rugosis , cùm discus (non ambitus) mul- à Dlicetur, ut inter rugas ascendat substantia instar conorum subtus Concavorum. » ( Linn., Phil. bot., 272.) | (2) « Crispa folia fiunt , cüm foliorum peripheria augetur ut circum- “ Circà fluctuet quasi undatus limbus. » ( Linn., loc. cit.) « Folia omnia S crispa monstra sunt.» (Ibid. ; loc. cit., p. 45.) Cette anomalie est Ppelée | par Ré, phyllorrhysseme. (3) La maladie des Pois chiches, connue sous le nom de rage (Ré), Clermine aussi la déformation crispée. 172 DES MONSTRUOSITÉS, Dans plusieurs cas, la disposition crispée arrive à la suite d'une maladie appelée cloque , produite par l'action des rayons solaires sur les feuilles naissantes , surtout au prin- temps, aprés les longues pluies, ou par la piqüre des pucerons et de plusieurs autres insectes ; mais, dans d'autres cas, c'est une anomalie réellement congéniale qui affecte sans cause connue tous les organes foliacés. | La culture parait beaucoup influer sur la production de ce phénoméne , peut-étre à cause de l'excés de nourriture qu'elle donne (1). 5 La disposition crispée se conserve souvent pendant plu- y sieurs générations, de maniére que cette anomalie pourrait f étre considérée comme une variété ou comme une monstruo- //' Qr sıté. Tout le monde connait le Chou frisé, la Laitue frisée; le Persil frisé. On cultive aussi, dans le méme état, des Chi- corées, des Endives , des Cressons et beaucoup d’autres plantes potagères. M. Galesio a observé que l’hybridité pouvait donner nais- sance à la frisure: il a obtenu une fois un Oranger à feuilles coquillées des graines de l'Oranger à peau raboteuse, fécondé par une autre variété ; il a eu des Choux à feuilles crépues de graines cueillies sur des Choux-fleurs cultivés ensemble avec des Brocolis (2), § II. — Déformation rubanée. La déformation rubanée est celle dans laquelle les organes (1) « Crispæ evadunt plante per culturam > fortè ob nimium nutri « mentum , nimiamque expansionem folii. » (Linn., Crit. bot. , 193.) (2) La frisure est normale dans plusieurs végétaux ( Malva crispt^ Rumex crispus); mais elle se montre généralement plus légère que la frisure anomale. DES MONSTRUOSITES. 173 appendiculaires s’accroissent outre mesure dans le sens de la lon gueur, et se changent en des espéces de lames étroites, étendues, plus ou moins semblables à des rubans. Olivier a découvert un Cyclamen monstrueux, qu’on a décrit dans un bel ouvrage sous le nom de Cyclamen linea- rifolium (1), dans lequel le limbe des feuilles a avorté et ou € pétiole s’est développé avec excès et métamorphosé en une Sorte de ruban foliacé. Lorsque la Sagittaire croit hors de l'eau, ses feuilles ont Un pétiole et un limbe bien distincts. Quand cette plante (St accidentellement submergée , son limbe avorte presque toujours, et le pétiole , au lieu d’avoir une forme triangu- laire ou cylindrique, prend l'apparence d'un long ruban , Plane, foliacé, terminé par une petite callosité. Il n'est pas Tare de trouver des pieds de Sagittaire qui portent les deux , Sortes de feuilles, parce qu'ils se développent moitié à l'air, moitié dans l'eau. Gaspard Bauhin a pris les pétioles ru- anés de la Sagittaire pour les feuilles d'une graminée ; inné et Gunner les ont regardés comme celles de la Vallis- nerie, et Poiret les a décrits comme les feuilles d'une nou- Yelle espèce de ce dernier genre, qu'ila nommée Vallisneria bulbosa. Je possède, dans PHerbier de ce dernier botaniste , *$ échantillons qui ont servi de type à son espèce. On s'est assuré que le Plantain d'eau est sujet à offrir * méme phénomène. M. Émeric de Castellanne a vu cette Plante, trés-abondante dans les eaux de l'Eygoutier, prés de Toulon , affecter la forme du feuillage des Vallisneries , *t M. Thiébaut de Berneaud en a recueilli des individus entre Bercy et Charenton, en 1822 et 1824 , portant des euilles linéaires entières et des feuilles larges sagittées (2). (1) con. gall. rar. , pl. vm. (2) Ann. soc. linn. , Paris, t. 11, p. 39. 174 DES MONSTRUOSITES, Les caractéres de la déformation rubanée se rencontrent dans l'état habituel d'un grand nombre de végétaux ; et c'est ici surtout qu'on peut reconnaitre que ce qui est mons: trueux pour une espèce peut se trouver normal dans une autre. | Les feuilles semblent privées de limbes et réduites à des pétioles rubanés dans certains Potamogets à demi submergés: Dans plusieurs Légumineuses d'Australie, le limbe a dis paru et le pétiole s'est dilaté; mais ici le ruban est plus épais; plus ferme et moins long que dans les feuilles où cette dispo- sition est arrivée par suitedu séjour dans l'eau. Cette singu- liére dilatation est connue sous le nom de phyllode (phyllo- dium) (1). Pendant la jeunesse de plusieurs Acacies, on re- marque , dans la plante , des feuilles deux fois ailées et un pétiole gréleà peu prés cylindrique. A mesure que l'individu avance en àge, le nombre des folioles diminue et le pétiole s'élargit. Peu à peu ces folioles disparaissent et le pétiole se transforme en phyllode. Il est des espèces qui, pendant leur vie entière, portent à la fois des feuilles ordinaires et des feuilles phyllodées. (A. Sophoræ , A. heterophylla). Des transformations analogues ont lieu dans les Buple- vrum (2) et dans quelques espèces d’Oxalis (O. fruticosa» O. buplevrifolia ). | $ III. — Déformation cupulée. Les pétioles , les pédoncules et les nervures médianes des limbes se dilatent quelquefois, à leur extrémité, en ul (1) Foy. Varticle sur les Fascies. | (2) Le Buplevrum difforme offre, dans sa jeunesse , des feuilles ? limbe découpé; dans Page adulte, il n'a plus que des phyllodes. DES MONSTRUOSITES. 175 disque creux plus ou moins foliacé, semblable à une sorte de godet ou de cupule. | Ces dilatations sont régulières ou irrégulières; elles se Montrent tantôt en cloche, tantôt en entonnoir : dans cer- lains cas, c’est une petite urne ou une coupe plus ou moins évasée, quelquefois presque sessile , d’autres fois longue- Ment pédiculée. | La déformation cupulée ou en cupule se fait voir de temps en temps dans le Gleditsia (1) ; on Pa trouvée dans €s Lentisques piqués , sans doute , par des insectes ( Gau- ichaud) ; dans des Pois etdans pinsienrs autres Viciées (2). : de Candolle a vu une sommité de Chou dont les grosses lérvures se prolongeaient au dela du limbe et s'épanouis- ‘tient en godets assez développés (3). Une anomalie à peu prés semblable avait été déjà indi- (Wée par Charles Bonnet. Ce célèbre naturaliste a repré- senté, dans son ouvrage sur les fonctions des feuilles, Pex- "rémite supérieure d'une feuille de Chou, de laquelle s’élève Un bouquet de nervures ou de folioles terminées, la plu- Part, par un petit cornet (4). M. de Candolle a fait sentir, dans son Organographie, les Points de ressemblance qui unissent les anomalies, dont il Vient d’être question, avec la structure normale des Nepen- thes et du Cephalotus follicularis (5). Les pétioles des Nepenthes se rétrécissent en un corps Presque demi-cylindrique ; bientôt après ilss’épanouissent en ames foliacées, à l'extrémité desquelles chacun porte une Sorte de vrille courte et ue épanouie, à son sommet, en (1) DC., Organ. végét. , t. 1, p. 316. (2) Ibid, , Mém. Légum., pl. 1 et I, (3) Ibid., Mém. Choux, Trans. soc. hort. , 5, pl. v. (4) Rech. us. feuill., p. 216, pl. XXVI, fig. 1. (5) T. 1, p. 320. 176 DES MONSTRUOSITÉS. un godet ouvert, en haut, enun orifice circulaire: un dis que plane, orbiculaire, susceptible de s'élever et de 9a baisser, sert de couvercle à ce godet (1). Les coupes du Cephalotus follicularis sont peut-être plus extraordinaires encore que les godets des Nepenthes. Une partie des feuilles du végétal se composent d'un pétiole di- laté, au sommet, en deux lèvres : l'une, inférieure, grande; fortement concave, ouverte, du cóté supérieur, en un Off iA ° fice circulaire à bords calleux, et offrant, extérieurement, trois nervures ou ailes longitudinales ; la lévre supérieure est plus petite, plane, et sert comme d'opercule à la coup? inférieure (2). Il est des anomalies dans lesquelles tout le limbe de Por- gane se courbe, se modifie et se déforme en coupe ou el godet. Le Tilleul présente quelquefois cette déviation. Je possède une feuille de Chou qui a la figure d'un cor- net parfaitement régulier, haut d'environ un décimètre e demi. J'ai aussi une feuille de Pelargonium inquinans qui ? pris la forme d'un petit entonnoir. Un pétale de Jasminum grandiflorum, monstrueux d’après le même système, m'a offert une figuré exactement sem blable à celle du pétale désigné sous le nom de carène dan les Polygalées; il était seulement plus petit que les autres éléments de la corolle. On sait que, dans les Polygalées, I caréne, est au contraire, le pétale le plus grand. Le Triphasia, arbre de la famille des Aurantiées, a fourni - a) DG., Flor. ji ss RER PE — Mirbel, Phys. végét- pl. xxvir , f. 5. —Turpin, Zcon. végét., t. xir, f. 8. — Ad. Brongniart» Obs. Nepenthes. Ann. scienc. nat. , t. 1, p. 29. (2) Labill., Nov. Holl. , 1, pl. xiv. ry DES MONSTRUOSITES. 177 3 M. Mirbel un autre exemple de ce genre de monstruosité : Ses fleurs ont généralement trois pétales réguliers et six éta- mines; dans plusieurs d'entre elles, il n "y avait que cinq amines, et un pétale, plus grand que les autres, s'était Voüté (4). C’est tout à fait la structure de la carène don il Vient d’être question. Dans quelques cas accidentels , les sépales des Aconits se bossellent au point de ressembler, en quelque sorte, au "asque de la fleur (nectazre, Linn.); quand ce phénomène iue, on est sür de trouver les deux pétales opposés à ‘aile transformés plus ou moins complétement en capuchons Serin ge). J'ai rapporté plus haut l'observation d'une Plante du méme genre dont tous les pétales avaient subi la Même anomalie (Schauer). Le changement des anthéres en capuchon, dans certaines Ancolies doubles, est encore uh exemple curieux de cette formation. - (1) Elém. Phys. végét. , t. 1, p. 221, note. ARTICLE II. DEFORMATIONS DES ORGANES AXILES. La plupart des atrophies et des hypertrophies des axes doivent être regardées comme de vraies déformations. Il est difficile, en effet, que les tiges ou les rameaux s’arréten! dans leur évolution, ou s'allongent outre mesure, sans que ces phénoménes ne soient accompagnés d'un changemen! plus ou moins sensible dans leur forme habituelle. Tous ces ordres d'anomalies sont intimement liés entre eux ; mais, comme il existe des déviations dans lesquelles la déformation a lieu sans atrophie et sans hypertrophie, a! moins bien sensibles, j'ai eru devoir étudier séparément ce phénoménes. Je distinguerai deux genres principaux d'anomalies par déformation des axes, les monstruosités dans lesquelles !es axes se courbent de haut en bas (enroulement), et les mons truosités dans lesquelles l'axe se tord de droite à gauche où de gauche à droite (forsion). | DES MONSTRUCSITES. 179 Je laisse de cóté ces formes bizarres qui naissent quelque- fois dans les axes et particulièrement dans les racines, mons- iruosités auxquelles l'imagination et l'ignorance, souvent Un peu aidées par l'art et plus souvent encore par le charla- lanisme , ont attribué des figures d'hommes , de singes , de Serpents... On voit avec peine, dans un ancien ouvrage Scientifique, recommandable, d'ailleurs, sous beaucoup de "apports, l'histoire et le dessin d’un Raifort et d'une Rave fabuleusement monstrueux. Le premier était en forme de Main humaine; on y distinguait parfaitement les articu- lations et jusqu’aux ongles (1); la Rave représentait une femme nue, assise, avec les pieds ct les bras croisés (2). § Ter. — Des Enroulements. Dans certaines monstruosités, l'axe principal ou les axes accessoires se courbent, se tordent, s’enroulent sur eux- Mêmes et déforment plus ou moins le végétal. Ces courbures Produisent des arcs, des boucles, des cercles, des spirales, Suivant l'intensité de l'anomalie. M. Ré a désigné cette tor- luosité sous le nom assez barbare de Stéléchorriphyssie. L'enroulement entraine avec lui la déviation des organes SDpendiculaires; ceux-ci sont tantôt nombreux et rappro- Chés, tantôt trés-rares et trés-écartés ; d'autres fois, ils man- (Went presque entièrement. Cette anomalie des axes est souvent combinée avec leur §platissement ou, pour mieux dire, avec leur fasciation (3). On observe alors, sur les axes dilatés, que les parties supé- tieures se divisent en plusieurs lanières , et que celles-ci s’en- Toulent en entier ou en partie, à la manière des feuilles des (1) Wedel, Ephem. nat. cur., déc. 1, ann. ie M Tn (2) Jacob Sachs, Ephém. nat. cur., 1. c., ann. 3, fig. (3) Foy. Particle Fascie, p. 150. 180 DES MONSTRUOSITÉS. fougéres. Richer de Belleval a figuré une tige de Chicorée fasciée et contournée en crosse. Wedel a représenté deux rameaux de Pin avec le même phénomène. Gilibert a décrit une branche d'If qui se trouve dans le méme cas. J'ai, moi- même, vu une monstruosité de Melia Azedarach , dans la- quelle sept à 8 jeunes rameaux s'étaient tordus en spirale; tous dans le méme sens. Il y avait une fascie de Féviet- dans le cabinet de Philippe Lapeyrouse , dont la spire était trés-réguliére ; le rameau paraissait fort dur et avait donné naissance à deux épines. M. B. Delessert posséde une mons- truosité de Fréne dans laquelle la torsion a produit une spt rale de trois tours. On m'a donné plusieurs branches dilatées de Muriet blanc, toutes divisées au sommet en deux petits rameauX: ceux-ci se montrent tordus, mais en sens contraire l'un de l'autre , de manière que les deux spirales ou commencement de spirale s'entre-croisent. Parmi les végétaux ligneux, on observe ce phénomène dans les Tilleuls, les Rosiers, les Genêts, les Groseilliers> les Saules T Parmi les espèces herbacées, on le trouve dans les Anse” rines, les Chicorées, les Bettes, les Anthemis, les Véro- niques... On a remarqué que, dans ces derniers végétaux, l'enroule- ment paraissait souvent déterminé par la piqûre des insectes: - Nous avons vu, plus haut, que la fasciation était une des prin- cipales sources de cette anomalie, surtout quand ce phéno- méne persévére pendant plusieurs années, comme cela arrive dans certains végétaux ligneux. Mais, dans ce cas, l'enroU lement n'est produit qu'aprés la seconde ou la troisième évo lution des bourgeons; la spirale devient d'autant plus com pléte que la fasciation est plus âgée. DES MONSTRUOSITES. § II. — Des Torsions. On voit des tiges, ligneuses ou herbacées , qui, au lieu de > présenter droites, naissent contournées , tordues de droite à gauche ou de gauche à droite, d'une maniére plus ou moins Prononcée. ui On trouve un exemple assez curieux de cette anomalie dans la variété de POrme appelée T'ortillard. Pai vu dans la Collection de monstruosités végétales, formée par M. Adrien de Jussieu , un chaume de Scirpus lacustris assez régulière- ment tordu sur lui-même. M. Vaucher a fait connaitre un fait analogue bien remar- quable ‘dans la Préle fluviatile. L'axe était tordu en spirale lort régulière depuis la base jusqu'au sommet (1). La méme anomalie a été retrouvée à Meudon par M. A. de Jussieu. Dans ce dernier exemple l'effet de la torsion a changé tous les verticilles en spirales. Quand la torsion est bien forte, tous les organes appen- diculaires se trouvent déplacés et plus ou moins modifiés. M. Lapierre de Roane a communiqué à la société lin- Néenne de Paris une monstruosité de Valériane officinale lrouvée dans une forêt de Chênes. Sa tige, contournée en spi- tale, avait 29 centimètres de hauteur et un diamétre, à la ase , de 27 millimètres ; à la partie supérieure, on voyait des feuilles et des fleurs (2). Une autre Valériane monstrueuse, avec une déviation Analogue, avait été déjà signalée par Gilibert. Sa tige était Courte, concave et obliquement striée; elle avait la figure € ces grosses coquilles désignées sous le nom de tomes. (1) Monogr., Préles; pl. u, A. (2) Mém. Soc. linn. , Paris, t. Wl, p. XXXIX. 182 DES MONSTRUOSITES.. Une troisième Valériane (V. dioica), à tige tordue, née dans le jardin des plantes de Pavie, a été dessinée par Vi- viani. Je dois sa connaissance à M. le professeur Moretti. Dans cet exemple, les organes appendiculaires étaient re- foulés sur le côté et formaient une série linéaire verticale. M. de Candolle a représenté une tige de Menthe dans laquelle ce phénoméne est arrivé avec une certaine inten- sité; celte tige parait fortement tordue, et toutes ses feuilles sont déjelées d'un seul côté (1). Un exemple semblable avait déjà été observé dans un Galium par George Franc; dans cet exemple, la tige était renflée et fusiforme ; elle se termi- nait par un bouquet d’organes foliacés ; tous les rameaux étaient placés en série linéaire sur un côté; les stries pa raissent bien marquées, spirales et parallèles (2). M. Decaisne m’a signalé une fascie de Zinnia accompa- gnée d’une forte torsion dans laquelle les organes foliacés, écartés les uns des autres, formaient une seule spirale depuis la base jusqu’au sommet de la tige. i Quelquefois la monstruosité n’affecte que les axes secon- daires; ainsi les graines de Robinier faux acacia produisent de temps en temps, dans les pépinières, des individus dont laxe principal est droit et dont les axes accessoires se montrent plus ou moins tortueux. Le système souterrain est aussi sujet au même genre de monstruosité. Il y a des racines qui se tordent en spirale irrégulière ou régulière ; ce phénomène peut même se perpé- tuer jusqu’à un certain point par la culture; ce qui a lieu, par exemple, dans la Rave tortillée et dans le Raifort en tire- bouchon. (1) Organ. végét., t. V, p. 155, pl. xxxvi. (2) Éphém. nat. cur., déc. 2, aun. 1, p. 6s, fig. 14. CHAPITRE IL. DES MONSTRUOSITÉS PAR ALTERATION RÉGULIÈRE DE FORME, QU DES PELORIES. Il n'est aucun botaniste qui ne connaisse les Linaires. Ces Plantes ont une corolle composée d’un tube oblong, irrégu- lier, bossu, terminé par un limbe divisé en deux lévres iné- Sales, La premiére de ces lévres, supérieure ou interne, est bifide ; ses côtés sont réfléchis et ses lobes obtus ; la seconde, inférieure ou externe, est trifide ou trilobée, obtuse et assez 8tande. Les relations des lobes de la corolle avec les folioles u calice annoncent que les lèvres sont formées , l'interne Par la réunion de deux pétales et l'externe par l'assemblage des trois autres. Le pétale médian de la dernière lèvre se prolonge infé- "'ieurement en un cornet plus ou moins long ct subulé (nec- 184 DES MONSTRUOSITES. tarium longum, Linn.). Cette association des pétales forme un ensemble irrégulier qui a été comparé à une sorte de casque ou de museau (persona) (1). Les étamines sont au nombre de quatre et assez rappro- chées; elles tiennent par leurs filets à la corolle ; deux d'entre elles sont placées vis-à-vis les fissures qui séparent les deux lèvres ; les deux autres, plus longues, répondent aux intervalles qui se trouvent entre le pétale inférieur el les deux pétales latéraux. A la base de la lèvre supérieure» on remarque un petit filet que l’analogie et sa position entre les deux lobes ou pétales qui forment cette lévre ont fait considérer comme un rudiment habituel d'une cinquième étamine (2), Dans certaines circonstances, les Linaires se développent avec tous leurs pétales, entièrement semblables au pétale moyen de la lèvre inférieure. Le verticille présente alors une figure parfaitement régulière; c'est une corolle à cind lobes et à cinq éperons égaux entre eux (3). En méme temps le filet placé à la base de la lèvre d'en haut se change en étamine organisée comme les étamine’ ordinaires, et celles-ci, inégales dans leur état habituel ( didynames ) , Se développent avec desdimensions absolument semblables; de manière que la fleur est pourvue de cind étamines symétriques (4). | ' Cette monstruosité des Linaires fut découverte pour là premiére fois, en 1742, par Zioberg, dans une ile située (1) Moq., Mém. irrég., corolles, p. 22. i (2) « Rudimentum quinti staminis vix conspicuum. » ( Juss., Get plant. , p. 120.) : (3) « Corolla regularis, quinquefida , quinquecorniculata. » ( Linn., Spec. plant. , t. 1, p. 859.) (4) « Corolla... pentandra; nature prodigium! » {Linn., loc. cil-) — Voy. la description détaillée de ce. nouvel état dans Chavannes + Monogr. Antirrh., p. 56. DES MONSTRUOSITÉS. 185 dans la mer, à peu de distance de la ville d'Upsal, vers la Province de Roslagne; elle était dans un fonds de sable et de gravier, au milieu d'un grand nombre de Linaires nor- males. Linné (1), Adamson (2), Jussieu (3), et tous les botanistes qui, les premiers, observérent ce nouvel état des Linaires, le Considérèrent comme un signe d'hybridité (proles hybrida) et regardèrent la plante qui le présentait comme une plante distincte, offrant le passage intermédiaire ou la transforma- tion d'une espéce dans une autre. Quelques physiologistes êmirent méme l'idée que l'exemple dont il s'agit devait Son existence à une Linaire commune fécond ée par un Tabac Où par une Jusquiame. L'immortel naturaliste suédois désigna cette prétendue Nouvelle plante sous le nom de pélorie (peloria), du mot Srec rèace, qui signifie prodige. Plus tard, on découvrit des changements analogues dans ~ différentes espèces de Linaria et dans d'autres fleurs irré- , 8uliéres, et la dénomination linnéenne devint un terme gé- l'éórique pour distinguer toutes ces nouvelles plantes. Quelques naturalistes imaginérent que cette anomalie était le résultat de la soudure de cinq fleurs, dont toutes les parties non éperonnées auraient avorté (4). Cette opi- lion n’était guére soutenable. D'autres botanistes ayant "emarqué que, sur certains individus, on trouvait à la fois des fleurs ordinaires et des fleurs péloriées, et que ces der- nières occupaient chacune une place semblable à celle de toutes les fleurs isolées, ces botanistes , dis-je, pensèrent, (1) Aman. acad., 1, p. 55, t. nr (1744). . (3) Fam. plant., t. 1, p. 110. (3) Gen. plant., p. 120. (4) Poiret, Encyclop. suppl., t. ur. — Jager; Misshild. der €wachs, p. 94-97 el 313. ` | G 186 DES MONSTRUOSITES. avec raison, que les pélories n'étaient pas des plantes lij- brides et distinctes, ni des fleurs soudées et avortées , mais des plantes déformées et monstrueuses ; dés lors expres sion de pélorie fut consacrée pour indiquer ce nouveau groupe de monstruosités. Enfin les botanistes modernes; tout en reconnaissant le caractère anomal de ces transfor- mations , les ont considérées, philosophiquement , comme des retours accidentels ay type régulier , dont la fleur asymétri- que serait, selon eux, une déviation habituelle; suivant cette théorie, une fleur péloriée n'est autre chose qu'une fleur régularisée (1). § Ie. — Histoire de quelques Pélories. .. On trouve des pélories dans beaucoup de familles végé- * tales, mais principalement parmi les Antirrhinées. Le genre | Linaria est, jusqu'à ce jour, celui qui a présenté le plus sou- | _ vent ce phénoméne (2). Plusieurs botanistes, aprés Zioberg ont observé le méme mode de transformation dans la Linaire commune (Linaria vulgaris, Meench.) (3). Stéhélin a figuré dans cet état la Linaire bâtarde (L. spuria, Mill.) (4). Haller a signalé la Linaire Élatine (L. Elatine, Desf.) (5), et Reemet la Linaire ternée (L. triphylla, Mill.) (6). Adamson (7) et (1) Cassini , Opusc. phyt., t: m, p. 331. — DC., Organ. végél.; tid, p. ht Ratzebourg, Animadv: ad peloriam spect. Berolini ; 1825. (2) Chavannes, Monogr. Antirrh., p. 56. (3) Ludolfe, cité par Linné, — Leers , Flor. herborn. ; p. 144. — Turpin, con. végét., tab. 20, fig. 10. — Hopk. , Fl. anom., pl. vil; fig. 1, 2, 3. : | (4) Act. helv., t. I, p. 25, t. iv. — V oy. aussi DC., Flor. fr., t. Wb, p. 585, et Cassini, Opusc. phyt. , t. 1, p. 330. (5) Lettre à Gmelin ( Adams., Fam. plant. , t, I, p. 111.) (6) Arch. bot., 1, st. 1, p. 125. (7) Fam. nat. , t. 1, avertissement, note. iu hci ca A A as DES MONSTRUOSITES. 187 Gouan (1) ont vu la Linaire rouillée (L. eruginea). D'au- tres ont rencontré la Linaire triornithopode (Durieu), la inaire poilue (Decaisne), la Linaire de Chalep (Boivin), la linaire cymbalaire, la Linaire pourprée, la Linaire cou- chée, la Linaire de Pélissier, la Linaire à feuilles d’Origan Plusieurs botanistes ont parlé de la pélorie du grand Mu- ler (Antirrhinum majus , L.). Je possède quelques fleurs de "elle espèce, recueillies, par M. Seringe, au jardin des plan- les de Genève. M. Elmiger a fait connaître un exemple de Digitale orien- lle, dont la corolle, parfaitement régulière, avait tous ses - Obes ou pétales allongés, organisés et colorés comme le Pétale inférieur de la corolle habituelle (2). MM. de Chamisso et Guillemin ont décrit, le premier lans le Linnea (3) et le second dans les Archives de bota- "ue (4) , une pélorie de Calcéolaire rugueuse (Calceolaria "gosa, Ruiz et Pav.). On sait que les Calcéolaires ont "ne corollé dont la lèvre extérieure est très grande, con- Ve et enroulée en forme de sabot, et deux étamines cor- "espondantes aux fissures de la corolle. Dans la pélorie dé- - “Tite par les deux savants botanistes qui viennent d'étre “tés, la corolle s’est montrée tellement modifiée, qu'elle n’of- tait plus la moindre analogie avec le verticille calcéiforme €s fleurs ordinaires. Cette corolle avait un tube lagéni- Orme d'environ 13 millimètres de longueur, cylindrique “Ws presque toute son étendue, excepté au sommet, ou il “lait atténué en col et terminé par un rebord calleux noira- "€. La pélorie de cette Calcéolaire , suivant M. Guillemin, (1) Illustr. bot. , p. 38. è (2) Hist. nat. des Digitales. Montpellier, 1812, p- 16; pied, 18. b, 152 RER (8) Année 1822, t. 7, p. 206. ^) Consid. corolle des Calceolaria..., t. U, p. 1 et 136. 188 DES MONSTRUOSITÉS. offrait extérieurement quelque ressemblance avec la fleur des Fabiana , plantes qui appartiennent à la famille des So- lanées. Les Labiées nous présentent aussi quelques exemples de fleurs péloriées. Dans le Teucrium campanulatum , pres que toutes les fleurs de la partie supérieure ou terminale se développent souvent avec une. corolle campanulée ; pourvue de cinq lobes ou pétales parfaitement égaux entr? eux (1). Trattinick a vu le phénomène qui nous occupe dans le Dracocéphale d'Autriche ( Dracocephalum austriacum) (2); M. Mirbel l'a observé dans le Cleonia lusitanica (3): M. Ratzebourg dansle Plectranthus fruticosus (4), M. À: Brongniart dans le Galeopsis Ladanum, et M. Decaisne dans le Nepeta diffusa; d'autres l'ont trouvé dans des Sideritis: des Mentha, des Lamium. Enfin des pélories ont été observées dans beaucoup d’autres plantes plus ou moins éloignées des Labiées et de Antirrhinées. Schlotterbecc et l'abbé Rozier ont trouvé dans cet étal la Balsamine (Impatiens Balsamina, L.) (5). Leers a cueilli la Violette commune (Viola odorata, L.) (6), et M. Colladon- Martin la Violette hérissée ( V. hirta L.) (7); Coquebert 4 signalé le Rhinanthus Crista-galli (8), et Reynier le Pe (1) Mirbel, Mem. Labiées, Ann. mus., 1810, t. Xv, p. 232. (2) F. Schmidt, Sammi. physick. cecon., 1, p. 214, t. n, f.c. (3) Elém. Phys. véget., t. 1, p. 221, note. 4 (4) Animadv. ad pelor. spect. 1825. (5) Sched., de Monst. plant., Act. hel. ye 11, - pl; > Com d'agric., t. VI, p. 528. (6) Flor. herborn., p. 145. ` (1) DC., Organ. végét., t. 1, p. 519, pl. XLV. (8) Cité par M. de Candolle. DES MONSTRUOSITES. 189 dicularis sylvatica (1) ; M. de Candolle a fait connaître le Sesamum indicum (2), et MM. de Chamisso et Chavannes le Chelone barbata (3). MM. His (4), Robert Brown (5) et A. Richard (6) ont indiqué des Orchidées ; d'autres ont signalé des Medicago, des Pelargonium, des Aconits. Plusieurs botanistes ont rencontré des demi-fleurons de Páquerettes , de Soucis, de Chrysanthémes, transformés En fleurons réguliers et, par conséquent, péloriós. M. de Candolle a observé une anomalie de Tagetes erecta qui Présentait aussi ce phénomène. Toutes les petites fleurs irrégulières de la périphérie du capitule étaient changées en fleurons tubuleux tout à fait pareils à ceux du disque, Mais plus grands (7). § II. — Remarques générales sur les Pélories. La déformation avec symétrie ou pélorisation est plus fréquente que la déviation avec irrégularité ou déformation . Proprement dite. En d'autres termes, on trouve plus sou- Vent des fleurs irrégulières symétrisées que des fleurs ré- | Suliéres devenues asymétriques (8). Il semble que la nature (1) Journ. phys., 1187, t. XXVI, p. 381, pl. 1. (2) Plant. rar. jard. Genèv., pl. v. — (3) Linnea, 1832, t. vit, p. 206. — Monogr. Antirrh., p. 62. (4) Lettre à UInst., août 1807. — Journ. phys. , 65, p. 241. — Oyez aussi Wydler, Arch. bot., t, n, p. 310. (5) Obs. org. orchid., p. 698. (6) Mém. Soc. d'hist. nat., t. 1, p. 212, pl. m (Orchis latifolia). Pai observé dans le méme état l'Orchis papilionacea. M. Noulet m'a 3SSuré avoir trouvé , aux environs de Toulouse , une pélorie d'Orchis _ Snia. — Foy. aussi Soyer-Willemet, Obs. plant. frane- » P: 123 , 118 (Ophrys anthropophora). (1) Organ. végét. , t. 1, p. 455. (8) « Multo frequentiüs occurrit reditus ad symmetriam abnormis 190 . DES MONSTRUOSITÉS. se conduise dans ses ouvrages comme l'homme dans SC essais, qu'elle préfère les formes géométriques à toutes les autres formes, et qu'elle ne s’en éloigne qu'avec une sorte de regret. Les pélories sont ordinairement accompagnées d'un diminution de volume dans certaines parties et d'une augmentation dans d’autres ; quelquefois elles offrent des variations partielles dans les couleurs et peut-être méme des changements dans la texture. Les pélories arrivent tantôt sur toutes les fleurs d'u? végétal, tantôt sur une partie de celles-ci, quelquefois suf une seule fleur. Les pélories peuvent être complètes ou incomplètes. Elles sont complètes quand la fleur parait tout a fai! Symélrisée , comme cela a lieu le plus souvent dans la Li naire commune et dans le grand Muflier. Elles sont incomplètes lorsque toutes les pièces des vel” ticilles floraux n’ont pas adopté les formes réclamées pa Pordregénéral. Ainsi, dans la Calcéolaire décrite par M. Guil lemin , Pandrocée, au lieu de compléter le nombre des éta” mines qui lui manquent pour égaler celui des pétales, 4: au contraire, éprouvé un avortement : la fleur n'a plus d’or ganes males. Dans la Balsamine figurée par Schlotterbecc, l calice présentait seulement trois éperons; dans celle signa lée par l'abbé Rozier, on n'en voyait que deux : la fleur devrait en avoir cinq. Dans plusieurs fleurs de Linair® poilue, étudiées par M. Decaisne, et dans celles dela Lr naire bàtarde que j'ai eu l'occasion d'examiner, les corolle offraient tantót quatre ou cinq cornets, tantôt trois ou deux c'est-à-dire que, dans différents cas, trois pétales, ou deux « quàm aberrationes abnormes ab ‘eddem symmetria. » ( Raper: Balsam. , p. 25.) DES MONSTRUOSITES. 191 OU un seul, s'étaient péloriés (1). Des symétrisations flora- les incomplétes , analogues à celles dont je parle, ont été vues par Gouan dans la Linaire ærugineuse et par M. de andolle dans la Violette hérissée. M. Elmiger a fait con- naitre une fleur de Digitale orientale dont la corolle est "nie de deux lobes réguliers, au lieu de cinq; les trois Utreg lobes ont conservé la forme habituelle; mais le ver- tteille staminal est revenu au type numérique, comme “ans les pélories les plus complètes (2). La plupart de ces Passages des fleurs irréguliéres à l'état de pélorie ont été eludies par MM. Ratzebourg et Chavannes. Le dernier de Ces auteurs a méme publié un tableau des diverses déforma- lions qui lui ont été offertes par les Linaria vulgaris, Puria , glauca et purpurea. inné pensait que les fleurs péloriées se trouvaient tou- Jours infécondes ; suivant lui, on ne pouvait les propager lue par bouture (3); Cétait aussi l'opinion de Jussieu (4) * de plusieurs autres célébres botanistes. Cependant Will- now fut assez heureux pour obtenir des graines; il les “ma dans un sol convenable et eut la satisfaction de les Voir germer; ces grainesdonnèrent naissance a des individus Affectés de la même anomalie. | Si l’on met les boutures des pélories ou les pieds venus de | Staine, dans un terrain maigre ou peu fertile, les fleurs, au | Out d'un certain temps, reprennent leurs formes ordinai- | (1) M. Guillemin a fait la même observation. (Dict. class. d'hist. t: XI, p. 164.) ex (2) Hist. nal. des Digit., p. 16, pl. 1, fig. 00. — Dans la fleur citee "5 haut , la corolle est parfaitement régulière, mais il y a seulement "amines. (3) « Radicibus infinite se multiplicans. » Spec. plant., t. 11, p. 859. (4) « Flores intereà non fructifere , sed taleis propagande. » Gen. ant., p. 120. à | 192 DES MONSTRUOSITÉS, res (1) : d'ou Pon a pu conclure que la principale source des pélories était l'excés de l'alimentation ; ce qui semble venir à l'appui de cette opinion, c'est la remarque faite par M. De- caisne, sur des pélories de Linaria pilosa et de Nepeta diffust. Get excellent observateur a compté un élément de plus dans l'ensemble de l'appareil floral ; chaque fleur avait 6 sépales; 6 pétales et quelquefois 6 étamines. Cette cause n'est cepen- dant pas la seule ; des individus placés dans des circonstan- ces tout à fait opposées ont perdu également leur symé- trisation. Leers trouva, au milieu d'un champ , une pélori® de Linaire commune; il la transporta dans un jardin @ ~} essaya dela cultiver. Au bout d'un an , il n'existait plus de „traces de la pélorisation (2). D. M. Guillemin parait penser que les mutilations peuvent influer sur la naissance de la symétrisation ; cette anomalie lui a paru déterminée , au moins dans certains cas , pa les lésions que les animaux , en broutant, ont faites à '! tige ou aux branches de la plante (3). _ La position des fleurs sur l'axe semble aussi agir sur I^ production des pélories. Les fleurs placées au sommet 5 f transforment plus facilement que les autres (Teucrium cam _panulatum y. C’est la fleur supérieure de la grappe qui * métamorphose ordinairement dans PAntirrhinum maj (Chavannes). Cependant, dans l'exemple de la Calcéolaif® — rugueuse, rapporté par M. Guillemin , ce botaniste fait ob^ server que les fleurs régularisées étaient placées, pour la plupart, sur les ramifications inférieures de la panicule, 44 milieu d'un grand nombre d'autres fleurs qui avaient col” servé leur forme habituelle , et que les fleurs adjacentes cal- (1) « Radices peloriz solo sterili plantate degenerant in Linariam: " ( Willd., Spec. plant., ut, p. 254.) (3) Flor. herborn., p. 144. (3) Dict. class. d hist. nat., t. xim, p. 164, DES MONSTRUOSITES. 193 iformes étaient tout aussi terminales que les fleurs pélo- "ees. La même remarque a été faite par M. Boivin sur des leurs péloriées de Linaria chaleppensis. Les Pélories sont les exemples les plus frappants de cette Vérité tératologique proclamée au commencement de cet Urage, que les déviations du type spécifique dans un végétal "@résentent l'état habituel d'un autre végétal. Ainsi les fleurs es Calcéolaires péloriées ressemblent tout à fait à celles des abiana (1); celles des Teucrium ont pris les caractères des *urs des Campanules; les fleurs des Digitales ne différent Pas de celles des Tabacs ; enfin les demi-fleurons des Co- l "Jmbifères ont adopté la forme des fleurons des Cynaro- “ephales. i (1) M. de Candolle, comparant les pélories des Personnées avec les “urs des Solanées, en a conclu que les Personnées ue sont que des : rations habituelles du type des Solanées. (Théor. élém. , 2° éd., * 266, ) CHAPITRE Il. DES TRANSFORMATIONS DES ORGANES LES UNS DANS LES AUTRES OU DES METAMORPHOSES. On désigne, sous le nom de métamorphoses , certain modifications profondes qui changent la nature et les font lions des organes appendiculaires et leur donnent la struc ture et le rôle qui appartiennent à d'autres organes. Dan’ ces variations, la force formatrice semble avoir éprouvé UP transport insoliteou unevéritable métastase, si l'on veut per mettre cette expression empruntée au langage médical. Comme ces transformations ne sauraient avoir lieu sa? offrir le plus souvent une variation dans le volume, ! forme , la consistance et méme la couleur, ces anomali’ Li A as RR got rs Se — DES MONSTRUOSITÉS. 195 *ont moins simples que les autres et méritaient de former Un ordre à part. La théorie des métamorphoses à été pressentie par Joachim. Ungius , qui a composé, vers la fin du xvn siècle, un °uvrage où les analogies des differents organes sont recon- Nues avec justesse et présentées avec sagacité (4). Gaspard-Frédéric Wolf , professeur. à l'académie dé Pe- lershourg, a annoncé peut-être le premier, d'une manière Positive, l'identité des organes élémentaires et leur réducti- bilité en un seul type (2). | Mais c’est à l'illustre poëte Goëthe que noüs devons l'ex- Position et le développement de cette belle théorie ; il la Présenta d'abord dans un ouvrage aussi remarquable par la auteur des vues que par l'élégance du style , un owvrage , it le savant auteur de la Philosophie anatomique , qui est , Dour le fonds des idées, le livre d’un savant, et, dans sa me, celui d'un philosophe qui s'exprime en poëte. Le public accueillit mal la conception de Goëthe ; on lui "procha d’avoir franchi le cercle déjà si grand de ses occu- Pations habituelles; on oublia qu'il devancait d'un demi- "cle les conquêtes scientifiques de son temps! on ne pou- Vait comprendre qu'un littérateur poëte , exercé à toutes les lances de Ja pensée, pat réunir l'esprit fécond et créateur Nécessaire aux produits de l'imagination, à cette raison sage “mesurée indispensable à l'observation de la nature (3). TI ' (1) Isagoge phyloscopica , 1678. (2) 4 C'est aussi un des premiers physiologistes qui aient eu l'idée des rêts ; de développement: 1 (3) Vers, die Metam. der Pflanz. , 1190. — Zur Morphol., 1817. 88. métam. des Plant., Genève, in-8°, 1829.— Stuttgard, 1837. — EU aussi Geoff. St-Hil., sur les écrits de Goéthe... (Ann. scienr. ‘LI, p. 188.) 196 DES MONSTRUOSITES. est vrai que dans les détails de son beau livre tous les c0- rollaires ne sont pas déduits avec la méme logique, ni tous les faits empreints de la méme vérité. Ce qui suffirait cependant pour établir la justesse des nou- velles idées deGoéthe sur les métamorphoses, c'est que, dans l'espace de quinze années, sa théorie a été conçue tout à la fois par plusieurs hommes, élevés dans la science , qui n° connaissaient pas l'ouvragesi remarquable de l'illustre Saxon et qui semblaient n'avoir entre eux aucun rapport (4): Ainsi , à peu prés vers 1810 , M. le docteur Pelletier d'Or- léans exposait à M. Auguste de Saint-Hilaire, dans des con- versations aussi instructives qu'attachantes , les idées ques Goéthe avait tàché de répandre en Allemagne; en 1819; M. le professeur Dunal, étranger, comme M. Pelletier, à la langueallemande, proclamait la méme théorie ou une théorie analogue, dans son Essai sur les Vacciniées. Vers la méme époque, M. de Candolle publiait une seconde édition de 54 Théorie élémentaire, et dans ce livre, l'un des plus beaux de la science, arrivait, par l'étude des monstruosités , a l'idée de ces transformations ; il esquissait leurs lois et démontrail leur importance. Enfin, quelques mois plus tard, en 1820; M. Turpin , qui ne connaissait ni Goéthe, ni M. Pelletier» ni M. Dunal, et qui sans doute n'avait pas encore vu la no velle édition de la Théorie élémentaire, développait des doc” trines tout à fait conformes, dans son bel Essai d'une Jeco- nographie. Depuis cette époque, la théorie des métamorphoses a été adoptée et confirmée par un grand nombre de botanistes » parmi lesquels il nous suffira de citer du Petit-Thouars, Cassini, et MM. Robert Brown, Auguste de Saint-Hilaire» Adrien de Jussieu, Adolphe Brongniart, Achille Richard : (1) Aug. de St-Hilaire, Deux. mém. sur les Résédacées, p. 5, note amm Te ae DES MONSTRUOSITÉS. 197 Gaudichaud , Martius, Ræper, Schimper, Lindley, Engel- Mann , Lestiboudois.... La plupart des physiologistes qui ont écrit sur les meta- morphoses se sont occupés principalement des transforma- lions habituelles ; ils ont regardé les différentes parties ap- Pendiculaires comme des modifications, des états particu- liers d'un. méme organe. Je ne dois étudier, dans cet ou- Vrage, que les métamorphoses monstrueuses. Plusieurs botanistes ont distingué les organes des végé- laux en organes fondamentaux et en organes accessoires. Cette division sépare aussi en deux sections les parties ap- Pendiculaires , puisqu'il existe parmi elles et des organes Accessoires ct des organes fondamentaux. Or toutes ces Parties peuvent se transformer les unes dans les autres ; de là quatre sortes de métamorphoses : 1° celle des organes fondamentaux entre eux (par exemple, le changement d'une élamine en pistil ou d’un pistil en étamine); 2° celle des Organes fondamentaux en organes accessoires (par exemple, le changement d'une feuille en aiguillon); 3° celle des or- Zanes accessoires en organes fondamentaux (par exemple , le changement d'un aiguillon en feuille); 4^ enfin celle des organes accessoires entre eux (par exemple, le change- Ment d'une glande en vrille ou d'une vrille en glande) (4). M. de Candolle a dirigé principalement son attention Sur le changement des organes fondamentaux en organes Accessoires; il a cherché à prouver que ces derniers devaient être toujours regardés comme des organes fondamentaux modifiés et dégénerés. De là le nom de dégénérescence dont il (1) Goëthe reconnáit deux sortes de métamorphoses : celle des or- Sanes en organes inférieurs , c'est la métamorphose descendante ( un- regelmæssige ou rückschreitende), et celle des organes en organes Supérieurs , c'est la métamorphose asceniante (regelmæssige ou fort- Schr eitende ). 198 - DES MONSTRUOSITÉS. se sert pour exprimer ce phénoméne ; mais ce nom ne sau- rait convenir à tous les genres de transformation , méme si l'on adoptait la théorie de ce célèbre botaniste. Dans une feuille modifiée en aiguillon , dans une étamine rapetissée en glande, on peut admettre un abâtardissement, si je puis m'exprimer ainsi, une dégénérescence ; mais, dans le phe- noméne inverse , dans une glande ch anée en étamine : dans un aiguillon développé en feuille, en suivant les mêmes idées , il est arrivé, au contraire , un perfectionne- ment, un ennoblissement. D’un autre côté , quand ce même phénomène a lieu entre deux organes fondamentaux: quand une étamine devient pistil ou qu'un pistil devient étamine , nous n'avons plus ni une dégénérescence , ni ub perfectionnement, mais un simple changement, une méta- morphose. Dira-t-on qu'il y a dégénérescence dans tout organe qui s'éloigne de sa nature habituelle pour adopter l'état d'un autre organe, quel qu'il soit? Mais alors un or- gane accessoire qui prendrait le caractére d'un organe fon- damental aurait dégénéré ; tandis que, dans la théorie de M. de Candolle , il serait arrivé un phénoméne inverse. Goéthe regardait les organes appendiculaires les plus éle- véssurl'axecomme les plus parfaits. Si l'on adoptait cette idée qui est purement hypothétique (chaque organe étant parfait dans sa nature) , toute métamorphose d'un organe en un orgave inférieur deviendrait une dégénérescence, paf exemple le changement d'un pistil en étamine. Mais la transformation d'une partie en une partie supérieure , celle d'une élamine en pistil, que serait-elle? devrait-elle avoit le méme nom ? I! me semble, d'aprés tout ce qui vient d'étre exposé; que Pexpression de métamorphose (le nom consacré pa! Goéthe ), qui embrasse le phénomène dans sa généralité €t qui ne préjuge rien sur sa nature, doit étre préférée à celle DES MONSTRUOSITES. 199 de dégénérescence ; elle a, d'ailleurs, une date plus ancienne: Si l'on considérait, avec M. de Candolle, les organes ac- Cessoires comme des organes fondamentaux habituellement déformés , ces parties ne devant plus être regardées comme des organes distincts , il résulterait de cette théorie que la transformation d’un organe accessoire en un organe fon- damental deviendrait un retour au type primitif, une sorte de pélorie (1), que la transformation d’un organe fonda- Mental en un organe accessoire serait une simple déviation de la forme de celui-ci, c’est-à-dire une déformation (2), et que la transformation entre deux organes accessoires se lrouverait une nuance de la déviation ou de la déformation. l vy aurait de véritables métamorphoses que les change- Meuts qui ont lieu entre deux organes proprement dits ou fondamentaux, Les quatre sortes de transformations indi- uées plus haut se réduiraient conséquemment à une seule. Comme mon but, dans cet ouvrage, est de passer en re- Yue toutes les métamorphoses anomales auxquelles les vé- Sélaux sont sujets, et que l'anomalie existe toutes les fois {Wun organe, quel qu'il soit, s’éloigne d'une manière no- lable de son type spécifique, je laisserai de côté la théorie de M. de Candolle et m’occuperai, dans ce chapitre, de tous les Modes quelconques de la tranformation. Je traiterai d'abord ès changements des organes fondamentaux et des organes cessoires en parties fondamentales, et ensuite des méta- Norphoses des uns et des autres en organes accessoires. Comme on observe ces transformations tantót dans les Parties des individus élémentaires, tantót dans les indivi- dus élémentaires tout entiers, j'étudierai séparément ces ux sortes de métamorphoses. (1) Foy. le chapitre précédent. (2) Voy. l'avant-dernier chapitre. DES MONSTRUOSITÉS, METAMORPHOSES. en feuilles. en sépales. en organes en pétales. fondamentaux. en élamines. en pistils. entre les organes. en vrilles. en écailles. en organes en poils. SASOHAYON VLAN accessoires. : en piquants. | en glandes. | en. bourgeons. | entre les individus. : len fleurs ou fru ARTICLE I~, METAMORPHOSES DES ORGANES APPENDICULAIRES. A. — Métamorphoses en organes fondamentaux. § Ier. — Des métamorphoses en feuilles ou des Virescences. Une des métamorphoses les plus communes est la trans- formation des organes appendiculaires en organes foliacés ; Cette transformation a été désignée sous le nom de vires- cence , virescentia (Engelmann). Les organes dont la nature ressemble un peu à celle des feuilles sont ceux qui sont le plus sujets à ce genre de dé- Viation : ainsi les stipules, les bractées, nous en offrent de nombreux exemples; il suffit souvent, dans ces parties, d'une égère expansion pour l'opérer; aussi, dans beaucoup de circonstances, la virescence est liée avec l'hypertrophie. 202 DES MONSTRUOSITES. On a observé surtout ce changement dans les Plan- tains (1); Jen ai vu un exemple assez marqué dans un épi de Plantago major; M. Seringe a indiqué dans le méme état le Plantago lanceolata; ce changement se présente aussi dans les bractées de l’ Amorpha fruticosa ( Schlechtendal ), dans celles de l'Ajuga reptans, de méme que dans l'involucre du Parthenium inodorum (A. J uss.) et dans celui du Centaurea Jacea (Hussenot). Quant aux sépales, on n'est pas surpris de la fréquence de leur métamorphose, lorsqu'on fait attention aux nom- breux points de ressemblance qui unissent le calice avec les feuilles. Ainsi, par exemple, les sépales des Renoncules (2); des Anémones (3) et des Roses (4) se convertissent bien souvent en organes foliacés plus ou moins semblables aux feuilles caulinaires. On a observé le méme changement dans le Salix alba (5), le Peltaria alliacea et le Diplotaxis tenui- folia (6). Beaucoup d’autres exemples sont figurés ou décrits dans les ouvrages de Weinmann, de de Candolle, de Schim- per, de Jeger, de Schlechtendal, d’Engelmann... Il me suffira de citer, comme plantes principalement affectées de cette anomalie, le Caltha palustris , les Primula elatior, grandi- /loraet acaulis, le Convolvulus sepium, le Gentiana campestris, le Geum rivale, | Athamanta Cervaria, le Trifolium repens; le P apaver orientale , Hesperis matronalis, le Thlaspi ar- vensis et le Cheiranthus Cheirit. Les pétales subissent aussi la transformation foliacée- Marchant a observé, il y a longtemps , ce singulier phéno- (1) Hopk., Fi. anom., pl. 10, fig. t. (2) Sweert, Florileg., pars 1, pl. ni. (3) Clus., Plant. hist., 2, p. 247. (4) DC., Organ. végét., p. 33. (5) « Salix alba monstrosa. » (Seringe, Saul. Suiss., p. 84.) (6) Seringe, Bullet. bot., 1. 1, p. 6. Se sn RE TTS SP i re ns 9 DES MONSTRUOSITÉS. 203 mène dans les fleurs de la Fraxinelle (1). Il a été découvert Par Pollini dans la Campanule fausse-raiponee (2), par Gi- libert dans le Phyteuma spicata (3), par Spenner dans unc Ronce (4), et par M. Delile dans plusieurs Molènes des en- “irons de Montpellier. Jeger en a trouvé des exemples dans les corolles du Trèfle rampant (5), Isidore de Lapeyrouse dans celles de la Mauve sauvage (6), M. Adrien de Jussieu dans celles du Spiræa oblongifolia et M. de Candolle dans Celles de la Julienne cassolette, de la Renoncule des mares de l'Anémone Sylvie (7); moi-même j'ai rencontré les urs de l’Echinophora maritima, du Diplotaxis muralis ct de l Amygdalus communis (8). Le changement des étamines en feuilles est moins com- Mun que la transformation des enveloppes sexuelles; M. de Candolle l'a observé dans l'Anémone Sylvie, M. Seringe làns PAnémone couronnée , M. Roper dans le Delphinium v üssicaule , et M. Engelmann dans le Torilis Anthriscus , Heracleum Sphondylium etle Daucus Carota. La métamorphose des pistils ou des carpelles n’est pas trés- (1) Mém. acad. scienc., 1693, p. 23. Elle a été retrouvée par du *lit-Thouars (DC., Organ. végét., t. 1, p. 543) et par Eysenhardt Beobacht. über Pflanz. missbild., tab. 1.) 3). Flor. véron., t. 1, p. 212.— Foy. aussi Roeper, Mém. infloresc., ES Seringe, Mélang., t. u, p. 99, et A. DC., Monogr. campanul., * 33. (3) Démonstr. bot., t. XXXII. (4) Flor. Friburg., p. 144. (5) Missbild., der Gewechs,p. 83, fig. 8-10.— Voy. aussi Seringe, Ullet. bot., t. 1, p. 6; — Steinheil, Ann. scienc. nat., t. XXVI, p. 65. x BC, Organ. végét., t. xxvru, fig. 1; — Schimper, Mag. pharm., 30, t. V-VI. , (6) Hist. acad. scienc. Toul., t. 1, 1 part., p. 215. (1) Organ. végét., 4. 1, p. 543, pl. 35. ; * (8) Consid. irrég. corolle, Ann. scienc. nat., t. XXVII, p. 242, A a IIT GP tt een. n c ces Imm eani ees eee & 904 DES MONSTRUOSITÉS, rare; elle a été signalée par les anciens botanistes, entre autres par Tabernemontanus et par Duhamel. Le premier a figure des carpelles de Cerise à l'état foliacé (1) et le second a T€ présenté dans le méme état des fruits de Prunier de Mira- belle (2). D'autres auteurs ont publié aussi des exemples de cette anomalie. MM. Seringe et Heyland l'ont indiquée dans le Diplotaxis tenuifolia (3), M. de Candolle dans le Lathyrus latifolius (4), M. Schauer dans un Heracleum (5) et M. Jæ- ger dans un Trèfle et dans une Ancolie (6). D'autres on! vu, avec le méme phénoméne, la Scrofulaire aquatique» des Jacinthes, des Tulipes , des OEillets. Ce sont des transformations de ce genre qui forment le yeux ou cœurs verts dans certaines variétés de Dahlia, d Renoncule et d'Anémone. On assure que les fleurs demi-doubles, fécondées avec le pollen d'autres fleurs demi-doubles, ont donné des pieds avec des fleurs couronnées dans le milieu par une houppe de p& tites feuilles vertes ; cette houppe venait de Pexpansion el de la transformation des organes pistillaires (7). Quand les ovaires se métamorphosent en feuilles , le cha? gement peut s'effectuer dans tout l'organe ou dans une seul? partie. Lorsqu'une partie seulement se transforme, on observe; dans le plus grand nombre de cas, que c'est la partie env€ loppante. J’ai rencontré , avec M. le professeur Dunal , aU* (1) Lcon. , pl. cuxxxm. (2) Phys. arbr. , pl. xin, fig. 314. (3) Bullet. bot. , t. 1, pl. 1. (4) Mém. légum., 1,t. i. — « L. latifolius 8 monstrosus. » (Prod) t. 11, p. 370.) (5) Schrift. , der schles. Gesselsch., 1834, p. 68. - (6) Missbild., der Gewæchs , t. 1, fig. 9 et 4-7. (1) DC. , Phys. végél., t. 11, p.. 372. DES MONSTRUOSITES. 205 environs de Montpellier, une fleur de Tulipe dont l'ovaire etait changé en véritables feuilles ; ces feuilles avaient une Couleur plus pale que les feuilles ordinaires; elles portaient Sur leur marge les ovules dans l'état habituel. Cette mons- l'uosité nous a rappelé l'organisation normale des fruits des Sterculiers. testa M. Schauer a vu un Reseda phyteuma, dont les carpelles “laient complétement changés en feuilles, et ces feuilles, Ainsi que dans l'exemple précédent, portaient encore les Ovules : ceux-ci étaient cependant dans un état rudimen- laire (4). Dans un certain nombre de fleurs doubles de Merisier , M, Auguste de St-Hilaire a remarqué au centre, à la place des pistils, de petites folioles pliées sur elles-mêmes, dont les bords ne présentaient aucune cohérence; ces folioles, qui ùe pouvaient laisser aucun doute sur leur nature, absolu- uent analogue à celle de la feuille véritable, offraient dans leur nervure moyenne un long prolongement, tout à fait semblable à un style, terminé par une sorte de stigmate: lans leur contour on voyait de petites saillies ou dents glan- duleuses (2); ces petites saillies étaient, sans doute, des 9Yules incomplétement avortés. Dans d'autres cas, il arrive un phénoméne tout à fait in- Verse ; ce sont les ovules qui ont subi la transformation et les Caveloppes ovariennes qui ont conservé la forme habituelle. M. Adolphe Brongniart a décrit une monstruosité de Pri- mula sinensis, dont les ovules étaient transformés, en tota- ité on en partie, en petites feuilles à 3 ou 5 lobes, couvertes de quelques poils courts et offrant de grands rapports de Orme avec celles de la tige; ces petites feuilles etaient (1) Schrift., der schles. Gesselsch. , 1834, p. 68. (2) Deux. mém. sur les Réséd., p. 20, note. 206 DES MONXSTRUGSITÉS. épaisses , celluleuses et un peu charnues. Les lobes parais- saient souvent dressés et le limbe avait une forme concave ou en entonnoir; elles naissaient d'un pétiole court et char- nu. La colonne qui supportait les ovules était un peu allon- gée. Souvent les ovules les plus inférieurs paraissaient transformés en feuilles, et ]es autres, qui avaient conservé la forme des véritables ovules, étaient portés , comme eux : par des funicules plus ou moins longs (1). M. Pancher a bien voulu me communiquer une mons- truosilé de Cortusa Mathiok, qui se trouve, dans ce mo- ment, dans le jardin des plantes de Paris. Les diverses piéces du périanthe sont plus ou moins changées en feuilles ; il en est de même des étamines. Les fruits qui forment la circonférence de l'ombelle sont dilatés; en les ouvrant, 0n trouve une petite colonne ou placenta central , offrant à son sommet un grand nombre de divisions filiformes, diver- gentes, rayonnées, portant chacune, à la place d'un ovule, une petite feuille arrondie. Vers le centre de l'ombelle les fruits ont perdu leur enveloppe, les petites feuilles sont plus Srandes et plus semblables aux feuilles caulinaires. Les organes accessoires éprouvent aussi, de leur cóté , de véritables transformations en feuilles. Les piquants, paf exemple , subissent quelquefois cette métamorphose. Il n'es! pas rare de voir, dans le Berberis vulgaris, l'épine axillaire se dilater et produire une feuille monstrueuse. (Hussenot-) Willemeta pris cette anomalie pour le caractère d'une autre Epine-vinette, et a placé cette monstruosité, dans sa Phyto* graphie encyclopédique , sous le nom de Berberis cretica (2): J'ai rapporté, dans le chapitre sur les balancements orga (1) Note sur une monstr. de P. sinensis. Ann. scienc. nat., 2 sér.» p. 308, pl. ix, c. (2) T. 1, p. 416. — Xoy. aussi Soyer-Willemet, Obs. 15. DES MONSTRUOSITES. 207 niques, l'exemple d'une Féve dans laquelle lesstipules avaient pris le développement et le róle des véritables feuilles. Il est bien rare qu'un organe subisse la transformation loliacée sans qu'il y ait un changement semblable ou ana- logue dans les organes voisins ; aussi la plupart des faits qui Viennent d'être énumérés nous offrent-ils des métamor- Phoses sur plusieurs organes ou sur plusieurs verticilles. Les changements en feuilles peuvent méme présenter trois degrés, suivant leur intensité : 1° celui dans lequel les or- Sanes ont pris une apparence herbacée, mais conservent leur forme et leur position normales ; 9? celui dans lequel les organes adoptent la figure des véritables feuilles avec urs nervures , leurs lobes ou leurs dents, mais offrent en- ore leur situation habituelle; 3° enfin celui dans lequel les organes, plus ou moins métamorphosés , ont perdu ou ‘emblent avoir perdu leur position normale par suite des ‘trophies, des hypertrophies, des avortements complets et Même des soudures, dont le phénomène est compliqué. (Ad. Tongniart.) § IT. — Des métamorphoses en sépales. Comme les sépales different peu des feuilles dans un Stand nombre de fleurs, il est bien difficile de distinguer la transformation dont il va être question de celle qui a été étudiée dans le paragraphe précédent. | Plusieurs auteurs ont vu des pétales, dans certaines Re- Moncules, se changer en vrais sépales. On dit que cette mé- ‘amorphose se présente assez souvent dans le Ranunculus abortiyus. Ce mode de transformation a été trouvé dans le Pyrus Talus (A. Braun), le Dictamnus albus, le Vinca minor, le 208 DES MONSTRUOSITÉS. Teucrium Chamædrys (de Candolle), les Campanula persi- cefolia et rapunculoides, et le Daucus Carota (Engelmann); je l'ai vu moi-méme dans le Cerastium vulgatum, le Vero- nica anagallis , e Verbascum Chaixii. Un exemple trés-curieux de la métamorphose en sépales à été découvert, par Dufresne, sur un pied de Podospermum laciniatum. L'aigrette était remplacée par cinq lobes linéai- res un peu foliacés (1). Un fait analogue a été observé tout récemment par M. Kirschleger dans les capitales d'un Tra- gopogon pratense (2). Les physiologistes qui considèrent Paigrette des composées comme un calice habituellement atro plié doivent voir dans ces faits un retour bien remarquable au type primitif. Le changement des organes mâles en folioles du calice arrive assez fréquemment dans les fleurs dont le verticillé calicinal est coloré, comme le Nigella damascena , I Aquile- gia vulgaris et la plupart des Dauphinelles (3). Les transformations calicinales se montrent plus fré- quentes dans les fleurs des Monocotylédones , surtout dans celles dont l'enveloppe sexuelle est colorée (périgone , DC.); M. Seringe a observé ce changement dans lesétamines du L£ hum Martagon et dans les carpelles du Lilium Pomponium. Une variété de Lis blanc, cultivée par les floristes, a! lien d'avoir tous les sépales (tépales, DC.), au nombre de si et sur deux rangs, en offre un nombre infini verticillés et imbriqués. Les étamines se sont transformées en sépales ; mais , comme le nombre des verticilles est plus considérable | que celui des organes sexuels, il faut qu'il y ait eu aussi me tamorphose des feuilles les plus élevées de la tige, qui 5 sont changées également en sépales et ajoutées aux autres (1) DC. , Organ. vegel., t. 1, p. 492, pl. XXXI, fig. 6. (2) Soc. d' hist. nat. Strasb., 2 juin 1840. (3) Engelm. , de Anthol. , p. 29. | DES MONSTRUOSITES. 209 Verticilles, Peut-être aussi l'axe s’est-il continué au-dessus de la fleur, et a-t-il produit de nouvelles lames sépalifor- hes (4). Dans les Tulipes, dites doubles, il y a aussi des change- ments d'étamines en sépales (2), mais ce phénomène se pré- Sente rarement seul; il est presque toujours accompagné d'une augmentation dans le nombre des organes, Je me "appelle d’avoir observé dans un jardin, aux environs de Ontpellier, avec M. le professeur Dunal, une Tulipe mons- lrueuse dont les étamines offraient tous les passages possi- les entre l'état. normal et la métamorphose dont il s'agit. Sur plusieurs des nouveaux sépales , on voyait une portion Vanthere avec ou sans pollen , tantôt au sommet ou sur un ôté de la lame sépaliforme , tantôt dans une petite échan- crure ou sur un point de la nervure médiane. Le gynécée était transformé en plusieurs petites feuilles. - Des transformations analogues se font remarquer aussi dang les Tubéreuses , les Iris , les Jacinthes, les Narcisses , ès Colchiques, les Safrans... ! $ HI. — Des métamorphoses en pétales. Cette métamorphose parait sans contredit la plus com- Mune, mais sa fréquence est variable suivant les verticilles. Les bractées sont peut-étre les organes appendiculaires qui l'offrent le moins souvent. Le tissu de ces organes dif- fre assez de la texture des pétales, pour rendre difficile le à angement dont il s'agit. Cependant il arrive quelquefois, (1) Foy. le livre sur les Multiplications. (2) Traité des Tulipes , Avignon, 1165, pl. 11, fig. 1. 14 210 DES MONSTRUOSITÉS, mais c'est surtout dans les fleurs où la nature foliacée des bractées ressemble le plus à celle des corolles. (Goëthe.) Il y a peu à faire pour qu'une pareille transformation s’effec- tue dans les bractées colorées de certaines Sauges, des Me lampyres , des Monardes. Celles de P Hortensia ressemblent tellement à des pétales, qu'on regarde communément leu” ensemble comme une véritable fleur. | Les calices des Aquilegia et des Delphinium sont aust plus ou moins colorés et offrent d'ordinaire le caractère des vraies corolles, Les pétales de ces plantes se montrent ha- bituellement peu développés. L'aspect pétaloïde est encor? plus prononcé dans d’autres fleurs où la corolie manque tout à fait (Anémones, Clématites). Dans tous ces végétaux: le phénomène de la transformation complète en pétales doit arriver avec autant de fréquence que de facilité: : Le calice d'une variété cultivée de Primevère ( Primula calycanthema) s'épanouit par la partie supérieure en W limbe coloré et pétaloïde ; de sorte que la fleur parait avoir deux corolles emboitées l’une dans l'autre. M. d° Schlechtendal rapporte que, dans une fleur de Syrinj^ persica , une seule dent du calice était passée à l'état péta” loide (1). Les organes sexuels se métamorphosent souvent en pe tales. Ce Phénomène est si commun , que M. de Can doll? a proposé de désigner sous le nom de pétalodées ( flor’ petalordet) les fleurs dans lesquelles on Pobserve (2). Tout le monde connait les fleurs dites doubles, demi-do bles ou semi-doubles et pleines : ce sont des fleurs dont 1° organes sexuels, surtout les étamines, se sont métamol phosés en corps pétaloides. On en trouve de uombreu* (4) Linnea, 9, p. 798. (9) Mém. sur les fleurs doubl. (Mém. soc. are., t. ur, p. 402) DES MONSTRUOSITES. 211 “xemples, parmi les polypétales, dans les Pavots, les Renon- cules , les Populages, les Anémones, les Pivoines, les Passe- roses, Jes Grenadiers, les Myrtes, les Violettes, les Giro- ĉes, les Juliennes, les Rosiers, les Cerisiers..., et, parmi les Samopétales, dans les Datura, les Primevéres , les Lauriers - 9ses, les Rosages, les Gardénes, les Campanules, les Chè- Yrefeuilles, les Véroniques, les Orobanches, les Scabieuses, ês Pervenches En général, les fleurs polypétales doublent plus facile- Ment que les fleurs gamopétales. (Willdenow, de Candolle.) ll y a des familles où les fleurs doubles sont trés-rares , par exemple les Légumineuses et les Antirrhinées (1). D’au- tres familles n’en ont jamais présenté ; telles sont les Om- ellifères, les Géraniées, les Polygalées , les Orchidées et loutes les plantes apétales (2). | Qu'on examine attentivement une fleur double, on ob- Servera que les étamines ont disparu, en tout ou en partie, “lont été remplacées par des pétales plus ou moins sembla- °S aux pétales ordinaires (3). Il est arrivé, dans les organes "atinaux de cette fleur, un avortement ou une hypertrophie € Panthère et un développement excessif du filet, qui a pris “Spect et la nature d'un corps pétaliforme, Les fleuristes ont ‘ppele béquillons les étamines transformées en pétales; M. de andolle les a nommées pétales staminaux. On rencontre souvent tous les étais intermédiaires entre rgane normal et l'organe monstrueux. (Goëthe.) On voit (1) On en a vu quelques exemples dans les Coronilla, les Anthyllis, * Spartium , lès Medicago , les Clitoria, les Ulex, et un seul dans °S Antirrhinum. ( Willd., Gründ. der Kraut. , p. 469.) (2) Wild. M , loc. cit. — M. Seringe possède un échantillon d'Orchis Orio qui e ommence à doubler. (3) « Luxuriantes flores multiplicant cum damno staminum que ex- * crescunt in petala. » (Linn. , Phil. bot., 150.) 912 DES MONSTRUOSITES. des étamines dont le filet est seulement aplati ou élargi: d'autres étamines où l'amplification se trouve un peu plus avancée; d'autres plus dilatées , plus grandes , plus péta- loides (1). Enfin on découvre des pétales nouveaux aussi larges , aussi colorés que les pétales véritables. Quelquefois ces pétales portent encore à leur sommet un rudiment d'an- thère ouverte ou déforméc, ou bien un peu de matière pol- linique, logée dans un petit repli (2). D'autres fois la dila- tation s'effectue de maniére qu'une portion du filet ou du connectif se développeen languette, et que l'organe ressem- ble plus ou moins aux étamines munies d'un appendice M. de Schlechtendal en a signalé un exempie remarquable dans le Solanum tuberosum. M. Dunal a fait connaitre un fait curieux de la transfor- mation des étamines en pétales, observé sur un Arbousicl ” On sait que la fleur simple de cet arbre renferme dix étamines- cing opposées aux lobes de la corolle ei cinq alternesaveceux: Ces étamines, parfaitement égales en apparence, ont des an- théres surmontées en arrière par deux cornes et sont suppor iées par des filets cylindriques renflés et velus à leur base. Un individu de la même espèce a offert à M. Dunal des fleurs dans lesquelles on observait, à la place des étamines, un : sorte de double corolle divisée à son sommet en dix lobes : disposés sur deux rangs alternes; les cinq lobes les plus voisins de la corolle étaient opposés aux lobes de celle-ci; ef manquaient d'anthéres ; les autres lobes staminaux , 0 (1) Duhamel, Phys. arbr. , t. 1, pl. XII, fig. 305. (2) La nature a tracé , dans l'état normal des Nymphæa , toutes le nuances possibles entre l'étamine complete et le pétale parfait. (Haller-) Les dilatations des filets des Tilleuls et de plusieurs autres végétaux peu" vent étre aussi comparées aux pétales. Les filets pétaloides sont dési- gnés, en organographie , sous le nom de staminodes. — Voy. aus! la structure de la fleur des Balisiers. (Goéthe. ) € DES MONSTRUOSITÉS, 213 peu plus intérieurs que les premiers et alternes avec eux , Portaient antérieurement des anthéres sans cornes au centre de leur sommité élargie (1). Ce qui est digne de remarque, Cest qu'un genre de plantes de la nouvelle Calédonie, qui appartient comme l'Arbousier au groupe des Ericinées , Nous offre , dans son état habituel, une organisation ana- logue à la monstruosité staminale dont il vient d’être ques- Que par les lanières qui terminent les écailles opposées aux Pétales et par une plus grande simplicité des filets des éta- Mines. (Dunal.) Dans les Ancolies qui commencent à doubler et dans plu- Sicurs autres Renonculacées anomales, on voit aussi les étamines se transformer insensiblement en corps pétaloides; Mais ces nouveaux pétales offrent cela de singulier, qu’ils Sont en forme de cornets et emboités les uns dans les autres. M. de Candolle parait s’être trompé quand il a avancé que ces Pétales ne sont pas produits par les filets des étamines comme dans les exemples cités plus haut, mais par des anthéres dila- les (Engelmann.) Suivant lui, il existe certaines Anco- les monstrueuses où l'anthére est à moitié changée en cor- Net (3). Il est trés-vrai que la culture a obtenu des fleurs de cette plante deux sortes distinctes d'anomalies. Il y à des Ancolies doubles, à pétales tous planes, elles for- Ment la variété Aquilegia vulgaris stellata, et d'autres à pé- | tales tous en capuchon, elles constituent la variété Aquilegia (1) Consid. org. flor., p. 26, pl. U, fig. 10, 14, 15. (2) Labill. , Sert. austro-caled. , t. 1, p. 40. .. (3) Linné regardait ces cornets comme des nectaires ; voilà pourquoi Ua dit: « Impletio florum simplicium vel petalis vel nectariis peragitur.» hil. bot., 125. 214 DES MONSTRUGSITES. vulgaris corniculata (1). Mais il n'est pas exact de dire que les premières sont dues au développement du filet et à ta vortemeut absolu de l'anthére, tandis que les secondes ré- sultent de accroissement cuculliforme de ce dernier organe et de l'atrophie de son support. Suivant M. de Candolle, dans la famille des Renoncu- lacées , les Clématites doublent ordinairement par le filet. les Renoncules_ par l'anthére et les Ellébores par le filet e! par l'anthére (2). | Dans les fleurs qui portent des étamines appendiculées » l'organe accessoire se métamorphose en méme temps qué l'anthére et le filet. Ainsi les fleurs des Lauriers- Rose qui commencent à doubler présenteut quelquefois des lames pétaliformes irrégulières dans lesquelles , avec uU? peu d'attention , il est facile de reconnaitre des trace? du filet, de Panthère et de son appendice. Dans une monstruosité de Vinca minor, les étamines étaient déjà el partie pétaloïdes, et la transformation avait commencé paf la languette qui dans ce genre surmonte les poches anthé- rales. (A. Juss, ) : Des observations nombreuses faites sur les fleurs doubles ou pleines ont conduit les botanistes à poser en principe que la facilité avec laquelle un filet staminal se transforme en béquillon est d'autant. plus grande que le nombre dés étamines est lui-méme plus considérable. Ainsi les RosacéeS - les Malvacées , les Magnoliaeées, les Renonculacées sont les familles où l'on trouvele plus souvent ce phénomène (3): Il a été constaté également que la métamorphose est aidée (1) DC., Syst. végél., t. 1, p. 334. —Ibid., Organ. végét., t! p. 496. (2) Organ. végét., t. 1, p. 513. (3) DC., Mém. fl. doubles, Mém. soe. arc., t. ut, p. 391. ‘ DES MONSTAUOSITÉS. 215 Par la largeur du filet. Ainsi les Renonculacees , dont les Supports anthéraux sont planes , se trouvent bien plas dis- Posées à ces transformations que les Rosacées, dont les filets Sont filiformes. Enfin on a reconnu que, lorsqu'une fleur Présente, dans l'état habituel, plusieurs rangées d'organes måles , ce sont généralement les rangées les plus extérieures (qui sont aussi celles où les filets sont les plus élargis ) qui Ont le plus de tendance à se transformer en béquillons. Le cas le plus simple de la transformation pétaloide est celui dans lequel un androcée formé d’un seul rang d'éta- Mines éprouve la métamorphose et donne naissance à une nouvelle corolle appliquée contre la corolle habituelle. Cette anomalie arrive surtout dans les fleurs gamopétales , par *Xemple dans les Lonicera(1), les Campanula, les Arbutus. Quand les fleurs doubles ne présentent qu'une ou plu- leurs corolles supplémentaires, on les appelle demi-doubles Où semi-doubles. Dans ce cas, il n'y a que les étamines ou Une partie des étamines qui aient subi la transformation , ais ces étamines étaient placées sur plusieurs rangs. Quand les fleurs offrent des pétales assez nombreux , il Y à alors non-seulement métamorphose des étamines , mais encore multiplication de ces organes (2) ; c'est ce qui arrive dans la plupart des Roses doubles, dans les OkKillets , les Anémones, les Pavois. , Enfin, si a ces deux genres d'anomalies se pee la méta- - Morphose des pistils (3) ou leur déformation , les pétales deviennent alors tellement nombreux , qu'ils sont pressés les uns contre les autres et qu'ils remplissent toute la fleur. Ces fleurs ont reçu le nom de pleines (Rubus, Ranunculus). (1) Koning, Bydrag. tot. de Natuurkund , t. 11, p. 237. (1827.) (2) Voy. le chapitre sur les Multiplications. (3) Cette métamorphose est le plus souvent une Chloranthie. 916 DES MONSTRUOSITÉS. La métamorphose des pistils en pétales est beaucoup moins fréquente que celle des étamines. Les pistils ainsi transformés ont été appelés panne, pluche ou peluche pat les jardiniers; M. de Candolle les nomme pétales pistil- laires. — Quand cette métamorphose arrive , le phénoméne a pres que toujours lieu dans le style et le stigmate, c'est-à-dire dans les parties susceptibles de coloration (1). M. de Can- dolle à vn des Anémones Sylvies dont toutes les parties florales avaient conservé l'état normal, et où les pistils seulement étaient convertis en pétales. Cette singulière monstruosité se cultive dans les jardins de la Hollande (2)- M. Engelmann a trouvé les stigmates du Scabiosa ar vensis changés en petits organes pétaloides de couleuf bleue (3). Koning avait déjà signalé une monstruosilé analogue dans le Lonicera Periclymenum (4). D'autres au ? teurs ont reconnu aussi cette transformation dans le Papaver somniferum (Goéthe) , le Nigella arvensis, PHi- biscus Rosa sinensis et le Dianthus caryophyllus ( Jeger). Je l'ai vue moi-méme dans le Saponaria officinalis , Y Alcet rosea , le Campanula Rapunculus et Amygdalus persica. Les fleurs demi-doubles peuvent être fécondes ; les fleur’ doubles le sont rarement, et comme elles manquent, en ge néral, des organes staminaux, il faut admettre, dans le ca de fécondité, que leurs pistils ont été imprégnés par la ma” tière fécondante de quelque autre fleur staminifére du méme pied ou d’un autre individu. Les fleurs pleines se trouvez! (1) DC., Mém. sur les fl. doubles, Mém. soc. arc., t. M p. 389. (2) Loc. cit., p. 390.—Goéthe a cité comme sujet à cette anomalie le Ranunculus asiaticus. (3) De Anthol., p. 26. (4) Bydrag., nat. Wetensch., 2, p. 326, t. ur. DES MONSTRUOSITES. 917 loujours infécondes, parce qu'elles sont privées à la fois des élamines et des pistils normaux. Ce sont de véritables *unuques qui ne montrent de l'éclat qu'aux dépens de leur Postérité. (Linné.) La métamorphose pétaloide arrive tantót sur toutes les fleurs du végétal, tantót sur une partie ; quelquefois sur un Seul rameau ou sur une seule fleur. M. de Candolle a vu Un Marronnier dont une branche isolée portait des fleurs doubles ; toutes les autres étaient simples (1). La transformation en pétales parait due principale- Ment à la trop grande abondance des sucs nutritifs : ce qui explique pourquoi elle naît si souvent dans nos par- lerres, Cependant ce n'est pas seulement dans les terres cul- livées que les sépales, les étamines ou les pistils peuvent Subir cette brillante métamorphose ; le phénomène se pro- duit quelquefois dans nos campagnes , mais le sol doit étre trés fertile. M. Mirbel a rencontré, non loin de Bagnères- de-Bigorre, sur le plateau de Leyris, montagne couverte des Plus riches pâturages, des Anémones, des Renoncules et des Roses, pleines ou doubles comme celles de nos jar- dins (2), M. Salisbury s’est assuré qu’en placant des plantes a leurs simples dans un trés-bon terrain et en leur faisant des ligatures vers le collet on obtient des graines qui donnent des fleurs doubles. M. Leach a, dit-on, opéré sur des Giroflées la castration des fleurs avant leur développe- Ment, et recueilli des graines qui ont produit des fleurs doubles (3). (1) Plant. rar. jard. Genéve , 1829, p. 31. (3) Elém. Phys. végét., t. 1, p. 360. (3) DC., Phys. végét., t. 11, p. 134. DES MONSTRUGSITES, $ IV. — Des métamorphoses en étamines. M. de Candolle a découvert des fleurs de Haricot vulgaire qui présentaient les ailes et quelquefois la caréne converties en élamines (1). Une métamorphose analogue a été remat- quée dans la corolle du Digitalis purpurea ( Chamisso ), € dans le périanthe de PAsphodelus ramosus (A. Juss.) — Les ovelles peuvent aussi se changer en organes stami naux. De méme que la précédente, cette anomalie mest pa À commune ; c'est sans doute à cause de sa rareté que plu Sieurs auteurs, et entre autres Gmelin (2) et Schultz (3): ont été conduits à nier son existence. M. Raper a observé ce phénomène dans ÜEuphorbia p^ lustris (4) et sur le Gentiana campestris (5). Dans ces exem ples, un des ovelles semblait manquer et se trouvait sou la forme d'une anthère. M. Roper a signalé aussi une fleur de Balsamine avec une étamine surnuméraire qui occupa exactement la place d’un ovelle (6). M. Agardh a observé une transformation semblable dan la Jacinthe orientale : il dit avoir vu, dans une fleur dew! pleine de cette jolie Liliacée , les placentas mélamorphost en élamines ; une moitié du fruit renfermait quelquefois de graines et l'autre moitié des anthères (7). (1) Mém. Légumin., p. 44. (2) Nat. abh. Gesellsch. J'ürt., t. 1, p. 303. (3) Nat. leb. pftanz. , t. 1, p. 294, (4) Enum. Euphorb. , p. 53. (5) Linnea, t. 1, p. 457. (6) De Balsam. , p. 17. (1) Organogr., 378. DES MONSTRUOSITES. : 219 M. Schimper a trouvé dans le Saule pleureur les passa- 865 les plus variés des changements de pistils en étamines(1). Dans le Primula acaulis, ila rencontré des loges anthérales à la paroi interne des ovaires (2). D'aprés M. Engelmann, les Campanula persicefolia et lapunculoides présentent quelquefois leur pistil surmonté dun organe semblable à une anthère(3). Il a découvert dans © Cheiranthus Cheirii la moitié d’une enveloppe ovarienne Métlamorphosée en une loge staminale. - M. Gay a reconnu ce genre de transformation dans un Colchicum autumnale. Un des styles était très-allongé et ré- 8uliérement conformé; les deux autres paraissaient rac- Courcis et changés en filaments anthérifères. _ Pai vu moi-même la métamorphose dont il s'agit dans une Inflorescence femelle de Mais. Plusieurs pistils étaient con- Vertis totalement ou partiellement en organes anthéraux. On doit à M. Mohl la connaissance d'une monstruosité *nalogue développée dans le Chamerops humilis. Les trois elles se trouvaient normalement conformés, dans chaque fleur ; ils présentaient leur forme et leur grandeur habi- tuelles ; chacun contenait un ovule parfaitement organisé ; ls ne s'écartaient des ovaires à structure entièrement Normale qu’en ce que, des deux côtés de la suture ven- trale , il régnait dans la longueur un bourrelet jaune ue la section de l'ovaire fit reconnaitre pour une loge an- thérale pleine de pollen et partagée en deux logettes par la Cloison ordinaire (4). | (1) Flora, 1829, p. 422. — On a trouvé aussi cette métamorphose dans les Salia: cinerea, silesiaca et caprea. (Uebers. arb. Gesells. Cult. 1825.) |... (à) Bot. zeit., 1829, p. 421. — Spenner, Fl. Friburg., p. 1061. (3) De Antholysi, p. 26, t. 1, f. 10, 11 et 14. | (4) Métamorph. des anth., Ann. sc. nal., 1837, p. 58. 990 DES MONSTRUOSITES, On pourrait diviser en deux séries les végétaux affectés de la métamorphose des pistils en étamines, ceux dont l0- vaire est formé par une seule feuille carpellaire et ceux qu! offrent plusieurs feuilles. La métamorphose est peut-être moins prononcée dans le second cas que dans le premie" (Mohl ); quand un ovaire à plusieurs feuilles se transforme les éléments foliacés qui le composent montrent constam- ment une tendance à se séparer les uns des autres. (Rape! Schimper. ) Il semble évident que, dans cette transformation, !@ loges de Panthère et la naissance du pollen n'ont aucu® rapport avec la production des ovules ; la matière fécon” dante se développe dans l'intérieur méme de la feuille ova rienne et dans le voisinage de ses bords. (Mohl.) Je dois à M. Seringe la connaissance d'une monstruosilé très-remarquable, qu'il a découverte dans un Passiflor4 holosericea. Le rang extérieur des filaments floraux a pri’ la forme des anthéres des Mélastomées ; ces filets se son! élargis et soudés ; leur ensemble parait comme plissé €" éventail ; les rangs intérieurs restés filiformes sont terminé - par de petites tétes ou par des loges anthérales incomplét€ ment organisées. hii $ V. — Des métamorphoses en pistils. . La transformation des éléments du périanthe en pistils 0" en carpellesa été observée par Steinheil dans le Tulipa Ges- neriana. V'enveloppe florale avait verdi ; ses lobes s'étaient courbés et portaient sur leurs bords des ovules imparfait: M. Gay a cueilli , au mois d'octobre 1824, dans le jardin du Luxembourg , un Crocus nudiflorus, dont le périgon? avait les lobes fendus, laciniés , fimbriés ; en même temps les extrémités découpées avaient pris des caractères et U” DES MONSTRUOSITES. 921 aspect tout à fait stigmatiques. Dans une autre espèce du Même genre, le Crocus odorus, M. Gay a trouvé un lobe obtus, fendu, dont le sommet offrait un phénomène ana- logue au précédent. La transformation paraissait cependant | Moins avancée. La métamorphose pistillaire est bien plus fréquente dans les organes males que dans les organes protecteurs. Une grande analogie existe entre les étamines et les pistils ( R. Brown , Roeper ). On a vu, dans le paragraphe précédent, des parties femelles se transformer en parties máles, voici Maintenant ces dernières qui, à leur tour , vont se changer en pistils et porter des ovules à la place du pollen. La première observation de cette curieuse métamorphose 3 été faite par du Petit-Thouars, sur des fleurs de Semper- vivum tectorum et montanum Crassulacées qui paraissent assez sujettes à cette anomalie, du moins dans le nord de la France et en Angleterre (1). : Dans les fleurs de la Pomme-figue ( Malus apetala) , toutes les étamines se changent aussi en pistils (2); il en est de même des rangs intérieurs de l'androcée dans certains in- lividus de Magnolia fuscata cultivés en serre (3). M. de Candolle a aussi observé cet accident dans les cha- lons males de diverses espéces de Saules, oü quelques-unes des étamines étaient converties en ovelles, et le plus sou- Vent les deux organes males d'une méme fleur formaient Wn fruit semblable au fruit de l'arbre (4). (1) Nouv. bull. phil., 1807, p. 31. — Dict. scienc. nat., t. V, P. 199, | (2) Poiteau et Turpin, 4rbr. fruit., t. XXXVII. i (3) DC., Syst. nal. végét., 1, p. 458. — Voy. une observation Curieuse de ce genre faite par M.: Roeper sur le Tulipa Gesneriana. DC., Organ. végét., t. 1, p. 556.) (4) Organ. végét., t. Y, p. 546. 299 DES MONSTRUOSITÉS. MM. Dunal ct Campdera ont décrit des fleurs de Rumes erispusà sept ovaires, dans lesquelles tousles pistils surnumé- raires occupaient la place des étamines abseutes (1). M. Gay a eu l'occasion d'étudier ce phénoméne et s'est convaincu de la transformation des organes males en femelles. D'aprés M. Spach , le connectif de l'anthére, dans le Tha- lictrum minus, s’allonge quelquefois et revét les caractères et l'aspect du stigmate. Turpin a trés-bien remarqué que , dans certaines inflo- rescences de Mais, il y a des fleurs mâles qui se changent en femelles, tandis que, dans d'autres circonstances , c'est un phénomène inverse qui a lieu. Les fleurs males forment, comme on sait, une panicule (crête) qui s'éléve plus haut que les épis femelles; quand la transformation pistiilaire s'effec tue, on observe tantót un seul épi surnuméraire, et ilse trouve ordinairement vers le sommet de laxe principal ; tantôt il e? existe plusieurs, et dans ce cas chaque rameau porte le sien- Ces épis sont généralement plus petits que les épis normaux Turpin a reconnu que, dans le Pavot à bractées, un asse grand nombre d'étamines, celles qui sont les plus rappro- chées de l'axe floral, se changent quelquefois en pistils sup” plémentaires, Dans cette métamorphose, les filets deviennent des ovaires, et les anthéres se crispent de manière à imiter les stigmates (2). Claude Richard avait trouvé une transformation analo- gue dans l Erica Tetralix. Du Petit-Thouars a observé dans cet état le Papaver orientale ; M. de France, le Papaver somni- ferum; M. Gay, le Bocconia cordata; M. Mirbel, le Pécher ; M. Lindley, un Amaryllis; M. Schimper, le Stachys germani- ca; M. Adolphe Brongniart, le Polemonium ceruleum; M. Se- (1) Monogr. Rumex, p. 50. (2) Ann. Soc. hori. Paris, t. xm, août, 1833. DES MONSTRUOSITES. 223 tinge, le Cucurbita Pepo; M. Guillemin, Euphorbia Esula; u Roper , le Campanula rapunculoides ; M. A. de J ussieu , l Asphodelus ramosus et un Myrte, et M. Robert Brown, le Cheiranthus Cheirii, le Cochlearia armoracia, le Papaver nudicaule, Ye Tropæolum majus ct le Salix oleifolia. M. Mohl a étudié tout récemment le phènomène dont il Vagit, surtout dans la Joubarbe des toits et le Pavot orien- lal, et ses recherches l'ont conduit à une théorie trés-in- Sénieuse et trés-simple sur la nature, le développement et les rapports de l'organe staminal (1). Dans la transformation des étamines en pistils, le filet de l'organe mâle conserve souvent son état habituel ; les "hthéres seules subissent la métamorphose. D’autres fois la transformation se fait à la fois dans le support et dans / Panthère. Quand les étamines sont nombreuses , une partie reste lormale et l'autre partie éprouve la déviation - ce sont celles des rangs les plus intérieurs qui la présentent le plus sou- vent ; celles des rangs extérieurs persistent dans leurs formes "'dinaires. Quelquefois toutes les étamines se convertissent “n méme temps; d'autres fois on trouve plusieurs de ces organes dont Panthère, normale ou déformée, est remplie - moitié d’ovules et moitié de coques de pollen. (1) Métamorph. des anthères. (Ann. scienc. nat., 1837, p. 50.) DES MONSTRUOSITES. B. — Métamorphoses en organes accessoires. S I". — Des métamorphoses en vrilles, La vrille monstrueuse est à l'organe. appendiculaire C que l'enroulement (1) est à l'organe axile. Quand le limbe des feuilles avorte, il arrive quelquefois que le pétiole ou-la nervure médiane s'allonge outre me sure sans s'aplatir, se courbe en spirale et produit une vrille ou une languette vrilliforme. Les stipules sont sujettes à la méme anomalie. Il en est dé méme des pédoncules et des pédicelles. Quand les fleurs s'4* trophient ou avortent, leur support peut prendre de l'ac- croissement et s'enrouler en spirale. On pourrait, en tératologie comme en organograpbie, distinguer deux sortes de vrilles, celles qui résultent de i modification des pétioles ou des organes foliacés ( vrilles p^ tiolaires), et celles qui sont produites par les pédoncules € les pédicelles ( v. pédonculaires). Les premiers seraient ana logues aux vrilles des Lathyrus et les secondes. aux yrilles de la Vigne. Si le pétiole ou le pédoncule sont simples, la Vrille pro” duite se présentera sans ramifications, comme celle des Oro bes ; elle sera, au contraire, plus ou moins ramifiée, comme celle des Cobées, quand ce pétiole ou ce pédoncule auront des divisions. | (1) Foy. Part. 2, liv. 2, part. 2. DES MONSTRUOSITES. § II. — Des métamorphoses en écailles. La déformation en écaille est ordinairement produite par Une atrophie puissante. L'organe parait réduit à une portion de sa substance ou à une partie de son support. Quand les limbes des feuilles (1) ou des pétales (2) ne se développent pas jusqu'à l'état normal, on trouve souvent à *ur place un rudiment du pétiole ou de l'on glet. C'est une Sorte de corps plus ou moins court, aplati, squammiforme, dont la présence est importante , puisqu'elle indique la place de l'organe primitif et le genre d'anomalie qui a dérangé la ‘Ymétrie de l'appareil. j| Les étamines sont trés-sujettes à ce genre de déviation ; ur anthére a disparu, et leur filet semble avoir gagné en , tgeur ce qu'il a perdu en longueur; c'est une petite lan- | Slette ou une véritable écaille (3). Dans les feuilles sessiles, dans les bractées, dans les pé- tales sans onglet et dans les étamines sans filament, l'organe, squ’il a éprouvé une forte atrophie, est représenté par Un appendice plus ou moins court, ordinairement dilaté, uammiforme, mais plus large et plus grand que la lame qui Provient de la métamorphose des supports. (1) Dans les Ruscus; les Asparagus, les Lathr'aa, les feuilles sont i bituellement réduites à de petites écailles membraneuses. M. de tistan a fait voir que dans les Pins ces organes sont représentés aussi 3 des corps membraneux peu apparenis (gaine). Mém. sur la fol. "5 Pins. — DC., Plant. rar. jardin de Genève, pl. 1, 2. 2) Les petits pétales latéraux de cerlaines Polvgalées (Securidaca, Mesperma ) offrent normalement une taille presque microscopique. | . 8) Un développement analogue nous est offert normalement par les | “cailles Staminales des Erodium. 15 296 | DES. MONSTRUOSITES. Dans un petit nombre de cas, la transformation écail- leuse est accompagnée d'un changement de consistance; 65 organes deviennent épais et charnus ou bien secs et scarieu*. J'ai vu un exemple du premier phénomène dans les fleurs d'un Vicia , et un exemple du second dans les feuilles d'un Chrysanthème fascié. Les pétales de la fleur monstrueuse res- semblaient en petit aux écailles larges, épaisses, incolores et pleines de suc qui composent les oignons dans les Lilia- cées. Les feuilles du Chrysanthème rappelaient parfaitemen! ces petits organes, secs, luisants, roussátres, qui recou- vrent et protégent les dar dans un grand nombre de végétaux, § III. — Des métamorphoses en poils. Le changement en poils est trés-yoisin de la transforma tion en écailles. Comme elle, il est produit par une atrophie trés-prononcée ; mais, dans cette dernière, l'organe a con” servé sa densité, sa texture et même sa couleur : trés-rar€ ment il devient plus sec ou plus charnu , tandis que dans P? déformation. en poil la partie s'est toujours desséchée et ? pris une apparence et un caractére tout à fait différents. Les organes filiformes (par exemple, les supports des éta mines) sont ceux qui nous offrent le plus souvent cette mé tamorphose. La partie essentielle s'atrophie et son n pédienl? se convertit en un poil scarieux. La pression peut être regardée comme une des causes p? ductrices du phénomène dont il est question. Que, dans u^ inflorescence ordinairement lache, les fleurs se trouvent ui cidentellement serrées les unes contre les autres, que let évolution soit génée par l'effet de ce rapprochement, les 0 L] DES MONSTRUOSITÉS. 227 Sanes staminaux et les folioles du calice auront à souffrir dans leur évolution ; le filet des uns et le limbe des autres se transformeront, ou en arêtes filiformes et demi-épineuses ou en poils simples ou rameux, susceptibles de produire des Ouppes, des aigrettes, des couronnes, suivant la position “es organes transformés (1). S IV. — Des métamorphoses en piquants: La transformation en piquant est plus profonde que le Changement en poil scarieux. La nature de la partie rudi- Mentaire différe beaucoup plus de la nature de l'organe pri- mitif. Dans la déviation en poil, l'organe s'est desséché ; dans la métamorphose en piquant, il y a non-sculement desséche- Ment, mais encore endurcissement. Une certaine quantité de Matière ligneuse s’est déposée dans les mailles da tissu. Presque tous les organes appendiculaires sont susceptibles de produire des piquants par l'effet d'une atrophie. Ces pi- quants paraissent plus ou moins nombreux suivant les es- Pèces. Les végétaux ordinairement épineux peuvent ainsi aug- menter le nombre de leurs piquants. Les espèces habituelle- Ment privées de ces organes sont capables d'en produire, Placées dans les mémes circonstances. Parmi les organes sujets à cette transformation; il faut (1) Des phénoménes analogues habituels se font remarquer dans la lombreuse tribu des Composées. Le calice est représenté par des arétes “pineuses dans le Cnicus Vaillantii , et par des houppes de poils , Simples dans les Sonchus, rameux. dans les Stehelina et plumeux dans 98 Scorzonera: | p ~ y ^ he à " ext Me -= : " 4 " SS ~~ : = = comen s DRAE epen " " a " n 2 RE se = ð " - T T. 5—— a LTS MÀ ~ - = 998 DES MONSTRUOSITÉS. placer en premiére ligne les pétioles (1) et les limbes des feuilles (2), les stipules (3) et les supports des fleurs (4). - $ V. — Des métamorphoses en glandes. Enfin le changement en glande est le dernier degré de transformation qui peut affecter les organes appendicu- laires ; c'est l'état le plus rapproché de la disparition com- pléte. Dans cette déviation, tout l'organe est réduit à une sorte de corps arrondi , plus ou moins petit, plus ou moins dense; ordinairement couvert d'une humeur mielleuse qui trans- sude de toute sa surface (nectar). Il n'est pas rare de trouver dans des végétaux herma- phrodites des fleurs dans lesquelles les étamines ou les pis tils sont représentés par des corps glanduliformes , soit isolément, ce qui rend ces fleurs unisexuées, soit simultané- ment, ce qui les rend neutres. Dans des cas plus rares, là déformation dont il s'agit atteint les enveloppes sexuelles: M. le professeur Dunal a observé, à Norwich , une fleur de Cistus vaginatus , dans laquelle une partie des étamines s'é- tait transformée , d'un côté, en une sorte de disque hypo (1) Les botanistes regardent les piquants des Astragales adragants comme des.pétioles normalement épineux. : (2) On admet généralement que les spinules habituelles des Berberis sont des feuilles modifiées. (DC., Organ. végét. pl. IJ, fig. 1. (3) Foy., pour l'état normal analogue, les piquants des Pictelid- ( DC., Mém. Légum. , pl. xuvit, ) ; | (4) Dans le Telozys aristata, certains pédicelles, aprés la chute des fleurs, s'allongent, se roidissent, deviennent pointus et forment norma- lement autant de petites aréles épineuses. DES MONSTRUOSITES. 229 ‘Syne glanduleux (1). Pai vu moi-méme plusieurs exemples analogues de remplacement des organes males, par un ren- flement glanduliforme, dans une Rose, dans un Mille-per- luis et dans un Pavot. (1) Consid. org. fleur, p. 44, pl. 1, fig. 2, 3. ARTICLE Il. METAMORPHOSES DES INDIVIDUS. $ Ier, — Des métamorphoses en bourgeons ou des Chloranthies- On a va, dans un des paragraphes précédents, que les dif- férentes parties de l'appareil floral pouvaient se transformer en feuilles, ct que ce phénoméne arrivait rarement isolé; c'est-à-dire dans un seul organe ou dans un seul verticille- Il est des cas où toutes les pièces de la fleur éprouvent à la fois ce changement ; leur ensemble se présente alors sous ^ forme d’une touffe, d’une petite houppe d'organes foliacés plus ou moins compacte. Cette houppe a été comparée paf M. George Dickie à un chou en miniature (a cabbage “ miniature) (1); c'est une fleur métamorphosée en bourgeon. (1) Not. vivip. plants, Ann. nat. hist. , i. y. p. 295, DES MONSTRUOSITES. 231 Cette transformation a été désignée sous le nom de chloran- thie. La métamorphose isolée des éléments de l'appareil flo- tal est donc une chloranthie partielle ou incomplète (1). Linné a rencontré cette anomalie dans une Saxifrage (2) et Haller dans le Campanula Trachelium (3), Bridel l’a ob- Servée dans le Sisymbrium officinale (4), M. Webb dans PE- l'ucastrum canariense (5) et du Petit-Thouars dans le Diplo- taxis tenuifolia (6). M. Seringe a décrit une monstruosité analogue, découverte sur un pied de cette dernière Cruci- fére attaqué par le charbon ; toutes les parties florales étaient COnverties en seize petites folioles distinctes, disposées en 'oseltes, lesquelles avaient conservé leurs places respec- lives (7). Les Crucifères peuvent être rangées au nombre les végétaux les plus sujets à ce genre de monstruosité. Le méme phénomène a été vu par M. de Cando!le dans le Trifolium repens(8) ; par M. Jeger, dans le Tropæolum ma- Jus (9); par M. Henslow, dans le Reseda odorata (10); par 4. Dunal, dans le Verbascum phlomoides (1 1), par M. Valen- lin, dans le Lysimachia Ephemerum (12), et par M. A. de Jussieu , dans le Scrofularia nodosa, le Rhamnus Fran- Jula , le Nicotiana rustica , le Potentilla argentea , le Campa- (1) Voy. le commencement de ce chapitre. (2) Flor. lapp., tab. u, fig. 3. — C'est le Saxifraga foliosa , : Brown; Parry , Voy. app.» p. 275. (3). Enum. , p. 193. (4) Journ. gén., 1791, n° 4. — Muscol. , t. 1, p. 52. (5) Phytogr. Can., pl. vni. see (6) Ess. végét. (7) Bullet. bot. , t. 1, p. p. 6- (8) Organ. végét. , pl. XXVI. (9) Nov. act. acad. nat. cur. Bon. , t. xut, part. 2, p. 811. (10) Trans. of the Cambr. phil. soc., 1833, t. v, part. 1. (11) Consid. org. fleur , p. 25. (12) Flora, 1840, Literaturber, p. 96. 232 DES MONSTRUGSITES. nula pyramidalis, PH edychium angustifolium et le Matri- caria Parthenium. Dans plusieurs des exemples rapportés, la transformation paraissait d'autant plus avancée que les fleurs éiaient plus supérieures. Cette métamorphose est assez ordinaire aux Graminées: aux Joncées et aux Cypéracées. On l'a signalée dans le Dactylis glomerata (Boivin), le Poa bulbosa, le Juncus ar- ticulatus et le Carex muricata. Draparnaud a observé dans le méme état les Poa trivialis, pratensis et angustifolia, l€ Cynosurus cristatus , le Festuca nemoralis, le Juncus muta- bilis et le Carex vulpina. Cassini a fait connaitre un individu de Scabiosa columba- ria, dont les corolles , les étamines et les styles étaient plus ou moins changés en lames de substance herbacée. L'ovaire; au lieu de contenir un ovule, renfermait une sorte de bou- ton, composé d’une petite touffe de pièces foliacées, inégales, irrégulières, informes , insérées sur un corps charnu articulé dans le fond (1). J'ai trouvé, aüx environs de Montpellier, un pied d’Eu- Phorbia segetalis dont les fleurs avaient subi le méme genre de chloranthie. Le phénomène paraissait seulement un peu plus avancé; chaque fleur avait produit un petit rameau grêle, couvert de feuilles allongées, étroites et pointues» qui produisaient un effet assez bizarre au milieu des brac= tées courtes, larges et obtuses de la plante; c'était un com- mencement de prolification (2). Dans les végétaux formés d'un seul bourgeon trés-gro$ (Agave, Aloe, Eucomis), les chloranthies produisent un siu gulier effet. Je dois à lobligcance de mon ami, M. Delile, (1) Obs. sur une monstr. (Bull. scienc., mai 1821, p. 78.--Opuse- phyt. , 1.11, p. 549.) (2) Foy. l'article sur les Multiplications des individus élémentaires: DES MONSTRUOSITES. 233 Une inflorescence de Furcrea gigantea, dans laquelle pres- Tue toutes les fleurs sont transformées en bourgeons plus ou moins développés. Chacun de ces bourgeons est exactément Organisé en petit comme toute la plante mère ; de manière que la grappe florale présente un assemblage régulier de Jeunes Furcrza. | La situation des fleurs sur les axes peut exercer une Srande influence sur le développement des chloranthies. ans plusieurs végétaux , quand les grappes axillaires de- Viennent accidentellement terminales, les diverses piéces de l'appareil floral sont sujettes à la transformation foliacée ; C'est ce qu i a étéobservé plusieurs fois sur des rameaüx de Laurier des Canaries, par MM. Berthelot et Webb, dans *$ bois de Ténériffe, et par ce dernier dans l'ile de Ma- ` dère, | La psylle des Jones, lorsqu'elle pique la sommité d'une Plante, fait naitre à la place des fleurs une touffe d'écailles foliacées et imbriquées , dont l’ensemble ne diffère pas du Vrai bourgeon (1). Le développement de certains Æcidium sur les différentes Pièces de l'appareil floral peut aussi déterminer la mons- truosité qui nous occupe. La chloranthie produite par des insectes et des ecidium, u développée sans cause appréciable, a été observée un Stand nombre de fois dans les chatons des Sapins, des Chê- Nes et des Saules. Les nosologistes ont désigné cet accident Sous le nom de squammation (2). La petite touffe d'organes Oliacás qui est produite dans celte anomalie est comparée Par les anciens auteurs à une rose en miniature , dont tous (1) Foy., par exemple, le Juncus uliginosus £ luxurians. (St-Am., lor, agen. , p. 148. (2) Ré, Nosol. végét. , p. 339. 934 DES MONSTRUOSITES. les éléments ont revétu la couleur verte ( Rosa salicina). Quand le chaton est composé d'un grand nombre de fleurs et qu'elles ont toutes subi la transformation dont il s'agit » l'inflorescence augmente de volume, devient de plus en plus compacte (1). § II. — Des métamorphoses en fleurs et en fruits. M. Jeger a observé, dans le royaume de Wurtemberg, de branches de Pin ( Pinus sylvestris) qui portaient dés cones ramassés en nombre trés-considérable ; l’une d'elles en avait 52 et l'autre 72 (2). Duhamel avait déjà cité des branches du méme arbre 4 24 et 32 cônes. Ces fruits étaient rangés autour des rameau* comme des faisceaux de feuilles. Il parait que, dans ces exemples, les bourgeons propre ment dits, au lieu de suivre les phases ordinaires de leu! évolution, se sont transformés en bourgeons-fleurs, et que. ces fleurs ont fructifié. | Les bourgeons et les fleurs des différentes plantes 5€. changent quelquefois en corps reproducteurs. Il se déve’ loppe à leur place des espèces de fruits composés d'une matiére solide ou écailleuse , qui peuvent avoir une végéta" tion à part, c'est-à-dire que, détachés de la plante mere» (i) oy., sur les fausses Roses, Journ. phys., t. 1, p. 489.7 Grassius (de excrescentiis floriformibus Salicum ), Ephém. nat. cull déc. 1, ann. 3, p. 410 et 478. — Vollgnad (de Rosa salignâ), ant. et 7, p. 343, fig. 5. — Wincler (de Rosis salignis), p. 152.— Albrecht (de Salicum rosis fictis ), 4ct. nat. cur., vol. 1x , p. 187. — Sehroede!': Berl. Samml. , 2 band. , p. 407. (2) Bibl. univ. , juillet, 1829, p. 249, DES MONSTRUOSITES. |. 235 ils se développent à la manière des graines proprement dites, et produisent un végétal parfaitement semblable a celui d’où ils tirent. leur origine. On a désigné ces corps léproducteurs sous les noms de hulbilles et de caïeux (1). Les Plantes qui présentent cette métamorphose ont été dites vi- “pares (2). Les bulbilles qui se montrent à la place des bourgeons or- dinaires ont été nommés propagines ; on les observe dans Plusieurs Liliacées , tantôt par monstruosité ( Hemerocallis Rava) , tantôt dans l’état habituel ( Lilium bulbiferum). "aprés les expériences de Gesner et de Tournefort, répé- tées pardu Petit-Thouarset de Lens, on peut faire naitre aux aisselles des feuilles du Lis blanc, des péricarpes, des graines Où des bulbilles, en quelque sorte à volonté; il suffit de Sparer les tiges de leurs bulbes un peu avantla floraison , et de les suspendre la téte en bas, dans un milieu plus ou moins humide (3). | Dans les Aulx, les bulbilles naissent ordinairement à la Partie inférieure de l'ombelle; M. de Candolle parle d'un Med dans lequel ils s'étaient formés au sommet et à la base de la hampe (4). -. | Dans certains végétaux, lorsque les rameaux inférieurs (1) Meisner, Monogr. Polygon., p.20. — (2) On confond assez habituellement sous ce nom deux autres phé- Omenes qui méritent d’étre distingués. Dans. un cas, un ou plusieurs Surgeons se développent à la place des organes sexuels; ce sont des ülbilles qui restent fixés a la plante, et qui s'y conduisent à la manière êS bourgeons proprement dits; les enveloppes florales conservent “urs formes et leur type habituels; voy. le chap. précédent. D'autres ls les enveloppes florales s’accroissent outre mesure et prennent l'as- Dect foliacé; en méme temps les organes sexuels s'atrophient. Foy. le ap. sur la Métamorphose foliacée. (3) Ann. Soc. hort. ,1. 1v, p. 36 et t. vi, p. 34- (4) Organ. végét., pl. XLVI. 236 DES MONSTRUOSITES. - sont enterrés, les bourgeons se changent en bulbilles ; ces nouveaux corps sont analogues à ceux qui existent norma- lement dans les Saxifrages granulée et porte-bulbe. Linné a observé , en Laponie, que les feuilles inférieures du Polygonum Bistorta se métamorphosaient, au printemps» en petits bulbes (1). Tournefort avait déjà remarqué cette transformation ; il avait vu chacun de ces bulbilles donne! naissance à de petites feuilles (2). | Les bulbilles produits par la transformation des fleurs ont cle nommés bacilli. On sait depuis longtemps que ces petits organes se rencontrent assez fréquemment dans les inflo- rescences de l'Ornithogalum viviparum, de V Allium carina- tum et de plusieurs autres Aulx. On a cité aussi des Crinum el des Amaryllis. M. A. Richard a analysé plusieurs de ces bulbilles , ele | montré que ce n'étaient que des dilatations anomales, des E hypertrophies des véritables graines. .. De méme que des bourgeons adventifs peuvent se former accidentellement sur les divers organes appendiculaires, de méme aussi il peut y naitre des bulbilles. Hedwig, ayant mis sous presse des feuilles de Fritillaire impériale, vits’élever de leur surface une multitude de petits corps arrondis, doués de la vertu de perpétuer la plante. M. Poiteau donna naissance au méme phénomène, € comprimant entre deux feuilles de papier des parties folia- cées d'Ornithogalum, thyrsoides; il remarqua , au bout d’une vingtaine de jours, qu'il s'était produit à la surface et sur les bords un grand nombre de petites éminence bulbiformes. Turpin reconnut que ces éminences élaient des bourgeons adventifs analogues aux bulbilles (3): (1) Flor. lapp. , p. 116. (2) Inst., p. 511, tab. 291, fig. GHI, KIM. (3) Rapp. à l'Inst., par MM. Cassini et Mirbel , nn. scienc. nal, DES MONSTRUOSITES. 237 M. Naudin a observé un Drosera intermedia offrant sur : Une de ses feuilles deux autres petits Droséras en miniature, nt l’un était long d'environ 13 millimètres et l'autre un Peu plus petit. Sous l'un des deux pieds, la feuille n'avait "Prouvé aucune altération , sous l'autre elle avait pris une Couleur noirâtre, Cassini avait déjà observé que les feuilles du Cresson des Prés ont souvent des bulbilles, situés solitairement à la àse de la surface supérieure de chaque foliole, rarement u milieu de cette face (4). i Des productions semblables se font voir quelquefois dans € Malaxis paludosa. Les feuilles de cette Orchidée sont ru- Sueuses et comme frangées à lextrémité. Cette appa- Tence est causée par de petits germes bulbeux qui sortent ù bord et vers le sommet de la feuille. Ces bulbilles sont verts sur les feuilles exposées à la lumière, et tout à fait ancs sur les feuilles inférieures ensevelies dans la tourbe M dans la mousse (2). On sait que dans les crénelures des illes du Bryophyllum calycinum se trouvent normalement * petits points noiratres, qui se développent comme de Vrais bourgeons, quand on détache une feuille et qu'on la Mace sur un sol humide (3). Il faut expliquer aussi, par l'apparition des bourgeons “dventifs, cette singulière monstruosité de feuille d? Alche- tile, figurée par Weinmann. Elle offre dans les sinus de Ra p. 44. — Turpin, Mém. ann. scienc. nat., t. XXII, p. 5, d , (d (1) Obs. sur les feuilles du Cardamine pratensis , Opusc. phyt. , “ll, p. 340, — Des bourgeons se sont aussi développés sur des morceaux * feuilles de Theophrastus, enfoncés dans la terre par M. Neumann. (2) Henslow, sur les feuilles du M. paludosa, Ann. scienc. nat., ` “XIX, p. 103, pl. iv, B. (3) DC., Organ. véget., pl. xx, fig. 1, 2. 238 DES MONSTRUOSITÉS. - sa périphérie une série de petits organes foliacés disposés en rayonnant (1). | L'excés de nourriture semble influer beaucoup sur la naissance des bulbilles. Draparnaud a observé que le Poa bulbosa est vivipare dans les années humides, et cesse de l'étre dans les années de sécheresse. Dans certaines plantes; les bulbilles , au lieu de se séparer du végétal comme le graines , se développent sur place, à la manière des bout- geons. Il se forme alors des touffes foliacées qui se mélent aux véritables fleurs, et qui donnent aux inflorescences u” aspect tout à fait bizarre. Le bulbille est devenu alors u” bourgeon proprement dit ; ce développement anormal e assez commun dans les Graminées et les Cypéracées ditë bulbifères , qui deviennent alors chloranthiées ou vivipares Quand le développement se continue et que les axes s'al- longent , il en résulte une véritable prolification (2). J'ai déjà parlé, dans mon Introduction (3) , des points nombreux de ressemblance qui existent entré les bourgeon’ et les fleurs ou les fruits, c'est-à-dire entre les différents étais des individus élémentaires. Tous les faits rapportés dans ct deux derniers paragraphes confirment la vérité de cette rel? tion. Le grand naturaliste dont le génie a plané sur toutes le Parties de la science , Linné avait reconnu, il y a longtemp* avec Jungius et Wolf, Pextréme analogie des bourgeons e des fleurs, Il est revenu dans plusieurs de ses ouvrages (Uu sur cette idée féconde qui a été présentée de nos jours: comme nouvelle, et dont MM. de Gingens et Raspail ont démontré avec raison l'ancienneté (5). (1) Phytanth., n^ 36, d. (Alchemilla minima. ) (2) Foy. le chapitre sur les Multiplications des individus élémentaire? (3) Page 8. (4) Amen. acad., t. n, p. 185. — Phil. bot., p. 305. (5) Préface de la trad. de Goéthe, — Phys. végét. introd., p. XI t i LIVRE III. ‘DES MONSTRUOSITÉS DE DISPOSITION. On a coutume, en botanique, de désigner la position des organes sous le nom d'insertion. Cette dénomination Semble supposer que tous les organes primitivement distincts Binns desantres ontiété implantés sur leur support, comme Une épingle dans une pelote, qu'on me permette cette com- Paraison < ce qui n'est pas rigoureusement exact. Les orga- Nes n'étant pas toujours distincts jusqu’a leur base, on à legardé le point où ils se montrent tout à fait libres comme © point de leur insertion, ou si l'on veut, comme leur véri» lable base. Corréa deSerraet M. de Candolle ont fait remarquer que, 940 DES MONSTRUOSITÉS. dans cette manière d'analyser, on procédait toujours de haut en bas, c'est-à-dire en sens inverse de la nature. Celle-ci nous présente la pl upart des organes végétaux réunis dans la tige ou le pédoncule. Peu à peu chacun d'eux sé sépare du faisceau commun sous divers modes et dans dif- férentes proportions, par suite du développement général, de sorte que ce que l'on nomme insertion eüt été à plus juste titre désigné sous le nom d’exsertion, ct ce seul changement de nom, ainsi que le fait trés-bien ressortir M. de Candolle, eüt évité une foule d'erreurs dans l'organographie (1). Les organes se trouvant originairement unis, fondus en- semble , si Pon peut s'exprimer ainsi , on concoit facilement que, lorsqu'un obstacle quelconque à la désunion vient agit sur eux au moment de leur évolution , cette désunion peut être arrêtée et l'organe doit se montrer à nos yeux saps avoir sa liberté qui appartient à son plan de symétrie. M. de Candolle est un des premiers physiologistes qui aient tourné leur attention vers le phénoméne dont il s'agit; il l'a étudié dans l'état habituel et dans l'état accidentel et l'a désigné sous les noms de soudure > Q'adherence et de cohérence suivant le caractére dont il est revêtu. Turpin l'a nommé collage physiologique ; d’autres se sont servis des mots union, jonction, greffe. Les expressions employées paf M. de Candolle ont été généralement consacrées par l'usage: Cependant ces expressions ne présentent pas une idée très- claire du phénoméne; elles semblent indiquer que toujour les organes, primitivement distincts, se sont greffés plus tard comme deux fœtus dans le sein de léur mère, tandis que c’est souvent un défaut de séparation qui a eu lieu. | On pourrait démontrer , d'une manière évidente , que’ l'union des organes est , dans cerlaines circonstances, an^ (1) Théor. élém., éd. 1, § 83. — Organ. végét., x. DES MONSTRUOSITÉS. 941 térieure à leur séparation , et que bien des parties dites sou- dées sont des parties où la désunion n'a pas eu lieu. On Sait que les feuilles des végétaux ont, en général, une ten- dance à se séparer les unes des autres et quelquefois méme à se découper. A mesure que l'individu se rapproche du Moment de sa reproduction , il épuise peu à peu l'énergie qui lui est propre, il s’affaiblit, il use sa vie. Ses efforts pour ]a division deviennent moins sensibles, et fort souvent les feuilles qui naissent au sommet de l'axe demeurent pres- Que entières quand les autres sont découpées (plusieurs Mo- lénes) , ou connées quand elles sont distinctes (plusieurs Chèvrefeuilles). Mais les feuilles les plus élevées, développées les dernières, ne different des autres que parce qu'elles ont éprouvé des arrêts dans leur évolution ; elles sont plus jeu- Nes, si l’on peut parler ainsi, et cela est si vrai, que, si, par Une circonstance quelconque, la plante, au lieu de mettre un lerme asa végétation et de fleurir, continuait a se dévelop- Per, les feuilles entiéres et connées dont nous parlons se Sépareraient et se découperaient comme les feuilles les Moins hautes. La séparation de ces organes étant due, d’a- Près ce qui vient d’être dit, à un développement plus avancé, Peut donc être philosophiquement considérée comme posté- eure à leur réunion (1). Comme il existe une trés-grande analogie entre la nature des parties florales et celle des organes foliacés, j'appliquerai le mame raisonnement aux différents verticilles de la fleur, * je dirai qu'il est plus exact de voir dans uu calice polysé- Pale un calice gamosépale dessoudé que de regarder len- Semble gamosépale comme un verticille polysépale à folioles 'éunies. Les corolles polypétales et gamopétales, les andro- "éespolyandres et monadelphes, pourraient être envisagés (1) Moquin, Zrrég. de la corolle, p. 8. 16 242 DES MONSTRUOSITÉS. sous le méme point de vue. Aussi serait-il peut-étre plus convenable d'adopter, avec M. Turpin, le mot de dessoudur? pour désigner les organes entièrement distincts, que d'em- ployer, avec M. de Candolle, celui d’adhérence pour signaler ceux qui sont unis (1). Cependant il faut dire que, dans un certain nombre decas, l'évolution est accompagnée de véritables greffes ; on voit les organes, d'abord distincts, se porter les uns vers les autres et finir par souder à différents degrés. Ainsi, paf exemple, les pédoncules des Lonicera montrent généralement deux fleurs et plus tard deux fruits. Dans plusieurs espèces ceux-ci se rapprochent en grossissant et se confondent- €? un seul fruit bilobé. Ce phénoméne arrive accidentellement dans les Cerises , les Pommes, les Prunes ; on le remarque aussi dans des pétales, dans des feuilles et dans des axes, Tous ces exemples ont fait supposer à plusieurs organographes que, dans le cas des soudures congéniales, l'union s’est opérée à une époque oü les organes étaient infiniment petits et inappréciables pour nos sens. Je me suis livré à de nombreuses recherches d'organo- génie , et j'ai constaté qu'il y avait, en effet, des parties distinctes et des parties soudées à toutes les époques visibles de leur existence, et qu'il est, par conséquent, impossible de ranger sous une méme loi tous les faits normaux ou ano!’ maux relatifs aux unions. Quoi qu'il en soit du reste, il n'en est pas moins vrai que des parties qui devraient étre libres ou distinctes peu” vent se présenter accidentellement unies ou accolées ; c'est là le phénomène que j'ai désigné sous le nom de soudure. Une seconde anomalie tout à fait inverse nous est offerte dans d'autres circonstances. Certains organes se divisen! (1) Icon. véget., p. 18, note. LA " [41 € DES MONSTRUOSITES. 248 avec excès ou dépassent les limites normales de leur sépara- tion. Ainsi, par exemple , une feuille qui devrait étre lan- C olée se partage en deux, en trois lobes plus ou moins distincts ; une corolle qui devrait étre gamopétale s'épa- Rouit avec tous ses pétales désunis. Je désignerai cette autre anomalie sous le nom de disjonction. Les disjonetions et les soudures sont dés anomalies de con- Rexion ; il existe un troisième genre de monstruosité qui tient uniquement à un changement dans la situation des Parties d'un méme organe ou dans l'arrangement des or- Sanes d'un méme appareil. Je donnerai à cette autre ano- Malie le nom de déplacement. Il y a donc trois sortes de monstruosités de disposition : {°celles par défaut de séparation ou excès d'union (soudures); = celles par excès de séparation ou défaut d'union (disjonc- tions); 3° et celles par changement de situation ( déplace- Dents), CHAPITRE Ie, DES MONSTRUOSITES PAR DEFAUT DE SEPARATION OU PAR EXCÈS D'UNION, C'EST-A-DIRE DES SOUDURES. Les anomalies par continuité de parties ordinairement dis jointes sont des phénomènes assez fréquents. Il n’est peut- ètre pas de monstruosité très-grave qui ne présente des unions accidentelles à différents degrés. Le défaut de loco motilité dans le végétal et la multiplicité de ses organes €? sont, sans doute, les causes principales. Dans beaucoup de cas, ces alliances insolites coexistent avec des atrophies ou des hypertrophies; mais, dans d’au- tres, elles peuvent arriver isolément et se montrer indépe! dantes des arréts ou des excés de développement; de ma- DES MONSTRUOSITES. 245 hiére que les organes ne different de leur état habituel que par un défaut de liberté plus ou moins grand. Les soudures, comme toutes les déviations organiques, Sont réductibles à des lois certaines et précises. On peut d'abord en reconnaitre de deux sortes , celles n Sont incomplètes et celles qui sont complètes. Les soudures incomplètes ont lieu toutes les fois que des Unions anomales s’effectuent entre une partie des organes et non pas sur leur totalité : ce sont les cas les plus fré- quents. Ainsi certains pétales naissent collés, quelquefois Par un point ou par une surface plus ou moins large, à d’au- tres pétales, à des sépales ou à des étamines. Les organes males se montrent unis, soitentre eux, soit avec lesorganes Voisins, tantôt par les filets ou une partie des filets, tantôt par les s, Les soudures sont complètes quand elles ont ho sur toute l'étendue ou presque toute l'étendue de l'organe ou de appareil. Je dis presque toute l'étendue, parce que la forme générale des organes étant ovalaire quand ils sont aplatis et ovoide quand ils sont renflés, il est impossible, lorsqu'ils se portent les uns vers les autres (excepté dans un Petit nombre de cas), qu'il ny ait pas quelque partie de leur extrémité inférieure et surtout de leur sommet, qui Wait pas conservé sa liberté. On trouve des pétales qui se tiennent à la fois par leur on- Sle et par leur limbe, et des étamines qui sont collées par - le filet et par l'anthére. Dans quelques cas, la fusion est si intime, qu’ on ne dé- couvre plus de trace des organes primitifs (1). C'est un mode de jonction analogue , dans la tératologie des animaux , qui (1) Voyez-en un exemple entre deux feuilles de Salvia /^ erbenaea. (Ann, seienc. nal., 3 sér., t. 4, p. 142, tab. 5, fig. 1.) 246 DES MONSTRUOSITES, a été désigné par M. Breschet sous lé nom de symphyste. Les soudures ont lieu tantôt entre les parties des indi- vidus élémentaires (organes) ou entre les individus élémen- taires eux-mêmes (bourgeons, fleurs, fruits), tantôt entre les parties axiles (tiges , branches, rameaux). ARTICLE I. SOUDURES ENTRE LES ORGANES APPENDICULAIRES, On peut diviser en deux sections les soudures des organes àppendiculaires , celles qui arrivent entre des parties ou des verticilles similaires, par exemple, les unions des étamines entre elles et des androcées entre eux, et les soudures qui S'établissent entre des organes ou des verticilles dissembla- bles, par exemple, les jonctions entre un pétale et une éta- mine ou entre une corolle et un androcée. M. de Candolle a donné au premier phénomene le nom de Cohérence et au second celui d’adhérence. DES MONSTRUGSITES, § Ier, — Des soudures entre des organes ou des verticilles similaires; ou des Cohérences. Il est reconnu depüis longtemps que, toutes choses égales ^. d'ailleurs, les réunions d'organes ou de portions d'organes sont d'autant plus intimes et d'autant plus fréquentes que : ces organes ou portions d'organes se ressemblent davantage - par leur nature et par leur position. Or, comme les parties homologues sont nombreuses, dans l'étre végétal, et qu’elles répètent avec exactitude les mêmes conditions de structure et d’exsertion, on peut dire, à priori, que les cohérence - doivent constituer des anomalies assez communes. * FrurLLES, Les feuilles sont peut-être les organes qui con” tractent le plus souvent des cohérences. Le fameux Fraisier monophylle de Duchesne parait de- voir son organisation anomale à la soudure de ses trois fo- lioles; ce qui parait prouvé par le vice de conformation de ses nervures, M. de Candolle a représenté deux feuilles de Justicia o2) phylla soudées (1) ensemble dans presque toute leur lon- gueur; ce célèbre botaniste en a figuré deux autres de Laurus nobilis, dont une partie est restée libre, tandis qu? l'autre est cohérente (2). Bonnet avait observé une semblable soudure dans celles du Grenadier (3), et Schlotterbecc dans celles du Lilas (4): (1) Organ. végét. , pl. xvi, fig. 3. (2) Loc. cit. , pl. XLVI, fig. 2. (3) Rech. us. feuill. , pl. XX1, fig. 2. (4) Sched., de Monstr. plant., Act. Helvet., t. It, pl. 1, fig. 9. om mo Le o o DES MOASTRUOSITES. 20 D’autres fois le phénomène est trés-borné ; il n'agit que sur Une faible partie des organes. | Dans les feuilles lobées ou composées, la cohérence peut ‘établir entre les lobes ou les folioles. Si ceux-ci se soudent n entier, le limbe devient entier ou simple, comme cela arrive quelquefois dans le Noyer (1) et dans le Gleditsia (2). Si le phénoméne est incomplet, la figure de ce limbe se Moutrera plus ou moins bizarre. Bonneta fait connaitre des feuilles de Framboisier à lobes cohérents à différents de- Srés(3). — | Quand les feuilles s’unissent, c'est ordinairement par la partie inférieure , et le sommet demeure libre. Aussi, dans la plupart des exemples cités, les pétioles et les on- Slets se trouvent presque toujours cohérents. Dans quel- Ges cas cependant, le collage s'est effectué en sens in- Verse ; ce sont les parties supérieures qui se tiennent et {s parties inférieures qui restent séparées. Charles Bonnet observé deux folioles de Haricot soudées sans que les pé- Holes respectifs participassent à cette union. Ils étaient distincts et séparés l’un de l'autre par une assez grande distance (4). Quelquefois l'union s'établit par la base et par le som- Met, la portion moyenne restant libre; il en résulte des vides, des lacunes, plus ou moins considérables. Qu'on suppose une feuille lobée ou composée, dont les lobes ou les folioles s’ani- Talent par le sommet , on aura un limbe anomal percé d'un Stand nombre d'ouvertures (folium fenestratum) : les Gle- litsig nous en offrent quelquefois des exemples remar- (1) Bonnet, loc. cit. , p. 195. | — (3) DC., Mém. Légum., pl. 1.— Macaire, Bibl. univ., t XVII, D: 149, pl. rr. (3) Loc. cit., pl. xxiv, fig. 2, 3. (4) Loe. cit. , pl. xxai, fig. 1. 250. DES MONSTRUOSIEES. quables. On sait que des lacunes analogues se manifesten! habituellement dans le Dracontium pertusum. Quand les soudures sont extrémes, il ne reste plus de lobes , de traces qui indiquent les organes primitifs; mais la distribution des nervures pourra toujours servir de guide pour apprécier le phénoméne. Ainsi, par exemple, si, dans unc feuille palmée à 3 ou 5 folioles, ceux-ci se greffent par leurs bords, l’ensemble pourra représenter un limbe unique; mais ce limbe sera pourvu de 3 ou 5 nervures: Presque toutes les feuilles cohérentes se tiennent pa} les bords. I] est cependant des exemples où l’union 507 père face à face. Bonnet a trouvé deux feuilles de Laitue collées , pres de leurs bases, au moyen des deux nervures princ pales, de maniére à se regarder par les deux faces de des sous (1). | M. His a communiqué a Turpin deux feuilles d'Oran- ger, l'une grande, l'autre petite, qui s'étaient greffées aus?! par les deux nervures médianes, mais en sens contraire d% feuilles de Laitue. Les deux surfaces supérieures étain! tournées l'une contre l'autre; les pétioles se tenaient dan? toute leur étendue et le bourgeon terminal du rameau ava" avorté. Enfin M. Tarpin a observé lui-même deux feuilles d'4 gave americana, cohérentes dos à ventre, c'est-à-dire fac? inférieure ou extérieure contre face supérieure ou int rieure (2). Quand les feuilles sont verticillées et nombreuses , si elles se greffent par les bords, elles pourront produire autour de (1) Loc. cit. , p. 309. (2) Mém. sur la greffe. (Ann. scienc. nat. , t. xxiv, p. 836.) y )^ DES MONSTRUOSITES. - 251 l'axe une sorte’ d’anneau foliacé, analogue à la collerette habituelle du Séséli Hippomaratre. : Quand le verticille est réduit à deux feuilles opposées, si l'union s'effectue entre ces dernières , ce sera base à base et l'ensemble pourra réaliser l’état normal des feuilles connées du Crassula perfossa ou du Sylphium perfoliatum. Les Stipules peuvent aussi se souder d'aprés divers _ Systémes. Elles deviennent cohérentes entre la feuille et à tige et forment une Stipule solitaire intra-axillaire. D’autres fois elles se greffent en dehors de Paisselle, de Manière à produire une stipule unique, échanerée, op- posée à Ja feuille. Enfin, dans certains cas, elles s'unissent *ütre elles des deux côtés de l'axe, de telle sorte qu'au lieu de quatre-il semble n'en exister que deux communes aux deux feuilles (4). Sépazes. On trouve quelquefois des sépales qui présen- tent le phénomène de la cohérence, et le calice devient ac- “dentellement gamosépale. Dufresne a vu deux sépales de Fraisier se coller dans toute ur longueur, de manière que le calice semblait n'avoir Que quatre folioles (2). Dans les inflorescences à fleurs trés-rapprochées, les ver- licilles calicinaux sont pressés et souvent disposés à con- lracter divers degrés de cohérence. PéraLEs. On voit des corolles habituellement poly pétales. u à pétales distincts, qui, sous certaines influences, se dé- Veloppent avec tous ces organes complétement ou incomplé- lement unis. Linné a rapporté, il y a longtemps, que la Saponaire. (1) Toutes ces anomalies ont des représentants analogues ou sem- lables dans l'état habituel. (2) Hist. des frais., Paris, 1766, p. 26. 952 DES MONSTRUOSITÉS. d'Angleterre devenait quelquefois anomalement gamopé- tale (1). M. Seringe m'a communiqué le dessin d’une Rosé monstrueuse cueillie sur un hybride du Rosier Bengale commun et du Bengale cerise; les pétales étaient unis €? tube allongé; leurs parties supérieures, restées libres, se rér fléchissaient en dehors et formaient une sorte de limbe irté gulier. M. Jæger a décrit une autre anomalie du même genre; découverte dans un Clematis viticella, dans laquelle le ver” ticille représentait assez fidélement une petite cloche ave deux lévres (2). J'ai eu Poccasion de voir et d'étudier tous les gente possibles d’alliance entre les éléments des corolles el de trouver à l'état monstrueux la plupart des mode d'union de l'ordre habituel. Le cas le plus commun est celui dans lequel les pétales se tiennent par la base D'autres sont unis par le sommet , d'autres par le somme! et par la base (3). Quand les pétales se soudent ensemble, on reconnait f cilement la trace de chacun d'eux , soit par la dispositio” des nervures médianes, soit parce que la soudure est rat ment assez compléte pour qu'une partie ne soit pas restée Ir bre vers le sommet des organes , oü elle forme, suivan! son étendue , un lobe ou une dent. : Examines. Les étamines se soudent entre elles, tantôt * moitié, au tiers, au quart, tantôt complétement. Elles DP! sentent un seul corps ou bien plusieurs faisceaux. Elles $ 1° nissent quelquefois seulement par les filets ou par les an théres (Goéthe). | (1) Phil. bot. , 125. (2) Nov. act. Bonn., xiv, 641. (3) Le premier phénoméne ennormal dans les Wéroniques, le second dans la Vigne et le troisième dans plusieurs Raiponces. DES MOXSTRUOSITÉS. 253 Les filets sont cohérents à tous les degrés ; les uns se lien- nent par la base , ceux-ci jusqu'au milieu, ceux-là jusqu'au Sommet. D’autres fois les supports sont libres et les anthéres cohérentes; ces dernières peuvent méme, si le phénomène St général, former une sorte d’anneau plus ou moins ana- gue à Panneau normal des Composées. Dans certains cas, toutes les parties de l’organe ont sup- Porté l'union ; Panthère et le filet sont cohérents. Toutes ces dispositions répètent, avec plus ou moins Vexactitude , la structure habituelle de certains genres ou de certaines famiiles. C'est surtout dans leur comparaison Won doit reconnaitre quels secours mutuels peuvent se prê- ter les faits normaux et les faits accidentels, la morpholo- Sie et la tératologie. Pisris. Les unions entre Pistils sont assez communes; la Position centrale de ces organes les expose plus que les au- tres à contracter des alliances insolites. Ils s'unissent, tan- tt par l'enveloppe ovarienne toute seule ,: tantôt par cette *hveloppe et par le style, tantôt par cette enveloppe, par le Style et par le stigmate. M. Robert Brown a vu des étamines de Cheiranthus Cheirii, transformées en pistils , se souder ensemble de maniére à for- Mer une sorte de gaine autour du pistil ordinaire. La coupe transversale présentait, outre les deux loges centrales, au- lànt de loges, sur un rang extérieur, qu'il y avait d'anthéres Onverties en ovelles. Le méme fait a été observé, par M. Roper , sur une fleur de Campanula rapunculoides. Dans ce cas, comme dans le Précédent, l'organe staminal avait augmenté de volume et 3 soudure s'était opérée avec la transformation. DES MONSTRUOSITÉS. § IT. — Des soudures entre des organes ou des verticillés dissemblables, ou des A dhérences. Les soudures entre des éléments ou des ensembles orga" niques différents sont moins communes que celles qui s'el- fectuent entre les organes homologues. Il y a une sort - d'affinité élective entre les diverses parties de ces dernier’ | qui ne saurait exister entre les organes dissemblables. L'hé- ~ térogénéité de deux systèmes , leur direction quelquefo# différente, leur position souvent éloignée, sont auta)! Wobstacles qui s’opposent aux alliances anomales. Je vais indiquer sommairement les principaux genre? d'adhérences monstrueuses qui peuvent arriver. On rencontre d'abord cette anomalie entre les feuilles € les bractées. J'en ai observé un exemple trés-curieux da! un Narcisse des poétes. Sa bractée scarieuse était soudée pa” le dos avec la face supérieure d'une feuille. Cette unio? avait arrêté la croissance de la hampe, et celle-ci sé trouvait à demi atrophiée. ` Viennent aprés les adhérences des bractées et des S pales. J'ai eu l'occasion d'en voir un exemple remarquable dans un Caucalis leptophylla ; une partie des involucelles p” lyphylles se trouvait collée à la face inférieure de plusieur? petites fleurs. Nous avons ensuite les adhérences des différentes parties del'appareil floral, parmilesquellesil faut citer premièrement l'union des sépales et des pétales.Je ne connaisqu'un seul fait de cette anomalie : c'estun Geranium nodosum , dans lequel un pétale s'était dévié de sa situation normale et collé par le dos de sa partie inférieure à une des folioles du calice: DES MONSTRUOSITES. 255 l'union des pétales et des étamines est moins rare , sans doute, à cause des affinités de structure qui se trouvent ntre la corolle et l'androcée. Cassini a décrit une mons- truosité de Centaurea collina , dans laquelle deux des cinq filets staminaux étaient greffés à la corolle, depuis la base du tube jusqu'au sommet, les trois autres filets demeurant libres (4), Les étamines peuvent aussi s’unir avec les pistils et pro- duire ainsi des fleurs gynandres anomales ; je crois en avoir YU un exemple dans une fleur de Scabieuse prolifère. Quelquefois ce sont des organes plus ou moins éloignés ês uns des autres, qui s'unissent dans diverses proportions, Dar exemple des pédoncules et des pétioles , des feuilles et des (leurs. M. Miquel a fait connaitre l'union d'un stigmate ec le lobe médian de la lèvre inférieure , dans une corolle de Salvia pratensis (2). Duhamel a figuré, dans sa Physique des arbres, une feuille soudée par son support avec la base un concombre (3). Voici une monstruosité analogue à la précédente, dont je Süis redevable à M. Germain. Qu'on se figure des Poires Soudées, pendant leur jeunesse, avec une ou deux petites feuilles portées par le pédoncule et collées sur le fruit par toute leur face supérieure. Quand ces Poires ont grossi, par Suite de la dilatation du parenchyme, une dessoudure s'est Opérée ; mais il est resté à la surface de chaque fruit une ‘pression plus ou moins profonde , ayant la méme forme Que la feuille, à surface rude, mate et de couleur fauve , Qui tranche avec la peau lisse, luisante et jaunatre de la oire, On voit trés-bien dans ces impressions la trace des (1) Opusc. phyt., t. 11, p. 387. (2) Linnea, t. 1, p. 607. (3) Liv. n, pl. xiv, fig. 324. 956 DES MONSTRUOSITÉs. nervures principales. La cicatrice. laissée par la base des feuilles, aprés leur chute, annonce que ces dernières étaient nées dans le voisinage du fruit, et que le pétiole était greffé avec le pédoncule. Les Poires dont il s'agit sont petites ^! arrondies comme des Pommes; il y en avait beaucoup SU" le méme arbre. | D'autres fois les organes appendiculaires se montren! unis aux Organes axiles. Il y a des pétioles ou des limbes de feuilles collés avec de rameaux ou bien aveé la tige. Cette union peut méme avoit ` lieu d’après deux systèmes: ou bien les feuilles adhèrent pa! la face supérieure de la nervure moyenne, de maniété qu'elles semblent ne sortir de l'axe qu'à l'endroit où la sot dure vient à cesser, et que la partie du limbe qui appartient å la portion dela nervure collée semble naitre de la tige méme et former deux ailes latérales; ou bien les feuilles peuvent être prolongées à leur base en lobes ou appendices qui sedr | rigent le long de la tige et s'unissent avec elle, Les pre mières anomalies réalisent létat habituel des feuilles florales des Tilleuls ou des feuilles caulinaires des Solanum; 1% secondes rappellent la structure normale des feuilles décuf rentes et particulièrement celles du Prenanthes viminea. Turpin possédait, parmi ses dessins , une vrille de vig soudée avec la tige dans la presque totalité d’un mérithalle: Cette vrille, ayant été admise à partager la nourriture d son axe, s’est convertie elle-même en une autre tige portant des feuilles et de nouvelles vrilles (4). (1) Mém. greffe. (Ann. scienc. nat., t. xxiv, p. 237.) E ARTICLE IT. SOUDURES ENTRE LES INDIVIDUS ÉLÉMENTAIRES. Les individus élémentaires sont placés ordinairement à Une distance plus grande les uns des autres que ne le sont leurs éléments. Aussi ce nouveau mode de soudure est.il plus tare que celui dont il vient d'étre question , et il constitue Une anomalie plus grave et plus importante. On peut distinguer trois sortes de soudures entre les indi- Vidus élémentaires : celles des bourgeons proprement dits , Celles des fleurs et celles des fruits. Je désignerai les pre- mières sous le nom de synophties , les secondes sous celui de Synanthies et les troisièmes sous celui de syncarpies. E DES MONSTRUOSITÉS. $ Ier. — Des soudures entre les bourgeons ou des Synophties- On a va, dans le chapitre précédent, comment des sou- dures pouvaient s'établir entre les éléments des verticilles, ou entre les verticilles eux-mémes , c'est-à-dire entre les différentes parties des individus élémentaires. Cette étude me conduit naturellement aux unions qui s'effectuent dans tout l’ensemble de ces individus. | Il y a deux sortes d'individus gemmes ou bourgeons: l'individu primitif ou embryon, le générateur de tout? l'agrégation végétale, et les individus secondaires, t€ tiaires , quaternaires , etc., ou bourgeons proprement dits: L'individu primitif, fourni par la graine , laquelle €‘! produite par la fleur, forme la nuance intermédiaire enit? les individus fleurs et les bourgeons proprement dits. A. — Synophties des embryons. Deux individus primitifs peuvent se souder ensemble. 6 phénomène est analogue à la duplicité monstrueuse des en bryons , chez l’homme et chez les animaux supérieurs (1); mais il a bien moins d'importance en botanique qu'en 20% (1) «Il y a une cause de monstruosité qui est commune au règ”? végétal et au règne animal; c'est la réunion de deux embryons en t0" ou en partie. » (Duhamel, Phys. arbr., t. 1, p. 306.) x T GITE 59 DES MONSTRUOSITES. Zo logie » ou, pour mieux dire, en tératologie végétale qu'en lératologie animale; ce qui tient à ce que les animaux vertė- brés sont des étres simples ou unitaires , et les végétaux des êtres agrégés ou composés. La cohérence de deux individus primitifs, dans une Plante, n'a guère plus de valeur que la soudure entre deux individus secondaires faisant partie de l'ensemble végétal ; l'union de deux arbres ou de deux collections Witdividus Se rapprocherait davantage , quant à la gravité de la dupli- Cité monstrueuse chez les vertébrés. La cohérencede deux individus primitifs ou embryons peut avoir deux origines, la pluralité de ces organes dans une Seule graine , ou bien la soudure de deux graines. Les botanistes ont constaté que la semence du Citronnier 'enfermait plus d’un embryon. On en trouve 4 dans celle de POranger (1) et 8 ou 10 dans celles des Pampelmousses. La pluralité des embryons a été reconnue aussi dans les Cycadées. M. R. Brown a montré spécialement son exis- lence dans Abies excelsa, le Méléze, le Pinus strobus *t plusieurs autres Pins; ce qui rend trés-probable la gé- Néralité de cette organisation dans la famille des Coni- feres (2). Des phénomènes analogues peuvent arriver aussi par ac- ident (3). Quand il existe plusieurs embryons dans une graine, Ceux-ci sont souvent distincts les uns des autres et disposés Vee une certaine régularité, mais d'autres fois ils se mon- trent soudés d’aprés divers systémes. M. Alphonse de Can- (1) Turpin, Zcon. végét., tab. 31, fig. 13. — On a trouvé aussi deux "Ibbryons dans l'Evonymus latifolius , 2 à 4 dans Euphorbia rosea Petit-Thouars ), et 4 dans l' Allium fragrans. ( Richard. ) (2) Report of brit. assoc. London. 1835, p. 596. (3) Foy. le chapitre sur les Multiplications. | 960 DES MONSTRUOSITÉS. dolle en a observé un exemple dans ? Euphorbia helioscopia: Il remarqua une graine de cette plante qui levait avec quatre cotylédons. Ce nombre était dà à ce que deux embryons s'étaient collés ensemble dans toute leur longueur (1). Le méme botaniste a vu encore une soudure de ce genre dans le Lepidium sativum et le Sinapis ramosa (2). Dans les synophties, les deux axes des embryons se por- tent ordinairement l'un vers l'autre. Si la cohérence €! faible, on les distingue tous les deux ; leur coupe transvel- sale donne une figure plus ou moins semblable à celle d'ur huit de chiffre. Si le phénomène est intense, il y a fasio” et l'on n'observe plus qu'un axe unique. L'union s'étend quelquefois jusqu'aux cotylédons , €! ceux-ci deviennent cohérents à différents degrés. D'autres fois, ainsi que M. de Candolle le fait remar quer , la soudure est accompagnée d'avortement. Au lieu de quatre cotylédons, on n’en compte plus que trois (3): Peut-être aussi dans ces cas s’est-il formé une fusion entr? deux cotylédons. La cohérence des ob lôdone peut être confondue ave un autre phénomène que j'ai observé une fois dans une graine de Bon-Henri. C'est une sorte de scissure q™ s'établit dans ces organes. La graine dont je parle avait produit une tigelle portant un cotylédon normal et Y” autre cotylédon incomplétement divisé en deux partie par une fente longitudinale qui s'étendait depuis la point jusqu'aux deux tiers du limbe. Devait-on admettre qu! y avait, dans cet exemple, soudure de deux embryo” ` (1) DC., Organ. végét., t. 1, p. 12, pl. 54, fig. 1. (2) Loc. cit., pl. Lit, fig. 1. — M. de Candolle a indiqué aussi dé Renoncules, des Haricots et des Morelles. (3) Loc, cit, , pl. LH, fig. 1,2. DES MONSTRUOSITES. 261 avec avortement d'un cotylédon, ou fusion de deux en un seul et cohérence incomplète des deux autres? Je ne le Suppose pas, parce que la fente se trouvait exactement dans e milieu, et que chaque lobe, n'offrant pas de nervure mé- diane , ne pouvait étre regardé que comme un demi-cotylé - don. D'ailleurs rien. n'annoncait qu'un autre de ces or- anes eùt avorté, ou qu’il se fat soudé de manière à se confondre. B. — Synophties des bourgeons proprement dits. Les bourgeons proprement dits se soudent plus souvent que les embryons. Cette union a lieu aussi de plusieurs maniéres. Quand elle est faible, les écailles ou tuniques des deux individus sont seulement cohérentes; quand elle est pronon- Ce, il y a pénétration, fusion des deux bourgeons. Les hourgeons collés par les écailles sont greffés unique- ment par les parties extérieures ; quand ils se développent, les Scions se montrent parfaitement distincts et l'anomalie finit peu à peu par disparaitre. Quand il y a fusion des deux bourgeons, l'ensemble pa- rait plus gros que les bourgeons ordinaires ; les écailles Sont aussi plus nombreuses. La symétrie de ces dernières , Surtout dans les cas de fusion bien intime , n'est pas sensi- blement pervertie. Il peut y avoir trois bourgeons dans une synophtie et même quatre ou cinq. mr Cette anomalie accompagne habituellement les atrophies des axes; quand une tige est réduite à son minimum de grosseur et pour ainsi dire à zéro d'existence, les bourgeons 262 DES MONSTRUOSITES. qu'elle produit sont serrés les uns contre les autres ct trés portés à contracter des greffes insolites. La synojhtie peut exister aussi avec la fasciation. Quand le.rameau dilaté est comme tronqué à son sommet, et qu'il surgit des bords de la troncature une série linéaire de boul geons nombreux et pressés, ceux-ci sont disposés à s'unir. ' Duhamel a émis l'idée que les fascies pouvaient être le résultat dela soudure des bourgeons; je suis tenté de croire; au contraire, que, dans un grand nombre de cas, c'est la fas ciation qui produit la synophtie. La synophtie est; au reste, assez difficile à observer, sauf dans quelques circonstances , à cause du grand nombre et du peu de volume des bourgeons. Comment reconnaitre, pà! exemple, une synophtie dans un Tilleul ou dans un Chêne?! faudrait un œil bien exercé ou une patience bien soutenue pour distinguer cette anomalie dans des individus aussi pe tits, au milieu d'une collection aussi immense. Les bour- geons ne deviennent un peu apparents qu'à l'époque. où ils commencent à se développer. Or, dès l'instant où Jeu! ciongation s'effectue, l'individu perd son caractère de bour- geon pour prendre celui de scion ou de rameau. Il existe cependant quelques végétaux dont les bourgeon sont assez grands pour que le phénomène de la synophtie devienne facilement appréciable, quand il se présente chez eux. Ainsi Turpin a fait connaître deux turions 0U bourgeons d'arperges, greffés depuis la base jusqu'à la moi- tié dela hauteur, puis libres dans l'espace de 27 millimètres et ensuile soudés au point de ne plus offrir au somme? qu'une seule pointe écailleuse (1). Dans une synophtie ana logue que j'ai eu l'occasion d'observer à Toulouse, les deu* (1) Mém. greffe. (Ann. science, DEL, D'AXIT, 0338; Bb xl: \ fig. 1.) << ee DES MONSTRUOSITES. 263 turions étaient distincts à la base, simplement accolés vers le milieu et confondus au sommet en une seule pointe. - § II. — Des soudures entre les fleurs ou des Synanthies. La synanthie arrive quand les fleurs sont trés-voisines Soit naturellement, soit accidentellement. Cette union peut avoir lieu à différents degrés. | Dans certains cas , la soudure s’effectue seulement entre les supports. On voit alors un pédoncule ou-pédicelle uni- “Que, portant à son extrémité deux fleurs plus ou moins tapprochées ou à peine cohérentes; c'est un commencement de synanthie (1). ‘Les Pommiers, les Poiriers, les Péchers et beaucoup d’au- tres végétaux sont sujets à cette anomalie. Nous en trou- Vons deux exemples remarquables dans l'Organographie de M. de Candolle; dans le premier, deux hampes de Jacinthe Sont incomplétement soudées (2), et, dans le secon? deux Pédoncules de Centaurée paraissent entièrement ums. Un sillon assez marqué indique la trace de la greffe ( DE -On rapporte que François I*, empereur d'Autriche, colla ensemble deux bulbes de Jacinthe, et que cet accouplement singulier produisit un axe composé de deux hampes cohé- Tentes qui portaient des fleurs blanches d'un cóté et des fleurs touges ou bleues de l'autre. 28035 ae Dans d'autres cas, il y a greffe anomale , non-seulement | (1) L'union par les supports arrive normalement dans certains Loni- cera (Chamecerasus, Xylosteum). Leurs pédoncules sont biflores. (2) PI. xiv, fig. 1. (8) Pl. xv, fig. 1. 964 DES MONSTRUOSITÉS, entre les pédoneules, mais encore entre les fleurs. Il arrive méme quelquefois que ces derniéres (surtout quand elles sont trés-grandes ) s'unissent par leur tégument extérieur, €t- que les pédoncules restent distincts. Tous ces exemples cons- tituent la synanthie proprement dite. | Les soudures des fleurs peuvent s'opérer d'aprés deux systèmes ; ou bien il arrive un fort rapprochement accom- pagné de la cohérence des calices et des parties les plus ex- térieures, ou bien il y a une pénétration , une fusion entre tous les organes floraux. | Un exemple du premier mode de synanthie a été figuré par Schlotterbecc, dans son Mémoire sur les monstres végétaux. Ce sont deux fleurs de Centaurea moschata. Les pe. doncules se trouvent entiérement unis et les deux calathides se tiennent par la base (1). Un fait à peu prés pareil a été re- cueilli par Turpin ; il consiste dans deux fleurs d Agave ame- ricana unies dans toute la longueur des pédoncules et dans la base des périanthes (2). Dans cette synanthie il y a deus fleurs uniques de greffées ensemble; dans l'exemple de Schlotterbecc, ce sont deux inflorescences. | Dans les cas de soudure sans fusion , on remarque que les fleurs sont tantót développées normalement et d'une ma- niére uniforme et tantót plus ou moins ayortées. Quelquefois l'une d'elles est normale et Pautre atrophiée , comme dans le fait suivant. Schlotterbece a représenté deux OEillets ac- colés, dont l'un est à peu prés dans son état habituel, tandis que le second se trouve petit, déformé et privé d'une partie de ses organes (3). Cette anomalie me rappelle la curieuse (1) Sched. , de Monst. plant. (Act. helvet., t. 1, tab. 1, fig. 3.) — Dans les Beta, les fleurs se soudent normalement et régulièrement par les calices. (2) Mém. greffe. (Ann. scienc. nat. , t. XXIV, p. 388, pl. XVIL) (3) Loc. cit., pl. tt, fig. 12. DES MONSTRUOSITES. 265 observation faite par mademoiselle Lucie Dunal , de Mont- ‘Pellier, sur la petite Vaillantie des murs. Les fleurs de cette petite Rubiacée naissent habituellement trois à-trois , entre les feuilles de chaque verticille. La fleur centrale, qui Se déjette en bas, est la seule fertile ; elle offre quatre di- Visions. Les deux fleurs latérales sont droites, stériles et à trois divisions. Aprés la fécondation, les calices de ces dernières se soudent par la base avec la fleur moyenne ; leurs limbes grandissent et produisent les petites cornes dont le fruit est couronné (1). Quand la soudure est bien complete et qu'il y a pénetra- tion des verticilles, il est souvent bien difficile de déter- miner l'anomalie, si l'on n'a pas sous les.yeux d'autres fleurs normales du méme végétal (2). En général , les fleurs produites par synanthie sont plus grosses que les fleurs ordinaires; mais leur taille n'est pas toujours deux fois plus grande que la taille habituelle: Pune part, parce qu'un verticille quelconque, formé d'un certain nombre d'organes , ne double pas son diamétre ou son rayon , quand il acquiert un nombre double de parties; Vautre part, parce que la cohérence entraine toujours avec elle une gêne, un arrét de développement du côté où elle a lieu, de telle sorte que l'ensemble de deux organes réunis offre toujours moins de volume que l'en- Semble des mémes organes non soudés. = Ledéfaut d'évolution peut être assez fort pour occasionner la disparition de certains éléments. Aussi voit-on des synan- lhies avec fusion, offrant tous les verticilles composés de (1) DC., Flor. fr., i. V, p. 499. (2) M. Dunal pense que les Zycopersicum à fruits toruleux doivent la multiplicité de leurs ovaires à la soudure normale de plusieurs fleurs. ( Monogr. des Solanum, p. 3.) 266 DES MONSTRUOSITES. parties en nombre double de celui des parties habituelles; tandis que , dans d'autres synanthies, le calice, la corolle; l'androcée et le gynécée, présentent tous les nombres pos- sibles entre le nombre double et le nombre naturel. Deux Labiées ou deux Personnées qui s'uniront pourront avoir. tantôt 10 lobes à la corolle ou 8 étamines à l'androcée , et) tantót 9, 8, 7 et méme 6 lobes ou 7, 6 et même 5 étamines- ions? M. hide Jussien aya des flens doubles de Jinta. minor dans lesquelles les sépales et les pétales étaient au nombre de 8, de 6 et même de 5, Dans une synanthie de Lilas vulgaire. formée par l'union de trois fleurs, l'ensemble offrait un calice à 11 dents, une corolle à 11 segments; 6 étamines et 3 pistils (1). ee une autre synanthie de trois fleurs de Narcissus Tazetta, cueillie aux environs de Mont- pellier par M. Viala, de Castelnaudary, j'ai compté 15 sé- pales au lieu de18. Les exemples dans lesquels la synanthie n’augmente les verticilles que d'une seule unité sont extrêmement rares Lorsqu'il n'existe dans un appareil qu'une partie supple mentaire, cette addition est le plus soüv ent produite par un autre phénomène (2). Dans les fleurs qui s'agrégent entre elles, comme che les animaux qui s'entre-greffent dans le sein maternel, l'al- liance a généralement lieu entre des organes ou des parties homologues (3). Le calice s’unit avec le calice, la corolle avec la corolle, Pandrocée avec l'androcée, le gynécé? | avec le gynécée. Voilà pourquoi, lorsque la fusion est bie? complète, l'ensemble des deux fleurs représente une fleur unique dont le calice aurait, sauf les cas d'avortement , UD a) Guillemin, Mém. soc. d'hist, nat. Paris, t. 1v, p. 363. (2) Voy. le chapitre sur les Multiplications. (3) Geoff. St-Hil. , Dict. class. @hist. nat. , art. Monstre. | DES MONSTRUOSITES. 267 nombre double de sépales, la corolle un nombre double de pétales, l'androcée un nombre double d'étamines, etc..... Voilà pourquoi aussi on n'observe jamais de sépale inter- | posée entre les étamines, ou d'étamine interposée entre les — Pétales. Tous les organes de méme nature sont placés dans | le même verticille. Bien plus, on peut constater que les diverses parties de deux verticilles donnés, appartenant à deux fleurs diffé- Tentes, se cherchent, se choisissent , si je puis m’exprimer ainsi , de maniére que l'union s’opére entre celles qui. ont la méme forme et la méme position. C'est ce dont on pourra Se convaincre , en examinant des verticilles composés de Pièces dissemblables. Ainsi , par exemple, dans deux fleurs de Digitale orientale soudées ensemble , figurées par M. El- miger (1), les petits lobes des corolles sont unis entre eux , ct les deux grands lobes sont placés l'un à côté de l'autre, en dehors de l'axe de la plante. M. Delile m'a montré deux exemples de synanthie recueillis sur un Justicia, qui vien- nent encore à l'appui de cette loi: dans le premier, les deux lévres supérieures des corolles étaient greffées cóte à cóte et formaient comme deux casques accolés ; dans le second , On voyait une seule lèvre plus grande que de coutume et lerminée par quatre lobes (2). Cette tendance à l'union des parties homologues , reconnue depuis longtemps dans la té- Tatologie animale , est assurément une des lois les plus ad- / mirables de la monstruosité. L'alliance des organes similaires n’empéche pas les ver- ticilles ou les parties de nature différente de pouvoir adhé- rer quelquefois les uns avec les autres; mais ce mode d'u- nion, d'une part, est trés- rare, et de "wem qiiis il arrive, (1) Hist. nat. des Digitales , p. 16, tab. (2) Moquin, /rrég. corolles. (Ann, scienc. nal., t. XXVII "m 335.) mt 968 DES MONSTRUOSITÉS. c'est presque toujours entre des piéces trés-voisines et saps un déplacement au moins sensible de la part des organes qu' se greffent. On ne saurait trop le.répéter, les déviations des organes ou des ensembles organiques ne sont pas les effets d'une puissance aveugle et capricieuse, mais les produits d'une embryogénie qui a des limites et des lois. La multiplicité et le rapprochement des fleurs sont le? causes les plus naturelles de la synanthie. M. Campdera ? observé cette aberration dans plusieurs espèces de Rumes qui ont des fleurs nombreuses et serrées (1). J'en ai trouvé moi-même dans les inflorescences compactes et fragiforme de certaines espèces de Blitum et de Chenopodium. Cependant la pression ne parait pas la source unique dU phénomène d'union, puisqu'il arrive aussi dans certains Rumex (Rumastrum , Acetosa), dont les inflorescences sot! laches et les fleurs en petite quantité. On a remarqué , d'un autre côté, que dans les calathides des Composées , où le? floscules se trouvent si rapprochées et si nombreuses , il es! trés-rare de rencoutrer des synanthies. L'avortement des pédicelles ou supports détermine aussi la jonction des appareils floraux. M. de Candolle a vu dans certains pieds de Galeopsis dont le sommet de la tige était atrophié , deux fleurs voisines réunies en une seule fleur terminale (2). La synanthie n'est pas aussi rare qu'on pourrait l'imagi- ner; on Pa rencontrée dans l'Aconit-Napel (Jæger),le Ranun- culus lingua (A. Juss.) , le Colchique d'automne (Miquel), le Campanula medium (Seringe), le Galeopsis ochroleuc4 (Germain ) , PAntirrhinum majus (Engelmann), le Linari® purpurea ( Chavannes); on l’a observée aussi entre les €% (1) Monogr. des Rumex. Montpellier, 1819, p. 37. (2) Organ. végét., t. 1, p. 529. DES MONSTRUOSITES. 269 Pitules de quelques Composées ; les inflorescences de ces plantes se conduisent exactement, dans leurs divers modes l'union, comme les fleurs solitaires. J'ai déjà parlé du Centaurea moschata (Schlotterbecc); je citerai encore le Zinnia elegans ( DC.) , V Anthemis retusa (Gay), les Dah- lias (Berthelot), la Chicorée, les Épervières, les Laiterons. Dans tous les exemples qui viennent d'étre rapportés, la Synanthie n'est formée que par deux fleurs ; il est des cir- constances, à la vérité, plus rares dans lesquelles l'anoma- lie se complique de plus de deux éléments. J'ai fait mention plus haut de trois fleurs de Lilas vulgaire ( Guillemin) et de trois fleurs de Narcissus Tazetta ( Viala ). Il a été observé par Bénédict Prévost trois fleurs de Renoncule flammette (1), et par M. Seringe trois fleurs de Lilium croceum également “Unies ensemble. Les pistils de ces dernières étaient encore Séparés, mais situés les uns à cóté des autres ; la fusion avait agi sur tous les autres verticilles. M. de Candolle a vu des fleurs d? Arabis sagittata, tantôt au nombre de trois , tantót àu nombre de quatre, qui offraient aussi une synanthie àvec pénétration dans les calices, les corolles et les andro- cées, et simple accolement dans les pistils. M. Seringe a communiqué à la Société royale d'agricul- ture de Lyon (2) deux grappes florales de Chasselas unies ensemble. Les deux pédoncules étaient cohérents à leur base et sensiblement tuméfiés ; la greffe s'étendait jusqu'aux ramifications; une longue vrille terminait cette double grappe ; la plupart des fleurs paraissaient déformées et ag- glomérées autour. d'une fleur centrale moins monstrueuse que les autres ; les pétales se trouvaient foliacés, pleins de Suc, ct semblaient persistants ; les ovaires étaient souvent (1) Sénebier, Phys. végét., t. 1v, p. 427. (2) Guillemin, Arch. bot., t. 1, p. 245. 270 DES MONSTRUOSITES. avortés ou bien se présentaient presque séparés les uns des autres, de manière que, au lieu d'offrir un fruit parfaitement sphérique , celui-ci paraissait déprimé et marqué de stries profondes qui indiquaient une soudure incomplète. § HI. — Des soudures entre les fruits ou des Syncarpies. Puisque des fleurs habituellement distinctes se souden! quelquefois par accident , le même phénomène doit arrive! entre les fruits. On a vu dans le paragraphe précédent que , dans la sY° nanthie, les parties similaires des verticilles s'unissaient les unes avec lés autres. Les pistils, comme tous les élément? floraux , sont soumis à cette loi. Or ces pistils conservent trés-souvent leurs facultés reproductrices ; ils sont fécondés; leurs ovaires se développent, mürissent et produisent de$ fruits plus ou moins cohérents. La synanthie a entraîné la synearpie. l On trouve dans les fruits unis, comme dans les synat- thies , tous les degrés possibles de jonction » depuis le sim- ple accolement jusqu'à la fusion la plus compléte. Il y a des syncarpies commencantes > €'est-à-dire des cas dans lesquels la cohérence n'est arrivée que dans les supports Pai vu deux Cerises, a peine soudées , attachées à un pe doncule commun (1). | M. de Candolle a fait connaître deux Pommes de grosseuf inégale, soudées intimement et portées aussi par un pédon- cule en apparence unique (2). La coupe de ce pédoncule à montré les deux canaux médullaires encore distincts. (1) Voy. aussi Schlotterbece, Sched. de monstr. plant., Aci. helvet. t. n, pl. it, fig. 11. i (2) Organ. végét., t. 1, p. 529, pl. 46. DES MONSTRUOSITÉS. > Sa Je posséde une syncarpie de Prune Reine-Claude et une Wire de Prunus lusitanica, qui présentent exactement les Mêmes caractères. : Les exemples les plus ordinaires de ces soudures- sont Ceux qui résultent de l'alliance de deux fruits. Schlotterbecc 3 trouvé dans cet état des Graterons (1), des Prunes (2), des Concombres (3). D'autrés ont observé des Poires, des Pêches , des Groseilles, des Raisins, des Courges , des Me- lons et une foule d'autres fruits. Dans le Gleditsia triacan- thos etle Cesalpinia digyna, cette duplicité est trés-fréquente; elle se montre presque habituelle et cesse pour ainsi dire d'être une monstruosité (4). Il peut exister aussi plus de deux fruits cohérents. M. Se- 'ingearemarqué dans le Ranunculus tripartitus tantôt deux fruits soudés et tantôt trois(5); il aobservéaussi trois Melons. Turpin a vu une greffe compléte entre les trois péricarpes lisses et crustacés , qui se développent naturellement et iso- lément dans Pinvolucre hérissé desChâtaigniers (6). MM. Poiteau et Turpin ont figuré et décrit, dans leur traité des arbres fruitiers, sous le nom de Nèfle de Correa , quatre ou cinq Néfles soudées cóte à cóte et couronnées par toutes les folioles persistantes des calices (7). Un exemple trés-remarquable de syncarpie, quant au Nombre des fruits agrégés, a été rapporté par Emmanuel Kenig dans les Éphémérides des curieux de la nature (8). (1) Loc. cit., pl. 1, fig. 5. | (2) Loc. cit., pl. 1, fig. 4, 7.— DC., Legum., pl. n, fig. 3. - (3) Loc. cit., pl. 1, fig. 10. (4) DC., Légum.,:pl. 11, fig. 6, et pl. ri, fig. 2. (5) Bullet. bot., tab. 3, fig. 4, 6. (6) Mém. greffe, Ann. scienc. nat.,t. 24, p. 334. (7) « Mespilus portentosa. » Poit. et Turp., liv. 31, p- 232, pl. 202. (8) « Fragaria botryformis, uno petiolo novem fraga gerens. » Ephém, nat. cur., 1685, p. 83. — Duchesne, Hist. nat. frais., p. 79. 279 DES MONSTRUOSITÉS. + C’est un pédoncule de Fraisier, deux fois plus épais que d'or dinaire, portant neuf fraises attachées au mére calice. Il y a apparence que ce calice était composé de plusieurs verti- cilles réunis. Turpin se souvient d'avoir peint, à Saint-Domingue , Y” Ananas fascié composé de sept fruits entre-greffés, de mà" , nière à former une espèce de grande raquette; les sept cot ronnes seules étaient libres (1). Dans les syncarpies oü les fruits primitifs sont encore distincts de l'ensemble, on observe quelquefois que ces fruits ont acquis un méme développement et se trouve”! tous égaux ou à peu près égaux. Ainsi Duhamel a repre senté, dans sa physique des arbres, deux Prunes de més taille portées par un pédoncule unique (2); il a figuré auss" dans le méme ouvrage, deux Melons cohérents, parfaite" ment égaux (3). J'ai cueilli deux Pommes et deux Cerises qu offraient le méme genre d'union. D'autres fois, il existe une grande inégalité entre © fruits soudés. Jai déjà parlé de deux Pommes observées p^ M. de Candolle , dont le volume était bien différent. Dub mel a fait connaitre aussi deux de ces fruits unis ensemble dont l'un a acquis le développement normal et dont l'aut!* a subi une atrophie trés-prononcée (4). Je puis citer enco! deux Prunes que j'ai eu l'occasion d'examiner : Pune d'ellé avait la taille ordinaire, l'autre était réduite au quart de $0” volume. Les fruits se soudent ordinairement par les cótés ; mais (1) Mém. greffe, Ann. scienc. nat., t. xxiv, p. 338. (2) Phys. arb.,t.1, p. 304, pl. xm, fig. 315, 316, 317. (3) Loc. cit., pl. xiv, fig. 320, 321. (4) Loc. cit., pl. XIV, fig. 325, 326. — Voy. aussi, dans la méme planche, des Concombres très-inégaux unis d'une manière assez bizat!* (fig. 322, 323). DES MONSTRUOSITES. 270 la jonction des supports leur imprime une certaine obliquité qui augmente souvent avec l'aceroissement du parenchyme. €s axes longitudinaux forment alors un V plus ou moins agu, dont la pointe prend naissance dans le double pé- oncule. Dans un petit nombre de syncarpies, les fruits, en grossis- Sant, éprouvent une sorte de conversion plus ou moins forte Qui ouvre le V dont il s’agit. Les sommets s’écarient et les bases se rapprochent. Le support commun est caché par ce dernier rapprochement ; les deux sommets se irouvent quel- quefois à la plus grande distance possible l'un de l'autre, et disposés de manière que les deux axes longitudinaux sont Placés à peu près sur la méme ligne. M. Berthelot m'a apporté deux Pommes, accolées base à base , qui présentaient cette soudure anomale avec tous les Caractères qui viennent d’être énumérés. On conçoit, d’après ce qui a été dit, que la syncarpie, Par le sommet des fruits, est impossible avec la jonction des pédoncules. Si elle arrive (je n’en connais aucun *Xemple), ce sera par le rapprochement de deux fruits ap- Partenant à deux fleurs distinctes, mais jamais par l’union de ceux qui se sont développés dans une synanthie. Dans certains cas de syncarpie, la pénétration des car- belles est devenue très-forte et l'on a beaucoup de peine à distinguer extérieurement ce qui appartient à chaque frait Particulier. L’agrégation ressemble à un fruit unique beau- coup plus gros que de coutume. Dans quelques espèces à car- pelles saillants, comme les Melons, il est encore possible, u comptant les côtes, de reconnaître l'existence de Pano- malie ; mais, dans celles où les carpelles ne sont pas distincts *Xtérieurement, soit parce qu'ils sont recouverts par le calice (Pommes , Poires), soit parce qu'ils sont fortement pressés *$ uns contre les autres (Solanum, Citrus), et dans les car- 18 RC SECURUM Rn 974 DES MONSTRUOSITÉS. pelles solitaires (Haricots, Cerises), l'observateur .est sou- vent embarrassé. J'ai sous les yeux une Pomme double dans laquelle la fusion , aussi intime que possible, a rendu l'ensemble pres que globuleux et trés-peu éloigné de la forme habituelle. Quand la fusion est bien puissante et que les fruits ont des noyaux, ceux-ci sont portés l'un vers l'autre et se greffent à divers degrés. Je possède deux noyaux de Prunes cohérents dans les deux tiers de leur étendue. M. le colonel Dupuy w’ communiqué deux amandes offrant le méme phénomène. Quand l'union ne s'effectue que dans une seule partie de l'endocarpe, c'est ordinairement dans la partie inférieure Dans les cas de fusion, comme dans les exemples de sin” ple cohérence, on peut trouver tantôt deux fruits, tantôt un plus grand nombre. Je dois à la complaisance d'un agronome distingué une - syncarpie produite par trois grains de Raisins noirs unis €? série linéaire. Chaque baie latérale est séparée du grain mé” dian par un fort sillon ; la pression semble lui avoir fait pe” dre environ un cinquième de sa substance, du côté de A soudure. Quant à la baie du milieu, elle est réduite au tiers ou au quart de son volume, et —— à une sorte de coin placé entre les deux autres grains. M. de Candolle a fait dessiner un fruit trés-curieux d'O- ranger, qui parait dû à l'agrégation de 3 ou 4 fruits, pf venant ap plusieurs fleurs soudées ensemble (1). Toutes les syncarpies ne résultent pas de la cohérence 0% de la fusion des fleurs. Il y a des fruits soudés produits paf des fleurs distinctes. Certains végétaux, dont les organe floraux se trouvent peu distants , portent des fruits qui sont sujets, en grossissant , à se rapprocher et à contracter des €% ` (1) Organ. végét., t. 1, p. 530, pl. xut. DES MONSTRUOSITES. 929 hérences. Si à cette soudure se joint 'avortement des pé- doncules des fruits surnuméraires, l'ensemble parait alors Produit par deux ou plusieurs fleurs unies ensemble, On Peut cependant reconnaitre ce nouveau genre d'union, en *xaminant la partie inférieure de ces fruits; on remarque ordinairement, à la base des surnuméraires, un rudiment de pédoncule, si l'avortement a été complet, et une cicatrice, - 5i ce pédoncule a disparu entiérement. M. Roper a observé deux Pommes greffées, dont une avait son pédicule rompu et paraissait évidemment portée et Rourrie par l'autre Pomme (1). J'ai vu trois Cerises unies, n'ayant qu'un seul support , articulé avec le fruit du milieu ; les Cerises latérales offraient chacune en dessous une légère dépression avec une petite Marque dans le centre, qu'indiquait nettement la place des Pédoncules avortés (2). Schlotterbecc a figuré trois Pommes Cohérentes qui semblent offrir un phénoméne absolument Semblable (3). | 59 Quand les fruits sont sessiles et qu’ils s’entre-greffent, le genre de syncarpie devient difficile à caractériser. On peut lire cependant, d'une manière générale, que l'union dé- lerminée par rapprochement n'est jamais aussi complète, àussi intime que l'union déterminée par synanthie. Turpin a dessiné trois Noisettes ou péricarpes osseux de Noisetier, contenus dans un seul involucre (4); M. Isidore Geoffroy St-Hilaire m'a donné deux autres exemples de ‘yncarpie, produits par le méme arbrisseau. Dans l'un, trois (i) DC., Phys. végét., t. ix, p. 781. (2) On a même trouvé des syncarpies formées par 4 ou 5 Cerises. (C. Bauhin.) (3) Loc. cit., pl. 1, fig. 8. (4) Mém. greffe, loc. cit., t. xxiv, p. 334. 276 DES MONSTRUOSITÉS. fruits sont unis, mais disposés sur la méme ligne ; celui du milieu se trouve pressé et déformé. Dans l'autre, les fruits sont au nombre de cinq et greffés en verticille à peu prés régulier. Ces exemples nous donnent les lois d'aprés lesquelles dot- vent avoir lieu les syncarpies , formées de plus de deux élé- ments : 1° les fruits se greffent en rosette, c’est le cas le plus fréquent; 2° ils se soudent en série linéaire. On peut confondre les syncarpies avec d'autres soudures auxquelles les fruits sont sujets. On sait que, dans certaines plantes, le gynécée ne pré- sente pas le nombre de pistils réclamé par l'ordre symétri- que : ainsi les Légumineuses n'ont généralement qu'un seul pistil, au lieu de cinq. Il se développe quelquefois, pat accident, dans ces plantes, un ou plusieurs des organes qui leur manquent. Il y a des Pois, des Haricots, des Anthyllis (1) monstrueux à deux gousses ou carpelles; on en trouve méme avec trois. Quand ces fruits ont acquis une certaine grosseur, et qu'autour d'eux il ne reste plus de traces des parties florales, il devient alors presque impossible de reconnaitre s'ils ont été produits par deux ou plusieurs fleurs et par soudure, ou bien par une seule fleur et paf symétrisation (2). Je rapporterai ailleurs plusieurs exemples de pistils supplémentaires dans des fleurs uniques. Je me borne, pouf le moment, à dire que j'ai vu deux gousses dans une fleur de Pois et trois loges dans un ovaire d’Jberis. Ces deux cas € m'ont offert aucun doute sur l'origine des fruits surnumé- raires. On voyait encore sur l'individu monstrueux de‘ traces apparentes des parties males et des enveloppes de la (1) Foy. Engelm., de Anthol., p. 19. (2) Foy. le chapitre sur les augmentations numériques. DES MONSTRUOSITES. gU fleur ; mais dans un exemple de Haricot double, très-déve- loppé, figuré par Duhamel, les éléments floraux ont disparu, et il n'est plus permis d'expliquer le phénomène (1). L'observation a démontré , cependant, que , lorsqu'une Synanthie ou un rapprochement ont occasionné une syn- carpie, les éléments de celle-ci tendent ordinairement à une fusion plus ou moins compléte, tandis que, dans le cas oü des fruits surnuméraires prennent naissance par symétrisation, il peut y avoir soudure dans ces fruits, s'ils sont pressés, mais bien rarement il y a fusion. On peut appliquer aux graines tout ce qui vient d'étre dit relativement aux fruits. Comme ces derniers, elles sont soudées à différents de- grés; elles s'unissent d'abord par l'enveloppe , comme dans des semences de Nymphea lutea, trouvées par M. le docteur Hussenot (2); comme aussi entre deux Marrons d'Inde communiqués à Turpin par Villustre de Jussieu; leurs enveloppes luisantes et crustacées étaient collées Pune con- tre l'autre; les deux empreintes des hiles wen formaient plus qu'une; mais on apercevait toujours deux ombilics dis- lincts, et les embryons étaient libres (3). M. Heyland a fait voir à M. de Candolle deux autres graines de Marronnier , affectées d'une semblable anoma- lie (4). | D'autres fois les graines s'unissent par les parties inté- rieures ; il y a pénétration plus ou moins intime; les coty- lédons se soudent aux cotylédons , l'embryon à l'embryon ; les parties homologues se portent les unes vers les autres et se (1) Phys. arbr., pl. xui, fig. 318, 319. (2) Chardons nancéiens, p. 56. (3) Mém. greffe, loc. cit., t. xxiv, p. 232. (4) Organ. végét., t. 11, p. Ti. 278 DES MONSTRUOSITÉS. collent ou se confondent : le phénomène devient alors une véritable synophtie (1). Peut-étre la pluralité des embryons, dans certaines grai- nes, est-elle le résultat de la soudure de plusieurs ovules dans les premiers temps de leur développement. Les deux albumens se seraient unis en un seul et les deux tuniques se seraient greffées et confondues. Cette supposition, qui rend parfaitement raison de la présence de plusieurs em- bryons dans une seule graine, a été émise par M. de Can- dolle, dans son Organographie. Cependant je dois dire que les soudures entre graines Se montrent fort rares. Ce qui est bien étonnant, parce que les ovules sont souvent trés-nombreux et trés-serrés dans les loges, que leur parenchyme est assez tendre, et que, daus plusieurs fruits, ils grossissent énormément, de telle sorte que certains d'entre eux finissent quelquefois par comprime” et par étouffer tous les autres, (1) Foy.le $ 1, A. ARTICLE IL SOUDURES ENTRE LES ORGANES AXILES. Les soudures des organes axiles sont connues depuis longtemps ; il parait méme que l'étude et Pimitation des greffes de la nature ont donné naissance aux greffes de nos horticulteurs; et l'on sait combien celles-ci ont rendu de Services.à l'art d'élever les végétaux. Les soudures entre les axes comprennent deux genres de Monstruositeés : Celles dans lesquelles l'union se présente entre deux ou Plusieurs axes d’un méme végétal ; ) Celles dans lesquelles la soudure s’établit entre deux ou Plusieurs axes appartenant à des individus collectifs diffé- rents, RN a ES iia Dm Scena na DES MONSTRUOSITES. S Ter. — Des soudures entre les y P axes d'un méme végétal. Daus ce premier genre de monstruosité, il y aunion en- tre les axes d'un individu collectif, c'est-à-dire entre les parties communes aux individus élémentaires. Cette cohé- rence peut arriver d'aprés trois systèmes : 1° Les rameaux ou axes accessoires se soudent entre eux. 2" Deux ou plusieurs tiges ou axes principaux ( d'une e péce multicaule) se soudent entre eux. 3° Les axes accessoires se soudent à l'axe ou aux axe principaux. à Le premier systéme est celui qui se présente le plus fré- quemment, sans doute à cause du nombre des axes se condaires et tertiaires, de la facilité qu'ils ont de se porte! les uns vers les autres et de la moindre densité de 1euf tissu (1). Quand deux bourgeons proprement dits se trou vent accidentellement soudés (synophtie ) , s'ils produisen! des rameaux , ceux-ci pourront offrir une cohérence plus ou moins grande; mais fort souvent les bourgeons unis sont frappés d’avortement : d'autres fois l’un d'eux , mieu* nourri, n'est pas atrophié ; il s’accroit, il accélère la mort de son voisin, et, parvenu à une certaine taille, il ne présenté plüs de trace de la duplicité. Dans certains cas, des rameaux déjà.dévéloppés , poussé les uns vers les autres par des circonstances particulières» déterminent des cohérences plus ou moins fortes. On trouve beaucoup d'exemples de ces espéces de greffes naturelles dans les bois épais et dans les haies touffues. Il suffit que l'épiderme des deux axes soit un peu usé par le frottement: ; lle deers -" CH holzge pat (1) La greffe naturelle des rameaux ést appelée cormenphytége P M. Ré. DES MONSTRUOSITES. 981 et que les parties dénudées se trouvent dans un contact Permanent, pour que le collage organique puisse réussir (Turpin). Ces cohérences ont lieu tantôt dans le sens de la ongueur, quand les branches sont placées parallèlement, tantôt obliquement ou méme à angle droit, quand les axes S'entre-croisent. Mais la plupart de ces greffes, arrivées quand les rameaux avaient déjà acquis une partie de leur accroissement, ne sont pas des phénomènes congéniaux et doivent conséquemment étre considérées plutót comme des déformations ou des maladies que comme des monstruosités. Quand deux embryons, appartenant à une méme graine ou à deux graines différentes, se soudent par accident et Viennent à germer, on peut observer alors deux tiges ac- colées. Ce second système de cohérence est beaucoup plus rare que le premier. Les jeunes tiges soudées sont tantot égales en force et en Srosseur , tantôt elles présentent une inégalité plus ou moins Srande. Dans le premier cas, les axes se pénètrent en gros- Sissant , se confondent et ne constituent bientót qu’uneseule lige; dans le second, l'axe le mieux nourri ou le plus ro- buste finit par absorber, par annihiler le plus petit ou le plus faible. Les axes peuvent aussi se coller dans les plantes multi- caules , quand ils ont déjà acquis un certain développement. Cette soudure s'effectue surtout dans les arbres dont le tronc a été coupé au pied et qui fournissent un grand nom- bre de rejetons. Les tiges tendres et celles qui sont herbacées contractent plus facilement des greffes que les tiges vieilles ou ligneuses. On a cru pendant longtemps que des cohérences de ce genre avaient donné naissance aux tiges fascices. J'ai poente, en traitant de ces dernières, les différentes raisons um s'op- posent à l'admission de cette théorie. 282 DES MONSTRUOSITES. Il existe, sur lemont Etna, un fameux Cha laignier, connu sous le nom d’Arbre aux cent chevaux (Castagno di cento cavalli) , qui parait formé par la soudure de plusieurs reje- tons d'un ancien pied. Cet arbre a 52 mètres environ de cit- conférence, selon Houel (1), et 58 mètres 5 décimètres; suivant M. Presl (2). Le chanoine Ricupero avait soupçonné que cette tige colossale était le résultat de la soudure de plusieurs troncs. M. Sirmond a communiqué à M. de Can- dolle un dessin qui laisse peu de doute sur cette opinion ; et M. Duby, qui a récemment visité ce beau Chataignier, est arrivé à la méme conclusion (3). M. Legrand , professeur à la faculté des sciences de Mont- pellier, à vu, entre Omont et Louvergny ( Ardennes), un Chéne gigantesque produit aussi par la soudure de plusieurs pieds. Quatre troncs énormes sont greffés par approche: dans une étendue d’environ trois mètres ; ils s'écartent en- suite et s’élévent à une même hauteur, formant quatre branches peu divergentes. Entre ces branches, se fait re- - marquer un creux d'un mètre environ de profondeur. Ce Chêne, fort connu dans le pays à cause de sa taille et de så position prés d'un chemin, est appelé par les habitants PArbre des quatre fils d Aymon. M. Legrand a mesuré là circonférence du tronc collectif ; il l'a trouvée de 6,17 mè tres à environ un mètre du sol, et de 6,50 mètres à la hauteur d’un homme. L'espace couvert par ce Chéne colos- sal présente à peu prés 28 métres, dans le sens dU chemin qui passe par-dessous. A l'aide d'un moyen trigono- métrique trés-simple, M. Legrand a calculé que la hauteur de l'arbre était d'environ 27 métres. Une des branches 4 (1) Voy. en Sicile, 2, p. 79, pl. cxiv. (2) Flor. sicil., préf., p. 1x. (3) DC., Phys. végél., t. n, p. 932. N AAE an eR RÉ RE 2 RCE TSR RT NRE Sa eee e DES MONSTRUOSITES. 983 éprouvé un accident vers le sommet , il y a une dizaine "années ; elle a poussé des jets nombreux et vigoureux qui tachent trés-bien sa blessure. Les autres branches offrent Cet là des crevasses ou des cicatrices, qui sont des signes Manifestes de vétusté. Cet arbre multiple est visiblement en décadence. Un vieillard du voisinage, âgé de 88 ans et JOuissant encore d'une bonne mémoire, a assuré avoir *onnu toute sa vie ce Chêne gigantesque avec le nom qu'il Porte et avec sa taille colossale; il l'a mesuré , il y a 60 ans, *t lui a trouvé de 5 à 6 mètres vá tour. A cette époque, on avait vendu et on se proposait de le couper. La commune de Chagny sollicita en sa faveur et réussit a le faire res- Pecter, Il fallut donner en échange à l’acquéreur quatre autres chênes, chacun avec un tronc de 2 mètres de tour. Les axes secondaires et tertiaires s'unissent plus difficile- Ment à l'axe principal ; la position des branches et des ra- Meaux , par rapport à la tige, l'angle plus ou moins ouvert {Wils forment et l'éloignement toujours plus grand de leurs Parties j jeunes et tendres, s ’opposent, en général, à ce genre l'union. Plusieurs espéces de Lianes Geiri après s’étre entor- lillées autour des troncs des grands arbres, au milieu des forêts , greffent leurs rameaux entre eux et avec l'axe prin- “pal partout oü ils se rencontrent et forment une sorte pcaveloppe comme percée à jour. On conserye au Muséum histoire naturelle de Paris un stipe de Palmier, apporté de Cayenne, engainé par un yégétal grimpant qu’on suppose tre un Figuier. Toutes les ramifications de celui-ci et sa lige forment un étui à réseau qui exerce une pression con- Sidérable contre le stipe du Palinier (1). (1) Mirbel, Phys. végét., pl. xix, fig. 1. — Turpin, Zeon. végét. , ab. 4, fig. 7. — DC., Organ. végét., pl. w. 284 DES MONSTRUOSITES. Tout ce qui vient d’étre exposé sur les axes aériens est ap” plicable aux axés souterrains. J'ai trouvé, aux environs de Montpellier, une racine de Silybum marianum traversée de part en part par une jew"? lige de Fétuque tout à fait gréle. Avec un peu d ‘attention: j'ai reconnu que cette racine était composée d'un tronc el d'une grosse radicelle qui s'étaient greffés ensemble apr avoir embrassé étroitement la jeune graminée. On a exposé, dans les galeries du Muséum d'histoire natt relle de Paris, des racines de T'axus baccata qui se son! entre-greffées de maniére à former un grand réseau. Les longues et nombreuses racines aériennes qui ge chappent de ce végétal parasite nommé Figuier maudi! ( Clusia rosea) et qui descendent, comme de longues ficelles des plus grands arbres jusqu'à terre, où elles donnent d® radicelles, présentent un phénoméne habituel qui peut êl” comparé aux greffes dont il est question (1). Ces racit“ finissent , en prenant plus de diamétre, par se greffer le unes aux autres, par étouffer leur tuteur en l'enveloppa?! de toute part et lui formant, comme dit Turpin, une sor de cercueil vivant (2). | Lorsque le savant botaniste qui vient d’être cité habit! l'ile de la Tortue, prés Saint-Domingue, il fut témoi" du fait suivant : Un propriétaire de l'ile avait devant ™ porte un Clusier rose, d'une grosseur prodigieuse ; T l'aurait payé au poids de Por. Cet arbre fut condam?" à être coupé, parce qu'il donnait trop d'ombrage et qu’ attirait trop d'insectes. Les nègres charpentiers, apré avoir enfoncé leurs cognées dans le bois blanc et t? dre du Clusia, furent tout à coup étonnés d'éprouve (1) Turpin, Zcon. végét., tab. 3, fig. 13. (9) Mém. greffe, loc. cit., t. xxiv, p. 340. DES MONSTRUOSITES. 285 Une grande resistance. Au centre se trouvait, sans doute depuis un grand nombre d'années, un trés-gros Acajou moucheté (Swietenia Mahogoni), qui fournit au propriétaire du bois trés-sain , trés-abondant et de bonne qualité (1). En terminant ce chapitre, je dois dire quelques mots dune greffe particulière qui ne dépend ni de l’union des 'ameaux ni de celle des tiges. Lorsqu'une cause queleonque, comme la main de Phomme , la dent d'un animal ou l'action de la carie, a Creusé dans un axe une cavité dont l'orifice est étroit et Peut être recouvert par les couches ligneuses subséquentes , les bords de l'ouverture se rapprochent, se touchent et se tonfondent comme les lévres d'une plaie. Ce phénomène, Par lui-même , n’a rien de monstrueux. | Mais, si la cavité renferme des objets, ceux-ci, conservés au milieu du tissu ligneux, pourront être retrouvés dans l'intérieur de l'arbre, après un temps plus ou moins long, et exciter admiration des amateurs du merveilleux. M. de Candolle a vu, par exemple, dans le tronc d’un Chéne. parfaitement sain, une cavité en partie pleine de Noisettes et de Glands , qui avaient été probablement ras- r emblés par des écureuils ou des loirs , avant que les couches ligneuses eussent fermé l'orifice. On a trouvé de la méme Manière de la terre, du gravier, des pierres et méme des Monnaies dans le cour des végétaux (2). Il a été découvert, il n’y a pas longtemps , dans l'épais- Seur du tronc d'un Hétre abattu, au village de Launay (Manche), à environ 8 centimétres de profondeur, une Croix parfaitement régulière, haute d'environ 18 centi- (1) Icon. végét., p. 15. (2) DC., Organ. végét., t. 1, p. 185. — Foy. aussi la note Sur un baton de voyageur enfermé dans le tronc d'un vieux Pommier. ( Van- deresse, Journ. phys., 1778, t. 1, p. 35.) 286 DES MONSTRUOSITES. métres, munie d'un petit piédestal. Cette croix avait élé sans doute cachée, dans le principe, au milieu d'une cavité du tronc, ou incrustée dans son bois. On lit, dans les Éphémérides des curieux de la nature (4): que des habitants d'Orléans trouvérent, dans une piéce dé bois, des os humains disposés en sautoir et recouverts de 50 couches de matière ligneuse. Il y avait done cinquante ans, au moins, que ces ossements reposaient dans le cov! du végétal. Au jardin des plantes de Toulouse, dans le pied d'un an* cien Tilleul argenté, il existait une petite cavité à moitié fer” mée par un bourlet qui s'était développé tout autour de Port fice. Une jeune Rainette (Rana arborea) avait choisi cet cavité pour son habitation. Le diamétre de la petite porté s'est rétréci insensiblement, par suite de l'accroissement du végétal; en méme temps le volume de l'animal s’est graduel- lement augmenté. Il est arrivé un moment où il a été impos sible à la pauvre rainette de sortir ; elle ressemblait à la belettt de la fable. Aujourd'hui elle est entourée de plusieurs cou” ches d'aubier , et son cercueil s'épaissit de jour en jqur. Tous ces exemplessont analogues aux réunionsimmédiat® chez les animaux. Je devais en dire quelques mots , parce que ces soudures entrainent quelquefois des effets qui pouf” raient étre confondus avec les greffes naturelles. S II. — Des soudures entre les axes de plusieurs végétaux. La cohérence de deux embryons pourrait être considérée comme un phénomène de ce genre, puisque chaque em- bryon est un individu distinct, un végétal en miniature; (1) Année 1783. DES MONSTRUOS; TES. 287 mais la plante présente un assemblage d'individus et l'em- bryon est isolé. A la vérité, cet individu deviendra le gé- hérateur de tous les autres ; mais, dés le moment qu'il se développe et qu’il reçoit le nom de végétal , il cesse d’être individu solitaire et devient commencement d’agrégation. ll y a d'ailleurs des graines qui contiennent plusieurs em- bryons, et ceux-ci font partie alors d'une méme agré- gation. L’adhérence entre les axes de deux végétaux ou de plu- Sleurs est tantót une véritable monstruosité, tantót une greffe accidentelle. Il arrive, comme dans les alliances des axes d'un méme végétal , que la soudure s'effectue ou bien dans l'extréme jeunesse des parties, ou bien dans un âge avancé. | Ces unions sont d’autant plus faciles que les organes sont Plus jeunes , plus tendres, plus herbacés. Quand elles arrivent de bonne heure et que la compres- ' Sion a été forte, la fusion pourra se présenter. Quand elles Sopèrent sur des rameaux âgés et que le rapprochement a été faible, c’est une légère adhérence qui arrive. Les axes des deux végétaux se tiennent à peine, et souvent le moin- dre effort suffit pour les séparer. Tout ce qui a été écrit sur les greffes artificielles est ap- Dlicable à ce genre de soudure. Elle s’établit plus aisément entre des végétaux de méme espèce qu'entre des individus d'espéces différentes, et, Parmi ces derniers, ceux qui appartiennent au méme genre Où à la méme famille la présentent moins rarement que les Végétaux à genre ou à famille différents. Les axes à bois dur s'unissent très-difficilement entre ux. Ceux qui ont un bois tendre sont, au contraire , fort Sujets à cette anomalie ; mais elle arrive encore plus souvent dans les axes non ligneux. 988 DES MONSTRUOSITÉS. L'adhérence peut avoir lieu entre les rameaux de deux | agrégations , entre leurs tiges ou bien entre la üge ou les tiges de l'une et les rameaux de l'autre. Sénebier a cité des chaumes de Graminées unis ensemble; le sommet de l'axe, en apparence unique, portait du Fro- ment d'un cóté et du Seigle de l'autre(1). Calandrini a trouvé un pied de Froment unicaule qu produisait, à l'un des nœuds, un second chaume terminé par un épi d'Ivraie parfaitement caractérisé ; la tige se pro longeait et avait à son sommet un épi de Froment (2), Du- hamel a regardé cette monstruosité comme le produit d'une hybridation (3). Il me semble que le phénoméne s'explique très-naturellement en admettant la greffe accidentelle d'une tige d'Ivraie et d'une tige de Froment. L’abbé Rosier rapporte un autre exemple tout aussi in- téressant , dû aux observations du père Cotte : c'est une plante moitié Carotte et moitié Betterave. Le parenchyme de chaque espéce avait conservé sa consistance, sa couleur et sa saveur (4). Romer a mentionné deux pieds de Renoncule de la tige desquels s’échappait une fleur de Paquerette. Je ne con- nais ce fait que par l'indication donnée par Sénebier (5); de maniére que je n'ose décider s'il y avait soudure dé la tige d'une Renoncule et de celle d'une Paquerette ( adhé- rence bien difficile à admettre), ou bien si deux tiges de Renoncule , en se greffant , wont pas enveloppé la tige 04 le pédoncule de cette Composée. Une soudure que je ne dois pas passer sous silence s'est (1) Phys. végét., t. 1v, p. 426. (2) Charles Bonnet, Rech. us. feuill., p. 201, 310, pl. xxx, fig. 9 (3) Phys. arbr., p. 311. (4) Cours d'agric., t. VI, p. 525. (5) Phys. végét., t. 1v, p. 426, 428. DES MONSTRUOSITES. 289 9pérée dans un des massifs du jardin des plantes de Tou- louse; c'est un rameau de Sophora qui passait dans la bi- furcation de deux branches de Sureau et qui s'est greffé d'une manière trés-intime avec ces deux dernières. Les branches de Sureau n'ont presque rien perdu de leur forme habituelle; mais le rameau de-Sophora , quoique d'un bois beaucoup plus dur, s'est développé, dans sa partie soudée, Comme s’il avait éprouvé un trés-fort aplatissement. On a vu, dans le paragraphe précédent , que des graines *t du terreau se ramassaient quelquefois dans les crevasses des troncs. Qu’on suppose la germination d’une de ces grai- Mes, et on aura une nouvelle tige qui semblera sortir de l'ancienne. Cette tige grossira et pourra remplir toute la Cavité ; elle se collera , se greffera à ses parois, et cela d'au- lant plus aisément que celles-ci, par suite du développement &néral , tendront davantage à resserrer la cavité. On aura alors un petit arbre qui sortira du cœur d'un plus grand. Pline a parlé de ce phénoméne de dendrologie, dans son listoire naturelle (1). Il peut arriver deux cas dans ces unions : tantôt la graine développée appartient à une espèce différente de l'individu lans le sein duquel elle a germé ; tantót, et c'est le cas le Plus ordinaire, cette graine est de la méme espéce, et méme, ‘elon toute apparence, elle a été produite par le grand vé- Setal. Je me rappelle d'avoir observé , aux environs de Mont- ellier, un petit Cerisier qui sortait du milieu d'une vieille Suche de Vigneordinaire.On ne reconnaissait plus de traces de la cavité primitive. ; M. Delile a vu, au jardin des plantes de Leyde, un Lo- “cera alpigena dont le tronc présentait un mètre et demi de (i) Chap. xiv, liv. 17. 290 DES MONSTRUOSITES. hauteur et un métre de circonférence. Ce tronc est fendu; on l'a lié avec un cercle de fer, immédiatement au-dessous de l'origine des branches, pour empêcher que ces dernières n'augmentent la division par l'effet de leur poids. Un jeune pied du méme arbre s'est semé naturellement daus la fente ; et s'est soudé avec la vieille tige (1). Les troncs des arbres jeunes placés naturellement ou arti- ficiellement à une faible distance finissent souvent par 5e greffer. D’après les remarques faites par mon savant ami M. Webb , pendant son voyage en Orient , il parait que le grand Platane de Bujukdéré (ou Bouyoukdereh ), près de. Constantinople , dont j'ai parlé au commencement de cet ouvrage (p. 98), est formé par la jonction de plusieurs pieds. Ce qui fortifie beaucoup cette opinion, c'est qu'il existe de l'autre côté du Bosphore plusieurs groupes de jeunes Pla- tanes, plantés à dessein en cercle , trés-rapprochés , mais non encore soudés. Tout ce qui a été dit sur les tiges et les branches peut s’ap” pliquer aux axes souterrains. Mentzel a figuré, il y a long temps, deux racines de Carotte intimement soudées; lan? d'elles, dilatée à sa partie inférieure et digitée, embrass? l'autre étroitement vers le collet ; la ressemblance de la pre mière racine avec une main humaine a été un peu trop exagérée par le dessinateur (2). (1) Foy. en Belgique, 2 part., p. 67. (2) Ephém. nat. cur., déc. 1, ann. 9 et 10, p. 218, tab. x. CHAPITRE II. DES MONSTRUOSITES PAR EXCES DE SEPARATION OU PAR DÉFAUT D'UNION, C'EST-A-DIRE DES DISJONCTIONS. C’est un sujet bien digne de méditation qué F assujettis- Sement à des règles précises, conservé par la natüre au mi- lieu de ses désordres apparents. Voici de nouvelles anomalies *oumises à ces régles, comme toutes les monstruosités dont ous nous sommes occupé jusqu’à présent. | Les disjonctions sont des phénomènes inverses des sou- dures. Dans les unes, il y a diminution ou défaut de divi- ‘ion ; dans les autres, augmentation ou excès, où bieti issure dans un sedis ou il ne devrait pas en exister. On trouve des pétalés ordinairement bifides, comme ceux de | Alsine media, ou frangés, comme ceux du Dianthus x = he mn = ae I aa E € sso ST EE. = - È tam — 299 DES MONSTRUOSITES. monspeliensis (1), qui, sous certaines influences , doublent, triplent l'étendue de leurs divisions. C’est ainsi que j'ai vu, sur les fleurs marginales d’un Caucalis grandiflora, tous les pétales extérieurs , qui sont , dans l'état habituel , pro- fondément bifides, représentés par deux lobes distincts jusqu'à la base (2). ; Dans d'autres exemples, la disjonction s'établit sans qu'il y ait aucune fente, aucune frange, c'est-à-dire aucun com- mencement de division habituelle. Par exemple, les feuilles du Gingko biloba ou Noyer du Japon, qui ont une forme triangulaire ou trapézoide, justement comparée, par Kæmpfer et Smith, à celle des lobes des Capillaires, et qui sont fenducs ordinairement jusqu'à leur partie moyenne, éprouvení quelquefois des fissures accidentelles dans les porüons du limbe non fendues, lesquelles partagent la feuille en trois ou quatre lobes (3). Marchand a fait connaitre, dans les mémoires de l'Académie des sciences, un exemple de Mer- curiale à feuilles anormalement laciniées (4). Les monstruosités dans lesquelles une scissure habituelle est devenue accidentellement plus grande et a divisé com- plétement ou incomplétement l'organe ne présentent pas une importance aussi grande que les scissures établies dans des éléments entiers ou indivis. Tous les organes appendiculaires sont formés, comme on salt, de deux moitiés semblables, l'une droite et l'autre gauche. Dans la plupart des disjonctions, la scissure s'ef- fectue entre elles deux. Les organes présentent, en général, T4 t. i (1) Dans les pétales des Reseda, des Schixopetalon, la tendance à lä division est manifeste. (2) Mém. irrég. corolle. ( Ann. scienc. nat., t. xxvii, p. 237.) (3) Gouan, Descript., Gingko , Montp.; 1812, p. 5. (4) Mém. acad., 1119, p. 56,t. vr et vi. DES MONSTRUOSITES. 293 une nervure ou veine médiane qui marque la limite des deux moitiés élémentaires. C'est sur cette nervure que la di- Vision s’opère le plus souvent. Quand la disjonction est double ou triple, elle parait alors sur les autres parties du limbe , mais toujours plutót dans le sens longitudinal et de haut en bas que de bas en haut ; et surtout que dans le sens transversal. = On a décrit, dans différents ouvrages, des organes fo- liacés anomaux., dans lesquels se trouvaient des commence- Ments de disjonction; on les a considérés mal'à propos comme des exemples de soudure partielle. Il est difficile, il faut en convenir, de reconnaitre toujours, au premier abord, quand on voit une feuille en partie divisée, si c'est l'effet d'une disjonction commencçante , ou si l'on a sous les Jeux deux feuilles incomplétement soudées. On pourra étre Suidé dans cette distinction, d'abord par le nombre des Pièces qui composent la spirale ou le verticille auquel Por- Sane appartient. Ce nombre ést complet dans les disjonc - ` lions commencantes ; il est incomplet dans les soudures. En Second lieu, on devra examiner le point d'origine qui se lrouve différent dans l'un ou l'autre cas. Quand une dis- Jonction arrive, il n'existe qu'une seule base. Quand deux feuilles se greffent, on remarque presque toujours, à la partie inférieure de l'ensemble , deux points plus ou moins "approchés qui correspondent aux deux points d'origine des Organes primitifs. Même dans le cas d'une fusion bien com- Pléte (ce qui a lieu trés-rarement) , on observe presque tou- jours, dans la forme ou sur la tranche du pétiole commun , quelque indice qui annonce l'union. | On peut apprécier encore cétte différence par l'inspection dela nervure médiane: on n'en trouve ordinairement qu'une dans les feuilles disjointes , ou deux moitiés situées sur les bords intérieurs des lobes ; tandis qu'il y en a deux dans les 294 DES MONSTRUGSITES, feuilles cohérentes, ct elles sont placées dans le milicu des lobes. Cependant ces deux derniers caractères ne sont pas trés-rigoureux ; car, dans certains exemples de feuilles ano- males, il y a division dans la nervure, sans qu'il existe dis- jonction dans le parenchyme ; en d'autres termes, il peut se développer deux nervures, plus ou moins écartées, dans une place où il ne devrait en naître qu'une seule. Ainsi M. Steinheil a récolté, aux environs d'Avignon , une feuille de Cardamine des prés, dont la foliole terminale, au lieu d’être trinervée , présentait quatre nervures. Il n’y avait; dans cette anomalie, ni disjonction du limbe, ni soudure de deux feuilles, mais un simple partage en deux parties de la nervure du milieu (1). Des divisions semblables ont été observées par le méme botaniste, dans des feuilles de Lierre, de Plantago major , de Geranium nodosum (2). Il existe , dans certains végétaux , des organes normale ment unis, soit avec leurs homologues (gamopétalie), soit avec d'autres organes ( gynandrie). Sous certaines influences insolites, tous ces organes peuvent acquérir une liberté accidentelle; il en résulte alors une véritable disjonction: ( Engelmann. ) Ainsi, par exemple, on a décrit des Primevéres anomales dont tous les pétales, au lieu d’être réunis en un tube cylin- dracé, se trouvaient parfaitement distincts les uns des autres. C'est une gamopétalie rendue polypétalie par dis- jenction. | Il y a donc deux sortes d'anomalies par séparation de paf” ties habituellement continues : celle dans laquelle des of ganes éprouvent des scissures, des fentes qui les divisent (1) Ann. scienc. nat., t. XXVI, p. 68, fig. 2. (2) Ce phénoméne est une véritable Multiplication. Voy. le chap- - du livre 1v. DES MONSTRUOSITES. 295 en deux ou plusieurs parties, et celle dans laquelle des Organes normalement soudés reçoivent une liberté acci- dentelle. On conçoit que ces deux sortes de disjonctions peuvent exister simultanément. Les Primevéres, citées plus haut, offrent quelquefois non-seulement tous leurs pétales sé- parés, mais encore , dans chacun d'eux ou dans plusieurs d’entre eux, des divisions plus ou moins grandes, qui Viennent compliquer l'aberration. § Ier. — Des Disjonctions qui divisent les organes. J'ai signalé, au commencement de ce chapitre , les dis- jonctions que présentent quelquefois les feuilles de la Mer- curiale et celles des Gingkos. Lorsque ce phénoméne est bien puissant , l'organe peut offrir un grand nombre de fentes ou déchirures et devenir complétement lacinié ; c'est ce qui arrive, par exemple, dans certains pieds cultivés de Syringa persica. Les feuilles de ce Lilas se montrent Plus ou moins pinnatifides. J'ai remarqué des déchirures analogues sur un échantillon de Chenopodium Quinoa et sur un rameau de Rhus Cotinus, conservés par M. de Candolle. Dans le premier, les feuilles sont si nombreuses et les fentes Si profondes, que l'espéce est à peine connaissable; dans le second , les lobes , encore plus étroits, presque filiformes, ontdonnéàl'ensemble du rameau l'aspect d'une Ombellifère. On sait que les feuilles des végétaux abandonnés dans un mauvais terrain sont sujettes à se fendre ou à se découper. (Linné. ) Quelques auteurs ont assuré que la culture, dans Certains cas, déterminait aussi de son côté une semblable anomalie. J'ai constaté qu'en effet des scissures pouvaient naitre également à la suite soit d'un défaut , soit d’un ex- 296 DES MONSTRUOSITES. cés de nourriture ; ainsi, par exemple, les feuilles compo- sées du Robinier faux Acacia offrent de temps en temps leur foliole terminale avec une scissure médiane, occupant le quart, le tiers ou la moitié de la longueur. Je posséde deux de ces folioles , chacune bilobée, dont une a acquis un V0- lume presque double du volume habituel, et dont l'autre est réduite à la cinquiéme partie de son limbe. L'hypertro- phie et l'atrophie peuvent donc se combiner avec la disjonc- tion : je dois dire cependant que les divisions paraissent plus communes dans les défauts de nutrition. Les enveloppes protectrices de la fleur sont soumises comme les feuilles au phénoméne dont nous nous occupons: J’ai observé une petite fente à la lèvre inférieure d’une Lo- bélie ; le lobe ou pétale médian était coupé en deux (4). Steinheil a décrit une fleur de Brassica oleracea dont un pétale était remplacé par deux pétales plus étroits, par- faitement distincts jusqu'à la base ; chaque demi-pétale avait conservé exactement la place qu'il occupait dans l'organe primitif. J'ai cité plus haut un Caucalis grandiflora affecté de la méme anomalie. .— Linnéa vu, dans les Alpes, un Lychnis dioica dans lequel tous les pétales se trouvaient quadrifides (2). Ce grand bo- taniste a rencontré aussi, en Laponie, un Rubus arcticus anomal , à pétales découpés (3). - Il y a beaucoup d’autres plantes sujettes 4 produire des pétales fendus, frangés ou déchirés ; tels sont surtout les Pavots somnifére (4) et argemone (5), la Saponaire, les (1) Mém. irrég. corolle. ( Ann. scienc. nat., t. XXVIL, p. 237. (2) Flor. lapp., p. 145. (3) Loc. cit., p. 164, t. v, fig. 2. (4) Papaver laciniatis floribus. Bauh. , pin. 171. — Sweert, Floriteg., pars 2, t. xxit. — Weinm., Phytanth., tab. 795, C. (5) Lejeune, Flor. sp., p. 241. — Viguier, Hist. Pav., p. 47. , [^ DES MONSTRUOSITES. 297 OEillets. On peut citer encore le périanthe des Tubéreuses , des Narcisses , des Tulipes. Une variété cultivée de ces der- nières plantes, appelée Perroquet par les jardiniers, présente Ses lobes découpés , frangés et en méme temps bosselés et Crispés, sur lesquels on remarque parfois des espèces de Capuchons analogues aux cornets des fleurs éperonnées (1). Passons maintenant aux disjonctions des organes sexuels. J'ai vu des étamines fendues dans toute leur longueur ( Mathiola incana , Silene conica); chaque partie de l'or- Sane avait une demi-anthére et un demi-filet, ce qui réali- Sail parfaitement l'état normal de ces organes dans les Poly- Salées (2). Dans d'autres fleurs (Tulipa Oculus -solis, Lilium Pyrenaicum) , le phénomène s'est présenté moins complet, la disjonction s'étant opérée seulement dans l'anthére ou dans une partie de cet organe (3). Les pistils, comme les étamines, sont sujets aux disjonc- lions ; dans certains cas de végétations surabondantes , Pen- Yeloppe ovarienne. s'accroit, verdit, se fend et s'étale: Pen ai donné plusieurs exemples en traitant de la transfor- Nation foliacée. Parmi les plantes qui sont le plus souvent frappées de cette monstruosité, on peut citer le Phleum Pratense (Engelman n), le Lathyrus latifolius (de Candolle), le Trifolium repens (Seger), le Melilotus officinalis , V As- tragalus stellatus , les Dauphinelles, les Renoncules et sur- tout les Cruciféres. Dans la plupart des exemples rapportés, les ovelles ou les carpelles sont disjoints à l'endroit de la Cohérence naturelle , de manière que ces disjonctions n'ont (1) Hopk., Flor. anom., pl. vim. (2) St-Hilaire et Moquin, Mém. sur les Polygalées, p. 17, 18. (3) C'est l'état normal des étamines du Vaccinium Myrtillus. Ses "ithéres sont fendues depuis le sommet jusqu’à la moitié de leur lon- Sueur; les loges s’écartent vers le haut et forment deux petites cornes. (Turpin, Icon. végét., pl. xxu, fig. 2.) Um , c SERRE et me MET E 998 DES MONSTRUOSITES. pas lieu en réalité par division dans la substance méme de l'organe ; elles se rapprochent plutót des disjonctions qui isolent les parties ; car, ainsi que ces dernières, ce sont des dessoudures et non pas des divisions (1). On peut considérer aussi, comme de véritables disjonc- tions, les déchirures qui s'établissent dans les frondes des Fougères habituellement entières , par exemple dans le Sco- lopendrium officinale. (A. Juss. , Boivin.) § II. — Des Disjonctions qui isolent les organes. Les disjonctions qui donnent la liberté aux organes ha bituellement unis sont plus fréquentes que celles! dont il vient d’être question ; comme je l'ai déjà dit, elles ont aus! moins d'importance. Une fente s'établit quelquefois du haut en bas sur le côté extérieur de l'utricule des Carex. Cette fente arrive tantôt jusqu'au tiers ou jusqu'au milieu, tantôt jusqu'aux troi? quarts et méme jusqu'à la base (2). (Gay.) Cette disjon™ tion anomale tend à prouver que l'utricule n'est pas formé de deux feuilles opposées et alternes avec l'axe, soudée’ ensemble par leurs bords (Lindley), mais composé d’un° écaille unique, bicarénée, placée entre l'axe et l’ovaire embrassant ce dernier par ses bords, lesquels sont pliés €? avant et cohérents. (Kunth, Gay. } Il y a des calices monophylles (ou gamosépales) qui pré (1) Voy. le paragraphe suivant. . (t) Ce dernier état est normal dans le Kobresia. DES MONSTRUOSJTES. 299 sentent par accident tous leurs sépales désunis; M. le doc- leur Roussel en a recueilli un exemple remarquable dans Un Daucus maximus des environs d'Alger. Quand les fo- lioles calicinales des Roses se métamorphosent en organes foliacés, ces parties éprouvent toujours des disjonctions blus ou moins complètes, et alors le tube ou godet du ca- lice est remplacé par une rosette de cing feuilles étalées. Un Phénoméne de ce genre a été recucilli par M. Jaeger, dans Une fleur monstrueuse de Trifolium repens dont les pétales “aient changés en feuilles, les étamines avortées et les pis- tls amplifiés. | La disjonction calicinale n'est pas rare dans le Primula elatior (1), le Symphytum officinale, le Gentiana campes- tris (2). M. Engelmann fait observer avec raison que, dans les fleurs à calice supere, la disjonction convertit ce verti- cille en un calice inférieur (Campanula persicefolia, Torilis Anthriscus, Athamanta cervaria, Daucus Carota). On con- Coit facilement, d’aprés cela, que la physionomie de la fleur doit étre souvent changée. Dans certaines circonstances, l'anomalie est assez grave pour en imposer aux botanistes , au point de leur faire méconnaitre les espèces. C’est ainsi Wun Primula officinalis , à calices divisés jusqu'à la base, à été considéré, par un savant botaniste, comme une nou- Yelle Primevère ( P. Perreiniana). M. Moretti a fait con- Uaitre cette monstruosité et cette erreur. Dans certains OEillets doubles ou pleins, la multiplication des pétales est si considérable et leur dilatation si grande; au moment de l'épanouissement, qu'ils font effort contre le tube du calice et y déterminent une forte disjonction. Si ( 1 (3 ) Weinmann, Phytanth., 832, e. ; ) Engelmann, de Anthol., p. 41, t. 1, fig. 1. 300 DES MONSTRUOSITES. . Pon ne soutient pas la fleur à l'aide d’un fil, tous les pétales se déjettent de côté; quelquefois il s'opère deux ou trois scissions , et celles -ci ont lieu presque toujours sur la limite des sépales, c’est-à-dire à l'endroit de la soudure habituelle: Ce dernier exemple serait une anomalie, s'il se montrait congénial. | Un Colchicum autumnale monstrueux a présenté à M. Gay les caraclères suivants : calice fendu en quatre jusqu à une trés-faible distance de la base ; trois des parties, sim-. ples, formées d'un long onglet filiforme et d’un limbe lan- céolé, avec ou sans étamine à la base ; la quatrième partit formée des trois autres éléments calicinaüx , avec un seul onglet pour les trois limbes et avec trois étamines. C’est un acheminement vers le calice 6-parti du Bulbocodium et dU Merendera. | Les corolles monopétales (ou gamopétales) adoptent asse - | fréquemment les caractères de la polypetalie ; la disjonctio? arrive tantôt entre deux ou plusieurs pétales, tantôt dans tout le verticille. i M. Charles Desmoulins a décrit une anomalie curieus et élégante d'Orobanche rapum. (Wallr.) Toutes les fleurs; au nombre de 45, formaient autour de l'axe une spirale régulière de trois fleurs à peu prés par tour de spire ; elle étaient plus largeset plusra pprochées que dans l’état normal; et offraient une couleur lilas à peu prés égale intérieurement et extérieurement. La lèvre supérieure de la corolle était fendue jusqu’à la base, et les deux pétales, devenus libres» paraissaient trés-étalés et renversés sur les cólés, ensorte que l'axe se montrait à découvert derrière le pistilet les étamines; et que la fleur avait quelque ressemblance avec celle des Te” cerium. Sur uneautre tige voisine de la première, on observait des fleurs dont la lévre supérieure était partagée jusqu’à 13 DES MONSTRUOSITES. 301 base ; ; @autres qui étaient aux deux tiers, au tiers et même 3u quart ; enfin d'autres qui avaient conservé l'ordre nor- - mal (1). On peut rapprocher de ce phénoméne ce qui arrive à trains capitules dans lcs Cynarocéphales et dans les Co- Tymbiféres. Les petites fleurs tubuleuses, qui composent len- Semble floral des premières ou le disque seulement des se- "ondes, se fendent d'un côté, le tube s'ouvre, s'aplatit , Se dilate et se déjette en dehors , formant une languette nomale exactement organisée comme un demi-fleuron ; la Calathide a pris les caractères de celle des Chicoracées. J'ai déjà parlé de cette intéressante anomalie daus mon chapitre Sur les déformations (2). Il est digne de remarque que, dans la plupart des cas où Une seule disjonction se manifeste dans une fleur gamopé- lle, c'est presque toujours du côté qui regarde l'axe de la Plante. Les corolles des Chévrefeuilles sont assez sujettes au phé- homéne de la disjonction. On sait que ces verticilles présen- lent habituellement quatre lobes unis ensemble en une Sorte de lévre et un cinquiéme lobe plus ou moins dis- tinct des autres. Dans certains cas, les lobes cohérents devien- lent isolés et acquièrent la liberté du lobe solitaire. Il y a des fleurs où cette anomalie n'affecte qu'un seul lobe ; on ên trouve d’autres où elle agit sur tous. Généralement la dis- Jonction ne s'établit que dans le haut du limbe, la partie infé- "leure des pétales formant toujours un petit tube; mais, dans “*tlaines circonstances, le phénomène s Roti dans toute ‘étendue de l'organe, et la corolle n'est plus gamopétale. i (1) Essai sur les Orobanches. (Ann. scienc. nat., 2 série, t. Til, - 69.) (9) Foy. p. 167 302 DES MONSTRUOSITÉS. M. de Candolle a vu dans le jardin de Genéve des fleurs de Rhodora canadensis portées parle méme pied, avec divers degrés de disjonction; il a représenté une de ces fleurs mü- nie de cinq pétales soudés en une lèvre ou lame unilatérale, comme dans l'exemple précédent : une autre fleur est figurée avec quatre pétales unis et un pétale libre; une autre à trois pétales cohérents et deux pétales distincts. Ainsi nous avons dans la premiére corolle une seule disjonction , deux dans la seconde et trois dans la derniére (1). Ces anomalies de Rhodora nous présentent l’état habituel de plusieurs autres fleurs; la première rappelle les demi- fleurons des Composées, la seconde les corolles de certains Lonicera , et la troisième les fleurs des Lobelies. Dans d'autres corolles , la dessoudure devient plus gé- nérale. .M. Duby a observé des fleurs de Campanula medium don! tous les pétales se trouvaient complétement libres. Ces fleurs étaient sur le méme pied avec d'autres fleurs à l'état normal et d'autres qui offraient tous les degrés intermédiaires entre la disjonction et l'union (2). On arencontré des disjonctions analogues dans les Campanula rhomboïdalis (A.DC.) et Ra punculus(A.. St-H.), dans le Polemonium cærul eum (A. Juss.) dans le Digitalis purpurea (Chamisso, Boreau) et dans l'At tirrhinum majus (Seringe). On peut citer encore le Cob@4 scandens (3), le Solanum tuberosum (4), l'Anagallis phent- cea(5), le Convolvulus arvensis et Y Azalea periclymena (6): Philippe Mercier a communiqué à M. de Candolle des (1) Organ. végét., pl. xvi, fig. 2. (2) DC., loc. cit., pl. XLI, fig. 1. ; (3) Turpin, Atlas de Goëthe, 1837, p. 19. (4) Bot. zeit., 1829, p. 714. (5) Engelmann, de Anthol., p. 41. (6) Hopk., Flor. anom., 1817. DES MONSTRUOSITES. 303 lleurs de Phlox amena, cueillies sur le méme individu, qui avaient éprouvé un semblable phénomène : les unes offraient quatre pétales soudés deux à deux et le cinquième à l'état libre ; d'autres trois pétales unis et deux à peu près disjoints; d’autres les avaient tous dessoudés (1). Cette anomalie peut se montrer isolément sans être com- Pliquée d'aucun autre phénomène ; mais, dans beaucoup de Cas, elle se présente avec la métamorphose plus ou moins Complète des pétales en organes foliacés. (Engelmann.) L’Hybridité parait être encore une autre source de cette : anomalie; des Gentianes, produites par fécondation croisée, Ont montré une tendance prononcée à isoler leurs pé- : lales (2). Il y a également des androcées dits monadelphes ou dia- delphes , et des gynécées dits monogynes , dont les éléments Se developpent accidentellement avec des disjonctions plus ou moins complètes (3). Quand les Mauves commencent à doubler, un des pre- miers degrés du phénomène , c'est la disjonction des étami- - hes, Quand les fleurs des Légumineuses se métamorphosent ên bourgeons foliacés (chloranthies) , le faisceau staminal $e décompose en plusieurs organes distincts, qui se trans- lorment en autant de corps foliacés. Dans plusieurs fleurs anomales de Diplotaxis tenuifolia figurées par M. Seringe, les deux ovelles sont tantôt in- Complétement disjoints et tantôt distincts jusqu'à la base (4); dans le premicr cas, ces organes paraissent bour- Souflés , dans le second ils sont changés en feuilles. (1) DC., loc. cit., pl. xu, fig. 5. (2) Guillemin et Dumas, Obs. hybrid., p. 85, fig. 4. (3) On trouve aussi des androcées unis avec des gynécées (gynandrie) qui se dessoudent soit en tout, soit en partie. (4) Bullet. bot., pl. 1, fig. 8-12. ee E mE = je aaa pem Se Sat. 304 DES MONSTRUOSITÉS. Des phénomènes plus ou moins semblables ont été remar- qués dans beaucoup d'autres Cruciféres et particulièrement dans le Cardamine pratensis (1), PErysimum Barbarea ; PAlyssum incanum , le Peltaria alliacea (2), le Brassict oleracea, le Cheiranthus Cheirit (3). Turpin a observé, dans un Fraisier de Plymouth, que les ovaires et méme les ovules étaient épanouis en petites feuilles vertes entièrement distinctes les unes des au- tres (4). : Le même botaniste a vu dans la Pivoine officinale les enve- loppes ovariennes, plus ou moins fendues, offrir sur les deus - bords six ou sept ovules plus ou moins étalés en autant de petites feuilles vertes et dentées; il a trouvé, dans le Poly” gonum Fagopyrum, des ovaires avec des scissures plus où moins profondes; qui laissaient voir l'ovule déformé (5). La disjonction des ovaires peut passer pour une des ano- malies les plus fréquentes ; on l’a trouvée dans l’ Aquilegi@ vulgaris (Jeger), le Delphinium crassicaule (Roeper), le Del- phinium Ajacis (Schultz), le Gynandropsis pentaphylla (Gay) le Primula acaulis (Spenner), le Symphytum officinale , € Stachys sylvatica , Orobanche gracilis (Schimper), le Gili glomeriflora, Y Anagallis phenicea (Engelmann), la Sapo- naire, les Tulipes, les Lis, les Hémérocales , les OEillets et une foule d'autres plantes. En général, le phénomène se complique de la transfor- mation des enveloppes ovariennes en organes foliacés. Avec M. Engelmann on peut distinguer trois degrés dans cette (t) Spenner, Fl. friburg., p. 921. (2) Bot. zeit., 1829, p. 434. (3) Engelm., de Anthol., p. 40. (4) Ann. hort., juillet 1830. (5) Mém. greffe, Ann. scienc. nat., i. XXIV, p. 333. DES MONSTRUOSITES. 305 anomalie: 1» le cas dans lequel les ovelles se séparent, chacun restant fermé; 2° le cas dans lequel l'ovaire demeure fermé, mais perd ses cloisons et ses moyens d'union intérieurs (1); 3° le cas dans lequel les ovelles se présentent ouverts et fo- liacés (2). ( Quand les ovaires se changent en fruits, les disjonctions, Si elles sont complètes, conservent généralement leur ca- ractère monstrueux, à moins que des cohérencés acciden- lelles ne viennent réunir de nouveau les parties qui sont distinctes; si les disjonctions sont incomplètes, elles peu- Yent augmenter ou diminuer leur étendue. La disjonction est plus facile dans les péricarpes sees que dans les fruits charnus : quand clle arrive dans ces der- ers pendant leur jeunesse , la tunigue ovarienne est sou- Vent transformée en lame foliacée et perd la faculté de de- Venir charnue; c'est ce qui nous est offert surtout par le Prunus Cerasus (3) et Amygdalus persica (4). Il y a cepen- dant des fruits déjà charnus dont les carpelles se disjoignent. M. de Candolle a bien voulu me communiquer les dessins de deux monstruosités de ce genre; la premiére réside dans Une Aubergine plus courte qu'à l'ordinaire, dont l'écorce est "ompue latéralement. Les cing placentas sont un peu déviés (1) Un exemple trés-curieux de ce second mode a été observé, par M, Gay, dans un Stachys sylvatica. Cette plante croissait dans une haie, Aux environs d'Orbe (canton de Vaud). Par suite d'une disjonction im- Parfaite, les deux ovelles bilobés se sont changés en une capsule à peu Près uniloculaire. Les ovules ont perdu leur position habituelle. La partie Supérieure du fruit est encore quadrilobée. Cette nouvelle capsule réalise, JWsqu’a un certain point , l’état normal de plusieurs Antirrhinées. — Un fait semblable avait été déjà figuré par M. Schimper. (2) De Anthol., p. 31. (3) Linnea, t. v, p. 175. (4) Engelmann, De Anthol., tab. 1, fig. 4, 5- 306 DES MONSTRUOSITES. de leur situation droite et font saillie hors de la fissure , sans cesser d'étre unis ensemble; ils portent à leur surface le$ graines disposées comme dans l'état normal. L'autre exem- ple est un fruit de Mélastomacée cultivée , également fendu sur le côté, mais dont le corps, formé par la réunion des pla- centas, n'a pas dévié de sa direction habituelle. La disjonction des carpelles n'est pas rare dans les Au- rantiées ; elle a lieu tantôt régulièrement , tantôt avec irré- gularité; dans l'un et l'autre cas, les parties disjointes 5° tiennent encore par la base, et les sommets des carpelles se montrent plus ou moins distants et plus ou moins pointus (fructus maniformis, digitatus, distortus) (1). Dans les Rosacées pomacées, quand le calice avorte el qu'il n'entoure plus les carpelles d'une lame épaisse el charnue, ceux-ci s'écartent, se disjoignent et forment au- tant de petits fruits distincts disposés en verticille. Les anomalies par isolement des organes habituellement soudés ne constituent pas des monstruosités bien graves surtout quand le phénomène se manifeste sans aucune cont plication. Les botanistes philosophes, qui regardent les verti- cilles à organes habituellement cohérents comme des dévia- lions constantes du type régulier, ne doivent voir, dans Je phénomènes dont il vient d’être question, que des retour’ vers l'ordre primitif. el (1) Voy. Ephém. nat. cur., déc. 1, ann. 9 et 10, p. 30, tab. 5, déc. 2, ann. 2, p. 35, g. 5, 1-7. CHAPITRE HI. DES MONSTRUOSITES PAR CHANGEMENT DE SITUATION OU DES DÉPLACEMENTS. Une des études les plus importantes en botanique est sans contredit celle de la position normale des organes ou des en- Sembles organiques, puisqu'elle fournit à la taxonomie excellents moyens de classification (Jussieu). Mais cette Position est-elle inyariable? a-t-elle toujours la même va- leur? n'est-elle pas altérée sous certaines influences? Il Suffit de connaitre méme superficiellement la structure géné- tale des végétaux, pour savoir que, dans diverses circon- Stances, les organes peuvent ne pas occuper tout à fait leur Place habituelle , et que d'autres fois, sans avoir changé de 308 . DES MONSTRUOSITES. position, différents phénomènes ont eu lieu, qui les font paraitre déplacés. Les anomalies de position ont été appelées ectopies dans la tératologic animale. Ces anomalies ne sont pas fréquentes dans les végétaux ; ce qui tient sans doute à leur genre de structure. Chez eux , les organes fondamentaux ne sont pas placés intérieurement comme dans les animaux. Presque toutes leurs parties se font voir à l'extérieur ou à la périphé- rie; elles jouissent généralement d'une assez grande liberté et peuvent se développer facilement dans leur place habi- tuelle. D’après cette organisation, les végétaux doivent être peu sujets aux déplacements par atrophie ou par hypertro- phie des organes enfermés et par diminution , augmentation ou déformation des cavités qui les contiennent. Ils n'offrent pas ces déviations du type spécifique, complexes et congé- niales, non apparentes à l'extérieur (hétérotaxies), où les par- ties sont situées en sens inverse (situs inversus) (1). Ils ne peuvent pas non plus avoir des organes extérieurs embrassés en tout ou en partie par une loge destinée à d'autres élé- ments, ou des organes intérieurs qui s'échappent de leur cavité pour faire hernie ou saillie extérieure. Les ovules sont peut-étre les seules parties capables d'éprouver ces derniers déplacements. : La disposition verticillaire ou spirale des organes peut bien entrainer avec elle une certaine géne; mais, comme cette góne est déterminée par une pression dans plusieurs sens ; la partie comprimée ne doit changer que bien difficilement sa position. On remarque, en effet, que, lorsque la pression est trés-forte, l'organe diminue de volume, s'atrophie et méme finit par avorter complétement , plutót que d'adopter une place différente de la sienne. On peut appliquer, avec ri- (1) Isid. Geoffr. St-Hilaire, Traité de lérat., t. 1, p. 45. DES MONSTRUOSITES. 309 Sueur, aux végétaux cette loi déduite par M. Geoffroy St- Hilaire. Un organe est plutôt anéanti que iransposé. C'est celte persévérance dans leur situation qui a fait regarder l'insertion ou exsertion des organes et leur position relative comme un caractére de la plus haute gravité (1). Il n"y.a done qu'un petit nombre de cas dans lesquels les verticilles ou les éléments des verticilles puissent offrir un véritable déplacement. Quand un organe ou un appareil se déplace, il est porte en partie ou en totalité, plus haut ou plus bas, plus à droite ou plus à gauche, plus en dehors ou plus en dedans, que dans l'état normal. | M. de Candolle a figuré, dans son Organographie (2) , une anomalie trés-remarquable d'Iris chinensis qu'il consi- dere comme un exemple de déplacement, et que je serais tenté de regarder comme un fait de double avortement. C'est une fleur dans laquelle il manque un tiers des parties qui composent habituellement cet appareil; ces parties se pré- sentent au-dessous sous forme de bouton demi-avorté. Ne - pourrait-on pas voir, dans cette aberration, deux fleurs incomplètes, qui ont perdu chacune un certain nombre de pièces, lesquelles se sont développées dans l’autre? Ce fait se- rait analogue à ce qui arrive normalement dans les inflo- rescences polygames. Certaines fleurs ne présentent pas de pistils et font voir des étamines bien saillantes (/. miles), à côté d'autres fleurs sans étamines qui offrent des pistils bien conformés (fl. femelles); c'est un balancement organique dont l'étude mériterait d'étre suivie. La torsion des axes entraine toujours avec elle le dépla - (1) « Sciant nullam partem universalem magis valere quam illam à « situ. » (Linn,, Class. Plant., p. 487.) (2) Pl. xL. VERS M t€——À à 310 DES MONSTRUOSITES. cement des parties appendiculaires ; on a vu plus haut que dans une Menthe à tige tordue (de Candolle ) toutes les feuilles étaient déjetées d’un seul coté, et que dans une Préle fluviatile affectée de la méme anomalie (A. Juss.) les spirales s'étaient contractées en verticilles. L'atrophie ou l'avortement peuvent causer aussi, de leur cóté , le changement de position. Si un organe prend trés- peu de nourriture et demeure bien au-dessous de son volume habituel, les parties voisines „pourront profiter de la place qu'il leur laisse et se porter un peu vers lui. Le déplace- ment deviendra plus sensible, si l'organe, avorté tout à fait, offre un espace vacant un peu considérable à l'oceupation de ses voisins. Ce qui favorise beaucoup cette déviation dans les parties rapprochées des organes atrophiés ou de la place des organes ayortés, c'est qu'elles absorbent, en général, la quantité de matiére nutritive devenue surabondante par l'effet de l'atrophie ou de l'avortement. Dans une fleur monstrueuse de Cistus vaginatus , déjà ci- tée, une partie des étamines était développée sous forme @un renflement glanduleux ; ce renflement avait soulevé et poussé du cóté opposé le gynécée et les autres éta- mines (Dunal). Cette organisation me rappelle la structure normale de ` l'androcée des Polygala et de plusieurs autres genres de la meme famille. A Ja place d'une étamine on de deux demi- étamines, on distingue, du côté de l'axe, un corps glan- duliforme plus ou moins apparent: c'est ce corps qui dé- termine, en grande partie, l'obliquité de l'appareil floral. Quand un axe est arrété dans son développement , les pièces appendiculaires qu'il supporte doivent nécessaire- ment offrir une position différente de leur position habi- tuelle. J'ai vu, dans Vherbier de M. A. de Jussieu, un rameau de Saule dont l'extrémité rabougrie offrait un DES MÜNSTRUOSLEES. 311 bouquet de feuilles trés-rapprochées , bien développées , un peu plus courtes que de coutume et disposées en ver- ticilles. i Un organe ou plusieurs organes qui se développent ac- cidente!lement avec excès peuvent aussi entrainer des chan- gements de position plus ou moins appréciables. Vai parlé, à l'article Fasciation, d’un Buplevrum falcatum dont toutes les spirales étaient transformées en verticilles. Dans les dilatations analogues, c’est un changement inverse qui a lieu ; les éléments des verticilles s'écartent les uns des autres et produisent des spirales ; souvent aussi le phéno- mène a lieu sans aucun ordre, ct la symétrie des organes ap- Pendiculaires n'est pas remplacée par une autre symétrie, Un des exemples les plus remarquables qu'on puisse rap- Porter est celui qui a lieu quand l'axe d'une fleur, au lieu de Se terminer brusquement , adopte un développement anomal excessif, au point de dépasser cette dernière (1). Les organes lloraux sont alors sujets à s'écarter les uns des autres, et les Verticilles deviennent quelquefois des spirales. Les pistils , dilatés en lames foliacées , emportés hors de leurs places ha- bituelles, sont souvent disposés sur le prolongement de l'axe, Comme les feuilles sur un scion. On observe cette anomalie dans les Roses, les Tulipes, les Juliennes... Quand la dilatation n'est pas assez puissante pour faire üaitre une prolification , elle peut suffire néanmoins, dans Certaines circonstances, pour développer les entre-nœuds lloraux et pour déterminer le déplacement des verticilles ou des parties des verticilles. Ce déplacement arrive tantót uniformément et tantôt irréguliérement. C'est ce phéno- mène que M. Engelmann a désigné sous Je nom d'apos- lasis (2). (1) Foy. le chapitre sur les Prolifications. (2) De Anthol., p. 42. 312 DES MONSTRUOSITÉS. L'anomalie dont il s'agit produit, dans certains cas, Pé- cartement du calice et de la corolle ou de quelques-uns des éléments de ces deux verticilles, comme on l'a observé dans le Convallaria maialis, le Tulipa Gesneriana, V Anagallis phemcea. (Engelmann. ) Dans d'autres cas, ce sont les ro- settes sexuelles qui se trouvent emportées à une certaine distance des verticilles protecteurs , ou qui s'éloignent l'une de l'autre, comme cela a lieu quelquefois dans les Rosacées, les Caryophyllées, les Renonculacées. (Jeger.) Dans d'autres fleurs anomales, tous les verticilles se montrent à la fois plus ou moins distants et déplacés (des Cruciféres, des Benoites, des OKillets). Enfin il est des fleurs dans les- quelles Pallongement axile est si grand et si irrégulier, que tous les éléments des verticilles se trouvent écartés et pour ainsi dire éparpillés (Lilium candidissimum, in herb. DC.) C'est sans doute à un phénoméne de ce genre qu’il faut at- tribuer Pétat d'un Arenaria tetraquetra apporté des envi- rons de Mende nar M. Boivin, ct dans lequel tous les ver- ticilles floraux étaient changés en Spirales imparfaites. Dans les inflorescences en têtes serrées, la dilatation du réceptacle peut déterminer aussi un déplacement plus oU moins fort; mais ce déplacement s'opére alors entre les fleurs et non pas entre leurs éléments. Quand cet excès d'ac- croissement est uniforme, les floscules conservent leurs re- lations ; elles paraissent seulement plus distantes que dans l'état normal. Le capitule tend à se changer en ombelle- Quand il y a inégalité dans la dilatation du support , ou que le gonflement ne s'effectue que dans une des parties de celui-ci, le défaut de symétrie devient alors plus remar- quable. On voit, dans ce cas, des fleurs qui ont persévéré dans leur situation ordinaire et d'autres qui sont empor- tées hors de leur place. Dans les épis, surtout dans ceux qui sont serrés, l'accrois 9 DES MONSTBUOSITES. 313 sement de l'axe devient aussi une cause de déplacement (1). La même monstruosité peut résulter encore de certaines soudures insolites. On sait que les pétales alternent générale- ‘Ment avec les folioles du calice. Supposons que, dans une Corolle polypétale, celle d’une Aigremoine, par exemple, deux de ces organes naissent unis de manière à n'en for- mer qu'un seul. Si l'ensemble devient concave, nous au- rons l'image de la carène dans une corolle de Papilionacée ; etsi ce double pétale est considéré, par un botaniste peu eXercé, comme un pétale unique, ce pétale ne sera plus alterne avec les piéces du calice; il se trouvera devant le Sépale qui aurait correspondu à l'intervalle masqué par la soudure. Que ce méme botaniste compare ensuite la Situation de ce pétale concave avec celle des trois autres éléments de la corolle , il sera tenté de regarder cet organe Comme un organe déplacé : un peu d'attention suffirait cependant pour le tirer de son erreur. Mais, si la soudure des deux organes était intime, s'il y avait fusion complete, il deviendrait très-difficile de caractériser le phénomène , Surtout si les autres pétales avaient avorté en entier. Steinheil a cueilli, au Havre, le long des falaises sur lesquelles s’élève le fanal, un échantillon de Salvia verbe- naca, dont les feuilles, soudées à différents degrés , pré- Sentaient des exemples fort curieux de déplacement déter- miné par cohérence. Deux de ces feuilles, placées au bas dun rameau , se trouvaient incomplétement greffées ; elles étaient confondues dans leur tiers inférieur et partagées en deux lobes distincts à la partie supérieure. Chacun de (1) Il arrive également dans cette derniére inflorescence un autre changement de situation; à la suite du développement inverse ou du défaut de nutrition de ce méme axe, les fleurs se rapprochent, l'inflo- rescence se raccourcit et l'épi prend l'aspect d'un capitule. 314 DES MONSTRUOSITES. ces lobes paraissait presque aussi grand que le limbe d'une feuille ordinaire et caractérisé par une forme absolument semblable. Au sommet du mérithalle supérieur , on remar- quait une feuille en apparence unique, sessile, très-large relativement à sa longueur, évidemment produite par la cohérence complète et la fusion de deux feuilles normales. Cette feuille et la feuille bilobée étaient alternes, distiques et embrassantes. On sait que ces organes sont opposés dans les Sauges. Steinheil a expliqué le fait de l'alternance; €n supposant que les feuilles opposées de chaque paire habi- tuelle se sont dirigées l'une vers l'autre pour se souder, el qu'il en est résulté un déplacement forcé. La déviation de$ organes s'est opérée , pour la premiére paire , dans un sens; et, pour la seconde, dans le sens opposé, et ainsi de suite pour les autres paires; ce quia produit nécessairement une alternance distique (1). Le déplacement d'un organe peut étre réduit à un simple changement de direction. La position est restée la même; mais au premier abord on dirait qu'elle a été gravement modifiée, Ce changement est déterminé ou par une disposition par- üculiére de l'organe ou par l'action des organes voisins. Ainsi, parexemple, certaines parties appendiculaires, telles que les pétales, sont droites dans les premiers temps de lcu" évolution ; elles s’étalent quand elles ont atteint leur volume normal. Si une cause quelconque arréte ces organes au mi- lieu de leur accroissement > ils se présenteront plus ou moins atrophiés et avec une situation verticale et non horizontale: J'ai vu une corolle de Rosa alpina avec deux pétales nor- (1) Obs. sur la Phyllotaxis, Ann. scienc. nat., 2 sér., t. 1v, p. 142 pl. v, fig. 1,2, DES MONSTRUOSITES. 315 Maux, couleur de chair et étalés, et deux autres pétales trés- Petits , rudimentaires , verdâtres et dressés (4). Dans l'Orobanche monstrueuse , décrite par M. Charles Desmoulins, par suite de la disjonction de la lévre supérieure ét du renversement des deux pétales, le style, n'étant plus lorcé, par la voûte de cette lèvre, ase recourber en dedans, est testé droit ou presque droit, ce qui le rend plus élevé que *$ autres parties de la fleur et le fait paraître plus long qu’à ordinaire. Le stigmate, au lieu d’être fléchi vers la terre, Parait plus ou moins tourné vers le ciel. Les étamines sont droites, et la petite pointe'des anthéres, au lieu d’être dirigée n avant, s’est tournée vers le côté de l'axe (2). En terminant ce chapitre je dois signaler certains dépla- ments apparents qui pourraient induire en erreur les bo- lanistes peu familiarisés avec les lois de la tératologie : je Yeux parler de ceux qui semblent exister toutes les fois ue des organes changent de nature et de fonction et se Nétamorphosent en d'autres organes (3). Quand les pétales € transforment en étamines ou que les étamines se méta- Norphosent en pétales, on trouve, dans un cas, un androcée "à la place d’une corolle, et dans l'autre une corolle au lieu Van androcée. Si ce phénoméne se combine avec l'avorte- Ment complet, dans le premier exemple de l'androcée ha- ituel, et dans le second de la corolle normale, on pourra toire qu'il y a eu déplacement des verticilles , tandis qu'en Téalité ces ensembles organiques n'ont pas changé de po- sition. (1) Dans les Légumineuses papillionacées, les pétales de la carène et ês deux ailes sont normalement moins développés que Pétendard; Ussi ces pétales se trouvent plus ou moins verticaux, tandis que Péten- ard est généralement horizontal. : (2). Obs. sur les Orobanches, loc. cit., t.2, p. 50- (3) oy. le chapitre sur les Métamorphoses: LIVRE Iv. DES MONSTRUOSITES DE NOMBRE. Les monstruosités numériques présentent deux ordres d'anomalies inverses l'un de l'autre : les monstruosités par diminution du nombre des organes ou par disparition, € les monstruosités par augmentation ou par apparition ; les premières sont les avortements , et les secondes les multipli- cations. La soustraction ou l’addition d’un organe ou de plusieurs organes à un système quelconque influe bien souvent SU' la symétrie de ce système. L’ordre est interverti et les co^ nexions sont changées. | DES MONSTRUOSITES. 317 Dans quelques circonstances , l'avortement ou la multi- Plication s'effectue d’une manière uniforme dans un cer- lain nombre d'organes homologues ; le phénoméne n’en- traîne pas alors l'irrégularité de l'appareil. Un nouvel ordre remplace l’ordre ancien. CHAPITRE Ie. DES MONSTRUOSITÉS PAR DIMINUTION DE NOMBRE OU PAR DISPARITION, C'EST-A-DIRE DES AVORTEMENTS. ARTICLE Ie. AVORTEMENTS DES ORGANES APPENDICULAIRES. Certains organes ou verticilles d'organes se présentent quelquefois aux yeux des observateurs sans avoir le nombre des éléments qui les caractérise d'ordinaire ; ils peuvent méme manquer tout entiers sans laisser aucune trace de leur existence. (De Candolle.) Ces anomalies , par diminution ou par disparition , pro- viennent de deux sources. Citons des exemples : DES MONSTRUOSITES. 319 Supposons deux fleurs de Bouillon-blanc, toutes deux Privées des organes staminaux. Daus l'une on trouve a la Place des étamines une rosette de corps pétaloides plus ou moins semblables aux éléments de la corolle ; dans l'autre, On observe, entre ce dernier verticille et le gynécée , une Sorte de ligne circulaire, couverte d’une humeur mielleuse; Cest l'espace habituellement occupé par l'androcée. Dans la Première fleur nous avons une absence apparente des orga- Nes staminaux, et dans la seconde une absence véritable. Les étamines de l'une se sont transformées en pétales ; elles *Xistent toujours, mais avec d'autres caractères; les étami- nés de l'autre ont réellement disparu ou, pour mieux dire, elles ne se sont pas développées. Ce dernier phénoménea êlé désigné sous le nom d'avortement. Le changement des étamines a été appelé métamorphose. ll a été traité, dans un chapitre spécial de cet ouvrage, des différents modes de transformation ou métamorpho- Ses (1); je ne m'occuperai, dans celui-ci, que des diminutions | 9u disparitions produites par avortement. Les anomalies numériques par avortement sont assez Communes. On a reconnu qu'en général le nombre absolu des organes se montrait d'autant plus variable que ce nom- bre était plus élevé, et d'autant plus constant qu'il s'appro- chait davantage de l'unité. Il y a plus souvent 19 étamines, dans une fleur qui en offre normalement une vingtaine, que 4 pétales dans une corolle où l’on n'en voit que 5. Il existe deux sortes d'avortements. Dans le premier, Por- Sane est visible pendant sa jeunesse. En suivant son embryo- Sénie , on le voit s'arréter à une époque et disparaître gra- duellement. Ainsi plusieurs plantes des contrées chaudes, enfermées dans nos serres, donnent des fleurs avec des gy- (1) Foy. le chap. ur du livre i. 390 DES MONSTRUOSITÉS. nécées remplis d'ovules développés normalement. Plus tard, soit que la fécondation ait été imparfaite ou la température insuffisante, ces ovules ou une partie d'entre eux éprouvent des arrêts d’évolution et se flétrissent. Le fruit se gonfle , devient mùr, mais ne présente plus de graines ou n’en con- tient que quelques-unes. Dans l’autregenre d’avortement, la formation s’est arrêtée à une époque où l'organe n'est pas appréciable pour nos sens, et sa présence ne peut être constatée , quel que soit le momentoü la plante sera soumise à l'examen. Dans certaines M fleurs accidentellement privées de gynécée, il est impossible, en disséquant les boutons, même les plus petits, d’y décou- vrir aucune trace des organes pistillaires. Vai montré, dans un autre chapitre, les rapports qui unissent avec les atrophies ces deux modes particuliers d'a- vortement. La disparition est un avortement complet ; l'atro- phie est un avortement incomplet. Les cas d'avortement complet, ou les organes sont visibles à une époque de leur vie embryonaire , forment la nuance intermédiaire enire Patrophie (1) et l'avortement proprement dit, c'est-à-dire le cas où l'organe n'est jamais appréciable. Les suppressions n umériques occasionnent ordinairement la perte de la symétrie, à moins que toute une rangée d'or- ganes ne disparaisse en méme temps. Comme il est bien rare qu'un élément fasse défaut sans que ce défaut ne soit accom- pagné de l'avortement complet de quelques autres parties. et quelquefois méme de disjonctions , d'hypertrophies ou de métamorphoses , le phénomène qui nous occupe peut avoir une complication qui le rend trés-important. Il est une circonstance, cependant, dans laquelle l'absence d'un organe , au lieu de déranger la symétrie d’un appareil; (1) Voy. le chap. 1 du livre t. DES MONSTRUOSITES. 321 influe, au contraire, sur son établissement : c'est lorsqu'un Système présente normalement des parties en sus de celles téclamées par le type numérique et que leur développement à rendu l'ensemble irrégulier. Si un avortement supprime Ces parties , il est clair que la symétrisation du systéme en Sera la conséquence nécessaire. Cette anomalie pourra étre considérée comme un retour à l'ordre primitif par les bo- lanistes qui regarderont l'état normal du système comme Une déviation constante de cet ordre. Les avortements peuvent agir sur les organes d'un ver- - ticille quelconque ou sur les rangées de tous les verticilles. § Ie. — Des Avortements des organes dans un verticille. Feuirces. Les feuilles manquent assez souvent; mais leur absence n'est pas toujours bien apparente à cause du grand hombre de ces organes. Ce genre d'anomalie est commun aux feuilles simples et iux feuilles composées. Dans les feuilles simples, un verticille ou une spirale peu- Vent étre privés d'un élément ou de plusieurs; tantót c'est la Rosette tétraphylle du Paris qui a perdu un de ses limbes (Bauhin), tantót c'est la spire pentaphylle de tout autre vé- 8étal qui est réduite à 4, à 3 ou à 2 éléments. Dans les feuilles composées, 11 manque quelquefois une foliole (Bonnet), et d'autres fois plusieurs ; quand la feuille Normale est formée de trois folioles, l'avortement peut agir Sur celle du sommet ou sur les folioles latérales. Dans le pre- mier cas, l'organe représente l'état habituel des Clifforties bifoliclées ; dans le second , il a adopté celui des Orangers. 21 499 - DES MONSTRUGSITES. Enlin, sí par hasard toutes les folioles d'une feuille com- posée viennent à disparaitre à la fois, la plante se trouve alors par monstruosité dans les conditions organiques de quelques Clifforties ténuifoliées et des Acacias phyllo- dinés. SEPALES. L’absence des sépales est plus rare que celle des feuilles; elle arrive aussi moins fréquemment que celle des partics internes de la fleur. La position extérieure du calice l'expose beaucoup moins à souffrir de la pression des autres verticilles. L’Ambrina ambrosioides , le Chenopodium glaucum , le Bli- tum polymorphum et généralement les fleurs disposées en ca- pitules fort serrés, nous fournissent des exemples de cet avortement. Ces trois Chénopodées ont une inflorescence en glomérules trés-compactes. Au milieu de ces glomérules, on trouve parfois de petites fleurs auxquelles il manque ur deux sépales et méme trois. Des fleurs proliféres d Arabis alpina, rapportées du mont Salève, prés de Genève, ont offert aussi à M. Seringe des ct lices privés, tantót d'un seul sépale, tantót de deux et quel- guefois de trois (1). Pirates. On trouve assez fréquemment des corolles qu! ont perdu un ou plusieurs de leurs organes. Qu'on examine avec un peu d'attention, un Jasmin officinal fleuri et Po” y découvrira bientôt, au milieu des innombrables fleurs qu’ le décorent, quelques corolles privées d'un lobe ou d'u? pétale. Ces corolles offrent alors leurs éléments rangés €? croix. Assez généralement le manque d'une pièce au calice entraine avec lui le manque d'une partie à la corolle. L4 plupart des Jasmins tétrasépales ou tétraphylles sont €? méme temps tétrapétales. (1) Bullet. bot., t. 1, pl. m, fig. 5, 6, 8. DES MONSTRUOSITES. 323 Dans une fleur de Diplotaxis tenuifolia, M. Seringe a ob- Servé l'avortement de deux pétales (1); le verticille était done réduit à la moitié de ses éléments. Cette fleur man- quait en méme temps de trois sépales. J'ai rencontré plu- Sieurs fois la méme plante avec des suppressions semblables ou analogues, et j'ai même remarqué que l'absence des pétales coincidait quelquefois avec l'avortement des éla- mines. On peut dire, d'une maniére générale, que les Suppressions d'un verticille quelconque de la fleur se font loujours plus ou moins sentir dans les verticilles situés au- dessus ou au-dessous (de Candolle). M. Boivin m'a montré des fleurs de Haricot, cueillies au jardin des plantes de Paris, dont la caréne avait disparu entiérement. J'ai vu, au Jardin de Toulouse, une corolle monstrueuse de Pois privée à la fois de sa carène et de ses | ailes, réduite à istonda el lionis qui conséquent, l'état Eoo! de l'Amorpha. 44 AA & dep ÉrAuINES. a MN présente bien souvent des étamines en nombreinférieur au nombre habituel (apanthéroste, Ré). Des fleurs anomales de Diplotaxis tenuifolia , étudiées par MM. Seringe et Heyland , avaient plusieurs organes stami- naux non développés ou seulement atrophiés (2). D'aprés les observations de MM. Cosson et Germain , l'an- drocée des Cerastium est sujet à perdre une étamine ; pres- que toujours en méme temps la corolle est privée aussi d’un élément, et la fleur se trouve à la fois tétrapétale et té- trandre ; ce double avortement se combine souvent avec ce- lui d'une des branches dans chaque dichotomie ; ce qui donne Une apparence oblique aux divers axes de la plante. Ce fait à été remarqué surtout dans les Cerastium glomeratum , (1) Bullet. bot., ee cit., fig. (2) Bullet. bot., t. 1, p. nl I pu en A £ - —————— RE —— i 394 ' DES MONSTRUOSITES. Thuil., et varians, C. et G. Ce sont des fleurs accidentelle- ment privées d'un élément staminal , qui ont conduit Cur- tis à établir unc espèce séparée sous le nom de Cerastium tetrandrum, . M. Auguste de St-Hilaire a cueilli des individus de Carda- mine hirsuta , dont les fleurs nées trois à trois avaient perdu chacune deux étamines ; leur androcée était tétrandre. D'aprés Adamson, le Mollugo Cerviana présente cinq éta- mines au Sénégal. On sait qu'en France il n’en a plus que deux; il a donc perdu trois étamines. 1l en est de méme dans. certaines monstruosités de Digitalis purpurea. La fleur n’a plus qu'un androcée diandre (1). Selon M. Gay , lorsque le Gypsophylla aggregata de Linné (Arenaria tetraquetra b aggregata) se développe sur les mon- tagnes élevées , au lieu d'offrir cing sépales , cinq pétales et dix étamines, il ne présente que quatre sépales, quatre pé- tales et huit étamines. Cest alors l'Arenarta tetraquetra « uniflora (2). Lapéyrouse assure avoir trouvé une variélé de cette plante avec quatre étamines seulement (3). Je n'en finirais plus, si je voulais rapporter tous les exenr ples signalés par les autéurs, relatifs aux suppressions des Organes staminaux. Pisnrs. Les pistils, placés au centre de l'appareil floral; entourés, pressés par tous les autres verticilles , devaient étre sujets à de nombreux avortements. M. Gay fait men” tion de quelques fleurs d’Arenaria tetraquetra, avec deux styles et uné capsule:5-valve ou 4-valve, au lieu de trois styles et d'une capsule 6-valve (4). . (1) Lindley, Digit. monogr., p. 10. . (2) Hist. de V 4. tetraquetra (Ann. scienc. nat., t. 111, p. 27). (3) Flor. Pyrén., t. 1, p. 251. | (4) Loc. cil., p. 44. 2 DES MONSTRUOSITES. - 325. J'ai observé moi-méme un Polygala vulgaris, avec un seul ovelle et réalisant, par conséquent, le fruit norniai des Monnina. Divers botanistes ont trouvé des Aconits pri- vés d'une ou de deux capsules, des Nigelles ou des Églan- lines à deux loges, etc. Dans les Mais on voit assez souvent avorter une ou deux rangées longitudinales de fruits; à leur place on observe Un espace lisse, en forme de gouttière, d’abord verdatre et plus tard rougeátre ou jaune fauve. Ce qui est digne de re- Marque, c'est que ce phénoméne se trouve trés-rarement isolé ; presque toujours une autre rangée de grains , oppo- Ste à la première, est aussi frappée d’avortement, de ma- nière que lépi a changé son caractére cylindrique contre une forme plus ou moins aplatie. J'ai vu sur un pied de Roncesauvage un KA peut- étre plus curieux, On sait que les Ronces portent des fruits composés de plusieurs petites baies monospermes, légère- ment soudées entre elles et placées sur un gynophore ' charnu. Qu'on suppose toutes ces baies avortées. moins une, et Pon aura un exemple de la monstruosité que J 'ai trouvée, en herborisant dans la montagne noire. M. Mirbel a com-- paré les fruits des Ronces à des Cerises en miniature qui. auraient été groupées et entre-greffées. Dans l'anomalie que- je rapporte, les fruits étaient parfaitement semblables à des. Cerises isolées. Leur seule différence consistait dans leur. laille. Divers botanistes se sont occupés de la FR du: hombre des graines dans un fruit ou dans un carpelle don- nés. On sait que la variété de la Vigne connue sous le nom vulgaire de Raisin de Corinthe se développe sans pepins. La Capsule du Nicotiana macrophylla contient, à l'état normal, Environ 2,500 graines parfaites; celle de cetteespèce fécondée- - par le N. quadrivalvis n'en avait que 658. La téte du Pavot: SY TI EE CT TS Sao MAD ns ECCE = EE +. emet = D rina c CR ea a a 326 DES MONSTRUOSITÉS. somnifère renferme environ 2,200 semences. Il ne s'en est trouvé que six dans cette plante fecondée par un Glaucium (Gartner). § II. — Des Avortements des rangées des verticilles. L'avortement des organes floraux n'agit pas toujours d'une maniére isolée ou restreinte. Nous avons vu que, lors- qu'il manque un sépale au calice , souvent en méme temps la corolle est privée d'un pétale, et Vandrocéed’une étamine. M. Roper a décrit des fleurs de Tradescantia virginica et de Jacinthe, qui offraient ce phénoméne à différents degrés. J'ai rapporté plus haut l'exemple d'un Arenaria tetraquetr4 observé par M. Gay. Dans certaines circonstances, la relation anomale, au lieu de s'établir entre les différents verticilles; se manifeste entre toutesles parties de la rangée à laquelle l'organe appartient, ou, si l'on veut, la cause de l'avortement exerce Son action sur tout un verticille. Carice. L'avortement complet du calice parait extrême ment rare. Je n'en connais pas d'exemple bien marqué: Dans un certain nombre de cas, le tube calicinal se ré- duit , il est vrai, à une sorte de bourrelet circulaire ; mais ce défaut de développement est plutôt une atrophie qu'u2 avortement complet. J'admets cependant à priori que ct verticille peut manquer. ConorLE. Il n’en est pas de méme de la corolle; un^ foule de causes sont capables d’arrêter son évolution et de priver la fleur de cette brillante enveloppe (1). - (1) La plupart des familles où la présence de la corolle a été mise ge nombre des caractères distinctifs offrent des genres normalement ape - 1; dae 327 DES MONSTRUOSITES. JA Le Sagine apetala offre tantôt des pétales plus ou moins | développés, tantôt en manque absolument. Le Céraiste vis- queux perd quelquefois les siens aux environs d'Agen (Saint-Amand) ; ceux du Ranunculus auricomus sont sujets à avorter dans la Thuringe. (De Candolle.) Il en est de même de ceux du Campanula perfoliata et du Ruellia clandestina dans les jardins d'Upsal. (Linné.) Plusieurs plantes des pays chauds se dépouillent de leur corolle quand elles croissent dans des régions un peu froides. (Adamson.) D'aprés Linné , certains Hélianthémes nais- Sent sans pétales au milieu des neiges de la Laponie. Ce cé- lébre botaniste a donné uneliste des plantes qui perdent leurs corolles dansles pays glacés. Selon M. Bentham, l' Ajuga iva, dans les Pyrénées orientales, fructifie constamment sans co- rolle (1). On a trouvé soit dans les jardins, soit dans la campagne, beaucoup d'autres fleurs accidentellement pri- vées de leurs pétales sans cause appréciable; je me bornerai à signaler le. Cardamine impatiens ( Mænch), le Viola odo- rata (Saint-Amand), le Viola mirabilis ( Monnier), V Alsine media (Gay), le Polemonium ceruleum (Decaisne), le Teu- erium Botrys (Cosson et Germain), le Lamium amplexicaule (Soyer-Willemet), le Rosa centifolia, le Medicago lupulina, le Melilotus officinalis, le Saxifraga longifolia, le Ver- bascum Thapsus... Linné a men sous le nom de mutiles (mutil) | les fleurs dans lesquelles la corolle a avorté (2) : on les tales; telles sont les Rosacées, où se trouvent les Alchemilles, les Saxi- frages, où nous voyons les Dorines, les Légumineuses, qui nous présen- tent le Caroubier (1) Cat. plant. pyr., p. 58. 3 (2) « Mutilus autem dicitur is flos qui 'corollam exeludit. — Mutilus flos nobis est qui corollam non promit, quanquam. eamdem promere debet. » (Phil. bot., 119.) ERE T UA — 2 sa ps pu T LEA SC musee ET CEE = pr t rer ter 328 DES MONSTRUOSITES. nomme apétales (apetali) dans les Species et les Flora (1). Anprocée. Dans certaines anomalies, c'est l'Androcée qui ne s'est pas développé; on appelle anandres les fleurs qui ont éprouvé cet avortement. L'Erica Tetralix perd son androcée dans le bois de Mont- morency, mais souvent il doit cette disparition à la transz formation de ses étamines en pistils. (C. Richard.) (2) - Dans une Pélorie de Calcéolaire dont il a été question dans ; un autre chapitre, M. Guillemin a remarqué l'absence de l'androcée. Il est vrai que dans les Calcéolaires normales il n'existe habituellement que deux étamines ; le type numé- rique de la fleur en réclamerait trois de dac: | Quand la fleur a plus d'un rang à l'androcée , l'avorte- ment peut agir sur un seul des verticilles ou bien sur tous à la fois. M. Ropera vu , dansl'Aigremoine , quelques fleurs qui avaient dix étamines opposées les unes aux folioles du ca- lice, les autres aux piéces de la corolle, et d'autres fleurs qui n'en portaient que cinq opposées aux folioles du calice (3). | Dans certaines variétés de Pommier, tous les organes | sexuels mâles avortent, et la fleur devient unisexuée. (Will- ' denow. ) M. Dupont a fait connaitre Nav espèces de Chénopo- dées , dans lesquelles les étamines sont sujettes à avorter et | qui Mndicent ainsi des fleurs femelles (4). | Les Artemisia de la section Abrotanum ont les capitules composés de fleurettes hermaphrodites fertiles , à limbe cam- panulé et quinquedenté ; un petit nombre de fleurs femelles, (1) « Viola odorata 8 apetala. (St-Amand, Flor. Agen., p. 365.) (2) «Erica Tetralix anandra, staminibus nullis ; ovario duodecim lo- eulari. » (Journ. Phys. , 1817, t. LXXXV, p. 467.) (3) Mém. inflorescence. (Seringe, Mém. bot., p. 94.) (4) Ann. scienc. nat., t. XI, p. 312. Sn SSS a i s res i rr nt i DES MONSTRUOSITÉS. 329 également fertiles, leur forment une ceinture; celles-ci sont pourvues d'un tube grêle et tridenté. Toutes ces fleurettes paraissent sessiles sur le réceptacle et leur sommet dépasse . à peine les squammes de l'involucre. Dans une monstruosité de Artemisia Tournefortiana , les fleurs hermaphrodites Sont devenues femelles par suite de l'avortement de l'andro- 06e, et leur corolle a revétu les caractéres des corolles de la Périphérie ; de sorte que les capitules sont entiérement com- posés de fleurettes femelles à tube conique et tridenté. Ces lleurs ne se montrent pas sessiles comme dans l’état normal, mais élevées au-dessus du réceptacle par un pédicelle cylin- drique et herbacé , égal en longueur au fleuron muni de son Ovaire. Toute la grappe de Artemisia est couverte de fleurs avec cette anomalie (Gay). | | Sur un individu de Linaire pourprée, cultivé dns le jar- din de Genève, M. Choisy a observé un avortement com- Plet des étamines; mais en même temps le pistil offrait cing 9velles et le style était terminé par cing stigmates ou tuber- Cules jaunâtres. La fleur avait une corolle rabougrie, d’une Couleur vert bleuâtre , portant à sa base, à côté de l'éperon Ordinaire, deux autres éperons plus courts. Le limbe pré- , Sentait cinq lobes réguliers de couleur bleue. On voit, dans cet exemple, un balancement organique entre lan- drocée qui disparaît et le gynécée qui augmente le nom- bre de ses éléments et de plus un commencement de pé- lorisation. D'autres fleurs du méme pied n'avaient pas Véperon, mais un limbe dont les lobes étaient verts; Pointus et semblables aux piéces du calice (1). ' Gynicée. L'avortement des rangées de pistils arrive plus | Souvent que celui des étamines. Il y a plus de fleurs herma- Phrodites qui deviennent accidentellement males par dispa- (1) Chavannes, Monogr. Antirrh., p. 10, Ti: 330 DES MONSTRUOSITÉS. | rition du gynécée que de fleurs femelles produites par avortement de l'androcée. | |. L’ombelle du Torilis Anthriscus paraît entièrement com- . posée de fleurs hermaphrodites: mais, quand la plante se | développe dans des endroits stériles, les pistils avortent dans les fleurs centrales et celles-ci deviennent uni- sexuées (1). Dans certaines fleurs doubles, le gynécée, étouffé par le développement des corps pétaliformes, avorte en entier : on a alors une fleur pleine privée de cœur ou de panne. Le centre de l'appareil parait, dans ce cas, un peu déprimé et comme ombiliqué. Ce phénoméne est fréquent dans les Re- noncules. (De Candolle.) M. de Schlechtendal a observé un Colchicum autum- nale, avec une fleur formée de folioles colorées en vert : on y voyait six pétales et neuf piéces staminiformes de diffé- rentes longueurs , portant presque toutes des anthéres de couleur blanche; au centre, on ne trouvait pas la moindre trace des ovelles (2). Certaines plantes , changées de climat , ne donnent plus de fruits (carpomosie , Ré); d'autres produisent des péri- carpes, mais ces péricarpes ne renferment plus de graine? (Bananier, Arbre à pain , Ananas). J'ai rapporté, plus haut, que sur 56 fruits de Balisier, cueillis dans un jardin, il y en avait 49 de normaux et 4 qui avaient subi des atrophies; les trois autres étaient réduits à un carpelle par l'effet de l'avortement des deu* autres. Sur 100 fruits d'Evonymus atropurpureus, j'en ai compté 11 auxquels il manquait un carpelle, cinq qui (1) J. Hoffer, Obs. bot., Act. helv., t. u, p. 15. (2) Linnea, 1834, p. 142. DES MONSTRUOSITES. 331 étaient privés de deux et quatre qui en avaient perdu trois. L’hybridité peut aussi déterminer l'avortement de tout le 8ynécée, celui des fruits ou seulement celui des graines. L'absence complète de l'androcée produit des fleurs uni- Sezuees femelles ; Vabsence du gynécée rend les fleurs uni- Sexuées mâles ; l'absence des deux verticilles les fait neutres. Lorsque le phénoméne n'est pas général et qu'il reste, dans la plante, quelques fleurs hermaphrodites, le végétal est alors dit polygame. ARTICLE Il. AVORTEMENTS DES ORGANES AXILES. L'avortement affecte les parties axiles comme les paf” ties appendiculaires; mais ce phénomène ne se présent? jamais dans l'axe principal. Un défaut de nutrition peut: dans certaines circonstances, empécher le développement d'une branche, d'un rameau, et diminuer le nombre des axes accessoires dans un être collectif. La position d’un at. bre contre un mur, le rapprochement dés individus dans U?* bois ou dans une pépinière , une lumière trop vive ou trop faible , un terrain trop maigre ou trop humide et une foule d'autres agents plus ou moins actifs , sont capables d'ame- ner l'avortement des axes végétaux. Mais, comme il existe DES MONSTRUOSITÉS. 333 en général, dans l'agrégation , un grand nombre de bran- ches et de rameaux, cette diminution n'est pas toujours fa- cilement appréciable; il est permis seulement de la recon- naitre quand elle affecte puissant la symétrie de l'être collectif. Quant à l'axe principal , il est facile d'expliquer comment Son avortement complet est impossible (1). Les botanistes sont convenus que la plupart des plantes dites sans tige ne doivent cette apparence qu'à une brié-. veté trés -prononcée de lorgane caulinaire. La tige ne | manque dans aucun végétal pourvu de vaisseaux ; mais elle nait tantôt trés-longue et bien développée, tantôt très- Courte et comme nulle. Les plantes à tige rabougrie ont été désignées sous le nom d'acaules , dénomination impropre, puisqu'elle indique l'absence de l'organe, tandis que cette absence n'est jamais réelle. Le nom de subacaules, adopté par quelques botanistes, serait plus convenable. (De Can- dolle. ) : L'existence de la tige dans toutes les plantes vasculaires a été annoncée par Hedwig (2) et confirmée par MM. de Candolle (3) et Dutrochet (4). Il est tellement vrai que les plantes dites sans tige ne sont nullement acaules, que la plupart d'entre elles, placées dans des circonstances favo- rables, donnent naissance à des axes bien caractérisés (Carlina acaulis, Gentiana acaulis, Carduus acaulis). Ce développement serait un retour au type primitif, si l’on you- lait admettre des monstruosités prédisposées. Dans certains génres, on trouve à la fois des espéces à (1) La maladie désignée par M. Ré , sous le nom d'acaulosie , est donc un étre de raison. (2) Samml. abhandl. in Beob. ae 1793. (3) Dissert. propr. Plant., Paris, 1804. (4) Mém. Mus. d hist. nat., 1821, p. 425. 334 DES MONSTRUOSITES. tiges rudimentaires et des espèces à tiges manifestes : par exemple, dans les Oxalis, on rencontre toutes les nuances intermédiaires entre les espéces prétendues acaules et les espéces évidemment caulescentes (1). Les Liliacées dites bulbeuses offrent des tiges qui ont peut-être le minimum de volume. Il existe dans la méme fa- mille des végétaux pourvus de tiges bien développées ( Dra- cena, Yucca), qui ne different. presque pas des stipes des Palmiers; d'autres à tiges un peu moins hautes (quelques Aloe, Anthericum frutescens ); enfin viennent ensuite le Liliacées bulbeuses ( Tulipes, Jacinthes, Amaryllis), dont la tige, courte, déprimée, est réduite à un plateau orbiculaire, entouré par les écailles du bourgeon. Cette dernière tige 4 cessé d’être un organe aérien ; le plateau qui en tient liet est caché sous terre à diverses profondeurs. Il est trés-logique de concevoir que les tiges bien déve” loppées des végétaux caulescents , frappées d'un défaut de nourriture, pourront, dans certaines monstruosités , di- minuer leur volume et être réduites à des axes plus où moins courts. J’admets méme que, si le phénomène se pré- sente avec son summum d'intensité, l'axe se réduira à u’ cône déprimé ou un disque aplati, analogue au plateau des Liliacées bulbeuses. Mais, dans tous ces cas d'anomalie: Porgane sera rapetissé, mais non pas anéanti. Il y aur? atrophie puissante, mais non pas avortement complet (2). (1) Zuccarini, Nacht. monogr. Oxalis. (2) Voy. le chapitre sur les Atrophies. CHAPITRE 1I. DES MONSTRUOSITES PAR AUGMENTATION DE NOMBRE OU PAR APPARITION, C'EST-A-DIRE DES MULTIPLICATIONS. De méme que des organes ou des verticilles d'organes Sont sujets à manquer dans certains végétaux, de méme aussi il peut y avoir, dans d'autres végétaux, des organes Ou des rangées surnuméraires. Les anomalies par augmentation de nombre se présentent Sous deux points de vue bien différents. Lorsque, à la place d’un pétale isolé , on trouve deux ou plusieurs pétales exactement semblables au premier , sortant du méme point, cette augmentation est un phénomène 336 DES MONSTRUOSITES. distinct de tous les autres, c'est une multiplication (1). Mais, lorsque dans une fleur double ou pleine, à cóté des pétales normaux, on en observe d'autres plus ou moins dé- veloppés occupant la place destinée aux organes sexuels, les étamines et les pistils se sont alors transformés en corps pétaloides, et cette augmentation est une métamorphose et non pas une multiplication (2). Les fleuristes ont parfaitement distingué depuis long- temps, dans les fleurs doubles, quatre sortes de pétales (ou lames pétaliformes) : 1° ceux qui forment le manteau et qui sont les folioles du calice, lesquels ne subissent ordi- nairement que peu ou point d'altération ; 2° les cordons qui viennent immédiatement aprés, et qui sont les vrais pétales de la plante; 3° les &equillons placés plus en dedans et pro- duits évidemment par la métamorphose des étamines ; 4° les peluches ou pannes qui occupent le centre et tiennent la'place des pistils. i Tous les corps pétaloides non produits par des organes transformés, qui, dans une fleur ou double ou pleine, pourront s'ajouter à ceux qui viennent d’être mentionnés, devront leur apparition à une multiplication, Un chapitre de cet ouvrage a été consacré à l'étude des métamorphoses ; je n'ai donc à m’occuper, dans celui-ci: que des multiplications proprement dites. Les multiplications organiques ont été signalées pat Linné ; mais ce grand naturaliste ne sut pas les distingue! (1) Quelques botanistes ont émis l'idée que, dans une fleur où il p^ rait une partie surnuméraire (une étamine, par exemple), il y a soudure de deux fleurs et avortement complet de l'une d'elles, moins la parti surnuméraire (l'étamine) ; cest comme si l'on disait que, dans un enfant né avec un pouce double, il y a deux enfants greffés , dont un a avort? tout entier, moins le pouce. - (2) Foy. le chap. 3 du liv. 1. DES MONSTRUOSITES, 7 des augmentations de nombre produites par métamor- . phose (1). : M. de Candolle les étudia, dans son beau travail sur les fleurs doubles (2), et ensuite dans la seconde édition de sa Théorie élémentaire (3) ; il fit voir les différences quiséparent l'un et l'autre phénomène. Plustard , M. Dunal chercha à démontrer que les multi- plications sont tantót accidentelles, tantót habituelles, et que , dans un grand nombre de fleurs dites simples, il existe des organes ou des rangées d'organes surnuméraires qui doivent uniquement leur présence à une multiplication (4). En 1826, j'ai publié, sous l'influence de ce savant maitre et ami, une dissertation inaugurale, dans laquelle j'ai étudié les lois des multiplications , particulièrement dans l'androcée, et leur influence sur la symétrie de l'appareil floral (5). J'ai désigné ce phénoméne , avec M. Dunal , sous le nom de dédoublement , afin de le distinguer des multipli- cations déterminées par les métamorphoses. M. Dunal est revenu sur ce sujet intéressant, dans ses €onsidérations profondes sur les organes de la fieur, et a cru devoir proposer le nom nouveau de chorise (6). Le phénomene dont il s'agit a donc été appelé indistinc- tement multiplication, dédoublement ou chorise, et les or- ganes dans lesquels on les remarque ont été dits multipliés, dédoublés , chorisés ou choristes. (1) Phil. bots, 119, 120, 121, 126. (2) Mém. soc. drc., t. n1, p. 397 et 402 (1817). | (3) Pag. 504 (1819).— Voy. aussi Organ. végét., t. i, p. 505 (1827). (4) Essai sur les Vacciniées, p. 15 (1819), ouvrage inédit. Quelques feuilles seulement ont été imprimées. | (5) Ess. dédoublements. Montpellier, 1826.— Voy. aussi Consid. irrég. corolle, Ann. scienc. nat., t. XXVII, p. 236. (6) Consid. org. fleur. Montpellier, 1829, p. 32, note 5. 338 DES MONSTRUOSITÉS; Il ny a rien de plus difficile, à ce qu'il paraît, que, lors- qu'une idée nouvelle entre dans une science , elle parvienne au degré d'action suffisant pour pénétrer jusque dans la partie didactique et pour se vivifier en quelque sorte par C? moyen (Goéthe). La connaissance des multiplications s'est propagée fort lentement ; beaucoup de botanistes, qui avaient admis avec facilité l'idée des avortements , soit prédisposés; soit monstrueux , ont paru repousser le phénoméne des cho- rises. L'existence de ces deux lois est cependant intimement liée, et la supposition de l'une entraine forcément l'admis sion de l'autre ; car le plus grand nombre des phénoménes monstrueux se réduisent, en définitive, à des organes ou des parties d'organes supprimés ou ajoutés. Il faut bien distinguer les chorises des disjonctions avet lesquelles on les a confondues jusqu'à présent : je veux par” ler des disjonctions qui divisent les organes (1). Si, à la plac? d'un pétale ou d'une étamine, une fleur produit deux éta- mines ou deux pétales, ou un faisceau de ces organes, ily. aura une vraie chorise du pétale primitif ou de l'étamine pri mitive ; mais, qu'une feuille isolée présente par accident son limbe partagé en deux ou plusieurs parties , il n'y aura pas multiplication ou chorise, mais une véritable disjonction- Pour que la multiplication existàt, il faudrait que chaque partie de la feuille divisée füt organisée de son cóté comme la feuille primitive , qu'elle eùt sa forme, ses nervures et; jusqu'à un certain point , sa taille. Dans plusieurs cas , cependant, la disjonction parait 5e rapprocher de la chorise. On a vu plus haut que les organe? pouvaient se diviser complétement en un certain nombre de parties. Les étamines, par exemple, sont sujettes à se fen- dre depuis le sommet de l'anthére jusqu'à la base du filet, et (1) Foy. liv. m, chap. it, S 1. DES MONSTRUOSITES. 339 à se partager ainsi en deux demi-étamines. Comme il existe des organes staminaux munis d'une anthére uniloculaire, 9n pourrait voir dans cette séparation un dédoublement réel; dans quelques circonstances, chaque demi-anthére fait voir, du côté où la disjonction s'est opérée, un léger renflement, un petit mamelon, souvent creux, qu'il est permis de regarder comme un rüdiment d'une nou- velle loge ; la séparation, dans ce cas, peut passer pour une chorise commencante. La disjonction serait donc quelquefois un premier degré de la chorise , comme l’a- trophie est un premier degré de l'avortement- Voici un fait dans lequel les deux phénoménes se suc- cédent et où l’on peut très-bien apprécier et leur nature et leurs rapports: l’androcée de la Balsamine est composé de cing étamines, dont trois inférieures à anthéres bilocu- laires opposées uné à une à trois pétales, et les deux au- tres uniloculaires opposées ensemble au quatriéme pétale ; il est évident, d'aprés la situation de cette derniére paire d'étamines et d'aprés leur unilocularité, que chacune d'elles he représente qu'une moitié d'organe. Or, dans certaines circonstances , chaque demi-étamine se développe avec une loge anthérale de plus et devient biloculaire (de Candolle). On trouve alors deux organes complets, occupant la place d’un seul organe : dans le preraier cas , il existait une division habituelle analogue à là disjonction ; dans le Second, cette disjonction est devenue une chorise. J'ai vu, dans beaucoup de fleurs , des faits anomaux plus Ou moins semblables à ces deux phénomènes : dans cer- laines, les organes étaient simplement fendus ; dans d'au- tres, il y avait apparition d'un organe aussi complet que l'organe primitif. C'est ainsi que, dans les exemples de polydactylie ou augmentation du nombre des doigts chez l'homme; il y a tantôt simple division d'un de ces organes 340 DES MONSTRUOSITÉS. el tantôt production d'un doigt réellement nouveau. Le règne animal a des disjonctions et des chorises , tout comme le régne végétal. Dans les organes doués d'une structure peu complexe, comme les pétales ou les feuilles , la chorise et la disjonction sont quelquefois faciles à confondre. Pour distinguer ces phénoménes, on peut se servir du moyen déjà indiqué pour différencier les disjonctions et les soudures ; je veux parler de l'absence ou de la présence de la nervure mé- diane. Quand une fissure partage une feuille en deux par” ties , la division a lieu sur la nervure ou dans un endroit plus ou moins éloigné de celle-ci : dans le premier cas, la ner- vure est partagée en deux faisceaux qui oceupent un bord dans chaque demi-feuille ; dans le second, elle se rencontre sculement sur un des deux limbes, mais elle ne se voit point dans le milieu, Quand il y a chorise , chaque organe étant complet parait pourvu de sa nervure médiane. Dans la dis’ jonction, les deux demi-pétaies sont placés toujours sur uP seul plan et se regardent par le cóté oü la scission s'est opérée; ce côté est ordinairement droit. Dans la chorise , les deux organes sont placés indistinctement l'un à côté de l'autre ou l'un devant l'autre, et tous leurs bords sont arrondis. JI faut avouer que, dans beaucoup de pétales, ces différences nê sont pas toujours faciles à constater. Les chorises sont incomplétes ou complètes, c’est-à-dire qu elles se présentent sur une partie des organes ou sur leuf totalité. Dans la chorise incomplète , les organes surnuméraire$ partent tous d’un même pied , ils semblent sortir du sommet d'un support commun , et ce support n'est autre chose que la partie de l'organe qui ne s'est pas dédoublée. j Dans quelques ficurs anomales, qui ont une tendance å devenir pleines, on voit des étamines offrir à leur som- DES MONSTRUOSITES. 341 met des branches ou filets partiels terminés par des loges anthérales plus ou moins développées, ou par des dilata- lions lancéolées plus ou moins pétaloides. Dans quelques circonstances, la multiplication arrive jus- qu'à une distance peu considérable du point d'origine de l'organe primitif , alors le support se montre plus ou moins Court , et la chorise est devenue presque compléte. Le nombre des organes produits par dédoublement incom- plet est extrémement variable ; on trouve toutes les nuances possibles, depuis le cas le plus simple, celui où un seul or- Sane surnuméraire a pris naissance, jusqu'aux excès de multiplication oü les organes se comptent par centaines. Dans la chorise compléte, il ne reste aucune trace de Porgane primitif; ce dernier est représenté par plusieurs organes distincts jusqu'à la base. Le dédoublement complet Varie, sous le rapport du nombre des parties, comme le dé- doublement incomplet : il y a tantót un seul organe ajouté et tantót un trés-grand nombre. à | L'ensemble de tous les organes développés, dans une cho- tise compléte ou incompléte , offre un volume beaucoup plus 8rand que celui de l'organe primitif. Cette différence tient à ce que la multiplication arrive le plus ordinairement par un excès de nourriture, et que cet excès est assez puissant, pour donner à chacune des parties surnuméraires, non- seulement une taille égale à celle de l'organe dédoublé , mais quelquefois un volume de beaucoup supérieur. Les appareils organiques sont sujets à une augmentation numérique des parties qui mérite aussi d’être étudiée; c'est le cas dans lequel un organe vient s’ajouter aux organes or- linaires , sans être formé aux dépens de ces derniers. A côté dun pétale normal, il peut naître un autre pétale et rien d'annonce que le premier ait éprouvé une chorise ; rien ne démontre non plus qu'un des organes voisins se soit changé 342 DES MONSTRUOSITES. en corps pétaliforme. Ce phénoméne arrive généralement dans les fleurs où le plan numérique de l’appareil semble in- diquer un manque habituel de parties. L'apparition de lor- gane anomal vient compléter le verticille ou l'appareil ; aussi quelques botanistes philosophes ont-ils regardé cette ap- parition comme un retour au type numérique, et considéré le phénomène comme une sorte de pélorie (1). Citons quel- ques exemples: M. Fenzl a reconnu, dans des fleurs femelles anomales d’ Atriplex hortensis, Vexistence de plusieurs petits organes foliacés placés entre les étamines et les deux grandes fo- lioles; il a considéré ces organes comme des sépales déve- loppés par accident; il a regardé en même temps, comm? deux bractées, le calice diphylle des auteurs. Suivant M. Fenzl, dans l'état habituel, les fleurs femelles des Atriplex sont privées à la fois et de corolle et de calice; elles ont seulement deux bractées, libres ou cohérentes» susceptibles de s’accroitre autour du fruit. Cette opinio? est confirmée par la découverte récente d’un nouveau genre de Chénopodées ( Exomis) (2), trés-voisin des Atriplex, dans lequel on trouve des fleurs normalement organisées , comme celles del Atriplex hortensis monstrueux. A chaque pas dans l'étude de la Tératologie yégelale, on est frappé de la vérité de cette loi sur laquelle j'ai déjà appelé l'attention : La strut- ture accidentelle d'un végétal présente généralement la strut- ture habituelle d'un autre végétal. Je reviens à l'apparitio? anomale des organes. La Boccone est habituellement sans corolle , ce qui est re marquable dans une plante si voisine des Chélidoines et def Pavots, ou, comme on sait, ce verticille est trés-développe (1) Engelmann, de Anthol., p. 31. (2) Foy. mon Enum. monograph. des Chénop., p. 49, 50. | DES MONSTRUOSITES: 343 Adamson assure avoir vu, dans les serres du duc d’Ayen, un individu de cette espèce , muni d'une corolle (1). On trouve des fleurs hermaphrodites anomales dans cer- taines plantes où elles sont habituellement unisexuées : tels Sont quelques Peupliers parmi les Amentacées, l'Épinard parmi les Chénopodées et le Chanvre parmi les Urticées. M. R. Brown a découvert des étamines dans l'utricule du Carex acuta (2) et M. Gay dans un Carex glauca venant de Rodez; l'hermaphrodisme a été observé aussi dans le Cu- curbita Melopepo (Schlechtendal). ; Des verticilles sexuels normalement incomplets repren- uent aussi de temps en temps les éléments qui semblent leur manquer : ainsi, par exemple, les Véroniques sont dian- dres; il leur faudrait trois étamines de plus pour compléter leur androcée. Quelques espèces, au rapport de M. Auguste? Duvau, renferment le rudiment d'une troisième étamine (3); d’autres, les traces d’une troisième et d'une quatrième (V. virginica). Enfin un échantillon de Veronica pinnata s’est | trouvé pourvu de quatre organes staminaux bien caracté- risés (4). Nous avons vu plus haut, dans les Linaires qui se pélo- rient, que l'étamine rudimentaire, placée.sous la lévre supé- rieure, se développe avec la forme des quatre autres. Dans la variété à grandes fleurs du Melittis melissophyllum , Pan- drocée est sujet aussi.à devenir pentandre (Bentham). Les gynécées des Chénopodées sont habituellement di- gynes ; cependant le nombre 5 est le type numérique de leurs leurs. J'ai compté plusieurs fois un troisième , un quatrième (1) Fam. Plant., t. Y, p. 112. (2) Prod. flor. iVov.-Holl., p. 242. (3) J'ai une fleur de Jasmin accidentellement triandre. (4) Consid. ge* re Veronica, Ann. scienc. nat., t- VIH, p. 69. 344 DES MONSTRUOSITÉS, stigmate ajoutés au gynécée normal (Bon-Henri) (1).Gérard a remarqué, de son cóté, que, dans les Sueda fruticosa et maritima, le nombre de ces organes est assez sujet à aug- menter (2). M. Auguste de St-Hilaire s'est assuré que la Betterave, cultivée au Brésil, se développait souvent is: 5 stigmates. Quand les Chénopodées n'offrent que deux stigmates, ce sont de petites lanières, tantôt droites , tantôt plus ou moins divergentes, pointues ou obtuses, entiéres ou légérement dé- chirées sur les bords, presque toujours de longueur inégale; quand il s'en trouve trois ou quatre, ces organes semblent avoir un peu plus de régularité ; dans le cas beaucoup plus rare ou il s'en développe cinq, les stigmates forment alors un ensemble symétrique. On voit que la régularité arrive à mesure que le verticille se rapproche du type numéri- que (3). | Le Sesamum indicum fait voir, dans. certaines circons- tances, un troisième et même un quatrième stigmate (de Candolle). L’Anchusa italica montre quelquefois un car- pelle surnuméraire (Ad. Brongn.). Le Sideritis canariensis et le Coleus aromaticus présentent aussi accidentellement un androcée à 5 étamines et un gy nécée à 5 styles. Leur ovaire est alors pourvu de 5 loges bi- lobées (Bentham). J'ai vu des fleurs de Socio contenir deux ovelles (4), et (1) Gen. Chenop. nov., Ann. scienc. nat. , 2° sér., t. 1, pl. 10.6 fig. 6, 7. (2) Flor. Gall. prov., p. 381. (3) Monog. Sucda., Ann. scienc. nat., t. xxn, p. 291, pl. xIX, fig. 14, pl. xx, fig. 8, (0, 11, pl. xxr B, "M 10. (4) Dans PH ematoaylon campechianum et dans le Mezoneuvrum glabrum, un cóté du carpelle présente une aile membraneuse normale, regardée , par M. Turpin, comme un second carpelle imparfaitement développé. (Zeon. végét., p. TJ DES MONSTRUOSITÉS. 345 rien n'annoncait qu'il y cùt deux fleurs soudées. On sait que, dans l'état ordinaire , il n'existe qu'un seul pistil par- tiel dans les Légumineuses et que le type numérique des fleurs de ces plantes est le nombre cinq; le développement @un ovelle supplémentaire était donc un commencement de Symétrisation : celle-ci serait parfaite si on trouvait un Ha- ricot à 5 pistils (1). | Cette anomalie, par symétrisation numérique des ovelles, a été observée dans d'autres Légumineuses : par exemple, dans des Casses, des Medicago, des Cercis. M. de Candolle la si- gnalée dans un Mimosa et dans un Cerasus (9); M. Jeger dans un OEillet (3), et M. Engelmann dans un Amandier et dans deux Campanula (4); tout récemment, M. Alphonse de Candolle a trouvé avec cette anomalie le Lepidium sati- vum et le Cheiranthus Cheirit, et M. Seringe le Diplotaxis te- nuifolia; je l'ai vue moi-même dans un Jberis , dans un Viola et dans plusieurs autres plantes dont malheureusement Jai oublié le nom. On a cité encore un Prunus domestica à deux fruits, un Ptelea, des Érables et des Ombelliféres munis de trois carpelles, et des Cucurbita pourvus de quatre. Ce retour au type numérique est bien , comme je l'ai dit plus haut, une sorte de pélorisation (5). M. Roper a re- connu, avec raison, que les pélories peuvent avoir rapport à la forme ou bien au nombre (6). Dans le plus grand nom- (1) Aucun botaniste n’ignore que M. Aug. de St-Hilaire a décou- vert, au Brésil, une Légumineuse normalement pourvue de cinq car- pelles. (2) Jard. Genev., tab. 18. (3) Missbild., p. 142. (4) De Antholysi, p. 31, t. 1, f. 4, et t. rr, f. 10, 15. (5) Foy. le chapitre sur les Pélories. (6) « Sunt nobis Peloriæ tàm quoàd formam quam quoàd nume- & rum. » (Linnæa, 1821, p. 85.) 346 DES MONSTRUOSITES. bre de cas, ces deux modes se trouvent réunis; quand une. fleur se symétrise, elle revét non-seulement les formes dont elle parait déviée, mais elle reprend en méme temps les or- ganes ou les parties organiques qu'elle semble avoir per- dus. On concoit trés-bien que la pélorisation numérique peut se montrer seule dans un appareil, et c’est de cette ano- malie dont j'ai voulu parler dans cet article. Revenons aux multiplications proprement dites. On peut observer 1° des chorises dans les organes appendiculaires, 2* dans les individus élémentaires, 3° dans les organes axiles- er er pi ARTICLE Is. MULTIPLICATIONS DES ORGANES APPENDICULAIRES , OU CHORISES SIMPLES. Les multiplications des organes appendiculaires sont par- tielles ou générales , c'est-à-dire qu'elles agissent sur un ou plusieurs organes d'un verticille , ou bien à la fois sur tout le verticille. $ Ier. — Des Multiplications des organes d'un verticille. Feuizces. Le développement de deux feuilles ou de plu- sieurs à la place d'une seule n'est pas rare; dans plusieurs 348 DES MONSTRUOSITES. cas de phyllomanie ou fullomanie , on observe cette multi- plication. La fertilité du terrain, la quantité de l'eau , l'abondance des engrais, influent souvent sur l'apparition de cette anomalie. Je posséde , dans Vherbier Poiret, une feuille de Laurier-rose qui offre à son extrémité un commencement de multiplication; son sommet est comme bifurqué ; on dirait que cette feuille est produite par la sou- dure et la fusion de deux autres restées libres seulement daus leur quart supérieur. Steinheil a fait connaitre un exemple de chorise in- complète arrivé dans le Scabiosa atropurpurea : il cultivait un individu de cette plante et l'avait abrité du froid pen- dant l'hiver; au printemps , cet individu poussa avec une grande vigueur ; une des feuillesde la tige se développa alors avec les caractéres suivants : elle était simple dans sa moitié inférieure et portait, dans l’autre moitié, deux lobes égaux entre eux, munis chacun d'une nervure médiane et de nervures latérales, et offrant la forme et la grandeur du lobe terminal des feuilles ordinaires. Cette feuille ne pouvait étre le résultat d'une soudure, puisque la feuille opposée était restée avec sa figure et dans sa place habituelle, et que les paires supérieure et inférieure se trouvaient aussi dans l'état normal. Il est donc évident qu'il y avait un com- mencement de chorise (1). Dans un échantillon de Céraiste, le méme observateur a remarqué une des feuilles d'une paire inférieure qui était pourvue de deux nervures médianes ; au-dessus de cette paire, il existait trois feuilles ternées. Dans l'exemple de la Scabieuse , on voyait aussi une branche à feuilles ternées sortant de l'aisselle de la feuille dédoublée. Il est évident (1) Bullet. scienc. nat., mai, 1831, p. 206. — Mém. Phyllotaxis, Amn, scienc. nat., 2 Sér., t. IV, p. 147, fig. 3, 4. DES MONSTRUOSITES. 349 que l'organe surnuméraire était le produit d'une multi- plication complète. D’après ces faits, on peut conclure que la plupart des feuilles opposées, qui se transforment acciden- tellement en verticilles ternés , doivent cette augmentation au phénoméne de là chorise. On a trouvé des feuilles surnuméraires dans les Lilas, les Lauriers, les Tilleuls, les Ormeaux, les Müriers... Un des exemples les plus curieux de cette multiplication est celui qui est offert de temps en temps par la Parisette à quatre feuilles. Cette plante, qui doit son nom au nombre de ses organes foliacés , présente quelquefois une feuille surnuméraire : j'en conserve un échantillon avec cinq feuilles parfaitement développées en rosette, dont une est bilobée à son sommet et semble préte à donner une sixiéme feuille (1). Les feuilles composées adoptent trés-souvent des folioles surnuméraires ; cette addition est remarquable surtout dans les Tréfles (2) et dans les espéces oü le nombre habituel des folioles n'est pas considérable. Par exemple, dans le Tri- folium repens, on voit tantot quatre , tantót gn et jusqu’a sept folioles (3). Il y a aussi des multiplications dans les stipules et dans les spathes. Par exemple, dans le Salix fragilis ou pendula, outre les deux stipules qui accompagnent la hase des pétioles, on en (1) «Folia habiter communiter quatuor, aliquandd quinque et sex. » (C. Bauh., Pin. 167.) — Soyer-Willemet, Obs. plant. franc., p. 179. —Un pied o Parisette a présenté 506 feuilles à Haller. Dans cet exemple, il y avait sans doute une prolification. (2) « Trifolium quadrifolium hortense.» (C. Bauh., Pin. 321.) — « Nil differt à trifoliolato magis, quàm homo sex digitis ab alio. » ( Linn., Crit. bot. , p. 193.) (3) « Foliisquaternis, quinis, aliquando septenis donatur. » (C. Bauh., loc. cit.) 350 DES MONSTRUOSITES. remarque quelquefois deux ou trois autres absolument fili- formes, denticulées et placées à la partie supérieure du pé- tiole (1). Dans le Calla palustris , il se développe quelque- fois un second spathe absolument pattie. au spathe habituel (2). SEPALES. Tl se produit des sépales surnuméraires comme des feuilles ; mais le phénomène n'est pas aussi commun. Des aos à (rois ou à cinq parties peuvent en offrir quatre ou six et même davantage. On a signalé des Tulipes; des Ornithogales (3), des Ails et d'autres Liliacées à sept: huit, dix et méme jusqu'à douze sépales (4). | PETALES. Il en ést de méme des pétales, et méme en gé- néral les deux phénomènes sont étroitement liés ensem- ble (5) : quand le calice d’un Jasmin officinal a six sépales, on est presque sir d'avoir une corolle avec six lobes. Là chorise des pétales se fait observer surtout dans les Anémo- snes , les Renonculés, les Primevères, les Lilas, lés OEil- lets (6); quelquefois la multiplication est fasciculaire » c’est-à-dire qu'un faisceau ou une houppe de pétales tiennent la place d'un pétale normal. Éramines. Les augmentations numériques sont plus fré- quentes dans les étamines que dans tous les autres organes | (1) « Salix pendula var. multistipulata. » ( Ser., Saul. suiss., p. 81-) (2) Hopk., Fl. anom. , pl. v. (3) Linea, IV, p. 383. (4) Engelm., de Anthol., p. 20. (5) M. Ré appelle pétalomanie la multiplication des pétales, €t. périanthomanie la multiplication des sépales. (6) L'apparition d'un élément de plus dans une corolle quelconque est une anomalie assez Commune. Aprés avoir rédigé cet article, jai visité quelques-unes des plantes fleuries du jardin de Toulouse, et jai irouvé, avec un pétale surnuméraire , plusieurs fleurs de Plumbago .europaoa , de Jasminum grandiftorum, de ae zonale, de Saponaria officinalis, V Hibiscus syriacus.. DES MONSTRUOSITES. 351 áppendiculaires ; il semble que la forme et la nature des par- lies males se prétent beaucoup mieux que celles des autres éléments floraux au phénoméne de la multiplication. M. Ré a désigné ce dédoublement sous le nom @anthéromanie. Un de mes parents, M. Fauconnet, de Genève, m'a com- muniqué une fleur de Linaria triphylla , cueillie au jardin des plantes de Montpellier, dans laquelle on voyait une pe- tite étamine anormale à côté d’une des étamines ordinaires; cette étamine avait un filet grêle et sinueux ; son anthère n’offrait pas deux loges comme dans les autres étamines ; elle portait une sorte de godet , vide de pollen, entr’ouvert en avant et attaché par le dos à son support. La comparai- son de cette fleur pentandre avec d’autres fleurs de la même Linaire m'a dévoilé qu’il y avait une chorise accidentelle. On sait que les Linaires ont habituellement quatre étà- mines placées entre les quatre sinus inférieurs de la corolle, c’est-à-dire deux entre les lèvres et deux entre les lobes la- téraux et le lobe moyen de la lèvre inférieure. Dans le si- nus de l'autre lévre se trouve à la base un petit filet peu saillant qui a été regardé comme le rudiment d'une cin- quiéme étamine. Les organographes considérent les Linaires comme tétrandres par défaut habituel d’une étamine. Dans l'anomalie qui vient d'étre décrite, cette étamine rudimen- taire a conservé sa nature ; mais uné des quatre autres en à produit une cinquième par chorise : nous avons donc 2 dans Pandrocée de cette Linaire, un défaut normal et une apparition accidentelle. Un exemple de chorise , trés-simple et trés-intéressant, à été signalé par le professeur Dunal; il est offert par le Laurus nobilis. La plupart des étamines des Lauriers ont habituellement; dé chaque côté de la: partie inférieure de leurs filets, un petit corps glanduliforme et bifide ; ces ap- pendices sont susceptibles de se transformer en petites éta- 352 DES MONSTRUOSITES. mines. Les fleurs males ont un calice à quatre folioles; et quelquefois huit étamines biappendiculées, quatre, sur UP premier rang, opposées aux sépales, et quatre, sur un second alternes avec eux. Plus souvent, deux des étamines opposées sont dépourvues des appendices glanduleux , mais alors elles ont de chaque cóté une étamine semblable à elles, et qui est évidemment le résultat du développement des appendices: alors, au lieu de huit étamines, on en compte douze, savoir: six privées d'appendices provenant de la chorise de dev* éfamines, opposées à deux sépales; deux appendiculées Op posées aux deux autres sépales ; et quatre également appe?" diculées, alternes avec eux. Ces dernières n’ont jamais été observées sous une autre forme (1). On voit, par cet exemple, que les multiplications peuvent être souvent considérées, non comme des productions d'or- ganes indépendantes des organes déjà existants, mais comm? une division , un fractionnement d'un organe normal; il est . vrai que , dans ce fractionnement, il y a toujours forma tion de quelques parties nouvelles qui viennent complétef l'organe et le rendre semblable à l'organe primitif ; car, sau? cette addition, le phénoméne serait, comme je l'ai établi plus haut , une simple disjonction et non une chorise. _ Ilest peu de fleurs qui ne puissent présenter des étamine$ surnuméraires ; c'est surtout dans les androcées composés d'éléments nombreux ( Rosacées, Pavots, Renoncules) que la tendance à la multiplication est prononcée. Cependant certaines fleürs pourvues d'un petit nombre d'étamines offrent aussi parfois l'anomalie dont il s’agit ; mais alors il arrive souvent que l'apparition des nouveaux organes vient compléter le verticille habituellement dévié du type numérique (Jasmin, Lilas, Sauge). (1) Essai V acciniées , p. 16. — Essai, dédoubl. , p. 8. DES MONSTRUOSITÉS. . 353 Le Tulipa sylvestris présente quelquefois 7, 8 étamines (Schmidt); le Lilium candidissimum peut en avoir 7,8, 9 et méme 10. La présence d'une ou de plusieurs étamines surnuméraires à souvent induit en erreur les commencants, surtout ceux qui employaient pour leurs déterminations la classification sexuelle de Linné. Des botanistes habiles ont souvent pris les espéces les unes pour les autres, ou considéré comme nouveaux des végétaux chorisés. Ainsi Fingerhuth a dé- crit, sous le nom d’Ornithogalum octandrum , un pied d’Or- nithogale qui montrait dans chaque fleur deux étamines de plus que dans l'état habituel (1). Quand les éléments de l'androcée se multiplient , cha- cun produit deux , trois, quatre étamines, ou méme un petit faisceau. J'ai cru remarquer que l'apparition de deux nouveaux organes est peut-être une des moins rares. Les parties surnuméraires sont à droite et à gauche de l'organe normal; cette disposition me rappelle deux monstruosités d'insectes, publiées par deux savants entomologistes. Un de ces insectes (Scarites pyracmon) offre, à la place de la premiére patte gauche, trois pattes bien distinctes (2); l'autre (Helops ceruleus) présente son antenne droite tri- . furquée au-dessus du quatriéme article (3). M. Jacquin a fait connaitre une singuliére anomalie de Capsella Bursa-pastoris , devenue en quelque sorte perma- nente par les graines, dans laquelle la corolle avait disparu et ou l'androcée offrait dix étamines (quatre de plus que dans l'état habituel? (4). eax nn ts qi B e as s ti ri, pa (1) Bot. Zeit., 1828 , p. 592. (2) Guérin , Mag. entom. , pl. XL. (3) J.-C. Seringe , Ann. soc. Linn., Lyon, p. 12, fig. 5, 6,7. L'au- teur regarde mal à propos cette anomalie comme l'effet d'une soudure, (4) DC. , Organ. végét. , pl. 42, fig. 3. — 23 ai ee oe eee — a A aD oi an Petite m — T. Ve ——— Se i " em EN DES MONSTRUOSITÉS. M.de Candolle a supposé que, dans cette monstruosité, les pétales s'étaient changés en étaminés (1). J'oserai ne pas partager l'opinion de ce célèbre botaniste. S'il est permis d'en juger par la figure de la fleur, toutes les dix étamines sontrangées sur une méme ligne. Les surnuméraires ont leurs bases trés-rapprochées des étamines normales, et semblent sortir du méme point. Je serais tenté de croire que, dans ce fait, il n'y a pas métamorphose des pétales, mais choris des étamines ordinairement solitaires. Chacune de celles-ci s'est dédoublée en trois. Cette opinion devient probable pat la considération que les étamines géminées des Crucifères sont dans un état constant analogue à la chorise. Chaque paire de ces étamines occupe la place d’un seul de ces oF ganes. Or ne peut-il pas arriver par accident , dans les éta- mines solitaires , un phénomiéne analogue à celui qui a liet habituellement dans les autres étamines? Quant à l'absence de la corolle , elle est due à un avortement complet, lequel avortement se lie, sans doute par balancement organique: avec le dédoublement de l’androcée. Il n'est pas rare, quan un verticille acquiert, par excès, des éléments surnuméraires; qu'un autre verticille perde par défaut tous les siens. Pisrirs. L'augmentation numérique des pistils est asse? rare. Ces organes, placés au centre de la fleur , sont ordi- nairement plus ou moins pressés par les autres verticilles » de manière qu'ils sont plutôt sujets à des avortements qu'à des multiplications. Cependant on rencontre de temps €? temps des gynécées qui présentent une ou plusieurs parties surnuméraires. Par exemple, le Cneorum tricoecon , dans le midi de la France, et le pulverulentum, aux Canaries (Webb) se montrent quelquefois avec un fruit à quatre coques. (1) Loc. cit. , t. 1, p. 497. DES MONSTRUOSITES. 354 Les fruits des Renouées adoptent aussi, dans diverses cir- constances , des éléments surnuméraires (Meisner). On a cité beaucoup de fleurs affectées de cette anomalie, mais je dois faire observer que, dans la plupart des cas, le développement des nouveaux carpelles n'est pas produit aux dépens des carpelles normaux, et que le phénoméne ne doit pas constituer alors une chorise véritable. L'appari- lion des fruits surnuméraires a été appelée carpomanie (Ré). On a vu , plus haut, que l'augmentation numérique des sépales entrainait le plus souvent avec elle l'augmentation du nombre des pétales. L'observation a démontré que la cho- rise d'une partie , dans un verticille quelconque, détermine une chorise analogue dans les verticilles voisins, comme l'avortement d'un élément, dans une rangée donnée, an- nonce presque toujours un autre avortement dans une autre rangée placée au-dessus ou au-dessous. Trés-rarement Pap- parition d'un organe dans un verticille constitue un fait isolé. Le plus habituellement toutes Jes rangées sont affec- tées de la méme anomalie. Les Tulipes et les Ornithogales , parmi les Monocotylédones, peuvent offrir une, deux, trois et jusqu'à six parties surnuméraires (1) ; les Primevéres , les Campanules, le Sureau, parmi les Dicotylédones, en présentent quelquefois quatre, cinq et jusqu'à dix (2). M. En- gelmanna signalé, avec des augmentations numériques dans toutes les parties florales, les Symphytum , les Fuchsia, les Rosa, les Rubus, les Clematis, et un grand nombre d'au- tres plantes. On a signalé encorele Linaria pilosa (Decaisne), le Lycium barbarum (Schlechtendal) , des Chenopodium , des 4Enothera , des Campanules. (1) Linnea, p. 1, p. 595, et 4, p. 83. (2) Engelm. , de Anthol. , p. 30. 356 DES MONSTRUOSITÉS, $ H. — Des Multiplications des rangées des verticilles. Quand la chorise se présente dans un organe quelconque; il est bien rare qu'un ou plusieurs organes homologues du méme appareil ne se soient pas multipliés comme lui. On sait que chez Phomme et chez les mammifères, lorsque les doigts viennent à offrir une anomalie numérique à Pun des mem- bres, celui du cóté opposé et quelquefois méme tous les membres répètent avec plus ou moins d'exactitude le méme genre et le méme degre d'anomalie. Dans les végétaux, il peut arriver aussi que tous les organes similaires soient af- fectés en méme temps par la chorise dans un appareil floral. C'est ce phénomène qui va fixer notre attention. Quand tous les organes se dédoublent à la fois et dans un méme nombre de parties, l'ensemble organique n'adopte - pas une figure irrégulière ; cependant il s’est dévié de so? type spécifique. Ainsi, lorsque, dans unefleur deRenoncule, tous les pétales | sont multipliés en deux ou trois pétales ou que les étamine? ont doublé, triplé, l'ensemble s'est éloigné du plan normal; mais il ma subi aucune irrégularité , quoique le phénoméne soit accompagné le plus souvent d'hypertrophies ou de mé- tamorphoses. Cette harmonie des organes anomaux est une des causes qui rendent les fleurs doubles, semi-doubles 04 pleines , si agréables à nos yeux. Les personnes du monde qui les admirent et les jardiniers qui les cultivent ne soup connent guére leur caractère monstrueux, tant on répug"? à considérer comme anomal ce qui parait avec un ordre régulier ! DES MONSTRUOSITES. 307 Invozucre. Je commencerai l'examen des multiplications des verticilles par celles des involucres et des involucelles. Ces rosettes foliacées sont soumises, comme les verticilles floraux, au phénomène du dédoublement. Il n'est pas rare de trouver, dans l'inflorescence du Cornouiller herbacé (Cor- nus suecica), des involueres qui ont doublé. (Linné. ) Les calicules de certaines Malvacées sont sujets à la méme ano- malie. Telle est aussi la conformation vicieuse de certains OEillets monstrueux; mais ici le phénomène est devenu beaucoup plus grave : les quatre petites bractées de la base se multiplient d'une maniére vraiment prodigieuse ; on y compte dix , douze et même vingt paires de ces organes, croisées à angle droit; l'ensemble prend l'apparence d'un épi gréle, allongé, formé d'écailles imbriquées les unes sur les autres, comme les écailles de certains animaux ; on dirait un épi de Crucianelle ou de Froment (1). Ce phénoméne est généralement accompagné de l'atro- phie ou de l'avortement des enveloppes et des organes sexuels. Dans quelques circonstances il y a aussi transfor- mation d’une partie des pièces florales en bractées squammi- formes. Cette monstruosité a été appelée Dianthus caryo- phyllus imbricatus (2). Carice. Le calice se multiplie aussi, mais plus rarement : la science en posséde plusieurs cas observés dans les Pri- mevères, les Lis, les Narcisses, les Jacinthes, les Tulipes, le Colchique, et dans plusieurs autres fleurs ou doubles ou semi- doubles. Dans la seconde fleur de l'épi terminal d'une Linaire vul- gaire, M. Reeper a observé un calice à cinq divisions nor- (1) « Caryophyllus spicam frumenti referens. » ( Éphém. cur. nal. , . AIX , cent. 3, p. 368.) (2) Bot. mag. , p. 1622. 358 DES MONSTRUOSITÉS. males; aprés ce verticille venait, non pas la corolle, mais un autre calice muni de cinq sépales comme le premier, mais un peu plus grand et un peu jaunatre ; la division si- tuée du côté de la bractée était gibbeuse à sa base, et celle qui se trouvait la première à gauche paraissait presque pé- taloide : les sépales de ce second calice alternaient avec ceux du premier. On trouvait ensuite une corolle semblable à celle des Linaires, excepté qu'elle présentait deux éperons situés à la base des pétales latéraux de la lèvre inférieure, réfléchis en dehors et alternes avec le cinquième pétale duse- cond calice. Cinq étamines fertiles et opposées aux lobes de la corolle formaient l'androcée; l'une d'elles, plus courte. se trouvait en regard du pétale moyen de la lèvre inférieure. D'ailleurs la glande entourait toujours l'ovaire, et le fruit à deux loges avait conservé son organisation habituelle (1). ConorLE. Dans quelques appareils floraux, c'est la co- rolle qui est affectée par la chorise. Quand le dédoublement des pétales arrive de dehors en dedans, l'ensemble repré- sente presque toujours plusieurs corolles emboitées les unes dans les autres. On en trouve des exemples dans les OEillets , les Roses, les Renoncules, les Anémones et beaucoup d'autres fleurs polypétales.On a vu, à l'article desdisjonctions, que la multi- plication de certains OEillets est si considérable, qu'ils font effort contre les parois du tube calicinal et finissent parde fendre. | Le phénomène d’une double, d’une triple corolle est plus apparent encore dans les fleurs monopétales. L'un des exem- ples les plus curieux est celui du Datura fastuosa, où l'on trouve assez souvent deux ou trois corolles enchassées les (1) Linnæa, 1827 , p. 55. DES MONSTRUOSITES. 359 unes dans les autres (1). Une pareille anomalie a été vue dans plusieurs Campanules (2) , dans quelques Labiées (3) , dans les Lauriers-roses , dans les Mauves , dans les Prime- véres, dans les Jasmins. ; Quand les étamines manquent et que la corolle a doublé, On pourrait croire que le verticille supplémentaire est dù à la transformation de Pandrocée , mais souvent les étamines existent en méme temps que la multiplication. D'autres fois ces étamines ont disparu, et on trouve trois ou quatre co- rolles. Quand il y a chorise , les corolles surnuméraires ont preque toujours leurs lobes ou pétales opposés aux lobes de la corolle ordinaire. Quand il existe une transformation de l'androcée, les lobes de la nouvelle corolle sont alternes, à moins que l'androcée métamorphosé ne soit composé d'é- lamines opposées; ce qui arrive rarement. En général, dans les fleurs monopétales, les chorises sont moins nombreuses que dans les polypétales; on y trouve rarement plus de deux ou trois corolles (4). Anorocée. Les chorises de l'androcée sont encore plus communes que celles de la corolle ; on les observe surtout dans les fleurs qui portent beaucoup d'étamines ou dans lesquelles le nombre des organes primitifs s'est déjà dédou- blé de maniére à produire une ligue circulaire d'étamines plus ou moins serrée. Si cette multiplication devient plus grande, ne pouvant plus s'opérer latéralement , forcément . elle aura lieu de dehorsen dedans, et il se formera un nouvel androcée. (1) DC. , Organ. végét., pl. xxxu, fig. 3. ) Théátr. flor. , pl. LXIX , fig. 4. 1 (2 (3) DG, , toc. cit. 1.1, p: 508. (4) « Multiplicantur sæpiùs flores in corolla polypetata ; duplicantur àutem frequentiüs in monopetalà. « (Linn. , Phil. bot. , 126.) rH 360 DES MONSTRUOSITES. On observe assez rarement la chorise des verticilles sta- minaux, quand les androcées sont composés d'un petit nombre d'étamines. Dans un cas recueilli par M. Seringe sur un Cheiranthus Cheiri var. grandiflorus, il existait deux ' rangées d'étàmines bien distinctes (1). Le méme botaniste 2 trouvé aussi un Diplotaxis tenuifolia avee deux verticilles mâles. Quand les étamines se transforment en pétales, ily 4 < presque toujours en même temps augmentation de nombre et de volume ; la chorise devient la compagne de la méta- morphose. Cette liaison se fait remarquer à différents degrés dans les fleurs demi-doubles, doubles ou pleines. Tantôt il y a deux, trois, quatre rangées surnuméraires d'étamines transformées, tantót dix, vingt, trente et méme davantage: Dans une fleur demi-pleine de Lychnis chalcedonica , j "al observé 150 pétales situés entre les pistils et les pétales oT" . dinaires. Si l'on distrait de ce nombre les pétales produits par la transformation des 10 étamines normales, on au^ 140 corps pétaloides de plus que dans l'état habituel. On cultive une trés-jolie variété de Rubus fruticosus à fleurs pleines, légèrement rosées, dans lesquelles le calice et la corolle ont conservé à peu près leurs caractères ordinai- res et où le gynécée paraît un peu atrophié. Toutes les ét” mines sont changées en corps pétaliformes très-petits, très étroits et en nombre extrêmement considérable. Jai compté ces nouveaux pétales, dans une de ces fleurs, cueillie au ba” sard, j'en ai trouvé 892. Si l'on admet 25 ou 30 étamint dans la fleur normale , il y aura toujours plus de 860 corp pétaloides produits par multiplication. Gvnécée. Je connais peu d’exemples relatifs à d multi- plication des verticilles pistillaires. L'un d'eux a été rapporté (1) Bullet. bot. , t. Y, p. 112. DES MONSTRUOSITES. 361 par M. de Candolle dans son Organographie (1). C'est une Gentiane pourprée qui avait quatre pistils sur un premier rang et cinq autres sur un second : celui-ci se trouvait comme emboité dans le rang extérieur. Tous ces pistils ren- fermaient des ovules. M. Meisner a figuré deux fruits de Polygonum orientale, embrassés par un seul calice, dont l'un est globuleux et l'au- tre trigone. On serait tenté de croire que ces fruits sont ainsi rapprochés par l'effet d'une synanthie incompléte ; mais le nombre des éléments calicinaux annonce qu'il n'y a pas eu soudure de deux fleurs; ce phénoméne est remarquable en ce que les deux verticilles, au lieu de se confondre ou d'étre logés l'un dans l'autre, se trouvent entiérement distincts et placés cóte à cóte (2). (1) T.1, p. 509, pl. XL, fig. 6, 7. (2) Monogr. Polyg., pl. 11, K , fig. 12. = a Sees Se ue TR ia CUORE qc apii Nw idis idc case ARTICLE II. MULTIPLICATIONS DES INDIVIDUS ÉLÉMENTAIRES OU PROLIFICATIONS- Les organographes considerent les bourgeons - fleurs comme des assemblages de verticilles disposés les uns au- dessus ou au dedans des autres, et tellement rapprochés que leurs entre-nœuds ne sont pas distincts. La tige ou le rameau , le pédoncule ou pédicelle qui porte ces bourgeons ne se prolonge pas au delà du dernier verti- cille. L'axe s’arréte brusquement, comme si la production des rosettes florales Pavait épuisé et atrophié: Aussi a-t-on annoncé comme une loi générale que toute fleur est termi- nale relativement à son support (1). (1) D'autres ont dit : « Une fleur est un rameau terminé dans sa Yé- geétation. » DES MONSTRUOSITES. 363 Dans certaines monstruosités, l'axe floral s’accroit avec , excès, s'allonge et dépasse la limite de son développement habituel : alors la fleur, au lieu d'étre terminale, se trouve traversée par un axe plus ou moins long ; quelquefois des bourgeons naissent au sommet de ce méme axe et produi- Sent des rameaux portant des feuilles et des fleurs. Beaucoup d'auteurs ont décrit ou figuré des exemples cu- rieux de cette anomalie; ils l'ont observée dans les Rosiers, les Amandiers, les Poiriers, les Ronces, les Benoites, les OEillets, les Lychnides, les Silénes, les Erysimum, les Alyssum, les Anémones, les Renoncules, les Tulipes, les Gentianes , les Consoudes , et dans beaucoup d'autres végé- laux (1). On a donné à cette monstruosité le nom de prolification (prolificatio) et appelé proliféres les fleurs qui la présen- tent (2), Linné, Duhamel et plusieurs autres physiologistes ont cru que, dans ce phénomène , le pistil ou les pistils s'étaient changés en tige chargée de feuilles ou de fleurs. Ce qui avait fait naitre cette idée, c'est que , dans le plus grand nombre de prolifications , la fleur inférieure ou traversée est privée de ses pistils. Mais ce qui prouve d'une maniére bien éyi- dente que Linné et Duhamel s'étaient trompés, c'est que, dans plusieurs de ces anomalies, on a pu observer les or- ganes femelles, tantót dans un état de modification, tan- tôt avec leurs formes ordinaires. Ces pistils sont méme sus- (1) Voy. Hill, Prolif. lowers. , tab. 1 — vt. (2) « Prolifer flos, ubi ex uno flore alius enascitur.» (Linn., Phil. bot., 123.) — Dans la Tératologie animale , on a nommé proliferes les dents dont la couronne est hérissée d'éminences saillantes , tantót poin- tues et coniques , tantôt aplaties et comprimées , qui semblent repré- Senter d'autres dents. I. Geoffr. St-Hil. , Z"rait. térat. , t. 1 , p. 641. 364 DES MONSTRUOSITES. ceptibles d'étre fécondés et de donner naissance à des fruits plus ou moins semblables aux fruits habituels, et c'est ainsi | qu'on a pu se rendre raison des Poires et des Pommes mons- trueuses, traversées par un rameau portant à son extrémité des feuilles, des fleurs et méme d'autres fruits. Il y a donc deux sortes de prolifications, celles des fleurs et celles des fruits (1). | * À. — Des fleurs prohféres. Les prolifications des fleurs peuvent être plus ou moins complexes. On a distingué deux degrés dans ces anomalies: le cas où le rameau produit seulement des feuilles ou des organes foliacés ; le cas où le rameau donne naissance à d'autres fleurs. Linné a appelé les premières anomalies fleurs proliféré frondipares (flores frondosi) (2); il n'a pas donné de nom pat ticulier aux secondes, j'oserai proposer celui de foripares: (1) M. Bosquet, capitaine d'artillerie, attaché à l'arsenal de Tou- louse , m’a communiqué plusieurs amandes affectées d'une anomalie ré” marquable qui pourrait être regardée comme une prolification de Vem bryon. Chaque amande avait deux embryons placés l'un sur l'autre; l'inférieur recevait le supérieur dans un écartement de ses cotylédon® Ces derniers étaient petits , atrophiés , sinueux sur leurs bords et re- duits, dans deux ou trois cas , au cinquième ou au sixième de leur sub" stance. Ce qui est digne de remarque , c'est que , malgré leur applica- tion intime contre les cotylédons supérieurs , malgré la forte pression qui semblait l'avoir déterminée, il ne s'était formé entre eux aucune espèce de cohérence. Rien n'annoncait d'ailleurs l'union de deux €" bryons appartenant à deux graines différentes. (2) « Prolifer autem frondosus dicitur, cum proliferi proles folio" sus fit. » ( Linn. , Phil. bot. , 123.) DES MONSTRUOSITES. 365 et je conserverai la dénomination de proliféres pour expri- mer l'ensemble des deux phénomènes. Les fleurs frondipares sont assez rares (1). Les fleurs floripares se trouvent, au contraire, assez communément (2). Dans les premiéres, le rameau se prolonge indéfiniment; dans les secondes, il est arrété une seconde fois. On observe cependant que le rameau des fleurs frondipares parait or- dinairement maigre, chétif et disposé à s'atrophier. Les prolifications frondipares et floripares ne présentent pas toujours un prolongement du pédoncule, s'élancant du milieu de l'appareil. Dans certains cas, l'axe de la fleur se prolifie d'aprés un systéme différent; des bourgeons nais- sent vers le sommet du support, dans l'aisselle des sépales, des pétales et des autres organes de la fleur, se développent et produisent des rameaux. Je donnerai à la premiére pro- lification le nom de médiane et ala seconde celui d’axillaire. La prolification médiane est nommée diaphysis par M. En- gelmann et la prolification axillaire ecblastesis (3). Il existe encore un autre mode de prolification, c'est ce- lui qui a lieu quelquefois dans l'inflorescence des Ombelli- féres, dans la calathide des Synanthérées et dans quelques autres capitules analogues. Le rameau n'est ni médian, ni axillaire ; il ne sort pas du sein des fleurs, il passe par côté. Les deux premiéres prolifications sont des monstruosités de la fleur, celle-ci est une monstruosité de l'inflorescence. Je désignerai ce dernier mode sous le nom de prolification latérale. Nous avons donc trois sortes de prolifications : les mê- (1) « Frondosus prolifer rarissimus est. » ( Linn. , loc. cit.) (2) « Prolifer autem, prole florifero , frequens est. » (Linn., loc. cit.) : (3) De Anthol., p. 43 et 48. 366 DES MONSTRUOSITES. dianes, les axillarres et les latérales. La première appartient à l’ensemble de la fleur, la seconde aux parties de la fleur et la troisième à une agrégation de fleurs. du milieu 0 , . es organes. 1" P. médianes. des fleurs d des aisselles des organes. 2° P. axillaires. des cótés PROLIFICATIONS des inforescences | 3° P. latérales. des fleurs. Ces trois prolifications sont, chacune, tantôt frondipares : et tantôt foripares. § Ier. — Des Prolifications médianes. _ Freurs rronpreangs. Nous trouvons un exemple de pro- lification médiane frondipare dans la physique des arbres de Duhamel (1): c'est une Rose traversée par un rameat assez long qui porte au-dessus d'elle plusieurs spirales dé feuilles plus ou moins semblables aux feuilles ordinaires; les sépales de cette Rose sont métamorphosés en feuilles €t les étamines en pétales. M. de Grave, de Pamiers, a bien voulu me communiquer une Rose prolifiée assez semblable à celle de Duhamel ; l'axe qui la traversait avait environ 8 centimétres de hauteur; il était droit et donnait naissance à cinq rameaux charges, (1) Liv. m , chap. 11, p. 303, pl. xir, f. 306. — Foy. aussi Hopk-; J Fl. anom. , pl. Ix, f. 2. my DES MONSTRUOSITES. 367 comme lui , de petites feuilles disposées en spirale. La base . de ce rameau offrait une couleur légérement violette. Les Sépales, complétement disjoints; étaient transformés en véritables feuilles, les unes à 4, les autres à 6 folioles. La fleur se trouvait demi-double; il ne restait que trois ou quatre étamines vers le centre, demi-pétaloides, chiffonnées et pressées autour de la base de l'axe prolongé. Un peu au- dessus de cette base, on voyait les pistils changés en pétales parfaitement conformés, mais petits, à peine colorés et en- trainés à une certaine distance de leur place habituelle ; ils semblaient décrire un commencement de spirale. On a vu des phénomènes analogues dans les Anémones, les Renoncules, les OEillets, les Benoites, les Aigremoines, la plupart des arbres fruitiers, les Labiées, les Personnées, . les Rutacées, les Polygonées, les Liliacées FLEURS rLoniPARES. Un exemple de prolification médiane floripare a été figuré par Sweert dans son Florilegium (1). La fleur est une Renoncule pleine, du milieu de laquelle on voit sortir un pédoncule terminé par une autre Renoncule beaucoup plus petite que là première. Un autre fait du méme genre nous est offert par Schlot- térbecc dans son mémoire sur les monstruosités des végé- taux (2). Cet auteur représente deux fleurs d'ORillet dis- posées de telle sorte que l'une d'elles semble sortir du centre de l'autre fleur et occuper la place des pistils. La fleur infé- rieure présente la taille habituelle, la supérieure paraît à peine plus petite ; l'une et l'autre ont leurs étamines métamor- phosées en pétales. Le prolongement de l'axe qui porte la fleur supérieure est infiniment court, de manière que le ca- (1) Pars I, tab. 54. (2) Sched. de monst. Plant., Act. heloet., 33, p. 6, tab. 2, fig. 17 368 DES MONSTRUOSITÉS. lice ne s’eléve que de quelques millimètres au-dessus du ni- veau de l'autre fleur. Schlotterbecc assure avoir trouvé sept anomalies semblables sur un méme pied d'OEillet. Un de mes éléves m'a apporté une monstruosité analogue; mais offrant cela de. remarquable que l'OEillet supérieur était plus gros que l'OEillet inférieur. Duhamel a vu aussi des OEillets prolifiés et floripares ; mais, dans l'exemple dont il donne la figure, le phéno- mene s’est passé irréguliérement; le calice de la fleur infé- rieure est déchiré et atrophié, et la fleur centrale ou supé- rieure ne s'est.développée que d'une maniére assez incom- pléte (1). Charles Bonnet a représenté une Rose prolifére assez cu- rieuse. Du centre de la fleur s’élance une tige irrégulière- ment carrée, assez longue, qui porte à son sommet deux boutons placés vis-à-vis l'un de l'autre (3) ; entre la fleur ef ces boutons, on voit une lame pétaloide, isolée, irrégulière: qui est sans doute un pistil transformé en pétale et emporté hors de sa place habituelle par l'effet du prolongement de Vaxe. Les étamines de la fleur inférieure sont changées en pétales; en dessous de cette fleur se trouve une petite fleur atrophiée qui annonce que tout l’ensemble du rameau est dans un état d’anomalie (3). M. de Candolle a décrit et figuré une autre Rose floripare, où l'on remarque un bouton assez avancé , porté par un ra- meau médiocrement long qui surgit du milieu des étami- nes. Les folioles calicinales du bouton sont légérement dé- (1) Phys. arbr., loc. cit. , fig. 307. ; (2) M. Schauer cite une fleur de Bunias Erucago , de laquelle sor- tait un pédonculeterminé par un bouton. WE des schles. gesselsch-» 1833 , p. 64. ES " Rech.| usag. des feuill., pl. xxv, fig. 2; voy. aussi Hopk- 7 Fl. anom. , pl. ix, f. 1. DES MONSTRUOSITES. 369 formées. Celles de la Rose paraissent changées en feuilles. On voit le long de l’axe qui porte le bouton cing lames péta- loïdes que M. de Candolle regarde comme des étamines dé- formées et que je serais tenté de prendre pour les pistils im- parfaitement pétaloides (1). —— Un très-joli exemple du méme phénomène , observé dans P Anemone ranunculoides, a été figuré par M. Engelmann (2). Dans cet exemple, la fleur inférieure a éprouvé des avorte- ments assez notables. M. Viala, de Castelnaudary , m'a communiqué un autre exemple de prolification médiane dans une plante de la méme famille, l'Anemone coronaria. La fleur supérieure était portée par un pédoncule assez long el se trouvait, par con- séquent, à une grande distance de la fleur traversóe. M. Viala avait cueilli cette anomalie dans un jardin depuis — longtemps inculte, transformé en une prairie naturelle. L'an- cien propriétaire de ce jardin y avait cultivé de belles varié- tés d'anémones doubles et pleines. Il est digne de remarque que la prolification dont il s'agit s’est présentée plusieurs années de suite. Les journaux d'Allemagne ont parlé d'une Rose à cent feuilles du milieu de laquelle sortait une seconde Hose qui en produisait une troisième , laquelle donnait naissance à une tige (3). Cette anomalie est tout a la fois un exemple de frondiparité et de floriparité et même de double foriparite. (1) Organ. végét. , t. 1, p. 396, pl. xxxii. (2) De Anthol. , t. 1, f. 2. (3) Journ. des sav. , 32 mai 1679. — Voy. aussi, sur les Roses proliféres , frondipares ou floripares , Hottinger, Æphém. nat. cur. , déc. 3, ann. 9 et 10, p. 249. — Marchant , Mém. Acad. Princ Paris, 1707, p. 488. — Preussius , Ephém. nat. cur. cent. , 7 et 8, App., p. 83. — Schuster , Act. acad. nat. cur. , vol. vr, p. 185. — Spadoni, Mém. Soc. ital., t. v, p. 488. —Turpin, Atlas de Goéthe, 24 Pie ot, et a a an! 0 ga ae D se DR RE E 27 ee — i ee sn 370 DES MOXSTAUOSITÉS. M. Schimper a signalé des fleurs de Reseda lutea qui se trouvaient trois ou quatre fois proliféres (4). REMARQUES GÉNÉRALES. On voit, par les observations précédentes , que le genre d'anomalie dont il s'agit est assez grave ; qu'il s'accompagne de défauts de développement ou atrophies, soit dans la fleur traversée , soit dans celle où celles qui naissent au milieu ou au-dessus. Ainsi le calice est rudimentaire dans la fleur inférieure de l'OEillet de Duhamel et dans la fleur supérieure dela Rose de M. de Candolle. D'autres fois l'avortement est plus complet et l'organe à disparu entièrement ; ce qui arrive dans les pistils de la fleur inférieure ou traversée , et c'est une des causes qui rendent cette fleur le plus souvent stérile. La fleur supérieure est habituellement incomplète , comme cela a lieu dans l'OEillet de Duhamel. En général » celte fleur parait plus petite que celle de dessous; j'ai cepen- dant noté un exemple du contraire, mais ce fait n'est qu'une exception à la régle générale. Des déplacements des éléments floraux compliquent sou- vent le phénomène ; les entre-nceuds , qui sont si courts dans l'état normal de la fleur, se dilatent , s'allongent , tantó! régulièrement , tantôt inégalement , et entraînent les verti cilles ou les parties des verticilles à des distances plus où moins notables de leur place habituelle. Jai déjà parlé de ce phénoméne dans le chapitre sur les Déplacements. Des disjonctions accompagnent aussi, dans certains cas; la prolification. Dans la Rose de M. de Grave, les sépales 5e sont dessoudés, et une rosette de feuilles a pris la place de l’urcéole du calice. dad Presquetoujourscesont des métamorphoses qui se font vor avec le phénomène dont il s’agit : ainsi le calice est changé (1) Bot. Zeit., 1829, p. 438. DES MONSTRUOSITES. 371 en feuille dans la Rose de Duhamel et dans celle de M. de Candolle, les étamines sont transformées cn pétales dans l'ORillet de Schlotterbec et dans la Rose de Bonnet ; les pis- tils ont éprouvé une semblable métamorphose dans la Rose de M. de Candolle et dans celle de M. de Grave. Les fleurs cultivées , quand elles deviennent doubles ou pleines , sont souvent en méme temps affectées de prolifica- tion; on l'a remarqué parmiles Renonculacées, dans le Cal- tha palustris , dans le Ranunculus acris (J eger) , dans I’ Ane- mone hortensis et dans le Ranunculus asiaticus (Hill). Parmi les Cruciféres, la prolification peut arriver à la suite de la métamorphose des organes sexuels en pétales (Jæger), ou des éléments floraux en organes foliacés (Engelmann). Des exemples de ces deux derniéres anomalies ont été fournis parles Juliennes , les Giroflées , les Diplotaxis , les Bras- Sica... ; D'autres fois enfin il y a excés de développement ou mul- üplications, et cet excès a pris naissance en méme temps que les métamorphoses. Voilà pourquoi la plupart des fleurs affectées de cette anomalie sont des fleurs doubles ou pleines (1). 5 | La cause principale du phénomène paraît due à une grande augmentation de nourriture, laquelle fait développer avec excès non-seulement la plupart des organes ap- pendiculaires, mais encore la partie normalement très. courte de l'axe sur laquelle les organes appendiculaires sont fixés (2). | On a désigné à tort, sous le nom de proliferes , certaines (1) « Flos fit prolifer , cùm intra florem (spits plenum) alii flores enascuntur. » Linn. , Phil. bot., 123. (2) « Proliferi flores fiunt ex eà causá plenitudinis auctá. » Linn. loc. cit. ave DES MORSTRUOSITÉS, fleurs disposées habituellement en têtes serrées et presque sessiles, dont les pédicelles s'allongent outre mesure et chan- gent le capitule en une sorie d'ombeile plus ou moins làche. Cette anomalie arrive dans le Crepis biennis (Roper) , dans le Trifolium repens (de Candolle), dans les Scabieuses , dans les Globulaires et dans beaucoup d'autres fleurs. § II. — Des Prolifications axillaires. FLEURS rronpipares. M. Roeper a vu une fleur d' Euphor- bia Cyparissias dont les piéces florales étaient munies cha- cune d'un bourgeon plus ou moins développé (1). Steinheil a récolté, au jardin des plantes de Paris, un capitule de Scabieuse dont les fleurs, encore jeunes, étaient mêlées d'organes foliacés qui les dépassaient. Ayant isolé une de ces fleurs , il y remarqua les pièces suivantes : tout à l'ex- térieur, deux folioles bien développées à trois nervures et (rois dents , soudées inférieurement d'un cóté, libres de l'autre. A l'aisselle de chacune de ces feuilles était un rameau à feuilles opposées entre elles , et dont la partie inférieure alternait avec la grande foliole, comme cela a généralement lieu quand un bourgeon se développea l'aisselle d’une feuille- Au centre se trouvait un bouton, muni seulement du calice intérieur. Ce calice n'avait que trois soies au lieu de cinq; Ja corolle ne présentait que trois dents, et il n'y avait que trois étamines. La prolification s'était donc opérée à l'aisselle des folioles du calice extérieur (2). | FLEURS FLORIPARES. M. Seringe a fait connaitre des fleur (1) Euphorb. germ. , pl. 3, fig. 58. (2) Ann. scienc. nat. , t. XXVI, p. 65, fig. 1. DES MONSTRUOSITES. proliferes d'Arabis alpina, dans lesquelles naissaient deux pédoncules portant chacun une autre fleur (1). Ces pédon- cules n'étaient pas produits par des sépales transformés, ainsi que l'auteur parait porté à le penser ; ils s'étaient déve- loppés à l'aisselle de ces derniers et avaient déterminé leur avortement. Dans les fleurs du méme pied non floripares , les enveloppes florales et les organes sexuels se trouvaient dans un état de racourcissement remarquable qui annoncait leur tendance à l'avortement complet. Une autre anomalie du méme genre a été recueillie encore par M. Seringe, dans le Tetragonia expansa. Les lobes du ca- lice avaient produit, après la fécondation, de petites fleurs bien conformées; ces fleurs étaient sessiles. Dans la figure de l'auteur on en voit une -— surgit d’un point de la rosette du calice (2). Voici une monstruosité d'Anemone coronaria , qui offre à la fois une prolification axillaire et une prolification mé- diane. Je dois sa communication à la complaisance de M. Boivin. Du milieu de l'axe floral s'élancent six pé- doncules inégaux portant des fleurs privées de collerette ; les pistils et les étamines de la fleur traversée ont avorté com- plétement ;. ses pétales sont irréguliérement échancrés ou divisés, et son involücre, développé outre mesure, se com- pose de trois feuilles laciniées comme celles de la base , dont une sessile et deux pétiolées. A l'aisselle dela plus grande de ces derniéres feuilles, il nait un pédoncule un peu plus long que les six autres, terminé par une fleur à peine épanouie ¢ et munie d'une petite collerette. La science doità M. Seringe l'exemple suivant de proli- fication axillaire floripare. Il a figuré des fleurs de Diplotaxis (1) Bullet. bot. , tab. xi, fig. 7, 8 (2) Bullet. bot. , tab. 1. am — E oe, 374 DES MONSTRUOSITÉS. tenuifolia, dont le calice, la corolle et l'androcée sont peu déformés, tandis que le gynécée, longuement stipité, est changé en deux feuilles qui portent des boutons à leur ais- selle (1). Dans d'autres fleurs de la méme Crucifére, le calice et la corolle sont à peine reconnaissables et, à leur aisselle, naissent des rameaux feuillés demi-transformés en fleurs, tandis que le gynécée stipité est métamorphosé en deux feuilles donnant des rameaux à leur aisselle; l'axe se continue et s’élance du centre de la fleur, et au sommet des rameaux et de l'axe sont des fleurs trés-déformées (2). Le hasard m'a fourni un fait intéressant de prolification floripare et axillaire. Dans plusieurs fleurs demi-doubles de Gypsophile saxifrage, on voyait sortir d'un point vers le centre, entre les pistils déformés et les étamines pétali- formes, deux petits boutons floraux portés par des pédi- celles inégaux et divergents. Je signalerai encore une prolification, observée par M. Choisy, dans le jardin des plantes de Genève; c'est une rose monstrueuse, qui présente, à l'endroit des éta- mines, sur le bord interne du réceptacle, un verticille de boutons floraux irréguliérement conformés, mais en- core reconnaissables (3). On m'a donné une autre Rose prolifére au milieu de la- quelle se trouvaient sept petites Roses parfaitement con- formées , : développées les unes à l'aisselle des étamines ; les autres à l'aisselle des pistils. La fleur inférieure pré- sentait tous ses caractères normaux ; on remarquait seu- lement une légére atrophie dans les organes males et une disjonction incompléte dans les feuilles ovariennes. Une pat (1) Loe. cit. , fig. 10, 11. (2) Loc. cit. , fig. 12. (3) DC. , Organ. végét. , t.1, p. 15 DES MONSTRUOSITES. 9/90 lie des pistils se montrait atrophiée, une autre partie, au contraire , avait subi une dilatation. : REMARQUES GÉNÉRALES. Les prolifications axillaires, comme les prolifications médianes, sont accompagnées de dévelop- pements avec défaut ou avec excés, de disjonctions et de métamorphoses. Il peut aussi exister , avec elles, des soudu- res et quelquefois 'avortement complet de l'organe à l'ais- selle duquel nait le bourgeon ou le rameau. Il peut sortir de l'appareil floral un seul rameau ou une seule fleur , comme dans le Tetragonia expansa, ou deux , comme dans l' Arabis alpina , ou tout un verticille, comme dans.la Rose de M. Choisy. | Quand il existe deux rameaux , ils sont souvent opposés. Tous ces rameaux ont une direction plus ou moins obli- que, relativement à l'axe de l'appareil floral; ils doivent être regardés comme des branches de celui-ci ou comme des axes secondaires. Dans la prolification médiane, il n'existe qu'un axe primitif , qui prolonge celui de la fleur. Les axes peuvent étre fort courts et la fleur parait à peu prés sessile (Tetragonia: expansa), ou fort longs et plus ou moins gréles (Diplotaxis tenuifolia). Les bourgeons sont quelquefois moitié fleur et moitié feuille ; ce qui confirme la grande analogie des modes fron. dipare et floripare. Enfin l'axe floral est susceptible de se prolonger en méme temps que les bourgeons axillaires se développent (Diplo- taxis tenuifolia). Alors il existe à la fois une prolification médiane et une prolification axillaire. Dans les prolifications axillaires les bourgeons peuvent se développer à l'aisselle de tous les éléments de l'appareil floral. Les exemples de cette anomalie ne sont pas rares à la base interne des feuilles du calice. Indépendamment des fleurs ci. 376 DES MONSTRUOSITÉS. tées plus haut, on en a observé dans lé Cardamine hir- suta (DC.), le Caltha palustris (Spenner) , le Veronica Cha- medrys et PHyacinthus botryoides (Braun.), le Rumes obtusifolius, le Melilotus leucantha, le Medicago sativa (Schimper), le Gentiana campestris, le Brassica oleracea, le Cheiranthus cheiri (Engelmann). D'autres exemples non moins curieux nous sont offerts par la corolle. Des bourgeons se développent parfois à l'ais- selle des pétales de lErysimum cheiranthoides (Courtois), du Brassica Napus (Schimper) et du Tropæolum majus (Jæ- ger). Les prolifications axillaires par naissance de bourgeons à Paisselle des organes sexuels sont beaucoup plus rares. J'ai cité plus haut une Rose monstrueuse observée par M. Choisy et affectée de cette anomalie. La méme prolifi- cation existait dans le Brassica Napus dont il vient d’être question (Schimper). Ce genre de prolification est , au contraire , assez >z fréquent à Paisselle des pistils: outre les faits rapportés plus haut , on a cité encore dans cet état le Dictamnus albus ( Eisenhard t) el le Brassica oleracea (Engelman n). § III. — Des Prolifications jlatérales. ! La prolification latérale (prolificatio à latere, Linn.) (1) pourrait être nommée avec raison extraflorale. Xcilesrameaux ou les bourgeons ne sortent ni du milieu de la fleur, nide - (1) M. Engelmann désigne sous le nom d'anthesmolysis les anoma- lies des inflorescences; il appelle antholysis , avec M. Spenner , le anomalies des fleurs isolées. DES MONSTRUGSITES. oe l'aisselle des organes ; ils naissent des supports, en dehors des fleurs, à cóté d'elles ou entre elles. Quand les inflo- rescences sont contractées , le phénoméme peut être con- fondu avec les prolifications médiaue et axillaire. On rencontre des prolifications latérales dans les végétaux qui ont des fleurs en ombelle ou en téte; elles sont plus communes dans les premiers et plus faciles à étudier. Les ombelles , comme on sait, sont des assemblages de pédicelles uniflores partant tous exactement du sommet d'une branche ou d’un pédoncule commun. L’ombelle est dite simple (sertule) quand les pédicelles sortent sans se diviser, comme dans les Primevéres, les Butomes ; on l'ap- pelle composée quand chaque pédicelle se sépare en d'autres pédicelles disposés en ombelles partielles (ombellules ), comme dans la Cigué, la Carotte. Or on trouve des om- belles simples anomales dans lesquelles il se développe entre les bases des pédicelles un ou plusieurs autres pédicelles, les- quels, au lieu de porter une fleur solitaire à leur extrémité, se ramifient comme dans les ombelles composées et produi- sent des ombellules parfaitement ou imparfaitement orga- nisées (1). Une ombelle composée de son côté peut devenir , par prolification, ombelle surdécomposée (2). Les inflorescences à têtes serrées ou capitules ne diffe- rent des ombelles simples que par la briéveté ou l'absence des pédicelles, le rapprochement des fleurs et la dilatation terminale du pédoncule commun. Supposons qu'une ano- malie analogue à celle des ombelles simples arrive dans une (1) « Umbellati dùm prolificantur , augent umbellulam , ut ex um- bellulà simplici altera exeat. » Linn. , Phil. bot. , 124. (2) « Supradecomposita umbella fit simul ex composità. » Linn., loc. eit. : LRT end 378 DES MONSTRUOSITES. calathide de Synanthérée et que les nouveaux pédicelles soient fort longs, ceux-ci s'élanceront du réceptacle, passe- ront à cóté des fleurons ou des demi-fleurons. et produiront à leur sommet ou des bourgeons foliacés, ou des fleurs solitai- ! . v A . . res, ou des capitules plus ou moins semblables au capitule qui les porte. Mais les pistils ne seront pas traverséset les aisselles des organes floraux n'auront pas fourni de bourgeons, car les nouveaux supports ne naitront pas dans les petites fleurs, mais en dehors et à côté; par conséquent, cette proli- fication est toute différente de celle des fleurs solitaires. Le capitule, pris collectivement, est prolifére, mais les fleurons et les demi-fleurons isolément ne le sont pas. Dans plusieurs inflorescences oü les fleurs sont disposées en spirale autour d'un axe plus ou moins developpé, par exemple dans certains chatons, cet axe est sujet à s’allon- ger. La prolification , quoique latérale, pourra ressembler alors à la prolification médiane. FLEURS FRONDIPARES. Les prolifications latérales frondi- pares se présentent bien rarement ; les bourgeons qui se dé- veloppent produisent presque toujours des fleurs ou des in- florescences. J'en possède un exemple tiré de Vherbier Poiret ; c’est une ombelle de Cherophyllum temulum dont les fleurs sont entremélées d'une quantité considérable de petits rameaux foliacés.. Ces derniers ne sont pas dus à une chloranthie des bourgeons floraux habituels, parce que j'ai reconnu, en comparant cette ombelle monstrueuse à une ombelle nor- male du méme pied, qu'elle offrait à peu prés le méme nom- bre de pédicelles et de fleurs régulièrement développés; con- séquemment tous les prolongements foliacés sont des pro- düits surnuméraires. Quelques botanistes ont vu des phénoménes analogues dans les Heracleum, les OEnanthe , les Daucus. D'autres DES MONSTRUOSITES. 379 ont observé des Scabieuses, des Soucis, des Uamomilles. FLEURS FLORIPARES. Les prolifications latérales floripares paraissent aussi communes que les précédentes sont rares. Linné avait observé cette anomalie dans le Selinum Cha- bræi (1). Plusieurs pieds d’Ængelica Razoulzti sauvages, autour du village de Querigut (Pyrénées), ont offert à M. de Candolle une prolification latérale et floripare bien caractérisée. Les tiges se trouvaient dans un état de fasciation; les ombelles - n'avaient pas de collerette générale, et les collerettes par- tielles s'étaient changées en véritables feuilles semblables aux feuilles caulinaires; les ombellules n'avaient qu'un petit nombre de fleurs portées par de trés-longs pédicelles(2). On a signalé avec des monstruosités analogues la Cigué, les Berces, la Carotte. Parmi les plantes sujettes à ce genre de prolification , il faut placer les Jasiones (3) et surtout les Scabieuses. J'ai un échantillon de Knautia arvensis, dans lequel la téte flo- rale est hérissée de 41 pédicelles filiformes, terminés les uns par une fleur unique, les autres par deux fleurs, le plus grand nombre par un petit capitule plus ou moins sembla- ble au capitule général. Ces pédicelles paraissent assez in- égaux; il y en a de courts et d'autres qui peuvent offrir jusqu'à trois millimétres de longueur: ceux des parties inférieures se montrent, en général, plus développés que ceux du centre ou du sommet (4). Les Synanthérées sont les végétaux qui présentent les (1) Flor. lapp. , p. 66. (2) Flor. franc. suppl. , p. 508. (3) Bell., Act. Tur., v, p. 547. — Latour., Chlor. Lugdn., 25. (4) M. Boivin m'a communiqué un exemple à peu prés semblable. 380 DES MONSTRUOSITES. prolifications latérales les plus réguliéres, j'oserai méme dire les plus jolies. Des pédicelles nombreux et divergents s’échappent en rayonnant de tous les points du capitule et se terminent par autant de capitules partiels, beaucoup plus petits que le capitule producteur. La Paquerette est la Com- posée qui £e prolifie le plus souvent : j'en conserve plusieurs | échantillons dans mon herbier ; sur l’un d'eux il y a16 petits capitules, et sur un autre 18 (1). On peut indiquer encore comme sujets à se prolifier le Calendula officinalis (2), le Lampsana minima (3), le Carlina lanata (4), U Anthemis fus- cata (Webb), le Rudbeckia purpurea. (DC.) Dans les épis, les chatons , les panicules, la prolification dont il s'agit détermine des ramifications et change tout à fait la physionomie de l'inflorescence. On a trouvé dans cet élat des Dipsacus , des Plantains, des Carex, des Lolium , le Dactylis glomerata, des Festuques, le Mais, le Blé (5), l'Orge(6) et un grand nombre d'autres Graminées. . Rumarques GÉNÉRALES. Linné, qui regardait le rameau des fleurs proliféres médianes comme fourni parla transformation du pistil, avait très-bien vu que dans les fleurs agrégées ce (1) Bellis hortensis prolifera. Lobel , Ic. , 411. — Sweert , Flor., pl. xcvur, fig. 5. — Weinm. , Phytant. Icon. , 236 D. — Soyer-Wil- lemet , Obs. plant. franc. , p. 159. (2) Calendula prolifera. Tabern. Ic. 334.— Acoluthus, Act. acad. nat. cur., vol.x, p. 208. — Calendula officinalis prolifera, DC. Prodr. vi, p. 451. — Desv. , Journ. bot., I, p. 85. — Jeger, Miss- bild. der Gewæchs, 192 , 195. — Klinsmann , Linnea, x, p. 607- (3) Hieracium proliferum falcatum, C. Bauh. Pin. , p. 128. (4) Barrel. , Ic. 48. (5) Triticum spicá multiplici vel ramosum. Bauh., Pin. 21. — Moris, Plant. hist. , t. 1. — Mathiolea comptéjusqu'à 24 ramifications dans un seul épi. _ (6) Wincler, Ephém. nat. cur, , déc. 1, ann. 1 et 8 , p. 151. DES MONSTRUOSITES. 381 rameau partait du réceptacle ou des pédoncules (1) : il avait remarqué aussi que le rameau est ordinairement central ct unique dans les premières , tandis qu’il naît latéral et rare- ment seul dans les dernières (2) ; mais il confondait les pro- lifications latérales avec les prolifications axillaires. Les prolifications latérales sont rarement compliquées d'atrophies ou d'avortements , d'hypertrophies ou de méta- morphoses. Les nouvelles fleurs ou les nouvelles inflores- cences sont portées par des pédoncules ordinairement gréles et longs, qui ne génent pas sensiblement l'évolution des petites fleurs normales de l'ombelle ou de la calathide. Adamson prétend que cette prolification est souvent oc- casionnée par la piqüre d'un Ichneumon (3) : on a reconnu qu'elle arrive principalement dans les plantes bien nourries, dans celles qui sont foulées aux pieds ou dont les sommités sont mangées par des bestiaux. On ne doit pas confondre la prolification latérale avec les développements excessifs des pédicelles qui transforment quel- quefois les capitules les plus compactes en ombelles dilatées. Il faut dire cependant que, dans quelques circonstances , la prolification se combine avec ce dernier phénoméne. M. Boivin m'a fait voir une inflorescence de Scabiosa colum- baria , dans laquelle presque toutes les fleurs se trouvaient portées par des pédicelles trés-allongés, et en méme temps plusieurs d'entre elles s'étaient multipliées et formaient déjà un petit capitule assez analogue au capitule primitif. (1) «Prolificatio Aggregatorum è receptaculo. » Linn. , Phil. bot. , 124. (2) « Prolificatio fit duplici modo. A. Prolificatio é centro seu ex pis- tillo enato in prolem uno pedunculo peragitur, fitque in floribus non compositis. B. Prolificatio € latere, ex calice communi proles plurimos pedunculatos emittens , fit in compositis aggregatis proprie dictis. Linn. , loc. cit. (3) Fam. Plant., t. 1, p. 111. d. aw 4 t E DES MONSTRUOSITÉS. B. — Des Fruits proliferes. Les fleurs proliféres sont généralement infécondes ; ce- pendant, dans certaines circonstances , elles peuvent don- ner naissance à des fruits, et ceux-ci sont disposés à être prolifères à leur tour. Je distinguerai ces fruits en trois genres : 1° Les fruits dans lesquels le rameau porte seulement des feuilles ou des organes foliacés ( frondipares ) ; 20 Les fruits dans lesquels le rameau donne naissance à des fleurs ( /loripares ) ; 3° Les fruits qui, à la place des feuilles ou des fleurs; portent d'autres fruits. Je désignerai ces derniers sous le nom de fructipares. - Tous ces fruits peuvent résulter d'une prolification ou médiane, ou axillaire, ou latérale. S Ie. — Histoire de quelques Fruits prolifères. Charles Bonnet a fait connaitre une Poire frondipare fort curieuse. Une touffe de 13 à 14 feuilles, de forme naturelle; semble sortir de l'œil et de l'intérieur de la Poire. Plusieurs de ces feuilles ont acquis les dimensions ordinaires. La Poire, en se développant, a embrassé la partie inférieure du. rameau, et, comme celui-ci n'était pas fort long, le fruit 2 DES MONSTRUOSITES. - 883 pu atteindre jusqu'aux ramifications ; de là vient qu'au lieu d'étre terminé par un axe simple, le fruit est couronné par un faisceau de feuilles (1). | Une autre Poire frondipare, mais avec un axe sans ramifi- cations, a été observée, en 1817, au potager de Versailles , par M. Poiteau. Cette Poire n'était point altérée, ni dans sa forme, ni dans son volume; l'aspect et la saveur de sa chair présentaient peu de différences, mais l'endocarpe ou la partie cartilagineuse des loges, de méme que les graines, avaient disparu entiérement (2). Quelques botanistes ont vu l'axe des fruits de certaincs Coniféres s'allonger et donner naissance à un rameau. Reygnier et M. de Candolle ont figuré dans cet état des cônes de Larix europea (3); en ai trouvé une douzaine de pareils dans un Méléze malade du jardin des plantes de Toulouse. : Les prolifications des Poires citées plus haut sont mé- dianes , celle des Larix est latérale. Gockel a donné l’histoire, dans les Éphémérides des curieux de la nature, d'une Poire terminée par deux ra- meaux floriféres divergents; quelques dépressious ou taches anomales de ce fruit sont comparées , par cet auteur, aux différentes parties de la figure humaine ; son dessinateur a été encore plus loin que lui, en donnant à la Poire proli- fére deux yeux, un nez et une bouche (4). (1) Rech. us. feuill. , p. 217 , pl. XXVI , fig. 1. (2) Turpin, Icon. végél., tab. x1 bis, fig. 1, 2. — Deux Poires frondipares , l'une avec deux feuilles et l'autre avec quatre , sont figu- rées par Haussmann dans les Ephémérides des curieux de la nature. ( Déc. 2, ann. 8, p. 134, fig. 17.) (3) Journ. physiq., t. xxvi, p. 254, pl. 1. — Organ. végét., 36 , fig. 3. ; (4) Déc. 2, ann. 6, p. 264, fig. 54. 384 DES MONSTRUOSITES. Duhamel a observé, dans le jardin des Chartreux de Paris des Poires proliféres, de l'œil desquelles on voyait sortir une branche ou une fleur; quelques-unes de ces (leurs étant fécondes ainsi que la fleur inférieure , il en était résulté des Poires doubles fort bizarres. Dans un des exem- ples représentés par ce grand naturaliste, le fruit terminal parait au moins trois fois plus petit que le fruit inférieur. Ce dernier est porté par une queue trés-courte accompa- gnée de deux petites feuilles embrassées par l’œil de la pre- miére Poire (1). Un autre exemple de Poires doubles nous est aussi fourni par Charles Bonnet ; c'est un fruit de Pail duquel part une tige d'environ trois centimétres de hauteur, garnie de bou- tons et portant à son extrémité une seconde Poire un peu plus grosse que la premiére (2). Durande a cité un grain de Raisin assez gros, du sommet duquel sortait un autre grain plus petit, avec une branche chargée d'une feuille. C'est une prolification tout à la fois fructipare et frondipare. Quand l'axe qui porte le fruit supérieur est trés-court, les fruits sont alors placés l'un sur l'autre, le supérieur of- frant sa base soudée sur le sommet du supérieur. Si l'axe est encore plus court, le fruit surnuméraire se irouve logé en partie ou en entier dans le sein de l'autre fruit; telles sont les Poires présentées à l'Académie royale des sciences par Perrault et Sedileau (3) : l'une d'elles semblait en enfanter une autre par sa téte; elle s’ouvrait et s'élargis- sait pour laisser sortir l'autre fruit. Cette seconde Poire don: (1) Phys. arbr. , liv. 11, chap. 3, p. 393 , fig. 308. (2) Loc. cit., fig. 2. (3) Mém. acad. scienc. , 1675, t. X, p. 552, et Hist., 1688» &. n, p. 53. DES MONSTRUOSITES. 385 nait naissance à une branche chargée de plusieurs feuilles. Ces fruits ayant été ouverts en long par la moitié, l'on a trouvé qu'ils n'avaient point de pepins ; leur chair était solide partout et les fibres ligneuses du pédoncule passaient au travers des deux Poires, pour aller former le rameau. Voici un exemple du méme mode de prolification qui s'est développé dans une Figue. Qu'on se représente deux fruits disposés de manière que l’un d'eux semble sortir de Veil prodigieusement dilaté du second; la moitié de sa téte se trouve dehors et l'autre moitié est embrassée par la Figue inférieure. Celle-ci a la forme d'un entonnoi? évasé, un peu oblique; on dirait qu'elle a été tronquée pat le haut pour donner passage à l'autre Figue. Mais, en regardant avec altention , on reconnaît, sur la marge de son orifice j les petites écailles de l'œil, très-écartées les unes des autres, mais conservant encore leur forme et leur nature. H est inutile de faire observer que la Figue n'est pas un fruit simple, mais une agrégation de fruits, et que, par conséquent, la prolification dont il s'agit est latérale et non pas médiane. Il existe, à Saint-Valery et dans plusieurs jardins, une variété femelle de Pommier commun ( Pyrus dioica, W. ) qui présente un fait remarquable de prolification fructipare avec pénétration et fusion. Cet arbre, semblable au Pom- mier ordinaire, par la forme de ses feuilles et par là disposi- lion de ses fleurs, produit des pédoncules tomenteux qui ! soutiennent des fleurs composées d'un calice à 10 folioles | disposées sur deux rangs. La corolle et les étamines ont! avorté. Les styles sont au nombre de 14, légérement velus à la base et surmontés d'un stigmate oblique trés-apparent. Les premières années que l'arbre a fleuri, son proprié- | taire, étonné et mécontent de ne pas voir de fruits , allait | l'abattre, quand un médecin conseilla la fécondation arti- | 25 hec Aue "Ea deos M A ACA ee ET 386 DES MONSTRUOSITÉS. ficielle, qui réussit parfaitement. Depuis ce temps, et chaque année, c’est à qui des dames et des demoiselles de Saint- Valery ira faire sa pomme : c’est l'expression consacrée. On applique sur chaque fleur une fleur hermaphrodite cueillie sur un Pommier quelconque, puis on attache un ruban de couleur au bouquet fécondé, afin que chacun puisse reconnaitre le fruit qui lui appartient. Ces Pommes différent entre elles pour la grosseur , la couleur et la saveur suivant les fleurs hermaphrodites qui ont été employées ; elles sont toutes remarquables par un étranglement situé vers les deux tiers de leur longueur. Dans leur intérieur il y a quatorze loges disposées sur deux | plants parallèles, dont cinq, placées comme celles des Pommes ordinaires, occupent le milieu du fruit; les neuf autres, plus petites, se trouvent vers le sommet (1). Ces loges contien- nent rarement des germes. Il serait possible, à cause de l'absence des étamines, que Tandrocée se fût transformé en une rangée de carpelles, lesquels naîtraient soudés aux carpelles ordinai res ; le phe- noméne dont il s’agit rentrerait dés lors dans la classe des métamorphoses organiques. On lit, dans les Registres de l'académie des sciences de Paris , qu'il fat cueilli en 1675 une poire Rousseline fruc- tipareencore plus extraordinaire. Ce fruit semblait enfanter une seconde Poire par la téte; cette téte s'ouvrait , s'élar- gissait et laissait sortir l'autre fruit, qui n'était libre qu’à. moitié. Cette seconde Poire donnait naissance à une petite branche et à plusieurs feuilles. Ces deux fruits ayant été ouverts dans le sens de leur longueur , on reconnut qu'ils n'avaient point de pepins et que les fibres ligneuses de la (1) Tillette , Note sur une var. de Pommier, Mém. soc. Linn. E Paris (1825), t. 11, p. 164, pl. 6. — Voy. aussi Revue encyclop- » | 1829, p. 761. — Seringe , Bullet. bot. , 1830 , p. 117. DES MOASTRUOS; TES. 387 queue continuaient leur direction à travers la Poire infé- rieure pour aller former le second fruit et à travers celui-ci pour donner naissance à la petite branche (1). Dans les fruits multiples, la prolification produit aus:i des fruits agrégés. Ainsi un épi de Froment ou de Planiain donnera naissance à un autre épi qui s'ajoutera au-dessus de lui, ce qui augmentera sa longueur, ou à côté de lui, ce qui le rendra ramifié.Parmiles Cypéracées, ce phénoméne arrive assez souvent dans le Carex distans, il est plus rare daas le Carex flava (Cosson) ; je l'ai vu dans l'Orge, l'Ivraie, les Fétuques, les Poa Un pied monstrüeux de Mais m'en a présenté un exempie digne d'étre rapporté. L'épi a conservé sa forme et son vo- lume ordinaires. Ses fruits sont gros, rapprochés et dis- posés sur huit rangs. A sa base, on voit naître trois autres épis couverts de grains assez réguliérement espacés, un peu plus petits que l’épi principal et fortement serrés contre lui. J'ai observé sur un autre pied de la méme Graminée cinq épis surnuméraires, parfaitement égaux, disposés circulairc- ment et symétriquement à la base de l'épi normal. On m'a assuré que, dans certaines circonstances, des épis développés par prolification naissaient en série , de manière que Pen- semble avait un aspect digité (¢nflorescentia digitata). § II. — Remarques générales sur les Fruits proliféres. Nous avons vu, dans les fleurs proliféres médianes, que le prolongement de l'axe peut se montrer tantót long et tantót court. Dans un cas, la seconde fleur est portée par (1) Journ. des sav. , 17 juin 1675. 388 DES MüNSTRUOSLH ÉS. un pédicule plus ou moins développé au-dessus de l'autre fleur ; dans l'autre cas, elle est placée au milieu de cette der- niére ; il semble que les pistils de la fleur inférieure aient été métamorphosés en une fleur complète. Ces mêmes différences, dans la longueur du rameau , se retrouvent dans les fruits proliféres. Les deux Poires figurées par Bonnet sont éloignées d’en- viron trois centimètres; dans celles de Duhamel, la Poire supérieure touche la Poire de dessous ; la queue ou la base de la première est embrassée par l'oeil ou le sommet de la seconde; dans!a Figue prolifére, le nouveau fruit estenfermé à moitié dans la Figue de la base. Dans la Poire de Saint-Va- lery, le fruit terminal est greffé et en partie confondu avec le sommet du fruit inférieur (1). Quand le rameau prolifié se trouve encore plus court, on a vu que le fruit surnumé- raire, au lieu de se montrer supérieur, était placé au milieu des carpelles du frait normal; dans cettecirconstance, il peut arriver un des deux phénoménes suivants : dans un cas, le fruit anormal ayantacquis un trés-grand développement, les carpelles de autre fruit seront génés par sa présence et ne se réuniront pas en un seul corps , en un seul fruit. Dans l'autre cas, le fruit surnuméraire étant atrophié ou trés- petit, le fruit inférieur pourra l'enfermer en tout ou en partie ( fructus in fructu) (2). Ces deux genres de monstruosités ne sont pas rares dans les Aurantiées (3) ; M. Ferrari appelle fætifères les fruits (1) Voy. aussi Vollgnad, Ephém. nat. cur. déc. 1, ann. 6 et 7; p. 347 , fig. vij. (2) Foy. Borrich, Act. Hafn. , 1613 , p. 163 ( Pyrus in Pyro). (3) Foy. Apinus, Ephém. nat. cur. déc. 3, ann. 4, p. 66. — Linné , Analect. transalp. , t. 1, p. 414. — Bomme, Verhand. ge- nootsch. Ulissing , 7 deel, p. 208. — Orange grosse d'une autre Orange. Collect. acad. , t. H, p. 117. ; DES MONSTRUOSITÉS. 389 qui en contiennent d’autres dans leur sein (1). D’après M. Berthelot, on le nomme pregnados dans les iles Canaries. Une JVaranja pregnada est une Orange enceinte. On décrit aussi, dans cet état, des Pommes, des Poires, des Melons, le Lychnis Githago (Seringe), plusieurs Passiflora. On a même trouvé jusqu'à trois ou quatre fruits emboitésles uns dans les autres. Il ne faut pas confondre la prolification dont il s'agit avec l'union de deux fruits produits par deux fleurs diffé- rentes. Quand cette derniére soudure s'effectae, jamais un des fruits n'est porté au cœur de l'autre. Généralement , les carpelles s’associent de manière à former un verticille gé- néral , dans lequel on trouve les éléments des verticilles des deux fruits. Si ces derniers ont cinq carpelles chacun, Pen- semble monstrueux en aura dix; ou bien, à cause des avor- tements , il offrira tous les nombres intermédiaires entre les chiffres 10 et 5. Ii y a des fruits chez lesquels on observe presque toujours le premier genre de monstruosité (Poires) , et d'autres dans lesquels on rencontre presque toujours le second ( Pom- mes ) (2). | Dans tous les exemples cités , le fruit est composé de plusieurs carpelles disposés verticillairement, comme les autres organes de Ja fleur. L’axe, en se prolongeant, est passé au milieu du gynécée. Mais tous les végétaux n’ont pas de carpelles nombreux et disposés en anneau. Dans des Légumineuses, par exemple, on ne trouve qu’un carpelle. Or supposons que l’axe floral d’un Haricot se prolonge (1) Ferrari, Hespérid., pl. 211 , 315 , 405. (2) Turpin, Mém. Pomme et Poire , p. 10. — La Pomme-figue (Malus apetala) fait exception à cette règle ; ses fruits sont emboités par trois , à la manière des tubes d'une Jongue-vue fermée, — Turpin , Esq. d'org. végét. , Atlas de Goethe, p. 68. 390 DES MONSTRUUSITES. outre mesure , le rameau ne traversera pas le carpelle solitaire , il passera à côté ; et , si ce rameau est infiniment court et qu'il produise une autre fleur et, par suite, un autre fruit, ce dernier ne pourra étre ni au-dessus ni au milieu du premier ; il sera placé à son cóté. Il faut distinguer aussi les fruits proliféres frondipares de certaines anomalies qui arrivent fréquemment dans les Coings, les Poires , les Azeroles et autres fruits de la tribu des Pomacées. On voit sortir de l’œil ou du sommet de ces fruits une rosette de feuilles plus ou moins grandes. Cette. roselte n'est pas portée par un axe prolongé; ce sont les dents ou lobes du calice qui se sont transformés en organes foliacés : cest une véritable chloranthie ; mais cette chlo- ranthie doít étre regardée comme incompléte, quel que soit le développement des appendices foliacés , puisque la plus grande partie du verticille calicinal entoure le fruit d'une enveloppe charnue intimement unie avec lui, laquelle n'a pas subi et ne subira pas la transformation foliacée. Tout ce qui a été dit sur les inflorescences en capitule et en épi doit nécessairement arriver dans les épis et les capi- tules formés par les fruits. Il y a des Triticum, des Holcus, des Plantago ramifiés. : Le Mais est peut-étre la graminée chez laquelle cette ano- malie se trouve la plus fréquente et la mieux caractérisée : Boccone (1) , Morison (2) et M. Mathieu Bonafous l'ont fi- gurée dans leurs ouvrages (3); ce dernier en a rencontré quelques exemples offrant six épis réunis autour d'un épi central. | (1) « Frumentum indicum spicà divisà. » Zcon. el descript. plant. — rar. , tab. xvj. à; (2) « Zea mays polystachytes. » Plant. hist. , t. 1, tab. xiij. (3) Hist. mais , p. 36, pl. ix , fig. 12. ARTICLE HI. MULTIPLICATIONS DES ORGANES AXILES. La multiplication des organes axiles arrive dans l'axe principal de méme" que dans les axes accessoires. Quand l'axe principal éprouve cette anomalie, on remar- que plusieurs tiges à la place d'une seule. , Si le végétal est normalement unicaule, il devient alors multicaule. S'il est multicaule, il y? a augmentation insolite des'axes princi- paux. : : Il n'est pas rare de rencontrer des plantes unicaules dont l'axe a été brouté par un mammifére , coupé par l'homme ou écrasé par un effort quelconque, qui produisent plusieurs bourgeons adventifs et remplacent!, par plusieurs tiges , la tige supprimée ; mais il faut bien distinguer cette anomalie 392 (DES MONSTRUOSITÉS. de l'extension des branches latérales , qui sont presque tou- jours la suite de la soustraction de l'axe principal. Dans un Ormeau greffé au jardin des plantes de Tou- louse , j'ai vu naitre au-dessous de la greffe , laquelle se trouvait presque au collet végétal, un bourrelet énorme qui donna naissance à plus de mille rameaux trés-rappro- chés les uns des autres et comme entrelacés. | Quand la multiplication agit sur les actes accessoires , ceux-ci se couvrent d’une multitude de jets dont la présence est d'autant plus appréciable qu'elle tranche davantage avec l'état normal des autres rameaux. Ces nouvelles bran- ches sont rapprochées, comme feutrées , et forment une masse que Linné a comparée à ces amas de büchettes et de rameaux que les Pies réunissent à l'extrémité des arbres pour en former leur nid. J'ai observé , sur l'esplanade de Montpellier, un rameau de Broussonetia qui produisait, dans un espace de quelques centimètres , plusieurs centaines de scions. Jai constaté la méme anomalie sur un mürier du jardin des plantes de Tou- louse. Dans les métamorphoses des fleurs en bourgeons foliacés, surtout dans les végétaux dont l'inflorescence est un chaton (Pins, Mélézes , Charmes , Bouleaux ), il arrive souvent que chaque bourgeon fournit son jet et que l'ensemble du chaton est l'origine d'une véritable multiplication axile. Dans les Saules , tous ces nouveaux rameaux sont géné- ralement chétifs et ne tardent pas à s’atrophier et à tomber. Linné a désigné cette multiplication anomale des jeunes scions sous le nom de Plique végétale (1) ; d'autres auteurs l'ont appelée polycladie. (1) « Plicata dicitur Planta , cùm arbor vel ramus excrescit minimis intertextis ramulis, tanquàm plica polonica ex pilis , seu instar nidi pice, quod vulgus à malo genio ortum arbitratur.» Linni, Phil. bot., 274- Nn see Uri ity Library. ridge University on sa pii deposit fro the Bota ny School GENRES ET DES ESPECES CITES DANS CET OUVRAGE. Abies, 76, 233. Abies excelsa, 102, 108, 111, 132, 259. Acacia, 174, 322. Acacia ‘heterophylla, 174. Acacia Sophore , 174. Acer, 108, 345. Acer platanoides, 34. Acer pseudo-platanus, 96. Achillea nana, 84. Achillea Ptarmica, 167. Aconitum, 129, 177, 189, 325. Aconitum "Napellus, 268. Aconitum Stoerkianum, 163. Adansonia, 109 Adansonia ‘digitata, 107, 108. Æcidium, 125, 233. Ænothera, 355. Æsculus, 8, 26, 46. Æsculus Hippocastanum,217,277. Agaricus, 43 Agave, 125, 141, 232. Agave americana, 45, 250, 264. Agrimonia, 313, 328, 367. Ajuga Iva, 321. Ajuga pyramidalis, 148. Ajuga replans, 202. Alcea, 211. Alcea rosea, 216. Alchimilla, 237, 327. Alchimilla minima, 238. Alisma Plantago, 90, 173. Allium, 235, 236, 350. Allium 'carinatum, 236. Allium fragrans, 259. Aloe, 45; 232, 334. Alsine media, 292.824 Alyssum, 363. 394 Alyssum incanum, 304. Amaryllis, 141, 159, 222, 236, 334. Ambrina ambrosioides, 322. Amorpha, 323. Amorpha fruticosa, 202. Amygdalus, 345, 363. Amygdalus communis , 74, 203, 274, 364. Amygdalus persica , 222, 263, 271, Po Anagallis, 3T. Anagallis phœnicea, 127, 302, 304, 312. Anchusa, 147. Anchusa italica, 344. Androsace, 91. Androsace maxima, 90, 149, 151. Anemone, 46, 51, 51, 139, 202, 204, 210, 211, 215, 217, 350, 858; 363, 367 Anemone coronaria , 203 , 373. Anemone ranunculoides, 369. Anemone sylvia, 203, 216. Anemone hortensis, ork Angelica Razoulzii, 7379. Anthemis, 167, 180. Anthemis ‘fuscata, 380. Anthemis retusa, 269. Anthericum frutescens, 334. Anthyllis, 54, 211, 276. Antirrhinum, 128, "211. Antirrhinum majus , 149, 187, 190, 192, 268, 302. Apargia autumnalis, 148. Apium graveolens, #1. Apium Petroselinum, 1 111,216; 369, CU7""" . Aquilegia, 54, 177, 204, 210, 213, | 325. — Aquilegia corniculata, 214. Aquilegia stellata, 213. Aquilegia vulgaris, 208, 304, Arabis alpina, 127, pui: 322, 313, : 315. Arabis sagittata, 269. Arbutus, 211, 212, 215. Arenaria, 91, Arenaria "tetr aquetra , 324, 326. 129, 312, 167, TABLE, Argophyllum, 213. Artemisia, 328, 329. Artemisia Tournefortiana, 329. Artocarpus incisa, 158, 330. Arundo Donax, 45. Asparagus, 148, 149, 154, 225. Asparagus officinalis , 262. Asphodelus ramosus, 218, 223. Aster , 127. Asteriscus aquaticus , 84. Astragalus stellatus, 297. Astragalus Tragantha, 228. Astrantia minor, 84. Athamanta cervaria , 202, 299. Atriplex, 342. Atriplex ‘hortensis, 342. Avena fatua , 158. Aylanthus glandulosa, 153. Azalea periclymena, 302. Balsamina , 47. Barkhausia , 140. Barkhausia taraxacifolia, 148. Bauhinia, 154. Begonia , 163. Bellis, 138. Bellis perennis, 50, 167, 189, 288, 380. Berberis , 228. Berberis cretica, 206. Berberis vulgaris, 36, 38, 56, 153, 206. Beta, 80, 264. ; Beta vulgaris, 50, 146, 148, 451, 180, 288, 344. Betula, 392. Blitum , 268. Blitum 'Bonus-Henricus , 85, 260, 344. Blitum polymorphum, 73 322. Bocconia, 342. Bocconia cordata , 222. Brassica , 29, 146, 166, 112, 115, 176, 371. Brassica Napus , 376. Brassica oleracea, 296, 304, 316. Brassica Rapa; 11, 146, 169, 179, 182. Bromelia, 159, 272, 330. Broussonetia , 392. TABLE. Brunella, 137. TES Bryophyllum calycinum, 231. Bulbocodium , 300. Bunias Erucago , 368. Buplevrum, 174. Buplevrum difforme, 174. Buplevrum falcatum, 149, 151 152, 311. Buxus sempervirens , 47. Cesalpinia digyna , 271. Calceolaria rugosa, 187, 190, 192, 193, 328. Calendula, 84, 158, 378. Calendula arvensis, 189. Calendula officinalis, 167, 380. . Calla palustris , 350. Caltha, 51, 202 , 211. Caltha palustris, 371 , 376. Camellia, 8 , 9. Campanula , 37, 42, 43 , 51, 193, 211, 215 , 345, 355, 359. Campanula medium , 149 , 268, 302. : Campanula perfoliata , 327. Campanula persicefolia, 131, 219, 208, 299. Campanula pyramidalis , 202. Campanula rapunculoides , 203 , 208, 219, 223, 253. Campanula Rapuneulus, 137,149, 216, 302. Campanula rhomboidalis , 302. Campanula Trachelium , 231. Camphorosma monspeliaca, 132. Cannabis , 343. Canna indica, 130, 212, 330. Capsella Bursa-pastoris , 253. Capsicum annuum, 168. Cardamine hirsuta , 324, 376. Cardamine impatiens, 327. ` Cardamine pratensis , 237 , 294, 304. Carduus acaulis , 233. Carduus pumilus, 84. Carex, 157, 298, 389. Carex acuta, 343. Carex ampullacea , 157. Carex distans , 387. Carex flava , 387. ? Caréx glauca , 343. Carex muricata , 232. Carex nutans , 157. Carex paludosa, 157. Carex riparia , 157. Carex vesicaria, 157: Carex vulpina , 232. Carlina acaulis, 333. Carlina lanata , 380. Carlina vulgaris , 148. Carpinus , 392. Cassia, 345. Castanea vesca, 97, 108, 271, 252. Caucalis grandiflora , 299 , 296. Caucalis leptophylla , 254, Celosia cristata , 153. : Centaurea, 263. Centaurea collina, 255. Centaurea Cyanus, 54. Centaurea jacea, 202. Centaurea moschata, 264, 269. Centaurea Scabiosa, 149. Cephalotus follieularis, 175, 176. Cerastium, 323, 348. Cerastium glomeratum, 323. Cerastium tetrandrum, 324. Cerastium varians, 324. Cerastium viscosum, 327. Cerastium vulgatum, 208. Cerasus, 11, 38, 44, 113, 204, 205, 211, 242, 270, 214. 274, 275, 289, 305, 325, 345. Ceratonia siliqua, 327. Cercis siliquastrum, 94, 108, 345. Cherophyllum temulum, 378. Chamerops humilis, 319. Cheiranthus, 55, 168, ats Brae . Cheiranthus Cheiri, 137, 202, 211, 219, 223, 253, 304, 845, 360, 316. Cheirostemon, 109. i Cheirostemon platanifolium , 108. Chelidonium, 342. Chelone, 128. Chelone barbata, 189. 94, ‘Chenopodium, 180, 268, 355. Chenopodium glaucum, 322. Chenopodium murale, 137. 396 Chenopodium Vulvaria, 124. Chironia Centaurium, 83. Chrysanthemum, 148, 189, Chrysanthemum Boon 167. Chysanthemum indicum, 53, 158. Chrysanthemum leucanthemum , 85, 149, 168. Chrysosplenium, 327. Cicer arietinum, 171. Cichorium, 54, 12. Cichorium Endivia, 172. Cichorium Intybus , 149, 180, 269. Cissampelos, 154. Cistus populifolius, 84. Cistus vaginatus, 228, 310. Citrus, 273. Citrus " Aurantium, 36, 46, ps bi, 83, 97, 98, 108, 109, 169, 112, 250, 259, 274, 321, 389. Citrus Decumana, 259. Citrus Limonium, 46, 169, 259. Clematis, 210, 214, 255. Clematis viticella, 252. Cleome, 139. Cleonia lusitanica , Cliffortia, 321, 322. Clitoria, 211. Clusia rosea, 284. Cneorum pulver ulentum, 354. Cneorum tricoccon, 354. Cnicus Vaillantii, 221. Cobæa scandens, 224, 302. Cochlearia Armoracia, 223. Colcus aromaticus, 344. Colchicum, 209, 357. Colchicum ’autumnale , 219 , 268, 300, 330. Comesperma , 131, 225. Conium maculatum, 317, 915. Convallaria maialis. 312. Convolvulus arvensis, 302. Convolvulus sepium, 202. Conyza, 148. Conyza chrysocomoides , 167, Cornus , 56. Cornus suecica, 351. Coronilla, 211. Cortusa Matthioli, 206. 413 188. TABLE. Corylus Avellana, 275, 276. Crambe maritima, 41. Crassula per fossa, 251. Crategus, 390. Crataegus oxyacautha, 50, 56, 91. Crepis, 140. Crepis biennis, 372. Crinum, 141,159, 236. Crocus, 54, 209. Crocus nudiflorus, 220. Croeus odorus, 221 . Crucianella, 357. Cucumis, 255, 271, 272, 389. Cucumis Melo, 271, 272, 213. Cucurbita, 47, 56, 271, 345. Cucurbita Melopepo, 343. Cucurbita Pepo, 223. | Cupressus, 95, 108. Cuscuta, 35. Cyclamen, 173. Cyolamen ‘linearifolium, 173. Cydonia, 56, 127, 390. Cynara cardunculus, AL. Cynosurus cristatus, 233. Cytinus, 35. Cytisus, 54. Cytisus Laburnum, 149. Dactylis glomerata, 232, 380. Dahlia, 55, 57, 167, 204, 26% Daphne indica, 149. Daphne Mezereum, 149. Datura, 50, 211. Datura fastuosa, 358. Daucus Carota, 146 , 203, 208, 288, 290, 299, 311, 378, 379- Daucus maximus, 299. Delphinium, 208, 210, 297. Delphinium Ajacis, 304. Delphinium. crassicaule, 203, 304. Delphinium elatum, 148. Dianella, 38. Dianthus, 46, 51, 204, 215, 264, AUT, 270 304, 312, 345, 350, 351, 358, 365, 367, 368, 310; 311. Dianthus Caryophyllus, 216. Dianthus imbricatus, 357. Dianthus monspeliensis, 492 Dictamnus albus, 203, 207, 376+ Chenopodium Quinoa, 295. TABLE. Digitalis, 43. Digitalis fuscata, 130. , 187, 191, 193, Digitalis orientalis 204: Digitalis purpurea, 218, 302, 324. Digitalis pur pureo-lutea, 130. Diplotaxis, 124, 371. Diplotaxis muralis, 203. Diplotaxis tenuifolia , 74, 133, 339, 345, 202, 204, 231, 303, 360, 314, 315. Dipsacus, 137, 380. Dodonæa viscosa, 149. Dracæna, 334. Dracæna ‘Draco, 107, 108. Dracocephalum austriacum, 188. Dracontium pertusum, 250. Drosera intermedia, 237. Echinophora maritima, 203. Echium pyrenaicum, 149. Echium simplex, 149. Echium vulgare, 54. Equisetum fluviatile, 181, 310. Erysimum, 363. Erysimum Barbarea, 304. Erysimum cheiranthoides, 376. Erica, 43. Erica tetralix, 222, 328. Erodium, 128, 226. Erucastram canariense, 231. Eucomis, 232. Euphorbia Characias, 56,148,151. Euphorbia Cyparissias, 147, 148, au Euphorbia esula, 223. Euphorbia exigua , 114, 149. Euphorbia helioscopia , 260. Euphorbia palustris, 218. Euphorbia rosea, 259. Euphorbia segetalis , 285. Euterpe edulis, 94. Euterpe oleracea, 94. Evonymus atro- -purpureus , 330. Evonymus latifolius , 259. Exomis , 342. Faba vulgaris, 50, 144, 156, 207. Fabiana, 188, 193. Fagus, 46, 285 Festuca, 380, 387. Festuca nemoralis , 232. Ficaria ranunculoides, 54. Ficus , 56. Ficus carica , 283, 385, 388. Fragaria, 44, 45, 304. Fragaria botryformis , TIT. Fragaria monophylla , 248. Fragaria vesca , 148, 351, 212. Fraxinus , 46, 93, 149, 180. Fritillaria imperialis , 141, 236. Fuchsia, 355. Fucus , 43. Fucus vitifolius , 36. Furcræa gigantea , 233. Galeopsis, 137, 268. Galeopsis Ladanum, 188. Galeopsis ochroleuca , 268. Galium , 182. Gardenia, 211. Genista , 180. Genista scoparia, 149. Gentiana , 38, 42, 91 363. Gentiana acaulis , 333. Gentiana campestris , 202 , 218, 2995 91:62 Geranium , 37, 147. Geranium batrachioides, 42. Geranium columbinum , 127. Geranium nodosum , 254, 294. Geum , 367, 312, 363. Geum rivale , 202. Gilia glomeriflora , 304. Gingko biloba, 292, 295. Gladiolus communis, 149. Glaucium , 326. Glechoma hederacea, 89. Gleditsia, 175, 249. Gleditsia tridcanthos , 49 ; 271. j Globularia , 372. Grewia, 163. i Gynandropsis pentaphylla, 304. Gypsophylla aggregata, 324. Gypsophylla saxifraga, 374. Hedera Helix, 95, 96, 108, 294, Hedychium angustifolium, 233. Helianthemum, 327. Helianthemum guttatum, 58. Helianthus, 167. 149, , 303, 361; 180 , 398 Helianthus multiflorus, 167. Helleborus, 214. Hematoxylum 344. Hemerocallis, 304. Hemerocallis flava, 235. Heracleum, 204, 318. Heracleum ’sphondylium, 203. Hernandia, 136. Hesperis, 148, 311, 371. Hesperis matronalis 4:202, At. Hibiscus syriacus, 350. Hibiscus rosa-sinensis, 216. Hieracium, 269. Hieracium ’pilosella, 147. Hieracium prenanthoides, 89. Hordeum, 380, 387, 390. Hortensia, 54, 210 campechianum , 203, Hyacinthus, 42, 46, bi, 5d, bj. 125, 204, 209, 263, 334, 351. Hyacinthus. botryoides, 376. Hyacinthus orientalis, 218. Hypericum, 21, 54, 229. Hypericum perforatum, 124. Hyssopus, 43, 147. Iberis, 46, 50, 216, 345. Tlex Aquifolium, 43, 45, 41. Impatiens Balsamina , [oie £90, 215, 339. Indigofera juncea, 125. Tris, 139, 209. Tris chinensis, 309. Jasione, 379. Jasione montana, 148. Jasminum, 149, 343, 352, 359. Jasminum ‘fruticans, 153. pi Jasminum grandiflorum, 176, 350. Jasminum officinale, 322, 350. Juglans regia, 99, 108, 130, 249. Juncus, 233. Juncus articulatus, 139, 232. Juncus mutabilis, 232. Juncus uliginosus, 233. Juniperus, 44. Justicia, 267. Justicia oxyphylla, 248. Knautia arvensis, 216,319. Kobresia, 298 . Kochia Scoparia, 159, 188, TABLE. "Lactuca, 172. Lactuca sativa, 250. Lamium, 188. Lamium amplexicaule, 321. Lampsana minima, 380. Lantana , 38. Larix, 392. Larix ‘Cedrus, 92, 99, 108 , 109. Larlx europea, 96, 91, 108, 259, 383. Lathræa, 225. Lathyrus, 224. Lathyrus Aphaca, 156. Lathyrus latifolius , 204, 297. L aurus, 349, 3^1. Laurus canariensis, 233. Laurus nobilis, 248. Lebeckia nuda, 125. Leontonyx pusillus, 84. Lepidium sativum, 49, 260, 343. Lichen, 43. Lilium, '304 Lilium ’bulbiferum, 235. Lilium candidissimum , 149, 208, 235, 313, 353. Lilium eroceum; 269. Lilium Martagon , 62, 208. Lilium pomponium, 208. Lilium pyrenaicum , 297. Linaria, 21, 128, 166, 167, 183, 184, 185, 186, 351, 358. Linaria æruginea , 187, 191. Linaria chaleppensis , 181, 193 Linaria cymbalaria, 187. Linaria Elatine, 186. Linaria glauca, 191. Linaria hirta, 190. Linaria origanifolia, 181. Linaria Pelisseriana, 187 Linaria pilosa, 187, 192, 355. Linaria purpurea, 148 , 187 268, 329. Linaria spuria, 186 , Linaria striata , 166. Linaria supina, 86. Linaria triornithopoda, 187. Linaria triphylla, 186, 351. Linaria vulgaris , 166 , 186, 190, 191, 182, 397. 141 , 149, > 191, 190, 191. TABLE, Linum, 38, 143. Linum "usitatissimum, 149,1 51. Lithospermum purpureum, 54.. Lobelia, 296, 302. Lolium, 380, 387. i Lonicera, 165, 211, 215, 241, 249) St m 301, 302, Lonicera alpigena, 289. Lonicera Chamæcerasus, 263. Lonicera Periclymenum, 216. Lonicera Xylosteum, 263. Lotus corniculatus, 73, 89. Lychnis, 363. Lychnis chalcedonica, 360. Lychnis dioica, 158, 296. Lychnis Gythago, 389. Lycium barbarum, 355. Lycopersicum, 265. Lycopsis arvensis, 54. Lysimachia Ephemer um, 231. Magnolia fuscata, 221. Magnolia grandiflora, 25. Majorana, 80. Malaxis paludosa, 331. . Malus, 23, 47, 57, 63, 82, 86, 127, 129, 242, 210, 272, 213, 274, 275, 285, 328, 364, '389. Malus ’apetala, 221, 389, Malva, 304, 359. Malva "arborea, 80. Malva crispa, 172. Malva sylvestris, 203. Mathiola incana, 297. Matricaria, 138, 148. Matricaria Camomilla, 85, 318. Matricaria Parthenium, 232.. : Mavs eryptosperma, 126. Medicago, 189, 211, 345. Medicago lupulina, 140, 329. Medicago sativa, 376. ` Melampyrum, 210. Melia Azedarach, 149, 180. Melilotus, 43. Melilotus leucantha, 140, 376. Melilotus officinalis, 297, 327. Melitis melissophyllum , 343. Menianthes trifoliata, 86. Mentha, 182, 188, 310. Mercurialis, 292. Merendera, 300. . Ni icotiana , _ Ophrys anthropophora , Mespilus, 271. | Mespilus portentosa, 271. ` Mezoneuvrum glabrum, 344. Mimosa, 345. Mollugo cerviana, 224. Monarda, 210. Monnina, 325. Morus, 82, 349. Morus alba, 149, 180 , 392.. Muraltia , 131. Musa, 330. Museari comosum , Mussonda, 137. Myosotis scorpioides , 148. Myosurus minimus , 84. Myrtus, 223. Myrtus communis , 45, 211. Narcissus , 148, 149 , 209 7297, 357. Narcissus poeticus , 254. 156. Narcissus Tazeta , 266, 269. Nasturtium , 172. Nepenthes , "178. 176. Nepeta diffusa, 188, 192. Nerium Oleander , 63, 211,214, 348 , 359. 193. Nicotiana macr ophylla , Nicotiana quadrivalvis , Nicotiana rustica , 231. Nigella, 325. Nigella arvensis , 325. 325. 216. ‘Nigella damascena , noie: Nyctago Jalapa , Nymphea , 212. Nymphæa cerulea , 57. Nymphæa lutea, 277. OEnanthe , 318. OEnothera , 54, Olea europea , 104 , 105, 109, 153. 108 , 189. Orchis, 189. Orchis latifolia , 189. Orchis Morio, 211. Orchis papilionacea , Orchis Simia , 189. Ornithogalum , 350 , 353 Ornithogalum octandrum , Ornithogaluw thyrsoides ; 189. RS 353. , 236. 400 Ornithogalum viviparum , 236. Orobanche , 35, 211, 315. Orobanche gracilis, 304. Orobanche major , 90: Orobanche rapum , 300. Orobus, 224. Oxalis, 31, 50, 174, 334: Oxalis buplevrifolia , 174. Oxalis fruticosa , 174. Oxytropis montana ; 42. Pachynema, 154. Peonia, 211, 304. Papaver, 57, 211, 215, 342, 352. Papaver Argemone, 296. Papaver bracteatum, 222. Papaver nudicaule, 223. Papaver orientale, 202, 222, 223. Papaver Rhoeas, 43, 46, 58, 137. Papaver somniferum, 114, 216, 222, 296, 325, 326. Paris quadrifolia, 8, 9, 321, 349. Parthenium inodorum, 202. Passiflora, 389. Passiflora holosericea, 220. Pedicularis, 42, 43. Pedicularis sylvatica , 189. Pelargonium, 189. Pelargonium inquinans, 176. Pelargonium zonale, 350. Peloria, 183, 345. Peltaria alliacea, 202, 304. Pencea, 137. Phalaris arundinacea, 45. Phaseolus, 47, 50, 86, 249, 260 214, 276, 211,.323, 344, 389. Phaseolus vulgaris, 218. Phleum Boehmeri, 157. Phleum pratense, 297. Phlox, 37. Phlox amena, 303. Phœnix, 283. Phœnix dactylifera, 93, 108. Phyllanthus, 154. Phyteuma, 252. Phyteuma spicata, 203. Pictetia, 228. Pimpinella magna, 90. Pinckneya, 137. Pinguicula, 47. Pinus, 83, 180, 225,259. PA: TABLE. Pinus Strobus, 259. Pinus sylvestris, 234. Pistacia Lentiscus, 175. Pistacia Terebinthus, 93. Pisum, 50, 140, 175, 276, 323. Plantago, 202, 380, 387, 390. Plantago coronopus, 66. Plantago lanceolata, 66, 202. Plantago major, 73, 85, 202, 294. Plantago minima, 85. Platanus, 98, 99, 108, 290. Platanus orientalis, 92. Plectranthus fruticosus; 188. Plumbago eutüpæa, 350. Poa, 387. Poa angustifolia, 232. Poa bulbosa, 232, 238. Poa coarctata, 86. Poa pratensis, 232. Poa trivialis, 232. Podolepis gracilis, 168. Podospermum laciniatum , 208. Polemonium cæruleum, 42 , 222, 302, 327. Polyanthes tuberosa, 209, 297. Polygala, 21, 54, 137, 310. Polygala. paludosa, 89. Polygala vulgaris, 325. Polygonum, 355. Polygonum Bistorta, 236. Polygonum Fagopyrum, 304. Polygonum orientale, 361. Polygonum Persicaria, 65. Populus, 343. Potamogeton, 144. Potamogeton bifolium, 174. Potentilla, 37, 43. Potentilla argentea, 231. Prenanthes viminea, 256. Primula, 211, 294, 295, 350, 355, 357, 359. Primula acaulis, 202, 219, 304. Primula auricula, 55. Primula calycanthema, 210. Primula elatior, 202, 299. Primula grandiflora, 202. Primula officinalis, 299. Primula Pereiniana, 299. Primula sinensis, 137, 205, 206. Primula veris, 147. TABLE. Prunus, 47, 56, 2414, 2127 214. Prunus armeniaca, 49, 56. Prunus domestica , 345, Prunus Lauro- ~cerasus, 46. Prunus lusitanica , 271. Prunus persica, it, 51. Prunus spinosa , 169. Prunus sylvestris , 149. Ptelea, 345. Punica Granatum , 51, 113, 149, 211, 248. Pyrethrum inodorum , 139. Pyrethrum Parthenium , 167. Pyrus, 12, 41, 47, 56, 127, 129, 255, 263, 271, 273, 363 , 364, 382, 383, 384, 386, 388, 390. Pyrus dioica, 385. Pyrus Malus, voy. Malus. Quercus, 25, 76, 83, 86, 93, 102, 103, 104, 108, 233, 262, 282, 285. Quercus Ilex , 92. Ranunculus , "ot, 204, 207, "211, 214, 215, 217, 260, 288, 297, "330, '350, 392, 356, 358, 363, 361, 311. Ranunculus abor! tivus 207. Ranunculus asiaticus, 54, 216. Ranunculus auricomus, 327. Ranunculus bulbosus, 84, 148.. Ranunculus Flammula, 269. Ranunculus lanuginosus , 84. Ranunculus Lingua , 268. Ranunculus parvulus, 84. Ranunculus philonotis , 203. Ranunculus pygmæus , 84. Ranunculus sceleratus, 84. Ranunculus tripar titus. , 148, 211. 169, 204, 242, Raphanus sativus, 146, 179, 182.. Reseda, 292. Reseda lutea, 370. Reseda odorata , 221. Reseda Phyteuma, 205. Rhamnus Alaternus , 46. Rhamnus Frangula, "eat. Rhinanthus Crista-galli , 188. Rhododendrum , 46 , 211. Rhodora canadensis, 302. 389, 37, 147, 202, 401 Rhus Coriaria, 36. Rhus Cotinus, 68, 156, 295. Ribes , 38, hh 46, 180, e Robinia pseudo-acacia, 110, 171, 182, 296. Rosa , 19, 30, 37, 82, 114. 137, 157, 180, 202 , 211, 2A S 217, 229, 252 , 271, 299, 311, 352, 355, 358, "363, "366, 7368, 369, 370, 371, 374. Rosa alpina , 215. Rosa centifolia , 3291. Rosa eglanteria, 54. Rosa gallica , 84. Rosa salicina , 234. Rubus, 51, 203, 215, 355, 363. Rubus arcticus, 296. Rubus fr uticosus, 325, 360. Rubus idæus, 249. Rudbeckia : purpurea , 380. Ruellia clandestina, 327, Rumex, 268. Rumex acetosa, 268. Rumex crispus, 172, 222. Rumex obtusifolius, 376. Rumex Rumastrum, 268. Ruseus , 21, 154, 225. Ruscus aculeatus , 149. Sagine apetala, 397. Sagittaria sagittifolia, 90, 173. Salicornia, 76. Salix, 68, 147, 153, 168, 180,221, 233, 234, 310, 392. Salix alba, 145, 202. Salix babylonica, 143, 219. Salix capraa, 219. Salix cinerea, 219. Salix fragilis, 349. Salix multistipulata, 350. Salix oleifolia, 223. Salix pendula, 349. Salix silesiaca, 219. Salix tomentosa, 168. Salix triandra, 68. Salomonia, 137. Salsola, 71. Salsola Kali, 131. Salvia, 210, 314, 352:. Salvia officinalis, 47. Salvia pratensis, 255, 4¢9 Salvia Verbenaca, 245, 313. Sambucus, 46, 355- Sambucus nigra, 149, 289. Samolus Valerandi, 83. Saponaria, 251, 252. Saponaria officinalis 3:316, 296, 304, 350. Saxifraga, 91, 231; Saxifraga bulbifera, 236. Saxifraga foliosa, 231. Saxifraga granulata, 226. Saxifraga irrigua, 149 Saxifraga longifolia, 321. Saxifraga mutata, 049... Scabiosa, 137, 311, Sh. 379. Scabiosa arvensis, 216, 379. Scabiosa atro-purpurea, 348. Seabiosa Columbaria, 232, 381. Scabiosa gigantea, 90. Schizopetalon, 292. Scilla, 37. Scirpus lacustris, 181. Scolopendrium offi icinale, 298. Scorzonera, 148, 227 Scrofularia aquatica, 204. Scrofularia canina, 86. Scrofularia nodosa, 331. Secale, 288. Securidaea, 137, 325. Sedum cristatum, 153. Sedum Rhodiola, 153. Selinum Chabrei, 37. Sempervivum montanum, 221. 312, Sempervivum tectorum, 221 223. Senecio elegans, 167. Senecio minutus, 84. Senecio vulgaris, 140. Sesamum. indicum, 189, 344. Seseli Hippomarathrum, 251. Seseli nanum, 84. Sideritis, 188. Sideritis” canariensis, 344. Silene, 363. Silene conica, 297. Sinapis ramosa, 260. Sisymbrium officinale, 231. Sisymbrium palustre, 84. Sium, 379. Solanum, 25865,0278, TABLE. Solanum Amazonium, 138. Solanum cornutum , 138. Solanum Dulcamara, 46, 138. Solanum. Melongena, 305. Solanum nigrum, 260. Solanum tridynamum, 138. Solanum tuberosum , 49, 171, 215. 1. Solanum Vespertilio, 138. Sonchus, 38, 227, 269 Sophora, 289. Sorbus Aucuparia, 91. Sparlium, 211. Spartium junceum, 54, 149. Spinacia, 343. Spiræa Aruncus, 158. ‘Spiræa oblongifolia, 203. Stachys germanica, 222. Stachys sylvatica, 304, 305. Stapelia, 148. Stehælina, Vp Sterculia platanifolia, 149. Strelitzia juncea, 125. Strelitzia par viflora, 123. Strelitzia Regina, 125. Suida, 67. Suæda fr uticosa , 344. Suæda maritima, 149, 344. Suæda setigera, 67 , 68. Swietenia Mahogoni , 285. Silybum marianum , 284. Syiphium perfoliatum , 251. Symphytum, 355, 363. Sympbytum officinale , 299, 304. Syringa , 43, 46, 349, ” 350, 68 , 143 , 139, 143, 149, Syrings persica, 210, 295. Syringa vulgaris , 248 , 266, 269. Tagetes, 138 , 158. Tagetes erecta, 189. Taxodium distichum , 145. Taxus baccata , 284. Teloxys aristata , 228. Tetragonia expansa , 'euerium , 300. Teucrium Botrys , 321. 106, 108., 105, 106, 180, 313, 315. TABLE. Teucrium campanulatum , 188 , 192 , 193. Teucrium Chamedrys , 208. Thalictrum minus , 222. Theophrastus , 237. Thlaspi arvensis , 202. Thuya orientalis , 149. Tigridia aurantiaca , 130. Tigridia conehifloro-pavonia , 130. Tilia , 36 , 46, 96, 100, 101, 102 , 108, 176, 180, 256, 262 , 349. Tilia argentea, 286. Torilis Anthriseus , 203 , 230, 299. Tradescantia virginica , 326. Tragopogon pratense , 139 , 148, 208. Trifolium, 42, 43 , 204. Trifolium fragiferum , 129. Trifolium procumbens , 83. Trifolium quadrifolium , 349. Trifolium repens, 202 , 203 , 231, E97, 299, 349, 319. Trifolium resupinatum , 148. Triphasium , 176. Triticum , 79, 158, 288, 357, 380, 387, 390. Tropæolum, 80. Tropæolum majus , 79, 223, 231, 316. Tulipa, 37 , 46, 41,51, 52, 57, 68, 125, 204, 205, 209, 297, 304, 311, 334, 350, 353,355, 357 , 363. Tulipa Gesneriana , 220 , 221, ado. Tulipa Oculus-solis , 297. Ulex , 84 , 211. Ulmus , 349. Ulmus campestris , 93 , 94, 95, 108, 149, 181, 392. Uredo , 125. Vaccinium Myrtillus , 44 , 297. 403 Vaiilantia muralis, 265. Valeriana dioica, 182. Valeriana officinalis , 145, 181. Valerianella olitoria , 128. Vallisneria , 173. Vallisneria bulbosa , 173. Verbascum, 37, 43, 63, 69, 138, 203, MT, 3100 Verbascum Chaixii, 208. Verbascum collinum , 130. Verbascum nigrum, 63. Verbascum phlomoides , 231. Verbascum thapso-nigrum , 130. Verbascum Thapsus , 327. Vericordia, 128. Veronica, 180, 211, 252, 343. Veronica anagallis , 208. Veronica Chamædrys, 376. Veronica pinnata , 343. Veronica virginica, 343. Viburnum Opulus , 157. Viburnum Tinus, 38. Vicia, 226. Vicia Craeca, 74. Vicia , 37, 43, 46, 54, 211. Vinca minor, 43, 207, 214, 266. Viola, 211, 345. Viola calcarata , 55. Viola hirta, 188, 191. Viola mirabilis , 137, 327. Viola odorata , 138, 188. Vitis, 44, 47, 17, 80, 129, 224, 252, 269, 271, 274, 289. Vitis vinifera, 256, 325, 384. Xylophylla, 154. Yucca, 334. Zea cryptosperma, 126. Zea Mays, 126, 149, 2195 22; 325, 380, 387. Zea tunicata , 126. Zilla myagroides, 80. Zinnia, 182. Zinnia elegans, 269. CATALOGUE DES LIVRES DE BOTANIOUE QUI SE TROUYENT. AUR T ia - CHEZJ.B.BAILLIERE, ~ LIBRAIRE DE L'ACADÉMIE ROYALE DE MÉDECINE, RUE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE, 17, A LONDRES, CHEZ H. BAILLIERE, 219, REGENT-STREET, —3233 980 ote . ACHARIUS(E ). Lichenographiæ suecicæ Prodromus , Lincopiæ, 1798, in-8, fig. | D — Methodus qua omnes detectos Lichenes secundum organa carpomorpha ad- genera, species et varietates redigere atque observationibus illustrare tentavit, Stockholm, 1803 , in-8 avec 8 pl... 3 10 fr. ADANSON. Famille des plantes. Paris, 1763, 2 vol. in-8. TTE AGARDH. Synopsisalgarum Scandinavie, Lunde , 1817, in-12. 4 fr. 50 — Icones algarum europearum. Représentation d'algues européennes, sui- vie de celle d'espèces exotiques les plus remarquables, récemment dé- couvertes. Leipsig , 1828 - 1835, in-8 avec 40 planches coloriées. 98 fr. ALPINI (P.). Historia naturalis de plantis Agypti, Lugduni Batavorum, 1738, 2, vol. in-4, figures. à : ^ 7 18 fr. ANNALES des sciences naturelles, par MM. Brongniart, Guillemin et De- caisne (partie botanique) , seconde série, Paris, 1835 à 1843, 20 vol. grand in-8. E 180 fr. AUBLET. Histoire des plantes de la Guyane francaise, Paris, 1778, 4 vol. in-4, avec 392 planches. | ; 80 fr. BABINGTON (CH.). Prinitiæ flore Sarnicæ ; or, an outline of the flora of the channel islands of Jersey, Guernsey, Alderney and Serk. London, 1839, in-12. - 6 fr. 59 BALSAMO et DE NOTARIS. Prodromus bryologiæ mediolanensis , Medio- lani, 1834, in-8. i ' ; 4 fr. 50 BARON. Flore des départements méridionaux de la France, et principalement de Tàrn-et-Garonne. Montauban, 1823 , in-8. 6 fr. BARTLING (F. T.). Ordines plantarum, earumque characteres et affinitates, adjecta generum enumeratione, Gottinga , 1830, in-8. 8 fr. BAUHINI. Theatri botanici ; Francofurti, 1620, in-4, fig., rel, 5 fr. BAUTIER, Tableau analytique de la Flore Parisienne; cinquième édition, Paris, 1843, in-18. F5 3 fr. 25 BECKER. Flora der gegend um Frankfurt am Main. Francfort , 1898, 9 vol. : - 16 fr. in-8. WV Page unavailable because it was uncut within original volume - es I <= CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY DARWIN'S LIBRARY PROJECT Page unavailable because It was uncut within original volume i CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY DARWIN'S LIBRARY PROJECT Page unavailable because it was uncut. within original volume DARWIN'S LIBRARY PROJECT Page unavailable because it was uncut within original volume i CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY DARWIN’S LIBRARY PROJECT Page unavailable because it was uncut. within original volume f = ua =m MU A "Tem nl RERANRANRU y CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY DARWIN’S LIBRARY PROJECT Page unavailable because it was uncut within original volume - pe oe CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY T DARWIN'S LIBRARY PROJECT suc JACQUIN (N. J.). Miscellanea Austriaca ad botanicam, chemiam et historiam naturalem expectantia. Vindobone, 1778-1781, 2 vol. in-4 avec 40 NEL color. "7 30 fr. JAEGER (G. F.). Transformatio corolle clematidis viticelle in bilabiatam, ejusdemque in tubulosam atque limbatam ; 1828, in-4 de 2 pag. et 1 pl. 1 fr. . JOHNSTON (G.). A Flora of Berwick-upon-T weed, Edimburg , 1829-1831, % vol. in-12 avec 3 pl. cart. 12 frs JOHNSTONI. Historie naturalis de arboribus et plantis libri X. Heilbron- nensis, 1768, in-fol. avec 137 pl. : 15 fr. JOLYCLERC. Principes de la philosophie du botaniste. Paris, an VI, in-8, broché. 5 fr. JUSSIEU (A. de). Mémoire sur le groupe des Méliacées. Paris, 1830, in-4 € 19 pl. TP — Mémoires sur les Rutacées, ou considérations sur ce groupe de plantes, sui- vies de lexposition des genres qui le composent. Paris, 1825, in-4, avec 46 pl. 45 fr. — Principes de la méthode naturelle des végétaux, Paris, 1824,in-8 de 50 pag. AN. r 4 fr. 75 — Cours élémentaire de botanique, Paris, 1844, in-12, fig. 6 fr. KICKX (J.). Recherches pour servir à la Flore cryptogamique des Flandres, 4840, 1re centurie, in-4 de 46 pag. — ` 2 fr. KNORR (G. W.). Thesaurus rei herbaria hortensisque universalis, exhibens figuras florum, herbarum, arberum, fructuum, aliarumque plantarum, prorsus novas, et ad ipsos delineatas depictasque archetypos nativis coloribus. Nurem- berg, 1788, 9 tom. en 3 vol. in-fol. avec 300 pl. color. 50 fr. KROCKER. Flora Silesiaca. Uratislavie, 1787-1815, 4 vol. in-8 avec 102 planch. 50 fr. KUNTH (E. S.). Synopsis plantarum quas in itinere ad plagiam equinoxia- lem orbis novi collegerunt Al. de Humboldt et A. Bonpland. Parisis, 1833, 4 vol. in-8. 40 fr. LABILLARDIERE. Icones plantarum Syriæ rariorum descriptionibus et ob- servationibus illustrate. Parisiis, 1791, decas I à V, in-& avec 50 pl. 45 fr. — Nove Hollandiæ plantarum specimen. Parisiis, 1804, 2 vol. grand in-4 avec 265 pl. 30 fr. — Sertum austro-caledonicum. Pars I et II, in-4 avec 80 pl. 20 fr. LAMARCK. Flore francaise, ou Description succincte de toutes les plantes qui croissent naturellement en France. Paris, an III, 3 vol. in-8, fig. 45 Tr: LAMARCK et POIRET. Dictionnaire de botanique (Encyclopédie méthodi- que). Paris, 1783-1808, 8 vol. in-4, avec 9 vol. in-4 contenant 900 planches, cart. 60 fr. LAMOUROUX. Dissertations sur plusieurs espèces de fucus peu connues ou nouvelles ; Agen, 1805, 1er fascicule, in-4 de 83 pag. 36 pl. 8 fr — Histoire des Polypiers coralligénes flexibles, vulgairement nommés zoophytes, Caen, 1816, in-8, avec 19 planches, rare. 36 fr. LAVY. Etat général des végétaux originaires, ou Moyen de juger, méme de son cabinet, de la salubrité de l'atmosphére, de la fertilité du sol et de la pro- priété des habitants, dans toutes les localités de l'univers. Paris, 1831. in-8. 7 fr. 50 LECOQ et JUILLET. Dictionnaire raisonné des termes de Botanique et des familles naturelles ; contenant l'étymologie et la description détaillée de tous les organes, leur synonymie et la définition de tous les adjectifs qui servent à les décrire ; suivi d'un vocabulaire des termes grecs et latins le plus générale- ment employés dans n Reit cid botanique. Paris, 1831, 1 fort vol.in-8. 9 fr. — Précis élémentaire de botanique et de physiologie végétale, contenant l'his- toire complète de toutes les parties des plantes, et l'exposition des règles à sui- - ur qm vre pour décrire et classer les végétaux. Paris, 1898, in-8. 5 fr. LECOQ. De la préparation des herbiers pour l'étude de la botanique. Paris, 1829, in-8. 9 fr. 50 — Le méme avec des échantillons de plantes séches. 3 fr. 50 — Recherches sur la reproduction des végétaux. Clermont, 1827, in-4. 2 fr. 50 LESCHEVIN. Physiologie végétale. Paris, 1895, in-8. 2 fr. 50 "E (TH.). Essai sur la famille des Cypéracées. Paris, aa in-4. pd — Botanographie élémentaire, ou principes de Botanique, d'Anatomie et de Physiologie végétale, Paris, 1826, in-8. 9 fr. LESSING (C. F.). Synopsis generum compositorum eorumque dispositionis no- ve tentamen monographiis multarum capensium interjectis. Berolini, 2 i 8 fr. in-8. LETELLIER (J. B. L.) Histoire et description des champignons alimentaires et vénéneux qui croissent aux environs de Paris. Paris, 1826, in-8 avec 12 pl. color. . : 6 fr. LIGHTFOOT. Flora scotica. London, 1799, 2 vol. in-8 avec 35 pl. 20 fr. LINDENBERG (I. B. G.). Synopsis liepaticarum Europæarum adnexis ob- servationibus et adnotationibus «criticis illustrata, Bonn., 4829, in-4, avec 2 planches. | 12 fr. aoe (J.). An introduction to Botany. 3¢ édit. London, 1839, in-8 isis pi. 2” TOSI: LINK (H. F.). Elementa philosophiæ Botanicæ. Berolini, 1824, v pl. T. LINNEUS (C.). Systema vegetabilium ; editio sextadecima, curante C. Spren- gel. Getlingue, 1824-1828, 5 forts. vol. in-8. 54 fr. — Systema vegetabilium nova editio curantibus J. Roemer et J. A. Schultes. Stuttgard, 1817-1830, 7 t. en 8 vol. in-8. — Mantissa, 3 vol. in-8. 110 fr. P. a plantarum, curante C.-L. Wildenow. Berolini, 1797-1830, 12 ue in-8. 80 fr. —{ Systema nature per regna tria naturæ, curante J. F. Gmelin. Lugdunt, 1789, 10 vol. in-8. 30 fr. — Systema nature sistens regna tria nature. Lugduni Batavorum, 1756, in-8 avec 8 pl. rel. ect. — Select ex amœænitatibus academicis C. Linnei dissertationes ad universam naturalem historiam pertinentes. Gracie, 1786, in-8 avec 3 pl. 4 fr. 50 — Genera plantarum, editio nona, curante C. Sprengel, Gettingue, 1829, er in-8. r. — Genera plantarum earumque characteres naturales. Lugduni Batavorum, 1742, in-8avec 1 pl., rel. | | 5 fr. — Philosophia botanica, edente Sprengel, Hale, 1809, in-8 avec 9 pl. : 8 fr. — Philosophia botanica in qua explicantur fundamenta botanicæ. Berolini, 1780, in-8, fig. | 5 fr. — Philosophie botanique, dans laquelle sont expliqués les fondements de la bo- tanique, traduit par F. A. Quesné. Paris, 1788, in-8 avec 11 pl. "weit. LINNÉ francais, ou Tableau dn règne végétal, d’après les principes et le texte de cet illustre naturaliste, avec l'éloge historique de Linné; par Vicq-d’Azyr. Montpellier, 1809, 5 vol. in-8. : 18 fr. LOISELEUR-DESLONCHAMPS. Flora gallica, seu Enumeratio plantarum in Gallia sponte nascentium secundum Linneanum disposita ; addita familia- rum naturali synopsi, nova editio emendata, aucta. Parisiis, 1898, ? vol. in-8 cum tabulis xxxi. 16 fr. — Recherches et observations sur l'emploi de plusieurs plantes de France, etc., Paris, 1819, in-8. , Sh ig Page unavailable because it was uncut within original volume [ LL LIRE CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY DARWIN'S LIBRARY PROJECT Page unavailable because it was uncut - within original volume | CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY DARWIN'S LIBRARY PROJECT Page unavailable because it was uncut | within original volume - f CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY DARWIN'S LIBRARY PROJECT Page unavailable because it was uncut within original volume CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY f DARWIN'S LIBRARY PROJECT Page unavailable because it was uncut within original volume | ae n x TEIL: CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY DARWIN'S LIBRARY PROJECT Page unavailable because it was uncut within original volume pe CAMBRIDGE UNIVERSITY LIBRARY DARWIN'S LIBRARY PROJECT a dA a OUVRAGE COMPLET 11 FORTS VOLUMES IN-8. HISTOIRE. NATURELLE ANIMAUX SANS VERTEBRES.— PRESENTANT LES CARACTERES GENERAUX ET PARTICULIERS DE CES ANIMAUX, LEUR DISTRIBUTI0B LEURS CLASSES, LEURS hace re Sa LEURS GENRES, ET LA CITATION SYNONYMIQUE DES PRINCIPALES ESPECES QUI S'Y RAPPORTENT. PRÉCÉDÉE D'UNE INTRODUCTION ^ Détermination des caracteres essentiels de l'Animal, sa Distinction du végétal et des aures corps naturels ; enfin, l'exposition des principes fondamentaux de la Zoologie. ; ; posi p 8 PAR J. D. P. À DELAMARGK , Membre de l'Institut de France, Professeur au Muséum d'Histoire Naturelle. DEUXIEME EDITION Revue et augmentée de notes et additions présentant les Fails nouveaux dont la Science s'est enrichie jusqu'à ce jour. Par MM. G. P. DESHAYES ct H. MILNE EDWARDS. prix DE CHAQUE VOLUME, 8 FRANCS. Le tome XI et dernier termine l’Hisroire pes MozLusques, et contient la TABLE GÉNÉRALE ALPHABÉTIQUE de tout l'ouvrage. Dans cette nouvelle édition, M. Desnayes s'est chargé de revoir et de compléter VIntroduction, Y Histoire des Mollusques et des Coquilles ; M. MILNE EDWARDS, les ' Infusoires, les Polypiers, les Zoophytes, l'organisation des Insectes, les Arachnides, les Crustacés, les Annélides, les Cirrhipèdes ; M. F.. Dusarpiy, les Radiaires, les Echinodermes et les Tuniciers ; M. NorpMann (de Berlin), les Vers, etc. Les nombreuses découvertes des voyageurs, les travaux originaux de MM. Milne Edwards et Deshayes, ont rendu les additions tellement importantes, que l'ouvrage de Lamarck a plus que doublé dans plusieurs parties, principalement dans V'Eus- TOIRE DES MOLLUSQUES, ei nous ne craignons pas de présenter cette deuxième édition comme un ouvrage nouveau, devenu de première nécessité pour toute personne qui veut étudier avec succes les sciences naturelles en général, et en particulier, celle des animaux inférieurs. ~ Cet ouvrage important est ainsi distribué : . Tome Ier, Introduction. Animaux infusoires. In-8 de 440 pages. —T. II. Po- lypiers, Zoophytes. In-8 de 684 pages. — T. HI. Les Radiaires, les Échinodermes; les Tuniciers, les Vers, Organisation des Insectes. In-8 de 770. pages. — T. IV. Histoire des Insectes. In-8 de 787 pages. — T. V. Les Arachnides, les Crustaces- les Annélides, les Cirrhipédes.. In-8 de 700 pages.— T. VI. Histoire des Mollusques- 1n-8 de 600 pages. —T. VII. Histoire des Mollusques. In-8 de 136 pages.— T. VIH. Histoire des Mollusques. In-8 de 660 pages. — T. IX. Histoire des Mollusques. In-8 de 728 pages. — T. X. Histoire des Mollusques. In-8 de 640 pages. — T. XI Histoire des Mollusques, suivi de la Table générale des Matiéres de tout l'ouvrage; in-8 de 600 pages. 2b Vou is E Corbeil, imp. de Crit. A ze SUE m am z Mme anm emm EN VENTE A LA MEME LIBRAIRIE. CHENOPODEARUM MONOGRAPHICA ENUMERATIO, par A. Moquin-Tandon. 1 vol. in-8. — Prix. 3 fr. 50. LECONS DE BOTANIQUE COMPRENANT PRINCIPALEMENT LA MORPHOLOGIE VEGETALE LA TERMINOLOGIE , LA BOTANIQUE COMPARÉE, L'EXAMEN DE LA VALEUR DES CARACTÈRES DANS LES DIVERSES FAMILLES NATURELLES, ETC. ; PAR AUGUSTE DE SAINT-HILAIRE, MEMBRE DE L'ACADEMIE DES SCIENCES DE L'INSTITUT DE FRANCE , PROFESSEUR A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE PARIS > CHEVALIER DE LA LEGION D'HONNEUR ET DE L'ORDRE DU CHRIST, des Académies de Berlin, St-Petersbourg, Lisbonne; C. L. C. des curieux de la nature; de la Société linnéenne de Londres, d'histoire naturelle de Genève, botanique d’Edimhourg , médicale de Rio-Janeiro, historique et géographique brésilienne, philomathique de Paris, des sciences d'Orléans, ete., etc. t fort vol. in-8 de 900 pages et 24 pl., contenant 446 fig. — Prix, 14 fr. * LE MATERIALISME LA PHRÉNOLOGIE, COMBATTUS DANS LEURS FONDEMENTS , ET L'INTELLIGENCE ETUDIEE dans son état normal et ses aberrations: dans le délire, les hallucinations, la folie, les songes et chez les animaux ; par M. l'abbé Foriehon. 1 vol. in-8 et 2 planches. — Prix, 6 fr. IMPRIMERIE BOUCHARD-HUZARD, RUE DE L ÉPFRON, 7. Ý; WEFFEFI2AI F, WAP FE T D # y "y; F y 7 7. D # 7, 7f, Lf tf, 4 " 4 4 CUAL, A D 7 2 7; PF; 7, z i *. #1 7 y #1 y 7 tf x th A Yy f 7 H if M YY iy //