ocrt-j Ls ; ■ 3rOCT. 96 tt ANNALES DE L'UNIVERSITÉ DE LYON XXW ÉTUDES SUR LES TERRAINS TERTIAIRES DU DAUPHINÉ DE LA SAVOIE ET DE LA SUISSE OCCIDENTALE H. DOUXAMI DOCTEUR ÈS SCIENCES ANCIEN ÉLÈVE DE L’ÉCOLE NORMALE SUPÉRIEURE, AGRÉGÉ DE L’UNIVERSIÏÉ PARIS MASSON ET Cie, ÉDITEURS LIBRAIRES DE l’âCADÉMIE DE MÉDECINE 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN i 89 G 313 ANNALES DE L'UNIVERSITÉ DE LYON ÉTUDES SUR LES TERRAINS TERTIAIRES DU DAUPHINE DE LA SAVOIE ET DE LA SUISSE OCCIDENTALE xxvii. — Juillet 1896. S.ÇCfÇ 3* m su / ANNALES DE L'UNIVERSITÉ DE LYON ÉTUDES SUR LES DU DAUPHINÉ DE LA SAVOIE ET DE LA SUISSE OCCIDENTALE PAR H. DOUXAMI Docteur ès Sciences. ’W Ancien Elève de l'Ecole Normale supérieure, Agrégé de l’Universite. i j PARIS MASSON ET C", EDITEURS LIBRAIRES DE L’ACADEMIE DE MEDECINE 120, Boulevard Saint-Germain 1896 INTRODUCTION Ce n'est point que je conseille de négliger les observations de detail, je les regarde, au contraire, comme l'unique base d'une connaissance solide, mais je voudrais qu'en observant ces détails on ne perdit jamais de vue les grandes masses et les ensembles, et que Ja connaissance des grands objets et leurs rapports fût toujours le but que l'on se proposât en étudiant leurs petites parties. De Saussure (Voyages dans les Alpes, introduction). Depuis le commencement du siècle, les sciences géologiques ont progressé avec la plus grande rapidité, et, de même que pour les autres branches des sciences naturelles, on sent de nos jours, de plus en plus le besoin de s’attacher surtout à des études monogra- phiques. Les nombreuses monographies paléontologiques, qui ont été publiées dans ces dernières années, ont montré tout l’intérêt qu’il pouvait y avoir à étudier, dans une région déterminée, l’ensem- ble d’une faune. Les résultats obtenus, soit uniquement paléon- tologiques, soit quant à la comparaison avec la faune des mêmes terrains dans d’autres régions, à la répartition des espèces, à leurs conditions d’existence, à la température et à la profondeur des mers aux différentes époques sont de la plus haute importance. L’étude paléontologique, que j’ai entreprise, des terrains ter- II INTRODUCTION tiaires de la Savoie et du Dauphiné nous permettra de préciser, non seulement l’âge, mais encore l’origine de certaines assises, âge et origine jusqu’ici fort discutés par les différents auteurs. Aussi la partie paléontologique, où j’étudie les mollusques et les vertébrés recueillis pendant les courses presque ininterrompues que j’ai effectuées pendant plus de deux années, constitue-t-elle un des chapitres les plus importants de ce travail. Mais, comme cela a été signalé depuis longtemps, les terrains tertiaires de la Savoie sont en général peu fossilifères et les fos- siles toujours en mauvais état de conservation. Ceci explique pourquoi l’étude des terrains tertiaires de la région qui fait l’objet de ce travail est encore si peu avancée et a donné lieu à tant de controverses. Il y a de nombreuses difticultés que la paléontologie seule ne peut toujours pas résoudre et il faut, qu'à chaque instant, une étude stratigraphique très serrée et toujours fort délicate lui vienne en aide. Les terrains tertiaires de la Savoie et du Dauphiné sont aussi fort importants à étudier à un tout autre point de vue : leur histoire se rattache en effet à celle de ces grands phénomènes orogéniques qui ont marqué les derniers soulèvements alpins. Nous pourrons, en effet, par l’étude des différents terrains tertiaires des hautes chaînes calcaires de la Savoie et du Jura, reconnaître l’existence de mouvements orogéniques importants, depuis le Sénonien jus- qu’au Pliocène et préciser l’âge des différentes régions naturelles comprises dans le territoire que j’ai étudié. Ges recherches m’ont permis enfin de compléter les notions déjà acquises sur les communications des mers ou des lacs qui existaient, d’une part dans la région rhodanienne, de l’autre dans la région helvétienne, avant l’existence des chaînes du Jura. Les explorations des terrains tertiaires des feuilles de Chambéry et d’Albertville ont été effectuées pour le Service de la Carte géo- logique de la France, auquel M. Michel Lévy a eu la bienveil- lance de m’attacher comme collaborateur adjoint. Les nombreuses courses que j’ai dû faire aux environs de Lyon, dans le Dauphiné et la Suisse, m’ont été facilitées par les subventions de la Société des INTRODUCTION III Amis de l’ Université de Lyon. Qu’elle me permette de lui adresser ici mes bien sincères remerciements. Ce travail a été fait au Laboratoire de Géologie de la Faculté des Sciences de Lyon, sous la bienveillante et savante direction de M. Depéret, auquel je tiens tout particulièrement à adresser mes respectueux remerciements. Les nombreux conseils et renseigne- ments qu’il m’a donnés pendant mon séjour dans son labora- toire m’étaient précieux par l’autorité de sa haute compétence sur les terrains tertiaires . L’étude du vaste territoire qui a fait l’objet de ce travail m’a mis en relations avec un grand nombre de personnes m’ayant fourni des renseignements divers et que je suis heureux de remercier ici. L’étude des synclinaux tertiaires de la Chartreuse et des envi- rons de Grenoble m’a été facilitée grâce aux renseignements et aux conseils précieux que M. Kilian, professeur de Géologie à la Faculté des Sciences de Grenoble, a bien voulu me donner à maintes reprises. 11 m’a également communiqué, de la façon la plus aimable, tous les échantillons de la riche collection de la Faculté, qui pouvaient m’être utiles. A Chambéry, M. Révil, président de la Société d’histoire naturelle de Savoie, qui m’a accompagné dans un grand nombre de mes courses, a mis à ma disposition la collection du Musée de Chambéry et m’a signalé nombre de faits nouveaux ou peu con- nus au sujet des terrains tertiaires de la Savoie. Pendant mon séjour à Lausanne, M. Renevier, professeur de Géologie à l’Université, m’a fait profiter de sa profonde connais- sance de la géologie de la Suisse occidentale et m’a facilité l’étude de la collection du Musée. M.Golliez, professeur de minéralogie à l’Université, et M. Lugeon, docteur ès sciences, assistant de géo- logie, avec lequel j’ai collaboré au tracé géologique des terrains tertiaires de la feuille d’Albertville, m’ont fait voir les points in- téressants des couches tertiaires des environs de Lausanne. M. Lugeon m’a fourni en outre des renseignements encore inédits sur la tectonique du massif des Bauges. IV INTRODUCTION MM. de Fellemberg et Studer à Berne, M. Duparc, professeur de Géologie et deMinéralogie à l’Université de Genève, M. Bedot, Conservateur du Musée, ainsi que MM. E. Ritte.r et Ch. Sarrasin, à Genève, m’ont fourni avec la plus grande amabilité les rensei- gnements, les ouvrages et les échantillons se rapportant à mon étude. MM. Mermier et Reymond ont mis également à ma disposi- tion, avec le plus grand désintéressement, leurs collections de fos- siles Tortoniens des environs de Ckimilin et m’ont ainsi permis de donner un aperçu aussi complet que possible de cette faune inté- ressante. Je tiens aussi à exprimer toute ma gratitude à MM. Riche, chef de travaux de Géologie à la Faculté des Sciences de Lyon, Roman, préparateur, qui m’ont témoigné le plus grand intérêt pendant le cours de cette étude, et à MM. Vivien, A. Girardot et Rittener, qui m’ont fourni de nombreux renseignements sur les terrains tertiaires de la Savoie et du Jura. Après un aperçu des diverses régions naturelles que j’ai parcourues, je passe à l’étude des différents terrains tertiaires, depuis l’Eocène inférieur jusqu’à la fin du Pliocène, en adoptant une division (période nummulitique, comprenant une partie de l’Eocène et le Tongrien, et période néogène depuis l’Aquitanien jusqu’à la fin) justifiée par les variations correspondantes de la mer pendant ces périodes. Un résumé permet de se rendre compte, à la fin de chacune de ces grandes périodes, de l’histoire géologique de la région et des relations avec les dépôts de la Suisse orientale, ou de la partie méridionale de la vallée du Rhône. Un dernier chapitre, enfin, est uniquement consacré à la des- cription des formes animales nouvelles ou peu connues des ter- rains tertiaires supérieurs. ÉTUDES SUR LES TERRAINS TERTIAIRES DU DAUPHINÉ DE LA SAVOIE ET DE LA SUISSE OCCIDENTALE . CHAPITRE PREMIER «Cv DESCRIPTION PHYSIQUE ET LIMITES DE LA RÉGION Les terrains tertiaires, dont j’ai entrepris l’étude dans le Nord de la vallée du Rhône, le Jura méridional et la plaine Suisse, ont subi de profondes dislocations et ont été soumis à des érosions considérables. Aussi se trouvent-ils actuellement répartis en lam- beaux plus ou moins isolés, difficiles à réunir les uns aux autres ; par suite, ils ne forment pas une région naturelle unique, facile à délimiter, tant au point de vue géologique qu’au point de vue géographique. Les plissements tertiaires qui ont affecté la région faisant l’objet de cette étude, l’ont divisée en plusieurs autres fort distinctes dont nous aurons à tenir compte dans le cours de ce travail. Au Sud, j’ai pris comme limite le cours actuel de l’Isère, depuis son confluent avec le Rhône jusqu’à celui de l’Arly. C’est une limite que nous pourrons appeler géographique : il n’y a, en effet, aucune différence entre les sédiments tertiaires au Nord et au Sud de l’Isère. Univ. de Lyon. — Douxami. i 2 DESCRIPTION PHYSIQUE ET LIMITES DE LA REGION La vallée actuelle de cette rivière, dans toute la plaine du Rhône, n’est qu’une vallée d’érosion relativement très récente. Vers Saint-Nazaire-en-Royans, l'Isère coule au pied des monta- gnes du Vercors, parallèlement à la direction des plis et même dans un synclinal, compris entre le petit anticlinal néocomien de Poliénas sur la rive droite et le premier anticlinal du Vercors sur la rive gauche. A partir du Bec de l’Echaillon, l’Isère qui a la direction N.-W. S.-E., coupe en cluse les plis de la Char- treuse et du Vercors jusqu’à Grenoble. En amont de cette ville, l’Isère vient du Nord-Est, parallèlement à la direction des plis alpins anciens du massif de Belledonne et coupe obliquement les prolongements des différents plis qui constituent le massif des Bauges. Au Nord d’Albertville, la limite de la région que j’ai étudiée est- nettement indiquée par le cours de l'Arly, le grand synclinal Nummulitique qui constitue la vallée de Serravaletdu Reposoir, et par la chaîne crétacée des Aravis; au delà de la vallée de l’Arve, par le massif des Fiz et de Platé, et la chaîne de la Dent du Midi. Au Nord de la vallée du Rhône, mes études ont surtout porté sur la Plaine Suisse, en y rattachant les premières chaînes (Pléia- des) des Préalpes Fribourgeoises et, au Nord-Est de cette zone des Préalpes, la région correspondant à la zone de la Molasse piissée de la Suisse orientale. La limite Ouest est à la fuis une limite géologique et une limite géographique ; c’est en effet le bord oriental du Plateau Central, depuis Valence, jusqu’au Nord de Lyon. Quant à la limite N.-W. et N., je ne peux la définir à présent, car elle correspond à la limite maxima d’extension septentrionale de la mer Miocène, venant du Bassin Méditerranéen à l'époque du Miocène moyen (deuxième étage méditerranéen) ; d’après les travaux des géologues suisses, et plus récemment de M. Depéret, cette mer s’étendait à partir de Lyon par Saint-Claude, jusque vers Pontarlier, pour rejoindre de là la mer du Bassin de Vienne, en suivant sensiblement le pied méridional du Jura. Ce vaste territoire, au moment où se déposait le Miocène LA. REGION DE LA PLAINE FRANÇAISE 3 inférieur et moyen, formait un bassin d’affaissement entre les parties déjà émergées des Alpes et les restes de l'ancienne chaîne Hercynienne (Plateau Central français, Vosges et Forêt-Noire). Il s’étendait au Sud jusque dans la région méditerranéenne et, à l’Est, vers le Bassin de Vienne. Par suite des plissements alpins, il a été subdivisé en un certain nombre de régions naturelles. C’est ainsi que l’on peut distinguer de l’Ouest à l’Est : 1° La région de la Plaine Française, ou, plus exactement, une région de plaines et de plateaux, comprenant ce que Lory appelait les plateaux tertiaires du Bas-Dauphiné septentrional, formés essentiellement de terrains tertiaires (Miocène et Pliocène) et de terrains plus récents (Alluvions ante-glaciaires, glaciaires et post-glaciaires). Ces plateaux se continuent au Nord par la Bresse, dont une partie seulement a été recouverte, comme je le montrerai plus loin, par la mer Miocène. Cette région s’étend depuis le bord oriental du Plateau Central, jusqu'aux premières chaînes du Jura méridional, c'est-à-dire jusqu’à une ligne sensiblement Nord-Sud, passant par Guiseaux, Saint-Amour, Coligny, s’infléchissant vers le S.-S.-E. une première fois à Courmangoux et une seconde fois à Pont-d’Ain vers Ambérieu, suivant ensuite, au delà du Rhône, le pied de la falaise delà Balme par Crémieu jusqu’à Saint-Quentin- Fallavier, laissant à l'Est les îlots calcaires de Saint- Quentin et Vaux-Milieu, la Grive -Saint- Alban, le plateau de Crémieu- Morestel, remontant vers le Nord le cours du Rhône, de Lagnieu au confluent du Guiers et redevenant ensuite sensiblement N. -S. le long de la chaîne jurassienne du mont Tournier et de la mon- tagne de Raz jusqu’à Voreppe et au cours actuel de l’Isère. Toute cette région a un aspect très uniforme; c’est une série de plateaux dont l’altitude maxima est de 964 mètres (signal de Baracuchet), séparés les uns des autres par de grandes plaines (Grand-Lemps, vallée de la Bourbre), ou par des vallées étroites transversales, dont l’altitude augmente régulièrement, à mesure qu’on se dirige vers l’Est. Les couches qui les constituent sont sensiblement horizontales, se relevant cependant vers l’Est, avec une pente très faible (1/300 environ). La régularité n’est troublée 4 DESCRIPTION PHYSIQUE ET LIMITES DE LA RÉGION que par les pointements granitiques de Vienne et de Saint- Vallier, prolongements du Plateau Central sur la rive gauche du Rhône et. un peu plus au Nord, par les affleurements de gneiss et de terrains houillers de Ternay-Communay, près de Givors ; ceux-ci ne sont que le prolongement du synclinal houiller de Saint-Etienne. Vers le Nord-Est, il reste encore à signaler le petit ilôt de gneiss for- tement granitisé et de schistes houillers de Chamagnieu. Jusque dans ces derniers temps, on le rattachait au synclinal de Saint- Etienne; les sondages effectués pour la recherche delà houille, outre les renseignements importants qu’ils ont fournis sur la constitution géologique du Bassin du Rhône, ont permis à M.Ter- mier 1 de constater que l’afrieurement houiller de Chamagnieu appartient à un autre synclinal que celui de Saint-Etienne, dont le prolongement à partir de Communaj- est suivant une ligne Nord- 45°-Est. 2° Plaine Suisse. — Une seconde grande plaine, égale- ment constituée par un grand bassin d'affaissement, existe entre le Jura et les premières chaînes alpines. Je la désignerai sous le nom général de Plaine Suisse, en y comprenant l'ensemble des collines molassiques des environs de Zurich, de Lucerne et de Berne, le plateau du Jorat, et, au Sud du lac Léman, le plateau des Bornes, la plaine d’Annecy et la grande vallée de Rumilly à l’Ouest du chaînon jurassien de la Chambotte. Les couches ter- tiaires y sont disposées régulièrement en fond de bateau; elles se relèvent à l'Est contre les chaînes alpines et à l’Ouest contre les chaînes jurassiennes. La disposition actuelle de ces dépôts est cependant beaucoup moins continue que dans la vallée du Rhône. Entre le plateau du Jorat et celui des Bornes, s’étend en effet la vaste nappe d’eau qui constitue le lac Léman et dont l’origine a été si longtemps discutée. Il semble bien prouvé aujourd'hui que la fosse du Léman est une vallée d'érosion, creusée par un Rhône miocène et dont l’histoire géologique, intimement liée, comme 1 Termier, Résultats d'un sondage pratiqué dans la commune de Saint-Bonnet-de- Mure (Isère). (C. B. séances, Soc. Géol. de France, 3e série, t. XXIII, p. 8, 1895.) JURA 5 celle de tous les grands lacs subalpins, aux plissements alpins, peut se résumer de la façon suivante : a) La vallée alpine du Rhône a débuté avec les premiers sou- lèvements alpins, se creusant à mesure que les Alpes se soule- vaient à une altitude de quelques centaines de mètres supérieure à l’altitude actuelle ; b) Au moment de l’affaissement général des Alpes qui aamené la région à l’altitude actuelle, l’affaissement étant limité aux Alpes, il s’est produit une contre-pente sur le cours des fleuves; les eaux sont devenues stagnantes et ont reflué dans les vallées alpines, formant le lac Léman, après la fonte générale des glaciers qui ont recouvert la Plaine Suisse; c) A partir de ce moment a commencé une période de comble- ment progressif qui dure encore. Outre le lac Léman, il existe encore un autre accident géologi- que ; je veux parler de cet anticlinal particulier du Salève qui naît au milieu de la plaine, près de Lovagny et, sensiblement dirigé S.-W. N.-E., se prolonge au delà du Salève proprement dit, sur une longueur de plus de 200 kilomètres, par l’axe anticlinal prin- cipal de la molasse des géologues suisses. C’est, aussi bien par le faciès des dépôts qui la constituent, que par sa position géogra- phique, une chaîne intermédiaire entre les chaînes alpines des Préalpes et les chaînes du Jura méridional. Entre cet axe et le Jura, les dépôts tertiaires sont sensiblement horizontaux ; au contraire, à l’Est de cette ligne anticlinale, les couches, comme je le mon- trerai dans le courant de cette étude, sont fortement disloquées. 3° Jura. — Entre cette grande dépression de la plaine Suisse et celle de la vallée du Rhône, s’élève aujourd’hui un massif mon- tagneux qui correspond à ce que j’appellerai le Jura méridional. Les plis qui conslituentla terminaison du Jura, comprenant ce que M. IIaug appelle le faisceau jurassien, parmi les régions natu- relles des Alpes, appartiennent tous à la région des hautes-chaînes du Jura. Lorsqu’on les suit vers le Nord, ils se compliquent par dédoublement et surtout par l’adjonction des autres zones du Jura : la zone des plateaux, à partir du Rhône et la zone du vignoble, à 6 DESCRIPTION PHYSIQUE ET LIMITES DE LA REGION partir de Verzon, au. nord de Bourg. Ce sont, en général, des plis anticlinaux dirigés sensiblement N. -S., et légèrement déversés à l’Ouest, entre lesquels, au moins dans la partie méridionale, pénè- trent de longues bandes synclinales de terrains tertiaires (Oligo- cène et Miocène). Dans le Jura central, les synclinaux sont beau- coup plus nombreux et ont subi une érosion considérable ; aussi, les dépôts tertiaires, qui recouvraient primitivement toute la chaîne, n’existent -ils plus qu’en lambeaux isolés dont j’aurai à parler incidemment. L’étendue vers le Sud et la limite exacte à l'Ouest, est encore actuellement fort discutée; aussi, comme j'aurai, à chaque ins- tant, dansle courant de cette étude, à m’occuper des synclinaux tertiaires, je tiens à préciser davantage les différents plis que je rattache à cette zone, d'après les nombreuses courses que j’ai faites dans toute cette région. En partant de la vallée du Rhône et se dirigeant vers l’Est, les premiers dépôts jurassiens que l’on ren- contre constituent les îlots de Saint-Quentin, Elle d’Abeau, la Grive Saint- Alban et l’ile Crémieu, qui, d’après M. Riche *, re- joindraient les chaînes interrompues du Jura, au niveau de Pont- d’Ain et de Courmangoux, puis, de là, les plateaux de Lons-le- Saulnier, à travers la Bresse et la Dombes. Derrière ces pla- teaux, on rencontre une série d’anticlinaux et de synclinaux ju- rassiens que je désignerai delà façon suivante, de l'Ouest à l’Est : I. Chaime du mont Tournier. — C’est le prolongement nord de la chaîne de l’Echaillon qui se continue au delà de l’Isère par la Malossane, la montagne de Ratz formée par les terrains infracrétacés ; les terrains du Jurassique supérieur n’existent qu’en profondeur, comme le montre la coupe classique de la cluse de Chaille. Interrompu à la hauteur de La Bridoire, où il est recou- vert par la molasse marine, cet anticlinal se continue par la chaîne du M* Chaffarou, au nord de laquelle il se dédouble pour former, comme l’a fort bien indiqué M. Hollande2, un anticlinal secon- 1 A. Riche, Etude stratigraphique sur le Jurassique inf. du Jura méridional (Ann. de l' Université de Lyon, t. VI, 3U fasc , p. 16, 1893). 2 D. Hollande, Contact du Jura méridional et de la zone subalpine, aux environs de Chambéry (Bull. Serv. Cart. Géol.,n° 29, 1892). ANTICLINAL DU MONT GRELLE, L’ÉPINE, MONT DU CHAT 7 daire jurassique, vers Saint-Maurice de Rotherens. Au Nord delà cluse de Yenne, son prolongement constitue la montagne des Par- ves, la montagne boisée de Cormaranche, à l’Est de Belley. Sur la plus grande partie de son parcours, cette chaîne est un anticlinal formé par des dépôts appartenant au -Jurassique supérieur, que surmontent les assises Néocomiennes; celles-ci peuvent manquer en certains points (col delà Crusille) ; le crêt du pli est à regard français et légèrement déversé à l’Ouest. Au delà du Rhône il y a même chevauchement. I . Synclinal de Novalaise. — Il offre le curieux lacd’Aigue- belette \ qui paraît être une cavité dans la roche molassique en place, due sans doute à un effort orogénique ou à un effondrement postérieur au plissement. Ce lac se trouve en effet situé à un coude du synclinal, en face de l’interruption que j’ai signalée dans la chaîne du Mont-Tournier. Ce synclinal qui, au Sud du lac d’Ai- guebelette, rejoint à Voreppe celui de Saint-Jean de Couz, se prolonge au Nord par Yenne et les marais de Lavaux, et, sur la feuille de Nantua, par le grand synclinal du Val Romey. Celui-ci, très large au niveau de Champagne, va en se rétrécissant beau- coup vers le Nord; j’en vois la continuation dans le petit synclinal de la combe d’Evuaz3, la combe de sur l’Etau, la combe du Lac, le synclinal urgonien du Bois d’ Amont et du lac de Joux. II. Anticlinal du mont Grelle, l’Epine, mont du Chat. — C’est un anticlinal à noyau jurassique (M. Révil y a signalé le Bajocien), à couverture Néocomienne et Urgonienne. Au Sud, au niveau de Saint- Jean- de -Couz, il se divise en deux anticlinaux, dont le plus occidental va finir sous la Molasse et les alluvions aux Echelles; le second se prolonge un peu plus au Sud, formant la montagne de Saint-Christophe-la-Grotte jusque près de Saint-Laurent, où se produit la réunion des deux synclinaux 1 Pour Us différents lacs de la région, consulter A. Delebecque, les Lacs du Dau- phiné, 1804, et les diverses publications de cet auteur. '1 2 H. Schaudt (Eludes géologiques sur la première chaîne du Jura. — Bull. Soc. Vaud. sc. Nat., vol. XXVII, p. G9, 1891) considère plutôt la combe d’Evuaz comme le prolon- gement du synclinal de Montanges (partie occidentale du synclinal de Bellegarde). 8 DESCRIPTION PHYSIQUE ET LIMITES DE LA REGION de Novalaise et de. Couz. Entre les deux, se trouve le petit synclinal secondaire de Saint-Christophe, entièrement rempli par la molasse marine à Pecten præscabriusculus , se redressant fortement à l’Est et à l’Ouest. Au Nord, au delà du canal de Savière, le petit mon- ticule du Mollard de Viens permet de rejoindre l'anticlinal du mont du Chat avec le Colombier. La direction qui était jusque-là sensiblement N. -S., subit, à la hauteur de Culoz, une inflexion assez brusque et devient alors S.-W. N. E. ’, direction que l'on peut suivre, à travers le Jura, par Montantes, Champfromier, le crêt de Chalam, Lajoux, la Forêt de la Frasse, etc. Nous avons affaire, en effet, à une de ces hautes chaînes du Jura dont le parcours très régulier se poursuit sur des longueurs considérables. La voûte anticlinale est plus ou moins régulière, toujours déversée vers l’Ouest; la partie supérieure a été érodée dans la région de Cham- béry. Cette chaîne était pour Ch. Lory, la dernière chaîne ju- rassienne issue du Bas Bugey. 2. Synclinal de Chambéry. — Le long anticlinal du mont du Chat forme la bordure occidentale d’un synclinal très important, auquel je donnerai le nom de Synclinal de Chambéry. Au Sud, au delà de Saint-Jean-de-Couz, confondu avec celui de Novalaise, il se continue entre la montagne de Ratz et l’anticlinal de la Dent de Sure, dans la Chartreuse, formant le synclinal de Saint-Lau- rent-du-Pont et de Voreppe. Vers Saint-Jean-de-Couz, ce synclinal fortement rétréci ne renferme plus que du Crétacé supérieur(Lauzes à Ananchytes ovala et Belemnitella mucronata du Sénonien) ; il reste encore très étroit dans toutela vallée de Couz et ne s’élargit que dans la grande plaine alluviale de Chambéry; il forme, un peu plus au Nord, la cuvette du lac du Bourget entre le mont du Chat à l'Ouest, la colline de Tresserve et la Chambotte à l’Est. D'après M. Delebecque1 2, ce lac, compris nettement entre deux anticlinaux jurassiens, se serait formé, comme les lacs subalpins 1 Ce mouvement s'observait déjà dans les anticlinaux du Jura plus occidentaux et, d'après M. Marcel Bertrand, serait général pour toutes les chaînes à l'Ouest du Colombier. 2 A. Delebecque, loc. cit., p. 24. ANTICLINAL RECULET-CHAMBOTTE 9 de Suisse et d’Italie, par suite de l’affaissement général des Alpes. Je crois qu’il vaut mieux y voir le résultat du creusement de la vallée par les eaux d’un bras de la Durance, venant dans la plaine de Chambéry par la cluse de Montmélian. Plus au Nord, ce synclinal se continue, par la vallée du Rhône, entre Chanazet Bellegardeet s’incline alors légèrement vers l’Est, pour prendre sensiblement la direction S.-W. N.-E. La partie septentrionale du bassin Miocène de Bellegarde se divise en deux golfes : 1° le vallon de la Mantière forme celui de l’Est et se con- tinue par le synclinal de la Valserine, jusqu’au delà des Rousses ; 2° le petit synclinal de Montanges à l’Ouest, brusquement inter- rompu par la grande faille de Champfromier ; il est difficile d’en voir, comme je l’ai déjà fait remarquer plus haut, le prolonge- ment au Nord, dans le synclinal de la combe d’Evuaz, dont la différence d’altitude (500 mètres) est par trop considérable. III. Anticlinal Reculet- Chambotte. — Dans la région située au nord de Bellegarde, le synclinal de la Valserine est net- tement limité à l'Est par le pli faille du Reculet, pli faille dû à un déjettement bien visible vers l’Ouest. Au niveau de Bellegarde, le crêt de la Mantière (prolongement ou mieux dédoublement du crèt de Chalam), finit à la Mantière. Du Reculet provient encore, quoique en divergence complète avec les alignements des autres chaînes du Jura, l'anticlinal rompu du Vuache. La faille qui a provoqué la rupture de l’anticlinal du Vuache a laissé le jambage Est de l’anticlinal pour le chaînon du Vuache et le jambage Ouest pour le mont de Musiège au Sud de la chaîne précédente. Selon Maillard cette faille, qui se trouve nettement dans le prolon- gement de la faille du versant S.-W. de la Balme de Sillingy, est celle-là même qui provoque le décrochement que W. G. Co- linüwood1 2 admettait pour les chaînes crétacées de part et d’autre du lac d’Annecy. Cette grande dislocation affectant à la fois des chaînes franchement jurassiennes et des chaînes alpines, d’ailleurs 1 G. Maillard, Bull. Serv. Carie Géol. de France, n° 22, 1S91. 2 W. G. Coljngwood, The Limestone Alps of Savoy, astudy in physical geoloyy, 1 vol. i n-8, Orpington, 188-i. 10 DESCRIPTION PHYSIQUE ET LIMITES DE LA REGION peu explicable, ne paraît pas, comme des études récentes de M. Lijgeon 1 tendraient à le prouver, devoir être maintenue dans la région du lac d’Annecy. Au Sud de Bellegarde, je considère le synclinal du Bourget comme nettement limité à l'Est par l’anticlinal du Gros Faoug et du mont Corsuet. Cet anticlinal, qui apparaît au milieu de la plaine tertiaire de Chambéry et d’Aix-les-Bains, comme un noyau anti- clinal isolé, se rattache cependant très nettement au Nord au petit chaînon de la Mantière ; au Sud, il se prolonge par les rochers Urgoniens du Roi, de Voglans, d’Aix-les-Bains, dans l’anticlinal du Corbelet, mont Olheran. Vers Saint-Jean-de-Couz, cet anti- clinal se dédouble, par suite d'une petite flexure dans l'Urgonien. 11 forme, à l’Ouest l’anticlinal de la Dent de Sure, à l’Est un second anticlinal qui se prolonge à travers toute la partie méridionale de la Chartreuse et s’accidente de nombreux plis secondaires. Ch. Lory l’a limité par la faille de la Chartreuse. Entre ces deux anticli- naux, se trouve le petit synclinal molassique qui constitue le pla- teau des Egaux entre Corbel et Saint-Jean-de-Couz et qui se continue au Sud par le synclinal du vallon des Courriers, de Pro- veysieux, de Saint-Estèphe et, au delà de l’Isère, par le synclinal molassique de Saint-Nizier. L’allure générale de cette chaîne est celle d’une voûte plus ou moins rompue sur le flanc Ouest, formant parfois combe et avec crêts regardant l’Ouest. La masse principale appartient au crétacé inférieur : les trois étages Hauterivien, Valangien et Urgonien y sont très bien représentés. Comme l’a fort bien indiqué M. D. Hollande2, cet anticlinal cons- titue la dernière chaîne du Jura méridional; il marque la limite d’extension de la Molasse marine dans le massif de la Chartreuse. C’est bien encore un anticlinal jurassien, non seulement parce qu'il est le prolongement méridional du chaînon de la Mantière, mais, en outre, parce que les terrains infracrétacés ont nettement le fa- ciès jurassien. Il ne forme pas, comme l’admettait Ch. Lory, un pli ‘ Renseignement inédit qui m'a été communiqué par M. M. Lugeon. 2 D. Hollande, loc. cit. Bull, n0 29, p. 11. D'après cet auteur, le Jurassique supérieur aurait cependant déjà le faciès alpin. REGION ALPINE II faille continu; on voit, en effet, très nettement la voûte anticlinale comme je l’ai fait remarquer 1 (au-dessus de Saint-Thilaud-de-Couz, route du Frou, etc.). Entre cette dernière chaîne jurassienne et les chaînes alpines, se trouve le prolongement de la Plaine Suisse, c’est-à-dire le synclinal de Rumilly et, au Sud de Chambéry, le petit synclinal Tertiaire et Sénonien de la Croix-du -Mollard, de la Frassette, du Couvent. Région alpine. — A l’Est de la Plaine Suisse et de son pro - longement méridional, tel que je viens de le définir, on rencontre les premières chaînes alpines. Ce qui reste du massif de la Char- treuse se rattache d’une façon très nette au massif des Bauges et du Génevois au Nord du lac d’Annecy. Ce dernier massif se termine à la vallée de l’Arve, vers laquelle tous les plis semblent converger. Toute cette région qui, au premier abord, semble être complè- tement séparée des trois régions naturelles, dont il vient d’être question, s’y rattache cependant d’une façon étroite. En effet, la mer Miocène (mer Molassique, sensu stricto) n’a point péné- tré dans les synclinaux intérieurs des Bauges ou des Préalpes, mais l’existence simultanée, dans les régions précédentes et dans les synclinaux alpins, de couches Oligocènes, soit marines (Ton- grien), soit d’eau douce (Aquitanien), déposées dans des dépres- sions primitivement réunies, m’a amené à m’occuper également des dépôts tertiaires de ces dernières régions et par suite à abor- der la question encore fort discutée des terrains Nummulitiques de la Savoie. Comme dans le Jura méridional, les dépôts tertiaires du faisceau du Genevois se trouvent aujourd’hui localisés dans des synclinaux, formant des bandes allongées plus ou moins étroites et dont l’alti- tude croit d’une façon très régulière de l’Ouest à l'Est. Aussi vais-je commencer pardonner rapidement l’énumération des diffé- rents plis qui constituent le massif des Bauges2, tels que des obser- 1 H. Douxami, Compte rendu cl'une excursion géologique à Saint-Pierre d'Entremont (Bull. Soc. des sc. natur. de Savoie, 1895). 2 Je ne me trouve en aucune façon d'accord avec la plupart des auteurs qui se sont ccupés de la tectonique de cette région, en particulier MM. W. G. Goi.ltngwood, 12 DESCRIPTION PHYSIQUE ET LIMITES DE LA RÉGION vations inédites de M. Lugeon et de nombreuses observations personnelles m’ont amené à les comprendre. IV. Semnoz, — Le pli le plus occidental que nous rencon- trions, constitue la chaîne du Semnoz', qui naît aux portes d’Annecy, avec la montagne de la Jeanne et se continue, après la cluse du Chéran, par la montagne de la Cluse, le, Revard et le Ni- volet. Ce premier pli doit être considéré plutôt, comme intermé- diaire entre le Jura et les Alpes, tout comme le Salève, dont il est sans doute le prolongement méridional légèrement déjeté à l'Est. Cette chaîne a, en effet, l’allure des chaînes jurassiennes : c'cst un anticlinal sensiblement N. -S. déjeté à l’Ouest, formant une voûte d’abord complète aux environs d’Annecy ou à la cluse du Chéran, puis rompue vers Aix-les-Bains et Chambéry, où l’on voit affleurer le noyau jurassique par suite de l'érosion et où il présente plusieurs plissements secondaires. Le Valangien, l’Hauterivien et l’Urgo- nien ont nettement un faciès jurassien ; par contre, le Jurassique et le Sénonicn ont un faciès alpin. Le Sénonien, que j’ai, le pre- mier, signalé sur le versant oriental de la montagne de la Cluse, se présente non pas comme à Saint-Jean-de-Couz, à l’état de dalles (lauzes) à Anancliytes , Bel. mneronata , mais à l’état de calcaire blanc, en lits minces, comme dans les Bauges proprement dites, et ne contient guère comme restes organisés que de mauvais moules d ' Inocérames. Vers Annecy, peu après sa naissance au milieu des couches ter- tiaires et quaternaires de la plaine, ce pli présente un petit syn- clinal secondaire, formant le vallon molassique de Sainte-Catherine. Au niveau de la cluse du Chéran, l’axe subit un abaissement consi- dérable. Le pli est brusquement interrompu à la cluse de Mont- mélian et reparaît au Sud, dans le massif de la Chartreuse, pour former le mont de Joigny et le Granier, jusqu’au roc de l’Aiguille. D. Hollande, et plus récemment M. Haug (Etudes sur la tectonique des hautes chaînes calcaires de la Savoie. — Bull. Serv. Carte Gcol. delà France, n°47, 1895). Ils admet- tent tous les trois un décrochement des plis, au niveau du lac d'Annecy et suivant la vallée du Chéran. Ce dernier décrochement, en particulier n'existe pas, bien que la carte de la Savoie, deLoRY, Pillet et Vallet, semble l'indiquer. SYNCLINAL DE LESCHAUX, LESCHER AINES, LE DESERT 13 4. Synclinal de Leschaux, Lescheraines, le Désert. — Le synclinal qui traverse les Bauges, depuis Sévrier sur le lac d’Annecy, par Leschaux, Lescheraines, Saint-François-de-Sales, le Désert, est l’un des plus importants pour l’étude des terrains tertiaires en Savoie. Au delà de la cluse de Montmélian, il se continue par la vallée haute synclinale du mont Granier et de Bellefont où le Sénonien est le terrain le plus récent. Au moment où ce synclinal rencontre la vallée du Chéran, il se dédouble en deux ; la partie occidentale constitue le synclinal du Désert dont je viens de parler ; la branche orientale forme la vallée étroite synclinale des Aillon 1 et le synclinal de la Rochc-du- Guet où elle est coupée par l'Isère; elle passe alors, sans doute, sur la rive gauche de cette vallée. Entre ces deux synclinaux, se trouve le grand pli faille da Margeriaz qui naît sur les bords mêmes du Chéran et se continue jusqu’à la cluse de Montmélian par la Boisserette. Les plis alpins véritables ne commencent qu'à l’Est de ceux-là ; on en trouve le prolongement, au Nord du lac d’Annecy, dans la région du Génevois. Ils sont, en général, orien- tés sensiblement N. N.-E., S. S.-W., d’allure très régulière, et presque toujours légèrement déjetés à l'Ouest; au Sud, ils sont tons coupés par la vallée de l’Isère, entre Montmélian et Albert- ville. Au delà de cette vallée, leurs prolongements sont complè- tement inconnus ou fortement hypothétiques. Je me contenterai, pour le moment, d'énumérer rapidement les principaux plis, me proposant d’y revenir, un peu plus loin, dans 1 étude détaillée des synclinaux. Ce sont, de l’Ouest à l’Est : L’anticlinal de la Buffa, qui, au delà du Chéran, constitue l’an- ticlinal occidental du Colombier-du-Châtelard (Dent de Bossane). Le synclinal d’Entrevernes, qui se prolonge au delà du Chéran, par le synclinal du Colombier-du-Châtelard. L’anticlinal de la Thuile, col de Cliérel, Ecole, Sainte-Reine. Le synclinal du Charbon, qui se dédouble près de Jarsy, dans la vallée du Chéran. 1 Ce fait a été bien mis en évidence par M. Hollande ; pour M. HaUg, le synclinal des Aillons serait la continuation déjetée de celui d Entrevernes. 14 DESCRIPTION PHYSIQUE ET LIMITES DE LA RÉGION L’anticlinal du Trélod. Puis vient la série des plis de la partie tout à fait orientale des Bauges ; elle est fort compliquée, mal connue et comprend les anti- clinaux de la Roche-Torse, de la Sellive et les synclinaux de Belle - vaux etdeTamié. Le synclinal de Bellevaux est le pli le plus oriental des Bauges qui contienne encore des dépôts nummulitiques ; il faut aller dans le prolongement septentrional du synclinal de Tamié, au delà de Faverges, pour retrouver les dépôts nummulitiques de la vallée de Serraval, auReposoir. Tous ces plis sont coupés en cluse par le Chéran qui ne constitue pas, comme je l'ai fait déjà remarquer plus haut, un accident tectonique ( décrochement )\ les plis se correspondent de la façon la plus nette de part et d’autre de la vallée ; seuls les axes de ces plis, aussi bien pour le Semnoz que pour les plis franchement alpins, du Pont- de-1’ Abîme au delà de Jarsy, subissent un abaissement considérable au niveau de la vallée du Chéran. CHAPITRE II PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE Quel aspect présentaient les Bauges, la plaine Suisse, le Jura méridional et la vallée du Rhône à la tin de l’ère secondaire. En un mot cherchons à reconstituer la géographie physique de ces régions au début de l’ère tertiaire. Les terrains les plus anciens qui affleurent appartiennent au Trias et au Lias. On ne les connaît que dans quelques points seule- ment de la bordure du Jura ; ils sont à 1 état de marnes bariolées et de gypse pour le Trias, de marnes avec bancs calcaires pour le Lias, et, sur la bordure orientale du massif des Bauges, à l’état de grès (Quartzites), de calcaires magnésiens dolomitiques (cargneules), d’anhydrite et de gypse; ils prennent une complication de plus en plus grande, à mesure qu’on s’avance vers la Tarentaise. D’après ce faciès, on avait là, à l’époque Triasique, comme sans doute sous le Jura, une masse d’eau peu profonde, analogue à celle qui exis- tait dans la première zone alpine. Ges dépôts appartiennent au géosynclinal extérieur des Alpes ou tout au moins à une dépression qui communiquait avec lui. Pendant tout le Jurassique, on ne constate aucun mouvement. 16 PÉRIODE PRÊNU MMUL1 TIQUE ET NUMMULITIQUE sinon des mouvements généraux d’affaissement oud'exhaussement. Dans les Bauges, en effet, la sédimentation parait avoir été con- tinue du Trias au Gault. Le Jurassique inférieur a nettement un faciès pélagique. Pendant toute la durée du Jurassique moyen et supérieur, le faciès calcaréo-vaseux occupait un espace très consi- dérable : le faciès dit provençal existe dans tout le massif des Bauges y compris le Semtioz, le Salèveet les Voircns au Nord. Le faciès jurassien, qui ne présente jamais un caractère franchement littoral, mais qui parait correspondre à des dépôts de mers moins profondes que les dépôts calcaréo-vaseux, existait dans tout le reste de la région que j'ai étudiée. Les limites des faciès jurassiens et alpins ont subi pendant la durée de la période Jurassique, de nombreuses oscillations, en relation avec les mouvements généraux auxquels je faisais allusion, un peu plus haut. Aussi voit-on s’intercaler, aux environs de Cham- béry, des couches à faciès jurassien, au milieu des couches à faciès alpin et Gce versa. M. Révil a montré ainsi que le Juras- sique et le Crétacé inférieur du Lémenc et de Montagnole, pré- sentent une série de dépôts identiques à ceux de la série corres- pondante de la région Delphino-Provençale. A la fin du Jurassique, l’océan Corallien a été refoulé à l’Ouest et a déposé un puissant ensemble de calcaires blancs pétris de coraux, sur l’emplacement actuel du Jura : les calcaires de Portlandien et du Kimméridgien présentent partout, dans la partie occidentale de la région, un faciès nettement Jurassien avec bivalves, et des dépôts coralligènes (l'Echaillon, Lémenc, Cirin, Salève). Au Portlandien, des mouvements ont eu lieu, assurant déjà au massif des Bauges une sorte d’individualité. Les formations lacustres du Purbeck qui existent à la Chambotte au- -dessus du du village de Grésine, se retrouvent au-dessus du château de Bordeau, le long de la route du Mont du Chat, au sommet de la montagne de l’Epine, dans la chaîne du Mont Tournier, ou col du Banchet, à la cluse de Chaille, au défilé de Yenne, au Val de Fier, en un mot dans tout le Jura méridional ; elles indiquent qu’il exis - tait, sur toute cette région, un vaste lac, s’étendant assez loin vers PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE 17 le Nord, tandis que, plus à l'Est, à partir de la chaîne du Semnoz, tous ces dépôts ont un faciès pélagique à céphalopodes. Les couches Berriasiennes des Bauges sont identiques à celles qui existent plus au Sud. Toute la région se retrouve cependant sous les eaux marines avec le Valanginien. Certaines parties, formant haut-fond, permettent la formation de petits récifs coralliens (pré de l’Eau qui sonne, chaîne du Corbelet). Le faciès jurassien existe aussi bien dans les Bauges 1 que dans le Jura méridional, pour tous les dépôts infra-crétacés. Cependant, à mesure qu’on s’avance vers l’Est, le Valanginien et l’Hauterivien prennent un faciès de plus en plus schisteux (environs deFaverges), indiquant une augmentation de profondeur de la mer, dans cette direction. Le faciès Urgonien, avec ses calcaires blancs à. Requienies , envahit le Barrêmien et l’Aptien. Ces dépôts jouent un rôleextrè- mement important dans toutes ces chaînes, au point de vue orogra- phique : ce sont eux qui constituent les hauts sommets des Bauges. Il y a continuité parfaite entre ces dépôts et ceux du Gault. L’Albien, dans les chaînes de la Chartreuse (route du Frou, vallon des Courriers, etc . ) , comprend une assise inférieure de calcaires roux, sableux, grenus, contenant de nombreux débris de fossiles indéterminables. Je l'ai signalée à Saint-André, à l’entrée de la cluse du Fier et elle se retrouve également dans les chaînes juras - siennes. C’est sous ce faciès que le Gault se présente dans les Bauges (Trélod, Bellevaux) et même au delà du lac d’Annecy (Grand-Bornand, mine de Momtmin). Au-dessus, on a une couche supérieure, formée de grès assez grossiers, très glauconieux, avec grains de sables ; puis des lits marno-calcaires, avec fossiles de phosphate de chaux, qui existent aussi dans les Bauges (synclinal du Désert, Chalet du Lac, au Colombier, au Chàtelard, aux Garins près du Chàtelard) et qui rappellent tout à fait le faciès du Gault de la Perte du Rhône à Bellegarde. Ces dépôts du Gault ne consti- tuent plus aujourd’hui que de petits lambeaux épars et peu inipor- 1 Le faciès à üstrea rectangularis se retrouve dans le Dauphiné, au Semnoz, au Saléve. Umv. de Lyon. — Douxami. 2 18 PERIODE PRENUMMULITIQUE ET NUM MUL1TIQUE tants ; ils no sont que les restes de la nappe qui recouvrait primitivement toute la région; elle a été démantelée par l'érosion. D’après un grand nombre d’auteurs, ces couches sableuses ont fourni une grande partie des matériaux de la Molasse : certaines Molasses sont identiques aux grès du Gault, comme si l’origine des matériaux de ces deux terrains, d’àges différents était la même. Des mouvements orogéniques importants se sont produits à la fin de l’Albien, éloignant considérablement la mer des régions qui nous occupent. On ne connaît, par exemple que quelques rares dépôts Cénomaniens à l'Ouest du Jura; la mer Cénomanienne était cantonnée au Nord et au Sud. Il en est de même du Turonien qui n’existe dans la région Rhodanienne que beaucoup plus au Sud. Ces mouvements anté-Sénoniens, déjà connus dans les Alpes orien- tales en Algérie, ont été signalés plus récemment par AI. P. Lory1 dans le Dévoluy. La mer Sénonienne envahit de nouveau la région; la transgression marine est bien marquée dans les Bauges, par l’existence, à la base des dépôts Sénoniens, d’un conglomérat calcaire avec nombreux grains de glauconie et nombreux éléments empruntés au Gault ; il repose en général sur le Gault, parfois sur l’Urgonien. M. Lugeon et moi avons, les premiers, signalé son existence dans les Bauges et les chaînes du Génevois. 11 est surmonté par des couches de calcaire blanc à cassure esquil- leuse, se délitant facilement et qui se terminent par des bancs de calcaires noirs fétides. Dans les chaînes du Jura (Chartreuse, le Sénonien est généralement à l’état de calcaires siliceux, connus sous le nom de Lauzes et qui contiennent les fossiles de la craie du Bassin de Paris. Après le Sénonien, pendant toute la fin de la période Crétacée et de l’Eocène inférieur, la région était complètement émergée et soumise par conséquent à l’action des agents atmosphériques, ac- tion très active comme je le montrerai un peu plus loin, par l’étude des dépôts Tertiaires inférieurs. Ce rapide exposé de l'histoire géologique des Bauges et du Jura 1 P. Lory, C. R. séances Soc. Gécl 1805, S° sérié, t. XXIII, p. cxl. PÉRIODE PRÊNUMMULITIQUE 19 méridional pendant l’ère Secondaire permet de mettre en évidence deux faits fort importants : 1° La différenciation des Bauges (et plus généralement du fais- ceau du Génevois de M. ITaug) d’avec le Jura méridional s’est manifestée dès la période Secondaire (au Piirbeck, au Sénonien). 2° Les Bauges ont été affectées par des mouvements anté-Séno- niens qui avaient déjà préparé l’émersion .définitive de ce massif et que nous allons voir se continuer pendant l’ère Tertiaire. ÉTUDE DES DIFFÉRENTS TERRAINS TERTIAIRES J’ai préféré, pour exposer les résultats de mes recherches, exa- miner les terrains les uns après les autres, plutôt que de faire la des- cription systématique et un peu monotone des differents synclinaux. Les lambeaux tertiaires qui existent dans ces synclinaux étaient, en effet, autrefois réunis les uns avec les autres. Cette méthode aura, en outre, l'avantage de permettre, pour ainsi dire à chaque instant, de reconstituer la géographie physique de la région et de suivre les différentes modifications qu’elle a subies avant de posséder son relief actuel. Les terrains, dont j’ai eu à m’occuper, se rattachent aux dépôts de toute l’ère Tertiaire, depuis TEocène inférieur jusqu'au Pleistocène. Je les ai groupés de la façon suivante : 1° Terrains Eocène inférieur et moyen (lacustre et continental) ; 2° Terrains Nummulitiques des Alpes de Savoie embrassant des couches d’âge Eocène moyen (partie supérieure) , Eocène supérieur et tout l'Oligocène (dépôts marins intimement liés les uns aux autres); 3° Terrains Miocènes 1 ; 1 Je prends ici provisoirement Miocène dans son sens le plus large, tel que le comprennent les géologues suisses, c’est-à-dire embrassant l’Aquitanien et le Miocène proprement dit. 20 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE 4° Terrains Pliocènes. La suite de ce travail montrera que ces divisions correspondent à des ensembles de couches bien homogènes et reliées intimement les unes aux autres, alors que ces différents ensembles se distin- guent facilement les uns des autres, soit par la nature des dépôts, soit par la localisation de ces dépôts. Ces localisations sont d’ailleurs en relation intime avec des mouvements du sol, par les- quels se sont peu à peu individualisées les différentes régions naturelles que j’ai distinguées au chapitre précédent. [Terrains eocène inferieur et moyen. § 1. Eocène inférieur. — Jusque dans ces derniers temps, l’étude du groupe Eocène, dans la vallée du Rhône, avait été beau- coup moins approfondie que celle des autres terrains, malgré le grand nombre de travaux régionaux où il en est question. Dans une note récente, M. Depéret1 a donné un résumé synthétique de l’histoire des dépôts Eocène inférieur et moyen de la vallée du Rhône. Le mouvement d’émersion qui s’y fait sentir dès le Séno- nien, a fait émerger, en particulier, toute la région occupée par la vallée actuelle du Rhône et delà Saône, le Jura et la plus grande partie de la plaine Suisse. M. Depéret a montré que, dans toute la vallée du Rhône, on avait à l’Eocène infe- rieur et moyen un puissant ensemble fluvio-lacustre , entièrement d’eau douce , représenté par des marno-calcaires dans la Basse- Provence. On peut y reconnaître, grâce aux fossiles, le Thanétien et le Sparnacien. Quand on s’avance vers le Nord, ce faciès d’eaux tranquilles disparaît ; le faciès fluvio-lacustre devient dominant et l’on peut distinguer, dans les localités où cet ensemble est le plus complet, la succession suivante : 1 Ch. Depéret, Note sur les groupes Eocène inf. et moyen de la vallée du Rhône (Bull. Soc. Qcol.de France, 1894, 3” série, t. XXII, p. 683). ÉOCÈNE INFÉRIEUR 21 1° A la base, des sables bigarrés (alternant souvent à la partie inférieure avec les calcaires Daniens de Rognac) ; 2J Quartzites lustrés, souvent mouchetés de rose; 3° Argiles réfractaires bigarrées. C’est uniquement avec ce faciès que se présenteront les dépôts dans la région septentrionale du Bassin du Rhône. Toujours très friables, ils ont été naturellement attaqués fortement par l’éro- sion et n’existent plus qu’en lambeaux, conservés, soit parce qu’ils ont été recouverts par des terrains plus récents (vallée du Désert près de Chambéry), soit dans des poches de terrains plus anciens (Proveysieux, Saint-Jean-de-Couz). Dans la valléede Proveysieux, ou près de Voreppe, ils présentent la composition suivante : 1° Alabase, des sables quartzeuxplus ou moins purs, rougeâtres; 2° Des argiles rouges, réfractaires, activement exploitées encore aujourd'hui, le long du chemin de Proveysieux au col de la Char- mette1. Ces dépôts forment une bordure presque continue sur les deux lianes du petit synclinal tertiaire de Proveysieux. Ils se retrouvent encore au delà du col de la Charmette, formant des poches plus ou moins étendues dans le calcaire Urgonien. Celui-ci est toujours fortement coloré en rouge, par les sels de fer, dans le voisinage de ces poches. On peut les suivre, tout le long du chemin descendant à Saint-Laurent, jusqu’au delà du sentier du Pas de la Cochette et dans l’intérieur du massif, à la grange d’Arpizon, au milieu de la forêt de la Grande-Chartreuse. A la Malossane, près de Voreppe, comme Lorv2 l'a depuis longtemps signalé, on exploite également ces sables et argiles bigarrés, colorés en rouge par de l’oxyde de fer, dans des poches creusées par érosion dans le calcaire Urgonien. Là, comme aux environs de Saint-Jean-de-Couz (carrière Milloz et carrière aban- 1 Ces dépôts sont utilisés ] our la fabrication des briques réfractaires employées dans la construction des hauts fourneaux. Les exploitations marquées sur la feuille de Grenoble par Cu. Lory sont maintenant complètement abandonnées. Les exploitations actuelles sont un peu plus au Nord, des deux côtés de la vallée; l'exploitation de la rive droite du ravin est à plus de 1100 métrés d'altitude. 2 Ch. Lory, Descrip. géol. du Dauphiné , p. 386, 1860. 22 PERIODE PRENUMMULITIQUE ET XUM.MULITIQUE donnée de Gerbaix), on remarque, au milieu de ces dépôts, des silex qui se présentent sous deux aspects bien différents. Tantôt ce sont des silex non roulés, à arêtes vives, identiques à ceux qui existent dans les dépôts de la Craie (Lauzes de Saint-Jean-de- Couz), et des fossiles siliceux de la Craie (Cidaris, Efiinocorius, Ananchytes) ; tantôt des silex plus blancs que les précédents, ou colorés en rouge, qui sont manifestement roulés et qui paraissent, par suite, provenir d’assez loin. Ces deux espèces de silex se retrouvent encore sur le plateau du Désert (près de Chambéry) à En Glaise (ancien poudingue polygénique de M. Hollande) et au Pré des Maréchaux, à la base des terrains tertiaires. La présence des premiers silex ainsi que des fossiles de la craie a amené M. Kilian à admettre que, dans la plupart des cas, ces sables résultent du lavage et du démantèlement des dépôts Sénoniens ; ceux-ci auraient eu une extension beaucoup plus grande que celle indiquée par les affleurements actuels. Ces dépôts ont pu être partiellement enlevés, comme à Saint-Jean-de-Couz, ou ont com- plètement disparu, comme cela arrive pour les environs deVoreppc1 ou le Plateau des Déserts. Dans le prolongement Norddu synclinal de Voreppe, on retrouve encore, à Saint-Jean-de-Couz, des dépôts identiques à ceux de Voreppe. La carrière Millioz, la seule actuellement exploitée, nous offre une coupe fort intéressante; elle comprend de bas en haut, d'après MM. Kilian et Révil2 : 1° Lauzes Sénoniennes ; 2° Sables et argiles à silex remaniés sur place et contenant des fossiles Sénoniens (Bèlemnitelles, Oursins) bien conservés (Eo- cène inferieur) ; 3° Marnes rouges avec galets de quartz à la base (Tongrien) ; 4° Marnes rouges avec banc de calcaire lacustre très siliceux (Aquitanien) ; 1 M. Kilian m’a signalé cependant un lambeau de Sénonien qui a résisté à l’érosion, près de l'église de Vorepp1. 2 Kilian et Révil, Révision des feuilles de Grenoble et VizillefC. R. des Collabora- teurs des Services delà Carte Géologique de France, 1894. p. 128). ÉOCÈNE INFÉRIEUR 23 5° Molasse marine en transgression marquée, renfermant des dents de Lamna et de Carcharodon meçjalodon. Ces auteurs voient dans les couches de calcaire lacustre, d’ailleurs sans fossiles, l’équivalent de l’ Aquitanien , en rapport avec les marnés bigarrées de la vallée, où l’on trouve Hélix Ramondi. M. Hollande’ rapporte à l’ Aquitanien les dépôts rouges inférieurs au banc de calcaire siliceux; ces couches sont, en effet, en discordance sur les couches sous-jacentes. Je ne connais pas, dans toute la région, ce faciès de calcaire siliceux dans l’ Aquitanien, même dans les cou- ches de la vallée de Proveysieux, placées également au-dessus des couches de l’Eocène inférieur ; je serais plutôt tenté d’y voir un équivalent du calcaire très siliceux, passant à une brèche de silex à ciment siliceux signalée à la forêt de Saou ou àDieuletit1 2. Dans ces localités, ces couches ont fourni Planorbis pseudo-ammonius, LimnæaMichelini, ce qui détermine parfaitement leur âge Lutétien. Fig. t. — Carrière Millioz à St-Jean-de-Couz. 1 Argile blanche avec silex de la Craie; 2 Argile rouge réfractaire; 3 Argiles et marnes rouges ; 4 Conglomérat siliceux et calcaire ; 5 Molasse marine. Je rapporte également à FÉocène inférieur les dépôts du plateau des Déserts; en particulier ceux que M. Hollande3 a désignés sous le nom de poudingue à cailloux exotiques des chalets 1 D. Hollande, Etude stratig. des terrains Tertiaires Oligocènes de la vallée des Déserts (près Chambéry) (Bull. Carte géol. de la France , n° 4L, p. 2, 1S95). 2 Ch. Lory, toc. cit., p. 382. 3 D. Hollande, Etude sur les dislocations des montagnes calcaires de la Savoie, 1889. 24 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE d’En Glaise; ils se présentent sous forme de gravier, avec argile grossière (glaise), où, malgré de patientes recherches, je n'ai pu retrouver les cailloux de roches granitiques et porphvriques qu’y signale cet auteur; j’y ai reconnu seulement des silex roulés ou anguleux, comme à Saint- Jean-de-Gouz et d’assez nombreux frag- ments de calcaire de la Craie. L’origine de ces dépôts est'donc bien la même qu'à Voreppe. Aux Déserts, ils reposent directement sur l’Urgonien légèrement corrodé ; la craie, qui existait autrefois dans la vallée des Déserts, a complètement disparu par érosion. La partie supérieure de ces dépôts a d’ailleurs été légèrement remaniée par la mer Nummulitique et ne forme pas, comme l’admet M. Hollande dans une publication récente1 2, la base des sédiments marins Numinulitiques des Déserts. Ces dépôts se retrouvent sur ce plateau, près du village des Gharmettes-, reposant encore sur l’Urgonien, avec les mêmes caractères; l’argile grossière parait manquer ici et les galets de silex sont plus parfaitement roulés. Lorsqu’on se dirige vers le Nord, on rencontre d’autres dépôts, ayant encore la même origine et le même âge, mais se présentant sous un faciès un peu différent ; ce sont les sables blancs d’Arith, sables quart zeux purs, reposant dans une poche de l'Urgonien (au delà et à l’Ouest du hameau de Montagny) et présentant quelques parties ferrugineuses. Il est probable que ces sables proviennent, en grande partie, du lavage non plus du Sénonien mais bien plutôt de l’Albien. Je sépare au contraire complètement de ces dépôts, avec lesquels on les a souvent confondus, les sables blancs des Déserts qui sont tout différents. On peut constater, en effet, faci- lement, près des chalets de Lézine (col de Planpalais), qu’ils ré- sultent de la désagrégation de grès friables, reposant sur des grès assez durs et assez tins pour fournir d’excellentes pierres à aigui- ser, et intimement unis aux grès et calcaires jaunâtres à Nummu- liies striata. Jusque dans les sables supérieurs, on trouve des débris des mêmes Pectens que dans les grès à petits Nummulites 1 D. Hollande, Bull. n° 41, p. 15. 2 A l'endroit désigné par M. Hollande, dans ses différentes publications sous le nom de Pré des Maréchaux. ÉOGÈNE INFÉRIEUR 25 (P. jpictus Goldfuss). En certains points, on les voit surmontés par les calcaires schistoïdes à écailles de poissons. C’est sans doute aussi à cette époque qu’il faut rattacher, en grande partie, les nombreuses formations sidérolithiques qui ont existé sur le Plateau des Déserts et dont on ne trouve plus que les traces, sous forme de scories, de laitiers, quelquefois assez abon- dants pour former une couche entière de débris (lit du ruisseau descendant du hameau des Favres). Ce sont les restes des exploi- tations du minerai de fer, faites par les premiers habitants de la région, alors sans doute fortement boisée. Dans les Bauges proprement dites, on retrouve encore des traces des dépôts de cette époque, dans la vallée de Leschaux, près du Pont-du-Diable, dans la vallée haute du Colombier du Châtelard. Ils forment une poche dans le Gault. Plus au Nord, ces formations atteignent un développement consi- dérable sur les deux flancs du Salève1. Ce sont des sables plus ou moins agglutinés, roux à la surface, par suite de l’oxydation du fer. Ils reposent surtout sur le terrain Urgonien, ou dans des poches creusées dans ce calcaire (Grande-Gorge, Pont de la Caille, Vc- vray). J’ai pu constater, grâce à l’existence de galeries (creusées pour la recherche de l’or), qu’en certains points ils reposaient sur du Gault ayant le faciès de celui de la Perte du Rhône. On peut suivre ces formations sur tout le versant Est du Grand Salève ; on y trouve fréquemment des traces de minerai de fer2. Au Pont de la Caille, ils remplissent les fractures des calcaires Urgoniens et communiquent à l’eau du puits qui se trouve près de ce pont une couleur de rouille; encore plus au Sud, ils sont très développés surle versant Est de la Balme de Sillingy. A. Favre 3 les rapportait au Tongrien, en les reliant d’une façon intime au poudingue de 1 Ces formations si étendues ont encore un développement plus considérable que ne l’indique la Carte Géologique ; ils affleurent, en effet, tout le long de la route de Cruseilles sur une longueur de plusieurs kilomètres, après au delà du village du Verney. 2 Les scories analogues à celles que j'ai signalées sur le Plateau des Déserts sont connues depuis longtemps au Salève. * A. Favre, Recherches géologiques dans les parties de la Savoie, du Piémont et de la Suisse, voisines du mont Blanc, t. I, p. 281, 1867. PERIODE PRENUMMULITIQUE ET NUMMÜL1TIQUE 26 Mornex ; c’est cette opinion qui a été admise par le Service de la Carte Géologique delà France {ni", Feuille d’Annecy) ; de Mor- tillet 1 les rapproche des sables blancs d’Arith, mais les confond avec les sables blancs des Déserts ou des environs d’Annecy, dont l’origine et l’âge sont tout différents ; il les rapporte alors à l'époque Eocène supérieur. C’est aussi la conclusion admise à la réunion de la Société Géologique de France à Genève2. Je crois qu’il faut, au contraire, synchroniser tous ces dépôts avec ceux ({ni vraiment leur correspondent plus au Sud (sables blancs d’Arith ou sables et argiles bigarrés de Saint- Jean-de-Couz), c’est-à-dire les rapporter à l’Eocène inférieur. Au Salève, ils proviendraient nettement du lavage des dépôts du Gault, qui ont dû autrefois certainement exister, comme le prouvent les lambeaux que j’y ai découverts (route de Cruseille) et dont la glauconie oxydée a donné naissance aux minerais de fer. Je tiens à faire remarquer, en passant, qu’il existe dans les Hautes-Alpes calcaires du canton de Vaud, un peu en dehors de la région que j’ai particulièrement étudiée, dans le massif des Diable- rets, des dépôts de ce niveau de l’Eocène inférieur. M. Renevier3 a en effet constaté les faits suivants : Les terrains Tertiaires de cette région débutent, nonpar la brèche à grandes Nummulites (Ah perforata) que l’on ne connaît pas en place, et qui est certainement de l’Eocène moyen, mais par un terrain ferrugineux interstratifié entre le Gault et le Num- mulitique. A la Mine de Houille, on voit reposer sur l'Urgonien crevassé, sur une épaisseur de 25 à 30 mètres, des grès ferrugineux jaunâtres, partiellement brunâtres ou rougeâtres, avec de petites masses de sesquioxyde de fer. Ils passent, par une transition insensible, aux marnes à Chara qui commencent les dépôts d’eau douce. Ces marnes sont surmontées par des calcaires à Limnées qui ont fourni les formes suivantes : 1 De Mortillet, Géologie et Minéralogie de la Savoie, p. 277, 1818, A. Faure. 2 Réunion extraord. à Genève, B. S. G. de France , 3e série, t. III, 1874-75. Excur- sions au Salève, p. 753. 3 E. Renevier, Monographie des Hautes-Alpes Vaudoises (Matériaux pour la Carte Géol. de la Suisse, xvi« livraison, p. 364, 1890.) 27 KO CK NE INFÉRIEUR Clausilia crenata Sandb. Limnœa acuminata Brongt. L. longiscata Brongt. L. fusiformis Sow. L. dilatata? Noulet. Planorbis pseudo ammonius Schlo- theim. Cyclotus exaratus Sandb. Strophostoma striatum Desh. Vivipara Soricinensis Noulet. V. Orbignyi Desh. Sphœrium Castrense? Noulet. Area Rosthorni Penecke. Chara helicteres Brongt. C’est une faune de l’Éocène moyen ; ce qui implique bien l’âge Éocèné inférieur des dépôts sidérolithiques sous-jacents. A l’Ouest du Salève, dans la cluse du Rhône, près de Bellegarde, reposant sur l’Urgonien, des grès quartzeux blancs, identiques à ceux du Salève, présentant, comme aux environs de Pyrimont, des parties brunies par des injections d’asphalte liquide venues de bas en haut. Ces sables sont surmontés en certains points (Pyrimont) par un poudingue à éléments calcaires énormes (quelques-uns ont un volume d’un mètre cube), intimement lié à des marnes aquitaniennes bleues ou bigarrées, sans fos- siles. Les dépôts analogues de Bellegarde (ils reposent alors sur le Gault et contiennent des silex qui disparaissent plus au Sud), ont été comparés (à tort, je crois) par M. G. de Mortillet a, aux grès des Déserts ou à ceux des Barattes, près d’An- necy. Dans cette dernière localité, lorsque l’on monte au- dessus du hameau des Barattes, on voit, en effet, reposant sur l’Urgo- nien, des calcaires gréseux qui, en certains points, comme nous l’avons vu aux Déserts, se décomposent au contact de l’air, devien- nent très blancs et rappellent ainsi par leur aspect les sables sidé- rolithiques. Ils sont nettement surmontés par des couches de grès micacés, d’aspect molassique, avec débris de plantes. Il n’y a rien de semblable dans la cluse du Rhône et les sables de Bellegarde doivent être rapportés également à l'Eocène inférieur, leurs élé- ments proviennent dans cette région des sables verts du Gault. Il en est de même des sables blancs signalés par différents 1 G. de Mortillet, Note sur l'âge des sables à silex et des marnes bigarrées de la Perte du Rhône (B. S. G. de France, 2« série, t. XVII, p. H9). 28 PERIODE PRENUMMULITIQUE ET NUMMUI.ITIQUE auteurs dans le Jura méridional ; ils se présentent toujours dans la même position, le long de la faille du Vuache. Ce sont des sables ferrugineux, siliceux, à ciment argileux, contenant de nombreux rognons de fer mamelonnés. Il est problable cependant que ces dépôts, qui ont commencé à se former au début de l'Ere Tertiaire, au moment de l’émersion totale de la région, ont dû se con- tinuer pendant la plus grande partie des périodes Tertiaires infé- rieures. Je les ai signalés également à Saint- André, à l’entrée orientale du val du Fier, reposant sur les grès du Gault et supportant des dépôts Aquitaniens. Ils sont rougis, au moins à la surface, par la décomposition de pyrites qui atteignent souvent la grosseur d'une noisette. Bassin de la Saône. — Au Nord de la vallée du Rhône, dans la région de la Bresse et sur la bordure du Jura, ces dépôts de l’Eocène inférieur sont représentés par les argiles à silex bien développées dans le Maçonnais et le Cbâlonnais, où elles occupent des surfaces considérables, sur une épaisseur pouvant atteindre 30 mètres. On y trouve des lits épais d'argiles bariolées (exploitées pour la fabrication des briques réfractaires) et des lits de sables quartzeux, sut tout à la base1 2. M.DEPÉRET-a également cité, toutâfaitsur le bord oriental delà région qui nousoccupe,aux environsdeSaint-Vallier,dans la vallée du Rhône (Douévas,Larnage), des couches d'argiles feldspathiques blanches ou bigarrées, reposant directement sur lagranulite et sur- montées par la Molasse marine. L’existence de ces dépôts dans nos localités tendrait à prouver leur extension, non seulement dans la région Alpine et Jurassienne, mais encore dans toute la dépression de la vallée du Rhône et de la Saône. Leur nature, nettement conti- nentale, est, comme le montre l’examen que je viens de faire, plus ou 1 Ch. Depéret, loc. cit., 1894, p. 703. 2 Les dépôts qui se composent à la base de sables qnaitzeux, plus ou moins ciment 's et de m; rnes blanches ou bariolées, réfractaires, proviennent comme dans la région rientale, du lavage des dépôts crétacés; sut tout du Sénonien, comme le prouvent les Oursins de la craie qui, s'y rencontrent Dans l'intérieur du Jura on les retrouve en p. rli- culier à Ramasse et Hautecour. 29 ÉOCÈNE MOYEN (LUTÉTIEN) moins influencée par les terrains voisins (Sénonien, Gault ou ter- rains anciens près du Plateau Central). § 2. Eocène moyen (Lutétien). — L’Eocène moyen lacustre, dont le faciès est très constant dans toute la partie méri- dionale de la vallée du Rhône, est intimement lié à l’Eocène infé- rieur (Bassin d’Aix, Dieulefit, dans le Dauphiné) ou en est indé- pendant, mais présente cependant dans toute cette région la même distribution géographique. Il s’étend au Nord dans la Haute-Saône jusqu’à Talmay, un peu au Sud de Gray. 11 restait encore de nombreuses parties soulevées où des phéno- mènes d’érosion continentale, commencés dès le début du Tertiaire, ont continué à se faire sentir. Sur ces territoires émergés vivaient de nombreux Vertébrés dont les restes ont pu être conservés, grâce à la présence de poches sidérolithiques. C'est ainsi que, dans une dépendance du Mont-d’Or Lyonnais, M. Depéret 1 a signalé récemment, dans les argiles sidérolithiques remplissant une poche du calcaire Bathonien, àLissieu, près de Lyon, de nombreux restes de Vertébrés, parmi lesquels il a pu reconnaître les espèces suivantes : Lophiodon Isselense Cuv. Lophiodon rhinocerodes Rütira. Hyrachius intermedius Filli. Paloplotherium magnum Rütim. P. cf. codiciense Gaudry. Propalæotherium Isselanum Cuv. P. minutum Rütim. Anchilophus Desmaresti Gerv. Lophiotherium sp. Acerotherulum saturninum Gerv. Dichobune sp. Dichodoa Cartieri Rütim. Phaenacodus europæus Rütim. Sciuroïdes siderolithicus Rütim. Viverra sp. Débris d’Oiseaux, de Tortues et d’autres Reptiles. et en outre, des débris de calcaire lacustre avec Planorbis pseudo- ammonius Schloth, montrant que le lac Lutétien ne devait pas être très éloigné de cette région émergée. Cette faune est identique à celle d’Issel (Aude), à celle du calcaire grossier du Bassin de Paris ou à celle d’Egerkingen en Suisse qui se présente dans des con- ditions identiques. 1 Ch. Depéiiet, Sur un gisement sidérolithique de l’Éocène moyen à Lissieu (G. H. Acad, des sciences, 9 avril 1894.) 30 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NÜMMULITIQUE PÉRIODE NUMMULITIQUE Pendant que les dépôts d'eau douce ou fluviolacustres dont je viens de parler se formaient dans la vallée de la Saône et du Rhône et sur quelques points, soit du Jura méridional, soit des Bauges, la mer n’occupait que le Nord de la France, la Belgique et la région méditerranéenne au Sud des Alpes. Ces deux dépressions étaient isolées et ne communiquaient qu’au large de l'Océan Atlantique. A l’Eocène moyen, dont les dépôts sont en transgression sur ceux de l’Eocène inférieur, les mers du Nord atteignent leur maximum de température, grâce à une communication plus facile avec les régions méditerranéennes, le long des Pyrénées. On admet généralement que l’Eocène moyen débute partout par l’apparition de la Nurnmulites lævigata. Pendant le Lutétien, la mer Eocène subit un mouvement de transgression très net : elle s’étend sur toute l'Italie septentrionale, pénètre dans la région des Alpes et des Monts Euganéens et atteint les Alpes Françaises à Nice. En même temps, le golfe Nummulitique qui existait en Hongrie s’avance dans un géosynclinal alpin tout le long de la plaine Suisse. Il y a envahissement graduel des Alpes par la mer Nummulitique (dont les dépôts sont en transgression sur les terrains Secondaires), à la fois par le Sud dans les Alpes occidentales et par l’Est dans les Alpes orientales. Le géosynclinal alpin Num- mulitique constitue un bras de mer relativement fort étroit, situé très nettement, dans la vallée du Rhône, sur l’emplacement de la partie la plus profonde du géosynclinal Secondaire, beaucoup plus près de la chaîne cristalline ancienne des Alpes, que du Plateau Central Français. Avant d’essayer de rattacher les dépôts Nummulitiques des Bauges à ceux des régions voisines, il est indispensable de les étudier en détail dans les différents synclinaux où ils ont été con- servés. D’une manière générale, ces synclinaux forment, dans le faisceau du Génevois, les régions élevées dont l’altitude augmente à mesure qu’on se dirige vers l’Est ; cette disposition s’explique PERIODE NUMMULITIQUE 31 parfaitement par le soulèvement Est-Ouest qui s’est produit dans toute cette région, dès la formation de ces dépôts. Tous ces syn- clinaux, comme les autres plis, sont dirigés sensiblement N. -N.-E., S. -S. -O. Les travaux auxquels ces dépôts ont donné lieu sont déjà fort nombreux. Je ne citerai dans le résumé historique ci-dessous que les plus importants : En 1844, au moment de la réunion de la Société géologique de France, à Chambéry1 2, tous les terrains Nummulitiques de la Savoie étaient encore considérés comme appartenant aux terrains secon- daires, et la Société avait relevé la coupe suivante au Désert près de Chambéry de haut en bas. 1° Grès micacé des Déserts à petits bivalves indéterminés ( Flyscli 2° Marnes avec très petites paillettes de mica, dents et ' des écailles de poissons. f géologues suiss. 3° Calcaire jaune clair avec Pectens très nombreux, des Cerithiums et Num- mulites; le calcaire se change parfois en grès jaune ou blanc s’altérant au contact de l’air. 4° Conglomérat à grains et noyaux siliceux avec Polypiers et renfermant de très grandes Nummulites. Elle avait constaté la grande extension de ces terrains vers le Nord par Bellecombe, Entrevernes, et au delà du lac d’Annecy, au Grand-Bornand et à Thônes. L’année suivante, Pillet, par la découverte des Nummulites de Montricher, montrait d’une façon nette que ces terrains étaient bien Tertiaires. M. de Mortillet - ne voit dans les terrains Nummulitiques de la Savoie que deux assises : 1° une assise inférieure qu’il appelle le calcaire à Nummulites et qui comprenait des conglomérats, des marnes à lignites, des grès et surtout des calcaires ; et 2° le flysch à l’état de marnes bleuâtres feuilletées et fortement micacées, se décomposant facilement au contact de l’air. 1 Comptes rendus de la réunion extraordinaire à Chambéry, B. S. G. de France , 2" série, t. I, 1844. 2 G. de Mortillet, lor. cit., 1858. 32 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE A. Favre1 2 admettait aussi deux étages seulement : 1° à la base, l’étage Nummulitique proprement dit (calcaires, grès et schistes); 2° macigno alpin (flyscli comprenant des grès à Fucoïdes et des grès de Taveyannaz). Gh. Lory, dans ses travaux, s’est souvent occupé du Nummu- litique des Bauges, mais sans chercher à séparer les différentes assises, les rangeant toutes au même niveau. Un certain nombre de Nummulites avaient cependant été déterminés par Pu. de la Harpe 2 qui avait reconnu les formes suivantes : du Châtelard-les-Bauges. de Faverges de Thônes Nummulites perforata var. Allobrogensis d. 1. H. Nummulites Lucasana Defrance. Nummulites striata d’Oib. Nummulites variolariaSow. Nummulites Boucheri d. 1. H. Num. striata d’Orb. Num. variolaria Sow. et enfin, plus au Sud, à Montricher en Maurienne : Num. complanata ? Lam. Num. variolaria Sow. Num. Lucasana Defr. Num. aff. elegans Sow. 11 avait donné une première distribution’des différentes zones de Nummulites dans les Alpes Françaises qu'il relie aux Alpes Bernoises. La même année, la Carte géologique du département de la Savoie 3 donnait la distribution de l’ensemble des terrains Num- mulitiques de la région. Pillet, ayant de nouveau étudié le plateau des Déserts, avait recueilli, malheureusement sans distinguer les différentes assises, un certain nombre d’échantillons qui, déterminés par Tournouer 4, 1 A. Favre, loc. cit., t. JL 2 Pu- de la Harpe, Nummulites des Alpes Françaises (Bull. Soc. Vaud. Sc. Natur., t. XVI, p. 409, 18791. 3 Carte Géologique de la Savoie par Ch. Lory, L. Pjllet et l’abbé Vallet, 1879. 3 Tournouer, Sur la faune Tongrienne des Déserts, prés Chambéry (B. S. G .de France , 3e sérié, t. V, p. 333, 1877). PÉRIODE NUMMULITIQUE 33 lui permirent cependant de conclure à l’indépendance complète de ces dépôts et de ceux du reste des Bauges 1 (couches à grandes Nummulites et niveaux saumâ(res) ; il put les rapprocher des couches Tongriennes de Barrême (Basses-Alpes), mais avec per- sistance de quelques espèces existant en général à un niveau infé- rieur. M. Hollande2, dans son étude sur les dislocations des mon- tagnes calcaires de la Savoie, donne la succession suivante, assez compliquée, du Tertiaire des Bauges, de haut en bas : Aquitanien. 16. Fausse molasse à Sabal Lamanonis ? Brgt. 15. Marnes rouges à Hélix Ramondi Brgt. 14. Flysch Oligocène à Fucoïdes et à écailles de poissons. 13. Couches à Operculines e t Cardita Laurae. 12. Grès et sables à Bythinia Dubuissoni. 11. Couches à polypiers et à Natica crassatina. 10. Poudingue à caillouxNéocomiens elNatica crassatina. 9. Grès grossier à Nummulites (4e niveau à Nummulites). 8. Poudingue et glaise à cailloux exotiques. 7 Grès de Taveyannaz (Aimes et Sulens). 6. Flysch éocène à fucoïdes et écailles de poissons. 5. Mauvaise molasse à Nummulites ou alternant avec des calcaires à Nummulites (3e niveau à Nummulites). (Settenez, Serraval). 4. Poudingue à gros cailloux Jurassiques, Néocomiens, ou des schistes cristallins (massif des Aimes et Sulens). 3. Calcaire à Nam. striata. (2U niveau à Nummulites). 2. Marnes à Cytherea Villanovae et Cerithium Liaboii. 1. Calcaire grossier et conglomérat à Num. per for ata (1er niveau à Nummulites). M. Hollande avait dû exagérer le nombre des niveaux à Num- mulites qu’il avait reconnus dans les Bauges, parce que, suivant les vallées que l’on considère, les dépôts changent beauconp de faciès 1 Dans leur travail sur les dépôts Nummulitiques, MM. Hébert et Renevier (Fossiles du terrain Nummulitique supérieur, Bull. Soc. Statistique de l'Isère , 2e série, t. III, p. 148, 1836) avaient signalé l'existence du niveau saumâtre des Liablerets à Pernant et Entrevernes dans la Savoie. * A. Hollande, loc. cit., p. 149, 1889. Univ. de Lyon. — Dotjxami 3 34 PÉRIODE PRÉNU MMULITIQUE ET NUMMULITIQUE et même d’origine (marine ou saumâtre). Dans une note que M. Lugeon1 et moi avons publiée, nous avons mis en évidence ce fait de la grande variabilité des faciès des dépôts Nummulitiques des Bauges ou de leur prolongement au delà du lac d’Annecy. Dans une note parue aux Comptes rendus des Collaborateurs de la Carte Géologique de F rance pour 18942 3, j’ai donné déjà une succession beaucoup plus simple des terrains Tertiaires des Bauges, réduisant en particulier les quatre niveaux à Nummulites, à deux que j’appelais les couches à grandes Nummulites à la base, et les couches à petites Nummulites. Je signalais, en particulier, avec M. Révil la présence des couches à grandes nummulites dans la vallée des Aillons. La même année, AI. Hollande 3 publiait une nouvelle note sur la vallée des Déserts et donnait la nouvelle succession suivante de Graviers et gros sables remaniés. Poudingue à Nat ica crassatina (vallée des Déserts). Grès à Nummulites et Natica crassatina (Désert, Aillon). Sables tins (vallée des Déserts). Flysch à Fucoïdes et écailles de poissons (vallée des Déserts, Aillon, etc.). Fausse molasse4 avec débris de plantes (Mermets, Cusy, Ghindrieux). Molasse sablonneuse sans galets (Déserts). Molasse alternant avec des couches rouges à Hélix rugulosa H. Ramondi (Aillon, Leschaux, les Déserts, Grésy-sur- Aix, Couz, Gerbaix). Molasse gris cendré ou gris jaunâtre (vallée de Leschaux). Les différentes opinions émises par les précédents auteurs ont nécessité une étude stratigraphique très serrée des synclinaux bas en haut Tongrien. Aquitanien. 1 H. Douxami et M. Lugeon, Sur le Nummulitique des Bauges (C. R. collaborateurs service de la carte g'éol ), 1895. 2 H. Douxami, Sur le tertiaire de la Savoie et du Dauphiné, p. 91, 1894. 3 D. Hollande, loc. cit.. Bull. n°41, 1894. 4 M. Hollande avait déjà employé ce mot pour désigner la molasse gris cendré ou gris jaunâtre bien supérieure. SYNCLINAL DU CHARBON 35 Tertiaires des Bauges. Par suite même de la grande variabilité dessé.lirnents, aucune vallée ne peut fournir une succession complète des dépôts Nummuli tiques, et il me faudra donner des coupes de ces différentes vallées et même de différents points de ces vallées. En général, ces synclinaux sont très réguliers et peuvent se suivre d'un bout à l’autre du massif des Bauges, et même au delà du lac d’Annecy, dans le massif du Génevois. Le flanc Est est toujours plus ou moins renversé (Trélod); ce renversement peut aller jusqu’à un véritable étirement des couches, comme cela se produit au Nord de l'ancienne mine d’Entrevernes. Les couches Nummulitiques des Bauges reposent en général sur le Sénonien : soit sur le Sénonien tout à fait supérieur (calcaire blanc à Inoceramus Cuvieri), soit sur les couches de calcaire à silex de la partie inférieure du Sénonien, ou sur le conglomérat de base (vallée des Aillons), soit sur le Gault (vallée d’Entrevernes) soit enfin sur l’Urgonien (col des Prés, plateau des Déserts), par conséquent en transgression bien nette sur les terrains secon- daires. Synclinal du Charbon. — Le synclinal le plus favorable à l’étude de la sér ie à peu près complète du Nummulitique est celui de la montagne du Charbon. 11 s’étend sensiblement N. S. depuis les environs de Doussard sur le lac d’Annecy, jusque vers Jarsy, où il se dédouble pour former les synclinaux uniquement Crétacés de la vallée de Sainte Reine. Au Nord de Doussard le prolonge- ment paraît être vers Blully. L’allure générale des couches, dans cette vallée haute (altitude moyenne de 1500 mètres), est c die d'un synclinal dont le bord Est est renversé plus ou moins complètement. Une cluse profonde, en bas des chalets de Planay, permet de se rendre compte de la disposition des couches Tertiaires. Vers le Nord, toutes les couches Nummulitiques ont, pour ainsi dire, joué dans le synclinal Sénonien et, un peu au Nord des chalets de Planay, vers les chalets du Rosay, on peut relever la coupe suivante, E. W. à partir du Gault qui affleure près des chalets, on a le Sénonien bien développé, formant un talus incliné, et les couches Tertiaires débutent par des 36 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE conglomérats et des calcaires, formant un abrupt d’une vingtaine de mètres de hauteur1, correspondant aux dépôts les plus inférieurs U Urgonien, G Gault, S Sénonien, 1 Couches à grandes Nummulites; 2 Cale, schistoïde à écailles de poissons; 3 Niveau saumâtre; 4 Couches à petites Nummulites» 5 Calcaire schistoïde passant à des grès micacés. du Nummulitique que je désigne sous le nom de couches à grandes . Nummulites : N. aturica Joly et Leym. N. Lucasana Defrance. Orthophragmina sp. de grande taille. On trouve au dessus, une série de couches marneuses et calcaires avec quelques rares écailles de poissons et dont certains lits mar- neux sont absolument pétris de fossiles saumâtres. Cytherea Villanovae Lmk. Cyrena cenvexa Brongt sp. . 'j Melanopsis fusiformis Sow. 1 C'est la limite naturelle entre les pâturages du Rosay et du Planay. SYNCLINAL DU CHARBON 37 Ges marnes sont identiques à celles que nous trouverons à la mine d’Entrevernes et correspondent au niveau saumâtre des Diable- rets. Au-dessus de ces couches marno-calcaires se trouve une nou- velle barre calcaire formant un synclinal couché très net. C’est un calcaire gréseux, jaune à la surface par altération et bleu en pro- fondeur, avec de nombreux débris de coquilles, parmi lesquels j’ai pu reconnaître. Pecten subtripartitus Gold. P. tripartitus Desh. P. pictus Desh. Ostrea gigantica Brand. Ce sont les couches que je désignerai dans la suite sous le nom de couches à petites Nummulites. Elles forment ici le sommet du Plan de Lire et sont surmontées par des calcaires schistoïdes à écailles de poissons , se chargeant peu à peu de mica à la partie supérieure et devenant grésiformes. La succession précédente se retrouve encore lorsqu’on se dirige vers le Nord, mais on voit apparaître, sous le niveau saumâtre très réduit, de nouveaux calcaires schistoïdes blancs à écailles, sur- montant la barre calcaire du niveau inférieur (couches à grandes Nummulites) qui domine le cirque où se trouvent les chalets de la Combe. Vers le Sud, sur la rive droite de la cluse, on aperçoit dans les couches Tertiaires, trois petits plissements secondaires qui s’atté- nuent peu à peu, à mesure qu’on s’avance vers le Trélod (2179m). Sous le Trélod, on peut relever la coupe suivante, sensiblement différente de celle que j’ai donnée un peu plus haut. De l’Ouest à l’Est, on rencontre successivement : Sur l’Urgonien fortement redressé, presque jusqu’à la verticale, on a le Gault à l'état de sables ou de grès verts, pouvant atteindre en certains points (chalets de Planay) une très grande épaisseur et présentant parfois tout à fait un aspect molassique ; le Sénonien épais d’une quarantaine de mètres est à l’état de calcaires blancs à Inocérames. La série Tertiaire, qui vient ensuite, débute par les 33 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE couches à grandes Nummulites , constituées par un conglomérat calcaire épais d’une quarantaine de mètres. Près de la Dent des Portes, ces couches inférieures sont particulièrement riches en Nummulites, Orthophragminaqu.eY ontrouve en grande abondance toutes dégagées. J’y ai recueilli, outre les espèces citées plus haut des moules de Lamellibranches (Peclen)e t un débris d eSpatangus V Urgonien, G Gault; S Sénonien; t Couches à grandes Nummulites; 2 Flyschcal- caire; 3 Grés à petites Nummulites; 4 Grès schisteux micacés. de grande taille. Ges couches, qui sont presque verticales, ravinent le Sénonien; dans le banc de poudingue de base, on reconnaît faci- lement de nombreux galets d’Urgonien, de Néocomien et de Craie; il est d’ailleurs facile à distinguer par l’absence de grains de glau- conie de celui de la base du Sénonien. Vers le milieu de ces pou- dingues, se trouve une intercalation schisteuse avec nombreux débris à’ Ostracés .Ils se terminent par des bancs épais de calcaires gris qui sont eux- mêmes surmontés par des calcaires blancs gri- sâtres feuilletés, constituant le tlysch des auteurs et que je dési- gnerai sous le nom de flysch calcaire ou de calcaire schisioide à écailles de poissons. Ges dernières couches peuvent d’ailleurs man- quer à ce niveau, comme dans la première coupe des chalets du Planay. Au-dessus, on rencontre des calcaires grisâtres ou légè- rement jaunâtres qui représentent le second niveau à Nummulites (couches à petites Nummulites) et qui sont affectés dans l’abrupt situé sous le Trélod, de plissements secondaires (fig. 3) Les couches supérieures du Tertiaire, situées au-dessus des cal- SYNCLINAL D’ARCLOZAN-BELLEYAUX 39 caires précédents, sont représentées dans l’abrupt du Tréiod par des grès bleuâtres qui se décomposent facilement à l’air, en devenant jaunâtres et terreux. C’est un grès très micacé, mais renfermant encore des écailles de poissons (Meletia). Le seul examen du synclinal du Charbon nous montre déjà de la façon la plus nette, la grande variabilité que présentent les cou- ches Nummulitiques des Bauges. Nous allons voir ce caractère s’accentuer davantage par l’étude des autres synclinaux de la région. Synclinal d’Arclozan-Bellevaux. — Le synclinal, qui forme la vallée haute où se trouvent les chalets d’Arclozan a été désigné par les auteurs sous le nom de synclinal de la mine de Montmin. Ce synclinal, très simple à la mine même, ne tarde pas à se compliquer en se bifurquant au Nord dans le massif de la Tournette et au Sud au niveau de Faverges; il se relie cependant, de la façon la plus nette, au synclinal de Bellevaux à l’Est d’Ecole, dans les Bauges proprement dites. 11 est connu depuis longtemps, grâce à l’exploitation minière (dignités de Montmin), qui y a existé pendant quelques années, au-dessus des chalets d’Arclozan (Mar- clozan de A. Favre), à l’altitude de plus de 2000 mètres au-dessus du niveau delà mer. En y montant de Faverges, par les chalets, on coupe la série des couches de Berrias, du Néocomien schisteux et de l’Urgonien. Sur ce dernier terrain repose, soit le Gault (grès vert), soit le Sénonien (calcaire gris blanc, avec, à la base, un banc de calcaire rosé) , formant tout le fond de la vallée, avant les chalets d’Arclozan. Au delà, on voit peu à peu les calcaires prendre une teinte de plus en plus foncée, devenir complètement noirs et répandre une odeur fétide quand les cassures sont fraîches. Ce sont ces couches qui forment les petits monticules, entre lesquels 1 Le sommet du Tréiod est formé, comme je l'ai figuré sur ma coupe, par les calcaires Urgoniens surmontant le Sénonien par renversement, les couches Tertiaires ont subi par ce fait un étirement qui fait que les couches à grandes Nummulites n’affleurent pas. 2 La vallée de Montmin est située à l’Ouest du synclinal de la mine, et forme une vallée anticlinale : aussi j'adopte avec M. Lugeon, auquel je dois les détails tectoniques qui suivent, le nom plus précis de synclinal d’Arclozan. 40 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE se trouve l’ancienne exploitation de lignites. Ces calcaires fétides, que M. Lugeon et moi 1 avons signalés les premiers dans la région, se rapportent encore au Sénonien, plutôt qu'au Nummulitique comme nous lavons montré. Plus au Nord, je les ai trouvés dans la vallée de Thônes. Les premières couches Nummulitiques, qui viennent au-dessus de ces calcaires, paraissent être représentées par des alternances de calcaires noirs en bancs plus ou moins épais et de qancs plus S Sénonien, C calcaire noir fétide; 1 Calcaires noirs nummulitiques ; 2 Couche de lignite; 3 Calcaire noir bitumineux; 4, 5 Bancs à Polypiers; 6 Grès et calcaires à petites Nummulites. marneux contenant de grands Cardium surtout dans les bancs marneux (Cardium granùlosum, Lmk.) au-dessus, l’on voit des couches marneuses noires très charbonneuses et, intercalée au milieu, la couche de lignites exploitée autrefois. Cette couche a été fortement disloquée, comme le montre la coupe de cette localité (fig. 4). Ces mouvements qui n’existent qu’à ce niveau sont difficiles à expliquer, mais rendent compte des surfaces polies fréquentes que présente le charbon. Le toit est formé par une nouvelle série de calcaires et de marnes bleues ou noires très délitables. Les calcaires, au contact de l’air, sous l’action des eaux de ruisselle- ment, laisssent voir de nombreux fossiles (petits Gastropodes) ; j’ai pu recueillir ainsi : 1 H. Douxami et Lugeon, Bull. Serv. de la Carte Géol., 1895. SYNCLINAL D’ARCLOZAN-BELLEVAUX 41 Cerithium Diaboli Brongt. Cerithium plicatum Brug. Cytherea Villanovae Desh. Cyrena convexa Brongt. sp. Petits gastropodes voisins des Na- tices C’est le niveau à Gérithes des Diablerets; on rencontre en outre dans ces couches de nombreux troncs d’arbres (Conifères) silicifiés, atteignant parfois un diamètre de 20 centimètres, où l’on distin- gue facilement les différentes couches de bois. A la partie supérieure de ces couches se trouve un banc de calcaire noir bitumineux de 1 mètre d’épaisseur, surmonté d’un premier banc de calcaire à polypiers branchus de 50 centimè- tres d’épaisseur, où j’ai recueilli : Cerithium Diaboli, Brongt. Natica sp., trois moules voisins de N. vapincana, d’Orb. Cardium granulosum, Lmk. Les Céritbes se trouvent surtout à la partie inférieure de la couche, quand les polypiers sont encore peu nombreux. Une couche d’argile noire de 50 centimètres d’épaisseur, conte- nant encore quelques mauvais moules de fossiles, se trouve inter- calée entre cette première assise à polypiers et une seconde beau- coup plus épaisse (2 mètres environ), contenant les mêmes formes que l’assise inférieure. Le tout se termine par des calcaires très épais, presque sans fossiles, où je n’ai pu trouver de traces de Pecten ; vers la partie supérieure, on rencontre un banc pétri de petites Nummulites (N. aff. striata , JY. aff. Ramondi) 1. L’ensemble des couches Tertiaires n’a pas plus d’une cinquan- taine de mètres d’épaisseur; les couches supérieures du Num- mulitique (grès micacé), ainsi que les couches tout à fait infé- rieures manquent. Au Sud de ce synclinal, à Faverges, on retrouve, à la colline qui supporte le château, unecoupe du Tertiaire différente encore de la coupe précédente. Elle comprend de haut en bas : 1 A. Favre, loc. cit., t. II, p. 191, y cite Nummulites planulata qui ne me' parait pas y exister. 42 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE Calcaire schistoïde et grès schisteux (Flysch gréseux). Grèsà petites Nummulites1 avecA7. striata, N.variolaria, N. Boucheri. Urgonien. Gault. Calcaire fétide noir. Urgonien (sur la rive gauche du torrent de Seltenaz). Les couches supérieures du Nummulitique existent seules en ce point ; de plus, cette coupe fait voir nettement que les couches de calcaire fétide noir sont complètement indépendantes des couches Tertiaires, malgré la grande ressemblance pétrographique de cer- tains bancs et se rattachent à la période du Crétacé supérieur. On retrouve encore des dépôts Tertiaires dans l’une des branches qui constituent le prolongement méridional du synclinal d’Ar- clozan : c’est le petit synclinal qui forme le plan de Bellevaux à l’Est d'Ecole. Dans ce synclinal, on observe le calcaire noir fétide dont je viens de parler, pincé dans le Sénonien franc et recouvert, non plus comme à Arclozan parles couches saumâtresà lignites,mais par une brèche calcaire à Nummulites striata2 d’Orb. On trouve également quelques rares Nummulites de taille un peu plus grande, que jerapporte à la N .complanata Lam. et des Pecten en mauvais état de conservation. Au-dessus, les couches supérieures du Nummulitique sont constituées par des calcaires marneux, bleuâtres à cassure conchoïdale renfermant des écailles de poissons (Meletta). Tous les autres synclinaux plus orientaux des Bauges ne renferment plus de dépôts Tertiaires. Synclinal d’Entrevernes. — A l’Ouest du synclinal du Char- bon, l’on rencontre un premier synclinal Tertiaire, où les dépôts présentent des caractères rappelant à la fois syn- clinal du Charbon et synclinal d’Arclozan : c’est celui qui renferme les lignites anciennement exploités à Entrevernes. Très resserré près de Duingt et la Tliuile , entre la mon- tagne du château de Duingt et la chaîne du Roc- des -Bœufs du 1 Ce sont sans doute ceux signalés par M. Hollande ( toc . cit., 1889). 2 Cette superposition est bien visible au-dessus des maisons de Bellevaux-derrière. SYNCLINAL D’ENTREVERNES 43 Banc-du-Plan, ce synclinal se prolonge au delà du lac d’Annecy par le synclinal de Verrier et vers le Sud, un peu à l’Est du Châtelard. Interrompu par la cluse du Cliéra, près de cette localité, il se ter- mine, sans avoir subi aucune déviation, au synclinal uniquement Crétacé du Colombier du Châtelard, entre la Dent-de-Rossane et le Colombier. A la mine d’Entrevernes même, près du puits d’exploitation et de l’anciennegalerie, on a, à partir de l’Urgonien, disposés en couches verticales : 1° Le Gault à l’état de grès vert, d’aspect molassique, rappelant aussi le faciès du grès à petites Nummulites. Ces grès avaient été considérés par les auteurs anciens comme Nummulitiques ; on les retrouve sur le versant Ouest au-dessous des couches à grandes Nummulites, ainsi qu’au Nord de la mine ; 2° Banc de marnes noires, 2 mètres; 3° Banc de lignites, d’une épaisseur moyenne de 2 mètres pou- vant en certains points atteindre jusqu’à 3 ou 4 mètres, renfermant des coquilles écrasées peu déterminables de Planorbis Cyclas ; 4° Banc de marnes fossilifères, 10 mètres. Dans ces marnes noires, pétries de fossiles, on peut recueillir en grande abon- dance : Melanopsis fusiformis Sow. a. c. Cerithium plicatum Brug. ar. et var. Alpina H. et R. Cerithium elegans Desh. a. c. Cytherea Villanovae Desh. r. Cyrena convexa Brongt. c. Cyrena vapincana ? Desh. r. Cardium granulosum Lamk Nombreux débris de plantes indé- terminables. Je rattache encore à ce niveau, qui correspond tout à fait au niveau saumâtre à Cérithes des Diablerets, c’est-à-dire au Pria- bonien de MM. Munier-Chalmas et Lapparent (équivalent méditerranéen du Ludien du Bassin de Paris), des couches decalcaire noir fétide qui se trouvent au-dessus et où l’on rencontre encore : Cytherea Villanovae Desh. Natica aff. Studeri Queenst. Cerithium Diaboli Brongt. Cerithium plicatum Brug. des Ostracées. 44 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE 5° Des calcaires bleuâtres, en lits minces, schistoïdes, à écailles de poissons et qui, comme toujours, se chargent peu à peu, à me- sure qu’on s’éleva dans la série, de mica, en devenant beaucoup plus gréseux, facilement décomposables à l’air, ayant tout à fait l’aspect de la molasse; ils occupent le centre du synclinal. Ces der- nières couches sont bien visibles, le long du ruisseau qui descend vers Entrevernes i. Fig. 5. — Coupe au Nord de la ruine d’Entrevernes. U. Urgonien G G-ault; S Sénonien; 1 conglomérat à grandes Nummulites; 2 Marnes saümâtres; 3 bancs de lignite; 4 Grès à petites Nummulites; 5 Flysch; Grès micacés. Un peu au nord de la mine, la première colline que l’on ren- contre permet de relever la coupe ci-jointe W.-E. (fig. 5.), 1 La mine d’Entrevernes est aujourd'hui complètement abandonnée. Le lignite consti- tuait cependant un combustible excellent fort employé autrefois dans la région. Il formait une couche verticale très régulière vers le Sud. On l'exploitait par une galerie horizon- tale longue de 600 mètres et par un puits de 35 mètres dé profondeur; vers le Nord, la couche était moins régulière par suite de, mouvements orogéniques locaux. SYNCLINAL D'EN TIIEVEIINES 45 montrant qu’il y. a étirement et renversement des couches sur le flanc Est du synclinal : l’Urgonien du sommet se rattache à celui, dè la montagne de Duiogt. „ , La succession de la mine se retrouve au delà. Au lac d’Annecy, le synclinal, d’Entrevernes traverse la dépres- sion lacustre, sans être affecté par elle et se prolonge au delà dÿt, lac, par le synclinal Nummulitique de la montagne de Veyrier, où, ■Né Néocomien; U Urgonien; G Gault ; S Sénonien; 1 Conglomérat; 2 Grés à petites, Nummulites ; 3 Flysch. après le passage dit des Contrebandiers, derrière l’église du village4 de Veyrier, on observe la coupe suivante, déjà donnée par M. de Mortillet1, comme exemple de renversement de couches' (fig. 6)., Les couches Tertiaires sont réduites à : 1° Grès Nummulitique reposant sur la Craie par un conglo- mérat (couches à petites Nummulites) ; 2° Grès et schistes marneux à écailles de poissons (Flysch). L’allure des couches est d’ailleurs la même qu’à Entrevernes. Sur le flanc' occidental, vers Entrevernes (fig, 7), on trouve, reposant sur le Gault, d’aspect molassique, le conglomérat de base') du Nummulitique que l’on peut suivre, presque sans interruption,; jusqu’au col du Golet : c’est un grès grossier, accompagné d’un ; " i % v> f. . . - ' ’ ’ ‘ . t ‘ ’ I 1 De Mortillet, Géol. et minéral, de la Savoie, pl. III, fig. 12. 46 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE poudingue calcaire, riche en Nummulites (N. aturica, N. I,uca- sana) et surmonté : 1° Par une couche marneuse de 2 mètres d’épaisseur, repré- sentant le niveau saumâtre. 2° Par des grès très siliceux (ce sont presque des quartzites), glau- conieux, avec bancs calcaires très glauconieux contenant quelques H Hauterivien; U Urgonien; 1 Conglomérat de base à gros éléments d'Urgonien et de Gault; 2 Cale, compact à grandes Nummulites; 3 Marnes saumâtres; 4 Cale, et grés à petites Nummulites; 5 Cale, schisteux; 6 Grés micacés ^Fausse Molasse). débris de Pecten. Ces couches, qui correspondent aux couches à Nummulites striata , ont là un faciès particulier, unique dans les Bauges ; 3° Etau centre du synclinal, par l’ensemble des calcaires schis- toïdes et des grès micacés à écailles (ces grès micacés correspon- dent aux couches de fausse molasse de M. Hollande). La couche à lignites, très réduite, comme on vient de le voir, sur le banc occidental, où d’ailleurs elle manque souvent, ne prend un certain développement qu’au-dessus delà cluse de Bellecombe ; on y a exploité jadis un banc de lignites compris entre deux cou- ches noirâtres avec nodules de différentes couleurs. La coupe du col du Golet, où les deux flancs du synclinal sont presque symé- triques, nous donne la composition moyenne et presque complète du Nummulitique des Bauges. L’épaisseur totale des couches atteint ici 150 à 200 mètres; le conglomérat de base repose sur l’Urgo- nien; le Gault qui devait exister, comme le prouvent les galets que W Fig 7. — Coupe du Col du Golet. SYNCLINAL D'ENTREVERNES 47 l’on trouve dans le poudingue, a été enlevé complètement par l’érosion (fig. 7). Vers le Châtelard, toujours dans le même synclinal, lorsque l’on remonte le torrent qui descend du hameau des Garins, on trouve, reposant sur l’Urgonien : 1° Gault (grès vert sans fossiles) ; 2° Sénonien (calcaire blanc avec Inoceramus Cuvieri a.c.); 3° Banc de poudingue bréchiforme avec une pâte très glauco- nieuse, où l’on trouve en grande abondance les fossiles sui- vants : Nummulites perforata Lmk. typique, identique aux échantillons du Midi. Numm. aturica 1 Joly et Leym. Numm. Lucasana Defrance. des Oursins de petite taille, malheureusement en trop mauvais état de conservation pour pouvoir être déterminés, et des Gas- tropodes (Rostellaria sp., Pyrula sp., Cerithium plicaturn Brongt). Epaisseur : 2 mètres ; 4° Poudingue brèche à cailloux et pâte calcaires. Quelques bancs calcaires. Fossiles très rares, 10 mètres ; 5° Petit banc marneux, en grande partie recouvert par les éboulis et qui correspond au niveau saumâtre, 5 mètres; 6° Calcaire gréseux bleuâtre avec Peclen (Grès à petites Num- mulites) ; 7° Calcaires schistoïdes et Grès micacés de la fausse Molasse. Le calcaire gréseux à Peclen est beaucoup mieux développé et plus fossilifère vers le Mont Julioz, où la nouvelle route du Châtelard aux Garins le coupe sur une grande épaisseur ; on peut y recueillir, dans des calcaires gréseux, bleus en profondeur, gris jaunâtre à la surface, par altération identiques à ceux du Plan de Lire, dans la montagne du Charbon, de nombreux fossiles, en particulier : 1 C’est une forme provenant de cette localité que de la Harpe (Num. des Alpes Françaises) a désignée, à tort, sous le nom de N. perforata, var. Baugensis. 48 PERIODE PRENUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE Dent de poissons. Astarte sp. Ostrea Brongniarti Bronn. Cardita imbricata d’Orb. Pecten imbricatus Desh ? Natica vapincana d’Orb. Turbo sp. Astrea raristella Mich. Conoclypeus sp. Nommalites complaoata La m . P. nov. sp. (aval ve gauche aplatie et nombreuses côtes arrondies, rayonnantes). Un peu au Nord des Garins, près du col du Planay, dans l’abrupt du flanc oriental, on voit reposer sur le Sénouien forte- ment plissé et faillé : 1° Conglomérat de base à grandes Nummulites ; 2° Alternances de grès calcaires jaunâtres (3 bancs de grès) et de calcaire schistoïde à écailles (Flysch calcaire). On trouve dans les grès des Pecten identiques à ceux du Mont Julioz; des blocs éboulés m’ont fourni Natica aff. studeri, Quenst; 3° Grès micacés supérieurs (Flysch gréseux passant à la fausse molasse). Cette coupe fort intéressante nous prouve à la fois que le faciès, que j’ai désigné sous le nom de calcaire schistoïde, com mence dès les couches inférieures, comme dans la montagne du Charbon et alterne nettement avec les grès à petites Nummulites. Ce sont là les synclinaux tertiaires des Bauges proprement dites et j’ai insisté à dessein sur leur étude : ce sont les seuls où l’on trouve bien développée la série complète des couches Nummu- litiques de la Savoie. Les nombreuses coupes de détail que j’ai données vont nous permettre de préciser la succession exacte des couches Tertiaires des Bauges, qui comprennent de bas en haut : I. Conglomérats à éléments calcaires (ou de roches locales) et bancs calcaires (couches à grandes Nummulites). Sa) Couches saumâtres à Céritlies (niveau' desDiablerets) et calcaires à polypiers et Natica Vapincana Arclozan,mont Julioz. sons (Flysch calcaire) b) Calcaire gréseux à petites Nummulites pouvant passer à : et Pecten, Ostrea Brongniarti. Ces deux faciès pouvant exister ensemble \ ou non. SYNCLINAL DES AILLONS 49 III. Calcaires schistoïdes, se chargeant peu à peu de mica, devenant gréseux, d’aspect molassique, comprenant ce que j’ai désigné sous le nom de Flysch gréseux et de fausse Molasse pour les couches supérieures l. Synclinal de Leschaux. — A l’Ouest des différents syncli- naux dont je viens de parler, formant le dernier synclinal tertiaire du massif géographique des Bauges, se trouve la large vallée qui s’étend de Saint -Jorioz par Leschaux-Bellecombe jusqu’au Ghéran . Elle est limitée, à l’Est par la montagne du Roc-des-Bœufs et du Banc-du-Plan, à l’Ouest par la chaîne duSemnoz; au Nord, ce syn- clinal se perd dans la plaine d’Annecy. Jusqu’au Ghéran, il ne ren- ferme que des dépôts Tertiaires Aquitaniens, ou peut-être encore plus récents, comme je le montrerai plus loin; les dépôts Nummu- litiques n’existent qu’en profondeur. Vers le Chéran, ce synclinal se dédouble en deux: 1° un synclinal qui, au delà du Chéran, constitue la vallée des Aillons, entre l’anti- clinal duMargéria à l’Ouest, le Mont de la Buffa et la Galoppaz à l’Est, et se termine à la Combe -Noire. 11 est fermé au Sud par les rochers Urgoniens qui surplombent au-dessus de la Thuile et de Monthouxla cluse de Montmélian à Chambéry2 ; 2° la partie occiden- tale constitue le synclinal de Lescheraines, Planpalais et le Pla- teau des Déserts. Brusquement interrompu à la cluse de Mont- mélian, il reparaît plus au Sud, dans le synclinal Sénonien de l’Alpette et plus au Sud encore dans le massif de la Grande- Char- treuse. A l'Ouest, il est limité par le prolongement du Semnoz, c'est-à -dire, comme je l’ai déjà indiqué plus haut, par la montagne de la Cluse, le Revard, le Nivolet et, au delà de la cluse de Mont- mélian, par le Mont de Joigny. Synclinal des Aillons. — Les couches Tertiairesles plus infé- 1 La limite exacte entre les couches II et III ainsi qu'entre le Flysch gréseux (qui correspond tout à fait au macigno alpin de A. Favre) et la fausse Molasse de M. Hol- lande est évidemment toujours un peu arbitraire ei varie beaucoup suivant les poinls considérés. 2 II me faudrait ajouter, pourêtre tout à fait complet, que, entre Aillon-le-Jeune et Aillon- le-Vieux, naît un petit synclinal secondaire sur le flanc oriental, formé par un repli de 1 Urgonien et rempli par le Gault et le Sénonien. C’est grâce au Gault perméable aux eaux que les chalets de la Bottière ont pu s’établir dans cette région (Fig. 9.) Univ. dk Lyon. — Douxami. 4 50 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE rieures que nous connaissions appartiennent à la base des terrains Nummulitiques1. C’est, comme toujours, un conglomérat bréchi- forme formé de débris anguleux de calcaires noirâtres ou blancs (surtout Sénoniens), empâtés dans une gangue calcaire grisâtre ou brunât e. J’ai suivi ces couches d'une façon presque con- tinue depuis les rochers au-dessus de la Lappe, tout le long de la montagne de la Buffu, jusque dans la Combe-Noire, c’est-à-dire sur tout le flanc oriental du synclinal. Dans ces couches, j’ai recueilli en grande abondance : Nummnlites perforata Lmk. type. Numm. aturica Joly et Leym. Numm. Lucasana Defrance. Au-dessus de cette assise, on trouve directement le Flysch calcaire (La Lappe) ou les calcaires gréseux à petites Nummuliles (Sauge). Ces calcaires gréseux à petites Nummulites sont bien développés, tout le long du flanc occidental du synclinal; les assises inférieures2 se présentent sous forme de calcaires noirs, rappelant ceux qui exis- tent à Arclozan, au voisinage de la couche de lignites ; ils ne con- tiennent ici que quelques rares débris de Nummulites et reposent directement sur l’Urgonien (col des Prés, derrière la Peisse). Les couches gréseuses, qui se suivent jusqu’au delà d’Aillon-le-Jeune, présentent de petites Nummulites (N. aff. striata ), et une grande quantité de Pecten : Pecten pictus Goldf. Ostrea Brongniarti Bronn. Pecten subtripartitus d’Archiac. Clypeaster sp. Pecten subdiscors d’Archiac. Les couches supérieures, constituées par des grès assez grossiers, très quartzifères, contiennent encore desNummuliteset sont surmon- tées parles assises duFiysch calcaire : calcaire schistoïde bleuâtre 1 Elles ont été découvertes par M. Révil. 2 II existe encore, peut-être tout à fait à la base, quelques bancs de conglomérat cal- caire que je n'ai vu qu’à l’état de blocs isolés, non en place. SYNCLINAL DES AILLONS 51 à cassure esquilleuse se débitant facilement en lamelles, bien visible tout le long de la route de Gol-des-Prés à Aillon; il contient de nom- breuses écailles de poissons 1 (Meletta). Gomme partout, ces cou- ches, à la partie supérieure, passent a des assises beaucoup plus micacées, qui occupent le centre du synclinal ; elles sont d'aspect Molassique, identiques aux grès qui supportent l’Eglise des Déserts. Ges grès (fausse Molasse) contiennent en abondance les moules d’un petit lamellibranche; certaines plaques en sont abso- lument pétries (Nucules, Grès à Nucules de mes publications antérieures) ; on y trouve, en outre, des restes charbonneux de plantes, quelquefois assez abondants pour former de petits amas ligniteux. Ges couches sont bien visibles dans le lit des ruisseaux qui les ont profondément découpées entre le col et Aillon-le-Jeune. Les couches de grès et de flysch calcaire ne dépassent guère au Nord le village d’Aillon-le-Jeune ; j’ai pu les suivre cependant jus- qu’au hameau de Sur-le-Vif; elles reposent toujours sur l’Urgo- nien ; les grès micacés supérieurs s’étendent un peu plus loin. Vers le Nord de la vallée des Aillons, on voit apparaître des couches Tertiaires [dus récentes, appar tenant à l’Aquitanien : ce sont des marnes rouges, alternant avec des couches de Molasse verte, grise ou jaunâtre, où je n’ai pu découvrir que de mauvaises empreintes de feuilles (Daphnogene?) Certaines de ces assises Molassiques ont un faciès qui rappelle énormément celui de la Molasse grise de Lausanne. En suivant le litduNant d’Aillon, on voit nettement les grès micacés à Nucules passer, d’une manière insensible, à ces assises Aquitaniennes. Le reste des assises Tertiaires doit exister en profondeur. Dans toute cette vallée des Aillons, les couches Tertiaires repo- sent en général sur le Sénonien, pour le flanc Est du synclinal et sur l’Urgonien, pour le flanc Ouest; le Sénonien a été presque partout complètement érodé et le Gault n’existe plus, sur ce ver- sant, qu’à l’état de lambeaux très faibles, par exemple le long delà nouvelle route d’Aillon-le-Jeune à Cimeterret. Vers le Sud, le 1 M. Munier-Chalmas a découvert autrefois un poisson presque entier dans le Flysch calcaire du col de Prés. 52 PÉRIODE PRÉNU MMULITIQUE ET NUMMUL1TIQUE Gault et le Sénonien sont plus développés ; c’est ainsi qu’à la cas- cade formée par le Nant, après le hameau de la Peisse, au passage de la barre Urgonienne qui va former le Mont-Cervin, on a la coupe suivante : 1° Urgonien ; 2° Gault (grès vert, 20 mètres) ; 3° Sénonien (Gale, blanc un peuglauconieux à la base) ; 4° Grès grossier et Calcaires à petites Nummulites, formant la barre supérieure de la cascade (8 mètres) ; 5° Flysch calcaire à écailles. Le Gault et le Sénonien ont donc dû autrefois exister dans toute l’étendue de ce synclinal, dont l'étude a mis en évidence deux faits très importants : Fig. 8. — Coupe au Sud de la vallée des Aillons H Hauterivien; U Urgonien; S Sénonien; 1 Conglomérat de base; 2 Cale, gréseux à petites Nummuliles; 2a Grès grossier; 3 Flysch calcaire ; 4 Grès micacés. 1° Les couches inférieures à Nummulites existent dans ce syn- clinal ainsi que les grès de la fausse Molasse que je considère comme terminant la série Nummulitique des Bauges. 2° Contrairement à ce qu’avait, avancé M. Hollande \ les cou- ches les plus anciennes ne sont pas uniquement sur le bord Ouest, mais surtout sur le bord Est de ce synclinal : les couches sont bien disposées dans l’ordre naturel qu’elles doivent occuper et il n’y a pas de retrait des couches. La constitution des assises Tertiaires varie du Nord au Sud, 1 De Hollande, Bull. n° 41, p. 9. SYNCLINAL DES DÉSERTS 53 commele prouvent les deux coupes suivantes, prises, l’une au Sud vers la Peisse (fig. 8), l’autre au Nord vers Cimeterret (fîg. 9). Il ne nous semble donc pas possible d’admettre les conclusions de M. Hollande. Interprétant des coupes imcomplètes, il admet un sou- lèvement précoce du flanc Ouest, soulèvement qui aurait repoussépeu à peu la mer vers l’Est. Le flanc Ouest doit, au contraire, être resté constamment sous les eaux, la partie orientale se soulevant peu à peu. Les eaux se déssalaient progressivement ; les dépôts Aqui taniens sont franchement d’eau douce; à mesure que la partie Sud s’exhaussait, la partieNord était soumise, au contraire, à un mouvement d’affais- sement, qui a laissé en profondeur les dépôts les plus anciens. Il en est de même, comme nous allons le voir, dans la vallée des Déserts. Fig. 9. — Coupe au Nord de la vallée des Aillons. U Urgonien, G Gault; S Sénonien ; 1 Nummulitique ; 2 Grès à Nucules; 3 Aquitanien. Synclinal des Déserts. — Les terrains Tertiaires bien déve- loppés sur le Plateau des Déserts, en particulier, ont déjà été étudiés par la Société Géologique de Fiance, au moment de sa réunion extraordinaire à Chambéry, en 1844 ; j’ai donné plus haut la coupe qui avait été relevée au r.ord de l’Eglise des Déserts par l’abbé Chamousset. M. G. de Mortillet. dans son Prodrome d’une géologié de la Savoie 1, fait également une allusion aux couches nummulitiques des Déserts ; dans sa Géologie et Minéralogie de la Savoie 2, il cite souvent le conglomérat de base, avec ses polypiers et ses 1 G. de Mortillet, Prodrome d’une géologie de la Savoie, 1855. 2 G. de Mortillet, loc. cit.> p. 256, 1860. 54 PÉRIODE PRËNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE débris de Craie, surmontés de grès durs, jaunes ou blancs et le Flysch: c’est à peu de chose près la succession observée par la Société géologique. Tournouer1 montra le premier tout l’intérêt que présente l'étude du synclinal des Déserts, en y signalant la présence d’une faune Tongrienne. La coupe qu’il donnait, due à Pillet, était la suivante: 1° Grès micacé, jaune ou gris à Lucina (Eglise des Déserts). 2° Calcaire très sec siliceux avec Potamides (?) Nystia Duchasteli. 3° Flysch schisteux, à pâte fine, avec écailles de poissons. 4° Calcaire Nummulitique à Polypiers. 5° Brèche. La faune qui accompagne ces dépôts a un caractère franchement méridional et se relie aux dépôts synchroniques des Basses Alpes2 3. Dans son travail sur les Bauges , M. D. Hollande 3 donne trois coupes des Déserts : d. Grès grossier àNummulites (4° niveau nummulitique). e. Poudingue à cailloux Néocomiens et N. crassatina. f. Couches à Polypiers et N. crassatina. g. Grès et sables à Cèrithes et Bythinies. h. Couches à Operculines etCardita Laurae. i. Flysch oligocène à Fucoïdes et écailles de Poisson. La coupe des Prés des Maréchaux est la même avec seulement en plus, à la base, les dépôts de glaise et de graviers grossiers plus ou moins ferrugineux. A la Féclaz (chalets d’En Glaise), M. Hollande donne toujours cette même succession (avec absence en certains points des couches g et h) que surmonte les marnes rouges à Hélix Rarnondi et la Molasse à Sabal Lamanonis de l’Aquitanien. A la Doria sur l’Urgonien. 1 Tournouer, loc. cit., 1877, Bull. Soc. Géol. 3 A la suite de la discussion à laquelle donna lieu cette communication, M. Noguès indiqua la succession suivante des couches des Déserts : Grès micacés (Pluviomarins ou lacustres), Flysch. Couches à Natica crassatina. Grès sableux à Num. variolaria. 3 D. Holt.ande, loc. cit., 4889, pl. VIII, fig. 24. SYNCLINAL DES DÉSERTS 55 Dans sa dernière note, M. D. Hollande 1 donne de nouvelles coupes de la Doria et des Prés des Maréchaux, où les grès grossiers à petites Nummulites se trouvent au-dessus des couches à Nalica crassatina. Toutes ces coupes différentes, qu’il est difficile à première vue de raccorder les unes avec les autres, nous engagèrent, M. Revii. et moi 1 2 3 * * * * * * * Il, à reprendre l’étude stratigraphique et paléontologique du Nummulitique des Déserts. La succession qui résulte de cette étude est la suivante. Reposant sur l’Urgonien : 1° Poudingue calcaire avec quelques silex et débris de Craie et Natices. 2° Calcaires à Polypiers; grandes Natices (N. aff. Vapincana) et Nummulites d’assez grande taille, reposant directement en certains points sur les calcaires Urgoniens (vers les Charmettes, derrière l’église des Déserts). 3° Calcaires schistoïdes à écailles de poissons (Flysch calcaire). 4° Marnes à Car dites (Cardita Laura °) et calcaires marneux (Flysch). 5° Grès micacés à Nucules de l’église des Déserts. 6° Aquitanien. L’existence de Flysch Tongrien ne paraît donc pas douteuse, comme le veut depuis longtemps M. Hollande, mais son exis- tence est prouvée par une coupe assez différente de celles qui ont été données jusqu’à présent. Ce Flysch existerait, non seulementdans la vallée des Déserts, mais encore dans la plupart des synclinaux des Bauges et, comme je le montrerai plus loin, dans tout le massif du Génevois. Ce faciès particulier, qui a débuté, au- dessus des conglomérats à grandes Nummulites (vallées du Char- 1 D. Hollande, loc. cit., Bull. n° 41, p. 3. 2 H. Douxamj et J. Révil, Sur les couches Tertiaires du Plateau des Déserts, près de Chambéry. (En publication.) 3 Au col de la Doria, on voit ces couches reposer sur l’Urgonien; c’est un grès calcaire jaunâtre, à grains fins, où j'ai recueilli : N. striata , c. petite variété à caractères très nets. iV. G uettardi, c. forme renflée, lame spirale mince, spire subrégulière. cloisons arquées. Orthophragmina , sp. r, Pecten pictus, Goldf. cc. Pecten aff. operus. Desh. c. dents palatines de poissons. Il est surmonté immédiatement par le Flysch calcaire à nombreuses écailles de poissons. 16 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE bon, des Aillons) par les calcaires schistoïdes, en lames plus ou moins épaisses, se continue en effet, pendant toute la série des temps Nummulitiques. Les bancs alternent avec les bancs à petites Nummulites dans le synclinal d’Entrevernes. Lorsqu’on se dirige à l’Est, vers le village des Mermets, on voit ces calcaires schistoïdes alterner avec des bancs fossilifères degrés à Nucules. Ces grès à petits bivalves de la vallée des Déserts ou des Aillons correspondent évidemment aux couches supérieures des grés mica- cés de la vallée d’Entrevernes (collines au-dessus de ce village); ils ont encore un faciès légèrement saumâtre ; les couches qui leur sont superposées et qui contiennent des fossiles Aquitaniens sont beaucoup plus nettement lacustres. Aussi je les considère, pour toutes ces raisons, comme appartenant encore au Tongrien et ter- minant la série Nummulitique des Bauges. Leur âge est d’ailleurs difficile à préciser davantage, non seulement par suite de l'absence de fossiles caractéristiques, mais encore à cause des transitions insensibles qui existent entre ces couches et les dépôts franchement Nummulitiques d’une part, ou les argiles bariolées et les Molasses plus ou moins sablonneuses, franchement Aquitaniennes. En un grand nombre de points (vallée des Déserts, Aillon, Annecy-le- Vieux, etc.), les eaux ont toujours existé pendant la fin de l’Oli- gocène et ont seulement subi une déssalure progressive. Gomme dans le synclinal des Aillons, les couches marines dimi- nuent beaucoup d’épaisseur, à mesure qu’on s’avance vers le Nord du Plateau des Déserts. J’ai pu suivre les grès à petites Nummu- lites, avec P ecl6n et Ostracés Jusqu’au Nord du col dePlanpalais, sur le versant Ouest du synclinal, jusque vers Saint - François -de- Sales; au delà, les Grès micacés supérieurs occupent encore les centre de la vallée, le long du ruisseau qui descend vers Lesche- raines (ruisseau de Saint-François) et. sont recouverts par des cou- ches de marne et de Molasse verte, appartenant à l’Aquitanien et d’ailleurs en parfaite concordance de stratification. Les couches de calcaire schistoïde, qui sont bien visibles tout le long de la route du col de Planpalais, présentent des bancs cal- caires à cassures esquilleuse, bien développés, contiennent de nom- SYNCLINAL DES DESERTS 57 breuses écailles de poissons et des débris de plantes (Chondrites affinis Ung) ; on les suit également avec les grès inférieurs, jus- que vers Saint-François -de- Sales L Comme l’a très bien fait remarquer M. Hollande, il y aune très grande variété dans la nature des dépôts Tertiaires, au contact de TUrgonien ou des sables de l’Eocène inférieur légèrement remaniés ; de plus, la présence dans les conglomérats de base ou dans les sables Éocènes, de débris abondants de Craie, de silex Urgôniens et Sénoniens, les lambeaux de Gault et de Sénonien qui existent un peu plus au Nord (Pont d’Entrèves, route de Leschaux, Sévrier) montrent que, primitivement, comme dans toute la région, le Sénonien et le Gault recouvraient toute la surface de l’Urgonien; ce sont les érosions post-Crétacées qui se sont produites au moment des mouvements alpins anté-Nummulitiques, qui les ont fait dispa- raître en grande partie. Ces dépôts inférieurs sont d’ailleurs nettement littoraux ; la chaîne Revard-Nivolet marquait évidem- ment la limite occidentale des mers Nummulitiques inférieures, grâce à un certain relief existant dans cette partie méridionale des Bauges. La composition des terrains Tertiaires supérieurs est extrême- ment variable. Au Nord du col de Planpalais, vers le Noyer et Lescheraines, on a un ensemble épais, constitué par des Marnes et des Molasses vertes, où l’on ne trouve que quelques rares débris de plantes. A droite du Pont de Lescheraines, sur la rive gauche du Chéran, on peut relever facilement la coupe suivante, donnée par M. Hollande : 1° Deux gros bancs deMolasse gréseuse, grise, séparés par des lits marneux. 2° Gros banc de grès, où l’on aurait trouvé le Sabal Lamalonis, conservé au Musée de Chambéry. 3° Marnes rouges bigarrées ave 3 rognons de grès. 4° Marnes rouges avec Hélix (Coryda) rugulosa. G. V. Martens. 5° Molasse à mica blanc (1er étage Méditerranéen?) 1 A Saint-François-de-Sales, M. Hollande signale un poudingue calcaire, à éléments surtout Urgôniens et Crétacés, qu'il rapporte à la base du Tertiaire et que je serais plutôt tenté, d’après le faciès, de rapporter au Sénonien. 58 PÉRIODE PRÉN UMMULIT1Q UE ET NUMMULITIQUE Plus au Nord, le long de la route de Leschaux, les couches reposent, tantôt sur le Sénonien (fours à chaux de Sévrier), tantôt sur le Gault (Leschaux, Eotrèves), enfin le plus souvent sur l’Urgo- nien. Les affleurements sont très épars, peu importants (le Glaciaire joue en effet un rôle considérable dans toute la vallée de Leschaux) et il est pour ainsi dire impossible de les relier les uns aux autres. Les dépôts comprennent une série de grès, de marnes plus ou moins bariolées, de molasse verte ou rouge ; la composition varie d’ailleurs avec chacune des localités, où l'on peut voir des affleure- ments. Si l’on se rapporte au faciès des couches, certains grès se rapprochent tout à fait, comme aspect, de la Molasse grise de Lausanne (base du premier étage Méditerranéen). Ils sont inter- calés en bancs épais, au milieu d’autres couches rappelant par leurs teintes bariolées les dépôts Aquitaniens. Il est donc impos- sible d’établir une division quelconque au milieu de ce puissant ensemble de couches Aquitaniennes et sans doute Miocènes infé- rieures. Les renseignements paléontologiques sur ces couches sont égale- ment extrêmement rares. C’est ainsi que, jusqu’à présent, les seuls restes organisés que l’on connaisse de ces couches sont les sui- vants : Sabal Lamanonis, Ung. (Lescheraines). Hélix (Fruticicola) lepidotricha. Braun (id.), vallée de Leschaux. Hélix (Corydal rugulosa G. -Y. Martens (id.). d’aprèsM. Hollande. J’ai trouvé, entre Glapignv et Leschaux, des moules d’Helix qui se rapportent à Hélix eurliabdota , Fontannes de l’Aquitanien du Bassin du Rhône ; et dans la vallée des Aillons, des feuilles de Daphnogene ; c’est-à-dire, d’une manière géné- rale, des formes nettement Aquitaniennes. Il faut surtout remarquer l’identité presque complète des for- mationsTertiaires inférieures et supérieures de la vallée des Aillons et de la vallée des Déserts. La stratigraphie vient apporter ainsi à la tectonique un argument pour montrer que ces deux vallées, au delà du Ghéran, viennent se confondre en un seul synclinal, celui SYNCLINAL DES DÉSERTS 59 de Leschaux. Entre les deux, se trouve le pli faille du Mont Mar- geria,Mont Gervin, dont le soulèvement, postérieur à l’Aquitanien, est venu troubler la régularité d’allure des dépôts, sur le versant oriental de la vallée des Déserts. Ce pli faille rompu à l’Ouest, s’explique bien plus naturellement par la poussée Est Ouest dont j’ai déjà signalé l’existence que par un soulèvement Ouest-Est comme le voudrait M. Hollande. Pendant toute la durée de la période Nummulitique, les Bauges ont été soumises en outre, à un soulèvement lent Sud-Nord, de la partie méridionale de ce massif : c’est ainsi que, dans le synclinal des Aillons, comme dans celui des Déserts, les dépôts les plus anciens se trouvent dans la partie méridionale la plus élevée de ces synclinaux 1 ; ils s’enfoncent, vers le Nord, sous des couches de plus en plus récentes. Les eaux reculaient en même temps que la salure diminuait. Au delà de Sévrier, l’anticlinal du Semmoz peu à peu disparaît sous les dépôts Quaternaires et Tertiaires de la plaine d’Anrn cy et ne reparaît pas plus au Nord, si ce n’est peut-être, comme je l’ai indiqué plus haut, dans la chaîne du Salève. L’anticli- nal du Roc-des-Bœufs et duBanc-du-Plat, au delà du lac d’Annecy, paraît se prolonger dans l’anticlinal Crétacé du Ramponet du Rampi- gnon, près Annecy-le- Vieux, en changeant légèrement de direction et s'infléchissant vers le Nord Est. Le synclinal de Leschaux vient donc s’étaler dans la région qui constitue le Plateau des Bornes, au Sud du lac Léman, entre l’anticlinal du Salève à l’Ouest et les premières chaînes subalpines ou des Préalpes du Chablais à l’Est. Le faciès des dépôts Tertiaires qui remplissent cette vaste cuvette, sous l’épais manteau de Glaciaire si développé dans cette région, présente en effet la plus grande analogie avec celui des dépôts Tertiaires delà vallée de Leschaux, des Déserts ou des Aillons. Dans toute la partie méridionale de la plaine d’Annecy, les couches, horizontales dans le centre du plateau, se relèvent légèrement, le long du Sa lève, où elles reposent sur l’U rgonien ou les sables Eccènes 1 Au delà de la cluse de Montmélian, dans le prolongement méridional du synclinal des i Déserts, on ne rencontre pas de terrains Tertiaires marins, mais seulement des dépôts ; Sénoniens. 60 PÉRIODE PRÊNUMM ULI TIQUE ET NUMMULITIQUE ferrugineux. A l’Est, ces couches sont, comme clans tout le massif du Génevois, beaucoup plus fortement relevées et arrivent même jusqu’au renversement L Cette bordure orientale est particulièrement intéressante à étudier: c’est ainsi que, près d’Annecy-le- Vieux, vers le hameau de Barattes, on peut relever la coupe suivante (tig. 10), le long du cheminallant à Sur-les-Bois. Surleealcaire Urgonien fortement redressé, on trouve : Fig. 10. — Coupe vers les Barattes. U Urgonien ; 1 Grés et Calcaires à N. striata; 2 Flysch gréseux passant à des 3 Grès micacés (Fausse Molasse); 4 Aquitanien. 1° Grès et Calcaires plus ou moins siliceux qui correspondent aux couches à petites Nunnnulites (N. striata) ; les couches infé- rieures sont plus grossières et contiennent des cailloux et des silex (provenant sans doute de la Craie). Les parties supérieures sont plus fines, passant même en certains points à un véritable sable jaunâtre qui, à l’air, devient blanc, comme aux Déserts et contient des traces de Pecten. 2° Grès gris-bleuâlres, en bancsde25 à 30 centimètres, séparés par des lits marneux, devenant fortement micacés à la partie supérieure et identiques aux grès micacés supérieurs de la vallée 1 11 en résulte que l'axe de ce synclinal est beaucoup plus rapproché des Alpes que du Salève. E SYNCLINAL DES DÉSERTS 61 du Désert (e* m!" de la feuille d’Annecy) ; on y trouve des traces de plantes comme aux Aillons. 3° Couches marno-sableuses micacées ; ces couches sont moins fortement inclinées que les précédentes. La couleur bleue est beau- coup plus foncée; elles se relient nettement aux couches qui affleu- rent plus loin vers le château de la Peisse. Elles appartiennent déjà à l’Aquitanien. Vers le Nord de la montagne de Rampon et Rampignon, au Pont Saint-Clair, on a une autre coupe aussi intéressante, qui présente de bas en haut : 1° Calcaire bleuâtre avec fossiles de l’Aptien fortement redressé ; 2° Calcaire blanc (Sénonien) ; 3° Grès siliceux et calcaire kJSurnmul. Raynondi , Pectenpictus, comme aux Déserts, au Passage des Contrebandiers, et dans tout le Génevois; 4° Grès siliceux brunâtre, rappelant beaucoup ceux du col de la Doria, et passant aux couches du flysch micacé gréseux ; 5° Molasse Aquitanienne comme à la Peisse. Toutes les couches sont d’ailleurs renversées. Le flanc oriental de la partie méridionale de ce plateau des Bornes présente donc une analogie complète avec ce que nous connaissons des dépôts Tertiaires des Bauges. Comme dans la vallée des Aillons ou la vallée des Déserts, les couches les plus anciennes sont situées sur le versant oriental et plongent sous les couches plus récentes (Aquitaniennes), qui existent seules dans le centre du synclinal. Il y a là aussi passage insensible et concordance parfaite entre les dépôts franchement Nummulitiques et marins et les dépôts sau- mâtres ou lacustres de l’Aquitanien. Cela montre que les eaux n’ont pas abandonné la région pendant toute la durée du Nummu- litique et de l’Aquitanien. Le Plateau des Bornes , qui s’étend entre les Alpbset le Salève, depuis les environs d’Annecy jusqu’à la vallée de l’Arve, est en grande partie constitué par les dépôts Molassiques, bien déve- loppés à partir d’Annecy-le-Vieux. Ces couches, qui atteignent une épaisseur considérable, sont de la plus grande pauvreté au 62 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMUL1TIQUE point de vue des restes organisés et d’une monotonie de faciès désespérante. On compte, non pas les points fossilifères, mais les fossiles recueillis dans ce puissant ensemble. A. Favre1, d’abord, et G. Maillard2, plus récemment, en ont donné d’excellentes descriptions. On a une série de collines déformés arrondies, comme toutes les collines Molassiques recouvertes de dépôts glaciaires avec blocs erratiques, dont le point le plus élevé (Gros Fayard) est à 1164 mètres d’altitude. Le longdu Salève, on voit, tout à fait à la base de cette forma- tion, les grès marins etpoudingues signalés depuis longtemps par A. Favre (route d’Etrembières à Mornex ; entre Mornex et Essert), ils ont une épaisseur d’une cinquantaine de mètres; les fossiles qu’on y a recueillis sont malheureusement peu déterminables; ce sontdes Cérithes, des Naticeset quelques bivalves; un Gérithe, à trois rangées de tubercules, me paraît se rapporter au Potarnides margciritaceus Lmk. L’âge de ces dépôts serait donc Aquitanien inférieur et je les rapproche des couches saumâtres qui existent dans le prolongement Nord du plateau des Bornes, au delà du lac Léman, dans le plateau du Jorat. L’existence de ces dépôts sau- mâtres, à la base de l’Aquitanien, s’explique d’ailleurs tout natu- rellement, par suite du soulèvement progressif qui s’est produit dans la région du Génevois ; ce mouvement a rejeté peu à peu la mer vers l'Ouest. Les eaux à la fin du Tongrien n’occupaient plus que la partie tout à fait occidentale des Bauges (vallée d’Aillon, des Déserts et de Leschaux) et la région des Bornes. Elles se sont peu à peu dessalées, par suite du retrait de la mer vers le Nord-Est; des lagunes saumâtres ont pu, dans la région du Salève, comme plus au Nord, dans la région du Jorat Suisse, persister jusqu’aux débuts de l’Aquitanien. Les couches, qui sont superposées aux précédentes, sont consti- tuées par un grès marneux plus ou moins micacé, dont certains bancs sont beaucoup plus durs et font saillie. Les couches infé- 1 A. Favre, loc. cit., t. I. 2 G. Maillard, Note sur diverses régions de la feuille d’Annecy (Bull, des services de la Carte Ge'ol. de la France, n ° 22, 1891). SYNCLINAL DES DESERTS 63 rieures sont formées de grès Molassique verdâtre, alternant souvent avec des marnes rouges et oeillées, comme on le voit dans le lit du Viaison, près des usines électriques des chemins de fer du Salève (les bancs de Molasse y sont activement exploités) ou, dans le lit du Fier, au pont de Cran, près d’Annecy. Du côté des Alpes, vers Thorens, ces couches inférieures présentent un bancde lignite intercalé de 30 centimètres d’épaisseur, anciennement exploité. Les couches marneuses, avoisinant le lignite, ont fourni de belles empreintes de fougères que O. Heer 1 a déterminées comme : Aspidium dalmaticum, A. Br. sp. Aspidium lignitum, Gieb sp. Arundo Gaepperti, Heer sp. avec des feuilles de Dicotylédones et des radicelles. Cela rattache ces couches à celles de la Paudèze et de Monod, dans le Jorat Suisse. Les couches supérieures, qui occupent surtout le centre du synclinal, ressemblent beaucoup comme aspect aux couches de la Molasse grise des environs de Lausanne 1 2. La sépa- ration précise est d’ailleurs impossible à faire, étant donnée l’absence presque complète de documents paléontologiques. Les seuls restes fossiles connus dans ces couches, outre les plantes que je viens de citer, sont: Hélix Ramondi, Brgt qui a été trouvé à Villy-le-Pelloux, à Groisy-en- Bornes, au Pont de-Cran (Maillard). Hélix Lausannensis, Dumont et de Mortillet (Pont-de-Cran). Limnea urceolata, Sandberger (Pont-de-Cran). Ges deux dernières formes, dans la Plaine Suisse, sont surtout Langhiennes. A Marnex, dans les grès plus ou moins marneux de la base, on a signalé : 1 O. Heer, Recherches sur la végétation et le climat du pays tertiaire, Trad. de Ch. Gaudin, p. 68. * Sur la feuille géologique (1/80000) d’Annecy, elles ont été rangées, en effet, dans le Burdigalien inferieur msi. 64 PERIODE PRENUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE Sabal hœringiana, Ung. Daphnogene lanceolata, Ung. Poracites ssp, Heer. Myrica Studeri, Heer. Pinus Lardyanus, Heer. Au Nord de la plaine de l’Arve, les dépôts Quaternaires ne lais- sent plus affleurer que quelques lambeaux de terrains Tertiaires, dont le plus intéressant est celui de la colline de Bissy. On peut, en suivant le cours du ruisseau qui coupe cette colline, constater, de la façon la plus nette, l'existence, dans les couches de grès Molas- siques, alternant avec des bancs marneux, d’un pli anticlinal qui n’est autre que la continuation septentrionale du pli du Salève. Nulle part on ne retrouve de sédiments marins Miocènes. Ces dépôts de la partie centrale et occidentale du synclinal du Plateau des Bornes qui, se relient si naturellement au Sud et à l’Est, aux couches Nnmmulitiqnes, sont aussi en relation intime, à l’Ouest, avec les dépôts Molassiques des environs de Genève et de la vallée de Rumilly, et au Nord, avec les dépôts Tertiaires supé- rieurs de la Plaine Suisse, dont je m’occuperai un peu plus loin. Sur la bordure orientale, au niveau de la vallée de l’Arve, les plis duGénevois ont subi une inflexion qui les fait se diriger vers le N.-E. Interrompus au niveau de la vallée de l’Arve, ou dispa- raissant sous une couverture de flysch, ils se prolongent au delà, comme l’a récemment montré M. Haug-, dans son remarquable travail sur les hautes chaînes calcaires de la Savoie1, par les plis extérieurs et les plis de la Dent du Midi. Au delà de la vallée du Rhône, on les retrouve dans le massif de la Dent de Mordes. Au Nord de la vallée de l’Arve, existe un massif montagneux (Préalpes du Chablais et de Suisse), tout différent des chaînes du Génevois et formant une zone tectonique distincte, dont l'indépen- dance a été mise en évidence par un grand nombre d’auteurs, depuis de Saussure) en particulier, dans ces dernières années par M. Schardt et M. Haug), depuis la vallée de l’Arve en France jusqu’au lac de Thoune en Suisse. Quelle que soit l’origine des 1 Hauo, Etudes sur la Tectonique des Hautes chaînes calcaires de la Savoie (Bull, des services de la Carte Géol. de France, n° 47, 1895.) SYNCLINAL DES DESERTS 65 Préalpes, lambeau de recouvrement, suivant M. Sciiardt, ou massif en éventail suivant M. Haug, d’après ce que je viens de dire, pour retrouver plus au Nord des dépôts comparables à ceux de la bordure occidentale des chaînes du Génevois, aux environs d’Annecy, il nous faudra étudier la grande vallée synclinale du val d’Illiez, qui sépare le massif des Préalpes du Ghalbais de celui de la Dent du Midi. L’étude des dépôts tertiaires du val d’Illiez nous révèle, en effet, des faits comparables à ceux que j’ai signalés pour la plaine d’Annecy ou les vallées occidentales des Bauges. Au-dessus du Flysch on a un puissant massif (400 mètres) de grès et de schistes verts et rouges en discordance peu visible. On y a signalé des aiguilles de conifères et Sabul major qui en déterminent parfaitement l’âge Aquilanien inférieur. Pour tous les auteurs, et en dernier lieu pour M. Lugeon, il n’est pas douteux que ces dépôts se rattachent à ceux de la Plaine Suisse. Ce serait une preuve de plus pour admettre la disposition d’un massif en éventail des Préalpes du Ghalbais. Lorsque l’on considère la bordure occidentale des Préalpes, soit dans la région française, soit dans la région vaudoise, les terrains Nummulitiques présentent un faciès tout différent de celui des régions des Bauges ou du Genevois. Le seul fait qui reste constant est la continuité parfaite qui existe entre les dépôts N uni - mulitiques et les dépôts plus récents de l’Aquitanien, comme dans la région d’Annecy. Il y avait donc, bordant les Préalpes et les Hautes- Alpes calcaires de la Savoie, les recouvrant en partie et s’étendant plus ou moins à l’Ouest, un vaste bassin, d’abord marin, puis lacustre. Il occupait un vaste géosynclinal subalpin, depuis le sud d’Annecy jusque dans la Suisse orientale et le bassin du Danube. Dans la région que jAtudie en ce moment, il existe en avant des Préalpes proprement dites, mais se rattachant cependant à ce massif, une première chaîne constituée surtout par les dépôts ter- tiaires. Ge sont les Yoirons, dont l’étude est particulièrement inté- ressante. Univ. de Lyon. — Douxami. 66 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE Les Voirons. — Les différentes opinions émises au sujet de ces chaînes ont été résumées par Alph. Favre L Cet auteur a considéré les Voirons comme formés par un double pli anti- clinal, dont la partie supérieure érodée laisse affleurer les couches Néocomiennes et même les couches Jurassiques. La coupe qu’il en a donnée (PL IV, fig. 4), a été reproduite, au moment de la réunion de la Société géologique de Genève et admise, par M. Eu Favre, dans la note sur la structure géolo- gique des Voirons2, publiée au moment de cette réunion. Dans la feuille géologique (1/80000) de Thonon, parue en 1894, M. Rene- vier distingue dans les couches jusqu'alors rapportées au Num- mulitique alpin de M. A. Favre), des couches d'aspect plus ou moins Molassique et des poudingues qu’il rapporte à l’Aquitanien. Cette dernière interprétation ne me paraît pas concorder avec ce que l’on peut observer sur un grand nombre de points de la chaîne des Voirons où la succession des couches données par A. Favre se retrouve, pour ainsi dire, trait pour trait. En particulier, en remontant le ravin qui se trouve immédiate- ment après la station de Saint-Cergues, sous l’erratique qui est encore plus développé que ne l’indique la carte géologique, et qui donne naissance à de nombreuses formations tuffacées le long des pentes, on voit affleurer une série de couches Molassiques formées degrés grisâtres, bleuâtres, alternant avec des bancs de marnes rouges et noires; la marne rouge renferme de nombreuses inter- calations de gypse et de calcite. Les bancs de grès grisâtre sont activement exploités dans de nombreuses carrières ; ils consti- tuent ce que Alph. Favre appelait la Molasse de la base des Voi - rons. Les couches plongent assez fortement vers l’Est ; à mesure qu’on s’avance vers l’Ouest, on voit ces bancs de grès marneux rougeâtre et de marnes œillées devenir subhorizontales et même 1 A.- Favre, loc. cit., t. I, p. 413 et suivantes. Il faut se rapporter à cet auteur pour toute la bibliographie antérieure à lui. 2 E. Favre, Note sur la structure géolog, des Voirons, Bull. Soc. Géolog., 3« série, t. III, p. 690. * LES VOIRONS 67 plonger vers l’Ouest, vers la plaine ; cela prouve l’existence d’un anticlinal1 dans ces couches qui sont nettement Aquita- niennes. Pour Em. Favre , cet anticlinal Molassique, plus oriental que celui du Salève, correspondrait au second anticlinal de la Molasse constaté par Kaufmann, aux environs de Zurich et de Lucerne. En continuant de monter par le ravin, on constate, au milieu de ces couches qui sont fortement plissées, de nombreuses fractures parallèles à la chaîne, accompagnées de glissements des couches, bien visibles par exemple, dans le ravin situé sous Arrniaz. Puis, on voit s’intercaler des bancs de grès plus fins au milieu de bancs degrés verdâtres, alternant avec des bancs de marnes qui pré- sentent de petits amas de jayets. Ces bancs sont fortement micacés et offrent de véritables lits charbonneux avec débris de plantes. Ce faciès rappelle complètement celui des dépôts que j’ai étudiés un peu plus haut, près d’Annecy -le-Vieux, aux Barattes. Ces couches correspondent par conséquent aux termes supérieurs du terrain Nummulitique des Bauges. Ce faciès se retrouve d’ailleurs plus au sud, dans le Mont Vuant et aux environs de Bonne. Il y a sur ce versant occidental, passage sans changement brusque, de la Molasse Aquitanienne au macigno alpin (flysch), sans qu’il soit possible de séparer ces deux formations. A mesure que l’on s’élève, on voit ces couches devenir un peu plus schisteuses, tout en restant toujours gréseuses et micacées. C'est au milieu de ces couches que jaillit le petit anticlinal Néocomien des Hivernages. Ce Néocomien présente un faciès alpin Provençal, différant com- plètement de celui du Néocomien du Salève. Au delà des Hiver- nages, on voit ensuite réapparaître des grès fins, micacés, mar- neux, schistoïdes, alternant avec des grès plus durs, calcaires qui, le long de la nouvelle route allant vers chez Hominal, mon- trent des bancs plus grossiers, avec petits cailloux cristallins. Il existe même déjà deux bancs de poudingues avec des cailloux granitiques altérés, et des marnes gréseuses facilement délitables 1 Ce que l'on voit encore également un peu plus au Sud. 68 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE au contact de l’air et contenant de nombreux débris de plantes peu déterminables. On rencontre ensuite les affleurements classiques du Malm et du Néocomien de chez Hominal. Au delà, en montant vers le Pralaire, on voit s’intercaler dans le flysch des calcaires schistoïdes identiques à ceux des Bauges, avec de nombreux fucoïdes ( Cliondrites Targioni , var. arbuscula Fisch-Ooster, Ch. longipes). Au-dessus, viennent des grès plus ou moins gros- siers, avec nombreux galets alpins (quartz rose, granité) et con- tenant toujours des intercalations marneuses. Ces grès forment l’abrupt des Voirons ; ils passent au sommet à un poudingue gros - sier dont les éléments peuvent atteindre la grosseur de la tète C’est ce poudingue qui a été assimilé par M. Renevier au pou- dingue Aquitanien de Lavaux. Ces deux formations différent essen- tiellement et par la nature des éléments et par l’aspect général ; le poudingue de Lavaux est surtout calcaire, les éléments cristallins y sont extrêmement rares, alors que dans le poudingue des Voi- rons, les éléments cristallins sont prédominants à tel point que les sables résultant de la décomposition des grès grossiers constituent une véritable arène granitique. Les poudingues de Lavaux alter- nent avec des marnes à plantes Aquitaniennes (moulin Monod, Rivaz); dans les parties gréseuses de ces pondingues, aux Voi- rons, on trouve des Nummulites. Ces grès constituent tout le versant N.-W. et S.-E. des Voirons, présentant une composition un peu variable. Aux chalets des Voirons, les intercalations mar- neuses y sont fréquentes, et vers Bons, des grès grossiers, for- mant des couches inclinées vers l’Est, présentent de nombreux galets de granité rouge. En se dirigeant vers Clavel, on voit s’intercaler, vers Bons, des grès blanchâtres et quelques lits marneux rougeâtres. De la Covaz à Lully, on marche constam- ment sur ces couches gréso-marneuses du flysch ; sur elles, on voit reposer, au coi de Couz, le Trias (cale à gypse et cargneules) par suite d’un recouvrement. Le mont Vuant (982 mètres), un peu au Sud et à l’Est des Voi- rons, n’est que la continuation de cette chaîne. En suivant le sentier qui va à Saint-André, on voit de nombreux bancs d’un conglomé- LES VOIRONS 69 rat polygénique, à éléments très variés, identiques à ceux des Voirons ; on y trouve des blocs de carbonifère alpin très volumi- neux, ayant fourni des restes de plantes houillères identiques à celles de Taninges. Les couches alternent, à la partie supérieure de la colline, avec des bancs de calcaire schistoïde à cassure esquil- leuse, ressemblant à s’y méprendre aux couches du col de Planpa- lais dans les Bauges. Ces calcaires sont exploités comme dalles et l’arène qui provient de la décomposition à l’air du poudingue, comme sables que l’on emploie dans les constructions. A l’Est du mont Vuant, on voit reposer, comme au col de Gouz, par suite d’un pli faille, le Trias sur le Tertiaire. La coupe générale est donc la suivante (fig. 11). Fig. 11. — Les Voirons. T Trias ; N Néocomien ;M Malm ; 3 Brèche polygénique; 4 Flysch feuilleté ; 5 Fausse Molasse; 6 Aquitanien. La composition du Nummulitique des Voirons diffère donc de celle du terrain Nummulitique des Bauges ou des chaînes du Gene- vois. On n’y connaît pas, en effet, comme dans tout le Chablais, de vrais calcaires Nummulitiques. Les calcaires schistoïdes bleuâ- tres y sont cependant représentés et correspondraient aux couches les plus inférieures du Nummulitique. Enfin l’on voit s’intercaler, soit au milieu de ces couches inférieures, soit au milieu des couches micacées et gréseuses qui passent par transition insensible aux couches Aquitaniennes, de puissantes couches de poudingues poly- géniques. M. Sarrasin1, dans une étude récente, fort intéressante, 1 Ch. Sarrasin, De l’origine des roches exotiques du Flysch, Arch. des sc. phys. et natur. Genève , 3° période, t. XXXI, 1894. 70 PÉRIODE PRÉNÜMMULITIQUE ET NUMMÜLITIQUE sur les roches exotiques du flysch, a reconnu, dans les roches qui renferment les conglomérats des Voirons : Granulite avec orthose rouge très abondante. Granité altéré. Porphyre globulaire rouge. Granulite très riche en biotite et orthoses porphyroïdes roses. Microgranulites à amphibole. Microgranulite graphique rose. Porphyre globulaire très acide. — — de couleur noire. Gneiss à gros cristaux d’orthose rose. Roche détritique métamorphosée. Grès noir ressoudé (Biotite, magnétite, parties charbonneuses et surtout quartz). Série de calcaires du Malm, du Néocomien et de l’Urgonien, provenant des chaînes des Alpes calcaires avoisinantes. Pour M. Sarrasin, il y a une analogie extrêmement frappante, entre les roches des poudingues des Voirons et celles si caracté- ristiques de la région de Lugano et de Baveno. Vers le Nord, lesVoirons se prolongent par les affleurements de grès Molassique du couvent de Roveréaz, de la colline du château de Rochette et des Allinges, dépôts ballottés entre le flysch gré- seux et l’Aquitanien. Aux Allinges, il existe une petite couche con- tenant des fragments d’ambre (succin) jaune ou brun. Le faciès rappelle celui des grès Aquitaniens du reste de la plaine, mais la présence de traces, attribuées à Y Helminthoïdea crassa Schafh, tendrait à les rapporter aux couches supérieures du flysch. Les Pléiades. La Berra. Habkern. — Au nord du lac Léman, la prolongation des Voirons se retrouve dans la chaîne des Pléiades. Le long du bord externe de ces chaînes, l’on constate, comme l’a montré M. Hans Schardt1 , la super- position directe à l’Aquitanien de la Molasse rouge de Vevey, des schistes feuilletés et des grès fins du flysch. La zone externe de flysch, qui constitue les Voirons et le mont Vuant, se retrouve 1 H. Schardt, Coup d’œil sut la structure géologique des environs de Montreux (Bull. Soc. vaud. sc. nat., XXIX, n° 112,1893). NUMMULITIQUE DES ALPES CALCAIRES DU GENEVOIS 71 également dans les Préalpes de Suisse, constituant la région de la Berra et du Stockberg; on la retrouve au Gurnigel, où, sur la mo- lasse renversée, on a d’abord des grès (grès de Gurnigel), du flysch schisteux, formant avec des marnes noires et des calcaires foncés un synclinal couché. Les bancs de poudingue se trouvent près de la base des grès de Gurnigel, et enfin, au Nord-Est du lac de Thoune, dans le synclinal de Habkern et toute la zone externe du flysch. La coupe générale du Nummulitique est toujours la même 1 2 ; les roches exotiques des poudingues, qui existent surtout dans les couches supérieures du flysch (ce que j’ai appelé le flysch gréseux) sont les mêmes et présentent l’analogie la plus frappante avec celles de la région de Lugano, Baveno, Prédazzo. J’ai insisté à dessein sur la composition de cette zone externe du flysch des Préalpes qui se continue si nettement au delà du lac de Thoune, parce que cela va permettre de comprendre beaucoup plus facilement le Nummulitique de la région du Genevois, qui représente un type intermédiaire entre le Nummulitique des Bauges et celui des Voirons. Nummulitique des Alpes calcaires du Genevois. — Avant de comparer les couches tertiaires des Bauges avec celles du reste des Alpes calcaires de Savoie, il importe d’abord de bien préciser la nature de ces dépôts, ainsi que leur succession exacte et l’âge qu’il faut leur attribuer, d’après les données stratigraphiques et paléontologiques. Des nombreuses coupes que j’ai données plus haut, il résulte la succession suivante de bas en haut : 1° Conglomérat de base, à éléments calcaires, provenant des ter- rains avoisinants, connu au Châtelard, à Entrevernes, dans la vallée du Charbon ; je l’ai signalé encore plus à l’Est, dans la vallée des Aillons, surtout le versant oriental1 ; on le retrouve également dans les chaînes du Genevois au Nord du lac d’Annecy, auBrison, à la montagne des Roches-Vieilles, à l’Est du synclinal de Ser- 1 U y a seulement à signaler quelques intercalations de calcaire Nummulitique. 2 Je serais assez tenté de rapporter à ce niveau le conglomérat inférieur du plateau des Déserts, également à éléments calcaires, où l'on a signalé de grandes formes de Nummu- lites. PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE 72 raval, au col du Grand-Bornand. au chalet de l’Essex, au Désert de Platé ; d'une manière assez constante sur le pourtour de la for- mation Nummulitique. On peut le suivre également dans le massif de la Dent de Mordes, où il a été signalé par MM. Hollande et Renevier, puis dans les Alpes Bernoises. Ces couches présentent toujours les mêmes formes de Nummulites : Num. perforata, Lam. type. Orthophragmina. de grande taille. Nam. aturica. Joly et Leym \ des Oursins et des moules de Gastro- Num, Lucasana, Defrance, podes. ces couches sont nettement en transgression sur les dépôts sous- jacents. MM. Munier Chalmas et de Lapparent1 2, ainsi queM. E. Haug, rapportent ces couches au Lutétien supérieur (e3, du service delà Carte géologique de France). 2° Au-dessus, on trouve soit du flysch : calcaires schistoïdes à écailles de poissons. C’est un faciès du flysch des géologues suisses beaucoup plus calcaire que celui que nous trouverons à la partie supérieure de la formation. On trouve fréquemment, soit interca- lées au milieu de ces assises (Montagne du Charbon), soit directe- ment sur le conglomérat de base (Entrevernes, Châtelard), des couches saumâtres : marnes noires et calcaires noirs à Cérithes, dont les formes caractéristiques sont : 1 Les Nummulites des Bauges ont été étudiées par de la Harpe (loc. cit ., 1879), en particulier celles du Châtelard; la grande forme avait été rapportée par lui à une variété de la N. perforata , qu’il avait désignée sous le nom de A\ perforata , var Baugensis et dont il signalait les affinités avec la N. Brongniarti de Ronca et avec la N.lcevigata du Bassin de Paris. L’existence de granulations sur sa surface et sur les filets, une forme déprimée et un bord tranchant étaient ses caractères distinctifs. Conservant quelques doutes sur la détermination de de la Harpe, j'ai envoyé mes échantillons à M. Ficheur d’Alger, qui a bien voulu me les déterminer ; il a comt.té que c’était une des nombreuses variétés de la Num. aturica , si reconnaissable à ses filets cloisonnés subréticulés (groupe de la N. Lœvigata). Cette forme caractérise en Algérie la base du Lutétien; la N. perforata caractériserait le Bartonien. Je me propose d'ailleurs, dans un travail en préparation, de revenir sur les déterminations qui ont été faites des Nummulites de la Savoie et des Alpes occidentales. 2 De Lapparent et Munier-Cualmas, Note sur la nomenclature des terrains sédi mentaires (B. S. G. de France , 3e série, t. XXI, p. 438). 3 E. Haug, loc. cit., Bull. n° 47, p. 26. NUMMULITIQUE DES ALPES CALCAIRES DU GENEVOIS 73 Cerithium plicatum, Brug. Cerith. Diaboli, Brongt. Cytherea Villanovae, Desh. CyrenaConvexa, Brongt. sp. Cyrena alpina, d’Orb. sp. Cardium granulosum,Lmk, etc. Immédiatement au-dessus, et en relations intimes avec ce niveau saumâtre, se trouve un lit de calcaires roux à Polypiers et à Naiices (Natica vapincana) avec la plupart des formes précé- dentes ; il constitue un premier niveau à Natices des Bauges. (Arclosan, vallée des Déserts, vallée d’Entrevernes). Au-dessus de ces couches, lorsqu’elles existent, ou bien intercalées dans le flysch calcaire et pouvant même reposer sur le conglomérat de base, se trouvent des couches de calcaires gréseux généralement jaunâtres, constituant le second niveau à Nummulites des Bauges : ce sont les couches que j’ai désignées sous le nom de couches à petites Nummilites1 . Les formes de Nummulites qui y ont été signa- lées, sont les suivantes : Numm. striata, d’Orb. Numm, Guettardi, d’Arch. Numm. Ramondi, Defr. Numm. Boucheri, de la Harpe. Numm. Variolaria, Sow. J’ai signalé en outre, dans ces couches, un certain nombre de formes de Pecten et de Cardium peu caractéristiques au point de vue de l’âge; on trouve en effet des formes de l’Eocène (P.operus), des formes signalées à Etampes (P. Pictus). Ces couches représen- tent, pour les auteurs que j’ai cités plus haut, 1 e Priabonien. C’est souvent par cet ensemble ou seulement par l’un de ces termes (flysch calcaire, couches saumâtres, grès à petites Nummulites) que débute le système Nummulitique dans les Alpes calcaires de la Savoie. 3° Flysch supérieur aux calcaires Nummulitiques. C’est le niveau le plus connu du Nummulitique delà Savoie; c'est ce qui corres- pond très exactement au flysch des différents auteurs qui se sont occupés de cette région, ou au Macigno alpin de A. Favre. Il pré- 1 Dans la note que M. Lugeon et moi avons publiée sur le tertiaire des Bauges, nous avons insisté sur ce fait que ces couches de calcaire gréseux à petites Nummulites, ains1 que les couches saumâtres, ne constituaient que des faciès latéraux du Flysch calcaire pouvant exister ou non suivant les points etoccupant un niveau un peu variable. 74 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMUL1TIQUE sente parfois, surtout à la base, des bancs de calcaire feuilleté ou à cassure esquilleuse (Voirons, Planpalais, Aillon) de couleur bleue, blanchâtre à la surface, contenant des restes de Poissons, de nombreuses écailles, comme les couches inférieures (ce faciès rap- pelle beaucoup celui des schistes à Meletta du Bassin de Vienne) et des fucoïdes identiques à ceux que l’on rencontre plus bas; je citerai parmi les formes les plus communes : Chondrites Targioni, A. Brgt. Chondrites intricatus, A, Brgt. Chondrites furcatus, A. Brgt. de nombreux débris de plantes charbonnées, quelques empreintes de coquilles et des traces méandréiformes d’annélides. Les couches gréseuses prédominent le plus souvent, se char- geant de mica, à mesure qu’on s’élève dans la série, tout en res- tant toujours plus ou moins schisteuses L Un faciès latéral de ces assises est représenté par les couches désignées sous le nom de Grès à Cardita Laurae , Nystia Duchasteli, du Plateau des Déserts qui sont déjà nettement Tongriennes. Ces couches présen- tent déjà à la base, dans la zone de Üysch des Voirons, des inter- calations de poudingues polygéniques bien développées, surtout dans les couches supérieures plus gréseuses. 4° Grès gris bleuâtre avec quelques intercalations marneuses (fausse molasse de M. Hollande) que j’ai désignés sous le nom de Grès supérieurs ou Grès à Nucules , rappelant les nombreux moules d’un petit bivalve ( Cyrèhe , Nucule) que l’on trouve en abondance dans ces grès, ils contiennent, en outre, de nombrenx débris de plantes, quelquefois en assez grande quantité pour former de petits lits ligniteux. Ges grès d’origine saumâtre, qui terminent la série Nummulitique en Savoie, sont de la fin du Ton- grien ; ils sont bien développés dans la région occidentale des Bauges (Aillon, les Déserts). On les retrouve également dans la 1 Les synclinaux du Charlon et d'Entrevernes offrent de magnifiques exemples de cette transformation ; les écailles de poissons existent encore dans ces couches supérieures. AGE DE CES DIFFÉRENTS DEPOTS 75 zone occidentale du flysch, vers les Barattes, à An necy-le- Vieux, dans les Voirons et sans doute aussi dans les couches supérieures du val d’Illiez. Partout, ils passent insensiblement aux couches inférieures de l’Aquitanien. J'ai déjà insisté sur ce fait qu’ils n’existent que dans la région occidentale (géosynclinal Nummuli- tique), par suite du soulèvement progressif E.-W. qui s’est mani- festé dans toute cette région. Age de ces différents dépôts. — Gomme l’a fait remarquer avec raison M. Haug, d’après les travaux de Tournouer sur les couches Nummulitiques des Basses- Alpes, l’assimilation des cou- ches à Cérithes des Alpes avec celles de la Granella dans le Vicentin et des couches à petites Nummulites striées ou à Natica Ivapincana représentant l’ensemble du Priabonien, c’est-à-dire avec l’Eocène supérieur, n’est plus douteuse h Les couches de Flysch qui sont associées à ces dépôts ou qui leur sont supé - rieures appartiennent à l’Éocène supérieur ou Tongrien. Cette détermination est d’ailleurs nettement confirmée par la présence des couches Tongriennes du plateau des Déserts, et c’est avec raison qu’on les a notées e1 * 3 m sur les feuilles géologiques de Thonon et d’Annecy. Quant aux couches inférieures, par lesquelles débute le Nummu- litique, dans le Massif des Bauges (couches à N.perforata , N. at u- rica et N. Lucasana ), leur âge précis est encore à déterminer. La Num. perforata typique et la forme à grande loge, N. Luca- sana, qui l’accompagne dans presque tous ses gisements, sont caractéristiques du Lutétien supérieur; cependant en Hongrie et en Dalmatie, cette forme se continue jusque dans le Bartonien. La Num. aturica caractérise, en Algérie, surtout la partie infé- rieure et moyenne de l’Eocène moyen. La continuité parfaite qui 1 Le faciès saumâtre à Cérithes peut d’ailleurs exister à un niveau quelconque du Priabonien, dépendant de la configuration du fond du géosynclinal Nummulitique. Il peut par conséquent exister soit en dessous des calcaires de Num striata, comme c'est le cas en général, soit en dessus comme cela arrive à Saint-Bonnet et ne caractérise pas tou- jours l’extrême base du Priabonien. C’est aussi l’opinion de M. P.Lory, sur les couches à Nummulites du Dévoluy et des régions voisines. ( B . S. G. de France, 3' série, t. XXIV, p. 18.) 76 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE existe entre les différentes couches Nummulitiques des Bauges, me porte à considérer ces termes inférieurs comme représentant la partie supérieure de l’Eocène moyen, c’est-à-dire le Bartonien du Bassin de Paris. La classification des terrains Nummulitiques des Bauges serait donc, d’après cela, la suivante : Bartonien : Priabonien: Tongrien : Tongr . sup. ou A quit. inf. : Aquitan. : Conglomérat et calcaire à Num. perforata, N. aturica, N. Luca- sana (couches à grandes Nummulites, 1er niveau à Num- mulites). Flysch calcaire, calcaire schistoïde à écailles de poissons avec intercalations de : a) Couches saumâtres à Cerithium Diaboli, Cyrena convexa> Cytheria Villanovae. b) Calcaire à polypiers et à Natica vapincana. c) Calcaire et grés à petites Nummulites striées, avec N. striata, N. variolaria, N. Boucheri, N. Guettardi et des Pectens (2e niveau à Nummulites 1). Flysch gréseux à écailles de poissons et fucoïdes avec niveau calcaire à Natica aff. crassatiaa des Déserts 2 et Poudin- gues des Yoirons. Grès supérieurs (fausse molasse), et à petits Lamellibran- ches (Cyrènes et Nucules), passant à: Molasses gréseuses avec lits marneux bariolés de la vallée des Aillons, des Déserts et de la base des Voirons. La partie supérieure de ces grès pouvant d’ailleurs déjà appar- tenir, dans le Plateau des Bornes, comme je l’ai indiqué plus haut, au Miocène inférieur. Région du Genevois. — La succession précédente se retrouve en un certain nombre de points, au Nord du lac d’An- necy. Les couches inférieures du Nummulitique n’ont été signalées que dans un petit nombre de localités; la coupe du chalet del’Essex, « 1 En général, ces calcaires et grès à petites Nummulites font rarement défaut et c’est souvent par ces couches que débute le Nummulitique, 2 L'âge exact de ces grès du Flysch y est évidemment impossible à déterminer. Il commence certainement dès le Priabonien et se continue très haut, jusque dans les grés supérieurs; c’est-à-dire pendant presque tout le Tongrien. REGION DU GENEVOIS 11 près du Désert de Platé nous donne une succession identique à celle des Bauges; on a de bas en haut : 1° Gault, reposant sur l’Urgonien. 2° Calcaires sénoniens. 3° Poudingue calcaire, 15 mètres (couches à grandes Nummulites). 4° Calcaire schisteux à Orbitolites sella, 15 mètres (d’après A. Favre). 5° Calcaire noir, marneux à Cerithes, 20 mètres. 6° Calcaire blanc à N. Ramondi. 7« Calcaire noir schisteux (Flysch calcaire ), 100 mètres. 8° Macigno alpin, Flysch gréseux (avec Grès de Taveyannaz. La couche saumâtre à Gerithium Dictboli est connue au con- traire dans un grand nombre de points; la série Nummulitique débute en effet souvent par ces assises qui présentent presque partout un niveau charbonneux. C’est elle qui constitue le niveau à lignites de Pernant (commune d’ Arraches). Sur la Craie, on a directement la couche à charbon, surmontée par des couches cal- caires à petites Nummulites, puis des grès du Flysch, avec interca- lation de grès de Taveyanna. Le niveau inférieur a fourni les formes suivantes : Corbula striata, Lam. Cytberea Villanovae, Desh. Cyth. incrassata, Sow. Cyrena convexa, Heb. et Ren. Cyrena Studeri, Desh. Pecten tripartitus, Desh. Natica vapincana, Brgt.(N. augustata Grat des auteurs). N. Studeri, Desh. Fusus subcarinatus, Lam. Fusus polygonatus, Brgt. Ghemnitzia lactea, Brug. Gerithium plicatum, Brug. Cerith. elegans, Desh, Cerith. Castellini, Brong, Cerith. conulus, Brug. Murex sp. ¥enus sp. Cette assise existe également au Petit Bornand, accompagnée de calcaires noirs ou grès fétides ; au col de Teine surmontée par des couches de calcaire et de grès à Num. Ramondi et -N. striata , au chalet du crêt de Léba, près de Thorens. Cette couche existe également dans tout le désert de Platé (chalet de l’Essex, à la Tète à l’âne). Cette zone présente partout la même composition et la même série de formes caractéristiques. La collection de A. Favre, 78 PÉRIODE PRÊN ÜMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE actuellement au musée de Genève, renferme une série assez nom- breuse d’échantillons recueillis au Désert de Platé. Grâce à l'obli- geance de M. Redot, directeur du musée d'Histoire naturelle de Genève, j’ai pu étudier ces échantillons et j’y ai reconnu : Natica vapincana d’Orbigny (présentant beaucoup d’affinités avec la N. augus tata Grateloup, avec laquelle d’ailleurs elle a été souvent confonduee (commune). Natica aff. Picteti Heb. et Ren., échantillons en assez mauvais état, mais parfaitement reconnaissables (rare). Natica Studeri, Queenstedt (N. Parisiensis Desh.) (commune). Cerithinmplicatum, Brug. var. alpina (très commune), complètement identique aux échantillons de Barrême. Cerithium hexagonum. Lam. (rare). Cerithium trochleare var. conjunctum, Desh. (assez rare). Cerithium Weinkauffi, Tournouer, extrêmement abondante ; c’est de beaucoup la forme la plus commune. Cerithium Vulcani, Brgt. (rare). Cerithiun trochleare var. Diaboli, Brgt. (commun). Pleurotoma dentata, Lam. (très rare). Fusus unicarinatus, Desh. (très rare). Fusas subcarinatus, Grateloup (Polygonatus Brgt.). Turitellaaff. Imbricataria, Lam. 1 échantillon de grande taille assez usé, mais cependant bien caractéristique. Présente également quelques affinités aux T. strangulata de Gaas. Pecten aff. multistriatus, Desh. (i échantillon). Cardium granulosum, Lmk. (très commun), Cytherea Villanovae, Lmk. (assez commun). CythereaatF. trigonella (moules internes d’assez grande taille). Cytherea aff. incrassata, Desh. (1 échantillon). Cyrena aff. alpina, Heb. et Ren. (1 échantillon). Coralliophaga alpina, Heb. et Ren. (La charnière caractéristique est bien visible sur un certain nombre d’échantillons). Ostrea cyathula, Lamk. (même variété qu’à Barrême assez fortement plissée). Cidaridé. Débris de petits Spongiaires et Orbitolites sp. 1 1 La coupe générale du Désert de Platé, où les couches Tertiaires sont sensiblement horizontales, est la suivante : 1° Conglomérat à cailloux calcaires de Sénonien et Gault (Tète à Tàne Pte de Platé); 2° Schistes gréseux brun foncé, noirs, où l’on recueille les fossiles que je viens de- RÉGION DU GENEVOIS 79 Au-dessus de ces couches saumâtres du niveau de la Granella, on rencontre partout les calcaires plus ou moins gréseux à petites Nummulites. Ces calcaires, comme je l’ai indiqué plus haut, for- ment souvent la base de la série Nummulitique. En dehors des formes que j’ai citées dans les Bauges, je signalerai encore Y Echi- nant us scutella Brg (fossile du Vicentin) qui accompagne le Pecten pictus Goldf, à Thônes. Dans le Flysch qui vient au-dessus, on peut distinguer un niveau inférieur, plus calcaire et un niveau supérieur gréseux, dont certains bancs ont l’aspect de vraies Mo- lasses Aquitaniennes ou Miocènes. Ce Flysch existe parfois seul sans intercalations de calcaires ou de schistes à Nummulites (plis entre Saint-Pierre et Entremont, synclinal de Serraval) et reposent en transgression très nette sur les terrains secondaires (Sénonien, Gault, Urgonien, Jurassique supérieur). C’est dans le massif du Genevois que l’on voit apparaître, inter- calée dans le Flysch, la formation connue sous le nom de grès de Taveyannaz. Dans les points où je l’ai examinée (Serraval, Désert de Platé) je l’ai trouvée, intercalée à tous les niveaux du Flysch : sur le calcaire Nummulitique (Châtillon) ou à la base de la forma- tion (lac de Gers, Arâches) et avec tous les passages latéraux aux grès typiques du Flysch1. L’origine éruptive de ces formations est aujourd’hui généralement admise. Les éléments qui composent le grès de Taveyannaz sont nettement roulés; dans les parties un peu plus grossières, qui passent à un véritable conglomérat (pou- dingue à éléments roulés), on reconnaît facilement dans les roches du grès de Taveyannaz des Andésites et des Labradorites et des élé- citer. Ces fossiles sont tous de couleur noire et légèrement écrasés; 3° Calcaires gris noir sans fossiles ; 4° Calcaires feuilletés à petites Nummulites (N. Ramondi) ; 5° Schistes gréseux à fucoïdes (Flysch), de plus de 200 mètres d’épaisseur, avec inter- calations de grès de Taveyannaz, qui, beaucoup plus résistants que le reste des couchesi forment en général tous les sommets (arête orientale, Pie de Platé, Pt0 d Pecoule). 1 M. Renevier ( Monographie des Hautes- Alpes Vaudoises, p. 428) a également constaté l’alternance des grès de Taveyannaz avec les schistes feuilletés du Flysch: M. de Mortillet (Géologie et Minéralogie de la Savoie , p. 259), signale aussi l’exis- tence de ces grès de Taveyannaz. au-dessus du calcaire Nummulitique, à la base du Flysch. 1 80 PÉRIODE PRÈNUMMULIT1QUE ET NUMMULITIQUE ments de roches plus anciennes (granités, pegmatites quelques micaschistes et amphibolites). MM. L. Duparc et E. Ritter1, dans une publication récente sur celte formation très répandue dans le Flysch qui alterne souvent avec ce dernier auquel elle passe latéralement d’une manière insensible, et présente des faciès rappelant ceux de certains grès et quartzites du Flysch, ont montré que : 1° Ces grès se trouvaient à tous les niveaux du Flysch ; 2° En ce qui concerne l’origine des matériaux de ces grès, ils ne peuvent provenir de volcans situés à proximité des grès en question qui n’en seraient que les tufs : les roches éruptives signa- lées dans ces couches sont, ou postérieures (massif de Chaillol2, ou bien, comme dans les Karpathes (Boikowitz, Banovvet Hrosen- Kau3), se rapportent à des andésites et des labradorites acconi pagnées de tufs éruptifs et tout différents des grès de Taveyaunaz. Ils ont une origine lointaine, comme le prouve la présence d’éléments bien roulés amenés par des courants dans le géosyn- clinal Nummulitique et ne peuvent guère provenir comme les galets des poudingues des Voirons que de la région du Vicentin ou des parties avoisinantes dans les Alpes méridionales. Ces auteurs assimilent complètement ces dépôts au grès mou- cheté du sud du Pelvoux, équivalent latéral du grès d’Annot, du Midi de la France. J’ai constaté, dans un certain nombre des coupes microscopiques de MM. Duparc et Ritter, l’existence de Forami- nifères et même de Nummulites très nettes dans le ciment calcaire ou gréseux qui réunit les éléments des poudingues. On retrouve ces dépôts avec sensiblement les mêmes caractères dans le massif de la Dent du Midi et de la Dent de Mordes, ainsi 1 L. Duparc et E. Ritter, Le grès de Taveyannaz et ses rapports avec les forma- tions du Flysch (Arcli. sc. Phys, et Natur. de Genève, 3e période, t. XXXIII, 1895. Voir p, 5 pour la bibliographie antérieure à ces auteurs.) 2 P. Lory et P. Termier, Sur deux roches éruptives récemment découvertes dans le massif de Chaillol (Hautes-Alpes). (G. R. de la üoc. Géol. de France, 3° série, t. XXIII, n» 10, 1895.) 3 Carl Paul, Die Karpathensandsteine der mahrisbh- ungarisch Grenzgebirge (. Jahr * buch der K » K. geoL Reichsanstalt, XL, Bd. 1890.) REGION DU GENEVOIS 81 que dans la zone des Hautes-Alpes calcaires Vaudoises. Le massif des Diablerets, qui a été étudié d’une façon si précise par M.E. Renevier, nous présente la série à peu près complète depuis l’Eo- cène inférieur représenté par les sables blancs sidérolithiques et minerais de fer, surmontépar les calcaires d’eau douce de l’Eocène moyen à Strophostoma et Plcmorbis pseudoammonius . Ce serait au-dessus que se trouverait le conglomérat calcaire à grandes Num- mulites que M. Renevier place, je crois, beaucoup trop bas. La classification adoptée par M. Renevier impliquerait des mouve - ments bien compliqués de la région pour expliquer cette arrivée de * la mer suivie d’un nouveau départ à l’Éocène moyen. On retrouve ensuite la série Nummulitique des Bauges : 1° Couches saumâtres à p èrithes avec la faune classique1 con- stituant le niveau des Diablerets et qui se retrouve accompagnée d’une couche de lignites comme dans la Suisse orientale, au Titlis à la limite des cantons de Berne et d’Unterwald ; sur les hauteurs de Beatenberg et d’Habkern au nord du lac de Thoune, au Mitta— ghorn près de Friitigen, etc.; 2° Calcaire à petites N ummuli tes (129 espèces fossiles dont Natica vapincana, de nombreuses formes de Nummulites N. striata N. contorta , N. Murchisoni , N. Fichteli , N. intermedia , N. Tournoueri , N. Bouclteri et Operculina aimmonea avec de nombreuses formes d ' Orbitoides ; 3° Schistes feuilletés alternant avec des grès fins (Macigno alpin) et les grès de Taveyannaz, surtout sur le bord septentrional du massif des Diablerets. En avant du massif des Hautes Alpes calcaires se trouve la région des Préalpes où les dépôts Nummulitiques sont également bien développés. J’ai déjà décrit un peu plus haut la zone externe de Flysch ou des Voirons. Plus à l’Est il existe encore d’autres zones indiquées par MM. E. Favre et Schardt : de l’Est à l’Ouest on a : ! 1 La Xatica. crassatina, qui avait été citée à ce niveau par MM. Hébert et Renevifr, comme ce dernier me l’a fait remarquer, n'existe pas, les formes sont beaucoup plus voi- sines de la Xatica vapincana. Univ. de Lyon. — Douxajii. 6 83 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE 1° Zone des Ormonts-Niesen où le Flysch débute toujours par le même horizon marneux-calcaire sur lequel se trouve un puissant ensemble de grès et de brèches à éléments assez tins que surmon- tent les schistes du Flysch gréseux supérieurs (Bandschiefer). j L’étude pétrographique des éléments de la brèche polygénique des Ormonts ou du Niesen a mis en évidence des faits fort impor- tants : cette brèche est surtout développée à la base du Flysch, c’est-à-dire dans des coiu-hes correspondant à ce que j’ai appelé le Flysch calcaire dans les Bauges. Cette brèche est donc, parconsé- ] quent d’âge plus ancien que la brèche des Voirons; les éléments cristallins proviennent tous d’un massif cristallophylien etgraniti - que appartenant à la zone du Mont-Blanc, situé sans doute entre j la Dent du Midi et le massif de l’Aar, recouvert depuis par les plis- j sements. Des courants venus du Sud (comme le montre l’accumula- j tion des blocs les plus volumineux dans la partie méridionale de cette zone) amenaient dans la mer de l’Eocène supérieur, les I matériaux arrachés à cette chaîne. A la fin de cette période, avant le dépôt des couches supérieures du Flysch, le mouvement qui a rejeté la mer plus à l'Ouest' a permis également aux roches de la région de Lugano, alors évidemment beaucoup plus fortement soulevée que le reste de la chaîne, d’arriver jusque dans la zone externe du Flysch ou des Voirons ; 2° Zone des conglomérats de la Mocausa (Rodomont-Huns- rück et Simmenthal) où l’on a une succession analogue à celle des Ormonts avec intercalation de conglomérats calcaires formant un ou deux bancs plus ou moins puissants, bien visibles au-dessous du château d’Oex. Les éléments de ces conglomérats sont des calcaires Jurassiques (Malm) Néocomiens et Crétacés (couches rouges) avec quelques éléments de quartz. Ces éléments proviennent des chaînes calcaires de la région dont le relief était plus ou moins accentué dès la période Nummuli tique. Dans toutes les Préalpes on ne connaît pas de vrais calcaires à Nummulites. Ôn connaît cependant des restes de Nummulites dans la brèche de la région des Ormonts à Ensex : A’. Lucasana. Defr. N. Guettardi, N . Tscliihatchefi , N. Complanata au sommet du REGION DU GENEVOIS 83 Meilleret (N. Variolaria , N. Bouchen1 ). M. E. HAUG2en se basant sur cette absence de calcaire à Nummulites, en conclut que la mer Priabonienne devait passer derrière les Préalpes qui avaient déjà, pour ainsi dire, leur individualité propre à cette épo- que. La présence des formes précédentes, ainsi que la continuité des faciès des dépôts Tertiaires des Préalpes et des Hautes- Alpes montrent que la mer Priabonienne devait occuper au moins la région orientale des Préalpes (zone des Ormonts-Niesen et même peut-être le Simmenthal) . Gomme l’a montré M Renevier3, renvahissement delà mer Nummulitique, venant de l’Est, a été progressif aux Diablerets; les couches deviennent de plus en plus saumâtres à mesure que l’on s’élève dans la série. La mer qui déposait les couches infé- rieures à grandes Nummulites s’étendait à l’Estet au Sud sur tout ce massif des Hautes- Alpes calcaires, des Alpes calcaires de Savoie, jusqu’au parallèle de Chambéry, dans les Bauges. Elle devait, sans doute, à l’époque suivante (Priabonienne) rejoindre en passant derrière le massif de la Chartreuse les dépôts plus méridionaux. La limite orientale est bien indiquée par les conglo - mérats de rivage; la limite occidentale est fort malconnue : le géo- synclinal Nummulitique a été, en effet, soumis à des mouvements E.-W. qui l’ont rejeté de plus en plus à l’Ouest ; les dépôts les plus anciens sont toujours les plus orientaux et les dépôts sont nette- ment en transgression vers l’Ouest quand les plissements posté- rieurs ne les ont pas dérangés. L’envahissement de cette mer a été précédé par les dépôts saumâtres contenant la faune dite des Diablerets. Cette mer a déposé les calcaires à petites Nummulites et les couches du Flysch calcaire avec les intercalations de Brèche polygénique d’origine peu éloignée des Ormonts-Niesen. Un mou- vement plus prononcé l’a rejeté encore plus à l’Ouest (la zone des 1 L’existence de ces restes de foraminifères nous montre bien en même temps l'âge Priabonien de ces couches inférieures du Flysch. 2 E. Haug, loc. cit., p. 18, 1894. 3 E. Renevier, Envahissement graduel de la meréocénique aux Diablerets (Bull. Soc. vaud. sc. Natur., XXVII, p. 41, 1891.) 84 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE Voirons est envahie) en même temps qu’une partie des Alpes méridionales atteint une altitude considérable. La présence à différents niveaux dans le Flvsch, de poudingues et de conglomérats bréchoïdes, toujours d’origine plus ou moins éloignée, a depuis longtemps préoccupé les géologues qui se sont occupés de ces terrains. La présence d’une chaîne cristalline en profondeur (chaîne Vindélicienne) donne lieu à un si grand nombre d’objections qu’elle n’est plus admise par la plupart des géologues. L’hypothèse d’un lambeau de recouvrement venant du Sud sou- tenue par M. Schardt, et plus récemment par M. Lugeon 1 paraît également peu probable, tant par la difficulté d’amorcer ce pli couché que par la continuité bien nette des plis et des faciès dans les points ou les Préalpes passent aux Hautes-Alpes. L’étude stra- tigraphique de la zone de soudure tertiaire des Préalpes s’accorde mal, comme je l’ai montré plus haut, avec celte hypothèse d’un recouvrement : ces diverses objections ont amené M. Haug à considérer les Préalpes comme un immense pli en éventail com- posé. La présence des roches exotiques du Flvsch devient alors très difficile à expliquer autrement que par un transport par les glaciers. M. Renevier1 2, en faisant remarquer que M. Schardt a constaté sur certains blocs de la brèche d’Aigremont des faces planes et comme usées par le frottement, qui rappellent les sur- faces polies par les glaciers, admet également cette hypothèse des glaciers : « Sans y être absolument contraire, dit- il, je n’avais pas, jusqu’ici, adoplé cette théorie; mais elle s’impose maintenant à moi, comme la seule explication rationnelle de ces deux faits patents: l’abondance des blocs anguleux et cristallins d’une part et l’absence de faune malacologique littorale d’autre part. » Dépôts marins du Nord du Jura. — En dehors du synclinal subalpin, on ne connaît guère, dans le reste de la région que j’ai étudiée, de dépôts pouvant se rapporter, d’une façon certaine, soit à l’Éocène supérieur, soit à l'Oligocène, si ce n’est dans le Nord 1 Lugeon, La région de la brèche du Chalbais. Bul. Carte Géolog. de la France, n° 49, 1896. 2 E. Renevier, Alpes Vaudoises, p. 458. REGION DU GENEVOIS 85 du Jura et dans la Basse Alsace dont l’étude offre, au point de vue des terrains Tertiaires en particulier, un intérêt tout spécial par suite de la présence de dépôts marins du Tongrien. Dans la Basse Alsace et le Jura septentrional, les dépôts de l’Eo- cène moyen sont franchement d’eau douce comme le calcaire de Buxwiller à Planorbis pseudoarn mon ius P. Cherlieri et Lopliio- don ou celui de Hobel (Jura), c’est le niveau qui correspond tout à fait au niveau d’eau douce desDiablerets. C’est, au contraire, à l’Éo- cène supérieur, qu'il faut rapporter la plus grande partie des cal- caires à Melania Laurae. A cette époque, la cuvette, qui plus tard devait être envahie par les dépôts marins du Tongrien, était déjà indiquée, et l’on voit se former, contemporains des gypses de Montmartre, les gypses de Zimmersheim, de Bambach, Hattstadt et de Wasenwiler, tandis que, plus au Sud, se sont formés les dépôts sidérolithiques du Jura-Bernois (terres jaunes ou Raitcbe de M. Greppin).La présence de Mammifères Eocènes rencontrés à Moutier, Egerkingen, Obergôsgen et au Mormont, ne suffit pas pour donner le même âge à tous les dépôts Sidérolithiques qui ont dû commencer à sefdrmer au moment de l’émersion de la région à la fin du Crétacé et se continuer, au moins en certains points restés émergés, pendant la plus grande partie du Tertiaire1; dans le Jura français, M. Kiuian2 a montré qu’ils étaient surmontés par des couches de calcaire à Melania Escheri et Planorbis rotundatus. Avec l’Oligocène, il se produit une grande invasion marine et la Mer du Nord pénètre dans cette région (dans la vallée du Rhin, en Alsace et en Suisse). Les premiers dépôts sont les marnes à Cyrènes du duché de Bade auxquelles sont superposés dans la région du Rhin des sables marins et des marnes à Pectunculus obovatus Panopæa Heberti,Osireacyalhula,Eusus elongatus des environs de Bâle; la limite du golfe alsatique est bien marquée par les con- 1 Signalons en passant qu’il existe en outre dans cette région des sables vitrifiables blancs d’àge différent et plus ancien, car ils sont pénétrés par le lobus et la mine de 1er et ont souvent été remaniés dans certaines nappes du sidérolithique (voir L. Rollter, Jura central (Matériaux pour la Carte géologique suisse , liv. VIII, 1° suppl., 1893)- - Kilian, Terrains Tert. du département du Doubs ( B. S. G. de France, 3e série, t. XII, p 629, 1884). 86 PÉRIODE PRÈNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE glomérats littoraux qui, aux environs de Montbéliard et de Belfort, recouvrent les dépôts de minerai de fer et que l’on peut suivre dans toute la région, le long des Vosges et de la Forêt Noire, dans le duché de Bade et dans le Jura Bernois sur tout le pourtour du golfe alsatique. Ce n’était d’ailleurs qu’un golfe delà Mer du Nord ne s’étendant guère au delà de Bâle et de Délémont (cours de la Birse et Dornach-Brück). Il n’y avait aucunement communication avec la mer du bassin Anglo-Parisien comme l’a montré M.Kilian. 11 n’y avait pas non plus communication de ce bras de mer au Sud avec la mer Nummulitique du géosynclinal subalpin. On ne connaît en effet aucune trace de dépôts Tongriens dans la Plaine Suisse. L’examen des faunes suffit d’ailleurs à montrer que ces dépôts marins se sont formés d’une manière tout à fait indépendante les uns des autres. La Plaine Suisse et le Jura devaient former un con- tinent relativement peu élevé où la mer pouvait pénétrer. plus ou moins loin. C’est ainsi que se rattache à ce golfe alsatique les dépôts saumâtres avec Potamides signalés depuis longtemps plus au Sud à Coligny, dans l’Ain, et d’âge un peu plus récent. Dans le Doubs, au-dessus de ces assises Marines de base dont nous venons de parler, on trouve encore des schistes à poissons correspondant aux Seplarien ilion du bassin de Mayence et l’en- semble des bancs du système de Bourogne de M. Kilian à Cyrena convexà , Cyrena donacina, Cytherea splendida, Corhicula Faujasi , Mytilus Faujasi, Hydrobia Dtibuissonni, Cerithium ylicaturn var.enodosa, var. Galeotli avec des couches de calcaire lacustre intercalées à Hélix (Coryda) girondica. Ces couches saumâtres et lacustres se retrouvent dans le Jura Bernois, dans le val de Délémont, constituant ce que M. Rollier appelle la Molasse alsacienne1. La série Tongriennese termine par le calcaire lacustre deMoutier,de Délémont, indiquant un comblement du Bassin alsa- 1 D’après cet auteur, la limite du golfe alsatique se suivrait dans le Jura Bernois depuis les Vosges par Bressaucourt, Fregiecourt, Montfaucon les Brenets à l’Ouest et à l’Est depuis la Forêt Noire jusqu'à Aesch vers le Sud. L’absence de gompholite entre ces deux cordons latéraux entraîne cet auteur à admettre la communication au Sud avec un golfe helvétique; j’ai déjà dit plus haut que la Plaine Suisse, au moins la partie septen- trionale et occidentale, était émergée au Tongrien. REGION DU GENEVOIS 87 tique à la fin duTongrien. Le territoire est de nouveau émergé et ne sera plus recouvert par les eaux marines qu’à l'époque du Miocène : les eaux venues du Sud et de l’Est ne dépasseront guère au Nord le val de Délémont. COMPARAISON DES DÉPÔTS NUMMULITIQUES DE LA SAVOIE AVEC LES DEPOTS PLUS MÉRIDIONAUX D’après ce qui précède, il n’existait aucune relation entre le bras de mer où se formaient les dépôts Nummulitiques de la Savoie et celui de la plaine d’Alsace; il nous faut donc chercher vers le Sud et toujours dans la région alpine les relations avec la mer qui existait dans la région méditerranéenne proprement dite. Lorsque l’on se dirige vers le Nord et dans les Alpes Orientales, on peut suivre d’une manière continue les dépôts Nummulitiques et constater l’existence de dépôts de plus en plus anciens à mesure que l’on s’avance vers l’Est, montrant que la transgression marine s’est produite dans cette région, depuis le Bassin de Vienne jusqu’en Savoie, progressivement de l’Est à l’Ouest. Les relations avec les dépôts Nummulitiques existant dans les Alpes Françaises au Sud des Bauges sont beaucoup moins nettes. Il existe, en effet, une lacune assez grande entre les dépôts Nummu- litiques les plus méridionaux des Bauges (Plateau des Déserts) et les dépôts Nummulitiques les plus septentrionaux de la Maurienne et de la Tarentaise. Le dépôt fossilifère le plus rapproché est celui de Montricher où Pillet a, le premier, signalé en 1859 des Nummulites. Les ter- rains Tertiaires débutent par un conglomérat analogue à celui des aiguilles d’Arve de Gu. Lory et reposant sur le Lias. Il est sur- monté par une puissante formation de grès alternant avec de nom- breuses masses de schistes ardoisiers. Les fossiles se trouvent dans les couches inférieures du terrain nummulitique. On a cité de cette localité : Nummulites complanata, Lam. Nummulites Dufrenoyi d’Arch. Num. Ramondi, Def. Orbitoïdes submedia d’Arch. Ostrea aff. gigantea, Brgt. Conoclvpeus anachoreta, Ag. 88 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE et en outre comme formes douteuses : N. perforata. Lam. N. variolaria. Sow. Ch. Lory ( Dauphiné , p. 548) identifie ces couches aux assises inférieures du terrain Nummulitique de Thônes (calcaire gréseux à N. striata). Ces couches, au delà de la vallée de l’Arc, se poursuivent d'une façon très nette par Saint Julien-en-Maurienne, Montdenis, vallon des Perrières jusqu’à l’Est de Saint Jean-de-Belleville sensible- ment alignées Nord-Sud formant un synclinal plus ou moins acci- denté. Au delà, les couches schisteuses et gréseuses disparaissent presque complètement et les assises Nummulitiques ne sont plus représentées, d’après MM.Kilian et Révil1, que parla Brèche poly- génique de Tarentaise, considérée autrefois comme Triasique par Ch. Lory. Elle se prolonge au delà de Moutiers en passant derrière le Quermoz où le synclinal Tertiaire primitif s’accidente de plusieurs anticlinaux secondaires Triasiques et forme une suite de syn- clinaux très rapprochés et se relayant entre eux, et se poursuit ensuite jusque vers le col du Bonhomme vers les Chapieux. Elle ne paraît pas s’étendre beaucoup au delà de la frontière italienne2. Cette brèche qui, comme dans le massif des aiguilles d’Arve, forme le sommet de la plupart des crêtes, renferme des fragments de schistes cristallins, des quartzites et dolomies et des calcaires du Trias et du Lias, du grès houiller. Elle rappelle, d’après MM. Iyilian et Révil, les brèches de Châtillon près Taningeset du Habkern; ces auteurs auraient une tendance à relier ces dépôts aux couches Nummulitiques les plus orientales des Alpes calcaires de Savoie (Aravis, Désert de Platé). Au Sud de Montricher, ces dépôts se suivent dans le synclinal des Aiguilles d’Arve jusqu’au Lautaret. Au delà ils se rattachent d’une façon très nette aux dépôts Nummulitiques de la région de 1 W. Ki u an et J. Révil, Une excursion géologique en Tarentaise (Bull, de la Soc. d'Hist. Natur. de Savoie, t. VII, p. 28, 1893). 2 J‘ai suivi cette brèche dans les courses que j'ai faites dans cette région par la Pietra Menta, l’Est de la vallée de Roselend jusqu'à un peu au delà des Chapieux. REGION DU GENEVOIS Saint-Bonnet par le col de l’Ecliauda à l’Est du massif du Pelvoux et avec la région Nummulitique de l’Embrunais. Celte région com- prend une immense série de grès alternant avec des schistes argilo-calcaires. La coupe de la montagne des Combes près de Saint-Bonnet donnée par Ch. Lory est identique à celle du Char- bon ou d’Entrevernes. On a en effet reposant sur les schistes à Posidonies de l’Oxfordien : 1° Conglomérat à galets énormes arrondis (Gneiss de Chaillol-le- Vieil) formé de calcaires Jurassiques et Crétacés et de silex de la Craie du Dévoluy ; 2° Couches argileuses noires, schisteuses, peu consistantes, avec Céritlies , Notices; 3° Grès à ciment argilo -calcaire avec Cyrena convexa , Car- dium yranulosum et avec trois petites veines de charbons (cou- ches saumâtres) ; 4° Grès plus dur, moins charbonneux, avec petites Nummulites; 5° Calcaire à Nummulites, compact, d’un gris foncé associé à des Polypiers; 6° Couches argilo-calcaires schisteuses, bleuâtres, gris noir (Flysch calcaire des Bauges); 7° Grès moucheté (Flysch gréseux et grès de Taveyannaz). C’est identiquement la coupe du Tertiaire de la Savoie et le con- glomérat de base doit correspondre aussi très probablement aux couches à grandes Nummulites des Bauges. Déjà MM. Hebert et Renevier (loc. cil.) avaient mis en évidence l’identité des dépôts saumâtres de Saint-Bonnet et plus au Sud, de Faudon, avec ceux des Diablerets d’une part, et ceux de Pernant et d’Entrevernes d’autre part. La stratigraphie vient confirmer de la façon la [fins nette cette affirmation. M. P. Lory1 a montré que dans le massif de Chaillol, la com- position du Nummulitique restait sensiblement la même; les cou- ches saumâtres, qui ne sont qu’un faciès, n’existant qu’en un petit 1 P. Lory, Observations sur la coexistence dans le massif de Chaillol de dislocations appartenant à deux périodes distinctes (lï. S. G. de France, 3e série, t. XXII. p. 162, 1894). 90 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULIT1QUE nombre de points (montagne de la Cavale et de Soleil Biou). Par- tout le Nummuli tique débute par un conglomérat local (ou un remaniement des couches sous-jacentes si elles sont faciles à désa- gréger) en discordance angulaire sur les terrains plus anciens jusqu’au Jurassique moyen. Cette invasion marine a été précédée dans cette région, sur le bord du massif du Pelvoux, des plisse- ments anté-Nummulitiques ayant fait émerger ce massif1. Dans toute la région de l’Embrunais, le Nummulitique est cons- titué par un massif énorme de grès gris ou roussâtres (quelquefois colorés de noir par des matières charbonneuses), alternant avec des schistes argilo - calcaires (Flysch calcaire) et des schistes ardoi- siers, présentant à la partie supérieure ces calcaires désignés sous le nom de calcaires à Myrianites. Au Nord du massif de l’Embrunais, vers Frevssinières et l’Ar- gentières, on peut relever une coupe fort intéressante, montrant la superposition directe des terrains Tertiaires Nummulitiques aux terrains cristallins. La transgression Nummulitique est ici bien manifeste, et l’on a la succession suivante de bas en haut : 1° Conglomérat cristallin et calcaire (essentiellement local). 2° Calcaire à petites Nummulites. 3° Grès quartzeux alternant avec des couches de schistes ardoi- siers. 4° Grès d’aspects très variés avec nombreuses empreintes végétales. A l’Ouest de la région que nous venons d’étudier, formant le prolongement vers le Nord du géosynclinal Nummulitique subal- pin, les dépôts Nummulitiques de la région du Dévoluy présentent également, comme dans la région occidentale des Bauges, un pas- sage insensible des grès Nummulitiques supérieurs aux couches marneuses bariolées, aux poudingues et aux couches de grès Molassiques franchement Aquitaniens (Coupe de Saint-Didier-en- Dévoluy). Il en est de même à Montmaur, où l’on voit superposés 1 L’existence dans le poudingue Nummulitique de la base des aiguilles d’Arve, de cailloux cristallins venant des massifs de Belledonne et du Pelvoux implique en effet l'émersion plus ou moins complète de ces massifs à l’époque Nummulitique. RÉGION DU GENEVOIS 91 à des grès verdâtres contenant des Nummnlites et correspondant aux couches à petites Nummulites de la Savoie, des poudingues calcaires passant à la partie supérieure à des couches de marnes bariolées et des poudingues nettement Àquitaniens. Les dépôts Nummulitiques précédents se continuent plus au Sud par les dépôts Tertiaires marins des Basses- Alpes dont l’étude com- plète résulte des travaux de Garnier et de Tournouer. Ils for- ment une bande presque continue allant de Champsaur jusque dans le Bassin du Var. Les dépôts Nummulitiques qui, dans la région avoisinant le Pelvoux, sont en transgression sur tous les terrains antérieurs à l’Oxfordien, sur lequel ils reposent dans la région de l’Embrunais, à mesure que l’on s'avance vers le Sud, reposent sur des terrains de plus en plus récents: dansl’Ubaye, c’est sur l’Aptien. Plus au Sud, le conglomérat de base du Nummulitique, à partir du Pic de l’Aiguillette, repose sur des terrains encore plus récents. Les dépôts Nummulitiques, surtout développés à l’Est des chaînes subalpines situées entre Gap et Digne ne dépassent pas à l’Ouest Faucon Gigors. Ils se sont déposés dans un bassin où, comme dans les Bauges, la sédimentation a été très irrégulière ; grâce aux travaux de Garnier et de Tournouer, l’on peut cependant y constater une série aussi complète. Le faciès est encore plus franchement méditerranéen qu’en Savoie, ce qui s’explique d'ail- leurs facilement par la situation plus méridionale des dépôts et la communication plus facile avec la région méditerranéene. Aussi, la comparaison avec les dépôts méridionaux, comme ceux du Vicen- tin ou des environs de Biarritz est-elle beaucoup plus facile. Ainsi que l’a montré Tournouer, la série débute à Branchai Allons par un poudingue à cailloux fortement impressionnés, mais qui sont d’origine fluviatile L Les couches supérieures du Nummulitique sont surtout développées dans la vallée de l’Asse (Barrême, Clu- mane, Tartonne). Ges couches Nummulitiques reposent ici soit sur la craie à Micraster, soit sur l’Aptien à Bel. semicanaliculatus . 1 Dans une course faite avec M. P. Lory, dans la région de Branchai, nous avons constaté en effet la présence au milieu de ces poudingues de niveaux marneux saumâtres passant aux couches à Cérithes et Natica vapincana. 92 PÉRIODE PRÉNUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE Lorsque l’on se dirige vers l'extrémité méridionale de la chaîne alpine, dans les environs de Nice1, on rencontre des assises nou- velles du Nummulitique, plus anciennes que toutes celles que nous avons rencontrées jusqu'ici dans la chaîne des Alpes. La série Num- mulitique comprend en effet de bas en haut : 1° Calcaires à Numm. per for ata , Montf. , N. Lucasana , Dcfr. du col de Braus, de l’Escarène, de la Palaréa, du cap de la Mor- tola et de Monte Bellinda, qui correspondent à l'horizon supérieur de Ronca, Ensiedeln, Peyrehorade, ayant fourni de nombreux restes d’animaux étudiés par L. Bellardi 2. 2° A la Mortola, couches à grandes Assilines A. exponens et des schistes à Orbiloïdes Fortisi Operculina ammoena , Num- mulites Biarritz en&is, et à la Palarea, avec Rotularia spirulace. 3° Les couches Nummulitiques de Vence, de Biot, et d'Antibes, qui présentent en outre N. striata , sont au niveau des couches de Priabona ou des falaises de Biarritz; ce seraient l’équivalent des couches de calcaire et de grès à petites Nummulites de la Savoie. Le niveau inférieur synchronique (correspondant aux couches supérieures de la Mortala) correspondrait à un niveau intermé- diaire entre les couches à N. perforata typ. et celles à A7, striata , franchement Priaboniennes, niveau qui serait caractérisé ici, comme dans toute la région Méditerranéenne, par la présence des Assi - Unes 3 * (A . exponens). 4° Puissant ensemble de marnes, argiles et grès à empreintes végétales (Chondrites) correspondant au Flysch et pouvant s’étendre depuis la partie supérieure de l’Eocène jusqu’à un niveau assez élevé du Tongrien, comme dans le reste des Alpes Occiden- tales. Le parallélisme des différentes assises Nummuli iques que l’on rencontre dans les Alpes Occidentales, depuis le massif des Dia- 1 Tournouer, Terrains tertiaires des environs de Fréjus et de Nice (Bull. Soc. Gcol. de France , 3e série, t. V, p. 341, 1877). 2 L. Beli.ardi, Catalogue raisonné des fossiles Nummulitiques du Comté de Nice, 1352. 3 P. de la Harpe, Note sur les Nummulites des environs de Nice et de Menton (Bull. Soc. géol. de France, 3e série, t. V, p. 817,1877). REGION DU GENEVOIS 93 blerets jusqu’au comté de Nice, peut donc se résumer dans le tableau suivant (pages 94-95). RÉSUMÉ DE L’HISTOIRE GÉOLOGIQUE DE LA RÉGION PENDANT LA PÉRIODE NUMMULITIQUE L’histoire géologique de la période Nummulitique depuis le com- mencement de l’ère Tertiaire jusqu’au Tongrien supérieur peut donc se résumer de la façon suivante : Pendant toute la durée des temps Secondaires, l’axe du géosyn * clinal subalpin a été beaucoup plus rapproché de la région alpine que des bords du Plateau Central, comme M. Haug 1 l’a montré par l’étude des différents faciès des dépôts Secondaires dans les Alpes Occidentales. Il occupaif à peu près l’emplacement qui sera plus tard celui du géosynclinal Nummulitique. Au Crétacé, on peut faire également, comme l’a proposé M. Fallot2, une dis- tinction très nette entre la province alpine à l’Est, qui va devenir sensiblement la région Nummulitique, et la province Rhodanienne à l’Ouest, qui constitue l’ébauche de la vallée actuelle du Rhône. Vers la fin du Secondaire, des mouvements importants se pro - duisent dans la région alpine : mouvements anté-Sénoniens cons- tatés par M. P. Lory dans le Dévoluy, et dont j’ai montré égale- ment l’existence dans la région du Génevois3, et surtout les mouvements anténummulitiques ayant eu pour effet de chasser les eaux marines loin de la dépression Rhodanienne et alpine. Au commencement delere Tertiaire, la Plaine Suisse, le Jura, la région alpine et la région Rhodanienne étaient émergés et soumis à des érosions, à des actions de ruissellement et de lavages des terrains sous-jacents ayant donné naissance à des sables et argiles bariolés dont j’ai montré l’existence dans le Dauphiné (Voreppe), la Savoie 1 E. Haug, les chaînes subalpines entre Gap et Digne (Bull, de la Carte géol. de France, n° 21, 1891). Voir article de M. Depéret sur le bassin du Rhône (Annales de géographie, juillet 1895). 2 E. Fallût, Etude géologique sur les étages moyens et supérieurs du terrain crétacé dans le Sud-Est de la France ( Ann. sc. géol., t. XVIII, art. n° 1, 1875). 2 La transgres-ion du Sénonien est également très nette dans la région des Préalpes ETAGES Aquitanien. Tongrien. Priabonien (Eocène sup. Bartonien (Cale, grossier supérieur). Lutétien moyen. SAVOIE Molasse à H. Ra- mondi (grès et marnes de cou- leur variable de Leschaux). Fausse Molasse à petits bivalves. Flysch gréseux avec intercala - tion d’un niveau à Ni/stia Hydro- bia du Désert. Flysch calcaire (calcaire schis- toïle à écailles de poissons pou- vant exister dès la base). e3m”’ Calcaires et grès à petites Num- mulites. Couches saumâ - très à Cérithes N. Vapincana. (Zone des Diable- rets). Conglomérats et calcaires de base à N. aturica,N. Lucasana (Couches à gran- des Nummulites) MONTRICHER Manque. Grès, marnes,) schistes ar- doisiei's pas- sant latérale- ment à la Brè- che de la Ta- rentaise. I Calcaires gré- seux et quart- zeux à Nconplanata N. striata. N. Ramondi ., U CHAILLOL- SAINT — BONNET Manque. Grès supérieurs passant aux grès mouchetés l *. Schistes argilo - calcaires, bleu- âtres sans fossi- les. Grès et calcaires compacts à pe- tites Nummulites et Polypiers. Couches à Cé rith.es et à N. Vapincana de Saint-Bonnet. Grès et conglo- mérats inférieurs. F AU DON Manque. Grès supérieii passant aux g mouchetés. * Couches saura très à Cérill et Notices. Calcaire grést se désagrégé avec N.conto N. striata. 1 Le faciès des grès mouchetés peut d'ailleurs, comme en Savoie le grès de Taveyadj mouchetés aux grès d’Annot constaté par M. Haug. Les grès d'Annot peuvent d’ailleurs reï Idévoluy AINT-DIDIER BRANCH Aï- ALLONS BARRÈME CLUMANE NICE if — fi’è dà big pa de Aç S15 j •c lurs, gris ou ver- îs avec marnes •rées verdâtres mt à des assises Molasse calcaire tanienne. ès micacé schis- ès quartzeux. Manque. Argiles, calcaires rnar - neux a Bitleynia Du- buissonni Hélix lïa- mondi , Planorbis cornu. Manque. Manque. Argiles et calcaires si- liceux lacustres, pou- dingues. Flysch de la Mortola à Chondrites. d) argiles à Lucines et à Teredo Tournali. c) Couches à Natica cassalina de Barrême b) Poudingues. a) Grès blancs h Mela- nia decussata. Grès d’Annol1, calcai- res et schistes argilo- calc. à Myrianites. Marnes argileuses à Orb. submedia Oper- culina ammoneaSer- pul spiraelua. Schistes gréseux de l’Asse et calcaires à Myrianites. r i ' 1 rè iOI CO) va bit '■2C V r 011 lax _j) pt ou calcaires, gris 3 très compacts ; înant quelques bi- ps peu détermina- n, 0. gigantica. omérats avec si- le la craie et des es Nummulites. Calcaires durs à Num- mulites et calcaires marneux d’ Allons. d) Marnes argileuses sans fossiles de Bar- rême. c) Marnes à Nummu- lites et à Tornatelles de Clumane. b) Calcaires à Torna- telles et à Nummuli- tes de Clumane. a) Glaucoine de Tar- tonne. Couches à Num. Bia- mtzensis, N. striata, serpula spiralea. (Vence, Diot. Antibes, Font de Jarieu). Calcaires marneux à Cardium granulosum et Polypiers. Schistes avec charbon. Marnes à C en thés et ■N. Vapincana de Branchai. Manque. Couches d’Escragnol- les à Natica Vapin- cana. Poudingues et argiles à la base d’origine la- custre (Le faciès saumâtre s’in- troduit peu à peu). Manque. touches à Num. expo- nens orbitoïdes For- tisi. _ Cale à N. perforata , N. Lucasana. Col. de Braus, etc.) mtj encer avec des couches plus anciennes ; c’est ce qui explique le passage latéral des grès une partie des couches Tongriennes proprement dites. 96 PERIODE PRÉNOM MU LITIQUE ET NUMMULITIQUE (Bauges, Salève), le Jura méridional (Bellegarde), et jusque dans la région des hautes chaînes calcaires Vaudoises, aux Diablerets. Dans quelques-unes de ces localités, et surtout dans la partie méridionale de la vallée du Rhône, à l’Eoeène moyen, des lacs se forment et déposent les calcaires d’eau douce à Planorbis pseudoammonius, pendant que dans d’autres points les forma- tions sidérolithiques continuaient à se former (poches à ossements de mammifères deLissieu près Lyon, Egerkingen). Pendant toute cette période, la mer n’existait au Sud que dans le Vicentin et bien au loin du rivage actuel de la Méditerranée : c’est la période qui correspond à la formation des dépôts du Lutétien inf. à Num. lævigata et planulata. Dans le Nord des Alpes orien- tales, la mer ne dépassait pas Eiusiedeln. A la fin du Lutétien, une première transgression marine se manifeste dans la région alpine ; la mer fornm, en effet, aux envi- rons de Nice, un petit golfe où se déposent les couches inférieures du Nummulitique (calcaire à Num. per for ata et A". Lucasana ), qui correspondraient aux couches de San Giovanni Ilarioue. Avec le Bartonien, la transgression marine s’accentue : c’est ainsi que la mer venue de l'Est, qui envahissait progressivement les dépôts de l’Eocène moyen aux Diablerets, y dépose à cette ' époque, comme en Savoie, les conglomérats et les calcaires que j'ai désignés sous le nom de couches à grandes Nummulites1 (N. per for al a , N. Lucasana , N. aturica). La mer qui envahis- sait la Savoie venait du Nord et s’avançait déjà jusqu’au Sud de la vallée des Aillons, c’est-à-dire à peu près auparallèlede Chambéry. Dans la région méridionale, la transgression marine paraît avoir été assez faible. C’est au Priabonien que la transgression marine, due à la fois à une mer venant du Sud (de la région de Nice) et à une mer venant du Nord, atteint son maximum. Cette transgression marine se 1 Ces couches ont pu se former dès le Lutétien supérieur , on sait en effet combien est difficile, même dans le Bassin de Paris, la séparation précise des assises du Lutétien supérieur et du Bartonien (voir Haug, loc. cit., 1895, p. 29), et ces couches pouvaient correspondre à une partie des assises inférieures de Nice. RÉGION DU GENEVOIS 97 manifeste en un certain nombre de points par des dépôts saumâtres où l’on trouve les Cêrithes , Cyrènes , Cyllièrèes , qui constituent la faune dite des Diablerets, à Pernant, au Grand-Bornand, Entre- vernes, Arclozan en Savoie, à Saint-Bonnet, à Faudon, à la Gra- nella, l’identité des formes recueillies dans ces différentes localités a été bien mise en évidence par tous les auteurs qui se sont occupés de ces dépôts. En d’autres points, les dépôts Nummulitiques sont des calcaires, des grès de couleur assez variable, suivant les loca- lités, constituant le calcaire à Nummulites des auteurs.il est carac- térisé par N. striata , N. variolaria , N. Ramond, N. Boucheri , N. Guettardi : ces formes se retrouvent pour ainsi dire partout, ainsi qu’à Priabona. Les Nummulites appartiennent surtout au groupe des Nummulites striées et vers la partie supérieure des Nummulites réticulées et granulées1. C’est au-dessus de ces assises que commence, en général, l’ensemble des couches gréso-mar- neuses qui constitue le faciès Flysch des Alpes occidentales 2. J’ai montré qu’en Savoie on pouvait y distinguer deux niveaux : un niveau inférieur plus calcaire (Flysch calcaire) pouvant en certains points (Bauges) commencer dès les couches inférieures à grandes Nummulites, et un niveau supérieur plus gréseux (Flysch gréseux). L’identité complète des faunes des couches à Cêrithes, dans les Alpes occidentales, à laquelle je faisais allusion un peu plus haut, ainsi que celle des calcaires ou des grès à petites Nummulites, la proximité des formations Nummulitiques des Bauges et du Gene- vois et des poudingues polygéniques récemment mise en évidence par MM. Kilian et REViLm’engagentàadmettreunecommunication directe entre les dépôts de la Savoie et ceux situés plus au Sud d’une façon certaine à l’époque Priabonienne. A ce moment, il existait dans la région subalpine un bras de mer dont le centre correspondait à peu près au thalweg du géosynclinal jurassique ou à la région alpine des dépôts Crétacés, sensiblement parallèle à la 1 Voir la note récente de M. P. Lory, sur les couches à Nummulites du Dévoluy et des régions voisines (C. R. Soc. géol. de France , 3e série, t. XXIV, p. 18, 1896.) - Ce faciès peut naturellement commencer à des niveaux plus ou moins élevés, varia- bles suivant les localités avec les conditions de dépôt des assises. Univ. de Lyon. — Douxami. 7 98 PERIODE PRENUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE direction générale de la chaîne alpine s’étendant depuis les envi- rons de Nice et de Fréjus, sur le littoral méditerranéen, jusqu’aux régions Nummulitiques des Alpes orientales et des Carpathes et dont les limites, dans les Alpes occidentales, sont les suivantes : A l’Est, par le col de Tende rejoignant les dépôts de l’Italie méridionale, puis formant un détroit de largeur assez faible à l'Est du Mercantour émergé à cette époque, par Démonté, les monts Niebius et Giordano, par le col de Larché ou de la Madeleine (à ce niveau, les dépôts Nummulitiques atteignent leur maximum d’ex- tension Est-Ouest), à l’Est de Larché, de Meyronnes, Saint-Paul, Vars, à Guillestre, puis au Nord de Saint-Clément par Plan de Phasy Freyssinières, à l'Ouest d’Argentière, Vallouisse,oùle synclinal se resserre beaucoup pour se diriger sensiblement N. -S. en passant derrière le massif du Pelvoux, à l’Est de Briançon, le Monnetier, Montricher, près Saint-Jean-de-Maurienne, et de là former un golfe étroit passant à l’Est du massif de Belledonne, du massif du Mont Blanc, vers le Quermoz et le col du Bonhomme. Y avait-il communication de ce golfe, comme le voudraient MM. Ivilian et Révil, avec la mer Nummulitique de la Savoie et par où se faisait cette communication, c’est ce qu’il est difficile de dire dans l’état actuel de nos connaissances, vu l’absence complète de dépôts intermé- diaires. La présence dans ces dépôts Nummulitiques de cailloux cristallins, originaires du massif du Pelvoux et de Belledonne, tendrait à prouver que ces massifs étaient complètement émergés à cette époque; ces dépôts Nummulitiques se formaient dans un golfe ne s’étendant pas beaucoup au delà des Chappieux. A l’Ouest, le rivage delà mer Nummulitique se constate aisément avec les dépôts Eocènes de la région occidentale et sur le territoire de laFrance par Antibes, Vences et, à partir de là, il s’incline fortement à l’Ouest par Saint-Vallier, Castellane, Blieux, Barrême, la vallée supérieure de l’Asse de Clumane, à l’Est du Cheval-Blanc, de la Tête des Brouisses, Seynes, Le Lauzet, Savines, où la limite s’in- cline de nouveau à l’Ouest pour former le golfe ou détroit du Dévoluy s’étendant à l’Est jusqu’au Pelvoux par Orcières, Saint- Bonnet en Dévoluy. Les dépôts Nummulitiques cessent au Nord de RÉGION DU GENEVOIS 99 cette dernière localité, vers Lus-la-Croix-Haute, et on n’en a signalé aucune trace plus au Nord, le long du massif de Belledonne. Cette région occidentale des dépôts Nummulitiques présente des phénomènes analogues à ceux que nous avons constatés dans les Bauges : déplacement progressif vers l’Ouest et passage insensible aux dépôts Aquitaniens. Le prolongement au Nord de ces dépôts est encore inconnu. Si l’on considère que les plis des Bauges se continuent entre Belledonne et les plis jurassiens qui constituent la Chartreuse et le Vercors, on est porté à admettre qu’un bras de mer, rétréci beaucoup par les plissements postérieurs, réu- nissait ces dépôts par derrière le massif de la Chartreuse, en empiétant plus ou moins sur les terrains cristallins du massif de Belledonne 1 • A partir des Bauges, la limite orientale du géosynclinal Nummu- litique coïncide sensiblement avec la limite des massifs du Génevois, de la Dent-du-Midi, des Diablerets et des Alpes des Quatre-Can- tons. La limite occidentale est beaucoup moins précise. Si, dans les Bauges proprement dites, les dépôts Nummulitiques ne dépassent pas l’anticlinal du Nivolet-Revard-Semnoz, plus au Nord, dans la région de la plaine d’Annecy et sur le bord des Préalpes, ils s’enfoncent sous les terrains plus récents Aquitaniens et Miocènes et aucun affleurement ne permet de limiter à l’Ouest les rivages de la mer Nummulitique qui s’est peu à peu déplacée de l’Est à l’Ouest. Au moment du dépôt des couches inférieures (couches à grandes Nummulites), la mer Nummulitique ne recouvrait que la région des hautes chaînes calcaires du pays de Vaud (Diablerets, Dent-de- Morcles), le massif de la Dent-du-Midi, le faisceau du Génevois jusqu’au sud de la vallée des Aillons. Elle ne semble pas avoir pénétré dans la zone des Préalpes. Celle-ci, en effet, comme l'a montré M. Haug, paraît avoir été particulièrement affectée par les 1 Comme M. Kilian me le faisait remarquer, les communications marines devaient sensiblement se faire au même endroit que celles de l'époque Néocomienne dont l'histoire est très analogue. 100 PERIODE PRENUMMULITIQUE ET NUMMULITIQUE mouvements anté-Nummulitiques et a présenté, dès cette époque, un relief suffisant pour que la transgression Nuinmulitique se pro- pageant de l’Est à l’Ouest ne l'ait atteinte qu’à l’époque del'Eocène supérieur (Priabonien) : les dépôts du Flysch calcaire sont en effet surtout développés dans les deux zones les plus orientales de cette région (zones des Ormonts-Niesen et de la Mocausa). Les couches du Flysch gréseux n’existent que dans la région du Simmenthal et dans la zone externe du Flysch (zone des Voirons, Berra et Habkern). Dans toutes les Alpes occidentales, l’on voit s’intercaler, dans le Flysch, des couches particulières dont les matériaux témoi- gnent à la fois, des relations intimes avec les régions déjà émer- gées des Alpes, et de l’existence de phénomènes glaciaires. Ceux- ci ont, dès l’Eocène supérieur ou la base du Tongrien, joué un rôle important dans la région alpine. C’est ainsi que l’on voit s’intercaler au milieu du Flysch calcaire, les conglomérats bré- choïdes polygéniques de la zone des Ormonts-Niesen qui pro- viennent nettement d’un prolongement du massif du Mont-Blanc, aujourd’hui recouvert. Dans les couches un peu supérieures la formation connue sous le nom de grès de Taveyannaz, dans le faisceau du Genevois et dans les Hautes-Alpes calcaires ; de grès mouchetés ou grès d’Annot, au sud du massif du Pelvoux ont la même signification. C’est aussi à cette époque que se forment la brèche polygénique de Tarentaise équivalent latéral des couches Nummulitiques de Montricher, en Maurienne. Si l’origine de ces formations, au sud du Pelvoux, comme l’ont récemment admis MM. P. Lory et Termier 1 , doit se rapporter à des roches éruptives locales, pour la Savoie, les travaux de A. Favre et plus récemment de MM. Duparc et Ritter, sur les grès de Taveyannaz, ont montré qu’il fallait chercher leur origine dans les massifs éruptifs des Alpes méridionales, dans la région de Lugano et duVicentin.il en est de même pour les conglomérats polygéniques qui existent dans toute la 1 P. Lory et Termier, Sur deux roches éruptives récemment découvertes dans le massif de Cliaillol (Hautes-Alpes) (C. R. Soc. géol. de France , 3e série, XXIII, n° 10). RÉGION DU GENEVOIS 101 zone externe clu Flysch (zone des Voirons), d’après les observations deM. Sarrasin. Les mouvements qui, dans cette région, ontpeu àpeu rejeté, la mer vers l’Ouest, ont provoqué un soulèvement dans la région méridionale des Alpes, à la fin de l’Eocène, permettant aux glaciers de s’y établir et d’amener des blocs anguleux jusque dans la Savoie; les éléments les plus fins, qui allaient constituer des grès de Taveyannaz, étaient transportés le plus loin. Ce voisinage des glaciers explique également l’absence de la faune littorale dans les dépôts d’eau peu profonde qui constituent le Flysch. La communication qui s’est établie pendant l’Éocène supérieur entre les dépôts du Nord des Alpes occidentales et ceux du Sud du Pelvoux n’a pas tardé à se rompre, et pendant le Tongrien il exis- tait denouve, au commeaux débuts de la période Nummulitique, deux golfes marins dans les Alpes occidentales : celui du Sud, s’étendant jusque dans la région du Dévoluy et communiquant encore avec une mer plus méridionale, celui du Nord ne dépassant pas les Bauges et en relation avec la mer septentrionale de la région alpine. Les dépôts de calcaire à faune tongrienne (Natica crassatina) de la région de Barrême et du Plateau des Déserts, près de Cham- béry, nous permettent de préciser l’âge des couches du Nummulitique supérieur. Dans les Alpes calcaires de Savoie, il s’est produit en effet, comme je l’ai montré dans l’étude détaillée des formations Nummulitiques, deux mouvements généraux ayant eu pour effet de rejeter de plus en plus la mer à la fois vers le Nord (synclinal occidental des Bauges) et vers l’Ouest ; ce dernier amenait peu à peu l’axe du géosynclinal Tertiaire dans les régions subalpines les plus occidentales et même à la fin de la période Ton- grienne en dehors de la chaîne alpine proprement dite (Plateau des Bornes et bordure des Préalpes). Les eaux marines en se retirant en même temps vers le Nord n’ont laissé que quelques lagunes sau- mâtres, où vivaient des Potamides et des Cyrènes et dont l’exis- tence a été constatée le long du Salève, et plus au Nord dans la Plaine Suisse. Je m’en occuperai un peu plus loin dans l’étude des dépôts Aquitaniens (la Molasse rouge de Vevey, d’origine saumâtre, se rattache également à ces dépôts, ainsi que, plus 102 PÉRIODE PRÉNUMMUL1 TIQUE ET NUMMULITIQUE au Nord, les grès de Ralligen). J’ai montré plus haut que ce déplacement vers l’Ouest de l’axe du synclinal Tertiaire s’était également produit dans la région méridionale des Alpes occi- dentales. La mer Tongrienne, qui existait dans le Nord de l’Europe, a formé, au Nord de la région alpine, les golfes du Bassin de Paris et de la plaine d’Alsace : l’étude, à la fois paléontologique et strati- graphique des dépôts qui se sont formés dans ces deux régions, a montré qu’elles étaient complètement séparées l’une de l’autre, et en même temps des eaux de la Savoie à la même époque : le Jura méridional, la région orientale de la plaine Suisse (Jorat) et la vallée actuelle du Rhône étaient émergés et il ne s’y formait que des dépôts continentaux, auxquels nous pouvons rapporter une partie des dépôts sidérolithiques de la chaîne du Jura et des envi - rons de Neuchâtel. Cen’est que dans la partie méridionale du Bassin du Rhône que des couches infra-Tongriennes et Tongriennes de quelque importance bien étudiées par MM. Font an nés etDEPÉRET, se sont formées dans des lagunes saumâtres ou des lacs d’eau douce, en complète discordance sur les terrains plus anciens et s’éten- dant jusque sur les bords de la région alpine, comme à Saint-Geniès (Basses-Alpes). Limites des régions naturelles. I. Vallée du Rhône et Bresse. II. Jura. III. Plaine suisse. IV. Région alpine. CHAPITRE III TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES Comme je viens de le montrer clans le chapitre précédent, la mer s’était retirée de tonte la région, ne laissant comme trace de son ancienne existence que quelques lagunes saumâtres où se for- ment les dépôts à Cêritlies de la plaine Suisse ou du pied des Préalpes (Ocuej, Ralligen). Dans toute la région occupée aujour- d’hui par les Préalpes et par les hautes chaînes calcaires de la Savoie (en exceptant pourtant le synclinal le plus occidental des Bauges Aillon -les-Désert, Leschaux), il n’existe pas de dépôts Tertiaires plus récents que le Tongrien ; toute cette région est émergée et soumise à une érosion très active ; une grande partie des matériaux des dépôts Aquitaniens et Miocènes a en effet été empruntée aux couches Tertiaires plus anciennes1. Dans tout le reste du territoire qui est situé à l’Ouest de la région subalpine, au contraire, c’est-à-dire dans la plaine Suisse, le Jura méridional et le Bassin du Rhône, il existe des dépôts ter- tiaires Aquitaniens et Miocènes. A la fin du Tongrien, dans ces 1 Les dépôts post-Tongriens des Bauges (vallée de Leschaux) ont été étudiés plus haut ainsi que les dépôts du Plateau des Bornes dans la plaine d’Annecy; je n’aurai donc plus à m’occuper de ces régions. 104 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES deux dernières régions s’établissent des lacs plus ou moins étendus où se forment des sédiments à faciès nettement continental : dépôts lacustres proprement dits ou duviolacustres. L’existence de débris de végétaux terrestres dans ces trois régions nous affirme aussi nettement la proximité de continents émergés. Dans la Plaine Suisse existe, comme je l’ai montré plus haut, une vaste dépression sensiblement parallèle au bord actuel des Alpes et où les dépôts Aquitaniens sont en continuité parfaite : 1° à la partie inférieure, avec le Tongrien, tout le long des Préalpes et des chaînes subalpines des environs d’Annecy ; 2° à la partie supérieure, avec les dépôts d’abord lacustres, puis saumâtres et enfin marins du Miocène. La Plaine Suisse constitue une région bien distincte des deux autres et devra, par suite, être étudiée à part. La continuité parfaite qui existe entre les dépôts Aquitaniens et Miocènes a depuis longtemps été constatée par les géologues suisses qui réunissaient ces couches sous le nom de Miocène ou d’étage de la Molasse, l’Aquitanien des géologues français corres- pondant en partie à leur Miocène inférieur. Dans les synclinaux Tertiaires du Jura et dans la vallée septen- trionale du Rhône, il y a, au contraire, indépendance à peu près complète entre l’Aquitanien et le Miocène1. Ces deux régions naturelles étaient déjà, à ces époques, plus ou moins séparées ; aussi nous faudra-t-il faire une étude détaillée des dépôts ter- tiaires : 1° dans la vallée septentrionale du Rhône; 2° dans le Jura méridional et central; 3° dans la Plaine Suisse. 1 Les couches Aquitaniennes présentent cependant partout des couches marneuses rouges dans la vallée du Rhône et le Jura, plus ou moins bariolées au pied du Jura et dans la Plaine Suisse ; les géologues suisses désignent depuis longtemps, à cause de cela, les dépôts Aquitaniens sous le nom de Molasse rouge. M. Haug a également appliqué cette dénomination à des couches des environs de Digne, comprenant non seulement des couches Aquitaniennes mais encore des couches plus anciennes (Saint-Geniès). Le faciès de marnes rouges ou bariolées peut en effet se montrer à différents niveaux du Tertiaire dans des dépôts subcontinentaux; aussi éviterai-je autant que possible d’employer ce mot pour désigner autre chose qu'un faciès. 1 VALLÉE DU RHONE 105 § 1. Vallée du Rhône. L’ Aquitanien à l’état de dépôts marins n’est connu dans toute la vallée du Rhône que dans la partie méridionale, sur une très faible portion de la côte de Provence. Dans tout le reste du Bassin, on ne connaît que des dépôts saumâtres avec Potamides et Gyrènes. Ces dépôts, qui existent dès le bassin de Marseille, sont très développés dans la vallée de la Durance, dans la région de Manosque et de Forcalquier. Au delà, cet Aquitanien saumâtre se suit dans la vallée : au pied du mont Ventoux et dans le Sud du département de la Drôme, à la Garde-Adhémar et Réauville, enfin jusque dans les plateaux d’ Antichamp, au pied de la chaine de Raye ; encore plus au Nord, à la Baume d’Hostun et jusque près de Grenoble, aux environs de Poliénas : c’est là que se trouve le dépôt saumâtre le plus septentrional de l’ Aquitanien. Il n’existe plus aucun autre dépôt saumâtre au Nord de cette région ; aussi, je considère ces couches saumâtres de la vallée du Rhône comme complètement indépendantes de ceux de la plaine Suisse. Ils sont, au pied du Ventoux, en relations intimes avec les dépôts Tongriens sous-jacents, ainsi que plus au Sud. Vers l’Est, lorsqu’on s’approche des premières chaînes des Alpes (région entre Digne et Gap), on voit s’introduire dans ces dépôts un faciès torrentiel, avec des brèches formées d’éléments très variables à peine roulés, des grès rouges micacés, contenant des éléments cris- tallins (serpentine et quartzite), provenant des parties émergées de la chaîne des Alpes. Tous ces dépôts se rattachent intimement les uns aux autres, depuis l’infra-Tongrien(Saint-Geniès) jusqu’à l’ Aqui- tanien tout à fait supérieur (Montmaur, dans leDévoluy) et il devait exister, dans toute cette partie méridionale du Bassin du Rhône, un grand lac, où se déversaient de nombreux torrents, venus des Alpes. Ce lac avait conservé des relations avec le bassin marin situé plus au Sud et plus à l’Ouest, d’où la formation de dépôts saumâtres en un certain nombre de points. Il devait s’étendre jusqu’aux 106 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES environs de la Baume-d’Hostun, où M. Mermier1 a découvert, il y a quelques années, au confluent de la Bourne et de l’Isère, des calcaires marno-sableux, saumâtres à la base et lacustres au sommet avec Hélix Ramondi, Brgt., H. eurhabdota, Font. Au Nord de l’Isère, les premiers dépôts Aquitaniens que l'on rencontre sont ceux du plateau de l’île Crémieu, où ils m’ont été signalés par le Dr Jacquemet. Entre Couvaloup et Montgaudet, ils sont représentés par un calcaire tuffacé ù Hélix eurhabdota , Fontannes, Planorbis cornu , Brgt; ces calcaires passent, à la partie inférieure à des calcaires plus compacts, avec les mêmes fossiles, et reposent sur un conglomérat calcaire rougeâtre. Les couches de calcaire lacustre se retrouvent sur la route de Soleymieu à Cha- nizieu. Les conglomérats sont au contraire bien développés vers Cozance et Carizieu, formés d’éléments calcaires provenant de la région (dans un de ces galets, j’ai trouvé Peliocerasbimammatum) pouvant atteindre une taille considérable, et d’éléments plus fins se désagrégeant facilement à l’air. Les éléments sont ù peine roulés et ont dù subir un transport très faible. Ges conglomérats reposent directement sur les terrains Jurassiques. Ce faciès détritique de l’Aquitanien se retrouve tout le long des premières chaînes du Jura et c’est à cette époque bien caractérisée par ces formations bréchiformes que je rattache la Brèche de Guris du Mont-d’Or L}ronnais. C’est une brèche calcaire reposant sur les calcaires siliceux du Giret et identique à des brèches de la bordure du Jura, franchement Aquitaniennes, comme celles de Chazelles. Jourdan a signalé dans cette brèche de Guris un Didelphe (Peratherium). La brèche de Dardilly serait également de cette époque. Dans la région Bressane, comme l’ont montré MM. Delafond et Depéret2, les calcaires et conglomérats à Hélix Ramondi 1 E. Mermier, Aperçu géologique des environs de la Baume d’Hostun (Drôme). (Annales de la Soc. Linnéenne de Lyon, t. XXXVIII, p. 1, 1891. 2 Delafond et Depéret, Les Terrains tertiaires de la Bresse et leurs gîtes de minerai de fer , 1893. VALLÉE DU RHONE 107 présentent un assez grand développement sur la bordure Ouest, où les conglomérats dominent. On les retrouve à la gare de Dijon avec Hélix Ramondi , Brgt., Hélix Vulcani, Tourn., Cyclostoma (Otopoma) Divionense, Martin sp., et avec les mêmes formes à Buay, à la Chassagne, à Romanèche, à Charentais. C’est égale- ment à l’état de bancs de poudingues et de calcaires lacustres que se présentent ces dépôts le long de la bordure du Jura à Ceyzériat, Meillonnas, Saint-Amour, Cousance, Vincelle1. Dans le centre du Bassin , les dépôts Aquitaniens de Pontailler sont à l’état de calcaires marneux à Hélix Ramondi ; près de Dijon, à Brognon, on a des tufs calcaires à végétaux, étudiés autrefois par de Saforta et dont on retrouve un équivalent dans la colline de Châtillon et dans les tufs à végétaux, signalés récemment parM. Abel Girardot, à Grusse, près de Vincelles (Jura)2. Il y avait donc, à l’époque Aquitanienne, dans la région Bressane, un lac s’étendant, à l’Ouest, jusqu’au Plateau Central, à l’Est jus- qu’aux premières chaînes du Jura. On retrouve encore ces dépôts plus au Sud, le long delà bordure de la première chaîne Jurassienne (anticlinal du mont Tournier), sur le versant Ouest du mont Chaffarou à Rocheron. Ce sont des conglomérats calcaires à éléments Infracrétacés ou Jurassiques, accompagnés de marnes rouges et qui sont identiques aux conglo - mérats bréchoïdes et aux marnes rouges qui forment le sommet du mont Chaffarou, avec lesquels ils devaient être réunis au sommet de leur formation. Toutes ces chaînes jurassiennes, à peine indi- quées à l’époque Aquitanienne, étaient recouvertes par les eaux d’un lac, s’étendant au Nord jusque dans la région de Belley, et à l’Est jusque dans la région de Chambéry. A Rocheron, ces dépôts reposent sur le Jurassique, plus au Sud, sur la bordure de ce pre- mier anticlinal Jurassien; entre Saint-Béron et la Bridoire, les 1 A Coligny, on a un conglomérat calcaire, associé à des calcaires à rognons siliceux où l’on trouve Potamides Lamarcki , Hydrobia Dubuissonni : j'ai rapporté ces derniers plus haut au Tongrien du Nord du Jura. Ces dépôts ont été marqués à tort comme Miocènes sur la feuille de Saint-Claude. 2 L. A. Gira.rdot, Découverte du gisement à végétaux Tertiaires de Grussé (Jurai (Mem. de la Soc. d'émulation du Jura , 1886). 108 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES marnes rouges et conglomérats calcaires qui représentent l’Aqui- tanien reposent sur l’Hauterivien. Après la formation de ces dépôts Aquitaniens, la mer Miocène envahit progressivement la vallée du Rhône. En Provence, entre Carry et Sausset i, il y a continuité parfaite avec l’Aquitanien des premiers dépôts Miocènes (sables et grès molassiques à Peignes et à Huîtres, correspondant aux faluns de Saucats et Léognan,dans le Sud-Ouest). Ces dépôts du Miocène tout à fait inférieur, réprésentés par un conglomérat de gros galets siliceux à patine verte et des sables grossiers à Scutella Paulensis, Ag., ne dépassent pas au Nord les limites de la Drôme. Dans le Nord de la vallée du Rhône, j’ai pu suivre les couches du Langhien des géologues suisses, qui cor- respondent également au Miocène tout à fait inférieur jusqu’aux environs d’Aix-les-Bains, mais entre cette localité et la Drôme, il existe une vaste région où l’on ne connaît, jusqu’à présent, aucun dépôt saumâtre ou lacustre pouvant représenter cet étage.2 La transgression marine continue avec les couches immédiate- ment superposées aux assises à Scutella Paulensis , les marno- calcaires à Pecten 'præscabriusculus , Fontannes, et l’on peut suivre les dépôts du premier étage Méditerranéen dans toute la région orientale delà vallée actuelle, dans les synclinaux du Jura méridional et la plaine Suisse jusqu’au Bassin de Vienne. Dans la vallée du Rhône proprement dite, le long du premier anticlinal Jurassien, la composition de l’assise par laquelle débutent les terrains Miocènes, est assez variable : tantôt, c’est un grès gris bleuâtre, à ciment calcaire, très dur, comme celui que l’on exploite, comme pierre de construction, aux environs delaBridoire, avec des éléments fins ou grossiers ; tantôt, ces grès inférieurs deviennent marneux, s’effritent au contact de l’air et contiennent alors un grand nombre de fossiles, plus ou moins bien conservés 1 Fontannes et Depéret, Les Terrains Tertiaires marins de la côte de Provence ( Etudes strat. période Tert. Bassin du Rhône, fasc. IX, 1889). 2 11 existe cependant dans le Royan un certain nombre de points où il y a continuité parfaite entre les dépôts Aquitaniens et les dépôts marins du Burdigalien, montrant que le Miocène tout à fait inférieur doit être représenté par des couches lacustres ou saumâ- tres, jusqu’à présent sans fossiles (Pont-de-Manne, etc.). VALLEE DU RHONE 109 (Grésiii, Sainte-Marie-d’Alvey, route de la Bridoire à Donnessin). Les grès durs, qui alternent souvent avec ces couches plus tendres renferment de nombreux débris de coquilles, surtout de Peclen L Ces couches, dont l’épaisseur est très variable, sont toujours forte- ment redressées le long du premier anticlinal Jurassien ; elles reposent sur les terrains Crétacés (Cv.) de Champagneux à Sainte- Marie-d’Alvey, où une faille les amène au contact du Jurassique supérieur jusqu’à la Bridoire. Tout le long de la montagne de Raz elles reposent sur les terrains Néocomiens et Urgoniens. Il est à remarquer que les bancs inférieurs, situés au contact des terrains Secondaires, ne présentent aucune différence avec les bancs supé- rieurs ; ce qui montre que l’anticlinal ne constituait pas à cette époque, comme l’anticlinal du mont du Chat qui vient immédiate- ment après vers l’Est, un haut fond dans la mer Miocène. Les fos- siles que l’on recueille sont les suivants1 2 : Chrysophrys helveticus, Ag. (Sainte-Marie-d’Alvey). Lamna cuspidata, Ag. Pecten præscabriusculus, Font., très commun partout. Ostrea gingensis, Hœrnes. Pecten Gentoni. Font, surtout dans les couches gréseuses. Gonns aff. canaliculatus. Phaladomya alpina. Math. Lucina, } à l’état de moules très nombreux. Venus Dujardim, Desch. 1 Patella sp. (Saint-Béron). Echinolampas hemisphericus, Ag. — scutiformis, Leske. Spatangus Deydieri, Cotteau 3 (Le Mollard). — Delphinus.Defr. Psammechinus dubius. Ag. Cidaris avenionensis, Desm., nombreuses baguettes et test dans les grès. 1 La route de Grésin offre une coupe excellente de la base du Miocène et montre la superposition directe aux couches plus anciennes du Secondaire (Jurassique). 2 Le nom de la localité indique que l’espèce citée n’a été trouvée que dans cette localité, les autres formes sont communes aux différents gisements fossilifères. 3 Je donnerai dans le chapitre paléontologique la description de cette espèce de Cotteau qui n’a pas encore été- figurée. iio TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES Les couches fortement redressées ne tardent pas a redevenir sensiblement horizontales très rapidement, lorsqu’on s’avance vers l’Ouest ; c’est ainsi que, déjà avant la vallée duGuiers, entre Saint - Genis d’Aoste et Pont-de-Beauvoisin toutes les couches sont hori- zontales. Ces couches de Molasses marno-calcaires disparaissent sous des couches plus récentes formant, à l’extérieur des chaînes Jurassiennes, une bordure presque continue. On la suit depuis la vallée du Rhône à Champagnieux par Grésin, Sainte-Marie d’Alvey, Chaille, interrompue un moment par la grande plaine alluviale de l’Isère; elle se retrouve le long des chaînes extérieures de Vercors pour rejoindre les dépôts contemporains du département de la Drôme. Plus à l’Ouest, on ne connaît aucun dépôt marin pouvant se rapporter à cette époque et l’absence du premier étage médi- terranéen le long des massifs anciens de la vallée (Ghamagnieu, Grémieu, Saint-Quentin) nous empêche de donner les limites occi- dentales exactes de la mer Burdigalienne ; elle ne devait cependant pas dépasser beaucoup le méridien de Belley, car les sondages effectués dans la vallée du Rhône même le plus occidental (celui de Ghamagnieu), n’ont révélé, en profondeur, aucun dépôt pouvant se rapporter à cette période, alors qu’ils révélaient au contraire l’importance de l’Aquitanien dans le sous-sol de la vallée actuelle du Rhône. Au-dessus de ces premières assises, l’on trouve, aussi bien dans la région extérieure aux chaînes Jurassiennes que dans les synclinaux internes où le second étage méditerranéen est repré- senté, une série puissante de couches sableuses d’abord assez con- sistantes à la base l, devenant de plus en plus sableuses et friables à mesure qu’on s’élève dans la série, avec intercalations de bancs devenus gréseux, lenticulaires, qui surplombent. Ges bancs degrés de couleur gris bleuâtre, sont exploités depuis fort longtemps 1 Vers SainteéMarie d’Alvey, ces couches inférieures (route du col de la Crusille) sont à l’état de marnes argileuses fines micacées avec fossiles très rares rappelant tout à fait le faciès des couches correspondantes de l’Etang de Berre près Istres. Ou y trouve Peclen Gentoni, Font., Echinolampas hemisphericus, A g. VALLÉE DU RHONE 111 comme dalles (Voreppe, environs de Chambéry, vallée de Rumilly). On rencontre fréquemment quelques lits marneux inter- calés, avec traces charbonneuses. Les fossiles entiers y sont excessi- vement rares quoique les débris de coquilles y soient fréquents. J’ai pu reconnaître presque partout O. gingensis Hoern. O. crassis- sima Lam., et dans les couches supérieures bien développées dans toute la vallée du Guiers, à Pont-de-Beauvoisin(routedelaBridoire, près du hameau du Pin) : Natica helicina, Brocch. Pecten Gentoni, Font. Balanus, sp. Le Pecten præscübriusculus persiste dans la plus grande partie de ces couches. Dans toute la région avoisinant Pont-de-Beau- voisin ou dans la vallée d’Aiguebelette, ces couches sableuses ne contiennent comme galets que de rares cailloux de quartz roulés et de taille assez faible. Ces couches sont bien développées dans toute la région de Pont- de-Beau voisin, Saint-Genis-d’ Aoste : le lit du Guiers depuis sa sortie de la cluse de Chaille presque jusqu’au Rhône est entière- ment creusé dans ces assises dont la route qui va de Pont-de- Beauvoisin à la gare nous offre une magnifique coupe. Elles repo - sent en parfaite concordance de stratification sur les couches à P. præscabriusculus et il y a souvent passage insensible entre les différentes assises. Aussi je les considère comme formant une zone intermédiaire entre le premier et le deuxième étage Méditérranéen constituant ce que j’appellerai la zone de Molasse sableuse à Ostrea gingensis et O. crassissima et correspondant tout à fait aux couches analogues de la vallée moyenne du Rhône également à cheval sur ces deux divisions du Miocène moyen et du Miocène inférieur. Ces couches ne dépassent guère à l’Ouest le Guiers. On les retrouve plus au Sud, formant, comme les couches inférieures, une bordure parallèle aux chaînes Jurassiennes. On ne connaît pas de dépôts correspondants plus à l’Ouest dans la vallée du Rhône et la limite d’extension doit correspondre 112 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES à peuprès à celle de la Molasse à Pecten præscasbriusculus. Elles disparaissent également sous les couches plus récentes avec lesquelles il y a souvent passage insensible, ce qui rend la limite exacte assez difficile à préciser ; c’est ainsi qu’à l’Est de la vallée du Guiers, entre Pont-de -Beauvoisin et les Abrets, aux Sablons, on constate, au-dessus de ces couches de Molasse sableuse, des couches de sables très friables jaunâtres alternant avec des lentilles de grès caillouteux où j’ai recueilli : Pecten substriatus, d’Orb. Dents de squales. Balanus porcatus, da Costa. et nombreux Bryozoaires. ce sont des dépôts marins dont la faune et le faciès rappellent tout à fait les dépôts de Saint-Fonsaux environs de Lyon ou le faciès des sables à Tèrébratulines et a Pecten Gentoni de la vallée moyenne du Rhône, qui appartiennent déjà au second étage méditerranéen (Vindobonien deM. Depéret). Dans cette région, le Miocène marin comprenden outre des dépôts sableuxjaunes grisâtres avec bancs de grès lenticulaires et nombreux lits de cailloux dépôts très fossilifères à Aoste, Bas-Leyssin, Chimilin, Veyrins, Saint-Sorlin, les Ave- nières, Corbelin, d’une manière générale, sur toute la bordure orientale des plateaux du Bas-Dauphiné septentrional. Parmi les nombreuses espèces que j’ai recueillies à ce niveau et dont l’étude fera l’objet d’.un chapitre spécial, je citerai comme particulièrement caractéristiques : Area Turonica, Duj. Cardita Michaudi, Tourn. Pecten improvisas, F. et T. Ancilla glandiformis, Lam. Ostrea crassissima, Lam. Murex, Trochus, Nassa, de petites tailles, formes très nombreuses. Ges dépôts sont synchroniques (avec peut-être cependant un caractère un peu plus ancien) des marnes de Cabrières du Sud du Bassin du Rhône. A la partie supérieure de ces couches, apparaissent déjà termi- nant le Miocène moyen, des assises sableuses renfermant des fossiles terrestres ou d’eau douce comme : VALLÉE DU RHONE ' 113 Hélix Delphinensis, Font. — Abrettensis, Font. Auricula Lorteti, Font. Pisidium, nov., sp. Le reste des dépôts Tertiaires de cette bordure orientale du Nord du Bas Dauphiné se présente comme un puissant amas decailloutis avec lits sableux et marneux dont je m’occuperai un peu plus loin. C’est avec ces dépôts du second étage Méditerranéen (Helvétien , Tortonien) que la mer Miocène atteint dans la vallée du Rhône, comme dans le Jura et la Plaine Suisse, son maximum d’extension. Dans la vallée du Rhône et le Jura méridional, la limite orientale delà mer du second étage Méditerranéen est sensiblement la même que celle du Miocène inférieur : je connais, en effet, en Savoie, des dépôts du Miocène moyen dans la vallée de Rumilly, vallée la plus orientale où l’on ait signalé des dépôts marins du Miocène inférieur ; mais il n’en est pas de même à l’Ouest. M. Depéret1 a fait voir que, dans la vallée du Rhône, la limite d’extension de la Molasse sableuse suivait de très près le bord des terrains cristallins du Plateau Central ; vers Lyon, le petit massif du Mont-d’Or et ses dépendances lui servaient sensiblement de rivage au Nord. Il y a donc nettement une transgression vers l’Ouest de la mer Miocène à l’époque du Miocène moyen, transgression encore marquée par l’existence de la Molasse marine au-dessus des dépôts sidéroli— thiques à ossements de Vertébrés de la Grive-Saint-Alban. Les mouvements d’émersion E.-W. que nous avons déjà constatés pen- dant la période Nummulitique, dans la chaîne des Alpes, ont con - tinué à se faire sentir, rejetant peu à peu vers l’Ouest, l’axe du synclinal marin, jusqu’à le faire coïncider, au Pliocène inférieur, avec la vallée actuelle du Rhône. On retrouve des dépôts du second étage Méditerranéen dans la région occidentale de la vallée du Rhône. Ce fleuve s’est creusé son lit dans ces formations, qui constituent ce que l’on désigne sous le nom de sables de Saint-Fons, On les retrouve, en effet, non 1 Ch. Depéret, Sur la classification et le parallélisme du système Miocène (Bull. Soc. géol. de France, 3e série, t. XXI, p. 170, 1893). Univ. de Lyon — Douxami. 8 114 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES seulement dans cette localité sur la rive gauche du Rhône, mais encore sur la rive droite, près d’Irigny, où ils reposent sur le granité. Ils forment, sur la rive gauche, des escarpements qui dominent à pic, d’une quarantaine de mètres, la vallée for- mant les collines connues sous le nom deBalmesde Saint-Fons et s’étendant au Sud jusqu’à Sérézin. Ce sont des sables tins, micacés, s’agglutinant, grâce à un ciment calcaire, postérieur au dépôt des couches, en grès plus ou moins saillants dont les formes bizarres rappellent plus ou moins grossièrement dans certains cas des Bélemnites; en général, à la pointe se trouve un fossile (valve de Balane, débris de Pecten) qui a dû jouer un rôle dans la formation de ces concrétions. Certaines surfaces sont ondulées rappelant tout à fait ce qui se produit dans les dépôts sableux, au fond des eaux peu profondes, sous l’action du vent. Ces couches présentent des galets arrondis, très petits (les plus gros atteignent la taille d’une noisette), formés par du quartz roulé, parfois très transparent, des silex, rappelant ceux de la Craie, des calcaires et des porphyres, des débris de Bélemnites, de la Craie et de nombreuses paillettes de mica blanc F Ces dépôts sont d’ailleurs franchement littoraux, car on y trouve, en outre, des lits de galets marneux, roulés qui ont été apportés dans ces eaux marines par des torrents descendant du Plateau Central français, alors complètement émergé. Ces couches, le long des Balmesde Saint-Fons, sont restées sen- siblement horizontales et se trouvent à une altitude de 200 mètres, inférieure, de près de 100 mètres, aux premiers dépôts du Miocène supérieur de la région. Les dépôts qui manquent correspondent aux sédiments marins sableux de la zone de Chimilin, à Area Turo- nica et Ancilla glandiformis. Ces couches, comme dans toute la vallée moyenne du Rhône, contiennent de nombreux fossiles, de petite taille en général ; les Brachiopodes et les Bryozoaires dominent ; les principales formes que l’on peut recueillir dans les Balmes de Saint-Fons sont les suivantes : 1 La plupart de ces éléments proviennent du Plateau Central qui servait alors de rivage à la mer Miocène, comme on l'a vu plus haut. VALLÉE DU RHONE 115 Lamnacuspidata. Ag. — Sauvagei, Locard. Calianassa minor, Fisch. Balanus tintinnabulum, Linné. — porcatus, de Costa. Tetraclita Dumortieri, Fischer. Scalaria cristata, Grateloup. Fissurella Chantrei, Locard. Patella Tholloni, Michaud. — Rhodanica, Locard. Pecten substriatus, d’Orbigny. Ostrea digitalina, Duj. (var. lamel- osa). Ostrea crassissima, var . minor , Locard . Lima squamosa, Lamarck. — inflata, Chemnitz. — Dumortieri, Loc. Teredo, sp. ind. Terebratulina calathiscus, Fischer. Argiope decollata, Chemnitz. — neapolitana, Scacchi. Portunus, sp. ind. Cancer, sp. ind. — critellula, Wood. Thecidium mediterraneum, Risso. Crania abnormis, Defrance. Cidaris Munsteri, Sismonda. Vincularia marginata, Reuss. — exarata, Reuss. Eschara varians, Reuss. — lamellosa, Michelin. Eschara, sp. ind. Retepora cellulosa, Linné. Porina Sedwigcki, Mil. Edw. Idmonea sercatopsia, Reuss. — Schlumbergeri, Locard. Radiotubigera Lorteti, Locard. Discoparsa, nov. sp. Hornera audegavensis, Michelin. Hornera, sp. Ceriocava arbusculum, Reuss. Enfin, on a trouvé dans ces sables quelques restes de Vertébrés Testudo antiqoa, Bronn, portion du plastron Ætobates arcuatus, Agassis (aiguillon caudal). Ces dépôts sont très développés au Sud de la région, où ils attei- gnent d’après Fontannes, une épaisseur de plus de 200 mètres et correspondent alors en certains points à l’ensemble du second étage Méditerranéen. Aux environs de Lyon et dans les plateaux du Dauphiné septentrional, ils ne constituent que la partie inférieure du Miocène moyen (Helvétien s. s.). Le Miocène moyen comprend encore une centaine de mètres de sables jaunes plus grossiers, avec lits caillouteux à Area turonica et Ancilla glandiformis (Tortonien) Ils n’affleurent que beaucoup plus à l’Est, vers Aoste et Chimilin, et existent également en profondeur, sous les alluvions Quaternaires de la vallée du Rhône, où ils ont été révélés par des sondages. llü TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES L’ensemble de la faune de Saint-Fons (Bryozoaires et Bra- chiopodes) caractérise des dépôts se produisant sous la mer. à une profondeur d’une centainede mètres ; le voisinage du rivage explique en même temps la présence de cailloux roulés et de formes plus littorales ( Ostracès , Pectinidès). La mer du second étage Méditerranéen a atteint au Nord la ville de Lyon. On trouve, en effet, dans la ville même, des dépôts marins Miocènes, mais présentant alors, tout à fait, un faciès littoral : il y avait là un rivage. Le promontoire de gneiss et de granité qui constitue le soubassement des plateaux de Fourvièreet de la Croix- Rousse, coupé en cluse par la Saône, montre, à l’ancien Jardin des Plantes de Lyon, dans les -tranchées des deux funiculaires de la Croix-Rousse, dans celles de la gare Saint-Paul, à Gorge-de- Loup et à la surface irrégulièrement ravinée des gneiss et mica - schistes, des sables grossiers ferrugineux et des marnes ocreuses micacées avec de nombreux fossiles marins (en général à l’état de moules) ; leur épaisseur est de 0m60 à 0m80. On peut citer de ces différentes localités les formes suivantes1: Poissons. . . . Lamna caspidata, *Ag. — Sauvagei, *Loc. Galeocerdo, sp. Myliotatis, sp. Crustacés. . . Portunus aff. puber., * Fabr. Callianassa minor, * Fischer. Balanus tintinnabulum, ‘ L. — lœvis, Brug. — porcatus, da Costa. Tetraclita Dumortieri, Fisch. Cthamalus Revillei, Locard. 1 Ces dépôts marins de la ville de Lyon sont connus depuis fort longtemps et ont été signalés et étudiés par MM. Jourdan, Fournet, Dumortier1, Locard 2, Fontannes3 4, Fischer, et plus récemment par MM. Delafond et Depéret 1 (loc. cit., la Bresse). Je ne fais que résumer ici les travaux de ces différents auteurs afin de donner un aperçu com- plet des formations Tertiaires de la région que j'ai étudiée. 1 Dumortier, Ann. soc. agricult., Lyon, 1858. 2 Locard, Arch. Muséum de Lyon, t. II, 1879, 3 Fontannes, Ann. soc. agricult., Lyon, 1S74. 4 Delafond et Depéret, La Bresse, loc. cit . VALLEE DU RHONE 117 Céphalopodes. . Belosepia, sp„ Gastéropodes . (Surtout à l’état de moules, de Murex, Fusus, ;Triton, Cancellaria, Mitra, Cypræa, Ancilla, Turbo, etc. Chrysodomus aff. Hœrnesi, Bell. Trocbus Tholloni, Mich. — Hœrnesi, Mich. — n. sp. — fanulum, Otmel. Haliotis tuberculata, L. Fissurella græca, L. — Lugdunensis, Font l. Patella Tholloni, * Mich. (= Patella cœrulea, L. var. vacuensis, Font. (1). — Tournoueri, Font. — Rhodanica, *Loc. — Ararica, Font. Lamellibranches Ostrea digitalina, * Dub. (non lamellosa, in Loc.). — crassissima, * Lam., var. minor. Anomia ephippium, L. — cf striata, Brocchi. — cf patelliformis, L. Pectensubstriatus, * d’Orb. Lima squamosa, * Lam. — Dumortieri, * Loc. — inflata , ' Chemn. Area barbata, L. — cf lactea, L. Lucina cf columbella, Lamk. Cardita Michaudi, Tourn. Pholas Dumortieri, Fisch. Moules de Venus, Tellina, Gastrochæcna. Brachiopodes . Terebratula manticula, Fisch. Terebratulina calathiscus, Fisch. Argiope decollàta, Chemn. Tbecidium méditer raneum, *Risso. Nombreuses espèces de Bryozoaires. Echinides . . . Cidaris Munsteri, * Sism. 1 Fontannes, Description des esp. nonv. ou peu connues (Etudes Tertiaires du Bassin du Rhône, fasc. V, 1879). 118 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES Echinides . . . Psammechinus, sp. Polypiers. . . Dendrophyllia Colonjoni. Fisch. A côté d’espèces tout à fait caractéristiques de la faune de Saint - Fons (ce sont celles qui ont été marquées dans la liste précédente d’un astérique), l’on rencontre un grand nombre de formes qui existent dans la partie supérieure du deuxième étage Méditerra- néen, des Gastropodes nombreux, des Troques et des Turbos. Aussi admettrons-nous que, malgré leur peu d’épaisseur, ces couches doivent représenter la plus grande partie du Miocène moyen et même sans doute se continuer jusqu’au début du Mio- cène supérieur (Pontique)1, comme le prouve l’existence dans un conglomérat ferrugineux analogue, vallée de la Saône (au pont du Vernay 2 ; tunnel de Caluire ; Gorge-de-Loup) avec les formes précédentes de la Nassa Michaudi Thiol. et du Melampus Delocrei Midi, qui caractérisent dans la région lyonnaise la base du Pontique. Il y aurait là comme à Tersanne passage insensible du niveau à Terebratulina calathiscus aux niveaux plus élevés déjà saumâtres. Au Nord-Ouest de Lyon, il est beaucoup plus difficile de préciser la limite occidentale de la mer Vindobonienne ; on retrouve seule- ment des dépôts Molassiques marins, tout le long de la bordure du Jura, jusqu’au Nord vers Goligny, sous des dépôts appartenant nettement au Miocène supérieur. La mer du deuxième étage Méditerranéen occupait donc la plus grande partie de la vallée actuelle du Rhône et, comme je le mon- trerai plus loin, de la région du Jura. Elle laissait cependant certaines parties émergées, où vivaient de nombreux Verté- brés dont les restes ont été conservés. C’est en effet au début du Miocène moyen qu’il faut rapporter la période de formation des dépôts sidérolithiques de la Grive -Saint-Alban, du Mont Ceindre, au-dessus de Vieux-Collonges dans le Mont d’Or Lyonnais, les dépôts du calcaire de Préty, près Tournus, de la citadelle de Gray 1 Le mot Pontien plus conforme aux règles de la nomenclature géologique est égale- ment employé. 2 Fai.san, Etud. posit. stratigraphique, tufs, de Meximieux (Arcli. Mus. de Lyon, t. I, p. 14, 1819). VALLÉE DU RHONE 119 (Haute-Saône). La faune de ces gisements extrêmement riche), en particulier à la Grive -Saint-Alban, a fourni de nombreuses formes de Vertébrés, magistralement étudiées par M. Depéret 1 ; en dehors de nombreuses espèces, surtout de carnivores, d’in- sectivores et de Lacertiens qui restent encore à étudier, les espèces suivantes ont été trouvées : Singes . . . Chiroptères . . Pliopithecus antiquus, Lartet, race Chantrei, Dep. . Vespertilio Grivensis, Depéret. Vesperugonoctuloïdes, Lartet. Rhinolophus Lugdunensis, Depéret (mont Ceindre. — Collongensis, Depéret (mont Ceindre). Carnassiers . . Machairodus Jourdani, Filhol. Œlurogale intermedia, Filhol. Pseudaelurus quadridentatus, Gervais. — transitorius, Depéret. Lotra Lorteti, Filhol. — dubia, Blainville. Insectivores. Martes Filholi, Depéret. — Delphinensis, Depéret. Trochictis hydrocyon, Lartet. Plesictis (Haplogale mutatus, Filhol). Plesictis, sp. Herpestes crassus, Filhol. Viverra aff. steinheimensis, Fraas. — leptorhyncha, Filhol. Progenetta incerta, Lartet, sp. Dinocyon Thenardi, Jourdan. — Gôriachensis, Toula ( — LausilDrdi, Pomel). Amphicyon major, Blainv. . Erinaceus sansaniensis, Lartet. Galerix exilis (Blainv, Parasorex socialis, v. Meyer). Talpa teliuris, Pomel. Dimylus paradoxus, v. Meyer. Sorexpusillus, v. Meyer, race Grivensis, Depéret. 1 C. Depéret, La faune des Mammifères miocènes de la Grive-Saint-Alban (Isère) (Arch. du Mus. de Lyon , t. V, 1892). — Travaux ant. de C. Jourdan. C. B. Acad, des Sc. vol. LUI, p. 959 et 1099, 1861; Fjlhol, Arch. Mus. de Lyon , t. III, p. 43 et 56, 1885; E. Chantre, Soc. anthr. de Lyon , t. III, p. 187, 1884; C. Depéret, Vertébrés mio- cènes du Bassin du Rhône (Arch. Mus. de Lyon , t. IV. p. 64, 1887). 120 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES Rongeurs . . . Steneofiber sansaniensis, Lartet (Gray., citadelle). Sciurus spermophilinus, Depéret. Myoxus (Eliomys) sansaniensis, Lartet. Cricetodon Rhodanicum, Depéret. — medium, Lartet. — minus, Lartet. Prolagus Meyeri, Tschudi. Lagomys (Lagopsis), verus, Hensel. Proboscidiens. . Mastodon angustidens, Cuv. Dinothérium giganteum, Kaup., racelevius, Jourdan. Pachydermes. *. Anchitherium Aurelianense, Cuv. Rhinocéros sansaniensis, Lartet. — brachypus, Lartet. Macrotherium grande. Lartet, race Rhodanicum, Depéret. Listriodon splendens, v. Meyer. Hyotherium Sœmmeringi, v. Meyer, race Grivense. Depéret. Chœromorus pygmœus, Depéret. Ruminants. . Pro tragocerus Chantrei, Depéret. Hyœmoschus Jourdani, Depéret. Palæomeryx magnus , Lartet. Micromeryx Flourensianus, Lartet. Dicrocerus elegans, Lartet. il faut citer en outre parmi les Reptiles : Chéloniens . Testudo aff. antiqua. Bronn. Emys. Cistudo. Sauriens . . . Lacerta, taille de l’ocellata. Oiseaux . . Anas aff. consobrina, M.-E. Palœortyx Edwarsi, Depéret. Phasianus altus, A. Milne Edwards. Phasianus, sp. Picus Gaudryi, Depéret. L’âge est exactement celui de l’horizon classique de Sansan (Gers) avec cependant, d’après M.Depéret, un caractère unpeu plusjeune, ce qui le fait tout à fait synchronique des dépôts de la Molasse d’eau douce supérieure de la Suisse orientale (Ellg. Kapfnach), du Wurtemberg (Steiuheim), de Bavière (Georgensmund, Ries Güns- burg),etc. Le plateau de calcaire Bathonien de la Grive-Saint- Alban MIOCÈNE SUPÉRIEUR (PONTIQUE) 121 n’a été recouvert par la mer qu’à la fin du Miocène moyen. Pans les dépôts marins du second étage Méditerranéen, ces restes de Mammifères si importants pour le synchronisme exact des dépôts Tertiaires sont très peu nombreux. Fontannes1 a cité le Mastodon angustidens Guv. au sommet des couches marines à Ostrea crassis- sima des environs de Digne qui terminent le Miocène moyen et M. Leenhardt, des couches à Cardita Jouanneti de Sorgues (Vaucluse); et dans la région dauphinoise en outre des dents de Squales, d’après Gervais 2 et van Beneden 3. Phocidés . . . Pristiphoca. Mysticktes . . Plesiocetus Gervaisi, van Bened. Gétodontes . . Hoplocetus crassidens, Gerv. Squalodon. Champ sodelphis acutus. G. et B. Schizodelphis planus, G. et B. Associés avec des ossements de Dinothérium giganleum , Lis- trodon splendens , Rhinocéros. Toutes ces formes se rapportent encore à l’horizon mammalogique de Sansan. Enfin, dans la région du Nord du Dauphiné, des débris de Dinotherum , au pont de l’Herbane près Romans, à Brin, près Saint-Donat, aux environs de Vienne (2 molaires) et Dicroceros (bois), à Gourep, près Saint-Donnat. Miocène supérieur (Pontique). — La mer qui, avec le Vindobonien a atteint son maximum d’extension dans la région Rho- danienne, comme dans la Plaine Suisse et le Bassin de Vienne, com- mence à se retirer vers le Sud. Déjà, dans le Dauphiné méridio- nal (environs de Grest et de Valence), les sables à Terebratulina calathiscus, qui constituent tout le Miocène moyen, passent à la partie supérieure à des marnes ligniteuses et à des sables (Mont- vendre) renfermant une faune légèrement saumâtre ayant la plus grande analogie avec celle des dépôts saumâtres qui existent à la 1 Fontannes, Sur la découverte de débris de Mastodontes dans la Molasse marine des environs de Digne (Ann. Soc. agric. de Lyon, 1886). 2 Gervais, Zoologie et Paléontologie française, 2e éd., p. 346 notes. 3 Gervais et van Beneden, Ostéogr. des cétacés vivants et fossiles. 122 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES base des dépôts Pontiques du Bas Dauphiné septentrional ; la forme caractéristique Nassa Michaudi Tkiol. a été constatée dans cette région près de Génissieux, à Arthenonay, et un peu plus au Nord, à Tersanne. Plus au Sud encore, dans la vallée du Rhône, il en est de même : on ne connait pas, dans toute cette vallée, de dépôts Pontiques franchement marins. Dans la région de Cucurou , on a des calcaires et marnes d’eau douce à Hélix Christoli et Mela- nopsis Narzolina , passant à la partie supérieure aux limons et cailloutis à Hipparion qui ont fourni la belle faune de mammifères connue sous le nom de faune du Léberon. Vers Forcalquier et Digne, tout le Miocène supérieur se présente à l’état de cailloutis impressionnés avec quelques bancs de calcaire lacustre intercalés; de même dans le Comtat pour la partie supérieure du Miocène. L’étude des dépôts Pontiques des environs de Lyon va nous présenter des faits comparables à ceux que je viens de passer rapi- dement en revue pour le reste de la vallée du Rhône. Ces dépôts Pontiques constituent la série de Plateaux découpés par les cours d’eau, qui s’étend au Nord de l’Isère, entre cette rivière et le Rhône. Ils sont restés sensiblement horizontaux et se relient de la façon la plus nette aux dépôts marins que j’ai étudiés plus haut, dans la partie orientale de cette région. Scipion Gras1 range tous les terrains de ces plateaux dans son terrain lacustre supérieur composé, dit-il « de marnes argileuses et sableuses renfermant la couche à lignites de la Tour-du-Pin et de Pommiers ». Ch. Lory2u donné une excellente analyse fort exacte de ces formations situées au-dessus des couches de Molasse sableuse de Pout-de-Beauvoisin où l’on commence, d’ailleurs, déjà à voir appa- raître des lits de véritables poudingues à cailloux impressionnés au milieu de ces couches sableuses. Les cailloutis augmentent et deviennent de plus en plus prédominants à mesure que l’on s’élève 1 Scipion Gras, Carte géologique du département de l’Isère avec légende, 1863. 2 Ch. Lory (loc. cit.), p. 602 et suivantes. lin] ; ! MIOCÈNE SUPÉRIEUR (PONTIQUE) 123 dans la série des couches. Cet auteur leur rattache les poudingues de Voreppe. L’existence de coquilles marines aux Abrets (zone de Saint-Fons), à Leyssin, et dans des couches sableuses (d’ailleurs toujours inférieures à la masse principale des poudingues), ainsi que la grande analogie avec les conglomérats inférieurs franchement ma- rins de Voreppe ou de Proveysieux, avaient amené Ch. Lory à con- sidérer l’ensemble de ces formations comme marines et à admettre l’existence de la mer jusqu’à la fin du Miocène dans cette région. Fontannes1, après avoir étudié le vallon de la Fuly où les dépôts Politiques de la zone inférieure à Nassâ Michaudi ont été repris et remaniés par les alluvions anciennes, émet l’opinion que « bon nombre des conglomérats Tertiaires de cette région — qu’on y trouve ou non des cailloux impressionnés — se réduiraient, s’ils étaient mieux connus, à de simples revêtements plus ou moins épais d’alluvions empruntant leur ciment et leurs fossiles aux sables Tertiaires auxquels ils sont superposés », et il assimile ainsi, aux cailloutis Quaternaires de la Fuly, d’Oytier, les con- glomérats de la Tour-du-Pin, d’Evrieu, du Ballon. Les divergences d’opinions de ces différents auteurs étaient donc considérables, et seule l’étude précise de ces dépôts m’a permis, comme je l’ai indiqué dans une note antérieure2 de faire la part exacte de vérité qu’il y avait dans ces différentes assertions. C’est à Fontannes, en particulier, que l’on doit les premiers ré- sultats précis sur la composition exacte du Miocène supérieur dans le Nord du Dauphiné. Dans l’étude à laquelle je viens de faire allu- sion un peu plus haut, il a montré de la façon la plus nette que le Pontique débutait par une assise de sables fins, gris ou ferrugineux, parfois grossiers, à stratification tourmentée, où abonde la Nassa Michaudi , Tbiol (d’où le nom de Zone à Massa Michaudi , sous lequel sont généralement désignées ces premières assises). Ce niveau affleure dans les environs d’Heyrieu, à la base des petites collines qui surmontent la plaine d’alluvions d’une cinquantaiue 1 Fontannes, Etudes stratig'. tertiaire Bassin du Rhône, I, le vailon de la Fuly. 2 H. Douxami, Sur le Miocène des environs de Bourgoin et de la Tour-du-Pin (C. R. Ac. des sciences, 17juin 1895). 124 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES de mètres. Ces premiers dépôts Politiques sont à l’altitude moyenne de 270 mètres, c’est-à-dire d’une centaine de mètres au-dessus du niveau des sables marins de Sain-Fons à Terebratulina calathiscus1 2 dont ils sont séparés, comme il est facile de le consta- ter plus à l’Ouest, par l’ensemble des dépôts de la zone à Area Turonica et Ancilla glandiformis , qui n’existe ici qu’en profon- deur. La coupe suivante, publiée par M. Depéret’, nous donne la composition moyenne de ces assises inférieures du Poli- tique (fig. 12). ■Rdg P* C E 32 0~ • w Fig. 12. — Coupe de la Base du Miocène supérieur du Compagnon près Heyrieu. 1 Zone à Nassa Michaudi ; 2 Marnes et Sables à Hélix Delphinensis, s Sables m Marne; P Pliocène supérieur; LLehm; a 16 Basse terrasse quaternaire. 1° Zone sableuse assez grossière, avec de nombreux galets mar- neux qui contiennent surtout les formes fluviatiles et terrestres, d’une épaisseur moyenne de 10 mètres. 2° Alternance de sables tins Molassiques et de marnes argi- leuses parfois légèrement charbonneuses (au Compagnon, il y a trois de ces niveaux marneux) avec rares fossiles de la zone infé- 1 Dans toute cette région les dépôts Miocènes sont restés sensiblement horizontaux jusqu’au delà du Guiers à l'Est; ils ne se relèvent vers l’Est que de 1 mètre par 300 mètres. 2 Depéret, Compte rendu de la course à Heyrieu, la Grive-Saint-Alban (B. S. G. 3e série, t. XXII, p. 611, 1895). MIOCÈNE SUPÉRIEUR (PONTIQUE) rieure, ce sont les sables et marnes à Hélix Delphinensis de Fon- tannes1 2. Au-dessus on voit apparaître des sables fins gris jaunâtres, que recouvre une nappe de galets de quartzites alpins du Pliocène su- périeur, et le Lehm (ou Loess) quaternaire; le Miocène supérieur n’est représenté ici que par ses assises tout à fait inférieures. Ces couches ont fourni dans la région d’Heyrieu (Rageat, butte de Toussieu-Chandieu, etc.) de nombreux fossiles marins, et des formes terrestres ou fluviatiles, je citerai : ainsi que des débris de pétiole d’un Palmier et des restes de l’ Hipparion gracile Kaup, qui caractérise si nettement par son apparition le Miocène supérieur. Cette zone inférieure, d’abord connue aux environs d’Heyrieu, a été signalée plus au Sud, à Hauterive, et récemment par M. Depéret, encore beaucoup plus loin dans la région de Valence. On la retrouve également vers l’Est ; je l’ai signalée en effet sur toute la bordure occidentale des plateaux qui s’étendent entre Bourgoin et la Tour-du-Pin, ainsi que dans les vallées d’érosion qui découpent ces plateaux à Domarin, dans la vallée de Saint- Agnin, de Saint-Savin, de la Bourbre, de Saint-Chef). Partout elle se présente avec les mêmes caractères : ce sont des sables plus ou moins ferrugineux, avec des galets marneux, surmontés d’un 1 II ne faut pas confondre ce niveau marneux (comme le voudrait Lory) à cause des traces de lignites qu'on y rencontre avec le niveau de la Tour-du-Pin qui se trouve à 100 mètres au-dessus. Triptvchius Terveri, Michaud. Limnæa heriacensis, Fontannes. Planorbis Thiollierei, Michaud. Hélix Gualinoi, Michaud. — Delphinensis, Font. — Escoffierae,Font. Bvthinia tentaculata var. L. Cyclostoma Falsani, Font. Hélix Chaixi, Michaud var. mio- — Heriacensis, Font. — submarginatus, Christ. cène. 126 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES ensemble de marnes et sables à Ilelix Delphinensis Font, l'en- semble atteignant une épaisseur d’une trentaine de mètres et constituant dans toute la région un niveau d’eau assez constant. Elle présente partout la même faune saumâtre ou d’estuaire que nous avons constatée aux environs d’Heyrieux. L'altitude moyenne à laquelle affleure cette zone est de 270 mètres au-dessus du niveau de la mer. Les formes les plus communes que j’ai rencon- trées sont, avec la Nassa Miahaudi Thiol, partout très abon- dante, Hélix Delphinensis , Hel. Chaixi1 , H. Gualinoi , Trïp- tychict Terveri , Auricula Viennensis, A. Lorteti et Zonites Colonjoni, que j’ai rencontrées aux environsde Bourgoin, dans les couches marnoy-sableuses supérieures. 1 Sables marneux (Vinclobonien) ; 2 Sables à Nassa Michaudi (Pontien) ; 3 Marnes et Sables à Hélix chaixi ; 4 Poudingues avec lits sableux et lit marneux 6; 5 Sables et Grès jaunâtres sans fossiles; 7 Poudingues; 8 boue glaciaire. Les coupes suivantes prises aux environs de Bourgoin montrent (coupe de Maubec, fig. 13) les relations de cette zone saumâtre avec les sables fins, gris, qui appartiennent encore au Miocène moyen marin, qui affleurent dans la plaine de Bourgoin. Cette 1 L. H. Chaixi qui a été créé par Michaud pour une forme pliocène et qui commence dés le Miocène supérieur est toujours facile à distinguer dans les dépôts miocènes par sa forme plus petite et son ombilic moins accentué. t V.. Fig. 13. — Coupe de Bourgoin à Maubec. MIOCÈNE SUPÉRIEUR (PONTIQUE) 127 coupe montre également l’apparition d’une puissante formation de poudingues entremêlés de lentilles sableuses ou gréseuses, de lits et de galets marneux contenant parfois des fossiles terrestres ou d’eau douce ; c’est la formation si bien décrite par Lory. La coupe de Saint-Sorlin montre également les relations de ccs assises supérieures avec les couches saumâtres (fig. 14), i Marnes sableuses avec lits de cailloux et N. Michaudi; 2 Sables et au-dessus grés avec cailloux de quartz bien roulés; 3 Sables marneux ; 4 Sables avec nombreux cailloux roulés; 5 Poudingue; 6 Grès durs; 7 Poudingues avec bancs de grès intercalés. et la coupe de Gessieu, prise E.-W. sensiblement, met en évidence de la façon la plus nette les variations latérales nombreuses que présente cette formation (fig. 15). De ces coupes, il résulte déjà : 1° Que la zone à Nassa Michaudi existe dans celle ré- 128 TERRAINS AQU1TANIENS ET MIOCÈNES gion au -dessus des couches tortoniennes d'Aosle et de Chimdin ; 2° Et que V ensemble des poudingues surmontant nettement les dépôts de cette zone appartient a la partie moyenne et supé- rieure du Pontique. ■ , » 1 Sables marneux bleus à .Y. Michaudi;2 Marnes bleues lignitifères à H. Delphi- nensis; 3 Sables avec bancs de cailloux H. Chaixi, N. Michaudi (2e niveau); 4 Pou- dingues avec jaspe, protogine, a) banc de sables intercalés; 5 Sables avec lits marneux b) passant aux poudingues à la partie supérieure ; alluvions glaciaires. Ces derniers dépôts, qui n’ont ici qu’une épaisseur de 200 mètres environ, ayant été profondément ravinés pendant toute la période , Pliocène et les temps Quaternaires, peuvent atteindre une épaisseur considérable. C’est, en effet, cette formation qui constitue tous les petits sommets s’élevant au-dessus des plateaux et, en particulier, le point culminant de la région des Plateaux du Bas Dauphiné | septentrional, le signal de Baracuchet (964 mètres), près de Voi- ron. La puissance de ces dépôts témoigne ainsi delà grande activité liuviatile et torrentielle de la fin du Miocène. Ces poudingues ont une composition très constante : depuis la base jusqu’au sommet, je n’ai pu constater aucune différence, la grosseur des éléments reste toujours sensiblement la même, aug- mentant légèrement dans les couches les plus récentes. Ces pou- dingues sont plus ou moins consistants, suivant qu’ils ont été plus ou moins fortement cimentés après leur dépôt. Ils sont surtout MIOCÈNE SUPÉRIEUR (PONTIQUE) 129 formés de galets de quartzites alpins, toujours parfaitement roulés, pouvant atteindre une grosseur considérable dans les bancs supé- rieurs ; de quelques galets de calcaire noir souvent impressionnés de jaspe et de porphyre rouge et enfin de granité et de protogine du Mont-Blanc parfois très abondants (colline de Gessieu). Ces dernières roches granitoïdes ont subi une altération profonde et sont presque complètement transformées en kaolin ; les galets de quartz présentent une patine rougeâtre. Dans cet ensemble homogène, on remarque cependant quelques particularités fort intéressantes. Si l’on relève, par exemple, la coupe de la colline qui se trouve derrière la gare de la Tour-du-Pin, on voit s’intercaler au niveau de la gare (altitude 340 mètres) un paquet de sables gris avec lits gréseux et galets marneux où existe, associée à des formes d’eau douce'et terrestres, la Nassa Michaudi de la zone inférieure. Gomme il est d’ailleurs facile de le constater par l’étude des collines qui dominent la rive droite de la Bourbre, entre Bourgoin et la Tour-du-Pin, les couches sont restées sensi- blement horizontales ; on se trouve évidemment là dans un point particulier où, par suite de circonstances locales, la salure des eaux a pu se maintenir ou diminuer assez lentement pour que les Nassa Michaudi aient pu continuer de vivre pendant que se for- maient les 70 mètres de dépôts qui les séparent, dans cette localité, de leur niveau habituel. J’ai pu suivre ces dépôts saumâtres jusque vers Saint- Didier-la- Tour et Sainte-Blandine, toujours à ce même niveau (340 mètres d’altitude). Dans la coupe que j’ai donnée des * collines de Gessieu, on rencontre également ce deuxième niveau à 51' Nassa Michaudi. C’est aussi dans les environs de la Tour-du-Pin, toujours à peu près à l’altitude de 400 mètres, que l’on voit s’intercaler au is11 milieu de ces poudingues, les marnes et les lignites connus sous le nom de lignites de la Tour-du-Pin , encore aujourd’hui activement af exploités. Ces dépôts, qui ne sont qu’une formation locale, com- f prennent, comme j’ai pu m’en assurer, dans les galeries actuelles ijl® ; d’exploitation : 1° A la base, une assise d’argile bleue ou grisâtre, avec lits Un iv. de Lyon. — Douxami. 9 130 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES sableux (certaines parties contiennent de nombreuses coquilles lacustres ou terrestres, Planorbes. Hélices , écrasées), d’épaisseur variable de 3 ou 4 mètres à plus de 30 mètres. M. Jourdan y a signalé une dent d’ Hippopotamus sp. et de Mastodon arver- nensis 1 et, plus récemment, M. Depéret1 2 y a cité le Sus palœo- cherus Kaup., indiquant bien l’âge Miocène supérieur de ces assises. On y trouve, en outre, de nombreux débris de végétaux. 2° Une couche unique de lignite de 50 centimètres d’épaisseur, exploitée par des galeries horizontales, dans la commune de Saint- Didier. Le maximum d’épaisseur serait 60 centimètres à Ruyjaillet ; elle diminue rapidement d’épaisseur dans tous les sens, soit vers Saint-André-le-Gazet les Abrets à l'Est, soit vers Saint-Victor de Gessieu à l’Ouest, soit vers Dolomieu au Nord. Ce lignite est formé de débris végétaux (Conifères) encore parfaitement reconnaissables et de plantes herbacées marécageuses (tourbe comprimée) ; on le débite à la hache comme du bois. C’est dans des couches un peu moins compactes qu’a été trouvée la dent de Sus palæocherus. 3° Nouveau banc d’argile bleue ou grise, pouvant d’ailleurs manquer suivant les points ; ces couches affleurent en certains points (au Vion, entre La Chapelle et Faverges) où elles sont alors directement recouvertes par le Glaciaire. Et enfin on voit de nouveau le poudingue à ciment sableux, avec lits de sables ou de grès, cailloux impressionnés et les mêmes éléments que le poudingue inférieur : il y a identité complète entre les poudingues inférieurs et supérieurs, ce qui montre bien que les dépôts de lignites et les marnes qui les accompagnent ne sont qu’un accident au milieu de ces cailloutis. Grâce à des sondages effectués en vue de la recherche du lignite, on a pu suivre ces dé- pôts. On constate ainsi qu’en certains points il n’existe plus que 1 Je ne donne ces deux déterminations que sous toute réserve. Ces pièces déposées respectivement, l'une à l’Ecole des mines de Paris, l'autre au Muséum de Lyon, n'ont pu être retrouvées. Le Mastodon Arvernensis est d’ailleurs extrêmement facile à con- fondre avec le Mast. longirostris surtout si l’on n’a affaire qu’à des pièces incomplètes. Il est probable, pour moi, que la pièce de la Tour-du-Pin se rapportait à cette dernière espèce. 2 Depéret, Arch. Mus. de Lyon , t. IV, p. 50, 1887. MIOCÈNE SUPÉRIEUR (PONTIQUE; 131 la couche d’argile bleue inférieure qui joue un rôle hydrographi- que assez important dans la région. Le niveau auquel elle affleure varie entre 380 et 427 mètres et semble augmenter légèrement lorqu’on se dirige vers l’Ouest. On l’a signalée à l’Est jusque sous les Abrets ; je l’ai retrouvée au Sud de Charancieu, Faverges, au Nord de Dolomieu, entre Montceau et Ruy et même par Virieu- sur-Bourbre, Blandin et jusqu’auprès de Grand-Lemps, toujours à ce niveau moyen de 400 mètres1. Elle joue, comme je le disais plus haut, un rôle orographique assez important dans toute cette région : les poudingues supérieurs ont été ravinés et découpés par l’érosion, ne forment plus souvent que de petits monticules isolés à la surface des plateaux où l’on ne trouve que les dépôts glaciaires, ayant plus ou moins remanié cette assise marneuse. Seules, les vallées profondes descendent dans les couches de poudingues inférieurs. On peut donc conclure de cette étude qu’aux environs de la Tour-du-Pin il y avait, pendant le Politique, des conditions particulières de tranquillité, ayant permis à un lac de persister avec la Nassa Michaudi. Ensuite, a existé un lac tourbeux, où les eaux amenaient les débris des plantes ou des animaux qui vivaient sur les régions émergées voisines. On doit rapprocher de ces lignites de la Tour-du-Pin, les dépôts analogues de Saint-Jean-de-Bournay (Isère), de Tersanne2, Montmirail, Montrigaud, dans le Viennois méridional, ainsi qu’une partie des dépôts et gîtes à lignites qui existent au Nord de la vallée du Rhône, dans la région Bressane, sur lesquels je reviendrai un peu plus loin. Mais ils sont tout differents : 1° des lignites d’Hauterives (Drôme), franchement Pliocènes, avec lesquels ils ont été con- fondus par un grand nombre d’auteurs; 2° de ceux des environs de Voreppe (lignites de Pommiers) qui sont marins et beaucoup plus anciens (Miocène moyen). 1 L'assise sableuse qui existe intercalée au milieu des poudingues Pontiques, aux envi- rons de Bourgoin (voir les coupes précédentes) me paraît correspondre aussi au niveau des marnes à lignites de la Tour-du-Pin. 2 A Saint- Jean-de-Bournay et Tersanne, ce sont plutôt des lits charbonneux que des lignites. Ils seraient à peu près de la base de l’Etage Politique. 132 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES Au Sud de la plaine de la Bièvre, les plateaux de Chambaran présentent une constitution identique à celle des plateaux de la Tour-du-Pin et il yen est de même des plateaux au delà de 1 Isère jusqu’à Montmeyran. La coupe du plateau de Chambaran est particulièrement intéressante (fig. 16). m3 Molasse marine (21-' étage ; m4a Pontien, molasse gréso-marneuse à II. Delphi- nensis; m4 b Pontien, Marnes et cailloutis à Hipp. gracile Dinothérium ; P. Cailloutis et Glaise du Pliocène supérieur; a,a Alluvions anciennes; * Gisement de Mammifères de la Trappe. La découverte récente d’ossements de Mammifères, au milieu des dépôts de cailloutis du Miocène supérieur, est veuue confirmer l’âge Pontique de ces formations. Les restes fossiles trouvés dans cette localité font partie de la collection de la Faculté des sciences de Grenoble et ont été gracieusement mis à ma disposition par M. Kilian, professeur de Géologie à cette Faculté ; j’ai pu y reconnaître : I Canon de derrière. Cinq molaires. Calcanéum, cubitus. _ ( 3° molaire inférieure. Dinothérium giganteum, Guv. j , , . ' Molaire supérieure très usee. tout à fait caractéristiques du Pontique et qui viennent donner une confirmation extrêmement importante de l’âge franchement Mio- cène de toutes ces formations et les distinguer complètement des formations Pliocènes de la vallée du Rhône. Dans ce puissant ensemble de cailloutis, de sables, de grès et de lits marneux, on ne connaît aucun fossile marin. Je n’ai pu y trou- : MIOCÈNE SUPÉRIEUR (PONTIQUE) 133 ver que des formes terrestres ou d’eau douce et des restes de plantes ; je citerai en particulier, de Saint-Victor de Cessieu1 : Hélix Delphinensis, Font. Hélix Chaixi, Michaud. Planorbis aff. Thiollierei, Mich. Zonites Colonjoni, Michaud. Cette dernière forme existe également avec des Planorbes écrasés dans les couches à lignites;des restes de plantes (dicolytédones) dans des argiles sableuses au-dessus de Montcarra. On a donc affaire à des formations essentiellement fluviolacustres et torrentielles et non marines, comme le voulait Ch. Lory ; de plus les cailloutis forment bien des couches continues et non un revêtement, un placage plus ou moins épais, sur des sables marins qui existeraient en dessous comme le prétendait Fontannes. Lorsqu’on s’avance vers l’Est, on 11e suit les couches saumâtres à Nassa Michaudi que jusqu’entre Bourgoin et la Tour-du-Pin : Fig. 17. — Coupe E.-W. de Saint-André à Pont-de-Beauvoisin. i Molasse à Terebratulina calathiscus ; 2 Poudingue et cailloutis avec lentilles sableuses et gréseuses ; 3 Marnes à lignites (niveau de la Tour-du-Pin) ; 4 Poudingues et cailloutis; 5 Glaciaire. les eaux ne restaient saumâtres que vers le centre du synclinal Pontique, dans la région occidentale de la vallée du Rhône. On constate, en outre, à mesure que l’on se dirige vers les Alpes, que les cailloutis et poudingues reposent non plus sur ce Miocène sau- mâtre, mais sur le Miocène moyen, marin ; le faciès torrentiel envahit des couches de plus en plus anciennes. Ainsi à Veyrins, 1 Ces fossiles se trouvent uniquement dans les galets ou lits marneux intercalés dans les poudingues; je n’ai trouvé que des débris de coquilles dans ces poudingues ou dans les grés et sables intercales. 134 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES les Avenières, Saint-Sorlin, d’une manière générale dans tous les points où j’ai constaté l’existence des dépôts Tortoniens, à Area turonica elAncilla glandiformis , on les voit reposer directement sur les dépôts Helvétiens (zone de Saint-Fons). C’est ce que le montre la coupe suivante, prise des Abrets à Pont-de-Beauvoisin (fig. 17). A Pont-de-Beauvoisin même, à la partie inférieure des sables marins et molassiques que j’ai signalés le long de la route de la gare, dans) e lit du Guiers, on voit des bancs lenticulaires de pou- Fig. 18. — Coupe schématique des faciès du Miocène dans la vallée du Rhône. Aq. Aquitanien (sondage de Toussieu); T Molasse à P. præscabriusculus ; II Molasse sableuses à O. crassissima; III Zone de Saint-Fons (Helvétien); IV Zone d’Aoste (Tor- tonien); V Zone à Xassa Michaudi ; VI Cailloutis du Pontien supérieur. dingue intercalés et qui deviennent de plus en plus prédominants dans les couches supérieures. Enfin, plus à l’Est encore, dans les dépôts des vallées jurassiennes de la Chartreuse (Voreppe, Pro- veysieux), ce faciès caillouteux envahit même les dépôts du pre- mier étage Méditerranéen, ou Burdigalien. La coupe schémati- que suivante, prise du Plateau Central à la Chartreuse, montre la disposition de ce faciès dans les différents dépôts du Miocène (fig. 18). Plus au Sud, dans la vallée du Rhône, aux environs de Digne, ! RÉGION BRESSANE 135 Sisteron, on retrouve encore des cailloutis pour représenter une partie du Miocène; mais leur origine est un peu différente de celle des cailloutis du Dauphiné : dès l’Oligocène, en effet, on voit des conglomérats et limons rouges, indiquant vers Forcalquier l’existence d’un cône de déjection torrentiel. On doit accorder la même origine auxpoudingues Pontiques de la région de Valensole et des Mées, qui sont en relation avec une sorte de Durance Miocène, amenant dans cette région les roches du Briançonnais (variolite en particulier, que M. Collot a montré exister dans les marnes de Gabrières, dès l’époque Tortonienne) . Région Bressane. — Au Nord de la vallée du Rhône, les dépôts d’eau douce du Politique existent sur un grand nombre de points. Ils ont été récemment étudiés par. MM Delafond et Depéret1, par M. Boistel2. Sur la lisière Est de la Bresse, ces dépôts se présentent dans la vallée de l’Ain, à Varamhon, Priay, Douvres, Saint- Jean-le-Vieux, Jujurieux, à l’état de grès fins Molassiques, avec quelques lits marneux, surtout à la partie supérieure, avec quelques gîtes de iignites (Douvres, Griay, Varamhon). L’épaisseur totale atteint plus de 140 mètres. Ces dépôts se rattachent à ceux de la vallée du Suran (Soblay), des environs d’Ambérieu, Pont-d’Ain, Geyzériat, Meillonas, d’Aubagna, et à ceux de Coligny, où l’on a surtout des dépôts marins à dents de Squales. Ces dépôts forment une double bande s’étendant du Nord au Sud, au pied de la falaise Jurassique : 1° une bande le long du Suran et de la rivière d’Ain, depuis Soblay jusqu’à Neuville-sur-Ain, par Priay et Mollon; 2° une autre, plus près du Jura (Mérignat, Jujurieux, jusqu’à Ambérieu, en passant par Saint-Jean-le -Vieux, Ambronay et Douvres). C’est également au Politique qu’appartiennent les dépôts de la 1 Delafond et Depéret, La Bresse, loc. cit., p. 33 et suivantes. 2 Boistel, La faune de Pikermi à Ambérieu (Ain) (B. S. G. F., 3“ série, t. XXI, p. 296, 1893). — Structure de la colline de Saint-Denis-le-Chossoii (B. S. G. F., 3e série, t. XXII, p. 299, 1894). — Sur le Miocène supérieur de la bordure du Jura aux environs d' Ambérieu (B. S. G. F., 3e série, t. XXII, p. 628, 1894). 136 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES Croix-Rousse, à Lyon. Ce sont des marnes grises et noires accom- pagnées de graviers qui ont fourni une belle faune de Mammifères, caractéristiques de la partie supérieure du Pontique. L’année der- nière, des galeries de recherche d’un niveau d’eau, ont permis de reconnaître sur la colline gneissique de Sainte-Foy, près Oullius, l’existence de marnes blanches identiques à celles de la Croix- Rousse et qui ont fourni deux défenses et deux arrière-molaires de Mastodon longirostris 1 et une belle faune de mollusques. C’est également au Pontique qu’il faut rapporter les galets de quartzites alpins, situés dans les fentes calcaires Jurassiques, qui constituent le Mont-d’Or Lyonnais, et signalés par MM. Falsan et Locard2 , à près de 600 mètres d’altitude. La composition des dépôts du Miocène supérieur de la région Dauphinoise, que j’ai donnée un peu plus haut, et l’étude des dépôts du Pliocène supé- rieur rendent, en effet, tout à fait vraisemblable l'hypothèse émise par MM. Delafond et Depéret, de rapporter au Miocène supé- rieur tous les dépôts de quartzite alpin, situés à une altitude de plus de 350 mètres3. D’après les études de M. Boistel, sur les gisements Miocènes des environs d’Ambérieu, les dépôts Politiques se terminent par des tufs sableux jaunes et des argiles. Il existe, en outre, aux envi- rons de cette localité un conglomérat calcaire présentant des blocs anguleux peu roulés avec des cannelures qui, à première vue, res- semblent à des stries glaciaires, et de nombreux cailloux impres- sionnés. Dans la marne qui réunit ses blocs, M. Boistel a pu recueillir Zonites Colonjoni Mich. Hélix Delphinensis Font., forme de grande taille passant déjà à la variété Pliocène. Triptychia 1 Ch. Depéret, L’Echange (Soc. Linnéenne de Lyon, 1895). Ces pièces font partie de la collection de la Faculté des Sciences de Lyon. Je citerai en outre comme mollus- ques recueillis dans ces couches: Vivipara ventricosa Sandb, Planorbis Heriacensis Font, P. Philippei Locard, P. Mariæ Michaud, P. marginatus Michaud, Limnæa Bouilleti Michaud var., Heriacensis Font., Bithynia Leberone?isis Fisch. et Tourn. Sphoerium Normandi, Michaud, Segmentina filocincta Sandb ; toutes ces formes passent dans le Pliocène. * Falsan et Locard, Monographie du Mont-d'Or, p. 396, 1866. 3 Les dépôts du Pliocène supérieur ne dépassent guère, sauf, dans la région tout à fait orientale de la vallée du Rhône, l'altitude de 320 mètres. PALÉONTOLOGIE DES DÉPÔTS PONTIQUES 137 Terveri , Mich. (Bettant, La Barre, Saint-Germain) ; les roches qui constituent ces conglomérats (Oxfordien, Rauracien) ont une origine lointaine, et proviendraient, d’après M. Boistel, de l’ébou- lement d’une ancienne falaise Jurassique, qui aurait complètement disparu de la région qui nous occupe en ce moment. Paléontologie des dépôts Pontiques de la vallée du Rhône. — L’étude paléontologique des dépôts Pontiques de la vallée du Rhône met en évidence des faits fort intéressants au point de vue du peu d’évolution de certaines formes de mollusques d’eau douce ou terrestres lorsque les conditions générales climatériques de la région varient peu et, au contraire l’évolution rapide des mammifères. C’est ainsi que dès la base du Miocène supérieur (zone à Nassa Michaudi), comme on peut le constater en se reportant à la liste des formes rencontrées dans ces dépôts que j’ai donnée plus haut, on voit apparaître un certain nombre de formes de mollusques telles que : Bithynia Leberonensis Fisch et Tourn . , Planorbis Heriacensis Font, Limnæa Bouilleii var. Heriacensis Font, Hélix Delphi- nensis Font, H. Abrettensis Font, Hélix Chaixi Mich1, Zonites Colonjoni Mich2, Triptychia Tei'veri Michaud, que l’on retrouve non seulement à tous les niveaux du Pontique, mais encore dans les dépôts du Pliocène inférieur lacustre de la Bresse (horizon de Mollon et d’Auvillars) et même (au moins certaines formes comme H. Chaixi , Zonites Colonjoni, Triptychia Terveri) jusque dans les tufs de Meximieux, de la partie inférieure du Miocène moyen. C’est à peine si l’on peut trouver, chez ces formes, des différences justifiant des variétés Miocènes ou Pliocènes; je signalerai cepen- dant la diminution de taille de la variété Miocène de VH. Chaixi et l’augmentation de taille de VH. Delpliinensis quand elle pro - vient de couches de plus en plus récentes. Le nombre de ces formes Mio-Pliocènes augmente d’ailleurs 1 M. Depéret considère la forme miocène de taille un peu plus petite comme un variété : var. Heriacensis , Depéret. 2 Var Planciana, Font, pour les formes Miocènes. 138 TERRAINS AQDITANIENS ET MIOCÈNES lorsque l’on s’adresse aux couches supérieures : toutes les formes que j’ai pu recueillir à la colline de Sainte-Foy près Lyon sont des formes Pliocènes. Cette remarque explique ainsi très naturellement les différentes opinions émises parles auteurs sur ces dépôts d’eau douce de la Bresse et d’Hauterives ou du Dauphiné. Ce n’est, comme l’a montré M. Depéret, que l’étude des Mam- mifères qui peut amener à fixer des horizons précis et à déterminer l’âge exact de formations, dont les faciès et les autres restes orga- nisés sont souvent les mêmes. J’ai déjà insisté sur ce fait que l’apparition de Y Hipparion gracile , remplaçant Y Anchiterium aurelianense du Miocène inférieur et moyen, caractérisait com- plètement les dépôts du Miocène supérieur. L’étude plus appro- fondie des restes de Vertébrés qu’ont fournis ces couches, permet de distinguer nettement trois horizons dans le Politique des envi- rons de Lyon. C’est ainsi que l’on a successivement : 1° Horizon inférieur ou Zone à Nassa Michaudi (saumâtre) avec la première apparition de Y Hipparion gracile Kaup et la persistance de certains Mollusques du Tortonien supérieur comme Auricula Lorteti Font, Planorbis Heriacensis Font, Hélix Delphinensis Font, H. Abrettensis Font, 77. Escoffierae Font; 2° Horizon moyen. Horizon de Soblag ou de la Tour-du-Pin (fluvio lacustre), (en outre Saint-Jean-le-Vieux, Priay, Varambon, Saint-Jean- de-Bournay, Ambérieu) caractérisé par : Sus major., Gerv. (Soblay, Ambérieu). Sus palæocherus, Ivaup. (Soblay, la Tour-du-Pin, Ambérieu). Rhinocéros Schleiermacheri, Kaup. (Soblay). Hipparion gracile, Kaup. (Soblay, Saint-Jean-de-Bournay, Sonnay, Oussiat, Ambérieu). Dinothérium giganteum, Cuv. (Ambérieu, Saint Jean-de-Bournay, Saint - Jean-le-Vieux). Mastodon Turicensis, Schinz. (Soblay). Castor Jœgeri, Kaup. (Soblay, Saint-Jean-de-Bournay). Protragocerus Chantrei, Desh. race major. (Soblay, Saint-Jean-de-Bournay). Tragocerus Amaltheus, Roth, et Wagn. (Ambérieu). Cervus aff. Matheroni, Gray. (id). Gazella deperdita, Gervais (Soblay). PALÉONTOLOGIE DES DEPOTS PONTIQUES 139 Hyæna eximia, Roth, et Wagn. (Soblay, Ambérieu). Testudo Amberiacensis, Depéret 1 2 (Ambérieu). Les Mollusques que l’on rencontre le plus habituellement à ce niveau sont : MelanopsisKleini, Kurr. var. Valentinensis, Font (existe dans la zone inférieure). Neritina crenulata, Klein (existe dans le Tortonien d’eau douce de Suisse). Valvata sibinensis, Neum. var. Savni, Font. Valvata Hellenica, Tourn. var. Cabeolensis, Font. Bythinia Leberonensis, Fiseh et Tourn. — Veneria, Font. Hydrobia Avisanensis, Font. Nematurella Lugdunensis, Loc. Hélix Nayliesi, Mich. Hélix cfLarteti, Boissy. \ Hélix Chaixi, Mich. var. Planciana, Font. (Ambérieu *). Hélix Delphinensis, Font. (Ambérieu). Limnæa Bouilleti, Mich. var. Heriacensis, Font. (Ambérieu). Testacella Deshayesi, Mich. (id). Planorbis Philippei, Loc. (id). — Heriacensis, Font. (id). TriptychiaTerveri, Mich. (id). Unioatavus, Partsch. var. Sayni, Fout. 3° Horizon supérieur ou de la Croix-Rousse (Sainte-Foy), dont les Mammifères indiquent un degré d’évolution plus avancé encore que ceux de la faune précédente, surtout dans la famille des Antilo- pidés. On y rencontre : Hipparion gracile, Kaup. (race lourde et grêle). Rhinocéros Schleiermacheri, Kaup. Mastodon longirostris, Kaup. (et à Sainte-Foy). Dinothérium Cuvieri, Kaup. Castor Jœgeri, Kaup. Tragocerus Amaltheus, Roth, et Wagn. (très commun). Gazella deperdita, Gervais. 1 Ch. Depéret, Note paléontologique complémentaire sur les terrains Tertiaires de la Bresse (B. S. G. F., 3e série, t. XXII, p. 717, 1894). 2 La faune d’ Ambérieu présente, surtout par ses formes de mollusques, la plus grande analogie avec l’horizon supérieur de la Croix-Rousse. 140 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES Hyœmoschus Jourdani, Depéret. Micromervx Flourensianus, Lortet. Metiratos sp. radius d’oiseau (Gros Pentelici, Gaud. ?) accompagnés de quelques Mollusques tous Mio-Pliocènes : Zonites Colonjoni, Mich. var. Plan- ciana, Font. Hélix Valentinensis, Font, (paraît exister depuis le Tortonien dans le Bassin de Visan). Limnæa Heriacensis, Font. Planorbis Heriacensis, Font. Planorbis Bigueti. Font. Ancylus Neumayri, Font. Bithy nia Leberonensis.Fisch et Tourn . Bithynia veneria, Font. Unio atavus, Partscb. Le Pliocène est, lui, nettement caractérisé par la disparition de Y Hipparion gracile , l’apparition du Mastodon Borsoni Hays et Rhinocéros leptorhinus, Cuvier, et un peu plus haut du Mastodon Arvernensis, Cr et Job ( = M. dissimilis de Jourdan). Dépôts post-miocènes du Nord de la vallée du Rhône. — Tous les dépôts du Miocène supérieur de la bordure du Jura dans la région Bressane ont été affectés par les derniers mouvements alpins post-miocènes, au point de se présenter en couches verticales ou même renversées sous les calcaires Juras- siques. Nulle part on a signalé dans ces dépôts la présence de cail- loux alpins. Les mouvements prépontiques, dont je démontrerai un peu plus loin l’existence, dans les chaînes du Jura méridional, en Savoie, ont dû également se faire sentir au delà de la vallée actuelle du Rhône, dans la région du Bugey, et ont soulevé assez cette partie du Jura pour s’opposer au passage des quartzites alpins, qui ne se retrouvent qu’au Sud, à partir du Mont d’Or Lyonnais. Ces mouvements prépontiques et post-miocènes ont eu pour effet de chasser la mer à la fois du Jura méridional et de la vallée du Rhône. Puis au Pliocène la mer revient peu à peu dans la vallée du Rhône, mais n’y occupant plus qu’un fjord étroit dont les limites ont été bien précisées par Fontannes, le long de la vallée actuelle du Rhône, jusqu’au village de Loire, un peu au Sud de Givors. Les mouvements ayant accompagné ce retour de la mer, ont en même temps augmenté la dépression de la vallée de la Saône. Elle 1 DEPOTS POST-MIOCÈNES DU NORD 141 a été remplie par un lac entièrement d’eau douce, se déversant dans le bras de mer de la vallée du Rhône, dont il était séparé par un seuil, s’étendant de Lyon à Givors. Cette cuvette Bressane, longue de plus de 250 kilomètres du Sud au Nord, a continué à s’affaisser lentement, pendant la période Plaisancienne. Les marnes de la Bresse qui constituent tout le sous-sol de la région ont une épaisseur de plus de 250 mètres. Un dernier mouvement a eu lieu à la fin du Pliocène inférieur, ayant eu pour résultat de vider la cuvette Bressane et de chasser définitivement les eaux marines de la vallée du Rhône. Les marnes de la Bresse ont aussi été affectées par ce dernier mouvement alpin ; elles forment en effet, aujour- d’hui, un vaste synclinal dont l’axe est beaucoup plus près du Jura que du Plateau central1 2. MM. DEPÉRETet Delafond 2 dans leur étude magistrale des dépôts Tertiaires de la Bresse, ont distingué dans ces marnes trois hori- zons principaux : 1° Horizon inférieur ou de Mollon. 2° Horizon moyen ou de Condal. 3° Horizon supérieur ou d' Auvillars. C’est à l’horizon de Mollon qu’il faut rattacher les formations lacustres de Chabeuil et d’Hauterives (Drôme) ; la faune est en effet identique à celle de Mollon et par conséquent d’âge Pliocène et non Miocène, comme on l’a cru pendant longtemps, par suite d’inter- prétations fausses des coupes de cette région. A la fin du Pliocène inférieur, le creusement des vallées de la Bresse commence : déjà les principales vallées actuelles sont indiquées comme le montre l’étude des dépôts du Pliocène moyen (sables de Trévoux, tufs de Meximieux). Puis ces cours d’eau, après avoir creusé leur lit, souvent même au-dessous du lit actuel (20 mètres au-dessous pour la Saône), alluvionnent, 1 Ce mouvement pliocène des Alpes s'est fait sentir également clans la vallée du Rhône, portant à une altitude de près de 400 mètres les dépôts marins du Pliocène inférieur. 2 Depéret et Delafond, La Bresse, loc. cit. 142 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES remplissant complètement ces lits et déposent dès latin du Plio- cène moyen, pendant tout le Pliocène supérieur, des galets roulés de diverses origines. Dans la partie méridionale de la Bresse (Dombesi, on trouve, ravinant le Miocène, des cailloutis alpins (quartzites, granités altérés) formant une série de terrasses, dont la plus élevée atteint 380 mètres l. Dans la région du Doubs et de la Loue, ces alluvions y forment également des terrasses étagées à différents niveaux, mais tous les éléments qui les constituent sont nettement d’origine vosgicnne. A l’Ouest, dans le Beaujolais, où les alluvions atteignent une importance considérable, leur origine est nettement locale : Elles proviennent du Plateau Central ou des calcaires jurassiques de bordure démantelés. Ce n’est que dans le plateau de la Bresse pro- prement dite que l’on trouve des alluvions beaucoup moins gros- sières, constituant les sables de Chagny. En résumé, les alluvions pliocènes de la Bresse peuvent, suivant leur origine, se classer de la manière suivante : Au Nordd’Auxonne (jusqu’à Mâcon), formant une zone longitu- dinale, correspondant au lit de la Saône pliocène (peu différent d’ail- leurs de la Saône actuelle), les alluvions sont essentiellement sili ceuses et d’origine Yosgienne. A l’Ouest, sur la lisière de la Bourgogne, les alluvions plus ou moins importantes, calcaires, à chailles ou avec des blocs de roches anciennes ont été empruntées aux terrains de bordure. Tout à fait au Nord (vallée du Doubs jusqu’à Sellières), les allu- vions sont Vosgiennes. A l’Est, au N. -E. , entre Sellières et Cuisa,les alluvions sont cal- caires, peu épaisses et empruntées aux rochers du massif du Jura ; au Sud, tout le long du Bugey, les alluvions sont surtout d’ori- gine alpine. 1 On trouve une seconde terrasse vers 330-340 mètres (Jujurieux, Ambérieu, Varambon), puis une troisième à 280-310 mètres (Saint-Didier, Ecully, Saint-Irénée, Saint-Genis- Laval), et enfin une dernière, beaucoup plus au Sud de Lyon, vers Givors et Vienne à 280 mètres d’altitude. DEPOTS POST-MIOCÈNES DU NORD 143 C’est à ces derniers dépôts qu’il faut rapporter les cailloutis des Hauts Plateaux, qui existent plus au Sud, sur la surface des Plateaux du Bas Dauphiné septentrional (P. de la feuille géolo- gique au 1/80.000 de Grenoble et de Lyon). Ces cailloutis se recon- naissent dans la région lyonnaise par ce fait que les galets de quartz parfaitement arrondis présentent une patine ferrugineuse et que les galets de roches granitoïdes sont profondément altérés, presque complètement transformés en kaolin et s’effritent au con- tact de l’air. Ces dépôts qui augmentent d’épaisseur, à mesure qu’on se rapproche de la vallée de Rhône, atteignent, dans la région de Romans, une centaine de mètres d’épaisseur. On les voit, dans cette région, reposer indistinctement, soit sur la zone de Saint- Fons, soit sur les couches à Nassa Michaudi, soit enfin, comme aux environs d’Hauterives (Drôme), sur les marnes du Pliocène inférieur lacus- tre, surmontant le Pliocène marin. A mesure que l’on s’avance vers l’Est, ils s’amincissent beaucoup et ne forment bientôt qu’un simple revêtement, à la surface des plateaux. Les caractères que présentent ces dépôts, dans toute la région lyonnaise, pourraient facilement les faire confondre avec les dépôts caillouteux des environs de Bourgoin et de la Tour du Pin, qui appartiennent, comme je l’ai montré plus haut, au Miocène supé- rieur. Entre Bourgoin et la Tour-du-Pin, les plateaux sont partout recouverts par les Alluvions Glaciaires qui ont remanié légèrement la partie superficielle des dépôts Pontiques1. Ges alluvions con- tiennent des cailloux de toute provenance, plus ou moins polis et striés quand ils sont calcaires, arrangés sans ordre, où les granités ne sont pas altérés et sur lesquels on trouve de gros blocs angu- leux d’origine alpine (Urgonien, quartz, poudingue et grès houiller, schistes à séricites, etc.). En quelques points, comme à la Bolla- tière, près des Abrets, sur la route de la Bâthie, on remarque en outre des alluvions grises largement stratifiées et où les granités ne sont pas altérés : ce sont des alluvions anciennes, plus anciennes que celles des grandes vallées, qui sont post-glaciaires. Elles 1 On trouve fréquemment dans les alluvions glaciaires des cailloux impressionnés qui proviennent des dépôts Pontiques sous-jacents. 144 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES correspondent sans doute à un arrêt local daus le recul du glacier après son maximum d’extension. En d’autres points (Saint- André - le-Gaz, Pont de-Beauvoisin, les Eteppes), la boue glaciaire a été fortement lavée et l’on voit s’accumuler, en général sur les pentes, du lehm argileux partout activement exploité pour la fabrication des briques1. A partir de Bourgoin, ou plus exactement d’une ligne sensi blement N. -S., passant entre Bourgoin et la Grive-Saint- Alban, on voit, mêlés à la boue glaciaire, des galets de quartzites à patine Fig. 19. — Sablière de Four. m4 Molasse sableuse avec bancs lenticulaires de cailloux; P. Quartzites et galels de roches granito'ides. (Pliocène sup.); a *5' Boue glaciaire. rougeâtre, plus volumineux, et différant d’ailleurs d’aspect, de ceux du Miocène supérieur. Je les attribue au Pliocène supérieur et je les rattache à la nappe de cailloutis du Sud de la Bresse et de la vallée du Rhône, dont je viens de parler : leurs caractères et leur posi- tion stratigraphique sont les mêmes. Une nouvelle preuve, qui vient confirmer ces assertions, est d’ailleurs fournie par la coupe que j’ai pu relever aux environs de Four (Isère) et qui montre (fig. 19) 1 Ces boues glaciaires qui recouvrent, on peut le dire, la surface de tous les plateaux, sont essentiellement calcaires; aussi les eaux de ruissellement et les eaux d’infiltration se chargent-elles abondamment de carbonate de calcium; elles le déposent ensuite dans tous les points où e’ies arrivent à l’air, sous forme de tufs calcaires. (Depuis l'ouverture de la tranchée du chemin de fer à la Tour-du-Pin, ces tufs atteignent plus d'un métré d’épaisseur ; on les rencontre dans tous les ravins.) DEPOTS POST-MIOCÈNES DU NORD 145 les cailloutis Pliocènes ravinant les dépôts caillouteux et sableux du Miocène supérieur. A partir de cette ligne N. -S., les dépôts du Pliocène supérieur forment une nappe sensiblement continue, s’abaissant rapidement vers la vallée du Rhône, en augmentant beaucoup d’épaisseur et ravinant des formations Miocènes de plus en plus anciennes. Leur grande analogie avec les dépôts Pontiques explique pourquoi on les a si souvent confondus avec ces derniers, auxquels ils ont d’ail- leurs, dans la vallée du Rhône, emprunté une grande' partie de leurs éléments. On rencontre outre ces dépôts caillouteux, dans les plateaux de Chambaran en particulier, uneformation fort différente, désignée par Ch. Lory sous le nom de Glaise de Chambaran et des plateaux viennois et qui comprend des sables fins et des argiles plus ou moins ocreuses, avec quelques galets de quartzite, exploitées comme argiles réfractaires ou comme terres à briques. Ces formations, bien antérieures au creusement des vallées, proviennent du rema- niement et épuisement sur place des cailloutis sous-jacents. La découverte du Mastodon Arvernensis est venue, d’ailleurs, con- firmer leur âge Pliocène. L’étude fort détaillée que je viens de faire des dépôts Tertiaires du Nord de la vallée du Rhône permet de fixer d’une manière définitive leur âge jusque-là fort discuté et constituera une base précise de comparaison avec les dépôts Tertiaires qu’il me reste maintenant à étudier dans le Jura et la Suisse. La nomenclature des terrains Tertiaires supérieurs du Nord du Dauphiné peut se résumer dans le tableau suivant : Univ. de Lyon — Douxami. 10 146 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES OLIGOCENE. Aquitanien. Conglomérats calcaires de Rocheron, l'ile Crémieu, avec Calcaires lacustres à Pl. Cornu. (Dépôts du ( pied du Jura à H. Ramondi et à plantes). Burdigalien. I Inf. (Sables à Scutella Paulensis) manquent. (1° Etage Médi-j Sup. (Molasse à Pecten præscabriusculus). Molasse terraneen). Miocène inf. marno-calcaire et gréseuse de Grésin Sainte- Marie-d’Alvey. I Molasse sableuse de Pont-de-Beauvoi- sin à O. crassissima et Natica heli- Vindobonien. MIOCÈNE. (2° Étage Médi- I terranéen). I Miocène moyen [ Helvétien. s. strict Tortonien. Infér. cina. Sables à Terebratulina caluthiscus (zone de Saint-Fons et conglomérat ferrugineux de la Croix-Rousse). Sables deChimilin, Aoste à Area Tu- ronica et Ancilla glandiformis. Sables et marnes à Nassa Michaudi, Hélix Delphinensis. Moyen. Cailloutis alpins et Lignite de la Tour-du- Pin, Soblav. Horizon de la Croix-Rousse, dépôts supé- rieurs du pied du Jura. Plaisancien, marnes de la Bresse (Dépôts marins de Loire, marnes lacustres d’Hauterives). PLIOCENE. Aloyen. Astien, horizon de Tre'voux (Sables et marnes). /Supér. Sicilien, cailloutis des Hauts-Plateaux, glaise de Chambaran, sables de Chagny, Châlons-Saint-Côme. Pontien. Miocène sup. Supér. Infér. § 2. Région Jurassienne. Gomme dans la vallée du Rhône, les dépôts Aquitaniens sont plus ou moins indépendants des dépôts Miocènes. Ils ne forment d’ailleurs que des lambeaux plus ou moins isolés, simples témoins de l’ancienne extension de ces formations, et qui sont situés dans des synclinaux étroits, en général fort réguliers. Les caractères généraux, intermédiaires entre ceux des dépôts de la Plaine Suisse et ceux delà vallée du Rhône, sont difficiles à résu- mer en quelques lignes, et se dégageront beaucoup mieux d’une étude détaillée. En laissant de côté l’ Aquitanien de Châtillon et de Grusse que j’ai rattaché, dans le chapitre précédent, au Tertiaire de la bordure de la vallée du Rhône, je passerai successivement SYNCLINAL DE SAINT- MARTIN-DE-BAVEL 147 en revue les différents synclinaux tertiaires du Jura méridional proprement dit. On les rencontre, en se dirigeant de l’Ouest à l’Est dans la région que j’ai particulièrement étudiée, et il sera facile ensuite de leur rattacher les dépôts du Nord du Jura. Synclinal de Saint-Martin- de-Bavel. — Les dépôts Ter - tiaires les plus occidentaux sont ceux des environs de Belley, en particulier ceux de Saint-Martin-de-Bavel, près de Virieu le- Grand, qui nous offrent une succession assez complète des assises Miocènes. Ils ont été bien étudiés par E. Benoit* 1. Les couches Tertiaires forment un plateau triangulaire faillé à l’Est, reposant à l’Ouest sur les calcaires roux du Valangien qui ont été fortement érodés. La coupe de cette région (fîg. 20) présente la succession suivante de bas en haut : rXe pin vTl il. J«. Qai/cC Fig. 20. — Coupe de Saint-Martin-de-Bavel. V Valangien; H Hauterivien; U Urgonien; 1 Conglomérat local calcaire (base du Burdigalien); 2 Molasse calcaire, argileuse et gréseuse à P .præscabriusculus-, 3 Molasse micacée très grossière à Ostracés (2° Étage). 1° Conglomérat local calcaire (Néocomien et Jurassique) à galets bien roulés, les plus volumineux à la partie inférieure, avec cail- loux percés de trous de Pholades, quelques lits sableux intercalés 1 à 3 mètres. 2° Molasse calcaire passant, à la partie inférieure, au conglomé- rat; 1 à 2 mètres. Elle contient P . præscabriusculus, Font, Tur- riteila terebralis , Lamk. Elle correspond tout à fait à la Molasse marno-calcaire de Grésin, Sainte-Marie d’Alvey, et représente avec 1 E. Benoit, Note sur la Molasse du département de l'Ain (Bull. Soc. géol. de France, 2e série, t. XVI, p. 369, 1859). 148 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES l’assise précédente le Burdigalien supérieur; les dépôts marins inférieurs du Miocène manquent en effet, comme dans tout le Jura, la Savoie et la Plaine Suisse. 3° Molasse argileuse, calcaire, de couleur bleue, avec fossiles excessivement rares, sauf Bornera striata , M. Edv. 5 àômètres. 4° Molasse gréseuse, grise, contenant de nombreux oursins, où le P. præscahriusculus devient très abondant et qui contient en outre : Echinolampas scutiformis, Ag. Moules de Venus, Cythérées. Ostrea squarrosa, M. de Serres. Epaisseur, 4 mètres environ. Elle passe à une Molasse micacée, grise, très calcaire, avec bancs pétris de P. præscahriusculus , P. ventilabrum , Goldf. , P. subhenedictus, Font., moules de Venus, Cyihèrèes.Lucina squamosa, Lamk. ,avecnombreux débris de Balanes. Ces couches terminent le Burdigalien1. 5° Au-dessus vient un ensemble de couches que Benoit désigne sous le nom de grès grossiers et de lits de charriage, subordonnés aux couches précédentes et marquant une nouvelle transgression delà mer Miocène dans le Jura, à l’époque du deuxième Etage Méditerranéen, comme dans la vallée du Bhône ou dans la Plaine Suisse. On a des couches grossières, contenant de nombreux débris de coquilles et des polypiers, des débris de calcaire d’origine alpine, des silex. On y trouve : Lamna (dents) Ostrea crassissima, Lmk. Ostrea squarrosa ? M. de Serres. (de très grande taille). — crispata, Goldf. Ostrea burdigalensis, Mayer. — palliata, Goldf. (aff. Qstrea — virginiana, Gmel. Granensis, Font.). Au-dessus, on aurait encore (environs de Belley) des assises sableuses, ayant disparu ici par suite de l’érosion ; le Glaciaire recouvre le tout. Le petit synclinal de Saint-Martin- de-Bavel n’est qu’une dépen- 1 Benoit, dans la note précitée, rapportait au contraire ces couches à la Molasse sub- alpine de Berne et Saint-Gall qui appartient au Miocène moyen. SYNCLINAL DE NOVALAISE 149 dance du val Romej, prolongement septentrional du premier syn- clinal tertiaire du Jura méridional que j’ai désigné plus haut sous le nom de synclinal de Novalaise. Synclinal de Novalaise. — Ce synclinal renferme des ter- rains Aquitaniens et Miocènes. Les premiers sont bien développés à l’Ouest, près du mont Chaffarou, dont ils constituent toute la partie supérieure, se rattachant aux dépôts Aquitaniens de la vallée du Rhône, que j’ai signalés à Rocheron. Une coupe Est-Ouest, pas- sant par le mont Chaffarou, permet de donner la constitution géné- rale des dépôts Tertiaires qui remplissent la vallée (fig. 21, et pl. V, fig. 2). Aq1 Poudingue et Brèche (silex etc.), avec lits marneux rouges (Brèche de Vimines); Aq- Marnes rouges avec deux bancs calcaires à dandines; Po Poudingue de base du Burdigalien à éléments Néocomiens; M Molasse gréseuse à P. prœscabriusculus. 1° Aquitanien. — Ces dépôts, qui forment la crête du mont Chaffarou (825 mètres) sont constitués par des alternances de bancs de conglomérats calcaires (dont les bancs inférieurs, qui reposent sur le Jurassique supérieur, renferment des éléments très volumineux) et de couches moins grossières plus tendres, passant, à la partie supérieure à des bancs de marnes rouges et de calcaires durs faisant légèrement saillie. Les bancs de conglomérat se com- posent surtout d’éléments calcaires; j’y ai reconnu des cailloux d’Urgonien, de Jurassique supérieur et des silex assez nombreux, provenant du Néocomien. Il n’y a pas d’éléments d’origine loin- taine. Ce dépôt est d’origine locale; les galets ne sont d’ailleurs que légèrement arrondis. Le ciment qui les réunit est légèrement 150 TERRAINS AQUITAN1ENS ET MIOCÈNES rougeâtre. Certains bancs de ce conglomérat, plus consistants que les autres, ressemblent d’une manière frappante à la formation Aquitanienne connue dans la vallée de Couz sous le nom de Brèche de Vimines , et dont l’origine (cône d’éboulis) est évidemment la même. Les bancs de marnes rouges et de calcaires durs de la partie supé- rieure sont fossilifères; on y trouve en grande abondance une Glan- dine rapportée primitivement par Maillard1 à la Gl. costellala, Sow. sp. Cette détermination avait amené L. Pillet 2 à considérer ces couches comme représentant l’Éocène supérieur. M. Hollande3 les a rapportées le premier à l’Aquitanien. J'ai recueilli dans ces couches supérieures : Glandina Revili, Douxami (G. inflata, Reuss in Hollande4). Hélix Ramondi, Brgt. Hélix eurhabdota. Font. Nanina intricata, Noulet. M. Hollande y cite en outre Hélix (coryda) rugulosa , G. v. Martens, que j’ai pu y rencontrer : c’est la forme la plus fréquente à Gerbaix et à Rocheron. O11 trouve encore des corps arrondis, plus ou moins cylindriques, qui, dans le Sud du Bassin du Rhône (environs de Forcalquier en particulier) ont été rapportés à des œufs de Bulimus (?), et que je considère plutôt ici comme de simples concrétions argileuses. Ces dépôts Aquitaniens du mont Chaffarou se retrouvent encore plus au Sud, sur le versant oriental de la vallée, le long de la chaîne de l’Epine, un peu à l’Est du village d’Aiguebelette. Lorsqu’on suit le sentier du passage Saint-Michel, on voit au-dessous de bancs de Molasse gréseuse grossière et de Molasse sableuse, for- mant entre le lac et la montagne une suite de collines boisées, 1 Maillard, Mollusques terrestres et fluviatiles de la Suisse ( Mémoires de la Soc. paléontologique Suisse, t. XVIII, p. 2, pl. I, flg. 2, 1891). 2 L. Pillet, Cale, de Saint-Oueu à Gerbaix près de Novalaise (Savoie) (Bull. Soc. Hist. Nat de Savoie, t. IV, p. 56, 1890). 3 Hollande, loc. cit., Bull. n° 29, 1892, p. 8 et Bull, no 41, 1895. 4 La diagnose de cette espèce nouvelle sera donnée un peu plus loin dans le Chapitre de la Paléontologie des Terrains Tertiaires. SYNCLINAL DE NOVALAISE 151 assez escarpées (fig. 22) et disposées en couches presque verti- cales, un conglomérat polygénique constituant la base des terrains Miocènes. Les dépôts Aquitaniens, qui existent en dessous, sont des couches de marnes rouges et des poudingues (3 à 4 bancs1) d’aspect identique aux dépôts du mont Chaffarou et à ceux qui existent de l’autre côté de la montagne de l’Epine, aux environs de Vimines et du hameau de la Fougère. Ils reposent ici sur l’Hau- terivien. Les bancs de conglomérat bréchoïde ont été rencontrés également, lors du percement du tunnel de l’Epine, des deux côtés de la montagne. H Hauterivien ; Aq Marnes rouges et Poudingues, bréchoïdes aquitaniens ; Po Poudin gue de base du Miocène ; 1 Grès durs ; 2 Grès sableux du Burdigalien. C’est sans doute également à l’Aquitanien qu’il faut rapporter les conglomérats très polygéniques de la vallée de Peyzieu, près Belley, qui constituent sur l’Urgonien des couches assez fortement redressées à l’Est. Miocène. — Si l’on continue maintenant la coupe de la vallée de Novalaise, on voit, au-dessous des couches de marnes rouges, le Miocène qui débute ici par un banc de conglomérat grossier, dont une partie des éléments a été empruntée aux couches sous-jacentes qu’il ravine ; ces couches contiennent quelques débris d’Huîtres et de Pecten (P. præscabriusculus) (2 à 3 mètres). Au-dessus, on rencontre des bancs de grès grossiers assez épais, séparés par des couches plus tendres. Il existe dans ces grès de 1 Ces couches, par leur couleur, ont donné sans doute son nom au petit hameau de Pierre-Rouge, près duquel elles sont bien développées. 152 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES nombreux restes de Lamellibranches, en particulier du P. præsca- briusculus, qui y est très abondant. Ces couches, qui plongent à l’Est d’environ 15 degrés, se continuent jusque près du village de Gerbaix. C’est en général par ces grès que débute le Miocène dans le reste de la vallée ; ils reposent à l’Ouest sur le Néocomien. J’ai recueilli à Ay il, derrière l’église, P.Gentoni, Cidaris avenionensis. Ce sont ces grès qui sont exploités comme pierre de construction à la Bridoire. On les retrouve, de l’autre côté du synclinal, fortement redressés, presque jusqu'à la verticale, reposant soit sur l’Aquitanien (Pierre- Rouge), soit sur l’Hauterivien, comme dans la coupe de la chapelle de Bon-Secours ; ils présentent quelques lits caillouteux et, comme fossiles, des dents de Larnna et des débris de Pecten P. præsca- briusculus, P. Gentoni. Ils alternent avec des bancs de Molasse sableuse, verdâtre, avec dents de poissons assez abondantes et des bancs de poudingues à cailloux impressionnés, surtout calcaires, formés de roches du Néocomien et du Malm. Les dimensions de ces galets atteignent souvent celles de la tête. Le centre de la vallée ést occupé par des couches de Molasse sableuse beaucoup plus tendre, sans fossiles, en parfaite concor- dance avec les couches précédantes, bien visibles le long de la route de Novalaise à Lépin, près de Nances, au moulin des Golets, etc. C’est la Molasse sableuse du second étage Méditerranéen. Au Nord, elle a été entièrement recouverte par le Glaciaire et n’aftleure plus que dans le lit des ruisseaux. Près delà chapelle de Notre- Dame-de-Bon-Secours, la coupe rencontre à l’Epinette un ensemble de couches différant essentielle- ment de celles dont je viens de parler et que j’ai rapportées, dans une note publiée avec M. Révil, au Pontique1. Ce sont des grès sableux, jaunâtres, bien lités, surmontés par des couches argileuses, bleuâtres ou jaunâtres, dans lesquelles existent deslignites ancien- nement exploités dans deux galeries aujourd’hui comblées par les 1 H. Douxami et J. IIevil, Miocène delà vallée de Novalaise (C. R. Ac. des sc. de Paris, 17 juin 1895). SYNCLINAL DE NOVALAISE 153 éboulis récents. Ces lignites et ces marnes ont fourni quelques restes de plantes très voisines des formes actuelles Salix,Populus. Au-dessus vient un banc de cailloux arrondis à patine ferrugineuse et, de nouveau, des marnes grisâtres et des marnes bleues où, grâce à quelques fouilles que M. Revil et moi avons fait exécuter, nous avons recueilli d’assez nombreux échantillons de fossiles parmi lesquels j’ai reconnu : Hélix Nayliesi, Michaud, forme Mio- pliocène, signalée dans les marnes de la Croix- Rousse et dans le Pliocène inférieur à Hauterives, Bas Nayron. — Chaixi, Michaud, existe dans le Miocène supérieur depuis la zone à Nassa Michaudi, à la Croix- Rousse, à Hauterives et dans la Bresse. — Escoffierae, Fontannes, espèce du Miocène supérieur du Bassin de Crest, jusqu’à présent a été exclusivement signalée dans le Miocène de la vallée du Rhône. — Delphinensis, Fontannes, espèce Mio pliocène, existe dans le Miocène supérieur et moyen. — Abrettensis, Fontanes, Miocène supérieur récemment cité dans le Pliocène inférieur delà Bresse par M. Depéret. Testacella Zellii, Klein, espèce Miocène et Pliocène. Limnæa sp. Sur ces marnes reviennent des couches de graviers avec len - tilles de sables et bancs de grès jaunâtres intercalés, bien visibles tout le long de la nouvelle route de Novalaise à Saint-Sulpice ; on voit en particulier, avec la plus grande netteté, le passage latéral des bancs de cailloux aux bancs de grès. Certains de ces lits de cailloux, surtout à la partie supérieure, présentent des roches cris- tallines, en particulier des granités altérés. Ces couches sont ondulées par places et plongent même légèrement vers la mon- tagne de l’Epine1. Cet ensemble superposé en complète discor- dance, sur les couches plus anciennes du Miocène moyen et infé- rieur, appartient bien aussi par sa faune au Miocène supérieur (Pontien) et ne doit pas être rapporté comme le voudraient certains 1 Peut-être laut-il voir là une trace d’un affaissement postérieur au dépôt de ces couches et en relation avec la formation du lac d’Aiguebelette. 154 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES auteurs au Quaternaire ancien. Le Pliocène, s’il existait ici, serait situé à une altitude beaucoup plus élevée. J’ai pu suivre ces formations au Sud jusqu'au delà de la butte de Nances : le château de Nances est bâti sur une petite colline entièrement formée par cespoudingues. Ils alternent avec quelques lits gréseux et plus au Nord del’Épinette; on les retrouve, par Mar- cieux, Verthemex, Meyrieuxet Gerbaix (chemin derrière le cime- tière), ce qui démontre que cette formation occupait une étendue beaucoup plus considérable encore et qu’il existait, dans la vallée de Novalaise à l’époque Pontienne, un lac s’étendant presque sur toute la vallée et où des torrents venus des chaînes émergées ap- portaient de nombreuxdébris. Dans le reste de la vallée d’Aiguebelette, on ne trouve au-dessus de ces dépôts Tertiaires que du Pleistocène ; le Glaciaire y joue un rôle considérable. 11 comprend parfois des dépôts assez particu- liers formés de petits cailloux Jurassiques venus des chaînes voisi- nes (Greyon). Gomme partout, ces dépôts glaciaires ont donné naissance postérieurement à leur formation à des tufs superficiels ou de pentes, avec quelques coquilles et des feuilles d’arbres (Aulne). Ils sont bien développés, le long de la route de Novalaise au col du Mont-du-Cbat et en bas de la colline de la chapelle Saint- Martin, où ils sont exploités actuellement. Au Sud du lac d’Aiguebelette, les collines légèrement ondulées que l’on remarque dans la vallée, sont formées de Molasse marine à l’état de grès plus ou moins marneux, sensiblement horizon- taux dans le centre de la vallée et se redressant fortement à l’Est, beaucoup plus qu’à l’Ouest. Les couches les plus élevées sont plus sableuses et sont identiques à celles qui constituent la Molasse de Pont- de-Beau voisin. Elles forment une bande presque continue au centre du synclinal. Le long de la chaîne du Mont-Grelle, la Molasse qui affleure est beaucoup plus grossière et renferme de nombreuxdébris de coquilles (P .præscabriusculus,Oslrea squar- rosa). Elles reposent directement sur l’Urgonien ou l’Hauterivien suivant les points. Au Sud, la grande plaine alluviale du Guiers interrompt brus- SYNCLINAL DE CHAMBERY 155 quement les assises Tertiaires, dont on ne peut voir les relations avec les couches du synclinal voisin deVoreppe, qui vient se confondre avec celui de Novalaise, pour former le synclinal de Saint-Laurent-du-Pont . Au Nord, c’est, la vallée du Rhône ainsi que les dépôts Quater- naires des marais de Lavaur qui les interrompent, et on ne voit réapparaître que les dépôts inférieurs de la Molasse marine (val Romey), reposant presque partout sur les calcaires Urgoniens. Dans la partie septentrionale du val Romey, ou encore plus au Nord, dans la combe d’Evuaz, où les dépôts Miocènes ont été portés à une altitude de 1100 mètres i, ils prennent un faciès particulier : ce sont des grès, vert noirâtre, assez calcaires, à éléments fins, souvent riches en Bryozoaires et en Polypiers , ressemblant beau- coup à l’assise n° 3 de la coupe de Saint-Martin-de-Bavel. Synclinal de Chambéry, Saint-Jean-de-Couz. — A l’Est de la chaîne l’ Epine-Mont- du-Chat, s’étend un nouveau synclinal Tertiaire, dans lequel nous aurons à distinguer plusieurs régions : au Sud, la vallée de Gouz et son prolongement méridional ; au Nord, la vallée du Bourget et du Rhône ; je laisserai complète- ment de côté l’étude des terrains Tertiaires de la vallée du Rhône, pour le moment. 1° Aquitanien. — Dans la vallée de Chambéry et dans son prolongement méridional, la vallée de Gouz, l’ Aquitanien acquiert un certain développement: ce sont toujours des dépôts d’eau douce. Sur le versant Est, au Pont-Saint-Charles, on voit ces formations d’eau douce présenter : à la base, des bancs d’un calcaire gros- sier grisâtre, contenant des fragments de calcaire plus ou moins arrondis (calcaires Néocomiens et quelques silex provenant des mêmes formations), alternant avec des bancs de poudingues cal- caires et surmontés par des marnes rouges, bariolées, tout à fait caractéristiques. Ces dépôts ont la plus grande analogie avec les couches correspondantes de la vallée de Rumilly ou de la Plaine Suisse ; on y trouve quelques filonnets de gypse lamellaire. Ces 1 C'est l’altitude maxima à laquelle on les rencontre dans le Jura méridional. 156 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES couches reposent, au Pont -Saint -Charles, sur l'Hauterivien ; plus loin, sur l’Urgonien. Dans les marnes rouges, on peut recueillir d’assez nombreuses formes de Mollusques terrestres(Helix,Cyclos- tomes). Je citerai en particulier: Hélix Ramondi, Br-gt., toujours de taille assez petite. — Corduensis, Noulet*. — (Parachlorea) Cadurcensis, Noulet, — aff. Raulini, Noulet (la forme générale de la coquille est un peu plus conique). Cyclostoma (Otopoma) Divionense, Tournouer. M. Hollande1 2 y cite encore Hélix (Fruticicola) lepidotncha Braun et Ilelix (Coryda) rugulosa, G. V. Martens. Ces marnes peuvent se suivre, d’une manière presque continue, tout le long de la Hière, jusqu’à Saint-Thibaud-de-Couz ; sur la rive gauche du torrent, on les voit, près de la route qui conduit à Vimines, surmontées par des couches de Molasse grisâtre sans cailloux roulés, à éléments fins, qui appartiennent à la base duMio- cène. Les couches de Molasse marine, à l’état de grès plus grossiers, quartzeux, avec débris de coquilles marines assez abondants, exis- tent en effet plus haut. Au delà de Chambéry, vers le lac du Bourget, j’ai également signalé l’existence de ces marnes bariolées tout à fait caractéristiques de l’ Aquitanien dans la région, vers le Grand-Port, près d’Aix-les- Bains, où elles forment une bordure, à l’extrémité delaChambotte, sur le bord du Sierroz : elles ne renferment là que des concrétions analogues à celles de Gerbaix, dans la vallée de Novalaise. Sur le versant occidental de la vallée, la composition de l’ Aqui- tanien est un peu différente : les conglomérats bréchoïdes de base sont beaucoup plus développés. Près de Vimines, au hameau de la Fougère, on voit, reposant sur l’Urgonien ou l’Hauterivien (cale. 1 Ces Hélix qui appartiennent à des formes voisines de VH. Ramondi, mais de taille plus petite, sont aussi très voisines de Hélix (Coryda) rugulosa G. V. Martens qui existe également, d’après M. Hollande, dans ce gisement. Elles sont de taille un peu plus petite que la forme de l’Aquitanien à laquelle je les rapporte. 2 D. Hollande, loc. cit. Bull. n° 49, p. 1?, 1895. SYNCLINAL DE CHAMBÉRY 157 jaune ferrugineux), un conglomérat, à éléments plus ou moins volu- mineux, de calcaires surtout Urgonien et Néocomien connu depuis longtemps sous le nom de brèche de Vimines. Elle a été rangée d’abord dans l’Eocène, puis dans rAquitanien. Dans cette localité, autant que les éboulis et les cultures permet- tent de s’en rendre compte, cette brèche est surmontée immédia- tement par les premières couches de la Molasse marine, à l’état de grès grossiers, avec débris d’Huîtres et dePecten : P.'præscabrius- culus,0.virginiana, O. crassissima ; mais, si on se dirige un peu plus au Nord, on retrouve, au delà de Vimines, les marnes rouges bariolées, identiques à celles du Pont-Saint-Charles et, vers Saint- Sulpice ou sur le sentier du col de l’Epine, on voit au milieu de ces marnes rouges qui acquièrent là un développement considérable, s’intercaler des bancs de poudingues identiques à celui de Vimines; le tout est surmonté comme à Gerbaix par le conglomérat de base du Miocène, tout différent, kPectens et à Uuîlres. L’âge Aquita- nien de cette brèche est ainsi démontré. Ces bancs de brèche ont été rencontrés dans le percement du tunnel de Couz, du côté de la cascade, alternant avec des marnes rouges : j’ai déjà indiqué qu’on les rencontrait de l’autre côté de la montagne de l’Epine. On peut donc en conclure qu’il existait un vaste lac Aquitanien, s’étendant sur toute cette région, par dessus la chaîne de l’Epine dont quelques points seuls étaient émergés et soumis aux actions des agents atmosphériques qui devaient agir avec activité, comme le montre l’existence de ces brèches h 2° Miocène. — Les dépôts Miocènes de la vallée de Chambéry reposent tantôt sur l’Aquitanien quand ce dernier terrain existe (Saint Sulpice, ravin du Forézan, vallée de Couz) tantôt directe- ment sur l’Urgonien (route du col du mont du Chat, Hautecombe), même sur l’Hauterivien (Vimines, col de l’Epine). Ils débutent en général par un conglomérat calcaire à éléments assez roulés, 1 Cette brèche de Vimines est depuis longtemps exploitée comme marbre. Les parties les plus compactes sont en effet susceptibles d’acquérir un beau poli, ce qui les fait employer dans la région de Chambéry comme pierre d’ornement. On a signalé dans la pâte (Abbé Chamousset) 1844), des restes de coquilles d’eau douce. 158 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES provenant des roches de la région, avec souvent des éléments remaniés de l’Aquitanien et quelques silex. Un grand nombre de ces galets ont été perforés par les pholades ainsi que la roche sous-jacente. Ils ont été signalés depuis longtemps près du Bourget le long delà route du mont du Chat et à Hautecombe. On s’est basé sur la présence de ces traces de pholades pour en con- clure que la montagne de l’Epine et le mont du Chat étaient déjà émergés à cette époque, c’est-à-dire au Burdigalien. Je suis plutôt amené à ne voir là qu’un fait général de la transgression marine du premier étage Méditerranéen et à considérer la chaîne de l’Epine comme formant simplement un haut fond, recouvert bien certainement par les eaux marines, comme le prouve l’identité des formations Miocènes de la vallée de Chambéry et de Novalaise '. Fig. 23. — Coupe du Forézan près de Chambéry. A q Aquitanien; M Molasse gréseuse à P. prxscabriusculus ; MJ Molasse sableues jaune du 2e Etage ; a Alluvions de la plaine de Chambéry. Ce poudingue de hase du Miocène, qui a été longtemps confondu avec le poudingue Aquitanien, s’en distingue par l’existence de ces galets perforés et par le ciment qui est molassique au lieu d’être calcaire et ferrugineux. Il contient enfin des restes de coquilles marines (Huîtres et P. præscabriusculus très recon- naissables). Au-dessus, on aune série puissante de bancs de grès, alternant avec des marnes et quelques bancs de conglomérat polygénique. 1 La chaîne de l’Épine avait certainement déjà été ébauchée avant l’Aquitanien par les mouvements Est-Ouest qui ont affecté les Bauges pendant toute la période Nummu- litique comme le prouvent les formations bréchoides de l’Aquitanien. SYNCLINAL DE CHAMBÉRY 159 A la partie supérieure, le centre du synclinal présente des cou- ches sableuses qui appartiennent au Miocène moyen (deuxième étage Méditerranéen) . Une coupe E. -W, prise le long du ravin du Forézan, près de Chambéry, permet de se rendre compte de l’allure et de la compo- sition moyenne de ces formations marines du Miocène (fig. 23). L’on rencontre successivement, au-dessus de l’Aquitanien (mar- nes bariolées) fortement relevé : lu Conglomérat de base, 1 mètre; 2° Bancs de Molasse marneuse, bleuâtre, alternant avec des bancs de grès grossiers, à petits cailloux de quartz et de porphyre rouge et vert ayant 1 à 2 mètres d’épaisseur. Ces couches, d’abord presque verticales, ne tardent pas à s’incliner, de moins en moins, quand on s’avance vers l’Est; 3° Au confluent des deux ruisseaux, on a un gros banc de molasse, gris-verdâtre, à grain fin, sans trace de stratification, atteignant 50 mètres d’épaisseur au moins et plongeant de 20 de- grés vers l’Est, séparé par quelques couches de marnes molassi- ques (3 à 4 mètres) d’un second banc épais de Molasse gréseuse à grains fins; 4° Bancs de marnes bleues, alternant avec la Molasse grise ordinaire; un banc de marnes bleues supérieures présente une intercalation lenticulaire de poudingue polygénique : l’ensemble a une épaisseur d’une quarantaine de mètres ; 5° Molasse sableuse, gris bleuâtre, contenant quelques galets de quartz et des poches de lignite (jayet) noir, compact1. Certaines parties plus gréseuses prennent des formes arrondies et souvent, au contact de deux bancs, on observe une surface ondulée, rap- 1 Ces poches ou nids de jayet sont très fréquentes dans les couches de cette Molasse gris bleuâtre qui constitue le faciès le plus habituel du Miocène dans la région. On en a signalé à Oncin, Bissy, Cognin, Vimines où elles ont donné lieu à des tentatives d’ex- ploitations naturellement improductives. Le lignite est fréquemment accompagné de pyrite (dont la présence s'explique facilement par la production de l’acide sulfhydrique dans la décomposition du bois), parfois assez abondante pour avoir été exploitée (Saint- Jean-de- Couz) et qui se décompose au contact de l'air en donnant des oxydes de fer qui colorent les couches de grès avoisinantes. 160 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES pelant les ripples-marks de Saint-Fons. On observe sur la rive droite une nouvelle intercalation de poudingue polygénique, formant un banc ayant 2 mètres d’épaisseur; 6° Bancs de Molasse sableuse, avec traces de lignites et pou- dingues (4 mètres) alternant avec des bancs de marnes bleues, intercalées. Les couches sont presque horizontales. Nous sommes là à peu près au centre du synclinal, et l’abrupt, qui se trouve sur la rive gauche du ruisseau, nous montre au-dessus d’un dernier banc de Molasse bleue : 1 a) banc de sable légèrement jaunâtre, avec grès en boules. b) banc de marne bleue (lm). Ic) Molasse sablonneuse, avec petits galets arrondis, roulés et des indices de stratification irrégu- lière de courants. d) Molasse gris verdâtre, s’effritant à l’air. e) Molasse sableuse, avec galets de grès, passant à des sables jaunâtres. Les couches supérieures appartiennent au second étage Médi- terranéen (Vindobonien). En continuant de descendre le Forézan, on voit les couches se relever peu à peu vers l’Est, pour redevenir presque verticales ; un peu après le hameau de Sur les Molasses, on retrouve une suc- cession à peu près identique. D’abord, des bancs de Molasse sableuse, avec bancs de poudingue, l’un d’eux a plus de 10 mètres d’épaisseur, et des bancs ondulés, suivant les lignes de contact: les bancs gréseux sont exploités comme dalles. Après la première carrière, on rencontre, intercalé entre deux bancs de Molasse sableuse, un banc de grès grossier avec petits cailloux rouges et verts qui fait saillie et que l’on peut suivre dans toute la vallée, jusqu’au delà de Saint-Thibaud-de-Couz. Ce banc est très fossi- lifère. J’ai pu recueillir en grande abondance: Lamna elegans, Ag. — contortidens, Ag. Lamna cnspidata, A g. Oxyrhina hastalis, Ag. SYNCLINAL DE CHAMBÉRY 161 Oxyrhina sp. Pecten Tournali, M. de Serres. Chrysophrys, sp. (voisin des dents Crocodile (Dent), figurées par Gervais. Paléontolo- Côte d’Halitherium. gie française, pl. 83, fig. 18, flg. 14-15 du Miocène de l’Hé- rault. L’on retrouve au delà, les bancs de marnes bleues, alternant avec des bancs de Molasse grise et ordinaire (n° 4) et les deux gros bancs qui existent au confluent des deux ruisseaux, sur l’autre lèvre du synclinal. Une ancienne galerie de recherches du lignite a été creusée dans le banc inférieur. Au delà commence la plaine d’alluvions de Chambéry. L’érosion quaternaire a complètement enlevé les couches inférieures et les dépôts Aquitaniens qui devaient prolonger ceux de Saint- Cassin et du Pont Saint-Charles jusqu’à l’alignement Voglans-Corbelet. La présence constante, dans toute la vallée, à la base des dépôts Miocènes marins, soit d’un banc de conglomérat, soit de grès grossiers avec débris d’Huîtres ou de Pectens, est une preuve directe de la transgression marine au Burdigalien supérieur et, en même temps, une raison pour rapporter les dépôts de la vallée de l’Hiège qui surmontent immédiatement les couches Aquitaniennes, à la base du Miocène. Ce terrain serait ici, comme dans la vallée de Rumilly ou la Plaine Suisse, d’origine lacustre. La coupe précédente montre en outre que l’axe du synclinal Tertiaire, qui suit sensiblement l’axe de la cuvette du lac du Bourget et de la vallée de la Couz, est très rapproché et paral- lèle à la chaîne de l’Epine-Mont-du-Chat; aussi la vallée actuelle de Chambéry, due aux érosions quaternaires des eaux venues de la Cluse de Montmélian, comprend, non seulement toute la partie orientale de ce synclinal, mais aussi une partie de celui de Rumilly- Aix - les-Bains . Lorsqu’on s’avance vers le Sud, du côté de Saint-Thibaud-de- Couz, le Miocène, qui diminue beaucoup de puissance, comme l’a montré M. Hollande1, reste toujours à l’état de grès grosser 1 D. Hollande, loc. cit.. Bull. n° 49, 1895, coupe de Pierre-Rouge. Univ. de Lyon. — Douxami. II 162 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES présentant quelques bancs de cailloux exotiques. On les voit reposer en complète discordance et sur les bancs du Sénonien et sur les couches Eocènes de la carrière Milloz à Saint-Jean-de-Conz. Les dépôts Tertiaires manquent complètement dans la partie très resserrée du synclinal, vers le tunnel; mais réapparaissent au delà des Echelles, pour former les dépôts puissants de la vallée de Saint-Laurent et de Voreppe. Ils sont peu développés sur le versant occidental de ce synclinal de Voreppe, ne formant que quelques lambeaux, reposant partout sur l’Urgonien: ce sont des couches dures, coquillières, fortement relevées contre la chaîne de la montagne de Raz : on les voit bien vers Miribel et dans le petit lambeau au Sud de Saint-Julien-de-Raz ; les dépôts Molas- siques atteignent là presque le sommet de la chaîne. Celle-ci a été certainement recouverte par la mer de la Molasse marine. Ces dépôts se présentent à l’état de grès très grossiers, alternant avec des bancs marno-calcaires, avec de nombreux débris de Pectens et d’Oursins. J’y ai recueilli, à la butte de Martinet, entre le hameau Garel et celui deVoissant : Pecten præscabriusculus, Pont. Pecten Restitutensis. Font. Débris d'Huîtres, d’Oursins et de Bryozoaires dans les bancs durs. Ces couches inférieures très caractéristiques affleurent égale - ment près de Voreppe, à la Mallossane, tout près des exploitations de sable et d’argile réfractaires Eocènes ; elles reposent sur l’Ur- gonien. Si on suit le chemin descendant de la route de Saint- Laurent au ravin de Pommiers (ravin de la R.oize), on peut rele- ver la coupe détaillée suivante (fig. 24) : Au-dessus de l’Urgonien: 1° Bancs de Molasse gréseuse à P. præscabriusculus, forte- ment inclinés à l’Est (80 degrés environ) ; 2° Banc de Molasse sableuse, typique, identique à celle de Pont- de-Beauvoisin; 3° Banc de poudingue polygénique surmonté d’un nouveau SYNCLINAL DE VOREPPE 163 banc de Molasse gréseuse, assez dure, où l’on remarque d’an- ciennes exploitations au niveau de la route de Saint-Laurent ; 4° Série d’assises de Molasse sableuse, avec quelques lits de poudingues intercalés, contenant de nombreux débris d’huîtres de grande taille : O. crassissima , O.gingensis. Ges couches descendent jusque dans le lit du torrent et toujours assez fortement inclinées. Après avoir traversé le torrent, en face le confluent de la J Jurassique marneux (Oxfordien) ; U Urgonien; m Grès durs à P. Præscabriusculus; P Poudingues de Voreppe, marins à la base, saumâtres au voisinage du lignite L : 1 Mo- lasse gréseuse et sableuse exploitée à O. crassissima, O. gingensis ; 2 Molasse gréseuse intercalée; P Poudingues lacustres (Pontien), avec lits sableux et marneux ; F. Faille. Roize, et en remontant ce ruisseau, on voit une puissante masse de poudingues à cailloux exotiques, dont les éléments sont identiques à ceux des cailloutis Miocènes des plateaux du Bas- Dauphiné septentrional, des poudingues de la vallée de Chambéry ou de la plaine de Rumilly. Ce sont les célèbres poudingues de Voreppe. Ils affleurent également, sur une grande épaisseur, le long de la route de Saint-Laurent, avant le col de la Placette, et ressemblent d’une manière frappante à la Nagelfiuh de la Plaine Suisse. Les cailloux calcaires sont impressionnés. La Roize s’est creusé son lit dans cette masse de poudingues, qui se retrouvent sur les deux rives. Ils présentent quelques intercala- tions marneuses et gréseuses; ces derniers bancs font généralement saillie. Les couches sont peu inclinées vers l’Est et ne tardent pas à devenir sensiblement horizontales, puis à quelques centaines 164 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES de mètres du confluent, se relèvent légèrement à l’Est et viennent butter en faille contre l’Oxfordien. Cette coupe fort intéressante nous montre l’intercalation des poudingues à cailloux impressionnés, ici fortement cimentés, dès les couches de Molasse sableuse que je considère comme intermé- diaires entre le premier et le deuxième étage méditerranéen. Ils forment des lentilles plus ou moins épaisses, intercalées au milieu des couches gréseuses. Ces intercalations sont encore bien visi- bles un peu au Sud deVoreppe. Là, les bancs de Molasse sableuse, plus fortement cimentées, forment des masses puissantes, exploitées depuis fort longtemps comme dalles, dans les célèbres carrières souterraines de Voreppe. On trouve abondamment dans les assises plus sableuses, comme l’a signalé depuis longtemps Ch. Lory. O .crassissima Lam (= O .longirostris Lamk.jO.^tm/ettstsSchloth. Ces poudingues, qui ne se présentent ici que sous une épais- seur d’une centaine de mètres, s’élèvent beaucoup plus haut; on les retrouve un peu au Nord, depuis le fond de la vallée (660 mè- tres), jusqu’à une altitude de 1008 mètres. Sur la rive droite du ravin de la Roize, se trouvent intercalés, au milieu de ces poudingues, des grès fins bien stratifiés et des argiles bleuâtres, avec une couche de lignites connus sous le nom de lignites de Pommiers . L’ancienne exploitation est aujourd’hui complètement aban- donnée ; le puits de 160 pieds de profondeur la galerie horizon- tale qui débouche dans le ravin de la Roize et qui servaient autre- fois à l’extraction du lignite sont aujourd’hui presque remplis d’eau et d’un abord très difficile1. Le lignite formait trois couches d’une épaisseur totale de lm,20 et provenait, d’après Ch. Lory, surtout de débris déplantés marécageuses. Les marnes contien- nent, ainsi que le lignite, des coquilles d’eau douce (Planorbes Lymnèes ) complètement écrasées et des restes de Mammifères ; on a cité en particulier Mastodon turicensis. 1 On voit encore les'restes de deux sondages effectués, il y a deux ou trois ans, par la Compagnie des usines de Fourvoirie pour la recherche du combustible. On a signalé en outre C. bidentatum, Lam. SYNCLINAL DE VOREPPE 165 Dans les couches d’argiles et de sables fins supérieurs au lignite, on rencontre des Gerithium tricinctum Brocchi, espèce saumâ- tre très caractéristique des faluns de la Touraine, c’est-à-dire de la zone de Chimilin et d’Aoste à Area turonica et Ancilla glan- diformis, du Tortonien de la vallée du Rhône. L’identité des pou- dingues inférieurs ou supérieurs aux couches de lignites n’a d’ail- leurs rien qui puisse nous surprendre, les matériaux qui les com- posent, ayant toujours la même origine, origine qui n’est influencée en rien par la nature des eaux (marines, saumâtres ou d’eau douce) où ils se déposaient. La dessalure des eaux, que nous venons de constater, au niveau des lignites de Pommiers, dont l’âge Tor- tonien est maintenant prouvé, ainsi que ce que nous savons se passer dans la vallée du Rhône, me portent à admettre que la partie supérieure des poudingues de Voreppe1 est d’origine fluvio-lacustre et doit se, rapporter au Miocène supérieur, au Pontien. Ils se rattacheraient donc bien comme le voulait Ch. Lory, aux cailloutis et conglomérats également Pontiens et d’eau douce de la plaine du Rhône, formant en particulier le signal de Baracuchet (937 mètres), par-dessus ou non la montagne de Raz déjà soulevée comme le Jura méridional à cette époque. Lorsqu’on se dirige vers Saint-Laurent-du-Pont, la puissance des couches diminue beaucoup, mais, présente toujours la même composition (grès et poudingues). Ces couches sont bien visibles, en particulier le long du Guiers mort. On voit nettement cet ensemble reposer sur les marnes bariolées de l’Aquitanien, près de Fourvoirie, à l’entrée du Désert de la Chartreuse. Au delà du Guiers mort et de l’ancien cône de déjection quater- naire de ce torrent, la Molasse à l’Est de Saint-Christophe entre deux Guiers, va rejoindre celle de la vallée synclinale de Couz et par suite de la vallée de Chambéry. Elle ne présente plus que de rares petits cailloux roulés d’origine lointaine ; elle rappelle tout à fait les couches de Molasse que j’ai décrites dans ces vallées. Il en est de même du petit synclinal secondaire, de Saint-Chris- 1 II y en a encore une épaisseur de plus de 200 mètres au-dessus des lignites. 16ô TERRAINS AQUITANIENS ET MIOGÈNES tophe-la-Grotte où j’ai trouvé, dans les couches inférieures (à l’état de grès grossiers), le Pecten præscabriusculus. Synclinal de Proveysieux. — A la hauteur de Saint-Jean- de-Gouz, comme je l’ai indiqué dans le premier chapitre de cet ouvrage, l’anticlinal Corbelet-Otheran se dédouble et donne nais- sance à un petit synclinal secondaire, celui de Corbel. Il se prolonge au Sud par celui du vallon des Courriers et le synclinal de Pro- veysieux, Sainte -Egrève et, au delà de l'Isère, vers Sassenage et Saint-Nizier. Fig. 25. — Coupe du synclinal de Proveysieux. N Néocomien; U Urgonien; G Gault; C Craie; Aq Calcaire d'eau douce, Aquitanien à H. Ramondi ; M Grès et Poudingues à Pecten præscabriusculus ; m. Molasse sableuse jaune avec Poudingues (2S Etage). Près de Proveysieux, ou plus exactement près de Quaix, il existe des dépôts Aquitaniens : ce sont des marnes verdâtres reposant, par un conglomérat à éléments Sénoniens, sur les sables et argiles bariolés de l’Eocène inférieur. Ges couches renferment Y H. Ramondi. Elles sont surmontées par les couches de la Molasse marine. Ch. Lory 1 a donné la coupe suivante du vallon de Pro- veysieux (Fig. 25). Les dépôts Miocènes présentent là, dès la base, le faciès cail- louteux qui, dans la plaine du Rhône, n’envahit que le Miocène supérieur et la coupe précédente est une confirmation de l’obser- vation que j’ai déjà faite plus haut (voir fig. 18). Le faciès cail- louteux envahit des couches Miocènes d’autant plus anciennes 1 Ch. Lory, loc. cit, SYNCLINAL DE PROVEYSIEUX 167 qu’elles sont plus orientales ; plus exactement, plus voisines des Alpes. Sur le versant occidental de la vallée, les assises inférieures de la Molasse marine, qui reposent en concordance sur les couches Sénoniennes, sont à l’état de grès bleuâtre, avec de nombreux débris de Pectens ( P . præscabriusculus) , elles sont bien visibles derrière Sainte-Egrève et le long de la route du col des Char- mettes, près du pont sur le torrent. Elles sont identiques aux couches gréseuses d’Ayn, dans la vallée de Novalaise ou de la Bridoire ; les bancs lenticulaires de Poudingues sont immédiate- ment au-dessus de ces assises ou bien alternent avec elles (sortie de Sainte-Egrève, descente du col des Charmettes). En d’autres points, comme près de Proveysieux, on voit sous le Glaciaire qui couronne la butte, sur laquelle est bâtie l’église, les poudingues alterner avec des Molasses sableuses, contenant des débris d’Huî- tres et de Gastropodes. Ces poudingues contiennent fréquemment de petits lits sableux avec traces de lignite (route de Proveysieux). Ils deviennent de plus en plus prédominants, lorsque l’on se dirige au Nord vers les Charmettes. L’ensemble des dépôts Miocènes de la vallée de Proveysieux est d’origine marine et se rapporte au Burdigalien supérieur et au Miocène moyen. Le petit lambeau de la combe de la Mollière, près de la Grande- Chartreuse, se présente également avec le même faciès ; la Molasse sableuse y manque et on ne trouve plus que les couches de base, les autres ayant été enlevées par l’érosion. Dans le petit val de Corbel, les couches Molassiques, qui ont subi de nombreux plissements secondaires, reposent à l’Ouest sur des couches de marnes bariolées Aquitaniennes ou sur le Gault (le Sénonien faisant défaut). Elles se présentent sous forme de grès verdâtres, à dent de squales; les parties supérieures deviennent beaucoup plus sableuses et ne présentent plus que des bancs de poudingues à petits éléments. On trouve dans les grès de nom- breux gîtes de lignites (jayet), comme dans les assises inférieures de la vallée de Chambéry, avec lesquelles ces formations pré- sentent la plus complète analogie. Dans le bas du ravin de Corbel, 168 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES on voit encore les restes d’une ancienne tentative d’exploitation de lignites ; ce synclinal de Gorbel finit en pointe, un peu au delà du plateau des Egaux1. J’ai insisté à dessein sur ces synclinaux Molassiques delà Char- treuse, dont Ch. Lory avait déjà donné une description excel- lente, que je n’ai fait que compléter sur quelques points, à cause de l’importance qu’ils présentent pour l’étude des terrains Miocènes. Ce sont, en effet, les seuls points où nous verrons les poudin- gues à cailloux exotiques et à cailloux impressionnés commencer, pour ainsi dire, avec les premiers dépôts marins miocènes duBurdi- galien à P. præscabriusculas et se continuer, en particulier dans la vallée de Voreppe, jusque dans le Pontien, pendant que les eaux marines s’éloignent peu à peu vers l’Ouest et sont remplacées d’abord par des eaux saumâtres (couches à Cêrithes de Pommiers), puis lacustres, pour la partie supérieure de cespoudingues. L’iden- tité parfaite de ces formations, depuis les couches marines à O. crassissima , jusqu’aux couches les plus élevées, ainsi que la présence, jusqu’à la fin du Tortonien2, de couches marines ou sau- mâtres, expliquent parfaitement l’hypothèse de Ch. Lory, qui considérait comme marines et identiques aux poudingues de Voreppe, toutes les formations de cailloutis des plateaux du Bas Dauphiné septentrional ; elles sont, en réalité, d’âge plus récent et d’origine nettement fluvio-lacustre. Ces poudingues de la vallée du Rhône sont comme ceux de Voreppe (qui sont simplement plus fortement cimentés), formés de cailloux parfaitement roulés de quartzites d’origine alpine, de roches exotiques (roches granitoïdes altérées, porphyres rouges et verts 3), inconnues , pour la plupart, jusqu’à présent, dans les Alpes françaises, mais dont l’origine alpine n’est pas douteuse, étant 1 Au delà de l’Isère, le prolongement méridional du synclinal de Proveysieux se trouve dans les petits lambeaux de Molasse de Sassenage et de Saint-Nizier, que l’on peut suivre jusqu’au village de LaDs, toujours formés de Molasse gréseuse et sableuse. 2 Et même dans la vallée du Rhône proprement dite, jusque dans la zone inférieure, saumâtre à Nassa Michaudi du Pontien. 3 Dans une course que j’ai eu l'honneur de faire à Voreppe avec M. Kilian, celui ci m’a signalé un grand nombre de roches Permiennes et des galets de Spilite. VALLÉE DU RHONE 169 donnée la disposition des mers à l’époque Miocène. Ces poudingues contiennent en outre quelques galets de roches locales (Néoco - miennes et Jurassiques) souvent, dans les couches marines, perfo- rées par les pholades et des galets de calcaire noir impressionnés h Les lignites de Pommiers, intercalés au milieu des poudingues marins ou saumâtres de la vallée de Voreppe sont donc tout diffé- rents, et comme âge, et comme origine, des lignites de laTour-du- Pin avec lesquels, tous les auteurs les assimilaient jusqu’à présent. Ils se rapprochent beaucoup comme âge de ceux d’Ellg, Kâpfnach ou d’CEningen, en Suisse : la rareté des documents paléontologi- ques au point de vue des Mammifères empêche de donner un parallélisme plus exact. Le Mastodon Turicensis qui y a été signalé, en effet, ne correspond pas à un niveau bien précis du Miocène et présente une grande extension verticale. Vallée du Rhône. — Au Nord du lac du Bourget, les dépôts Molassiques, qui constituent la cuvette de ce lac, sont interrompus par la grande plaine alluviale de Châtillon et ne forment plus qu’une mince bordure le long de la montagne de Gessens à partir de Chindrieux. Ils ne recommencent à ne prendre une certaine importance, au point de vue des affleurements, qu’à partir de la cluse du Fier. Ils affleurent en lambeaux plus ou moins morcelés sur les deux versants de la vallée du Rhône, qui, entre Guloz et Bellegarde, occupesensiblementl’axe d’une vallée Jurassienne entre le Colombier de Guloz à l’Ouest, et la montagne du Gfros-Foug et des Princes à l’Est. Cette dernière chaîne disparaît, sous les dépôts Tertiaires et Qua- ternaires, un peu auNord-Est de Seyssel, avant la vallée des Usses, dont les dépôts Tertiaires se relient d’une façon intime à ceux de la vallée du Rhône. J’ai déjà indiqué plus haut, que je voyais dans le chaînon de la Mantière, le prolongement de la chaîne du Gros-Foug. 1 Ce caractère de cailloux calcaires impressionnés sur lequel Cn. Lory a le premier attiré l’attention en France, se retrouve fréquemment dans la plupart des poudingues { du Flysch, de l’Aquitanien de Lavaux près de Lausanne dans la Nagelfluh Miocène du Nord de la Suisse). Ces impressions sont dues à l’action dissolvante des eaux chargées d acide carbonique, circulant par capillarité, entre les divers éléments du poudingue au moment de sa consolidation. 170 TERRAINS AQCJITANIENS ET MIOCENES Les terrains Tertiaires de la vallée du Rhône et de la vallée des Usses, qui se relient, d’une part, aux dépôts du Jura méridional de Savoie, et d’autre part, aux dépôts Tertiaires de la vallée de Rumilly et des environs de Genève, par suite de la Plaine Suisse, ont déjà donné lieu à de nombreuses notes de MM. Renevier, Benoit et A. Favre. L’Aquitanien en particulier y est bien développé et présente une composition un peu variable suivant les points. Près de Bellegarde (perte du Rhône), au-dessus du Gault et de l’Aptien, on a des marnes bariolées1, identiques à celles que j’ai décrites dans la vallée de Chambéry, reposant tantôt sur l’Aptien, tantôt sur le Gault. Elles avaient d’abord été rapportées par M. Renevier2 au Crétacé, puis avec MAL de AIortillet et Benoit à l’Aquitanien. Ces marnes sont directement surmontées par la Molasse marine qui débute en ce point par des assises sableuses, alternant avec trois bancs degrés grossiers renfermant de nombreux débris organisés, j’ai pu y recueillir les formes suivantes : Nombreuses dents de Squales : Lamna dubia, A g. — — Lamua contortidens, Ag. Ostrea palliata, Goldf. (0. Granensis, Font.). Qstrea virginiana, Mayer (petite forme ancestrale de 0. crassissima). Pectenpræscabriusculus, Font. Pecten carriensis, Gouret, forme de Carry (Bouches-du-Rhône). Pecten opercularis, Lamk. Cerithiumpapaveraceum, Basterot ? Cardita sp, Cytherea sp. Venus Brocchii. Nombreuses valves de Balane. qui caractérisent le premier Etage méditerranéen, le Burdigalien supérieur. Certaines couches de Molasse fine forment des bancs de grès puissants exploités. Lorsqu’on descend la vallée du Rhône, creusée en grande partie 1 II y a souvent entre l’Aquitanien et les terrains Secondaires des grès quartzeux, blancs ou bruns que j'ai rapportés plus haut à l’Eocène inférieur. 2 E, Renevier, Mémoire géologique sur la Perte du Rhône , 1854. VALLEE DU RHONE 171 en forme de canon dans les calcaires Urgoniens, à Ch al longes, au-dessus des sables blancs imprégnés d’asphalte de l’Eocène inférieur, l’Aquitanien débute par un conglomérat d’une épaisseur de 20 centimètres à 1 mètre à éléments peu roulés pouvant atteindre un volume de 1 mètre cube. Ges poudingues ravinent profondé- ment les couches Urgoniennes; ils descendent jusqu’à 40 mètres au-dessous du niveau actuel du Rhône et un peu à l’Ouest du lit actuel, montrant que ces dépôt aquitaniens fluviolacustres étaient en relation avec un cours d'eau tout différent du fleuve d’aujour - hui. Les éléments sont des calcaires Urgoniens et Jurassiques avec quelques silex : ils paraissent provenir surtout du Reculet et du Vuache déjà ébauchés avant l’Aquitanien. Au-dessus, on a des bancs de marnes bleues et de Molasse d’eau douce gris bleuâ- tre, assez compacte, rappelant les couches de la Molasse de la plaine de Genève et présentant quelquefois des lits de cailloux. Elles contiennent avec des fossiles remaniés du Jurassique comme Bhynchonella arolica Masch. de l’Oxfordien, des ossements de Mammifères. J’j ai trouvé : Dremotherium sp. (Musée de Chambéry). Rhinocéros (Acerotherium) minutus, Cuv. (Musée de Chambéry). Tapirus Helveticus, H. von Meyer. Tapiras, sp. Hyotherium, sp. Débris de Tortues 1 et de Crocodiles. Ges marnes et le poudingue ravinent très nettement les cal- caires Urgoniens comme on peut le constater dans la coupe de la carrière située derrière la maison d’habitation, à l’exploitation d’asphalte, dirigée par M. L. Berthet. Un peu plus loin, à l’endroit même où fai recueilli les débris du Tapir, on peut relever la coupe suivante (fig. 26). L’on voit, au-dessus des couches de marnes bleues, un banc de Molasse gris bleuâtre, très dure, sans fossiles et beaucoup plus haut encore les couches de Molasse sableuse, jaune marine, et les bancs de grès à dents de squales du Burdi- 1 L étude paléontologique de ces Mammifères aquitaniens sera donnée un peu plus loin. 172 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES galien qui forment la partie supérieure des collines qui bordent le Rhône jusqu’au delà de Bellegarde. La coupe est la suivante : 1° Calcaire Urgonien, compact, descendant jusqu’au Rhône; il affleure également sur l’autre rive du fleuve et présente de belles traces des érosions successives du fleuve ; U Urgonien avec le 9e banc d'asphalte (a) et qui se retrouve sur la rive droite du Rhône; 1 Poudingue aquitanien de base en discordance sur l'Urgonien; 2 Marnes bleues avec Mammifères; 3 Molasse gréseuse gris bleue (Miocène inférieur); 4 Grès et sables marins à P. Prœscabriusculus ; a*a Alluvions anciennes. 2° Banc d’asphalte qui se retrouve au même niveau de l’autre côté du Rhône jusque sous la pente butte alluviale. C’est le seul des neuf bancs d’asphalte exploités qui traverse le Rhône. Les huit autres s’arrêtent brusquement à la vallée. L’épaisseur de ces bancs qui finissent en pointe vers l’Est, augmente à mesure que l’on s’adresse à des bancs plus profonds. Les bancs d’Urgonien compact, non crayeux comme celui exploité qui les séparent sont très fis- surés et toutes les fissures sont remplies par l’asphalte ; 3° Nouveau banc de calcaire Urgonien compact; 4° Poudingue Aquitanien de base 25 à 50 centimètres d’épais- VALLEE DU RHONE 173 seur (les sables Éocènes manquent ici, mais existent tout près de là, dans la tranchée du chemin de fer) ; 5° Banc de marnes bleues avec débris de Mammifères ; 6° Banc de Molasse gris bleu, plus ou moins épaisse, très dure sans fossiles (Miocène inférieur) ; 7° Paquet d’alluvions du Rhône, stratifiées (contenant quelques micaschistes et surtout des quartzites et des calcaires). Ils se retrouvent de l’autre côté formant la petite butte de la rive droite et en un grand nombre de points de la tranchée du chemin de fer entre Pyrimont et Injoux; 8° Molasse sableuse jaune (Burdigalien sup.); 9° Banc de grès à dents de squales et P. præscabriusculus (Burdigalien sup.). C’est encore au-dessus et un peu plus loin que se trouvent les bancs puissants de grès qui affleurent à la gare de Seyssel et le long du Rhône. Les couches de Molasse gris bleuâtre comprises entre les cou- ches Aquitaniennes et les premières assises marines se rapportent donc probablement au Miocène inférieur, au Langhien des géolo- gues Suisses. Cette remarque se trouve encore confirmée par les coupes que l’on peut relever le long de la ligne du chemin de fer de Bellegarde à Seyssel avant la station de Pyrimont. On voit, en effet, par exemple près du passage à niveau, des sables blancs ou verdâtres avec quelques galets roulés de quartz de l’Eocène infé- rieur surmontés par des marnes rouges panachées de l’Aquitanien et au-dessus de ces dernières assises une série de bancs de Molasse de couleur grise alternant avec des bancs de Molasse tendre avec galets marneux et rognons de calcaires ou bancs marno-calcaires. C’est au-dessus que commencentles premiers bancs de grès grossiers à dents de squales débris d 'Ostracês et de Pectens si caractéristi- ques de la Molasse à P. 'præscabriusculus du Burdigalien supé- rieur. Tout le long de la montagne du Gros Foug, l’Aquitanien forme une bordure presque continue et repose tantôt sur l’Urgonien, tantôt sur le Gault (Blinty, Châteaufort). Au-dessus de Ruffieux, on peut observer les marnes bariolées Aquitaniennes surmontées de 174 TERRAINS AQU1TANIENS ET MIOCENES bancs de Molasse grise avec débris de plantes rappelant tout à ; fait l’aspect de la Molasse d’eau douce de la Plaine Suisse : une ! partie des couches considérées par Benoit (feuille de Nantua) comme Molasse marine, doit donc être plutôt rapportée au Mio- cène inférieur lacustre. R Récif corallien; K Kimmeridien ; P Purbeck; V Valenginien; H Hauterivien; U Urgonien; G Gault; Aq Calcaire oolitkique lacustre Aquitanien; M Molasse marine à P. Præscabriusculus. Ces dépôts présentent d’ailleurs quelques variations ; c’est ainsi qu’à Châteaufort, à la sortie du val du Fier, l’ Aquitanien qui repose sur le Gault fossilifère (fig. 27) est à l’état de calcaire lacustre oolithique et est directement surmonté par la Molasse marine qui se présente en gros bancs de grès molassiques presque horizon- taux à stratification peu apparente, identiques à ceux de la vallée de Rumilly, de l’autre côté du Gros Foug. On retrouve ces calcaires Aquitaniens intercalés dans les marnes bariolées plus au Nord, dans la vallée des Usses et renferment là Hélix (Coryda) rugulosa G. V. Martens. Dans le prolongement septentrional du synclinal de Bellegarde, dans la vallée de la Valserine, les dépôts Aquitaniens n’existent plus et la Molasse marine existe seule. Elle repose à l’Ouest sur l’Urgo- nien et vient buter en faille contre le Jurassique supérieur. C’est un calcaire plus ou moins gréseux, gris bleuâtre, grumeleux, avec SYNCLINAUX TERTIAIRES DU NORD DU JURA 175 des parties plus gréseuses et micacées ; l’aspect est un peu diffé- rent de celui des dépôts delà plaine de Bellegarde. Quelques bancs présentent de nombreux Bryozoaires. Je rapporte également à ces couches Burdigaliennes des sables légèrement quartzeux jaunâtres, reposant sur l’Urgonien dans le Nord de la Combe de Mijoux dans le vallon des Dappes. Synclinaux tertiaires du Nord du Jura. — Il existe une distance assez grande entre les dépôts Miocènes que je viens d’étu- dier, dans la vallée de la Valserine ou de la combe d’Evuaz, et les lambeaux Tertiaires qui existent plus au Nord au delà de Morez. Il est difficile de les rejoindre entre eux d’une manière certaine. Leur ’etude nous fournira cependant des renseignements précieux sur l’extension de la mer Miocène dans cette région. Passons rapi- dement en revue les petits lambeaux Tertiaires des environs de Saint-Claude : Aux Bez, M. l’abbé Bourg eat1 a signalé des bancs à O. cr assis- sima reposant sur l’Urgonien inférieur perforé ; au-dessus, un pou- dingue calcaire correspondant à la transgression marine du second étage méditerranéen et des grès micacés appartenant encore au second étage. Dans la combe de Grand Vaux, il existe, près de l’abbaye et aux Mussillons, deux petits lambeaux de Molasse marine à l’état de grès blanc jaunâtre, à texture lâche, à ciment calcaire avec nom- breuses taches rougeâtres. On trouve dans ces couches très fossi- lifères, avec des fossiles remaniés, du Gault et quelques silex, de nombreux bivalves et des Bryozoaires ; ils reposent en couches presque verticales sur rUrgonienoul’Hauterivien. J’y ai recueilli: Sphærodus sp. Ostrea granensis. Font. Turritella sp. — caudata. Munst. in Goldf. Pecten præscabriusculus. Font, très net. Cardium, Cytherea, Retepora, Mem- — stalzanensis, Mayer. branipora, Tubipora.etc. — subbenedictus, Font. Echinolampas hemisphericus. Ag. Je considère ces couches comme représentant le premier 1 L'abbé Bourgeat, Quelques observations nouvelles sur les Lapies, le Glaciaire et la Molasse clans le Jura (U?. S. N. F 3° série, t. XXIII, p. 414s 1895). 176 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES étage méditerranéen et comme inférieures aux couches des Bez h Des dépôts Miocènes du même âge s’observent encore près de Charbonny à Foncines , Fort du Plasne : la Molasse est ici fran- chement gréseuse. Dans cette dernière localité M. Girardot a donné la coupe suivante : Dans un pli de l'Urgonien, Molasse jaune très grossière avec : Pecten Gentoni, Font. Pecten solarinm. Goldf. — præscabriusculus, Font. — Restitntensiss, Font. — subbenedictus. Font. Ostrea virginiane, Goldf. surmontées par des couches encore plus détritiques avec : Balanus tintinabulum, L. Pectunculus stellatus, Gm. Venus nmbonaria, Lam. Psammechinus dubius, Ag. qui représentent l’Helvétieu H. de Mayer, c’est-à-dire nettement le premier étage méditerranéen. On peut encore relever quelques petits lambeaux de Molasse marine gréseuse près de la Chaux-Neuve, et dans la vallée du Doubs, près de Sanageois. La coupe du vallon des Verrières situé un peu plus au Nord est beaucoup plus complète, et va nous pré- senter des couches d’âge différent de celles que nous venons d’étu- dier. Dans l’état actuel de nos connaissances, c’est le lambeau de Molasse marine le plus septentrional du Jura. Ces dépôts ont été bien étudiés par M. Dollfuss 2, d’après les observations de cet auteur et celles que j’ai pu faire dans cette région, on voit nettement aux Verrières Françaises, la Molasse marine inférieure à : Pecten præscabriusculus 3, Font. Ostrea crassissima, Lam. Echinolampas scutiformis, Ag. 1 Le faciès calcaire, ainsi que la présence des couches à Bryozoaires , Polypiers, Ostra- ces, s’expliquent facilement par l'existence sur toute la région d'une mer peu profonde. Le Jura avait subi, avant l’Aquitanien, des mouvements lui ayant donné un certain relief et ébauché les plis des Hautes Chaînes et, sur ce haut fond calcaire, les dépôts sont natu- rellement plus calcaires que dans la plaine Suisse qui, d’ailleurs, est plus rapprochée des Alpes d'où provenaient, en grands partie, les matériaux. 2 G. Dollfuss, Quelques nouveaux gisements de terrains Tertiaires dans le Jura, près de Pontarlier. (B. S. G. F., 3e série, t. XV, p. 179, 1887.) 3 M. Dollfuss cite en outre de ces couches : Pecten scabrellus = P .præscabriusculus Ostrea edulis, L, var. O. Boblayi , Desh. Brissopsis Nicoleti. Desor, Tetliya lyncu- rium, Lk. Fasciculipora, Membrani pora. SYNCLINAUX TERTIAIRES DU NORD DU JURA 177 reposer par un poudingue calcaire, indice de la transgression marine du premier étage méditerranéen, sur les calcaires Urgo- niens ; elle est surmontée par des assises de Molasse sableuse du Miocène moyen, et la série se termine par des couches calcaires à Hélix sylvana, H. Larteti, Hélix eliingensis du Vindobonien supérieur, qui se rattachent aux couches Œningiennes du Locle et de la Ghaux-de -Fonds. Au Nord (coupe au Moulin des Boîtes, tranchées du chemin de fer), en-dessous de la Molasse marine, l’on constate la présence de marnes grises avec grosses poupées de calcaires blanches à Melania Escheri. Nulle part on ne constate, comme l’admet M. G. Dollfuss, la présence des couches à P. præscabriusculus, au-dessous de ces dernières assises ; aussi la succession que j’admets, dans le val des Verrières, est-elle la suivante: Burdigalien ( inf. Marne grise à Melanoïdes Escheri. (Miocène infér.). I sup. Molasse marine à P. præscabriusculus. Vindobonien ( Helvétien s. str. Molasse sableuse. (Miocènemoyen). | Tortonien. Marne calcaire à Hélix sylvana. Cette succession se trouve d’ailleurs parfaitement vérifiée, comme je l’ai montré1, au val de La Chaux près Sainte-Croix ; une coupe N. -W., S.-E. passant par la fontaine des Arraudes et Francastel nous montre la série suivante : Sur l’Urgonien fortement redressé, on a l’Aptien et l’Albien marneux fort réduits et une série complète des couches Tertiaires depuis l’Aquitanien jusqu’au Miocène supérieur. Les couches Aqui- taniennes renferment, avec des fossiles remaniés du Néocomien (Rhynch. multiformis ), Hélix (macularia) E eliingensis Sandh. Ces couches sont ici à l’état de marnes rouges, tandis que vers Noirvaux elles sont à l’état de brèche calcaire2, à éléments Crétacés 1 H. Douxami, Le Tertiaire des environs de Sainte-Croix (Jura Vaudois) (Eclog. géol Helvet., IV, p.418, 1896). ~ Comme je l’ai indiqué (loc. cit), cette brèche Aquitanienne à ciment rougeâtre est identique à la brèche de Vilaines, près Chambéry et à la brèche de Narlay, près de Champagnole (E Feuille de Lons-le-Saulnier). Cette brèche n’est donc pas Miocène et marine, comme le présume M. l’abbé Bourgeat. Univ. de Lyon. — Douxami. 12 178 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES et Jurassiques, indiquant bien un certain relief dans le Jura, avant 1 époque Aquitanienne. Les marnes intercalées dans cette brèche m ont fourni ITelix (Fruticicola) leptoloma Braun var. suha- picalis Sandb. et II. (Galactochilus) ehinpensis, Klein. Fig. 28. — Profil du Bassin de La Chaux. — 1 : 12 500. Fig. 28. — Profil du Bassin de La Chaux. — 1 : 12 500. „ _ il. Sables gris à dents de Squales. a t 2. Grès a Bryozoaires. Burdigalien .... 3. Conglomérat de base. , 4. Marnes et calcaires lacustres. Langhien -5. Banc à Melania Escheri. [ 6. Cale, à Planorbis, Unio, etc. 7. Marnes rouges bariolées aquitaniennes. 8. Argiles sableuses (Gault et Aptien). 9. Calcaire blanc compact (Urgonien). Les couches lacustres, comprises entre l’Aquitanien franc et la Molasse marine à P. præscabriusculus du Burdigalien supérieur sont identiques aux couches à Melania Escheri Merian du val des Verrières et présentent les mêmes poupées de calcaire blanc. Elles renferment ici : Melania Escheri, Merian. Melania spina, Dunk. Archaeozonites subangnlosns, Reuss. Hélix (Fruticicola) leptoloma, Braun. Hélix (Galactochilus), Ehingensis, Klein. Hélix (Pentatœnia) moguntina, Desh. Limnæa pachygaster, Thomae, Limnæa urceolata, A. Braun. Planorbis declivis, A. Braun. Planorbis cornu, Brongt. tlnio flabellatus, Goldfuss. Neritina, sp. Écailles et dents de Poissons , débris de Tortues et de Mammi- DEPOTS TERTIAIRES DU JURA NEUGHATELOIS 179 fères (Rhinocéros). Cette faune renferme à la fois des formes de l’Aquitanien supérieur et du Langhien des géologues suisses. Ces couches correspondent aux couches à II. eliingensis des environs d’Ulm, intermédiaires entre l’Aquitanien et le Miocène. Les couches Miocènes qui les surmontent renferment : 1° Conglomérat de base : I Pecten præscabriusculus, Font. Cidaris Avenionensis, Des. — sub-Holgeri, Font. Psammechinus dubius, Ag. — Tournai!, M. de Serres. qui caractérisent nettement partout le Burdigalien supérieur. 2° Grès rappelant ceux de la zone de Saint-Fons, près Lyon, avec banc marneux à O. crassissima, intercalé à Suvagny ; nom- breuses dents de Squales et Bryozoaires, des restes de Vertébrés (dent de Crocodile , côte d’ Halitherium , défense de Dinothérium, Ilyotherium sp., Myogale sp.) et Balanus sp. Callianassa aff'. minor, Fischer, espèce de la zone de Saint-Fons 1. Et enfin, sur toute la surface du vallon, on ne trouve plus, comme dépôts Tertiaires, que des cailloux roulés, d’origine alpine (quartzites, roches granitoïdes altérées), que j’ai rapportées au Sicilien, c’est-à-dire au Pliocène supérieur. Ils sont en relation avec l’existence de glaciers alpins (lre glaciation de MM. Penk et Dupasquier), dans le voisinage de Sainte- Croix. Ces dépôts attei- gnent ici une altitude de 1096 mètres. Dépôts Tertiaires du Jura Neuchâtelois et du Jura Bernois. — Les terrains Tertiaires du Jura Suisse se rattachent également à la fois aux dépôts de la Savoie et à ceux de la Plaine Suisse. Les études récentes de M. L. Rollier2 sont venues préciser nos connaissances à ce sujet, en particulier pour le Jura bernois. 1 J’ai vu au musée de Lausanne des dents d 'Hipparion gracile , venant du vallon de Noirvaux, ce qui tendrait à indiquer qu’il y aurait eu dans cette région des dépôts du Miocène supérieur, enlevés ensuite par érosion. — Rolliur, Etude stratigraphique sur les Terrains Tertiaires du Jura Bernois ; partie méridionale (Arch. Sc.phys. et natur.de Genève , 3e période, t. XXVII, p .313, 1892), partie septentrionale (Arch. Sc. phys. et natur. Genève, 3e période, t. XXX, p. 105, 1893.) — Structure et Hist. Géol. Jura central (Matériaux pour la Carte géologique de la Suisse, liv. VIII, 1"' supplément, 1893). 180 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES Entre Bienne et Délémont, on constate, dans les vallons de Saint- Imier, Tavannes, Petit-Val, Bellelay, Tramelan, Moutier, Cour- rendlin, Vermes, la succession suivante des terrains Tertiaires : Reposant, tantôt sur le Crétacé inférieur, tantôt sur les étages supérieurs du Jurassique : 1° des Bolus et des sables vitrifiables (en général inférieurs) , remplissant les poches du calcaire et recouverts, comme à Moutier, par un calcaire lacustre Eocène à Succinea Rollieri , Maillard, Limnæa longiscata, Brgt, Sphærium Mail- lardi, Locard, Sphærium Studeri , Locard. Il semble y avoir une lacune pour les dépôts Tongriens corres- pondant à la mer venant du Bassin Alsatique qui ira pas dépassé au Sud Délémont. 2° Calcaires et marnes lacustres subordonnées, présentant par- tout les formes caractéristiques suivantes : Hélix Ramondi, Brgt. Limnæa subuüata, Sandb. — Moroguesi, Brgt. Planorbis cornu, Brgt. Limnæa pachygaster, Th. — declivis, Braun. C’est l’Aquitanien franc, correspondant au Délémontien des géo- logues suisses. 3° Ces couches sont recouvertes de Marnes sableuses grises, avec quelques rares bancs de calcaires, présentant en certains points le Cinnammomumpolymorphum, et C. Scheuchzeri si caractéris- tiques de la Molasse grise des environs de Lausanne et qui repré- sentent la base du Miocène, ici comme à Lausanne, à l’état de dépôts lacustres. On peut la suivre jusque vers Mayence, ce qui indiquerait dans cette région, une communication plus ou moins directe, à cette époque, du Bassinhelvétique et du Bassin de Mayence ; 4° Les premiers dépôts marins sont constitués par des grès coquilliers(Musc/u?/saudstemj,identiquesàceuxde la Plaine Suisse, avec les mêmes dents de Lamna et des fossiles peu déterminables . le P. præscabriusculus y est cependant toujours facilement reconnaissable. Bs représentent le Burdigalien supérieur. La mer, venue du Nord-Est, a envahi peu à peu cette région, ne dépassant pas Moron et le Noirmont, aux Franches-Montagnes. Elle allait DÉPÔTS TERTIAIRES DU JURA NEUCHATELOIS 181 rejoindre, par les dépôts du Jura Français, la mer du premier étage Méditerranéen qui recouvrait tout le Jura méridional et la partie occidentale de la vallée du Rhône. 5° Après le dépôt des premières couches marines, les mouve1- ments concomitants de la transgression marine du second étage Méditerranéen, que nous avons constatée dans la vallée du Rhône et dans le Bassin de Vienne, ont eu aussi un retentissement dans la région Jurassienne. C’est ainsi que, dans le val de Délémont, les dépôts marins Helvétiens s’étendent plus au Nord que les dépôts Burdigaliens et viennent recouvrir le calcaire Aquitanien perforé par les pholades. D’une manière générale, le Muschelsandstein est partout recouvert par une formation de poudingues 'polygé- niques à galets alpins (qui vont au Nord jusqu’à Sorvilier) et à galets jurassiens. Ce sont de gros galets avec trous de pholades et des galets calcaires impressionnés indiquant bien une nouvelle trans- gression marine ; elle a amené jusqu’au voisinage des Vosges et de la Forêt-Noire des galets d’origine alpine h Ces poudingues repo- sent en certains points sur les couches de calcaires Jurassiques. Ils sont surmontés par des sables, ou Molasses feuilletées, micacées, encore marines 2 et qui passent peu à peu aux sables à Dinothé- rium (Dinoth. Bavaricum, v. Meyer), ou aux marnes rouges et calcaires lacustres supérieurs de l’CEningien qui renferment : Hélix inflexa, Klein. Planorbis cornu, Brgt., var. — moguntina, Desh. Succinea minima, Klein. — Renevieri, Maill. Limnæus subpereger, Maillard. de la partie supérieure du Miocène moyen. La mer s’est, déjà au Tortonien, retirée dans la Suisse orientale et dans la vallée du Rhône, proprement dite : Au pied du Jura Bernois, on ne trouve que des lambeaux du ter- rain Aquitanien, tout le reste des dépôts Tertiaires ayant été enlevé par l’érosion et n’existant qu’au Sud du lac de Bienne, où l’on 1 Les galets vosgiens ne dépassent pas Sorvilier au Sud. * On a signalé en particulier Cerithium crassum, ce qui indique une dessalure pro- gressive. 182 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES ‘ retrouve la Molasse grise de Lausanne et le grès coquillier bien développé. Le val de Délémont nous offre une succession très complète des terrains Tertiaires du Jura Bernois ; c’est en effet le point le plus méridional atteint par le Golfe alsatique Tongrien. C’est ainsi qne l’on rencontre successivement : 1° Marnes calcaires surmontant les dépôts de fer pisolithique et renfermant : Chara helicteres, Brgt. Planorbis rotundatus. Ch. siderolithica, Greppin. Lvmnæa longiscata, Brgt. Chara Greppini, Heer. Crocodilas Hastingsianus, Owen. et un peu plus haut le Palæotherium medium. Cuv. du gypse de Montmartre. 2° Formation marine Tongrienne (calcaire marin et gompho- lite) ; 3° Grès de Develier, avec flore d’Aarwangen et d’Eriz ( Aqui- tanien) ; 4° Marnes à Melania Escheri ( Langhien ) ; 5° Grès coquillier contenant déjà, à la partie supérieure, des plan- tes delà Molasse d’eau douce supérieure (dépôt à Mammifères de Yermes) avec Anchitherium aurelianense , Palaeomeryx Bojani, P. minor , Lagomigs Meyeri, Didelphis Blainvillei ?, du Miocène moyen. A la Chaux-de -Fonds, au Locle, on trouve également, au-des- sus du Burdigalien à P. præscabriusculus, une série de marnes bigarrées, rappelant les marnes Aquitaniennes, avec intercalations gypseuses et d’eau douce, contenant quelques ossements. Elles se terminent par des couches ligniteuses, avec amas de cailloux roulés calcaires, d'orgine locale. Vallée de Rumilly. — Les dépôts Tertiaires des environs de Bellegarde, qui se rattachent d’une part, grâce aux petits lambeaux isolés du Jura méridional, aux dépôts Tertiaires du Jura central et méridional se rattachent également, par les dépôts Tertiaires des Usses, à ceux de la plaine de Rumilly et par suite, de la plaine de Genève et de la Plaine Suisse. Les dépôts de la plaine de Rumilly, qu’il me reste maintenant à VALLÉE DE RUMILLY 183 étudier, vont présenter encore plus accentués que dans la vallée de Chambéry qui est un peu plus occidentale, des caractères de tran- sition très nets avec les dépôts de la Plaine Suisse proprement dite. Les terrains Tertiaires de cette grande vallée, qui s’étend entre le Semnoz-Revard-Nivolet à l’Est et la montagne des Princes, du Gros-Foug, du Corsuet à l’Ouest, ont déjà été étudiés avec beau- coup de soin par un grand nombre de Géologues : la Société géolo- gique de France, dans sa réunion extraordinaire à Chambéry, en 1844, en a relevé une coupe E.-W.,et L. Pillet, dans sa Des- cription géologique des environs d’Aix1, donne sur les terrains Ter- tiaires de cette vallée des détails fort exacts ; il en est de même de M. D. Hollande2 pour les terrains Aquitaniens. J’aurai cependant un certain nombre de faits nouveaux à ajouter à ceux déjà connus. Les terrains Tertiaires les plus anciens sont ceux de l’Eocène inférieur, que j’ai déjà signalés le long du Gros Foug, à l’entrée du val du Fier, vers Saint-André, où ils reposent directements sur le Gault. Il me faut citer comme terrains anté-aquitaniens d’âge indé- terminé, faute de document paléontologique, les dépôts sidéroli- thiques des poches de l’Urgonien signalés par Pillet à Grésy-sur- Aix près du Pont-de-Pierre, dans le Néocomien de Voglans, de Saint-Innocent, de la Chambotte. Ils forment d’ailleurs toujours des amas très peu importants. Aquitanien. — Les premiers dépôts importants, au point de vue de leur développement et au point de vue stratigraphique, appar- tiennent à l’ Aquitanien. Dans ce que je considère, au delà de la cluse de Montmélian, comme le prolongement du synclinal de Rumilly, c’est-à-dire dans le synclinal delà Croix-du-Mollard, ces dépôts existent seuls, reposant sur le Sénonien, comme plus au Sud, vers Saint-Pierre- d’Entremont, à l’état de marnes calcaires bariolées sans fossiles, mais identiques à tous les dépôts Aquitaniens de la région auxquels ils se rattachent. 1 L. Pjllet, Description géologique des environs d'Aix (Savoie), 2e édition, 1863. 2 D. Hollande, loc. cit.,Bull., n° 49, 1895. 184 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCENES Après avoir traversé la grande plaine d’alluvions de Chambéry, on ne retrouve plus de dépôts Tertiaires que vers Méry et le Viviers. A partir de là, on peut suivre le long du Nivolet, du Revard, de la montagne de la Cluse, jusqu’au Pont-de-l’Abîme sur le Chéran et à l’Ouest, le long de l’anticlinal d’Aix-les- Bains (Voglans), de la Chambotte et du Gros Foug, jusqu’à la vallée des Usses, d’une manière pour ainsi dire continue, les dépôts Aquita- niens. Ce sont quelquefois des bancs plus ou moins poudingui- formes, surmontés par desmarnes rouges et bleues et des calcaires lacustres, redressés verticalement contre l’Urgonien du Nivolet à Cusy, à Mouxy et à Clarafond au dessus d’Aix-les-Bains, aux Fa- verins. La coupe classique de cette formation est celle de l’escar- pement sur lequel est bâtie la vieille tour de Grésy-sur Aix ; les assises atteignent là d’après Pillet près de 500 mètres d’épaisseur, la partie visible ( 170 mètres) comprend : 1° Calcaires marneux feuilletés et cariés (2 mètres visibles) ; 2° Marnes grises ou jaunâtres (24 mètres) ; 3° Molasse verdâtre avec marnes d'un rouge brique (4 mètres) ; 4° Calcaires gris, compacts, en assises de 20 à 50 centimètres, avec lits charbonneux et des Hélix , Lymnêes (20 mètres) ; 5° Marnes blanches, passant au jaune et au rouge, avec veines de gypse, 120 métrés. La Molasse marine à P. præscabriusculus recouvre ici directement cette dernière assise. Les fossiles que l’on peut recueillir dans les marnes, au voisinage des bancs calcaires, sont les suivants : Hélix Ramondi, Brgt. Lymnæa pachygaster, Thomæ. — (Coryda) rugulosa, G-.,v. Mar- Lymnæa auricularia, Draparnaud. tens. Hélix Lausannensis, Dumont et Mor- tillet. On a une coupe tout à fait comparable à celle de l’Aquitanien des environs de Lausanne : les bancs de calcaire sont identiques. Mais ici la base du Miocène (Molasse grise) paraît manquer, ou n’est représentée que par une partie des bancs de marnes blanches, rouges ou jaunes, immédiatement subordonnées aux couches de la VALLÉE DE RUMILLY 185 Molasse marine. La présence dans ces bancs de H. Lausannensis , si caractéristique de la Molasse grise Langhienne des environs de Lausanne, vient encore apporter une preuve à cette allégation. Quant aux 300 mètres de couches non visibles, ils correspondent aux dépôts inférieurs de l’Aquitanien, qui sont bien visibles au Nord, dans la vallée des Usses. J Jurassique supérieur; P Purbeck; V Valenginien; H Hauterivien; U Urgonien; G Gault; E Grès siliceux de l'Éocène inférieur; A q Aquitanien; i Poudingue calcaire, 2 Calcaire lacustre rognonneux; 3 Marnes bigarrées, micacées à la partie supérieure (Mio- cène inférieur); 4 Grès à Pecten præscabriusculus (Burdigalien). La composition de l’ Aquitanien, comme cela arrive souvent dans les dépôts d’eau douce, varie beaucoup suivant les points. Une coupe particulièrement intéressante est celle que j’ai relevée, à l'entrée de la cluse du Fier, près Saint -André, dans le lit du tor- rent (fig. 29). L’Urgonien est surmonté du Gault, peu épais, représenté par les grès inférieurs, les bancs sableux supérieurs, qui existent de l’autre côté du val du Fier, ayant été enlevés par l’érosion, n’existent plus ici. Au-dessus vient une masse non stratifiée de sables blancs ou légèrement jaunâtres, devenant très ferrugineux en certains points, par suite delà décomposition de grains de pyrite qu’ils renferment en assez grande quantité. Us renferment aussi des silex, provenant delà Craie : ce sont les sables de l’Éocène inférieur. Puis, venant 186 TERAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES butter contre cette formation, existe un poudingue calcaire accom- pagné de bancs de calcaires rognonneux, pétris de grains de fer, (pyrite altérée) qui se dissolvent au contact de l’air et ne laissent que leur empreinte. La discordance qui existe ici entre les dépôts sous-jacents et les premiers dépôts Aquitaniens, vient apporter, comme dans tout le Jura méridional, une preuve que les mouvements anlé- aquitaniens, qui ont peu à peu refoulé la mer à l’Ouest de la région alpine, ont eu un retentissement plus ou moins profoud dans les chaînes Jurassiennes. Au-dessus de ces calcaires lacustres, existent des marnes bigar- rées, contenant quelques bancs de calcaire et deux lits de lignite avec Hélix et Planorbes complètement écrasés. Ces couches passent à des marnes de plus en plus micacées, rappelant tout à fait la Mo- lasse grise de Lausanne et qui se trouvent, un peu plus, loin recou- vertes par un grès grossier, où l’on rencontre en abondance le P. præscabriusculus et desdents de Squales comme dans le reste de la vallée. Toutes ces couches, lacustres et marines, qui sont parfaite- ment concordantes, ont ici un plongeaient vers l’Est de 45°; elles ne tardent pas à devenir sensiblement horizontales, un peu plus loin. Cette coupe nous montre donc la série complète des assises Ter- tiaires de l’Aquitanien au Burdigalien supérieur. Un peu au Nord de Saint-André, dans le vallon de Crampigny, la Molasse d’eau douce est très développée. Elle repose sur l’Ur- gonien. Les couches inférieures sont des poudingues calcaires, dont les cailloux sont entourés, comme dans la brèche de Vimines, de couches concentriques de concrétion calcaire ; ces couches deviennent complètement oolithiques au Pont -Serrasson comme à Châteaufort. Au-dessus, on a des marnes grises, presque blanches, accompagnées de grès de couleur variable, renfermant avec des Unio, des Planorbes , Limnées, Hélix à l’état de moules, malheu- reusement indéterminables. Il est à remarquer qu’à mesure que l’on s’avance vers le N. -E., : c’est-à-dire vers la région alpine, la composition des couches d’eau douce devient très uniforme : ce sont toujours des grès siliceux, micacés, gri& verdâtre, plus ou moins compacts alternant avec des VALLÉE DE RUMILLY 187 marnes argileuses et micacées (Gorges duFier, pont de Cran, etc.). Les fossiles y sont extrêmement rares, pour ne pas dire inconnus. Dans la plus grande partie de la vallée de Rumilly, les couches sont restées sensiblement horizontales et ne permettent guère de voir les couches inférieures. Pourtant, un peu au Nord, le petit bombement Crétacé de Chavanod permet cependant de relever une coupe tout à fait comparable à celle du val du Fier. Au-dessus du calcaire Urgonien, imprégné ici d’asphalte, se trouvent des marnes bleues, avec petits lits de lignites pétris d 'Iielix aplaties, passant à des marnes beaucoup plus micacées (10 mètres), et ce n’est qu’au-dessus que l’on a les premières assises de la Molasse marine à dents de Squales. A Massingy, près de Rumilly, on voit même, à la partie supérieure des marnes bigarrées, un banc de grès fos- siles, avec empreintes de plantes, malheureusement peu déter- minables. Après ces dépôts inférieurs franchement d’eau douce, la mer, venue du Nord, a fait irruption dans toute la vallée de Rumilly, à l’époque du Burdigalien supérieur. Les premières assises marines reposent presque partout sur ces couches d’eau douce qui existent évidemment dans toute la vallée. Ces couches marines se présen- tent à l’état de grès grossiers, avec de nombreux galets roulés, entraînés parles courants. Ces galets sont, pour la plupart, d’ori- gine lointaine Pillet cite : Jaspe rouge et vert. Silex blanc rose et noir. Spilite. Serpentine. Actinote fibreuse. Syénite. Porphyre avec feldspath rose. Grenats des roches grenatifères. Calcaire urgonien. Calcaire lumachelle. Ces roches sont d’ailleurs identiques à celles qui existent, plus au Sud, dans les poudingues et conglomérats à cailloux impres- sionnés de Voreppe et de Proveysieux, ou dans les bancs inter- calés dans la Molasse marine de la vallée de Chambéry. L. Pillet 1 1 L. Pillet, Les cailloux exotiques du Bassin d’Aix ( Revue savoisienne, 21e année, p. 54, 1888). 188 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES admettait que des courants les amenaient du Plateau Central. Rien de ce que nous avons vu dans les dépôts de la vallée du Rhône, que j’ai étudiés plus haut, ne vient justifier cette hypothèse: ces cailloux ont bien certainement une origine alpine. Cette Molasse grossière inférieure contient de nombreux débris, toujours très roulés, de Pecten , Ostrea , Bivalves indéterminés, Cerithium sp. Natica sp. ; elle passe en général à des bancs gréseux ou marneux, beaucoup moins grossiers : la mer, une fois l’invasion accomplie, était peu profonde mais relativement calme. La composition de cet ensemble de couches, comme cela existe pour tous les dépôts arénacés, est extrêmement variable ; elle varie avec les localités : tous les ravins, où ces couches affleu- rent donnent autant de coupes différentes. L. Pillet 1 a publié une coupe, relevée le long du Sierroz, à partir de Grésy-sur-Aix, qui donne la composition moyenne de ces assises marines. Les couches qui, à partir de Grésy-sur-Aix, sont sensiblement horizontales, se redressent brusquement presque jusqu’à la verticale, ou même se renversent, près de la montagne de la Cluse, comme cela est bien visible, en particulier, dans les ravins, au-dessous des Fave- rins (Savoie et Haute -Savoie). Une coupe excellente de cet ensemble de couches est donnée par la route des Bauges, depuis Grésy-sur-Aix jusqu’au delà des moulins dePrimaz : les couches que l’on coupe un peu obliquement en se dirigeant vers le Nord, plongent d’abord vers le N.-E. d’en- viron 20 degrés se redressent peu à peu ; au moulin de Primaz, elles sont sensiblement horizontales : on est là au centre du syn- clinal. On traverse ainsi une épaisseur de plus de 200 mètres de couches : grès homogènes à pâte très fine, formant de gros bancs atteignant jusqu’à 20 mètres d’épaisseur, sans présenter aucune trace de stratification, activement exploités dans toute la région de Rumilly ; les bancs de grès sont séparés par des bancs marneux noirâtres, ou par des bancs minces d’une Molasse gréseuse, très dure, plus grossière, très siliceuse et employée comme dalles 1 L. Pillet, loc. cit ., p. 73, 1863. VALLÉE DE RUMILLY 189 réfractaires pour construire les fours. Les bancs un peu plus gros- siers fournissent d’assez nombreux fossiles (Route de Bauges, Grésy, Mognard, hameau de Maclens, anciennes carrières de Cusy, etc.) et des restes de plantes. Les dents de Poissons y sont particulièrement abondantes ; Dent de Crocodilien (Musée de Chambéry). Notidanus primigenins, Ag. Galeocerdo aduncus, Ag. — latidens, Ag. Kemipristis serra, Ag. — paucidens, Ag. Oxyrhina hastalis, Ag. — Desorii, Ag. Lamna caspidata, Ag. contortidens, Ag. — dubia, Ag. je citerai en particulier : Sphærodus irregularis, Ag. — cinctus, Ag. — parvus, A g. — gigas, Ag. Pycnodus. Hybodus, dents deChrysophrys, nom- breuses vertèbres de Poissons. Pecten præscabriusculus, Font. Pecten, Sq. Ostrea squarrosa, Munst. Bryozoaires. Empreintes d’Annélides. Lorsqu’on parcourt la région deRumilly, on ne peut s’empêcher d’ètre frappé de l’identité d’aspect et de restes organiques, que présente cet ensemble de couches inférieures avec la Molasse marine de Fribourg en Suisse, et également avec les formations correspondantes de la vallée de Chambéry. Comme dans le ravin de Forézan, dont j’ai donné la coupe détaillée un peu plus haut, certains bancs présentent des ondula- tions, pouvant donner naissance aces tiges cylindriques plus ou moins digitées, que j’ai signalées à tous les niveaux de ces forma- tions sableuses et qui sont dues à l’action des vagues. Les parties marneuses augmentent à mesure que l’on s’élève dans la série des couches, en même temps que les bancs gréseux diminuent d’épaisseur, comme on le voit bien dans les carrières existant dans ces assises près des moulins de Primaz, Epersy, Mognard. Au-dessus, formant par exemple toute la partie supé- rieure de la colline d’Epersy, on a des Molasses plus tendres, avec couches feuilletées en lits minces ; des grès jaunâtres, s’effri- tant facilement, bien visibles dans tous les ravins qui entament la colline qui sépare Cusy de la grande plaine d’Albens-Rumilly. 190 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES Les fossiles y sont extrêmement rares ; j’ai pu y recueillir cepen- dant, près d’Epersy ou dans les ravins de Saint-Girod : Ostrea crassissima Lam. Pectunculus cf stellatns. Munst. Ostrea gingensis Schloth. Balanus sp. Et encore de nombreu- Pecten sp. ses dents de Squales. Fig. 30. — Coupe de la carrière du Moulin Priraaz. M Grés molassique marin (1° Etage); P Pontien ; m Marnes bleues avec débris de plantes; p Poudingue à granités altérés quartzite ; g Grès jaunâtre. Toutes ces couches appartiennent à la Molasse sableuse à Ostracés, intermédiaire, comme celle de Pont-de-Beauvoisin, entre le pre- mier et le deuxième étage Méditerranéen appartenant évidemment en grande partie au Miocène moyen. Il n’existe pas, dans cette large vallée, qui était cependant plus près de leur lieu d’origine, de poudingues à cailloux impressionnés, comme à Voreppe ou dans la vallée de Chambéry. Les couches de poudingues, que l’on rencontre dans le synclinal de Rumilly, sont d’un aspect tout différent. Leurs relations avec les couches sous-jacentes sont également /Tune toute autre nature. Au moulin Primaz, dans les carrières qui se trouvent sur la droite de la route qui mène à Montcel, on peut relever la coupes sui- vante (fig. 30). En complète discordance et ravinant les couches supérieures VALLEE DE RUMILLY 191 de grès Molassiques gris bleuâtre qui alternent ici, en bancs peu épais, avec des couches marneuses noires, on a une série de bancs gréseuxjaunâtres (tout différents d’ailleurs des couches de Molasse sableuse jaune d’Epersy à O. crassissima) , puis de marnes bleues et de poudingues à cailloux roulés de quartzite et de roches granitoïdes altérées, le tout atteignant au moins une dizaine de mètres d’épaisseur. Le tout est recouvert par le Glaciaire. On retrouve une formation analogue dans la colline située en face sur la rive droite du torrent. J’ai également retrouvé ces poudingues avec les mêmes caractères (ce qui permet de les distinguer facile- ment, et des poudingues marins, et des poudingues subordonnés aux^ormations glaciaires dans toute cette région), alignés sensible- ment suivant une direction Nord-Sud, qui correspond assez exac- tement à l’axe du synclinal. Je rattache également à cette for- mation, de nombreux cailloux épars sur le haut de la colline et s’étendant jusqu’auprès du village de Montcel. Je n’ai pu, à mon grand regret, malgré de patientes recherches, trouver autre chose que de mauvais débris de végétaux dans ces assises 1 . Au-dessus des carrières précédentes, lorsqu’on suit la route de Montcel, on voit un second abrupt où, à la partie supérieure, appa- raissent de nouvelles couches stratifiées. Ce sont des sables plus ou moins agglomérés, disposés en couches horizontales qui, à première vue, se confondraient aisément avec les couches précé- dentes, mais les galets qu’elles renferment, en particulier de roches granitoïdes, ne sont pas altérés. Ges couches sont comprises nettement entre deux masses d’alluvions glaciaires et ce ne sont qu’un petit lambeau d’alluvions interglaciaires. Pour les couches inférieures, plusieurs questions se posent. Faut-il simplement y voir des alluvions anciennes2? On connaît, 1 J'ai signalé pour la première fois ces dépôts à la Société d’Hisloire naturelle de Savoie, au moment de la course géologique qu'elle a faite au mois d’août 1895, dans la vallée de Rumilly. • J’évite à dessein d’employer ici une désignation plus précise que celle d’alluvions anciennes. L’étude des dépôts Quaternaires de la vallée de Rumilly est encore tout entière à faire et les alluvions de la plaine de Chambéry qui lui fait suite ont donné lieu à trop de controverses pour que l’on puisse encore aujourd’hui avoir une idée exacte à ce sujet. 192 TERRAINS AQU1TANIENS ET MIOCÈNES en effet, en Suisse, de nombreux exemples d’alluvionsanté-glaciaires, où les roches granitoïdes sont altérées et où l’ensemble des dépôts est plus ou moins rubéfié. En ce cas, elles seraient fort différentes des alluvions occupant la même position stratigraphique dans la vallée de Chambéry, ou de celles situées plus au Nord, soit dans la cluse du Chéran, dans le défilé de Bauges, ou encore, de celles que j’ai signalées à Cusy où elles ravinent également les couches de la Molasse marine. Faut- il plutôt, comme l’aspect pétrogra- phique parait l’indiquer, rapprocher ces formations des dépôts tout à fait comparables, que j’ai décrits un peu plus haut, dans la vallée de Novalaise? Le problème est fort difficile à résoudre, étant don- née l’absence complète, jusqu’à présent, de documents paléontolo- giques. Après les nombreuses courses que j’ai faites dans toute cette région, je suis plutôt porté à adopter la dernière hypothèse et à rapporter ces poudingues à cailloux altérés ainsi que ces assises de marnes bleuâtres et ces sables, au Miocène supérieur, au Pontien. Cette détermination concorde d'ailleurs parfaitement avec le fait que la chaîne de la Chambotte-Gros-Foug est encore un pli jurassien situéà l’Est de l’anticlinal l’Epine Mont-du-Chat, dont j’ai montré l’âge prépontique. Il est à présumer que des recherches, encore plus précises que celles que j’ai pu faire, amèneront la découverte de nouveaux lambeaux de cette même formation, soit dans le reste du synclinal de Rumilly, soit même dans celui de Chambéry, malgré les érosions énormes qui ont eu lieu dans ces régions pendant la période Quaternaire. Les couches de la Molasse marine qui, clans tout le centre du Synclinal, sont restées sensiblement horizontales, ne se relevant que tout contre les chaînes voisines à l’Est et à l’Ouest. Elles ont subi cependant un certain nombre de dislocations, faciles à constater dans toutes les coupes un peu étendues, ayant amené au jour les couches de l'infracrétacé comme à Chavanod, ou redressé jusqu’à la verticale les couches de grès grossier inférieur comme à Alby (lit du Chéran, colline de Saint- Sylvestre). Derrière les bâti- ments de l’école primaire supérieure d’ Alby, dans le lit du Chéran (on voit, en se dirigeant vers Cusy, les couches de Molasse rede- VALLEE DE RUMILLY 1P3 venir horizontales, puis se relever de nouveau contre le Semuoz), lescouchesde Molasse marine à Pecten et à dents de Squales sont presque verticales, ravinées par des alluvions grises, surtout formées de galets de quartzite et de calcaires Néocomiens ou Jurassiques, avec des éléments cristallins non altérés, très rares1. Ces alluvions sont recouvertes par la boue glaciaire. La colline de. Saint-Sylvestre est une des dernières où l’on trouve la Molasse marine bien caractérisée. Il en existe encore des lambeaux un peu plus au Nord, près de Chavanod. Les alluvions extrêmement développées ne laissent plus affleurer dans la plaine au Sud d’Annecy, que quelques rares lambeaux de Molasse dont les rapports sont difficiles à préciser et dont l’âge est indéterminé. Bien plus, il est même souvent impos- sible de dire, étant donnée l’absence complète de débris organisés, si on a affaire à des couches marines ou à des couches d’eau douce. La mer a remplacé peu à peu les eaux douces du grand lac Aquitanien subalpin, sans que cette invasion marine ait changé en aucune façon la nature des sédiments, qui venaient toujours en grande partie de la région alpine. J’ai déjà, à plusieurs reprises, insisté sur ce fait qui a été la cause des différentes interprétations auxquelles ces couches de faciès identiques ont donné lieu. Il suffit, pour s’en convaincre d’une façon absolue, d’examiner les cartes géologiques qui ont été publiées, en particulier les feuilles au 1/80000 de Nantua et d’Annecy. Ce qui était Molasse marine sur la feuille Nantua, parce que la majorité des dépôts Tertiaires situés plus à l’Ouest a surtout une origine marine, devient de la Molasse d’eau douce sur la feuille d’Annecy pour une raison analogue. Aussi, au Nord du Gros-Foug et delà montagne des Princes, où il y a communica- tion, dans la vallée des Usses, entre le synclinal essentiellement à dépôts marins de la vallée de Chambéry, lac du Bourget et la 1 Une assise de ces alluvions anté-glaciaires, disposées en couches horizontales, est uniquement formée de débris peu roulés de Molasse marine. L’ensemble de la formation a une cinquantaine de mètres d’épaisseur. Univ. uk Lyon. — Douxaüi. 13 194 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES plaine de Genève, la classification est- elle chose fort délicate, et E. Benoit1 y voyait tous les terrains Tertiaires depuis les calcaires Nummulitiques jusqu’aux faluns de la Touraine. L’Aquitanien y est beaucoup plus développé que dans la plaine de Rumilly; les couches les plus inférieures, qui reposent souvent sur le Sidérolithique, auquel elles ont emprunté une partie de leurs matériaux, comprennent des marnes sableuses fines, de con- sistance molassique, bleuâtres ou verdâtres, ou bariolées. Ce sont celles que j’ai décrites dans la coupe de Challonges ou de Pyri- mont, un peu plus haut. On les retrouve également à Seyssel et à Frangy-sur-les-Usses. C’est ce que Benoit2 appelait la première Molasse rouge , qui correspondait aux dépôts de Molasse rouge du pied du Jura. Elles présentent souvent , dans les couches sableuses, des imprégnations d’asphalte, et sont surmontées par des grès micacés dont l’épaisseur augmente beaucoup (comme dans la Plaine Suisse), à mesure que l’on s’avance vers l’Est. Ces couches sont bien visibles à Seyssel (Savoie), Epilly, Pont-Serrasson sur les Usses, dans le ravin du Vengeron, à Chexbres : on y a recueilli Hélix rugulosa, G. V. Martens et récemment, j’ai reconnu à Chexbres Y Hélix Ramondi , Brgt3. La plus grande partie de ces assises représente donc l’Aquitanien lacustre; quelques lits calcaires intercalés ont fourni Chara helicteres, Brgt. C’est au-dessus de ces couches, quand elles existent , ou directement sur les marnes bariolées , que l’on trouve un ensemble assez ponstant non seulement dans cette région, mais dans toute la partie occidentale de la Plaine Suisse (Morges, Lausanne), constituant la Molasse à gypse de Benoit. C’est une molasse grise, sableuse, très calcarifere, finissant également en biseau comme les grès micacés vers le Jura, et traversée 1 E. Benoit, Note sur les terrains Tertiaires entre le Jura et les Alpes (B. S. G. de Fr.. 2e série, t. XVII, p. 387, 1860). 2 E. Benoit, Essai d’un tableau comparatif des terrains Tertiaires dans le Bassin di Rhône et des Usses (B. S. G. de Fr., 3e série, t. III, p. 436, 1875.) 3 Ces couches m’ont également fourni un certain nombre de plantes (Cinnamomuni JDaphonogene) peu déterminables. VALLÉE DE RUMILLY 195 par de petits filonnets de gypse fibreux, postérieur à ces dépôts (anciennes exploitations d’Epilly, ravin de Châtel, etc.). Ces couches sont associées à des calcaires marneux et à des marnes souvent ligniteuses à llelix sp. Chara Esche7Û, Brgt et à des grès brunâtres micacés. La deuxième Molasse rouge de Benoit qui vient au-dessus et qui correspondait pour lui à la vraie Molasse rouge des géologues suisses d’âge Aquitanien, était formée d’alternance de grès mar- neux micacés et de marnes de couleurs bigarrées, sans fossiles, et vers le Jura ou, dans le Sud de la vallée de Rumilly, par des marnes et calcaires plus ou moins rognonneux à lits charbonneux (Grésy-sur-Aix, Saint-André, Epilly, Frangy-sur-les-Usses) que surmontent les couches de Molasse marine à Peclen et dents de Squales1. Ainsi, dans les Usses, les couches Tertiaires inférieures, toutes d’eau douce, beaucoup plus développées que dans la vallée de Rumilly, comprennent, outre les couches visibles à Grésy-sur- Aix (qui correspondent aux marnes à gypse et à la deuxième molasse rouge de Benoit), une série d’assises lacustres, marnes et grès micacés, qui m’ont fourni à Challonges des restes de Mam- mifères précisant leur âge Aquitanien. La coupe des Usses met en évidence une autre particularité, sur laquelle j’ai déjà appelé l’attention à propos de la plaine de Rumilly, c’est la suivante : lorsque l’on se rapproche des Alpes, ce que l’on peut appeler le faciès alpin des dépôts, grès et marnes micacés d’aspect molassique, envahit de plus en plus les dépôts, surtout calcaires, de la région proche du Jura, pour persister seul dans le plateau des Bornes, le long des chaînes subalpines. La Molasse marine disparaît complètement au Nord de la vallée des Usses ; elle a été enlevée par l’érosion et ne se retrouve que beaucoup plus au Nord, dans la Plaine Suisse pro- prement dite. 1 II résulte de là que la deuxième molasse rouge de Benoit est plutôt d'àge Miocène inférieur que d'àge Aquitanien. 196 TERRAINS AQUITAN1ENS ET MIOCÈNES Dans le canton de Genève, en particulier, il n’existe que de petits lambeaux isolés deMolasse1, bien connus, et par les descriptions des auteurs anciens, et par les travaux de A. Favre et Benoit. On reconnaît facilement que ces dépôts sont d'origine lacustre, contrai- rement à l’opinion de ce dernier auteur; tous les restes organiques qui en proviennent sont ou des formes de Mollusques terres- tres et lacustres, ou des plantes terrestres. On a cité Hélix (coryda) rugulosa , G. V. Martens duVengeron, Bulimus sp., Lyrnnea sp., Planorbis aff. declivis , enfin à Chexbres; j'ai reconnu Hélix Ramondi Brgt et des plantes terrestres, comme Sabal Lamaonis , Çinnamomum, à Verrières, carrière d'Archamp, Sabalhærin- giana Ung. et Sabal Lamaonis Ung. Les coupes qui ont été données des différents affleurements, montrent une variété extrêmement grande dans la composition de ces couches Tertiaires. On peut cependant distinguer, d’une manière générale les assises suivantes : 1° A la base, marnes bariolées (marnes œillées) avec bancs de calcaire et couches gypseuses correspondant aux assises inférieures et moyennes des Usses (Molasse rouge) ; 2n Marnes avec bancs calcaires à Planorbes et des traces de lignites ; 3° Grès micacés (Molasse) alternant avec des couches mar- neuses surtout à la base. C’est-à-dire tout à fait la composition que nous avons reconnue plus au Sud, dans la vallée des Usses ou dans la vallée de Rumilly. Comme pour le plateau des Bornes, les alluvions si développées des environs de Genève, viennent interrompre les dépôts Tertiaires qui ne se retrouvent plus que dans la Plaine Suisse proprement dite, où il nous reste maintenant aies étudier. 1 De Saussure, Voyages dans les Alpes , p. 65, 1779, est le premier géologue ayant employé le mot de Molasse ; pour désigner ces assises j’ai respecté l’orthographe qu’il a adoptée. — F. Soret, Bull. Soc. Philomathique de Paris, p. 177, 1816. — Necker, Études géologiques dans les Alpes, 1841. I DÉPÔTS TERTIAIRES DE LA PLAINE SUISSE 19? § 3. Dépôts tertiaires de la Plaine Suisse. La Plaine Suisse, telle que je l’ai définie dans le premier chapitre de cet ouvrage, comprend au Sud du lac Léman, le plateau des Bornes, à l’Est du Salève et la plaine de Genève prolongée par la plaine de Rumilly, à l’Ouest du Salève. Au Nord du lac Léman, ces deux parties se rejoignent en un vaste géosynclinal compris entre le Jura et les Alpes. Les terrains Tertiaires et Quaternaires rem- plissent, sur une épaisseur considérable, toute cette vaste région. Les premiers qui occupent en Suisse plus du cinquième du terri- toire, correspondent à l 'Etage de la Molasse ou Miocène des Géologues Suisses et comprennent, non seulement le Miocène propre- ment dit, mais encore tout l’Aquitanien et même peut-être la partie supérieure du Tongrien. Ces dépôts si étendus ont naturel- lement donné lieu à de nombreux travaux, en général sur des régions plus ou moins limitées de la plaine, ce qui rend l’étude syn- thétique des dépôts fort difficile à faire b Les difficultés sont encore accrues par les grandes variations de faciès que présentent tous les dépôts gréseux, par l’état de conservation fort défectueux des fossiles, généralement à l’état de moules plus ou moins déformés, ainsi que par la continuité parfaite entre les dépôts Aqui- taniens généralement d’eau douce et les dépôts Miocènes marins; cela rend la limite des étages fort difficile à préciser. Je n’ai pas la prétention de présenter une étude complète sur les terrains Tertiaires de la Suisse, sur la « Molasse Suisse ». Je me suis, en effet, surtout attaché à relier, par l’étude particulière d’un certain nombre de points où la succession des assises était bien nette, les dépôts de la Plaine Suisse proprement dite, c’est-à-dire du Jorat et du pied du Jura à ceux qui existent au Sud du lac Léman. Pour cette région très limitée, les publications sur la Molasse ont été fort nombreuses. Un résumé fort complet de la bibliogra- 1 La création de noms d’étages locaux est venue encore compliquer les tentatives de parallélisme. 198 TERRAINS AQUITANIENS ET MIOCÈNES phie relative à ces terrains a été donnée récemment par M. Jac- card, dans son Deuxième supplément à la Description géolo- gique du Jura- Vaudois et Neucliatelois (Matériaux Carte gèolog. de la Suisse, 1893) et me permettra de me borner à quelques indications sommaires sur les différents ouvrages que j’aurai cités au cours de cette étude et sur les publications récentes. Pendant longtemps les Géologues Suisses ont admis dans les dépôts Tertiaires supérieurs de la Suisse, quatre subdivisions com- prenant de bas en haut : 1° Molasse marine inférieure (Tongrien) ; 2° Molasse d’eau douce inférieure; 3° Molasse marine supérieure (Helvétien, s. 1.) ; 4° Molasse d’eau douce supérieure. La molasse marine inférieure n’étant pas représentée dans la plaine ou tout au moins fort mal caractérisée sauf dans le Jura (Dole, Délémont), on considéra généralement les trois autres termes comme constituant la Molasse Suisse ou le Miocène avec les subdi- visions suivantes : Miocène supérieur Miocene . , , , d eau douce supérieur. Molasse ) r (Obéré Süsswasser-Molasse). Etage IV. Œningien (Forma- tion des lignites supérieurs). Miocène moyen Molasse marine. 1 Molasse subalpine '• (St-Gall-Berne). III \ (Helvétien sup.) Helvétien 4 H 73 ✓a < y 73 a 73 CS ►J 4) CS a u> < 5 cc 73 Q 73 a y. a 4 N H 33 73 Z 33 N 33 F < CS O CS O E. striata Bell. E. adunca var rhodanica Doux. + Ranella sp + Fusus provincialis F. et T. . F. Y alenciennesi. Gratel. . . -F F- Nassa conglobata Brocclii . . -L N. Dexivac. Font F- N. Sallomacensis Mayer. . N. atlantica Mayer .... F- N. Bujardini Deshayes . . . N. Falsani Tourn -F -F F- N. acrostyla F. et T . . . . N. conforta Duj F- F- Eburna Caronis Brgt. Ancilla glandiformis Lam. + + + F- F- Columbella curta Duj. sp. F- F- -+- C. subullata Defranc. . . C. porcata F. et T. . F- F- -U + Clavatula gradata Defr. -F F- C. Cabrierensis F. et T. . . C. interrupla Brocchi . . . -F F- C. calcarata Gratel . . . . -F "+~ F- C. asperulata Lam. F- F- F- C. granulocincta Munster . -F + F- H- Mitra fusiformis Brocchi . . H- F- + M. Manzonii F. et T. -F il/, ebenus Lam F- Erato lœvis Donovan. . . . -F F- F- + F- Natica lielicina Brocchi. . . F- F- N. Josephinia Risso . . . . -F F- F- F~ + Turritella bicarinata Eichw. -F F- F- F- + + Proto rotifera Lam. F- H- Yermetus arenarius L. -F F- F- F- F- + F- V. intortus Lam. . . . . H- F- F- Turbo muricatus Duj. . . • F- F- F- 1 T. mamillaris Eichw. . . . F- 502 DESCRIPTION DE QUELQUES FOSSILES NOUVEAUX 03 U A as U — Z < 3 O H J K C/3 Z 3 J Z A < -w A Z a 95 05 N A O a 00 Ç/3 a géol. France , 2e série, t. XXII, p. 287). 1866. L. Pillet, Description géologique des environs de Chambéry ( Mèn Acad, de Savoie, 2e série, t. VIII, p. 159). 1867. A. Favre, Recherches géologiques sur les parties de la Savoie, o Piémont et de la Suisse voisines du Mont Blanc. 1869. A. Jaccard, Jura vaudois et neuchâtelois (Mat. Carte géol. Suiss 6e livraison). 1870. J.-B. Greppin, Jura bernois et districts adjacents (Mat. Carte g èi Suisse, 8e livraison). — A. Jaccard, Supplément à la Description du Jura vaudois et ne châtelois (Mat. Cart. géol. Suisse, 7e livraison). 1871. C. Moesch, Partie méridionale du Jura d’Aargau et des environ (Mal. Carte géol Suisse, 10e livraison). 1872. F. Garnier, Sur les couches nummulitiques de Branchai et d’ Aile? (Basses-Alpes) (Bull. Soc. géol. de France, 2e série, t. XXV , p. 484). — Terrains tertiaires de l’Asse du Verdon et du Var (Bul. S< . géol. de France, 2e série, t. XXIX, p. 492). — - Tournouer, Sur les fossiles tertiaires des Basses-Alpes recueil] , par M. Garnier (Bull. Soc. géol. France, 2e série, t. XX i p. 492). i BIBLIOGRAPHIE 007 1872. Tournouer, Sur le terrain nummulitique des environs de Gastel- lane (Bull. Soc. gèol. France, 2° série, t. XXIX, p. 492). 1873. V. Gilliepon, Alpes de Fribourg en général et Monsalvens en parti- culier (Mat. Carte gèol. Suisse, 12e livraison). 1874 Kowalewsky, Monographie d. Gatungs Anthracotherium (Paleonlo- graphica , t. XXII). — Fontannes, Note sur la coupe delà gare Saint-Paul, à Lyon (Soc. d' Agriculture de Lyon). 1875 E. Favre, Notesurla structure géologique des Voirons (Bull. Soc. gèol. de France , 3e série, t. III, p. 690). — F. Fontannes, Etudes stratig. tertiaire , Bassin du Rhône , I. Le vallon de la Fuly. — Réunion extraordinaire de la Société géologique à Genève (Bull., 3e Série, t. III). — Fallot, Etude géologique sur les étages moyens et supérieurs du terrain crétacé dans le Sud-Est de la France (Ann. Sc. gèol., t. XVIII art., n° 1). — E. Renevier, Sur les terrains de la Perte du Rhône (Bull. Soc. gèol. France , 3e série t. III, p. 704). 1877. Tournouer, Sur la faune tongrienne des Déserts, près de Cham- béry (Bull. Soc. gèol. France , 3° série, t. V, p. 333). — Terrains tertiaires des environs de Fréjus et de Nice (Bull. Soc. gèol. France , 3e série, t. V, p. 841). — Ph. de la Harpe, Note sur les Nummulites des environs de Nice et de Menton (Bull. Soc. gèol. France, 3e série, t. V, p. 817). 1878. Fontannes, Etude sur les faunes malacologiques miocènes des envi- virons de Tersanne et d'Hauterives (Revue des Sciences natu- relles Montpellier). 1879. Ph. de la Harpe, Nummulites des Alpes françaises (Bull. Soc. vaud. Sc. Natur., XVI, p. 409). — Ch. Lory, Pillet et Vallet, Carte géologique du département de la Savoie. — E. Renevier, Les Anthracotherium de Rochette (Bull. Soc. vaud. Sc. Natur, XVI, p. 140). — H. Schardt, Notice géologique sur la molasse rouge et le terrain sé- dérolithique du pied du Jura (Bull. Soc. vaud., XVI, p. 609). 1880. L. Pillet, Les cailloux exotiques du Bassin d’Aix (Revue savoi- sienne, 21 année, p. 97). — G. Maillard, Notice sur la molasse dans le ravin de la Paudèze (Bull. Soc. vaud. Sc. Natur., XVII, p. 31). 308 BIBLIOGRAPHIE 1882. Portis, Les Chéloniens de la molasse vaudoise (Mem. Soc. Paléon- tolog. suisse, t. IX). 1884. W. G. Colingwood, The Limestone Alps of Savoy, a stucly in phy~ sical geology. — D. Hollande, Les ramifications du Jura dans la Savoie (Revue sa- voisienne, 25 année). — W. Killan, Terrains tertiaires du département du Doubs (Bull. Soc. géol. France , 3e série, t. XII, p. 729). 1 — Ch. I.ory, Feuille géologique de Grenoble, au y y 1 80.000 1885. V. Gilliêron, Description géologique du territoire de Vaud, Fri- bourg et Berne, entre le lac de Neuchâtel et le Niesen (Mater, pour la Carte géol. de la Suisse . 18e livraison). 1886. L.-A. Girardot, Découverte du gisement à végétaux tertiaires de Grusse (Jura) (Mém. Soc. èmul. Jura). 1887. Ch. Depêret, Recherches sur la succession des faunes des vertébrés miocènes de la vallée du Rhône (Arch. du Mus. de Lyon, t. IV).1 — G. Dolfuss, Quelques nouveaux gisements du terrain tertiaire dan.1 le Jura près de Pontarlier (Bul. Soc. géol. France, 3e série t. XV, p. 179). 1889. Fontannes et C. Depéret, Les terrains tertiaires marins de la Pro vence (Etudes Stratigr. période tertiaire, Bassin du Rhône fasc. IX). — D. Hollande, Elude sur les dislocations des montagnes calcaire de la Savoie. — G. Maillard, Note sur la géologie des environs d’Annecy, La Roche Bonneville (B ull. Serv. Carte géol. France, n° 6). 1890. L. Pillet, Le calcaire de Saint-Ouen à Gerbaix, près de Novalais (Savoie) (Bull. Sôc. Hist. Nat. de Savoie, t. IV, p. 56). - — Ghoffat, Le tertiaire de Fort de Plasne (Mém. Soc. d'èmul. di Jura). ■ — E. Mermier, Aperçu géologique sur les environs de la Baume d’Hos tun (Drôme) (Ann. Soc. Linn. de Lyon). — E. Renevier, Monographie des Hautes Alpes vaudoises (Mat. pou la carte géol. de la Suisse, 16° livraison). 1891. Bourgeat (l’abbé), Observations sur le Jura méridional (Bull. Sot géol. Fr., 3e série, t. XIX, p. 169). 1891. E. Haug, Les chaînes subalpines entre Gap et Digne (Bull Ser< Carte géol. de France , n° 21). G. Maillard, Note sur diverses régions de la feuille d’Annecy ( But Serv . Carte géol. de France, n° 22). BIBLIOGRAPHIE 309 1891. G. Maillard, Mollusques terrestres et fluviatiles de la Suisse (Mém. Soc. palèontol. suisse, t. XXIII). — T. Rittener, Notice sur un affleurement d’Aquitanien dans le Jura vaudois (Bul. Soc. vaud. Sc. natur. XXVII, p. 291). — Hans Schardt, Etudes géologiques sur l’extrémité méridionale de la première chaîne du Jura (Bull. Soc. vaud. Sc. natur., vol. XXVII, p. 69). 1892. D. Hollande, Contact du Jura méridional et de la zone subalpine aux environs de Chambéry (Bul. serv. Carte gèol. France, n° 29). — L. Rollier, Etude statigraphique sur les terrains tertiaires du Jura bernois (partie méridionale) ( Arch . Sc. Phys, et Natur. Genève, 3e période, t. XXVII, p. 313). — Ch. Depéret, La faune de mammifères miocènes de la Grive Saint- Alban (Isère) (Arch. Mus. de Lyon. t. V). — Bourgeat (abbé), Observations sur le Boulonnais et le Jura (Bul. Soc. geol. France , 3e série, t. XX, p. 268). 1893. A. Boistel, La faune de Pikermi à Ambérieu (Ain) (Bul. Soc. gèol . de France, 3e série, t. XXI, p. 298). — Delafond et Depéret, Les terrains tertiaires de la Bresse et leurs gîtes de lignites et de minerais de fer. — A. Jaccard, Description du Jura vaudois et neufchâtelois (Mat. pour la Carte gèol. suisse, 7e livraison, 2e supplément). — W. Kilian et Révil, Une excursion géologique en Tarentaise (Bul- Soc. d'hist. natur. de Savoie, t. VIII, p. 28). — L. Rollier, Structure et Histoire géologique du Jura central Mat # Carte gèol. suisse, 8e livraison, 1er supplément). — Etude statigraphique sur les terrains tertiaires du Jura bernois (partie septentrionale) (Arch. Sc. phys. et nat., Genève, 3e période, t. XXX, p. 105). — Schardt, Coup d’œil sur la structure géologique des environs de Montreux (Bul. Soc. vaud. Sc. natur., XXIX, p. 112). 1894. A. Boistel, Structure de la colline de Saint-Denis-le-Chosson(.Z?ML Soc. gèol. de France, 3e série, t. XXII, p. 299). — Miocène supérieur de la bordure du Jura aux environs d’Ambérieu (id., p. 628). — A. Delerecqub, Les lacs du Dauphiné (Annuaire Soc. Touristes du Dauphiné). — C. Depéret, Note sur les groupes Eocène inférieur et moyen de la vallée du Rhône (Bul. Soc. gèol. de France, 3e série, t. XXII, p. 683). 310 BIBLIOGRAPHIE 1894. G. Depéret, Note paléontologique complémentaire sur les terrains tertiaires de la Bresse (id., p. 717). — — Sur un gisement sidérolithique de l’Eocène moyen de Lissieu, près Lyon (C. R. Acad. Sciences , 9 avril). — — Réunion extraordinaire de la Société géologique à Lyon- Bollène (Bul., 3° série, t. XXII). — H. Douxami, Tertiaire de la Savoie et du Nord du Dauphiné (C. R . des collaborateurs du service de la Carte géologique de la France, p. 91). — Haug, Excursion géologique dans la haute vallée du Drac (C. R. B. S. G. de France, 3e série, t. XXII, p. 138). — IIeim, Die Entstehung der alpinenRaudseen (Viertel jahrschrift der natur. Gesellschaft, Zurich, XXX, IX). — Jura et Alpes de la Suisse, Livret guide géologique . 1894. Kilian et Révil, Révision des feuilles de Grenoble et de Vizille (C. R. des collaborateurs du service de la Carte géologique de France, p. 128). — P. Lory, Observations sur la coexistence dans le massif de Chaillol de dislocations appartenant à deux périodes distinctes (C. R. som- maires B. S. G. France, 3e série, t. XXII, p. 162). — Cartes géologiques au 1/80.000 de la France (Feuilles de Thonon et d' Annecy). — Ch. Sarrasin, De l’origine des roches exotiques du Flysch (Arch. Sc. natur. Genève, 3e période, t. XXXI). 1895. Abbé Bourgeat, Sur les Lapiez, le Glaciaire et la Molasse dans le Jura (Bul. Soc. gèol. de France, 3e série, t. XXIII, p. 418). — Ch. Depéret, Observations à propos de la nomenclature des terrains sédimentaires (C. R. Soc. gèol. de France , 3e série, t. XXIII). — H. Douxami, Sur le Miocène des environs deBourgoin et de la Tour- du-Pin (C. R. Ac. des Sc., 13 mai 1895). — H. Douxami et J. Révil, Sur le Miocène de la vallée de Novalaise (C. R. Ac. des Sc., 17 juin 1895). — H. Douxami, Compte rendu d’une excursion géologique à Saint- Pierre-d’Entremont (Bul. Soc. d’hist. nat. de Savoie). — Duparc et Ritter, Le grès de Taveyannaz et ses rapports avec les formations du Flysch (Arch. Sc. phys. et nat. de Genève, t. XXXIII). — E. Haug, Les hautes chaînes calcaires de la Savoie (Bul. serv. Carte gèol. de France, n° 47). — D. Hollande, Etude statigraphique des terrains tertiaires oligocènes de la vallée des Déserts (Bull. Carte gèol. de la France, n° 47).' BIBLIOGRAPHIE 311 1895. P. Lory et Termier, Sur deux roches éruptives récemment décou- vertes dans le massif de Chaillol (C. R. Soc. géol. de France , 3e série, t. XXIII, p. 10). — E. Mermier, Sur la découverte d’un nouvel Acerotherium dans la Molasse burdigalienne du Royans (Ann. Soc. lin. de Lyon , p. 162). — Termier, Résultats d’un sondage fait à Saint-Bonnet-de-Mure (Isère) (C. R. Soc. géol. de France), 3e série, t. XXIII). 2° Paléontologie. 1778. Da Costa, Historia naturalis Testaceorum Britanniæ, or the British. conchiology. 1792. Bruguière, Encyclopédie méthodique. 1810. Lamarck, Description des coquilles fossiles des environs de Paris (Ann. du Muséum de Paris, vol. XVI). 1814. Brocchi, Conchiologia fossile subapennina. 1817-1830. Defrance, Dictionnaire des sciences naturelles. 1821. Borson, Saggio di orittografla Piemontese (Mém, dell'Acad. di scienze di Torino, t. XXV). 1822. Lamarck, Histoire naturelle des animaux sans vertèbres. 1823. Brongniart, Mémoire sur les terrains de sédiment sup. calcarèo- trappèen du Vicentin. — Risso, Histoire naturelle des environs de Nice et des Alpes-Ma- ritimes. 1825. Basterot, Mémoire géologique sur les environs de Bordeaux (Mém. Soc. d'hist. nat. de Paris, t. II). 1831. Dubois de Montpereux, Conchy. fossile du plateau Vochyni- Podolien. 1836. Dujardin, Mémoire sur les couches du sol en Touraine (Mém. Soc. géologique, lra série, t. II). — Philippi, Enumeratio molluscorum Siciliæ. 1840 1841. Grateloup, Atlas de conchyologie fossile du Bassin de l'Adour. 1846. Agassiz, Recherches sur les poissons fossiles. 1847. Michelotti, Description des fossiles miocènes de l'Italie septen- trionale. 1853. Mayer, Catalogue des fossiles de la Molasse. — — Journal de conchyl., vol. X, p. 273. 1854. Michaud, Description des coquilles fossiles d’Hauterives (Soc. lin. de Lyon). 312 BIBLIOGRAPHIE 1856. Hôrnes. Die fossilen Mollusken des Tertiàr Beckens von Wien. 1860. Mayer, Journ, de conchyl, vol. VIII, p. 215). 1862. Dôderlein, Cenni gealogici intorno la giautura dei ter. mioc. super* deU’Italia centrale (Atti d. X Cong. de Scienze). 1865. Fischer in Falsan et Locard, Monographie géologique du mont d'Or lyonnais. 1868. Mayer, Journ. de conchyl ., vol. XYI, p. 107, 1873-1896, Bellardi et Sacco, I. Molluscki del Piemonte e délia Li guria . — Fischer et Tournouer, Animaux invertébrés du mont Lèberon. 1875. Tournouer, Muricidés de Touraine (Journ. de conchyl., XXIII , p. 151). — Tournouer in Falsan, Etude sur la position stratigraphique des tufs de Meximieux (Arch. mus. de Lyon, vol. I). 1876. Fontannes, Les terrains tertiaires sup. duhautComtatVenaissin 1877. Michaud, Description des coquilles fossiles des environs d' Haute- rives, 3e fasc. 1878. Fontannes, Les terrains néogènes du plateau de Cucuron. 1879-1882. Fontannes, Les mollusques Pliocènes de la vallée du Rhône et du Roussillon. — . — Description de quelques espèces nouvelles ou peu connues (Ann. Soc. d'Agr. et dHist. natur. de Lyon, 5° série, t. II). — Locard, Description de la faune de la Molasse marine et d’eau douce du Lyonnais et du Dauphiné (Arch. Mus. de Lyon, t. II). EXPLICATION DES PLANCHES Planche I Fig. 1. — Rhinocéros (aceratherium) minutus Cuvier. — la mandibule gauche, vu de côté, 1 b vu de dessus (Challonges-Aquitanien). Fig. 10. — Rhinocéros (aceratherium) minutus Cuvier, canine supérieure. Fig. 2, 3, 4, 5, 6 et 7. — Tapirus Helveticus. H. v. Meyer. — 2 deuxième pré- molaire supérieure droite. — 3 troisième prémolaire supérieure droite. — 4 première arrière-molaire supérieure droite. — 5 deuxième arrière molaire supérieure droite. — 6 troisième arrière-molaire supérieure droite. — 7 deuxième prémolaire inférieure droite ( Challonges-Aquitanien) . Fig. 8 et 9. — Tapirus aff. Douvillei Filhol. — 8 molaire supérieure droite. — 9 molaire inférieure droite (Challonges-Aquitanien). Fig. li. — Hyotherium aff. Meissneri, H. von Meyer. — dernière molaire infé- rieure (Challonges-Aquitanien). Fig. 12. — Spatangus Deydieri Cotteau Burdigalien, Sainte-Marie d’ Al vey (Savoie). PI anche I B Lamna denticulata , Ag. Murex (Ocinebra) Bujardini , Tournouer. Murex (Ocinebra) exoletus, Bellardi. Murex Dertonensis, Mayer. Murex (Ocinebra) inflexus , Dôderlein. Fig. 1. — - 2. — - 3. — — 4. — 314 EXPLICATION DES PLANCHES Fig. 7. — Murex (Ocinebra) funiculosus , Borson. — 8. — Murex (Ocinebra) anconae, Bellardi. — 9. — Murex (Ocinebra) geniculatus, Bellardi. — 10. — Murex (Ocinbra) confragus, Bellardi. — 11 et 12. — Murex ( Ocinebra ) bifrons, Tournouer. — 13. — Murex (Ocinebra), Berardi, Douxami. — 14. — Murex Mermieri, Douxami. — 15. — Murex Reymondi, Douxami. — 16. — Murex Arnaudi, Fisch et Tournouer. — 17. — Pollia Bredæ, Michelotti. — 18. — Pollia exsculpta, Dujardin. — 19. — Pollia magnicostata, Bellardi. — 20. — Fusus Valenciennesi, Grateloup. — 21. — Fusus provincialis, Fisch et Tournouer. — 22. — Euthria nodosa, Bellardi. — 23. — Euthria strtata, Bellardi. — 24. — Nassa atlantica, Brocchi. — 25. — Euthria adunea, Bellardi. — 26. — Nassa sallomacansis, Mayer. — 27. — Nassa Falsani, Tournouer. — 28. — Nassa accostyla, Deshayes. Planche III Fig. 1. — Nassa conforta, Dujardin. — 2. — Nassa Bexivæ, Fontannes. — 3. — Nassa Dujardini, Deshayes. — 4. — Collombella curta, Dujardin. — 5. — Clavatula interrupta Brocchi. — 5 a — Columbella su bulat a Defr. — 6. — à gauche Clavatula gradala, Defrance. — 6. — à droite Pleurotoma cabrierensis, Fisch et Tournouer. — 7. — Clavatula asperulata, Lamarck. — 8. — Mitra fusiformis, Brocchi. — 9. — Natica Josephinia, Risso. — 10. — Natica helicina, Brocchi. — 11. — Turritella bicarinata, Eichwald. — 12. — Erato lœvis Donovan, var. nentricosa, Locard. — 13. — Mitra Manzonii, Fisch et Tourn. — 14. — Vermetus (Serpulorbis) arenaruis, Linné. — 15. — Turbo car inatus, var. Delphinensts Douxami. — 16. — Turbo muricatus, Dujardin sp. — 17. — Turbo mamillaris, Eichwald. — 18. — Fissurella italica, Defrance. EXPLICATION DES PLANCHES 315 Fig. 19. — Solarium simplex , Bronn. — 20. — Patella Tournoueri, Fontannes. — 21. — Crepidula unguiformis , Lamk. — 22. — Trochus Rhodaniens, Douxami. — 23. — Trochus cingulatus Brocch. 24a 24&. — Trochus Hôrnesi, Michaud. 25. — Clanculus angulatus, Eichwald. Planche IV Fig. 1. — Hélix Delphinensis, Fontannes. — 2. — Hélix Escoffieræ, Fontannes. — 3. — Pecten improvisus, Fischer et Tournouer. — 4. — • Area diluvii, Lamarck. — 5. — Area (barbata) barbata, Linné. — 6. — Auricula (Melampus) Lorteti, Fontannes. — 7. — Pecten pusio, Linné. — 8. — Plicatula aff mytilina, Philippi. — 9. — Plicatula aff ruperella, Dujardin, — 10. — Cardita Michaudi, Tournouer. — 11. — Nucula nucléus, Linné. — 12a 12 b. — Area (barbatia) lactea, Linné. — 13. — Pisidium Rhodanicum, Douxami. — 14a 14 b. — Mactra triangula, Renieri. — 15. — Tapes enigmaticus , Fischer et Tournouer. — 16. — Eastonia rugosa, Chemnitz. — 17a 17 b. — Glandina Revili, Douxami (Aquitanien, Gerbaix,). îiv. de Lyon TERTIAIRE DE LA SAVOIE ET DU DAUPHINÉ Univ. de Lyon TERTIAIRE DE LA SAVOIE ET DU DAUPHINÉ PL. II Phot. J. Sylvestre, Ljon. PL III. I Pliot. J. Sylvestre, Lyon. TABLE DES MATIÈRES CHAPITRE PREMIER. — Description physique et limites delà région. 1 Région de la Plaine française 3 Plaine Suisse 4 Jura 5 I. Chaîne du Mont Tournier. . 6 1. Synclinal de Novalaise. 7 II. Anticlinal du Moot Grelle, l’Epine, Mont du Chat 7 2. Synclinal de Chambéry 8 III. Anticlinal Reculet-Chambotte 9 Région alpine 11 IV. Semnoz 12 4. Synclinal de Leschaux, Leschereines, Le Désert 13 CHAPITRE II. — Période Prénummulitique et Nummulitique 15 Période Prénummulitique 15 Etude des différents terrains tertiaires 19 Terrains éocène inférieur et moyen 20 § 1. — Eocène inférieur 20 Bassin de la Saône 28 § 2. — Eocène moyen (Lutétien) 29 Période Nummulitique 30 Synclinal du charbon. 35 Synclinal d’Arclozau -Bellevaux . 39 Synclinal d’Entrevernes 42 Synclinal de Leschaux 49 Synclinal des Aillons 49 Synclinal des Déserts . .... 53 Les Voirons 66 Les Pléiades, la Berrec, Habkern 70 Nummulitique des Alpes Calcaires du Genevois 71 Age de ces différents dépôts 75 Région du Genevois 76 Dépôts marins du Nord du Jura 84 Comparaison des dépôts nummulitigues de la Savoie avec les dépôts plus méridionaux 87 Résumé de l'histoire géologique de la région pendant la période Nummu- litique. ■ 93 318 TABLE DES MATIERES CHAPITRE III. — Terrains Aquitaniens et Miocènes 103 § 1. Vallée du Rhône 105 Miocène supérieur (Pontique) . 121 Région Bressane 135 Paléontologie des dépôts pontiques de la vallée du Rhône 137 Dépôts post-miocènes du nord de la vallée du Rhône 137 § 2. Région Jurassique 146 Synclinal de Saint-Martin-de-Bavel 147 Synclinal de Novalaise .... 149 ■ Synclinal de Chambéry, Saint-Jean-de-Couz 155 Synclinal de Yoreppe 162 i Synclinal de Proveysieux 166 Vallée du Rhône 169 Synclinaux tertiaires du Nord du Jura 175 j Dépôts tertiaires du Jura Neuchàtelois et du Jura Bernois 179 Vallée de Rumilly 182 j § 3. Dépôts tertiaires de la plaine Suisse. 197 Molasse d’eau douce inférieure 201 Molasse marine 205 Molasse d’eau douce supérieure 211 Variations de faciès des couches tertiaires supérieures de la Suisse . . 212 Dislocations de la Molasse Suisse »... 222 CHAPITRE IV. — Dépôts pliocènes et pleistocenes 226 î CHAPITRE V. — Résumé de l’histoire géologique de la région pendant la période Postnummulitique 229 Limites de la mer Burdigalienne 233 jj Origine des matériaux qui constituent ces dépôts 234 Miocène moyen 235 : Miocène supérieur 238 CHAPITRE VI. — Description de quelques fossiles nouveaux ou peu CONNUS DES TERRAINS TERTIAIRES DE LA SAVOIE ET DU DAUPHINÉ SEPTENTRION AI 245 § 1. Aquitanien 245 § 2. Burdigalien 256 § 3. Etude palèontologiquc delà Faune du niveau d'Arstc 250 Vertébrés. Poissons 259 Crustacés. Cirrhipèdes • . . . 260 Annélides. Tubicolidæ 261 Mollusques. Gastropodes 261 Lamellibranches 288 Brachiopodes 299 Bryozoaires 299 Polypiers 299 Bibliographie 305 Explication des planches 313 Lyon. — lmp. Pitiîat Aîné, A. Rcy Successeur, 4, rue Gentil - 13203 5 0$T. 9 6 Univ. de Lyon. PL. V. [ T a. i élu. Brtïicfccfr-- Fig. 2. — Coupe Est-Ouest de la vallée de Novalaise. Èclielle : Long -L_ Haut ^ Fig. 1. — Gr, granité; V, Virgulien; Po, Portlandien; Pu, Purbeck; Va, Valangieu; H, Hauterivien. m8«, Molasse gréseuse et marnocalcaire à P. præsoabriuscults; mab, Molasse sableuse à O. oraaissima ; m3", zone de Saiut-Fons à Terebratulina ealathisus (Helvétien s.s) ; mib, zone d'Aoste à A ncilla glandiform fs ifTortomen) ; »i4«, Pou- tien inf., zone à Nassa Michaudi,(, Molasse grise de Lausanne (Miocène inférieur); M-’, Molasse ma- rine à P .præscabriusculus&vec banc de Muschelsaudstein, Musoh (Burdigalien); M3, molasse marine à Cardita Jouanneti, Vindobonien inf. (miocène moyen), Helvétien, s.s.; M4, Nageifluh polygénique et Œningien, Vindoonbien sup , Tortonien. Fig. 4. — N, Néocomien; F, Flysch; M, Molasse rouge de Vevey et couches de Saint-Sulpice (Aquitanien inf.); Mr, Molasse lacustre aquitanienne à II. Ramondi : 1 Molasse rouge de Lausanne, 2 Molasse 4 ignites de llochetle Belmont, P, poudingue Aquitanien du Pèlerin; M4, Molasse grise de Lausanne (Burdigalien inf.) ; M3, Molasse marine à P. præscabriusçulus. Fig. 3. — Coupe de Lausanne à Fribourg et à Berne. NE Echelle : Long Haut ^ Fig. 4. Coupe de Lausanne aux Pléiades. «saris * . ANNALES DE L’UNIVERSITE DE LYON VOLUMES PARUS AU La doctrine de Malherbe d'après son commentaire sur Desportes, par Fer- dinand Brünot, docteur ès lettres, chargé d’un Cours complémentaire à la Faculté I des Lettres, lauréat de l'Académie fran- çaise, avec 5 planches hors texte. 10 fr. j Rjteherches anatomiques et expérimen 'Taies sur la métamorphose des Amphi- '’ïiens anoures, par E. Bat.ui.i "N. prépa- rateur de Zoologie à la Faculté des Sciences, avec 6 pl. hors texte. 4 fr. Anatomie et Physiologie comparées de la Pholade dactyle. Structure, locomo- tioh, tact, olfaction, gustation, action ; dermatoptique. photogénie, avec une J théorie générale des sensations, par le Dr Raphaël Dubois, professeur de Phy- ! siologie générale et comparée à la Fa- ; culte, avec 68 figures dans le texte et 15 planches hors texte 18 fr. Sur le pneumogastrique des oiseaux, par E. Couvreur, docteur ès sciences, chef | des travaux de physiologie à la Faculté | des sciences, avec 3 planches hors texte : et graphiques dans le texte. ... 4 fr. Recherches sur la valeur morphologique des appendices superstaminaux de la fleur des Aristoloches, par Mlle A. Ma- youx, élève de la Faculté des Sciences, avec 3 planches hors texte. ... 4 fr. Sur la théorie des équations différen- tielles du premier ordre et du premier degré, par Léon Autonxe, Ingénieur des Ponts et Chaussées 9 fr. Recherches sur l’équation personnelle dans les observations astronomiques de passages, par F. Gonnessiat, Aide- Astronome à l’Observatoire, chargé d'un Cours complémentaire d’Astronomie à la Faculté des Sciences 5 fr. Lettres intimes de J.-M. Alberoni adres- sées au comte I. Rocca, ministre des finances du duc de Parme, et publiées d’après le manuscrit du collège de S. Lazaro Alberoni, par Emile Bourgeois, professeur à la Faculté des Lettres, avec un portrait et deux fac-similé. . 10 fr. Le Fondateur de Lyon, Histoire de L. Munatius Plancus, par M. Jui.uen, pro- fesseur-adjoint. à la Faculté des Lettres, avec 1 planche hors texte .... 5 fr. Etude stratigraphique sur le Jurassique inférieur du Jura méridional , par Attale Riche, docteur ès sciences, avec planches hors texte 12 fr. Etude expérimentale sur les propriétés attribuées à la tuberculine de M. Koch, laite au laboratoire de médecine expé- rimentale et comparée de la Faculté de Lyon, par M. le professeur Arloing, M. leD1' Rodet, agrégé, et M. le ûr Cour- mont, avec planches en couleurs. 10 fr. Ier JUILLET 1896 Histologie comparée des Ebénacées da ses rapports avec la Morphologie l’histoire généalogique de ces plant par Paul Parmentier, professeur l'L'niversité. avec 4 pl. hors texte. 4 Recherches sur la production et la loc lisation du Tannin chez les fruits mestibles fournis par la famille d Pomacées, par M||c A. Mayovx, élève la Faculté des Sciences de Lyon, av 2 planches .... 3 Essai critique sur 1 hypothèse des atom dans la science contemporaine, [ Arthur Mannequin, chargé d'un Coîj complémentaire de philosophie à la F culté des lettres de Lyon. . 7 fr. , Saint Ambroise et la morale chrétie au ivc siècle, par Raymond Tham ancien maître de conférences à la 1 culté des leltres de Lyon, professeur] philosophie au lycée Condorcet. 1 fr. Etude sur le Bilharzia haematobia et Bilharziose, par M. Lortet, doyen1 la Faculté de médecine de Lyon, Viam.eton, professeur agrégé à la Faci de médecine de Lyon, avec planches figures dans le texte 10 Recherches sur quelques dérivés s chlorés du phénol et du benzè par Etienne Barrai., docteur en mé cine, pharmacien de lr0 classe, çh des fonctions d'agrégé à la Faculté médecine de Lyon 5 Phonétique historique et comparée sanscrit et du zend, par Paul Regn professeur de sanscrit et de gramm comparée à la Faculté des lettres. 5* La République des Provinces-Unies, France et les Pays-Bas espagnols 1630 à 1650. par A. Waddingto.n, ] fesseur-adjoint à la Faculté des let de Lyon. Tome I (1630-42.) ... fl Sur la représentation des courbes g ches algébriques, par Léon Auto' ingénieur des ponlset chaussées, m de conférences à la Faculté des Sc ces Histoire de la Compensation en d Romain, par C. Appleton, professe la Faculté 7 fi La Jeunesse de William Wordsw (1770-1798). Etude sur le « Prélu par Emile Legouis, maître de confère à la Faculté des Lettres 7 fi La Botanique à Lyon avant la Révolu et l’histoire du Jardin Botanique i cipal de cette ville, par M. Gérard, fesseur à la Faculté des Sciences, figures dans le texte 3 f L’Évolution d’un Mythe. Açvins et cures, par Ch. Renel, docteur ès le Physiologie comparée de la Marni' par Raphaël Dubois, professeur de siologie générale et comparée , 119 fig. et 123 planches hors texte. 1 Paris. — Imprimerie L. Maretheux, 1, rue Cassette. — 8259. ANNALES DE L'UNIVERSITÉ DE LYONTEtW RECHERCHES PHYSIOLOGIQUES SUR L’APPAREIL RESPIRATOIRE DES OISEAUX PAR J.-M. SOUM Docteur ès Sciences naturelles Professeur agrégé au Lycée de Lyon PARIS MASSON ET Ci0, ÉDITEURS LIBRAIRES DE L’ACADÉMIE DE MÉDECINE 120, Boulevard Saint-Germain ; mm mms mum MB