ANNALES SCIENCE AGRONOMIQUE FRANÇAISE ET ÉTRANGÈRE Comité de rédaction des Annales. Rédacteur en chef : L. GRANDEAU, directeur de la Station agronomique de l'Est. U. Gayon, directeur de la Station agronomique de Bordeaux. Guinon, directeur honoraire de la Sta- tion agronomique de Châteauroux. Margottet, recteur de l'Académie de Lille. Th. Schlæsing, de l’Institut, professeur à l'Institut national agronomique. E. Risler, directeur de l’Institut na- tional agronomique. A. Girard, de l'Institut, professeur au Conservatoire des arts et métiers. A. Müntz, professeur à l'Institut na- tional agronomique. A. Ronna, membre du Conseil supé- rieur de l'agriculture. Ed. Henry, professeur à l'École na- tionale forestière, E. Reuss, inspecteur des forèts à Alger. Correspondants des Annales pour les colonies et l'étranger. COLONIES FRANCAISES. H. Lecomte, docteur ès sciences, pro- fesseur au lycée Saint-Louis. ALLEMAGNE. L. Ebermayer, professeur à l'Univer- sité de Munich. J. Kônig, directeur de la Station agro- nounmique de Münster, Fr. Nobbe, directeur de la Slation agronomique de Tharand. Tollens, professeur à l'Université de Gôtungen. ANGLETERRE, R. Warington, chimiste du laboratoire de Rothamsted. Ed. Kinch, professeur de chimie agri- coie au collège royal d'agriculture de Cirencester. BELGIQUE. A. Petermann, directeur de la Station agronomique de l'Etat (Gembloux). CANADA. Dr 0. Trudel, à Oltava. ÉCOSSE. T. Jamieson, directeur de la Station agrouomique d'Aberdeen. ESPAGNE ET PORTUGAL. Joäo Motta dâ Prego, à Lisbonne. ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE. E. W. Hilgard, professeur à l'Univer- sité de Berkeley (Californie). HOLLANDE. A. Mayer, directeur de la Station agro- nomique de Wageningen. ITALIE. A. Cossa, professeur de chimie à l'É- cole d'application des ingenieurs, à Turin. NORWÈGE ET SUÈDE. Dr Al. Atterberg, directeur de la Sta- lion agronomique et d'essais de se- mences de Kalmar. SUISSE. E. Schultze, directeur, du laboratoire agronomique de l'École polytech- nique de Zurich. RUSSIE. Thoms, directeur de la Station agro- nomique de Riga. Nora.— Tous les ouvrages adressés franco à La Rédaction seront annoncés dans Le premier fascicule qui paraitra après Leur arrivée. IL sera, en outre, publié s'il y a lieu, une analyse des ouvrages dont la spécialité rentre dans le cadre des Annales (chimie, physique, géologie, minéralogie, physiologie végétale et animale, agricullure, sylviculture, technologie, etc.). Toul ce qui concerne la rédaclion des Annales de la Science agronomique francaise el étrangère (manuscrits, épreuves, correspondance, elc.) devra être adressé franco à M. L. Grandeau, rédacteur en chef, 48, rue de Lille, à Paris. ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE FRANÇAISE ET ÉTRANGERE ORGANE DES STATIONS AGRONOMIQUES ET DES LABORATOIRES AGRICOLES PUBLIÉES Sous les auspices du Ministère de l'Agriculture PAR Louis GRANDE AU DIRECTEUR DE LA STATION AGRONOMIQUE DE L'EST PROFESSEUR AU CONSERVATOIRE NATIONAL DES ARTS ET METIERS INSPECTEUR GENERAL DES STATIONS AGRONOMIQUES VICE-PRÉSIDENT DE LA SOCIETE NATIONALE D'ENCOURAGEMENT A L'AGRICULTURE MEMBRE DU CONSEIL SUPERIEUR DE L'AGRICULTURE 2° SÉRIE — TROISIÈME ANNÉE — 1897 Tome Il. Avec figures dans le texte. PARIS BERGER-LEVRAULT ET Ci, LIBRAIRES-ÉDITEURS 5, rue des Beaux-Arts, 5 MÊME MAISON 4 NANCY 1897 af ju ave À'1- à ‘ 3 à L à ra, % a dé w - C5 PEN Le) LÉ NE HA TUAITLIN LES (LE ETAT UE Hu Am ÉTUDES SUR PAPCANNE-A:SUCRE DOSAGE DU SUCRE — COMPOSITION DE LA CANNE — ÉCHANTILLONNAGE PAR MIA EELTEET CHIMISTE-CONSEIL TROISIÈME PARTIE ÉTUDES SUR LA QUALITÉ DES DIFFÉRENTES VARIÉTÉS DE CANNES (Suite.) Il y a évidemment un très grand intérêt à connaître les meilleures qualités de cannes à planter pour tel pays, car les différences peu- vent être considérables tant au point de vue de la richesse que du rendement en poids et du sucre total produit à l’hectare. Pour citer des expériences récentes à ce sujet, nous emprunterons à un arlicle publié dans la Sucrerie indigène, du 14 septembre 1897, deux tableaux concernant les rendements en poids de 140 variétés de cannes, avec les richesses correspondantes. On verra que la quantité de sucre à l'hectare peut varier de 7588 à 12150 kilogr. à l’hec- tare. (Résultats extraits de la gazette officielle, La Barbade, 19 juil- let 1897.) ANN. SCIENCE AGRON. — 2€ SÉRIE, — 1897, — 11. Î 2 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Essais dans les jardins botaniques de Demerara. Tableau LIX. DÉSIGNATION dE nat des variétés. TER à SÉBOURE MERE AN RU Rnoeleldon st al aite 77 000 SU Ces RS ER RE RCE De 70 200 BULKE RAS RE A NA NT Crea DÉCORS LE ANUS 0 EE A 65 261 SECTHOD LISE A CAM OR EE 59 460 Queenslandieré0le eme EM RE 58 986 Caledonian queen il: Lier Re 55 221 Bourbon ere pet er RS 54 200 SECOURS NAN EE CL AM TR Re 54 000 Mhitestransnarente Re NN RENE 1 000 Tableau LX. SUCRE 5 1006 8 SRE E RICHESSE. p- 100 gr. de “rs FAUrS cannes. J HEDIDEE J (coeff. 88). à l’hectare. Caledonian queen. . . . 18.30 16.10 8 890 Queesland créole . . . . 18.11 15.93 9 396 Seedling. lion rex 18.08 15.90 9 454 White transparent. . . . 18.05 15.87 8 093 Seedling, 145060 17.96 15.77 12 150 Seeding 7'AMEMEAN- TIR 17.65 15153 S 426 Séedling, 147. "en 16.75 14.74 10 290 Burke. "Manet 16.66 14.66 9 935 Bourbon M CRETE 15.91 14.00 7 588 Des expériences ont été également entreprises au Brésil depuis plusieurs années et il a été constaté, suivant les variétés de cannes, des rendements de 25 000 à 115000 kilogr. à l’hectare et des richesses allant de 11 à 17 pour 100 gr. de cannes. O9 ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. QUATRIÈME PARTIE SUR LE DOSAGE DIRECT ET INDIRECT DU SUCRE CRISTALLISABLE ET DU SUCRE INCRISTALLISABLE DANS LA CANNE A SUCRE Dans une étude spéciale, intitulée : Le Dosage du sucre cristallisable dans la belterave, nous avons donné la description des 20 procédés employés, depuis 1747 jusqu’en 1886, pour le dosage direct ou indi- rect du sucre dans la betterave, sans assurer que la liste était com- plète. Nous n’avons nullement l’intention de les résumer et nous ren- voyons le lecteur que cela peut intéresser à notre travail paru dans les Annales de la Science agronomique française et étrangère (tome I”, 1892), sous la direction de M. L. Grandeau”. Quelques-uns de ces procédés peuvent être appliqués au dosage du sucre dans la canne, mais nous en parlerons au fur et à mesure que nous décrirons les différentes méthodes directes ou indirectes et les procédés basés sur l’emploi de l’eau ou de l'alcool par diges- tion ou par extraclion. Depuis 1886, de grands progrès ont été réalisés dans les mé- thodes employées pour le dosage direct du sucre contenu dans la betterave. Pour ne pas trop nous étendre et pour comparer en outre l'analyse de la betterave à celle de la canne, nous suivrons le même ordre que celui que nous avons suivi dans la troisième partie de notre travail relatif au dosage direct du sucre dans la bette- rave. 1. Brochure tirée à part de 164 pages. + ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE,. I. — Des différents procédés qui peuvent être appliqués à l'analyse de la canne pour le dosage direct du sucre cris- tallisable qu’elle renferme. . On peut résumer ainsi les divers procédés : Procédés chimiques ; Procédés physiques (polarimétriques). a) PROCÉDÉS CHIMIQUES Les procédés chimiques reposent principalement sur le dosage du sucre cristallisable (transformé en sucre inverti), au moyen de la liqueur de Fehling ou de Violette. Ils ne sont plus employés pour ainsi dire lorsqu'il s’agit de l’analyse directe de la betterave ou de la canne, et ils sont réservés seulement au dosage du sucre inverti. Nous aurons donc à en parler lorsque nous traiterons de la question du dosage des sucres réducteurs contenus dans la canne à sucre. Ü) PROCÉDÉS PHYSIQUES (POLARIMÉTRIQUES) Les procédés physiques (polarimétriques) sont basés sur l'emploi du saccharimètre pour la détermination directe du sucre. Ils peu- vent être divisés en deux groupes. 1°" groupe À. Procédés à l'alcool. % — B. Procédés à l’eau. A. Les procédés à l'alcool connus pour la betterave sont les sui- vants : 1° Extraction alcoolique (Riffard-Scheibler) ; 2 Digestion alcoolique à froid (Stammer) ; O0 Tic 1 n , | | ‘De À , R 21) 0° , 3° Digestion alcoolique à chaud (Degener, Rapp-Degener, etc). B. Les procédés à l’eau également connus pour la betterave sont les suivants : 1° Extraction aqueuse à froid (Pellet); ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. D 2% Extraction aqueuse à chaud (Pellet) ; 3° Extraction aqueuse à chaud (Delville); 4° Extraction aqueuse à chaud (Vivien-Castels) ; 5° Extraction par épuisements successifs à chaud (divers) ; Ge et 7° Digestion aqueuse à chaud (Pellet-Wiley) [bain-marie]; 8° Digestion aqueuse avec eau chaude (divers); 9° et10° Diffusion instantanée aqueuse à froid (modification Kaiser- Leuwenberg). Nous allons passer maintenant rapidement en revue ces diverses méthodes, en indiquant si actuellement elles sont applicables au do- sage direct du sucre dans la canne à sucre. A. — Procédés à l'alcool. 1° Procédé Riffard. — Scheibler (Extraction alcoolique). Ce procédé est parfaitement applicable au dosage direct du sucre dans la canne à sucre. Nous ne décrirons pas le procédé Scheibler bien connu, soit à l’aide de son extracteur, soit à l’aide de tous les extracteurs imagi- nés pour l’analyse de la betterave (Sohxlet, Kunter, Pellet, etc.). Relativement au procédé Riffard, nous renverrons le lecteur à notre travail (brochure, p. 14), ou mieux en remontant à la source de nos renseignements, c’est-à-dire dans la magnifique Étude histori- que, chimique et industrielle des produils d'analyse des matières sucrées ; 1 volume, p. 405 et suivantes (1884), par H. Leplay. Le procédé Riffard est basé sur l'emploi de l’alcool pour extraire le sucre de la matière divisée, et en utilisant les appareils dits ex- tracteurs, genre Payen. 2 Digestion alcoolique à froid. La digestion alcoolique à froid indiquée par Stammer n’est appli- cable dans certaines conditions qu’à l’analyse de la betterave. Ce procédé exige une pulpe véritablement à l’état de crème, c’est-à-dire excessivement fine. Déjà pour la betterave, cette divi- 6 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. sion extrême présente de grandes difficultés, surtout pour éviter la dessiccation de la matière et ensuite pour obtenir un poids notable de substance à l’état convenable pour le procédé. Mais lorsqu'il s’agit de la canne, nous croyons devoir dire que, jusqu'à présent, on n’est pas parvenu à la réduire à l’état de pulpe analysable par la méthode alcoolique à froid de Stammer. 3° Digestion alcoolique à chaud. La digestion alcoolique à chaud est parfaitement applicable à l'analyse de la canne. Seulement, comme le sucre est beaucoup moins rapidement soluble dans l'alcool que dans l’eau et que la division de la canne présente plus de difficultés que celle de la bet- terave, il s’ensuit que les résultats fournis par la digestion alcoo- lique de la canne sont beaucoup plus incertains que lorsqu'elle es appliquée au dosage direct du sucre dans la betterave. Avant de passer en revue les Procédés aqueux, examinons et ré- sumons les essais qui ont élé faits pour le dosage direct du sucre dans la canne, soit par extraction, soit par digestion alcoolique. Le dosage direct du sucre dans la canne par extraction alcoolique a élé étudié dans plusieurs laboratoires, mais c’est principalement dans le laboratoire de Kagok-Tegal, à Java, que cette méthode a été expérimentée, comparativement avec d’autres procédés par diges- tion alcoolique ou par digestion aqueuse. Nous extrayons les renseignements ci-après de l’ouvrage du D° Krüger, intitulé : Berichle der Versuchsstalionen fur Zucker- rohr in West-Java, Kagok-Tegal (Java), Heft I. On découpe la canne au moyen d’un coupe-cannes à cinq couteaux, et on obtient des rondelles d’un millimètre d’épaisseur, qu'on divise ensuile à la main en morceaux de 3 à 4 millimètres de grandeur. (Nous préférons pour cela le mortier.) On peut préparer ainsi quel- ques kilos de cossettes en 10 minutes, et on évite sensiblement l’é- vaporation. (Nous ne le pensons pas, malgré ce que dit l’auteur, qu'après une demi-heure à l'air libre le dosage ait été de 16.20 au lieu de 16.44 avant.) L'auteur s’est servi de telles cossettes pour l'analyse par l'alcool ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 7 Il a toujours employé l'alcool absolu du cominerce. Durée de l’ex- traction : deux heures. L'auteur a eu sur un même échantillon : Tableau LXI. 1. 2 3. Extraction alcoolique (2 heures). 05 16.5 14.3 16.7 15.7 13.0 Digestion alcoolique — La digestion alcoolique donne un résultat trop bas. En prolongeant la digestion durant trois heures, on obtient des chiffres qui se rapprochent de l’extraction alcoolique, les légères différences pouvant provenir de l’échantillon même : Extraction alcoolique. JS OT" RTE 1 Digestion alcoolique . LS TORRES 1 CS A un mé ot ] © A WW [Sal A ON 2 L'auteur a remarqué que la digestion pouvait se faire aussi bien à l’eau qu’à l'alcool; que c’était plus simple, plus rapide, plus exact, puisqu'on pouvait prendre plus de malière à analyser, la digestion se faisant au bain-marie bouillant durant une heure. Mais M. H. Win- ter ne veut pas abandonner tout à fait l’alcool. Il en met pour bai- gner les cossetles, ce qui agit comme antiseptique, dit-il, puis il met de l’eau aux trois quarts du ballon, fait la digestion aqueuse pour ainsi dire, et complète le ballon avec de l'alcool. On voit que dans les trois cas la richesse du liquide en alcool est bien différente, et on peut admettre que la deuxième est une digestion aqueuse. Or, les résultats sont très concordants par les trois méthodes : Tableau LXII. 1. 2. 3. LA 5: 6. Extraction alcoolique. 16: SAUCES RE RO SET 52 Digestion aqueuse . LG SORA SNS ES RMI ROMA SERA IE Digestion alcoolique . RE 2 2.0 OO) rer Rte Por EN DEEE DisestOmiaquenss tele, SONDE 1728 IV LAID TG. 31 15707 1. Cependant ces chiffres seraient un peu forts par rapport à l'extraction alcoolique, la correction de l'erreur due à la présence du mare n'ayant pas été faite. L'auceur a trouvé qu'il y aurait à multiplier par 0.98, ce qui donnerait un résultat général de 0.30 environ en moins par les digestions que par l'extraction alcoolique (?). 8 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. L'auteur paraît en effet, par la suite, préférer la méthode par diges- tion aqueuse à chaud et nous en reparlerons. Expériences du D° Wiley sur le dosage direct du sucre dans la canne au moyen de l'alcool. M. Wiley, chimiste en chef au département de l’agriculture à Washington, a publié dans le Bullelin de l'Association des chimistes de sucrerie et de distillerie de France (numéro de juin 1884, p.154, tome Il), une note très intéressante sur le dosage direct du sucre dans la canne. Il a étudié l'épuisement à l’eau, l'épuisement à l’alcool et la diges- tion aqueuse à chaud. Nous donnerons dès maintenant les résultats qu’il a obtenus par l’emploi de alcool. M. Wiley a essayé : 1° L’épuisement de la rondelle de canne plus ou moins divisée par cinq ébullitions successives ayant une durée de 20 minutes, et en employant à chaque traitement un volume sensiblement égal à celui de la matière ; 2% Même série, mais en opérant dix traitements successifs ; | 3° Même série, mais en laissant les rondelles en ébullition au con- tact de l’alcool durant une heure. Les résultats ont été détestables dans tous les cas, et en général il y a eu 1.66 de saccharose en moins que la quantité calculée d’après l'analyse indirecte, différence bien supérieure à celle constatée par l'application de la digestion aqueuse à chaud. L'emploi de l’alcool pour l'analyse de la canne amène également d’autres inconvénients, si bien que M. Wiley n’est nullement parti- san de son emploi, au contraire. Traitement par l'alcool (digestion et épuisement). Série V. — On a opéré comme avec l’eau, c’est-à-dire par cinq ébullilions successives, puis par dix, et ensuite on à mis bouillir les rondelles dans cinq fois leur volume d’alcool, durant une heure. On a constaté une différence de 1.66 p. 100 de saccharose. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 9 Résultats moyens. — L'alcool amène également d’autres incon- vénients, ce qui a fait complètement rejeter l'emploi de ce véhicule pour l’extraction du sucre des cossettes de cannes, au moins dans le laboratoire de Washington. Nous verrons d’autres essais à Java, tendant aux mêmes conclusions. Comme nous avons vu que, dans le laboratoire d’essais de Java, on à reconnu que l'extraction alcoolique bien employée donne exac- tement les mêmes résultats que les méthodes aqueuses, qu’en outre la digestion alcoolique peut fournir des résultats inférieurs à ces deux procédés, que l'extraction alcoolique exige une longue durée pour être certain de l’épuisement et enfin que ce procédé ne permet que quelques dosages dans une journéé et réclame une surveillance incessante, nous pouvons conclure que, pour le dosage direct du sucre cristallisable dans la canne à sucre, L’ALGOOL DOIT ÊTRE COM- PLÈTEMENT REJETÉ. (Même conclusion que pour l'analyse de la bet- terave.) B. — Procédés à l'eau. 1° Extraction aqueuse à froid. Ce procédé est applicable à la betterave, à la condition d’avoir une pulpe suffisamment fine et analysable à froid par diffusion ins- tantanée. Alors, au lieu de mettre le poids normal de pulpe avec de l’eau jusqu’à un volume déterminé, on place ce poids normal de pulpe dans un extracteur (Pellet ou autres) et on l’épuise au moyen d’un courant d’eau dont l'écoulement est réglé de telle sorte que le volume de 200 centimètres cubes soit obtenu en 10, 15 ou 20 mi- nules. Mais, avec la canne, ce procédé n’est pas utilisable, parce qu'il n’exisle pas encore d'appareils permettant d’effectuer la division nécessaire de la canne pour l’application générale des procédés dits à froid, quoiqu’on ait parlé d’avoir de la crème de cannes. 2 Extraction aqueuse à chaud (Pellet). C’est le même procédé que le précédent, mais en employant l’eau chaude. 10 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Cependant, même avec l’eau chaude, cette méthode peut laisser à désirer, suivant la division de canne, division qui, comme nous le verrons, Joue un très grand rôle. Aussi l’extraction aqueuse du sucre à chaud d’un poids de 165,20 à 266,048, dans un volume de 100 à 200 centimètres cubes, même en prolongeant la durée du contact, n’est-elle pas à conseiller, pas plus au point de vue scientifique qu’au point de vue pratique. 3° Extraction aqueuse à chaud (Delville). Mêmes observations que pour les procédés précédents. 4 Exlraclion aqueuse à chaud (Vivien-Castels). On met 100 gr. de matière divisée dans un tube spécial disposé comme un extracteur. On remplit le tout d’eau chaude (80° à 85°) el on laisse en contact trois minutes. Au-dessous, se trouve un ballon d’un litre. On reçoit le liquide chargé de sucre, on recommence et on opère ainsi 7, 8 ou 10 fois jusqu’à ce que le litre soit à peu près rempli; on complète avec un peu de sous-acétate de plomb et, après agitation, on filtre et on polarise. On calcule le sucre pour 100 grammes de cannes. Ce procédé réclame également une pulpe très divisée et nous doutons que les appareils connus actuellement pour réduire la canne en fins filaments puissent fournir la matière dans un état suffisant de division pour appliquer sans crainte la méthode de M. Vivien. | On peut mettre dans cette catégorie le procédé indiqué par M. O. Castels, publié dans le Bulletin de la Sociélé des anciens élèves de Gembloux, 1896. Voici en quoi consiste ce procédé : On dispose un réservoir d’eau bouillante dans lequel on prélève l’eau bouillante pour le lessivage d’un poids donné de pulpe. Cette eau arrive par siphon ou des tubulures inférieures à l'extrémité des- quelles on a placé soit des pinces de Mobr, soit des robinets ré- glables à l'effet d’avoir un jet fin et puissant. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. il L’eau est amenée sur la pulpe de canne (50 gr.), placée dans un tamis reposant sur un entonnoir mis sur un ballon de 9 litres. L’eau, traversant la couche plus ou moins épaisse, enlève le sucre et, suivant la vitesse avec laquelle on a rempli le ballon de 2 litres contenant toujours 5 à 6 centimètres cubes de sous-acétate de plomb, la matière est épuisée totalement ou renferme encore un peu de sucre. Tout cela dépend de la division de la matière. Aussi- tôt qu'il y a des parties grossières, l'épuisement est incertain pour l’un ou l’autre de ces procédés, à moins de procéder par épuise- ments séparés et avec des volumes de moins en moins grands et d'analyser tous les liquides pour être certain de l’épuisement com- plet, ce qui est toujours douteux. Un liquide ayant passé à travers une couche de cossettes de cannes divisées peut ne pas contenir de sucre, alors qu’il en reste dans la masse, ce que nous avons vérifié. Cela tient à ce que le sucre facilement enlevable a été entrainé dans les premières eaux de lavage, tandis que le sucre situé au centre des filaments plus ou moins épais ne peut être enlevé qu'avec le temps. C'est alors que le sucre peut être rendu visible en opérant une digestion, ou en exerçant une forte pression sur le marc supposé épuisé. On retrouve du sucre dans le liquide extrait. (Correspon- dant à 0,1 ou 0.2 pour 100 gr. de cannes.) 9° Ectraclion par épuisements successifs à chaud (Divers). Ce système a été essayé par divers chimistes et même appliqué couramment dans certaines usines. Voici d’abord les expériences de M. Wilev. Dosage direct du sucre dans la canne (procédé du D° Wiley). — Nous trouvons dans le Bulletin de l'Association des chimistes de sucrerie el de distillerie de France el des colonies ‘du mois de juin 1884 (page 154, n° 6, tome Il) quelques détails relatifs aux essais faits par le D° Wiley, chimiste en chef du département de l’agricul- ture à Washington, pour la détermination directe du sucre dans la canne à sucre, dans le sorgho et dans les bagasses. 12 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. M. Wiley a étudié diverses méthodes et voici comment il a con- duit ses expériences, ainsi que les bases admises pour les calculs. On a admis : 4° que la canne à sucre contenait 92 p. 100 environ de jus, soit 8 p. 100 de marc (cannes de la Louisiane) ; 2° Que le sorgho ne contenait au contraire que 89 p. 100 de jus et 11 p. 100 de marc. 3° Pour l'analyse des jus, on s’est servi d’un petit moulin agissant sur des rondelles obtenues par le passage de 25 à 50 kilogr. de cannes à analyser dans un coupe-cannes ordinaire. 4* La quantité de jus obtenue a été environ de 64 p. 100. 5° Poids variable de cossettes, mais généralement en les traitant par à ou 10 fois leur poids d’eau dans différentes conditions. Durant l'opération, addition d’eau pour maintenir le volume. Aprés refroidissement, le contenu du ballon jaugé est complété à un volume ou à un poids donné el soumis à l'examen. M. Wiley a essayé ensuite pour chaque série trois méthodes : a) La méthode optique; b) La méthode cuprique (Fehling) ; c) La méthode au permanganate de potasse. Cette méthode con- siste à dissoudre l’oxydule de cuivre au moyen d’alun ferrico-ammo- niacal et à déterminer le sulfate ferreux produit par une solution titrée de permanganate de potasse. EnsuiteM. Wiley a essayé plusieurs modes de traitement des ron- delles, avec ou sans broyage, et enfin le traitement par l’eau et à l’alcool. Résultats généraux. Procédés par épuisements successifs. — 4e série. — Rondelles bouillies dans 5 fois leur poids d’eau ; durée moyenne de l’ébullition, une heure et demie. Nous donnons seulement un tableau complet pour indiquer en détail les résultats obtenus; pour les autres séries nous ne donne- rons que le résumé. TABLEAU. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 13 Tableau LXIII. MÉTHODE D’ANALYSE. p. 100 gx. DÉFICILT de saccharose. EXCÉDENT de saccharose, DÉFICIT d’autres sucres, EXCÉDENT d’autres sucres. l'échantillon. SAGCHAROSE AUTRES SUBSTANCES BACCHAROSE p. 100 gr. de cannes calculés d’après le jus. AUJRES SUCRES p. 100 gr. de cannes calculés d’aprèslejus. JUS ES Optique et réductrice. | Rondelles . Cuivrique. Optique. +9 1] Oo À © Cuivrique. » 0. S. 8. 8. te te 7. Optique et réducfrice. Cuivrique. Permanganate. Optique. US ee Rondelles . » » G 1 1 © Jus TARA Optique et réductrice. Rondelles . . Optique. » 0.49! Permanganate. 0.64! Guivrique. 0.10! 0.35 SI 10 La moyenne indique donc un déficit de saccharose et souvent une augmentation des autres sucres. Méthode à rejeter. 2 série. — Mèmes conditions; durée de l’ébullition, trois heures au lieu de une heure et demie. Résultats moyens. —Déficit en saccharose de 1.22 à 1.92. Méthode à rejeter. 3° série. — Rondelles bouillies dans cinq quantités d’eau succes- sives. Chaque quantité un peu supérieure au volume de la cossette. Durée moyenne de l’ébullition, 20 minutes chaque fois. Résullals moyens. — Pertede 1.29 de saccharose. Méthode égale- ment à rejeter. 4 série. — Mêmes conditions, mais en mettant dix fois de l’eau successivemen£. Résullats moyens. — Perte de 0.98 de saccharose. 14 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. On déduit de ces essais que le traitement des rondelles de cannes par de l’eau bouillante, même en renouvelant dix fois l’addition de l'eau, n’est pas suffisant pour obtenir l’extraction complète du sucre de Ja cossette. En outre, il y a à craindre que par une durée aussi prolongée 1l y ait parfois formation de sucre réducteur aux dépens du saccharose. Enfin, il n’y a pas de relation entre le jus extrait de la canne et la richesse directe pour 100 gr., ainsi que cela a été démontré aussi pour la betterave. Mais, d’après nous, cela doit tenir surtout à la division de la canne, c’est-à-dire à ce que les rondelles étaient trop épaisses. M. Wiley dit bien que dans quelques cas on a essayé le broyage des cossettes au mortier sans avoir constaté d'augmentation dans le pour-cent de sucre. En effet, si on divise la cossette de cannes en plusieurs morceaux, qu’elle soit déjà mince par elle-même, et ensuite qu’on la passe dans un morlier pour avoir une matière représentant de la grossière pulpe de betterave, on parvient à extraire sensiblement tout le sucre de la canne par des épuisements successifs, surtout en opérant comme suil : Peser 50 gr. de la matière divisée et bien mélanger, ajouter 150 à 200 centimètres cubes d’eau, faire bouillir et après cinq minutes environ d’ébullition décanter le liquide dans un ballon de 1 litre renfermant 5 centimètres cubes de sous-acétate de plomb, remettre de l'eau, et faire bouillir à nouveau 7 à 8 minutes et ainsi de suite, on arrive à faire ainsi 7 à 8 lavages, avec lesquels on a extrait sinon absolument tout le sucre (car il y en a encore des traces visibles à l’alpha-naphtol), mais au moins pratiquement. On refroidit, on complète 1000 centimètres cubes et on polarise au tube de 500 ou de 400, on calcule le sucre pour 100 gr. de cannes et on applique ensuite le coefficient tel qu’en multipliant le degré observé par ledit coefficient, on trouve de suite la richesse de la canne analysée pour les conditions adoptées (poids 50 gr., volume 1000 centimètres cubes, tube de 500 millimètres). C’est un procédé évidemment long, et qui exige une certaine sur- veillance, mais il peut être appliqué à des essais de contrôle pour l’analyse moyenne des rondelles, à chaque poste si la sucrerie uti- ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 15 lise la diffusion. Le résidu de l'extraction sert au dosage du ligneux dans l’échantillon moyen. Après ces cinq ou six extractions prolongées sur la cossetle divisée convenablement, 1l ne reste plus que des traces de sucre visibles seulement pour l’alpha-naphtol et correspondant à 0.02 ou 0.05 de sucre pour 100 gr. de cannes, et quelquefois à 0.12 ou 0.145. On peut opérer sur 100 gr., ou 78, ou 1045,096 de pulpe. Sur une partie de cannes riches on a eu ainsi: : Tableau LXIV. SUCRE p. 100 gr. de cannes. TESDANONNRE MERE ENT S,92 DNA ES à SRE RENE AE LR SET 6.24 Ann PA sat 2 0e 1.69 HORS ET Me da M SRE pes Te 0.78 RNA EN pe NT A ER CS 0.26 OR TP NM Le PTE Le traces Totale 129 Si on représente la marche de l’épuisement par une courbe, on a la suivante (fig. 2) : F1G. 2. — Marche de l’épuisement de la cossette de cannes par lessivages successifs à l’eau chaude. Ce procédé n’est pas très pratique pour un grand nombre d’es- 1. En opérant avec le tube de 500 centimètres cubes — alors on lit directement la richesse — puisqu'on multiplie par 2.5 le résultat et la pesée égale quatre fois plus de matière normale. Mais il faut absolument le 6° lavage pour assurer l'épuise- sement pratique. 16 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. sais et, on le voit, il ressemble beaucoup à celui préconisé par M. Vivien pour l'analyse de la betterave par diffusion, tandis qu'ici on opère par ébullition directe. L’épuisement par lavages successifs ne peut jamais, du reste, être complet, sinon en pratique, du moins en théorie, et il est facile d’ex- pliquer pourquoi on constate toujours du sucre dans les dernières eaux d'extraction. Admettons les quantités de matière ci-après : Pulpe, 100 gr.; richesse, 18 p. 100 de sucre ; eau, 65; eau, 200 gr. ajoutés par chaque lavage ; nombre de lavages, 9. Si on met 200 gr. eau + 65, on dissoudra après 10 minutes dans les meilleures conditions tout le sucre dans 265. La richesse du li- quide sera ou 7.95 p. 100 environ. 18 265 Admettons qu'il reste chaque fois avec la pulpe les 65 p. 100 d’eau. | Donc, il y aura _ 4.87 de sucre pour 265 d’eau, ou 4.85 p. 100. 3° lavage, même calcul, 0.45 p. 100. 4° lavage, même calcul, 0.11 p. 100. D° lavage, même calcul, 0.095 p. 100. 6° lavage, même calcul, 0.006 p. 100. On voit donc qu’il faut au moins 6 lavages bien exécutés pour ob- tenir un liquide ne contenant plus que 0.06 de sucre par litre, très visible avec l’alpha-naphtol. Si maintenant on peut réduire le volume du liquide restant dans la pulpe après chaque lavage, l'épuisement sera plus rapide, sans être complet, scientifiquement parlant. On voit, en outre, qu’il faut que la diffusion soit complète après chaque lavage pour que l’eau extérieure corresponde à la même richesse que l’eau située à l’intérieur de la pulpe. En pratique, on a tendance à avoir plus de sucre dans le jus intérieur, ce qui explique que l’on constate en effet encore parfois de 0.1 à 0.2 de sucre par litre dans la dernière eau de lavage et de 0.2 à 0.3 dans l’eau de pression de la cossette épuisée. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 17 La perte ne correspond qu’à 0.05 ou 0.15 de sucre p. 100 gr. de cannes, mais, enfin, si elle n’est pas toujours très visible avec le saccharimètre, elle est très calculable. La courbe devient celle-ci : F1G. 3. — Marche de l'épuisement de la cossette de canne par lessivages successifs à l’eau chaude. : Et, suivant le rapport entre la richesse, la quantité d’eau ajoutée, le poids de pulpe employée, elle varie principalement au début, si la durée de l’ébullition n’est pas exactement la même entre chaque extraction. ÿ FiG. 4, — Appareil Zamaron pour le dosage direct du sucre dans la canne par épuisements successifs. A. Réservoir cylindrique en cuivre muni d’un robinet F. B. Réservoir cylindrique (un peu plus petit que A) en tôle de cuivre perforée, et dans lequel on met 100 gr. de canne divisée, Ce réservoir est porté par un croisillon placé au fond du vase A. C. Plateau perforé muni d’une tige D pour presser la pulpe de cannes quand on ouvre le robinet F. Le tout est placé sur un support pour être chauffé au gaz, etc. Sous le robinet F on met un ballon de 1 litre, M. J. Zamaron a décrit un appareil permettant le dosage direct du sucre dans la canne par épuisements successifs à l’eau bouillante. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1897. — II, 2 18 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Cet appareil est construit de manière à faire 5 ou 10 analyses à la fois, et a été disposé heureusement pour éviter les espaces nuisibles afin d'obtenir l'épuisement pratique de la cossette, aussi divisée que possible, avec 6 lavages, pour un volume total de 1 litre. C’est l’appareil qui, jusqu'ici, nous semble le plus pratique pour opérer le dosage du sucre dans la canne par épuisements. Le marc reste dans le panier intérieur en toile métallique et, après dessicca- tion, donne le ligneux'. « Le dosage direct et exact du sucre dans la canne étant assez délicat à exécuter pour avoir des résultats se rapprochant de la vérité, 1l est bon de ne suivre qu’une seule et bonne méthode, afin d’avoir des chiffres satisfaisants. « Le procédé que je vais décrire peut être employé aussi bien pour les analyses de betteraves que pour celles de cannes. Il suffira d’ap- porter dans la marche de l’analyse toutes les précautions qui y seront indiquées. ÇA l’aide d’un seul appareil spécialement construit à cet usage, on pourra faire dix analyses de cannes en une heure et demie. « Comme la betterave s'obtient dans un état de division plus grande que la canne, il est certain que l’on pourra faire un plus grand nombre d’analyses de betteraves que de cannes, par suite de Ja vitesse d'extraction du sucre à chaud. « Pour les analyses de cannes, on devra avoir : « 1° Un coupe-cannes; «2° Un mortier en fonte (de dimension assez grande) pour diviser Ja canne ; € 3° Un appareil pour le dosage direct du sucre dans la canne*. « Dans les usines où l’on marche avec la diffusion, on pourra prendre de nombreux échantillons de cossettes (pour la canne), afin d'obtenir à la fin de la journée, ou de Ja nuit, une moyenne qui, certainement, devra représenter la quantité du sucre contenu dans la canne, pourvu que les échantillons de cossettes soient réguliers, 1. Appareil présenté à l'assemblée générale de l'Association des chimistes de sucrerie et de distillerie de France et des colonies, séance du 12 juillet 1897. 2, La description de cet appareil sera décrite plus loin dans cet article. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 19 afin d’avoir une moyenne aussi exacte que possible de la canne tra- vaillée à usine. « Préparation de la pulpe de canne qui doit être analysée. — Les cossettes prélevées aux coupe-cannes de l’usine, ou celles que l’on obtient au laboratoire avec des cannes qui y sont envoyées spé- cialement, sont broyées très finement dans un mortier en fonte. On doit faire subir à la cossette la plus grande division possible. De celle façon, on obtient une pulpe de canne qui se mélange parfaite- ment, et s’épuise à chaud avec rapidité. « La préparation de cette pulpe doit se faire très vivement, afin d'éviter une évaporation d’eau, qui amènerait une augmentation sensible de sucre dans 100 gr. de canne. « Dès que la pulpe est préparée, on doit avoir soin de la placer dans un récipient muni d’un couvercle, afin d’éviter une évaporation d’eau ; ensuite l’on procède aussitôt à la pesée des 100 gr. de ma- tière intimement mélangée. à « Comme l’on obtient, dans les usines de betteraves, la pulpe très divisée, la préparation des échantillons moyens devient plus facile que pour les cannes. « Cela fait, on procède à l'analyse. « Marche à suivre pour avoir l'extraction totale du sucre dans la canne. — On prélève 100 gr. de pulpe divisée et bien mélangée, et on les introduit dans le panier métallique P de l’appareil à doser le sucre. Cela fait, on épuise la pulpe avec de l’eau bouillante. « On commence par verser d’abord 200 centimètres cubes d’eau bouillante dans le récipient V de l'appareil qui contient le pamier métallique et la pulpe, et l’on fait bouillir cette eau 10 à 12 minutes. Par suite de cette ébullition, une grande partie du sucre de la pulpe se dissout rapidement, et, au bout du temps indiqué ci-dessus, lon soutire le liquide sucré dans un ballon jaugé A de 1 000 centimètres cubes. Lorsque tout ce liquide sucré est soutiré, on verse une se- conde fois 200 centimètres cubes d’eau bouillante sur la pulpe; on laisse le même temps de contact de l’eau sur la canne en faisant bouillir, el l’on procède ensuite au soutirage du liquide sucré. 20 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. « Comme l’on doit faire six épuisements successifs pour extraire la Lotalité du sucre, on ne devra plus ajouter après le second épui- sement que 150 centimètres cubes d'eau bouillante (au lieu de 200 centimètres cubes). « Au bout du sixième épuisement, on aura un volume de liquide sucré chaud, de 960 centimètres cubes environ, à cause de l’évapo- ration d’eau produite par l’ébullition. « Avant de recueillir le jus sucré du premier épuisement, on devra avoir soin d'ajouter 10 ou 15 centimètres cubes de sous-acé- tate de plomb à 28° Baumé, afin de précipiter les matières orga- niques et d'éviter l’aitération du liquide sucré. « Lorsque les six épuisements sont terminés, on refroidit le jus sucré, recueilli dans le ballon, à la température de 20° C. environ, ensuite l’on complète le volume à 1000 centimètres cubes; l’on agite le tout et l’on filtre. « Le liquide filtré est polarisé dans un tube de 400 millimètres. « Le nombre de degrés lus, multipliés par : POIDS norial. Gr. 0,81 Saccharimètre Laurent. . . … . , . . 16,20 0,8135 — re sn Ent 16,27 1,3024 — Schmidt et Hænsch,. . , 26,048 — le sucre contenu dans 100 gr, de canne ou de betterave. € On peut doser le glucose sur le liquide filtré. « La pulpe, une fois épuisée, est pressée assez fortement dans le panier même, à l’aide du petit pressoir T, pour en extraire le plus d’eau possible, et on la porte ensuite en la laissant dans le panier à l’étuve chauffée à 100-110° pour la dessécher complètement. Lorsque la dessiccation est terminée, on obtient la quantité de ligneux con- tenu dans la canne pour 100 gr. de matière. « Cette méthode est rapide et certaine; et l’on arrive facilement à obtenir de très bons résultats. « Aucune altération ne se produit pendant l’ébullition. « Depuis 1889 que j'emploie ce mode de dosage du sucre dans la canne, je n'ai jamais eu d'augmentation de glucose pendant l’opéra- ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 21 tion, et, pour qu'il y ait interversion de sucre, il faudrait opérer sur des cannes fortement altérées. Exemple, les cannes attaquées par le borer (ver de la canne). Si l’on se trouve en présence de semblables C ex) ju LE Détails. F1@G. 5. — Appareil Zamaron pour le dosage direct du sucre dans la canne. cannes, on n’a qu’à ajouter un peu de chaux ou de baryte pour neu- traliser la forte acidité de ces cannes. | « Cette méthode s’applique aussi bien à la betterave qu’à la canne ; 22 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. il suffit d'ajouter un peu de chaux pour alcaliniser très légèrement les eaux d’épuisement. « Description de l'appareil spécial pour doser le sucre dans la canne et dans la betterave. — Cet appareil se compose de cinq ou de dix récipients cylindriques V en cuivre, reposant tous sur une table métallique. « Chaque récipient est muni d’un petit robinet en cuivre R, pour l'écoulement du liquide sucré dans un ballon de 1000 centimètres cubes A. « Un panier cylindrique P, destiné à recevoir la pulpe divisée, se trouve dans chaque récipient. Chaque panier a un petit pressoir mé- tallique rond T muni d’une tige. € Au fond de chaque récipient se trouve un petit croisillon métal- lique pour éviter le contact du fond du panier avec le fond du réci- pient. « Une rampe de cinq ou de dix becs Bunsen B est placée sous les récipients pour chauffer le liquide en contact avec la pulpe. « Une table mobile se trouve fixée aux pieds de l'appareil pour recevoir cinq ou dix ballons jaugés de 1 000 centimètres cubes. Ces ballons reçoivent directement le liquide sucré de chaque récipient. Des numéros (1 à 10) sont gravés sur les récipients et sur les pa- niers métalliques. | « Afin de pouvoir compléter le volume de 1000 centimètres cubes aussitôt les dix analyses terminées, on pourra adapter un récipient D avec courant d’eau froide, dans lequel baigneront les ballons recevant le liquide sucré chaud. Cette petite installation pourra se faire dans chacun des laboratoires qui emploieront cet appareil. « Comme cet appareil est la réunion de cinq récipients sem- blables, on pourra, si l’on veut, augmenter ou diminuer à volonté le nombre de récipients. € On trouvera chez MM. Gallois et Dupont, 37, rue de Dunkerque, à Paris, l’appareil ci-dessus indiqué avec toutes les explications pour son fonctionnement. » ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE, 23 6° Digestion aqueuse à chaud (Pellet). On connaît ce pfocédé pour la betterave. Il peut être appliqué ab- solument de même pour l'analyse de la canne. On ne doit modifier que le poids de la canne si on veut faire un volume fixé de 200, 300 ou 500 centimètres cubes, ou modifier le volume définitif si on prend 1 fois, 1 fois 1/2 ou 2 fois 1/2 le poids normal du sacchari- mètre que l’on emploie pour obtenir un dosage direct à l’aide du tube de 400 ou de 500 millimètres. Le procédé se résume en ceci : Quel est le volume occupé par la cellulose impure renfermée dans la canne ? Cette question à été traitée par plusieurs chimistes. M. Wiley con- seille d'adopter la densité de 1, donc 1 centimètre cube par gramme de résidu insoluble de la canne. C’est-à-dire que si on pèse 16.20 de matière par 200 centimètres cubes et qu'il y ait 10 p. 100 de cellu- lose impure, le volume occupé par le résidu serait de 1,6, soit 201,6. Cetle manière de voir nous paraît très applicable et très simple pour la pratique. Nous conseillons donc de l’adopter, quoi- que, au point de vue scientifique, cela ne soit pas tout à fait exact. Nous avons trouvé des densités de cellulose impure un peu supé- rieures à 1, et, dans nos calculs, nous adoptions 1.2, ce qui aurait donné 1°°,33 au lieu de 1*,6 en adoptant la base formulée par le D: Wiley. Mais, comme nous le verrons plus loin, le dosage direct du sucre dans la canne ne peut pas servir de base à un contrôle absolu- ment exact par suile de la trop grande variation de richesse de la canne. Dans le laboratoire de Java, on préfère également la méthode par digestion aqueuse et nous avons donné précédemment les résultats comparatifs avec les méthodes alcooliques. Pour l'application de la digestion aqueuse à chaud, nous conseil- lons la pesée du double poids normal et demi dans un ballon de 900 centimètres cubes, de telle sorte que la polarisation dans un tube de 400 millimètres donne directement la richesse. Si donc le ligneux est de 10 p. 100, le saccharimètre a 16.20 de 24 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. poids normal; cela fera 405,5 de matière ou 4.05 de ligneux, soit 504 centimètres cubes. Si l’on veut rester au volume de 500 centimètres cubes, on devra peser seulement 16.07 x 2.5 ou 408,17. Même calcul pour le sac- charimètre allemand. On peut avoir des ballons de 500 centimètres cubes à col assez large pour l’introduction de la pulpe et de la forme de nos ballons de 200 centimètres cubes pour l’analyse de la betterave en verre spécial résistant aux changements brusques de température. Uuliser l’acétate de plomb neutralisé au lieu de sous-acétate de plomb et l'ajouter avant le chauffage. Laisser digérer au bain-marie presque bouillant durant une heure, une fois le ballon chaud. C’est pourquoi il est bon d’ajouter de suite de l’eau presque bouil- lante jusqu’à la marque de 500. Si l’on craint que la pulpe ne vienne en partie flotter au-dessus du liquide, accompagnée de bulles d’air, on peut placer une rondelle de plomb, percée de trous, dans le col du ballon, descendue jus- qu’un peu au-dessous du niveau du liquide, comme nous l’avons si- gnalé pour la betterave. On peut aussi agiter de temps à autre pour chasser l'air émul- sionné, etc. Refroïdir, compléter au volume définitif adopté, agiter, filtrer et polariser au tube de 400 à l’aide d’un polarimètre très sensible au vingtième, on a directement la richesse pour 100 gr. de canne. On peut opérer avec le double poids normal dans 200 centimètres cubes s’il s’agit du saccharimètre à 166,20, mais avec le simple poids nor- mal s’il s’agit du polarimètre allemand. Le volume de 52 gr. de pulpe de cannes dans 200 centimètres cubes est trop considérable, el si la division n’est pas convenable, le rapport de l’eau à la pulpe est trop faible pour obtenir un rapide épuisement en une heure au bain-marie, De même, on doit bien faire attention à mettre, dès le début, la presque totalité de l’eau, car l’eau ajoutée ensuite ne fait que diluer le liquide extérieur situé autour de la pulpe, mais ne dilue pas celui renfermé dans les cellules mêmes. Donc, le dosage est inférieur à ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 25 la réalité. Ce phénomène est très net déjà avec de la betterave et est très accentué avec la pulpe de cannes. Le docteur Wiley a essayé aussi l'application de la digestion aqueuse à chaud, et nous extrayons de son travail, déjà cité, les notes sui- vantes : 7° Digestion aqueuse à chaud (Wiley). Les céries 6 et 7 correspondent à des essais faits au moyen de la digestion aqueuse à chaud, en ballon bouché et dans 5 fois le poids d’eau environ, durant une heure (série 6) et deux heures (série 7). Tableau LXV. Série 6. — Résultats moyens (1 heure) : Déficit de saccharose. . . ._ 0.30 moyenne dans 5 essais. Excédent de saccharose . 0.52 — 8 — Déficit d'autres sucres . 0.16 — 4 — Excédent d'autres sucres . 0.07 — 1 — Série 7. — Résullats moyens (2 heures) : Déficit de saccharose. . 0.97 —— 2 essais. Excédent de saccharose . 0.69 —— 10 — Déficit d'autres sucres . , 0.19 — 3 — Excédent d’autres sucres . 0:22 — — Il résulte de ces essais que ce mode d’analyse semble préférable aux autres et qu’il n’y ait pas lieu de prolonger la durée du chauffage au delà d’une heure. De l’ensemble des essais ci-dessus, M. Wiley a conclu à la mé- thode ci-après pour le dosage direct du sucre dans la canne à sucre ‘: 1° Échantillonnage de la canne ; 2° Découpage en rondelles aussi minces que possible par le coupe- cannes ; 3° Mélange des cossettes et prise de l’échantillon ; 1. Tout ce que nous disons sur la canne est applicable au sorgho et aux bagasses de cannes, de sorgho, etc. 26 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 4 Peser 3 fois le poids normal du saccharimètre que l’on pos- sède et passer le tout dans un ballon portant un bouchon en caout- chouc analogue à celui des bouteilles de bière. Un trait doit indi- quer le volume de 305%,4 si l'on veut analyser le sorgho"; 9° Mettre au bain-marie bouillant durant une heure après avoir ajouté un peu de sous-acétate de plomb, puis de l’eau jusqu'à la marque à peu prés; 6° Faire refroidir, compléter exactement, agiter, filtrer et pola- riser ; 7° Faire deux ou trois analyses du même échantillon et prendre la moyenne ; 8° Ajouter au besoin des traces de soude ou de potasse* ; 9° On peut faire le volume de 300 centimètres cubes et modifier le poids de la canne à peser pour tenir compte du volume du marc. On voit que M. Wiley a beaucoup étudié la question de l’analyse directe de la cossette ou rondelle de la canne et qu'il y a dans son procédé beaucoup de points de ressemblance avec la méthode que nous avons appliquée à l'analyse de la betterave depuis 1883, c’est- à-dire l’analyse directe de la pulpe en ballons chauffés au bain-ma- ric et dont la description à paru dans le Bulletin de l'Association des chimistes du mois d'août 1884. Cela tient à ce que nous avions ré- servé ce mémoire pour l'assemblée générale du 98 juillet 1884 ct dont le compte rendu n’a été imprimé que dans le Bulletin du mois suivant. Mais, depuis longtemps, nous avions fait les essais et toutes les recherches relatives aux formes des ballons et à la durée du chauffage, à l’emploi du sous-acétate de plomb, ete. 8° Digestion aqueuse avec eau chaude (Divers). Pour l'analyse de Ja betterave, on a proposé, dans ces derniers temps, un procédé dit de Herles, et qui consiste à melire de l’eau chaude sur la pulpe, et à laisser le tout en digestion pendant un 1. Volume différent pour les autres sortes de cannes. 2, Nous avions indiqué également précédemment pour la betterave l'addition de l'eau de chaux, Plus tard on a proposé le ca’bonate de chaux pour neutraliser l'acidité, si on la croit trop forte. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 24 certain temps. Ceci pour supprimer le bain-marie dans le cas par l'application du procédé à chaud. Mais ce procédé est dangereux, car si la pulpe n’est pas très di- visée, on ne sait pas le temps de contact nécessaire pour chaque essal. En effet, il est dit que, pour appliquer celte manière d'opérer, on doit éviter la présence de morceaux grossiers, les séparer, etc. On ne peut pas éviter ces semelles avec la préparation de la pulpe de betteraves par les râpes à dents, par exemplé, ou même par les hache-viande. Aussi, conseillons-nous la digestion aqueuse à chaud au bain- marie pour l'analyse de toutes les pulpes qui ne peuvent pas être analysables à froid. On reconnait qu’une pulpe est analysable à froid lorsque, essayée par le procédé de diffusion aqueuse instantanée et à froid dans le minimum de temps possible, le résultat correspond à celui obtenu par la méthode à chaud. Du reste, dès 1887, nous avons essayé cette marche à eau chaude et, ayant eu des résultats incertains, nous l’avons rejetée. (Voir notre brochure de 1887 sur l'analyse de la betterave par un nouveau procédé simple, rapide et peu coûteux, page 49.) Par conséquent, nous ne croyons pas devoir la conseiller davan- tage pour l’analyse de la canne, d’autant plus que, jusqu'ici, la divi- sion de la matière première laisse à désirer. 9 et 10° Diffusion aqueuse à froid (Pellet) et digestion aqueuse à froid (modification Kaiser-Leuwenberg). Jusqu'ici, malheureusement, nous ne pouvons donner aucun ré- sultat sur l’application des procédés d’analyse à froid aussi instanta- nés que peuvent le permettre les manipulations, car la pulpe de cannes, aussi fine qu’on puisse la préparer à l’aide des instruments actuels connus, n’est pas analysable à froid. Néanmoins, il faut espérer qu’on ne tardera pas à avoir des appa- reils capables de réduire la cossette ou la rondelle de cannes en une bouillie analysable à froid et sans que cela occasionne trop de diffi- 23 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. culté, avec un rendement pratique sans dessiccation sensible de la masse triturée. Car, une fois en possession de cette bouillie ou crème de cos- setles de cannes, on peut appliquer immédiatement tous nos pro- cédés d'extraction ou de diffusion aqueuse à froid indiqués pour la betterave. Il va sans dire que nous avons déjà essayé bien des appareils, tels que râpe cylindrique à laille Keil, hache-viande de divers modèles, aucun n’a donné de bons résullats. II. — Action des réducteurs sur la lumière polarisée dans l'analyse directe de la canne. Il faut bien se rappeler, en outre, que le réducteur contenu dans la canne agit en général sur la lumière polarisée, mais que cette action devient presque nulle, ou nulle, s’il y a eu addition de sous- acélate de plomb en quantité sensible en excès. Pour la pratique, on a donc ainsi le dosage direct sensiblement exact du sucre cristallisable. Mais si la proportion de réducteur aug- mente à 4 et 2 p. 100 du poids de la canne, la polarisation directe n’est plus exacte. On doit alors opérer au moyen de l’acélale de plomb neulre neu- tralisé par l'acide acélique pour remplacer le sous-acétate de plomb et procéder à l’inversion Clerget. Mais cela devient très difficile dans les liquides étendus provenant de l’extraction ou de la digestion de la canne. On doit alors opérer sur le jus afin de déterminer l'influence du réducteur sur la polarisation et en tenir compte dans le dosage direct. III. — Résumé. Procédé à employer pour le dosage direct du sucre dans la canne. De tout ce qui précède, il s'ensuit qu’il faut rejeter l’alcool, parce qu'au point de vue pratique, l'extraction alcoolique exige trop de temps et de soin. Il faut opérer par digestion aqueuse à chaud ou par épuisements successifs. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 29 La canne étant divisée pour obtenir un échantillon moyen et non desséché, on dose le sucre par la méthode de digestion aqueuse à chaud, qui est absolument semblable à celle employée pour la bet- terave. On pèse donc 1, 2 ou 3 fois le poids normal dans des ballons de 100, 200 ou 500 centimètres cubes, on y ajoute la valeur de 10 cen- timêtres de sous-acétate de plomb ordinaire du poids de la canne pesée, on ajoute de l’eau jusqu’au trait. Pour éviter que la pulpe ne remonte dans le col par l’air dilaté, mettre un disque de plomb perforé suspendu par un liège, disque ayant à peu près la largeur du col des ballons et 1 à 2 millimètres d’épaisseur. Chauffer au bain-marie bouillant une heure et agiter de temps en temps. Laisser refroidir, compléter en lavant le disque, agiter, fil- trer et polariser, multiplier le résultat par le volume du ballon di- minué d'autant de dixièmes de centimètre cube qu’on a pesé de grammes de cossettes et diviser le tout par 100. Exemple : On a pesé 16.20 dans 100 centimètres cubes, si on trouve 15° de sucre, le résultat devra être multiplié par _—— ou 0.984 — 14.76. 100 — 2.6 100 Si on a pesé 26.048 dans 200 centimètres cubes, le résultat devra ; PRE 200 — 2.6 3 être multiplié par pe 0.987. | Pour un dosage très exact d’un échantillon, rappelons qu’il est indispensable de faire 2 ou 3 essais et de prendre la moyenne. M. le D' Krüger a également essayé l’addition de la chaux à la cos- selte de cannes pour l’analyse par digestion aqueuse à chaud et dans les autres procédés. Il a employé la valeur de 5 à 10 centimètres cubes de lait de chaux par essai, lait de chaux fait avec 20 gr. de chaux pure et avec 800 centimètres cubes d’eau. En général, les essais exécutés avec la chaux ont donné un résul- tat légèrement supérieur à celui fourni par l’analyse sans chaux. Ce résultat, d’après nous, tient uniquement à la destruction d’une Si on a pesé 26.048, ce sera ou 0.974. 30 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. grande partie du glucose (qui diminue en effet de 40 à 50 p. 100), ce qui réduit l’action sur la lumière polarisée et probablement parce que cet alcali réagit d’abord sur le lévulose. Tableau LXVI. EXTRACTION 2 sans chaux. avec chaux. EE EE Sucre. Glucose, Sucre. Glucose. 15.00 0.590 » » » » 15:10 0.333 14.85 0.792 15.10 0.319 14.93 0.691 15.10 0.326 Lorsqu'on opère par digestion, les différences peuvent être plus sensibles si la proportion de glucose détruite est plus notable. Sans chaux. Avec chaux. A —— A Sucre, Glucose, Sucre, Glucose. Moyennes, 14.97 0.611 15.33 0,226 Dosage par épuisements successifs. On pèse 48.6 ou 52.048 de cannes, on met 150 à 200 centimètres cubes d’eau, on y ajoute une trace de sous-acétate de plomb, on fait bouillir 10 minutes et on décante dans un ballon de 1 litre contenant 4 à à centimètres cubes de sous-acétate de plomb. On ajoute encore 150 à 200 centimètres cubes d’eau, ébullition 10 à 15 minutes, et ainsi de suite jusqu’à ce que le litre soit complet, c’est-à-dire après avoir fait 6 extractions. Lorsque l'opération est terminée, on refroidit le litre et on com- plète à 1 000 centimètres cubes, ‘on polarise au tube de 400 et on calcule le sucre d’après un coefficient calculé à l'avance. Soit 22,096 dans 1 litre, tube de 400 : 1° Le résultat doit être multiplié par 5 ; 2° - _— divisé par 2. En résumé, les divisions trouvées au saccharimètre doivent être ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 31 multipliées par 2.5 pour avoir le résultat p. 100, ou bien on emploie l’appareil Zamaron, que nous avons décrit, permettant d'opérer sur 100 gr. de matière. IV. — Des appareils servant à la préparation de l’échan- tillon moyen de cannes destiné au dosage direct du sucre. Nous supposons deux cas : le 1°, travail par les moulins ; 2° cas, par la diffusion. Dans le premier cas, lorsqu'on ne possède que les moulins, on doit analyser des échantillons de cannes entières prélevées plus ou moins fréquemment et en nombre plus ou moins élevé durant le travail, s’il s’agit du contrôle. On se trouve dans les mêmes condi- ons si on doit procéder à des analyses de cannes composant l’échan- üillon d’un champ ou d’une fourniture quelconque. Le nombre de cannes, dans les deux cas, est toujours forcément considérable si l’on veul avoir une analyse, sinon absolument exacte, du moins se rapprochant de la vérité. On peut donc avoir 20, 30, 40 ou 100 cannes à analyser et ce répété 2, 3, 10 ou 50 fois dans une Journée. Or, il n’y a pas d’autre moyen que de passer tous ces échantillons à un coupe-cannes de laboratoire, coupant plusieurs cannes à la fois et possédant plusieurs couteaux pour que lopération ne dure pas trop longtemps. Nous avons vu que M. Wiley, dès 1884, employait le coupe-cannes pour réduire en rondelles 25 à 50 kilogr. de cannes assez rapide- ment; qu'à Java, on avait le coupe-cannes à 9 couteaux, réduisant plusieurs kilogrammes de cannes en rondelles en 10 minutes. On peut avoir des coupe-cannes de divers modèles, soit disposés absolument comme ceux d’une sucrerie ayant la diffusion, mais d’un plus petit diamètre et à plateau horizontal, soit un coupe-cannes genre hache- paille, d’un débit déjà assez considérable, à plateau vertical. L'appareil de MM. Gallois et Dupont, spécialement construit à cet effet, permet de réduire en cossettes un certain poids de cannes en le manœuvrant à la main. Mù par courroie, il pourrait débiter da- 22 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. vantage, mais il faudrait un modèle plus grand, plus fort, pour ob- tenir un échantillon moyen de 15 à 20 cannes en un temps relative- ment court. Car ce coupe-cannes ne peut agir que sur une seule canne à la fois. Naturellement, l'installation doit être complétée par une disposition spéciale en vue de recevoir la cossette en un réser- voir fermé. Une fois la cossette produite, il s’agit d’opérer un mélange pour ainsi dire parfait, sur lequel on prélève 1 kilogr. de cossettes qu’on suppose représenter la moyenne. Ces cossettes, si elles sont trop grossières, peuvent être divisées encore rapidement au mortier, le tout mélangé, et, sur ce dernier mélange, prendre les poids de ma- tière nécessaire pour l'analyse. Quel que soit le soin apporté dans la préparation de cet échantil- lon définitif, on ne peut assurer qu’il représente bien exactement la moyenne. Et, d'autre part, si on analyse 2, 3 ou 4 fois le même échantillon, on trouve trois résultats différents. Les différences ex- trêmes sont faibles parfois, ou quelquefois assez fortes. Cela dépend précisément du degré de division de la masse. Si on a en résumé de la cosselle grossièrement divisée, il est évi- dent qu’en pesant 16.20 ou moins de 50 gr. environ de matière, l’homogénéité de la masse n’est pas suffisante pour qu'il n’y ait pas d'écart entre les 2 ou 3 résullats. _ Si, au contraire, on s’est donné la peine de passer les cossettes déjà divisées au mortier, ou au hachoir, de couper aux ciseaux les fibres trop longues, en un mot d’avoir une matière analogue à de la grosse pulpe de betterave hachée, alors les résultats pourront être peu éloignés les uns des autres; mais il y a une chose à crain- dre, c’est que toutes ces manipulations exigeant beaucoup de temps et se faisant souvent par une température assez élevée, il ne se pro- duise (et elle se produit) une évaporation très sensible pouvant être de 2 et 3 p. 100, ce qui de suite peut amener un écart de 0.25 à 0.50 sur le résultat de l'analyse directe. Lorsque l'usine possède la diffusion, pour le contrôle on peut évidemment préparer de suite un échantillon moyen avec les ron- delles ou cossettes prélevées au diffuseur et prendre les disposilions en conséquence pour éviter la dessiccalion, elc. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 49 Mais, même dans ces usines, on a intérêt parfois à analyser des échantillons de cannes avant leur passage au coupe-cannes, analyse de cannes venues par barques, wagons, etc., ou prélevées sur des charges. On se trouve donc dans le cas de l’usine travaillant par les mou- lins. Par conséquent, on doit utiliser soit le coupe-cannes industriel, soit celui de laboratoire, suivant l'importance des échantillons. F1G. 6. — Coupe-cannes Gallois et Dupont. J y a bien un appareil qui est quelquefois employé dans certains laboratoires de sucrerie de cannes. C’est un appareil analogue à celui qu’utilisent les marchands de comestibles pour débiter le saucisson en tranches minces régulières el suivant une inclinaison déterminée. Il y a de ces machines divers modèles, marchant à la main généralement (qu’on peut faire trans- former pour marcher mécaniquement), mais encore on ne peut opérer que sur une canne à la fois. Comme chaque tranche représente une rondelle de 2 à 3 milli- mètres d'épaisseur, si on a une canne de 1",20 à 1,90, cela repré- sente 400 à 800 coupes par canne, et si on doit passer 20 cannes, on voit que l’on peut avoir 15 000 à 20 000 coupes à exécuter par ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1897, — 11. 3 34 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. échantillon. A raison de 200 à 250 coupes par minute, cela repré- sente une heure et demie à deux heures pour confectionner un seul échantillon. Et ensuite, cela n’empêche pas la préparation de l’échantillon dé- finitif après le mélange de toute la cossette produite, pour avoir la masse plus divisée sur laquelle on prélèvera les poids de pulpe à peser. Appareils divers. En sucrerie de betteraves on se sert de râpes et de hache-viande. Nous avons essayé le râpage de la canne en nous servant d’une râpe cylindrique, construite spécialement en acier et taillée à peu près comme le disque Keil de notre râpe conique pour l'application de nos procédés aqueux à chaud et à froid pour l'analyse directe de la betterave. Mais le résultat n’a pas répondu à notre attente, et nous avons dû renoncer à celte application. On fait peu de travail et il y a une perte considérable par évaporation. Les mêmes résullats ont été observés à Java. Puis nous avons essayé le hache-viande, soit à hélice, soit à cou- Leaux, mais sans plus de succès. Avions-nous des outils défectueux ? Nous ne le pensons pas. C’est pourquoi nous avons été très surpris de lire, dans un article de M. IT. Pohlmam, publié par le Centralblatt für die Zuckerindustrie de Welt, du 9 janvier 1897, et traduit par notre collègue B. Mittelmann (Bullelin de l'Associalion des chimistes de sucrerie de mars 1897), l'application du hache-viunde pour produire de la cRÈME de bagasse. Nous avons aussi essayé l'application du hache-viande à la division de la bagasse de diffusion ou de moulin sans aucun succès. La ma- uère est trop fibreuse d’abord et pas assez résistante, par suite de Ja longueur des fibres, pour être divisée par un semblable appareil. Aussi, avons-nous demandé des explications à cet égard, car si véritablement on peut obtenir de la crème de bagasse, il n’y aura aucune difficulté pour obtenir la crème de cannes et alors l’unalyse directe de la canne sera bien simplifiée, puisque cette crème, nous ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 35 n’en doutons pas, pourra être analysée probablement à froid, ou alors par une digestion très rapide au bain-marie. Enfin la préparation de la crème aura en outre pour résultat la confection d’un échantillon moyen irréprochable. Nous attendons les renseignements demandés, nous donnant la des- criplion de ce hache-viande, sa force, etc., et les résultats obtenus. Dans tous les cas on peut réduire la quantité de masse à couper et le temps nécessaire à la coupe totale, en divisant d’abord toutes les cannes en deux parties suivant la longueur. Cela est facile : on divise d’abord la canne en 2%, 3 ou 4 tronçons suivant la hauteur, puis chaque tronçon est coupé suivant la lon- gueur et par le centre; on met de côté seulement un demi de chaque tronçon, pour le passage au coupe-cannes. On peut donc rassembler deux demi-cannes pour en former une qu’on passe au coupe-cannes à orifice unique. Cette division en deux parties n’a pas grand avantage si on possède un coupe-cannes, pouvant réduire en cossettes 20, 30 ou 50 kilogr. de cannes en quelques instants. Nous avons fait des essais démontrant que la richesse obtenue de chaque moitié d’un certain nombre de cannes était sensiblement égale. V. — Le dosage direct du sucre dans la canne n'est pas à conseiller pour le contrôle journalier de la fabrication. On voit d’après ce qui précède combien il faut prendre de pré- caution, pour obtenir un échantillon moyen de la canne d’abord, et ensuite les difficultés à vaincre pour éviter l’évaporation de la masse durant la préparation. Comme, d’autre part, les appareils diviseurs connus jusqu'ici ne permettent pas l’analyse de la pulpe à froid aussi rapide que pour la betterave, et enfin la différence considérable de richesse existant entre la canne la plus riche (partie inférieure), et la canne la moins riche (partie supérieure), il s’ensuit que dans les fabriques où l’on travaille par les moulins on ne peut pas espérer avoir un échantillon de cannes moyen représentant véritablement la richesse exacte des cannes travaillées. C’est aussi l'avis de quelques 36 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. chimistes qui ont beaucoup travaillé la question du contrôle chimi- que des sucreries de cannes, notamment de L. Biard, qui a publié de remarquables mémoires à ce sujet. D'autres, au contraire, pensent que l'analyse directe est préféra- ble; nous donnerons plus loin notre manière de voir et nos con- clusions basées sur la pratique. Si on travaille par la diffusion, la difficulté est déjà moins grande, et en répétant.des essais sur des échantillons exécutés après chaque heure sur une moyenne de cossettes fraiches prélevées sur chaque diffuseur comme en sucrerie de betteraves, on parvient à avoir des résultats beaucoup plus sérieux comme nous le verrons, Mais il y a encore une autre question qui est très importante. C'est de savoir la quantité de sucre lotal, entré à la diffusion ou par les moulins, rapportée au poids de la canne peste. En France, par exemple, la betterave achetée avec lare est mise dans les lavoirs et propre elle est pesée. Donc, à la diffusion il entre bien de suite 100 kilogr. de betteraves, dont l'échantillon bien pré- lévé donne la quantité de sucre total mis dans les diffuseurs. Mais en sucrerie de cannes, on ne lave rien. La canne est pesée et envoyée au travail par les moulins où par la diffusion, Les wagons, les voitures, les charges quelconques de cannes une fois pesées n’en- trent pas de suite dans l’usine, On pèse à l’avance pour la nuit, Mal- gré loutes les précaulions prises pour le nettoyage de Ja canne, il arrive des débris de feuilles, de la terre, des bouts blancs, etc. De telle sorte que si on repassait la canne à Pétat de cossettes avant l'entrée aux diffuseurs ou à l'état de cannes avant le passage au moulin, il vaurait une perte sensible sans compter la canne man- gée, la canne écrasée plus ou moins dans les entraineurs, etc., et ayant perdu une grande partie de son jus. Enfin, la canne ayant séjourné à lair plus ou moins longtemps perd une partie de son poids, surtout sous l’action du vent et du soleil, On a parfois constaté que tout cela représentait 2,5 à 3 p. 100, et dans d’autres cas seulement, 4 à 1.5, ce qui est toujours très sensible à la fin de la campagne et influence le rendement, rap- porté à 100 kilogr. de cannes pesées. Évidemment, la perte en poids correspond à une augmentation de richesse qu'on applique à un ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 37 poids trop fort de matière première, mais la canne mangée, écrasée, les pertes en terre et en feuilles, éte., constituent une perte réelle calculée en cannes. Si donc l'analyse directe de la canne au moment où on la travaille par la diffusion, peut donner un renseignement, ce n’est pas suñi- sant pour le contrôle définitif, et il faut alors procéder à une série de déterminations pour obtenir ce qui est le plus important, l'analyse de la canne rapportée à 100 kilogr. de cannes pesces. Nous arrivons donc à faire un contrôle rapide de la qualité de la canne par la méthode indirecte, suffisamment exact pour la pra- tique courante et vérifié où modifié, chaque semaine, par le calcul de la richesse exacte de la canne pesée au moyen de la détermination totale du sucre contenu dans le jus et dans les résidus, C'est ce que nous étudierons dans un chapitre spécial, Mais avant, il est indispensable de montrer la variation de la ri- chesse de la canne, la variation de la composition du jus suivant la pression, ete., ce que nous ferons dans la 9° partie, Du reste, on peut encore comprendre la difficulté de l'analyse di- recte par la variation de la richesse du jus des moulins, Si l’on prend des échantillons avant le moulin, c’est encore la même chose : on constate à chaque instant des variations de richesse de la canne, Dans la même journée, on peut trouver des cannes ayant 19 p. 100 de sucre, une pureté de 88 à 89, 1 à 2 de glucose p. 100 de sucre et ensuite un échantillon n'ayant que 9 à 10 p, 100 de sucre, 77 à 80 de pureté, et 8 à 12 de glucose p. 100 de sucre, Il s'ensuit que, si l’on veut connaître la moyenne de la canne tra- vaillée, il faut prendre régulièrement des échantillons, et beaucoup de fois durant chaque poste, Les échantillons doivent comporter au -moins 20 cannes tout venant et, d’après nos essais, pour suivre exactement la qualité de la canne, il faudrait au moins # analyses par heure. Ce qui n’est pas possible avec les instruments que l’on possède ac- tuellement pour diviser la canne et opérer par analyse directe sur un échantillon n'ayant pas perdu de poids depuis le moment où on découpe les cannes en cossettes jusqu’au moment où on pèse la pulpe pour l'analyse; tandis que l’analyse indirecte peut permettre 38 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. de suivre ce nombre d'analyses. Lorsqu'on a la diffusion, alors c’est encore plus simple. On prélève à chaque diffuseur un échantillon de 4 à 5 kilogr. de cossettes placées dans des vases ou paniers ou couffins se fermant à peu près. Après une heure, on mélange tous les échantillons mis de côté et on prépare un échantillon de Jus moyen, elc., on n’a donc qu’une analyse par heure et même en conservant le jus on n’a qu’une ana- lyse de 12 heures; nous y reviendrons. Pour les analyses de cannes entières destinées à faire connaître la richesse moyenne, il suffit de mettre également du jus ‘de chaque essai de côté pour n'avoir qu’une analyse par 12 heures. Enfin, on peut prélever chaque 5 minutes un volume égal du jus des moulins pour obtenir une moyenne par 12 heures, en conser- vant les jus au moyen du bichlorure de mercure ; nous en repar- lerons. Mais alors se pose une question : Comment passera-t-on de la ri- chesse du jus à la richesse de la canne ? C’est ce que nous examinerons dans le chapitre n° 6. VI. — De l'analyse indirecte. La détermination de la richesse en sucre de la canne travaillée nous paraît jusqu'ici devoir être établie indirectement. C'est-à-dire en connaissant le volume et la richesse du jus extrait et la perte en sucre dans les cossettes (si on procède à l'extraction du jus par la diffusion), ou dans la bagasse, si on extrait le jus à l’aide des moulins avec plus ou moins de repressions, avec ou sans eau, à froid ou à chaud. Il est évident qu’on doit connaître le poids de la bagasse produite, . celui de la cossette est très facile à calculer. Quant à l’échantillonnage de la bagasse pour le dosage du sucre perdu, il y a encore là quelques difficultés, et nous conseillons de faire des échantillons moyens à plusieurs reprises dans la journée et l’analyse du résidu par l'extraction aqueuse à chaud et directe au moyen de l'appareil Zamaron, en opérant sur 100 gr. de matière. Au besoin, dans le liquide neutraliser à peu près exactement l’aci- ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 39 dité de la bagasse par une trace de chaux, ou mettre du sous-acé- tale de plomb. Pour le mesurage des volumes de jus, les appareils utilisés en su- crerie de betteraves conviennent parfaitement, ainsi que tous les appareils de contrôle. Quant à l'échantillonnage moyen du jus, c’est encore ce qui se a FiG, 7. — Tube continu de Pellet et panier à cases pour l’examen polarimétrique rapide des liquides sucrés. fait en sucrerie de betteraves, et ce qui est le plus pratique pour la sucrerle de cannes. Pour le jus on prélève 5 ou 10 centimètres cubes à chaque mesu- reur, ou à chaque chaudière à éliminer ou à déféquer. Le volume extrait est mis dans un flacon avec 08°,1 de bichlorure de mercure (solide). | Dans un autre flacon, pour vérifier le sucre au moins, on met 90 centimètres cubes de sous-acétate neutre de plomb. A chaque addition de jus on a soin d’agiter parfaitement, Après 12 heures, on analyse chaque jus. Pour celui avec l’acétale de plomb, on note le volume total pour tenir compte du volume du sel plombique ajouté dans le calcul de la richesse. 40 ANNALES DE. LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Le résultat est parfaitement moyen et proportionnel et les résul- tats, sauf de rares exceptions, sont parfaitement d’accord dans la li- mile des erreurs possibles en pratique. Pour l’analyse rapide de tous les échantillons de jus de cannes, liquides sucrés, il est indispensable d’avoir une installation spéciale avec notre tube continu, qui permet de polariser exactement 5, 6 ou 10 fois à la minute. Toutes les liqueurs à examiner sont placées dans des verres mis par ordre dans un panier à cases. On procède par série de 12 ou de 16 échantillons (fig. 7). Moulins à cannes de laboratoire. Il y a divers modèles. On connait depuis longtemps le moulin employé dans la plupart F1G. 8, — Moulin à cannes de laboratoire, des laboratoires des fabriques de sucre de cannes et dont nous don- nons la figure ci-dessus. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. . 41 Puis on a également utilisé des moulins analogues aux cylindres à laminer, en rayant les cylindres seulement pour la facilité du pas- sage des cannes (fig. 9). Enfin, ayant le coupe-cannes Gallois et Dupont ou des cosseltes préparées pour obtenir du jus, on peut utiliser les presses ordinaires employées en sucrerie de betteraves. Seulement les presses simples et de petite dimension ne peuvent F1&. 9, F1G. 10. servir. Il faut avoir la presse à double vis de Gallois et Dupont, ap- pareil très résistant, et qui permet d'obtenir { à 2 kilogr. de cos- seltes, presque autant de jus que par les moulins (fig. 10). Enfin il y a les presses dites stérhydrauliques, qui sont disposées pour obtenir de très fortes préssions. Naturellement, quels que soient le moulin et la presse employés, le rendement en jus sera d’autant plus fort que la cossette sera di- visée plus finement. | 42 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. CINQUIÈME PARTIE COMPOSITION DU JUS DE LA CANNE SUIVANT LE DEGRÉ DE PRESSION EXERCÉE Lorsqu'on soumet de la canne entière ou coupée en deux parties égales à l’action d’un moulin, le jus obtenu a-t-il à tous les instants de la pression la même richesse en sucre ou la même composition générale ? Nous pouvons répondre de suite : Non. Le jus extrait le premier est généralement plus riche et plus pur. Nous allons résumer les essais nombreux qui ont été faits à cet égard. 4° Résullals du D' Icery. On trouve déjà des essais relatifs à cette question dans la remar- quable brochure du D" Icery qui donne, à la page 29, les chiffres c1- après : : Tableau LXVII. SUCRE par litre de vesou. 1'° pression. 21.4 2 29 ES 20.45 2 90 Résullats de M. P. Bonäme. M. P. Bonâme a donné de nombreux exemples (page 247 de son ouvrage sur la culture de la canne à sucre). ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 1" pression . 9e PA Le D° W. Krüger à publié un mémoire très complet sur cette question dans le livre n° 2 du compte rendu des essais de la station Tableau LXVIII, VE ext e 100 kilogr, de SOU rait cannes, œ. ee Qt [er] 2 © G CO 0 O1 «© 2] mi 19 19 » » SUCRE p-100ce, de jus. GLUCOSE p.100ce. de jus. 9° Résultats du D'° Krüger. de West-Java (Kagok-Tegal, Java) publié en 1896. Extrayons deux ou trois de ces essais qui sont intéressants au point de vue scientifique, mais ne correspondent pas tout à fait à ce qu’on a besoin de connaître en pratique, où l’on procède à l’extrac- tion du jus des cannes en extrayant d’abord la plus grande propor- MATIÈRES organiques p. 100gr. de sucre, Qt À O2 19 = CO C0 a bte es tion de jus comme 1°* pression et une faible quantité comme 2°. JUS obtenu de 1 kilogr, de cossettes de cannes. 200 400 100 350 600 100 200 300 {400 500 | 600 700 Tableau LXIX. PROPORTION de jus extrait p. 100 gr. d e cannes. 21e 43. 10. 38.42 65. 10. 21e 31.8 42. 53. 63. 74. SUCRE p. 100 gr. de jus. 19.90 19 21 .00 .00 20. 197 12 12 126 12%: 1122 1:15 15 75 PURETÉ, CENDRES, 2000 oCo© 44 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 4 Résullats de L. Biard. Dans le Bulletin n° 1 de l'Association des chimistes (juillet 1888), M. L. Biard a publié un article très intéressant sur l'influence de la pression sur la composition du vesou. Tableau LXX, — Composition moyenne des deux jus obtenus en fabrique. GLUCOSE p. 100 gr. PURETÉ. de sucre, — — — — — — Jus de 1'° pression. 103 1071.4 16.45 0.73 88.8 4.44 — 2 — 103 1070.6 15:60 %2%0:70:.-C84788 1 4749 NOMBRE DENSITÉ SUCRE GLUCOSE d'analyses. à 150. p.100cc. p.100 ce, L. Biard à examiné le jus de 3° et de # pression et a constaté que la densité et la richesse en sucre diminuaient avec le nombre de pressions. C’est pourquoi, ce chimiste avait conclu, comme d’autres collègues du reste, que la richesse de la canne calculée d’après l’analyse du jus extrait par pression et la quantité de marc dosée est toujours exagérée, le Jus restant dans la bagasse étant moins riche que celui extrait. Voir également les essais de L. Biard sur la même question (Bul- letin de l'Association des chimistes de sucrerie et de distillerie, nu- méro de juin 1891) et d’après lesquels le jus de 2° pression a été en moyenne de 1 p. 100 moins riche en sucre que le vesou de 1"° pres- sion et cela pour quatre campagnes entières sensiblement. Cette différence de richesse influe sur celle du jus moyen d’envi- ron 0.25 p. 100, par suite de la proportion des deux sortes de jus mélangés. 45 ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. D° Résultats de H. Pellet. Nous avons trouvé de notre côlé : Tableau LXXI. GLUCOSE SUCRE a — QUO- DENSITÉ. p.100gr. PURETÉ. CENDRES. TIENT p.100 cc. p.100 cc. de salin. sucre Jus de 1"epression.. 1074.5. 17.32 0.36 2.10 89.2 0.54 TT de 2 DOME TE OT 7 (EN) ee Jus de repression après imbibition . 1 016.0 SH 60123-30885 50 20827078 Tableau LXXII. GLUCOSE SUCRE DENSITÉ. p.100ce. dejus. , dejus. Jus de 1'° pression. 1061.7 1183on 1e — 2° = 1 060.0 13.3 Î sucre. 9.33 10.60 TE © p.100 gr. PURETÉ. E de Tableau LXXIII. — Cannes coupées depuis plusieurs jours et altérées. GLUCOSE SUCRE nes sers DENSITÉ. p.100 gr. p. 100 cc. p.100 gr. PURETÉ. de jus. de jus. Lee Jus de {1° pression, 1 068 13.39 2 (OT 15.46 74.6 — 2 — 1 069 1420022729 17.03 TNT Nous avons eu encore les résultats ci-après : Tableau LXXIV. He GLUCOSE ; DENSITÉ, .100 cc. P: 1er; ERA Ce Me du jus. ile 1'° pression . 1 066.7 14.39 5.49 81.65 2° — 1 065.8 13.83 5.93 79.55 232 —— 1, » » » » 2 RO ee 1 066.0 13.92 JET 80.10 2° — 1 066.0 13.78 Je 29 719.30 3° A à 1 065.5 13.60 s: 97 78.50 1. Pas de jus obtenu. 46 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 6° Essais de M. Dræœshout. M. P. Drœshout a donné quelques résultats d’analyses sur les jus de diverses pressions de la canne à Cuba et a obtenu les chiffres ei- après, en opérant sur des produits industriels. (Bulletin de l'Asso- cialion des chimistes de sucrerie, numéro de janvier 1895.) Tableau LXXV. SUCRE SUCRES NON- ; ; VALEUR * p. 100 gr. ré- CENDRES, PURETÉ. propor- de jus. ducteurs. EOCRES tionnelle. {re pression . 18.58 1.10 2.49 0.225 84.30 14.50 me —- 16.90 1.10 290 0.234 S1.70 12.70 3° = 10,50 1.85 4.50 0.345 70.00 7.35 SIXIEME PARTIE I. — Quel est le coefficient à appliquer pour passer de la richesse du jus de la canne pressée à la richesse de la canne : 4°” analysée; 2° travaillée ? Il faut considérer deux cas : Premier cas. — Étant donné un échantillon de cannes et le jus obtenu, calculer la richesse de la canne pour 100 kilogr., connaissant l'analyse du jus. Deuxième cas. — Connaissant la richesse en sucre d’un jus fourni par un grand nombre d’échantillons moyens journaliers, calculer la richesse de la canne pesée à l'entrée à la fabrique. Ce sont deux questions bien distinctes. Examinons la première question. ÉTUDES SUR LA GANNE A SUCRE. 47 Eésullats de MAL. L. Biard, E Giesbers, H. Pellet et divers. On sait, d’après ce que nous avons dit sur la qualité du jus obtenu par pression, que le jus de 1" pression est toujours sensi- blement plus riche et plus pur que le jus de 2° pression et ainsi de suite. Par conséquent, le jus extrait par pression ne représente pas la moyenne du jus de la canne. Si donc on a dosé le ligneux, soit 10 p. 100, les 90 gr. de jus con- tenus dans la canne ne sont pas de même richesse que les 60.55 ou 68 p. 100 de jus extraits par la pression. Il en résulte que si on multiplie la richesse pour 100 gr. du jus recueilli par la quantité de jus déduite du dosage du ligneux, on ob- tient une richesse de la canne trop élevée. C’est un fait bien établi par un grand nombre de nos collègues: L. Biard, Giesbers, etc. Aussi, les uns ont-ils proposé un coefficient différent de celui pro- posé par d’autres. M. L. Biard a proposé celui de 86 pour passer de la richesse pour 100 gr. de jus à celui de la canne, bien que, par le dosage du ligneux, on trouve 90 de jus (n° 8, 15 mars 1889) et il a établi qu'avec les coefficients 88 ou 89 et à plus forte raison 90 on calculail une ri- chesse exagérée de la canne. M. E. Giesbers propose d'adopter le coefficient 87.5 au lieu de 90, lorsqu'il y a en moyenne 90 de jus. Il a trouvé par expérience que, suivant le cas, 1l fallait adopter de 86 à 89 et c’est pourquoi il propose la moyenne. (Bullelin de l'Association des chimistes, 4 oc- tobre 1895, p. 287.) De notre côté nous avons fait également un certain nombre de dosages directs de cannes comparés aux dosages du sucre dans 12 jus obtenu par double pression, et pour des cannes ayant aussi de 9,9 à 10.5 p. 100 de ligneux. Voici, par exemple, les détails d’une opération : D'abord nous avons voulu vérifier si les cannes coupées en deux parties égales suivant la longueur, l’une pressée à l’état de canne, 48 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. l’autre partie découpée en rondelles et pressées, fournissaient toutes deux un jus analogue. Nous avons déjà dit qu’à ce sujet nous n’avions aucun doute et que, pratiquement, les différences entre les deux moitiés étaient insi- gnifiantes. Dans le cas présent, ayant cherché à nous mettre dans les meil- leures conditions pour séparer les cannes en. deux parties, nous avons obtenu .des résultats absolument concordants, vérifiant à Ja fois la même qualité du jus des deux moitiés et celle du jus des cannes entières ou découpées en cossettes avant d’être pressées. Ceci a surtout un intérêt pour les usines qui se servent des coupe- cannes, soit pour l'extraction du jus à la diffusion, soit pour l’échan- tillonnage. Nous avons eu (même moulin, même proportion de jus): Tableau LXXVI. SUCRE 3 DEN- ti, G LUC OS E CENDRES p.100 gr. p.100 ce. , p.100ce.} x à SITÉ de jus. p.100 ce. de jus. sucre. Jus des moiliés | coupées en longueur. . 1071 16.48 15.34 0.37 0.60 de cannes découpées en cossettes. 1071 16.48 15.34 0.36 0.70 On a vu qu’au laboratoire de West-Java (Tegal Kagok) on a ob- tenu des résultats analogues sur des cannes découpées en deux parties suivant la longueur. On a ensuite prélevé sur les cossettes, bien mélangées avant d’en passer la plus grande partie au moulin, deux forts échantillons, de nouveau mélangés séparément, et fait sur chacun une analyse. Tableau LXX VII, SUCRE p. 100 gr. MOYENNES. direct, Analyse a. . , . 18517 (l er 1 . e 1° échantillon. NT dur 193,414 air A MANAIYSe/TS MERS 13.39 en 2° échantillon. PS 1 13.06 13 22 Moyenne générale, . . . 13.19 | À ajouter : sucre restant encore dans la cossette épuisée (par l'alpha naphtol), , , . . . . 0.02 ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 49 D'où, coefficient calculé : 13.21 sucre p. 100 gr. de cossetttes — 801 15.34 — — de jus. Nous avons fait d’autres essais en extrayant le jus de la canne par différentes pressions, puis imbibition, repression et analyse de la bagasse restante, en pesant, mesurant et analysant tout et en pre- nant naturellement toutes les précautions pour éviter les pertes et les altérations de jus. Voici les détails qui peuvent intéresser nos collègues : 1° cannes choisies pesant ensemble 245,335 ; 2% On a pressé une première fois, puis une deuxième ; 3° La bagasse restante a été imbibée d’eau par trempage dans un vase dont-on a analysé le liquide ; 4° On a pressé la bagasse imbibée et enfin on a analysé la bagasse. Tableau LXXVIII. — Analyse des produits. jure PETIT JUS de (eau de 1re de 2e repression d'imbibi- pression. pression. ep tion). DenSHÉ TERME ETES MNREMX 1 074.5 1 070 1016 1 005 Volume Ne rer. 995 325 850 4.050 Sucre p. 100 centim. cubes. 1e 15.87 3.90 1.00 SUCTESD TO URE TES EEE lo 14.83 » » Glucose p. 100 cent. eubes. 0.36 0.35 0.12 traces Glucose p. 100 gr. de sucre. 21 2 3.9 » Pureté CD AT 89.2 87.2 S5.5 cE Cendres p. 100 cent. cubes. 0.54 0.75 0.20 0.08 Quotient salin 32 ILE 20.8 1275 1re ANALYSE. 2e ANALYSE. MOYENNE. Bagasse. . . . 3.9 3.4 3.45 Sucre retiré ou laissé. Jus de LEDrESSION EE AU 1178255: — 29 Re: OR UAEN DUR es 06 TEPTESSIONT. NS ne 30,3 Petit jus . 11.5 Bagasse . 25.9 DUCret0tal 0 3217 ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SERIE, — 1897. — Ir, 4 50 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Soit pour 100 kilogrammes de cannes fraîches a "8,77 15:71 g TE 101 — 0,854 comme coefficient. Si on adopte la moyenne proportionnelle du jus des deux pres- sions qui est: PERSAN AUEUS CEST RAE OC ANENRRE 1 073.4 Sucre D. 100 centimètres cubes. . . . . . 16.96 SUCTOLPE 00 ETS EMEA AE LE RE 15.80 PUDEUR re en ns ie PE ne 0 A TE 88.7 13.77 le coefficient calculé est de = — 87.1 au lieu de 90 p. 100 15.80 qu’on aurait dù adopter par le dosage du ligneux. On voit done qu'il n’est pas possible non plus de dire le coef- ficient exact à adopter, puisqu'on ne connaît pas le degré de pression exercé lors de chaque essai. Ainsi, dans notre expérience, le jus de 1" pression représentait 46 p. 100, et le total du jus des deux pressions, plus de 60 p. 100. C’est ce que l’on peut obtenir couramment dans les laboratoires. Mais, d’autre part, si on arrive à une telle proportion de jus lors- qu’on peut surveiller les préparations, on n’a pas la même certitude lorsqu'on a beaucoup d’essais à terminer en un jour et qu’on ne peut assister à toules les opérations. Il est certain qu’il y a une tendance générale à obtenir moins de jus de la canne pressée, donc un jus plus pur, ce qui diminue le coefficient à adopter. C’est ce qui doit expliquer les variations ob- servées par différents chimistes. Ces deux essais donneraient le coefficient 0.862, se rapprochant beaucoup de celui de M. L. Biard qui a proposé 0.86. Mais nous avons cherché à vérifier ce chiffre par un certain nom- bre de dosages directs et indirects. Nous avons trouvé, comme M. E. Giesbers, que ce coefficient n’était pas constant et qu’il variait même considérablement. ' 1. Pour 100 gr. de jus de 1° pression. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 5i Voici des moyennes de nombreux résullats par semaine : Tableau LXXIX. SUCRK COEFFICIEN! (dosage direct). calculé. 1'° semaine, 12.81 89 291: — 12.29 S9.0 3 — 12220 87.5 4e — 12.14 86.0 D? — 1201 S9.0 6° — 12716 SS.0 7 — 02757 89.5 S° — 12.20 88 9° — 12.06 87.5 10° — 12.94 85,5 11: — 12.53 86 129 - — 13.20 S7 TRES 13.955 83 Moyennes. . . 12.955 87.4 chiffre qui se rapproche aussi de celui de M. E. Giesbers. Les différences de 83 à 89 ne correspondent pas évidemment complètement à la variation de richesse du jus de pression par rap- port à la richesse réelle de la canne. Il faut aussi en attribuer une part à la difficulté d'obtenir f’échantillon moyen de la canne devant être analysée directement. Nous l’avons signalée et il faut peu de chose pour que lanalyse ne représente pas la moyenne exacte lorsque certaines parties de la canne contiennent 17 à 48 p. 100 de sucre et d’autres à côté 4 à 5 seulement. Aussi, malgré les soins pris pour l’échantillonnage, arrive-t-on, dans chaque semaine, si on fait 14 essais directs (2 par jour, 1 par poste) sur un échantillon moyen de cossettes, à obtenir certains écarts avec l'analyse indirecte et calculant la richesse de la canne d’après le coefficient qui paraît le meilleur comme moyenne. Pendant les 13 semaines correspondant aux tableaux ci-dessus on a eu parfois les écarts suivants. 52 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Tableau LXXX. ANALYSE Par STE directe, COEFFICIENT Gur l'analyse directe. 13.10 12.48 — 0.62 11557 12.09 —+ 0.52 11906 12230 —+ 0.40 12.35 112199 — 0.36 19752 12.19 — 1.33 12 02 11.78 — 1.04 13.33 12.61 — 0.72 14:55 12.04 —+ 0.49 IA S I 11.85 —+ 0.54 12.87 122106 — 0.71 13291 19,91 — 0.60 13.00 12.45 — 0.55 13.30 6/5) + 0.49 Nous avons voulu étudier les variations du coefficient pour passer de la richesse du jus de cannes à celle de la canne elle-même en opérant comme on peut le faire dans un laboratoire de sucrerie, c’est-à-dire au point de vue pratique. Pour cela, nous avons suivi durant une journée le travail d’une sucrerie et prélevé pendant chaque heure plusieurs échantillons de cannes divisées en cossettes. Après chaque heure, on préparait un échantillon moyen sur lequel on enlevait 2 à 3 kilogr. de cossettes, lesquelles étaient passées au moulin à deux pressions. Sur le tas, quelques poignées de cossetles étaient mises à part, passées au mortier, el réduites en fibres plus ou moins grossières. Les trop longues élaient coupées aux ciseaux de façon, en un mot, à pouvoir faire un mélange aussi homogène que possible sur lequel on prélevait le poids nécessaire à l'analyse directe. L'analyse directe était faite par épuisements successifs et dans les mêmes conditions, c’est-à-dire 6 épuisements avec 150 centimètres cubes à 175 centimètres cubes d’eau chaude chaque fois pour 50 er. de cossettes ; durée de l’ébullition : de 10 à 12 minutes par addition d’eau. Un dernier épuisement était mis à part, complété à 200° afin de voir s’il y avait encore du sucre en quantité sensible. La polarisation ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 53 faite sur un tube de 400 millimètres n’a fourni que des quantités très faibles, pouvant faire varier la richesse directe de 0.05 à 0.1 au plus. | Même résultat en opérant sur le liquide extrait de la pulpe épui- sée par pression, seulement le liquide obtenu ainsi paraissait natu- rellement plus riche, puisqu'il n’était pas dilué dans 4 fois son poids d’eau. C’est même le meilleur moyen de voir si une pulpe de cannes est bien épuisée. Si on opère par extraction, on peut avoir un dernier liquide sans traces de sucre, parce que le véhicule suit un chemin toujours le même, mais si on soumet le résidu paraissant épuisé à une forte pression, on constate parfois encore la proportion de sucre de 0.2 à 0.5 par litre à l’aide de notre méthode micro-chromosaccharimétri- que par le naphtol-alpha. S'il n’y a que 50 gr. de matière, cela cor- respond à 0.01 ou 0.025 ou 0.02 à 0.05 p. 100 de matière normale, quelquefois plus, suivant l’épuisement. Voici le résultat de 12 essais de détermination du coefficient n° 2. Tableau LXXXI. COEFFI- : SUCRE SR OT DENSITÉ DRE Dre ET TUE ANALYSE (analyse di- du jus. + a te mn directe. ce de jus. de jus. p. 100 gr. de jus. 7 heures. 1 071 15.87 14.82 13.00 87.7 BD 1 073 16.32 1157211 13.65 OT 9 — LORS 15.87 14.80 1228 (07/ 85.6 10 — 1 072 15.83 AATEAT, 12.67 85.8 11 — 1 074 16.71 15.55 3.60 84.2 12 — 1 073 ESA 14.69 3.00 88.4 1 — 1 075 16.00 14.91 13.32 89.4 2 — 1 073 15.87 14.7 1967 85.5 2 — 1071 15.44 14.41 1209 59.7 4 — 1 070 15.00 14.00 12.06 86.1 D — 1 070 15.34 14.30 12.35 S6.3 6 — 1071.5 15.87 14.81 12.84 56.0 1 072 15.82 14.75 12.84 86.7 Le ligneux était en moyenne de 9.8 p. 100. 4 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 14.75 X 90.2 100 tandis que par l’analyse directe en moyenne on n’a eu que 12.84. Contrôle de la moyenne. — Analyse de la moyenne du jus des cossettes mises à part à chaque heure : La richesse par le ligneux aurait donc été de — 13.90, Sucre p. 100 centimètres cubes de jns. . . . . . . . 15.76 SUUNTO DA DUREE EE ET RNA Es RE SRE 14.70 On voit que ce coefficient se rapproche de celui que nous avons obtenu par un essai spécial sur de la canne pressée, repressée, et avec imbibition d’eau, etc. Mais il faut remarquer que si le coefficient 86.7 est possible, il y a eu des variations très grandes de 84.2 à 89.7. Cependant cela ne doit pas tenir aux cannes, puisque la densité du jus normal a peu varié. En outre, pour # échantillons ayant donné sensiblement le même jus (densité 1073-1074) on a eu depuis 84.2 jusqu'à 89.4 comme coefficient calculé. Ce grand écart ne vient pas de ce que le jus recueilli par le mou- lin était plus différent du jus normal dans un cas que dans l’autre. I ne doit être attribué, en grande partie, qu’à la difficulté précisé- ment de préparer un échantillon bien moyen pour que 950 gr. d’un mélange aussi variable que la cossette de cannes puisse représenter la richesse absolue correspondant à un travail de plusieurs milliers de kilogrammes. Tandis que par le moulin la quantité de malière pressée est 30 à 100 fois plus grande et on n’a pas à craindre pour la dessiccation. Ce sont là des faits qui paraissent évidemment en contradiction avec les conclusions que nous avons formulées au sujet du contrôle chimique en sucrèrie de betteraves. Mais les conditions, on doit le reconnaitre, sont tout à fait diffé- rentes, attendu que la division de la betterave s'obtient aisément à l’aide des coupe-racines, et que, d’autre part, les variations de ri- chesse extrêmes qu’on peut trouver d’une cossette à l’autre ne sont pas aussi considérables que dans la canne. C’est précisément en étudiant le contrôle chimique de la sucrerie ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 55 de cannes pour l’établir conformément à celui de la sucrerie de bet- teraves que nous avons reconnu les difficultés d’opérer absolument de même, Cependant, lorsque des appareils permettront de réduire en pulpe fine un poids assez fort de cossetles de canne, obtenues d’un fort échantillon de cannes entières ou recueillies du coupe-cannes, et que pendant tout ce travail on n'aura pas à craindre une évapora- tion, on pourra accepter l'analyse directe faite par le procédé le plus simple, ou digestion aqueuse à chaud (à froid, si la division de la fibre le permet) ou par épuisement ou lavage. ]l ne restera plus qu’à adopter un coefficient pour passer de la ri- chesse directe de la canne travaillée à la richesse industrielle de la canne pesée, pour tenir compte de la perte en poids par la dessic- cation des cannes, des cannes écrasées, mangées, des débris de feuilles, terre et déchets de toute nature n’arrivant pas au moulin ou au coupe-cannes. Le coefficient moyen par lequel on doit multiplier la richesse pour 100 gr. de jus pour avoir la richesse de la canne doit donc être déterminé pour chaque usine suivant les conditions dans lesquelles on se trouve, c’est-à-dire l’appareil servant à presser les cannes, la pression exercée, le rendement en jus, le procédé suivi pour l’échan- tillonnage de la cossette, ou de la canne analysée directement, etc. En tout cas, pour une richesse en ligneux de 10 p. 100, ce coeffi- cient sera inférieur à 90 et pourra varier de 84 à 89 suivant les cir- constances et se rapprocher de 86 à 88 en général. Si les cannes sont peu chargées de ligneux, il est bien évident que l’on atteindra le coefficient 90, même s’il n’y a que 8 à 8 1/2 de li- gneux, mais on descendra à 84, 85 pour des cannes ayant 12 p. 100 de ligneux et peu pressées. Ce coefficient moyen permet donc de passer de la richesse du jus à celui de la canne et d’avoir des résultats rapides très sensiblement comparables pour des analyses industrielles. Mais il ne donne que la richesse de la canne ou de la cossette pré- levée soit au moulin, soit au coupe-cannes. Or, cette canne analysée à ce moment ne représente pas exacte- ment la canne entrée à l'usine à la bascule. 56 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. C’est alors qu’il nous faut étudier la deuxième question : Le coef- ficient à appliquer pour passer de la richesse du jus de moulin p. 100 à la richesse calculée de la canne p. 100 entrée à la bas- cule. II. — Coefficient à adopter pour passer de la richesse du jus à la richesse de la canne travaillée. La canne entrée à la bascule n’est généralement pas toute tra- vaillée de suite. Dans les usines où on travaille constamment, le service de nuit se fait au moyen de la canne reçue plus ou moins tard le jour. Les cannes des wagons de la veille ne sont pas toujours écrasées ou coupées par ordre d'entrée, si bien que quelques wagons restent sur les voies pendant 10, 12 ou 15 heures. S'il y a des arrêts quelconques pour nettoyage, fêtes, ete., de la canne en tas ou en wagons peut donc être conservée durant plu- sieurs jours. Quel que soit le laps de temps écoulé entre la pesée et le travail de la canne, celle-ci subit une perte de poids, une dessiccation plus ou moins notable suivant l’état atmosphérique de l'air (température, vent). S'il survient des pluies, c’est le contraire, mais c’est le cas le moins fréquent, au moins pour certains pays. La perte de poids est variable, suivant le mode de chargement, l'endroit où sont déposées les cannes, etc. On constate, par exemple, que des wagons peuvent perdre un poids correspondant à 0.6 ou 0.7 p. 100 en quelques heures. Dans d’autres circonstances, celte perte atteint À à 1.5. Par conséquent, sur 100 kilogr. de cannes pesées à la bascule il n’en entrerait au moulin que 98.5, 98 ou 99.4, suivant la perte su- bie, si on n'avait qu'à compter sur la dessiccation. Mais il y a bien d’autres pertes difficiles à calculer et qui corres- pondent : 1° Aux cannes écrasées ; 2° Aux cannes mangées ; 3° Aux débris de feuilles restés sur les wagons; ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 57 4° À la terre qui tombe peu à peu des cannes et qu’on retrouve sur la plate-forme (quantité variable, quelquefois négligeable); D° Aux déchets mis au rebut et provenant du nettoyage des trans- porteurs, etc. Il y a donc perte de sucre réelle en poids, et perte de cannes. La perte en sucre correspond au Jus des cannes écrasées, aux cannes mangées et déchets de cannes. La perte en poids correspond aux débris de feuilles et à la terre. Quelles sont les proportions de ces deux sortes de pertes? Cela est diflicile à évaluer. Mais on compte encore qu'il y a de 0.2 à 0.3 p. 100 de déchets et terre. Quant aux cannes écrasées, mangées, la perte se chiffre encore par 0.1 à 0.2 p. 100. On peut donc avoir, d’une part, une dessiccalion de 1.5 p. 100 et une perte en jus et di- vers déchets de 0.5, soit au total 2 p. 100. En un mot, sur 100 ki- logr. pesés, il n'entre réellement dans ces conditions que 98 kilogr. de cannes. De plus, celte canne est plus riche que celle entrée, puis- qu’il y a dessiccation et que lorsque cette dessiccation est rapide, en 10 ou 20 heures, il n’y a pas d’altération du sucre, mais augmenta- lion de la richesse. La richesse calculée de la canne avec le coefficient 86, 87 ou 88 est donc trop élevée si on veut savoir la richesse réelle rapportée à 100-kilogr. de cannes payées. On peut calculer approximativement le 2° coefficient. Admettons que le coefficient n° 1 soit 87. D'autre part, qu’il y ait 2 de perte totale, on a 87 — 2 —&5. Mais on peut le déterminer exactement par le contrôle de la fabri- cation. Pour cela, il faut connaître le volume du jus, sa richesse en sucre, la perte dans la bagasse ou la cossette, et la perte totale en sucre, ce qui donne le sucre total entré dans la fabrique. Ayant le poids de la canne entrée, on a la richesse industrielle de la canne payée. C’est un contrôle qui est plus ou moins facile à appliquer, mais qui, en résumé, ne présente pas de difficultés sérieuses lorsqu'on examine ce qu’on fait déjà en sucreries de betteraves. Il faut des mesureurs de jus, puis un échantillonnage régulier du jus obtenu par n'importe quel procédé, conservé et analysé une 58 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. seule fois par 12 heures. Enfin, pour les résidus, en avoir l’analyse et le poids (c’est là ce qui peut présenter le plus d’ennuis pour obtenir des résultats sérieux lorsqu'il s’agit des moulins), c’est-à-dire le poids de la bagasse et son analyse moyenne, etc. Cependant, nous avons vu bien souvent ces poids notés et les ana- lyses relevées. En résumé, on a ainsi le sucre Lotal entré. Lorsqu'on a la diffu- sion, le contrôle est des plus simples et c’est ce qui nous a permis d'étudier le 2° coefficient à plusieurs reprises et même constam- ment durant le fabrication. Comme le coefficient n° 1, il est assez variable. Nous avons trouvé depuis 82 jusqu’à 87, suivant les années, les fabriques et l’époque de l'analyse, soit une moyenne de 84.5. Voici quelques chiffres : Tableau LXXXII. d, 2. 3 Densité du jus. . . . te 1 066.7 » » Sucre p. 100 centim. cube jus . 14.56 » » Sucre p. 100 gr. de jus. . .—. . . 13.65 15.67 14.71 Ligneux 2.2 Vis Le LodRe EAN 9AGI 10.07 10.50 Jus par différence VAS Uri M ee 90.39 89.93 89.950 Richesse caleulée par le rene ee 12,34 14.08 13.20 Sucre p. 100 gr. de cannes par jus LE DOCS CR Ne 11.88 12.84 12.44 2°coeMitenticalenlé , 11.722 87.1 82.0 84.5 ANAIYSENOINECIO RE EME » 13.41 F2#87 1% coeficient à appliquer. . . . . » 85.6 87.4 Le coeflicient n° 2, pour passer de la richesse p. 100 gr. du jus à la richesse industrielle rapportée à 100 kilogr. de cannes pesées, que nous venons de signaler comme étant de 84.5 d’après nos es- sais, est très voisin de celui adopté à Maurice, ainsi que nous l’a ap- pris M. P. Bonâme dans son rapport annuel de la station agrono- mique de l’île Maurice pour 1895. Nous trouvons à la page 39 les lignes suivantes : € Pour tous les chiffres se rapportant à la canne, à moins d’indi- cations contraires, l’analyse est faite sur le jus obtenu par le moulin ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 59 de laboratoire et la richesse de la canne est calculée avec le coefficient de 0.84, adopté dans la colonie. » Nos résultats moyens concordent sensiblement avec ceux qui ont pu servir aux fabricants de sucre de Maurice pour établir ce coeffi- cient. MM. Kænig, Fouquereaux de Froberville, J. Maricot, J. de C. Ma- zerieux ont donné des tableaux dans lesquels ils ont adopté le coeff- cient 84 pour passer de la richesse du jus en poids à celle de la canne (Maurice). [Bulletin de l'Association des chimistes, numéro de novembre 1892.] M. G. L. Clarenc a donné une formule qui est la suivante : R XX 1.80 — G ou sucre p. 100 gr. de cannes. R correspond au degré régie, ce degré régie étant 7.5 par exemple pour 4 075. Donc 7.5 x 1.8 —13.5 de sucre p. 100 de cannes. Ce calcul se rapproche beaucoup de l'adoption du coefficient 84, mais ne peut s’appliquer à tous les cas, surtout pour les densités in- férieures à 4 070 et pour les cannes plus ou moins altérées ou des- séchées. On pourrait peut-être, jusqu’à nouvel ordre, adopter alors pour les recherches faites d’après l'analyse du jus, des coefficients moyens : Soit, 1° le coefficient 87 pour calculer la richesse de la canne passée au moulin, d’après la richesse du jus p. 100 gr.; Soit, ® le coefficient 85 pour calculer la richesse industrielle de la canne pesée d’après la richesse du jus p. 100 gr; Ou uniquement le coefficient 85 pour toutes les analyses, puisque, en résumé, on doit toujours tout rapporter à la canne pesée et tra- vaillée industriellement. 60 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. SEPTIÈME PARTIE NOTES ADDITIONNELLES I. — Détermination de la quantité de marc ou ligneux contenue dans la canne, On sait que la canne contient une proportion très variable de ré- sidu insoluble dans l’eau qu’on est convenu d’appeler le ligneux. La proportion de ligneux varie avec l’âge des cannes, la maturité, la qualité des cannes. Dans une même canne, le ligneux varie sui- vant la hauteur, les nœuds ou entre-nœuds, la partie extérieure ou intérieure. Nous avons donné des chiffres. Mais, toutes choses égales d’ailleurs, {4 quantité de ligneux varie avec le procédé employé pour sa délerminalion. Voici un tableau dû à M. W. Krüger, que nous trouvons dans le 2° volume qu’il a publié sur les achete faites au laboratoire de Kagok Tegal (Java), 1896, p. 5. Tableau LXXXIII. Par l'extraction alcoolique. 3 HEURES. 6 HEURES. 9 HEURES. DIFFÉRENCE a b c a—c Î 10.25 10.11 10.00 027 22 10.62 10.46 10.37 0229 3 10.19 10.08 10.00 019 Par l'extraclion aqueuse. 10 Fois. 15 FOIs. 20 FOIS. DIFFÉRENCE a b € a—c 1e 9.94 9279 9.46 0.48 22 9.98 0.78 959 0.39 Je 10.13 9592 9.73 0.40 1. À propos du travail de M. H. Prinsen Geerligs (Archéef voor de Java Suiker- industrie. 1897, n° 7). ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 61 D’après H. Prinsen Geerligs, la différence entre le ligneux par extraction alcoolique et l’extraction par l’eau est d’autant plus forte que la canne est plus Jeune. Tableau LXXXIV. CANNES DE A" 5 mois. 6 mois. 9 mois. 12 mois. Matières ligneuses par l'extraction aqueuse. 1006 ESS 2210752 — — alcoolique. 8 8:60... 8-85 10:94 Différence en p. 100 du ligneux . 8.2 1.5 D.3 CAS) I s'ensuit donc que plus on traite longtemps la canne par l’eau plus ou moins chaude et plus on dissout de matières, moins on calcule de ligneux; que si on remplace l’eau par lalcool, on obtient encore moins de dissolution, d’où plus de ligneux. Cela a été observé également pour le dosage du mare dans la betterave à propos des différentes méthodes employées pour le do- sage du sucre dans cette racine’. M. H. Prinsen Geerligs a conseillé récemment de se servir de l'alcool pour la détermination du ligneux par extraction. Il y a bien, dit-il, quelques causes d’erreurs, mais moins grandes que par les traitements à l’eau. Au point de vue scientifique, M. H. Prinsen Geerligs a probable- ment raison, mais au point de vue pratique, nous ne le croyons pas. D'abord, le dosage du ligneux n’est qu’un résultat comparatif. Donc, il suffit d’opérer de la même façon à chaque essai pour obtenir des résultats normaux. C’est ce qui peut être fait en suivant le procédé de dosage du sucre par extraclions successives à l’aide de l’appareil de Zamaron. Soit 6 lavages en 1 heure et avec des proportions de cannes et d’eau toujours les mêmes. Puis, en industrie, on n'utilise pas l'alcool, mais l’eau pour imbi- ber les cannes, ou bien pour extraire le jus par diffusion. Donc, dans les usines qui opèrent par la diffusion, le dosage du ligneux doit êlre exécuté par l’eau chaude. 1. E. von Lippmann (Bulletin de l'Association des chimistes de sucrerie et de dislillerie, 15 mai 1887, p. 152). 62 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. II. — Composition du ligneux. M. H. Prinsen Geerligs, dans une récente et remarquable étude sur la bagasse', a indiqué que la bagasse traitée dans différentes conditions donnait les résultats ci-après : Tableau LXXXV. — Sur 100 gr. de bagasse sèche. Cellulose par la méthode de Weenden . se au chlorate de potasse . . — — Substance soluble dans l'acide sulfurique dilué à l'ébulli- tion. Sucre formé par ce (e tonen Matières solubles dans la soude provenant T l'insoluble dans l'acide chlorhydrique . Matière totale soluble dans la soude à 5 p. 100 | De cette matière on précipite :- Par l'alcool et l'acide acétique Cendres . Azote . Je Matières azotées anse É Le même auteur a ensuite étudié séparément les substances orga- niques, les matières colorantes, la cellulose, la gomme de canne, etc. Il a remarqué que le ligneux de la canne jeune contient moins de cellulose que celui de la canne plus âgée. Tableau LXXXVI, Cellulose d’après la méthode de Weenden. Xylone . Cendres. : Albumine, etc. . . Non dosés . 1. Archief voor de Java Suikerindustrie, — Substances diverses et cellulose p. 1400 gr. de ligneux. CANNES DE 2 5 mois. 6 mois. 9 mois, 12 mois. 38.306 9975 41.36 20,3 25.70 28.9 30.82 31.50 3.45 3.30 4.02 SR 2 2 2 2 30,49 26.40 21.80 12625 1897, n° 7. 2. On a également démontré que le mare de betteraves ne renfermait qu'une quan- té de cellulose pure relativement faible et que, suivant que la betterave était montée ou non montée en graines, plus ou moins mûre ou suivant les années , la quantité de matières solubles dans l'eau chaude variait, à propos du travail à la diffusion. (Divers.) ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 63 M. H. Prinsen Geerligs, d’après ses essais, dit que la bagasse de cannes n’est pas très recommandable pour la préparation de pâte à papier, puisque, dit-il, il y a 40 p. 100 de matières solubles dans la soude. Ceci était connu et, dans les études faites pour l'emploi de la ba- gasse, on admettait qu’il y avait en moyenne 9 p. 100 de cellulose plus ou moins pure destinée à la production de la pâte à papier. M. P. Bonâme, de son côté, a dosé la quantité de cellulose contenue dans la canne renfermant diverses proportions de ligneux et a obtenu les résultats ci-après: Tableau LXXXVII. 1 2. 3. Dinant Ru Bert ed etepa 00H03. 11.45. 14:80 COMLIOS ER RES ANS En Mo Ne LE Le 5.83 5.96 7.80 — (après traitement par les acides et alcalis dilués et à chaud). . . . . p. 100 55.3 53.4 5221 Ce qui faisait dire à M. Bonâme que le ligneux contenait en moyenne 20 p. 100 de cellulose. $ Ces chiffres sont très rapprochés de ceux cités par M. Prinsen Geerligs et, en outre, le dosage exact de la cellulose pure n’est pas encore très facile, puisque les résultats varient avec les procédés employés au traitement de la substance insoluble de la canne”. III. — Eau colloïdale. On sait que le jus obtenu par la pression n’est pas le Jus moyen renfermé dans toute la canne, et que le jus recueilli ne correspond pas au jus restant dans la bagasse déjà pressée. Le jus restant est tou- jours plus pauvre, pour ne parler que de la proportion de sucre. On doit donc admettre, comme pour la betterave, la présence de 1. P. Bonâme, Culture de la canne à sucre, p. 206. 2. Du reste, dans une étude sur la fabrication du papier de bagasse, parue il y a plusieurs années dans le Journal des Fabricants de sucre, il est dit qu'il faut 2 parties de bagasse ordinaire des moulins pour avoir une partie de papier vendable. Or, on peut admettre 25 à 30 p. 100 de bagasse, soit donc 4 à 5 de papier pour 100 kilogr. de cannes. 64 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. l’eau combinée à différentes matières organiques et M. H. Prinsen Geerligs a essayé de déterminer ia proportion d’eau colloïdale con- tenue dans la canne. Il a trouvé dans différents essais environ 35.5 p. 100 du ligneux, c’est-à-dire que si une canne laisse 10 p. 100 de ligneux, il peut y avoir 3.5 d’eau colloïdale ne participant pas au jus 1 sucré. Ce chimiste a opéré à l’aide de solutions salines titrées notamment da chlorure de sodium. Voici un exemple de calcul : Bagasse complètement épuisée à froid et légèrement pressée. 100 gr. Solution de sel marin . . . . . 1.006 p. 100 gr. 500 gr. Soit sel marin ajouté... 00 5.030 -- Après mélange, on a dosé p. 100 gr. de la solution 0,8 808 de chlorure de sodium. D'où : 5.030 X 100 — Li ROUES 0.8808 Tite — On avait donc retiré de la bagasse 715°,4 d’eau non combinée. La bagasse, directement, contenait 78.9 p.100 d’eau, 21.2 de li- oneux. D'où, eau de constitution, 78.9 — 71.4— 7.5 ou 35.9 p. 100 de la matière fibreuse ou du ligneux. M. Prinsen Geerligs déduit de ses recherches que c’est. surtout la gomine de cannes qui retient celte eau dans la canne et non la cellu- lose !, IV. — Conservation de la bagasse pour l'analyse. IL est très intéressant de pouvoir conserver la bagasse de plusieurs prélèvements pendant la journée pour n'avoir qu’une analyse à 1. Nous avons étudié aussi cette question, mais en remplaçant la canne par de la pâte à papier. Or, nous avons constaté, par des essais analogues à ceux rapportés par M. H. Prinsen Geerligs, que toute l'eau de la pâte à papier pressée ne participait pas à la dilution. En un mot, que la cellulose retiendrait fortement son eau et empé- cherait une diffusioa rapide entre l'eau intérieure retenue par la pâte et la solution saline mise en contact. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 65 exéculer par poste. M. H. Prinsen Geerligs a essayé divers antisepti- ques sans succès. Il a repris les essais de van Lookeren Campagne, datant de 1894, et il a pu constater que l’on pouvait obtenir la conservation de la bagasse par la stérilisation. Pour cela, l’auteur prend 20 gr. de bagasse qu'il stérilise dans les appareils ordinaires connus pour la bactériologie et il a essayé successivement ? et 3 stérilisations. Il a obtenu les résultats ci-après : Tableau LXXXVIII — Stérilisation. Mr 1 Fois. 2 FOIS. 3 FOIS. Avant stérilisation, 6.5 6.5 6.9 Après { jour. . 625 6.4 6.5 — 2 jours . . . 5.76 6.3 6.4 — 4 jours. 4.52 6 6.4 — 10 jours , . . » 6 6.2 C’est un moyen qui, en effet, peut être employé pour réduire les analyses de bagasses, lorsqu'on écrase la canne par les moulins. Lorsqu'on emploie la diffusion, la cosselte épuisée se conserve très facilement durant 12 heures, après avoir subi l’action d’une température de 90° pendant plusieurs heures. Il suffit alors de composer un échantillon moyen des cossettes écrasées prélevées autant de fois qu’on le désire, et de le conserver dans une grande boîïle en zinc fermée et entretenue aussi propre que possible. Ceci ne sert que de contrôle, car, pour la marche même de la batterie, on doit analyser la cosselte, épuisée très sou- vent, et avoir des résultats après chaque heure. V == Composition du sol égyptien. Limons et eaux du Nil. Un grand nombre d’analyses ont été faites. Nous rappellerons celles dues à MM. Champion et Pellet, exécutées sur des échantillons rapportés par Gastinel-Bey et publiées en 1871-1872 dans un rap- port à S. A. Ismaïil-Pacha présenté par ia commission spéciale dont Payen était le président. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE — 1897. — 71. 5 66 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Évidemment le sol égyptien doit se rapprocher beaucoup de la composition du limon du Nil, dont diverses analyses ont été faites. Tableau LXXXIX. — Limon du Nil!. Analyses de M. Schlæsing. POUR 100 @&r. de matière sèche. 1° Analyse physique : Gaïlloux .et graviers, ,!4 440514 AU 0 Grossible en ar TE NAT ATERE 20 SADIB ARE 2 SE Bu he en D a te Pasta 99 JA DA RU RE ED EE er CE 21 2° Analyse chimique : SIC es mme De ee denis Eee ee 50.40 POROSSP ET ad Re er Ra Re de 15102 DOUTE Et de te Rene ne OS EE Pie 1.20 Chaux . . 4.70 Magnésie . . 3-20 PINCE tee 0 ME ASP EN NE 19.80 Peroxyde de fer . 11.70 ACIde CaTDONIQUe A TU PP Never OA Acide phosphorique. ide 0.08 Eau combinée et matières OrÉtIques. ce 8.20 101.29 Tableau XC. Analyses du professeur Letheby, de Londres. (Moyenne d’une année.) PENDANT CC la crue. l'étiage. Acide phosphorique . fe 0.57 Chaux , 2.06 3.18 MApnÉSIe 7 11? 0.99 Potasse . 1.82 1.06 Soude. , PORN PRE AIEUE 0.91 0.62 AÏUMINE MA er des 20.92 93 55 Oxyde de fer. | 79, RO | RS Mit DICO ne: x A 22.09 58.22 Matières rites et humidité à 15.02 10.37 at CATDOMIQUE PE AE STE 1.98 (44 Pertes, elec te 100.00 100.00 {. Voir les différentes communications faites par M. Ventre-Pacha à l'Institut égyp- tien, de 1887 à 1891. 2, Dont 0,048 soluble dans l'acide nitrique faible. ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 67 \ Tableau XCI. Analyses failes au Muséum, à Paris, par M. Terreil. Acide phusphorique ...:..... ..,..+ 0.24 A LE à SR NE ER PS PR NS DU EE 2.63 MagnÉMéRR Sl Pe mA E A 3.42 BOtASS EM Bates 0.91 SOUTEMR ER so EE r0R 2.92 Alumine, . 21.90 Oxyde de fer. 4.72 SCOR DETENTE Ne LS sn mie vie 50.37 Matières organiques et humidité , . . . 11.52 Acide carbonique..." ... .7 1.66 JE RTE sl ER RE RE PR SRE PTE re OH 100.00 Tableau XCII. — Eau du Nil. Analyse de M. A. Müniz. POUR 1000 PARTIES. EEE En En dissolution. suspension. AVAL CAM MEN TRE ESP AN A TRUE 1.07 3.00 NCIdéDROSDROTIQUE- EU. - 0e 0e 0.40 4.10 BOTASSO NE a TN Ce ad eu Loose lolt Le 3.66 150.00 CHAUX ER NE NN E At Mets 48.00 70.50 Tableau XCIII. Analyse de M. le D' Letheby, de Londres. / PAR LITRE D'EAU. Minimum. Maximum. Matières organiques : . . . . « 3 » : 0.0051 0.1841 ——AIDINÉTAIOS Le eee 0.0383 1.3074 Total! VS LRO NE 0.0434 1.4915 Vœlcker a indiqué £e PAR LITRE. a ——— — ———— Au En début de la crue. pleine crue. Matières en suspension. . . . . . . . 0.2398 1.2480 — en dissolution. . . . . . . . 0.2548 0.169% 1. Ch. Pensa, Les Cultures de l'Égypte (Annales de la Science agronomique française et étrangère, t, Il, 1896). 68 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. PAR LITRE D'EAU A L'ÉTIAGE — ——— Eau Eau d'infiltration du Nil d’un puits. ayant traversé. Chaux . . 0.1656 0.0424 Magnésie . 0.045353 0.0100 Soude 0.0820 0.006? Potasse . 0.0037 0.0144 Cblore . 0.1360 0.0067 Acide sulfurique . 0.0593 0.0216 — nitrique . 0.0017 » Silice, alumine et fer. . 0.0180 0.0097 Matières organiques . 0 0060 0.0175 Acide carbonique et pertes . 0.1226 0.0403 0.6402 0.165S8 (Voir aussi les analyses de M. Mathey en 1887.) VI. — Analyses directes de terres provenant d'Égypte. En 1881, Gastinel-Bey avait trouvé, d’après l’analyse de 22 échan- tillons de terre, mêmes échantillons que ceux ci-dessous, mais après la culture intensive : Tableau XCIV. POUR 100 GR. de matière sèche, AZOIPAÉ ORALE MM TS EE ren de 0.124 à 0.279 Acide phosphorique. . . . . . de 0.230 à 0.850 Chlorure de sodium. . . . . . de 0.007 à 15.024 Dulfate de SOON E , 6 = de 0.018 à 1.070 Ces mêmes terres, analysées en 1871-1872 par Payen Champion et Pellet, contenaient : POUR 100 GR. de matière normale. AO MORE 1e LE TE Th re. de 0.041 à 0.064 Acide phosphorique . . . . . de 0.160 à 0.290 1. Ch. Pensa, les Cultures de l'Égypte (Annales de la Science agronomique française et étrangère, t. 11, 1896). ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. 69 En 1895, nous avons analysé un grand nombre d’échantillons de terres d'Égypte et nous avons eu les résultats ci-après : Tableau XCV. POUR 1000 GR. DE MATIÈRE NORMALE SÈCHE. TT —— : Fond DHrACE à Om,80 ne. mètre. A ——— —— + ae 2. 1 2 VAUT AE NE À 2 1.00 1.10 0.90 0.93 Acide phosphorique , , 1.30 2.30 2.00 1.90 CHANXNEE 2e Er nr 28.40 25.80 2e UE 26.50 Magnésie . ne 21.40 18.00 17.10 .00 POSE ar: 2.90 2) Di 0 250 Pour 30 autres échantillons on a eu : Tableau XCVI. ADORE MA Men eV UT Ve ENS dEMDT TRAME PE0 0 Acide phosphorique . . . . . . dense St 30210) CHAUX PR ES de 11550 à, 27:30 MACNÉSIO SR D EME TE Res de 9.80 à 23.60 POLISSO AREA AP ER CT RUE de 1.60 à 3.50 AcilesSUluriQue ee de 0.254 055 Tableau XCVII. Analyse moyenne de 30 échantillons de terres d'Égypte de divers endroits. TERRE AUTREK à 200 kilomètres’ endroit du Caire. à TT — MOYENNE 40 kilomètres Tamis 60. Tamis 30. Ne AOC EE MN ae 1.40 1.20 1.30 0.77 Acide phosphorique. 1.84 1.98 1.90 QE DRAUE PEUR ES 25.80 26.60 26.20 2420 Magnésie . : 17.30 (TES 17.50 23.90 M LÉSRE TRS SRI 2.30 2.70 2.90 2.80 Acide sulfurique . 0.40 .34 0.37 0.30 70 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. On a trouvé pour l’analyse physique : TEBRE AUTRE à 200 kilomètres analyse du Caire. de 1894, ne LT? Sable grossier . . . à 54.6 3 68, ï FT TRE 13.4 “is ÿ Argile. fé 31.0 32.0 95 Partie soluble et div ers . 1.0 100.0 100.0 100 Le sable et l'argile sont tous deux calcaires. Analyse séparée du sable et de l'argile des échantillons de 1895. - DANS SABLE. ARGILE, | PPS de terre. AZOIC ie Re END 1.67 0.80 traces Acide Doc Que 1.87 2.10 traces Chaux. un 25.20 28.20 2.450 Magnésie, 16.60 19.0 1.470 Potasse 2.30 2.0 0.150 Nous avons fait ensuite une analyse complèle de l'échantillon moyen des terres ci-dessus, et nous avons eu : Tableau XCVIII. POUR 1000. DIRCP 20 De RE tn et 00 Ma VAT LL 546.00 AlUMMES nr en TR med AT CORRE 197.00 Peroxyüe detter. rer Le Ress 92.00 Garhortafe de ChANXE 74 NS EE 7.00 — OMMAMESIC OC ECRENT 41.00 Potasse . Seb os en EPA ee PTIT) Ammoniaque ei MR AAN: 0.00 Acide phosphorique . 1.84 — sulfurique. = 0.50 Matières organiques . . . . s. le 59.00 Non aies — Chlore. Doté: FC LONE 0 2.96 1000.00 Azote nitrique.. : 4% Ps en. 0.130 =" HOTBANAUE NME net re ue 1.270 Azote total 22" 5". 1.400 ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE. ‘E! M. Ch. Pensa a trouvé de son côté : Tableau XCIX. POUR 100 DE TERRE. —— A la surface À 0m,60 de profondeur. RE EE TT ——, 4 2. 4: TéTTE ÎnEvs7- 98.20 99.30 98.50 98.35 Rierres 4222329: 18.0 0.70 1.50 1.65 Calcaire .:. . . 3.40 3.01 4.35 1.80 Insoluble nee 62,70 69.20 64.70 64.10 A l'analyse chimique : A la surface. A 0w,60 de profondeur. A — — EEE 6 Le 2. LATE 2. JE PAU EN EE PAPAS PRES A 1e 0.77 0.42 0.84 0.42 Acide phosphorique. . 1.50 1.84 2.96 3.23 Potasse 4,24 Food ».68 "3.23 Chlore. . . 0.25 0.38 0,00 0.00 VII. — Culture de la canne à sucre en Égypte. Nous n’avons nullement l'intention d’entrer dans des développe- ments bien longs à ce sujet. Nous n’en parlons pour ainsi dire qu’accidentellement et parce que M. Ch. Pensa a publié dans le même recueil un très intéressant travail sur les cultures de l'Égypte. Dans l’opuscule de M. Ch. Pensa on trouve certains détails par- faitement exacts relativement à la cullure de la canne en général. Mais, par contre, d’autres nous paraissent beaucoup moins exacts. Par exemple, M. Pensa dit (page 54) que le sol égyptien est géné- ralement peu calcaire. Cela est vrai si on le compare à certains terrains renfermant 10, 15 et 20 p. 100 de carbonate de chaux. Mais c’est une terre excellente au point de vue de la quantité de calcaire qui s’y trouve et l’état de division dans lequel on le ren- contre, puisque les cailloux sont pour ainsi dire inconnus dans le sol égyplien. La canne, du reste, ne réclame pas un terrain tout parti- culièrement calcaire, car les sols des colonies, de très bonne qualité pour la canne à sucre, renferment beaucoup moins de chaux que le sol égyptien. ; Voici, du reste, des chiffres publiés dans divers ouvrages et que 2 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nous retrouvons dans la brochure de M. Ventre-Pacha (1889) inti- tulée : Le sol égyptien et les engrais, pages 31 ct suivantes. Pour 100 gr. de terre sèche : Tableau C. de la Mar- DE LA A PE. 7e E GUADELOUPE tinique. EE — | Potasse et soude | Acide phosphorique . | Chaux . | Magnésie : | Oxyde de fer et alu- | mine . | Insoluble, ete. . On voit que, par kilogramme, cela représente 1 à 15.60 de chaux, alors que nous en avons dosé plus de 25 gr. environ, et M. Ch. Pensa lui-mème a dosé plus de 18 à 43 gr. de calcaire par kilo- gramme de terre d'Égypte. Au Brésil, beaucoup de terres à cannes ne contiennent également que peu de chaux. D’après nous, les apports de chaux dans la terre d'Égypte ne sont nullement nécessaires, en général du moins, sauf dans quelques cas spéciaux et surtout au point de vue physique. L’addition d’acide phosphorique dans le sol égyptien n’est pas toujours utile et les essais de culture directe apprennent à ce sujet beaucoup plus que toutes les analyses de terre. Il y a surtout à faire remarquer qu'en général la couche arable est très profonde et que l'épuisement du sol étant fait pour ainsi dire à la surface, le travail physique et mécanique du sol a une très grande influence sur les résultats des récoltes. Du reste, des essais ont étéentrepris de divers côtés pour l’amé- lioration de Ja canne à sucre, tant au point de vue de la richesse ÉTUDES SUR LA CANNE A SUCRE 7 que du rendement à l’hectare ou, pour parler comme en Égypte, par feddan (0,42). Nous ne doutons pas des rendements cités par M. Pensa, à la Martinique, chez M. Thiéry, mais 1l faut voir si ces rendements se - maintiennent plusieurs années et s’ils sont pour des surfaces relati- vement grandes. En Égypte, il y a quelques feddans qui donnent bien 100 000 et 110 000 kilogr. à l’hectare, mais à côté il y en a d’autres qui ne donnent que 50 000 et 60 000 kilogr. Néanmoins, il y a encore des progrès à faire dans ce sens. Seulement, il n’est pas toujours facile de faire essayer même les bons conseils. D’autre part, au point de vue des engrais, il y a un facteur tellement important, l’eau el son mode d'emploi, qu’on peut obtenir des résultats complètement diffé- rents dans le même sol, avec les mêmes engrais et par conséquent faire attribuer à un engrais un résultat bon ou mauvais qui ne provient exclusivement que de la manière dont l’eau a été fournie et utilisée. Nous parlons de la culture avec irrigation. Puis il y a la grosse question de l’échantillonnage de la canne, du mode d’analyse, etc., ce qui, jusqu'ici, n'avait pas été, selon nous, suffisamment étudié, sauf par M. P. Bonâme dans ces derniers temps. C’est précisément en nous livrant à des recherches variées sur la canne à sucre que nous avons reconnu la nécessité d’une base sérieuse pour connaître la véritable valeur d’un carré ou d’un champ de cannes. Autrement, auparavant, avec les méthodes ordi- naires admises comme les plus exactes, on arrivait à tout, exceplé à des résultats précis. Quant à la richesse saccharine de la canne, elle est très variable ainsi qu’on l’a vu, mais les moyennes citées par M. C. Pensa nous paraissent faibles. | En effet, l’auteur parle de richesses de 12 à 15 kilogr. de sucre à l’hectolitre de jus, suivant les mois de travail. Prenons la moyenne de 13.5 de sucre p. 400 litres de jus. Den- sité 1067 à 1069 (d’après les rapports de la Daira Sanieh), soit sucre pour 100 grammes de jus, 12.7. Il ne faut compter que 87 à 88 comme coefficient industriel pour passer de la richesse du jus pour 100 gr. à la richesse de la canne 74 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ou 41*,1 de sucre pour 100 kilogr. de cannes, et cela sans perte. La différence serait encore bien plus grande si on adoptait le coeff- cient 84 comme à l’île Maurice. Or, les pertes à l'extraction, le sucre dans la mélasse, la perte dans le noir, les pertes par transformation, etc., etc., forment un total tel que les rendements industriels obtenus sont au-dessus de cette différence, d’après les rapports même officiels. C’est pourquoi nous avons calculé que la richesse de la canne en Égypte était de 12 à 43 kilogr. en moyenne p. 100 kilogr. de matière normale avec des variations considérables. La moyenne entre les années bonnes et les années mauvaises peut aussi différer de plus de 2 p. 100. Tableau CI. — État comparatif des récoltes de 1890 à 1895. SURFACE CANNES cultivée CANKES TOTALES en cannes ; par te par fil récoltées. Nés! hectares kilogr. kilogr. 1890 . . . . (environ) 4 150 130 000 000 31 000 ISSUE — 3 350 117 000 000 34 000 192 Here — 3 250 114 000 000 36 000 18937512: — 2 520 89 S00 000 52 000 LS TA: — 1 395 65 000 000 46 000 LOTO 2. — 1075 48 000 000 45 000 Ces rendements, on le voit, angm2ntent chaque année et com- prennent la moyenne des deux récoltes pour une seule plantation. Or, la seconde repousse ne donne que 50 à 60 p. 100 du rende- ment de la première année. Certainement, les rendements de 45 000 kilogr. en moyenne ont été dépassés dans plusieurs Teftiches (sociétés agricoles), et des ré- coltes de 80 000 à 90 000 kilogr. à l’hectare ont élé observées en première année. Il faut tenir compte aussi que le procédé par irri- galion donne lieu à une certaine perte de surface de terrain cultivé par suite de la division du sol en carrés séparés par des canaux d'importance variable. 1. Cannes à sucre. Rapport de la Daira Sanieh de 1896, p. 7. L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE Par M. Th. SCHLŒSING MEMBRE DE L'INSTITUT PROFESSEUR AU CONSERVATOIRE DES ARTS ET MÉTIERS, C’est une question très intéressante pour les agriculteurs que celle de savoir combien une terre végétale lavée par les infiltra- tions des pluies perd d’azote assimilable, au cours d’une année. On est tenté de la résoudre en prenant pour base de calcul les propor- tions d’acide nitrique trouvées par divers observateurs dans les eaux de drainage, mais il y a des raisons de penser que ces proportions, mesurées dans des cas particuliers où la nitrification prend une ac- tivité inusitée, conduiraient à une évaluation exagérée. Il m’a paru possible d'obtenir une évaluation plus sûre en mesu- rant l’azote perdu, non par des surfaces très limitées, comme celles de champs drainés, mais par une vaste étendue de territoire, par exemple celle du bassin entier d’une rivière. Les cours d’eau sont les drains naturels où aboutissent les eaux infiltrées dans leurs bas- sins ; doser l’acide nitrique dans un cours d’eau, c’est le doser dans l’ensemble des eaux de drainage de son bassin; c’est mesurer la perte d’azote subie par une superficie de terrain très étendue, de laquelle se déduit la perte moyenne par unité de surface. Mais il faut choisir pour une semblable étude l’occasion où une 76 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. rivière est exclusivement alimentée d’eaux souterraines, exemptes de toute allération. Cette occasion s’est présentée au mois de fé- vrier 1895, pendant que régnait un froid rigoureux qui avait sus- pendu tout apport d’eau de ruissellement et toute consommation de nitrates par la végétation aquatique. Je me suis empressé de Ja sai- sir, et j'ai dosé alors l’acide nitrique dans les eaux de la Seine, de l'Yonne, de la Marne, de l'Oise. Ce premier travail en a amorcé un deuxième, dans lequel je me suis proposé de suivre, pendant une année, les variations de l'acide nitrique dans la Seine et ses trois principaux affluents, afin d’acqué- rir sur le régime nitrique des rivières des notions que n’ont pu fournir jusqu'ici des dosages isolés faits dans diverses eaux, à des dates quelconques. En même temps, j'ai déterminé l'acide nitrique dans les eaux de source dérivées à Paris ; et cette recherche n’a pas tardé à prendre un intérêt lout spécial que je ne soupçonnais pas à son débul: des différences très neltes se sont produites entre les eaux de la Vanne et de la Dhuis, d’une part, et celles de l’Avre, d'autre part. Pendant que le titre nitrique restait presque constant dans les premières, malgré la diversité des conditions climatériques, il subissait dans les eaux de l’Avre des variations considérables. Ce contraste m’a suggéré des idées et des études nouvelles sur les condilions natu- relles, d’où résultent la constance ou la variabilité de la constitution minérale des eaux de source, et sur un nouveau mode de lemploi de l’analyse chimique pour distinguer les eaux pures et potables de celles qu’on doit tenir pour suspectes. Ainsi, de nouveaux points de vue m’apparaissant successivement, mon travail s’est développé bien au delà de mes prévisions; il n'est pas terminé en ce qui concerne les eaux de source: il reste à con- naître l'influence sur leur constitution des années sèches, ou hu- mides, ou normales. Mais, sans attendre le terme nécessairement assez éloigné de ces éludes, je crois avoir réuni dès maintenant des observations assez nombreuses, assez originales, pour en faire la matière d’un premier Mémoire. L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. tp: I. — Azote enlevé à la terre végétale par l'infiltration des pluies. La question de savoir combien d’azote est enlevé annuellement à la terre végétale par les infiltrations des pluies s’est présentée cha- que fois qu’on a essayé d'établir, au point de vue de l'azote, la sta- tique d’un sul, c’est-à-dire le compte de ses pertes el gains en prin- cipes azotés. Pour la résoudre, on a admis, avec raison, que l'azote entraîné se trouve presque en totalité dans les nitrates dissous ; conséquemment, on s’est borné à doser l'acide nitrique dans les eaux de drainage. On a trouvé ainsi, le plus souvent, des pertes d’azote considéra- bles, qui donneraient à l'entrainement des principes azotés par l'infiltration des pluies une très grande importance, si on les éten- dait à la généralité des terres labourées ; mais ce serait prendre l’ex- ception pour la règle. Il est certain, en effet, que les résultats d’a- nalyse publiés ont été obtenus, pour la plupart, dans des conditions où la nitrification acquérait une activité inusilée ; on a dosé lacide nitrique exclusivement dans des eaux qui avaient lraversé des champs drainés, ou des cases de végétalion ou même de simples pots. Or, les terres que l’on draine ont accumulé en elles, avec le temps et en l’absence d’air, de grandes quantités de matière orga- nique, laquelle, venant à rencontrer l'oxygène après l'installation du drainage, devient, pendant nombre d’années, une source abondante de nitrates. Quant aux cases de végétation et aux pots, on sait bien que l’émiettement de la Lerre, inévitable au moment du remplissage, détermine une exagéralion longtemps soutenue de la nitrification. En réalité, malgré toutes les analyses d’eaux de drainage exécu- tées jusqu’à ce jour, malgré toutes les recherches dont la nitrifica- tion dans la terre végétale a été l’objet, nous ignorons encore combien une terre cultivée perd d’azote dissous dans les eaux d’in- filtration, au cours d’une année, et la raison de notre ignorance, c’est que nous ne savons pas recueillir ces eaux sans porter alteinte à l’état physique du sol, c’est-à-dire sans augmenter par nos mani- pulations son pouvoir nitrificateur. 78 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Mais ces mêmes eaux, qui nous échappent au moment de leur in- filtration, nous les retrouvons finalement dans les rivières, drains naturels où elles aboutissent, et là nous pouvons les puiser sans troubler nulle part la marche de la nitrification; leur analyse doit permettre de mesurer l’azote total ravi par elles aux terrains qu’elles ont traversés. Ainsi, ce même problème, que nous ne savons pas résoudre dans chaque cas particulier, devient soluble dans le cas . général où l’on envisage tout l’ensemble des terrains composant le bassin d’un cours d’eau ; la solution donne alors, d'emblée, la perte d'azote par unité de la surface embrassée. Mais, avant d’appliquer cette méthode, il est nécessaire de la discuter à divers points de vue ; c’est ce que Je vais faire. 1° Comme celle des eaux de drainage, et avec plus de raison en- core, l’anaiyse pourra être bornée à la détermination de l’acide ni- trique. C’est, en effet, le seul composé azolé restant, d’ordinaire, dans les eaux souterraines, au moment où elles se déversent dans les rivières. Quand on lave de la terre végétale avec de l’eau pure, on dissout, outre les nitrates, parfois des traces d’ammoniaque, et toujours de petites quantités de matières organiques azotées, dites humiques, qui colorent la dissolution en brun clair. Les eaux d’in- filtration ne se comportent pas autrement au contact de la couche superficielle du sol occupée par la végétation, couche qui est le siège essentiel de la formation des nitrates. Mais, à mesure qu’elles s’enfoncent dans le sol et y accomplissent leur trajet, leur azote or- ganique ou ammoniacal est entièrement converti par la combustion lente en azote nitrique, pourvu qu'elles ne soient pas absolument dénuées de carbonate calcaire ou alcalin et qu’elles trouvent dans le terrain parcouru de l’oxygène libre ; c’est le cas très général, puis- que les nappes souterraines et les eaux de source sont presque tou- Jours incolores et imprégnées d'oxygène. Dans certaines circonstances, cependant, l'oxygène fait défaut, par exemple quand les eaux traversent des terrains chargés de dé- bris végélaux constiluant des milieux réducteurs qui détruisent les nitrates et changent les sulfates en sulfures ; ou bien quand elles sé- journent dans des couches géologiques contenant des minéraux oxy- dables, comme le silicate de protoxyde de fer des sables verts: les L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 49 eaux artésiennes du puits de Grenelle sont précisément dans ce cas ; aussi, d’après l'analyse de Peligot, elles ne contiennent pas trace d'oxygène ni de nitrates, mais, au contraire, du bicarbonate ferreux, preuve de leur passage en milieu réducteur. Ces circonstances sont exceptionnelles, et il me sera permis de n’en pas tenir compte dans une étude qui ne doit conduire évidemment qu’à des évaluations approximatives et non à des mesures précises. 2 On peut se demander si la présence de l’oxygène suffit pour préserver les nitrates de toute destruction, quelle que soit la durée du séjour des eaux dans le sol: ne voit-on pas ces sels servir d’ali- ment azoté à des organismes divers, dans des conditions de tempé- rature, d'aération, d’obscurité semblables à celles où se trouvent ces eaux ? Je répondrai qu’il faut à ces organismes, sauf peut-être de très rares exceptions, un aliment carboné, outre l'aliment azoté, et qu'ils ne peuvent plus se développer quand la matière humique a disparu ; les nitrates se conservent alors indéfiniment, Il est possible qu’ils soient mis à contribution par les organismes qui ont pour fonction de consommer la matière organique ; mais comme ces organismes se succèdent de génération en génération depuis un temps immémorial, leur quantité a cessé de croitre ; il en meurt autant qu'il en naît, en sorte que la consommation des nitrates par ceux qui se développent est égale à leur reproduction aux dépens de ceux qui sont morts, sous l’action des ferments de la nitrification qui se trouvent partout. J'admettrai, en conséquence, que les nitrates ne subissent pas de déchet sensible pendant le séjour des eaux dans le sol. 3° Mais il n’en est plus de même quand ils sont parvenus aux ri- vières , ils y deviennent l’aliment des tourbes, des plantes diverses qui en garnissent les lits et les bords, et des algues qui se multiplient dans leurs eaux ; il se fait ainsi, par la végétation aquatique, une consommation de nitrates qui n’est certainement pas négligeable, mais que personne n’a encore évaluée. 4° Une autre cause d’altération du titre nitrique des eaux de ri- vière est leur mélange avec les eaux de ruissellement qui, en temps de pluie, s’écoulent à la surface des terrains peu perméables sans s’y infiltrer. Ges eaux ne contiennent guère que la petite quantité de 80 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nitrate d'ammoniaque qu’elles ont rencontrée et dissoute en traver- sant l'atmosphère ; plus pauvres que celles d'infiltration, elles en abaissent le titre en s’y mêlant. Il résulte de la discussion précédente que les nitrates contenus dans les eaux souterraines représentent avec une fidélité suffisante l'azote perdu par les sols que ces eaux ont traversés ; mais que, dans les rivières, ils peuvent être consommés par la végétation ou dilués par des eaux étrangères; par conséquent, pour que la méthode proposée donne des résultats satisfaisants, il est nécessaire que les prises d’eau pour analyse aient lieu en un temps où la végétation el le ruissellement soient nuls. [est bien rare que ces deux conditions né se trouvent pas réalisées simultanément au cours d’un hiver. Elles lont été, en particulier, d’une manière exceptionnellement favorable, au mois de février de l’année 1895, si bien qu’elles m'ont suggéré alors les études que je rapporte ici. Quand j'ai pris mes premiers échantillons d’eau, le 9 février, un froid intense régnait depuis plusieurs semaines ; toutes les rivières du bassin de la Seine élaient couvertes de glaçons et il était certain qu’elles étaient exclu- sivement alimentées par des eaux souterraines dont le titre nitrique ne pouvait être altéré ni par la végétation ni par le ruissellement. Le froid s'étant maintenu jusqu’à la fin de février, il m'a été permis de continuer mes prises d'échantillons pendant une vingtaine de jours. J'ai puisé l’eau de la Seine en trois points: Au pont de Montereau, au-dessus du confluent de PYonne ; Au pont de Charenton, au-dessus du confluent de la Marne ; À Paris, à la hauteur du pont des Invalides, Les eaux de l'Yonne, de la Marne et de l'Oise ont été échantillon- nées tout près de leurs confluents avec la Seine. J'ai aussi déterminé l'acide nitrique dans les eaux des sources de la Vanne, de la Dhuis et de l’Avre, dérivées à Paris. Pour éviter dans le transport des échantillons tout retard pouvant occasionner quelque altération des eaux, j’envoyais sur les lieux des prises un homme de confiance qui me rapportait les échantillons aussitôt après leur prélèvement, et dès son retour, ou au plus tard le lendemain, je procédais aux opérations qui précèdent un dosage d'acide nilrique ; ces opérations consistent à vaporiser, dans un bal- La d L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE, 81 lon de 2 litres, 4 litres d’eau que l’on réduit au volume de 12 à 15 centimètres cubes ; par filtration, on se débarrasse du précipité de carbonate de chaux et de silice produit au cours de la concentra- lion ; le liquide filtré et les lavages formant un volume d'environ 90 centimètres cubes sont ensuite évaporés à sec, dans une petite capsule de porcelaine, à une douce chaleur; le résidu obtenu est mis sous cloche, dans une atmosphère desséchée par de la potasse solide, et peut alors attendre, sans danger d’altération, le dosage définitif de l'acide nitrique, J'emploie toujours, pour effectuer ce dosage, le procédé que j'ai décrit en 1856 dans les Annales de Chimie et de Physique ; il consiste à réduire en liqueur acide et bouillante l'acide nitrique par le protochlorure de fer, à recueillir le bioxyde d'azote dégagé, auquel on rend ensuite l'oxygène perdu, pour le restituer à l’état d'acide nitrique dosable par l’eau de chaux titrée. La quantité d’acide trouvée est divisée par 4, pour être rapportée à 1 litre d’eau. Voici maintenant les résultats que j'ai obtenus : Seine, LIEUX ” ACIDE NITRIQUIE . AZOTR des prises. RARE: dans 1 litre, équivalent, milligr, milligr, 16 février. 7,66 ] 1,99 Montereau. , à 7,85 ( PANIE T'es A1? Qi CPR Es 2108 | "100 15 — 9,84 2,55 | Charenton, . 4 10,2 +. 2 65 28 (os Re A LA PRE Ritt 9 — 8,08 2,09 19 © — 8,88 | 2,31 Paris ant Î 8,5 1 200! 19 — 8,67 \ ne 2,25 | “»*° 28 — 8,71 2,26 Yonne. 16 février. 8,54 | pe Ve | Montereau. , , | Lin 9,18 1054 2,36 l'27 — 9,780 7 2bau YA T1 Marne, 14 février. 9,01 2,34 | Charenton, , . 4 8,40 ? 2.18 28 — 7180007 2,021} © Oise. 19 février. 10,68 | 2,18 | Pontoise . 4 10,03 Ê 2,60 Î{ inars. CRETE One 2,48 fu ANN. SCIENCE AGNON. —— 29 SÉRIE, — 1897, — 11, 6 82. ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Sources. LIEUX DES PRISES. DATES. PAT Has PH ee tE Vanne, au débouché dans le réservoir milligr. milligr. de MONISQUAS EL. NiRwe et: DA INATS. 10,08 2201 Dhuis, au débouché dans le réservoir de Ménilmontant. . . . . . . . 8 — 11,03 2,86 Avre, au débouché dans le réservoir He RASE sn ET ER Se TE 11,87 3,08 On remarque tout de suite, en lisant ce tableau, que les titres ni- triques de la haute Seine et des trois principaux tributaires du fleuve, tous compris entre 7°#,89 et 108,03, ne présentent pas de différences bien grandes: en d’autres termes, les eaux pluviales qui, en s’infiltrant dans les bassins des quatre rivières, ont fourni les mé- langes d’eaux souterraines analysés, avaient enlevé aux terres végé- tales traversées des quantités d’azote de même ordre, L’azote n’est plus aujourd’hui, comme au début de la chimie agricole, la seule mesure de la richesse du sol ; mais il en reste tou- jours l’élément le plus précieux, et l’on est toujours fondé à penser que les terres les plus fertiles sont aussi celles qui mettent en œuvre le plus de nitrates, et qui par suite en perdent le plus; d’où cette conséquence que les bassins de rivière les plus riches sont en même temps ceux dont les eaux souterraines possèdent les plus hauts titres nitriques. À ce point de vue, s’il n’était pas imprudent de fonder des comparaisons sur quelques résultats d’analyse, il semblerait que le bassin de la haute Seine jusqu’à Montereau et ceux des troisautres rivières, pris dans leur Lotalité, se classent dans l’ordre décroissant suivant : l'Oise, l'Yonne, la Marne, la haute Seine. Le tableau ci-dessus montre encore que, du 14 au 98 février, chaque rivière a gardé à peu près un même titre ; cependant, entre ces deux dates, les débits des eaux ont subi une baisse considérable. M. G. Lemoine, ingénieur en chef des ponts et chaussées, a bien voulu, à ma demande, calculer les débits des quatre rivières aux dates où les prises pour analyse ont eu lieu; je lui en adresse ici mes plus vifs remerciements. Les débits de la Seine à Paris n’ont pu ètre mesurés, parce que les embâcles accumulés devant les ponts L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE, 83 ont rendu inapplicables les formules en usage ; mais ceux du fleuve à Montereau, de l’Yonne, de la Marne et de l'Oise aux points de leur cours déjà mentionnés, ont pu être calculés avec une approximation très suffisante pour l’usage que j’en voulais faire ; les voici : MÈTRES cubes. — - 16 février. 80 par seconde. Haute Seine . . PRE 20 Yonne AE 50 = 3 | 27 — 30 (barrage relevé en amont). , 28 9 en 14 ei par seconde. 28 — 55 —— 19 — 167 — Oise. tait, D 1 mars. 96 — Ainsi, les débits des rivières, c’est-à-dire des sources et nappes qui les alimentaient, ont baissé de moitié pendant que les titres ni- triques demeuraient à peu près constants, comme si la constitution chimique des eaux élait indépendante de leurs débits. Nous savons déjà, par les recherches de Belgrand continuées après lui dans les laboratoires de la ville de Paris, que les titres calciques ont une cer- laine fixité dans les eaux de sources importantes ; cependant, les quantités de sels calcaires, parmi lesquels domine ordinairement le bicarbonate, sont très variables dans les eaux d'infiltration, au mo- ment où elles sortent de la couche de terre végétale ; elles dépen- dent en effet de conditions naturelles qui varient sans cesse : l’humi- dité, la température, la tension de l’acide carbonique dans le sol. Il en est de même pour les nitrates; leur proportion, souvent consi- dérable en été et en automne, quand la nitrification est en pleine activité, devient presque nulle à la fin de l'hiver, après le lavage par les pluies d’une terre trop froide pour nitrifier. Mais, dans les profondeurs du sol, les dissolutions calciques et nitrées formées à des époques différentes se mélangent et constituent une dissolution moyenne de composilion à peu près constante; les variations des titres de la chaux et de l'acide nitrique s’éteignent dans les réser- voirs souterrains comme en de vastes régulateurs. Je reviendrai sur ces importants phénomènes dans la suite de ce Mémoire. Il faut maintenant essayer de calculer, d’après les résultats analy- 84 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. tiques que j'ai rapportés, la quantité d'azote perdu en un temps donné, une année par exemple, par l’unité de surface du sol, soit pour un hectare. Dans le calcul, doit évidemment intervenir le vo- lume des eaux souterraines. Nous ne pouvons le déterminer par le jaugeage des débits des rivières, puisque ces débits sont accrus dans une proportion inconnue par les eaux de ruissellement; mais, au lieu de mesurer les eaux souterraines après leur sortie de terre, nous pouvons et nous allons en faire l'évaluation à leur entrée. On connaît, pour le bassin entier de la Seine, le seul que je veuille considérer, la hauteur moyenne des pluies, qui est, en nombre rond, de 700 millimètres ; on est moins fixé sur la fraction de cette hau- teur qui s’infiltre réellement, pas plus que sur celle qui ruisselle ou est dissipée par l’évaporation ; ces fractions sont d’ailleurs variables d’une année à l’autre. D’après les observations, en trop petit nom- bre, qui ont été publiées, la première varierait de + à + de la hauteur totale d’eau tombée ; nous allons la supposer successivement de #, :, :, soit 440, 175, 233 millimètres, représentant des volumes de 4 400, 1750, 2333 mètres cubes infiltrés par hectare. D'autre part, nous prendrons pour titre nitrique la moyenne 9°6°,33 de tous les dosages qui figurent dans le tableau ci-dessus ; partant de ces données, nous trouvons les nombres suivants : QUANTITÉ D'EAU ACIDE NITRIQUE AZOTE infiltrée par hectare. emporté. correspondant. métros cubes kilogr. kilogr. 1 400 13,1 3,4 1 750 16,3 4,2 2 333 cine 5,6 Telles seraient, dans les trois hypothèses, les pertes moyennes d'azote par hectare, dans le bassin de la Seine. Mais, pour être plus près de la réalité, il convient de les estimer plus haut. En effet, le mode d’exploitation du sol a la plus grande influence sur la produc- tion des nitrates ; c’est essentiellement dans les terres labourées que la nitrification s'établit ; et l’on admet qu’elle est faible ou nulle dans les sols occupés par les bois, les prairies, les landes. Toute- fois, sur ce point, on manque d’observations, et l’on s’en tient à des considérations théoriques. Je ne serais nullement surpris si quelque L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 89 observateur démontrait que les bois et les prairies qui couvrent des sols contenant du calcaire, fournissent aux eaux d'infiltration de no- tables quantités de nitrates. Mais gardons l'opinion générale, et altribuons aux seules terres labourées le pouvoir de nitrifier et, par conséquent, de perdre de l’azote ; elles occupent, d’après la stalis- tique, les deux tiers du territoire agricole ; multiplions donc par + les chiffres ci-dessus, pour avoir les pertes moyennes d’un hectare de terre labourée, nous obtenons les chiffres suivants : QUANTITÉ D'EAU ACIDE NITRIQUE AZOTE infiltrée par hectare. emporté. correspondant, rs ironien bete loge kilogr. 1 400 19,6 5,1 1 750 24,5 6,4 2 333 32.7 8,5 Les valeurs de ces pertes en argent sont, en comptant le kilo- gramme d'azote à 1 fr. 50: 71,65, 97,60, 19,75, Les calculs que je viens de présenter n’ont d’autre prétention que de fournir une première et peut-être grossière approximation de l'évaluation des pertes d'azote ravi par les eaux d'infiltration ; toute- fois, ils démontrent que ces pertes sont beaucoup moindres qu’on ne l’admet généralement, en se fondant sur les analyses publiées d’eaux de drainage. Je suis persuadé qu’elles sont plus que balancées par l'absorption spontanée de l’ammoniaque atmosphérique ; j’ai montré, en effet, qu’une terre nue et humide emprunte à l’air, en un mois, 9 kilogr. d'azote ammoniacal par hectare ; sous notre climat, les ierres labourées restent, pour la plupart, en cet état, l'hiver, pen- dant plusieurs mois. Toutes les terres calcaires ou non calcaires, capables de porter des céréales, réalisent à peu près un même gain d’ammoniaque ; mais les pertes d'azote se répartissent très inégale- ment entre elles ; ces pertes sont proportionnées à l'intensité de la nitrification, et celte intensité est proportionnée à la fertilité des sols ; on peut donc assimiler les pertes d'azote à un impôt propor- tionnel sur les terres labourables, qui pèse peu sur les pauvres, et ne grandit qu'avec leur richesse. DO à: ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. II. — Variations du titre nitrique pendant treize mois consé- cutifs dans les eaux de la Seine, de l'Yonne, de la Marne et de l'Oise. Après avoir déterminé les quantités d’acide nitrique que conte- naient, dans les conditions climatériques toutes spéciales du mois de février 1895, les eaux de la Seine et de ses trois affluents principaux, j'ai pensé qu’il serait utile de continuer ces dosages, malgré leur monotonie, au moins pendant une année, afin d'acquérir, sur ce qu’on pourrait appeler le régime nitrique des rivières, des notions que n’ont pu donner jusqu’à présent quelques dosages isolés, sans suite, faits à des dates quelconques. Je vais, dans ce chapitre, pré- senter et discuter les résultats que j'ai obtenus dans cette voie, du mois de février 1895 au même mois de l’année 1896. | Les échantillons d’eau ont été puisés aux lieux déjà indiqués, Savoir : Pour la Seine, au-dessus de Montereau, au-dessus de Charenton, et, dans Paris, à la hauteur du pont des Invalides ; Pour les autres rivières, à la fin de leur cours, mais avant leur confluent avec le fleuve. Les prises, au pont des Invalides, ont été répétées au moins une fois et deux fois le plus souvent, par semaine ; toutes les autres ont été faites à peu près une fois par mois ; on a toujours usé des pré- caulions déjà mentionnées pour éviter toute altération des nitrates. YONNE MARNE OISE A MONTEREAU. A CHARENTON. A PONTOISE. EE RE , Dr A de paies: rer Dates: Ha milligr. milligr. milligr, 18952, Février... «. 16 8,54 16 9,01 16 10,68 FE y TN 9,73 28 7,80 » » — Mars este » » » » Î 9,38 —— AYTIl 28676 9 7,18 10 4,18 11 7,06 TE =! NA tURD 6,71 19 2,34 » » NE CORTE NE 10 #87 11 6,78 — Lie 4,98 10 3,99 16 6,80 — Juillet. : -.: 12 3,98 13 3,806 15 6,65 — ROUTES 9 3,01 10 3,84 12 6,43 L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 81 YONNE MARNE OISE A MONTEREAU. A CHARENTON. A PONTOISE. — — Dasen, nue, EEE, Rl Dates: rs milligr. milligr. milligr. 1895 Septembre. 19 3:19 20 3,27 » » — Octobre . . » » » » » » — Novembre . 6 522 8 5,36 9 7,32 = Décembre . 13 7,09 14 6,48 16 6,66 1896 Janvier . . 30 9,25 31 7,60 » » — Février . . » » » » Î 8,96 Seine. AVANT AVANT AU PONT MONTEREAU. CHARENTON. DES INVALIDES!, Re EE D CE D ELSC TRE LS Dates nee ar al milligr. milligr, milligr. 1895 Février . . 16. 7,66 15 9,84 19 8,67 2 — ECS PO 8,04 28 10,59 28 9,00 — Mars: » » » » » » — ANT ES ce 9 3,48 10 2,39 10 5,15 = 1%: 016 5,25 19 6,30 19 6,19 — Mais. 9 6,07 10 5,81 11 5,97 — June 268 4,87 10 4,87 10 4,80 — Juillet eee? 4,14 3 4,18 13 4,15 — NOUEE 5, 9 4,11 10 4,03 10 4,29 — Septembre . 19 4,38 20 4,09 20 3,85 — Octobre . . » » » » » » — Novembre . 5,93 8 6,50 8 ,38 — Décembre . 13 7,13 14 7,23 14 7,13 1896 Janvier , . 30 7,66 31 99? 31 8,62 — Février..." 1» » ” » 15 8,94 Les résultats inscrits dans ces deux tableaux deviennent plus frap- pants, quand on les met sous la forme de graphiques, en prenant pour abscisses les dates des prises et pour ordonnées les quantités d’acide nitrique. J'ai dressé de la sorte deux graphiques ; à l’aide du premier, on peut comparer facilement les variations de l’acide ni- 1. Il m'a paru inutile de surcharger le tableau d'une centaine de dosages dans l'eau de Seine puisée au pont des Invalides. Parmi ces dosages, je ne fais figurer que ceux dont les dates correspondent à peu près à celles des dosages effectués dans les eaux puisées à Montereau et à Charenton. 88 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. trique dans la haute Seine, l'Yonne, la Marne et l'Oise ; le second fait voir comment cet acide varie dans la Seine en divers points de son Cours. Un coup d'œil sur la figure 1 révèle une concordance assez inat- tendue entre les variations des Litres nitriques dans les quatre ri- vières ; les titres les plus élevés se sont produits en même temps au mois de février 4895, à la fin de la période des grands froids, quand les rivières étaient exclusivement alimentées d'eaux souter- raines ; puis les titres ont subi une baisse rapide, à la suite du dégel survenu en mars et des ruissellements qui en ont été la conséquence. En avril et mai, ils continuent à baisser dans l'Oise et l'Yonne ; ils se relèvent un peu dans la Marne et la haute Seine, pour redes- cendre bientôt après. Pendant la saison chaude, tous restent voisins de leurs minima. Cependant, l’été de 1895 ayant été passablement sec, les rivières n’ont guère reçu de ruissellements, et leur alimen- tation s’est faite surtout par les eaux souterraines qui leur ont ap- porté tout leur approvisionnement de nitrates. Une partie de ces sels a donc disparu, et c’est évidemment la végétation aquatique qui l’a consommée. Ses effets sont d’autant plus manifestes; qu’elle s'exerce dans de moindres volumes d’eau, et que la température est plus élevée, deux conditions qui ont été réalisées d’une façon exception- nelle pendant le mois de septembre ; la chaleur a été très forte, durant plusieurs semaines, et le déhit de la Seine à Paris est tombé à 09 mètres cubes ; de plus, les barrages, en retenant les eaux, pro- longeaient singulièrement leur séjour en rivière ; ainsi, la végéta- tion avait, pour consommer les nitrates, toute Factivilé possible et tout le temps nécessaire ; il en est résulté que les titres sont alors descendus à leurs limites inférieures. A partir d'octobre, ils sont remontés progressivement, et, en février 1896, ils ont atteint de nouveau, comme en février 1895, des valeurs élevées. Celte analyse des variations des titres nitriques nous montre com- ment elles dépendent des conditions climatériques, et nous explique en même temps leur concordance dans les quatre rivières. En effet, les observations des stations météorologiques apprennent que, sui- \ant l'expression de Belgrand, le climat est homogène dans tout le bassin de la Seine ; toute l'étendue de ce bassin est envahie à peu L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 89 près en même temps par les pluies, les sécheresses, le froid, la cha- leur ; c’est donc en même temps que tous les cours d’eau reçoivent les ruissellements qui atténuent leurs titres, ou sont soutenus par les eaux souterraines qui les élèvent ; c’est en même temps que leurs nitrates éprouvent l’action conservatrice du froid, ou l’action inverse de la chaleur. Ainsi, les conditions climatériques gouvernent le ré- gime nitrique des rivières, aussi bien que leurs crues, leurs basses eaux, leur limpidité, leur température, et, comme elles s'étendent en même temps à tout le bassin de la Seine, dans tout le bassin aussi les régimes nitriques des rivières ont les mêmes allures. févuier mars ail mai juin juillet août peplt oct Et noue déc janvier fuir 4205 - co nm — Les circonstances qui favorisent les titres élevés se produisent pendant la saison froide (novembre-avril), et celles qui leur sont contraires, pendant la saison chaude (mai-octobre) ; en conséquence, des graphiques dressés comme ceux de la figure 1, pour d’autres années, en présenteraient la forme générale; mais ils seraient infi- niment variés dans les détails, au gré des caprices de l’atmosphère. Si quelque observateur, par exemple, avait exécuté, en 1876, le travail auquel je me suis livré en 1895, tous ses tracés auraient pré- senté au mois de mars des chutes exceptionnelles, en raison de la crue des cours d’eau dans tout le bassin, qui fut pour la Seine l’une des trois plus grandes depuis le commencement du siècle. Le 17 mars, Belgrand cunstatait que le débit du fleuve s’élevait à 90 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 1 660 mètres cubes, et Boussingault ne trouvait dans ses eaux que la très minime quantité de 18,2 d’acide nitrique par litre. On voit, par la figure 1, que l'Oise a maintenu son titre entre 6 et 7 milligrammes pendant toute la saison chaude, bien au-dessus de ceux des autres rivières. La richesse agricole du bassin de l'Oise n’est probablement pas sans influence sur cette supériorité ; mais je lui trouve encore une autre cause. Le Manuel hydrologique du bas- sin de la Seine: donne, pour chaque bassin partiel important, la hauteur moyenne des pluies et l'étendue des terrains perméables, les seuls qui recèlent les eaux souterraines. En multipliant cette étendue par la hauteur des pluies correspondantes, on obtient la quantité d’eaux pluviales reçues par les terrains perméables de chaque bassin ; on trouve ainsi que MILLIARDS de mèêtres cubes. Le bassin de la haute Seine, jusqu'à Montereau, reçoit. . 6,4 Celtt-de RON SR rer ST NS 5,0 Gelai-de a Marne ER Es ie a EE 4,4 Celm dé TOI. NS OS er PO TES 10,8 En admettant que, chaque année, la hauteur d’eau infiltrée soit à peu près la même pour les divers bassins, on doit croire que le bassin de l’Oise emmagasine plus d’eaux souterraines que les autres; de fait, celte rivière doit à la constitution de son bassin, composé partout de terrains perméables, sauf près de sa source, de se mieux soutenir pendant l’étiage. Or, si son débit est alors plus considé- rable que celui des cours d’eau que nous lui comparons, son appro- visionnement en nitrates est donc aussi plus considérable, et, toutes choses égales, une même perte de nitrates occasionnée par la végé- tation doit moins affecter son titre nitrique. La figure 2 fait voir nettement que, pendant l'hiver, en l'absence de toute végétation, quand Ja Seine est alimentée par les seules eaux souterraines, son titre nitrique varie sensiblement tout en res- tant élevé, en divers points de son cours. Le 27 février 1895, je lui ai trouvé le titre de 86,04 à son arrivée à Montereau; le même jour, l'Yonne me donnait 9"6°,75; elle devait donc par son mélange avec le fleuve augmenter son titre. De plus, entre le confluent de “ L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. DE l'Yonne et celui de la Marne, la Seine reçoit plusieurs affluents dont le principal est le Loing”, et les nappes souterraines de la riche vallée qu’il traverse ; toutes ces eaux sont encore plus chargées de nitrates que celles de l’Yonne ; aussi, à l’arrivée à Charenton, le titre s’élève le 28 février à 108,59. Mais celui de la Marne est alors seulement de 78,8; cette rivière abaisse donc le titre de la Seine qui n’est plus à Paris, le 28 février, que de 9 milligr. Pendant la saison chaude, les différences que je viens de signaler entre les titres de la haute Seine, de l’Yonne et de la Marne disparaissent ; les bas titres sont très voisins et se confondent presque dans les graphiques; fin mau auil mai juin juttet août sept oct nov déct* janvier fevuer s 189 n un mmes d'acide nihique pur Lite CRE 2 ro mlliqu [e] F1c. 2. mais, à la fin de janvier, quand a repris l’alimentation presque exclu- sive des rivières par les eaux souterraines, les titres se différencient de nouveau et se classent dans le même ordre qu’en février 1895. Il serait intéressant de continuer pendant plusieurs années la dé- termination des plus hauts titres dans toutes les rivières d’une cer- taine importance tributaires de la Seine, au moment où leurs eaux représentent fidèlement les mélanges des eaux souterraines de leurs bassins. Si, selon l'hypothèse émise au chapitre [*, la richesse en ni- trates de ces eaux va de pair avec la fertilité des sols, une classifica- tion des bassins selon les titres nitriques de leurs eaux souterraines 1. On va voir un peu plus loin que cette rivière et l'Essonne sont sensiblement plus riches que la Seine. 92 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. devra être conforme, dans une certaine mesure, à la classification selon la richesse agricole dressée à l’aide des documents statistiques publiés par le ministère de l’agriculture. J'ai commencé cette étude des plus hauts litres des tributaires de la Seine, au mois de février 1896 ; mais, les conditions climatéri- ques venant à changer, il ne m’a plus été permis de la continuer ; je compte la reprendre l'hiver prochain. Voici, en attendant, quel- ques résullats :' Grand-Morin, à Esbly. . . 106,64 Bassi Marne . 18 février. MASON ane de le Marne LÉ Petit-Morin, à la Ferté . . 8 ,23 Fe Blaise, au-dessus de Dreux. 15 ,47 D te A Pere Avre, à Nonancourt. , . . 12 ,62 — du Loing . . 19 — Loing.-à Morel. "562 TEL 87 — de l'Essonne, 20 — Essonne, à Corbeil. . . . 12 ,10 À la même époque, je trouvais dans la Seine, à Paris, . . . . . SL O M. G. Lemoine, avec son inépuisable complaisance, a bien voulu recommencer, pour les débits de la Seine à Paris, aux dates de mes prises d'échantillons, les calculs par lesquels il avait déterminé déjà les débits de la haute Seine, de l'Yonne, de la Marne et de l'Oise en février 1895. Dans le tableau suivant, j'ai placé en regard les titres nitriques et les débits correspondants. va ne, Re milligr. mètres cubes DOMÉVNCTSOD Er 0 8,67 230 DONNE AI EN RON ART Tr 9,00 100 L'OPANTI ESPN Er PRESS 5,19 465 LOTUS DLL ATEN is 6,19 170 LAN SENS CE A 5,97 90 DONNE SPORE AE. EEE 4,80 95 Lo JUPE TEE DE en 4,19 70 JO AOUTEIOETE TE TER EE 4,29 50 20:septembre.,.:., 21 ue. 3,59 99 BUHOYENDTE 5e ne verte 6,38 80 EM 1) EM OR TT TS 390 34 janvier 1896.440/34 1 9 8,62 11225 19 fÉNME mu Te ls hilenritre 8,94 125 Ce tableau ne montre aucune relation apparente entre les titres et les débits, à part la diminution qui affecte les uns et les autres L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 93 pendant l’étiage ; il n’en peut être autrement, puisqu’un même débit peut être produit par les mélanges les plus divers d’eaux souter- raines el d’eaux de ruissellement, et que, pendant qu’on l’observe, la végétation aquatique peut avoir tous les degrés possibles d’acti- vité. Nous retiendrons seulement celte observation qu’au mois de février 1896, la Seine ne roulant que des eaux souterraines, J'ai trouvé les mêmes hauts titres 8"8°,62 — 8"5°,94 qu’au mois de fé- vrier 1895, 88,67 — 9 milligr., ce qui confirme l'hypothèse émise au chapitre [*, d’après laquelle le mélange des eaux souterraines d’un bassin de rivière possède un titre à peu près constant, au moins pendant treize mois consécutifs. Il est possible que ce titre moyen soil assujetti à des variations lentes, déterminées par la succession en séries des années humides, sèches ou normales ; les progrès dans la culture du sol peuvent aussi l’influencer. Des recherches ultérieures feront connaître l’am- plitude de ces variations ; tout ce qu’il est permis de supposer jus- qu’à présent, c’est que le titre nitrique des eaux souterraines d’un bassin est exempt de sauts brusques et se soutient à peu près le même au cours d’une année. III. — L'acide nitrique dans les eaux des sources de la Vanne te et de la Dhuis. - Les déterminations de l’acide nitrique dans les eaux de source dérivées à Paris, exécutées d’abord dans le seul but d’ajouter quel- ques renseignements à ceux que m’avaient donnés les eaux de la Seine, de l'Yonne, de la Marne et de l'Oise, ont pris un intérêt dont je ne me doutais pas d’abord, quand j'ai compris qu’elles pouvaient intervenir utilement comme élément de discussion dans la recherche el le choix des eaux potables. On sait qu’il y a des distinctions à établir entre les sources : les unes débitent des eaux parfaitement fillrées, bien dépouillées de matière organique après un séjour prolongé dans un terrain oxy- géné; ce sont de vraies sources offrant les meilleures garanties de salubrité. D’autres ne sont évidemment que des issues par les- quelles réapparaissent au jour des rivières qui se sont perdues, en 94 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. partie ou en totalité, dans des terrains très perméables ; ce sont de fausses sources, dont les eaux plus ou moins contaminées par une première circulation à la surface du sol, n’ont pas été complète- ment débarrassées de leurs souillures pendant leur voyage souter- rain. D’autres, enfin, ne sauraient être rangées sûrement ni parmi les vraies ni parmi les fausses sources ; elles sont seulement sus- pectes, parce que l’on peut craindre que leurs eaux, quoique frai- ches, limpides et pures en apparence, ne soient des mélanges d’eaux de vraies sources et d'eaux de rivière ou de ruissellement venues par des voies trop rapides, trop larges, qui les ont affranchies d’une parfaite filtration. C’est à distinguer les sources vraies des sources fausses ou suspectes que peut servir l’étude du titre nitrique. Admettons en effet, provisoirement, que ce titre, dans une vraie source, demeure, sinon constant, du moins compris entre des li- mites peu écartées. Nous savons qu’il est très faible dans les eaux de ruissellement, et très variable dans une eau de rivière ; si donc une source n’est que la réapparition d’une rivière, ou un mélange en proportions diverses d’eaux souterraines et d’eaux de ruisselle- ment, son litre doit être essentiellement variable. Ainsi, semble-t-il, la nature d’une source peut être reconnue à l’amplitude des va- riations de son titre nitrique. Un tel moyen d’information, je tiens à le faire remarquer, ne peut permettre de décider, avec une entière certitude, si l’eau d’une source doit être acceptée ou rejetée comme boisson. L'eau de ri- vière ou de ruissellement n'est pas nécessairement souillée de germes infectieux, parce qu’elle a coulé quelque temps à la surface du sol ; le serait-elle, que ces germes peuvent être arrêtés en che- min, avant d'arriver à la source, si l’eau rencontre et traverse quel- que terrain sableux qui en opère la filtration. Mais les procédés en usage pour l'étude des eaux potables ne sont pas non plus parfaits, bien au contraire ; en certains cas, mais non pas dans lous les cas, ils révèlent la mauvaise qualité de ces eaux, mais ils ne permettent ouère d'affirmer qu’elles sont absolument impropres à l’alimentation. Le mode d'examen que je propose fournira un élément de plus pour la solution de la question, élément qui pourra montrer qu’une eau est suspecte, quand les autres méthodes ne lindiqueraient pas. L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 95 Ce n’est pas le moment d’insister sur les services que l'hygiène peut en attendre; le plus pressé est maintenant de savoir si réelle- ment le titre nitrique d’une vraie source est peu variable. Je vais étudier à ce point de vue les eaux de la Vanne et de la Dhuis; j'examinerai plus tard celles de l’Avre qui en diffèrent très nettement. Grâce à l'autorisation qui m’a été accordée avec empressement par M. Humblot, inspecteur général des ponts et chaussées et directeur du service des eaux, j'ai pu faire les prises d'échantillons aux débou- chés mêmes des aqueducs de la Vanne, de la Dhuis et de l’Avre dans leurs réservoirs respectifs de Montsouris, Ménilmontant et Passy. Dans les deux tableaux qui vont suivre on trouvera les détermi- nations de la chaux à côté de celles de l’acide nitrique, et l’on se demandera peut-être pourquoi j'ai ajouté le-dôsage de l’alcali à celui de l'acide; peut-être aussi voudra-t-on savoir pourquoi, dans une question où les conclusions doivent reposer sur l’analyse chimique, je m’en tiens au dosage de deux éléments, au lieu de les déterminer tous, sulfates, chlorures, bicarbonates alcalins ou terreux, silice, gaz dissous, matière organique. Je répondrai qu’il s’agit unique- ment ici de saisir des différences de constitution chimique entre les eaux de source, d’une part, et celles de rivière ou de ruissellement, d’autre part. S'agit-il de différencier les eaux de source de celles de rivière ? Ce sont surtout la matière organique et l'acide nitrique qui les distinguent ; ni la silice, ni les sels autres que les nitrates, ni les gaz dissous ne fournissent des différences qu’on puisse utilement interpréter. Le dosage, précis, direct de la matière organique est une opération trop longue, trop délicate, pour être répétée un grand nombre de fois; je m'en suis abstenu, ne voulant pas surcharger : mes recherches d’un énorme travail, Cest encore l'acide nitrique qui établit une différence essentielle entre les eaux de source et celles de ruissellement ; mais il n’est pas le seul élément à doser ; il convient de déterminer en même temps la chaux, parce qu’elle est bien plus abondante dans les premières et sert dès lors à les dis- ünguer des secondes. J’ai donc toujours dosé cette base, non par le procédé dit hydrotimélrique, qui, s’il est très rapide, satisfait peu un analyste, mais par la méthode usuelle qui consiste à lisoler à l’état d’oxalate insoluble. Voici maintenant les deux tableaux annon- 96 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. cés : l'acide nitrique et la chaux y sont exprimés en milligrammes et rapportés à 1 litre d’eau. Vanne. DATSS. Fo 20 5 dt, milligr. milligr. S'ymars 895 5016/4208 33 10,08 11192 RATE Ed etes 9,86 111,2 LS RUE Else ee 10,14 110,6 Pi Nc AC TO AT ARE RÉ 10,16 ITS 15 Male St 56 OU 10,13 113,6 HN lé Sie st 9,51 115,8 ALU OR POTTER 9,81 116,3 APAOURCE sue 0 Dir ete 2e 9,85 kr) DU SHIGE LUS CTAR 10,00 115,4 28 septembre .. : 1. « 9,81 125,3: 2STOCLODCE SANT De Ar 10,07 111,3 20 NOYEMDFÉ: lentes » 10,00 112,4 23 -MÉsembrés 7 10,70 113,9 29}janyien 1896. astra 11,34 111,3 PAU LA ENS DORE SR DR PO LAS 114,3 PE à OUR AO ne 10,86 115,4 L'ASIE bete dapere 10,57 114,4 193 :avril. GAME EROE. . 10,82 113,1 Dhuis J'mars 1899 2." 157072 11,30 LE e 18 AVS sertie ASS 14582 112,4 PA PERS UP 11,80 112,6 TALONS 11,74 112,4 LUS A Pete peau s 11,65 106,5 L'iniliet tr AO STARS 11,93 104,8 DL dé eteée àVe-e y 11,90 103,3 2 A0, Le Te à 10,40 99,8 28 OCLODE BE tn ae er 7e 11597 94,0 26 novembre; 4. .", 11,50 95,6 28 décembre. . .« . . . 11,99 109,2 29 janvier 1896," 0 11,30 106,9 PA (1 6 1) FPS RER 12,03 103,8 L'EMARS PACEPEETIS US 11,03 » 1Ssanrilens ee Lie Per aile 11:82 118,9 1. L'acide nitrique a toujours été dosé dans le résidu d'évaporation de 4 litres ; la chaux a été dosée dans { litre préalablement filtré. 2, Il est probable que ce chiffre est trop fort de 10 milligr. ; dans la lecture du poids, on a dû prendre le poids de 10 milligr. pour le poids de 20 milligr. L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 97 Voici les titres moyens de l’acide et de la chaux, et les plus grands écarts en deçà ou au delà de ces titres : YANNE Acid nitrique. ChAUX milligr. milligr. MITTESEMONEDS ER 10,26 114,2 Écarts les plus grands au- dessus des titres. . . . 1,08 <+11,i Écarts les plus grands au- dessonsides Uiires 4 n0iou—= ES. 6 DHUIS. oo Acide nitrique. CRE milligr. milligr. 11,61 106,5 SEE SE RONA ES OR On voit que l'écart le plus grand est, pour l'acide nitrique, dans les deux eaux, d'environ # des titres moyens ; pour la chaux, il est mau aol mai jun jullf août st oct nov dec prvien fevrier ma avril 1895 à Li œæ an tammes d'acida nilique par lilie 4 mil un peu moindre dans l’eau de la Vanne, un peu plus grand dans celle de la Dhuis. Quelques observations intéressantes sont suggérées par la repré- sentation graphique des variations des titres nitriques et calciques dans les deux eaux : La figure 3 fait voir que les variations du titre nitrique dans l’eau de la Vanne n’ont aucune relation avec celles qu’on observe dans l’eau de la Dhuis; la figure 4 montre que les variations des titres calciques sont dans le même cas. Il en serait autrement si toutes ces varialions étaient sous la dépendance immédiate des circons- ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SERIE. — 1897. — 11. 7 98 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. tances climatériques, comme le sont les débits des sources, lesquels en même temps, s'élèvent après les pluies d'hiver ou s’abaissent par l'effet des sécheresses. Elles dépendent probablement des accidents de la surface et de l’intérieur des bassins des eaux : il suffit que ces accidents diffèrent d’un bassin à l’autre pour que les variations qu'ils occasionnent ne concordent ni dans Le temps, ni dans leur orandeur. On n’aperçoit pas davantage de concordance entre les variations du titre nitrique et du titre calcique dans chacune des deux eaux. Elles concorderaient sûrement si, dans une eau de source, les quan- Eu mau aol mai juan jubrt août pt ot nou déc pau fie mous avt Mes de chaux ÉE mil F1G. 4. lités de nitrates et de sels calcaires, parmi lesquels domine le bi- carbonate, se trouvaient toujours dans un rapport constant ; mais nous savons au contraire que les conditions de la formation du bi- carbonate de chaux et celles de la nitrification sont fort différentes ; la chaleur développe la nitrification, mais restreint la production du bicarbonate; le froid arrête la formation des nitrates et favorise celle du sel calcaire ; la sécheresse laisse intacts les nitrates formés et détruit le bicarbonate. Au reste, pendant qu'elles traversent un terrain et y séjournent, les eaux peuvent perdre une partie de leur bicarbonate, ou en acquérir de nouveau, selon que la tension du gaz carbonique diminue ou augmente dans l’atmosphère ambiante, tandis que la quantité des nitrates demeure invariable. De ces expli- L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 99 cations 1] résulte que les titres nitrique et calcique sont indépen- dants l’un de l’autre ; donc leurs variations ne peuvent être que dis- cordantes. Ilest intéressant de comparer les titres des deux sortes avec les débits des sources. Ces débits sont fréquemment relevés par le ser- vice des eaux ; M. Humblot a bien voulu me les communiquer. Dans le tableau suivant, J'ai mis les plus forts et les plus faibles débits, exprimés en litres et rapportés à la seconde, en regard des titres correspondants. Vanne. DATES. DÉBITS. dau CHAUX. litres milligr. milligr. 2ÉAVTINIS95 TR 1 533 9,86 11462 Débits les plus | 29 janvier 1896, , 1 645 11,34 111,3 forts. 21 février . . . . . CE LS AO RMMENTE RTE SAP RAS 1 576 10,57 114,7 aa | 28 septembre 1895 . 1 166 9,81 125,3 rs RE SC nbees due Le Le Lo0 LTD 07 NII LS ra | 26 novembre. . . . 1 132 10,00 112,4 Dhuis. ee LME OS 208 11,74 112,4 es IE ; DA ONE D AU 186 10,40 99,8 F VELOImars 89600. 215 11,03 » Débits les plus | 28 octobre 1895 , . 178 1402 94,0 faibles. | 26 novembre. . . . 173 11,80 95,6 Ce tableau montre qu’il n’y a pas de rapport entre les débits des sources et les titres de leurs eaux. Nous avons déjà fait la même observation, après avoir comparé les débits de la Seine en divers points de son cours, de l'Yonne, de la Marne et de l’Oise, avec les titres nitriques trouvés dans ces rivières aux époques où elles étaient exclusivement alimentées d’eaux souterraines exemptes d’al- tération : pendant que les débits variaient dans le rapport de 2 à 1, les titres restaient à peu près constants, et celui de la Seine à Paris se reproduisait le même, dans des circonstances semblables, à un an d'intervalle. Ainsi, la constance que nous avons trouvée dans des eaux souterraines, mélanges d'eaux d’un grand nombre de sources, 100 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nous la retrouvons maintenant dans les eaux de grandes sources isolées. Bornons-nous, pour le moment, à enregistrer tous ces résultats d’études analytiques ; nous les interpréterons sans peine à la fin du chapitre qui va suivre. IV. — Constance de la constitution minérale des grandes | sources. Je vais maintenant essayer d'expliquer pourquoi, dans les eaux des sources importantes, les proportions des éléments minéraux, celles de l'acide nitrique et de la chaux en particulier, doivent de- meurer comprises entre des limites rapprochées. Les géologues divisent les terrains perméables en deux catégo- ries, au point de vue de leurs rapports avec l’eau ; les terrains sa- bleux, et ceux qui sont formés de roches stratifiées ou non. J’adop- terai la même division, et m'occuperai d’abord des terrains sableux, non sans faire observer que le mot sableux veut dire composé de menus débris de roches, y compris le calcaire fin et l'argile plus fine encore, aussi bien que les sables proprement dits ; il ne signifie pas, comme pourrait le croire un agriculteur, que ces menus débris sont entre eux sans cohésion. Je considère donc un terrain sableux, en son état d’humectation normale, celui auquel il revient quand il s’est ressuyé spontanément après une sursaluralion passagère. Survient une pluie qui occa- sionne une nouvelle infiltration d’eau ; si le terrain était absolument gorgé d’eau, que tous les interstices entre ses éléments en fus- sents remplis, personne ne douterait que ce nouvel apport ne dé- terminât un mouvement général de toute la masse liquide, de façon qu'il sortit par le bas du terrain autant d’eau qu’il en serait entré par le haut. Mais je suis en présence d’un terrain ressuyé, c’est-à- dire dont tous les éléments, mouillés à la vérité d’une mince couche d’eau, laissent place cependant dans leurs interstices aux gaz de l'atmosphère ; c’est un état très différent de celui de la saturation complète, état, d’ailleurs, qui est normal dans toute l’épaisseur d’un terrain sableux comprise, en remontant, entre la nappe sou- L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 101 terraine où aboutissent toutes les infiltrations, et la couche de terre où l’appel de l’eau vers la surface pour les besoins de l’évaporation ne se fait plus sentir. Néanmoins, les mouvements de l’eau sont les mêmes dans un terrain ressuvé que dans celui qui serait exactement rempli; une nouvelle infiltration y produit encore un déplacement général qu’on se représentera fidèlement en supposant l’existence d’une multitude de tranches égales et parallèles à la surface se transmettant de l’une à l’autre le liquide qui les imbibe, de manière que l’eau qui sort du terrain est précisément celle qui occupait la tranche la plus basse. Je n’en dirai pas plus sur le mécanisme de ce phénomène ; je l’ai décrit et expliqué sous le nom de déplacement dans les Contribu- hions à l’élude de la chimie agricole (Encyclopédie de Frémy). Je m'en suis servi pour extraire de diverses terres végétales, sans alté- ration ni dilution, les dissolutions qui s’y trouvaient contenues. Mais il faut que je signale ici l'importance capitale de son rôle dans la purification des eaux par le sol: en réglant les mouvements des in- fillrations de manière qu’elles se suivent méthodiquement selon l’ordre de leurs dates, il Les oblige à séjourner dans le sol, au con- tact de l'oxygène et des organismes purificateurs, pendant des Lemps à peu près égaux, suffisants pour la complète épuration. Il n’en serait plus ainsi, et la pureté des eaux serait compromise, si cer- taines de ces infiltrations, précipitant leurs mouvements, et devan- çant les autres, pouvaient arriver à la source avant le temps voulu. Ces notions si simples, si élémentaires, je les ai inutilement cher- chées dans les meilleurs ouvrages d’hydrologie. Dans l’étude des mouvements de l’eau, les auteurs ne tiennent guère compte des différences de constitution dues aux matières dissoutes, encore moins du déplacement des dissolutions successivement formées par les infiltrations ; pour eux, semble-t-il, l’eau est partout un même liquide, dont ils n’analysent pas le mode de cheminement dans les sols. Cette absence de distinctions est la cause d’erreurs très répan- dues : combien de gens, par exemple, qui, voyant une source gros- sir après des pluies, s’imaginent que l’eau sortant de terre sous leurs yeux est précisément celle que ces pluies ont apportée, el qui par- tent de là pour calculer le temps qu’elle a mis à se transporter de 102 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. la surface du sol jusqu’à la source ! Ce temps est, en réalité, celui de la propagalion du déplacement, c’est-à-dire de la transmission, de l’une à l’autre des tranches dont il a été déjà question, des excé- dents d’eau qu’elles ne peuvent retenir. Confondre la propagation du déplacement avec le transport effectif d’une même quantité d’eau, de l’origine à la fin de l’espace occupé par les infiltrations, c’est à peu près donner à toute une masse liquide la vitesse d’une onde qui court à sa surface. Les eaux souterraines ne vont pas si vite ; dans les terrains d’où sortent les sources, elles séjournent beaucoup plus longtemps et se meuvent beaucoup plus lentement qu’on ne pense. Voici un calcul très simple, propre à fixer les idées sur ce point. Supposons que la densité apparente d’un terrain soit de 1,5, c’est-à-dire que, sous le volume de 1 litre, il pèse 1*#,5, et que sa capacité d’humectation normale, en d’autres termes, que la proportion d’eau qu’il peut re- tenir après ressuyage, soit de 10 p. 100 de son poids ; ces hypothèses ne sont nullement exagérées. Supposons encore que la hauteur des pluies soit pour une année de 600 millimètres, dont le tiers s’in- filtre dans le sol. Une tranche de terrain de 1 mètre d’épaisseur retiendra une tranche d’eau de 0",10 X 1,5 ou 0",15 d'épaisseur : mm | 5) de terrain de 1",33 ; en sorte qu'avec une épaisseur de 10 mètres seulement au-dessus d’une source, ou plutôt au-dessus de la nappe souterraine qui l’alimente, le terrain emmagasinera les eaux d'infiltration de plus de sept années, ce qui veut dire que ces eaux mettront tout ce laps de temps à descendre de sa surface jusqu’à la nappe. Après cette digression sur le jeu et l'importance du déplacement, je reviens au terrain sableux que j’envisageais ci-dessus, et reprends ma démonstration interrompue : il s’agit de mettre en évidence les circonstances qui tendent à unifier la constitution des eaux des grandes sources, en déterminant le mélange d’infiltrations datant d'époques différentes. Lesa pports successifs des pluies forment dans la couche végétale autant de dissolutions qui s’en échappent à tour de rôle en empor- donc, pour retenir une tranche de , il suffira d’une tranche L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 103 tant des quantités très diverses de nitrates, de bicarbonate calcaire et autres sels. Ces dissoltions descendent dans le sol en se dépla- çant, et conservent d'abord leurs différences ; aussi trouve-t-on des variations considérables de composition, surtout en ce qui concerne les nitrates, dans les eaux de drainage ordinaires, qui sont recueil- lies, à la faible profondeur de 1°,2 à 1",5, dans une canalisation parallèle à la surface du terrain et alimentée partout en même temps de dissolutions contemporaines. Mais les déplacements ne s’opèrent pas avec une précision mathématique ; à mesure qu'ils se multiplient par leur progrès en profondeur, les dissolutions succes- sives subissent d’inévitables mélanges qui sont évidemment une pre- mière cause d’unification de la constitution des eaux. En voici une autre d’un effet plus assuré. Que les dissolutions se mêlent ou non en se déplaçant, on peut toujours diviser le terrain par la pensée en tranches successives contenant chacune une des dissolutions ; or, dans un terrain sableux, toutes les infiltrations aboutissent à une nappe continue, dont la surface, modelée selon le relief du sol, est nécessairement inclinée partout vers une issue, C’est-à-dire une source. En raison même de son inclinaison, cette nappe coupe un certain nombre de tranches du terrain, et en reçoit des dissolutions de conslitutions et d’âges Fi@. 5. différents dont elle opère le mélange. C’est ce que représente la coupe ci-dessus (fig. 5) d’une portion d’un bassin de source, où l’on a figuré des tranches, une source S et une nappe N. Plus la source est importante, plus son bassin a d’étendue, et plus loin se prolongent les pentes diverses de la nappe; plus grand est le nombre de tranches coupées et de dissolutions mêlées ; plus les 104 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. proportions des éléments variables, comme l'acide mitrique et le bicarbonate de chaux, tendent vers des valeurs constantes. Quand on compare la faible hauteur de terrain qui suffit pour emmagasi- ner les infiltrations d’une année à la hauteur bien plus considérable des points culminants de la nappe au-dessus de la source, on con- çoit que cette nappe reçoive et mêle des infiltrations datant de sai- sons et même d'années différentes, et qu’ainsi les variations de l'intensité de la nitrification et de la formation du bicarbonate de chaux se fondent dans le mélange final qui constitue l’eau de source. Quand le relief du bassin d’une source est accidenté, et c’est le cas général, les distances que les infiltrations ont à parcourir pour F1. 6, se rendre à la nappe sont d’autant plus différentes que les dénivella- tions sont plus accentuées, ainsi qu’on le voit dans la figure 6. En conséquence, les âges des dissolutions arrivant en même temps dans la nappe sont plus variés, et l’unification de constitution des aux s’en (rouve mieux assurée. Le défaut d’homogénéité dans le terrain tend à produire le même effel : on sait que de menus débris de roches retiennent, après res- suyage, des quantités d’eaux très différentes, selon leurs dimensions. Du sable grossier qui traverse les mailles d’un tamis de 1 millimètre, mais ne passe pas à travers celles de 0"%,5, retient environ 3 p. 100 de son poids; cette proportion s'élève à mesure que le sable devient plus fin, et monte jusqu’à 15-18 p. 100 quand il est mêlé d'argile, sans toutefois cesser d’être perméable. Ainsi, sous une même épais- seur, un terrain graveleux contient quatre, cinq, six fois moins d’eau qu'un terrain sablo-argileux, c'est-à-dire que les infiltrations L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 109 s’y meuvent quatre, cinq, six fois plus vite. Si donc le bassin d’une source est formé en certains points d'éléments grossiers, en d’au- tres d'éléments fins, les dissolutions sortant en même temps de la couche végétale descendront avec des vitesses inégales et gagneront la nappe à des époques différentes; en d’autres termes, celles qui atteindront la nappe en même temps remonleront à des époques différentes. En résumé, dans les terrains sableux, le déplacement systéma- tique des infiltrations, leur mélange partiel pendant leur descente, l’inclinaison de la nappe souterraine, les accidents du relief du sol et le défaut d’homogénéité sont autant de conditions qui tendent à unifier la constitution minérale des eaux des grandes sources. Le type de terrain envisagé jusqu'ici n’est pas le plus répandu, ni le plus propre à fournir les sources importantes, les seules que j'étudie, parce qu’elles sont seules recherchées pour l'alimentation des villes. Les grands réservoirs d’eaux souterraines se trouvent, comme on sait, dans les massifs de roches fissurées, dont le régime hydrologique ne ressemble guère à celui que je viens de décrire ; autant l’un est simple et se prête à l’analyse des mouvements de l’eau, autant l’autre est varié et échappe à la descriplion. Mais ces différences n’empêchent pas le mélange des dissolutions formées à des époques très variées d’être encore réalisé dans les terrains fissurés. 11 faut remarquer d’abord qu’un massif fissuré qui alimente une source importante s'élève au-dessus d’elle à une altitude considé- rable, témoin le plateau d’où sortent les eaux de la Vanne, ce qui lui permet d’emmagasiner les infiltrations d’un assez grand nombre d'années. Il les répartit entre ses assises, dans les fissures, les ca- naux, les bassins, en un mot dans les vides dont il est criblé de toute part. Ces vides, de formes et de dimensions indéfiniment di- verses, sont évidemment associés en séries, de manière à former, de la surface du terrain à la source, les chemins les plus variés : les uns plus courts et plus directs, la plupart très longs et accidentés de toutes les façons, aboutissant tous à une conalisation ramifiée terminée par la source. ]l n’y a plus ici de nappe souterraine con- linue ; elle est remplacée par des bassins et des canaux situés à des 106 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. niveaux différents et communiquant entre eux. Mais, quelle que soit la complication d’un tel appareil, le régime hydrologique, une fois établi, y demeure constant ; je veux dire que les chemins tracés ne changent pas, au moins dans l’espace de quelques années; quel que soit le mode de logement des eaux, qu’elles occupent les in- terstices de matériaux pulvérulents, ou mouillent des fissures, ou dorment dans des creux petits ou grands, leur déplacement pro- gressif s’effectue néanmoins à chaque infiltration nouvelle ; par con- séquent, elles séjournent dans le terrain aussi longtemps qu'il est nécessaire pour leur épuration; de plus, le mélange des dissolutions différentes effectué pendant leur parcours, la variété des routes qu’elles suivent, les différences de niveaux dans la canalisation der- nière qui les reçoit, les accidents du relief du sol sont cause que des infiltrations produites au cours d’une longue période de temps arrivent en même temps à la source; en sorte que l'unification de la constilulion des eaux tend à se réaliser dans un terrain fissuré comme dans un terrain sableux. Je ne Lerminerai pas ce chapitre sans faire observer que tous mes raisonnements supposent qu’une source tire son alimentation d’un vaste terrain situé au-dessus d'elle et pénétré à la fois par les infil- tralions des pluies et des gaz de l'atmosphère. Les eaux sont alors assujetties à des mouvements, simples dans les terrains sableux, compliqués dans les terrains fissurés, mais se réduisant dans tous les cas à ces déplacements méthodiques sur lesquels j'ai fait reposer leur épuration et leur homogénéité. Mes démonstrations ne s’ap- pliquent ni aux petites sources, ni aux eaux artésiennes, encore moins aux eaux minérales, Les bassins des petites sources sont trop exigus pour jouer le rôle de régulateurs. Les eaux arlésiennes ont expulsé les gaz des couches perméables qui les emmagasinent ; elles obéissent dès lors à des pressions qui leur font suivre les chemins de moindre résistance ; en de telles conditions, 1l ne peut plus être question de déplacements méthodiques, au moins dans la couche de terrain proprement artésienne. Quant aux eaux minérales, leur parcours dans les profondeurs est encore plus ignoré que celui des eaux artésiennes ; elles échappent encore mieux aux considérations théoriques que Je viens de présenter. L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE.. 107 Revenant maintenant aux faits acquis dans les précédents cha- pitres, relativement à la constitution à peu près constante et indé- pendante des débits observée soit dans les eaux de la Vanne et de la Dhuis, soit dans les eaux de rivière en l’absence de la végétation et des ruissellements, on voit de suite que, pour les expliquer, il suffi d'admettre que les sources de la Vanne et de la Dhuis sont de vraies sources; il suffit d'appliquer au bassin entier d’une rivière les considérations dont le bassin d’une seule source a été l’objet dans ce chapitre. V. — L'acide nitrique et la chaux dans les eaux des sources de l’Avre. Le 8 mars 1895, un premier dosage de l'acide nitrique et de la chaux dans l’eau de l’Avre me donnait : Acide MITFIQUE. Le ee ee de 11m8r 87 CHAUX NNEN MEET MENT ST 6 Un second dosage, fait le 4 avril, réduisait ces chiffres aux sui- vants : Acide rique. He. Lee Gmsr 67 EN CRE RAP PE ES ER RS 66 ,6 Pendant que survenaient ces grandes variations, les titres nitrique et calcique restaient à peu près constants dans les eaux de la Vanne et de la Dhuis; je résolus dès lors de suivre de près les variations de ces titres dans l’eau de l’Avre, et j'en vins bientôt à y faire des dosages hebdomadaires. Le tableau suivant représente tous les résultats obtenus du 8 mars 1895 au 29 avril 1896. ACIDE DATES. nitrique. CHAUX. milligr. milligr. SHUATSE LOTS CNE 11,87 87,6 HAN de ii er ee 6,67 66,6 LORD à sup 8,57 76,4 LOR miics VOIt En QE CRC a 2 0 1e 221l 81,5 DORE AR. RENE 10,59 84,1 108: ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ACIDE DATES. nitrique, CHAUX. milligr. milligr. LOFRIAL LES ES SR Er 9,51 80,2 int astenté Lise 10,78 8748 LP SR EVE MP VOD 11,40 88,7 De te ee «asie ous 11,15 87,7 LE LE USERS EE AU EE EEE 11,75 89.8 LOMME PRE CON HET 12,17 JET RER TD ER RES 58 ME 12,29 92,4 2 FUEL. US ES e Ans à 12,56 SF 48 de Der ete doit de 12,41 93,5 LOU ESP MAPS ee 12,69 94,2 LENS Re D EE OT ON 12,80 » PUIS, DÉLITS, ARR 12,49 94,2 G'aout". 2 + ARE 11,78 91,8 ET NSP TE 11,25 90,7 DE ee LA CUE 11,54 TS | PE RP TR Pr M 11,40 93,2 J'PEPIEIDIE RE nie elles 122520 93,5 10 AN EP ENT le 12,63 93,7 17 ge OU hES else 1241 95,9 25 RE ET TE AS 12,39 93,6 DAOLLODTE See e me ge + 12,61 94,6 DANS ere ee Ve 12,64 95,1 LÉ are, apr 11,98 » DR ER Tr da le) + qte 14,92 926 ON seen dos 12:21 95,0 5 novembre . : . + + 11,84 » 13 — ne nete : are ts 11,84 93,8 20 — eee 10,59 90,9 2700 —= IEMRANTSETMS 10,90 90,0 ÆdéceMDre RC eee J 10547 87,0 11 — See ererraste 10,51 86,2 18: :— SUR eh Toit le Fe 10,24 86,4 Pl ns DS Vie EU ve 10,40 » 2 janvier 1896. . . , . . 10,20 78,4 RE Re D er VEUT ul La 10,01 78,5 15 . = Ars er Etes 10,38 83,8 29 el ANNEE Gate 10,07 82,9 DU = Une d'ou 9,84 82,4 EE (0) de: MEL TER PE 10,04 84,5 12 ES sis re a te ne a 10,75 84,7 19 ne +, RUE de bete 10,53 86,0 D PRE EE CPE ges à 9,85 83,9 A DANS retour Da fie 10,04 83,1 Né ERLS ER 8,90 S0,5 L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 109 DATES, 18 mars. 25 —. 1 avril. BH Lee 15 — DONS 20 ACIDE nitrique. milligr. 8,08 8,74 9,84 8,28 9,15 7,96 8,27 CHAUX. milligr, 73,2 76,1 83,0 78,8 83,1 78,1 80,5 Voici les titres moyens et les plus grands écarts au delà ou en deçà : MITPES MOYENS EE Plus grands écarts au-dessus des titres moyens. Plus grands écarts au-dessous des titres moyens. ACID itriques CHÈRE" milligr. milligr. 10,84 86,3 +1,96 ENG A LA Le plus grand écart pour l'acide nitrique est à peu près de 4/10 du titre moyen, et, pour la chaux, de 2,3/10. L'un et l’autre dé- passent beaucoup ceux que j'ai trouvés pour les eaux de la Vanne et de la Dhuis. Voici encore d’autres nombres concernant les débits des sources et les titres correspondants : DATES. Débits les plus ( 4 avril 1895 forts. 10 mai. 16 octobre . Débits les plus E US. 4 décembre 5 novembre . DÉBITS. litres 1 436 1 296 792 Fa) 192 He taie milligr. milligr. 6,67 66,6 9,51 80,2 11,98 » 11,84 » 10 1e LET D Lorsque nous avons comparé les titres nitrique et calcique des eaux de la Vanne et de la Dhuis aux débits des sources, nous n’avons trouvé entre eux aucune relation apparente; il n’en est plus ainsi pour les eaux de lPAvre; sans être mathématiquement en raison inverse, Jes titres et les débits varient en sens contraires. Le plus fort débit, observé le 4 avril 1895, correspond précisément au moindre titre, et l’on peut constater, d’une manière générale, que les titres se sont élevés pendant la période eslivale (mai-octobre), 110 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. qui a été celle des débits moyens ou faibles, et abaissés pendant la saison froide (novembre-avril), période de débits plus élevés. =. LES RS CO IIRRE ON BR EE D ET En EE ER LE RE ER RE A ER En 7 7 Fun PO LE EU EE SE RE ENS Le Se RP ER PT A POP ERIE PESER PE PPE EUR à + Er RSR ES AURONT ET ER SR ER NE A RP NE RP EE A RE AE D A AR EE A BE ES a RE A A RP NE RQ EE RUE milli F1G. 7. Les graphiques (fig. 7 et 8) construits en prenant les titres pour ordonnées et les temps pour abscisses sont très instructifs. On remarque dans le graphique des titres nitriques une grande ma auf mai jum juillet août apté ot nov“ déc janvier fanin mars auxil 36 4895 . a = de chaux par lire &æ gramme ) > © milli dépression, le # avril, qui pourrait bien être la conséquence du dégel survenu en mars, après les grands froids de février. Une dé- pression moindre, mais considérable encore, se voit en mars et avril 1896, à la suite des pluies abondantes qui ont fait déborder la L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 111 Seine, à Paris, vers le 15 mars; on en trouve encore une en août, après un mois de juillet qui a été le plus humide de l’année, à Ver- neuil (87 millimètres). On remarque encore une similitude frappante entre le graphique des Litres nitriques et celui des titres calciques, similitude à laquelle on n’a pas été préparé par les graphiques analogues fournis par la Vanne et la Dhuis, où l’on ne peut saisir aucun rapport entre les quantités correspondantes d'acide et de chaux. Non seulement l'allure générale des deux graphiques de PAvre est la même, mais encore leur concordance se manifeste souvent dans les moindres détails. Ainsi, l’eau de l’Avre diffère, sous plusieurs rapports essentiels, de celles de la Vanne et de la Dhuis : Les quantités d’acide nitrique et de chaux y sont en relation avec les débits des sources; elles diminuent quand les débits augmentent et augmentent quand les débits diminuent ; les sources de la Vanne et de la Dhuis sont exemptes de toute relation entre les titres et les débits ; Les variations des quantités d’acide nitrique et de chaux sont beaucoup plus importantes dans l’eau de l’'Avre que dans celles de la Vanne et de la Dhuis ; Les quantités d’acide et de chaux ne sont plus indépendantes les unes des autres dans l’eau de l’Avre, comme dans les eaux de la Vanne et de la Dhuis ; elles sont, au contraire, liées par une remar- quable concordance de leurs variations. Je ne trouve à ces différences si manifestes qu’une seule expli- cation : L'eau de l’Avre doit être un mélange, en proportions très varia- bles, de deux sortes d’eaux : L'une, de même genre que celles de la Vanne et de la Dhuis, serait fournie par les infiltrations des pluies et leurs déplacements successifs dans les terrains qui constituent son bassin; elle serait pure ; ses titres nitrique et calcique, peu variables, s’élèveraient au moins jusqu'aux plus hautes valeurs trouvées par mes analyses : ACIDE TIQUE Dee eee Et 12m67,8 CRAN LR OT EE. EE 112 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. L'autre eau contiendrait beaucoup moins d’acide et de chaux ; sa proportion dans le mélange augmenterait à la suite des pluies, di- minuerait à la suite des sécheresses. Les faits observés s'accordent très bien avec cette hypothèse : Il est bien évident, d’abord, que la baisse des titres sera d’autant plus rapide, d'autant plus marquée, que l’eau pauvre arrivera aux sources en moins de temps et en plus grande abondance ; inverse- ment, les titres se relèveront d'autant plus que la proportion de l’eau pauvre sera plus faible ; ils atteindront leurs valeurs les plus hautes si l'apport d’eau pauvre devient nul. Ainsi sont expliqués à la fois le rapport inverse entre les tilres et les débits, et la grande amplitude des varialions des titres. Quant à la concordance entre les allures des graphiques nitrique et calcique, elle résulte encore de l'hypothèse, mais, pour s’en bien rendre compte, 1l faut y regarder de plus près. Si l’eau riche et l’eau pauvre avaient des litres nitrique et calcique invariables, il est incontestable que, dans tous leurs mélanges, les deux titres s’élèveraient ou s’abaisseraient en même temps, en raison des proportions relatives des deux eaux; les va- riations seraient toujours de même sens, toujours concordantes. Mais les titres ne sont pàs absolument constants dans ces eaux ; 1ls y éprouvent des variations de l’ordre de celles que j'ai trouvées dans les eaux de la Vänne et de la Dhuis ; par conséquent, les variations des titres dans les mélanges ne dépendent pas seulement des pro- portions des deux eaux, mais encore des variations de titre qui leur sont particulières. Si la différence entre les proportions des deux eaux est suffisamment grande, son effet l'emporte sur celui des va- riations de titre particulières, et les variations dans les mélanges sont alors concordantes; c’est ce qui explique la similitude d’allure des deux graphiques: au cours d’une année, sous l'influence des pluies et des sécheresses, le rapport entre les volumes des deux eaux dans les mélanges varie entre des limites tellement écartées, que les variations de titres qui lui sont dues couvrent les variations propres à chaque eau. Mais, dans les détails des graphiques, la con- cordance peut fort bien faire défaut ; par exemple, entre deux prises d’eau successives, si la proportion des deux eaux est restée cons- tante, les variations propres à chaque eau régleront seules les varia- L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 113 Lions dans le mélange et celles-ci seront discordantes, quand celles- là seront de sens contraire. Mais on peut constater, par l’étude des deux graphiques, que ce cas a été assez rare; presque partout, on y voit les deux titres varier, d’une semaine à la suivante, dans le même sens. On voit que l'hypothèse d’après laquelle l’eau de l’Avre serait un mélange de deux sortes d’eaux, l’une comparable à celles de la Vanne ou de la Dhuis, l’autre particulièrement pauvre en nitrates et bi- carbonate calcaire, explique si bien les faits observés qu’il est diffi- cile de ne pas en faire la réalité. La question se pose donc, au point de vue de la salubrité, de savoir d’où vient l’eau pauvre. Serait-ce une eau de vraie source, filtrée el épurée, comme celle qui provien- drait de terrains dont la surface, occupée par des landes, des bois, serail peu propice à la nitrification et à la formation du bicarbonate de chaux ? En ce cas, les deux eaux, différant seulement par leurs titres nitrique et calcique, auraient des régimes semblables ; leurs débits s’élèveraient ou s’abaisseraient parallèlement, sous l'influence des mêmes conditions climatériques ; on ne verrait pas, dans leurs mélanges, les titres et les débits varier en sens inverses ; on ne ver- rait pas non plus, dans les graphiques nitrique et calcique, ces va- riations brusques et considérables qui accusent d’autres variations aussi brusques, aussi considérables, dans le rapport entre les débits des deux eaux. Il est beaucoup plus probable que l’eau pauvre est simplement de l’eau de ruissellement rapidement absorbée en certains lieux et ar- rivant aux sources peu de temps après son absorption. La relation inverse entre les débits et les titres, la grande étendue et la rapidité des variations de ces titres s’expliquent très bien par l'abondance subite des ruissellements pendant les dégels et les pluies prolon- gées; cette abondance, qui se produit surtout pendant la saison froide, explique encore la baisse générale des titres observée l’hiver, et leur relèvement pendant l’été. Je ne veux pas quitter ce sujet sans faire observer que ni les ex- périences bien connues de M. Feray ni mes analyses ne démontrent que les ruissellements souillent effectivement les eaux souterraines qui sont le principal aliment des sources captées. Il n’est pas dit que ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1897. — 1, 8 114 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ces ruissellements rencontrent des germes nocifs à la surface des terrains qu'ils lavent; s’ils en rencontrent, peut-être les abandon- nent-ils dans les terrains sableux placés sur leur chemin. Mais, quoi qu'il en soit, on reconnaîtra que les résultats de mes analyses sont moins salisfaisants pour lAvre que pour la Vanne et la Dhuis; et, s’il m'était permis d’avoir un avis sur le degré relatif de pureté des eaux conduites à Paris, je l’exprimerais en disant que Je continuera à boire l’eau de la Vanne et celle de la Dhuis, sans aucune inquié- tude, telles qu’elles sont distribuées, et que je voudrais maintenant ne boire de l’eau de l’Avre qu'après son passage dans un bon filtre. Je rapporterai, en terminant, une observation faite au cours de toutes ces études. J’ai déjà dit que J’emploie, pour un dosage d’acide nitrique, # litres d’eau réduits par l’action de la chaleur au volume de quelques centimètres cubes. Quand J'opère avec l’eau de l’Avre, je puis toujours poursuivre et achever la concentration dans un même ballon d'environ 2 litres, malgré la formation du précipité de carbonate de chaux ; ce précipité est toujours plus ou moins jaune, ainsi que l'extrait sec qui contient les nitrates. L’eau de la Dhuis est, le plus souvent, dans le même cas que l’eau de PAvre ; seulement le précipité et l’extrait sec sont de nuance plus claire. Mais, parfois, il devient impossible de vaporiser les 4 litres dans un même ballon, tant sont violents les soubresauts produits par le dépôt calcaire ; alors celui-ci est d’un blanc pur, et l'extrait est incolore. En pareil as, Je fais deux parts de mes 4 litres, et Je les fais bouillir dans deux ballons, jusqu’à formation intégrale du précipité calcaire ; je laisse reposer, puis je décante les liquides successivement dans un troi- sième ballon où je les vaporise. C’est toujours ainsi que je suis obligé d'opérer quand j'ai affaire à l’eau de la Vanne ; avec elle, j'ai tou- jours un précipité calcaire cristallin et un extrait incolore. Ces différences tiennent à la présence de la matière humique, qui se précipite avec le carbonate de chaux, en habille les grains, les empêche de se souder et les maintient à l’état de poudre fine res- tant en suspension dans le liquide bouillant, Jai constaté que 1 cen- limètre cube d’extrait de terreau contenant 08,4 de matière hu- mique, ajouté dans chaque litre d’eau de Vanne, permet d’en L'ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 119 vaporiser 4 litres dans un même ballon, sans danger de rupture. Ainsi, l’on peut dire que l’eau de Vanne ne contient pas trace sen- sible de matière humique ; l’eau de la Dhuis est parfois aussi belle, mais elle contient souvent quelque trace de cette matière. On en trouve toujours dans l’eau de l’Avre, plus que dans l’eau de Dhuis, mais néanmoins en très faible quantité. VI. — Résumé. 1. — Entrainements d’azole par les infillralions des plines. Dans la plupart des cas, l’azote ravi à la terre végétale par les in- filtrations des pluies se retrouve intégralement à l’état d'acide nitri- que dans les eaux souterraines provenant de ces infiltrations; les eaux souterraines se retrouvent mélangées dans la rivière qui les reçoit ; leur titre nitrique moyen est donc celui des eaux de la ri- vière, à la condition qu’il soit déterminé aux époques où il ne peut être altéré ni par la végétation aquatique n1 par les eaux de ruis- sellement. De telles époques se rencontrent presque toujours au cours d’un hiver. Étudiées à ce point de vue pendant les grands froids du mois de février 4895, la Seine, au-dessus de Montereau et à Paris, l'Yonne, la Marne, l'Oise, un peu au-dessus de leurs confluents, ont fourni des doses d'acide nitrique comprises entre 78,85 et 106,05 par litre. Dans chaque rivière la dose d’acide nitrique est restée à peu près la même, pendant que le débit des eaux variait dans le rapport de 9 à 1; on l’a retrouvée la même un an après, lorsque la végétation aquatique et les ruissellements ont été de nouveau suspendus par le froid. On doit inférer de là que le titre nitrique moyen des eaux souterraines d’un bassin de rivière est à peu près constant, au moins pendant le cours d’une année. Pour estimer la perte annuelle d’azote que subit le bassin d’une rivière, il faut connaître, outre le titre nitrique moyen, le volume des eaux souterraines débitées en un an. Ce volume ne peut être mesuré ni directement, ni par le débit de la rivière qui est augmenté, 116 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dans une proportion inconnue, par les ruissellements ; mais, à dé- faut de mesure des infiltrations à la sortie de terre, on peut les estimer à leur entrée, d’après la fraction de la hauteur annuelle de pluies réellement infiltrée : cette fraction étant comprise entre : et !: de 700 millimètres dans le bassin entier de la Seine, on trouve qu’en moyenne chaque hectare perd de 35,4 à 5%4°,6 d'azote ; et si l'on attribue la perte d'azote aux seules terres labourées, elle est alors comprise entre 9"#,1 et 84,5. Malgré cette augmentation, elle demeure beaucoup moindre qu’on ne le supposerait d’après ies déterminations publiées Jusqu'ici d’a- cide nitrique dans les eaux de drainage. Elle varie d’ailleurs en rai- son de la richesse des champs, ce qui en fait une sorte d'impôt pro- portionnel qui pèse peu sur les terres pauvres, et ne devient sensible que pour les terres riches en état de la supporter. IL — Régime nilrique dans les rivières. Lorsque les eaux souterraines sont devenues eaux de rivière, le litre nitrique, jusque-là à peu près constant, devient très variable, parce qu’il tombe sous la dépendance des condilions climatériques. C’est ce que démontre l’étude de ses variations, pendant treize mois consécutifs, dans les eaux de la haute Seine, de l’Yonne, de la Marne et de l'Oise. Les plus hauts titres s’observent l’hiver, en l’absence de végétalion et de ruissellements ; les plus bas, pendant l'été, lorsque l’élévation de la température et les faibles débits de l’étiage permet- tent à la végétation de produire son effet maximum. On sait que le climat est homogène dans tout le bassin de la Seine ; de là aussi la similitude des régimes de tous les cours d’eau ; de là aussi la similitude des régimes nilriques, mise en parfaite évi- dence par les graphiques construits avec les temps pour abscisses et, pour ordonnées, avec les titres nitriques trouvés du mois de février 1895 au même mois de 1896 dans les eaux des rivières précitées. Il est probable que les titres nitriques des eaux souterraines de bassins différents sont en rapport avec les richesses agricoles de ces bassins. D’après cela, les bassins de la haute Seine et de la Marne, à peu près de même richesse, le céderaient à celui de l'Yonne, qui L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 117 serait à son tour inférieur au bassin de l'Oise. Il sera intéressant d'observer les titres nitriques dans d’autres bassins moins impor- tants, aux époques où les eaux de leurs rivières représentent fidèle- ment leurs eaux souterraines. II. — Acide nitrique et chaux dans les eaux de Vanne et de Dhuis. Quelques dosages d’acide nitrique n'ayant donné des résultats à peu près constants dans les eaux de la Vanne et de la Dhuis et va- riables dans les eaux de l’Avre, l’idée m’est venue de faire intervenir dans l’étude des eaux potables la mesure des variations de leur constitution minérale, comme moyen de distinguer les sources vraies des sources fausses, qui ne sont que des réapparitions de rivières, el des sources suspectes dont les eaux peuvent être des mélanges d’eaux pures et d’eaux impures de rivières ou dé ruis- sellement. La constitution minérale, à peu près constante dans des sources vraies, serait variable dans les eaux des sources fausses ou suspectes. Pour vérifier cette hypothèse, on a d’abord étudié par l'analyse les eaux de la Vanne et de la Dhuis d’une part, celles de PAvre d'autre part, puis cherché des explications théoriques de ja cons- tance de composition des premières, de la variation de composition des secondes. Parmi les composés divers dont l’ensemble fait la constitution mi- nérale d’une eau de source, l'acide nitrique et la chaux sont les seuls dont la détermination intervienne utilement pour différencier les eaux de vraies sources de celles de rivières ou de ruissellement. On a donc répété de mois en mois, pendant plus d’une année, les dosages de ces deux composés dans les eaux de la Vanne ei de la Dhuis ; on les a répétés chaque semaine dans celles de l’Avre. En ce qui concerne les eaux de la Vanne et de la Dhuis, les faits suivants ressortent des analyses. Les titres nitrique et calcique n’ont varié pendant treize mois que de +, en plus ou en moins, de leurs valeurs moyennes. On n’aperçoit aucune relation entre les variations simultanées du titre nitrique dans les deux eaux; il n’y en a pas davantage entre > 118 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. les variations du titre calcique ; d’où la conséquence que ces varia- tions sont indépendantes des conditions climatériques et doivent ré- sulter d'accidents dé relief ou de constitution interne propres à chaque bassin de source. On ne trouve non plus aucune relation entre les variations du titre nitrique et celles du litre calcique dans une même eau. Enfin, on n’en trouve pas entre les Litres nitrique ou calcique et les débits des sources; ainsi, l'observation déjà faite pour les mé- langes d’eaux souterraines qui alimentaient, au mois de février 1895, la haute Seine, l'Yonne, la Marne, l'Oise, se reproduit pour des sources isolées. IV. — Constance de composilion minérale des grandes sources. Les résultats fournis par les eaux de la Vanne et de la Dhuis peu- pent être expliqués par des considérations théoriques fort simples. Les terrains servant de réservoirs aux sources, qu’ils soient sa- bleux ou composés de roches fissurées, sont imbibés d’air en même temps que d’eau; la présence de l’air sert à rompre la transmission de pressions qui tendraient à chasser les eaux dans certaines voies de moindre résistance ; soustraite à ces pressions, la masse liquide opère exclusivement sa descente par déplacement méthodique des infiltrations successives. De ce mode de progression résultent deux conséquences essentielles : d’abord l'obligation pour toutes les infil- trations de demeurer dans le terrain, au contact de loxygène et des agents épuraleurs, tout le temps nécessaire à leur purification; en- suite, l’accès simultané, dans une nappe continue ou discontinue, d'infiltrations remontant à des saisons et même à des années diffé- rentes ; de là, par le mélange de ces infiltrations, l'unification de la constitution minérale des eaux. Ces explications ne sont applicables ni aux petites sources dont les réservoirs trop peu importants ne peuvent remplir la fonction de régulateurs ; ni aux eaux artésiennes ou minérales, qui sont mues, au moins sur une partie de leur cours, par des pressions qui excluent le déplacement méthodique. Leur conclusion essentielle est que, pour expliquer lous les faits L’ACIDE NITRIQUE DANS LES EAUX DE RIVIÈRE ET DE SOURCE. 119 révélés par l’étude des eaux de la Vanne et de la Dhuis, il suffit d’ad- mettre que les sources de ces eaux sont de vraies sources d’eaux pures et potables. V. — L'acide nitrique et la chaux dans l’eau de l'Avre. Les déterminations de l’acide nitrique et de la chaux dans l’eau de l’Avre conduisent à une conclusion bien différente. La grande amplitude des variations des titres nitrique et calcique, la singulière concordance entre les variations de l’acide et de l’alcali, l’accroisse- ment des titres en temps de sécheresse et leur chute rapide après les dégels et les pluies autorisent, et même rendent extrêmement probable, l'hypothèse que certaines des sources captées débitent à la fois et dans un rapport très variable des eaux de deux sortes: les unes semblables à celles de la Vanne et de la Dhuis, provenant d’in- filtrations pluviales épurées par les mêmes procédés naturels; les autres fournies par des ruissellements absorbés par des terrains trop perméables et arrivant aux sources peu de temps après leur absorp- tion. Les sources de l’Avre dérivées à Paris ne seraient donc pas toutes, certainement, des sources vraies, ne débitant leurs eaux qu'après leur séjour prolongé et leur déplacement méthodique dans un sol épurateur; et mes recherches soulèveraient à nouveau la question de savoir si les eaux de l’Avre sont toujours vraiment po- tables, en la précisant en ces termes : les eaux de ruissellement qui envahissent certaines sources sont-elles suffisamment filtrées par les terrains qu’elles traversent, de manière à être toujours dépouillées de tout organisme malfaisant ? LES PRODUITS CHIMIQUES STÉRILISATION DES EXCRÉMENTS HUMAINS SONT-ILS NUISIBLES AUX PLANTES AGRICOLES ET AUX MICROBES BIENFAISANTS DU SOL? Par A. PETERMANN DIRECTEUR DE LA STATION AGRONOMIQUE DE I'ÉTAT A GKMBLOUX La stérilisation, désinfection des déjections des hommes et des animaux, a pour but de rendre celles-ci non seulement inodores, comme on le comprend souvent, mais aussi et surtout de tuer les microbes pathogènes et leurs germes qui y séjournent. Si, au point de vue de l'hygiène prophylactique de certaines maladies (fièvre typhoïde, choléra, charbon, rouget, etc.), on a réclamé depuis long- temps déjà et avec instance la généralisation de l’emploi de germi- cides, et si de nombreux travaux‘ ont fait connaître les substances remplissant ce rôle, le mieux et le plus économiquement possible, on ne rencontre néanmoins chez ceux qui utilisent les matières ex- crémenlielles à la fertilisation de la terre, que de l’indifférence et même de la résistance. Cependant, outre lintérêt hygiénique, la stérilisation des excré- ments présente actuellement un intérêt de premier ordre pour l’a- griculture, depuis les récentes recherches de MM. Bréal, Wagner et surtout celles de Stutzer. Ces savants expérimentateurs ont démon- 1. Nous signalons parmi les plus récents, l'importante étude du D' Vixcenr (Annales de l'Institut Pasteur, 1895, n° 1). STÉRILISATION DES EXCRÉMENTS HUMAINS. 121 tré, en effet, la présence dans les litières, les matières fécales et les fumiers, de microbes dénitrifiants (Bacterium denitrificans) qui, avec une énergie extraordinaire, détruisent les nitrates, la nourri- ture azotée par excellence, et occasionnent ainsi une perte sérieuse d’azot: à l’état élémentaire, à ajouter à celle connue depuis long- temps produite par la fermentation ammoniacale. L’embarras du choix entre les nombreux germicides prônés, leur prix pour la plupart élevé, mais avant tout la crainte que ces subs- tances vénéneuses ne nuisent aux plantes cultivées, sont la princi- pale cause de l’abstention du cultivateur. Il en a été de même lors- que, il y a de longues années, on a recommandé le chaulage des semences au sulfate de cuivre; il en est encore ainsi en ce qui con- cerne l'emploi de la bouillie bordelaise comme puissant moyen de lutte contre la maladie de la pomme de terre. : Ces craintes se comprennent, d’ailleurs. L’extrême sensibilité des végétaux à l'influence de certains sels métalliques et l’absence d’ex- périences directes prouvant l’innocuité des engrais liquides stérilisés chimiquement, justifient ces appréhensions. Mais, d’autre part, on perd de vue l'énorme différence qui existe entre l’épandage direct, par exemple, d’une dose de 200 à 250 kilogr. de sulfate de cuivre ou d’acide sulfurique sur un hectare de récoltes en végétation, et l'application, avant les semailles, de 20 à 25 mètres cubes d'engrais liquide traité par la même dose d’une substance germicide qui, dans ce cas, est en grande partie saturée ou décomposée par les sels ammoniacaux, etc., des matières excrémentielles. Il faut ajouter à cela qu’il est expérimentalement démontré que le pouvoir absorbant du sol arable est presque nul pour les sels métalliques dont il s’agit ici. Par conséquent, leur accumulation par l'emploi continu d'engrais stérilisés chimiquement, ce qui pourrait élever le taux de ces substances à une dose réellement toxique, n’est pas à craindre. Rappelons à ce sujet que nous avons constaté l'absence complète du cuivre dans les tubercules de pomme de terre poussés dans un champ qui, pendant plusieurs années, a été soumis au traitement de la bouillie bordelaise. Les expériences dont nous allons rendre compte ont été entre- prises à la suite de l’inscription à l’ordre du jour du congrès inter- 192 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. national d'agriculture, qui a siégé à Bruxelles en 1895, de la question de la stérilisation des engrais liquides au point de vue de leur em- ploi agricole. Envisagé sous le rapport bactériologique par M. van Ermengem , l’éminent professeur de l'Université de Gand, le problème avait déjà trouvé une solution partielle, mais les essais agronomiques n’étaient pas terminés ; ils devaient être répétés et complété durant une se- conde année. Nous ne pouvions fournir alors que quelques rensei- gnements préliminaires. Nous avons tenu compte aussi, pour les nouveaux essais de 1896, du vœu émis au congrès par M. Crispo, de comprendre parmi les germicides à essayer, l'acide phosphorique liquide ?, tel que le four- nit l’industrie, et de celui présenté par M. Bieler et par M. Graftiau, d'étudier l’action des engrais liquides stérilisés sur les microbes utiles de la terre arable. $ 4. — L’engrais liquide employé et sa stérilisation. L’engrais liquide qui a servi provenait d’une citerne de l'institut agricole de Gembloux, dans laquelle on recueille le mélange d’excré- ments liquides et solides et les déchets de dissection d'animaux. Après un brassage de tout le contenu, on a prélevé l'échantillon destiné à T'analyse, en même temps que la quantité nécessaire aux expériences. 1 litre de gadoue renferme : Matières organiques et volatiles *. . . . 198°,65 2 YEN AIBS 0 PR PORN 8 ,35 RésiT See PATANEDS FA RER LEP 285",00 * Renfermant : Azote-ammonacals A UE EME Ce 287,03 —= "Organique Pr. 0e LT 0 ,03 ** Renfermant : Acide phosphorique anhydre . . . . . . O5r, 48 Potassetanhydre. 21/0 ET e 0 ,68 1. Congrès inlernalional d'agriculture. Bruxelles, Weissenbruch, tome T, p. 574 ; tome Il, p. 42. 2. Nous rappelons ici que dès l'apparition sur le marché de l'acide phosphorique liquide comme produit industriel, nous avons recommandé son emploi à la fixation du carbonate d'ammoniaque des fumiers (Engrais et malières fertilisant le sol, etc. Bruxelles, 1874, p. 29). Ms: STÉRILISATION DES EXCRÉMENTS HUMAINS. 123 L'analyse montre qu’il s’agit d’un engrais liquide riche, dont la fermentation est très avancée. La stérilisation a été opérée dans de grandes cuvelles, en agissant chaque fois sur un hectolitre de matières. Au moment de l’emploi, des échantillons ont été prélevés, placés dans des flacons stérilisés el expédiés immédiatement à M. van Ermengem, qui a bien voulu nous prêter son précieux concours. Nous réunissons dans le tableau suivant l’ensemble des essais bactériologiques faits en 1895 et 1896; le nombre de colonies exprime la moyenne de deux essais faits avec chaque espèce de ger- micide. NOMBRE DE COLONIES par centimètre cube après 48 heures. Mélange A ——"" — à à à 1 p. 100. 11/2 p. 100, 2 p. 100. Engrais liquide non traité. . . . . . . » 7 308 000! » Acide sulfurique a 600-P ER 1 0 0 Acide phosphorique liquide du commerce ?, 480 0 0 Extrait aqueux d'un superphosphateÿ , . 800 0 0 DONC MOT EDS Mol er riche Lie rare 40 074 85 559 2 756 SHHAIC AE SCIVRO ET eat enr Le 5 0 0 Sulfate de zinc° , D (9 0 Chlorure deze MEN ET EC ER 51 0 0 Acidé:phénique re M ets nette ho 1 078 11 0 LVSOL PES 2e LR Ne en) ee ee ee » 4 » Après traitement par les germicides susmentionnés, la réaction de l’engrais liquide était nettement acide, sauf pour le lysol. L’acide sulfurique et l'acide phosphorique ont donné lieu à un dégagement abondant d’acide carbonique et d’acide sulfhydrique. 1. Environ 5 000 colonies de Bacterium coli. 2. Acide phosphorique du commerce de la fabrique d'Engis, 45 p. 100 d'acide phos- phorique anhydre. 3. Superphosphate à {1 p. 100 d'acide phosphorique anhydre. . Sulfate de fer cristallisé du commerce. . Sulfate de cuivre cristallisé du commerce. . Sulfate de zinc cristallisé du commerce. . Chlorure de zinc liquide du commerce, à 60 p. 100. . Acide phénique cristallisé du commerce. . Lysol à 6°5 Baumé, de réaction faiblement acide. © ON 1 D où À 124 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les essais bactériologiques prouvent d’abord, à nouveau, que le sulfate de fer, même à la dose élevée de 2 p. 100, est sans valeur germicide ; en décomposant le sulfhydrate d’ammonium, il n’agit que comme désodorisant. L’acide sulfurique, le sulfate de cuivre, le sulfate de zinc à la dose de 1 p. 100, ont laissé survivre quelques colonies. Mais, pratiquement parlant, les excréments ainsi traités doivent, d’après M. van Ermengem, être considérés comme stérili- sés. Ces trois substances se sont montrées bien supérieures à l'acide phénique. Le chlorure de zinc, si recommandable par son bon marché, n’a point produit de stérilisation complète en l’employant à 1 p. 100, mais porté à 1 1/2 p. 100, il a produit, comme toutes les autres substances, un eflet complet. $ 2. — Essais de germination. L'acte de la germination est évidemment celle de toutes les phases de la végétation pour laquelle il y a le plus à craindre lorsqu'on emploie des engrais liquides stérilisés par des agents chimiques. Nous avons par conséquent, en 1895 et 1896, à côté des essais de culture, multiplié les essais de germination avec des plantes de fa- milles diverses et à développement radiculaire différent (traçant ou pivotant). Ces essais ont élé entrepris dans des pots contenant 40 kilogr. de bonne terre sablo-argileuse de jardin. On a enterré à la spatule dans chacun d’eux 100 centimètres cubes des mêmes engrais li- quides que ceux employés aux autres essais : les produits chimiques stérilsateurs et leur concentration étaient les suivants : Engrais re . p. 100 d'acide sulfurique ; 2 p. 100 d’acide sulfurique ; p. 100 de sulfate de zinc ; 2 p. 100 de sulfate de cuivre; 2 d'acide phosphorique (liquide du com- ce); — à 1 1/2 p. 100 d'acide phosphorique (extrait de superphosphate). 1 — à : 1/2 — à 1 1/2 — CRU mer 126 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. On a planté dans les pots ainsi préparés 10 à 30 graines (suivant leur grosseur) des espèces botaniques suivantes et on a surveillé quotidiennement la levée : COMMENCEMENT de la levée, © TT LEVÉE COMPLÈTE. Dee Engrais mn: Engrais Hénin the ÉNOnNE es Maïs, ”Dettbraye MAN Peer Rens après 7 8 ii 11 jours Colza, lin, froment, avoine, trèfle. . après 6 6) 11 12 jours La durée de la levée a été par conséquent tout à fait normale et aucune aclion nuisible ou seulement retardatrice n’a été constatée. Les plantes issues des graines employées ont du reste continué à se développer et à parcourir normalement les diverses phases de la végélation. $ 3. — Essais de culture de 1895. Maïs dent-de-cheval. — Application des engrais : 20 avril; enter- rés au râteau: 10 mai; plantation de deux graines en poquets à l’écartement de 36/10 centimètres ; commencement de la levée dans toutes les parcelles : 22 mai; levée générale : 26 mai; binage à la houe: 28 mai ; enlèvement d’un plant par poquet : 30 mai. À partir du mois d’août la récolte présente un aspect magnifique ; les tiges, d’une végétation très vigoureuse, ont une hauteur moyenne de 3 mètres, avec un maximum atteint par quelques pieds de 3,55 (voir le cliché photographique, page 125). Dans la parcelle sans en- grais plus faible, 11 n°v a pas de différence appréciable. Récolte : 23 octobre. Bellerave fourragère allemande. — Application des engrais : 20 avril ; bêchage, travail au râteau et au rouleau : 24 et 25 avril; plantation à l’écartement de 45/25 centimètres: 26 avril ; commen- cement de la levée : 11 mai; premier binage : 24 mai ; second binage et mise en place définitive : 6 juin. Rien de particulier sur l’état de la végétation qui continue normalement dans toutes les parcelles. Récolte : 29 septembre. STÉRILISATION DES EXCRÉMENTS HUMAINS. 127 Poids de la récolte, parcelles de 12,5 mètres carrés. BET- MAÏS VERT TERAVES épis racines et tiges en kilogr. en kilogr. DOBTÉMOINAS ANS ENETAIS ee ce de 84 90 29 Engrais liquide. . . . . E 114 105 3° Engrais liquide à 1 p. 100 L sulfate de fer state. 109 99 4° Engrais liquide à 1 p. 100 de sultate de cuivre cris- ÉAISÉ RS Mae 110 104 5° Engrais liquide à 1 p. 100 r suriée Fe zinc | eristallisé. 107 102 6° Engrais liquide à 1 p. 100 de chlorure de zine (solu- ME CUS LULU PRES RER 108 96 7° Engrais liquide à { p. 100 d' “ie D éniques cristallisé. 112 103 8° Engrais liquide à { p. 100 de lysol (liquide à 6°5 B.). 115 106 Les chiffres précédents prouvent que l’action fertilisante très mar- quée de l’engrais liquide (augmentation à l’hectare de 24000 kilogr. de betteraves et 20000 kilogr. de maïs) n'a pas été entravée par l’addition des produits chimiques dans la proportion de 1 p. 100. Les différences, en moins ou en plus, du rendement de la parcelle à l’engrais non traité, tombent entre les limites (5 p. 100) de l'erreur inévitable dans toute expérimentation en plein air et de la pesée de récoltes telles que la betterave et le maïs vert. $ 4. — Essais de culture de 1896. Mais dent-de-cheval. — Application des engrais : 27 avril ; plan- tation : 29 avril à l’écartement de 38,5/25 centimètres ; commence- ment de la levée dans toutes les parcelles: 21 mai ; levée générale : 93 mai; binage : 6 juin ; démariage : 49 juin; buttage : 19 juin. La végélation est dans tous les carrés d’essai d’une belle vigueur ; on place des fils de fer en travers des lignes afin de supporter les tiges contre le vent ; hauteur moyenne : 2",80. Récolte : 1° octobre. Pomme de terre, variété Schwan. — Application des engrais : 27 avril; plantation de tubercules d’un poids moyen de 62 gr. à l'é- cartement de 62,5/30 centimètres: 41 mai; commencement de la 128 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. levée: 26 mai; levée générale dans toutes les parcelles: 10 juin ; buttage : 15 juin; application de la bouillie bordelaise : les 11 et 30 juillet. Récolte : 1°* octobre. Poids de la récolte, parcelles de 25 mètres carrés. POMMES DE TERRE. MAÏS VERT A "A —— — 1° Engrais liquide brut. Ra 0 43,5 à 20.4 148,2 2° Engrais liquide avec 1 1/2 p. 100 d'a- cide phosphorique anhydre (liquide du COMMENCE) MES PATENT RTRe LA; ADD 150,5 3° Engrais liquide brut avec { 1/2 p. 100 d'acide phosphorique anhydre (à l'état de superphosphate) . . . . . . : 46,2 à 20.9 146,9 Le remplacement du sulfate de cuivre, du sulfate de zinc, de l’acide sulfurique, etc., par l'acide phosphorique, employé soit comme acide phosphorique liquide du commerce, soit comme su- perphosphate de chaux, a produit à la dose de 1.5 p. 100 une stéri- lisation complète de l’engrais liquide et n’a pas agi défavorablement ni sur la végétation, ni sur le poids de la récolte en maïs et en pom- mes de terre, ni sur la richesse en fécule de ces dernières. $ 5. — Les engrais stérilisés et les microbes bienfaisants du sol. En comparant la quantité d’azote nitrique fournie par les eaux de drainage d’un volume donné de terre, fumé à l'engrais liquide brut, avec celle — toutes autres conditions égales — produite par la terre fumée à l’engrais liquide stérilisé, on doit constater si les ger- micides employés sont nuisibles ou non àla nitrification. Les cases de végétation ® dont dispose la Station agronomique se prêtent parfaitement à cette expérience; elles permettent de la 1. Nous renvoyons pour la description détaillée de ces cases, à notre ouvrage : Recherches de chimie et de physiologie appliquées à l’agriculture, 1, 1, 2° édit., p. 46. 2% STÉRILISATION DES EXCRÉMENTS HUMAINS. 129 poursuivre pendant une période assez longue et d’opérer sur un fort poids de terre. Ces cases se trouvaient au printemps de 1896 dans un état de comparabilité parfaite ; elles contenaient exactement un mêtre cube de terre sablo-argileuse, chargée en 1895 après un mélange intime; elle portait du gazon qui a été retourné en février 1896. La nitrifi- calion y était assez active malgré la basse température du mois d'avril, car les eaux de drainage renfermaient avant le commence- ment de l’expérience, à différentes époques de prélèvement des échantillons, de 2%8°,4 à 85,4 d'azote nitrique par litre. Les engrais liquides ont été répandus le 27 mars 1896, à la dose de 2,5 au mètre carré, répartis et enterrés superficiellement au râteau ; les bouteilles à eau de drainage étaient vides. À partir de ce moment jusqu’au 12 octobre (199 jours), les eaux furent recueillies et MM. Graftiau et Hendrick y ont opéré le dosage de l’azote nitrique, chaque fois que le volume de l’eau recueillie était d’un litre au moins. Notre étude comprend en tout 104 déter- minations d’azote, faites en double *. Pendant toute la durée de l’expérience, la terre est restée nue, sans végétation aucune. Avec l’élévation de la température dans le courant des mois de mai et de juin, le titre en azote des eaux de drainage montait rapi- dement, atteignant quelquefois, pendant l’été et dans les cases ayant reçu de l’engrais liquide, le taux élevé de 70 milligr. par litre. Le volume des eaux de drainage produites pendant la période expérimentale était, en moyenne pour toutes les cases de végéta- tion, de 79 litres par mêtre cube de terre, pour une hauteur de pluie de 291 millimètres. {. L'analyse a été opérée d’après la méthode Schlæsing-Grandeau, contrôlée par celle de Warington-Fleck. (Voir : Recherches de Chimie, ete., t. Il, p. 180 et 243.) Il a été constaté à nouveau que la réduction des nitrates par le couple zinc-cuivre n'est complète que dans des liquides très étendus, quelques milligrammes d'azote par litre. La méthode de Grandval et Lajoux reposant sur la formation d’acide picrique donne également d'excellents résultats lorsqu'on a à doser de faibles quantités d'azote, Dans ces conditions, elle est de toutes les méthodes exactes, la plus rapide ; nous publierons sous peu une méthode complète sur ce procédé. ANN. SCIENCE AGRON. — 9° SÉRIE. — 1897, — Ir. 9 130 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Voici, par case soumise à un régime différent, la quantité d’azote nitrique recueillie du 27 mars au 12 octobre 1896 : NUMÉROS OR ER AZOTE NITRIQUE des cases. en grammes. il RICE UM Se ASE As ER LR Mrs Ce ENS # 2 1 Le 2 Engrais liquide 1 SEE 3 209 3 Engrais liquide brut, à 1 p. 100 d Aoû Se: 2995 4 Engrais Hquide brut, à 1 ie p. 100 de sulfate de DIN CHENE DPI SES VE AE 3 048 5 Engrais liquide br 2e à Se 12 P. 100 d'acide phos- phorique (liquide du commerce) . DONC. 2 992 6 Engrais liquide brut, à 1 1/2 p. 100 d D phos- phorique (extrait aqueux d'un superphosphate) . 3192 Si, pour rendre plus frappante la comparaison, nous exprimons par 100 la quantité d'azote produite par 1 mètre cube de terre fumée par 2,5 d'engrais liquide brut, nous obtenons pour les cases différemment traitées, respectivement : 93.3 95.0 9322 99.5 Ces chiffres, vu les conditions d’une expérience en grand, sont certainement assez rapprochés pour devoir conclure que le traite- ment de l’engrais liquide par des germicides n’a pas eu d'influence déprimante sur la nitrification de l'azote du sol ni de celui de l’en- grais. Il est démontré depuis quelques années par divers expérimenta- teurs que l’absorption de l'azote élémentaire par les légumineuses s'opère sous l'influence d’un microbe vivant en symbiose dans les nodosités que portent les racines des plantes de cette grande fa- mille. La stérilisation complète du milieu nutritif empêche ce phé- nomèêne de se produire. Par conséquent, si les matières excrémen- tielles désinfectées dans un but hygiénique renfermaient encore, après les réactions qui s’y opèrent, un. excès de germicides suffisant pour tuer les microbes utiles du sol, l’emploi agricole de ces ma- tières serait à rejeter : elles empêcheraient la formation des nodo- sités et aucun gain d'azote ne serait réalisé. Après avoir démontré plus haut que l’engrais liquide stérilisé n'est pas nuisible à la nitrification, nous devions rechercher encore STÉRILISATION DES EXCRÉMENTS HUMAINS. 131 comment il se comporte envers la particularité physiologique qui favorise la vie des légumineuses. Six pots ont été remplis chacun de 10 kilogr. de terre d’une tré- fière, terre que nous savions suffisamment pourvue du microbe spécial par suite d'expériences antérieures ‘ auxquelles elle nous avait servi. La terre a été arrosée avec 50 centimètres cubes d’en- grais liquide stérilisé par les mêmes produits que ceux employés dans les cases de végétation, savoir : , LA NUMEROS des pots. RER Î Rien. 7 Engrais liquide brut, 3 Engrais liquide brut + 1 1/2 p. 100 d'acide sulfurique. 4 Engrais liquide brut + 1 1/2 p. 100 de sulfate de zinc. 6] Engrais liquide brut + 1 1/2 p. 100 d'acide phosphorique (li- quide du commerce). 6 Engrais liquide brut + {1 1/2 p. 100 d'acide phosphorique (ex- trait aqueux d'un superphosphate). Les lupins ont été plantés le 2 juin 1896; la levée s’est opérée le 10 juin. Assez chétive d’abord, la végétation s’est peu à peu mon- trée d’une belle venue ; les plantes, après une belle floraison, ont donné des gousses. Récoltées le 10 octobre et débarrassées de la terre par un lavage à eau courante, toutes les plantes de chaque pot étaient richement garnies de nodosités radicales. Nous publions à titre de preuve (voir page 133) la photographie de plantes pro- duites par le pot n° 4, au sulfate de zinc. Conclusions. Un mélange d'excréments humains liquides et solides, trailé par les germicides suivants : acide sulfurique, acide phosphorique, ex- trait aqueux de superphosphate, sulfate de cuivre, sulfate de zinc, chlorure de zinc et lysol, à la dose de 1 à 1 1[2 p. 100 suivant la 1. Recherches de Chimie et de Physiologie appliquées à l'agriculture, t. WE, p. 212 et 252. Contribution à la question de l'azote. 132 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. substance, n'a plus donné lieu à aucun développement de colonies de microbes. Employée dans la proportion de 20 et 25 mètres cubes à l'hectare, la vidange slérilisée n'a pas entravé, ni même relardé la germinu- lion du lin, du colza, de l'avoine, du froment, du mais, de La bette- rave el du trèfle ; elle n'a exercé aucun effet nuisible sur la quantité el la qualilé de la récolte de la pomme de terre, du mais et de lu bellerave fourragére. La vidange slérilisée n'a pas arrélé l'action du microbe nitrifiant, ni du microbe vivant en symbiose dans les nodosilés du Lupin. La quantilé d'azole nilrique produite dans l'espace de plusieurs mois par un mèlre cube de terre fertilisée par la vidange slérilisée, est égale à celle oblenue dans les mêmes conditions par la terre ayant recu la vidunge brute. Les lupins cultivés dans des pots avec des eæcréments slérilisés élaient, les uns comme les autres, richement garnis de tubercules radicaux. En appliquant le résultat de notre étude à la pratique, nous de- vons poser la question : lequel, parmi les agents germicides, con- vient-il de recommander à l’emploi usuel, en ayant en vue l’utilisa- lion des engrais liquides comme matière fertilisante ? Ou autrement dit, lequel, parmi les agents reconnus actifs, est le plus commode et le moins cher, sans présenter du danger pour les personnes qui le manipulent et sans nuire aux qualités fertilisantes des matières excrémentielles ? Ces réserves éliminent tout d'abord la chaux, malgré son action parasiticide énergique et bien connue, son emploi entraînant fatale- ment des pertes d’ammoniaque. Le chlorure de chaux et le chlorure de mercure, très actifs dans d’autres conditions, ne conviennent pas à la stérilisation de matières renfermant une proportion élevée de sels ammoniacaux. Le prix de lacide phénique et du lysol, ce der- er d’une grande efficacité, restreint leur emploi aux hôpitaux. Il an est de même de l'acide sulfurique, pourtant remarquable comme effet, sa manipulation présentant un réel danger. Il ne doit être mis que dans les mains de personnes habituées à son maniement, telles que les gardes-malades d’hôpitaux ou le personnel spécial de désin- 134 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. fecteurs, qui fonctionne en cas d’épidémie et sur l'intervention des autorités. Nous n’ignorons pas que l’industrie, dans le but de rendre l’em- ploi de l'acide sulfurique plus commode et sans danger, prépare maintenant des poudres‘, poussière de tourbe, charbon, sulfate de chaux, auxquels on a fait absorber des acides minéraux (sulfarique et phosphorique) et que le superphosphate lui-même n’est pas autre chose que du plâtre imprégné d'acide phosphorique ; mais ces pré- parations, appropriées au traitement de mélanges d’excréments d'animaux ct de lilières, recommandables aussi pour la stérilisation des selles dans les charnbres des malades, ne conviennent pas à la stérilisation d’une quantité un peu importante de déjections hu- maines recueillies dans une citerne. Pour réaliser celle-ci, c’est-à-dire pour porter le taux du principe actif à 1 ou 1 1/2 p. 100 de l’engrais liquide, on doit lui incorporer une proportion si élevée de matières solides, le véhicule du germi- cide, que le mélange intime de toute la masse est fort difficile et qu'il devient impossible de vider la fosse à l’aide d’une pompe dont la tuyauterie et le corps même seraient vite obstrués. Le plâtre acide et le superphosphate produisent une véritable précipitation, une coagulation des matières fécales en suspension. En nous basant sur nos essais et sur les considérations qui précè- dent, il nous reste pour la stérilisation en grand des excréments humains, que nous avons seule en vue dans ce travail: le sulfate de cuivre, le sulfale de zinc, le chlorure de zinc et l'acide phospho- rique. Au cours actuel, le sulfate de zinc est d’un prix plus réduit que le sulfate de cuivre. Le chlorure de zinc est le moins cher des trois, mais, comme il est moins efficace que les sulfates, il en faut une quantité plus forte, ce qui annule cet avantage. Mais nulle de ces substances ne renfermant un principe nutritif essentiel des végétaux, il est recommandé en fin de compte d’opérer 1. Münrz et Ginanp, Les Engrais, t, I. VoceL, Die städlischen Abfallstoffe. Berlin, 1896. Lucke, Résumé des travaux de Slutzer. Malle, 1896. STÉRILISATION DES EXCRÉMENTS HUMAINS. 135 la stérilisation du contenu des citernes par l’acide phosphorique li- quide que le commerce fournit actuellement à une concentration de 45 à 50 p. 100, et dont le prix d'achat envisagé comme stérili- sant est fortement réduit par la valeur intrinsèque qu'il représente comme principe fertilisant. Il présente encore cet avantage de pouvoir être employé tel qu'il arrive, tandis que les sulfates de cuivre et de zinc doivent être dis- sous auparavant. En effet, on ne peut juger ces sels directement dans la citerne, leur dissolution et leur mélange avec les matières fécales se faisant fort lentement dans ces conditions. La stérilisation d’un mélange d’excréments humains solides et liquides est en général complète lorsque le taux des trois germi- cides que nous recommandons atteint 1 à 1 1/2 p. 100. La compo- sition du contenu des citernes étant naturellement fort variable, son état de fluidité et la nature des microbes qui y vivent jouant un grand rôle dans l'exécution de la stérilisation, et enfin le cubage des matières à traiter et le pesage des produits chiniques ne se faisant pas facilement dans la pratique, il est à conseiller de ne pas opérer quantilativement mais qualilativement. C’est-à-dire, sans se préoc- cuper du pourcentage à atteindre, de verser l’acide phosphorique liquide ou les dissolutions des sulfates peu à peu dans la fosse, de brasser la masse et d’attendre la fin du dégagement d’acide carbo- nique, ce ‘qui se constate par l’abaissement de la mousse. On ajoute ensuite une nouvelle quantité de désinfectant, jusqu’au moment où un papier bleu de tournesol plongé dans l’engrais liquide prend une couleur rouge. Si l’on veut agir consciencieusement, on essaie à nouveau au papier de tournesol après une heure et après un nou- veau brassage. Si la réaction s’est maintenue acide, l’opéralion à réussi et l’on peut considérer l’engrais comme étant stérilisé, prati- quement parlant. MÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS SUR LES TERRES DE L'INFRA-CRÉTACÉ DE LA PUISAYE Par M. POTIER PROFESSEUR SPÉCIAL D’AGRICULTURE A SAINT-SAUVEUR-EN-PUISAYE (YONNE) — 20 PQ O ©— I L'usage des engrais phosphatés commençant à se répandre dans la Puisaye, dont les sols sont pauvres en calcaire et en acide phos- phorique, il m'a paru utile de déterminer par des essais culturaux sous quelles formes ces engrais doivent être donnés aux terres de celte région et à chacune des plantes qui en composent l’assole- ment. Les recherches de ce genre ont un intérêt direct bien évident. Ce sont elles qui nous fournissent les moyens de résoudre celte ques- tion très importante, à savoir : quelles sont les fumures phosphalées économiquement les plus avantageuses dans tous les cas qui peuvent se présenter ? Sans doute, la science agronomique nous donne actuellement des règles générales très précieuses ; mais il est indéniable qu’elles ont besoin d’être vérifiées, modifiées même, en un mot, elles doivent ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 137 être mises au point suivant les lieux et les circonstances en s'appuyant sur les résultats obtenus dans les expériences directes en plein champ. L’analyse complète ou partielle du sol rend, il est vrai, de grands services dans le choix des engrais ; la détermination du cal- caire notamment (aujourd’hui une opération à la portée de tout le monde) nous permet de préjuger assez exactement de la nature des engrais phosphatés à appliquer à la plupart de nos sols. Néanmoins il faut reconnaître que les données du laboratoire sont parfois insuf- fisantes et le dernier mot appartient sans conteste aux champs d’ex- périences. En les multipliant sur les sols types de toutes les forma- tions géologiques d’une région, on en retire des indications précises d’une grande portée pratique et susceptibles de quelques générali- sations très profitables aux praliciens. Ce sont aussi, il faut l’ajouter, les résultats acquis dans les champs d'expériences qui permettent de créer en Loute confiance les champs de démonstration. C’est ainsi des résultats recueillis dans les champs d’expériences que j'ai pu établir dans la Puisaye que je me propose de donner ici une courte analyse. I ORIGINE GÉOLOGIQUE DES SOLS DE LA PUISAYE Nos expériences se rapportent aux sols issus du crétacé inférieur du S.-0. du département de l’Yonne. Cette formation est composée d’une série de couches souvent fort épaisses, alternativement argi- leuses, sableuses, rocheuses ou ferrugineuses. Ces assises forment sur la rive gauche de l'Yonne une bande de terrains adossés d’une part, au N.-E., au pied de la terrasse portlan- dienne de l’Auxerrois et, s’étendant parallèlement vers le N.-0. sur une largeur de 10 à 12 kilomètres, elles viennent butter contre les plateaux tertiaires du Gâtinais. Cette région a un facies particulier. C’est une suite de vallons où la fraicheur à peu près constante du sol ou du sous-sol entretient une végétation forestière luxuriante, qui encadre agréablement les cultures et dont l’ensemble contraste 138 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. si bien avec les coteaux dominants, pierreux, secs et découverts, de l’oolithe supérieure. Il y a entre ces deux formations (oolithe supérieure et crétacé m- férieur) une brusque transition. L'une, calcaire, très perméable, propre à la vigne, au noyer, à la luzerne, moyennement riche en potasse et en acide phosphorique, est totalement livrée à la culture. L'autre, celle qui nous occupe, aux vallons frais et souvent hu- mides aux bords des étangs qu’on y rencontre encore, est formée de sols d’une fertilité initiale bien inférieure aux précédents. Pau- vres en calcaire et en acide phosphorique, ces terres se couvrent spontanément de houx, fougères, genêts, ajoncs, digitale, d’agros- ts, de petite oseille, de miboras et de droues. La marne empruntée aux couches supérieures du portlandien et à la craie inférieure de la vallée du Loing a transformé la culture de cette région. Le seigle a fait place au blé; la culture des plantes sarclées a ré- duit de beaucoup la sole de jachère; les prairies artificielles et tem- poraires, trèfle et ray-grass, ont donné jusqu’à ces derniers temps des fourrages abondants et d'assez bonne qualité. Les effets du mar- nage qui remontent souvent à plus de 40 ans s’effacent aujourd’hui et au dire des cultivateurs les marnages nouveaux sont sans efficacité. [n’y a donc rien d'étonnant à ce que les engrais phosphatés fas- sent merveille sur ces sols frais de la Puisaye dont la richesse très médiocre ne peut être entretenue que par l'apport poursuivi de ma- tières fertilisantes empruntées au dehors. Comme j'espère le montrer dans l'exposé qui va suivre, les en- grais phosphatés produisent dans ce pays des améliorations immé- diates et durables que je vais essayer de mettre en relief. Les expériences ont été entreprises sur les sols suivants en adop- tant la désignation de la Carte géologique déluillée du service des mines. Ge sont par ordre d'ancienneté : L’assise argileuse du néocomien C,. ; les assises sableuses ou si- lico-argileuses ferrugineuses, des argiles bariolées C,, des argiles à plicatules C' des sables et grès ferrugineux C', puis les argiles de Myennes C*, enfin les sables de la Puisaye C? (dont l'épaisseur est de plus de 80 mètres) qui forment à eux seuls les trois quarts des terres cultivées. ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 139 Sables ferrugineux de la Puisaye C', de la carte géologique détaillée. Thureau de Saint-Sauveur. Le champ, situé à 315 mètres d’altitude, domine la vallée du Loing ; il est siliceux-gréseux-ferrugineux. Négligé depuis plusieurs années, il est considéré comme pauvre. En jachère nue en 1894, il est emblavé le 46 octobre avec du blé bleu et du blé au budeau, après avoir reçu environ 25 000 kilogr. de fumier à l’hectare. C’est cette terre superficielle, boueuse en hiver, sèche en été, que nous avons choisie comme type des terrains de celte catégorie si- tués sur les sommités. Les parcelles d’un are traitées aux engrais minéraux étaient for- mées de planches de 3 mètres de large; toutes étaient séparées de leur voisine par un témoin de même largeur. Gette multiplication des parcelles témoins permet de mettre très bien en relief l’action des engrais et surtout elle donne le moyen de reconnaitre si, par suite du défaut d’homogénéité du sol, il n’y a pas lieu de rectifier les résultats obtenus sur l’une ou l’autre des parties du champ. L’expé- rience m'a montré que dans notre région cette multiplicité des té- moins est indispensable ; souvent le rendement de ces lots témoins varie dans d’assez grandes limites d’un bord à l’autre d’une pièce. On ne peut donc considérer comme imputable à l’engrais étudié que l'excédent de la parcelle sur ses 2 voisines témoins. Si on se contente de laisser un lot témoin au hasard, on s’expose à conclure prématurément et à commettre de bonne foi de très graves erreurs. Le but de notre expérience était : 4° De mettre en comparaison les engrais phosphatés que nous avions reconnus depuis plusieurs années comme les seuls recom- mandables à cause de leur efficacité, ce sont le superphosphate de chaux, les scories, le phosphate précipité. Ces engrais mis séparément ou associés à une fumure minérale azotée d'automne (sulfate d’ammoniaque) ou de printemps (nitrate 140 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. de soude) ont été ainsi placés dans toutes les conditions favorables à leur comparaison. 2° Les engrais potassiques seuls ou associés aux phosphates ont été employés pour montrer aux cultivateurs l'erreur coûteuse qu’ils commettent en achetant des engrais complets tout préparés par le commerce, enfin ces engrais ont élé employés également dans le but de reconnaître si dans la suite ils ont quelque influence sur le déve- loppement des légumineuses composant la prairie temporaire : trèfle, ray-grass, qui succède à l’avoine. Les résultats obtenus ont été des plus nets pour ceux qui ont suivi cette expérience pendant la durée de la végétation. Les engrais phosphatés, les scories à l’égal du superphoshate se sont révélés dès le début du tallage automnal par la vigueur excep- uonnelle des parcelles traitées, par le départ précoce de la végéta- tion à la sortie de l’hiver, la grande régularité des chaumes et des épis; enfin une maturité précoce de huit jours permettait à ces par- celles d'échapper à l’échaudage. Tandis que les grains de parcelles témoins élaient longs, glacés, les autres étaient renflés jaunes et à cassure fraiche, farineuse. C’est là un effet opposé à celui des en- grais azolés et qui a son importance. A la moisson, les gerbes ont été pesées en complet état de dessic- cation, les pesées de la paille et du grain faiteslors du battage, qui a suivi quelques jours après, nous ont donné les résultats suivants ra- menés à l’hectare et consignés dans le tableau I. Ces chiffres méritent de retenir attention. En comparant les ren- dements et en mettant en regard la dépense occasionnée par la fu- mure minérale, il ressort de ces chiffres : 1" Qu’à l’aide des phosphates le rendement passe de : 2 400 à 5 600 pour la paille, soit un écart de 3 200 kilogr. 1450 à 3 150 pour le grain, — de 1700 — Cet écart considérable, prévu par les estimations faites avant la ré- colle, serait certainement atténué sur une semblable terre soumise à une culture mieux entendue : nous en avons la preuve dans d’autres expériences faites sur le même sol. Mais en admettant qu’on fasse subir une réduction à cet excédent de rendement afin de se placer ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS, 141 TABLEAU I. — Expériences sur engrais complémentaires appliqués au blé d'automne (Noé). Sol silicéo-ferrugineux C'. Année 1894. (Thureau de Saint-Sauveur.) DÉSIGNATION DES PARCELLES ET DES FUMURES. Témoin fumier seul . ee 1 Scories de Longwy 16/18 de POS he 1 000 kilogr . Nes ol 2? Même fumure additionnée de KCI, 200 kilogr. : 3 Même fumure ne de KOSO, 200 kilogr. . . 4 Scories 16/18 +- 200 og nitrate ne soude en mars 1895. 300 kilogr.. 400 600 800 5 Série 1600 + 200 kilogr. 600 + 200 kilogr. KOSO3 . KCI . super-/600 +200 kilogr. sulfate d'am- phos- aux moniaque mis à l'automne phate FOIE Fa Dos Rte 13/15./600 + 200 kilogr. nitrate 7 soude printemps 1895 800 + KOSO* 200 + 200 ki- logr. sulfate d'ammoniaque automne . — 14 Phosphate précipité, 250 kilogr. . . 15 Chlorure de potassium seul, 200 kilogr. 16 Sulfate de potasse seul, 200 kilogr. . 17 Sulfate de potasse 200 + 200 kilogr. nitrate de soude . 18 Nitrate de soude, 200 kilogr . Témoin fumier seul . PRIX des engrais mi- néraux complé- men- taires. fr. » REN- DEMENT en paille. kilogr. 2 400 o 600 o 600 o 600 7 000 4 350 4 400 5 400 > 450 5 450 o 450 4 900 5 150 2 400 2 400 4 050 3 690 2 470 fumure com- plémen- taire, nn kilogr. » Ex- CÉLENT dû à la fumure com- plémen- taire. REN- DEMENT en grain. kilogr. 1 450 kilogr., 3 190 2 900 2 900 1 450 1 450 1 980 1 780 1 550 142 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dans les conditions les meilleures de la bonne culture de ce pays, il n’en reste pas moins acquis que les engrais phosphalés sont le com- plément indispensable du fumier dans la culture du blé. Scories el superphosphates. — Les superphosphates sont les seuls engrais phosphatés employés sous le nom de guano par nos cultiva- teurs. La comparaison entre le rendement et les prix de ces deux fumures montre qu’il y à ici pour une dépense égale équivalence d'action. C’est à retenir, car je montrerai plus loin l'influence pro- longée de ces catégories d'engrais dans l’assolement, c’est ce qui nous permettra de conclure sans réserve. Enfin, en comparant les parcelles 5, 6, 7, 8 à doses variables de superphosphates le calcul montre que, abstraction faite de la paille, on obtient, Avec 22 fr. 50 c. par hectare un excédent de 950 kilogr. de grains. — 30 fr. ee — 1 030 — — A45fr. = — 1 600 — — 60fr. = — 1 625 _— Jusqu'à 600 kilogr. les famures de superphosphates peuvent être avantageusement employées; au delà, il y a perte; en deçà, suivant les ressources dont ils disposent, les cultivateurs pourront adopter les doses modérées qui seront toujours rémunératrices dans ces sols pauvres. L'examen des rendements des parcelles 2, 3, 9, 10, 15, 16 mon- trent linutilité des engrais potassiques. Quant aux engrais azotés, les parcelles 11 et 13 révèlent l’inefli- cacité du sulfate d’ammoniaque. Le nitrate de soude répandu sim- plement à la surface n’a pas été enterré à la herse comme le font avec raison les cultivateurs soigneux, aussi n’a-t-il donné qu’un excédent de rendement insuffisant. Il n’a pas dépendu de moi d'éviter la cou- pable incurie qui rend toujours ici ces engrais peu rémunérateurs ; le hersage doit ne jamais être négligé pour enterrer cet engrais dont le prix justifie assez les moyens propres à en assurer le maximum d'action. Enfin la parcelle 13 nous montre que, malgré les engrais incor- ÉTUDE SUR L'EMPLOI LES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 143 porés à haute dose à un sol déterminé, on ne peut espérer d’un seul coup augmenter proporlionnellement sa puissance produc- live. Aux Michauts (Moutiers). Une expérience établie sur le même plan à 3 kilomètres de la première sur un sol de même origine et de constitution identique nous a donné également en 1895 des résultats qui confirment en tous points ceux que nous venons d'exposer. Je n’y insiste donc pas. Argiles de Myennes C*, de la carte géologique détaillée. Blé 189%. Les sols de cette nature sont situés autour des premiers à la base des vallons; ils sont généralement silico-argileux, froids, un peu pierreux (rognons gréseux,), mais le sous-sol formé d’une argile jaune ou noirâtre, schisteuse, est absolument imperméable. Le drai- nage s’y impose : sinon, le blé languit et au printemps il est clair- semé; plus de la moitié est détruit par humidité. Ainsi assainis, ces terrains doivent, sans doute à leur situation, d’être susceptibles de donner des récoltes plus abondantes et plus assurées que celles des sables ferrugineux, rocheux de la Puisaye. En 1893, la prairie temporaire qui occupait ce terrain depuis 3 ans fut rompue au printemps. L’avoine semée sur ce labour frais ayant mal réussi, après la récolte on donna un labour de déchaumage suivi d’un labour moyen qui a enterré en fin de septembre le fumier semé sur la moitié inférieure du champ. Les engrais minéraux ont été répandus sur le labour avant le her- sage des semailles, le 16 octobre 1893. Cette expérience, faite un an avant la précédente, comportait la comparaison des principaux phosphales ; j'y avais ajouté la viande moulue, engrais qui avait été trop facilement accepté à ce moment par nos cullivateurs. Comme au Thureau, l'acide phosphorique apporté sous les formes 144 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. facilement assimilables a produit des effets physiologiques extrême- ment remarquables. L'hiver rigoureux de 1893-1894 n’a atteint que les parcelles témoins ou à phosphates fossiles ; pendant la végétation la différence de vigueur s’est soutenue, la maturité a été également avancée. La récolte faite le 18 juillet nous a donné les résultats réunis dans le tableau IT. On constate comme précédemment : 1° que pour une dépense sensiblement égale de scories et de superphosphate on obtient des résultats presque identiques ; 2° la différence de 200 kilogr. que l’on constate en faveur des superphosphates rentre dans la limite des variations indépendantes de la nature de la fu- mure. Le phosphate précipité a même valeur que la précédente, tandis que les phosphates minéraux de l'Oise, des Ardennes et de lAuxois ne se sont pas mieux révélés à la récolte que pendant la végétation, où il n’a jamais été possible de leur attribuer une influence quel- conque. Ils ont été complètement inertes comme partout d’ailleurs où je les ai essayés sur les terres régulièrement soumises à la cul- ture. L’engrais azoté organique, la viande moulue, au prix indiqué est un engrais très inférieur aux scories, les cultivateurs n’ont aucun intérêt aux prix actuels à se procurer cette matière particulièrement facile à adultérer. Quant à la dose la plus avantageuse de superphosphate, l'examen des parcelles 4, 5, 6, 7, 8'et 9 indique clairement que la dose de 600 kilogr. ne doit pas être dépassée. Sables et grès ferrugineux C', argiles à plicatules C,, argiles bariolées C.. De semblables constatations ont été faites sur les sols siliceux des sables et grès ferrugineux C! des argiles à plicatules G,, enfin des argiles bariolées G,. Ces couches présentent entre elles de très grandes analogies de composition physique; elles forment une ceinture étroite très constante de caractère à la base des sols de la Puisaye et sépare ceux-ci des assises argileuses du néocomien infé- ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 145 TABLEAU II. — Blé 1893-1894. Argiles de Myennes C?. Sols silicéo-argileux pierreux. DÉSIGNATION rer et au HE PR dela |hgmenr| dû [pemexr| dû DES PARCELLES ET DES FUMURES fumure à la à la ne en fumure en fumure complémentaires. e > mi- D mi- nérale. | paille. PR LC CS PR Pa fr, kilogr. | kilogr. | kilogr. | kilogr. 17° Série, — Engrais minéraux associés à 15000 kilogr. de fumier par hectare. Témoin fumier seul …« . LR” » 3 650 ” 2 300 » 1 Phosphate de l'Oise, 980 kilogr. . .| 46 | 4000 390 | 2500 200 2 — de l'Auxois, 634 kilogr. .| 46 4 000 350 | 2 500 200 3 —= des Ardennes, 920 kilogr .| 46 4 000 350 | 2 500 200 4 Superphosphate minéral 13/15, 600 ki- ML Reteen er Lo ee ere TA 6 200 | 2 550 | 3 600 | 1 300 5 Superphosphate d'os 16/18, 420 kilogr.| 46 6 300 | 2650 | 3 650 | 1 350 6 — minéral 13/15, 1 200 KIIOC ESPN PE EN D Ne ee Superphosphate d'os 16/18, 840 kilogr.| 92 | 6 300 S — minéral 13/15, 900 ki- OR EN ER Rs te ei à O9 6 300 | 2650 | 3 700 | 1 400 9 Superphosphate d'os 16/18. 630 kilogr.| 69 6 200 | 2 550 | 3 600 | 1 300 10 Phosphate précipité, 180 kilogr. . .| 46 6 150 | 2 500 | 3 500 | 1 200 [| 11 Scories de Jœuf, 920 kilogr. . . . .| 46 6 100 | 2450 | 3 450 | 1 150 || 12 Viande moulue 10/10. Azote organique, OO en, SUN, SPNUISERENS 50 4 600 950 | 2 700 400 — 2° Série, — Engrais phosphatés seuls employés sans fumier. Pâture ancienne défrichée. Témoin ni fumier ni engrais minéraux. » 2 850 » 1 800 » 13 Phosphate des Ardennes, 1 000 kilogr.| 50 2 850 0 1 800 0 || 14 Scories de Jœuf, 1 000 kilogr. . . .| 50 6 000 | 3 150 | 3 400 | 1 600 || 15 Superphosphate minéral 13/15, 600 ki- OR ER Se AR VOS Pa EU 6 000 | 3 150 | 3 400 | 1 600 ANN. SCIENCE AGRON. — 2€ SÉRIE. — 1897, — 11. 10 146 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. rieur. Leur composition oscille autour de celles-ci prises comme types. Terre fine : argile et sable ténu . . . . . . 950 970 ET M ed PER ES CDS or o0 30 Azote. . LR 0.73 1.02 Acide phosphorique . 0.3 0.44 Potasse . = 2.24 1.40 Calcaire p. 100. . 0.08 0.20 Ces sols forment le fond des vallées ; imperméables, comme on peut le voir d’après cette analyse, où la portion ténue forme plus des 9/10 du poids de la terre, ils bénéficient beaucoup des amendements calcaires et les phosphates métallurgiques équivalents aux superphos- phates dans la culture du blé. J'y reviendrai d’ailleurs au sujet des fourragères sarelées. Calcaires à spatangues et marnes ostréennes. Ces assises qui forment la base de l’infra-crétacé et s’appuient sur le portlandien, donnent des sols argileux compacts couleur brun jau- nâtre, d’une culture extrêmement difficile. Le sous-sol formé soit d’une argile grise ou noire, soit de bancs de petites pierres caverneuses de gris fumée à oolithes ferrugineuses a la plus grande influence sur les facultés productrices du sol. La nature du sol permet la culture de la luzerne et le blé y réussit bien, mais lorsqu'il est argileux ce sol ne se prête qu’à la culture du blé après jachère. Le succès des cultures réside principalement dans l'opportunité de façons mécaniques qui doivent aboutir à un ameublissement convenable permettant des semailles précoces. Aussi l'influence des engrais complémentaires n'est plus aussi mar- quée que dans les sols précédents, du moins en ce qui concerne le blé. Les cultivateurs les emploient néanmoins avec profit. On ob- tient : É Avec fumier seul un rendement de 16 à 18 hectolitres par hectare. Avec superphosphates 600 ou 1000 kilogr. de scories, 24 à 26 hec- tolitres par hectare. ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 147 Dans ces terres si rebelles à l’ameublissement le travail mécanique prime les fumures; l’engazonnement du sol nous paraît, concurrem- ment avec le drainage, l'amélioration la plus heureuse. On obtien- drait ainsi des pâtures riches en légumineuses, ainsi qu’on peut le prévoir d’après la végétalion spontanée. Après avoir ainsi passé en revue toutes les formations géologiques de la Puisaye, il me paraît inutile de rapporter les résultats des autres expériences que J'ai instituées sur le blé. Elles confirment les résultats précédents; elles nous permettent donc de déduire les conclusions suivantes : 1° L'emploi des engrais phosphatés comme complément du fu- mier est à recommander sur loutes les terres de la Puisaye, soumises à l’assolement du pays; 2° Dans les sols silicéo-ferrugineux ou silicéo-argileux des couches supérieures de l’infra-crétacé leur influence sur le rendement est de beaucoup supérieure à celle qu’on en obtient sur les sols argileux ou argilo-calcaires du calcaire à spatangues et des marnes ostréennes; 3° De tous les engrais phosphatés, seuls le phosphate précipité, les scories de déphosphoration, à dosage élevé et garanti et le super- phosphate sont à recommander ; à prix égal, ces fumures d’origine différente sont d’une efficacité directe analogue. Les doses de 500 à 600 kilogr. de superphosphate à 15 p. 100; 800 à 1000 kilogr. de scories 16/18 ; 200 à 250 kilogr. de phos- phate précipité, sont les meilleures doses, il n’y a aucun intérêt économique à les augmenter; les frais de la famure se maintiennent ainsi de 45 à 50 fr. par hectare. Céréales de printemps. Les excellents effets de l'apport supplémentaire d’acide phospho- rique pour le blé nous ont conduit à vérifier si, dans les mêmes conditions, cette influence est aussi marquée et aussi avantageuse, lorsqu’on applique directement aux céréales de printemps, avoine et orge, les mêmes engrais phosphatés. Dans ce but, nous avons institué en 1893, 1894, 1895, 12 expé- riences où les engrais phosphatés et les engrais azotés étaient mis 148 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. en comparaison. Ces céréales succédaient à des blés ayant reçu ex- clusivement du fumier de ferme, quelques-unes succédaient à une pâture de 4 à 5 ans. Les conditions étaient donc absolument identi- ques à nos essais sur le blé et à priori on pouvait espérer des résultats analogues à ceux que nous avons rapportés. Il n’en a rien été, sauf dans un cas de défrichement de lande, où ces engrais ont eu une influence marquée, nous n'avons observé partout ailleurs, à la récolte, aucune différence appréciable ni dans le poids du grain ni dans le poids de la paille. Ce fait observé dans toutes ces expériences n’est pas accidentel. Les résultats négatifs de ces essais ne sont pas pour cela sans intérêt et, s’il est vrai qu'il n’entre guère dans la pratique courante d’user ._d’engrais complémentaires sur ces céréales, ceci démontre qu’on ne Es saurait généraliser les effets d’une catégorie d'engrais à toutes les céréales indistinctement. Mais il est juste de dire que si nous avons constaté que les engrais phosphatés ne sont pas avantageusement employés sur ces plantes, ce n’est pas qu’elles soient insensibles à l’acide phosphorique. Nous avons remarqué au contraire sur toutes nos parcelles à superphos- phates, scories et phosphate précipité, une végétation de début beau- coup plus régulière, plus précoce que sur les voisines, mais cette phase rapide du début aboutissant à une maturité avancée de 8 à 10 jours n’a pas eu pour effet, comme dans le cas du blé, d’augmen- ter d’une facon sensible le rendement. Il en est tout autrement des engrais azotés solubles : sauf lorsque l’avoine succède à une vieille pâture défrichée à l'automne, le ni- trate de soude et le sulfate d’ammoniaque sont employés avantageu- sement au moment de la semaille ou quelque temps après. Mais il est à remarquer que cette influence des engrais azotés est entière- ment variable ; elle est subordonnée aux conditions météorologiques du printemps et leur réussite n'est pas aisée à prévoir. Dans notre région, la sécheresse en fin mai et juin est désastreuse pour ces cé- réales. ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS, 149 Les engrais phosphatés et les plantes sarclées. Dans nos exploitations, les plantes sarclées occupent du sixième au quart de la sole de jachère; on cultive ainsi en vue du fourra- gement d'hiver principalement la betterave fourragère, la pomme de terre, à laquelle, à mon avis, on ne donne pas assez d’impor- tance, le choux-navet et enfin la carotte. Nous avons cherché s’il n’y aurait pas intérêt pour les cultivateurs à ajouter (principalement lorsqu’à la suite de pénurie fourragère, ils disposent d’une quantité insuffisante de fumier) des engrais phos- phatés à la famure ordinaire. À ces engrais nous avons associé les sels minéraux azotés, enfin des sels potassiques afin de reconnaitre si dans le cas de cultures réputées exigeantes en potasse l’emploi de ces dernières ne serait pas de même que pour les céréales une rui- neuse superfétation, Nous allons examiner successivement l’action de ces engrais sur: betteraves, choux, raves, pommes de terre et ca- rottes. Detleraves fourragères. Il est d’usage, et l'expérience montre que cette pratique se justifie à tous les points de vue, d'élever les betteraves en pépinière pour les repiquer sur billons fin mai ou juin. J’ai montré dans les Annales agronomiques (juin 1894) que le semis, outre qu'il exige des frais d’entrelien plus considérables, donne une récolte inférieure d’un tiers, souvent même de la moitié à ce qu’on peut obtenir par repi- quage. Le fumier est appliqué suivant la méthode locale avant la forma- tion des billons ; les engrais minéraux, répandus à la volée, ont été enterrés de la même manière *. Le nitrate de soude a été répandu à deux reprises lors des binages d'entretien. Les résultats que je vais d’abord rapporter ont été obte- 1. Cette pratique expéditive me paraît inférieure à celle qui consiste à serrer l’en- grais derrière la charrue, de sorte qu'il se trouve localisé suivant l'axe des billons à une profondeur de 0",15 à 0",18. Des essais en cours nous permettront d'en juger cette année. 150 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nus en 1892, année relativement anormale à cause de sa sécheresse ayant quelque analogie avec celle de 1893. De l'examen du tableau IT il ressort notamment : 1° Que, dans la circonstance, 40 000 kilogr. de fumier n’ont pas donné de meilleurs résultats que 200 kilogr. de nitrate de soude ; 2° Le nitrate de soude appliqué comme supplément du fumier à haute dose a élevé de 16 000 à 30 000 kilogr. le rendement, soit un excédent de 14000 kilogr. avec une dépense de 50 fr. par hectare ou 220 kilugr. pour 1 fr. de dépense ; 3° Avec une dépense qui varie de 29 fr. 50 à 50 fr., suivant l’ori- gine de l'acide phosphorique, on obtient, avec une modeste fumure de 20 000 kilogr., des rendements aussi élevés qu'avec le fumier à haute dose et nitrate de soude ; 4° Au point de vue économique, le superphosphate a été le plus avantageux. Belleraves 1897. Argiles de Myennes. Sol argilo-siliceux. L'année 1894 a présenté des conditions météorologiques normales favorables à la végétation. Le fumier employé avec parcimonie était en outre de lente décomposition ayant été recueilli sur des feuilles lirées des bois. Les résultats inscrits dans le tableau IV sont des plus probants. L’examen des deux colonnes 4 et 5 fait ressortir l’in- fluence des fumures phosphatées sur la betterave et montre qu'avec elles seules, on à obtenu des excédents variant de 23 900 à 33 700, la dépense allant de 42 fr. 50 à 70 fr. par hectare. On voit en outre que les rendements les plus élevés sont obtenus dans la série à base de superphosphate, les scories phosphoreuses n’en ont pas moins donné un excédent dont le prix de revient est in- férieur à celui de la série à superphosphate. Au point de vue du ré- suliat économique, elles occupent donc un très bon rang. Si ensuite on examine l'influence des engrais azotés et potassiques ajoutés aux phosphates, il est visible que les sels potassiques dont l'emploi élève si démesurément le prix de la fumure ne sont pas avantageux. Le niurate de soude ainsi employé avant le billonnage ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 151 TABLEAU III. — Année 1892. Influence des engrais complém=ntaires en sols siliceux des sables de la Puisaye C*. TÉ- NI- FUMIER | FUMIER | FUMIER FUMIER MOINS RATE , | 4000 | 20000 | 20000 scoRER sans e : æ de PERS de kilogr. | kilogr. | kilogr. du te udé 40 000 et super- | phos- kilogr. | nitrate | phos- phate de soude| phate |précipité| 1000 SRE 200 300 160 Les kilogr. | dose). | kilogr. | kilogr. | kilogr. taire. = g Creusot engrais seul com- 200 (haute kilogr. Prix de ces fumures mi- MÉRAlESE een ils 50 » | 50 22,90 | 41,20 Belteraves fourragères. 52 000 [49 400 [44 S00 |38 650 37 750 |48 800 |42 050 |41 600 37 880 [40 800 |32 950 |33 280! » |44 160 |36 000 |29 440 10 800 [41 850 |31 200 |29 950 © (=) | Géante de Vauriac. . .![12 800 | Ovoïde des Barres. . .| 6128 Globe jaune . . . . .|16 960 |Tankard. . . . . . .|13 440 | Mammouth. . . . . .| S 800 Moyennes générales des rendements sur les parcelles différemment | fumées(chiffresronds).|11 600 |28 000 |28 300 137 400 |33 550 Excédents sur la parcelle : | DÉMONTRE 16 400 |\16 700 25 800 |21 950 (=) 9 © © © WW D OR À 1 1 or Q NN © © 9 © (=) Belteraves à sucre. | Améliorée Vilmorin. . .| 9040 121 600 28 400 |20 000 |19 600! i Fouquier d'Hérouel . .| 8 000 25 600 30 000 |24 000 |27 606. | Klein Wanzleben. . . .| 4 800 24000 |. .» |29 600 |23 600 19 200! | Électorale Knauer . . .| 7 200 31 600 30 600 |30 400 |25 600 | | Blanche à sucre alle- nandents val 8.400 32 400 38 000 |30 800 |22 800 Moyenne générale des rendements sur les parcelles différemment TUMÉCRIE TRE 25 790 |22 950 152 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. TABLEAU IV. — Année 1894. Betteraves fourragères. Sol argilo-siliceux des argiles de Myennes. DÉSIGNATION DES FUMURES. ER ES RES DR TER Témoin fumier seul. 2 Fumier et superphosphate 16/18 os, 300 ki- logr. Fumier, DTHROSU, et rar ie so 200 kilogr. Fumier et ste Dhos Rats LE Rte de potasse, 200 kilogr. . , . Fumier et superphosphate + He de potassium, 200 kilogr. Fumier et phosphate précipité, 300 ee Fumier et phosphate + nitrate de soude, 200 kilogr . . : Fumier, phosph et sulf. de sel 200 kil. | Fumier et scories de Lamarche, { 000 kilogr. Fumier et scories + nitrate de soude, 200 kilogr. 5e . Fumier et scories + chlorure de one sium, 200 kilogr . . CE] . Fumures minérales complètes additionnées au fumier de ferme : | 1° Superphosphate 16/18. 600 H:) Nitrate de soude , 200 Kk.} Sulfate de potasse. 200 Kk. 20 Phosphate précipité . 300 k. Nitrate de soude , 200 Kk./ Sulfate de potasse. 200 k. | 3° Scories de Lamarche. . 1 000 Kk. | Nitrate de soude . 200 Kk.}? Sulfate de potasse. 200 Kk. | Superphosphate d'os 16/18, 11,10 Sulfate de potasse. , . . . 27 ,15 Sories Lamarche, . . . « 4 ,25 PRIX PRODUIT EX- 2e PS nee jus cépaan fumures PES mn + à dû aux à mi- fumures 1fr. de nérales. | l’hectare, | ses. dépense. fr. kilogr. kilogr. D 15 000 » » 69,00 | 48 700 | 33 700 488 119,00 | 56 500 | 41 500 365 123,30 | 47 500 | 32 500 264 119,00 | 48 700 | 33 700 291 70,2 | 46200 | 31200 | 445 120,70 | 54 200 | 39 200 326 124,50 | 50 000 | 35 000 282 42,50 | 38 900 | 23 900 268 93,50 | 47 900 | 32 900 309 92,50 | 38 200 | 23 200 252 173,8 | 49 200 | 34200 | 199 175,00 | 63 500 | 48 500 278 147,30 | 49 600 | 34 600 235 Les prix sont établis sur ceux du syndicat auxerrois : 251,00 23 ,40 Chlorure de potassium. . Phosphate précipité. . Nitrate de soude ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 153 c’est-à-dire avant le repiquage des betteraves, n’a pas eu une puis- sance d’accroissement comparable à celle qu’il avait montrée précé- demment. Son action est beaucoup plus marquée lorsqu'il est em- ployé par doses fractionnées précédant les binages donnés pendant la végétation. Betteraves 1896. Argiles de Myennes C°. Sols silico-argileux de la vallée de Branlin. Les argiles de Myennes sur leur bord, avec les argiles bariolées, sont recouvertes d’un sol formé de silice à grains très fins réunis par une argile blanche. Le sous-sol argileux, rouge marbré de blanc, est très imperméable; aussi, ces terres sont difficilement abordables dans les périodes pluvieuses, la végétation y est tardive, les blés su- Jets à un déchaussement excessif et la pomme de terre y contracte très aisément la pourriture. Ces Lerres sont à ce point dépourvues de calcaire que les eaux de puits employées comme potables sont toujours limoneuses: pendant les sécheresses, leur degré de clarté ne dépasse jamais l’opalescence. Aussi les cultivateurs expriment très bien les propriétés physiolo-. giques et physiques de ces terres qu'ils désignent sous le nom de terres mortes. Elles sont bien mortes, en effet, ces terres lourdes où l’action ameublissante des façons mécaniques est si vite détruite par la première pluie, qui les bat comme une aire de grange, les trans- formant ainsi en un bloc imperméable à l'air. Notre expérience de 1896, faite sur ces sols très médiocres, a donné les résultats sui- vants : Ces chiffres indiquent une supériorité économique incontestable des superphosphates et phosphate précipité sur les scories et le phosphate fossile. Il est à remarquer que c’est la première fois que nous constatons l'influence de ce dernier dans nos cultures : nous l’avions soupçon- née l’année précédente sur un sol semblable, ici elle ne fait aucun doule, le phosphate de l’Auxois n’est pas resté inerte vis-à-vis de la betterave et surlout pour les choux-navets. Ce fait mérite d’être vé- rifié. Cette expérience montre en outre l'influence prépondérante de ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. DÉSIGNATION DES FUMURES. Témoin fumier seul, 18 000 kil. || Fumier et superphosphate 13/15. 600 kilogr. . Se Me ae De | Fumier et scories de Longwy 15/17, 1 000 kilogr. : Fumier et phosphate précipité 37/40, 200 kilogr. . . = Fumier et phosphate de l'Auxois, 700 kilogr. Fumier et nent 600 k. —- nitrate 200 kilogr. avant la- bour. Fumier et super te 600 u « — nitrate 200 kilogr. pendant la végétation : - Fumier et superphosphate, 60 k. —- sulfate d'ammoniaque 150Kk. | Fumier et scories, 1 000 kilogr, —- nitrate 200k. avant labour. | kumier et scories, 1 000 kilogr. —- nitrate 200 kilogr. pendant la vegétation Fu : | Fumier et phosphate nn | 200 k. + sulfate AZH‘0 150k. avant labour. | Fumier et nitrate seul, 200 kil. avant labour. DC | Fumier ct nitrate, 100 kil. un labour + 100 k. en végétation. Fumier et sulfate d'ammoniaque seul, 150 kilogr. avant labour. Les prix étaient en 1896 : Superphosphate 13/15, les 100 k. Phosphate précipité. . . . . . . Scores 10/17 Vi, ee, 1. À TABLEAU V. PRIX BETTERAVES. CHOUX-NAVETS. EE D UE DOS Ex- Ex- Ex- Ex- famure | Fende cédent | cédent Rende- | cédent | cédent ment dû obtenu | ment saû obtenu mi- . ; Foire avecune F4 “HR à avecune nérale. |l’hectare LE ie l’hectare RE Es es fr. kilogr. | kilogr. kilogr. | kilogr. » 25 000 » » 10 000 » » 49 36 000! 11 000! 262 | 25 000! 15 000! 357 46 30 000! 5000! 108 |29 500! 19 500! 424 46 37 000! 12000! 260 | 24 300| 14300! 310 15,9 35 000! 10 000! 242 30 000! 20000! 440 92 41 000! 16000! 174 33 000! 23 000! 250 92 44 250! 19 250! 209 | 33 000! 23 000! 250 81 40 000! 15 000 185 » » » 96 30 000! 5 000 52 32 000! 22 000| 230 96 42 000! 17 000! 175 | 34 000! 24 000! 250 85 45 000! 20 000! 235 36 400! 26 400! 310 50 33 000! S000! 160 |16000! GO000! 120 50 30 000! 5000! 100 [16000 GO00! 120 39 31 500! 6500! 160 |17 500! 7500! 192 7,00 Nitrato de 800007... 00.0 251,00 23 100 Sulfate d’ammoniaque. . . . . . 26 ,00 1 ,60 SA ame pp ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 155 l'acide phosphorique sur les choux-navets. Avec une dépense de 42 à 45 fr. par hectare, la misérable récolte de 10 000 kilogr. du lot té- moin est passée à 30 000 kilogr., il n’est pas inutile non plus de faire remarquer que cette plante paraît en quelque sorte indifférente à la forme de combinaison de l'acide phosphorique. En ce qui concerne les engrais azotés, on voit que, employés avant le repiquage, nitrate de soude et sulfate d’ammoniaque ont une action très inférieure à celle qu’ils possèdent lorsqu'on les ré- pand pendant la végétalion, c’est-à-dire fin juin et juillet. Quant à la préférence à accorder à l’un ou l’autre de ces sels azo- tés, 1c1 le choix paraît indifférent. Dans ces sols frais, le sulfate d’am- moniaque paraît, au prix actuel surtout, au moins égal au nitrate de soude. C’est la première fois que nous constatons un effet marqué du sulfate d’ammoniaque dans notre région. Il me reste à examiner si de semblables résultats peuvent être attendus de l'emploi de ces engrais dans la culture de la pomme de terre. Mais, avant d'aller plus loin, il convient de rapporter ici les résultats d’une expérience faite en 1892 sur 2 plantes cultivées sur une petite surface dans la Puisaye: ce sont les carottes et Le maïs- fourrage. Comme on va le voir, les résultats sont très probants et confirment les précédents. TABLEAU VI. — Année 1893. Carottes fourragères et maïs sur sol sableux C*. TÉ- FuMIER |FUMIER 18000 KILOGR. ET h NS A — RE seul ni 5 2T- S=— fhiater haute RPEe ph umier phos- phate ni phate |précipité| 1000 autres | 40000 3 5 ; | > > 300 150 kilogr. engrais.| kilogr. | kilogr. | kilogr. scories dose Carotte blanche d'Orthe . . . . . . .|21 600 |35 200 [46 400 41 600 Blanche des Vosges . . . . . . . . .115 200 |30 400 [41 600 36 800 Longue à collet vert. . . . . . . . .|15 200 |45 200 |43 200 138 39 200 Moyennes générales des parcelles diffé- | remment traitées par fumures minérales. |17 330 |36 930 [43 730 41 200 Maïs caragua. Récolte en vert. . . . .|27 500 |42 250 [46 250 |44 750 |52 500 On remarque que l’emploi simultané des engrais phosphatés et 156 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. d’une pelite fumure ordinaire au fumier donne de meilleurs résul- tats qu’une haute dose de fumier seul. Le superphosphate a eu une action supérieure aux autres engrais de la même catégorie, mais cette supériorité disparaît dans le cas du maïs céréale qui se com- porte comme le blé. Pommes de terre. Les bons effets d'une fumure minérale appliquée directement à la culture de cette précieuse plante fourragère ne sont pas à beaucoup près aussi tangibles, aussi nets que ceux que nous avons rapportés pour les autres plantes. Cela tient à ce que le rendement de la pomme de terre est influencé dans une large mesure par la grosseur, la densité des semenceaux, par l’espacement. Une irrégularité dans le plant d’une parcelle à l’autre suffit pour masquer l’influence de la fumure ; à la suite de divers essais, nous avons constaté des variations du simple au double, suivant qu’on s'adresse aux petits ou aux gros tubercules. Les expériences rapportées ci-dessous ont été établies sur le même plan : addition de fumure minérale enterrée au moment de la plan- talion après avoir été répandue à la volée à la surface du champ. TABLEAU VIII — Année 1894. Grès ferrugineux du Thureau C*. Sols siliceux pierreux perméables inconsistants, secs et superficiels. (1% Essai.— Ferme des Janc!s.) PRIX , DIE , de la DÉSIGNATION DES FUMURES. fumure RENDEMENTS BRUTS FÉRENCE à l’hectare. rapport Grosses. | Moyennes. etites. 'otal. s Ë . Grosses. | Moy Petites Total Peu kilogr. | kilogr. | kilogr. | kilogr. kilogr. Témoin fumier seul, 18 000 kilogr . . 750 | 10150! 2 750 | 13 650 » Scories seules, 1 000 kilogr. . . . .| 450! 5500! 3750 | 9 700|— 5 950 Superphosphate, 600 kilogr. . . . . Û 6 300! 3 750 | 10 600|[— 3 050 Témoins 04. 10 000! 2 250 | 12 250|— 1 400 Superphosphate, 600 kilogr, Le 100 À de carbonate de potasse . . . / 2.2 14 550! 2 650 | 19 400! 5 750 Superphosphate + KO S0? 200 kilogr. / 3 Si 14 000! 3 200 | Scories, 1 000 kil. + KO GO? 100 kil.|140,5 9 250! 2 100 | Scories, 1 000 kil. + KO S0* 200 kil. viande moulue, 200 kilogr . . . . 4 ù 13 650! 2 350 | 17 800/—+ 4 150 ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 157 TABLEAU IX. — Année 1894. Pommes de terre en sols silicéo-ferrugineux et secs du Thureau C°. (2° Essai.) PRIX RENDEMENTS BRUTS Ne : de la à l’hectare. en + DÉSIGNATION DES FUMURES, fumure ou en — —_— 2 miné- : dr : mn. )arc e rale. Î|Grosses.| Moyennes. | Petites. | Total. ee el Êr: kilogr. | kilogr. | kilogr. | kilogr. kilogr. 1Témonefumier seul.1. Vue 0 » 390 | 8950! 2 000 | 11 300 » 1 600 kilogr. . . . . .| 47,4] 1 100 | 13250! 2 750 | 17 100|+ 5 800 —- Sulfate de potasse, 200 Kk.| 101,7. 1 500 | 12 200! 2 250 | 15 950[ 4 650 4 + Carbonate de pot., 100 k.|] 96,0 650 | 9500! 2? 050 | 12 100|—+ 1 800 TT} + Sulfate de potasse, 200 k. —+ viande moulue, 200 K.| 141 | Seules, { 000 kilogr . . . .| 42 —- Sulfate de potasse, 200 k.| 96 ‘ + Carbonate de pot., 100 k.| 91 3 Sulfate de potasse, 200 K. —+- viande moulue, 200 Kk.| 136,5 | 2 520 | 7 500! 4 950 | 14 970|< 2 670 2\° SOU AAOOEKOST-A.t+ (5) 77072 750 | 7600! 5 250 | 13 600|+ 2 300 — Sulfate de potasse, 200 Kk.| 124,0 | 1 700 | 12 600! 3 900 | 18 200/+ 6 900 =, | + Carbonate de pot., 100 k.| 119,2 | 1 500 | 11 800! 3 250 | 16 550|+ 5 250 Posphate de l'Auxois, 800 kilogr. . .| 51,2 | 1050 | 7850! 1 650 | 10 550|[— 0 750 Phosphate + sulfate de potasse, 200 k.| 105,2 950 | 10650! 1 800 | 13 400|+ 2? 100 20/Témoin fumier seul. :. « . . » 400 | 7400! 1900 | 9700 » Superphosphate minéral seul, 600 kil, 47,4 350 | 12 100| 2 200 | 14 650] 3 350 3/1 Supér- PRAPRÉS T| 1800 | 10150! 2650 | 14 100|+ 2 800 ,9 250 | 7000! 1900! 9150|— 2 150 5 | 1600! 9350| 3 300 | 14 250] + 2 950 2 850 | 9000! 2 300 | 12 150|+ 850 Scories 1 000 kilogr. précipité, phosphoreuses, 00 k. Phosph. 2° Série. Sol siliceux graveleux. Depôt tertiaire mélangé aux sables de la Puisaye. (3° Essai.) Lémonunier seule. 4 ur » » 6 900| 2100 | 9000 » & # (Seul avec fumier. . . . . .| 47,4] » | 5850] 2700| 8550|— 450 £, $ 2 | + Carbonate de pot., 100 k.| 96,0 ) 6750| 2700 | 9450|+ 450 See —+- Garbonate de pot., 100 k. A | + viande a 200 k.| 136,0 » 8 800! 2950 | 11 750|+ 2 750 SU SNERE ENS . ST OS2 » 6 800! 3 200 | 10 000! { 000 £ oo El —- Carbonate Fe Le 100 k.| 119,2 » 11400! 2 550 | 13 950|+ 4 950 EL —+- Sulfate de potasse, 200 k.| 124,0 » 13 050! 2 700 | 15 750! 6 750 = #4 —- Carbonate de pot., 100 k. —+ viande moulue, 200 k.| 159,0 » 14 000! 2 600 | 16 600! 7 600 4 GS CON Me RAD » 7700! 3 200 | 10 900|—+ 1 900 ÈS à —- Carbonate a Fe 100 k.| 91 En) ES 9 300| 2 400 | 11 700|+ 2 700 2 — | + Carbonate de potasse + viande moulue, 200 kilogr.| 131,5 » 13 050| 3 200 | 16 250] + 7 250 Carbonate de potasse tu 100 kilogr.| 49,0 Ù 12 550| 2 350 | 14 900| + 5 900 158 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. TABLEAU X. — Année 1894. Pommes de terre en sol argilo-siliceux des sables de la Puisaye C*. (4° Essai.) PRIX RENDEMENTS BRUTS ES ; Le à l'hectare. en + DÉSIGNATION DES FUMURES. fumure ou en — ee 55 avec nérale. |Grosses.| Moyennes. | Petites. | ‘l'otal. RD fr kilogr. | kilogr. | kilogr. | kilogr. kilogr. Témom inner seul enr EU » 1300 | 9050! 1 850 | 12 200 » M Seul, 600 kilogr. . . 4 47,4 | 1200! S550| 5 450 | 15 200|+ 3 000 ÊS Sulfate de potasse, 200 kilogr.| 101,7 550 | 9 800! 4 250 | 14 600] + 2 400 Ua Sulfate de KO, 200 kil. + sul- ES fate d'AzHO*‘, 200 kilogr. .1165,7 | 1 800 | 13 950! 5 150 | 20 900[+S 700 7 | Carbonate de potasse, 200 kil.|145,0 | 2 500 | 10 800! 2 850 | 16 150] 3 950 | Sulfate de potasse seul, 200 kilogr. 24,0 | 1450 | 10950! 2 750 | 15 150[- 2 950 Carbonate de potasse seul, 100 kilogr.| 49,0 | 1 550 | 10 400! 2 500 | 14 450|- 2 250 | Seules, 1 000 kilogr. 42,5 | 1300 | 11 550! 3 250 | 16 100! 4 900 | ; | + Sulfate de potasse, 200 kil. 69,05! 1 200 | 11 650! 2 900 | 15 750] + 3 350 | 2 | + Sulfate de KO, 200 k. + sul- £ 3 | fate d'AzHO*, 200 kilogr. .1133,65! 2 800 | 13 750) 3 100 | 19 650]+ 7 450 | 5 + Sulfate de potasse, 200 k. = + viande moulue, 200 kil.1109,0 | 4 200 | 13 300! 2 550 | 20 050|+ 7 850 F* |. Carbonate de potasse, 100 | kilogr. 49,0 | 2800 | 12 700! 3 000 | {8 500[+- 6 300 Année 1895. Expérience faite sur le même sol et après pâture. (5° Essai.) Témoin fumier seul. . . . . s » » » » 17 700 » | Phosphale de l'Auxois, 800 UE 58,0 » » » 17 700 » Superphosphate seul, 600 kilogr. 47,4 » Ù » 20 600! 2 900 Superphosphate + nitrate de soude, 200 kilogr. 72,4 » » » | 26 800 + 9 100 | Scories de FIRE AE 000 k. 42,5 » » » 20 300! 2 600 Scories de déphosphoration +- 200 k. | de nitrate de soude . sue 92,5 » » » | 24 400[+- 6 700 Phosphate précipité, 300 kilogr. . 69,0 ) » » 24 100]+ 6 400 | Phosphate + nitrate de soude, 200 k.|119,0 » » » | 23 600[<+ 5 900 | Phosphate + sulfate d'ammon., 200k./131,0 » » » 24 100|+ 6 400 | Phosphate + sulfate de potasse, 200 kilogr. se de RL Z RU | Nitrate cnfoui par Ha 400 kilogr.!109,0 Id. id. 300 kilogr.| 75,0 Id. id. 200 kilogr.| 50.0 Sulfate d'ammoniaque, 200 kilogr. 62,0 23 300]+- à 600 22 400! 4 700 20 700|-+ 3 000 19 800/+ 2 100 16 400|— 1 300 ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 159 Observations. — D’après les chiffres contenus dans ce tableau, on constate que le superphosphate et les scories, loin d’avoir été utiles, ont occasionné une diminution dans le rendement. Ce fait en appa- rence peu vraisemblable est dû à un accident, à une maladie. Dans cette expérience dont je ne puis donner la totalité des résultats par suite d’une méprise du cultivateur, j'ai constaté que l’acide phosphori- que dès le début de la végétation se manifestait très nettement par une vigueur exceptionnelle des fanes et la largeur des feuilles; en somme, tout l'appareil foliaire en avance de développement sur les parcelles témoins se dessinait sur le reste par son état plantureux. Il n’était doac pas permis de prévoir une diminution de rendement vis-à-vis des témoins. Mais en fin juillet, commencement d’aoûl, dans ces parcelles précoces des taches noires apparurent sur les feuilles et sur la tige. Le limbe des feuilles s’épaississait, devenait cassant, jaunâtre, les bords se recoquevillaient et au bout de quelques jours les feuilles noires séchaient sur pied, de même que les fanes. Au 15 août’, sur ces parcelles qui n'avaient rien que des phosphates, il n'y avait plus de feuilles. Les tableaux IX et X résument les résultats obtenus en 1894-1895 sur sols analogues. L'examen des chiffres de ces 5 expériences ne fait pas ressorlir aussi nettement que pour les autres plantes l’in- fluence des engrais minéraux. De cet ensemble de résultats essayons cependant de tirer quelque enseignement : 1° Les engrais phosphatés ont-ils été utiles ? Les tableaux VIT, IX et X ne permettent pas de conclure en ce sens d’une manière géné- rale. Ainsi on constate que le superphosphate à donné, pour une dé- pense de 47 fr. 40: No 1. No 2. N° 3. N° 4. N° 5. Diminution. Augmentation. Diminution. Augmentation. Augmentation. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. 3 050 » 800 450 3 000 2 900 1. N'est-ce pas à l'absence de potasse et d'azote que doit être attribué ce résultat ? De nouvelles expériences seraient nécessaires pour fournir une explication de ces faits. La maladie de la pomme de terre aurait dû ètre prévenue par le sulfatage. (Note de la Rédaction.) 160 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les scories de déphosphoration, pour une dépense de 42 fr. 50 : No 1. N° 2. N° 8. N° 4. N° 5. Diminution. Diminution. Augmentation. Augmentation. Augmentation. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. 3 095 2 150 1 900 4 900 2 600 Le phosphate précipité a donné, pour une dépense de 70 fr. : No 1. N° 2. No 8. N°4. Nos. Augmentation. Augmentation. Augmentation. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. » 2 300 1 000 » 6 400 Le phosphate de l’Auxois n’a donné aucun résultat. 2° Au point de vue économique, l'efficacité de ces engrais ne me paraissant pas assurée dans nos terrains, j'estime que les écarts de plus-value n’en justifient l'emploi direct que dans certains cas. L’ex- périence montre que les sols bas à sous-sols imperméables bénéficient seuls, avec certitude, des phosphates dans la culture de la pomme de terre. Il y a en outre lieu de remarquer que les scories se sont montrées très inférieures au superphosphate et au phosphate préci- pité. Ce dernier surtout me paraît préférable parce que dans nos essais où 1l était employé à côté du superphosphate, nous n’avons pas remarqué comme chez celui-ci le développement de la frisolée, cette maladie qui dessèche les feuilles et les fanes en pleine période d'activité. Enfin, il est aisé de voir que l'emploi des engrais phosphatés ne provoque pas une augmentation dans le rendement brut rappelant celles que nous avons constatées pour les céréales d’automne et pour les plantes racines. Ainsi dans nos essais le superphosphate a donné : 1° Une augmentation de 5 800 kilogr. sur le terrain ayant un pro- duit de 11 300 kilogr., soit excédent de 92 p. 100 ; 2° Une augmentation de 3000 kilogr. sur le terrain ayant un pro- duit de 12 200 kilogr., soit excédent de 26 p. 100 ; 3° Une augmentation de 2900 kilogr. sur le terrain ayant un pro- duit de 17 700 kilogr., soit excédent de 16 p. 100. Le phosphate précipité a donné au maximum un excédent de ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 161 36 p. 100, tandis que les scories ont donné des excédents de 14, 21 et 40 p. 100 avec complets insuccès dans les autres cas. Quant aux engrais azotés et potassiques, on remarque qu’ils ont régulièrement augmenté le rendement brut, seuls ou associés aux engrais phosphatés, Malheureusement, ces engrais élèvent démesu- rément le prix de la fumure minérale en considération de la plus- value qu’on en obtient. Les engrais azotés seraient peut-être utilement et avantageuse- ment employés. Je dis peut-être, car dans la Puisaye, où la pomme de terre est cultivée après défrichement de vieille pâture tempo- raire, c’est-à-dire sur sol bien pourvu de matières organiques, elle peut y trouver, en beaucoup de circonstances, avec la fumure ordi- naire, une quantité d’azote suffisante. C’est le cas des défrichements faits avant l'hiver. Enfin j'ai constaté que le choix des semenceaux, les labours pro- fonds et l'emploi de variétés appropriées sont capables d’élever les rendements de la pomme de terre dans une mesure plus considé- rable que les engrais minéraux et avec beaucoup moins de frais. Il semble qu’on est autorisé à dire que, dans notre assolement de la Puisaye, l’avoine et la pomme de terre sont de médiocres utilisa- trices de fumures minérales directes et en particulier de l’acide phosphorique. Haricots. Les haricots cultivés en plein champ dans la sole de jachère sont extrêmement sensibles à l'apport supplémentaire d’acide phospho- rique. En 1896, nous avions sur des parcelles d’un are mis en compa- raison les superphosphates, scories, phosphate précipité et sels po- lassiques. L'effet des engrais phosphatés était des plus saisissants : les touffes de couleur vert tendre tranchaient sur les touffes chétives des par- celles témoins ou des parcelles à engrais potassiques. Cette exubé- rance des végétations dissimulait la belle récolte très supérieure à celles des parcelles voisines. Les cosses plus abondantes et beaucoup ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1897. — 11. 11 162 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. plus longues nous permettaient d'espérer un rendement doublant au minimum celui des témoins. Les circonstances n’ont pas permis de contrôler par les pesées de la récolle les remarquables effets constatés pendant la végétation. Nous pouvons dire que, sur cette plante à cycle végétatif si court, le phosphate précipité et le super- phosphate ont été de beaucoup supérieurs aux scories. Enfin, du début de la végétation jusqu’à la récolte, il n’a pas été donné de soupçonner une action quelconque de la famure potassique. C’est là une preuve nouvelle que l'apport d’élément fertilisant est inutile dans notre région des sables de la Puisaye. Prairies artificielles. La luzerne n’est cultivée que sur les marnes ostréennes et sur le calcaire à spatongues. Sa durée de bonne production ne va pas au delà de 4 à 5 ans. C’est sur une jeune luzernière de 2 ans établie à la lisière du portlandien et des marnes ostréennes que nous avons fait l'expérience suivante (ancienne ferme-école de l’Orme- du-Pont). Elle avait pour but : 4° de rechercher si l'apport d’acide phospho- rique et de potasse ne serait pas avantageusement employé et à quelle source ces matières fertilisantes devraient être empruntées. Enfin je voulais subsidiairement montrer aux cullivateurs l’inefi- cacilé des sels azotés, sulfate d’ammoniaque et nitrate de soude qu'ils étaient tentés de considérer comme des engrais d'application universelle. Les carrés d’un are étaient entourés d’une bordure de 2 mètres servant de témoin. Pendant la végétation, on pouvait ainsi voir très aisément l'influence des engrais; cette bordure a formé en effet dans la suite un encadrement vert-jaunâtre autour de nos parcelles à végétation luxuriante et d’un vert foncé et très touflues. Lucerne sur sol argileux pierreux des marnes ostréennes. L'expérience comportait 18 parcelles de 1 are disposées en trois rangées ; chaque rangée était séparée de la suivante par une bande ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 163 de 4 mètres. Les carrés séparés entre eux par une bande latérale de 2 mètres de large. L'emplacement a été choisi de manière à ce que toutes nos parcelles aient un plant d’une densité égale ; condition indispensable si l’on veut se rendre compte par la pesée du fourrage de l'effet produit par la fumure. Les engrais ont été répandus à la volée au 15 mars 1894. Sur la première coupe, l’effet a naturellement été nul: les racines de la luzerne de deux ans sont déjà descendues profondément et comme nous n'avons pu obtenir qu'un bon hersage enterrât nos engrais, ceux-ci ne se sont révélés sur la végétation qu’à partir de fin juillet-août. La seconde coupe ayant été pâlurée, nous ne pou- vons rapporter que la physionomie de la végétation. Elle était d’ailleurs très démonstralive. Sur le fond jaunâtre de la pièce, le superphosphate, le phosphate précipité et les sels potassiques se révélaient en dessinant une mo- saïque très nette par la vigueur, la couleur foncée du plus parfait contraste avec les environs. Comme il avait été prévu, les parcelles à nitrate et à sulfate d’am- moniaque, de même qu’à phosphate fossile ne présentaient aucune différence avec leurs voisines. A priori, on pouvait estimer que la supériorité appartenant au superphosphate, et des deux engrais potassiques, le sulfate de po- tasse à faible dose donnait de meilleurs résultats que le chlorure de potassium à dose ordinaire : 200 kilogr. Enfin, ajoutés au super- phosphate, les sels de potasse ont encore augmenté le rendement. Fait à noter, le bétail fréquentait plus spécialement nos carrés d’es- sais, c’est apparemment qu’il y rencontrait un fourrage meilleur. L'analyse botanique montrait, en effet, que dans nos parcelles la vé- élation spontanée avait été élouffée par la luzerne, qui composait ainsi à elle seule tout le fourrage. L'année suivante, 1895, nous avons observé les mêmes effets d’une manière plus accusée encore, et le fauchage nous a donné les résultats suivants (le foin a été pesé un jour après fauchage, lorsqu'il était bien ressuyé). Les chiffres contenus dans ce tableau permettent d'apprécier la valeur relative des engrais apportés l’année précédente ; leur action, 164 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. visible à l’automne 1894, s’est prolongée pendant toute la durée de la luzernière et à peu près dans le même rapport. PRIX | RENDE- AUGMEN- TATION = céDExr | Centési- DÉSIGNATION DES FUMURES. fumure brut male mi- à sur les du nérale. |l’hectare|témoins.| rende- | | ment, de la MENT kilogr. | kilogr. | P. 100. | | | Témoin SHELL 04 : TUE 5 000 » | Superphosphate nn ut 100 Dr. dE cie 9 500! 4 500 Id. — sulfate de potasse, 150 MT : 11400! 6 400 | Id. —+- chlorure de potassium, 150 k. > 10 700! 5 700 Phosphate précipité, 150 kilogr. . : . . . . .| 36. 8 200 Id. —- sulfate de potasse, 150 kilogr. . .|7 19 500 Id. —- chlorure de potassium, 150 kilogr. | 7 9 S00 Phosphate de l'Auxois, 500 kilogr. . . . 1. | 96 » 200! Id. —+- sulfate de potasse, 150 re CEE > | 7 700 Id. —+ chlorure de potassium, 150 kilogr.| 72,2: 6 000 Sulfate de potasse seul, 150 kilogr . . . . . .|40;,: 12 100 Chlorure de potassium seul, 150 kilogr. . . . . 50 | 11 200 Sulfate de potasse seul, 200 kilogr. . . . . . .|: 13 200 Chlorure de potassium seul, 200 kilogr. . . . .|5 13 000 Sulfate d’ammoniaque, 170 kilogr. . . . . . .| 5: 7 500 | Nitrate de soude, 200 kilogr. . . . . Se ONE 7 300 À VIS À D © 19 À 19 Cr ni it nt © Superphosphete minéral 13/15. 7f,90 Phosphate précipité Id. d'os 16/18. . … 11 ,40 Sulfate de potasse Chlorure de potassium . . . , 25 ,00 Nitrate de soude Phosphate de lPAuxois . . . . 7,19 On voit notamment que lemploi d’une famure minérale phospha- tée et potassique exerce sur les prairies arlificielles de ces sortes de terrains l’action la plus heureuse, non seulement sur la quantité, mais aussi sur la qualité. Les engrais azotés, à considérer les chiffres du tableau, ont aug- menté aussi le rendement ; cela tient à ce qu'ils ont favorisé le dé- veloppement des plantes adventices ; de grossières composées onl envahi ces carrés d'expériences où il n'y avait plus que quelques rares brins de luzerne. Ce qu’il importe de retenir, c’est que les fumures phosphatée et potassique permettent de doubler la production de ce précieux ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 165 fourrage et de prolonger la durée des prairies artificielles en retar- dant l’envahissement des plantes adventices qui sont les principaux ennemis de la luzerne. Le mode d'application qui nous a été imposé par les circonstances n’est pas à conseiller. En répandant ces engrais au moment de la semaille de la céréale de printemps qui précède, on sera assuré que, dès le commencement, la prairie arüficielle prendra régulièrement possession du sol à l’exclusion de toute végétation adventice, et les engrais produiront leur maximum d'effet. Il nous reste à examiner l'influence des engrais sur les prairies naturelles. Prairies naturelles. Beaucoup sont établies dans les parties basses, particulièrement humides des assises énumérées plus haut. Toutes celles appartenant à la série sableuse sont pauvres en légumineuses, les houlgues dans les parties fraiches, la flouve odorante sur les parties élevées domi- nent dars le fourrage, tandis qu’au contraire, sur les marnes os- tréennes, ce sont les légumineuses qui forment un tapis épais et court; on v rencontre quelques rares graminées, conche, crételle pour la plupart de qualité secondaire. Enfin, sur les bords des petits ruisseaux qui coulent lentement au fond de nos petites vallées, les prairies sont acides, tourbeuses, ne donnent que de maigres pâtures etne sont fauchées qu’en vue de se procurer de la litière. D’après ce que nous avons vu précédemment, il n’est pas permis de douter de l’heureuse influence des engrais phosphatés sur la plupart de ces prairies. Dans les prairies sableuses, fraîches ou humides, les scories trans- forment, en moins de deux ans, la qualité du foin. Les légumineuses, trèfle des prés, lolier, elc., apparaissent spontanément où, de longue date, les carex et les jones, les renoncules et le populage compo- saient à eux seuls la misérable végétation de ces lieux bas. Ce chan- gement profond dans la flore est si frappant que, à la suite de nos essais, beaucoup de petits propriétaires n'hésitent pas à répandre des scories sur leurs prairies. Si nous pouvions rapporter les expériences que nous avons insti- 166 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. tuées sur une douzaine de points, nous montrerions, en outre, que non seulement la qualité du foin a été singulièrement modifiée, mais qu’encore la production s’en est vivement ressentie. Ces prairies phosphatées sont garnies à la base d’un fourrage épais que la faux coupe beaucoup plus aisément qu’autrefois, où elle glissait sur les agrostis, ces plantes basses, envahissantes et d'assez médiocre valeur nutritive. Il ne nous à pas été possible de réunir autant de chiffres que nous l’aurions voulu pour indiquer la plus-value dans le rendement obte- nue avec les engrais phosphatés. De plus, 1l eût été intéressant de suivre chaque année l’action persistante de ces engrais, afin d’en établir la durée ; malheureusement et à regret, nous avons dû nous contenter d’en juger par l'aspect. Je puis dire tout de suite que ces expériences, faites en 1895, produisent aujourd’hui leur plein effet. Les résultats ci-dessous se rapportent à la récolte 1895 et mon- trent l’influence exercée sur la première coupe, l’épandage ayant été fait au commencement de mars de la même année. Influence des engrais minéraux sur la première coupe qui a succédé à l'application printanière de ces engrais en 1895. Prairie argileuse des marnes ostréennes. État de la prairie avant l'expérience : sèche et haute ; la flore est surtout composée de trèfle rouge, filiforme, peu de graminées, bon foin peu abondant, très bon comme pâture ; seule, la première coupe est fauchée, suivant l'usage du pays. Fauchaison le 1° juillet 1895. Pesée à l’état sec, le 3 juillet, la récolte nous a donné les résultats suivants : FOIN SEC à l’hectare. Témoin. 0 EEE RAC ÉOLIEN EAP RUEMTREEENN VO { 650 kilogr. Scories de déphosphoration, { 000 kilogr. 16/. . . . . . 2 800 — Phosphate précipité, 300 kKilogr.... 4,1... 3200 — Superphosphate seul, 600 kilogr . . . . . . + . . . 3 000 — — seul, 1200 /KH08r. MEN RER EE UE 2PU0M — 600 + 300 kilogr., chlorure de potassium. 3100 — — 600 + nitrate de soude, 200 kilogr. . . . 4 500 — Nitrate de soude seul, 200 kilogr, . . . . . . . . . 2300 — Chlorure de potassium, 300 kilogr. . . . . . . . . . . 18501" — ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 167 Ainsi, après quatre mois d'application, les engrais phosphatés sur cette prairie élevée en doublaient le rendement. Deuxième expérience. — Prairie basse silicéo-argileuse, sous-sol perméable du portlandien. Prairie fraiche, flore graminée domine, inondée pendant l'hiver. A la première coupe on a obtenu : FOIN SEC à l’hectare. TE MOINE ee eee ride te Dole leon eee 4 000 kilogr. GOONKIDET PAM EUR 6500 — Superphosphate 13/15 {800 — ,. . . . . . 6500 — ee MER OP A € 6000 — Phosphate-précité 150 kilogr: 07202 6000 — Superphosphate, 600 + 200 kilogr. nitrate . . . 8200 — Nirate SOUL 200 KO Ra LT RES JOUR Dans les prairies établies sur les sables gréseux, ferrugineux ou argilo-siliceux, les effets sont analogues, l'amélioration de la flore est encore plus marquée, parce qu'ici les essais que nous rapporlons ont été faits en sols mieux pourvus de calcaire et d'acide phosphorique. Quant à la forme phosphorique la plus avantageuse, le premier essai nous indique que les scories, tout en ayant une action presque aussi rapide que les superphosphates, sont préférables à tous les autres phosphates. Pour une même dépense, on oblient un phospha- tage plus énergique, à action prolongée et partant plus productif. Après avoir ainsi promené notre champ d’expériences à travers les cultures de la Puisaye, afin d'interroger les sols de cette région d’après une méthode uniforme, on peut conclure que le phospha- lage des sols de la Puisaye est la première amélioration à introduire dans la méthode de fertilisation des terres. Nous terminons cette étude en montrant l'influence persistante des fumures phosphatées dans la rotation. Durée d'action des phosphates dans l’assolement. Si l’action directe des phosphates appliqués aux plantes annuelles est utile à connaître, il n’est pas moins important de savoir si leur 168 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. heureuse influence se prolonge sur les cultures qui se succèdent dans la rotation. La mesure de cette influence permet alors de résoudre la question économique du choix de lengrais phosphaté le plus avantageux ; en outre, elle indique quelle part des frais de fumures on peut imputer à toutes les cultures de l’assolement. Ces recherches sont donc du plus haut intérêt. Nous sommes heureux d'avoir pu récemment recueillir, sur ce sujet, quelques données intéressantes. Dans la région, on a adopté, depuis longtemps déjà, l'assolement suivant : 1" année. Jachère nue ; plantes sarclées ; betteraves, rutabagas, pommes de terre. 2° année. Céréales d'automne. 9° année. Céréales de printemps. 4e lide. année. Prairie temporaire : trèfle-ray-grass ; fléole, anthyl- L’expérience que nous allons rapporter nous permet d’apprécier l'influence des engrais appliqués au blé sur la prairie temporaire qui succède deux ans après et qui termine la rotation. Les engrais appliqués le 15 octobre 1894, avant le dernier labour, ont élé enterrés à la charrue. Le sol silicéo-argileux des sables de la Puisaye est identique à celui de nos essais n° 4 et 5 sur pommes de terre. Les résultats obtenus sur le blé ont été identiques à ceux de la même année rapportés dans notre première expérience du Thureau. Ils se résument ainsi : les fumures au superphosphale 13/15, 600 kilogr. on 1000 kilogr. de scories ont produit le même excédent. La po- tasse seule ou associée aux engrais précédents n’a produit aucun résultat, Notre expérience nous permet donc, en outre, de voir si dans la suite ces engrais potassiques ont quelque efficacité sur les légumineuses de la prairie temporaire. La prairie temporaire trèfle-ray-grass, semée l’an dernier dans l’avoine succédant au blé récolté en 1895, nous a offert un exemple saisissant de l'influence persistante des fumures phosphatées. L’étendue de la pièce nous avait permis de laisser entre chaque planche traitée aux engrais minéraux une planche témoin. Nous st ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 169 avons donc pu aisément comparer la différence de composition du fourrage avec les lots Lémoins qui entouraient sur quatre côtés nos lots d'expérience. Le ray-grass d'Italie, dominant dans les lots témoins, formait presque à lui seul la totalité du foin. Ce fourrage rare el dur en- cadrait les andains épais des parcelles à scories où le trèfle, la mi- nette s’élevaient haut entre les tiges de ray-grass formant ainsi une garniture épaisse et touffue. On eût dit, et beaucoup l'ont cru, que cel effet saisissant était dû à l'application directe des engrais sur la prairie temporaire. Il n’en était rien : depuis leur application, ces engrais avaient été remués par deux labours, deux hersages et ce- pendant la végétalion indiquait avec la plus parfaite régularité la ligne de démarcation de toutes les planches. Il n’y avait pas la plus lécère confusion. Celte prairie temporaire fauchée à la première coupe donnera un pâturage qui durera ensuile un an ou deux. La fauchaison faite le 15 juin dernier nous à permis de recueillir les chiffres suivants, rendement constaté : 4° en vert (c’est-à-dire pesé derrière le faucheur qui travaillait depuis la chute de la rosée jusqu’à 9 heures du soir) ; 2° en sec. L'examen des chiffres de ce tableau nous permet de constater l’action persistante de l'acide phosphorique. Deux années après son application à une récolle antérieure qui en a elle-même tiré grand profit, le rendement brut de la prairie temporaire a été augmenté dans la proportion de 37 p. 100 à 200 p. 100. La récolte a été dou- blée à la première coupe, le pâturage qui suivra en bénéficiera en- core, mais ce que les chiffres ne peuvent indiquer, c’est l’améliora- üon considérable de la qualité nutritive du fourrage. L'examen de la végétation de ces prairies temporaires de la Pui- saye montre que la flore, au lieu d’être composée exclusivement de tréfle et ray-grass comme dans nos parcelles à scories, est formée, au contraire, de plantes adventices, plantain, reine-marguerite, ombelliféres au milieu desquelles les bonnes plantes sont étouffées. Les rendements en poids ne permettent donc pas de juger com- plètement de l’importance des engrais phosphatés sur la production des prairies temporaires. 170 TABLEAU XI. ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. — Effets prolongés des engrais phosphatés appliqués au blé en 1894. Résultats obtenus sur la prairie temporaire de 1897. DÉSIGNATION DES FUMURES APPLIQUÉES AU BLÉ DE 1894. Témoin. ASE 4e Superphosphate seul, 500 kilogr. Id. 600 kilogr. . Id. 800 kilogr. Superphosphate, 600 kilogr. + sulfate | d'ammoniaque, 200 kilogr. (automne). Superphosphate, 600 kilogr. + nitrate de soude au printemps, 200 kilogr. . . —+- sulfate d'ammoniaque au printemps, 200 kil. Superphosphate, 600 kilogr. + sulfate de potasse, 200 kilogr. Superphosphate, 600 kilogr. + chlort ure de potassium, 200 kilogr. . . . . . Scories, 800 kilogr. 16/18 Longwy. . . 1 000 kilogr. ; 1200 KO SEM EN Te tee Pac tue 1 000 kilogr. + sulfate de potasse, 200 KILOS PE ES A VERRE | 1 000 kilogr. 2O0KIOLT ENS 2NE 1 000 kilogr. + nitrate de une au prin- temps 1895, 200 kilogr. = 1000 kilogr. + sulfate d'ammoniaque, AUS 61 4 M A ATOS A at lors LE 1000 kilogr. + sulfate d'ammoniaque, 200 k. + 200 kil. | Sulfate de potasse, 200 kilogr. . . . . Superphosphate, 600 kilogr. —- chlorure de potassium, sulfate de potasse. Chlorure de potassium, 200 kilogr. | Nitrate de soude seul, temps 1895). Sulfate d'ammoniaque seul . . 200 kilogr. (prin- PRIX de la fumure miné- rale de 1894. 98 100 RENDEMENT EX- © CÉ DENT En vert à l’hectare kilogr. 2 700 4 300 4 950 6 300 4 950 4 950 4950 » 680 total sur les témoins. Four- l’hectare|rage sec. En sec à kilogr. | kilogr. 1 165 » 1600! 435 1660| 495 2 490 | 1 325 1660 | 495 1660! 495 1660! 495 1800 | 635 {800 | 635 3 360 | 2 195 3 580 | 2415 3 740 | 2 575 3 690 | 2 525 3 630 | 2 465 3 580 | 2415 3580 | 2415 4 290 | 3 125 1050 [552 1120 [253 . 1250|F355 1275 | 238 | | | | AUGMEN- TATION ceutési- male des pro- duits. P. 100. 1) —1 [SA] ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. £TI De cette expérience il résulte : Que si le superphosphate était équivalent aux scories sur la ré- récolte de blé, il est ici, très inférieur ; son influence se traduit par une augmentation de 40 à 45 p. 100, tandis qu’une fumure d’un prix à peu près égal donnée sous la forme de scories a plus que doublé le rendement de la prairie temporaire. Avec le superphosphate à la dose de 600 kilogr. on a apporté 13 << 6— 78 kilogr. d’acide phosphorique ; Avec les scories à la dose de 1 000 kilogr. on a apporté 16 x 10 — 160 kilogr. d'acide phosphorique. Pour une somme déterminée, environ 90 fr. par hectare, les sco- ries apportent plus du double d’acide phosphorique, dont l’action se fait sentir naturellement pendant plus longtemps sur les récoltes qui se succèdent dans la rotation. Constatons en passant que les sels potassiques n’ont aucune action sérieuse sur ces terres ; qu’enfin les engrais azotés solubles, comme tout le monde sait, n’exercent aucune espèce d’action sur les ré- coltes qui suivent celles où on les applique. Ainsi donc, de l’ensemble de nos expériences faites chez les culti- vateurs dans les conditions identiques à celles de leurs cultures, sauf la fumure, on peut conclure en toute confiance : 1° Que l'emploi des engrais complémentaires pourrait se borner à l’apport d’un seul élément, l'acide phosphorique. A cette famure de fond, .pour les céréales, les betteraves, on pourra avec avantage associer le nitrate de soude, ou le sulfate d’ammoniaque en sols hu- mides ; ils seront employés pendant la végétation, mais toujours en- terrés soit à la herse, soit à la houe. 2° Ces expériences confirment nos conclusions formulées en 1894 dans les Annales agronomiques, à savoir : exception faite des marnes ostréennes et du calcaire à spatongues, l’inutilité complète de la potasse pour les céréales, les légumineuses. Pour les pommes de terre elle paraît agir, mais au prix actuel, les engrais potassiques ne paraissent pas être d’un emploi général avantageux. 9° En ce qui concerne le sulfate d’ammoniaque, nous avons re- connu, dans nos expériences faites depuis 1894, que son action est sensiblement égale à celle du nitrate de soude dans les sols argilo- 112 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. siliceux frais des argiles de Myennes, des argiles barioles et des argiles à plicatules, voire même bien bas des sables de la Puisaye. Au prix actuel, cet engrais apportant au sol, ponr une dépense dé- terminée, une somme d'azote supérieure à celle du nitrate de soude, il sera avantageusement substitué à ce dernier dans ces cas spé- CIaux. 4 On pourra s’en tenir pour la fumure phosphatée aux super- phosphates et aux scories. Les premiers seront employés dans la culture des plantes à végé- tation rapide et à système radiculairé peu étendu: betteraves et choux-navets repiqués en juin, vesces de printemps, haricots-chan- vre : doses convenables, 400 à 600 kilogr. par hectare. Les scories à dosage garanti et riches seront employées en tout autre cas aux doses de 800 à 1 000 kilogr. à l’hectare. Nous ne pouvons terminer cel exposé sans insister sur les consé- quences évidentes de l'emploi régulier des engrais phosphatés dans le système de culture de la Puisaye. Elles sont considérables ; on peut les résumer ainsi : Une dépense de 40 à 50 fr. par hectare se traduit, à la récolte, par une augmentation directe de : PAILLE. GRAIN. p. 100 p. 100 BIS ET PE en Eee 30 à 40 115 Plantes sarelées, racines . . plus de 200 p. 100 et indirectement, sur les prairies temporaires, une augmentalion d'environ 200 p. 100. L'apport de l'acide phosphorique aura, en outre, pour effet, de mettre à profit toutes les facultés productives du sol, et au lieu des récoltes si irrégulières d’une année à l’autre que nous constalons, j'estime qu’on peut arriver à régulariser beaucoup les rendements. Cette régularité, abstraction faite de l'influence prépondérante des saisons, est évidemment due aux proportions convenables d'azote, d'acide phosphorique, potasse et chaux disponibles, Or, l’un d’eux, l'acide phosphorique, dans ce pays où le sol est originairement pauvre en cet élément, fait défaut à toutes les plantes ; celles-ci languissent ÉTUDE SUR L'EMPLOI DES ENGRAIS PHOSPHATÉS. 173 de celte pénurie, et c’est seulement par hasard que lon obtient par des fumures ordinaires cet état d'équilibre que révèle si bien la vé- gélalion vigoureuse, le développement harmonique de toutes les parties de la plante. Dans un pays d'élevage comme celui-ci, où les animaux pâturent dans les prairies temporaires et les prairies naturelles de juillet jus- qu'en hiver, n'est-il pas permis d’espérer obtenir les plus heureux résullats du phosphatage du sol dans l'amélioration du bétail ? Nos cultivateurs ne me paraisseut pas assez comprendre la rela- tion étroite du sol et du bétail. Le rôle de l'acide phosphorique dans le développement précoce de nos animaux est pourtant si bien re- connu par nos éleveurs, que bon nombre cherchent à lintroduire sous la forme minérale dans la ration des jeunes animaux. D’excel- lentes raisons physiologiques démontrent que la seule manière de ie faire pénétrer sûrement et efficacement dans l’organisme, c’est de l’introduire par les fourrages. Phosphater ses terres et ses prai- ries, c'est donc phosphater son bétail ; c’est hâter son évolution et sa croissance, C’est l'améliorer beaucoup plus sûrement que par les croisements avec les races précoces, ou par l'introduction de celles-ci dans ce milieu impropre par lui-même à suffire à leurs besoins. Les cullivateurs ne doivent done pas considérer seulement l'effet direct des engrais phosphatés sur les cultures ; qu'ils se rappellent que l’emploi de l'acide phosphorique sur le blé assure non seule- ment les rendements rénuméraleurs de cette culture, mais aussi et surtout, loin d’épuiser leurs terres, leur fait produire, dans la suite, le double que par la méthode ordinaire, en foin beaucoup plus nu- titi el plus riche en acide phosphorique. Voilà ce qu'il était bon de montrer aux cultivaleurs de notre région. En faisant en quelque sorte voyager notre champ d’expériences sur leurs propres exploitations, J'espère les avoir convaincus que les engrais phosphatés, en élevant à la fois la production céréale et four- ragère et agissant d’une façon persistante pendant toute la durée de la rotation, ne sauraient ruiner leurs terres. L'usage rationnel de ces engrais permettra d'améliorer et d’éle- 174 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ver la dénsité du bétail, et en dernière analyse augmentera la masse de fumier et partant la richesse du sol en humus. C’est assez dire ce que vaut ce ridicule préjugé qui règne encore trop dans nos campagnes : « Tout ce qui n’est pas fumier ruine la terre ». f Saint-Sauveur, 24 juin 1897. RECHERCHES EXPÉRIMENTALES SUR L'ASSIMILATION DE L'AZOTE AMMONTACAL ET DE L'AZOTE NITRIQUE PAR LES PLANTES SUPÉRIEURES ! Par M. LAURENT DU LABORATOIRE DE BOTANIQUE DE L'INSTITUT AGRICOLE DE L'ÉTAT, A GEMBLOUX. Seuls parmi les organismes, les végétaux sont capables de faire la synthèse, non seulement des matières hydrocarbonées, mais encore celle des substances albuminoïdes. Ils utilisent l'azote libre, l’acide nitrique, l'ammoniaque et les combinaisons azotées organiques. Chez les légumineuses, l'assimilation de l’azote libre est l’œuvre de microbes spéciaux qui vivent dans les nodosités radicales ; bien qu’elle ait lieu à l'obscurité, elle dépend indirectement de la lu- mière; en effet, pendant ce travail de synthèse, il y a disparition d'importantes réserves d’amidon provenant de l'assimilation foliaire*. Le Clostridium Pasteurianum, de Winogradskv, consomme, pen- dant qu’il fixe l’azote, de grandes quantités de sucre *. 1. Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 3° série, t. XXXII, n° 12, p. 815-865, 1896. 2. Émile Laurent, Recherches sur les nodosités radicales des Légumineuses. (Annales de l’Institut Pasteur, t. V, 1591.) | 3. S. Winogradsky, Recherches sur l'assimilation de l'azote libre de l'atmosphère par les microbes. (Archives des sciences biologiques, t. IL, n° 4, 1895.) 176 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Quant aux algues, telles que les Nostoccacées, qui, seules ou en symbiose avec des bactéries, assimilent l'azote libre, elles ne se dé- veloppent qu’à la lumière. Ces divers micro-organismes empruntent sans aucun doute l’é- nergie nécessaire à la synthèse des matières albuminoïdes, soit directement, soit indirectement, à la radiation solaire; à défaut de chlorophylle, ils utilisent une substance hydrocarbonée appro- priée. En est-il de même pour la synthèse des substances albuminoïdes à l’aide des nitrates et des sels ammoniacaux ? Ces combinaisons azotées peuvent-elles pénétrer dans la matière vivante sans l'inter- vention de l’action solaire ? Pour les organismes inférieurs privés de chlorophylle, la question est résolue depuis longtemps déjà. Pasteur a fait croître, à l'obscurité, la levure de bière dans un milieu minéral additionné de sucre et d’un sel ammoniacal ”. D’autres, après lui, ont cultivé de même des bactéries et des moi- sissures dans des mélanges salins renfermant un nitrate ou un sel ammoniacal *. Assurément, pour les organismes ainsi cultivés comme pour le Clostridium Pasleurianum, 1 faut qu'une certaine quantité de sucre soit brûlée pour fournir l’énergie nécessaire à la synthèse des ma- tières albuminoïdes. Néanmoins, on peut affirmer que chez les plantes inférieures l'assimilation de l’azote ne dépend ni de la chlo- rophylle ni de la lumière (directe), qu’il s'agisse de l'azote des com- binaisons minérales, ou, à plus forte raison encore, de l’azote des combinaisons organiques plus ou moins simples. L'état de nos connaissances est beaucoup moins parfait si l’on en- visage, non plus les végétaux cellulaires, mais les plantes supé- rieures. On sait déjà que leurs capacités de synthèse pour les subs- tances hydrocarbonées sont beaucoup plus limitées que celles des 1. Pasteur, Mémoire sur la fermentation alcoolique. (Annales de chimie el de phsique, t. LYII, 1859.) 9, Émile Laurent, Recherches sur la valeur comparée des nitrates et des sels am; moniacaux comme aliment de la Levure et de quelques autres plantes, (Annales de l'Institut Pasteur, t. HE, 1889.) ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. LTT microbes’. En serait-il de même pour la production des matières albuminoïdes ? | Les expériences de Th. Schlæsing fils et Ém. Laurent ont dé- montré que les plantes vasculaires, autres que les légumineuses, qui n’ont pas de nodosités microbiennes, n’assimilent jamais l'azote libre*. A la suite des travaux de A.-B. Franck, on admet, sans que ce soit absolument démontré par l'expérience, que diverses espèces de plantes pourvues de micorhizes peuvent se nourrir aux dépens non seulement des composés hydrocarbonés de l’humus, mais également de ses combinaisons organiques azotées. Ce mode de nutrition doit être fréquent dans les forêts des régions équatoriales abondamment pourvues d’humus. Les plantes carnivores ont aussi la propriété d’utiliser les pro- duits azotés de la digestion des petits animaux qu’elles capturent. Enfin, expérimentalement, on a pu alimenter des plantes privées de mycorhizes (maïs) avec des solulions d’asparagine privées de microbes. Pour ce qui est des nitrates, on a des raisons de supposer que les plantes supérieures ne peuvent les utiliser en l’absence de lumière, mais c’est là une opinion qui a été mise en doute. Quoi qu’il en soit, on ne sait pas non plus si la consommation des nitrates est liée ou non à la présence de la chlorophylle. Si nous considérons l’assimilation des sels ammoniacaux, les quel- ques faits relatifs à leur disparition dans les feuilles manquent de netteté : ici encore, on ne peut affirmer, d’une façon formelle, si leur utilisation exige l’intervention de la lumière et de la chloro- phylle. Nous nous sommes proposé d’élucider la question de la produc- : tion de malière organique azotée aux dépens de l'ammoniaque et de l'acide nitrique. 1. Comparer, à ce point de vue, les résultats des essais d'Étile Laurent, Sur la nutrition de la Levure et de la Pomme de terre avec des solutions organiques. (Bul- lelin de la Sociélé royale de botanique de Belgique, t. XXNI, et Annales de l'Institut Pasteur, t. II, 1889.) 2. Annales de l’Instilul Pasteur, t. VI, pp. 635 et 824, 1892. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1897. — I, 12 178 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les travaux antérieurs sur la question. Ce fut Pagnoul qui observa, le premier, que dans les tissus des plantes exposées au soleil, les nitrates disparaissent et sont transfor- més en combinaisons organiques azotées. Il fut amené à faire cette importante découverte à la suite des inconvénients que présente pour la pureté des jus l'emploi tardif des nitrates dans la culture de la betterave à sucre *. Il voulut rechercher si l'accumulation de ces sels dans les racines était due uniquement à cette cause, à une surabondance d'éléments azotés, et ne pouvait être attribuée aux conditions de la végétation et notamment à l'intensité de la lumière. En analysant à des moments déterminés des betteraves en crois- sance, cultivées en sol enrichi de nitrates, dans des conditions va- riables d’éclairement, 1l put constater que, sous l’influence de la lu- mière, les nitrates amenés dans les feuilles y disparaissent presque aussitôt ; au contraire, ils s'accumulent à l’obscurité et ne subissent pas de modification. Pagnoul fut ainsi amené à celte conclusion fort importante : & La lumière paraît avoir à remplir, dans la décomposition des nitrates et dans la formalion des principes azotés et des corps organiques, un rôle analogue à celui qu’elle Joue dans la décomposition de la- cide carbonique pour la formation des corps hydrocarbonés. » Cette conception nouvelle de la formation des principes azotés des plantes n’a point subi jusqu'ici d'autre contrôle expérimental. Cependant, plusieurs faits tendent indirectement à prouver que c’est surtout dans les feuilles, sous l'influence des radiations, que s'effectue la formation des matières organiques azotées aux dépens des nitrates. L'absence de ces composés dans les limbes foliaires, alors qu’ils existent plus ou moins abondamment dans les racines, 1. Expériences diverses faites à la Station agricole du Pas-de-Calais sur la culture de la Betterave. (Annales agronomiques, t. NV, p. 481, 1879.) — Champs d'expé- riences de la Station agricole du Pas-de-Calais. Essais divers. (Annales agronomiques, t. VIL, p. 5, 1881.) — Influence de la lumière dans les phénomènes de végétation. (Bulletin de la Slation agronomique du Pas-de-Calais, p. 27, 1890.) ASSIMILATION DE L'AZOTE AMMONIACAL, 119 les tiges, les rameaux et les pétioles, a été signalée par B. Frank, puis surtout par Schimper*. Toutefois, Frank pensait que chez les arbres et certaines espèces pauvres en nitrates, l'assimilation de ces sels peut avoir lieu dans tous les organes traversés par des faisceaux libéroligneux, même déjà dans les racines. L’accumulation d’asparagine dans les feuilles pendant le jour, dé- montrée par Frank et Otto *, peut aussi trouver son explication dans la réduction des nitrates à la lumière. Quant à l'assimilation de l’ammoniaque, on sait que ce corps peut servir à la production de matières organiques azotées, aussi bien chez les plantes supérieures que chez les micro-organismes. Cette transformation s'opère directement, sans oxydation de l’am- moniaque. Les recherches de Molisch*, de Frank*, de Schulze*, de Kreusler * et les expériences toutes récentes de Pagnoul* ne laissent subsister aucun doute à ce sujet. Elles prouvent que, contrairement à l'opinion de Berthelot et André”, les plantes supérieures ne nitri- lient jamais l’ammoniaque. L'influence de la radiation sur l'assimilation de l’ammoniaque n’a pas encore été précisée. A la fin de son important travail sur l’inter- vention de l’ammoniaque atmosphérique dans la nutrition végétale, 1. Ursprung und Schicksal der Salpetersäure in der Pflanze. (Ber. d. deutschen bot. Ges., t. V, p. 472, 1887.) 2. Botan. Zeitung, 1888. n° 5 ; Flora, 1890. 8. Franck et Otto, Untersuchungen über Stickstoffassimilation in der Pflanze. (Ber. d. deutschen bot. Ges., t. IX, 1890.) 4. Molisch, Ueber einige Beziehungen zwischen anorganischen Stickstoffsalzen in der Pflanze. (Sézungsber. d. math.-natur. Cl. d. Kais. Akademie Wien, Bd. XCY, Heft [, p. 221.) >. Schulze, Bilden sich Nitrate im Organismus hôherer Pflanzen ? (Ber, d. deutschen chem. Ges., p. 1500, 1887.) 6. Ber. der deutschen bot. Ges., t. V, 1887. 7. Kreusler, Bildet dich im Organismus hôherer Pflanze Salpetersäure ? (Ber. d. deutschen chem. Ges., p. 999, 1887.) 8. Pagnoul, Assimilabilité de l'azote par les plantes sous les deux formes nitrique et ammoniacale. (Annales agronomiques, t. XXII, 1896.) 9. Berthelot et André, Sur la formation du salpêtre chez les végétaux. (Annales de chimie el de physique, 6° série, p. 116, 1886.) 130 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Muntz! fait remarquer que la lumière favorise l’utilisation des com- posés ammoniacaux par les plantes ; mais il ne cite pas d'expérience bien concluante à l’appui de cette opinion. En revanche, les recherches de Kinoshita*, faites sur des plantes d'orge et de mais développées à l’obscurité, tendent à prouver que l'assimilation de l’azote ammoniacal ne dépend pas de l’action du soleil; et il émet la même opinion pour ce qui concerne les nitrates. Méthodes d'analyse adoptées. L’azote nitrique a été dosé par le procédé Schlæsing. Un poids de matière séchée à 100° est soumis à l'extraction alcoolique pen- dant douze heures en présence d’un peu de chaux. L’extrait évaporé à sec, repris par l’eau, est mis à bouillir dans un ballon, afin d’en chasser l'air ; puis, sans laisser pénétrer celui-ci, on introduit 30 centimètres cubes de chlorure ferreux, 30 centimè- tres cubes d’acide chlorhydrique, qu’on a purgés d’air par une courte ébullition. Le bioxyde d’azote qui se dégage est reçu dans une cloche à mercure dans laquelle on a placé 20 centimètres cubes d’un lait de chaux destiné à absorber l’acide chlorhydrique qui a passé avec le gaz. Le bioxyde d’azote est transvasé dans un ballon purgé d’air par l’ébullition de quelques centimètres cubes d’eau. Le gaz est absorbé par le vide qui se produit pendant le refroidissement du ballon. Ce dernier est mis en communication avec le gazomètre à oxygène ; après six heures, tout le bioxyde est transformé en acide nitrique. fl ne reste plus qu’à doser l'acide formé par une solution d’ammonia- que titrée. Le dosage de l'azote organique et ammoniacal à été fait par le procédé Kjeldalh : Un gramme environ de la matière séchée à 100°-105° et finement 1. Muntz, Recherches sur l'intervention de l'ammoniaque atmosphérique dans la nutrition végétale. (Annales de La science agronomique française el étrangère, série 2, t. I, 1896.) 2, Kinoshita, Bull. College of agricullure. Tokio, 1895. ASSIMILATION DE L'AZOTE AMMONIACAL. 181 pulvérisée est introduit dans un ballon avec 20 centimètres cubes d’acide sulfurique à 66° B. et 06°,8 de bioxyde de mercure. Le ballon est chauffé jusqu’à ce que le mélange devenu d'abord goudronneux soit complètement décoloré. Après refroidissement, on ajoute au liquide transvasé dans un grand ballon, 100 centimètres cubes de soude caustique à 30 p. 100, 90 centimètres cubes de sulfure de sodium à 8 p. 100 et 1 gramme de poudre de zinc. Les vapeurs ammoniacales sont reçues dans 100 centimètres cubes d'acide sulfurique titré. L’excès de cet acide est neutralisé par l’ammoniaque titrée en prenant le tournesol pour indicateur. Le procédé Kjeldahl ainsi appliqué permet de doser l'azote orga- nique (albuminoïdes, amides, asparagine) et ammoniacal. Les ni- trates échappent intégralement à l'analyse, grâce à la présence du bioxyde de mercure. | L’azote ammoniacal est obtenu par distillation de la matière sèche pulvérisée, en suspension dans l’eau, en présence de magnésie cal- cinée. On sait que celle-ci ne décompose que les sels ammoniacaux et laisse intacte la presque totalité des composés organiques azotés des végétaux, si ce n’est toutefois quelques principes amidés ins- tables. Pour les matières bien homogènes, la limite d’erreur du chef des lectures et des mesurages de solutions titrées peut être évaluée à Omer 5 d'azote. D’habitude nous opérions sur le quart ou le sixième de la matière et l’erreur maxima était de 2 ou 3 milligrammes. Le plus souvent, pour le dosage de l’azote organique et ammontacal, on à fait deux dosages au moins et on a pris la moyenne des résul- ‘tats. Rarement, ils différaient de plus de 2? milligrammes pour des quantités totales de 200 à 300 milligrammes. Faute d’avoir tenu compte de l’erreur inévitable dans ce genre d'analyses, on a pu être conduit à des interprétations vicieuses des résultats donnés par des recherches sur l'azote des végétaux. 182 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Expérience I. — Feuilles vertes de betteraves exposées à la lumière sous des écrans absorbants. Les recherches de Pagnoul ont mis en évidence l’action de la lu- mière sur l'assimilation des nitrates dans les feuilles vertes. Bien que cet expérimentateur ait opéré avec des plantes cultivées sous une cloche en verre violet, on n'avait aucun renseignement sur l’in- fluence propre aux diverses régions du spectre sur la réduction des nitrates. Car dans les essais de Pagnoul, les plantes sont restées cons- tamment sous la cloche violette, ce qui a dù forcément troubler toute leur nutrition. On ne peut donc tirer aucune conclusion de ce fait que, dans ces conditions, les plantes renfermaient des quantités considérables de nitrates. Comme on va le voir par les résultats de l'expérience [ et aussi par ceux de l’expérience IX, ce sont les rayons violets et surtout ultra-violets qui interviennent dans l'assimilation des nitrates. Le 16 juillet 1895, à 8 heures du matin, des feuilles de betterave à sucre sont cueillies dans un champ. On en fait quatre lots, dont l’un, A, doit servir à doser les nitrates ; il est aussitôt desséché et soumis à l’analyse. Le lot B est placé sous une cloche à double paroi contenant une couche de 30 millimètres d’eau ; les pétioles des feuilles plongent dans l’eau distillée. Le lot C est placé sous un écran formé par une solution de bi- chromate de potassium à saturation, de la mème épaisseur que la couche d’eau recouvrant B. Entin, la cloche qui se trouve au-dessus du lot D contient une so- lation de sulfate de cuivre ammoniacal à 2 p. 100. Les pétioles de feuilles composant les lots C et D plongent aussi dans l’eau distillée. L'expérience à duré du 16 juillet, à 9 heures du matin, au soir du 22 du même mois, c’est-à-dire pendant sept jours. Durant ce laps de temps, le ciel a été presque toujours couvert et pluvieux, sauf le 17 et le 18 avant midi. ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. 183 L’acide nitrique a été dosé dans chaque lot par la méthode de Schlæsing. | Lot A (échantillon). — Poids sec: 3*°,405. Azote nitrique : 198,9 = 5.6 p. 100 du poids sec. Lot B (sous l’eau). — Poids sec : 4#,036. Azote nitrique : 5"%,65 — {1.4 p. 100 du poids sec. Lot C (sous le bichromate de potassium). — Poids sec : 5%,057. Azote nitrique : 12%#,2 = 4 p. 100 du poids sec. Lot D (sous le sulfate de cuivre). — Poids sec : 337,678. Azote nitrique : 5"%7,1 — 1.4 p. 100 du poids sec. Au moment où elles ont été cueillies, les feuilles renfermaient une quantité d'azote nitrique égale à 5.6 p. 100 de leur matière sèche ; sous l'écran formé par la solution de bichromate de potas- sium, une pelite partie seulement de cet azote a disparu, tandis que sous l’eau et le sulfate de cuivre la plus grande partie a été transformée. La réduction des nitrales duns les feuilles vertes est un phéno- mêne que domine l'action des rayons les plus réfrangibles du spectre. Expérience II. — Tiges étiolées de pommes de terre conservées à l'obscurité. Des pommes de terre ont germé dans une cave obscure. Le 12 juillet 1895, on a cueilli 1250 grammes de tiges éliolées, dont on a fait quatre lots désignés par les lettres A, B, C et D. Ils sont de composition bien uniforme : on évite de rassembler un grand nom- bre de tiges minces dans un même lot; pour éviter des inégalités dans la composition, on n’emploie que les portions supérieures des tiges et on rejette les parties vieilles, ligneuses. Le lot À pèse 100 grammes; il servira au dosage de la matière sèche, de l’azole organique et ammoniacal. 184 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Le lot B, de 250 grammes, est placé à l'obscurité et plonge dans l’eau jusqu’à 3 centimètres de profondeur. On prépare la solution suivante, qui n’est autre que le mélange salin de Sachs, dans lequel le nitrate de potassium est remplacé par le sulfate du même métal et auquel on ajoute du sucre. Eau (privée de nitrate et d'ammoniaque). . . . 1 000,0 Sutate TePDIASSIOM PAT A MN PRE 057,5 — de magnésium . . . . . . de FA EE 0 ,5 = M de Calc te RARE MNT 0 ,5 SaCCHarOSe (TÉSADUTE NE PRE CR cite 40 ,0 Comme l’eau, la saceharose est très pure ; elle ne contient que des traces d’azote ammoniacal et nitrique. À une moitié de la solution, on ajoute 2 p. 100 de nitrate de po- tassium ; à l’autre moitié, 2 p. 100 de sulfate d’ammoniaque. Nous avons employé ces solutions dans les expériences IT à IX ; nous les désignerons simplement sous les noms de solutions nitrique et ammoniacale. Il est bien entendu qu’elles renferment toujours des sels minéraux et du sucre. Le lot C pèse 400 grammes ; les Liges qui le composent plongent par la base jusqu’à 3 centimètres de hauteur dans la solution ammo- niacale. Le lot D pèse 200 grammes ; il plonge de même dans la solution nitrique. Les lots G et D sont placés dans l'armoire obscure à côté du lotB ; la température y varie de 15 à 22°. Tous les Jours les solutions et l’eau sont renouvelées pour éviter le développement des moisissures et l'élaboration de matières albuminoïdes par ces organismes. Le 20 juillet au soir, au bout de huit jours et demi, on a mis fin à l'expérience. Étude du lot A (échantillon). Matière sèche : 5#,76 pour 100 gr. de poids frais. Azote organique et ammoniacal, . . . . . . « . . 26487 ,5 AZOTEAMMOMRCAl RS ae Le 194.1 AZOLG II NO Re Lee de a Rene 107 54 Azote organique (2646r,5 — 138,1) . , . . . . 20L A ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. 185 Étude du lot B (tiges dans l'eau). — Matière sèche : 557,73 p. 100. Dans 100 grammes de tiges, il y a: Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 261m2,9 Azote ammoniacal . . . . . MT he ie 1ORP Azote organique (261"27,9 — tomsr. ‘) CPI RES 251 7,8 Azote nitrique : le dosage n'a pas réussi. Étude du lot C (tiges dans la solution ammoniacale). — Matière sèche : 6,07 p. 100- L'augmentation de la matière sèche provient de l'absorption du sucre ; il peut même, comme on sait, en résulter une production d’amidon. Dans 100 grammes de tiges fraîches, 1l y a: Azote organique et ammoniacal. . : . ... . . . . 289M87,8 Azote ammoniacal . . . . . ASIE CAR SONReZ Azote organique (289m8r,8 — 36m. a) SOA RS 253 ,6 MO TIQUEATs Le cc ls ellare Tu See 0 Étude du lot D (tiges dans la solution nitrique). — Matière sèche : 5,73 p. 100. Dans 100 grammes de tiges fraiches, il y a : Azote organique et ammoniacal. . . 27587 ,6 Azote ammoniacal . : SUR ONE 247,4 Azote organique (275"87,6 — 24m87 4) APS? AZOICANIITIQUE RE RTE nr 37 ,0 I n’y a pas eu transformation de l’acide nitrique en matières or- ganiques azotées ; mais une certaine quantité de nitrate a été trans- formée en composés ammoniacaux. On savait déjà que les nitrates peuvent être réduits en nitrites dans les tissus vivants des plantes, notamment par la pomme de terre‘ Résultats de l'expérience Il. AZOTE . LOTS. organique am- SR one all organique. nitrique. milligr. milligr. milligr. milligr. Tiges coupées venant de la cave. . 264,5 13.1 251 ,À 10,3 —— dans l'eau 2. 261,9 lo 251,8 » — dans la solution ammoniacale. 289,8 36,2 253,6 8,9 == — nitrique. . . 275,6 24,4 251,2 37,0 1. Émile Laurent, Bulletin de l'Académie royale de Belgique, 3° série, t. XX, p. 478, 1890. 136 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les différences entre les quantités d’azote organique des quatre lots sont insignifiantes, inférieures à la limite d'erreur que les ana- lyses comportent. À l’obscurilé, les liges étiolées de pomme de terre n’assimilent mi l'azote ammoniacal ni l'azole nitrique. Expérience III. — Tiges verdies de pomme de terre exposées au soleil. Le 27 juillet 1895, 600 grammes de tiges de pommes de terre, cueillies avec les mêmes soins que dans l’expérience IT, ont été pla- cées à la lumière afin de les laisser verdir. Tous les deux Jours, on a renouvelé l’eau dans laquelle elles plongeatent. Le 3 août, les tiges ont été retirées; elles étaient devenues vertes et portaient de jeunes feuilles de même couleur. On a coupé la par- tie inférieure des tiges, le plus souvent pourrissante, puis on a fait quatre lots: Lot A: 150 grammes destinés au dosage de lazote organique, ammoniacal et nitrique. Lot B: 100 grammes ; les bases des tiges plongent dans Peau. Lot C: 150 grammes, placés dans la solution ammoniacale. Lot D: 150 grammes, que l’on fait plonger dans une solution ni- trique. Les lots B, C et D sont placés à la lumière sur le rebord d’une fe- nêtre exposée au nord-ouest. Les solutions sont renouvelées tous les jours. L'expérience à duré jusqu’au 8 août matin. Dans l'intervalle, le ciel avait élé assez clair les 3 et 5 août; couvert et pluvieux, les ‘ trois autres Jours. Étude de A (échantillon), — Matière sèche : 5,7 p. 100. Dans 100 grammes de tiges fraiches, il y a : Azote organique ct ammoniacal. . . . . . . . . . 292281; 4 AZOIE ARMONIREAl LE ln 4. et URSS Le 30. .2 Azote organique (292m8,4 — 3037 2) , , , . . . 2021 442 Azote nitrique. . ,Ô ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. 187 Au moment où elles ont été coupées à la cave, ces tiges renfer- maient 251"8,4 d'azote organique, 13,1 d’azote ammoniacal, 108,3 d'azote nitrique. Pendant le verdissement, elles ont perdu la plus grande partie de leur nitrate ; par contre, elles sont plus ri- ches en ammoniaque formée aux dépens de l’acide nitrique et enlevé à l’air et à l’eau. Il y a eu assimilation de 262"5,2 — 951"5,4 — 10,8 d'azote organique. Étude de B (tiges dans l'eau). — Matière sèche : 6%°,5 p. 100. Dans 100 grammes de tiges fraiches, 1l y a: Azote organique el ammoniacal. .:. . . . . . . + 299m8r 4 AZOLCPAMMOMACAPSIR., RENE if at Qal euUe 81.438 Azote organique (292m87,4 — 8m 8), . . . . . . 230006 Azote nitrique. LME L’ammoniaque contenue dans les tiges pendant le verdissement a en grande partie disparu sous l’influence de la lumière solaire. Un peu de nitrate a persisté dans les tiges. Étude de C (tiges dans la solution ammoniacale). — Matière sèche : 7#,5 p. 100. Dans 100 grammes de tiges fraiches, 1l y a : Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 4292088 SAOLCRAMITIONIAC AIR MT DRE ele re Seite 68 ,5 Azote organique (422"57,8 — 685,5) , . . . . . 354 ,3 ALOLE MILFIQUE:r ACMEMENENER LD Ines » Il y a eu une assimilation énergique de l’azote ammoniacal. Étude de D (tiges dans la solution nitrique). — Matière sèche : 75,02 p. 100. Dans 100 grammes de tiges fraiches, il y a : Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 38287, 7 AzOTe AMICALE ne: ee ARS LT AO 33 .,9 Azote organique (382m8r,7 — 338,5) . . . . . . 349. .,2 AZOLe RME AR Vert À Me are UN RTS TRS Les lots C et D renferment beaucoup plus de matière sèche que le lot B et surtout que le lot A ; ils ont assimilé l’acide carbonique de l’air absorbé et en outre le sucre des solutions. 188 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les tiges verdies exposées à la lumière assimilent l'azote nitrique ; il paraît y avoir d’abord réduction de lacide nitrique en ammonia- que, comme tend à le prouver la quantité d’azote ammoniacal cons- talée lors de l’analyse. L’azote nitrique (75,6) provient du nitrate qui se trouvait diffusé au moment où l’on à mis fin à l'expérience et qui n’avail pas encore été décomposé par l’action combinée du protoplasme et de la lu- mière. Résultats de l'expérience III. AZOTE LOTS. organique am- à Fee ARE moniacal, ©r#anique. nitrique. milligr. milligr. milligr. milligr. Tiges venant de la cave 264,5 13 251,4 10,3 MN OTOIRS RAR Ie 292,4 30,2 26262 1,6 — verdies dans l'eau . nee 292 ,4 8,8 283,6 1,8 — verdies dans la solution ammo- MACAIE PRE EN PE ORSU LE 492,8 68,5 304,3 » Tiges veraies dans la solution nitrique. 382,7 33,9 349,2 7,6 Les tiges verdies de poinme de terre assimilent l’azole ammoniacal el l’azole nitrique à la lumière solaire. Expérience IV. — Tiges étiolées de l’asperge à la lumière. Après les expériences Il et IT, nous aurions voulu opérer avec des tiges de pomme de terre non verdies exposées à la lumière. Un essai fait dans ce but ne nous à pas réussi parce que le verdissement des tiges étiolées de cette espèce est très rapide. Alors nous avons eu recours à des tiges d’asperges (asparagus ofjicinalis) qui s'étaient développées à la cave et qui étaient complètement privées de chlo- rophylle. Ces Ligés ont été découpées en morceaux; on a réuni {ous ceux de la base, tous ceux de la partie moyenne et tous ceux du sommet en trois lots pesant chacun 200 grammes. Chaque lot a été divisé en quatre portions de 90 grammes, puis on a fait quatre lots de 150 grammes en réunissant 50 grammes de chacun des trois pre- ASSIMILATION DE L'AZOTE AMMONIACAL. 189 miers lots. On a ainsi obtenu de nouveaux lots comprenant une quan- tité égale des morceaux de tiges pris aux différents niveaux. Il y a tout lieu de croire que les quatre lots sont identiques comme com- position chimique. Nous les appellerons À, B, G et D. Le lot A sert au dosage de l’azote total et ammoniacal. Les bases des tiges du lot B plongent dans un vase contenant &e l’eau. Le lot G est placé dans un vase renfermant une couche de 3 centi- mètres de solution ammoniacale. Le lot D plonge de même dans la solution nitrique. La mise en expérience a lieu le 21 août 1896 au soir, afin de faci- liter la diffusion des sels pendant la nuit et de réduire ainsi la durée de l’insolation, de crainte d’un verdissement rapide. Le lendemain, à 8 heures du matin, les lots B, C et D sont mis en plein soleil. Le ciel a été presque toujours pluvieux pendant les trois jours de l'expérience. Néanmoins, les extrémités des tiges ont verdi légère- ment, puis sont devenues rougeâtres ; il est des tiges qui sont rou- ges sur toute leur longueur. Le 24 au soir, lorsqu'on retire les tiges, leurs pointes, la veille encore brun verdâtre, ont une teinte nelte- ment verte. La quantité de chlorophylle formée est peu considé- rable. Étude de A (échantillon). — Matière sèche : 11,04 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . DAME, { AZ0te ammOoniIac a RER ER ME SIP MONTE MES Ad Azote organique (542% ,1 — gmer He) NES AE pee 532 Étude de B (tiges dans l'eau). — Matière sèche : 115,0 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 53775,0 Arote ammomaeal te usant te S 248 Azote organique (537%, 5 — gmer Os PT TE Re FOIE L’azote ammoniacal n’a pas sensiblement diminué dans les tiges exposées durant trois jours au soleil. Serait-ce dû à la grande quan- tité d’asparagine qui s’accumule dans les tiges d’asperge éliolées et qui aurait ralenti l’assimilation de l'azote ? C'est précisément pour éviter cet inconvénient que nous avons toujours ajouté du sucre à nos solulions nutritives. 190 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Étude de C (tiges dans la solution ammoniacale). — Matière sèche : 11,1 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 58557 ,45 Azote ammoniacal. . . . . . NU nSP ENS 14,20 Azote organique (5S5mer. 81,45 — jme G 9). RUE ES EL RE Étude de D (tiges dans la solution nitrique). — Matière sèche : 11,13 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . Do1mer,4 Azote ammoniacal . . . . . SE SE 5.0 DEPSR Azote organique (551"%,4 — qmer .9) Jante SRE 544 ,2 L’azote nitrique contenu dans les liges au début de l’expérience et à la fin n’a pas été dosé dans l'expérience [V ni dans les suivantes. Les faits relatifs à la disparition des nitrates se dégagent assez clai- rement des analyses des lots plongés dans la solution nitrique. Résultats de l'expérience IV. AZOTE LOTS. organique am- pee moniacal, Dette milligr, milligr. milligr. Tigessyenant de la iCave 542,10 9,8 532,30 Tiges exposées au soleil dans l'eau. . . 537,90 8,8 228,70 Tiges exposées au soleil dans la solution ANMONACAlE Te 585,45 14,2 571,25 Tiges exposées au soleil dans la Ktition ÉTIQUE RS Ce NO CU 551,40 2 544,20 Les tiges d'asperge à peu prés privées de chlorophylle assimilent à la lumière solaire l'azote nitrique et mieux encore l'azole ammo- niacal. Afin de résoudre d’une manière encore plus nelle la question re- lative au rôle de la chlorophylle dans l'assimilation de lazote nitri- que et de l’azote ammoniacal, nous avons renoncé à expérimenter sur des tiges étiolées et les avons remplacées par des feuilles com- plètement blanches des variétés à feuilles panachées. On sait que plusieurs espèces présentent parfois des feuilles, même des rameaux complètement privés de chlorophylle. En opérant de la sorte, nous avons obtenu les résultats les plus concluants. ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. 191 Expérience V. — Feuilles blanches et feuilles vertes de l’orme à grandes feuilles panachées (Ulmus campestris fol var.) exposées à la lumière. Parmi les feuilles mises en expérience, les unes étaient toutes blanches ou ne présentaient que des taches vertes peu étendues. Les autres, au contraire, étaient toutes vertes, bien que provenant de branches du même arbre que les feuilles blanches. De chaque catégorie de feuilles, on a pesé 30 grammes, dont on a fait trois lots de 10 grammes. Désignons-les par AÀ,, B,, G, et A, B. et CG; les indices b et v signifient feuilles blanches et feuilles vertes. Les lots À, et À sont destinés au dosage de l’azote organique et ammoniacal. Les feuilles des lots B, et B, sont couchées la face supérieure tournée vers le haut dans des cuvettes en porcelaine, plates, et im- mergées dans la solution ammoniacale sucrée. Quant aux lots GC, et C., ils ont été immergés dans les mêmes conditions, sauf que la so- lution ammoniacale à été remplacée par la solution nitrique. Les quatre derniers lots ont été exposés à la lumière le 28 août 1896, à 4 heures du soir, par un soleil modéré. Le 29 et le 30, le ciel était bien clair et la radiation vive. L’expérience a été interrompue dans la soirée du 30 août; les feuilles ont été bien lavées dans l’eau et brossées soigneusement pour enlever les poussières de l'air appliquées à leur face supé- rieure. Voici les résultats de l’analyse : Lot A,. — Matière sèche : 2#,05 — 20,5 p. 100. Azote organique et ammoniacal . . : . oo... GGMET 4 AA AMINOMMACT ANT 2 A0: NON ER 019 Azote organique (66m87, 4 — Qm8r,9), , . . . . . . 65 ,5 Lot À. — Matière sèche : 4,2 — 42 p. 100. Azote organique et ammoniacal . 4 , . . . . . . 12887,35 AAUUÉRAUHDONCA RE eue a. ee AE se lee 200 00 Azote organique (12827,35 — 2m87 1), . . . . . 12619 125 192 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. I convient de remarquer la richesse beaucoup plus grande — plus du double — en matière sèche des feuilles vertes. C’est le ré- sultat de l'assimilation chlorophyllienne. Quant à l'azote organique, il y en a 5,2 p. 100 dans les feuilles blanches et 3 p. 100 dans les feuilles vertes ; la différence est due aux matières hydrocarbonées formées par les feuilles vertes et qui s’y trouvaient au moment de l'expérience. Si l’on fait abstraction de ces matières, la proportion de l'azote organique est plus grande dans les feuilles vertes que dans celles qui sont privées de chlorophylle. Étude de B, (feuilles blanches dans la solution ammoniacale). Matière sèche : 28,07 — 20,7 p. 100. Azote organique et ammoniacal . . . . . . . . . . 81m, 4 AZOLE AMMOMACAT A 2e 0e, ME Po DER SORA AUS Azote organique (878,4 — 48,3). , . . . . . . ST Oo q 2 ) 1 Les feuilles blanches immergées dans la solution ammoniacale ont assimilé l'azote donné sous cette forme. Étude de B, (feuilles vertes dans la solution ammoniacale). Matière sèche : 45,18 — 41,8 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 149m8r 2 Azote ammoniacal . . . . : . . 4 DD Azote organique (14257,2 — 5m8r 2), , . . . . . 137 ,0 Les feuilles vertes ont aussi assimilé l'azote ammoniacal, mais beaucoup moins en proportion de leur poids sec que les feuilles blanches. Étude de C, (feuilles blanches dans la solution nitrique). Matière sèche : 2#,07 = 20,7 p. 100. Azole organique et ammoniacal . , 4 . « . « « . + 69787, 1 ete ammomacal., 5 HS PONS KEANE à LETI ya Azote organique (6987, 1 — 1m8r,5) , . .. . . . 6746 Les feuilles blanches ont peu ou même pas assimilé l’azote de la solution nitrique dans laquelle elles flottaient. ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. 193 Étude de C, (feuilles vertes dans la solution nitrique). Matière sèche : 43,95 — 42,5 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 15982 ROLE AINMONMACAN OS SP SR Tele a : à ARE AD Azote organique (159m8r,2 — 4msr 0). , . . . . . 155 © ,2 Les feuilles vertes ont assimilé activement l’azote du nitrate de potassium. Résultats de l'expérience V. AZOTE LOTS. organique am- s Fm Le milligr. milligr. milligr. Feuilles blanches, échantillon . . 66,40 GER, 65,50 —— dans la solution amMDACAIES) ts LUS à 87,40 4,3 83,10 Feuiiies blanches dans Ja solution MAIOE RSR ee ad ONU Ne 69,10 EE 67,60 Feuilles vertes, échantillon . . . 128,35 21 126,25 — dans Ja solution dMMONACAIE RTE ere 142,20 D,2 137,00 Feuilles vertes dans la solution HILEMME ES eee he rte 159,20 4,0 155,20 Si l’on compare les quantités d’azote assimilées par les feuilles blanches flottant dans la solution ammoniacale et par les feuilles vertes plongeant dans les deux solutions nutritives, on s’assure que la synthèse des matières albuminoïdes est aussi active dans les deux cas lorsque le sel est favorable. En d’autres termes, la chlorophylle n’est pas nécessaire à l’assimilation de l’azote, tout au moins de l’a- zole ammoniacal. Mais elle stimule singulièrement l'assimilation de l'azote nitrique, sans doute à cause des rayons qu’elle absorbe et que le protoplasme utilise pour la réduction des nitrates. Nous avons cependant fait remarquer précédemment qu’en réalité les feuilles blanches contiennent moins d’azote organique que les feuilles vertes débarrassées des produits de l’assimilation du car- bone. Voici, d’après nous, comment on peut interpréter ce fait: la synthèse des matières albuminoïdes exige la présence de substances ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1897.— 11. 13 194 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. hydrocarbonées, ainsi que le prouve l’accumulation bien connue d’asparagine dans les graines et les pousses végétant à l’obscurilé. Dans nos essais, les feuilles blanches trouvaient dans la solution nutritive du sucre qui pouvait diffuser dans les cellules, au moins par la section des pétioles. Mais à l’état naturel, il est vraisemblable que les feuilles blanches ne reçoivent pas beaucoup de matières su- erées des feuilles vertes, surtout si les unes et les autres se trouvent sur des rameaux différents. On peut aussi supposer que la sève de l’orme renferme peu de sels ammoniacaux, que les feuilles blanches utilisent de préférence. Voici les conclusions qui résultent des chiffres consignés dans le tableau précédent : 1° Les feuilles blanches d’orme assimilent diflicilement, peult-étre pas du tout, l'azote nitrique ; elles semblent réduire difficilement les nitrales ; | 2% Les feuilles blanches assimilent activement l'azole ammonia- cal ; 3 Au soleil, les feuilles vertes assimilent activement l'azote nitri- que beaucoup mieux que l’azole ammoniacal. Expérience VI. — Feuilles blanches et feuilles vertes d'érable à feuilles de frêne (Acer Negundo) exposées à la lumière. Cette expérience est analogue à la précédente que nous aurions voulu répéter en opérant sur des quantités de feuilles plus considé- rables. Mais nous ne sommes pas parvenus à nous en procurer sufi- samment. Nous avons employé les feuilles blanches et les feuilles vertes de l'érable à feuilles de frêne. La variété panachée de cette espèce pré- sente fréquemment des rameaux porlant des feuilles toutes blan- ches. Parfois certains pieds portent des branches à feuilles complè- tement vertes ; nous n’en avions pas à notre disposition et avons fait usage de feuilles blanches et de feuilles vertes cueillies sur des ar- bres différents de la même espèce plantés dans l’arboretum de l’Ins- tilut agricole. ASSIMILATION DE L'AZOTE AMMONIACAL. 195 Le 1 septembre 1896, on a pesé 105 grammes de feuilles d’éra- ble toutes blanches, qui ont été réparties en trois portions aussi égales que possible quant à l’origine des feuilles provenant d'arbres différents. Désignons-les par A,, B,, C,. Le même jour, on prépare, avec les mêmes soins, des lots pesant 39 grammes, mais composés de feuilles vertes ; appelons-les À, B, Et Oe Les rachis des feuilles de chaque lot sont liés avec un petit cor- don ; on les place ensuite dans un verre, de façon à faire reposer les limbes au-dessus du bord du récipient ; au fond de celui-ci, on verse de l’eau ou l’une des solutions nutritives, de façon que les ra- chis y plongent jusqu’à environ 3 centimètres de leur section. Les six lots ont été exposés le 1° septembre, à 3 heures, à un so- leil assez brillant. Les lots À, et À, plongent dans l’eau ; B, et B, dans la solution ammoniacale ; G, et C, dans la solution nitrique. - Le lendemain, le temps était très beau jusqu’à midi, puis le ciel est resté couvert jusqu’au soir ; à ce moment, on a renouvelé l’eau et les solutions nutritives. Le 3 septembre, le ciel fut couvert et pluvieux. Les vases sont re- tirés à 6 heures du soir et, aussitôt, mis à l’étuve à dessiccation. Étude de À, (feuilles blanches dans l'eau). Matière sèche : 5%,25 — 15,0 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . 215m8r, 4 9 5) AZOTETAHIROMACAIE PES MAMUEO ETES ENTER | 5 Azote organique (215m87,4 — 5msr 9). Étude de À, (feuilles vertes dans l'eau). Matière sèche : 12#,75 — 36,43 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 31m 3 AzbtetaMmomaACAl ee. CT US nee DD sie JE 9 Azote organique (311M37,3— 92,9). . MEN 3015224 Les feuilles vertes sont plus riches en matière sèche que les feuilles blanches; les premières renferment 3,99 p. 100 d'azote organique et les secondes 2,36 p. 100. Nous avons, à propos des feuilles d’orme, expliqué ces différences. 196 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Étude de B, (feuilles blanches dans la solution ammoniucale). Matière sèche : 6*7,60 — 18,S6 p. 100. Azote organique ct ammoniacal. . . . . . . . . . 318mE,7 Azote ammoniacal . . . . . ÉSM O Reel? 1320 Azote organique (318®27,7 — (ns sr 1) NU ee 305 ,6 Étude de B, (feuilles verles dans la solution ammoniacale). Matière sèche : 12%,60 — 38,86 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . , . . 387737, 6 Azote ammoniacal . . . . . AMEL LE ET 33 .,6 Azote organique (3873, 6 — 33m ct) 6). MALE 354. ,0 Dans la solution ammoniacale, les feuilles blanches ont assimilé une grande quantité d'azote (3058,6 — 209,5 — 96° 1), pen- dant que les feuilles vertes en ont assimilé beaucoup moins (354"8°,0 POS 901me,4 — Jour 6) Étude de C, (feuilles blanches dans la solution nitrique). Matière sèche : 651,90 = 19,71 p. 100. Azote organique et ammoniagal. . , . . . . . . . 26627 ,6 Azote ammoniacal . . . . . SEE EN Le LE me Azole organique (266m2,6 — gma gr fe POELE DTAUES Azote nitrique assimilé par les feuilles tte : A PAS SR D = RE le de AE ET de 48 .,0 Étude de C, (feuilles vertes duns la solution nitrique). Matière sèche : 135,50 — 38,57 p. 100. Azote organique et ammoniacal . . . . . . . . . 57881, 09 Azote ammoniacal. . . . . . UN RARE 34 05 Azote organique (578"#,05 — a mat 03) és «4 Ptit 944 ,00 Azote nitrique assimilé par les feuilles vertes : BAAUSE 0 = SOLDE ARE NN TER OR 249 ,60 Contrairement aux feuilles blanches, les feuilles vertes d'érable assimilent l'azote nitrique beaucoup mieux que lazole ammo- niacal. Il n’est pas sans intérêt de remarquer que la matière sèche des feuilles plongées dans les solutions sucrées, surtout pour les feuilles ASSIMILATION DE L'AZOTE AMMONIACAL. 197 blanches, est notablement supérieure à celle des deux lots plongés dans l’eau : FEUILLES blanches, vertes. p- 100 p- 100 Fotsiplongés dans lea PC 15.00 36.43 Lots dans la solution ammoniacale . . . . 15.86 38.86 Lots dans la solution nitrique . . . . . . SET 38.27 Le pouvoir absorbant plus élevé des feuilles blanches est en cor- rélation avec leur pauvreté en substances hydrocarbonées . Résultats de l'expérience VI. AZOTE LS a I OT ES 8 LOTS. organique am- | PÉRAE Hanoi organ!que. milligr. milligr. milligr. À,. Feuilles blanches dans l'eau . . . 215,40 5,90 209,5 BE — dans la solution ANIHOMIACAIE PE SN In Peer NE 318,70 13,10 205,6 C,. Feuilles blanches dans la solution d QUES EN EN NE 266,60 9,10 251,9 À. Feuilles vertes dans l'eau . . . . 311,30 9,90 301,4 BE — dans la solution am- MONACAIOMPER ER Sr 07 387,60 33,60 354,0 C,. Feuilles vertes dans la solution ni- CFE ST tee Mes ee 578,05 34,05 044,0 L'expérience VI démontre à Pévidence : 1° Que les feuilles blanches de l'érable à feuilles de fréne à lu lumière, assimilent beaucoup mieux l’azole ammoniacal que l'uzole nilrique. 2° Que les feuilles vertes de La même espèce, exposées au soleil, assimilent énergiquement les nitrales el beaucoup moins bien l'azote ammoniacal. Nous discuterons plus loin celte préférence des feuilles vertes pour les nitrales. Atürons tout de suite l'attention sur ce fait déjà constaté dans les expériences Il et ILE, que les organes verts et blancs nourris avec la solution nitrique renferment des quantités assez importantes d'azote 198 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ammoniacal. On peut donc supposer que l'acide nitrique, avant d'entrer dans [a composition des matières albuminoïdes, doit, au préalable, être transformé en combinaison ammonijacale. Au reste, c'est une hypothèse qu'imposait, «& priori, la composilion de ces substances. Il est aussi intéressant de remarquer que la quantité d’ammo- niaque renfermée dans les lots B, et G, est la même. Serait-ce la li- mite de ce qui peut exister, sans nuire, dans les tissus mis en expé- rience ? Expérience VII. — Feuilles blanches et feuilles vertes Ide l’érable à feuilles de frêne placées à l'obscurité. La lumière est-elle vraiment nécessaire à l’assimilation de l’azote nitrique et ammoniacal par les feuilles blanches et par les feuilles vertes ? Les résultats de l'expérience IT tendent à démontrer que les organes étiolés sont incapables de réaliser ce travail à l’obscurité. En est-1l de même des feuilles pourvues de chlorophylle ? L'expérience VIT va nous éclairer à ce sujet. On prépare deux lots de feuilles blanches d'érable à feuilles de frêne, pesant chacun 15 grammes, et deux lots de feuilles vertes, de 25 grammes chacun. Les matériaux employés proviennent d’un autre jardin que ceux de l'expérience VI. Les lots ont été composés soigneusement et on les a disposés au-dessus de vases en verre comme dans l'expérience VI. Désignons ces lots par A,, A, B,, B. Les deux premiers plongent dans l’eau, B, dans la solution ammoniacale et B, dans la solution nitrique. Après les résultats des expériences V et VI, nous pouvions nous borner à étudier l’assimilation de l'azote ammoniacal sur les feuilles blanches, et celle de l’azote nitrique sur les feuilles vertes. Les quatre lots en question sont placés, le 26 septembre, à 11 heures 1/2, dans l'armoire obscure du laboratoire (température variant de 15 à 20°). On a renouvelé Jes solutions et l’eau le 27 au soir. Le 30 septembre, à 7 heures du matin, c’est-à-dire après 3 jours 1/2, on a arrêté l’expérience. ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. 199 Étude de À, (feuilles blanches dans l'eau). Matière sèche : 25,918 — 19,45 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . 1392819 AZoteammonaCal, 217 MMS FULL Sears 4,5 Azote organique (133"5°,9 — 4m 5), , . . . . . 129 ,4 Étude de À, (feuilles vertes dans l'eau). Matière sèche : 7,47 — 29,9 p. 100. Azote organique et ammoniacal . . . . .« . . . . 198m87,95 Azote ammoniacal. . . . . . ON PO NOTEC 92070 Azote organique (1983, 93 — ur 5 7. SÉTSPET 188. ,55 Les feuilles blanches renferment 4,44 p. 100 du poids sec en azote organique ; dans les feuilles vertes, il y en a seulement 2,52 p. 100. Celles-ci provenaient de rameaux particulièrement vigou- reux, à végétation tardive; elles étaient larges et épaisses, et avaient dû assimiler en abondance. Étude de B, (feuilles blanches dans la solution ammoniacale), Matière sèche : 3,65 — 24,33 p. 100, Il y a eu une absorption considérable de sucre. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 13837,8 Azote ammoniacal . . . . . TR Fee HERO Azote organique (1383, S— fins 9) ÉMERGER ETS 1266-19 Étude de B, (feuilles vertes dans la solution nitrique). Matière sèche : 7%,49 — 29,96 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 19487,7 Azote ammoniacal . . . . . A et ARE 10640 Azote organique (194m27,7 — tom 0). at 8e 184 ,7 Résultats de l’expérience VII. AZOTE A — ——— LOTS. organique am- et am- - organique. moniacal, Donc F milligr. milligr. milligr. À,. Feuilles blanches dans l'eau . . , 133,90 4,5 129,40 Be: — dans la solution AHHNOMIACAIR RME 7 NES 138,80 11,9 126,90 À. Feuilles vertes dans l’eau . . . . 198,25 ST. 188,55 Bi — dans la solution ni- ÉHQUe PERLE AA: cf ESS 194,70 10,0 184,70 200 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Il y a moins d'azote organique dans les lots plongés dans les solu- tions nutritives que dans les deux autres lots. Pour B,, la différence ne dépasse pas la limite d’erreur provenant des analyses; pour B3 elle est peut-être accidentelle, car, d’après Th. Schlæsing fils’, on ne peut admettre qu'il y ait dégagement d'azote libre par les tissus végétaux. Nous savons encore qu'ils sont aussi incapables de nitrifier l’ammoniaque. Mais il a pu se former de l’ammoniaque aux dépens des matières azotées organiques. À l’obscurilé, les feuilles blanches n'assimilent pas l'azote ammo- niacul el les feuilles vertes n’utilisent pas les nitrates pour élaborer des matières organiques azolées. Évidemment, on peut aussi admettre qu’à l'obscurité les feuilles blanches n’assimilent pas les nitrates et que les feuilles vertes ne consomment pas les sels ammoniacaux. Expérience VIII. — Feuilles blanches et feuilles vertes d’Aspidistra elatior exposées à la lumière. Les plantes qui jusqu'ici ont été l’objet de nos recherches sont des dicotylédones. L’Aspidistra est une monocotylédone. Nous avons eu la bonne fortune de disposer d’un assez grand nombre de feuilles, toutes blanches, d’Aspidistra elatior fol. var. provenant de plantes cultivées dans la même serre et dans les mêmes conditions de sol. Nous en avons fail trois lots : Lot À, pesant. . . . 2 3 Lot:B,: peste) MARNE AE 20P 0 Lot C, pesant . 21890 En même temps, on a préparé trois lots de feuilles vertes de la même ‘espèce, cueillies dans la même serre, mais sur des plantes complètement vertes. Ces lots pesaient : À 36 grammes, B 35 gram- mes et C, 34 grammes. 1. Th. Schlæsing fils, Contribution à l'étude de la germination. (Comptes rendus. 10 juin 1895.) ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. 201 Les six lots ont été placés dans des vases au fond desquels il y avait une couche de 4 centimètres d’eau ou de solution nutritive; les feuilles y plongeaient par la base de leur limbe, les pétioles ayant été coupés. A,et À plongeaient dans l’eau; B, et B, dans la solution ammo- niacale ; C, et CG, dans la solution nitrique. Le 2 octobre au soir, tous ont élé placés dans une serre où la température a varié de 15 à 18°, à un endroit bien éclairé. Le lendemain, il fit un beau soleil ainsi que le 4, de 10 à 12 heu- res, le 6, avant midi, et toute la journée du 8. Pendant le reste du temps, le ciel fut couvert et pluvieux. On a mis fin à expérience dans la soirée du 8 octobre. Étude de 4, (feuilles blanches dans l'eau). Matière sèche : 2%,545 — 12,41 p. 100. Azote organique-et ammoniacal. . . . . . à . . 387, 60 AZOIE ARMAEAl t PRET lee aan en a Ve Ve Bher GA Azote organique (535,6 — 3m8r 9) . . . . . . . 49 1,70 Azote organique pour 100 de matière sèche. . . . . 95 Étude de A, (feuilles vertes dans l’eau). Matière sèche : 115,750 — 32,64 p. 100. Azote organique et ammoniacal . . + . . . - . . JR) SEA) ALOLE AMIMONMACAL EME ELA AA SRE Va TOME 20) Azote organique (191%87,95 — 195,9) , . . . . IE UT Azote organique pour 100 de matière sèche . . , . 127 Mêmes remarques que pour l’orme et l’érable, en ce qui concerne la proportion de la matière sèche et le taux d’azote organique. Étude de B, (feuilles blanches dans la solution ammoniacale). Matière sèche : 2#,810 — 14,05 p. 100. Azote organique et ammoniacal . . . . . . . . . . SES ADO AMICALE se ele ce a lo le es al SU CI Azote organique (825,5 — 12m8,7)... , . . . . . 69438 Étude de B, (feuilles vertes dans la solution ammoniacale). Matière sèche : 123,190 — 34,83 p. 100. Azote organique et ammoniacal . . . . . . . . . 236737, 69 BAOTE IUDIOACALS LE 26e CU MR rente 39 ,50 Azote organique (2362 ,65 — 39m8,5), . . . . . 197 202 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Étude de C, (feuilles blanches dans la solution nitrique). Matière sèche : 257,8 — 13,33 p. 100. Azote organique et ammoniacal , . . . . . . . . . 6Sm5E,6 AZOLO TA MDTOMACA AMEN NU MEME SU 9 Azote organique (6SM87,6 — Smsr 5) 4 , , , . . . . 6051 Étude de C, (feuilles vertes dans la solution nilrique). Matière sèche : 123,2 — 35,88 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 2608,2 AO TONATNONIACAIS UE LS LR a te A nee 25 AE Azote organique (260m57,2 — 28m8r,9) , . . : . 282 ";0 Les lots À,, B, et C, n'avaient pas le même poids; il en est de même des lots-A,, B, et GC. Si l’on calcule les quantités d’azote orga- nique et ammoniacal pour 20 grammes des trois premiers et 39 grammes des trois derniers, on obtient les chiffres indiqués au tableau suivant : Résultats de l'expérience VIII. AZOTE A — ©" am- moniacal. LOTS. organique. milligr. milligr. À,. Feuilles blanches dans l'eau . . . . . . . . 48,50 3,8 B,. — dans la solution ammoniacale. 69,80 | PN/ (0 = dans la solution nitrique. . . 27,20 8,1 AAeUILES Vertes dans LEARN RU Ne 167,95 ST 112 — dans la solution ammoniacale, . 197,15 39,5 C.,. — dans Ja solution nitrique . . . 238,80 29,0 A la lumière, les feuilles d’Aspidistra vertes et blanches assumilent l'azote nitrique et l'azote ammontacal ; les premières préférent les nitrates el les secondes l’ammoniaque. Pour l’Aspidistra, comme pour l’orme et l’érable, le fait suivant se vérifie: tandis que les feuilles blanches ont une préférence mar- quée pour lPammoniaque, les feuilles vertes assimilent beaucoup mieux l’acide nitrique. Le faible pouvoir des feuilles privées de chlorophylle de réduire les nitrates se comprend aisément : elles ne peuvent utiliser pour ce travail les rayons absorbés par la chlorophylle. ASSIMILATION DE L'AZOTE AMMONIACAL. 203 Pour ce qui est des feuilles vertes, on comprend moins bien leur prédilection pour les nitrates. On sait depuis longtemps que parmi les plantes, supérieures et inférieures, il y a des espèces qui préfé- rent les nitrates, d’autres les sels ammoniacaux et qu’il en est aussi pour lesquelles la nature du sel azoté est indifférente. D'après Lœw, ces différences s’expliqueraient par l’action des combinaisons ammoniacales sur la cellule végétale : elle résisterait, suivant les espèces, à des doses d’ammoniaque plus ou moins con- sidérables. Et cette résistance serait plus grande chez les espèces qui préfèrent l’ammoniaque. Cette interprétation peut sans doute être appliquée dans le cas actuel, puisque, comme nous l'avons fait remarquer, dans l’expé- rience VI, il y avait la même quantité d’ammoniaque dans les feuilles vertes nourries avec la solution nitrique et la solution ammonia- - cale. Néanmoins, nous sommes porté à croire que, à côté de l'influence de l’ammoniaque sur la cellule, il y a aussi l’action de ce corps pro- duit à l’état naissant à la suite de la réduction des nitrates. Sinon, comment comprendre que pour la même espèce, les feuilles blan- ches assimilent activement l’ammoniaque ? Peut-être pourrait-on supposer que l’action nuisible de ce corps se ferait surtout sentir en présence de certains produits de l’assimilation chlorophylienne. Expérience IX. — Quels sont les rayons qui interviennent dans l'assimilation de l'azote ammoniacal et de l'azote nitrique ? Pour répondre à celte question, que résout incomplètement l’ex- périence |, nous avons eu recours aux feuilles blanches et aux feuil- les vertes de l’Acer negundo et à la méthode des écrans absor- bants. C’étaient les mêmes cloches et les mêmes solutions que dans l'expérience [. L'expérience IX a été entreprise en même temps que l’expé- rience VIT. On a fait quatre lots de 15 grammes de feuilles blanches et quatre lots de 25 grammes de feuilles vertes. 204 - ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les lots de feuilles blanches sont C,, D,, E, et F,; ils plongent dans Ja solution ammoniacale. Les feuilles vertes des lots C,, D, E et Font les parties inférieures de leurs pétiolas immergées dans la solution nitrique. GC, et G, sont placés côte à côte sous un écran formé par une cou- che de 30 millimètres de bichromate de potassium à saturation. Les lots D, et D' sont recouverts par une solution de sulfate de cuivre ammoniacal de même épaisseur. Les lots E, et E sont placés sous la cloche double avec une solu- Lion de bisulfate de quinine à 2 p. 100. Eufin les lots F, et F sont recouverts par une cloche de mêmes dimensions que les trois premières, mais, entre ses parois doubles, il y a de l’eau. Les quatre cloches se trouvent dans un endroit bien exposé au soleil, à parür du 26 septembre, à 11 heures 1/2 du matin. Le so- leil, alors assez vif, a fait place, à 1 heure, à un temps couvert, qui a persisté jusqu’au soir. Le 28, soleil pendant presque toute la journée. Le 29, ciel un peu brumeux. Le 30, à 7 heures du matin, on retire tous les lots en expé- rience. On remarque que le lot D, n’a pas bien plongé dans la solution et qu'il est partiellement desséché. Sous la couche, assez foncée, de sulfate de cuivre, cet accident avait passé inaperçu pendant la durée de l’expérience. L’assimilation a dû s’en ressentir. Étude de C, (feuilles blanches sous le bichromate de potassium). Matière sèche : 257.9 — 19,33 p. 100. Azote organique et ammoniacal . . . . . . . + . . 144m8r,2 Azote ammoniacalls mA Lt Mais re tn IN SRE Le l150;24 Azote organique (144m87,9 — 11m, 4) , ,. =. . . 19 Se Étude de C, (feuilles vertes sous Le bichromate de potassium). Matière sèche : 85,25 = 33 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 19827 ,4 ROLE OUR RU ere Dr Ne acts RAR EUR Le l'US Azote organique (LISE #4 — 10m81,5) , 4. « . . [STAR ASSIMILATION DE L'AZOTE AMMONIACAL. 205 Étude de D, (feuilles blanches sous le sulfate de cuivre). Matière sèche : 23,94 — 19,6 p. 100. Azote "organique et ammOniaCal. 0. .. 12 . J43mer, AZ01e aMMONACANENME PME ET CAN ONE NIMES SANTE Azote organique (1438, 1 — 8M81,5). . . . , . , 134 ,6 Étude de D, (feuilles vertes sous le sulfate de cuivre). Matière sèche : 8%,375 — 33,5 p. 100. Azote organique et ammoniacal . SUR D2ASMSE 9 MAD fe ARMIOMACAE INSEE IR ET ORNE (ETienet(t, Azote organique (248m87,9 — 17m57,0). . , . . . . 28100 Étude de E, (feuilles blanches sous le sulfate de quinine). Matière sèche : 3%,01 — 20,07 p. 100. ‘ Azote organique et ammoniacal. : 1340, 6 Az0té aMMONACAR ARE ES ENTRE RCE ER Azote organique (L34M8,6 — 3m8r 6). . . . . . . 1310020 Étude de E, (feuilles vertes sous le sulfate de quinine). Matière sèche : 857,67 — 34,7 p. 100. Azote organique et ammoniacal . AS 19987, 0 NON AMMONIA CALE Tee MAT NL 2Re QUE IA Azote organique (199m37,0 — 13mM57, 4). , . . . . . UE Étude de F, (feuilles blanches sous l'eau). Matière sèche : 35,22 — 21,46 p. 100. Azote organique et ammoniacal. . a 168765,1 AVOLE MATÉMONIACAI EME SE RATER IR Er E fe SU Azote organique (16837, 1 — 8m3r 4), , , . . . . do SM Étude de F, (feuilles vertes sous l'eau). Matière sèche : 83,49 — 33,68 p. 100. Azote organique et ammoniagal. . . . . . . . . . 2 710 AS AZOTCRAMMONACAIME RE AE ER NE RME PRE SRE Azote organique (279m87,5 — 32m8,6) , . . . . . D'ÉCRAN S Remarquons l’augmentation de la matière sèche des lots D,, D, E,, E,, de F et surtout de F,. Aux chiffres exprimant les résultats précédents, joignons ceux de l'expérience VIE, faite le même jour et avec les mêmes matériaux. Les lots de cette expérience serviront de témoins. 206 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. A cause de la dessiccation des feuilles, nous ne tiendrons pas compte du chiffre relatif à D,. Disons encore que, au moment où l’expérience a été commencée, le 26 septembre, beaucoup de feuilles de l’érable à feuilles de frêne étaient sur le point de tomber: elles n’ont donc pu fonctionner comme elles l’auraient fait plus tôt. C’est à cette cause qu'il faut attribuer, sans aucun doute, le peu d’azote que le lot F, (sous l’eau) a assimilé ; comme on le voit au tableau VI, des feuilles de la même variété avaient été beaucoup plus actives dans les premiers jours de septembre. Résultats des expériences VII et IX. AZOTE LOTS. Srbtaue a ne 9 NE sde Mr moniaeal, °'8anique. milligr. milligr. milligr. À,. Feuilles blanches dans l'eau à l'obscurité. . . 133,90 4,5 129,40 B,. Feuilles blanches dans la solution ammoniacale à l'ODSCurité 0m 2 : 138580 - 11,9 126,90 C,. Feuilles blanches dans la Son Re sous le bichromate de potassium . . . . . 144,20 11,4 . 132,80 D,. Feuilles blanches dans la solution ammoniacale sous le sulfate de cuivre . . . » » » E,. Feuilles blanches dans la solution ns sous le sulfate de quinine . . . . «" : 2134460 3,6 131,00 F,. Feuilles blanches dans la solution ARE SOUS NEA Es - AE ARR Lo à 168,10 8,4 À. Feuilles vertes dans he à l'obscurité, UE 198,25 9,7 188,55 B. Feuilles vertes dans la solution nitrique à l'obs- CEROART ER se EL Le ES ETIDIS LDSD ETS C,. Feuilles vertes dans " salhtion de sous le bichromate de potassium . . . . Te 198,40 10,5 157,90 D,. Feuilles vertes dans la solution tnuie sous Jersulfate(delCuivre. . "1. hs ve SOPRE0, 0. | ALU UMR E,. Feuilles vertes dans la solution inue sous le sulfate de quinine . . . : Se 199,00 13,4 185,60 F. Feuilles vertes dans la nn ce sous PEAU 18 as lo 000 2e CU à EDIT 00 USE D RP ARS De l'expérience IX, nous pouvons tirer les conclusions sui- vantes : 1° Hn'y a pas assimilalion de l'azote nilrique par les feuilles ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. 207 vertes de V’Acer negundo sous les solutions de bichromate de potas- sium et de sulfate de quinine. Celle assimilation est très active sous la solution de sulfale de cuivre et sous l'eau. Ce sont donc les rayons ultra-violels qui interviennent dans celle assimilation. 2° Avec les feuilles blanches de la même espèce, il n’y a qu’une assimilation minime de l'azote ammoniacal, et peul-élre elle est nulle, sous les solutions de bichromate de potassium et de sulfate de quinine ; sous l’eau, elle est considérable. L'assimilation de l’'ammo- niaque est donc stimulée par les rayons ullra-violets. Les essais avec les feuilles blanches placées sous des écrans absor- bants seront répétés l’an prochain, afin de nous assurer s’il y a réel- lement une légère assimilation de l’ammoniaque dans la région lumineuse du spectre. Le rôle des rayons ultra-violets dans la synthèse des matières al- buminoïdes avait déjà été mis en évidence, mais par une autre voie, dans des recherches entreprises par J. Sachs”. Il avait vu que des plantes soustraites aux radiations ultra-violettes sont incapables de fleurir, faute de pouvoir produire les substances albuminoïdes né- cessaires à la formation des boutons floraux. Expérience X. — Plantes d'orge conservées à l'obscurité. Les expériences que nous venons de rapporter étaient terminées, lorsque nous avons eu connaissance d’un travail de Kinoshita ? l’assimilalion de l’azote des nitrates et des sels ammoniacaux. En opérant à l'obscurité sur de jeunes plantes d’orge et de maïs cultivées dans du sable et arrosées avec des solutions de nitrate de sodium et de chlorure d’ammonium, cet expérimentateur a obtenu le résullat suivant : lorsque les tiges d’orge avaient 20 centimètres de hauteur et celles de maïs 40 centimètres, les unes et les autres renfermaient plus d’azote organique que d’autres plantes des mêmes espèces, cultivées dans les mêmes conditions, mais arrosées avec de 1. J. Sachs, Ueber die Wirkung der ultravioletten Strahlen auf die Blüthenbildung. (Arbeiten des botan. Instituts in Würzsburg, Bd. Il, p. 372, 1887.) 2. Locrcil. 208 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. l’eau pure. Les plantes qui avaient reçu le sel ammoniacal renfer- maient beaucoup d'asparagine ; au contraire, ce corps n’a pas aug- menté dans les plantes arrosées avec la solution de nitrate de so- dium. Nous avons répété celle expérience et nous avons obtenu des résultats qui ne concordent pas avec ceux de Kinoshita. Le 6 octobre 1896, nous avons fait six lots de 80 graines d'orge de grosseur aussi régulière que possible et qui provenaient d’une malterie ; les racines ont environ 1 centimètre de long et les tigelles commencent à poindre. Poids des lots : 4 LOT SPE At e ES NS 651,72 ECO APR AAA EE A SMET SAN A EC 6 ,38 DOCTORAT 6 ,54. Lot D. 6 :,37 Lot E. 67 Lot F. 6 ,51 Les lots A, B et C sont placés sur des étamines au-dessus de bocaux cylindriques contenant de l’eau privée de combinaisons azotées, chaque lot est recouvert d’une cloche reposant sur une assiette. Les lots D, E et F sont plantés dans des pots avec du sable cal- ciné auquel on à ajouté 12 p. 100 d’eau privée de combinaison azotée. Les pots sont aussi placés sur une assielte et recouverts de cloches. Le 20 octobre au matin, on s’assure que la germinalion a été très régulière ; quelques graines à peine n’ont pas continué à croître. Les üges ont de # à à centimètres de longueur. On remplace l’eau de B par la solution ammoniacale sans sucre et celle de GC par la solution nitrique, également sans sucre. Le lot E est simplement arrosé avec la solution ammoniacale sans sucre et le lot F par la solution nitrique dépourvue de sucre. Pour ne pas dé- ranger les jeunes plantules, on ne verse pas les solutions au-dessus du sable, mais sur l'assiette, de façon qu’elles remontent par imbi- bition. Tous les jours on arrose ainsi les trois pots, D recevant simple- ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. 209 ment de l’eau ; de deux en deux jours, on renouvelle, en les sipho- nant, les Lduides de Cet B. Le développement des six cultures a élé aussi régulier que la germination ; sous l'influence des matières minérales, les lots B, CO, E et F étaient un peu plus beaux que A et D. Nous avions oublié de donner à ceux-ci, au lieu d’eau, la solution minérale privée d’azote. Le 30 octobre, dans tous les lots, la plupart des tiges avaient en- viron 20 centimètres de hauteur. On a mis fin à l’expérience et sou- mis chaque lot à un examen attentif. Seules, les quelques graines qui n’avaient pas continué à croître présentaient des traces de moi- sissures. On a pu facilement rassembler les plantes qui avaient été placées sur les étamines et ne. point perdre la moindre radicelle. Pour celles qui avaient été cultivées dans du sable, celui-ci adhérait si intimement aux poils radicaux que nous avons renoncé à l’élimi- ner complètement. Une certaine quantité de sable se trouvait donc mélangée à la matière sèche et se retrouvera après dessication. Tous les lots ont été desséchés immédiatement. Dans un lot de 10 grammes de graines analogues à celles qui avaient été mises en culture, on a trouvé : Azote organique et ammoniacal. . . . . . . . . . 111m87,0 GRO AR NIDIMA CAE ET tar dure ve A eat eue Le D 3 APOLE OPÉAIQUO Ne eee AN 07 bat de AMIS rite 105207 Le poids des six lots sera ramené plus loin à 6 grammes ; dans ce poids de graines, il y a done des quantités d’azote égales aux 6/10 des chiffres ci-dessus, soit 668,6, 3"8°,2 et 658,4. L'analyse des plantes composant les lots, restes des graines com- pris, a donné des résultats qui ne peuvent pas être aussi exacts que ceux donnés par les expériences précédentes. Voici pourquoi: les enveloppes des graines épuisées se mêlent assez difficilement aux tiges et aux racines pulvérisées après dessi- cation ; en outre, la présence d’une certaine quantité de sable dans les lots D, E et F n’a pas permis d’en avoir des échantillons parfaits pour l’analyse. Et nous ne pouvions songer à doser l’azote total dans chaque lot, puisque nous devions tenir compte de l’azote am- moniacal. + . ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1897. — II. 14 210 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. J faudra faire la part de ces difficultés dans l’examen des résultats des analyses. Étude de A. — Matière sèche, 24,7. Dans6:r,72. Dans 6 gr. milligr. milligr. Azote organique et ammoniacal . . . . . . 74,5 66,5 Azotetanmoniacal: 1404 EAU 23m, PE S,4 7,5 Azoleorganique 1 is Sarl nie 66,1 59,0 Étude de B. — Matière sèche, 22,58. Dans 6ër,38. Dans 6 gr. milligr. milligr. Azote organique et ammoniacal , . . . . , S3,8 75,8 A7DIP AM MOMACAl en ere te 14,2 15,4 BZOLS OFPAMIUE, 8 2 Ne ere lemme eee 69,6 65,4 Étude de C. — Matière sèche, 2,885. Dans 63:r,54. Daus 6 gr. milligr. milligr. Azote organique et ammoniacal . , . . . . 71,8 68,6 AZOLE AIDMOILACA I A EE REA re El 10,6 97 Azoté- organique... 2 42 ANNE FOUT 64,2 58,9 Étude de D. — Matière.sèche, 4,01 (avec sable). Dans 6:r,37. Dans 6 gr milligr. milligr. Azote organique et ammoniacal . . . . . . 85,3 80,3 Azote'dmmonracals VAUMCRENLEMAUEQE, 12,0 1188 Azote0ieanmquen ag de 2htetpenente ml sf 73,5 69,0 Étude de E. — Matière sèche, 4,32 (avec sable). Dans 6:r,17. Dans 6 gr. milligr. milligr. Azote organique et ammoniacal . . . . . . 91,5 S8,9 Azote ammoniacal shiuetis ele me retire 1955 18,9 AZOLE OTRANIQUE Se nt 25e pts lo li 72,0 70,0 Étude de F. — Matière sèche, 3%,48 (avec sable). Dans 6er,51. Dans 6 gr. milligr. milligr. Azote organique et ammoniacal . , . , . . 89, 1 82,1 Avote amont" 0s à + 212 a 10,1 9,3 Asote organiques" 0% 724 RTS RENE 79,0 72,8 .ASSIMILATION DE L’AZOTE AMMONIACAL. its | Résultats de l'expérience X. (Calculés pour un poids initial de 6 grammes de graines.) AZOTE LOTS. organique am- x milligr, milligr. milligr. Echantillon pris au moment de la mise en expériences) MOTARD 66,6 3,2 63,4 A'Graines AVEC EAU. 6 Atari ste 66,5 7,5 59,0 B. — avec solution ammoniacale , . 78,8 13,4 65,4 G. — avec solution nitrique , , . , 68,6 9,7 58,9 D.” — dans le sable avec eau. , ... 80,3 11,3 69,0 E — dans le sable avec solution am- HONMCAIGARE D'RA NET E CARNS 88,9 15,9 70,0 F. Graines dans le sable avec solution ni- DU Tor Ses PRET a tan VS 82,1 9,3 72,8 Comme nous le faisions pressentir plus haut, ces résultats n’ont pas la netleté de ceux que nous avons obtenus avec ies feuilles. Ainsi, pour s’en convaincre, il suffit de comparer la teneur en azote orga- nique de l’échantillon original, de A et de D. Dans A et C, on serait tenté de voir une diminution de l’azote organique avec transforma- tion partielle en ammoniaque. Cette expérience démande à être ré- pétée et c’est ce que nous ferons prochainement. En attendant, nous croyons pouvoir conclure qu'il n’y a pas eu dans l’expérience X as- similation de l’azote ammoniacal ni de l’azote nitrique. Les résultats de Kinoshita s'expliquent soit par des accidents ana- logues à celui que nous venons de signaler, soit, ce qui est plus pro- bable, par le développement de moisissures sur les graines mises en culture. Lorsque ces champignons apparaissent sur une matière or- ganique imbibée d’une solution nitrique et surtout ammoniacale, il faut s'attendre à ce qu'ils assimilent de l’azote de ces combinaisons. Nous avons eu l’occasion d’en avoir la preuve dans un essai fait à l'obscurité avec des tiges étiolées de pommes de terre. Le témoin renfermait au début de l'expérience 32"8,9 d'azote organique. Quatre jours plus tard, un lot de même poids, plongé dans la solution ammoniacale (température, 20 à 25°), renfermait 046,4 d'azote organique ; un autre lot, plongé en même temps DA? ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dans la solution nitrique, a donné à l’analyse 67"6°,7 d’azote orga- nique. On n’avait pas renouvelé les solutions et de nombreux fila- ments mycéliens avaient envahi les tiges, déjà souffrantes au début de l’expérience. Conclusions. 1° Chez les plantes supérieures, l'assimilation des nitrates n’a pas lieu à l'obscurité ; elle exige l'intervention des rayons ultra-violets. 2° Pour les sels ammoniacaux, l'influence des mêmes rayons est sûrement prédominante ; il se peut cependant que les rayons lumi- neux provoquent une faible Leo de PRES dans les es blanches. ° L'intervention de la chlorophylle n’est pas nécessaire; les feuilles blanches assimilent même mieux l’azole ammoniacal que les feuilles vertes. 4 L'assimilation de l'azote nitrique donne lieu à une production intérimaire d'ammoniaque. Ce travail met une fois de plus en relief le rôle dévolu à la radia- tion solaire dans l’économie de la nature : elle ne donne pas seule- ment aux plantes supérieures l’énergie nécessaire à la synthèse des matières hydrocarbonées ; elle est aussi indispensable à la produc- tion, par ces végétaux, des substances albuminoïdes, ces éléments fondamentaux de la matière vivante. LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE Par L GRANDEAU La Société des ingénieurs civils de France a publié, dans son Bul- letin du mois d’août dernier, un important mémoire de l’un de ses membres, M. L. Chateau, sur Les gisements de phosphales de chaux dans les provinces de Constantine et d'Alger. Cette monographie, la plus complète qui ait paru Jusqu'ici sur ce sujet, doit attirer l’atten- tion des agriculteurs, des économistes et des pouvoirs publics de France et d'Algérie. L'auteur, en effet, ne nous apporte pas seule- ment le résultat de ses études techniques sur la nature géologique des gisements, leur étendue, leur richesse et leur exploitation; il aborde, en s'appuyant sur les documents et les chiffres puisés aux sources les plus sûres, l'examen des graves questions soulevées par la découverte de ces immenses dépôts d’une matière première qui est à l’agriculture ce que la houille est à l’industrie. IL est de toute urgence, comme nous le verrons plus loin, que le Parlement donne une solution à la question légale de l'exploitation des phosphates d'Algérie. Le statu quo en se prolongeant paralyse toutes les entre- prises que notre colonie d’abord, notre commerce et notre agricul- ture ensuite, ont un intérêt de premier ordre à voir aboutir sous l'empire d’une législation libérale. 214 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Depuis le mois d'octobre 1895, c’est-à-dire depuis plus de deux ans, les Chambres sont saisies d’un projet de loi qui, il faut l’espérer, dans l'intérêt de l'Algérie aussi bien que dans celui de l’industrie et de l’agriculture françaises, devra subir de profondes modifica- tions; il faut enfin que ce projet arrive en discussion au Parlement si l’on ne veut pas tarir pour longtemps et irrémédiablement peut- être une source féconde au premier chef en bienfaits pour la colonie et pour la métropole. Il ne m'est pas possible dans cette revue, cela va de soi, de pré- senter une analyse tant soit peu complète du travail, considérable à tous égards, de M. L. Chateau ; mais j’atteindrai le but que je me propose si l’aperçu que je vais tenter d'en donner provoque à le lire et à le méditer ceux qui auront à se prononcer bientôt sur la solution à apporter à cetle question quasi vitale, pour l'avenir de l’une de nos industries les plus considérables, et si importante pour l’agriculture de la France et de l’Algérie. Laissant de côté la partie descriptive et technique où l’auteur étudie en détail, avec une entière compétence, les gisements des provinces de Constantine et d'Alger, exposé dont l'intelligence né- cessite, d’ailleurs, la consultation des excellentes cartes qui accom- pagnent le texte, je m'attacherai à résumer les constatations indis- pensahles pour donner une idée précise de l'importance économique et agricole de la question. La découverte des oîtes de phosphates sédimentaires, due à un vétérinaire militaire, M. Philippe Thomas, remonte à peine à vingt- cinq ans. En 1873, ce géologue distingué a découvert l'existence d’une zone phosphatée dans la vallée du Chéhf, près de Boghar. Mais c’est en 1888 seulement qu'il a fait connaîlre ces gisements dans une note adressée à l’Académie des sciences. Poursuivant, en 1885, ses explorations dans le sud de la Tunisie, M. Thomas décou- vre les fameux gisements de Gafsa. C’est encore lui qui signale, peu après, le gite {rès important du Guélaat-ès-Snam, sur la frontièré de Tunisie, continuation du plateau du Dyr, près de Tebessa. MM. Fi- cheur, Jacob, Blayac, de leur côté, firent ensuite connaître de nom- breux gîtes dans les provinces d’Alger et de Constantine; enfin, pen- dant les années 1895 et 1896, M. L. Chateau, dans son voyage LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÈRIE. 219 d'exploration et d’études, en a également découvert quelques autres. Tous ces gisements appartiennent à l’étage géologique désigné sous le nom de Suessonien (Eocène de l’âge tertiaire). Présentement, il existe trois centres d’extraction : un dans le dje- bel Kouif, exploité par la Compagnie anglaise fondée par M. Ja- cobsen; deux dans le djebel Dyr, exploités, l’un par une autre sociélé anglaise (Crookston frères, de Glasgow), l’autre par une compagnie française, à Aïn-Kissa. Les phosphates de ces gisements sont riches : 70 à 75 p.100 de phosphate pur, associé à 10 à 13 p. 100 de calcaire. Les minerais algériens, pris dans leur ensemble, ont des teneurs en phosphate pur variant de 95 à 73 p. 100 et une teneur en calcaire allant de de 10 à 40 p. 100 ; leur teneur en alumine et en fer est faible, ce qui les rend très propres à être transformés en superphosphates. J'aurai occasion de revenir plus loin sur l’inégale richesse des minerais en phosphate pur, condition dont il est essentiel de tenir grand compte dans la législation à venir pour en réglementer l’ex- ploitalion. La longue descriplion que M. Chateau fait des gisements algé- riens déjà connus! montre combien ils sont abondants, et il n’est pas douteux, ainsi qu'il le fait observer, que le travail de décou- vertes, entravé par la législation actuelle qui n’encourage pas l’ini- tiative privée, est loin d’être terminé. Tous les gisements ne sont pas exploitables, et il est bien difficile, à l'observateur le plus attentif, de faire une évaluation, même ap- proximative, des quantités de phosphates disponibles. M. L. Chateau compte actuellement dans la province de Constantine 17 gîtes ex- ploitables, géologiquement parlant, et il estime qu’on peut porter de 150 à 200000000 de tonnes de phosphate, titrant de 50 à 70 p. 100, la puissance de l’ensemble de ces gisements; cette quantité de phosphate, pour le dire en passant, correspondrait à la consom- mation actuelle de la France pendant quatre siècles environ. 1. Les géologues et les chimistes liront avec an grand intérêt cette partie du mé- moire que je passe forcément sous silence, D16 1:58) ‘ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Mais il ne suffit pas qu'un gîte de phosphate soit exploitable, géo- logiquement parlant. Pour qu’il le soit industriellement, il faut que la richesse du minerai d’une part, les facilités d'exploitation et de transport de l’autre satisfassent, à des conditions dont dépendent absolument les résultats d’une entreprise industrielle. M. Chateau estime que les gisements de phosphates riches, nécessitant pour leur mise en œuvre des raccordements de voies ferrées n’excédant pas 2 kilomètres, pourraient ensemble produire annuellement, lorsqu'ils seront en pleine exploitation, un tonnage de 1 200 000 à 1500 000 tonnes, chiffre qui correspond actuellement à peu près à la consommation en phosphate de l’Europe entière. Cette pro- duction laisserait encore une réserve de minerai pour de longues années. Les chemins de fer actuellement existant en Algérie ne sont pas en état d’effectuer le transport de ce gros tonnage. Il y a donc lieu de prévoir, de ce chef, des améliorations indispensables dont nous parlerons plus tard. L'exploitation des phosphates algériens exige pour la mise en œuvre des gisements et la construction d’embranchements de voies ferrées, le concours de capitaux très importants, fait dont il faut tenir grand compte dans le régime légal à appliquer aux exploitants. M. Chateau aborde, dans ses détails, la question du prix de re- vient des phosphates, qu’il arrive à fixer, tous frais compris, pour le minerai rendu dans un port d'Europe, entre 30 et 32 fr. la tonne. Ce prix de revient, M. L. Chateau le base sur une exploitation mar- chant dans de bonnes conditions, c’est-à-dire disposant d’un minerai abondant, relativement facile à extraire, dont la concession à pu être obtenue à un prix peu élevé’, pas trop éloigné de la voie ferrée et faisant son broyage au port d'embarquement, afin d'éviter d’a- mener sur les chantiers du combustible dont les tarifs de transport sont d’un prix inabordable sur les lignes algériennes. M. Chateau suppose enfin que la compagnie exploitante possède au port d’em- barquement un magasin relié à la voie ferrée el que, sans de grosses manutentions, elle pourra charger directement ses minerais à l’aide 1. Redevance de 1 fr. par tonne, LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 217 d’un treuil sur le navire. J’insiste sur ces détails parce que le prix de revient occupe dans l’industrie des phosphates une importance primordiale que j'aurai bientôt l’occasion de mettre en lumière. L'exploitation des phosphates d'Algérie, par suite de l'incertitude où sont restés longtemps les exploitants, n’a pas pris l’essor sur le- quel les compagnies existantes pensaient pouvoir compter avec leur outillage perfectionné. Malgré cela, l'exportation a progressé très rapidement : les expéditions du rayon de Tebessa par le port de Bône, de 6 000 tonnes, en 1893, se sont élevées à 158000 tonnes en 1896, se répartissant, comme suit, entre les trois compagnies : Société francaise (Aïn-Kissa) . , . . 23 600 tonnes. Société Grokston (le Dyr) . . . . . 49000 — Société Jacobsen (le Kouif). . . . . S5500 — Total: : 5,15 “158400 — On pense atteindre celte année un tonnage de 160 à 170 000 tonnes qui ne pourra guère être dépassé, la Compagnie de Bône-Guelma n’élant pas en mesure de transporter plus de 180 000 tonnes. A eux seuls, quatre pays ont absorbé plus de 80 p. 100 de la production de l’année 1896. Les phosphates expédiés se sont ainsi r'éparils : ANPICeRTe MMS NC UE UMA 8 00ITONNES; HN 01000 0000000 100 mA OUI HAUT CMP Rene cr COE re RS ODRES ANCMICDESS ee ee sens te en SOU Pour se rendre compte des conditions économiques où se trouvent les exploitants de phosphates en Algérie, il est nécessaire d'analyser la situation du commerce et l’état du marché des phosphates dans le monde. M. L. Chateau a résumé, avec beaucoup de clarté, les principaux éléments de cette question si complexe. Nous allons, à son aide, tâcher d’en présenter succinctement une vue d'ensemble. La consommation du phosphate en agriculture a doublé depuis dix ans et mes lecteurs savent qu’elle est loin, malgré cela, de ré- pondre aux besoins du sol. Des fluctuations énormes dans les prix ont marqué cette période décennale ; nous y insisterons plus lom. Comment se répartit la production du superphospate en Europe ? 218 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Quelle origine ont les phosphates qui servent à la fabrication du pré- cieux engrais? Quelle est l’importance relative des importations et des exportations ? Tels sont les points qu’il importe de préciser et dont le législateur doit se pénétrer dans l’élaboration du régime lé- gal à introduire en Algérie. En 1895, la production du superphosphate, en Europe, a été éva- luée comme suit par les personnes les plus autorisées : Allemagne fer Pre Érancer RE rente Royaume-Uni . . « : BEISIQUE RER Italie , NEA UE États scandinaves : : : Autriche . Pays-Bas. . , AUIPESEDAVS NN A 10 Total 209 800 000 tonnes. 7190 000 — 750 000 — 300000 — 150000 — 35 000 — 65 000 — 30 900 — 30000 — 21940 000 Soit, en nombre rond, {rois millions de tonnes. La quantité de phosphate nécessaire pour cette énorme produêlion peut être es- timée à 1 500 000 tonnes. En 1895, on en a importé ou extrait, en Europe, environ 1 400 000 Lonnes ainsi réparties : FOLIE. LAON PNEUS. CALOURESAREREN CREMMUN. France. . Belgique re Garsdyrdtte AIPÉCIE- RE TAPER Norvège, Ganada, etc. . Total . 425 000 tonnes. 125385 — 3715000 — 300000 — 136000 — 30000 — 1391 895 — Les stocks anciens ont done dû concourir, en 1895, à la fabrica- tion du superphosphate pour un poids d'environ 150000 tonnes. Les quatre grandes sources de phosphates dans le monde” sont, d’après cela, les États-Unis ; la France, avec le bassin de la Somme; {. Non compris les phosphates russes qui commencent à être exploités, mais ne sont pas encore l’objet d'une exportation de quelque importance. LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 219 la Belgique, avec les bassins de Mons et de Liège ; la Tunisie et AI gérie. Personne n’ignore, comme le fait observer M. L. Chateau, que les gisements français de la Somme, qui ont pendant longtemps ali- menté, avec les phosphates belges, le marché des engrais, sont, quoi qu’on en dise, fortement amoindris el en voie d’être bientôt épuisés. En Belgique, les bassins de Mons et de Liège sont dans une situalion encore plus avancée peut-être, étant donné en outre que les produits des environs de Liège sont d’un titre peu élevé et ne peuvent circuler au loin. Les deux sources de phosphate qui sont appelées à dominer désormais sont donc les gisements des États-Unis, d’une part, et ceux d'Algérie et de Tunisie, d'autre part. Le mouve- ment des importalions et des exportations de phosphates naturels en France, depuis 1889, confirme ces appréciations ; il montre qu'après avoir été, jusqu’en 1894, exportateurs de phosphates bruts, nous sommes depuis cette époque importaleurs : l’exédent des exporta- tions sur les importations, qui était, en 1889, de 145 000 tonnes, est tombé à 29000 tonnes en 1894, et aujourd’hui, la France importe annuellement 60 à 70000 tonnes. Ainsi, au fur et à mesure de l'épuisement des gisements de Ja Somme, l'excédent de nos expor- tations sur nos importations a rapidement décliné et ce sont aujour- d’hui les phosphates étrangers “ou pénétrent comme matière pre- mière dans nos usines. Cet état de choses ne semble pas du reste avoir beaucoup influé sur le mouvement des produits fabriqués livrés à l'agriculture. Si nous nous reportons, en effet, à la statistique générale des douanes, voici ce que nous constatons : en- 1890, nos importations en super- phosphates élaient de 99440 tonnes, el nos exportations de 27 327 tonnes ; l'excédent des premières sur les secondes était donc de 72119 tonnes. En 1896, nous importions 124115 tonnes et nous exportions 43951 tonnes. L’excédent des importations sur les ex- portations s’élevaient à 81164 tonnes : il n’a donc varié, de 1890 à 1896, que de moins de 10 000 tonnes : c’est la Belgique qui fournit les 9/10 de notre importation en superphosphate. Pour pouvoir apprécier l'importance capitale qui s'attache pour la France, autant que pour notre colonie, à la solution libérale que 220 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. l'exploitation des phosphates d'Algérie doit recevoir du Parlement, il est indispensable de se faire une idée précise du développement, dans l'extraction et dans les expéditions, des redoutables concurrents que rencontrent aux États-Unis nos gisements algériens. Nous ver- rons, en serrant de près la question, que l’Algérie est merveilleu- sement placée pour prendre en Europe, dans cette branche d’in- dustrie, une place prépondérante, si les mesures administratives viennent donner aux capitaux la confiance que peut seule inspirer une législation libérale, assurant aux entreprises une stabilité in- compatible avec le projet de loi de 1895, comme il nous sera aisé de le démontrer. Il L'agriculture européenne consomme actuellement, par année, 3000000 de tonnes de superphosphate nécessitant, pour leur fa- brication, environ moitié de ce poids de phosphates bruts. Dans ces dernières années, ces 1 500 000 tonnes de matières premières ont été fournies à peu près exclusivement par les gisements de cinq pays, dans les proportions suivantes : Hioride ep Üaroline Er: EE 40 p. 100, LTANCE MARRANT SCA ANES MA AT Belgique VALEURS, DU PER SR RTE EE Algbnie (4 PEMEUC TEEN ATEN EURE 10 Norvège, Canada, ete: te 0e 2 — Total Oo s Corte MODs Bien que la part de la France et de l'Algérie réunies soit presque égale à celle des États-Unis, dans l’approvisionnement de l’Europe en phosphates bruts, on se tromperait grandement en admettant qu’il doive en être ainsi longtemps encore, si une législation libé- rale et protectrice des véritables intérêts des producteurs et des con- sommateurs de phosphates algériens ne vient pas promptement donner à l'exploitation des gisements de notre colonie l'essor trop longtemps. retardé par l’incohérence des agissements administratifs LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D’ALGÉRIE. 224 et les difficultés de tout genre auxquelles ont été en butte les pre- miers exploitants. La question qui se pose à propos de la législation relative à l’ex- ploitation des phosphates est de la plus haute gravité pour l’avenir de l'Algérie autant que pour celui de l’industrie et de l’agriculture françaises. On ne saurait donc l’envisager avec trop d’attention pen- dant qu’il en est temps encore, c’est-à-dire avant la discussion du projet de loi déposé depuis bientôt deux ans au Parlement (janvier 1806). AE PAR Il ne s’agit rien moins, en effet, que de décider si une loi libérale, encourageant l’initiative privée, offrant aux capitaux très considé- rables qu’exige l’industrie des phosphates une stabilité indispen- sable à toute grande entreprise, viendra permettre aux phosphates algériens de prendre sur les marchés français et européens la place qui peut et doit leur appartenir. Le projet de loi du 18 janvier 1896, s’il était voté sans les modifi- cations capitales que j'indiquerai tout à l'heure, aurait pour résultat inévitable, bien qu’allant à l'encontre des intentions de ses auteurs, cela va sans dire, d'augmenter, de plus en plus, l’exportation des phosphates américains vers l’Europe et d’assurer aux gisements des États-Unis l’approvisionnement presque exclusif des fabriques de su- perphosphates du continent. Le jour, plus proche peut-être qu’on ne semble le croire dans certains milieux, où les gisements riches de France et de Belgique seront épuisés, il serait bien à craindre, sui- vant l'expression de M. L. Chateau, que, si le projet déposé était promulgué dans son ensemble, l’exploitation industrielle des phos- phates en Algérie ait vécu et que ces beaux gisements, uniques au monde, deviennent une simple curiosité scientifique. Sur quelles bases solides repose cette assertion ? Dans quel esprit doit, suivant nous, être conçue la législation sur les phosphates d’Al- gérie si impatiemment attendue du monde commercial et agricole ? C’est ce que je demande à mes lecteurs la permission d’exposer aussi nettement qu’il me sera possible de le faire. L'ensemble des documents et des chiffres que M. L. Chateau a réunis avec tant de soin dans son intéressant travail, va nous per- mettre d’abord de bien préciser les conditions de la redoutable con- AHPARRE ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. currence que les gîtes algériens rencontrent dans le développement des exploitations de la Floride. Quelques chiffres suffisent pour donner une idée de la rapidité des progrès accomplis en moins de six années dans l’extension et l’ex- portation des phosphates américains. À eux seuls les gisements de la Floride ont donné lieu aux exportations suivantes : NE PO RON ONE EEE tar En 189240: te ue cout COSTA) ICONE ER 18960 0 MEME PRE EME PRES D'après les relevés statistiques de l'American Fertiliser, la pro- duction totale des gisements de la Floride, de la Caroline et du Ten- nessee a été en 1896 de 854454 tonnes ; la consommation locale, de 347 893 tonnes et l’exportation de 477 431 tonnes. De 522000 tonnes qu’elle était, en 1894, l'exportation de la Flo- ride est tombée un peu au-dessous de 500000 tonnes en 1895 et 1896 ; cette diminution de 25 000 tonnes a été causée par la débâele qui s’est produite en Europe dans les cours de vente du phosphate, à la nouvelle de la découverte des gisements d'Algérie. En 1895 et en 1896, un certain nombre d’exploitants américains ont même sus- pendu leurs travaux, quand cette situalion est venue se compliquer de la hausse du fret. Malgré cela, la statistique des arrivages de Flo- ride montre qu'ils ont encore eu lieu couramment en 1896, non seu- lement dans nos ports de l'Océan, comme Bordeaux, la Pallice, Nantes, mais que les ports de la Méditerranée, qui devraient être déjà les clients exclusifs des phosphates algériens (Gênes, Venise, Barcelone et Saint-Louis-du-Rhône), ont reçu des arrivages très importants de minerais américains, bien que l’Algérie fût en me- sure de servir cette clientèle, en 4896. A quoi lient-il que les ports européens, même les plus voisins des gisements algériens, soient approvisionnés par les phosphates de la Floride ? Quels sont les principaux motifs qui permettent à la Flo- ride de lutter avec les gisements algériens sur Je marché européen ? La situalion peut-elle se modifier et comment? Tels sont les points qu'il importe d'examiner d'autant plus attentivement que les faits révélés par cet examen devront être pris en très grande considé- LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 223 ration dans la confection de la législation sur les phosphates algé- riens. La première constatation de fait est la différence sensible de ri- chesse en phosphate pur des minerais de la Floride et de l'Algérie. J'ai dit précédemment que la teneur en phosphate des minerais al- gériens oscille entre 99 et 73 p. 100 : celle des minerais de Floride varie de 75 à 85 p. 100. Il faut donc, d’une part, que l’abaissement du prix de revient des phosphates d'Algérie pouvant servir à la fa- brication des superphosphates, c’est-à-dire d’une richessse moyenne de 67 à 68 p. 100 et, de l'autre, la différence du fret amènent nos phosphates algériens dans les ports européens à un prix au moins égal, sinon inférieur, à celui des phosphates des États-Unis. Exami- _‘nons Lout de suite, avec M. L. Chateau, la question du fret. Présen- tement, par suile de la situation économique des États-Unis, les importations d'Europe en Amérique ont fortement diminué; les navires, en retour, sont naturellement devenus beaucoup plus rares et les prix du fret pour le continent ont subi une notable augmen- lation. Les dix-huit vapeurs expédiés en 1896, de Floride sur Stettin, ont eu un fret moyen de 21 fr. 45 c. par tonne. Les dix vapeurs expédiés de Bône sur Stetlin ont payé un fret moyen de 11 fr. 25 c. Si nous admettons avec M. L. Chateau que les expéditions de Floride avaient un titre moyen de 80 p. 100, on voit que le fret représentait, par unité de phosphate et par tonne, environ 27 centimes, tandis que les phosphates algériens qui titraient autour de 67 p. 100 avaient, par unité de phosphate et par tonne, un prix de fret de 17 centimes environ. D’une façon générale, en Baltique et dans tous les ports de l’Europe du Nord, lPAlgérie a donc un avantage de 10 centimes par unité de phosphate et par tonne, sur les prix de transport de Flo- ride. Cette différence permet à ses minerais de s’introduire dans des usines où, en général, on préfère traiter les phosphates plus riches de Floride; elle s’accentue naturellement en Méditerranée. Mais il ne faut pas perdre de vue que si, dans quelques années, la politique économique des États-Unis subissait une nouvelle évolution, le prix du fret en relour d'Amérique baisserait forcément et que la diffé- rence au profit de l’Algérie pourrait s’atténuer et même disparaître. La conclusion à tirer de cette situation nous parait évidente : si 224 ANNALES 'DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. important que soit l'élément fret dans l'industrie des phosphates, comme ses variations échappent absolument à notre action, c’est sur l’organisation et le fonctionnement des exploitations de phos- phates que doivent se concentrer les efforts, afin de réduire à son minimum possible le prix de revient. C’est à aider l’initiative privée sous le triple rapport de la découverte, de la prise de possession, de l’exploitation commerciale des gisements, que doit viser la future législation sur les phosphates algériens. A cet égard, les États-Unis nous offrent des exemples qui ne devraient pas être perdus pour nous. On ne saurait douter, pour peu qu'on ait étudié le développe- ment de l’industrie phosphatière aux États-Unis, que les gisements algériens eussent, depuis des années déjà, pris dans le commerce des phosphates la place qui leur revient par leur abondance et par leur richesse, si l’on eût appliqué dès l’origine à leur exploitation la législation libérale et l'esprit pratique que nos concurrents du nouveau monde ont mis au service de cette grande industrie, au progrès de laquelle est lié en grande partie l'avenir de l’agriculture continentale. Si, depuis l’époque déjà lointaine (1884-1888) où, avec le désin- téressement du vrai savant, M. Ph. Thomas a signalé à lattention publique, au fur et à mesure de ses découvertes, les riches gisements phosphatés d'Algérie et de Tunisie, à laquelle son nom demeurera attaché, si, dis-je, encouragés et stimulés par les pouvoirs publics, les capitaux et l’activité d’industriels français s'étaient depuis douze ans portés de ce coté, l’Algérie aurait conquis dans le commerce des phosphates la place qu'il lui faut aujourd’hui disputer à l’Amé- rique. Mais il est temps encore de remettre les choses en état ; cela se peut, à la condition qu’au lieu d’aggraver par le vote du projet de loi du 18 janvier 1896 les dispositions du décret de 1895, si peu favorable déjà à l'essor de l’industrie phosphatière en Algérie, le Parlement, s'inspirant des mesures libérales de la législation améri- caine, assure à l'initiative privée la stabilité de ses entreprises et fa- vorise les débouchés au lieu de les restreindre, comme à plaisir. Ce n’est pas en limitant à dix ans le contrat par l’adjudication qui assurera le droit d'exploitation d’un gisement à une compagnie in- dustrielle et en grevant de 2 fr. par tonne les minerais expor- LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 229 tables à l'étranger, qu’on engagera les capitaux considérables que nécessitent ces entreprises à se porter vers la colonie. J’insisterai plus loin sur ces deux points que je me borne à signaler : de leur rejet ou de leur adoption dépend entièrement l'avenir de l’industrie phosphatière en Algérie: voilà ce qu’on ne saurait trop affirmer. Pour que cette industrie prenne le développement quasi illimité qu’elle peut atteindre, il faut, d’une part, qu’elle arrive à abaisser, par tous les moyens pratiques, le prix de revient du phosphate in- dustriel livrable dans un des ports d'Algérie ; cet abaissement im- plique, avec Pextraction de la masse la plus considérable possible de phosphate riche, la vente directe à l’agriculture du phosphate de titre moyen. Or, ces deux conditions essentielles ne peuvent être remplies qu’au prix d'installations coûteuses, de constructions de lignes de chemins de fer reliant les centres d'extraction aux ports d'embarquement etc., etc. Il faut enfin que les minerais à livrer à l'industrie du superphosphate en Angleterre, en Italie, en Allemagne, pays de grande consommation où n'existent pas de gisements de phosphate, ne soient pas grevés à leur sortie d'Algérie d’un droit de 2 fr. par tonne, comme le propose le projet de loi, soit de près de 10 p. 100 du prix de revient du phosphate dans un port algérien. Je dis que nous ayons profit à faire de ce qui se passe aux États- Unis, en ce qui regarde l’action des pouvoirs publics et l’organisa- tion de cette grande industrie. Les Américains sont, comme on le sait, des industriels avant tout pratiques. Sans avoir recours à l'État, par la seule puissance de l'initiative privée qui, à vrai dire, n’est pas entravée, chez eux, par l'administration, ils ont créé un outillage des plus perfectionnés pour la mise en exploitation de leurs gisc- ments. Îls ont successivement établi cinq ports nouveaux. Ils les ont reliés à leurs gisements par de nombreuses lignes de chemins de fer qui, non exploitées administrativement comme en France, mais avant tout, commercialement, lransportent le minerai à bas prix. Dans les exploitations, ils ont concentré tous leurs efforts sur l’abais- sement du prix de revient ; ils ont amélioré leurs procédés d’aba- tage et de broyage, en généralisant l’emploi de machines, en utili- sant le travail à l’excavateur, etc. De son côté, à l'encontre de ce qui se passerait en Algérie avec la ANN. SCIENCE AGROX. — 2° SÉRIE, — 1897. — 11. 15 226 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. loi en projet, l'État américain encourage énergiquement l'extraction des phosphates aux États-Unis ; l’acte du 41 juin 1891 qui règle, en Floride, la législation de cette industrie, est très libéral. Il en est de même dans la Caroline du Sud, ainsi que le prouvent les faits suivants. Dans cet État, les minerais, quoique de très bonne qualité, sont sensiblement plus pauvres que ceux d'Algérie : ils ne dosent que de 57 à 61 p. 100 de phosphate. Les redevances payées à l'État par les exploitants des terrains domaniaux s’élevaient, en 1890, à près d’un million de francs (240 000 dollars). Dès 1893, à la suite de la baisse provoquée par le commencement d'exploitation des gisements d'Algérie, presque toutes les compagnies exploitantes de la Caroline fermérent leurs chantiers d'extraction. M. Jones, inspecteur des phosphates de la Caroline du Sud, démontra, dans un rapport au gouvernement, que le produit des redevances avait passé de 240 000 dollars à 60 000. La redevance à l'État, qui était primitive- ment de À dollar par tonne, déjà réduite à 90 cents, fut abaissée à 25 cents, à la suite du rapport de M. Jones. Jusqu'en 1893, la Caro- line du Sud exportait en Europe de 125000 à 160000 tonnes de phosphate, par année ; cette exportalion ne dépasse pas 80 000 tonnes aujourd'hui. La richesse de nos minerais d'Algérie, supérieure de sept à huit pour cent à celle des minerais de la {aroline, peut donc leur permettre de prendre la place de ces derniers sur le marché européen. La fabrication du superphosphate en France, se répartissant à peu près comme suil : Région du Nord... =.04 27.404. m190/0B0 tonnes; Paris et région du Gentre . . . . . 320000 — Sud et Sud-Ouest . . . . . . . . 240000 — le marché du Sud et du Sud-Ouest, tout au moins, devrait appar- tenir au phosphate d'Algérie. De plus, le commerce des engrais prend en Italie une certaine ampleur. C’est l'Algérie encore qui de- vrait alimenter les ports de Gênes, de Venise, et, pour l'Autriche, eux de Trieste et de Fiume. Je suis convaincu, avec M. Chateau, que, si l’on n’entrave pas l’es- sor de son industrie, l'Algérie arrivera à prendre dans tous ces pays LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 227 une situalion importante pour la vente de ses phosphates. Petit à pelit, ses minerais doivent conquérir, dans le bassin de la Méditer- ranée, une sorte de monopole et se partager, avec les phosphates de la Floride, les demandes des fabricants du nord de l’Europe. Mais, pour cela, il faut résolument seconder l’initialive privée et substituer une loi libérale au décret du 12 octobre 1895. Il me reste à présenter à ce sujet les observations que suggère la lecture attentive du projet de loi soumis en ce moment à l’examen ‘et aux délibérations du Parlement et les modifications à lui faire subir dans l'intérêt de l’agriculture et de l'industrie de l'Algérie et de la France. I L'examen que nous avons fait de la remarquable étude de M. Chateau sur les phosphates d'Algérie a mis en évidence l’impor- tance des gisements sous le double rapport de leur étendue et de leur richesse. Nous avons vu que ces gisements n’ont de com- parables dans le monde que ceux de la Floride et nous sommes amenés à conclure à la possibilité, pour notre colonie, de concur- rencer sur le marché européen les phosphates américains, au grand profit de l'Algérie, de l’industrie et de l’agriculture françaises. A quelles conditions celte possibilité peut-elle devenir une réalité? C’est le point essentiel qui reste à examiner. La solution favorable de la question des phosphates algériens est tout entière entre les mains du Parlement. De la législation qui sor- tira de ses délibérations dépend, on peut dire absolument, l’avenir d’une industrie au sort de laquelle est étroitement liée la prospérité de notre colonie. On ne saurait trop mettre en lumière, pendan qu’il en est temps encore, l’évidence de celte vérité pour quiconque a fait de la question une étude approfondie. Si le Parlement, abrogeant le décret du 12 octobre 1895, vote, sans la modifier radicalement, la loi dont le projet lui a été soumis le 18 janvier 1896, c’en est fait pour longtemps, et pour toujours peut-être, du développement de l’exploitation naissante des gise- 228 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ments d'Algérie. Que les Chambres, au contraire, s'inspirant des nécessilés de l’industrie, adoptent une législation libérale, aidant l'initiative privée au lieu de l’entraver, et donnent aux entreprises des garanties de stabilité indispensables à leur succès, la colonie prendra bientôt dans le commerce des phosphates la place que lui assignent ses richesses souterraines. Je n’ai point la prétention d’opposer au projet de loi de 1896 une rédaction nouvelle; je laisserai ce soin aux membres du Parle- ment que j'aurais la bonne fortune d'amener à la conviction que le projet de 1896 est néfaste, son adoption équivalant à la condamna- tion anticipée de lout développement de l’industrie phosphalière en Algérie. Je bornerai donc l’examen critique du décret de 1895 et du projet de loi de 1896 aux points qui en indiquent l’esprit, en résu- ment l’économie et dont l'adoption, à l'encontre des vues du législa- teur, tuerait dans l’œuf la poule aux œufs d’or. La première remarque que suggère la lecture de ces documents est, comme l’a très justement fait observer M. l'ingénieur Chateau, que les commissions composées de fonctionnaires, qui ont préparé les projets de loi, semblent surtout avoir recherché l'intérêt de l'État, sans tenir compte des besoins industriels et des nécessités commerciales, et sans paraître se douter qu’une loi libérale peut seule permettre aux phosphatiers de soutenir la concurrence étran- gère et de développer leur industrie, sans se ruiner. Les rédacteurs du projet ignoraient, sans doute, totalement les conditions économiques du marché des phosphates ; ils se sont figuré que cette industrie devait donner des bénéfices considérables, et ils ont tâché de faire profiter le Trésor de ces gains imaginaires. Les vices fondamentaux du projet de loi résultant des illusions de ses auteurs se résument à trois principaux : 1° L’adjudication comme seul moyen pour l’industrie d’acquérir le droit d'exploitation ; 2° La limitation de la durée de l’amodiation par la voie d’adjudi- calion ; 3° La fixation, en dehors de la redevance qui fait l’objet de l’ad- judication, d’un droit d’extraction de 2 fr. par tonne de phosphate expédiée ailleurs que dans la métropole. LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 229 Pour faire saisir combien ces dispositions du projet de loi sont graves et contraires au développement de l’industrie des phosphates en Algérie, il nous faut dire quelques mots de la loi du 21 avril 1810, concernant les mines, minières et carièrres, et du décret de 1895 qu'abrogerait la loi en projet depuis deux ans. La loi de 1810, promulguée à une époque où l'existence des gise- ments de phosphates élait complètement inconnue, range en trois catégories «les masses de substances minérales ou fossiles renfer- mées dans le sein de la terre ou existant à la surface ». Tous les minerais métalliques, y compris le fer, en filons, couches ou amas, ainsi que la houille, l’alun et le sulfate d’alumine sont classés sous la rubrique mines. Les mincrais de fer, les terres pyriteuses ou alumineuses et la tourbe forment une deuxième catégorie sous le nom de minières. Enfin, sont dénommés carrières les gisements de pierre à bâtir, pierre à plâtre, sable, kaolin, etc., etc. Le sel gemme, oublié par le législateur de 1810, a été classé dans les mines par la loi du 17 juin 1840. La différence essentielle des mines, minières et carrières au point de vue de l'exploitant, réside en ceci: les mines et les minières, exploitées seulement par travaux souterrains, sont concessibles, c’est-à-dire deviennent la propriété perpétuelle de l'individu ou de la société en faveur desquels la concession a été accordée par l’État. Si l'inventeur d’une mine n’en oblient pas la concession, il lui est dû par le concessionnaire une indemnité fixée par l’acte de conces- sion. L'exploitation d’une carrière à ciel ouvert ou en galeries sou- terraines ne donne lieu à aucune concession, elle peut se faire sans autorisation préalable: le propriétaire du terrain dans lequel se trouve une carrière peut disposer de celle-ci à son gré, le vendre, l’affermer, le louer, etc., sans aucune intervention étrangère. Le droit pour celui qui découvre un gisement classé dans la pre- mière catégorie d'obtenir la concession de ce gisement ou, lout au moins, de recevoir une indemnité du concessionnaire, est un slimu- lant incontestable pour la recherche des gîtes métalliques ; il n’est, en tout cas, qu’une juste rémunération du savoir de l’inventeur et des sacrifices qu'il s’est imposés. En France, contrairement à l'équité et à la logique, 1l faut bien le dire, les gisements de phosphates en 230 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. masse ont élé rangés dans les carrières et l'on s’est obstiné jusqu'ici à les maintenir dans cette catégorie. Leur inventeur n’a aucun droit à leur exploitation, aucune rémunération de ses peines à en at- tendre. L'occasion s'offre, par la découverte des gisements d’Al- gérie, de réparer cette double erreur; pourquoi ne Ja saisirait-on pas? Je n’ai pas rencontré jusqu'ici, de la part des hommes com- pétents, une seule objection sérieuse à cette addition à la loi de 1810. Le phosphate de chaux est, ce semble, un minerai aussi précieux, sinon plus, que l’alun ou le sulfate d’alumine, sels métalliques aux- quels on peut l’assimiler au point de vue légal : il ya pour le rendre concessible, condition qui soumet son exploitation à une surveil- lance destinée à empêcher le gaspillage peu redoutable pour la pierre à bâtir ou le sable, tout autant de raisons qu’on en peut invoquer pour le sel ou pour l’alun. Le gouvernement tunisien, en adoptant le système de la concession pour les immenses gisements de Gafsa, à donné un exemple dont l'Algérie devrait profiter. Objecterait-on que les gisements de phosphates se rencontrent en Algérie dans des territoires divers au point de vue de la constitution de la propriété: terrains domaniaux, terrains de droit français, ter- rains melk, terrains arch ? Le principe de l'indemnité prévue par la loi de 1810, en faveur des propriétaires du sol dont le tréfond ren- ferme des mines ne suffit-il pas à dédommager l'État, les com- munes, les douars ou les particuliers du dommage que pourraient leur causer les exploitations et même à les faire participer, sous une forme à étudier, aux bénéfices de cette exploitation ? Si, laissant de côté cette grave question de la concessibilité des phosphates à laquelle on ne saurait trop accorder d’attention, nous revenons au projet de loi, voici ce que nous constatons : les gise- ments de phosphates algériens ne seraient classés ni dans la catégorie des mines, comme en Tunisie, ni dans celle des carrières comme en France. Le propriétaire des terrains dans lesquels ils se trouvent ne peut pas les exploiter, qu’il les ait découverts ou qu’un autre en ait signalé l’existence. On a créé pour ces gisements une catégorie, un régime de carrières spéciales pour emprunter le langage de l’ex- posé des motifs de la loi de 1896. o LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 251 Quel est ce régime? le voici en deux mots: l’État se réserve le droit exclusif d’accorder des concessions par voies d’adjudication sur les terrains domaniaux, communaux ou indigènes, de droit collectif ou privé. Le décret de 1895 respectait les droits tréfonciers des pro- priétaires français en Algérie ; il récompensait l’inventeur du gise- ment en lui accordant le droit d'exploiter sans payer de redevance; le projet de loi de 1896 fait disparaître ces deux dispositions libé- rales. Bien mieux, il supprime la faculté que ce décret avait laissée à l'administration de concéder aux explorateurs un gisement de gré à gré, sans recourir à l’adjudication, L’inventeur n’a plus droit à rien et les colons ne pourraient plus disposer des phosphates contenus dans leurs propriétés de droit français. Cette inégalité de traitement avec le régime appliqué à la propriété en France s’expliquerait, suivant l'exposé des motifs, parce qu’on n’a pas à respecter chez les propriélaires algériens des droits acquis ! Quel encouragement à la colonisation! Voilà une loi qui rangerait les phosphates d'Algérie dans le régime des carrières, en enlevant aux colons le droit qu’a en France tout propriétaire d’une carrière de l’exploiter à sa guise sans passer par l’adjudication. Il ne nous paraît pas possible qu’une pa- reille exception, si défavorable aux colons français, soit sanctionnée par le Parlement. Du principe, passons à l'exécution : l’État, en possession du droit exclusif d'accorder des concessions, met l’exploitation des gisements uux enchères et limite à une période très courte, beaucoup trop courte, nous allons le voir, la durée du bail. Le chiffre de la rede- vance que le preneur s’engagera, par soumission cachetée, à payer, par tonne de phosphate extraite, décidera du choix de amodiataire. Sans se soucier ou plutôt, je le crois, sans se douter de la double né- cessilé, dans des travaux de mines de ce genre, d’y consacrer des ca- pitaux considérables et d’avoir la sécurité du lendemain avant de les y engager, les rédacteurs du projet enlèvent à l'administration la possibilité de tenir compte aux industriels des sacrifices consentis par eux. On devra, coûte que coûte, procéder tous les dix ans à une nouvelle adjudication. L'article 6 du projet, il est vrai, dit qu’un dé- cret rendu en la forme des règlements d'administration publique peut accorder, à litre exceptionnel et pour une durée qui ne pourra 232 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. excéder dix années, sans adjudication nouvelle, une prorogation de l’amodiation à l’amodiataire dont le bail serait sur le point d’expirer. L'article se termine ainsi: « Ce décret fixe la redevance à payer par tonne pendant cette prorogation : Zn caudä venenum. » Quels seront les industriels qui pourront désirer user de cette faculté de proro- gation ? Parfois celui qui aura réalisé quelques bénéfices pendant la durée de son bail, mais, le plus souvent, sans doute, celui qui, ayant engagé de gros capitaux dans son exploitation, verra arriver le mo- ment de la récolte à l'instant même où expirera le contrat avec l’État. Or, n'est-il pas à craindre que le renouvellement, sans adjudication, ait pour corollaire l’augmentation de la redevance par tonne que devra fixer le décret? Les rédacteurs ne se sont certainement pas rendu compte de la situation de l’industrie des phosphates et pas davantage des condi- tions de succès des entreprises qui s’y rattachent. Ils se sont figuré qu'il existe un écart énorme entre les prix de production et les prix de vente : ils n’ont point réfléchi à l'importance des capitaux néces- saires pour l’exploitation de la mine, le traitement des minerais, la construction des voies ferrées, leur transport au lieu d’embarque- ment, etc... En un mot, ils semblent avoir envisagé, avant tout, le côté fiscal de la question sans se demander si le régime bâtard ima- giné par eux n’étoufferait pas, dans son germe, l’industrie naissante qui peut être pour l’Algérie une des causes trop rares, hélas! de sa prospérité. Mais il ne suffirait pas d’édicter un mode de concession ou de droit d'exploitation plus libéral, ni même d'étendre l’exercice de ce droit à une période beaucoup plus longue que celle prévue par le projet de loi, pour assurer la prospérité future de l’industrie des phos- phates en Algérie et les bénéfices que la France doit en attendre pour son agriculture. Il faut rayer de la loi impôt de 2 fr. dont le projet grèverait le prix de revient de la tonne de phosphate exportée en tout pays autre que la France. Ce droit de 2 fr., dit l'exposé du projet, « n’a rien d’exagéré avec les bénéfices qui peuvent être réa- lisés dans ces exploitations ». Voyons ce qu'il en est de cette asser- lion. Les évaluations les plus modérées portent à 20 fr. le coût de la LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 293 tonne de phosphate rendue à quai au port de Bougie. Le droit de 2 fr. correspond donc tout bonnement à 10 p. 100 du prix de re- vient. Cet impôt de 2 fr. s’appliquerait, comme la redevance résul- tant de l’adjudication à chaque tonne de phosphate brut, sans distinc- tion de richesse des minerais en phosphate pur. Or, nous l'avons vu, la richesse des phosphates d'Algérie qui est, en moyenne, de 67 p. 100, varie entre 58 et 71 p. 100. Étant donné les cours actuels des phosphates sur les marchés européens, un impôt de 2 fr. par tonne, non seulement mettrait les phosphatiers dans l'impossibilité d’écou- ler les minerais à 60 p. 100, mais encore rendrait très difficile aux compagnies algériennes la vente de leurs phosphates 65/70 sur les marchés européens. En voulant percevoir des droits trop élevés, comme le dit M. Chateau, l'État menacerait de rendre impossible l’exploitation des phosphates en Algérie et courrait le risque de ne plus rien avoir à encaisser. Quel est l’objectif à poursuivre? C’est, à coup sûr, de permettre à une industrie considérable de s'installer en Algérie dans des con- ditions qui lui permettent de prospérer. Comment latteindre ? Par une législation libérale aidée dans son application du concours de l'administration à toutes les entreprises de l'initiative privée, se substituant aux tracasseries et aux incertitudes qui ont si malheu- reusement marqué ces dernières années. La première préoccupation du législateur doit donc être d’encou- rager les colons français à exploiter les richesses minérales de leur sol, d'attirer en Algérie les hommes et les capitaux indispensables pour donner essor à l’industrie naissante qu’on semble avoir pris plaisir à entraver jusqu'ici. Que le Parlement se pénètre de ces vérités et se hâte de mettre enfin à son ordre du jour, par un tour de faveur, la discussion d’un projet de loi déposé depuis bientôt deux ans à la Chambre des dé- putés. Les plus graves intérêts sont en suspens; il ne s’agit rien moins que de décider si les immenses richesses renfermées dans le sol algé- rien y demeureront enfouies ou si leur exploitation, à l'abri d’une législation libérale, nous rendra maîtres du marché européen, sup- primant en même temps le tribut que nous payons au nouveau 234 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. monde pour la fertilisation de nos terres. Peu de questions semblent aussi dignes que celle-là du souci et de la sollicitude des pouvoirs publics. By L'étude rapide que nous venons de faire de la question des phos- phates algériens a pour objet principal de mettre en lumière l’ur- gence du vole d’une loi qui règle, sur des bases libérales, les con- ditions d'exploitation des gisements. Rien, en effet, ne peut être plus funeste à une industrie naissante, surtout lorsque celle-ci exige des capitaux considérables, que l’in- certitude du régime sous lequel elle se trouvera. Virtuellement abrogé par le dépôt du projet de loi de 1896, le décret du 12 oc- tobre 1895 n’est plus appliqué ; le sort des anciennes concessions n’est pas réglé, il n’en est plus accordé de nouvelles et, finalement, exploitation très restreinte des richesses que renferme le sol algé- rien demeure stationnaire *. Cet élat de choses voisin de lanarchie ne saurait se prolonger plus longtemps sans compromettre grave- mnt les intérêts les plus évidents de la colonie, de l’industrie et de l’agriculture françaises. Mes lecteurs me permettront donc, après avoir montré combien seraient préjudiciables les dispositions du projet de loi du 21 jan- vier 1896, de préciser davantage encore les raisons majeures qui condamnent ce projet et d'indiquer les points essentiels que le légis- lateur doit avoir en vue. J'ai dit ma prédilection pour le régime de la concession substituée à l’amodiation par voie d’adjudication. En vain objecterait-on que placer les phosphates d'Algérie dans la catégorie des mines, établie par la loi de 1810, serait adopter pour notre colonie une législation différente de celle de la métropole. Cet argument est sans valeur, 1. Le tonnage de phosphate extrait en 1897 ne dépassera pas celui des années précédentes des quantités qu'il aurait pu atteindre par la mise en exploitation de nouveaux gisements, Les centres d'extraction de Tebessa ont produit 153 000 tonnes en {596 ; ils fournirent en 1897 180 000 tonnes environ. LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 2939 puisque le projet de loi du 21 janvier 1896, en rangeant les phos- phates algériens dans la catégorie des carrières, comme cela existe en France, leur applique un régime tout différent de celui de la métro- pole. Disparate pour disparate, ne vaudrait-il pas mieux donner à l'Algérie le régime le plus favorable au développement de l’industrie phosphatière que de lui appliquer, sous le prétexte que les gisements de phosphate sont non des mines, mais des carrières, un régime beaucoup moins libéral que celui des carrières françaises ? Les au- teurs du projet de loi de 1896 paraissent avoir subordonné l'intérêt de l’industrie et de l’agriculture à ce qu'ils croient être l'intérêt budgétaire de la colonie ; voilà, je crois, l'erreur fondamentale qui a élé le point de départ des dispositions que je combats. On a dû partir d’une idée fausse, répandue dans le public, au moment de la découverte des gisements de Tebessa, par desassertions plus enthou- siastes que compétentes. Il s’agit de milliards, disait-on, à tirer de l'exploitation des phosphates algériens ; on ne saureit donc négliger de faire au budget algerien une large part dans les bénéfices que réaliseront les exploitants. De là, sans doute, la double mesure de l’adjudication au plus offrant et de la limitation à une courte période (dix ans au maximum) de la durée de l’amodiation. Personne à coup sûr ne peut chiffrer la valeur vénale réelle de la masse de phosphate à extraire du sol algérien; elle est sans doute très considérable, mais à des conditions essentiellement différentes de celles que le projet de loi propose de faire aux exploitants. Dans la situation tendue du marché des phosphates, la question du prix de revient prime toutes les autres et ce n’est pas le cas d’escompter le bénéfice que le gouvernement algérien pourra retirer de la con- currence dans les adjudications ; il faut voir bien plutôt les profits indirecls à attendre d’une industrie largement assise, ayant devant elle la sécurité que seule peut donner une longue possession du droit d'exploiter et l'assurance de l'emploi fructueux des capitaux considérables qu’il lui faudra engager. Ces profits indirects sont nombreux : ils résulteront d’abord de la masse de bras nécessaires à cetle industrie, le jour où elle pourrait exploiter annuellement les 1200 000 ou 1 500 000 tonnes de phosphate dès à présent dispo- nibles ; en second lieu, de l'augmentation du trafic par voies ferrées 236 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. qui viendra diminuer les garanties d'intérêt très élevées que l’État sert chaque année aux chemins de fer algériens, lorsque par l’abais- sement des tarifs les transports des phosphates seront plus abor- dables et plus commerciaux, Enfin, notre marine marchande, qui manque de fret, trouverait là une alimentation qu’on assurerait cer- tainement en décidant, par exemple, que seront seuls exempts des droits de sortie les phosphates naviguant sous pavillon français. Ces profits indirects, cela ne semble pas douteux, seraient plus avantageux pour la colonie que le produit des redevances résultant de lamodiation aux enchères de quelques centres d’exploitation. Il ne faut pas perdre de vue, en effet, que, contrairement à ce que semblent implicitement admettre les auteurs du projet de loi, l’ex- ploitation des gisements de phosphate ne saurait se multiplier pour ainsi dire à l'infini, comme celle des carrières ordinaires : pierre à bâtir, pierre à chaux, etc... Leur nombre sera forcément restreint pour de nombreuses raisons sur lesquelles il n’est peut-être pas inutile d’insister, et qui toutes aboutissent à démontrer la nécessité pour cette industrie de disposer d’un gros capital. Deux points doivent être particulièrement envisagés, savoir: 1° la richesse variable des phosphates d’un même gisement, d’où dépendent le traitement à leur faire subir et leur utilisation par lindustrie ou par l’agriculture ; 2 le transport des phosphates aux centres d’expé- ditions. Examinons-les avec quelque détail. Les analyses déjà nombreuses qu'on a faites des minerais d’Al- gérie ont montré que leur richesse en phosphate tribasique de chaux varie de 5 à 73 p. 100, leur teneur en carbonate de chaux allant de 20 à 40 p. 100. Ces phosphates sont pauvres en silice, en alu- mine et en sesquioxyde de fer et de magnésie ; ils sont, par consé- quent, très propres à être transformés en superphosphates. Notons tout de suite qu’étant donnée la baisse énorme des phosphates, dont la valeur vénale a, depuis cinq ans, diminué de près de 50 p. 100, les minerais titrant moins de 60 p. 100 de phosphate réel ne peuvent aborder le marché européen, en vue de leur transformation en su- perphosphate. On ne saurait trop insister sur ce point et le préciser. Aux cours pratiqués actuellement, le prix de l'unité de phosphate d'une teneur de 55 à 60 et même 65 p. 100 est de 0 fr. oÙ c., ce LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 231 qui représente, pour un minerai titrant 60 p. 100, une valeur dans un port d'Europe de 30 fr. la tonne. Or, nous avons vu que les chiffres réunis avec beaucoup de soin par M. Chateau conduisent précisé- ment à fixer le prix de revient de la tonne de phosphate algérien (fret compris jusqu’à un port d'Europe) entre 30 et 31 fr. 50 c. la tonne. À moins donc, ce qui est peu probable, que les prix des phos- phates bruts se relèvent sensiblement, le marché algérien ne peut pas compter exporter des minerais dosant 60 p. 100 et à fortiori des phosphates à titre inférieur à celui-là. Nous aurons à examiner le parti à tirer de cès phosphates peu riches. Les phosphates d’A- mérique titrant 65 à 70 p.100, valent actuellement de 0 fr. 691 à 0 fr. 721 l'unité de phosphate pur, dans un port européen‘. A ce compte, la tonne de phosphate algérien, d’un titre moyen de 67 p. 100, vaudrait environ 46 fr. En admettant que les minerais de 63 à 67 trouvent seulement leur placement à raison de 0 fr. 60 c. l'unité, la valeur de la tonne serait encore de 38 à 40 fr. La situation se résume donc ainsi : tous les phosphates à un titre égal ou inférieur à 60 p. 100 ne peuvent pas actuellement être exportés tels quels; les minerais de 65 à 67 p. 100 et au delà trouveront preneurs sur le marché européen à des prix rémunéra- teurs. La première condition qui s’impose à l’exploitant algérien est dans le triage, au lieu même d’extraction, des phosphates de richesse inégale ; la seconde est la recherche des meilleurs moyens de tirer parti des phosphates d’un titre inférieur à 63 p. 100 qu’on ne pour- rait, sans un véritable gaspillage, abandonner sur le carreau de la mine, comme on le fait des débris de pierre dans les carrières ordi- naires. Suivant la richesse des couches exploitables, ce triage four- nira des quantités très inégales de phosphates bruts à exporter et de phosphates à traiter ou à employer en Algérie. Trois moyens se pré- sentent pour l’utilisation de ces minerais à titre inférieur : 4° l’en- richissement du phosphate par lavage ou ventilation ; 2° leur trans- formation sur place en superphosphates ; 3° leur emploi direct par 1. Journal l’Engrais du 17 décembre. Valeur de l'unité, 5 deniers 1/2 à » de- niers 3/4. 2338 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. la culture algérienne. Les deux premiers procédés nécessitent des installations et des frais de manipulation qui justifient encore ce que nous avons dit précédemment de la nécessité d’une mise de fonds considérable ; j'y reviendrai dans un instant. Quant à l'emploi agri- cole des phosphates bruts moulus, on n’est pas encore fixé. Quelques essais de laboratoire, cultures en pot, etc... sembleraient indiquer que l’assimilabilité de ces phosphates par les plantes est faible, mais des expériences en rase campagne, bien conduites, sont nécessaires pour résoudre la question. À priori, d’après la composition des sols d'Algérie, dont la plus grande partie manque à la fois de chaux et d'acide phosphorique, je suis porté à penser que les phosphates de Tebessa, riches en calcaire, très finement moulus, devront donner de notables accroissements de rendement; mais, je le répète, les hypothèses les plus rationnelles ne suffisent pas ; il faut que l’expé- rience se prononce sur leur valeur. À mon instigalion et sur mes conseils, plusieurs propriétaires algériens et tunisiens ont entrepris, celle année, des essais de phosphatage de leur terre dont les ré- sultats nous édifieront sur la valeur agricole des phosphates bruts de Tébessa. Si les phosphates naturels ne peuvent être utilement employés par les cultivateurs algériens, les exploitants de cette précieuse matière devront, dans un délai prochain, arriver à les transformer sur place en superphosphate, car 1l n’est pas admissible qu’on laisse inutilisée la masse à coup sûr considérable de phosphate dont le titre ne per- meltrait pas lexportation. Il faut donc, d'ores et déjà, envisager la créalion d'usines à superphosphates, c’est-à-dire la fabrication d’a- cide sulfurique sur le territoire algérien, car cette matière première de l’industrie phosphatière ne semble pas pouvoir être importée d'Europe à raison des frais et des difficultés de transport jusqu'au siège des gisements de phosphates. Les pyrites d’Espagne et le soufre de Sicile sont les sources auxquelles on pourrait économiquement s'adresser pour la production de l'acide sulfurique. La fabrication du superphosphate trouverait aussi des débouchés en Jtalie et en Espagne où ce produit pourrait concurrencer avanta- geusement les superphosphates continentaux. Aux dépenses qu’entrainera la création d’usines à superphosphates, LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 299 il faut ajouter, dans les prévisions des frais de premier établissement d'un gisement, le coût des voies ferrées indispensables au plus grand nombre des futures exploitations. Dans son étude si intéressante, M. l'ingénieur Chateau énumère les gisements exploitables, géologiquement parlant, dans la province de Constantine. Il en compte six dans l’est ou sur la frontière luni- sienne; quatre dans le centre de la province ; sept dans l’ouest de Sétif; deux sur les territoires de Bordj-Rédir et de Tocqueville ;-un, enfin, entre le Djebel-Soubella et le Djebel-Tassa ; au total, dix-sept - gisements qui, dans un avenir plus ou moins prochain, pourront êlre mis en exploitation, si une législation libérale et intelligente vient donner à l’industrie naissante l’essor qui en dépend pour la plus large part. Les deux tiers environ de ces gisements peuvent être réunis aux voies ferrées existantes par la construction de raccordements d’une faible longueur, 25 kilomètres au maximum pour les plus éloignés. Les autres gites phosphatés sont situés à des distances du chemin de fer algérien variant de 30 à 80 kilomètres. L'établissement de ces raccordements étant une question sine qua non de possibilité d’ex- ploitation des phosphates, on voit à quelle dépense seront nécessai- rement conduits les concessionnaires ou les amodiataires de gise- ments. On ne peut guère penser, en effet, que le gouvernement général d'Algérie, pas plus que les compagnies de chemins de fer, prendront à leur charge la construction de ces raccordements. Le doublement des voies existantes qui s’imposera absolument, si l’on veul rendre viable l’industrie phosphatière, sera sans doute le maxi- num d'efforts qu’on puisse obtenir de la colonie el des compagnies de chemins de fer. De tout cela résulte que l'exploitation des phosphates algériens ne pourra se faire qu'avec des avances de fonds très considérables, dont seront seules capables des sociétés financières fortement cons- tituées, les petites exploitations par des individus isolés étant rendues absolument impossibles par l’importance des capitaux qu'exigent l’extraction, le traitement, l'installation de fabriques de superphos- phates et l'établissement des voies de transport des produits jusqu’au port d'embarquement et, dans l’intérieur de l'Algérie même, jus- 240 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. qu'aux lieux où phosphates bruts et superphosphates seraient em- ployés par l’agriculture algérienne. Il faut done que la loi votée par le Parlement tienne compte de ces considérations et qu’elle ait pour visée principale, presque unique, d'attirer, par les mesures libérales qu’elle édictera, les capitaux in- dispensables au succès des entreprises qu’elle a pour objet de pro- voquer et d'encourager. Si le principe de la concession pure et simple est repoussé, il faut, en tout cas, que de très longs baux, écartant les chances d’adjudica- tions répétées à courtes périodes, donnent une sécurité absolue aux capitaux. Il faut, en outre, que la redevance à payer à l’État soit aussi modérée que possible; que le droit de sortie soit faible, 0 fr. 50 c. par tonne par exemple, avec suppression de ce droit pour les phosphates exportés sous pavillon français. ll est de toute nécessité de ne frapper d’aucun droit supérieur à 0 fr. 50 c. par tonne les phosphates destinés à l’exportation vers les ports européens ; agir autrement, infliger un droit de 2 fr. comme le propose le projet de loi de 1896, c’est donner une prime à la con- currence des phosphates d'Amérique et rendre presque impossible la lutte de l'Algérie contre la Floride. Il faut enfin améliorer les voies ferrées existantes qui, actuelle- ment, ne peuvent transporter que la dixième partie du phosphate que l'Algérie pourrait livrer chaque année à l’industrie. Il dépend du Parlement d'imprimer, par le vote d’une loi libérale, un essor immense à l’utilisation des richesses du sol algérien et d'assurer à notre colonie la prédominance sur le marché européen. Espérons qu’il en sera ainsi et, cela, le plus tôt possible. J'emprunte à l'excellente étude de M. l'ingénieur Chateau les ta- bleaux statistiques relatifs au fret et aux cours des phosphates bruts au commencement de l’année 1897. On trouvera à la suite de ces tableaux le texte du projet de loi du 18 janvier 1896 et celui du décret du 12 octobre 1895. ANNEXES. LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 241 V. — ANNEXES. ANNEXE N° À. Statistique des Frets pour phosphate brut expédié de la Floride et de l'Algérie dans les ports de la Baltique. LIEUX FRETS LIEUX FRETS VAPEURS. TONNES. YAPEURS, TONNES. de chargement. | payés. de chargement. | payés, | Hartoillen. O0: Sir Wim Amstrong. Cordova. . è Orsino. . . Roikiliff. . Springheld. . | Hypatra. . . | Springfield. . . . Britannio . . | Birdoswald . . | Inverness . Birdoswald . . Macedonia. . . David Mainland . Henriette H . . . Tynedale . | Mab. . CLÉ | City of Newcastle. Stuart Prince . | Clintonie. . ne || Nymphea. . . . . WBothali + .1: ends ae N Vannghar . . . l » | Florida . Punta Gorda. Brunswick. . Punta Gorda. Fernandina . Brunswick. . Fernandina . Savannah . . Port Tampa. Savannah . . Port Tampa . Fernaandina . Port Tampa . Fernandina . Port Tampa. Fernandina . Port Tampa. Stettin,. 18/- 18/9 17/6 17/6 16/9 19/- 18/6 19/- 16-6 19/6 15; - 19/6 17/9 : 17j3 17/- 19/- 17/6 17/6 19/- 18/9 18/6 19/- Cart Hirschberg. Ennismore . Novak . . Barrailough. Oaklands. . . Roikklif . . Ben Clune . RERITELE CNE Durham City . . Mab . Ruabon. . . Glanhafren, . Marima. . Ben Corlio . . . North Flint. . . Lovstakken . . Jane Kelsall . Rjukan. . Ranmoor. . . Ragna : . .". Bothal . . Atthalie Liebenstein . . Danzig. Fernandina | 18!- | Dunmore Head . | Vésuv . Memel. Fa Niovsian . . Hallamshire . . 1 750 1 500 1 950 2 127 2 459 2 162 2 550 2 795 2 200 2 082 2 673 { 2 650 | 450 2 168 2 531 2 720 3 300 2 489 2 329 2 752 2 009 2 470 2 697 1 000 Ports en dehors de l'Allemagne. HELSINGBORG. . STOCKHOLM. . LANDSORONA . . TEMTOMEME eee North-Goalia . Stalheim . Ciburnum. . Langoe. . Virginia . . . . Le tout en shillings sterling à la tonne. Bône . Dales Crak. . Fernandina . Port Tampa, Bone. uw. 1. Fernandina .! Brunswick. . Fernandina . Port Tampa . Fernandina . Brunswick. . Bone". Brunswick. . Port Tampa . Bone 2:14; Fernandina . Bone er. Fernandina . Port Tampa. \ Les vapeurs affrétés à Tampa à la date du 31 décembre 1896 ne sont pas compris dans ce qui précède. 9/9 9/6 9/- 15/6 16/9 16/40 4/2 16/- 17/6 17/6 19/6 8/9 13/9 15/- 15/- 15/9 16/6 16/- 17/6 19/6 19/3 8/3 25] - 20 -6 12/- 17/- 18/4 1/2 23/6 17/- 17/6 18/3 18] - 14/- 22/6 ANN. SCIENCE AGRON. 9e SÉRIE. — 1897. — IL, 16 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ANNEXE N° 2. Cours du 28 avril 14897. GARANTIE : LIEUX DÉSIGNATION DE LA PROVENANCE, \ fer de livraison. EE ES DS SR 3 ED D SRE PHOSPHATES DE LA SOMME. Non lavés. | Dosant de 75 à 80 p. 100 de AURA de chaux. — 70 à 75 | Doullens. 65 à 70 60 à 65 55 à 60 o0 à 55 45 à 50 40 à 45 ’Auxi-le- tel Péronne. qu ons Lavés. Dosant de 70 à 75 p. 100 de phosphate de chaux. 3 1/2 à 4 et alumine. Sans garantie. — 65 à 70 — 60 à 65 — 55 à 60 (Prix à l'unité de phosphate par 1 000 kilogr.) CRAIES PHOSPHATÉES LAVÉES. Dosant de 60 à 65 p. 100 de phosphate de chaux. | 55 À — 50 à 5 — 48 à 5 — 45 à == 42 à _— Canal de la Somme ou de Saint-Quentin. Saint- Da ou parités. { 40 à 45 — / (Prix à l'unité de phosphate par 1 000 kilogr.) PHOSPHATES Du CANADA. (Prix à l'unité de phosphate par 1 000 kilogr.) | | ja Ê | Ports d'Europe.’ ja PHOSPHATES DE CAROLINE. 55 à 60 roche de rivière, en vrac 55 à 60 roche de terre, l'unité par Î 000 fon | Dosant de 80 à 85 p. 100 de phosphate de chaux. | DISPONIBLE. LIVRABLK, » 70 » 60 » 2) » 0 » 45 » 40 » 3 » LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D’ALGÉRIE. 243 ANNEXE N° 2 (suwale). Cours du 28 avril 1897 (suile). GARANTIE # a A LIEUX 2 R DÉSIGNATION DE LA PROVENANCE. fer z < li 1 à k à D de livraison Salaires = 4 p. 100 PHOSPHATES DE LA FLORIDE. Dosant de 75 à 85 p. 100 de phosphate de chaux.) { 643/4| 643/4 — 595 à 65 p. 100 de rivière . jADLE Ronropes 3 5 3/41 5 3/4 (Prix à l'unité de phosphate par 1 000 kilogr ) PHOSPHATES ALGÉRIENS, (Province de Constantine) | Dosant de 58 à 63 p. 100 . . . . . . . . . .| Ports Bayonne ci à Ü »55 en C0 070 pi TOUS ER uen. a Dunkerque} 447 l » 60 OS A0 0 4D OUR EN ET AR Le -| Ports de la : À » D) 1 — 63à 70 p. 100 . . . . . . . . . .\ Méditerranée. | | » 60 0e 03 DIODES Pat ts ee 541/2|5 R 2 eye RE 10 p.100 m0 Na ee ere oaune Un. | RUES nt AO D AUDE ES RE ER POP SE RAR \ 51/2151} LE: 69270 p+100 . | du continent. | ” | 53415 34 PHOSPHATES DE LIÈGE. | | | Dosant de 65 à 70 p. 100 de phosphate de chaux. » » 65 | 004860 — Liège 20112 » 60 — 60 à 65 — Rocour Ge) UE » 52 52 — 55 à 60 . 3 1/2 » 50! » 50! — 50 à 55 -- | jante. | 4 » 40 — 45 à 50 — Sans garantie. » 25| » 25 { (Prix à l'unité de phosphate par 1 000 kilogr.) — 12 50112 50 | | Dosant de 40 à 45 p. 100 prix par { 000 kilogr. PHOSPHATES DE Mons. Craie lavée de 40 à 45 p. 100 de phosphate de chaux. Mons. 1 2/5 »33| » 33) — 45 à 50 — | | 2 » A0! » (Prix à l'unité de 50 à 55 par 1 000 kilogr.). : .} Ciply » » 49] » 42 — 55 à 60 — A | » »45| » 45 244 ANNALES DE. LA £CIENCE AGRONOMIQUE. ANNEXE N° 3. Projet de loi sur l'exploitation des phosphates de chaux en couches situés en Algérie Présenté au nom de M. FÉzix Faure, Président de la République francaise, par M. Léon Bouncrois, Président du Conseil, Ministre de l'Intérieur, par M. Paue DouuEr, Ministre des Finances, par M. Guyor-DessaiNe, Ministre des Travaux publics, et par M. Vicer, Ministre de l'Agriculture. Exposé des motifs. Messieurs, Conformément à l’engagement pris par le Gouvernement dans la séance de la Chambre des députés du 24 décembre dernier, nous venons vous présenter le projet de loi qui nous à paru pouvoir régler les conditions de l’exploitation des phosphates de chaux en Algérie. Comment ces gites ont été découverts, comment leur exploita- tion a débuté, quels incidents et quelles difficultés elle a soulevés, comment le Gouvernement a cherché à les résoudre provisoirement par le décret du 12 octobre 1895, ce sont des questions sur les- quelles il nous parait inutile de revenir ; les diverses discussions qui ont eu lieu dans le Parlement les ont suffisamment élucidées. Mais il ne sera pas inopportun de rappeler les motifs, invoqués déjà par le Gouvernement dans la dernière discussion devant la Chambre, qui expliquent et justifient la législation spéciale que nous vous proposons et qui en doivent constituer les bases. « Une législation particulière est ici nécessaire », faisions-nous observer dans cette discussion, « parce qu’elle doit être appliquée à un pays différent de la métropole par la nature de son sol el par l’état de civilisation de ses habitants. Il n’est pas possible d'appliquer d’une manière mécanique, pour ainsi dire, la législation française aux terriloires algériens ». Les mêmes idées avaient déjà inspiré la préparation du décret du 12 octobre 1895. On s’y était efforcé de ne modifier la loi métro- LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D’ALGÉRIE. 24 politaine — qu'il y a toujours intérêt à suivre en Algérie lorsqu'on le peut — que dans celles de ses dispositions qui ressorlaient comme incompatibles avec les conditions spéciaies à l'Algérie. Aus:1 bien le Gouvernement a déjà fait connaitre qu’il pensait devoir maintenir comme base de la législation projetée l’économie géné- rale de ce décret, sauf à le modifier sur divers points, en ce qui concerne notamment l’extraction et les redevances et en cherchant, en outre, à étendre aux agriculteurs français les avantages qui n'étaient accordés par le décret, et sur une échelle très réduite, qu'aux agriculteurs algériens. Il y a trois points sur lesquels le projet de loi diffère du décret du 12 octobre 1895 et dont l'importance nécessile que nous nous y arrêtions tout d’abord. Le décret avait laissé de côté les terrains qui sont actuellement des propriélés conslituées au litre français entre les mains de per- sonnes privées. Nous ne méconnaissons pas les motifs de droit qui avaient conduit à faire une distinction entre ces terrains et ceux appartenant à des collectivités administratives ou relevant du droit musulman. Mais/l ne faut pas perdre de vue que les phosphates en couches, dont la découverte a suscité une si légitime émotion, ont été reconnus depuis trop peu de temps en Algérie pour que des transactions sérieuses aient pu être faites, en vue de leur exploita- tion, sur des terrains de propriété privée suivant le droit français : de pareilles propriétés existent à peine dans les régions à phos- phates. Le législateur peut donc séparer les phosphates de la pro- priété du sol en Algérie pour en rendre l’exploitation plus utile aux intérêts publics, sans êlre arrêté par cette question des droits acquis qui, dans la métropole, n’a pas laissé de contribuer puissamment à faire classer les phosphates dans les carrières. Aussi bien la dévolu- tion des « redevances lréfoncières » faite par l’article 15 aux pro- priélaires superficiaires paraîtra, dans l'espèce, une large compen- sation à la perte d’espérances qu’ils auraient pu entrevoir plus que de droits acquis dont ils auraient pu se croire réellement investis. D'autre part, il y a lieu de remarquer que si l’on rencontre dans la métropole des phosphates de chaux en couches, ces couches n’ont jamais présenté, jusqu'ici, la richesse, la puissance et l’étendue de 246 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. celles du Sud Algérien. C’est pourquoi aussi — et c’est la seconde différence entre la loi et le décret du 12 octobre 1895 — le projet que nous vous soumettons ne s'applique qu'aux phosphates en couches, tels que ceux de Tébessa. Il y a deux autres catégories de gîtes de phosphates connus en Algérie : les uns se rencontrent, notamment aux environs d'Orléansville, dans les grottes où ils for- ment des terres phosphatées de basse teneur en phosphate, mais contenant aussi de l'azote ; les autres, près de la frontière du Ma- roc, forment des poches de phosphorites très pures mais en très faibles masses. Les uns et les autres sont très limités, sans impor- tance industrielle actuelle, et paraissant sans avenir. Le régime du présent projet ne donnerait ici que des complications sans utilité pratique ; il aurait plus d’inconvénients que d'avantages. Il nous reste à définir le caractère juridique fondamental du projet. Comme nous venons de le dire, il détache de la propriété super- ficiaire les gites de phosphates de chaux en couches, dans tous les terrains où ils peuvent se lrouver ; mais de celte séparation il ne résulte pas que les phosphates doivent être classés dans les mines. Les mines, dans notre droit français, ne sont pas seulement carac- térisées par leur séparation de la propriété superficiaire, mais encore et surtout par tout un régime que définit une législation spéciale pour le mode d'institution des concessions et la nature de leur propriété perpétuelle entraînant pour le concessionnaire des obligations et des droits particuliers. Il a été reconnu que ce régime était incompatible avec l’allure et la nature des gîtes de phosphates algériens et le décret du 12 octobre 1895 a très judicieusement établi celui qui convenait aux conditions de l'espèce. Ge régime est, en fait, un régime de carrières, mais de carrières spéciales : c’est ce que le projet de loi admet et établit nettement par les articles 1 et 14. Il en résulte donc que les gîtes de phosphates de chaux en couches, dans quelque terrain qu’ils se trouvent placés, deviennent des carrières domaniales, mais des carrières dont le régime normal, à ce titre, se trouve modifié par les dispositions de la loi dont il nous reste maintenant à expliquer les détails dans l’ordre de ses articles. Nous n’avons pas à revenir sur l’article 1* dont nous venons LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 247 d'expliquer l'importance et la portée par sa combinaison avec l’ar- ticle 14. L'article 2 relatif aux recherches ne fait que reproduire l’article 6 du décret, sauf les modifications du dernier paragraphe. Avant d'en parler, nous devons rappeler que de pareilles recherches seront généralement indispensables. Ce qui reste inconnu pour le dévelop- pement de l'exploitation des phosphates algériens, c’est une question de teneur. On sait parfaitement aujourd’hui les localités où se trouve leur niveau géologique. Ces recherches par galeries ou puits peu- vent seules permettre de s’assurer si, en profondeur, la couche est exploitable nonobstant l’insuffisance de teneur de l’affleurement. Le dernier paragraphe vise la procédure à suivre pour loccupa- tion des terrains nécessaires à l’exécution des travaux et l'indemnité à payer pour celte occupation. On s’est borné à poser le principe d’une indemnité Caux intéressés » sans autrement préciser dans les termes, à raison de la multiplicité des cas qui peuvent se présenter suivant que l’on $e trouve en terrains domaniaux, départementaux, communaux, en terrains melk ou arch, ou en terrains de droit français. Il peut y avoir en cause le propriétaire pour ces terrains et éventuellement son fermier ; l'usager ou l’arabe simple détenteur dans les terrains de droit musulman. Pour être complexe en fait, la question n’en est pas moine analogue à toutes celles de cette nature qui peuvent se présenter pour d’autres occupations semblables. Ce sont des questions de jurisprudence algérienne dont il suffit que la loi indique le principe. Les articles 3, 4, 5, 6 et 7 reproduisent en principe les disposi- üons fondamentales du décret du 12 octobre sur les amodiations et leur procédure, sauf une différence de fond et quelques modifica- tions de forme. Hi Au fond on a cru devoir supprimer la faculté donnée à l’adminis- tralion d’attribuer une amodiation sans adjudication à l'inventeur. Il a semblé que l'inventeur trouverait une rémunération suffisante dans des indications qu’il sera seul à connaître et qui lui donneront un avantage marqué sur ses concurrents à l’adjudication. On peut donc compter que les recherches auront lieu nonobstant la sup- pression de cette clause. 248 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. On a réduit à la durée de dix ans la faculté de prorogalion sans adjudication de l’article G. L'article 8 met dans la loi même l’ensemble des obligations que l'article 2 du décret, dans la seconde partie, proposait d'insérer dans chaque cahier des charges. Celte solution, qui aboutit au même résultat, est à la fois plus sûre et plus simple. Au paragraphe 6 de cet article se présente une question de rè- glement d'indemnité « aux intéressés » de même ordre que celle ci-dessus discutée à l’occasion de Particle 2. Un paragraphe 7 nouveau permettra l'établissement des voies extérieures dans des conditions plus pratiques que celles que pré- voyait l’article 11 du décret. L'article 9 ne se trouvait pas dans le décret. On l’a mis dans la loi à cause des différences entre celle-ci et celui-là. La loi met tous les phosphates dans les mains de l’État ; elle lui én attribue la pro- priété, qui est légalement et définitivement détachée de celle du sol. Il serait toutefois inadmissible, et nul ne voudrait admettre qu'un cultivateur ne püt bénéficier, pour amender son champ, d’une marne phosphatée, alors qu’elle ne sera pas exploitable industriel- lement et que la propriété ne serait pas comprise dans les limites d’une exploitation. Légalement il ne le pourrait cependant pas, puis- que les phosphates sont la propriété de l’État. Penserait-on vider ce conflit incessant et continu par une distinction fondée sur lexploi- tation industrielle du produit ? On ne ferait que déplacer la difficulté sans la résoudre ni même l’atténuer. L’exploitabilité industrielle est el restera incessamment variable suivant les lieux et les époques. La solution proposée par l’article 9 est une transaction de nature à concilier partout et en tout temps les intérêts en présence. Dans les termes indiqués, l'application ne soulèvera pas de difficultés. Il n’y a pas là d’ailleurs une véritable innovation. L'idée est empruntée aux minières de minerai de fer que notre législation attribue aux propriétaires du sol, même en terrains concédés à un autre. Entre ce régime des minières et celui des phosphatières de l'article 9, il y aura deux différences importantes qui feront disparaitre pour les phosphatières les difficultés incontestables que soulève la pratique des minières et qui auraient été encore plus grandes pour les phos- à % LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 249 phatières en territoires arabes; le cultivateur même, en terrains non amodiés, ne peut se servir des phosphates que pour l'usage immédiat de la culture sur place ; tout trafic lui en est interdil; ce n’est pas une propriélé qui lui est attribuée comme avec la minière ; c’est un simple droit d'usage parfaitement défini et limité. En terrains explorés ou amodiés, ce droil ne pourra s'exercer que par des travaux exclusivement à ciel ouvert, comme pour la minière stuée sur l’affleurement d’un gîle de minerai de fer concédé en profondeur. Ce dualisme n’amènera pas de complications, par suite des conditions dans lesquelles l'administration pourra arrêter la phosphatière du superficiaire, s’il en est besoin, pour assurer l'exploitation de l’amodiataire de l’ÉtaL. L'article 10, après l'addition faite à l’article 8, paragraphe 7, pour les voies extérieures, pouvait se borner à garder les servi- tudes d’aérage et d'écoulement d’eaux, en en réglant les détails avec plus de précision que ne le faisait l’article 12 du décret du 12 octobre 1895. L'article 11 est un simple article d'ordre qui reproduit la partie ulile de l’article 15 du décret du 12 octobre 1895. On aurait pu à la rigueur se dispenser de cette reproduction, puisqu’au fond l'article ne süipule d'obligations que pour l'administration supérieure ; mais à ce titre il reste utile. Dès l'instant que le droit d'extraction établi par l’article 12 ne doit pas être perçu sur les phosphates consommés en France ou en Algérie, on pouvait, sans inconvénient, relever ce droit de 0 fr. 50 c. à 2 fr. el ce taux n’a rien d’exagéré avec les bénéfices qui peuvent ètre réalisés dans ces exploitations. Nous avons déjà expliqué les motifs généraux qui doivent conduire l'État à la dévolution faite par l’article 13 d’une partie des rede- vances résullant des adjudications pour les terrains autres que les terrains domaniaux. Il n’a pas paru, d'autre part, que l’on püt régir différemment les diverses sortes de terrains. Ils sont tous traités également sous réserve de la question de savoir quel sera l’attribu- taire définiuif de la redevance suivant la nature juridique des terres ; le propriétaire dans les terrains soit de droit français, soit melk ; le détenteur dans les terres .arch. Le règlement d'administration f 250 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. publique prévu à l'article 16 règlera le mode d'attribution d’après le principe relativement simple de la loi, pratiqué notamment en Belgique pour les redevances tréfoncières de mines, à savoir la répartition au prorata des surfaces, au lieu du système d’attribution faite par l’article 11 du décret à chaque propriétaire sous les ter- rains duquel on eût exploité ; on aurait été conduit ainsi à des difficultés inextricables. Nous avons précédemment expliqué toute l'importance de l’ar- ticle 14 qui était nécessaire pour achever de définir le caractère juridique de ces exploitations, de ces carrières domaniales d’une espèce particulière. L'article 15 s'explique de lui-même. La loi ne pouvait tout régler sans descendre dans des détails qui auraient retardé sa promulga- tion et obscurci ses principes. Il nous à paru inutile de dire explicitement dans la loi que le décret du 12 octobre 1895 était abrogé ; cela va de soi. Projet de loi. Le Président de la République française Décrète : Le projet de loi dont la teneur suit sera présenté à la Chambre des députés par le Président du Conseil, Ministre de l'Intérieur, les ministres des Finances, des ‘fravaux publics, de l'Agriculture, qui sont chargés d’en exposer les motifs et d’en soutenir la discussion. Arlcle premier. — La recherche et l'exploitation des phosphates de chaux en couches, silués en Algérie, seront soumises aux règles suivantes. Art. 2. — Des recherches peuvent être autorisées pour une durée de un an par arrêté du Gouverneur général rendu sur l'avis des Ingénieurs des Mines. L'autorisation assure à son titulaire le droit exclusif de faire des recherches dans les limites qu’elle indique. Ce droit ne peut être cédé qu'avec l’assentiment du Gouverneur général. L'autorisation peut être renouvelée. LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 292 Tout travail d'exploitation est interdit, à peine de retrait immé- diat de l'autorisation. Le requérant doit fournir, avec sa demande, pour la région dans laquelle il veut explorer, un plan en double expédition, qui per- mette d’y inserire les limites du périmètre. L'autorisation est annulée de plein droit si une amodiation est consentie sur les terrains pour lesquels elle a été accordée. L’explorateur doit s'entendre avec les intéressés pour l'occupa- tion, à l'intérieur de son périmètre, des terrains nécessaires à l’exé- culion de ses travaux ; à défaut, il ne peut les occuper qu'après une autorisation donnée par le Préfet, sur l'avis des Ingénieurs des Mines, el après paiement d’une indemnité aux intéressés, réglée à l’amiable ou à défaut par l’autorité judiciaire. Art. 3. — L’exploitalion ne peut avoir lieu qu’en vertu d’amo- diations consenties par l’État à la suite d’adjudications, sauf dans le cas prévu à l’article 6.- Art. 4. — L'adjudication porte sur la redevance à payer par Lonne de phosphate extraite. Elle a lieu sur soumissions cachetées. Les concurrents doivent, un mois à l'avance, justifier de leurs facullés. La liste des concurrents est arrêtée par le Gouverneur général en Conseil de Gouvernement. L'adjudication n’est définitive qu'après approbation du Gouver- neur général. Art. 5. — Les adjudications sout préparées par l'Administration des Domaines avec le concours du service des Mines. Les lots à adjuger doivent être abornés avant l’adjudication, par- tout où cela sera reconnu nécessaire. Un plan du lot doit être remis à l’amodiataire lors de l’approba- tion de l’adjudication; un double reste entre les mains de lAdmi- nistration. Art. 6. — Un décret rendu en la forme des règlements d’ad- ministration publique, sur le rapport des Ministres de l'Intérieur et des Travaux publics, après avis du Conseil géneral des Mines, peut accorder, à litre exceptionnel et pour une durée qui ne pourra 252 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. excéder dix années, sans adjudication nouvelle, une prorogation de l’amodiation à l'amodiataire dont le bail serait sur le point d’ex- pirer. Ce décret fixe la redevance à payer par tonne pendant celte pro- rogalion. Art. 7. — Le cahier des charges relatif à toute amodiation ou prorogalion d’amodiation fixe : 1° Les limites entre lesquelles le droit d'exploiter est accordé ; 2° La durée de l’amodiation ; 3° L’extraction minimum à laquelle l’amodiataire sera restreint dans les périodes successives de son amodialion ; 4° Les installations, travaux ou ouvrages que l’amodiataire devra exécuter en cours d’amodiation ou laisser à la fin de l’amodiation. Art. 8. — Tout amodiataire doit exploiter suivant les règles de l’art en évitant les travaux susceptibles d’être une cause de gas- pillage du gite dans le présent ou de ruine dans l'avenir. Il est soumis à cet effet et dans ce but à la surveillance et au contrôle des Ingénieurs des Mines, le tout à peine d’annulation de l’amodialion, laquelle sera prononcée par l'autorité judiciaire et sans préjudice des dispositions de police administrative sur l'exploitation des car- rièr'es. Aucun amodiataire ne peut céder son droit qu'avec l'autorisation du Gouverneur général en Conseil de Gouvernement et en restant responsable de son cessionnaire vis-à-vis de l'État. L'amodiataire est responsable au regard de tous intéressés de tous les dommages produits par ses travaux. | L'amodiation sera résiliée de plein droit, sans autre mise en demeure, pour relard de plus de six mois dans le paiement de la redevance prévue à l’article 4 ou 6, ou pour inobservalion de la clause de l'extraction minimum, à moins de dispense obtenue au préalable du Gouverneur général, le tout sous les recours de droit en faveur de l’amodiataire. L'État ne donne aucune garantie en ce qui concerne les res- sources du gîte el ne peut encourir aucune responsabilité de ce chef, pas plus que pour erreur dans la contenance superficielle, à moins que celte erreur ne soit de plus d'un dixième. LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D’ALGÉRIE. 293 L’amodiataire aura le droit d'occuper dans l’intérieur de son périmètre les terrains reconnus nécessaires à son exploitation par un arrêté du Préfet, rendu après avis des Ingénieurs des Mines, moyennant le paiement aux intéressés d’une indemnilé réglée à l'amiable ou à défaut par l’autorité judiciaire. Il pourra établir à l’extérieur de son pèrimètre des routes ou voies ferrées de toute nature, nécessaires à son exploitation, qui auraient élé déclarées d'utilité publique. En fin d’amodiation, il n’est dû par l’État aucune indemnité pour les ouvrages souterrains faits par l’amodiataire. L'État aura la fa- culté de reprendre, à dire d'experts, les autres installations fixes ou élablies à demeure par l'amodiataire, soit à l’intérieur, soit à l’ex- térieur du périmètre qui lui a été attribué, lPamodiataire pouvant toujours disposer des approvisionnements, de l’outillage et du maté- riel mobile lui appartenant. Art. 9. — Tout cultivateur conserve le droit d'utiliser, sur place, pour la culture, les amendements phosphatés provenant des terres pour lesquelles il a le droit de fouille et qui ne sont pas comprises dans un périmètre de recherche ou d’amodiation. À l’intérieur des périmètres de recherche ou d’amodiation, il ne pourra être fait, dans le but et sous les réserves indiqués au para- graphe précédent, que des fouilles à ciel ouvert qui pourront même être interdites, sans indemnité, par arrêté du Préfet, rendu sur l'avis des Ingénieurs des Mines, s’il était reconnu qu’elles dussent nuire à l’exploitalion industrielle, présente ou future, d’un gîte de phosphate. Art. 10. — Il existera entre carrières voisines de phosphales de chaux en couches, ane servitude réciproque pour l'établissement des puits et galeries nécessaires soit pour l’aérage, soit pour l’écou- lement des eaux. En cas de contestations entre les intéressés pour l’exercice de celle servitude, il est statué par le Préfet, après avis des Ingénieurs des Mines, sur l’établissemeut des ouvrages reconnus nécessaires. Les indemnités, s'il y a lieu, seront réglées par l’autorité judi- claire. Art. 11. — Il ne pourra être accordé ni autorisation de recher- 254 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. che, ni amodiation en vertu de la présente loi dans les territoires non encore soumis aux opérations du sénatus-consulte du 22 avril 1863. Art. 12. — En dehors de la redevance qui fait l’objet de l’ad- judication visée en l’article 4, il est établi un droit d’extraction de 2 fr. par tonne de phosphate expédiée. Seront affranchis de ce droit les phosphates effectivement con- sommés en Algérie et dans la métropole. Art. 13. — Le total des redevances effectivement payées en vertu des articles 4 ou 6 reviendra pour une moitié à l’État et pour l’autre moitié aux propriétaires ou aux détenteurs des terrains compris dans le périmètre de l’amodiation au prorata des surfaces desdits terrains. Art. 14. — Les lois qui régissent les carrières sont applicables aux exploitations de phosphate de chaux en couches, en tout ce qui n’est pas contraire à la présente loi. Art. 15. — Des règlements d'administration publique fixeront les détails d'application de la présente loi, notamment en ce qui con- cerne le mode d'imposition et de recouvrement du droit prévu à l'article 12 et la répartition des redevances prévues à l’article 13. Fait à Paris, le 18 janvier 1896. Le Président de la République francaise, Signé : FÉLIX FAURE. Par le Président de la République : Le Président du Conseil, Ministre de l'Intérieur, Signé : LÉON BOURGEo1S. Le Ministre des Finances, Signé : PauL DoumEr. Le Ministre des Travaux publics, Signé : GUYOT-DESSAIGNE. Le Ministre de l'Agricullure, Sioné : VIGER. LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 299 Annexe au projet de loi. Décret du 12 octobre 1895. Le Président de la République française, Sur le rapport des Ministres des Travaux publics, de l'Intérieur et des Finances ; Vu la loi du 24 avril 1833, article 95 ; Vu l'ordonnance du 22 juillet 1834, article 4; Décrète : TITRE PREMIER. — Exploilalion des phosphales dans les terrains domaniaux. Article premier. — L'exploitation des phosphates de chaux dans les lerrains domaniaux a lieu en vertu d’amodiations passées par voie d’adjudication publique, dans les conditions prévues au présent titre. Art. 2. — Le cahier des charges relatif à chaque amodiation fixe : 1° Les limites entre lesquelles le droit d'exploiter est accordé ; 2° La durée de l’amodiation ; 9° L’extraction minimum à laquelle l’amodiataire sera restreint dans les périodes successives de son amodialion ; 4° Les installations, travaux ou ouvrages que l’amodiataire devra exécuter en cours d’amodiation ou laisser à la fin de l’amodiation. Le cahier des charges rappelle: - 1° Que l’amodiataire doit exploiter suivant les règles de l’art, en évitant les travaux susceptibles d’être une cause de gaspillage du gite dans le présent ou de ruine dans l'avenir ; Que l’amodiataire doit être soumis, à cet effet et dans ce but, à la surveillance el au contrôle des Ingénieurs des Mines, agissant au nom et pour le compte du Domaine ; Le tout à peine d’annulation de l’amodiation, que le Domaine pourra provoquer de l’autorité judiciaire ; 2° Que l’amodiataire ne peut céder son droit qu'avec l'autorisation du Gouverneur général et en restant responsable de son cessionnaire vis-à-vis du Domaine ; 3° Que l’amodiataire reste responsable de tous les dommages 256 ANNALES DE LA ‘SCIENCE AGRONOMIQUE. produits à la surface par ses travaux, soit au regard de l'État, pour la propriété, soit, pour la jouissance, au regard de ceux qui la dé- tiennent à un titre quelconque ; 4° Que l’amodiation sera résolue de plein droit, sans autre mise en demeure, pour retard de plus de six mois dans le paiement de la redevance prévue à l’article 3, ou pour inobservation de la clause de l'extraction minimum, à moins de dispense obtenue au préalable du Gouverneur général, le tout sous les recours de droit en faveur de l’amodiataire ; 5° Que l’État ne donne aucune garantie en ce qui concerne les ressources du gîte et ne peut encourir aucune responsabilité de ce chef, pas plus que pour erreur dans la contenance ; 6° Que l’amodiataire aura le droit d'occuper les terrains doma- niaux reconnus par l'Administration nécessaires à son exploitation, moyennant le paiement d’une indemnité à l’amiable ou à défaut par experls ; | 7° Qu'en fin d’amodiation, il n’est dù aucune indemnité pour les ouvrages souterrains faits par l’amodiataire ; que le Domaine aura la faculté de reprendre, à dire d'experts, les autres installations fixes ou établies à demeure par l'amodiataire, sur les terrains domaniaux, soil à l'intérieur, soit à l’extérieur du périmètre qui lui a été attri- bué, l’amodiataire pouvant toujours disposer des approvisionne- ments, de l'outillage et da matériel mobile lui appartenant. Art. 3. — L'adjudication porte sur la redevance à payer par tonne de phosphate expédiée. Elle a lieu sur soumissions cachetées. Les concurrents devront, un mois à l’avance, jusüfier de leurs facultés. La liste des concurrents est arrêtée par le Gouverneur général en Conseil de Gouvernement. L'adjudication n’est définitive qu'après approbation du Gouver- neur général. Art. 4. — Les adjudications sont préparées par l'Administration des Domaines, avec le concours du service des Mines. Les lots à adjuger devront être abornés avant l’adjudication, par- tout où cela sera nécessaire. LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D’ALGÉRIE. 251 Un plan du lot doit être remis à l’amodiataire, lors de l’appro- bation de l’adjudication ; un double reste entre les mains de l'Administration. Art. 9. — Le Gouverneur général, en Conseil de Gouvernement, peut consentir, sans adjudication, une prorogation d’amodiation à l’amodialaire dont le bail va expirer. La redevance à payer par tonne pendant celte prorogation est fixée par le Gouverneur général en Conseil de Gouvernement. Un nouveau cahier des charges est dressé dans les conditions stipulées à l’article précédent. | Art. 6. — Dans les terrains domaniaux non encore amodiés, des recherches pourront être aulorisées pour une durée d’un an par arrêté du Gouverneur général, rendu sur l’avis des Ingénieurs des Mines, l’Administration des Domaines entendue. L'autorisation assure à son titulaire le droit exclusif de faire des recherches dans les limites qu’elle indique. Ce droit ne pourra être cédé qu'avec l’assentiment du Gouver- neur général. L'autorisation pourra être renouvelée. Le requérant devra fournir, avec sa demande, pour la région dans laquelle il veut explorer, un plan en double expédition, qui permettra d’y inscrire les limites du périmètre. L'autorisation est annulée de plein droit, si une amodiation est consentie sur les terrains pour lesquels elle a été accordée. Art. 7. — Le Gouverneur général en Conseil de Gouvernement peut, sur la proposition des Ingénieurs des Mines, accorder une amodiation sans adjudication, en faveur de tout explorateur dûment autorisé, dont les travaux de recherche auraient établi l'existence d’un gîte exploitable en dehors des régions connues. L'acte d’amodiation fixe, en ce cas, la redevance à payer par tonne expédiée. Le cahier des charges est rédigé suivant les indications de l’ar- ticle 2. Le lot est aborné et le plan est dressé comme il est dit à l’ar- ticle 4. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1897. — li. 17 258 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. TITRE I. — Exploitation des phosphates dans les terrains des départements et des communes. Art. 8. — Les départements et les communes, pour les terrains dont ils ont la disposition et l'administration au titre français, ne pourront céder le droit d'exploiter les phosphates que par adjudica- tions publiques portant sur une redevance à payer par tonne expédiée. Les amodiations et les cahiers des charges, pour les terrains que les départements et communes voudront mettre en adjudication, seront préparés par les Ingénieurs des Mines. Les adjudications ne seront définilives qu'après approbation du Gouverneur général en Conseil de Gouvernement. Les Ingénieurs et agents du service des Mines seront chargés de la surveillance des exploitations départementales et communales, en vue d'éviter leur gaspillage ou leur ruine par les amodiataires. Des remises seront faites au personnel du service des Mines par les départements et les communes, pour le concours que ledit per- sonnel aura à prêter d’après le présent article. Le taux de ces re- mises sera fixé par un arrêté du Gouverneur général. Art. 9. — Le département ou la commune peut consentir, sans adjudication, une prorogation d’amodiation à l’amodiataire dont le bail va expirer. La redevance à payer par tonne pendant cette prorogation esl fixée par le Conseil général ou le Conseil municipal. Un nouveau cahier des charges est dressé dans les conditions slipulées à l’article précédent. La prorogalion ne peut produire effet qu'avec l'approbation du Gouverneur général en Conseil de Gouvernement. TirRe I. — Æxploilation des phosphates dans les terrains com- munauax de douars el dans les terrains relevant du droit mu- sulman. Art. 10. — La recherche et l'exploitation des phosphates dans les terrains communaux appartenant aux douars, ont lieu comme il est. slipulé pour les terrains domaniaux aux articles 4 à 7. LES GISEMENTS DE PHOSPHATES DE CHAUX D'ALGÉRIE. 209 La redevance à payer par l’adjudicataire est payée par moitié entre le douar et l’État. Le personnel du service des Mines recevra des indemnités à la charge des douars, pour le concours qui lui est imparti aux termes du présent article. Le taux de ces indemnités sera réglé par arrêté du Gouverneur général. Un arrêté du Préfet, rendu sur l'avis des Ingénieurs des mines, peut autoriser l’amodiataire, à charge d’une indemnité qu’il paiera au douar, à occuper, à l’intérieur ou à l'extérieur de son lot, les terrains communaux de douars qui seraient reconnus nécessaires à l'exploitation. Art. 11. — Dans les douars qui, après avis des Ingénieurs des mines, auront été désignés par le Gouverneur général, en Conseil de Gouvernement, comme contenant des phosphates susceptibles d’être exploités, la recherche et exploitation des phosphates, dans les terrains qui relevaient du droit musulman à la date de la pro- mulgation de cet arrêté de désignation, ont lieu comme il est dit à l'article précédent pour les terrains communaux de douars. Toutefois la redevance à payer par l’amodiataire pour l’extraction, et l'indemnité par lui due pour occupation de surface, reviennent à ceux qui ont la propriété ou la jouissance des terrains fouillés ou occupés. Les droits acquis au titre français, postérieurement à la pro- mulgation de l'arrêté de désignation, ne peuvent être opposés au droit d’extraction de l’amodiataire pendant la durée de son amo- diation ; ils peuvent être opposés à son droit d'occupation de la surface. Titre IV. — Dispositions générales. Art. 12. — Il existera, entre carrières voisines de phosphates, à quelque titre qu’elles existent ou soient entreprises, une servitude réciproque de desserte, pour permettre à un exploitant enclavé de jouir, en traversant la carrière voisine, de voies souterraines pour l’aérage, l’épuisement ou le sortage des produits, ladite servitude se combinant, s’il y a lieu, avec celle de l’article 682 du Code civil. Art. 13. — Il ne pourra être accordé ni autorisation de recherche, 260 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ni amodiation, en vertu du présent décret, dans les territoires non encore soumis aux opérations du sénatus-consulte du 21 avril 1863. Des désignations pourront être faites dans ces territoires suivant les formes et pour l’objet prévus à l’article 11 ; elles produiront les mêmes effets à partir de la date de leur promulgation. Art. 14. — Il sera perçu un droit de 0 fr. 50 c. par tonne de phosphate, marchand et prêt pour la vente, qui aura été extrait en Algérie. Ce droit ne sera pas perçu sur les phosphates employés dans l'Algérie. Art. 15. — Le Gouverneur général édictera, en Conseil de Gou- vernement, les arrêtés nécessaires pour l’exécution du présent réglement. Art. 16. — Les Ministres des Travaux publics, de lIntérieur et des Finances sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exé- cution du présent décret, qui sera inséré au Bulletin des lois et au Bulletin officiel du Gouvernement général de l’Algérie et publié au Journal officiel de la République française. Fait à Paris, le 12 octobre 1895. Ê Signé : FELIX FAURE. Par le Président de la République : Le Ministre des Travaux publics, Signé : Duruy-DurTemps. Le Président du Conseil, Ministre des Finances, Signé : RIBOT. Le Ministre de l'Intérieur, Signé : LEYGUES. RECHERCHES SUR LES QUANTITÉS DE MATIÈRES FERTILISANTES NÉCESSAIRES À LA CULTURE INTENSIVE DE LA POMME DE TERRE PAR M. Aimé GIRARD MEMBRE DE L'INSTITUT PROFESSEUR AU CONSERVATOIRE NATIONAL DES ARTS ET MÉTIERS. —— 0-0 70% 0 o— Les données que la science agricole possède au sujet des quantités de matières fertilisantes nécessaires au développement de la pomme de terre sont, en face des progrès modernes de la culture, devenues insuffisantes. C’est principalement sur les recherches faites par Bous- singault à Bechelbronn, il y a soixante ans, que ces données repo- sent; mais les récoltes d’aujourd’hui ne sont plus les récoltes d’au- trefois ; les exigences des variétés nouvelles à grand rendement et à grande richesse ne nous sont pas connues et c’est chose certaine, à priori, qu'entre les unes et les autres, à ce point de vue, comme au point de vue de la teneur en matières utiles, doivent exister des différences. En présence du grand développement qu’a pris, depuis quelques 262 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. années, la culture intensive de la pomme de terre, et pour éclairer les agriculteurs sur la question si importante des engrais que cette culture réclame, j'ai considéré comme utile de reprendre, dans son entier, la question de la détermination des quantités de matières fertilisantes enlevées au sol par la pomme de terre. Pour que cette étude fût complète, j'ai pensé qu’elle devait com- prendre deux parties distincles, d’un côté la détermination des quantités de matières fertilisantes fixées par les tubercules récoltés, d’un autre une détermination toute semblable sur les toulfes que dé- veloppe la végétation aérienne de la plante. De ces deux questions, la première est aisée à résoudre ; il n’en est pas de même de la seconde, celle-ci présente des difficultés sur lesquelles je dois d’abord insister. Une première fois, en 1892, j'ai entrepris cette étude. Choisis- sant, dans mes cultures, une dizaine de variétés, j'ai soumis à l’ana- lyse, pour chacune d’elles, d’un côté, les tubercuies, d’un autre, les touffes entières. Cetle manière de faire — je lai reconnu depuis — était défec- tueuse, pour deux raisons. En premier lieu, c’est une faute que de mettre au compte des matières ferlilisantes exportées, et en bloc, celles que contiennent les feuilles et celles que contiennent les liges ; en fin de campagne, en effet, si l’arrachage est retardé jusqu’au moment où la maturité des tubercules est complète, les tiges restent seules debout, toutes les feuilles desséchées sont tombées sur le sol et lui ont restilué les matières feruihsantes qu’elles avaient absorbées au cours de la vé- gélalion. De là, pour obtenir le bilan exact de l’assimilation par la plante des matières fertilisantes, la nécessité de soumettre à la pesée d’a- bord, à l'analyse ensuite, d’un côté les tubercules, d’un autre les tiges effeuillées, d’un autre enfin, les feuilles elles-mêmes. En second lieu, c’est une question délicate que de savoir à quel moment de la végétation il convient de placer ces pesées et ces ana- lyses. A première vue, il semble qu’il faille le faire au moment où la vé- MATIÈRES FERTILISANTES NÉCESSAIRES À LA POMME DE TERRE. 263 gétalion atteint son maximum et avant que le feuillage commence à se flétrir ; c’est vers la fin d’août, en général, que ce moment se rencontre pour les variétés demi-tardives et tardives. Des doutes, cependant, me sont venus à ce propos, et je me suis demandé si l'étude des tiges et des feuilles, faite à ce moment, ne conduirait pas à exagérer le poids des matières fertilisantes expor- tées. À partir de ce moment, en effet, les tubercules, Je l’ai cons- taté par l'expérience directe, continuent à s'enrichir, non seule- ment en fécule, mais encore en matières minérales, et, par suite, j'ai été conduit à me demander si, dans cette circonstance, les - feuilles et les tiges ne se dépouillent pas d’une partie des matières fertilisantes qu’elles avaient précédemment immobilisées pour les délivrer aux tubercules; si, en un mot, la teneur des tiges et des feuilles mortes en azote, en acide phosphorique et en potasse n’est pas, à poids égal de substance sèche, moindre que celle des tiges et des feuilles fraîches, cet amoindrissement étant, bien entendu, indépendant de celui qui peut résulter de lintervention de la pluie. C’est en 1893 que j'ai cherché à résoudre cette question déli- cate. L'été de cette année se prêtait singulièrement à la solution. On sait combien la sécheresse à été grande alors ; à la ferme de la Faisanderie, à Joinville-le-Pont, depuis la fin d'août jusqu’au mo- ment de la dessiccation complète des touffes, il n’est pas tombé une goutte d'eau, et, par suile, je n’ai pas eu à me préoccuper de lin- fluence que le lavage des feuilles mourantes par la pluie aurait pu exercer. Dans de semblables conditions, la question se ramène à comparer entre elles, au point de vue de leur composition, d’un côté les feuilles et les tiges vertes au moment de leur développement maxi- mum, d’un autre, les feuilles et les tiges alors que, mortes et déssé- chées, elles constituent le résidu de la végétation. Pour faire cette comparaison, c’était chose indispensable que de récolter ces dernières, aussitôt leur dépérissement, de façon à les soustraire à l’action des agents atmosphériques qui en auraient pu modifier la composition. 264 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Dans ce but, j'ai, à la fin d’août et sur quatre variétés, opéré de la manière suivante : Pour chacune de ces variétés, trois pieds ont été choisis parmi les plus vigoureux de la pièce et les touffes coupées au ras du sol; puis les feuilles et les tiges de chaque touffe ont été séparés à la main, pesées et enfin soumises séparément à l’analyse chi- mique. Dans la même pièce et au voisinage de ces trois pieds, trois autres ont été choisis ensuite, parmi les plus vigoureux également, aussi semblables que possible aux premiers et chacun d’eux a été marqué d’un piquet et numéroté. À chacun des douze pieds ainsi marqués, : un pelit sac de Loile, soigneusement étiqueté, à été individuellement affecté, et tous, à partir de ce moment, ont été l’objet d’une surveil- lance attentive. Deux ou trois fois par semaine, suivant les circons- tances, les uns et les autres étaient visités, l’état des feuilles attenti- vement vérifié, et de chaque pied, immédiatement, on détachait, pour les loger dans le sac correspondant, les feuilles dont la dessic- cation annonçait le dépérissement. La cueillette des feuilles a été ainsi continuée jusqu'à ce que, toutes ayant péri, les tiges mortes restassent seules absolument vues au-dessus des tubercules. Ces tiges sèches ont été alors cou- pées au ras du sol comme l'avaient été précédemment les touffes fraiches. J'ai eu ainsi, entre les mains, les feuilles et les tiges, d’un côté des touffes en pleine végétation, d’un autre, des touffes mortes. Les unes et les autres ont été alors séchées à 100° puis soumises à l'analyse dans le but de déterminer leur teneur en azote, en acide phosphorique et en polasse. Sur les procédés à l’aide desquels cette analyse a été exécutée, il est inutile d’insister ; je me contenterai d'indiquer qu'après avoir séché feuilles et tiges à 100°, de façon à établir la comparaison sur des produits amenés préalablement au même état, la teneur en azote a été déterminée par le procédé Kjeldab], l'acide phosphorique dosé à l’état de phosphate ammoniaco-magnésien, la potasse enfin à l’état de chloroplinate de potassium. En opérant ainsi sur quatre variétés différentes, j'ai obtenu, pour MATIÈRES FERTILISANTES NÉCESSAIRES A LA POMME DE TERRE. 269 100 grammes de matière séchée à 100°, les proportions suivantes des trois éléments fertilisants : FEUILLES TIGES récoltées récoltées EE EE vertes, mortes. vertes. mortes. Azote. . TE SAN rl 2.83 2.38 Athènes. , .4 Acide phosphorique, 0.72 0.54 0.58 0.08 Potasse.…. 300 ADRESSE 187 | Azote. . MARS CEA 2.66 2.03 1.26 Gelbe rose. . | Acide phosphorique. 0.33 0.30 0.31 0.05 Potasse. . : 370-212 420 15020; 0 98 ES ne The 3.45 ai 2.83 2,69 Charolaise, . { Acide phosphorique, 0.79 0.53 0.53 0,25 Potasse. DM CMOS CESR "176 Azote. . A UJNES 2e 00) VE TA! 2,41 1.96 Ds Acide phosphorique. 0.49 0.34 0.28 0.10 de Beauvais. | F per ae A Potasse. 3 0900 2-09 045 TA TS En étudiant les nombres qui précèdent, il est aisé de reconnaitre qu’au dépérissement de la touffe, correspond la disparition d’une partie des éléments fertilisants logés dans le tissu des feuilles et des tiges; sur les 24 résultats que ces nombres traduisent, deux fois seu- lement, une fois pour l’azote, une fois pour la potasse, des excep- tions se sont produites, et c’est, à coup sûr, à quelque accident d’échantillonnage ou d’analyse que ces exceptions doivent être attri- buées ; la concordance des 22 autres résultats autorise à considérer le phénomène comme constant. Peu importante le plus souvent pour l'azote et l’acide phospho- rique, en ce qui regarde les feuilles, peu importante également pour l’azote en ce qui regarde les tiges, la diminution devient con- sidérable, au contraire, pour la potasse, en ce qui regarde les feuilles et les tiges ; en certaines circonstances, elle dépasse le tiers des pro- portions constatées dans les touffes fraiches ; elle dépasse la moitié, en ce qui concerne l’acide phosphorique primitivement contenu dans les tiges. Dans les circonstances ordinaires, le remarquable phénomène que je viens de faire connaître pourrait être expliqué par l’action des pluies, mais, comme je l’ai fait fait remarquer déjà, les conditions météorologiques de 1893 obligent à écarter cette explication; pen- 266 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dant la durée entière de l’observation et de la récolte des feuilles, il nest pas tombé à Joinville une seule goutte d’eau. Il faut donc recourir à une autre hypothèse et admettre qu’à la fin de la végétation, une partie des matières fertilisantes contenues dans les tiges et dans les feuilles émigre vers les tubercules en même temps que les hydrates de carbone générateurs de fécule. De là, la nécessité absolue de réserver spécialement à l'analyse les feuilles et les tiges récoltées au moment de leur dépérissement ; à l'analyse des feuilles et des tiges fraiches, correspondraient, en effet, des dosages trop élevés. C'est en 1894, qu’éclairé par les recherches précédentes, j'ai en- trepris la détermination des quantités de matières fertilisantes con- sommées tant par la végétation souterraine que par la végétation aérienne de la pomme de terre et par conséquent le poids de ces mabères exporté par les produits de la cullure. Cette détermination, afin de lui donner autant de généralité que possible, a porté sur huit variétés, les unes hâtives comme l’Institut de Beauvais, la Geélbe rose el la Charolaise, les autres demi-tardives ou tardives comme la Red Skinned, l’Idaho, la Chardon, la Richter’s Imperator et la Géante bleue. Étude des lubercules. — Cultivées par moi, à la ferme de Ja Fai- sanderie, à Joinville-le-Pont, pendant dix années consécutives, les variétés que je viens de nommer ont, pour les dix récoltes corres- pondantes, fourni, d’une année à l’autre, des rendements souvent très différents. Conduites à toute époque d’après la même méthode, recevant les mêmes labours, les mêmes engrais, etc., mais placées sous la dépendance des condilions météorologiques de l’année, les cullures ont montré des variations qui, quelquefois, se sont élevées du simple au double. Parmi ces rendements, ce sont, évidemment, les rendements maxima que j'ai dû choisir pour fixer les quantités maxima égale- ment, de matières fertilisantes exportées par la récolte des tuber- cules ; les rendements moyens, en effet, n'eussent pas fait connaître la limite des exigences de la pomme de terre. MATIÈRES FERTILISANTES NÉCESSAIRES À LA POMME DE TERRE. 267 J'indique ci-dessous quels ont été, à la ferme de la Faisanderie, ces rendements maxima, en quelle année ils ont été obtenus el quelle a été, pour la campagne citée, la teneur en fécule des tuber- cules récoltés : Richter’s Imperator . Géante bleue. . Red Skinned. Idaho. . Institut de Beauvais. . Charolaise. . Chardon . Gelbe rose 35 000 kilogr. 395 000 31 400 30 700 26 600 28 400 31 200 29 100 20.50 p. 100 en 11.85 — 17 — 17.30 — 13.70 — 15.10 — 13 — 16 — en en en 1895. 1892, 1887. 1890. 1893. 1893. 1887. 1588. Ce sont là de grands rendements en poids auxquels ne corres- pond pas toujours, malheureusement, une richesse proportionnelle en matières sèches ; de là la nécessité de tenir compte de l’hydrata- tion des tubercules et de faire porter l'estimation des matières ferti- lisantes consommées par ceux-ci sur la matière préalablement des- séchée à l’absolu. Découpés en cossettes, les tubercules de ces huit variétés ont été, avec précaution, séchés à 100° et leur teneur en eau ainsi déter- minée. En tenant compte de l’espacement adopté pour la plantation (0°,60 sur 0",50), ce qui correspond au nombre de 33000 poquets environ à l'hectare, j'ai pu alors déterminer le poids de tubercules secs récolté à chaque poquet et récolté également sur un hectare de terrain; ces poid sont indiqués dans le tableau suivant: Richter's Imperator. . Géante bleue. Red Skinned. Idaho. . Iustitut de Beauvais . Charolaise. Chardon. . Gelbe rose. . tubercules frais au poquet kilogr. 1,060 1,060 0,951 1,082 0,806 0,860 0,945 0,881 80. D © O0 4 © © mo — POIDS de tubercules secs RS au poquet. kilogr. 0221 0,203 0,187 0,221 0,133 0,180 0,187 0,186 à l’hectare kilogr. 1 296 6 699 6171 1296 4389 5940 6171 6138 268 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Aux cossettes desséchées à 100° de ces huit variétés, on a appliqué alors la méthode d'analyse précédemment indiquée et dans les tubercules de chacunes d’elles on a constaté la présence par kilo- gramme de tubercules secs des quantités ci-dessous de matières fertilisantes : Richter's Imperator.. Géante bleue. Red Skinned . Idaho. . Institut de Beauvais. Charolaise. Chardon. . . Gelbe rose. . AZOTE. gr. 15,40 15,96 18,48 16,24 21,84 18,48 17,36 19,88 ss lo d nues F O TASSE: gr. cr. 3,82 25,19 3,97 30,46 8,52 31,68 3,80 96,72 4,46 33,61 3,58 27,83 5,54 32,83 3,85 28,22 C’est, on le voit, dans des limites peu étendues que varie, en général, le pourcentage de matières fertilisantes constaté par l’a- nalyse dans les cossettes desséchées des huit variétés de pommes de terre sur lesquelles j'ai fait porter cette étude; cependant, lorsqu'on applique ce pourcentage aux poids de tubercules récoltés à l’hectare, on voit apparaître chez ces huit variétés des exigences notablement différentes ; à la récolte totale correspondent alors, par hectare, les chiffres de consommation suivants : Richter's Imperator.. Géante bleue. Red Skinned. Idaho. Institut de Beauvais. Charolaise. Chardon. . Gelbe rose, . AZOTE, kilogr. 112,3 106,9 114,0 118,5 95,8 109,8 107.1 1220 ACIDE phosphorique. RCA PNEE Kilogr. Kilogr, 27,87 183,8 26,59 204,0 21,72 195,5 Se) 194,9 19,57 147,5 21,26 165,3 34,19 202:6 23,63 173,2 Ce sont là des quantités considérables qui, dès à présent, condui- sent à ranger la pomme de terre parmi les plantes les plus exi- geantes en azote et en potasse. Sur l'importance de ces quantités, MATIÈRES FERTILISANTES NÉCESSAIRES A LA POMME DE TERRE. 269 je n’insisterai pas cependant pour le moment; c’est seulement lorsque, de même, les quantités de matières fertilisantes contenues dans les feuilles et dans les tiges auront été déterminées, qu’en examinant la question dans son ensemble, il conviendra de s’y arrêter. Étude des touffes. — La première difficulté rencontrée au cours de cette étude devait être la détermination du poids représentant le développement maximum de la touffe et la répartition du poids de cette touffe entre les feuilles et les tiges dont elle est formée. C’eùt été s’exposer à des erreurs graves que d’adopter, d’une manière générale, et pour toutes les variélés, le poids constaté pour la touffe au cours d’une campagne unique. Les conditions mé- téorologiques exercent, en effet, sur les unes et sur les autres, une influence quelquefois très différente, et l’on voit, pour une même campagne, la végétalion de certaines variétés atteindre un déve- loppement considérable, alors que d’autres variétés, à côté de celles-ci, restent inférieures à ce qu’elles fussent devenues sous l'influence de conditions différentes. Aussi, préoccupé comme J'ai dù l’êlre en entreprenant ces re- cherches, de reconnaître les quantités maxima de matières fertili- santes que la pomme de terre peut, dans les circonstances qui la favorisent le plus, immobiliser dans ses diverses parties, ai-je dû, pour fixer le poids maximum de la touffe des huit variétés étudiées, envisager à la fois les résultats constatés à la suite de plusieurs cam- pagnes (1892, 1893, 1894 et 1895). Laissant de côté alors les pieds de dimensions exceptionnelles que l’on rencontre quelquefois dans les cultures soignées, J'ai fait porter mon choix en dehors de ceux- ci sur les touffes le plus régulièrement développées et dont la végé- tation était la plus belle. Les pesées, d’ailleurs, ont toujours eu lieu sur un nombre de touffes assez grand pour qu’il fût possible de considérer la moyenne de ces pesées comme représentant la normale du maximum. En opérant ainsi, J'ai été conduit à adopter, comme poids maxi- mum d’une touffe, pour chacune de huit variétés étudiées, les nombres ci-dessous, nombres qui ensuite ont élé appliqués aux 270 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 33 000 poquets que comporte un hectare à l’espacement de 0,60 sur 0",90. POIDS DES TOUFFES —— — per pied. par hectare. Kilogr. kllogr. Richter's Imperator . . . 1,100 36,300 Géante Dieter 0,800 26,400 Red Skinned . . 0,750 24,750 BRON 0,745 24,585 Institut de Beauvais. . . 0,723 23,859 GharohiSe EN Re 0,714 23,062 Ghardons ne 17.2. 0,680 22,440 Gelbesrose.#. te 0,650 21,450 Après avoir ainsi déterminé le poids maximum des touffes déve- loppées pour chacune de ces huit variétés, je me suis attaché à re- connaître les proportions relatives des feuilles et des tiges fraîches dont chacune d’elles était composée; pour la plupart des variétés, ces proportions se sont traduites par des chiffres très voisins les uns des autres, pour quelques-unes cependant, elles ont présenté des différences trop marquées pour qu’on les puisse négliger. En outre, et pour pouvoir, ensuite, avec plus de précision établir la composition des diverses parties de la touffe, j'ai, pour chacune des variétés, déterminé l’état d’hydratation des tiges et des feuilles. Les proportions relatives des Liges et des feuilles par rapport à 100 de touffe, vérifiées à plusieurs reprises, ainsi que l’état d’hydratation des unes et des autres, correspondent aux chiffres ci-dessous : FEUILLES. TIGES. Poids PET Poids ki Eau p. 100 p- 100 p-. 100 p- 100 de touffe. de feuilles. detouffe. de tiges. Richter's Imperator . 40 85.40 60 89.37 Géante bleue.’ . : + | 34 76.09 66 89.64 Red Skitmet:. 7, 38 83.60 62 90.19 JADE TERRE CRE 43 84.32 27 90. 82 Institut de Beauvais. . , 39 79.36 61 90.47 Charonne EMA RUNE Te 45 85.66 55 91.16 ChATUON ES RP Te 40 82.65 60 93.58 ! Gélberose nn rs 38 76.31 62 89.57 1. La grande hydratation des tiges de la variété Chardon, qui paraît anormale, s'est vérifiée pour trois campagnes différentes (1892-1894-1896). MATIÈRES FERTILISANTES NÉCESSAIRES A LA POMME DE TERRE. 211 Rapportées aux poids de touffes précédemment fixés, les propor-- tions ci-dessus conduisent à admettre les proportions. suivantes, en poids, des feuilles et des tiges formant les touffes vertes de chaque varlélé : PAR TOUFFE. A L’'HECTARE. Fouhen a Tiges. Feuilles. Tiges. he kilogr. or Eine) Richter's Imperator . . . 0,440 0,660 14 520 21 780 GÉANTENDIeUC Ce 05272 0,528 8 976 17 424 RediSkinnedi ue. 0. eu 0,285 0,465 9 405 15 345 Idaho. . x 0,320 0,425 10 560 14 025 Institut de DÉae 0,282 0,441 9 306 14 553 GHATOIIISC AMEN EURE 0,321 0,393 10 593 12 969 Chardon. . 02e 0,408 8976 13 464 Gelbe rose. . 0,247 0,403 8151 13 299 Tels sont les poids de feuilles et de tiges vertes que développe, à chaque poquet et sur chaque hectare cultivé, la végétation de cha- cune des huit variétés dont j'ai entrepris de déterminer la capacité de consommation vis-à-vis des matières fertilisantes. Ces poids de tiges et de feuilles sont beaucoup plus considérables qu'on ne l'avait cru jusqu'ici; en outre, ils sont très différents d’une variété à l’autre; c’est ainsi, par exemple, qu’on voit le poids des feuilles et des tiges de la Gelbe rose inférieur d’un bon tiers au poids des feuilles et des tiges de la Richter’s Imperator. Pour établir, cependant, le compte des quantités de matières ferti- lisantes empruntées au sol par ces huit variétés, il ne m’a pas semblé prudent de prendre, comme point de comparaison, les poids de feuilles et de tiges vertes qui viennent d’être déterminés pour chacune d'elles ; des conditions météorologiques spéciales à chaque campagne, en effet, peuvent déterminer dans l’état d’hydratation des unes et des autres des différences notables, et c’est sur le poids des feuilles et des tiges séchées à 100° qu’il convient de faire reposer la détermination des quantités d’azote, d’acide phosphorique et de potasse absorbées par les touffes de la pomme de terre. , d’ailleurs, on attribue aux feuilles et aux tiges vertes l’état d’hydratation moyen ci-dessus indiqué, on retombe, pour le poids du produit sec, sur des chiffres sensiblement égaux à ceux qu’a fournis, 272 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. en 1894, la pesée directe des feuilles et des tiges qui, après avoir été récoltées au Jour le jour sur les touffes qui commençaient à faner, ont été ensuite séchées à 100°. On est ainsi conduit à considérer les touffes des huit variétés mises en expérience comme formées d’une quantité de feuilles et de tiges qui, après dessiccation à 100°, représentent les poids suivants au poquet et à l’hectare: PAR POQUET. A L’'HECTARE. De BR UT E RE FREE Feuilles. Tiges, Feuilles. Tiges. _… E, Roue. Elden! Richter’s Imperator . . . 64 70 2 0 2310 Géante bleue. . . . . . 65 55 2145 1815 RedSkinne ll rer 47 46 1551 1518 GET ONE RERO 50 39 1650 1287 Institut de Beauvais. . . 28 42 1914 1386 Charolaise ss er A6 35 1518 1155 CANTON RES Core 47 26! 1551 658! Gelbeirose ER rl 23 42 1749 1386 C’est sur les feuilles et sur les tiges récoltées comme je l’ai pré- cédemment indiqué, au fur et à mesure de leur dépérissement et après les avoir, ainsi qu’il vient d’être dit, séchées à 100°, que j'ai fait porter l’analyse. J'ai ainsi obtenu, par kilogramme de feuilles séchées à 100° et pour chacune des huit variétés étudiées, les poids suivants d’azote, d’acide phosphorique et de potasse : AZOTE. Re POTASSE. gr. gr. gr. Richter's Imperator.. . 33,13 5,24 37,17 Géante bleue. . . . . 31,26 5,78 39,67 Red Skinned. . . . . 25,20 4,91 39,30 Idahd "es sen liée 34,93 4,91 44,14 Institut de Beauvais. . 34,06 9,13 33,91 CRarDIMse. Su cs 29,86 4,55 30,05 CHATONS UE EURE 36,40 5,14 50,85 Gelbe rose. ... . .:. 27,06 0,97 35,99 1. C'est à la grande hydratation des tiges de la variété Chardon qu'est due la fai- blesse de ce chifire. MATIÈRES FERTILISANTES NÉCESSAIRES À LA POMME DE TERRE. 213 Appliquées aux poids de feuilles sèches développées à l’hectare, ces teneurs correspondent à une consommation de: AZOTE. toi POTASSE. Étos klloer. re Richter's Imperator.. . . 70,00 11,06\ 78,50 Géante bleue. SERRE 67,05 12,40 85,09 RediSkinnedi ne." "0. 39,08 1367 60,95 LLC vd dan dé egrechtts TS DOS 8,10 72,83 Institut de Beauvais . . . 65,19 9,82 64,90 Gharotaise Een. 45,32 6,90 45,61 Chao EP Et eue 56,45 To 78,86 Gelboïsose: eue 47,32 9,39 62,94 L'analyse des tiges a, dans les mêmes conditions, donné, par ki- logramme de tiges séchées à 100°, les nombres ci-dessous : ACIDE AZOTE. phosphorique. POTASSE. gr. gr gr. Richter’s Imperator . . . 13,10 1,54 42,94 Géante bleue. . . . . . 18,55 2,94 57,15 Red Skinned. . . . . » 19,95 2,30 54,54 (ENT SALE re 18,90 2,66 53,84 Institut de Beauvais. . . 17,85 2,10 64,73 CharolmSes 84 08 0 18,20 2,20 60,19 Ghartoñ: une un 24,15 2,58 68,46 GEIDE OS EE 19525 2,58 47,70 Appliqués aux poids de tiges sèches développées à l’hectare, ces poids correspondent à une consommation moyenne de: ACIDE AZOTE. GE phosphorique. Pre a Edo Étner Ekilogr üchter’s Imperator . . . 30,26 3,99 99,19 GÉAMeMDEUE CET CE 33,66 0,93 103,72 Red'Skinned. 4. ! .,* 30,28 3,49 82,79 Idaho, . QE 24,32 3,42 69,29 Institut de Beauvais . 24,74 2H 89,71 Charolaise. Lee 21,02 2,94 69,52 Chardon. . . . . 20 224 58,74 Gelbe rose. . 26,68 3,07 66,11 A l’aide des données qui précèdent on peut alors établir le compte ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1897. — IL. 18 274 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. exact des quantités de matières ferlilisantes qui, pour les huit va- riétés soumises à l’étude, correspondent aux récoltes maxima; ce compte est fourni par la somme des quantités d’azote, d'acide phos- phorique et de potasse constatées à l'analyse dans les poids maxima également de tubercules, de feuilles et de tiges produit sur un hec- tare ; on trouve ainsi : Poids d'azote, d'acide phosphorique et de potasse enlevés à l’hectare par les récoltes maxima de tubercules, de feuilles et de tiges. TUBER- FEUIL- CULES. LES. ARE TE US kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. Richter’s us RE 112,30 70,00 UE de Ton et phosphorique . 28 Tee 1906 3,90 42 PotassE ee 0e 183,80 78,50 99,19 361 ('APOIE TER 2 en UE ÉLOB- JU PTS US 33,66 208 Géante bleue. { Acide phosphorique. 26,59 - 12,40 5,33 44 Potasse dents 1.77 "204, 00: :"85-09/2103572 393 (220 Re 114,00 39,08 30,28 155 Red Skinned . { Acide phosphorique . JTE 7,61 3,49 33 POTASSE RENE AE 195,50 60,95 82,79 339 Azote . rte 118,50 56,97 24,82 200 Idaho . . . ‘Acide phosphorique. DU 8,10 3,42 3 Potasse. 42070 28 194,90 72,83 69,29 337 Istilut EAU RENE TUE 95,80=.165; 19 24,74 186 .. + Acide phosphorique. 19,57 9,82 2491 32 de Beauvais. : MPOLASSE ME RC Nr 147,50 64,90. . 89,71 302 NZOTCT Le Mmes sie 109,80 45,32 21,02 176 Charolaise. . « Acide phosphorique . 21,26 6,90 2,54 31 POLASSER RER 165,30 45,61 69,52 280 AZOTERM Se Eure 107,10 56,45 20,72 154 Chardon . . ‘Acide phosphorique . 34,19 7,97 2,21 41 POfASSE SET TEL 202 60 T8 T66 58,74 310 Azote ce 1122 004722 26,68 196 Gelbe rose . < Acide phosphorique. 23,63 949 3,91 on POTASSC ARTE 173,20 62,94 66,11 302 De l'examen des chiffres inscrits au tableau qui précède résulte aussilôt cette conséquence que la présence dans le sol d’une quantité considérable de matières ferlilisantes est indispensable au succès de la culture intensive de la pomme de terre. Les exigences de la plante, cependant, n’ont rien d’incompatible avec les coutumes de la culture perfectionnée d’aujourd’hui, et c’est MATIÈRES FERTILISANTES NÉCESSAIRES A LA POMME DE TERRE. 219 sur l'emploi d'engrais naturels ou complémentaires renfermant les quantités d'azote, d'acide phosphorique et de potasse constatées par les analyses ci-dessus que mes plus habiles collaborateurs ont, depuis dix ans, basé leurs opérations. La plupart de ceux auxquels les rendements de 30 000 et 35000 kilogrammes de tubercules riches sont familiers apportent à l’hec- tare environ: 35 000 kilogr. de fumier, 200 — de nitrate dé soude, 400 — de superphosphate riche, 300 — de sulfate de potasse, ou l’équivalent en autres produits. Or, si l’on admet que les fumiers d’exploitations bien tenues comme celles sur lesquelles ces cultures ont lieu sont riches à 0.9 p. 100 d’azote, 0.95 p. 100 d’acide phosphorique et 0.7 p. 100 de polasse, on trouve que l'emploi des quantités d’engrais ci-dessus indiquées correspond aux apports suivants : 5 , ACIDE à AE AZOTE. phosphorique. POTASSE. kilogr. kilogr. kilogr. Parile fumier ts U£2n09 4 175 87,9 249 Parle milrates sr 57 32 ) » Par le superphosphate . . » 60 ») Par le sulfate de potasse . à ) 108 COTATE 207 14770 393 Pour mes cultures personnelles, à Joinville-le-Pont, sur le terrain oraveleux et pauvre de la ferme de la Faisanderie, j'ai générale- ment employé comme fumure : 35 000 kilogr. de fumier de mouton. 250 — de nitrate de soude. 400 — de superphosphate riche. 200 — de sulfate de potasse. Le fumier de la bergerie de Joinville, où, pendant l'hiver, Les moutons sont nourris de luzerne sèche et de betteraves, renferme, d’ailleurs, 0.65 p. 100 d'azote, 0.30 p. 100 d'acide phosphorique 216 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. et 1.50 p. 100 de potasse, de telle sorte qu'à l'emploi des engrais ci-dessus correspond à l’hectare un apport de : PAL ACIDE 2. AZOTE. phosphorique. POTASSE. kilogr. kilogr. kilogr. Pare Tumier th ne 162,5 10 375 FAPACPRNMIE 72 0 2 2 40 » Ù Par le superphosphate . , » 60 » Par le sulfate de potasse . » » re TOTAL 202,5: 13500 447 Si l’on compare alors ces divers apports aux quantités moyennes de matières fertilisantes absorbées par les récoltes maxirma, quan- tités moyennes qui, d’après le tableau précédent, s'élèvent aux chiffres suivants : AZOLE PNR RE ER NE E MOS"EToer par hectare. Acide phosphorique.. . . 38 — Potasse 24: IRELD 240.10 832 — On reconnait que ces apports suffisent aux exigences des plus belles récoltes et, pour l’acide phosphorique particulièrement, les dépassent de beaucoup. L'achat de quantités d'engrais aussi considérables viendrait, ce- pendant, grever la culture de frais élevés et diminuer dans une me- sure importante les bénéfices si lexportation en devait être totale. Il n’en est rien, heureusement, et si le travail est bien conduit, la culture doit récupérer la moitié environ de ces engrais. Tout d’abord, il convient de faire remarquer qu'à l’époque de la maturité, toutes les feuilles de la toulfe se détachant des tiges re- tombent sur le sol, y pourrissent et rendent par conséquent à celui- ci toute la matière fertilisante logée dans leurs tissus. C’est là, en dehors de la question d’enrichissement des tubercules, une des rai- sons qui doivent faire considérer l’arrachage des plantes encore vertes ou partiellement vertes comme une coutume absolument dé- fecltueuse ; les quantités d'azote et de potasse surtout que les feuilles contiennent sont considérables, souvent elles représentent le tiers de la consommation totale faite par la plante et leur intervention à la culture prochaine ne doit pas être négligée. MATIÈRES FERTILISANTES NÉCESSAIRES A LA POMME DE TERRE. 211 C’est, d'autre part, une coutume très fâcheuse que celle de brûler les tiges sur le champ, après l’arrachage. Sans doute, on retrouve bien ainsi dans les cendres l’acide phosphorique et la potasse, mais tout l’azote est perdu. Or, la quantité de cel élément fertilisant que renferment les tiges est importante ; en moyenne, elle est de 27 kilogr. à l'hectare, ce qui, au prix de 1 fr. 50 c. le kilogramme, équivaut à une perte qui dépasse 40 fr. à l'hectare également. Les tiges doivent donc êlre soigneusement recueillies et jointes aux fumiers ; là elles se transforment rapidement et les éléments fertilisants qu’elles ont exportés du champ s’y retrouvent bientôt, à l’état assimilable. A Joinville-le-Pont, M. Lachouille, régisseur de la ferme de la Fai- sanderie, en a fait, pendant plusieurs années, la litière des 500 mou- tons que comptait son troupeau et il en a obtenu un fumier particu- lièrement riche. Ce serait donc une erreur que de considérer les matières ferlili- santes absorbées par les feuilles et par les tiges comme réellement perdues pour l'exploitation ; naturellement pour les feuilles, artifi- ciellement pour les tiges, elles doivent rester à la ferme, et c’est en somme aux quantités absorbées par les tubercules seuls que doit se borner l’exportation des engrais délivrés au sol. La réduction que subissent, lorsqu'il en est ainsi, les chiffres pré- cédents, est considérable ; si l’on se reporte au tableau que j'ai pré- cédemment donné des quantités consommées par les diverses parties de la plante, on voit que lexportation se limite alors aux chiffres ci-dessous : AZOTE. er ee POTASSE. kilogr. kilogr. kilogr. Richter’s Imperator. . . . 112,30 27,87 153,80 HÉATRC DIEM à 2 106,90 26,99 204,00 Red ‘Skmned à ROSE : 114,00 à PYE 195,50 Nah0. : sarelougel y 2: 118,50 27,72 194,90 Institut de Beauvais . . . 95,80 19,57 147,50 CRATO IS AS ARE DE. + 109,80 21,26 165,30 Ghardôn 148 3 IGN ELITE 107,10 34,19 202,60 Gelberrosentr riad al 122,00 23,63 173,20 Moyennes . . _ 110,80 25,31 183,35 278 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. En étudiant les chiffres qui précèdent, on est conduit à faire, au sujet des quantités de malières fertilisantes exigées par les grosses récoltes de pommes de terre, quelques observations intéressantes. En ce qui concerne les quantités d’azote exportées par les tu- bercules, on reconnaît ainsi que ces quantités varient peu, quelle que soit la variété cultivée ; celte quantité, sauf deux exceptions (Institut de Beauvais — 95,88 et Gelbe rose —122 kilogr.), reste généralement comprise entre 105 et 120 kilogr. à l’hectare. L’exportation de l’acide phosphorique est relativement faible; elle ne représente pas, en moyenne, plus de 2,31 à l’hectare et l’on peut se demander, par suite, si les grandes quantités de phosphate employées jusqu'ici par Ja culture et qui, généralement, représentent 400 ou 150 kilogr. d'acide phosphorique, sont réellement néces- saires. Mais, à ce sujet, il faut se garder de tirer une conclusion trop hâtive. La pratique jusqu'ici a semblé justifier cet emploi et l’on sait qu’en certaines circonstances on voit, par suite d’une in- fluence encore inexpliquée, la présence des superphosphates, alors même que ceux-ci ne sont pas absorbés par les plantes, entrainer une utilisation plus importante des autres éléments fertilisants. La consommation de la potasse par la pomme de terre est au con- traire considérable ; les quantités qu’en exporte la récolte des tu- bercules sur un hectare s'élèvent en moyenne à 183 kilogr. Ce chiffre suffirait à montrer combien est grande l'influence des com- posés potassiques sur le développement de cette plante ; mais, en comparant entre eux les chiffres correspondant aux huit variétés étudiées, on trouve de cette influence une démonstration décisive. D'une manière générale, en effet, et sans tenir compte de la ri- chesse en fécule de récoltes obtenues en des années différentes et sous des conditions météorologiques différentes aussi, on peut con- sidérer les quatre premières variétés : Richter’s Imperator, Géante bleue, Red Skinned et Idaho comme des variétés à grande richesse, les quatre autres, Institut de Beauvais, Charolaise, Chardon et même Gelbe rose comme des variétés à richesse moyenne. Or, on voit, d’après les résultats fournis par l'analyse, les pre- mières consommer, par hectare et pour les tubercules seuls, 195 ki- logr. de potasse en moyenne, tandis que pour les secondes, cette con- MATIÈRES FERTILISANTES NÉCESSAIRES À LA POMME DE TERRE. 219 sommation ne dépasse pas 172 kilogr. La différence est de 23 kilogr. par hectare. Et si, aux quantités exportées par les tubercules, on joint celles que l'analyse fait reconnaître dans les feuilles et dans les üges, la différence devient plus marquée encore. C’est au chiffre moyen de 597 kilogr. par hectare que s'élève, pour les variétés à grande richesse, le poids de potasse nécessaire à la plante entière, alors que, pour les variétés à richesse moyenne, ce poids se limite à 306 kilogr. ; la différence est de 51 kilogr. par hectare. L'influence des composés potassiques sur la richesse en fécule des pommes de terre, au sujet de laquelle on rencontre des opinions si opposées, me semble être définitivement établie par cette observa- tion. En terminant cette étude, il m’a semblé intéressant de comparer les dépenses en engrais qu’exige la culture de la pomme de terre à grand rendement et à grande richesse à celles auxquelles la cul- ture de la betterave fourragère a, dès longtemps, habitué nos culti- vateurs. Des chiffres que MM. Muntz et Ant. Ch. Girard ont adoptés dans leur Traité des engrais, comme représentant la moyenne des obser- vations faites par divers expérimentateurs sur la culture de la bet- terave fourragère, il résulte qu'une récolte de 50000 kilogr. à l’hectare exporte par ses racines : 90 kilogr. d'azote, 40 — d'acide phosphorique, 215 — .de potasse, alors que, ainsi que je viens de l’établir, une récolte de 35 000 ki- logr. de pomme de terre riche, de la variété Richter’s Imperator, par exemple, exporte par ses tubercules, à l’hectare : 11248,3 d'azote. 27 ,9 d'acide phosphorique. 183 ,8 de potasse. Si, partant de ces données, on met en parallèle, d’un côté, une bonne récolte de 50 000 kilogr. de betterave fourragère, d’un autre, 280 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. une bonne récolte de 30000 kilogr. de pomme de terre riche ex- portant par ses tubercules, 96k5,2 d'azote, 23 ,7 d'acide phosphorique, 157 ,4 de potasse, on voit, qu’au point de vue de la dépense en engrais, la betterave a exigé, il est vrai, 6"5,2 d’azote en moins que la pomme de terre, mais a exigé aussi 165,3 d’acide phosphorique et 57*#,6 de potasse en plus que celle-ci. Si, en face de ces dépenses, on considère les prix de vente de 50000 kilogr. de betteraves à 16 fr. la tonne, soit 800 fr., et de 30 000 kilogr. de pommes de terre à 32 fr., soit 960 fr., d’où résulte une différence de 160 fr. à l’hectare, on est conduit à regarder, au point de vue des dépenses en engrais, la culture intensive de la pomme de terre riche et à grand rendement comme plus rémuné- ratrice que celle de la betterave fourragère. SUR LE DOSAGE DE LA QUANTITÉ DE BEURRE CONTENU DANS LA MARGARINE PAR MM. .. Achille MUNTZ H. COUDON . MEMBRE DE L'INSTITUT CHEF ADJOINT DES TRAVAUX CHIMIQUES PROFESSEUR-DIRECTEUR DES LABORATOIRES DE CHIMIE A L'INSTITUT NATIONAL AGRONOMIQUE A L'INSTITUT NATIONAL AGRONOMIQUE CT La recherche de la margarine dans le beurre a fait l’objet de nombreux travaux, qui ont abouti à la possibilité de reconnaître un mélange frauduleux, lorsqu'il est fait dans de certaines proportions. L’interdiction de toute addition de margarine au beurre permet, d’ailleurs, de regarder comme fraudés tous les beurres dans lesquels on a pu déceler la présence de la margarine, en quelque minime quantité que ce soit. La nouvelle législation qui régit la fabrication et le commerce de la margarine oblige à chercher la solution d’un problème inverse, celui de la détermination du beurre dans la margarine. En effet, la loi du 10 avril 1897 autorise les fabricants de margarine à introduire du beurre dans les graisses comestibles qu’ils mettent en œuvre. Mais c’est dans une mesure strictement limitée que cette autorisation a été donnée, et le législateur a fixé à 10 p. 400 le maximum de 282 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE: beurre qui peut exister dans les margarines, en y comprenant non seulement le beurre ajouté en nature, mais aussi celui qu'y apporte le lait incorporé en cours de fabrication. Le problème, ici, se présente donc sous une forme différente. Il ne sert de rien de constater l’addition du beurre dans la margarine, puisque cette addition est autorisée dans une certaine proportion. Dans le cas présent, c’est une question de dosage qui doit intervenir, et l’analyse qualitative n’a pas sa raison d’être. Il faut établir une méthode d'analyse quantitative, permettant de dire si un produit, vendu comme margarine, est bien dans les con- dilions fixées par la loi; offrant une précision et une sûreté suffisantes pour permettre aux tribunaux de réprimer toute addition de beurre dépassant la limite assignée et donnant, d’un autre côté, aux pro- ducteurs de margarine qui se seront conformés strictement aux in- dications de la loi, toute garantie contre des résultats erronés de l'expertise et les condamnations qui pourraient en être la consé- quence. L'autorisation d'introduire une certaine quantité de beurre dans la margarine a eu pour objet de permettre à cette graisse alimen- taire, qu’on doit d’ailleurs regarder comme offrant une ressource précieuse à l’alimentation publique, de se présenter au consomma- teur sous une forme plus agréable et de lui donner des qualités sa- pides qui font accepter ce produit plus facilement, tout en lui gar- dant son état de graisse, différente du beurre de vache. Ce qui a porté le législateur à interdire l’introduction d’une plus forte proportion de beurre, c’est la crainte de voir, dans ces grais- ses, prédominer l'apparence et le goût du beurre naturel, au point de permattre la confusion des deux produits et de faire naître la possibilité d’une substitution de margarine, fortement mélangée de beurre, au beurre pur. La détermination précise de la quantité introduite est donc un problème qui intéresse, au même degré, les tribunaux chargés de l’application de la loi et les industriels qui veulent se tenir dans les limites qui leur ont été fixées. Pour retrouver le beurre et en déterminer la proportion, il était nécessaire de chercher son caractère le plus constant et celui qui, en DOSAGE DU BEURRE CONTENU DANS LA MARGARINE. 2383 même temps, s'éloigne le plus des caractères des graisses qui cons- tituent les margarines. Il convient de rappeler que les margarines commerciales, quel que soit le nom sous lequel on les vend, sont essentiellement constituées par de la graisse de bovidés. Le suif en branches est apporté de l’abattoir à l'usine encore tiède, il est séché rapidement puis fondu, après découpage et broyage, dans des cuves en sapin contenant de l’eau chauffée à 60 degrés en- viron par de la vapeur. La graisse limpide, décantée après dépôt, forme ce que l’on appelle les premiers jus, dont une partie est con- servée.en nature, tandis que l’autre sert à la préparation de loléo, qui se fabrique de la façon suivante : Le premier jus est maintenu, pendant douze à vingt-quatre heures, dans des chambres chauffées à 38 degrés. La stéarine cristallise et l’oléine, ou oléo, qui reste liquide à cette température, est extraile par pression. Celte oléine, ou oléo, ou encore oléo-margarine, est le principal constituant de la margarine. On lui adjoint d’autres graisses, dont la proportion varie suivant les saisons, de telle sorte que la consistance des produits fabriqués soit Loujours à peu près la même. Dans la période d’été, alors que la température est élevée, les margarines contiennent généralement de plus grandes quantités de graisses consistantes, premiers jus, destinées à empêcher leur ra- mollissement. Dans la période d'hiver, au contraire, par les temps froids, on y introduit des quantités plus élevées de graisses fluides, telles que l’oléo, les huiles végétales, qui les empêchent de dureir oulre mesure. Par celte pratique, on obtient un produit assez régulier, quant à la consistance, et qui se présente sous le même aspect, quelle que soit la température ambiante. Ce qu’en terme commercial on appelle oléo, ou oléo-margarine, ne doit pas être confondu avec la margarine proprement dite. oléo- margarine est une graisse pure de bovidés, éther oléique de glycé- rine, d’un point de fusion de 29 à 33 degrés, sans mélange d’eau ni de lait, ne constituant pas une émulsion. Elle ne peut donc pas être regardée comme un succédané du beurre, auquel elle ne ressemble 284 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nullement. Elle est la matière première de la fabrication de la mar- garine, dont elle constitue la majeure partie, comme il a été dit plus haut. Elle ne devient margarine que par son barattage avec du lait, qui la transforme en émulsion dont l'apparence se rapproche alors de celle du beurre. Si la constitution chimique de ces diverses graisses était sensible- ment différente, il y aurait de grandes difficultés pour le dosage du beurre dans la margarine. Mais, comme on va le voir, ces différen- ces n'existent pas, ou sont tout au moins insignifiantes, de telle sorte que les résultats de l’analyse ne sont pas affectés par ia substi- tution de ces graisses les unes aux autres, quelle qu’en soit la pro- portion. Ce point est précieux à noter, car il fournit la base la plus sé- rieuse à la détermination quantitative du beurre introduit dans un mélange. C’est ici le moment d’examiner quels sont les caractères constants des diverses graisses servant de base à la fabrication de la mar- garine, et en quoi leur constitution diffère de celle du beurre de vache. Tous ces produits ont une propriété commune : ils sont constitués, en totalité, par des glycérides à acides gras fixes. Tout au plus peut- on y déceler une faible trace, à peu près toujours la même, de gly- cérides à acides volalils. Si l’on fait le dosage de ces derniers, on en trouvera donc toujours une très minime proportion, très sensible- ment la même, soit qu’on opère sur ces corps gras séparés, Soil qu'ils se présentent à l’état de mélange, plus ou moins complexe, et dans les proportions les plus variées. Voilà un caractère sur lequel on peut fonder une base solide de recherches. Le beurre, au contraire, contient toujours une très notable pro- portion de glycérides à acides volauls et cette proportion, sans être invariable, est cependant comprise entre des limites assez rappro- chées. La différence de teneur en acides volatils des graisses indi- quées plus haut et du beurre naturel est à Lel point considérable que la plus petite quantité de beurre introduite dans ces graisses augmente, dans une proportion frappante, leur teneur en acides vo- lauls. DOSAGE DU BEURRE CONTENU DANS LA MARGARINE. 235 Ces principes étant exposés, nous allons décrire le procédé qu'il convient de suivre pour le dosage rigoureux des acides volatils con- teaus dans les graisses. Description de la méthode. Préparation de l'échantillon. — Les analyses ne doivent jamais être faites sur le produit en nature qui contient, outre la matière grasse proprement dite, des quantités variables d’eau. Cette ean provient du lait et de l’eau introduits dans la margarine, au cours de sa fabrication, et du beurre lui-même qui en apporte une certaine proportion. Pour obtenir des résultats réguliers et constants, il convient d’éli- miner cetle eau et de ne considérer que la matière grasse elle- même, qui est le véritable constituant de la margarine. Les résultats seront donc toujours rapportés, non au produit tel que le fournit le commerce, mais à la matière grasse qu'il renferme. De là, l'obligation de séparer cette matière grasse et de l'isoler de la solution aqueuse qui l'accompagne, ainsi que de la caséine qui s’y trouve mélangée. C’est par la fusion et la filtration qu’il faut séparer la matière grasse. La margarine est introduite dans un verre à précipiter, qu’on place dans une étuve à 60 degrés. On la laisse fondre tranquillement, sans aucune agitation, Îl se forme alors une couche huileuse qui sur- nage un liquide aqueux tenant en suspension de volumineux flocons de caséine. Quelques-uns de ces flocons nagent souvent à la surface de la margarine fondue. La couche de graisse est soigneusement décantée sur un filtre, placé dans l’étuve même. On évite complètement l'entrainement, sur le filtre, des gouttelettes d’eau. On à ainsi séparé la matière grasse, et c’est sur celle-ci que doit porter l'analyse. La graisse filtrée, encore liquide et rendue homogène par l’agita- tion, est introduite dans deux ou trois flacons bien propres et secs, qu’on remplit entièrement, qu’on bouche et qu’on conserve à l'abri de la lumière. Ces précautions sont indispensables si l’on veut conserver la graisse 286 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. pendant un certain temps dans le but de vérifier les opérations ayant trait à son examen. Dans les flacons, la matière se sépare ordinairement, par le refroi- dissement, en parties solides et en parties liquides. Quand on veut en prélever une partie pour l'examen, il faut lui rendre son homogé- néité. On chauffe le flacon entre 40 et 50 degrés pour liquéfier toute la masse de l'échantillon et l’on agite alors vivement. Saponificalion. — La saponification, en vue du dosage des acides gras volalils, se fait de la manière suivante : Dans un verre cylindrique, à bee, d’un diamètre de 0",05 et d’une hauteur de 0",07 et qu’on tare sur le plateau d’une balance pouvant peser au milligramme, on introduit à gr. de graisse fondue et par- faitement homogène, à l’aide d’un tube étiré, et en évitant de faire tomber des gouttelettes sur la paroi intérieure. Elle doit, en effet, être réunie tout entière au fond du verre. Avant que la graisse soit figée, on ajoute 2°,9 d’une solution con- centrée de potasse, dont nous donnons la préparation plus loin. A laide d’un agitateur, on fait un mélange intime qui se transforme, presque aussitôt, en une émulsion épaisse. On continue à agiter pen- dant vingt minutes, afin de mettre toutes les particules de matière orasse en contact intime avec la potasse. La masse qui s’est échauf- fée et épaissie est portée à l’étuve à 40-50 degrés, et la saponification est complète lorsque la matière est devenue dure. A celte masse de savon, on ajoute 80 centimètres cubes d’eau bouillante et l’on agite pour faire dissoudre, en plaçant le verre sur un bain de sable chaud. On obtient un liquide limpide qu’on introduit dans le ballon à dis- tillation, à l'aide d’un petit entonnoir. Ce ballon, d’une capacité de 350 à 400 centimètres cubes, a un col étiré par lequel on le relie à un réfrigérant ; on y a soudé, en outre, un tube permettant l’intro- duction de l’eau. Le verre et l’entonnoir sont lavés soigneusement avec de peliles quantités d’eau bouillante, afin que le savon soit inté- gralement introduit dans le ballon. Le volume total du liquide ne doit pas dépasser 100 centimètres cubes. DOSAGE DU BEURRE CONTENU DANS LA MARGARINE. 287 Mise en liberté des acides gras. —On met les acides gras en liberté en saturant la potasse par un acide énergique. Celui qu’il convient d'employer, c’est l’acide phosphorique, en raison de sa fixité. Mais, pour éviter complètement tout entrainement d'acide phos- phorique qui pourrait influer sur le titrage des acides gras volauls, il convient de n’employer l'acide phosphorique que dans la propor- tion nécessaire pour saturer la potasse, avec un très léger excès pour donner une réaction acide très nette. Il faut done mesurer l'acide phosphorique à employer. Pour cela, dn prend 2°,5 de la solution de potasse qui sert à la saponification, on les teinte par le tournesol et l'on détermine la quantité de solution d’acide phosphorique nécessaire pour obtenir une réaction faiblement, mais nettement acide. C’est cette même quantité qu'on emploie pour décomposer le savon contenu dans le ballon. La solution d’acide phosphorique a d’ailleurs été préparée en dis- solvant l'acide phosphorique sirupeux dans deux ou trois fois son volume d’eau. L’addition de l’acide phosphorique a eu lieu dans le ballon à dis- tiller où se trouve le savon; les acides gras mis en liberté forment alors des flocons laiteux. Pour régulariser Pébullition pendant la distillation, on ajoute, aprés l’acide phosphorique, quelques grains de pierre ponce. Avant de procéder à la distillation des acides gras, il faut éliminer complètement l'acide carbonique que la potasse aurait pu absorber au cours des opérations. On sait, en effet, que cet acide carbonique fausserait les titrages. Pour l’enlever, on soumet au vide, dans le ballon même, le mélange rendu acide par l’acide phosphorique. On maintient le vide pendant dix à quinze minutes, à froid, en agilant pour faciliter le départ de acide carbonique. Distillation dès acides gras. — On attelle le ballon au réfrigérant, en le plaçant lui-même dans un bain de chlorure de calcium d’une concentration telle qu'il marque à l’ébullition environ 120 degrés. Un récipient rempli d’eau est, d’ailleurs, disposé pour maintenir constant le niveau du bain de chlorure. 288 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Le produit de la distillation, condensé par le réfrigérant, se dé- verse sur un petit filtre en papier Berzélius qui a été préalablement mouillé par de l’eau et qui est placé sur une carafe jaugée de 400 centimètres cubes. Ce filtre est destiné à retenir les acides insolubles dans l’eau, qui sont entrainés dans le cours de la distillation. On sépare ainsi le produit distillé en deux fractions : 1° Les acides solubles dans l’eau qui comprennent, presque exclu- sivement, l'acide butyrique et l’acide caproïque ; 2° Les acides insolubles dans l’eau qui, arrosés constamment par le liquide aqueux condensé, de moins en moins chargé d'acides so- lubles, sont dépouillés, par ce lavage méthodique, des acides solubles qu'ils pouvaient retenir. Ceci étant dit par anticipation, voici comment on conduit la distil- lation : Le bain de chlorure de calcium étant maintenu à l’ébullition, on laisse d’abord distiller presque entièrement les 100 centimètres cubes qui avaient servi à dissoudre le savon et à opérer les lavages. Quand il ne reste plus dans le ballon qu'environ 5 centimêtres cubes d’eau, ce.qu'il est très facile de voir, on ajoute par la tubulure latérale, qui porte un caoutchouc et une pince, et à l’aide d’une pipette graduée, environ 20 centimètres cubes d’eau bouillante. Le bout étiré de la pipette est au préalable introduit dans le tube de caoutchouc; on ouvre ensuite la pince et on laisse s’écouler le liquide jusqu’à la partie inférieure de la pipette, en fermant la pince avant que l'écoulement soit complet. De cette façon, le contenu du ballon n’est jamais en communication avec l’air extérieur, et aucun dégagement de vapeurs acides ne peut se produire. Lorsque le liquide aqueux dans le ballon a de nouveau atteint un volume d’environ 3 centimètres cubes, on répète cette addition de 20 centimètres cubes d’eau, et cela jusqu’à ce que le volume du liquide recueilli soit de 400 centimètres cubes. L'opération dure près de cinq heures ; on peut en conduire huil ou dix à la fois. Il est indispensable d'opérer ces introductions d’eau en se servant DOSAGE DU BEURRE CONTENU DANS LA MARGARINE. 289 d’eau distillée préalablement bouillie et ainsi débarrassée d’acide carbonique. L'appareil doit être disposé de telle façon qu'aucune trace de chlorure de calcium du bain ne puisse s’introduire dans le ballon. On a ainsi recueilli: dans la carafe, 400 centimètres cubes d’eau renfermant les acides gras volatils solubles ; sur le filtre, des acides volatils insolubles qui se présentent sous forme de gouttelettes hui- leuses, ou sous celle d’un magma volumineux dans lequel l’eau entre pour la plus grande partie. Titrage des acides volatils solubles. — Le liquide qui a été re- cueilli et que le filtre a débarrassé des acides insolubles est souvent un peu opalescent, ce qui est dû à des traces d’acides gras insolu- bles qui ont été entrainés. Il n’y a pas lieu de se préoccuper de celte opalescence et l’on procède au titrage par de l’eau de chaux. L'indice du virage est la phtaléine de phénol, dont on fait une so- _lution à 1 p. 100 dans l’alcool; dix gouttes suffisent pour le volume recueilli. On titre avec l’eau de chaux contenue dans une burette gra- duée. On s’arrête dès que la coloration rose apparaît dans toute la masse du liquide, bien agité, et persiste pendant quelques se- condes. On lit alors le volume d’eau de chaux versé et l’on exprime les acides volatils en acide sulfurique monohydraté, le titre de l’eau de chaux ayant été pris avec de l'acide sulfurique titré. Préparation de la solulion de potasse. — Pour que ce mode opé- ratoire réussisse complètement, il faut opérer avec une solution de potasse très concentrée et débarrassée de sels potassiques. On emploie Ja potasse purifiée par la dissolution dans l’alcool, exempte ainsi de carbonate et de sulfate. Ce produit se trouve dans le commerce sous le nom de potasse à l'alcool. On en fait une dissolution saturée à la température de 20 degrés ; comme les produits commerciaux sont plus ou moins secs, on opère de la façon suivante : Environ 120 gr. de potasse sont dissous, à l'abri de l’air, par de ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1897. — II. 19 290 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Veau chaude ajoutée par petites quantités, de telle façon que le vo- Jume final de la dissolution encore tiède ne dépasse pas 100 centi- mètres cubes. Cette solution est, dans tous les cas, assez concentrée. Si elle venait à cristalliser par le refroidissement, on redissoudrait en chauffant au bain-marie et l’on ajouterait de petites quantités d’eau jusqu’à ce que toute la potasse reste dissoute à la température d'environ 20 degrés et commence à former un dépôt cristallin au- dessous de cette température. On a ainsi une dissolution de potasse dont l’action sur les matières grasses du beurre et des produits qu’on y introduit frauduleusement est extrêmement rapide. Résultats du dosage des acides volatils dans les matières premières. Le mode opératoire étant ainsi rigoureusement fixé, voyons les résultats qu’il donne quand on l’applique aux graisses de diverse nature, aux huiles, au beurre, c’est-à-dire à toutes les substances qui entrent dans la constitution de la margarine. Nous verrons ensuile comment ce procédé peut servir à la détermination exacte de la quantité de beurre introduite dans les graisses comes- ubles. Pour simplifier les calculs et avoir un point de comparaison ab- solu, nous avons exprimé les quantités d’acides volatils dosés en acide sulfurique monohydraté, en rapportant à cent parties de ma- üère grasse fondue et filtrée : 1° échantillon . . 0:",034 Oléo (diverses provenances). . . .42° échantillon . 0 ,047 3° échantillon . 0 ,060 qe échantillon . 0 ,047 Premiers jus (diverses provenances). ‘2° échantillon . . 0 ,064 (3° échantillon . . 0 ,069 Neutral (saindoux) . ERA 0 ,043 sésame . 0 .038 OO Re hole De at le De IE re NPD ENIIS 0 ,039 arachide. . 0 ,043 Beurre. 3 ,305 DOSAGE DU BEURRE CONTENU DANS LA MARGARINE. 291 Ce qui distingue très nettement les divers produits qui entrent dans la constitution de la margarine, du beurre naturel, c'est l’ab- sence presque complète de glycérides à acides volatils dans les pre- miers. Aussi les titrages de ces acides volatils donneront-ils, pour tous ces produits, un chiffre extrêmement bas formant en quelque sorte une constante. Le beurre, au contraire, contient ces glycérides à acides volatils en très forte proportion. La plus faible introduction de beurre dans les diverses graisses, ou dans leur mélange, augmentera donc très notablement les dosages des acides volails et permettra d’en déter- miner la quantité. Les glycérides à acides volatils contenus dans les beurres ne sont pas en proportions tout à fait constantes, mais il y a tout au moins une constance relative, et ce n’est que dans les cas exceptionnels que cette méthode pourra donner quelques incertitudes. Encore celles-ci ne seront-elles pas assez grandes pour empêcher de reconnaître si le beurre est bien dans les limites qui lui sont assignées. Le dosage des acides volatils est donc une opération qui per- met de déterminer la quantité de beurre introduit dans la mar- garine. Pour fixer les idées, admettons pour la moyenne des acides vola- tils contenus dans les graisses et les huiles le chiffre de 08°,050, et ajoutons seulement 1 p.100 de beurre, donnant par exemple 35°,305 d'acides volatils. Cette faible addition de 1 p. 100 augmentera de 08,033, c’est-à-dire fera presque doubler la quantité d’acides vola- üils existant primitivement dans ces graisses et ne pourra pas passer inaperçue. Ces différences augmenteront progressivement et proportionnelle- ment avec l'addition de beurre. Pour une addition de 5 p. 400, par exemple, on trouvera dans la margarine 0#,215 au lieu de 05,050, et pour 10 p. 100 de beurre on aura 0,380 au lieu de 05,050. On voit que les écarts sont très considérables et que le procédé est sus- ceptible d’une précision largement suffisante pour déterminer le beurre ajouté aux margarines. Donnons quelques exemples de dosages effectués sur des mélan- 292 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ges, d’un titre connu, provenant de diverses usines de marga- rine : BEURRE TT introduit. à EEE p. 100 p. 100 Oléo-lait En ete 4 8 4-1 724 DANSE RAS PLEINE 4 S 5.3 56.8 Margarine P . 4 8 427200 0 Margarine G. P. 4 8 4,9 9.58 Les beurres ajoutés l’ont été en plus de celui qui à été introduit par le lait au cours du barattage. Cette quantité de beurre ainsi in- troduite, en plus du beurre en nature, est ordinairement comprise entre À et 1.5 p. 100. On voit donc qu’on a pu retrouver, à 1 p.100 près, et même le plus souvent à 1/2 p. 100 près, la quantité de beurre qui avait été ajoutée à la margarine. Et, s’il existe quelques faibles différences entre les résultats de l'analyse et les indications fournies par les fabricants, cela tient cer- tainement plus à des inégalités dans la richesse du lait en beurre et à des incertitudes dans les pesées du beurre ajouté en nature, qu’à des imperfections dans la méthode de dosage, qui offre une grande sûreté. Nous avons demandé à une fabrique de margarine de préparer avec soin des mélanges de margarine et de beurre, en proportions variées, et, sans connaître ces quantités, nous avons retrouvé les résultats suivants (matière employée : 2 gr.) : ACIDE SULFURIQUE CORRESPONDANT BEURRE EAU a a total dans due aux acides ; àl'eau Aux acides aux acides ARS 100 gr. DÉSIGNATION. de chaux volatils ! FE de de volatils « versée | des ne gr. mar- 2 one à de : chaux. graisses. du beurre. SRE NES garine, cent. cubes milligr. milligr. milligr. gr. er. Noa 2,0 4,32 252 2 02 0.0424 1,26 NORD 8,1 17,90 2,2 15,30 0,3060 tés (1 N° 3 13,7 29,59 Me) 27,39 0,5478 16,31 No, "0! 9,6 20,74 2,2 18,54 0,3708 11,04 Nos a) BP 17,7 29 15,51 0,3102 9,24 N° 6 3,5 7,56 7,9 5,36 0,1072 3,19 N° 7 9,6 20,74 CA. 18,54 0,3708 11,04 1. Titre de l'eau de chaux : { centimêtre cube correspond à 24,16 de SO* HO. L DOSAGE DU BEURRE CONTENU DANS LA MARGARINE. 293 Si l’on retranche des quantités de beurre total trouvées à l’analyse la quantité de beurre que le lait apporte normalement, c’est-à-dire 1.4 p. 100 de margarine, nous aurons ainsi les résultats suivants, la première colonne donnant les quantités de beurre ajoutées par le fabricant et communiquées seulement après l’analyse, la seconde donnant les proportions de beurre trouvées par l’analyse, déduction faite de celui apporté par le lait: BEURRE EEE —© ajouté à 100 retrouvé de par margarine. l'analyse. N°1 . 0 0.00 N°2 re 8 tai NP 15 14.91 N°4 3 Î 9.64 NORS ES di 5 7.84 NEC 2 179 Ne 10 9.64 D'autres méthodes de recherches, telles que la détermination de l'indice de saponification et celle de la température critique de solu- bilité dans l'alcool ont été essayées. Aucune n’a donné des résultats approchant, comme sûreté et comme sensibilité, de ceux fournis par la détermination des acides volatils, qui est un moyen offrant toute garantie et une précision largement suffisante. Le procédé de dosage du beurre contenu dans la margarine étant ainsi établi, il convient d’interpréter les résultats qu’il fournit en vue de savoir si réellement une margarine ne contient pas plus de 10 p. 100 de beurre, c’est-à-dire si elle se trouve dans les conditions exigées par la loi, ou si elle dépasse la limite fixée et constitue alors un mélange frauduleux. Tout d’abord, il convient de dire que les fabricants de margarine n'auraient aucun intérêt à ajouter de petites quantités de beurre en plus de celles qui sont tolérées. En effet, une surcharge, fût-elle de 3 à 10 p. 100, ne pourrait pas faire ressembler la margarine à du beurre et le produit ne se vendrait donc que comme margarine. Ce n’est que dans le cas de l'introduction d’une quantité de beurre assez notable pour pouvoir 294 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. faire naître une confusion entre les deux produits, que le fabricant aurait avantage à faire cette opération frauduleuse. Dans la recherche de la fraude, on peut donc admettre une petite tolérance, au-dessus du chiffre de 10 p. 100, tant à cause de quel- ques incertitudes de dosage, que de la composition variable du lait introduit dans la margarine et qui à pu apporter, tantôt un peu plus, tantôt un peu moins de beurre. Mais celte tolérance ne doit point dépasser % à 4 p. 100. C’est une marge suffisante pour donner toute garantie au fabricant, eten même temps assez faible pour permettre aux tribunaux d'appliquer la loi dans tous les cas où elle aura été violée. La méthode d’analyse étant délicate et d’ailleurs les pénalités étant élevées, il conviendra de ne confier ces expertises qu’à des chimistes familiarisés avec l’étude des corps gras, suivant en cela ce qui a été fait pour l’analyse des beurres, Il serait d’ailleurs à souhaiter que toutes les mesures adoptées par les pouvoirs publics pour la recherche de la margarine dans le beurre le fussent également pour le dosage du beurre dans la mar- garine. Les dispositions législatives auraient alors une unilé qui rendrait plus facile et plus certaine la recherche de la fraude du beurre, ainsi que des graisses alimentaires qui, sous le nom de « margarine », peuvent être considérées comme ses succédanés. —C "PS — 0. CONTRIBUTION L'ÉTUDE DU VANILLIER Par L. GRANDEAU Les conditions d’alimentation des orchidées sont encore très im- parfaitement connues ; on sait peu de choses sur leurs exigences en matières nutritives et, par conséquent, sur la nature et sur les quan- tités d’engrais qu’il convient de leur donner. M. A. de Villèle, secrétaire de la Chambre d’agriculture et du Co- mice central agricole de Saint-Denis (île de la Réunion), m'a fait l'honneur de me consulter l’année dernière sur la fumure qu’il con- viendrait d'appliquer aux plantations du vanillier afin d’accroître leurs rendements. L’insuffisance de documents sur la composition chimique de cette précieuse orchidée m’a engagé à demander à M. de Villèle de me procurer les éléments d’une étude, aussi complète que possible, sur la composition des diverses parties de la plante, étude qui püt servir de point de départ à des essais de fumure. Nous avons examiné et analysé au laboratoire de la Station agrono- mique de l'Est, M. E. Bartmann et moi, des échantillons du sol, des racines, feuilles, tiges et gousses de vanillier, ainsi que les détritus de filaos (Casuarina equisetifolia) et des feuilles de lHydrocotyle asiatique, seuls engrais que les vanilliers reçoivent, jusqu’ici, à l’île 296 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. de la Réunion. Les résultats de cette étude m'ont permis de fournir à M. de Villèle quelques indications sur les exigences du vanillier et sur la nature des engrais minéraux qu’il y a lieu d’expérimenter dans les sols de la Réunion. L’examen chimique fait au laboratoire de la Station agronomique de l'Est a porté sur les substances suivantes qui m’unt été expédiées par M. A. de Villèle : 1° Racines, feuilles, tiges et gousses de vanilliers ; 2° Sols de vanillières de deux ans et quatre ans d’âge ; 3° Détritus servant de fumure. Casuarina et Hydrocotyle. En comparant la composition de ces diverses matières, il est pos- sible de déduire de leur rapprochement quelques indications utiles aux planteurs et d’y trouver un point de départ pour des recherches ultérieures. I. — Composition du vanillier. Pour pouvoir fixer, par un caleul exact, les quantités de principes minéraux nécessaires à la croissance annuelle du vanillier, afin d’en déduire la nature et le poids des engrais à fournir tous les ans à une plantation, il faudrait, au préalable, connaître l'importance des prélèvements de la récolte annuelle et pour cela le poids dont s’ac- croit dans l’année la liane et ses feuilles, le taux de substance sèche produite et la teneur de cette dernière en chacun des principes mi- néraux importants. Les éléments de ces déterminations nous ont fait défaut en partie et c’est à l’analyse de la matière sèche que nous avons dù borner notre examen. En partant des chiffres que je vais résumer, le planteur pourra, suivant l’état de ses vanilliers, calculer aisément les emprunts faits par eux au sol. Pour cela, il lui suffira de se rendre compte par des essais qui ne peuvent être faits que sur place : 1° de la quantité de liane produite annuellement; 2 de sa te- neur en eau (par dessiccation complète de la plante) ; 8° du poids des gousses récoltées. Appliquant ensuite aux chiffres que lui donneront ces diverses opérations les nombres fournis par l'analyse de la subs- tance sèche des feuilles, de la tige de la liane et des gousses, il arri- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DU VANILLIER. 297 vera, en tenant compte du nombre de pieds de vanilliers à l’are ou à l’hectare, à se faire une idée approchée des exigences minérales d’une plantation de surface connue et, par suite, de la fumure à lui donner. D'après les observations de M. A. de Villèle, suivant l’état de vi- gueur des vanilliers, l’accroissement annuel en poids de la liane avec ses feuilles oscillerait autour des chiffres suivants : Vanilliers vigoureux, . . . . . 1 kilogr. à 1K,400 Vanilliers moyens. . . . . . . 0k5,300 à 0ks,425 Vanilliers faibles . . . . . . . 08,180 à Ok,200 Les gourmands, qui servent de boutures, ne sont pas compris dans ces chiffres: leur poids diminue avec l’âge du vanillier. M. de Villèle l’évalue à 20 gr. par pied pour des vanilliers de deux ans et à 10 gr. pour des lianes de cinq ans; mais il pense que ces poids pourraient aisément doubler dans de bonnes conditions d’entretien de la plantation. M. A. Delteil a assigné aux tiges et feuilles du va- nillier la composition générale suivante : PAU RE Ale Te El ne 90.00 BTE ES RE NE er cure 8.83 Genre SRE Le M Le PART 100.00 Dans l'impossibilité de déterminer directement la teneur initiale en eau des échantillons de lianes et feuilles dont le poids au moment de la récolte ne nous était pas connu, nous avons dû nous borner à les dessécher complètement à l’étuve (vers 100°) et à faire l'analyse de la substance sèche ainsi obtenue. 100 parties de racines, de tiges, de feuilles et de gousses nous ont donné les quantités de substance organique et minérale ins- crites dans le tableau ci-dessous. Les poids d’azote, acide phos- 1. Il entend par là l'ensemble des matières combustibles. , 298 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. phorique, etc., décelés par l’analyse sont également rapportés à 100 gr. de substance sèche. RACINES. TIGES, FEUILLES. FRUITS. Matières organiques , . . 93.73 91.53 84.32 89.69 -- minérales . . 6.27 8.47 15.68 10 31 100.00 100.00 100.00 100.00 \ Azote. . Es 1.340 0.758 1.181 1.759 Acide phosphorique . 0.221 0.187 0.347 0.453 Potasse , 0.186 1.166 1.668 2.513 Soude. . 0.248 0.617 0.284 0.153 (D'ETAT ER ON 0.966 2 Lan 0.072 1.449 Magnésie . ALT 0.358 12372 2.438 0.735 Peroxyde de fer et alumine. 1.403 0.322 0.278 0.347 Acide sulfurique . 0.153 0.1o1 traces. 0.073 Chlore . U.270 0.610 0.872 1.231 Pour rendre plus sensibles les relations existant entre les quan- tilés de chacune des matières minérales qui entrent dans la constitu- tion des diverses parties du vanillier, j'indique ci-dessous la composi- tion centésimale des cendres des tiges, des feuilles et des gousses, en leurs éléments essentiels. 100 gr. de cendres renferment : TIGES. FEUILLES. GOUSSES. gr. gr. gr. Acide phosphorique. . 220 2,213 4,200 Potasse. 1 4 5. 13,199 010 68702200 E Soude . de 1,281 1,811 1,484 Chouxe sn NS ni 85086, To0 14052 Magnésie. 16,190 15,547 LE An Chlore. . : 0,721 0,556 1,194 Acide sulfurique. . . 0,188 traces. 0,708 La potasse et la chaux sont, d’après cela, les éléments dominants des cendres du vanillier ; la potasse s’accumule dans la gousse et la chaux atteint son chiffre maximum dans les feuilles. Un fait intéres- sant à noter est la teneur élevée en chlore. M. A. Delteil, qui l'avait déjà constatée, rappelle à ce sujet l'observation d’Aublet, à savoir que les plus belles vanilles de la Guyane se rencontrent au bord des criques, dans les terrains saumâtres et baignés d’eau salée. Il y a CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DU VANILLIER. 299 dans la présence de cette quantité de chlore une indication dont on doit tenir compte dans le choix de la fumure potassique. Le chlo- rure de potassium sera employé de préférence au sulfate de potasse, la teneur du vanillier en acide sulfurique étant de beaucoup infé- rieure à celle du chlore. MM. Truffault et Hébert ont publié récemment un intéressant tra- vail sur les orchidées (‘). Voici, à titre de comparaison, la composi- tion que leurs analyses assignent au Catileya labiala autumnalis d'importation directe du Brésil, en 1891, et à la même plante dégé- nérée en serre (1897). 100 parties de la plante entière renferment: CATTLEYA CATTLEYA EN 1891. EN 18917. HaUrREneLe sg 90.88 94.00 Substance sèche. . . 9.12 6.00 100.00 100.00 AZOLESLRIERENT, RAA. 1.21 0.87 400 parties de substance sèche contiennent: Matières combustibles. 95.45 94.58 (CEE 4.55 5.49 100.00 100.00 100 parties de cendres renferment : Botasse. "ar PEN 25.00 11.46 GELT RMS A MENACE 38.00 27.07 LEA ES CAE ali PERS 7.04 4.60 Acide phosphorique. . 192 2:01 À la dégénérescence de cette orchidée correspond, on le voit, un abaissement très notable dans la teneur de la plante en azote, en potasse, en chaux et en magnésie. La conclusion que MM. Truffault et Hébert tirent de ces analyses est la nécessité de fumer directe- 1. De la dégénérescence de certaines espèces d’Orchidées, Journal de la Société nationale d'Horticulture de France, 1897. 300 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ment les orchidées pour leur donner les matières minérales qu’elles ne peuvent se procurer qu’en quantités tout à fait insuffisantes dans l'humus des troncs d'arbres où elles végètent dans nos serres. J'ai moi-même émis celte opinion il y a quelques années déjà‘ en appe- lant l'attention des horticulteurs sur la fumure minérale appliquée avec succès par M. Roman, dans ses belles cultures d’orchidées de Périgueux. La conclusion qui se dégage de l’ensemble des analyses précé- dentes est que les plantations de vanilliers ont besoin, comme toutes les cultures, de trouver dans le milieu où elles croissent une alimen- tation minérale -appropriée et assez abondante pour suffire à une production rémunératrice. Avant d'examiner les moyens pratiques d'atteindre ce but, je donnerai quelques indications sur la composi- tion du sol de deux vanilliéres que m’a envoyé M. de Villèle et sur la fumure naturelle que le filaos leur fournit, à la Réunion. II. — Composition du sol des vanillières. Les deux sols que nous avons analysés provenaient : le n° 1, d’une plantation de vanilliers âgés de quatre ans ; le n° 2, d’une plantation de deux ans seulement. L'analyse physico-chimique de ces deux terres a donné les résul- Lats suivants : SOL N° 1. 80L NO 2. p. 100, p. 100. Arnileggéms 27 ue TA EN MN 24.30 19.60 SADIeXSIICEUX: 2 EN ME 65.40 70.20 Calcaigen a: TES SO ere UE néant. néant. Humusts ee CU ol er traces. traces. Eau et matières non dosées . . . 10.30 10.20 DOtaux EEE 100.00 100.00 Ces terres franchement argileuses sont, comme la plupart des sols de l’île de la Réunion que j'ai eu l’occasion d’analyser jusqu’ici, dépourvues de l'élément calcaire si favorable à toute végétation. Le {. La fumure des champs et des jardins, 1° édition, 1893. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DU VANILLIER. 301 sous-sol est formé d'argile compacte dans laquelle ne peuvent s’in- troduire les racines des lianes. Celles-ci, dons l’état naturel, c’est-à- dire en dehors de tout apport d’engrais, ne peuvent donc trouver leur nourriture que dans la couche superticielle de Ja plantation et dans les détritus des feuilles des arbres qui leur servent de tuteurs (filaos et hydrocotyle) dont j'indiquerai plus loin la composition. L'analyse chimique des deux sols à été exécutée sur la terre fine passant au tamis de 1 millimètre d’écartement de maille. Au cas particulier, la terre fine n’était autre que la terre brute envoyée par M. de Villèle, celle-ci ne renfermant aucun caillou et tous ses grains passant au Lamis que je viens d'indiquer. Cette analyse a donné les résultats suivants: SOL N° 1. SOL N° 2. p. 100. p. 100. AZOLO SE re le sr age re 0.158 0.154 Acide phosphorique . . . . . . 0.184 02219 POTASSO RE D MER den rie 0.017 0.028 CRAN MANS, NÉE TR, Ce traces. traces. MA DITÉSTE NN NT, RAI 0 150 0.300 LOUÉETMIOLES EMCNENOMENTOS » » Oxyde de fer et alumine. 21.140 24.860 Silicates insolubles. . 55.360 50.360 Ces deux terres présentent de grandes analogies dans leur com- position chimique; elles sont toutes deux assez abondamment pour- vues en azote et en acide phosphorique, très pauvres en potasse et manquent presque complèlement de chaux. Elles semblent donc peu propices à la culture du vanillier si exigeant, comme nous l'avons vu, en potasse et en chaux, et l’on pourrait même s'étonner que cette liane ne se refuse pas à y végéler. C’est sans nul doute la fumure naturelle résultant de l’ac- cumulation sur le sol des détritus des feuilles, graines et brindilles du casuarina et de lhydrocotyle, qui est la principale, pour ne pas dire l’unique source d’alimentalion du vanillier dans un sol aussi mal pourvu de deux des principes nutritifs essentiels : potasse et chaux. La composition de ces détritus et la quantité relativement élevée qui s’en accumule à la surface du sol semblent confirmer cette hy- 302 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. pothèse, mais cela ne doit pas faire négliger l’apport direct de fu- mures minérales si l’on veut placer les vanilliers dans de bonnes conditions de production. III. — Composition des débris de filaos et d'hydrocotyle asiatique. Le mélange des feuilles, des graines, des brindilles, racines, etc., que m'a envoyé M. de Villèle a été séché, sans triage préalable, à l’étuve à 400°, puis broyé au moulin Aimé Girard, tamisé et ana- lysé. Ce mélange renfermait pour 100 parties: EU SP IESMS PALEN EEE UR CM E EU SCT AT 9.50 Matières organiques . . . . . . 61.2 Matières MmiINTÉrAIES RCE CN 29.25 100.00 100 gr. de détritus à l’état naturel (non desséchés) contenaient : Nagte ie: MALE ere ER AE BP OER T0G Acide phosphorique . 02REAS Potasse . 0 ,106 Chaux. . 10276 Magnésie. . 0 ,420 Si l’on en excepte l'azote, cette composition se rapprocherait de celle d’une terre de bonne qualité. Pour apprécier l'importance des apports que les détritus font au sol, il est nécessaire de tenir compte de Ja quantité qui recouvre un hectare de terre. Voici les chiffres que M. de Villèle m’a communiqués à ce sujet. Les tuteurs four- nissent environ 15 800 kilogr. de détritus à l’hectare qui porte 2900 vanilliers. Si l’on applique à cette quantité de détritus la com- position que nous avons trouvée à l’échantillon analysé, on constate que, de ce chef, la couverture du sol renfermerait les quantités sui- vantes des principaux éléments de fertilisation, quantités qui, divi- sées par le nombre des lianes, correspondent pour chacune d'elles au poids inscrit dans le tableau suivant: CONTRIBUTION A L’ÉTUDE DU VANILLIER. 303 15 800 kilogr. de détritus renferment : NZOLE Te ed APN OR UE Pr A. 111K5,8 Acide phosphorique . . . . . . 33 ,6 Potassen nr min ARLES M GMT Chaux PRAIRIE HR VE 221 (4 MARGES EAN ES 66 ,4 Soit par pied de liane : AVOIR ATARI LE MOS:ANALEATS 385,9 Acide phosphorique ... . . . : SIDA ROTASSE MEET E ete rte DT CHAUX M TE M ee 739,0 Magnésie. SU ot pme Ne PEN Ces quantités de matières minérales ne sont à coup sûr pas négli- geables ; mais si l’on tient compte des faits suivants : 1° lenteur de la décomposition totale de ces détritus, nécessaire, suivant toutes pro- babilités, pour que les matériaux minéraux qu'ils renferment soient assimilés par la plante ; 2° absence de calcaire dans le sol, d’où résulte une faible nitrification des matières azotées ; 3° pauvreté relative de ces détritus en potasse — il semble qu’on doit être conduit à fumer directement les plantations de vanilliers. Ici l’expérience du reste est nécessaire pour se prononcer sur le meilleur choix d’engrais à faire. IV. — Fumures à essayer pour le vanillier. Pour cette culture, comme pour celle de la canne à sucre, du caféier, etc., dans les sols siliceux et argilo-siliceux de l'ile de la Réunion, l'introduction de chaux dans le sol me paraît être la pre- mière opération qui s'impose. On peut la réaliser de plusieurs manières et notamment en recou- rant, soit à l’épandage à haute dose de sables calcaires (90 p. 100 de carbonate de chaux), tels que ceux que M. de Villèle m'a prié d'analyser ; soit, mieux encore, par l'emploi de scories de déphos- phoration qui ont l'avantage d’apporter au sol, en même temps que l'acide phosphorique, environ moitié de leur poids de chaux très 304 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. efficace pour l’alimentation de la plante et pour la nitrification de l'azote. L'extrême pauvreté de ces terres en potasse, fait assez fréquent aussi à la Réunion, implique l'emploi d'engrais potassiques et, de préférence, celui du chlorure de potassium, à raison des exigences du vanillier en chlore. Il me semble donc qu'il y a lieu d’expérimenter dans des sols d’une composition analogue à celle des terres que m'a soumis M. de Villèle, l’action des engrais commerciaux suivants : Scories de déphosphoration. . 1000 kilogr. à l'hectare. D : Fumure à renouveler Ou sables calcaires. . . . . 2 000 — Die. Chlorure de potassium . . . 500 — \ er. Nitrate de soude. . . . . . 200 à 250 — (Annuellement.) L'expérience viendra montrer si de l’emploi de ces engrais résulte un accroissement notable dans la production de la vanille; je crois, en tous cas, que ces fumures minérales auront pour résultat d’aug- menter la résistance des vanilliers aux affections parasitaires. J’émets sous toutes réserves ces indications relatives à la fumure. Je n'ai pas de notions suffisantes sur le mode de nutrition des orchi- dées pour oser être affirmalif sur le résultat d'essais qui me sem- blent pourtant devoir être tentés. Les analyses des tiges et des feuilles du vanillier montrent que cette liane a de grandes exigences en potasse et en chaux, mais les engrais que je viens d'indiquer ne sont pas les seuls qu’il y ait lieu d’expérimenter pour la fumure des vanilliers. Les engrais concentrés solubles me paraissent appelés à rendre les plus grands services à nos colonies, leur emploi diminuant, dans de larges proportions, le coût des fumures, à raison de leur concen- tration. La préparation de ces engrais est devenue industrielle depuis quelques années : en supprimant les matières inertes ou peu utiles à la végétation que renferment nécessairement la plupart des en- grais commerciaux, On diminue d'autant le prix du transport, ce qui, pour les longues distances qui séparent les lieux de production des territoires où les engrais sont appliqués, permet de réaliser une CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DU VANILLIER. 303 sérieuse économie dans les prix de revient des matières fertili- santes. | Les engrais concentrés que les usines H. Albert de Biebrich- sur- le-Rhin et d'Engis, en Belgique, livrent à l’agriculture me semblent tout indiqués pour la fumure des vanilliers. L’engrais H. Albert renferme, par 100 kilogr., 14 kilogr. d’acide phosphorique, 29 kilogr. de potasse et 12 kilogr. d’azote. Ces trois principes fertilisants se trouvent dans l'engrais, à l’état soluble dans l’eau, ce qui permet de les employer en arrosage et de les distribuer très également aux végétaux. On peut, en outre, en faisant varier les proportions des quatre sels qui constituent l’engrais dit pour jar- dins (Gartendünger), modifier, suivant les indications de l’expérience, les quantités de chacun des éléments fertilisants. Le mélange qui correspond aux quantités d'azote, d'acide phosphorique et de potasse que je viens d'indiquer est constitué par l’association des quatre substances suivantes : Phosphate d'ammoniaque . . . 28 à 30 kilogr. ! NItTAteATe DOLASS RENTE 44 à 45 — NATTATCTENSONTE PSE NN 15 à 16 — Sulfate d'ammoniaque. . . . . 10 à {1 — L’engrais concentré peut être emplové de deux manières : à l’état solide ou en dissolution dans l’eau, suivant les conditions climatolo- giques. Dans le premier cas, on répand 500 kilogr. de ce mélange (par hectare), on sème l’engrais aussi régulièrement que possible sur le sol et on l’enfouit légèrement au râteau. Pour les vanilliers, le second procédé serait sans doute préfé- rable. Il consisterait à dissoudre 250 gr. du mélange dans un hecto- litre d’eau et à arroser le sol avec celte dissolution à raison de 20 litres par mètre carré. Je ne puis donner ici qu’une indication générale des essais à faire ; l'expérience montrerail sans doute bien vite dans quelles proportions il conviendrait de faire varier la quan- tité d'engrais et sa dilution dans l’eau, suivant l’âge et l’état de la 1. Pris à l'usine de Biebrich-sur-le-Rhin, les 100 kilogr. de ce mélange coûtenf environ 90 fr. ANN. SCIENCE AGRON, — 2° SÉRIE. — 1897. — 1. 20 306 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. plantation du vanillier. Il me semble que ces essais méritent d’être tentés. L'emploi des engrais concentrés ne dispenserait pas de l’ap- port direct de calcaire aux sols qui en manqueraient. J'ajouterai, en terminant, une remarque qui me parait utile. Les analyses des tiges et des feuilles du vanillier montrent que cette liane a de grandes exigences en principes minéraux et notamment en polasse et en chaux, mais 1l ne faut pas oublier que la majeure partie des malières empruntées au sol par le vanillier n’est pas exportée par la récolte. En effet, si l’on admet une récolte moyenne de 295 kilogr. de gousses à l’hectare et qu’on rapporte à cette récolte les chiffres fournis par l’analyse des gousses, on constate que l'exportation des matières minérales est, en définitive, extrème- ment faible, car elle ne dépasse pas les poids suivants d'azote, de potasse, elc. 290 à 295 kilogr. de gousses contiennent : POTASSE*. PRES PANNE" 6 kilogr. environ. AZotefets 22h ts Ur 4 — Acide phosphorique . . . . . l — GRAUXS SR SATA PERS 3 — Magriésie ns. SN EME RENE 1k5, 600 environ. Quantités infimes si on les compare à celles qu’emportent les ré- coltes de céréales, de cannes à sucre, etc. ConcLusION. — Si incomplètes que soient les observations qui précèdent, elles me paraissent cependant conduire à cette conclusion qu'il y a lieu d'étudier expérimentalement la fumure des vanilliers, dans le double but de donner aux plantes une résistance plus grande aux maladies parasitaires et d’augmenter le rendement de la pré- cieuse orchidée. STATION AGRONOMIQUE DE L'ILE MAURICE RAPPORT SUD RES, ERA VAE DE 18,96 Par M. P. BONÂME DIRECTEUR DE LA STATION ————— 5 DS. 0—— I. — Météorologie. Baromètre. — Les observations sont faites à 10 heures du matin et la pression réduite à 0°; altitude du baromètre, 1030 pieds. La moyenne annuelle à 10 heures du malin est de 737°%,8 au lieu de 737,9 pour l’année dernière, c’est-à-dire légèrement supérieure. Les observations extrêmes présentent une assez grande variation, l'amplitude totale étant de 25"*,9 à 10 heures du matin et variant de 717,6 le 20 février à 744,5 le 22 juillet. Le minimum de 717,6 a été atteint pendant la bourrasque du mois de février et la baisse oc- casionnée par le mauvais temps a été açcentuée; la hauteur baro- métrique au Réduit a varié dans cette circonstance de 750 millimè- tres le 17 à 10 heures du matin, à 709 le 20 à 4 heures du soir, mais la baisse a surtout été rapide pendant la journée du 20 et la pression, qui était de 717,6 à 10 heures du matin, n’était que de 709 à 4 heures du sois, soit 8"",6 de différence. Ces chiffres ramenés au niveau de la mer sont donc respectivement de 744,6 et 736"%,0. Généralement, la pression moyenne mensuelle augmente régulière- ment du commencement de l’année au mois de juillet ou août. Cette année, le mois de février ne suit pas la règle générale, et cette irré- 1. Voir tome Il, 2° série, 1896, le Rapport sur les travaux de 1895. 308 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. gularité est due à la baisse accidentelle produite par le voisinage du cyclone. Tableau I. BAROMÈTRE HUMIDITÉ à 0°10 a. m. relative de l'air. A — SE — — Moyennes. RU pu Moyennes. Maxima. Minima. Janvier”. 734,1 735,8 731,0 77 90 69 Févhientes.r. 732,4 737,5 717,6 82 97 70 Mars. 735,4 737,6 133,1 78 90 70 Avril x 135,9 738,4 133,5 81 95 74 MATE, Maple HOT 740,3 139,0 82 96 67 Juin. . Ne 739,17 149,3 731,1 80 95 70 Idiet se 741,1 744,5 737,7 78 gt 70 ONE, 78 Qt 741,7 743,5 738,9 76 89 69 Septembre . . 740,3 142, 0 138,8 72 87 62 Octobre 2e 138,9 741,4 735,6 71 93 2 Novembre . . 137,4 739,5 135,2 72 S3 6 Décembre . . 736,5 138,7 134,7 76 90 65 Moyennes. 137,81 739,94 133,9 77 9175 6788 Hygromètre. — Le degré hygrométrique moyen est de 77 en 1896 contre 78,8 en 1895 à 10 heures du matin. Pendant presque toute l’année et surtout pendant le dernier semestre la moyenne mensuelle est inférieure à celle de l’année dernière, elle n’est plus élevée qu’au mois de février pour lequel plusieurs observations jour- nalières de 97° sont venues modifier la moyenne mensuelle. Les ob- servations extrêmes varient pour l’année de 62° à 97°. Pendant la bourrasque de février, les pluies ont été ininterrom- pues et l'humidité atmosphérique constante et élevée; du 27 au 21 février l’hygromètre enregistreur suit une ligne horizontale sans interruption qui indique la saturation presque absolue de Pair. Température. — La température est de 21°,54 contre 21°,89 en 1895. La moyenne du maxima est de 26°,37 avec des extrêmes allant de 20°,5 à 31°,9 et celle du minima de 16°,72 avec des extrêmes va- riant de 10°,5 à 22°. La température la plus élevée de la journée a été de 31°,5 le 9 dé- cembre et la plus basse de la nuit, de 10°,5 le 16 septembre. La moyenne est donc un peu moins élevée que l’an dernier, sur- RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 309 tout pour les températures nocturnes; mais celles-ci devraient subir une légère correction, car le thermomètre minima par suite d’un léger accident a enregistré plusieurs fois des chiffres d’environ un demi-degré plus bas que la normale, et la moyenne doit par ce fait subir une légère augmentation. C4 Tableau 11. — Température à l'ombre. MAXIMA. MINIMA. TEMPÉRA- —— —— TURE Moyennes. Extrèmes. Moyennes. Extrêmes. moyenne. Janvier. =" 28,93 25,50 ° 31,00 19,8% 17,50: 22,00 24,40 Février. . 28,24 24,05 31,00 20,07 17,00 21,50 24,15 Marse 0028820 97,001 31200, 19.081400 21:00,23,02 Avril. : . 27,65 024,50 (29,00 19,17 17,00. 21,50 - 33,41 Mad EUR 04870250 027,007 La to" 1360717220; 0011720798 Jui. : 293,80 421,50), 426:00: : 145957 :11,00:1:17,00.. :19#0P Juillet. . 22,41 20,50 24,50 13,29 9,00 18,50 17,80 Xoûtt, 2 209 75 Éc 91100 625300 18,100 11,00 15,00! 17:08 Septembre. 25,95 22,50 28,00 14,18 10,50 16,50 20,06 Octobre. . 26,55 23,00 28,50 15,87 13,00 18,50 21,21 Novembre . ‘27,28: 22,50 : 29,50 16,38 13,50 19,50 -,21,85 Décembre. 29,16 25,50 31,50. 18,30 13,50 21,50 23,173 Moyennes. 26,37 23,34 28,50 16,72 13,59 19,38 . 21,54 Pluviomèétre. — La quantité de pluie enregistrée au Réduit pour l’année 1896 a été de 2031" ,15 (79,8 pouces) contre 1771 millimè- tres l’an dernier, soit une différence de 260 millimètres en plus. Sur c2tte quantité, 830 millimètres sont enregistrés pour la jour- née el 4201 pour la nuit. Quant à la répartition journalière, on compte 321 jours de pluie mais seulement 128 jours pendant les- quels la quantité d’eau par 24 heures a été supérieure à 1 millimé- tre, les 193 autres observations comprennent plutôt de fortes rosées que de la pluie proprement dite et sont enregistrées presque géné- ralement pendant la nuit. Le nombre de jours de pluie au-dessus de 1 millimètre pendant la journée ouvrable, c’est-à-dire de 6 heures du matin à 6 heures du soir, n’a été que de 56 pour l’année dont 12 pour le mois de février. La répartition mensuelle des pluies caractérise la saison au point de vue agricole. Nous voyons qu’elles ont été abondantes pendant la première partie de l’année, car de janvier à mai on enregistre 310 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE, 1690 millimètres d’eau, soit une moyenne de 338 millimètres par mois, mais de mai à décembre on ne reçoit plus que 341 millimètres, soit une moyenne de 48"",7 par mois, c’est-à-dire que pendant les sept derniers mois on n’a reçu en totalité qu'environ la quantité moyenne enregistrée pour un des cinq premiers mois de l’année; la sécheresse a donc persisté pendant la plus grande partie de l’année. Tableau III. — Répartition des pluies en 1896. NOMBRE DE JOURS RENE de pluie. JOUE: NUIT: ü À ARTE PERS Ÿes Totaux. de un millimètres. pouces, Le. Janvier . . 67,90 202,50 270,40 10,52 30 12 Février. . . 267,50 407,00 771,50 30,44 26 15 Mars. . . . 121,00 28,50 150,20 5,90 29 12 Avril . . . 93,40 105,90 199,30 7,83 30 15 Mai... . « 156,90 239,15 996,05 11,53 28 (l JR GS 2,40 37,80 40,20 1,58 25 9 Juillet. . . 12,95 38,39 51,30 2,01 26 15 Août re: 6,40 53,35 59,75 2,34 25 12 Septembre . 5,60 35,25 40,55 1,60 28 7 Octobre . . 40,70 17,10 57,80 297 27 7 Novembre . 30,80 12,90 43,70 ; 22 6 Décembre . 24,00 23,10 47,10 1,85 25 9 Totaux. 830,15 ‘/1201,00 - 2031,15, : 79,78, 321 128 Cette irrégularité dans la répartition mensuelle se remarque aussi dans la répartilion journalière ; néanmoins, la coupe de 1896 a été assez favorisée, car à partir de novembre 1895 des pluies assez abondantes sont venues mettre en végétation toutes les plantations qui ont pu profiter largement de la saison chaude malgré leur irré- gulière répartition pendant le reste de l’année. Après les fortes on- dées des premiers jours de janvier viennent les pluies torrentielles du 14 au 21 février; la quantité enregistrée pendant celte semaine à Ja Station a été de 730 millimètres, dont 494 millimètres pour la nuit et 487%%,5 pour le jour, soit 377 millimètres pour les 24 heures, encore celle quantité recueillie est un minimum, car le récipient du pluviomètre étant presque rempli, les fortes rafales ont dû faire dé- border une partie de l’eau qui y était contenue. Il est hors de doute que des pluies semblables lavent le sol et en- RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 311 traînent une partie de ses éléments fertilisants ; il en est de même des engrais mis en terre peu de temps auparavant. Cependant, les fumures employées de bonne heure dans les repousses ont dû être moins facilement entrainées, car les pluies de novembre avaient donné une grande activité à la véfétation et la canne déjà développée avait eu le temps de les absorber en grande partie avant leur arrivée. Après ces fortes pluies une sécheresse relative s’est fait sentir jus- qu'à la fin de mars; la terre était, il est vrai, assez saturée d'eau pour suffire amplement aux besoins de la végétation dans des conditions normales, mais pendant la bourrasque toutes les cannes vierges un peu avancées, et dont les tiges étaient très développées, ont été for- tement secouées et souvent à moitié déracinées par le vent, il aurait donc fallu pendant quelque temps des petites pluies continues pour que la terre puisse se tasser à nouveau autour des racines et pour empêcher sa dessiccation, mais ce n’est pas ce qui a eu lieu, et la sé- cheresse de mars qui n’aurait eu aucun inconvénient dans des con- ditions ordinaires, a nui dans une certaine mesure à toutes les plan- tations qui avaient souffert de la brise, et la végétation est restée pour ainsi dire stationnaire pendant un mois. En avril, les pluies sont assez régulièrement réparties, puis elles deviennent très copieuses les 6 et 7 mai (230 millimètres, dont 193 pendant la nuit). Après ce moment, la sécheresse survient et dure jusqu’à la fin de l’année, non pas absolue, mais suffisante pour nuire à beaucoup de jeunes plantations. D'un autre côté, ce temps sec a favorisé la coupe ainsi que la ma- turation des cannes dont les rendements à l’usine ont été générale- ment satisfaisants, aussi la récolte s’est poursuivie sans interrup- tions et a pu être terminée de très bonne heure. Malheureusement, ces conditions ne seront pas sans influence sur la coupe prochaine, et quoiqu’on ne puisse guère encore prévoir les résultats qu’elle donnera, 1l n’en est pas moins vrai que les effets de la sécheresse des mois de novembre et de décembre se feront sentir dans quelques localités; certains quartiers ont reçu des pluies en novembre, mais dans d’autres endroits la sécheresse a sévi pendant les deux der- uiers mois de l’année sans discontinuer et les repousses ne se sont pas développées normalement. 312 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Si dans certaines localités, étant donné un temps favorable, l’acti- vité de la végétation en mai et juin permettra de rattraper en par- tie le temps perdu, il en est d’autres où une forte diminulion de rendement ne pourra être évitée. La végétation dans nos climats n’est pas assez exubérante pour que deux mois d'arrêt à cette époque de l’année n’aient pas un effet quelconque sur la récolte en cours, surtout quand la sécheresse se prolonge ainsi que cela a lieu actuellement. II. — Laboratoire. En 1896 les analyses demandées au laboratoire ont été beaucoup plus nombreuses que l’an dernier, elles s'élèvent à 167, correspon- dant à 596 dosages divers. On a donc eu beaucoup plus fréquem- ment recours au contrôle ou à l’étude de certaines questions que précédemment. Cette augmentation n’est pas due seulement aux ana- Iyses demandées par les planteurs de Maurice, car elle comprend un certain nombre de recherches faites pour le compte de divers pro- priétaires de la Réunion consistant principalement en analyses de terres et de fourrages, c’est même de là qu'a été demandée la presque lotalité des analyses relatives aux fourrages et matières alimentaires. La diversité de ces analyses semble indiquer qu’à la Réunion on cherche à tirer parti de toutes les ressources pour l'alimentation du bétail d’une façon beaucoup plus complète qu’on ne le fait à Maurice. Ces analyses payantes ont été les suivantes : ANALYSES. DOSAGES. HMPTAISICOMPOSÉS 16 109 Guanos . AL at it Vis à Re 6 20 Phosphates et superphosphates . 19 36 Sel ivEre Mr eu, Le 10 il Guanos phosphatés . . . . . . 14 35 EnpTais GIVERS ANT re 14 33 EESTI Ame 9 24 Fourrages et matières alimentaires. 19 113 MORNOS be d'a Se 5 Ed nie AT 18 83 Sucres, sirops, cannes, etc. . . 17 6 Divers Hi 406: EHIAEX 25 70 RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 313 La composition moyenne de quelques-uns de ces engrais est indi- quée ci-après : pour les superphosphates ordinaires : acide phospho- rique soluble dans l’eau, 17.54, avec des extrêmes de 14.6 à 20.3; acide phosphorique soluble dans le citrate d’ammoniaque, 2.22, avec des extrêmes de 1.3 à 5.6, et une moyenne d’acide phosphorique total de 20.0 avec des extrêmes de 16.8 à 23.9 p. 100. Celle des engrais composés est de 5.85 d’azote et de 14.6 d'acide phosphorique avec des extrêmes de 4.8 à 6.8 pour l’azote et de 13.9 à 16.5 p. 100 pour l’acide phosphorique. Les guanos phosphatés varient de 1.2 à 1.3 d’azote et de 24.5 à 27.5 d’acide phosphorique avec des moyennes de 1.26 d’azote et de 26.5 d’acide phosphorique. Les fumiers ordinaires contiennent, suivant leur fabrication et les différentes substances qui entrent dans leur composition, de 0.37 à 0.61 d’azote, 0.14 à 0.43 d’acide phosphorique et0.14 à 0.54 p. 100 de potasse. Les mélanges varient dans de grandes limites, non point parce qu’on cherche à modifier leur composition suivant les variations du prix des matières premières el leur valeur relative sur le marché, mais simplement parce qu'on est partisan de tel engrais ou de telle formule. Ils ont donné les variations suivantes : APOLEIOTPARIQUE. ele rer e 0e 2 ER pt 00: AZOLOPDITTIQUEN- Re NE CIRE CRE loi 5.0 — Azote ammoniacal . ENT NE at Do Me 4.1 5.2 — AZOLONLOLALE SNA ARS EEE ARS SE TEE Acide phosphorique soluble dans l'eau . 1911 IR — Acide phosphorique soluble dans le citrate d'ammoniaque : 0.6 DÉONRE—E Acide phosphorique insoluble . 0 SUR Acide phosphorique total . RES) ou LES Potasse . JMTOLO TIR Dans quelques-uns de ces engrais on emploie avec le nitrate de soude, le chlorure de potassium ou le sulfate de potasse pour don- ner la potasse nécessaire ; nous ne reviendrons pas sur ce que nous disions l’an dernier au sujet de la composition et de l’achat des en- grais, mais nous ferons encore remarquer qu’actuellement, au point de vue de l’économie, l’emploi du chlorure ou du sulfate de potasse 314 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ne s'impose pas. En effet, si on prend la valeur marchande de ces sels on voil que si les prix ont subi des variations depuis l’an dernier, ils n’ont pas modifié la situation. Le nitrate de potasse est coté 265 Rs., le nitrate de soude 180 Rs. et le sulfate de potasse 240 Rs.'. Pour remplacer un tonneau de nitrate de potasse il faut : 838 kilogr. de nitrate de soude à 180 Rs. . . . . . , 150,8 Rs. 880 kilogr. de chlorure de potasse à 240 Rs. . . . . . 211.2 362,0 Rs. Soil 362 Rs. au lieu de 265 Rs. pour avoir les mêmes éléments fertilisants que dans le nitrate de potasse. Si on veut calculer d’une autre façon pour savoir à combien re- vient l’unité de potasse dans le nitrate de potasse et le sulfate de po- tasse, prenons la valeur de l'azote dans le nitrate de soude qui est de 18.0 15.5 130 X 1,16 — 150,8 Rs.; reste, pour la valeur de la potasse, — 1,16 R; l'azote du nitrate de potasse vaudra done 265 150,8-—414,2 Rs,, soit l'unité de-polasse À es — 0,259 au lieu de = 0,48 dans le sulfate de potasse ou le chlorure de polassium. Le nitrate de potasse est donc beaucoup plus économique que le mélange de nitrate de soude el un sel de potasse, soit chlorure soit sulfate, et doit, par conséquent, être employé de préférence ; le même calcul indiquera le choix à faire dans le cas où les prix ci-dessus va- rieront en plus ou en moins. Le guano phosphaté est généralement utilisé comme source d’a- cide phosphorique insoluble dans les mélanges, c’est en effet la ma- üère première qui livre au plus bas prix l’acide phosphorique inso- luble dont lunité revient à 0,36 R. en admettant un titrage de 25 p. 100 et au prix de 90 Rs. la tonne; si on tient compte de l’azote qu'il contient généralement dans la proportion de 1 p. 100 et si on compte celui-ci à 1 R., Punité phosphorique ne revient plus qu’à 1. La R. (ou roupie) vaut 2? fr. 37 c. RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 319 0,32 R.; c’est donc une matière première très économique. Mais si on ne s’en lenait pas à des formules toutes faites, il serait souvent encore possible de diminuer ce prix en employant des matières ana- logues dont le Uitrage est variable et qui, pour cette raison, sont plus rarement demandées. Les îles du groupe des Seychelles en fournis- sent dont la richesse varie dans de grandes limites et dont l'emploi serait souvent encore plus avantageux. Ainsiles deux suivantes, ana- lysées au laboratoire, dont le titrage était respectivement 0.8 et 2.7 p. 100 d'azote et 11.5 et 7.4 d'acide phosphorique, auraient, en prenant les chiffres de 1 R. pour l'azote et 0,32 pour l’acide phos- phorique, une valeur de : NAME S azote RL REP SIRET CEE SR ER SR AT SS OURS M 5facidesphosphorique 10/32 NE ra TMS 4,48 Rs NE AIT AC VAL ENERO LeRt ET Ne DOS NEO SR A ent CAN NT LU 7.4 acide phosphorique à 0,32? . 2,36 5,06 Rs. soit 44,8 Rs. el 50,6 Rs. le tonneau, c’est-à-dire à un prix bien supé- rieur à celui auquel ils étaient offerts. Un autre guano brut de même provenance a donné les résultats suivants. [l était composé de poudre fine mélangée à de gros débris organiques et à des matières pierreuses de grosseur variable dont les plus volumineuses atteignaient le poids de 500 grammes. La poudre fine mélangée de sable quartzeux était composée de : LE TT ETES ARR RSA PDA E en US 11.20 p. 100. Matières organiques: . +40 %.., 26.12 — Matières minérales) ÆHPIMAAMTE" 62.68 — 100.00 p. 100. Le guano brut séparé en trois lots de diverses grosseurs a donné pour chacun des lots séparés : : ACIDE ARE phosphorique. p. 100. p. 100. Éoudresfinent. pe: Re 1.0 4.3 GTAVIBES EU Lee 0.5 18-10 l'ierres On FERMENT 0.0 19.8 316 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. La composition moyenne du guano mélangé calculée d’après la proportion et la composition de ces divers lots était de : AZOTBE NS RTE MES m0 Ace 2 Le 0.97 p. 100. Acide phosphorique . . . . . . . 71,43 — Soit une valeur de : AZOte 049 SD: 100€ A PLAOD PRES TE ED OURS Acide phosphorique 7.4 p. 100 à 0.32 R.. 2.36 Rs. 3.26 Rs. soit le tonneau 32,60 Rs. On remarquera que les portions rocheuses sont plus riches en acide phosphorique que la partie fine, mais celte richesse est elle- même très variable; partagées en trois lots suivant leur couleur et leur texture elles ont donné les chiffres suivants en acide phospho- rique : ACIDE phosphorique. Roches très tendres, amorphes . . . . 18.2 p. 100. — tendre, texture cristalline . . . 18.4 — NOUS AMOTNRES RAT EP NUE PaN—E Ces guanos sont donc loin d’être homogènes, c’est un inconvé- nient au point de vue de leur exploitation, mais il ne diminue en rien leur valeur intrinsèque, et il est toujours facile, en les mélan- geant après broyage, d’en faire une marchandise de composition ré- gulière et uniforme. III. — Notes diverses. Ainsi que les années précédentes les cannes récoltées sur la sta- tion ont été livrées à l’usine de Trianon. Malheureusement, par suite des nécessités du travail de l'usine et de circonstances diverses, il n'a pas élé possible de passer séparément tous les lots des essais, et pour quelques-uns l'analyse des cannes n’a pu se faire que sur les jus extraits au moulin de laboratoire, qui, ainsi que nous l’avons déjà fait remarquer, ne donne pas une moyenne très exacte de la richesse saccharine simplement par la raison que l’on ne peut pas RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. bi Me agir sur un poids suffisant de tiges; cependant, comme la majeure partie des cannes était composée de repousses dont l’échantillonnage est plus facile, l’écart est moins considérable. À chaque analyse nous indiquerons si elle a porté sur le jus d’usine ou sur du jus de labo- ratoire. Cette année, presque toutes les cannes étaient d’une richesse saccharine relativement fort élevée, il n’y a d’exception que pour les cannes vierges de graines dont la maturation était imparfaite pour des causes signalées un peu plus loin. Les semis de cannes de graines se continuent de divers côtés, mais moins activement que par le passé parce que l’on n’a pas ob- tenu du premier coup et dès le début une ou des variétés incontes- tablement supérieures à celles déjà connues et cultivées. Aussitôt que la réussite des semis de cannes a été un fait incontestable, on a tant parlé de la dégénérescence de la canne et de sa régénération par les semis qu’on a été surpris de voir que la plupart des cannes obtenues n’étaient pas des merveilles et que beaucoup d’entre elles étaient même très inférieures à celles que l’on connaissait déjà. C’é- tait cependant à prévoir puisque la canne primitive a dû être amé- liorée tant par la sélection que par les soins culluraux dont toutes les variétés obtenues accidentellement ont été l’objet. On pensait à tort que du premier semis allait sortir la canne idéale donnant un fort rendement à l’arpent, possédant une grande richesse saccharine, résistant bien aux intempéries et ne craignant pas plus les attaques des insectes que les atteintes de la maladie; et comme tous ces desiderata ne sont peut-être pas encore réalisés, on en con- clut que les cannes issues de graines ne valent pas mieux que les autres. Il est évident que quelques-unes ont très peu de valeur, mais d’autres paraissent donner de très beaux résultats. Une canne qui semble tout d’abord ne pas valoir la peine d’être propagée ne doit cependant pas être abandonnée après un premier essai, car il se peut qu'après avoir été reproduite plusieurs fois par bouturage et placée dans des conditions différentes elle se modifie et montre certaines qualités qui la feront apprécier. Il est difficile de méconnaitre l'importance et les avantages qui peuvent résulter des semis de graines de cannes et de l’oblention de 318 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nouvelles variétés. Il existe un fait indiscutable, c’est que depuis de longues années déjà les variétés introduites à Maurice après avoir, pour quelques-unes d’entre elles, donné de bons résultats et des séries de récoltes abondantes, ont perdu peu à peu de leur vitalité et ont fini par fournir des rendements si aléatoires qu’elles ont été abandonnées par la culture. La cause d’une telle situation est beau- coup moins évidente, et les explications qu’on en donne parfois sont très discutables, elles sont probablement très complexes et difficiles à délerminer exactement, mais le fait est indéniable et il faut en tenir compte, Actuellement, les anciennes variétés disparaissent; il faut en trouver de nouvelles qui, à leur tour, soutiendront la culture pendant un certain nombre d'années ; or, les semis de cannes, par la diversité de variétés qu’ils produisent, peuvent donner naissance à une ou plusieurs variétés de cette nature et c'est à ce titre qu'il est ulile de les poursuivre. On attache parfois une influence prépondérante, au point de vue de l’obtention de bonnes variétés, aux semis de graines provenant déjà de cannes issues de graines, c’est-à-dire qu'à la troisième ou quatrième génération on obliendrait des variétés plus rustiques et de meilleure qualité; il est possible, même probable, que de cette façon on stüimulera la faculté de la plante à produire des semences plus fertiles, mais il est beaucoup moins évident que les produits vaudront mieux au point de vue cultural et industriel, c’est-à-dire donneront des rendements plus élevés et d’une plus grande richesse saccharine, et le seul point sur lequel on puisse compter c’est que des nombreux semis exécutés sortent une ou plusieurs variétés r'e- commandables sous un rapport quelconque, soit qu’elles provien- nent d’une ancienne variété, soit d’une canne ayant déjà été repro- duite par semis. Cette année, les semis faits à la Station ont été continués, environ trois cents plants ont été obtenus. Les premières graines mises en terre à Ja fin du mois d’août 1896 de fleurs venant d’être récoltées ont commencé à lever au bout de dix jours et la levée s’est conti- nuée encore pendant une quinzaine de Jours. Le 20 septembre, c'est-à-dire près d’un mois après, on a semé des graines identiques RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 319 aux premières, mais les premiers plants n’ont commencé à appa- raître qu'après 18 jours et beaucoup moins nombreux, ce qui in- dique qu’on doit semer le plus tôt possible après la récolte parce que les graines fertiles semblent perdre rapidement leurs facultés germinalives. Quand un$emis ne réussit pas, l’insuccès doit être attribué pres- que généralement à ce que les graines employées n'étaient pas fer- tiles, si toutefois il n’y a pas eu négligence dans les soins qui sont indispensables à une graine aussi ténue et aussi délicate que la graine de canne à sucre. Le point essentiel, mais le plus difficile, est d’avoir de bonnes graines, et quand on récolte les inflorescences on ne peut être assuré de leur qualité. Certaines localités semblent réunir plus que d’autres les conditions nécessaires à la fécondation et à la maturation des graines. Dans les nombreux essais entrepris à la Station, les fleurs ramassées sur place et aux environs n’ont ja- mais donné de résultats satisfaisants malgré toutes les précautions prises pour la récolte, celle-ci se faisant sur des panicules à divers degrés de maturité depuis le début de leur complet épanouissement jusqu’au moment où les épillets sont presque complètement déta- chés et tombent sur le sol. D'un autre côté, des fleurs récoltées dans quelques localités du lit- toral sans précautions spéciales ont presque toujours donné des résultats satisfaisants; il y a là une question de situation et d’expo- sition ou de circonstances météorologiques qui semblent influencer d'une manière particulière la fécondation ou la maturation de la graine. Cette année, il a été mis à la disposition de la Station un terrain situé au Pamplemousses à côté du Jardin Botanique sur les terres de l’ancienne propriété de « Mon Plaisir ». Ce terrain anciennement planté en cannes et abandonné depuis plusieurs années était recou- vert de bois et de broussailles ; il a été défriché et planté en cannes de graines avec les boutures provenant des cannes récoltées au Ré- duit et qu'il était utile d’expérimenter dans d’autres conditions et surtout sous un climat différent. Les résultats qu’elles y donneront comparés avec ceux obtenus au Réduit permettront de voir si cer- 320 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. taines variétés sont plus appropriées à un climat qu’à un autre, et il se peut que certaines espèces donnant de médiocres résultats au Ré- duit en donneront de meilleurs sur le littoral et vice versa. La préparation du terrain ayant été faile tardivement, la planta- tion n’a pu avoir lieu en temps normal, d'autant plus qu’il s'agissait d'utiliser les têtes provenant de la coupe faite à la Si@tion en octo- bre 1896. Une autre partie du terrain a été plantée au café de Libéria (200 plants); cette variété prospère sur les terres chaudes du littoral et n’est pas sujette aux attaques de l'Hemileia Vastatrix qui a détruit dans certaines localités les caféiers ordinaires, ou tout au moins ce cryptogame ne se développe pas abondamment sur ses feuilles et l’arbuste résiste parfaitement à ses attaques. La culture du café Li- béria n’a pas été expérimentée à Maurice, il existe seulement quel- ques plants sur divers points de la colonie, qui sont généralement prospères et vigoureux. Il ne serait pas sans intérêt de se rendre compte de l’avenir de cette culture dans les différentes localités de l’île et nous avons profité du terrain des Pamplemousses pour en faire l'essai. Si le café de Libéria n’est pas atteint par l’Hemi- leia, il est attaqué par un insecte très répandu dans la colonie, cet insecte (Ratopus Sp.), connu généralement sous le nom de scarabé, dévore les feuilles du café Libéria dont il ne laisse parfois que la ner- vure médiane, Nous ne l’avons observé que sur de jeunes caféiers en pépinière, où ses dégâts n'étaient pas sans importance puisque certains plants ont été en quelques jours complètement dépouillés de leurs feuilles. Il ne paraît pas s'attaquer au caféier ordinaire, car lorsque le café du pays est intercalé entre des plants de Libéria, ces derniers seuls subissent ses atteintes; cet insecte dévore aussi les feuilles de beaucoup d’autres arbustes, notamment de l’oranger et du citronnier et ses ravages sont souvent attribués à tort au papil- lon appelé papillon Vinson, malheureusement ce coléoptère est ab- solument dédaigné par les oiseaux dits insectivores. Au Réduit il a été aussi planté du café de Libéria et du café du pays. Ce dernier dont la culture avait été abandonnée après l’appa- rition de l’Hemileia peut résister à ce champignon au moyen des RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. BAL traitements par les sels de cuivre. À la Réunion, par des pulvérisa- tions suivies et des soins culturaux intelligents, on a réussi à enrayer la maladie et la culture du café ordinaire paraît entrer dans une phase nouvelle. Au Réduit, les quelques arbustes plantés il y a trois ans commencent à rapporter et s'ils ne sont pas tout à fait indemnes des atteintes de l’Henvileia, du moins ils n’en souffrent pas trop et les baies qu'ils portent arrivent facilement à une maturité complète. L’Hemileia se développe surtout pendant la saison chaude et plu- vieuse : aussi les traitements au cuivre doivent avoir lieu à cette époque ; au Réduit les pulvérisations sunt commencées en novem- bre et continuées de mois en mois jusqu’en mai ou Juin; on se sert de la bouillie bordelaise sucrée à 2 p. 100 de sulfate de cuivre sans excès de chaux, c’est-à-dire en en ajoutant de façon à ne pas rendre la mixture alcaline. C’est pour continuer ces essais sur une plus vaste échelle, qu’il a élé planté cette année une plus grande quantité de caféiers; cette pelite plantation a été faite sur terrain nu où il semble que le café résiste mieux que lorsqu'il est planté sous bois ou du moins entre des arbres plus ou moins rapprochés. Le bois d'oiseau (Tetranthera laurifolia), qui constitue généralement les terrains boisés dans les- quels on serait tenté de planter le caféier, est un des plus mauvais abris qu’on puisse trouver, ses racines nombreuses s'étendent au loin, et si, à proximité d’un de ces arbres on creuse un trou pour y mettre un plant quelconque, elles s’y ramifient et l’envahissent rapi- dement en s’y développant d’autant plus que la terre a été ameublie et amendée ; alors l’arbuste qu’on y a placé est affamé par ce voisi- nage, sa végétation est languissante, il reste chétif et dans ces con- ditions précaires 1! résiste beaucoup moins facilement à l’envahisse- ment du champignon. Avant la maturation des baies et alors que la graine du café est encore verte, on a remarqué à la Réunion que la larve d’un papillon de la famille des Pvyraliens attaque le pédoncule à la base du fruit, puis pénètre dans la baie dont 1l dévore les tissus; le fruit alors noir- cit et se dessèche, puis tombe sur le sol; c’est ce que l’on appelle coulure du café. Dans certaines plantations, cet insecte a, paraît-il, réduit la récolte d’un tiers et on ne connaît pas d’autre moyen de ANN. SCIENCE AGRON. — 2€ SÉRIE. — 1897. — II. 21 ®) 5 2 NB ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. © destruclion que celui de cueillir les baies attaquées et de les brûler pour empêcher sa propagation. — Ce papillon existe également à Maurice; nous ne l’avions pas observé l’an dernier, mais cette année ses dégâts n’ont pas été sans importance. La description de cet insecte est la suivante, d’après M. Bontilly, inspecteur des forêts et chef du service forestier du Crédit Foncier Colonial à la Réunion : « L’insecte parfait est un papillon nocturne de petite taille, de 6"",1/2 de longueur et de 11 millimètres d’en- vergure au repos, les ailes restant ouvertes dans cette position. Les deux grandes cachent en partie les deux petites. La couleur géné- rale des ailes est brune, mais foncée et d’un beau gris près du corps pour finir par une bordure sinueuse d’un brun clair doré à la base de lPaile. Sur la marge de chacune des deux ailes supé- rieures, on remarque quatre plaques d’un blanc nacré aux reflets bleuâtres, de forme irrégulière et nettement dessinée par une fine bordure noire. Les ailes sont finement plissées, légèrement coton- neuses. Les antennes sont ténues, de couleur jaune d’or, le corselet argenté. Le dessous des ailes est beaucoup plus clair que la partie supérieure, la couleur générale est alors le gris argenté tirant sur le jaune, à mesure qu'on se rapproche de la base. L’abdomen est gris argenté. Les trois paires de pattes, d’abord argentées près du corps, tendent de plus en plus vers la couleur brun clair doré en al- lant vers les extrémités. » Des essais de culture de tabac ont été entrepris depuis quelque temps à la Station, afin de voir si, dans toutes les circonstances, le tabac récolté à Maurice est de qualité aussi inférieure qu’on le dit sénéralement. Ces essais se poursuivent actuellement et les résul- tats déjà obtenus semblent indiquer qu’il ne serait pas impossible de produire du tabac de qualité ordinaire et qui serait loin d’être infumable. Sans chercher actuellement à faire des tabacs pour l’ex- portation, on pourrait commencer à en produire pour la consomma- tion locale qui est assez considérable, et comme le climat de Mau- rice est très favorable à cette culture, il ne semble pas impossible de trouver des terrains produisant des tabacs de qualité courante. La production de larome spécial qui fait la réputation et la valeur de D) dans Én dé. fm ( 2 RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 329 certains tabacs, comme ceux de la Havane par exemple, tient surtout à la nature du terrain; il y a là une question de cru qui est particu- hère à ces terres privilégiées et que rien ne peut remplacer, mais dans une situation déterminée la qualité ne dépend pas uniquement du terrain et de son exposition, elle peut être plus ou moins modi- fiée par l'espèce à cultiver, la distance dés plants, l’époque de la ré- colte, la préparation des feuilles, etc., qui sont autant de facteurs importants et qui ne doivent pas être livrés au hasard. Le discrédit dont jouit le tabac indigène doit provenir en partie de l’époque où cette culiure était libre et où chacun pouvait planter quelques pieds de tabac dont les feuilles, n’étant l’objet d'aucun soin, arrivaient à la consommation en plus ou moins mauvais état; il en serait autrement si, entreprise sur une étendue moins restreinte, elle était conduite normalement. Le tabac est une plante qui exige beaucoup de soins et de travail depuis la plantation jusqu’au moment de la vente ; il suffit de la ré- colter avant ou après sa maturité pour modifier complètement ses propriétés et aucune précaution ne doit être négligée pour lui con- server ou pour lui communiquer les qualités demandées par le con- sommateur. Sa principale qualité est la combustibilité et c’est surtout celle qui, dit-on, ferait défaut au tabac récolté à Maurice, mais cet incon- vénient n’est pas inévitable, puisque la généralité des tabacs récoltés au Réduit est au moins d’une bonne combustibilité moyenne, et ce qu’on pourrait leur reprocher c’est de ne pas posséder l’arome par- ticulier qu’on recherche dans les tabacs d'importation; néanmoins, la plupart des amateurs qui ont bien voulu donner leur avis à ce sujet ont trouvé très passables les cigares qui avaient été fabriqués à la Station. Nous pensons donc que si, avec les conditions primitives dans les- quelles nous avons opéré, absence de séchoir convenable, pas de fermentation en meule à cause de la petite quantité de tabac récolté, le produit n’était pas de mauvaise qualité, oh peut admettre que cette qualité s’améliorerait notablement si la manipulation à partir de la récolte était conduite telle qu’elle doit l’être dans une fabrication normale. 324 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. La gomme a été encore moins abondante sur les cannes cette an- née qu’en 1895 et dans quelques quartiers on recommence à plan- ter la canne bambou qui avait été presque complètement abandonnée sur certaines propriétés; néanmoins, cette affection est loin d’avoir disparu et si son acuité semble s’atténuer, elle existe toujours plus ou moins, non seulement sur la bambou qui est la plus sensible à ses alteintes, mais sur beaucoup d’autres espèces; s’il est utile de conserver celte variété qui se recommande par ses qualités spéciales, il ne serait peut-être pas prudent pour une propriété de la cultiver sur une trop grande échelle. Les allures de cette maladie sont anormales et dans certains quar- tiers des carreaux qui étaient gravement alteints ont donné l’année suivante de très belles repousses où la maladie semblait avoir com- plètement disparu. Il est vrai de dire que les cannes bambou ont été coupées au début de la saison et qu’on s’est d’autant plus empressé de les manipuler que l’on craignait de voir se renouveler les dégâts observés pendant les années précédentes et dont la gravité s’accen- tue au fur et à mesure que la saison de coupe est plus avancée. Pour les nouvelles plantations 1l est de toute nécessité de choisir les têtes des cannes dans des champs où l’on n’observe aucune trace de maladie et autant que possible de les prendre sur une propriété indemne. Malgré l'obscurité qui règne encore sur les causes de cette affection et son mode de propagation, 1l est évident que l’on en sera d'autant plus à l’abri qu'il aura été pris plus de précautions pour n’en pas introduire les germes dans la plantation à créer; même dans ce cas on aura toujours à craindre sa réapparillon, tandis qu’en, met- tant en terre des têtes de cannes gommeuses on sera à peu près cer- tain d’avoir une pousse irrégulière, la maladie se manifestera dès le début et les rejets qui sortiront de la bouture seront souvent malin- gres et périront avant d’avoir pu constituer une souche. IV. — Essais d'engrais divers. Cette année, on s’est généralement abstenu d’entreprendre les essais d'engrais qui avaient été recommandés il y a deux ans, ou du moins, s'ils l’ont été sur quelques propriétés, nous n’avons reçu RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 32D aucun renseignement à cet égard et n’en connaissons pas les ré- sultats. : Lorsque la culture du sol est prospère et que les récoltes laissent un large bénéfice à celui qui l’exploite, on comprend jusqu'à un certain point que l’on néglige les recherches qui pourraient abou- tir à une augmentation de rendement ou, ce qui revient pratique- ment au même, à une diminution du prix de revient; mais lorsque cette exploitation tend à devenir de moins en moins rémunératrice, ce qui paraît véritablement résulter de la situation actuelle et des plaintes nombreuses que l’on entend de tous côtés, ces recherches devraient intéresser davantage le producteur, et chacun, semble-t-il, devrait y contribuer dans la limite de ses moyens ; cependant, c’est à ce moment qu’on s’en préoccupe le moins, et c'est d'autant plus regrettable que les essais commencés auraient dû être continués et reproduits pendant quelques années, afin de pouvoir en brer des données certaines et pratiques. On a eu raison de dire que si les expériences de culture ne doivent pas être bien faites et rigoureusement suivies, il vaut mieux ne pas s’en occuper. Est-ce pour ce motif que l’abstention est générale? On serait presque tenté de le croire, car il est difficile de trouver une autre cause sérieuse. Pour entreprendre un essai dans de bonnes conditions sur une propriété à Maurice, il faut, pour ainsi dire, une double collabora- tion, celle du propriétaire et celle de l’admimistrateur, et c’est assu- rément cette dernière qui est la plus importante, car quand l’admi- nistrateur sera convaincu de l'utilité et de l'avantage des essais culturaux de quelque nature qu’ils soient, et qu’il espérera en reti- rer une indication utile, on est sûr qu'ils seront surveillés et bien exécutés et qu'on pourra compter sur les résultats obtenus. Ces essaisan’entrainent cependant pas une grande dépense pour une propriété, surtout ceux concernant les engrais; 1l s’agit sim- plement d’un peu plus de surveillance et de soins, puisqu'il faut répartir uniformément l'engrais dans chaque lot d’égale superficie, et à la récolte couper chaque essai séparément et le peser ; seu- lement c’est un travail dont il faut se charger soi-même, ou le faire exécuter par quelqu'un sur qui on puisse compter, et non 326 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. pas donner des ordres sans s'occuper s’ils seront exécutés convena- blement. On éprouve aussi de la difficulté à trouver un terrain bien uni- forme ; si on le possède, on hésite avant de le consacrer à une expé- rience, et parfois on choisit un carreau, le premier venu, plus ou moins accidenté ou irrégulier, toujours assez bon, pense-t-on, pour faire un essai, et sur lequel les résultats des divers lots ne seront plus comparables. On a suggéré parfois que la Station devrait posséder des terrains sur divers points de la colonie pour y faire des essais; mais à cause de l’éloignement, l’organisation et la surveillance des divers travaux seraient difficiles, et la seule façon pratique de les entreprendre, c’est que le propriétaire se charge du travail suivant les indications qui lui seraient données par la Station. Il n’est guère probable que la dépense soit un obstacle à leur exécution, mais si cependant cela élait, on pourrait encore y arriver et la Station pourrait rembourser toutes les dépenses du propriétaire qui, naturellement, lui tiendrait compte de la valeur de la récolte obtenue. La véritable cause de celte abstention doit cependant être beaucoup plus simple que celles que nous énumérons; il est probable qu’elle est due principalement à ce que chaque planteur croit que ses méthodes culturales sont par- faites et que toute modification lui semble inutile. Cependant, les essais culturaux sont d’une telle importance et si fertiles en résultats que nous croyons devoir insister encore sur ce sujet, d'autant plus que les expériences sur la canne à sucre sont plus difficiles, ou du moins qu’il est moins facile d’en tirer des con- clusions immédiates que pour beaucoup d’autres cultures, pour plu- sieurs raisons dont les deux principales sont les suivantes : D'abord le temps pendant lequel la canne végète avant d’être récoltée, un an pour les repousses et deux ans pof@r les cannes vierges, époque pendant laquelle la canne reste soumise à toutes les influences climatériques ou autres qui lui sont favorables ou défavo- rables, et les engrais agissent d’autant mieux ou donnent des résul- tats d'autant plus visibles et marqués que la plante expérimentée met moins de temps pour se développer complètement, c’est-à-dire du moment de la plantation à celui de la récolte. RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 327 En outre, chaque souche de cannes, comme tout végétal en géné- ral, possède une certaine individualité qui fait que deux plants pla- cés l’un à côté de l’autre sont rarement identiques sous tous les rapports, et souvent l’un d’eux prend un développement plus consi- dérable sans qu’on puisse toujours l’attribuer à une cause connue, de sorte que plus le nombre de sujets faisant partie d’un lot d’ex- périence est grand, et plus on sera à l'abri de ces anomalies ; or, les plants de cannes sont toujours relativement très espacés, puis- qu'on n’en compte qu'environ 7 000 à l’hectare — il faudrait donc prendre pour chaque lot une surface assez considérable pour atté- nuer dans la mesure du possible ces accidents, mais d’un autre côté on se heurte à un autre inconvénient, c’est que le terrain peut ne pas être homogène et les divers essais à comparer ne seraient plus dans les mêmes conditions. Ge sont deux extrêmes qu’il faut tâcher d'éviter, mais cela n’est pas toujours possible, de sorte que pour la canne, plus que pour la plupart des autres cultures, il faut multi- plier les essais afin de se mettre à l’abri d’une conclusion trop pré- maturée. En 1896, le champ d’essai de la Station a été coupé en premières repousses, puis 1l a reçu les mêmes engrais qu’on avait déjà donnés en 1895 pour les cannes vierges; le tableau IV indique les résul- tats obtenus. La récolte s’est faite le 15 octobre 1896, les vierges ayant été coupées le 9 octobre 1895. Le guanage à eu lieu le 20 décembre 1895 avec les mélanges dont nous rappellerons la composition. Les lots sont de + d’arpentet comprennent 190 fossés. La fumure employée et correspondante à l’arpent était de 30 kilogr. d’azote, 40 kilogr. d'acide phosphorique et 30 kilogr. de potasse. Parcelles 1 à 4. — 40 kilogr. d'acide phosphorique, dont moitié par le superphosphate et moitié par le guano phosphaté; 30 kilogr. de potasse par le sulfate de potasse; l’azote est employé sous des formes différentes. Parcelle 4 : 50 kilogr. azote organique par le sang desséché. 328 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Parcelle 2 : 30 kilogr. azote ammoniacal par le sulfate d’ammo- uiaque. Parcelle 3 : 30 kilogr. azote nitrique par le sulfate de soude. Parcelle 4: Mélange des trois azotes : 10 kilogr. organique, 10 kilogr, ammoniacal et 10 kilogr. nitrique. Parcelle 5. — Engrais de la parcelle 4, plus 30 p. 100 du même mélange. Parcelle 6. — Engrais de la parcelle 4, mais une demi-fumure seulement. Parcelles 7 à 9. — Mêmes doses que parcelle 4. Dans la par- celle 7, la potasse est à l’état de chlorure de potassium et à l’état de nitrate dans la parcelle 8. En 9, même dosage, mais cette parcelle a été en partie détruite par les cerfs. Parcelles 11 à 14. — Mèmes doses et composition que dans la par- celle 4 pour l’azote et la potasse; l'acide phosphorique est employé sous les formes suivantes : Parcelle 11 : Acide phosphorique soluble dans l’eau par le super- phosphate. Parcelle 12 : Acide phosphorique soluble dans le citrate d’ammo- niaque par le phosphate précipité. Parcelle 13 : Acide phosphorique insoluble par le guano phos- phaté. Parcelle 14 : Mélange par parties égales d’acide phosphorique soluble et insoluble. Parcelles 15 à 17. — Avec le même mélange que dans la par- celle 4, les parcelles ont reçu en plus : dans le n° 15, 15 kilogr. de potasse par le nitrate de potasse; en 16, 20 kilogr. d'acide phos- phorique par le superphosphate, et en 17, 10 kilogr. d'azote par le nitrate de soude. Purcelles 18 à 21. — Ces parcelles ont reçu des engrais incom- plets, c’est-à-dire la fumure n° 4 dans laquelle il manquait un élément; l’azote pour la parcelle 18; l'acide phosphorique pour la parcelle 19 et la polasse pour le n° 20 ; la parcelle 21 n’a rien reçu. RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 329 La partie du terrain où se trouve cette dernière série parait infé- rieure aux autres parties du champ et moins homogène, ainsi que nous le faisions remarquer l’an dernier; en outre, les trois dernières parcelles ont été légèrement endommagées par les cerfs. Tableau IV.— Analyse des cannes du champ N° 2, le 15 octobre 1896. NUMÉROS POUR POUR COEF- REN- SUCRE __ [DENSITÉ ; 100 d 5 ER Le des , 1100 centim. cubes. 00 de cannes. . | FICIENT| DEMENT| produit PURETÉ, ar a CC _ à ; par iso: glu. à à celles. Glucose.| Sucre. |Glucose. cosique. |l’arpent. l'arpent.| Kilogr. | Kilogr. | 39 600! 5 876 39 000 40 000! : 41 900! 5 92 ot 7 1 I © D ON COMMON ROC) LR À 46 100 = [we] en (w2) © 38 100! 5 : 31 100! 4 : 26 100! 3& [=] m M e 38 600 39 600 32 900: 36 500! 5 eu D OO 1 © © ” 9 t92 © © & am 19 O2 19 © D © 14 © 1 DRRORQIONS RENE) EX CNE. te) 36 800! 5: 37 300! 5 36 39 000! 5 612 33 200 19 100! : 22 600! : Le 2 x (Sa) ei mi CO OO À 19 À Fr À © Co CS © = ü @ HOLS ORORONS © = LA . CS SES 8 8 8 8 8 8 8; 8 8 8 7 7 M 1 © eh bi © OO I Cr I Eyes 5 es] 7 L'analyse des cannes du tableau IV a été faite sur Les jus d'usine : provenant du premier moulir, elle présente donc bien exactement la richesse moyenne. Elle ne varie guère dans les parcelles de la même série, et on peut considérer pratiquement les richesses sac- charines comme équivalentes dans les divers lots. L’an dernier, ces cannes récoltées en vierges étaient très pauvres, tandis qu’elles sont cette année d’une richesse relativement élevée, 330 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. de sorte que, malgré la réduction sur le poids des cannes récoltées, le sucre produit à l’arpent est sensiblement le même. L'influence de la nature des engrais sur la richesse saccharine n’est pas plus marquée que dans les essais précédents, les différences que l’on peut observer sont dans l’ordre de celles qui peuvent se présenter dans les cannes du même carreau traitées d’une façon identique, et elles ne pourraient être mises à l’actif de l’engrais que si elles se reproduisaient dans une série d’essais de même nature. Si on prend la moyenne des richesses des deux années consécutives, vierges et repousses, pour les lots où la nature de l’engrais pourrait avoir de l’influence, on a des résultats semblables aux précédents ainsi que le montrent les chiffres suivants : RICHESSE moyenne. Azote)/CrSANIQE SE le del t OIU ES. 12541 AOte ammoniacal}e ae ENS ATEN NCEE 11.86 AZDCEPMILTIQUE PRE EC Er Ne nee 11.94 AZOÉC MÉMNBE PAIEMENT QU RS NE EDP ENS 12.05 et dans les parcelles à engrais incomplet : RATS AZOLR. RS TETE NU TA dt 13.43 Sans acide phosphorique . . . . . . . . . 15629 SALSNDOIAES REIN EE den sun Lu eu y SDS 13.08 Les poids de cannes à l’arpent sont également peu différents dans la première série, les parcelles 5 et 6 seules indiquent l'influence d’une fumure plus ou moins copieuse. Dans la série des phosphates, l’acide phosphorique insoluble a donné un rendement inférieur, tandis que pour les cannes vierges on avait constaté un résultat inverse ; la moyenne des deux rende- ments, vierges et repousses, est de : Acide phosphorique soluble dans l'eau. . . . . . . 48 000 kilogr. — — soluble dans le citrate. . . . . 50200 — — — insoluble dans le citrate . . . . 49 100 — — — iasoluble et soluble. . . . . . 20200 — Il résulterait que l’acide phosphorique soluble est préférable pour les repousses et que l'acide phosphorique insoluble peut remplacer RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 28 avantageusement l’acide phosphorique soluble dans les vierges, c’est possible, mais nous attendons d’autres résultats avant de prendre le fait comme acquis. Les indications fournies par les parcelles 18 à 21 ne doivent pas être acceptées sans réserves pour les raisons indiquées plus haut, et les résultats relatifs à l'acide phosphorique demandent confirmation. Sur un autre terrain anciennement en culture, on a reproduit les expériences sur la forme de l’azote. Les cannes étaient des Lousier en premières repousses, coupées en vierges le 25 octobre 1899 el guanées le 30 décembre; elles ont été coupées le 14 novem- bre 1896. La composition de l’engrais est identique à celle des parcelles précédentes, 1 à 4, même engrais dans les quatre parcelles, mais l’azote sous forme variable. L'analyse des cannes a été faite sur le jus extrait au petit moulin du laboratoire, et peut présenter moins d’exactitude que dans le premier cas; les résultats ont été les sui- vanis : , POUR POUR COEF- REN- DENSITÉ À 100 centim. cubes. 100 de cannes. FICIENT : DEMENT CHAMP N°9 3. PURETÉ. ù à 159. EE À TT, |] — glu- à = 2 2 Sucre. |Glucose.| Sucre. | Glucose.| C0Sique. larpent. LE] . Sang desséché Sulfate d'anmmoniaque. Nitrate de soude Azote par tiers. 17.53 17.84 17.65 17.45 16.35 © Co Co 19 19 © 19 © ©2 mr 1] © 9 19 19 19 © « RTE ei 19 19 72 1 Sans engrais . . + Le] Sur une autre partie du même champ, on a ajouté l’engrais ordi- naire n° 4, mais, dans chaque lot, on a augmenté respectivement d’un tiers la dose de chacun des éléments. Chaque parcelle a donc reçu en plus et rapporté à l’arpent : Parcelle 1. 10 kilogr. d'azote nitrique. 2, 10 kilogr. d'azote nitrique. — 3. 15 kilogr. d'acide phosphorique. — 4, 10 kilogr. de potasse. 332 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Dans la parcelle 1, les 10 kilogr. d’azote supplémentaire ont été ajoutés en même temps que la fumure générale ; dans la parcelle 2, ils ont été ajoutés seulement en mai. Non 109 2222-2028 0736 LAON 0.28 LOMME 22 509 N9:9° 6: 62007059 15.98 0.45 2.8" 90.8 25 160 NoES SS0/21 28880 0:52 15.42 0.59 2 91.3 24260 N°.4° SOLE 20 ADS 15.28, 0.43 ADR NOP ET 24 S80 V. — Composition minérale d’une récolte de cannes. Si la proportion des substances minérales contenues dans une récolte ne permet pas de calculer d’une manière absolue la quantité et la nature des engrais à lui appliquer, elle est un des facteurs im- portants de cette évaluation, et elle donne la mesure de ses exi- gences culturales qui, mises en parallèle avec la nature et les res- sources du sol, fournissent les indications nécessaires pour y arriver. Ces exigences peuvent subir des variations qu’il est utile de cons- tater et de déterminer. Nous établissons donc ci-après la composition minérale de la canne à diverses périodes de sa végétation, c’est-à- dire à des époques de plus en plus rapprochées de la récolte. L’absorption des principes minéraux ne paraît pas très régulière dans le cas présent, et cette variation ne semble pas uniquement devoir être attribuée à la difficulté de la prise d’un échantillon moyen d’une récolte, mais aussi au mode spécial de végétation de la canne, aux alternatives d'arrêt et d’activilé de sa croissance sous notre chmat et à la longue période pendant laquelle elle reste sou- mise à ces influences avant d’être récoltée. Les résultats suivants ont élé obtenus sur des cannes vierges, et il est possible que sur des repousses dont la végétation est plus rapide et plus régulière, les variations que l’on y remarque soient moins accentuées. Tels qu'ils sont, 1ls permettent de se rendre compte de la proportion d'éléments prélevés dans le sol par une récolte moyenne et d'établir le bilan de la culture, c’est-à-dire la somme des prin- cipes contenus dans la récolte et qui doivent être fournis tant par le sol que par les engrais. Les cannes (Lousier) ont été plantées en janvier 1894 et guanées RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. De en avril suivant. Les échantillons ont été prélevés chaque mois à partir du 6 mai jusqu’en octobre 1895, c’est-à-dire durant les six mois qui précèdent la récolte et alors que les tiges avaient déjà ac- quis les trois quarts de leur développement total. A chaque fois on a choisi six cannes représentant la moyenne du champ, les tiges ont été divisées longitudinalement en deux parties identiques ; l’une d’elles a été passée au moulin pour avoir la richesse saccharine du jus, l’autre à servi à la détermination de la matière sèche et au dosage des matières minérales. L'analyse a été faite séparément sur les tiges et sur les feuilles, celles-ci comprenant toute la sommité de la canne à partir de la der- nière feuille verte adhérente à la tige. La richesse saccharine des tiges a été déterminée par l'analyse du jus extrait au moulin en comptant une proportion de jus normal de 84 p. 100. Ces diverses déterminations ont donné les résultats suivants : MAI. JUIN. JUILLET. AOÛT. SEPTEMBRE. OCTOBRE. Proportion centésimale des tiges et des feuilles : FiSes ae ee 66.1 70.5 66.5 69.7 To .1 Feuilles. - | 35.9 29)26 33.0 30.3 24.9 20.4 Canne entière. 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 100.0 Matière sèche p. 100 de cannes : Matière sèche . 21.90 23.40 50e 24.87 25.60 23.30 LDÉUTNS CRE 78.10 7 100.00 100.00 100.00 100.00 100.00 100.00 Matière sèche p. 100 de feuilles : Matière sèche . 18.46 23.00 297 25.83 22,94 20.00 atlas Riva 81.54 77.00 71 100.00 100.00 100.00 100.00 100.00 100.00 Richesse saccharine de la canne : SUGPE) AU NUE 9.56 9.94 12.26 13.14 13.70 11.50 Glucose . . . 1.31 120 0.98 0.65 0.45 0.45 Total. . 10.86 11.14 13.24 13.79 14.15 11.9, Pour l’évaluation du poids de la récolte à chaque prise d’essai, il n’a pas été possible de se baser sur celui des cannes prélevées pour l’analyse ; les varialions dans la croissance n’étant pas considérables 334 _ ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. d'un mois à l’autre, ne pourraient être constatées en raison de la difficulté de choisir des cannes représentant exactement le poids moyen de la récolte à un moment déterminé. Pour se rendre compte de l'accroissement, on a choisi un certain nombre de tiges moyennes qui ont élé mesurées exactement et dont les entre-nœuds découverts ont été comptés chaque fois jusqu’à la première feuille verte en- core adhérente. On a eu de cette façon l’accroissement en longueur, et à la récolte les cannes ont été divisées en sections correspondantes au mesurage précédent et pesées séparément. On obtient ainsi l’ac- croissement en poids d'une façon aussi précise qu'il est possible de le faire, et c’est sur ces données que sont calculés les poids succes- sifs de la récolte. Les moyennes obtenues ont été les suivantes : POIDS POIDS successifs LONGUEUR ps de LONGUEUR oil moyen la récolte moyenne découverts en tiges, au® ; lé poids final relative. d’une canne. tee d’une canne. une canne à 100. moyenne. kilogr. kilogr. mètres. mètres. 1,362 34 1,75 67,5 24 1,631 87,9 HE 83,7 29 1,709 LME EE) 88,4 32 1,781 95,6 7 91,5 33 1,836 98,6 2,51 96,5 34 1,861 100 ,0 2,59 100,0 36 - On remarque qu’en ramenant les accroissements en poids et en longueur à 100, les deux nombres différent légèrement et que l’ac- croissement en longueur est plus élevé que l’augmentation en poids ; cela est dû à ce que la canne n’a pas la même grosseur sur toute sa longueur et que son diamètre diminue dans la partie supérieure de la tige. Avec ces données, on calcule que 100 kilogr. de tiges à la récolte donnent aux diverses époques les proportions centésimales suivantes de cannes et de feuilles : Tiges. . . . 73.1 BTS DIET 95.6 98.6 100.0 Feuilles. . . 37.4 36.5 45.8 A1.4 42,6 255 Poids total , 110.95 124.0 137.9 157.0 131.2 125.5 RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. et pour une récolte de 30 000 kilogr. de cannes à l'arpent : Kilogr Tiges . 21 93 Feuilles... 11 230 AUDE PREMIER D Kilogr. Kilogr. 26 250 27 510 10 940 135 750 37 190 41 260 Kilogr. 28 680 12 420 41 100 Kilogr. 29 580 39 370 330 Kilogr. 30 000 7 650 = ——— ————— _ _ _— _ ————— ——— 37 650 L’irrégularité de la proportion des feuilles relativement au poids des tiges tient à plusieurs causes : d’abord à'ce que l'échantillon sur lequel a porté l'analyse n’est pas le même que celui qui a servi à la mesure de l'accroissement, puis à ce que la longueur de la canne ayant été prise jusqu’à la dernière feuille verte, il suffit qu’une feuille soit sèche ou verte pour modifier sensiblement la longueur relative sur un lot et faire varier sur l’autre la proportion centésimale des tiges et des feuilles, variations qui peuvent ne pas toujours se pro- duire dans le même sens et occasionner ces différences. Les tableaux V à VE cqptiennent : Tableau V : Composition centésimale des cendres pures, c’est-à- dire moins le charbon et l’acide carbonique, cannes et feuilles. Tableau V. — Composition centésimale des cendres moins l'acide carbonique. SICER SRI ele Chlore . 2 Acide sulfurique . Acide phosphorique . Chaux . Magnésie . . Potasse. Soude EL SES Oxyderde fer." Silice. . Chlore . . Acide sulfurique . Acide phosphorique . Chaux . ; MACRÉSIEL. RE Potasse. : SOU PERTE Oxyderderfer 6 MAI. ps & Or oo où À D 12 = © © OÙ 19 = 9 y © = 109 D © À O2 © Co x 6 JUIN. 6 JUILLET. CANNES, RCD mIRC 2.88 LES 8.14 7.54 4.87 4.85 6.45 T'en) 8.00 10.73 25.20 15-55 0.52 0.50 1.56 1227 FEUILLES. 55.62 SHOT 4.06 Do Henlte 3.89 2896 3.02 SELS 5.60 4.10 5.94 DTENCE 18.61 0.73 0:52 1.39 0.78 6 AOUT. [Sal © D & © © cv Et = © on COM a Ori 0 10-71 00 6 sEP- TEMBRE. 94. + CO ere © © Où où -1 9 —j° 0 7 oc- TOBRE. ox © a mu OO. CO, 1 Où © © 336 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Tableaux Vlet VIT: Matières minérales contenues dans 100 kilogr. de matière naturelle, c’est-à-dire à l’état vert, cannes et feuilles, et dans 100 kilogr. de matière desséchée à 100°. Tableau VI. — Matières minérales contenues dans 100 kilogrammes. D e 6 SEP- T OC- G MAI. 6 JUIN. 6 JUILLET. 6 AOUT. HD el kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. CANNES. SITE Ar QU Eee GATE SRORS2 00 2082070 COTE SEEN TE 0,016 0,021 0,005 0,003 0,002 0.003 Acide sulfurique . . 0F0298M0 001008 TOO ; Acide phosphorique . 0,023 0,036 0,020 0,019 O,01S 0,025 Chaux 00 22050 000095 À | 0:048)2.0/029 L0N08 ON 0S C2 MAI 08: Magnésie . . . . . 0,034 0,060 0,04Ÿ 0,039 0,036 0,031 Potasse. . . . . . 0,150 0,188 0,063 0,052 0,046 : 0,090 Soude. . . . . . . 0,006 0,004 0,002 0,001 0,002 0,003 Oxyde de fer. . . . 0,010 0,012 0,005 0,007 0,004 0,006 TOLA IS ee 0,469 0,750 0,406 0,423 0,389 0,473 AZOTOS FRA Dee (rterl 0,071 0.074 0,106 0,100 FEUILLES. 85 1,159 1,088 55 0,062 0,082 48) 0, 142 50.84 12 0,053 0,50 5 0,149 0,112 3 0,112 0,075 98 0,301 0,388 37 0,012 0,009 09 0,015 0,014 MCE UC M7. 0600 10, 71100 "1,31007.# 03747132 Cnlore. 14 8.00" 0,0670:0,096 1210, 0608 0,0 Acidé sulfurique . . : 0,077 0,122 0,088: O,1 Acide phosphorique . 0,060 0,070 0,064 0,0 Caux. Sr 040: 08908 10$ 1212404 10182107 Magriésiey.06.% ...2140,0692070;096%4% 0; 1070000 Potasse. ME GT Ut 0,450 0,5 12070,5350002 DOUTE MERE ele rate 0,008 0,017 0,009 0,0 Oxyde de fer 1,200; 02824,0; 03324040; 0142400 Total 1 5 0455909 8780/8150" Ho nue en Pie rot. JL. | 0,15800 0,224, 0, 1831007902 1:0,2920/0/20p TABLEAU. units né RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. D Tableau VII. — Composition de 1400 kilogr. de substance séche. G SEP- 7 oc- AI. JUIN, Gr NO : 6 MAI 6 JUIN. 6 JUILLET. 6 AOUT re HOT kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr. kilogr CANNES. Silice. 0805 12373 10822 M ONQLEL 00830 1 F:024 Chlore . ‘ 0,074 0,092 0,018 0,010 0,007 0,012 Acide sulfurique . 0155 072000408121 08% 0 Len TETE OT Acide phosphorique . 0,104 0,155 0,078 0,075 0,070 0,110 Chaux . MT MED Ton C0 LIN 0 12 AUNTES Magnésie . 0520025560 MO LTO MOSS ONE EE 07133 Potasse . DS MRO SD 02508 022080 LST 0,387 Soude OO OT OI MONDUS RON O0 OS OUSMNOAOE Oxyde de fer. 0,046 0050 0,020 0,029 0,015:5 10,024 GTR es 2.146 0,210 1,604 1,702 1,921 2,032 en AOC EEE RME 00810 5600 2820 M0 2981 NON ETAT ES 07230 FEUILLES. DICO UE cree 004 Non 0000140500 24 07018 LUI SAUT CHIC MERS COOL GNT OR 22 TEE 026 MOTOS Acide sulfurique . . 0,419 0,530 0,387 0,571 0,620 0,420 Acide phosphorique . MN 0801072297 602771060225 "0220 CRAUL EE NS AU NON AS NO ES ON ASE 0602 0649 1105559 MAGIE NT NO SE TE A2 EN ATOM 6690 0,490 00:378 Potasse . + Se 2; TOR PRO GE TER M D RS 11e fe OA SOUTENUE Pe". 2 OO EN O OST UN O ES ON 00 0 0 Oxyde de fer. 0,153 004 05142410; 062% 0503/0065 #10:069 EUR TC 8.451810, 2380107008 ce 1e TAOPLS RS ADIER PTE is à 0: Sara IL O2 DT .0N8 06 MONTANT Tabieau VIIT : Matières minérales contenues dans une récolte de 30 000 kilogr. de cannes à l’arpent, calculées d’après la proportion des üges et des sommités obtenue à chaque essai, le poids des cannes à chaque époque étant estimé d’après l'accroissement cons- taté sur un lot de cannes identique à celui qui a servi aux ana- lvses. ANN. SCIENCE AGRON, — 2° SÉRIE. — 1897. — II [he] 12 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. &r'8T Di) ga ‘per ap‘9 La ‘9 ‘ && 68 06‘Tr1|#8 "11€ 08‘T 660 00‘L& 0€°6 OI‘TT (9f2 0027 06°0 OF TL c9 ‘a 9L'T 80°£F 1918 do 14 1p‘01 cote 99°9 ST 921 91‘96T DTÈT LF°68 96‘O0T 9G°TT 60°C O6'£I 10°‘9 LF STI 90 {CTI C9'OT 92°6 c9‘O1 6ç°0 IL 69 00'0£ 0669 000 0€ ‘II ‘II LOFE CPI & 062 6 1 gg°Te |og‘or &L1GL |TGGOI 08C 68 [007 1F ID TT *Sa][In9 4 e: a & = e = “Sa][rno 4 T0‘ 28 ST°T& ca‘ GT F6‘8 gg ‘81 £g‘9 09" GCT 2 ‘HHHOLNDO } ‘senhodo sojuoxoyrp xne oxoruo 9710091 ej suep sonuequoo sepexeuru “hi ‘HUANILAAS te O£'FI 6908 89 6 18" GGI 69‘3r 9C"GF& gg'2T S8-TI 86‘2 0G°G DIS à 9T'CG GTT 6 896 9 DIG La 89"TI1 96 co 96 ‘92 FS ‘cz TT‘2T 96 ‘6 T0 ‘97 TG‘ LUZ 99°L cefeT oc‘or GTI OC'Ta 91C & 0FG OT ‘IA 0981 cp‘6 10'9T 1G‘G 00 ‘F8 88 °TE ar 9 0C8 98 ‘II Sr'CT 8L'TI T0 ‘CT GO'TI Fr'STI CS°TY 289 O9T ££ ‘I ‘M0 L'LT 610 & OS IT “it SUILLER F8‘zoûr 61‘& ST |68°g 1C‘£ 0986 a‘ Fe 208 F (l 086 T& A S0[%J0] S91pU29) 19} 9p opÂx( * * sapuos * ‘Ossu]0Œ4 * OISQU2SEN " * xuuqf) * onbnouydsoqd oproy anbrnyns pro * * a10109 ans ‘2707 * 01998 01910 * * 18303 SPI04 SOIQTEN — ‘IIIA NEeIQEL RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 339 Dans la composition centésimale, tableau VIIT, les différents élé- ments varient dans les divers lots, sans règle bien établie, excepté pour le chlore et la potasse, qui diminuent régulièrement tant dans les feuilles que dans les tiges au fur et à mesure que la canne ap- proche de sa maturité. À toutes les époques, la potasse est tou- jours l'élément le plus abondant dans les cendres; au début, sa pro- portion est surtout considérable dans les tiges, mais dans les derniers mois elle en disparait plus rapidement que dans les feuilles. On n’ob- serve qu’une anomalie en octobre, où la potasse semble réappa- raître, tandis que la chaux et la magnésie subissent une diminution sensible. Cette particularité n’est pas la seule que l’on puisse cons- tater, comme nous le verrons plus loin, elle ne peut guère s’expli- quer par une reprise de la végétation amenée par les pluies, puisque la sécheresse s’est continuée jusqu’à la récolte, et cependant elle élait très nette. Si le fait était constant et non accidentel, il serait dù à l’influence de la saison. À cette époque de l’année, on remarque en effet sur beaucoup de végétaux, soit herbacés, soit ligneux, un mouvement séveux caractéristique qui coïncide généralement avec les premières pluies, mais si celles-ci ne surviennent pas à l’époque habituelle, cette manifestation ne s’en produit pas moins avec plus ou moins d'intensité. Les pluies viennent évidemment contribuer à activer cette reprise de la végétation, mais en leur absence, elle se produit néanmoins par l’influence de la température qui s’élève alors rapi- dement, et il n'ya rien d’élonnant à ce que la canne en subisse aussi les effets comme d’autres plantes sur lesquelles ils sont plus visibles. La proportion de matières minérales est très élevée dans les cannes et dans les feuilles ; elle varie de 4 à plus de 7 p. 1000 dans les tiges, en outre celles-ci sont de qualité très inférieure au point de vue de la richesse saccharine, de sorte que la quantité de matières minérales totales varie, p. 100 de matière sucrée dans la canne (sucre et glucose), de 3 à plus de 6 p. 100, dont 0,4 à 1,6 de potasse. Cette proportion de matières minérales est beaucoup plus élevée que celle qu’on rencontre habituellement, et il en est de même de l’azote, qui s’y trouve également en forte proportion. 340 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. La valeur de ces chiffres est plus facile à établir dans le tableau de la composition minérale p. 100 de matière sèche. Les cendres totales y varient de 15 à 31 dans les cannes et de 72 à 102 dans les feuilles p. 1000 de matière sèche. On observe d’assez grandes variations dans le taux des cendres totales ; en juin il atteint un maximum qui peut être dû aux pluies du mois précédent; cette augmentation se remarque également dans les feuilles et chacun des éléments y participe à peu près dans les mêmes proportions. Relativement à la matière sèche totale, les éléments minéraux ne suivent pas une marche très umforme, 1l n’y a que la potasse et le chlore qui diminuent régulièrement dans les tiges au fur et à mesure que les cannes mürissent, ce n’est qu’à la dernière analyse d'octobre qu’on observe la réapparition de la potasse et une augmentation du taux des cendres. En juillet et août, la richesse en azote subit une forte dépression dans les tiges et dans les feuilles qui n’est pas accusée par les autres éléments minéraux. Dans le tableau de la composition des cannes de mai en octobre, les chiffres qui y sont indiqués ne représentent pas la totalité des principes puisés dans le sol par la récolte; ils indiquent seulement les éléments qui y sont contenus au moment de l’analyse, non com- pris ceux qui ont servi à la constitution des feuilles qui se dessèchent et qui se détachent de la tige au fur et à mesure de l’accroissement de la plante. C’est donc un minimum des substances absorbées et utilisées pendant la végétation de la canne et par conséquent de ses besoins. C’est pour la même raison que le poids total des tiges et des feuilles diminue à la récolte, parce que les feuilles sont moins abon- dantes ; à la coupe la proportion des feuilles n’était que de 25 p. 100 du poids des tiges, tandis qu’elle était de 50 p. 100 quatre ou cinq Mois auparavant. Si dans la composition de Ja récolte totale, la proportion de cendres est élevée, il est à considérer que, relativement à de précé- dentes analyses, le taux d’acide phosphorique est plus faible et celui de la potasse plus considérable ; il en est de même de l'azote, dont la RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 341 proportion est au-dessus de la moyenne habituelle, et il est utile de rappeler à ce propos que les cannes en question, récoltées en 189%, étaient d’une très faible richesse saccharine et incomplètement mûres. L’acide phosphorique prélevé par arpent pour la production des 30 000 kilogr. de cannes est, dans le cas présent, de 17 kilogr. au maximum en juin, généralement en proportion plus grande dans les feuilles que dans les tiges en octobre; c’est une proportion plus faible que celle qu’on trouve habituellement et qu'il y a lieu de signaler en passant, surtout quand on la compare à celle de l’acide sulfurique. La potasse est toujours plus abondante dans les feuilles que dans les tiges, son maximum en juin s'élève à 105 kilogr., puis cette quantité diminue peu à peu, excepté pour le dernier mois, où elle se trouve en augmentation dans les tiges proprement dites. La chaux et la magnésie se trouvent en proportions sensiblement égales dans la récolte entière, et il est probable que ces deux élé- ments peuvent se substituer l’un à l’autre dans une certaine mesure; leur ensemble s'élève dans la récolte totale jusqu’à 61 kilogr.* Si maintenant on considère la proportion qui existe entre les éléments contenus dans les engrais fournis habituellement à la canne et ceux contenus dans la récolte, on est frappé surtout de la différence qui existe pour la potasse entre la quantité prélevée dans le sol et celle qui est restituée par les engrais. Il faut reconnaitre que, dans la majorité des cas, la potasse est un des éléments dont les effets sont le moins marqués sur la végétation et il est difficile par- fois de constater son influence sur les rendements, du moins dans des essais isolés et non suivis. Une succession de cultures sans restitution de la potasse ou avec une restitulion insuffisante pourrait seule montrer son efficacité. On ne peut guère admettre, en présence des prélèvements énormes faits au sol par une récolte de cannes, que la réserve qui y existe ne s’épuise pas peu à peu et ne finisse par être insuffisante pour les besoins de la végétation, car dans toutes les circonstances, c’est toujours cet élément qui domine dans la composition des cendres de la canne. 342 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Au point de vue absolu, si tous les principes contenus dans une récolte de cannes faisaient retour au sol, l'épuisement serait pour ainsi dire nul puisqu'on n’exporte que le sucre. Mais, sur la plupart des propriétés, ies résidus sont inutilisés ou ne le sont que partiel- lement. La bagasse et les feuilles servent de combustible dont les éléments minéraux se retrouvent dans les cendres et peuvent être reslitués à la terre, mais la chaleur des foyers étant très élevée, ces éléments se trouvent engagés dans des combinaisons stables et leur assimilabilité se trouve profondément modifiée ; ils ne deviendront utilisables pour la végétation que peu à peu et dans un délai plus ou moins éloigné. D'un autre côté, les sels qui se trouvent dans les jus sont princi- palement constitués par de l'acide phosphorique et de la potasse. L’acide phosphorique passe dans les écumes et retourne à la terre, plus ou moins directement suivant leur mode d’utilisation, mais la potasse reste dans les mélasses qui ne sont presque jamais utilisées sur l’exploitation qui les a produites, mais presque toujours expor- tées pour une distillerie quelconque. Il s'ensuit donc, d’un côté, une immobilisation momentanée de la potasse et de l’autre une perte réelle qui devrait, semble-t-1l, con- duire à ne pas trop diminuer le taux de potasse dans les engrais pour ne pas épuiser le stock que le sol renferme encore. Suivant la loi dite de la restitution, qui consiste à faire retourner au sol, sous une forme ou sous une autre, tous les éléments puisés par les récoltes, il faudrait, pour la canne, employer des engrais à haute dose de potasse ; mais, d’un autre côté, cette loi ne doit pas être considérée comme absolue et elle ne doit être observée que dans le cas de sols absolument inertes, ce qui n’est pas le cas des terres cultivables. Il est évident que sans restitution on diminue peu à peu les réserves du sol et qu’à un moment donné elles seront épuisées, mais en pratique celle solution aura plus ou moins d’im- portance suivant le temps pendant lequel dureront ces réserves, el il peut y avoir intérêt à profiter du stock accumulé au lieu de l’en- tretenir et même de l’augmenter. Pour la potasse, en particulier, la quantité disponible dans nos terres n’est pas considérable, mais elle se renouvelle peu à peu par RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 3543 la décomposition lente de ses éléments conslituants, qui eux-mêmes ne sont pas une réserve inépuisable. Sur les propriétés où sont uti- lisés tous les résidus, mélasses, cendres, etc., et où l’on emploie suffisamment de fumier, l'épuisement est moins à craindre et les engrais de potasse auront moins d'importance que sur celles où ces règles ne sont pas suivies; dans ce dernier cas, il arrivera fatalement un moment, peut-être rapproché, où l’on s’apercevra pratiquement du manque de cet élément dans le sol. C’est ce qui est déjà arrivé dans certaines colonies sucrières, à l’époque où le guano du Pérou était seul employé pour la culture de la canne à l’exclusion des autres engrais et même du fumier de ferme. Au bout d’un certain nombre d’années, les résultats obtenus, merveilleux au début, étaient loin d’être satisfaisants, et les rende- ments ne se sont relevés que par un emploi judicieux des sels potassiques. Du reste, emploi de la potasse, comme des autres engrais, est réglé par la relation qui existe entre la proportion con- tenue dans le sol et les besoins de la plante ; si ceux-ci sont élevés, il est à craindre que dans une culture où les engrais potassiques seront employés avec parcimorie, où les résidus de toutes sortes sont peu utilisés, et où la fabrication des fumiers est réduite, on arrive en peu de temps à épuiser la réserve que l’on exploite actuel- lement. VI. — Essai sur la nitrification de la matière azotée du soi et de quelques engrais azotés. Parmi les éléments que les récoltes enlèvent au sol, et qu'on doit lui restituer pour conserver ou augmenter sa fertilité, l’azote est celui qui a le plus d'importance, tant par son action sur la végé- tation que par sa grande valeur commerciale. Des trois éléments fertilisants qui constituent les engrais employés dans la culture de la canne, c’est en effet celui dont le prix est le plus élevé, et il représente, à lui seul, souvent plus de la moitié de leur valeur totale ; il est donc nécessaire de le rechercher dans les produits qui le fournissent au prix de revient le moins élevé. Certaines matières azotées entrent rarement dans la composition 344 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. des mélanges, sans que la défaveur dont elles jouissent paraisse justifiée, et c’est pour étudier la question que nous avons cru de- voir, à côté des expériences culturales proprement dites, entre- prendre quelques essais de nitrification. On sait que les deux formes minérales de l’azote sont considérées comme les seules sources directes de l'alimentation azotée des végétaux. Autrefois, on pensait que l’ammoniaque était la seule forme sous laquelle l’azote pouvait être absorbé par les plantes ; mais depuis, une opinion différente tend à prévaloir, et l'azote nitrique est considéré par beaucoup d'auteurs comme étant la seule combinaison assimilable, l'azote organique et l’azote ammoniacal devant se nitrifier avant leur absorption par les végétaux. En pra- tique, la question est difficile à étudier, car lammoniaque se trans- forme rapidement dans le sol en acide nitrique, mais, en général et dans des conditions normales, la culture fait peu de différence entre ces deux états particuliers, et la variation qu’on remarque parfois dans le prix de ces deux formes de l’azote tient beaucoup plus à des considérations commerciales qu’à une préférence marquée de la part des cultivateurs. Cette variation est d’ailleurs généralement assez faible, mais sur certains marchés locaux, comme, par exemple, à Maurice, l’abon- dance ou la rareté d’un des principaux sels qui fournissent l'azote, peut amener momentanément une différence de prix assez notable pour qu'il soit de l'intérêt de l’acheteur de choisir de préférence l’engrais qui lui livre l’azote au plus bas prix, sinon en totalité, du moins pour une proportion plus ou moins grande de la quantité qui entre dans la composition du mélange. À Maurice, on a souvent des idées très nettes et très absolues sur diverses questions culturales, telles que l'action des divers éléments sur la canne, et notamment sur l’action relative de l'azote, soit sous forme d’ammoniaque, soit sous forme d’azote nitrique; seulement, la même opinion n’est pas générale, et il y a des partisans de l'azote ammoniacal comme il y en a de l’azote nitrique. Il n’est guère probable, cependant, qu'il existe pratiquement une différence aussi capitale entre ces deux formes de l'azote; évi- demment, elles présentent, chacune, certaines propriétés spéciales RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 349 qu'il serait imprudent de méconnaître et dont il faut tenir compte ; ainsi, les nitrates sont facilement entrainés par les eaux pluviales qui traversent le sol, puisque la terre arable ne possède aucune propriété absorbante pour ces sels, et une copieuse fumure nitratée avant les grandes pluies et alors que la végétation est peu active n’est pas à recommander, mais, en mettant l'azote nitrique en deux fois, on éviterait en partie cet inconvénient, qui est d’autant moins à craindre que les plantes auxquelles on lapplique ont une végétation aclive et plus vigoureuse. D'un autre côté, l'azote du sulfate d’am- moniaque n’est pas absolument à abri de toute perte par entraine- ment, et d’après les derniers travaux sur ce sujet (Brustlein), Îles terres qui ne renferment pas de carbonate de chaux et dans les- quelles le sulfate d’ammoniaque ne subit pas de transformation, ne le retiennent et ne le fixent que d’une façon relative, et comme c’est le cas presque général de nos terres, la différence principale entre ces deux formes de l’azote est encore atlénuée. Il faut ajouter que des expériences culturales suivies sur la canne à sucre n’ont pas encore démontré d’une manière indiscutable que dans tous les cas on doive donner la préférence exclusive à l’une ou l’autre de ces deux formes de l’azote, et pratiquement, on devrait plutôt en faire varier la proportion dans les mélanges suivant les conditions diverses, culturales et économiques, du moment, qui elles-mêmes se modifient journellement. On a trop souvent une tendance à généraliser les observations faites dans la pratique agricole et à en déduire des conclusions trop absolues, et pour cette question spéciale de Pazote, on a souvent varié d'opinion et la vogue a été tantôt à l'azote ammoniacal, tantôt à l’azote nitrique sans avoir égard, le moins du monde, au prix de revient de ces deux éléments fertilisants. Ce qui tendrait encore à infirmer ces opinions absolues, c’est le fait qu’à la Réunion une partie des planteurs, et non des moindres, ont à ce sujet des idées diamétralement opposées à celles des plan- teurs de Maurice, et pour eux, le sulfate d’ammoniaque doit être absolument rejeté pour la confection des engrais destinés à la canne à sucre, car le nitrate de soude seul peut donner des récoltes riches et abondantes. 346 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Il est difficile d'admettre que dans des îles aussi voisines et aussi semblables comme situation agricole, le même élément fertilisant pris sous une forme différente puisse produire des effets aussi op- posés ; el, jusqu’à plus ample informé, nous pensons que ces opi- nions extrêmes ne sont point basées d’une manière bien évidente, ni sur les données de la science, ni sur celles de la pratique, et que le prix de revient ainsi que les circonstances particulières locales, doivent guider les planteurs dans le choix et la proportion de ces deux éléments ainsi que nous le disions plus haut. Si l’on discute encore pour savoir si l'azote minéral est absorbé sous la forme ammoniacale ou nitrique, il n’en est plus de même en ce qui concerne l’azote organique, et on s'accorde généralement pour convenir qu’il doit être minéralisé avant de devenir assimilable. L’azote organique se trouve dans le commerce sous des formes diverses, et sa transformation plus ou moins facile en azote nitrique par les micro-organismes du sol varie avec l’origine des matières premières qui le renferment ; cette rapidité dans sa minéralisation peut servir à mesurer son efficacité el par conséquent sa valeur agricole. Les matières premières auxquelles on peut s'adresser pour l'azote organique sont nombreuses, mais, dans la colonie, ce nombre est limité; néanmoins, certaines d’entre elles sont absolument délais- sées, et c’est pour étudier leur degré d’assimilabilité que nous avons entrepris les quelques essais de nitrification qui suivent. Dans la plupart des essais classiques sur la nitrification des ma- üières azotées, le sulfate d’ammoniaque est toujours pris comme type représentant la matière la plus facile à nitrifier, parce que son azote est déjà sous forme ammoniacale, et les engrais contenant de l’azote organique sont classés suivant leur aptitude à se transformer en azote minéral, c’est-à-dire en azote ammoniacal d’abord, puis en azote nitrique. Dans nos essais, nous voulions surtout comparer le sang desséché avec les tourteaux qui nous viennent de l'Inde, mais les résultats obtenus avec le sulfate d’ammoniaque pris comme comparaison ont été complètement inattendus ; c’est pourquoi les mêmes essais ont été reproduits plusieurs fois, afin de s'assurer qu'ils n'étaient pas dus à une circonstance fortuite quelconque. RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 347 La première expérience a été faite dans les conditions suivantes : De la terre tamisée a été placée dans des caisses en fer-blanc contenant chacune 16 kilogr. de terre ; le fond de chaque caisse était percé d’un ajutage recouvert d’une toile métallique, et une fiole placée sous l’ajutage permettait de recueillir les eaux qui au- raient pu s’écouler de la terre par un excès d’arrosage. Les réci- pients étaient à l'abri de la pluie sous un hangar couvert, et on arrosait avec de l’eau distillée, de façon à maintenir une humidité convenable. Les échantillons n°® 2 et 5 ont été additionnés préalablement de 5 p. 100 de leur poids de sable calcaire (sable de mer) pulvérisé grossièrement et également tamisé. Chaque lot devait recevoir la même quantité d'azote apportée par le sulfate d’ammoniaque, le sang desséché et le tourteau, mais, par suite d’une erreur, cette quantité a été inégale et s’est trouvée, pour 100 gr. de terre sèche, de 05,300 d’azote pour le sulfate d’ammo- niaque, de 05,290 pour le sang desséché et de 05,400 pour le tourteau. L'erreur faite sur l’azote du tourteau provient de ce qu’on avait tamisé cet engrais en employant la poudre fine passant au tamis et en rejetant les parties grossières. Une analyse ultérieure a montré que le tourteau qui dosait 6.5 p. 100 d’azote a donné une poudre fine dosant 9.5 d’azote et des débris grossiers qui ne conte- naient plus que 5.0 p. 100 d’azote. L'analyse ayant été faite après le mélange du tourteau à la terre, il s’est trouvé que la dose d’azote incorporé était exagérée, mais cette circonstance, dont il faut tenir compte, ne modifie pas les résultats de l’expérience. Pour les analyses, chaque caisse était vidée complètement et le contenu mélangé intimement avant la prise d’échantillon. L’azote ammonical a été dosé par les procédés ordinaires et l’azote mitrique par le procédé Schlæsing ; les dosages sont rapportés à la terre sèche. La terre employée présentait la composition suivante : Analyse physique : GLOMSADIES AUS TS ANA NEEREONr 2.80 SADI eue EN RARE PUR 46.30 ADOBE Met et TC EN A Us 25.50 HUMUS RE PIE SEE RETRO Trace. 348 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Analyse chimique : Acide phosphorique . . . . . . . . » OS Acide: finie ES RE ge 1e 0.000 CHAUX LT PNR 0155 MABDÉSIO ERP ea 0.043 POTASSEMERMAUEME (OT RE 0.066 Oxyde de fer et alumnine. 13.000 BZDÉP RE MT DEN UT, 0.350 Le taux d’azote organique paraîtra élevé, mais il n’a rien d’exagéré pour les terres de Maurice, qui sont généralement caractérisées par leur faible teneur en chaux et leur richesse en azote, el ce ne sont pas toujours les plus fertiles, car la nitrification y est lente et dif- ficile. Le sable calcaire employé a été pulvérisé grossièrement; 1l conte- nait 32 p. 100 de parties passant au tamis n° 60, et 68 p. 100 pas- sant au tamis n° 30. Sa composition était de : Carbonate de chaux ES 91.10 Sutate de CHAUX VE RS PO RUE 0.68 RéSIQU AINSOIUDIE NS CAPE MR OURS RTRS 1212 Eau, soude, magnésie, ete. . . . . . . TELO 100.00 Les échantillons ont été préparés le 16 septembre 1895 et les analyses faites en janvier, février, avril, mai et juin 1896, c’est-à-dire après un délai d'environ quatre,'cinq, sept, huit et neuf mois. La quantité d'azote ammoniacal et nitrique formée est exprimée en mil- ligrammes pour 100 grammes de terre desséchée. 20 JAN- 24 FÉ- Rte : + 5 vrer 1896. Se 23 AVRIL. 23 MAI. 26. JUIN. N° 1. — Terre ordinaire : Azote ammoniacal . . . » 1e 1.0 12 0.9 AiriqUe PE ON » 6.0 8.0 8.6 8.0 Azote total . . » H:9 9.0 9.8 9.5 N° 2, — Terre avec 5 p. 100 de calcaire : Azote ammoniacal . . . 1.6 1e 1.8 0) 4,0 —.miriquet SL. 6.0 110 20.0 22.0 24.0 Azote total , . 7.6 1819 2176 252 26.0 RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 349 20 JAN- 24 FÉ- VIER 1896. SR 23 AVRIL. 23 MAI. 26 JUIN. No 3, — Terre avec sulfate d'ammoniaque : Azote ammoniacal. . . 270 oil 258 262 260 ronitriquers. ne 28 31 36 37 49 Azote total . . 298 302 294 299 302 N° 4. — Terre avec sang desséché : Azote ammoniacal . . . 63 58 79 85 86 —NONIITIQUE 1.0.0. 145 153 150 150 158 Azote total . . 208 211 299 239 244 N° 5. — Terre avec sang desséché et calcaire : Azote ammoniacal . . . 3 & 320 4 6 — nitrique . . . . 707 188 214 292 299 Azote totai . . 180 191 217 226 228 N° 6. — Terre avec tourteau : Azote ammoniacal . . . 112 94 54 48 45 — mitrique . . . . 145 206 237 253 276 Azote total . . 2 300 291 301 321 Pendant la durée de l'expérience, il s’est produit accidentellement une infiltration d’eau pluviale dans le n°5 ; il en est résulté une perte d'azote nitrique qui a été évaluée au minimum à 25 ou 30 milligr. pour 100 gr. de terre sèche; le 20 avril, le même accident s’est renouvelé pour le n° 6, mais la perte d’azote a été relativement très faible. Ce qui frappe tout d’abord dans l’essai ci-dessus est la nitrification relativement lente du sulfate d’ammoniaque comparée à celle du sang et du tourteau; cette différence s’accentue de suite après la première prise d’échantillon qui a été faite quatre mois après la pré- paration des terres, et c’est pour vérifier cette anomalie, ou du moins qui paraissait telle, qu’il a été remis de suite de nouveaux échantillons en expériences. Ceux-ci ont été placés à l’intérieur du laboratoire, dans des allon- ges en verre contenant 900 gr. de terre contenant 05,324 d’azote 350 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. organique p. 100 de terre sèche, des traces d’azote nitrique et 0#',0016 d’azote ammoniacal ; il a été ajouté à chaque lot, au moyen du sulfate d’ammoniaque, du sang et du tourteau, 08,300 d’azote. Les échantillons, constitués comme suit, ont été préparés le 30 jan- vier 1896 : 1° Terre avec sulfate d’ammoniaque ; 2° Terre avec sulfate d’ammoniaque et 5 p. 100 de calcaire ; 9° Terre avec sang desséché ; 4 Terre avec tourteau. nr 8 AVRIL. N° {. — Terre avec sulfate d'ammoniaque : Azote ammoniacal. . . , 280 265 UOTE 13 26 Azote total. . . 293 291 N° 2, — Terre avec sulfate d'ammoniaque et calcaire : Azote ammonjacal. . . . 139 14 D IUITIQUE 2 140 266 Azote total. . . 279 280 N° 3. — Terre avec sang desséché : Azote ammoniacal. . . . A1 80 — |1nitrique . . . . . 75 104 Azote total. . . 116 184 N° 4. — Terre avec tourteau : Azote ammoniacal, . . . 133 61 —vmtrique », RU. 29 106 Azote total, . . 162 167 Le même fait s’est reproduit pour le sulfate d’ammoniaque com- paré au sang desséché et au tourteau, mais le n° 2 fait ressortir l’in- fluence du carbonate de chaux ajouté à la terre contenant du sulfate d'ammoniaque. En avril de la même année, on installe une série un peu plus 194 13 JUIN. 13 187 200 RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 991 complète que les précédentes. Dans ce troisième essai, on ajoute à de la terre ordinaire, d’une part 5 p. 100 de calcaire et de l’autre 4 p. 100 de chaux contenant 90 p. 100 de chaux caustique (n° 1, 2, 3). Trois lots sont additionnés de sulfate d’ammoniaque, de sang des- séché et de tourteau, puis trois autres identiques reçoivent 5 p. 100 de calcaire n° 4 et 5, 6 et 7, , et 10. Chaque lot contenu dans des cylindres tubulés en fer-blanc com- prenait : 3 kilogr. de terre analogue à celle du premier essai et a reçu 0.180 p. 100 d'azote ammoniacal ou organique. La richesse des en- grais en azote était de : sulfate d’ammoniaque 20.5, sang desséché 15, tourteau 6.1, fertilizer 5.4, fish guano 6.8. Les terres addilionnées d’engrais ont été mises en expérience le 15 avril 1895 et ont donné les résultats suivants : Tableau IX. LL JUIN 12 JUIE- 15 sEP- 26 xo- 20 xé- : ga 14 AOUT. VRIER 1896. LET, TEMBRE, VEMBRE. 1897. No {. — Terre ordinaire : Azote ammoniacal . 0.5 17 1.8 2) 16) 2.9 » —hnitrique. 0 4,2 >.0 o.0 8.3 8.0 8.0 Azote total . 4.7 GEL 6.8 10.8 10.9 » N° 2, — Terre avec sable calcaire : Azote ammoniacal . DE 0 716) 1.8 2.8 » — nitrique. . . 6.2 28 6.0 10.0 10.0 rl Azote total . 87 10.3 8.5 HteS 12.8 » N° 3. — Terre avec chaux : Azote ammoniacal . 229 1.6 8.0 1.6 3. » — mnitrique. . . 17.0 20.0 19,0 24,0 28.0 28 Azote tolal . 19,12 24.6 HR 25 PO) 31110) » N° 4, — Terre avec sulfate d'ammoniaque : Azote ammoniacal . 161 105 154 150 145 104 — mnitrique, . . 22 29 39 44 GA 85 Azote total . 185 194 189 194 196 189 3)2 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 11 JUIN 12 JUIL- 15 sxp- 26 No- 20 ré- 14 AOUT. VRIER 1896. LET. TEMBRE. VEMBRE. 1897. N° 5. — Terre avec sulfate d'ammoniaque et calcaire : Azote ammoniacal . 102 De 8 4 7 5 — nitrique. . . 79 133 156 190 187 188 Azote total . 177 186 194 194 194 153 N° G. — Terre avec sang : Azote ammoniacal . 7 75 68 63 5 50 — mnitrique. . . 66 74 85 88 1o0i 101 Azote total . 137 147 153 151 152 151 N° 7. — Terre avec sang, plus calcaire : Azote ammoniacal . 20 7 4 4 3 5) — nitrique. . . 123 151 159 158 174 178 Azote total . 143 155 163 162 177 183 N° 9. — Terre avec tourteau : Azote ammoniacal . 63 55 48 A7 13 À — nitrique. . . 9 82 95 101 139 155 Azote total . 129 138 143 148 152 159 N° 10, — Terre plus tourteau, plus calcaire : Azote ammoniacal . 26 6 7 9 4 3 — nitrique. . . 97 139 137 148 155 166 Azote total . 123 145 144 150 159 169 N° 11. — Terre, plus fertilizer : Azote ammoniacal . 34 29 Î 3 5 » — nitrique. . . 64 90 iii 127 140 145 Azote total . 98 119 112 130 145 D N° 12. — Terre, plus fish guano : Azote ammoniacal . D) 40 30 18 4 » — nitrique. . 74 110 113 137 161 164 Azote Lotal . 129 150 143 1595 165 » Les essais de cette dernière série présentent des résultats de même ordre que les précédents, et les quelques divergences qu’on y cons- tate n’en modifient pas le sens général. Dans les trois promiers lots, l’action nitrifiante de la chaux sur les matières organiques du sol est bien marquée : employée à une dose cinq fois moins considéra- ble que le sable calcaire, elle a un pouvoir nitrifiant bien supérieur ; RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 393 ce résultat est dû non seulement à sa causticité, mais aussi à son état physique, car, que la chaux soit mal cuite, ou qu’elle se soit re- carbonatée à l’air, elle se trouve dans un état de finesse qui ne peut être comparé à celui du sable coquillier ou madréporique que l’on ramasse sur le bord de la mer et dont les particules sont toujours d’une dimension relativement considérable. A ia même dose, le sable calcaire agira d'autant plus énergiquement et sa valeur agricole sera d'autant plus grande que les grains dont il est composé seront réduits à des dimensions plus ténues et qu’il pourra être incorporé plus intimement au sol; dans les essais ci- dessus, même après avoir été pulvérisé, il était encore en particules assez volumineuses pour qu'après avoir été mélangé intimement à la terre, on puisse encore les distinguer facilement à l’œil nu. Lors de son emploi agricole, 1l faudrait donc le choisir sur les points du rivage où il est le plus ténu, mais, malgré cela, l’avantage restera à la chaux, qui pourra être employée à doses beaucoup moins consi- dérables toutes les fois que les frais de transport viendront augmen- ter le prix du sable dans toutes les localités situées à une certaine distance du lieu d’extraction. L'action agricole de la chaux caustique comparée au sable est d'autant plus marquée que la matière orga- nique azolée de la généralité de nos sols est de décomposition diffi- cile, et y existe sous un état presque inutilisable pour les plantes; c’est ce qui explique son accumulation dans certaines terres qui, malgré leur richesse en azote, bénéficient largement des engrais azotés qu’on leur donne. La mobilisation de ce stock inutile doit donc être recherchée, et c’est par le chaulage qu’on y arrivera le plus sûrement et le plus ra- pidement. L'influence du sable calcaire sur la nitrification des engrais est beaucoup plus énergique que celle exercée sur la matière azotée du sol, et cela est caractéristique en ce qui concerne le sulfate d’am- moniaque. Dans la terre non additionnée de sable calcaire, la nitrification du sulfate d’ammoniaque est très lente, le sang s’y nitrifie plus facile- ment, mais les autres matières organiques azotées essayées, tour- teau, fertilizer et fish guano, sont de décomposition encore plus ANN. SCIENCE AGRON, — 2C SÉRIE. — 1897. — 1. 23 324 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. rapide et nitrifient plus facilement, ainsi que les chiffres suivants l’in- diquent nettement : Azote nitrique formé dans la terre ordinaire en milligrammes. JUIN. JUILLET. AOUT. SEPT. NO. Sulfate d'ammoniaque . 22 29 35 44 93 Saroenettettales Vsitoiti 66 74 85 S8 101 MOULES. a 2e 59 82 95 101 139 ÉCRLIZER EN NENTENE 64 90 111 127 140 Fish guano. . 74 110 ibls 137 161 Si, pour faciliter la comparaison, on rapporte ces chiffres à l’en- grais qui à nitrifié le plus abondamment en le désignant par 100, on obtient : JUIN. JUILLET. AOUT. SEPT. NO. Sulfate d'ammoniaque. . 30 26 31 32 33 SAND RON 4 EEE 89 67 75 61 62 POUPUPAU AS Mo + Me 79 74 84 73 86 RéLHIZEL MEME REUTERS 86 82 98 92 87 Fishiguano. na#tr tee. 2 100 100 100 100 100 Il semblerait donc que la nitrification est d’autant plus lente que la matière première est plus riche en azote, c’est-à-dire contient re- lativement moins de matières étrangères ; il est probable que, dans ce cas, ces substances, phosphate et carbonate de chaux el autres sels contenus dans le tourteau, fertilizer et fish guano, viennent faci- liter la nitrification et remplacer, jusqu’à un certain point, la base nitrifiable qui lui fait défaut dans les premiers. Gela paraît d’autant plus probable que, quand on additionne la terre de sable calcaire, le sang et surtout le sulfate d’'ammoniaqne nitrifient très rapidement et fournissent dans le même temps une proportion d'azote nitrique plus abondante que le tourteau; dans l'expérience ci-dessus, dès le mois d'août le sulfate d’ammoniaque est totalement nitrifié. Nitrification dans la terre additionnée de sable calcaire. JUIN. JUILLET. AOUT. SEPT, NOV. Sulfate d'ammoniaque., . 75 133 186 190 157 DADP A+ ER Re 123 151 159 158 174 Toute LA mMEUtE 97 139 137 148 155 RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 3)5 En ne tenant pas compte de l’azote nitrique provenant de la ma- tière organique du sol, on voit que dans tous les cas la presque to- talité de l’azote ajouté s’est nitrifié en quelques mois. L’azote organique des quatre engrais expérimentés se transforme facilement en azote ammoniacal, et si cet azote ammoniacal persiste assez longtemps dans la terre ordinaire, il se transforme rapidement en azote nitrique quand elle est additionnée de carbonate de chaux. Ce retard dans la nitrification du sulfate d’ammoniaque dans nos terres n’est pas une raison pour en conclure à son infériorité comme engrais; l'expérience journalière prouve le contraire, mais cette constatation vient à l’appui de l’opinion qui admet, suivant leur na- ture et les circonstances dans lesquelles ils se trouvent placés, l’uti- sation directe de l’ammoniaque par les végétaux. D'un autre côté, la facile nitrification des engrais azotés employés dans ces engrais démontre leur grande assimilabilité et indique que c’est bien à tort que leur valeur est souvent méconnue; elle indique encore qu'il n'y a pas de différence fondamentale entre certains en- grais, ainsi que quelques planteurs le supposent, mais que le prix de revient de la matière azotée à ajouter dans les mélanges est de beau- coup plus générale que ce qui a lieu habituellement. Il se trouve parfois sur le marché des matières fertilisantes qui sont offertes à un prix très inférieur à leur valeur intrinsèque, parce qu’elles n’ont pas le dosage de celles dont la vente est courante ou parce qu’elles sont différentes de celles employées habituellement dans la fabrication des mélanges. Il n’est pas possible de les y faire entrer, parce qu’elles modifieraient la formule à laquelle l’acheteur üent essentiellement, mais elles permettraient souvent d’obtenir un engrais plus économique et de même valeur agricole que celui qui sera composé avec des matières premières dont le prix peut subir -momentanément une hausse sensible. La nitrification de l'azote ammoniacal dans la terre qui a été amen- dée avec du carbonate de chaux paraît plus lente au début que celle de l’azote organique et semble devenir au contraire plus active au bout de quelques mois. Une autre terre plus riche en matière organique totale et qui con- 306 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. tenait 0.508 d'azote organique p. 100 a reçu 05,170 d’azote par le sulfate d’ammoniaque et le sang desséché ; l'azote nitrique formé pendant les deux premiers mois a été le suivant, les terres ayant été mises en expérience le 7 janvier 1897. AZOTE NITRIQUE fourni le EE 21 janvier. 12 février. 4 mars. Terre avec sang desséché : Lerré normale ca Mar ln ee: 15 S/ 0 + 5 p. 100 de sable calcaire . . . . 21 102 131 Terre avec sulfate d'ammoniaque : Terrémormale M4. MvET Re 7 lt 27 + 5 p. 100 de sable calcaire . . . . 8 46 66 L’addition de chaux ou de carbonate de chaux à la terre active la nitrification en fournissant une base capable de saturer l’acide ni- trique qui se forme aux dépens de l’ammoniaque, mais dans certains cas, quand cette base manque pour saturer l'acide, il paraît se for- mer du nitrate d’ammoniaque quand cette dernière base préexiste dans le sol, ainsi, dans la première expérience relatée plus haut, la terre n° 4 contenant du sang et la terre n° 5 contenant du sang et du sable calcaire ont été épuisées par de l’eau distillée. Pour 1000 d’a- cide nitrique formé et dosé, dans la solution il y avait 481 de chaux et 30 de magnésie dans le n° 5 et seulement 201 de chaux et 65 de magnésie dans le n° # qui n'avait pas reçu de chaux, quantité abso- lument insuffisante pour saturer l'acide nitrique qui aurait exigé, pour former du nitrate de chaux, 518 de chaux p. 1000 d’acide ni- trique ; dans les deux échantillons, il y avait des traces de potasse, de soude, mais en quantité trop faible pour saturer l'acide nitrique formé. Cet acide n’a donc pu l’être que par l’ammoniaque formée aux dé- pens de l’azote organique de l’engrais et qui persiste longtemps sous cet état dans la terre non additionnée de carbonate de chaux. Dans l'emploi des engrais, il y a lieu de tenir compte du climat et des conditions dans lesquelles 1ls se trouveront vis-à-vis des plantes qui auront à les utiliser. On sait que la nitrification est en rapport RAPPORT SUR LES TRAVAUX DE L'ILE MAURICE. 3917 avec la température du sol et de son humidité, du moins dans cer- taines limites; c’est-à-dire jusqu’à 35° ou 40° pour la température et pourvu que l’eau ne soit pas stagnante ou la terre sursaturée de façon à y empêcher la libre circulation de l'air. Dans notre climat, la chaleur est toujours très favorable à cette transformation, puisque la température moyenne journalière ne varie guère qu'entre 15° et 32° ou 33° annuellement, c’est-à-dire que la nitrification peut toujours être active, mais c’est pendant la saison chaude, de décembre à juin ou juillet, qu’elle rencontre toutes les conditions nécessaires, chaleur et humidité. Depuis le mois de juillet à novembre ou décembre, c’est-à-dire jusqu’à l’arrivée des premières pluies, l'humidité du sol est parfois insuffisante pour permettre aux ferments nitriques d'agir énergique- ment et, à plus forte raison, pour enlever les nitrates formés anté- rieurement ou apportés par les engrais, de sorte que la perte de nitrate par lévigation du sol n’est réellement à craindre que pendant les pluies torrentielles amenées par le passage d’un cyclone plus ou moins rapproché de Pile. Dans ces cas exceptionnels et lorsque la terre a déjà été imbibée par des pluies précédentes, les pertes de nitrate paraissent Inévita- bles, de sorte qu’il n’est pas à recommander de faire de fortes fu- mures au nitrate au début de la saison pluvieuse. | Les engrais à azote organique seront alors avantageux, puisque leur nitrification se fait progressivement, et les nitrates seront em- ployés lorsque ce danger ne sera plus à craindre. Il ne faudrait cependant pas croire qu’une fumure partielle au ni- trate sera perdue complètement, car à cette époque de l’année la vé- gétation de la canne est excessivement vigoureuse et la plus grande partie de l’acide nitrique sera rapidement absorbée et utilisée. Cette perte sera donc réduite pour les repousses, mais si les cannes vierges viennent d’être plantées, elles n’auront pas encore complètement pris possession du terrain, dont la majeure partie restera découverte et soumise aux inconvénients du lavage par les eaux pluviales. C’est surtout pour cette raison que les cultures intercalaires, c'est- à-dire entre les lignes, pourront être pratiquées sans inconvénients pour les jeunes plantations ; le terrain entre les lignes reste absolu- 38 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ment inutilisé pendant plusieurs mois, et si des pluies abondantes surviennent, elles pourront entrainer les nitrates formés, puisque la jeune canne n’occupe qu'une partie restreinte du sol, et en dehors de toute autre considération, il serait avantageux de l’utiliser par une culture quelconque. Le choix de la plante à employer dépend des circonstances locales et de l’époque de la plantation des cannes vierges; il faudra autant que possible une culture occupant le terrain pendant les grandes pluies et ne prenant pas un trop grand développement, il faudra en outre qu'on puisse la récolter avant le moment où la canne, prenant possession du terrain, serait gênée dans sa croissance. On voit donc que le choix est assez limité pour remplir ce but spécial, la plupart des plantes pouvant être cultivées entre les lignes de cannes ne s’ac- commodant pas très bien des grandes pluies et de la haute tempéra- ture des premiers mois de l’année, ne pourront être exploitées que dans certaines localités où la plantation de la canne est tardive. La localité, l’époque de plantation de la canne, et les diverses circons- tances locales, détermineront donc la culture qui pourra utiliser le terrain pendant cette époque, culture qui, au point de vue absolu, épuisera le sol d’une certaine quantité de principes fertitisants, mais qui, dans la généralité des cas, ne nuira pas plus à la culture principale que les mauvaises herbes qui l’envahissent trop fréquem- ment. Le Réduit, avril 1897. L’AZÔOTE ET LA VÉGETATION FORESTIÈRE Par FE. HENRY CHARGÉ DE COURS A L'ÉCOLE FORESTIÈRE ! Les arbres de nos forêts ont un besoin aussi impérieux d’azote que les plantes agricoles. Cet élément, associé au carbone et à l’eau, constitue le groupe si varié et si important des matières protéiques, entre autres le proto- plasma, l’élément fondamental de toute cellule vivante. En admettant les chiffres des forestiers bavarois, une forêt de hêtre, la forêt de Haye par exemple, produit annuellement au moins 3 009 kilogr. de bois et 3 000 kïlogr. de feuilles, bois et feuilles sup- posés desséchés à 100°. Les 3 000 kilogr. de bois renferment de 15 à 95 kilogr. d'azote suivant qu’on admet les taux de 0.5 p. 100 ou de 0.8 p. 100 qui sont à peu près les extrêmes, et les 3 000 kilogr. de feuilles contiennent, à leur chute, 30 kilogr. d’azote d’après des analyses de feuilles de hêtre, chêne, charme de la forêt de Haye. C’est donc un chiffre total de 45 à 55 kilogr. d’azote par hectare que la forêt absorbe et qu'il lui faut trouver sous peine de voir sa pro- duction diminuer et les arbres manifester les symptômes de l’inani- tion azotique. 1. Communication faite à la Société des Sciences de Nancy dans la séance du 1° juin 1897. 360 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. La différence capitale avec les plantes agricoles consiste en ce que celles-ci sont, pour la plupart, beaucoup plus exigeantes en azote et qu'elles ne restituent au sol rien ou presque rien des principes al- buminoïdes qu’elles ont absorbés, tandis que la forêt, à la fin de chaque saison de végétation, rend au sol, sous forme de feuilles mortes (que les forestiers appellent la couverture), la plus grande partie des matières azotées et minérales empruntées à l'air et au sol. Dans la culture agricole, il ne reste au champ que l'azote des racines (céréales, prairies artificielles) et même pas dans certaines récoltes (betteraves). Aussi les agriculteurs sont-ils obligés de rapporter de temps en temps de l’azote combiné (engrais vert, fumier, sels am- moniacaux, nitrates) pour entretenir la fertilité de leurs sols. On n'apporte jamais d’engrais à la forêt, et malgré les déperdi- tions incessantes d'azote dues à l’enlèvement des bois exploités et aux décompositions chimiques, la vie végétale s’y reproduit indéfi- niment et le sol forestier, au lieu de s’appauvrir en azote, s'enrichit, comme il est facile de le constater dans le boisement des sols nus. Il faut donc qu'il y ait des gains qui viennent compenser, et au delà, les pertes. | Quelles sont les causes de gain et de perte d'azote combiné en culture forestière ? Cette question, d'importance capitale en agriculture, qui a été et qui est encore si ardemment discutée par les chimistes et les agro- nomes, qui à suscité Lant de controverses passionnées et tant de tra- vaux remarquables, qui est du reste loin d’être épuisée aujourd’hui, mérite d’être envisagée spécialement au point de vue de la forêt, parce que, en raison de la durée et des exigences des essences fores- tüières, en raison du couvert et de la couverture, de l’absence de culture du sol, et d’autres circonstances encore, les processus chi- miques et biologiques y sont souvent autres qu’en plein champ. Grains. — Le sol forestier peut s’enrichir en azote : 1° Par l'apport aux plantes ou au sol d’azote combiné venant de l'atmosphère ou des eaux météoriques ; 1. Les sols indéfiniment fertiles sans fumure (terres noires de Russie) sont de très rares exceptions. L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. 361 2 Par les matières azotées qui retournent chaque année au sol sous forme de détritus végétaux et animaux ; 9° Enfin par la portion de l’azote gazeux qui pourrait être fixée soit par les plantes vivantes, soit par les matières organiques mortes, soit par les éléments minéraux du sol. On ne voit pas d’autres causes possibles d’augmentation dans le taux de l’azote combiné. Pertes. — Le sol forestier s’appauvrit en azote : 1° Par la consommation des plantes herbacées ou ligneuses qu'il nourrit. Nous venons de dire que cette consommation s'élevait à 00 kilogr. environ d’azote par hectare et par an, dont une vingtaine est contenue dans le bois, c’est-à-dire dans la récolte exportée et ne fait pas retour au sol; 2° Par la portion d’azote combiné non retenue dans les couches superficielles du sol et entraînée avec les eaux de dramage ; 3° Par la portion d'azote combiné qui, dans les divers processus de décomposition des matières organiques, retourne à l’état d'azote gazeux dans J’atmosphère. On ne voit pas d’autres causes possibles de diminution. En faisant la balance des gains et des pertes, on saura si le sol de la forêt s'enrichit ou s’appauvrit en cet élément si parcimonieuse- ment départi même aux sols agricoles et d’une si grande importance pour la végétation. Des analyses chimiques faites à des intervalles suffisamment éloi- gnés permettront de contrôler la première méthode. Examinons d’abord le côté : Pertes d'azote. Elles résident essentiellement dans la quantité d’azote contenue dans le bois exporté. Des deux autres causes de déperdition, celle due aux eaux de drainage, ne se rencontre pas en culture forestière, par la raison qu’il n’y à pas de nitrification dans le sol forestier. Or, c’est seulement l'azote à l’état de nitrate qui est entrainé par les eaux de drainage. Dans les champs cultivés où la nitrification est énergique, surtout après l’épandage des engrais, et dans les terres en jachère, il y a de ce chef une perte très importante d’azote. 362 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. M. Dehérain‘ a trouvé dans les eaux de drainage de 4 cases, en 1895, de 110 à 130 gr. d’azote nitrique par mètre cube. De ces taux combinés avec la quantité d’eau écoulée, quantité variable suivant que le sol à été ou non travaillé, il conclut que 84 à 144 kilogr. d'azote nitrique par hectare ont été emportés par les eaux de drai- nage. Rien de tel ne se passe en forêt, où même les sols calcaires, comme Je viens de m'en assurer, ne nitrifient pas. Le 20 mai 1897, j'ai pris 10 échantillons de sols voisins, les uns en plein air, les autres sous bois ; 30 gr. ont été triiurés dans 25 centimètres cubes d’eau distillée ; après un jour de macération, une ou deux goulles projetées dans 4 gouttes de sulfate de diphény- lamine donnent une auréole bleue, pourvu qu'il y ait une trace de ni- trate. Pour apprécier l'extrême sensibilité de ce réacuf, dissolvons un centigramme de nitrate de potasse dans un litre d’eau distillée : une seule goulte de cette dissolution tombant au milieu de la petite masse liquide formée par les 4 gouttes de diphénylamine y détermine presque immédiatement une auréole d’un bleu intense. 3 échantillons de sol, pris en trois points d’une pièce de terre nue de la pépinière de Bellefontaine, n’ayant pas reçu d'engrais depuis deux ans, ont accusé très nettement la réaction des nitrates; 2 échan- tillons de sol pris en même temps dans la forêt, à 50 mètres des précédents, sous un massif plein de hêtres à l’état de haut perchis, n’ont pas donné la moindre coloration bleue ; ils ne nitrifiaient donc point, pas plus qu’un échantillon de sol pris dans la pépinière mème, mais sous un gros hêtre couvrant un sol tassé et enherbé; pas plus que deux autres échantillons pris dans le bois de M. Hinzelin. Au contraire, 2 terres, prises l’une dans un champ fraîchement labouré au-dessous de la pépinière, l’autre aux abords de Maxéville, ont montré nettement l’auréole bleue. Il y a déjà longtemps que Boussingault, au cours de ses belles re- cherches sur la nitrification, avait constaté la pauvrelé en nitrates du sol des forêts d'Alsace. D'autre part, Ebermayer, l'éminent professeur de Munich, a pu- 1. La Jachère. (Annales agronomiques, p. 258. 1896.) L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. 363 blié en 1888 un important travail sur la Teneur en nitrate des sols foreshers et des arbres”. « L'examen de plus de cent échantillons de sols prélevés en autant de points différents, la plupart dans les montagnes de Bavière, lui à montré que les sols forestiers et les tourbes sont ou absolument exempts de nitrate ou n’en renferment que des traces, tandis que les sols des champs et ceux des jardins, fumés avec des excréments, fu- mier, purin, se sont, sans exception, montrés très riches en ce pré- cieux aliment des plantes. Le terreau noir, qui s’accumule parfois en masses d’une épaisseur considérable dans certaines forêts des Alpes bavaroises, est lui-même dépourvu de nitrates ou n’en con- tient que des traces. D’après Ebermayer, il n’existe donc pas de mi- crobes nitrificateurs dans le sol des forêts ni dans la tourbe. En d’autres termes, dans toutes les terres dont l’humus est de prove- nance exclusivement végétale, les conditions générales sont tout à fait défavorables à la nitrification et la décomposition des principes azotés des végétaux semble être limitée à la formation de l’ammo- niaque. » (Grandeau.) M. Bréal” a constaté aussi qu’on ne rencontre de nitrates ni dans la terre des prairies, ni dans le sol des forêts. Comme la nitrification exige la présence dans le sol d'éléments alcalins, il pouvait se faire que l’absence du ferment nitrique fût due à l’absence de chaux dans les sols foresliers expérimentés ou à leur acidité. C’est pourquoi j'ai pensé qu’il n’était pas inutile de refaire ces essais dans la forêt de Haye dont le sol superficiel est si près du calcaire en place et recou- vert d’une si faible couche de feuilles mortes. Si de telles forêts ne nitrifient pas, aucune ne doit nitrifier. Les premiers essais ont élé négatifs, mais ils sont trop peu nombreux pour que je puisse affirmer qu'il ne se forme pas d’acide nitrique dans le sol des forêts calcaires. Je me propose de reprendre cet examen à une époque plus favo- rable, à la fin de l’été, quand la nitrification est à son maximum. S'il ne se forme pas de nitrates dans le sol des forêts, cela tient 1. Voir A//gemeine Forst- und Jagdzcitung. Fascicule du mois d'août 1888. ana- lysé dans Etudes agronomiques, par L Grandeau, 4° série (1888-1889). 2. Annales agronomiques, t. XII, p. 561. 364 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. peut-être à ce qu'il s’y trouve d'autres ferments réducteurs des nitrates. MM. Gayon et Dupett, Dehérain et Maquenne ont prouvé que, dans une atmosphère réductrice, la décomposition des nitrates a pour agents des organismes microscopiques qu’ils ont appelés Ba- cillus denitrificans, puisqu'ils agissent en sens inverse du Bacillus nitrificans, cause première de la nitrification. M. Bréal a montré que ces organismes dénitrificateurs, qui existent dans les pailles et, sans doute, dans tous les débris végélaux, décomposent les nitrates pour en faire entrer partiellement l'azote dans une combinaison or- ganique et qu’en outre cette transformation est accompagnée d’une perte d'azote qui retourne dans l'atmosphère sous forme de gaz. «Dans le sol des prairies permanentes et des forêts, qui est si abondamment pourvu de matières végétales mortes, ce ferment aérobie réducteur des nitrates doit être très répandu, dit M. Bréal, et s'opposer à toute nitrification. » D'autre part, tous les expérimentateurs reconnaissent que dans la nitrification, c’est-à-dire dans la transformation des sels ammo- nacaux où des amines primaires en nitrate, il y a aussi un dégage- ment d'azote gazeux quand l'oxygène est surabondant. Donc, qu’il y ait ou non nitrification, une partie de l’azote combiné, partie qu'il est difficile de déterminer, quitte le sol à l’état d’azote gazeux sans profit pour la végétation. En somme, deux causes de perte : L’une très importante, résultant de l'enlèvement de la récolte et se chiffrant par une vingtaine de kilogrammes ; L'autre, moins importante, mais qu’il est impossible d’évaluer rigoureusement, résullant du retour dans l'atmosphère sous forme d'azote libre d’une partie de l'azote organique pendant les multiples transformations de celui-ci. Voyons maintenant les causes de gain. Ï y en a trois possibles, avons-nous dit, que nous examinerons successivement. La première est l'apport aux plantes ou au sol d’azote combiné venant de l’atmosphère ou des eaux météoriques. On sait, depuis Liebig, Boussingault et autres, que les eaux mé- L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. 369 téoriques (pluie, brouillard, rosée, neige) renferment de lammo- niaque et de l’acide nitrique. Boussingault a trouvé, comme termes extrêmes dans l’eau de pluie, 05,11 à 35,49 d’ammoniaque par litre. La moyenne a été, pour 1853, de 04,42 par litre et de 0®,18 pour l'acide nitrique. Le brouillard renfermait de 2°6,56 à 49°5,1 d’ammoniaque par litre d’eau condensée. Dans six stations alle- mandes, les quantités d'azote combiné trouvées dans l’eau de pluie ont oscillé entre 05,29 et 43 milligr. par litre. On voit et on com- prend que ces taux sont très variables suivant les localités et les années. MM. Lawes, Gilbert et Way ont évalué à 8 kilogr. la quantité d'azote combiné reçue par un hectare dans un an : À Proskau on a trouvé . 2348 EU LUE À ae or AP QE 5 à 10 car PAU LE PS COL ANristerbO re EU EN EL A0 0 6 1,2 À Kuschen . : PRET En tous cas, ces quantités, qui varient du simple au décuple, sont faibles. Il y a aussi dans l'air, quoique en très faible proportion, du carbonate d’ammoniaque qui, d’après les expériences de Sachs, Schlæsing, Mayer, Müntz, etc., peut être absorbé soit par Îles feuilles, soit par le sol. M. Schlæsing a trouvé, pour la moyenne générale de toute une année, 26,95 d’ammoniaque dans 100 mètres cubes d’air. M. Müntz est arrivé au même résultat. Des expériences de M. Müntz, com- mencées en 1886 et finies en 1895, il résulte que les Jus végétaux absorbent l’'ammoniaque (qu'ils soient alcalins ou acides) et avec autant d'énergie que de l'acide sulfurique à 2 p. 100 jusqu’au pot de saturation. Les feuilles vivantes l’absorbent aussi, mais en pro- portion beaucoup moins forte; ce pouvoir absorbant ne représente que 3 à 9 p. 100 de la faculté absorbante du liquide végétal, et M. Müntz arrive à cette conclusion‘ « que l’agriculture ne saurai compter sur l’ammoniaque atmosphérique pour fournir un appoint sensible d'éléments azotés. Cet appoint existe, mais il ne doit pas {. Annales de la Science agronomique française et étrangère, t. [°*, p. 207. 1896. 366 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. être regardé comme supérieur à celui que fournissent les eaux pluviales qui apportent à la végétation de lammoniaque et de l'acide nitrique qu’elles ont dissous pendant leur passage dans l’eau. En évaluant de 5 à 6 kilogr. la somme de l'azote apporté à la végéta- lion d'un hectare, tant par l'absorption directe de l’ammoniaque gazeuse que par l'apport des eaux méléoriques, j'estime qu'on ne saurait beaucoup s'éloigner de la vérité. » Il est certain que si l’ammoniaque des eaux météoriques n’est absorbée par les feuilles qu’en proportion insignifiante, tout le reste est fixé par le sol en vertu de son pouvoir absorbant, qui s'exerce sur l’ammoniaque comme sur la potasse et l’acide phosphorique ; il ne s’en perd pas un atome. On ne peut être aussi affirmalif pour les traces d'acide nitrique qui tombent sur le sol forestier; cepen- dant, en raison de la rareté des nitrates en forêt et de l’avidité des végétaux pour ces sels, 1l est très probable que tout est absorbé ; nous avons déjà dit qu’on ne trouvait pas d’acide nitrique ou seule- ment des traces dans les eaux de drainage des sols forestiers. Ce pouvoir absorbant du sol pour l’ammoniaque est tel, qu’il fixe non seulement celle des pluies, mais celle de l'atmosphère qui provient essentiellement, affirme M. Schlæsing, de l’évaporation qui s’exerce à la surface des mers. On connaît les idées ingénieuses que M. Schlæsing a émises sur la circulation de l'azote combiné à la surface du globe. Des essais faits sur des terres sèches et humides, calcaires ou non, ont montré à M. Schlæsing que le sol emprunte de l’ammo- niaque à l'air et ne lui en cède point. Les terres sèches, incapables de nitrifier, ont absorbé, on le comprend, moins d’ammoniaque que les terres humides, où la nitrification est incessante l'été ; dans celles-ci, lammoniaque est constamment transformée en nitrates ; l'équilibre de tension ne peut donc s'établir, et la terre demeure en état d’absorber indéfiniment l’alcali de l'air. L’absorption est par suite subordonnée à la rapidité de la nitrification. Deux lots de 50 gr. de terre fine, sèche, inapte à nitrifier, exposée à l’air, mais à l'abri de la pluie, ont passé, dans l’espace de un mois et demi (1% août-15 septembre 1875), du taux de 06,747 à celui de 2°6,504 pour une terre calcaire et de 06,219 à 46,145 L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. 367 pour une terre non calcaire. Cette absorption est nécessairement limitée par l'équilibre de tension; il n’en est plus ainsi pour les terres humides aptes à nitrifier. M. Schlæsing a trouvé qu'un hectare aurait fixé dans un premier essai de 14 jours 2,590 d’ammoniaque, et dans un deuxième essai de 28 jours 4,097, soit en un an 65 kilogr. pour la première terre et 53 kilogr. pour la deuxième. Mais la nitrification n’ayant lieu que l’été, ces chiffres, pour se rapprocher de la réalité, doivent être fort diminués, au moins de moitié. Du reste, nous n'avons pas à nous préoccuper ici de cet appoint d'azote très important pour les terres humides aptes à nitrifier, puisque les forêts ne nitrifient pas. Leur sol, même humide et en plein été, se comporte toujours comme des terres nues sèches et nous en restons toujours jusqu'ici, pour les forêts, aux 9 à 6 kilogr. (évaluation de M. Müntz), aux 10 à 15 kilogr. (évaluation de M. Berthelot) fournis par hectare, tant par l'absorption directe de lammoniaque gazeuse que par l'apport des eaux météoriques. C’est tout à fait insuffisant pour combler le déficit produit dans le capital azoté primitif par l’exportation des 20 kilogr. d’azote du bois des coupes et par le retour à l’état d'azote gazeux d’une portion de l'azote combiné de la couverture. Et s’il n’y avait que les causes réparatrices énoncées ci-dessus, les forêts iraient constamment en s’appauvrissant en azote, ce qui n’est pas ; il doit donc y en avoir d’autres. Avant qu’on eûùt prouvé que certains végélaux avaient le pouvoir de fixer dans leurs tissus l'azote gazeux de l'air, c’est l'apport in- cessant d’ammoniaque dù surtout aux vents d’ouest pour la France qui compensait, dans les idées de M. Schlæsing, la différence entre la perte d’azote par les récoltes et les eaux souterraines et le gain certainement moindre dû aux effluves électriques. C'était la théorie admise jusqu’au jour où Hellriegel et Wilfarth ont montré, de la façon la plus nette, que les légumineuses fixaient dans leurs nodosités, à l’aide des bactéries qui y vivent, l’azote gazeux de l'air et ont prouvé irréfutablement la justesse des idées soutenues par G. Ville d’abord, par M. Berthelot ensuite, mais contestées par le plus grand nombre jusqu’en 1888. La deuxième cause de gain consiste, avons-nous dit, dans les 368 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. matières azolées qui retournent chaque année au sol sous forme de détritus végétaux et animaux. Mais ce n’est pas là une cause d’enrichissement, puisque les principes azotés de la couverture provenaient déjà du sol; ils ne font qu’y retourner ; c’est une simple restitution, même pas intégrale, puisqu’une notable partie des principes azotés émigre dans le bois avant la chute des feuilles et puisqu'il est prouvé que les multiples transformations des matières azolées s’accompagnent toujours d’un dégagement d’azote gazeux. Il ne pourrait y avoir enrichissement du sol forestier en azote par la couverture, qu'en admettant que la quantité d’azote combiné qui a élé puisée dans l'air et les eaux météoriques soit supérieure aux quantités perdues par l'exportation du bois et le départ d’azote libre dans les transformations des matières organiques : ce qui ne peut être, quelque oplimisme que l’on montre à cet égard. Mais il y à une troisième cause de gain possible. Si le sol ou les plantes pouvaient prendre directement dans l'air une partie de l'azote libre (qui forme les 4/5 de l'atmosphère) sans qu'il fût besom que cet azote fût préalablement combiné à l’hydro- gène ou à l'oxygène, les craintes légitimes exprimées si souvent sur l'insuffisance des sources de l'azote des végétaux et, par suite, sur l’entretien de la vie animale à la surface du globe s’évanouiraient, les plantes ou le sol ayant à leur disposition un réservoir d’alimen- tation inépuisable. On sait que les animaux ne fixent directement dans leur corps ni l'azote gazeux de l'air, ni l’ammoniaque, ni l'acide nitrique ; ils empruntent tout leur azote aux matières protéiques des plantes et, d'autre part, on croyait, jusqu’en 1888, que celles-ci, à leur tour, pouvaient bien utiliser lammoniaque et l’acide nitrique de l'air, mais en aucune façon l’azote gazeux. Voici en quelques mots les principales étapes de la question depuis 1838. 1838.—A celte date, Boussingault a fait ses premières expériences: il constate un léger gain d’azote dans le trèfle et les pois, aucun dans le froment et l’avoine. Sans se prononcer catégoriquement, il penche pour une fixation de l'azote de l’air par les légumineuses. L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. 369 1849-1859. — M. George Ville affirme, à la suite de ses expé- riences, que les végétaux assimilent l'azote gazeux. 1851-1853. — Boussingault, dans une seconde série d’essais exécutés avec tout le soin possible, conclut à la non-fixation de l’azote gazeux, même par les légumineuses (lupin, haricot). 1861. — Lawes, Gilbert et Pugh, en présence de ces assertions contradictoires, firent au laboratoire de Rothamsted de nombreuses expériences qui durèrent trois années. Ils s’entourèrent des pré- cautions les plus minutieuses. Les conclusions de leur magistral travail! sont conformes à celles de Boussingault. Il semblait donc qu'on püût dire en toute assurance en 1879, comme le fait M. Grandeau dans son Cours d'agriculture?, p. 446 : « La question est désormais vidée : les végétaux n’absorbent pas l’azote libre. » Cependant, il faut remarquer que les chimistes anglais, dans les conclusions très prudentes de leur beau mémoire, ne parlent pas des légumineuses avec la même assurance que des graminées. Voici ce qu'ils écrivaient en 1861: « En exécutant de nombreux essais sur les graminées el en faisant varier dans de larges limites les conditions de végétation, on n’a jamais reconnu qu’il y eût assimilation d’azote libre. « Dans les expériences sur les légumineuses, la végétation fut moins satisfaisante et les limites de variation furent moindres ; mais les résultats enregistrés n’indiquent aucune assimilation d’azote libre. I! serait désirable que de nouvelles expériences fussent reprises sur ces mêmes plantes dans des circonstances plus favorables. » C'est à Hellriegel et à ses collaborateurs qu'était réservé le grand honneur d'exécuter enfin ces expériences si ardemment désirées par le monde agricole, de les exécuter de telle façon qu’il n’y ait plus de place pour le doute et la controverse, et de jeter enfin la lumière sur cette obscure et difficile question qui, depuis cent ans, depuis Priestlev, Ingenhoutz et de Saussure, passionnait les chimistes et les 1. On the sources of the nitrogen on vegetation. Phël. Trans. T. IL, p. 431-577. 1861. 2, Cours d'agriculture de l'École forestière, par L. Grandeau. Berger-Levrault et Gie, 1879, p. 446. ANN. SCIENCE AGRON. — 9° SÉRIE. — 1897. — 11. 24 310 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. agronomes et avait donné lieu à tant de travaux et tant de discus- sions. Le mémoire de Hellriegel, Wilfarth et de leurs collaborateurs est de novembre 1888. Les principaux résultats en avaient été annoncés en 1887. Dans cet intervalle, il a paru un certain nombre de recherches sur la fixation de l'azote par le sol et les plantes. Voici les plus impor- tantes. 1873. — M. Dehérain publie des expériences desquelles il résul- terait que l'azote atmosphérique aurait la propriété de se combiner avec certaines substances ternaires, cellulose, glucose, etc., et, par induction, avec les matières organiques du sol en voie de décompo- sition. Mais M. Schlæsing a montré les causes d’erreur de ces expériences et, en les répétant dans de meilleures conditions, n’a obtenu aucune fixation d'azote. 1879. — M. Berthelot affirme que certaines substances organiques non azotées (cellulose, benzine, essence de térébenthine) peuvent, sous l'influence de l’effluve électrique, fixer l'azote gazeux de l'air. 1885. — Dix ans plus tard, M. Berthelot fait connaître une nou- velle condition, plus générale, de fixation de l'azote gazeux : c’est l’action sourde mais incessante des sols argileux et des organismes microscopiques qu'ils renferment. Dans un second mémoire (1886), il examine la nature et la pro- portion de la matière organique contenue dans ces terrains, matière qui constitue la trame des êtres vivants microscopiques, aptes à fixer l’azote atmosphérique. M. Berthelot étudie ensuite la fixation de l’azote, non plus sur des sables argileux et des kaolins, mais sur la terre végétale elle-même et, dans un mémoire postérieur, cette fixation sur la terre végétale avec le concours de la végétation. « En résumé, dit1l, dans ces expériences, il y a eu fixation d'azote en proportion considérable : « 4° Sur les sables et sols argileux, aussi bien que sur la terre végétale proprement dite, lorsque j'ai opéré en l'absence de la végétation ; « 2 Sur la terre et la plante réunies, lorsque j'ai opéré en pre- sence de la végétation. » L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. 311 En somme, au moment où parut le mémoire de Hellriegel, on savait, par les travaux de M. Berthelot, que les sols avec les orga- nismes microscopiques qu'ils renferment pouvaient fixer l’azote atmosphérique ; mais on ne connaissait aucun de ces microorga- nismes, on ne les avait pas vus, pas isolés; on ne savait rien de leur manière d’agir et enfin leur présence supposée dans le sol n’expliquait pas la faculté remarquable des légumineuses seules de prospérer dans un sol privé d'azote combiné et d’en emmagasiner dans leurs tissus des quantités considérables. Les botanisies avaient signalé depuis longtemps l’existence de nodosités sur les racines des légumineuses; Woronine le premier, dès 1866, a appelé l’attention sur les innombrables corpuscules de leur protoplasma, corpuscules qui ressemblent beaucoup à des micrococcus, à des bacilles, et il admettait que ce sont en effet des microbes, vivant en symbiose avec les légumineuses et fabriquant des aliments au profit de l'association. Mais personne n’avait songé qu'il y eût une relation entre les tubercules radicaux et la fixation de l'azote. C’est la démonstration absolument nette et convaincante de cette relation qui constitue la grande découverte d’'Heliriegel. Voici les principales conclusions de ce mémoire qui marque une date importante dans la science agronomique : « L’assimilation et la production des céréales, orge et avoine, ont toujours été presque uniformément nulles dans un sol dépourvu d'azote, qu'il fût ou non stérilisé. « Par une addition de nitrate, une végétation normale se mani- festait alors dans ces plantes et leur développement était toujours dans un rapport à peu près direct avec la quantité de nitrate donnée (90 à 100 de substance sèche pour 1 d’azote du sol). « Fuen n’a indiqué que les céréales puisent ou qu’il leur soit possible de puiser dans d’autres sources que le sol une quantité appréciable de l'azote employé à leur nutrition. « Les légumineuses expérimentées (pois, serradelles, lupins) se sont exactement comportées comme les céréales dans un milieu de {. On trouvera une excellente traduction du Mémoire de Hellriegel dans les Annales de la Science agronomique française el étrangère. 7° année, 1890. T. I, p. 84-350. 3172 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. culture stérilisé et maintenu en état de stérilisation, c’est-à-dire que la croissance et l'assimilation ont été chez elles toujours et uniformément à peu près nulles. « Cest le cas qui s’est trouvé réalisé dans les expériences de Boussingault (1853). « Les nitrates y produisaient le même effet que les céréales. « On était certain d’obtenir la croissance des légumineuses dans un sol dépourvu d’azote en donnant au sol un peu de délayure d'une terre fertile. Non seulement on oblenait ainsi une végétation normale, mais parfois un développement d’une luxuriance éton- nante, et, dans ce cas, la récolte accusa constamment un excédent d'azote souvent fort élevé qui ne pouvait avoir son origine dans le sol. » Il fallait en conclure que la délavure de la terre fertile avait apporté les germes des bactéries qui se fixent sur les racines en y produisant les nodosités et qui savent faire servir l’azote atmosphé- rique à la constitution des matières azotées des légumineuses. Ces faits ont été depuis vérifiés maintes fois « et la pratique agricole, ainsi que le dit M. Dehérain, a tiré parti de ces observa- tions. Elle a pu faire développer des légumineuses sur des terres rebelles jusque-là à cette culture en les {errant à l’aide de sols fertiles’. » Or, les sols forestiers abondent en légumineuses, surtout les sols les plus pauvres, les sols siliceux, et c’est précisément dans ce cas, lorsque le sol ne leur offre pas une dose suffisante d’azote combiné, que les légumineuses complètent ce qui leur manque sous ce rapport en puisant dans l’azote élémentaire de l’atmosphère. Dans maintes forêts en sol siliceux, tantôt le genêt à balai, tantôt l’ajonc, tantôt les deux mêlés à beaucoup d’autres papilionacées (genêts, cytises, bugranes) forment une bonne partie du sous-bois, tandis que sur les sols calcaires on verra en abondance des caly- 1. M. Mazé vient de montrer tout récemment (Annales de l'Institut Pasteur, t. XI, p. 44) que les légumineuses fournissent aux microbes des nodosités l'azote organique indispensable aux premières générations ; alors seulement ils peuvent fixer l'azote libre de l'air qui, dans l'expérience de M. Mazé, a fourni jusqu'aux 2/3 de l'azote contenu dans le milieu à la fin de l'essai. L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. GS Yf( cotomes, des cytises, des coronilles, des genêts, des bugranes, des adénocarpes, des spartiers d’Espagne, pour ne parler que des plantes ligneuses. La découverte d’Hellriegel intéresse donc la culture forestière, puisqu'elle nous fait toucher du doigt une de ces causes compen- satrices des pertes d'azote que subissent tous les sols forestiers. Mais il y en a, je crois, une plus importante et plus générale qui a passé jusqu'alors inaperçue : je veux parler de la fixation de l’azote atmosphérique par les feuilles mortes. En novembre 1894, j'ai cueilli sur de jeunes chênes et charmes de la forêt de Haye, des feuilles mortes encore adhérentes aux rameaux. Je les ai laissées dessécher à Pair du laboratoire, puis à 100°. Les feuilles de chêne contenaient alors 9.73 p. 100 d’eau et celle de charme 12.70 p. 100, avec un taux d’azote de 1.108 p. 100 pour le chêne et de 0.947 p. 400 pour le charme. 235,130 de feuilles de chêne séchées à l'air et correspondant à 48e", 96 de feuilles à 100° ont été placés dans une caisse en zinc de 0",50 de côté dont le fond était garni d’une plaque de calcaire et qui était recouverte d’un grillage en fil de fer galvanisé. Un autre lot des mêmes feuilles, équivalant à 535,54 de feuilles desséchées à 100, fut placé dans une autre caisse en zinc garnie d’une plaque de grès bigarré. Enfin, deux autres lots de feuilles de charme correspondant tous deux à 435,65 de feuilles desséchées à 100° furent mis en même temps dans deux autres caisses en zinc pareilles aux précédentes. Ces caisses furent exposées en plein air sur un support de 0®,60 de hauteur, à l’abri des émanations du sol et de toute source d’ammoniaque. Je me proposais, en installant ces essais, un double but: 4° étu- dier la rapidité de décomposition des feuilles de diverses essences suivant la nature du substratum (calcaire ou grès); ® suivre les modifications qualitatives et quantitatives des matières minérales et organiques jusqu'à leur transformation en humus. Parmi ces matières organiques les principes azotés m’intéressaient surtout. Étant donné que la décomposition des feuilles mortes en présence de l’air (ou humification) est essentiellement due à des microorga- 314 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. nismes, comme je l'ai montré en 1886’, que, d’autre part, cette décomposition est très active et suppose la présence de myriades de microbes, on pouvait penser que ces microbes, qui ne sont, à vrai dire, chimiquement, que de petites masses de protoplasma, c’est-à- dire de matière azotée, compenseraient les pertes que pouvaient éprouver les feuilles mortes dans leur taux de matière azotée par retour d’une partie à l’état d'azote gazeux, peut-être même qu'ils enrichiraient leurs hôtes, les feuilles, en azote, s’il s’en trouvait, parmi eux, quelques-uns qui eussent la même précieuse faculté que les bactéries des racines des légumineuses. C’est ce dernier cas qui s’est réalisé dans mes expériences. En décembre 1895, après un an d'exposition à l'air, les feuilles de chêne sur calcaire renfermaient 1.993 p. 100 d’azote et les feuilles de charme sur grès bigarré 2,246 p. 100, les feuilles étant supposées desséchées à 100°. Le gain a donc été de 08,815 d’azote par 100 gr. de feuilles de chêne et 15,299 par 100 gr. de feuilles de charme; les taux pri- mitifs étant de 1.108 pour le chêne et de 0.947 pour le charme, on voit que les feuilles sont devenues environ deux fois plus riches en azote qu'elles ne l’étaient au début. Pendant cette année, les feuilles de chêne ont perdu 21.62 p. 100 de leur poids primitif à 100° et les feuilles de charme 23.01 p. 100. En nous mettant dans le cas le plus défavorable et en supposant, ce qui n'est guère probable, que la disparition n’ait porté que sur les matières ternaires, qu’il ne se soit formé aucun composé ammoniacal ou nitré ou amidé soluble et entrainé par les eaux aux dépens de l'azote primitif des feuilles, le taux de 1.923, rapporté non plus au poids des feuilles en décembre 1895, mais à leur poids au début de l'expérience, devient 1.508. De mème, le taux de 2.246 devient 1.727 avec un gain de 1.508 — 1.108 — 0.400 p. 100 d’azote pour les feuilles de chêne et de 1.727 — 0,947 — 0.780 p. 100 pour les feuilles de charme. 1. Intervention des ferments organisés dans la décomposition de la couverture des sols forestiers. (Associalion française pour l'avancement des sciences. — Uon- grès de Nancy, 1886.) 7 , . > L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. 319 Ainsi, dans les conditions des expériences, les feuilles qui ont passé un an à l’air sont relativement deux fois plus riches en azote que les feuilles mortes qui viennent de tomber sur le sol et elles sont encore plus riches d’une manière absolue. Ce gain d’azote est très important, puisqu'il s’élève, même dans ce dernier cas, à la moitié ou aux deux tiers du taux primitif; il représente, en admettant que le sol de la forêt reçoive, à chaque automne, 5 300 kilogr. de feuilles mortes, un total de 22%5,4 d'azote pour les feuilles de charme et de 13*,2 pour celles de chêne, c’est-à-dire à peu près le quantum d’azote absorbé par la fabrication du bois. Cette cause principale d’appauvrissement en azote des sols fores- tiers se trouve immédiatement compensée par l’activité que mettent les feuilles mortes à accaparer l’azote atmosphérique, si bien qu’en dehors de ces déperditions d'azote par suite des transformations successives des matières azotées, déperditions qu’on ne pourra ja- mais chiffrer exactement, mais qui sont certainement minimes, on n’aperçoit plus que des sources d’enrichissement en azote pour les sols forestiers, et nous voyons clairement une des causes, peut-être la principale, en tous cas la plus générale, pour lesquelles la culture forestière a toujours été considérée comme essentiellement amé- liorante, comme la seule qui sût accumuler assez de matières nu- tritives pour permettre, au bout d’un certain temps, de faire de la culture agricole sur les sols les plus pauvres. Ainsi, ce lit de feuilles, appelé si justement couverture, qui est déjà si utile par ce que nous connaissions de son rôle physique et chimique, acquiert un nouveau titre à notre reconnaissance par cette remarquable captation d’azote qui est, je crois, mise pour la pre- mière fois en lumière’. 1. M. Berthelot a montré en 1885, comme je viens de le rappeler, que, dans ses expériences, il y avait eu fixation d'azote sur des sables, des sols argileux, de la terre végétale. MM. Gautier et Drouin ont établi en 1868 (C. A. T. GVI passèm et T. GX. p. 820) « que Fhamus et même l'acide humique préparé chimiquement avec le sucre et les acides conférait aux sols naturels ou composés artificiellement de silice, caleaire et kaolin, ensemencés ou non de végétaux, la propriété de s'enrichir en azote assimilable, que les sols nus pourvus de matières organiques, et ceux-là seulement, fixaient l'azote libre ou ammonijacal de l'atmosphère et que la matière humique était une condition nécessaire de cette fixation. » (C. R. T. GXXIV, juin 1897.) Il ne s’agit, dans mes expé- 316 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les feuilles sont réellement des organes admirables. Après avoir activement travaillé toute leur vie à élaborer les matières plasti- ques nécessaires à la vie actuelle et future de l'arbre, elles tombent quand les circonstances atmosphériques les empêchent de continuer à remplir leur rôle ; mais elles ne tombent qu'après avoir mis en réserve, j'allais dire en sûreté, dans l’arbre les matières rares, pré- cieuses (azote, phosphore, potasse) qui serviront au printemps à édifier les nouvelles feuilles, aussi laborieuses que leurs devan- cières. À leur chute, elles ne renferment plus que le minimum possible de ces matières, le capul mortuum, ce qui n’a pu se dis- soudre pour émigrer dans le bois des rameaux et des branches. Mais on dirait qu’elles ont hâte, même mortes, de travailler pour l'arbre qui les a produites. Dès qu’arrivent les beaux jours, elles servent de pâture à des myriades de microorganismes dont la pré- sence et l’activité sont attestées par un fort dégagement d’acide car- bonique et dont un certain nombre a la faculté d’absorber, outre l'oxygène, l’azote de l'air pour le faire entrer dans la constitution de leur protoplasma. D'où viendrait cet excédent considérable d’azote dans les feuilles mortes après un an d'exposition à l'air ? Il n’y en a ni dans le zine, ni dans le calcaire, ni dans le grès qui élaient en contact avec les feuilles, et ce ne sont pas les traces d’ammoniaque et d’acide ni- trique contenues dans la pluie qui a mouillé ces feuilles qui ont pu doubler leur taux d’azote, le faire passer de 1.108 à 1.923 p. 100 et de 0.947 à 2.246 p. 100. Il faut donc que la plus grande partie de cet excédent provienne de l'azote élémentaire de l'atmosphère. Les feuilles des deux autres caisses, celles de chêne sur plaque de grès bigarré et celles de charme sur plaque de calcaire, au lieu riences, ni de sol, ni d'humus, mais de feuilles mortes encore adhérentes aux rameaux et qui, après deux ans d'exposition à l'air, n'étaient nullement réduites à l'état d'hu- mus, c’est-à-dire d'une substance noire, grumeleuse, ayant perdu toute trace d'orga- nisation végétale. Les feuilles de chêne et de charme étaient devenues noires, mais étaient encore parfaitement reconnaissables. Ce n'est donc pas seulement à l'état d'humus, combiné ou non avec le sol, que la matière organique peut fixer l'azote de l'air comme l'ont montré MM. Berthelot, Gautier et Drouin. Dès que la feuille est morte et pendant qu'elle conserve sa forme avant de se transformer en humus, elle jouit de cette précieuse faculté. L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. DA de rester un an exposées à l’air, y furent laissées deux ans, de dé- cembre 1894 à décembre 1896. De plus, en mai 1896, j'ai ajouté à chaque caisse 90 gr. de terre fine de la forêt de Haye, dont j'avais préalablement dosé l’eau et les matières organiques. Les dosages d’azote ‘donnèrent des résul- tats absolument concordants avec les précédents : 1.73 p. 100 de feuilles sèches à 100° pour le chêne sur grès bigarré ; 2.15 p. 100 pour le charme sur calcaire, c’est-à-dire un petit peu moins (0.1 à 0.2 p. 100) que le chiffre trouvé à la fin de la première année, pé- riode de grande activité des microbes; mais ces chiffres sont tou- jours très supérieurs aux taux primitifs : ils accusent un gain relatif d'azote de 0.6 p. 100 pour le chêne et de 1.1 p. 100 pour le charme. Pendant ces deux ans, les feuilles de chêne ont perdu 29.64 p. 100 de leur poids à 100° et les feuilles de charme 28.61 p. 100. En admettant encore, pour rendre la captation d’azote plus évi- dente, que les 28 à 29 p. 100 perdus ne comprissent pas de ma- tières azotées, il y aurait eu néanmoins un enrichissement absolu de 1.922 — 1.11, soit 0.11 p. 100 du poids imtial pour le chêne et de 1.53 — 0.95, soit 0.58 p. 100 pour le charme. Si l’on trace une courbe représentant les taux d'azote dans une feuille depuis sa naissance jusqu’à sa transformation en humus, on voit qu’elle a son point d’inflexion au moment de la chute, puis qu’elle se relève par suite de la captation d’azote libre. Voici des chiffres se rapportant aux feuilles de chêne : MATIÈRES azotées. MÉTRO MAR T2 ET At En et PATES: E 25.9 p. 100. UE OS TRS PAPR ENS ER LS MRC LE 14.6 — JANET TASER 14.0 — AAC CS out A M Sr PA feu 9.9 — SeptemDres: MONT ENT ENTRE 71.0 — Octobre Er AR AE 6.6! — Décempre-L894 Men 6.9 — Décembre 1895 Tete Re 12.0 — Décembpremts96 MSN RRrR 10.8 — 1. Les chiffres précédents sont empruntés à Ebermayer. 318 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Ainsi donc, si les choses se passent dans la nature comme dans les essais dont je viens de parler, les 3500 kilogr. de feuilles mortes annuelles reçues par un hectare contiennent, au moment de leur chute, 1 p. 100 d’azote, soit 33 kilogr. d’azote ou 206 kilogr. de matières azotées. Un an après, ces 3 300 kilogr. se sont réduits à 2640 kilogr. à 2 p. 100 d’azote en moyenne (1.92 pour les feuilles de chêne, 2.95 pour celles de charme), ce qui équivaut à 53 kilogr. d’azote ou 331 kilogr. de matières azotées par hectare. Le gain d’azote par hectare s'élève donc à 20 kilogr., correspondant à une fumure de 125 ki- logr. de matières azotées. Au bout de deux ans, les feuilles de chêne et de charme, qui avaient subi comme en forêt toutes les influences atmosphériques et qui reposaient sur une dalle calcaire ou gréseuse presque horizon- tale, de façon que l'humidité s’y maintint le plus longtemps possible, élaient complètement noires mais parfaitement reconnaissables, les feuilles de charme aussi bien que celles de chêne, malgré ce que l’on dit de leur plus grande altérahilité. Elles étaient loin d’être réduites à l’état d’humus. I faudrait, pour épuiser le sujet et lever tous les doutes, pouvoir isoler ceux des microorganismes phyllophages qui fixent l’azote, les élever en culture pure et démontrer directement leur faculté d'absorption par la diminution du volume déterminé d’azote dans lequel on les ferait vivre, comme l'ont fait MM. Schlæsing fils et Lau- rent pour les bactéries des légumineuses”. Mais ce sont là des points en dehors de ma compétence et qui ne peuvent être élucidés que par des bactériologistes. Jai remis ces feuilles fixatrices d'azote à M. le professeur Macé, qui a bien voulu se charger de les étudier. En dehors des bactéries des légumineuses, 1l n’y a guère à citer, parmi les microorganismes du sol dont le rôle comme fixateur d’a- zote ait été nettement déterminé, que le Clostridium pasteurianum récemment découvert par M. Vinogradsky*. Je ne puis mieux faire 1. C. R, Séance du 10 novembre 1890. ?, Ge travail en langue russe: Absorplion par des microorganismes de l'azote Uibrg de l'air, est analysé dans les Annales de Micrographie, p. 78. 1896. L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. 319 que de donner l’opinion, sur le sujet qui nous occupe, d’un maître in- contesté en bactériologie. « Vinogradsky part de ce fait que l’assimilation de l’azote est un phénomène très répandu dans le sol des champs et des prairies (nous venons de voir qu'il l’est probablement aussi dans le sol des forêts), pour penser qu’il est difficile de l’attribuer seulement à quelques espèces de plantes supérieures ou aux algues et que cette assimila- tion doit se faire par des microbes, surtout par ceux auxquels suffit un milieu riche en carbone mais pauvre en azote. Il les a donc cher- chés et les a isolés par la méthode élective des cultures. Voici ses conclusions : 1° Sur 10 microbes extraits du sol, pas un, ni l’Aspergillus, n’a assimilé d’azote libre ; 2° Pas un des microbes n’a pu se développer dans un milieu tota- lement dépourvu d’azote et le Clostridium pasteurianum est unique à ce point de vue. Lui seul peut fixer l’azote en quantité suffisante pour ses besoins, depuis le commencement jusqu’à la fin de sa vé- gétation. L'auteur admet, contrairement à l’opinion de M. Berthelot, que la faculté de fixer l'azote libre de l'air n’est pas très répandue dans le monde des microbes et constitue une fonction spéciale d’une seule ou de quelques espèces, mais jusqu’à présent on n’en connaît avec certitude qu’une seule : c’est le Clostridium pasteurianum. » M. Claudio Fermi” dit aussi, dans les conclusions d’un travail r'é- cent sur le même sujet : € Parmi les microorganismes que j'ai étudiés, je n’en ai point trouvé, dans ceux que l’on peut cultiver sur solutions de saccharose pure, qui soient capables de fixer l'azote de l’air. A cet égard, mes recherches concordent avec celles de Vinogradskv. » Quant à la prétendue fixation de l’azote libre par des algues infé- rieures, fixation qui devrait se manifester aussi en forêt où ces algues existent, elle ne serait pas due, parait-il, aux algues, comme l'ont cra MM. Schlæsing fils et Laurent, mais aux colonies de bac- téries qui y vivent. | 1. Annales de Micrographie, p. 520. 1896. 380 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. « En cultures pures, exemptes de bactéries, dit M. Kossowitch!, les algues ne fixent pas l'azote. Mais, à la lumière, associées aux bactéries, elles peuvent influencer directement ce phénomène de la fixation de l'azote en fournissant à ces microorganismes les subs- tances hydrocarbonées nécessaires à leur développement. Mieux nourries, les bactéries se développeront plus vite, et, par suite, la proportion d’azote fixée par elles augmentera plus rapidement. » M. Bouilhac * a aussi constaté que la fixation d’azote peut se faire par l’association de certaines algues et de bactéries. Même certains auteurs, tels que M. Stoklasa, de Prague”, attri- buent, dans lassimilation de l'azote gazeux par les lupins, un rôle plus actif aux algues et aux bactéries du sol qu'aux bactéroïdes des tubercules. On voit que si le fait de l'assimilation de l’azote gazeux par la vé- gétation est maintenant hors de conteste, son mécanisme reste en- core bien obscur; on l’entrevoit seulement et on ne connaît avec certitude que quelques-uns de ces organismes, sans doule nom- breux, par l'intermédiaire desquels s'établit une des compensations aux pertes que subit incessamment la masse totale d'azote combiné du globe. L'autre cause compensatrice, la seule que l’on pût invo- quer, il y a dix ans, était, on le sait, la combinaison de l'azote de l'air à l’oxygène et à l'hydrogène de la vapeur d’eau sous l’action des effluves électriques. Il semble que les bactériologistes auraient profit à porter leurs in- vesligations sur les feuilles mortes des forêts, à l’époque où elles sont le siège d’une décomposition active due à des microorganismes aérobies, ceux dont la technique est justement la plus avancée, et il est probable qu’ils enrichiraient de quelques noms la liste encore bien courte des microbes fixateurs d’azote. En résumé, d’après ces premiers résultats d’essais, que je pour- suis en variant le matériel et les conditions d'expérience, je crois avoir montré l’une des raisons, la plus importante peut-être et en 1. In exlenso dans Bo!. Zeil. 1894. 1*€ partie, p. 97-116, analysé dans les An- nales de Micrographie, p. 227. 1896. 21CR; TACXXN "p823: 3. Landwirthschaftliche Jahrbücher, t. XXIV, p. 827-863. 1895. L'AZOTE ET LA VÉGÉTATION FORESTIÈRE. 381 tous cas la plus générale, pour lesquelles la forêt enrichit le sol en azote. Si l’on comprenait cet enrichissement pour les matières minérales qui, grâce aux réactions chimiques plus prolongées et plus intenses en forêt qu'ailleurs, deviennent assimilables en plus forte proportion dans le sol forestier, il ne s’expliquait plus pour l’azote, quoiqu'il fût réel, depuis qu’on était éclairé sur les faibles quantités d’azote com- biné apportées à la forêt par l’atmosphère et les eaux météoriques. Ainsi, la forêt, la grande bienfaitrice, ne se contente pas de nous fournir, avec le bois et ses multiples dérivés, une foule de produits utiles, de protéger les pentes de nos montagnes contre les dévasta- tions des eaux sauvages, de nous procurer de frais ombrages et de charmer nos yeux par sa verdoyante parure ; elle est encore le moyen le plus précieux que l’homme ait à sa disposition, le seul qui ne né- cessile aucune dépense, pour enrichir les sols en ces deux groupes de substances si rares et si essentielles à la végétation, les matières azotées et les principes minéraux nutritifs et pour mettre, avec le temps et sans frais, les plus pauvres d’entre eux en état de fournir aux exigences des récoltes agricoles. SUR LA POSSIBILITÉ D’UNE CULTURE AVANTAGEUSE DE LA BETTERAVE A SUCRE D'ANISLCERTAINSITEREAINS: S'ATL ANUS D'après une étude de MM. HILGARD et LOUGHRIDGE ' PAR J. VILBOUCHEVITCH = LD E—C- Il est généralement admis que la culture de la betterave à sucre? ne convient point aux terrains salants, les quelques cas y relatifs dé- crits en Europe ayant montré que la teneur en sucre et la pureté du jus se trouvent basses et la proportion de cendres haute. En Califor- nie, d’où nous vient aujourd'hui l'avis contraire, la même constata- lion a été faite autant que les essais avaient porté sur des terrains salants du littoral: la meilleure graine n’y donnait que des racines à o p. 100 et 6 p. 100 de sucre, avec pureté de 20° au-dessous de la tolérance. Le résultat n’a pas été meilleur à la succursale de la {. Report of work of the Agricultural Experiment Station of the University of California for the year 1894-1895. Sacramento, 1896, p. 71-91, avec une planche, huit tableaux, trois diagrammes et une carte pédologique. 2. Contrairement à celle de la betterave fourragère (voyez une notice que j'ai pu- bliée là-dessus dans la Revue des sciences naturelles appliquées). L'espèce sauvage Bela marilima dont se déduit la betterave cultivée est une halophyte comme la plu- part des Chénopodiacées auxquelles elle appartient. CULTURE AVANTAGEUSE DE LA BETTERAVE A SUCRE. 9983 Station agronomique de l'Université de Californie, qui a été créée il y a quelques années spécialement pour l’étude du salant continental, près Tulare, dans la vallée de San-Joaquin : partout où les racines arrivaient au contact du salant, la richesse en sucre et la pureté étaient insuffisantes. Le salant, à Tulare, se compose, en même temps que de carbonate et de sulfate de soude, d’une respectable dose de chlorure (sel marin) ; il comporte, en plus, de la potasse, des phosphates d’alcalis et du salpêtre. Or, il y a quelques années, une vaste entreprise de betteraves à sucre se fondait à Chino, où la Station possède également une suc- cursale grande de 10 acres de terrain sis en contre-bas et accusant chaque été des taches d’efflorescences salines. Fort des résultats dé- courageants observés à Tulare, M. Hilgard s’empressa de mettre les propriétaires de la sucrerie en garde de ne pas avancer leurs cul- tures, sous peine d’échec, du côté de cette partie basse salante ; ve conseil fut suivi d’abord, mais la sucrerie prenant de plus en plus d'extension, bientôt on ne pensa plus au salant et les cultures em- piétèrent sur les terres franchement salantes; quel ne fut pas l’éton- nement des chimistes de la Station en voyant venir, deux années de suite, des racines d'excellente qualité tout près d’endroits en été les plus chargés d’efflorescences! Il fut résolu de consacrer le terrain adjacent appartenant à la Station agronomique à l’étude approfondie de l'affaire. Les 10 acres furent mises en culture pour la première fois en 4894; à l’état naturel, le terrain laissait voir de loin en loin de petites taches de salant sans que sa couverture végétale de hautes graminées et de composées eût l’air de s’en ressentir, mais une fois dénudé, et la sécheresse de l’année aidant (en 1894 il n’était tombé que 8 pouces de pluie), il y eut une forte recrudescence des efflorescences ; il en vint en maint endroit où jamais auparavant on n’en avait vu; «ceci eut d’ailleurs l'avantage de maintenir la surface à un degré d’humi- dité favorable à la germination’ » ; les jeunes plantules, tout entou- {. « La présence d'une quantité modérée de salant est d'une utilité directe en empé- chant le desséchement du sol... L'agriculture d'une très vaste superticie de terres ne € 384 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. rées qu’elles étaient de blanches efflorescences, paraissaient être tout à fait à leur aise. La plus grande partie du champ avait été ensemencée de différen- tes graminées fourragères ; malgré une petite pluie tardive tombée sur le semis, parmi les semences de petite taille il n’y eut guère de levées ; seuls, le sorgho et le maïs levèrent bien, mais ne tardérent pas à dépérir au point qu’on dut renoncer à l'espoir de récolter quelque chose. Du grand choix de papilionacées semées en même temps et presque toutes bien levées, aucune ne se développa norma- lement. Dans ces conditions, qui témoignent suffisamment de la salinité du terrain, la partie ensemencée fut défoncée à nouveau et, le 29 mai, ensemencée de betteraves à sucre qui y vinrent admira- blement, au beau milieu des efflorescences. Si ce terrain se comporte vis-à-vis de la betterave d’une autre façon que ne le font les terrains salants maritimes et les terrains de: Tulare, c’est qu’aussi la composition du salant est différente ; c’est ici le sulfate de sodium qui prédomine, tandis que sur le littoral c’est le sel marin. Pour donner une idée plus précise du terrain de Chino, en voici une analyse complète faite en 1890 : « De l’alluvion ancien, argileux ; gris bleuâtre ; gris souris quand il est humide ; très profond ; chan- geant à peine à mesure que l’on s'enfonce à 10 pieds et davantage ; demeure humide pendant l'été; rentre dans la catégorie appelée par les gens du pays adobe” » ; se laisse labourer aisément lorsque encore assez humide ; par les années pluvieuses devient facilement marécageux, comme c’est le propre des sols couverts à l’état natu- rel, comme l'était celui-ci, de Anemopsis Californica (yerba mansu). Matériaux d'un diamètre supérieur à 0,6 millimètre. . . . . 10.00 p. 100. Terre: ne, SE RME DS PEU AT COPA MERE 90.00 — pourrait pas du tout exister dans sa forme actuelle sans le concours de l'humidité bygroscopique absorbée dans une proportion notable grâce à la présence du salant » (Hilgard, dans les Annales de la science agronomique française et étrangère, 1893- p. 70 du tirage à part); M. Hilgard revient souvent sur ce sujet dans ses publications postérieures. 1. Pour autres détails sur L « adobe », voyez l'ouvrage précité de M. Hilgard, p. 22 du tirage à part. CULTURE AVANTAGEUSE DE LA BETTERAVE A SUCRE. 389 Analyse chimique de la terre fine. Matières insolubles. . . . . L 24 262402 Silice soluble dans une ab Plante ie car- } 710.92 p. 100. bonater dé SOUMET UNE MARTEL 8.30 \ Potasse (K?0) . EP ET PELLE E OUTRE NS PLAIT Sable (Nas (Ne ERREUR SC à Sn de Chaux (Ga 0). Magnésie (Mg 0). Oxyde salin de maganèse (Mn*° 0‘) Oxyde de fer (Fe* O*) Alumine (Al* 0°) Acide phosphorique (P*0*) Acide sulfurique (S 0), Acide carbonique (G 0?) Eau et matières organiques . D'OrUOOS Hu ©: SE 2 (we) 02: — ART EM ME ERA ARR 99.70 — Humus DR US RE LE 11800 ne LOT) Richesse ahdaus à en hot PARC ASS ES ILES AA UT ef E 10.20 — Richesseidursohentazote Enter nr 0.203 — Cendres . ; PAS Acide phosphorique nee 0.03 — SiCe 0.96 — Humidité hygroscopique (absorbée à 15°C) . . . . 5.81 Analyse mécanique de la terre fine. Argile colloïdale . Moihe Boéae 13.44 p. 100. ie 0"%,25 de valeur hydraulique 20.65 — (QUE — — Er Limoa . omm 50 — n — 4.91 — | 1,00 — — 5.95 — 22200 = — 13.46 — 4,00 — == 10.36 — | 8,00 — 9.925 — Sable : ( 162,00 = — 12.01 — 327,00 — —- 2.15 — be 40m, 00 — — 1.66 — Capacité hydraulique. œ (==) Ÿ [=] Le salant. — [L'analyse par délavage d'échantillons prélevés en octobre 189% et comprenant l'épaisseur des premiers 12 pouces, montra une teneur en salant total variant de 0.032 p. 100 à 0.322 ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1897. — II. 26 386 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. p. 100 du sol desséché à l’air (dans les livres classiques on trouve indiqué 0.250 p. 100 comme limite de la résistance des cultures dans les terrains salés), donc la salinité totale variait du simple au décuple ; la composition du salant variait encore davantage. Comme l’on tenait à avoir des données précises, on se décida à diviser les 10 acres en 169 carrés de 50 pieds chaque et à rechercher séparément, pour le centre de chaque carré, la richesse totale en salant et la richesse de celui-ci en sulfates, carbonates, chlorures et nitrates (surtout — du nitrate de magnésium), en échantillonnant l'épaisseur de { pied (— 12 pouces). Au moment de la publication du compte rendu, il y avait déjà 65 analyses effectuées. Sans reproduire le tableau dans lequel les résultats sont consi- onés, disons que, dans certains carrés (1, 8, 20, 60), le sol a été trouvé chargé de carbonate de soude à raison de plus de 2 000 livres à l’acre-pied’, tandis que dans d’autres il n’y en a que des traces ; que presque sur toute l’étendue du champ d’expérience 1l a été constalé une proportion de nitrates inusitée, dans quelques carrés s’élevant jusqu’à 90 p. 100 de la somme des sels solubles. Ainsi, dans le carré n° 9, il a été trouvé tant de nitrates qu’en salpêtre cela aurait fait près de 2 tonnes à l’acre pour 1 pied d’é- paisseur, et 500 livres anglaises pour 3 pieds; c’est à peu près le trentuple de la fumure la plus forte de salpêtre de Chili, jamais pratiquée en agriculture. Ce carré a donné des racines caractéri- sées par les défauts que l’on connaît aux betteraves démesurément fumées de salpêtre ; le mémoire de MM. Hilgard et Loughridge donne la photographie d’une de ces racines, pesant 2,5 livres, avec 10 p. 100 de sucre dans le jus et pureté égale à 67, tandis que la moyenne pour le reste du champ d’expérience était de 0,86 livre (400 gr.) et la richesse de l’ensemble de la récolte du champ d’ex- périence, vendue à la sucrerie, de 15.5 p. 100, avec pureté entre 89 el 90*. 1. Le poids d'une couche de sol, grande de { acre et épaisse de 1 pied, étant es- limé à 4 000 000 livres anglaises. 2, À propos de ce carré n° 9, un détail qui rappelle combien il faut de circons- pection lorsqu'il s'agit de juger un terrain salant : L'analyse de l'échantillon pris en octobre 1894 avait accusé, comme on vient de le dire, une teneur en nitrates qui re- CULTURE AVANTAGEUSE DE LA BETTERAVE A SUCRE. 3831 Résullats. — Les betteraves expérimentées appartenaient aux va- riétés : € Vilmorin améliorée », « Vilmorin », « Mammouth rouge », « Géante dorée », « Blanche française », € G. R.», « L.R. », « Nor- ton’s Giant », « O. D. ». Le mémoire donne un grand nombre de chiffres sur les qualités des racines obtenues, selon l'emplacement, la variété, l’époque de la mise en terre et de la récolte. Nous n’en retiendrons d’abord que cette conclusion générale : «C’est la « Vilmorin améliorée » et la « Vilmorin » qui ont donné la richesse en sucre la plus élevée ; le maximum revient à une racine appartenant à la première variété et est égal à 16.9 p. 100. Vient ensuite la «CG. R. », avec 15.8 p. 100. Les deux premières ont été récoltées sur le carré n°1 qui contient très peu de nitrates, mais d'autre part beaucoup de carbonate de soude”. Toutes les autres variétés sont restées au-dessous de 15 p. 100*. La pureté a été maximale dans des « Vilmorin améliorées » (89) et des « L. R. » (85 et au-dessus) ; pour le reste des variétés, le degré demeura au-dessous de 85 p. 100; 24 échantillons, sur environ une centaine, restèrent au-dessous de 80 p. 100. » Les tableaux qui suivent permettront de juger plus en détail l'effet produit sur les betteraves par les différents sels. Il y en a un pour chaque variété, celles-la seulement des variétés étant d’ailleurs prises en considération qui ont été cultivées sur plus de deux carrés. Dans chaque tableau, en regard des données sur les résultats de la culture, viendrait, pour 3 pieds, à plus de » 000 livres à l’acre; or, un échantillonnage du même endroit fait en avril 1895, après que les pluies d'hiver y eurent passé, n’en révéla plus que 140 livres à l’acre pour la même épaisseur. 1. Pour éviter une confusion dans la suite, je rappelle qu'il ne s'agit ici que des meilleures racines du carré n° {; ainsi cette même « Vilmorin améliorée » y a donné aussi des racines dont le jus ne contenait que 10.5 p. 100 de sucre. 2. Un détail qui est peut-être pour quelque chose dans la supériorité de la « Vilmo- rin améliorée » : Les betteraves des différentes variétés furent plantées toutes sur la partie est d’un petit nombre de carrés situés sur l'extrême bord est du champ, ja « Vilmorin » occupant la rangée la plus externe (la plus à l’est), tandis que la « Vil- morin améliorée » occupait la rangée la plus à l’ouest, contiguë à quelques rangées de blé, d'orge et d'autres graminées dont l'ombrage lui profitait en réfrénant la croissance des racines, ce qui ne peut ne pas avoir contribué à en rehausser la richesse en sucre. 383 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. on en trouvera d’autres sur la salinité totale et la composition du salant pour les différents carrés auxquels ces résultats se rapportent. IL n’y à que cette façon de comparer qui puisse être instructive, la variété demeurant toujours un facteur impossible à compenser. Je rappelle que les analyses de salant qui entrent dans ces tableaux concernent une épaisseur de À pied et se rapportent au centre de chaque carré, l’échantillonnage ayant été fait en octobre 1894. Les analyses de betteraves sont dues au chimiste de la sucrerie de Chino. NUMÉRO du SUCRE. |PURETÉ. CARRÉ. solubles. CAR- CHLO- NI- FATE. |BONATE.| RURE. TRATE. Variété « Vilmorin améliorée ». 14.: 27 1710 116Ya ‘ .093 | .014 13. .113 | .033 122 82 151410:093 12.5 83 .107 | .059 Variélé « Vilmorin ». .113 -093 S2nil 78 .-107 79 .157 Variélé « L. R. ». 1) .093 211 oo © D t ot Cr — er] Variélé 82 80 78 CULTURE AVANTAGEUSE DE LA BETTERAVE A SUCRE. 389 Je continue en traduisant intégralement les commentaires dont les auteurs font suivre ces tableaux : 1. La moyenne de la « Vilmorin améliorée » pour les cinq carrés à été bonne autant pour la richesse que pour la pureté. La moyenne pour la richesse a été la plus élevée, toujours pour cette variété, sur le carré 53, qui est le plus chargé de salant (0.271 p. 100, ce qui équivaut à à tonnes à l’acre-pied) et offre, en même temps, le plus de sulfate et le plus de sel marin; elle a été la plus basse pour le carré 26, qui cependant offre le moins de carbonate de soude. Cependant, comme il a été mentionné plus haut, une racine, la plus riche pour cette variété et en même temps la plus riche de tout le champ — 16.2 p. 100 de sucre, — provenait du carré n° À dont la teneur est à la fois très basse pour le nitrate et pour le chlorure, et dont la salinité totale ne dépasse que de peu 2 tonnes à l’acre-pied. Les racines étaient relativement menues — 3/4 de livre en moyenne sur les carrés 53 et 52, qui ont donné les moyennes de sucre les plus élevées; il a été indiqué plus haut que le voisinage des rangées de graminées doit y avoir été pour quelque chose. 2. La « Vilmorin » qui, dans les mêmes carrés, occupait la rangée la plus externe (et, par conséquent, la moins ombragée), était beau- coup plus grosse et beaucoup moins riche que la « Vilmorin amé- liorée ». Sur le carré n° 1 qui a donné, pour cette variété, la moyenne de sucre la plus élevée, le poids moyen était de 2 livres. Pour cette variété, le sol le plus chargé de salant (le carré 93 accusant près de 5 tonnes de sels solubles à l’acre-pied) a donné des racines fort pauvres en sucre; le sol le plus pauvre en chlorures (le carré n° 1), les plus riches en sucre ; le sol le plus riche en chlorures (le carré n° 53), des racines pauvres en sucre. Impossible de dire pour le moment si ces résultats, contraires à ceux observés pour la « Vilmorin améliorée », doivent être attribués à la grande dimension atteinte par les racines de la « Vilmorin », ou réellement à une façon différente de se comporter vis-à-vis du salant qui tiendrait à la variété (ou à autre chose). 3. La CL. R. » avait en moyenne des dimensions bonnes ; excepté le carré n° 1, elle a donné une bonne richesse et une bonne pureté. Cette variété a donné les racines les meilleures sur le carré n° 59, le 390 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. moins chargé de salant au total quoique le plus riche en nitrates et presque le plus riche en carbonate de soude. A remarquer que le carré 93, le plus chargé de salant au total et aussi de chlorures, a donné dans ce cas des racines à peu près aussi bonnes que le 52, le moins salé. 4. La «G. R.» est demeurée, à l'exception du seul carré 53, au- dessous de 12 p. 100 comme moyenne de sucre pour chaque carré, et sur tous les six carrés où on en avait mis, le poids moyen de ses racines a été supérieur à une livre. Sa pureté également a été basse. La meilleure moyenne que cette variété ait fournie provient du carré )3, qui a le plus de sels solubles au total, le plus de chlorure et le plus de sulfate ; en ceci concordance avec le résultat donné par la « Vilmorin améliorée ». Voici encore quelques données recueillies moins méthodiquement, un peu au hasard du travail courant de la Station; dans le tableau ci-dessous, il a été impossible de retrouver quelle est la variété qui a été plantée, mais il est probable que cela a été la même pour les quatre parcelles compulsées dans le tableau (carrés n° 158, 21 et 8 et une parcelle de Rincon-Ranch, propriété située à 7 ou 8 milles de Chino et remarquable, d’après le dire du chimiste de la sucrerie de Chino, par la qualité exceptionnelle des betteraves qu’elle fournit — 19 à 21 p. 100 de sucre comme moyenne de plusieurs charges de voiture). Les dosages du salant se rapportent, comme dans les autres tableaux, à la couche supérieure d’un pied d’épaisseur. Sols et racines ont été analysés par M. E. Jaffa, du laboratoire de Ber- keley. ‘ SELS (pour 100 du sol). DÉSIGNATION des Chlo- rure, 2] 7 A Pureté. gels solubles. parcelles, Carré n° 158 . Carré n° 24. Carré n° 8 | Sol de Rincou- Ranch . CULTURE AVANTAGEUSE DE LA BETTERAVE A SUCRE. 391 Il est évident que les betteraves n’ont pas élé sérieusement en- dommagées par le haut dosage total du salant ni dans le carré n° 24, où 11 y en a 4 tonnes à l’acre-pied, ni dans le carré n° 158, où le salant s’élève à 3 1/2 tonnes à l’acre-pied. D'ailleurs, déjà par les tableaux précédents, nous avons vu que la «€ Vilmorin améliorée » et la « L. R. » avaient parfaitement réussi dans le carré n° 53, malgré ses 2 tonnes de sels solubles à l'acre-pied. Toutefois, le carré n° 8, qui a beaucoup moins de salant total que n’en a le carré n° 55, a donné des racines volumineuses et pauvres en sucre ; 1l faut en conclure que dans ce cas la faute doit en être à la composition du salant ; voyons ce qu'il en est: Les sulfates sont dans le carré n° 8 à un dosage inférieur de beau- coup à celui qu’ils accusent dans différents autres carrés ayant pro- duit d’excellentes racines. Le nitrate de magnésium également est dans le carré n° 8 à un dosage inférieur à celui d’autres carrés à racines riches en sucre. Mais voici un point remarquable: le carbo- nate et le chlorure de sodium y sont chacun à un dosage beaucoup plus élevé que dans n’importe lequel de ceux des carrés où la bette- rave à sucre a bien réussi. Peut-être avons-nous par ce cas-là l’indi- cation de la hmite de teneur en carbonate et en chlorure compatible avec une culture avantageuse de la betterave à sucre, laquelle limite serait par conséquent à 3200 livres à l’acre-pied pour chacun de ces deux sels ; cependant, il vaut mieux réserver pour l’avenir des appréciations aussi subtiles. L’extrême richesse en sucre des betteraves récoltées au Rincon- Ranch, sol argileux rougeâtre accusant à l’acre-pied environ 1 700 livres de salant total, ne peut être mise que sur le compte de l’ab- sence presque complète de sel marin, puisque, pour le reste, il n°y a pas de différence essentielle entre ce sol-là et les sols du champ d’ex- périence de Chino. En résumé, meltant à part les détails qui ont besoin de plus amples investigations, 1l appert de toul ce qui précède que des bette- raves à sucre de bonne et même de haute qualité — tant pour le sucre que pour la pureté — peuvent parfaitement être récoltées sur des sols contenant jusqu’à 12 000 livres de sels solubles à l’acre pour une épaisseur de 3 pieds, pourvu que le pour-cent du sel marin ne 392 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dépasse pas 0.4 ou 1500 livres à l’acre-pied. Ceci n’est peut-être même pas la limite extrême ; ce n’est que le maximum qui a été ren- contré dans les expériences exposées dans cet article. Pour ce qui est du carbonate, la limite de la tolérance de la bette- rave à sucre pour ce sel n’est guère de première importance à con- naître, puisqu'on a toujours le moyen de convertir le carbonate en sulfate par le plâtrage. Toutefois, autant que l’on peut en juger par les expériences de Chino, cette limite serait à proximité de 0.076 p. 100 dans le premier pied, à la fin de la saison sèche, ce qui équivaut à 3000 livres à l’acre-pied et correspondrait probablement à environ 4 000 livres dans les trois où quatre pieds’. A en juger par les faits observés à Chino, la qualité des betteraves à sucre ne souffrirait pas plus des carbonates qu’elle ne souffre des sulfates ; il n’y aurait sous ce rapport aucun rapprochement avec l’effet si nocif des chlorures. Le maximum de sulfates trouvé dans un point ayant produit de bonnes racines a été de 0.179 p: 100 — 7 200 livres dans le premier pied; vu les conditions de saison au moment de l’échantillonnage, ceci correspondrail probablement à 9 000 livres pour les trois pieds. Il a été dit plus haut qu'à la Station de Tulare on n'arrive pas à élever des betteraves bonnes pour la sucrerie; c’est qu'aussi, à Tulare, la salinilé totale est en moyenne beaucoup plus élevée et que, en même temps — point essentiel, — le sel marin y constitue pour la plupart près du tiers de la somme des sels solubles. Les sols de Chino sont ainsi beaucoup meilleurs que ceux de Tulare ; s’ils ne le paraissaient pas, c’est que, étant lourds, ils accusent, une fois mis eu culture, des efflorescences cristallines hors de proportion avec le degré en réalité fort bas de leur salinité ; ailleurs, des sols légers, sablonneux, pourraient se trouver en réalité chargés de salant au delà de Ja limite de tolérance, quoique n’accusant que des efflores- cences toutes superficielles et insignifiantes. (Néanmoins, 1l est pro- bable que les limites réelles même dépendent quelque peu de la texture du sol.) 1. Voyez la distribution verticale et les oscillations du salant passant d'une couche dans l'autre selon les dépôts atmosphériques, la saison, etc., dans les Annales de la science agronomique française et élrangère pour 1892 et la suite de ces études dans le présent volume. CULTURE AVANTAGEUSE DE LA BETTERAVE A SUCRE. 393 A Tulare, 1l n’a pas été trouvé de terrain salant qui eût moins de 12000 à 15000 livres de salant à l’acre dans les quatre pieds; or, autant que le montrent les analyses jusqu'ici faites, la moyenne arith- métique pour le champ d’expérience de Chino devrait être aux alen- tours de 5 500 livres dans le premier pied à la fin de la saison sèche, ce qui devrait correspondre à pas plus de 7500 pour les trois pieds. Un enseignement d’un ordre plus général se dégage de cette der- nière comparaison, à savoir : l’importance de s’assurer du total de sels solubles présents dans la couche de trois à quatre pieds qui ali- mente la surface en salant ; on pourrait le faire le jour où le terrain serait soumis à l'irrigation; cette façon de procéder étant d’autant plus obligatoire que la texture du sol peut parfaitement influencer le phénomène des efflorescences au point de donner à des sols par- faitement aptes à être avantageusement cultivés un aspect que géné- ralement n’offrent que les terrains absolument stériles. ÉCHANTILLONNAGE DE TERRAINS SALANTS Façon de présenter les résultats de l’analyse Suite DES ÉTUDES SUR LES TERRAINS SALANTS DE LA CALIFORNIE Par MM. E. W. HILGARD et R. H. LOUGHRIDGE Résumée par J. VILBOUCHEVITCH D'après le « Report » de la Station pour l’exercice 1894-1895, daté de 1896, p. 37-71. Le dernier rapport annuel de la Station de Berkeley propose une solution, du moins partielle, de ce probième dont les multiples diffi- cultés ont été exposées en détail dans la division E du 6° chapitre d’un travail paru dans les Annales de la science agronomigne fran- caise et étrangère, année 1893, sous le titre : De l Influence du climat sur la formation et la composition des sols, suivi d’un chapitre sur les terrains alcalins', et représentant la traduction annotée d’un livre de M. Hilgard publié la même année. Il est d’un intérêt pratique de porter les nouveaux procédés de M. Hilgard à la connaissance des chimistes français, l'Algérie possédant, sans aucun doute, des ter- rains en tous points identiques à ceux dont ont eu à s’occuper M. le 1. Avec une bibliographie assez détaillée des différentes questions se rapportant aux terrains salants, ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 395 professeur Hilgard et ses collaborateurs; peut-être même y a-t-il des terrains tout pareils aussi dans le midi de la France ; M. Lagatu, à Montpellier, et M. Gastine, à Marseille, ont fait, à ma connaissance, à ce sujet des comparaisons en se servant d’un procédé d’études analogue à celui de M. Hilgard ; ils devraient aujourd’hui être en état de confirmer la supposition que je viens de rappeler ou de la récuser, ce qui m'étonnerait bien. Quoi qu’il en soit à cet égard, le résultat auquel M. Hilgard est arrivé pour les cas qu’il a examinés, lui, selon sa propre appréciation, que je cite d’après une lettre datée de juin 1896, se résume dans la conclusion que voici: En prélevant, pour échantillon, une colonne de terre d’une certaine hauteur pratiquement réalisable el en établis- sant la quantité de salant contenue dans l’ensemble de lPépaisseur envisagée, l’on connait, dans la rêgle, la presque tlolalité du salant capable de monter un jour à la surface; l'épaisseur à considérer pouvant varier d’un pays à l'autre, ce n’est pas en tant pour cent, muis plutôt en tant et tant de kilogrammes à l’hectare ow de livres à l'acre qu'il faut exprimer la salinité des terrains pour pouvoir les - comparer entre eux el pour pouvoir en apprécier, sur les données de l'analyse chimique, la valeur agricole. Dans le cas des champs d'expériences de Tulare et de Chino dont s’est occupée plus particulièrement la Station de Berkeley, c’est jusqu’à 4 pieds anglais de profondeur qu’il à fallu descendre pour épuiser la provision de salant susceptible de réagir sur la couche arable ; dans d’autres régions, l’épaisseur des couches du sol et du sous-sol] alimentant la couche arable en sels pourrait se trouver être supérieure ou inférieure à ce qu’elle est à Tulare et à Chino ; cela ne devrait guère, il nous semble, rendre la comparaison illusoire ; en effet, du moment que l’on sait que la couche arable de telle par- celle de terrain est alimentée par un stock de chlorures à raison de 20 000 kilogr. à l’hectare et celle de telle autre par un stock de chlo- rures à raison de 40 000 kilogr. à l’hectare, ne peut-il pas nous être à peu près indifférent de savoir que, dans le premier cas, 1l s’agit d’une couche de 4 pieds d’épaisseur, et dans le second cas, d’une couche de 4 pieds et demi ou de 3 pieds? Bien entendu, à condition que le premier chiffre aussi bien que le second épuisent les chances 396 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. pratiques d’endommagement des cultures par le salant et n’aillent pas au delà des limites réelles des phénomènes observés dans la con- joncture la plus extrême de circonstances aggravantes du côté de l’état atmosphérique, de Pirrigation, du genre d’exploitation agri- cole, etc., etc. L'essentiel est donc de reconnaitre l’épaisseur de cette couche, dont le salant influence le sol arable ; dans les terrains salants conti- nentaux, tels que les « alkali soils » de la Californie, dont la salinité n’est que le résultat de l'accumulation sur place, multiséculaire, des produits d’effleurissement du sol même, cette épaisseur se trouve forcément en rapport avec la profondeur maxima de pénétration des pluies. Ainsi, dans le comté de Tulare et dans la partie septentrionale du comté de Kern, les pluies hivernales ne mouillent le sol que rare- ment à plus de 5 pieds anglais de profondeur ; à la fin de la saison pluvieuse, le gros du stock de salant circulant dans le sol se trouve ramené à cet horizon, la couche arable en étant à peu près débar- rassée ; pendant la saison sèche, le salant remonte dans la couche arable avec d'autant plus d'intensité que la surface du sol évapore plus d’eau ; dans des conditions particulièrement défavorables, on finit par avoir le gros du stock de salant à proximité même de la surface et le minimum là même où précédemment était le maximum, c’est-à-dire à ce niveau de 3 pieds au-dessous de la surface qui logeait la presque totalité du salant avant que le jeu de la capillarité et de l’évaporation superficielle eût renversé l’ordre des choses. Dans le cas du «salant noir », « black alkali >» des Américains, c’est-à-dire de salant plus où moins chargé de carbonates alcalins, à cet horizon limite le sous-sol présente un caractère physique très particulier qui permet de le reconnaitre à première vue ; le chimiste se trouve ainsi, du coup, renseigné sur la profondeur jusqu’à laquelle il faut qu'il prenne son échantillon: l'on se trouve, en effet, en pré- sence d’une espèce de planche de tuf cimenté par du calcaire et du carbonate de soude, dure, résistante, totalement imperméable, à peine perforable au moyen de la sonde; c’est ce que les gens du pays appellent le « hardpan ». (Pour les détails, voyez le travail de 1893, cité plus haut.) ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 397 Dans le courant des dernières années, M. Hilgard a fait faire de nombreuses analyses de quelques-uns des terrains salants des Stations de Tulare et de Chino, dans le but d'approfondir ces phénomènes d’oscillation verticale du salant et aussi les variations de sa constitu- tion centésimale au même endroit, d’une époque à l’autre. Nous allons, dans ce qui suit, présenter une partie des renseignements fort variés que contient le compte rendu de ces expériences et re- produire quelques-uns des tableaux y Joints et ceux des diagrammes (profils) qui nous ont paru les plus démonstralifs ; cela suffira pour donner un exemple du plan de recherche poursuivi, de la façon adoptée pour présenter les résultats et de la manière de les inter- préter. Et d’abord, un petit nombre de remarques introductrices : Les endroits choisis furent échantillonnés chacun à plusieurs épo- ques différentes de l’année; les échantillons, dans chaque cas, pré- levés par séries de 16 pour chaque forage de 4 pieds de profondeur ; l’analyse faite à part pour chacune des 16 couches successives de 3 pouces qu’il faut pour constituer une colonne verticale de 4 pieds. Les résultats sont donnés, pour la plupart, à la fois en tableaux ordinaires (1° en tant pour 100 du sol; 2° en tant pour 100 de la somme des sels solubles constituant «le salant »; 3° en livres à l’acre) et en diagrammes ou «€ profils » qui permettent d’embrasser d’un coup d'œil une foule de détails et facilitent énormément l'intelligence du cas soumis à l'examen; 1l serait à souhaiter que dorénavant tous les comptes rendus d’analyse de terrains salants soient accompagnés de pareilles représentations graphiques. Les diagrammes de MM. Hil- gard et Loughridge comportent les chiffres obtenus pour : le chlo- rure de sodium ; le carbonate de sodium ; la somme de sels solubles, autrement dit «le salant » considéré comme un tout réuni. Le nitrate de sodium n’est porté sur le diagramme que lorsqu'il se présente en quantités de quelque importance ; l’acide phosphori- que soluble, qui ne manque jamais dans le « salant noir », n’est pas porté du tout; les différents sels de potassium qui, dans la règle, constituent de 3 à 7 p. 400 de la totalité du « salant», sont addition- nés au sulfate de sodium et la somme est représentée par la courbe intitulée : « sulfates d’alcalis ». 398 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. L’échelle verticale (lordonnée) est divisée en portions figurant chacune 3 pouces anglais; dans l’échelle horizontale (abscisse), chaque division correspond à 0.02 p. 100 du poids du sol, La traduction en livres à l’acre a été faite en calculant sur la base de 4000000 de livres l'eacre-foot», c’est-à-dire en estimant à 4 000 000 de livres le poids d’une couche de sol grande d’une acre et épaisse d’un pied ; à 16 000 000 de livres celui d’une couche pareille, mais épaisse de 4 pieds ; ces chiffres ont été déduits par MM. Hilgard et Loughridge de pesées de P« alkali hardpan » dont il a été ques- tion plus haut et qui, en moyenne, pèse 4 500 000 livres l’acre-foot à l’état naturel (compact) et 3 500 000 à 3 600 000 lorsqu'il a été artificiellement réduit en poudre et qu’il foisonne. Traduction des inscriptions anglaises des diagrammes. Amounts of ingredients in 100 of soil. . Dosages des ingrédients en p. 100 du sol. Depth of soil column . . . . . . . . Profondeur de la colonne de terre. First, second, third, fourth foot . . . . Premier,second, troisième, quatrième pied. Total soluble. alkali salts . . . . . . . « Salant, » au total. Sal-soda ou Sodie carbonate. . . . . . Carbonate de soude. Glauber salt ou Alkali sulphates . . . . Sulfates d’alcalis (sel de Glauber). Common salt ou Sodium chlorid . . . . Chlorure de sodium. Alkali"hardpan' .#. 4 M Or, A TAtÉté expliqué dans lertexte: AmMmOunts Continue. ete LE Suite du diagramme. Rapport des mesures américaines avec les mesures métriques. Lada MOUSE CREUSE L:PONCE TA LEONE Mate Es MORE jbyres A ee se DRASS LAON sine 20e STE EU EU es 28 CRAN L'ÉDNMÉ NS à ta D, Désert LI) VID IRIURPe Livres à l'acre-pied' . . . . . — 1,233 mètres cubes. 1. L'acre-pied est le volume de terre correspondant à la surface de 40°,47 multi- pliés par la hauteur du pied 0, 3048. ‘GGS8T EU 79 SIN "on$tut UOU ‘9JRINI 9P UOIJEJS EI 0P JUEJES UIA9) UN SUUP SIN9PUOJOIË S9JU9JQUIP XUE JUELES NP UOIJISOUWO9 J9 XNEGOIS So9ES0( EX | 12 MERCI SEnNaEs 0 RE D FA Aer En ER ete ne du El, ES She SRE BEN DIÉ D TROIS COST IN O8: 0 08 APP NICE MOSS (BIT GT id) ne OI EL: 60 00 in V0 e0 QUO ‘7/0S 40 QQ{ N! SINTIGIYIN JO SYMNOWY ‘y où euwmeurfetq ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 400 er 9$ Solglf9 op SOH9S XN9P S0P 2AIJONASUT JPY & JN0} UOSWAPAUON ER] ANS ANIJ99] NP UOJU9J}P,] SUOIJJE SOU -UPU99 9)9 JUeÂE GI 19 G SIA} SOL 2AJUo 9SHAMO9 249n09 ET ‘ondedsip arjied uo Jo 29429s$0p JueJ9 uOrP)9894 EI m. 0 070‘ |079 089‘F & l k « « r: : + CTI" PORT TR Es Te Te es So APR CIC POTT SE « 09€ 08L°2 OST 009‘ 6 « g'£ +'08 8 €I « 600* £6T" 8£0” OF" ACC SUR er sedlerrnn à 9 Ut ns el a In * pord 2 or ogr logg‘e lo92 oser | 6'0 Leg |ng"220! 9°2r | 1007 | 500: | 80° | 610 BORA RE BUTS ARE VER RES CU PET CC TER TE DOI er OF Aoog |lotz 09€ dois 1'& | g're | S'26 | 3'cr | 100° | coo’ | 900: | 600: TG0S A RP NS PR RE PRES PE DETUENT ‘S{eU U9 1e} soonod Zy ep seyonoo xed efeuuorrrqueuog Ü —- —— = _ _ LE Es “eu uo st1d 919 100 fins mb 99 1n01 J8 Suoppjuregoe sa 08 |ozr‘r |o00'‘8e|\o01r‘r |080°1& « 6°G LL ANPLOT “du] | 600' FEI 980” tte +: * + spord o4gonb 899 mod ouuohozg « 08 0r0‘F |089 089°F « &° 6'£8 | 6'S « « J0I* | 970: Poe ei ete ere paid 27.91 NOT oUUSR Op « « 09€ O£T O6F « « g'e | c'9a « « 9£0° | £r0° EURE, CROIRE == 287 NE >CF n « « 092 |0g OIS « « 8°86 | 39 « « 920° | C0” RS ER Le = CF NB :2p nQ « « 088 |093 |OFl‘I « « 122 | 6:88 « « 880° | 930: DC ÉTÉ OST ONE — °F NE 266 NC « 08 00‘ |O8I OF&‘& « OT INRONTENIROSS « z00° | F0Z’ | 810’ tt: tt * * queuearsnout o9n0d 266 NE 09€ nQ « |oro‘r |ocg‘erlogr‘a |080‘r| « 9°g |g'6ez | 0'g | « 980° | OF£' | 790° tt tt tt" ‘perd 26 01 4nod ouuohozy m | de < 09G°£ |002 098 °F ce « 1'£8 | 6'9I « “oovi] | 9C£* | 020: DANONE Le . 29 08 6€ nq E > | « 06 over [0007 [068 6 | « 0'I 1:08 | 6'8I « CO0" | Fat’ | 001’ he pee ES °66 nt 20604 ?/ EE | « 0£6 |ogz‘e |ogs |016r | « 6*81"|"6"c2 Na: « £60° | gg” | Gao” MONTE CM = 20€ NE 228 nu E— « 09 0903 |00€ 0898 « g'& OUCPAINTAGT « 900° 903: | 0C0* ° : * * * *JUOUOAINIOUr 89n0d 228 nv sg NA }) : « 067 OFI‘F |084 COF'F Se 1'F 0'84 | 6'88 « GO0' | 680' | 870' tte rt tt * * * pord 28 91 Amod auuoñoyg « 0G OGI‘r |028 OLF'T « CHE Ne: INCLeT « G00° | CII‘ | 280: CINE mue FORT SC Æ SFA NE »18 NC « O8I O8F‘T |06 069 T € &'L g'18 | g'G « GI0' | SFI° | 600: A NME OX EE = 218 NE 28T NC | « « OFL 018 066 F « G'LL | T'a&8 « « FLO‘ | T0” RAP pie SEE = 28T 0% 20 NC | « 08 OZT 091 066 « L1°G 9°SF | L‘'CF « Z00° 2IO' | 9I0' tt tt * * + * : JUOMOAISNIOUT 99nN0d ,CT n6 987 n« | 08 |067 |oge |o18 |078 TON Tr RO ZEN GRO ENIIENC 900' | 900° | 600: GEL Q 1 dec *Pard 197 21 AnOd auuañoyg | « « OGT 06 OF& S'y « g°8g | g'26 | 100° « FI0' | 600” AA ONE ROSE — € 06:66 nl| « 08 09 O9T |078 W g'8 | 0°63 | L°99 « 800° | 900 | 970° 4) ed] OMC LC LOS O0 sn — el nt+6 nq | « 06 08 0G 088 LS cor | g'16 | L'e8 « 600 | 800* | Goo” CA | COCO CEE SCENE — 26 nG29 nT| OT |08 (02 09 OfT 8°2 SI | L'08 | 1°9r | 100° | 800‘ | F00° | 900° S10° RTE — o9 nr»g nd OT 09 0G O0T 088 OT G°'L6 | L'66 | G'Gp | 100' | 900° C00' | OI0° &c0° * + + + * + * ‘JUOUOAISNJOUF 90n0d »£ n6 0 o(T | CC | | CREER" CES | ONCE" REED CREME EEE | NES © ENCEENCEESS CEE CREER DÉPUR ER NOR PAG RE PER R : ne) a TES je O| & w » ls Qle Slaule e oQle gleaulse LE Bee ES =» = Ba € ÊnE CRE EE ME EVE EE 2 = A ‘SNOTTILNVHOY Son lenOolEs cols à = soplses|= ee) $ Fr icgsleos|seoo| Sslesoes LES ES AE Me CE PES ESA A et EPA ST SE ‘ Dr EE rs x EE x &|° = Sup —————, , —— TT |], TT “HHOV/I V SUHUAIT SENTE AS ‘108 N€G ({} HAO4 NOZTUOH | ATVNISALNAND NOITISO4aNON ‘oy9n09 9729 E JueI0d ‘sonbodg xnap xXne aguton fTRU U9 9JS21 9] À AUOILAT Jo 9M9A J08)9 101/P}989A EI “SIP U9 99A9/94d 9J9 R JUOMOAISNIOUT 99004 ,8J NE O 2p 249n09 ET — ‘J OÙ AUUPASPIP NP JUBPUOÏSAIOI ‘} ÇU AH9S 401 » NTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. ECHA og | o66 |ogo‘er|gse‘r « OFT |OLS'T « 08 |OZT « 09 losg « 0€ |ogg « 08 |0g8 « 089 |086‘TIT « 068 |0Lr‘& « OPL |OIL‘F « OIT |0g£'g « 06 0688 « 008 |000'g « 09 |O88‘r « 08 002'T « « OCI‘E « 081 |08£ « 08 06 « « 09 « « 0F 0G « 08 RDS | RS | CUT [æ) 8 218 e18 » Saslsaclese E ® $ SE ©" ETS 8 515 515 $ œ 09F 0G (172 O8T Lé4 6 (24 0FG 018 STI 088 090° 009 0G& OLT OF 06G OST OFT OGT OST *SIU[E p sa1e}[ns & T "HUOV,T V SHUAIT LA AT O2F‘& OT& 0GF 089 07°C 086 ST 000 ‘€ O81‘c 019°F OZ6°T OLT‘T OS 098 0F& 008 O9T 098 SD x N Nm er] NN M4 Gi À «3 0 “N où t- rs Là] m4 mm = ne Om “ 1Q HS D NI GI 1 m4 QU SHN DADE © DiQH #4 OS mA # br) = A GI c Où = CIETNIQ DLOMmO "M © LIN D M M D HO ; on re n Olu [æ) ee © Z|e | © NIUE ME EE El I EN EI = Eopleon|lsool $ p 5 = |5 SE = at : GIE EE CNE: œ TT “LNVIVS N« HIVNISHLNYN NOILISO4NON « 900° 6II" F60° 6SI° « £00° LF0° €&10° &90° « &00° L10° G00* F80° te 900” 60° 200" CTO" « £00° £c0* &I0° 890” « £00" G$s0” &c0° OTI° \ 970° 668" F80° 866 «G 6&0° LTG" FCO" 00£° € FI0"* TIF° 180” GIC° « TI0° (4 CIE” T9F° HJ 600” 688" &80° 086" Ke G00' | &&I° 60° FSI" « 900" G81° 090 87° « &00° O21° C&0° L6T"° « « 001” 2TO° LL Ki &GI0° 860" +00” FCO" T00° « 900” £10° &&0"° (s &00° 600” £T0' 60° KG ( 900" FI0° 00° « « F00* &GI0° 910" G00” « 800" £6i0° 980" [æ) Éd a EM ET AE as|eas lea) else EXO E ME ES IS NÉ SNS RITES Ba PS EME CRT AIRE GUEE EE ‘108 NA (OL HNO4 * spord o17Dnb 82) ANOd auudhoyg * * * + pord 57 29 4nOd ouushoyg Ê — aSF NE °C} nq à = oCF NU 987 nCT 5 == a8F 0% 26€ nQ * JUOMOAISNIOUT 9904 :6€ nv ,9€ n * * * “ pord »g 0) anod ouuolioyg é = 296 06 5£6 NC € — 2£6 08 :0€ nŒ F TS 20$ 0 9/8 nq ‘ JUOUIOAISNIOUT 99n0 223 nE 3:78 nA pord 28 21 An0d auualozg H — 0P& NC »18 nq PAZ — oT& NE 381 nG 5 cu = 28T UE sCT NC E = JUOUOAISNIOUL 99004 ,CT n6 287 n4 : * * * * * ‘poid wy 27 ARNO ouwIhoY 9 — o8[ NGoG nq ® — 26 0659 nn 2 = +9 Nnts£ nq * JUAMOAISNIOUT 99n01 4€ nt Q eo ‘SNOT'IILNVHOM sap NOZIHOH ‘c68] ]N0P 06 9[ QUUOIIJUBUI9 SIBU ST ol OUPS LIP NP 79 F où 2H9S LC] O0P IN[99 onb dUUQUE OT :{ STI UOU JUEJUS UIBHIOI — ‘N F} «UE 919$ : D J 919$ 0))09 & JueJaoddea 9$ Soul Sof 1910A ‘poid ,g np jaënb ,3 of suep jaenb ,6 np Juejuourai u9 Jn0} ‘O0 ‘d 1° JApuryJe 9qan09 9))99 9p WNUIXEU 91 nb SW AQU UD JUOUEIUION 94) ISSN Juorvauerde,s sopeyqns S2p 9qin09 8j op Sjuoplooe soj S poid ,€ np Jaënb 4y 01 SUCP 007 ‘À £0°0 v 169 WNUIXEM UN 9048 ‘O[VOIJIOA OUT un U9 onbsaid Je491179,S UTIBUT [9S NP 9qAN09 6j : Juowoagrquo onbsord — ojeuoquro np oqin09 vf ‘NoAI Wu ne ‘Jr onb mo2 Jo Juowojarduoo navdsip Jreane pod ,& np 91ION ,% PJ SUEP « [RJO) JUPFES » NP oqun09 eJ Je} onb 9pnoo of :SogJUap)2e SULOU ‘SaQrNe Sud quoreaeredde soqan0o sal onb Juotmopnas oouaaIp 2))09 9948 ‘f QU oUUPASEIp ne dnooNPIG HPLIQUOSSOL D F NP) JU9591d NP SIQUUOP S0F 9948 JIAIOSSOIP HO, onb oMPAISCP 9 — ‘J OÙ AUMUPISEIP NP JUS] À pnqHJU09 v (CGSJ Ur 9 Jrey ‘Ib Inf09 op Spord op outezip un & JIeJ 9J9 U 06040] 9] 26 .— 1897. — nu. SERIE ANN. SCIENCE AGRON. — 2° DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. ANNALES 068 OGS FE | OFEL 008 F& 66 9°9c G°YE 610" | ÿL0 | 950 ggL' | Spoid y sop anod ouuañogy OSF 006 009 080 F G'YE 9°66 gg 700” 800” Gr0° 1&0' |‘ poid ,y 97 4nod auuañoyy | 07 08] 09€ 086 AL A ER LL RS 2) CS ET ER D | OYT (ra OF& 00€ 0'L& | 0°6& | 087 | 200 | 900 | &ro° | geo’ |’ * * oonod ,zy ne .9€ nq | | 08 00€ | 088 0666 | 8'g 698 | 6°L G00' | 910° | 100 | 880° |‘ Pord 6 27 anod ouuoñong 08YF |066% |0Y88 |0ÿ60r | S'#r | 0'8ÿ | S'Le | Leo | 66r | 960 | 9çe' | poid .G op «nod auuoñon O8 0968 |066SG |0989 br 0° 96 6 0Y C00' 680° | 90: 6çr' |‘ poid ,,} 99 nod ouuohont LOF (era 68 O0T & G'I 9 8ç G'68 700” LA) 68°0 0FG:: PNR MELON ESSOR E RONLEIT 0Y O0TI | O6 O£9 1] (oi ie) ARTE 700” OI” 6y0” COL | ER En EEE GR TO RU | 07 066 (0er 0GS Ce y °69 CAT 100” 660” &&0” GO, 2 REMOTE 70 (] | 06 0#9 OSOT OSLT & 6 6-66 6 $S 6)0° 790" SOI” SLT = |» ° * Ssamod € & 0 2Q | ‘wnrpos "wWnIpos uInIpOS "UNIpOS ‘unIpos “TUNIpOS "SIUOIEP *SI[UOTEP "SIIVOIRD LPITSOTER s[es "NOTITLNVHOH ANdVHO op op ‘CIO op op op ap ms a : sop soyey[ns sayeyqn sa4% 91N10[U9) | 2800180) Jens 9INI0O) | 9JE00Q1E9) em s 2N10|4) | oyeuoquef) | SoYuJmns (OI = 3 JURA P Le ES | ‘AIHNIOS NTIVS AONVIAN N NOZIHOH HHOV,/I V SAUAIT ‘110$ AG (OT 4NO4 O0T HN04 ‘D & CUCISEIP NP JUAMSSIAR)Q.] E IAIOS JUEŸY — ‘2 Z oÙ 91188 ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 403 Diagramme 2 a. AMOUNTS 0F INGREDIENTS “ /00 or S qu OA 060 VAN E 4RCH, | 1894] bed ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 404 | 067 & OLE « 06 06 O6T 09€ F 06] OGY Ocy | 0£E | : OGL 0S& 06] 06 09] — | ‘“unrpos ep aini -0119 TE —, —— — OLS FH 020 F 06 0Y ( 006 09Z & OTS 06Yy OSTI OST 0ÿ0 L 068 à OTLT 0967 OSFT a *unIpos op ayeuoq -189) OGF OF 0ÿ9 HF OL& (RES (ra OLT O6LY 088 O&y] SHB2T8,P soyeyrn sg ‘AYOV,/T V SAUAIT OLY Y& ÿL0° 060 & 160” 09€ 600° | L&O' 08S 600° | y00' | S£0” 0C6 600° | y00' | &S0’ 098 610° | 060° : LT0' 068 6 ÿ60° | #60 | SEE 088 GI0* | FSO' | S80° O£E é &rO" | GO | CYl OSL “eÿ AO ML) 1 EN ES #1 098 & k 660" | TSI” | SCT 06G à 810’ | 9LF° | Y60 O£S 8&0° | 6&c | 960° 00} ' 6GI0' | OLT' | F&0° OGS G 600% 9SJ)ALTIS 080 & k TO |ManTE IT “œnrpos |‘wnrpos *nrpos | ‘wnIpos un ap ap SHBII6P op ep »1C 1570 ous |opeuog urmel 101 au te) 189 0149 -189 978004 léoyeyng "LAV'IYS ANG 4'IVNISALNHO NOILISO4aNON *Q à AUUPASPIP NP JUAMASSIARIAI R IAI9S JUEÂY — "9% oÙ 8TI8S SHBOTGP ‘110$ Na (0T HNO4 9€0° &c0”" S60° 981” 9% 881” AT SL& 988 S88 66C" OT& Gi G S08° S1[BOIE,p s[as sap 18101 mm" | — ——— me = Spoid $101) Sa] 1n0d auuañojy * * poid ,ç 29 An0d ouuoñoyg or 096 NE 66 n( 4££ Ne 0€ 0Q — 206 NE ,18 nQ JUATIAAISNIOUT 99n0d ,L& NE ,F& nn pad ,G 91 An0Œ auuohoy LE oYà 0B 4J8 0Q e1& NE SI nQ Fr aS} NB ,CT nQ JUAUMAAISNIOUT 29004 ,CJ NE ,8] 0 paid xE 21 An0d auuohoyg ES ac} 08,6 n( :6 nP,9n0( — +9 D 0Q * JUAWAISNIOUE 29n0d ,€ ne 0 2 ‘NOI'TILNVHOG SNAdVHO ap NOZIHOH ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. Diagramme 2 6. Amounts et Îngredrenis in 100 of Soil 14 16 18 CF ATP 4 : .24 0 r02-Roke 06 logs 2510 711 26 Depth, 0! # Er 3 # pet il | AIRE LI 405 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 406 06 « « « « « « «C « « « « «€ « « « OI6F OYE Où (1 « 08 OTF (1 Où 068 (ra 08 09 O8T 060 # OGF OG& O6à 086 Oÿr 6 OS 089 066 080] 06L1S OY8T OOLT OCOT (rm OINIO[U) ‘umIpos 9p oyeuoq1e9 “HHOV,T V SHHAIN 07 OCT OIT OLT OYT OLS (tra (or d 007 O6T 009 008 OLT OST 08 066 09€ 098 OCT 09} "SITUOTEP saJeJrug OL& OF |079 & F } O6 SF 0L6 O9I OE& 068 066 08L 0cE 067 08€ OJS 0S6 & OTL OLS OLTI 008 TJ 099 8 008 & O86T OSYI 0£0 & & Y& FYG|* G O'GL | « 8'Y6 17 LY | « 1 9316 62] « l'LS ; « 7°09 « ( L° « OùTS « 09 « C°YL « L'6L « 6 LI] L 82 G°6L 0'S8 F'L9 9°68 8°cs8 6'°0L 9 07 G'&l «C « SN © D — 7 Où ‘unIpos ep O1nI0|U9 ‘UnIpOos 9p aJeuoq1e9 *SIUOIRP s9J8Jn | | *HMIVNISHLNHO NOILISOANON ‘2904 |$00 ÿ00° &00° y00” « 800” 600” y00” &00° 600” « G00° « &00” 600” 070” 1&0” « &00° 880” 6GO' cn [à — wuntpos ep 2INIOTUS) "SILU2IE,D saJ8JInS *SITUOTEP sap 1810L ‘untpos ep aJUU0qIr) so[qnIo8 S[0os ‘108 14 (OI HNO4 2% OUMEAISPIP 9[ T9SS94P e Ÿ AIS JUBÂY — ‘2% où 819$ *$po1d ou70nb so7 1n0d ouuañoyy | (| poid sÿ 91 AN04 ouuohoyy e87 NE ,6Y n( = e6y NE Gr n( MALE AUS JUAMYAISNIOUL 99004 ,6£ NP ,9€ N( poid ,g 07 1n0d ouuañhoyy = 9€ NE 66 nQ | j Ex 266 NB 06 nQ - FE +06 NE 4/8 nQ “JUAUAISNIOUL 29004 ,L3 NE ,F& n( °° * poid ,% 97 n0d ouuañoyy ; Sp oYo NP 18 n 2 En a1è NE 4,87 n( à = CASA OL UL PT: OL 1 à *JUAMYAISNOUT 99n0d ,6J NP ,8J n( * ‘ * * pod ,E 97 Anod auuohoy N =, oc} 0 ,6 n( ; S °6 NE ,9 n( CR 09 0,6 nt | JU AISN TOUT aonod 6 NE 0 9 ‘SNOTTILNVHOMN sep NOZIUOH ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 407 Diagramme 2c. Dept ofle gi _ du 06 98 ét , IE £ .20 272 24 16 °28 DRE 36__34 : Les diagrammes ? a, 2b et °c représentent la distribution verticale du salant dans un seul et même terrain, partiellement amendé par le plâtrage, et qui a produit de l'orge hauté de 4 pieds : les 3 torages sont à quelques pieds seulement de distance les uns des autres ; les différences dans la distribution du salant ne sont dues essentiellement qu'à la différence des conditions au moment du prélèvement : 2 a, ayant été échantillonné le 31 mars (l'orge était haute de 2 pieds) ; 2 4, quelques jours après, en mai, le terrain ayant reçu tout ré- cemment, par le fait d'une pluie, 0,9 d'un pouce d'eau ; enfin 2 c le 21 septembre, après > mois de sécheresse. ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 408 OGE « 0LG 08 « 006 (tra OQT OTT OL& |'unipos °p | JUIN 06£L 6 (172) OST OLI OfT OGT 0GY O0F O0T OST OL (a 097 098 069 09L s|OÿS 9 066 OY9 00L] OI & OSE6 |01981 O€T 068 OL Où 0ù 07 (re OF (ya OfT OGF OYSF (1 OT& 06 OG& « 00 06 089 OF OF6 « 066 « 00L OYI 066 OL& 068 à 067 & 10666 OfE OYST OL£ OG& à 066 066 & Oÿy I 016 *unypos op CAUR ee ‘unIpos ep oyeuoq SITB21E,P S38JInS *“HYOV,T Y SHHAIT 006 6 008 6} | G00° | 060 « £€00° « L00” « &00” « &00° « &00” « 700” « 600” « C00” « ‘098J] « G00° 010” « "29P4] L&o' | ‘997 800” F0” « L&O” £10° | G90° &00 | 660 L£0° G60° YYL. on) OLr 6| 96 060 F « OL& « 068 « OGT « 0Y£ « OÿE « 09€ € 007 « 08 « 008 « NE + © © t- _— [#2] ït- _— Lai « #2] cn Le) LE] CO Gi co © © 19 me Où cm en) a 0607 (Ike 098 & OG6 € NO Commun MmR mo mm © © où] LS D OÙ 1 it ON D mi 19 I © 19 D M D © LL (trare SY&' FST Ga” 66c" 166 GRICN rt 7 Ru © 19 ce GS OST £ © mm © D DO LE E mm © Cù GO D -# con ‘wnpos ep oinx 0149 ‘UnIpos 9p PFEUOQ |goyuyqng -189 ‘seqnIos "SHUOTEP | ereore p S[9s sep 18301 ‘unipos |‘Wnypos ep op on ayeu0q 049 189 ‘wntpos ep OYETIN ‘wntpos op OYETIN LH A0 ‘180 AE saJeyins “LNVIvS na A'IVRISHLNUO NOILISO4 NO9 ‘110$ Na (0T 4NAO4 ‘6 QU AUUMPASEIP NP JUOUISSR)9.I & IAI9S JUEÂE SOIJIU) — ‘€ où 8H9S *spaid y sa ‘d'ouuahoyg ‘poid ,p 01 *d ouuohoyy * * * ‘saonod $y e Gr *saonod y e zy ‘saonod &# R G6£ "saonod 6£ Re 9€ ‘pad ,g 01 ‘d auuañoyy *saonod 98 e gg saonod £€ PR 08 | *saonod O0£ R L& *saonod LG R yo “paid ,& 91 ‘d'ouuañhoyy * + + *saonod r& R JG "saonod JZ RSI *saonod SJ R CI "699100 GT ER GI “PAT 14 91 ‘d auuahory PAP E6onnot: ZT RIG * ‘saonod 6 R 9 * ‘saon0d 9 R£ * ‘saon0od & 0 a a. se . . . . ES *SNOTILLNVHON sap NOZIHOH ‘001 ‘4 06 0 op (npuoque uorq ‘onbrogy}) WnmIxeUT Un & JRJOANNE 9[f9 [OS NP 998JANS EI vnbsnf « 1[R]0} Juejrs » np 2qun09 e] JIPOSUOIOIT U0 1 CGR] TU € Of JUUOQUEIY SpOId y ap ojuey 9840 ‘UIOT SN[d Spord XI R *9[H9JS HNSAUI JURIES UE], mr UE ISEMIRUnE HAT PME SNS See Omer PE PP A EE AR A Ex ie CERR -- SR ui LT AE TN EE = (Es tn ie ne cannes men À er ee om FETE DL” al" OL 89 95 #9 cf LS 85 55 ë OS EN 9 PP CP OF BE JE pe dE UF 82 S7 #2 7 0€ C7 SF #1 à O0 80° 0° »0 *7/0Q 79 QO1 N! SLH3IIGIYSNf 40 SINNOWY ‘£ oU omtueafrrq ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Le” | sie COR & DL, TRS + a nn. el) A ds ne ” L de gr] OGF F 0019 |008 & 080 6€T |0F86& F'S8I F'TG £'6 G'FF 0°3 GG0'0 | F90'0 | 860'0 | F£I'O | L10'0 | 8680 O6T 09 0F9 7 0007 068 & Sr 897 F'6F 8'S& Le £€00°0 | FI0‘0 | IF0 O0 | 1&0°0 | F00'0 | ES0'0 OCE F OFSF |099 OO IT |06S 0& 0'T& 0"&& s'& £°8r 8° 801"O0 | £871'O | FI0'O | 8F&'0 | 060'0 | £879°Q 08€ 068 068 06G OSFI £'c& 0'9I &'08& )'T6 9%9 &60°0 £€0°0 | 680°0 | 0C0'0 | 600°0 | $FI'0 OT£ 0C£ OIT 026 OFLT 8'LT L°0& g'9 8'ec 0°£ 160°0 | C60'0 T10'0 £60°0 F00'O | FLT'0 086 09F 08 08C & O7G & L'OT G'&I c'& L'69 [di À 860°0 | 9F0'O | 800°0: | LF&'O | CIO'O | FGE'O 068 & 006€ 108 06r 9 OTS8 ST 8'6G £'ca 1'0 Y'6y 8'9 6860 | 0C£°0 | 8000 | 009°0 | F60'0 | ESS'T Q Y OUeASETp NE PUOdY — ‘9 Y 2118 00F & 08126 Ï|OFFIT |06008 |0996F g'g £°&& T°398 0'SF LaT: 060°0 | &&I'0 | SFI'0 | 976 O0 | 9000 | 9FS'0 00F 098 083 £ OF9T 080 OT 6'£ 92e & 92 1'ST &'T 0700 | 600°0 | &61'0 | 8600 | 5000 | £L&'0 000 & 08F6 |0918 066 8T |08986 6°'G LATE &'IT 0'FG s'0 090°0 | 968°0 | F60'0 | FSF'O | 900'0 | OF8'0 OT& 009 086 O6FT 088 & v'9 GEST 8°6G ci: S°T 180°0 | 0900 | 860°0 | SFT'O | FO0 ‘0 | 8£'0 OT& OFF 086 O0TT O0FL& 9° O0'9T L'ag 9°88 T'& 180°'0 | FFT0'0 | 860'0 | 901 0 | CO0'0 | FL 0 076 066 090 € OGC T 086 & g°s G°FG &' 96 9° 26 8'& F£0'0 | 660° 0 | 9010 | OCT 0 | 600 0 | 86£'0O OF&T 06€ L |O7L OTGYI |08G 6& £°q G°TE L°6 T'09 &'0 FGL O | 662°0 | rL0'O | 9IF'T | GO0'O | 8CL'& CESR COS EN CEELT EL SSSR CRM NM TES | CESSE CEENNMPEMMEENRS X--MERNENPERZ CESSE ect > | CRMMENMR EEE TS — COMMUNE GORE D CE = TS Et ER Re RE CE NE EN le EE Et pa es CA EE 6 CE ER ES ETES ET ET ES OT, Ep |[Eon [ses [2 124 S É06 lé om ES léÉopg vor |£os | Son | 00 | sos |2or|pes D 'pse | PLREn El eS AIRE on LEE EN BEC EE REA EN RE QUES SR OR ES Se Te . . 2 ES L a . . e 5 = H B s x à = 2 . 5 = à mm 2 © 2 — — 410 “HUDVQI V SHHAIT “HIHNIOS NIIVS GONVIAN Na O0T Yn04 ‘"I0OS na OO0I AXNO04 *2D y OUURASLIP NE PUOÏPY — "2 ÿ oU OLIS a *spard & 822 4n0d auualiozy * part 2 29 4nod auushoyy ‘pad x37 91 AN0d auueliozy RTE — €I869Q "APS PE (528 0 SR ER EL RUE | * * * * soonod e0eq *6pard g 821 4n0d auushñoyg * perd 2g 21 An0d ouuehñozy | *pa1Œ 127 29 ANO ouushozy RON EI TEeC ne: ee LRO EE AR CARE US RS La, * * * * soonod $ e00ca| ‘uoypnuegoe onbeyo op NOZTHOH ‘001 ‘À Fa'e L JBIOANNE 9710 ‘9 F omRTÉRIP 9[ SUPP [OS np 99ejans ej enbsnf 19800014 8 00 !S 001 ‘A JG T E MBA [RJ07 JUEIES NP 9009 PJ ‘D Y AUMRASEIP Of SUP — ‘9198, & AUUO) AUN,P UOSIA R 9810,P UOJ 9p 9)09941 oun guuop & mb ‘(9y) Hopuo puosos ne jney op spoid y Jupe one ?(9 y) MOupuo Jonmoad ne a1Jl019 & asnjou 9 9810,1 ‘YGS] 21qu0)des 119 Suour -OUT AUQUI NE SpAIPAIÉ SHOJJUEUIY *: PpUOUE JUoUOJAEA ‘JIey 90 0p ‘Je QAJEIÉ JUIES UT) OUQUE UND SOJUOIP Sajooded xnap e juayioddez 9$ a —— ee me + dre ++ =" Le + + Lshrstrt 1%7 ST ZT 801 HOT C01 96 26 68 PP 08 1 A 09 79 09 2 2 PP PF WE 2E 6e 7/06 70 O0! N! SLNTICTYINY 40 SINONY r—- UT I I OT TL rrwrper RSR UT le mis rer) - Le 69e F9 P 092 Sa Se re pre 0e _SEL CE -BET "ré2 082 JI2 22 802 r0é 00€ 96! Re Es CIN eee 967 26/ 881 F1 OB1 SLT LT 891 F9] 091 961-257 OP) Pl DL SET 201 Bel Fél 021 SE (GFNNUNOD) SLNNOW °7/0S 40 QO0L N! SINTIGIWIN] 10 SLNNOWY 412 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Commentaire. Les séries 1 et 1 a se rapportent à des points éloignés l’un de l’autre de 15 pieds, cependant à peu près identiques pour ce qui est du dosage global et de la composition centésimale du salant; à condition de ne pas nous arrêter aux tout petits détails, l’on peut donc se permettre de considérer les deux tableaux comme s'ils se rapportaient à un seul et même point. Le premier (1) représente la distribution verticale du salant dans le sol au printemps, en mars-mai ; le second (1 «), au commencement de septembre, après une sécheresse de quatre mois ou davantage ; or, Contrairement à ce qui a été dit au début de cet article, on voit que la distribution du salant n'a pas changé ! C’est que les conditions dans lesquelles ce sol se trouve compor- tent à peine une évaporation d’eau par la surface et, partant, l'appel des solutions salines dans la couche arable n’a lieu que dans une mesure négligeable. En effet, l'endroit en question, situé à un demi- mille anglais au nord du champ d’expériences de Tulare, est un terrain vierge non irrigué ; comme la provision totale de salant n’y est pas très considérable, un dense gazon de graminées et d'herbes a pu s’y établir par un printemps favorable, les pluies hivernales ayant évacué le principal du salant à une profondeur de trois pieds — horizon qui n’est point atteint par les racines du gazon; ces racines ne dépassent pas la profondeur de 18 à 24 pouces; à la pro- fondeur de 24 pouces, le taux total du salant, au printemps, y est de 0.21 p. 100 du poids du sol ; les racines d’un assez grand nombre d'espèces sont aptes à supporter sans dommage ce degré de sali- nilé. Or, la surface du sol une fois gazonnée, elle n’évapore plus que dans une mesure insignifiante, le principal de l’évaporation de l’eau contenue dans le sol se fait par la voie même des plantes; la couche supérieure du sol, bientôt réduite à un minimum d’humi- dité par le fait de la consommation d’eau que font les racines super- ficielles du gazon, assume le rôle d’une couverture protectrice à la manière de ces « paillis » en usage dans les pays à salant du midi de la France. ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 413 Le fait est que la parcelle à laquelle se rapportent les deux ta- bleaux ne produit pas d’efflorescences salines. « Une culture quel- conque », font observer MM. Hilgard et Loughridge, « tendrait à empêcher la montée du sel à l’égal de ce gazon naturel, pourvu que les plantes aient bien pris au printemps et qu’elles constituent une couverture parfaite » ; mais dégarnissez ce sol, aussitôt l’évapo- ration superficielle et l'appel par capillarité reprendront leur plein jeu et, avant que vous ayez eu le temps de vous y reconnaitre, il y aura une «tache » manifeste, avec efflorescences et tout ce qui s’en suit ; et si l’hiver n’est pas très pluvieux, peut-être qu’encore même au printemps suivant vous vous trouverez en présence d’une couche arable trop imprégnée de sels pour permettre la germination des oraines que vous y aurez semées. C’est ainsi qu’une luzernière, une fois créée, prospère pendant des années et, des années; mais voici venir une saison où, pour une raison quelconque, le semis n’aura point levé ; la surface dégarnie, exposée à l’insolation et à une évaporation intense, se remet à fonc- tionner à la manière d’une pompe et bientôt la couche arable du champ est resalée si solidement que peut-être faudra-t-il attendre plusieurs années avant de pouvoir y remettre quelque chose d’utile. « Le cas que représentent les tableaux 4 et 1 & est typique pour une srande partie des sols de la Station de Tulare et du pays environ- nant, pour mille autres localités de la vallée de San-Joaquin et pour l’auires régions de la Californie; autant que ces sols demeurent abandonnés à eux-mêmes, iln’y a que de loin en loin quelques ta- ches d’efflorescences salines qui y apparaissent ; à part ces taches, le reste du terrain se couvre au printemps d’une luxuriante végéta- tion d'herbes, pour la plupart annuelles, dont beaucoup ont une floraison superbe, de sorte que le pays prend un aspect fort al- trayant. Avec le progrès de la saison, en avril-juin, ces plantes mon- tent en graines ou se dessèchent; seules, subsistent quelques espèces spécialement adaptées à la sécheresse, la plupart vivaces. Dans la règle, c’est-à-dire à part les saisons anormales, la super- ficie globale des taches salantes dispersées de-ci de-là dans la cam- pagne, si on voulait les additionner les unes aux autres, se trouverait demeurer à peu près invariable d’une année à l’autre, tout en ad- 414 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. mettant des changements de place. Défrichés et mis en culture, sens irrigation, des terrains de cette nature, dans les années particuliè- rement humides, produisent, grâce à leur énorme richesse intrinsè- que, des récoltes de toute beauté qui dédommagent le cultivateur des échecs absolus dans les années plus sèches. Naturellement, c’est là un jeu quelque peu hasardeux auquel maint brave homme s’est ruiné ; il faut ajouter que quelques heureux, particulièrement favo- risés par Ja chance, s’y sont enrichis. Pendant quelque temps, cela dure ainsi, telle année comblant les greniers, telle autre semant la ruine et le découragement, jusqu’à ce que la population se décide à établir l’irrigation artificielle, et alors voici ce qui se produit: Pendant quelques années, l’on a des récoltes plus belles les unes que les autres, mais avec le temps, l’on remarque que de petites taches salantes anciennes et bien connues se mettent à grossir, font tache d'huile, en arrivent à se rencontrer, se confondent en une seule grande tache ; d’autres apparaissent où l’on n’en n’avait jamais vu, d’abord minuscules, € pas plus grandes que la main », mais, avec les années, s'étendent de plus en plus jusqu’à ce que le champ se trouve à ce point moucheté et coupé de taches et de bandes sté- riles qu'il ne reste qu’à plier bagages. La qualité de l’eau employée pour l'irrigation n°y est pour: rien ; il s’est passé de ces choses en Californie, même dans les pays irrigués par des canaux dérivés de la Kings River et de la Kaweah River, dont l’eau est d’une pureté idéale. Le diagramme n° 3 donne une idée bien nette de l’état des choses dans un pareil terrain dégarni de couverture végétale et soumis à Pirrigation. « Souvent, le tableau sera moins prononcé; soit que l’é- vaporation n’aura pas encore duré assez de temps pour amener le plem de ses conséquences ; soit que, par une culture soignée et attentive de la surface, le terrain aura été, jusqu’à un certaint point, mis à labri de ce phénomène de « montée » du salant, soit que, enfin, le sol porte une couverture végétale protectrice pendant toute l’année, comme c’est le cas de luzernières irriguées. » La concentration du salant dans la couche arable aux dépens des ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 415 couches plus profondes atteindra son maximum dans des vergers irrigués où le sol entre les arbres fruitiers demeure nu; dans ces conditions, lorsque, en plus, le salant comprend du carbonate de soude, la couche arable s’affaisse et finit par se convertir en un tuf alcalin absolument analogue au « hardpan » du sous-sol ; rien d’é- tonnant à cela — mêmes facteurs, mêmes effets. Le € alkali hardpan » étant imperméable, la surface de terrains ainsi dégradés ne tarde pas à se couvrir de flaques quelquefois permanentes, d’eau noircie par le fait de la solubilité de l’humus en présence du carbonate de soude. Diagrammes n°° 24, 2b et 2e. — Ces diagrammes représentent un terrain salant qui a reçu en 1894 et 1895 un amendement de plâtre’, chaque fois à raison de 1/2 tonne par acre ; cette intervention était devenue nécessaire à la suite du resalement de la couche arable qu'avait amené l'irrigation. Antérieurement cet endroit — un ver- ger — ne présentait qu’une insignifiante tache salante en contre-bas du reste de la parcelle ; mais dès l’établissement de l'irrigation cette tache s’était mise à grandir jusqu’à ce que, en automne de 1893, la plus grande partie du terrain se trouva encroûtée et totalement dé- oradée ; les arbres avaient péri. Le plâtrage ne manqua point son effet : en 1893, à peine quelques touffes de l’orge que l’on avait semée sur l'emplacement de l’ancien verger, avalent-elles müri leurs épis; en 1894, malgré une saison très sèche, la moitié à peu près du terrain plâtré fouruit du foin d'orge à raison de 1 tonne à l’acre, les brins ayant atteint 2 pieds de haut ; en 1895 la récolte en fut à raison de 2 tonnes et demie à l’acre avec des brins hauts, en mai, de 4 pieds. Le diagramme 96 représente l’état des choses en mai 1895, après que, quelque temps auparavant, il y avait eu une pluie égale à environ 0.9 d’un pouce d’eau ; ce sont spécialement les relations réciproques des deux courbes des sulfates d'alcalis et du « carbonate de soude » qui doivent rete- nir l'attention du lecteur : à proximité de la surface il y a à peu près autant de carbonate que de sulfates, mais bientôt les courbes com- 1. Voyez le Progrès agricole el vilicole, année 1894 : « Le Plâtrage des terrains alcalins, » 416 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. mencent à diverger, Jusqu'à ce que, entre le 6° et le 12° pouce de profondeur, les sulfates ne soient tombés à 0.02 p. 100 du sol et le carbonate monté à 0.23 p. 100 ; dans la suite de leur parcours les deux courbes se rapprochent et en arrivent à se croiser à 15 pouces de la surface, pour diverger à nouveau jusqu’à la couche comprise entre le 18° et le 12° pouce ; à ce niveau, la situation est l’inverse de la précédente ; c’est ici les sulfates qui ont le dessus, avec 0.14 p. 100 et le carbonate le dessous avec 0.04 p. 100. Entre le 21° et le 24° pouce, nouvelle intersection ; entre le 24° et le 27°, nouvel écar- tement maximum avec 0.09 p. 100 de carbonate contre 0.02 p. 100 de sulfate. Au niveau du 27° pouce encore intersection ; entre le 27° et le 30°, encore un écartement maximum, toujours renversé par rapport au précédent : cette fois c’est 0.08 p. 100 de sulfate contre 0.09 p. 100 de carbonate. Les sols salants contiennent toujours plus ou moins de carbonate de chaux et de magnésie et de sulfate des mêmes métaux; dans le cas spécial dont il s’agit, il a été encore ajouté beaucoup de plâtre arüfciellement à titre d’amendement ; or, entre les carbonates de chaux et de magnésie d’une part et les sulfates et chlorures d’alcalis d'autre part, en présence d’un excès d’acide carbonique, d’une cer- taine humidité et à certaine température, il s'établit une réaction d'échange dont la conséquence est le passage d’une partie des sul- fates et chlorures d’alcalis en carbonates ; vice versa, lorsqu'il n°v a point d’excès d’acide carbonique, lorsque les conditions d'humidité et la température sont différentes, les carbonates d’alcalis entrent en réaction d'échange inverse avec les sulfates de chaux et de ma- gnésie et il en résulte la transformation d’une partie des carbonates d’alcalis en sulfates. La reconstitution des chlorures d’alcalis ne peut avoir lieu dans les mêmes proportions que celle des sulfates, à cause de l'extrême solubilité des chlorures de chaux et de magnésie formés lors de la transformation antérieure de chlorures d’alcalis en carbonates ; par le fait de cette grande solubilité la plus grande partie des chlorures alcalino-terreux se trouve éliminée dans les couches profondes du sol ou dans le drainage général de la localité ; lorsque les conditions ambiantes amènent la neutralisation des carbonates d’alcalis, c’est ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 417 donc, en première ligne, des sulfates d’alcalis qui en résultent, et vice versa ; de là, dans le diagramme 24 la corrélation si curieuse des courbes qui figurent la’ distribution verticale des sulfates et du carbonate. Voici l'interprétation qu’en donnent MM. Hilgard et Loughridge : I y a eu une pluie, depuis, du soleil ; les couches successives du sol se sont trouvées humectées et échauffées à un point différent, chacune en raison des différences de leurs propriétés hygroscopiques et caloriques ; comme conséquence, la fermentation de l’humus, source d'acide carbonique, a été très intense dans les unes et insi- gnifiante dans les autres; et alors, dans les unes il y a eu excès d’a- cide carbonique et transformation de sulfates en carbonates ; dans les autres, ces conditions faisant défaut, les réactions d'échange ont eu lieu dans le sens opposé, des carbonates d’alcalis sont passés en sulfates. D'une manière générale, de grandes quantités d’acide carbonique ne sont formées qu’à la condition que le sol soit bien humide; de là, la proportion importante de carbonate d’alcali dans la profondeur du sol où d'habitude se localise l'humidité , à moins que les pluies ou une abondante irrigation n'aient pour quelque temps rendu aussi la surface assez humide pour favoriser une fermentation intense de l’humus, auquel cas on peut trouver, même à la surface, une rela- tive abondance de carbonates d’alealis. Dans les conditions normales on constatera donc toujours que la richesse du mélange salin en carbonate de sodium augmente à me- sure que l’on s'enfonce, et cela, aussi longtemps qu’il y a de l’hu- mus et partant possibilité de production d’acide carbonique. Il en est ainsi dans les cas illustrés par les diagrammes 1, 4a, 4b ; la comparaison de ces 3 diagrammes donne à la fois un bel exemple de l'influence de la saison : les deux diagrammes 4a et 4b représen- tent des sols naturellement asséchés et ventilés pendant toute la durée d’un été ; il en résulte, en même temps que l’accumulation du salant vers la surface, une prédominance de sulfates tout aussi tranchée que la prédominance du carbonate l’est dans le « hard- pan » du sous-sol dans le diagramme n° 1. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÈRIE. — 1897. — 11, 27 413 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Dans ce seul et même forage n° 4, les quinze premiers pouces con- tiennent les sulfates et le carbonate en proportions presque égales, tandis qu’à 45 pouces de profondeur le carbonate constitue la pres- que totalité (94 p. 100) du salant. D'ailleurs, 1l est d'observation constante que, dans un terrain donné, ce sont toujours les parties les plus basses et les plus humides qui accusent le plus d’ « alcali noir » ; qu’à conditions égales, un sol argileux, lourd, a toujours le salant plus chargé de carbonate qu’un sol sablonneux, léger. Toutes les fois qu’un sol est parfaitement aéré (comme c’est le cas de terres drainées à tuyaux), il n’y a guère à craindre de voir le sol se charger de carbonate de sodium ; s’il s’en forme, il ne tardera pas à revenir à l’état de sulfate. Au contraire, toutes les fois qu’un terrain salant est laissé longtemps imbibé d’eau, il y a danger d’en- richissement en carbonates, aux dépens des sulfates. A ce propos MM. Hilgard et Loughride font observer que, « bien : qu’un grand excès de plâtre devrait essentiellement retarder les réactions inverses qui tendent à annuler les bons effets qui auraient pu être obtenus par le plâtrage d’un terrain à « alcali noir », il ne faut pas oublier non plus que l'expérience de tous les temps, dans d’autres pays, enseigne que les sols riches en plâtre sont très suscep- tibles d’être sérieusement endommagés par la stagnation des eaux, en raison de la réduction qui en pourrait résulter du sulfate en sul- fure capable de dégager du sulfure d'hydrogène excessivement nui- sible à la végétation ». Salinité exprimée en livres à l’acre. 19 Ceci est un chapitre que je me permettrai de traduire presque sans modifications en commençant par les tableaux I, Il, HE, pa- ges 419, 490 et 422, qui en constituent la partie essentielle. Je rappelle que le calcul est basé sur l'estimation d’un acre-pied à 4 000 000 de livres anglaises. Considérons d’abord les échantillons prélevés sur les deux endroits stériles où l’orge s’est refusée à germer ou à croître (tableau [, page 419 : n° 3 et n° 4a); nous constatons un total de 32 470 livres ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 419 (la couche entrant en jeu est de 4 pieds) et de 43660 livres (la couche qui entre en jeu étant de 2 pieds). TABLEAU I. — Sols irrigués où les plantes agricoles se refusent à croître. (Forages no 3 et no 4a; comparez avec les diagrammes et les séries d'analyses ayant servi à les dresser.) Teneur en livres à l’acre. TOTAL des sels solubles. CAR- CHLO- SULFATES. NITRATES. BONATES. | RURES. N° 3. Échantillonné en mai 1895. PAIE RME ER EME 9 800 6 840 9 930 2 490 200 | DÉRDIC 2 tr ts LR Se 9 500 1 830 6 910 410 300 | Somme des deux premiers pieds.| 29 300 8 670 | 16 840 2 900 850 Fa ed ed ee A AT ( 450 | 1540 150 : med eee tue LA 1 030 670 | 230 130 » | Somme des quatre pieds . . .| 32470 | 9790 | 18610 | 3 180 850 N° 4a. Échantillonné en septembre 1894. nie ne Ne 55620 18800" 03 160.) 9420 | Au00 Paépied ee 0e MIO SD LE 16404 27.680 360 100 | Somme des deux premiers pieds.| 43 660 | 20 030 | 11 440 | 9780 | 2400 Sur les 32 470 livres, plus de la moitié (18610) est du carbonate de soude. Sur les 43 660 livres, un quart seulement est du carbonate, mais le chiffre total (43 660) est tellement élevé, que si même ce n’é- tait que des sels à réaction neutre et qu’il n’y eût pas du tout de car- bonate, la salinité de ce sol dépasserait quand même ce que peuvent supporter toutes les plantes agricoles jusqu’à ce jour expérimentées, a part les « salt-bushes ». En comparant avec ces données celles obtenues pour un sol (n° 24, b, c, tableau Il) apte à produire de l'orge (en 1895, récolte à raison de 2 tonnes et demie de foin d’orge à l’acre), nous voyons l’un des échantillons (n° 2 4) accuser 21 200 livres ; l’autre, 25 550, plus 420 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. TABLEAU II. — Sols salants où les plantes agricoles réussissent. (Forages nos 2a, 2b,2c,4b; pour leur désignation plus précise, voir les en-têtes des diagrammes ou tableaux concernant les mêmes échantillonnages.) Teneurs en livres à l’acre. TOTAL CAR- CHLO- des Sel SULFATES. NITRATES. she BONATES. | RURES. | solubles. N 2a. Mars 1895. 1°T pied. 2° pied 3° pied . 4° pied . | Somme des quatre pieds N° 26. Mai 1895. RTS Del TONER ME 530 NPES, 760 ane TIME AE TRE NO GE GATE SD Se nette At Eee 0 P'ée e ta e ÉD ODA SET E 4 pe er NOT NUE 0E 600 2 à © | Somme des quatre pieds N° 2c. Seplembre 1895. DÉPANIE TEA NES AUTRES EEE: ISO D LAN ER AU RE PARC TES DIU 2e CD 0 PTE O0 ! 4° pied i Somme des quatre pieds N° 4b. Septembre 189%, LEE ET Nr AR AI 2052 US AU 1r0 20 DIODES ENT ut ere er RITES DU 1 000 3° pied 4° pied Somme des quatre pieds . . .[ 23 840 | 12 020 1, Ne pas s'étonner de la coïncidence ab:olue de ce chiffre avec celui de la même couche en mars (forage n° 2 a): il a été simplement emprunté à celle-ci pour parfaire la profondeur de quatre pieds, atin de rendre possible la comparaison ; eu rialité, le forage de mai (no 2 b) n’a été fait que jusqu’à la profondeur de 3 pieds. ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 421 de la moitié étant du carbonate ; ce dernier chiffre se rapporte à un point couvert d'orge haute de 4 pieds ; donc, malgré son importance, ilest encore dans les limites de la résistance de l'orge. La proportion de carbonate demeurant à peu près la même dans les échantillons 24 el 2b, le premier pied du 24 en a accusé, dans les conditions de l'examen, presque le double en chiffres absolus (c’est que le salant total y est également à peu près double) ; néanmoins, l'orge a, comme on voit, très bien réussi ; la germination s'était faite avec une régu- larité parfaite. Il est très curieux de faire remarquer qu'un échan- tillonnage fait en septembre de la même année (voyez 26, tableau Il) à quelques pieds seulement de distance des forages 2 « et 2b échan- tillonnés en mars et mai, ne fournit que le chiffre de 15310 livres pour le total du salant, la différence portant surtout sur le premier pied ; il est difficile de s’expliquer le fait autrement qu’en admettant qu’une grande partie du salant monté à la surface dans le courant de l’été a été emporté par les vents”. Au mois de septembre de l’année d’avant (1894), un forage (4b), à 40 pieds de distance du même endroit, fait sur un point où lorge avait également très bien réussi cette année-là, avait donné, rien que pour les deux premiers pieds, un total de 23 840 livres de salant, dont 20 000 logées dans le premier seul. Passons aux deux forages (tableau IE) pratiqués, lun en mars, l’autre en septembre, sur un sol non irrigué couvert de la végéta- tion spontanée commune à la région ; le premier accuse pour l’en- semble des 4 pieds un total de 27 030 de sels solubles d’alcalis, avec seulement 230 livres de carbonate de soude dans le premier pied contre 13 590 dans le troisième, au niveau du « hardpan » d’ailleurs non atteint par les racines. « L’autre (septembre) donne un total tou- jours un peu inférieur à celui du mois de mars, à savoir 25 420 li- vres seulement, mais cependant sans que la distribution des chiffres révélât d’accumulation dans la couche arable pendant la durée de l'été. » 1. Cette hypothèse s'accorde avec ce que j'ai entendu dire au bien connu botaniste, M. le général Korolkov, gouverneur militaire de Tachkent, sur les terrains salants du Turkestan qu'il est à même d'observer depuis de longues années ; il croit fermement au dessalement de terrains salants par le fait du vent. UN 422 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. TABLEAU III. — Terrain salant non irrigué couvert de la végétation naturelle propre à la région. Teneur en livres à l’acre. TOTAL AR- HLO- des [e} CHLO 1 SULFATES. NITRATES. sels BONATES. | RURKS. solubles. a. Échantillonné au mois de mars. ÉMIS ER ace radie 810 MAMIE ES 0 + m2 600 RO IDIEU EE eee LIT EU SL 4° pied . Somme des quatre pieds . . .| 27 030 22 000 b. Méme terrain, échantillonné au mois de septembre. | | {2 pied. 2° pied . 3° pied . 4° pied . Somme des quatre pieds Une comparaison avec le tableau IT enseigne que Ja parcelle du tableau IIT pourrait produire de l’orge aussi bien que le font les sols du tableau IT, pourvu que, toutefois, la proportion de carbonate, beaucoup plus considérable dans le cas du tableau IF, fût réduite au taux de ce qu'offrent les sols du tableau If, chose facile à réaliser au moyen du plâtrage. Il résulte de ces faits que, pour l'orge, toutes conditions étant fa- vorables d’ailleurs, et le salant ne contenant pas plus de la moitié en carbonate de soude, la limite de tolérance compatible avec une entière récolte de foin est quelque part entre 25 500 et 32 000 livres de sels solubles d’alcalis à l’acre dans les quatre premiers pieds ; ces chiffres ne valant toujours qu’autant que cette couche de quatre pieds contient tout le salant susceptible d’arriver à portée de la sur- face, Exactement, le plus imprégné des sols des tableaux précités où ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 423 l’orge a encore parfaitement réussi, accuse 25 550 livres (tableau ff, n° 2b), le moins imprégné de ceux où elle n’a plus voulu pousser —_ 32470 (tableau I, n° 3). s Si on voulait traduire ces quantilés en tant pour cent, on aurait masue XX 100 et EE X 100, ce qui fait 0.159 p. 100 et 0.203 p. 100. Cette manière d’aborder le problème paraît pouvoir énormément simplifier la taxation de tout terrain salant en vue d’un avis à don- ner sur la réalisabilité et la méthode d’un amendement : il suffirait d'extraire une colonne de sol profonde de 4 pieds, par exemple, et d’en faire une seule analyse (et non plus 16) quant à la teneur totale en salant et à la composition de celui-ci ; si la richesse moyenne en salant total ne dépasse pas de beaucoup 0.175 p. 100 et la richesse du salant en carbonate 50 p. 100, on sera autorisé à déclarer le sol susceptible d’être amendé, du moins pour l'orge, simplement par le plâtrage et par une culture profonde et parfaite ; tout terrain qui aurait donné, dans les mêmes conditions d’examen et de calcul, des chiffres essentiellement inférieurs à 0.175 p. 100 de salant total et à 90 p. 100 de carbonate, devrait pouvoir être mis en culture, sans aucune crainte, même sil était couvert d’une végétation naturelie d'alkali grass (Distichlis maritima, plante halophyte). Il n’y a pas de doute que pour les cultures autres que l'orge, les limites de la tolérance sont notablement différentes et qu’il les faut rechercher exprès pour chacune. On trouvera plus loin un tableau (tableau IV) résumant quelques notions sur les limites de la résistance des cultures au salant obtenués antérieurement à la méthode des forages à 4 pieds de profondeur, au cours d'efforts plutôt inefficaces qui tendaient à résoudre le pro- blème par l’analyse de la seule couche supérieure épaisse de 1 pied. On voit par ce tableau (IV) qu’un sol qui a fourni une belle ré- colte d’orge contenait en mars, dans le premier pied, 0.185 p. 100 de salant dont presque 7/9% en carbonate de sodium ; en août de la même année, l’orge ayant été enlevée en mai et le sol, depuis, laissé dénudé, il a été trouvé 0.305 p. 100 de salant complètement libre de carbonate (voyez ce qui a été dit plus haut sur le passage de sul- fates en carbonates et vice versa). 008 TI |086 6 0898 |080€ 00F 81 |009 F 00 GT |096 08 0308 |09TL O8PT |0089 0918 10089 096 & OFF € *Sa1e11IN] SaIN1047) *saJeuoquer) ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 096 OT 070 & 008 1€ O8r 08 O8y OT 0929 O9T OT 08C L 0097 *sa]BJinS “HHOV/T V SHXAIT 086 0€ 000 £T 008 89 007 &L 08% 08 O9T ST 00 0& 008 &T 007 L ‘unipos 2p aJeu0qIe') | SIJEIIE,P Sa] [as sap 820'°9 |PLL°6 |LFF GT|802°C& 089°I |088°T |08G°F |096'2 9"68 TT 16. |62L” 981" Ces” G62° |OLG'T &9L° |OTS'I 898 |GIC" G9T* |626° 6°2 T'88 G°y6 8°Fr FCe” 10C° S8T° |CO£” 0ÿ0* 5aGS le] ra per e) Sap 1810L *TUNIPOS 9Pp 2JE1IN IU9[EP S918JIns ‘WNIpOS 9p 21BIN *SIROIE p Sa1eJins ‘nIpoOS 2p 2a1NJ0I4 ‘wUnIpoS 2p e1e00q18!) ‘SI[BOIE,p Se[qNI0S Sjes "WNIpOS 9P 21N10]4") “st | | *ENVIYS AG H'IVRISTLNHNO : 7 ‘108$ N€G (OT HNAO4 NOILISOANON * *FGST JU0V ‘F68T JU0Y © *F68T SUN ‘FORT SIEN *FG8I SIN "FGST 100Y *FGST SUN ‘uor[hueg9g.] ap quowmoaAagrgud np * ‘JIOUI 759 ysnq-J[68 97] * * * * outod % 9J0AIA qsnq-J[us 97] ‘809108 8210017) eunaf onb quezne JinSue] ysnq-118S OT perse eee -pymogp SUES SOUIVIS oP 9AO[ JUBÂE SnQ-JI88 0 ‘+ + + + + quepes of 4ed son) SIOLIO4 * * quees O7 48d ogn 0810 SODU998010HJ9 SOHIOH ‘0840 n, Sn vends Le * oxptea -8dde,p JUOUUaTA S220098010A ‘A 8410 “oarervdde,p JuouuaIA 8990998010 ‘0810 *S09009S010HJ0,p SEA ‘Spord F 9p oqueu 0310 *SO0U998910HJ9,p SEA ‘SpPold & 9p one 6510 “010019 eç onb juouuosdwos au mb SIa1uIap XN0p saj 91d09x9 “pord 27 9j aueuordw09 suo||Nueqo4 "SLNVIVS S'I08S queres ne eoueJSISOH — ‘AI AVATAVIL ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 425 Pas loin de là, en un endroit où l'orge était bien vivante mais moins prospère, il y a eu, dans le premier pied, en mars, de 0.4 p. 100 à 0.5 p. 100 de salant. En un autre endroit où l'orge dépérissait, il a été trouvé en août, dans le 1° pied, l'énorme dosage de 1.81 p. 100 de salant total, ce qui fait, pour ce 1* pied seulement, 72000 livres à l’acre, sur les- quelles il y avait 20 000 livres de carbonate de sodium. La même an- née (1894), des poiriers âgés de plusieurs années moururent dans un sol qui accusa, dans le 1* pied, un peu plus de 1.5 p. 100 de sa- lant Lotal, soit 63 000 livres à l’acre, dont en chiffres ronds 32 000 de sulfate de sodium, 18 400 de sel marin, 8000 (— 4 tonnes) de nitrate de soude valant au prix du jour 200 dollars, enfin 2 tonnes et demie seulement de carbonate de soude. « Nous nous proposons », ajoutent MM. Hilgard et Loughridge, « de faire l’année prochaine aux mêmes endroits des forages de 4 pieds ; il est probable que le total du salant dans les 4 pieds at- teindra 400 000 livres. Il est douteux qu’un sol aussi imprégné de sels puisse servir à quelque chose, à moins de lui enlever une grande partie du salant au moyen de drains. » Le même tableau donne quelques renseignements généraux sur la résistance de l’Atriplez semibaccatum”, toujours basés sur l’ana- lyse du premier pied seulement. Les auteurs y joignent les remar- ques suivantes : «On observera que ce salt-bush s’est développé aisément de semis sur des sols qui ont accusé dans le premier pied 1/3 p. 100 de sa- lant ; qu’il a langui, sans toutefois périr, Sur des parcelles où il en a été trouvé, dans les mêmes conditions de calcul, 1/2 p. 100, taux équivalant à 31 000 livres par acre pour ce premier pied ; il a eu beaucoup de peine à garder un peu de vie dans un sol qui, dans notre tableau, est caractérisé par l’analyse de la croûte (efflorescence, y compris environ 1/2 pouce de sol immédiatement attenant); dans 1. Un « salt-bush » d'Australie dont la culture en tant que fourrage parait prendre en Californie une certaine importance; d'après une lettre de M. Hilgard, datée de décembre 1895, il y en aurait eu en culture 4 000 acres. Pour les salt-bushes en général, voyez Mémoires de la Société nationale d'agriculture de France, 1892, et communications postérieures dans le Bulletin de la même société. 426 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. celte « croûte » 1l a été trouvé 8 p. 100 de salant au total, dont la moitié en sulfate de soude, le reste étant constitué presque à parties égales par du carbonate et du sel marin ; il a péri enfin dans un cas où le premier demi-pouce accusait 24 p. 100 de salant, dont 0.6 de sulfate de soude et 0.15 de carbonate de soude. » Dans une lettre, postérieure à ces lignes et datée de juin 1896, M. Hilgard dit: « Nous n'avons pas réussi à faire vivre notre salt- bush là où le sol contient près de 75 000 livres de salant par acre » (dans les 4 pieds ?). Pendant que nous sommes au chapitre de la résistance au salant, Je me permettrai de reproduire quelques passages relatifs à ce sujet et que J'emprunte à des lettres postérieures au « Rapport pour l’exer- cice 1894-1895 » : « Nous avons dressé une carte du salant pour l’un des terrains de notre station (Chino) en divisant la superficie en carrés de 50 pieds et en analysant à part chaque carré. «Sur ce terrain qui accuse environ 15 000 livres de salant par acre (pour # pieds), nous avons récolté des belleraves à sucre de la plus haute qualité ; depuis, nous y avons planté, à litre d’expérience, un grand nombre de plantes différentes ; il se trouve que déjà cette pe- üte quantité (dont l'orge sait supporter le double) entrave le déve- loppement de presque toutes les légumineuses, tandis que les compo- sées y prospèrent, entre autres le grand soleil de Russie (Helianthus annuus). Parmi les légumineuses, seules la vesce velue et la luzerne réussissent un peu et encore sans arriver à former les tubercules assimilateurs ; il faut bien dire qu’ils y seraient bien superflus, le terrain renfermant, par acre, près de 1 000 livres de salpêtre ; n’im- porte, les plantes ont mauvaise mine (juin 1896). €. Depuis ma dernière lettre, nos cultures du champ d’expé- rience de Chino ont révélé quelques faits intéressants. D'abord, d'accord avec vos observations, il y a deux espèces de mélilot qui prospèrent et possèdent quelques tubercules, mais seulement sur celles des racines qui sont assez éloignées de la surface du sol et où, par conséquent, le salant n’est plus qu’extrèmement faible. La même remarque s'applique à la vesce velue ; presque toutes les autres légu- mineuses, y compris les lupins (d'Europe et indigènes), sont mortes ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 427 ou près de mourir (nous n’avons pas encore expérimenté le Trifolium fragiferum des terrains salants d'Europe sur lequel vous avez attiré notre attention). Après la betterave, le grand soleil continue à être le meilleur succès sur toute l’étendue du champ. Je pense que le {o- pinambour (Hehanthus tuberosus) pourra aussi être cultivé sur des salants déjà assez joliment concentrés. « Je viens de recevoir un Bulletin de la Station agronomique du Wyoming sur des expériences de germination en terrains salants ne contenant presque que des sulfates ; elle se trouve extrêmement lente ; d’ailleurs, le ralentissement est en raison directe du degré de salinité ; 1 p. 100 dans les deux premiers pouces parait être le maximum compatible avec le développement normal du seigle que ces Messieurs trouvent être la plus résistante des céréales de leur climat. La lenteur de la germination est due au ralentissement de l’imbibition (gonflement) de la graine, fait bien connu des fermiers californiens... » Nous allons terminer par quelques extraits de la correspondance du laboratoire de Berkeley pour l'exercice 1894-1895, intéressants en tant qu'il y est question de types de salants plus ou moins nou- veaux (du moins, non spécifiés dans le travail publié dans les An- nales de la science agronomique française et élrangère en 1893) ou en {ant qu’exemples d’appréciation et d'interprétation : « 1. Croûte salée, deux échantillons provenant l’un de la Southern- California Experiment-Station (succursale de la station de Berkeley) près Chino, l’autre de « Chino Ranch », ferme (sucrerie) de M. Gird, également près Chino ; une analyse de croûte de cette dernière pro- venance nous est en mème temps communiquée, qui a été faite par le chimiste de la sucrerie. TABLEAU. 498 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Croûtes salées de Chino (Californie). No 1. No 2. N° 5. Analyse Échantillon Échantillon d’un à échantillon Ses tient ie dE LA LA À à provenant provenant de même provenance du de que des sols. le No 2, champ d’ex- la propriété mais faitepar le chimiste périences, de M. Gird. de la sucrerie. DUAL TUE DOLASSO NEC ST PRINT 3.97 2.56 40.10 QULTATENAE SOUL EF 2 Aer Lite eee Vis 49.58 80.41 2792 Carbonaterde souder Petite » 4.50 » DLMATIN EE TE NS EEE, à 15.61 3110 7.49 Mitrate de MAgnésie 7 NE CAEN, 2 11E6S 1229 » DULTATe TE MANESIe en ee NE de 10.66 0.23 3.21 SulfatePHefChaUXU ES EEE TEL DECO 1.94 » » Matières organiques et eau de combinaison DAFT ONCE are NEA RE 6.61 1529 » MaHére Or PAMAUR ML Lénine Me eu. ) » 3.34 Non!détérminées MEME AE TER METRE » » 17.94 SOMME APE MRANNMEUN 100.00 100.00 100.00 1. Livres à l’acre (premier pied). . : . 444 218 » ?. Équivaut, à l'acre (premier pied) à sal- pétre de Ghil1 livres: 7 EN TE 1 500 131 » Q Il n’est pas facile de concilier les deux analyses n° 2 et n° 3 se rapportant à la ferme de Chino ; on nous affirme que les deux échan- tillons qui y ont servi ont été prélevés sur un seul et même endroit. Les différences entre l’échantillon n° 1 de la station et l’échantillon n° 2 de la sucrerie, qui portent principalement sur le sulfate de soude, les nitrates, le sulfate de magnésie, sont, au contraire, par- faitement plausibles, puisque les deux terrains sont à quelque dis- tance l’un de l’autre ; or, des différences de cette valeur peuvent être observées même sur une seule et même tâche de salant, comme en font preuve les investigations de M. Colemore publiées dans le « Report » de la station de Berkeley pour l'exercice 1894, p. 141. « Le taux de sulfate de potasse trouvé dans le salant de Chino par le chimiste de la sucrerie (n° 3) est extrèmement élevé ; jamais nous n’en avons encore rencontré de pareil ; quant à l’analyse du labora- ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 429 toire de Berkeley (n° 2), elle répond à un type bien commun de «salant blanc », autant pour le sulfate de potasse que pour les nitrates. Pour ce qui est de ces derniers, on remarquera que l’échantillon de la sta- tion agronomique de Ghino en contient à peu près dix fois autant que celui du Chino Ranch; or, il se trouve Justement que sur l’en- droit d’où provient le premier échantillon, la betterave était la plus petite et la moins satisfaisante de tout le champ, tandis que sur la tâche où a été prélevé l'échantillon de Chino Ranch la betterave était de belle taille et riche en sucre. « Calculés en livres à l’acre, pour une couche arable de 1 pied de profondeur, les dosages de potasse et de nitrate constalés par nous dans la croûte saline de Chino Ranch reviennent à peu près à la charge d'engrais artificiel que l’on a l'habitude d'appliquer à la bet- terave à sucre en Allemagne ; par contre, avec le même calcul, pour le sol de la station de Chino on trouve un fort excès de nitrates sur les doses habituelles d'engrais... «2. Terrain salant provenant d’une propriété sise sur la Mojave River, San Bernadino County ; envoi de M. B. F. Taylor, de Rialto. Échantillon pris jusqu’à une profondeur de 16 pieds ; sol léger (si/t); réaction alcaline. Le délavage d’une portion de cet échantillon four- nit le résultat suivant : DANS COMPOSITION 4 100 grammes centésimale de sol. du salant. Sulfates de soude et de potasse. . . . . 0.110 Jen El CALDOHATE TELSOU TE MEME NN RL 0.270 7216641 Se LRTT ADIEU EAN EME AIR ER AS DIN 0.610 61.62 COtAlA RER AE 0.990 100.00 « Conformément à la loi générale de la distribution verticale du salant, la couche toute superficielle de ce sol'devrait en contenir 5 ou 6 p. 100 du poids du sol; c’est plus que n’en saurait supporter au- cune plante agricole (excepté un salt-bush), à moins que le salant, actuellement «noir », ne soit converti en «blanc » par le plâtrage. «3. Efflorescence provenant de l’Oregon ; envoi de M. P. M. Scott, de San-Francisco. La matière, par sa richesse en carbonate de soude 430 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. (65 p. 100 du total des sels solubles), est comparable à la soude natu- relle ramassée dans un but industriel sur les terrains salants de la Hongrie, du Caucase, de l'Arabie, de l'Inde, de l'Égypte, du Fezzan, de PAustralie (voyez le travail, maintes fois mentionné au cours de cet article, publié dans les Annales en 1893, chapitre VI, division E) ; elle présente encore ceci de remarquable qu’elle contient près de 40 p. 100 de carbonate de chaux insoluble. «4. Efflorescence et eau souterraine ; envoi de M. J. Warren Dut- ton, Dutton’ s Landing. L’efflorescence se forme en été sur les par- lies basses du terrain ; l’eau provient du mème endroit. » Ce que j'y trouve de digne d’attention est que l’efflorescence neutre étant « du sulfate de magnésie presque pur, avec un peu de gypse », l’eau, très salée, accuse à la fois € un peu de carbonate de soude ». «9. Produits de délavage d'échantillons du sol et du sous-sol d’un terrain sis dans la propriété de M. H. À. P. Carter, Byron, Contra Costa County ; le sol étant prélevé jusqu’à une profondeur de12 pou- ces, le sous-sol étant pris à 5 pieds au-dessous de la surface. Question posée par l’envoyeur : « La luzerne réussira-t-elle dans ce terrain ? » DANS 100 PARTIES DU SELS SOLUBLES. © sol. sous-sol. Sulfate de potasse. . . . .: . . . 0.116 0.005 Sullaterde SOU PER CEE CP EE 0.109 0.095 SELMATIN POS VE] 0.064 0.032 Carbonate de soude. . . . . . . 0.026 0.015 DOTE 0.315 0.147 Nous sommes ici tout près de la limite au delà de laquelle, sur un sol de la nature de celui dont il s’agit, on ne peut espérer avoir des récoltes. Si on se bornait à l’appréciation du sol, on pourrait dire que la luzerne devrait y être cultivablé, car elle a été cultivée avec succès sur des sols aussi lourds et même plus imprégnés de salant que n’est celui-ci. Mais la difficulté viendra du sous-sol que le pivot, lorsqu'il laura atteint, ne pourra jamais pénétrer, du moins autant que le carbonate n'aura pas été converti en sulfate ; il suffit de dire ÉCHANTILLONNAGE DES TERRAINS SALANTS. 431 que lorsque nous tentâmes de le délaver, bientôt, en dépit de toutes les précautions que nous avions prises, il se balla en une pâte presque imperméable qu'il nous a fallu soumettre au lavage pendant 10 jours pour obtenir un extrait suffisant pour l’analyse. Il est tout indiqué de plâtrer ce terrain, ce qui neutralisera le « salant noir » et, par- tant, enlèvera à l’argile cette propriété de se coaguler. » DE LA VALEUR AGRICOLE + DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION : PAR L. GRANDEAU L'introduction dans la pratique agricole d’une nouvelle matière fertilisante, alors surtout que cette matière présente une constitution complexe, a toujours pour résultat de soulever un certain nombre de questions imprévues. Leur solution exige le double concours de recherches physiologiques et d'expériences culturales poursuivies pendant assez longtemps pour permettre des déductions dont les cultivateurs puissent faire leur profit. 1. Les lecteurs des Annales trouveront plus loin l'étude de MM. Petermann et Graftiau sur la question encore controversée de la relation qui existcrait entre la solubilité des scories de déphosphoration dans le citrate d'ammoniaque acide et le poids de la récolte produite. Pendant que MM. Petcrmann et Graftiau poursuivaient leurs expériences dans la serre de végétation de la Station de Gembloux dans des conditions dont ils étaient à peu près maitres, ce qui donne un grand intérêt aux résultats, de mon côté j'entreprenais, au pare des Princes, des expériences en plein champ sur le même sujet. En Autriche, sous la direction de M. Meissl, directeur de la Station agronomique de Vienne, de nombreux essais étaient faits chez les cultivateurs en vue d'étudier l'action comparative des scories à divers titres de solubilité. I ma paru intéressant de faire précéder la publication du mémoire de MM. Petermann et Graftiau d'un exposé rapide des résultats obtenus en Autriche et en France, en l'ac- compagnant de quelques considérations générales sur cette importante question, VALEUR AGRICOLE DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION. 433 L'application à la fumure des terres des laitiers phosphoreux, obtenus dans la transformation de la fonte en acier, par le procédé Thomas Gilchrist, devait tout naturellement provoquer l'examen de divers points importants relatifs aux conditions d’assimilation du phosphore par les plantes. Les scories de déphosphoration, dont l'introduction dans la pra- tique agricole remonte à peine à une douzaine d'années, se sont montrées, dès le début, un engrais phosphaté de premier ordre, applicable, dans les sols de compositions les plus diverses, à toutes les natures de récoltes, autant pour les cultures d'hiver que pour les cultures de printemps et aussi profitables aux prairies naturelles et artificielles qu'aux céréales, aux plantes sarclées et à la végétation arbustive, vigne, fruitiers, etc... Au fur et à mesure de la constata- ion de ces faits, la consommation des scories est allée en croissant ; elle s'élève annuellement en Europe à plus d’un million de tonnes. Après avoir été, en partie, exportée à l’étranger pendant sept ou huit ans, la production des aciéries françaises, qui dépasse aujour- d’hui 150 000 tonnes, a été entièrement utilisée, cette année, par nos agriculteurs, ce dont on ne saurait trop s’applaudir, étant donnée la pauvreté générale de notre sol en acide phosphorique. S’ajoutant aux 800 000 tonnes de saperphosphate que consomme la culture française, l’appoint des scories porte à peine à 150 000 tonnes, soit à moins de 6 kilogr. par hectare, la quantité d’acide phosphorique que reçoivent nos vingt-cinq millions d’hectares sous culture. On voit, par le rapprochement de ces deux chiffres, quel dévelop- pement attend l’industrie des engrais phosphatés, superphosphates, scories, etc., le jour où la masse de nos cultivateurs sera pénétrée de l'insuffisance des quantités qu’elle emploie aujourd’hui et des augmentations de rendement qui suivront parallèlemeni leur déve- loppement. J'ai dit tout à l’heure que l’un des caractères essentiels des sco- ries de déphosphoration est de donner dans tous les sols, en toute saison et pour toutes les cultures, des résultats excellents, égaux dans les sols calcaires à ceux que fournit le superphosphate, supé- rieurs en général dans les terrains argileux et silicéo-argileux. Je ANN\. SCIENCE AGROX. — %° SÉRIE. — 1897. — 11. 28 434 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. suis autorisé à émettre cette assertion, Lant par mes essais dans divers champs d'expériences, que par les résultats obtenus dans un domaine de 400 hectares situé en Lorraine, où j'ai employé depuis dix ans plus de 300 tonnes de scories. Comment s'explique l’uni- versalité des bons effets des scories dans les sols de composition le plus variable ? C’est ce qu’il n’est peut-être pas inutile de rappeler. Les scories sont essentiellement constituées, comme on le sait, par un composé résultant de la combinaison d'acide phosphorique, de silice et de chaux qui les différencie des phosphates minéraux natu- rels, Ce composé présente cette particularité que son acide phospho- rique esL soluble à froid dans de l’eau contenant une faible propor- tion d’un des acides organiques (eitrique, elc.) existant dans le suc des racines des végétaux. C’est donc un aliment tout préparé pour la plante et qui n’a pas besoin de subir dans le sol des transforma- tions qui le rendent apte à être assimilé par le végétal. Il se com- porte, à cet effet, comme le nitrate de soude qui fournit directement à nos récoltes, céréales, plantes sarclées, etc., l'azote dont elles ont besoin, tandis que les matières organiques azotées (fumier de ferme, par exemple) doivent être préalablement nitrifiées pour servir à la nutrition des plantes. Du degré de finesse auquel les scories ont été amenées par la mouture dépend, au premier chef, l’action dissolvante qu’une liqueur faiblement acide exercera sur leur acide phosphorique ou, pour mieux dire, la quantité de ce dernier qui se dissoudra, par rapport au poids d'acide phosphorique total que contient la scorie. L’in- fluence de la finesse du grain est donc, toutes choses égales d’ail- leurs — tout le monde est d'accord sur ce point, — un élément essentiel de la valeur fertilisante immédiate des scories. Les produits livrés actuellement à l’agriculture renferment de 75 à 85 p. 100, et même davantage, de poudre fine passant au tamis dont l’écartement des mailles est de 0"",17 et qu'on désigne, dans l’industrie, sous le nom de tamis n° 100. C’est à dessein que je viens d'employer l'expression de valeur fer- tilisante immédiate, parce qu'àu bout d'un certain temps la totalité de l’acide phosphorique sera utilisable pour la récolte ; en effet, la masse entière de la scorie étant homogène, les grains trop volumi- VALEUR AGRICOLE DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION. 435 neux pour passer au tamis n° 100 possèdent la même composition que la poudre fine. Or, au contact de l’humidité et de l’acide carbo- nique du sol, ces grains se désagrègent et se transforment en poudre impalpable dans un temps variable avec les conditions qu’ils rencon- trent dans la terre. Il s’ensuit que, selon toute vraisemblance, ils posséderont plus ou moins vite la même solubilité, dans les acides faibles, que la poudre passant au tamis n° 100. Les faits constatés dans nos Isboratoires tendent à démontrer le bien-fondé de cette manière de voir. Un traitement réitéré par l'acide citrique des di- verses parties d’un échantillon de scories, amenées par des pulvéri- sations successives à une égale finesse, permet de faire entrer en dissolution la totalité de l'acide phosphorique de cette scorie. On est donc autorisé à admettre que le délitement progressif, dans le sol, des grains de différentes grosseurs produira le même résultat. Ce qui importe, c’est de vérifier expérimentalement, par des cul- tures méthodiques, comment les choses se passent dans nos champs. Tous nos lecteurs connaissent les expériences de P. Wagner et de Mærcker, sur la relation qui existe entre la solubilité des scories dans le citrate acide d’ammoniaque et leur action sur la végétation. Les directeurs des stations agronomiques de Darmstadt et de Halle étaient arrivés à conclure à un certain parallélisme entre la solubilité au ci- trate et la valeur fertilisante des scories. De là à adopter, pour base des contrats de vente des scories, la teneur de ces dernières en acide phosphorique soluble dans le réactif de Wagner, il n’ç avait qu'un pas ; on a essayé de le franchir, et un certain nombre de marchés ont été conclus, en Allemagne notamment, d’après cette donnée analytique. En France, en Belgique et en Autriche, ce mode de vente a été combaitu par les directeurs des stations agronomiques, non que nous le considérions comme mauvais en principe, Mails, ainsi que nous l'avons dit, M. Petermann et moi, comme prématuré, la question n'étant pas suffisamment étudiée, ni sous le rapport cultural, ni sous le rapport analytique. M. P. Wagner lui-même, avant de devenir partisan enthousiaste de cette réforme dans les conventions du com- merce, s'était prononcé à son sujet dans des termes que nous consi- 436 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. dérions alors et que nous considérons encore aujourd’hui comme l'expression de la vérilé. Il écrivait en 1894: « Je ne recommande nullement d'acheter les scories exclusivement d’après leur titre en acide phosphorique soluble dans le citrate. Cela serait un mode inexact etinapplicable. [napplicable, parce que la méthode ne possède pas le degré de précision que les intéressés ont le droit d’exiger. inexact, parce que la solubilité citrique d’une scorie n’est pas une expression nette et absolue de son effet, mais seulement une base approximative pour juger de sa valeur agricole. » Cette manière de voir est Lout aussi juste aujourd’hui qu'il y a quatre ans, et les tran- saclions doivent continuer à être, comme elles l'ont été jusqu'ici presque universellement, basées : 1° sur la teneur de la scorie en acide phosphorique total ; 2 sur son degré de finesse. Rien ne s’op- pose à ce que le vendeur indique la teneur de la scorie en acide so- luble dans le citrate, ainsi que beaucoup d’aciéries le font, mais seu- ment à titre de renseignement utile et sans la prendre pour base de la fixation des prix. Les raisons sur lesquelles nous nous appuyions, il y a quatre ans, pour combattre l’adoption de la vente des scories sur la base de leur teneur en acide soluble au citrate, ont reçu une nouvelle consécra- tion des expériences faites, dans l’année qui vient de finir, à la Sta- tion agronomique de Gembloux par MM. Petermann et Graftiau ; en Autriche, sous la direction de M. Meissi, enfin au champ d'expé- riences du parc des Princes. Je résumerai brièvement les résultats de ces divers essais qui montrent à quelles incertitudes et à quels dommages on exposerait les producteurs et les consommateurs de scories, en modifiant prématurément les règles actuellement appli- quées aux lransaclions. MM. Petermann et Graftiau ont répété, en 1897, les essais de cul- ture faits en 1896 dans la serre expérimentale de Gembloux. Une terre pauvre en acide phosphorique a reçu, dans divers vases, des quantités égales de ce principe fertilisant, sous forme de scories à teneurs très différentes en acide soluble dans le citrate, 37.6 p. 100 à 93.4 p. 100. {. Voir, page 445, le mémoire de MM. Petermann et Graftiau. VALEUR AGRICOLE DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION. 437 Les plantes mises successivement en expérience dans chacun de ces vases ont été : l’avoine, la moutarde blanche et le froment. Les conclusions qui se dégagent de la pesée des récoltes eLde leur analyse, au point de vue de la quantité d’acide phosphorique utilisée par les plantes poussées dans la terre additionnée de scories à te- neurs si différentes en acide phosphorique, sont les suivantes — je cite textuellement : € S'il est vrai, d’une part, que le maximum d’avoine a été produit par la scorie la plus soluble dans le réactif Wagner (93 p. 100), 1l est à constater, d'autre part : 1° que la supériorité ne s’est mamifestée ni dans la récolte de moutarde qui suivait, ni dans la seconde série d'essais avec le froment ; 2° que le minimum d’avoine et le minimum de froment ont été obtenus par des scories à solubilité élevée (88 et 76 p. 100), et 3° que, de l’ensemble de tous les résultats, ne ressort aucun rapport bien défini entre la cause et l'effet. Quant à Pacide phosphorique absorbé par la plante entière de froment, il est à remarquer que l’utilisation de lacide phosphorique donné comme engrais n'a pas dépendu de la solubilité citrique du phosphate em- plové. En effet, avec le phosphate à 93 p. 100 de solubilité, l’utilisa- tion par la plante a été de 30.8 p. 100 ; avec une scorie à 37.6 p. 100 seulement, la plante a absorbé 28.2 p. 100 d'acide phosphorique et ainsi de suite. Nous sommes donc d’avis, concluent MM. Petermann et Grafliau, que la solubilité citrique de l'acide phosphorique de la scorie, constitue une base d’estimation de la valeur commerciale qui est loin d’être en rapport avec l'effet produit par ce précieux engrais phosphaté. Cette base est donc arbitraire et, par conséquent, l’ache- teur, en attendant mieux, doit continuer à exiger la garantie du titre en acide phosphorique tôtal et celle d’une finesse de mouture suffi- sante. » I ne s’agissait à Gembloux — comme dans les recherches anté- rieures de MM. Wagner et Mærcker — que d'essais physiologiques faits dans des pots, sur de faibles quantités de terre. Nous allons voir que les nombreuses expériences exécutées en plein champ, l’an der- nier, sur des parcelles plus ou moins étendues, ont conduit à des conclusions tout aussi favorables au maintien du mode actuel de vente des scories. 438 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Le congrès annuel des directeurs des stations agronomiques autri- chiennes avait mis la question à l’ordre du jour des travaux de ces établissements ; M. Meissl a rendu compte, en ces termes, dans la réunion d'avril 4897, des résultats constatés : : Une série considérable d'expériences de fumure a été instituée à l'automne de 1895, avec le concours de praticiens, dans cinquante localités réparties dans presque toutes les provinces de l'empire. 162 parcelles ont été consacrées à ces essais qui ont été continués en 1896. Ces essais de culture avaient pour objet principal l'étude sur le terrain de la question, si importante pour la pratique, de l’action comparative de l’acide phosphorique des scories, soluble ou non dans le citrate acide. Dans un certain nombre de champs, on a, en outre, expérimenté, par comparaison, la valeur de la poudre d’os dégélatinée. Toutes les parcelles ont reçu, en quantités égales, une fumure fondamentale composée de sulfate d’ammoniaque et de chlorure de potassium. Puis, on a répandu dans les trois parcelles devant servir de termes de comparaison une quantité d’acide phospho- rique égale (120 kilogr. par hectare) fournie, pour la première parcelle, par une scorie à haut titre en acide soluble, 93.3 p. 100; pour la seconde, par une scorie à titre faible (50.6 p. 100) en soluble ; pour la troisième, par de la poudre d’os dégélatinée à 71.2 p. 100 d’acide soluble. Les résultats connus au mois d’avril dernier n'étaient encore qu’au nombre de 30. Sur ce nombre, un peu plus de moitié (17 sur 30) accusaient une plus-value en faveur des scories à haut titre de soluble, mais les excédents de récoltes étaient très peu élevés, de telle sorte que la moyenne gé- nérale des trente champs d’expérience s’en trouve à peine affec- tée, ainsi que le montre le tableau suivant, qui résume tous les ESSAIS. Si l’on prend, pour termes de comparaison : la production to- tale, le rendement en grains et en paille de la parcelle témoin non fumée, de chaque localité, et qu’on l’égale à 100, voici les résultats 1. Protokoll über die am 1. 2. und 3. April 1897 der Versammtung der Vertreter æslerreichischer Versuchs-Stationen. Wien, 1897. VALEUR AGRICOLE DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION. 439 fournis par la moyenne des récoltes des trois parcelles en expé- rience : RÉCOLTE RENDEMENT RS totale. en grains. en paille. Scories à 93 p. 100 de soluble. . . 119 128 120 Seories à 50 p. 100 de soluble. . . 121 126 221! Poudre d'os dégélatinée . . . . . . 118 122 117 Les résultats de ces essais de culture, ajoute M. Meïssl, sont parli- culièrement intéressants dans deux directions. D'abord en ce que les expériences faites en plein champ confirment l’assertion que la solu- bilité de l’acide phosphorique des scories dans le réactif de Wagner est un étalon infidèle de la valeur agricole de cet engrais ; en second lieu, ces expériences infirment l'opinion émise relativement au peu de valeur fertilisante de la poudre d’os dégélatinée. Au printemps de 1897, j'ai institué au pare des Princes des expé- riences qui devront être poursuivies pendant plusieurs années avant que j'en tire des conclusions fermes. Mais la question étant à l'ordre du jour, dans la pensée de provoquer sur d’autres points du pays des essais du même genre, je vais indiquer les conditions dans les- quelles je me suis placé et les résultats de ma première année d’ex- périences, qui prouvent combien il est prudent d’attendre avant de modifier Le régime d’achat des scories. La parcelle XIX du champ du parc des Princes a été consacrée à des essais comparalifs de scories de finesse égale, mais de titres très difffférents en acide phosphorique total et en acide phosphorique soluble. Cette parcelle n’avait pas reçu de fumure phosphatée de- puis six ans. En 1896, on ne lui avait donné aucun engrais; elle se trouvait donc dans des conditions favorables à l'étude de l'influence de l’acide phosphorique sur la récolte. Dans les derniers jours d’avril 1897, on a délimité, dans la grande parcelle XIX, quatre parcelles de superficie égale. Nous les désigne- rons pour simplification par les lettres A, B, G, D. Chacune d’elles a recu, avant le labour, les quantités suivantes, rapportées à l’hectare, d’acide phosphorique, d’azote et de potasse : Acide phosphorique. . . . . . . . 150 kilogr. POTAS SOU: OO AE ARR PRE AA 2 200 — ADO: ANT RON SE PU AA 45 — 1. Sous forme de kaïnite. 2. À l'état de nitrate de soude. 440 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Les scories qui ont servi à donner l’acide phosphorique à ces quatre parcelles ont été choisies, à dessein, de Leneurs très différentes en acide soluble au citrate ; le tableau ci-dessous indique la richesse centésimale en acide phosphorique total et la teneur en acide soluble au citrale ; la troisième colonne fait connaître la proportion centési- male d’acide soluble rapportée au taux d'acide total. AOIDE PHOSPHORIQUE RAPPORT 2 de soluble l'acide soluble total. mis à au citrate. l'acide total. p. 10) p. 10) p. 100 ParoellerA "Tales 2647 MECS 21102 7.93 S'ILS RE EN NET T3 res 13.44 7.59 06,17 pire LR ED veu VA EE ee TSH 12.41 66.39 D NE tGlonel. 15.30 16.51 90.20 On à choisi, pour la plantation de ces parcelles, trois plantes ap- partenant à des familles végétales différentes : une graminée, maïs- caragua; une légumineuse, haricots d’Alger; une solanée, une pomme de terre (prince-de-Galles). Un tiers de chaque parcelle a été consacré à chacune de ces plantes. Le principe essentiel à tout essai de ce genre, à savoir qu'ilne faut faire varier qu’une seule des conditions de l'expérience, à été appliqué. Chacune des parcelles ayant reçu même quantité d'acide phosphorique total, d'azote et de potasse, la seule condition variable a été la proportion d'acide phos- phorique soluble apporté pas la scorie. L'écart entre les teneurs ex- trêmes des scories et ce composé était très grand : 52.71 p. 100 [90.2 p. 100 — 37.5 p. 100] ; on pouvait donc s'attendre, si la rela- tion établie par MM. Wagner et Mærcker entre la solubilité et l’assi- milabilité du phosphate est réelle, à trouver des différences considé- rables dans les récoltes des trois plantes. Je réunis,dans le tableau ci-dessous, les résultats des pesées faites immédiatement après l'enlèvement de la récolte de chaque plante (les récoltes sont calculées à l’are). POMMES MAÏS- PARCELLES. HARICOTS. erre Surragèl p. 100 kilogr. kilogr. kilogr. Al. 144020 837.:05 soluble. 70,0 158,2 14 Bree OMS GET à: = 68,4 154,3 259 Gosse /RAU0BL 89: — 65,6 203 ;6 647 DONS RE LOUE 0 2 104,2 246,53 672 Témoins sans engrais. . . . . 2750 78,3 361 VALEUR AGRICOLE DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION. 441 Le premier fait qui ressort de la comparaison de ces chiffres, c’est la diversité des écarts que présentent les poids des récoltes suivant la nature de la plante cultivée. Examinons-les rapidement. Haricots : la parcelle À a fourni, malgré le titre’ peu élevé de la scorie en soluble, une récolte supérieure à celles de chacune des parcelles B et C ; l'influence du taux d’acide soluble ne s’est mani- festée, pour cette légumineuse, que dans la parcelle D, fumée avec une scorie à 90 p. 100 de soluble. Pour la pomme de terre el pour le maïs géant, les choses se sont passées différemment : les rendements des parcelles ont été plus élevés à mesure que le taux de la scorie en acide soluble dans le ci- trate l'était lui-même, résultat qui semblerait favorable à Popinion de P. Wagner. Mais si la présence d’acide soluble a coincidé pour le maïs et pour la pomme de terre avec l'élévation des rendements, contrairement à ce qui s’est produit pour les haricots, il s’en faut que l'accroissement des récoltes aitété proportionnel à l'augmenta- tion du titre en soluble des scories employées ; c’est ce que montre vettement le tableau suivant, dans lequel, prenant pour unité (égale à 100) les récoltes de haricots, de pommes de terre et de maïs obte- nues dans la parcelle D, qui a reçu la scorie la plus riche en phos- phate soluble (90.2 p. 100), se trouve indiqué le rapport centésimal des teneurs des autres scories en acide soluble et celui des récoltes correspondantes : HARICOTS. ROPMER Maïs. de terre. DASCOrES A0 DID AIDE RER 100 100 100 G. Scories à 66.39 p. 100. . . . 6229 82.6 97.6 BScoriesEuo6 1Tap. 1005707 65.6 75.8 82.6 APSCOTIES ANT OIDALIDOR GT 64.3 12,19 On est autorisé d’après cela à conclure, comme je l’ai déjà fait, que, même dans la première année de fumure, il n’y a en ce qui regarde la composilion des scories et les récoltes qu’elles fournissent, aucune corrélation étroite à établir entre la solubilité de l'acide phospho- rique au citrate acide et son assimilation par la plante. Pour les haricots, la scorie à 37.02 p. 100 de soluble a donné une récolte plus élevée que la scorie à 66.4 p. 100. Pour le maïs, un écart de 23.6 p. 100, soit près du quart dans la teneur des scories 442 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. des parcelles D et C, n’a produit qu’un excédent de récolte de 2.4 p. 100. Je suis donc en droit de conclure qu'il n’v a pas lieu de modifier la base adoptée jusqu'ici pour l’achat des scories et qu’il est prudent de s’en tenir à la fixation du prix d’après la teneur en acide phospho- rique en exigeant une garantie de finesse de mouture. Il ne faut pas d’ailleurs oublier que les scories à faible teneur en acide phospho- rique soluble au citrate sont de beaucoup les moins nombreuses, au moins dans les produits des aciéries qui alimentent l’agriculture française. Les analyses accusent presque toujours 60 à 65 p. 100 d’a- cide phosphorique soluble, et très souvent 70 à 80 p. 100 et au- dessus. Il n’y a donc, pour l'instant, rien de mieux à faire que de pour- suivre expérimentalement l’étude de la question, Si, ce qui n’est pas, il était démontré que la valeur agricole d’une scorie est proportionnelle à sa teneur en phosphate soluble dans le citrate acide, il est clair qu’on pourrait trouver dans le dosage de ce dernier une base équitable des transactions : encore faudrait-il tenir compte, dans la fixation du prix, de la quantité d’acide phosphorique insoluble dont la proportion atteint et dépasse même souvent le quart ou la moitié de l’acide soluble. Ce mode de vente entrainerait des difficultés pratiques, mais on arriverait à les vaincre, si l'équité exigeait qu’on l’adoptät pour sauvegarder à la fois les intérêts du vendeur et ceux de l’acheteur. Le point capital, c’est d'établir d’une façon précise si, oui ou non, la solubilité dans le citrate donne la mesure de l’utilisation du phos- phate des scories pour les récoltes. Avant qu’on se décide à modifier la base des contrats, il faut trancher la question par des expériences culturales assez nombreuses, méthodiquement suivies et suffisam- ment prolongées. Ces expériences doivent être nombreuses, dis-je, parce que l’action exercée par le sol sur ces matières fertilisantes est variable d’un terrain à un autre ; il faut qu’elles soient méthodi- quement suivies pour écarter, autant que possible, les causes d’er- reurs, enfinil est nécessaire de les prolonger pendant un temps assez | long pour qu’on puisse constater si, une proportion plus ou moins grande, la totalité peut-être, de l’acide phosphorique, insoluble au VALEUR AGRICOLE DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION. 443 début de l’essai dans le citrate acide, ne se montrera pas aussi assi- milable, au bout d’un certain temps, que l’aura été l’acide soluble. Une dernière remarque. Quand on se trouve en présence de di- vergences dans les résultats culturaux observés par des expérimen- tateurs également habiles et consciencieux, il faut se garder, pour expliquer ces différences, d’invoquer, dans l'ignorance où nous sommes de leurs causes, la possibilité d’exceptions qui, suivant le vieil adage, confirmeraient la règle : il n’y a pas d’exceptions, à proprement parler, dans les phénomènes naturels : il n’y a que des différences dans les conditions qui accompagnent la production des phénomènes. (C’est à définir ces conditions qu’il faut s’attacher, afin d’en déduire les règles sur lesquelles le praticien devra s'appuyer. L'expérience seule peut conduire à la solution. Dans son admirable Introduction à la médecine expérimentale, Claude Bernard, auquel on doit la démonstration éclatante de cette vérité, a posé le principe scientifique du déterminisme, dans des termes dont ne sauraient trop se pénétrer les expérimentateurs et, en particulier, les agronomes : « Il faut admettre, dit-il, comme un axiome expérimental que chez les étres vivants aussi bien que dans les corps bruts, les conditions d'existence de tout phénoméne sont déterminées d’une manière absolue. Ce qui veut dire, en d’autres termes, que la condition d’un phéno- mène une fois connue et remplie, le phénomène doit se reproduire toujours et à la volonté de l’expérimentateur. La négation de cette proposition ne serait rien autre chose que la négation de la science même. En effet, la science n’étant que le déterminé et le détermi- nable, on doit forcément admettre comme axiome que, dans des con- ditions identiques, tout phénomène est identique et qu’aussitôt que les conditions ne sont plus les mêmes, le phénomène cesse d’être identique. Ce principe est absolu, aussi bien dans les phénomènes des corps bruts que dans ceux des corps vivants et l’influence de la vie, quelle que soit l’idée qu’on s’en fasse, ne saurait rien y changer. » Les divergences d’opinion touchant la valeur alimentaire pour la plante de telle ou telle matière fertilisante, la difficulté de prévoir et d'évaluer à l’avance l’action des engrais sur les récoltes n’ont pas d'autre cause que l'ignorance où nous sommes presque toujours du 444 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. déterminisme des conditions naturelles en face desquelles se trouve placé lagriculteur. Les facteurs de la production végétale, de même que ceux de la fertilité d’une terre sont nombreux et variables d’une plante et d’un sol aux autres. L'expérience directe fondée, d’une part, sur la con- naissance expérimentale aussi complète que nous pouvons l’acquérir des propriétés physiques et chimiques de la terre arable, de l’autre sur les exigences en principes nutritifs de la plante qu’on y veut cultiver. Voilà les éléments qui nous permettront, en tenant compte de la composition et de l’état des matières fertilisantes, de décider de la meilleure application à faire de ces dernières. En ce qui touche les exigences minérales des plantes, nous sommes assez avancés pour prévoir les quantités de chacun des aliments que nous devons leur fournir pour obtenir des récoltes maxima. Si toutes les terres en culture avaient une constitution et une composition chimique identiques, le problème des hauts rendements serait sin- gulièrement simplifié. Malheureusement, il n’en est point ainsi, et les cultivateurs sont en présence des sols les plus variés et dans lesquels les mêmes substances fertilisantes ne sont pas mises de la même ma- nière à la disposition du végétal, d’où résultent des divergences par- fois très considérables dans les rendements. Ces divergences ne sont point imputables au hasard ; elles tiennent à l'absence de détermi- nisme des conditions de la végétation dans des sols différents et di- versement fumés. Ces réflexions s'appliquent tout particulièrement à l’étude du rôle de l’acide phosphorique dans la végétation; des expériences multi- pliées dans des conditions bien définies et suffisamment prolongées pourront seules nous éclairer. On ne saurait trop encourager les agriculteurs à les tenter. > rs Lileï D bé. hs EXISTE-T-IL UNE RELATION CONSTANTE ENTRE LA SOLUBILITÉ DES SCORIES DE DÉPHOSPHORA TION DANS LE CITRATE D'AMMONIAQUE ACIDE RUE PORDS DE. DAGRÉCGOËETE/ PRODULLE PAR MM. A. PÉTERMANN J. GRAFTIAU DIRECTEUR CHEF DES TRAVAUX À LA STATION AGRONOMIQUE DE GEMBLOUX * À la suite d'expériences entreprises par M. Wagner et par M. Maercker, la plupart des producteurs de scories de déphosphora- tion essayent de remplacer l’ancienne base de vente de cetexcellent engrais phosphaté — garantie du degré de finesse de mouture et du titre en acide phosphorique soluble dans les acides minéraux — par la garantie en acide phosphorique soluble dans le citrate d’ammonia- que acide. L’agriculture européenne consommant près de 1 milliard de kilogrammes de scories', vendues partout sur analyse, on com- prend combien un changement des bases de transaction doit vive- ment émouvoir, non seulement les vendeurs et les acheteurs, mais aussi les chimistes agricoles appelés à guider le cullivateur et les analystes chargés de déterminer la richesse de la marchandise li- vrée. Aussi les appels à la prudence dans l’application immédiate de {. L'Engrais, 1897. 446 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. la nouvelle méthode d'appréciation de la valeur des scories n’ont-ils pas manqués. M. Wagner lui-même, avant de devenir partisan enthousiaste de la nouvelle méthode, écrivait” : «Je ne recommande nullement d’ache- ter les scories exclusivement d’après leur titre en acide phosphorique soluble dans le citrate. Cela serait un mode inexact et inapplicable. Inapplicable, parce que la méthode ne possède pas le degré de pré- cision que les intéressés ont le droit d’exiger. Inexact, parce que la solubilité citrique d’une scorie n’est pas une expression nette et ab- solue de son effet, mais seulement une base approximative pour ju- ger de sa valeur agricole. » Dès 1894, et en ce qui concerne le marché belge, nous avons combattu la réforme proposée non comme mauvaise en principe, mais comme prématurée, la question n'étant pas suffisamment étu- diée, ni sous le rapport cultural, ni sous le rapport analytique. De leur côté, les directeurs des laboratoires de l’État belge ont publié en 1895 la déclaration suivante : « Le dosage de lacide phosphorique soluble dans le citrate d’am- moniaque acide, dont les journaux agricoles ont déjà parlé, sera exécuté d’après la méthode de Wagner chaque fois que l'expéditeur le demande ; mais l’assemblée a été unanime à déclarer comme pré- maturé de basér, dès maintenant, la vente des scories sur leur titre en acide phosphorique soluble dans le citrate acide. On fera, par conséquent, sur le bulletin d'analyse même, des réserves quant à l'exactitude du dosage demandé et quant à son utilité. » Cette réserve prudente est partagée par M. Grandeau, de Paris, M. Liebermann, de Budapest, et M. Meissl, de Vienne. De plus, l’in- suffisance scientifique de la méthode au citrate acide appliquée à l’analyse des scories à fait le sujet de plusieurs publications que l’on trouve résamées dans une brochure de M. Dubbers®. Aussi, l'application du nouveau mode de vente est-elle, en Alle- magne même, loin d’être aussi générale qu'on voudrait le faire croire aux cultivateurs. La station agricole de Marburg*° à analysé 1e Düngungsfragen, 1894, p. 25. 2. Ucber Citralloslichkeit der Thomasschlacken. Francfort, 1897. 3. Dietrich, Jahresbericht der Versuchsslalion Marburg. SOLUBILITÉ DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION. 447 l’année dernière 464 scories, dont 68 seulement ont été achetées sur la base de la solubilité citrique ; à la station de Halle’, le nombre d'échantillons a été respectivement de 989 et de 320. Afin de contribuer par des expériences personnelles à la soiution de la question de savoir: si la relation entre la solubilité citrique des scories et leur valeur agricole, relalion constalée par plusieurs au- leurs, « une portée générale et doit, par conséquent, élre admise comme base commerciale, nous nous sommes procuré, au commen- cement de 1896, onze échantillons de scories dont la solubilité citri- que présente un grand écart. C’est avec intention que nous ne Îles avons pas recueillis au hasard, mais que nous nous sommes adressés à l'industrie intéressée même pour les obtenir. Les « Rheinisch-West- fälische Thomasphosphatfabriken » à Cologne ont eu l’obligeance de répondre à notre demande, en nous adressant les scories 1 à 10, la onzième est un produit de l’industrie belge. Le tableau suivant éla- blit leur composition d’après les analyses faites par M. l'assistant Hendrick : FINESSE ACIDE de phos- phos- LUBILITE Rate mouture silicique ACIDE ACIDE phorique | phorique | titrique soluble soluble p. 100 soluble : de l’acide dans la fumure phos- de O:r,3 les acides | le citrate honoue les acides| vyerture d'acide | de minéraux.| Wagner. total. minéraux, PTE). dans dans p.100 | p.10 in TOR PS TA IEEE AT 808 1637 19. 13130) 69. 20. 14.73 19. 15. 18. 16. 18. 15. 18. 1 18.85 | 15.82 ÊE 10. 16. 9. Le] 9. 79. NC OM OTL COM IN OO ICS NL CENT = 4 6 1 .9 . +2 3.7 3.4 ee) .3 .6 LS . {. Maercker, Jahrbuch der Versuchsslation Halle. 448 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. En tenant compte de leur litre en acide phosphorique soluble dans les acides minéraux et de leur finesse de mouture, nous cons- tatons que toutes les scories analysées — sauf le n° X — sont de bons produits commerciaux : la richesse en acide phosphorique dé- passe 16 p. 100 et la proportion de poudre fine 79 p. 100. Mais leur solubilité dans le citrate d'ammoniaque acide, préparé d’après Wagner, varie sensiblement : du minimum de 37 au maximum de 93 p. 100. Comme nous l'avons conseillé dès 1886, le dosage de la chaux li- bre a été fait en épuisant en plusieurs opérations à grammes de sco- ries par 150 centimètres cubes d’eau exemple d’acide carbonique, renfermant 20 p. 100 de saccharose. La richesse en oxyde calcique varie de 0.84 à 5.67 p. 100 et, chose intéressante à constater, la solubilité citrique est en proportion inverse du titre en chaux : SOLURILITÉ OXYDE. citrique de l’acide calcique. phos- phorique. p- 100 p. 100 MT + er nes EE 0.84 37.6 Maximum "AE EEE »:67 93.4 Mais il existe également un rapport entre le taux en silice et la solubilité citrique des scories : SILICE citrique de l’acide soluble, phos- phorique. p. 100 p. 100 Minimamsh Alone ner Eux 3.24 37.6 MAXI ES EE RE PE ONCE: 9.27 93.4 De ce qui précède, il résulte clairement que la relation entre la chaux, la silice et la solubilité citrique de l’acide phosphorique re- pose tout simplement sur un phénomène de saturation de l'acide ci- trique libre du réactif employé. Une scorie riche en silice, par con- séquent pauvre en chaux libre, laisse intacte la presque totalité de l'acide citrique qui, sans entrave, peut exercer son action dissol- vante sur le phosphate. Le contraire a lieu lorsqu’on traite, d’après SOLUBILITÉ DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION. 449 Wagner, un phosphate Thomas pauvre en silice et riche en chaux. Les scories de cette nature donnent un faible rendement par la mé- thode Wagner, moins parce que leur acide phosphorique se trouve dans un état chimique spécial, défavorable à leur solubilité, mais plutôt parce que la composition du réactif employé, autrement dit son acidité, n’est pas la même que lorsqu'il agit sur une scorie riche en chaux. C’est pour cette raison que le procédé industriel de Hoyer- man, consistant à ajouter de la silice à la scorie en fusion, est ab- solument juste. C’est encore pour cette raison que M. Dubbers et que M. Paturel' ont pu constater, en employant un excès de citrate d’ammoniaque acide, que toutes les scories fournissent finalement une solubilité citrique très élevée et sensiblement égale. Essais de 1896. La méthode expérimentale suivie est celle que nous avons adoptée pour toutes nos recherches antérieures entreprises dans la serre *?. Nous y renvoyons pour la description de l'installation des bocaux, de l’application des engrais, du mode d’arrosage, etc. Nous répétons seulement que le sol, de nature sablo-argileuse, renferme 0,65 par kilogramme d’acide phosphorique soluble dans l'acide chlorhy- drique à froid. Notes de cullure. —6 avril : emplissage des pots avec 4 kilogr. de terre pour. chacun, application des engrais : 08,25 d’azote à l’état de nitrate de soude, 05,20 de potasse anhydre à l’état de kaïnite et 0,50 d'acide phosphorique anhydre à l’état de scories Thomas. Notre étude ayant en vue l'essai comparatif de 11 scories de com- position différente et chaque expérience comprenant 4 pots absolu- ment sous le mème régime, la culture de 1896 comptait en tout 92 essais, lorsque aux 44 pots fumés à l'acide phosphorique on ajoute 4 pots sans engrais aucun et 4 pots avec azote et polasse seu- lement. À 1. Annales agronomiques, 1596. 2. Recherches de chimie et de physiologie appliquées à l'agriculture, t. et t. IL. ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE, — 1897. — ri. 29 4 450 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. 6 mai : plantation de 12 grains d’avoine géante à grappes par pot ; — 11 mai : levée générale; — 15 mai: on supprime 6 plants par pot, en laissant les 6 plus vigoureux ; — 29 juin : commencement de l’épiage ; — 24 juillet : les épis commencent à mürir ; — 6 août: récolte. On a fait suivre la culture principale d’une culture dérobée de moutarde blanche. A cette fin, les pots ont été vidés, le contenu de chacun mélangé isolément et remis en place. 13 août : semaille de 16 graines de moutarde blanche ; — 16 août : levée ; — 19 août: démariage en laissant 6 plants par pot; — 31 août: les boutons apparaissent ; — 10 septembre: floraison; — 17 octobre : récolte. Les produits (plantes entières) des 4 pots uniformément traités ont été réunis et pesés après leur dessiccation à l'air. Récolte de 1896. LA | 2 , | LA RÉCOLTE RÉcOLTE| récolte 2 RÉCOLTE TOTALE àV e ER des pots à l'azote | sozu- | dérobée en et à ; . » » BILITE avoine séchée la potasse — 100, NUMÉROS à l'air des 4 pots | ceux ayant reçu | Citrique | potasse | À tarde —= 100, identiquement NE) des she LUZ | se02€e || gyant reçu en | 244 de l'acide 1 traites. ; scories 4 des pots. phosphorique =. à expéri- | J'air, ? Paille Paille |mentées.| pluntes | Grains. et et entières.| balles. balles. \T nm œ a 1,2, 3, 4.| Sans engrais. 5, 6, 7, 8 .|Azote + l'otasse. 10, 11, 12.|. Id. + Scories 1 4, 15, 4 es 19, 2 23, 7 © © 1 © À OO pt ph - on D. O1 =] O1 © . m1 C9 © == 19 (#2) I Com © KW 19 WI = 19 1 D © 22 © © us _ 1 Oo Y © © md nt Het He et Del et Del eh eh Opei eb Éd 1 à = OO D = O7 M 19 à we SOLUBILITÉ DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION. 451 Essais de 1897. Les essais de 1897 sont une répétition, pour contrôle, de ceux de 1896 ; aussi toutes les données expérimentales relatées ci-devant s’appliquent-elles à la nouvelle série de culture. Nous avons seu- lement remplacé l’avoine par une plante de végétation plus longue : le blé de Bordeaux. Notes de culture. — 96 février : préparation des pois; — 27 fé- vrier : plantation de 12 graines préalablement chaulées au sulfate de cuivre ; — 8 mars: commencement de la levée ; — 14 mars: levée complète ; — 18 mars: suppression de 6 plants par pot; — 51 mai: sortie des épis ; — 9 juin : floraison ; — 28 juillet: récolte. Après la pesée des épis et de la paille ÿ compris les balles, on a dosé l’acide phosphorique dans un échantillon moyen formé avec les récoltes des 4 pots traités idenliquement. Les matières végétales riches en amidon, ou en graisse ou en sucre, ne laissant pas dans leurs cendres la totalité de l’acide phos- phorique absorbé, une partie quelquefois sensible étant réduite et volatilisée, nous avons désagrégé le froment par l’acide sulfurique d’après Kjeldahl, en oxydant finalement par quelques gouttes d'acide nitrique famant et en supprimant l’emploi du mercure. Les résultats de ces dosages, exécutés par M. Grégoire, chef des travaux à la sta- . lion agronomique, se trouvent inscrits dans le tableau ci-après, ren- seignant également le poids de la récolte. Si, pour la clarté de ce tableau, comme de celui des essais avec l’avoine de l’année précédente, nous n’y avons fait figurer que le rendement total obtenu par les 4 pots se trouvant sous le même ré- gime, nous tenons à constater que les écarts entre le maximum et le minimum du poids des graines produit par chacun des 4 pots com- posant la même série, n’ont pas dépassé la valeur de 2.5 p. 100. C’est cette erreur inévitable d’expérimentation que nous avons tou- jours constatée dans nos recherches en serre depuis 1872, sauf dans les années 1883 et 1884, où elle atteint respectivement 3.0 ei 2.9 p. 100. Ces chiffres — qui se réduisent du reste de moitié lorsqu'on prend AGRONOMIQUE. ANNALES DE LA SCIENCE 452 109$ Sap enbuouydsoyd aproy ‘Sal anbraoydsoqd Pro] OP 007 ‘d no ostçmn anbroydsoyd HaI19V ÉLICHER Lt suup nuoyuo9 15704 onbri -oqd -soyd Har1O0v “#a[1eq *SUIUIX) 91184 a ‘oq108q8 anbrioydsoqd HOIOV 9°09 6-92 6 68 768 L'68 &° ss I 6L 6°0L La69 JEU6 y 66 « ‘on brxy10 SLTTTE *sor|ed LE) "SUIUIE) 9TIIEd ST, *=enbroqdsoud 9PIOBI 9P 91}n0 u9 nSo1 JUBGAE Xn99 oor — ossuJod &I LE 9702Z8,1 8J0d sop ALIONGA VI g‘s0] s‘98 Eye D2PCI “18 ‘13 *SaIruq Jo *SULPA) SAUT! EE ‘SOI quewonbryuept s30d + Sp Hu] ® 21998 JUa OT ua YIVLOL ULIO9HEA ‘L68} 9P 2710994 ré — } S2H09$ + ‘PI ‘2S$PJ04 —- 2702 ‘SIPISUD SULS ‘HUNDNWNOXA ‘SLOa4 S&a SOHANAN SOLUBILITÉ DES SCORIES DE DÉPHOSPHORATION. 453 , comme base de comparaison, non l'écart entre le maximum et le minimum, mais bien leur déviation de la moyenne des 4 pots — parlent en faveur de l'exactitude de notre méthode expérimentale. Conclusions. Dans un sol sablo-argileux, titrant 08,65 par kilogramme d’acide phosphorique soluble dans les acides minéraux et enrichi en azote et en potasse, l’augmentation du poids d’une récolte d’avome et de mou- tarde (1896) et d’une récolte de froment (1897) n’a pas montré une relation constante avec la solubilité citrique de l’acide phosphorique des scories de déphosphoration appliquées. S’il est vrai, d’une part, que le maximum d’avoine a été produit par Ja scorie Thomas la plus soluble dans le réactif de Wagner (93 p.100), il est à constater, d’autre part: 1° que cette supériorité ne s’est manifestée, ni dans la récolte de moutarde qui suivait, ni dans la seconde série d’essais avec le froment; 2 que le minimum d'avoine et le minimum de froment ont été obtenus par des scories également à solubilité élevée (88 et 76 p. 100) et 5° que, de l’en- semble de tous les résultats, ne ressort aucun rapport bien défini entre la cause et l'effet. Quant à l'acide phosphorique absorbé par la plante entière de fro- ment, il est à remarquer que, dans nos essais, l’utilisation de l'acide phosphorique donné comme engrais, n’a pas dépendu de la solubi- lité citrique du phosphate employé. En effet, nous avons obtenu les chiffres suivants : SOLUBILITÉ COEFFICIENT citrique d'utilisation par de ordre décroissant. l’acide phosphorique. p. 100 p.109 93.4 30.8 S5,2 492,5 53.9 36.7 83.7 46.7 83.4 44,9 TDER 42.5 76.3 24.2 ie, 40.0 69.1 26.7 60,6 28.3 CE 2842 454 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. Nous sommes donc d’avis que la solubilité citrique de l’acide phos- phorique de la scorie Thomas constitue une base d’estimation de sa valeur commerciale qui est loin d’être toujours en rapport avec l'effet produit par ce précieux engrais phosphaté. Cette base est donc arbilraire et par conséquent l’acheteur, en attendant mieux, doit continuer à exiger la garantie du titre en acide phosphorique total et celle d’une finesse de mouture suffisante. INFLUENCE DES FORTS SUPER SE AUX "SOU TER EE NTENES (Excursion hydrologique de 1895 dans les forêts des steppes) PAR EPTOTOCZIKRYS COXSERVATEUR DU MUSÉE MINÉRALOGIQUE DE L'UNIVERSITÉ DE SAINT-PÉTERSBOURG Au cours d’une excursion hydrologique faite en 1891 dans les domaines du comte Woronzoff, je me heurtai contre un fait extraor- dinaire : je ne trouvai pas d’eaux souterraines dans les forêts de ces domaines. Je pratiquai une série de sondages en remontant la pente, sans trouver d’eau. Le dernier trou de sonde était à 250 mè- tres du champ (clairière) où se trouvait un puits assez abondant. L’eau, dans ce dernier, reposait sur une couche d’argile bleue, tandis que dans le trou ci-dessus mentionné je ne constatai pas d’eau sur cette même couche. Le même fait s’est répété dans une autre forêt située à 40 kilo- mètres au sud de la première. On a fait des trous de sondage de-ci 1. Nous devons la traduction de ce travail, publié à Saint-Pétersbourg en 1896, à M. Schrayer, étudiant russe de l'Université de Nancy, auquel nous adressons nos remerciements. (Rédaction.) En me joignant à ces remerciements, de mon côté, j'envoie mon cordial spassibo (merci) russe au professeur Henry, à l'initiative et à l'amabilité duquel je dois le grand plaisir de partager mes modestes observations avec les Français. (L'auteur) 456 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. de-là dans les forêts, soit sur les pentes, soit en terrain horizontal sans trouver d’eau, et cependant les forêts étaient entourées de sources provenant de deux niveaux. Je ne savais que penser et n’osais m’arrêter à celte idée hardie que c'était la forêt qui asséchait le sol, bien qu'on eût déjà publié des observations sur le pouvoir asséchant des forêts et qu’on sût que dans la couche où plongent les racines des arbres le sol est tou- Jours plus sec que dans les terres nues. Mais ces observations ne concernaient que de faibles profondeurs. Peux ans plus tard, en 1893, je constatai un fait identique. Des études hydrologiques faites dans la partie orientale d’une forêt do- maniale (forêt Chipoff) ont montré que la forêt est moins riche en eaux souterraines que les steppes environnantes. Comme ici le phé- nomène était des plus nets et que j'avais déjà publié une série d’études sur ce sujet (1894) en décrivant la forêt Chipoff, je me suis permis de hasarder l’hypothèse d’une influence des forêts sur l’abaissement du niveau des eaux souterraines, ajoutant que des études complémentaires étaient nécessaires avant qu’on püt généra- liser cette relation. | L'honneur de l'initiative, pour la solution de cette question, revient à la Société libre économique qui entreprit, en 1895, une expédition hydrologique spéciale dans les forêts des steppes et m’en confia la direction. C’est dans ce but que j'ai visité les forêts Chipoff et Semionoff (gouvernement de Voronej), la forêt Noire (gouvernement de Kher- son) et les forêts de Khvalynsk (gouvernement de Saratov). Je ne parlerai ici que des forêts Chipoff et Noire où j'ai travaillé le plus longtemps; dans les autres, j'ai simplement vérifié les faits. Forêt Chipoîf. Cette forêt, située dans le gouvernement de Vorone), a été choisie parce que Je la connaissais déjà partiellement, ainsi que ses alen- tours, grâce à mes excursions précédentes, mais surtout parce qu'elle est typique, à tous les points de vue, pour l’est et le sud-est des steppes russes. INFLUENCE DES FORÈTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 497 Les traits généraux de toute la partie orientale de la forêt sont déjà donnés dans mon travail de 1894 ; ils peuvent s’appliquer aussi à la partie occidentale où furent concentrés les travaux de l’expé- dilion de 1895. Elle est formée de peuplements feuillus d'âge moyen (60-80 ans) ; il n’y a plus que quelques vieux arbres du temps de Pierre le Grand qui tira de cette forêt les bois nécessaires à la construction de la flotte de la mer d’Azov. La composition géologique de cette partie occidentale est la même que celle de la partie orientale et des steppes avoisinantes. [Immé- diatement au-dessous du sol vient de l'argile morainique rouge avec galets; dans cette argile est interstratifiée une légère couche de sable. Plus bas on trouve des sables gris tertiaires peu épais, puis, à nouveau, de l’argile tertiaire verte, très épaisse et très com- pacte; au-dessous des sables gris phosphatés d’âge problématique et enfin la craie. En de rares points la dénudation a enlevé toutes les couches jusqu’à la craie. Sur la steppe, dans toutes ces couches de sable et bien souvent dans les horizons inférieurs de l’argile, on trouve de l’eau à trois niveaux : le premier, peu abondant, dans l'argile morainique, le second, très abondant, dans le sable tertiaire, le troisième au-dessus de la craie. Dans les forêts, le premier niveau manque complètement ; le se- cond, quand il ne manque pas, est très pauvre et situé plus bas. Je ne puis rien dire du troisième, parce que les trous de sondage ne l'ont pas atteint. Ce qui frappe tout d’abord, c’est la diminution brusque du non- bre des sources dans la forêt. Sur tout ce vaste espace, qui a une surface de 110 kilomètres carrés, il n’y a que trois sources et fort peu abondantes. La pauvreté de la forêt en sources est indiscutable et ce fait est d’autant plus saisissant qu’autour d’elle l’eau abonde. En sortant de la forêt, si l’on marche dans la steppe vers le nord ou vers l’ouesi, on trouve partout des sources et des puits toujours remplis d’eau, bien que les pavsans en consomment d’énormes quantités pour leurs jardins. Il est curieux de constater que les puits se remplissent par 458 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. de l’eau venant des steppes; il n’en vient pas de la forêt. On à vu des cas où cette eau de la steppe affluait en telle abondance qu’elle dé- bordait jusque dans la forêt; jamais le fait inverse ne s’est produit. Dans le 69° carré on rencontre une source; mais elle prend son origine dans la steppe et le ruisseau auquel elle donne naissance disparait en forêt après un parcours de 500 à 600 mètres. Parmi les 24 puits qu'on trouve, soit dans la forêt, soit sur ses bords, 3 seulement sont en forêt, sous des arbres ; tous les autres sont hors de la forêt, souvent à quelques mètres seulement. Est-ce un hasard ? Une si faible distance peut-elle avoir un effet ? Disons d’abord, avant toute explication, qu’il est bien reconnu qu'on trouve toujours les puits hors des forêts. Tous les ouvriers attestent le fait, en s’en étonnant, et affirment que, chaque fois qu’on a essayé d’en creuser en forêt, on a dû y renoncer. Examinons les trois puits qui, faisant exception à la règle, sont creusés en forêt. Le puits n° 6 est au fond d’un petit ravin; c’est une sorte de fosse captant les filets d’eau du voisinage. Le puits n° 21 est aussi dans un ravin; il est alimenté par le niveau d’eau de la craie, très abondant, comme nous l’avons dit. Le puits n° 15 (voir coupe n° 1) se trouve sur une petite pente. Il y a à côté deux puits : l’un (n° 14) est à 106 mètres du précédent en terrain nu et à 24 mè- tres du bord de la forêt. L'autre est dans le massif en terrain hori- zontal. Le puits n° 14 a son orifice à 3",17 au-dessous de l’orifice du puits n° 15 situé en forêt. L'eau s’y montre à une profondeur de 8,52, tandis que le puits de la forêt, plus profond (17*,05), est à sec. Ainsi ce serait une erreur de croire que dans les forêts, même à proximité des puits, l’eau souterraine se tienne au même niveau que hors forêt. En s’éloignant très peu du massif boisé, on constate une différence dans le niveau des eaux souterraines. Bien plus, en forêt, les clairières, dont le sol est identique aux parties boisées, présentent avec ces parties des différences hydrologiques très nettes. On trouve plus de puits et plus d’eau dans ces clairières que sous bois. Dans les carrés 83, 84, 90, on voit la steppe pénétrant en langue étroite dans la forêt sur moins d’un kilomètre carré et dans ce petit espace nu on ne compte pas moins de quatre sources très abondantes. INFLUENCE DES FORÊTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 459 Avons-nous le droit de dire pour cela que la forêt Chipoff est riche en eau ? Nullement. Il y a encore une circonstance qui accrédite dans le vulgaire la croyance que la forêt emmagasine les eaux souterraines. Grâce à l’ombrage des arbres, à l’absence d’agitation dans l’air, à une cer- taine imperméabilité de la superficie du sol, la forêt retient à la sur- face les eaux pluviales. J’ai souvent observé que, pendant les grandes chaleurs de l’été, l’eau des pluies, même peu abondantes, persistait plus d’une semaine sur les routes forestières. Alors que les routes des steppes élaient couvertes d’une couche de poussière, celles des forêts étaient boueuses. Dès lors, s’il se trouve en forêt des endroits favorisant l’accumulation des eaux pluviales, celles-ci formeront des mares qui ne s’évaporeront pas de tout l’été et l’on pourra croire qu’on a affaire à des étangs formés par de véritables sources, lan- dis qu'il s'agira simplement d’eaux de pluie. Nous avons trouvé quelques-unes de ces mares dans la forêt Chipoff. À proximité de la ligne séparative entre la 31° et la 32° parcelle, sur une place nue, horizontale, il y a un creux rempli d’eau qui était, dit-on, plus grand autrefois ; il n’a maintenant que 20 à 30 mè- tres de diamètre et 0®,50 à 1 mètre de profondeur. Il ne se dessèche Jamais ; à la fin de l'été, il diminue beaucoup, l’eau s’y putréfie et se couvre d’algues. On trouve encore à ou 4 autres mares sembla- bles dans les parcelles 77, 24, 90; il est évident que ces amas pro- viennent des eaux pluviales et n’ont aucun rapport avec les niveaux d'eaux. De cette série de faits résulte la preuve absolue de la pauvreté de Ja forêt en eaux souterraines. Bien que le nombre des faits ainsi observés soit considérable, on comprend qu’on ne peut s'appuyer uniquement sur eux et qu’il faut faire des expériences dans des conditions bien déterminées où l’on tiendra compte de tous les fac- teurs qui peuvent influer sur le régime des eaux souterraines. Voici comment on a procédé. On choisissait une lisière de forêt voisine de steppes ou de champs cultivés et on forait une suite de sondages allant du terrain nu vers la forêt. Ces sondages étaient reliés par un nivellement qui donnait la courbe exacte du niveau de l’eau. Sachant quelle influence énorme 460 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. a dans la distribution des eaux souterraines la moindre modification de relief et de composition géologique, j'ai pris soin d'établir ces lignes de sondages sur des lisières situées absolument à ces deux points de vue dans les mêmes conditions que les terrains nus avoisi- nants, de manière que la seule différence fût l’état boisé. Pour se rendre compte du degré d'intensité de l'influence des forêts, on changeait les circonstances physico-géographiques des emplacements. Tantôt on choisissait une place où la steppe et la forêt étaient sur le tchernozem", tantôt sur le sol forestier *; tantôt la forêt descendait en pente douce vers le terrain nu, tantôt c'était le contraire, tantôt le terrain était horizontal. Dans certains cas on opérait sous de vieux peuplements, ailleurs sous de jeunes. Le plus souvent on intercalait dans la chaine des sondages un puits déjà existant, qui remplaçail avec avantage un sondage arüficiel et renseignait de suite sur la profondeur à laquelle on trouverait l’eau. Le niveau de l’eau a été mesuré plusieurs fois en même temps dans les puits et trous de sondage. Dans la forêt Chipoff on a établi quatre chaînes de sondages : une dans la partie ouest, deux dans la partie nord et la quatrième dans un champ au milieu de la forêt. Au sud et à l’est on n’a pu trouver d'emplacement convenable à cause des conditions compliquées du relief. La première chaîne, celle de l’ouest, près de la lisière de Laptieff, est installée sur un terrain en pente légère vers l’ouest aboutissant à un large ravin qui débouche dans la vallée du fleuve Osserioda. L'emplacement paraît horizontal à la vue, et le massif est constitué par de vieux peuplements. Une partie du bord occidental de la forêt 1. La lerre noire ou tchernozem de la Russie méridionale et de la Hongrie résulte d'une transformation opérée, sur un sol primitivement siliceux, par la décornposition des herbes des steppes. La terre noire, dont l'épaisseur va parfois jusqu'à 1,25 (Uladowka), renferme, d'après les analyses de M. Grandeau, 75 à 84 p. 100 de partie minérale, 4-15 p. 100 de matières organiques et de notables proportions de chaux, . de potasse et d'acide phosphorique. (Voir dans les Annales de la Slation agrono- mique de l'Est les Recherches de M. Grandeau sur les terres noires de Russie et les causes de leur fertilité, p. 225-354.) 2, Le sol forestier est le (chernozem changé par la végétation forestière ; il se distingue de ce dernier par sa couleur plus claire et par sa structure spécifique grenue. INFLUENCE DES FORÊTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 461 se trouve sur le tchernozem, c’est-à-dire sur un terrain conquis ré- cemment par la forêt sur la steppe. À 40 mètres du bord de la forêt, il y à un puits dont la profondeur jusqu’au niveau de l’eau est de 15720: Le premier sondage (n° 1) a été fait à 32 mètres de la hsière du massif dans la prairie copverte d’une herbe épaisse et très haute. L'emplacement est horizontal; le sol est du tchernozem au-dessous duquel est argile brune habituelle, avec des concrétions de fer et de calcaire. Ge sol est sec, peu compact; l'instrument passe facile- ment; à 4 mètres, l'argile est devenue humide et l’eau s’est mon- trée à 4,40. L’eau arrive abondamment ; un jour après le forage, elle avait monté de 0,40. Le sondage n° 2, au bord de la forêt, touche d’un côté à des chê- nes de 60-70 ans et de l’autre à une prairie couverte de gazon très épais. L’orifice du trou est à 0",71 au-dessus de celui du sondage précédent. Sous le tchernozem on trouve l’argile brune traversée par de nombreuses concrétions de calcaire ; le sol est beaucoup plus compact que celui du trou n° 1; à 6",4 l'argile est devenue plus noire et plus humide; elle était parsemée de taches ferrugineuses rouges. La sonde pénétra difficilement jusqu’à 15 mètres sans trou- ver d’eau. Trou n° 3, sous les cimes de vieux arbres, à 75 mêtres du précé- dent: terrain horizontal à 2",20 au-dessus du trou n° 1. La compo- sition géologique est identique à la précédente, c’est-à-dire de l'argile brune avec nombreuses concrétions de calcaire. Le sol est d'une sécheresse et d’une compacité remarquables ; le percement se faisait avec une énorme difficulté ; jusqu’à 15 mètres, limite où peut aller Pinstrument, non seulement on ne trouve pas d’eau, mais pas trace d'humidité. Dans cette première série on a donc constaté une brusque dépres- sion du niveau des eaux souterraines sous la forêt, fait d’autant plus bizarre que, dans la règle hydrologique, on devait s'attendre, d’après la forme du terrain, à un relèvement de la courbe sous bois: La deuxième chaine est sur le bord septentrional de la forêt. L'emplacement est dans des conditions idéales pour des études d’hy- drologie. Devant la forêt s'étend la steppe sans bornes et absolument 462 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. horizontale; la steppe est nue et le nivellement n’accuse aucune pente. Le point choisi est intéressant aussi par ce fait que la steppe borde ici, non un vieux massif, mais une jeune coupe d’un an avec des réserves. Les trous de sondage (coupe 3) vont du puits n° 7 situé dans la steppe au massif plein en passant par la jeune coupe. Le puits n° 7 est à 45 mètres du bord dé la forêt ; il est creusé dans l'argile ordinaire ; on trouve l’eau à 5 mètres de profondeur et cetle eau à 1%,40 jusqu’au fond du puits. Un trou de contrôle fait dans l'alignement du puits a rencontré l’eau à la même profondeur. L'exploitation de la forêt a commencé en 1893. D’après les rensei- gnements des gardes, pendant les années 1894 et 1895, l’eau a augmenté. Le trou de sondage n° 4 est au milieu de la coupe à S0 mêtres du précédent et à 43 mètres du massif plein. Il y a des réserves de-c1 de-là ; les plus proches du trou en sont à 6, 7, 13 et 16 mètres. Les souches ont fourni de nombreux rejets. Le sol est couvert d’une herbe très épaisse qui rendait la circulation difficile. Le terrain est horizontal ; le nivellement n’accuse pas plus de 9 à 3 centimètres de différence de niveau avec le trou précédent. Le sol est formé d’abord par le tchernozem, puis par l'argile rouge ordi- naire ; à 7-8 mètres l'argile devient plus noire et plus humide ; au- dessous elle se montre plus claire, plus sèche. La sonde va jusqu’à 11,28 et on rencontre l’eau à 10%,68 ; son niveau reste constant, son débit est-insignifiant. Le trou n° 9 est creusé dans un vieux massif plein, sous les cimes des arbres, à 107 mètres du trou n° 4, vers le sud-ouest. Le terrain est horizontal ; 1l y a 0®,75 de différence de niveau entre ce trou et le puits n° 7. La forêt est sur le tchernozem ; au-dessous vient une argile rouge, épaisse et sèche; à 6",40, elle devient plus noire et plus humide; à 13,19, elle est plus molle, sableuse et imbibée d’eau; à 15 mètres, la sonde entre dans le sable gris tertiaire où l’eau se montre, mais pas abondante ; son niveau reste constant. Comme le montrent les coupes, les eaux de la forêt descendent vers la steppe par une pente un peu plus douce que dans la pre- mière chaîne de sondages. Considérant que, d’une part, il y à iden- tité absolue dans là composition géologique et le relief, . que, de INFLUENCE DES FORÊTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 463 l’autre, l’abaissement du niveau des eaux souterraines est propor- tionpel à la densité du massif, on est disposé à attribuer cet abaisse- ment à l'influence du boisement, sinon entièrement, du moins en grande partie. C’est la cause principale, peut-être unique. La troisième chaine est encore située sur la lisière septentrionale de la forêt. Emplacement horizontal en général (voir coupe n° 4); c’est seulement hors des limites de la forêt que le sol s’infléchit. Près de la lisière est le puits n° 5. Jusqu'à 46 mètres de la forêt, le sol est nu ; la profondeur jusqu’à l’eau est de 3,20 et jusqu’au fond du puits de 10,15. Il y a beaucoup d’eau; d’après les renseigne- ments pris, cette abondance est constatée depuis plusieurs années. À 4920 mètres vers l’ouest de ce puits, il y a un ravin au fond duquel se trouvent des sources découlant de ces sables tertiaires en assez grande abondance. Ces sources situées tout à fait à la limite de la forêt sont dans un endroit couvert d’une végétation très clairsemée. D’après le nivellement, elles sont à 14°,19 en dessous de l’orifice du puits n° à et il est évident qu’elles appartiennent à l'horizon des sa- bles tertiaires, alors que le puits est alimenté par la nappe superti- cielle, c’est-à-dire par le premier niveau dont nous avons parlé, dans l'argile avec des galets. Le sondage n° 6 a été fait dans la forêt entre les sources dont il vient d’être question et le puits n° 9. Le massif, vieux, est devenu clair, d’où production d'herbes épaisses. La distance du sondage n° 6 au sondage n° 7 est de 150 mètres et celle du puits n° 5 à ce même sondage n° 7 est de 45 mètres. L’orifice du sondage n° 6 est à 0",93 au-dessus de celui du puits n° 5. Le sondage traversa les couches suivantes : A la surface : tchernozem typique vierge ; Au-dessous : argile brune d’abord, puis rouge à cause de la pré- sence du fer; À 7°,32: petite couche de sable bien sec ; A 12",72: l'argile brune devient plus sableuse ; À 44,64: l'argile devient verte et sableuse ; A 14,80 : sable argileux vert-gris. L'eau a été rencontrée à 19",9 avec un débit faible. Le sondage n°7 est à 43 mêtres du puits et à 16 mêtres de la 464 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. forêt, qui est formée là d’un vieux massif s’élevant comme un mur. Il est en terrain tout à fait horizontal; c’est une place de repos pour le bétail. Le nivellement donne 0",64 au-dessus du puits n° 5. Le sol est le tchernozem vierge. Au-dessous: argile ordinaire brune comme la précédente ; À 7%,02: pete couche de sable micacé où l’eau se montre; Au-dessous reprend l’argile ordinaire. Cette chaîne de sondages est intéressante parce qu'ici se manifeste l'influence des forêts sur l’abaissement des eaux. Malgré la petite distance des trous et l'identité de composition géologique, les deux points ont présenté une grande différence dans l’abondance des eaux. Il est curieux de constater que les couches de sable qui se rencontrent au même niveau dans les deux sondages, à 7 mètres de profondeur, sont lout à fait sèches sous la forêt et saturées d’eau dans la steppe. La quatrième chaine date de 1891 pendant que je me livrais à des études dans les domaines du prince Voronzoff sans viser ce but par- ticulier ; à présent j'ai fait plus attention aux caractères minéralo- giques, J'ai relevé le plan et le nivellement avec soi et j'ai fait en- core un trou de contrôle. La chaîne commence au puits n° 1 (voir coupe n° 5) creusé près du bord de la forêt dans un champ de 30 ares environ. Le terrain est là horizontal, puis s'incline vers le midi en pentes faibles d’abord, puis plus fortes. C’est dans cette direction qu'est la chaine des son- dages. Le puits n° 1 creusé en 1891 est à 8 mètres des arbres les plus proches; il rencontre d’abord l'argile brune, puis l'argile verte tertiaire servant de base aux eaux souterraines assez abondantes. La profondeur jusqu’à l’eau est de 13,63 et jusqu’au fond de 17 mètres. I y a plus d’eau maintenant qu'il y a 4 ans. Le sondage n° 8 est à 250 mètres du précédent en descendant la pente et son orifice est à 8",998 au-dessous. Comme le sol à une pente régulière, je ne puis admettre qu’il soit en mouvement. Ce sondage n° 8 est dans un peuplement d’âge moyen. A la surface : sol (terre) forestier ; Au-dessous : argile brune ordinaire, très sèche et très compacte ; INFLUENCE DES FORÊTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 465 À 9,76: argile tertiaire verte, d’abord un peu sableuse, puis très compacte. La sonde pénétra jusqu’à 12,78 sans trouver d’eau. J'ai décrit les sondages n° 9 et n° 10 dans un autre travail; je ne m’y arrête pas. Il est très intéressant de constater l'influence de si petits champs sur le niveau des eaux souterraines. Sachant, par les recherches précédentes, combien il s’abaisse vite, sous la forêt, même sur des distances très faibles, on pouvait prévoir qu’on allait rencontrer le même fait dans ce champ. Malheureusement il faut reconnaitre que la chaine de sondages dont nous parlons ne résout pas la question. On a bien constaté l’abaissement des eaux sous la forêt, mais on ne peut affirmer qu'il soit dù exclusivement à son action; on pourrait tout aussi bien l’attribuer à la dépression des eaux vers le ravin. Cependant les trous n° 9 et n° 10 feraient songer à l'influence de la forêt en raison de lidentité de la composition géologique en tous ces points. Je n'ai pas pu trouver d’autres emplacements favorables dans la forêt Chipoff; j'ai été plus favorisé sous ce rapport dans la forêt Noire. Forêt Noire. La forêt Noire (gouvernement de Kherson, district d'Alexandria, 48°20" lat., 30° 18° long.) se trouve, comme la forêt Chipoff, sur le bord sud de la région appelée en Russie Sleppe à forét ou Steppe demi-forestière. Ni vers l’est sur le même parallèle, n1 vers le sud sous le même méridien, on ne trouve de véritables foréts de steppe. U n’y a que dans les vallées de fleuve et sur les ravins des steppes qu’on trouve des forêts naissantes. | Cette forêt Noire est entourée de légendes ; elle a autrefois abrité des moines, après avoir servi de repaire à des brigands. La nature en a fait une véritable forteresse d’où les brigands ob- servaient la proie qui passait dans les steppes. Les légendes popu- laires qui la concernent prouvent qu’elle est très ancienne. La partie nord confine à la rive droite du fleuve Ingoulets et sa lisière sud ANN. SCIENCE AGRON. — 2° SÉRIE. — 1897. — 11. 30 466 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. s'étend sur une ligne de partage des eaux très étroite ; les sources des affluents du fleuve Ingoulets touchent presque celles des affluents qui vont en sens contraire. Néanmoins, toute la région donne l’im- pression d’une surface horizontale, plus encore que la forêt Chipoff. Alors que, dans celle-ci, la pente des ravins commence à une distance de 1 kilomètre et plus, si bien que la voiture donne la sensation d’un voyage sur les vagues, ici le sol est horizontal et c’est tout d’un coup, sans être prévenu, que l’on tombe sur un ravin. La caracté- ristique des forêts de steppes de lorient, d’après Ommer de Hell, réside dans les vallées larges et profondes qui les sillonnent et qui sont bordées de versants abrupts si bien qu'on se croit dans une vaste plaine et qu'il faut arriver au bord de la fente pour la voir. Les ravins de la forêt Noire débouchent tous dans le fleuve Ingou- lets; deux ont 55 mètres de profondeur ; ils commencent avant la forêt. (Voir le profil du S.-E. au N.-0. fait d’après mon nivellement et celui des élèves de l'École forestière.) Les chiffres d'altitude ont été reliés à ceux des gares; ils donnent exactement le niveau au- dessus de la mer Noire. Composition géologique. — On possède à cet égard très peu de renseignements. En 1869, Barbot de Marny a, le premier, décrit la composition géologique de la province; mais 1l n’a pas vu les envi- rons de la forêt, et ce n’est que d’après des renseignements qu’il dit que, sur le fleuve Ingoulets, près de la station de Cibouleva, on voit du granit. Sur la carte géologique, cette région est colorée de la teinte affectée à l’argile sableuse tertiaire et dans les ravins sont marqués des pointements de roches cristallines. Plus tard, Sokolof fit des recherches hydrogéologiques ; malheu- reusement l’auteur n’a pas publié tout son travail. En 1893, a paru un résumé’ dans lequel l’auteur donne brièvement les caractères généraux de quelques districts du gouvernement de Kherson. Il dit qu’au sud et au centre du district d’Alexandria il y a un grand développement de roches cristallines anciennes (granit, 1. Études hydroçéologiques dans le sud el le sud-est du gouvernement de Kherson, par Sokolof, Saint-Pétersbourg, 1893. INFLUENCE DES FORÊTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 467 gneiss) dont les affleurements montent jusqu’à la ligne de partage des eaux des steppes ; ces roches sont couvertes d’une couche mince de lôss. C’est surtout le tertiaire et notamment l’oligocène qui y est re- présenté. La littérature est donc très pauvre, malheureusement, car, dans le cas contraire, j'aurais pu me fier à la carte géologique de la pro- vince sans être obligé de la faire. D’après mes recherches, la série des couches géologiques est la suivante : 4° Lôss au-dessous duquel on trouve de l'argile plus compacte, plus brune, l'épaisseur générale est de 14-17 mètres ; 2 Sable argileux gris, très compact, pénétré de veines de lignite, a10240;; 3 Sable orange, de 0,45 à 0",70; 4 Lignites très terreux, de 0",07 à 0,10; 5° Sable blanc ou ocreux avec amandes de kaolin, 17 mètres. Sur les formations cristallines, je n’ai pas constaté de sable, mais à leur surface d’affleurement il y a beaucoup de graviers provenant de leur destruction. A la base de toutes ces couches, on trouve le granit-gneiss. Les conditions hydrologiques sont 1ci simples. Le premier niveau des eaux souterraines est partout à la limite entre le lôss et l’argile brune. Il est curieux qu'ici la structure des couches ne semble pas jouer un grand rôle, comme je l’avais déjà constaté. L’eau suinte tantôt de la partie inférieure du lôss, tantôt de la couche supérieure de l’argile brune, et à œil nu on ne constate pas la moindre différence entre les portions de ces terrains qui res- tent sèches et celles qui sont gorgées d’eau. Ge premier niveau n’est pas très riche en eau et il n’est pas très répandu, bien qu’il soit ali- menté par toutes les pluies de la steppe. Dans tous les ravins où la dénudation ne s’est pas exercée, on voit de pelites sources à ce ni- veau. Ces eaux sont assez bonnes, bien que le lôss soit riche en sel. Le deuxième et dernier niveau se trouve dans les sables qui re- couvrent le granit. Par son développement et son abondance en eau, il joue le premier rôle dans la région. Comme les couches tertiaires 468 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. inférieures occupent presque tout le nord-ouest du gouvernement de Kherson, il faut admettre que le rayon d’alimentation est très grand. Il est vrai que la surface des formations cristallines de base est irrégulière et que dans les creux ont pu s’accumuler des sables provenant de la désagrégation des granits et renfermant de l’eau. Cette irrégularité de la surface fait que les eaux ne sont pas distri- buées régulièrement. Néanmoins, la provision d’eau est très consi- dérable ; c'est elle qui alimente les fleuves de la région. Deux pom- pes de la Station de Znamenka sont alimentées par cette nappe ainsi que toute la ville d’lelizavetgrad. D’après l'ingénieur, les trois puits existants fournissent 75 000 seaux par 24 heures ; ils ont 2",1 de diamètre. Si on avait voulu augmenter le nombre des puits, on se- rait arrivé à 300 000 seaux dans les 24 heures. Dans la plupart des ravins aboutissant au fleuve Ingoulets, au fond et au milieu où se voit une série de sables tertiaires 1l y a une masse d’eau qui forme de véritables sources. L’eau pénètre souvent dans les fentes du massif cristallin et coule sur le granit-gneiss. Tous les étangs, sauf celui de Znamenka, s’entretiennent par les eaux de cet horizon ; à cause de l’irrégularité de la surface, 1l y a des diffé- rences profondes dans l’abondance et le niveau de l’eau. Dans la forêt Noire, nous avons constaté le même fait que dans la forêt Chipoff ; elle est plus pauvre en eau que les steppes envi- ronnantes. La première nappe aquifère ne donne pas de sources; elles proviennent du second niveau et il faut les chercher dans les r'avins. La forêt Noire est coupée du nord au sud par un ruisseau qui par- court plus de 7 kilomètres dans la forêt et qui a sa source en dehors. À la tête du ravin, on voit de bonnes sources appartenant au premier horizon, celui du lôss; mais ce ruisseau devient à sec en entrant dans Ja forêt jusqu’à la 58° parcelle; à partir de là, le fond est formé simplement de boue avec un peu d'eau en deux ou trois en- droits ; la mare la plus importante est dans la parcelle 29. Dans les parcelles hautes 46 et 39, la forêt est jeune ; dans les parcelles 18, 11, 3, elle est vieille. À partir de la parcelle 39, en descendant, le fond et le bas des versants du ravin sont nus; les champs occupent une grande surface autour de la mare de la parcelle 29. INFLUENCE DES FORÊTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 469 Une autre rivière traverse la forêt au sud-est et prend sa source près de Znamenka ; les eaux du village de Znamenka sont du pre- mier horizon et nourrissent un grand étang dont les eaux se perdent avant d’arriver dans la forêt ; la rivière y est à sec; ce n’est qu’au bout d’un kilomètre qu'apparaissent de petites sources appartenant à l’horizon des sables tertiaires. Voilà toutes les eaux superficielles. Il nous reste à étudier les puits et les trous de sondage. Pour les puits, de même qu’à Chipoff, le plus grand nombre est en dehors de la forêt ; les quelques puits qui s’y trouvent sont tous alimentés par le second horizon. Le puits n° 13 est très caractéristique. Il est ouvert dans un vieux massif à 24 mètres du bord (voir coupe 6). On est allé jusqu’à 27,69 sans trouver d’eau et pourtant, à 114 mètres de là, en ter- rain découvert, à 60 mètres du bord du massif, le sondage n° 23 à trouvé l’eau à une profondeur de 15",54; l’orifice du trou de son- dage est à 1",47 plus bas que celui du puits de la forêt. La structure géologique est la même dans les deux points. D’après les renseigne- ments des gardes, ce fait se reproduit fréquemment. Puisque les eaux souterraines sont à une grande profondeur, on peut prévoir que l'influence de la forêt sera moins frappante qu’à Chipoff; mais d’autre part, grâce aux conditions du relief et surtout à la forme de la forêt se prolongeant dans la steppe par de minces bandes boisées, les sondages offrent encore plus d'intérêt. En traçant une ligne de sondages traversant la forêt, les champs, puis la forêt, nous espérions avoir pour la courbe dessinant le niveau des eaux souterraines une ligne en zigzag ; c’est en effet ce qui s’est réalisé. Les principes et les moyens de recherches ont été les mêmes que pour la forêt Chipoff. Chaine n° 5 (coupe 7). — Elle est située dans la partie sud de la forêt en terrain horizontal; mais à 120 mètres de la forêt se trouve une petite dépression qui se dirige vers le nord-ouest. À l’ouest de cette dépression peu marquée, le terrain descend brus- quement vers le ravin de Roudka, sur le fond duquel se trouve une petite source provenant de l’eau qui a filtré de l’étang de Znamenka sous les rails de Ja voie ferrée. 470 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. La forêt est vieille et forme un grand demi-cercle entourant les champs. À 200 mètres du bord de la forêt, sur une petite élévation, se trouve le puits n° 17, bien fourni d’eau potable de l’horizon du lôss. Profondeur jusqu'à l’eau . . . . . . . 10,15 — jusqu'au fond du puits . . . 14 ,15 Les habitants de Znamenka utilisent cette eau qui ne s’épuise pas. Ce puits est le point de départ de notre chaîne de sondages vers la forêt. Le trou de sondage n° 11 est à 106 mètres du puits ; l’orifice est à 0,95 au-dessous de celui du puits et il y a une distance de 88 mètres entre ce sondage et la forêt. On a constaté les couches suivantes : 1° Tchernozem à 0,76 ; 2° Lôss éluvial et lôss normal ; à partir de 7,17, le lôss deyient brun-noir ; 3° À partir de 9°,15 encore le lôss avec veines nombreuses ; 4 A partir de 11,44 on trouve largile brun-noir, gluante, assez riche en fer et en chaux. La sonde a pénétré jusqu’à 14,95 et l’eau s’est montrée à 11",55 avec un faible débit. Le sondage n° 12 est à 71 mètres du n° 11 et à 18 mètres de la forêt; son orifice est plus haut que le précédent de 0",75. Sous le tchernozem (0,70) se trouve le lôss typique gris-jaune. A 7,63 se voit une couche plus brune de même structure que le lôss. A 8,90, on touche encore le lôss très calcarifère, et à 9",98 l'argile brun-noir, plus compacte et plus sèche que dans le sondage n° 11. La sonde a pénétré jusqu’à 14",80 et l’eau a été rencontrée à 12",90 avec un faible écoulement. Le sondage n° 13 est fait dans un vieux et haut massif à 36 mètres du précédent et à 18 mètres du bord. Les couches traversées par la sonde sont les mêmes que les pré- cédentes, mais très sèches et très compactes. On a éprouvé d'énormes difficultés pour le forage. Immédiatement au-dessous du sol forestier on trouve le lôss élu- vial et normal; à 10,22, l'argile brun-noir avec grains noirs et INFLUENCE DES FORÈTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 471 veines nombreuses ; cette argile, très compacte, est collante, gluante, très humide dans le fond. L’eau apparaît à 15",90. On a mesuré à diverses reprises les niveaux dans les divers trous sans conslater de changements. Ainsi l’on voit un abaissement progressif, des eaux souterraines à mesure qu’on se dirige vers la forêt. Seulement, au début, cet abais- sement est faible (2 mètres sur 100 mètres); dès qu’on entre en forêt, la courbe tombe brusquement (de 2 mètres sur une distance de 36 mètres). Il est curieux de constater que la situation du sondage n° 11, au fond d’une petite dépression, et la présence d’une fouille assez pro- fonde, près du trou n° 12, n’ont pas eu d'influence sur cet abaisse- ment régulier des eaux souterraines. Chaine n° 6 (coupe 8). — Elle se trouve sur la lisière sud-est de la forêt, qui se termine ici, dans la steppe, par une langue étroite remontant sur une pente vers la tête d’un petit ravin. Vers le sud, la forêt borde la steppe horizontale. Ce point domine toute la con- trée, grâce au développement des sables tertiaires. La composition géologique est assez régulière. Les eaux souterraines, comme le montrent les puits 23, 24, 25 et 26, sont relativement à faible pro- fondeur. Notre attention s’était portée sur la lisière d’Odessa comme sur l'endroit le plus horizontal. Près de la forêt est le puits n° 23 dont l’eau est très abondante ; pendant nos recherches, une machine à vapeur, nombre d’ouvriers et de voyageurs y ont puisé et chaque matin l’eau y était au même niveau. Profondeur jusqu à l'eau . . . . . . . 13 — TUSTAUN ONE US CRUE 16 ,954 Le sondage n° 16 à été fait dans la forêt, à 72 mètres du puits précédent et à 48 mètres du bord de la forêt, constituée là par un vieux et haut massif. L’orifice est à 0,55 plus bas que celui du puits. Les couches géologiques sont toujours les mêmes : d’abord le lôss, avec une coloration brune à la profondeur de 25 mètres; plus 472 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. bas, à partir de 40 mètres, l'argile brun-noir, compacte, avec grains noirs et concrétions nombreuses. On a creusé jusqu’à 18*,14; l’eau affleure à 15,70. Le sondage a été rendu très difficile par la compacité et la sécheresse des couches. Nous voyons que, sur une très faible distance, il y a un abaisse- ment marqué des eaux souterraines sous la forêt, et on ne peut l’at- tribuer à l’inclinaison, très faible du reste, du terrain vers la forêt ; car, même en tenant compte de cette circonstance, la différence porterait sur des centimètres et il y a une brusque dépression de 2%,16: Chaîne n° 7 (croquis 9). — La parcelle 68 se prolonge par une bande longue et étroite dans la steppe ouverte. Cette bande est tra- versée, presque en son milieu, par un chemin de 36 mètres de lar- geur. Îl était curieux de savoir si cette petite clairière avait une influence sur l'allure des eaux souterraines. Dans ce but, on a pra- liqué deux sondages, d’un au milieu de la clairière, l’autre dans la forêt voisine, vieille et épaisse, à 70 mètres du premier sondage et à 42 mètres du bord. Les deux sondages sont au même niveau. Le sol est de terre forestière jusqu’à 0",92; au-dessous vient le lüss éluviel; à parür de 3",96, on voit le lôss typique, gris-jau- nâtre ; à 8°,08, on rencontre l'argile rouge-brun, semblable au lôss ; à 8",09, à nouveau le lôss gris; à 11%,83, l’argile brun-noir ; à 11,34, elle devient sableuse et plus riche en chaux. La sonde s’est enfoncée jusqu'à 15",02 et l’eau s’est montrée à 14%,48. Le sondage a été assez facile. Dans le sondage n° 18, fait en forêt, on trouve sous le sol forestier le lôss éluvial brun, pas très dur; la sonde passe bien. A partir de 4 mètres, elle entre dans le loss typique et pénètre difficilement. A 7%,17, on rencontre le lôss brun; à 8",96, à nouveau le lôss ordi- naire (le sondage avance très lentement) ; à 11",28, l'argile brun- noir ; dans cette couche plus douce, moins dure, la sonde pénètre plus facilement et arrive à 15",09 sans trouver d’eau; le sondage s'arrête là, parce que l’instrument se rompt. Néanmoins, cela suffisait pour montrer que le niveau de Peau est plus bas en forêt. Ainsi, dans ce lieu présentant partout le même INFLUENCE DES FORËTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 473 relief, la même composition géologique, le niveau de l’eau souter- raine se relève juste sous la projection de ce petit espace dé- boisé. Il est regrettable que l'accident survenu à la sonde ait empêché de préciser les limites de ce bombement. Chaîne n° 8 (coupe 10). — Elle est installée dans la partie sud- ouest de la forêt. Entre les parcelles 25 et 36 se trouve un grand champ, relié à la steppe par une bande étroite. La forêt est d'âge moyen; en dehors d’un ravin boisé, qui coupe le champ, le terrain est hori- zontal. Presque au milieu du champ, le puits n° 44 est assez riche en eau. Profondeur jusqu'à l'eau . . . . . Rs 10,95 — jusqu'au fond”. à . 4: 2%. : 1559 Le point de la forêt le plus rapproché est à 236 mètres; à 215 mè- tres du puits n° 14, au fond du ravin boisé, est creusé le puits n°12, qui a une profondeur de 2,70 jusqu’à l’eau et de 4,17 jusqu’au fond. Il se trouve dans un peuplement de 25 ans. Comme l’a constaté le nivellement, la surface de l’eau du puits n° 14 est à 2",19 au-dessus de celle du puits n°12, bien qu’on en tire une énorme quantité d’eau. Nous avons voulu déterminer le plan d’eau sur une plus grande largeur en faisant des sondages d’un côté vers la steppe, de l’autre dans la forêt qui avoisine le champ. Nous avons ainsi obtenu une chaîne dont les quatre anneaux ont touché successivement la steppe, la forêt, le champ, la forêt. Sondage n° 19 dans la steppe ouverte, avec pente légère vers le ravin. L’endroit est cultivé. L’orifice du trou est plus haut que celui du puits n° 12 de 19%,95 ; il est à 70 mètres de ce puits et à 40 mètres du bord de la forêt. La sonde traverse 0",61 de tchernozem, puis le lôss éluvial pas- sant au lôss normal; à 5",49, le lüss devient argileux et brun-noir ; à 8,59, l'argile se montre plus claire, riche en formations ocreuses * 474 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. passant peu à peu au lôss; à 10,55, le lüss devient mol et hu- mide. L’eau se manifeste en abondance à 11,44. Sondage n° 20 dans la forêt pleine d'âge moyen (parcelle 36), à 20 mètres du bord, à 256 mètres du puits n° 14. L'orifice est plus baut que celui du puits de 0,04. Entre eux se trouve une légère dépression. Le sol forestier passe au lôüss plus ou moins éluvial. A 3",66, on trouve de petites veines de l’argile brune du lôss avec des concré- tions de calcaire de 0",1 d'épaisseur ; à partir de 8",2, argile brun- noir plus molle ; à partir de 10,69, argile plus noire, marneuse ; à partir de 11,28, argile plus claire, plus compacte, assez humide, et à partir de 12,50, argile plus sombre avec ocre jaune, ferrugineuse. La sonde pénètre à 14",50 ; l’eau affleure à 14,03. Le résultat du sondage est très curieux. En réunissant par une ligne le niveau de l’eau des puits et des sondages, on oblient une ligne brisée dont les points les plus bas sont toujours sous la forêt. L’abaissement du niveau sous le massif boisé ne peut avoir d’autre cause que la présence de la forêt. Chaine n° 9 (coupe 11). — Elle traverse un champ d’un kilo- mètre carré, presque au centre de la forêt, dans les parcelles 40 et 41. Ce champ est horizontal; ce n’est qu'à l'extrémité occidentale qu'il est un peu en pente vers un ravin. Par son bord nord-est ce champ confine à un vieux massif; au sud-ouest la forêt est Jeune. Sur le champ même, vers le sud-est se trouvent deux puits : le pre- mier (n° 4), à 55 mètres d’une jeune forêt, a une profondeur de 14,05 ; son eau n’est pas utilisée ; le second (n° 5), à 114 mètres du précédent, plus près du centre du champ est à 100 mètres du point le plus rapproché de la forêt. Son orifice est à 0,38 au-dessous du précédent et il est très curieux que le niveau de l’eau y soit à 1,38 au-dessus du niveau du puits n° 4. Le sondage n° 21 a été fait dans un peuplement jeune et très dense près du puits n° 4, à 85 mètres de lui et à 30 mètres du bord de la forêt : l’orifice est au même niveau que celui du puits. Sous le sol forestier, on trouve le 1üss un peu modifié, puis, à ru on 1,99, l'argile du lôss, brun-noir. INFLUENCE DES FORÊTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 475 Plus bas, le lôss parsemé de concrétions nombreuses; l’eau se montre à une profondeur de 15 mètres, avec écoulement faible. Le trou n° 22 a été foré dans un massif épais et vieux (parcelle AA), à 694 mètres du puits n° 9 et à 40 mêtres du bord de la forêt, sous de grands chênes. F Le terrain est en pente légère vers l’est. On a relevé les couches suivantes : Sol forestier, 0,70; au-dessous, lôss; à partir de 2,90, argile du lôss brun-noir ; à 3",35, encore le lüss normal de teinte claire; à 8,84, il devient plus gris et collant ; à 9",76, argile brun-noir. L’eau se montre à 12°,20. Comme le montre cette coupe, la structure géologique est ici normale ; seulement l'horizon supérieur du lôss, ainsi que le lôss noir a été enlevé par dénudation et remplacé par une formation qui ressemble au lôss, peut-être de nature alluviale. Ainsi, comme dans les cas précédents, le niveau des eaux souter- raines est plus élevé, sous le sol nu, que sous la forêt, et l’abaisse- ment du niveau est moindre sous le jeune peuplement que sous le vieux massif. La courbe atteint son point culminant sous le centre du champ et s’abaisse de chaque côté dès qu’on s'approche de la forêt. Une partie de la forêt a été exploitée par bandes alternes, une bande restant pleine entre deux bandes exploitées à blanc étoc. Nous avons fait deux sondages, l’un dans la bande pleine, l’autre dans la coupe exploitée pour voir s’il y avait une différence dans le niveau des eaux. Mais la sonde ne pouvait aller qu’à 15 mètres et à celle profondeur l’eau ne se montra ni dans l'un ni dans l’autre. Rappelons en terminant que, dans l’été de 1891, M. Bliznin a entrepris des observations comparées sur l'humidité du sol dans la forêt Noire, à 108 mètres du bord et dans les champs qui l’envi- ronnent, à 139 mètres de la forêt, sur un emplacement horizontal et normal”, Les déterminalions faites à trois reprises jusqu’à 1",50 de profondeur, ont montré que les couches supérieures du sol fores- {. Travail de M. Bliznin sur l'humidité du sol dans la forêt et dans les champs. 1592, Bullelin méléorologique, n° 7. p. 269-273. 476 ANNALES DE LA SCIENCE AGRONOMIQUE. tier sont plus humides que celles des champs cultivés et que les cou- ches inférieures sont, au contraire, plus sèches. FORÊT DE 30 ANS. CHAMP DE BLÉ. n # EE TAUX D'HUMIDITÉ. 23 juil $ juil 17 mai. 22juin. * À 7 mai. 22juin. * 3 j let 17 ma 22 j of De Om à0",30 . . . Aro: A0, 5 14 10:84 10e De/0 400040 :602e OO T:S. AA nan 15 52 0 FAT Des0 AD OL M0 et er. 1804 OA OV Le dib 24e SU De 0 ,90 à 1 ,20 . . 1825 POTE UE COTON 6,2 CSA De 1 20 à 1 ,50 . . 15,50 SA US PAT En 1558 NES Les points où ont eu lieu les prélèvements ont été choisis de telle façon, affirme M. Bliznin, que la différence d'humidité ne peut être attribuée qu’à l’influence de la végétation. Conclusions. Il résulte de l’ensemble des faits observés dans les forêts de steppe de la Russie méridionale que : toutes conditions physico-géographi- ques égales, le niveuu des eaux phréatiques* dans les foréls est plus bas que dans la steppe adjacente ow qu'en géneral dans un espace libre voisin. Comme le montrent les coupes, dans tous les cas sans exception, à l’approche de la forêt, le niveau des eaux phréatiques s’abaisse, la couche plonge et, dans certains cas, la dépression de la courbe est très accentuée. Il en est ainsi dans la forêt Chipoff, près de la lisière d’Ericheff, où sur un parcours de 190 mètres le niveau s’abaisse de 10,96 (voir coupe 4), ou encore près de la lisière de Laptelf; là, sur une distance de 32 mètres la différence de niveau dépasse 10 mètres. Le même fait se constate dans la forêt Noire; près de la lisière de Zandrof, sur 200 mètres environ, le niveau tombe de 4,95 (voir coupe 7) et de 40",78 (voir coupe 6) sur une distance de 11% mètres près de la lisière Tsybouleff. {. Daubrée dans son ouvrage : Les Eaux souterraines, t. 1, p. 19. appelle ainsi la nappe d'eau souterraine la plus rapprochée de la surface, celle qui alimente les puits ordinaires (du grec 2p£x9, «tos, puits). INFLUENCE DES FORÊTS SUR LES EAUX SOUTERRAINES. 477 Il est intéressant de remarquer que cette dépression du niveau des eaux phréatiques est plus accusée sous les vieux massifs que sous les jeunes peuplements; dans ce dernier cas, le niveau s’est seulement abaissé de 1°,57 sur une distance de 80 mètres. Constatons aussi que, généralement, le plan de surface des eaux phréatiques à une pente inverse de celle du terrain, contrairement à la loi empirique de l’hydrologie qui veut que la nappe des eaux souterraines soit inclinée dans le même sens que le terrain. FIGURES. FORÊT CHIPOFF ë | à ou. 15. = 106 --—-- "à AR le re DRE fe nvlz LÉGENDE cx6 — sondage ; KOI — puits. FORËT NOIRE 20 ESSENCE ab 11. cb 19. ak 13. "Go 80 109 ÉCHELLE 1/500- pour les distances verticales ; 1/2000° pour les distances horizontales. . vare A ' L 3! à Né Fe 041 RE ncccb n a stt ME Pa lÈ cuis Nora, à FR AR « y x FAT UP * 1: ns TE ‘ si : 4 sl Lie j de Let ra 4 : , # ee al , 4,4 ; PAR Me TABLE DES MATIÈRES DU TOME DEUXIÈME (1897) H. Pellet. — Eludes sur la canne à sucre; dosage du sucre, com- position de la canne, échantillonnage (suite et fin). . . Th. Schlæsing. — L’acide nitrique dans les eaux de rivière et de source. À. Petermann. — Les produits chimiques employés à la stérilisa- tion des excréments humains sont-ils nuisibles aux plantes agri- coles et aux microbes bienfaisants du sol?. . M. Potier. — Étude sur l’emploi des engrais phosphatés sur les terres de l’infracrétacé de la Puisaye . . M. Laurent. — Recherches expérimentales sur l’assimilation de l'azote ammoniacal et de l’azote nitrique par les plantes supé- RICHES ar eee L. Grandeau. — Les gisements de phosphates de chaux d’Al- gérie. . Pa A. Girard. — Recherches sur les quantités de matières fertili- santes nécessaires à la culture intensive de la pomme de terre. . A. Müntz et H. Coudon. — Sur le dosage de la quantité de beurre contenu dans la margarine. . . L. Grandeau. — Contribution à l'étude du vanillier. M. P. Bonâme. — Station agronomique de l’île Maurice : Rap- port sur les travaux de 1896. . : E. Henry. — L’azote et la végétation forestière . . Hilgard et Loughridge. —- Sur la possibilité d’une culture avan- tageuse de la betterave à sucre dans certains terrains salants. Résumé par J. VILBOUCHEVITCH . . . Pages. 120 136 175 213 261 281 295 307 309 382 482 TABLE DES MATIÈRES. Hilgard et Loughridge. — Échantillonnage des terrains salants. Façon de présenter les résultats de l'analyse; suite des Études sur les terrains salants de la Californie. Résumé par J. VizBou- CHENITOHEN CGR SEE. L. Grandeau. — De la valeur agricole des scories de déphospho- TAROT UN NET AE ER ER à A. Petermann et J. Graftiau. — Exisle-t-il une relation cons- tante entre la solubilité des scories de déphosphoration dans le citrate d’ammoniaque acide et le poids de la récolte produite ? P. Ototzky. — Influence des forêts sur les eaux souterraines. Excursion hydrologique de 1895 dans les forêts des steppes . . DE SNSSR O—— Nancy, impr. Berger-Levrault et Cie, | <. Na N tes: ie es qu ie SAIS M RD. ARR b A eng DAME DE ÉNORL x + Rue æ Pan d: lie SE Etre ie de DRE LU AT AUS ARE ang Le ae