Série IIL 8e année, Ne2 Avril-Juin 1936

ALAUDA

Revue trimestrielle d’Ornithologie

publiée par Paul PARIS, Professeur de Zoologie à la Faculté des Sciences de Dijon

Rédacteur : Henri JOUARD Bulletin de la

Société d’Études Ornithologiques Secrétaires : Henri HEIM DE BALSAC et André BLOT

——————————— André Blot, éditeur, 12 avenue de la Grande-Armée, Paris

Source : MNHN. Paris

ALAUDA

Revue trimestrielle d’Ornithologie

COMITÉ DE PATRONAGE

MM. Buræau, Professeur honoraire à l'École de Médecine de Nantes ; Caurzen, Membre de l'Institut, Professeur à la Sorbonne ; Cuénor, Membre de l'Institut, Professeur à la Faculté des Sciences de Nancy ; Dusosca, Professeur à la Sorbonne ; Jocxaup, Professeur à la Sorbonne ; Lewoux, Directeur du Muséum National d'Histoire Naturelle ; Picarp, Professeur à la Sorbonne ; Raraup, Professeur à la Sorbonne: SEURAT, Professeur à la Faculté des Sciences d'Alger ; Torsenr, Professeur honoraire à la Faculté des Sciences de Dijon.

COMITÉ DE SOUTIEN

Le constitueront tous ceux qui, appréciant les efforts du Comité de Rédac- tion et tenant à le soutenir moralement et matériellement, verseront, en guise d'abonnement, une somme d'au moins 100 francs.

Le nom des membres du Comité de soutien sera donné, pour autant qu'ils ne s’y opposent pas, dans le dernier fascicule de l’année, avec l'indication du montant de leur versement,

ABONNEMENTS

France et Colonies : 60 francs. Etranger : 75 francs (60 + 15 francs de frais de port supplémentaires) Prix du présent numéro : 20 francs Le montant des abonnements, qui sont dus au 1er janvier, doit être adressé à M. Henri JOUARD

45, rue Lamartine, Dijon (Côte-d'Or) Compte de chèques postaux : Dijon 298-21

AVIS DIVERS

Toutes publications pour compte rendu ou en échange d'A lauda doivent être adressées, impersonnellement, à M. le Rédacteur d’Alauda, Faculté des Sciences, 51, rue Monge, Dijon (Côte-d'Or).

Tous manuscrits, demandes de renseignements, etc., doivent être adres- sés à M. Henri Jouanro, Rédacteur, 45, rue Lamartine, Dijon (Côte-d'Or).

La Rédaction d'Alauda reste libre d'accepter, d'amender (par ex. quant à la nomenclature en vigueur) ou de refuser les manuscrits qui lui seront proposés. Elle pourra de même ajourner à son gré leur publication.

Elle serait reconnaissante aux auteurs de présenter des manuscrits tapés à la machine, n’utilisant qu’un côté de la page et sans additions ni rature.

Faute aux auteurs de demander à faire eux-mêmes la correction de leurs épreuves (pour laquelle il leur sera accordé un délai max. de 8 jours), cette correction sera faite épso facto par les soins de la Rédaction sans qu'aucune réclamation y relative puisse ensuite être faite par ces auteurs,

Alauda ne publiant que des articles signés, les auteurs conserveront la responsabilité entière des opinions qu'ils auront émises.

La reproduction, sans indication de source, ni de nom d'auteur, des articles contenus dans Alauda est interdite.

Voir, page 3 de la couverture, les indications concernant la Société d'Études Ornithologiques

Source - MNHN. Paris

Supplément à Alauda (avril-juin 1936).

La Société d’Études Ornithologiques vient de publier:

INVENTAIRE DES OISEAUX DE FRANCE

par Noël MAYAUD

AVEC LA COLLABORATION d’Henri HEIM DE BALSAC et Henri JOUARD

Un volume in-8° de 220 pages

Expédié franco France et colonie autres pays, 46 fr.

S’adresser à M. André BLor, secrétaire adjoint de la E 0; 12, avenue de la Grande-Armée, Paris (7 { lui envoyer le mon- tant par versement à son compte postal 1146-60, ou par mandat Ou par chèque sur Paris.

DRM REN ES SA de 40 fr. Belgique, Luxembourg, 43 fr. ;

Nota. Jusqu'au 1% novembre 1936, les membres de la Société d'Etudes Ornithologiques bénéficieront d'une remise de 25 %. Les prix ci-dessus sont donc, Pour eux et jusqu’à la date indiquée. di- minués de 10 fr. (30 fr., 33 fr., 36 fr.).

Source : MNHN. Paris

BIOGÉOGRAPHIE DES MAMMIFÈRES er pes OISEAUX DE L'AFRIQUE DU NORD

par Henri HEIM DE BALSAC, Docteur ès Sciences

Un fort volume de 446 pages avec 52 figures dans le texte, 7 planches et 16 cartes hors texte, 125 fr. (Remise aux abon- nés du Bulletin biologique de France et de Belgique 25 *,).

Laboratoire d'Évolution des Etres organisés, 105, boulevard Raspail, Paris.

LES RAPACES D'EUROPE

LEUR RÉGIME, LEURS RELATIONS AVEC L'AGRICULTURE ET LA CHASSE par Paul MADON Un volume in-8° de 296 pages, chez l'auteur, 5, avenue Vauban, Toulon (Var), contre envoi préalable d’un mandat- carte de 30 fr. pour la France, 35 fr. pour l'étranger, frais d'envoi et de recommandation compris.

Henri Heim de Balsac LA NOTION D'ESPÈCE ET DE SOUS-ESPÈCE DANS SES RAPPORTS AVEC LA BIOGÉOGRAPHIE (tiré à part d’Alauda), franco 5 fr. S'adresser à M. André BLor, secrétaire adjoint de la S. E. O., 12, avenue de la Grande- Armée, Paris (179). Paiement en timbres- poste par chèque postal, Paris 1146-60.

Comte de Bonnet de Paillerets

ADDITIONS ET CORRECTIONS A LA RÉGENTE BIBLIOGRAPHIE DES FAUNES ORNITHOLOGIQUES DES RÉGIONS FRANÇAISES

DE MARCE

Nous avons fait tirer à part un certain nombre d'exemplaires de

cet article paru dans Alauda 1936, 1. Nous le tenons à la dispo-

sition de ceux de nos collègues qui, possesseurs du travail de

M. Legendre, voudraient y joindre ce qui, d'ores et déjà, vient le

compléter; franco 5 fr.

S'adresser à M. André Bio, 12, avenue de la Grande-Armée,

Paris (17°), voir ci-dessus.

Source : MNHN. Paris

ALAUDA

Série III, 8e année. No2 Avril-Juin 1936.

SOCIÉTÉ D’ÉTUDES ORNITHOLOGIQUES

Séance du 2 mai 1936.

Présidence du D' Rocnon-DrvrexEaun.

S'étaient excusés de ne pouvoir assister à la séance : MM. Co- GNEAU, Monmacn, MouirLarp, professeur RasauD, baron DE Sancy.

Invité : capitaine Voisin.

Le secrétaire général donne lecture d’une communication de M. Jean Morsacu sur la présence, observée pour la première fois dans le Grand-Duché de Luxembourg, du Grimpereau familier Certhia familiaris (CT. Alauda, 1936, 1, pp. 116-118).

M. Herm DE Barsac signale que le Pigeon colombin Columba aenas parait accroître son effectif à Paris. Depuis quelque temps, trois ou quatre de ces oiseaux viennent régulièrement dans la cour de l'immeuble qu'habite notre collègue. Le professeur Picarp en voit depuis plusieurs années aux alentours de son laboratoire, 105, boulevard Raspail. Depuis deux ans notre secrétaire-adjoint M. André BLor en voit un couple dans sa cour. Précédemment, le Dr Rocnon-DuviGneauD en avait signalé au pare Monceau, il y en a cette année encore (Cf. Alauda, 1934, 3, pp. 401-402).

M. Heim DE Bazsac rapporte ensuite une observation qu'il a faite lors d’un récent séjour en Lorraine. Les Merles d’eau Cinclus cinclus, qui sont communs à Buré d'Orval (Meurthe-et-Moselle), se tiennent d'ordinaire aux abords des ruisseaux.Or, cette année, et pour la première fois, notre secrétaire général a pu les observer sur l'étang. Et ce changement de milieu a déterminé un changement complet de

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Source : MNHN. Paris

146 ALAUDA, Vu. 2. 1956.

comportement, Ces oiseaux, en effet, au lieu de se tenir sur les bords de l'étang, puis d’entrer dans l’eau en marchant sur le fond, restaient sur l'eau, en surface, nageant, plongeant, remontant, exactement à la manière des Grèbes castagneux Podiceps ruficollis. Cette intéressante observation, qui soulève plusieurs problèmes bio- logiques, sera relatée en détail, et commentée, dans un prochain numéro d’'Alauda.

Enfin, notre secrétaire général donne lecture des nouvelles obser- vations de Becs-croisés faites par plusieurs de nos collègues.

Séance du 6 juin 1936.

Présidence de M. le Professeur RaBauD.

Le secrétaire général donne lecture d’une importante étude de M. Georges Démenrierr sur les Oies des moissons Anser fabalis, que nous publions plus loin (pp. 169-193).

Séance du 4 juillet 1936.

Présidence du D' Rocnon-DuvIGNEAUD.

S’étaient excusés de ne pouvoir assister à la séance : AM. J. DE Cuavieny, Mouizzann, Professeur RaBauD, TROUCHE ; capitaine 6).

Le secrétaire général présente une épreuve de l'Inventaire des Oiseaux de France, établi par Noël Mayau, avec la collaboration d'Henri Hem pe Bazsac et d'Henri Jouar», et indique les prin- cipales caractér & ouvrage, que la Société d'Etudes Ornithologiques va publier très prochainement. On trouvera plus loin (pp. 258-260) un premier aperçu de cet important volume, qui sera, avant longtemps, entre les mains de tous les ornithologistes de France, de Belgique, de Luxembourg, de Suisse, et de maint autre

pays !

Voisin (invit

tiques de ©

4. Peu de temps après cette séance, un prospectus détaillé a été envoyé à tous les merabres de la S, E. O. et à tous les abonnés d'Alauda. Et l'/nventaire des Oiseaux île France a été mis en vente,et envoyé aux souscripteurs, dans le courant du mois d'août, Rappelons, pour ceux que ce prospectus n'aurait pas touchés, que l'/nventaire es Oiseaux de France forme un volume de 220 pages, dont le prix est de 40 fr. (franco France, colonies, Belgique et Luxembourg 4 fr. autres pays 46 fr). Jus lovembre 1936, les membres de la S. E. O. bénéficieront sur ce prix d'une

qu'au 1

Source : MNHN. Paris

SOGIÊTÉ D’ÉTUDES ORNITHOLOGIQUES 147

Le secrétaire général donne ensuite lecture d’une étude de notre rédacteur Henri JouarD, retenu à Dijon et, de ce fait, empêché de la présenter lui-même, sur la question des Aigles criards. On la lira plus loin sous le titre : Qu'en est-il des Aigles « criards » de Franc

Puis M. Seypoux fait part de la découverte qu'il a faite ce printemps, en forêt de Fontainebleau, de la Fauvette pitchou Syl- via undata, et présente une ponte, deux nids et un spécimen de jeune. La trouvaille de notre collègue, qui fera l’objet d’une note détaillée dans un prochain numéro d'Alauda, étend vers l'Est l'aire de distribution, jusqu’à présent connue, du Pitchou. (L'Orléanais, d'après les observations du marquis ne TRrisrAn, était considéré comme sa limite orientale.)

M. Heim ne Bazsac rapporte enfin le récit d'une visite aux colonies d’Aigrettes garzettes Egretta garzetta et de Hérons cra- biers Ardeola ralloides qu'il a eu l'occasion de faire récemment en Camargue.

Le secrétaire-adjoint :

André BLor.

La thèse d'Henri Heim de Balsac.

Nous sommes heureux d'annoncer aux lecteurs d'Alauda et aux membres de la Société d'Etudes Ornithologiques que notre ami Henri Heim DE Barsac a été reçu docteur ès sciences à la Sorbonne, le 23 mars 1936.

La thèse principale d'Henri Herm ne BaLsac était cette Biogéo- graphie des Mammifères et des Oiseaux de l'Afrique du Nord dont M. le Professeur Seurar a dit, dans la bibliographie de notre der- nier numéro (cf. Alauda, 1936, 1, pp. 130-132), l'intérêt et la valeur. Les deux autres thèses avaient pour sujet les Zracoïdes jos- siles de l'Afrique du Nord et les Reptiles de l'Afrique du Nord.

C’est avec une aisance souveraine qu’elles ont été soutenues, tou- tes trois, par le naturaliste de premier ordre qu'est notre secrétaire

remise de 25 % ; le prix est done pour eux, et jusqu'à la date indiquée, diminué de 10 fr. (30 fr,, 33 fr,, 36 fr.), S'adresser à M. André Buor,secrétaire adjoint de la S.E. ©. 12, avenue de la Grande-Armée, Paris, 17° et lui envoyer le montant par versement à son compte postal 1146-60, ou par mandat ou par chèque sur Paris.

Source : MNHN. Paris

148 ALAUDA. vit, 2. 1936.

général. Et les membres du jury MM. les Professeurs RABAUD, JozEauD et Picarp tinrent à souligner la portée peu commune de la thèse de notre ami en déclarant que, s'ils accordaient à Henri Heim DE BaLsac la mention très honorable, c'est qu'ils ne dispo- saient pas d’une mention plus expressive encore pour qualifier le travail présenté et la façon magistrale dont il avait été exposé.

Paul Paris ; André BLor ; Henri JouaRD.

Avis et remerciements.

Avant de remettre la charge de la trésorerie de notre Revue et de: notre Société à M. H. Jouanr», le Dr E. Béraur a tenu à nous mani- fester d’une façon concrète la vive sympathie qu'il leur témoigne. Il a done donné à Alauda, pour être mises à la disposition des mem- bres de la Société d'Etudes Ornithologiques, une collection de la revue belge Le Gerfaut (1911-1933) et une collection de la revue anglaise British Birds (1907-1933).

Ces collections ont été entreposées au Laboratoire de Biologie expérimentale de la Sorbonne, avec les autres périodiques et vo- lumes de notre bibliothèque.

Source : MNHN. Paris

SUR L'OSTÉOLOGIE ÉLÉMENTAIRE DU GRAND CORMORAN PHALACROCORAX CARBO SUBCORMORANUS ET SUR SON CURIEUX CRANE

par le Dr Marcel Baupouix,

Ancien Président de la section d'Anthropologie de l'A. F. A. S.

Le Cormoran est un Palmipède grand-voilier qu’on rencontre assez souvent sur les côtes de France, l'hiver, de la Gironde à la mer du Nord. C’est du Phalacrocorax carbo subcormoranus que nous voulons parler ?.

1. Bien que M. le D' Bauvouix n'ait pas fait allusion, dans son article, à divers travaux étrangers relatifs à l'ostéologie des Cormorans publiés ces dernières années, nous avons tenu à lui donner l'hospitalité d'A/auda, Ses propres recherches présen_ tent en effet, par elles-mêmes, un caractère fort original. On pourra, d'ailleurs, les soumettre, par la suite, à toutes comparaisons utiles avec celles des autres auteu Citons notamment celles de Gaow et de SrResEMANN :

. 19 « Ilest remarquable de constater chez Carbo cormoranus et C. graculus (mais Seulement chez ces deux espèces) l'existence d'un os triangulaire et pyramidal dirigé en arrière et réuni par un ligament à l'occ, superius ; c'est un os sésamoïde qui n'appartient pas au crâne et qui augmente la surface d'insertion des muscles qui commandent les mouvements de la tête » (x Æigenthümlich ist dem Carbo cormo- ranus und C. graculus, aber auch nur diesen beiden, ein an dem Occ. superius durch Bandmasse verbundenen, dreieckig pyramidenfôrmiger, nach hinten gerich- teter Knochen, welcher die Ansatzfläche der den Kopf bewegenden Muskeln 02, vergrüssert : er ist ein Sehnenknochen und gehürt nicht zum Schädel », M. Gavow et E. Seexka, Vôgel, 1, p. 19 et pl. VII, fig. 5).

20 « Chez Phalacrocorax, qui doit posséder des muscles adducteurs du bec parti- culièrement puissants pour maintenir des Poissons robustes, le muscle adductor mandibulae externus s'étend jusqu'à la région occipitale. Pour augmenter la surface d'insertion de ce muscle, il s’est formé un os sésamoïde allongé en forme de bâton qui s'applique sans articulation sur le supraoccipital et dont l'extrémité libre se dirige en arrière » Bei Phalacrocorax, der zum Festhalten muskulüser Fische besinders kräftiger Schliessmuskeln des Schnabels bedarf, ist die Ursprungstelle des Musculus addvctor mandibulae externus sogar aus Hintenhaupt verlagert. Zur Vergrôsserung der sich dort tretenden Ansatzflûche hat sich freibeweglich an das Supraoccipitale anlegt und seine freie Spitze kaudalewärts richtet », Srresemanx, in KuxexrauL, Aves, pp. 81-82).

La divergence d'interprétation de Ganow et de Srresemanx souligne l'intérêt de l'étude du D' Bauvou. N. D, L, R.: H. H, ve B.

2. Phalacrocorax graculus desmaresti vient aussi en France.

L'oiseau qui nous a servi pour cette étude de l'os spécial ici décrit est aujourd'hui

Source : MNHN. Paris

150 ALAUDA, VII. 2. 1936.

C'est un oiseau assez mystérieux par ses allures inaccoutumées, le port de sa tête, ete, Type de l'oiseau marin !, ce volatile, aux pattes largement palmées, perche, en effet, sinon souvent sur les arbres, du moins sur les clochers et les hauts édifices comme sur les rochers. Et on se demande comment, avec de telles palmures aux doigts, il peut se tenir en équilibre sur une tige horizontale ou sur un cordon de fer ou sur un sommet aigu, à de très fortes hauteurs.

Son anatomie, en tout cas, quoiqu’elle n'explique pas toutes ces eurieuses habitudes, mérite qu'on s'y intéresse, car elle présente des particularités qu'on ne rencontre que chez ce seul genre ani-

mal, comme on va le voir.

I. Le crâne.

Le crâne du Cormoran, surtout au niveau de l'os occipital, est éritablement quelque chose d'insolite.

Pour nous faire mieux comprendre et pour mieux faire saisir son aspect spécial, nous allons le décrire, en le comparant, point par point, avee celui d'un autre oiseau marin, grand voilier lui aussi, le Fou de Bassan, au crâne presque deux fois plus grand !

Les crêtes. Le crâne du Fou, à la face externe de l’occipital, ressemble aux crânes ordinaires des Vertébrés moyens (grands oiseaux, petits Mammifères).

conservé dans une boîte en ciment ad hoc, pourvue d'un vitrage hermétique en vitrex, après formolisation intense (20 %), et exposée en plein air au musée de Croix-de-Vie, au milieu de nombreux autres oiseaux de passage, capturés au Havre-de-Vie (Vendée). Il a conservé son plumage de jeune et ne peut être confondu avec un adulte, ou avec un individu d'une autre espèce, point intéressant à souligner ici,

IL fut tué le 6 décembre 1933 par un chasseur dans les marais salants de Croix-de- Vie. Il était bagué, et la bague portait le 118.345. L'Institut de baguage nous avisa qu'il s'agissait d'un individu bagué à Lekkerkek, province du Sud de la Hol- fande, le 25 mai 1933, em duvet. Observation qui démontre de façon péremptoire que le Cormoran peut émigrer à l'âge de moins de dix mois.

Le second oiseau, qui a fourni le squelette complet d'étude, est un autre Cormoran baqué, Capturé en duvet le 21 juillet 1932, à Lekkerkek également, il fut bagué le même jour sous le 118.242. Pris mourant (de par le mazout) à Saint-Gilles-sur- Vie au début de février 1933, il fut formolisé, mais mis en terre seulement le 26 mars 1933, au pied d'un vieil arbre, pour préparer son squelette, Déterré le 22 août 1933, cet oiseau nous a fourni un squelette admirablement conservé, qui nous a permis de constater que toutes les épiphyses osseuses étaient soudées et, par conséquent, que tous les os étaient adultes, quoique le volatile fût encore en plumage de jeune, comme le précédent,

Ces deux Cormorans ont servi de base à notre communication, faite à l'Académie des Sciences, le 22 janvier 1934 sur l'âge les oiseaux peuvent émigrer.

1. Marcel Bauvoui. Les arbres carnivores du parc botanique de Croix-de-Vie. Préparation de squelettes d'oiseatix. Physiologie expérimentale, « Progrès médical », Paris, 1933, 16 septembre, 37. Tiré à part.

Source : MNHN. Paris

M: BAUDOUIN SUR L'OSTÉOLOGIE DU CORMORAN 151

a) Il présente une crête verticale saillante, suite des deux arètes latérales, correspondant aux pariétaux et descendant jusqu’à la partie supérieure du trou occipital, assez large. Cette crête est croi- sée en son milieu par une autre crête transversale. Leur croisement, en saillie plus étalée, forme la protubérance occipitale externe, dont la surface chez le Fou n’est pas pointue, mais émoussée et aplatie, comme usée en petits losanges, de 6 mm. de côté, par le roulement de la peau du crâne sur cette partie de l'os.

b) Au contraire, chez le Cormoran, qui possède bien les deux crêtes, mais dans des conditions très différentes, la protubérance occipitale externe est en pointe, sinon aiguë ; mais elle est réduite à un petit losange de 2 mm. de côté, non usé, rugueux plutôt.

Condyle occipital. Le condyle occipital, chez le Cormoran, est cylindrique et petit (diamètre 3 mm.) ; chez le Fou, il est allongé transversalement, comme étalé (7 x 5 mm.). La différence est réelle,

Fig. 1. Radiographie d'une tête de Grand Uormoran. Vue de la face inférieure (radiographie positive ordinaire : les noirs représentent les os. On ne voit pas l'os rétrooccipital).

Dimensions. Voici les dimensions comparées des deux crânes. Dimensions Cormoran Fou Long. max. ant, post. Bec trou occipital. 120 180 A. Face et crâne :

Diam. trans. max. (Cavité glénoïde)...... 30 53 HAN RAT NA 24 32

B. Os fronto-pariétal : Long... 42 57 Tania 30 51 MEN, 16 30 Rétro-oculaire 20 30

Source : MNHN. Paris

152 ALAUDA. vin. 2. 1936.

Dimensions Cormoran Fou

Os nasal (Bec) : Longueur 67 105 Large. | MEX- 16 23 AD TR AR nex 6 4

C. Cavités :

Trou occipital : Haut. ......................... 5 it TO OR PRE aude 8 9

Cavité orbitaire : Long........................... 21 30 HAE ne eme tetes 16 20

Il ÿ aurait bien des réflexions à faire sur ces mesures ! D abord la longueur du bec, un tiers plus grand chez le Fou, en rapport avec les dimensions des nasaux : les différences du trou occipital, la longueur du front, les différences des cavités orhitaires, plus éta- lées chez le Fou, ete, etc.

Caractères du trou occipital. Retenons simplement que, chez ces deux oiseaux, les trous occipitaux sont disposés en sens inverse, au point de vue dimensions. Ainsi, chez le Cormoran, le trou est

Fig. 2. Radiographie d'une tête de Cormoran, vue de profil : face latérale gauche (radiographie en négatif, d'après le procédé du D: Bouland, de Paris). Les os apparaissent en blanc. La traînée blanchâtre de la nuque indique l'os rétrooccipital.

étalé horizontalement, tandis que, chez le Fou, le grand axe est vertical. On peut d’ailleurs se demander pourquoi il en est ainsi, car il est peu probable que cela tienne au mode d'alimentation et à la nature de la flexion du crâne sur la colonne vertébrale au

Source : MNHN. Paris

M. BAUDOUIN SUR L'OSTÉOLOGIE DU CONMOIAN 153

moment de la déglutition. En tous cas, il y a une disposition

- curieuse, qui doit être ancestrale. Mais, les choses se corsent, c'est au niveau de l'écaille de l’occipital au-dessous de la protu- bérance externe.

Crête horizontale (annexe) spéciale. Là, au beau milieu de l'os, on voit une petite crête transversale, qui coupe la verticale en son milieu et qui vient des cavités glénoïdes du temporal.

Le tubercule du Cormoran (condyle supérieur). Et, au point de croisement, il y a le fameux tubercule spécial occipital du Cor- moran, qui simule un second condyle du type occipital placé au- dessus du classique et en haut du trou occipital. Ce condyle est constitué par un bouton saillant à surface arrondie et polie, cou- vert de cartilage à l’état frais, qui sert à l'articulation du célèbre osselet rétro-occipital du Cormoran.

Ce condyle, bien rond, a 3 mm. de diamètre et fait une saillie d’au moins 2 mm. Il est unique en son genre.

Ce qui est curieux et à noter, c’est la crête supplémentaire qui, chez le Cormoran comme chez le Fou, part des cavités glénoïdes, mais va s’anastomer, chez le Fou, au milieu de la crête transver- sale supérieure, tandis que, chez le Cormoran, elle se recourbe tout de suite en bas, sans atteindre cette crête principale, pour rejoindre le condyle rétro-oceipital.

Il en résulte que, chez le Cormoran, il y a, en arrière de l'occipi- bal, une gouttière transversale complète qui, chez le Fou, n'existe que sous la forme d’un triangle, au-dessus des cavités glénoïdes, à la partie externe. D’autre part, la face supérieure des pariétau frontaux, chez le Cormoran, est extrêmement lisse et on dirait qu’elle a été polie par le glissement de la peau. Chez le Fou, au contraire, les pariétaux et les frontaux sont rugueux et d'aspect fibreux, comme une tige d’arbre, sans aucune analogie avec le caractère précédent. En somme, le Cormoran présente deux con- dyles occipitaux, l'un au-dessus, l'autre au-dessous du trou occipi- tal.

Il en résulte qu'il n'a pas encore acquis tout le bénéfice qu'ont les oiseaux de n’en posséder qu'un seul, ce qui leur permet de tour- ner la tête de 1800, au lieu de 900 seulement. Mais ce deuxième condyle est plutôt gênant, car il empêche ces oiseaux, qui ont deux condyles, en sens inverse des Mammifères, de tourner leur tête, en ne leur présentant aueun avantage.

Source : MNHN. Paris

154 ALAUDA, vil, 2. 1936.

Certes, ces deux condyles sont placés en sens inverse de ceux de l'Homme, sur un même axe de giration (fig. 1), mais cela ne facilite en rien les choses, puisque los rétro-occipital est fixé fermement au milieu des muscles de la nuque ou même d’une façon peu solide.

Me.

Fic. 3. Même radiographie, positive.

Quoi qu'il en soit, c'est peut-être à cette conformation anato- mique que les Cormorans doivent la rigidité et le port particulier de la tête, qui reste immobile, souvent, au lieu de se déplacer cons- tamment. Ce fait m'avait frappé quand j'observais le couple de Cormorans qui percha jadis, si longtemps, sur le clocher de Croix- de-Vie ; mais je n'en pouvais alors soupçonner la cause.

IT. L'osselet rétro-occipital.

L'osselet rétro-occipital du Cormoran est une fine aiguille os- seuse de 23 mm. de longueur, qui se termine en pointe très aiguë.

Vu de profil, sa base, large de 3 mm. à peine, s'articule avec le tubercule spécial ou supérieur du pourtour du trou occipital, par une petite cavité glénoïde encapuchonnant le condyle propre du Cormoran. À simple vue le poids ne doit pas dépasser 1 à 2 gr., car la minceur de cette tige semble extrême.

Radiograph miner in &

Pour bien comprendre cet osselet, il faut l’exa- tu, plongé dans les muscles de la nuque, sur la peau et au- dessus de la colonne vertébrale, sur une tête intacte de Cormoran, à l’aide d'une radiographie latérale et d’une vue de profil.

Source : MNHN. Paris

N. BAUDOUIN SUR L'OSTÉOLOGIE DU CORMORAN 155

On l’aperçoit très nettement alors, sous la forme d’un filet noirâtre, à travers la masse grise des muscles, sur les épreuves positives ordinaires.

Fi. 4 schématique de cette radiographie, montrant les deux con rieurs de l'occipital, C. S. : condyle spéci condyle des oiseaux ; Cr. S. et Cr, 1. : les deux crêtes occipi- A. B. : os rétrooccipital ; M : muscles de la nuque ; B P : bosse pariétale ; O : orbite ; P T O É : protubérance occipitale externe.

Sur les négatifs, au contraire, on le voit encore mieux, sous forme d’une lame peu haute, longue traînée blanche, filiforme !

Il court au-dessus des premières vertèbres cervicales, d'avant en arrière, à environ 5 mm. de distance du trou occipital jusqu'au milieu de la 3 vertèbre. Il est ainsi logé sous la peau de la nuque, exactement dans le plan médian.

5.— Tête de Grand Cormoran disséquée, montrant l'os rétro- occipital, disséqué, mais encore inclus et articulé au niveau du con- dyle occipital (les muscles ont été simplement écartés ; vue latérale gauche).

Source : MNHN. Paris

156 ALAUDA. VII, 2, 1936

Dissection. On le trouve à la dissection, en s’efforcant de ne pas le sectionner au bistouri en disséquant les muscles d'avant

en arrière de chaque côté de la ligne médiane.

Pour disséquer ce petit os, je le repérai d’abord par palpation, en appuyant la pulpe de l'index sur le sommet de l'occipital. Je le reconnus nettement sous la peau sous forme d’une ligne de résis- tance osseuse descendant vers le cou. Il en résulte qu'avec un examen soigneux de la tête, on peut facilement reconnaitre sa présence. Je fis alors exactement au-dessus de lui sur la ligne mé- diane une incision longitudinale au bistouri de 6 à 7 cm. Je dissé- quai avec soin les deux lèvres de la plaie en y comprenant les tissus musculair: et j'aperçus alors l'osselet, exactement au milieu, mobile entre les muscles s'insérant sur lui. Je le libérai de chaque côté de ces insertions, et, passant la lame du bistouri au-dessous de lui, et à le luxer sans le désarticuler, de facon que, sortant du milieu de l'incision, je puisse le placer ver- ticalement et le voir sur ses diverses faces.

j'arrivai à le dégage

Fic. 6. Mème tête de gauche, On voit los r le condyle occipital spécial .

Anatomie. C'est en réalité un os long de 25 mm. à trois faces concaves : une inférieure, s'appuyant sur les muscles de la nuque, et deux latérales ; l’arête supérieure est directement sous la peau et c'est elle qu'on sent à la palpation.

La radiographie, bien entendu, ne donne que l’aspect d'une des faces latérales, vue surtout près de l’arête supérieure.

Le sommet, libre en arrière, n’a que 2 mm. de diamètre ; à leurs bases, les trois faces mesurent, au-dessus de la petite cavité glé-

Source : MNHN. Paris

M. BAUDOUIN SUR L'OSTÉOLOGIE DU CORMORAN 157

noïde d’articulation, à peine 6 mm. de large ; les trois lames os- seuses qui le forment sont transparentes et ne sont épaisses que de Î mm.

L'os ne commence à diminuer notablement de largeur qu'à 40 mm. de sa base ; alors il n’a plus que 4 mm. de large ; et de à son sommet il va se continuant en une pointe aiguë. La hauteur n'est que de 4 mm. à la base !. Cette forme, à l'aspect d'un poi- gnard à trois lames, de coupe triangulaire en étoile, est très facile à reconnaître. Pour quiconque a disséqué une fois cet os, la recon- naissance est aisée, car il ne ressemble à aucun autre chez les Oi- seaux.

Articulation occipitale. L'articulation de l'os rétro-occipital avec le condyle supérieur de l’occipital est, on l’a vu, une enar- throse avec cavité glénoïde classique, à grand axe transversal (6 mm.).

La jonction des éléments osseux est opérée par une capsule Jibreuse en calotte ou manchon, que j'ai bien vue et disséquée. Elle est en tissu mince et fragile ; on n'aurait qu'à tirer dessus en la tordant pour la déchirer et la désarticuler ! Elle s’insère d'une part tout autour du condyle, et, d’autre part, autour de la base de la glénoïde.

Bien entendu ses fibres se continuent et s'imbriquent avec le périoste, très facile à isoler, de l'os rétro-occipital.

Ce sont tous ces caractères anatomiques, précis et indiscutables, qui font de cet appendice une véritable apophyse épineuse, arti- culée |

Musculature. Dans les deux gouttières latérales, constituées par deux angles dièdres, et recouvertes par le périoste, s’insérent de petits faisceaux musculaires très allongés fixés au tissu con- jonctif. Ces fibres proviennent de muscles qui recouvrent l’occi- pital.

Dans la gouttière inférieure plus plate, il y avait surtout une petite quantité de tissu conjonctif très peu dense ressemblant à celles qui entourent les bourses séreuses. Il serait très possible qu'il y ait eu autrefois l’une de ces formations, réduites à sa plus simple expression désormais.

4. Je n'ai pas pu peser cet osselet, n'ayant pas voulu le séparer de la tête con servée ; mais il ne peut peser que 1 à 2 gr.

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158 ALAUDA, VII. 2, 1936.

Evidemment autrefois, chez une autre espèce, ancêtre lointain du Cormoran, ce minuscule appareil musculaire devait agir sur l'os, en le redressant et en dirigeant en l'air sa pointe libre et aiguë. On est par suite amené à penser qu'il à pu y avoir là, dans la série des aïeux de l'Oiseau, et peut-être en descendant jusqu'aux Oiseaux reptiles, une sorte de crête à aïgrelte de plumes, d'un genre très par- ticulier,

En présence d’un tel état anatomique encore à l'heure présente, toutes les hypothèses de travail sont permises.

ture de l'os. II résulte de cette description, en effet, que cet osselet ne peut être que l’apophyse épineuse persistante, et très peu épaisse, d’une vertèbre disparue, dont le corps est constitué par le condyle occipital spécial de l'occipital, isolé de ce vestige d'apo- physe 1,

En effet, sur ces apophyses, la face inférieure de l'os est concave, même chez l'Homme, pour recevoir l’arête supérieure de l'apophyse sous-jacente des colonnes vertébrales, surtout chez les Bipèdes ou Semi-Bipèdes, comme les grands Oiseaux.

Et les faces latérales sont aussi concaves pour étaler les insertions musculaires et les rendre plus fortes.

Quand cet apophyse devient libre, comme chez le Cormoran, tout en maintenant ses relations avec le condyle d’origine vertébrale, il est bien évident que la physiologie de cet os change du tout au tout.

Ici, en somme, ce crâne à un occipital à deux condyles, qui semblent s'appuyer, en sens inverse du type normal, sur deux colonnes vertébrales, parallèles et distantes de 5 mm. dans le plan médian du corps. Mais ce n’est qu'une apparence, car en réalité cette apophyse épineuse ne peut servir à rien qu'à gêner beaucoup les mouvements de flexion en avant et surtout en arrière de la tête sur l’axe et à limiter dans une certaine mesure les mouvements de latéralité. Le crâne ne peut s'appuyer sur elle, comme sur l'atlas et l'axis, parce que sa pointe est libre au milieu des masses muscu- laires de la nuque. Il est indiscutable que cet os rétro-occipital est

1. Il existe un petit os, double, qui ressemble un peu au réfro-occipital. C'est un os des ailes (phalangette modifiée), qui a 30 mm. de long, au lieu de 25 mm. ! De plus, les faces de cet os triangulaire n'atteignent pas, à la base, 6 mm. elles ne dépassent pas 4 mm, de haut de large Les lames osseuses sont plus épaisses et moins creisées. L'analogie n'est que superficielle, surtout quand on examine avec soin la constitution des faces.

Source : MNHN. Paris

M. BAUDOUIN SUR L'OSTÉOLOGIE DU CORMORAN 159

très particulier et qu’il n’a absolument rien à voir avec un os sésa- moïde. D'ailleurs les deux petits muscles spéciaux qui l’encadrent le démontrent. Il ne peut représenter qu'une disposition atavique inconnue qui devait constituer l’ossature d’une sorte d’aigrette, mue par les muscles cités et que devait porter redressée en hau- teur l’ancêtre de cet oiseau.

On voit qu’une telle hypothèse nous fait remonter haut dans la série des oiseaux fossiles et dans le temps... En tous cas, c’est bien d’une apophyse épineuse qu'il s’agit ici ; mais libérée et articulée sur l'arrière de l’occipital.

*# k *

L'apophyse épineuse de la première vertèbre occipitale de l'Hom- me doit correspondre à l'osselet de Kerkringe, qui se trouve à l'arrière du trou occipital. L'écaille de l’occipitale et la protubérance occi- pitale externe correspondent à la 3€ vertèbre occipitale, et la pro- tubérance à son apophyse épineuse.

Dans ces conditions le condyle postérieur et supérieur du Cor- moran et son os représentent l’apophyse épineuse de la 2e ver- tèbre occipitale. C’est du moins la conclusion à laquelle aujour- d’hui nous conduit cette étude.

Historique. À propos de cet os du Cormoran, on lit dans le Dic- tionnaire d'OrrIGNyY (Cormoran, t. IV, p. 244) : « M. CHAVANNES a confirmé un fait assez obscurément énoncé par Volcher Correr et Trepmann, c'est que le Cormoran porte, dans la partie corres- pondant à la protubérance occipitale externe, un o$ triangulaire et mobile, par deux museles particuliers et ne faisant pas partie de l’occipital. D’un autre côté, le trou occipital est percé dans la partie supérieure de l’occiput, disposition qui facilite les efforts de cet oiseau pour avaler une proie souvent d’une grosseur extra- ordinaire. »

La note très précieuse du Dictionnaire de p'ORBIGNY nous à fait rechercher les mémoires cités. Malheureusement, nous n'avons pas pu les retrouver et par suite nous expliquer les erreurs de CHAVANNES, qui sont étonnantes s’il a disséqué des têtes de Cor- moran !

Il n’en est pas moins vrai que ces auteurs ont très bien fait de citer cet os rétro-occipital inconnu avant eux, car, si nous n'avions pas lu par hasard l’article de GÉrArD dudit Dictionnaire, nous

Source : MNHN. Paris

160 ALAUDA. Vill, 2, 1936.

n'aurions jamais songé à radiographier une tête de Cormoran et à examiner ensuite avec soin les crânes préparés par nous, sans rien savoir de tout cela (1933), au niveau même de l’occipital.

Signification de cet os. Cet osselet, étant donné la présence d'un condyle d'articulation sur l'occipital, ne peut être qu'un vestige atavique d’une disposition ancestrale très éloignée. Pour le comprendre, il faut supposer que ledit condyle représente un second condyle occipital et que, par suite, l'occipital doit être triple, c’est-à-dire être composé de trois vertèbres, ou mieux, comme on dit aujourd’hui, de trois somites superposés, l'un énfé- rieur ou cervical, l'autre supérieur, le troisième pariétal, qui furent autrefois séparés, non pas au niveau de la protubérance occipitale externe, mais au-dessous d'elle, à environ 3 mm. au-dessus du condyle spécial.

Là, jadis, il a done y avoir un trou occipital (trou supérieur)

FiG, 7. Dessin schématique reproduisant l'os rétrooccipital . 1. Vue de dos de l'os (bord supérieur À B S). S, sommet pointa

A B, cavité glénoïde ; A! B,, vue de face de cette cavité ;

a coupe pratiquée en D, au m Vue de la coupe, pratiquée en E”. bord supérieur ; M' M”, les deux goutt

ceaux musculaires,

D. de l'os, gran ù s'insèrent les fa

que rien n'indique désormais chez les autres animaux, tandis que chez le Cormoran il y à un condyle particulier et une crête tranversale

correspondant à la ligne de fusion de deux des trois somites en ques- tion.

Dans ces conditions, l'osselet rétro-occipital ne peut évidemment être que Papophyse épineuse du corps de la 2€ vertèbre occipitale

Source : MNHN. Paris

M. BAUDOUIN SUR L'OSTÉOLOGIE DU CORMORAN 161

disparue, dont le condyle représente tout au moins le corps lui- même.

Conséquence. Dans ces conditions on comprend désormais le lieu de prédilection des méningocèles occipitales, congénitales et ordinaires, dont le trou osseux se trouve souvent à égale distance de la protubérance externe et des condyles occipitaux des Hommes et des Mammifères. La hernie cérébrale se fait alors à l'union des deux anciens somites inférieurs, au lieu de moindre résistance, indiqué par le condyle du Cormoran.

Et nous expliquons désormais de la sorte l'anomalie occipitale que nous avons autrefois découverte dans dolmen d'Assignan (Hérault), anomalie consistant en un orifice simulant un trou de trépanation crânienne guérie, au niveau du lambda. Cependant, dans ce cas, le trou ne correspondait pas au milieu de l’occipital, mais à son sommet, c'est-à-dire au-dessus du 2 somite indiqué.

Théorie vertébrale du crâne. Le professeur Sarrey, le grand anatomiste humain, est l’un de ceux qui ont le plus clairement exposé la question des vertèbres crâniennes 2. 11 a décrit la ver- tèbre postérieure occipitale du crâne pièce à pièce, et, bien en- tendu, il a attribué l'apophyse épineuse de cette vertèbre, non à la protubérance occipitale externe seule, mais à la crête externe (ce qui était une grosse erreur). 11 a précisé en disant : « L'apophyse épineuse est très bien représentée par la crête et la protubérance en se continuant avec les deux lames, elle forme l'écaille de l’occi- pital. » Autre erreur ?.

Le crâne et l'os rétro-occipital du Cormoran sont venus prouver qu'il y avait en réalité trois vertèbres occipitales : une inférieure, une moyenne ; et une supérieure ; soudées non pas au niveau de la protubérance occipitale externe, mais à mi-distance entre elle et le trou occipital et le lambda. Dès lors, ce n’est plus à l'opinion d'origine de Gœrue et d'OKkey qu'il faut se rapporter, ni même à celle de l’anatomiste Carus, affirmant qu'il fallait dédoubler

1: Sur un crâne la protubérance occipitale externe est peu marquée et la crête transversale correspondante peu saillante. Cela tient sans doute au très jeune âge de l'oiseau, qui semble moins vieux que celui du crâne que nous avons décrit (n° 1).

2. Le célèbre anatomiste OKey a raconté que c'était à la vue d'un crâne de Biche qu'il avait eu l'intuition de la théorie des vertèbres craniennes, Nous avons, nous aussi, sous les yeux, au moment nous rédigeons cette notice, un crâne de vieux Cerf. Il wy pas un mot à retrancher au texte d'Oxrv, malgré les cent ans écoulés

11

Source : MNHN. Paris

162 ALAUDA, vu. 2. 1936.

toutes les vertèbres et qu'il en existait six en somme, dont deux pour l'occipital. En réalité l'occiput correspond à trois ver- tèbres. À tort Carus croyait done qu'une occipitale, l'inférieure, était la principale, et la supérieure, la secondaire. En réalité toutes. les trois ont même origine et même signification. Le Cormoran le démontre de façon formelle.

En ces matières, il ne faut pas exagérer, et ne pas s’emballer, comme Srix, qui a fait sortir le professeur Sappey de ses gonds. (Cf., t I, p. 329)

Mais le cas du Cormoran prouve qu'il faut s’incliner devant les faits : le 2 condyle occipital et l'os rétro-occipital ! Il ne servirait à rien, d'autre part, de s’obstiner à ne pas vouloir les expliquer, sous prétexte qu'on tombe dans l'hypothèse... de travail non. In medio stat virtus, en l'espèce ; c’est notre devise et nous nous y tiendrons.

III. Prineipaux os.

La place nous manque pour décrire tous les os du Cormoran. Nous nous bornerons ici à parler des os des ailes, en raison des migrations importantes de cet oiseau, qui arrive parfois très jeune sur les côtes de Vendée (6 à 8 mois), comme nous avons pu le véri- fier, et qui, cependant, à cet âge, a déjà toutes ses épiphyses soudées, comme nous l'avons récemment constaté dans les deux cas corres- pondant aux oiseaux disséqués.

Au point de vue de l'anatomie osseuse, le Cormoran, quoiqu’en plumage de jeune, est vraiment adulte à l'automne qui suit sa nais- sance ; et c’est ce qui lui permet d’effectuer sa première migration dès l’âge de 6 à 8 mois, comme je l'ai prouvé dans une note récente.

On va voir, en effet, que, dès ce moment, il possède, par ses

4. Pour a critiqué vertement la théorie des vertèbres craniennes. Il a certaine- ment exagéré. Nous venons de le démontrer.

Tesrur (1, p. 170) a répété les erreurs de Sarrey. Pour lui aussi, il n'y a qu'une seule vertèbre occipirale, et l'apophyse épineuse est aussi la crête et la protubérance externe, Îlest vrai que cet anatomiste n'est pas très convaincu de la valeur de la théorie de Gasrnr-Oxrv. Mais peu importe ici

Auseur ayant découvert, da s l'apophyse basilaire, deux pièces osseuses ayant chacune la valeur d'un corps (1883), cela doit ouvrir les yeux des réfractaires. La 3e pièce, qui a exister, s'est atrophiée et a complètement disparu,

SamneiNe à montré que, chez l'Homme, il y a parfois, dans la région de la crête occipitale externe, un ou plusieurs /ro"s vasculaires, Il est très probable que ces trous corresnondent à la partie qui, chez l'embryon et chez les animaux, a correspondu aux espaces intervertébraux des trois vertèbres occipitales. C'est un point à vérifier, bien entendu.

Source : MNHN. Paris

M. BAUDOUIN SUR L'OSTÉOLOGIE DU CORMORAN 163

puissantes ailes et ses pattes si fortement palmées, des os admira- blement constitués, solides, et capables de supporter les efforts les plus considérables nécessités par ses voyages de 1.000 km.

Ailes :

49 Humérus. Voici les caractéristiques de l’humérus du Cor- moran :

Poids : 9 gr. 50.

Dimensions : Longueur max. ..................... 150 Ext. sup. Transversal . 23

Dimensions : (Palette) Epaisseur ... 14 Centre Transversal . 9

Diamètres : Ant. post. ... 8 Ext. inf. Transversal .. 16

Ant, post ».N.200 1

Le capuchon est bien circulaire et non subdivisé. La tête articu- laire est ovale et transversale. Derrière, la gouttière transversale est très marquée et limite ce capuchon. La tête est assez longue, au moins 35 mm. Le corps de l'os est à peine aplati (9 X 8).

Le trou nourricier est à 70 mm. du haut de la tête.

La trochlée présente une épitrochlée détachée et rejetée en avant.

La cavité olécrânienne, peu marquée, est oblique à 45°.

L'épicondyle, remonté, est séparé par une dépression du condyle.

Il y a une ébauche, nette, d'apophyse susépicondylienne à 5 mm. au-dessus du condyle.

Par contre, pas trace d’apophyse susépitrochléenne |

Deux gouttières verticales sur la base de l'extrémité inférieure, derrière condyle et trochlée.

Grosse trochlée avec bec externe, crochu, très vigoureux.

Les os des ailes sont les plus beaux et les plus typiques, car l'aile atteint 0,310 en général dans sa totalité.

L'humérus droit de ce Cormoran pèse un peu plus de 9 gr.

L'épiphyse inférieure est d’ailleurs plus large à gauche de 1 mm. (45 et 16).

Il est vrai que l'épiphyse supérieure est plus large à droite de 4 mm. (24 contre 23) également. Il en résulte que l'extrémité cubi- tale est à peu près la moitié de l’extrémité scapulaire. Cependant cet oiseau devait être plutôt gaucher !

Chez le Fou de Bassan, l'os pèse 18 gr., exactement le double !

Source : MNHN. Paris

164 ALAUDA. VIN. 2, 1936.

Dans mon exemplaire le droit était plus lourd que le gauche. Lon- gueur 220 mm., au lieu de 150.

Cubitus. Très peu courbe, presque rectiligne. Extrémité supérieure la plus large ; épiphyses bien soudées.

Longueur max... Larg épiph. sup. Epaisseur épiph. sup.

IC RER. s ARMES

0,160 (Fou de Bassan, 0,190) 0,012 0,007 6 gr. (Fou de Bassan, 9 gr. 50)

Os aplati en haut, arrondi en bas.

3 Radius. Os arrondi très grêle, avec extrémité inférieure la plus large. Epiphyses soudées.

LOnPUEUT mas nu 0,157 (Fou de Bassan, 0,185) Larg. épyph. inf. . 0,008

Epaisseur . 0,004

Poids... 3 gr. (Fou de Bassan, 4 gr.)

Longueur des os (bras et avant-bras) : 0,150 + 0,160 0,310 chez le Cormoran ; 0,220 + 0,190 0,410 chez le Fou.

On remarquera la presque égalité de longueur entre le bras et l’avant-bras chez le Cormoran, tandis que, chez le Fou de Bassan, la différence est de plus de 30 mm. Les indices : avant-bras sont done assez différents. Leur valeur est la suivante : bras et avant-

50 310 MO

Le Cormoran, qui a un radius très long (157 mm.) par rapport à l’humérus (222 mm.), présente sur la face postérieure de cet os neuf boutons 1 peu saillants (3 mm.), nets, mais très allongés, de 5 mm. de long sur 1 mm. de large, à peine, espacés de 10 mm. Ces boutons, extrêmement minces et très allongés, différent totale- ment de ceux du Héron et des cupulettes du Paon. En réalité, ‘ls représentent une sorte d'arête interrompue et une sorte de ligne âpre par les insertions musculaires, isolées et spéciales des difé- rentes plumes de l'aile (grandes rémiges).

3f 220 bras : 48,00 ; et —— 53,00.

OS coccygien coceyr. En réalité, ce petit os du Cormoran

1. L'étude de ces boutons chez les oiseaux est extrêmement curieuse ; mais elle n’a jamais été faite, nous semble-t-il,

Source : MNHN. Paris

M. BAUDOUIN SUR L'OSTÉOLOGIE DU GORMORAN 165

est un os plat, de forme triangulaire, assez long, à base supérieure et pointe inférieure. Sa base rectiligne, mais un peu concave, et oblique, présente, presque en son milieu, une cavité glénoïde, allon- gée transversalement (4 x 3 mm.), qui s'articule avec la vertèbre lombaire précédente. Elle présente une pointe supérieure qui pro- longe la ligne des apophyses en arrière. En forme de lame de cou- teau, la partie mince est en bas et le dos du couteau, épais, en haut. Ayant l'aspect d'un triangle à côtés inégaux très aplatis, ni isocèle ni équilatéral, cette pièce ne pèse que 0 gr. 70! Voici ses dimen- SIOnS :

a. base oblique de haut en bas et d'avant en arrière 15 mm. b. bord supérieur, épais (5 mm.) 35 mm. c. bord inférieur, mince ({ mm.) 28 mm.

Si on compare ce coccyx du Cormoran avec celui du Fou de Bassan, on constate que ce dernier est beaucoup plus gros, plus long, moins étalé, et que leur forme diffère. Le coccyx du Fou n’a pas l'air d’un couteau, mais d’une pointe aiguë à ailettes, constituée par les deux apophyses transversales de la vertèbre coccygienne. On dirait une « pointe de flèche» en métal ! Et si nous disons ici un mot de cet os, peu intéressant, c’est que nous avons vu certains naturalistes le prendre pour l'os rétro-occipital. Et c’est pour éviter une telle confusion que nous en avons donné ici une courte descrip- tion, qui nous à paru nécessaire.

Nous aurions pu continuer cette note par l'étude des autres os du squelette, pour montrer qu'ils étaient bien adultes ; mais nous croyons inutile de le faire ici pour ne pas allonger ce travail, des- tiné surtout à mettre en relief les caractères réellement exception- nels de l’os occipital des Cormorans.

CONCLUSION

Nous pensons que notre description aura, en tous cas, suffi pour faire comprendre et apprécier la haute portée de l'anatomie philo- sophique, comme on disait il y a cinquante ans, et l'intérêt de cette partie du squelette de cet oiseau.

Certes, à l'heure présente, on attribue moins d'importance à ces considérations transcendantes ; mais il n’en est pas moins vrai qu’au point de vue du transformisme et de l'anatomie comparée

Source : MNHN. Paris

166 ALAUDA. Vin. 2 1936.

nos constatations ont une valeur qui nous a paru très digne d’être bien soulignée, à la fin de ce rapide exposé des faits.

* FA TX

A mon avis, les conclusions qui dérivent de cette étude pure- ment anatomique de l'os du Cormoran et des considérations d'ana- tomie comparée qui en découlent, ont une très grande importance au point de vue de l'anatomie générale et philosophique et de l’em- bryologie.

Cette étude prouve, en effet :

19 que l'occipital des Mammifères, des Oiseaux et de l'Homme se compose en réalité de trois vertèbres crâniennes, et non pas d’une seule (GœrnE) ou de deux (Carus) ;

que les limites intermédiaires correspondent pour l’inférieure au condyle supplémentaire du Cormoran, dont les vestiges seront à rechercher cher les Mammifères et surtout chez les grands Rep- tiles ; pour la moyenne, à la protubérance occipitale externe, qui n'est qu'un troisième condyle d'oiseau, atrophié ;

que tous les trous intérmédiaires ont disparu ;

qu'il ne reste qu'un ou deux vestiges des apophyses épineuses de ces vertèbres (os de KERKRINGE) ;

59 enfin, que l'os du Cormoran est la preuve la plus forte qu'on puisse donner de la théorie vertébrale du crâne, malgré toutes les critiques qui ont été dirigées contre cette vue géniale de l'esprit humain, représenté par l'illustre GœTue.

De telles déductions doivent nous rendre extrêmement fiers de ce que peut faire encore l'anatomie comparée, qui n'a pas dit son dernier mot.

+ x

L'os crânien du Cormoran chez l'Homme et les grands Singes.

Le hasard d’une lecture récente nous a permis de retrouver dans l'espèce humaine une réapparition par anomalie, une résurgence atavique, si on peut dire, de l'os crânien du Cormoran.

Ce sont les deux faits de crêtes occipitales externes apophysaires, découvertes par notre regretté collègue, le professeur LEDONBLE,

Source : MNHN. Paris

M. BAUDOUIN SUR L'OSTÉOLOGIE DU CORMORAN 167

de Tours, dès 1895 et 1903, et qu'il a publiés en 1903 (A. F. A.S., Congrès d'Angers, 1903, IT, pp. 874-876, 2 fig.). Mais, dans ces cas, l’apophyse épineuse de la vertèbre occipitale

Cormoran Homme

Paroi occipilale

correspondante s’est soudée à l'os principal et est devenue une crête, au lieu de rester un os bien isolé, allongé comme chez le Cor- moran, et articulé avec l'occipital à sa face externe.

Fee 1 bn ne a

Crète verticale mediane

Source : MNHN. Paris

168 ALAUDA. VII, 2, 1936.

LenonsLe appelle suroccipital cette apophyse épineuse (neuré- pine). Ce terme est mauvais et complique les choses.

La question qui se pose dans ces conditions est celle-ci : « Le suroccipital se développe par deux points d'ossification ; la neuré- pine par un seul, chez l'Homme ! »

Mais cet argument n’a aucune valeur en réalité contre la théorie vertébrale du crâne, parce que LEDoNBLE a confondu neurépine avec suroccipital.

---- -Occipital CV) NO Mg G Sur-occi 1 . il | "Jon Crête d (TILL LANL verticale mediane

at Go Re D Eseprt

Je me demande si l'énorme crête occipitale des crânes des grands Singes, en présence des anomalies humaines ci-dessus, ne renferme pas dans son intérieur le germe, l'épine intra-aponévrotique, allongée, de l'os du Cormoran, à l'état atavique, persistant malgré tout.

Cette épine dans les tissus mous de la nuque a peut-être été la cause d’une irritation, un peu pathologique, au moins au début, puis continuée, des tissus conjonctifs péri-occipitaux,

Une telle irritation, très prolongée dans le temps, aurait pu cer- tainement jadis provoquer l'apparition du tissu osseux nécessaire à la formation de cette longue crête verticale, bien connue, chez le Gorille, en particulier.

En tous cas, à notre avis, il n°y a aucun doute à avoir. Les deux faits de LEDONBLE sont bien des faits de retour atavique, par la crête des grands Singes, de l'os du Cormoran, ici soudé au crâne, et non resté libre et articulé à l’occipital, comme chez l'oiseau.

Croix-de-Vie (Vendée).

Source : MNHN. Paris

ESSAI DE REVISION DES FORMES DE L'’OIE DES MOISSONS ANSER FABALIS LATHAM

par Georges DÉMENTIEFF.

« Die individuelle Variabilität ist stets noch grôsser, als man sie maximal bewartet. »

B. Rexscu, Kurze Anweïsung für Zool.-systemat. Studien, 1934, p. 110.

I. Etat actuel de la question.

Le groupe des Oies des moissons présente des difficultés très sérieuses au point de vue systématique. La diversité des opi- nions chez les différents auteurs qui ont abordé ce sujet (Har- TERT, TUGARINOV, OarEs, comte SALVADORI, BUTURLIN, ALpné- RAKI et autres) est très grande et leurs points de vue paraissent inconciliables. Les deux opinions extrèmes sont celles de Harrenr et de Tu&ariNov, d’une part, d’ALPHÉRAKt et BururLIN d'autre part.

Le premier admet l'existence de deux espèces : fabalis et brachy- rhynchus, et d'une forme de position systématique incertaine, neglectus. TUGARINOY admet deux espèces seulement : fabalis (y compris neglectus) et brachyrhynchus. Le dernier arrangement des formes proposé par BururriN comprend quatre espèces distinctes : brachyrhynchus, neglectus, fabalis, et serrirostris, dont les deux premières monotypiques et les deux autres se divisant en sept races géographiques. Les points de vue du monographiste du groupe, ALPHÉRAKI, coïncident avec ceux de BuTuRLIN (et vice versa).

Les notions concernant la division subspécifique et la distri- bution géographique de ce groupe sont aussi incomplètes que con- fuses.

Par exemple, les places de nidification d’Anser neglectus restent

Source : MNHN. Paris

170 ALAUDA, VII, 2. 1936.

jusqu’à présent introuvables. Quant aux autres formes, les don- nées sur leur distribution géographique sont souvent inexactes ou fondées sur des oui-dire ou des suppositions. Les auteurs ad- mettent parfois sans hésitation la présence en période de nidi- fication de deux formes d'une même espèce dans plusieurs localités de la Sibérie septentrionale et de l'Europe N.-E. (p. ex., on peuple la Nouvelle Zemble de trois races d'Anser fabalis !).

La question reste jusqu’à présent tellement embrouillée dans ses points les plus essentiels que le seul moyen d’essayer de la résoudre d'une manière plus ou moins satisfaisante et objective est, nous paraît-il, d'appliquer le principe géographique de la manière la plus rigoureuse.

Pour suivre cette méthode, l'étude doit être fondée principale- ment sur l'investigation et la comparaison de séries appartenant aux populations des Oiseaux pris en saison de nidification. C'est le seul moyen d'éviter les résultats fâcheux de l'application trop étroite du ceritérium purement morphologique qui, semble-t-il, a fâcheusement influé sur les déductions de plusieurs ornitholo- gistes ayant écrit sur le sujet.

II. Matériel.

L'auteur a pris pour base de son étude les principales collections conservées en Russie, celle de l'Institut zoologique de l’Académie des Sciences de Léaingrad, celle du Musée zoologique de l'Univer- sité de Moscou, et quelques autres moins considérables, par exemple celle du Muséum Darwinianum de Moscou. Le nombre d’exem- plaires examinés est de 225 de l'Institut zoologique académique, 130 du Musée de l'Université de Moscou, près de 100 exemplaires des autres collections, en tout plus de 400 spécimens.

Les déductions suivantes sont fondées sur l'analyse de ce maté- mel et principalement sur la comparaison des Oiseaux pris pendant la saison de nidification. Voici la provenance de ces derniers : Spitzherg, Laponie, région de la mer Blanche (y compris la pres- qu'ile Kanin), ile Kolguev, Nouvelle Zemble, région de la basse Ob, Yamal, presqu'ile de Gyda, Yénissei, Taïmyr, Léna, Yana, Indighirka et Kolyma, presqu'île de Tchakche et bassin del’Anadyr dans la zone des toundras ; les populations nicheuses des parties boisées de la Sibérie sont représentées par des spécimens provenant des terri-

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M. DÉMENTIEFF SUR L'OIE DES MOISSONS 44

toires situés entre Khatanga, Moniéro, Vilini et l'Altaï à l'Ouest, le Kamtchatka et la Mongolie à l'Est. Les Oiseaux de passage pro- viennent de différentes parties de l’Europe (surtout orientale), de la Sibérie, de la Mongolie, de la Chine, du Japon et du Turkestan.

Notre matériel couvre ainsi tout le territoire habité par les Oies des moissons. Il n’est peut-être pas très nombreux, mais l’auteur se permet de noter qu'il a épuisé les ressources des priacipales collections d'Anser fabalis existant pour le moment et qu'il a eu à sa disposition les collections qui servirent de base à ses prédé- cesseurs russes.

L'étude de la collection académique fut facilitée par le concours amical du Dr B. SreGmans ; le matériel du Muséum Darwinianum fut mis à notre disposition par le Prof. A. Kours. Nous leur expri- mons ici notre reconnaissance.

III. Limites naturelles de l'espèce Anser fabalis.

L'analyse de la variabilité géographique et individuelle dans le groupe compris par les auteurs russes sous la désignation sub- générique de Melanonyx démontre que les relations entre les diffé- rentes formes de ce groupe, même celles qui sont considérées par la plupart des ornithologistes comme des espèces particulières, sont très étroites.

La séparation spécifique d’Anser brachyrhynchus ne nous parait nullement justifiée par sa position naturelle parmi les Oies des moissons. Le vicariat géographique dans ce cas est absolument, évident. Brachyrhynchus occupe 1a partie occidentale de l'aire de distribution du groupe (Groënland oriental, Islande, Spitzberg, peut-être l'archipel de François-Joseph). Sa présence exclut la nidification des autres formes d'Oie des moissons. D’un autre côté, l'aire d'habitat de brachyrhynchus se rattache immédiatement à celle de fabalis sensu stricto et complète naturellement l'aire de distribution du groupe entier. Au contraire, si nous traitons bra- chyrhynchus en qualité d'espèce distincte de fabalis, l'absence de cette dernière dans la partie occidentale de la zone arctique et boréale du paléarctique devient peu compréhensible au point de vue zoogéographique.

L'analyse des caractères morphologiques (y compris la colora- tion) d'A. brachyrhynchus est aussi en faveur de la réunion de cette

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172 ALAUDA, vit. 2, 1936.

forme au même complexe que fabalis. Les variations de dimensions (longueur d’aile, surtout celle du bec) consistent, chez les Oies des moissons, dans une augmentation de l'Ouest à l'Est. Sous ce rap- port À. rachyrhynchus est un membre naturel du groupe ; c'est la forme la plus occidentale et respectivement aux dimensions les plus faibles. La forme du bec (épaisseur et courbure de la mandi- buls inférieure) varie chez les Oies des moissons dans le même sens que les dimeasions : les formes occidentales ont le bec assez court et faible, à mandibule inférieure droite ou presque droite; À. bru- chyrhynchus, avec son bec court, à mandibule inférieure droite, occupe une place très naturelle parmi les formes d'A. fabalis 1.

La différence principale de coloration de l'Oie à bec court et des Oies des moissons est celle-ci : chez la première les grandes couver- tures alaires sont grises, chez les secondes, brunes. Mais cette règle n’est pas sans exception. La coloration grise ou grisâtre des grandes couvertures alaires se rencontre, en tant que de variation indivi- duelle, assez souvent chez À. fabalis. Dans les collections étudiées une coloration des couvertures alaires très semblable à celle de bra- chyrhynehus se trouve chez des exemplaires pris en saison de nidi- fication dans toutes les parties de l’aire de distribution de l'espèce, chez des Oiseaux adultes de Nouvelle-Zemble, basse Ob, baie de l'Yénisséi, Moniéro, affluent du Khatanga, Taymyr, Léna, Ala- zéia, Kolyma, Anadyr et, plus au Sud, dans les régions de Vilini Altaï (lac Felezkæ), Sayan (11. Kizir). Des exemplaires semblables se rencontrent aussi parmi les Oiseaux de passage dans les différentes parties de la Russie d'Europe et même en Asie orientale (Sakhaline, Japon, Chine (Fou-Tchéou), Quant aux jeunes dans leur premier plumage, la coloration claire (grise, grisâtre ou gris-brunâtre) des grandes couvertures claires se rencontre chez eux très souvent : c'est plutôt une règle qu'une exception (constatée chez les spéci- mens de l'ile Kolguev, de la presqu'ile Gyda, du bassin du bas Yénisséi, du fl. Vilini, du fl. Kolyma et des monts Sayan). D'un autre côté la teinte grise des couvertures alaires chez brachyrkynchus est assez variable et atteint parfois le ton brunâtre (femelle 24-25, VI, 1899 Hornsund, Spitzherg; mâle 19, VI, 1900 Isfiorder, Spitzberg). Il apparaît ainsi que la coloration grise des couvertures

1. Parmi les À. /. fabalis se rencontrent, quoique bien rarement, des spécimens dont le bec a les dimensions de celui de £rachyrhynchus : un adulte tué le 21 avril 1935 au lac Telezkoe, Altaï, a le bec long de 48 mm.

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NS 173

M. DÉMENTIEFF SUR L'OIE DES MOl

alaires est non seulement l'indice caractéristique de brachyrhynchus, mais aussi de fabalis sensu stricto en livrée juvénile. Au surplus, cette coloration apparaît comme variation individuelle chez toutes les formes d'A. fabalis. C’est donc un élément variable dans l'espèce A. fabalis.

Il nous reste à analyser la question de la coloration rose du bec (plus précisément de la bande du bec et des pieds) chez brachyrhyn- chus. Cette différence de coloration paraissait avoir une impor- tance capitale à beaucoup d'auteurs qui étudiérent le problème et justifiait à leurs yeux non seulement la séparation spécifique de brachyrkynchus, mais aussi celle d'autres formes (neglectus, carnei- rostris, anadyrensis). Cette importance fut probablement exagérée. La coloration des parties nues chez les Oies en général paraît être, en effet, un caractère très variable. Les Oies des moissons ne forment pas d'exception sous ce rapport.

Il faut avant tout remarquer que le Prof. E. LônnserG, dans un remarquable travail (Some Remarks on the Systematic Status of the Yellow-legged Herring-Gulls, The Ibis, 1933, pp. 47-50), a prouvé avec évidence que la coloration jaune des parties nues chez Larus argentatus est causée par la présence d’une matière caroténoïde (et précisément du xanthophylle). La différence entre la coloration rouge et jaune dans ce cas n’est pas qualitative, mais purement quantitative ! (l'augmentation de la quantité de xanthophylle cause l'apparition de la couleur jaune). Ces variations de couleur, d'après les données du Prof. LônNserG, peuvent apparaître chez le même individu. Les causes précises de ces variations restent à établir, Elles se rattachent peut-être aux fonctions des organes géni- taux (comme, p. ex., la coloration jaune du bec qui apparaît en saison nuptiale chez différents Passereaux), ou peuvent être cau- sées par l'absorption d'une certaine nourriture ?, ou enfin être expliquées par des différences d'âge ou de saison. Comme exemple d'une variation d'âge analogue on peut mentionner le cas du chan- gement de coloration de la cire et des pieds chez plusieurs formes

1. Ce point de vue trouve un certain appui dans le fait que chez les Oies des mois- sons préparées en peaux la colcration de la bande du bec devient, pour la plupart, jaune, même chez les exemplaires qui avaient ces parties roses ou rosâtres pendant la vie, D'autre part, chez les spécimens conservés en alcool, la différence entre la colo- ration rose et jaune se conserve pendant de longues années.

2. V. sur ce sujet un autre travail du Prof, Lônnnerc,, An Experiment to transfer a Colour Substance to the Fat Fissues of a living Bird, Arkiv für Zoologie, Bd 24- B, D 8, pp. 1-2. 1932.

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174 ALAUDA. vil. 2. 1936.

de Faucons (bleuâtres chez les jeunes, jaunes chez les adultes). Il se peut même que des changements considérables de tempéra- ture produisent l'afflux du sang aux parties périphériques des Oiseaux et que cela en change la coloration (peut-être le froid, en dilatant les vaisseaux, contribue-t-il ainsi au passage de la colo-, ration jaune au rosâtre ou au rose).

Après ces considérations générales, remarquons que la coloration rose des pieds chez brachyrhynchus n’est probablement pas abso- lument, constante. Du moins Sir Payne Gazzwoy (Letters to Young Shooters, III, 1896, p. 69) assure-t-il avoir tué en Angleterre des Oies à bec court ayant les pieds orangés.

Chez les Oies des moissons sensu stricto la coloration rose des parties nues n’est pas rare. Premièrement, chez les jeunes : chez une grande quantité de jeunes Oies chez lesquelles la pigmentation du bec n'est pas encore bien localisée, le bec est d’une couleur plus ou moins rosâtre (p. ex., chez les exemplaires pris en août 1902 dans l'ile Kolguev). La coloration rose ou rosâtre de la bande du bec se trouve chez plusieurs spécimens adultes appartenant aux formes connues pour avoir cette partie jaune ; ces spécimens sont parfois pris côte-à-côte avec des spécimens à bande du bec jaune. La bande du bec rose se trouve, par exemple, chez les deux Oies des moissons prises en 1902 à Olekminsk ; chez l'Oie prise au pas- sage le 2.1V. 1906 dans le district de Belebei, du Gouvernement d'Ufa (l'oiseau est à considérer comme type de carneirostris) ; chez plusieurs exemplaires pris à Yamal (ic été 1908 »; © 11. VI. 1908, 3 3.VL.1908, tous pris par l’expédition de B. M. Jrrkov ; le dernier spécimen était apparié avec la femelle à bande du bec orangé; enfin, chez le 4, 30.V.1935) 1 Chez plusieurs autres exemplaires adultes la coloration de la bande du bec est intermé- diaire entre le rose et l’orangé (chez deux oiseaux adultes 28. VIT. 1902, île Kolguev ; chez un autre de la basse Kolyma daté du 3. VII. 1905 ; chez la femelle prise le 26.V.1908 à Yamal, tous conservés au Musée zoologique de l'Université de Moscou). Enfin, la colora- tion rosâtre a été notée assez souvent dans la littérature (v. la bibliographie placée à la fin de cet article ; v. aussi von HeuGLix, Frevor-Barrye, BiLxewiren, ete.).

1. Tous les spécimens mentionnés, excepté le dernier, se trouvent au Musée Zoolo- gique de l'Université de Moscou; le dernier fait partie de la collection académique de Léningrad.

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M. DÉMENTIEFF SUR L'OIE DES MOISSONS 175

11 nous paraît ainsi que l'Oie à bec court Anser brachyrhynchus ne peut nullement être considérée comme une espèce distincte, mais qu’elle est tout simplement une forme occidentale d'A. fabalis 2.

Les considérations et les f'aits concernant la valeur taxonomique de la coloration de la bande du bec et des pieds chez les Oies des moissons que nous venons d'exposer ont de l'importance pour la solution d’un autre problème, celui d’Anser neglectus. La principale différence entre cette prétendue espèce et les autres Oies des mois- sons est, comme on sait, la coloration rouge constante de la bande du bec et des pieds. Les autres caractères indiqués par les auteurs (forme du bec, ete.) ne paraissent pas réellement distinguer neglectus des autres formes de fabalis. La forme du bec chez neglectus res- semble beaucoup à celle qui se rencontre souvent chez les Oies des moissons dans la Sibérie occidentale, en Nouvelle-Zemble, etc. : leur bec est assez long, mais pas haut, la mandibule inférieure est sans courbe marquante. Il semble ainsi que, du point de vue mor- phologique, il n'existe aucune raison sérieuse de prendre neglectus pour une espèce distincte de fabalis.

La distribution géographique de neglectus reste énigmatique. Les places de nidification certaines de cette forme sont inconnues. Les indications de sa présence dans plusieurs localités septen- trionales on supposait qu'elle nichait (p. ex. dans l’île de Kol- guev) sont fondées sur les communications de personnes ayant vu obtenu dans lesdites localités des Oies des moissons à bande du bec et à pieds rouges. Cela, comme nous avons essayé de le dé- montrer, ne décide encore rien, puisque les exemplaires en question n'existent pas dans les collections et puisque cette coloration est au fond un élément de variabilité dans le groupe. Le seul exemplaire de provenance nordique pareil à la série typique de neglectus et existant dans les collections est un sujet, dont le sexe ne fut pas déterminé, rapporté par Nosizov de la Nouvelle-Zemble (ce spé- cimen se trouve au Musée zoologique de l'Université de Moscou). L'exemplaire n’est pas daté. Ajoutons que la Nouvelle-Zemble est habitée par la race nominale 4. f. fabalis, que le matériel des collections russes d'A. fabalis couvre tout le Nord de l'Europe et de

4. Cette opinion fut émise ily a longtemps par H. Sessons (British Birds, 111, p.498 : mais n'a puint trouvé d'accueil favorable dans la littérature, sauf quelques ex ceptions peu nombreuses. Parmi celles-ci il faut noter CzerneL et tout récemment le D°E, Naëv.

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176 ALAUDA, VII. 2. 1956.

l'Asie. Ce qui rend l'existence d’une aire d'habitat de neglectus en qualité de forme de fabalis (c'est-à-dire isolée des autres races) peu probable, même invraisemblable.

Le territoire passe neglectus peut servir du point de départ pour tâcher de trouver la patrie de cette Oie. 11 coïncide avec celui des populations d'Anser fabalis qui habitent l'Europe N.-E. et l'Asie N.-0. Les Oies des moissons nichant dans les régions cen- trales et orientales de la Sibérie paraissent au passage et hivernent dans les parties orientales de l'Asie (par la Transbaïcalie, les bas- sins de l'Amour et de l'Oussouri, le Japon, la Chine). La forme du bec des Oies orientales est d’ailleurs bien différente de celle de neglectus. Il est d'autre part à noter qu'Anser neglectus passe par les mêmes localités se rencontrent dans la même saison les repré- sentants d'A. /. fabalis ayant la configuration du bec très sem- blable à celle de neglectus. Cela rend la nidification commune de ces deux Oies dans les mêmes localités très probable (la présence de neglectus en Nouvelle-Zemble est en faveur de cette supposi- tion). Neglectus ne doit donc pas être considérée comme une race géographique d’A. fabalis, puisque son isolement géographique des autres formes de cette espèce n'existe point selon toute évi- dence.

Nous avons déjà remarqué que les caractères morphologiques d'A. neglectus ne sont pas en faveur de sa position systémati- que comme espèce particulière. Le Prof, A. Konrs qui occupa plusieurs années le poste du directeur du Jardin zoologique de Moscou m'a communiqué des faits qui permettent de supposer l'absence d’aversion sexuelle entre fabalis s. str. et neglectus. Une femelle de type neglectus, prise sur les bords de la mer Caspienne en saison froide en 1911 et qui vécut ensuite prèsde 20 ans au Jardin zoologique, fut appariée avec un mâle de fabalis typique. L'union fut léconde ; il en naquit 6 petits done 2 atteignirent la maturité. L'un avait la coloration du bec comme chez neglectus et l'autre l'avait comme fabalis. Le critérium physiologique est done à l'appui de la réunion, en une seule espèce, de neglectus et de fabalis.

Comme nous venons de le montrer, les exemplaires neglectus proviennent probablement des parties occidentales de l'aire d'habitat de fabalis, proches de la région occupée par brachyrhyn- chus. C'est ainsi que les Oies neglectus pourraient jusqu'à un cer- tain point être considérées comme des variations d'A. fabalis fabalis vers À. f. brachyrhynchus.

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M. DÉMENTIEFF SUR L'OIE DES MOISSONS 177

Nous croyons donc qu’en restant strictement sur le terrain des faits on peut attribuer aux Oies neglectus le rang de variation indi- viduelle d'A. j. fabalis. I reste à établir si cette variété est localisée ou si elle est plus ou moins répandue par toute la région habitée par la forme typique de la race nominale.

Les autres divisions spécifiques du groupe des Oies des mois- sons sont fondées surtout sur l'appréciation insuffisante de la variabilité individuelle et géographique chez ces oiseaux ou sur un matériel incomplet. Nous allons reprendre cette question dans le chapitre suivant, qui contiendra l'analyse des variations indivi- duelles et géographiques d’A. fabalis.

Le groupe des Oies des moissons ne comprend ainsi qu’une seule espèce, Anser fabalis LATHAM.

IV. Variabilité géographique et individuelle chez Anser fabalis.

La variabilité individuelle chez les Oies des moissons est très développée. Certains territoires sont habités par des populations d'A. fabalis les variations individuelles atteignent leur maxi- mum, d’autres abritent des populations homogènes. Les caractères des formes continentales varient en transgression continue. Les types extrêmes sont bien différenciés, mais ils sont réunis par toute une échelle de types intermédiaires. Même parmi les popu- lations homogènes apparaissent parfois, en qualité de variations individuelles, des spécimens pareils aux représentants d'une autre race géographique (parallélisme de la variabilité géographique et individuelle).

La variabilité des dimensions se traduit dans les changements que subit la taille des oiseaux (index : longueur d’aile), d’une part, et dans les variations de la longueur et de la forme du bec, d'autre part.

Le tableau qui suit est fondé principalement sur des oiseaux pris dans la saison et sur les places de nidification. Elle contient l'indication de la provenance de l'exemplaire en question, les me- sures de la longueur du bec et de la hauteur de la mandibule infé- rieure. La longueur est mesurée à partir de la limite frontale du plumage ; la hauteur équivaut à la partie visible de la mandibule inférieure du bec fermé. Toutes les mesures sont prises en milli- mètres.

12

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178 ALAUDA. vil. 2. 1936.

Tous les cas les mesures sont prises sur des oiseaux de passage sont expressément indiqués. Les exemplaires dont les mesures figurent dans le tableau sont tous adultes.

Nombre et sexe

Hauteur de la mandibule Longueur

Longueur du bec inferieure de l'aile

Europe orientale, Sibérie occidentale et centrale (fabalis).

Russie N.-O. (Laponie, presqu'île de Kanin, île de Kolguev) :

248 72,48 1459, 465 299 6, 7.6 1440 9? 6.8, 7.5, 8,8, 8, 8.2, 8.6 |—

NouveLLe-ZENB

4 SA |61,65, 67.2, 67.5 te 3420 899 15,195, 56, 57,67; 6.2, 6.5, 6.5, 7 460 57.5, 60 10? |50, 55, 55.4, 6, 6.2, 6.5, 6.7, 7, 7.2, 7.2.1 454, 458 575, nl 64.5, 68 7.5, 8, 8.5 |

Sisérie N.-O. (Oh, Taz, Gyda) : 6 8 157.5, 57.5, 58.2, 59, 62,1 5.5, 6, 6.8, 7.2, 8

64.1 299 1525, GT En 445 1? 64 6.6 430 PRESQU'ILE D'YAMAL : 1788 | 51,55, 55. 58.5, 59, 7,7, 74, 7.2, 8, 8, 8, 8, 8,404, 435, 438, 440, : de 62, 62.5, 8, 81, 8.2, 8.5, 8.5, 9, 9,[452, , 64.5, 65, 66.5 9.5

10 $Q 53.5, 55, 56, 56, 56 403, 422, 495, 56.5, 57.5, 60 ; 433, 44O 1? 7.5 1445 Yénisséi : :68 8.5, 8.5, 8.7, 11 475, 482 299 8 428, 458 175 8

Source : MNHN. Paris

M. DÉMENTIEFF

SUR L'OIE DES MOISSONS

179

TAYMYR : 3599 2?

55, 57, 57 57, 62.5

Fabolis nicheurs :

#46 279% 24?

51-67 52.5 - 60 50 - 69.5

Sibérie N.

DezrTa DE LA LÉNA:

364 299

61, 64.5, 65

61, 64.5

Yana, InpicniRka, KoLyMa :

1188

799

4?

59.2, 60, 60, 62, 62.5, 62.5, 63.5, 63.6, 64.5, 65.5 67.5, 67.5, 68, 68, 70.5, 71.5

58.5, 59, 61, 62.6, 63.5, 64.5, 66 57.2, 58, 61, 65

PRESQU'ILE DE TOHUKRTOHÉ :

5?

ANADYR : ‘dd

499 3?

61, 65, 65, 69.5, 79

65.5, 66, 67, 68.5, 71

62, 64, 67

Serrirostris nicheurs :

288

1399 42?

59.2 - 71,5 58.5-66 57.2-74

7.5,8 | 8,9

188-9.5 (14)

NES

6-9 E. (serrirostris).

9, 9.5, 9.5 9, 9.5 |

8.5, 9, 9.5, 10, 10.2, 10.2, 10.4, 10.5, 10.6, 10.7, 11, 41, 41, 414, 112, 42,5, 12.5

8.1, 8.5, 9.1, 9.4, 9.5, 10, 11.3

8.5, 9, 9.6, 10.2

9.5, 9.5, 9.8, 10, 11

8, 10.6, 11, 11

9.7, 14.2, 11.5

8-125 8.1-11.3 85-415

420, 428, 428

433, 443

404 - 482 402 - 460 430 - 458

456, 465

450, 452

422, 445, 446,448, 452, 462, 462, 465, 477, 480, 484, 485,

495, 502, 502

422, 423, 426, 434,

438, 445

438, 445, 450, 457

455, 458, 460, 500, 510

440, 450, 454, 480,

502, 524

440, 460, 482, 491

445, 471, 510

422 - 524 422 - 491 433 - 510

Source : MNHN. Paris

180 ALAUDA. VI. 2. 1936.

Oiseaux de passage (serrirostris).

SARHALINE : 19 (68 10 193 12 |715 É 522

Guine (Fou Sa-reueu) :

19 1625 7(?) 475 2? |57,62 | 8, 9.8 449

Exemplaires de serrirostris déterminés comme mentalis ? par les différents auteurs (Alpheraki, Buturlin, Menzbier).

Suimosa, Honpo, 12.1.1904 :

19 |% 19.2 1486 Inkow, Manpcuourie, 27.1X.1901 :

41? 68 ut 1500 AnaDvr, 1.VI.1905 :

19 JA 1? 1450 Poxuopskor, Kozvmc, 3.VIL.1905 :

189 |A jui ja85

Zone boisée (rarca) de la Sibérie orientale (middendorfii sibiricus).

Auraï, SAvAN, Pays D'OURIANKE, COURS SUP. ET MOYEN DE LA LÉNA (Yakoutsk, Olekma), Vuinr, Nunia Tuneurka, KuaranGa, Monréro, Monrs Wen KHOYANSK, ADYTCHA AFFL. DE LA YANA, TRANSBAÏCALIE, KnaNGaï :

644 16%, 70, 71.5, 76.5, 77, 80] 7.6, 8.5, 8.6, 9, 9.6, 10.5/440, 445, 463, 532 533, 558

499 |66,73.5, 74,79 8.2, 8.9, 9, 9.8 494, 502, 505

10? 65, 69, 70, 70.5, 71, 72.5,| 6.8, 8, 8.2, 8.5, 8.5, 8.5,1448, 150, 485, 49% 74, 76, 76.5, 76.5 9, 9, 9.8 512

Kawremarka (mai, septembre, octobre) :

2 84 | 66,81 7, 9.5 168, 528

199 l755 8.6 52% Middendorfii nicheurs :

844 |64-81 71-405 440 - 558

599 |66-79 8.2-9.8 494 - 524

107 |65-76.5 68-9.8 448-512

Source : MNHN. Paris

M. DÉMENTIEFF SUR L'OIE DES MOISSONS

181

Oiseaux de passage (middendorfii).

SIBÉRIE oRIENTALE (Transbaïcalie, mer d’Okhotsk, région d’Oussouri, îles du

Commandeur) : 188 |66.5, 67, 68, 70.5, 75,76.5, 80.5 399 |63.2, 69.2 19 |ss

Oiseaux de passage

7, 8, 8.2, 8.2, 8.3, 9, 9.5 7, 7.8

9.2

Esrnone Smozensk, Twez, Moscou, Kosrow, Kounsk :

séé

4

54, 54.5, 58, 59, 63

99 |51.8, 54, 57, 57

7.2, 8, 8, 8,9

6.5, 6.5, 7.3, 8

468, 470, 478, 484, 493, 498, 530

465, 467, 475

5441

en Russie d'Europe (fabalis).

433, 440,443, 448, 452

400, 406, 412, 420, 457

Oiseaux de passage au Turkestan (CoLr. SEvERTzZOW ET Russow).

TomimkenT, 28.11 : 1801725 ASS |62, 63.5, 66.2, 67.2 49 60.5 12 |685

7.5 6.5, 7, 7, 7.2

6.7

6.5

Oiseaux de type neglectus.

Disrr. Bezesri, Gouv. »'Oura, 2%.1X.1891 (Type) :

18 157

Isipem, 22.1X.1891 (paratype) : 19 156.5

Isinem (série topotypique) : 28 157.5, 63 29 |55,55.5, 57.2, 57.5 A | 555

15.5

15.5

5.5, 5.6 5.5, 6, 6.5, 7 6.4

492

468, 476, 482, 520

1465

1460

474, 485

430, 438, 460, 465 465

4. Les chiffres se rapportent à une partie seulement des exemplaires étudiés. 2. Indiqué par erreur par AzrméRaxt, comme type d'A. middendorfii SEV. {au Musée académique de Léningrad).

3. Au Musée de l'Académie de Léningrad.

Source : MNHN. Paris

182 ALAUDA. vil. 2. 1936.

NoUVELLE-ZEMBLE : 1% 154 16,5 1410 Spécimen-type carneirostris Disrr. Beveser, Gouv. pOura, 2.1V.1906, A. P. Torsroï : 17 156 18 101 Oies à bec court brachyrhynchus.

Spitzsere, Tenre DE FRANÇOIS-JOSEPR, ALLEMAGNE, ANG. GOUVERNEMENT DE

Nowcoro : 6 |45,47, 47.5, 48, 48.2, 50 | 4.2, 5, 5, 5.5, 6.5 1406, 425, 440, 450, 459, 468 299 |44, 47.5 4.8, 5 410, 443 au 4 5 425

Il résulte de ce tableau que les dimensions générales atteignent le maximum chez les Oies de la Sibérie orientale, le minimum chez celles des parties occidentales (Spitzherg, ete.). Entre les extrêmes existe toute une échelle de populations intermédiaires.

La variabilité individuelle est, comme nous l’avons indiqué plus haut, très considérable. Même dans le N.-E. de la Sibérie on ren- contre des spécimens dont les dimensions générales le cèdent à celles des spécimens occidentaux. L’amplitude des variations de la lon- gueur d’aile apparaît bien, par exemple dans les chiffres ayant rapport aux mâles adultes de Kolyma : l'aile varie de 422 à 502 mm. Le poids chez les Oies de la région de la basse Kolyma, pris par M. Bururuin, est chez les mâles adultes (en livres russes) 11, 9 1/2 9, 8 1/2, 8 1/2, 8, 8, 8, 7 1/2, et 6; chez les femelles adultes 8 2/3, 6 3/4, 6 3/4, 6 3/4 ; chez les jeunes pris en août 8, 7 3/4, 7 1/2, 7 1/2, 7,6 1/2, 6 1/2, 5 1/2 ; chez le jeune pris en septembre 8 3/4.

La longueur du bec la plus considérable est propre aux oiseaux de la Sibérie orientale et diminue vers l'Ouest. Dans la même direc- tion la forme du bec et surtout de la mandibule inférieure change. Le bec chez les oiseaux du Spitzherg (brachyrhynchus) est court et leur mandibule inférieure est droite. Dans le N.-E. de l'Europe (Kanin, Nouvelle-Zemble) et dans la Sibérie occidentale jusqu'à l'Yénisséi, on rencontre des oiseaux à forme de bec variable :

1. Au Musée de l’Université de Moscou.

Source : MNHN. Paris

M. DÉMENTIEFF SUR L'OIB DES MOISSONS 183

chez les uns, le bec est court et assez épais, chez les autres, long !. Chez le type à bec épais se montre plus ou moins clairement la tendance vers le développement de la courbure à la partie proxi- male de la mandibule inférieure. Les Oies décrites comme neglectus appartiennent toutes au type ayant le bec faible ; les dimensions du bec ne dépassent pas les limites des variations chez A. fabalis de la Nouvelle-Zemble ou de la Sibérie N.-0. Dans la Sibérie orien- tale les dimensions du bec sont plus considérables qu’à l'Occident, mais la forme du bec varie entre deux types. Chez les oiseaux de la région des toundras (Kolyma, presqu’ile de Tchuktché, Anadyr) le bec atteint le maximum de longueur et d'épaisseur ainsi que le maxi- mum de courbure de la mandibule inférieure (les spécimens ayant les plus fortes proportions du bec furent décrits comme mentalis). Chez les Oies de la zone de la Taiga les dimensions du bec sont aussi considérables et atteignent même le maximum dans le groupe, mais la mandibule inférieure est plus’ ou moins droite ; le bec de ces oiseaux ressemble ainsi à celui du type « long » de leurs congé- nères de la Sibérie occidentale, mais toutes les proportions sont plus fortes. La forme du bec chez les différentes populations des Oies des moissons de la Sibérie orientale est plus constante que dans la Sibérie occidentale. Toutefois sur le territoire oceupé par des oi- seaux à bec épais et à mandibule inférieure courbée (zone des toundras) on rencontre parfois des individus dont le bec ressemble à celui des oiseaux de la Taïga (p. ex., deux mâles de la région du delta de la Léna, pris le 10. VIL.1914 et le 28.V1.1927, longueur du bee 77 et 87 (sic), hauteur de la mandibule inférieure 8,5 et 7,8 mm.). De quatre exemplaires de la région d’Alazeia, bassin d’Indighirka, conservés au Musée de Moscou, deux (mâle et fe- melle) ne diffèrent pas de ceux des toundras de la Sibérie orien- tale ; mais les deux autres (aussi un mâle et une femelle) ont les caractères des oiseaux de la Taïga. Dans la zone de la Taïga aux environs de Yakoutsk et dans le district de Turukhausk le 12. VI. 1896 et le 11. VI.1908 deux Oies ne différant pas de celles des toun- dras ont été prises ; un troisième exemplaire pareil fut pris près de Yakoutsk le 14.V.1927 (tous au Musée zoologique de l'Académie).

1. L'existence de ces deux types morphologiques, auxquels se rapportent parfois des oiscaux appariés et qui se rencontrent côte à côte dans toute la Russie septentrionale et la Sibérie N.-O, (Kanin, Nouvelle-Zemble, Yamal), a donné lieu aux opinions émises sur l'existence de deux espèces d'Oies des moissons dans ces régions.

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184

ALAUDA. Vi 2, 1936. FiG. 1. Anser fabalis middendorfii, Olekma 1907. Fi. 2. Anser fabalis fabalis nicheur, Yamal, Sibérie N. O., été 1908. Fi6. 3-4. Anser fabalis fabalis G et Q, appartenant à la même

paire, 18 juin 1908, Yamal (les fig. 2-4 démontrent la variabilité de la forme du bec chez les Oies des moissons de la Sibérie occidentale).

Fic. 5. Anser fabalis serrirostris $, embouchure de la Kolyma, 3 septembre 1905.

Fic. 6. Anser fabalis serrirostris Q, i

, 10 septembre 1905.

Fic. 7. Anser fabalis fabalis, sexe ?, adulte, lac Teleskoe, Altaï,

21 mars 1935 (oiseau de passage, variation vers Anser fabalis Prachy rynchus).

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M: DÉMENTIEFF SUR L'OIE DES MOISSONS 185

Source : MNHN. Paris

186 ALAUDA. vin. 2. 1936

Pour les variations de la coloration du bec et des pieds nous renvoyons à la partie précédente de cet article. Il suflit de noter ici que la forme la plus occidentale paraït avoir la bande du bec toujours rose ; que chez les autres formes la coloration jaune de la bande du bec prévaut (au moins chez les adultes); que le type de variation décrit comme neglectus paraît être localisé aux parties occidentales du continent eurasiatique (et aux iles qui le bordent au Nord) ; que la coloration rosâtre du bec et des pieds se rencontre chez les oiseaux des différentes parties de l'aire de distribution du groupe (en qualité de variations individuelles, d'âge ou de saison P). Enfin, il est à noter que les populations occidentales de fabalis (la forme brachyrhynchus exceptée) se distinguent par la fréquence de la coloration jaune du bec et des plumes blanchâtres vers la base du bee (quoique des oiseaux semblables se rencontrent aussi dans la Sibérie N.-E., p. ex. dans la région de Kolyma, quoique rarement).

Le dimorphisme sexuel se traduit surtout dans les dimensions plus fortes chez les mâles, plus faibles chez les femelles. Les varia- tions d'âge se traduisent peut-être dans les dimensions ; les oiseaux en premier plumage se distinguent par la coloration grise ou gri- sâtre des grandes couvertures alaires (au moins chez la plupart d’entre eux), par des couleurs faibles et peu différenciées, par la coloration moins nette des parties inférieures.

Les adultes varient considérablement quant à leur coloration. Les Oies des parties N.-O. de l’aire de distribution du groupe bra- chyrhynchus se caractérisent par le ton général clair el gris des parties supérieures du corps, surtout par le gris des grandes cou- vertures alaires. Chez les autres populations la coloration plus ou moins analogue se rencontre parfois en qualité de variation indivi- duelle. Le ton général de la coloration des parties supérieures est d’ailleurs très variable, du grisâtre au brun-foncé ; la largeur des bords clairs des plumes subit des variations corrélatives. Enfin, même chez les adultes, la distribution et les teintes des couleurs des parties inférieures du corps sont aussi sujettes à des variations : chez certains spécimens la coloration du ventre et de la poitrine est d'un blanc pur, chez d’autres elle est lavée de grisâtre, etc. Il semble que le développement du blanc des parties ventrales se rencontre surtout chez les Oies de la zone de la Taïga de la Sibérie orientale.

Pour résumer cette partie de notre étude, nous pouvons dire

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M. DÉMENTIEFF SUR L'OIE DES MOISSONS 187

que parmi les Oies des moissons on distingue quatre types mor- phologiques localisés, ou quatre types de variation géographique. Ce sont :

À. Taille faible. Bec court, à mandibule inférieure droite. Bande du bec et pieds roses. Coloration claire, grandes couvertures alaires, chez les adultes, d’un gris plus ou moins pur.

B. Taille plus forte. Bec plus long et plus fort, de forme et de dimension variables, tantôt plus ou moins court et épais, à cou- bure plus ou moins évidente de la mandibule inférieure, tantôt long et svelte, à mandibule inférieure droite. Bande du bec et pieds ordinairement orangés ou jaunes, parfois roses. Couvertures alaires, chez les adultes, ordinairement brunes ou brunâtres (rare- ment grises ou grisâtres).

C. Taille encore plus forte (en moyenne). Bec fort, long et épais, avec courbure de la mandibule inférieure. Coloration comme chez le précédent.

D. Taille comme chez le précédent. Bec fort et long, mais mandibule inférieure droite. Coloration comme chez le précédent.

Ainsi compris, tous les types de variation ont des aires de distri- bution nettement délimitées 1.

V. Quelques notes de nomenclature.

Malgré la synonymie abondante, les noms à appliquer aux formes réelles des Oies des moissons que nous venons de caractériser sont faciles à choisir. Le nom brachyrkynchus revient évidemment aux Oies des moissons à bec court habitant l'Islande, le Spitzherg et le Groënland oriental ; celui de fabalis à la forme occidentale de la zone des toundras ; celui de serrirostris à celle de la Sibérie N.-E.

À la forme de la zone boisée de la Sibérie orientale on donne ordi- nairement le nom de sibiricus, qui fut proposé en 1904 par Arpne- RAKI dans sa monographie Gusi Rossii. Selon l’idée d'ALpnEeRAKt le nom de sibiricus devait remplacer celui de middendorfii Severr- Zow, sous lequel les Oies en question étaient connues auparavant ALPHERAKI motivait ce changement par deux causes : les oiseaux

1. Un point de variabilité géographique d'A. fabalis reste obscur : quelle forme habite la zone de Taïga de la Sibérie Occidentale ? Il semble que ce soit la race no- minale, mais dans les collections les spécimens nicheurs manquent absolument.

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188 ALAUDA. Vut, 2. 1936.

de la collection de SEVERTZOW, pris au passage dans le Turkestan et identifiés par Severrzow avec son middendorfii, étaient diffé- rents de ceux de la Sibérie orientale ; les notes qui accompagnaient le texte sur À. middendorfii étaient en partie inexactes. Ces re- marques d'ALPHERAKI ne résolvent pas la question de la validité du nom widdendorfii. Severrzow, en effet, en établissant son middendorfii, dit expressément qu'il s’agit ici de la création d’un nouveau nom et non pas de la description d’une forme nouvelle. Le nom middendorfii, dit SEVERTZOW, se rapporte à l'oiseau que Mipnennorrr nommait Anser grandis parce que Anser grandis GMELIN est un oiseau différent des Oies des moissons. Cette re- marque de SevErTzow est absolument correcte, Quant à la descrip- tion d'Anser grandis chez Minnenporrr (Sibirische Reise, IT, 1851, p. 225), elle ne donne lieu à aucune confusion. MInbENDORFF dit qu'il a vu ces oiseaux à Boganida (Taymyr) et qu'il n’en à capturé qu'un seul exemplaire le 25 avril sur les côtes de la mer d'Okhotsk (Oudskoï Ostrog), dont l'aile avait 460 mm. et le bec 76 mm. de longueur. Cette dimension du bee, ainsi que la figure donnée par Minpennorrr (0. C., pl. XX, fig. {), permet d'identifier l'oiseau en question comme appartenant à la forme de la Taïga de la Sibérie orientale. L. v. Scurenck (/eisen und Forschungen im Amur- Lande, p. 462) qui a vu l’exemplaire de Minpenborrr (qui parait ne plus exister dans la collection académique) établit son identité avec l'Oie prise le 4.V.1855 à Nikolaewsk sur l'Amour. Ce dernier oiseau fut étudié par moi dans les collections de l’Institut zoolo- gique de l'Académie des Sciences. C’est un mâle qui a le bec long de 75 mm., avec la mandibule inférieure droite et haute de 82 mm., l'aile de 493 mm., en somme, un sibiricus typique. Puisque SEVERT- zow dit clairement et précisément qu'il donne le nom middendorfii aux Oies des moissons que MippeNporFr nommait grandis, il paraît évident que le nom proposé par SEVERTZOW se rapporte à la forme de la Taïga qu'ALpnéRAKI a renommée sibiricus sans aucune nécessité.

ALPréRaKI avait peut-être raison de dire que SEVERTZOW se trompait en identifiant les oiseaux de passage en Turkestan avec middendorfii. Ce sont plutôt des fabalis de la Sibérie occidentale, quoiqu’un exemplaire, le mâle, pris à Tehimkent le 28.11 (qu'Ar- PHÉRAKI sans raison sérieuse prenait pour le spécimen-type de middendorfüi), ait le bec long et que les deux autres spécimens aient l'aile tellement longue (v. le tableau des mesures) qu'ils

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M. DÉMENTIEFF SUR L'OIE DES MOISSONS 189

peuvent peut-être être pris pour des intermédiaires entre les Oies de la Sibérie occidentale et ceux de la zone de la Taïga de la Sibérie orientale. Mais enfin même si SEVERTZOW a commis une erreur dans l'identification des Oies mentionnées, le nom middendorjii ne perd pas sa validité 1. C’est done ce nom qui revient de droit à la forme habitant les parties bordées de la Sibérie orientale (sibiricus). Pour éviter dorénavant les confusions il serait peut-être bon de fixer comme spécimen-type le mâle mentionné, collecté par v. SCHRENGK, comparé par ce dernier et trouvé identique à l’exem- plaire sur lequel furent fondées la description et la figure d'A. gran- dis chez MIDDENDORFF.

VI. Catalogue et distribution géographique des formes d’Anser fabalis.

1. Anser fabalis brachyrhynehus BaïLLon.

Anser brachyrynchus Baturox. Mémoires Soc. d'Abbeville, 1833, p. 74, Abbe- ville, Somme.

Caractéristiques. Type A : Dimensions des adultes (d’après les spécimens mesurés par moi) (en mm.) : aile 406-468 ( 4 4) et 410-443 (9) ; longueur du bec 45-50 ( & 4) et 44-47,5 ( 9 ©) ; hauteur de la mandibule inférieure 4,2-6,5 ( 4 4) et 4,3-5 ( 9 9).

Distribution géographique. Groënland oriental, Islande, Spitzherg. La présence en Islande fut jusqu’à ces derniers temps discutée, mais c'est encore Procror (The Ibis 1864, p. 132), qui mentionne la nidification de cette Oie en Islande. L'oiseau fut retrouvé en 1929 par CONGREVE et Free (The Ibis 1930, p. 204- 218) ; v. aussi TIMMERMANN, Journ. f. Ornithologie, 1933, p. 3 330).

Pour les limites de l'U. R.S.S. nous disposons des dates sui- vantes : Un mâle fut pris sur l'ile de Hoocker, dans l'archipel de François-Joseph, le 30.V.1914 par l'expédition du lieutenant

4. D'autant plus qu'Acrnerakt. qui critique Severrzow pour l'inexactitude de ses données sur A. middendorfii. commet lui-même des erreurs inexplicables en indiquant par exemple que la distribution de sibiricus comprend le N -E. de la Sibérie et pre- cisément la presqu'ile de Tehutché, ete. Il est en général regrettable que l'application d'un critér um exclusivement morphologique à l'analyse des formes ait rendu le grand travail d’ALpnerart sur les Oies presque inutilisable quant aux données sur les formes d'A. fabals.

Source : MNHN. Paris

490 ALAUDA, vil. 2. 1936.

Sepow ; la nidification sporadique de l'Oie à bec court dans cet archipel reste ainsi probable. Dans la collection du Musée zoologi- que de l'Académie des Sciences de Léningrad se trouve un mâle adulte tiré le 8.1V.1912 à Arkatskoë, dans la vallée du fleuve Lowat, dans l’ancien Gouvernement de Nowgorod (le fait fut men- tionné par V. L. Brancui, Annuaire du Musée zoologique de l'A- cadémie des Sciences, XVII, 1912, p. XXXIX). A. Tu. v. Min- DENDORFF (Sibirische Reise, I1,1851, p. 227) communiqua qu'un exemplaire fut pris aux environs de Saint-Pétersbourg, mais cette identification peut être erronée, comme aussi les données de Tu. PLESKE, qui supposait la nidification de cette Oïe dans la pres- qu'ile de Kola. Les autres données sur la présence d’A. /. bra- chyrhynchus au passage dans l'Europe orientale sont tout à fait douteuses.

Les lieux de passage et d'hivernage normal de cette forme se trouvent en Europe occidentale, Angleterre, Pays-Bas, rarement plus à l'Est. E. Stuart Baker (Fauna of British India, Birds, VI, 1929, p. 403) note que l'Oie à bec court fut prise une fois à Assam (Sarrma Valley).

2. Anser fabalis fabalis Larnam.

Anser fabalis Larnan Gener. Synops.. Suppl., 1, 1787, p. tagne ; Anser carneirostris Buruniix, Psovaïa i ruzheinaïa Okhota 1901, avril, p. 28, « Nouvelle-Zemble » ; Anser neglectus Suseuxis, Bulletin British Ornithol. Club, V, 1895, p. VI, de passage au district Belebei, gouver- nement d'Ufa ; Anser serrirostris rossieus Burunu, in Buturlin i Dementiev «Polnyi Opredelitel ptits »,S.S. S. R, II, 1935, p.89 pe d'ad.. Belu- chia Guba, Samal, 2-VI-1908, Zhitkov leg., au musée de l'Université de Mos- cou).

Caractéristiques. Type B : Dimensions des adultes (en mm.) : aile 404-482 ( 4 8), 402-460 ( © ©) ; longueur du bec 51-67 (S 9), 51,8-60 ( 2 ©), 50-69,5 (sexe ?) ; hauteur de la mandibule inférieure 5,5-9,5 (4 4, une fois 11 1), 5,5-8,5 (9 ©).

Distribution géographique. Parties boréales (toundras et parties septentrionales de la zone boisée) de l'Europe orientale et de l'Asie occidentale, à l'Est jusqu'à Taymyr et le bassin de Kha- tanga, à l'Ouest jusqu'à la Scandinavie. Vers le Sud cette forme se rencontre en Scandinavie même jusqu'à 630 1. N., dans le bas-

sin de l'Yépisséi au moins jusqu'à 6401, N. Les limites méridionales

Source : MNHN. Paris

M. DÉMENTIEFF SUR L'OIE DES MOISSONS 191

dans la Russie N.-E. restent à préciser. Cette Oie se rencontre aux îles de Kolguev et de Nouvelle-Zemble.

Au passage cette forme se rencontre en Europe occidentale jusqu'à l'Angleterre et les régions méditerranéennes, en Russie d'Europe jusqu’à la Crimée et la Transcaucasie, en Iran (Perse), Turkestan.

Les spécimens de la phase »eglectus furent rencontrés en dehors de la saison de nidification en Allemagne, en Italie, en Albanie, en Dalmatie, plusieurs fois en Iran (Seïstan), au Turkestan et même aux Indes.

3. Anser fabalis serrirostris Swinnoœ.

Anser segélum var. Serrirostris Swixno, Proceed. Zoolog. Society of Lon- don 1871, p. 417, Ningpo, Chine (type au Musée Britannique) ; Swinno note à propos de cet oiseau (The Ibis, 1867, p. 392-393) que la bande de son bec était rouge, pinkish-red ». Anser mentalis Oares, Manual of Game Birds of India, I, 1899, p. 77, Yokohama ; Melanonyx segetum anadyrensis Burns, Nacha Okhota, 1908, novembre, p. 26, Anady qués trois oiseaux, En 1935 M. Bururrin dans « Polnyi Opredelitel ptits » vol, IT, p. 91, nomme comme type le S, Il-VI-1902, Nowomarünski ; le cotype 47.VI, 1902, Nowomarün: Anadyr, Sovormxow leg., est conservé au Musée Zoolo- gique de l'Univ 6 de Moscou); Anser oalesi Rickerr, Bulletin I: Ornith,

Club, XL, 1901, p.46, Toochow, Fokien? Anser fabalis curtus Lôxvoene. Fauna och Flora, 1923, p. 277, Shansi. Caractéristiques. Type C : Dimensions des adultes (en mm.) :

aile 422-524 ( 4 4), 422-491 ( 9) ; longueur du bec 59,2-71,5 ( 4 4), 58,5-66 ©); hauteur de la mandibule inférieure 8-12,5 (4), 8,1-11-3 (99).

Distribution géographique. Zone arctique de la Sibérie N.-E., entre le cours inférieur de la Léna et la presqu'île de Tehuktché et le bassin d'Anadyr. (Au Sud, dans la zone boisée, remplacée par la forme suivante).

Au passage, dans les parties orientales de la Sibérie, bassin de la Léna, Transbaïcalie, bassins de l'Amour et de l'Oussouri, îles de Commandeur et Sakhaline, Japon, Mongolie. En hiver en Chine.

4. Anser fabalis middendorfii Severrzow.

Anser middendorfi Sevenrzow. Vertikalnoë i gorizontalnoë Rasprostranenie turkestanskikh Zhivotnykh, 1872 (1873), p. 149. Sibérie Orientale (pour locus classieus il faudrait prendre Oudskoï Ostrog fut prise au passage l'Oie ayant

Source : MNHN. Paris

192 ALAUDA, Vu. 2. 1936.

servi pour la description de cette forme chez Minoexonrr). Anser arvensis sibiricus Aurenat, Gusi Rassü, 1994, p. 9 et 98, nomen novum pour le précé- dent, errore.

Caractéristiques. Type D : Dimensions des adultes (en mm.) : aile 440-558 (4 4), 465-524 ( © ©) ; longueur du bec 64-81 (4 6), 63,2-79 ( © 9), même 83 (sex) ; hauteur de la mandibule inférieure 7-10,5 (4 4), 7-9,8 ( £ 9), même 6,8 (sexe ?).

Distribution géographique. Zone boisée de la Sibérie orientale entre Moniéro et Khatanga (les parties N. du bassin de ce fleuve exceptées), Vilini et Altai à l'Ouest et au Nord-Ouest, à l'Est jusqu'aux parties boisées du bassin de la Yana et Kamtchatka. La limite septentrionale de la distribution en Yacoutie reste à éta- blir, Au Sud jusqu'à l'Altaï S., Sayan, Alatau-Kuznezki, Mongolie, peut-être même le lac Zaissan.

Passage en Sibérie orientale, en Transbaïcolie, Daourie, Mongo- lie, par les bassins de l'Amour et de l'Oussouri, en Chine, au Japon, une fois à Burma (E. Sruarr BAKER, ouvr. cit., p. 4051.

VII. Bibliographie.

Cette liste n’a aucune prétention à donner la bibliographie com- plète de la question et ne contient que les travaux qui paraissent à l’auteur les plus importants.

Hanrenr. Die Vügel d. Paläark Tucannov. Les Oiseaux de l'U. et les Harles, 1932, pp. 61-64 (en russe). Aurnenax (S. N.). Gusi Rossü, 1904 (publié aussi en anglais sous le titre : The Geese of Europe and Asia). Sarvavont (T.). Catalogue of Birds in the Bri ). Dikie Gusi Rossüskoï Imperii (Li ), Psowaïa i Ruzheinaïa Okhota, 1901, F p- 1-47 (en russe). Gusi-gumenniki(Les Oies des moissons), Nacha. Okhota, 1908, novembre, p. 21-28 (en russe). Ucbersicht der Saatgansrassen. Aguila, XXXVITI-XLI, 1931-1931 (1935), p- 219-226 Die Kennzeichen der Saatgansrassen, £. c., p. 211-218. .). Ucber die neuere systematische Einteilung der Saatgänse, £. €. p- 220-246. Burunu (S. A.). In Burunux et Demexriev « Polnyi Opredelitel ptits » S. S.S. R., vol. IT, 1935, p. 86-91 (en russe).

schen Fauna, II, 1912-1 p. 1283 Canards, les Oies, les

h Museum, Ji

XVII, 1895. auvages de la 1, supplément,

Source : MNHN. Paris

M. DÉMENTIEFF SUR L'OIE DES MOISSONS 193

MANX (B.). Annuaire du Musée Zoologique de l'Académie des Sciences de l'U. RS. S., t XXIX, 1928 (1929), p. 132-133 (aperçu des formes sibériennes).

Naustanx (I. F.). Naturgeschichte d. Vôgel Mitteleuropas, t. IX, 1902,

p. 321-359.

Bnenm (Ch. L.). Der vollstandige Vogelfang, 1855, p. 366-377.

Handbuch der Naturgeschiehte aller Vogel Deutsehlands, 1831, p. 837-

843.

La polémique soulevée à propos du livre d'ALPnénakt se trouve dans les articles suivants : Ones, Journ. Bomb. Soc. Nat. Hist,, 1906, 1907 ; Arpmenakt, t. C, 1907 ‘.

Buronux, L. e., 1908 ; Sazvavori, The Ibis, 1905 ; Aurmenarr, The Ibis, 1906 ; Oares, The Field, 1906, ete.

Sur la question de la coloration de la bande du bec et des pieds, sur la forme du bec et sur le problème neglectus :

an, Ornith. Monatsberichte, 1935, p. 27-28 (distribution) ; H. Th. 6, Report on the Scient. Results of the Norweg. Exped. to Nowaja Zemlya, 1921, 11, p. 14 (prise d’un oiseau du type negleetus le 16 VI dans la baie Beluchia) : J. Berry, The oceurence of an unusual Goose of the type Anser neglectus in Scotland, The Ibis, 1934, p. 80-85 : J. x, Ornith. Mo- natsberichte, 1930, p. 172-174 ; Aguila, 1929-1930, p. 54-68, £. 1931-1934, p. 193-210 ; Journ. f. Ornithol., Harterts Festschrift, 1929, p. 282-291 (discus- sion de la question neglectus ; passage en Europe occidentale) ; Srnésemanx, Ornith. Monatsberichte, 1922, p. 107-109 ; 4. c., 1929, p.35 ; t. C, 1930, p 9; 1934, p. 22 (passage en Europe occidentale) ; E. Stuart Baxen, Fauna of India, Birds, VI, 1929, p. 403 (hivernage aux Indes) ; Szaray, Compa- rative Osteologie der Brustschulter Apparate von Anser fabalis und neglectus ; Aquila 1902, p. 12 ss ; V. p. Bmxx, The Ibis, 1930, p 55 559 ; H. Gnore, Ornith. Monatsberichte, 1930, p. 79 et 174-166 (passage) ; Zanun, Messager Ornithologique, 1910 ; Iswestia Turkest. Otdela Russk. Gcogr, Obchtestwa, XVI, 1923 (passage au Turkestan) ; Znrrxov, Ann. d. Mus. Zool. Acad. Sci., XVIL, 1912, p. 311-369 (coloration du bec et des pieds ; discussion ale de la question ; article d'une importance de premier ordre) ; DanLov, Zapiski Zabaïkalskogo Otdela Obchtestwa Kraewedenia, I, 1930, p. 57-83, 3 pl. (remarques très importantes sur la rencontre d'oiseaux à bande du bec rouge et rougeâtre chez serrirostris et middendorfii passant en Transbaïcalie) ; V. Ma- Darasz, Ann. Mus. Nat. Hung., VII, 1909, p. 304 ; de Beaux, Ornith. Monats- ber., 1909, p. 85-87 ; Ocizvie-Gnanr, Bull. Brit, Orn. Club, XIX, 1907, p. 57 (variations de la couleur et de la forme du bec) ; Susckin, Ptitsy Ufimskoï Gubernii, 1897, p. 69-78 (description détaillée).

4e

Travail du Musée zoologique de l'Université de Moscou. Manuscrit reçu à Alauda le 20 janvier 1936.

13

Source : MNHN. Paris

DE L'APPAUVRISSEMENT DES FAUNES

par Paul Manow.

Mes conclusions sur le rôle économique des Rapaces ! m'ont été reprochées, bien que j'eusse été moins sévère pour eux que la Con- vention internationale. J'estime que l'esthétique est, à cet égard, une considération d'autant plus secondaire que les principaux intéressés ne sont nullement disposés à lui sacrifier gibier, volailles, troupeaux, et que, comme je l'ai remarqué ailleurs, les conseilleurs ne sont pas les payeurs.

La démocratisation de la chasse et le perfectionnement des armes à feu condamnent d’ailleurs les Rapaces et je crains bien qu'ils ne disparaissent de l'Europe occidentale avant la fin du siècle ; on leur fait une guerre acharnée par tous les moyens dans les chasses gardées, non seulement chez nous, mais plus encore, peut-être, dans les grands domaines de l'Europe centrale, la plu- part des propriétaires et des gardes étant à leur égard d’une igno- rance presque incurable, généralement en proportion directe avec leurs prétentions. L'organisation d’un service spécial cynégétique m'avait donné quelque espoir ; il a été dissipé par la constatation que de très nombreuses sociétés de chasse accordent ouvertement, par leurs statuts, souvent publiés par les journaux locaux, des primes pour la destruction de tout Rapace diurne nocturne sur la simple présentation de la mandibule supérieure, primes souvent payées par les secrétaires de mairie, et cela dans une région la Bondrée niche encore et les derniers Circaëtes sont attirés par la pullulation des Vipères !

J'avais désiré faire précéder mon étude par un tableau permettant la détermination des espèces ; mon ami regretté LAVAUDEN, à qui

4. Les Rapaces d'Europe, leur régime, leurs relations avec l'agriculture et la chasse, Toulon 1933. Chez l'auteur, 5 avenue Vauban, Toulon (Var), 30 fr. Pour la France, 35 fr. ; pour l'étranger, franco de port.

Source : MNHN. Paris

M. MADON SUR L'APPAUVRIS

MENT DES FAUNES 195

je m'étais adressé, me répondit qu'il s’en était occupé, mais que la multiplicité des livrées ne lui avait pas encore permis d'arriver à un résultat satisfaisant. Les meilleurs tableaux des auteurs, de Fario par exemple, sont trop compliqués et insuffisamment répan- dus. IT faudrait du reste les accompagner de silhouettes au vol comme on en a donné beaucoup en Allemagne pendant ces dernières années. On pourrait alors faire appel aux huttiers au Grand-Due, aux propriétaires de chasses gardées, et aux chasseurs conscien- cieux, pour la conservation des espèces les plus utiles.

Quatre sont particulièrement recommandables : les deux Hiboux, la Bondrée et le Circaëte.

Les deux premiers sont facilement reconnaissables.

On me permettra de rappeler pour les autres, de même que pour la Crécerelle, quelques caractères indépendants des variations de plumage.

La Bondrée Pernis apivorus se distingue facilement par ses lorums emplumés, ses tarses réticulés sur toute la partie nue, la pré- sence de 2 à 4 seutelles seulement sur le doigt médian, contre ordi- nairement 4 ou 5 chez les Buses, le Balbuzard, les Aigles, 8 à 12 chez les Milans et le Pygargue, 14 à 18 chez les Busards, 14 à 16 et acci- dentellement 24 chez les Faucons, 18 à 20 chez l'Autour, 24 à 28 chez l'Epervier. S'il est malheureusement trop tard quand on peut l'examiner à l'aise, on peut déjà la distinguer au vol, parmi les Oiseaux de taille analogue, des Milans qui ont la queue fourchue, des Buses par ses ailes plus longues et moins élargies, comme par ses évolutions gracieuses !. Dans l'aire, presque toujours ample- ment garnie de verdure, l'œuf parfois porte sur un fond d’un roux pâle de larges taches sanglantes, plus prononcées que dans ceux des Faucons et des Pygargues.

Par sa taille le Circaëte Circaetus gallicus ne pourrait être con- fondu qu'avec l'Aigle eriard, l’Aigle de Bonelli, le Balbuzard, la Buse, l'Archibuse. Les Aigles et l'Archibuse en diffèrent par leurs tarses bien plus emplumés ; il a la tête plus forte que celle de la Buse, les yeux très ouverts, les tarses presque entièrement réti- culés au lieu d’être écussonnés en avant et en arriére. Il se distingue

1, Certains auteurs lui attribuent un vol très lourd ; mes observations sont en complet désaccord ; j'ai eu notamment l'occasion de suivre les évolutions d'un couple pendant plusieurs semaines ; après s'être gorgées de couvain de Guêpes. vers 11 heures, elles s'élevaient rapidement en spirale, presque hors de vue, et dessinaient alors des courbes élégantes avec des cris de satisfaction, sans aucune préoccupation de chasse.

Source : MNHN. Paris

196 ALAUDA, Vuit. 2. 1936.

du Milan royal par sa queue carrée, ses formes plus lourdes, ses tarses bien plus allongés. Le Balbuzard, plus petit, en diffère par la granulation spéciale de ses doigts, ses tarses très raccourcis, ses ailes pointues. Au vol, il est encore plus massif que la Buse. L'œuf est d'un blanc azuré sans taches, ce que l'on retrouve souvent chez le Pygargue, les Busards et les Asturiens ; mais il est presque tout, jours unique et d’ailleurs bien plus gros que chez les Busards et les Asturiens. Le premier duvet du poussin est d'un blanc pur, avec la cire et les pieds d’un gris plombé.

La Crécerelle Falco tinnunculus, en dehors de son plumage, se distingue de l'Epervier par le nombre bien moindre des seutelles du médian, par ses tarses et ses doigts bien plus courts, par sa mandibule supérieure dentée. Au vol, son aile est plus longue et plus étroite et elle se livre à des évolutions spéciales. Le premier duvet des poussins est blanc jaunâtre, le second gris fauve, tandis qu'ils sont respectivement blanc rosé et cendré chez le Faucon hobereau, l'un et l’autre blanes chez l'Epervier.

La Chevêche Athene noctua, que nous pouvons avoir à ménager, est bien connue de tous ; le Scops Ous scops et le Faucon kobez Falco vespertinus, très faciles à reconnaitre.

Bien d'autres Oiseaux sont menacés. W. RornseniLn avait déjà donné, au Congrès de Londres de 1905, une liste de 139 espèces complètement disparues et de 98 en voie d'extinction, liste néces- sairement incomplète puisque la distinction était très insuflisante pendant la majeure partie des cinq siécles qu'il envisageait. Sur les 237, il attribuait la destruction de 82 à l'action directe de l'homme, de 38 à celle des animaux introduits par lui, de 46 à des causes naturelles, de 38 à la combinaison des deux premières causes, de 11 par les deux dernières, de 3 à celle de la première et de la troisième, de 19 aux trois réunies. Le mal s’est considérablement accru depuis, malgré la suppression des massacres pour modes ; il se précipite de plus en plus et avec sur nous des répercussions plus étendues qu'on ne le suppose.

Il en est de même pour les grands Mammifères. Pendant ma jeunesse les Loups étaient encore communs en Provence, beaucoup descendant des Alpes à la suite des grands troupeaux transhu- mants: lors de mon premier séjour en Algérie j'ai entendu les derniers Lions, chassé couramment la Panthère. On a, ces dernières années, à peu près achevé, sous divers prétextes, la destruction des

Source : MNHN. Paris

M. MADON SUR L'APPAUVRISSEMENT DES FAUNES 197

Castors du Rhône. Les Eléphants, les Girafes, les Rhinocéros, les grands Félins, même l’Hippopotame, si commun autrefois, sont en voie de disparition malgré les restrictions apportées à leur chasse dans les colonies anglaises et dans quelques-unes des nôtres ?. Les énormes bandes de Bisons ont été systématiquement et hy- pocritement détruites en Amérique pour atteindre les Indiens dont ces animaux constituaient la principale ressource ?. Les grands Cétacés et les Amphibies ne laisseront bientôt qu’un souve- nir malgré l'intérêt que nous aurions à les ménager ?.

Malheureusement le mal est sans remède, les gouvernements éphémères ne vivant qu'au jour le jour sans $ inquiéter de l'avenir. Certes, la conservation de certaines espèces n’est pas compatible avec l'expansion de l’homme et il serait difficile de les maintenir dans de grandes réserves ; mais nous devons tâcher de prolonger l'agonie de celles qui nous sont utiles. Nous marchons rapidement vers l'ère des Moineaux, des Corvidés et des Rats ; mais n’épuisons- nous pas les réserves de houille et de pétrole accumulées pendant des milliers de siècles ?

4. DesacorGur a vu à la fois 100 Hippopotames, plus de 600 Eléphants, 3 ou 400 Cynhyènes, 4 à 50 Conaggas ; Livixasrowe, des centaines de Zèbres et de Buffles et des passages de plus de 40 000 Euchores cités par bien d'autres (Gaupy, Les an- cètres de nos animaux, 1888, p. 90). En 1888, Ewarr S, Grocan disait : « Sur le Pangwe, à 70 milles environ au N.-W de Meisla la quantité de gibier est incroyable... J'ai vu plus de 40.000 têtes, surtout Blue Wildebesst, sur le même point, et, pendant notre séjour de cinq mois, nous tuâmes dix-sept Lions et primes vivants cinq jeunes... Dans les marais du Nil, à Bohr, « le nombre des Eléphants était prodigieux, de sorte qu'ils génaient beaucoup notre marche, refusant de quitter la piste. des Hippopo- tames sur toutes les rives ». (T#rough Africa from the Cape to Cairo, Smith. Inst, 1890).

2. 11 faut lire le lamentable exposé de ce massacre par W. T. Houay dans Smith Inst. Museum, 1887, pp. 367 à 548, avec 22 planches.

3. Voir W. N. Dai, On the Preservation of the Marine Animats of the NW. Coast, dans Smith Inst., 1901, pp. 683-688. 11 vise dix espèces d'Amphibies et la Loutre marine. Les mesures de protection étant mal observées, il ajoute : « Il faut s'attendre à la disparition, peut-être plus prochaine qu'on ne le croit, de tous les grands Mam- mifères et des Oiseaux les plus remarquables. » !

Source : MNHN. Paris

QU'EN EST-IL DES « AIGLES CRIARDS » DE FRANCE ?

par Henri Jouarp.

La question des « Aigles criards» a déjà fait couler tant d'encre que j'hésiterais à y ajouter la mienne si les nouvelles relations du D: Rocnox-Duvi up sur la présence estivale, dans les gorges du Tarn et les Pyrénées, d’un Aigle de taille et coloration semblables à celles d'Aguila clanga [1, a, et b, pp. 507-508]: ne la remettaient en quelque sorte à l’ordre du jour 2. Essayons done de « faire le point », je veux dire d'exposer ce qui semble désormais acquis, et d'attirer l'attention des ornithologistes bien placés pour en connaître sur ce qui demeure matière à investigations :

Mais, avant d'étudier les principaux documents (?) français et étrangers sur les rencontres, les récoltes, et, surtout, la nidifi- cation (!) de « l'Aigle criard » en France, voyons : 10 ce que sont exactement les Aigles criards, tant au point de vue de leurs carac- tères spécifiques, aujourd'hui bien reconnus®,que de leurs habitats et déplacements normaux ; ce que l’on sait sûrement de leurs apparitions dans les pays qui nous entourent.

1. Voir ên fine la bibliographie des auteurs et ouvrages successivement cités, en recherchant la correspondance des chiffres romains entre crochets du texte et des chifires romains de cette bibliographie.

2. On aurait pu espérer qu'après les errements dont fourmille notre ancienne « li rature », l'article sur les Aigles criards que G, Eroc publia en 1913 [11] marquerait, pour les pays de langue française, un premier pas vers la lumière. Il n'en fut rien. Pour commencer à y voir clair, nous dûmes attenire jusqu'à ce qu'en 1921 le cheva- lier van Havre [IIL, 4] et en 1925 Lavauoex et Heu pe Batsac [IV] prissent la plume

3. Bien qu'à ma connaissance il m'existe encore aucune clef de détermination pei- nement satisfaisante les concernant.

Source : MNHN. Paris

M. JOUARD SUR LES « AIGLES CRIARDS » DE FRANCE

199

I. Les DEUX AIGLES CRIARDS.

Aquila elanga 1

Bec plus haut et plus fort (culmen 32,5-39 mm.) ; tarses plus longs (11- 12 em.) et plutôt plus grêles ; ré- mige (dernière primaire |) à barbes ex- ternes en général fortement échan-

Aquila pomarina pomarina ?

Bec moins haut et moins fort (cul- men 28-32 mm.) ; tarses moins longs (8-9,5 em.) et plutôt plus robustes ; 7e rémige à barbes externes frès faible- ment échancrées, et inférieure de plus

crées, et inférieure d’au plus 6 em. à la rémige la plus longue ? ; aile de 49 à 56 cm.

Première livrée juvénile : sus-cau- dales blanc-jaunâtre, reste des faces supérieures brun-noir à reflets euivrés, chaque plume avec, de part et d'autre de sa baguette, une tache médiane plus claire qui, mince à la tête et à la nuque (où elle peut même manquer), S’élargit considérablement au dos et aux couvertures alaires: menton et gorge d’un brun-noir unicolore, reste des faces inférieures varié, selon le même mode que les faces supérieures, de brun foncé et de brun jaunâtre 4. Vieux Oiseaux : brun-noir foncé, un peu plus clairs à la tête et au cou, les sus-eaudales plus pâles et parfois plus |

de 6 cm. à la rémige la plus longue ; aile de 46 à 53 cm.

Première livrée juvénile : faces su périeures d’un brun foncé à légers re- flets pourpres, dans l’ensemble un peu plus claires que celles des jeunes Aquila clanga, avec généralement une tache roussâtre à la nuque, et plus ou moins de larmes oblongues de même nuance ; faces inférieures brunes plus ou moins striées de roux5.— Vieux Oi- seaux : d'un brun ferreux presque uni- colore.

4 Le terme d'Aguila naevia doit être particulièrement banni de notre terminologi

Car l'Aguila naevia des auteurs n'a sûrement rien a voir avec le Falco naevius de Gueux (lequel s'applique à un jeune Autour Accipiter gentilis), et le nom même d'Aguila naevia a été employé à tort et à travers pour désigner tantôt l'un;tantôt l'autre des Aigles criards [cf, Harrerr, V,p. 1104. synonymie]. Le nom français correspondant d'Aigle tacheté est pareillement à rejeter : en tant qu'il a été l'objet des même confu- sions. Restent à notre disposition, en application de la loi de priorité qui s'impose en matière de nomenclature latine, et comme suite aux délibérations du « Comité Boumer » [VI,p. 20]: Aguila clanga Pauuas 1811, Aigle criard (proprement dit), ou Grand Aigle criard; Aguila pomarina pomarina Buenm 1831, Aigle pomarin, ou Petit Aigle criard.

2. La nomenclature trinominale est ici de rigueur, car il existe, chez l'Espèce Aquila pomarina, une Race géographique assez différenciée de celle qui nous occupe : Ia Race Aquila pomarina hastata (Lssow) 1834, qui habite l'Inde.

3. Voir illustration, par exemple dans Paris [ VII, p. 219].

4. On connaît une variété (soi-disant phase ») d'un jaunâtre-roux clair (ailes exceptées) qui rappelle la variété dite « dorée » de l'Aigle royal Aguila chrysaetos. Cest 1Oiseau que Naumanx considérait comme une Espèce distincte et nommait Aquila fulvescens Gray VIN, vol, v, pl. 47]

5. Ici encore une variété pâle, soi-disant « dorée ».

Source : MNHN. Paris

200

ALAUDA. VI

2. 1936.

ou moins marquées de blane, parfois une large tache blanche aux épaules 1:

Nicheuse dans la région de l'Amour, la Chine, la Sibérie méridionale, le Turkestan, l'Inde, et, vers l'Ouest, jusqu’à la Macédoine, la Hongrie, la Galicie, la Pologne, la Livonie, excep- tionnellement la Silésie et la Prusse elle fréquente les régions ouvertes, bien arrosées, les prairies humides, les

Nicheuse dans les Balkans, l’Autri- che, la Hongrie, la Pologne, les pays baltes, le Nord et l'Est de l'Allemagne elle fréquente des biotopes com- parables à ceux d’Agquila clanga l’Espèce va hiverner du Sud dela Rou- manie et de l’Asie mineure au Soudan et au Kenya.

boisements proches des fleuves et des lacs —, l’Espèce va hiverner dans la Chine méridionale, l'Inde, et l'Afrique Nord-orientale, un certain nombre d'individus prenant toutefois une di- rection plus Sud-Ouest qui les amène jusque dans l’Europe occidentale.

(Pour distinguer d'emblée les deux Aigles criards des autres Espèces du Genre Aguila, comme aussi des Espèces du Genre voisin {ieraaëtus, le seul examen des narines sujfit : chez Aquila clanga comme chez Aquila pomarina, elles sont rondes, ou sub- arrondies, alors que, chez leurs cousins, elles sont allongées et subverticales !)

IL. BELGIQUE : SUISSE : IrALIE.

A) Belgique :

D'après VAN Havre [III, b), pp. 227-229] :

Aquila clanga : Aucun cas de nidification, mais Oiseau de passage occasionnel, plusieurs spécimens (juv. !) en collection.

Aquila pomarina : Oiseau de passage accidentel ; très probable- ment deux captures.

1. La mue des Aigles se fait d'une façon lente et quasi-continue (tous les mois de l'année), et, si l'on fait abstraction des jeunes qui portent leur livrée juvénile « Simple +, on n'en peut jamais trouver qui aient toutes leurs plumes fraiches, Ce n'est qu'au bout de plusieurs années qu'un plumage adulte, qui désormais ne va- riera plus, ou plus guère, est acquis, et l'on trouve tous les intermédiaires entre cette livrée et la livrée juvénile.

Source : MNHN. Paris

M. JOUARD SUR LES « AIGLES CRIARDS » DE FRANCE 201

B) Suisse : D'après Fario et Sruner [IX, pp. 77-80] :

Sous l'appellation d'Aquila nævia BrissoN, ces auteurs présen- tent un « Aigle criard » comme s'il s'agissait, en fait, d'Aquila p. pomarina, et le donnent pour passer assez irrégulièrement en Suisse. Ils rapportent, au conditionnel, un soi-disant cas de nidification dans ce pays (région de Lucerne, d’après SrAurreR), mais admet- tent sans hésitation les dires de Barzzy [X, pp. 96-101] concernant sa nidification en Savoie. Sous le nom d'Aquila clanga ParLAS enfin, ils traitent d’ « apparition accidentelle très rare en Suisse » (trois spécimens de collection), un Aïgle criard qui, d’après sa distribution, est bien, lui, le véritable Aquila clanga.

Aucun doute : les deux Espèces n’ont, le plus souvent, pas été distinguées 1.

D'après Fario [XI, pp. 82-99] :

D'une lecture attentive des dix-sept pages que Faro a consacrées aux Aguila nævia et Aquila clanga, il ressort sans conteste que cet auteur, malgré la peine qu'il s’est donnée, n’a réussi qu'à obscur- cir davantage ce qui, déjà, était obscur ? ; et que :

19 ce qu'il appelle Aguila clanga, d'après PALLAS mal interprété, n’a rien à voir avec les deux Aigles criards mais correspond à un tout autre type d'Aigle, Aguila nipalensis (sous sa race orientalis Caganis 1854, fâcheusement pour le bon sens la plus occidentale des deux !), de structure différente, de plus grande taille, et de coloration tout autre : sa tête d'Aquila clanga (p. 84) avec narines subverticales très allongées suffirait à le prouver si les noms fran- çais « Aigle oriental », et surtout allemand « Steppenadler », qu'il lui attribue ne venaient encore en témoigner ;

1. La chose est courante dans le Catalogue des Oiseaux de la Suisse, quand il

de formes voisines. Pour la raison bien simple qu'aucun esprit critique n'a pr

sidé À son élaboration et qu'on y a recueilli péle-mêle les « identifications » des rares

ornithologistes et celies de nombreux chasseurs ou observateurs occasionnels les plus

étrangers aux sciences exactes. Toujours la quantité primant la qualité, loi des

démocraties C'est le cas de répéter que les renseignements ne valent que par celui les donne.

2 Ce n'est pas là, malheureusement, le seul cas les efforts de Fario n'ont porté que des fruits amers ! Qu'on se rappelle, par exemple, les trop nombreuses pages qu'il a consacrées aux deux « Mésanges grises » Parus palustris et Parus atricapillus et aux deux Grimpereaux Certhia brachydactyla et Certhia familiaris |

Source : MNHN. Paris

202 © ALAUDA. vit. 2. 4936,

29 si les deux formes a) et à) qu'il groupe sous ie titre d'Aquila nævia GMETIN ont bien trait aux Aigles criards, sa « forme petite » ressortit plus souvent au véritable Aquila clanga que ne fait sa « forme grande » ;

30 la plupart des spécimens suisses étudiés sont, à en juger par leur plumage, à rapporter à Aquila clanga, mais certains autres correspondent si exactement, de ce même point de vue, à Aguila P. pomarina (par exemple le spécimen de la collection Sraurrer des pp. 91 et 92, et le spécimen de la collection Farro des pp. 92-93) qu'il m'apparaît inévitable de considérer qu'Aguila p. pomarina s’est montré en Suisse.

Nidification : Tout en retenant les données de Bai et celle de Sraurren déjà citées dans le Catalogue examiné ci-dessus, Fario en ajoute une autre : « La citation la plus certaine d’une nichée de cet Aigle en Suisse est celle du Dr Fiscier-Sicwanrr, de Zofingue, qui m’a écrit qu'il possédait deux œufs de Nævia recueil- lis le 21 mai 1891, à Hühtragen, entre Bülach, Backenbülach et Niederglatt, dans le canton de Zurich » (p. 95).

Enfin, faisant d'Aguila nipalensis l'authentique Aquila clanga de Parras, Fario se devait de rapporter à «Aguila nævia» (— Aquila clanga surtout, et Aquila p. pomarina un peu, done !) les trois spécimens qu'il avait, quelque temps auparavant, dans le Catalogue, accepté de faire figarer sous la rubrique Aquila clanga. Ce à quoi il ne manque pas, après examen de ces spécimens 1!

L'après Corrr [XII a), pp. 34-35] :

Aquila clanga Parras, dit en français Aigle tacheté, est donné pour rare, hôte d'été, de passage, hôte d'hiver.

Aquila p. pomarina Breun, dit en français Aigle criard, est donné pour rare, de passage, hôte d'hiver.

D'après Corri [XI b), p. 4] :

Aquila clanga figure parmi la liste des Oiseaux qui, précédem- ment admis comme nicheurs, ne doivent en réalité pas être consi- dérés comme tels, faute de preuves.

4. Voir aussi, même auteur et même ouvrage, pp. 1713-1714, une note : Aguila nævia, clangoïdes (Aigle criard), qui rapporte, d'après Fiscuer-Sicwarr, la capture en Suisse de quatre Grands Aigles criards (le Schelladier des Allemands Aguila clanga).

Source : MNHN. Paris

M. JOUARD SUR LES « AIGLES CRIARDS » DE FRANCE 203

C) Italie : D'après ARRIGONT DEGLI Ont [XIIT, pp. 401-403] :

Aquila clanga PALLAS (dit en français Aigle eriard) : De double passage irrégulier, en Italie, moins rare en livrée de jeune qu’en livrée adulte. « La notizie sulla sua nidificazione nella Valle Padana, Toscana et Liguria meritano ulteriori conferme » ajoute celui qui fut, pendant tant d'années, la gloire de l'ornithologie d’outre- Monts.

Aguila pomarina pomarina BRESN (dit en français Aigle tacheté) : De passage accidentel, mais tout de même certain (près de vingt exemplaires récoltés, surtout en octobre, en Italie).

III, FRANCE.

A

Que disent sur les Aigles criards les trois seuls ouvrages français d'ornithologie générale (quant à la France et quant à‘l'Europe) dignes d’être consultés ?

DecLanp et Gerse [XIV, pp. 26-30] citent les deux Espèces, sous noms Aquila nævia Aigle tacheté et Aquila elanga Aigle criard, mais non sans faire diverses erreurs. Il apparaît en effet, d’après les termes mêmes de ces auteurs, que la « Femelle adulte tuée en automne » et la « Femelle non adulte également tuée en automne » qu'ils décrivent à leur paragraphe Aquila nævia sont à rapporter à Aquila clanga ; que leurs « mêle et femelle vieux » d’ « Aquila clanga » ont été des Aquila pomarina ; que leur tableau des «Caractères essentiels » et « Caractères accessoires » des deux espèces comportent plusieurs inversions. Précisons que DeëLann et GERRE rapportent à leur « Aquila nævia » les renseignements biologiques qu'ils empruntèrent à Baïzzy (voir plus loin)...

Orpne-Gazriarn (XV, pp. 29-42] cite les deux Espèces, sous noms Aquila nævia Briss., Orn., 1, p. 425 (1760), et Aquila mela- naetos Savieny, Egypte, p. 25, p. 12, f. 1 (1810) d’après M. TH; Gurney 1, avec, pour chacune d'elles, une abondante synony-

1. Le nom Falco Melanaëtus semble avoir été appliqué par Linné (Syst. N., Ed. X, 1, p. 88) à l’Aigle impérial. Ou alors à un Aigle royal ? La diagnose étant dou- teuse, le nom n'a pu être retenu,

Source : MNHN. Paris

204 ALAUDA, VII, 2, 1936,

mie de laquelle il ressort (comme il ressort des descriptions dont elles sont l'objet !) que la première est A. P. pomarina et la seconde À. clanga. Mais c’est, cette fois, à clanga melanartos » | 1) que sont rapportées les références de nidification en France (BarLLy pour la Savoie, Lacroix pour les Pyrénées, ete. voir plus loin….).

Paris [VII, p. 240] cite les deux Espèces, sous noms Aguila clanga PazLas Aigle criard et Aquila pomerana (sie !) Brruu Aigle tacheté, Aigle de Poméranie, et, tout en déclarant fort à pro- pos la première « de passage irrégulier et rare » et la seconde « en général erratique et accidentelle », rapporte à cette dernière les cas de nidification soi-disant constatés Donné comme quelquefois sédentaire dans les régions montagneuses et boisées de l'Est et du Sud de la France »).

Mais remontons, par delà ces auteurs et leurs ouvrages, aux sources mêmes ils puisèrent. Ces sources, si nous éliminons les données qui ne méritent aucune espèce de créance par les con- fusions évidentes qu'elles révèlent 1, peuvent, je crois, être rame- nées sans dommage à quatre.

B

Nous trouvons dans Baizix [X, pp. 96-101], sous titre Aigle criard Plaintif (Aguila Planga) (sic !), et avec l'indication des «noms vulgaires » « Petit Aigle noir : dans quelques lieux de la Maurienne, surtout à Bessans : Aigle de Prusse », une description de plumages correspondant tantôt davantage à Aguila clanga (taches blanchâtres des juv.), tantôt davantage à Aguila p. poma- rina (brun-ferrugineux des adultes). L'Oiseau, qui, rare en Savoie, y arriverait fin mars pour en repartir en septembre non sans y passer également, venant d’ailleurs, sur la fin de l'été (généralement par petites bandes) y rechercherait un biotope qui cadre assez bien avec celui de son aire de distribution normale (voir ci-dessus). Mais le plus intéressant, c'est le récit, par Barcr y, de l'observation qu'il poursuivit, trois années consécutives, d’une aire, apparem- ment du même couple, placée sur un buisson de Buis croissant

1. Ainsi les déclarations de 'Hanoxvise 1895, de Macauv D'Aunresson 1897 et de Rapor 1898, d'après lesquelles Aguila nævia niche ou à niché dans les forêts de la Reine et de Rangival (Meuse), du Grand Cheneau (Meurthe) il serait même sédentaire ! —, au bois des Essarts entre Noyelle et Favières (Somme), dans la forêt de Laucosme (Indre) [rappelées par Eroc, I, p. 90, et van Havas, III D, p. 228].

Source : MNHN. Paris

M. JOUARD SUR LES & AIGLES CRIARDS ) DE FRANCE 205

entre les fentes d'un rocher (rochers de Mont-Basin, au pied de Nivolet)' Tout ce qui a trait à l'aire elle-même, à la taille et à la coloration des œufs, aux poussins, correspond assez bien à ce que nous savons de la nidification d'Aguila p. pomarina (ef. Heix- roru, XVI, pp. 25-26), mais il y a désaccord entre les dires de Bay selon quoi l' « Aigle criard » construirait son aire « dans une crevasse de rocher ou sur les branches des plus épais buissons qui eroissent entre les fentes, très rarement sur les arbres, même les plus élevés » et élèverait deux jeunes, et les données des auteurs qui, ayant observé maintes fois Aqguila p. pomarina sur ses terri- toires allemands et polonais, sont d'accord pour affirmer qu'il niche toujours sur les arbres et n'élève guère qu'un de ses pous- sins.…

Taxera-t-on Baïrziy de mauvaise foi ou, plus simplement, de fantaisie ? Le passé ae cet ornithologiste de qualité nous interdit l'une et l’autre imputation. Alors ? s'est-il trompé d'Espèce ? Et si oui, quel autre « Aigle » at-il pris pour l'Aïgle criard ?

Cowpaxyo [XVII pp. 109-110] écrit, pour le département des Pyrénées-Orientales :

« 3. Aigle eriard, Falco nœvius Linx. ; en catalan Aliga cri-cri.

Cet oiseau est fort commun dans le département ; il habite les hautes régions de nos montagnes. Les Albères, Prats-de-Mollo, Montalba, la Font-de Comps, le Capeir sont ses lieux de prédilec- tion. Cet Aigle, quoique d'une assez forte taille, n'a pas le courage ni la hardiesse des précédentes espèces ; cependant, il se jette sur les basses-cours des maisons de campagne isolées, et enlève les poules et les pigeons ; mais le cri très aigu qu'il répète souvent quand il chasse, donne l'éveil aux métayers, qui le mettent en fuite en criant et faisant du tapage. Il fait son aire sur les arbres les plus élevés de nos forêts, ou dans les trous des rochers hors de portée de l'Homme. J'ai nourri des Aiglons de cette espèce. Ils étaient dans un grand appartement ; et, lorsqu'ils furent assez forts, ils attaquaient violemment les animaux vivants qu’on leur donnait ; les chats étaient de suite dévorés. Après les avoir terrassés, ils débutaient par leur enlever les yeux ; leur ouvraient le ventre ; en retiraient le foie, qui était le premier viscère dévoré. Je les ai vus se disputer ce morceau, qui doit être friand pour eux. Je mis un Catharte-Alimoche, déjà fort, puisqu'il était âgé de 5 mois, dans le même appartement des Aigles ; il ne fut pas respecté. Quel fut

Source : MNHN. Paris

206 ALAUDA. VII, 2, 1936.

mon étonnement, le lendemain, de ne voir épars, sur le plancher, que des os et les plumes de cet animal ! »

Or, s’il est certain qu'avec ComPanyo nous avons affaire à quel- qu'un de moins avisé, et moins sérieux que BaiLLY (son ouvrage abonde en erreurs et en introductions indues d'Espèces étonnantes dans la faune des Pyrénées-Orientales !), si nous sommes immédia- tement en droit, en l'occurrence, de « tiquer » sur la qualification de «fort commun » que ledit Companyo attribue dès la première ligne à l'« Aigle criard », il ne nous est pas permis, devant son récit d'élevage d’Aiglons, de dire : « Cet homme a menti... ». encore seule nous reste la ressource de considérer qu'il a confondu... Mais avec quoi ?

Lacroix [XVIIT, p. 19] écrit, pour les Pyrénées françaises et les régions limitrophes :

«7. Aigle eriard Aquila nævia (Briss.).

Sédentaire et de passage dans notre département. En été, il habite les grandes forêts de sapins et de hôtres de nos Pyrénées ; en hiver, il descend dans la plaine et arrive même dans les environs de Toulouse.

R. Niche presque régulièrement (ceci concerne la Haute-Garonne).

Aupe. De passage accidentel ...... TR ne niche pas. AriÈèGe. Sédentaire et de passage sur

les hauts sommets .............. R Niche régulièrement. Héraurr. De passage en hiver ..... AR Ne niche pas.

Haures-Pyrréxées. Sédentaire dans les grandes forêts des parties éle-

vées PC Niche régulièrement Tarn. De passage tout à fait acci-

HÉNDELR PRES et Men A UTIERENeHIChESEeS, TaRN-ET-GaroNxE. De passage tout

à fait accidentel. .......... .... TTT R Ne niche pas. PyYRÉNÉES-OrtENTALES. Sédentaire

sur les hauts sommets des Pyré- ES RUES PÉNNNEE PL EEE CRE RE: C Niche régulièrement ! ».

Sans que rien ici ne vaille, au point de vue « vécu », les précisions de BaïLLy sur l'aire qu'il a surveillée en Savoie, ou même la relation,

4. J'ai transerit ce texte de Lacroix, comme le texte de Couranvo, qui précède, tels que me les a obligeamment communiqués notre collègue le Comte pe Boxer DE Pacuerers.

Source : MNHN. Paris

M. JOUARD SUR LES « AIGLES CRIARDS » DE FRANCE 207

par Compaxvo, du comportement de ses aiglons captifs, et bien que Lacrorx ne soit pas non plus un auteur sans reproches, com- ment faire fi d’un texte aussi détaillé !

Après avoir écrit, dans son Catalogue de 1911 [XIX, p. 187] « 13. Aigle eriard (Aquila nævia Geuin). R. 4: De passage plus ou moins régulier ; niche parfois», Lavaupen, en 1920, annotait en ces termes un exemplaire de ce Catalogue qu'il envoyait au Dr Bureau: «Il s’agit ici de la grande forme d’Aigle criard Aquila maculata clanga, tel qu'on devrait l'appeler. La petite forme Aquila pomarina n’a jamais été constatée en Dauphiné. J'en possède un spécimen tué dans l’Ain en décembre 1918. »

C

Quels sont maintenant les examens critiques auxquels ont donné lieu les textes ci-dessus ?

Abstraction faite du mauvais papier d'Eroc [I], je ne vois que ceux de van Havre [II, a)], de Lavaunex et Hem pe Barsac [IV], de Mayarn [XX]. Or vax Havrr, après des considérations généraes sur la nomenclature des Aigles criards et les confusions qu'elles expriment, puis l'indication des caractéristiques morpho- logiques et de la distribution géographique normale de ces Oiseaux, se limite à l’étude des captures belges. Passons aux suivants !

Lavaupex et Heim pe Bazsac [IV, pp. 84, note infrapaginale, 85-86] ont accepté en ces termes le fait (!) de la nidification de l « Aigle criard « chez nous : « Sa nidification parait sporadique. Elle a été constatée avec certitude dans les Pyrénées-Orientales dans les Alpes.., et peut-être dans les Vosges », en spécifiant qu'ils rapportaient ces soi-disant nidifications à l'Aigle criard proprement dit, ou Grand Aigle criard, Aquila clanga Pazras, lequel passe « pour ainsi dire régulièrement dans le Midi de la France », tandis que, ajoutaient-ils, « nous n’avons connaissance d'aucun spécimen » de l’Aigle pomarin, ou Petit Aigle criard, Aquila p. pomarina Breum (dans leur langage Aquila clanga pomarina ?) « capturé

1. Rare.

2, Ces auteurs préféraient alors considérer les deux formes d'« Aigles criaris », si voisines à tant d'égards, comme des Sous-Espèces, Races géographiques, d'une même Espèce, ou « Rassenkreis », alors qu'il est aujourd'hui admis qu'on les doit considérer comme des Espèces différentes. Qu'on ne se trompe pas sur la note de

Source : MNHN. Paris

208 ALAUNA, VII, 2, 1936.

authentiquement en France » 1 Et LavauDEN profitait de l'occa- sion pour s'expliquer sur son identification erronée de 1920 : « L'un de nous possède dans sa collection un Aigle criard, tué à Montluel (Aïn), qui est à rapporter à A. clanga, mais dont une aile présente le caractère d'A. pomarina ».

MayauD, dans la partie critique de son Znventaire des Oiseaux de France [XX, a, p. 180], sous paragraphe Aquila pomarina Pomarina, se contente d'entériner les conclusions précédentes de LavauDex et Her DE Bazsac sur le manque de toute certitude concernant la venue, en France, d’Aguila p. pomarina. 11 appa- rait qu'il ÿ a toujours eu confusion avec Aquila clanga PAiLAs sensu Harrerr, 1922, ou bien erreur sur la provenance des sujets ») ; de déclarer, quant à ce dernier Oiseau : « La nidification d'A. clanga PazLas est considérée par L. Lavaunex et H. Heim pe Bausac Gi. PF. 0., 1925, p. 85) comme sûre « dans les Pyrénées-Orientales » sur le rapport de Companyo et de Lacroix, dont les allégations doivent être rejetées comme insuffisamment établies ; eb aussi « dans les Alpes », sur la foi de Baizuy et de L. LAVAUDEN, auteurs sérieux : la confirmation de ces données semble néanmoins bien désirable, en dépit des précisions de BarzLy (Orn. de la Suvoie, I, p. 96-101) » ; et d’opposer à une récente note du Dr Rocnox-Duvr- GNEAUD, sur laquelle nous allons revenir, une suggestion et un fait que nous reprendrons aussi.

.… Restent, avec les données belges et suisses, les témoignages formels de Baïizy, de Comranvo, et ce que le D' Rocmon-Duvi- GNEAUD nous a dit des Aigles des Causses et des Pyrénées.

Kieixscumibr (XXI, p. 24] cet ornitholugiste aflirme la vraisemblance d'une origine <ommune des deux formes d’\igles criards, et, pour cette raison, les réunit dans son « Formenkreïs » Praedator Naevianus ! À | ncontre des « Rassenkreise » de Rexscn, les « Formenkreise » de Kueinscumir n'ont rien à voir avec l'Espèce telle que nous la <oncevons ordinairement, c’est-à-dire avec l’Espèce actuelle, Au reste, Kueinscampr s'explique lui-même sur la chose quand 11 ajoute: « Der Systematiker mag sich wei- geu beide Adler als Subspecies einer Species anzuschen » !

1. Deux aus plus tôt [XXIT p. 254, note 1]. Lavauvex avait déjà spécifié : « Toutes les recherches que nous avons faites, dans toutes les collections et 1lans tous les musées de France que nous avons visités, et ils sont nombreux, ne nous ont jimais montré que des Aguila clanga, au sens adopté aujourd'hui par Harrerr… Nous nous trouvons d'accord sur ce point avec notre maître et ami le Dr Bureau »,rectifiant ainsi l'identification erronée qu’exprimait son annotation manuscrite de 1920 (voir plus haut)

Source : MNHN. Paris

M. JOUARD SUR LES ( AIGLES CRIARDS » DE FRANCE 209

D

Le « fait nouveau », qui m'a incité à revoir non sans peines | toute la question, c’est l'observation, produite à nouveau par le Dr Rocnon-DuvieneauD, d'un Aigle d'aspect Aquila clanga dans les Pyrénées ! Et c'est à son occasion qu'il va nous falloir reprendre les textes précédents, non plus cette fois dans un ordre chronolo- gique, mais par régions, et, si possible, les éclairer par d’autres textes et avis :

10 Alpes françaises :

Si LAvaUDEN n'était venu, avec son Catalogue de 1911, puis son annotation de 1920, enfin son article de 1925 en collaboration avec Hein DE Barsac, répéter qu’un Aigle criard par lui rattaché à Aquila clanga nichait « parfois » dans le Dauphiné, nous en serions restés, sur les Alpes françaises, au vieux texte de BaiLLy, à peine confirmé par les auteurs suisses. Mais LAVAUDEN ne s'embar- quait pas à la légère ! Mais LavauDEn, grand chasseur autant que bon naturaliste, « faisait » du «terrain », et connaissait les Rapaces | Si privés que nous soyons de ne plus pouvoir lui demander : « De- meurez-vous fidèle à vos écrits antérieurs ? », et obtenir de lui une réponse qui, par les précisions qu’il ne manquerait pas d'y joindre, nous satisferait, dans un sens ou dans l’autre, nous ne pouvons pas rejeter d'un trait de plume ses aflirmations d'il y a quinze ans. Reste à les expliquer. si possible !

20 Pyrénées françaises :

Nous avons vu que la qualité des auteurs français du siècle dernier qui donnèrent l’ « Aigle criard » (lequel ?) pour nicheur dans les Pyrénées laissait autrement à désirer, que, néanmoins, leurs textes comportaient l'énoncé de faits qui valaient aussi qu'on s'y arrêtât. Peut-être même n'aurait-on pas songé à mettre en doute le bien-fondé de leurs identifications si, à leur suite, les ornitholo- gistes visiteurs des Pyrénées avaient tenu le même langage. Or...

Dépérer [XXII] fait bien figurer « Aguila nævia » dans sa liste des Oiseaux sédentaires de la zone montagneuse inférieure {moins de 1.500 m. sur mer) des Pyrénées-Orientales ;

Saunpers [XXIV, p. 383] écrit, certes :

«107. Aquila clanga, Parz. The Spotted Eagle is tolerably common throughout the wooded mountains ; in Navarre I had

14

Source : MNHN. Paris

210 ALAUDA. VI. 2. 1936.

several opportunities of observing it, but as I did non carry a gun in Spain, [ could not obtain specimens » :

mais déjà MreGEmarQuE [XXV, pp. 78-79] (qui réunit sous le titre d'Aigle tacheté ou criard F « Aquila nævia » de BriSsoN et le Clanga de ParLas) rectifie : « Quoi qu'il en soit, cet Aigle, d’après moi, ne serait que de passage accidentel dans notre région, soit qu'il y parvienne du versant espagnol, soit qu'il y passe à l'occasion de ses migrations » 1;

et ni Backnouse [XXVI], ni CLarke [XXVII], ni Wazus [XXVIIT] ni Wirnerey [XXIX a) et b)],ni Ticenursr et Wuisr- LER [XXX], ni Wuisrcer et Harrison [XXXI] ne citent le moindre « Aguila nœvia » pour les Pyrénées et l'Espagne voisine, pas plus, au demeurant, que ne l'avait signalé Locne [XXXI1]...

Autrement dit, et sauf défaut d'information de mon fait ?, il faut attendre jusqu'aux notes de vacances dernières du D' Rocnon- DuviGxeaun pour que resurgisse à nos yeux étonnés le spectre, si j'ose dire, de Aigle criard » des Pyrénées.

39 Ravins des Grands Causses :

Là, un seul témoin, mais de poids : le D' Rocnon-Duvieneaun [I], que Mavaun ne pourra contredire que sur un point : celui de la présence, au moins récente, dans la région (Causse noir), du Cir-

caëte Jean-le-Blanc Cireaëtus ferox [XX, c), p. 227]...

IV. HYPOTHÈSES EXPLICATIVES.

tous deux OMPANYO,

Six textes, que j'emprunte à WaLus, à WIiTHERB déjà cités, et à notre collègue OLrvtER, d'une part ; Lacroix et DEpérer, tous trois également cités, d'autre part ; me suggèrent une explication :

Sous le $ Aquila adalberti L. Brenm % de Wazuis [XXVIII, p. 82] nous pouvons lire :

1. D'aucuns s’étonneront peut-être de me voir citer Miécemarour. Le fait est que son livre d'ailleurs émaillé d’anecdotes, voire de plaisanteries, d'un intérêt douteux n'est pas exempt d'erreurs. Mais, en chasseur-naturaliste passionné qu'il était, M MARQUE a tiré déniché d'innombrables Rapaces et ne les connaissait pas mal du tout, de même qu'il ne connaissait pas mal plusieurs autres espèces montagnardes.

2. J'ai limité mes recherches aux textes que j'avais immédiatement sous la main. Il reste possible qu'en examinant une à une les pages des nombreux auteurs qui trai tèrent de l’avifaune des Pyrénées [CF XX et XXXIII] on retrouve trace de l'Aigle criard, Cela changeraît-il rien à mes essais d'explications, et À mes conclusions ?

3. 14 est Aquila heliaca adal berti L. Breux !

Source : MNHN. Paris

M. JOUARD SUR LES « AIGLES CRIARDS » DE FRANCE 211

« Determining the species of an Eagle on the wing is ticklish work, and the field-naturalist’s heart warms towards any bird that is at the pains to wear distinctive plumage.

Twice we saw a dark-coloured Eagle splashed with withe : one in the Valle de Ara, whilst following up fresh ibextracks among the cliffs, one of these pied Eagles flapped past and was hailed as an « Imperial » by Passer, The other occasion I have already enlarged upon. This bird was many miles on the French side of the frontier. There was a dump-bell-shaped white patch on the underside of each wing, the rump of root of the tail showed a large expanse of white, whilst the shoulder and fore-edge of the wings were Splashed. Our guides said the « Imperial » bred upon the Pic Rouge de Pailla, just inside the French fontier. »

À propos des Aigles royaux de l'Espagne, dont il a examiné divers spécimens de collection et qu'il rattache à la race LomeyerèSeverr- zow, décrite des Iles Baléares et d'Algérie 1, Wirmerry [XXIX b), P. 636] remarque :

«AI these examples clearly belong to the dark and dull-coloured form with the feathers of the crown and nape brown with buff tips and not bright tawny. »

Après avoir traité spécialement de l’Aigle royal, ou Aigle fauve, Aquila c. chrysaetos, de l’Aigle impérial espagnol Aquila heliaca adalberti, de l'Aigle à queue barrée, ou de Bonelli, Hieraaëtus VE fasciatus, de l'Aïgle botté Hieraaëtus pennatns, Ouivien [XXXV, pp. 662-664] termine ainsi le paragraphe qu'il consacre à cette dernière espèce :

«Enfin, le 7 septembre 1930, nous trouvant à Luchon, dans le Pare des Quinconces, notre attention fut attirée par des cr inconnus de Rapaces ; regardant en l'air nous aperçfimes deux Aigles de taille moyenne et à face inférieure foncée traversant la vallée. S'agissait-il de jeunes Oiseaux de Hieraaëins fasciatus (en raison de leur taille, ce n'étaient ni des Aigles fauves, ni des Aigles bottés), ou au contraire d’une autre espèce ? C’est une ques- tion à laquelle nous n’avons pu répondre. »

1. D'après Kieke Swanx [XXXIV] le nom d'Aomeyeri de Severrzow s'applique au même Oiseau que le nom d'occidentalis de Breux, et, en vertu de la loi de priorité 1889 contre 1883), tombe en synonymie,

Source : MNHN. Paris

212 ALAUDA. vu. 2, 1936.

De Hieraaëtus fasciatus qui, certainement, habite d’une façon normale certaines régions des Pyrénées, et que SAUNDERS, dans le travail il nous parlait d'Aquila elanga, n’a point cité, Cow- ranyo et Lacroix écrivent

le premier [XVII, p. 2] : « Nous n'avons jamais observé cet Aigle dans notre département ».

le second [XVIII] :

«8. Aigle bonelli, Aguila bonellii La Marnona ex TE.

L'Aigle Bonelli, appelé aussi Aigle à queue barrée, est de passage en automne et au printemps dans notre département ; il suit, de préférence, les coteaux ; on rencontre rarement des sujets adultes. Un jeune mâle, qui fait partie de ma collection, fut capturé le 15 octobre 1870, près Portet (10 kilomètres de Toulouse). PC. Niche accidentellement (ceci concerne la Haute-Garonne).

Aune. Tout à fait accidentel ........... TR Ne niche pas. Gers. De passage non régulier et isolément TTR Ne niche pas. Héraurr. De passage régulier en automne et

NN EME EE ET ee AR Ne niche pas. Haures-Pyrénées. De passage non régulier

et de loin en loin Tanx-Er-GaRONNE. De passage tout à

accidentel ete Pyrénées-OnIENTALES. De pa:

mais toujours isolément

TR Ne niche pas.

TTR Ne niche pas.

ge régulier,

AR Ne niche pas. »

Quant à Dérérer [XXI], il le cite d'abord pour la zone mon- tagneuse inférieure, puis le range dans la catégorie des oiseaux accidentels des Pyrénées-Orientales…

L'explication que me suggèrent ces textes ? Les « tenants » d'un Aigle eriard dans les Pyrénées n'auraient-ils pas pris pour « Aquila nœvia » (vel clanga) des Hieraaëtus fasciatus sombrement colorés 1, ou jeunes, comme tels autres y prirent pour des Aquila

4. On sait combik leur coloration !

n les Aigles sont variables, individuellement, pour ce qui est de n'est-il pas à présumer que Hieraaërus fasciatus se présente par- fois sous une « phase nègre » comme celle de son cousin l'Aigle botié Hieraaëtus pen- natus si bien étudiée naguère par le D: Bureau [(XXXVI] ? - Lesjeunes .fasciatus sont plus foncés que les adultes, et leurs faces inférieures rousses peuvent très bien paraître noires, vues de loin sur fond de ciel bleu ou gris !

Source : MNHN. Paris

M. JOUARD SUR LES AIGLES CRIARDS » DE FRANCE 213

heliaca adalberti des Aquila chrysaetos tachés de blanc sur fond

noirâtre ? ?

# id *

Je me suis adressé au collaborateur de LaAvauDEN en 1925. La substance de sa réponse tient en ces mots :

« Manquant de renseignements personnels sur les faits de nidi- fication admis par LAvVAUDEN, je m'en suis remis à lui. A tort ? En tout cas je suis très sceptique. Tout ce qui, dans notre article, n'a pas trait à l'Oiseau de la collection d'HAMoNvILLE et aux carac- tères différentiels des deux espèces d’Aigles dits criards reste à vérifier

* * *

J'ai donc prié le D' Rocnon-DuvieneauD d'envisager un à un les divers cas de confusions d'Espèces possibles. D'où ce dialogue, consigné dans plusieurs lettres :

Aigle botté Hieraaëtus penratus, variété sombre, ou « phase nègre » pour reprendre la terminologie du D' Bureau ?

Non ! « Mon » Aigle noir et tacheté est bien plus grand que l’Aigle botté !

Aigle royal Aquila chrysaetos, jeune à plumage particulière ment foncé et taché de blanchâtre ?

Non ! « Mon » Aigle est nettement plus petit ! Aigle impérial Aquila heliaca adalberti adulte ? Non ! « Mon » Aigle est encore plus petit ! D'ailleurs, même

si j’admettais de rapporter à l’Aigle impérial mon Aigle noir et

tacheté des Pyrénées ce que je n’admets pas ! resterait celui

des Causses pour lequel cette assimilation ne serait même pas à

envisager.

Aigle à queue barrée, ou de Bonelli, Hieraaëtus fasciatus, qui est bien, lui, de la taille moyenne de « vos » Aigles ; dont les jeunes peuvent apparaître, à distance et sous certains angles ou lumières,

1. Je ne parle pas pour Ouvir, qui, lui, semble parfaitement distinguer les deux espèces in natura | Mais je ne serais pas étonné que, par exemple, les deux Aigles décrits par Wauuis dans le $ de son travail cité plus haut eussent été des Aguila chry- saetos |

2. A l'encontre de l’Aigle royal qui, en vieillissant, passe souvent du plus foncé au plus sombre, l’Aigle impérial, d’une nuance générale claire {d'un isabelle roussâtre chez, la race adalberti l) en premier plumage, foncit en vicillissant jusqu'à devenir à l'exception de ses épaulettes blanches et de sa nuque jaune-roussâtre presque noir.

Source : MNHN. Paris

2414 ALAUDA. VII, 2. 1936.

tachetés de blanchâtre sur fond noirâtre ; dont il existe peut-être, au surplus, une variété mélanique non encore décrite ; dont la voix rappellerait celle des Aigles criards 1; à la férocité duquel corres- pondrait bien la scène de carnage narrée par CompanYo ; qui pond deux ou trois œufs dans une aire située tantôt dans les rochers et tantôt sur les arbres (plus rarement !) ; que Sauxners et autres n'ont pas vu, ou méconnurent, dans les Pyrénées où‘il vit cependant : dont il ne serait pas impossible qu'il habitât pareillement les Causses et même qu'il montât, par delà le Dauphiné, jusqu'en Savoie (où nichent plusieurs autres Espèces méridionales) ?

Il me serait tout à fait indifférent que « mes » Aigles fussent des Bonelli « nègres ». Mais d’abord, y a-t-il des Bonelli « nègres » ? Noirs comme des Taupes, avec de belles taches blanches sur et sous les ailes, une queue moyenne, un vol de planeur plutôt mou, et piaulant perpétuellement

Et croyez-vous que les gens du Tarn inventent la nidification

© de leur « Aclo sarpatiéro » sur les Pins ?

Sans doute on voudrait revoir tout cela, mais ce n'est pas com- mode, parce qu'il y a certainement moins d'Aigles qu'autrefois. 11 faudrait avoir le temps d'aller en mai et juin passer deux ou trois semaines dans le détroit des gorges du Tarn, dans les ravins boisés qui se jettent dans ces gorges et celles de la Jonte…. C'est là, vrai- semblablement, qu'on aurait le plus de chances de rencontrer l'Oiseau. Les explorations y sont plus faciles que dans les Pyrénées,

moins fatigantes

plus limitée:

En attendant, puisqu'on a effectivement trouvé des Aguila clanga en Camargue, pourquoi ne pourraient-ils pas venir jusque dans les gorges du Tarn et les Pyrénées ? Je crains que vous n'alliez contre les faits...

V. VERS UNE CONCLUSION...

Et c’est cette dernière phrase du D' Rocnon-DuviGnEauD qui, tout naturellement, m'amènera à ma conclusion. Une conclusion provisoire, hélas ! en trois parties :

1. D'après ExGermanx [XXXV; p, 224] : « Auch die Stimme des Habichtsadler erinnert weit mehr an die des Habichts als des Steinadlers. Er lässt recht oft ein laut kie, kie, ki, ki, ki erschallen »

Source : MNHN. Paris

M. JOUARD SUR LES & AIGLES CRIARDS à DE FRANCE 2415

Pourquoi est-il improbable qu'un « Aigle criard » niche, ne fût-ce que localement, dans les Alpes, les Pyrénées, les Causses ?

S'il en nichaïit un, serait-ce Aqguila pomarina plutôt qu'Aquila clanga, ou inversement ?

En attendant la preuve que, seule, constituerait la récolte sur ses places de ponte d'un des Aigles mystérieux de BaïLzy, de Com- PANYO, de Lacroix, de SaunDERs, du Dr RocHon-DuvIGNEAUD, comment signaler, dans une faune de France, les Aigles criards ?

A. Pour expliquer que tant d'auteurs du siècle dernier aient donné « Aquila nœvia » pour nicheur sous nos latitudes:et qu'au- jourd’hui le Dr Rochon-DuviGneaup seul nous en reparle en tant que tel, on pourrait être tenté de dire qu’à l'instar de tant d’autres Espèces cet Oiseau s’est : d’une part retiré en direction Nord-Est sur un secteur toujours plus restreint (la Grande Outarde Olis tarda, par exemple, ne nichait-elle pas communément en France autre- fois ?) ; d'autre part raréfié où, par exception, il se maintenait encore à l’état de «taches » (comme se maintient à l’état de taches, dans quelques (?) coins de la Meuse et des Vosges, le Gobe-mouches à collier Muscicapa c. collaris, partout éteint, comme nicheur (?), dans le reste de la France).

Mais pour que cette thèse fût assise, il faudrait que, dans les pays situés immédiatement à l'Est du nôtre, on eût assisté à cette régression et à cette raréfaction. Et ce n’est pas le cas ! Ainsi, en Allemagne, on n’a jamais, que je sache, signalé la présence prin- tanière ou estivale d'Aguila p. pomarina (la plus occidentale, ne l’oublions pas, des deux Espèces naguère plus ou moins confon- dues sous le nom d’Aguila nœvia) à l'Ouest de Hanovre, et encore sa présence dans le Hanovre a-t-elle été mise en doute par divers auteurs !

Si un Aigle criard était effectivement nicheur chez nous, il fau- drait done admettre : une solution de continuité énorme entre ses deux aires de distribution ; 20 que les deux « branches » géo- graphiques de l'Espèce ont choisi, pour y vivre, des biotopes abso- lument différents : l’une les bords boisés des fleuves, des lacs et des prairies humides ; l'autre les forêts montagnardes, fussent- elles les plus sèches. Et c'est cette ségrégation double, géographique et écologique, d'une Espèce qui, malgré des « précédents » (le Venturon montagnard Carduelis citrinella, par exemple, peuple, dans les Alpes et les Pyrénées, les forêts subalpines, tandis qu'en

Source : MNHN. Paris

216 ALAUDA. Vi. 2, 1936.

Corse il vit aussi dans le maquis sans arbres au niveau de la mer), justifie un doute a priori.

B. A consulter la carte de l'Europe on serait tenté de dire, dans l'hypothèse d’un Aigle criard nicheur chez nous : c’est plutôt l'Aigle pomarin ! Puisqu’il habite déjà l'Allemagne (et done que la troublante solution de continuité serait réduite) !

Mais : {0 on sait aujourd'hui que cet Oiseau migre en direction générale Sud-Est; 20 on n’a pour ainsi dire (voir plus loin !) aucune pièce de collection ou de musée prouvant sa présence chez nous (et s'il y avait niché aussi communément que le voulaient les an- ciens auteurs, comment ce défaut radical serait-il possible ?) 30 il apparaît également accidentel dans les collections belges et suisses : 40 la plupart des descriptions portent sur un Oiseau très foncé, p'us ou moins tacheté de blanc, de taille assez forte presque l’envergure d’un Perenoptère », précise le D'Rocnex-DuvI@NEAuD), qui rappelle bien plus Aquila clanga qu'Aquila p. pomarina ?.

Autrement dit : Admettrait-on qu'un Aigle criard habitât loc lement chez nous (Alpes, Pyrénées, Causses ?), qu'il conviendrait de le considérer plutôt comme Aquila clanga que comme À. p. pomarin«.

C. Une seule certitude : c’est qu'Aquila clanga passe, chez nous, pas trop rarement, surtout dans le tiers méridional de notre pays. D’assez nombreux spécimens naturalisés en témoignent.

Une probabilité : c’est qu'il arrive à Aquila p. pomarina de s'éga- rer chez nous. Si, voici treize et onze ans, LAVAUDEN s'exprimait comme nous l'avons vu, il n’en reste pas moins qu'en Belgique, en Suisse, et en Italie (surtout l), l'Espèce a été sûrement constatée et récoltée. La défunte revue internationale Orxis porte d'ail- leurs une référence qui pourrait bien avoir échappé au DT Bureau et à Lavaupex (?), une référence dont le bien-fondé n'aurait done pas été nié par un examen ultérieur rectificatif de l'Espèce d'Oiseau qu'elle concerne : la référence d’un ; ad. récolté en octobre 1887 dans la région de Nice et qui figure (ou figura) dans la collection Piecui [XXXVII].

1. Le Dr Rocnox-Duvixeaub m'a écrit encore, en date du 30 novembre 1935 : « Mon Aigle des Pyrénées ressemble essentiellement au Grand Aigle criard de Keeinsemr (Die Raubvügel der Heïmat, planche 24), et particulièrement au « ganz dunkler Stüch mit weissen Schuiterflecken » qu'a déjà décrit Harrerr ».

Source : MNHN. Paris

M. JOUARO SUR LES GAIGLES CRIARDS » DE FRANCE 217

Une possibilité : c'est que certains couples d’Aquila clanga, à l'issue d’un de leurs déplacements migratoires, restent nicher chez nous, ou qu'il existe, dans certaines régions privilégiées de notre territoire continental, des « taches » Aquila clanga aujourd'hui (et depuis des siècles, sinon des millénaires !) non seulement sépa- rées par des milliers de kilomètres des populations orientales de l'Espèce mais encore dont l « évolution » s’est poursuivie dans un autre sens (puisque leurs biotopes ne correspondent plus). Mais, encore une fois, de cette possibilité à l'introduction d’Aquila clanga parmi les Oiseaux nicheurs de France reste l'immense marge de la preuve nécessaire, que seule peut combler la récolte, de mai à juillet, d’un Oiseau « cantonné » et du contenu de son aire. D'autant que, sans aucun doute cette fois, la plupart des auteurs ont attribué à la pseudo-Espèce « Aquila nœvia » tantôt des Aigles royaux de petite taille et marqués de clair sur fond sombre, tantôt de vieux Aigles impériaux très «noir ét blanc »,tantôt des Aigles bottés « nègres » (11), tantôt le plus souvent ? des spécimens foncés d’Aigle à queue barrée.

Décembre 1935-janvier 1996.

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Source : MNHN. Paris

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6) Essai d’une bibliographie ornithologique des Pyrénées françaises.

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6) Coup d'œil sur l’avifaune des Causses. Alauda, 1934, pp. 222-259. XXI. Kueiseuminr (D O.) : Die Rauboôgel der Heimat : Leipzig, 1934. XXII. Lavaunex (L.) : Sur les Oiseaux des Alpes-Maritimes (en réponse

à la liste du Commandant Cazior). Revue française d'Ornithologie, 1924, pp. 250-255.

XXIIL. Dévéner (Ch.) : Caractères de la faune ornithologique des Pyrénées- Orientales et des particularités qu'elle présente. Bulletin de la So- ciété agricole, scientifique et litéraire des Pyrénées-Orientales ; Per- pignan, 1881 [1882], XXV, pp. 78-102.

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1

Source : MNHN. Paris

M. JOUARD SUR LES ( AIGLES CRIARDS } DE FRANCE 219

XXVIIL Wazus (H. M.) : Notes on the Birds of the central Pyrenees. The Ibis, 1895, pp. 64-85.

XXIX. Wirnersy (H. F.) : a) Results of a collecting trip in the cantabrian mountains, Northern Spain. The Ibis, 1925, pp. 323-345.

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5) On the summer Avifauna of the Pyrénées-Orientales. The Ibis,

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XXXIIL Paizveners (Comte pe Bonner pe) : À propos de la bibliographie ornithologique des Pyrénées françaises. Alauda, 1934, p. 562.

XXXIV. Kinke Swanx : dansle Bulletin British Ornithology Club, XLV, pp. 70 et 72.

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XXXVI. Bureau (Dr L.) : L'Aigle botté, Aquila pennata (uvre), d’après des observations recueillies dans l'Ouest de la France. Association française pour l'avancement des sciences, Congrès de Nantes, 1865.

XXXVIL. Excrzmanx : Die Raubvôgel Europas ; Berlin, 1928.

XXXVIIL Prcemr (C.) : Elenco Degli Uccelli conservati nella sua colle- zione ornitologica italiana al 29 Febbraio 1904 con notizie intorno alla distribuzione e nidificazione in Italia. Ornis, 190%, p. 386.

Source : MNHN. Paris

NOTES SUR QUELQUES ESPÈCES D'OISEAUX OBSERVÉES A LA STATION ORNITHOLOGIQUE DU PORT DE CHOISEUL-LA-VILLE PRÈS DE VERSOIX (LÉMAN)

par Robert Poncy.

C'est bien involontairement que Cuoiseur, le célèbre ministre de Louis XV, fut le créateur d’une station ornithologique ! Encou- ragé par VorraiRe, il décida de fonder à un kilomètre au Nord du village de Versoix une ville rivale de Genève, et, pour cela, construisit en 1767 une route destinée à relier la nouvelle ville avec Lyon, route partant d’un magnifique port les barques à voiles latines pourraient s’abriter et « le Roy pourrait aller se baigner dans le Léman sans sortir de France » 1.

Hélas ! la ville ne vit jamais le jour et il ne reste plus du fameux Port Choiseul que des ruines ; ce sont elles qui nous intéressent puisqu'elles servent aujourd'hui de Station ornithologique, c’est- à-dire de lieu de repos soit pour les Oiseaux migrateurs soit pour les Oiseaux séjournant dans les environs.

De larges maçonneries courant à fleur d’eau entre un millier de piquets en Chène d’un pied de diamètre, rongés par les vagues, forment un quadrilatère d'environ 200 mètres de côté avec angles saillants arrondis et dont l'entrée au levant est à l’abri des vents

1. Dict. géog. suisse, t. 6, p. 323.

Voici ce que dit Laranve dans son 7raité des Canaux de Navigation: « M. Râcle entrepreneur des travaux de Versoix est le premier qui ait établi sur le lac des barques marchandes ; il fit venir des charpentiers de Toulon pour faire une barque sur de bons principes (1778). »

D'après la Biogr. univers., t. 35, Léonard Râcle de Dijon (1736-1791), architecte de Voltaire à Ferney, recommandé à Choiseul, établit les plans du Port.

Source : MNHN. Paris

M. PONCY SUR LE PORT DE GHOISEUL-LA-VILLE 221

du Nord-Est et du Sud-Ouest !. L'intérieur du port, d'une profon- deur de 2 à 3 mètres, est tapissé d'Algues se trouvent suivant les saisons de nombreux Poissons et des Insectes ; lors des basses eaux il est bordé par une grève sur laquelle s’écoulent des sources et un canal provenant de la rivière la Versoix.

Ce port est situé entre deux centres ornithologiques importants : l'embouchure de la Versoix au Sud et les Gouilles de Mies au Nord, centres d’où les ornithologistes et les collectionneurs genevois Huser, Le CLerc, Junine, les De Saussure, NECKER, GOSSE, Mazcer, Lunez, les Faro, recevaient une partie de leurs spéci- mens.

La plupart des espèces d'Oiseaux se montrant au passage occasionnellement en ces lieux sont les mêmes que celles que l'on observe sur beaucoup d'autres points analogues du rivage léma- nique ; entre autres : Corvus corone L., Anthus spinoletta L Mota- cilla cinerea Tuxsr., Motacilla alba 1, Cinclus cinclus L., Hirundo rustica L., Delichon urbica L., Riparia riparia L., Alcedo atthis L., Nyroca ferina L., Nyroca fuligula L., Glaucionella clangula L., Mergus serrator L., Podiceps cristatus L., Podiceps nigricollis Breuw, Podiceps ruficollis PazLas, Tringa hypoleucos L., Larus canus L., Larus ridibundus L., Fulica atra L.

D'autres espèces nous ont fourni des notes intéressantes, que nous relevons ci-dessous :

Mergus merganser L. Harle bièvre. Cette belle espèce tend de plus en plus à se propager depuis l'adoption de la nouvelle loi sur la chasse lacustre. De temps à autre un couple aborde les pierres de l'enrochement ; il est probable que des tentatives de nidifica- tion ont été faites à proximité.

Un couple d'adultes : 21 avril 1935, 10 et 15 avril 1936 (en février 1935 un couple fut tué).

Phalacrocorax carbo L. Grand Cormoran. Cette espèce se montre presque chaque année par la pluie et les vents du S.-0.

Le 13 novembre 1895 7 individus jeunes et adultes s'étant posés sur les piquets furent presque tous tués !, En octobre 1897 2 adultes,

4. Ces constructions n'émergent pas toujours de la même quantité, car le niveau du lac Léman est soumis à des variations allant, suivant les années, d'un mètre au-des- sous de l'extrémité des piquets jusqu’à quatre-vingts centimètres au-dessus.

2 Sauferreur, 2 ou 3 sur les piquets même, puis 2 ou 3 autres parles chasseurs sur le lac.

Source : MNHN. Paris

222 ALAUDA, VI. 2, 1936.

de même. Noté encore { individu les 9 octobre 1901, 29 octobre 1905, 17 octobre 1926, et 5 individus le 12 octobre 1917.

Le 11 avril 1934, venant du large, je m'approchais en bateau d'un individu plongeant dans le port et survolé par une cinquan- taine de Mouettes rieuses. Sortant de l'eau, il se percha sur un piquet, puis, lorsqu'il me vit à une cinquantaine de mètres, prit son vol et alla se poser au large, toujours accompagné des Mouettes.

Philomachus pugnax L. Chevalier combattant. A l’époque la chasse était encore autorisée sur le lac, au mois de mai, un mâle de cette espèce, fort peu sauvage, fut observé sur la digue puis tiré. Il avait déjà les oreilles du plumage de noces.

Tringa totanus L. Chevalier gambette. Anciennement, le matin, avant le lever du soleil, les chasseurs tiraient dans ces pa- rages les diverses espèces de Chevaliers, mais je n'ai pas de préci- sions à ce sujet.

Le 10 avril 1936, je pus observer longuement 3 Gambettes cou- rant sur la digue et ayant parfois de l’eau jusqu'au ventre. Con- tinuellement pourchassés par les Rieuses ils finirent par s'en aller en répétant leur cri : Hlui-tu-tu.

Numenius phacopus L. Courlis corlieu. Le 15 avril 1936 un individu dort au sommet d’un des plus hauts blocs, et je peux l'ap- procher de très près. Un Milan noir Mileus migrans, qui vient ramas- ser un Poisson mort, réveille brusquement le Corlieu qui s'envole alors en criant : tiurlitututu.

Haematopus ostralegus. L. Huitrier pie. Cet Oiseau, qui se montre sur les gros blocs des bords du lac, de temps à autre, m'a été signalé le 27 septembre 1903.

Parmi tous les Oiseaux fréquentant ces lieux, les Laridés, et plus spécialement les Hirondelles de mer, ou Sternes, sont des plus inté- ressants. [Is passent la nuit sur les piquets puis, au lever du jour, partent à la chasse des Insectes ou des petits Poissons, allant au Sud jusqu'à Bellevue et remontant au Nord jusqu'à Coppet en sui- vant le bord. Vers le milieu du jour ils reviennent aux piquets sur lesquels ils font leur toilette et se reposent ?.

1 L'ornithologiste Le CLerc, qui chassait dans les environs de la Versoix, ne con- nut pas ce port, construit vingt ans après sa mort Par contre L.-A. Necker, qui chassait dans ces parages avec son oncle pr SaussuRE, captura à plusieurs reprises des Hirondelles de mer.

Source : MNHN. Paris

M. PONCY SUR LE PORT DE CHOISEUL-LA-VILLE 223

Chlidonias nigra L. Guifette noire. Aux deux passages, visi- teuse régulière de la digue, elle vient coucher. Parmi les der- nières observations, je note : 80 individus environ au coucher du soleil, le 30 avril 1933 ; 6 le 22 avril 1934 ; 20 le 12 mai 1935 ; 8 le 1er octobre 1933. Se pose aussi sur les bouées et les objets flot- tants ; je ne l'ai jamais vue sur l’eau.

Chlidonias leucoptera Temmincx. Guifette à ailes blanches. Se trouve quelquefois au printemps dans les vols de Chlidonias nigra, comme par exemple le 28 mai 1916.

Chlidonias leucopareia Temmincx. Guifette à moustaches. Plusieurs individus se sont montrés les 2 mai 1897 et 24 juin 1906.

Gelochelidon nilotica Guerin. Sterne hansel. Entre les 19 et 25 mai 1891, un individu adulte en plumage de noces fut capturé ; c'était en plein passage des Guifettes noires.

Hydroprogne caspia PaiLas. Sterne caspienne. La citation de Necker dans son ouvrage sur les Oiseaux de Genève (1823) est intéressante : « Enfin, un oiseau non moins rare s'est offert à moi une seule fois, l'Hirondelle de mer Tchegrava (Sterna caspia), nommée par Burron l'Hirondelle de la mer Caspienne. Cette es- pèce, qui n’avait encore jamais été vue aux environs de Genève n'a pas reparu dès lors. L'individu qui me fut apporté en avril 1812, au moment on venait de le tuer dans le port de Versoix, fait maintenant partie du Musée de Genève. C’est un beau mâle adulte en plumage de printemps qui se trouvait au milieu d'une troupe de Pierre-garins ; ce ne fut qu'après une poursuite de deux heures qu'on parvint à s’en rendre maître. Les chasseurs et les pêcheurs les plus âgés n'avaient jamais vu un oiseau semblable. Il y avait au même moment un autre oiseau de la même espèce et que je suppose être la femelle ; quoiqu'il reparût de temps en temps les jours suivants dans le port de Versoix, on ne put jamais par- venir à le tuer ».

Sterna dougalli MonraGu. Sterne de Dougall. [D'après G. Lu- NEL, dans ses Notes supplémentaires au Mémoire de L. A. NECKER (1863)]. Deux individus de cette belle espèce en livrée de noces furent tués en cet endroit en mai 1860 1.

1. 11 est probable que la Sterne naine, Séernula altifrons Pairas, se montre aussi dans ces parages, mais je ne possède aucune citation,

Source : MNHN. Paris

224 ALAUDA. vit, 2, 193

Sterna hirundo L. Sterne Pierre-Garin. Noté l'arrivée de cette espèce au port Choiseul : 10 avril 1904 1 couple ; 13 avril 1921 1 in- dividu ; 15 avril 1924 id. ; 14 avril 1933 2 couples ; 11 avril 1934 6 couples ; 16 avril 1935 1 couple ; 10 avril 1936 1 individu ?,

Après avoir chassé les Insectes (Phryganes) et les petits Pois- sons (Ablettes) le long du bas fond ou « beine » des bords du lac, elles viennent se reposer soit sur les piquets ou les blocs des digues, soit sur les bouées des filets de pèche ? ; elles se posent très rarement sur l’eau. De temps à autre le mâle vient offrir un petit Poisson à sa femelle en le déposant sur le bloc elle se trouve, comme je l'ai observé le 26 avril 1936. C’est l’coffrande » (voir fig. 2) 3.

Fic, 1, Avec un peu de patience le jeune observateur pourra bientôt observer l'offrande du mâle de Pierre-Garin à sa femelle.

Je suppose que, comme en Angleterre, les Oiseaux de cette espèce continuent à arriver ou à passer au printemps pendant plusieurs semaines, errant dans les ports ou le long des grèves ;

1. On voit souvent à leur arrivée des couples pêchant dans les ports des côtes du Léman : 20 avril 1917 1 couple, port de Nernier;15 avril 1933 1 couple, portde Nyon ; 30 avrit 1933 1 couple, port de Thonon ; 22 avril 1934 2 couples, au même endroit ; 16 avril 1935 4 couple, port de Morges.

2, Car qui dit « pêcheur » dit « het » et par conséquent bouées pour le repos et Poisson pour la nourriture; l'observateur se rend compte que pêcheurs, filets et bouées, Poissons et Pierre-garins font un tout.

3. Jai aussi observé un autre manège dans le port de Vernier, ainsi qu'à Thonon. Le mâle fait le tour du port en se précipitant dans l'eau avec violence, mais sans jamais ressortir avec quoi que ce soit au bec, Puis, tout à coup, les Poissons ayant été probablement rassemblés par ce manège, la femelle arrive, plonge et ressort avec un Poisson,

Source : MNHN. Paris

M. PONCY SUR LE PORT DE CHOISEUL-LA-VILLE 225

Croquis de Robert Prical.

Fig. 2. Le mâle va déposer le Poisson sur 1 qui le reçoit en criant : Xüroë

pierre, devant sa femelle kii-vât.. kit-vût.

Croquis de Robert Prical.

Fic.

Par son cri : Kriid.. kip-kip… kri signale à sa femelle trop confiante l'approcl

- kip-kip.. Je mâle e d'un intrus.

15

Source : MNHN. Paris

226 ALAUDA. VII. 2. 1936.

puis à partir du 15 mai d’autres arrivants se rendent directement sur les lieux de ponte de la côte de Savoie ?.

Larus argentatus Ponroprinan. Goéland argenté. NECkER, dans ses Notes ornithologiques ?, dit : « le 30 août 1816 on m'a apporté de Versoix un « Grisard ». Dimier l'avait vu depuis quel- ques jours donnant la chasse aux Mouettes ». Le terme de « Grisard » désigne les jeunes Goélands argentés qui se montrent à cette époque de l'année sur notre lac. Dans une collection de Versoix se trouvait un fort bel exemplaire adulte de cette espèce qui de- vient de plus en plus rare sur le Léman #.

Larus canus L. Goéland eendré. Se montre en hiver et au printemps avec les Mouettes rieuses dès que les eaux baissent et laissent émerger le sommet des bloes ou des piquets. Noté les derniers, 2 adultes et 2 immatures, le 10 avril et 1 adulte le 22 avril 1936.

Larus minutus L. Mouette pygmée. Se pose sur la grève ou sur le môle. Jeunes individus isolés les 2 décembre 1900, le 26 décembre 1908, et fin décembre 19.

Larus ridibundus L. Mouette rieuse. Se montre presque toute l’année en vols plus ou moins considérables ; elles fait toute Ja journée un bruit assourdissant, surtout au passage du printemps. Le 15 avril 1936, sur environ 400 individus je note au moins une vingtaine de jeunes à queue barrée et à capuchon complet.

Le 19 avril 1936, par temps magnifique après gel nocturne, les bulletins météorologiques signalent d’abondantes chutes de neige sur tout le parcours du Rhin; c'est probablement la cause pour laquelle environ 750 individus sont rassemblés au lever du soleil sur les piquets du port Choiseul. Lorsqu'ils s'envolent, leurs cris ne cessent pas et ils forment alors un nuage serré cachant le soleil.

Le 22 je n’en compte plus que 260, et le 26 une dizaine.

1, Pour tout ce qui concerne les mœurs des Hirondelles de mer, consulter le bel

ouvrage illustré de George et Anne Marpzes, Sea Terns or Sea Siwallows, London,

1934. 2. Publiées par R. Powcv, Bull. Soc. Zool. Genève, t. M, f. 8, 1916, p. 140.

J'ai capturé un « Grisard » dans une compagnie de 8 sujets groupés avec des

Guifettes noïres et des Rieuses devant le Port-Choiseul, le 5 septembre 1889.

Source : MNHN. Paris

M. PONCY SUR LE PORT DE CHOISEUL-LA-VILLE 227

Je trouve sur le mêle, parmi une douzaine de pelotes dégorgées par les Rieuses et composées d’ossements d’Ablettes (Alburnus lucidus L.) une pelote composée d’une vingtaine de fourreaux sablonneux de la larve d’un Phrygane, le Leptocerus aterrimus STEPH.

Mannscrit reçu à Alauda le 25 mai 1936.

Source : MNHN. Paris

NOTES SUR QUELQUES OISEAUX DU CHABLAIS

par Gérard BERTHET.

Depuis un certain nombre d'années, nous faisons dans le Haut- Chablais des séjours qui, pour être courts, ne nous ont pas moins permis de déterminer quelques espèces sédentaires, estivales ou de passage de la faune avienne de cette intéressante région.

Le Chablais se place au Sud du lac Léman ou plus exactement au Sud de la partie côtière comprise entre Yvoire et Saint-Gingolph. Il est limité à l'Ouest par le Genevois, à l'Est par la frontière suisse, au Sud par le Faucigny. Une vallée médiane le partage à peu près en deux, c’est la vallée de la Grande-Drance, qui se jette dans le lac de Genève aux environs de Thonon. Sur cette Grande- Drance, vient s'embrancher quantité d’autres vallées, au fond des- quelles coulent de Petites-Drances, la principale étant la vallée d'Abondance avec la Drance-d'Abondance.

Mes modestes observations ont été faites de part et d'autre de la Grande-Drance, principalement dans le haut cours de sa vallée, non loin de la frontière suisse, et en particulier sur le territoire des communes de Saint-Jean d'Aulph, Essert-Romand, la Côte d'Ar- broz, Montriond, Morzine, les Gets et Samoëns (partie Nord). Ces lignes pourraient done être une sorte de complément, sans prétention d’ailleurs, aux Notes ornithologiques concernant le département de la Haute-Savoie, de Robert Poxcy 1, notes qui nous ont semblé concerner la partie « basse » du Chablais et, en particulier, la côte lémanaise.

Nos séjours, comme nous l'avons dit, toujours assez courts, (45 jours, 3 semaines ou Î mois au maximum) se firent, sauf de rares exceptions, entre deux dates extrêmes : 15 août, 15 octobre.

1. Alauda, 1, 1933, pp. 27-32 ; 1, 1934, pp. 38-46 ; 2, 1935, pp. 170-166.

Source : MNHN. Paris

M. BERTHET SUR LE CHABLAIS 229

Aussi, quoique l'époque des nichées soit, en ces lieux, tardive, vu l'altitude 1, n'avons-nous pu faire que de rares observations sur la nidification des espèces, observations basées sur quelques nids et le plus souvent sur de jeunes individus venant de sortir du nid, se faisant nourrir, ete. Nous indiquerons la date de ces observa- tions. Pour les autres espèces, nous indiquerons, lorsqu'il y aura lieu, la probabilité de leur nidification.

Pour les espèces constituant la faune cynégétique du Haut- Chablais, nous ne donnerons que des dates sans préciser les com- munes sur les territoires desquelles elles pourraient être rencon- trées, ni aucun autre lieu que ce soit. Plusieurs d'entre elles consti- tuent en effet des gibiers recherchés et rares et ce serait donner une prime à certains chasseurs peu soucieux de l'extinction des espèces que d'indiquer d’une façon précise le lieu l’on trouverait ces gibiers, d'autant plus que, la plupart du temps, il s'agit d’es- pèces Strictement sédentaires. On voudra bien nous en excuser, Nous nous permettons de citer ici une phrase très vraie du regretté Professeur Louis LAvauDEx : « En matière de protection, le secret est la meilleure condition à observer. » ?

Ajoutons que la plus grande partie de ces notes a été rassemblée en 1934. Nous en avons ajouté quelques-unes, fruit de rares obser- vations durant un séjour de convalescence en août-septembre 1935.

L’altitude moyenne du Chablais n'est pas extrême. Cependant, dans le Haut-Chablais, 10 à 12 pointes dépassent l'altitude de 2.000 m. ; parmi elles, 3 ou 4 dépassent 2.200 m., le point culmi- nant étant les Hautforts qui atteignent 2.466 m.

Les villages dont il a été question plus haut, situés généralement au fond des vallées, quelquefois sur un versant, sont à des altitudes relativement élevées, soit entre 811 m. (Saint-Jean-d’Aulph) et 1.172 m. (les Gets). Ils sont reliés les uns aux autres par de très nombreux hameaux, quelquefois très importants, presque aussi importants que le village lui-même. é

Plus haut, ce sont les châlets d’alpage, étagés à deux, quelque- fois trois altitudes différentes, et qui sont occupés au printemps

1. Crest une affirmation générale à laquelle bien des faits parti contredire ! (Rédaction, H, J.).

2. Louis Lavaupex, La Faune cynégétique des Alpes françaises, conférence donrée aux élèves de l'Ecole Nationale des Eaux et Forêts, Annales de l'Ecole Nationale des Eaux et Forêts et de la Station des Recherches et Expériences forestières, +. iv, fasc. 2, 1932, p. 306,

liers viennent

Source : MNHN. Paris

230 ALAUDA. vu 2. 1936.

en montant, au fur et à mesure de la fonte des neiges, et réoccupés à l'automne en descendant, lorsque le bétail se trouve chassé des hauteurs par la mauvaise saison commençante, Les troupeaux retrouvent alors les pâturages laissés au printemps, pâturages qui se sont refaits durant l'été.

Les différents milieux ou biotopes de la région envisagée sont :

I. Le fond des vallées, avec dans la moindre un torrent, la plu- part du temps encaissé, parfois s'étendant dans une pénéplaine miniature de 200 à 300 m. de largeur. Ces torrents, lorsqu'ils ne sont pas trop resserrés entre les 2 versants, sont entourés soit simple- ment de prairies très humides, soit d'une végétation très serrée, parfois même impénétrable et composée principalement d'Epi- céas (Picea excelsa) (jeunes) et d’Aulnes.

Les villages sont entourés de petites cultures, cultures potagères, champs de Fèves, céréales diverses (Seigle, Orge, très peu de Blé). Autour des villages, quelques arbres : Noyers (Juglans regia), Frènes (Fraxinus excelsior) un ou deux Tilleuls (T'ilia), Poiriers sauvages (Pirus communis), ete. Mais le principal arbre fruitier que l'on trouve autour des villages et même légèrement au-dessus, le principal arbre même, de ce milieu et jusque vers 1.100 m., est le Pommier (Pirus malus). Ces Pommiers souvent très hauts, très vieux aussi, produisent des petites pommes aigres de diffé- rentes grandeurs dont on fait encore chaque année quelques hecto- litres de cidre.

IL. Peu au-dessus des villages, c’est la zone des bas pâturages et de la forêt subalpine. Forêt composée en Chablais en grande partie d'Epicéas. Des Pins (Pinus) et des Hêtres (Fagus silvatica), vul- gairement appelés Fayards, en assez grandes quantités et souvent méêlés aux Epicéas, complètent la flore forestière. Dans cette zone, parmi de nombreux arbustes et arbrisseaux à baies, un arbuste assez répandu est le Noisetier (Corylus avellana) en formation de touffes et de bosquets. Une essence également remarquable et assez répandue, quelquefois arbre, le plus souvent arbuste, est le Sorbier des Oiseaux (Sorbus aucuparia). À l'automne ces Sorbiers sont le rendez-vous de tous les Turdidés. Cette zone s'étend jusqu'à la limite de la végétation forestière qui, à la latitude du Chablais, ne dépasse guère 1.800 m. Plus haut, ce n'est guère que dans quel- ques ravins abrités qu’on trouve encore de vagues exemplaires de cette végétation, exemplaires bien petits et bien rabougris.

III. Au-dessus, se trouve la zone des hauts pâturages alpestres,

Source : MNHN. Paris

M. BERTRET SUR LE CHABLAIS 231

oceupés tout l'été par les troupeaux, s'étendant soit en grandes pentes, soit en quelques hauts plateaux (Plateau d’Avoriaz, 1.650 m.). En de nombreux endroits, ces étendues sont couvertes d'une végétation alpestre composée d'Aulnes verts (Alnus viridis), d’Airelles Myrtilles (Vaccinium myrtillus), de Rhododendrons (Rhododendron ferruginosus) et de Bruyère commune (Calluna vulgaris).

C'est à la limite de cette végétation et des derniers Epicéas, débordant sur les deux zones, qu'on trouve principalement l’un des plus beaux et plus recherchés gibiers des régions alpines, le petit Coq de bruyère ou Tétras lyre Lyrurus tetrix. Aux endroits les plus pauvres de ces hauts pâturages, nous avons souvent trouvé des étendues semées de blocs glaciaires, ceux-ci surgissant quelque- fois de terre. Paysages ressemblant assez à ceux, semés de blocs granitiques, de notre Bretagne.

IV. Au-dessus de la région des hauts pâturages cesse toute végé- tation. Seul, si on excepte quelques herbes rares et quelques maigres et dernières prairies sur les pentes exposées du Sud, la pierre règne jusqu'aux sommets. Ce sont, habituellement, de grands éboulis de roches et d’ardoises. encore vit une faune spéciale et adé- quate (Lagopèdes blancs, Lièvres variables, Marmottes, etc..).

Grand Corbeau Coreus corax. C'est en 1933 que nous avons observé, pour la première fois, le Grand Corbeau. D'abord un indi- vidu isolé, tantôt en vol tantôt arpentant le haut plateau d'Avo- riaz (alt. 1.650 m.), sur le territoire de la commune de Morzine. Plus tard, vers le 15 septembre de la même année, nous avons fait par deux fois de nouvelles constatations : celles d’un couple dont les cris répétés retentissaient le long des pentes droites et rocheuses des Terres-Maudites (alt. 2411 m.), sur la commune de Samoëns. Ce cri, répété souvent, est une sorte de kreu, kreu, kreu, ou, plus rauque, krok, krok, (qui n’est pas sans quelque analogie avec le cri de rappel de la Perdrix blanche (& ou © ? probablement ©) qu'il nous a été donné d'entendre plusieurs fois, après la dispersion d’une couvée par exemple.

En 1934, nous avons trouvé le Grand Corbeau en plus grande quantité. Il semblait avoir nettement étendu son aire de dispersion de l'année précédente.

Nous avons noté le 25 août et les jours suivants un couple dans la vallée des Ardoisières, vallée bordée d'immenses falaises ro-

Source : MNHN. Paris

232 ALAUDA. Vitt. 2, 1936.

cheuses de 150 à 200 m. de haut, non loin de Morzine. La présence de ce couple en ces lieux nous a semblé très régulière et sa nidifica- tion n’y serait pas étonnante. Nous n'avons pas observé de jeunes ensemble mais, au 25 août, leur dispersion pouvait bien être effec- tuée.

Dans cette même année 1934, nous avons encore noté le Grand Corbeau entre le 25 août et le 8 septembre : à la pointe de Nion (alt. 2.023 m.), aux environs de Morzine (1 couple) ; non loin de la pointe de Nautaux, commune de Montriond (1 individu isolé) ; au col de Jouplane, commune de Samoëns (1 couple).

Mais lors d’un second séjour dans la région, du 26 septembre au 18 octobre, notre étonnement fut grand de ne trouver le Grand Corbeau dans aucune des stations signalées, ni en aucun autre lieu. L'espèce serait-elle seulement estivale en Haut-Chablais ? Nous ne l'avons pourtant jamais observée dans les vallées, la plus basse altitude à laquelle nous l’ayons rencontrée étant celle du haut pla- teau d’Avoriaz (alt. 1.650 m.). Et nous l'avons trouvée sur les plus hauts sommets (pointe de Nautaux, alt. 2.176 m.).

En 1935, par contre, et encore à notre grand étonnement, nous n'avons ni vu ni entendu l'espèce (août-septembre) qui nous a paru totalement disparue.

Corbeau corneille Corvus corone. Nous avons noté également, pour la première fois en 1933, la Corneille noire. Un couple avait certainement niché dans la forêt de Nion (alt. 1.100 m.) car au 15 août de cette même année, 6 individus (4 jeunes et 2 vieux ?) y étaient notés presque chaque jour.

En septembre 1934, nous avons observé { groupe de 3 Corneilles noires non loin de Morzine (3 septembre) et { couple dans la vallée du Lac, commune de Montriond (28 septembre). Le 1 octobre, nous observions également 1 couple (peut-être le même) dans la haute vallée du Lac, au-dessus des châlets d’alpage du Lindaret (alt. 1.300 m. environ). C'est l’altitude la plus élevée à laquelle nous ayons rencontré en été la Corneille noire, qui semble préfé- rer les cultures des vallées, qui sont d’ailleurs de hautes vallées, aux pâturages et aux rocailles des sommets que fréquente le Grand Corbeau. Cependant, le 4 octobre, une bande de 15 Corneilles noires traversait la vallée à plusieurs reprises, en criant très fort, entre Montriond et Morzine. Nous nous rappelons avoir déjà observé une bande semblable, composée du même nombre d’indi-

Source : MNHN. Paris

N. BERTHET SUR LE CHABLAIS 233

vidus, un matin très tôt, dans les premiers jours du mois précédent. Entre le 10 et le 18 octobre de la même année, toujours composée à peu près du même nombre d'individus, une bande fréquentait assidûment les environs des maisons de Zaures (1.650 m.), à la Joux-Verte.

En 1935, nous avons fréquemment entendu une bande de 4 à 6 individus de cette espèce sur les basses pentes de la Joux-Verte (août et septembre.)

Casse-noix moucheté Nucifraga caryocatactes. Le Casse-noix n’est pas rare en Chablais et nous l'avons observé chaque année, à chacun de nos séjours, en été et en automne (juillet à novembre). Nous avons pris fin octobre ou dans les premiers jours de novembre 1933, dans les montagnes de Montriond, un individu de sexe in- déterminé, qui travaillait probablement à son approvisionnement hivernal. Sa poche contenait, en effet, un nombre de noisettes peu ordinaire, compris, autant que nous nous en souvenons, entre 18 et 24.

L'espèce niche certainement. Nous avons observé des jeunes chaque année en août et septembre (1932, 1933 et 1934) et, spécialement, le 7 septembre, non loin de la forêt de Morginate (1935). Ceux-ci sont assez différenciés par une taille un peu moindre, une queue plus courte et, de près, des couleurs plus claires. Ils sont surtout moins sauvages.

Le cri des jeunes comme des vieux est rauque et assez difficile- ment reproduisible ; il fait penser à celui du Geai Garrulus glan- darius, sans qu’on puisse cependant le confondre avec le cri de ce dernier.

Geai des chênes Garrulus glandarius (L.). Nous avons observé des Geais, mais en assez petite quantité, non loin du village d'Essert- Romand. Un individu sur un Epicéa, en août 1932. Plusieurs iso- lés en août et septembre 1933, notés à la Joux-Verte (Morzine), et au Lac de Montriond.

Bien que nos séjours se soient prolongés parfois fin octobre et dans les premiers jours de novembre, nous ne nous rappelons pas avoir remarqué de passages de Geais.

Corbin ehocard Pyrrhocorax graculus (L.). Alors que nous n'avons jamais observé aucun Crave Pyrrhocorax pyrrhocorax

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234 ALAUDA. VII 2. 1936.

dans la région envisagée du Chablais et que des membres de ma famille, qui viennent depuis plus de 30 ans dans cette région, m'assurent n'en avoir jamais vu, nous avons trouvé le Chocard assez abondant, mais jamais au-dessous de 1.800 m.

Nous l'avons noté en colonies au Roc-d’Enfer (alt. 2.240 m.) sur la commune de la Côte d'Arbroz, aux Terres-Maudites (alt. 2.411 m.) sur la commune de Samoëns, à la pointe de Nautaux (alt. 2.176 m.) sur la commune de Montriond, et dispersé par groupes de deux ou trois en biens d’autres endroits. Une colonie relativement importante (60 à 30 individus) avait retenu notre attention les années précédentes. Elle se tenait dans les montagnes assez abruptes de la Chavache (alt. moyenne 2.000 m.), débor- dant également sur les pentes de hauts pâturages mêlés d’Epicéas de Bassachaux, en bordure de la commune d'Abondance. Nous fûmes fort étonnés de la trouver en forte augmentation en 1924 (près de 200 individus). Printemps favorable, ou apports nouveaux ?

Nous n'avons fait aucune observation au point de vue de la nidification, qui est certaine. Des indigènes nous ont seulement rapporté que l'espèce nichait dans des troux aux «envers » à pic des montagnes de la Chavache.

Nous ne serions pas étonné que cette espèce soit assez souvent la proie des Rapaces. Nous avons observé, en effet, qu'un groupe d’une centaine, volant bas et très occupé par l’arrivée d’un Chien, prenait de la hauteur en vitesse et à grands cris, bientôt disparais- sant presque à la vue, au simple envol dans les environs immédiats d'un Tétras à queue fourchue Zyrurus tetrix (L.) 4.

Bec-croisé des sapins Loxia curvirostra. Nous avons observé seulement deux fois, à notre souvenance, le Bec-croisé durant l'été. En 1933 aux environs du 20 août, forêt de la Charnia (alt. 1.530 m.); en 1934, le 27 août, la Joux-Verte (alt. 1.700 m.). Par contre, nous avons observé chaque année dès les premiers jours d'octobre, et plus encore en fin de ce mois et dans les premiers jours de novembre, de nombreux et importants vols de Becs-croisés de passage. Nous nous rappelons des vols de plus de 300 individus en ces occasions. Des observations de cette espèce ont été faites dans les premiers jours de juillet 1935 par des membres de notre famille,

Pinson des arbres Fringilla coelebs. Le Pinson des arbres est très certainement, avec le Moineau domestique Passer domesticus

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M. BERTHET SUR LE CHABLAIS 235

l'espèce la plus commune autour des villages. Il est commun éga- lement dans le fond de toutes les vallées. Mais il ne semble pas monter très haut 1. Au-dessus de 1.400 m. il diminue beaucoup. Nous l'avons cependant trouvé au mois d'août, donc probablement comme nicheur, à la Joux-Verte (alt. moyenne 1.700 m.) et dans la forêt de la Charnia (alt. moyenne 1.530 m.).

Il niche en quantité. Il n’est pas besoin de lever la tête et de chercher bien longtemps pour découvrir des nids tout de mousse verte, à l’enfourchure des hautes branches des nombreux Pom- miers eb Poiriers qui environnent les villages ou garnissent les premières pentes. Tout le mois d'août, ce n’est que piaillements de jeunes se faisant fourrir au nid ou hors du nid. Le 4 septembre 1934, des parents nourrissaient encore des jeunes au nids, à 300 m. du village de Morzine.

En automne (octobre et novembre) nous avons toujours observé des Pinsons des arbres de passage, à n'importe quelle altitude dans les montagnes. Le 8 septembre 1935 des parents nourrissaient des jeunes sortis du nid depuis 3 jours au plus dans le fond de la vallée des Ardoisières.

Pinson du Nord Fringilla montifringilla. Nous avons observé le Pinson du Nord en automne (fin octobre et novembre), de passage et en petite quantité. Tantôt isolé, tantôt par petits groupes. Dans le centre de la France, cette espèce nous a été parfois signalée sous le nom vulgaire de « niard ».

Niverolle des Alpes Montifringilla nivalis. Nous n'avons observé que deux fois la Niverolle des Alpes et encore ne sommes- nous pas sûr de notre première observation. Notée (?) en août 1932 en montrant aux Terres Maudites (alt. 2.411 m.), commune de Samoëns, et le 29 septembre 1934 au-dessous et entre les pointes de Nion (alt. 2.023 m.) et Angolon (alt. 2.097 m.). Ces deux observa- tions furent faites en vol, la seconde d’assez près.

Chardonneret élégant Carduelis carduelis. Nous avons trouvé le Chardonneret exactement dans le même milieu que le Pinson

1. IL est infiniment probable que, dans le Haut-Chablais comme dans le reste des Alpes, le Pinson monte s'établir jusqu'à la limite supérieure de la végétation arbores- cente, bien que, sans doute, moins dense là-haut qu'un peu plus bas. Le Pinson est, chez nous. le type même de l'Oiseau ubiquiste : il niche du niveau de la mer jus- qu'à 2.000 mètres, pourvu qu'il s’y trouve des arbres (Rédaction), H. J.).

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236 ALAUDA, vin, 2. 1936.

des arbres mais en nombre beaucoup plus restreint. Il monte d’ail- leurs moins haut et, passé 1.200 ou 1.300 m., nous ne l'avons plus observé. Ses nids, sur le même genre d'arbres que ceux des Pin- sons (Pommiers et Poiriers élevés), sont plus difficiles à découvrir parce qu'ils sont d'un plus petit diamètre, placés aux plus grosses enfourchures, et aussi parce qu'ils sont revêtus extérieurement du Lichen même qui recouvre ces arbres fruitiers 2.

En août 1931, un nid sur un des rares Tilleuls (Tilia) du pays, au village de Morzine. Dans les premiers jours d'août 1932 des parents nourrissent leurs petits dans un nid situé sur un des arbres de la place de Morzine.

.

Tarin des aulnes Spinus spinus. Nous n'avons observé le Ta- rin que de passage, fin octobre et novembre, en bandes stridentes, aux cris mille fois répétés. Ces bandes, observées en montagne, nous ont toujours paru assez régulièrement composées de 30 à 50 individus. Mais cette espèce a fort bien pu nous échapper comme estivale et comme nicheuse, Des observations faites, en juillet, à la Joux-Verte (alt. 1.700 m., environ) par des membres de notre famille, pourraient le confirmer.

Serin eini Serinus canarius serinus. Nous avons trouvé le Cini dans le même milieu que le Chardonneret et le Pinson, dans les vallées, autour des villages, et très peu au-dessus. Il nous a même semblé qu'il tendrait à demeurer plus bas encore que le Char-

donneret. En tout cas il ne monte pas plus haut et nous n’en avons observé aucun au delà de 1.200 m. Le 6 septembre 1934, des pa- rents nourrissaient des jeunes sortis depuis peu du nid. Cepen- dant, au 25 septembre, à notre second séjour de l’année, alors qu'il restait de nombreux Pinsons et quelques Chardonnerets, nous n'avons plus observé aucun Cini,

Bouvreuil pivoine Pyrrhula pyrrhula. Nous avons trouvé le Bouvreuil assez répandu en Haut-Chablais. Nous l'avons observé en août, septembre, et commencement d'octobre, isolé ou, le plus souvent, par couple. Depuis les bois taillis d'Aunes mélangés de jeunes Epicéas des bords de la Grande-Drance entre Morzine et

1. Le revêtement extérieur de Lichens est en général la caractéristique des nids du Pinson, et non pas celle des nids du Chardonneret, De même, et toujours en géné- ral, le Chardonneret choisit des supports plus fins que ne fait le Pinson. Les positions seraient, ici, inversées ! À revoir de plus près ! (Rédaction. H. J.),

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M. BERTHET SUR LE GHABLAIS 237

Montriond (alt. moyenne 900 m.), jusqu’à la limite supérieure des forêts de Conifères. Nous l'avons d'ailleurs observé dans toute la vallée de la Grande-Drance, déjà peu après Thonon, en particu- lier à partir de Saint-Jean d'Aulph (alt. 811 m.).

Le 6 juillet 1935 un individu 4 charrie des matériaux ! non loin de la Drance, au Verney-Bron (alt. 870), sur la route de Thonon ; le 10 août 1935, au même lieu, un jeune sorti du nid depuis quelques jours se fait nourrir.

Moineau domestique Passer domestiens. Très répandu, mais seulement dans les agglomérations et les alentours immédiats de celles-ci (champs de Seigle, d'Orge de Fèves, ete...). Nous l'avons trouvé dans tous les villages cités au commencement de ces notes, sauf à Samoëns et à la Côte d’Arbroz, nous n'en avons pas observé mais il se trouve certainement. L'année 1934 nous a semblé particulièrement favorable à sa nidification (même re- marque faite à Lyon et dans les environs).

En 1935. nous avons fait les mêmes observations que les années précédentes et en particulier nous avons noté les couleurs très claires de la race, qui est de taille ordinaire. Les © sont presque isabelles.

Bruant jaune Emberiza cütrinella. Le Bruant jaune n’est pas rare ; nous l'avons toujours rencontré en août (fin août, 1933 et 1934) et dans la première quinzaine de septembre. Nous avons vu des jeunes le 29 août 1933. 11 ne nous à pas semblé monter très haut, l'altitude extrême nous l’ayons rencontré étant non loin de la forêt de la Charnia (alt. 1.550 m.) (champs et prairies).

Bruant fou Emberiza cia. Nous avons trouvé le Bruant fou assez commun, mais s’observant moins facilement que l'espèce pré- cédente et montant à des altitudes beaucoup plus élevées : à la Joux-Verte (alt. 1.700 m.), commune de Morzine, en 1933; à Bassachaux (alt. moyenne 1.750 m.), commune de Montriond, en 1934.

Nous l'avons d’ailleurs également trouvé beaucoup plus bas en altitude, Le 15 août 1932, un nid avee 4 œufs (2 à 4 jours), non loin du village de la Baume (alt. 650 m.), situé au ras du sol, sur le talus, bordé d'une haie, d’un sentier. Composé d'herbe sèche et des radi-

1. Ou de la nourriture ? (Rédaction, H. J.).

Source : MNHN. Paris

238 ALAUDA, Vu. 2. 1936.

celles, il était caché dans une touffe. Trois jeunes arrivèrent à bonne fin (1 œuf non fécondé). Nous les avons gardés 2 ans en captivité.

Alouette lulu Lululla arborea. Dans les premiers jours d'oc- tobre 1933, nous avons noté deux Lulus de passage, à la Joux- Verte (alt. 1.700 m.).

Alouette des champs Alauda arvensis. Nous avons rencontré partout l'Alouette des champs. Depuis les cultures qui entourent immédiatement les villages, jusqu'aux plus hauts pâturages qui dépassent la limite des arbres. Nous l’avons notée particulièrement, à la Joux-Verte (alt. 1.700 m.), sur le Haut-Plateau d'Avoriaz (alt. 1.650 m.), commune de Morzine, à Bassachaux (alt. moyenne 1.750 m.) commune de Montriond, et en montant au Roc-d'Enfer sur la commune de la Côte d'Arbroz.

Pipit des arbres Anthus trivialis. Nous avons observé chaque année cette espèce, à partir du 8 septembre, et seulement de pas- sage. Aucune année nous ne l’avons aperçu en août. Il est infiniment probable cependant que le Pipit des arbres niche ici et que sa pré- sence avant le 8 septembre nous est seulement demeurée inaperçue.

Pipit spioncelle Anthus spinoletta. C'est certainement le Pas- sereau le plus répandu. Nous l'avons observé dans tous les mois d'été et d'automne, quelquefois jusque dans les derniers jours d'octobre. Depuis le fond des vallées jusqu'à 2.200 m., presque jus- qu'aux tout derniers pâturages. Nous l’avons noté en particulier et très fréquemment à la Joux-Verte, à Bassachaux, à la pointe de Bassachaux, sur le plateau d'Avoriaz, en montant du roc d'Enfer et à la chapelle de Graidon. La plupart de ces points nommés sont de hauts pâturages semés de rochers glaciaires et de rocailles d'un aspect très particulier. Le 20 août 1935, nous avons pris un jeune sorti du nid depuis peu (la Joux-Verte alt. 1.750 m.).

Pipit des prés Anthus pratensis. Nous avons observé chaque année en août et septembre quelques Pipits des prés sur le plateau d’Avoriaz (alt. 1.650 m.), haut plateau semé de rochers glaciaires surgissant de terre et d'aspect assez dénudé, se trouvait égale- ment le Traquet motteux Œnanthe œnanthe. Nous sommes per- suadé qu'il doit passer aussi en d’autres lieux sa présence nous. a échappé jusqu'ici.

Source : MNHN. Paris

M. BERTHET SUR LE CHABLAIS 239

Bergeronnette des ruisseaux Motacilla cinerea. Cette espèce est très répandue le long des différentes Drances. Dans les derniers jours d’août 1932, des parents faisaient la navette pour nourrir leurs petits aux environs de la commune de Saint-Jean-d'Aulph (alt. 811 m.). Le nid, qui se trouvait de l’autre côté du torrent, était inabordable. On apercevait seulement un trou dans la mousse au pied d’une paroi à pic. Espèce observée très fréquemment en 1935.

Bergeronnette printanière Motacilla flava. Le 7 septembre 1934, un groupe de 10 à 12 est posé au milieu de la route à 1 km- de Morzine, et s'envole devant l’autobus qui fait le service entre Morzine et Thonon. En septembre, à Morzine, plusieurs fois dans la journée, une Bergeronnette printanière traverse la vallée en criant.

Tichodrome éehelette Tichodroma muraria. Connu ici sous le nom vulgaire de « glody ». Nous l'avons noté deux fois, en 1933, une fois sous l’à-pic Est du Tour (alt. 2.048 m.), une autre fois à l'envers abrupt de la Chavache (alt. 2.086 m.) non loin de Bassa- chaux. Il était, paraît-il, bien moins rare autrefois.

Grimpereau familer Certhia familiaris 1. Ce Grimpereau est commun. Nous l'avons observé et entendu dans chaque forêt de Conifères, et il atteint en altitude la limite de ces derniers. Pas d'observation au point de vue de la nidification.

Sittelle torchepot Sitta europea. Nous avons observé chaque année cette espèce, mais jamais bien avant les premiers jours du mois de septembre; aussi pensons-nous qu'il s'agit seulement d'oiseaux erratiques. En tout cas, du 5 septembre au 10 octobre, nous en avons toujours observé en quantité autour des villages et dans les vallées, montant et descendant inlassablement les troncs et les maîtresses branches des Pommiers et des Poiriers. Nous ne l'avons rencontrée qu'accidentellement en montagne (en montant

1. Il est extrémement probable que, sous l'appellation de Grimpereau familier, M. Seeruer a confondu, au moins pour partie, le Grimpereau des jardins Cer/hia brachyaactyla, et le Grimpereau des bois Cerfhia familiaris (race alpestre costa Bay, sans doute, pour le Haut-Chablais). Car le premier monte en général, dans l'Alpe, jusqu'au niveau auquel les Epicéas ou Sapins remplacent complètement les feuillus et les Pins, pour n'abandonner la place À son congénère qu'au delà de ce ni- veau. Et les deux Espèces mordent l'une sur l'autre en bien des points de végétation

mixte ! (Rédaction H. J.).

Source : MNHN. Paris

240 ALAUDA, Vi 2, 1936.

à la Joux-Verte, 5 septembre 1934; dans la forêt de la Charnia 6 septembre). Par contre, en 1935, des individus ont été observés en juillet à Morzine, et nous-même, dès les premiers jours d’août, avons pu observer des individus, adultes d'apparence, au même endroit. Il n’est donc pas impossible que l'espèce se reproduise 1.

Mésange charbonnière Parus major. La Charbonnière est très commune jusqu'à 1.400 et 1.500 m. Elle monte d’ailleurs, et nous avons pu le constater souvent, jusqu'à la limite de la forêt. Nous avons observé des jeunes en quantité en août et septembre de chaque année.

Un & de l’année, mais des premières nichées, obtenu le 4 sep- tembre 1934 et terminant sa mue, avait un bec nettement plus arqué que des spécimens des environs de Lyon. L'estomac de cet individu contenait, parmi d’autres débris d'Insectes, une Guêpe.

En 1955, le 7 juillet, des jeunes sont prêts à sortir d’un nid situé dans un trou du soubassement en pierre d’un châlet, au village de Morzine.

Mésange bleue Parus caeruleus. La Mésange bleue n'est pas rare dans la région envisagée, bien qu'elle soit certainement la Mésange la moins répandue. Un jeune 4 du 4 septembre 1934, qui terminait sa mue, avait dans l'estomac 15 à20 œufsd'Insectes (?), débris d'insectes et débris végétaux. Cette espèce nous a semblé avoir le même milieu que Parus major, avec une préférence pour les forêts non entièrement composées de Conifères (Hètres par exem- ple).

Mésange noire Parus ater. Cette Mésange, qui nous avait sem- blé tout d'abord assez rare, est beaucoup plus commune que nous le supposions. Il faut la chercher au cœur des forêts de Conifères, des forêts élevées et étendues. Elle y est d’ailleurs assez difficile à découvrir et nous n'en avons fait que peu d'observations. A l'au- tomne cependant, on trouve des jeunes sujets en bordure.

Mésange huppée Parus cristatus. La plus commune des Mé- sanges, aussi commune et peut-être même plus que Parus mutjor. La plus familière aussi, Nous nous sommes souvent amusé à la faire venir en imitant ses cris à l’aide d'un petit sifflet. En cinq

1. C'est même tout à fait vraisemblable ! (Rédaction, H 3.)

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BERTHET SUR LE CHABLAIS 241

minutes, trois, quatre, cinq, arrivaient de tous les côtés, venant se percher sur la branche d'Epicéa la plus proche, s’approchant parfois jusqu’à 50 em. de la figure, regardant souvent la tête en bas, manifestant par de petits cris leur étonnement et leur curiosité.

Un 4 adulte du 27 août 1934 avait dans l'estomac des débris de très petits Insectes et 2 larves de bois. Nous n'avons jamais vu la Mésange huppée fréquenter les vergers et les environs immédiats des villages, ainsi que nous l’avons observé pour toutes les autres Mésanges, même la Mésange no're.

Mésange alpestre ! Parus atricapillus. Nous avons trouvé cette espèce assez répandue, la plus répandue après Parus cristatus et Parus major, depuis les environs immédiats des villages et des châlets, elle est assez familière, jusqu'à la limite de la végétation forestière. Mais nous n’avons fait que peu d'observations biolo- giques la concernant.

Mésange à longue queue Ægithalus caudatus europaeus. Nous avons observé la Mésange à longue queue, mais seulement en petite quantité. Un vol de jeunes sous la pointe de Chéry (alt. 1.838 m.), commune des Gets, le 28 août 1934. Un vol de jeunes également le 4 septembre 1934 en montant à la Joux-Verte, non loin des Granges. Un vol encore, le long de la Grande-Drance, entre Morzine et Montriond, le 4 octobre de la même année. Un sujet, de sexe indéterminé, obtenu dans ce vol, avait dans l’esto- mac 1 Araignée d'assez grande taille (pattes 25 mm.) et 30 à 40 petites larves aquatiques de 6 à 9 mm. de long.

Fauvette des jardins Syloia borin. Un nid sur un buisson, à 1 m. du sol, à quelques mètres de la Grande-Dranse, non loin de Saint-Jean-d'Aulph (alt. 811 m.) en 1932. Ce nid contenait, fin août, 4 jeunes. Deux survéeurent à l'élevage et périrent acciden- tellement à 19 mois.

Fauvette à tête noire Sylvia atricapilla. Nous avons trouvé la Fauvette à tête noire, en particulier le long de la Grande-Drance,

il est extrèmement probable que, sous l'appellation de Mésange alpestre, M. Berruer a confondu la Mésange nonnette Parus palustris, qui habite l'Alpe jusqu à 0001.30 m, s. mer (selon le niveau auquel les Feuillus cèdent complètement la place aux Conifères), et la Mésange boréale Parus atricapilius trace alpestre jouardi Buxc, sans doute, pour le Haut-Chablais) qui, elle, monte jusqu'à Ia limite supé rieure de la végétation arborescente. Les deux espèces cohabitent d'ailleurs sur les limites de leur distribution verticale, (Rédaction. H, J.).

16

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242 ALAUDA. VIII, 2. 1936.

mais en quantité restreinte. Nous nous rappelons une nichée de jeunes, récemment sortie du nid, en 1932, autour du 15 août, Nous ne l'avons pas trouvée plus haut qu'aux environs de 1.150 m., dans des peuplements de jeunes Hètres. Une $ y nourrissait un jeune le 24 août 1934, en montant à la chapelle de Graidon et sous les rochers du même nom (commune de la Côte d’Arbroz).

Pouillots PAylloscopus sp. pl. Nous nous rappelons avoir observé Phylloscopus trochilus, en petite quantité, en automne. Nous avons observé plusieurs fois Phylloscopus bonelli en août et septembre, notamment en montant à la Joux-Verte, non loin des villages de Montriond et Morzine.

Nous avons rencontré d'autres Pouillots, mais nous ne pouvons préciser, nos observations du genre ayant été très courtes, faites à l’occasion et accidentellement, sans recherche spéciale. Il faut d’ailleurs avoir une certaine expérience et un jugement sûr pour déterminer les Pouillots, lorsqu'ils sont silencieux. Particulière- ment si les observations ne sont pas faites de près !

Merle noir Turdus merula. Le Merle noir n’est pas rare, La Drance et les peuplements d'Aunes et d’Epicéas qui la bordent sem blent être son milieu de prédilection. Nous l'avons observé en août, septembre et octobre, jusque dans les derniers jours de ce mois. Il est possible que cette espèce soit sédentaire malgré le fort et long enneigement hivernal de ces hautes vallées.

Nous avons fait ici la même remarque que nous avions faite dans le Lyonnais. C'est qu'après le rigoureux hiver de 1929 qui a été funeste à tant d'oiseaux, le repeuplement normal ne s’est fait qu'en 3 ou 4 années seulement. À notre avis, le fait de 1929 doit se reproduire plus souvent qu'on ne croit généralement. Le Merle noir, lorsqu'il ne transhume pas, souffre beaucoup de l'hiver et du froid. À 15 km. au Sud de Lyon, nous observons chaque année des couples faisant 3, souvent 4 nichées de 4 ou 5 jeunes chacune, sans que pour cela l'espèce se répande davantage. Il est vrai que de nombreux nids (œufs ou jeunes) sont détruits. Et, à ce propos, on ne dira jamais assez de mal des deux plus invétérés destructeurs de nids de Passereaux : la Pie Pica pica, et le Chat.

1. L'étude de M. Henri Jouarn, Comment reconnaître, dans la nature, nos quatre Pouillots (Alauda, 1934, 4, pp. 479-502), n'était pas parue à l'époque furent rédigées ces notes G. B.

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N. BERTHET SUR LE CHABLAIS 243

Merle à plastron Turdus torquatus alpestris. Le Merle à plas- tron est vraisemblablement nicheur, mais seulement à partir de 1.600 à 1.700 m. et particulièrement en lisière et dans les grandes forêts de Conifères, les peuplements de jeunes Epicéas, d'Aunes verts, mêlés de Rhododendrons et de Genévriers. Nous l’avons noté le 15 août 1932 (Joux-Verte). Des jeunes par bandes de 3 à 5, fin août et septembre 1933 et 1934. C’est certainement à la Joux- Verte (alt. 1.700 m.) et au creux de la Joux, presque à la limite de la végétation forestière, que l'espèce nous est apparue en plus grand nombre. Elle dépasse d'ailleurs largement cette limite, puisque nous l’avons trouvée aux Hautforts (alt. 2.466 m.) dans les premiers jours de septembre 1933 (2 adultes ?), fréquentant les hautes pentes herbeuses semées seulement de Rhododendrons. Plusieurs sujets (jeunes ?) sans plastron ou à plastron peu visible, examinés de loin avec des jumelles, nous ont paru avoir les plumes de la face inférieure assez tachées de blanc. Le Merle à plastron est d’ailleurs un Turdidé sauvage, peut-être le plus sauvage, et qui ne se laisse pas observer facilement.

A côté de ces oiseaux estivaux, chaque année nous avons pu observer, dès le 15 octobre et jusqu'en novembre, de grandes bandes (30 à 80) de Merles à plastron de passage mêlés parfois de Turdus viscivorus, bandes passant d’un bouquet d'Epicéas à un autre et généralement inabordables. Un sujet adulte obtenu cepen- dant dans ces conditions (sexe indéterminé) avait un plastron très visible quoique lavé de roux et les plumes de la face inférieure simplement bordées de gris-blanchâtre ; tel, il ne différait pas des spécimens de passage obtenus en hiver (janvier-février) dans la région lyonnaise.

En 1935 (août-septembre), nous avons particulièrement remar- qué l'absence presque totale de Turdidés dans la région envisagée, et particulièrement du Merle à plastron.

Grive draine Turdus viscivorus. Nous avons trouvé cette espèce à la même époque et exactement dans les mêmes conditions et aux mêmes endroits que le Merle à plastron. Cependant, à la différence de ce dernier, elle descend beaucoup plus bas, dans toutes les forêts mêlées de Conifères et de Hôtres, particulièrement à la fin de l'été et en automne, dans celles nous avons trouvé le Sorbier des Oiseaux. A cette époque d’ailleurs, nous l'avons trou- vée dans chaque ravin coule un peu d’eau et les arbustes à

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244 ALAUDA, Vi, 2, 1936.

baies ne manquent pas, jusqu'aux abords de la Grande-Drance. Un individu & (?) obtenu le 27 août 1934 non loin de ce torrent entre Montriond et Morzine, était un jeune hors du nid depuis peu. I avait encore à la tête son duvet de poussin (Gésier : nombreuses baies indéterminables, { noyau de cerise sauvage). Tard dans l'automne, nous avons constaté des passages de Draines, comme en plaine. En 1935, diminution sensible de l'espèce.

Grive musicienne Turdus ericetorum. Ce Turdidé n’est pas rare non plus. Il nous a semblé, bien que nous l’ayons trouvé parfois à la même altitude que torquatus (Joux-Verte), qu'il préférait les basses forêts, quelque peu humides principalement (forêt de la Charnia, alt, moyenne 1.550 m.). Les peuplements particuliers qui longent la Grande-Drance semblent être son milieu de prédilec- tion. C’est que nous avons trouvé un nid, le 29 septembre 1934, dans lequel il restait quelques débris de coquilles. Ce nid, de l’année, très frais, était situé sur un jeune Epicéa, contre le tronc, à 2 m. du sol, et était en tous points semblable à ceux que nous avons l'habitude de rencontrer dans les ciles du Rhône », au Sud de Lyon.

En 1935, diminution sensible de l'espèce dans les basses forèts. Mais des nids abandonnés, plus nombreux que les autres années, sont trouvés entre le 10 et le 15 août, tout près de la Grande- Drance, dans le fond de la vallée à basse altitude.

Dès le mois d'octobre, comme dans le Lyonnais, nous avons cru observer des Grives musiciennes de passage.

Grive mauvis Turdus musicus. Entre le 10 et le 15 octobre 1932, un chasseur tue devant nous un Mauvis, à quelques mètres de la Grande-Drance, entre Montriond et Morzine.

Grive litorne Turdus pilaris. Nous nous rappelons avoir vu cette espèce, certaines années, tard dans l'automne, et évidem- ment de passage. Nous la connaissons sous le nom vulgaire de « Tiatia ».

Rouge-gorge familier Zrithacus rubecula. Le Rouge-gorge est assez répandu, mais rarement au-dessus de 1.200 m. ou 4.300 m. Il niche certainement, car dès août et septembre nous avons très souvent observé des jeunes.

En 1935, l'espèce ne nous a pas paru en diminution.

Nous avons capturé deux jeunes sortis du nid le jour même,

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M. BERTHET SUR LE CHABLAIS 245

le 17 août 1935, à quelques mètres des bords du lac de Montriond (alt. 1.050 m.). Une capture également en 1935, d’un jeune sem- blant abandonné de ses parents, tout près du Verney-Bron (alt, 870 m.) sur la route de Thonon à Morzine.

Rouge-queue à front blane Phœnicurus phœnicurus. Observé depuis plusieurs années à Morzine et dans les environs. L'espèce niche sous les auvents des châlets, et pond de 5 à 6 œufs.

L'espèce reste cependant peu commune, relativement à la sui- vante.

Rouge-queue noir Phœnicurus ochruros. Espèce très répan- due et très commune dans toute la région. Nous l'avons trouvée dans les lieux les plus disparates. Depuis les villages (tous ceux cités au commencement de ces notes, sauf à Samoëns nous n'avons pas fait d'observations), jusqu'aux plus hauts sommets du Chablais (les Hautforts, alt. 2.466 m.), Ressachaux, Nautaux, alt. 2.176 m.) ; et partout l’on trouve des rochers, des rocailles et des trous.

Traquet motteux Œnanthe œnanthe. Nous avons surtout observé le « eul-blane » (c'est ainsi que nous le connaissons de son nom vulgaire), sur le plateau d'Avoriaz (alt. 1.650 m.). Il y vit avec Phæœnicurus ochruros et aussi avec Anthus spinoletta. Nous avons déjà parlé du plateau d'Avoriaz, haute prairie semée en quantité de rochers glaciaires, tantôt posés à même le sol, le plus souvent en surgissant. Ces rochers pleins de trous plaisent admi- rablement à l’Oiseau et il y niche certainement. Nous l'avons également noté ailleurs : dans le Creu de Morzinette, dans la cuvette de la pointe de Bessachaux, sous la pointe de Nauteau, au Roc d'Enfer (spécialement), et en bien d’autres endroits.

Merle de roche Monticola saxatilis. Nous avons rencontré deux fois cette espèce. Ce fut d’abord en juillet 1932, lors d’un des rares séjours que nous avons faits à cette époque dans la région. Un & chantait parmi les éboulis rocheux de la pente Sud de la pointe de Nauteau (alt. 2.176 m.). Bien que nous n'ayons pas pris de notes, nous nous rappelons un chant un peu genre Turdus merula, mais plus léger, plus fluté, plus musical et plus varié.

L'année suivante, en septembre, nous avons trouvé au même endroit un individu ( © ou jeune ?), assez peu sauvage.

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246 ALAUDA. VI, 2, 1936.

Aceenteur alpin Prunella collaris. Nous avons plusieurs fois en 1933 et 1934, rencontré cette espèce qui nous avait tout d’abord échappé. Nous l'avons notée assez jusqu'à 2.300 m. (Les Haut- forts), et toujours dans le même milieu que Phœnicurus ochruros, Œnanthe œnanthe et Anthus spinoletta (hautes prairies semées de rochers, simplement éboulis et amas de rocailles). Nous rele- vons : plateau d'Avoriaz, les Hautforts (2.466 m.), au-dessus de la Quie (commune de Morzine), la chapelle de Graidon, pente Sud de Nautaux, les endroits nous l'avons notée en août et septembre.

Aecenteur mouchet Prunella modularis. Un membre de notre famille nous à signalé en 1934 l'Accenteur mouchet (1 individu), aux maisons de Zoré, à la Joux-Verte (commune de Morzine) (?).

Cinele plongeur Cinclus cinclus. Nous avons trouvé très com- munément le Cincle sur tous les torrents de quelque importance. Bien que ce fût plusieurs fois aux altitudes extrêmes auxquelles on s'accorde généralement à reconnaitre que la Truite peut vivre (Ardent, cascade et châlets), il nous a paru préférer des altitudes plus basses et en particulier la Grande-Drance, entre Saint-Jean- d’Aulph, Montriond et Morzine (alt. moyenne 750 à 1.050 m.). Nous avons également maintes fois vérifié l'axiome : rivière à Truites, rivière à Cincles, rivière sans Truites, rivière sans Cineles 1.

Le Cincle, de naturel habituellement peu farouche, est ici difficile à observer longuement. Nous pensons que cela vient de la chasse que lui font les indigènes, qui le tuent pour le manger (vraiment bien petit gibier!) et qui prétendent (naturellement) qu'il con- somme les alevins de Truites. Cette chasse, bien que faite au mo- ment des basses eaux, est d’ailleurs peu profitable, les individus tués tombant souvent à l'eau ils flottent comme un bouchon et sont vite emmenés par le courant. D’autre part, un Cincle blessé se précipite au fond de l'eau comme une Sarcelle. Beaucoup sont donc ainsi inutilement perdus.

Nous reproduisons une note prise sur la Grande-Drance entre Montriond et Morzine, le 26 août 1934, et qui donne une idée de la généralité de nos observations, lesquelles n’apportent d’ailleurs aucun éclaircissement à un fait assez peu connu, la marche au fond de l'eau :

1. CF. H. Jouarp sur les Pyrénées-Orientales, Alauda, 1933, V, 2.

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M. BERTHET SUR LE CHABLAIS 247

« Trois jeunes Cineles pêchent en famille. Ayant pour point de départ soit le bord du torrent, soit une pierre au milieu de l’eau, ils plongent à des endroits d’ailleurs peu profonds. Les plongées sont très courtes (10 secondes environ). Parfois sans reprendre pied, ils reviennent chercher de l’air à la surface ; on voit, l'espace d’une ou deux secondes, apparaître leur tête sur l'eau, puis ils disparaissent à nouveau. De retour à terre ou sur un caillou, ils font des efforts du gosier comme pour finir d'avaler quelque chose. Nagent-ils dans l'eau ou font-ils un plongeon pour s'agripper dans le fond ? Peut-être les deux. Mais aucune observation ne nous permet de prendre position.

Lorsqu'ils se mettent à l'eau, c’est par un mouvement de tout le corps, particulièrement de l'avant et du cou, qui semble beaucoup plus une plongée qu'une descente par le fond. Par contre, il semble parfois que, lors de leur retour à terre, c'est une remontée en sui- vant le fond (??

L'eau « louche », et l'observation « lointaine », bien que faite avec des jumelles, ne nous a pas permis de constater si une couche de bulles d’air les entourait lors de la plongée. Quoi qu'il en soit, leur plumage semble rester parfaitement sec. Ce n’est qu'au bout d'un certain nombre de plongées que leur plumage paraît légèrement mouillé. Ils commencent alors à se secouer après chaque plongée. »

Nous avons observé le Cincle qui est, paraît-il, absolument sédentaire (d'après les personnes du pays), jusque lors de nos plus tardifs séjours (novembre et octobre). Un nid vide, trouvé en septembre 1933, était une grosse boule de mousse de 40 cm. de diamètre extérieur, coincée entre des aspérités de roche, à À m. au-dessus de la Drance de la Manche (Morzine).

Nous avons fréquemment observé, mais de très loin, des Cineles isolés, restant des heures sur la même branche morte, celle-ci sou- vent au-dessus du plus fort courant, surveillant tantôt l’eau, tantôt l'air, ou paraissant assoupis, la tête légèrement rentrée dans les épaules et fermant et ouvrant alternativement les paupières. Un & (?) observé ainsi sur une branche au-dessus de l’eau, le 4 octobre 1934, sur la Grande-Drance, répétait une petite chanson que le bruit du torrent nous empêchait de bien distinguer mais qui semblait assez harmonieuse, les notes dominantes ressem- blant toutefois à la petite ritournelle de toute saison de Phœ- nicurus ochruros.

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248 ALAUDA, vil. 2. 1936.

Troglodyte mignon Troglodytes troglodytes. Cette espèce est très commune, particulièrement auprès des torrents. C'est par 4 à 6 par jour que nous avons rencontré des nids vides en longeant la Grande-Drance nous pêchions la Truite en août et septembre. Souvent de mousse verte, ces nids sont souvent assez difliciles à découvrir. Ils sont coincés dans les anfractuosités des rochers bor- dant le torrent et se confondent facilement avec quantité d'autres plaques de mousse. Nous les avons trouvés également assez sou- vent sous les tabliers des ponts.

Le 15 août 1932, des membres de notre famille ayant touché un nid, non loin de Saint-Jean-d'Auph (alt. 840 m. env.), il en sortit une dizaine (?) de jeunes prêts à prendre leur vol. En bordure du village de Montriond, nous avons vu (septembre 1933) un individu entrer et sortir par la fenêtre de la cuisine d’un châlet, comme un vieil habitué. C'est aux Granges (alt. 1.450 m. environ), en mon- tant à la Joux-Verte, et dans les châlets d’alpage du Crot aux Chiens (commune de Morzine), que nous avons trouvé les plus hautes altitudes de cette espèce, jusqu'en 1934 inclus. Cependant en 1935 un individu chantait le 8 août sous l’à pic de Ressachaux à 1.800 m. d'altitude. Et le lendemain 9 août, nous avons bagué trois individus au nid, restant d’une nichée non encore envolée. Nid situé contre la face Nord d’un pont, non loin de Montriond.

Hirondelle de cheminée Hirundo rustica. Nous avons vu quel- ques Hirondelles de cheminée en septembre 1933 et 1934, entre Montriond et le Pont de fer (alt. 960 m.). Cette espèce nous à semblé rare ici. Aucun nid observé. Par contre, en 1935, l'espèce nous a paru beaucoup plus nombreuse au même endroit. Mais nous n'avons pas observé de nids et ne l'avons pas remarquée ailleurs.

Hirondelle de fenêtre Delichon urbica. Nous avons trouvé cette espèce en très grand nombre et chaque année, alors qu'A/irun- do rustica nous a paru peu fréquente. C'est exactement le contraire de ce que nous avons constaté dans la ville même de Lyon, et dans de banlieue et des environs. L'Hirondelle eul-blanc jusqu'aux plus hauts sommets du Chablais (Hautforts, alt. 2.466 m., Nautaux, alt. 2.176 m., la Chavache ; Roc-d'Enfer).

Mais nous n’avons trouvé aucun nid, pas plus sous les auvents des châlets d’alpage ou des villages que le long des à-pic et fa- laises accessibles. Cependant, si nous en jugeons par le nombre

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M. BERTHET SUR LE CHABLAIS 249

d'individus que nous avons rencontrés dans les vallées, non loin des villages, comme partout dans les plus hautes montagnes, cette espèce doit constituer quelque part, en des rochers inacces- sibles, des colonies assez nombreuses. Il est vrai que la date tardive de nos séjours n'a pas facilité la découverte de ces colonies. Delichon urbica nous a semblé partir assez +ôt : aux environs du 25 septembre, peut-être avant. Nous nous rappelons avoir observé en 1929 ou 1930 un très important passage en Verney-Bron, entre Saint-Jean-d'Aulph et Montriond. Le vol descendait la vallée de Ja Grande-Drance, en direction de Thonon, à basse altitude (30 à 40 m.) et par un terrible vent debout. Ainsi les Oiseaux étaient-ils très dispersés, et le passage, quoique très suivi, ne dura pas moins de deux à trois heures. C’est le passage le plus curieux que nous ayons observé. La direction S.-N. était vraisemblablement exigée par la configuration du sol de la région, le passage s’effectuant vraisemblablement par le lac Léman et la vallée du Rhône.

Hirondelle de rocher Riparia rupestris. Nous avons aussi 0b- servé souvent cette espèce, mêlée à la précédente dans les mêmes conditions et aux mêmes altitudes (très variables). Même date de départ (environ), mais, comme pour l'Hirondelle de fenêtre, nous n'avons pu faire aucune observation sur les lieux de nidification.

Pie noir Picus martius. Nous avons trouvé le Pic noir norma- lement répandu, chaque couple ayant ses cantonnements ou à peu près. Chacun d’eux ne se gène d’ailleurs pas pour visiter celui de son voisin, et il n’est pas rare de les voir ainsi traverser la vallée pour se rendre de l’un à l'autre, mais ils reviennent toujours aux leurs.

Nous l'avons observé de 1.200 m. à 1.400 m. jusqu’à la limite de la végétation forestière (la Joux-Verte alt. 1.700 m., Bassa- chaux, forêts de Morzinette, etc.….). Il nous a paru avoir un habi- tat identique en tous points à celui du Casse-noix, à ceci près qu'il affectionnerait plus particulièrement que ce dernier les forêts de Hôtres et d'Epicéas (1.200 à 1.400 m.).

Son cri le plus commun est : Tru, truû, truû, qu'il fait entendre lorsqu'il passe d'un bouquet d’Epicéas à l’autre. Une jeune © pous- sait une sorte de cri Kreu-ûu, kreu-üu dans une forêt de Hêtres au-dessus des châlets de la Quie (alt. 1.500 m.), en montant à Morzi- nette, le 27 août 1934. Un autre (sexe ?), le même jour au même endroit, puis plus tard le 5 octobre 1934, sous Nion et Angolon et

Source : MNHN. Paris

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e Vuf. 2. 1936.

entre ces deux sommets, faisait entendre une sorte de grincement de scie : Tuuine, tmuine. Deux sujets, 27 août 1934, pris sous les châlets de la Quie (com-

mune de Morzine), étaient des jeunes en pleine fin de mue, el ont fait de bien mauvaises peaux.

Pie vert Picus viridis. Nous avons noté deux fois le Pic vert. Une fois non loin des maisons de Zore, alt. 1.600 m. environ (septembre 1932), une autre fois non loin des Granges, alt, 1.350 m. environ (septembre 1933), Ces deux hameaux d'alpage se trouvent en montant à la Joux-Verte (commune de Morzine).

Deux fois, dans la forêt de Ja Charnia en 1932, et en montant aux Granges (Joux Verte) en 1934, nous avons entendu un cri qui nous à paru être celui d'un Pic, ces mêmes « notes », peut-être, qui ont attiré l'attention de M. Jacques DELAMAIN dans les Alpes d'Insbrück : « elles rappelaient un peu le rire du Pic-vert Picus viridis, mais sans ses éclatantes aspérités, et presque musical » 1 C'est cela très exactement. Mais de quel Pie s'agit-il ?

Coucou gris Cuculus canorus. Le 15 mai 1932 un individu chante sur un Epicéa situé en plein milieu d’un immense champ de neige, aux maisons de Zore (la Joux-Verte).

Martinet à ventre blane A pus melba melba. Nous avons vu plusieurs fois, durant nos rares et courts séjours de juillet, le Mar- tinet à ventre blane, mais en un seul endroit, au sommet de la pointe d'Angolon (1932 et 1934, un couple). Au sommet de cette pointe, se tient toujours, vivant solitaire, un troupeau de Moutons. En 1935, le 20 août, nous avons vu un individu de cette espèce, d’assez près, vers 5 heures de l'après-midi, à la Joux-Verte (alt. 1.750 m.). 11 semblait de passage en direction du lac Léman.

Martinet noir Apus apus. Nous l'avons toujours observé dans la vallée de Morzine, aux mêmes époques que le précédent. Il nous à paru se reproduire dans les environs immédiats de l'Eglise (alt. 980 m.) de cette localité (clocher ?). Nous n'avons trouvé ni l’une ni l'autre espèce durant d'autres séjours qui commencèrent au 15 août. En 1935, quelques individus du 2 au 8 août, au-dessus

2. Jacques Déssmax, sur les Alpes d'Innsbrück, Alauda, 1934, VI, 2,

Source : MNHN. Paris

M. BERTHET SUR LE GHABLAIS 251

de la place de Morzine. Le 20 août, deux individus à la tombée de la nuit, au sommet du téléférique du Plenay (alt. 1.650 m.).

Engoulevent d'Europe Caprimulgus europaeus. Un membre de notre famille, pêcheur de Truites, nous a affirmé l’avoir rencon- tré trois fois : une fois (un individu), auprès de la Petite-Drance (alt. 1.100 m.) qui descend du lac de Montriond pour rejoindre la Grande-Drance au pont de Fer. Deux autres fois au même endroit, non loin d’un ancien lit de torrent desséché, et également près d’une petite Drance, celle de la Manche (Morzine).

Chouette ehevêchette Glaucidium passerinum ? Le 23 août 1934, à tombée de nuit, nous avons aperçu aux alentours du village de Montriond, à côté du tremplin à ski, une petite Chouette qui nous a paru être une Chevéchette.

Chouette hulotte Strix aluco. Fin août 1932, nous avons en- tendu une Hulotte, au même endroit exactement et dans les mêmes conditions que la précédente.

Hibou brachyote Asio flammeus. Le 1% octobre 1934, un Chien fait lever à 15 m. de nous un Brachyote de passage. Nous étions presque à l’arête de Bassachaux (alt. moyenne 1.700 m.). L'Oiseau était à terre, en plein champ de Rhododendrons.

Faucon pèlerin Falco peregrinus. Nous avons cru voir deux fois le Pèlerin. Une fois dans les «lanches de la pointe d'Angolon, côté des châlets de Jouplane, il fut surpris de si près qu’il nous a paru à la recherche de Lyrurus tetrix qui chantait non loin. C'était dans les derniers jours d'octobre, en 1931. Une autre fois, sous la même pointe, mais du côté opposé (côté de la vallée de la Manche), le 3 octobre 1934.

Faucon crécerelle Falco tinnunculus. Le Faucon crécerelle est très répandu en Haut-Chablais son habitat préféré nous a paru s’étendre de la limite supérieure de la végétation forestière (1.700 à 1.900 m.), en particulier au-dessus de cette limite, dans les hautes prairies, les rocailles, les à-pie, jusqu'aux plus hauts som- mets (les Hautforts 2.466 m.). Nous l'avons noté sur toutes les

1. Petites arêtes montantes sur lesquelles croit l'Epicéa.

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252 ALAUDA. Vi, 2, 1936.

autres pointes : Nautaux, Rassachaux, le Roc-d'Enfer, ete…., mais surtout dans les hauts pâturages qu’on trouve, habituellement, immédiatement au-dessous de ces sommets.

En 1935, une nichée de 4 ou 5 jeunes peu farouches et leurs pa- rents fréquentaient les abords immédiats des maisons de Zore (la Joux-Verte, alt. 1.680 m.).

Epervier d'Europe Accipiter nisus. Nous avons noté deux fois (1934) le petit Epervier. Au Roc d'Enfer, presque au sommet, le 19 août. Le 27 août 1934, sur la route qui relie Montriond à Morzine.

Aigle royal Aquila chrysaëtos. Sans qu'il soit commun, nous l'avons vu presque chaque année, rarement par couple, mais plu- tôt isolé, planant lentement le long des à-pie.

Les lieux de nidification restent introuvables depuis déjà un certain nombre d'années. Ce splendide Rapace se reproduisait au- trefois sur une sorte de large corniche placée au flanc des parois verticales surplombant de 300 m. un petit lac vert, le lac de Mon- triond. 11 transportait là, chaque année, des quantités considé- rables de bois et ne changeait jamais l'emplacement de son aire, Celle-ci était très grande, plate, avec une contexture de très grosses branches. 11 ne reste plus maintenant qu'une masse de bois morts de plusieurs mètres cubes, et une large tache blanche, le long du rocher, produit ineffaçable des exeréments.

On voit l’Aïgle royal assez rarement au repos. Nous l'avons vu cependant s'arrêter sur une arête (1932) ou un pic inaccessible, surveillant les alentours en faisant faire à son cou un tour de près de trois quarts de cercle. Il fut immédiatement entouré de Cho- cards, qui lui firent une auréole gouailleuse et criarde, à laquelle, du reste, il demeura indifférent.

Les deux endroits on aurait le plus de chance de le rencontrer sont les montagnes de la Chavache (commune de Montriond) et la pointe de Rassachaux (commune de Morzine).

Le manque d'observations nous confirmait jusqu'ici dans notre idée qu'Aquila chrysaëtos ne serait bientôt plus dans le Haut-Cha- blais qu'accidentel. Et qu'il se pourrait bien que ce ne soit bientôt plus, hélas, qu'un souvenir. Pas encore peut-être, car en 1935, nous avons bien cru faire la découverte d’une aire habitée d'un couple. Si des observations et des faits nouveaux confirmaient cette décou-

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M. BERTHET SUR LE CHABLAIS 253

verte fort intéressante, nous ne manquerions pas d’en faire des observations plus suivies que nous ferions connaître.

Bondrée apivore Pernis apivorus. La Bondrée est ici assez commune. Au contraire de Falco tinnunculus, c'est un habitant des forêts et des bas pâturages qui se tient au-dessous de 2.000 m. A cet état, nous l'avons trouvée partout assez répandue, dans le Haut et Pas-Chablais et en particulier sur le territoire des com- munes que nous avons citées au commencement de cette étud.. 1

Canards et Sarcelles (sp. ?). On nous a rapporté qu'il n'était pas très rare de voir, tard dans l'automne, des Canards et des Sar- celles (sp ?,, sur le lac de Montriond.

Oie Anser ? Un vol de 20 à 30 Oies au-dessus du village de Morzine, le 20 octobre 1935.

Bécasse des bois Scolopax rusticola. Nous avons trouvé cette espèce, estivale, et sur ses lieux de reproduction. Nous nous dou- tions depuis longtemps du fait, car nous avions observé à plusieurs reprises des sujets adultes en juillet et août et des jeunes en sep- tembre. La preuve de la nidification de la Bécasse en Haut-Cha- blais nous fut apportée, en 1933, par le récit très circonstancié d’un indigène, suffisamment connaisseur, qui nous conta la capture qu'il fit d'un tout jeune sujet. Sans pouvoir dire que Scolopax rusticola, en cet état, soit commune, elle n'est cependant point rare. Nous l'avons trouvée aux endroits humides et l'eau coulait, notamment à la Joux-Verte et sous la pointe de Chéry, mais en plus grand nombre dans la partie Ouest de la forêt de la Charnia : forêt d'Epicéas et de quelques Hêtres, coupée de petites clairières hu- mides.

1. Parmi les Oiseaux considérés comme Bondrées par M. Bekruer devait figurer un pourcentage important de Buses Buteo b. buteo, Pour autant qu’on le sache, en effet. la Bondrée ne monte pas très haut dans l'Alpe, et la fuit très tôt, dès la fin de l'été. La distinction, au vol, d'une Buse et d’une Bondrée n'étant pas, dans tous les cas, sous tous les angles, aussi facile qu'on l'a dit, je crois utile de signaler ici une carac- téristique passée sous silence par les auteurs de manuels, mais qui serait constante : quelle que soit la coloration générale de la Buse (très variable d'un individu à l'autre comme chacun sait) cet Oiseau m'a fait voir, sur tous les spécimens qui passèrent entr

mes mains ou furent, de ma part, l'objet d’une observation attentive dans li nature, la présence, sous l'aile étendue, d'une zone plus moins foncée qui s'étend depuis le corps (région de l'épaule) jusque vers le poignet ; et, la Bondrée, la présence, au même endroit, d'une zone plus moins claire à partir du corps et jusqu'au poignet, puis une grosse tache foncée —, un peu comme chez la Buse pattue Bufeo lagopus. Ré- daction (H. J.).

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254 ALAUDA. VII, 2, 1936.

Béeassine des marais Gallinago gallinago. Nous avons toujours trouvé cette espèce, de Passage, en automne, à deux endroits : sur les mares, dites « gouilles », du plateau d'Avoriaz, et dans le petit marécage situé au Sud et à quelques centaines de mètres du col de Jouplane.

Bécasseau (sp ?). Vu un Bécasseau (sp ?) sur le lac de Mon- triond, le 8 août 1935.

Râle de genêts Crer crex. Le 21 septembre 1933, un indi- vidu & (2) est tué sous nos yeux par un chasseur, sur l’arête de Nautaux, à 2.250 m. d'altitude. Cet Oiseau, que nous avons eu en mains, était très gras. Nous reviendrons un jour sur cette pré- sence, qu'on nous signale comme exceptionnelle à cette altitude,

Pigeon ramier Columba palumbus. Deux Ramiers sont tués par un chasseur l'automne (octobre ?} de 1930 ou 1931, non loin de Bon-Morand (commune de Morzine alt. 1.500 m.). Un individu de cette espèce est tué le 18 septembre 1935 à la Joux-Verte, dans un champ de Myrtilies, parmi les grands Epicéas de l’arrête. Jabot plein des fruits de cette plante.

Perdrix bartavelle Alectoris grœca saratilis. Cette belle Per- drix propre aux Alpes, au bec fort et assez courbé, est disséminée en plusieurs endroits mais peu répandue. Elle affectionne les lieux arides et secs et ies éboulis de rochers. Nous l'avons trouvée jus- qu'à 2.000 m., en général nettement en-dessous de Lagopus mutus helveticus.

Comme on devrait le savoir, la Bartavelle, dont les plumes des flancs portent deux bandes noires, ne peut se confondre avee la Perdrix rouge Alectoris rufa, dont les plumes des flancs ne portent qu’une seule bande noire. Pour être infaillible, ce critère reste in- connu de la plupart des chasseurs.

Un sujet du 17 septembre 1935 était de taille particulièrement petite (nichée tardive, conséquence des neiges printanières ?) Non loin, un sujet mort dans un creux de rocher.

Caille des blés Coturnix coturnix. Des membres de notre fa- mille nous ont aflirmé avoir rencontré plusieurs fois des Cailles à plus de 2.000 m. au moment des passages, particulièrement celui de printemps (pointe de Nion).

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M. BERTHET SUR LE CHABLAIS 255

Gélinotte des hois Tetrastes bonasia. Nous n'avons fait, en 1934, aucune observation de Gélinotte.

Ce gracieux volatile, qui jusqu'ici n’était pas rare en Chablais et semblait même repeupler sensiblement, n'a cependant certaine- ment pas disparu. Très souvent perché sur les Epicéas, nous avons pu le voir, tantôt partant d’un vol rapide et bruyant dans notre dos, tantôt plongeant silencieusement au fond d’un ravin. Ses habi- tats préférés sont les forêts mélangées d'Epicéas et de Hêtres. C'est un Oiseau élégant et qui vient facilement (beaucoup trop facilement même |) à son cri de rappel : Tuuñ, tuuû, tu, tu, tu, tu. Observation d'une couvée de 5 ou 6, dans les derniers jours d'août 1935.

Grand Tétras Tetrao urogallus. Quoique les montagnes du Chablais ne constituent pas son habitat préféré, il y en a toujours eu quelques couples, au moins depuis 1910, se reproduisant de fa- çon indiscutable. Souvent branché à mi-hauteur dans les très vieux Epicéas.

Le grand Tétras recherche les profondes ravines ainsi que les lieux les plus sauvages. Il ne semble pas devoir peupler facilement. Son véritable habitat français reste bien, sans contredit, le Jura.

Nous l'avons observé plusieurs fois. Chaque année, en septembre, on nous signale des individus tués par des chasseurs. Nous n'avons jamais pu avoir ces spécimens en main, de sorte que nous n'avons pu nous rendre compte s'il s'agissait en ces cas particuliers de Tetrao urogallus, ou d'hybrides Tetrao urogallus X Lyrurus tetrix. Car l'hybridation des deux espèces doit se produire très certaine- ment, étant donné surtout, la rareté de la première. Des rémiges et des rectrices des deux sexes que nous avons recueillies semblent bien prouver cependant qu'il ne s’agit pas en l'occurrence que d'hy- brides. C’est une question sur laquelle nous reviendrons.

Tétras lyre Lyrurus tetrix, Autrefois très abondante, mainte- nant beaucoup moins, cette espèce trouve son habitat parfait dans les moyennes hauteurs du Chablais. Les couvées demeurent avec la mère jusqu’au 15 octobre environ, dans les bois d’Epicéas, prin- cipalement de jeunes, qui les ont vu naître. Les vieux 4 au con- traire (l'espèce est polygame), restent près des à-pie, prêts à plon- ger dans le vide à la moindre alerte. Tous se défendent admirable- ment. Cependant, malgré cette défense, à laquelle, en de nom- breux endroits, les lieux se prêtent, le Tétras lyre accuse depuis

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256 ALAUDA. VII. 2. 1936.

1920-1922 une diminution angoissante en Chablais. Nous croyons d’ailleurs qu'il y a un fait généralement constaté dans tous les habitats français de cette espèce. Les causes sont multiples. Une cependant est à retenir parce qu'il serait facile d'y remédier. Et c’est dans l'espoir que ces lignes tomberont sous les yeux d’un « pouvoir compétent », que nous l'indiquons ici, bien que ce n’en soit pas précisément la place.

L'ouverture de la chasse au Tétras lyre se fait à la même date que celle de la chasse au gibier de plaine dans nos régions du centre, c’est-à-dire entre le 25 août et le 127 septembre. A cette époque, les jeunes Tétras sont encore de très petite taille (les prin- temps à ces hauteurs sont généralement tardifs). 11 nous est arrivé d’avoir vu prendre à la main des jeunes entre le 10 et le 15 août. Résultat : à l'ouverture, les jeunes Tétras partent en compagnies serrées, comme des Perdreaux de chasse gardée, et à découvert. Les compagnies sont habituellement, en effet, dans les champs de Rhododendrons, en bordure des forêts de jeunes Epicéas la © a mené à bien sa couvée. Et c'est le massacre. Alors qu'en plaine la chasse au Faisan ne s'ouvre jamais avant le 20 septembre. À notre connaissance, jamais encore la préfecture de Haute- Savoie n'a réglementé l'ouverture du Tétras lyre. Seules des s0- ciétés de chasse locales l'ont fait, et plus pour des intérêts de per- sonnes que pour l'intérêt général.

L'affaire est simple. Si, d'ici peu, des mesures telles que celles que nous avons indiquées (ouverture de la chasse au Tétras lyre au plus tôt au 20 septembre) ne sont pas adoptées, nous le disons clairement, avant 6 ans l'espèce ne sera plus chassable en Haute- Savoie, et avant 15 ans, peut-être moins, un des plus beaux habi- tants de nos forêts alpines s’éteindra complètement.

Une autre cause de la diminution du Tétras lyre est l’intense et odieux braconnage pratiqué toute l’année, mais particulièrement au printemps, à la « chantée ». Les 4, à cette époque et dans cet état, se laissent approcher très facilement. Mais, direz-vous, dans ce cas, il n'est tué que des 3! Or, l'espèce est polygame. Il y a toujours des $ en surnombre. D'ailleurs la Pologne, un pays qui sait protéger son gibier, ne permet-elle pas précisément la chasse au Tétras lyre qu'à cette époque de la « chantée » ? Qu'importe ! Croyez-vous que l'espèce chante son bel amour pour les verts Epicéas et les neiges éternelles ? Au printemps, à la « chantée », le braconnage détruit des Q, beaucoup de &.

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M, BERTHET SUR LE CHABLAIS 257

11 y aurait beaucoup à dire sur le Tétras lyre, son chant, son vol rapide, sa nourriture, ses habitudes. Nous y reviendrons peut-être un jour.

Ces lignes avaient été rédigées en 1934. La Préfecture de la Haute-Savoie a pris en 1935 un arrêté n’autorisant la chasse du Tétras lyre qu'à partir du 15 septembre.

Lagopède alpin Lagopus mutus. Cette espèce, assez commune autrefois, même à des altitudes relativement basses (1.800 m. à 2.000 m.), ne se trouve guère maintenant avant 2.200 m. Elle est même devenue assez sauvage, presque rare. Il semble que le Lagopède blanc doive disparaitre du Haut-Chablais à brève échéance, car peu de montagnes de cette région lui donnent aujour- d'hui assez de facilités pour sa défense. Cependant, il ne paraît pas que la diminution rapide de cette espèce ces dernières années soit en rapport avec la destruction humaine qui en est faite. Quelle autre cause alors ? Nous y reviendrons aussi.

En terminant ces notes, nous tenons à signaler que nous nous sommes abstenu de mentionner quelques espèces, non des moins intéressantes et des moins rares, dont nous avons cru faire des ob- servations, mais sans preuves suffisantes. Si nous acquérons des certitudes nouvelles, à leur sujet, tout de même que si nous obser- vons d'autres espèces encore qui jusqu'ici nous auraient échappé, nous ne manquerons pas de les mentionner dans des notes qui sui- vront.

Nous renouvelons la remarque, que nous avons établie au début, du peu d'observations faites en ce qui concerne la nidification des espèces étant donné l'époque généralement tardive de nos séjours.

Enfin, pour terminer, nous ferons une remarque générale, c'est la grave diminution des espèces cynégétiques, non les moins inté- ressantes. La dépopulation des montagnes, bien que peu accentuée en Chablais, a été largement compensée par l'amélioration des moyens de transport et surtout des voies de communication. Les routes montent dans la vallée, mais la faune fuit. Puisse-t-elle ne pas disparaître un jour complètement !

Manuscrit reçu à Alauda le 26 janvier 1936.

Source : MNHN. Paris

CORRESPONDANCE, NOTES ET FAITS DIVERS

Sur l’ «Inventaire des Oiseaux de France », par Noël Mayaud, avec la collaboration d'Henri Heim de Balsac et Henri Jouard.

Au moment la Société d'Etudes Ornithologiques donne, par la publication de l’/nventaire des Oiseaux de France, une si belle preuve de sa vitalité et une réponse si précise aux espoirs que tant de bons ornithologistes ont mis en elle, il semble nécessaire aux soussignés d'indiquer ici l'origine de l'ouvrage, la part que chacun des trois auteurs y a prise, et ce qu'il convient d'en attendre.

x CRU

Le projet même de l'inventaire, auquel beaucoup pensaient, mais qu'il était permis de considérer comme prématuré, revient à Noël Mayaun. È

Notre collègue nous en fit part.

Nous applaudimes avec d'autant plus de cœur que la Liste de MM. MexeGaux et Rapixe de 1921 (qu'il s'agissait en somme de remplacer), nous était toujours apparue comme témoignant d'une grave erreur de jugement, génératrice de confusions : par limpor- tance traduite typographiquement en caractères gras qu'elle réservait aux formes dont seul le hasard avait voulu (priorité de description) que leur nom subspécifique fût le même que leur nom spécifique (formes nominales, soi-disant « types »), au détriment des autres formes de la même espèce, celles-ci fussent-elles nidifica- trices et celles-là simplement de passage chez nous. Sans insister autrement (puisque, déjà, Noël MayauD y fait allusion dans sa pré- face) sur la légèreté dont les auteurs de cette Liste avaient encore fait preuve en y incorporant, sans raisons sérieuses, bon nombre d’Oiseaux douteux !

Source : MNHN. Paris

CORRESPONDANCE, NOTES ET FAITS DIVERS 259

Puis notre collègue nous posa la question de savoir si, éventuelle- ment, la Société d'Etudes Ornithologiques accepterait de publier son Inventaire en lui accordant son patronage.

Nous fûmes heureux de lui apporter la réponse positive que nous avions sollicitée de notre Conseil de Direction.

Noël Mavaup nous demanda enfin notre collaboration effective. Un échange d'idées s'ensuivit, sur la façon dont il convenait de pré- senter le travail. Selon nos suggestions, notre collègue modifia cer- tains de ses plans primitifs (c’est sur nos instances, par exemple, qu'il distribua ses sous-espèces, numérotées a, b, €, ete. dans les cadres pré-établis des espèces, numérotées 1, 2, 3, ete

x EU

Vint la question du travail lui-même. Noël MayauD garda la charge de la plupart des recherches bibliographiques. Nous lui communiquâmes, nous, ce que nous savions, du fait de nos études pré- cédentes, et de par notre propre expérience, des Oiseaux en question, par nous recherchés et étudiés sur le terrain pendant de longues années. Certains textes furent amendés, repris, plusieurs fois. Il arriva même que nous ne fussions pas d'accord : Noël MayauD décida alors de son propre chef.

Résultat : la partie critique (première généalogiquement, si seconde dans l'ordonnance du texte, comme Noël Mayaun l'a lui-même expli- qué) de l'Inventaire est surtout due à Noël Mayaun ; la liste pro- prement dite est le produit, à parts sensiblement égales, de chacun de nous, MM. Robert HainaRD, Olivier MEYLAN, Bernard Mouiz- LARD (que nous sommes heureux de remercier ici) ayant encore été interrogés par nos soins sur leurs régions respectives, c’est-à-dire sur les abords du Lac Léman pour les deux premiers, et sur le Massif Central pour le troi

LL) di *

Nous ne considérons nullement l’/nventaire comme une fin, et nous ne nous faisons aucune illusion sur le degré de sa perfection. Nous le voyons, bien plutôt, comme une mise au point temporaire, et une base plus solide que toutes les précédentes pour l'orni- thologie de la France à venir.

Aussi, loin de repousser les critiques, nous les sollicitons, assurant

Source : MNHN. Paris

260 ALAUDA. VIII 2. 1936.

d'avance de notre reconnaissance ceux qui viendront nous dire : « Vous avez oublié tel point. Vous avez fait erreur sur tel autre. Quand un nombre suffisant de nouvelles données nous aura été journi, nous publierons un complément rectificatif au travail d'aujourd'hui.

En attendant, nous prions nos collaborateurs d'utiliser, pour leurs communications et travaux, la nomenclature de l’Znventaire.

Et maintenant, ornithologistes de France, au travail, à partir de l’Inventaire 1936 qui vous est offert !

»

Henri Jouarn et Henri HEIM pe Barsac.

Le Venturon dans les Vosges.

Le 30 mai 1936, au cours d’une exeursion ornithologique dans la partie des Hautes-Vosges comprise entre les cols du Bonhomme et de la Schlucht, nous avons pu observer plusieurs couples de Ven- turons (Carduelis c. citrinella), dont certains occupés à la construc- tion de leur nid. Aux environs du col de Luaspach notamment (alt. 977 m.), 2 ou 3 paires de Venturons stationnaient sur la route. Tandis que les & 3, perchés à la pointe d’arbrisseaux ou sur le som- met des bornes bordant la chanssée, ou décrivant pr esque au ras du sol de capricieuses et papillonnantes évolutions, émettaient les Strophes de leur chant, dont le timbre nous a paru comparable, pour certains moifs, à celui du Bruant proyer (Emberiza calandra), les © © parcouraient diligemment les bas-côtés de la route, cher- chant dans les détritus amoncelés les briadilles menues racines desséchées qu’à grands efforts parfois elles arrachaient de la boue séchée elles étaient retenues. En possession de ces matériaux elles s'envolaient vers une sapiuière toute proche, fidèlement escor- tées de leurs époux. Les deux Oiseaux, à ce moment, poussaient simultanément leur cri d’appel doux et harmonieux, qui permet- trait, à défaut de tout autre moyen, d'identifier immédiatement l’es- pèce.

Nous étant rendus au pied même des grands Sapins, lieu de ral- liement des Venturons, il nous fux impossible de découvrir l'endroit les couples observés édifiaient leur nid. Les Oiseaux devaient “l’ailleurs bientôt cesser leurs allées et venues, gênés sans doute par la pluie qui commença à tomber vers 10 heures.

L’après-midi, sur les chaumes dominaat le lac Noir, à la limite de la végétation (alt. environ 1.230 m.), nous entendimes et aper-

Source : MNHN. Paris

CORRESPONDANCE, NOTES ET FAITS DIVERS 261

çûmes également un couple de Venturons évoluant dans un taillis de Pins et d'Epicéas rabougris.

Enfin, vers 19 heures, au col même du Bonhomme (alt. 940 m.), un couple fut encore observé à quelques centaines de mètres de l'hôtel : les deux Oiseaux étaient perchés côte à côte sur les fils télégraphiques.

C. A. KrœxER, conservateur adjoint du Musée d'Histoire natu- relle de Strasbourg, dans son Aperçu des Oiseaux de l'Alsace et des Vosges (Strasbourg, Dérivaux 1865), écrit : « Le: Venturon est sédentaire dans les montagnes, d'avril en septembre. Habite les parties élevées des Vosges, niche dans les fourrés de Sapins et pond 4 à 5 œufs blanchâtres marqués de taches d'un rouge de

brique (col. KRŒNER). » Bernard MourLLar».

[D’après les excellentes observations faites dans les Hautes- Vosges par ScHELcRER Ornithologische Ausflüge in die Umge- bung von Freiburg (i. Br.) und in die Vogesen » V. O0. G. B. 1914, pp. 53-86) et par SrresemMANx Drei Jahre Ornithologie zwischen Verdun und Belfort » V. O. G. B. 1918, pp. 245-288, et spéciale- ment pp. 254-255) le Venturon montagnard est un Oiseau commun dans les Hautes-Vosges, entre 7-800 mètres et la limite de la végé- tation arborescente.

Il est stupéfiant et combien triste ! de constater avec quel ensemble la plupart de nos fabricants de « faunes locales » l'ont méconnu. M. MouiLLarD à d'autant mieux fait d'exhumer la vieille note de KRŒNER !

Et puisqu'il s'agit ici de faunes locales, remarquons que, dans sa récente Bibliographie des Faunes ornithologiques des régions françaises (ef. Alauda 1936, 1 p. 303), M. LEGENDRE ne cite pas SvrEsEmANN pour les Vosges auxquelles, pourtant, à trait pour une large part l’article précité. Pas plus, il est vrai, qu'il ne cite

tELcHER !... Du moins cette dernière omission a-t-elle été déjà réparée par notre collègue ne Bonner DE PAILLERETS. FRéduc- tion : H. J.].

Sur l'instinct des jeunes Cincles et sur leur précocité de plongeurs et nageurs.

Dans la première quinzaine d'avril 1936, nous avons pu contrôler plusieurs nids de Cincles aquatiques Cinclus cinclus subsp. ?,

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262 ALAUDA. vit. 2, 1936.

édifiés contre les parois rocheuses qui dominent la rivière « Lu Couze-Chambon », dans la partie inférieure de son cours, en amont, et en aval du village de Neschers (Puy-de-Dôme). À cette époque tous contenaient des poussins, soit nouvellement éclos, soit parve nus à la moitié de leur développement. Le 10 avril, comme nous approchions de l’un de ces nids, construit bien en évidence et à hauteur d'homme sur une saillie rocheuse d'une haute caverne baignée par la rivière, l'un des jeunes s’échappa brusquement par le trou de vol et, s’élançant hors du nid, tomba à l’eau, dans la- quelle il plongea, et, le cou tendu, se propulsant sous l'eau à grands coups d'ailes, gagna le milieu du chenal il disparut emporté par le courant extrêmement violent à cet endroit. Nous ne le vimes point réapparaître. Sans doute avait-il été brisé contre l’un des gros rochers parsemant le lit du torrent.

Néanmoins, pendant qu'il franchissait en plongée les quelques mètres d'eau calme et limpide baignant la falaise, nous avions eu le temps de l'observer. Ce jeune Oiseau n'avait pas encore revêtu son plumage complet : les grandes rémiges et les couvertures des ailes étaient encore « en tuyaux », de même que les rectrices, fort apparentes et couvertes de bulles d'air. Ainsi ce poussin encore impropre au vol était déjà capable d'évoluer facilement sous l'eau et, placé dans des conditions normales, d'échapper sans doute aux poursuites !

Pour ne point provoquer l'abandon du nid par le reste de la couvée, nous décidâmes d'interrompre nos investigations. Durant tout le temps de notre visite les adultes étaient demeurés invi- sibles.

Bernard MouiLLARD.

Sur la sève des arbres dans le régime des Pics.

En explorant un petit bosquet dans le pare de Rambouillet, je venais de découvrir la présence de deux Acer dasyearpum, essence rarement plantée dans ledit pare, et qu'on appelle Acer saccharinum aux Etats-Unis par raison de priorité. C’est un des arbres qui four- nissent le sucre d'Erable. Ces sujets voisins, assez âgés mais non vétustes, végétaient cependant assez mal au milieu d'arbres plus élevés. Tout de suite, mon attention fut attirée par l'aspect du rhy- tidome qui, d'un seul côté le côté Sud ——, portait une multitude ininterrompue de petites excavations plus ou moins losangiques, à

Source : MNHN. Paris

CORRESPONDANCE, NOTES ET FAITS DIVERS 263

bords et fond brunâtres. Ces excavations étaient plutôt disséminées à la base du tronc jusqu'à 0 m. 75 du sol, mais, au-dessus, elles deve- naient aussitôt assez rapprochées et régulièrement jusque tout en haut du fût. L'aspect était absolument le même sur ces deux Erables.

Après les observations publiées dans Alauda par MM. Paris et Lienuanr, il était aisé de voir ici un cas similaire se rapportant au travail de Pics en quête de sève sucrée. La chose fut remarquée par d’autres et certainement interprétée autrement, car moins de huit jours après ma constatation et lorsque je me disposais à prendre une photographie, les infortunés arbres venaient de tomber sous la cognée des bücherons.

Dr J. VisLENEUVE DE JANTI.

Un point du régime alimentaire et de l’éthologie du Pic épeiche.

Le Pic épeiche Dryobates major ne se contente pas d’Insectes xylo- phages ; il recherche, sur l'écorce des Peupliers Populus nigra, avec une prédilection particulière, tout au moins en Lorraine (Buré d'Orval, Meurthe-et-Moselle), les cocons d’un Lépidoptère dont la chenille vit sur le Peuplier et se chrysalide sur les écorces : le Dicra- nure bifide Coerura bifida. Le cocon, formé de particules d’écorce détachées par la chenille, puis agglomérées par elle, acquiert une consistance ligneuse ; sa surface extérieure a le grain et la teinte exacte de l'écorce ; on peut dire qu'il présente avec l'écorce le mimé- tisme homochromique le plus parfait qu'il nous ait été donné de voir jusqu'ici. Pour l'œil humain, ce mimétisme parfait joue un rôle protecteur indéniable. Mais le Lépidoptère n’a guère à craindre de l'espèce humaine ; l’entomologiste seul est son ennemi.

Par contre, le Pic épeiche est un prédateur redoutable pour l’Insecte ; il ne se trouve nullement dérouté par le mimétisme homochromique du cocon ; il l’attaque à coup sûr et l’ouvre pour en extraire la chrysalide. Sur les troncs de Peuplier visités par l'oiseau, pas un cocon ne semble épargné. Une fois ouvert, le cocon devient très apparent, par sa surface interne, luisante, vernissée.

Quel sens (l’olfactif ?) révèle à l'oiseau la présence du cocon et de la chrysalide incluse ? C'est un premier problème biologique tou- chant les rapports de l'oiseau et de l'insecte. Il attend sa solution.

Un autre problème de biologie générale est posé par ce cas de

Source : MNHN. Paris

264 ALAUDA, VIH, 2, 1936.

mimétisme si remarquable : l'efficacité réelle ou illusoire du mimé- tisme homochromique poussé à un si haut degré de perfection. Ce problème se résout franchement par la négative. Le mimétisme joue un rôle de protection parfaite de l'insecte vis-à-vis de l’homme ; l’insecte est préadapté, pourrait-on dire, à la protection vis-à-vis de l’entomologiste, mais il n’est en rien protégé contre son prédateur normal, l'oiseau.

Le rôle protecteur du mimétisme homochromique reste, dans ce cas particulier, une vue de l'esprit, un concept anthropomorphique, sans lien avec la réalité.

L'interprétation que formulerait avec toute vraisemblance Je biologiste de cabinet, ne résiste pas à l'examen du biologiste de plein air.

Ce point de l'éthologie du Pie épeiche offre done un intérêt général indéniable.

D'autre part le rôle du Lépidoptère arboricole dans le régime ali- mentaire de l'oiseau, en saison hivernale et vernale, se trouve ainsi précisé.

Henri Hem De Baisac.

Deux nouveaux points de rencontre de Parus atricapillus en France :.

Les ornithologistes allemands campés en France pendant la Grande Guerre avaient signalé que Parus atricapillus ne vivait pas dans les forêts de Résineux des Hautes-Vosges. Du moins était-il à présumer que l'Espèce habitait, dans notre département des Vosges, les formations boisées de plaines et vallées correspondant à son biotope habituel dans le Nord-Est de notre territoire national (sous-bois épais, grosses haies en lisières, ete…, vivre le plus sou- vent caché et pouvoir creuser dans les troncs, branches, ou piquets vermoulus, les cavités de nidification que l’on sait) ?. M. B. MourL- LarD vient de transformer celte présomption en certitude. Je lis en effet, dans une lettre qu’il m'adressait le 25 juin :

« Parus atricapillus : entendu et vu le 2 juin un couple à { km. du pont de la Voivre, sur la Meurthe, à 4 km. en aval de Saint-Dié; réentendu l'Oiseau, 15 jours plus tard, à 200 m. du même endroit.

1. Voir pour derniers pointages, Alauda, 1932, p. 358 et 1933, p. 527. 2: Cf. He ve Barsac, A/auda, 1929. pp. 305-335 ; Jouaro; ibidem, 1933, pp. 42-100.

Source : MNHN. Paris

CORRESPONDANCE, NOTES ET FAITS DIVERS 265

Epais buissons d’Epine noire avec, émergeant, des Sureaux et des Chênes ; non loin de là, région marécageuse en bordure de la Meur- the, avec Saules, taillis de Frênes et d’Aulnes…. »

Le plus méridional des lieux de rencontre, chez nous, de Parus atricapillus (abstraction faite, bien entendu, de ses races alpestres !) restait, depuis 1928 1, la Bresse louhannaise, Or, à l'occasion de deux explorations printanières dans les Dombes (département de l'Ain, entre Bourg et Lyon), M. O. MeyLax vient de retrouver l'Oiseau, à deux reprises, à une dizaine de lieues au Nord de Lyon :

«25 mai : Rieulfort, près Villars, sur la digue de l'étang et le talus du fossé voisin, parmi buissons divers de feuillus (Erables cham- pêtres, Frênes, Noisetiers, Epines noire et blanche, Ronces, ete…..), j'entends les appels caractéristiques d’une Mésange boréale.

« 14 juin : Bords de l'étang de Balancet, près Bouligneux, biotope comparable au précédent (en plus : Saules blancs, Genêts Sarotham- nus europaeus), j'entends des séries d'appels et je vois à plusieurs reprises, l'Oiseau, très petit, qui les pousse en passant d'un buisson à l’autre. »

Ne sommes-nous, devant ces rencontres de la Mésange boréale, sous une forme dite « des Saules », dans un pays qui, s’il prolonge en quelque sorte la Bresse louhannaise, n’en est pas moins à près de 100 km. plus au Sud, en droit de nous demander si l'Espèce ne des- cend pas encore plus bas, comme telle, jusque dans les bois rive- rains du Rhône, du Lyonnais et de la Savoie, par exemple ? |

Henri Jouarn.

Un cas de nidification curieusement anormal de la Mé- sange charbonnière.

On trouve de temps à autre, dans la littérature ornithologique, la relation de cas de nichée « à ciel ouvert » d’un quelconque de nos Parinés. Et, bien que, 999 fois sur 1.000, ces Oiseaux se montrent de vrais cavernicoles (d’ailleurs invraisemblablement éclectiques dans le choix de la cavité, naturelle ou artificielle, déposer leurs œufs depuis le trou d’arbre, le trou en terre, et le trou de mur, jusqu'au corps de pompe à eau, à la boite aux lettres et à l'aire de Rapaces —) les connaisseurs ne s’en étonnent pas trop : l’abon-

1. CE Porv, R. F. O., 1928, p. 394.

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266 ALAUDA. vil, 2, 1936.

dance des matériaux employés pour le nid lui-même (chez beau- coup des espèces du moins), et les taches plus ou moins rougeâtres sur fond blane des œufs des Mésanges,n'autorisent-ils pas à penser, en effet, qu'à l'origine !, elles nichaient à ciel ouvert ?

Nous croyons néanmoins que la plupart des cas relatés jusqu'ici pouvaient s'expliquer par un manque de cavités propices sur le canton choisi.

Or nous avons découvert, le 5 mai 1936, sur la commune de Gemeaux (Côte d'Or), en lisière d’un bois abondent les grosses branches et les troncs vermoulus creusés par les Pics épeiches Dryobates major (peut-être aussi les Pics épeichettes Dryobates minor), les Mésanges boréales Parus atricapillus subrhenanus, et les Mésanges huppées Parus cristatus brunnescens, un nid de Mésange charbonnière Parus major major dans un Genévrier.

A la recherche de nids de Bouvreuils Pyrrhula pyrrhula, de Linottes Carduelis cannabina, de Verdiers Chloris chloris, de Bruants jaunes et zizis Emberiza c. citrinella et E. c. cirlus, d'Orites Ægithalos caudatus expugnatus, de Mouchets Prunella modularis, ete…., nous « faisions » systématiquement les arbustes et les buis- sons des abords du bois en question, quand un nid assez volumi- neux, négligé, et mal assis sur plusieurs petites branches, nous appa- rut à 2 m. 20 de hauteur. Tiens : encore un nid de Verdier (nous venions d'en trouver deux !); mais apparemment pillé par quel- que bête de rapine ! pensämes-nous (nous venions de trouver un nid d'Orites défoncé).… Quelle ne fut pas notre surprise quand, ayant à tout hasard tâté sa coupe, nous en retirâmes un, puis deux... et jusqu'à douze œufs de Mésange charbonnière !

Cela valait une étude plus détaillée du nid lui-même. Et voici ce que, l'ayant descendu de son perchoir, nous reconnûmes : Sur une infrastructure de branchettes et de radicelles dûe de toute évidence à l'apport ancien d'un Bouvreuil, une Mésange char- bonnière avait amassé d'abord de la Mousse verte, puis des poils

4. 1 y a, évidemment, bien des millénaires : On pourrait voir une preuve de l'ancien- neté du changement de mode de nidification de nos Parinés dans le double fait que : à l'approche d'un ennemi, réel ou supposé, de même qu'en réponse à des coups portés contre l'arbre (ou autres) contenant le nid, la couveuse ne s'enfuit pas, à l'instar des Moineaux, des Etourneaux, etc. mais se tasse plus profondément encore dans la cavité ; 20 la femelle, n’ayant plus besoin pour sa protection de la livrée terne des femelles nichant à ciel ouvert comparer avec femelles Pinson, Bouvreuil, rée dont la vivacité de coloration ne le cède guère à celle de son

etc... porte une li

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CORRESPONDANCE, NOTES ET FAITS DIVERS 267

poils de Lièvre presque exclusivement, dont certains encore tachés de sang et avec, même, des morceaux de peau !, Presque pas de plumes, comme il est d'usage, contrairement à ce qu’on peut lire dans diverses publications (même consacrées aux Mésanges !) dont les auteurs se sont bêtement copiés les uns sur les autres : trois en tout pour l’ensemble du nid, dont l’une de Bouvreuil 9, l'autre de Mésange charbonnière (?), l’autre indéterminée... Et c'était dans l’amas des poils eux-mêmes (bourre) que l'Oiseau avait fa- çonné sa mauvaise coupe.

Dimensions : Grand diamètre : 10 à 15 (nid très irrégulier, avec une sorte de bavure sur un côté). Hauteur totale : environ 10 (nid de Bouvreuil compris). Petit diamètre (coupe) : 5 à 6. Profon- deur (coupe) : environ 4 em.

Poids total : 15 gr. ; des branchettes et des radicelles du Bou- vreuil : 9 gr. ; de la Mousse : 2 gr. 1/2 ; de la bourre : 3 gr. 1/2.

Les 12 œufs, parfaitement frais, pesaient, pleins : au total : 21 gr. 20; séparément : 1,80-1,80-1,85-1,75-1,80-1,80-1,60-1,70- 1,80-1,80-1,80-1,70.

La femelle pondeuse n’avait pas paru (elle ne couvait certaine- ment pas encore), mais le mâle était venu chanter à deux ou trois reprises pendant nos opérations de reconnaissance et de récolte.

Henri Jouarp et Georges DE Vocué.

[C’est l’occasion de citer ici deux autres cas de nidification anor- male chez des oiseaux cavicoles.

Le premier se rapporte au Rouge-queue Phœnicurus phœnicurus. Au Bois de Boulogne (Paris) il nous a été donné d'examiner un nid de cet Oiseau, situé dans un faisceau très dense de petites branches, qui se dégageait du tronc lisse d’un Hêtre, et qui avait la densité d’un « balai de sorcières ».

L'autre cas se rapporte à la Bergeronnette grise Motacilla alba. En gare d’Albertville (Savoie) un couple de ces Oiseaux avait placé son nid sur la section d'une branche verticale de Marronnier d'Inde (si nos souvenirs sont exacts). Les rejets jaillis au niveau de cette section étaient nombreux et entouraient complètement le nid.

Dans ces deux cas les nids étaient absolument enfouis dans un

1. Sans doute arrachés au cadavre d'un de ces Mammifères blessé, puis crevé dans les environs.

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268 ALAUDA, Vi. 2, 1936,

lacis de branches et de feuilles. 11 n’est donc pas surprenant que les Oiseaux aient trouvé dans ces micromilieux particuliers des condi- tions assez analogues à celles qu'ils recherchent dans les véritables cavités et que le phototropisme négatif et le stéréotropisme qu'ils manifestent dans leur mode de nidification aient été ainsi satisfaits.

Henri Hem DE Bazsac.]

Pour l’étude de la migration des Oiseaux.

J'ai lu avec le plus vif intérêt l’article de M. le professeur-Dr Aly Waury : « Quelques propositions pour l'étude de la migration des oiseaux » (Alauda, 1, janvier-mars 1936, pp. 86-90).

Bien que partageant les idées de l’auteur au sujet de la création de nombreuses stations ornithologiques, je ne saurais accepter sans réserves qu'on accorde le titre, et surtout la fonction d’observateur à des personnes même très instruites, mais qui ne se sont pas préa- lablement astreintes à une étude sérieuse et suivie des oiseau

« L'ornithologie ne s’improvise pas », à dit mon regretté ami Louis LAVAUDEN dans l'Eleveur du 21 octobre 1934, page 530.

Accorder aux instituteurs ce qu'on ne pourrait refuser aux profes- seurs, médecins, notaires, avocats, magistrats, vétérinaires, ete.,etc. ne saurait nous apporter qu'un lot important d’ebservations plus ou moins douteuses. Alors que dix notes émanant de personnes qua- lifiées ont une grande importance, je ne saurais en accorder à cinq ents provenant d'observateurs non avertis.

Û

« Oserai-je dire, d'ailleurs, écrivait LAVAUDExN dans l’article déjà cité, que je ne crois pas beaucoup aux enquêtes en matière d'histoire naturelle ?

« Ce procédé journalistique commode, par lequel un ignorant demande à d’autres ignorants de l’éclairer sur des sujets que ni les uns ni les autres ne connaissent, ne saurait, en cette matière, donner des résultats sérieux. »

Or, il est extrêmement difficile, dans certains cas, d'identifier à une certaine distance des oiseaux au vol et même posés. Les meil- leurs ornithologistes commettent parfois des erreurs monumentales, qu’en bons naturalistes ils sont les premiers à reconnaître, L'obser- vateur accidentel ne saurait s’avouer qu'il s’est trompé, bien que doué de la plus entière bonne foi. « HERBERT SPENCER... a montré la curieuse tendance qu'ont la plupart des hommes, à formuler des

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CORRESPONDANCE, NOTES ET FAITS DIVERS 269

avis d'autant plus catégoriques qu’ils connaissent moins les choses dont ils parlent. »

Un docteur en pharmacie, président du Syndicat des pharma- ciens d’un département, très grand chasseur, m'a affirmé bien sou- vent avoir abattu des Colibris ! un jour d'hiver, sur les Peupliers bordant la rivière qui baigne le territoire de mon village natal dans

le Gard ! Albert HuGues.

Le Bruant des neiges Plectrophenax nivalis en France (Addendum).

Les légendes des figures illustrant l’article de Noël Mayaun sur « le Bruant des neiges Plectrophenax nivalis en France » (Alauda, 1, 1936, pp. 9-24) ont été omises. Nous les indiquons ci-après :

FrG. 1 (p.19). De gauche à droite : rectrices : 10€ et 9e rémiges

primaires (internes) ; 72 rémige secondaire.

Fi. 2 (p. 20). De gauche à droite : rectrices ; 106, 9e et 8e ré-

miges primaires (internes) ; 7€ régime secondaire.

Fi. 3 (p. 21). De gauche à droite : 4 rectrices latérales gau-

ches ; 4€ rectrice latérale droite ; 10e et 9e primaires.

Fic. 4 (p. 22). De gauche à droite : rectrices ; 10€, 98 et 8 pri-

maires ; 7€ secondaire.

Fic. 5 (p. 23). De gauche à droite : rectrices ; 10e, 9e et 8e pri-

maires ; secondaire.

Ajoutons, pour l'intelligence de ces figures et du texte qu'elles illustrent, que notre collègue (conformément à ce que font depuis quelques années certains auteurs étrangers, mais contrairement à ce qui s’est toujours fait en France), compte les rémiges à partir des secondaires et de l’intérieur à l'extérieur.

ER PAR PE PC TE TEE EEE Mort du Baron R. Snouckaert van Schauburg.

On nous annonce le décès tout récent, survenu à Territet (Suisse), après une longue et douloureuse maladie, du baron René SNouc- KAERT VAN SCHAUBURG, vétéran de l'ornithologie hollandaise et grand ami de notre œuvre. Une note spéciale sera consacrée, dans notre numéro de fin d’année, à cet éminent et très regretté collègue.

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BIBLIOGRAPHIE

TRAVAUX RÉCENTS

A propos d'un livre récent de M. Cuénot sur l'espèce.

[Le dernier livre de M. le Professeur CuÉNoT, déjà cité par H. HEIM DE BALSAC dans un précédent numéro d’Alauda (1935, 4, p. 457) dépasse infiniment le cadre de l'ornithologie. Mais en même temps, il touche de si près aux passionnantes questions auxquelles certains d’entre les chefs de file des ornithologistes contemporains consacrent leurs études, et tient un si large compte des théories qui leur sont dues, que nous ne jugeons pas déplacé de lui consacrer, dans nos colonnes, un important compte rendu.

Ce compte rendu, rous le devons à la plume savante et précise de M. J. R. DENIS, de la Faculté des sciences de Dijon, qui voudra bien trou- ver ici l'expression de nos remerciements. Rédaction (. J.)

Ce livre de trois cents pages. l'érudition se joint à l'expérience du praticien, représente au moins cinquante années de travail et de réflexion. Aussi n'aurons-nous pas la prétention d'y découvrir tout ce que l'auteur a pu y mettre. Notre rôle se bornera à y rechercher ce qu'un systémati- cien peut y trouver d’utile pour sa gouverne.

* +" «

Une première partie traite, sans en discuter, de l'histoire de la notion d'espèce D'importants théoriciens, caractéristiques d'un état d'esprit plus répandu qu'on ne pense AGASSiZ, VIALLETON, par exemple —, sont laissés, ou à peu près laissés, dans l'oubli, et peut-être à dessein. L'opi- nion de M. CUÉNOT sur les compromis métaphysico-scientifiques nous eût cependant été précieuse.

* Ce

Dans la seconde partie, après avoir brièvement défini les principaux termes usités en cytologie, l’auteur nous fait connaître son point de vue :

Tout. depuis le caractère d'embranchement jusqu’à la plus infime parti cularité individuelle, reconnaît une cause dans le patrimoine héréditaire. Le cytoplasme (plasmon) ne joue que sous l'influence du noyau C'est ie patrimoine héréditaire du noyau (génome) qui a « l'initiative des change- ments évolutifs qui se sont produits d’âge en âge ». « La formation d’une

1. L'Espèce, par L. Cuévor. G. Doix et Cie, Editeurs, 8, place de l'Odéon, Paris (6e). Prix : 30 francs.

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BIBLIOGRAPHIE. TRAVAUX RÉCENTS 271

espèce nouvelle sera le résultat d'un changement dans le génome. » Le point de vue est très clair : Tout vient du dedans, rien du dehors. Chaque parent apporte à la lignée une contribution égale Chaque gamète apporte à l'œuf un nombre égal de chromosomes. « Il est donc logique de regarder le matériel chromosomien comme représentant le patrimoine génomique. » On aimerait savoir s'il le représente tout entier. Il semble que le con- texte réponde à la question Ily a, dans le patrimoine génomique, « quelque chose » que nous nommons des gènes, et ces quelque chose sont « indé- pendants les uns des autres et répartis d’une façon ordonnée et fixe dans les divers chromosomes ». Cependant les gènes sont passibles de change- ments (mutations). On nomme allélomorphes (allèles) les deux termes d’un couple formé par un gène et par sa modification A l'aide d'exemples, l’auteur montre comment on peut dans un génome substituer un gène à son allèle. En même temps, il nous avertit que le changement d’un gène en un allèle semble entraîner souvent la modification d'autres gènes. Par conséquent, l'indépendance des gènes, postulée plus haut, n’est pas abso- lue. Toutefois, dans la pratique, on peut toujours nommer un gène d’après son rôle principal. L'auteur définit l'homozygote. l'hétérozygote. la domi- nance, le partage d'influence, faits d'observation courante, dont la domi- nance et la mosaïque ne sont sans doute que des cas particuliers et qui semblent bien prouver l'interaction de gènes. Il ne tarde pas à souligner l'importance de cette interaction : « leur qualité (celle des gènes) n'est pas le seul fait qui intervienne dans la différenciation d’un caractère ; leur quantité, par rapport aux autres facteurs (balance génique) a aussi son importance ainsi que leur position topographique dans un chromo- some ». Naturellement, l'effet d'un gène est modifié par les agents exté- rieurs et les hormones : et l’auteur prend bien soin d'employer les mots «effet» ou « expression », de telle sorte que si le gène peut perdre son omnipotence, il n'en conserve pas moins son identité et ses propriétés latentes. Il faut, en effet, que le gène ne soit aucunement modifié du fait de son fonctionnement, afin de se retrouver identique à lui-même lors de la génération suivante, M. CUÉNOT appelle aussi nutre-attention, fort dis- crètement, sur la valeur de la méthode génétique. On ne connaît un gène que quänd il a donné un allèle : « Ce qui n'a pas varié reste inconnu. » Or, les Variations par mutation sont généralement de faible importance, les fortes variations (Méduse pentamère-tétramère par exemple) étant rares et leur interprétation discutable, Et la méthode génétique ne peut s'appliquer qu’à des variations suffisamment fortes pour donner lieu à des répartitions en classes bien tranchées Elle ne permet pas l'étude des plus faibles. De l'impression erreur ou vérité? de phénomènes discontinus, Mais, une méthode ne donne que ce qu'elle peut donner, et il faut bien avouer que c’est elle qui nous donne le plus clair de notre connaissance. C’est pourquoi l'auteur parle en généticien. pense même en généticien. Il ne discute pas. Il ne s'arrête pas à quelqu'une de ces solu- tions éclectiques, ménageant le pour et le contre. qui sont chères à notre esprit latin Il se met résolument à l'école: non pas qu'il pense qu'il n'y ait point de salut hors de l'Eglise morganienne, mais simplement pour voir elle nous conduira, C'est une attitude fort louable et qu’encou- ragent les résultats acquis.

Que sera la génétique de l'avenir ? L'auteur n’est pas prophète. On peut cependant tirer de son texte quelques données sur l'évolution des idées en génétique, et deviner que les contradictions des résultats d’expé- riences fondées sur la nature discontinue des variants vont nous con-

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272 ALAUDA Vi, 2, 1936.

duire à des conceptions analogues à celles qu’on a de la sexualité. On passera du domaine qualitatif au quantitatif. Mais, encore une fois. M. CuéNor ne spécule pas sur l'avenir et se contente de nous laisser devi- ner la leçon du passé.

Comment établir la carte des gènes ? Les gènes s'héritent par groupes, et tout se passe comme s'ils étaient alignés, à la manière des chromo- mères, le long des chromosomes. 1l arrive que cet enchaînement (linkage) des gènes se trouve rompu. Or (c’est fort regrettable) l'examen des chro- mosomes ne montre rien d'anormal, On en est réduit à une hypothèse, celle de l’enjambement (crossing-ower). qui postule l'échange, en synapsis, de portions de chromosomes entre les deux partenaires synaptiques. Cet échange implique des ruptures de chromosomes. La chance pour qu’une rupture se fasse entre deux gènes sera d'autant plus grande que les loca- lisations (loci) de ces gènes dans les chromosomes seront plus éloignées. On se rend compte de la réalité des échanges par des croisements appro- priés. Dressons le tableau de fréquence des échanges pour les divers couples de gènes pris deux à deux. Si notre documentation est suffisante, nous pourrons obtenir des valeurs de fréquence qui seront proporticn- nelles aux distances relatives des loci. Si nous choisissons une distance- unité (le morgan), nous pourrons ainsi établir notre « carte des gènes » {toutefois la chaîne des gènes aura, par rapport aux bouts du chromosome, une position tout à fait arbitraire). Le gène doit grandir afin d'avoir doublé de volume lors de la cinèse. A noter que les chromosomes ont des régions sans gènes: leur existence empêche d’assimiler le gène au chromo- mère.

Cette hypothèse a le mérite d’être la plus simple qu'on puisse imaginer. De plus, elle a été vérifiée par « des milliers d'expériences » qui ont valeur de recoupements. Aussi « cette construction hardie est devenue aussi cer- taine que possible. »

L'auteur définit ensuite le génotype, le biotype et le phénotype, signale les convergences des phénotypes Puis il note très nettement, à propos des facteurs multiples, la somation des influences géniques Certains fac- teurs sont dits « lethals » quand ils sont en double dose et ne peuvent persister que s’ils sont compensés par un allèle non léthal. Tout homozy- gote par rapport à un gène léthal meurt plus moins tôt. Il y a des degrés dans la léthalité, il y a donc matière à mesure Autre question de valence : le déterminisme des supersexes polyploïdes des Drosophiles, et sans doute des Bombyx disparates.

Comparant les générations d’hétéro- et d'homozygotes, on constate que généralement les premières ont une vitalité supérieure à celle des secondes (hétérosis) La dissemblance des patrimoines parentaux semble accroître la vitalité On fera sans doute rentrer ces faits d'hétérosis dans le cadre plus général de ceux qui sont à la base de la continuité des lignées cellu- laires. D'autre part, cette dissemblance ne saurait être trop accentuée, sous peine de voir le phénomène qui en résulte changer de zone et l’inter- stérilité faire place à la fécondité.

Insistant encore sur l'importance de la quantité de substance génique.l’'au- teur passe à l'étude de la variation ou mutation génique, qualitative et quan- titative, A la mutation génique s'ajoutent d’autres causes de variations transmutations chromosomiennes. Il définit la polyploïdie et la polysomie, puis la variation structurale des chromosomes (modification de l’ordre des loci par inversion, translocation interchange, doublement ou reduplica- tion. déficience ou délétion). Il attache aux variations structurales en ce

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BIBLIOGRAPHIE. TRAVAUX RÉCENTS 273

qui concerne leur résultat une importance plus grande qu'aux muta- tions géniques : celles-ci, même répétées, ne peuvent créer de « bonnes espèces nouvelles », tandis que celles-là en sont souvent capables.

Le nombre des chromosomes n’est pas forcément un caractère spéci- fique, mais beaucoup de groupes sont caractérisés par une « garniture chro- mosomienne » relativement bien définie condition d'imaginer des divi- sions ou des soudures de chromosomes). Chez les Reptiles. le type de garniture est aisé à découvrir ; mais il y a des cas d'interprétation plus difficile (Mus rattus et M. r. alexandrinus p. ex.). L'évolution des garnitures chromosomiennes a été suivie parallèlement à celle de divers groupes, principalement chez les Végétaux. Ici, on peut placer, à la base du groupe, une forme à nombre minimum, que nous appellerons 2 n, « diploïde », puis considérer toutes les autres formes comme des polyploïdes de la première. Si le coefficient du nombre basal est pair, il y a artioploïdie ; s’il est impair: périssoploïdie. Il y a naturellement des cas le coeffi- cient n’est pas entier (polysomie), mais ils sont rares (types 2 n—1 ou 2 n + 1). La forme artioploïde est seule persistante, ; car seule elle com- porte deux lots de chromosomes homologues capables de se coupler en synapsis et de donner des gamètes complets. Une telle forme est dite équilibrée. Par contre, üne forme périssoploïde ne peut donner qu'un certain pourcentage de gamètes pourvus ,de tous les gènes nécessaires. Aussi ces formes (et les polysomiques du type 2 pn g (q étant impair)) ne peuvent avoir qu'une descendance fort irrégulière. Quand il se forme un polyploïde, deux cas peuvent se présenter: il naît aux dépens d'un diploïde homozygote par exemple (AA... PP) et présente la constitution AAAA.. PPPP. C’est un « autopolyploïde » (ici : autotétraploïde) ; 2 il naît par hybridation de deux diploïdes différents (AA... PP) et (aa... pp). Il aura donc une constitution AAaa... PPpp. C’est un « allopolyploïde », et il y en a beaucoup dans la nature. « L'allopolyploïdie est un mode fréquent de constitution d'espèces nouvelles. »

En général, les polyploïdes sont de plus grande taille que les diploïdes correspondants, mais cette règle est loin d’être absolue. La constance de la relation nucléo-plasmatique est loin aussi d'être toujours respectée. En général les polyploïdes sont moins fertiles que les diploïdes et les auto moins que les allopolyploïdes (sans doute en conséquence de la loi d'hété- rosis). Les polyploïdes végétaux stériles peuvent persister par multiplica- tion asexuée, les animaux par parthénogénèse (Arfemia salina race yigas, Carausius morosus). Dans le règne animal, la polysomie n'est connue que chez les Drosophiles. Dans le végétal elle a été fort étudiée chez les Sola- nées n 12, ily a par conséquent 12 types possibles de trisomi- ques simples et ces 12 types ont été effectivement repérés. Une fécondation d'un trisomique (n + 1) + (n + 1) peut établir une nouvelle lignée balancée. Une polyploïdie peut conduire au même résultat. La poly- somie peut tirer origine d'une non-disjonction en anaphase de méiose : on a alors les gamètes n + 1 et n—1 et ce dernier, incomplet, est non viable L'autre, uni à un normal n donne un polysomique 2 n + 1. Si la non-dis jonction porte sur un polyploïde de rang a, on aura des gamètes an + 1 et an—1, qui seront tous viables (n> 1) car ils ont tous au moins un exemplaire de chaque gène nécessaire, le plus déficient des gamêtes ayant a-1 exemplaires du type de chromosomes dont un ne s'est pas découplé et a>2 Le balancement peut être rétabli comme précédemment, mais des hybrides tels que 2 an—1 sont viables tout comme les gamètes (Exemple : mutant cannelé de Micotiana tabacum parpurea, 2 (2 n—1).

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274 ALAUDA. VII. 2. 1936.

L'auteur étudie ensuite les variations structurales des chromosomes par inversion et translocation, là, naturellement, la carte des gènes est bien connue. La translocation consiste en une rupture, lun des fragments allant se joindre à un autre chromosome. Certains résultats non déficients peuvent donner une descendance. On connaît une cause de translocation : le bombardement des chromosomes par les électrons. Certaines figures cytologiques dénotent les translocations Soit une race À de Datura : notons chaque chromosome par un chiffre à chaque bout : 1-2. 17-18. Soit une autre race B les bouts 2 et 18 se sont détachés et joints respectivement aux bouts 17 et 1 de telle sorte qu’on a la garniture 1-18... 17-2. Opérons le croisement À x B. Chaque élément germinal aura le stock: 1-2,.. 17-18, 1-18,... 17-2. En synapsis, les bouts portant les mêmes numéros vont s’at. tirer et on aura des couplements en chaîne tels que 2-1-1-18-18.17-17-2 (fermeture sur le premier 2. De telles chaînes s'observent effectivement (chez Œnofhera on en connaît à 14 éléments). Mais il arrive que la chaîne ne se referme pas, l'un des segments s'étant soudé à l'autre par son extré- mité et non par sa section et le bout libre du nouveau chromosome attirant mal celui du partenaire synaptique. Les facteurs de tous ces processus sont mal connus. On les rapporte généralement au hasard, mais l'auteur se contente d'écrire, lui qu’ils (ces phénomènes) « se produisent toujours comme par hasard ».… « c'est-à-dire sans cause apparente ». Ce qui veut dire que ces causes cachées existent, et l’auteur en examine quelques-unes de probables : le vieillissement, qualifié de « cause interne », les trauma- tismes, le Bacterium tumefaciens, les greffes, la température, les oscilla- tions à grande longueur d'onde et surtout les radiations courtes.

Les caractères souvent variables en fonction du milieu non héré- ditaires, sont dits accommodats ou somations. Un être accommodé croisé avec un non-accommodé ne voit pas mendéliser ses somations. On er déduit quele génome n'a pas été touché par la somation. S'il l'avait été, on aurait eu affaire à une mutation. Donc « par définition » si somation caractère acquis, un caractère acquis ne saurait être héréditaire. Cela est parfaitement logique et le débat fondamental du transformisme change simplement de vocabulaire. Y a-t-il des mutations acquises, c'est-à-dire reconnaissant une causalité immédiatement ou médiatement extrinsèque autre que le hasard ? Il semble résulter de la leçon des faits exposés que l’auteur n’en nie point la possibilité, mais, s’il ne soulève pas la question, c'est qu'elle sort du domaine de la génétique actuelle. On connaît certaines somations qui ne sont pas sans influence sur les gamètes. sinon sur leur génome. Il faut parfois plusieurs générations pour qu'apparaisse progres- sivement le phénotype accommodat ou pour qu'il disparaisse. Il est bien difficile d admettre que ces somations d'influences ne portent que sur la quantité de vitellus ou d'albumen et qu'elles n'ont pas, temporairement, modifié au moins le plasmon. (Chez les Criquets migrateurs on parle d'une substance (locustine), qui serait localisée dans le cytoplasme ) Dans l'état actuel de nos connaissances. il y a évidemment un hiatus entre l'accom- modat même persistant temporairement et le gène. Mais nous com- mençons à entrevoir l'importance du facteur « temps », dont nous ne dis- posons guère. Peut-être n'y a-t-il, entre la somation et la mutation, qu'une question de seuil à franchir? Mais l'auteur s'est interdit le domaine de l'imagination!

A la page 72, le systématicien méditera profitablement sur la nécessité d'établir une définition de l'espèce. valable dans toute l’aire de dispersion, et surcelle de reconnaître les « possibilités » de cette espèce. C’est la

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condamnation de la systématique du «type», fort en honneur en plein xxe siècle.

Avec le paragraphe suivant, nous attaquons le dangereux domaine de l'adaptation : « la sélection écologique des préadaptés ». Les mutations semblent se faire au hasard et le hasard ne se préoccupe pas de la valeur biologique des phénotypes résultant. Certains seront capables d'exploiter leur domaine. d'autres non Ceux-là seront les adaptés. L'auteur les déclare « préadaptés » et semble se complaire, maintenant ce mot dange- reux, à égarer les esprits vagabonds Logiquement, sa position semble inattaquable, le génome étant préadapté par rapport au soma. Parmi les préadaptés. certains le sont plus que d'autres (étant plus prolifiques, plus résistants, mieux immunisés. etc.) et ceux qui réussissent dans la vie,ceux quic proviennent d'un choix séculaire parmi les divers génotypes candidats à l'occupation de la place« vacante» sont les « écotypes». Ilest bien évident que le « choix » (nous ne voulons voir dans ce mot qu'une figure de rhétori- que) porte sur les génotypes par l'intermédiaire de leur phénotype, et qu'un accommodat.en ce qui concerne la pérennité des lignées, vautune mutation. 11 est donc bien possible « qu'il n’y ait par places, dans les régions élevées par exemple. que des accommodats » Le systématicien sera souvent fort empêché de distinguer, sans faire appel à la méthode expérimentale, lécotype de l'accommodat. C'est une difficulté principalement pour ceux qui voient entre les deux choses une différence fondamentale à laguelle on doit se résigner. L'harmonie constatée entre l'écotype et le milieu résulte d'une sélection. Suivons l’auteur avec l'exemple du Plantain mari- time dans la nature. L'espèce est constituée par des hétéozygotes, et géné- ralement non autofécondée. Sur les rochers, tout près de la mer, les pieds sont nains et À tiges florales prostrées (type I): plus loin de la mer, sur les talus herbeux, on a surtout des pieds du type dressé (type Il), ainsi que quelques formes intermédiaires entre les types I et III (type Il). Semons au jardin d'expériences des graines des types I et III. La sélec- tion ne saurait jouer sur leurs produite, L'élevage montre que certains caractères sont des somations et que, pour les autres, le pourcentage des divers types n’est pas le même dans chaque lot cultivé. Les graines du lot I donnent 61 % du type I. 87 % du type Il, 2 ®, du type III : celles du lot HI. 15 %, du type 1, 70 % du type Il, 15 9, du type III. Les deux lots n'ont donc pas même constitution génotypique. « On ne peut comprendre ce rapport avec le milieu qu'en faisant intervenir une sélection. » Si nous comprenons bien, il s'ensuit que statistiquement parlant, les lots I et III sont considérés comme primitivement identiques et tenus pour capables si la sélection n'était pas intervenue de fournir le même pourcen- tage de phénotypes. La sélection, opérant sur le lot I par exemple, a sup- primé presque tous les phénotypes III et les deux lots sont devenus géné- tiquement inéquivalents. Le jeu de la sélection cesse quand le pourcentage d'inadaptés est assez faible pour que le peuplement voie sa pérennité assu- rée. Il est regrettable que le jeu de la sélection ne soit guère facile à constater effectivement et qu’on ne puisse sans scrupule souscrire à l'af- firmation si catégorique de l'auteur : « On ne peut comprendre. . » Une explication lamarckienne vient immédiatement à l'esprit et nous ne voyons pas quelle mérite d'être reléguée l'auteur remise les choses « du temps l’on croyait à l'hérédité des caractères acquis ». (Nous n'enten- dons pas prendre parti en revendiquant la mise dans le même sac de deux explications également invérifiables.) Ajoutons que le cas envisagé ne saurait apporter la solution du débat, les variants n'étant pas lignées

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276 ALAUDA. vin 2. 1936.

pures et les elasses beaucoup trop imprécises. Notons encore que l’inter- prétation choisie est pratiquement indifférente au systématicien…

Comme conclusion de sa seconde partie, l’auteur énumère tous les chefs de documentation que le taxinomiste doit réunir pour qu’une espèce soit bien connue. Toutes les disciplines de la biologie sont mises à contri- bution, et la systématique nous apparaît comme une synthèse générale de nos connaissances. Ce point de vue diffère notablement de celui que M. F. PICARD a soutenu dans sa préface à la Faune de France des Lon- gicornes. Quand M. Cuénor fait de la morphologie « évidemment la base » de la systématique. ce n’est pas qu'il prétende assigner un rôle prépondé- rant à telle ou telle discipline, car il n’y a pas, dans l'univers, de sys- tème de référence privilégié. Il constate simplement un rôle historique de la morphologie. Si les espèces physiologiques sont actuellement peu nombreuses, c’est qu'on n'a pas eu le loisir d'en établir davantage.

+ +.

La troisième partie du livre traite des unités de la systématique. Tout le monde connaît l'histoire des Draba de JORNAN On se demande pour- quoi on a inventé, pour les 200 types d'Erophila verna. la qualification de jordanon et surtout celle d'espèce élémentaire. alors que ces 200 types se comportent exactement à la manière de bonnes espèces. Mais on doit se souvenir qu'il faut toujours compter avec le facteur historique quand on étudie l'évolution des idées scientifiques. Et sile jordanon n’a pas été élevé au rang d'espèce, c'est que « les botanistes herborisants du temps de JORDAN lui firent mauvais accueil ». Le jordanon (p. 91) n'est au fond qu'une lignée pure (une lignée pure naturelle) qui se propage par auto- fécondation et aussi ce qui complique (p. 88) l'interprétation des croisements par parthénogenèse. « La culture prolongée. par semis, est le seul procédé qui permette de reconnaître les jordanons qui exis- tent dans la nature. » (Cependant des études statistiques associées à des considérations de localité pourront, à défaut de mieux, fournir d’utiles indications.) A notre avis, le jordanon est l'espèce variable au uini- mum. Le linnéon « seul groupement utilisable en systématique pratique » peut valoir un jordanon et, S'il figure un complexe plus compréhensif c'est en réalité que les jordanons dont il serait composé ne se présentent pas comme individualisés. Le linnéon appelé parfois espèce collective comprend sans doute parfois un ensemble d’ensembles plus ou moins sépa- rés; mais ces ensembles élémentaires devraient être nommés, aulieu de jordanons, simplement groupes de variants ou. d'une façon plus imagée espèces naissantes, sinon espèces jointives. Mais laissons ces considérations, auxquelles l’auteur ne touchera pas directement. pour noter la remarque suivante : « L'existence... des jordanons, affines, autonomes. constants, pose sous un aspect nouveau le problème de l'espèce et aussi la réa- lité des solutions lamarkienne et darwinienne de l’évolution, » Influence du milieu ? Non pas : les jordanons vivent fort bien côte à côte. Sélection ? Comment pourrait-eile être efficace purtant sur des objets si peu dissem- blables ? Mutations. répond l’auteur, sans se perdre en considérations sur leur déterminisme

Quelques mots ensuite sur les jordanons animaux qui, chez les formes à fécondation croisée, ne peuvent guère persister sans l’artifice de la sé- lection. Puis. le clone des bactériologistes. qui ne diffère de la lignée pure {ou jordanon artificiel)que par le mode de multiplication de ses composants,

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BIBLIOGRAPHIE, TRAVAUX 1

ÉCENTS 277

lesquels ont pour origine une seule cellule On étend notion de clone à des formes plus compliquées que les Schizophytes, Infusoires, Daphnies parthénogénétiques. et peu importe l'homo- ou l'hétérozygotie des consti- tuants. Tout comme la lignée pure, le clone ne tarde pas à manifester des signes de variabilité L'auteur reprendra la question des clones et des souches, dans sa IVe partie (p 116). La notion de syngaméon est encore notre avis) un reliquat de l’histoire, un vestige des temps sont-ils révo- lus ? l’on admettait à priori que l’amixie ou l'infertilité des hybrides constituait le caractère spécifique privilégié. L'auteur nous montre qu'il Ya des cas le synganéon se confond avec le linnéon, mais que la plupart du temps il est plus vaste ou plus restreint. Suit une revue d'exemples d'hybrides fertiles, complétant heureusement celle donnée dans la l’enèse des espèces animales : formes donnant des hybrides féconds À disjonction mendélienne, recroisables avec les parents et sources de formes nouvelles, et beaucoup d'intermédiaires vers le type hybride orphe- lin, ayant, en certains lieux. complètement éliminé ses parents et « en voie de former des espèces nouvelles plus ou moins constantes »

Il est toujours permis d'étudier la variabilité d’une espèce en fonction de tel ou tel caractère et la première variable qui se présente à l'esprit est la localité. Avec RENSCH, M CUÉNOT nous présente d’abord la « race géographique ». De deux choses l'une : ou bien, dans le district-frontière de la race considérée, existent des intermédiaires (en particulier des hybrides], ou ces intermédiaires n'y existent pas. Dans le dernier cas, il ne saurait S’agir que de linnéuns, et la notion de race géographique n'est admissible que dans le premier cas. L'auteur fait montre à ce propos d'un grand libéralisme : « Cest alors au spécialiste d'apprécier la valeur qualitative et quantitative des différences et de décider si la forme à l'étude est encore une race ou une espèce autonome. » Ces « apprécia- tions » ces « décisions » sont difficiles. On peut cependant concevoir un découpage d'une aire meilleur que tout autre : celui qui jnindrait toutes les zones le pourcentage des formes de passage serait minimum. La question se pose de la terminologie à adopter, On pense à une nomencla- ture trinominale, le troisième nom définissant un iype standard ou bien un type extrême. Mais il est bien évident que cette méthode par coupures ne rend qu’assez imparfaitement compte du phénomène. Aussi, certains (STRESEMANN, p. ex.) ontils. pour mieux faire, utilisé dans la nomencla- ture des signes indiquant les grandeurs, traçant ainsi à notre avis du moins la route à suivre vers une systématique précise les nombres {et qui sait ? les fonctions) remplaceront à leur tour les signes arithmé- tiques. Pour Son compte, l'auteur admet la nomenclature trinominale.

I1 s'est donné la peine - et c'est fort méritoire d'homologuer les ter- minologies des différents auteurs (cf. le lexique de la fin du livre). Il étu- die la sous-espèce géographique en botanique et en zoologie. et trace la marche de la variabilité de l'espèce dans les deux règnes Naturellement, il superpose au problème statistique du taxinomiste celui de l'isolement par sélection de préadaptés à partir d’un type nodal. On passe ensuite au « Rassenkreis » (cercle de races) qui serait si nous avons correctement compris un ensemble continu de races géographiques, un ensemble de formes assez proches pour qu'il soit raisonnable de regarder ces formes comme descendues d’un ancêtre commun !. La question d’interfécondité

1. C'est là, plutôt, le Formenkreis de Kimwscumor, ou la Realgattung de Kaxr, conceptions sur lesquelles Kiriscumibr, après s'en être expliqué en un livre spécial

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278 ALAUDA, vil -— 2, 1936.

est laissée de côté. Si le paragraphe consacré au Rassenkreis ne laisse que des idées plutôt vagues, ce n'est assurément pas la faute de l’auteur. « On voit écrit-il que le cercle de races correspond à la grande espèce de LINNÉ, à l'espèce naturelle de beaucoup de systématiciens modernes Il est défini par une formule binominaie. » Il a le syngaméon pour cas-limite: certains répartissent encore en groupes particuliers les races dont il est constitué, et cela nécessite une nomenclature quadrinominale. Disons encore que, puur RENSCH, l'espèce Art n’est pas notre linnéon ; ce n’en est qu'un cas particulier, un linnéon dont la variabilité serait assez faible pour qu'on ny puisse distinguer aucune race géographique. L'auteur montre que dans l’Arf de RENSCH rentrent les espèces à brassage (le bras- sage étant un facteur de régularité des courbes), les espèces récentes sur lesquelles la sélection des préadaptés n’a pu agir (l'aire de dispersion étant trop restreinte), les espèces-reliques. On ne s'étonnera pas qu'il n'y ait pas de coupure nette entre le syngaméon, le Rassenkreis et l’Art. Notons que le syngaméon est établi sur la considération d’un caractère privilégié dont on ne tient naturellement pas compte pour établir le cercle de races Or. il arrive que le cercle de races puisse être plus compréhensif ou moins compréhensif que le syngaméon, Il y aura done une difficulté pour énoncer dans l'ordre de compréhensivité décroissante les termes d'une nomenclature voulant représenter ces catégories. Il existe encore. selon RENSCH, un Artenkreis, genus geographicum. Mais M. CUÉNOT ne voit aucune différence entre ce cercle d'espèces et le genre à moins que ce ne soit avec le sous-genre : encore certains en font-ils avec des cercles de races ou bien avec des syngaméons ! On continue cette descente aux enfers de la taxinomie par une visite aux ichtyologistes russes, dont la nomenclature est, selon l'auteur, « un peu confuse ».… Puis l’on passe à l'examen des travaux de CRAmPTON. Les espèces de Partula y sont décou- pées jusqu'à la quatrième dénomination. Les catégories établies par CRAMPTON, s'il est vrai qu'elles sont « de plus en plus comp réhensives » nous apparaissent comme logiquement justifiées. Elles sont fondées sur la morphologie et l'écologie. CRAMPTON, n'ayant pas fait de croisements, traite sur le même pied somation et mutation. Et nous revenons à la question très épineuse de savoir quelle sera l'attitude du taxinomiste devant le problème : somation-mutation :

On sait avec quel soin certains éliminent de leur systématique tout ce qu’autrefois on nominait « caractères adaptatifs ». pour ne conserver que ce qui était adaptatif au minimum, à savoir tort ou à raison) les carac- tères sexuels secondaires D'autre part, le rôle du systématicien et même, n’en déplaise à certains, celui du scientifique en général n'est-il, pas avant tout de décrire ? Une somation présente à nos yeux autant d'in- térêt scientifique qu'une mutation. Les facteurs de l'une sont dans le génome, ceux de l'autre dans le plasmon ; le comportement des deux, en descendance. n'est pas le même. Mais si l'on pense qu’il n’y a, entre eux, que des différences de degré, on ne doit pas les négliger puisqu'il est un seuil d'émergence entre les deux catégories de phénomènes. On voit les

Die Formenkreislehre (traduit en anglais sous letitre de The Formenkreis Theory), est revenu à maintes reprises dans ses Berajah et Falco. À la vérité, les différences entre le Rassenkreis de Rexseu et le Formenkreis (bien plus large et, en quelque sorte « historique v} de Kuæinscumpr semblent avoir momentanément échappé à M. Cuëxor, Rédaction (H. J.)

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BIBLIOGRAPHIE. TRAVAUX RÉCENTS 279

difficultés, et l’on commence à comprendre ce que l’auteur entend dire quand il parle de « systématique pratique ».

Quand on étudie les courbes de fréquence représentant la variation d'un caractère, on note souvent des points très isolés, loin du côté des asymptotes. Les porteurs du caractère correspondant seront dits aberra- tions. encore, le systématicien doit se contenter provisoirement (prati- quement) de cette dénomination, qui ne préjuge de rien. Pour le généticien, laberration sera soit un accident non héréditaire, soit une mutation (sensu lato). L'auteur juge superflu le mot exotype proposé pour les aberrations héréditaires, et le met en synonymie avec mufation génétique (il semble pourtant qu'une transmutation, une polyploïdie, etc., puissent fournir aussi bien que les mutations géniques (sensu stricto) des phénotypes aber- rants).

L'auteur étudie ensuite la terminologie de TURESSON, Ce dernier pro- pose comme critère l'évaluation du degré d’amphimixie. A priori, il est assezplaisant qu'on vous propose une balance pour mesurer des longueurs. Plus sérieusement, on constatera que la méthode se révèle impuissante à définir au moins un groupement suffisamment discontinu pour être maniable. Elle a pour conséquence l'établissement de catégories nou- velles telles que l'agamospecies (espèce asexuelle) qui ne sont pas faites pour simplifier la nomenclature 1.

Enfin, l'auteur reprend la question des mufations des paléontologistes, et nous met en garde contre l’homonymie de deux séries de choses qui ne sont pas dans le même espace.

+

La IVe partie monographies d'espèces est la « mise à l'épreuve des terminologies proposées » et que, jusqu'à présent, M. CUÉNOT n'avait pas voulu critiquer, On ne saurait résumer ici cette quatrième partie. Tout ce qu'on en peut dire, c'est ;que même les spécialistes auront à y apprendre beaucoup. Notons, entre autres, les questions des Sauies, des Pensées, des Blés, des Roses, des Crepis, des Œnothères, des Helix (Cepaea). des Faisans, Pintades, Poules, Mulots, Souris, Peromyseus, ete., ainsi qu'une étude des Micraster fossiles et des Cérithes. « ss

La Ve partie traite de la naissance, de l'établissement, et de la fin des espèces. De l'espèce diploïde dérive l'espèce polyploïde (allo- ou autopo- lyploïde). L'isolement se fait souvent par suppression de fertilité et jeu apomixique (espèces elonales). L'auteur admet des variations génomiques «internes et invisibles » qui se traduisent « chez l'être développé par un changement chimique ou physiologique ou encore par des modifications somatiques plus ou moins marquées ». Ces variations sont « la première étape, passant forcément inaperçue. vers la constitution d'une espèce autonome ». C’est reconnaître de la continuité dans la marche de l'évolu- tion. Y aurait-il donc des substrats de l’hérédité, précédant l'apparition du gène et qui ne sont pas des gènes ? Les esprits audacieux ne vont-ils pas immédiatement imaginer une évolution du gène ? Comment aussi inter-

Nous n'avons repris ici que les principales des terminologies étudiées par M. Cuinor !

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préter le « forcément inaperçues » ? Sans doute parce que l'analyse géné- tique se revèle impuissante les classes de variants n'étant pas suffi- samment distinctes pour être maniables à les révéler. Et nous revenons à cette vérité première fort bien soulignée par M. CAULLERY qu'il ne faut pas demander à la génétique (telle que nous la possédons actuelle- ment bien entendu) des services qu'elle ne peut rendre.

Une autre source de nouvelles espèces réside dans l'hybridation (espèces hybrides structurales) Que deviennent les homozygotes disjoints ? Ils sont éliminés, répond l’auteur, au stade d'embryon: « il n’y a de viables que les combinaisons entre deux gamètes différents. » Il s'agirait non pas d’une sélection du plus apte mais d'une sorte de sélection germinale du pré-adapté. Ainsi, une combinaison homozygote parfaitement compatible avec la vie chez les parents devient en quelque sorte léthale quand elle se trouve réalisée chez/un descendant d’hybride. Les uns diront qu'il faut qu'elle ait été modifiée, les autres soutiendront qu’elle est incompatible avec les caractères du nouveau plasmon. Il est oiseux de se demander qui aura raison. Bien entendu, les*facteurs de séparation agissent par sélection sur les candidats à l'existence et les espèces deviennent /statistiquement parlant) de plus en plus distinctes. L'auteur nous fournit une mise au point de la variation polyploïdique, créatrice d'espèces nouvelles. Le méca- nisme du doublement des chromosomes n’est pas toujours le même. Il peut jouer dans l'œuf ou dans les cellules dites somatiques (il s’agit de Végétaux) et on obtient alors des rameaux polyploïdes. D'autres fois, la suppression de la méiose conduit à des gamètes polyploïdes. Les allopoly- ploïdes, grâce à leur matériel hétérogène, donnent naissance à des formes plus éloignées du type parental que les autopolyploïdes, On a vu plus haut comment jouait, en polyploïdie. la balance génale et comment elle peut opérer une sorte de sélection germinale. L'auteur passe en revue divers exemples et montre comment on a réalisé expérimentalement la synthèse de diverses plantes: Tabac, Galeopsis tetrahit, Fléole d'Amérique, Crepis artificialis, ete. Dans le chapitre « Variation numérique des chromo- somes à l'intérieur d'une espèce animale », il suggère une interpréta- tion des faits de polyploïdie constatés chez les Animaux; mais la question est loin d'être aussi étudiée en zoologie qu'elle l'est en botanique. Un cha- pitre assez long est consacré à la variation chimique et physiologique (c'est-à-dire à la variation non décelable par la morphologie). Peut-être y a-til quelque imprudence à faire rentrer dans ces catégories les faits

probable et que l'autenr ne semble pas admettre si lon en juge par les termes mêmes qu'il emploie. L'auteur met-il en série des somations indu- bitables et les plus primitives des variations héréditaires ?

Mais peut-être lui prêtons-nous des intentions qu'il n’a pas ? Quoi qu'il en soit, retenons l'importance théorique de ces variations non décelables.

On a proposé de faire une catégorie pour les espèces physiologiques ou biologiques. A notre avis. toute tentative de ce genre, toute tentative de taxinomie fondée sur la nature des caractères, doit être prohibée Car ce n'est pas la nature d’un caractère, mais sa valeur statistique qui fait sa spécificité.

L'auteur reprend la question des valences sexuelles, telle que l’a déve- loppée R. GOLDSCHMIDT, et soulève l’idée que la force serait en rapport avec la polyploïdie. La tendance aux explications faisant intervenir, la notion de quantité reste entière.

M. CuÉNOT se consacre ensuite à l'étude détaillée des « processus d’iso-

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lement », insistant, non seulement sur les équilibres numériques des chro- mosomes, mais encore sur des déséquilibres de nature non définie groupés sous le nom de non-homologies ou dysharmonies chramosomiennes. Il y a, en effet, autre chose que des dislocations entraînant des couplements anormaux. Ces dysharmonies se traduisent par des incompatibilités mani- festées par l'apparition de la léthalité. Ces incompatibilités sont suscep- tibles de grandeur. Ainsi, l'effet léthal peut ne se manifester que sur l’un des deux sexes (L'auteur rapporte à des dysharmonies chromosomiennes la disparité numérique des sexes dans les hydrides, races humaines par exemple). L'effet léthal, d'autre part, peut agir sur l'embryon ou même l'œuf de l'hydride. Cette dysharmonie est « le phénomène capital de l'iso- lement spécifique ; il faut peut-être encore chercher plus loin que le méca- nisme des inversions, des soudures, des fragmentations. des transloca- tions. ». Et l'auteur pense à toutes sortes de troubles de la maturation et de la fécondation replaçant ainsi le chromosome dans son milieu naturel et laissant imaginer des causalités extra-génomiques qui sortiront peut- être un jour de la pure hypothèse, Sont ensuite passés en revue divers facteurs d'isolement : isolement psychique, dysharmonie entre l'hybride et son milieu, déplacement de l'époque de maturité sexuelle et, plus longue- ment, l'isolement géographique

Considérée dans l’espace, la genèse des espèces s'accompagne du décou- page de l'aire primitivement occupée par l'espèce mère en petites aires habitées chacune par « une future sous-espèce géographique, qui, avec le temps, pourra devenir une espèce vicariante ». D'autres fois, la nouveile espèce naïîtra sur place et s’isolera grâce à quelque processus réalisant l'amixie. De beaux exemples nous en sont fournis par les Gammares du Lac Baïkal, les Fauvettes de la forêt canadienne etc. Naturellement, auteur adopte la théorie du « berceau » : « L'espèce se fonde par la rencontre for- tuite de quelques individus séparés de leur souche. » Nécessairement l'espèce nouvelle a une région d'origine. aire très petite, qui est son ber- ceau, et l'extension de l'espèce est centrifuge par rapport au berceau. L’auteur juge très sévèrement la théorie de l’hologenèse, qui postule une transformation simultanée de tousles représentants de l'espèce mère À en deux autres espèces B et C. Cette dichotomie des espèces reconnaîtrait des « causes internes ». Or, la probabilité d'une mutation est déjà très faible Plus faible encore sera celle de l'apparition simultanée de deux mutations parallèles. On peut alors penser, avec l’auteur, que, parmi toutes les hypothèses probables, celles de l'hologenèse est la moins pro- bable detoutes Certains ne manqueront pas de confronter l’idée d’holo- genèse à celle d’orthogenèse qui fut (et semble encore) très chère à l'auteur. Les mots portaient jadis en eux quelque vertu magique. Nous voulons croire qu'il l'ont perdue et que la notion d'orthogenèse n'est plus, pour tous. que l'expression d’une vérité banale : à savoir qu’on peut toujours joindre par une ligne à peu près droite un certain nombre de points qu’on s'arrange pour disposer convenablement. Ceux qui, comme le statuaire de LA FONTAINE, se mettent à adorer le dieu qu’ils n'ont pas fait table ou cuvette, ne nous intéressent pas ici. Pour rous, l’orthogenèse est un fait, ou, mieux, la transformation d’un fait en une figure pédagogique des plus utiles. Quant à l'hologenèse, ce n'est, selon la propre expression de M. CuÉNOT, qu'uneconstruction de pure imagination. Aussi,à notre avis, ceux qui voudraient embarrasser celui-ci ne pourraientils le faire qu'à l'aide d'arguments extra-scientifiques.

Il va sans dire que notre auteur admet la possibilité à titre de très

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rare exception de la simultanéité d'apparition de deux mutations sem- blables en deux districts différents. Il ne montre cependant pas, pour le « polytopisme », érigé en théorie explicative, une ardeur empressée. Il sait que les lamarckiens donneront de la similitude des flores de hautes montagnes trop distantes pour qu'on puisse admettre une colonisation des interprétations fort séduisantes. Il sait que les généticiens trouvent faci- lement réponse aux objecteurs. Il sait surtout qu’il est oiseux de poser des questions qui ne sont pas mûres pour la réponse.

Après avoir étudié « l'établissement de l'espèce », au chapitre « Fin des espèces », l'auteur expose le point de vue suivant : Contrairement à ce que beaucoup admettent ou semblent aûmettre pour la commodité du langage, l'espèce n'est pas affectée d’un potentiel de durée indépendant des actions de conturrence ou de milieu. « Je crois dit-il qu'une espèce durerait indéfiniment, comme le fait le genre, si aucun agent extérieur ne venait troubler l'équilibre délicat entre les causes de mort et le nombre des germes reproducteurs. » « Pour rendre compte de la vie limitée des espèces, il n’est pas besoin d'imaginer une mystérieuse sénescence. » Son exposé, d’ailleurs court, montre que le seul jeu des influences externes sur le soma peut expliquer la vie limitée des espèces On ne voit cepen- dant pas que sa démonstration exclue formellement une potentialité évolutive inhérente au germen. Elle se contente de la rendre inutile, Et c'est déjà fort beau de ne point surcharger les questions insolubles d'hypo- thèses inutiles.

On ne manquera pas de reprocher à l'auteur d'avoir écrit que le « genre dure indéfiniment »

En somme, M. CUÉNOT tient à rester dans le pur esprit généticien. La cause de variation est dans le germen, et cela ne gêne en rien la théorie qui veut que les causes de mort soient extrinsèques et jouent sur le soma. Il s'agit, pour le germen, de muter ou de périr. Et il ne peut périr qu'en compagnie du soma,

La VIe partie traite de ce que l'auteur nomme les « définitions ». Le pra- ticien n'y trouvera pas tout ce qu’il aurait souhaité (en particulier une dis- cussion de ce qu'il faut entendre par autonomie d’un groupe), mais il y récoltera une foule d'idées profitables, des directives et des cri iques non moins salutaires. Un glossaire, que d'aucuns eussent souhaité plus complet (1), mais qui, tel quel, sera déjà fort utile à qui voudra se livrer à l'étude de l'histoire des idées, termine le livre. On ne saurait trop louer M. Cuéxor d’avoir eu la patience d'homologuer la plupart des termes pro- posés par les auteurs. termes qui sont souvent plus malaisés à comprendre que la nature elle-même.

On ne saurait donner de l'espèce une définition standard, valable pour tous les groupes. Cependant, à l'intérieur d'un groupe donné, l'auteur (trop bienveillant) admet que la bonne entente règne entre spécialistes et que, grosso modo, ceux-ci fournissent des déterminations pas trop discordantes. Peut-on faire mieux ? Oui, à condition de faire appel à tous les carac- tères, de quelque ordre qu'ils soient. Il peut sembler superflu de rappeler

1. En cas d’une nouvelle édition, il serait également souhaitable que fussent revues la bibliographie et la table alphabétique : on n'y retrouve pas toujours, en effet, les noms d'auteurs cités dans le texte et l'énoncé de leurs travaux, Rédaction

€. 3.)

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cette vérité première, condamnant par avance tout système fondé sur des caractères choisis a priori sous prétextes divers et tout système qui ne tendrait pas à devenir de plus en plus complet. La définition de l'espèce, donnée par M. CUÉNOT, sera certainement admise par tous : elle n’est que le développement de formules bien connues, mais sans adjonction de caractères privilégi On pourrait la résumer ainsi: Cons- tituent une espèce tous les individus récoltés dans toute l'aire de leur répartition pendant un temps suffisamment long et qui, à tous les points de vue, se ressemblent plus entre eux qu'à l’un quelconque des individus faisant partie d'un autre groupement. S il est relativement aisé d’arriver à une telle définition, il est plus difficile d'en réaliser l'application. Que de cas litigieux ! Les uns tiennent à notre ignorance, les autres à notre connais. sance du passé. Parmi ceux-ci, il en est la position de l’auteur reste flottante :ainsi celui des Chiens danois et des Chiens chinois, dont M. CuÉ- NOT ne fait que des races. alors qu’en toute rigueur il devrait en faire des espèces. Sans doute convient-il de ne pas heurter trop brutalement l’opinion commune ? Mais, pourquoi ces formes, dont la cytogénétique dé- montre indubitablement l'autonomie, et que cependant on n’érige pas en espèces ?

«Il y a accord général pour leur laisser le statut de formes », dit M. CuÉNOT, plus respectueux du suffrage universel que les « congrès légiférants ». Par contre, c’est avec raison qu’il n'hésite pas à maintenir comme espèces les formes géographiques ou biologiques nettementisolées. S’il y a impossibilité de transfert d'une aire à l'autre ce qu’on peut généralement savoir « on admettra deux espèces autonomes ». Ces espèces éthologiques ont l'inconvénient de n'être déterminables qu'à l'aide de l'étiquette de provenance ; mais un tel inconvénient ne saurait être pris en considération puisqu'il est le fait d'une insuffisance de docu- mentation. Plus délicate est la question du « nettement séparé ». L'auteur envisage des cas douteux. Leur solution sera « affaire d'opportunité ». Ceux qui regardent de près les collections savent que les cas douteux ne sont pas si rares, à telle enseigne que, quand nous parlons de « sépa- ration nette » ou d’«ensemble limité », ce n’est qu'approximativement. 0 %, de cas douteux : cela existe sans doute Réserverons-nous le nom d'es- pèce aux seuls groupements réalisant ce pourcentage idéal ? Serons-nous moins absolus ? Admettrons-nous qu’à un certain écartement des sommets des courbes de variations modes ») on pourra commencer à tenir pour bonnes espèces des espèces jointives ? L'auteur n'envisage pas la ques- tioa, se contentant de recommander l’opportunisme et de dire que, dans le doute, « il est préférable d'être diviseur ». Passant à l’étude de la varia- tion à l'intérieur de l'espèce, il reconnaît un certain nombre de points de repère pouvant servir à définir des ensembles plus moins commodes à manier, et qui sont les sous-espèces géographiques, physiologiques, de valence d'hétérochromosomes, de nombre de chromosomes, les jordanons, les biotypes homozygotes, les mutants et les écotypes, qu'il faudrait savoir distinguer des accommodats.

L'auteur remarque qu’il faut peu de chose pour faire une bonne espèce d’une sous-espèce chromosomienne On se demande même ce qui lui man- que puisqu'un cytologiste n'hésitera pas à faire une détermination sans ambiguïté ! On est choqué de voir ériger en espèce un polyploïde, sur- tout si on en connaît l'origine. Réunir deux groupements, logiquement sé- parés, sous prétexte qu'on connaît leur parenté, nous semble illogique et dangereux. Les discontinuités existant dans la nature doivent être indé-

Source : MNHN. Paris

284 ALAUDA. vi. 2, 1936.

pendantes de notre connaissance ou de notre ignorance. L'auteur parle de « jordanons-espèces ». C’est dire qu’il promeut certains jordanons au rang d'espèce. les autres étant à considérer comme espèces jointives. Une convention s'impose pour déterminer le pourcentage de cas douteux en deçà duquel on fera commencer l'espèce et finir l'espèce jointive (les courbes étant asymptotiques. le pourcentage n’est théoriquement (et pra- tiquement) jamais nul). On pourra de même concevoir des biotypes espè- ces. des écotypes-espèces et naturellement des mutants-espèces.

Bien qu'il se montre fort respectueux des idées reçues. M. CUÉNOT ne nous montre pas moins la voie que nous devons suivre. Telle est du moins notre impression. Peut-être substituons-nous inconsciemment nos propres tendances aux siennes ? Au moins pouvons-nous croire qu’elles ne sont pas contradictoires

* ++

Vient, pour finir, un petit chapitre intitulé « Nomenclature ». L'auteur, et nous le regrettons, n'en pose pas les règles formelles. I] Jaisse voir peu d’empressement pour les nomenclatures polynominales et, sans se préoc- cuper du spécialiste, propose « pour les usagers » une nomenclature très simple, trinominale au plus. C'est qu'en effet on peut se demander s’il est nécessaire. et commode, de vouloir indiquer « par le simple énoncé de l’état civil » des renseignements sur les affinités de l'espèce et. pour aller au vrai, à transcrire en langage plus ou moins cabalistique une partie de ce qu'on trouvera très facilement écrit en langage clair dans la diagnose. L'auteur s'attache aux inconvénients. voire aux ridicules, de la nomenclature... ou bien de ses « usagers ». Le culte de l'idée géné- rale, les tendances de la science officielle, l'impossibilité matérielle d’ab- sorber, dans le même laps de temps, dix fois plus de matière enseignable qu'ily a un quart de siècle, tout cela justifie dans une certaine me- sure les petites ignorances systématiques dont, charitablement, M. CUÉNOT ne cite qu'un seul exemple...

Il est certain que l’usage des noms vulgaires comporte certains dangers et nous voyons que l’auteur lui-même traite parfois de Phalènes ce qui, jadis, s'appelait assez généralement Noctuelle ou Bombyx. Cela n'a, somme toute, que fort peu d'importance. Plus grave est l'instabilité de la nomenclature. Qui ne connaît de ces flibustiers en chambre,dénicheurs de priorités, qui pensent bien mériter de la science en couronnant de leur rond de cuir le buste de LINNÉ ou d'ARISTOTE ? Ce sont les Docteurs dela « Loi ». Contre ces malfaisants invoquerons-nous l'autorité des Conci- les ? Hélas. M. CUÉNOT ne croit guère à l'infaillibilité des «Congrès légi- férants ». Pour lui et nous ne pouvons que souscrire à cette opinion < on ne peut attendre que du temps la stabilisation lente des noms et le balayage des synonymies ».

* +

Qu'il nous soit maintenant permis d'écrire ceci : Ceux qui, dans leur domaine particulier. s'attaquent à la question de l'espèce. trouveront dans le livre de M CUÉNOT, non seulement une documentation élaborée les faits essentiels présentés sous la garantie d'un demi-siècle de pensée ! mais encore le moyen le plus sûr de mettre en ordre leur propres idées. Ceux qui. sans être spécialistes de la génétique, se voient contraints d'en présenterles rudiments, mesureront l'importance du livre aux remanie-

Source : MNHN. Paris

BIBLIOGRAPHIE. TRAVAUX RÉCENTS 285

ments qu’ils devront faire subir à certains de leurs chapitres Et ceux qui ne sont que curieux du développement des connaissances humaines tireront de l'Espèce de bons enseignements sur leur passé et leur présent, peut- être même sur leur avenir.

J. R. DENIS.

How to know British Birds, par NORMAN H. Joy, M. B. O. U. (H. F.et G. WirHERBY, éditeurs, Londres).

Présenter au publie pour une somme de cinq shillings un livre illustré de 40 planches hors-texte, dont 15 en couleurs, et décrivant à peu près toutes les espèces que le lecteur anglais moyen aura des chances de ren- contrer, voilà certes un tour de force dont on doit féliciter M. NORMAN H. Joy et son éditeur.

Ce manuel de vulgarisation s'adresse à céux qui veulent s'initier à l'ornithologie de terrain. L'auteur considère à juste titre qu'à distance, même avec de bonnes jumelles, les couleurs jouent dans l'identification de beaucoup d'espèces un rôle moindre que ne font la silhouette et l'attitude générale de l'Oiseau. Dans cet esprit. il s'est attaché à faire de bons cro- quis en grisaille exécutés d’après nature ou d après des photographies, la couleur n'étant utilisée que lorsqu'elle constitue le seul moyen de recon- naître l'espèce rencontrée (notamment pour beaucoup de Passereaux).

C’est une intéressante innovation et si certains dessins peuvent pré- ter à critique, ils ont du moins tous le mérite d’être clairs et éducatifs pour l'œil. Qu'il nous soit permis cependant de n'être pas entièrement d'accord avec l'auteur sur la question de l'échelle. Nous pensons que. sur une même planche, et pour des espèces voisines, cette échelle devrait être unique. La planche 27, par exemple, sur laquelle la Pie-grièche écorcheur Lanius collurio L (n° 2) est représentée plus grande que le Loriot jaune Oriolus oriolus L. (n° 3), et la planche 32, sur laquelle le Pouillot sitfleur Phylloscopus sibilatrix (BCHST.) (n° 6) a deux fois la taille de son voisin immédiat le Pouillot chantre Phylloscopus trochilus (L.) [n° 7), et la même taille que celle du Rossignol philomèle Luscinia megarhyncha (BRM.) (n° 2), risquent de dérouter.un amateur, malgré les mesures données en légende.

Le texte de 130 pages environ, les espèces sont présentées suivant une méthode qui, pour les besoins de l'identification in mafura, s'éloigne un peu de la systématique habituelle, met en relief par des italiques tout ce qui peut faciliter cette identification.

Enfin, dans un index final sont classées par ordre alphabétique les dif- férentes particularités que pourra noter l'observateur. On y trouvera par exemple, à l'article « Bec », subdivisé en « très recourbé », « légèrement recourbé », jaune », « orange », « rouge », « courbé vers le haut », les espèces répondant à ces diverses caractéristiques. On trouvera de même à l'article « marécage » les espèces de marais. et à l’article « suspendus aux branches la tête en bas » celles qui ont cette habitude Cet index, bien qu'au premier abord on soit un peu dérouté d'y trouver mélangées des indications si diverses, contient, comme les italiques du texte, une foule d'informations de la plus grande utilité et presque toujours très exactes.

Si l'on voulait chercher dans l'ouvrage quelque lacune, c'est sans doute au chapitre de la voix (Songs and Notes) que l'on pourrait la trouver : en dehors des indications extrêmement brèves du texte, cinq pages et demie seuleinent (p. 119 à 124) sont consacrées à traiter des chants que l'auteur

Source - MNHN. Paris

286 ALAUDA. Vill. 2. 1936.

considère comme vraiment spécifiquement caractéristiques. Quelle que soit la difficulté de mettre à la portée de tous l'ornithomélologie, divers volumes de vulgarisation en langue allemande et anglaise montrent le parti que l'on peut tirer du sens de l'ouïe pour l'initiation des novices à l'ornithologie de terrain.

Quoi qu'il en soit. il faut saluer avec grande sympathie ce nouveau manuel, et lui souhaiter le succès qu'il mérite.

Comte Georges DE VOGüÉ.

PÉRIODIQUES ORNITHOLOGIQUES

Anzeiger der Ornith. Gesellschaft in Bayern, IL, 10, mars 1936,

W. Eichler et J. Heidemann : Reprises d'oiseaux bagués en Bavière (p. 365).

F. Groebbels : Variations de plumage et hérédité (p. 368).

H. Grote: Remarques sur la nomenclature de certains oiseaux africains (p. 373).

B. Hoffmann: Sur la voix des Bouvreuils (p. 375).

Von Besserer : Matériaux pour l’avifaune de Bavière (p. 377). Bibliographie.

The Auk, LIIT, 1, janvier 1936.

J. E. Crouch: La nidification de Bombycilla cedrorum (p. 1). W. T. Shaw : Comportement hivernal et reproduction de Leucosticte È tephrocotis (p. 9.

E, G. Allen : Sur des peintures anciennes d'oiseaux américains |p. 17).

G. M. Relyea : Statistique des caractères différentiels des sous-espèces orientales et occidentales d’un certain nombre d'espèces (p. 22).

R. B. Cowles : Observations sur Chalcomitra amethystina (p. 28).

Th. H. Bissonnette et À. J. Zujko: Les modifications de l'ovaire, dans la période de décembre à avril. chez l’Etourneau (p. 31)

L. Kelso etE. H. Kelso : La densité des plumes sur les pattes des Chouettes dans ses rapports avec le milieu ambiant (p. 51). Assemblée de l'A. O. U., notes, etc.

Beitrâge zur Fortpflanzungsbiologie der Vôgel mit Berücksichtigung der Oologie, 12° année, 2, mars 1936.

W. Gaupp : La densité des Cigognes blanches en Prusse orientale en 1934 (p. 41).

F. Hornberger : La Cigogne blanche dans le canton d’Insterburg (Prusse orientale). :

E. Schüz : La densité des Cigognes dans le territoire de Memel (p. 44) en 1934 (p. 49).

H. Dathe et J. Profft: Etudes sur la ponte du Canard sauvage (p. 50).

0. Schnurre : Contribution à la biologie du Grand-Duc en Allémagne (p. 54).

Source : MNHN. Paris

BIBLIOGRAPHIE. PÉRIODIQUES 287

L. Schuster : Sur la reproduction du Milan noir (p. 69). Notes, etc.

No 3, mai 1936.

NN. Tinbergen : Sur la sociologie du Goéland argenté (p. 89).

R. Zimmermann : Observations sur les œufs et les nids de Nyroca ferina (p 96).

F. Heilfarth : Les facteurs écologiques dans la reproduction des oiseaux de haute montagne (p. 98).

H. Hennings : Observations sur le nid de Circus ce cyaneus (p.105).

P. Robien : Les cultures du delta de l'Oderet leur action sur l’avifaune (p.114). Notes, etc.

Berichte des Vereins Schesischer Ornithologen 21° année, 1-2. février 1936.

G. Herzog : Notes sur quelques oiseaux de Silésie (p. 1).

R. Stadie : Sur le régime des Rapaces diurnes et nocturnes de l'ile de Hiddensee (p. 4).

W. Hahn: L'invasion de jeunes Flamants en Silésie durant l'automne 1935 (p. 10).

H. J. Stammer: Les endoparasites des Flamants capturés en Silésie (p- 15)

R. Zimmermann : Falco peregrinus en Lusace (p. 17).

J. Heidemann : Reprises de Crécerelles baguées en Silésie (p. 20).

0. Uttendürfer : Nouvelles observations sur le régime des Rapaces (p. 22) Notes, etc.

Le Gerfaut, fasc. 4, 1935.

Ch. Dupond : Le Bruant roux Emberiza ratila PALL. (p. 234).

P. Zalessky : Sur la faune ornithologique du pays de Marym (p. 239). L. Lippens : Note sur la migration des Plectrophanes, ete. (p. 245).

S. Meunig: Observations sur l’'Hirondelle de rochers (p. 248).

Ch. Dupond : Oiseaux bagués (p. 254)

The Ibis, vol. VI, 2, avril 1936.

R. H. W. Pakenham: Notes sur les Oiseaux de Zanzibar et de Pemba (p. 245).

C. B. Ticehurst : Notes de systématique sut certains Dicrurus (p. 273).

H. M. S. Blair : Sur les Oiseaux du Finnmark (p. 280).

G. M. Mathews: Note sur Bulweria macgillivrayi (p. 309).

P. R. Lowe : Les Fringilles des Galapagos et les conceptions darwiniennes de l'espèce.

P. F. Holmes et D. B. Keith : Observations sur les Oiseaux de Grimsey et de l'Islande septentrionale (p. 322).

H. Whistler : Nouvelles observations sur les Oiseaux d’Albanie (p. 335).

E. Stresemann: Liste “2?s Oiseaux de Célèbes et description de trois races nouvelles (p. *6).

Mackworth Pread et Gran * Notes de systématique sur quelques espèces de l'Est africain (p. 3% ). Notes, etc.

Source : MNHN. Paris

288 ALAUDA. Vi. 2, 1936.

Journal für Ornithologie. 84 année, 2 avril 1936.

H. Grote : Michael MENZBIER (p. 173).

W. Rüppell : Recherches sur l'orientation lointaine et le retour au nid chez les Etourneaux et les Hirondelles en 1935 (p. 180).

Maxheinz Sy : Recherches sur l'anatomie et la mécanique de l'aile des oiseaux (p 199).

W. Libbert : La migration de Grus grus (p. 296).

Ornithologische Monatsberichte, 44° année, n°,2, mars-avril 1936.

E. Schüz : À propos de l’enquête de 1934 sur les Cigognes (p. 33).

E. Mayr et À. L. Rand : Espèces intéressantes rapportées par l'expédition de 1933 en Nouvelle-Guinée (p. 41).

G. Niethammer . Sur les races du Pic-Vert de l’Europe moyenne (p. 431.

R. Rensch : Réponse à des critiques de KLEIXSCHMIDT (p. 58). Notes, etc,

Rivista Italiana di Ornitologia, VI, 2, avril 1936.

Giuseppe Aldeghi: Sur le Serin et ses races domestiques (p. 46).

E, Moltoni : Sur l'invasion de Becs-croisés en 1935 (p. 53).

G. Orlando : Les Oiseaux qui nichent sur la zone littorale comprise entre Palerme et Castellammare (p. 61).

P. Zangheri : Faune de Romagne (suite) (p. 73).

C. Orlando : Notes sur l’avifaune de Sicile (p. 83) Notes, etc.

Bulletin d'offres et de demandes.

On désire acquérir les ouvrages suivants :

BOUILLET et LECOQ : Catalogue des Oiseaux du Puy-de-Dôme, 1898; PENNE- TER : Ornithologie de Seine-Inférieure, 1898 ; PRÉCIGOU : Ornithologie de la Haute-Vienne, Paris, 1904; DE MONTESSUS : Ornithologie de Saône-et- Loire (ex « Mém. Soc. Hist. Nat. Saône-et-Loire », 1886-1890): DES PRU- GNES : Les Oiseaux, Faune du département du Puy-de-Dôme, Clermont- Ferrand, 1917;— LETACQ : Les Oiseaux du département de L Orne ( ex « Bull. Soc. Hortic de l'Orne »), Alençon, 18% MAINGAUD : Faune des Vertébrés du dép. du Gard, Nîmes, 1912; Coïe : Catalogue des Oiseaux du dép. de l'Ain (ex « Ann Soc. linn. Lyon », 53, 1906 (1907), 79-86; Bull Soc. Sci. Nat. et d'Archéologie de l'Ain, Bourg, 20, 1907; nos 54, 55, 1909

Faire offre à M. H. G. R. Morneux, The Cottage. Isfeld, Uckfeld, Sus- sex, Angleterre.

Le Gérant : P. PARIS.

1937 Impr. Jouve et Cie, 15, rue Racine, Paris. 10-36,

Source : MNHN. Paris

SOCIÉTÉ D’ÉTUDES ORNITHOLOGIQUES

Association déclarée, régie par la loi du 1°* juillet 1907

Siège social au Laboratoire de Biologie expérimentale de la Sorbonne, 1, rue Victor-Cousin, Paris (5e)

MEMBRES D'HONNEUR

MM. le Docteur Louis Bureau, Paul Manon, le Professeur Paul Paris, le Professeur Etienne Rasaup», le baron SNOUGKAERT VAN SCHAUBURG.

CONSEIL DE DIRECTION

MM. Henri Ham pe Bazsac, secrétaire général ; André BLor, secrétaire adjoint ; Henri Jouanp, trésorier ; Comte C. pu Bonnet pe PAILLERETS ; Joseph Courrois ; Olivier MevLan ; Bernard Mouizcauo ; Professeur Paul Paris ; D' Paul Porx ; Professeur Etienne Rasaup ; D' A. Rocnon- Duvieneaub ; Comte Georges DE Vocüé.

Aux termes des statuts (art. 6 et 7), la Société d'Études Ornitholo- giques ne peut s’accroître, chaque année, que de 15 nouveaux membres titulaires ou bienfaiteurs, au maximum. Les candidats doivent être présentés par un membre du Conseil de Direction à ses collègues du Conseil, être admis au moins à l'unanimité moins une voix des Volants français, enfin payer un droit d'entrée verser une fois pour toutes, après admission) de 10 francs.

Pour tout ce qui concerne l’administration de la Société d'Études Orni- thologiques (demandes de renseignements, statuts, etc.), s'adresser : soit à M. Henri lle pe Bazsac, secrétaire général, 34 rue Hamelin, Paris (16°) ; soit à M. André BLor, secrétaire adjoint, 12 avenue de la Grande-Armée, Paris (17°). Pour l'emprunt des livres et périodiques de la bibliothèque, s'adresser à M. R. Sevpoux, bibliothécaire-adjoint, au siège social les jours de séance, ou, par correspondance, 4 rue Hervieu, Neuilly (Seine).

COTISATION ANNUELLE

Membres titulaires | France Er Membres bienfaiteurs.| france." 130 fe

Le versement de la cotisation, due au début de chaque année, donne droit au bulletin de la Société (Alauda) ou à toute autre publication en tenant lieu. La différence entre les cotisations françaises et étrangère (15 fr.) cor- respond aux frais de port supplémentaires.

Trésorier : M. Henri Jouan, 45, rue Lamartine, Dijon (Côte-d'Or). Compte de chèques postaux : Dijon 298-21.

Date des séances de la Société en 1936

Les samedis 11 janvier, rer février, 29 février, a1 mars (assemblée générale), à mai, 6 juin, 4 juillet, 7 novembre, 5 décembre, à 5 heures, au Laboratoire de Biologie expérimentale de la Sorbonne, 1, rue Victor-Cousin, Paris (5e).

Source : MNHN. Paris

SOMMAIRE VIII. 2. 1936

Société d'Études Ornithologiques.

Séance du 2 mai. M. Morbach sur le Grimpereau familier Certhia familiaris dans le Luxembourg; M. Heim de Balsac sur l'extension du Pigeon colombin Columba aenas à Paris; M. Heiïm de Balsac sur un curieux comportement du Merle d'eau Cinclus cinclus........... sn... 145

Séance du 6 juin. M. Démentieff sur l'Oie des moissons Anser 'ÉULI TARN ù hr PTOOTNCTEE À 1

Séance du 4 juillet. Présentation de l'nventaire des Oiseaux de France; M. Jouard sur les « Aigles criards » de France; M. Seydoux sur la Fauvette pitchou Sylvia undata en forêt de Fontainebleau ; M. Heim de Balsac sur les colonies d'Aigrettes garzettes Egretta garzetta et de Hérons crabiers Ardeola ralloides de Camar. H

La thèse d'Henri Heim de Balsae ; don à la bibliothèque. . RS

D: Marcel Baudouin, Sur l’ostéologie élémentaire du Grand Corm ran Phalacrocorax carbo subcormoranus et sur son curieux crâne (avec

6

dix figures)... «.. 149 Georges Démentieff, Essai de révision des formes de l’Oie des mois- sons Anser fabalis Latham (avec sept figures) 169 Paul Madon, De l'appauvrissement des faune: . 194 Henri Jouard, Qu'en est-il des « Aigles criards » de 198 Robert Poncy, Notes sur quelques espèces d'oiseaux observées à la Station ornithologique du Port de Choiseul la Ville, près de Versoix (Léman) (avec trois figures) 220 Gérard Berthet, Notes sur quelques oiseaux du Chablais, 228

CORRESPONDANCE, NOTES ET FAITS DIVERS

Sur l’Inventaire des Oiseaux de France, par Her gras Lr$ Noël Mayaud, avec la collaboration enr Helm de BalsaG | d'Henri Heim de Balsac et Henri Jouard. 258 Bernard Mouillard, Le Venturon Carduelis citrinella dans les

260

_ Sur l'instinct des jeunes Ci Is et sur leur précocité de plongeursetnageurs. 261 D: Villeneuve de Janti, Sur la sève des arbres dans le régime des

Pics. 262 Henri Heim de Balsac, Un point du régime alimentaire et de 1”

logie du Pic épeiche Dryobates major 263 Henri Jouard, Deux nouveaux points de rencontre de Parus atric

pillus en France... 264 Henri Jouard l nt Georges de Vogüé anormaux de Parus major, Phœnicurus Henri Heim de Balsac \ phænicurus et Motacilla alba. .. 265 Albert Hugues, Pour l'étude de la migration des oiseaux 268

Légendes (omises dans le dernier n°) des figures illustrant l'étude de Noël Mayaud sur le Bruant des neiges Plectrophenax nivalis en France, 269 Mort du baron Snouckaert van Schauburg... À

BIBLIOGRAPHIE Travaux récents de M. Cuénot, par J. R. Denis... 270 _— , de M. Joy, par Georges de Vogüé 285 Périodiques ornithologiques. . 286 Bulletin d'offres et de demandes. 288

IMPRIMERIE JOUVE ET Ci, 15, RUE RACINE, PARIS. 10-1936.

Source : MNHN, Paris