4 RE A Ha A ÉR SE RR AR DER : PERS Ve ë : ; de RTS = 5 » ‘- dise, mice En à CE, Tu ES a " ES ae LR -mp 4 A F LEA AE Te ISSU EN TETE Fa de as ANT Se de ù à e ? : . A L _ Y % Last AU nm “ EL ET ve #9 v à * ? . ‘ ” te ins > RQ M ra pe QU PE LA NET EE ï. SN sen À à © : De M Ve Et no ? So ae A pe. à + as vip 1 , ! 1e « M. 2x SFA AREQ LT | | 4 0 ns 111 AZ k BE JUL.|JI0 16] ANNALES DE L'UNIVERSITÉ DE LYON NOUVELLE SÉRIE I. — Sciences, Médecine. — Fascicule 36 LES FORMATIONS MARINES PLIOCÈNES ET QUATERNAIRES DE L'ITALIE DU SUD ET DE LA SICILE PAR ( Maurice GIGNOUX Ancien Elève de l'Ecole Normale Supérieure, Agrégé de l'Université, Docteur ès sciences, Préparateur de Géologie à la Faculté des Sciences de Grenoble. Avec 42 figures et 21 planches hors texte. ÉEON- PARIS FA REY, IMPRIMEUR - ÉDITEUR | LIBRAIRIE J.-B. BAILLIÈRE & FILS Rue Gentil, 4 Rue Hautefeuille, 19 1913 ANNALES DE L’UNIVERSITÉ DE LYON EN _VrE NUE A LYON Chez À. REY, Imprimeur Éditeur 4, RUE GENTIL | | | A PARIS Chez les Libraires spéciaux SUIVANTS Ia mention en chiffres romains qui précéde le numéro du fascicule indique, pour les ouvrages parus dans nouvelle Série, qu'ils appartiennent soit au groupe Sciences- Médecine ([), soit au groupe Droit-Lettres (Il). Arthur ROUSSEAU, 14, rue Soufflot. Histoire de la Compensation en droit Romain, par C. APPrETON (Fasc. 21). 7 fr. 50 Caractères généraux de la loi de 1884 sur les Syn- dicats professionnels; justification de cette loi; réformes possibles. Etude de législation indus- trielle, par R. GonnarD (Fasc. 36). 3 fr. La Représentation des Intérêts dans les Corps élus, par Charles François (II, Fasc. 2). 8 fr. Mélanges Ch. Appleton : Etudes d'histoire du droit, dédiées à M. Ch. APPLETON, professeur à la Faculté de Droit de Lyon, à l’occasion de son XXVe anni- versaire de professorat (II, Fusc. 13) : 45 tr. Physique sociale. — Emploi combiné du système du Quotient vrai et du système du Quotient ffcrif pour la répartition des sièges dans la Représen- tation proportionnelle, par le Dr Monoyer (II, Fasc. 18) ï 3 fr. Félix ALCAN, Lettres intimes de J.-M. Alberoni adressées au comte I. Rocca, ministre des finances du duc de Parme, et publiées d’après le manuscrit du collège de S. Lazaro Alberoni, par Emile BourGgois (Fasc. 8) . . 40 fr: Essai critique sur Th Dothrèse ‘des atomes dans la science contemporaine, par Arthur HANNEQUIN (Fasc. 14) . 7 fr. 50 Saint Ambroise et la morale chrétienne au1ve siècle, par Raymond THaAMIN (Fasc. 15). 7 fr. 50 La République des Provinces-Unies,la France et les Pays-Bas espagnols de 1630 à 1650, par A. Wap- DINGTON, 2 vol. (Fasc. 18 et 31). A2 tr. Le Vivarais. Essai de Géographie nie: par Louis Bourpin (Fasc. 37) . È : G fr. 108, boulevard Saint-Germain. Alphonse PICARD et Fils, 82, rue Bonaparte. La doctrine de Malherbe d’après son commentaire sur Desportes,par Ferdinand Brunor (Fasc.1er).A0fr. Le Fondateur de Lyon, Histoire de L. Munatius Plancus, par M. JULLIEN (Fasc. 9) . 5 fr. La Jeunesse de William Wordsworth (1770-1798). Etude sur le « Prélude », par Emile Lecouis (Fasc. 22) . : 7 fr. 50 La Question des Dix Villes impériales d'Alsace depuis la paix de Westphalie jusqu'aux arrêts de « Réunions » du Conseil souverain de Brisach (1648-1680), Re Georges BarvorT (II, Fasc. ACT) SEE Se 7 fr. 50 EzÉCHIEL Sn HEIM. — Relation de la Cour de France en 1690, nouvelle édition, établie sur les manuscrits originaux de Berlin, accompagnée d'un commentaire crilique,de fac-similés, et suivie de la Relation de la Cour d'Angleterre en 1704, par le même auteur, publié avec un index analytique par Emile Bourcgois (II, Fasc. 5) . 40 fr. Histoire de l'Enseignement secondaire dans le Rhône de 1789 à 1900, ie C. CHABOT et S. CHARLÉTY QU rase T) RE se 510 6 fr. Bibliographie critique de l'Histoire de Lyon, depuis les origines jusqu’à 4789, par Sébastien CHARLÉTY (LT Fa Sc 9) NE Er 50 Bibliographie critique de l’histoire de Lyon, depuis 1789 jusqu'à nos jours, par Sébastien CHARLÉTY (II, Fasc. 11). : 6 7 fr. 50 Pythagoras de ne RS Henri Lecxar (Il, Fasc. 14). . . Er & fr. Les Philosophes et la Société Rene au xvirie siè- cle, par M. Rousran (II, Fasc. 16) . 6 fr. Documenti per la Storià dei rivolgimenti politici del Comune di Siena, dal 1354 al 4369; pubblicati con introduzione ed indici da Giuliano LucHAIRE (II, Fasc. 17) . 7 fr. 50 Bibliographie de la Syntaxe du français, 1840-1905, par P. Horzucet G.Mariner (Il, Fasc. 20). Gfr. Etude sur les Relations de la Commune de Lyon avec Charles VII et Louis XI Ce je par L. CAILLET (IL, Fasc. 21). oi 40 tr. Le mouvement antijac ob et anis à Lyon et dans le Rhône-et-Loire en 1793 (29 mai-15 août), par C. RiFFATERRE, (Il, Fasc. 24). 2 vol. 40 fr. L’Asie centrale aux XVIe et XVIIIe siècles, Empire Kalmouk ou Empire Mantchou ? par Maurice Couranr (Il, Fasc. 26). . . 6 fr. Contribution à l'étude de deux réformes judiciaires au XVIIIe siècle : Le Conseil supérieur et le grand Bailliage de Lyon (1771-1774. AE MErzoËr (Il, Fasc. 27). . par Paul . Gr. LES FORMATIONS MARINES PLIOCÈNES ET QUATERNAIRES DE L'ITALIE DU SUD ET DE LA SICILE — À. REY, Imprimeur de l'Université, 4, rue Gentil. - # ANNALES DE L'UNIVERSITÉ DE LYON NOUVELLE SÉRIE I. — Sciences, Médecine. — Fascicule 36 LES FORMATIONS MARINES PLIOCÈNES ET QUATERNAIRES DE L'ITALIE DU SUD ET DE LA SICILE PAR Maurice GIGNOUX ., Ancien Elève de l'Ecole Normale Supérieure, Agrégé de l'Université, Docteur ès sciences, Préparateur de Géologie à la Faculté des Sciences de Grenoble. Avec 42 figures et 21 planches hors texte. LYON | PARIS A. REY, IMPRIMEUR - ÉDITEUR | LIBRAIRIE J.-B. BAILLIÈRE & FILS Rue Gentil, 4 Rue Hautefeuille, 19 1913 GS ST NUS, FF & S ni : y \ Lg PER ?| LA Le À pee \ \P 5e ns a * C'est sur les conseils de M. Ch. Depéret que j ai entrepris, dès 1906, les recherches qui font l’objet du présent ouvrage. Et si c'est à lui que je dois l’idée première d’une pareille étude, on reconnaîtra que nul mieux que le maître incontesté du Tertiaire méditerranéen ne pouvait m'aider à la mener à bien. La fréquentation journalière de son laboratoire; pen- dant plus de trois années consécutives, m'a surtout permis (el c'est à cela que j'attache le plus de prix) de me familiariser avec les méthodes qu’il à appliquées avec tant de succès à la straligraphie des formations récentes. Et particulièrement, Je noublierai jamais avec quel dévouement l'éminent profes- seur de Lyon a bien voulu entreprendre une tournée lointaine en Sicile el Calabre pour y revoir, avec moi, les localités que Je considérais comme les plus importantes. | Le Laboratoire de (réologie de l’Université de Lyon est donc resté constamment mon centre d’études paléontologiques; j'y at trouvé des matériaux de premier ordre, constitués par d’im- portantes séries de fossiles pliocènes el quaternaires de France, Angleterre, Italie et Algérie, soigneusement classés el déterminés. Dans ce milieu, où l'activité du maïtre à su créer une atmosphère de vraie cordialité et simplicité scienti- lique, ses dévoués collaborateurs, MM. Riche, Roman et Don- cieux, ainsi que mon excellent ami rene Chaput, m'ont ES in nes . constamment aidé de leurs conseils et de leurs encourage- ments. Une grande partie de mon travail à élé rédigée à Grenoble, où M. le Professeur W. Kilian à bien voulu m appeler comme Préparateur. Avec une affectueuse cordialité, dont je lui sais un gré infini, mon éminent maitre s'est ingénié à me faciliter le plus possible l'achèvement de mes recherches; en m'accep- tant comme collaborateur à ses études sur le Bas-Dauphiné, il m'a fail profiter de ses vues personnelles sur la classification du Quaternaire rhodanien, et les idées générales que j'en at relirées, onteu une heureuse influence sur la marche de mon travail. Enfin j'ai (rouvé, en la personne de M. P. Lory, une be amilié constante qui m a élé un bien vif encouragement. | Je dois ajouter que la si commode organisation bibliogra- phique du Laboratoire de Grenoble, due à la féconde initia- tive de son Directeur, m'a grandement facilité mes recherches; les riches collections de ce Laboratoire m'ont également fourni, comme on le verra d’après les planches, quelques échantil- lons intéressants ; enfin, une parfaile installation photogra- phique m'a permis d'y exéculer moi-même la plupart des clichés reproduits ici en phototypte. De précieux encouragements me sont venus aussi de mes anciens maîtres. Parmi eux, M. le Professeur Wallerant m'a inilié le premier à l'étude des sciences géologiques el na cessé depuis de me témoigner le plus vif intérét. M. Haug, aprés avoir élé mon maître à la Sorbonne, à suivi mon travail avec une constante bienveillance : et le bon accueil qu'il m'a loujours réservé a élé pour moi un agréable stimu- lant ; ses collaborateurs, MM. Gentil, Blayac et le regretté — IX — Pervinquière, ont bien voulu me faciliter l'étude des collec- tions de la Sorbonne. Enfin, j'aiteu la bonne fortune de pro- filer pendant deux années de l'enseignement de M. Léon Ber- trand, qui s'est montré pour moi le plus dévoué des maitres; et je n'oublierat pas non plus que les encouragements de mon excellent ami, M. Charles Jacob, ont dés l'abord contribué à décider de ma vocation géologique. Je dois aussi beaucoup à la cordiale amitié que m'a tou- Jours témoignée M. E. de Martonne: des entretiens ou excur- sions en commun avec lut m'ont habitué de bonne heure aux considéralions morphologiques, si importantes pour l'étude des formations récentes. M. Ph. Dautzenbergq a eu l'extrême amabilité de me prêter le concours de sa haute compétence pour la détermination de quelques espèces particulièrement délicates ; on trouvera son nom cité souvent 1c1, el je lui garde une bien vive el respec- lueuse reconnaissance. — M. Filliozal a bien voulu examiner pour moi quelques Polypiers. — MM. P. Fallot, Bédé, Alle- mand-Martin ont obligeamment mis à ma disposilion des matériaux récoltés par eux aux Baléares et en Tunisie. — M. Gaillard m'a aimablement quidé dans la Bibliothèque et les riches collections conchyliologiques (déterminées par Locard), trop peu connues, du Muséum de Lyon. — Notre toujours actif confrère, le commandant Caziol, a l(enu à me faire visiter lui-même quelques-uns des gisements quater- natres de Nice, st bien étudiés par lui. Grâce à la haute bienveillance de M. H. Douvillé, j'ai pu tirer parti de quelques pièces intéressantes des collections de l'Ecole des Mines ; je lui en exprime ici mes remerciements respeclueux. M. Stanislas Meunier a bien voulu me permettre l'étude de Univ. DE Lyon. — Gicnoux, à b EE Es la collection Bédé, déposée au Laboratoire de Géologie du Muséum. Enfin, nombre de nos confrères m'ont fourni d'utiles ren- setgnement(s ou communiqué des échantillons: MM. G.-F. Doll- fus, R. Douvillé, M. Gennevaux, L. Joleaud, P.Jodot, général de Lamothe, P. Lory, Maury, Miquel, Pailary, G. Sayn. En lialie, j'ai partout recu le plus cordial accueil. Je garde en particulier une bien vive reconnaissance à M. G. Chec- chia-Rispoli qui m'a montré lui-méme le Pliocéne éludié par lui à San-Severo (Fogqia), à M. Scalia qui m'a guidé aux environs de Catane, à MM. di Stefano et Gemmellaro, avec lesquels j’at eu le plaisir de faire quelques excursions dans le bassin de Palerme. À Lecce, M. C. de Giorgi n'a fait visiter sa collection particulière et celle du Muséum d'histoire natu- relle, dont il est le directeur si achf et dévoué à sa province natale. M. le Marquis di Monterosato m'a accueilli avec sa courtoisie habituelle, et m'a procuré un grand nombre de fos- siles rares el intéressants du Sicilien de Palerme. M. Bellini m'a fourni oralement d'importantes indications sur la réqion de Naples. MM. de Stefani et Dainelli, à Florence; MM. Portis et Cerulli-Irelli, à Rome; M. Ugolint el monezxcellent ami, le D: Merciai, à Pise; MM. Bassant et Galdieri, à Naples; M. le Chevalier Jannacci, à Regqio-Calabria ; le regretté L. Sequenza, à Messine; le Professeur R. Zuccardi, à Tarente ; le Marquis À. de Gregorio, à Palerme, m'ont donné une foule de renseignements utiles, ou n'ont facilité l'étude des collections dont ils avaient la garde. Je ne saurais non plus oublier tous les services que m'a rendus mon dévoué ami, le D' Stefanini, ni les encouragements que m'a prodiqués avec tant de bonté le Professeur Taramelli. a — Les voyages que j'ai dû faire en vue de ce travail m'ont été facilités par une Bourse d'études, renouvelée pendant deux années, près la Faculté des Sciences de Lyon, et par une sub- vention accordée par la Caisse des Recherches scientifiques : J'en remercie bien vivement le Conseil d'Administration de cette Caisse. Les Annales de l'Université de Lyon ont bien voulu prendre à leur charge la plus grande partie des frais de publication de cet ouvrage : j'en exprime ici mes remerciements à M. le Professeur Lameire, agent exécutif du Comité des Annales. L'impression a été faite par le Maitre-Imprimeur lyonnais, A. Rey, dont on connaît la compétence toute spéciale en malière de publications scientifiques ; les planches en photo- typie ont été exécutées par MM. Bourgeois frères, de Chalon- sur-Saûne. SOMMAIRE PREMIÈRE PARTIE GÉNÉRALITÉS CHAPITRE PREMIER. — Inrropucrion. BUT ET PLAN GÉNÉRAL DE L'OU- MA GER ES RC RU Mt PS ie die 47 one F9 ©T CHAPITRE II. — Hisrorique. 4 $ 1. — Les travaux des géologues français . . . . . . . . . 4 $ 2. — Les travaux des géologues italiens 7 GENRES PRINGIPESIED MÉTHODES nr $ 1. — Notion de cycle sédimentaire . . . M N, TD $ 2. — Succession de plusieurs cycles dime tee PS ER AT RE AL $ 3. — Relativité de la notion de cycle sédimentaire. 16 $ 4. — Application à la classification Ro date et discontinuité . . . EN EN $ 5. — Le point de vue once ét ie scpèces caractéris- tiques (mutations, espèces éteintes, immigrées el émigrées) . . FO Ne 18 . — Conclusion, essai dune Classihonton. du locère de du Quaternaire (Pliocène ancien, Calabrien, Sicilien, COUCHES ARS ÉLONIDES) EE RE OI /e (®N DEUXIÈME PARTIE DESCRIPTION RÉGIONALE DÉTAILLÉE DE LA SÉRIE PLIOCÈNE DANS L'ITALIE DU SUD RÉPARTITION DES SÉDIMENTS PLIOCÈNES EN CALABRE. . . . . . . . . 27 CHAPITRE PREMIER. — LA CALABRE MÉRIDIONALE . . . . . . . 29 Sr lieNdétroiidelCaranzaro ENV AL EN 0." , 0 29 xIV se SOMMAIRE L 1) Shaligaphie PR A EAUTe : Re Région centrale du détroit Ce de Caraffa di Catanzaro), 29. — Modifications de facies sur les rives du détroit, 32. 20 Les Faunes pliocènes … … … D CNE D ; 10 Les conglomérats de base; 2° Le argiles enees 3° les couches Aire (gisement de ‘S. Maria di Catanzaro, autres gisements). Résumé . .… . ee 30 Conclusions. — La plaine alluviale de la fin du Ploecne Fe $ 2. — La côte ionienne de la Calabre méridionale . . . . . . TON eSCHIDHONSÉNÉTAlC EEE CT EE Région située près de la côle actuelle. Zone de bordure de massifs anciens (calcaires à Amphistégines). soMnterprétationdelacouperdelGerce Te à PersisementdemMonos ter ER DOONCITSIONS NAN EE ne Ne LEA NE $ 3. - — La vallée du Mesima et le golfe de Go É Description State TApIqUES EN NEC ; La coupe de Monteleone, 54. — La coupe du Rio Été iaci près Mileto, 56. — Beni sud du golfe de Gioia, . 0 Les faunes pliocènes . . . ë : AE ; : Faunes du Pliocène ancien, el — tres de Plbebre cupé- rieur, 60. CHAPITREMEELCE DÉRRONMDENMESSINE SE Caractères généraux du Pliocène. … … … = $ 1. — La côte sicilienne du détroit ne 1° La coupe de Gravitelli près Messine … …_._ ._._._—. Tnn.ÙE. Résumé, 70. — L'ancien rivage pliocène, 71. 9 La côte sicilienne au sud de Messine. . . … … … . 3° La côte sicilienne au nord de Messie : . _..__—_—__U_._—. 7° Conclusions PET TONER PS Les faunes du Pliocène supérieur + . … … … … … . $ ». — La côte calabraise du détroit . . .L. : c 10 La coupe des Archi près Reggio et la Eee du Monte de Penbimeleeer 0 b su NP ce Rive droite du Torrente Mende, région de Monte Corvo, 78. — Rive gauche du Tone Torbido, Monte di Pen- timele, 80. — La faune calabrienne de Monte Corvo et du Pentimele, 83. — Conclusions, 85. 0 Le Monte di Botte et la coupe Reggio-Terreti. + … … . (Description de la coupe, 87. — Faille « postpliocène » de Terreti, 90). — Conclusions, 92. Appendice : le gisement de Carrubbare . . . . 30 Coupe de la série pliocène à Gallina . . . HE UN (Description de la coupe, 97.) — Les tes : 19 gisement de Gallina ouest, 101; 2° gisement de Gallina est, 108. 29 33 JU NII NI NO OO à © SJ NN] 97 SOMMAIRE 4 Les environs de Villa S. Giovanni et le gisement de Musalà. (Conditions stratigraphiques, 104). — Etude de la faune de Musalà, 108. — Conclusions, 109. 5° La partie méridionale de la côte calabraise Mt sde (Le « Quaternaire soulevé à 830 mètres » des environs de Motta, rr1.) CHAPITRE III. — La Caragre pu Non $ 1. — Vallée du Crati 19 Généralités 29 Stratigraphie . 3° Les faunes. : re 4° Les facies ce di Calame supérieur . pt. (Coupe de Castrovillari, 119. —Les plateaux alluviaux, 120.) $ 2. — Le Pliocène du versant oriental de la Sila. 1° Région de Cotrone ose Le (Les argiles plaisanciennes, 12°, — I” hobe. de Sono 123.) 2° Région de Rossano-Cariati CHAPITRE IV. — LE DOMAINE APPULO-GARGANIQUE . $ r. — La dépression entre Apennin et Pouille. 1° La coupe de Gravina-en-Pouille DOS ES 0e APTE Description de la coupe, 129. — (Pliocène à type Appulo- Garganique ; facies « Materin », 130). 2° Modifications de facies dans la dépression des Pouilles, 131. — La surface de remblaiement de la fin du Pliocène, 134. — Le Pliocène lacustre des dépressions intra- apennines, 139. 3° Les faunes. SA Den OR MECS I. — Faune des eee caler inférieures ou tufs « materins », 136. — II. Faune de l'extrême base des argiles, 137. — III. Faune des argiles supérieures et des sables, 138. — Les faunes calabriennes de la Basilicate, 139. . — Le Pliocène dans la région de Tarente . 1° Description stratigraphique . (Coupe de Montemesola, 141.) 20 Les faunes. : 1° Les mollasses D ces 5 29 1 DRE ” lee le el grès supérieurs, 144. $ 3. — Le Pliocène dans la terre d'Otrante 1° Description stratigraphique . 20 Les faunes. . . ML LENS DAS La faune des Éclliscce ne Ures. 148. — La faune des nn Ê XV 104 110 136 XVI | SOMMAIRE argiles, 149. — La faune des « Panchine » supérieures, ° 100. | S de — La côte adriatique 1° La terre de Bari . . . APE Ce 4 eee 2° Région du Monte Custac ë (Calcaires d’Apricena, près S. us Fa) 3° La côte adriatique au nord du Gargano . CHAPITRE V.— LE PLIOCÈNE SUPÉRIEUR EN SICILE. $ 1. — La région del’Etna . RE © à ML ol Qivesses régions at elles C Cône de l’Etna, 156. — Ter- reforti, 157. — Plaine de Catane, 157.) 19 La faune des argiles subetnéennes 20 Conditions stratigraphiques de ces argiles. ; (Coupes de Cannizzaro, 159, et de Calatabiano, 160 ) 30 Région de Lentini au sud de la plaine de Catane (Gisements de Valsavoja, 16r, et de Brucoli, 161.) 4° Conclusions — Côte sud de la Soie, x (Ile de Lampedusa, 164, note 2.) 1° La région de Girgenti . ; (Coupe de Girgenti, 165). — mire succession des ones en — (Gisement de Porto US: 169.) 0 La région de Terranova 3° Les environs de Sciacca. 3. — Régions occidentale et centrale a ha Siere . — Côte nord de la Sicile. LINE (Gisements denis, 174 à ie Ne. 179.) Ur (C] nr A LH TROISIÈME PARTIE 101 198 Em) 199 160 . 163 164 164 170 171 172 174 DESCRIPTION RÉGIONALE DÉTAILLÉE DU QUATERNAIRE DANS L'ITALIE DU SUD CHAPITRE PREMIER. — La Srcrre . $ 1. — Le Sicilien de Palerme au point de vue stratigraphique 1° Indications topographiques générales. 20 Les divers facies du Sicilien de Palerme ; À. Le facies zoogène du Monte Pellegrino, 179. — B. . facies argileux de Ficarazzi, 181. — C. Facies sableux littoraux, 182. 30 Les anciens rivages de la mer sicilienne. (Cozzo S. Rosalia, 185. — Contrée Allauro, 186. — Grotte de S. Ciro, 186.) LM 277 178 179 184 LUS SOMMAIRE XVII 4° L'ancienne plaine côtière sicilienne sur la côte à l'ouest de Palerme et les relations stratigraphiques du Sicilien avec le Pliocène. . . 187 (Plateau d’Altavilla, 188. — saines dore du Sicilien et ét Pliocène, 190.) $ 2. — Les formations postsiciliennes dans la région de Palerme. . 192 1° Les couches à Strombes de Sferracavallo . . . . . . . 192 (Faune, 192. — Conditions de gisement, 193.) 0 Les dépôts postsiciliens dans la plaine de Palerme. . . . 195 (Régions du Monte Pellegrino et de Ficarazzi : « pietra molara » et « scorcione », 195.) $ 3. — Le Quaternaire dans le solfe de Castellamare . . . . . . 197 10 ÎLa coupe ce BAIE RE SOS es NE EM NC os) 20 Les faunes.. PR Eau te: 2200 (Sicilien de Pete 198, el de Castellamare, 200.) $ 4. — La côte nord de la Sicile entre Palerme et Messine. . . . 202 (Anciennes plaines côtières siciliennes). Le gisement de Milazzo. . . : ARE moe NS Of Conditions stratigraphiques, 53. — Faués 206. Le gisement de Mortelle. . . . MR IT A ec ir 200 (Sicilien discordant sur le Coin 209.) Sr Paicoteonentalerde larSicile ee RE SO 10 Bnrrons Ce -TAGRENTME MEET EE CO) 2® Rédion de EE EAN EE NE 2 3° Environs de Syracuse. . . DR AR Or Et 1 NAT $ 6. — La côte méridionale de la Sicile SHRÉLSEE ANR APe : LE) (Terranova, 214.— Girgenti, 214. — Sciacca, 215. re mité occidentale de la Sicile, 216.) CHAPITRE Il. — Lx pérrorr pe MESSINE 217 S sr. — Les couches à Strombes de Ravagnese et Bovelo 217 ° Le gisement de Ravagnese 217 DOME HS eMENATENBONELON RE RTIE C 219 rbucerderlarfaune ete NS he M... 220 A. Les formes éteintes . . . DS RE LR nee DOI B. Les formes émigrées néons à D ES DE) 4° Altitude du rivage de la mer à Strombes . : : : . . . 924 $ 2. — Les terrasses quaternaires du détroit de Messine . . . . 226 (Terrasses de Gallina, de S. Sperato, de Condora, de S. Francesco, etc, 228. — Age de ces terrasses, 229.) MEPMPINRENUITER ENT ANCACABRE RENE NN SE DU 0 .'o8r S x. — Le Quaternaire sur la côte Tyrrhénienne . . . . . . . ot NS UNduoledelGio EN PR ON RR 252 (Gisement de Palmi, 232.) XVIII SOMMAIRE 20 Le solfe de Gioia et le gisement de Rosarno . . . 233 (Coupe du Sicilien de Rosarno, 233). — La faune de Ho sarno, 234. JOIE et CUUCEOVELEENOE 0 6 SC ULN2 L : : à 2 AoMberrolterderS tEufemia Abe ME PERMET EE EDS 6 boSParCalabre septentrionale M PP EN NE 2: $ >. — Le Quaternaire sur la côte ionienne . . . . . . . . . 238 1° Calabre méridionale. . . . ER nn ir die te I) (Région de Monosterace, 238. ) 20 Région de PO Me ei Me Cr 200 (A. Topographie, 240. — B. Sa abri — C. Faunes, 241). — Conclusions, 242. 3° JaCalabre du Nord Le PE RE RE RENE" (Plaine du Crati). CHAPITRE IV. — LA RÉGION APPULO-GARGANIQUE . . : NS TE $ r. — Les formations quaternaires dans la région de Tarente. : . 249 Historique, 245, — (Généralités, 246.) 1° Indépendance stratigraphique des argiles de Tarente et du niveau à Strombes d'avec la série pliocène. . . . . 247 (Coupe de S. Giorgo, 248. — Coupe de S. Pietro, 249.) °° Existence de plusieurs niveaux dans le Quaternaire de ND Tarente Ne itee PR A OS Gt Ge à INC Niveau de 30 à 35 metres sé: — Niveau de 70 à 80 mètres (argiles de Tarente), 251. — Niveau de 15 à 0 mètres (coupes de « Il Fronte », 253, et de Bagnara, 255). ° Divers facies des couches à Strombes autour du Mare Piccolo 256 Rivage sud du Mare Piccolo, 256. — (« Il Fronte », 257). — Rivage nord du Mare Piccolo, 258. — (Punta della Penna, 259, Turtara, 260, gare de larente, 261.) ° Le Quaternaire dans la plaine de Palagiano, à l’ouest de larente ne, : 262 Niveau de 15 à 20 tes 263. — Nican de 35 inetres, 264. — Niveau de 70 mètres, 269. —\Conclusions, 266 (com- paraison des régions est et ouest de Tarente, oh 90 Etude des faunes . . . 5 268 I. Faune des argiles de Haicute (See) 268. — TL. bre faune du niveau à Strombes (Tufo mazzaro), 269 : 1° les espèces caractéristiques, 270, signification bathy- métrique de cette faune, 272. 60 Résumé; anciennes lignes de rivage dans la région de C ASS Tarente rene RME 0 ‘OO $ 2. — Le Quaternaire dans la jme d’ Die ER oo) 1° La coupe de Gallipoli . . . . SR 5 culo E A À, La faune des argiles (Sicilien , : 275. —— B. La faune SOMMAIRE des grès supérieurs (couches à Strombes), 276. :— Con- clusions, 276. 20 La coupe de Brindisi . à 3° Remarques géo-morphologsiques ; : GET $ 3. — Le Quaternaire du Tavoliere di Puglia et des côtes voisines. (Sicilien de S. Severo, 279.) QUATRIÈME PARTIE LE PLIOCÈNE SUPÉRIEUR ET LE QUATERNAIRE DANS LA MÉDITERRANÉE OCCIDENTALE CHAPITRE I. — L'{raLiE CENTRALE ET SEPTENTRIONALE $ 1. — La côte tyrrhénienne dans la province de Naples Marnes de l’'Epomeo (Ischia), 283. — Gisements d’Ischia à de Pouzzoles (tufs du Pausilippe, masses erratiques du Vésuve), 285, — L'Ile de Capri, 286. S >. — La province de Rome. sa A le 19 Gisement du Monte Mario et sa Sete ae hioue dans la série pliocène. Dee No APT TE Description stratigraphique, 286 (coupe de la Farnesina, 287. — Le Pliocène entre Rome et l'Apennin; ancien rivage, dépressions lacustres, 289). — Lafaune mala- cologique du Monte Mario, 90. — A. Les espèces disparues, 291; B. Les espèces émigrées, 293. — Fossiles autres que les mollusques, 294. 29 Le Quaternaire de la côte au Nord de Rome. (Slratigraphie, 295, facies, 296). — Divers niveaux, 297. — Les faunes quaternaires, 298. — (Gisements de Fontana Matta et de Corneto, 298). — Conclusions, 300. $ 3. — La Toscane. 1° Le Pliocène supérieur dans D Vallée de Doc I. Le gisement de Vallebiaja, 300; la faune de Venere (Galabrien inférieur), 303. — II. Le val d'Arno supé- rieur et les faunes de Mammifères, 304 (dépressions lacustres intra-apennines, 305, coupe du val d’Arno, 306, Relations de la faune villafranchienne avec le Pliocène marin, 307). 2° Le Quaternaire marin des collines livournaises, de la Maremme toscane et de l’Archipel toscan. SUN I. Les collines livournaises, 309; argiles de conne à Cyprina Islandica (Een), 310; Panchina de Livourne (niveau à Strombes), 31°; conclusions, 313. — II. La Maremme toscane, 313. — III. L'archipel toscan (Ile d’Elbe, Pianosa), 315. XIX 277 277 278 286 286 = Le] OT 300 309 xx SOMMAIRE $ 4. — Le Pliocène supérieur de l'Italie du Nord (Plaisancien, Astien, Fossanien, Villafranchien). — Le problème des faunes a CGyprinalJslandica de Emilie M 3777 'CHAPIILRE IL" AurnEs RÉGIONS 0 CU EI NN SES Stat Les/cotes/africaines EEE RER TRS D ; 10 La série pliocène. . . 320 EU Tunisie, 320. — Sahel d Alaces 30 — PonRce d On et & Matoe: 322. — Conclusions, 323. 5 20 Le Quaternaire des côtes eee POELE 324 HA I. Résultats stratigraphiques, 324. — II. Résultats Plon tologiques, 325 : À. Faune des niveaux supérieurs à 103 mètres ; B. Faune du niveau de 103 mètres ; C. Faune du niveau de 60 mètres; D. Faune des niveaux de 31 mètres et de 18 mètres; (Couches à Strombes). — III. Synchronismes avec les formations types de l'Italie méridionale, 328. $-2:=HbLesicôtes 1bériquess MN MENEE ER RS 19 -Le”, PlioOCénE. Lie, AS ER RS MR 520 20 Le Quaternaire. . . PR Re Le D OI Gibraltar, 332. — PONS de tres à Strombes de CéRabic), 332. — Environs de Barcelone (couches à Strombes de S. Juan de Vilasar), 333. S,3.:— Les côtes francaises et SR RE 00 : 1° Le Pliocène. . . A te au ee S MOTOR 00 0 % (Poudingues du Vie 1336). : 20 Le Quaternaire. . . 0567 us A. Rivages de 85 ètre ai de 5. à Go dns, 337. — “ B. Rivages de 28-30 mètres (couches à Strombes), 338. — GC. Rivages de 13 mètres (Grotte du Prince), 339. — Appendice : gisements sous-marins de Banyuls (Sici- « lien), 340. : ë $ 4. — Les Iles Baléares. . . RS D Be LES RAT EN RARE OT #7 10 Les couches à Stromhess LR ES NO ER RE RO x 0e CMarespioucalcaire atelier 03/2 # 3° Les anciennes lignes de rivages; synchronisme avec les 3j autres RÉSIONS, à NET CALE CON NE 7 $ $,5#==Mla Gorsetet la Sardaigne..." "10e ES 0 “ 10 1a Corse... Re D RSR SN ES (Couches à See (?) d'Ajaccio, 346. — Etang de Diane, 347). “1 30" La Sardaigne. 70100 0 OO PERS FA CHAPITRE. Ostréidés, 349. — Anomiidés, 35 CHAPITRE II. CHAPITRE III. — GasrRoPoDEs. CHAPITRE IV. SOMMAIRE CINQUIÈME PARTIE HISTOIRE DES PRINCIPAUX GROUPES DE MOLLUSQUES MARINS PENDANT LE PLIOCÈNE ET LE QUATERNAIRE — LAMELLIBRANCHES AR AR A en ARTE M te T0 1. — Dimyidés, 353. — Spondy- lidés, 353. — Limidés, 356. — Pectinidés, 358. — Aviculidés, 389. — Mytilidés, 388. — Arcidés, 393. — Nuculidés, 399. — Carditidés, 400, — Astartidés, 407. — Kellysellidés, Ery- cinidés, Galéommidés, 410. — Cardiidés, 410. — Chamidés, 421. — Isocardiidés, 424. — Cyprinidés, 424. — Vénéridés, 428. — Pétricolidés, 444. — Ungulinidés, 444. — Donacidés, 445. — Psammobidés, 445. — Solénidés, 446. — Mésodes- matidés, 446. — Mactridés, 446. — Cardiliidés, 449. — Myidés, 449. — Corbulidés, 451. — Glycyméridés, 452. — Gastrochænidés, Pholadidés, Térédinidés. 455. — Luci- — Scrobiculariidés, 463. Pandoridés, Verticor- 64.— Pholado- nidés, 46. — Tellinidés, 459. — Cuspidariidés, Solénomyidés, diidés, Lyonsiidés, 464. — Anatinidés, myidés, 465. — Clavagellidés, 466. — SCAPHOPODES. Opisthobranches, 471. — Pleurotomidés, 474. — Térébri- dés, 477. — Conidés, 478. — Cancellariidés, 481. — Margi- nellidés, 484. — Mitridés, 485. — Fasciolariidés, 489. — Chrysodomidés, 491. — Buccinidés, 496. — Nassidés, 504. — Columbellidés, 516. — Muricidés, 517. — Tritonidés, 523. — Cassididés, 528. — Doliidés, 530. — Cypræidés, 531. — Strombidés, 534. — Chénopidés, 540. — Cérithidés, 544. — Trichotropididés, 548. — Turritellidés, 549. — Cæcidés, 556. — Littorinidés, 556. — Fossaridés, 557. — Solariidés, 557. — Rissoidés, 558. — Capulidés, 558. — Xénophoridés, 560. — Naticidés, 561. — Seguenziidés, 566. — Scalariidés, 566. — Eulimidés, 567. — Pyramidellidés, 568. — Néri- tidés, 569. — Turbinidés, 569. — Trochidés, 573. — Cyclo- strématidés, 579. — Haliotidés, 580. — Ro 580. — Fissurellidés, 580. — Acmæidés, 583.— Patellidés, 583. — BracxioPopes. Craniidés, 586. Rhvadrortéle, 587. — Te ulidés 588. XXI 349 [SL O0 JU XXII SOMMAIRE SIXIÈME PARTIE RÉSUMÉ ÊÉT CONCLUSIONS CHAPITRE I. — La sUCcESsSION DES FAUNES MALACOLOGIQUES RÉCENTES DANS LA MÉDITERRANÉE OCCIDENTALE. 599 $ 1. — La fauné calabrienne. . . D : 55 506% Formes du Pliocène ancien de él la Mediter née avant le Pliocène supérieur, 596. — Formes cala- briennes disparaissant avant le Quaternaire, 598. — Formes d'origine atlantique apparaissant pendant le Calabrien, 599. — Subdivisions du Calabrien, 600. — À. Calabrien inférieur, 600. — B. Calabrien supé- rieur, 6or. $ 2. — La faune sicilienne . DE, 002 1° Formes éteintes du Sicilien ne Palerme Go3. — 2° Formes émigrées du Sicilien de Palerme, 603. — 30 Les formes caractéristiques des autres gisements quaternaires antérieurs aux couches à Strombes, 605. S 3. — La faune des couches à Strombes. A . 605 $ 4. — Conclusions. — Migrations et évolution sur See — Pros vinces palécniooenes AND PEN . 607 Influence des facies, 610. — SAR conchy lose nee Grr. CHAPITRE II. — Les GiSsEmMENTS DE MAMMIFÈRES. 6r2 $ 1. — Gisements à Elephas meridionalis à “Oé) $ 2. — Gisements à ÆElephas antiguus : à » … s .… * 614 SNS MCONCIUSION SN MERE E SR 619 CHAPITRE IIL. — PRINCIPAUX GISEMENTS ET FACIES CLASSÉS STRATIGRAPHI- QUEMENT. . . . 620 $ 1. — Le Calabrien. : 620 1° La limite inférieure de Calabr en Éso 20 Y a-t-1l du Calabrien en dehors de l'Italie méridionale, 622. 3° Les facies, 620, $ 2. — Le Quaternaire ART 625 1° Hautes lignes de rivage Fes nes G27. 20 Le Sicilien (s. str.), ou niveaux de 80-100 mètres, 628. 30 Niveau de 5o-60 mètres, 630. 4° Couches à Strombes : niveaux de 30-35 mètres, et de 15 mètres environ, 631. CHAPITRE IV. — ConcLUSIONS : LES MOUVEMENTS RELATIFS DES TERRES ETADÉS MERS RSS Ne 633 AppeNpice. — Listes des mollusques, brachiopodes et polypiers récoltés dans divers gisements pliocènes et quaternaires de l'Italie . . . 639 SOMMAIRE XXII I. — Fe ancien. 0 . 639 , Altavilla, 639. — », me tot Géo. — 3, Calna Ouest 64. — . arearne 642. — 5, Marchesato, 642. — 6, Strongoli, 642. — 7, Corneto 643. IT. — Calabrien . . 070 8, Girgenti (grès), 643. — 9, Get Galles) 644. — “10, Porto Empedocle, 644.— 11, Terranova di Sicilia, 644. — 12 Brucoli, 645. — 13, Valeo 645. — 14, Nizzeti, 646. — 1 Gravitelli, 646. — 16, Carrubbare, 647.— 17, Gallina Est, 647. — 18, Monte di Botte, 648. — 19, Monte di Pentimele, 648. — 20, Monte Corvo, 648. — 21, Musalà, 649. — 22, S. Giuseppe di Valanidi, 650. — 23, Fiumara dei Macellaï, 651. — 24, Mileto, 651. — 25, Piscopio, 652. — 26, Monosterace, 652. — 27, S. Maria di Catanzaro (niveau inférieur), 653. — 8, S. Maria di Catanzaro (niveau supérieur), 654. — 29, Valle Lamato : Fiumara S. Ippolito, 654. — 30, Valle Lamato : S. Pietro a Maïda, 655. — 31, Valle Lamato, 655. — 32, Cas- trovillari, 655. — 33, Bernalda, 656. — 34, Gravina di Puglia, 656. — 35, Nardd (près Lecce), 657. III. — Duaeneie antésicilien . . ee en 007 36, Cutro (Casa Campanoro), près Cou 658. IV. — Sicilien ou niveau de 80-100 m. . PACS 37, Castellamare del Golfo, 658. — 38. He, É. — 39, Mortelle, 659. — 40, Rosarno, 660, — 41, Gallipoli, 661. V, — Niveau de 50-60 m. . 661 42, Milazzo, 661. — 43, Ce Cle. et Cat Colonne! 66». — 44, Corneto : Casa Fontana Matta, 663. VI. — Couches à Strombes . . . : 6 663 45, Sferracavallo (près ea), 663. — 6, Ravaness et Boyveto (près Reggio), 663. — 47, Tarente, 665. IER MALOCMEMIQUER EEE 7 INDEx ALPHABÉTIQUE des noms de familles, genres et sous-senres, cités ANS ANS EMDALÉTE RE NE MEN PM EEE EE D OR RNGSr INDEX ALPHABÉTIQUE des espèces el variétés figurées. . . . . . . . 69 PLANCHES Prancne [, — Fig. r. — Coupe montrant les modifications de facies dans la série pliocène vers le rivage Nord du Détroit de Catanzaro. Fig. 2. — Coupe théorique montrant la répartition des facies dans le Pliocène de la côte orientale de la Calabre méridionale (région de Gerace-Monosterace). Fig. 3. — Coupe des collines de Gallina, près Reggio. Prancne Il. — Fig. 1. — Coupe de Reggio à Terreti, Fig. 2. — Coupe des terrains pliocène et quaternaire (type appulo-sarganique), dans les environs de Tarente. XXIV PLANCHE PLaANcee PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE PLANCHE SOMMAIRE Fig. 3. — Coupe théorique montrant la constitution du Pliocène dans le détroit des Pouilles. HT. — Fig. 1. — Coupe théorique du bassin de Palerme, montrant la répartition des divers facies du Sicilien. Fig. 2. — Coupe de l’ancienne plaine côtière sicilienne à Altavilla (Est de Palerme). Fig. 3. — Profil des deux terrasses quaternaires marines au Capo Colonne, près Cotrone (Calabre). Fig. 4. — Coupe de Palagianello à la mer, suivant le cours de la Lama di Lenna (Ouest de Tarente). [V. — Fig. 1. — Coupe théorique montrant la répartition des facies dans le Pliocène ancien et récent, entre Rome et la chaîne apennine. Fig. ». — Coupe schématique des collines pliocènes au Sud de Pise (Vallebiaja). Fig. 3. — Coupe transversale du bassin pliocène lacustre du Val d'Arno supérieur. V. — Carte de la Méditerranée occidentale. VI. — Espèces sénégaliennes fossiles dans les couches à Strombes. VIT. — — — VIII. — — — IX. — Espèces septentrionales fossiles dans le Calabrien et le Sicilien. X. — — — XI. — Espèces septentrionales fossiles du Calabrien et du Quater- naire. XII. — Espèces septentrionales du Calabrien et du Sicilien. XIII. — Espèces septentrionales fossiles dans le Calabrien et le Sicilien. XIV. — Espèces éteintes du Pliocène supérieur et du Quaternaire. XV. — Formes éteintes du Pliocène supérieur et du Quaternaire. XVI. — Fossiles divers du Pliocène supérieur et du Quaternaire, OUI = == ee XVIII. — Exemples de variations dans les groupes du Chlamys septemradialus Müll. et de l’Astarie sulcata da Costa. XIX. — Exemples divers de variations et d’adaptations. XX. — Brachiopodes du Pliocène. XXI. --. Strombes miocènes, pliocènes el qualernaires. LES FORMATIONS MARINES PLIOCÈNES ET QUATERNAIRES DE L'ITALIE DU SUD ET DE LA SICILE PREMIÈRE PARTIE GÉNÉRALITÉS CHAPITRE PREMIER INTRODUCTION BUT ET PLAN GÉNÉRAL DE L'OUVRAGE Il n’est peut-être pas de chapitre de la Géologie où les vues d’en- semble soient aussi hasardées que dans le Quaternaire. Cela tient, non pas à ce que nos connaissances sur ce sujet sont moins éten- dues, mais bien plutôt à ce que, plus proches de la réalité, les observations sont plus complexes et se prêtent moins à la synthèse. L'histoire des phénomènes glaciaires dans les Alpes et dans le Nord de l'Europe, celle des faunes de Mammifères, celle des indus- tries humaines, celle enfin des formations marines dans les mers du Nord et dans la Méditerranée, forment autant de chapitres séparés, tous assez bien connus en particulier, mais entre lesquels il est malaisé d'établir des synchronismes. Je me suis donc imposé de ne pas sortir de l’un de ces chapitres, celui qui a trait aux dépôts ma- rins de la Méditerranée ; tout au plus serai-je amené à dire quelques mots des faunes de Mammifères et à essayer de les synchroniser Uxiv. De Lyon — Gicxoux. Le 1 22 INTRODUCTION avec les formations marines. Ce travail est d’ailleurs strictement limité à la Méditerranée occidentale, et s’arrête, vers l'Est, à l'Italie et à la Sicile. D'une manière générale, j'ai supposé connus tous les faits relatifs au Pliocène ancien classique (Plaisancien et Astien), ou plutôt je ne les ai rappelés que dans la mesure où ils m'étaient nécessaires comme point de départ. En particulier, j'ai laissé complètement de côté la question de la limite inférieure du Pliocène, question qui, spécialement pour l'Italie du Sud, demanderait peut-être à être revisée. e Le grand nombre des faits connus m'imposait de les exposer d'une manière synthétique, en indiquant leur place dans un cadre construit d'avance. Aussi, après un court historique, j'ai cru devoir indiquer à quelles méthodes on pouvait avoir recours pour classer les terrains récents étudiés ici. La classification à laquelle je me suis arrêté est ainsi exposée a priori (["° partie) ; elle se trouve ensuite. justifiée a posteriori, au point de vue stratigraphique, par l'étude détaillée de nombreuses coupes locales (IL, III° et 1V* parties) : j'ai commencé ces descriptions locales par l'Italie du Sud : je me suis imposé, en effet, d y revoir personnellement tous les gisements fossi- lifères postérieurs au Pliocène ancien et suffisamment célèbres pour avoir été pris comme points de comparaison dans les études anté- rieures. Il ne pouvait être question, en effet, non seulement de faire beaucoup de découvertes nouvelles, mais même de revoir tout ce qui avait été antérieurement observé : J'ai dû me borner aux localités les plus intéressantes : leur examen m'a permis d’ailleurs de bien inter- préter les descriptions des auteurs pour des régions voisines. C’est ce que J'ai fait aussi pour l'Italie du Nord et pour la côte niçoise. Enfin, à titre de comparaison, j'ai tenu compte des faits connus en- Algérie-Tunisie, aux Baléares et en Espagne. L'étude des faunes malacologiques fait l’objet d’une V° partie. Supposant connues la faune pliocène typique et la faune actuelle, j'ai d’abord étudié les divers groupes de Mollusques dans l'ordre zoologique : cela m'a permis de préciser mieux l’histoire et les affi- nités des diverses espèces, et par suite leur signification stratigra- phique. Ici encore il était impossible d’être complet, et j'ai insisté surtout sur les formes susceptibles de conduire à des résultats inté- ressants. La conclusion naturelle de cette étude (VI® partie) est la jus- BUT ET PLAN GÉNÉRAL DE L'OUVRAGE 3 tification, au point de vue paléontologique, de la classification expo- sée dès le début : ici se place donc un résumé des principaux caractères propres aux trois faunes successives du Calabrien, du Sicilien, et des couches à Strombes, ainsi qu'une revision sommaire des principaux facies et gisements de ces trois étages. J'ai exposé en outre les faits qui permettent un essai de synchronisme de ces for- mations marines avec les faunes continentales de Mammifères. Enfin, dans un dernier chapitre, j'ai examiné les conclusions qui peuvent se dégager de ce travail au point de vue des mouve- menis relatifs des terres et des mers, car Je me suis imposé de n'admettre à ce sujet dans le courant de cette étude aucune hypo- thèse a priori. J'ai rejeté à la fin, dans un appendice, les listes de fossiles recueillis et déterminés par moi-même dans différents gisements : comme on le verra, ces faunes récentes comprennent surtout un nombre immense de formes banales, ne donnant aucune indication strati- graphique : je me suis donc borné à rappeler, dans les descriptions de détail, les espèces caractéristiques de chacun de ces gisements, sans encombrer le texte de toutes les autres. Les listes complètes données à la fin seront néanmoins utiles en donnant une idée du caractère général de ces faunes, et, leur provenance étant bien pré- cisée, elles pourront être consultées pour des recherches ulté- rieures. Nos confrères italiens m'excuseront d'avoir repris à nouveau un sujet qui leur est si familier et qui a été tant de fois traité par eux et avec tant de maîtrise. À défaut de beaucoup d'observations nou- velles, peut-être trouveront-ils dans ce travail quelques idées d’en- semble, inspirées d’ailleurs par l’influence des divers milieux scien- tifiques dans lesquels j'ai vécu. Et je souhaite seulement de voir naître de la discussion de ces idées quelques clartés nouvelles. k HISTORIQUE CHAPITRE II HISTORIQUE Je me bornerai ici à exposer l’état actuel de la question du Plio- cène et du Quaternaire marins dans la Méditerranée occidentale, à résumer sommairement les principales synthèses proposées au sujet de leur classification, et surtout à préciser les méthodes employées et les points de vue auxquels les problèmes ont été jusqu'à présent envisagés par les diverses écoles géologiques. Car il y a à ce sujet des différences essentielles entre les idées des géologues français et italiens. $ 1. — Les travaux des Géologues français. En France, en effet, la question du passage du Pliocène au Quater- naire ne se pose pour ainsi dire pas, si on ne considère que les faunes marines. Le Pliocène français est bien connu depuis les clas- siques travaux de Fontannes, auxquels sont venus s'ajouter, pour la région niçoise, ceux de MM. Depéret et Caziot [88] !. En Algérie, ce même Pliocène a été étudié par tous les géologues algériens (voir spécialement la Réunion de la Société géologique de France en Algérie, B. S. G. F., 3° série, t. XXIV, 1896) et sa faune a été ré- cemment revisée, pour les environs d'Alger, par MM. Dautzenberg et de Lamothe [152]. Partout les sédiments marins de cette époque forment un ensemble bien naturel qu'il n'est venu à l'idée de personne de démembrer?, Puis les premières faunes marines que nous connaissions à la suite de cet ensemble pliocène si homo- gène se présentent dès l’abord avec des caractères tout différents : les espèces y sont presque toutes identiques à celles qui vivent actuellement dans la mer voisine : de plus les formations qui con- tiennent cette faune sont peu épaisses, locales, discontinues, réduites 1! Les chiffres placés entre [| | à la suite des noms d'auteurs indiquent les numé- ros de la liste bibliographique donnée à la fin de cet ouvrage. 2 Voir plus loin toutefois ([Ve partie, chap. 11) les idées émises par certains auteurs sur le Pliocène algérien, TRAVAUX DES GÉOLOGUES FRANCAIS 5 à des lambeaux accrochés le long des côtes sur des terrains plus anciens quelconques. Visiblement il n y à aucun rapport entre ces formations et les sédiments pliocènes si largement et si régulière- ment étalés au fond de nos golfes et pénétrant dans la vallée du Rhône jusque près de Lyon. Tel est le Quaternaire pour les géolo- gues français. Les recherches poursuivies au cours de ces dernières années sur ce Quaternaire français par MM. Depéret et Caziot, de Lamothe, Boule, etc., ont conduit à d'importants résultats à deux points de vue. Dans les couches les plus récentes de ce Quaternaire, ces géo- logues ont montré en effet l'existence d’une faune marine spéciale, caractérisée par diverses espèces habitant actuellement l'Atlantique tropical : c’est la faune dite « à S/rombus bubonius Lmk. », horizon dont j'ai eu moi-même |141] l’occasion de montrer la généralité dans toute la Méditerranée occidentale. D'autre part on y a reconnu les traces de nombreuses lignes de rivage, d’altitudes successivement décroissantes, à partir de 100 mètres environ (côtes françaises) ou de plus de 300 mètres (côtes algériennes) ; MM. Depéret et de Lamothe ont eu l'idée, extrêmement féconde, de mettre en relation ces an- ciennes lignes de rivage avec les terrasses d'alluvions développées dans les vallées continentales! : les beaux travaux du général de Lamothe, relatifs à la liaison mutuelle des terrasses de l'Isser (Algérie) avec d'anciennes plages marines, sont désormais classiques. Ainsi se précisait dans l'histoire du Quaternaire un nouveau point de vue, en quelque sorte topographique ou morphologique. Mais, et c'est là que je veux insister, entre les faunes pliocènes typiques décrites par Fontannes et la faune quaternaire également typique des couches à S{rombus bubonius Lmk., il existait dans les connaissances des géologues français une vaste lacune où manquaient à la fois des données paléontologiques sur l'histoire des faunes ma- rines, et des renseignements stratigraphiques précis sur ces couches intermédiaires. On tentait donc d'utiliser en France les dénomina- tions proposées par les géologues italiens, qui connaissaient depuis longtemps dans leur pays des représentants très fossilifères de ces ! Au sujet du développement progressif de cette notion de « terrasse », voir quelques indications dans : W. Krcran et M. Giexoux, les Formations glaciaires du Bas-Dauphiné {Bulletin des Services de la Carle géologique de France, t. XXI, 1909-1910). 6 HISTORIQUE couches intermédiaires. Les termes de Postpliocène, Sicilien, Qua- ternaire, étaient ainsi employés sans que l’on se fit une idée bien nette de leurs relations stratigraphiques ; et, dans cet ensemble, la limite du Pliocène et du Quaternaire demeurait confuse. _ Au contraire, l'étude des facies continentaux de ces formations limites avait été poussée à un haut degré de précision, au double point de vue paléontologique et topographique. ; Car les gisements de Mammifères sont en France assez nombreux et assez bien connus pour que l’on ait pu présenter plusieurs syn- thèses très salisfaisantes de leur classification. Je me bornerai ici à rappeler celle qui a été exposée récemment par M. Depéret [86]. La succession des faunes de Proboscidiens permet de caractériser d’une façon très simple les horizons paléontologiques successifs reconnus par cet auteur. M. Depéret distingue d’abord une faune pliocène ancienne, contemporaine des sédiments marins de la vallée du Rhône et du Roussillon: elle est caractérisée par la présence du Mastodon arvernensis et l'absence du genre Elephas. L'apparition de ce dernier genre marque ainsi une nouvelle phase, celle du Pho- cène supérieur ou Villafranchien, subdivisé à son tour en Vüillafran- chien (sensu stricto) et Saint-Prestien : dans le premier de ces deux sous-élages, on observe l'association de l'£. meridionalis et du Mastodonte ; dans le Saint-Prestien, le Mastodonte a disparu, et l'E. meridionalis se rencontre seul. Enfin, dans cette classification, le début du Quaternaire est marqué par l’apparition d’autres espèces d'Eléphants, les £. antiquus et E. primigenius. Ainsi ces diverses méthodes, issues de points de vue différents, avaient chacune conduit à des résultats intéressants, mais isolés en quelque sorte les uns des autres. Pour les concilier, 1l était nécessaire de trancher le nœud de la question, c’est-à-dire d'examiner les régions où des facies marins s’observent entre le Pliocène classique et le Quaternaire récent: c'est dans l'Italie du Sud spécialement que ces facies sont déve- loppés et qu'ont été créés les noms d’étages qui leur correspon— dent. TRAVAUX DES GÉOLOGUES ITALIENS 7 $ 2 — Les travaux des géologues italiens. Nous sommes donc amenés à voir comment était comprise la classification des faunes marines récentes en Italie. Ce problème y est posé depuis LyecL : le grand géologue anglais avait remarqué en divers points de l'Italie méridionale (solfe de Naples, Etna, Sicile) des formations qui, par leur facies et la nature de leurs affleurements, rappelaient le Pliocène classique subapennin, mais dont la faune se composait presque uniquement d'espèces encore vivantes : 1l en faisait son Pliocène récent ou « nouveau Plio- cène », réservant le nom de Postpliocène à d’autres couches plus récentes quil ne définit d'ailleurs pas très clairement f. Ces faunes, plus Jeunes que le Pliocène ancien, furent étudiées en Sicile et en Calabre par Philippi [190], dans un ouvrage demeuré célèbre, mais où toute préoccupation stratigraphique est laissée de côté. Cet auteur altira l'attention sur la présence, dans ces faunes, de coquilles habitant aujourd'hui les mers du Nord (par exemple Cyprina islandica) ; ce sont elles que Suess nomma plus tard les « émigrés du Nord » {Nordische Gäste) : entre tous, le riche gisement fossilifère de Palerme devint rapidement célèbre, et, en 1872, Doderlein ? le prenait pour type d'un étage Sicilien. Depuis, ont paru d'innombrables monographies locales, signalées au cours de ce travail. La plupart du temps, la question y est envisagée au seul point de vue paléontologique. Pour déterminer la place d’une formation dans la chronologie, on en étudie la faune avec le plus grand soin. Ayant dressé une liste d'espèces, le plus souvent fort longue, on met à part les formes éteintes et émigrées. Le pourcentage de ces formes donne ainsi un critérium numérique à l’aide duquel on établit avec une rigueur presque mathématique la succession stratigraphique des divers gisements. C’est là, en somme, l'application de la méthode proposée par Lyell pour la chronologie de tous les terrains tertiaires. Il est inutile d'insister ici sur les dangers d’une pareille méthode, qui a d'ailleurs été excellemment critiquée par plusieurs géologues ! Voir par exemple : G. Lxecr, Eléments de Géologie, t. I, p. 306: > Donenzeix (P.). Note illustralive della Carta geologica del Modenese e del Reg- grano, Modena, 1870-1872. Ge 8 HISTORIQUE italiens. Si elle à pu rendre des services pour des comparaisons d'ensemble (par exemple entre Miocène et Pliocène, Pliocène et Qua- ternaire), elle ne saurait être utilisée dans la chronologie de détail, en raison de multiples influences accidentelles (les facies, la plus ou moins grande richesse des gisements, l'appréciation des espèces, etc.). Je me contenterai donc d'examiner ici les deux séries d'ouvrages qui, au cours de ces dernières années, ont eu et mérité la plus grande influence, en Italie comme à l'étranger : ce sont les travaux de G. Seguenza et de C. de Stefani!. Dans ses premières études sur le Pliocène de l'Italie méridionale, G. SEGCTENZA [207] avait adopté une division des dépôts pliocènes et quaternaires en six zones, dont la distinction est assez confuse et ne repose guère que sur des différences de facies. Plus tard dans son classique ouvrage sur la province de Reggio[206|, il a repris la ques- tion d’une manière un peu plus claire : se basant à la fois sur des faits stratigraphiques (concordances et discordances) et paléontologiques . (espèces éteintes ou émigrées) il distingue dans le Pliocène trois divisions correspondant aux étages Zancléen, Astien et Sicilien ; puis vient le Quaternaire, pour lequel il reprend un nom mal défini de Mayer, le Saharien, et qu'il divise en Saharien inférieur etSaharien supérieur. Ces coupures sont de fort inégale valeur, et ont été plus tard critiquées avec beaucoup de justesse par de Stefani [gr] (et avant lui, d'ailleurs, par Fuchs [132-134] et Mantovani | 165 |). Ainsi la discordance que Seguenza prétend exister entre son Zancléen et son Astien est purement imaginaire ; une bonne partie des couches qu'il a considérées comme zancléennes sont même postérieures à des marnes qu'il regardait comme astiennes : il y a donc là, dans l'ou- vrage de Seguenza, si remarquable au point de vue paléontologique, une véritable incohérence stratigraphique. La coupure entre Astien et Sicilien est plus justifiée, tout au moins au point de vue des faunes : elle correspond à peu près à la limite supérieure du Pliocène ancien classique (Plaisancien et Astien). Quant à la distinction du Sicilien et du Saharien inférieur, je n’ai pu réussir à en entre- voir la raison d'être. Reste la coupure que Seguenza a mise entre son 1! Je dois signaler aussi comme particulièrement intéressantes et souvent repro- duites les réflexions suggérées à M. di Stefano par l'étude des dépôts récents de Sciacca et de Gravina [r20, r2r]|. TRAVAUX DES GÉOLOGUES ITALIENS 9 Saharien inférieur et son Saharien supérieur. Celle-ci est justifiée à la fois par la paléontologie et par la stratigraphie, et c’est là une des meilleures pages de l'ouvrage : à propos du gisement de Ravagnese, type du Saharien supérieur, Seguenza fait ressortir nettement son indépendance stratigraphique d'avec toutes les formations plus anciennes et en particulier sa situation bien en contre-bas des sables sahariens inférieurs du plateau de Gallina; en même temps il y reconnait une faune caractérisée par de nombreuses espèces chaudes : c'est là la première indication qui ait été donnée de la faune à Strombes et Suess en a immédiatement souligné l'importance. Quant aux deux cartes géologiques au 1/50.000 qui accompagnent le mémoire de Seguenza, elles sont bien difficilement compréhen- sibles, et cela témoigne du peu de fondement stratigraphique de la classification adoptée par leur auteur. Il revient à M. C. De Srerani d’avoir notablement éclairci cette confusion. L’éminent géologue de Florence a exposé ses idées sur la classification des terrains récents dans plusieurs publications | 100, 101, 104]!. Je n'examinerai ici que la dernière d'entre elles, la plus explicite- d'ailleurs [101]. Là, dans une étude d'ensemble magistrale du Tertiaire supérieur méditerranéen, M. de Stefani a consacré au Pliocène et au Postpliocène des chapitres d’une lecture passionnante, écrits avec une profonde connaissance personnelle de nombreux gisements italiens et des faunes méditerranéennes tertiaires et actuelles : c'est pour notre sujet une œuvre capitale et à laquelle je ferai constamment de nombreux emprunts. La notion fondamentale de M. de Stefani est en effet la distinction du Pliocène et du Postpliocène, notion admise d'ailleurs par la grande majorité des géologues italiens (exception faite de M. Sacco, par exemple ; Cf. Sacco [200|) ; il réserve le nom de Pliocène aux couches contenant les faunes classiques de Plaisance et d’Asti; cette différenciation des faunes plaisancienne et astienne lui parait, avec raison d'ailleurs, due uniquement à l'influence des facies : il se refuse donc à subdiviser le Pliocène ainsi entendu. Au-dessus, vient le Postpliocène, mais ce mot est pris ici dans une acception tout à fait différente de celle de Lyell : la concordance des deux £ Voir aussi ([90], p.9, note 1) la bienveillante discussion que cet auteur a faite des idées émises par moi-même sur la question, : 10 HISTORIQUE classifications peut être, d'après M. de Stefani lui-même, indiquée de la manière suivante : LyeLr DE STEFANI Postpliocène . . . . . . . . . . Postpliocène supérieur. Postpliocène moyen. Postpliocène inférieur. Pliocenersneten ARENA R Pliocene Pliocène récent . Il y a, en effet, entre le Pliocène et le Postpliocène ainsi entendus d'importantes différences paléontologiques : M. de Stefani les a étu- diées en détail et nous y reviendrons à la fin de ce travail ; mais nous pouvons retenir dès maintenant que la plus récente de ces faunes se distingue de la faune pliocène surtout par la disparition définitive d’un grand nombre de groupes de Mollusques, et aussi par l’appa- rition d'espèces « émigrées du Nord ». Comment subdiviser main- tenant cet ensemble « postpliocène » ? M. de Stefani le fait encore à l’aide de critériums exclusivement paléontologiques ; il distingue donc : un Postpliocène inférieur ou étage à Cyprina islandica, où les espèces éteintes sont encore relativement abondantes, tandis qu'on ne trouve que deux émigrés du Nord, Buccinum undatum L. et Cyprina islandica L.; un Postpliocène moyen ou étage à Pecten septemradiatus!, où les espèces éteintes sont plus rares et où le nombre des formes septentrionales est maximum; enfin un Postpliocène supérieur dont l'auteur ne parle guère, mais qui doit vraisemblablement correspondre aux dépôts littoraux ou « panchine » si répandus en Italie et ne contenant plus, la plupart du temps, que des espèces vivant dans la mer voisine. Quant aux couches à faune chaude de Seguenza, M. de Stefani les fait rentrer dans son Postpliocène moyen, car à son avis la présence de ces espèces méridionales n’a aucune valeur stratigra- phique; toutefois, il convient ([9o], loc. cit.) que les « couches à Strombus » de Ravagnese, de Pianosa, de Tarente, lui paraissent un peu plus récentes. : En résumé, et si on veut personnifier chacune des subdivisions 1 Voir plus loin (VIe partie),à propos du Pecten septemradiatus et de la Cyprina islandica, combien il est difficile de les utiliser comme formes caractéristiques d'un étage. TRAVAUX DES GÉOLOGUES ITALIENS il admises par l’auteur au moyen d'un gisement typique, on aura la succession suivante : DE Ravagnese, Tarente. Postpliocène moyen . Palerme. Postpliocène inférieur . . Monte Mario, Vallebiaja. Pliocène, . . . . . . Plaisancien et Astien classiques de l'Italie du Nord. C’est précisément la succession que je suis amené à adopter, Mais M. de Stefani y arrive au moyen de considérations uniquement paléontologiques : or ces considérations, basées sur des nuances très délicates, ne sont applicables que pour des gisements à faune suffisamment riche et bien connue : pour les autres, et c'est le grand nombre, je ne vois vraiment pas pourquoi M. de Stefani leur assigne un âge plutôt qu'un autre. Visiblement, il faut faire intervenir ici des faits de continuité stratigraphique : la connaissance paléontologique si détaillée que nous avons de toutes ces formations récentes demande à être complétée de renseignements sur leurs conditions de gisements et leur relations stratigraphiques mutuelles ; sont-elles concordantes, discordantes, transgressives, régressives, en série continue, emboîtées, etc., etc. ; autant de questions qui se posent et qui nous paraissent d'une importance capitale pour la classification chronologique de ces dépôts. Aiïinsi, l'impression d'ensemble qui se dégage de la lecture des nombreux et beaux travaux des géologues italiens est que les étages distingués par eux sont des entités paléontologiques et non strati- graphiques : ils se réduisent à des listes de fossiles et n’expriment point des stades définis de l'histoire des continents et des mers. 12 PRINCIPES ET MÉTHODES CHAPITRE III PRINCIPES ET MÉTHODES Les changements dans la répartition des terres et des mers, autrement dit les transgressions et les régressions, fournissent en effet des points de repère pour une classification chronologique. L'importance de cette notion a été, récemment encore, hautement mise en lumière dans le Traité de Géologie de M. Haug. Mais elle a surtout, semble-t-il, été appliquée aux terrains plus anciens, qui se prêtaient mieux à la schématisation, puisque toutes les synthèses y restent forcément plus loin de la réalité. Néanmoins, son rôle dans les formations récentes n'est pas moins grand, car elle nous conduit à une autre conception d'importance fondamentale, celle de cycle sédimentaire. $ 1. — Notion de cycle sédimentaire. Supposons qu'un certain point de la surface continentale soit atteint par une transgression marine, et qu'il s'y établisse un régime de sédimentation clastique: cette sédimentation va débuter par un conglomérat de base, souvent peu développé; très vite, la profondeur augmente, et il se dépose des sédiments marneux ou argileux de mer profonde, il y a remblaiement ; ce remblaiement se termine par des couches sableuses, alternant d'abord avec les marnes, puis seules existantes, et devenant de plus en plus gros- sières ; finalement les apports terrigènes prennent un facies de plus en plus littoral et gagnent sur le domaine marin ; les alluvions appor- tées par les fleuves et remaniées par les vagues et les courants littoraux, construisent, dans la région considérée, une vaste plaine côtière dont la surface supérieure vient se raccorder avec celle du niveau de la mer ; tant que ce dernier continue à s'élever, il y a rem- blaiement etles alluvions s'accumulent. Au moment du maximum atteint par ce niveau de la mer, il s'est constitué ainsi par accumu- lation progressive une vaste plaine d’alluvions, dont l'altitude est réglée par cette hauteur maximum du niveau de base, car dès que la régression commence, on entre dans une période d’érosion, CYCLE SÉDIMENTAIRE 13 Et on peut ici appliquer cette loi générale bien connue dont l'expression mathématique est que « toute fonction continue varie peu au voisinage de ses maxima » ; sa traduction plus large dans ce cas est que, à tout maximum d'altitude du niveau de base, correspond une période de stabilité relative de ce même niveau de base. Cette stabilité même favorise, dans les régions où les apports terrigènes sont considérables, la formation et l'extension progressive des plaines alluviales. Bien plus, d’ailleurs, par rapport aux déplacements verticaux de la ligne de rivage, la construction de ces plaines côtières est souvent un phénomène très rapide, presque instantané. Il suffit, pour s’en con- vaincre, d'observer ce qui se passe actuellement : on sait que les célèbres recherches de Suess, puis celles plus récentes de M. Cayeux dans la Méditerranée orientale (voir aussi Merciai [177]) ont mis de plus en plus en évidence la stabilité du niveau de la mer pendant les-temps histo- riques ‘. À cette stabilité (qui n’est en réalité qu'une lenteur extrème) s'oppose au contraire l'extrême rapidité avec laquelle ont progressé, durant les temps historiques, les plaines d’alluvions qui ont remblayé les anciens golfes marins: les exemples du Rhône,du Pô (Cf. Suess, la Face de la Terre), de l'Arno (Cf. de Stefani, Geologia del Monte Pisano ?, et Mer- ciai [177]), sont bien connus. Et cela nous explique pourquoi on retrouve si développés et si fréquents ces restes d’anciennes plaines côtières. Ainsi, depuis le moment où le niveau de la mer s’est élevé au- dessus du point considéré jusqu'à celui où il a commencé à s’abaisser, on a dans la région ce qu'on peut appeler une série de remblaiement, dont les termes successifs, conglomérats de base, argiles, sables, graviers, alluvions de plaine côtière, sont intimement liés les uns aux autres et se succèdent en continuité absolue. On a parcouru la la phase sédimentaire, ou encore, pour parler le langage de M. Haug, la phase de lithogénèse d’un cycle de phénomènes géolo- giques, ou enfin, plus brièvement,un cycle sédimentaire. Dans le cas typique que nous venons de choisir, ce cycle sédimentaire aboutit à la formation d’une vaste étendue d’alluvions, ou ancienne plaine côtière. Mais on peut prendre un autre cas extrême et supposer que la sédimentation clastique soit nulle au point considéré. Alors il ne s y formera que des dépôts zoogènes (mollasses calcaires), qui reste- ront en général de faible épaisseur et surtout ne donneront pas lieu ! IL faut mettre à part, bien entendu, quelques régions volcaniques, telles’ que le golfe de Naples (exemple classique du temple de Sérapis). ? Memorie d. R. Conutato geol, d'Ilalia, vol. INT, 1876. 14 PRINCIPES ET MÉTHODES à la formation de ces plaines côtières si caractéristiques : la notion de cycle sédimentaire perdra alors beaucoup de sa netteté ! et l'his- toire stratigraphique de la région en deviendra beaucoup plus difficile à reconstituer ; tel est le cas, comme nous le verrons, pour la terre d'Otrante et pour l'extrémité Sud-Est de la Sicile au cours du Plio- cène et du Quaternaire. Enfin, cette notion de cycle sédimentaire n’est pas limitée au domaine marin, car toute transgression se répercute le long des thalwegs des grandes vallées; le profil d'équilibre des fleuves doit venir se raccorder constamment à la surface de la mer ; par consé- quent, à une série de remblaiement marine comme celle que nous venons d'étudier doit correspondre dans l’intérieur du continent une série de remblaiement alluviale (voir plus loin, Il° partie, chap. 1v, des exemples de pareilles séries alluviales dans les dépressions intraapennines). Cette influence lointaine de la ligne de rivage jusque dans l’intérieur des continents a été très heureusement exprimée par le mot de « niveau de base » (voir par exemple les travaux du Général de Lamothe). $ 2. — Succession de plusieurs cycles sédimentaires. Aïnsi, à une transgression aboutissant à une altitude maximum du niveau de base N,, correspond une série sédimentaire S, ; sup- posons maintenant qu'après la régression consécutive à ce maximum survienne une autre transgression aboutissant à un nouveau maxi- mum N,: on aura une nouvelle série sédimentaire S,. Deux cas peuvent alors se présenter : si N, est plus grand que N,, les dépôts de la sérieS, seront, en quelque sorte, noyés par le remblaiement de la série S,, sous laquelle ils disparaîtront ; il faudra des circonstances exceptionnelles pour qu’on puisse retrouver les traces de l’existence de S, ; en particulier, les traits les plus caractéristiques des séries de remblaiement, à savoir les restes des plaines côtières correspondant au niveau N,, seront noyés sous celles auxquelles le niveau N, aura donné naissance. Ainsi on peut poser en principe que tout nouveau maximum du niveau de base tendra à effacer les traces des maxima précédents inférieurs. 1 D'autant plus que dans de télles régions calcairés manqueront en général les grands fleuves côtiers et s’atténueront par suite les phénoménes d’érosion séparant les cycles sédimentaires successifs. CYCLE SÉDIMENTAIRE 15 Au contraire, si N, est plus petit que N,, les sédiments de la série S, viendront se déposer en contre-bas de ceux de la série S, ; ils en seront séparés en général par un ravinement et leur seront accolés et non superposés ; et surtout les plaines côtières correspondant à ces deux niveaux successifs seront nettement distinctes, la plus ancienne restant la plus élevée ; c’est l” « emboitement » des séries sédimentaires marines ; un tel emboiïtement se retrouve dans les séries sédimentaires alluviales, où 1l donne lieu au phénomène des terrasses fluviatiles, correspondant aux terrasses marines. En résumé, on voit que « tous les cycles sédimentaires dont on peut retrouver le plus nettement des traces, correspondent forcément à des maxima régulièrement décroissants du niveau de base. » Divers auteurs, par exemple MM. de Lamothe [155] et M. Boule ([24|, p. 154, fig. 18) ont essayé récemment de traduire par des courbes les variations d'altitude du niveau de base dans des régions déterminées : portant en abscisses les temps et en ordonnées les altitudes, ils ont obtenu des courbes à allure oscillatoire, mais dont les sinuosités dimi- nuent peu à peu et régulièrement d'amplitude à mesure qu'on se rap- proche de l'époque actuelle : cette dernière serait donc dans l’histoire de la terre un point singulier, jouissant de propriétés particulières. Bien entendu, rien ne nous autorise à croire à une pareille singularité : le moment présent est un stade quelconque de l’évolution géologique. Les considérations précédentes nous permettent de voir comment cette sin- gularité n’est qu'une apparence due à ce que, parmi les sinuosités irré- gulières et alternativement plus grandes et plus petites de la courbe réelle, nous ne voyons plus que celles qui peuvent se disposer dans un ordre régulièrement décroissant. Altitude de la digne derivage. FiG. 1. — Diagramme schématique des oscillations de la ligne de rivage depuis le Plivcène. (La courbe en traits pleins, irrégulière, représente l'allure probable, réelle, du phéno- mène ; la courbe en pointillé, avec maxima régulièrement décroissants, traduit les résultats visibles tels qu'ils ont été interprétés par MM. de Lamothe et M. Boule). 16 PRINCIPES ET MÉTHODES $ 3. — Relativité de la notion de cycle sédimentaire. Les transgressions et régressions récentes que nous aurons à étudier ici n'ont souvent affecté que des zones continentales très voisines des rivages actuels. Il est extrêmement probable que, sous la Médi- terranée, au large des côtes, existent de vastes étendues de fonds sous-marins où la sédimentation est depuis longtemps ininterrom- pue, tout au moins depuis le début du Pliocène. De même, à l'opposé, dans les parties les plus hautes des massifs montagneux, beaucoup de régions étendues sont en proie depuis longtemps aux seules forces érosives sans que les remblaiements remontant par les vallées aient pu les atteindre !. Les unes comme les autres sont restées indiffé- rentes aux variations du niveau de base. Ainsi, ces variations, et les diverses séries sédimentaires qui en résultent, ne sont individua- lisées que dans une zone relativement étroite, domaine des incursions et régressions marines récentes ; aussi bien, cela nous importe peu, puisque toutes les formations que nous nous proposons d'étudier et de classer sont localisées dans cette zone. Mais je tenais à attirer l'attention sur cette relativité de la notion de cycle sédimentaire, de manière à en apercevoir la valeur exacte dans l’ensemble de l’his- toire géologique. Il faut se garder en effet de l’idée qui consisterait à considérer les phénomènes de cycles sédimentaires successifs, de terrasses marines ou alluviales emboîtées, comme spéciaux aux époques géologiques les plus récentes ; cette idée a laissé des traces dans la nomenclature géologique : M. Sacco a proposé l'étage « {er- raziano » et M. de Lamothe a parlé de la « période des lignes de rivage ». Ces expressions sont louables en ce qu’elles précisent bien le point de vue auquel nous avons avantage à nous placer pour l’étude des périodes récentes. Mais, évidemment, on pourrait, en théorie, se placer au même point de vue pour des périodes bien antérieures. C’est ainsi que le Miocène, par exemple, dans beaucoup de régions méditerranéennes, paraît correspondre à un seul immense cycle’ sédimentaire ; sur le bord de cette mer miocène ont dû se pro- duire les mêmes phénomènes d’alluvions « terraziane » et de « lignes de rivage » que nous étudions avec tant de détails pour les mers ! Je ne parle pas, bien entendu, des dépressions fermées, qui out chacune leur niveau de base propre. CYCLE SÉDIMENTAIRE 17 quaternaires. Mais les traces de ces phénomènes au Miocène ne sont ni aussi souvent observables, ni aussi intéressantes ; nous n’en rete- nons plus que les résul{antes générales. De même pour le Pliocène. Ainsi, quand on passe à l'étude du Quaternaire, on change, en quelque sorte, l'échelle des observations et on fait, pour ainsi dire, de la stratigraphie microscopique. Les phénomènes étudiés ne sont pas différents, mais seulement le grossissement sous lequel on les observe. $S 4. — Application à la classification chronologique: continuité et discontinuité, Cette notion de cycle sédimentaire est d’un intérêt capital pour la classification géologique ; chaque série de remblaiement déposée au cours d’un de ces cycles constitue en effet une véritable unité stra- tigraphique. L'importance de cette unité stratigraphique dépend évidemment de l’étendue de la région affectée par les phénomènes de transgression et régression qui définissent le cycle. M. Haug { Traité de Géologie) a récemment montré quel parti on pouvait tirer de ces considérations pour l'établissement des grandes divisions de la série géologique ; par l'étude des cycles sédimentaires dans les régions d’ « aires continentales », on arrive à des principes de clas- sification purement stratisraphiques. Evidemment, les déplacements de lignes de rivage que nous étu- dions au Pliocène et au Quaternaire n’ont rien de commun avec la transgression du Crétacé supérieur, par exemple; il ne saurait être encore question pour nous de distinguer des géosynelinaux et des aires continentales. Mais la notion de cycle sédimentaire n’en reste pas moins essen- tielle. Quelle que soit l'hypothèse que l’on fasse sur la cause et sur la plus ou moins grande généralité de ces mouvements relatifs des terres et des mers, la considération des cycles sédimentaires succes- sifs nous conduit à préciser les coupures stratigraphiques. A chaque cycle correspond, dans une région donnée, une ligne de rivage d’al- titude maximum, c'est-à-dire un certain stade de l’évolution géogra- phique. Les travaux de M. Depéret pour les côtes françaises, et du général de Lamothe pour les côtes africaines, ont déjà vulgarisé cette idée de lignes de rivage successives et montré qu’elle était la base de toute classification chronologique des dépôts récents. Dans l'Italie du Univ. pe Lyon. — Gicnoux 2 ENT ENT (0 18 PRINCIPES ET MÉTHODES Sud, où la sédimentation clastique a été plus abondante, on a de véritables séries de remblaiement, et leur considération permet d'échapper à des erreurs grossières en évitant de synchroniser des dépôts qui appartiennent à des séries différentes. Ainsi apparaît la nécessité de préciser les relations stratigraphiques des formations récentes, ce qui n’a peut-être pas toujours été fait. Pour en donner un exemple, quand nous voyons les argiles et les couches à Strombes de Tarente (cf. plus loin, 3° partie, chapitre 1v) reposer direc- tement, soit sur le crétacé, soit sur les mollasses de la base du Pliocène, nous en concluons nécessairement qu'elles appartiennent à une série de remblaiement distincte de la série pliocène, et qu'elles sont, par suite, bien postérieures aux argiles de Gravina intercalées dans cette série pliocène, et auxquelles on les a souvent comparées. C'est par des considé- rations analogues de continuité et de discontinuité dans les séries strati- s graphiques que Fontannes a été amené à reconnaître l'individualité du Pliocène de la vallée du Rhône et à le distinguer du Miocène. En résumé, et en dehors de toute idée théorique, la succession des cycles sédimentaires dans une région déterminée permet d'y établir la chronologie des sédiments récents. $ 5. — Le point de vue paléontologique et les espèces caractéristiques. La méthode précédente ne nous permet pas, si on ne veut pas faire d'hypothèse 2 priori sur la généralité des oscillations de la ligne de rivage, de synchroniser les formations développées dans des régions trop distantes pour qu’on puisse suivre les couches de l’une à l’autre par continuité. On peut alors faire appel à l'étude des faunes. La manière dont on doit étudier les faunes récentes a été excel- lemment décrite par de Stefani. On dispose, pour une telle étude, de deux points de comparaison bien définis : d’une part, la faune plio- cène ancienne typique (Plaisancien et Astien du Piémont, de la vallée du Rhône, d'Algérie, etc.); d'autre part, la faune actuelle de la Méditerranée. Je supposerai ces faunes connues, et il ne me res- tera plus qu’à indiquer comment se fait le passage de l’une à l'autre. Tout d’abord, il est bien certain que l'immense majorité des espèces méditerranéennes actuelles se rencontrent déjà dans la POINT DE VUE PALÉONTOLOGIQUE 19 Méditerranée du Pliocène ancien, sans que l’on puisse voir de diffé- rences bien constantes (non dues à des adaptations à des facies divers) entre la forme ancienne et la forme nouvelle. De telles espèces sont absolument dénuées d'intérêt au point de vue stratigra- - phique : je les appellerai espèces banales. Naturellement, elles con- sutuent, presque à elles seules, les longues listes de coquilles (par exemple plusieurs centaines) que fournissent la plupart des gise- ments que nous étudions. Par leur abondance, elles ont l’inconvé- mient de « noyer », en quelque sorte, les rares espèces caractéris- tiques !. Aussi, dans les descriptions locales que j'ai consacrées à tous ces gisements récents, je n'ai retenu absolument que les formes caractéristiques, et c'est pour mémoire seulement que j’ai rapporté à la fin de ce travail (en appendice) la liste complète de toutes les espèces recueillies par moi. Néanmoins, la considération de ces espèces banales demeure extrêmement intéressante au point de vue des facies et de la bathymétrie. Une première catégorie d'espèces caractéristiques doit être fournie, a priori, par les formes qui se sont modifiées sur place entre le Pliocène ancien et l’époque actuelle. Mais de telles « mutations » sont extrêmement difficiles à utiliser en stratigraphie. M. de Stefani, qui connaît à fond les faunes récentes, n’a guère pu en citer [101 qu'une dizaine; et encore, comme nous le verrons, sont-elles plus apparentes que réelles, dues, par exemple, à des adaptations à des profondeurs diverses, ou encore au développement plus grand de rameaux latéraux existant dès le Pliocène ancien à l’état rudimen- taire. D’autres exemples de ces mutations seront donnés dans la - V° partie. Mais en somme, les « critériums » ainsi obtenus et qui pourraient en théorie servir à la succession d’une série de zones paléontologiques sont d’un emploi très délicat en pratique. Une deuxième catégorie est formée par les espèces qui ont disparu de nos mers depuis le Pliocène ancien, soit qu'elles aient continué à vivre ailleurs (et en particulier dans l'Atlantique subtropical, comme cest le cas général), soit qu’elles aient totalement disparu. Ces espèces sont extrêmement nombreuses et nous serviront d’abord à 1 Aïnsi les auteurs qui ont publié la plus récente monographie sur les dépôts quaternaires de Tarente, aprés avoir apporté tous leurs soins à l'établissement d’une longue liste de ces formes banales, se bornent à citer le Sfrombus bubonius comme Sfrombus Sp. sans paraître y attacher aucune importance. 20 PRINCIPES ET MÉTHODES caractériser le Pliocène ancien par rapport aux faunes plus récentes; car dès la fin de ce Pliocène ancien on assiste à la disparition d’un grand nombre de ces formes, que j’appellerai, pour abréger, espèces éteintes ou disparues; ce grand fait paléontologique a amené les géologues italiens à établir ainsi une coupure entre Pliocène et « Postpliocène » (sensu de Stefani) et cette coupure est assez nette pour que, pour la plupart des gisements, leur attribution au Pliocène ou au « Postpliocène » puisse se faire facilement, par des considéra- tions uniquement paléontologiques. De plus, ces formations postplio- cènes accusent, elles aussi, une disparition progressive de celles des espèces éteintes qui ont continué à y vivre; il est donc possible d'éta- blir une hiérarchie dans ce « Postpliocène » : ainsi, M. de Stefani y a depuis longtemps distingué deux types successifs, l’un repré- senté à peu près par le gisement du Monte Mario, l’autre, plus pauvre en formes disparues, par le gisement de Palerme. On a ainsi un premier ensemble de faits qui nous permettent de classer chronologiquement les dépôts que nous étudions, les plus récents d’entre eux étant distingués des plus anciens par des carac- tères négatifs par rapport à ces derniers. Venons-en maintenant aux caractères positifs. Ils nous seront fournis par des espèces qui n’existaient pas au Pliocène ancien dans notre mer et qui y sont apparues depuis. Ces formes, sans racine dans les faunes antérieures de la Méditerranée, méritent donc le nom d'espèces immigrées. Il semble qu'un assez petit nombre de ces espèces immigrées aient continué de vivre jusque dans la faune actuelle. Pour la plupart, elles n’ont fait dans la Méditerranée qu'une assez courte apparition, et elles ne se trouvent plus vivantes aujour- : d’hui que dans l'Atlantique Nord ou, au contraire, dans l'Atlantique tropical, méritant ainsi la qualification d'espèces émigrées : ce seront donc, soit des émigrés du Nord, les « nordische Gäste » de Suess, soit des émigrés du Sud, déjà reconnus par Seguenza, et signalés à sa suite par Suess. Bien entendu, il ne faut pas se méprendre sur la valeur absolue de ces qualificatifs : l'absence de racines, pour une forme, dans les faunes pliocènes anciennes, son extinction dans la Méditerranée actuelle, sont des faits en quelque sorte négatifs qui peuvent être infirmés d’un jour à l’autre par des découvertes ulté- rieures. On trouvera peut-être que je leur ai attribué une trop grande valeur : mais j'estime que se refuser à en tenir compte, c'est CLASSIFICATION DU PLIOCÈNE ET DU QUATERNAIRE 21 se condamner à ne pas tirer profit des données paléontologiques. Les considérations synthétiques ne sont possibles qu'en prenant pour base l’ensemble des faits actuellement connus : il reste bien entendu qu'elles devront être modifiées dans la mesure où l'exige- ront les observations ultérieures. $ 6. — Conclusion: essai d’une classifieation du Pliocène et du Quaternaire. Prenons donc comme point de départ le Pliocène classique des collines subapennines de l'Italie du Nord. Les géologues ont l’habi- tude de le subdiviser en un étage inférieur ou Plaisancien, ayant pour type les argiles bleues de la région de Plaisance, et un étage supérieur ou Asfien, représenté par les sables jaunes de l’Astésan. Cette classification est justifiée par le fait que, dans la plupart des bassins pliocènes méditerranéens, on observe en effet la superposi- tion de sables jaunes à des argiles bleues. Mais en réalité, la diffé- renciation des faunes plaisancienne et astienne est due uniquement à une question de facies, comme l’a montré depuis longtemps M. de Stefani. Néanmoins, on ne peut, avec cet auteur, rejeter complète- ment ces deux dénominations classiques; leur emploi reste justifié dans une foule de régions, quitte à employer pour celles où une telle distinction n'est pas possible, le nom unique de Pliocène ancien. Cette succession de sables à des argiles, si générale dans le Pliocène ancien, nous indique que nous avons là le début d'une série de remblaiement, d’un cycle sédimentaire, qui, nécessairement, doit se terminer par des alluvions continentales. C’est ce cycle qui sera pour nous le système pliocène : nous verrons d’ailleurs que notre définition n'est pas purement conventionnelle, et qu’elle con- corde en particulier très bien avec ce que nous savons des faunes marines et des faunes de mammifères. En tout cas, elle a l’avan- tage d’être précise : les longues discussions qui ont agité quelques géologues à propos de la limite du Pliocène et du Quaternaire me paraissent fort avoir manqué de base puisqu'aucun d'eux n'avait formulé une définition nette et précise de cette limite. Dans beaucoup de régions de la Méditerranée, on ne connaît pont, dans cette série pliocène ainsi définie, d’autres faunes marines que les faunes plaisancienne et astienne : tel est le cas en France, dans le 22 PRINCIPES ET MÉTHODES Piémont, probablement aussi en Algérie eten Espagne. Dans beau- coup de ces pays on retrouve avec facilité les couches qui ont mis fin au remblaiement pliocène : ce sont les alluvions villafran- chiennes de Pareto, intimement liées par leur base à l'Astien marin. Dans l'Italie Centrale et l'Italie du Sud, au contraire, les facies marins ne s'arrêtent point, dans la série pliocène, avec l’Astien; au-dessus de ce dernier et en continuité parfaite, on trouve encore des couches marines dont la faune est différente; les espèces éteintes y sont en bien moins grand nombre que dans 1e Pliocène ancien ; en même temps apparaissent quelques émigrés du Nord; ce ae de la faune correspond à peu près à ce que M. de Stefani a nommé son Postpliocène inférieur ; enfin, la série se termine par un équiva- lent très réduit des alluvions villafranchiennes. Ainsi, la série pliocène, unité au point de vue stratigraphique, doit être au point de vue paléontologique subdivisée en un Pliocène ancien, Plaisan- cien et Astien, et en un Pliocène supérieur pour lequel j'ai proposé [140, 144] le nom de Calabrien. Les coupes Les plus importantes servant à définir ce Calabrien sont celle des collines toscanes à Vallebiaja, celle du Monte Mario, près de Rome, et surtout celles de Calabre (Gravina di Puglia, détroit de Catanzaro, environs de Messine et de Reggio); on les trouvera décrites en détail plus loin et on verra pour chacune d’elles se répéter la série que je viens d'indiquer schématiquement. La fin du Calabrien correspond donc partout à un puissant rem- blaiement, au cours duquel se sont formées de vastes plaines côtières dans l'Italie du Sud, d'immenses plateaux alluviaux en France et dans l'Italie du Nord : ces constructions topographiques ont d’ail- leurs été plus ou moins morcelées par les érosions ultérieures. En tout cas, ce grand remblaiement, le plus ancien dont nous ayions à nous occuper ici, correspond par suite, partout au moins où nous pouvons en retrouver les traces, à la ligne de rivage la plus élevée. Les cycles sédimentaires qui ont suivi se trouvent donc dans ces régions en contre-bas de la série pliocène; nous conviendrons de les attribuer au Quaternaire. L'examen de toutes les coupes étudiées plus loin fournit autant d'exemples de cètte indépendance du Pliocène et du Quaternaire (voir par exemple les coupes de Tarente, de Ravagnese, etc), Des divisions au sein de ce Quaternaire sont “ah CLASSIFICATION DU PLIOCÈNE ET DU QUATERNAIRE 23 encore possibles à un point de vue uniquement’stratigraphique, si on se borne à une même région : car chaque cycle sédimen- taire pourra à son tour jouer le rôle d'unité stratigraphique que l’on pourra dénommer d’après l'altitude de la‘ligne de rivage cor- respondante dans la région considérée. On aura ainsi une série de niveaux, de plus en plus bas à mesure qu'ils seront plus récents, et auxquels nous pourrons rapporter tous les dépôts observés : il s’en- suivra une classification chronologique rigoureuse de ces dépôts. A de pareilles synthèses sont arrivés M. Depéret pour les côtes fran- çaises, le général de Lamothe pour les côtes algériennes ; et leurs travaux peuvent être cités comme des modèles de ce genre de recherches. Le grand avantage de cette méthode est de conduire à une stratigraphie exacte d'une région déterminée. La figure ci-dessous les données précédentes, dédie d'un point de vue purement stratigraphique : elle nous montre, théoriquement, la répartition des facies dans un cycle sédimentaire et la succession de plusieurs de ces cycles. Série pliocene Quaternaire Jurface de remblaiement ancien récent = tuell cluelle Plaisancter= 7 8 ee — ERREP PR PPTTEETT DETTE Joclé prépliocéne Es Argiles. EE Argiles sableuses Graviers el conglomérals. el sables. F1c. 2. — Constitution théorique de la série sédimentaire pliocène et des cycles quaternaires. Reste maintenant à synchroniser les divisions ainsi obtenues dans des régions différentes. Comme il n’y a pas, la plupart du temps, de continuité entre les formations de deux régions tant soit peu éloi- œnées, on est obligé d’avoir recours, soit à des considérations théo- riques, soit à la paléontologie. Au premier parti s’est arrêté le général de Lamothe : ses études lui ont fait retrouver, en divers points de la Méditerranée, toujours la même succession de lignes de rivage aux mêmes altitudes : il les attribue done à des mouvements d'ensemble du niveau de la mer (mouvements eustatiques), les continents étant supposés immobiles : dans ces conditions, le problème des synchronismes est entièrement résolu; les lignes de rivage situées à une même altitude seront par- 24 PRINCIPES ET MÉTHODES tout rigoureusement contemporaines. Cette théorie semble au pre- mier abord s’adapter assez bien à l'ensemble des faits connus, mais ce serait, me semble-t-il, faire une pétition de principe que de s’en servir pour établir un synchronisme rigoureux à distance, puisque la théorie n’est elle-même que l'expression de ce synchronisme. Nous reviendrons plus loin sur la part de vérité qu’elle renferme. Essayons alors de recourir à la paléontologie ; évidemment, les syn- chronismes que nous obtiendrons ainsi ne pourront pas être poussés jusque dans les détails, car nous n'aurons entre les faunes les plus anciennes et les plus récentes que des différences à peine percepti- bles; toutefois, cette méthode aura l’avantage de nous donner des indications d'ensemble bien sûres, en dehors de toute hypothèse : ce sera, si ] ose ainsi parler, commencer par calculer les unités avant de calculer la dixième décimale. On remarquera alors que les plus anciennes de ces faunes quater- naires, celles qui dans chaque région correspondent aux lignes de rivage les plusélevées, gardent encore d’étroites affinités avec la faune calabrienne : il y demeure encore un certain nombre de formes dis- parues ; en outre, c’est là que se rencontrent en plus grand nombre les espèces « émigrées du Nord » que nous avons vues commencer à apparaître dans le Calabrien ; la plus typique de ces faunes du Quaternaire ancien est celle de Palerme, pour laquelle Doderlein a proposé le nom d'étage Sicilien! que l'on doit donc adopter. Il n’y a d'ailleurs entre les faunes sicilienne et calabrienne que des diffé- rences souvent insignifiantes, surtout si on s'adresse aux faunes du Calabrien supérieur, comme nous le verrons. Ainsi, la coupure entre Pliocène et Quaternaire est plutôt d'ordre stratigraphique que palé- ontologique. Les faunes quaternaires les plus récentes, correspondant aux lignes de rivage les plus basses (en général au plus à 35 mètres d’al- titude) ont une individualité bien marquée : les formes éteintes ont passé à l'état d’insignes raretés ; il n’y a plus de véritables émigrés du Nord ; mais, par contre, apparaissent un certain nombre d'espèces émigrées du Sud, dont la plus célèbre et la plus commune est le Strombus bubonius Lmk.; aussi donnerons-nous le nom de couches à Strombes aux formations renfermant cette faune spéciale. ! C'est aussile Frigidien de M. de Gregorio{78], le Palermitain de Brugnone [26), etc. CLASSIFICATION DU PLIOCÈNE ET DU QUATERNAIRE 25 Sicélien . Quches à Strombes ee Me) sue loi Mer actuelle DUO CO JO LCNS C0 SOMNOEO OU 0 0 CrOtOWNo WE LEON CONTE EDIT D'PLCRO NO 020 MC CIO EDIT ID OPTION CAO :: Espèces éleintes. La densité des figurés est pro- È Espèces septentrionales. portionnelle à l'abondance des espèces caractéristiques. Espèces méridionales. FiG. 3. — Schéma indiquant la répartition des espèces caractéristiques dans les diverses zones du Pliocène et du Quaternaire, I1 faut bien remarquer d’ailleurs qu’un grand nombre de gise- ments ne renferment pas suffisamment de formes caractéristiques pour reconnaitre nettement s'ils appartiennent au Calabrien, au Sicilien ou aux couches à Strombes ; pour ces gisements, nous en serons réduits à tenir compte de leurs caractères stratigraphiques : l'altitude de la ligne de rivage à laquelle ils correspondent nous per- mettra tout au moins de nous faire une idée de leur âge. Telle est la façon dont j'ai été amené à concevoir la stratigraphie du Pliocène et du Quaternaire : elle sera justifiée seulement après l'étude de nombreuses coupes locales ; mais j'ai cru bon de l'exposer au début pour qu'elle serve d'orientation dans la suite. , La classification que J'ai adoptée et ses rapports avec celle de M. de Stefani, admise par la plupart des géologues italiens, peuvent donc s'exprimer ainsi : Facies marins. Facies continentaux. Classification Classification adoptée ici. de C. de Stefani. CŒuehes à Strombes ne ARE Quaternaire, Quaternaire. Postpliocène. . SICITENS EE | Calabrien . . . . Pliocènerécent. Villafranchien. ne Astien ; mr : ’ Pliocène à £ Pliocène ancien, Levantin. Plaisancien . : J'ajouterai que, dans ce tableau, la principale coupure stratigra- phique se trouve entre le Calabrien et le Sicilien, tandis que la plus importante différence faunique se place dans l’ensemble entre le Pliocène ancien et le Pliocène récent, DEUXIÈME PARTIE DESCRIPTION RÉGIONALE DÉTAILLÉE DE LA SÉRIE PLIOCÈNE DANS L'ITALIE DU SUD RÉPARTITION DES SÉDIMENTS PLIOCÈNES EN CALABRE Pour orienter notre étude détaillée, il ne sera pas inutile de résumer ici en quelques mots comment on doit comprendre la répar- tition des terrains pliocènes en Calabre. La division en régions naturelles que nous obtiendrons ainsi servira de cadre à notre enquête, On pourra à ce sujet se rapporter aux nombreuses études d'en- semble sur la péninsule calabraise : je citerai en particulier la rapide et magnifique synthèse de Suess, et surtout l'excellente description générale due à l'ingénieur Cortese [51], accompagnée de la très belle carte au 1/500.000° publiée par le R. Ufficio Geologico (voir aussi la carte schématique hors texte dans le présent ouvrage). Les grandes falaises calcaires qui dominent la basse vallée du Crati entre le cap Bonifati près Cetraro, sur la côte tyrrhénienne, et la région de Trebisacce sur la mer Ilonienne, en passant par Castrovillari, forment un rempart continu, frontière naturelle géolo- gique autant que topographique entre la Calabre et le reste de la péninsule italienne. Car, au Sud de ces massifs calcaires qui dépendent encore de l’Apennin secondaire, commencent à apparaître les massifs anciens qui vont se continuer jusqu à l'extrémité Nord- Est de la Sicile. Ce sont, au Nord, la chaîne côtière tyrrhénienne et la Sila, séparées par la profonde coupure de la vallée du Crati qui coule à peu près Nord-Sud avant de tourner à l'Est au pied des der- nières falaises calcaires de l'Apennin. Puis vient, au Sud, une zone 28 PLIOCÈNE DE LA CALABRE déprimée qui sépare la « Calabria citeriore » de la « Calabria ulte- riore » : c’est l'isthme de Catanzaro, par lequel le chemin de fer a pu faire communiquer les deux versants ionien et tyrrhénien de la Calabre, par ailleurs si isolés l’un de l’autre. Enfin, au Sud de cet isthme de Catanzaro s'élèvent, encore trois massifs cristallins: à l'Est celui du Capo Vatficano, commandé par la ville culminante de Monteleone et faisant face aux Lipari : à l'Ouest, séparée du Capo Vaticano par la grande plaine du golfe de Gioia et la coupure du fleuve Mesima, s'étend une longue crête dans laquelle un ensellement transversal permet de distinguer, au Nord, la Serra (ou Jejo de C. de Stefani) et, au Sud, l’Aspromonte (Montalto). La constitution géologique détaillée de ces divers massifs ne nous importe en aucune manière : car n'ayant point à examiner la ques- tion de la limite inférieure du Pliocène, tous les terrains plus anciens que le Pliocène seront pour nous des masses inertes sur lesquelles la transgression pliocène a ramené une nouvelle vie géologique. Même à son maximum, cette transgression n’a point recouvert la plupart des massifs anciens : de sorte que les sédiments accumulés au cours du remblaiement pliocère se trouvent répartis, soit en bordures ceinturant ces massifs, soit en bassins séparant deux d’entre eux: tous ces bassins de la mer Pliocène communiquaient plus ou moins largement entre eux, mais ils pourront néanmoins _ fournir à notre étude des divisions fort naturelles. 1° Ainsi, commençant par le Nord, nous trouvons un premier bassin pliocène dans la vallée du Crati: largement ouvert au Nord entre Castrovillari et Rossano, ce golfe du Crati allait en se rétré- cissant vers l’amont et il semble avoir été toujours fermé vers le Sud.— 2° Une bande continue de sédiments pliocènes entoure à l'Est le massif de la Sila : cette bande subit un élargissement notable dans le Marchesato, c’est-à-dire dans la région de Cotrone, S. Severina, et là elle projette dans la mer lonienne une péninsule trapézoïdale dont les deux pointes avancées sont le Capo Colonne et le Capo Rizzuto. Se rejoignant au Nord avec le golfe de Castrovillari, cette bande nous amène au Sud à l'entrée de l’isthme de Catanzaro, —- 3° Car la mer Pliocène occupait toute la région dépriméecompriseentre le golfe de S. Eufemia et le golfe de Squillace, formant ce que nous appellerons le détroit de Catanzaro. — 4° Sur le versant Est de la Calabre méridionale, le Pliocène forme également une bande étroite DÉTROIT DE CATANZARO 29 qui, se recourbant vers le Sud tout autour de l'Aspromonte, se continue sur la côte calabraise du détroit de Messine ; en un seul point cette bande s’élargit, et dans les plateaux au-dessus de Gerace, des témoins de sédiments pliocènes nous attestent que la mer avait franchi là la ligne de partage et séparait l’Aspromonte de la Serra. — 5° Enfin la mer Pliocène pénétrait dans le golfe de (rioia et s’enga- geait au Nord dans la vallée du Mesima : elle rejoignait ainsi l'entrée du détroit de Catanzaro et recouvrait d’ailleurs en grande partie les plateaux culminants du Capo Vaticano. Ainsi: bassin du Crati, versant oriental de la Sila, détroit de Catanzaro, côte ionienne de la Calabre méridionale, détroit de Messine, golfe de Gioia, vallée du Mesima, telles sont les régions dans lesquelles nous allons examiner avec détail la coupe de la série pliocène. CHAPITRE PREMIER LA CALABRE MÉRIDIONALE $S 1. — LE DÉTROIT DE CATANZARO 1° Stratigraphie. C'est là que la séfie pliocène se présente de la manière la plus nette, à la fois au point de vue paléontologique et stratigraphique. On peut y observer facilement la continuité absolue entre les divers termes de la série pliocène, ainsi que les progressives modi- fications de facies qui font là de cette série un type vraiment schématique de cycle sédimentaire. Région centrale du détroit. Examinons d’abord une coupe relevée dans la région centrale de l’ancien bassin pliocène, par exemple celle du versant oriental des plateaux de Borgia-Caraffa di Catanzaro, attaqués ici par le fleuve Corace et ses affluents ; je la décrirai en commençant par les couches les plus anciennes, 30 DÉTROIT DE CATANZARO us a Alluvions L Catanzaro modérés du fleuve Grace Contrada Cstantino 400 300 200) ' ‘ ' 1 100 0 O. E Fi. 4. — Coupe du plateau de Caraffa (région centrale du détroit de Catanzaro). 4. — Cailloutis et graviers continentaux. . . FAN EN L. — Lentille argileuse à faune lagunaire. Pliocène supérieur 3. — Graviers et sables marins. . GORE O AE (Calabrien) 2. — Argiles sableuses et argiles bleues. G. — Banc de grès calcaire jaune DR 1. — Argiles bleues plastiques . . . . . . . . . Pliocène ancien. Echelle des hauteurs et des Pneus 1/40.000 En partant du fond de la vallée du Corace, on traverse d’abord une région de collines à pente très douce, à sol argileux. C'est le terme inférieur, à facies profond, de la série pliocène. Nous verrons tout à l’heure qu'il contient la faune classique du Pliocène ancien, auquel l'ont d’ailleurs rapporté sans hésitation tous les auteurs qui ont étudié la région (Lovisato [163], Cortese [44,51], de Stefani [gr], etc.). A la base des escarpements qui supportent le plateau de Caraffa, on voit bientôt le facies devenir progressivement plus sableux. C'est ainsi qu'à 175 mètres d'altitude, sur le sentier muletier qui monte de la station de Corace-Settingiano au village de Caraffa, on voit apparaître, intercalé dans les marnes, un petit bane de grès calcaire jaune!, ne contenant ici que des espèces banales de Pectens (P. opercularis, par exemple) sans signification stratigra- phique. C'est probablement ce même banc que nous retrouverons très fossilifère à S. Maria di Catanzaro, où il renferme une faune déjà nettement calabrienne avec Cyprina islandica L.. Au-dessus de ce banc gréseux, on a encore des récurrences marneuses où on recueille également des fossiles peu caractéristiques (Nasses, Nucules, Natices), habituels de ce facies. Mais on voit apparaître ensuile des intercalations sableuses ou gréseuses fines qui devien- nent de plus en plus abondantes à mesure que l’on s'élève. Vers 280 mètres d'altitude, toute trace de facies marneux a disparu. Les pentes se font plus abruptes et le facies des sédiments de plus en plus grossier. Vers 300 mètres ce sont de véritables graviers, ! C'est probablement ce banc qui est signalé par Lovisato ([163] p.rr2), sous la curieuse appellation locale de « Strada del Re Milio ». EC STRATIGRAPHIE 31 puis des conglomérats: la stratification entre-croisée apparaît, et les derniers escarpements sont formés de couches d'origine continen- tale, altérées et rubéfiées, à stratification irrégulière, avec de gros galets. Ce sont de véritables alluvions. Et de fait, en débouchant à 380 mètres sur le plateau, on voit s'étendre devant soi à perte de vue l’ancienne plaine alluviale qui marque 1ci la fin du remblaiement pliocène. Les profondes coupures que les érosions quaternaires ont entaillées dans celte vaste plaine disparaissent au regard, et il ne faut pas un grand effort d’imagi- nation pour se reporter à l’époque où, dans cette mer pliocène, près de 4oo mètres plus haute que la mer actuelle, les « fiumare » descendues de la Sila et de la Serra réunissaient leur delta en une immense nappe de cailloutis qui achevait de remplir l’ancien golfe pliocène. On verra encore mieux la structure de ces couches alluviales supé- rieures en se rendant à l'Ouest du village de Caraffa, au « burrone » (ravin) Costantino. On se trouve là à la naissance d'une gorge profonde entaillée dans la partie Nord des Piani (plateaux) del Carrà et conduisant par le Vallone Savucello au fleuve Turboli qui s'écoule vers la mer Tyrrhénienne. Le passage du facies marin au facies continental est ici rendu manifeste par la présence de couches lagunaires. Sur les versants de ce ravin, on observe, en effet, à l'altitude de 300 mètres environ, inter- calées dans les sables et graviers, des couches d’argiles noires ligniteuses, où abondent les Cardium edule L., Cerithium vulgatum Brug., Tellina nitida Poli, Syndesmya alba Wood, et autres fossiles des argiles saumâtres. Au-dessus on peut étudier nettement les assises continentales et reconnaître en particulier leur altération très profonde. La couche supérieure, sur une profondeur de plusieurs mètres, est complètement rubéfiée : les cailloutis prennent une teinte générale rouge vif et la plupart des galets cristallins tombent complètement en poussière au moindre choc. A la surface du plateau, cette décomposition a produit une couche de terre rouge, véritable limon d'altération, épaisse souvent de plus d’r mètre. Ce sont, encore accentués par le climat méridional, les caractères que nous reconnaissons habituellement dans les alluvions très anciennes f. ! Ces couches supérieures alluviales sont, dans les cartes géologiques officielles de la Calabre, désignées par le symbole : gm — terrasses marines, dénomination tout à fait impropre. 32 DÉTROIT DE CATANZARO Modifications de facies sur les rives du détroit. Nous allons examiner maintenant de quelle manière se modifie la coupe de la série pliocène quand on se rapproche des anciens rivages. À cet égard, la région comprise entre Catanzaro, Tiriolo et la voie ferrée est des plus intéressantes. Il est facile d'y constater les deux faits principaux suivants : 1° l'extrême base de la série pliocène est ici visible ; elle est formée de conglomérats à blocs souvent énormes, emballés dans des sables et graviers jaunes; cette zone inférieure du Pliocène est d’ailleurs très exactement indiquée sur les cartes géologiques officielles où elle est désignée par le symbole p,,; 2° à mesure qu’on se rapproche des anciens rivages, constitués ici par les roches cristallines de la Sila, la série entière des sédiments pliocènes est envahie par un facies de conglo- mérats littoraux, dans lesquels les sables et marnes de la partie centrale du bassin viennent finir « en biseau », en s'amincissant de plus en plus. J'indiquerai brièvement quelques coupes de détail permettant d'appré- cier cette disposition. Quand, partant de la station de Corace-Settingiano, on se dirige sur la route de Catanzaro, en remontant les pentes qui dominent à l'Est le fleuve Corace, on voit, au-dessus des gypses du Miocène supérieur affleurant au fond de la vallée, un beau développement des conglomérats inférieurs. Des blocs granitiques très altérés y sont emballés dans des sables argileux : j'ai récolté là, dans des bancs plus marneux associés à ces conglomérats, une petite faunule nettement pliocène ancienne. On passe ainsi graduellement aux marnes bleues, qu'on peut voir affleurer au Fondaco Mele près de la jonction des routes de Catanzaro-Tiriolo et Catanzaro-Gagliano. Là ces marnes reposent presque directement sur le calcaire caverneux du Miocène appelé « marna bianca » par Lovisato [163]. D’autres coupes très typiques de la base du Pliocène sont nettement visibles dans les tranchées de la route de Catanzaro à Tiriolo, au delà du Fondaco Mele, Getle route traverse ici une série de vallons en décrivant de multiples sinuosités. Dans le fond de chacun de ces vallons apparaît le calcaire miocène en bancs irréguliers, dont l’aspect rappelle celui de nos cargneules du Trias, plongeant vers le Sud. Au-dessus de ces calcaires et les ravinant de la façon la plus capricieuse, on retrouve toujours les conglomérats pliocènes : il est facile de constater qu'ils contiennent des | FAUNES 33 blocs bien roulés de gypse miocène, ce qui fournit une preuve stratigra- phique de leur âge. Les blocs de ces conglomérats, qui atteignent à la base plus d'r mètre de diamètre, deviennent de plus en plus petits à mesure qu'on s'élève. Ainsi, en montant vers Tiriolo, on voit peu à peu apparaître le facies sableux représenté par des grès ou des graviers à Peclen opercularis. Les marnes, si développées dans la partie centrale du bassin, ne forment plus ici que des intercalations relativement minces, en particulier en dessous du village de Marcellinara où elles recouvrent presque directement les gypses du Miocène supérieur. Au contraire, sur la route de Tiriolo dans la région Varracoli, les conglomérats inférieurs prennent sous ces marnes un énorme développement. Enfin, au-dessus de ces marnes on peut voir, en dessous de Tiriolo comme à Caraffa, le facies devenir progressivement plus sableux; on passe finalement à des conglo- mérats continentaux, prolongement direct de ceux des plateaux de Caraffa et qui viennent s'appuyer sur la surface altérée des montagnes cristallines. La coupe reproduite ici (voir planche I, fig. 1) donnera une idée d'ensemble de la façon dont il faut comprendre ces variations de facies : elle a dù forcément être un peu simplifiée, et je n'y ai point fait figurer entre autres les alternances répétées par lesquelles se font les passages entre facies voisins ou successifs. Bien entendu, des coupes analogues pourraient être relevées en n'importe quel autre point du détroit de Catanzaro : il n'y a de différences inté- ressantes entre les diverses localités qu'au point de vue des fossiles qu’on y trouve. 2° Les faunes pliocènes. Ïl nous reste à voir, en effet, comment se répartissent les faunes dans cette grande série concordante des couches pliocènes. 1° Les conglomérats de base, — Ces assises inférieures, si déve- loppées entre Catanzaro et Marcellinara et aussi, d’après Cortese {43], dans les environs de Jacurso et Cortale, sur le rivage Sud du détroit, sont très pauvres en fossiles, en raison même de leur facies, Les auteurs ne donnent aucune liste paléontologique qui s'y rap- porte. Je rappellerai seulement que J'ai recueilli dans des bancs ! Cette observation avait déjà été faite par l'ingénieur Cortese [44]; le grand développement des conglomérals en dessous de Tiriolo est mentionné aussi par Lovisato ([163] p. 96). Univ. DE Lyon. — Gicnoux, 3 < Le + » 34 DÉTROIT DE CATANZARO plus marneux intercalés dans ces conglomérats, au-dessus et au Nord de la station de Corace-Settingiano, les espèces suivantes : Anomia ephippium L. | Pecten jacobæus L: Flabellipecten flabelliformis Br. Chlamys scabrellus Lmk. Ces deux dernières formes sont éminemment caractéristiques du Pliocène ancien. Ainsi la faune et la stratigraphie sont d’accord pour nous faire retrouver là la base du Pliocène classique. 20 Les argiles inférieures. — Ici non plus la faune n'est pas très abondante, au moins dans la partie orientale du détroit. Person- nellement, je n’y ai guère récolté que des espèces assez banales à la base des collines de Caraffa : Limopsis anomala Eichw. Verticordia acuticostata Phil. Dentalium rectum L. Nassa semistriata Br. var. Edwardsi Fischer sp. Lovisato | 163] signale à ce niveau, dans les ravins de Borgia et de Caraffa, une assez longue liste d'espèces parmi lesquelles on peut noter : Drillia sigmoidea Bronn Turritella subangulata Br. D'ailleurs, on ne voit pas encore apparaître ici les formes septen- trionales caractéristiques du Calabrien. Ainsi, et c’est bien l'avis de tous les géologues qui ont étudié la région, nous sommes encore ici dans le Pliocène ancien. Et surtout ces couches se relient d’une manière continue aux argiles, nettement pliocènes anciennes, que nous verrons si typiquement développées sur la côte ionienne. La pauvreté relative de leur faune dans le détroit de Catanzaro tient probablement à leur facies profond, car cette faune paraît s'enrichir à l'extrémité occidentale du détroit, où le facies des couches devient plus néritique. Là, en effet, sur la route de Tiriolo à P1zzo, à l’en- trée du premier tunnel traversé par le chemin de fer après la station de Marcellinara, j'ai pu récolter une faune assez riche dans des alternances répétées de graviers et de sables argileux : on en trou- vera la liste complète dans l’appendice (gisement de Marcellinara). Comme on le verra, c'est une faune pliocène ancienne indubitable caractérisée en particulier par des Flabellipecten, le Conus ante- diluvianus Br., la Pecchiolia argentea Mariti, etc. FAUNES 30 3° Les couches calabriennes. — Il nous reste à examiner la faune des couches supérieures, qui terminent la série pliocène et corres- pondent, comme nous le verrons, au Calabrien. M. C. de Stefani ([91| p. 239) a tenté d'y distinguer deux niveaux : l’un inférieur à Cyprina islandica L., bien représenté, dit-il, au Monte Santa Maria, près de Catanzaro, l’autre supérieur, caractérisé surtout par les Buccins des mers du Nord. Cette distinction paraît bien exacte dans l’ensemble, mais se justifierait mieux par d’autres considérations, car le Buccinum undatum L. a précisément été rencontré au Monte S. Maria par Lovisato. Gisement de S. Maria di Catanzaro. — Sa description mérite certains détails en raison de la richesse et de la célébrité de la faune. A égale distance de Catanzaro et de la mer, sur la rive droite du Torrente Fiumarella, s'étend du Nord au Sud une chaïne de collines profondément ravinées par l'érosion. Les vastes plateaux alluviaux que nous avons décrits plus haut près de Caraffa devaient primiti- vement s'étendre sur toute cette région ; mais ici, au voisinage de la mer lonienne, l'érosion en a fait disparaître les derniers témoins, de sorte que nous retrouvons seulement, dans ces collines de Santa Maria, le prolongement des couches argileuses et sableuses qui constituaient le soubassement du plateau de Caraffa-Borgia. NO. Yluvions modernes Station Serra Mula SE. 300— dela Fiumarella Monte S Maria ' 3 2001 : PE a S 100 ! 0 1 Fi@. 5. — Coupe des collines de S. Maria di Catanzaro (Echelle des hauteurs et des longueurs, environ 1/25.000) 3. — Graviers et sables très fossiliféres . 2, — Sables argileux et argiles Pliocè HR G. — Banc de grès calcaire très fossilifère à IOSENÉ/EUPEFIEU Cyprina islandica. - 1. — Argiles plastiques . . . . . . . . . . . . . Pliocène ancien. Ainsi, partant de la station de S. Maria pour monter au Monte S. Maria (point 207 des cartes topographiques au 1 /100.000°), nous rencontrons successivement, de bas en haut : À. — Des pentes douces couvertes d’oliviers et formées par les argiles du Pliocène ancien, très peu fossilifères (1 sur la figure). 36 DÉTROIT DE CATANZARO : B. — Puis, à l'altitude de 180-190 mètres, un banc plus résistant (G sur la figure) qui détermine un ressaut dans la pente et donne à la colline un profil tabulaire ; c’est un grès calcaire à Cyprina islan- dica formé surtout de débris de coquilles et de Bryozoaires avec de petits graviers quartzeux : la présence de ce banc calcaire perméable amène de nombreux suintements aquifères, permettant l’établisse- ment d'une végétation plus riche que dans les marnes (châtaigniers). Dans ce banc abonde, en particulier, la Cyprina islandica L., accompagnée de beaucoup d’autres fossiles. On trouvera dans l’appen- dice la liste des espèces que j'y ai moi-même récoltées, et parmi lesquelles je ne puis guère retenir comme formes intéressantes, d'ailleurs communes au Calabrien et au Sicilien et, par suite, peu caractéristiques, que les suivantes : . Chama placentina Defrance Astarte sulcata da Costa Cyprina islandica L. Dosinia lupinus Poli, var. fica- Dentalium rectum L. ratiensis nov. Brocchia sinuosa Br. Mais Lovisato 163] et Neviani [181], qui ont étudié soigneuse- ment la région, donnent aussi d'abondantes listes d'espèces ; du travail de ce dernier auteur (p. 104 et suiv.) j'extrairai les formes caractéristiques suivantes : Comme espèces éteintes : Nucula placentina Lmk. Venus præcursor Mayer Plicatula mytilina Phil. Dentalium Delesserti Chenu — Fusus longiroster Br. D. rectum L. Pleurotoma dimidiata Br. Nassa musiva Br. Turritella subangulata Br. Pieurotoma carinata Biv. Monoceros monaeanthos Br. Brocchia sinuosa Br. Etc. Comme espèces émigrées : Arcopagia crassa Pennant Cyprina islandica Î. Buccinum undatum |, D'après l'ensemble de la faune, il s'agit certainement ici de Calabrien, mais, comme le montrent les espèces citées par Neviani, on est encore très près du Pliocène ancien: c’est probablement le niveau inférieur distingué par C. de Stefani, conclusion légitime FAUNES € 31 aussi au point de vue purement stratigraphique ; peut-être avons- nous là le prolongement du banc gréseux signalé au même niveau dans la coupe de Caraffa. GC. — Au Monte S. Maria, le plateau culminant du point 07 est occupé par des marnes blanches (2 sur la fig.) qui recouvrent ce banc à Cyprina islandica : ce fait est intéressant à noter, car il nous montre d'abord que l'apparition de ce banc est due à une modifica- tion de la sédimentation et de la population organique et non à une émersion ; ef ensuite, 1l nous prouve que le facies argileux a persisté Jusqu'après le début du Calabrien : la continuité de sédimentation qui relie le Pliocène ancien au Calabrien est donc ici bien manifeste. D. — En s'éloignant maintenant du Monte S. Maria, vers le Nord, et en parcourant les crêtes jusque vers la Serra Mula (250 m.), on peut étudier les termes supérieurs de la coupe (3 sur la fig.). Ce sont, comme à Caraffa, des sables alternant avec des marnes à leur base, puis devenant de plus en plus grossiers à mesure qu'on s'élève; au sommet, on a même de véritables conglo- mérats avec de gros galets. Mais ici, les couches continentales que nous avons vues à Caraffa ont été enlevées par l'érosion. La faune de ces sables et graviers est très riche : les fossiles s’y recueillent tout dégagés et dans un état de conservation admirable; leur variété dénote une faune ayant vécu à une profondeur beaucoup plus grande (au moins ro0 m. par exemple) qu'on ne pourrait le supposer au premier abord d'après le facies très grossier : c’est une conclusion à laquelle nous serons fréquemment conduits pour ces couches du Calabrien supérieur. Je donne, dans l'appendice, la liste des espèces recueillies par moi à ce niveau : on n'y trouvera point de formes disparues, mais seulement les formes émigrées suivantes, plus ou moins caracté- ristiques : Chlamys septemradiatus Müll. Cyprina islandica |. Dosinia lupinus Poli var. fica- Tapes rhomboides Penn. ratiensis nov. Autres gisements. — À cause de la rareté des espèces caracté- ristiques, il est impossible de reconnaitre partout des subdivisions dans le Calabrien : mais dans l’ensemble, il paraît bien que ce sont les niveaux supérieurs qui sont les plus fossilifères, nt Dar, VAE LUN AT LS an er - Ÿ rs CE Le ETC LS 4 Ces a Te, NAT NS, Les à 4 MES 2e OS SA ’ Fe, Le CORRE 5" 38 : DÉTROIT DE CATANZARO Ainsi, dans les couches supérieures du plateau de Caraffa, au burrone Costantino, j'ai récolté la faunule suivante : Anomia ephippium L. Mytilus galloprovincialis Lmk. Pecten jacobæus L. Chlamys flexuosus Poli Chlamys multistriatus Poli Chl: mys opercularis L. Chlamys septemradiatus Müll. Corbula gibba Olivi Pachylasma giganteum Phil. Lovisato ([163] p. 113) signale dans les sables pliocènes supé- rieurs de la localité dite Serra di Spina, entre le plateau de Caraffa et la vallée du fleuve Amato, une liste très longue de coquilles fossiles; je n’en retiens que les formes caractéristiques : Espèces éteintes : Dentalium Philippii Monterosato — D. rectum L. Nassa musiva Br. Pleurotoma carinata Biv. Turritella tornata Br. Terebratula Davidsoni Segu. Du travail de M. C. de Stefani [g1] on peut extraire les formes caractéristiques suivantes : (P. 241) Fossiles récoltés à Caraffa par Lovisato, dans le « Postpliocène supérieur à Buccinum undatum » : Espèces éteintes : Nassa musiva Br. Turritella tornata Br. Espèces émigrées : Buccinum undatum L. Buccinum humphreysianum Bennett (P. 242) Entre Squillace et Borgia : Chlamys scabrellus Lmk. Et à Girifalco, espèce éteinte: Turritella tornata Br. Espèces émigrées : Buccinum undatum I. Waldheimia cranium Müll. Enfin, dans l'ouvrage de Neviani et Rambotti [183], on trouvera citées une vingtaine d’espèces des « sables supérieurs de Borgia » : une seule est éteinte, le Dentalium rectum L. = D. elephantinum . Phil. Plus à l'Ouest on s'approche du golfe de S. Eufemia et on arrive à la vallée du Fiume Amato. Les anciens auteurs ont donné de nombreuses listes de fossiles « postpliocènes » de cette région, sous le nom de « Valle Lamalo », et on peut en voir de beaux exemplaires dans la FAUNES 39 plupart des musées italiens, mais les provenances exactes sont rarement précisées. Je me bornerai donc à renvoyer au travail de Philippi [190], le plus important, et aux listes de fossiles que je donne dans l’appendice pour les gisements que j'ai personnellement étudiés ; les espèces caracté- ristiques y sont d’ailleurs assez rares (sauf les Térébratules) et ne nous apprennent rien de nouveau. Dans cette « Valle Lamato », le facies change d’ailleurs un peu : le Pliocene supérieur est beaucoup moins épais que sur le versant ionien et il est représenté en général par des sédiments peut-être plus littoraux. J'y signalerai en particulier, près du pont sur le F. Amato que traverse la route de Nicastro à Pizzo, l'apparition d’un facies de graviers grossiers, très riches en Bryozoaires, Térébratules du groupe ampulla et certains Cirrhipèdes (les pièces massives des Pachylasma giganteum Phil. forment des bancs entiers), que nous retrouverons absolument identique dans le Calabrien de Gravitelli, près Messine. Ces sables et graviers à Pachylasma giganteum forment ici, comme à Caraffa, le soubassement d'un plateau couronné par les alluvions du Calabrien supérieur : c’est le plateau du Monte S. Maria, à 200 mètres environ. Sur le versant Nord de ce plateau, on retrouve une série de remblaiement analogue; à la base, des argiles plastiques à Zsocardia cor L., avec une faune calabrienne peu caractéristique, puis des argiles sableuses à Turritelles, enfin des sables jaunes qui passent graduellement aux cailloutis du plateau. Ces diverses formations peuvent se suivresur la rive droite de la Fiumara S. Ippolito, jusqu'au Stretto Veraldi (Verardo sur les cartes officielles) où elles conti- nuent d’être assez fossilifères, mais sans éléments caractéristiques (peut-être a-t-on ici un peu de Silicien?). Plus au Sud, des argiles sableuses du Calabrien, riches en Brachiopodes, affleurent également dans le soubassement Nord-Est du plateau de Brunini, non loin de la station de Maida. (Pour toutes ces faunes, voir l'Appendice.) Résumé. — En résumé, nous trouvons dans l'isthme de Catanzaro : 1° À la base, des argiles qui, stratigraphiquement et paléontolo- giquement, appartiennent certainement au Pliocène ancien : le facies argileux persiste ici jusqu'au sommet, de sorte qu'il est impossible d'y distinguer un Plaisancien et un Astien; on peut dire que l’Astien est envahi par le facies plaisancien; les faunes sont d’ailleurs, en général, assez pauvres, comme il arrive d'ordinaire dans ces argiles profondes. 2° Au-dessus vient le Calabrien : le passage entre Pliocène A0 DÉTROIT DE CATANZARO ancien et Pliocène récent étant insensible, on trouve encore à la partie inférieure de ce Calabrien des argiles à facies plaisancien (nous en avons une preuve nette dans la coupe de S. Maria di Catanzaro). Mais la faune est devenue toute différente : nous sommes déjà dans le « Postpliocène » des géologues italiens. Dans un fond de peuplement formé d'espèces méditerranéennes vivantes en immense majorité, on peut récolter : A. des espèces immigrées d’origine septentrionale, nouvelles venues dans les faunes méditer- ranéennes : Buccinum undatum L., B. humphreysianum Benn. Cyprina islandica L., Waldheimia cranium Müll. — B. des espèces éteintes à caractère franchement pliocène : Turritella tornata Br., T. subangulata Br., Térébratules du groupe ampulla, Fusus longi- roster Br., Pleurotoma dimidiata Br., P. carinata Biv., Chlamys scabrellus Lmk.!. — C. des espèces également éteintes, mais qui persisteront encore dans les couches plus récentes du Sicilien, et qui, par suite, n'offrent pas grand intérêt : Plicatula mytilina Phil. ; Nucula placentina Lmk., Chama placentina Defrance, Dentalium rectum L., Nassa musiva Br., Brocchia sinuosa Br. Cette association d'espèces pliocènes et de formes septentrionales caractérise le Calabrien, ainsi reconnaissable par sa faune et, plus encore, par sa situation stratigraphique. 29 Conclusions. — La plaine alluviale de la fin du Pliocène. Je dirai ici quelques mots de l'allure de cette vaste surface de remblaiement par laquelle se termine partout, dans le détroit de Catanzaro, la série continue des sédiments pliocènes : son altitude est variable. Les plateaux de Caraffa et de Borgia, presque au centre du détroit, sont à une altitude de 350-380 mètres. Vers la mer Jonienne, cette surface se maintenait probablement très haute, car elle est totalement enlevée par l'érosion quaternaire. Vers le Nord, les cailloutis se relèvent très sensiblement sur les bords de la Sila, jusqu'à 500 ou 600 mètres (route de Tiriolo); il en est de même sur le rivage Sud puisque les formations pliocènes de Cortale, Giri- 1 Ces quatre dernières espèces proviennent en tout cas des couches les plus inférieures du Calabrien, si mème il n'y a pas eu mélange avec des faunes plus anciennes, PLAINE ALLUVIALE DE LA FIN DU PLIOCÈNE A1 falco, etc., atteignent au moins 450-500 mètres, Vers l'Ouest, au contraire, cette grande nappe de cailloutis s’abaisse régulièrement : c’est elle qui forme les Piani di Cortale à 320-350 mètres; puis, plus en aval encore, les Piani di Vena (200-250) et du Monte S. Maria (200) dont le soubassement reste toujours formé, comme nous l’avons vu, par les couches marines du Calabrien. Cette diminution d'altitude correspond d’ailleurs à une diminution d'épaisseur de la série pliocène. En effet, dans le promontoire qui sépare près de leur confluent les Fiumare Pesipo et Amato, le long de la route de Nicastro à Pizzo, on peut voir affleurer en couches très inclinées vers le Nord de gros bancs calcaires avec gypses associés, qui représentent le terme supérieur de la série miocène ‘ ; on a donc là, entre ce calcaire et le sommet des Piani di Vena, tout ce qui représente la série pliocène : il y manque en particulier les puissantes assises de marnes blanches si déve- loppées sur le versant ionien. Ainsi, à mesure qu'on va de l'Est à l'Ouest, à travers le détroit, on voit le Pliocène devenir de plus en plus littoral, et de moins en moins épais. Cela semblerait indiquer que, conformément à l'hypothèse de Suess, la mer Tyrrhénienne était alors occupée, non par une fosse profonde comme celle où s'est accumulé le Pliocène ionien, mais bien au contraire par un continent, ou tout au moins par un haut fond ; cette conclusion s'accorderait ainsi avec l'absence, souvent remar- quée, du Pliocène entre les golfes de S. Eufemia et de Salerne, sur la côte tyrrhénienne. Mais ce problème de la Tyrrhénide, si souvent agité, est encore bien obscur. Il reste à expliquer comment il se fait que la plaine alluviale de la fn du Pliocène se retrouve ici à des altitudes si diverses : on peut faire à ce sujet deux hypothèses extrêmes. 1° On peut supposer qu'il ny a pas eu de déformation du sol continental depuis le Calabrien. Alors les parties les plus hautes de la plaine alluviale seraient les plus anciennement formées; puis la ligne de rivage se serait abaissée lentement et progressivement (je ne parle ici, bien entendu, que de mouvements relatifs); au fur et à mesure de ce mouvement de descente, se seraient formées des plaines alluviales à des altitudes de plus en plus basses, jusqu'à celles de la région occidentale qui ne dépassent guère 200 mètres. 1! M. de Stefani [gr] signalé là une « panchina » postpliocène, dont il cite même des fossiles, 42 COTE IONIENNE DE LA CALABRE MÉRIDIONALE Le soulèvement du continent aurait donc marché de pair avec le remblaiement. . 2° Mais on peut faire intervenir aussi une autre explication. Nous verrons qu'il y a en Calabre des dislocations nettement posté- rieures au Pliocène (les faits énoncés plus haut relativement à l'exis- tence d’un haut fond ou d’un continent tyrrhénien dans la mer pliocène nous forceraient également à invoquer des dislocations profondes). Dès lors, la différence d'altitude des diverses parties de la plaine aïiluviale s’expliquerait facilement : la partie centrale du détroit de Catanzaro, qui est dans l’ensemble une zone affaissée déjà antérieure au Pliocène puisque la mer pliocène a pu y pénétrer, aurait continué à s’affaisser par rapport à ses bordures Nord et Sud. De même la partie occidentale, la « Valle Lamato », voisine de l’ancienne Tyrrhénide(?) effondrée, aurait continué à s’abaisser par rapport à la partie orientale du détroit. | $8 2. — LA COTE IONIENNE DE LA CALABRE MÉRIDIONALE Cette région particulièrement déshéritée de la Calabre n'a guère fait l’objet d'études de détail. En dehors de l'ouvrage fondamental de Cortese [51], nous aurons surtout à utiliser les travaux de G. Seguenza [206], de Fuchs [132], de Neviani |[18r, 183] et en particulier de C. de Stefani [gr]. La série pliocène y est d’ailleurs très uniforme et ne renferme que peu de gisements fossilifères célèbres ; pour le Pliocène supérieur, je ne vois guère que la faune de Monosterace qui mérite d’être signalée. 1° Description générale. Du Capo Staletti, promontoire granitique qui ferme, vers le Sud, le détroit de Catanzaro, jusqu'au Capo dell Armi, que l’on double pour entrer dans le détroit de Messine, s'étend une côte remarquable par sa monotonie, sur laquelle on ne rencontre pas un seul de ces golfes semi-circulaires qui apportent une si heureuse variété au versant tyrrhénien. Nous y décrirons d’abord la série pliocène près de la côte actuelle, c'est-à-dire à une certaine distance de l’ancien rivage pliocène et j'indiquerai ensuite les principales modifications que l'on rencontre en s'approchant de ce rivage. DESCRIPTION GÉNÉRALE 13 Région située près de la côte actuelle. En commençant par la base, la série pliocène montre, près de la mer, la coupe suivante : A.— Le terme le plus bas de la série, visible le long de la côte actuelle, est constitué par de érès puissantes marnes blanches : c'est la roche connue sous le nom de tfrubi en Sicile, de maramosca en Calabre. Elle est excellemment décrite par Fuchs et surtout par de Stefani qui en a fait ressortir les caractères intéressants : on y reconnaît une véritable boue calcaire à Foraminiferes (Globigérinidés et Miliolidés), analogue aux craies des terrains secondaires. Des couches plus calcaires, ou plus marneuses, ou plus riches en fer, ou plus sableuses y alternent avec une grande régularité et forment des strates nettement visibles sur tous les escarpements : le facies d'ensemble est d’ailleurs sujet à variations; en particulier, la pro- portion de matières argileuses peut augmenter, et on passe ainsi à de véritables argiles plastiques. Aussi, comme le note de Stefani, ces couches peuvent être exploitées, suivant les points, tantôt pour fabriquer des tuiles, tantôt pour faire de la chaux hydraulique. La faune est assez peu variée et peu riche en espèces : elle com- prend presque uniquement des formes de grande profondeur dont quelques-unes sont éteintes mais dont la plupart ont été retrouvées dans les grands fonds actuels; je me bornerai, à ce sujet, à ren- voyer aux listes données par de Stefani et à signaler, comme formes caractéristiques, les petits Pecten lisses {P. fenestratus Forb. etc.), certains Pleurotomidés, des Turbinidés {Turbo peloritanus Can- traine, Sequenzia, etc.), d'assez nombreux Lédidés et Dentalidés, toujours noyés dans une masse énorme de Foraminifères. Dans l'ensemble. cette faunule est tout à fait différente des vraies faunes pliocènes classiques de l’Italie du Nord et paraïîtrait, au premier abord, bien plus voisine de la faune actuelle : c'est là un nouvel exemple du peu de différenciation et de la lenteur d'évolution de ces faunes profondes. Cela nous importe peu d’ailleurs au point de vue des synchro- nismes, car les rapports stratigraphiques sont des plus clairs : il n’y a aucun doute, el c'est l'avis de tous les géologues qui ont étudié la région, nous avons là les équivalents du Pliocène ancien de l'Italie du Nord, Mais il se présente ici avec une exagération, en quelque 7e COTE JONIENNE DE LA CALABRE MÉRIDIONALE sorte, du facies plaisancien, et nous ne connaissons guère, en dehors de l'Italie méridionale, de sédiments pliocènes déposés à une pro- fondeur aussi grande‘ et possédant en même temps une puissance aussi considérable, puissance qui se chiffre par centaines de mètres. Ainsi, la fosse ionienne si marquée dans la Méditerranée actuelle était déjà dessinée au Pliocène, et le facies ionien pourrait presque être qualifié de géosynclinal. B. — Au-dessus de ces marnes blanches et en concordance, on voit apparaître peu à peu le facies détritique. Comme dans l’isthme de Catanzaro, les argiles deviennent, dans le haut, plus sableuses, et on passe ainsi à des graviers quartzeux blancs. En même temps, la faune change, de sorte que dans les graviers on rencontre une immense variété d'espèces, et l’on y reconnaît les représentants de l'étage calabrien. Ainsi, là comme dans le centre du détroit de Catanzaro, l'ensemble du Pliocène ancien, plaisancien et astien, se trouve englobé dans le facies marneux : aussi, ne trouvons-nous pas, en dessous du Calabrien, la faune plus littorale typique du Pliocène ancien de l'Italie du Nord. La s'arrêtent les coupes que l’on peut relever dans les collines qui bordent la mer Ionienne. La partie supérieure du remblaiement pliocène, correspondant aux cailloutis continentaux du détroit de Catanzaro, n'existe pas ici : elle a été enlevée par l’érosion, comme elle l’a été égale- ment dans les collines de S. Maria di Catanzaro; il est d’ailleurs raison- nable de penser que ces cailloutis ne devaient pas être fort épais, car il n'existe sur toute cette côte ionienne aucun cours d’eau comparable, comme importance, à ceux qui ont coulé et coulent encore entre la Sila et la Serra. Zone de bordure des massifs anciens. Nous allons donc maintenant nous éloigner de la plage actuelle et décrire les modifications que subit notre coupe en nous approchant des anciens rivages pliocènes. Tout d'abord, nous verrons apparaître à la base de la série, sous les marnes blanches, des conglomérats de plus en plus épais à mesure qu'on s’avance vers l'Ouest; reposant sur des roches plus anciennes quelconques, ces conglomérats sont identiques à ceux ! On peut leur comparer dans l'Italie centrale, les célèbres marnes du Vatican. Voir par exemple Manzoni [168]. DESCRIPTION GÉNÉRALE 45 que nous avons vus plus haut dans le détroit de Catanzaro. Ce facies particulier de la base du Pliocène a déjà été excellemment décrit par G. Seguenza, qui signale en particulier sa netteté et sa con- stance entre Giojosa ionica et Benestare, en passant par Gerace; près de Portigliola, cet auteur a noté son intime association avec les marnes blanches qui, dans leur partie inférieure, alternent avec lui. Fuchs signale de même ce conglomérat à Gerace. Au-dessus de ce conglomérat, reparaissent en général les marnes blanches, mais à la partie supérieure de ces marnes se montre un facies particulier : c’est le facies littoral du Pliocène ancien, consti- tué ainsi par une roche dure, d’origine surtout zoogène, un grès cal- caire à Amphistéqines. C. de Stefani paraît être le premier auteur qui ait justement compris la signification de ces couches à Amphistégines, et c'est d'après ses données que je les décrirai. En commencant parle Nord nous les trouvons développées d’abord entre Squillace et Chiaravalle; elles forment à Cen- trache, Olivadi, S. Vito, Argusto, Gagliato, un vaste plateau sur lequel ces villages s’abritent derrière les hautes falaises cristallines qui les dominent. Plus au Sud ce facies est bien développé dans les environs de Gerace, où Fuchs l’a étudié sous le nom de calcaire à Bryozoaires. De là, ces calcaires à Amphistégines et Bryozoaires remontent en plateaux ondulés jusqu'à atteindre le faîte de l'axe calabrais : ils arrivent ainsi aux vastes « Piani » qui, entre Gerace et Cittanova, séparent la Serra de l’Aspromonte : d’après de Stefani, ils atteignent 802 mètres au Piano Crasto (« Cresta » des cartes topographiques), au-dessus de Canolo. Plus au Sud, on peut les suivre dans la région de Portigliola,S. Ilario, Ardore, Bovalino : ils recouvrent là les argiles blanches du Pliocène ancien à facies profond. La faune contenue dans ces couches à Amphistégines est en général mal conservée et relativement peu connue. Les seules listes un peu longues sont celles de de Stefani (|91] p.180); avec l'Amphi- stegina Haueri et d'abondants Bryozoaires et Brachiopodes plutôt littoraux appartenant à des espèces vivantes, cet auteur y signale, en particulier, Chlamys latissimus Br. et C. scabrellus Lmk., qui sont des formes pliocènes anciennes. Enfin, la série pliocène se termine ici, d'après les observations des auteurs, par des sables blancs sans Hole qui, sous une épais- 46 COTE IONIENNE DE LA CALABRE MÉRIDIONALE seur très réduite, viennent s’étaler à la surface des grands plateaux formant la crête de la chaîne calabraise. Cortese et de Stefani ([91]p. 193) signalent, en effet, ces sables entre la Serra et l'Aspromonte, dans la zone déprimée utilisée par les routes de Gerace à Cittanova et de Giojosa à Cinquefronde. Là s'étendent de vastes « piani » à une altitude de 850 à 95o mètres, recouverts par places de sables d'origine marine dont la partie supérieure prend un facies con- tinental ou tout au moins de plage, Telle est l'altitude maximum atteinte ici par le niveau de base à la fin du Pliocène, et sans nul doute ces vastes surfaces aplanies et arasées dans le socle cristallin sont le résultat de la pénéplanation commandée par ce niveau de base. J'ai cherché à exprimer ces modifications de facies dans une coupe théorique (voir planche I, fig. 2). On est ainsi conduit, à la suite de C. de Stefani, à considérer les grès et calcaires à Amphistégines comme un facies local et littoral du Pliocène entou- rant comme d’une guirlande les massifs anciens : l’Aspromonte et Ja Sila formaient des îles dans la mer pliocène, et, sur leurs rivages, se développaient ces formations zoogènes. Dans les parties les plus voisines des massifs anciens, les grès à Amphistégines reposent souvent directement sur les terrains pré- pliocènes, mais, plus près de la côte, ils surmontent les marnes blanches : c’est le cas, en particulier, dans les environs de Gerace, dont nous reparlerons plus loin; et de Stefani ([g1}, p. 177) signale encore une telle superposition dans les collines de Siderno, Ardore, S. Ilario, Portigliola; il y a d’ailleurs partout concordance parfaite et liaison intime entre les deux facies successifs, qui appa- raissent bien comme faisant partie d'une même série stratigra- phique. Aiïnsi, en adoptant le langage de C. de Stefani, nous pouvons dire que, près des anciens rivages, on voit apparaître, au-dessus du facies plaisancien, le facies astien, qui finit par envahir tout le Pliocène. Mais, au lieu du facies astien typique avec la faune carac- téristique d’Asti, nous avons ici un facies zoogène d'eaux pures et agitées avec une sédimentation clastique souvent très réduite. C'est ce qui nous explique l'épaisseur assez faible de ces couches littorales relativement à la puissance énorme des argiles blanches et, en même temps, leur faune très particulière avec prédominance INTERPRÉTATION DE LA COUPE DE GERACE 47 des Amphistégines, des Bryozoaires et de certains Brachiopodes, toutes espèces recherchant un tel habitat. C’est grâce à l'absence de grands fleuves sur le versant ionien que ces conditions ont été réalisées au Pliocène sur la plate-forme continentale qui bordait les . massifs anciens. Il est frappant de voir, en effet, que, dans le détroit de Catanzaro, où les fleuves amenaient dans des eaux plus tran- quilles, sans courants littoraux, une masse énorme de sables et de vases argileuses, le facies zoogène n’a pu s'installer. Nous le retrou- verons, au contraire, dans le détroit de Messine, ramené par le même concours de circonstances!. La faune de ces couches à Amphistégines n’est pas suffisamment riche pour conduire à des conclusions intéressantes sur la succession des faunes méditerranéennes. La présence des Chlamys latissimus et scabrellus les rattache, au moins en partie, au Pliocène ancien, mais il se pourrait qu'elles correspondissent, en partie aussi, au Pliocène supérieur (Neviani les rapportait au « Sicilien »). 2° Interprétation de la coupe de Gerace. Cette coupe générale du Pliocène sur la côte ionienne de la Calabre n'a d’ailleurs pas été admise par tous les géologues qui ont étudié la région. Les discussions ont porté surtout sur la coupe de Gerace, dont je dirai quelques mots à titre d'exemple. == = Jocle prépliocene Se Jocle prépliocéne E. œ F1G. 6. — Coupes schématiques de la colline de Gerace. d'après T. Fuchs d'après G. Sequenza 4. — Grès calcaires à Amphi- 4. — Argiles blanches . . , . Astien Stépines 1m Astien 3. — Grès calcaires à Amphi- 3.— Assises sableuses . stégines. Z : 2. — Argiles blanches 2. — Argiles blanches GnOGes | Plaisancien 1. — Conglomérat de base. 1. — Conglomérat de base. Cette coupe a été d'abord étudiée en détail par Fuchs [132, 134] qui la décrit d'une manière tout à fait conforme à la succession ! Les mêmes calcaires à Amphistégines se rencontrent d’ailleurs dans beaucoup d'autres régions : Toscane, environs d’Alger, côtes françaises (mollasse de Biot), etc…., et toujours dans des conditions analogues. 48 COTE IONIENNE DE LA CALABRE MÉRIDIONALE que J'ai adoptée plus haut : les calcaires à Bryozoaires et Amphistégines surmontent en concordance les marnes blanches du Pliocène ancien qui s'étendent jusqu’à la mer. Seguenza [206, 210|, au contraire, sépare absolument les marnes inférieures aux calcaires à Bryozoaires de celles qui forment les collines entre Gerace et la mer : les premières seraient bien anté- rieures aux calciures et formeraient avec eux l'étage zancléen ; mais les secondes seraient postérieures à ce Zancléen, dont les sépareraient une discordance et une transgression; elles consti- tueraient l'étage astien. Ainsi, la série pliocène, au liea d’être unique et continue, serait divisée en deux parties stratigraphiquement indépendantes, dont la limite se placerait après le dépôt des couches à Amphistégines. Seguenza a étendu cette manière de voir à toute l'Italie du Sud et il a cherché à l'appliquer également dans l'Italie du Nord en inter- prétant les observations des auteurs; de là une grande confusion qui règne dans toutes ses œuvres et rend très difficilement utilisables ses renseignements stratigraphiques. De Stefani, après une nouvelle étude de Gerace, a montré de nouveau qu'il n'y avait là aucune discordance dans le sein des assises pliocènes!. L'opinion de Seguenza doit donc être complètement abandonnée et, si jy ai insisté quelque peu, c’est qu’elle ne tendait à rien moins qu'à modifier de fond en comble la classification du Pliocène dans l'Italie du Sud et même dans l’Italie du Nord; l’étage Zancléen, auquel les beaux travaux de Seguenza ont donné une certaine notoriété, même en France [208|, est donc fondé sur une erreur stratigraphique. 3° Le gisement de Monosterace. Il nous reste maintenant à examiner les faunes que nous offre le Pliocène récent dans cette partie de la Calabre. Si des sables « post- pliocènes » ont élé signalés par de Stefani et Seguenza en un assez | La coupe de Gerace donnée par de Stefani ne différe de celle de Fuchs que par un point de détail local. Pour de Stefani, les marnes pliocènes s'arrêtent un peu en aval du village de Gerace, de sorte qu’à Gerace même les calcaires à Amphisté- gines, au lieu de reposer comme d'habitude sur ces marnes, recouvrent directe- ment le Miocène marneux. Comme nous le verrons plus loin (p. 59), cet auteur a, en effet, considéré comme miocènes une bonne partie des marnes blanches pliocènes de la Calabre. GISEMENT DE MONOSTERACE A9 grand nombre de localités (par exemple, de Stefani cite la rive droite de la Valle di Melis, en aval de Davoli, la région de collines entre Gerace et la mer, elc.), en revanche, ils ne sont, en général, que très peu ou pas du tout fossilifères. Heureusement, la localité de Monosterace, près Stilo, fait exception. Seguenza en a publié une longue liste de fossiles et cette faune de Monosterace a, par suite, très souvent été prise comme point de comparaison par les auteurs qui se sont occupés de « postpliocène ». Elle mérite donc que je décrive en détail ses conditions de gisement, telles qu’on peut les observer en parcourant la chaîne de collines qui s'élève entre la Fiumara Assi et la Fiumara Stilaro, et sur laquelle se trouve situé le village de Monosterace. E. 200 Rivage “ile 0 ©. Monte Rosito Monosterace 200 ! ! # E Argiles plastiques. Sables et ol Plioc. m Graviers el cailloutis Plioc. ancien. E3 Argiles sableuses.\ sup. quaternaires. F1G, 7. — Coupe de Monosterace à la mer Ionienne. (Echelle des hauteurs : 1/25.000. — Echelle des longueurs : 1/50.000) La coupe est d’ailleurs absolument identique à celle que nous avons étudiée à S.Maria di Catanzaro, au Monte S. Maria. Au-dessus de la plage actuelle très étroite, les premières collines sont formées par les marnes du Pliocène ancien !. Comme toujours à ce niveau, la faune, de grande profondeur, est peu abondante et peu variée : je n'y ai guère rencontré que des Mucula sulcala Bronn, Nassa semistriala Br., etc. D'après de Stefani ([g1], p. 171), on y trouve encore, parmi les formes les plus caractéristiques : Surcula Lamarcki Bell., Drillia sigmoidea Br., D. modiola Jan, Nassa italica Mayer, Isis peloritana Segu., etc. La stratigraphie et la paléontologie sont donc absolument d'accord pour nous faire considérer ces marnes comme appartenant au Pliocène ! Pour G. Seguenza, c'est de l'Astien qui, plus en amont, viendrait buter en dis- cordance contre le Zancléen du Monte Tavoleria : nous avons montré à propos de la coupe de Gerace, que cette interprétation devait être absolument rejetée. D'ailleurs le simple examen de la carte géologique au r/50.000 donnée par cet auteur pour les environs de Monosterace ([206], pl. 11), montre immédiatement que la limite de son Astien et de son Zancléen ne correspond à rien de réel. Univ. DE Lyon, — Gicnoux. A 90 COTE IONIENNE DE LA CALABRE MÉRIDIONALE ancien, et exactement synchroniques des marnes blanches inférieures du Monte S. Maria. $ Entre la mer et le village de Monosterace ces marues sont nivelées par une ancienne plaine côtière quaternaire à une altitude de 80 à 100 mètres. Elles sont donc ici recouvertes, par ravinement et en discontinuité com- plète, par une mince couche de sables jaunes et de cailloutis dont nous reparlerons à propos du Quaternaire. Mais les collines qui s'élèvent à l'Ouest de Monosterace (chaîne du Monte Rosito, à 170-200 mètres), et dominent les fragments de cette plaine côtière, vont nous montrer au contraire les sédiments par lesquels se continue, au-dessus des marnes, la série pliocène. Là, à mesure que l’on s'élève, on voit en effet ces marnes commencer à alterner avec des bancs sableux ou gréseux, de sorte que la partie supérieure des collines est formée de sables ou graviers blancs avec intercalations de marnes sableuses : mais ici les termes supé- rieurs de la série, correspondant aux alluvions des plateaux du Détroit de Catanzaro, ont été enlevés par l'érosion : jusqu’à l'extrême sommet des crêtes du Monte Rosito, on n’observe pas trace de facies continental et les faunes témoignent même d’une profondeur encore notable. Ces sables supérieurs sont en effet très fossilifères : ils renferment une faune nettement calabrienne. Stratigraphiquement et paléontologique- ment, nous retrouvons donc là la continuation directe des gisements calabriens de Caraffa et de S. Maria di Catanzaro. Et ici, comme dans cette dernière localité, il semble que la faune « postpliocène » débute dans un banc gréseux, encore intercalé dans les marnes, et où abonde plus particulièrement la Cyprina islandica ; mais les éboulis ne permet- tent que difficilement de retrouver cette succession stratigraphique, et les faunes ont trop d'affinités pour que l'on puisse établir des subdivisions dans le Calabrien. Cette faune calabrienne de Monosterace m'a fourni une longue liste d'espèces que l’on trouvera dans l’appendice. Il s’agit presque uniquement d'espèces actuelles, dont quelques-unes témoignent d’une profondeur notable, par exemple : _Limopsis anomala Eichw., Nucula sulcata Bronn, Ostrea cochlear Poli, Chlamys septemradiatus Müll, Turbo pelorita- nus Cantr., etc. Comme formes caractéristiques, en tenant compte de mes propres récoltes et des listes de Seguenza [206] (que de Stefani se borne à reproduire sans y rien ajouter), je puis signaler à Monosterace : an et CONCLUSIONS p1 Espèces septentrionales : Buccinum undatum L. B. humphreysianum Benn. Natica Montacuti Forbes Cyprina islandica L. Chlamys septemradiatus Müll. Espèces éteintes : Nassa musiva Br. Nassa semistriata Br., var. ca- Dentalium rectum L. labrensis nov. Chama placentina Defr. Pecten cf. Planariæ Simonelli Nucula placentina Lmk. Presque toutes ces formes persistent encore dans le Sicilien, mais le Pecten et la Nassa semistriata, var. calabrensis, sont très spéciales au Pliocène. D'ailleurs, la stratigraphie est trop claire pour que l’on puisse conserver le moindre doute et on peut conclure que : Le « Postpliocène » de Monosterace est l'équivalent exact de celui du détroit de Catanzaro ; comme lui, il fait suite en continuité parfaite! au Pliocène ancien; il fait donc partie de la série pliocène, telle que je l’ai entendue, et sa faune nous montre qu'il doit rentrer dans l'étage calabrien. 4° Conclusions. Ainsi, sur tout le versant oriental de la Calabre méridionale, les massifs cristallins ont été recouverts d'une série continue de sédi- ments pliocènes. Représenté près de la côte actuelle par des argiles blanches et des sables de mer profonde, ce Pliocène devient de plus en plus littoral à mesure qu'on se rapproche des anciens rivages, tout le long desquels on retrouve une zone de récifs zoogènes à Amphisté- gines et Bryozoaires; cette accumulation atteint son épaisseur maximum près de la mer lonienne et là il est possible, grâce aux faunes, d'y distinguer, à sa partie supérieure, un étage calabrien ou pliocène récent représenté par des sables et argiles sableuses de grande profondeur. Toute cette série se réduit de plus en plus dans l'intérieur des terres, et, sur la ligne de partage des eaux, entre ! Je n'ai pu observer la « légère discordance » que de Stefani dit exister entre le Pliocène et le « Postpliocène »; il y a au contraire passage par alternances répétées entre le facies marneux du Pliocène ancien et le facies sableux du Calabrien,. D2 VALLÉE DU MESIMA ET GOLFE DE GIOIA la Serra et l’Aspromonte, nous retrouvons, pour témoigner de l’ancien niveau de base de la fin du Pliocène, d'immenses plateaux à goo mètres, recouverts de lambeaux très peu épais de sables et cailloutis marins sans fossiles. Ainsi, conformément à l'opinion de de Stefani, Seguenza, Cortese, la mer du Pliocène supérieur est venue ici recouvrir et niveler les crêtes entre la Serra et l’Aspro- monte. S 3. — LA VALLÉE DU MESIMA ET LE GOLFE DE GIOIA lo Description stratigraphique. Entre les massifs cristallins du Capo Vaticano et de la Serra, qui forment, comme on l’a vu, deux traits essentiels de la structure de la Calabre, les cartes géologiques montrent une longue bande de formations phiocènes et postphiocènes. Vers le Nord, ces formations, par la région de Filadelfia, Curinga, Maida, vont se relier à celles qui remblaient l'isthme de Catanzaro. Vers le Sud, elles viennent s'appuyer, dans la région de S. Eufemia, Sinopoli, contre le massif ancien de l’Aspromonte. Enfin au fond du golfe de Gioïa, elles fran- chissent la ligne de partage des eaux de la Calabre dans sa partie déprimée entre la Serra et l’Aspromonte; là, en effet, entre Citta- nova et Mammola, la crête est occupée par de grands plateaux où des lambeaux de formations de cet âge viennent établir la liaison entre le Pliocène du golfe de Gioia et celui de la côte orientale de Calabre ; il a été parlé plus haut (p. 46) de cette continuité. Transportons-nous au château qui domine la ville de Monteleone, à 556 mètres, et d’où le panorama s’élargit, vers l'Est, de la Serra à l’Aspromonte, embrassant d’un seul coup toute la Calabre méridio- nale : à nos pieds, s'étend la dépression qui sépare la Serra du massif du Capo Vaticano ; et dans tout le fond de cette dépression on peut reconnaître d'une manière admirable un vaste plateau morcelé à l'infini par les fleuves Mesima et Marepotamo et leurs nombreux affluents. Ces cours d’eau ont minutieusement disséqué ce plateau primitivement continu, de manière à le transformer en une multi- tude de crêtes allongées : dans quelques-unes, une partie de la cou- verture alluviale aplanie est conservée ; d'autres sont réduites à STRATIGRAPHIE 53 des arêtes étroites où les sables du Calabrien apparaissent à nu, formant de grands talus abrupts et stériles ; dans les plus basses, les formes arrondies et les pentes adoucies nous montrent que l'érosion a mis à nu les marnes du Pliocène ancien. L'examen d’une carte topographique à grande échelle suffit d'ailleurs à se rendre compte de cette constitution. Nous retrouvons donc ici le même cycle de remblaiement pliocène que nous avons jusqu à présent suivi partout en Calabre, et mon- trant toujours en superposition concordante et en continuité par- faite, les marnes du Pliocène ancien, les argiles sableuses et les sables du Calabrien couronnés par les alluvions continentales de la fin du Pliocène (dites quaternaires sur les cartes géologiques). Dans la région que nous venons d'examiner, les restes de ce plateau sont à une altitude de 280 à 300 mètres. Les morceaux les plus étendus qui en aient subsisté portent les noms de Piano Pongali (285 mètres), Piano Settore, Piano Cavallo, Piano delle Caverre, etc. Tout le long du versant occidental de la Serra, les derniers fragments de ces plateaux pliocènes, recouverts et nivelés par les alluvions supérieures, forment ainsi un rebord frangé et découpé à l'infini par les vallées qui descendent des massifs cristallins ; cette zone, de parcours facile en raison de son horizontalité, constitue donc comme un vaste trottoir sur lequel viennent se localiser les cultures et les villages. Dans un article antérieur [143], j'ai émis l'opinion que l’abrupt dominant les plateaux pliocènes et conduisant vers l'Est à un autre plateau plus élevé, à 600 mètres, pouvait être considéré comme un abrupt de faille ! ; de sorte que le niveau de base qui a déterminé la formation de la plaine alluviale se retrouverait dans le plateau à 600 mètres auquel vient aboutir l’abrupt. Et plus encore, ce plateau à 60o mètres vient lui aussi aboutir vers l’Est à un autre abrupt au sommet duquel se développe la topographie vieillie de la Serra ; un coup d'œil sur les cartes à grande échelle montre en effet immédia- tement que ce massif est constitué par un vaste plateau ondulé à 1.000 mètres, d’où s'élèvent par des pentes insensibles les som- 1 Voir aussi Taramelli [221], qui a suggéré, presque en même temps, la même hypothèse, 54 VALLÉE DU MESIMA ET GOLFE DE GIOIA mets culminants, compris à des altitudes variant entre 1.200 et 1.400 mètres. Nous avons donc là les traces d'une vaste pénéplana- tion, et, dans mon hypothèse, toutes les surfaces aplanies que nous retrouvons à 1.000 mètres, puis à 600 mètres, enfin vers 300 mètres, dans les plateaux pliocènes, seraient toutes de même âge et la déni- vellation des unes par rapport aux autres serait due à des causes tectoniques. Cherchons maintenant le prolongement de ce grand plateau allu- vial, du côté du Capo Vaticano. Nous le voyons de ce côté s’élever peu à peu, par des gradins mal précisés, jusqu'aux immenses éten- dues, aplanies dans le cristallin, qui forment les parties eulminantes du massif vatican. Ces pentes plus douces sont d'ailleurs entière- ment constituées par les terrains pliocènes qui transforment ainsi en simples ondulations les gradins si nets accusés par les roches cris- tallines sur le versant Est de la dépression. Mais sous le manteau sédimentaire semblent subsister encore les dislocations qui ont donné naissance à de tels gradins dans le socle cristallin, ici cachés en profondeur. La coupe de Monteleone. Et à Monteleone, l'une de ces dislocations apparaît nettement. En effet, le château que nous avons pris comme point d’observa- tion est bâti sur les roches cristallines. Du côté du Capo Vaticano, il émerge à peine d’une grande région de plateaux archéens. Mais vers la dépression pliocène une falaise abrupte plonge d’un coup jusqu’au fond du ravin qui sépare Monteleone du village de Piscopio. Et contre cette falaise cristalline vient buter la série pliocène dont on peut voir une coupe sur le versant opposé du même ravin. On y retrouve la succession habituelle : une puissante formation de marnes blanches qui descend jusqu'au fond du ravin (c'est la loca- lité dite « I Molini ») ; au-dessus, des sables jaunes ou blancs, plus ou moins agglutinés en grès et très fossilifères; au-dessus, enfin, et toujours en concordance, les alluvions continentales qui cou- ronnent la série calabrienne. C'est là la série de remblaiement habituelle du Pliocène, depuis les marnes inférieures jusqu'aux sables supérieurs. C’est d’ailleurs seulement dans ces derniers que j'ai récolté une faune un peu abondante (voir la liste dans l’appendice, gisement dit de Piscopio); STRATIGRAPHIE D5 elle ne comprend que des espèces vivantes et ne peut être par suite que calabrienne supérieure. Je reviendrai d'ailleurs plus loin sur l'étude des faunes de la région. 600 Chäleau de Monteleone PRLRTRES ++++++++ +++t+t+t+t++ ++t+t++t+++t++ SES GE PSE CR PR NU NT TT 7 PT DT EEE SOS CES 400 +++ +++ +++ + 227€ Piscopio 500 C3 en, ttttttt+ + so Se, © CA KA 20 a © DDR RE RE RO he en De te SE, Faille FiG, 8. — Coupe montrant le contact par faille du Pliocène et des roches cristallines à Monteleone. : Pg. — Sables et graviers . . . . . PS OR a Et Ps. — Argiles sableuses et sables . . | PRISE Pa. — Argiles blanches. . . . . . . Pliocène ancien, Echelle des hauteurs et des longueurs, environ 1/13.000, En tout cas, de cette coupe de Monteleone figurée ci-dessus, on peut retenir deux enseignements principaux : 1° [ci, comme partout ailleurs, les sables dits « postpliocènes » à faune très voisine de la faune actuelle sont intimement liés aux marnes pliocènes inférieures sous-jacentes, auxquelles ils passent par l'intermédiaire d’alternances répétées. 2° Le contact du Pliocène avec l’Archéen ne peut guère s'expli- quer autrement que par un contact de faille; car ce contact est presque vertical et le Pliocène n’y montre aucun indice de l'ap- proche d'un rivage (voir plus loin, p. go, des faits analogues dans la coupe de Terreti). Ainsi quand nous nous plaçons au château de Monteleone, nous avons à nos pieds, dans la dépression du Mesima, une zone pliocène effondrée, reste d’un manteau sédimentaire général autrefois plus étendu. Aussi ai-je pu émettre l'avis que les grands « fossés » tectoniques de la Calabre étaient en partie d’âge postérieur au Pliocène ; et cela nous conduit tout naturellement à voir dans les falaises rectilignes qui dominent cette dépression au Sud-Est, des « abrupts de faille », comme je l’ai indiqué plus haut. Ces faits nous suggèrent en outre des réflexions intéressantes rela- 56 VALLÉE DU MESIMA ET GOLFE DE GIOIA tivement à la position des anciens rivages de la fin du Pliocène. Du côté du Capo Vaticano, rien n'indique l’approche de ce rivage, car la coupe précédemment étudiée au pied du château de Monteleone nous montre au contraire un grand développement des facies argileux pro- fonds. Ainsi il est presque certain qu'au Pliocène ce massif du Capo Vaticano devait être en grande partie noyé sous les eaux : c'est à cette conclusion qu'arrive d’ailleurs M. de Stefani [91]. Au contraire, sur le bord oriental du détroit du Mesima, il est très probable que la mer pliocène devait s'arrêter, à peu de chose près, à l’endroit où les parois cristallines s'élèvent aujourd’hui au-dessus des plateaux pliocènes (dans la région de Soriano, par exemple). Ici, en effet, les conglomérats envahissent une grande partie de la série pliocène et on voit se répéter des faits analogues à ceux que nous étudierons plus loin dans la région de Castrovillari. Il y aurait donc, comme on le voit, une coïncidence curieuse entre la position approximative de l’ancien rivage pliocène et le grand effon- drement qui a abaïssé de 600 à 300 mètres, au voisinage de Soriano, la masse des sédiments pliocènes. Il est facile pourtant de se rendre compte que cette coïncidence est toute naturelle. Gar cest à la suite d’effon- drements prépliocènes que la mer a pu envahir le « fossé » tectonique du Mesima ; ainsi les contours de la mer pliocène correspondent déjà à des lignes d’effondrement, et il est naturel que ce soient aussi ces mêmes lignes qui aient rejoué à la fin du Pliocène. La coupe du Rio Gacariaci, près Mileto. Un peu au Sud de la coupe précédente, on peut encore avoir un bon aperçu de la série pliocène dans le vallon du Rio Cacariaci, qui coule entre Monteleone et Mileto. Ici encore, la partie inférieure du ravin, où le ruisseau coule encaissé dans une gorge étroite, est formée de marnes bleues extrêmement fines et plastiques à Ostrea cochlear Poli; puis viennent des marnes blanches à facies moins profond, riches en grosses Térébratules du groupe ampulla et en petits Amussiopecten (on peut mettre ici la limite entre Pliocène ancien et Calabrien) ; enfin la série se termine par des sables et grès blancs ou jaunâtres, renfermant la faune calabrienne (voir la liste dans l’appendice, gisement de Mileto). Le passage des marnes aux sables peut encore s’observer nettement en remontant la grande route de Mileto à Nao. Mais, dans cette région, la série pliocène est ‘ encore incomplète, car les alluvions du Calabrien supérieur ont le STRATIGRAPHIE 97 plus souvent disparu par dénudation; aux environs de Mileto, par exemple, le sol est formé par les marnes et sables marins. Cette dénudation s'accentue si on continue à descendre de Mileto jusqu'au centre du golfe, On chemine alors sur les marnes blanches du Pliocène inférieur. Mais vers le fond du golfe, la région prend un tout autre caractère : nous entrons dans de grandes plaines d’allu- vions quaternaires, à l'altitude de 80 à 100 mètres, dont le soubas- sement est formé par des argiles sableuses, siciliennes, qui seront étudiées dans la suite. Partie Sud du golfe de Gioïia. Sur le bord Sud du golfe de Gioïa, entre Cinquefronde et Radicena, les alluvions du Pliocène sont beaucoup plus continues et plus étendues, car elles n'ont pas été aussi attaquées par l'érosion que dans la vallée du Mesima; mais sous ces alluvions, les cartes géo- logiques nous montrent toujours les mêmes argiles et sables plio- cènes. Le tout vient buter contre une paroi cristalline abrupte, qui s'élève d’un jet au-dessus de la plaine de Cittanova, Polistene, Cin- quefronde, jusqu'au sommet du Monte Cappella et aux Piani della Limina. Et sur ces hauts plateaux nous rejoignons les sédiments pliocènes qui remontent de la*mer [onienne (voir plus haut). Ainsi, étant donné que les marnes et sables pliocènes affleurent, d’une part, sous les alluvions de Polistena à 200 mètres d'altitude, et d'autre part viennent, à 4 ou 5 kilomètres plus à l'Est, niveler les hauts plateaux à 1.000 mètres, il faut bien admettre là une intense déformation d'origine tectonique ; la plaine de Gioia se montre donc comme effondrée par rap- port au massif ancien et le grand abrupt cristallin qui domine cette plaine entre Cinquefronde et Radicena nous apparaît équivalent au double escalier par lequel on s'élève du détroit du Mesima jusqu'aux plateaux de la Serra. Et si maintenant nous achevons jusqu’à Gerace notre traversée du faîte calabrais de manière à comparer les deux versants, nous y verrons de suite des différences bien frappantes : la pente douce et presque con- tinue du versant ionien s'oppose à l’abrupt du versant tyrrhénien, Ainsi nous apparaît dans la morphologie cette dissymétrie de la Calabre qui avait tant frappé Suess, cette opposition entre un versant oriental uniforme et 1 C'est dans ces couches du Calabrien supérieur que M. de Stefani a signalé ([91}, p. 237) des couches de ponce volcanique provenant sans doute des Lipari : ainsi ces volcans seraient aussi anciens que le Vésuve, l'Etna et le Vulture. 58 VALLÉE DU MESIMA ET GOLFE DE GIOIA rectiligne et un versant occidental découpé par ces brusques effondre- ments en « ovales méditerranéens ». On croit bien voir là, avec le savant géologue de Vienne, un immense anticlinal dont la clef de voüte aurait disparu sous les eaux tyrrhéniennes. Mais poursuivons encore notre étude plus au Sud, arrivant ainsi sur le flanc Nord de l’Aspromonte. Les sédiments pliocènes qui bordent ici ce massif ont été profondément découpés par les torrents et donnent lieu ainsi à de très beaux affleurements dont quelques-uns sont très fossilifères. La coupe en est d’ailleurs toujours la même: des marnes à la base, surmontées, en série continue, de sables, de gra- viers marins et enfin de conglomérats continentaux. Le sommet de cette série de remblaiement, formant plateau à 500 mètres d’alti- tude environ, porte en particulier les villages de S. Eufemia d'Aspro- monte, Sinopoli, etc. Et ces plateaux viennent s’adosser comme partout à un abrupt de roches cristallines qui s'élèvent jusqu'aux immenses plaines des Piani d'Aspromonte, nivelées dans le massif ancien. À mesure d’ailleurs qu'on s'approche de ce massif, le Pliocène prend un facies de plus en plus côtier. À S. Eufemia d’'Aspromonte en particulier, les profonds ravins qui entourent le village montrent l’épaisseur énorme .qu acquièrent ici les conglo- mérats renfermant des blocs de très grande taille. Quant aux Piani d'Aspromonte, on ne voit plus trace, à leur surface, de sédiments marins : le sol est recouvert de sables, de limons rouges ou jaunes; c’est le résultat du remaniement, par ruissellement, des produits de décomposition des roches cristallines!. L’épaisseur de ces sédiments qui peut atteindre plusieurs mètres, leur état d'altération et de rubé- faction très prononcée, nous indiquent que la période de pénéplana- tion pendant laquelle ils ont pris naissance a dû être fort longue et que cette période est d'âge vraisemblablement assez reculé. Comme pour la Serra, je crois qu'il faut voir là la pénéplaine qui bordait la mer pliocène, laquelle a fourni le niveau de base sous lequel cette péné- plaine a pris naissance. Ici, encore, c'est une dislocation tectonique qui a coupé en deux cette ancienne surface topographique. Le bel abrupt régulier et rectiligne haut de plus de 40o mètres, formé par les roches cristallines au-dessus de S. Eufemia, serait ainsi un abrupt ! Toutes ces observations ont été faites en compagnie de M. Depéret. FAUNES 59 de faille [143] et la localisation de cet abrupt au voisinage de l’ancien rivage pliocène s'expliquerait comme dans la vallée du Mesima. 20 Les Faunes pliocènes, On doit s'attendre à retrouver là la même succession de faunes qu'ailleurs, à savoir : à la base, dans les marnes, la faune du Pliocène ancien; dans les sables (et la partie supérieure des marnes), la faune du Pliocène récent, intimement liée à la précédente. Faunes du Pliocène ancien. Mais ici l'extrême base de la série pliocène n’est presque jamais visible, par suite du peu de profondeur des entailles qu’y ont faites les torrents. Et ainsi, il ne m'est pas possible de citer un gisement où la faune pliocène ancienne se rencontre d’une manière suffisam- ment riche et typique. C'est probablement la raison qui a conduit M. de Stefani ([911 p. 138) à considérer comme muiocènes la plus grande partie des marnes que nous avons décrites comme pliocènes : « Tout le bassin des fleuves Mesima et Marepotamo, entre la Serra et le Capo Vaticano, est, dit-il, rempli par les marnes tortoniennes recouvertes par endroits de sables postpliocènes. » Il est très probable en effet que sur le côté occidental de la région qui nous occupe, dans les environs de Palmi et sur les flancs du Capo Vati- cano, les sables miocènes à Peclen Besserti et P. scabrellus (il s’agit plutôt de la forme miocène dénommée P. sarmenticius par Goldfüss) ont pu être confondus avec les sables du Pliocène récent, de même que les marnes blanches micacées du Miocène ont pu l’être également avec les marnes du Pliocène ancien. Mais dans l'ensemble il est bien indéniable que les marnes blanches remblayant le fond du golfe de Gioïa et de la vallée du Mesima appartiennent à la série pliocène, car ces marnes, à leur partie supérieure, passent par alternances aux sables du Pliocène récent, comme j'ai pu le constater moi-même aux environs de Monteleone et de Mileto (le fait est bien visible en particulier entre Mileto et Nao); ét à leur partie inférieure elles ne présentent aucune coupure qui autori- serait a considérer la base comme miocène et le sommet comme pliocène. Au point de vue paléontologique, d’ailleurs, on n’y rencontre aucune espèce caractéristique du Miocène. Je m'en tiendrai donc à la manière de voir qui a guidé l'exposé stratigraphique précédent, et, conformément aux indications de la carte géologique officielle, je considérerai cette puis- sante formation marneuse comme pliocène. Et je serai tout à fait d'accord en ceci, avec À. Neviani, qui a longuement [182] discuté la question. 60 VALLÉE DU MESIMA ET GOLFE DE GIOIA D'ailleurs, certains indices paraissent témoigner de l'existence de faunes pliocènes anciennes. Aïnsi, il faut noter la présence du Monoceros monacanthos Br., signalé par de Stefani dans des maté- riaux récoltés par le professeur Pignatari près de Vallelunga; c’est là une espèce inconnue partout ailleurs dans les faunes calabriennes. Deux espèces essentiellement pliocènes anciennes, le Pecten histrix Dod. et le P. cristatus Br., sont signalées dans ces marnes par Neviani [181, 182]. D'autres espèces à cachet archaïque ( Axinus rostralus Pecchioli, Turritella subanqulata Br., Fusus longiroster Br., Surcula nodulifera Phil., Haminea varicosa Ponzi, et surtout Nassa italica Mayer) sont citées par Seguenza à S. Cristina d'Aspro- monte : et il considère même ce gisement comme type de son « Astien à facies littoral » ; en réalité et conformément à l'opinion de C. de Stefani ([191] p. 234), on a certainement là du Pliocène supérieur, indiqué par des formes septentrionales que nous citerons plus loin : mais il se peut aussi que la liste de Seguenza contienne un mélange de plusieurs zones, dont les plus inférieures seraient pliocènes anciennes. Faunes du Pliocène supérieur. Mais la plus grande partie des listes données par les auteurs pour cette région, et celles aussi que m'ont fournies mes propres récoltes!, se rapportent au Calabrien et même le plus souvent au Calabrien supérieur. Comme formes éteintes, les plus fréquentes sont : Turritella vermicularis Brocchi (S. Nicolà di Crissa, Vallelunga, d'après de Stefani). Terebratula Scillæ Seg. (Jonadi, d'après de Stefani, Mileto). Dentalium rectum L. (Varapodio, Vallelunga, d’après de Stefani). Les deux premières de ces formes sont essentiellement pliocènes, Comme espèces septentrionales : Cyprina islandica L. (S. Cristina, d’après Seguenza). Neptunea sinistrorsa Desh. (S. Cristina, d’après Seguenza). Buccinum undatum L. (Vallelunga, d’après de Stefani, Piscopio). B. humphreysianum Benn. (Vallelunga, Zea catania, d’après de Stefani). Waldheimia septata Phil. (S. Giorgio Morgeto, d’après de Stefani). 1 Voir, en particulier, dans l'appendice, la faune des. gisements de Mileto et de Piscopio. DÉTROIT DE MESSINE 61 Cette association des Cyprines, des Buccins et même, ici, de la grande Neptunea sinistrorsa, avec les Turritella vermicularis et les Térébratules du groupe ampulla, est bien caractéristique du Cala- brien. Nous l’avions observée dans le détroit de Catanzaro au même niveau, toujours dans les couches immédiatement inférieures aux alluvions qui couronnent la série pliocène. CHAPITRE II LE DÉTROIT DE MESSINE Le détroit de Messine et spécialement la côte calabraise entre Scilla et le Capo dell’ Armi, est certainement, au point de vue des formations marines récentes, la région la plus intéressante de toute l'Italie et même probablement de toute la Méditerranée occidentale. Cela tient à des causes multiples : d’abord, grâce au voisinage des grands centres de Messine et de Reggio, les environs ont été depuis longtemps explorés et étudiés par les naturalistes. Puis, étant donné l'intensité des mouvements récents qui ont donné au pays sa con- figuration actuelle, les attaques de l'érosion régressive, plus vives ici que partout ailleurs, découpent une foule de sections naturelles dont la netteté est sans cesse rafraîchie. Enfin et surtout, toutes ces particularités coincident avec une richesse paléontologique admi- rable : toute cette partie de la côte calabraise constitue, en quelque sorte, un inépuisable musée naturel où il est facile de réunir rapi- dement des collections de fossiles de toutes les zones pliocènes et quaternaires. Aussi, et pour toutes ces raisons, 1l y a là pour nous un champ d'observations qui mérite une étude spécialement approfondie. D'autant plus qu'à tous ces avantages viennent s’adjoindre quelques inconvénients qui, augmentant la difficulté du sujet, en augmentent par là même l'intérêt. Car ces mêmes mouvements récents qui facilitent nos observations, ont profondément modifié l'allure des couches étudiées : les géologues du Nord se voient avec surprise contraints d'adopter pour l’étude du Pliocène le plus supé- 62 DÉTROIT DE MESSINE rieur, des méthodes qu'ils réservent d'ordinaire pour les terrains plus anciens, le Miocène tout au moins; car le Pliocène supérieur est ici véritablement disloqué. Si l’on ajoute que les gisements fos- silifères, tout le long de la côte, se succèdent de la façon la plus capricieuse dans tous les niveaux du Pliocène et du Quaternaire, ayant presque tous des facies très voisins, on comprendra combien la stratigraphie devient ici difficile : il convient d’user de la plus grande réserve dans l'interprétation des listes données par les anciens auteurs, en général plus soucieux de l'étude paléontologique de leurs matériaux que de leur exacte répartition stratigraphique. Ces diverses particularités nous expliquent à la fois comment la bibliographie relative à cette région spéciale est si abondante, et comment nous y trouvons en somme si peu de documents utilisables pour l'étude stratigraphique poursuivie ici. Je laisserai d’abord de côté toute une série de travaux anciens dus aux premiers visiteurs de l'Italie du Sud. Les uns, comme Vom Rath, Bür- gerstein et Noë,etc., étaient plutôt des explorateurs, ne s’attachant guère aux observations de détail et curieux surtout des grands traits de la structure morphologique. D’autres, au contraire, étaient uniquement paléontologistes et ne se souciaient pas du tout de la stratigraphie : tels furent Costa, Pilla, et surtout Philippi : leurs travaux, restés fonda- mentaux au point de vue de la diagnose et de la dénomination des espèces fossiles, ne peuvent être malheureusement d'aucun secours au stratigraphe. C'est G. Seguenza qui ouvre l'ère des observations vraiment fruc- tueuses. Le détroit de Messine a été véritablement son domaine et il a passé sa vie à l’étudier. Ses deux plus grands ouvrages [206, 207] sont en grande partie consacrés à l'étude des terrains récents développés le long du détroit. J'aurai l’occasion de leur faire de larges emprunts et de constater que, malgré d'importantes erreurs stratigraphiques, Seguenza a été sur beaucoup de points un véritable précurseur. D'ailleurs, son œuvre eut très vite un retentissement considérable et, en France surtout, c'est elle qui constitue encore la source d'informations la plus volontiers. consultée pour l'Italie du Sud. Les travaux de détail de Mantovani [165] et d'ensemble de de Stefani [91] ! Spécialement en ce qui concerne l'étude détaillée des faunes fossiles au point de vue de leur facies et de leur com raison avec les faunes vivant actuellement aux différentes profondeurs. GÉNÉRALITÉS 63 et de Cortese [42, 48, 51, 53], inspirés de points de vue très divers, sont venus compléter et rectifier l’œuvre de Sezuenza. Le célèbre auteur de la carte géologique de la Calabre au 1/100.000, œuvre colossale, n'étant point paléontologiste, ne semble pas s'être intéressé d’une manière bien spéciale aux faunes pliocènes et quaternaires du détroit. Au contraire, le savant paléontologiste de Florence y a fait une étude strati- graphique minutieuse des terrains récents. Comme nous l'avons vu, c'est à lui que revient l'honneur d’avoir fait définitivement justice des erreurs stratigraphiques lancées par Seguenza : avec un remarquable esprit de synthèse il a saisi et exprimé d'une manière fort nette les rapports entre le Pliocène calabrais et celui du reste de l'Italie. Tres certainement son Excursion scientifique en Calabre, trop peu connue en France, est l'ouvrage qui donne l’idée d'ensemble la plus claire et les détails les plus précis sur le Pliocène et le Postpliocène de cette région. Enfin, toute une science nouvelle, la sismologie, a grandi autour de Messine : des savants comme Baratta et Mercalli y ont étudié les tremble- ments de terre dans leurs moindres détails et avec un souci d’objectivité, une prudence dans les synthèses, que n'ont point imités quelques savants étrangers, comme W. H. Hobbs, et, tout récemment, certains géologues belges. Mais en somme, et si on se borne au problème spécial de la stra- tigraphie des terrains récents, cette bibliographie se réduit beaucoup et il ne nous reste plus guère à citer que les noms de Fuchs, G. et L. Seguenza, Botti, Cortese, de Stefani, de Stefano, Mantovani. C'est d’après les indications de ces auteurs, auxquelles j'ai pu ajouter quelques observations personnelles, que je décrirai le Pliocène et le Quaternaire du détroit. Caractères généraux du Pliocène, Îci, comme partout ailleurs, la stratigraphie d'ensemble des dépôts récents peut se schématiser très simplement : on retrouve d'abord une série pliocène continue, où, à la base, existe la faune pliocène ! J'ai laissé entièrement de côté toute la longue série de publications récentes suscitées par le tremblement de terre de 1908, et qui, très intéressantes au point de vue sismologique, ne paraissent avoir révélé aucun fait nouveau bien essentiel pour la stratigraphie du Pliocène et du Quaternaire. Je signalerai seulement la carte géologique au 1/25.000 des environs de Messine dressée à cette occasion par l'ingénieur Francui (Boll. d. R. Comit. geol. d'Italia, vol. 40, 1909, pl. VI). 64 DÉTROIT DE MESSINE ancienne, tandis qu'au sommet, calabrien, est apparue déjà la faune dite « postpliocène ». Et c'est en discontinuité, parfois même en discordance complète avec cette série, qu'on observe des formations quaternaires que nous étudierons plus loin. Mais ici interviennent deux particularités qui rendent la série pliocène du détroit de Mes- sine assez différente de ce qu’elle est ailleurs : 1° Des dislocäations récentes l’affectent; elles se traduisent, comme nous le verrons en détail, soit par des failles ou des flexures qui amènent des contacts anormaux et empêchent de faire de la strati- graphie par continuité, comme on est habitué à le faire d'ordinaire pour le Pliocène, soit par un pendage très accentué des couches, pendage qui, nous le verrons, fut interprété d'une manière tout à fait autre par quelques géologues italiens. 2° La base de la série n’a point ici la puissance et la régularité que nous lui avons vues jusqu à présent. Et, spécialement dans toute la région comprise entre Messine, la Punta del Faro, Villa S. Giovanni et Reggio, on constate une réduction très nette du facies habituel de marnes pliocènes que nous avions trouvé si puissamment déve- loppé dans toutes les autres parties de la Calabre : cela tient en partie au voisinage des masses émergées de l’Aspromonte et des monts Péloritains, et en partie aussi, sans doute, au régime de cou- rants violents qui a dû toujours régner sur l'emplacement du détroit de Messine, et y empêcher l'accumulation des sédiments fins ; aussi quand le Pliocène ancien y acquiert une épaisseur un peu notable, il est souvent représenté par des facies de calcaires zoogènes à coraux et brachiopodes. Tels sont les principes généraux qui vont nous éclaircir le pliocène du détroit, et que l'étude de détail qui suit suffira à justifier. J'ai placé dans ce chapitre l'étude de la côte sicilienne du détroit en même temps que celle de la côte calabraise ; car, à tous les points de vue, le massif des monts Péloritains, formant l'extrémité Nord-Est de la Sicile, se rattache géologiquement à la Calabre dont il n’est qu'un mor- ceau détaché. Je dirai quelques mots de toutes ces côtes, mais les résultats les plus importants nous seront surtout fournis par la coupe de Gravitelli près Messine, par la coupe des Archi près Reygio, celle de Terreti et celle de Gallina : les autres localités n'offrent qu'un intérêt secondaire, tout au moins au point de vue stratigraphique. GRAVITELLI 69 $ 4. — LA COTE SICILIENNE DU DÉTROIT 1° La Coupe de Gravitelli, près Messine, Je commencerai par l'étude de cette coupe, bien que toute la série n'y soit pas extrêmement fossilifère : par contre, les termes infé- rieurs et supérieurs nous offrent des points de repère bien étudiés et bien nets, et pour cela particulièrement précieux. Les fossiles de Gravitelli sont assez répandus en Italie, dans les collections : aussi la célèbre faune postpliocène qu'on y recueille a-t-elle été souvent prise comme point de comparaison : l'étude paléontologique de cette faune a été faite autrefois par G. Seguenza {207] et par Brugnone. Depuis, le regretté L. Seguenza [211] a repris d'une facon détaillée l'étude de la colline de Gravitelli : ses con- clusions sont assez différentes de celles qu'avait formulées autrefois son père; mais il a eu surtout en vue la stratigraphie précise des couches de base du Pliocène, et son travail, d'une importance capitale à ce sujet, ne traite que tout à fait incidemment du point de vue qui nous occupe. C’est donc d'après les travaux de G. et L. Seguenza que je vais décrire cette coupe : j'y ajouterai les interprétations qui m'ont été suggérées par des visites répétées dans la localité. Il ne sera pas inutile de donner ici des renseignements permettant de retrouver facilement cette localité célèbre, qu'un géologue de passage à Messine peut visiter en quelques heures, car, d’après les seules publica- tions des auteurs, il pourrait être difficile de retrouver le gisement. Il suffit de partir du Jardin Botanique de Messine et d’en longer le mur d'enceinte Sud. La route que l'on prend ainsi suit d’abord la rive gauche d’un torrent (Torrente Portalegni), dans le lit duquel on continuera à remonter jusqu'au « Molino Gravitelli ». Il suffira là de tourner à droite et de suivre un petit chemin conduisant à une exploitation d’argiles à tuiles, dominée par la colline que nous allons étudier, La colline de Gravitelli est située à l'Ouest et tout près de la ville de Messine : car entre la mer et le massif cristallin des monts Pélo- ritains s'étend d’une manière continue une zone de collines très ravinées, constituées par des terrains récents (pliocènes et miocènes) Univ. pe Lyon: — GieNoux 5 66 DÉTROIT DE MESSINE et appuyées contre les roches cristallines. D'ailleurs, entre ces coHines et la mer, les terrains cristallins reparaissent parfois (sur- tout au Sud de Messine, voir la carte au 1/100.000), de sorte que, comme l’a fait justement remarquer L. Seguenza ([211], p. 144), le Pliocène forme ici comme une sorte de synclinal dont l’axe res- terait un peu à l'Ouest de la côte. + nl » des Monts Péloritains F + ca + + ES cristal , Œ--=-n==---=-------=e=sr--e--=2-=-e-- > e F1G.9.— Coupe de Gravitelli, près Messine, en partie d'après G. et L'Seguenza, montrant la position stratigraphique du gisement de mammifères et l’envahissement de la série pliocène par le facies littoral. 7. — Sables et graviers quartzeux blancs très fossilifères . + PATES è 6. — Banc calcaire à Brachiopodes nl AR SN PART IC CRE SApren, 5. — Sables et marnes à foraminifères . . . RO OR e 0 © 4. — Calcaire à Brachiopodes, Coraux, Cirrhipèdes. 3. — Argiles et sables avec rares fossiles He Pliocène ancien. que Pontien pour L.Seguenza. . — Argiles à coquilles “lacustres G oi o — Argiles plastiques à mammifères P. — Conglomérats, facies littoral de tout le Pliocène. a. — Alluvions quaternaires étagées en terrasses mal individualisées. Sur le versant Sud du petit vallon de Gravitelhi, une colline montre d'une manière des plus nettes la coupe figurée ci-dessus : G. Seguenza l’avait déjà très exactement relevée ; mais, préoccupé de retrouver partout les six zones qu'il avait établies [207] dans le Pliocène et le Quaternaire et dont l’individualité n’a paru depuis justifiée en rien, son interprétation se trouve obscurcie par une grande complication et des discordances absolument imaginaires. A. — A la base et au contact des roches cristallines s’observe un puissant ensemble de conglomérats (non marqué sur la fig. 9) con- tenant parfois quelques lits de sables et grès mollassiques : à Gravi- £elli les conglomérats sont particulièrement développés et à éléments énormes. Aucun fossile n’a été rencontré dans ces couches qu'on a regardées le plus souvent comme appartenant au Miocène supérieur; on verra dans la suite qu’elles pourraient peut-être aussi (en l’ab- sence de toute relation avec du Miocène fossilifère) être considérées GRAVITELLI 67 comme l'extrême base de la série pliocène, indiquant un faciés de transgression. Au reste, la question ne nous intéresse pas directe- ment. B. — Puis viennent, sans que l’on puisse voir nettement le contact, des argiles plastiques, bleu-noirâtres, exploitées pour tuiles, et entremélées de quelques bancs plus sableux. Dans la parte inférieure de ces argiles (1 sur la figure) ont été trouvés des restes de mammifères fort bien étudiés par L. Seguenza. On en trou- vera la liste dans le travail de cet auteur ([211]p. 131), et on verra que Seguenza considère cette faune comme exactement synchronique de celles de Pikermi, Samos, du Léberon, et par conséquent comme d'âge pontique. J'ai eu Je plaisir d'examiner les matériaux de M. Seguenza au Musée de Messine en compagnie de M. Depéret. Et ce dernier proposa à M. Seguenza quelques rectifications de détail, à la suite desquelles la faune de mammifères de Gravitelli apparaît comme plus jeune que le Pontique, et exactement compa- rable à la faune de Casino (près Sienne) et à celle des couches à Congéries (Cf. Depéret [86|). Ainsi les argiles plastiques de Gravi- telli doivent être considérées comme appartenant à l’extrêéme base du Pliocène, ce qui est tout à fait d'accord, comme nous le verrons, avec la stratigraphie. Car L. Seguenza, qui croyait ces couches pon- tiques, avait longuement insisté sur la « pliocénicité » de ce Pon- tique, qui lui semblait mise en évidence par la coupe de Gravitelli!. Dans leur partie supérieure (2 sur la figure) les argiles contiennent des bancs de lignite, avec empreintes végétales difficilement déter- minables et des débris de coquilles lacustres : Seguenza y cite seulement des opercules de Bythinia, dont j'ai pu moi-même con- stater l'abondance, et un Ostracode, le Cypris faba Desm.; c'est la une faune sans caractère, qui peut être aussi bien miocène ou pliocène: mais elle est intéressante en ce qu’elle nous révèle un facies nette- ment lacustre à l'extrême base du Pliocène. C. — Vers le haut, ces couches lacustres passent en continuité à des argiles, entremélées aussi de lits sableux, mais contenant une faune marine bien nette (3 sur la figure). Visiblement il y a eu là ! Ayant bien vu qu'au point de vue stratigraphique ces argiles à mammifères étaient intimement liées aux couches supérieures pliocènes, et les croyant d'autre part néttement pontiques parleur faune, L. Seguenza tirait de là un argument pour réunir le Pontique au Pliocène. 68 DÉTROIT DE MESSINE envahissement progressif, au cours de la transgression pliocène, des lagunes où s'étaient déposées les argiles à mammifères. Quant à cette faune marine, comme on pouvait s’y attendre d’après l’âge des couches sous-jacentes, c’est une faune des plus typiques du Pliocène ancien. L. Seguenza en a donné (p. 135) une liste soigneusement revisée. J'y relèverai la présence de: Amussium cristatum Br., A.duodecimlamellatum Goldf., Cardita rudista Lmk., Turritella Archimedis Brongn., Columbella subulata Bell., Dolichotoma cata- phracta Br., Raphitoma harpula Br., R. monile Br. Ce sont là des espèces classiques, suffisantes pour nous faire ranger cette faune sans hésitation dans le Pliocène ancien !. G. Seguenza l'avait consi- dérée autrefois comme tortonienne : cette erreur reposait sur des déterminations ou citations inexactes rectifiées par son fils: d’ailleurs l’âge pliocène de ces couches résulte nécessairement de leur position stratigraphique. D. — Au sommet de cette assez puissante série d'assises sableuses (4-5 sur la figure), viennent s'intercaler quelques bancs marno-cal- caires durs, pétris de Brachiopodes, de Coraux et de Cirrhipèdes (en particulier Pachylasma giganteum Phil., Isis peloritana Segu., etc.). C'est le « Calcaire à Brachiopodes et à Coraux » si caractéristique du Pliocène du détroit : il est activement exploité dans le vallon de la Fiumara Scoppo au Nord de Gravitelli?. G. Seguenza a récolté là une riche faune qu'il rapporte à l’Astien : nous savons déjà que la dis- tinction établie par cet auteur entre Zancléen et Astien ne repose sur aucune donnée sérieuse. En tout cas la faune suffit à nous faire constater que nous sommes bien là dans le vrai Pliocène, et c'est d'ailleurs l’avis de tous les auteurs. ! Comme nous le verrons plus loin, L. Seguenza, estimant que cette faune est stra- tigraphiquement inférieure à la € formazione gessoso-solfifera », la considère encore comme pontique et y voit un exemple remarquable de Pontique marin d'assez grande profondeur (facies d'argile à Donne) : il insiste d’ailleurs sur le carac- te enlièrement pliocène de cette faune. Cet auteur a cru remarquer en effet, à la parlie supérieure des couches C, quelques assises de schistes feuilletés à diatomées qu’il considère comme Mnvaleut des tripoli si développés partout en Sicile et en Calabre, à la limite du Miocène ct du Pliocène ; au-dessus de ces bancs rudimentaires de tripoli, il asignalé quelques rares cristaux de gypse qui représentent pour lui, d’une manière très réduite, la « forma- zione gessoso solfifera » pontique. Ces assimilations ne me paraissent pas définiti- vement prouvées, et au reste la question, ayant trait à la limite inférieure du Pliocène, ne nous intéresse pas directement. * Les colonnes de l'Université de Messine en étaient construites: GRAVITELLI 69 E. — Mais le facies de l’ensemble des couches s’est modifié (6-7 sur la figure) : les dernières intercalations calcaires se trouvent en effet, non plus dans des sables, mais dans des graviers assez grossiers, blancs, dont les éléments proviennent en toute évidence des roches cristallines voisines. Et à mesure que l’on s'élève au- dessus des derniers bancs calcaires, on voit la faune contenue dans ces graviers s'enrichir peu à peu, en même temps que leur facies devient de plus en plus grossier. Aiïnsi apparaît la célèbre faune dite « postpliocène » de Gravitelli, qui était pour G. Seguenza un des types de l’étage Sicilien. Il n’est pas douteux quelle ne soit paléontologiquement plus récente que le Pliocène ancien, et rapportable par suite au Calabrien. Mais malheureusement il n’est guère possible d’en faire une analyse de détail. Car en dehors du travail déjà ancien de Brugnone, nous ne pouvons recourir qu'aux listes de Seguenza, lesquelles sont com- munes à toutes les localités de la province de Messine : nous en examinerons plus loin les principales espèces caractéristiques. Personnellement je n'ai récolté à Gravitelli, malgré plusieurs visites, qu'une trentaine d'espèces, toutes vivantes, qui ne sont d'aucun intérêt, mais suffisent à nous indiquer le caractère d’ensemble de la faune. D'ailleurs cette faune n'est pas absolument homogène : il est facile de constater en effet que le facies devient de plus en plus littoral au fur et à mesure qu'on s'adresse à des couches plus jeunes. À la base, en effet, on peut récolter dans des graviers déjà très grossiers des milliers de valves de Pachylasma giganteum Phil.! ainsi que des exemplaires de Turbo peloritanus Cantraine, accom- pagnés d'une foule de Bryozoaires, espèces qui indiquent une profondeur certainement bien supérieure à 100 mètres. Au sommet, au contraire (à partir de 200 mètres d'altitude environ), ces espèces disparaissent et on assiste par contre au grand développement des petits Troques propres aux graviers littoraux déposés au voisinage des côtes rocheuses, et on peut même récolter des Cardium edule L. F. — La série se termine (vers 280-300 mètres) par des conglo- mérats alluviaux équivalents à ceux que nous avons vus partout dans 1 On sait que cet intéressant Cirrhipède vit actuellement dans le Détroit de Messine, où il reste confiné à de très grandes profondeurs. 70 DÉTROIT DE MESSINE l'Italie du Sud. Mais ici les sommets des collines sont extrêmement ravinés par suite de la proximité de la mer et la continuité de cette nappe alluviale n'apparaît pas avec netteté, Résumé. La seule difficulté qui se présente dans l'interprétation de cette coupe est la position à attribuer à la limite inférieure du Pliocène. L. Seguenza plaçait cette limite entre les couches C et D : il y était conduit en admettant l'assimilation des couches C avec la formation « gessoso-solfifera » d'âge pontique. J'ai montré plus haut pourquoi on pouvait être tenté au contraire de considérer comme pliocène toute la série visible à Gravitelli, sauf peut-être les couches A. En tout cas cela nous importe peu. L'essentiel est de constater que nous retrouvons, à Gravitelll comme partout ailleurs, une série sédimentaire continue, la série pliocène, qui accuse un rem- blaiement progressif. La base de cette série est formée de marnes avec faune typique du Pliocène ancien, tandis que dans les graviers du sommet est définitivement apparue la faune « postpliocène » : nous retrouvons donc ici l'étage calabrien défini à la fois stratigraphi- quement et paléontologiquement. Il y a visiblement continuité parfaite entre tous les termes, réguliè- rement superposés, de cette série: je ne puis vraiment être de l'avis de L. Seguenza qui, tout en reconnaissant une concordance parfaite entre les couches B, C et D, croit à une discordance entre D et El. Il est parfai- tement exact, comme le fait remarquer, après son père, le regretté géologue de Messine, que les couches D sont légèrement inclinées vers l'Ouest, tandis que les couches E sont à peu près horizontales ; mais cette diminution du plongement s'accuse en réalité d’une façon progressive depuis les couches A et B où ce plongement a une valeur maximum jusqu'aux couches E où il devient nul: c’est ce que j'ai essayé de mettre en évidence dans la coupe ci-contre. Nous en déduirons simplement que, pendant toute la durée de la série pliocène, la région a été le siège d’une lente déformation qui n’a influé en rien sur les phénomènes généraux de transgression et de régression de la mer. 1 Cet auteur s'exprime en effet ainsi, p. 140 : « Conviene infine ricordare che le prime tre zone (que je réunis dans les couches D) sono concordanti fraloro e conla sottostante formazione gessifera (couche C\), tutte insieme inclinate verso ovest, mentre l'ultima zona (couche E) è quasi orizzontale e quindi discordante con le sottostanti, » GRAVITELLI gl Il ne me reste plus maintenant qu'à souligner les quelques particularités intéressantes qui ressortent de cette coupe de Gravi- telli. Ce sont : 1° L'apparition dans le Pliocène ancien d'un facies calcaire à Cirrhipèdes, Coraux et Brachiopodes : à Gravitelli même, par suite de circonstances locales dans la sédimentation, ce facies calcaire ne forme que des banes d'épaisseur très réduite (moins d'r mètre); mais un peu plus au Nord, comme Jje l’ai déjà dit, dans la partie supérieure du bassin de la Fiumara Scoppo, ce facies se développe beaucoup, au point de pouvoir être exploité comme pierre de con- struction : il contient là une riche faune étudiée par G. Seguenza qui l’attribuait à son étage Astien. 2° La faune calabrienne, au lieu d'apparaître, comme dans le reste de la Calabre, dans des argiles sableuses de mer profonde, débute ici dans des graviers grossiers, qui tout en ayant, par la grossièreté et le volume de leurs matériaux, un faux air de sédiments littoraux, sont également de mer profonde, comme l’attestent les espèces qu'ils contiennent, Ces deux particularités se retrouvent constamment, comme nous le verrons, tout le long du détroit de Messine : il me parait qu'elles s'expliquent facilement en admettant que cette région a été, pendant la plus grande partie des temps pliocènes, baignée par une mer profonde, mais animée de violents courants se faisant sentir jusqu’à de grandes profondeurs. Dans de telles conditions, en effet, la forma- tion de sédiments fins, tels que les argiles pures ou les marnes à foraminifères, n’est pas possible dans un milieu aussi agité. Dans les endroits où les apports clastiques étaient nuls, on assiste alors au développement des facies zoogènes, des récifs de Coraux, de Brachiopodes, de Cirrhipèdes: ce sont les calcaires du Pliocène ancien. Si au contraire les courants avaient à charrier des matériaux détritiques, ce sont les plus volumineux seulementqui sedéposaient : ainsi s'explique le grand développement des graviers grossiers coralligènes. L'ancien rivage pliocène. La coupe que je viens de décrire ne peut être suivie longtemps vers l'Ouest. Si, en effet, partant de la crête dela colline de Gravitelli, au-dessus de l'exploitation d'argiles, on se dirige, du côté de l'Ouest, 72 DÉTROIT DE MESSINE vers la montagne, on voit le facies changer progressivement. Toutes les couches pliocènes que nous venons d'étudier passent indistinc- tement à des graviers de plus en plus grossiers, puis à des conglo- mérats à blocs énormes, peu roulés, qui viennent en se relevant fortement s'appuyer contre les roches cristallines des monts Pélori- tains. Ces observations, que j'ai eu la bonne fortune de faire en compa- gnie de M. Depéret, montrent avec toute évidence que la trans- gression pliocène n’a point submergé la crête des monts Péloritains. Bordée au début du Pliocène par des lagunes d’eau douce où ont été entraînés les débris de mammifères, cette chaîne a formé rivage pendant toute la durée des temps pliocènes: elle plongeait dans la mer par des pentes abruptes, comme en témoigne le facies des dépôts de rivage. Et la mer pliocène n’a pas dû dépasser sur ses flancs, dans cette région Sud de Messine, l’altitude de 300 mètres environ. 20 La côte Sicilienne au Sud de Messine Le Pliocène diminue rapidement d'importance si on s'éloigne de Messine. Aussi est-ce seulement d’après les renseignements des auteurs et en particulier d’après la carte géologique officielle au 1/100.000 que je le décrirai brièvement. Près deS. Lucia, un peu au Nord de Tremestieri, un lambeau impor- tant de Pliocène est encore conservé : il s’agit surtout ici du facies calcaire à coraux, Isis et Brachiopodes (p“° de la carte) que nous avons appris à connaître à Gravitelli. Plus au Sud un lambeau plus important de ces mêmes calcaires est encore conservé à Giampilieri. Puis, tout le long dela côte abrupte oùaffleurent les terrains primaires et secondaires d'AlietdeTaormina, on croyait le Pliocène tout à fait absent; et ce sont les recherches soigneuses de M. L. Seguenza qui nous en ont fait connaître quelques lambeaux insignifiants, accro- chés aux falaises littorales. Cet auteur signale en effet |214| près de Nizza, Roccalumera, etc... des affleurements très réduits de cal- caires à Terebralula minor Phil. qui, dit-il, représentent les seuls témoins d'une zone pliocène autrefois continue entre Giampilieri et Taormina. Nous allons donc ainsi rejoindre le domaine etnéen que nous étudierons dans un chapitre ultérieur. NORD DE MESSINE 73 Ainsi, dans cette région Sud de Messine, il est probable qu'une ceinture continue de dépôts calabriens surmontant, comme à Gra- vitelli, les calcaires pliocènes, a dû autrefois s'étendre tout le long de la côte. Mais l'érosion torrentielle ou marine a totalement enlevé ces sédiments meubles, et seuls ont subsisté les calcaires zoogènes accolés à la falaise. 3° La côte Sicilienne an Nord de Messine C'est exactement l'inverse, au contraire, qui arrive au Nord de Messine. Mais ici la question est plus délicate et je vais être conduit à des conclusions assez différentes de celles généralement admises Entre Messine et la Punta del Faro, en dessous des pentes escarpées de roches cristallines qui conduisent au Monte Cicci et au Campo inglese, la côte est bordée, en effet, par une zone de collines sableuses toutes pareilles à celles que nous étudierons plus loin au Nord de Reggio. Cette formation a dès longtemps retenu l'attention des géologues italiens, mais comme elle ne contient que de très rares fossiles, elle n’a guère intéressé les paléontologistes, et ce sont surtout les cartographes qui l'ont étudiée. Cortese la distingue, en effet, comme « une forme spéciale de dépôts quater- naires qui se montrent le long du détroit de Messine » et elle est désignée sur la carte géologique par le symbole g‘’. Ces couches sont faciles à étudier en remontant les fiumare qui débouchent dans la mer au Nord de Messine (par exemple la F. della Pace). On verra alors des sables et conglomérats extrêmement grossiers, dont certains bancs sont cimentés en poudingues très durs : ce sont des formations indubitablement marines, comme le prouvent les rares débris de fossiles roulés et indéterminables qu'on y rencontre le plus souvent. Une telle accumulation de sédiments aussi grossiers sur des épaisseurs de plusieurs centaines de mètres, ne peut s'expliquer que par des courants sous-marins extrêmement intenses, roulant au fond de la mer des galets comme dans un véri- table fleuve. Nous retrouverons sur la côte calabraise une forma- tion tout à fait analogue, mais se prétant à des observations plus intéressantes. Pour le moment je me contenterai, pour cette région Nord de Messine, d'attirer l'attention sur les deux points suivants : 1° Dans les rares endroits où l’on peut voir le soubassement de 74 DÉTROIT DE MESSINE ces sables et cailloutis marins, il est formé par le Pliocène ancien bien caractérisé. La carte géologique détaillée l’indique ainsi dans la vallée de la F. dell’ Annunziata un peu au Nord de Messine : plus au Nord rien n’est visible à la base des collines sableuses qui s'étendent jusqu'au Faro. Mais cette constatation est extrêmement importante. Elle nous montre, en effet, qu'il faut considérer les puissants conglomérats des collines au Nord de Messine comme représentant l'équivalent des graviers supérieurs de Gravitelli les- quels recouvrent également le Pliocène ancien. Nous ne retrouvons pas dans ces collines la riche faune calabrienne (Sicilienne des auteurs) qui a rendu célèbre la localité de Gravitelli, mais ce n’est pas là une raison qui s'oppose à ce synchronisme. D'ailleurs sur la côte calabraise nous arriverons à une conclusion tout à fait analogue et que nous pourrons là démontrer d'une manière beaucoup plus péremptoire. 2° Le plongement de ces assises caillouteuses est très variable : il est encore peu accentué aux environs de Messine, et dans le bas de la F. della Pace on peut voir les couches presque horizontales. Mais plus au Nord elles s’inclinent fortement vers l'Est et vers le Nord. Ainsi la carte géologique détaillée indique un plongement de 15 degrés vers l’Est à la latitude du Monte Cicc1; en s'élevant au-dessus de S. Agata, on observe également un fort plongement vers la mer. Mais la région la plus frappante à ce point de vue est le versant Nord de la Punta del Faro : la côte est formée ici par une haute falaise très abrupte et presque rectiligne, dont je donne plus loin (IIIe partie, chap. [) une coupe relevée dans la « contrada Mortelle »: les pentes inférieures de cette falaise sont constituées par les con- glomérats marins que nous étudions en ce moment. Ils contiennent ici des moules gigantesques { Mytilus galloprovincialis Lmk., aff. var. herculea Mts.) et plongent très fortement d'au moins 30 degrés vers la mer. Et ce plongement est encore souligné par le fait que tout est recouvert ici en discordance par une formation quaternaire éga- lement marine, mais très littorale, avec Ostrea edulis et Cardium edule, et que nous étudierons plus loin. Seguenza devait avoir connaissance de cette localité, car il dit ([207], p. 86) avoir récolté à la « contrada Mortelle », Osfrea edulis et Cardium edule; mais . n'ayant pas vu la distinction à établir entre les cailloutis qui forment l’ossature de cette extrémité Nord-Est de la Sicile et la mince cou- CONCLUSIONS 75 verture de dépôts quaternaires qui les recouvre ici, il attribuait ces fossiles aux cailloutis. Il spécifie bien d'ailleurs que c'est là le seul endroit où il ait pu récolter des coquilles dans ces collines du Nord de Messine. De pareilles dispositions ne me paraissent pas pouvoir s'expliquer autrement que par des déformations du sol. M. Cortese, au contraire, qui a fort bien noté ces diverses particularités, croit qu'il s’agit là de cônes de déjections sous-marins dus à des fiumare du Quaternaire ancien : ainsi se comprendrait l'inclinaison très variable et parfois très forte des assises. Cette explication est évidemment juste dans beaucoup de cas analogues : mais ici il s’agit de formations épaisses de plusieurs centaines de mètres, où le plongement des couches dépasse, d’après M. Cortese lui-même, la valeur de 25 degrés. Je ne puis me résoudre à voir là une inclinaison ori- ginelle de la stratification, et j'ajouterai que M. Depéret, avec qui j'ai eu le plaisir de faire quelques courses dans cette région, a eu la même impression que moi. 40 Conclusions Nous retrouvons donc sur la côte Sicilienne du détroit les mêmes faits que partout en Calabre ; au dessus d’un Pliocène ancien bien caractérisé, on a en concordance des dépôts renfermant une faune « postpliocène » : c’est donc là du Calabrien, ou Pliocène supérieur suivant nos définitions. Ce Calabrien, marquant une altitude maxi- mum du niveau de base, devrait se terminer par des alluvions conti- nentales ceinturant d'une bordure continue la chaîne péloritaine. En réalité, les érosions ne laissent presque plus rien reconnaitre de cette disposition primitive. Près du village de Curcurace pourtant, on peut constater que les couches marines du Calabrien sont sur- montées par des alluvions continentales très grossières à cailloux à peine roulés : la teinte rouge briquede ces alluvions, leuraltération profonde qui rend friables la plupart des galets granitiques, les font distinguer facilement de leur substratum marin: elles forment là un petit plateau à 300 mètres environ qui vient au contact des pentes abruptes de roches cristallines s’élevant jusqu’au Campo Inglese. Peut-être faut-il voir là un fragment homologue des grands plateaux alluviaux calabriens que nous avons vus si nets dans d’autres régions de la Calabre. 76 DÉTROIT DE MESSINE Ce n'est pas à dire d’ailleurs qu'il n’y ait point, dans la région, d'allu- vions continentales : car on retrouve à divers niveaux, nivelant le Cala- brien marin, des cailloutis continentaux dont les caractères sont analogues à ceux que je viens de décrire à Curcurace : M. Cortese a.très justement fait ici la distinction entre les dépôts marins et les dépôts alluviaux, res- pectivement désignés par lui sur la carte géologique détaillée sous les symboles gs’ et gs. Mais il est ici, la plupart du temps, impossible de voir si ces alluvions succèdent en continuité au Calabrien marin (auquel cas ce serait encore du Pliocène supérieur) ou si elles ravinent ce Calabrien et témoignent par suite d'anciens niveaux de base quaternaires. La topo- graphie de la région ne m'a non plus rien montré de bien net à cet égard. Les faunes du Pliocène supérieur. Comme je l’ai dit plus haut, je me référerai aux listes de G. Seguenza ({207], p. 86 et p. 268). Les zones quatrième, troisième et deuxième de cet auteur semblent correspondre à peu près à notre Calabrien, car on n’y trouve déjà plus que très peu d'espèces disparues et on y voit apparaître des formes septentrionales. Suivant Seguenza, la modification de la faune pliocène se ferait ainsi progressivement dans les différentes zones. Mais je n'ose analyser trop en détail les conclusions de cet auteur dont les idées stratigraphiques nous sont apparues trop souvent sujettes à caution. Aussi je me contenterai de reproduire ici, d'après ses listes, l’énumération des quelques espèces éteintes ou émigrées qui m'ont paru les plus intéressantes dans le Calabrien des environs de Messine : Telles seraient parmi les formes émigrées : Buccinum humphreysianum Benn., B. undatum L., Pecten maxi- mus L., Chlamys septemradiatus Müll., Chlamys islandi- cus L., Mactra solida L., Modiola modiolus L., Waldheimia cranium Phil., ete. Et comme espèces éteintes : Nassa musiva Br., Brocchia sinuosa Br., Plicatula mytilina Phil., etc. Des résultats bien plus précis nous seront fournis en étudiant la faune des couches correspondantes sur la rive calabraise du détroit. COTE CALABRAISE DU DÉTROIT 77 $ 2. — LA COTE CALABRAISE DU DÉTROIT Nous allons y retrouver dans la série pliocène les mêmes parti- cularités que sur la côte sicilienne : 1° Au point de vue des facies, nous v reverrons également des facies calcaires à la base : mais ici le Pliocène ancien est, surtout vers le Sud, beaucoup moins réduit qu'aux environs de Messine ; et de plus, en le suivant vers l’intérieur, sur la bordure du massif de l’Aspromonte, on assiste au développement des facies de grès calcaires zoogènes à Amphistégines que nous avons déjà étudiés sur la côte 1onienne de la Calabre méridionale : 2° Les mouvements récents qui ont déformé les couches pliocènes paraissent avoir été ici beaucoup plus intenses et ont produit de véritables failles affectant ces couches. Je commencerai cette étude par un exemple particulièrement net au point de vue de la position stratigraphique de la faune cala- brienne, et je choisirai pour cela la coupe qu’on peut relever au Nord de Reggio près du village des Archi, et qui nous montre la structure du Monte di Pentimele. 1° La coupe des Archi prés Reggio et la structure du Monte di Pentimele. Quand, de Reggio, on tourne ses regards vers le Nord-Est, on voit, dominant la plage, une montagne dénudée, couronnée par un fort, et dont les flancs sont écorchés par des ravinements sau- vages creusés dans des sables blancs visibles de très loin. C'est le Monte di Pentimele, À part une ceinture inférieure à 70-100 mètres environ, formée, comme nous le verrons, par des terrains quater- naires, cette montagne a sa masse entièrement constituée par des sédiments pliocènes. Au pied de son versant Sud coule la Fiumaru dell” Annunziata dont le cours remonte jusqu'aux hauts plateaux de l’'Aspromonte. Sur son versant Nord, vient déboucher dans la mer, entre les petits villages des Archi au Nord et de S. Francesco au Sud, le Torrente Torbido dont le cours est beaucoup moins long. C’est ce dernier qui nous fournira la coupe que nous allons étudier d’abord. 78 DÉTROIT DE MESSINE Remontons en effet à partir de la mer le cours de ce T. Torbido : il coule d’abord dans un vaste delta d’alluvions modernes qui empêchent toute observation : ke sol est d’ailleurs favorable aux cultures et les jardins ne laissent rien voir. Mais très vite la vallée se resserre et, de part et d'autre du lit du torrent, on voit pointer le Miocène représenté par des grès blancs micacés à facies langhien. Rive droite du Torrente Torbido, région de Monte Gorvo. Là, sur la rive droite du torrent, entre 100 et 200 mètres d’alti- tude, s'élèvent des collines sableuses qui font face au Pentimele. C'est la région dite Monte Corvo. Cette localité, sous le nom assez impropre de « gli Archi ou Reggio-Archi », a fourni une foule de fossiles « postpliocènes », répandus dans toutes les collections : ce gisement des plus classiques, que je désignerai sous le nom de Monte Corvo, mérite donc d'être étudié en détail, d'autant plus qu'on n’en a jamais donné, à ma connaissance, aucune coupe détaillée. Monte Corvo Fic. 10. — Coupe du gisement de Monte Corvo (Rive droite du Torrente Torbido), près Reggio. Ps. — Graviers et sables très fossilifères. . . . . Pliocène supérieur. Pa. — Marnes blanches avec bancs calcaires et conglomérats de ‘base. Pliocène ancien. A. — Alluvions récentes. Les grès mollassiques du Miocène sont ici ravinés et recouverts directement par le Pliocène. Ce Pliocène débute par un conglomé- rat de base où l’on voit des blocs énormes cimentés par une vase calcaire renfermant en abondance des Coraux et des Brachiopodes. Ainsi, aussitôt après l'invasion marine amenée par la transgression pliocène, s’est installé le facies zoogène. Rapidement d'ailleurs, la profondeur a dù augmenter, car ces formations zoogènes né forment qu'une croûte en quelque sorte, à la surface du soubassement miocène dont elles remplissent les inégalités. Et au-dessus apparaissent les marnes blanches puis bleues habi- MONTE CORVO 79 tuelles du Pliocène ancien de grande profondeur, avec leur faune ordinaire, peu variée, de petits Nuculidés et de Polypiers isolés !. Ces marnes sont d’ailleurs, elles aussi, assez peu épaisses : on les voit vers le haut devenir de plus en plus sableuses. Finalement, on a des sables fins, blancs, micacés, provenant de la trituration des roches cristallines de l’Aspromonte: c’est là qu'apparait la riche et célèbre faune « postpliocène » de Monte Corvo (gisement dit des Archi) que nous étudierons en détail. Ces sables constituent ainsi toutes les collines qui dominent la rive droite du Torrente Torbido et atteignent l'altitude de 200 mètres environ. Vers le haut, ils deviennent un peu plus grossiers, certains bancs s'agglomèrent en grès très durs ; en même temps le caractère de la faune se modifie un peu : la belle faune de Monte Corvo est dans l'ensemble, comme nous le verrons, une faune profonde, coralligène ; on y trouve en abondance les Astartes, le Buccinum humphreysianum Benn., la Venus effossa Bivona, le Turbo pelo- rilanus Cantr. A la partie supérieure, au contraire, la note domi- nante est fournie par les Pectinidés. Mais on n'arrive point à un facies vraiment littoral et, même au sommet de la coupe, il n’y a pas encore de traces d’émersion. Ainsi la fin du remblaiement pliocène n’est pas visible ici et a été entière- ment enlevée par l'érosion. En tout cas, une chose est certaine ici: c'est que ces sables du Monte Corvo, dont la faune a un cachet « postpliocène » si marqué, 1 On retrouverait d'ailleurs des affleurements de ce Pliocène ancien en continuant à s'élever dans les collines à l'Est de Monte Corvo (car les couches plongent ici fortement vers la mer, c'est à-dire parallèlement à la pente générale du terrain); on arriverait ainsi au gisement célèbre dit Vigna di Mare ou Testa del Prato, dont divers auteurs, en particulier Seguenza, ont donné de longues listes de fossiles ; on y trouve une riche faune typique du Pliocène ancien (Zancléen de Seguenza), par exemple Flabellipecten flabelliformis Br., Chlamys scabrellus Lmk, Spondylus crassicosta Lmk., etc., et on peut voir au Musée de l'Université de Naples des Cly- péastres (Clypeasler pliocenicus Seg.) qui en proviennent et suffiraient à eux seuls à dater le gisement ; aussi ai-je jugé inutile de le visiter personnellement. On trouvera aussi dans Cortese ([51], p. r7r) une liste de fossiles de cette localité, récoltés et déterminés par M. di Stefano ; à remarquer la présence d'Amphislegina Haueri qui annonce l'approche du rivage et indique un facies analogue à celui que nous étudierons plus loin à Terreti. Enfin, en continuant à remonter vers l'Est au delà de Vigna di Mare, on arrive- rait, après avoir suivi des crêles où la dénudation a fait apparaître le Miocène, à de nouveaux lambeaux de Pliocène ancien : c'est la région d'Orti et du Monte Chiarello où se développent d'une manière typique les grès calcaires à Pectinidés et Amphistégines que nous retrouverons plus loin (p. 92) à Terreti. 80 DÉTROIT DE MESSINE sont intimement liés au Pliocène ancien sous-jacent auquel ils pas- sent progressivement en continuité. Le même fait se vérifie d’ail- leurs dans la faune: car on peut recueillir là, au milieu d'une immense majorité d'espèces toutes actuelles, et côte à côte avec les Buccins d'origine septentrionale, une comtile à caractère aussi essentiellement pliocène que le P. flabelliformis. Ce sont de telles raisons qui, dans ce cas, comme dans beaucoup d’autres, m'ont engagé à voir dans ce « Postpliocène inférieur » ou Calabrien un horizon supérieur du Pliocène. Rive gauche du Torrente Torbido ; Monte di Pentimele. + Mais laissons pour plus tard l'examen détaillé de cette faune et traversons la F, Turbido pour étudier le soubassement du Monte di Pentimele. Sous les sables dont, avons-nous dit, est constituée cette montagne, nous allons retrouver là, comme à Monte Corvo, les argiles du Pliocène ancien. F1c. 11, — Coupe sur la rive gauche du Torrente Torbido, près Reggio. À, — Plaine côtière actuelle. Q: — Terrasse marine quaternaire à 80 m.. Ps. — Graviers et sables du Pliocène supérieur. Pa. — Argiles du Pliocène ancien, exploitées en GO. Le contact avec le Miocène est ici malaisé à étudier en détail, car il a lieu à peu près au niveau du lit du torrent et est masqué par les alluvions de ce torrent ou par des éboulis. Par contre, les marnes pliocènes sont des plus faciles à voir, car elles sont exploi- tées dans de grandes carrières ; elles ne contiennent que les rares fossiles habituels de ces facies, c’est-à-dire surtout des petits Nucu- hdés et des Polypiers isolés ; M. de Stefano les a signalées récem- ment [106] sous le nom d « argiles pliocènes à GHRob orme Scillæ Seg. ». He sur l’autre rive, ces marnes sont surmontées par les sables argileux, puis par les graviers du Pliocène supérieur ; cette superposition se fait par transitions graduelles, et le passage d’un MONTE DI PENTIMELE 81 facies à l'autre est rendu encore plus manifeste par l’intrication des bancs sableux et marneux. Cette intrication donne même lieu ici à une apparence de discordance. Comme le montre la coupe ci-jointe, on voit en effet, au-dessus de la carrière d'argile, un banc gréseux plus dur, plongeant assez fortement vers la mer, et qui semble reposer sur les tranches d’autres bancs gréseux inférieurs moins inclinés. Fi 1. — Détail de la figure 11, montrant une apparence de discordance entre la base et le sommet de la série pliocène. g. — Sables et graviers. AB, CD, ED s. — Argiles sableuses. Bancs gréseux plus durs. a. — Argiles plastiques exploitées. Cette disposition a été interprétée par M. de Stefano comme l'indice d’une discordance existant entre les marnes du Pliocène et les sables fossilifères du Postpliocène. En réalité, un examen de détail montre qu'il n’y a là qu'une apparence de discordance !. Car d’abord il y a pas- sage graduel des marnes aux sables ; puis on constate que les bancs tels que CD, ED, de la figure, viennent finir en biseau au lieu d’être recoupés par leurs tranches ; un effet de perspective contribue encore à exagérer les différences d’inclinaison des divers bancs. Enfin, à prioru, il serait tout à fait étrange qu'une discordance nous montrât des bancs plus inclinés reposant sur des couches plus anciennes demeurant presque horizontales ; c'est l'inverse qui aurait dû se produire, et la discordance . réelle qui existe dans la région entre le Pliocène (s. 1.) et le Quaternaire, nous montre ce dernier reposant horizontalement sur les bancs inclinés du Pliocène. L'âge pliocène supérieur des graviers du Pentimele, qui domine la rive gauche du Torrente Torbido, se trouve donc établi stratigra- 1 Cette manière de voir a été pleinement acceptée par M. Depéret, que j'ai eu le plaisir de conduire dans cette localité. Univ. DE Lyon. — Gicnoux 6 82 DÉTROIT DE MESSINE phiquement. Il peut l’être aussi paléontologiquement, bien que les faunes soient là infiniment moins riches qu'a Monte Corvo. Ce sont les pentes inférieures de ce Monte di Pentimele qui paraissent surtout fossilifères : je signalerai spécialement à ce point de vue les escarpements qui le terminent au Nord-Ouest, dominant la grande route de Reggio, près de la localité de San Francesco ; là, les cou- ches inclinées du Calabrien sont recouvertes par les bancs horizon- taux des grès grossiers quaternaires, que nous étudierons plus loin ; et dans ce Calabrien on peut récolter en très grande abon- dance quelques-unes des coquilles caractéristiques de cet étage, en | particulier de nombreux Buccinidés. Sur les pentes Nord de la montagne, aux environs de la cote 100, j'ai pu aussi récolter de petites faunules renfermant en particulier Pecten flabelliformis et P. scabrellus, comme à Monte Corvo (voir la liste dans l’appendice) ; ces fossiles suffisent à nous assurer qu'il ne s’agit point ici de Quaternaire. Vers le sommet de la mon- tagne, les fossiles paraissent extrêmement rares ; néanmoins, au col qui se trouve à l'Est du fort couronnant le mont, à près de 300 mètres d'altitude, j'ai recueilli une valve d’Anomia, ce qui suffit entre autres à nous montrer que nous sommes toujours là dans des dépôts marins ; le facies est, d’ailleurs, devenu très grossier, les sables se mêlent de bancs de galets avec de véritables blocs roulés : tout cela nous indique déjà la proximité de l’ancien rivage pliocène. Pour terminer l’étude de cet immense amas de graviers qui con- sutuent le Monte di Pentimele, il ne me reste plus qu’à dire quelques mots de son versant Sud. Monte di Pentimele Vito infre Vito supre FiG. 13. — Croquis demi schématique du versant Sud du Monte di Pentimele près Reggio (en partie d’après Mantovani). x. — Graviers et sables du Pentimele . , . . . . . Calabrien. S. — Banc sablo-gréseux à Flabellipecten . CR duo M AMarnesDlAnChE RTE Pliocène ancien. C. — Conglomérat de base . . FAUNE DE MONTE CORVO 83 Les pentes qui descendent à la Fiumara dell Annunziata nous y montreront, d'ailleurs, une coupe identique à celle du versant Nord. Là, encore, le soubassement de la montagne est constitué par le Miocène, toujours à l’état de marnes gréseuses, micacées, blanches, assez fortement inclinées; c'est dans ce Miocène que s’encaisse la Fiumara dell’ Annunziata avant de déboucher dans la plaine litto - rale, et c’est lui qu'on voit affleurer entre les petits villages pitto- resques, perdus sous les oliviers et les orangers, de Vito inferiore et de Vito superiore. Au-dessus de ce dernier commence la série plio - cène, et les argiles de base y sont exploitées pour faire des tuiles; elles ont toujours leur faune peu variée de Nuculidés et de Coral- haires isolés; j'y ai récolté, à Vito superiore, les espèces suivantes : Ostrea cochlear Poli, Nucula sulcata Bronn, Limopsis anomala Eichw., Nassa semistriata Br., Aporrhaïs serresianus Mi- chaud, Natica cf. catena da Costa. Ces argiles paraissent ici moins épaisses et à facies moins profond que le long de la Fiumara Torbido, car on est là plus loin de la mer actuelle et plus près de l’ancien rivage pliocène. Les couches qui recouvrent ces argiles en concordance et font passage avec elles sont, comme on peut bien le voir dans la partie supérieure des exploitations, des sables fins gréseux pétris de Pectinidés; on y trouve en abondance : Flabellipecten flabelliformis Br., Pecten jacobæus L., Chlamys opercularis L., Chlamys scabrellus Lmk., Chlamys seéptem- radiatus Müll. L'abondance du F. flabelliformis et du C. scabrellus nous montre que l’on est encore dans le Pliocène ancien présentant ici un facies relativement littoral, analogue à celui que nous verrons plus loin si magnifiquement développé à Terreti. Enfin, au-dessus de ces bancs à Pectens, on arrive dans les sables et graviers blancs du Calabrien qui s'étendent jusqu'au sommet de la montagne et dont nous venons de décrire le prolongement, si fossilifère, dans la colline de Monte Corvo. La faune calabrienne de Monte Corvo et du Pentimele. J'ai récolté des fossiles ici dans deux localités différentes : A. — Sur le versant Nord du Monte di Pentimele, dans les sables 84 DÉTROIT DE MESSINE et graviers qui surmontent les argiles de la rive gauche du Torrente Torbido; la liste de ces espèces est donnée dans l’appendice; il est probable ici que le facies sableux doit s’étendre jusque dans le Plio- cène ancien, car cette liste renferme des espèces telles que Chlamys latissimus B., que nous ne sommes pas habitués à rencontrer dans le Calabrien : c’est une preuve de l'intime liaison stratigraphique des deux divisions du Pliocène. B. — Dans la colline de Monte Corvo, sur la rive droite de ce Tor- rente Torbido, dans les sables et graviers surmontant les argiles et les calcaires coralligènes du Pliocène ancien : ici il s'agit bien de Calabrien, car on trouve, dès la base, le Buccinum undatum L., forme septentrionale, associée au Flabellipecten flabelliformis B., forme pliocène. En parcourant la liste donnée dans l'appendice, on sera frappé de l'abondance extrême des espèces actuelles : visible- _ment, on n'est plus ici dans le Pliocène ancien classique. | Les espèces caractéristiques, à part les deux que je viens de citer, sont ici des raretés : aussi je m'aiderai des listes données par G. Seguenza; cet auteur ne décrit pas la localité d'une manière bien précise, mais il est bien probable que les fossiles qu'il cite au Nord de Reggio dans son Sicilien des Archi ([206|, p. 318 et suiv.) proviennent des couches que nous étudions. En tenant compte de ces listes et dé mes propres récoltes, on trouve comme formes septentrionales : Buccinum undatum L. Buccinum humphreysianum Bennet. Natica Montacuti Forbes. Chlamys septemradiatus Müll. Pecten aff. maximus L. et comme formes disparues : Flabellipecten flabelliformis Br. Venus messanensis Ses. = V, libellus R. E. P. Plicatula mytilina Phil. Nassa musiva Br. dont les deux premières sont seules bien caractéristiques du Cala- brien, car les deux autres se rencontrent encore dans le Sicilien. À un autre point de vue, on sera frappé du caractère profond de cette faune, caractère qu’elle partage avec les autres faunes cala- briennes du détroit et qui contraste vivement avec le facies plus Gas tes MONTE DI PENTIMELE 85 littoral des faunes quaternaires : de cette profondeur témoignent, par exemple, les espèces suivantes : Astarte sulcata Bronn!. Limopsis aurita Br. Chlamys Bruei Payr. Venus effossa Bivona. Turbo peloritanus Cantraine. Cette présence d'espèces profondes dans des couches à facies grossier nous suggère les mêmes réflexions qu'à Gravitelli {voir p. 71). Conclusions. En résumé, cette étude du Monte di Pentimele nous a conduits aux trois conclusions suivantes qui me paraissent bien établies : 1° Partout où l’on peut voir les couches de base de la série, elles apparaissent constituées par les argiles typiques du Pliocène ancien : les sables et graviers, qui s’y superposent en concordance, et forment la masse même de la montagne, appartiennent donc encore, suivant nos définitions, à la série pliocène; 2° La faune de ces sables et graviers contient, sur les versants mêmes de la montagne, des éléments ({P. flabelliformuis, P. scabrel- lus) qui ont un caractère pliocène bien net et qui excluent d'une manière absolue son attribution au Quaternaire, comme le voulaient quelques géologues, lesquels en faisaient même du Quaternaire supérieur ; 3° Le prolongement de ces sables et graviers se retrouve, au Nord du Torrente Torbido, dans le riche gisement dit de Monte- Corvo : la faune de ce gisement, par l'abondance des espèces vivantes, par la présence de quelques rares espèces nettement plio- cènes, par l'apparition de formes immigrées d'origine atlantique, concorde exactement avec la définition que nous avons donnée de la faune « calabrienne »; ce n’est plus du Pliocène ancien, mais ce n'est point non plus du Quaternaire. Si j'ai particulièrement insisté sur cette région du Pentimele, c'est qu elle a été en effet interprétée d'une manière fort différente par la plupart des géologues qui l'ont visitée. Seguenza, dans son grand ouvrage sur la province de Reggio [206], ne ! Avec toute la série de formes conduisant à la var. pseudofusca et si fréquentes partout dans ces faunes calabriennes, 86 : DÉTROIT DE MESSINE donne pas de description spéciale de cette région : les seules indications que nous y puissions trouver sont celles fournies par ses listes de gise- ments fossilifères et surtout par sa carle géologique. Le gisement de Monte-Corvo (sous l'indication générale de Reggio-Archi) est par lui (d’après sa carte) rapporté à son étage sicilien ; étant donné le sens que Seguenza donnait à cet étage, cette attribution est tout à fait exacte, puisque le type du Sicilien de Seguenza, dans la province de Reggio, se trouve précisément à Monosterace, gisement que j'ai été amené à consi- dérer également comme calabrien. La carte de Seguenza n'indique pas les affleurements de marnes blanches du Torrente Torbido, mais par contre, sur le versant Sud du Pentimele, elle montre ceux des environs de Vito, en les attribuant à l'étage zancléen, c’est-à-dire à la base du Pliocène, solution conforme à celle que nous avons adoptée. Enfin, la grande masse des sables du Pentimele est considérée par cet auteur comme d'âge saharien inférieur, c’est-à-dire parallélisée avec les gisements calabriens situés à l'Ouest de Gallina, où il a pris, comme nous le ver- rons, le type de son Saharien inférieur. Toutes ces assimilations de Seguenza sont évidemment justes dans l’ensemble ; toutefois, d'après la seule lecture de son ouvrage et de ses cartes, il est bien difficile de se faire une idée nette de la stratigraphie de cette région : cela tient surtout à sa conceplion d'un étage zancléen séparé de l’Astien par une discor- dance, et à la distinction établie par lui entre le Sicilien et le Saharien inférieur, distinction qui, même dans ses travaux, n'est appuyée sur aucun fait paléontologique ou stratigraphique. Mantovani a, au contraire, étudié spécialement | 165] la région du Pen- timele, et il a fort bien reconnu la succession des divers terrains tant sur le versant Nord près des Archi, que sur le versant Sud près de Vito, il s’est malheureusement laissé trop influencer par les idées théoriques de Seguenza, bien qu'il « confesse » floc. cit., p. 451) n'avoir pas réussi à trouver bien nette la distinction entre Zancléen et Astien. Mais la plupart de ses observations de fait n’en demeurent pas moins assez justes, et ses coupes surtout sont beaucoup plus rapprochées de la réalité que celles de Seguenza. En particulier, son panorama du versant Sud du Pentimele (p. 448) montre très bien la position stratigraphique des assises du Pliocène ancien (couches C et D), reposant sur le Miocène et supportant toute la masse de graviers du Pliocène supérieur; les fossiles qu'il cite (p. 447) dans ces assises, près de Vito (par exemple Pecten flabelliformus, P. latissimus, Hinnites crispus, Rhynchonella bipartita, Clypeaster pliocenicus, etc.), en démontrent l’âge d'une façon indubitable. M. de Stefani [91] a, le premier, signalé d’une façon nette les argiles pliocènes anciennes du Torrente Torbido, près des Archi; quant aux COUPE REGGIO-TERRETI 87 sables de Monte Corvo et du Pentimele, il les range dans son étage Post- pliocène, dont la partie inférieure correspond précisément à notre Cala- brien ; mais 1l croit (loc. crt., p. 216) à une discordance entre ce Postplio- cène et le vrai Pliocène ; j'ai montré ci-dessus pourquoi je ne pouvais me ranger à cette opinion. C'est une pareille discordance qu'admet également M. G. de Stefano, qui a parlé de cette région de Monte Corvo dans diverses publications récentes |106, 111] ; cette discordance Jui paraît prouvée par la coupe de la carrière d'argiles du Torrente Torbido, coupe que nous avons longue- ment étudiée plus haut (voir fig. r1 et 12); le même auteur a signalé à Monte Corvo des restes d'Éléphants et de Rhinocéros dont j'aurai à reparler dans la suite. Enfin, M. Cortese [51] a fait ressortir l’analogie existant entre la série des terrains aux Archi et à Monoslerace ; dans ces deux localités il a constaté la superposition aux argiles de sables très fossilifères qu’il rap- porte à l'étage sicilien, considéré par lui comme concordant avec le Pliocene ; il donne en même temps (p. r78) une liste de fossiles « sici- liens » de ces deux localités ; on sait d’ailleurs que sur les cartes de détail relevées par lui, ce Sicilien est réuni, sous le symbole p#, aux sables « astiens ». Par contre, les graviers du Pentimele sont séparés par M. Cortese du Postpliocène : et cet auteur en fait (p. 188) « une forme spéciale de dépôts quaternaires », qualifiée par lui de « Quaternaire de déjections », et développée partout sur les deux rives du détroit de Mes- sine ; nous en avons déjà parlé à propos des collines au Nord de Messine, 2° Le Monte di Botte et la coupe Reggio-Terreti, (Planche Il, fig. r). Entre la Fiumara dell Annunziata et le Torrente Calopinace, qui coulent respectivement, l'une au Nord, l’autre au Sud de Reggio, s'étend une longue crête de collines orientées Est-Ouest, qui va finalement se raccorder aux hauts plateaux de l’'Aspromonte, dans la région dite Campi di Reggio, à 1.000-1.100 mètres d’altitude. Ces plateaux étant formés de terrains cristallins, il est donc à pré- voir que pour y arriver, à partir de Reggio, on doit traverser des ter- rains de plus en plus anciens; c’est ce que nous allons faire, en effet, en décrivant la coupe de ces collines, depuis la mer jusqu'au village de Terreti, vers 550 mètres d'altitude (voir la coupe pl. TI, fig. 1). La ville de Reggio est dominée à l'Est par une terrasse en pente douce vers la mer, dont le sol est formé d’alluvions quaternaires, à 88 DÉTROIT DE MESSINE l’altitude moyenne de 100-120 mètres; nous l’étudierons dans la suite sous le nom de terrasse du cimetière de Reggio. Après la tra- versée de cette terrasse, la pente s’accentue et la route gravit en lacets le versant occidental d’un premier massif de collines sableuses appelé Monte di Botte, du nom d'un petit hameau qu'il domine. A. — Ce Monte di Botte est formé par une immense accumula- tion de sables et de graviers blancs, tout à fait analogues à ceux du Monte di Pentimele : les deux montagnes se font face, d’ailleurs, de chaque côté de la Fiumara dell Annunziata. Au point de vue stratigraphique, l’âge pliocène supérieur, calabrien, de ces sables n'est pas douteux : ils sont le prolongement direct de ceux du Pen- timele et de Monte Corvo. Mais ils ne présentent pas une richesse paléontologique comparable à celle de ce dernier gisement : Seguenza ne signale pas de fossiles provenant expressément de cette région; Mantovani n’en cite ici que cinq ou six espèces banales ([165], p. 456, couches A); M.de Stefani ([91], p.216) indique Botte comme localité fossilifère pour son Postpliocène, mais sans en donner d'espèces. Ces sables sont, d’ailleurs, remaniés sur place en une succession de petites terrasses d’alluvions continentales, évidemment quaternaires; par leur profonde altération et leur couleur rouge vif, ces parties remaniées tranchent vivement sur la masse blanche des sables et graviers marins. Ces derniers paraissent au premier abord fort épais, puisque la route de Terreti s'y élève de près de 200 mètres, mais, en réalité, elle recoupe souvent les mêmes bancs, car le plongement des couches se fait, d'une manière générale, suivant la pente du terrain. B.— Mais, finalement, la route devient moins inclinée, de sorte -qu'elle commence à recouper rapidement des couches de plus en plus anciennes. Comme d'ordinaire, on voit alors les sables devenir plus fins, puis plus marneux, de sorte que, par des passages insensibles, on arrive ainsi à des assises marneuses typiques. Vers 366 mètres d'altitude, ces marnes sont exploitées pour une tuilerie, dans la région dite Pozzicelli; les carrières creusées là permettent de voir nettement ces argiles plongeant vers la mer avec une incli- naison assez faible, puis passant insensiblement par leur partie supérieure à des couches de plus en plus sableuses!, qui se relient 1 Voir dans l’appendice la liste des quelques espèces que j'ai récoltées dans les sables des tuileries de Pozzicelli, COUPE REGGIO-TERRETI 89 enfin à la masse des graviers du Monte di Botte. Ce sont des argiles blanches, d'ailleurs très micacées, peu plastiques, et où les fossiles sont assez rares; je n y ai observé que quelques Dentalidés et Nucu- lidés (par exemple LZimopsis anomala Eich.) sans intérêt stratigra- phique. Mantovani (|165/, p. 457, couches C) en donne une petite liste de fossiles où l’on retrouve les Polvpiers habituels de ce facies dans le Pliocène ancien et quelques Mollusques caractéristiques, comme T'urritella tornata B., Dentalium elephantinum L. (= D. rec- tum L.). Seguenza à indiqué ces argiles sur sa carte géologique ([206 |, pl. I) en les attribuant, comme à son ordinaire pour ce facies, à l'étage astien. CG. — Ces argiles ne forment, d’ailleurs, qu'une intercalation relativement peu épaisse, car à la base elles deviennent calcaires, plus compactes, de nombreux Brachiopodes y apparaissent, et fina- lement on passe insensiblement, toujours en continuité, à des grès calcaires assez compacts dans lesquels la route est taillée en cor- niche, et qui forment de grands abrupts dominant les deux vallées profondes de la Fiumara dell Annunziata et du Torrente Calopinace, dont les bassins ne sont plus séparés ici que par une étroite crête. Mais là le caractère de la faune devient des plus nets : on peut y récolter avec une abondance extraordinaire les fossiles que Seguenza jugeait caractéristiques du facies littoral de son étage zancléen : le cachet spécial de cette faune zancléenne est donné par la très grande rareté des Gastropodes, réduits à quelques espèces éteintes de Scalaires (cf. Seguenza [206], p. 186) et la fré- quence des Brachiopodes (Térébratules du groupe ampulla) et des Pectinidés, particulièrement des Pecten flabelliformis, scabrellus, septemradiatus. L'étude détaillée de cette faune sortirait, d’ail- leurs, de notre cadre, car aucun doute n'est possible à son égard : c'est une faune pliocène ancienne des plus typiques. Ensuite notre route, taillée dans les assises de ces grès « zan- cléens », descend vers une partie basse de la ligne de crête, sorte de col séparant le massif du Monte di Botte, du massif du Monte Goni; le paysage est ici des plus grandioses et des plus instructifs. À gauche et à droite de la route, vers le Nord et vers le Sud, des ravins escarpés descendent à la Fiumara dell Annunziata et au Torrente Calopinace. À l'Ouest, les bancs de grès à Pectens que nous venons de traverser couronnent de grands escarpements 90 DÉTROIT DE MESSINE dont la base est formée par les assises du Miocène. Vers l'Est, l'horizon est dominé par la silhouette tabulaire du Monte Goni, formé également par les couches du Pliocène. Mais il faut, de ce côté, s'élever beaucoup pour retrouver le Pliocène, car, tout près de nous, la paroi rapide qui fait face aux grès à Pectens et que la route de Terreti contourne en corniche, est constituée par des schistes cristallins anciens. Cette brusque dénivellation des couches pliocènes est certaine- ment causée ici par une faille, et c’est sur le trajet de cette faille, au contact du Pliocène et des schistes cristallins, que les ravins descendant au Nord et au Sud ont abaissé la ligne de crête ; et les parois extrêmement abruptes de ces ravins permettent de bien étu- dier ici la disposition relative des deux terrains. Leur contact est s, forcément à peu près vertical, ainsi qu'il résulte de la coupe dessinée pl. IL, fig. 1; il est particulièrement facile à suivre dans le petit ravin qui descend au Nord de la route. Les couches pliocènes, en venant buter contre le cristallin, ne pré- sentent aucun changement de facies ; elles ne contiennent pas de blocs roulés : ce sont des grès sableux et argileux qui ont dû correspondre à des fonds vaseux tranquilles, assez profonds ; c'est au moins ce que suggère l'abondance, dans ces couches, d’un Pectinidé actuel, Chlamys seplemradialus, dont les conditions de vie sont bien connues. On n'a donc visiblement pas affaire ici aux couches de base du Pliocène, repo- sant sur leur substratum normal; partout où nous avons déjà décrit le début de la transgression pliocène, il nous est apparu avec des caractères tout différents (conglomérats de base, calcaires à coraux englobant des blocs de roche, etc.). Ainsi, c'est bien une faille (dont la direction est en gros parallèle à la côte) qui a déterminé ce contact ; on peut d’ailleurs s’en convaincre en examinant l'allure des strates du Pliocène. Ces strates sont, d’une façon générale, très légèrement inclinées versla mer, de sorte qu'elles viendraient couper presque à angle droit la surface de contact. Mais au voisinage de cette surface, elles subissent un léger rebroussement vers le haut; le mouvement orogénique qui a produit la faille a donc d’abord mis en jeu leur plasticité et la rupture ne s’est produite qu'à cause de la rigidité des schistes anciens ; dans l'épaisseur même de la masse pliocène, la dislo- cation n’a dû ainsi se traduire que par une flexure : ce passage de la faille à la flexure, suivant la plasticité plus ou moins grande des sédiments intéressés, est d’ailleurs un phénomène tout à fait classique. COUPE REGGIO-TERRETI 91 Cette dislocation présente un grand intérêt au point de vue tecto- nique ; iln’en est pas de même malheureusement au point de vue stratigraphique, car elle interrompt la série des couches et nous em- pêche de poursuivre notre coupe par continuité directe. C’est seulement en effet au-dessus du petit abrupt déterminé par les schistes anciens, que nous allons retrouver le Pliocène, reposant directement sur ces schistes, et nous offrant par conséquent sa série complète. Les couches de base et leurs contacts avec l’Archéen sont malheureusement difficilement visibles ici et je n’ai pu les observer personnellement. Mantovani dit les avoir étudiées tout près de Terreti, à Nasiti où apparaissent, dit-il ([165] p. 457), « les couches les plus anciennes du Pliocène, contenant en abondance de très grosses masses de roches cristallines » : dans ces zones inférieures, ajoute cet auteur, « la faune se modifie, les Brachiopodes deviennent rares et on voit apparaître le Peclen latissimus, la Scalaria retusa et le grand Clypeaster pliocenicus » ; ce dernier fossile surtout indique nettement un facies de transgression encore relativement littoral. Puis la profondeur augmente, et le facies devient franchement marneux : c'esble facies plaisancien (Astien de Seguenza) du Plio- cène ancien ; mais nous sommes tout près ici de l’ancien rivage pliocène et ce facies n'apparaît que d’une façon rudimentaire : je n'ai pu l’étudier moi-même et c’est d'après Mantovani que je signale ces couches marneuses : le village de Terreti serait bâti à peu près à leur partie supérieure. Au-dessus, par contre, la continuation de la coupe est des plus nettement visibles, par exemple quand on remonte au Nord-Est de Terreti, dans la direction du Monte Goni. À peine sorti du village, on trouve des sables fins d'un blanc très pur, qui donnent lieu à un paysage tout à fait caractéristique ! ; aucune végétation n’a pu s’y établir et le pays prend un aspect désertique : de petites dunes for- mées par le remaniement sur place des sables pliocènes ajoutent à l'illusion. La faune est ici extrêmement abondante, quoique relati- vement peu variée, et a rendu cette localité célèbre depuis les pre- mières explorations géologiques de l'Italie : Philippi [190] en a cité de nombreux fossiles et Seguenza y a pris le type du facies littoral de son étage zancléen; cette faune ne nous intéresse pas direc- ! Voir dans mon article [143] la photographie pl. II, fig. A. 92 DÉTROIT DE MESSINE tement, car il n’y a aucun doute sur son âge pliocène ancien ; elle est d’ailleurs identique à celle des grès à Pectinidés que nous avons étudiés à l'Ouest de la faille, sauf que les Brachiopodes et le Chlamys septemradiatus deviennent très rares, nous indiquant ainsi un facies plus littoral. La note dominante est toujours donnée par les Flabellipectens, dont les valves, comme l'avait remarqué Phi- lippi ([190] t. IT, p. 60), forment des bancs entiers; d’autres bancs gréseux plus durs se montrent entièrement formés par des Bryo- zoaires dans un magnifique état de conservation. Ces pentes sableuses sont dominées par des abrupts dont le talus régulier limite l'horizon du côté de l'Est ; çar à mesure qu'on s'élève le facies devient de plus en plus calcaire en même temps que la roche se consolide ; on finit par avoir des grès calcaires, formés presque uniquement par l'agglomération de coquilles d’Amphisté- gines (Amphistegina Haueri d'Orb.) : c’est le « calcaire à Amphit- stégines », facies dont Seguenza et M. de Stefani ont reconnu l’exten- sion dans le Pliocène de toute l'Italie. Les bancs presque horizon- taux de ce calcaire déterminent la plate-forme tabulaire du Monte Goni; ce dernier n'est en effet qu’un lambeau découpé par l'érosion dans un grand plateau autrefois continu que ces couches formaient ainsi tout autour de l’Aspromonte. La contrada Colombo au Sud, le Monte Chiarello et le Monte Roereto au Nord, sont d’autres lam- beaux analogues. Ainsi, les calcaires à Amphistégines forment ici le terme visible le plus élevé de la série de remblaiement pliocène. M. de Stefani a excellemment fait ressortir leur caractère littoral : cette zone à Amphistégines se développait autour de l’Aspromonte à la façon d’une ceinture de récifs frangeants, que l’on traverse chaque fois que, partant des zones profondes de la mer pliocène, on se dirige vers les parties émergées du massif ancien. | Malheureusement, la faune de ces couches supérieures est devenue très pauvre ; les auteurs ne citent pas expressément de fossiles qui en proviennent et il est probable que toutes les listes données de Terreti ne comprennent que la faune des sables inférieurs. Conclusions. Essayons maintenant de résumer la stratigraphie de toutes çes COUPE REGGIO-TERRETI 93 zones pliocènes, en cherchant à rétablir la continuité des assises de part et d'autre de la faille. La partie de la coupe qui s'étend entre Reggio et la faille de Terreti est très facile à interpréter ; les grès à Pectinidés (couches C) appartiennent indubitablement par leur faune au Pliocène ancien (ils sont marqués en Astien sur la carte de Seguenza); par contre, les sables du Monte di Botte (couches A), terme supérieur de la série, se montrent évidemment, comme l'ont d’ailleurs admis tous les auteurs, l'équivalent exact des sables calabriens de Monte Corvo. Quant à la limite à tracer entre le Pliocène ancien et le Calabrien, sa place exacte est difficile à préciser : elle viendrait évidemment tomber dans le complexe des couches sablo-marneuses B, mais les faunes ne sont pas assez riches pour nous permettre de préciser davantage. La question n’a d’ailleurs qu'un intérêt purement local, et, pour ainsi dire, cartographique. Il est beaucoup plus important pour nous de noter que tout cet ensemble de couches forme une série absolument concordante, et qu'on passe par continuité de couches sûrement pliocènes anciennes à des couches sûrement cala- briennes. Il nous reste maintenant à interpréter la partie de notre coupe située à l'Est de la faille de Terreti; en se basant sur la différence d'altitude qui existe entre Terreti (environ 540 mètres d'après mes observations) et le Monte Goni (740 mètres), on peut y évaluer à 200 mètres l'épaisseur de la série pliocène visible. Cette série est indubitablement concordante et la faune pliocène ancienne typique s'y rencontre depuis le soubassement jusqu'à la base des abrupts formés par le calcaire à Amphistégines : il y a d’ailleurs une simili- tude remarquable, au point de vue du facies et de la faune, entre les sables inférieurs à ces calcaires et les grès à Pectinidés {couches C) de la série précédente. Quant aux calcaires à Amphistégines, ici comme sur la côte ionienne (v. plus haut, p. 45-47), leur niveau exact est difficile à préciser, en l'absence de faune suffisamment caractéristique : ils contiennent surtout des Pecten opercularis, forme banale. Il me semble rationnel d'attribuer au Calabrien tout au moins la partie supérieure de ces calcaires : cette partie supérieure représenterait alors le facies littoral des sables qui, à Monte Corvo, contiennent la si belle faune dont nous avons déjà signalé le carac- tère profond, 94 DÉTROIT DE MESSINE En résumé, nous retrouvons, entre Reggio et Terreti, une coupe de la série pliocène tout à fait identique à celle que nous avait fournie la région de Monte Corvo; mais tandis qu'à Monte Corvo la faune la plus riche était celle du Calabrien, à Terreti au contraire c'est le Pliocène ancien qui se montre le plus intéressant au point de vue paléontologique. Je terminerai en résumant brièvement les opinions exprimées par les divers auteurs au sujet de cette région. Les travaux de Seguenza nous fournissent surtout une étude paléon- tologique soigneuse de la faune de Terreti : cet auteur y a découvert un certain nombre d'espèces nouvelles, surtout des Scalaires et des Pectens, dont quelques-unes (Pecten rhegiensis, Clypeaster pliocenicus, etc.) ont été depuis retrouvées en beaucoup d’autres localités. Par contre, les idées stratigraphiques de Seguenzale conduisent à une interprétationinadmissible de la stratigraphie. Le massif du Monte Goni, c’est-à-dire toute la partie située à l'Est de la faille de Terreti, est rapporté par lui (voir sa carte, pl. I) à son étage zancléen, terme inférieur de la série pliocène. A l'Ouest de cette faille, les couches pliocènes anciennes, que j'ai appelées B et C, sont considérées (d’après sa carte) comme de l’Astien, indépendant du Zancléen et reposant directement sur le Miocène. Bien entendu, comme le pressentait déjà Mantovani el comme l'ont démontré plus tard Fuchs et M. de Stefani, rien ne peut justifier une pareille distinction entre des formations si voisines, presque identiques par la faune et le facies. Enfin, les sables du Monte di Botte (couches A) sont parallélisés avec ceux du Pentimele et rapportés à l'étage saharien inférieur. Mantovani a fait [165] une étude spéciale et soigneuse de la région de Terreti, sa coupe géologique (p. 459) constitue certainement un des documents les plus précis qui aient été publiés pour la stratigraphie des terrains récents du détroit de Messine; malheureusement, ici encore, sa préoccupation de distinguer les étages établis par Seguenza l’a conduit à des assimilations tout à fait inacceptables pour les couches visibles de part et d'autre de la faille (où il a vu seulement la preuve de l'existence d’un « écueil émergeant à peine de la mer pliocène »). Par contre, il a bien mis en évidence dans sa coupe (fig. 3, p. 456) la liaison intime entre les assises pliocènes anciennes et les sables calabriens du Monte di Botte. M. de Stefani, sans s’être occupé spécialement de cette région, a apporté néanmoins à la compréhension de sa structure une importante contri- bution, puisqu'il a, le premier, reconnu d’une manière générale la place des calcaires à Amphistégines à la fin du Pliocène et non avant l’Astien, GISEMENT DE CARRUBBARE 95 comme le voulait Seguenza; comme je l’ai déjà dit, il a précisé les con- ditions de facies et la répartition de ces calcaires. Enfin, M. Cortese a publié aussi (|51}, p. 189, fig. 21) une coupe Reggsio- Terreti : il y attribue au Pliocène supérieur, reposant directement sur les schistes cristallins ou le Miocène, toutes les formations que nous venons d'étudier, à l'exception des sables du Monte di Botte (couches A); ces derniers sont assimilés, par lui, aux sables du Pentimele et rapportés aussi au € Quaternaire de déjection ». Cette interprétation l’a amené à dessiner sa coupe d'une manière quelque peu étrange et difficilement compréhensible. Le même auteur a aussi donné (p. 172, fig. 18 a) une coupe de détail Terreti-Nasiti, également assez difficile à interpréter en l'absence de texte qui la commente; elle paraît toutefois montrer, entre ces deux villages, l'existence d'une faille, prolongement certain de la dislocation que notre coupe rencontrait un peu plus au Nord. Appendice : le gisement de Carrubbare, Du massif du Monte di Botte, que nous venons d'étudier, dépend le fameux gisement de Carrubbare (on dirait mieux des Carrubbare); cette localité célèbre se trouve, en effet, située sur le versant Sud du Mont, non loin de la vallée du Torrente Calopinace, à 3 kilomètres environ à l'Est de Reggio. Un petit ruisseau, affluent de ce torrent, a creusé ici un étroit ravin sur les pentes duquel on peut récolter en abondance des fossiles admi- rablement conservés. Malheureusement, la stratigraphie ne m'a pas paru pouvoir donner de renseignements bien nets. Les couches les plus infé- rieures visibles ici sont des sables fins, un peu argileux; on ne peut constater la présence des marnes que nous avions vues si nettement plus au Nord, près des Archi, à la base de la série pliocène. Quand on s'élève, le facies devient un peu plus grossier et, finalement, on arrive sur un replat, à 1950 mètres environ, qui correspond à peu près à l'extrémité amont de la terrasse du cimetière de Reggio, signalée plus haut; mais on ne peut voir si les alluvions de cette terrasse sont en continuité avec le soubassement, D'ailleurs, l’altitude du gisement étant à peu près de 120 mètres el la faune dénotant une profondeur d'eau d'une centaine de mètres il est certain que l'altitude de l'ancien rivage correspondant est bien supérieure à celle de la mer contemporaine de cette terrasse. Ainsi, on ne peut affirmer la concordance et la continuité de ces sables de Carrubbare avec le Pliocène ancien et il se pourrait qu'ils représen- tassent une ancienne ligne de rivage postérieure au Calabrien; en tout cas, ils sont bien certainement antérieurs aux couches à Strombes qui, dans le gisement de Ravagnese, tout voisin, correspondent à une ligne 96 - DÉTROIT DE MESSINE de rivage de 90 à 100 mètres environ. Ils pourraient être contemporains de la mer qui a servi de niveau de base à la terrasse de Gallinà, à une altitude de 220-240 mètres environ. On peut donc hésiter entre un âge calabrien ou quaternaire ancien. | Toutefois, il semble très naturel de rattacher ces sables de Carrubbare à la puissante masse de graviers du Monte di Botte, dont nous avons pré- cédemment démontré l’âge calabrien. C’est cette dernière manière de voir qui a été adoptée par beaucoup de géologues. Ainsi, Seguenza, après une courte discussion ([206], p. 341, voir aussi sa carte), en fait du Sahärien inférieur et les compare ainsi aux dépôts du Pentimele et du : Monte di Botte. Sur la carte de M. Cortese, ces dépôts de Carrubbare sont, sous le symbole gs’, réunis au « Quaternaire de déjection », qui constitue ces deux montagnes. La faune ne permet pas non plus de décider nettement s'il s’agit de Calabrien ou de Sicilien. Elle a été souvent étudiée depuis Scilla (1670) et, en particulier, par Philipp [190], Mantovani [165] et Seguenza [206|; M. de Stefani en a donné aussi une liste de fossiles. Les Bryozoaires ont été étudiés par Neviani {Boll. d. Soc. geol. ital., vol. XXII. p. 507). Enfin, j'ai pu y faire moi-même une assez abondante récolte (voir dans l’Appendice). : Il s'agit évidemment d'une faune plus jeune que le Pliocène ancien; cela constaté, nous n’en retenons plus que les éléments caractéristiques, qui sont : 1° Comme espèces disparues : Nassa musiva Br., Raphiloma Columnæ Scacchi (Seguenza, de Stefani), Brocchia sinuosa Br. (Seguenza), Dentalium rectum L. (Mantovani, sous le nom de D. elephantinum). De Stefani y ajoute encore deux espèces qui me sont inconnues, la Mitra de Stefani Brugnone et la Columbella Scillæ de Stel.; il y cite aussi la T'urritella vermicularis Br., mais, peut-être, ne s'agit-il pas d'une forme typique, car elle avait été déterminée par Seguenza comme 7’. triplicata Br.. Mantovani signale également les T'urritella vermicularis Br., (ornala Br. et subangulata Br., mais ces déterminations ne peuvent être considérées comme bien certaines. 2° Comme espèces septentrionales : Modiola modiolus L., Tapes rhomboïdes Penn., Buccinum undatum L., Büccinum humphreysianum Benn., var. ventricosa Kiener (de Stefani), Chlamys ligrinus Müll. (de Stefani), C. seplemradiatus Müll. (Seguenza, collections de l'Institut technique de Reggio), Cyprina islandica L. (id.), Mactra solida L. (Philippi?), Cochlodesma prætenue Pultn. (Seguenza). Enfin, j'ai pu voir dans les collections de l'Institut technique de Reggio COUPE DE GALLINA 97 Panopæa norvegica Spengl. et Mya {runcala L.; toutefois, il paraissait y avoir eu dans cette collection de nombreux mélanges de faunes et je n'osérais garantir la provenance de ces échantillons. En résumé, les seuls caractères positifs de « pliocénicité » seraient fournis par les Turritelles éteintes citées plus haut, dont les détermina- tions ne sont peut-être pas absolument certaines; dans le même sens témoignerait aussi le caractère d'ensemble de la faune et, en particulier, l'abondance des As{arte sulcala da Costa avec la variété pseudofusca nov. si abondante partout dans le Calabrien : le gisement a ainsi beaucoup d'analogies avec celui, tout voisin, de Monte-Corvo. Par contre, la richesse en formes septentrionales tendrail à rajeunir la faune. Il y a donc doute au point de vue paléontologique. Mais, somme toute, au point de vue stratigraphique, il m'a semblé plus naturel de réunir les couches de Carrubbare aux assises sableuses qui constituent toute la masse du Monte di Botte et, par suite, de les consi- dérer comme calabriennes. 3° Coupe de la série pliocène à Gallina. (Planche I, fig. 3). La localité de Gallina est l’une des plus célèbres de toute l'Italie pour l'étude des formations « postpliocènes », par suite de la richesse de sa faune : aussi cette faune de Gallina est-elle souvent prise comme point de comparaison par les paléontologistes qui ont étudié les dépôts récents. Mais si cette faune est bien connue, il n'en est pas de même de la disposition stratigraphique des diverses couches, et c'est surtout ce dernier point que je vais m'efforcer de préciser. Les collines de Gallina, situées à 4 ou 5 kilomètres au Sud-Est de Reggio, s'élèvent au Sud de la Fiumara di Sant’ Agata, qu'elles dominent par des pentes assez raides. Je décrirai la coupe de ces collines en partant de la mer, près de l'embouchure de la Fiumara, pour me diriger vers l'Est, en passant par le village de Gallina (voir la coupe, pl. I, fig. 3). Le rivage est formé ici par une vaste plaine côtière, que les allu- _ vions des Fiumare élargissent continuellement ; on chemine donc d'abord dans ces alluvions en pente assez forte vers la mer; mais bientôt, dans la région Arangea ou Ravagnese, commencent à appa- raître, en dessous d'elles, des sables marins très fossilifères qu'elles Univ. pe Lyon. — Gicnoux 7 -98 DÉTROIT DE MESSINE ravinent : c'est le gisement de Ravagnese, d'âge quaternaire, que nous étudierons plus loin. Dans sa partie amont, ce Quaternaire est d’ailleurs fort peu épais, et on le voit reposer sur le Miocène. Après avoir dépassé, près du cimetière de Gallina, les traces les plus élevées de ces dépôts marins de Ravagnese, le Miocène surgit définitivement : brusquement la pente se redresse, on est au pied des collines de Gallina. La montée de ces collines se fait dans le Miocène, représenté par des marnes gréseuses, blanches, micacées, à facies langhien, dont les couches plongent assez fortement vers le Nord-Ouest (comme l'indique d’ailleurs fort exactement la feuille Messine de la carte géologique au 1/100.000°). Il en est ainsi Jusqu'à 220 mètres d’altitude environ. A partir de là, la pente devient plus douce, les cultures plus riches ; on voit, en effet, reposer sur les assises miocènes inclinées, les couches à peu près horizontales du Pliocène ; les affleurements sont d'ailleurs assez limités, car la région est couverte de cultures. En outre, la hauteur sur laquelle peuvent s'étudier ces assises est assez faible : car dès l'entrée du village de Gallina, vers 240-250 mètres, on les voit arasées en une terrasse magnifique dont la surface est recouverte d’alluvions et de limons argileux résultantde l’altération du Pliocène. En particulier, il ne m'a pas été possible de voir avec précision le contact du Miocène et du Pliocène : on peut seulement se rendre compte que les couches inférieures du Pliocène sont surtout mar- neuses et que le conglomérat de base, s'il existe, doit être très réduit ; puis viennent des marnes alternativement plus calcaires et plus sableuses, riches en fossiles ; dans les bancs inférieurs, le facies marneux domine et on peut récolter surtout des brachiopodes (Térébratules du groupe ampulla), d'une magnifique conservation ; dans le haut, au contraire, se développent des sables blancs très fins contenant la faune si riche et si variée que G. Seguenza avait prise pour type de son « Astien à facies mixte ». Peut-être au point de vue paléontologique pourrait-on observer que les espèces franche- ment pliocènes sont surtout localisées à la partie inférieure de Ia coupe, tandis que c'est plutôt dans les sables supérieurs qu'appa- raissent une foule d'espèces vivantes : mais ce sont des questions de facies qui paraissent causer ces différenciations. M, Manlovani, à qui est due la découverte de ce beau gisement de COUPE DE GALLINA 99 Gallina, y a étudié avec soin la série des couches et distingué ({165), p. 854) la succession suivante : A. — A la base, couches à foraminifères, auxquelles les Pectinidés, les Huitres (groupe de O. lamellosa Br.), les Balanes donnent encore un certain caractère littoral ; les fossiles sont assez rares, toutefois l’âge plio- cène ancien est prouvé par la présence presque exclusive de fossiles carac- téristiques de cet âge : Chlamys lalissimus Br.1, Flabellipecten flabelli- formis Br., T'erebratula groupe ampulla Br., Rhynchonella bipartita Br. B. — Alternance de couches calcaires (marneuses) et sableuses ; des espèces vivantes apparaissent en plus grand nombre, mais on peut citer encore comme formes caractéristiques du Pliocène: Cardila inlermedia Br., Scalaria pseudoscalaris Br., Turritella subangulata Br., T. tor- nala Br. C. — Couches marneuses (sables fins) dont la faune, d'après Manto- vani, serait la même que celle de Carrubbare, gisement calabrien étudié plus haut. M. Mantovani s'efforce de reconnaître l'Astien de Seguenza dans les couches B et son Zancléen dans les couches A; mais 1l ne cache pas combien cette distinction lui paraît ici difficile à établir. Ainsi, dans ce gisement de Gallina, nous avons encore affaire à une série concordante et continue qui débute certainement avec le Pliocène ancien; quant à savoir si la faune des couches supérieures est encore pliocène ancienne (astienne, comme le voulait Seguenza) ou si elle est déjà calabrienne (postpliocène, comme le veut de Stefani), c'est la une question purement locale et paléontologique, que nous discuterons en examinant la faune; je dirai tout de suite que je suis amené, par le grand nombre d'espèces éteintes qu’elle contient, à la laisser encore dans le Pliocène ancien. Les couches fossilifères dont nous venons de parler ne repré- sentent d'ailleurs pas le terme supérieur de la série pliocène. La seule considération de leur épaisseur permet déjà de s'en douter. En effet, reposant vers 220 mètres d'altitude sur le Miocène, elles sont ici brusquement tronquées vers 240 à 250 mètres par la même couche de formations alluviales quaternaires qui nivellent la haute terrasse de Gallina. D'ailleurs, dans la région que nous venons d'étudier, en dessous du village, on n'observe même au sommet aucun indice de diminution de profondeur. ! Cité par Mantovani dans la note dela page 458. 100 DÉTROIT DE MESSINE Traversons alors le village, puis cette terrasse dans toute sa lon- gueur, en continuant à nous diriger vers l'Est. Son altitude augmente lentement, puis on gravit bientôt une succession de petits replats correspondant à des niveaux d’alluvions plus anciens. On arrive ainsi à une région de collines très découpées s’élevant à 320 mètres d'altitude environ : c’est la région Badia (ou Puzza). Sur les flancs de tous les ravins, on a là de très belles coupes naturelles où se retrouvent les termes supérieurs de la série pliocène, dont les couches de base se continuent, masquées par les alluvions de la terrasse, jusqu'au gisement que nous avons étudié. Dans cette région Badia, nous reprenons donc la suite de la coupe de Gallhina : à la base, des sables fins, alternant avec des couches marneuses, doivent correspondre à peu près au sommet de cette coupe; cette zone est d’ailleurs ici assez peu fossilifère; puis, à mesure qu'on s'élève, on voit le facies devenir de plus en plus grossier : aux sables fins se substituent peu à peu des graviers, puis de véritables conglomérats; mais leur caractère franchement marin et même coralligène est. attesté par la faune qu'on y récolte et où dominent les grandes Térébratules du groupe ampulla; les formes éteintes y sont peu nombreuses; c’est une faune calabrienne typique, Seguenza a pris là le type de son étage saharien inférieur. D'ailleurs, la série pliocène ne semble pas tout à fait terminée avec ces couches, et le sommet n'en est pas visible; car les lambeaux d’alluvions qui, à l'altitude de 320 à 350 mètres environ, couronnent les collines, paraissent raviner les couches pliocènes qui devaient s'élever primi- tivement plus haut. Résumons maintenant en deux mots l’ensemble de la coupe que nous venons de décrire. Tout, d'abord, à la base des collines de Gallina, se montre une première série de dépôts marins (gisement de Ravagnese) nettement indépendants des suivants et appartenant par suite au Quaternaire. Au-dessus et séparée de cette première série par une falaise mio- cène, apparaît une deuxième série : c’est le Pliocène (s. L.); au- dessus d’un Pliocène ancien assez réduit, mais à faune typique, se développe un Calabrien dont le facies devient-de plus en plus grossier, sans cependant que nous puissions observer ici les alluvions conti- nentales qui, dans d’autres régions de la Calabre, couronnaiïent la série, FAUNE DE GALLINA (OUEST) 101 Seguenza, le premier, avait fort bien vu l'importance de la distinction à établir entre les couches fossilifères de Ravagnese, en bas de la colline, et celles de Gallina-Badia, au-dessus. Il a même insisté spécialement sur cette coupe de Gallina : la figure et la description qu'il en donne ([206|, p. 338) constituent certainement, à mon avis, une des meilleures pages de son {ravail au point de vue stratigraphique ; on y trouve même, en germe et encore confuse, la notion de niveau de base, et en tout cas l'idée de la classification des dépôts marins et alluviaux d’après leur alti- tude, Aussi sa distinction, basée sur cette coupe, entre un Saharien supé- rieur (Ravagnese) et un Saharien inférieur (Région Badia), est-elle la plus jusüfiée des nombreuses coupures stratigraphiques qu'il a proposées dans les terrains pliocènes et récents. Quant à sa manière de comprendre la série des couches du plateau de Gallina-Badia, elle est des plus com- pliquées, comme on peut s'en convaincre par l'examen de sa figure : son texte est d'ailleurs muet sur ce point et les indications qu'on pourrait déduire de sa carte ne concordent pas avec celles fournies par sa coupe, Les faunes. — Nous avons à examiner dans ces collines de Gallina deux faunes successives : la plus ancienne est celle des couches surmontant immédiatement le Miocène, et visibles sur le bord du plateau de Gallina, au Sud-Ouest du village; pour plus de _brièveté, je l'ai désignée dans le reste de ce travail (en particulier dans la partie paléontologique), sous le nom de gisement de Gallina Ouest, et rapportée, dans l'ensemble, au Pliocène ancien: la faune la plus récente est contenue dans les couches sableuses formant les collines qui s'élèvent à l'Est du village et du plateau de Gallina, dans la région Badia. J'ai appelé ce gisement Gallina Est et je l'ai considéré comme calabrien. 1° Gisement de Gallina Ouest. — II a été découvert et brièvemeny étudié par M. Mantovani, et nous avons rapporté plus haut (p. 99) les données de cet auteur. Comme je l'ai dit, il est fort possible quon ait là plusieurs zones qu'il ne m'a pas été possible de distin- guer nettement, Prise dans son ensemble, la faune d2 ce gisement a un caractère très spécial, qui a occasionné quelques divergences de vues relativement à son âge. Seguenza [206] la considérait, en effet, comme un représentant typique de son Astien à facies mixte, caractérisé par l'association d'espèces littorales et d'espèces profondes. Plus tard, de Stefani [91] la classe dans son Postpliocène inférieur : 1l se borne d'ailleurs à 102 DÉTROIT DE MESSINE reproduire les espèces s'aniées par Seguenza, de sorte que c'est au mémoire de Seguenza que J'aurai recours, en dehors de mes propres récoltes ! (en voir la liste dans a eme Cette faune est extraordinairement riche : Seguenza en cite près de goo espèces, dont environ 650 Mollusques; sur ces 650, 200 à peu près se rapportent à des espèces éteintes, mais près de 100 de ces dernières sont nouvelles, de sorte qu'on ne peut les faire entrer en ligne de compte dans l'appréciation de l’âge du dépôt. Il reste- rait donc environ 100 formes disparues caractéristiques. Mais, en parcourant la liste de Seguenza (mise par de Stefani [91], p. 209, sous une forme plus facile à consulter), on s’apercevra bien vite que ce nombre doit être fort réduit; en effet, l’'éminent paléontologiste italien avait, de l'espèce, une conception parfois un peu étroite, de sorte que beaucoup de formes qu'il considère comme disparues, sont, en réalité, impossibles à séparer de leurs analogues vivantes ; de plus, les explorations récentes ont fait découvrir, dans les grandes profondeurs de la Méditerranée et de l'Atlantique, un grand nombre de coquilles connues auparavant seulement à l'état fossile. Tout cela tendrait à rajeunir la faune de Gallina, beaucoup plus que ne le croyait Seguenza. M. de Stefani va même fe loin dans cette voie, puisqu'il considère le gisement comme « postpliocène ». Il est bien vrai que la plupart des espèces éteintes se a encore dans le Calabrien inférieur, à Vallebiaja et au Monte Mario par exemple : telles sont, d’après mes propres récoltes : Plicatula mytilina Phil. Flabellipecten flabelliformis Br. Chama placentina Defrance. __ Cardium hirsutum Bronn. Dentalium rectum L. Venus libellus R. E. P. — V. messanensis Ses. Columbella subulata Br: Terebratula cf. ampulla Br. Puncturella capuliformis Pec- chioli. auxquelles la liste de Seguenza permettrait d'ajouter beaucoup d'autres (par exemple de nombreuses espèces de Mitres et de Pleurotomes). ! Plus récemment cette faune a été encore étudiée par G, de Stefano [107], FAUNE DE GALLINA (EST) 103 Mais on trouve à Gallina des formes archaïiques qui n'ont encore été rencontrées nulle part dans le Calabrien : telles sont : Chlamys latissimus Br., dont j'ai moi-même recueilli une magnifique valve de grandes dimensions. Flabellipecten Alessii Phil. Amussiopecten cf. oblungum Phil. Rhynchonella bipartita Br. De telles formes ont beau être noyées dans un ensemble imposant d'espèces vivantes, elles n’en gardent pas moins leur signification et constituent des caractères positifs de Pliocène ancien. Un caractère négatif qui plaide dans le même sens est l’absence à Gallina des formes septentrionales immigrées caractéristiques du Calabrien : on ne trouve ni la Cyprine, ni le Buccinum undatum qui, pourtant, apparaissent partout, l’un ou l’autre, dans le Calabrien inférieur. Comme forme étrangère à la faune pliocène ancienne clas- sique, je ne vois guère à signaler à Gallina que le Buccinum hum- phreysianum Bennet, auquel on ne peut, je crois, attribuer une grande valeur stratigraphique. L'abondance des formes vivantes, qui contribue à donner à ce gisement un caractère quelque peu différent du Plaisancien et de l'Astien typique, tient surtout à son facies de sables coralligènes pro- fonds : les espèces profondes qui apparaissent de ce chef, et que l’on n'est pas habitué à rencontrer dans les « sables jaunes » du Pliocène, sont presque toutes des espèces qui n’ont pas varié depuis le début du Pliocène et sont encore vivantes. La question de l’âge de ces couches est d’ailleurs une question de mots, ou plutôt de conventions : la continuité stratigraphique est complète entre le Pliocène ancien et le Pliocène récent; et, au point de vue paléontologique, on a à Gallina une étape intermédiaire entre l'Astien classique et le Monte Mario : la limite du Calabrien est-elle - en deçà ou au delà de cette étape ? C’est une convention à établir. J'avoue qu’en rattachant ces couches de Gallina au Pliocène ancien, je me suis laissé surtout guider par la présence du Chlamys latis- simus Br. Mais aucune faune ne nous montre mieux la continuité absolue qui existe entre le Pliocène ancien et le Pliocène récent. 2° Gisement de Gallina (Est). — La faune y est bien moins riche et moins célèbre que dans le gisement précédent : elle mérite pour- 104 DÉTROIT DE MESSINE tant d'être examinée, car Seguenza avait pris cette localité comme type de son Shine inférieur. La liste donnée par cet auteur n'est pourtant pas très longue et ne contient aucune espèce éteinte! ; on y trouve une seule espèce septentrionale: Waldheimia cranium Müll. Mes récoltes ont été ici un peu plus abondantes, comme on le verra dans l’appendice. Mais elles ne m'ont révélé comme Mol- lusques qu'une seule forme éteinte, Hinnites ercolanianus Cocconi. Parmi les Brachiopodes, abondent par contre les grandes Térébra- tules du groupe ampulla ; cela suffit à nous montrer que nous sommes bien dans le Calabrien, puisque ce groupe n'existe plus dans le Quaternaire. 4° Les environs de Villa S. Giovanni et le gisement de Musalà. Au Nord de la région des Archiet dela Fiumara de Gallico, la côte calabraise du détroit ne nous offre plus d’autre gisement fossilifère célèbre que celui de Musalà. Les travaux antérieurs sont d’ailleurs assez pauvres en renseigne- ments sur cette partie de la côte; personnellement je n’ai guère exploré que le gisement de Musalà : celui-ci offrait en effet pour moi un intérêt de premier ordre. Seguenza, après en avoir décrit une faune extrêmement riche, et avoir quelque peu hésité sur l’âge de cette faune, s’esten effet décidé à considérer ce gisement comme con- temporain de ceux de Ravagnese et de Boveto ; il le range donc dans son Saharien supérieur, dont le type (Ravagnese) est pour moi l'équivalent exact de l’horizon à Sérombus bubonius Lmk. Je commencerai d'abord par préciser les conditions stratigraphi- ques de ce gisement ; puis nous en analyserons la faune d'une manière détaillée. | : Musalà est un petit village situé à 4 kilomètres environ à l'Est de Villa S. Giovanni ; il est séparé de la mer par un vaste plateau allu- vial, la terrasse de Campo di Calabria : nous retrouvons là une ancienne plaine côtière quaternaire, magnifiquement conservée et 1 Etant donné que Anomia siriala Br., considérée comme éteinte par Seguenza, est identique à la forme vivante 4. glauca Mts. GISEMENT DE MUSALA 109 correspondant à un niveau de base de 80-90 mètres environ : nous en reparlerons plus loin. Près de son extrémité amont, ce plateau, s'élevant en pente douce jusqu'à 170 mètres d'altitude environ, vient s'appuyer contre des collines sableuses stériles entre lesquelles s’abrite le village de Musalà. Les vallons qui circulent entre ces collines sont d’ailleurs assez profondément creusés, car la grande Fiumara di Catona coule à 1-2 kilomètres au Sud et est le point de départ d’une vigoureuse érosion régressive ; ils vont nous montrer la coupe suivante : e Fic. 14. — Coupe du gisement de Musalà, près Villa S. Giovanni. A. — Plaine côlière actuelle. Q. — Terrasse de Campo : ancienne plaine côtière quaternaire. Ps. — Graviers et sables très fossilifères. . . , . (Calabrien. Pa. — Marnes et calcaires à polypiers . . . . . Pliocène ancien. Cr. — Roches cristallines. Echelle des hauteurs et des longueurs: 1/50.090. A. — Les couches les plus anciennes visibles de la série pliocène sont des calcaires à grain fin, très riches en Brachiopodes et en grands Coralliaires : certains blces sont tellement durs et compacts qu'on serait tenté de les prendre pour des calcaires coralligènes secondaires ; Je n'en ai pas observé d’ailleurs d'affleurement bien net, mais on trouve de nombreux blocs isolés dans les champs au Nord du village ; c'est bien en effet dans cette direction qu'il faut s attendre à trouver les couches de base du Pliocène, puisque, un peu plus au Nord, ce sont les schistes cristallins qui affleurent. B. — Les couches sableuses qui viennent ensuite sont bien visibles dans tous les versants des collines entourant le village ; elles forment un ensemble unique et on ne saurait y faire de cou- pures stratigraphiques ; la faune ne paraît pas se prêter non plus à aucune subdivision ; c'est tout au plus si on pourrait observer qu'à la partie inférieure les sédiments sont plus fins, plus marneux ; en corrélation avec ce facies, on voit se développer beaucoup de Bra- chiopodes. À la partie supérieure, les sables deviennent plus grossiers, sans que l'on trouve d'ailleurs de dépôts proprement côtiers ; car les alluvions continentales qui couronnent ici les collines à 200 ou 106 DÉTROIT DE MESSINE 240 mètres m'ont paru nettement raviner les sables pliocènes et être, par suite, quaternaires. En tout cas, ce sont surtout ces couches sableuses un peu grossières qui sont fossilifères : Seguenza ([206] p. 350 et suiv.) en cite 183 espèces dont 112 Mol- lusques. | Ainsi la coupe que nous observons ici, quoique moins nette, paraît analogue à celle que nous avons décrite dans la basse vallée du Torrente Torbido, à Monte Corvo. À Musalà aussi nous retrou- vons une série pliocène continue, débutant par des formations zoogènes calcaires qui se moulent sur les inégalités du substratum cristallin, et se continuant par des dépôts marneux ou marno-sableux dont l'individualité est ici, à vrai dire, moins accusée qu'à Monte Corvo. Enfin la série se termine par des sables et graviers à faune certainement plus récente que le Pliocène inférieur. Mais là encore, il ne semble pas que nous puissions voir la fin du remblaiement pliocène, comme nous l’avons observée dans l'isthme de Catanzaro: elle a été enlevée par l'érosion et ce sont des alluvions quater- naires qui « tronquent » la série pliocène. Aucun auteur à ma connaissance, pas même Seguenza, n'a donné d indications stratigraphiques sur ce gisement de Musalà. Mais les diverses couches qui y affleurent sont bien connues dans d'autres localités voisines, et nous pourrons y trouver une confirmation de l’interprétation que je viens de donner à cette coupe. On a signalé depuis longtemps, en effet, dans les environs immédiats de Villa S. Giovanni et de Pezzo (ou Pizzo) un calcaire blanc zoogène, riche surtout en Polypiers et en Bryozoaires et assez activement exploité comme pierre à chaux sous le nom de « tufo » ou « tofo » (on sait que ce nom s'applique, dans l'Italie du Sud, à toutes les roches calcaires un peu tendres et correspond à peu près à notre appellation de « mollasse calcaire »); l'apparition, près de la mer, de ce terme inférieur de la série pliocèneestévidemment liée au voisinage des affleurements de schistes cristallins : momentanément interrompus par les alluvions de la partie Nord de la terrasse de Campo, les terrains anciens reparaissent, en effet, le long du rivage, immédiatement au Nord de Pezzo, à Cannitello (voir la carte au 1/100.000, feuille Messine) ; la superposition directe de ces cal- caires aux roches cristallines me paraît donc, ici encore, infiniment probable. Ce « tufo » de Pezzo est d’ailleurs peu épais et intimement lié par sa partie supérieure à des marnes sableuses et à des sables peu | 4 3 GISEMENT DE MUSALA 107 fossilifères! (cf. de Stefani [91], p. 230), mais qui semblent bien être d'âge calabrien. Quant au « tufo » lui-même, les fossiles y sont abon- dants, mais peu variés. Seguenza n'y cite que sept espèces : Fissurisepla papillosa Segu., Pachylasma giqanteum Phil., Scalpellum zancleanum Segu., Stirechinus Scillæ Desm., 1sis melilensis Goldf., Dendrophyllia cornigera Lmk, Enallopsammia Scillæ Segu. Cette petite faunule est tout à fait analogue à celle qui se rencontre partout dans les facies calcaires du Pliocène ancien (Gravitelli, Archi, Milazzo, etc.), que Seguenza a rapportés à son étage astien. Aussi, je ne vois pas pourquoi M. de Stefani considère le « tufo » de Pezzo comme postpliocène, alors qu'il considère comme pliocènes les calcaires du Torrente Torbido, ainsi que les marnes qui les surmontent. La similitude des deux coupes me paraît absolue. s : D'autres faits intéressants nous seront fournis par l’étude de la région située immédiatement au Sud de Musalà. Dans cette direction, en effet, on s'écarte de l’ancien rivage pliocène et on voit se développer beaucoup plus les facies marneux qui, à Musalà, n'étaient qu'à peine représentés entre les calcaires coralligenes et les sables du Pliocène supérieur. Ces bancs marneux, devenus très épais, constituent, en effet, l’ossature des collines qui s'étendent entre Musalà et la Fiumara di Catona; on a là, spécialement à la base de ces collines, de véritables et puissantes marnes blanches qui ont tout à fait un facies pliocène ancien; elles sont malheu- reusement peu fossilifères et je n'y ai guère récolté que des Polypiers localisés d’ailleurs dans un seul banc à la partie supérieure. Ces marnes sont indiquées sur la carte géologique officielle au 1/100.000 (feuille Messine) par le symbole p,, apparaissant sous les sables du Post- pliocène. Seguenza a signalé incidemment cet affleurement marneux en le rapportant à l’Astien ?. Ainsi, bien qu'à Musalà même, la base de la série pliocène se trouve extrêmement réduite, elle y existe néanmoins et se relie, par continuité, au Pliocène ancien des régions voisines. Les sables fos- silifères de Musalà sont donc superposés en concordance et en conti- nuité au Pliocène ancien : stratigraphiquement, ils appartiennent au 1 Philippi [190] cite à Pezzo une cinquantaine d'espèces, d’ailleurs sans intérêt, mais ces citations n'étant accompagnées d'aucune indication précise de localité ou de niveau, je ne puis en tenir compte ici. — Manzoni a également donné deslistes de bryozoaires fossiles à Pezzo. Seguenza (206), p. 244 : « L'Astien est représenté à Pezzo par des sables et des calcaires à Polypiers et Cirrhipèdes pédonculés, et,sous forme de sables fins marneux, il se rencontre sur la route qui conduit à Fiumara, » 108 DÉTROIT DE MESSINE cycle pliocène et non au « Quaternaire à Strombus » comme cela résultait des assimilations de Seguenza. L'examen détaillé de la faune de Musalà va nous montrer qu'elle est d'âge calabrien. Etude de la faune de Musalà. Seguenza est le seul auteur qui, à ma connaissance, ait donné une liste de fossiles du gisement de Musalà pris en particulier, sans mélange avec des gisements voisins. Il en cite 183 espèces, dont 108 Mollusques, 4 Brachiopodes, 7 Annélides, 62 Bryozoaires, 1 Echinoderme, 1 Polypier. Je ne tien- drai compte ici que des Mollusques, car les autres groupes ne four- nissent aucune espèce intéressante (il y aurait seulement quelques Bryozoaires éteints, paraissant d’ailleurs peu caractéristiques, mais qu'il n est pas de ma compétence de discuter). Parmi ces Mollusques, Seguenza n’a reconnu qu’une seule espèce éteinte, la Mitra Bronni Michelotti, représentée par un seul exem- plaire; il y signale une espèce émigrée septentrionale, la Nafica Montacuti Forbes, trois espèces émigrées de l'Atlantique africain : Tritonium ficoides Reeve, Terebra corrugata Lmk, Natica porcel- lana d’Orb., enfin une espèce émigrée de l'Océan indien, Natica orientalis Gmelin. Mes propres matériaux sont à peu près aussi riches que ceux de Seguenza (voir la liste dans l’appendice), car j'y ai reconnu quatre- vingt-onze espèces de Mollusques, en laissant de côté certains ue (Vermétidés, Rissoidés) pour lesquels je n’ai pas cru peter arriver à des déterminations bien précises. Mais en revanche, j'y ai retrouvé plusieurs espèces intéressantes non citées par Seguenza, de sorte que les deux récoltes se complètent heureusement, Ma liste comprend en effet Comme espèces éteintes : Chama placentina Br., Mitra Bronni Michelotti, Nassa musiva Br. Comme espèces septentrionales : Tapes rhomboïdes Pennant, Buccinum undatum L. Je n'ai retrouvé, dans mes récoltes, aucune des espèces à affinités méridionales citées par Seguenza; et je montrerai (5° partie) qu'il convient de considérer ces citations comme douteuses. De sorte que, finalement, la comparaison des deux récoltes me permettra d'établir la liste suivante ; CONCLUSIONS 109 Espèces éteintes : Chama placentina, Mitra Bronnü, Nassa musiva, Terebra corrugata [(?). Espèces émigrées septentrionales : Buccinum undatum, Tapes rhomboïides, Nalica Montacuti. Espèces émigrées méridionales : Tritonium ficoïdes (?) Nalica lactea Guilding (?) Quelles conclusions pouvons-nous tirer de ces espèces ? Tout d'abord il est absolument évident qu'il ne s’agit pas ici de Pliocène ancien. Les espèces éteintes et les espèces émigrées sep- tentrionales constituent des caractères positifs pour nous faire écarter le niveau à Sfrombes et cette manière de voir serait encore justifiée par nombre de caractères négatifs, tels que l'absence com- plète des Strombes et des Cônes si abondants à ce niveau dans le gisement voisin de Ravagnese; j'attirerai spécialement, à ce sujet, l'attention sur le Buccinum undatum, espèce tout à fait étrangère à la faune à Strombes et dont j'ai récolté à Musalà (où elle n'avait pas été signalée par Seguenza) des exemplaires bien typiques. Quant aux espèces septentrionales et aux espèces éteintes, elles sont communes au Calabrien et au Sicilien, sauf la Mifra qui n'est pas connue en dehors du Pliocène ancien et qui donne ainsi à la faune de Musala un caractère archaïque bien net. Quant à la Terebra, c'est également un genre inconnu en dehors du Pliocène ancien, mais sa sigmification me parait encore obscure. Conclusions. Ainsi, en nous bornant aux caractères paléontologiques, nous pouvons hésiter entre Calabrien et Sicilien. Dans ces conditions, j'estime qu'il appartient à la stratigraphie de décider, et c’est pour- quoi je pense, provisoirement au moins, que cette faune de Musalà doit être regardée comme Calabrienne. Si d'ailleurs, au lieu de faire appel seulement aux espèces carac- ténistiques, nous considérons le facies d'ensemble de cette faune, cette conclusion nous paraîtra extrêmement naturelle. Car, toutes ses affinités sont avec les gisements (Calabriens) voisins, des Archi, par exemple!, et non avec ceux de Ravagnese et Boveto : en par- Dans la deuxième édition de la carte géologique officielle au 1/100.000 (feuille Messine) revisée en 1890 par l'ingénieur Cortese, les sables de Musalà sont désignés par le symbole qi, et assimilés aux sables du Pentimele, ce qui est bien d'accord avec l'interprétation que j'ai adoptée. 110 DÉTROIT DE MESSINE ticulier, cette faune de Musalà est une faune profonde, comme le montrent les espèces suivantes : Asfarte sulcala da Costa, Chlamys septemradiatus Müll., Venus effossa Biv., Turbo peloritanus Cantr., etc.; l'extrême abondance des Asfarte sulcata avec leur mutation pseudofusca, que l'on peut ici ramasser par centaines, comme à Monte-Corvo, tandis qu'elles sont absentes à Ravagnese, constituent un des traits de ressemblance les plus frappants entre cette faune de Musalà et les faunes calabriennes. Si, enfin, on voulait rapporter le dépôt de Musalà à la période de régression qui a suivi le maximum d'extension de la mer pho- eène, on serait conduit à l’attribuer à une ligne de rivage extrême- ment élevée, à 300 mètres au moins au-dessus de la mer actuelle; car les sables fossilifères s'élèvent jusqu'à 200 mètres, et la profon- deur d’eau à laquelle ils se sont formés n'est certainement pas infé- rieure à 100 mètres. 5° La partie méridionale de la côte calabraise, Au Sud du plateau de Gallina, la côte calabraise devient moins. intéressante : il n y a plus, en effet, dans cette région, de gisement fossilifère célèbre. Je dois néanmoins la mentionner à cause du grand développement qu'y montre la série pliocène. Cette série a d'ailleurs sensiblement la même constitution qu'à Gallina. I est surtout remarquable d'y constater l'épaisseur toujours crois- sante des marnes de la partie inférieure. Extrêmement réduites aux Archi, un peu plus développées à Gallina, ces marnes prennent ici une grande importance : on pourra bien les étudier, par exemple, dans le ravin étroit creusé par la petite Fiumara di Macellaï qui coule au Nord-Est de Pellaro. Elles ne sont pas extré- mement fossilifères, et on ne peut guère y récolter que des Nucu- lidés et des Polypiers, faune monotone et insignifiante habituelle à ces facies, À mesure qu'on s'élève dans la série, on voit ces marnes devenir sableuses, en même temps qu'apparaissent de nombreux * Brachiopodes, en particulier de magnifiques Térébratules du groupe. ampulla. Enfin, à la partie supérieure, ce sont de véritables sables ou graviers grossiers avec bancs de conglomérats, Pectinidés, huîtres, balanes, etc. Les facies à Brachiopodes sont encore magni- PARTIE MÉRIDIONALE DE LA COTE CALABRAISE 111 fiquement visibles près du petit village de S. Giuseppe di Valanidi, où j'ai aussi récolté une petite faunule (voir dans l’appendice). Mais les faunes ne m'ont pas permis ici de préciser l’âge exact de ces diverses assises qui forment une série bien concordante, plon- geant assez régulièrement vers l'Ouest. Il est, toutefois, hors de doute quil s'agit bien de Pliocène (s. 1.) comme nous l'indique l’abondance des Terebratula ampulla ; par analogie avec les coupes voisines, 1l est certain que la partie inférieure marneuse est pliocène ancienne, tandis que les graviers du sommet sont calabriens. Ces formations ont été assez diversement interprétées par les auteurs, mais aucun ne les a spécialement étudiées dans cette région Seguenza a classé dans son Astien les couches marneuses à Brachiopodes dont nous venons de parler : quant aux sables et graviers, ceux situés entre Motta et la mer, en particulier aux envi- rons de Pellaro, sont considérés par lui comme du « Saharien infé- rieur » : ils atteignent là, d’après lui, la hauteur de 830 mètres. Cette indication de Seguenza est devenue rapidement célèbre, car cet auteur rangeait son Saharien dans le Quaternaire : ainsi a pris naissance la notion fameuse du « Quaternaire soulevé à 830 mètres de la Calabre ». Quant aux sables qui couronnent les montagnes à l'Est de Motta, Seguenza les a attribués (d’après sa carte) au Sici- lien et 1l les indique (sur cette carte) recouvrant les plateaux de la région Calcarella à plus de 1.000 mètres d’altitude. Il est superflu d'ajouter que ces distinctions d’étages ne reposent absolument sur aucun fait stratigraphique ou paléontologique : les faunes sont 1ci extrêmement pauvres et Seguenza ne cite dans cette région aucune liste de fossiles à l'appui de ses déterminations d'âge. Et c'est ici le lieu de signaler une des plus bizarres de ces détermi- nations. Le grand plateau à 1.000 mètres qui ceinture tout ce ver- sant de l'Aspromonte a été iei découpé, par des vallées d’érosion, en trois régions qui sont, du Sud au Nord, la Regione Calcarella (se prolongeant jusque près de Motta), les Campi di Sclan, les Campi di S. Agata. Or, d'après la carte de Seguenza, ces trois régions seraient occupées respectivement par du Sicilien, de l'As- tien, du Zanciéen, reposant chacun directement sur le substratum de roches anciennes. Ainsi, le célèbre « Quaternaire à 830 mètres d'altitude » est, bien à tort, devenu classique, car la région où le cite Seguenza est Juste- 12 à VALLÉE DU CRATI ment une de celles où l’âge des sables et graviers recouvrant les roches cristallines de l’Aspromonte demeure le plus indécis et n'est certainement pas postérieur au Pliocène (s. 1.). C'est ce qu'a d’ailleurs fort bien compris M. de Stefani : cet auteur se refuse à faire dans ces formations aucune coupure strati- graphique ou paléuntologique : il les considère toutes comme post- pliocènes, même les marnes inférieures. Mais, d’après lui, la plus grande altitude constatée pour ce postpliocène serait 450 mètres au Monte Leporicchio; en ce qui concerne le « Quaternaire à 830 mètres » et les sables et graviers des hauts plateaux del’Aspro- monte, il se montre avec raison extrêmement réservé et hésite même, pour leur âge, entre miocène et pliocène. Enfin, les sables des Monts de Motta sont assimilés par M. Cortese aux sables du Pentimele et rapportés par lui à son « Quaternaire de déjection ». C'est surtout la célébrité de ce « Quaternaire à 830 mètres » qui m'a engagé à dire ici quelques mots de cette région, laquelle n’a pas, à part cela, d'intérêt bien spécial. CHAPITRE IIL LA CALABRE DU NORD $ 1. — VALLÉE DU CRATI 1° Généralités Sur les cartes géologiques à petite échelle, la vallée du Cratise dessine nettement. C’est un grand fossé presque rectiligne, allongé du Nord au Sud, entre la Sila et la chaîne côtière tyrrhénienne. Vers le Nord, cette dépression s’élargit beaucoup, tout en tournant à angle droit pour venir s'ouvrir vers l'Est : elle se termine ainsi sur la mer Ionienne, au pied des escarpements calcaires du Monte Pollino, par une vaste plaine d’alluvions récentes, malsaine et inhabitée, où sont les ruines de l'antique Sibari. La mer pliocène a pénétré en effet dans cette dépression jusqu'au. GÉNÉRALITÉS 113 delà de Cosenza. Mais elle ne formait là qu’un golfe et non un détroit, car elle ne parait pas avoir jamais rejoint la mer qui occupait l'isthme de Catanzaro. En effet, les traces les plus méri- dionales et les plus élevées laissées par les eaux marines dans ce golfe du Crati, consistent dans les sables du Pliocène supérieur (p, de la carte géologique au 1/100.000°), indiqués sur la feuille Cosenza à la cote 761 au Nord du Torrente Jassa, à l'Ouest de Rogliano. Plus au Sud, la ligne de partage des eaux, dont le point le plus bas dépasse gvo mètres, est partout constituée par les phyllades anciennes ou les roches cristallines. Partant des environs de Rogliano, il faut aller jusqu’à Nicastro et Tiriolo pour retrouver des sédiments pliocènes marins, et nous avons vu qu'à Tiriolo ils ne dépassaient pas 600 mètres d'altitude, sous un facies tout à fait littoral ou même continental. Aïnsi, dans ce golfe étroit, fermé vers le Sud, nous n'allons pas retrouver les formations de grande profondeur et les facies zoogènes que nous avons étudiés sur la côte orientale de la Calabre méri- dionale. Les sables et les argiles sableuses vont jouer un rôle prédo- minant. Par contre, la surface topographique résultant du rem- blaiement pliocène va nous apparaître ici avec une grande netteté : par suite de l'éloignement de la mer, l’érosion régressive n’a pas encore eu le temps de la faire disparaitre complètement ; et nous retrouvons entre Cosenza et Castrovillari les mêmes plateaux alluviaux que dans l’isthme de Catanzaro. Malheureusement, les {ravaux spéciaux relatifs à cette intéressante région sont trop peu nombreux; il faut signaler d'abord les renseigne- ments donnés par Cortese [43, 51] puis ceux fournis par les cartes géolo- giques détaillées. On trouvera beaucoup de vues intéressantes sur le Pliocène et l’orographie dans un travail de Taramelli [220]. Quelques indications sur la basse vallée du Crati sont contenues dans la belle monographie de Fucini [137]. Mais les travaux les plus importants à ïotre point de vue sont ceux de l'ingénieur Crema [55, 56]. D'ailleurs, dans les ouvrages de Taramelli et de Crema, on trouvera des indications bibliographiques de travaux plus anciens qui ne nous intéressent pas directement. Grâce aux indications de ces auteurs, que j'ai eu l’occasion de com- pléter par mes propres observations, il est facile de se faire une idée claire de la structure générale du Pliocène dans le bassin du Crati. Univ. pe Lyon. — Gicnoux 8 114 VALLÉE DU CRATI 2° Stratigraphie Cette structure générale est d'ailleurs des plus simples, et, en particulier, rappelle trait pour trait celle que j'ai décrite plus haut dans l’isthme de Catanzaro. La série débute par un conglomérat de base, visible en quelques points seulement : elle se continue par des argiles, puis par des sables qui s’y superposent en continuité, et enfin elle se termine par des alluvions continentales. 1° Le conglomérat de base. du Pliocène est surtout développé près de la mer, dans la partie inférieure de la vallée : là, en effet, l'érosion a fait œuvre plus efficace, et a pu ainsi le mettre à découvert; car il est bien évident que le Pliocène, étant partout : transgressif, doit débuter également partout par un conglomérat de base. En tout cas, Cortese [43] a longuement décrit ces conglomérats sur le versant Nord du golfe du Crati, aux environs de Villapiana, Francavilla maritima, Civita. D'ailleurs, dans cette région voisine de l’ancien rivage pliocène, le facies des conglomérats envahit souvent toute la masse du Pliocène : ainsi s'expliquent les faits notés par Cortese : alternance des conglomérats et des marnes à la base de la série, et, au sommet, superposition fréquente des conglomérats aux marnes. 2° Puis vient le facies marneux : des argiles blanches ou bleues forment le plus souvent la base visible des sédiments pliocènes. 3 ILest difficile d'en séparer les formations qui suivent : ce sont des argiles sableuses où le facies sableux prédomine de plus en plus à mesure qu'on s'élève : c'est cette partie de la série pliocène (« Sicilien » de Crema, « Postpliocène » de Fucini) qui joue de beaucoup le plus grand rôle dans le comblement du bassin. 4° Enfin tout se termine, comme d'ordinaire, par des conglo- mérats continentaux, formant de vastes plateaux que nous étudierons en détail plus loin. 3° Les faunes. Cette puissante accumulation de sédiments était rapportée sans hésitation, Jusqu'à ces dernières années, au Pliocène typique : c'est l'interprétation adoptée dans le travail de Taramelli, c’est aussi celle des cartes géologiques officielles (où les cailloutis. FAUNES 115 supérieurs sont toutefois considérés, ainsi que dans le reste de la Calabre, comme du « Quaternaire marin »). Les travaux ultérieurs ont montré que les argiles el sables supérieurs contenatent la faune classique du Pliocène récent (Postpliocène des auteurs italiens). Toutefois, il est indubitable que la partie tout à fait inférieure des argiles de base correspond encore au Pliocène ancien : la faune y est d’ailleurs très pauvre et peu caractéristique ; je ne vois guère à rappeler que la liste donnée par Fucini ([137], p. 72) pour les argiles pliocènes de Corigliano, à l'entrée Sud du golfe. Mais l'existence du Pliocène ancien sous les argiles sableuses calabriennes résulte en tout cas des faits de continuité stratigraphique : dès que l’on sort, vers le Nord ou vers le Sud, du golfe du Crati, l'érosion plus avancée montre partout ce Pliocène ancien à la base de la série de remblaiement. D'ailleurs, étant donné le passage graduel entre les deux faunes, la question perd de son intérêt. Les faunes calabriennes au contraire ont été beaucoup mieux étudiées. Taramelli ([220]|, p. 100) en cite une longue liste provenant des environs de Cosenza : comme toujours, on y remarque une immense majorité de coquilles vivantes que je laisse de côté ; j'y relève seulement les formes éleintes suivantes : Nassa musiva Br, Raphitoma harpula Br., Mitra scrobiculata _ Br., Turritella subangulata Br., Dentalium rectum L., Spon- dylus crassicosta Lmk., Nucula placentina Lmk., Cardita intermedia Br. Plusieurs de ces espèces sont spéciales au Calabrien inférieur, et même le Spondyle n'a jamais élé, à ma connaissance, rencontré au dessus du Pliocène ancien ; de sorte que, si les déterminations sont bien exactes, on aurait là un indice de la présence, dans les environs de Cosenza, d'affleu- rements de cet étage, comme nous l'avons dit plus haut, il n'y aurait rien là que de très naturel. Fucini a donné une assez longue liste de fossiles « postpliocènes » récoltés près de S. Demetrio Corone, dans deux gisements, l’un à l'Ouest de Corigliano, sur la rive gauche du Torrente Coriglianeto, l’autre à la Serra Cogliano, au Nord de S. Demetrio. Ses deux listes sont presque pareilles : j'y note comme formes caractéristiques : Nucula placentina Lmk., Dentalium rectum l., Terebratula ampulla Br. 116 VALLÉE DU CRATI espèces éteintes habituelles du Calabrien, voisinant naturellement avec de nombreuses formes vivantes. Mais les études les plus soigneuses sur les faunes postpliocènes du bassin du Crati sont celles de Crema; elles ont porté sur quatre localités différentes : 1° Les argiles bleues visibles dans le lit des torrents au Sud de Castrovillari : c’est probablement là le meilleur gisement de toute la vallée du Crati, et j'y ai moi-même récolté une cinquantaine d'espèces, d'ailleurs toutes banales, dont on trouvera la liste dans l’appendice et qui montrent bien la physionomie récente de ce gisement (une coupe détaillée de cette localité sera donnée plus loin); »° la Serra Cogliano et la Serra S. Nicola, au Nord de S. Demetrio Corone : le premier de ces gisements avait été étudié déjà, comme nous l'avons vu, par Fucini; 3° la Regione Valle di Campo, sur la rive gauche du Torrente Campagnano, à l'Est de Castrolibero, non loin de Cosenza ; 4° les argiles des Bocche del Drago, près de S. Vincenzo la Costa, au Nord-Ouest de Cosenza. Dans ces diverses localités il s'agit bien, comme le fait très jJus- tement remarquer Crema, d’une même faune, qui mérite d’être discutée en détail, car elle a, depuis, servi de point de comparaison dans d’autres travaux ultérieurs. Nous y trouvons d'abord un nombre immense (plus de 150) d'espèces actuellement vivantes : c’est le fond banal de toute faune calabrienne. Parmi les formes considérées par Crema comme des espèces éleintes, un certain nombre ne peuvent être, à mon avis, retenues comme vraiment caractéristiques (voir, à propos de chacune d'elles, dans la 5° partie); telles sont : Pinna tetragona Br., P. Brocchii d'Orb., Cardium obliquatum Aradas non Michelotti = G. Aradasi Crema, Gibbula di Stefanoi Crema, Scalaria Sormanii Crema, Pyramidella aprustica Crema, Dentalium calabrum Mts., Rissoia puella Mts., Xeno- phora trinacria Fisch., Gerithium di Blasii Mts. Les seules espèces éteintes bien nettes sont dès lors : Plicatula mytilina Phil, Nucula placentina Lmk., Gerithium crenatum Br., Nassa gigantula Bonelli!, N. musiva Br, Daphnella Columnæ Scacchi. ! C'est plutôt la forme que j'ai appelée N. semistriala Br., var. calabrensis now. (voir 5e partie): FAUNES 117 On pourrait peut-être y ajouter la Turritella tricarinata Br., représentée, comme J'ai pu le constater à Castrovillari, par des spécimens souvent plus voisins du type pliocène que du type actuel (voir 5° partie). D'autre part, parmi les sept espèces septentrionales citées par Crema, soit : Pectunculus glycimeris L., Dosinia lincta Pulin., Rissoia lilacina Recl., Mangilia costata Donov., Gyprina islandica L., Pecten subclavatus Cantr., Dentalium rectum L. la dernière me semble plutôt devoir être considérée comme éteinte; plusieurs autres témoignent d’affinités septentrionales, mais la seule vraiment caractéristique est la Cyprina islandica L.1, En somme, le rôle joué par les espèces pliocènes devient ainsi tout à fait insignifiant : la seule forme qui ne paraisse pas survivre dans le Quaternaire est Le Cerithium crenatum Br. ; encore appartient-elle à un groupe bien polymorphe. En se basant sur le seul point de vue paléontologique, on peut donc être amené à classer ces couches dans le Quaternaire, et à leur attribuer un âge très récent. C’est ce qu’a fait d’ailleurs M. Crema qui les compare au « Postpliocène » de Palerme et même aux couches quaternaires de Tarente (Mazzaro). Le point de vue stratigraphique nous permet d'ajouter quelque chose de plus : elles appartiennent encore à la série pliocène et leur position immédiatement en dessous des alluvions continentales de la fin du Pliocène nous amène à leur attribuer un âge calabrien supérieur : elles sont donc exactement comparables aux sédiments calabriens de Gravina, de l'Etna, du détroit de Messine, etc., mais un peu plus récentes que les couches calabriennes inférieures du Monte Mario et de Vallebiaja. Par contre, elles sont stratigraphiquement tout à fait distinctes du Silicien de Palerme et, à plus forte raison, du « Mazzaro » de Tarente, et des sables de Ravagnese qui, comme nous le verrons, appartiennent au niveau à Strombes. Quant à la rareté des vraies espèces septentrionales, ‘représentées ici seule- ment par la Cyprina islandica, c’est un caractère négatif, qui peut 1 J'ai pu voir moi-même, dans les collections du R. Ufficio Geologico, à Rome, Punique valve récoltée à Castrovillari par l'ingénieur Crema : elle est de petite taille, mais très typique, appartenant à un individu jeune comme on en rencontre fréquemment aussi à Ficarazzi. FRS 2 %:, : APS T ER ES à Ce nn 118 VALLÉE DU CRATI tenir, soit à notre connaissance imparfaite de la faune, soit au fait que l’on se trouve ici dans un golfe étroit, où les courants n’ont pu amener les espèces immigrées : celles-ci en effet ne se rencontrent guère en grande abondance que sur le trajet des courants venant de Gibraltar (Sicile, détroit de Messine, terre d'Otrante). Il convient, en outre, d'ajouter que, si les couches étudiées par M. Crema se rapportent au Calabrien supérieur, en revanche, quelques-uns des fossiles cités par d’autres auteurs et rappelés plus haut /Spondylus crassicosla, T'urrilella subangulata, Raphitoma harpula, R. plicalella, Cardila inlermedia, Terebratula ampulla, etc.) nous montrent l’exis- tence, sous le Calabrien supérieur, d’une faune du Calabrien inférieur et peut-être même du Pliocène ancien. Ainsi, comme nous l'avons vu partout jusqu'à présent, ces faunes se montrent superposées dans une puissante série de remblaiement absolument continue. 40 Les facies continentaux du Calabrien supérieur. Le cycle de remblaiement pliocène du golfe du Crati se termine, comme nous l'avons dit, par des alluvions continentales, rougeâtres, très altérées, formant de vastes plaleaux isolés les uns des autres par l'érosion -quaternaire. Ces alluvions sont le plus souvent indiquées comme « quaternaire marin » sur les cartes géologiques officielles. Je les étudierai spécialement dans les environs de Castrovillari, où ilest facile de constater leur intime liaison avec les sédiments marins sous-jacents, dont nous venons d'examiner la faune. Ici en effet on a, entre la série marine typique et les alluvions continentales, un beau développement de formations saumâtres et lacustres déjà signalées par Taramelli, puis, avec plus de détails, par Crema : on devait donc être tout près de l’ancien rivage pliocène. A Castrovillari, les plateaux alluviaux qui couronnent la série calabrienne ont un remarquable développement et une grande régu- larité : la ville est bâtie sur un éperon détaché de ces plateaux et isolé comme une presqu'ile entre deux profonds ravins. Mais ces plateaux servent encore de niveau de base pour les cônes torrentiels descendus des montagnes (Regione Petrosa, Vallepiana, etc.) : la marche en amont de l'érosion régressive due au niveau de base actuel n'est pas encore remontée assez haut pour se faire sentir sur eux. COUPE DE CASTROVILLARI 119 Sous la ville même de Castrovillari, la proximité de l’ancien rivage pliocène est rendue manifeste par le facies des sédiments : des parois escarpées montrent là des alternances de conglomérats à gros éléments et de graviers grossiers avec de rares intercalations argilo-sableuses donnant autant de niveaux aquifères : Je n’y ai d'ailleurs pas rencontré de fossiles. C’est seulement à la base de ces escarpements, dans le lit même du torrent, que l’on voit apparaître des argiles plastiques, bleues, très fossilifères. Et à mesure que l’on descend vers le Sud, et que l’on s'éloigne de l’ancien rivage, ces argiles se développent beaucoup et envahissent de plus en plus les termes supérieurs de la série. Une coupe très instructive (fig. 15) peut se voir en remontant Castrovillri(s507) Ravin du lénte dé Wrta ll fiumicello Argiles plastiques, Argiles sableuses. Sables. Conglomérats. L. — Intercalations lacustres. FiG. 15. — Coupe demi-schématique montrant la fin du remblaiement pliocène près de l’ancien rivage, à Castrovillari, depuis le Fiumicello, qui coule à l'Est de Castrovillari, jusqu'au Ponte di Virtü, sur la route allant à la station de Spezzano. Il y a là un ravin très profond, creusé par un petit torrent affluent. A la base on a surtout des argiles bleues : ce sont elles qui contiennent la faune calabrienne étudiée plus haut d’après Crema; j'y ai aussi personnellement récolté d'assez nombreux fossiles (voir Ja liste dans lappendice); on y voit des intercalations de bancs absolument pétris de Cladocora cespilosa, et des lits de graviers, même de conglomérats, qui dénotent la proximité de l’ancien rivage. Dans la partie supérieure, ce caractère littoral s’accentue : on n'a plus guère que des sables et des graviers. Puis apparaissent des inferca- lations lacustres. Ce sont : des argiles avec lignites contenant encore des fossiles marins saumâlres ; des couches sableuses à Cardium edule indiquant 120 VALLÉE DU CRATI des lagunes littorales ; des bancs de calcaires travertineux d’eau douce avec des troncs d’arbres entiers magnifiquement fossilisés ; des couches marneuses jaunâtres à Limnées, etc.; des bancs riches en Diatomées constituant presque de véritables tripolis : sur certaines plaquettes plus dures de ces bancs peuvent s’observer d'innombrables empreintes de Dreissensia. Enfin, le tout est recouvert par les alluvions des plateaux, généra- lement très torrentielles, à éléments relativement peu roulés : on avait là de véritables cônes de déjections formés sur les rivages. Cette coupe montre d'une manière très frappante comment se terminent les cycles de remblaiement. Si on cherche à la prolonger vers le Sud jusque dans le centre du bassin du Crati, on aura l’npression que des dislocations se sont produites postérieurement au remblaiement, et ont contribué, comme nous le disions, à affaisser encore récemment le centre de ce bassin par rapport aux bords. En effet, sur la route de Castrovillari, à Spezzano, on peut voir, dans la région dite « Pellegrino » sur la carte au 1/100.000°, des sables marins jaunâtres, avec débris de coquilles, inclinés vers l’amont : on a donc là la preuve d’un affaisse- ment postcalabrien. À la hauteur de « Varcasia » on retrouve les sables calabriens à Chlamys opercularis et Pecten jacobæus presque horizontaux. Puis, en continuant encore plus loin, on revoit ces mêmes sédiments très fortement inclinés vers la mer, et leur incli- naison est trop forte pour être due à leur sédimentation originelle. Enfin, toute cette série inclinée et disloquée vient disparaître sous les terrasses quaternaires qui occupent la basse vallée du Crati et dont je reparlerai dans la troisième partie. Ainsi le plateau alluvial qui termine le remblaiement pliocène se retrouve très nettement dans les environs de Castrovillari à une altitude de 350-400 mètres. La même disposition pourrait être décrite sur tout le pourtour de l’ancien golfe du Crati : je me contenterai de signaler seulement les régions les plus typiques. D'abord, sur le versant Sud, presque en face de Castrovillari, nous 1 L'altitude considérable atteinte par les conglomérats calabriens au Monte Cas= sano, où ils dépassent notablement le niveau du plateau alluvial, peut s'expliquer en les attribuant ici à d'anciens cônes de déjections ou même d'éboulis à très fortes pentes, actuellement séparés de leurs «racines » par l'érosion du torrent qui coule au Nord de Cassano, FACIES CONTINENTAUX 121 retrouvons notre plateau entre S. Lorenzo del Vallo et Spezzano albanese : il apparaît là avec une grande netteté, et a d’ailleurs élé déjà signalé par Salmojraghi [201] ; le remblaiement du golfe paraît avoir atteint ici la même cote, voisine de 350 mètres, qu'à Castrovillari. Salmojraghi remarque ainsi que le monticule de S. Salvatore, haut de 422 mètres, situé au Sud de S. Lorenzo, a dû toujours émerger de la mer pliocène ; cet auteur a même pu retrouver, tout autour de cette colline, les traces de l’ancien rivage calabrien, marquées par une zone de trous de pholades. Quant à la gorge étroite que le Crati s’est creusée dans la roche en place entre Tarsia et Terranova di Sibani, elle résulte très probablement d’une capture : le thalweg de la fin du Pliocène devait, en effet, de Cosenza, continuer droit au Nord, par la vallée du Fleuve Fellone, empruntée d’ailleurs aussi par la voie ferrée. Sur cette rive droite de la basse vallée du Crati, le soubassement des plateaux alluviaux est constitué, comme à Castrovillari, par les sables et argiles sableuses du Calabrien fossilifère (gisements de Serra Cogliano et Serra S. Nicola, étudiés plus haut). Plus au Sud, il semble, comme l’a remarqué Salmojraghi, que l'altitude de ces plateaux s'accroisse régulièrement. Ainsi, le château de Cosenzä est bâti à 400 mètres d'altitude environ, sur des sables à Turritelles avec bancs gréseux, facies dénotant encore une certaine profondeur. D'ailleurs dans la région, le seul examen des cartes topographiques nous permet de reconnaître facilement le plateau alluvial sur les deux rives du golfe à une altitude de 500 à 600 mètres. En continuant toujours vers le Sud, nous retrouvons, aux environs de Rogliano, le Calabrien marin à des hauteurs de plus en plus fortes, puisque, dès le début de ce paragraphe, nous l'avons signalé à plus de 700 mètres dans la haute vallée du Torrente Jassa. Là, notre plaine alluviale vient se raccorder avec les vastes pla- teaux situés au Sud de Rogliano et décrits d'une manière si suggestive par Taramelli [220] ; nous sortons donc là du golfe pliocene pour pénétrer sur Ja vaste pénéplaine qui le limitait vers le Sud. Mais, comme nous avons dit, les eaux de la mer pliocène n’ont point franchi la ligne de partage pour rejoindre le détroit de Catanzaro : le golfe du Crati était fermé vers le Sud. En résumé, tandis qu'à l'extrémité Nord du bassin pliocène, les plateaux alluviaux de la fin du Calabrien restent en moyenne à 390 mètres, vers le Sud, au contraire, ils s'élèvent jusqu'à ) 9 1 800-900 mètres. Cette disposition peut être interprétée, comme pour P P le détroit de Catanzaro, de deux manières : on peut supposer que la partie basse de la vallée n’a été remblayée qu'après la partie 122 VERSANT ORIENTAL DE LA SILA haute, alors que le niveau de base avait déjà notablement baissé; ou bien, et c'est l'opinion exprimée par Salmojraghi et surtout Taramelli, on peut faire intervenir des mouvements du sol posté- rieurs au remblaiement : l'allure des couches calabriennes au Sud de Castrovillari rend très probable, comme nous l'avons vu, l'existence de dislocations très récentes. $ 2. — LE PLIOCÈNE DU VERSANT ORIENTAL DE LA SILA Entre les débouchés respectifs sur la mer Ionienne du détroit de Catanzaro et de la vallée du Crati, les auteurs n'ont signalé jusqu'à présent aucun gisement fossilifère important qui puisse être attribué au Calabrien. Aussi, pourrai-je être ici assez bref pour cette région, sur laquelle je reviendrai à propos du Quater- naire. Les terrains pliocènes n’y forment qu'une bande assez étroite dans la partie Nord, où ils viennent s'appliquer contre le massif éocène et miocène de Pietrapaola. Mais au Sud, dans la région de Cotrone, ils constituent toute l'ossature d’une vaste région natu- relle, le Marchesato, à laquelle ils donnent des caractères géogra- phiques tout particuliers. 1° Région de Cotrone ou Marchesato. Les argiles bleues à facies « plaisancien » apparaissent ici à nu sur de vastes surfaces: stériles et attaquées par d'innombrables ravins, elles donnent un paysage de « bad-lands » des plus caracté- ristiques ; un trait important de la morphologie est d’ailleurs fourni par les terrasses quaternaires, si magnifiquement développées, dont nous parlerons en détail plus loin. Au point de vue géologique, les argiles du Marchesato, tout en restant en dehors du sujet que je me suis proposé d'étudier spécia- lement, n’en offrent pas moins pour nous un très grand intérêt, car elles contiennent une faune pliocène ancienne des plus typiques et fournissent ainsi un point de repère important. Comme elles se relient d'une manière continue, d'une part aux couches inférieures de la série de remblaiement de la vallée du Crati, d’autre part aux MARCHESATO 123 argiles blanches formant le soubassement des collines de Catanzaro, elles nous démontrent d’une façon bien nette l’âge pliocène ancien de ces couches dont les faunes étaient, par ailleurs, tant dans la vallée du Crati que dans l’isthme de Catanzaro, assez peu caracté- ristiques. Dans tout le Marchesato, ces argiles pliocènes anciennes montrent d’ailleurs la plus grande monotonie : leur épaisseur doit être consi- dérable, puisque, depuis ie niveau de la mer, on les voit s'élever en formant des collines hautes de plus de 200 mètres sans changer de caractères; elles sont à peu près partout fossilifères, mais la faune est des plus uniformes : j y ai récolté des fossiles au Capo Colonne, au Capo Castelle, près de la station de Cutro et de celle de Stron- goli, comme on le verra, en se reportant aux listes que j'en donne dans l’appendice, la plupart des espèces sont absolument spéciales au Pliocène ancien; je citerai en première ligne les Pleurotomidés, la Turritella subangulata Br., la Nassa ilalica Mayer, la Mitra cupressina Br. ; c'est donc ici un facies plaisancien des plus typiques ; M. Cortese rappelle à ce sujet ([51], p. 168) que de Bosniaski, après avoir étudié des poissons fossiles dans les argiles de Cutro, con- cluait pour ces argiles à une formation de grande profondeur. Mais, dans la plus grande partie de cette vaste région pliocène, le sommet de la série n'est pas visible, car les argiles plaisanciennes sont brusquement tronquées et arasées par d'immenses plateaux, que les mers quaternaires ont recouverts d'une mince couche de sables et graviers; ces dépôts quaternaires seront étudiés plus loin (voir par exemple fig. 3, pl. II). En tout cas, la meilleure preuve qu'ils ne font pas suite en continuité aux argiles, c’est que, pour voir la suite de la série pliocène, il suffit de gagner les bords du bassin. C'est ce que nous ferons en décrivant brièvement la coupe de Strongoli. Les couches les plus inférieures, visibles par exemple près de la station de Strongoli, sont les argiles plaisanciennes, bleues en profondeur, blanches 1! On trouvera dans A. Neviani (|[18r], Il), de longues listes de fossiles de ces argiles, démontrant bien leur âge pliocène ancien. Le même auteur (Boll. d. Soc. geol. ital, vol. VIII, fasc. 3) a aussi observé, inlercalées dans ces argiles, des couches de tripoli, qui avaient fait croire, à tort, à l'existence du Miocène supérieur. Cela nous montre combien il faut se défier de l'interprétation de la coupe de Gravitelli donnée par L. Seguenza et basée sur des faits analogues (voir plus haut, p. 68, note 1). 124 VERSANT ORIENTAL DE LA SILA en surface par altération : elles contiennent leur faune habituelle typique de Pleurotomidés. Mais, à mesure qu’on s'élève dans les collines de Stron- goli, on voit le facies se modifier peu à peu; vers l'altitude de 100 mètres, les argiles deviennent légèrement sableuses. Puis apparaissent de véritables bancs de sables bleuàtres, très riches en fossiles ; mais, avec le facies, la faune s’est modifiée et enrichie. On peut récolter ici en abondance des Pecti- dinés (Flabellipecten Alessi Phil., Chlamys scabrellus Lmk., etc.), des Turritellidés { T'urrilella tornata Br.), des Carditidés, des Lucinidés, des Térébridés,‘etc.; en se reportant à la liste donnée dans l'appendice, on sera frappé de la similitude absolue de cette faune de Strongoli avec la faune d’Asti : ce gisement qui, à ma connaissance, n’a pas été exploré en détail (M. Cortese se borne à signaler ([51},p. 171) à Strongoli des grès riches en Pectinidés) mériterait de devenir célèbre ; avec Altavilla, c’est certainement le plus beau gisement de Pliocène ancien à facies littoral de toute l'Italie du Sud. — Les couches supérieures deviennent tout à fait sableuses et même gréseuses : c'est sur une colline escarpée, formée par des bancs durs de grès calcaires, que se dresse le pittoresque village de Strongoli. Mais bien que des galets épars çà et là dans la masse annon- cent la proximité du rivage, le facies reste marin jusqu'au sommet de la colline, et la faune, devenue plus littorale, presque réduite à des huîtres et à des Pectinidés, garde toujours les caractères du Pliocène ancien. Ainsi, là non plus, nous ne voyons pas le sommet de la série pliocène; le Calabrien manque, enlevé par l'érosion ; il ne sub- siste plus aucune trace de la surface de remblaiement correspon- dant à la fin du cycle pliocène, et cette surface devait donc ici atteindre une altitude de plus de 4oo mètres. Pour observer, dans le Marchesato, le Pliocène supérieur ou Calabrien, il faudrait donc s'adresser aux régions de bordure, près de la Sila, oùles collines pliocènes atteignent les plus grandes hau- teurs et où les couches terminales de la série ont eu plus de chances d'être conservées. ; Je n'ai malheureusement pas d'observations personnelles à apporter pour ces régions et les renseignements fournis par les auteurs sont bien rudimentaires. C’est ainsi que M. Cortese signale ([51], p. 175) dans le Marchesato, au-dessus des « sables jaunes » de l’Astien que nous venons d'étudier à Strongoli, des sables blancs qu'il rapporte à l'étage « Sicilien » et dont il a observé la concordance avec le « Pliocène supérieur ». Les listes de fossiles qu'il donne ne peuvent malheureusement être utilisées ici, car cet ROSSANO-CARIATI 125 auteur parait avoir confondu les termes supérieurs de la série plio- cène, qui seraient notre Calabrien, avec les dépôts quaternaires des terrasses du Marchesato!. Il convient, en effet, d’insister sur ce point et c'est par là que nous terminerons cette étude : les sables blanes ou jaunes qui, dans toute la région de Cotrone, recouvrent en discordance les argiles plaisanciennes, en constituant (entre 50 et 250 mètres) de magni- fiques et immenses terrasses marines, doivent certainement être rapportés au Quaternaire. Nous les décrirons donc dans un cha- pitre ultérieur, mais dès maintenant je tiens à faire remarquer quils ne peuvent représenter le sommet de la série pliocène, puisque les collines de Strongoli, dont l'ossature est de l’Astien typique, sont elles-mêmes entaillées par les terrasses, qu'elles dominent de beaucoup. D'après la carte officielle au 1/100.000!°, la montagne des Murgie qui, à l'Ouest de Strongoli, s'élève à 412 mètres d'altitude, est encore en entier constituée par les dépôts pliocènes. Il ne reste donc plus rien ici de la surface de remblaie- ment de la fin du Pliocène qui, si elle existait, se trouverait entre 400 et 5oo mètres d'altitude. 2° Région de Rossano-Cariati. Au Nord du Marchesato, entre Strongoli et Rossano, la série pliocène a été bien étudiée par M. Fucini ([137], p. 72-83). Cet auteur y distingue : 1° À la base, un Pliocène ancien, en général argileux, mais montrant, quand on s'approche de la Sila, les facies littoraux habituels, sables, graviers, conglomérats; cest là visiblement le prolongement des argiles plaisanciennes du Marchesato, tandis que, vers le Nord, ce Pliocène se relie aux couches de base de la vallée inférieure du Crati. D'ailleurs, dans cette région de Rossano, les affinités de facies et de faune paraissent déjà être surtout avec le bassin du Crati; le facies semble moins profond que dans le Mar- chesato et les faunes y sont moins typiques. Les seules espèces ! Par contre, les argiles sableuses signalées par A. Neviani ([181], Il, p. 2r de l'extr.) près de S. Mauro, pourraient bien être véritablement du Calabrien, d’après la petite faune qu’en cite cel auteur: 126 VERSANT ORIENTAL DE LA SILA bien caractéristiques qu'’ait récoltées M. Fucini sont : Pleurotoma rotata Br., Fusus clavatus Br. | 2° Ce Pliocène est en général surmonté, d’après l’auteur, par des sables et graviers « postpliocènes » : nous retrouvons là un Ca/a- brien bien typique, au double point de vue paléontologique et: stratigraphique. AÀ.— Au point de vue paléontologique, les listes de M. Fucini sont des plus démonstratives. Au milieu du grand nombre des espèces vivantes habituelles de ces faunes calabriennes, j'y relève comme formes caractéristiques : Nucula placentina Lmk., Ceri- thium varicosum Br., Turritella tornata Br., Cancellaria hirta Br., Terebratula ampulla Br., Cyprina islandica L. B. — Au point de vue stratigraphique, ces couches se montrent superposées au Pliocène ancien. M. Fucini, en signalant ce fait, ajoute que, loin de la mer, on voit ce « Postpliocène » reposer par- fois directement sur les roches anciennes. En réalité, il me paraît qu'il doit être bien difficile de distinguer Pliocène et Postpliocène au voisinage de l’ancien rivage, quand le facies sableux envahit toute la série. J’ajouterai que cette série pliocène, sans être nettement disloquée, est dans l’ensemble fortement inclinée ; on peut s’en rendre compte à Cariati, village pittoresque bâti sur un promontoire formé par les grès durs du Pliocène supérieur plongeant vers la mer, comme l’a d'ailleurs déjà indiqué M. Fucini, qui y signale (p. 77), d’après Greco, une petite fau- nule d'espèces actuelles ; ces grès en couches inclinées y recouvrent, d’après lui, les argiles du Pliocène ancien, de sorte que la coupe serait assez analogue à celle que nous a donnée la série pliocène dans certaines parties du détroit, en particulier au Nord de Messine". ! A. Neviani [183] a signalé lui aussi ce Pliocène incliné de Cariati, argileux à la base, gréseux au sommet, et recouvert en discordance par du Quaternaire horizontal. DOMAINE APPULO-GARGANIQUE | j: ii 1 CHAPITRE IV LE DOMAINE APPULO-GARGANIQUE Tandis qu'en Calabre, comme au Nord vers la plaine du Pà, la péninsule italienne n’est formée que d'un seul élément structural, la chaîne apennine plissée, ici sur la côte orientale, entre Ancône et la terre d'Otrante, vient s’y ajouter un deuxième élément cest le massif appulo-garganique. Tous les terrains, depuis le Crétacé jusqu'au Quaternaire, revêtent ici le facies calcaire et, par leur origine zoogène, ils contrastent fortement avec les immenses épaisseurs de roches détritiques, marnes, argiles, sables, qui consti- tuent une grande partie de l’Apennin; au point de vue tectonique et morphologique, l'opposition n'est pas moins grande entre la chaîne axiale de l'Italie, fortement plissée, et le rempart de pla- teaux tabulaires qui vient ainsi s’y surajouter!. L'extrémité Sud deces plateauxappulo-garganiquesestla T'erre d'Olrante, limitée vers le Nord par la ligne Brindisi-Tarente : ici le substratum crétacé n'affleure que suivant des ondulations anticlinales et il est le plus souvent masqué par la couverture des terrains miocène, pliocène et quaternaire. Plus au Nord, entre Brindisi et Barletta, dans la Pouille calcaire, c'est le Crétacé qui règne, et le Pliocène ne forme plus que de minces lambeaux disséminés à sa surface. Ensuite, une interruption de la zone des plateaux correspond au golfe de Manfredonia; le massif appulo- garganique y disparaît en profondeur sous une vaste plaine quaternaire, le T'avoliere di Puglia. Et, au Nord-Est de cette plaine, surgit brusque- ment un nouveau plateau calcaire, le Monte Gargano. Entre les Pouilles et l'Apennin s'étend une large zone déprimée Nord- Ouest-Sud-Est ; au Sud-Est, elle aboutit au golfe de Tarente; au Nord- Ouest, elle débouche sur la plaine du Tavoliere : ce sera pour nous la dépression ou le détroit des Pouulles, rempli de Pliocène. Ainsi : terre d'Otrante ou province de Lecce, Pouille calcaire | L'individualité de ce massif appulo-garganique a été encore récemment discutée (voir, par exemple, Virgilio [23r]); mais, à notre point de vue, la considération de cet élément structural n’en reste pas moins très commode et très féconde, =4 \ 128 DÉTROIT DES POUILLES ou province de Bari, Tavoliere ou province de Foggia, enfin, détroit phocène des Pouilles, telles sont les régions naturelles qui viennent s'ajouter ici aux zones apennine et subapennine. Et l'étude du _ détroit des Pouilles est d’un intérêt capital, car elle va nous mon- trer le passage du Pliocène à type subapennin au Pliocène à type appulo-sarganique. $ il, = LA DÉPRESSION ENTRE APENNIN ET POUILLE 1° La coupe de Gravina-en-Pouille. Je prendrai comme point de départ la coupe de la série pliocène à Gravina-di-Puglia, d’abord parce qu’elle est très nette et très facile à voir et qu'elle se retrouve identique sur toute la bordure Nord-Est du détroit des Pouilles, et ensuite, surtout, parce qu'elle a été étudiée avec beaucoup de soin, au double point de vue strati- oraphique et paléontologique, par MM. di Stefano et Viola; leur travail | 120] est certainement une des monographies les plus claires et les plus précises qui aient été publiées sur les terrains pliocènes de l'Italie du Sud; ilest à bon droit devenu classique et c'est à lui que j emprunte la plupart des données qui suivent. La petite ville de Gravina est siluée à quelques kilomètres du rebord occidental de la Pouille calcaire ; les plateaux crétacés, appelés ici les -« Murgie », se terminent par une falaise blanche, escarpée, haute d'une centaine de mètres (voir pl. II, fig. 3). Au pied de cette falaise, s'étend un vaste plateau à 450 mètres d'altitude environ, qui descend en pente douce vers le Sud-Ouest. Le Crétacé y disparaît bientôt sous des dépôts plus récents, mais le ravin profond où coule le Torrente Gravina continue de l’atteindre en profondeur et montre ainsi la coupe suivante : Serra Pennino (4207) Torren le Gravina Gravna } Fic. 16, — Coupe de la série pliocène à Gravina di Puglia (En partie d'après Viola et di Stefano). Pg. — Grès et poudingues, sables: Ps. — Argiles sableuses. , . . .$ Pliocène supérieur. - ue Pa. — Argiles bleues plastiques. . Lis qe US Pt. — Mollasses calcaires ({ufo); fa- eRIOnSRCUER 10 COS cies « materin # . : . à; Pliocène ancien. Ve) COUPE DE GRAVINA 12 Description de la coupe. 1° Sur le Crétacé nettement raviné, repose en discordance une roche calcaire blanche, tendre, essentiellement s0ogène, toute formée de débris d'organismes calcaires, en particulier de Bryozoaires et de Lithothamniums : c’est le {ufo des géologues italiens, pierre tendre activement exploitée, car elle peut se travailler à la scie; comme facies, elle équivaut tout à fait à nos mollasses calcaires du Miocène rhodanien : elle s’est d’ailleurs formée dans des conditions analogues, car, dans les deux cas, elle marque une transgression marine envahissant des plateaux calcaires. Au contact du Crétacé existe une assise relativement mince (50 centimètres par exemple) et très irrégulière de conglomérats ou mieux de brèches à galets calcaires anguleux : c’est une brèche de trangression marine, car on y trouve des fossiles marins littoraux (des Balanidés en particulier). Le Torrente Gravina s’est creusé dans ces « tufs » une gorge étroite sur les parois de laquelle on voit, de la manière la plus nette, les bancs peu inclinés de la mollasse pliocène venir trancher les assises ondulées du Crétacé : c'est un des plus magnifiques exemples de discordance que l'on puisse trouver. La ville est bâtie sur ces « tufs » ; dans les plateaux, au Nord-Est de Gravina, ils sont presque horizontaux, mais, à partir de Ja ville, on les voit plonger assez fortement vers le Sud-Ouest. »° Au-dessus de ce premier terme du Pliocène, vient une puis- sante série argileuse : il y a d’ailleurs continuité parfaite entre les mollasses calcaires et les argiles, et le passage se fait par des marnes calcaires riches en Brachiopodes. Ce sont, à la base, des argiles plastiques bleues, activement exploitées au pied de la colline dite Serra Pennino, sur la rive droite du Torrente Gravina. Puis, quand, à partir de cette exploitation, on gravit la colline pour continuer la coupe, on voit les argiles prendre une teinte plus claire et devenir peu à peu plus sableuses. 3° On passe ainsi en continuité absolue à des sables fins, blanc- Jaunâtres, assez fossilifères, qui forment les dernières pentes de la Serra Pennino; comme d'ordinaire, certains bancs y sont consolidés en grès durs qui donnent lieu à de petits escarpements. Enfin le facies devient de plus en plus grossier et ce sont des graviers ou des conglomérats qui couronnent la colline: Ces assises peuvent surtout Univ. De LYon. — Gicnoux. (s) 130 DÉTROIT DES POUILLES bien s’observer quand on suit la crête vers le Sud-Est, jusqu'à la Serra S. Gerolamo; on voit là, épars, des blocs tabulaires de conglo- mérats où abondent les galets siliceux originaires de l'Apennin. Des débris de coquilles nous indiquent que, même dans ces forma- tions terminales, on a encore affaire à un facies qui, bien que littoral, reste toujours franchement marin. Arrivés là, à 420 mètres d’altitude, nous voyons le panorama s'élargir beaucoup ; à l'Est, l'horizon est borné par la ligne blanche monotone de la falaise des Pouilles calcaires ; à l'Ouest, s'élèvent les premières chaînes de l’Apennin aux lignes adoucies. Cherchons dans tout cela la significa- tion de la coupe que nous venons de parcourir. Nous sommes ici près du bord oriental du large fossé séparant les Apennins des chaînes appuliques ; envahi par la mer pliocène, ce fossé fut ensuite comblé au cours d’un cycle sédimentaire. Au début de ce cycle, les apports terrigènes venus de l’Apennin n'arrivaient point jusqu'aux eaux baignant les plateaux calcaires des Pouilles ; à celte époque, il y avait donc une opposition très nette entre deux provinces sédimentaires. Dans l’une, à laquelle les chaînes apennines servaient de terres nourricières, s’accumulaient sur de grandes épaisseurs les graviers, les marnes argileuses et sableuses, du Pliocène à type subapennin; dans l’autre, les éléments clastiques manquaient totalement, et les eaux de la mer, ne remaniant que leurs propres organismes, faute de matériaux que le continent calcaire aux torrents limpides ne pouvait leur fournir, donnaient ainsi naissance aux minces assises zoogènes du Pliocène à facies appulo-garganique. Puis peu à peu le facies apennin s’est fait envahissant : les apports terrigènes sont venus noyer les constructions calcaires ; aux tufs ont succédé les argiles, et les plages grandissantes venues de l’Apennin ont: fini par s’avancer jusque sur les premières pentes du massif calcaire, comblant ainsi complètement le détroit des Pouilles. Ainsi l’ensemble de la série pliocène se montre, à Gravina, sous un aspect assez différent de celui sous lequel nous l'avons ren- contré jusqu à présent en Calabre et qui était en somme analogue à celui du Pliocène typique subapennin de l'Italie du Nord. Et ces différences consistent dans les deux faits suivants : 1° Apparition, à la base de la série, d’un facies de mollasse calcaire z0ogène qu’on peut appeler le facies materin, de Matera, petite ville au Sud-Est de Gravina, où il se montre développé dans des conditions identiques à celles que nous venons d'étudier à MODIFICATIONS DE FACILES 131 Gravina. Ce nom avait été en effet proposé par Mayer comme nom d'étage. Le célèbre paléontologiste de Zurich avait été frappé de l’analogie des argiles bleues plastiques de Gravina et de Matera avec les argiles plaisanciennes du Nord de l'Italie; assimilant donc lesdites argiles au Plaisancien, Mayer considéra comme miocènes les «tufs » calcaires qui leur sont inférieurs : il erut y voir l’équivalent marin des formations, habituellement continentales, du Pontien et en fit l'étage « materin! ». Nous allons voir que cette conclu- sion ne saurait plus être admise depuis les belles études de MM. di Stefano et Viola; mais le nom de « Materin » peut être conservé, ainsi que l'a proposé M. Sacco?, comme nom de facies. 2° Réduction considérable d'épaisseur pour l’ensemble du Plio- cène; par suite du développement des tufs « materins », cette réduction portera donc surtout sur les formations argileuses et sableuses qui les surmontent. Ces deux caractères, dont je viens d'indiquer la signification et la cause, définiront pour nous le {ype appulo-garganique du Pliocène, que nous opposerons ainsi au {ype subapennin (voir la coupe pl. IL fig. 3). 2° Modifications de facies dans la dépression des PFouilles. Des coupes tout à fait analogues à celle de Gravina pourraient être décrites en un point quelconque de la bordure occidentale du plateau des Pouilles. Suivant que l’on est plus ou moins près de cette bordure, on voit les mollasses calcaires augmenter d'épaisseur aux dépens des argiles ou inversement. Ainsi, tandis qu'au Sud de Ginosa l'épaisseur de la série argilo-sableuse, d'après MM. di Stefano et Viola, dépasse 200 mètres, à Matera elle est déjà réduite à 100 mètres ; et c'est aussi à peu près cette même puis- sance qu'elle atteint pres de Gravina. Sur cette même bordure du détroit des Pouilles, les mollasses calcaires de la base du Pliocène atteignent 60 à 80 mètres d’épaisseur. L K. Mayer, Sur la carte géologique de la Ligurie centrale { Bull. de la Soc. Geéol. de France, 3e série, t. V, 1877). ? K, Sacco, l'Apennino meridionale (Boll. della Soc. Geol, Ilal., vol. XXIX, r910). 132 DÉTROIT DES POUILLES Au contraire, dans le centre du détroit, c’est le facies sub- apennin qui domine. On peut citer comme particulièrement typiques à ce point de vue les collines qui bordent la vallée du Bradano et celle du Basento. Bien que profondément creusées, ces vallées ne nous montrent point la base de la série pliocène : les couches les plus inférieures visibles sont toujours les argiles plastiques bleues, recouvertes, comme à Gravina, par une série de remblaie- ment continue. ; Ferrgndina i Voie farree Flux Basento 500 ! 1 1 j 250 0 Alluvions modernes À 0 S.-O, N.—E. Fic. 17. — Coupe de la série pliocène à Ferrandina, dans le centre du détroit des Pouilles, montrant l'épaisseur atteinte par le remblaiement pliocène. = gl ts ee a à TRS A } Calabrien. Echelle des hauteurs et des Pa, — Argiles plastiques bleues. , Pliocène ancien. longueurs 1/50.000. La coupe reproduite ci-dessus (fig. 17), et relevée entre le fleuve Basento et le village de Ferrandina, nous montre par exemple, au-dessus de ces argiles, une alternance de bancs argileux, sableux et gréseux, avec des assises de véritables conglomérats parfois durcis en poudingues; le sommet de la colline sur laquelle est bâti le village est, encore ici, formé par des grès sableux en gros bancs et contenant des fossiles marins. On ne saurait trouver de meilleur exemple de la puissance qu'atteint le Pliocène dans cette partie centrale du détroit des Pouilles. En effet, les couches n'y sont affectées que de légères ondulations et restent dans l’ensemble à peu près horizontales, Or, tandis que le fond de la vallée est à 70 mètres d'altitude environ, la colline de Ferran- dina, qui le domine directement, atteint 500 mètres, On peut donc évaluer la puissance du Pliocène à 430 mètres, et ce chiffre est cer- tainement un minimüm, car d'un côté la base n’est pas visible et, de l’autre, le sommet de la série de remblaiement n'est pas conservé ii, puisqu'il y manque la couverture d'alluvions continentales qui devait primitivement s'étendre sur toute la région. MODIFICATIONS DE FACIES 133 Toute cette partie centrale de la dépression des Pouilles est donc une région typique de collines subapennines : les fleuves y circulent dans de larges vallées à fond marécageux, entre des pentes argileuses dénudées que l'érosion découpe en curieuses pyramides. Elles se relient, vers le Nord, aux argiles de Venosa, formant le soubassement du volcan Vulture. Enfin, vers l'Ouest, toute cette série vient s'appuyer contre les flancs de l’Apennin; et ce voisinage se traduit par un développe- ment de plus en plus grand des conglomérats! (voir la coupe, pl. IT, fig. 3). D'ailleurs, cette bordure occidentale du détroit des Pouilles ne paraît pas avoir été spécialement étudiée. Pourtant, des renseignements fort intéressants sont donnés par M. Viola sur les environs de Stigliano [229]. Ici on retrouve encore une dernière trace du facies materin : à la base de la série pliocène apparaissent en effet çà et là, d’après cet auteur, quelques bancs de « tufs cal- caires », parfois alternant avec les argiles; ces tufs sont spéciale- ment développés dans la région Fazzano où il atteignent 25 mètres d'épaisseur; ils présentent les plus grandes analogies avec ceux de Matera et de Gravina, et, comme eux, ils sont exploités pour les constructions. Mais ils n'ont ici ni la puissance, ni la constance que nous leur avons trouvées sur le bord du plateau des Pouilles, car on voit fréquemment, d'après M. Viola, les terrains préplio- cènes recouverts directement et en discordance par les argiles, les sables et les conglomérats du facies subapennin. D'ailleurs la présence de ces tufs à facies « materin » paraît être ici exception- nelle pour cette région de la Basilicate : elle doit tenir à l'avancée que forme vers l'Est, au milieu du Pliocène, le promontoire éocène et miocène de Stigliano. À un autre point de vue, l’infercalation des lufs dans les argiles, observée par M. Viola, est extrêmement intéressante à noter, car elle nous démontre stratigraphiquement que les tufs « materins » représentent bien un RUES latéral de la base du Pliocène subapennin. 1 Ces conglomérats ont été étudiés, avec quelques délails, par M. Deecke [67, 68], dans la région voisine du Vulture : cet auteur a beaucoup insisté : 19 sur la pré- sence de roches cristallines exotiques dans les conglomérats; elles seraient em- pruntées à d'autres conglomérats et proviendraient, d’après lui, de la Tyrrhénide disparue; 2° sur le passage latéral des conglomérats à des argiles de même âge (Pliocène supérieur), à mesure qu'on s’écarte de la chaîne apennine. 134 DÉTROIT DES POUILLES J'ajouterai enfin que, d’après le même auteur, l'allure des couches pliocènes aux environs de Stigliano obligerait à admettre l'existence de failles ayant affecté ces couches ; ces dislocations, dirigées en gros paral- lèlement à la direction générale de la dépression des Pouilles, auraient contribué à affaisser en bloc toute cette dépression; il y aurait donc là une analogie remarquable avec les autres « fossés » de la Calabre, vallées du Crati, du Mesima et détroit de Messine. La surface de remblaiement de la fin du Pliocène. Nous avons plus haut été conduits à admettre le remblaiement de tout le détroit des Pouilles à la fin du cycle sédimentaire pliocène. La surface topographique qui a pris naissance par suite de ce rem- blaiement est encore nettement reconnaissable : les régions où elle doit être a priori le mieux conservée, seront les plus éloignées de la mer, les mieux protégées par conséquent contre les attaques de l’érosion régressive. C’est le cas pour la zone de partage entre les eaux qui descendent vers le golfe de Tarente par les fleuves Bradano et Basentiello, et celles qui, par le fleuve Ofanto, longent le bord Sud de la plaine de Foggia et vont aboutir à l’Adriatique. On retrouve là, presque intact, un immense plateau à 500 mètres d'altitude environ, à peine entamé par les ruisseaux marécageux qui plus en aval couleront dans des vallées profondément encaissées. La sur- face de ce plateau est recouverte d’alluvions continentales très altérées, avec une zone rubéfiée très épaisse ; on peut bien les voir, par exemple, près de la gare de Spinazzola, où elles sont exploitées. IL semble d’ailleurs y avoir là plusieurs plateaux échelonnés; le plus élevé paraît être précisément celui de Spinazzola, dont une butte-témoin porte le village de Palazzo-San Gervasio, et qui se retrouve au Sud jusque dans la région de Gravina : il y aurait là des questions de morphologie locale à éludier en détail. Nous en retiendrons seulement que le niveau de base fourni par le maximum de la transgression pliocèné doit se trouver ici à une altitude voisine de 5oo mètres. Il est ainsi probable que la mer pliocène a - dû recouvrir la plus grande partie du plateau calcaire des Pouilles, comme le prouvent les lambeaux de « tufs » qui trainent çà et là à sa surface, près de Ruvo, à Acquaviva, à Gioiïa del Colle, etc. ; il semble bien pourtant que le massif des Murgie, atteignant 670 mètres au Nord-Ouest de Gravina, a dù rester émergé, et que 49 ge 7” “ ét SURFACE DE REMBLAIEMENT 139 la falaise crétacée qui, comme nous l'avons dit plus haut, domine ? les plateaux de Gravina, devait border l’ancien rivage de la mer pliocène. Si de là nous descendons vers le golfe de Tarente, nous allons voir notre surface de remblaiement de plus en plus découpée par les érosions régressives; mais il est néanmoins facile de la retrouver dans les crêtes aplanies qui séparent les vallées. Vues d'un point culminant, toutes ces crêles se profilent horizontalement avec une remarquable régularité. Elles se maintiennent ainsi très élevées jusque tout près de la mer ionienne, puisque, à Ferrandina, par exemple, comme nous l'avons dit plus haut, à 500 mètres d'altitude on arrive à peine au sommet du remblaiement pliocène. Puis, et assez brusquement, elles semblent s’abaisser fortement; dans la région de Bernalda, les grands plateaux qui, à des altitudes variables entre 120 et 200 mètres, s'étendent de part et d'autre du fleuve Basento, doivent être un peu plus récents et correspondre à une époque où le niveau de base s'était déjà notablement abaissé, préparant ainsi la régression préquaternaire dont nous n’aurons de preuves netles que dans les environs de Tarente. De même, à leur extrémité Nord, les plateaux pliocènes de la dépression des Pouilles viennent dominer la grande plaine quaternaire du Tavoliere, que nous étudierons plus loin. Le Pliocène lacustre des dépressions intraapennines. Pendant que le détroit des Pouilles était ainsi remblayé, au cours du Pliocène, par une série puissante de couches marines, il existait, dans la chaîne apennine, une série de grands lacs, magistralement étudiés par de Lorenzo!. Ils s’échelonnent depuis les confins de la Calabre (lac du Mercure sur le versant Nord du massif du Pollino, au Nord de Castrovillari) jusqu'au mont Vulture. Ces dépôts lacustres, représentés par des conglomérats et des argiles à mollusques d’eau douce, ont avec les formations pliocènes du détroit des Pouilles les mêmes relations stratigraphiques que les couches lacustres célèbres dites du val d'Arno avec les formations marines du val d Arno inférieur ? ; ainsi l'histoire de l’Apennin s’est déroulée parallèlement dans la partie septentrionale et dans la partie méri- ! Voir, par exemple, G. de Lorenzo [81], où la question est très clairement résu- mée, avec des cartes schématiques. ? Ou mieux encore, du val de Chiana. 136 DÉTROIT DES POUILLES dionale. Mais le remblaiement lacustre, de même que le rem- blaiement marin, paraît s’être poursuivi plus tard dans le Sud que dans le Nord; d’après de Lorenzo (loc. cit.) (voir aussi De Angelis d'Ossat et Bonetti [66] et Flores [125]), le remplissage lacustre, dans l'Apennin méridional, aurait continué même pendant la sn à Elephas antiquus. 30 Les faunes. Il nous reste maintenant à déterminer, dans ce cycle sédimen- taire, la succession des divers horizons paléontologiques, et en particulier à chercher où s'y trouve la limite approximative entre le Pliocène ancien et le Pliocène supérieur. Presque tous les termes de cette série sont en effet fossilifères et la localité de Gravina est depuis longtemps célèbre au point de vue paléon- tologique. Scacchi en a décrit de nombreux fossiles dans ses « Notizie intorno alle conchiglie ed ai zoofiti che si trovano nelle vicinanze di Gra- vina in Puglia » (Ann. civ. del Regno delle due Sicilie, vol. VI, 1834, vol. VII, 1835, Napoli), Philippi [190] en cite également beaucoup d'espèces; et l’on peut voir au Musée de Naples une magnifique collection de mollusques de Gravina. Mais dans ces anciens travaux, le côté strati- graphique est entièrement négligé, de sorte qu'il vaut mieux s'en rap- porter au travail de MM. di Stefano et Viola [120] qui ont mis au contraire un soin extrême à préciser les faunes successives des divers niveaux !. Dans ce qui suit, je réunirai par niveaux les listes données par ces auteurs pour les diverses localités qu’ils ont étudiées (Matera, Gravina, Ginosa, Laterza, etc.), car la coupe y est exactement la même qu'à Gravina. I. — Faune des mollasses calcaires inférieures ou tufs « materins ». On trouvera dans l'ouvrage des auteurs précités une liste com- plète des espèces qu ils ont reconnues dans ces assises : ils les considèrent comme appartenant au Pliocène ancien. Cette con- 1 Le travail de Di Poggio [119], sur la région de Matera, est à signaler également; mais il a été utilisé par MM. di Stefano et Viola. Les quelques fossiles que j'ai moi-même récoltés à Gravina, dans le Calabrien, et dont on trouvera la liste dans l’appendice, ne m'ont rien permis d'ajouter aux belles études paléontolog iques de ces deux savants. Enfin on vérra aussi avec intérêt le récent travail de M. Sacco [200], paru pen- dant la rédaction de ces lignes. Dép 8 dé inir df ART 4 FAUNES 137 clusion, admise par la plupart des géologues, ne me paraît pas douteuse. Aussi, négligeant les formes actuelles banales, je signa- lerai seulement les espèces les plus caractéristiques et les plus probantes en faveur de cette attribution. Ce sont : Rhynchonella bipartita Br. Terebratula ampulla Br. Flabellipecten Alessii Phil. Chlamys latissimus Br. Hinnites crispus Br. Spondylus crassicosta Lmk. Pholadomya alpina Math., var. Surcula dimidiata Br. Gancellaria hirta Br. Cancellaria varicosa Br. Ranella marginata Martini. Conus Brocchii Bronn Conus virginalis Br. Conus antediluvianus Brug. La plupart de ces espèces sont essentiellement caractéristiques du Pliocène ancien et n'ont jamais été rencontrées dans le Calabrien : telles sont, par exemple, la Zianella marqginala, le Conus antedilu- vianus, le Spondylus crassicosta, etc. Bien entendu, il est à peine besoin de faire remarquer qu'il ne peut être question ici de Miocène supérieur, comme l'avait voulu Mayer. Il ne peut être question non plus de « Postpliocène » comme semblerait l'indiquer M. de Stefani, tout au moins d’après la carte jointe à un de ses récents travaux [99]. Ainsi la série sédimentaire que nous venons d'étudier à Gravina et dans le détroit des Pouilles débute bien par le Pliocène ancien, II. — Faune de l'extrême base des argiles Les couchesinférieures des argiles, formant passage aux « tufs », renferment une faune qu'avec MM. di Stefano et Viola on peut déjà rapporter au Pliocène supérieur; on a là un facies à Brachiopodes, indiquant encore une notable richesse en calcaire, et les fossiles les plus abondants sont les grandes Térébratules du groupe ampulla que Seguenza a cherché à distinguer sous le nom de T. Scillæ. Ici encore Je laisse de côté les espèces vivantes banales, et Je ne cite que les formes caractéristiques, telles qu'elles résultent des listes de MM. di Stefano et Viola. Terebratula Scillæ Segu. Pholadomya sp. Crenella sericea Bronn Cardita rudista Lmk. Cardita intermedia Br. Turritella vermicularis Br. Surcula intermedia Br. Surcula dimidiata Br. Nassa serrata Br. Nassa gigantula Bonelli 138 DÉTROIT DES POUILLES Toutes ces espèces se rencontrent dans les faunes calabriennes!, et toutes aussi, sauf la Crenella, ont déjà disparu au Sicilien. La faune est relativement peu riche, puisque MM. di Stefano et Viola ne citent là que 56 espèces en tout; mais cest suffisant pour y reconnaître du Calabrien inférieur, conclusion très naturelle car ces couches surmontent directement les « tufs » pliocènes anciens. C’est bien d’ailleurs l’avis des savants géologues italiens puisqu'ils y voient l’équivalent exact des dépôts du Monte Mario et de Vallebiaja. III. — Faune des argiles supérieures et des sables MM. di Stefano et Viola y ont distingué une troisième faune, plus récente que les deux premières, et qu’ils rapportent au Postpliocène supérieur. Leurs listes nous en donnent, comme espèces éteintes caractéristiques : Cardium striolatum (Calcara) —? C. cyprium Br. Nucula placentina Lmk. Dentalium rectum L. Trochus granulatus Born, var. lævis —T. Brugnonei Mis. Chenopus uttingerianus Risso Nassa musiva Br. Nassa gigantula Bonelli Nassa italica Mayer Nassa turbinellus Br. Pleurotoma Columnæ Scacchi Niso eburnea Risso Ainsi que l'ont fort bien dit les savants paléontologistes italiens, cette troisième faune a, comme on le voit, un cachet un peu plus récent que la précédente : beaucoup des espèces éteintes de la liste ci-dessus passent en effet dans le Quaternaire : et si on compare la deuxième faune aux niveaux classiques du Monte Mario et de Vallebiaja, choisis comme types d’un Calabrien inférieur, on pourrait rattacher la troisième faune à celle de beaucoup de localités de la Calabre (Gravitelli, Monte Corvo, Musalà, etc.) et y voir du Cala- brien supérieur. Toutefois, une pareille distinction me paraît assez difficile, et s'il est souvent délicat de mettre une limite précise entre i En revanche, comme l'ont fort bien fait remarquer les auteurs italiens, on ne trouve ici aucune des grandes espèces éteintes si abondantes partout dans le vrai Pliocène ancien : c'est ce qui m'a engagé à considérer cette faune comme calabrienne, bien que la position exacte de la limite entre les deux divisions du Pliocène soit 3 forcément difficile à préciser. FAUNES 139 le Pliocène ancien et le Calabrien, à plus forte raison l’est-il de faire encore des coupures dans ce même Calabrien. Mais, en tout cas, c'est encore là une faune nettement cala- brienne ; nous y rencontrons en particulier trois espèces : Chenopus utlingerianus, Niso eburnea, Cardium striolatum, inconnues dans les faunes quaternaires. La dernière, surtout, appartient à un sous- senre qui reste tout entier exclusivement pliocène. Ainsi la faune la plus récente qui ait vécu à Gravina, dans le détroit des Pouilles, est une faune calabrienne, c’est-à-dire encore pliocène ; et nous voyons cette faune apparaître dans des couches superposées en parfaite continuilé aux assises renfermant la faune pliocène ancienne : on ne saurail trouver un type plus net de notre élage calabrien défini à la fois paléontologiquement et straligra- phiquement. Les faunes calabriennes de la Basilicate. La région voisine de Gravina nous à fourni un excellent point de départ, car elle nous a offert une succession complète de faunes toutes bien étudiées. Mais on peut obtenir sur ces faunes d'utiles renseignements complémentaires en s'adressant à d’autres parties du détroit des Pouilles, particulièrement à sa bordure Ouest, celle , ?) qui touche à Ja Basilicate. Malheureusement, les études paléont(o- logiques nous font ici défaut ; une visite personnelle à Bernalda m'a permis d'y trouver un certain nombre de fossiles, d'ailleurs tous banaux, dont on trouvera la liste dans l’appendice : c'est évidemment Ù P du Calabrien supérieur. Des données beaucoup plus intéressantes nous sont fournies pour DS F cette région par M. de Lorenzo [85]; cet auteur a déterminé des fossiles récoltés par l'ingénieur Bruno au Sud du cours du Basento, et conservés à l'Université de Naples : il s'agit ici de faunes cala- briennes, et, les localités nous important peu, je me contente d'y noter les espèces intéressantes reconnues par M. de Lorenzo. Ce sont d’abord des formes éteintes : Arca mytiloïdes Br. Dentalium rectum L. — D. Delesserti Chenu, Miso eburnea Risso, Nucula placentina Lmk.; la première est fort intéressante à noter, car elle n'a pas été rencontrée à Gravina, mais se trouve, comme on sait, au Monte Mario. 140 RÉGION DE TARENTE De plus, à Pisticei, est signalée la Cyprina islandica L. : cet élément important, sinon caractéristique, des faunes calabriennes, n'avait pas été rencontré à Gravina, dans des couches pourtant contemporaines de celles de Pisticei; c’est donc à juste raison que MM. di Stefano et Viola n'avaient attaché aucune importance à l'absence, à Gravina, de tout émigré du Nord, absence en effet purement locale et accidentelle. Au point de vue straligraphique, cette partie Sud-Ouest du Détroit des Pouilles ne nous montrera rien de plus que ce que nous avons vu dans la région de Gravina. M. de Lorenzo y signale à la base du Pliocène quelques couches de « tufs calcaires » qui représentent, comme aux environs de Stigliano, la trace du facies materin. Au-dessus, des argiles bleues, puis des argiles sableuses, des sables et des conglomérats achèvent le cycle pliocène; les faunes que nous venons de citer proviennent évidemment des argiles sableuses et des sables jaunes, qui se montrent dès lors tout à fait comparables aux couches supérieures de Gravina, d’un côté, à celles de la vallée du Crati, de l’autre. La continuilé entre le Pliocène de la Basilicate et celui du bassin du Crali est d’ailleurs attestée par quelques lambeaux conservés le long de la côte; tels sont les massifs pliocènes d’Amendolara et de Rocca Imperiale. Ce dernier a été autrefois étudié par Fuchs [135]; mais les fossiles qu'il en cite doivent provenir, non des argiles bleues du Pliocène, mais de sables et cailloutis quaternaires qui m'ont paru recouvrir ces argiles en discordance; cette faune de Rocca Imperiale, d’après ce qu'en dit Fuchs, paraît en effet bien plus littorale que ne le sont d'ordinaire les faunes des argiles sableuses calabriennes. | $2. — LE PLIOCÈNE DANS LA RÉGION DE TARENTE 1° Description stratigraphique (PI. II, fig. 2). L'étude du Pliocène dans les environs de Tarente ne nous mon- trera point de faits nouveaux; il est nécessaire, toutefois, d'en dire quelques mots ici, et de bien préciser les divers termes de la série pliocène, car ils ont été parfois confondus entre eux ou avec les formations quaternaires si bien développées et si fossilifères dans la même région. Il importe. d'éviter une pareille confusion. STRATIGRAPHIE 141 La plaine qui s'étend autour de la ville de Tarente, à une alti- tude moyenne de 30-50 mètres, est en effet constituée par les dépôts quaternaires. Et c'est, par contre, le Pliocène qui forme les collines dominant cette plaine : les diverses assises pliocènes affleurant sur les flancs de ces collines se trouvent ainsi tronquées du côté de la plaine : on a bien affaire à deux cycles sédimentaires distincts (voir la coupe, pl. IL, fig. 2). Les collines qui s'élèvent au Nord-Ouest de Tarente marquent, en effet, le rebord Sud du plateau des Pouilles : ce plateau se termine par une falaise haute de 150 à 200 mètres, le long de laquelle s'alignent les villages de Montemesola, Massafra, Mottola, Pala- gianello, Castellaneta, postés sur sa crête ou abrités à son pied. Tous les cours d’eau qui descendent à la mer ont entaillé dans ceite falaise de profonds ravins ou « gravine », dont les parois dénudées et abruptes nous montrent partout d'excellentes coupes de la série pliocène. L'une des plus nettes et des plus rapprochées de Tarente peut s'observer à Montemesola. Les premières pentes dominant la plaine quaternaire sont ici formées par les « {ufs calcaires » à facies &« materin », identiques à ceux que nous avons décrits à Gravina. C'est l’assise désignée par Fucbs [135| sous le nom de « calcaire à Bryozoaires », et pour laquelle MM. Verri et de Angelis d'Ossat [226] ont adopté le nom local de « tufo zuppigno ». Ces mollasses calcaires reposent en discordance sur le Crétacé, et, mieux encore qu'à Montemesola, ce contact peut s’étudier dans les « gravine » de Castella- neta et de Palagianello, où existent de grandes exploitations de tufs; on y remarquera à la base un conglomérat à galets calcaires anguleux, avec débris d'Oursins, Balanes, Peclen jacobæus, P. opercularis, etc., remplissant toutes les anfractuosités des calcaires crétacés ; la surface de ces derniers est en effet des plus irrégulières, ciselée de « lapiazures » nous indiquant qu’une phase continentale a précédé, iei comme partout, le début de la transgression pliocène !. Les tranchées du chemin de fer, à l'Ouest de la station de Montejasi, au lieu dit Ferrara, nous montrent même un contact presque vertical; la topographie de la surface crétacée ! Je dois rappeler à ce sujet une intéressante observation faite par Verri ([226|; p. 184) et que je n'ai pas eu l'occasion de vérifier. Cet auteur dit avoir observé, en effet, dans le bassin de Triglie (Triglia de la carte au 1/100.000°) des « marnes riches en Potamides, Néritirés et autres fossiles saumâltes », et inférieures au « tufo Zuppigno )»: 142 RÉGION DE TARENTE envahie par la mer était donc très accidentée, et il devait y avoir ier une véritable falaise sous-marine. Au-dessus de ces mollasses calcaires à facies materin, viennent, comme à Gravina, et en continuité parfaite, des argiles bleues. Cette superposi- tion est particulièrement facile à étudier sur le versant Est de la petite colline dite Monte Gravina, qui s'élève au Sud: Ouest de Montemesola, et où « les tufs » pliocènes sont exploités. Le passage entre les deux formations se fait par l'intermédiaire d'une mince assise marno-calcaire où les fossiles sont assez nombreux et bien conservés, mais malheureusement peu carac- téristiques ; on peut y récolter en abondance : Pecten jacobæus L., Chla- mys seplemradiatus Müll., Ostrea cochlear Poli, etc. Quant aux marnes bleues, à l'inverse de ce qui arrive à Gravina, elles m'ont paru à Monte- mesola très peu fossilifères. Vers la partie supérieure, ces marnes deviennent de plus en plus sableuses et finalement on arrive à de véritables sables avec bancs de grès très durs, sur lesquels est bâti le village de Montemesola; ces grès sont de couleur jaune-rougeâtre foncé et contiennent de nombreux moules de coquilles ; tantôt ils se débitent en minces plaquettes, tantôt ils sont assez compacts pour être exploités ; 1ls rappellent d’une manière frappante, par tous leurs caractères, les grès sableux qui couronnaient la sérié pliocène à Gravina : bien entendu ils leur sont aussi exactement assimilables par leur position Sheep one, Et enfin, ici, de même qu'à Gravina, la fin du cn inere se traduit par un vaste plateau, dont la surface est formée par des couches gréseuses grossières à facies littoral. Ce plateau, plus ou moins entamé par l'érosion, s'étend au loin au Nord de Montemesola, à une altitude variable de-200 à 250 mètres environ; et comme, à Gravina, on le voyait dominé par la chaîne calcaire des Murgie, ainsi, à Montemesola, nous en voyons surgir brusquement une falaise crétacée qui, à une altitude voisine de 450 mètres, barre l'horizon du Nord, tandis qu'à l'Ouest en émerge à peine, comme un îlot, le sommet crétacé du Monte Belmonte (272 m.). Ainsi, ü y a identité complète entre les divers termes de la série pliocène à Gravina et à Tarente; il y a, d’ailleurs, une continuité absolue entre ces diverses formations, à partir de Castellaneta, par exemple, jusque dans la région de Matera et de Gravina. Il s’ensuit nécessairement que les couches constituant la plaine quaternaire de Tarente et qui appartiennent à un cycle sédimentaire sûrement plus récent, ne sauraient, en aucune façon, être comparées aux dépôts de Gravina. Nous en aurons des preuves précises en étudiant plus loin, en détail, les formations quaternaires de Tarente, mais Je FAUNES 143 tiens à insister dès maintenant sur ce point, car il ne me paraît pas avoir été suffisamment éclairei par les divers auteurs qui ont étudié le Pliocène et le « Postpliocène » de la région de Tarente. Ces confusions me paraissent surtout portées à l'extrême dans la feuille Tarente de la carte géologique au 1/100.000°; celte carte n'indique, en effet, dans les couches que nous venons d'étudier, que deux subdivisions : à la base, des argiles bleues pliocènes (p,); au-dessus, des tufs calcaires : « postpliocènes » (p.). Le symbole et la teinte p, s'appliquent, sur la carte, à la fois aux mollasses calcaires à facies materin qui sont certaine- ment inférieures aux argiles, et aux grès calcaires des plateaux de Monte- mesola, qui leur sont certainement supérieurs : nous verrons d’ailleurs plus loin que le même symbole p, s'étend aussi aux couches à Strombes. II ne m'a donc pas paru inutile d'éclaircir un peu cette confusion. 20 Les Faunes. Il ne nous resterait plus qu'à établir la succession des faunes dans la série pliocène de la région de Tarente. Malheureusement, ces faunes sont ici assez pauvres, même en faisant appel aux recherches des auteurs qui y ont consacré le plus de temps. 1° Les mollasses calcaires. — Fuchs [135| ne cite, dans ses « calcaires à Bryozoaires », qu'une dizaine d'espèces; toutes, sauf la Terebratula ampulla Br., dont j'ai pu moi-même constater l'abondance dans ces couches, sont des formes méditerranéennes actuelles, par suite sans intérêt. MM. Verri et de Angelis d'Ossat [226] ont été plus heureux ; sur les vingt-deux espèces qu'ils citent (p: 205), dans leur « tufo zuppigno », nous pouvons retenir les suivantes : Terebratula ampulla Br., Cyprina islandica L., Pho- ladomya alpina Math., var. appula de Franchis, Clavagella bacillum Br. Parmi ces formes étrangères à la Méditerranée actuelle, la Térébratule .et la Pholadomye ont un caractère plio- cène très net, mais toutes sont communes au Pliocène ancien et au Pliocène supérieur; on pourrait, à la rigueur, invoquer pour l'âge pliocène supérieur de ces couches l’absence des espèces éteintes que L'on est habitué à rencontrer dans le Pliocène ancien; mais 1l me semble que la faune n'est pas ici assez riche pour que 144 RÉGION DE TARENTE l’on puisse faire état de caractères négatifs'. Ainsi, au strict point de vue paléontologique, il y a doute. Mais, en s’aidant d'arguments stratigraphiques, la solution n’est pas douteuse : le «{ufo zuppigno » de Tarente se relie d'une manière continue, d’une part aux tufs de Matera, dont nous venons de démontrer l'âge pliocène ancien; d'autre part avec les tufs de la terre d'Ofrante, où, comme nous le verrons, se rencontrent des formes bien caractéristiques de ce même étage. C’est d’ailleurs à peu près la solution adoptée par MM. Verrietde Angelis d'Ossat pour lesquels le tufo zuppigno « indique le passage entre Pliocène et Postpliocène (— Calabrien), avec un caractère pourtant plus pliocène que quaternaire (ou calabrien) ». De même M. Sacco [200] range ces sédiments dans le Plaisancien à facies « pseudoastien ». Il est donc très intéressant d’y faire remarquer la présence de la Cyprina islandica L ; l'introduction de cette espèce dans la Méditerranée paraît donc bien ici s'être produite dans la premiere partie du Pliocène, comme cela arrive dans la terre d'Otrante et en Algérie; je dis parait, car la C. islandica serait, d'après MM. Verri et de Angelis, localisée dans les zones supé- rieures des tufs : les deux termes du Pliocène sont ici trop peu fossilifères el trop indissolublement liés pour qu’on puisse préciser leur limite relative. 2° Les arqules et les sables et grès supérieurs. — Je n'ai pas pu, personnellement, faire de bonnes récoltes de fossiles dans ces couches, qui paraissent bien moins riches qu'aux environs de Gra- vina. Les citations des auteurs ne peuvent être acceptées sans discussion, car la plupart ont confondu les argiles pliocènes des collines de Tarente avec les argiles, probablement quaternaires, développées. aux environs de la ville et autour du Mare Piccolo, immédiatement sous les couches à Strombes ; tel est le cas pour M. Bassani [9], dont nous étudierons plus loin les listes de fossiles. Par contre, Fuchs [135] signale quelques espèces, probablement récoltées par lui dans les collines de Palagianello et de Castellaneta, et provenant bien, par suite, des argiles pliocènes, Ce sont : Nassa l Il est juste dé faire observer, d'ailleurs, que les niveaux fossiliféres de ces tufs sont localisés surtout à leur partie supérieure, près des couches de passage aux argiles; l'âge pliocène ancien de leur partie inférieure, toùt au moins, en devient d'autant plus vraisemblable. £ TERRE D'OTRANTE 149 semustriala Br.,-Fusus longiroster Br., Isocardia cor L., Nucula placentina Lmk. Cette faune est bien insuffisante, mais le Fusus longiroster Br., s'il n'a pas été confondu par Fuchs avec le F. rostra- tus Br., lui donne un caractère très net de pliocénicité. Il s'agit certainement de Calabrien, ainsi que cela résulte surabondamment de la stratigraphie. $ 3. — LE PLIOCÈNE DANS LA TERRE D'OTRANTE La péninsule qui, à partir d'une ligne Tarente-Brindisi, s'étend jusqu'au cap S. Maria di Leuca, constitue une région naturelle bien individualisée, à laquelle on peut appliquer le nom de terre d'Otrante. Le plateau crétacé des Pouilles calcaires s'y termine en s’abaissant notablement ; en effet, les roches crétacées n’y affleurent plus que dans des chaines de collines allongées Nord-Ouest-Sud- Est, comme la péninsule, et appelées « Serre »; les larges dépres- sions séparant ces « Serre » sont comblées par des terrains pliocènes et qualernaires. Enfin, tout cet ensemble est nivelé en une série de vastes plates-formes, nettement visibles sur les cartes topogra- phiques, et dont M. Biasutti [22] a fait récemment une étude mor- phologique fort intéressante. Au point de vue stratigraphique, cette terre d'Otrante a été surtout étudiée par M. C. de Giorgi, le savant directeur du Musée de Lecce, dans de nombreuses publications ; je ferai surtout appel à l'excellent résumé qu’il en a donné lui-même dans sa « Serie geolo- gica dei terreni nella Penisola Salentina » [74]. Une soigneuse monographie particulière du bassin de Galatina est due à M. de Franchis [69,70]. Enfin, l'extrême pointe méridionale de la pénin- sule a été étudiée par M. Dainelli [58]. 1° Description stratigraphique. La stratigraphie précise des terrains pliocènes et quaternaires est d'ailleurs des plus difficiles. Car il n'existe dans toute la région aucun véritable cours d’eau ; il est, dès lors, impossible de relever des coupes de quelque étendue, dans ce pays presque complètement plat et sans vallées d'érosion. S'il est assez facile, d’après l'aspect du pays, de se rendre compte de la nature du sous-sol, en revanche les UNIv. DE Lyon. — Gicnoux. 10 146 TERRE D'OTRANTE contacts ne sont presque jamais visibles : c'est surtout en suivant les forages de puits que l’on peut se rendre compte des superpo- sitions. On conçoit donc que je ne puisse malheureusement apporter que très peu d'observations nouvelles de quelque intérêt. _ Bien des points m'ont paru rester encore obscurs et douteux ; aussi c'est avec une grande réserve que je vais exposer ci-dessous l'idée que l'on peut se faire de la stratigraphie de cette région, principale- ment d’après les travaux de M. de Franchis et de M. de Giorgi. 1° L’assise la plus inférieure des couches pliocènes est une mollasse calcaire identique au facies « malerin » que nous avons étudié à Gravina et à Tarente; la contemporanéité de toutes ces mollasses, recouvrant par- tout directement le Crétacé du massif appulo-garganique, est absolument hors de doute. J'ai pu étudier moi-même ces couches au Sud- Ouest de Nardd, pres de la Masseria Incoronata : elles reposent là, tantôt sur le Crétacé, tantôt sur la « pietra leccese » miocène. Le contact est magnifi- quement visible dans les tranchées du chemin qui conduit à la mer, près de la Torre S. Caterina; cette mollasse, extrêmement riche en Oursins et en Cyprina islandica, est ici exploitée à la scie. M. de Giorgi la qualifie de « sabbione ». . 20 Au-dessus, viennent des argiles bleues, tantôt plastiques, tantôt sableuses ; mais ces argiles n’affleurent presque jamais d’une façon visible : elles sont surtout connues par les forages de puits; parfois elles sont exploitées, également dans des puits’. En tout cas, leur présence est facile à deviner d'après l'aspect du paysage, car dans cette région surtout calcaire, elles donnent lieu à des bassins parfois marécageux, en tout cas relativement humides: beaucoup de ces bassins sont des dépressions fermées, entourées de tous côtés par les croupes arides et monotones des calcaires crétacés ou des mollasses pliocènes. 3° Au-dessus des argiles enfin, viennent des assises fort irrégulèr en développées : ce sont des Sais jaunes appelés « piromafo », ou des calcaires qréseux à débris de coquilles, avec bancs durcis, ou « pan- china ». Cet ensemble de formations superficielles, le plus souvent très calcaire, est appelé la « crosta », et il paraît avoir été partiellement confondu avecla mollasse inférieure par M. Dainelli. Cet auteur ne signale, en effet, dans la région méridionale de la terre d'Olrante, que des « tufs » et des argiles, et, dit-il, les argiles lui ont paru inférieures aux tufs; mais 1 C'est le cas, par exemple, pour les argiles de S. Pietro in Lama, célèbre gise- ment fossilifère, que j'ai eu l’occasion de visiter, sans pouvoir y Re d’ailleurs aucune observation stratigraphique, STRATIGRAPHIE 147 ailleurs, comme à la Punta Meliso, à Novaglie, etc .., il a vu le tuf fossi- lifère reposant directement sur le Crétacé. Cela ne peut s'expliquer qu’en admettant que cet auteur, trompé par l'aspect des affleurements, a con- fondu le véritable « tuf » avec la « panchina » supérieure. Cet exemple montre combien est délicate la straligraphie de ces terrains. D'après les faunes, il est certain, comme nous allons le voir, que le Pliocène ancien est représenté dans la terre d’Otrante : il l’est donc par les mollasses calcaires inférieures, et tout au moins par la partie inférieure de celles-ci. Ce Pliocène ancien est recouvert en continuité par du Calabrien, constitué par les argiles et les « pan- chine » supérieures. Mais il est très probable qu’une partie des argiles et des sables de la terre d'Otrante sont au contraire qualernaires, par analogie avec ce qui se passe aux environs de Tarente, où la chose ne me parait pas douteuse. Il sera donc très difficile de faire ici le départ entre ceux de ces sédiments qui sont pliocènes, et ceux qui, avec un facies en tout semblable, sont au contraire quaternaires. Car, dans cette région, les phénomènes stratigraphiques qui nous ont servi partout à distinguer le Pliocène du Quaternaire, ont dû avoir certainement le minimum d'effets visibles. L’érosion étant supprimée, faute de reliefs et de cours d’eau, la discontinuité qui devrait séparer deux cycles sédimentaires successifs ne se traduira plus d'une facon aussi nette. De plus, la sédimentation même se trouve fort réduite; les formations clastiques se limitent à des bancs argileux ne dépassant guère 10 à 20 mètres d'épaisseur ; les facies calcaires zoogènes deviennent de beaucoup prédomi- nants, et la notion de série de remblaiement ne trouve plus à s'appliquer que d’une façon fort vague. D'une manière générale, je crois que l’on peut attribuer à la série pliocène les sédiments de l'intérieur même de la péninsule, qui atteignent en général des hauteurs variant de 50 à 100 mètres. Tandis que nous laisserons dans le Quaternaire les argiles et les « panchine » qui, à Tarente, à Galhipoli, à Brindisi, bordent la côte à des altitudes variables entre o et 25 mètres, et dont, par suite, nous réservons l'étude pour un chapitre ultérieur. Nous verrons que les faunes ne paraissent pas s'opposer à cette interprétation ’. 1 Qui paraît bien être aussi celle adoptée par M. Sacco [200|, dans un (ravail paru après la rédaction de ces lignes. 148 TERRE D'OTRANTE 2° Les Faunces. La Faune des mollasses inférieures. Une liste très soigneusement établie des fossiles du « tuf » de Galatina a été donnée par de Franchis: cet auteur a récolté là quarante espèces ; sept sont éteintes, ce sont : 1° T'erebralula ampulla Br., forme Scillæ Segu., et Pholadomya alpina Math., var. appula de Franchis, communes toutes deux au Pliocène ancien et au Calabrien ; 2° Crenella sericea Bronn, Arcopagia ventricosa M. de Serres et Clava- gella bacillum Br., arrivant jusque dans le Sicilien; 3° Un Sirombus sp., impossible à interpréter, puisque le genre Strombe est représenté à la fois dans le Pliocène et le Quaternaire; 4° Enfin le Flabellipecten Alessi Phil., forme exclusivement pliocène ancienne. Il faut noter en outre l'abondance de la Cyprina islandica L. et de l'Echinolampas Ho/fmanni Desor, forme pliocène arrivant jusque dans le Sicilien, et dont j'ai récolté moi-même de nombreux échantillons à Nardo, localité toute voisine de Galatina. Se basant surtout sur le pourcentage des formes éteintes et sur la présence de la Cyprine, de Franchis range ces couches dans le « Postpliocène inférieur », sur le niveau de Vallebiaja et du Monte- Mario. Au contraire, MM. Verri et de Angelis d’Ossat([226], p. 208) les considèrent comme franchement pliocènes, à cause de la Phola- domya et surtout du Flabellipecten. Je serai porté à être de leur avis et à classer ces « tufs calcaires » dans le Pliocène ancien; cette opinion se trouve confirmée si on examine les données que l’on peut avoir sur cette faune en d’autres points de la terre d'Otrante. Ainsi, dans la partie méridionale, M. Dainelli a récolté dans ces mêmes assises, outre la Terebratula ampulla Br., forme Scillæ Seg., toujours abondante, la Rhynchonella biparlita Br., espèce essentiellement pliocène ancienne, «ns1 que la Crania anomala Seg. Et surtout M. de Giorgi a cité ({[74|, p. 4o), sans indication précise de localité, de nombreux fossiles ces mêmes assises. Si quelques-unes de ces citations ne semblent pas pouvoir être accep- tées sans discussion (par exemple : Sfrombus coronatus, Conus FAUNES 149 virginalis, Turritella bicarinata, Pecten scabrellus, Cardila Jouan- neti, etc.), d’autres, par contre, se rapportent certainement à des espèces franchement pliocènes anciennes : telles sont, par exemple : Conus antediluvianus Br., Clypeasler sp. Enfin, M. de Giorgi a bien voulu me permettre l'examen de ses magnifiques collections particulières, ainsi que de celles réunies par U. Botti et lui à l'Institut technique de Lecce : j'y ai relevé les deux formes suivantes, absolument spéciales au Pliocène inférieur : Amussium crislatum Bronn, échantillons typiques et de grande taille, provenant d'Arnesano, près Monteroni (puits dans la villa de Simone), de Muro leccese (contrée Cupuni) et d'Otranto. Chlamys latissimus Br., de Novoli. Il me semble donc bien certain que le Pliocène ancien est repré- senté dans la terre d'Olrante, et je ne puis, à cause de cela, être de l'avis de M. de Stefani [99], qui n'y reconnait que du « Postplio- cène ». Ici encore, la Cyprina islandica semble bien avoir coexisté avec une faune à caractère très archaïque. La faune des argiles. En tout cas, la faune des argiles est bien nettement calabrienne ; il est facile d'y mettre en évidence l'association d'espèces atlan- tiques immigrées, abondantes, avec les formes éteintes habituelles à cet étage. Parmi Les premières, je citerai, à Galatina, d'après de Franchis : Cyprina islandica L., très abondante; Mya truncata L., rare; Tellina perfrigida de Greg., rare!. Les espèces éteintes rencontrées à Galatina par le même auteur sont les suivantes ? : … Crenella sericea Bronn, Nucula placentina Lmk., Lucina Sismondai Desh., Turritella subangulata Br., Dentalium rectum L.». ! Citée sous le nom de T. obliqua Sow. dans la liste de de Franchis et dans les collections de M. de Giorgi : les exemplaires que j'y ai vus sont absolument iden- tiques à la forme de Ficarazzi, pour laquelle j'ai conservé le nom de T. perfrigida; mais qui est évidemment très voisine des coquilles vivantes des mers anglaises (voir 5* partie). ? Je ne considère pas comme des formes disparues caractéristiques les Tellina élliplica Br. et Xenophora (rinacria Fischer (voir 5° partie), citées pour telles par l'auteur. : 3 Cité comme D. Philippii Monterosato (voir 5e partie), 150 TERRE D'OTRANTE . En outre, j'ai pu voir, dans les collections de l’Institut technique de Lecce, de belles Turritella tornata Br., bien typiques, provenant toujours de ces mêmes argiles dans la localité de Supersano, située dans le milieu de la péninsule, à la latitude de Gallipoli‘. Un certain nombre de ces espèces éteintes sont communes au Calabrien et au Sicilien, mais plusieurs d’entre elles, par exemple la Lucine et les Turritelles, ne dépassent pas le Calabrien. . ILest donc certain que la faune calabrienne est bien représentée dans la terre d'Otrante, et l’on remarquera que les localités où elle se rencontre sont situées dans l’intérieur de la péninsule, à des alti- tudes variant entre 60 et 15o mètres. La faune des « panchine » supérieures. Dans la panchina étudiée à Galatina par M. de Franchis, cet auteur n'a reconnu que des espèces actuelles : le facies et la faune ont, en effet, un caractère beaucoup plus littoral, de sorte qu'il n’est pas étonnant de n'y rencontrer aucune des formes caractéris- tiques, assez profondes pour la plupart. D'ailleurs, si certaines de ces « panchine » correspondent à la fin du Calabrien, d'autres sont sûrement qualernaires, comme nous le verrons dans un chapitre ultérieur; et il est actuellement impossible de délimiter d’une manière précise ces formations d'âges divers. Ainsi la liste donnée par M. C.: de Giorgi ([74], p- 31) comprend évidemment un mélange de faunes, puisqu'on y trouve côte à côte des formes lit- torales et récentes, comme le Sérombus bubonius Lmk. de Gallipoli (sous le nom de S. coronatus Defr.), et d'autres anciennes et plus profondes (Dentalium rectum L., Turritella vermicularis Br; etc.). Un rapide examen des collections réunies par M. de Giorgi pour ce niveau ma d’ailleurs donné l'impression d'un Âge calabrien pour beaucoup de localités : on y voit, représentées par des variétés identiques, les mêmes espèces qu'en Calabre et en Sicile : Nassa semistriala Br., var, calabrensis nov., Dosinia lupinus Poli, var. ficaraliensis nov., ete. 1 La liste donnée par M. de Giorgi pour ce sniveau renferme encore d'autres formes éteintes, par exemple Fusus longiroster Br., Pecten cristatus Bronn, Tere- bratula ampulla Br., mais ilest à craindre qu'il n 'y ait eu CONSO avec le niveau inférieur. | RÉGION DU MONTE GARGANO 151 S 4. — LA COTE ADRIATIQUE . f° La terre de Bari. Dans sa partie restée compacte et massive, le plateau calcaire des Pouilles, ou terre de Bari, ne montre pas un développement bien important du Pliocène : ce terrain s’y réduit à des placages de « tuf calcaire » se reliant vers l'Ouest aux mollasses de Gravina et vers le Sud aux « tufi » de la terre d'Otrante, que nous venons d'étudier. Les argiles superposées à ces tufs manquent le plus souvent, enle- vées par l'érosion qui a mis partout à nu les assises calcaires créta- cées ou pliocènes. Les faunes étant très mal connues, il n'est pas question ici de distinguer un Pliocène ancien et un Pliocène supé- rieur. On peut seulement affirmer la présence du Pliocène (s. 1.); car partout abondent, dans ces mollasses, les Térébratules: du groupe ampulla déjà signalées ici par Fuchs [135]; comme dans la terre d'Otrante, il est d’ailleurs probable que le Quaternaire est représenté le long de la côte par des facies analoques, ce qui rend alors la distinction très difficile à établir. Pour des descriptions locales détaillées, je me contente done de renvoyer aux travaux des géologues italiens, et en particulier à la monographie récente due à Virgilio [231], et dans laquelle on trou- vera, en particulier, une bibliographie fort complète; cette région ne peut malheureusement rien nous apprendre d'intéressant sur le Pliocène. | | Mais si nous traversons le Tavoliere di Puglia, ancien golfe comblé par les dépôts quaternaires, nous arriverons au Massif du Gargano, tout autour duquel on retrouve un Pliocène bien développé. 20 Région du Monte Gargano, Nous possédons surtout sur cette région les travaux de Viola et Cassetti [230], de Ricciardelli [197] et de Checchia-Rispoli [35,37] : sans parler des études plus anciennes, telles que celles de Niccoli [184]. Tandis que, dans les collines qui font face au Gargano du côté du continent, le Pliocène est développé avec son facies subapennin ordinaire, on retrouve, le long de la base du massif crétacé du 152 RÉGION DU MONTE GARGANO Gargano, le {ype appulo- garganique ie mers encre étudié d’abord à Matéra et Gravina.. _ La base de la série est encore représentée par des mollasses calcaires à facies materin, exploitées souvent dès la plus haute antiquité, et reposant en général directement sur le Crétacé : elles forment comme une ceinture tout autour du Gargano, et MM. Viola et Cassetti les signalent là dans de nombreuses localités. J'ai pu les étudier moi-même dans la région d'Apricena, près de S. Severo, où M. Checchia-Rispoli en a fait une étude spéciale : Je dois une bien vive reconnaissance à mon excellent confrère et ami, qui a bien voulu m'y accompagner lui-même. Il existe là une première chaîne dé collines qui, précédant la masse du Gargano, surgit de la plaine quater- naire du Tavoliere. L'ossature de cette chaîne est formée par des calcaires crélacés : la surface de ces calcaires est recouverte d'une croûte assez mince d’un autre calcaire très dur, compact, analogue à celui que nous avons vu à Monte Corvo près Reggio, à la base de la même série pliocère; l'aspect de cette roche pourrait au premier abord la faire confondre avec le Crétacé sous-jacent. Mais les nombreux fossiles qu’on y récolte prouvent à l'évidence son âge pliocène {. Au-dessus de cette croûle calcaire, viennent les His ou « tufs » avec leurs caractères hahituels. Là s'arrête la série pliocène ; en quelques points on y a signalé sur le pourtour du Gargano, au-dessus des tufs, quelques lambeaux d'argiles représentant les argiles calabriennes du détroit des Pouilles. Maïs les sédiments qui, en contre-bas des collines pliocènes, remblaient le Tavoliere, sont certainement quaternaires, comme nous le verrons pie fou _ La faune de ces calcaires à Coraux et de ces mollasses est indu- bitablement pliocène ancienne?. M. Checchia-Rispoli en a donné des listes très démonstratives à cet égard ([37], et [35] p. 293) : j'y 1 Je ne partage pas tout à fait l'opinion exprimée jadis sur ce point par M. G. Chec- chia-Rispoli [35]. Cet auteur.attribue en effet au Pliocène toute la masse des col= lines qui, de S. Giovanni in Piano, vont jusqu'aux environs de Poggio-Imperiale,; aussi décrit-il ce Pliocène comme « un calcaire subcristallin, en gros bancs épais de 2 mètres, formant un anticlinal ». Outre que la ligne de démarcation entre la croûte de calcaire pliocène et le substratum crétacé est le plus souvent visible avec netteté, l’âge de ce substratum ne peut faire l’objet d'aucun doute quand on à examiné les belles carrières où il est exploité, près de la station de Poggio-Impe- riale; des préparations microscopiques de la roche récoltée là ON montré un calcaire zoogène à miliolidés du type urgonien, ? Ces environs de S. Seyero sont, d'ailleurs, au voisinage du Gargano, Ja seule. localité d’où on ait cité des espèces d'une manière précise. LA COTE AU NORD DU MONTE GARGANO 153 relèverai les espèces suivantes, absolument caractéristiques, et dont il a bien voulu me montrer de superbes spécimens recueillis par lui-même : Amussium cristatum Br. Chlamys latissimus Br. Chlamys scabrellus Lmk. Terebratula sinuosa Br. formes associées à d’autres espèces banales, à de nombreux Bryozoaires, Coraux et Foraminifères (Amphistégines), Ce facies ressemble donc trait pour trait aux mollasses calcaires de Mustapha, qui, aux environs d'Alger, représentent également un facies z00- gène du Pliocène ancien. Cette faune correspond d’ailleurs à une profondeur notable : car on y rencontre en particulier, d'après M. Checchia-Rispoli, le Chlamys Bruei Payr., espèce notoirement profonde. Et comme les sédiments qui la ren- ferment s'élèvent au moins à 150 mètres, on en déduit que le niveau de la mer pliocène a certainement, dans cette région du Gargano, dépassé 250 ou 300 metres. Cette région bordière du Gargano ne nous apprend rien de plus sur l'étage calabrien. Mais je la considère comme très intéressante néanmoins, car les découvertes de M. Checchia-Rispoli nous y montrent avec une entière évidence que les mollasses calcaires à facies « materin » appartiennent bien naléontologiquement au Plio- cène ancien. Gomme ces mollasses sont contemporaines de toutes celles qui, à Gravina, Matera, Tarente, etc., occupent aussi la base du Pliocène de type appulo-garganique, l’âge de ces dernières se trouve ainsi fixé. On se rappelle que dans la terre d'Otrante et à Tarente en particulier, la faune de ces mêmes assises ne nous avait pas présenté de caractères aussi nets. 3° La côte Adriatique au Nord du Gargano. Le Pliocène de la côte adriatique au Nord du Gargano n'a pas été, à ma connaissance, étudié d’une façon spéciale. On trouvera à ce sujet quelques indications dans les travaux de Cassetti [31], Tellini [222], Moderni | 178]. 154 LA COTE AU NORD DU MONTE GARGANO Tellini, dans sa très intéressante monographie consacrée aux îles Tremiti, situées au Nord du Monte Gargano, y a fait connaître la constitution de la série pliocène. On y trouve à la base, comme au Gargano, une faune pliocène ancienne indubitable, à One cochlear Poli, et Pecten comitatus Font. ; dans les termes les plus élevés qui soient visibles de cette série, le même auteur ne cite que des espèces encore vivantes, de sorte que le Calabrien est peut-être représenté là; mais la EE n'est pas assez bien connue pour qu on puisse l Mie | Sur la côte adriatique, entre le Gargano et le Monte Conero, près d'Ancône, le Pliocène forme une bande continue, longeant la chaine apennine; il y présente son facies subapennin typique, argileux à la base, puis devenant progressivement plus sableux, et se terminant par des cailloutis continentaux; l'épaisseur de la série dépasse 5oo mètres et, d’après Mode le Pliocène monterait jusqu'à plus de 1.000 mètres d'altitude, et serait affecté, du côté de l’Apennin, Eee des dislocations fort intenses, les couches étant relevées jusqu'à la verticale, et parfois même renversées (?); les termes les plus élevés contiendraient, d'après le même auteur, la faune caractéristique du Pliocène supérieur, mais il est difficile d'en juger, car il ne cite aucune espèce. Il en serait de même, d’après Cassetti, près du Monte Conero, dans la région Conero : reposant. sur le Miocène supérieur, le Pliocène présente ici dès la base le facies subapennin; les couches supérieures, formées par des grès marno-calcaires (tufi) auraient aussi une faune pliocène supérieure, mais les listes données par l’auteur, se bornant à quelques espèces actuelles, ne permettent pas d’en juger nettement ; il semble bien, néanmoins, que l’on ne soit déjà plus dans le Pliocène ancien. Et, surtout, en présence de l’unité et de la régularité de cette bande pliocène subapennine qui se poursuit, sans interruption, des Pouilles à la région d'Ancône, il est logique de croire que nous retrouverions à son extrémité nord le Calabrien que nous y avons vu développé au Sud. Nous reparlerons plus loin de cette question à propos du Pliocène de l'Italie du Nord. RÉGION DE L'ETNA 155 CHAPTIRE V LE PLIOCÈNE SUPÉRIEUR EN SICILE Bien que le Pliocène de la Sicile soit connu dans ses grands traits, la stratigraphie détaillée en reste encore assez obscure. La descriplion d'ensemble la plus commode à consulter est celle faite par l'ingénieur Baldacci dans son grand ouvrage sur la Sicile [6]; les études comparatives de G. Seguenza [207] ont porté, en dehors de la région de Messine, sur les environs de Syracuse et de Palerme; mais elles sont beaucoup obscurcies par ses idées stratigraphiques et sa division en nombreuses zones paléontologiques impossibles à caractériser. En dehors de cela, on n'a guère que des monographies locales, dont plusieurs, il est vrai, sont excellentes : je citerai en première ligne celle de M. Scalia [204] sur la région de l'Etna, et celle du professeur di Stefano [rar] sur les environs de Sciacca; Stôhr [219] a étudié le Pliocène de Girgenti, Fuchs et Bittner [136], la région de Syracuse et Lentini. MM. Baldacci et Mazzetti [7], Cafñci!, Travaglia [224], ont donné quelques renseignements sur le Plio- cène de la région Sud-Est de la Sicile. Enfin les nombreux auteurs qui se sont occupés des gisements de soufre n'ont eu à parler, la plupart du temps, que des termes tout à fait inférieurs de la série pliocène, lesquels justement ne nous intéressent pas ici. De sorte qu'il subsiste encore aujourd hui bien des lacunes; je n’ai pu arriver à me faire, de la constitution de la série pliocène en Sicile, une idée aussi claire et aussi cerlaine qu'en Calabre. Je me bornerai donc à parler du Pliocène supérieur dans quelques régions seulement, soit qu’elles aient été étudiées d’une manière satisfai- sante, soit que j'aie pu y faire des observations personnelles. $ 1. — LA RÉGION DE L'ETNA À cause de leurs relations avec l'histoire du grand volcan, les dépôts pliocènes supérieurs de la région de l'Etna, ou « argiles subetnéennes », ont depuis longtemps retenu l'attention. Négligeant les travaux antérieurs dus à Lyell?, à von Lasaulx, à Sartorius 1 Cf. Cafici, Da Vizzini a Licodia, Syracuse, 1878. ? Voir plus haut, p. 7. 156 RÉGION DE L’ETNA von Waltershausen, à Gravina, à Platania, etc., nous pouvons nous en tenir ici à l'excellente monographie détaillée que M. Scalia a publiée récemment sur le « Postpliocène de l’Etna » [204] et où il a résumé ses propres travaux antérieurs sur le même sujet!. J’ajou- terai que M. Scalia a eu l’amabilité de me guider? lui-même dans les principaux gisements fossilifères des environs immédiats de Catane, complétant ainsi la rapide connaissance de la région que J'avais acquise dans quelques courses antérieures. Les observations que l’on peut faire sur le terrain sont d’ailleurs de peu de valeur et ne donnent guère d'indications stratigraphiques. Les couches les plus profondes que l'on puisse voir dans la région sont, en effet, des argiles bleues plastiques, fossilifères, dites argiles subetnéennes, et prises par Lyell comme types de son « nouveau Pliocène ». Pour décrire leur répartition, nous distinguerons trois régions naturelles : A. — Au Nord, c'est l'immense cône volcanique, dont les pentes descendent doucement, avec une majestueuse régularité, Jusqu'à la mer; là, presque tout est recouvert par les coulées de lave histo- riques ou préhistoriques : le soubassement sédimentaire n'apparaît que dans des points isolés et sur des étendues fort restreintes, sous forme d’argiles bleues avec lentilles d'argiles sableuses fossilifères. Un premier gisement a été ainsi découvert et étudié par M. Scalia sur le versant Nord-Est du volcan, à la Vena, localité située à 800 mètres d’altitude, au Sud-Ouest de Piedimonte etneo. Les anciens vulcanologues, partisans de la théorie des « cratères de soulèvement », n'eussent pas manqué de voir dans ce dépôt récent ainsi soulevé à une telle altitude, au cœur même de la région volcanique, une preuve en faveur de leurs idées; c'eût été bien à tort d’ailleurs, car la mer pliocène supérieure a recouvert la majeure partie de la Sicile, de manière que les sédiments calabriens s’y retrouvent un peu partout à des hauteurs comparables ; ils devaient remblayer toute la région, et les laves de l’Etna n'ont joué ici qu un rôle protecteur, en nous conservant, à l'abri de l’éro- sion, un fragment élevé de ce puissant manteau argileux. Les autres gisements fossilifères des « argiles subetnéennes » sont beaucoup plus bas : une première série s aligne sur le versant 1 Voir aussi F. Wallerant [232]. 2 En compagnie de M. Depéret, RÉGION DE L'ETNA 157 Sud du volcan et est visible le long du bord d’une sorte de terrasse sur laquelle M. de Lorenzo ([84], p. 16) a appelé l'attention : ce sont, de l'Est à l'Ouest, les localités de Nizzeli, Catira, Licatia, Dagala di S. Paolo, situées à des hauteurs variant entre 250 et 300 mètres. Enfin, tout près de Catane, un autre affleurement isolé d'argiles fos- siifères est visible au Pogqio di Cibali (dit aussi Cifali ou Cefali), à 100 mètres d'altitude environ. Ces quelques affleurements ! suffisent à nous montrer que le socle seédimentaire tout entier du volcan est constitué par ces argiles sub- elnéennes que nous verrons être d'âge calabrien ; c’est à leur exis- tence, d'ailleurs, que la partie inférieure de la montagne doit sa légendaire fertilité, car les nappes aquifères qu’elles déterminent sous les laves ont permis l'irrigation des cultures. B. — Au Sud s'étend une deuxième région naturelle : c’est la contrée des Terreforti, venant finir en pointe près de la mer à Catane, et s’élargissant vers l'Ouest dans les environs de Paternd, traversée là par les cours moyens des fleuves Simeto et Dittaino. Ici, le substratum sédimentaire n’a pas été atteint par les courants de lave, et toute la contrée est formée par les argiles « post- pliocènes » ; tantôt elles sont recouvertes d'une mince couche de cailloutis quaternaires ; tantôt, cette dernière ayant été enlevée par l'érosion, les argiles donnent des « mauvaises terres » stériles et ravinées ; c'est le cas, au Sud-Ouest de Misterbianco, dans la région des Siele ?. On peut citer ici comme gisements fossilifères les localités de Fossa della Creta (tout près de Catane), San Biagio, Salustro, cette dernière étant de beaucoup la plus riche. GC. — Enfin, plus au Sud, s'étend la grande plaine alluviale de Catane, ou du fleuve Simeto; elle nous empêche malheureusement de constater directement les rapports stratigraphiques des argiles subetnéennes avec les formations de la région de Lentini, que nous étudierons plus loin. ! Dans la plupart de ces localités, en particulier à Catira, à Nizzeti, à Licatia, on voit pointer, au milieu des argiles, des dykes de basaltes compacts connus sous le nom de « basaltes préetnéens », car ils se montrent partout inférieurs aux coulées etnéennes : les beaux prismes basaltiques d’Aci Castello et des îles des Cyclopes en sont des exemples célèbres, > [ci encore, nous retrouvons les basaltes préetnéens avec les dykes de Paterno et de Motta S. Anastäsia, ce dernier si bien étudié par M. de Lorenzo [84|, 158 RÉGION DE L’ETNA 1° La faune des argiles subetnéennes. _ Ces différents gisements ont été étudiés avec grand soin par M. Scalia, et j'ai eu le plaisir d'examiner à l’Université de Catane les belles collections réunies par lui, jointes aux récoltes anciennes de Gravina. La liste donnée ainsi par M. Scalia, pour l’ensemble de ces gisements subetnéens, est des plus riches, puisqu'elle com- prend 374 espèces ; 1l est vrai que la distinction des petites espèces a été poussée aussi loin que possible (par exemple, 6-7 espèces de Vermets, 21 de Rissoa, une trentaine de petits Trochidés, etc.). Sur ce total, les espèces caractéristiques sont peu nombreuses. Parmi les formes éteintes, on n'a que le Dentalium rectum L. et la Nassa musiva Br.; je ne puis, en effet, considérer comme espèces disparues caractéristiques, ainsi que le voudrait M. Scalia, Chlamys subclavatus Cantr., Cardium obliquatum Aradas, Scalaria frondiculæformis Brugn., S. Gregorioi de Boury, Buccinum striatum Phil. (voir 5° partie). Les deux formes qui restent, le Dentale et la Nasse, sont communes au Calabrien et au Sicilien; par contre, j'y ajouterai le Chenopus utlinge- rianus Risso, que j'ai récolté à Nizzeti, et qui, bien que voisin des Ch. pespelecani et serresianus, est néanmoins assez caractérisé; il abonde dans le Calabrien et semble déjà disparu au Sicilien. | Parmi les espèces septentrionales, nous trouvons : Chlamys septemra- diatus Müll. et var. subclavala Cantr. sp. et Dosinia lupinus Poli, var. ficaraliensis nov. ; il faut y ajouter en outre une espèce non franchement émigrée, mais néanmoins à affinités septentrionales, le Buccinum hum- phreysianum Bennet et var. sériata Phil. sp.!; toutes ces formes sont communes au Calabrien et au Sicilien. Üne pareille faune éxclut, en tout cas, comme l’a bien fait remar- quer M. Scalia, le Pliocène ancien. Mais elle ne nous permet guère de décider entre le Calabrien et le Sicilien, car je ne puis me résoudre à attribuer, à ce point de vue, ainsi que le voudrait cet auteur, une véritable importance au pourcentage des espèces éteintes, quand il s’agit de nuances faunistiques aussi délicates; seul, 1! Quelques fragments recueillis par moi à Nizzeti me paraissent se rapporter (?) à Cyprina islandica L. et Nucula placentina Lmk. : la présence de ces deux espèces, à la fois calabriennes et siciliennes, ne changerait d’ailleurs en rien nos conclusions! ARGILES SUBETNÉENNES 159 le Chenopus ultingerianus nous indiquerait plutôt du Calabrien. L'étude des conditions de gisement va nous confirmer dans cette opinion. 20 Conditions stratigraphiques de ces argiles. Le soubassement des argiles etnéennes est, comme nous l’avons dit, inconnu. Pourtant M. Scalia nous a fourni à ce sujet une indi- cation extrêmement intéressante et qui me paraît mériter d'être remise en lumière. D’après l'étude de matériaux de forage autrefois récoltés à Cannizzaro (localité située entre Catane et Aci-Castello) par Aradas, il a pu reconnaitre [203] dans cette localité la succes- sion suivante : 1° A la base, des bancs sableux et calcaires plus ou moins compacts contenant une riche faune de Coraux et de Brachiopodes identiques à celle du Pliocène ancien dans la province de Messine, où ce même facies se rencontre précisément, Je rappellerai entre autres : T'erebratula ampulla Br., sis melilensis Goldf., Z. peloritana Segu., Flabellum messanense Segu., etc., Loutes espèces à cachet nettement pliocène; 2° Au-dessus, des argules sableuses assez riches en Mollusques, et con- tenant comme espèces éteintes caractéristiques : Nucula placentina Lmk., Dentalium sexangqulum Br., D. rectum L., Turritella subangulalà Br, Nassa dertonensis Bell., Nassa semistriala Br., var. gigantula Bon. sp., N. musiva Br. La plupart de ces espèces sont spéciales au Calabrien et ne passent pas dans le Sicilien; quelques-unes même (/entalium sexanqulum, Turrilella subangulata) sont habituellement confinées dans le Pliocène ancien. On a donc là en tout cas l'indice d'une faune Cala- brienne inférieure!. Ainsi les argiles subetnéennes ne seraient que les fermes supe- rieurs de la série pliocène?, dont la partie inférieure serait déve- loppée au-dessous d’elles, sous le même facies que dans la province de Messine. Si nous nous éloignons de l’Etna vers le Nord, il va nous être 1 Ïl ne serait même pas impossible que la base de ces couches sableuses corres- pondit encore au Pliocène ancien à facies astien. >? C'était déjà l'avis de M. F, Wallerant [232] qui les a même considérées comme plaisanciennes, 160 RÉGION DE L’ETNA possible de retrouver les fermes inférieurs du Pliocène. Seguenza les a fait connaître à Calatabiano, entre Taormina et Fiumefreddo, et j'en décrirai ici la coupe d'après les renseignements qu'il donne ([207|, p. 99 et [206], p. 239) : | A la base, au-dessus des couches à gypse du Miocène supérieur, viennent des sables à Pectinidés (Zancléen de Seguenza) dont la faune est nettement pliocène ancienne ( Pecten flabèlliformis, P. Alessii, Spondylus crassicosla, Rhynchonella hiparlita, etc.); au-dessus, après des couches plus calcaires, à Amphistégines, viennent des marnes sableuses contenant une faune identique à celle du gisement de Gallina (Ouest) et choisie par | Seguenza comme type de son Astien à facies mixte; pour M. de Stefani, c'est déjà du « Postpliocène » ; nous l’avons considérée comme représentant la partie tout à fait supérieure du Pliocène ancien (voir plus haut, p. rot). Au point de vue paléontologique, on arrive ainsi tout près de la faune des couches argilo-sableuses de Cannizzaro, elle-même reliée à celle des argiles. subetnéennes. Ces dernières forment donc le sommet d’une grande série concordante dont la base est pliocène ancienne ; elles doivent dès lors être rattachées au Calabrien supé- rieur. À tous égards, par leur facies comme par leur faune et par leur position stratigraphique, ces argiles subetnéennes se montrent exactement équivalentes aux argiles calabriennes supérieures de Gravina et de la province de Catanzaro ; elles n’ont par conséquent rien de commun avec les argiles de Ficarazzi et encore moins avec le « carparo » (— couches à Strombes) de Tarente, auquel elles ont été parfois comparées. Le petit nombre des espèces éteintes et émigrées est dû ici à des circonstances purement accidentelles et en particulier au fait que cette faune subetnéenne ne se compose en général que d'espèces de petite taille, alors que ce sont au contraire les grandes coquilles qui fourniraient le plus de formes carac- téristiques. C'est un exemple de la: réserve avec laquelle il faut porter des jugements basés sur des caractères négatifs, comme l’est le pourcentage des espèces éteintes. : 3 Région de Lentini, au Sud de la plaine de Catane. Quand, après avoir traversé la plaine d'alluvions récentes de Catane, on se dirige, au Sud, vers la région de Lentini, on voit se ENVIRONS DE LENTINI 161 développer dans le Pliocène des facies tout à fait différents. La chaîne de collines qui s'étend de la gare de Lentini à l'embouchure du fleuve Simeto, séparant la plaine de Catane du Pantano (marais) de Lentini, a en effet la constitution suivante : A la base, ce sont des basalles et tufs basaltiques dépendant du massif volcanique de Lentini-Licodia, et notablement plus anciens que ceux de l'Etna. Les sédiments qui leur sont associés sont des calcaires en pla- quettes alternant avec des bancs marneux, en couches ondulées, et qui m'ont paru appartenir au Miocène supérieur. Au-dessus de ces basaltes et tufs basaltiques, vient un congloméral à gros blocs de roches volcaniques. Puis, formant la plus grande partie des collines, c’est une mollasse calcaire (tufo) bien blanche, riche en Bryo- zoaires et Brachiopodes, contenant des bancs plus ou moins sableux. Comme il arrive souvent dans de tels facies, la faune est assez peu variée et renferme peu d'éléments caractéristiques (voir la liste dans l’appendice, gisement dit de Valsavoja?). L'abondance des Térébratules du groupe ampulla prouve qu'il s’agit en tout cas de Pliocène, et la présence d’un Chlamys du groupe spinosovatus Sacco et de la Crania anomala Segu. nous indiquerait du Pliocène ancien. Je crois qu’on peut considérer ces mollasses calcaires comme équivalentes, à tous points de vue, à celles qui existent à la base du Pliocène appulo-garganique; nous y avons vu le développement d’une faune analogue et on y a rencontré en particulier la Crania anomala (voir p. 148). Les relations de ces couches avec les argiles subetnéennes, dont elles sont séparées par toute la plaine de Catane, ne peuvent être observées directement. Néanmoins, tout me porte à croire qu’elies sont bien inférieures à ces argiles ; elles représenteraient alors le prolongement des couches à Brachiopodes que M. Scalia a reconnues à la partie tout à fait inférieure de la coupe de Cannizzaro, Plus au Sud, les tranchées du chemin de fer, avant d'arriver à la station de Brucoli, montrent une autre coupe intéressante, décrite 1 Dans la tranchée du chemin de fer au Sud de la station de Lentini, ils appa- raissent au-dessus des basaltes; au contraire, sur le versant Nord des collines que nous étudions, dans le vallon au Sud-Ouest du Bivio Primo Sole, on voit ces mêmes couches recouvertes par les tufs basaltiques. > Dans beaucoup de collections, les fossiles provenant de cette région sont éti- quetés « Bivio Primo Sole », du nom d'un croisement de routes non loin de Valsa- voja, el où se voient en effet des. tranchées fossilifères. Univ. pe Lyon. — Gicvoux. 11 162 RÉGION DE L'ETNA autrefois par Fuchs et Bittner [136] et que J'ai eu l’occasion d'étudier moi-même. Les plus anciennes couches visibles, reposant directement sur le basalte, ne paraissent pas correspondre à la base du Pliocène : ce sont des dépôts zoogènes ou marno-calcaires (tufo) avec, à leur base, quelques galets basaltiques perforés. Ces couches plongent fortement vers le Sud; elles contiennent une faune extrêmement riche, dont on trouvera la liste dans l’appendice (gise- ment de Brucoli'); comme on le verra au premier coup d'œil, ce n’est certainement pas là du Pliocène ancien, l'abondance des Coraux, de la Terebratula minor Phil., rappelle quelque peu les calcaires à Brachio- podes du Pliocène ancien de la province de Messine, mais en revanche la rareté des espèces éteintes (je ne puis y citer que la Chama placentina Defr.? parmi les Mollusques) et la présence d’une forme nettement atlan- tique (le Chrysodomus sinistrorsus)indiquent un âge plus récent; je crois qu'on a là du Calabrien ; ces affinités calabriennes sont encore soulignées par l’extrème abondance des Asfarte sulcata et des Chlamys du groupe septemradiatus ; le caractère profond de cette faune est d’ailleurs accusé par des espèces intéressantes, telles que T'urbo peloritanus Cantr., Spon- dylus Gussonii Costa, Venus effossa Biv. Plus au Sud, et sans que l'on puisse voir nettement le contact, apparaissent, près de l’entrée d’un tunnel, des couches supérieures : ce sont des argiles plastiques bleues qui, au moment de ma visite, étaient entaillées par les travaux de réfection de ce tunnel et m'ont fourni ainsi la petite faunule suivante : Fusus vaginatus Crist. et Jan. Nassa semistriata Br., var. Edwardsi Fisch. sp. Natica millepunctata L. Dentalium rectum L:. Nucula sulcata Bronn. . Loripes lacteus L. La seule forme éteinte est le Dentale; ces couches me paraissent assi- milables aux argiles subetnéennes : elles seraient ainsi d'âge calabrien supérieur. 1 C’est probablement de ces mêmes ceuches que proviennent les espèces des « strati sabbioso-tufacei », citées par Fuchs et Bittner floc. cit., p: 202). 2 Et encore est-elle représentée par une variété spéciale de petite faille (voir 5e partie). ——————— CONCLUSIONS 163 Enfin, les couches les plus récentes sont des grès calcaires ou panchine à stratification entre-croisée, visibles en particulier au voisinage de la station de Brucoli et ne contenant que de rares fossiles (Mytilus cf. galloprovincialis, Pecten maximus, Chlamys varius, Patella sp.) ; ces couches littorales paraissent indépendantes de la série précédente et sont probablement quaternaires; on retrouve ces formations dans la région de Syracuse, où elles s'étendent sur de vastes surfaces et reposent directement sur le calcaire miocène qu'elles ravinent fort irrégulièrement. Ainsi, dans cette coupe de Brucoli, au-dessus des basaltes qui tiennent la place du Pliocène ancien, repose directement le Cala- brien. C'est ce dernier étage qui a, dans toute la région, Le plus grand développement ; c'est très probablement à lui qu'il faut rapporter le riche gisement fossilifère de Rizzolo (territoire de Francofonte), décrit par G. Seguenza, mais que je n'ai pas eu malheureusement l’occasion de visiter moi-même. 4 Conclusions. Si l'étude des argiles subetnéennes proprement dites peut être considérée aujourd'hui comme suffisamment poussée, en revanche nos connaissances sur les environs Nord et Sud de l’Etna auraient besoin d’être encore précisées. Mais il semble, néanmoins, que l’on puisse dès maintenant s’en faire l’idée d'ensemble suivante. Au Nord de l'Etna, c’est une série pliocène puissante el complète, à type subapennin ; les termes supérieurs, les alluvions de la plaine de remblaiement qui a marqué la fin du cycle pliocène, ne sont plus toutefois observables nettement, enlevés par l'érosion ou recou- verts de produits volcaniques. A la base de cette série viendraient se placer les couches de Calatabiano, où l'on passe du Pliocène ancien au Calabrien inférieur; puis viennent les épaisses argiles subetnéennes, appartenant au Calabrien supérieur. Vers le Sud, au contraire, on assiste à la fois à une réduction d'épaisseur de cette série pliocène, et spécialement du Pliocène ancien, et à l'apparition de facies mollassiques zoogènes : les « tufs calcaires » de Valsavoja-Bivio Primo Sole représentent ainsi l'ana- logue des mollasses du « Materin » de Gravina. Autrement dit, le 164 RÉGION DE GIRGENTI Pliocène de cette région Sud-Est de la Sicile parait se rapprocher du type appulo-garganique ; son étude offre aussi les mêmes diffi- cultés que nous avons rencontrées dans la terre d’Otrante. L’Etna, placé à la limite de ces deux zones, a donc une situation pareille à celle du Vulture : les argiles subetnéennes sont tout à fait comparables aux argiles du détroit des Pouilles qui, aux envi- rons de Venosa, servent aussi de soubassement au Vulture, comme les argiles subetnéennes supportent le cône de l’Etna. Poursuivant cette analogie et entrant dans le domaine de l'hypothèse, on pourrait même paralléliser les zones volcaniques encore plus exté- rieures à l'arc apennin; alors les basaltes du Capo Passero, à l’angle Sud-Est de la Sicile, recouverts par des calcaires à hip- purites, seraient peut-être les homologues du petit massif volca- nique dont un lambeau se retrouve associé au Trias de la Punta delle Pietre nere, près du Gargano, mais qui devait s'étendre autrefois beaucoup plus sur le domaine adriatique, car on retrouve des blocs roulés de ces roches volcaniques jusqu'aux environs de S. Severo 1. M. de Lorenzo [83] a exposé, avec sa largeur de vue habituelle, cette analogie de position du Vulture et de l'Etna. $ 2. — COTE SUD DE LA SICILE ? 1° La région de Girgenti Le principal intérêt de la région de Girgenti est de nous montrer une coupe continue partant du Miocène supérieur pour aboutir à un niveau dont la faune est évidemment plus récente que celle du Pliocène ancien. C’est ce qu'avait déjà fait ressortir 1 Où j'ai eu le plaisir de les observer en compagnie de M. Checchia-Rispoli, dans la région d'Apricena. 2 Au large de cette côte, l'ile de Lampedusa vient d'être étudiée récemment par B. Nelli [170]. Les formations récentes qu'on y rencontre sont des calcaires zoogènes;, très ingrats au point de vue paléontologique, car les fossiles y sont le plus souvent à l'état de moules. Après une étude soigneuse, cet auteur y a néanmoins reconnu du « Postpliocène »; la faune qu'il y cite est en effet calabrienne. On y verra comme formes éteintes caractéristiques : Pecten Planariæ Sim., var. Lampedusæ Trabucco, Arca syracusensis Mayer, Brocchia lœvis Brn., toutes formes cala briennes. Les trois autres espèces éteintes signalées par l’auteur me paraissent moins bien caractérisées. l STRATIGRAPHIE 165 Stôhr qui, en 1876, à publié une excellente étude [219] sur le Pliocène de Girgenti : depuis, si l'on met à part les données fournies par la carte géologique officielle au 1/100.000° et par la description générale de l'ing. Baldacci [6], nos connaissances sur la question n'ont pas été augmentées, même par le récent article de M. Craveri!, La région pliocène de Girgenti forme un vaste bassin largement ouvert vers la mer : les couches plongent vers l’intérieur du bassin, c'est-à-dire, en général, vers la mer : dans la région centrale de ce bassin, la seule que nous étudierons, deux bandes d'’affleurements gréseux donnent deux crêtes de collines à peu près parallèles au rivage : la plus haute porte la ville de Girgenti (330 m.) et se prolonge par la Rupe Atenea (351 m.); sur la deuxième crête, plus basse, s'élèvent les ruines solitaires des vieux temples doriques, dominant ainsi la vaste plaine couverte d'oliviers : temples de Jupiter, de la Concorde, de Junon. Rupe Atenea ’ LS 400 nc . dan GPRE 400 Fleuve S.Bragio 1 E Lin 200 j ; Z - LAN 2 D — = LOSS Z CRÈSLAE: - _ _10 sud oRe 4 5 2 1 Nord Fic. 18. — Coupe de la série pliocène. à Girgenti. 6. — Grès calcaires des Temples 5. — Argiles de Girgenti . . . . Pliocène supérieur. * EG A es M Echelle des hauteurs et >. — Marnes blanches à foramini- Pliocène ancien. desAongueurs,1/50:000! fères (Drubi), ; 1. — Formation gypso-solfifère . Miocène supérieur. Un excellent point de départ nous est fourni par les terrains de la zone gypso-solfifère (voir la coupe fig. 18), où le soufre est préci- sément exploité près de la station de Girgenti. Au-dessus viennent les marnes blanches crayeuses à foraminifères, où « trubi », que l’on rencontre presque partout en Sicile et Calabre à l'extrême base du Pliocène ; à ces trubi succèdent, par passages insensibles, des argiles plastiques bleues à facies plaisancien ; elles sont malheureu- sement très peu fossilifères, et je n'y ai guère observé que des Ostrea cochlear Poli et Dentalium rectum L.?; néanmoins, d'après ! Cf. M. Craveri, Il {ufo calcareo 0 breccia conchigliare dei Templi di Girgenti (Boll. d. Soc. geol. ital., t. XXIX, 1910, pp. 403-410). > Stôhr ([219], p. 458) a aussi reconnu la pauvreté en fossiles macroscopiques de ces assises, qu'il désigne par leur nom local de « creta ». 166 RÉGION DE GIRGENTI leur position stratigraphique et leur facies, il n’y a pas le moindre doute sur leur attribution au Pliocène ancien. | Par l'intermédiaire de couches un peu plus sableuses, ces argiles passent aux grès calcaires de Girgenti et de la Rupe Atenea, dont les abrupts dominent les pentes argileuses. Les couches plongent vers le Sud-Ouest, de sorte que, sur le versant des collines qui regarde la mer, le sol est formé, sur de grandes étendues, par la surface supérieure de ces grès. La mise à nu de cette surface supérieure a été en effet particu- lièrement facile, car elle était recouverte d’argiles. La superposition aux grès calcaires de Girgenti, d'un nouveau niveau argileux est indubitable et j'y insisterai quelque peu, car elle n'apparaît pas dans les coupes de Stôhr. Ë = 3. — Argiles devenues jaunes par altération. Ê == ë 2. — Argiles bleues de Girgenti: S = SSESS 9 1. — Grès calcaires jaunes de Girgenti. SSSR N. S FiG. 19. — Coupe montrant la superposition des argiles aux grès de Girgenti (extrémité E. du Corso Cavour.) Au moment de ma visite à Girgenti, cette superposition était très nettement visible dans de grandes tranchées pratiquées à l'extrémité Est du Corso Cavour (voir la fig. 19); le contact se faisait là par un banc pétri d’Astarles et de Corbules, et témoignait d’une continuité absolue entre les deux formations. Les mêmes faits sont encore visibles tout le long du chemin qui descend de l'Hôtel des Temples directement au vallon de S. Biagio, en passant près du nouveau cimetière : le chemin suit le contact même des grès et des argiles supérieures; les couches de base, marno-sableuses, de ces dernières, sont là extrêmement fossilifères. C'est enfin au-dessus de ces argiles, que j’appellerai les argiles de Girgenti, que vient une deuxième zone calcaréo-gréseuse, celle de la crête des femples. Son épaisseur ne dépasse pas 5 à ro mètres et sa superposition aux argiles est très nettement visible à l’extré- mité Est de la crête, le long du vallon de S. Biagio. Les bancs à: FAUNES 167 gréseux sont coupés à pic du côté de la mer et leurs débris s’ébou- lent sur les pentes, où l’on retrouve les argiles de Girgenti. Ces ) [e) dernières, plus ou moins recouvertes de calloutis quaternaires 3 1 s'étendent jusqu'à la mer. J'ai cru bon d'insister sur cette coupe et d'en donner des preuves de détail, car Stôhr l’a décrite d’une manière toute différente : cet auteur ne fait pas mention des argiles de Girgenti; pour lui, les grès calcaires (tufi) de la Rupe Atenea sont le prolongement de ceux des Temples, sans inter- position ni couverture de sédiments argileux. Sur ce point la question me paraît définitivement tranchée par la coupe visible sur la rive droite du vallon de S. Biagio. Par contre, Stôhr a distingué plusieurs assises qui se développeraient localement entre les argiles inférieures ou « crela » et les grès de Girgenti : ce seraient des sables argileux au sommet, des grès bleuâtres à la base; l’auteur insiste d’ailleurs sur le fait que tout cet ensemble de couches montre une continuité parfaite et que ses divers termes ne représentent probablement que des modifications locales de facies : il dit les avoir observées surtout à l'Ouest de Girgerli, région où je n'ai pas étudié de coupe assez continue. La succession des faunes. 1° Je ne parlerai plus ici des argiles inférieures ou « Creta » dont la faune est insignifiante, mais qui représentent certainement un facies profond du Pliocène ancien. 2° Au-dessus viendraient d’abord les couches inférieures aux grès de Girgenti, étudiées par Stôhr : ne les ayant pas observées moi- même, je ne puis me porter garant de l'exacte position stratigra- phique de leur faune ; toutefois, d'après les listes de l’auteur, cette faune se montre bien exactement intermédiaire entre la faune pliocène ancienne et celle des grès de Girgenti. Elle comprendrait en effet un total de quatre-vingt-cinq espèces, parmi lesquelles je relèverai, à côté de nombreuses formes que nous retrouverons dans les couches plus récentes, les espèces caractéristiques suivantes : Turritella subangulata Br., Pleurotoma cataphracta Br., PI. dimidiata Br. Ce sont des coquilles essentiellement pliocènes anciemnes : leur coexistence ici avec la Cyprina islandica L.1 nous montre que ces 1 Citée par Stôühr, sous le nom de Cyprina islandicoïdes Lmk. Stühr indique expressément que la coquille récoltée par lui à Girgenti est vivante dans les mers 168 RÉGION DE GIRGENTI couches appartiennent à une zone de passage entre le Pliocène ancien et le Calabrien. | 3° Venons-en maintenant aux grès de Girgenti : les fossiles que j'y ai récoltés proviennent surtout de leur partie supérieure, et même des couches tout à fait inférieures des argiles de Girgenti. Les localités précises où je les ai ramassés sont : 1° les grès de l’extré- mité Sud-Orientale de la ville (Corso Cavour) et les argiles qui dans cette région les recouvrent immédiatement ; 2° les couches de passage des grès aux argiles sur le chemin qui descend vers le ravin de S. Biagio; 3° une anciegne carrière dans le massif gréseux du Monte Crasto, au Nord de Porto Empedocle, massif qui m'a paru (comme aussi à Stôhr) le prolonge- ment direct de la crête de Girgenti. Je ne vois pas la nécessité de distinguer les faunes de ces divers niveaux, lesquelles sont en effet tout à fait homogènes. Je n’y retiendrai comme à l'ordinaire que les formes caractéris- tiques ”, soit éteintes, et par conséquent à cachet archaïque, soit « émigrées du Nord », à cachet récent. Ce seront respectivement : À. — Espèces éteintes. — Arca mytiloïdes Br., Chama placen- tina Defr., Nucula placentina Lmk., Tapes rhomboïdes Penn., var. antiquata nov., Cardila rhomboïdea Br., var. inermis Miche- lotti, Cardium mullicostatum Br., Lucina cf. bellardiana May. Chenopus uttingerianus Risso, Turritella tornata Br., Turritella vermicularis Br., Cancellaria hirta Br., Cerithium varicosum Br., Nassa clathrala Born, var. ficaratiensis Mts. sp., Dentalium rectum L., Dentalium sexangulum Br. Je noterai en outre l'abondance des Æchinolampas Hoffmanni Desor. Ces formes, dont un certain nombre sont déjà citées dans la liste de Stôhr, se rencontrent toutes au Monte Mario et la plupart ne dépassent pas le Calabrien inférieur. B. — Espèces émigrées. — Arcopagia crassa Pennant, Cyprina islandica L. * | D'après Stôhr, il faudrait en outre y ajouter : Panopæa norvegica du Nord, il s’agit donc bien de la Cyprine, et non, comme on pourrait le croire; de la Venus (Amianlis) islandicoïdes Lmk., forme pliocène ancienne et éteinte. 1 La liste complète de toutes les coquilles que j'ai récoltées dans ce niveau des. grès de Girgenti est donnée dans l'appendice, Voir aussi les listes de Stôhr., FAUNES É 169 Spengler, citée par cet auteur sous le nom de Saxicava norvegica Sp. On ne peut trouver de faune plus caractéristique pour le Cala- brien inférieur. 4° La faune des argiles de Girgenti est très analogue à celle des grès, auxquels je les ai réunies pour les couches inférieures ; dans les couches supérieures, je n'ai récolté de fossiles que dans deux localités, en dessous du temple de Jupiter, et près du passage à niveau de la route qui mène des temples à Porto Empedocle: j'y noterai comme espèces caractéristiques : Cerithium varicosum Br., Nassa clathrata Born, var. ficaraliensis Mts. sp., Nucula placentina Lmk., Cypring islandica L. Les formes éteintes sont, comme on le voit, devenues beaucoup plus rares, mais le Cerithium nous indique que nous sommes toujours dans le Calabrien. 5° Enfin les couches les plus récentes de notre coupe sont les grès des Temples, que je regarderai encore comme du Pliocène supé- rieur, et non comme du Quaternaire, ainsi que l'a indiqué M. Bal- dacei [6] ; car, à leur partie inférieure, 1ls passent en continuité, par l'intermédiaire d'assises sableuses, aux argiles de Girgenti. Leur faune est assez mal conservée (voir la liste dans l’appendice): je n’y noterai que la Cyprina islandica L., et le Dentalium serangulum Br. ; ce dernier indiquerait aussi un âge calabrien. FiG. 20. — Coupe du ravin de Pancamo, près Porto Empedocle. LA Caloutistavéchuitres MN Ru Quaternaire. 3. — Grès calcaires à Echinolampas . PP: TOO 2. — Grès sableux à Cyprina islandica. . . , . . Pliocène supérieur. 1. — Argiles bleues à Dentalium rectum . \ C'est probablement à ce même niveau que viendraient se placer des couches très fossilifères que j'ai étudiées aux environs de Porlo Empe- docle, dans le ravin qui passe près du mot « Pancamo » sur la carte au 1/100 000°. On a là un grand plateau, dont l'altitude varie de 60 à 170 RÉGION DE TERRANOVA 8o mètres, et dont on peut étudier le soubassement dans les parois escarpées du ravin (voir la coupe fig. 20). A la base, des argiles bleues à Dentalium rectum L., très peu fossili- fères, représentent probablement les argiles de Girgenti; au-dessus, des assises plutôt sableuses en bas, plutôt calcaires en haut, renferment une faune très riche : Cyprina islandica L. domine dans les couches infé- rieures, Echinolampas Hoffmanni Desor et Turritella lornata Br. dans les couches supérieures. La liste que j'en reproduis plus loin (voir l’appendice) nous montre comme espèces caractéristiques : Turritella tornata Br., Nassa clathrata Born, var. ficaratiensis Mis. sp., Cerilhium varicosum Br., Chenopus uttingerianus Risso, Nucula placentina Lmk., Chama placentina Defr., Cyprina islandica L. Comme on le voit, c’est une faune identique à celle des argiles de Girgenti, c'est-à-dire calabrienne supérieure. Au-dessus de ces dernières assises pliocènes, et après un ravinement, viennent des couches sablo-argileuses très littorales avec de gros galets et des huîtres du groupe edulis : ces couches sont évidemment contempo- raines de la formation du plateau, donc quaternaires, et correspondent à une ligne de rivage de 80 mètres environ. En résumé, le grand intérêt de cette coupe de Girgenti est de nous montrer une série continue de couches fossilifères allant du Pliocène ancien au Calabrien supérieur: nous trouvons en parti- culier, dans les grès de Girgenti, une faune tout à fait identique à celle du Monte Mario et de Vallebiaja ; au point de vue stratigra- phique, l'attribution de ces couches au Pliocène paraît très natu- relle : il me semble qu'il y a quelque chose de choquant à voir, sur la carte géologique au 1/100.000°, marqués en Quaternaire, ces grès, qui, relevés à près de 45 degrés, forment l'ossature d’une chaîne de collines hautes de plus de 300 mètres! 4 2° La Région de Terranova. Je ne parlerai ici de cette région que parce que j ai eu l’occasion d’y récolter quelques fossiles (voir la liste dans l’appendice) : tout le 1 L'interprétation adoptée dans cette carte géologique conduit d'ailleurs à une contradiction : car, tandis que les grès de Girgenti et de la Rupe Atenea sont mar- qués q, les grès des Temples, qui leur sont supérieurs, sont indiqués au contraire en p3 (sables jaunes du Pliocène supérieur). ENVIRONS DE SCIACCA 171 bassin de Terranova, quand on a franchi la plage sableuse actuelle, souvent dominée par des dunes très élevées (30 mètres), se montre constitué par des argiles bleues plastiques; elles paraissent se continuer jusque sur les bords du bassin, où on les voit passer aux « trubi » et reposer finalement sur la formation gypso-solfifère du Miocène supérieur. Toutefois je n'ai pu faire ici aucune observation stratigraphique intéressante : je me bornerai à constater que ces argiles bleues, dans le centre du bassin, sont certainement cala- briennes, comme le montre la faune récoltée par moi sur les pentes Sud du Monte Lungo, à l'Ouest de Terranova. On y notera en effet comme formes éleintes : Dentalium rectum L., Cerithium varicosum Br., Aporrhaïs utlinge- rianus Risso; ces deux dernières sont exclusivement pliocènes et ne se prolongent pas dans le Sicilien. Comme forme seplentrionale, j'attirerai l'attention sur le Chrysodomus sinistrorsus Desh., dont j'ai recueilli des fragments indubitables. Comme à Brucoli!, nous voyons donc cette espèce apparaître ici dès le Pliocène supérieur. Il est donc probable que ces argiles de Terranova (recouvertes d’ailleurs par du Quaternaire dont nous parlerons plus loin) sont équivalentes aux argiles subetnéennes et aux argiles de Girgenti. 30 Les cnvirons de Sciacca. Les dépôts récents des environs de Sciacca ont été très bien étudiés par M. p1 SreFANO | 121}. Aussi en parlerai-je ici, bien que je n'aie pas eu occasion de les visiter personnellement. Le dévelop- pement du Pliocène dans ce bassin de Sciacca rappelle d’ailleurs trait pour trait celui que nous venons d'examiner dans le bassin de Girgenti. Le Pliocène ancien est représenté ici, non seulement par son facies plaisancien d'argiles blanches ou bleues, très pauvres en coquilles, mais encore par un facies littoral de mollasse calcaire astienne, où l’on voit apparaître la faune caractéristique de cet étage, par exemple : Chlamys latissimus Br. C. scabrellus Lmk., Flabel- 1 Et à S. Cristina d'Aspromonte, d'après G. Seguenza (cf, p. 50). 172 OUEST ET CENTRE DE LA SICILE lipecten flabelliformis Br., Spondylus crassicosta Lmk., Rhyncho- nella bipartita Br. : l'apparition de cette faune est liée évidemment au facies, et elle est intéressante à noter, car nous ne l’avions pas trouvée à Girgenti. Au-dessus, vient une faune du Calabrien inférieur ; les couches qui la Léherraent sont des sables argileux, qui, d’après M. di Ste- fano, reposeraient en « discordance » sur le Pliocène ancien. Je serais plutôt porté à croire qu'il s’agit de simples discordances appa- rentes de stratification, comme nous sommes habitués à en rencon- trer au passage d’un facies à un autre : Les coupes de l’auteur sont d’ailleurs très difficiles à interpréter à ce point de vue. La faune est, en tout cas, absolument typique comme Calabrien inférieur, et tout à fait pareille à celle du Monte Mario et de Vallebiaya. M. di Stefano distingue ensuite des grès calcaires ne contenant plus que très peu d'espèces disparues : d’après ses listes de fossiles, il est difficile de décider s’il s’agit de Calabrien ou de Sicilien, car toutes les espèces sont communes avec les couches de Palerme. Mais il semble bien que ces assises, à facies encore profond, soient, stratigraphiquement, intimement liées aux précédentes. Elles doivent être comparables aux grès des temples de Girgénti et de Porto Empedocle (ravin de Pancamo); je les attribuerai donc encore au Pliocène tout à fait supérieur. Enfin, c’est dans le Quaternaire qu'il faut, par contre, ranger les poudingues, graviers et sables à Pectoncles de la Tour de Mahàäuda et du Piano del Fossillo : nous en reparlerons dans un chapitre ultérieur. P2£ 2 | RÉGIONS OCCIDENTALE ET CENTRALE DE LA SICILE A l'Ouest de Sciacca, dans la région de Porto Palo, Castelvetrano, Mazzara del Vallo, Marsalà, les vastes plateaux qui bordent la côte montrent un grand développement du Pliocène supérieur. Mais l'étude en est particulièrement ingrate à cause de la rareté des coupes naturelles et de la monotonie des facies. Le sol de tous ces plateaux est, en effet, constitué par des mollasses calcaires (tuñi) contenant surtout des Brachiopodes, des Æchinolampas, et des formes banales de Pectinidés: il est impossible de mettre une OUEST ET CENTRE DE LA SICILE 173 limite entre le Pliocène supérieur et le Quaternaire qui existe cer- tainement aussi le long de la côte; je me borne à rappeler l'inter- prétation admise sur la carte géologique par l'ingénieur Baldacei [6 |, qui s'est simplement basé sur l'alfitude et a considéré, par analogie avec ce quise passe sur la côte Nord, comme pliocènes tous les pla- teaux élevés de plus de 80 mètres. Au-dessous de ces « tufs » cal- caires, la carte montre des affleurements d'argiles pliocènes, appa- raissant dans Je fond des vallées : c’est le cas pour la vallée du Fiume Marsala, et j'ai pu le constater aussi moi-même pour la vallée du Fiume Modione, près de son embouchure. Il est probable que les grès calcaires du Pliocène supérieur viennent partout plonger doucement vers la mer, et disparaître sous les mollasses quater- naires, sans que le contact soit marqué par d'importants ravinements. Ici, comme dans la terre d'Otrante, le rôle de l'érosion et de la sédi- mentation clastique est réduit au minimum, et la stratigraphie détaillée des dépôts récents en devient très difficile. Dans la région centrale de la Sicile, la série pliocène se rapproche plus du éype subapennin. Au-dessus des « trubi » et des argiles plai- sanciennes, viennent des mollasses calcaires (tufi calcarei ou breccie conchigliari), probablement équivalentes aux grès de Girgenti, surmontées d'assises sableuses ou gréseuses. Cet ensemble à une épaisseur de plusieurs centaines de mètres et recouvre une grande partie du centre de l’île, montant ainsi Jusqu'à 1.000 mètres d’alti- tude. Les faunes n'y ont d’ailleurs guère été étudiées au point de vue stratigraphique : on peut citer seulement les travaux de Brugnone |25 |, Baldacci et Mazzetti |[7|, Travaglia|224|, Néanmoins, il est hors de doute dès maintenant que la partie supérieure de cette série doit être attribuée au Calabrien inférieur : les listes données par Travaglia /loc. cit., p. 248 et 505) pour les environs de Gram- michele (près Caltagirone), sont très probantes à cet égard. De plus, il semble bien que ces couches supérieures contiennent aussi des émigrés du Nord; j'ai pu voir, dans les collections du Labora- toire de Géologie de la Sorbonne, des Buccinum undatum provenant de Caltagirone. Au reste, n'ayant pas visité moi-même ces régions, e ne puis que renvoyer, pour plus de détails, aux travaux précités. Je n'en retiendrai qu'un fait, c’est qu'au Calabrien inférieur, la plus grande partie de la Sicile était encore sous les eaux marines, 174 COTE NORD DE LA SICILE $S 4 — COTE NORD DE LA SICILE La chaine cristalline des Monts Péloritains, puis les massifs secon- daires et éocènes des Madonie et des Caronie, dominent ici presque directement la mer ; de sorte que les sédiments pliocènes n'ont pas une grande extension et ne sont conservés, le long de cette côte Nord de la Sicile, qu'en lambeaux isolés et insignifiants. La plupart du temps, d’ailleurs, il s’agit de Pliocène ancien : tel est le cas, par exemple, pour les marnes blanches à foraminifères (trubi), qui, sur le versant Nord-Ouestdes Péloritains, ou entre Cefalù et Termini-Imerese, servent souvent de soubassement aux terrains quaternaires (voir la coupe, fig. 28); tel est le cas aussi à Milazzo où le Pliocène ancien, réduit à une croûte de Calcaire à polypiers revétant les roches cristallines, ou à des lambeaux de marnes jaunes à Foraminifères et à Brachiopodes, est raviné par le Quaternaire marin (voir la coupe, fig. 30). Je dirai aussi quelques mots du Pliocène d'Altavilla, à l'Est de Palerme (voir la coupe, pl. II, fig. 2 !). Le fameux gisement dit d’'Altavilla, dont les fossiles sont répandus dans toutes les collections et parfois indiqués bien à tort comme « siciliens », se trouve situé dans la contrée Cannamasca, sur la rive gauche du Torrente S. Michele; on voit là des assises sa bleuses, plus argileuses à la partie inférieure et extrêmement fossi- Lifères : la faune est absolument identique à celle d’Asti, et les grosses espèces, Strombes, Cérithes, Turritelles, Pectens, etc., prédominent. Ces couches reposent directement sur les Calcaires secondaires dont elles contiennent même des blocs à peine roulés: la faune indique cependant une certaine profondeur ; on se trouve donc là au pied d'une falaise plongeant dans la mer pliocène, tandis que, plus au large, se déposaient les marnes à foramimfères ou « trubi » que l’on voit apparaître à la base du Pliocène, tout près de là, à Torre Colonna. Ces sables astiens continuent à se développer . 1 Voir aussi G. Seguenza ([207], t. IV, p. 40); la coupe donnée par cet auteur (fig. r, pl. I) pour le Pliocène des environs de Palerme est bien difficile à interpréter. GISEMENT D’ALTAVILLA 179 tout le long du Torrente S. Michele, et ils sont partout très fossili- fères. | En arrivant près de la mer, et, précisément, au pont sur lequel passe la grande route littorale, on voit ces sables plonger sous des bancs épais de grès calcaires, inclinés vers la mer ; la faune parait ici changer: la roche se charge d’Amphistégines, de manière à prendre le facies de « Calcaire à Amphistégines » que nous sommes si habitués à rencontrer dans les termes supérieurs du Pliocène ; en même temps, la faune se réduit presque à des Pectinidés et, au lieu des types disparus, Flabellipectens et Chlamys scabrellus, que l’on pouvait récolter en abondance dans les sables inférieurs, on ne voit plus ici que des formes vivantes: Chlamys opercularis L., Pecten jacobæus L. ; il est donc possible que l’on ait là déjà affaire aux termes supérieurs du Pliocène, au Calabrien!. En tout cas, comme nous le verrons, cette série pliocène est recouverte en discordance par les dépôts quaternaires de la plaine côtière d'âge sicilien. Mais c'est surtout sur le versant Nord-Ouest des Péloritains que nous allons trouver du Pliocène supérieur fossilifère bien typique. Là, en effet, dans les régions de Gesso, Barcellona, Castroreale, Patti, Naso, etc., apparaissent les termes supérieurs de la série plio- cène, sous forme de sables ou grès plus ou moins calcaires ou argi- leux. On trouvera des détails à ce sujet dans les travaux de Seguenza [207] et de Cortese |[53|, mais nous manquons encore de coupes détaillées montrant des successions de faunes bien nettes. Aussi je me bornerai à attirer l'attention sur les couches supérieures de Naso, pour lesquelles Seguenza a donné floc. cil., p. 101) une très importante liste de fossiles. Dans ce gisement de Naso, manquent les espèces caractéristiques de la faune pliocène ancienne: les Pectinidés, par exemple, ne sont représentés que par des formes vivantes: mais il y a suffisamment d'espèces disparues pour que nous puissions, avec Seguenza, consi- dérer cette faune comme tout à fait équivalente à celle du Monte 1 La question, pour être tranchée, demanderait d'ailleurs une étude paléontolo- gique détaillée des divers niveaux; car, aux environs de Torre Colonna, ce facies de grès jaune descend, en certains points, jusque dans le Pliocène ancien, comme le montrent les fossiles (Flabellipectens, Clypéastres) que j'y ai récoltés. 176 _ COTE NORD DE LA SICILE Mario, c'est-à-dire du Calabrien inférieur. Ainsi nous y retrouvons Cerithium varicosum Br., Turritella tornata Br., Turrilella subangulata Br., qui en excluent l’âge sicilien. En même temps, il s'y associe les « émigrés du Nord », caractéristiques du Calabrien : Buccinum undatum L., Buccinum humphreysianum Benn., Natica Montacuti Forbes, Cyprina islandica L. Il va sans dire que ces couches fossilifères de Naso sont entië- rement indépendantes de la terrasse quaternaire, d'âge silic'en, qui court tout le long de la côte Nord de la Sicile: elles se montrent, à tous points de vue, équivalentes aux couches calabriennes du Faro de Messine (contrée Mortelle) et de Gravitelli, qui leur corres- pondent sur le versant Sud-Est de la chaîne cristalline. TROISIÈME PARTIE DESCRIPTION RÉGIONALE DÉTAILLÉE DU QUATERNAIRE DANS L'ITALIE DU SUD CHAPITRE PREMIER LA SICILE S 1. — LE SICILIEN DE PALERME AU POINT DE VUE STRATIGRAPHIQUE Les formations quaternaires si développées dans la région de Palerme, sont depuis très longtemps célèbres. Cela tient à leur grande richesse paléontologique, grâce à laquelle les fossiles « sici- liens » de Palerme sont répandus dans l'Europe entière. La plupart des espèces qu’on y rencontre ont été citées et décrites par Philippt dans son € Enumeratio » [190], mais toujours sans indication précise de localités et de niveaux; telles quelles, toutefois, les listes de Philippi ont pu servir de base à beaucoup de considérations générales. Mais, actuellement, toutes nos connaissances précises sur la faune qua- ternaire de Palerme sont dues à l'éminent conchyliologiste palermitain, le marquis Allery di Monterosato : avec une patience admirable, il a réuni, des divers gisements du bassin de Palerme, une fort importante collection à laquelle est venue récemment s'ajouter celle provenant des récoltes de l'abbé Brugnone; enfin, possesseur également d'une série magnifique de coquilles vivantes méditerranéennes et exotiques, il a pu faire, dans trois publications successives [114-116], une étude complète et rationnelle de la faune sicilienne, en en mettant bien en évidence les formes caractéristiques. UNIv, DE LxoN. — GiGNoux. 12 178 SICILIEN DE PALERME Mais, en revanche, si le Sicilien est certainement un des types d'étages les mieux connus au point de vue paléontologique, il n'en - est pas de même au point de vue stratigraphique, et, quand on cherche à se documenter à ce sujet, on s'aperçoit bien vite de cette pauvreté. G. Sequenza, dans son Etude sur les formations pliocènes de l'Italie méridionale [207], ne consacre guère que quelques mots au Quaternaire de Palerme; l'ingénieur Baldacci n'en parle qu'inci- demment dans sa Description géologique de la Sicile [6]; des ren- seignements plus nombreux sont contenus dans une petite note due au marquis À. de Gregorio [78]; enfin, en 1909, le gisement fossilifère de Ficarazzi ayant été visité par la Société Géologique Italienne, les principaux faits observés au cours de cette excur- sion furent relatés soigneusement par M. Gemmellaro [139]. Dans les indications qui vont suivre, j'utiliserai ces diverses publications, ainsi que les observations faites par moi-même en 1907 et 1908 et dont certaines ont déjà été publiées [142]. 1° Indications topographiques générales. Le bassin de Palerme est une grande plaine doucement inclinée vers la mer et dont l'altitude, en général comprise entre 30 et 4o mètres, ne dépasse pas 8o mètres environ, des terrains quater- naires marins la constituent entièrement ; la belle végétation qui la recouvre la fait apparaître comme une mer verdoyante (Conca d'Oro) dominée par les rochers nus et stériles des montagnes secondaires environnantes : au Sud, c’est la masse abrupte du Monte Grifone (777 m.); à l'Ouest, c’est le massif plus abordable des collines de Monreale, puis le Monte Cuccio (1.050 m.) et le Castellacio (959 m.). Enfin, comme une île escarpée dans la plaine quaternaire, s'élève, au Nord de Palerme, le fameux Monte Pelle- grino (600 m.). : Les formations quaternaires, qui remblaient le fond de cette vaste plaine, ne sont d’ailleurs pas foutes contemporaines : les unes sont d'âge récent, peu fossilifères et ont, jusqu'à présent, peu retenu l'attention; nous les étudierons en détail plus loin et nous montrerons qu’elles correspondent, en grande partie, aux couches à Strombes. Les autres, plus anciennes, contiennent les niveaux fossilifères pour lesquels a été créé le type du Siciien. MONTE PELLEGRINO 179 Ce sont ces dépôts siciliens dont nous allons examiner main- tenant les divers facies. 20 Les divers facies du Sicilien de Palerme, Les formations quaternaires du bassin de Palerme montrent, dans les différentes parties de -ce bassin, des facies divers qui s'expliquent fort bien, si on considère ces formations çomme déposées au fond d'une mer dont le niveau dépassait de 9() mètres environ celui de la mer actuelle; nous verrons que cette hypothèse est entièrement d'accord, d’ailleurs, avec tous les faits observés. Je commencerai par examiner les deux facies les plus importants au point de vue de leur richesse en fossiles et qui correspondent préci- sément aux deux gisements les plus célèbres. A. — Le facies zoogène du Monte Pellegrino. Le Monte Pellegrino était entièrement entouré par la mer Sici- henne, au milieu de laquelle 1l constituait une île calcaire bordée de falaises abruptes. Et nous retrouvons aujourd'hui, tout autour de lui, une ceinture continue de dépôts zoogènes ; les apports détritiques étaient évidemment réduits là au minimum, puisque aucun cours d’eau ne pouvait exister dans cette île; la sédimentation y était donc exclusivement zoogène, donnant des mollasses calcaires presque entièrement composées de débris d'organismes, Bryozoaires, Lamel- hibranches richement ornés, petits Brachiopodes néritiques, ete. Les roches ainsi constituées sont désignées par les géologues italiens sous le nom assez impropre de fufi calcarei, nom qui correspond assez exactement à notre appellation de « mollasse calcaire ». On en voit un magnifique développeinent dans le gisement célèbre dit « le Falde del Monte Pellegrino » ou, par abréviation, Monte Pellegrino. Les carrières qui ont fourni, en grande partie, cette faune célèbre se trouvent sur les pentes (falde) méridionales du Mont, au Nord de Palerme. De grandes tranchées, où la roche quaternaire est exploitée à la scie, montrent ici lacoupe fig. 21 ; sur presque toute la hauteur de ces tranchées, on voit un calcaire zoogène très tendre, blanc pur, formé principalement par l'accumulation de rameaux de Bryozoaires remarquablement conser- 180 SICILIEN DE PALERME vés : les fossiles y sont relativement fréquents, mais isolés dans la masse. Au milieu on remarque un banc gréseux jaunâtre, où les fossiles sont généralement à l’état de moules : les Pectinidés. (Pecten jacobæus L., Chlamys opercularis L.) y abondent : ce banc correspond à une phase d’apports sableux. Enfin, la mollasse calcaire sicilienne est recouverte, par ravinement, de formations marines beaucoup plus récentes, que nous étudierons plus loin. £ 4 Postsieilien 26%. * 22 tB Le 14 ee 1 Molaste cacare Âicélienne 10 men em=e mm mn me mm mem em —m— Fr, 21. — Coupe de la carrière des Falde del Monte Pellegrino, près Palerme (gisement sicilien dit du Monte Pellesrino). 4. — Croûtc calcaire à Helix, Bulimes, débris de Cladocores remaniés. Post-Sicilic 3. — Calcaires à Cladocora cespitosa et gros Turbo rugosus. o8t-Sicilien $ ; __ Croûte de calcaire à Lifhothamnium avec fragments anguleuxde calcaires ; secondaires. Sicili ( 1. — Mollasse calcaire blanche à Bryozoaires : en À B, banc gréseux jaunâtre Len) à Pectinidés et moules de fossiles. Ce facies zoogène se retrouve tout autour du Monte Pellecrino : on le voit à Acqua Santa, à l'Arenella, au hameau de Vergine Maria; dans ces diverses localités, 1l est plus ou moins exploité et toujours très fossilifère. Sur le versant Nord du Mont, dans la contrée Allauro, il est beaucoup moins développé, mais on le retrouve en bancs épais à Partanna, Mondello et sur tout le versant occidental du Mont. A l'extrémité Est du bassin de Palerme, le Monte d'Aspra, au Nord de Bagheria, devait occuper dans la mer Sicilienne une position tout à fait analogue à celle du Monte Pellegrino : c'était aussi une ile. Aussi retrouvons-nous sur ses bords un facies iden- tique : le Sicilien y est exploité à Aspra et à Solanto, dans de belles carrières ; c’est également un « tufo » calcaire tendre, formé de Bryozoaires et de débris de coquilles, ayant ici un facies un peu moins profond, car les gisements sont, en général, à des altitudes supérieures à celles des exploitations du Monte Pellecrino. FICARAZZI 181 B. — Le facies argileux de Ficarazzi. À peu près à égale distance entre la Montagne d’Aspra et le Monte Pellegrino, se développe, au voisinage de la côte, entre les bourgades de l’Acqua dei Corsari et de Ficarazzi, un facies du Sici- hen tout à fait différent. Ce sont d’épaisses argiles bleues, utilisées dans diverses grandes exploitations pour la fabrication des tuiles. Les rapports stratigraphiques entre ces argiles de Ficarazzi et les mollasses calcaires du Monte Pellegrino sont malaisés à préciser en l'absence de coupe continue entre ces deux localités. Nous verrons qu'au point de vue paléontologique la contemporanéité de ces formations n'est pas douteuse; elles apparaissent bien comme deux facies différents du seul et même étage sicilien; ce fait n’a jamais été, je crois, contesté par aucun géologue. G. Seguenza, dans la coupe qu'il a donnée du bassin de Palerme ({[207], 1853, p. 4o et pl. I, fig. 1), considère les argiles comme recouvertes par les mollasses calcaires, mais fait bien remarquer qu'il est impossible de voir là deux étages distincts. La coupe la plus célèbre de ce facies argileux est celle qu'on peut observer dans la propriété Puleo (c'est le lieu dit « Fabbrica Pideo » sur la carte topographique au 1/50.000°), un peu à l'Est de l’Acqua dei Cor- sari; elle a été décrite récemment avec beaucoup de détails par M. Gem- mellaro ([139], p. czv) et nous réservons pour plus tard l'étude des couches les plus récentes. Quant au Sicilien, il apparaît constitué ici par dé puissantes argiles bleues, très plastiques à la base, plus sableuses au sommet ; les fossiles y sont dans l’ensemble assez rares; mais vers la base de l’exploitation, on voit un banc sablo-argileux, parfois durcei en grès, et formé presque exclusivement par l'accumulation des coquilles. C’est celle couche, épaisse de 60 centimètres environ, qui constilue le fameux gisement fossilhfère de Ficarazzi!. Elle correspond donc à une phase assez courte durant laquelle, grâce à un changement du régime des courants, la sédimentation sableuse est venue momentanément se substituer à la sédimentation argileuse. ! Voir dans le frailé de géologie de M. Haug, la pl. CXXXIV, où est reproduit un bloc de ces sables fossilifères : cet échantillon a été, sur ma demande, aimabie- ment envoyé aux Collections du Laboratoire de Géologie de Lyon par M. G. Di Ste- fano; le cliché a été fait par M. F, Roman, 182 SICILIEN DE PALERME 8° 6 4 Argéles bleues . rgiles sableuses :banc fossilifère 5 Argiles bleues ne Fc. 22, — Coupe de la carrière Puleo : gisement fossilifère Shen de Ficarazzi, près Palerme (en partie d'après M. Gemmellaro). Les couches (grès et te) surmontant les argiles, se montrent indépendantes de ces dernières et sont d'âge post-sicilien. Ce facies argileux et argilo-sableux de Ficarazzi, localisé près de la mer actuelle, se trouve ainsi dans la partie la plus profonde actuellement visible de l’ancien golfe sicilien, et aussi dans la partie la plus éloignée des anciens rivages et des îles du Monte Pellegrino et du Monte d’Aspra. G. — Facies sableux littoraux. Quand, en effet, on se rapproche de ces anciens rivages, on voit le Sicilien devenir petit à petit plus sableux, de manière qu’on retrouve les anciennes plages. C'est ce dont on peut bien se rendre compte, par exemple, en remontant la petite vallée d'érosion creusée dans la plaine par le Fiume Oreto; dans sa partie inférieure, cette vallée traverse des argiles sableuses jaunâtres très fossilifères ; on y retrouve la même faune qu'à Ficarazzi : c'est le gisement désigné par M. di Monterosato sous le nom de Fiume Oreto. Mais, en con- tinuant vers l’amont, le Sicilien n'est plus représenté que par des sédiments gréso-calcaires ne renfermant plus que des Pectinidés ou des huîtres peu caractéristiques ; on les voit bien, par exemple, sur les berges du fleuve, près du Molino-Nuovo, un peu en aval du village de la Grazia; à la partie supérieure, leur facies devient de plus en plus grossier et, au niveau de la plaine, à 70 mètres environ, on a des conglomérats tout à fait côtiers. Plus en amont encore, au niveau du Ponte della Grazia, ce facies grossier envahit presque toute la série; au-dessus des « argille scagliose » éocènes, le Siciien s y réduit à une faible épaisseur de grès et de Pie FACIES LITTORAUX 183 mérats, s'élevant à la hauteur de 8o mètres environ. On est là sur l'ancien rivage de la mer Quaternaire et, à partir de l'altitude de 90 à 100 mètres, on ne voit plus que les célèbres fravertins de la Grazia, à empreintes végétales, déposés par les sources qui surgis- saient à la limite de l'Eocène imperméable et des montagnes calcaires. Dans une grande partie de l’ancien golfe Quaternaire, le Sicilien est ainsi à l’état de grès calcaires plus ou moins sableux, avec nombreux Pectinidés /Pecten jacobæus, Chlamys opercularis, C. varius, etc.); c'est le cas, par exemple, dans le quartier dit Mezzo-Monreale, au Sud- Ouest de Palerme, où M. le marquis de Gregorio a bien voulu me mon- trer les beaux affleurements existant dans sa propriété. Plus au Nord, on retrouve un facies analogue entre le Monte Pellegrino et le massif du Monte Cuccio; dans la région de S. Lorenzo, les tranchées du chemin de fer en montrent de fort belles coupes. Enfin un autre exemple très inté- ressant nous est fourni par les carrières de Mortellaro, situées à l'Ouest de la route de Mortellaro à Rocca, un peu au Sud de l'endroit où cette route se raccorde avec celle qui conduit directement à Palerme. On voit, dans ces carrières, la coupe ci-dessous (fig. 23). Ce sont, à la partie infé- rieure, d'épais sables jaunes avec de grosses huîtres du groupe edulrs- lamellosa; puis, à 42 mètres d’altitude, un banc gréseux avec Cladocora cespilosa et de très nombreux moules de fossiles. pour la plupart indéter- minables spécifiquement (Cardium, Panopæa, Turrilella, Fissurella, Pecten jacobæus, Chlamys opercularis, ete.); enfin, le tout se termine par des calcaires sableux riches en Bryozoaires et rappelant le facies QE mollasse calcaire du Monte Pellegrino. 507 Calcare blanc sableux 45 æ Bryozoaires Banc gréreux al Jables jaunes & Auitres Fi&. 23, — Coupe de la carrière de Mortellaro, près Palerme (Sicilien). Ici done, le facies sableux à Ostracés développé à la base de la série, 1! M. de Gregorio [78] dit également avoir constaté, dans divers sondages, la pré- sence d'un banc de sable à la base du Sicilien. 184 SICILIEN DE PALERME correspond au début de la transgression sicilienne; et c'est au moment du maximum de cette transgression qu'il a été recouvert par les mollasses calcaires. D'une manière générale, on remarquera combien est réduit, dans ces divers facies, le rôle joué par les apports terrigènes gros- siers. Ce rôle est tout à fait nul autour du Monte Pellesrino et de la Montagne d’Aspra, où on ne trouve guère dans le Sicilien que des fragments calcaires anguleux, isolés, tombés des falaises voisines. Les argiles et les sables ont toujours un grain très fin. Enfin, on ne rencontre guère de conglomérats que dans la région où venait déboucher l’ancienne vallée de l'Oreto. Ces faits s'expliquent aisé- ment si l’on se rappelle que ce golfe de Palerme était entouré de hautes montagnes calcaires dénudées, sans cours d’eau important, où les eaux infiltrées devaient sortir, le plus souvent, près de la mer par des sources vauclusiennes qui ont déposé, un peu partout, de puissantes masses de travertins. A un autre point de vue, le développement des facies argileux, surtout à la base de la série, dans le centre du bassin palermitain, a déterminé une nappe d'eau souterraine qui permet partout une irrigation facile. C'est donc au Sicilien que la « Conca d'Oro » est redevable de sa mer- veilleuse végétation : vu des hauteurs de Monreale, le bassin quaternaire apparaît comme une vaste mer verdoyante où les feuillages des oliviers, des orangers et des citronniers, ne laissent pas deviner le sol; c'est un contraste frappant avec les monts calcaires dénudés et éblouissants. 3° Les anciens rivages de la mer Sicilienne. L'étude des facies du Sicilien de Palerme vient de nous conduire jusque dans la région des anciennes plages et nous a laissé entrevoir que les rivages de la mer Sicilienne devaient se trouver à une hauteur de 80 à 9Ù mètres environ au-dessus de la Méditerranée actuelle. C'est ce que nous allons pouvoir vérifier en recherchant les traces de ces anciens rivages. La région où les phénomènes se présentent de la manière la plus nette et la plus impressionnante est le Cozzo Santa Rosalia, roche calcaire qui, au Nord-Ouest de Palerme, s'élève sur le bord de la plaine quaternaire, ANCIENS RIVAGES 185 Au pied des parois verticales de calcaire secondaire, à l'altitude de 85 mètres environ, se creusent de nombreuses grottes, très allongées dans le sens horizontal, Ces grottes débouchent sur une petite plate-forme où le calcaire secondaire est recouvert çà et là d’une mince croûte de dépôts récents : ce sont des brèches calcaires à fossiles marins très litto- raux (huîtres, patelles, etc.), plus ou moins roulés, remplissant les anfrac- tuosités de la roche; ce petit palier ou ancienne plate-forme littorale se trouve environ à 82-83 mètres. Il se termine vers le bas par un petit ressaut, où la roche secondaire est à nu, enfin, au pied de ce ressaut, commence la grande plaine quaternaire de Palerme, formée ici de dépôts sableux d’ancienne plage!. 1407 130 120 (10 10 90 80 70 Fra. 24. — Ancien rivage sicilien au Cozzo S. Rosalia, près Palerme. GC. — CGalcaires secondaires. L. -— Croûte calcaire de Sicilien litloral avec Balanes, Palelles, etc. 8. — Grès calcaires sableux du Sicilien : extrémité de la plaine quaternaire de Palerme. Ainsi, la mer Sicilienne devait venir battre ici les falaises de calcaire secondaire à la hauteur de 83-85 mètres; ses vagues ont certainement contribué à creuser ou tout au moins à élargir les erottes; elles ont modelé, au pied de ces falaises, le petit palier où nous retrouvons des Balanes encore fixées au rocher. 1 Toutes ces altitudes résultent d'observations personnelles, faites avec un baro- mètre anéroïde de précision, et peuvent être considérées comme exactes à quelques mètres près. Le tracé des courbes de niveau sur la carte au 1/50.000° (feuille Palerme) doit être,en cet endroit, légèrement incorrect, car il conduirait à hausser ces chiffres d'une quarantaine de mètres. Je remarquerai, en outre, que, sur la feuille Palerme de la carte géologique au r/r00.000t, l'extension accordée ici aux ( argille scagliose » éocènes est, comme en beaucoup de points de la bordure du bassin, de beaucoup exagérée au pied des abrupts calcaires : la plupart du temps, et au Cozzo Santa Rosalia, en particulier, il s'agit simplement d’éboulis sur les pentes, ou de l’extré- mité des formations siciliennes. 186 SICILIEN DE PALERME Des faits analogues peuvent s'observer tout autour du Monte Pellegrino et, là, ils ont été déjà signalés en partie par l'ingénieur Baldacci [6] qui, avec une grande ingéniosité, y avait reconnu des traces de l’ancienne mer quaternaire. C’est d’abord, sur le versant Sud du mont, une grotte à longue ouverture horizontale, qui s'ouvre à 85-90 mètres d’altitude au pied des escarpements calcaires, non loin de la route carrossable qui conduit au sanctuaire de Santa Rosalia. D'autres grottes $’observent également si on contourne la montagne par le pittoresque sentier qui suit la côte jusqu’à la baïe de Mondello. Là, dans la contrée Allauro, on en voit s'ouvrir à la base des escarpements formés par le calcaire à Hippurites, et Baldacci ([6] p. 176) s'exprime ainsi à ce sujet : « A l'entrée des grottes et le long d’une ligne qui se maintient horizontale à environ 80 mètres au-dessus du niveau de la mer, le long de toute cette partie de la côte, il y a une série de trous de lithodomes indiquant l’ancienne ligne de plages. » Ici, d'ailleurs, il n’est pas possible de saisir, comme au Cozzo Santa Rosalia, de relations directes entre les dépôts siciliens et cette ligne de rivage, car, sur-cétté côte abrupte, les dépôts quaternaires se réduisént à une mince croûte de « pan- china » calcaire qui ne dépasse guère 25 mètres d’altitude et doit probablement être post-sicilienne. La célèbre Grotte de San Ciro, située au Sud-Est de Palerme, au pied du Pozzo Maredolce, mérite encore d’être signalée ici, car elle est en partie d'origine marine. Le fond de cette grotte est recouvert de sables à coquilles marines, et, postérieurement au retrait de la mer, y a vécu la faune conti- nentale bien connue à Hippopotamus Pentlandi; en dessous de cette grotte et dans des graviers calcaires blancs remplissant les anfractuosités des calcaires triasiques criblés de perforations, j'airécolté une petite faunule qui, par l'abondance des huîtres du groupe edulis et des Brachiopodes côtiers, indique un facies zoogène littoral; en voici la liste : Mytilus galloprovincialis Lmk., Ostrea cf. stentina Payr., Pecten jacobæus L., Chlamys multistriatus Poli, GC. pesfelis L’, GC. varius L., Spondylus gæderopus L., Megathyris decollata Chemn., Mühlfeldtia truncata L., Terebratula minor Phil: J'ai malheureusement négligé de mesurer ici avec précision les alti- tudes absolues; toutefois, d'après la carte topographique, l'altitude de ANCIENNES PLAINES COTIÈRES 187 cette grotte serait d'environ 8o mètres, et on retrouverait là la ligne de rivage sicilienne à la même hauteur que précédemment !. Enfin, à l'extrémité Sud-Orientale de la plaine quaternaire, on voit les derniers dépôts siciliens, représentés par des sables de plage, reposer sur la surface aride des calcaires secondaires : il y a là une véritable plate-forme littorale qui, à l'altitude de 70-80 mètres, s'étend à l'Est du village de Bagheria, au pied du rocher de Val- guarnera (135 mètres). Mais, d'ailleurs, nous sommes là sur la limite du golfe quaternaire, et nous allons retrouver plus à l'Ouest des témoins magnifiques de l'ancienne mer Sicilienne, 70 uaterhaër . 60 TR FiG. 25, — Coupe de la grotte de S. Ciro (Pozzo Maredolce, près Palerme) (altiludes absolues douteuses). G. — Lambeaux de grès calcaires à fossiles très littoraux (Pectoncles, Patelles, Cérithes, etc.) S. — Sables blancs à Brachiopodes. 4° L'ancienne plaine cotière sicilienne sur la côte à l'Ouest de Palerme et les relations stratigraphiques du Sicilien avec le Pliocène, La morphologie de toute cette côte, à l'Ouest de Palerme, entre Bagheria et Termini-Imerese (et même beaucoup plus loin, comme nous le verrons), est, en effet, uniformément dominée par un trait caractéristique : c'est l'existence d'un gradin continu à une altitude voisine de 80-100 mètres, et bien visible sur les cartes topographi- ques à grande échelle. Les coupes figurées ici (fig. 28 et 29, et surtout fig. >, pl. IT) en divers points de cette côte sont, en effet, ! Voir les indications fournies par Issel [149], qui donne le chiffre de 60 mélres seulement pour allitude de la grotte. 188 SICILIEN DE PALERME déduites rigoureusement de la carte au 1/50.000° en courbes de niveau. Sur le terrain, ce gradin continu apparaît avec une admi- rable netteté; les meilleurs observatoires sont le promontoire de Solunto et surtout le Capo Grosso (au Nord-Ouest de la station de S. Nicola), d'où le regard embrassetoute l'étendue de côtes comprises entre le Capo Zaffarana et le promontoire de Termini. Partout l’étroite plage sableuse actuelle est dominée par un abrupt régulier, s'élevant d’un coup jusqu'à 70 mètres d'altitude environ; au-dessus, de grands plateaux conduisent, en pente douce, de 70 mètres jusqu'à 130 mètres environ, et leur surface vient ensuite se raccorder avec les immenses talus d'éboulis descendus des hautes montagnes. Ainsi, d’après la seule topographie, il apparaît déjà comme pro- bable que l’abrupt dont nous venons de parler a été entaillé par l'érosion marine récente dans une ancienne plaine côtière, et la sur- face de cette plaine côtière nous est encore conservée par la ceinture continue des plateaux. Un bref examen géologique va nous permettre de le confirmer. Décrivons, en effet, la coupe que l'on observe en descendant, sur un de ces plateaux, depuis la montagne jusqu'à la mer, et choisissons pour cela, par exemple, celui sur lequel se trouve bâti le petit vil- lage d’Altavilla (voir pl. II, fig. 2). Dans la partie la plus haute du plateau, appelée Piano Olivi, le sol est parsemé de gros blocs calcaires bien roulés, descendus des montagnes voisines : ce sont des a/luvions continentales assez altérées, rubéfées, reposant ici en discordance sur les sables marneux du Pliocène ancien; nous reviendrons plus loin sur ce point spécial. A mesure que nous descendons vers la mer, ces alluvions quaternaires deviennent plus épaisses et moins grossières : certains bancs s'agglomèrent en poudingues, dans lesquels on commence à trouver, vers 70 à 8o mètres d'altitude environ, des galets perforés et des débris de coquilles : c'est l’ancien rivage de la mer quaternaire. Nous arrivons ainsi jusquau village d’Altavilla; à partir de là, nous descendons rapidement et les tranchées de la route nous permettent d'étudier le soubassement du plateau. Dans le haut, on voit alterner avec les poudingues, des bancs gréseux plus fins avec quelques fossiles marins, Pecten jacobæus, Chlamys opercu- laris; plus bas, à l'altitude de 50 mètres environ, ces « panchine » qua- ternaires reposent directement sur les sables argileux du Pliocène ancien, dans lesquels s'achève la descente. ANCIENNES PLAINES COTIÈRES 189 Ainsi, la formation de ces plateaux est due à un s{alionnement de la mer quaternaire à une altitude voisine de 80 mètres. Au-dessus de cette altitude, ils sont formés par les cônes de déjection construits, par les torrents côtiers sous l'influence de ce niveau de base ; au- dessous de 8o mètres, ils correspondent au fond de l'ancienne mer avec ses dépôts de galets et de sables côtiers. Cet ancien fond de mer devait primitivement se prolonger bien au delà de la côte actuelle par un profil régulier (voir pl. II, fig. 1); l'érosion marine récente a rongé ce profil et a tronqué l’ancienne plaine littorale suivant l’abrupt qui domine la plage actuelle. Ces plateaux côtiers représententent donc des tronçons de l’ancienne plaine lit- torale, construite sous un niveau de base de 8o mètres environ : nous retrouvons ici La même ligne de rivage que pour la mer Sici- lienne de tout le bassin de Palerme. Cette topographie et cette même structure géologique se retrouveraient identiques en n'importe quel autre point de la côte entre le Capo Zaffa- rana et Termini : le mot de « Piano » s'applique fréquemment aux ter- rasses marines siciliennes : tels sont, de l'Ouest à l'Est, le Piano Olivi, le Piano San Michele, le Piano Sperone, le Piano d’Aci, le plateau de Ter- mini. Au delà de Termini, la série se continue par le Piano d’Imera, le Piano d'Antoni, le plateau de Campofelice, etc. Les figures 28, 29, 37, donnent des exemples divers de ce caractère morphologique, si net dans toute cette partie de la côte sicilienne. Il me reste maintenant à insister spécialement sur deux points : ce sera d’abord (A) la manière dont se fait le raccord de cette an- cienne plaine côtière avec les dépôts siciliens du bassin de Palerme ; ensuite (B) j'étudierai les relations stratigraphiques de ces diverses formations quaternaires avec la série pliocène, pour en bien montrer l'indépendance réciproque. A. — Il peut paraître au premier abord paradoxal de considérer comme contemporaines des formations aussi différentes que les conglomérals de la plaine côtière d'Altavilla et les argiles de mer profonde de Ficarazzi; c'est, pourtant, une conclusion qui s'impose tout naturellement, à condition de tenir compte de leur différence d'altitude. Si, en effet, on parcourt la région, d'Altavilla à Pa- lerme, on voit les grès et sables quaternaires développés à la partie 190 © SICILIEN DE PALERME inférieure de la plaine côtière (voir pl. IL, fig. r et 2), augmenter d'é épaisseur, et. descendre jusqu'à la mer, masquant complètement, dès qu’on arrive un peu au Nord de Casteldaccia, les sédiments pliocènes!. Ces sables et grès se raccordent ainsi à ceux que nous avons vus déjà aux environs de Bagheria ; devenant de plus en plus argileux, ils se continuent jusque dans la région du Fiume Oreto et du gisement de Ficarazzi; vers le Nord, au contraire, ils passent aux sédiments zoogènes de la contrée d’Aspra. Ces relations strati- graphiques ont déjà été indiquées, d’ailleurs, par l'ingénieur Bal- dacci [6], et la carte géologique au 1/100.000° (feuille Dash les exprime d'une façon suffisamment explicite. Ainsi, la plaine côtière des environs d’Altavilla et de toute la côte Nord de la Sicile est d'âge sicilien. Et si l'érosion marine, ron- geant la plaine quaternaire de Palerme, avait pu faire reculer le rivage actuel jusque dans la haute vallée du Fiume Oreto, les falaises qui s'y seraient formées, par exemple dans les régions de la Grazia et de Mezzo-Monreale, nous montreraient une constitution identique à celle des falaises d'Altavilla?. Grâce à l’action protec- trice des promontoires avancés du Monte Pellegrino et de la Mon- tagne d’'Aspra, le fond de l'ancien golfe Sicilien nous a été conservé. Ces circonstances, un peu exceptionnelles, nous ont valu de pou- voir étudier aujourd'hui, à Ficarazzi, des dépôts quaternaires pro- fonds et éloignés de l’ancien rivage; car ils n’ont été, n1 enlevés par l'érosion ue des mers plus récentes, ni recouverts par les puissants dépôts d’alluvions qui nous les masquent en tant d'au-: tres régions. B. — Les descriptions qui précèdent nous ont fait voir déjà l’in- dépendance stratigraphique du Sicilien de Palerme d’avec toutes les formations antérieures, y compris le Pliocène. Dans le bassin palermitain proprement dit, le Sicilien repose, en effet, directe- ment, soit sur les calcaires secondaires (triasiques, liasiques), soit sur les « argille scagliose » éocènes. Cela est vrai, non seulement 1 Le gisement de S. Flavia, étudié par M. di Monterosato [117], dans cette région, paraît bien être d'âge Sicilien : la seule espèce vraiment caractéristique du Pliocène y serait Venericardia pectinata Br.; mais peut-être les échantillons ne corres- pondent-ils pas à la forme typique du Pliocène ancien. 2 C'est ce que j'ai cherché à faire comprendre par la fig. «, pl, II. ANCIENNES PLAINES COTIÈRES 191 sur les bords du bassin, où l’on peut voir directement le contact, mais aussi loin des rivages ; les sondages profonds qui ont traversé le Sicilien ont, ainsi qu'a bien voulu me le confirmer M: de Gre- gorio, atteint directement les roches anciennes. De sorte que le Pliocène ancien est inconnu dans la « Conca d'Oro ». Plus à l'Ouest, entre Bagheria et Casteldaccia, les formations siciliennes, en même temps quelles passent à l'état d'anciennes plaines côtières, viennent en contact avec le Pliocène ancien, et-elles ravinent ce Pliocène. Cela est très net dans la région d'Altavilla, où les conglomérats et grès quaternaires en couches horizontales repo- sent en discordance sur le Pliocène fortement incliné vers la mer (voir la fig. 2, pl. III); au-dessous d’eux apparaissent ainsi, succes- sivement, les sables à faune astienne du gisement d’Altavilla (Con- trada Cannamasca), puis les grès calcaires à Amphistégines du Ponte Milicia. Plus à l'Ouest, la terrasse marine sicilienne est entaillée dans les marnes à foraminifères ou « trubi » du Pliocène ancien, qui commencent à affleurer au pied de la falaise, près de la station de S. Nicola (voir, à ce sujet, Baldacci [6], p. 164). Nous retrouverons les mêmes dispositions jusqu’à l'entrée du détroit de Messine. Ainsi, le Sicilien de Palerme est stratigraphiquement indépendant de tous les terrains antérieurs et, en particulier, du Pliocène. Tandis que la répartition des sédiments pliocènes indique une distribution des terres et des mers toute différente de l'actuelle, au contraire la mer Sicilienne ne diffère de la mer actuelle que par des détails de contour : les traits essentiels de la géographie n'ont pas changé depuis le Sicilien; au point de vue de l’évolution morphologique, comme au point de vue des faunes, nous sommes bien déjà dans le Quaternaire. L'étude détaillée de la faune sicilienne de Palerme sera faite dans la vi® parte ! : elle confirmera pleinement ces conclusions en nous mon- trant, d’une part, des caractères de plus grande jeunesse que la faune 1 En effet, à l'inverse des faunes calabriennes, où les gisements sont très nombreux, et se complètent mutuellement, la faune sicilienne, au contraire, peut être entière- ment « personnifiée » par le gisement de Palerme : l'étude des caractères généraux … de la faune sicilienne se confond dès lors avec l'étude de la faune de Palerme. 192 POST-SICILIÈN DE PALERME calabrienne et, d'autre part, un parfait accord, au point de vue bathymé- trique, avec l'hypothèse d’une mer sicilienne, à Palerme, à 80 mètres environ au-dessus de la Méditerranée actuelle. C'est plus loin également que nous parlerons des restes d’Ælephas antiquus découverts daus le Sicilien de Palerme. S 2. — LES FORMATIONS POST-SICILIENNES DANS LA RÉGION DE PALERME On connaît depuis longtemps, dans la plaine même de Palerme, des sédiments marins postérieurs aux mollasses calcaires du Monte Pellegrino et aux argiles de Ficarazzi, par conséquent post-siciliens : ce sont les « scurciuni »! (écorce) et la « pietra molare » (pierre meulière), du langage local. Aux environs immédiats de Palerme, dans la « Gonca d'Oro », ces sédiments ne renferment qu’une faune insignifiante et seraient, par suite, peu intéressants. Mais un peu plus loin de Palerme, sur la côte Nord, au petit village de Sferra- cavallo, on retrouve la faune à Strombes; c'est par ce gisement que nous commencerons notre étude. 1° Les couches à Strombhes de Sferracavallo. La petite baie de Sferracavallo est dominée au Nord-Est et au Sud-Ouest par de formidables escarpements qui, de la mer, mon- tent d’un jet à près de 5oo mètres de hauteur. Vers le Sud-Est, elle n'est séparée du bassin quaternaire de Palerme que par un seuil situé à une altitude de 4o mètres environ, et où affleurent les cal- caires triasiques. Les gisements à Strombes sont développés sur le rivage même, tout près du village. On voit là, sortir des flots, des assises de grès calcaires ou « panchine » très durs, entremélés de bancs de conglomérats et où les fossiles sont très difficiles à récolter en bon état; ainsi, à des altitudes comprises entre 1 et 4 mètres, j ai pu réunir une petite faune, dont on trouvera la liste complète dans l'appendice ; comme d'ordinaire, je n’y examinerai ici que les formes caractéristiques. Le plus important de ces fossiles, le Sérombus bubonius Lmk., 1 Ou « scorcione ». COUCHES A STROMBES DE SFERRACAVALLO 193 est difficile à recueillir entier ; 1l avait été déjà signalé à Sferracavallo par M. de Gregorio; y reconnaissant une espèce distincte du Strombus coronatus pliocène, cet auteur avait proposé le nom nou- veau de Strombus Sferracavallensis de Greg. Il a eu l’amabilité de me montrer, dans sa collection, les échantillons-types de son espèce: ce sont des fragments en assez mauvais état, mais dans lesquels 1l est facile de reconnaître la forme quaternaire. M. de Gregorio avait, d’ailleurs, déjà remarqué que la faune de Sferracavallo lui paraissait plus récente que celle du Sicilien de Palerme; 1l était donc probable que l’on devait avoir affaire aux cou- ches à Strombes, et l'on pouvait, a priori, y prévoir l'existence des autres espèces propres à cés couches. Aussi ai-je eu une grande satis- faction à y rencontrer la Trifonidea viverrata Kiener, forme si carac- téristique. On conviendra que la présence de cette espèce qui, justement, est toujours compagne du Sfrombus, ne peut être inter- prétée comme un fait accidentel; cela nous prouve, une fois de plus, l'unité de cette faune à Strombus, unité contestée récemment encore par M. de Stefani !. A ces deux espèces, dont la présence est bien certaine, il faut probablement ajouter le Conus tes{udinarius, car j'ai recueilli des fragments de Cônes qui ne me paraissent pas pouvoir être rapportés au mediterraneus. M. de Gregorio avait, d’ailleurs, déjà signalé de « grands Cônes » à Sferracavallo. Enfin, le reste de la faune comprend aussi d’autres espèces moins caractéristiques, il est vrai, mais habituelles dans les facies littoraux des couches à Strombes : telles sont : Spondylus gæderopus L., Columbella rustica L., Conus mediter- raneus Brug., Patella ferruginea Gmel., Purpura hæma- stoma L., Turbo rugosus L., Trochus turbinatus Born. Reste, maintenant, à examiner les conditions de gisement de ces couches, Elles paraissent, à Sferracavallo même, là où elles con- hiennent la faune que nous venons d'étudier, confinées au voisinage immédiat de la mer, dans laquelle on les voit même s’enfoncer. En s'éloignant un peu vers le Nord, on les voit reposer, par 1 Cf. de Stefani [go] p. 9, note r. Univ. px Lyon, — Giexoux 13 # 194 POST-SICILIEN DE PALERME transgression et ravinement, sur d'autres couches gréseuses à carac- tères un peu différents. Car ces dernières sont formées uniquement par la consolidation de couches sableuses très fines et très régulières, à stratification très oblique et entre-croisée comme celle des dépôts de dunes; elles ne contiennent plus que quelques rares débris très petits et très roulés de coquilles marines; mais, en revanche, on peut y récolter de nombreux elix; on n’y trouve plus, comme dans les couches à Strombes, de galets de plage. Il est donc très probable que ces grès sont des formations éoliennes ; ils seraient alors analogues aux « grès à Helix » des côtes algériennes, des Baléares, etc., et de tant d'autres points des côtes méditerranéennes. Dans cette hypothèse, et comme ces couches à Helix arrivent jusqu'au niveau de la mer, elles seraient la preuve d’un mouvement négatif antérieur aux couches à Strombes : l'indépendance stratigraphique de ces dernières, par rapport à toutes les formations marines anté- rieures, serait alors bien accusée. - Mais cette indépendance, spécialement par rapport au Sicilien marin, résulte encore d’autres considérations. En effet, tandis que nous avons vu la mer sicilienne atteindre dans la région de Palerme une altitude voisine de 8o mètres, la ligne de rivage indiquée par les couches à Strombes de Sferracavallo, est certainement beaucoup plus basse. Car ces couches ne dépassent pas actuellement 3-4 mètres d'altitude, et leur facies et leur faune leur donnent un caractère extrêmement littoral ; je signalerai, par exemple, les Patelles, la Columbella rustica, le Trochus turbinatus, toutes coquilles qui y sont très communes et qui ne se rencontrent pas, à pareille altitude, dans le Sicilien. Je ne crois donc pas me tromper en affirmant que la mer, où se sont déposées ces couches à Strombes de Sferracavallo, ne dépassait certainement pas 30 mètres, et devait, plus probable- ment, s'arrêter vers 15 mètres d'altitude. En suivant la côte plus à l'Ouest, entre Sferracavallo et Isola delle Femmine, on peut observer des traces d'anciens rivages plus élevés. A l'entrée du tunnel du chemin de fer, après la station de Sferracavallo, on voit, plaqués contre les calcaires triasiques, des grès et conglomérats fossilifères, où abondent en particulier les Spondylus gæderopus : ces formations s'élèvent jusqu’à 25 mètres d'altitude environ. Au delà encore, on voit dans la falaise des encorbellements et des grottes alignées à 30- 35 mètres au-dessus de la mer et indiquant vraisemblablement une PLAINE DE PALERME 195 ancienne ligne de rivage. Enfin, tout autour de la station d'Isola delle Femmine, s'étend une grande plate-forme à 15 mètres d'altitude environ; le soubassement de cette plate-forme est constitué par les couches arasées des calcaires triasiques, avec de nombreuses perforations, et elle est recouverte par places de lambeaux de conglomérats marins : de toute évidence, on a là une ancienne plate-forme littorale. En résumé, dans toute cette partie de la côte Nord de la Sicile, on retrouve des traces d’anciens rivages plus récents que le Sicilien : une étude plus précise serait nécessaire pour les démêler avec cer- titude, mais en tout cas, c'est dans un des moins anciens, à 15 ou à Jo mètres, qu'apparait la faune à Sfrombus. 2° Les dépôts post-siciliens dans la plaine de Palerme. Dans la plaine de Palerme, les dépôts plus récents que le Sici- lien n'ont pas pour nous un grand intérêt, car is ne renferment pas de faune caractéristique et il m'est actuellement difficile d'évaluer avec précision l'altitude des lignes de rivage correspondantes. Je me bornerai à décrire quelques observations qui témoignent de leur présence. Reprenons la coupe de la grande carrière des Falde del Monte Pel- legrino (v. fig. 21, p. 180). Les mollasses calcaires du Sicilien y sont surmontées en discontinuité par des dépôts marins postérieurs : le contact, irrégulier, est marqué par une croûte de calcaire à Litho- thamnium (couche n° 2), contenant des blocs de calcaires secon- daires anguleux et perforés par des éponges; la faunule de ces couches post-siciliennes (n° 3), où prédominent les Cladocora cespitosa et les gros Turbo rugosus, est nettement littorale, et, par cela, différente de celle des mollasses siciliennes. A la partie supérieure, l’altération continentale de ces couches à Cladocores a donné naissance à une croûte travertineuse (couche n° 4), où des mollusques terrestres voisinent avec des débris remaniés des fossiles marins; le tout s'élève ici jusqu’à une altitude peu inférieure à 30 mètres. La ligne de rivage correspondante devait donc se trouver à une altitude voisine de 30-35 mètres. Des traces de ces mêmes dépôts récents s’observent quand on con- tourne le Monte Pellegrino par l'Est. Entre l’Acqua-Santa et Vergine Maria, elles ont été marquées, avec une extension peut-être exagérée, 196 POST-SICILIEN DE PALERME en a sur la carte géologique au 1/100.000; on les revoit aussi dans la contrée Allauro, où paraît se dessiner une plate-forme littorale à 10-15 mètres d'altitude. Ce sont ces mêmes formations post-siciliennes que l’on retrouve entre Palerme et Ficarazzi; elles sont visibles là, soit au bord de la mer, soit dans diverses carrières dont M. Geinmellaro a donné récemment [139] une description très soigneusement faite et très minutieuse !. Les géologues palermitains ont distingué dans ces dépôts : — une partie supérieure formée de sables et graviers cal- caires généralement assez meubles : c’estle scorcione ; —et une partie inférieure ou pietra molara, extrêmement dure, très compacte, passant parfois à de véritables poudingues. Cette distinction paraît surtout redevable à des différences locales de facies : et il n’est pas prouvé qu'il faille voir là des formations absolument différentes. En tout cas, elles sont nettement postérieures aux argiles siciliennes de Ficarazzi. En effet, il est matériellement impossible de considérer, ainsi qu'on l'a fait parfois, la « pietra molara » comme contemporaine des argiles de Ficarazzi auxquelles elle passerait latéralement par changement de facies. Car le facies et la faune? de la pietra molara, comme aussi du scorcione, en font un sédiment extrêmement littoral, qui ne peut à aucun titre être contemporain des argiles profondes de Ficarazzi, situées à la même alti- tude dans les mêmes localités. Le fait que les « scurciuni » reposeraient, tantôt sur la « pietra molara », tantôt directement sur les argiles, prou- verait simplement l'indépendance des scurciuni et de toutes les formations antérieures, y compris la pietra molara, Ces dépôts post-siciliens ont été figurés, au-dessus des argiles, sur la coupe (fig. 22, p. 182); il semble bien ici qu'il soit intervenu une phase continentale entre le sommet des argiles bleues, et les grès durs, avec petits galets, - post-siciliens; car à leur partie supérieure, les argiles ont été jaunies par oxydation des sels de fer, et contiennent des concrétions -1 Après avoir visité, en 907, cette partie du bassin de Palerme, j'ai eu le plaisir d'y retourner en 1908 en l'aimable compagnie de MM. G. di Stefano, M. Gemmellaro et G. Checchia-Rispoli, ainsi que de M. C. Depéret; je tiens à exprimer spécialement ma vive reconnaissance à nos confrères italiens pour les précieuses indications qu'ils m'ont données à cette occasion. 2 J'ai récolté dans ces formations post-siciliennes les espèces suivantes : Cardium tuberculatum L., Venus gallina L., Columbella rustica L., Conus mediterraneus Brug., Patella sp., toutes très littorales et recueillies à quelques mètres seulement au-dessus du niveau actuel de la mer. | | GOLFE DE CASTELLAMARE 197 calcaires, comme cela se voit habituellement au sommet des masses argileuses qui restent longtemps exposées aux actions atmosphériques. Enfin, je donne ci-contre la coupe de la carrière Mustica, que j'ai eu le plaisir de relever sous la direction de nos éminents confrères italiens ; on trouvera d’ailleurs beaucoup de détails intéressants dans le travail pré- cité de M. Gemmellaro, et dans diverses notes dues au D' E. Salinas! F1G. 26. — Coupe des formations post-siciliennes à la carrière Mustica, entre Palerme et Fica- razzi (en partie d'après E. Salinas et M. Gem- mellaro). 5 — Traverlin à empreintes végétales. 4. — Terre noire avec Helix et restes préhistoriques. 3. — Travertins (molaires d'Elephas cf. africanus). 2, — Sables et graviers calcaires à coquilles marines (scurciuni). 1. — Grès dur (pielra molara). Eu résumé, ces observations nous montrent l'existence, dans le bassin même de Palerme, de lignes de rivage postérieures au Sici- lien, et situées vraisemblablement à des altitudes voisines de 15 et 30 mètres; elles correspondent certainement aux couches à Strombes développées près de Sferracavallo, sans qu'il soit possible de pré- ciser autrement. $ 3. — LE QUATERNAIRE DANS LE GOLFE DE CASTELLAMARE Cette région du golfe de Castellamare où, d'après les cartes géolo- giques, les dépôts quaternaires acquièrent une extension si remar- quable, parait avoir été fort délaissée. Je ne connais guère à son sujet qu'une brève note de M. de Gregorio signalant à Balestrate des fossiles post-pliocènes [77]. Comme nous allons le voir, c'est ici le Sicilien qui est le plus intéressant : cest lui en particulier qui forme les falaises aux environs de Balestrate et de Castellamare ; aux extrémités Est et Ouest du golfe, il s'appuie directement sur les roches anciennes secondaires ou éocènes ; dans le fond, au contraire, il semble venir s accoler, vers le Sud, à des sédiments pliocènes. 1 Voir en particulier, E. Sazinas, Stazione preistorica all’'Acqua dei Corsari presso Palermo { Arch. stor. sicil., N.S., anno XXXII, fase. I-II, Palerme, 1907). — Id. (avec coupe) (Nolizie degli Scavi, anno 1907, fase. 2). 198 | QUATERNAIRE DE BALESTRATE 1° La coupe de Balestrate, Je décrirai d’abord la coupe que l’on peut observer en s'éloignant de la mer à partir de Balestrate (v. la fig. 27); la plage actuelle, très étroite, y est dominée par une falaise haute d’une vingtaine de mètres, donnant ainsi de superbes affleurements. A la base, ce sont des couches argilo-sableuses renfermant, près du niveau de la mer, la faune typique du Sicilien profond : nous allons en reparler dans un instant ; puis, à mesure qu’on s'élève dans la falaise, le facies devient plus sableux et la faune se modifie en conséquence ; en par- ticulier les Pectinidés {Chlamys opercularis L.) deviennent pré: dominants ; on arrive ainsi au sommet de la falaise, sur une vaste plate-forme, où est construit le village de Balestrate, et qui s'élève en pente douce depuis l'altitude de 25 mètres jusqu’à celle de 40 mètres environ. En continuant à s'éloigner de la mer, on à à gravir un nouveau petit abrupt où affleurent encore les mêmes sables jaunes. Enfin, on débouche alors sur un vaste plateau ondulé, projetant son dernier contrefort vers la mer à la Madonna delle Grazie (80 m.) et se prolongeant à perte de vue vers le Sud jusqu'à près de 150 mètres d'altitude. Toute la surface de ce plateau est formée de sables extrémement fins, d’un blanc pur, ou jaunâtres, sans trace de galets ni de coquilles marines; je crois qu'il faut les considérer comme d’origine éolienne. La topographie ondulée s'accorde d’ailleurs bien avec cette interprétation : ces sables forment en effet des mamelons, disséminés sur le plateau, où l’on peut voir d'anciennes dunes (ex. à la villa Velez). Route d'Alcamo Villa Velez ! NNO FiG. 27. Coupe de la falaise de Balestrate et du fond du golfe de Castellamare, Sd. — Sables fins d'origine éolienne. Sicilien. . .+ Sg. — Sables fins et grès de plage. Sa. — Sables argileux à faune sicilienne profonde. Pliocène . . { Ps: — Sables et grès supérieurs {Calabrien ?) t Pa. — Argiles bleues inférieures. Echelle des longueurs 1/70.000, Mi. — Miocène supérieur (gypses). des hauteurs 1/40.000. La coupe que nous venons de décrire peut donc être résumée par COUPE DE PBALESTRATE 199 la figure 27; elle nous a montré une série unique de sédiments, argileux en bas, puis sableux ; enfin, au delà de l’ancien rivage, qui se trouverait à une altitude voisine de 8o mètres, nous arrivons dans une ancienne plaine côtière, occupée ici, non par des dépôts torrentiels, mais par des chaînes de dunes élevées; les grandes altitudes atteintes par les sables éoliens ne sauraient être invoquées comme preuve d'une ligne de rivage élevée. D'ailleurs, la limite supérieure atteinte par ces sables du côté du Sud m'a paru très difficile à préciser; car ils viennent là reposer sur des sables également marins, qui me semblent appartenir à une série plus ancienne. La carte géologique au 1/100.000 indique dans ces hauts pla- teaux du fond du golfe (région de Partinico, Valguarnera) toujours du Quaternaire marin, qui monterait ainsi jusqu’à 230 mètres d'altitude envi- ron. Mais la vallée du Torrente Giancaldara, qui, au Sud de Valguarnera, entaille profondément ces plateaux, permet de reconnaitre que leur sou- bassement est formé des couches suivantes (voir la coupe fig. 27) : 1° À l'extrême base, se trouvent les gypses du Miocène supérieur, qui étaient autrefois exploités un peu au Nord du Ponte Tauro ; actuellement, leurs affleurements sont recouverts et non indiqués sur la carte géolo- gique au 1/100.000; 2° Au-dessus, viennent des argiles bleues dans lesquelles je n'ai malheureusement pas trouvé de fossiles, mais que la carte rapporte avec raison, je crois, au Pliocène inférieur; 3° Au-dessus, enfin, après un banc régulier de conglomérats à petits galets, vient une série puissante de sables, grès, conglomérats, alternants : les fossiles y sont rares à la partie inférieure, plus fréquents à la partie supérieure, où les grès contiennent de nombreux moules de coquilles, malheureusement difficiles à déterminer; ce sont d'ailleurs des espèces banales. Toute cette série m'a bien paru concordante, à partir des gypses miocènes : je crois donc qu'il faut voir là la série pliocène tout entiere, réduite à une épaisseur assez faible, comme il arrive souvent sur cette côte Nord de la Sicile. Peut-être les grès supérieurs de Partinico et de Valguarnera représentent-ils le Calabrien, car leur faune, peu caracté- ristique il est vrai, semble exclure le Pliocène ancien. Je n'ai d’ailleurs pas pu voir, d’une façon nette, quelles étaient les relations stratigra- phiques de ces couches élevées avec celles développées au voisinage de la mer. Pour en revenir à ces dernières, la topographie (v. fig. y montre la trace de deux anciennes lignes de rivage : l’une à 27) nous 200 QUATERNAIRE DE CASTELLAMARE 80 mètres environ, de laquelle dépendent les couches fossilifères de la falaise ; l’autre à 30 mètres à peu près, marquée seulement par la plate-forme d’abrasion sur laquelle se trouve le village de Balestrate, et qui est modelée dans les sédiments ressortissant du niveau de 80 mètres. | Ces deux plates-formes successives persistent dans la topographie sur tout le pourtour du golfe de Castellamare ; au Nord, elles sont bien visibles, entaillées dans la roche en place, au Capo di Rama qui, vu du Sud-Ouest, a ainsi un profil bitabulaire caractéristique (voir aussi la carle topographique au 1/25.v00). A Trappeto, elles sont encore mieux marquées qu à Balestrate, se retrouvant, l’une sous le village et la gare, l’autre dans la région Giambruno. Enfin, à Castellamare del Golfo, le niveau supérieur donne lieu à des remarques très intéressantes. Il correspond en effet à une magnifique ferrasse, qui, à une altitude comprise entre 7o et go mètres, est très développée au Sud du village. Le soubasse- ment de cette terrasse est, comme à Balestrate, formé par des sables argileux à faune sicilienne ; on y peut récolter des fossiles dans la falaise, entre la gare et le village, mais ce sont ici surtout des Oursins (Echinolampas), et la plupart des mollusques ont leur test décalcifñié. Un meilleur gisement fossilifère se trouve sur la route car- rossable, après la montée qui suit le pont sur le Fiume San Barto- lommeo, C’est encore dans le soubassement de cette même terrasse, près de la sortie du premier tunnel du chemin de fer après la station, qu'a été trouvé le Sérombus aff. bubonius dont je parlerai plus loin (b° partie). Mais la série de ces sédiments, au lieu de se terminer, comme à Balesirate, par des sables de plages et de dunes, est cou- ronnée ici par des alluvions en terrasse, avec gros galets roulés, qui, à la base, alternent avec les sables, et, au sommet, couronnent les plateaux. Ce développement d’alluvions fluvio-marines correspond done à un facies bordier du golfe de Castellamare, dont le centre était au contraire, à l’époque sicilienne comme aujourd hui, occupé par une chaine de dunes. ° 2° Les Faunes, Les deux seuls gisements fossilifères intéressants que j'aie étudiés dans ce golfe de Castellamare sont donc, d’abord les falaises de + FAUNES 201 Balestrate, ensuite le gisement de Castellamare, dont la position est précisée plus haut. Les listes complètes des fossiles trouvés dans ces deux localités sont données plus loin dans l’appendice : il serait, d'ailleurs, facile de les augmenter par des recherches un peu plus prolongées!. Je me bornerai ici à quelques remarques sur l’âge et le facies de ces faunes. Leur caractère peut, d’ailleurs, être défini d’un seul mot, en disant que, la richesse et l'abondance des espèces mises à part, elles reproduisent absolument la faune sicilienne typique de Fica- razzi : toutes les espèces que j'ai récoltées à Balestrate et à Cas- tellamare se trouvent aussi à Ficarazzi, et elles y sont représen- tées par le même ensemble de variétés. Cette similitude est surtout marquée pour le gisement de Balestrate situé, comme celui de Ficarazzi, à quelques mètres au-dessus du niveau de la mer; dans les deux cas, on notera la présence de coquilles étran- gères aux faunes littorales proprement dites, telles que : Isocardia cor L., Venus multilamella Lmk., Nucula sulcata Bronn, Capulus nee L., Xenophora Ge Kônis, etc., etc., associées aux ie Turritella communis et Chlamys opercularis habituels à ces facies argilo-sableux. Ces constatations sont tout à fait d'accord avec les résultats aux- quels nous avait déjà conduit la stratigraphie, à savoir que la mer où se sont déposés les sables fossilifères de Balestrate et de Castel- lamare, devait, comme la mer Sicilienne à Palerme, atteindre à peu près l'altitude de 8o mètres. Quant aux espèces caractéristiques, elles sont naturellement moins abondantes qu'à Ficarazzi, car les gisements du golfe de Castellamare n'ont jamais été explorés d'une façon bien suivie. Comme formes disparues, je ne puis guère y citer que : Nucula placentina Lmk. Clavagella bacillum Br. Dentalium rectum L. Nassa clathrata Br., var. fica- ratiensis Mts. sp. ! Le travail, cité plus haut, de M. de Gregorio [77], ne me permet d'ajouter rien d’intéressant aux résultats déduits de mes propres observations. 202 QUATERNAIRE DE LA COTE NORD DE SICILE et comme espèces à affinités septentrionales, plus ou moins carac- téristiques : Cyprina islandiea L. Dosinia lupinus, var, ficara- Tapes rhomboides Penn. tiensis nov. (aff. D. lincta). Buccinum humphreysianum Chlamys septemradiatus Benn. Müll. Il faut y noter en outre la fréquence des Cardium du groupe echinatum, représentés par les mêmes variétés qu'à Ficarazzi, et des Echinolampas Hoffmanni (Desor), genre d'Oursin complètement éteint dans nos mers, mais abondant partout dans le Sicilien à facies sableux ou zoogène. Toutes ces formes, sans exception, sont communes dans le Sici- lien de Palerme : il est donc très rationnel de conclure quelles ont vécu ensemble, dans la même mer, et très intéressant de retrouver aujourd'hui les rivages de cette mer Sicilienne, dans le golfe de Castellamare, à peu près à la même altitude que dans le bassin de Palerme. $ 4. — LA COTE NORD DE LA SICILE ENTRE PALERME ET MESSINE Nous avons déjà décrit, dans la partie occidentale de cette côte, entre Palerme et Termini-Imerese, une ancienne plaine côtière d'âge sicilien, formant terrasse au-dessus de la plage actuelle, à des alti- tudes variant de 70 à 100 mètres. Cette plaine côtière se retrouve au delà de Termini et jusqu’à l’entrée du détroit de Messine, exac- tement avec les mêmes caractères ; ce fait important avait déjà été remarqué par l'ingénieur Baldacci [6], qui y a insisté à plusieurs reprises. Depuis Termini jusqu'au Capo Palaja, le seul examen des cartes topographiques à grande échelle suffit à montrer l’existence de l’an- cienne plaine côtière; elle forme, à une altitude variant depuis 70 jusqu’à 120 mètres, une ceinture continue au-dessus de la plage; c’est ce qu'on voit d’abord près de Termini, dans les contrées S. Gerolamo et Cacasacco, où les blocs des conglomérats quaternaires recouvrent l’Eocène étudié avec tant de détails par M. Checchia-Rispoli; notre terrasse se poursuit par le Piano d’Imera, sur les deux rives du Fiume Imera ; elle forme ensuite le plateau dit Rocca d’Antoni, et, 2 ANCIENNES PLAINES COTIÈRES 203 par Campofelice, se retrouve encore dans la région Piana Calzata, dans la contrée Lentine, etc., jusqu’au Capo Palaja, J J'ai eu l’occasion de l’étudier entre le Fiume Torto et Campofelice, et spécialement près de l'embouchure de l'Imera settentrionale, qui l’entaille en montrant des coupes fort nettes (voir la fig. 28) : on voit là les marnes blanches du Pliocène ancien‘, recouvertes en discontinuité et ravinées par des poudinques marins très durs, entremélés parfois de bancs sableux ; je n’y ai pas observé de fossiles, mais c'est de cet endroit précisément, près de Buonfornello, que proviennent des dents molaires d’Hippopotamus Pentlandi déterminées par Doderlein (cf. Battaglia et Ciofalo [11 |). Molino lestaveccha Rocca d'Antont _ Regione m 1 77 Rivage 167) 16100 7) Ee ee re [ 1 Plaine côtière Sicthienne | Plaine côtière actuelle SEA — focène CLS ptuwcenes N.-O. S.-E. F1. 28. — Coupe de l’ancienne plaine côtière sicilienne vers l'embouchure de l'Imera, entre Termini et Cefalu (côte Nord de la Sicile). Echelle des hauteurs et des longueurs: 1/40.000. A l'Est de Cefalü, nous retrouvons l’ancienne plaine côtière sici- lienne dans la région la Marina et à la pointe du Telegrafo di Pol- lina, puis à Santo Stefano di Camastra, sur la rive gauche du Fiume Caronia, près de son embouchure, et aux environs de Santa Agata di Militello (Piano Levito): au delà, encore, entre Santa Agata et le Capo d'Orlando, elle est magnifiquement développée (Piana di S. Pietro, Piano di Scodoni, Contrada Malvicino). Nous arrivons ainsi à la péninsule de Milazzo, où les dépôts qua- ternaires sont extrêmement fossilifères : je ferai plus loin une étude détaillée de ce gisement. Enfin, la région comprise entre Spadafora et la Punta del Faro, ou pointe extrême de la Sicile, est une des plus typiques qui se puissent voir pour l'étude des anciennes plaines côtières. La topo- 1 À ZLimopsis aurila Br., Nucula sulcata Bronn, Dentalium sexangulum Br., et nombreux foraminifères étudiés par De Amicis : La fauna a foraminiferi del Pliocene inferiore di Buonfornello presso Termini-Imerese (Sicilia) (Atti d. Soc. toscana di Sc. nalur., Processi verbali, IX, Pise, 1894) et id. (Naturalista siciliano, anno XIV, n 4, 5, 6 e 7, Palerme, 1895). Cet auteur estime que ces marnes blanches {{rubi) cor- respondent à une profondeur de 500 à 1.000 mètres. 204 QUATERNAIRE DE LA COTE NORD DE SICILE graphie, excellemment rendue sur les cartes au 1/50.000 avec courbes de niveau, y est d'une merveilleuse netteté. Ces plateaux, dont la coupe (fig. 29) donne un exemple, se terminent sur la mér par une falaise abrupte, et s'élèvent en pente douce depuis l'altitude de 8o mètres jusqu'à celle de 120 mètres environ; les conglomé- rats qui les recouvrent semblent être en majeure partie d'origine continentale, deltas de fiumare ou simplement cônes de déjection et d’éboulis descendus des montagnes. Mais en l'absence de fossiles, l'altitude de la ligne de rivage correspondante est difficile à fixer avec exactitude; nous allons voir plus loin qu'elle était probable- « ment inférieure à 100 mètres et voisine de 8o mètres!, IT. 250€ Ter CRE LaRocca 200 (50 Plaineh côtière Sicéli 100 a AAA TI PIT A 100 . 50 50 (RP es É mn — Fic. 29. — Profil de la côte Nord de la Sicile sur la rive gauche du Fiume dei Corsari, entre le cap Rasocolmo et la Punta del Faro. (D'après la carte au 1/50.000 en courbes de niveau. — Echelle des hauteurs et des longueurs 1/50.000). Nous suivons ainsi notre plaine côtière jusqu’au-dessus de Mortelle, et là, c'est elle qui forme le plateau culminant de la pointe du Faro, et communique à cette extrémité de la Sicile ce profil tabulaire, si remarquable quand on l’observe des côtes cala- braises ; mais cette localité de Mortelle mérite, comme celle de Milazzo, une étude spéciale. Le gisement de Milazzo. La péninsule de Milazzo, faisant face à l'archipel des Lipari, est un écueil de roches archéennes relié à la côte par une vaste plaine basse, de formation très récente. Elle formait done dans la mer Quaternaire une île émergeant à peine, et autour de laquelle les dépôts quater- naires, éloignés ainsi de tout cours d’eau, ont pu se conserver. 1 C’est très probablement cette même ligne de rivage qui se retrouve en face dela côte sicilienne, à l'ile Lipari, où l'ingénieur Cortese [45] a signalé une terrasse à 120- 130 mètres environ; il y a vu aussi des grès à coquilles marines, maïs il n’en précise pas l'altitude, MILAZZO 205 La richesse en fossiles de ce Quaternaire de Milazzo est depuis long- temps connue, puisqu'on trouve des coquilles de Milazzo citées dans l’ou- vrage de Philippi | 190]; mais à part les quelques indications données par Baldacci [6} et par G. Seguenza [207], cette région n'avait pas fait l’objet d’études spéciales ; récemment, G. de Stefano lui a consacré une petite monographie [105], mais ses déterminations paléontologiques ne paraissent pas à l'abri de toute critique, et il semble bien aussi avoir mélangé les faunes du Pliocène ancien et du Quaternaire. Conditions stratigraphiques. Sur l’ossature de roches crislallines, on trouve en effet çà et là des lambeaux isolés et {rès restreints de Pliocène ancien : tels sont les cal- catres à coraux, déjà décrits par Baldacci, qui remplissent les fissures de l’Archéen près du château, et qui ressemblent beaucoup, à tous points de vue, aux formations analogues que nous avons étudiées à Reggio-Archi (Monte Corvo) et à Messine. Plus intéressants sont des lambeaux de marnes jaunes pétries de foraminifères, qu'on peut voir en particulier (fig. 30) sur la côte occidentale, dans l’anse de la Tonnara, près de l’extré- mité de la péninsule : elles contiennent surtout des Brachiopodes { Tere- Bbralula meneghiniana Seg., T. sphenoïdea Phil., Terebratulina caput- serpentis L., Waldheimia sepligera Lov.) et quelques rares mollusques profonds (Chlamys Bruei Payr., Nucula sulcata Bronn). Le Quaternaire repose indifféremment: sur l’Archéen ou sur ce Pliocène ancien, que la mer avait arasés en plate-forme à 50-60 mètres d'altitude avant la formation des dépôts : ceux-ci sont, d'ailleurs, toujours très littoraux. On peut les étudier surtout sur le versant Nord du rocher du château et dans l’anse de la Tonnara, au Sud du phare, où les affleurements sont les plus com- modes à explorer et les plus fossilifères (voir la fig. 30). Wiveail ‘actuel de La mer F1G. 30. — Coupe des falaises du Capo di Milazzo à la Baja S. Antonio (montrant les conditions stratigraphiques du Quaternaire de Milazzo). Qb. — Dépôts de falaises et de grotles sous-marines Q. — Sables et graviers fossilifères . . . . Ou) : f Quaternaire P. — Marnes jaunes à Foraminifères et Brachiopodes. Pliocène ancien. 206 QUATERNAIRE DE LA COTE NORD DE SICILE Vers 55 mètres d'altitude, on voit là les anfractuosités des roches cristallines remplies de sables et graviers siliceux, provenant, évi- demment, de la décomposition de ces mêmes roches, et très riches en coquilles marines : fréquemment ces sables remplissent des sortes de grottes sous-marines existant entre des blocs énormes d'Archéen : ce sont même là les endroits où les fossiles, plus abrités de l’action des eaux d'infiltration, se sont le mieux con- servés. Dans ces sables de l’anse de la Tonnara, la faune atteint son maximum de richesse et de variété, car on y trouve quelques rares espèces non strictement littorales (Venus casina, Astarte fusca, etc.). Au-dessus, et formant de vastes plateaux à l'altitude de 60 mètres environ, viennent des poudinques très durs, renfermant surtout des espèces de grande taille (Mytilus galloprovincialis Lmk., var. herculea Mts. sp., Turbo rugosus L., etc.!).Il n’y a pas trace d’allu- vions continentales, et tout est marin jusqu'en haut. Par places, néanmoins, on voit le tout recouvert d’une couche, épaisse parfois de 1: mètre, d'une terre rouge-brunâtre, qui m'a paru provenir de l’altération de cendres volcaniques. Au-dessus de ces plateaux s'élèvent quelques collines, telles que la pointe du phare (83 m.), le Monte Trino (117 m.), point cen- tral et culminant de la péninsule, et la roche du Château (93 m.); elles devaient émerger dans la mer Quaternaire. En effet, au Sud de l’anse de la Tonnara, la petite chaîne du Monte Trino se ter- mine par une butte formée d’un entassement de blocs archéens : jusqu’à une altitude de 65 mètres environ, ces blocs sont criblés de perforations dues à des mollusques lithophages. En admettant, ce qui me paraît probable, que ces mollusques aient vécu sous une pro- fondeur d’eau de quelques mètres, on arriverait à 70 mètres environ pour l'altitude de l'ancien rivage quaternaire. Faune. Cette conclusion s'accorde bien avec les caractères de la faune. On ne trouve, en effet, à Milazzo (voir la liste complète dans l’ap- 1 C'est probablement de ces assises supérieures que proviennent les grandes coquilles que l’on peut voir à l'extrémité Nord de la ville de Milazzo, dans une villa où elles ont été employées à la décoration d’un petit jardin (en particulier des Tritonium nodiferum gigantesques). 51 MILAZZ0 207 pendice) que des espèces vraiment lif{orales!, abstraction faite de quelques-unes dont nous avons parlé plus haut. Cela donne à la faune une physionomie toute différente de celles de Ficarazzi ou de Rosarno, par exemple, et cette différence est encore augmentée par le fait que nous avons à Milazzo une faune essentiellement rocheuse, où les Lamellibranches sont relativement peu nombreux; la note dominante est donnée par de petits Gastropodes, et surtout par d'innombrables Trochidés, associés aux Cérithes, aux Biltium, aux Colombelles, aux Patelles; aux Fissurelles, etc. Je n'ai trouvé à Milazzo aucune espèce disparue et une seule forme à affinités atlantiques, le Tapes rhomboides Penn. ; et encore cette dernière, se rencontrant depuis le Calabrien jusqu’à l'époque des Strombes inclusivement, n'a-t-elle rien de bien caractéristique. Il est nécessaire de tenir compte de ce facies si nous voulons comparer la faune de Milazzo aux autres faunes du Quaternaire. Ainsi la comparaison avec la faune typique dn Sicilien est impos- sible. Nous ne pouvons nous attendre à rencontrer à Milazzo aucune des espèces caractéristiques de Ficarazzi, car celles qui sont les plus fréquentes, comme les Buccins, la Cyprine, la Neptunea sinistrorsa, ne vivent pas sur les fonds rocheux. Donc, rien ne s'oppose à ce que nous puissions considérer cette faune de Milazzo comme à peu près contemporaine de celle de Ficarazzi, et repré- sentant par conséquent le facies littoral rocheux de la faune sici- lienne. Il en est tout autrement si nous voulons tenter la comparaison avec les couches à Strombes : car le facies littoral des sables de Milazzo est précisément le facies habituel de ces couches ; et il est remarquable que nous ne trouvions à Milazzo aucune des espèces caractéristiques de ces dernières. Malgré le danger qu'il y a à tenir trop grand compte des « caractères négatifs», on ne peut manquer d’être frappé de ce fait ; provisoirement, donc, et en l'absence de décou- vertes ultérieures, nous sommes autorisés à considérer ce gisement de Milazzo comme antérieur à l'introduction de la faune à Strombes dans la Méditerranée, c’est-à-dire comme Quaternaire inférieur ou Sicilien fs. lat.). 1 Il faut ici se rappeler que les gisements fossilifères sont à des altitudes comprises entre 40 et 60 mètres. 208 QUATERNAIRE DE LA COTE NORD DE SICILE Comme âge et comme facies, il est donc tout à fait identique aux gise- ments qualernaires élevés de la côte française, déjà rattachés autrefois au Sicilien par M. Depéret [87] : gîtes des fentes de la carrière Saint- Jean à 65-70 mètres, et du cap Ferrat à 85 mètres Il y a, à ce point de vue, une analogie extrêmement curieuse entre le Capo di Milazzo et le cap Ferrat, qui, se faisant face d’une rive à l'autre de la Méditerranée, paraissent avoir eu une histoire identique. Tous deux ont formé des écueils dans la mer Sicilienne, et sur tous deux cette mer a laissé des sables à coquilles banales, où manquent les espèces chaudes des faunes ultérieures {. Le gisement de Mortelle. Le grand intérêt de cette coupe de Mortelle (voir fig. 31) est de nous montrer des formations quaternaires marines, fossilifères, probablement siciliennes, discordantes sur du Calabrien également marin. L’ancienne plaine côtière sicilienne que nous avons étudiée sur la côte Nord de la Sicile, peut être suivie nettement dans la topographie au Levant du cap Rasocolmo, jusque sur les deux rives de la Fiumara del Tono; plus à l'Est, elle cesse d’être reconnaissable et la falaise abrupte formée par les couches calabriennes s'élève d’un trait jusqu'à 200 mètres et plus d'altitude. Mais en continuant encore vers la Punta del Faro, on voit cette extrémité Nord-Est de la Sicile se terminer par une grande plate-forme à l'altitude de 90-100 mètres, arasant les couches calabriennes; c’est évidemment le prolongement de notre plaine côtière sicilienne. En s’élevant à partir.du petit village de Mortelle, situé sur la côte Nord, pour arriver jusque sur ce plateau, on voit, dans la falaise qui surgit au-dessus de la plaine côtière actuelle, la coupe suivante. La partie la plus abrupte de la falaise est formée par des pou- dingues à gros galets fortement cimentés et érès inclinés vers le 1 Si l’on voulait, entrant dans le domaine de l'hypothèse, tentef des synchro- nismes de détail, on pourfait retrouver dans ce niveau de Milazzo à 65 mètres, l'équivalent des niveaux de 60-70 mètres signalés par M. Depéret sur les côtes françaises et par le général de Lamothe sur les côtes algériennes ; on y pourrai voir alors une étape intermédiaire entre le Sicilien (s. st., ou niveau de 80- 100 mètres) et les couches à Strombes, et où manqueraient à la fois les espèces froides et les espèces chaudes caractéristiques respectivement de ces deux derniers étages. MORTELLE 209 Nord-Est, comme le représente la figure. Un petit ravin qui descend vers la mer permet de les étudier sur ses versants mieux que sur la falaise elle-même, où ils sont plus ou moins recouverts d’éboulis. Ils contiennent des bancs sableux et on peut y récolter en abondance des Moules gigantesques (Mytilus qalloprovincialis Lmk. var. herculea Mis. sp.), qui vivent aujourd'hui dans des zones relativement profondes : nous avons déjà parlé plus haut (p. 74) de:ces assises qui appartiennent incontestablement au Calabrien. Au-dessus, vient le Quaternaire horizontal reposant, de la manière la plus évidente, en discordance sur le Calabrien incliné. On voit d'abord, vers 62 mètres d’altitude, des graviers et cailloutis super- ficiellement rubéfiés, et dans lesquels j'ai trouvé des fragments de défenses d'Iééphant malheureusement indéterminables ; au-dessus, et vers 70 mètres, viennent des bancs de marnes laqunaires blan- ches ou jaunes à Cardium edule ; un peu au-dessus, apparaissent des bancs d'Osfrea edulis, dont les valves jonchent le sol par milliers ; enfin, à la partie supérieure, dans des sables fins, on ren- contre la riche faune marine dont on trouvera la liste dans l’appen- dice. La série se lermine par des ciilloutis superficiels assez mal visibles, se mélangeant à ceux qui résultent de l'érosion actuelle des poudingues calabriens. 120 _S. N. 80 25 EE AR Ne AU AA A à Niveau de la mer Sicilienne Sicilien Rivage actuel ain €: Coliere actuelle F1G. 31, — Coupe du Sicilien discordant sur le Calabrien dans la contrée Mortelle, près Messine. 4. — Couches marines littorales très fossili- \ fères . DAMON ET RON à CUS PANTO 3, — Banc d'Ostrea edulis . . . . . . ., Sicilien. 2 — Poudingues et marnes lagunaires à | Echelle des hauteurs et des CARAUN elle MEL UN longueurs 1/8.000, 1, — Poudingues très durs à grands WMy- OURS 22° MEN EN EUIRe PR TRE Calabrien. Toutes ces couches quaternaires forment évidemment un ensemble homogène, et la succession de ses différents termes n’a pas grande importance : ces facies subcontinentaux, à Ostracés, ou lagunaires, sont essentiellement locaux. Univ. pe Lyon. — Gicxoux 14 210 QUATERNAIRE DE LA COTE ORIENTALE DE SICILE La faune de Mortelle est malheureusement absolument banale : elle a les plus grandes analogies avec celle de Milazzo, de laquelle elle ne se distingue que par l'abondance de quelques espèces habitant les fonds vaseux lagunaires, telles que Cardium edule L. (avec des variétés identiques à celles des étangs littoraux actuels), Tapes decussatus L., des Syndesmyes, etc... Toutes ces coquilles sont franchement littorales, et toutes vivantes dans la Méditerranée, à l'exception du Tapes rhombhoides Penn , que nous avions déjà trouvé à Milazzo. Cette faune donnerait donc lieu aux mêmes obser- vations stratigraphiques que celle de Milazzo : il est naturel d'y voir un facies très littoral et même laqunaire du Sicilien. ; Une molaire d'Elephas antiquus, soigneusement déterminée par L. Seguenza ([213], vol. XXIII, p. 54) a été trouvée autrefois « dans les dépôts marins des collines de Faro superiore » ; il est très pro- bable qu’elle provient du gisement même où j'ai récolté des débris de défenses. On aurait alors un exemple de plus de coexistence de l’Æ. antiquus avec des dépôts marins siciliens. $ 5. — LA COTE ORIENTALE DE SICILE Sur la côte sicilienne du Détroit de Messine, on ne connait pas d'une façon bien certaine de dépôts marins appartenant typique- ment au Quaternaire : seuls quelques lambeaux de plateaux étagés viennent témoigner de l'existence de lignes de rivage plus récentes et plus basses que le maximum de transgression calabrien (voir par exemple la coupe de Gravitelli, fig. 9, p. 66). 19 Environs de Taormina. Ces traces d'anciens rivages se multiplient, ou plutôt ont été mieux étudiées, dans la région de Taormina. Elles y sont connues depuis longtemps, et C. Gemmellaro, dans son étude du Jurassique de Taormina, signale au Capo S. Andrea et au Capo S. Alessio, un encorbellement horizontal indiquant un stationnement de la mer à 15 mètres : dans leur « Guide géologique des environs de Taor- imina! », MM. di Stefano et Cortese ont de nouveau attiré l’atten- 1 Boll. d. Soc. geol. ilal., vol. X, 1891, p. 197. QUATERNAIRE DE TAORMINA 211 tion sur ces dépôts quaternaires. Mais les renseignements les plus détaillés nous ont été fournis récemment par Limanowskif. Cet auteur attribue à d'anciennes surfaces d’abrasion marine les replats successifs en roche vive, qui peuvent se suivre depuis le Capo di Taormina jusqu’au Monte Venere (884 mètres). Le point le plus intéressant pour nous est la découverte d’une faune marine relative- ment abondante à 155 mètres d'altitude, sur la terrasse du cime- tière de Taormina. Les vingt-deux espèces citées par M. Lima- nowski, d'après les déterminations de M. Scalia, sont toutes des coquilles littorales actuelles, à l'exception de : Dentalium rectum L. (sous le nom de D. Delesserti) et Nassa semistriala Br. var. Edwardsi Fisch. sp.; la présence de ces deux espèces plutôt pro- fondes, dans une faune par ailleurs extrêmement littorale, est assez surprenante ; en tout cas, on sait qu'elles sont bien connues dans le Sicilien. Par son altitude, ce gisement du cimetière de Taormina paraît se rattacher au Quaternaire ancien, antérieur au Sicilien de Palerme. Son indépendance complète d'avec les dépôts pliocènes est à retenir. M. Limanowski a apporté aussi une attention particulière aux traces de lignes de rivage récentes : la plus fraiche, se traduisant par un encorbel- lement dans les rochers, se trouverait à 4 m. 70 à la pointe du Capo di Taormina, à 5 m. 70 au Capo San Andrea, à 5 m. 8o à l’'Isola Bella. Considérant ces traces comme contemporaines, l’auteur y voit la preuve d'un soulèvement, dont l'intensité croîtrait dans ces trois localités, du Sud vers le Nord. La conclusion est peut-être exacte, mais ne me paraît nullement prouvée par les observations de l’auteur. Enfin M. Limanowski rappelle aussi une observation intéres- sante de L. Seguenza ?, d'après laquelle des ossements d'Jippopo- tamus Pentlandi, cimentés par du Quaternaire marin, auraient été trouvés dans une grotte du rocher du château de Taormina (c'est-à-dire à une altitude supérieure à 200 mètres); on aurait donc encore là une ligne de rivage très élevée du Quaternaire ancien. Li M. Limaxowsxi, Sur la tectonique des Monts Péloritains {Bull. de la Soc. vau- doise des Sc. nat., Vol. XLV, n° 165, et Bull. des Laboratoires de Géol., Géog. phys., Mineral. et Pal. de l'Univ. de Lausanne, n° 13, 1909). ? L. SecuewzA, l’Hippopotamus Pentlandi di Taormina (Atti d. Accad. di Se. lett. ed arti degli Zelanti, vol. X, Acireale, 1899-1900). ES PA 21200 QUATERNAIRE DE L'ETNA 2° Région de l'Etna. Les dépôts quaternaires du domaine etnéen se réduisent à des lambeaux de terrasses recouvertes d’alluvions. 7 Les lignes de rivage les plus basses, pourtant, correspondent à des dépôts coquilliers où on n’a d’ailleurs jamais signalé que des espèces vivant dans la mer voisine. Les plus célèbres de ces dépôts récents sont ceux des îles des Cyclopes, au large d’Aci-Trezza : Aradas [4] y a décrit les traces d’un stationnement de la mer à 15-16 mètres d'altitude. Tout près de là, entre Aci-Castello et Santa Maria la Scala, Platamia [191}) a signalé des preuves de l’action de la mer jusqu’à plus de 5 mètres, dans des coulées de laves datant des + temps historiques : il a fait aussi, près de Riposto, des observations analogues. On aurait donc là, dans cette région volcanique, la preuve de mouvements alternatifs très récents, analogues à l'exemple célèbre du temple de Sérapis. Le même auteur signale encore, dans une autre publication !, une ligne de plage, déjà remarquée par Waltershausen, près de la grotte des Palombe (au Nord d'Acireale), à 30 mètres d'altitude. Le long des flancs de l’Etna, et particulièrement sur le versant Sud, le mieux étudié, des conglomérats à galets roulés de roches volcaniques correspondent à des lignes de rivage de plus en plus hautes : c'est dans un de ces dépôts de caïlloutis, à une profondeur de 3-4 mètres, que fut trouvée, d'après Basile |8], une molaire d'Elephas antiquus, dansle Piano Reiïtana, au Nord d’Aci-Castello : d'après la carte topographique, ce plateau de Reitana, remarqua- blement net, correspondrait à un niveau de 80-100 mètres ; la contemporanéité de cet éléphant et de l'ancienne plage quaternaire serait donc, si elle était définitivement prouvée, des plus intéres- santes. D'autres lignes de rivage plus élevées sont visibles çà et là sur le versant Sud de l'Etna (cf. de Lorenzo [84], p. 16); dans les sables et conglomérats de l’une d'elles, à Cibali, M. Scalia (|204], p. 16) signale un Melanopsis sp. et, probablement, la Corbicula fluminalis. 1 PLaranrA, Origine della Timpa della Scala ; contributo allo studio dei burronii vulcanici (Boll. d. Soc. geol. ilal., vol. XXIV, 1go5). QUATERNAIRE DE LA COTE SUD DE SICILE 213 Au Sud de l’Etna, sur les bords de la plaine de Catane, dans la région pliocène des Terreforti, que nous avons décrite plus haut, l'influence de ces lignes de rivage se traduit par des ferrasses d'alluvions dont les plus hautes sont réduites à l’état de lambeaux isolés (Monte Tiriti, 324 m.), tandis que les plus basses sont mieux conservées : tel est le cas pour les magnifiques plateaux à 70-90 mètres qui s'étendent au Sud de Misterbianco. Dans ces alluvions des Terreforti, on connaît depuis longtemps (Lyell) des restes d’Elephas antiquus et d'Hippopotamus Pentlandi!. 3° Environs de Syracuse. Je ne vois pas grand’chose à ajouter à ce qu'a dit Baldacei ([6}|, p. 118) du Quaternaire de cette extrémité Sud-Est de la Sicile : ce sont des grès calcaires ou « panchine » à Peclen jacobæus et opercularis, parfois des conglomérats, qui ne s'élèvent jamais beaucoup, dit cet auteur, au-dessus du niveau de la mer, et forment des plateaux doucement ondulés à des altitudes comprises entre 15-30 et 80 mètres. Nous avons déja décrit ces « panchine » près de la station de Brucoli, où elles ravinent le calcaire miocène; un peu plus au Nord, ce sont des sables à Cardium edule, visibles près du tunnel du chemin de fer, et reposant sur les argiles cala- briennes dont nous avons parlé plus haut. Près de Syracuse, les « pan- chine » reposent sur le calcaire miocène. Plus au S., ce sont elles qui forment en particulier la petite terrasse sur laquelle s'élèvent les ruines de l'Olympeion (lieu dit « le Colonne », sur la carte au 1/100.000°); entre Noto et Avila, elles ravinent les marnes à foraminifères du Pliocène ancien, etc, Nulle part, d’ailleurs, ni les faunes, ni les formes topographiques ne m'ont permis d'arriver à des conclusions intéressantes, $S 6. LA COTE MÉRIDIONALE DE SICILE La côte Sud de la Sicile est de peu d'intérêt pour nous, car on n'y connait pas de faune marine quaternaire un peu abondante. Mais des traces d'anciens rivages s'y montrent, comme à l'ordi- naire, un peu partout. ! Au Musée géologique de l’Université de Catane, on peut en voir qui proviennent des environs de Biancavilla, 214 QUATERNAIRE DE LA COTE SUD DE SICILE - Aux environs de Terranova di Sicilia, on reconnaît immédiate- ment une ancienne terrasse marine à 70-80 mètres d'altitude ; la colline sur laquelle est bâtie la ville en est un fragment détaché, et un témoin isolé encore plus net en est conservé au Monte Lungo, plus à l'Ouest. On voit là des bancs sableux et gréseux, avec conglomérats, à facies très littoral, contenant de petits Dentales et des Ostrea edulis; ils forment un étroit plateau à 70 mètres d'altitude, et reposent, très OR Eon en discordance, sur les argiles bleues calabriennes. Au Sud de la station de Butera, près de la ferme de S. Cristina, un vaste plateau à 80 mètres d'altitude montre des blocs parfois disséminés sur le substratum miocène ou pliocène inférieur. On retrouve donc ici la trace d'un niveau marin à 80 mètres d'allitude environ, si fréquent sur toutes les côtes, et probablement contemporain du Sicilien de Palerme. D'après la carte géologique au 1/100.000, d’autres lignes de rivage plus anciennes seraient indiquées par les hauts plateaux couverts de conglo- mérats (gs de la carte) dans la région du Monte Ursillo, au Nord de Niscemi, à plus de 300 mètres d'altitude. Dans la région de Girgenti, les dépôts quaternaires semblent tous se rattacher à un niveau de base de 70-80 mètres environ, mais ils ne renferment malheureusement pas de faune intéressante ; aussi n’en -parlerai-Je que très brièvement. Contrairement à l'interprétation admise sur la carte géologique, nous avons vu qu'il fallait rattacher au Pliocène, non seulement les grès de la Rupe Atenea, mais encore ceux de la crête des Temples (voir p. 165, fig. 18); mais le petit plateau au Nord de celte crête des Temples nous montre, à go-100 mètres environ, des cailloutis d’ailleurs assez peu visibles, mais certainement quaternaires. On peut mieux les étudier un peu plus à l'Ouest, près de la maison appelée « Casa Granet » sur la carte au 1/100. 000°; des travaux faits pour capter une source montraient là une épaisseur de 4 à 5 mètres d'alluvions à gros ses bien roulés, à l'altitude de 90 mètres environ. - Enfin, tout le plateau qui borde la mer à l'Est de Porto Empedocle est dodniters de dépôts quaternaires qui, arasant le Calabrien, ont déterminé la forme topographique de ce plateau. Nous avons noté plus haut ces formations quaternaires dans le ravin de Pancamo, à l'altitude de 70-80 mètres (voir la coupe fig. 20); en approchant de Porto Empedocle, elles passent à des sables et graviers contenant encore à leur partie supérieure , 200 QUATERNAIRE DE SCIACCA 215 de gros galets roulés ; à leur base, ces sables sont beaucoup plus fins, et stratifiés en couches régulières horizontales ; ils reposent, par ravinement, d’abord sur les marnes bleues pliocènes, ensuite, à l'entrée de la ville, sur les « trubi » en couches inclinées; la discordance et le ravinement qui séparent ces deux formations sont là bien manifestes. Stôhr, qui a déjà décrit [219] un certain nombre de ces faits, a trouvé, dans ces sables quaternaires, des molaires d’éléphant qu'il rapporte à deux espèces : E. antiquus et E. africanus; il est probable que toutes devaient appar- tenir à la première de ces deux espèces, que nous retrouvons ainsi, comme d'ordinaire, associée à un niveau de 70-80 mètres. Pour la réqion de Sciacca nous aurons recours au beau travail de M. di Stefano ! [121]. On peut d'abord retrouver là, d’une manière fort nette, le niveau de 70-80 mètres que nous venons d'étudier à Girgenti. Il est très bien marqué dans la topographie tout le long de la côte, à partir de Siculiana; c’est lui qui, sur la rive droite du Fiume della Ver- dura, forme la terrasse de la Torre di Mahàäuda, dont M. di Stefano a donné une coupe : on y voit des argiles pliocènes inclinées, recouvertes en discordance par des graviers et conglomérats à Pectoncles, Peclen jaco- bæus, Mytilus galloprovincialis, etc. De là, notre terrasse continue, plus ou moins interrompue, jusqu'à la ville de Sciacca, en partie bâtie sur elle. Plus à l'Ouest, elle reparaît d’une façon admirablement nette à la Torre del Tradimento : là, un vaste plateau, à l'altitude de 70 à 80 mètres, est entaillé par la mer en une falaise abrupte où M. di Stefano a reconnu : à la base, les argiles calabriennes, au-dessus (et évidemment en discor- dance), sur une épaisseur de 14 mètres, des grès calcaires à stratification oblique, contenant une petite faunule banale. Rivage Terrasse de Mahaäuda Piano del Possillo . =. | KF1G. 32. — Profil de la côte Sud de la Sicile près de Sciacca, montrant deux plaines côtières quaternaires entaillées dans la série pliocène. (D après la carte au 1/50.000 en courbes de niveau et les indications de M. di Stefano. Echelle des hauteurs et des longueurs : 1/50.000.) On peut retrouver d'une manière analogue des traces de lignes de rivage plus élevées. 1 Interprété conformément aux idées développées dans le présent ouvrage sur la distinction du Pliccène ct du Quaternaire. 216 QUATERNAIRE DE L'EXTRÉMITÉ OCCIDENTALE DE LA SICILE À l’une d'elles, se rattacherait le Piano del Fossillo (ou Fussillo) sur la rive gauche du Torrente Bella-pietra : d'après M. di Stefano, ce plateau est recouvert de conglomérats à Ostrea edulis. Enfin, selon le même auteur, ces mêmes poudingues marins à coquilles vivantes se prolonge- raient bien plus loin, dans la direction de Ribera, Calamonaci, Siculiana, s’élevant ainsi jusqu’à 300 mètres; toutefois, il serait nécessaire ici d’éta- blir leur distinction d’avec le Calabrien supérieur. Toute l’extrémité occidentale de la Sicile, entre Sciacca et Tra- pani, est très ingrate pour l'étude du Quaternaire. Comme nous l'avons vu plus haut (p. 172), il est là impossible de mettre une limite entre les mollasses calcaires du Quaternaire et du Pliocène supérieur. Aussi l'ingénieur Baldaccei s'est-il borné à indiquer, sur la carte géologique, en Pliocène supérieur, tous les plateaux qui dépassent 70-80 mètres d'altitude. Tout ce que l'on peut dire en effet, c’est que le niveau de 70-80 mètres, si nettement développé aux environs de Sciacca, peut se suivre dans la topographie bien au delà vers l'Est : à partir de la Torre del Tradimento, au Capo S. Marco, c’est lui qui forme les plateaux dominant Porto Palo, en particulier la Regione Belice di Mare; on le retrouve très étendu aux environs de Sélinonte; puis, après une interruption où le littoral est bordé de dunes envahissantes qui viennent noyer les cultures, on le revoit aux environs de Mazzaro; là, sur la rive droite du Fiume Arena, près de son embouchure, les mollasses quaternaires reposent directement sur des marno-calcaires blancs qui m'ont semblé se rattacher au Pliocène infé- rieur, Enfin, près de Marsala, la topographie elle-même devient confuse, en même temps que les coupes naturelles sont très rares, QUATERNAIRE DU DÉTROIT DE MESSINE CHAPITRE II LE .DÉTROIT DE MESSINE Les traces des anciens rivages quaternaires sont visibles un peu partout dans le détroit de Messine, sous forme d’anciennes plaines côtières dont les débris subsistent actuellement en donnant des ter- rasses littorales. Leur étude de détail serait extrêmement intéres- sante, mais sortirait un peu du cadre de ce travail. Je me contenterai d insister spécialement ici sur ceux de ces dépôts quaternaires qui renferment des faunes marines caractéristiques; je commencerai par le plus intéressant et le plus célèbre de ces gisements fossili- fères, celui de Ravagnese. $ {. — DES COUCHES À STROMBES DE RAVAGNESE ET BOVETO Les deux gisements voisins de Ravagnese et de Boveto sont situés à l'extrémité amont de la plaine alluviale qui borde la mer au Sud de Reggio, au pied des falaises miocènes supportant le plateau de Gallina. 1° Le gisement de Ravagnese, PI. I, fig. 5. Pour se rendre à ce gisement, on quitte Reggio par la route littorale qui conduit à Pellaro; puis, après avoir traversé la Fiumara di S. Agata, on tourne à gauche par la route carrossable du village de Gallina, que l'on suit pendant un quart d'heure environ. On se trouve alors près de la villa de la baronessa Gagliardi; de petits chemins à droite, dans les champs, conduisent aux premiers affleurements fossilifères. Sous les alluvions torrentielles de la plaine côtière qu'on avait traversée jusque-là, on voit apparaître, en effet, dans les tranchées et les petits vallonnements, des sables fins, blancs, parsemés d’une foule de coquilles marines extrêmement bien conservées; le facies dénote des dépôts sablo- vaseux effectués dans des eaux tranquilles, 218 COUCHES A STROMBES DE RAVAGNESE à une certaine profondeur; l'étude détaillée de la faune nous per- mettra d'arriver sur ce point à plus de précision. En continuant à se diriger vers l’amont, c’est-à-dire vers l'Est, on voit diminuer progressivement l'épaisseur des alluvions torren- tielles qui recouvrent les sables fossilifères, et on peut se rendre compte nettement que ces alluvions ravinent les dépôts marins; en même temps apparaît le substratum sur lequel reposent les forma- tions fossilifères : ce sont les grès mollassiques, blancs, micacés, du Miocène à facies langhien ; le contact est, d’ailleurs, très irré- gulier; des pointements de ces grès miocènes surgissent çà et R, comme des écueils, au milieu des sables quaternaires. Quant à ces derniers, plus on s'écarte de la mer, plus ils deviennent grossiers; on arrive ainsi à de véritables graviers où dominent les grosses coquilles, Strombes, Pectoncles, Spondyles, pour la plupart roulées ; en même temps apparaissent des espèces franchement littorales, telles que : Cardium tuberculatum, Murex trunculus, Patelles, Pholades, etc. Finalement, près du cimetière de Gallina, le Quater- naire se réduit à des amas de gros galets de plages qui dessinent, au pied de la falaise miocène, un véritable cordon littoral encore reconnaissable dans la topographie. Au delà et après une très étroite plate-forme entaillée dans la roche en place, commence une falaise assez escarpée, par où les grès miocènes remontent jusqu'au village de Gallina. Nous avons vu que c'était seulement au-dessus de cette falaise que se développait la série des dépôts pliocènes anciens et calabriens. Par conséquent, cette coupe de Ravagnese, et c’est là son grand intérêt stratigraphique, nous montre des sables contenant, comme nous le verrons, la faune à Strombes, et absolument indépendants de la série pliocène. Mieux que par toute description, cette indépendance est exprimée par la figure 3 de la planche I. On ne peut trouver un exemple de coupure plus nette entre Pliocène et Quaternaire, et il est d'autant plus important d’y insister que, par leur facies, par l’aspect et l’état de conservation de leurs fossiles (et même par leur faune si on l’examine superficiellement), les couches de Ravagnese ne se distinguent en rien des sables fossilifères du Calabrien dans la même région. Beaucoup d’auteurs s'y sont d’ailleurs trompés et je ne crois pas qu'aucun géologue, depuis G. Seguenza, ait fait ressortir les caractères stratigraphiques de ce gisement de Rava- ME COUCHES A STROMBES DE BOVETO 219 gnese, souvent cité pêle-mêle avec tous les gisements calabriens de la région. G. Seguenza avait pourtant fort exactement Jugé de ces conditions de gisement, et sa coupe des collines Ravagnese-Gallina ([206|, p. 338), malgré quelques obscurités ou inexactitudes, est des plus intéressantes. Les termes supérieurs (calabriens) de la série pliocène de Gallina, étaient par lui rapportés au Saharien inférieur, et il a insisté beaucoup sur la discontinuité absolue qui les séparait des couches de Ravagnese, dont il a fait le type de son Saharien supérieur. Cette distinction entre Saharien inférieur et supérieur est même la seule qui puisse vraiment se justifier parmi les trop nombreuses coupures stratigraphiques admises par lui. 20 Le gisement de Boveto. Ce gisement, très peu éloigné de celui de Ravagnese, se présente dans des conditions stratigraphiques tout à fait pareilles; on n'a là, à vrai dire, que deux affleurements séparés d’une seule et même for- mation. La région de Boveto est, en effet, située directement au Sud de la contrée Ravagnese et se trouve, comme cette dernière, à la limite de la plaine côtière alluviale et des collines miocènes. La coupe la plus instructive de ces couches de Boveto est celle qui nous est fournie par le promontoire séparant, près de leur confluent, la Fiumara d'Armo et la Fiumara Cuzzo, affluent de rive gauche de la première (voir la fig. 33). e£ alluvions continentales Hiinnis ces intacte dela 0 Primera de F1G. 33. — Coupe du gisement fossilifère (couches à Strombes) de Boveto, près Reggio. | Ce promontoire est ceinturé d'abord par une {errasse alluviale | qui domine de 15 à 18 mètres le lit actuel de la Fiumara,; elle | ravine naturellement le Quaternaire marin et est plus récente. | Les couches marines les plus basses qui soient visibles sont des sables jaunes très fins, même un peu argileux, où abondent surtout les Lamellibranches à test mince, caractéristiques des fonds vaseux ; ainsi, on peut y ramasser par centaines les Zoripes lacteus L. et 220 COUCHES A STROMBES DE RAVAGNESE ET DE BOVETO Pinna nobilis L., en même temps que de nombreux Tellinidés et Lucinidés. À la partie supérieure, le facies devient plus grossier et la faune s'enrichit en espèces variées, mieux ornées. Finalement, on arrive ainsi à de véritables conglomérats, peu cimentés, dont la base est encore marine, tandis que le sommet est formé d’alluvions continentales recouvertes d’une épaisse couche de limons de ruis- sellement. C’est une série de remblaiement typique. La plaine côtière résultant de ce remblaiement a été ici presque entiè- rement détruite par les érosions postérieures, grâce auxquelles nous avons pu étudier les couches profondes de son soubassement; mais elle est bien conservée plus au Sud; on la voit nettement se dessiner sur la rive gauche de la Fiumara di Boveto, sous forme d'un vaste plateau alluvial, en pente douce vers la mer, à une altitude moyenne de 90-100 mètres; cette topographie est d’ailleurs nettement visible sur la carte au 1/50.000 en courbes de niveau. Enfin, comme à Ravagnese, tous ces dépôts quaternaires viennent s'appuyer sur les mollasses miocènes qui s'élèvent au-dessus en une falaise assez abrupte. 30 Etude de la faune. La continuité stratigraphique qui relie ces deux gisements rend inutile d'étudier à part la faune propre à chacun d'eux; au point de vue paléontologique, les différences qui les séparent sont dues uniquement au facies; à Boveto, on avait un fond plus nettement vaseux, presque lagunaire, ce qui est marqué par l'abondance extrême des Loripes lacteus; à Ravagnese, au contraire, la plage devait être plus ouverte aux courants marins et, de plus, d’une extrémité à l’autre du gisement, on traverse des zones de plus en plus profondes et éloignées de l'ancien rivage. Aussi la faune de Ravagnese est-elle plus variée et plus riche en espèces caracté- ristiques. 1 Par suite d'une interdiction des autorités militaires, les cartes topographiques de détail de la région du Détroit ne sont pas dans le commerce ; maïs, grâce à lobligeance de M. M.E de Martonne et M. Zimmermann, j'ai pu consulter à l'Institut de Géographie de l'Université de Lyon une édition provisoire au 1/50.000 en courbes de niveaux déduite directement des minutes de campagne : la topographie y est rendue d’une façon très précise et saisissante. FAUNES 221 J'utiliserai pour cette étude, d’abord mes propres récoltes, qui m'ont fourni d’abondants matériaux de provenance bien authentique. J’ai eu aussi l’occasion d'étudier, grâce à l’amabilité du Professeur Chevalier Jannacci, les riches collections de l'Institut technique de Reggio, réunies en grande partie par Botti et Mantovani, mais entièrement détruites, quelques mois après ma visite, par le tremblement de terre du 28 décembre 1908; ces collections contenaient malheureusement des mélanges de faunes et de localités, qui m'en ont rendu l'utilisation bien difficile. G. Seguenza ([206|, p. 378) a fait une étude soigneuse des fossiles de Ravagnese et Boveto : on sait que ses collections ont été également détruites. Plus tard, M. de Stefani ([91], p. 213 et suiv.) s’est borné à reproduire, sans adjonctions nouvelles, les listes de Seguenza. Enfin, il faut signaler les travaux plus récents de M. G. de Stefano [108-110|. Le fond de la faune est constitué par des espèces méditerra- néennes encore vivantes!; je ne men occuperai pas ici et c'est plus loin seulement que nous en tirerons parti pour évaluer la pro- fondeur à laquelle se sont déposées les couches qui les renferment. Pour le moment, il me suffira d'examiner les espèces caracté- ristiques au point de vue stratigraphique, lesquelles sont, comme d'ordinaire, des formes éteintes et des formes émigrées. A. — Les formes éleintes. Mes récoltes ne m'ont fourni aucune espèce éteinte, car on ne peut considérer comme telle une espèce nouvelle décrite plus loin (5° partie) sous le nom provisoire de Mactra rhegiensis. Il est beaucoup plus pro- bable que cette forme appartient à un rameau représenté seulement dans les faunes exotiques et momentanément immigré dans la Méditerranée à l'époque des Strombes. En tout cas, je ne puis en faire état 1c1. Seguenza cite comme disparues treize espèces de Mollusques ; mais sa liste doit être beaucoup réduite. — Un certain nombre de ces espèces : Cyphoma bovettensis Ses., Conus subventricosus, Seg., G. rhegi- nus Seg , CG. Mantovani Sec., Mitra cf. Aquini O. G. Costa (citée comme M. scrobiculata Br., var.), Strombus bubonius Lmk. (cité comme S, coronatus Defr.) doivent ètre interprélées comme des formes émigrées. ! Jia liste de toutes les coquilles que j'ai récoltées est donnée dans l'appendice. 222 COUCHES A STROMBES DE RAVAGNESE ET DE BOVETO D'autres, soit : Actæon bovettensis Seg., Cylichna obesiuscula Brugn., Odostomia confusa Seg., Limopsis pygmæa Ph., var. major Seg., ne me paraissent pas suffisamment distinctes de coquilles méditerranéennes vivantes !. : De sorte quil ne nous reste comme espèces éteintes vraiment caractéristiques dans la liste de Seguenza, que : Raphitoma Columnæ Scacchi Arca cf. diluvii Lmk. La première de ces espèces est inconnue partout ailleurs dans les faunes à Strombes. Quant à la deuxième, que Seguenza dit être voisine de la forme miocène (A. furonica Duj.), il est probable qu'elle devait se rapporter à l'A. syracusensis Mayer, qui se trouve jusque dans le Quaternaire de la côte romaine. En tout cas, et c’est surtout ce qui nous importe de retenir ici, on ne rencontre plus à Ravagnese, ni à Boveto, aucune autre des espèces éleintes assez nombreuses qui persistaient encore au Quaternaire ancien ou Sicilien. B. — Les formes émigrées méridionales. . J'ai récolté moi-même à Ravagnese les espèces suivantes : Strombus bubonius Lmk., dont une série magnifique d’exemplaires existait dans les collections de l'Institut technique de Reggio: Conus testudinarius Martini, déjà cité par Seguenza sous ce nom. Tritonidea viverrata Kiener, espèce inconnue de Seguenza. Natica lactea Guilding, citée par Seguenza sous le nom de N. porcellana d'Orb. Ces formes sont à affinités essentiellement subtropicales, incon- nues, tout au moins les deux dernières, dans les faunes antérieures et, par suite, très caractéristiques des couches à Strombes. Trois autres espèces, citées par Seguenza, donnent lieu aux mêmes remarques; ce sont : = Tornatina Knockeri Smith Tritonium ficoides Reeve Cyphoma bovettensis Seg. ! Pour l'examen critique de ces formes, voir V° partie. FAUNES 223 Les deux premières ayant été rencontrées ailleurs dans les couches à Strombes, la véracité des citations de Seguenza s’en trouve confirmée; quant à la Cyphoma, nous verrons plus loin (5° partie) qu'elle doit être aussi interprétée comme une forme émigrée d'origine tropicale; mais elle est encore inconnue partout ailleurs dans le Quaternaire méditerranéen. Quant aux autres formes considérées par Seguenza comme des espèces tropicales, à savoir : Natica orientalis Gmel., Diplodonta Savignyi Vaillant, Loripes Smithii Ses. on verra dans la cinquième partie, à propos de chacune d'elles, que je suis amené à les négliger. Je signalerai enfin, d'après mes propres récoltes, quelques espèces à affinités atlantiques, mais déjà connues dans les faunes méditerranéennes antérieures aux couches à Strombes et, par suite, beaucoup moins carac- téristiques, ce sont : Tapes rhomboides Penn., Mitra cf. Aquini O. G. Costa, Dosinia lupinus L., var. fic:ratiensis nov. (aff. D. lincta Pult.), Pecten maximus L. Enfin, nous rencontrons là, naturellement, toutes les espèces encore méditerranéennes, mais à affinités méridionales, que nous sommes habi- tués à retrouver partout dans les couches à Strombes; mais ici, leur pré- sence est moins caractéristique, car nous sommes, à Reggio, dans le bassin de la Méditerranée Sud. Telles sont : Purpura hæmastoma L., Gassis undulata Gmel., Tritonium cos- tatum Born, Bufonaria scrobiculator L. (liste de Seguenza), Cassis saburon Brug. (collections de l’Institut technique de Reggio), Patella ferruginea Gmel. /id.). Ainsi, cette faune de Ravagnese et Boveto appartient, de la manière la plus typique, à l'horizon à Sfrombes. On ne saurait la confondre, comme l'ont fait jusqu'à présent les géologues italiens, avec la faune sicilienne, ni, à plus forte raison, avec la faune cala- brienne; la variété et l’état de conservation des fossiles lui donnent, il est vrai, au premier abord, des caractères tout différents de ceux 224 COUCHES A STROMBES DE RAVAGNESE ET DE BOTEVO des « panchine » méditerranéennes récentes; mais ici, comme à Tarente, cela est dû uniquement au facies et à la profondeur. « 4 Altitude du rivage de la mer à Strombes. Comme d'ordinaire, nous évaluerons cette altitude en cherchant à reconnaitre la position qu’occupaient, par rapport à l’ancien rivage, les sédiments formés dans la mer à Strombes; nous essayerons ensuite de confirmer notre évaluation par l'étude des conditions bathymétriques de la faune. Le gisement de Ravagnese se présente pour cela dans des conditions exceptionnelles de netteté; comme nous l’avons vu en décrivant la coupe (voir pl. I, fig. 3), les sédiments quaternaires y sont classés, en quelque sorte, par profondeur; c'est vers 40 à 5o mètres d'altitude qu'apparaissent, sous les alluvions, les sables” fins fossilifères ; les dépôts grossiers avec galets et coquilles roulées se trouvent vers go mètres d'altitude. Enfin, le sommet des amas de galets disposés en forme de cordon littoral, près du cimetière, atteint 100 mètres ; ce dépôt est certainement formé sous l’action des vagues et non des torrents littoraux, car j'y ai moi-même récolté, à l'altitude de 100 mètres, des débris rongés et roulés de grands Cônes et de Strombes!. On peut donc, avec une erreur certai- nement inférieure à quelques mètres, fixer à 100 mètres l'altitude maximum alleinte ici par la mer à Strombes. La faune de ces couches est très différente suivant l'altitude des diverses parties du gisement : à go mètres ce ne sont que de grosses. espèces liltorales, souvent à l'état de coquilles roulées : Cardium tuber- cülatum L., Spondylus gæderopus L., Murex trunculus L., Pholas dactylus L., Patelles, etc.; la faune ne s'écarte pas du type habituel des couches à Strombes. Au contraire, dans les parties les plus basses que l'on puisse explorer, c'est-à-dire vers 40-50 mètres?, apparaissent de 1 J'ai eu le plaisir de conduire, en 1908, dans cette localité, M. Depéret, qui a bien voulu s'associer à ces constatations. ? D'après M. de Stefano [rio], on aurait des renseignements sur la faune de couches bien plus profondes à Ravagnese. Cet auteur donne, en effet, une liste d'espèces récoltées, lors du forage d’un puits, à 27 mètres de profondeur, ce qui doit correspondre à peu près à une altitude absolue d'environ 25 mètres, soit 75 mètres au-dessous du niveau de la mer à Strombes. Il y cite en particulier Cassidaria à Le en ALTITUDE DE L'ANCIEN RIVAGE 225 nombreuses espèces que l’on n'est pas habitué à rencontrer dans des dépôts aussi récents; telles sont par exemple : Arca diluvii Lmk., Astartle fusca Poli, Cardium mucronalum Poli, Venus casina L., Turritella communis Risso, etc.. Cette association d'espèces relativement profondes, avec un ensemble de formes littorales, s'accorde bien avec une profondeur de 40 à 50 mètres, qui résulterait d’un niveau de la mer atteignant 100 mètres d'altitude. La faune est ainsi tout à fait analogue à celle de Tarente, et même à celle de Monastir, qui correspondent à des profondeurs à peine plus faibles. A Bovelo, nous avons décrit plus haut, à l'altitude de 90-100 mètres, les restes de l’ancienne plaine côlière correspondant au sommet des couches fossilifères : ils témoignent donc que le maximum positif de la mer à Strombes a atteint là la même altitude qu'à Ravagnese. Mais ici, la faune a des caractères un peu différents, à cause du facies beaucoup plus vaseux : le niveau le plus fossilifère correspond à une profondeur d'une vingtaine de mètres environ; ce sont essentiellement des vases sableuses à Loripes lacleus L., Pinna nobilis L., Gastrana fragilis L. Le caractère littoral est ici marqué, encore plus qu'à Ravagnese, par quelques espèces presque saumâtres : Nassa reliculala var. nilida Jeffreys, et des Tellinidés; l’ensemble rappelle un peu la faune des sables à Tellina planala de Vaugrenier sur la côte du Var. Mais, et c'est sur ce point que je veux encore insister, ces faunes de Ravagnese et Boveto ont un caractère d'ensemble tout différent de celui des faunes profondes calabriennes, avec lesquelles on les a si souvent confondues : on n'y trouve pas le Turbo peloritanus Cantraine, la Massa limata Chemn., le Buccinum humphreysia- num Bennet, ni ces Astarle sulcata da Costa, si abondantes par exemple dans les gisements des Archi (Monte Corvo). Visiblement, cette différence dans les faunes correspond à des conditions géogra- phiques tout à fait autres : c'est dans la mer actuelle, seulement un echinophora Lmk., l'erebratula minor (?) Phil., Buçcinum sp., Dentalium elephanti- num L.[= D. rectum L.]. Cette dernière surtout est une espèce profonde sicilienne, dont la disparition de la Méditerranée est certainement très récente. Peut-être de ce même puits provenaient aussi plusieurs Buccinum humphreysianum Bennet que J'ai vus dans les collections de l'Institut technique de Reggio, avec l'indication « Ravagnese ». Mais, outre l'hypothèse d'un remaniement, il peut arriver aussi qu'on ait affaire là, en dessous des couches à Strombes, à un lambeau de formations plus anciennes. De sorte que je m'abstiendrai de tirer parti de ces données, lesquelles d'ailleurs ne modifieraient pas nos conclusions, sauf en ce qui concerne la persis- tance jusque dans les couches à Strombes, du Dentalium reclum L. Univ. De Lxon. — Gicwoux 10 226 QUATERNAIRE DU DÉTROIT DE MESSINE peu surélevée, que se sont déposées les couches de Ravagnese et Boveto, et nous retrouvons non loin du rivage actuel toutes les particularités de l’ancien rivage, C’est une mer toute différente, et une géographie lointaine et encore obscure, qui correspond au con- traire aux couches calabriennes supérieures du Détroit. $ 2. — LES TERRASSES QUATERNAIRES DU DÉTROIT DE MESSINE Un simple coup d’œil sur les cartes topographiques de détail (voir la note, p. 220), montre immédiatement, le long des rives du Détroit, et particulièrement de la rive calabraise, des pla- teaux en pente douce vers la mer, contrastant vivement avec les formes jeunes et vigoureuses dues à l'érosion récente. Ce sont des fragments d'anciennes plaines côtières ; leur pente, qui est de l’ordre de 3 ou 4 pour 100, est ainsi comparable à celle de la plaine côtière actuelle. À leur extrémité amont, elles sont dues surtout à un arase- ment de la roche en place, recouverte par un mince voile d’allu- vions continentales ; quand on y descend vers l'aval, on voit l’épais- seur des alluvions augmenter, et celles-ci passer à des dépôts de deltas fluvio-marins, et parfois à des sables marins fossilifères. La détermination exacte du niveau de base sous lequel ont pris naissance les différentes plaines côtières est un problème beaucoup plus difficile qu’il ne semble au premier abord : à cause de leur forte pente, l'altitude de leur surface ne conduit qu’à une évaluation grossière : 1l serait nécessaire d’y examiner un grand nombre de coupes, de manière à y bien délimiter les facies marins et conti- nentaux. Je me contenterai donc ici d'indications générales, en commençant par le Sud. Sur la rive gauche de la Fiumara di Vallanidi, la carte montre les indices de deux terrasses : l’une à go mètres environ, au Sud-Est de S. Leo, correspond probablement à la mer à Strombes; l’autre, à 150 environ, se montre dans la région T'rapezi. _ Sur la rive droite de cette même Fiumara di Vallanidi, on trouve d’abord, vers l’amont, au Nord-Est de S. Giuseppe, une terrrasse bien nette à l’altitude de 270-300 mètres; on n'a ici qu'une couverture très mince d’alluvions, reposant sur les marnes sableuses à Brachiopodes du Pliocène. Cette même terrasse, nettement accusée dans la topographie, se pour- TERRASSES 221 suit visiblement jusque dans le plateau de Galiina, où l’on voit également une mince couche de cailloutis et de limons rouges recouvrir les marnes et sables du Pliocène ancien étudiés précédemment (voir la coupe fig. 3, pl. I). Cette ancienne plaine côtière de S. Giuseppe, Contrée Arelena, Gal- lina, est une des mieux individualisées de toute la région : on la voit encore au Nord de la Fiumara di S. Agata, en face de Gallina, dans la contrée La Sala, où elle tranche horizontalement les couches ondulées du Miocène. Enfin, après une longue interruption, c’est peut-être elle qu'on retrouve à l'Ouest de Gallico, dans la région Bruzzano et dans la Pianura di Sambatello. Comme on n'y connaît pas de sédiments marins, il est difficile de préciser la hauteur de la ligne de rivage correspondante, mais il est très probable qu’elle était au plus de 200-250 mètres. Comme terrasses plus basses, nous avons déjà vu, sur la rive droite de la Fiumara di Vallanidi, une plaine alluviale qui paraît bien dater de l'époque des Strombes. Dans la contrée Ravagnese, à l'écart des grands courants torrentiels, il n’y a, au contraire, que des restes d'anciennes plages : la mer venait battre directement le pied des falaises de Gallina. La crête qui sépare, près du village de S. Speralo, les deux vallées de la Fiumara di S. Agata et du Torrente Calopinace, montre deux terrasses superposées, très mal indiquées sur la carte topographique, mais nette- ment visibles si on examine cette crête de profil : la plus haute, se termi- nant à l'aval à 100 mètres environ, est peut-être de l’âge des Strombes ; l'inférieure, qui ceinture la base du promontoire séparant les deux fiumare, correspond peut-être aux bas niveaux d'alluvions indiqués sur les coupes de Boveto (fig. 33) et de Ravagnese (fig. 3, pl. I). C'est probablement à cette haute terrasse de S. Sperato, que se rattache une très belle terrasse développée au Nord du Torrente Calopinace, et sur les pentes de laquelle est bâtie en amphithéâtre la ville de Reggio; nous l’appellerons la terrasse de Condora (ou Cundaro) ou du Cimetière de Reggio. Son soubassement peut être étudié facilement dans les ravins qui découpent son versant Sud; on le voit formé de couches marines, sables argileux et graviers alternant avec des lits de poudingues; G. Seguenza y avait déjà rencontré des coquilles marines, et surtout un éléphant qu'il désigne sous le nom d'Æ. armentacus Fale. ; il a insisté sur le fait que cet éléphant provenait indubitablement des dépôts marins, et donné même (|206|, tav. III, sez. 3) une coupe de ce gisement. Plus tard, les molaires de cet éléphant ont été décrites et figurées par Luigi Seguenza (|212|, pl. I, fig. 1-2), qui y a reconnu un Ælephas antiquus Falc.. J'ai d'ailleurs moi-même trouvé des fragments de défense dans 228 QUATERNAIRE DU DÉTROIT DE MESSINE la même région, sur la route de Reggio à la bourgade de Spirito Santo. D'après son altitude, cette terrasse du cimetière de Reggio paraît à peu près contemporaine des couches à Strombes de Ravagnese; les allu- vions continentales qui couronnent la série marine s'élèvent de go à 130 mètres environ, et le sommet des dépôts marins doit atteindre 80 ou 90 mètres, c'est-à-dire une altitude voisine de celle de l’ancienne plage de Ravagnese. Il est intéressant de pouvoir y confirmer la présence de l’Elephas antiquus. Un petit lambeau isolé d’une terrasse marine de 100 mètres est conservé un peu au Sud des Archi, à S, Francesco, contre l'extrémité Nord-Est du massif du Pentimele. Là, sous des alluvions continentales formant à 100 mètres un étroit plateau, on voit des poudingues marins alterner avec des couches sablo-marneuses pétries de Cardium edule : ces forma- tions quaternaires, dont l'épaisseur ne dépasse guère 5 à 10 mètres environ, sont en couches bien horizontales et reposent en discordance sur des sables marneux à Buccinum undatum fortement inclinés vers la mer et dépendant de la masse calabrienne du Monte di Pentimele (voir fig. 11, P: 80). esse 4 100- LEE 3 a a A Fic. 34. — Coupe d'une ancienne plage quaternaire à S. Francesco (versant Nord-Ouest -du Monte di Pentimele), près Reggio. 4. — Alluvions continentales SAR met PR Ù 3. — Couche pétrie de Cardium edule. … … . … . Quaternaire. 2. — Poudingues durs avec bancs sableux . . . . ; 1. — Sables marneux à Buccinum undalum : . . Calabrien. C'est un exemple fort net de discordance entre Pliocène et Quaternaire (voir la fig. 34). Malheureusement, ces dépôts quaternaires ne renferment pas de faune caractéristique; on en est réduit à des conjectures pour savoir s'il s’agit du Sicilien ou de la zone à Strombes, car l'altitude constitue, dans cette région sismique, un critérium particulièrement délicat à appliquer [141], I faut remonter ensuite bien plus au Nord pour trouver: des traces très nettes de terrasses quaternaires : ce sont les plateaux traversés par le cours inférieur de la Fiumara di Catona, Sur sa rive droite, s'étend la N $ var RÉSUMÉ 229 magnifique terrasse de Campo di Calabria (voir fig. 14, p. 105) ; celle-ci se termine à 130 mètres d'altitude environ, au-dessus de Villa S. Gio- vanni : son soubassement est formé de cailloutis avec des intercalations sableuses fines qui en montrent l'origine marine. Vers l’amont, la couver- ture d’alluvions continentales augmente d'épaisseur, et vient s'appuyer, comme nous l’avons vu plus haut(p. 105), contre les collines de Musalà, | dont elles ravinent les sables calabriens. Au delà du ruisseau de Musalà, dans les Piant di Lirari, à 200 mètres d’altitude, ce n’est plus qu'une | mince couche d'alluvions, nivelant les marnes blanches et les sables à Brachiopodes du Pliocène. Sur la rive gauche de la Fiumara di Catona, le | prolongement de la lerrasse de Campo se retrouve évidemment, à 130- 150 mètres d'altitude, dans le Piano d'Arghilla ou d'Argala, que je n'ai pas visité. | | | | | | | | | En résumé, si nous cherchons maintenant à synthétiser toutes ces observations, en évitant toute hypothèse implicite, nous pour- rons présenter les faits de la manière suivante : Il existe, le long de la côte calabraise du Détroit, une première série de terrasses, indiquant d'anciens niveaux de base à des altitudes voisines de 100 mètres. Ce sont, en allant du Sud au Nord : la Regione Trapezi, le plateau au Sud de Boveto, la terrasse de 5, Francesco, les plateaux d'Arghilla et de Campo di Calabria, L'ancien rivage de la mer à Strombes à Ravagnese atteignant 100 mètres de hauteur, il est naturel de supposer que celles de ces | terrasses qui sont voisines de Ravagnese sont bien contemporaines des couches à Strombes. | Mais par contre, la terrasse « sicilienne » de la côte Nord de la Sicile, arrive à la Pointe du Faro, à l'entrée même du Détroit | (contrée Mortelle), à une altitude également voisine de 100 mètres. | Donc, parmi ces terrasses du Détroit de Messine, celles de la partie | Nord du Détroit doivent être siciliennes ; tel serait le cas en parti- | culier pour celle de Campo di Calabria, et du plateau d’Arghilla, qui fait face à la Pointe du Faro, et semble déjà montrer, d'ailleurs, | un léger relèvement. | Dès lors, deux hypothèses sont possibles : | 1° On peut négliger ces variations d'altitude et considérer toutes ces terrasses comme contemporaines : puisqu'au Nord elles se rac- cordent à une terrasse « sicilienne », et qu'au Sud elles se relient | aux couches à Strombes, il en résulterait que les couches à 230 QUATERNAIRE DU DÉTROIT DE MESSINE Strombes de Ravagnese seraient siciliennes : une faune chaude typique à Sérombus bubonius serait ainsi contemporaine de la faune froide classique du Sicilien : c’est une conclusion à laquelle, je crois, la plupart des géologues français ne sauraient souscrire, d'autant plus qu'il est facile d’y échapper par une autre hypothèse; 2° On est, en effet, très naturellement amené à supposer que l’ancien rivage sicilien du Nord de la Sicile, lequel semble déjà se relever avec la terrasse de Campo, continue à s'élever vers le milieu du Détroit : 1l viendrait ainsi passer bien au-dessus du niveau de la mer à Strombes de Ravagnese : ces couches de Ravagnese auraient, elles aussi, subi là une surélévation locale et, malgré leur altitude, elles seraient post-siciliennes; quant à la terrasse sicilienne, on pourrait, aux environs de Reggio, en retrouver les traces, par exemple, dans les terrasses à 250 mètres que nous avons décrites plus haut (Région Bruzzano, Pianura di Sambatello, contrée La Sala, village de Gallina, Nord-Est de S. Giuseppe di Vallanidi). Mais il faut bien reconnaître qu'aucun argument paléontologique ne peut être apporté à l'appui de ces détermina- tions d'âge. Enfin, dans la même région, on retrouve encore des indices de niveaux de base plus élevés, échelonnés en contre-bas du maximum de remhl'uement pliocène (voir les alluvions élevées dans les coupes de Reggio-Terreti, pl. IL, fig. r, de Gravitelli, fig. 9, p. 66, et de Gallina, pl. I, fig. 3). On ne connaît donc pas, avec certitude, dans cette partie centrale du Détroit (à la latitude Reggio-Messine) de formations marines intermé- diaires entre celles du Calabrien et celles des couches à Strombes! : ces niveaux intermédiaires ne sont représentés que par des terrasses d’allu- vions continentales. Il est donc possible que pendant le début du Quater- naire et le Sicilien, le Détroit de Messine ait été momentanément fermé, soit par suite d’un soulèvement, soit par l'avancée des plaines côtières qui auraient réuni, à cette époque, la Sicile au reste de l'Italie. Il y aurait là une analogie de détail très curieuse avec le cas du Détroit de Corinthe, ‘ étudié récemment par M. Depéret. 1 En admettant, comme je l'ai fait plus haut (p. 95), que les sables marins de Carrubbare, près Reggio, se rattachent au Calabrien, et non à une ancienne ligne de rivage quaternaire (qui se trouverait alors à 200-250 mètres d'altitude). E LA COTE TYRRHÉNIENNE 231 En tout cas, on peut considérer comme bien définitivement acquis un fait extrêmement important : la faune typique à « Strombus bubonius » se retrouve à Ravagnese, près Reggio, dans un ancien rivage à 100 mètres d'altitude. Comme nous le verrons plus loin, cela ne peut guère s'expliquer qu'en admettant l'existence, dans le centre du détroit de Messine, d'une sorte de bombement anticlinal récent, ayant affecté même les couches à Strombes. CHAPITRE II LA CALABRE $ 4. — LE QUATERNAIRE SUR LA COTE TYRRHÉNIENNE Dans une étude, publiée en 1909, sur la morphologie de la Calabre [143], j'ai déjà parlé assez longuement de la morphologie de la côte tyrrhénienne. J’ai émis ainsi l'hypothèse que les replats successifs, qui constituent un des traits caractéristiques de cette morphologie, étaient attribuables à une structure en gradins étagés. dus à des effondrements déjà décrits par Suess : j’ajoutais toutefois que les plus inférieurs de ces gradins étaient constitués par d’an- ciennes lignes de rivage quaternaires. Ce sont ces dernières seules qui nous intéressent ici. Aussi bien est-ce là seulement que l'on a trouvé des faunes marines quaternaires!; elles tendent à nous prouver l'existence, tout le long de la côte, d’une ligne de rivage à l'altitude constante de 100 mètres environ. Il est naturel d'y voir le prolongement de la ligne de rivage d'âge sicilien qui court tout le long de la côte Nord de la Sicile jusqu'à la Pointe du Faro. Et dans le golfe de Gioia, à Rosarno, nous retrouverons en effet une faune sicilienne suffisamment typique. Nous poursuivrons notre description du Sud au Nord. ! Cf. Correse [49] et Gicnoux, Ancora due parole sulla morfologia della Calabria (Rivisla geografica ilaliana, anno XVIII, fase. X, 1911). 232 QUATERNAIRE DE LA CALABRE 1° Au Sud du golfe de Gioia, Je n'ai pas visité personnellement cette païtie de la côte, et je me contenterai d'utiliser ici les renseignements qui nous sont fournis par M. de Stefani ([91], p. 252). Tout d’abord, un certain nombre de formations littorales, situées près du niveau actuel de la mer, doivent probablement être rapportées à des lignes de rivage récentes et très basses (30 mètres ou au-dessous). Telles sont, par exemple, les « pan- chine » de la côte entre la Marina di S. Gregorio et Sailla. Mais une série beaucoup plus importante de dépôts quaternaires marins paraît se rattacher au niveau de 100 mètres, c’est-à-dire à l’an- cienne ligne de rivage sicilienne que nous avons suivie sur toute la côte Nord de la Sicile. Tel est le cas pour les « panchine » et les conglomérats signalés par M. de Stefani entre Torre Cavallo et Scilla. En face de Scilla, ces dépôts forment une très belle terrasse, nettement marquée dans la topographie : c'est le Piano della Lutra, continué par d’autres replats plus à l'Est. Enfin, c'est peut-être à la ligne de rivage de 100 mètres, et par conséquent au Sicilien, qu'il convient dé rattacher un gisement signalé par M. de Stefani (loc. cit., p. 232), près de Palmi; ce géologue déclare malheureusement n'en pas connaître là position précise : il serait situé « près de la mer », c'est-à-dire probable- ment à une faible altitude. La faune y contient les formes septentrionales les plus caractéristiques des faunes siciliennes, que nous allons retrouver un peu plus au Nord, à Rosarno, par exemple: Neptunea Sinistrorsa Desh. — Fuüsus contrarius auct:, Buccinüum humphreysianum Benn., var. ventricosa Kicner, Ghlamys septemradiatus Müll. — Pecten peslutræ L., Dosinia lupinus L., var. aff. D. lincta Pulin. Il est peu probable qu'il s'agisse de Calabrien, lequel est inconnu sur cette partie de la côte. Plus au Nord, on ne connait pas de gisements fossilifères, mais l'ancienne plane côtière reste bien nettement marquée dans la topographie (voir la carte au r1/50.000) jusqu'au Sud de l'embou- chure du Fiume Petrace. ROUTES SICILIEN DE ROSARNO 233 20 Le golfe de Gioïa et le gisement de Rosarno, Le golfe de Gioia s'ouvre entre le massif du Capo Vaticano, au Nord, et l'extrémité de l’Aspromonte, au Sud ; le fond en est occupé par une vaste plaine marécageuse, où se confondent les alluvions modernes des fleuves Metramo, Marepotamo et Mesima : presque au centre de cette plaine s'élève, sur uñe butte isolée, le village de Rosarno. Mon attention fut tout d'abord attirée sur cette région de Rosarno par l'examen de la carte topographique. On ÿ reconnait en effet au fond du golfe une vas{e lerrasse plus ou nioins morcelée, qui demeure sur de grandes étendues à des altitudes sensiblement constantes de 30 à ioo mètres (en particulier Bosco di Rosarno, Regione Mala, etc.) ; la colline de Rosarno est justement un témoin détaché de cette terrasse; d'autre part, M. de Stefani déclarait avoir récolté des fossiles « en face de Rosarno, sur la rive droite du Metramo », dans des sables postpliocènes en couches horizontales formant le soubassement de cette terrasse. J'étais donc amené à prévoir, en quelque sorte, l'existence du Sicilien dans cette région de Rosarno ; c’est ce que m'a confirmé l'étude de ces gisements et de leur faune. De belles coupes s’observent dans les collines séparant, près de leur confluent, les Fiumi Marepotamo et Metramo, et spécialement sur leur versant Nord (voir la coupe, figure 35). 907 A TOUT TE + Gravters Fiurie Marepotamo LE : 60 ° Aïgiles bleues Plastiques FiG. 35. — Coupe de la terrasse de Rosarno (Sicilien), près du confluent des fleuves Marepotamo et Metramo. Là, au-dessus du fond plat ét argileux de la vallée, à 30 mètres d'altitude environ, s'élève une falaise .abrupte : à la base, on voit à peine affleurer des argiles bleues plastiques sans fossiles. 234 QUATERNAIRE DE LA CALABRE Puis la partie inférieure de la falaise est formée de sables très fins, même suffisamment argileux pour qu'ils aient pu être exploités par des briqueteries (sur le versant Sud de ces collines) : dans ces sables, à l'altitude de 35 mètres, se voit un banc horizontal très régulier, pétri de fossiles, en particulier de Cyprina islandica L., Chlamys opercularis L., Cardium echinatum L. var. En s’élevant dans la falaise, on voit les sables devenir de plus en plus grossiers, passer à des graviers et finalement à des conglomérats à petits éléments, dont la couche superficielle rubéfiée forme les grands pla- teaux qui s'étendent tout autour à l'altitude de 75-80 mètres environ. Une carrière abandonnée, sur le versant Sud de ces col- lines, le long de la route de Rosarno à Laureana, montre très net- tement la superposition, en continuité parfaite, des graviers aux sables argileux. Un autre gisement tres riche en Cyprines se trouve sur la route de Rosarno à Limbadi, sur la rive gauche du Torrente Mammella, dans la contrée Janni. Notre terrasse de Rosarno vient se terminer vers le Nord, non loin de là, à 120 mètres d'altitude environ, dans la région Santa Maria, et la route de Rosarno à Mileto montre là encore une coupe de son soubassement. Au delà, on se trouve directement dans les marnes du Pliocène ancien, sans interposition de Pliocène supérieur; ainsi, bien qu'on ne puisse voir nettement le contact, 1l semble qu'il y ait discon- tinuité entre les dépôts de la terrasse de Rosarno et ceux de la série pliocène. La faune de Rosarno. On trouvera dans l’appendice la liste de toutes les espèces que j'ai récoltées dans le soubassement de la terrasse de Rosarno; M. de Stefani ([yr], p. 233) en avait déjà cité trente-cinq. Les formes caractéristiques sont malheureusement peu nom- breuses : comme espèces: éteintes, on ne trouve guère que les suivantes : Dentalium rectum L. Nassa musiva Br. cette dernière déjà citée par M. de Stefani. Comme formes septentrionales (dont aucune n'est citée par M. de Stefani), j'ai récolté en abondance : SICILIEN DE ROSARNO 235 Chlamys septemradiatus Müll., Cyprina islandica L., Dosinia lupinus Poli, var. ficaratiensis nov. (aff. D. lincta Pultn.), Bucci- num humphreysianum Benn. Ces formes sont précisément toutes communes dans le Sicilien de Palerme. Et on peut citer encore d’autres coquilles qui, par leur abondance, con- tribuent à donner à l’ensemble de la faune des analogies frappantes avec celle de Ficarazzi ; telles sont : Cardium echinatum L., var. mucronata Poli sp., var. Deshayesi Payr. sp., var. propexa Mts.sp.,Isocardia cor L., Chlamys opercularis L., Venus multilamella Lmk.,Nassa limata Chemn.,Turritella tricarinata Br., var. communis Risso sp., etc. Néanmoins, la faune paraît moins profonde qu'à Ficarazzi : il y manque par exemple les Trochus granulalus, les Astartes, etc. Et en effet, en admettant que la ligne de rivage sicilienne soit ici à 80 mètres d'altitude environ, les couches dont nous étudions la faune se seraient déposées sous une cinquantaine de mètres d’eau. Ainsi, s{raligraphiquement et paléontologiquement, les couches de Rosarno sont quaternaires et très probablement siciliennes. La terrasse de Rosarno est un reste d’une ancienne plaine côtière cor- respondant à un niveau de base de 80 mètres environ, et dont la formation a dû se dérouler d'une manière identique à celle de la plaine côtière que nous voyons s’agrandir actuellement. L’érosion récente a morcelé cette plaine côtière ancienne, et les lambeaux étendus qui en subsistent encore sont faciles à reconnaitre sur la carte topographique : Bosco di Rosarno, collines de Paparati et de Rosarno, plateau de Feroleto, Regione Mulo, plateau de Massara, Regione Janni, Regione Sovverito, etc. 3° Le massif du Capo Vaticano. Ce massif est classique pour l'étude des ferrasses calabraises: considérées comme les traces d'anciens rivages quaternaires par Cortese, leur âge remonterait au contraire, d'après de Stefani [91], au ‘9 Miocène ; j'ai moi-même |143| suggéré l'hypothèse que les plus 236 QUATERNAIRE DE LA CALABRE élevées d’entre elles, comme celles de l’Aspromonte, sont dues à des effondrements en gradins successifs !. Mais il existe dans cette partie de la côte, au voisinage de la mer, un replat régulier, qui représente certainement une ancienne plaine côtière du niveau de 80-100 mètres : il est recouvert de caïlloutis et conglomérats qui ravinent indistinctement tous les dépôts plus anciens, y compris le Pliocène, représenté par des lambeaux de marnes blanches à foraminifères (d'après de Stefani ces marnes devraient être considérées comme miocènes ?). La topographie de cette partie basse de la côte est donc tout à fait identique à celle du rivage Nord de la Sicile : spécialement nette, à ce point de vue, est la région comprise entre le Capo Vaticano et Tropea. On n'y connaît malheureusement point de faune marine d'une manière bien certaine ; il est possible pourtant qu’à cet ancien rivage (Sici- lien ?) puissent se rattacher des fossiles récoltés à Tropea par l'ingé- nieur Rottini, et que J'ai pu examiner au Musée Géologique de l'Université de Naples : ce sont des coquilles très littorales, dont beaucoup ont conservé leurs couleurs: Columbella rustica L., Conus mediterraneus Brug., Cerithium vulgatum L., Pa- telles, etc. Quant à la panchina récente que M. de Stefani ([g1], p. 253) signale près du château de Bivona, elle est sans doute attribuable à une ligne de rivage beaucoup plus récente, car elle est située à quelques mètres seule- ment au-dessus du niveau de la mer, et renferme une faune strictement littorale. 4° Le golfe de Santa Eufemia, Dans ce golfe, symétrique du golfe de Gioïa par rapport au massif vaticän, on.pourrait s'attendre à rencontrer aussi une terrasse marine sicilienne, analogue à celle de Rosarno. En réalité, l'âge des formations marines qui affleurent là est assez difficile à préciser. Au point de vue topographique, on reconnaît dans le fond du golfe l'existence de deux niveaux assez bien caractérisés : le plus 1 Voir aussi, outre les nombreuses publications de E. Contese, T. TAnAMerur [220] et M. Giexoux : Ancora due parole sulla geomorfologia della Calabria (Rivisla geografica ilaliana, Anno XVIII, fase. X, 1grr). | ? Voir plus haut, p. 59. CALABRE SEPTENTRIONALE 231 élevé se trouve à une altitude voisine de 200 mètres ; c’est Lui qui forme les plateaux du Monte S. Maria, dont le soubassement renferme, près du pont sur le Fiume Amato (route Nicastro-Pizzo), une faune pliocène supérieure (voir p. 39); cette ancienne surface de remblaiement, qui se prolonge au Nord-Ouest vers Pianopoli et Zancarona, correspond donc à la fin du Calabrien. En dessous, une deuxième terrasse, à 100 mètres d'altitude en- viron, est visible de part et d’autre du Stretto Veraldi, et sur la rive droite du Fiume di S. Ippolito, dans la région Lenza- Torre Sacco-Lenti, d'où elle remonte jusqu'au dessus de la station de Feroleto antico, à 140 mètres environ ; retrouve plus au Sud dans les régions de Serratura et Brunini, à l'Est de la station de S. Pietro a Maida. Cette terrasse de 100 mè- tres est couverte d’alluvions : près de la station de Feroleto antico, un autre lambeau s’en des tranchées montrent que ces alluvions ravinent des argiles sableuses calabriennes, prolongement de celles du Monte S. Maria ; près de Brunini et de Serratura, elles sont très épaisses, contiennent des blocs de gypse très peu roulés, et reposent (en discordance ?) sur les assises ondulées et inclinées du Calabrien à Brachiopodes, formant le soubassement du plateau de Brunini ; enfin, dans la région du Stretto Veraldi, elles paraissent concordantes avec des argiles bleues, très fossilifères sur la rive gauche du Fiume di S. Ippolito. Peut-être ces argiles sont-elles siciliennes ? Mais leur faune, citée dans l’appendice, est absolument banale, et, à moins de faire intervenir des caractères négatifs, ne permet pas de décider entre Calabrien supérieur ou Sicilien. En somme, Je ne puis encore affirmer, dans le golfe de S. Eufe- mia, la présence du Sicilien marin; mais on y constate en tout cas l'existence d'une nappe alluviale, répondant à un niveau de base d'environ 80-109 mètres. àä° La Calabre septentrionale. La topographie de cette partie de la côte, depuis le golfe de S. Eufemia jusqu’à la province de Naples, est pareille à celle que nous avons vue au Capo Vaticano ; des gradins {rès élevés peuvent être interprétés comme dus à des effondrements ; au contraire, les terrasses inférieures représentent encore une ou plusieurs lignes de 238 QUATERNAIRE DE LA CALABRE rivage, à des altitudes non supérieures à ro0 mètres ; elles ont été surtout étudiées par Cortese [47, 49, 51, 52] et par Salmoyjraghi [201]. Je n'insisterai pas ici sur cette région, car on n'y a point découvert de faunes marines. $ 2. — LE QUATERNAIRE SUR LA COTE IONIENNE 1° Calabre méridionale. Entre l'isthme de Catanzaro et l'extrême pointe méridionale de la péninsule, la côte calabraise montre presque partout, de la manière la plus nette, les traces d'un ancien rivage quaternaire à 80-100 mètres d'altitude ; provisoirement, en l'absence de faune bien caractéristique, nous pouvons le rapporter au Sicilien. Je vais citer ici, en allant du Sud au Nord, les régions où ces formations sont les plus nettes. Fuchs [132] a reconnu près de Gerace, au-dessus de la plage actuelle, des cailloutis discordant avec toutes les formations anté- rieures : il les rapporte au Quaternaire ou « Diluvium », et ils doivent, au moins en grande partie, se rattacher à notre niveau de 80-100 mètres. Aux environs de Monosterace, l’ancienne plaine côtière, très reconnaissable dans la topographie, est encore marquée par des dépôts de grès calcaires fossilifères ou panchine. Ces formations étaient connues de G. Seguenza, qui les a indiquées sur la carte géologique des environs de Stilo jointe à son mémoire [206]. M. de Stefani ([91|, p. 251) en a aussi parlé avec quelques détails: il les signale à la Torre S. Fili, près de la station de Riace, à la Torre di Riace et à la Torre l’Ellera : leur altitude maximum est, d’après lui, de go mètres; la carte topographique montre là, dans la région lerettano, un immense plateau à 100 mètres, témoin magnifique de l’ancienne plaine côtière. Sur la rive gauche de la Fiumara di Stilaro, j'ai personnellement étudié ces formations entre Monosterace et la mer, où G. Seguenza les avait également indiquées sur sa carte géologique. La coupe fig. 7 (p. 49) montre ici leur disposition stratigraphique. Les pentes qui dominent la plage actuelle sont formées de marnes blanches plaisanciennes à MARCHESATO 299 Nuculidés; au-dessus, et ravinant ces marnes, viennent des gravters el cailloutis de plage, dont la partie supérieure forme ur grand plateau partant de 70-80 mètres près de la mer, ce plateau remonte en pente douce vers l’intérieur. À 80-90 mètres d'altitude, on y voit des blocs énormes atteignant près d'1 mètre de diamètre; cela nous indique l'approche de l’ancien rivage. Celui-ci devait être près du château de Monosterace, où les conglomérats de la plaine côtière s'élèvent jusqu’à 130 mètres environ et sont dus probablement aux anciens alluvion- nements des Fiumare Assi et Stilaro. Vers le Nord, le prolongement certain de cette plaine côtière peut se suivre dans le Monte Moturavolo, la Regione Vincerello, la Regione Borgorosso, et bien au delà jusqu’à Soverato, où elle supporte le village supérieur. Les cartes topographiques nous montrent ensuite ce même replat, à 70-100 mètres, continu tout le long de la côte entre le Capo Stal- letti et le Fiume Corace. Sur la rive gauche de ce fleuve, la colline qui domine la Marina di Catanzaro a son sommet constitué par des sables jaunes recouvrant en discordance les argiles pliocènes et formant plateau à 8o mètres d'altitude. Là, A. Neviani [183] avait déjà signalé les cailloutis quaternaires « con stratificazione discordante evidentissima sopra le sabbie e le argille phioceniche ». Enfin, plus à l'Est, des lambeaux bien conservés de cette ancienne plaine côtière (par exemple, les plateaux à 70-110 sur les deux rives du Fiume Simeri, près de son embouchure) nous conduisent jusqu'à la région de Cotrone, où le Quaternaire mérite une étude spéciale. 2 Région de Cotrone (Marchesato). (PI. IL, fig. 3.) La péninsule massive qui, au Sud de Cotrone, se termine en mer par les pointes des Capo Colonne, Capo Cimiti, Capo Rizzuto, Capo Castelle, mérite de devenir une terre classique pour l'étude du Quaternaire marin. Comme nous l'avons déjà indiqué plus haut (p. 122), les argiles plaisanciennes y sont nivelées et arasées par d'immenses plates-formes, recouvertes de Quaternaire marin. Ce sont les restes d'anciennes plaines côtières, conservées ici sur de grandes étendues. Car, par suite de sa situation en marge de la grande chaîne calabraise, le Marchesato a échappé à l'érosion des 240 QUATERNAIRE DE LA CALABRE fleuves descendant des montagnes. Nous étudierons ces plateaux quaternaires aux points de vue topographique, stratigraphique et paléontologique. A. — Au point de vue topographique, l'excellente carte au 1/50.000 du Service géographique militaire montre avec une grande netteté que tout le Marchesato est formé de vastes plateaux, en pente très douce vers la mer, séparés les uns des autres par des falaises assez escarpées, et entaillés profondément par les vallées actuelles. On voit, en outre, immédiatement, que ces plateaux se répar- tissent entre frois niveaux, dont deux surtout sont très importants. D'abord, presque tout le long de la côte, entre le Capo Colonne et le Capo Castelle, court une plate-forme basse, coupée à pic près de la mer, et s’élevant, en pente très douce, de 20-30 mètres jusqu à 50 mètres environ (voir pl. II, fig. 3). Une deuxième plate-forme, assez mal individualisée, constituerait un niveau moyen de 80-100 mètres: elle n'est guère nette qu'à l'extrémité Sud-Ouest de notre région : elle y forme le plateau de San Leonardo, dominant la station d’Isola di Capo Rizzuto et la petite plaine qui s'étend à l'Ouest de ce dernier village, dans les régions S. Costantino et S. Nicola : elle semble, d’ailleurs, là, se dédoubler (voir fig. 36). Regtone Anastasi Rivage J. fente Regione S Nicblé ju 0 F1c. 36. — Profil passant à r kilométre à l'Ouest du village d'Isola-di-Capo-Rizzuto (construit d'après la carte au r/50.000 en courbes de niveau). Soubassement d'argiles plaisanciennes recouvertes par le Quaternaire matin des anciennes plaines côtières. Echelle des longueurs : 1/50,000 ; hauteurs quadruples des longueurs. Enfin, un froisième niveau, bien conservé sur de vastes étendues, comprend le haut plateau qui, entre Cutro et Isola di Capo Rizzuto, forme les points culminants de la région que nous étudions, Il se termine, du côté de la mer, à 160 mètres d'altitude environ, et s'élève vers l'Est, en pente très douce, jusqu'au Bosco Rosito, à 200 mètres d'altitude; mais au delà, il se prolonge encore par le plateau de Cutro, qui atteint 230 mètres. MARCHESATO 241 B. — Au point de vue straligraphique, nous avons déjà dit l'essentiel, en faisant remarquer que ces plateaux étaient recouverts d’une mince couche de dépôts quaternaires marins, discordant avec les argiles pliocènes. J’ajouterai que ce sont là des formations essen- tiellement ltlorales. Le niveau inferieur est le plus facile à étudier, car la mer ravive constamment la coupe des falaises; on peut ainsi bien observer le contact avec les argiles pliocènes qui, à leur partie supérieure, sont durcies en une croûte irrégulière, perforée par les lithophages qua- ternares; au-dessus, viennent des sédiments très httoraux dont le facies est des plus variables : ce sont parfois des couches marno- sableuses à Corbula qibba et Cardium edule, ou bien des calcaires très durs, caverneux, où les fossiles sont dissous, ou encore des sables en stratification oblique, avec concrétions gréseuses, ou bien des calcaires sableux tendres, avec faune rocheuse (Trochidés, litho- phages), ou enfin des couches plus zoogènes à Bryozoaires ou à Cladocora cespilosa, etc., ete. Ces formations augmentent d’épais- seur à mesure quon s'éloigne de l’ancien rivage, en descendant sous le niveau de l’ancienne mer quaternaire : cela se remarque particulièrement bien sur la falaise, à l'Est du Capo Colonne (voir pl. II, fig. 3) : réduites à 1 mètre d'épaisseur et moins, près de la racine de la péninsule, les couches quaternaires atteignent, vers le phare, à l'extrémité du Cap, une puissance de plus de ro mètres, masquant presque les argiles pliocènes : ce sont là des grès calcaires à facies de « panchina », exploités pour constructions dès la plus haute antiquité. Le niveau moyen, que J'ai étudié dans le plateau de S. Leonardo, ne m a montré que des sables et graviers jaunes. Quant au niveau supérieur, à son extrémité orientale, je n'y ai observé que des sables et grès calcaires souvent très durs, avec fossiles dissous. Près de Cutrd, au Tempone Mallighieri, ce sont encore des sables fins, parfois blanc pur, concrétionnés en plaquettes gréseuses très régulières. Plus à l'Est, entre le Signal Acqua della Quercia (170 m.), et la Casa Campanoro, on voit au-dessus de ces sables des couches marno-calcaires pétries de Cardium edule. C.— Au point de vue paléontologique. — L'ingénieur Cortese [51 |, qui a étudié assez soigneusement ces formations quaternaires au Univ. pe Lyon. — Gienoux 16 242 QUATERNAIRE DE LA CALABRE point de vue cartographique, n’en donne aucune liste de fossiles ; c’est donc uniquement d’après mes propres récoltes que j'examinerai leur faune. J'ai exploré érois gisements fossilifères principaux : deux appartiennent au niveau inférieur; ce sont les falaises situées respectivement à l'Ouest du Capo Colonne et à l'Est du Capo Castelle; et un au niveau supérieur, au Sud de la gare de Pudano, entre le Signal Acqua della Quercia (170 m.) et la Casa Campa- noro; on voit partout, dans le Quaternaire, des traces de fossiles marins, mais nulle part ailleurs (et en particulier dans le niveau moyen), je n'ai récolté de faune assez importante pour pouvoir être étudiée. ; Ces faunes (voir l’appendice) n’ont absolument rien de caractéristique au point de vue stratigraphique : toutes les espèces, sauf une, sont acluel- lement vivantes dans la mer voisine. Les seuls caractères positifs qu'on pourrait y trouver n’ont qu une fort mince valeur, ce sont : 1° la présence, dans le niveau supérieur, d'un T'apes extrêmement voisin du 7. Dianæ Requ.; mais cette espèce, déjà représentée dans le Calabrien par des formes presque identiques, et persistant Jusque dans le Quaternaire récent (Corse, Toscane, Languedoc) n’a, comme on le voit, rien de bien caractéristique; 2° l'abondance, dans le niveau inférieur, du Chlamys pesfelis L. : on sait que cette espèce, actuellement rare dans la Méditer- ranée, paraîl avoir eu son maximum de fréquence à l’époque sicilienne (Nice et Palerme). Mais il est important de noter dans ces faunes l'absence complète de tous les éléments caractéristiques des couches à Strombes; cette absence est d'autant plus remarquable que le niveau inférieur réunit toutes les conditions de facies les plus habituelles dans les gisements à Sfrombus. Inversement, l'absence des formes caractéristiques du Sicilien ne prouve rien, Car ces espèces ne sauraient se rencontrer dans des facies aussi littoraux et aussi grossiers. Ainsi, le problème est le même pour ces gise- ments du Marchesato que pour ceux de Nice et de Milazzo (voir p. 207) : je crois qu'on peut, provisoirement tout au moins, le trancher de la même façon et considérer que ces « panchine » du Marchesato représentent des facies littoraux du Quaternaire antérieur aux couches à Strombes. Conclusions. Les faunes que nous venons d'étudier sont toutes extrêmement littorales {Cardium edule, Conus mediterraneus, une multitude de CALABRE DU NORD 245 petits Zizyphinus, ete., absence complète des Astartes, du Chlamys opercularis, des Turritelles, etc.); par conséquent, les plaines côtières correspondantes n'ont dû être recouvertes que d'une très mince couche d'eau, par exemple une dizaine de mètres. Les anciens niveaux marins correspondant à ces trois plates-formes peuvent donc être évalués très approximativement à 50-60, 80-100, 180- 230 mètres. Ce sont là, d’ailleurs, seulement des étapes sueces- sives, car la dénivellation assez forte de la plate-forme supérieure (160-230) pourrait peut-être s'expliquer, soit par un mouvement du sol qui l'aurait relevée vers l'Ouest, soit plus probablement par une descente lente et progressive du niveau de la mer, qui se serait abaissé d’une cote voisine de 230 mètres, à une autre voisine de 160. Enfin, on voit que c’est le niveau moyen qui correspond à la ligne de rivage (d'âge probablement Sicilien) que nous venons de suivre sur la côte orientale de la Calabre : son individualité est d'ailleurs ici assez mal accusée. De plus, il est important de constater que, ici comme partout ailleurs!, le niveau de 50-60 mètres semble bien être antérieur à l'apparition de la faune à Strombes dans la Méditerranée. 83° La Calabre du Nord. C'est encore ce même niveau de 80-100 mètres que nous allons retrouver sur la bordure orientale de la Sila, entre les embouchures des fleuves Neto et Crati : les dépôts constituant cette terrasse de 80-100 mètres se voient très bien, en particulier, de Cird à Cariati, et ils reposent en discordance sur les formations antérieures, le plus souvent sur les argiles bleues pliocènes. À partir de Cariati, et jusqu'à la plaine du Crati, nous entrons dans la région de Rossano, si soigneusement étudiée par M. Fucini |137]. Cet auteur a beaucoup insisté sur la ferrasse marine qualernaire, qu'il a reconnue tout le long de la côte. Il a cru remarquer que l'altitude de cette terrasse allait ici en croissant de l'Est vers l'Ouest; élevée de 80 mètres près de Cariati, elle serait déjà à 130 mètres au cimetière de Rossano, et atteindrait 150 mètres à l'entrée de la plaine du Crati. Avec une remarquable sagacité, M. Fucini observe 1 Sauf à Ravagnese. 244 QUATERNAIRE DE LA CALABRE que cette dénivellation apparente n’est pas forcément attribuable à des mouvements du sol, mais que la surélévation observée au voisinage de la grande vallée fluviale peut fort bien être due à des apports fluviatiles ou torrentiels. Cela revient à dire, en d’autres termes, que l'étude des formes topographiques ne suffit pas, et qu'il serait nécessaire de pouvoir fixer avec précision le niveau de base sous lequel elles ont pris naissance : tant qu'une telle étude de détail n'aura pas été faite, nous devons nous abstenir de prononcer des conclusions trop fermes. En tout cas, ces formations sont bien nettement indépendantes du Pliocène, et les lignes de rivage quaternaires viennent passer en contre-bas de la grande surface de remblaiement calabrienne dont nous avons retrouvé un dernier reste (voir p. 121) dans le plateau de S. Lorenzo del Vallo, à 350 mètres d’altitude. Dans la basse vallée du Coscile, on peut voir nettement, au Nord de Spezzano-Albanese, les traces de deux terrasses : l’une forme, à 115-130 mètres, le Piano Stragolia sur la rive droite; un lambeau détaché à la Torre S. Antonio montre une coupe superbe où l'on peut étudier toutes les irrégularités de stratification de ces allu- vions de « fiumare »; l’autre, plus basse, dominant de 30 à Ao mètres le thalweg actuel, constitue le Piano della Corte, et se prolonge jJusqu'au-dessus de Doria, sur la rive gauche ; à elle probablement se rattachent des marnes blanches à faune d'eau douce (Bythinies), qui s'élèvent au-dessus de la plaine actuelle, à l'Est de la station de Spezzano-Castrovillari. Enfin, au Nord de la plaine du Crati, la topographie de la côte nous fait retrouver très nettement notre plaine côtière à 80- 100 mètres; on la voit ainsi à partir de Trebisacce, vers le Nord, à Monte Giordano, et jusqu'au fleuve Sinni; mais là, 1l apparaît des traces de lignes de rivage postérieures, sous forme de plate-forme alluviale à 6o mètres environ. Nous arrivons ainsi à la grande plaine alluviale, avec anciens cordons littoraux, qui s'étend depuis l’'embou- chure du Basento jusqu'à Tarente ; nous en reparlerons en étudiant le Quaternaire des environs de cette ville. RÉGION APPULO-GARGANIQUE | 245 CPAS PA NIPAMINN LA RÉGION APPULO-GARGANIQUE $ 1. — LES FORMATIONS QUATERNAIRES DANS LA RÉGION DE TARENTE (PI. II, fig. 2 et pl. IIL, fig. 4.) J'étudierai ici avec quelque détail le Quaternaire des environs de Tarente. D'abord il renferme un niveau extrêmement fossilifère dont le rattachement aux couches à Strombes ne peut faire l’objet d'aucun doute. Et en outre il m'a paru intéressant de préciser les relations stratigraphiques de ces dépôts quaternaires avec les cou- ches, plus anciennes, de la série pliocène: Car la coupure qui sépare ici le Pliocène du Quaternaire me paraît avoir été méconnue par tous les géologues qui ont étudié la région. Historique. — Depuis longtemps-en effet, la localité de Tarente est bien connue des paléontologistes. Pniciprr en a cité, dans son Ænumera- {10 [190|, un grand nombre de fossiles, mais ses listes sont, comme d'ordinaire, bien difficiles à utiliser en l'absence de toute indication sur les niveaux auxquels elles se rapportent. Une excellente étude paléontologique des formations quaternaires de Tarente a été faite par Kogerr [151], et il est possible de tenir compte de la longue liste de fossiles qu'il en donne, car il précise les localités où il les a récoltés. Mais son travail est plus spécialement d'ordre malacolo- sique, et tout en assignant à ces dépôts fossilifères (nous verrons qu'il s'agit des couches à Strombes) un âge très récent, l’auteur ne cherche pas à en établir d’une manière précise la place dans la chronologie géolo- gique. Un autre savant allemand, Tu. Fucus, qui a tant étudié les divers élages tertiaires dans l'Italie du Sud, a consacré aux couches de Tarente un travail [135] cette fois purement straligraphique. Il fait nettement ressortir que ces formations constituent dans les environs de la ville une immense plaine basse, située bien en contre-bas des plateaux pliocènes et 26 QUATERNAIRE DE TARENTE crétacés qui la dominent, au Nord surtout, par un ressaut bien marqué. Mais il attribue ce ressaut à un rejet, à une faille, et par suite il eroit retrouver dans les dépôts de Tarente l'équivalent de la partie supérieure des couches de ces hauts plateaux. Aussi ajoute-t-il que les niveaux fossilifères du Tarentin ne sont en rien comparables aux « panchine » récentes des côtes italiennes avec lesquelles, dit-il, on pourrait être tenté de les confondre tout d’abord. Enfin, la monographie la plus récente et la plus complète de ces envi- rons de Tarente est due à la collaboration du Général Ver: et du Profes- seur DE ANGELIS D'OssaT [226]; les observations sur le terrain ont été faites par Verri, ainsi que la récolte des fossiles, ceux-ci étant étudiés par de Angelis. Les formations quaternaires de Tarente font ici l’objet d’une comparaison détaillée avec les autres dépôts « postpliocènes » de l'Italie du Sud, comparaison étayée surtout par des arguments paléonto- logiques. Les auteurs ont adopté la même opinion que Fuchs, en voulant retrouver les équivalents des formations de Tarente dans la partie supé- rieure de la série sédimentaire constituant les hauts plateaux pliocènes (par exemple, argiles sableuses et sables de Gravina); mais, d’autre part, ils n’ont pas tenu compte, dans leur étude paléontologique, des formes qui sont précisément les plus caractéristiques de cette formation ; ainsi le Strombus bubonius n'est cité qu’'incidemment comme Strombus sp., et aucune autre des espèces de la faune chaude n’est signalée. Les conclusions de MM. Verri et de Angelis d'Ossat ont été adoptées par M. C. pe Giorc1 dans ses récentes publications [74], ainsi que par tous les auteurs qui ont étudié le « Postpliocène » dans ces dernières années. Car les couches fossilifères de Tarente sont souvent citées à titre de comparaison. C’est ce qui m’a engagé à en reprendre l'étude détaillée. La plaine quaternaire des environs de Tarente? s'arrête vers le Nord à une ligne passant approximativement par Grottaglie, Montemesola, Massafra, Palagianello, au Nord de laquelle com- mencent les plateaux crétacés et pliocènes de la Pouille calcaire. Vers l'Ouest, cette plaine est partiellement limitée par les collines crétacées de Montejasiet de Roccasforzata ; enfin vers l'Est et le Sud, elle vient se perdre sous la mer [onienne. Nous avons déjà dit plus ! On trouvera une bibliographie extrêmement bien faite dans le travail du pro- fesseur Bassani [9]. ? Voir la fort jolie page descriptive que lui consacre le Général Verri (loc. cil,, p. 180), GÉNÉRALITÉS 247 haut (p. 141) la constitution de la série pliocène à Montemesola : mollasses calcaires inférieures (appelées à Tarente « tufo zuppigno »), argiles bleues, argiles sableuses, sables etgrès supérieurs (Calabrien) de Gravina et de Montemesola. Le soubassement de la plaine quaternaire est constitué par une partie arasée dans le socle de ces plateaux ; le Quaternaire y repose, tantôt sur le Crétacé, tantôt sur des lambeaux conservés de « tufo zuppigno » pliocène. On peut y distinguer, au point de vue des facies de ce Quaternaire, deux régions, l’une à l'Est, l’autre à l'Ouest de Tarente : dans la région orientale !, le Quaternaire comprend, , inférieurement, des couches argileuses, que nous appellerons les arqiles de Tarente, et, supérieurement, des vases calcaires à Sfrom- bus bubonius ; les éléments clastiques ne jouent qu'un rôle fort réduit et on retrouve là dans le Quaternaire le prolongement du même type appulo-garganique que nous avons reconnu dans le Pliocène. Dans la région occidentale?, au contraire, prédominent les galets siliceux de l’Apennin, et le Quaternaire y est représenté surtout par des sables, grès et conglomérats littoraux. Au point de vue de leur place dans la série chronologique, les vases calcaires fossilifères à Strombus bubonius sont certainement quaternaires, et appartiennent à l'horizon à Strombes ; quant aux argiles de Tarente, comme elles ne renferment pas une faune bien abondante, la détermination de leur âge n’a qu'un intérêt local, mais elles me paraissent bien quaternaires et puisqu'elles sont anté- rieures au niveau à Strombes, elles seraient donc approximativement sicillennes (s. 1.). Etant ainsi éclairés par avance, il nous reste à justifier ces conclusions par l'étude détaillée des faunes et des coupes que l'on peut relever dans la région. 1° Indépendance stratisgraphique des argiles de Tarente et du niveau à Strombus d’avec la série pliocène. (PI. II, fig. 2.) Les coupes les plus instructives pour l'étude du Quaternaire sont 1 Voir pl. IL, fig. 2. > Voir pl. IL, fig. 4. 248 : QUATERNAIRE DE TARENTE fournies par les falaises hautes de 10 à 15 mètres qui bordent la petite mer intérieure, ou « Mare piccolo » de Tarente!; d'une façon très générale, leur partie inférieure est formée par des argiles plastiques bleues, à peu près dépourvues de fossiles ; nous les appel- lerons les argiles de Tarente; au-dessus, formant corniche, se trouve un banc calcaire, plus ou moins sableux ou marneux, très dur en quelques points, sans cohésion dans d’autres : c'est le fufo mazzaro du langage local, épais de quelques mètres ; 1l contient le Strombus bubonius et il a fourni la riche faune qui a rendu -Tarente célèbre. Supposons d’abord que, partant deS. Giorgio (à l'Est de Tarente), on se dirige vers le Mare Piccolo (voir la coupe, pl. IL, fig. 2). A S. Giorgio, on peut voir un magnifique développement du {ufo zuppigno Pliocène ancien; il est exploité dans de grandes carrières ouvertes aux flancs de la colline qui supporte le village, et se relève au contact du Crétacé, qui en émerge pour former l’arête blanche et nue de Roccasforzata. Au pied de cette colline de S. Giorgio, le même «tuf » forme un vaste plateau à l'altitude de 35 mètres environ : traversons-le par le chemin qui conduit de S. Giorgio à une grosse ferme dénommée, sur la carte au 1/100.000, « Casa d'A yala o di S. Giovanni ». Sur le plateau formé par le tuf pliocène, représentant une formation de mer profonde, avec Oursins, Bryo- zoaires, Térébratules, on voit bientôt apparaitre des traces d'une nouvelle invasion marine, témoignée par des formations extrème- ment littorales : c'est d’abord une simple croûte calcaire recouvrant la surface arasée du tuf, et contenant des exemplaires roulés de Cardium et d'huitres. Nous arrivons ici, en ellet, sur l'ancien rivage de la mer où se sont déposées les couches à Strombes. Et il y a une indépendance straligraphique manifeste entre ces couches et celles de la série pliocène; car ici, au-dessus des mollasses calcaires du Pliocène ancien, manque l'entière série calabrienne, enlevée par l'érosion qui a précédé le retour de la mer quaternaire, En continuant dans la direction de la Casa d'Ayala, on voit bientôt, à droite du chemin, une petite carrière : là c'est le Crétacé 1 Voir pl, IL, fig. 2. nt mnt STRATIGRAPHIE 249 qui affleure : sa surface est perforée par des lithophages, et recou- verte encore par le Quaternaire ; on a ici une sorte de « panchina » bréchoïde, très altérée, contenant des fragments anguleux du Crétacé sous-jacent, et de nombreuses coquilles, plus ou moins roulées, de Spondylus gæderopus L., Lima squamosa L., Venus verrucosa L., Turbo rugosus L., de Mactres, de Pectoncles, ete., ainsi que des débris de Cladocora cespitosa E. et H.. Et partout cet ancien rivage quaternaire se montre à une altitude de 30-35 mètres. Telle était donc l’altitude atteinte par la mer dans laquelle se sont déposées les couches à Strombes de Tarente. De plus, puisque le Quaternaire marin repose directement, tantôt sur le Pliocène ancien, tantôt sur le Crétacé, ce nous est une preuve for- melle de l'indépendance entre les cycles de sédimentation pliocène et quaternaire |. Comme le montre la figure 2, pl. Il, si nous continuons la coupe en gagnant le rivage actuel du Mare Piccolo, nous verrons les « panchine » quaternaires se développer de plus en plus, et acquérir un facies plus profond; en dessous apparaissent finalement les argiles de Tarente, mais nous ne voyons pas ici les relations de ces argiles avec leur substratum. Une autre coupe nous les monirera. Transportons-nous pour cela vers l'extrémité Nord-Est du Mare Piccolo. Le petit ruisseau qui y débouche, après avoir passé en dessous et à l'Est de la Masseria (métairie) S. Pietro, permet ici de suivre vers l'intérieur (fig. 2, pl. IT) la coupe montrée par la falaise. Sur le rivage, on observe l'habituelle superposition du «{ufo maz- zaro » aux argiles de Tarente. En remontant le ravin étroit creusé par ce ruisseau, on voit bientôt, dans le lit même, affleurer le cal- caire crélacé ; la surface de contact de ce calcaire avec les argiles est arasée et perforée par les lithophages : c'est une surface de {rans- gression ; immédiatement sur le Crétacé reposent les argiles réduites ici à quelques mètres d'épaisseur. Et ces argile: sont toujours sur- montées par les couches à Strombes, mais qui ont pris un facies particulier : en effet, à mesure qu'on s'éloigne de la mer, on les voit devenir de plus en plus sableuses, se durcir et passer ainsi à un ! La superposition directe des dépôts à Strombes sur le « tufo zuppigno » peut aussi s'observer, comme nous le verrons plus loin, au « Borgo » de Tarente, non loin de la station. 250 QUATERNAIRE DE TARENTE véritable grès ou « panchina ». En face de la métairie de S. Pietro, le ravin se trouve ainsi transformé en une gorge étroite ou « gra- vina », encaissée entre des parois abruptes de «panchina » formant, au-dessus des argiles, une corniche à demi éboulée. Et cette pan- china montre d'admirables exemples de stratification entre-croisée : c'est évidemment un dépôt de plage; remanié par les courants lit- toraux et le choc des vagues; on y trouve des débris de fossiles marins roulés (Columbella rustica, Patelles). Ainsi, là, le complexe formé par les arqiles de Tarente et par le niveau à Strombes, repose directement sur le Crétacé, sans interpo- sition des « tufs calcaires » habituels de la base du Pliocène. Cela suffit à nous prouver que les argiles de Tarente ne sauraient être, comme le voudraient certains géologues italiens, comparées aux argiles calabriennes de Gravina el de Montemesola, qui au contraire font suite en continuité aux « tufs calcaires » du Pliocène ancien. L'absence de ces derniers, dans la coupe que nous venons d'étudier, ne peut à aucun titre être considérée comme résultant d'un changement momentané de facies ou d'une lacune accidentelle. Car tout autour de l'emplacement du Mare Piccolo, sur son rivage Nord, à Tarente, à S. Gior- go, on retrouve toujours la base du Pliocène (quand elle n’a pas été enlevée par l'érosion) représentée par ce facies, dont nous avons suivi la continuité jusqu’au Monte Gargano, sur des centaines de kilomètres de distance, et avec une épaisseur de 20 à 6o mètres environ. L’attention de Verri avait déjà été attirée sur cette superposition directe, en certains points, des argiles de Tarente au Crétacé, mais il l'avait interprétée par des phénomènes tectoniques ou dynamiques de glissement en masse (loc. cit., p. 184): « Di fatti, mentre sulle pend ici Sud dell'anticlinale secondaria, è rimasto elevato il tufo zuppigno aderente al calcare crelaceo, l’argilla è scesa verso le zone depresse; e per causa di {ali scorrimenti, a volla posa anche direttamente sul calcare. » Je ne saurais admettre une pareille interprétation. En résumé, la série pliocène a été ici arasée avant le dépôt des argiles de Tarente ; c’est dire que ces dernières, et aussi, à plus forte raison, les couches à Strombes (mnazzaro), appartiennent cer- tainement au Quaternaire. 3 STRATIGRAPHIE 251 ®° Existence de plusieurs niveaux dans le Quaternaire de Tarente,. Nous venons d'acquérir la preuve que, postérieurement au dépôt de la série phiocène, 1l a dû y avoir une émersion générale de la région, au cours de laquelle l'érosion a donné au relief du pays, à peu de choses près, son actuelle configuration. C’est sur la région ainsi modelée qu'est revenue la mer quaternaire. Mais il est facile de se rendre compte que fous les dépôts quaternaires ne peuvent corres- pondre à un seul et même stationnement de cette mer, à une unique ligne de rivage. Niveau de 30-35 mètres. Nous avons vu, d'après des observations d'ordre morphologique et stratigraphique, que la ligne de rivage de la mer où se sont déposées les couches à Strombes, devait se trouver ici à une altitude d'environ 30 à 35 mètres ; l'étude bathymétrique de la faune de ces couches nous confirmera plus loin cette conclusion. Niveau de 70-80 mètres. Quantaux argiles de Tarente, il paraît bien certain qu'elles se sont formées dans une mer beaucoup plus élevée. La faune de ces argiles est très pauvre et paraît, comme nous le dirons plus loin, assez mal connue; mais la présence bien certaine de quelques espèces nettement profondes(Terebratula vitrea, Chlamys septemradiatus), qui manquent dans les couches à Strombes, nous montre que ces argiles ont dû se déposer sous une profondeur d’eau non inférieure à 60 mètres. Leurs affleurements, sur les rives du Mare Piccolo, étant seulement à quelques mètres au-dessus du niveau actuel, on voit que la ligne de rivage correspondante devait se trouver à 60-70 mètres au minimum, c’est-à-dire notablement plus haut que celle des couches à Strombes. On peut d’ailleurs avoir des preuves directes d’un stationnement de la mer quaternaire à une pareille altitude : même dans le bassin du Mare Piccolo, il m'a paru exister des dépôts quaternaires à ces hauteurs : Ainsi, dans le plateau qui s'étend, au Nord de la station de Montejasi, 252 QUATERNAIRE DE TARENTE jusqu’au pied des collines de Montemesola, le sol est formé par des mollasses marno-calcaires dans lesquelles, près de cette station, à l’alti- tude de 50 mètres environ, j'ai observé de mauvais échantillons de Cyprina islandica, Isocardia cor, Turbo rugosus, Lucina borealis, Cardium cf. papillosum, Corbula gibha, faune relativement profonde ; plus au Nord, à la Masseria Vitreti, vers 60-66 mètres, on voit nettement des marnes blanchâtres riches en Mactra subtruncata et Corbula gibba ; enfin, plus au Nord encore, près de la route de Grottaglie à Montemesola, dans la région où ce plateau vient se terminer, à 70-80 mètres, au pied des collines pliocènes, j'ai observé de nombreux blocs de conglomérats à gros galets qui correspondent peut-être à un ancien rivage. Mais, dans cette région complètement plate, il est impossible d'observer des affleurements et des coupes bien nets, de sorte que je ne signale ces observations que sous toutes réserves — car je ne puis prouver en toute rigueur qu'il s’agit bien là de Quaternaire! et non de Calabrien. Mais c’est surtout dans la région située à l'Ouest de Tarente que nous aurons des preuves précises d'un séfafionnement de la mer quaternaire à une altitude voisine de 10-80 mètres. Selon toute vraisemblance, c'est à lui que l’on doit rapporter les argiles de Tarente. Reste à examiner comment s'est fait le passage de ce haut niveau de 80 mètres à celui de 30-35 mètres correspondant aux couches à Strombes. Il ne me semble pas qu'entre les deux le niveau de la mer se soit abaissé au-dessous du o actuel. Car dans les coupes que nous venons d'étudier, et dans celles que nous examinerons plus loin, on ne peut sur- prendre de discontinuité entre les argiles de Tarente et les couches à Strombes qui les recouvrent ; il y a au contraire passage continu de l’une des formations à l’autre par une zone marno-sableuse riche en petits Lamellibranches à test mince habituels à ces facies (Tellinidés, Scrobicu- lariidés). C’est ce que l’on peut voir tout autour du Mare Piccolo, où, dans les falaises, cette zone de passage ne dépasse pas 10 à 12 mètres d’allitude. Mais, d'autre part, nous avons vu, en certains points (Borgo de Tarente, Casa d’Ayala près S. Giorgio), les couches à Strombes sup- portées directement, à des altitudes de 15-30 mètres, par des terrains plus anciens. Il est donc naturel de supposer l'existence d’une petite lrans- gression. 1! Dans celte hypothèse, ces formations marno-calcaires représenteraient un facies plus zoogène et plus littoral des argiles de Tarente. < « STRATIGRAPHIE 293 Ainsi, postérieurement à la formation des argiles de Tarente, le niveau de la mer a dû baisser jusqu'à une altitude voisine de 20 mètres ; puis un léger mouvement positif l’a ramené à l'altitude de 30-35 mètres, et c’est alors que se sont déposées les couches à Strombes. Niveau de 15-20 mètres. D’autres données vont nous permettre de poursuivre l'histoire des phases ultérieures de ces mouvements marins. Revenons pour cela sur les bords du Mare Piccolo, et étudions la coupe des falaises qui forment, dans son extrémité Sud-Est, le petit promontoire appelé « Il Fronte » sur la carte au 1/100.000. À l'extrême pointe de ce promontoire, nous pourrons observer la coupe figurée ci-dessous. 45 Mare piccolo Fic. 37. — Coupe de la falaise à l'extrémité du promontoire dit & il Fronte », Rivage Sud du Mare piccolo. Au pied de la falaise, on voit les argiles de Tarente (couche [ dans la figure) ; elles sont bleues, un peu feuilletées, parfois légèrement sableuses, mais à peu près dépourvues de fossiles ; à leur partie supé- rieure (couche IT), elles deviennent marno-calcaires, riches en petits Lamellibranches (Tellinidés, Scrobiculariidés, Corbula gthbha) : ce sont les couches de passage au niveau à Strombes qui les surmonte. Ce niveau est représenté (couche III) par un calcaire sableux assez dur, formant une petite corniche au-dessus des argiles, et épais de 1 ou 2 mètres à peine : 1l renferme une faune fort riche et variée, où dominent surtout les grands Spondylus gæderopus L., et j'y ai récolté, à cet endroit même, des frag- ments bien caractéristiques de Sfrombus bubonius. La surface supé- rieure de ces mollasses à Strombes est particulièrement remarquable ; elles sont recouvertes en effet par des argiles dont il sera question plus loin; mais le contact avec ces argiles est un contact d'érosion. Les der- 254 QUATERNAIRE DE TARENTE niers centimètres des calcaires à Strombes apparaissent profondément altérés et de couleur rougeâtre, et la formation se termine par une cara- pace ou croûle calcaire durcie (couche IV) contenant des fragments de calcaire à Strombes, ainsi que des fossiles roulés et corrodés de ces calcaires (j'y ai reconnu par exemple des débris de Cytherea chione, de Venus verrucosa, de Spondylus gæderopus). C’est l'aspect, habituel dans les pays méditerranéens, des surfaces calcaires restées longtemps soumises aux actions atmosphériques. Ainsi, après le dépôt des assises à Sfrombus, il y a eu un brusque arrêt dans la sédimentation, et il est intervenu une phase continentale. Cela témoigne d'un notable abaissement des lignes de rivage, puisque les der- nières couches du calcaire à Strombes renferment encore une faune qui dénote une profondeur d’une vingtaine de mètres environ. Au-dessus de cette surface d’altération, et par conséquent après une discontinuité stratigraphique, viennent des argiles marneuses bleuâtres ou jaunâtres (couche V) : elles renferment, à côté de nombreux Cardium ‘ edule en place, des débris roulés de fossiles plus anciens (en particulier des rameaux de Cladocora cespitosa); ce sont là, très probablement, des vases lagunaires : en tout cas, leur seule présence implique un mouve- ment positif du niveau de base, grâce auquel une sédimentation nou- velle est venue noyer la surface, auparavant mise à nu, des couches à Strombes. Ces vases forment, tout le long du rivage Sud du Mare Piccolo et jusqu’à la mer libre, un vaste plateau à l'altitude de 15-18 mètres, représentant ainsi une ancienne plaine côtière correspondant à une ligne de rivage de 15-20 mètres environ. Le seul examen de cette coupe nous permet donc de reconstituer la série d'événements suivants: 1° formation des calcaires à Sérombus, qui, par leur faune, dénotent une ligne de rivage à 35 mètres environ ; 2°émersion de la contréeet abaissement du niveau de base jusqu’à une altitude qui, d’après notre coupe, ne peut pas être supé- rieure à la hauteur qu'y atteint la surface supérieure des couches à Strombes, soit une dizaine de mètres au plus !; 3° nouveau mouve- ment positif ayant ramené la mer jusqu à une altitude de 15 mètres environ, et ayant donné lieu à la formation des vases argileuses V. Nous aurons des preuves plus nettes de l'existence de cette ligne 1 Un peu à l'Ouest du promontoire « il Fronte », il semble que cette surface descend, sous les argiles V, presque au niveau de la mer; il est donc possible que la régression ayant suivi le dépôt des couches à Strombes ait abaissé la ligne de rivage jusqu’au-dessous du niveau actuel. STRATIGRAPHIE 255 PONC de rivage à 15 mètres, quand nous étudierons la région à l'Ouest de Tarente. Pour le moment, je veux encore faire remarquer que l'existence d'un niveau de 15 mètres différent de celui de 35 mètres nous permetlrai d'expliquer certaines autres particularités, déja mentionnées par Kobelt. Allons en effet au Nord-Est de Tarente, toujours près du Mare Piccolo, immédiatement à l'endroit où la route qui côtoie cette mer intérieure (ra- verse un petit vallon passant au point nommé « Bagnara » sur la carte au 1/100.000. Ce vallon est creusé dans un plateau à 15 mètres d'altitude environ, dont la constitution est visible dans les tranchées du chemin. Quest né Rursseau # Bagnara sv Est Cale. à Cladocora + +5r ir, : Liaçnef SablEuUSes RER = É { Marnes Hanches Alluvions_; modernes d’eau douce Argiles de Tarente F1G. 38. — Coupe relevée au Nord-Est de Tarente, montrant des couches d'eau douce intercalées entre deux dépôts quaternaires marins. Sur le versant Ouest du vallon, affleurent, au sommet, des calcaires gréseux plus ou moins meubles, dans lesquels dominent le Cladocora cespilosa et diverses coquilles très littorales ; mais au-dessous, au lieu de trouver comme d'ordinaire les argiles de Tarente, à faune marine pro- fonde, on voit des marnes sableuses extrêmement riches en Mollusques d'eau douce (Planorbes, Lymnées), sans aucune espèce marine; ces marnes sableuses jaunes passent, à leur partie inférieure, à des marnes blanches, toujours d'eau douce ; enfin, en dessous, se trouveraient les arqules de Tarente qui ne sont pas visibles dans la coupe, mais forment certainement le fond marécageux du vallon. Sur le versant Est du même vallon, on retrouve à la base les mêmes marnes blanches à fossiles d'eau douce, surmontées ici directement par les couches marines à Cladocores ; la surface supérieure de ces marnes est rubéfée, durcie : c’est une surface d’altération ; ainsi, à une période lacustre, a fait suite ici une période continentale: enfin, la mer est revenue. Cette remarquable superposition des couches marines à Cladocora à des sédiments lacus{res avait déja été signalée par Kobelt, sans que cet auteur indiquât, d’ailleurs, la localité précise où il l'avait observée. — De telles dispositions pourraient à la rigueur être expliquées sans faire intervenir des mouvements positifs et négatifs, par un simple déplace- ment de la ligne de rivage dans le sens horizontal ; mais il me paraît plus 256 QUATERNAIRE DE TARENTE naturel de retrouver ici les mêmes lignes de rivage successives que nous verrons plus nettement individualisées à l'Ouest de Tarentef. Les jaunes correspondant à ces deux lignes de rivage de 15 mètres et de 35 mètres sont d'ailleurs absolument identiques, en dehors du facies, plus profond dans la plus ancienne : ainsi le Cardium hians, la Venus effossa, etc..., paraissent bien spéciaux au niveau de 35 mètres. 8° Divers facies des couches à Strombes autour du Mare Piccolo. C'est seulement autour du Mare Piccolo qu’on peut avoir des ren- seignements précis sur la constitution des couches à Strombes; la falaise continue qui l'entoure de tous côtés nous permet d’v suivre pas à pas les variations de facies : nous la parcourrons en partant de Tarente par la rive Sud, pour revenir à Tarente par la rive Nord. Rivage Sud du Mare Piccolo. Immédiatement au sortir de la ville, j'ai eu l'occasion de faire des observations fort intéressantes dans les travaux que l'on effec- tuait en 1909 un peu à l'Est de l’Arsenal, au nouveau bassin de caré- nage. De profondes tranchées y montraient, à ce moment, une coupe magnifique du Quaternaire. Les argiles de T'arente, très plastiques à la base, y deviennent mar- neuses, puis sableuses, formant ainsi passage aux tufs calcaires à Strombes avec une conlinuilé manifeste ; les couches à Strombes sont représentées ici par des vases sableuses très fines, dépôts lranquilles effectués à une certaine distance des côtes ; il n’y a aucun débris roulé ; d'ailleurs la partie profonde des assises a échappé à la calcification, de - sorte que les fossiles s'en dégagent facilement et sont d'une admirable conservation; les coquilles épaisses, à caractère récifal, comme Îles Spondyles, les Chames, sont ici relativement moins abondantes ; 1l y a au contraire prédominance de bivalves recherchant les fonds sablo-vaseux 1 MM. Verriet de Angelis ont, eux aussi, considéré les « calcaires à Cladocora » comme plus récents que le & tufo mazzaro » ou calcaire à Sfrombus, sans donner d’ailleurs des indications bien précises sur la distinction de ces niveaux. Car il est inutile d'ajouter que les Cladocora cespitosa sont aussi bien développés dans le « tufo mazzaro » (comme nous. le verrons plus loin) que dans le niveau supérieur, STRATIGRAPHIE 291 (Cytherea chione, Pinna, etc.) et conservés avec leurs deux valves en con- nexion ; les Strombes sont extrêmement abondants, et conservés avec leurs couleurs ; de ce gisement de l’Arsenal provient une grande partie des fossiles cités dans ma liste. A leur partie supérieure, ces couches, devenues un peu plus dures et plus calcaires, forment un vaste plaleau à l'altitude de 17-21 mètres!. La mer où elles se sont déposées devail d’ailleurs, comme nous l'avons vu, monter plus haut, car la faune des couches supérieures n'est point encore strictement littorale. Tout au voisinage de l'Arsenal, sur la pointe qui fait face à la Punta della Penna, sur l'autre rive, et sépare ainsi le bassin occi- dental du bassin oriental, au lieu dit i/ Pizzone, existe également un très riche gisement fossilifère ; les fossiles et le facies sont les mêmes qu'à l'Arsenal. C'est dans cette région que l'on parait, d’après la nature des dépôts, être le plus loin des anciens rivages de la mer à Strombes (niveau de 35 mètres). Franchissons maintenant le petit promontoire du « Pizzone » et pénétrons dans le bassin oriental du Mare Piccolo. Le rivage de la baie qui s'étend entre ce promontoire et celui dit « il Fronte » est formé par les vases supérieures aux couches à Strombes (couches V de la coupe fig. 37), qui, comme nous l’avons dit plus haut, descendent là jusque près de la mer. Puis, sur le versant Ouest de ce pro- montoire « il Fronte », les couches à Strombes reparaissent dans la falaise, et on voit s'y développer un véritable récif corallien : la roche est entièrement formée par des rameaux de Cladocora cespitosa, entre lesquels on retrouve les mollusques compagnons habituels de ces poly- piers, Spondyles, Chames, Troques du sous-genre Clanculus, etc... A la pointe même du promontoire, la où passe la coupe fig. 37, nos assises reprennent le facies habituel de vase calcaire sableuse, avec une faune plus variée. Enfin sur le versant Est, le facies devient encore plus sableux ; la faune, moins riche, ne comprend plus guère que des Cardium ! Cette partie des plateaux du Tarentin a dû rester au-dessus du niveau de base de 10 mètres, marquant le maximum de la transgression qui a suivi le dépôt des couches à Strombes du niveau de 35 mètres. Il ne faut point, en effet, se laisser tromper par les nombreuses coquilles qu’on trouve ici éparses à la surface du plateau (en particulier Murex brandaris et M. trunculus, les « Pourpres » des anciens) : ce sont des accumulations dues à la main de l'homme, et peut-être en partie contemporaines des tombes grecques creu- Sées dans les « tufs » à Strombes, et découvertes au moment des travaux. Uxiv, pe Lyon — Gicxoux, 17 298 QUATERNAIRE DE TARENTE edule L. var. Lamarcki et une foule de petits Lamellibranches, hôtes des plages sableuses : {out cela nous indique la proximité d'un ancien rivage de la mer à Strombes ; c'est précisément celui qui la limitait à l'Est, du côté des collines de S. Giorgio, et dont nous avons tout à l'heure reconnu les traces à la Casa d’Ayala. Le fond du Mare Piccolo, du côté de l'Est, est bordé par une plaine d’alluvions modernes qui s'étend jusqu'à plusieurs kilomètres dans l'intérieur. La falaise formée par les couches à Strombes, n'étant plus rafraichie par l'érosion marine, s’adoucit et ne montre plus de bons affleurements ; seules, de nombreuses sources marquent le contact des calcaires à Strombes avec les argiles de Tarente. Rivage Nord du Mare Piccolo. Après avoir dépassé cette zone d’alluvions qui tendent à combler par le fond le Mare Piccolo, nous retrouvons bientôt, au Nord, la falaise qui termine les plateaux calcaires constitués par les couches à Strombes ; ces plateaux dépassent en général l'altitude de 15 mè- tres ; et par suite nous n’y retrouvons plus, comme au Sud, la cou- verture de vases saumâtres déposée à l’époque de la mer à 15 mètres; leur surface de « tufs calcaires » reste nue et stérile. Au point 20, au Nord de la Sorgente Riso, les couches à Strombes prennent le facies d'une « panchina » sableuse où les fossiles sont com- plètement décalcifiés : la roche est parcourue par de nombreuses tubulures restées vides qui représentent la place d'autant de rameaux de Cladocores : nous retrouvons donc ici un récif corallien côtier. Puis, un peu avant l'endroit où la falaise atteint le bord de la mer, 1l y a un point très fossilifere : la faune, assez côtière, se compose surtout de Lamelli- branches. Près du lieu dit «il Convento », la roche devient au contraire tres meuble; des argiles de Tarente, qui affleurent toujours en dessous, on passe insensiblement à des marnes calcaires blanches, pulvérulentes, avec petits Cérithes, Zapes, ete. Plus loin, on a des sables blancs pétris _de débris de petits Lamellibranches. Immédiatement après avoir dépassé le « Convento », on arrive à un gisement où pullulent les Cardium edule L. var. Lamarchki Reeve sp. ; ils coexistent ici avec des Pinnes, des Spondyles, des Arches : des bancs entiers sont constitués uniquement par l’accumulation de ces grandes et STRATIGRAPHIE 259 belles coquilles. Ce fait avait déjà frappé tous les géologues qui ont visité les environs de Tarente; car on est habituellement porté à voir dans le Cardium edule une espèce strictement littorale et même saumätre. On sait que cette opinion est trop absolue : en particulier les variétés saumâtres du C. edule sont bien différentes du vrai C. Lamarcki qui peut se rencontrer jusqu’à 20-30 mètres de profondeur. Avant d'arriver au ruisseau de S. Pietro, on voit apparaître dans les couches à Strombes un nouveau récif de Cladocora, avec de nombreuses huîtres, nous annonçant de nouveau l'approche du rivage. En effet, le long de ce ruisseau, nous retrouvons la coupe qui a été décrite plus haut (fig. 2, pl. II) ; près de la mer on a encore un facies de sables blancs fins avec petits Lamellibranches, mais en remontant un peu vers le Nord, jus- qu'en dessous de la métairie de S.Pietro, nous avons vu ces sables passer, sur toute leur épaisseur, à un grès sableux, grossier, à stratification entre- croisée, dénotant une ancienne plage : nous sommes là sur le rivage de la mer à Strombes, et il se rapproche ici beaucoup du rivage actuel: car, comme à S. Giorgio, les collines crétacées ou pliocènes arrivent tout près du Mare Piccolo. A l'Ouest du ruisseau de S. Pietro on retrouve toujours, au-dessus des argiles de Tarente, le même facies des couches à Strombes : ce sont des marnes calcaires tendres à petits Lamellibranches : les bancs supérieurs seuls restent plus durs et forment un petit abrupt terminant la falaise. Nous arrivons ainsi à la Punta della Penna, longue péninsule s’avançant vers le Sud dans le Mare Piccolo, et signalée déjà par Kobelt comme particulièrement intéressante. Ici on s'éloigne des anciens rivages : aussi la faune devient-elle plus variée et mieux conservée, le facies de sédimentation plus tranquille. La partie Est de la péninsule n'est plus accessible aujourd'hui, depuis la construction d'une poudrière, et les plus riches gisements indiqués par Kobelt se trouvent ainsi recouverts. Mais sur le versant Ouest on peut encore faire de magnifiques récoltes de fossiles. Dans des sables très fins, presque marneux, abondent les Strombes ayant vécu là en place, les Spondyles, les Vénéridés, les Arches, ete. ; le facies et la faune rappellent d'une manière frappante les gisements précédemment décrits du Pizzone et de l'Arsenal, situés Juste en face, sur la rive Sud du Mare Piccolo. On se trouve ici à peu près au centre de l'ancien grand golfe, largement ouvert vers l'Ouest, qui à l’époque des Strombes occupait la place du Mare Piccolo actuel; et cela nous explique la tranquillité de la sédi- mentation, et le caractère moins côtier de la faune, dans ces trois gisements. 260 QUATERNAIRE DE TARENTE Ayant achevé le tour de la Punta della Penna, et rentrant vers Tarente, nous allons trouver de nouveau des facies plus côtiers : Ainsi, vers la Casa d'Ayala, les couches à Strombes reprennent le facies de marnes friables, d’un blanc pur, riches en petits Lamellibranches à test mince, particulièrement en Tellinidés : c’est le méme facies que nous avons rencontré entre San Pietro et la Punta della Penna. Un peu plus à l'Ouest, au point nommé T'urlara, on peut observer une très belle coupe. Entre deux vallons, où affleurent les argiles de Tarente, s’avance vers la mer un éperon formé par une digitation du plateau quaternaire ; du côté de la mer, cet éperon se termine par une grande tranchée qui montre les couches à Strombes surmontant les argiles. A l'extrémité Est de cette tranchée, ces couches prennent le facies de récifs à Cladocores, lacies plus côtier par conséquent qu’à la Punta della Penna ; et à l'Ouest elles passent à un calcaire sableux extrêmement riche en fossiles; mais l’abondance des Spondyles et surtout l’état des Strombes, roulés pour la plupart, indiquent encore le voisinage de la côte. En continuant notre marche vers l’Ouest, nous allons rencontrer des formations qui me paraissent devoir se rapporter au miveau de 15 mètres, car elles sont séparées des argiles de Tarente par une discontinuité, ou même, comme nous l’avons vu plus haut (p. 255), elles reposent sur des couches à fossiles d’eau douce. Ainsi, avant d'arriver au pont du chemin de fer, on voit, au-dessus des arviles de Tarente, des bancs de galets et de graviers surmontés par des sables très riches en Cardium edule appartenant, non à la var. Lamarcki, mais à ces multiples formes de petite taille et à test mince qui se ren- contrent dans les dépôts siumâtres ou tout à fait côtiers. Tout près du pont du chemin de fer, on revoit ces couches à Cardium edule, et elles passent ici latéralement, vers l'Ouest, à un récif magnifique de Cladocora cespitosa, reposant sur un banc de grosses huîtres : cet ensemble paraît bien discontinu d'avec les argiles de Tarente qui alfleurent en dessous. Après une interruption, nous arrivons ensuite à la coupe déjà étudiée (fig. 38, p.255) où des couches marines à Cladocores surmontent des marnes à Limnées. Enfin une coupe très analogue nous est montrée, à l'entrée même de la ville de Tarente, par les tranchées de la route qui monte sur le plateau quaternaire pour conduire à Massafra. Au-dessus des argiles de Tarente, bien développées et exploitées pour la poterie, vientun grès dur, une véri- table « panchina » à fossiles marins, puis un banc sableux à Cardium STRATIGRAPHIT 261 edule, et des marnes d’eau douce avec Limnées et Planorbes; elles sont surmontées par un nouveau banc sableux à fossiles marins (qui à son extrémité Sud se remplit de grandes huîtres); enfin, la surface du plateau est formée de « terre rouge » où se disséminent des galets. On a donc ici, au-dessus des argiles de Tarente, deux séries de couches marines séparées par une formation d'eau douce: l'inférieure, la plus ancienne, serait à rapporter au niveau de 35 mètres ; la supérieure, au niveau de 15 mètres. Mais il n’est pas certain que de tels phénomènes ne soient pas attribuables aussi à des déplacements horizontaux de la ligne de rivage et au dévelop- pement de lagunes littorales. Je terminerai par l'examen d’une dernière coupe qui nous mon- trera plus nettement l'existence de deux cycles sédimentaires corres- pondant probablement aux niveaux de 15 et de 35 mètres. On peut voir cette coupe (fig. 39) entre la mer libre et la voie ferrée, juste au sortir de la station de Tarente par la ligne de Metaponto. 20 Nord Sud FiG. 39. — Coupe relevée un peu à l'Ouest de la gare de Tarente, montrant l’existence de deux niveaux quaternaires séparés par un ravinement( (légende dans le texte). À la base, au-dessus des argiles de T'arenle (1 sur la figure), on a une couche de passage (n° 2), sableuse, blanche, contenant des Cardium Lamarcki, Cerithium vulqalum, etc. ; puis vient un grand développe- ment de grès grossiers (n° 3), formant falaise : ces grès sont entaillés par les tranchées du chemin de fer, ety montrent d'admirables exemples de stratification entrecroisée ; ils contiennent des fossiles très roulés (Car- dium, Huîtres, Pectoncles) et sont tout à fait identiques à la panchina que nous avons étudiée à San Pietro, sur la rive Nord du Mare piccolo : nous retrouvons encore ici un facies de plage formée sous l’action des ragues et des courants littoraux. Vers le haut, cette panchina devient tout à fait grossière : elle contient de nombreux galets de roches éocènes identiques à ceux qui forment la plage actuelle : nous entrons définitive- 262 QUATERNAIRE DE TARENTE ment ici dans le domaine des influences apennines. Car ces roches pro- viennent de la grande chaîne : elles ont été amenées à la mer par le fleuve Basento, puis, poussées vers l'Est par les courants littoraux, elles sont venues ainsi Jusque dans le domaine appulo-garganique !. Cette panchina de l'Ouest de la station de Tarente forme le soubasse- ment du grand plateau à 15-20 mètres quis'étend vers l’intérieur. Mais la surface de ce plateau ne correspond pas à la fin du cycle sédimentaire pendant lequel s’est déposée la panchina. Car près des tranchées du che- min de fer, on la voit nettement ravinée, et recouverte, par places, de graviers el cailloutis plus meubles (couche n° 4 sur la figure) ; ce sont ces derniers qui vraisemblablement correspondent au niveau de 15 mètres, tandis que la panchina dure, plus ancienne, doit être probablement rapportée au niveau de 35 mètres. 40 Le Quaternaire dans la plaine de Palagiano, à l’Ouest de Tarente. (PI. II, fig. 4.) Dans la grande plaine côtière qui s'étend entre les voies ferrées de Tarente à Palagianello et de Tarente à Metaponto, les dépôts quaternaires sont développés avec des facies tout différents de ceux que nous avons étudiés à l'Est de Tarente. Un simple coup d’œil jeté sur les feuilles Tarente et Matera de la carte topographique au 1/100.000, permet immédiatement de reconnaître, dans cette région, une série de cordons lit{oraux successifs, à peu près concentriques au rivage actuel, et s'échelon- nant depuis ce rivage jusqu à une altitude de près de 100 mètres: les formes topographiques sont donc ici des formes d'accumulation. Il en est de même pour les facies. Les cours d’eau descendant des plateaux pliocènes et crétacés, ont été, dès le début du Quaternaire, assez puissants pour amener, comme aujourd hui, jusqu'à la mer, des cailloutis calcaires, d’ailleurs assez peu roulés. D'autre part, les courants littoraux venant de l’Est étalaient sur les plages des galets et des graviers provenant de la Basilicate, et dont les éléments (calcaires et schistes bariolés de l'Eocène, roches vertes, etc.) 1 M. de Giorgi assure que les courants littoraux actuels vont de l'Est à l'Ouest; supposant cette direction restée constante au cours du Quaternaire, ilest conduit à expliquer la présence de ces matériaux apennins, dans les plages récentes, par le démantélement d'une vaste plaine littorale plus ancienne. PLAINE DE PALAGIANO 263 contrastent vivement avec les roches calcaires de la région : ce sont les conglomerats polygéniques du Général Verri { loc. cit., p. 186). Aïnsi, au lieu des facies calcaires zoogènes, ou argileux, sous lesquels nous est apparu le Quaternaire à l'Est de Tarente, nous ne trouverons plus ici que des sables, des graviers et des conglomérats. Il faut faire exception toutefois pour une masse argileuse difficilement observable, mais formant néanmoins le soubassement tout entier de cette plaine ; Je n’ai pu voir ses rapports avec les couches plus anciennes et je ne puis affirmer qu'il ne s'agit pas là d’argiles calabriennes identiques aux argiles de Gravina ; mais l’hypothèse la plus probable pour moi est qu'elles sont assimilables aux arqgiles de Tarente, et par suite d'âge qua- ternaire ancien. Cette région mériterait de faire l'objet d’une étude détaillée. Je devrai me contenter ici de montrer qu'on peut y retrouver les traces des mêmes lignes de rivage que l'étude des environs de Tarente nous avait déjà fait prévoir. Je décrirai pour cela la coupe que l'on peut observer en remontant la vallée où « Lama » du Fiume Enna, qui, entre Palagianello et la mer, prolonge la « Gravina » de Palagianello ! (voir la coupe pl. IT, fig. 4). Le rivage actuel est bordé ici par une chaïne régulière de dunes hautes de près de 10 ou 15 mètres; en arrière s'étend une dépression marécageuse résultant du comblement d'anciennes lagunes, car le fond de cette dépression est occupé par des marnes à Cardium edule affleurant à 1 ou 2 mètres au-dessus du niveau de la mer; la région est d'ailleurs actuellement en grande partie drainée et on y voit prospérer des cultures de coton. A cette plaine viennent se raccorder les alluvions modernes du Fiume Enna, attestant ainsi que ce sont elles qui ont comblé les anciennes lagunes. Niveau de 15 à 20 mètres. Au-dessus de cette plaine, s'élèvent bientôt des collines sableuses ! Dans toute la région, le nom de « Lama » s'applique aux vallées à versan(s adoucis des terrains argileux ou sableux, et celui de « Gravina » aux gorges abruptes creusées dans les terrains calcaires. Ainsi le torrent de Castellaneta (voir la carte au 1/100.000) traverse successivement de l'aval à l'amont : 1° une « lama » dans la plaine côtière quaternaire; 2° une « gravina » dans les calcaires crétacés et les mollasses calcaires du Pliocène inférieur; 3° une nouvelle « lama » dans les argiles et sables du Pliocène supérieur. 264 QUATERNAIRE DE TARENTE parfois isolées, comme le Cozzo Marziotto : ce sont des buttes- témoins, détachées d’un vaste plateau qui s'étend vers l'intérieur à 19-25 mètres d'altitude. Les deux versants de la vallée du Fiume Enna nous permettent d'étudier la constitution de ce plateau. Ainsi, près de la ferme appelée Carmignano sur la carte au 1/100.000, on peut relever la coupe suivante : A l'extrême base du petit escarpement qui domine le fleuve, on trouve des argiles plus ou moins sableuses, blanches ou bleues, renfermant une faune d’eau profonde et tranquille (petits Nuculidés, Dentalidés, Venus verrucosa, Cytherea chione, etc.); — puis, au-dessus, et en discordance, viennent des graviers et des sables blancs à Pectoncles, Cardium tuberculatum, Donax; à mesure qu'on s'élève, les bancs de graviers deviennent plus grossiers et subsistent seuls, contenant des coquilles roulées : vers 15-20 mètres d'altitude, ils font place à des formations lagunaires ou à des dépôts de cordons littoraux ; on y trouve des lentilles de dépôts saumâtres (marnes blanches concrétionnées à Cardium edule) ou lacustres (argiles sableuses à Limnées et Planorbes). On à ainsi un premier complexe sédimentaire, correspondant à une mer plus élevée de 15-20 mètres environ que la mer actuelle. Niveau de 35 mètres. En continuant à remonter vers l’amont, nous allons rencontrer des sédiments témoignant de lignes de rivage plus hautes et plus anciennes. Ainsi, à la Madonna della Stella, une bonne coupe est visible dans les tranchées du chemin qui traverse là le vallon : À la base, on a toujours des argiles bleues s’élevant à peine au-dessus des alluvions modernes qui les cachent; puis viennent des bancs gréseux durcis et enfin une importante masse de sables fins, épaisse de près de 20 mètres et contenant quelques bancs d'huîtres et de conglomérats. Ici le plateau dont toutes ces couches forment le soubassement est à 20 ou 25 mètres environ. Mais, jusqu'au sommet, les facies indiquent encore un certain éloignement du rivage : pour trouver des formations tout à fait littorales, 1l faut remonter Jusqu'à la Fontana Trovara : là, les facies de sables fins de la Madonna della Stella ont disparu presque entièrement, remplacés par des amas de gros galets perforés, avec bancs d'huîtres, en stratification oblique, PLAINE DE PALAGIANO 265 de type deltaïque. Et le plateau est ici à l'altitude de 35 mètres; ce sera donc là sensiblement l'altitude de la mer où se sont déposés les sables fins de la Madonna della Stella. Nous sommes bien là, en effet, sur un ancien rivage, car en poursuivant notre coupe un peu plus en amont, nous allons retrouver les formations d'eau douce et lagunaires déposées en arrière de ce rivage et complétant ainsi notre complexe sédimentaire. En effet, vers Fico, nous voyons les sables marins avec bancs d’huîtres recouverts par des alternances de sables et de conglomérats à Limnées, Planorbes et Cardium edule : au-dessus viennent des marnes blanches contenant des milliers de petites Néritines ;c'est dans ces couches que j'ai également récolté des Melanta (Striatella) tuberculata Müller, espèce à affinités tropicales, disparue de l'Italie, et dont je reparlerai plus loin. Enfin, encore plus au Nord, au lieu dit Camera Lo Forese, tout cet ensemble se relie à une ancienne plaine côtière, à l'altitude de 40 mètres : il n’y a plus ici que des formations continentales, et au lieu des graviers polygéniques -marins, on voit apparaitre des galets calcaires peu roulés, dépôts torrentiels amenés par les petits cours d'eau descendant des plateaux crétacés : c'est la plaine côtière correspondant au niveau de 35 mètres. Niveau de 70 mètres. Tout ce complexe sédimentaire vient à son tour buter contre des collines plus hautes dont la formation relève d’une ligne de rivage plus élevée; ces collines ne sont d’ailleurs que les extrémités, découpées par l'érosion, d'un vaste plateau s'étendant jusqu'à la route de Palagiano : on voit même la surface topographique dépen- dant du niveau de 35 mètres s’insinuer, sous forme de basse- terrasse, dans la vallée creusée au sein de ce plateau. Le soubassement de ce plateau est formé de sédiments très faciles à distinguer de ceux, plus récents, du niveau de 35 mètres ; tandis que ces derniers sont restés meubles et offrent ici un facies très grossier, avec nombreux galets calcaires, les premiers, au contraire, sont, surtout à la base, des sables très fins, agglomérés en grès durs avec stratification entre-croisée, et rappelant d'une manière frappante les « panchine » étudiées plus haut dans le Quaternaire de la station de Tarente et de la 266 QUATERNAIRE DE TARENTE rive Nord du Mare Piccolo (S. Pietro). Ces grès reposent sur les mêmes argiles bleues que nous avons vues tout le long du F. Enna, mais le contact n’est pas assez visible pour que l’on puisse dire s’il y a ou non continuité. En s’élevant jusque sur le plateau, qui est ici, à son extrémité Sud, à 60 mètres d'altitude, on voit les grès devenir plus grossiers, etse charger de cailloutis polygéniques; mais tout cet ensemble est encore marin, comme le prouvent les rares fossiles qui y ont échappé à la décalcifica- tion (Cladocora cespitosa, Venus gallina, etc.). La surface de ce plateau, quand on la parcourt vers le Nord, s'élève lentement jusqu’à la route de Palagiano, à 70 mètres; là, le facies est devenu encore plus grossier, et, surtout, apparaissent de nombreux blocs calcaires peu roulés : nous arrivons de nouveau à un ancien rivage, et c'est à cette ligne de rivage à 70 mètres environ qu'il faut rapporter la formation des grès que nous venons de décrire; la série sédimentaire correspondante vient d’ailleurs se terminer ici en biseau sur unsoubassement bien plus ancien ; car sous le pont de la route de Palagiano à Castellaneta, c’est la mollasse calcaire « matérine », de la base du Pliocène, que l’on voit affleurer, recouverte et ravinée par les derniers sédiments du rivage de 70 mètres. À Des traces analogues de cette ligne de rivage peuvent être suivies vers l'Ouest. Ainsi dans les tranchées de la route de Castellaneta, près du pont sur le torrent de Castellaneta, on peut voir un magni- fique contact : les sédiments les plus élevés du niveau de 70 mètres, représentés par des conglomérats à fossiles marins { Pecten jacobæus) reposent par ravinement sur la mollasse calcaire du Pliocène ancien également fossilifère (Terebratula cf. ampulla, Oursins, etc.) : d’après mes observations, ce contact serait exactement à 70 mètres. Conclusions. En résumé, cette coupe (fig. 4, pl. IIT) nous a montré, s'adossant aux collines crétacées et pliocènes, {rois séries sédimentaires corres- pondant respectivement à des lignes de rivage de 7o mètres, 1 Il semble d'ailleurs y avoir, dans cette région, des traces de lignes de rivage plus élevées; car j'ai observé en remontant dans la direction de Castellaneta, à l'altitude de 90 mètres, des blocs de conglomérats avec coquilles marines tres pro= bablement quaternaires, et des galets de calcaires à Rudistes perforés, 4\ PLAINE DE PALAGIANO 267 35 mètres, 15 mètres environ. Chacun de ces cycles sédimentaires comprend : — vers le continent, une bordure de conglomérals calcaires amenés par les torrents, — puis des dépôts de plage, qui sont des graviers polygéniques transportés par les courants littoraux, et associés à des formations lagunaires, — enfin, plus au large, des sédiments sableux ou gréseux, à facies plus profond. Ces divers cycles sédimentaires sont séparés les uns des autres par des ravine- ments d'inégale netteté; ainsi tandis que la séparation des niveaux de 35 mètres et de 70 mètres s’accuse nettement, celle des niveaux de 35 mètres et de 15 mètres n'apparait qu'à peine. Enfin, toutes ces formations reposent, comme l'indique la coupe, sur un soubassement d’argiles bleues dénotant un facies bien plus profond : ces argiles sont certainement ravinées par les dépôts du niveau de 15 mètres ; pour les autres il y a doute : nous pouvons admettre provisoi- rement qu'elles sont contemporaines des argiles de Tarente et corres- pondent, soit au niveau de 79 mètres, soit à un niveau plus élevé. Bien entendu, je ne considère pas ces chiffres de 15, 30, 70 comme établis avec une rigueur mathématique. Toutefois, il est très intéressant de constater que les deux premiers concordent bien avec ceux auxquels nous sommes arrivés pour les lignes de rivage des couches à Strombes de Tarente. Une telle concordance à si petite distance n'a d'ailleurs rien que de très naturel. Enfin je voudrais encore, en terminant, mettre en parallèle ces deux régions quaternaires de types si différents, l’une à l'Est, l’autre à l'Ouest de Tarente. À l'Est, c'est le domaine appulo-garganique où les éléments clastiques jouent dans la sédimentation un rôle minimum : les formes topographiques sont adoucies et peu instruc- lives; par contre, dans ces facies zoogènes, les fossiles pullulent. À l'Ouest, on entre dans le domaine subapennin ; les formes topo- graphiques sont des formes d'accumulation, nettes et faciles à interpréter; mais les coquilles sont plus mal conservées, et les faunes monotones n'apprennent rien au géologue. La limite de ces 1 Ces argiles sont signalées par M. C. dé Giorgi ([72], p. 244), qui les a observées dans la Lama di S. Angelo, à l'Ouest de la Lama di Lenna;il en cite quelques fossiles n’offrant pas d'intérêt particulier, et, se basant sur leur facies, les consi- dère comme pliocènes. 268 QUATERNAIRE DE TARENTE deux domaines si différents n'a guère varié depuis le début du Pliocène jusqu'à l’époque actuelle. 5° Etude des faunes. I. — Faune des argiles de Tarente. La faune des argiles de Tarente est frès mal connue. Ces argiles sont, en effet, très peu fossilifères et, de plus, comme tous leurs affleu- rements sont dominés en corniche par les couches à Strombes, il est parfois difficile de faire la part des espèces qui leur appar- tiennent en propre et de celles qui proviennent de la désagrégation des couches à Strombes et qu’on peut ramasser en abondance sur Les talus argileux. MM. Verriet de Angelis ([226] p. 205) ne citent dans ces argiles aucun fossile : ils ont seulement reconnu dans les couches supé- rieures faisant passage au « tufo mazzaro » (— couches à Strombes) les espèces suivantes : Mytilus minimus Poli, Gardium edule L., Syndesmya alba Wood, qui ne donnent lieu à aucune remarque intéressante. Le Professeur Bassani [9] a déterminé dans ces argiles une trentaine d'espèces de Poissons, toutes vivant encore dans la Méditerranée; il y a reconnu, à côté d'un grand nombre de types côtiers, quelques formes spéciales aux faunes très profondes et qu'il pense avoir été amenées là, après leur mort, par l'action des courants ; dans l’ensemble, le caractère de la faune ichtyologique reste donc relativement littoral. A une pareille conclusion conduit l'étude des Algues faite par de Gasparis [71]. On trou- vera également dans l'ouvrage de M. Bassani (p. 9, note 3) une liste de Foraminifères déterminés par Fornasini!. Quant aux Mollusques, la liste donnée par M. Bassani (p. 57) me parait porter la trace évidente des mélanges de faunes auxquels je faisais allusion au début; ainsi la coexistence, dans un même dépôt, de la Tere- bratula vitrea et de la Columbella rustica, est manifestement impossible : celte dernière espèce, strictement littorale et inconnue sur les fonds argileux, provient certainement des couches sus-jacentes. La courte liste 1 Ces argiles viennent d'être étudites, surtout au point de vue lithologique, par D. Pantanelli [189] : il y a reconnu une seule espèce de foraminifère, Ho hé par des milliers d'individus, l’Orbulina universa d'Orb, , Las “E SAS AY RES FAUNE DES ARGILES 269 de M. Bassani ne contient d’ailleurs aucune forme intéressante au point de vue stratigraphique. Inversement, Kobelt [151] cite, dans la faune des couches à Strombes, des espèces qui, certainement, proviennent des argiles ; ce sont : Nucula placentina Lmk. et Dentalium rectum L. (sous le nom de D. elephantinum). Personnellement, je ne puis guère y affirmer la présence que des espèces suivantes : T'erebralula (Liothyrina) vitrea Born, Den- talium rectum L., Chlamys septemradiatus Müller. Le Dentale et la Nucule citée par Kobelt sont des formes éteintes; le Chlamys est, comme on sait, une forme plutôt sep- tentrionale, rare dans la Méditerranée. Toutes ces coquilles, d’ailleurs, sont des plus communes dans la faune sicilienne. En résumé, cette faune des argiles de Tarente est, jusqu'à présent, trop mal connue pour qu’on puisse déterminer d’une manière précise son âge!. Mais si on s’aide des considérations stra- tigraphiques développées dans le chapitre précédent, on voit que tout nous porte à considérer ces argiles de Tarente comme sici- liennes ; c'est cette conclusion, jusqu'à présent conforme à toutes les observations, que j'adopterai. Au point de vue bathymétrique, ces quelques espèces des argiles de Tarente sont extrêmement intéressantes, car elles nous indiquent un facies relalivement profond, identique à celui des dépôts de Ficarazzi ; comme ces derniers, elles affleurent actuellement près du niveau de la mer : nous pouvons donc en conclure que l'altitude de la mer où elles se sont déposées devait atteindre au moins 70 à 8o mètres. Elles correspon- draient donc bien, comme nous l’avons admis, à la plus élevée des lignes de rivage quaternaires que nous avons pu reconnaître, précisément à cette altitude, dans la région de Tarente. Î11. — La faune du niveau à Strombes (tufo mazzaro). Dans les dépôts postérieurs aux argiles de Tarente, il me parait difficile d'établir une différence paléontologique entre les niveaux ! Si l'on admet la contemporanéité de ces argiles de Tarente avec les mollasses Marno-calcaires développées aux environs de la station de Montejasi (voir plus haut, p.251), nous pourrions ajouter à cette faune quelques autres espèces, en parti- culier là Cyprina islandica, forme éminemment sicilienne. 270 é QUATERNAIRE DE TARENTE de 15 et de 35 mètres; les gisements fossilifères les plus riches (voir plus haut), ceux dans lesquels on trouve la faune à Strombes bien caractérisée, se rattachent vraisemblablement presque tous au niveau de 35 mètres; mais cette différence provient, proba- blement, seulement du facies, car le niveau supérieur ne nous est connu que sous des facies beaucoup moins profonds, où la faune, exclusivement composée d'espèces tout à fait littorales, est for- cément moins variée. J’examinerai cette faune à Strombes de Tarente à deux points de vue : 1° au point de vue stratigraphique, en y notant les espèces caractéristiques; 2° au point de vue bathymétrique. 1° Les espèces caractéristiques. D'après mes propres récoltes, je puis citer d'abord les formes suivantes, actuellement disparues de la Méditerranée et vivant dans l'Atlantique tropical : Strombus bubonius Lmk. Tritonidea viverrata Kiener Tritonium ficoïides Reeve Conus testudinarius Martini Natica lactea Guilding Arca Geissei Dunker Deux espèces vivent dans l’Aflantique tempéré et septentrional ; ce sont : Tapes rhomboïdes Pennant Venus fasciata da Costa Enfin, une autre forme, citée ici par Costa (voir 5° partie), a une signification stratigraphique un peu moins claire, mais elle se retrouve dans les couches à Strombes de Ravagnese, près Reggio; » cest : Mitra Aquini O. G. Cosla. A côté de ces espèces caractéristiques et absolument étrangères à la faune méditerranéenne actuelle, on doit encore souligner l’abondance de beaucoup de grandes et belles coquilles à affinités méridionales, devenues rares ou localisées dans la Méditerranée. .Tels sont, par exemple, les Cassis saburon et undulata, le Cardium hians, les Tritonium costatum et nodiferum, la Panopæa Faujasi, etc. Onsaitque toutes ces coquilles se montrent partout abondantes dans la faune à Strombes, dont elles contribuent à accentuer le caractère tropical. FAUNE DES COUCHES A STROMBES 271 Ainsi, même en se basant sur le seul point de vue paléonto- logique, on ne saurait souscrire à l'opinion de Fuchs et de MM. Verri et de Angelis, et assimiler les couches de Tarente aux termes supérieurs de la série pliocène de Gravina et de Monte- mesola. Leur faune les place nettement dans l'horizon quaternaire à Strombus bubonius, dont elles sont même un des représentants les plus typiques. Enfin, j'ai récolté, dans la plaine à l'Ouest de Tarente, dans des formations lagunaires associées aux dépôts du rivage de 35 mètres, la Melania (Striatella) tuberculata Müll.; le groupe auquel appar- tient cette Mélanie est, actuellement, disparu de l'Italie. Au Pliocène, on le trouve généralement répandu dans l'Europe méri- dionale, en particulier en Italie. Au Sicilien, il y persiste encore, car nous voyons citée par M. di Monterosato, dans les couches de Palerme, la Melania plicalula Libassi; actuellement, par contre, il reste confiné sur les rivages Sud de la Méditerranée, en Algérie (où il forme un des élé- ments les plus abondants de la faune des « chotts »), en Egypte, en Syrie, en Perse; pourtant il subsiste encore à Malte. La découverte à Tarente d'une forme de ce groupe est donc par- ticulièrement intéressante, en ce qu’elle donne aux couches qui la contiennent un caractère archaïque, en même temps qu'elle nous indique, à l'époque des couches à Strombes, un climat plus chaud que le climat actuel. Les listes données antérieurement par les divers auteurs ne signalaient que fort peu de ces espèces caractéristiques, qui y étaient d'ailleurs toutes inexactement déterminées. Ainsi, dans celle de MM. Verri Er DE ANGeris D'Ossar (loc. cul., p. 205), je ne relève que le Strombe, cité comme Sfrombus sp., et le grand Cône, déterminé Conus virginalis Br.f. Dans la liste de Koger, ces deux coquilles sont cilées sous les noms de Sfrombus coronatus Defr. et Conus deperditus Brug. in Philippi; la Natica lactea y est également citée sous le nom de N. mamilla L. *. Quant aux espèces éteintes signalées par Kobelt, deux d’entre 1 Il ne faut pas, à mon avis, attacher une grande importance (voir 5e partie) à la Nassa angulata Br., citée par ces auteurs à Tarente comme espèce éteinte. > Kobelt signale, en outre, une espèce nouvelle, Bulla À maliæ. 212 QUATERNAIRE DE TARENTÉ elles, Dentalium elephantinum L. (c'est le D). rectum L.) et Nucula pla- cenlina Lmk., appartiennent certainement, non à la faune des couches à Strombes, mais à celle des argiles de Tarente, car ce sont des formes relativement profondes, fréquentes partout dans les facies argileux du Sicilien. Restent les Chenopus pesgraculi Bronn, Terebralula grandis Blumb. et Rissoa canaliculata Phil., qui sont des formes essentiellement pliocènes : elles doivent donc provenir des mollasses calcaires pliocènes anciennes (tufo zuppigno), où j'ai précisément récolté de grandes Téré- bratules dans la ville même de Tarente (au Borgo). 2° Signification bathymétrique de cette faune. Les gisements les plus riches, d’où proviennent la presque totalité des coquilles que j'ai récoltées (voir la liste dans l’appen- dice), sont ceux du Pizzone, de l’Arsenal et de la Punta della Penna : ils sont situés à une altitude de quelques mètres seu- lement (4 à 10 mètres). Essayons, d’après l'examen de l’ensemble de la faune, d'évaluer la profondeur à laquelle cette faune a vécu. Il convient d'abord de noter l'absence complète des espèces pro- fondes, si fréquentes dans le Sicilien de Palerme, par exemple: ainsi les Nassa semistriata, Trochus granulatus, Chlamys septem- radiatus, Isocardia cor, Cardium du groupe mucronatum, ete., si caractéristiques à ce point de vue, manquent absolument à Tarente; il en est de même du Chlamys opercularis, si abondant partout dans les dépôts récents tant soit peu profonds. Par contre, la note dominante est donnée par des espèces litto- rales, fréquentes actuellement sur les plages, telles que les Pec- toncles, les Cardium du groupe edule, les Cardium tuberculatum, _Arca Noæ, Loripes lacteus, Chlamys glaber et var. aff. liburnica, les petits Murex, la Columbella rustica, une multitude de petits Trochidés, ete. Mais à ces espèces, formant le fond même de la faune, se joignent, à l’état de raretlés, quelques coquilles profondes, comme Venus effossa Biv., Arca corbuloïdes Mts.. Des associations telles que celle de Venus effossa et de Columbella rustica nous conduisent à admettre que les dépôts où elles se rencontrent ont pris nais- sance à une profondeur de 90-30 mètres environ. Nous concluons donc de là que les rivages de la mer à Strombes, à Tarente, devaient se trouver à une al{itude de 30 à 40 mètres CONCLUSIONS 213 au-dessus de la mer actuelle; cette conclusion est tout à fait d'accord avec les faits d'ordre stratigraphique que nous avons observés dans la région. 6° Résumé ; anciennes lignes de rivage dans la région de Tarente. Des faits exposés précédemment, on peut déduire que : 1° La fin de la série de remblaiement pliocène correspond, dans la région de Tarente, à une ligne de rivage qui se retrouve à une altitude probablement de peu supérieure à 900 mètres (altitude des plateaux pliocènes de Montemesola) ; 2° A la fin du Pliocène a dû se produire une grande régression, car les plus anciens sédiments quaternaires connus reposent (jusqu'à la cote — 72, sondage rapporté par Verri), par ravinement, soit sur le Crétacé, soit sur les divers niveaux du Pliocène; Une transgression a ensuite ramené la mer à une altitude voisine de 60-100 mètres; c'est à ce moment que se sont déposées les argiles de Tarente; on peut les rapporter à l'époque sicilienne; 3° Postérieurement, une ligne de rivage à 35 mètres environ cor- respond aux couches à Strombes; ce nouveau stationnement de la mer a été précédé d'une petite régression, car, en certains points, les dépôts du rivage de 35 mètres reposent directement sur le Pliocène ancien; mais cette régression n'avait certainement pas ramené le niveau marin au-dessous du o actuel, car, sur les bords du Mare Piccolo, il y a, en général, concordance entre les argiles de Tarente et les couches à Strombes qui les surmontent ; 4° Enfin, on peut reconnaître des traces, assez indistinctes à la vérité, d'une ligne de rivage à 15 mètres, précédée aussi d’une régression dont il est malaisé de préciser l'importance, mais qui a dû abaisser le niveau de base tout au moins fort près du niveau actuel. $ 2. — LE QUATERNAIRE DANS LA TERRE D'OTRANTE Nous avons vu précédemment combien était difficile la strati- graphie des terrains récents dans la Terre d'Otrante!. Je crois que ! M. Robert Douvillé a été frappé par « l’étonnante similitude de facies qui Univ. DE Lxon. — Gienoux 18 214 QUATERNAIRE DE LA TERRE D'OTRANTE le Quaternaire, tel que je l’ai défini ici, ne joue dans cette province qu'un rôle assez restreint; les mollasses calcaires inférieures, les argiles, enfin les calcaires sableux supérieurs, toutes formations qui remplissent la plupart des dépressions de la péninsule, doivent, comme nous l'avons vu d’après leurs faunes, être en général attribués au Pliocène. Le Quaternaire paraît donc localisé au voisinage des côtes : sur la frontière de la Terre d'Otrante, nous l'avons déjà décrit à Tarente; nous allons le retrouver avec des caractères presque identiques à Gallipoli et à Brindisi. S'il pénètre dans l’intérieur de la péninsule, ce n’est, en tout cas, que sous forme de calcaires sableux peu épais, formant une simple « crosta » sur les sédiments antérieurs. Cette manière de voir paraît être, d’ailleurs, celle adoptée par les auteurs de la Carte géologique détaillée, car dans les feuilles Tarente, Brindisi, Lecce, Maruggio, Gallipoli, Otranto, Tricase, en aucun point les plateaux indiqués en Quater- naire ne dépassent 60 à 80 mètres!. J'examinerai seulement deux coupes de ce Quaternaire. 1° La coupe de Gallipoli. Entre deux baies à côtes sableuses bordées de dunes, la péninsule de Gallipoli s’avance dans la mer, suivie de plusieurs petites îles ; elle est constituée par des couches dures de grès quaternaires formant falaise ; la coupe de cette falaise est surtout nettement visible à l'extrémité Nord de la ville, au lieu dit « le Fontanelle ? ». Les couches les plus basses, émergeant de la mer, sont des argiles bleues très pures et très plastiques; dans les bancs infé- rieurs, elles ne contiennent guère que des Zsocardia cor; mais, peu à peu, elles deviennent un peu plus sableuses et se chargent de fossiles; la partie supérieure devient ainsi un véritable grès à Chlamys septemradiatus, où l’on peut récolter des centaines de ces belles coquilles. Au-dessus, enfin, et en concordance, viennent des existe, dans cette région, entre le Crétacé, l'Eocène et le Miocène»; j'ajouterai « le Miocène, le Pliocène et le Quaternaire »; à toutes ces époques, la zone apulo-garga- nique a toujours été une région de plateaux calcaires tabulaires, partiellement ou totalement recouverts par des fonds marins zoogènes. ! M. F. Sacco [200] vient de nous faire connaître sa manière de voir à ce sujet: il ne reconnaît lui aussi le Quaternaire qu'à Brindisi, à Tarente et à Gallipoli. … 2 Ce nom provient des sources abondantes qui filtrent dans la falaise à la limite des argiles et des grès. GALLIPOLI 275 grès de plus en plus grossiers ayant le facies habituel de « pan- china » à stratification entre-croisée; je n'ai pu y voir que de nombreux moules de fossiles, des Pecten jacobæus, Chlamys oper- cularis, C. fleæœuosus, C. glaber, Columbella rustica, etc.; en tout 1 = Mer Fic. 40. — Coupe du Quaternaire à Gallipoli (le Fontanelle). 3. — Grès grossiers à S/rombus bubonius (stratification entre-croisée). 2. — Grès fins à Chlamys seplemradiatus. 1. — Argiles bleues à Cyprina islandica et Isocardia cor. cas, la faune est devenue tout à fait lif{orale en même temps que le facies. Il ne m'a pas été possible de voir les relations stratigraphiques de toutes ces couches avec les formations antérieures. A. — La faune des argiles. On trouvera dans l’appendice la liste de toutes les espèces que j'ai récoltées dans ces argiles de Gallipoli, dont la hauteur visible au-dessus de la mer ne dépasse pas 1 à 2 mètres. Je n'en retiendrai ici que les analogies frappantes de cette faune avec celle de Fica- razzi. Nous retrouvons en effet à Gallipoli, comme formes septen- trionales : Cyprina islandica L. Chlamys septemradiatus Müll. Dosinia lupinus Poli, var. ficaratiensis nov. Buccinum humphreysianum Benn., var. striata Phil. sp. et une seule espèce éteinte : Dentalium rectum L. De plus, toutes les espèces de Gallipoli sont également repré- sentées à Ficarazzi avec le même degré de fréquence relative. Bien que l’on ne puisse encore considérer cette faune comme suffisam- ment connue, on voit que, pour le moment, aucune raison ne s'oppose à son rattachement au Sicilien. 276 QUATERNAIRE DE LA TERRE D'OTRANTE J'ajouterai qu’au point de vue hathymétrique l'identité des deux gise- ments n'est pas moins grande : on y trouve les mêmes formes profondes, et encore avec la même fréquence relative (ex. : Asfarle sulcata, Isocar- dia cor, Nucula sulcata, Chenopus serresianus, Nassa limata, etc.) ; comme à Palerme, nous serons donc conduits à penser que la mer, où se sont déposées ces argiles, devait s'élever à 80 mètres environ au-dessus de la mer actuelle ; c’est précisément, à peu de chose près, la cote maxi- mum que l’on semble pouvoir attribuer aux formations quaternaires dans la Terre d'Otrante. B. — La faune des grès supérieurs. Mes récoltes ont été ici tout à fait insuffisantes; mais j'ai pu retrouver dans diverses collections plusieurs fossiles intéressants, dont la provenance ne me paraît pas douteuse. M. C. de Giorgi m'a montré en effet, dans sa collection particulière, un Strombus bubonius typique, trouvé dans les grès de Gallipoli, comme suffit d’ailleurs à le prouver sa gangue; j'ai pu voir au Musée de l’Institut technique de Lecce de grands Cônes qui m'ont paru se rapporter plutôt au type quaternaire (C. testudinarius) qu'au C. mediterraneus. Enfin les collections du R. Ufficio geologico à Rome contiennent divers fossiles de la « panchina » de Gallipoli ; 29 j y ai noté : Strombus bubonius Lmk. Trochus turbinatus Born Lima squamosa L. Spondylus gæderopus L. Ce sont précisément les espèces liftorales les plus fréquentes dans les couches à Strombes. Conclusions. Ainsi nous retrouvons à Gallipoli, superposées en concordance, les couches à Strombes et les argiles siciliennes. La coupe, très analogue à celle de Ficarazzi, est encore plus identique à celle de Tarente ; et dans ces trois cas, les lignes de rivage correspondant à ces deux faunes successives sont à des altitudes comparables. En outre, à Gallipoli comme à Tarente, entre le maximum positif du Sicilien et le maximum positif des couches à Strombes, il ne paraît pas s'être intercalé de minimum négatif bien important : en tout cas, ce minimum négatif n’a pas dû abaisser les eaux de la mer au-dessous du niveau actuel. BRINDISI 277 2° La coupe de Brindisi. Le port de Brindisi! est formé par deux vallées confluentes submer- géeset envahies par la mer ? : ces vallées se sont creusées dans un vaste plateau à 25-30 mètres, et, sur leurs versants, on peut étudier le soubassement de ce plateau : la coupe en est semblable à celles de Tarente et de Gallipoli, et a été décrite par M. de Giorgi (L74}, p. 12 et (73). A la base, ce sont des argiles bleues plastiques; devenant sableuses dans le haut, elles passent ainsi progressivement à des sables et grès cal- caires, qui s'élèvent jusqu'au sommet. Les grès supérieurs ne contiennent pas ici de faune bien caractéristique ; jy ai surtout noté l’extrême abondance des Chlamys opercularis, qui donne à ces couches un facies plus profond qu'aux couches supérieures de Gallipoli et de Tarente. La zone la plus fossilifère est celle des argiles sableuses ; ayant malheureusement égaré les fossiles que j'y ai recueillis, je ne puis en donner de liste complète. J'ai été néanmoins frappé dans l’ensemble par le caractère sicilien de la faune : comme à Ficarazzi, les Chlamys opercularis et T'urrilella communis y indiquent une profondeur assez grande ; et, comme espèces caractéristiques, il me semble avoir récolté Chlamys seplemradialus et Neplunea sinis(rorsa; je n'ai pas souvenir d’y avoir vu des formes éteintes. Ainsi, 1l semble bien que l’on retrouve, dans le grand plateau de Brindisi, des formations d'âge sicilien. | 3° Remarques géomorphologiques. Je crois ainsi avoir démontré (spécialement par l'étude des envi- rons de Tarente) que la série géologique de la Terre d'Otrante est moins simple qu’on ne le croyait, en identifiant des terrains de même facies mais en réalité d’âges très divers (p. ex. les argiles de Tarente et les argiles de Gravina, les couches à Strombes de Tarente et les grès calabriens de Montemesola, etc.). Et, dans mon hypothèse, aux divers niveaux marins successifs ont dû correspondre autant de cycles d’érosion, qui ont dû laisser des traces dans la morphologie : leur reconstitution serait donc 1 Voir par exemple Th. Fischer [238]. ? On a là une preuve d’un mouvement négatif récent. 278 QUATERNAIRE DE LA COTE ADRIATIQUE extrêmement importante. Précisément une tentative de ce genre, fort intéressante, vient d’être faite par R. Biasutti [22] ; une simple inspection de la carte au 1/50.000° fait immédiatement reconnaître dans la Terre d’Otrante une succession de grands plateaux situés à des altitudes décroissantes; M. Biasutti a ainsi distingué trois de ces niveaux d'abrasion marine dans les hauts plateaux de toute la pénin- sule : ils correspondent aux altitudes de 200, 147 et 115 en moyenne ; en dessous viennent deux ferrasses côtières, de 70 mètres etde 35 mètres environ. à - En admettant que les surfaces élevées, de 200 mètres, correspon- dent au maximum positif de la fin du Pliocène, on aurait là la trace des anciens rivages quaternaires de plus en plus récents ; la terrasse la plus basse, celle de 35 mètres, correspondrait aux couches à Strombes, les plus hautes, au Sicilien. $ 3. — LE QUATERNAIRE DU TAVOLIERE DI PUGLIA ET DES COTES VOISINES La côte entre Brindisi et Barletta, formée d’une plaine littorale relativement étroite qui sépare de la mer les plateaux calcaires des Pouilles, a été très peu étudiée au point de vue du Quaternaire; ce terrain doit y être d’ailleurs, en raison de la similitude des facies (mollasses calcaires), assez difficile à distinguer du Pliocène. Par contre, dans le Tavoliere di Puglia, nous arrivons à une région formée entièrement de dépôts quaternaires. Ils sont signalés par de nombreux auteurs, mais c’est surtout dans le travail déjà ancien de Niccoli [184] et dans ceux plus récents de Ricciar- delli [197] et de Checchia-Rispoli [36, 37], que nous trouverons les documents les plus intéressants. Le Tavoliere di Puglia est une grande plaine s'étendant entre le Fleuve Ofanto, au Sud, et le Monte Gargano au Nord, et dont la ville de Foggia occupe à peu près le centre. Tout cet ancien golfe a été comblé, pendant le Quaternaire, par des sédiments marins. Partout, en effet, dans la plaine, la constitution géologique du sol, visible seulement dans les puits ou sondages, est à peu près la même : TAVOLIERE DI PUGLIA 219 Sous la terre végétale, des couches sableuses superficielles sont en général durcies, formant un grès calcaire sableux : c’est la « crosta », qui équivaut en petità une espèce de « croûte tropicale » ; sa formation est due à une cimentation ultérieure des sédiments sous l'influence des eaux d'infiltration, et elle ne constitue pas un horizon stratigraphique. Au-dessous, viennent des sables avec bancs de galets, puis des sables argileux, enfin des argiles sableuses, fort épaisses, souvent exploitées pour des tuileries. Sous ces argiles se rencontre habituellement, d’après Checchia-Rispoli, un banc de graviers et conglomérats déterminant une nappe aquifère. Quant au soubassement de ces terrains, il n’est pas visible, maïs il est possible qu’en beaucoup de points du centre du bassin il soit formé par les argiles pliocènes. Sur les bords de la plaine, et spécialement du côté du Gargano, ces dépôts quaternaires apparaissent bien indépendants du Pliocène. Aiïnsi j'ai pu constater que, dans les collines d’Apricena, Poggio- Imperiale (au Nord de San Severo), ils viennent s'appuyer soit sur les calcaires à Amphistégines du Pliocène ancien, soit sur les cal- caires crétacés. Tous ces sables, argiles, graviers, qui ont remblayé le golfe de Foggia et rattaché le Gargano à la péninsule, sont d’origine marine, comme le prouvent les fossiles qu'ils contiennent partout. Les faunes ne sont malheureusement pas très intéressantes : elles se réduisent à un assez petit nombre de Lamellibranches littoraux : Dans deux excursions faites en compagnie de M. Checchia-Rispoli aux environs de S. Severo, J'ai récolté, à la station de S. Severo, à Contatore et à Poggio-[mperiale, les espèces suivantes, dans les couches supé- rieures : Ostrea groupe edulis L., Pecten jacobæus L., Ghlamys opercularis L., G. varius L., C. flexuosus Poli et var., GC. glaber L. et var. M. Checchia-Rispoli signale, en outre ([37], p. 2), dans ces mêmes couches supérieures : Anomia ephippium L., et Modiola adriatica Lmk. % © \ . « . + . Ce n’est certainement pas là une faune pliocène ancienne. Mais on voit que le point de vue paléontologique ne nous permet pas une détermina- . A Gus le o tion d'âge plus précise, en l'absence de toute forme caractéristique. Pye, ar NT TE RE AE TIRER 2% 280 QUATERNAIRE DELA COTE ADRIATIQUE Au point de vue stratigraphique, nous avons déjà dit que ces for- mations apparaissent comme qualernaires. Quant à leur place dans la série quaternaire, aucun document autre que leur alfitude ne nous permet actuellement de nous en faire une idée. Il est d’ailleurs probable que, dans le Tavoliere, on doit ainsi rencontrer des dépôts de plus en plus récents à mesure qu’on s'approche de la mer. Mais la limite supérieure de ces formations ne paraît pas dépasser 100 mètres et, en particulier, dans les environs deS. Severo, les couches marines dont nous venons d'étudier la faune forment un vaste plateau à 70-80 mètres !. Il est donc naturel de les considérer comme anté- rieures aux couches à Strombes et par suite de les attribuer au Sicilien ?. C’est dans la partie inférieure de ce « Sicilien » de S. Severo, et précisément dans le conglomérat décrit plus haut à sa base, que M. Checchia-Rispoli a signalé la découverte d'une molaire d’Elephas antiquus figurée par lui [36] et bien typique. Comme cette dent était enfouie sous une épaisseur de 14 mètres de sédiments marins, il ne peut être question ici d'apport superficiel : c’est un des rares gisements bien authentiques d’'Eléphant dans du Sicilien marin, et, à ce titre, il m’a paru intéressant de le mettre en lumière. C’est à un niveau beaucoup plus récent que l’on doit rapporter la « panchina » décrite par Viola et Di Stefano # à la Punta delle Pietre nere, curieux pointement de Trias et de roches éruptives, situé sur la ES côte au Nord de Lesina; ils y ont observé, à 1 mètre au plus au-dessus du niveau de la mer, des grès bréchoïdes à Lithothamnium et Cladocora ces- pitosa : ils en citent (loc. cit., p. 132) une vingtaine de coquilles très littorales et toutes actuelles. Ce gisement correspond donc à une ligne de rivage très basse, ne dépassant certainement pas 15 mètres. Toute la côte adriatique entre le Gargano et le Monte Conero, 1 Bertacchi [20] signale au Gargano, sur le versant Sud, l'existence d’une terrasse marine à 70-80 mètres. Des terrasses d’alluvions sont magnifiquement développées dans toutes les vallées avant leur débouché sur le Tavoliere ; l'étude détaillée de ces terrasses serait certainement très intéressante. 2 C'est à cette conclusion que vient de se ranger récemment M. Gran RisPozi: Osservazioni geologiche sull! Apennino della Capitanata (Giornale di Sc. natur. ed econom. di Palermo, vol. XXIX, rgr2). 3 La Punta delle Pietre nere presso il Lago di Lesina in provincia di Foggia (Boll, d, R. Comit. geol. d’Italia, vol. XXIV, 1893). ATERNAIRE DE LA COTE ADRIATIQUE 281 près d'Ancône, a été très peu étudiée au point de vue du Quater- naire. Je ne l’ai pas visitée personnellement et je ne vois guère à y rapporter qu'une observation fort intéressante due à Moderni | 178]. D'après cet auteur, la plage actuelle est dominée, sur de grandes étendues, par un plateau haut d’une centaine de mètres ; et à la surface de ce plateau, apparaissent des sédiments quaternaires marins, sables, graviers et cailloutis, avec Lithothamnium. Il n’est pas douteux que de telles formations ne soient stratigraphiquement indé- pendantes du Pliocène. Il faudrait donc y voir, vraisemblablement, du Sicilien, et cette partie de la côte adriatique présenterait ainsi la plus curieuse similitude avec la côte Nord de la Sicile, le long de laquelle court également une ancienne plaine côtière sicilienne à 100 mètres d'altitude environ !. 1 Je signale ici, seulement pour mémoire, le travail de G. Capeder [28]. QUATRIÈME PARTIE LE PLIOCÈNE SUPÉRIEUR ET LE QUATERNAIRE DANS LA MÉDITERRANÉE OCCIDENTALE CHAPITRE PREMIER L'ITALIE CENTRALE ET SEPTENTRIONALE $ 4. — LA COTE TYRRHÉNIENNE DANS LA PROVINCE DE NAPLES Depuis le golfe de S. Eufemia jusqu'à celui de Salernet, on ne connaît pas de Pliocène marin ; et cette absence a été souvent invo- quée en faveur de l'existence d'une « Tyrrhénide » pliocène, qui aurait occupé une grande partie de la mer tyrrhénienne actuelle. Il faut arriver jusqu'au golfe de Naples pour retrouver des for- mations récentes fossilifères : elles sont depuis longtemps célèbres, car Lyell ?les a prises pour type de son « nouveau Pliocène »; aussi, bien que je n'aie pas eu l’occasion de les visiter personnellement, dois-je en dire quelques mots ici. Marnes de l’Epomeo. Les formations tertiaires récentes les plus inférieures que l’on connaisse dans la région napolitaine sont des argiles bleues très puissantes : elles affleurent en particulier à l’île d'Zschia où Lyell signale des fossiles à 486 mètres d'altitude ; on les connaît sous le 1 Où le Pliocëène ancien fossilifère vient d'être signalé, tout récemment encore, par M. Sacco (Boll. d. Soc. geol. ital., vol. XXI, 1912, p. 379, note 1). ? Eléments de Géologie, t. Ier, p. 306. 284 GOLFE DE NAPLES nom de « marnes de l’Epomeo », car elles forment l’ossature même de cette montagne, la plus élevée de l’île (794 mètres). Ces marnes descendent d’ailleurs, à Ischia même, jusqu’au-dessous du niveau de la mer, et elles semblent constituer le soubassement de toute la région napolitaine, car on les a rencontrées dans des sondages à Naples, et, comme nous le verrons, elles font partie des matériaux arrachés par le Vésuve à son soubassement, et rejetés sur ses flancs à l’état de « masses erratiques ». La faune de ces marnes a été étudiée par beaucoup d'anciens auteurs, en particulier par Brocchi, Philippi [190], Spada- Lavini [216], etc., enfin, récemment par M. R. Bellini! [14, 15, 16]. Cette faune se compose, en très grande majorité, d’espèces vivant encore dans la mer voisine, et à facies profond ; on ne peut guère y citer (d’après Philippi et Spada-Lavini) qu'une seule forme dis- parue? : c’est la Rhynchonella bipartita (Brocchi, Terebratula), qui a un caractère franchement pliocène. Nous sommes ainsi con- duits à exclure l’âge quaternaire de ces marnes. D'autre part, la rareté des espèces éteintes exclut aussi le Pliocène ancien; les marnes de l'Epomeo seraient donc « calabriennes », ainsi que Île voulait Lyell, en les donnant en exemple de son « nouveau Pliocène». D'ailleurs, comme il est arrivé pour les sédiments analogues, l’âge de ces marnes à fait l’objet de discussions parfois violentes : ainsi, tandis que Puggaard, se basant sur la faune, les considérait comme bien posté- rieures au Pliocène vrai, Spada-Lavini, frappé surtout par l’analogie de ces marnes d’Ischia avec les marnes subapennines, voulait voir là des formations toutes contemporaines. Tous deux avaient raison à des points de vue différents, puisque ces couches calabriennes, intimement liées stratigraphiquement au Pliocène subapennin, n'en sont pas moins distinctes paléontologiquement du Plaisancien et de l’Astien typique. Aiïnsi nous retrouvons, dans la région napolitaine, comme sou- bassement du massif volcanique, des argiles calabriennes tout à fait pareilles comme âge, facies et faune, aux argiles subetnéennes sur 1 Pour la bibliographie, je me contente de renvoyer aux excellentes études de | M. Bellini. ? Je suis, en effet, conduit à laisser de côté (voir 5e partie), au point de vue stra- tigraphique, les Crassopleura elegans Scacchi, Cassis inarimensis Bellini, Natica acuminala Costa, cités par M. Bellini comme espèces éteintes. GOLFE DE NAPLES 285 lesquelles s'élève l’Etna, et aux argiles bleues des Pouilles, sur les- quelles s’est édifié le Vulture. L'histoire de ces trois grands massifs volcaniques de l'Italie méridionale paraît ainsi avoir commencé à peu près en même temps. Gisements d'Ischia et de Pouzzoles. Les autres formations fossilifères de la région napolitaine parais- sent plus récentes. Ce sont d’abord les assises épaisses de tufs volcaniques connus sous le nom de « {ufs jaunes du Pausilippe ». Leur stratification régulière, et les rares coquilles marines qu’on y trouve, sont géné- ralement considérées comme des preuves de leur origine sous- marine, sur laquelle, pourtant, M. de Lorenzo a récemment émis des doutes !. Enfin, soit à Ischia, soit sur la côte de Pouzzoles, divers gisements fossilifères paraissant encore postérieurs, situés à des altitudes inférieures à 4o mètres, sont encore énumérés par M. Bellini; certains avaient d'ailleurs été étudiés antérieurement (Philippi, Scacchi, De Angelis, etc.); la seule espèce éteinte qu’on y ait citée est le Pecten medius Lmk.(in Philippi); mais d’après M. Bellini[18], on aurait là en réalité une forme du groupe jacobæus-marimus, peut-être le P. intermedius Mtr. Enfin, dans un de ces gise- ments, à Ischia, le même auteur signale la Modiola modiolus L., espèce septentrionale dont la présence est très intéressante à noter. Je signalerai, en terminant, les très curieuses « masses errati- ques du Monte Somma » ; ce sont des blocs d’argiles ou de grès fossilifères que l’on trouve épars sur les flancs du Vésuve et que l’on suppose arrachés par le volcan à son soubassement ; on n'y a trouvé que des espèces vivantes, et M. Bellini y cite aussi la Modiola modiolus. En résumé, il semble bien que dans cette région napolitaine, aussitôt après la fin du Calabrien, a dû commencer un grand mou- vement négatif, au cours duquel se sont édifiés les massifs volca- niques du Vésuve et des Champs phlégréens, Mais l’histoire des 1 Cf. G. de Lorenzo : Il Cratere di Nisida nei campi flegrei {Ati d. R. Accad. di Sc. fis. e mat. di Napoli, vol. XIII, série 2, n° 10, 1907). 286 MONTE MARIO mouvements relatifs des terres et des mers a dû être ici extrême- ment compliquée, à en juger par ce qu’on sait des périodes histo- riques : ces fait sont connus de tous depuis les études critiques de Suess et les travaux plus récents de Günther!. L'ile de Gapri. On ne connaît pas à Capri de Pliocène marin; mais on y a signalé des lambeaux de formations marines jusqu'à des hauteurs considérables, atteignant certainement 200 mètres, d’après M. Bel- lini [17, 19]. Les faunes ne renferment que des espèces extrême- ment littorales (par exemple Trochus turbinatus Born) non carac- téristiques : c'est sans doute du Quaternaire. Toutefois, l’absence actuelle de dépôts pliocènes à Capri n’entraîne pas forcément l’émer- sion de l’île à l’époque pliocène, et il se pourrait que les plus élevées des lignes de rivage qu’on y observe fussent pliocènes supérieures. 8 2. — LA PROVINCE DE ROME La bibliographie des terrains récents dans les environs de Rome est immense, et je n’ai pu songer même à l'indiquer; ce serait d’ailleurs tout à fait en dehors de notre sujet. Aussi je me bornerai à décrire, dans cette région, deux exemples, l’un pour le Pliocène supérieur, ce sera le Monte Mario, l’autre pour le Quaternaire, sur la côte aux environs de Civita-Vecchia. Une autre région extrêmement intéressante serait la côte au Sud de Rome, entre Anzio et Nettuno, où il semble bien que l'on ait à la fois du Pliocène marin et du Quaternaire marin; mais je n’ai malheureusement pas eu encore l’occasion de la visiter, et il m'a été difficile, d’après les publications des auteurs, de me faire une idée claire des relations stratigraphiques mutuelles de ces couches. 1° Le gisement du Monte Mario et sa situation stratigraphique dans la série pliocène (PL IV, fig. z). Description stratigraphique. Presque tout a été dit sur le gisement du Monte Mario; la coupe 1 Cf. R.-T. Günther, Contributions to the study of earth-movements in the Bay of Naples (Oxford, 1903). STRATIGRAPHIE 287 en est devenue classique depuis les déjà anciennes études de Ponzi; mais son interprétation a fait l’objet de nombreuses discus- sions non encore terminées, spécialement sur le point de savoir si la zone fossilifère célèbre devait être rapportée au Pliocène ou au « Quaternaire » (Postpliocène). D'après les indications des très nombreux auteurs qui ont étudié la question, et en particulier de Clerici, Verri, Meli ! et de Cerulli-Irelli {32} pour ne citer que les plus récents, la stratigraphie de la région se présente de la manière suivante : Le massif volcanique de Bracciano vient se terminer sur la rive droite du Tibre, aux portes mêmes de Rome, par un pays de collines très découpées, hautes de 150 mètres environ, dont la consti- tution est visible dans toutes les vallées. Je la décrirai par exemple à la Farnesina, dans le vallon qui débouche à l'extrémité Nord-Ouest de la Place d'armes; on a là une coupe magnifique que J'ai eu l'occasion d'étudier à plusieurs reprises. Les assises les plus inférieures sont des marnes bleues plastiques, décrites par Ponzi sous le nom de marnes du Vatican; cet auteur les considérait comme miocènes; tout indique au contraire, comme l’a montré depuis longtemps Manzoni [168], qu'elles représentent le Plio- céne ancien sous un facies un peu plus profond que ne l'ont d'ordinaire les typiques argiles plaisanciennes; la faune de ces argiles est d’ailleurs assez pauvre, mais leur âge n’est plus l’objet aujourd'hui d'aucune discussion. Au-dessus de ces argiles, viennent des sables gris fossilifères ; le pas- sage d’une assise à l’autre se fait, comme il arrive fréquemment en pareil cas, par l'intermédiaire de marnes sableuses durcies, riches en Brachio- podes, formant un banc dur, nettement visible. Ces sables gris, qui passent à leur partie supérieure à des sables jaunes, constituent l’assise fossilifère ayant fourni la célèbre faune dite du Monte Mario. Au-dessus de cette zone fossilifère, relativement mince, on voit encore les sables jaunes se prolonger beaucoup plus haut, devenant un peu plus grossiers, montrant parfois des intercalations gréseuses : mais les fossiles sont devenus rares (Huïîtres et Pectinidés). Enfin, cette épaisse formation sableuse se termine par quelques assises plus caillouteuses, puis finalement par des {ufs volcaniques qui cou- ronnent toutes les collines; il faut remarquer d’ailleurs que, dans toutes les 1 Voir surtout les deux excellentes études de Meli [173, 236]. 288 ! MONTE MARIO assises inférieures à ces tufs, on ne trouve pas de matériaux volcaniques. Il y a certainement une continuité absolue entre tous les termes de cette série sédimentaire !, qui constitue, comme on le voit, un exemple typique de cycle de remblaiement. Beaucoup d'auteurs italiens (et M. Cerulli-Irelli l’affirmait encore récemment) indi- quent une discordance entre les marnes du Vatican et les sables gris : en réalité, il y a simplement une modification dans le régime de la sédimentation et, comme dans beaucoup de cas analogues, les phénomènes de stratification oblique qui accompagnent cette modi- fication ont été interprétés comme une discordance. L'analogie est curieuse, par exemple, avec ce qui se passe pour le Pliocène d'Alger, et elle peut être suivie jusque dans les détails : dans le Sahel d'Alger on a aussi, à la base, des marnes bleues puissantes, presque sans fossiles, et rapportées par certains géologues au Miocène supérieur ou Sahélien; au-dessus d’elles, viennent des couches ntarno-sableuses riches, comme à Rome, en grosses Térébratules du groupe ampulla. Mais, ni à Rome, ni en Algérie, on ne voit la moindre trace d'émersion, ni de véritable discordance (comme l’a fait observer M. Depéret pour l'Algérie). D'ailleurs, le fait même que cette coupe de la Farnesina se retrouve identique à elle-même dans toutes les collines qui bordent la rive droite du Tibre est bien une preuve que ses divers termes en sont stratigraphiquement inséparables et appartiennent à un même cycle de remblaiement. Les quelques variations que subit en effet la coupe du Pliocène dans cette région sont dues simple- ment à des changements accidentels et locaux dans la sédimen- tation, mais n'en altèrent pas l'homogénéité : ainsi, parfois, la zone fossilifère disparaît, de sorte que les marnes bleues sont direc- tement recouvertes par des sables jaunes stériles ; parfois aussi, à la partie supérieure de ceux-ci, se développent des lentilles à faune saumâtre ?, comme cela arrive fréquemment à la fin des cycles de remblaiement. Ainsi, au point de vue stratigraphique, le gisement fossilifère du Monte Mario appartient bien à la série pliocène, antérieure au 1 J'ai eu le plaisir de faire constater ce fait à M. Depéret dans la coupe, si nette à ce point de vue, de la Farnesina, 2 Cf. Clerici [39]. STRATIGRAPHIE 281) creusement des vallées ; au contraire, une coupure importante le sépare des formations quaternaires : la fin des temps pliocènes et le début des temps quaternaires ont dû être marqués ici par une grande régression suivie de remblaiements, puisque les dépôts fluviatiles du Tibre descendent, à Rome même, bien au-dessous du niveau de la mer. De plus, les formations quaternaires contiennent toujours ici d'abondants galets de roches volcaniques : l’arrivée de ces derniers fournit ainsi un point de repère précieux dans la chrono- logie des terrains de transport. Cette opposition entre des forma- tions anciennes, antérieures au premier creusement des vallées et à l’apparition des roches volcaniques, et des formations récentes, postérieures à ces deux événements, avait dès l’abord attiré l’atten- tion des premiers observateurs qui étudièrent la région. D'après les beaux travaux des géologues romains?, il est d'ailleurs possible de se faire une idée d'ensemble du Pliocène entre Rome et l’Apennin, et d’y mieux comprendre, par suite, la place qu'y occupe cette zone du Monte Mario (voir la coupe schématique, pl. IV, fio.br). Sur la rive gauche du Tibre, entre Rome et Orvieto, les tufs volcaniques cessent de former une couverture continue, car on voit partout à découvert le Pliocène. Ce sont surtout des sables jaunes, que leur faune rattache nettement au Pliocène inférieur. MM. Cerulli-frelli et de Angelis d'Ossat [33] l'ont encore récem- ment décrite près de Palombara-Marcellina : ils y ont trouvé, en compagnie de beaucoup d’autres espèces éteintes, le si caracté- ristique Â#labellipecten flabelliformis Br., et en ont conclu avec raison que l’on était là dans une zone plus ancienne que celle du Monte Mario. On arrive ainsi tout près d'un ancien rivage pliocène, le long duquel les falaises calcaires des premières chaînes apennines se montrent criblées de trous de lithophages. C'est celui que Verri [228] a suivi, à des altitudes variables de 300 à 500 mètres, par Fara Sabina, Poggio Mirteto, Magliano Sabino, Narni, Amelia, Città della Pieve, Chiusi, Montepulciano, jusque dans la province de 1 Voir, à ce sujet, d'Archiac, Histoire des progrès de la géologie, t. II, pp. 277 et 797. ? On lira aussi avec intérêt l'excellente étude d'ensemble de M, de Stefani [98]. 5 Voir aussi Meli [175]. Uxiv. pe Lyon. — Gicnoux 19 290 | MONTE MARIO Sienne, où il se raccorde avec le rivage de la mer qui occupait le Val d’Arno inférieur. Plus à l'Ouest, le Pliocène devient saumäâtre, et même franche- ment lacustre. Entre les chaînons apennins, allongés Nord- Ouest- Sud-Est, existaient en effet des dépressions longitudinales occupées par des lacs : tels sont les bassins de Terni et de Riet, si bien étudiés par Verri [loc. cit.] : les cours d’eau transversaux drainant ces dépressions construisaient dans la mer pliocène de vastes. deltas, comme ceux de Città della Pieve et de Poggio Mirteto. C'est vers la fin de ce puissant remblaiement, que se sont déposées les couches fossilifères du Monte Mario; à ce moment la ligne de rivage avait déjà notablement reculé, soit que le mouvement négatif, prélude du Quaternaire, fût déjà commencé, soit tout simplement par suite de l’avancée des plaines côtières alluviales. Mais on est bien encore dans la mer pliocène. La faune malacologique du Monte Mario. On désigne habituellement sous ce nom la faune des sables gris et des sables jaunes inférieurs des collines romaines sur la rive droite du Tibre; le Monte Mario lui-même n'est pas la seule localité fossi- lifère : d’autres excellents gisements se voient à la Farnesina, où passe la coupe que nous avons décrite, à Acquatraversa, à Valle dell’Inferno, à Malagrotta!, etc. Cette faune célèbre a été étudiée par beaucoup d’anciens paléontolo- gistes, mais la bibliographie de ces anciens travaux est devenue mainte- nant tout à fait inutile, car M. Cerulli-Irelli a refait, depuis 1907, avec une patience et un soin admirables, une revision complète de toutes les espèces connues. Cette œuvre, déjà presque achevée, constitue certaine- ment la contribution la plus précieuse que l’on ait jusqu’à présent pour l'étude de ces faunes récentes, et il serait à souhaiter que des travaux analogues fussent entrepris pour tous les autres gisements « post- pliocènes » célèbres de l'Italie. C'est donc d’après le mémoire de M. Cerulli-lrelli que nous ferons l'examen critique de cette faune?. 1 Cf. Cerulli-Irelli [32], p. 3. 2 J'ajouterai, d'ailleurs, que les collections du Laboratoire de Géologie de l'Uni- versité de Lyon possèdent une assez belle série du Monte Mario, où j'ai pu étudier à loisir un grand nombre des types décrits parle savant paléontologiste de Rome. FAUNE 291 Je ne veux donc pas entrer ici dans de trop grands détails, car M. Cerulli-Irelli nous donnera certainement, au moment de l’achèvement de son œuvre, une étude d'ensemble, avec une compétence à laquelle je ne saurais prétendre. Néanmoins, dès maintenant, il est possible de se rendre compte de la physionomie d'ensemble de la faune. On sait depuis longtemps que cette faune du Monte Mario diffère nettement de la faune typique du Pliocène ancien : des groupes entiers, très abondants dans tous les gisements typiques du Plaisancien et de l’Astien, manquent ici complètement : tel est le cas pour de nombreux Pleurotomidés, Conidés, Marginellidés, Mitridés, Muricidés, Scalariidés, Spondylidés, Pectinidés, Vénéridés, Lucinidés, etc. Le fond même de la faune est constitué par des formes méditerranéennes actuelles, connues d’ailleurs dès le Pliocène ancien. Les espèces caractéristiques seront donc fournies, soit par des formes actuellement disparues de notre mer, soit par des formes immigrées, inconnues dans les faunes plus anciennes. A. Les espèces disparues. — Ces espèces, dont un certain nombre se retrouvent, représentées par des formes identiques ou très voisines, dans la faune actuelle de l'Atlantique chaud, sont d'intérêt fort divers : il est loisible à quiconque d'en relever la liste complète dans le travail de M. Cerulli-Irelli. Toutefois, notre but étant différent de celui de cet auteur, 1l me semble que le mode d'appré- ciation des espèces doit être quelque peu divers. Par exemple, une étude minutieuse a permis à notre éminent confrère italien de découvrir un nombre assez grand de formes éteintes parmi les petites espèces, si polymorphes et si difficiles à déterminer, de Pleuroto- midés, Nassidés, Muricidés, Rissoidés, Lédidés, etc. : ces formes ne peuvent être retenues ici comme de bons fossiles, Enfin, il conviendra de ne pas tenir compte de quelques formes douteuses, et aussi de celles des espèces nouvelles qui n'accusent pas d’affinités bien nettes avec d’autres formes connues et ayant une signification stratigraphique déterminée. Ce travail de critique sera fait pour tous les groupes successivement dans la cinquième partie de cet ouvrage. Comme formes bien caractérisées au point de vue morphologique et intéressantes au point de vue stratigraphique, on peut surtout citer, dans le gisement du Monte Mario, les suivantes : 292 MONTE MARIO Carcellaria hirta Br. Nassa musiva Br. N. semistriata Br., mut. cala- brensis nov. Turritella vermicularis Br. T. tornata Br. Cerithium varicosum Br. + Brocchia sinuosa Br. Niso eburnea Risso + Dentalium rectum L. —+ Plicatula mytilina Br. Pecten Planariæ Simonelli — Grenella sericea Brn. —+ Arca syracusensis Mayer Arca mytiloides Br. + Nucula placentina Lmk. Cardita intermedia Br. Cardita rudista Br. Cardita revoluta Ses. Gardita pectinata Br. Cardium paucicostatum Sow., var. bianconiana Cocconi Cardium multicostatum Br. Cardium hirsutum Br. : Cardium Jeffreysi Rigacci! Cardium lævinflatum Sacco Cardium striatulum Br. + Chama placentina Defr. Meretrix Brocchii Desh. Venus libellus R. E. P. Tapes rhomboides Penn., var. antiqua nov. + Tapes senescens Dod.? Cardilia Michelottii Desh. Lucina elliptica Borson + Arcopagia ventricosa M. de Serres Gastrana lacunosa Chemn. Pholadomya alpina Math. + Glavagella bacillum Br., var. bacillaris Desh. Terebratula groupe ampulla Br. L'importance de ces espèces est d’ailleurs assez inégale. Nous en retrouverons d'abord un certain nombre dans la faune sicilienne : elles sont marquées d'une + dans la liste ci-dessus et celles-ci, se trouvant ainsi à la fois dans des faunes antérieures et postérieures à la faune calabrienne, ne peuvent plus caractériser cette dernière, | D'autres n’ont élé encore rencontrées, en dehors du Pliocène 1 Forme spéciale au Monte Mario, mais extrêmement voisine du C. cyprium Br., espèce classique du Pliocène ancien. ? Cette espèce est encore citée par Clerici [39] dans des lentilles argileuses sau- mâtres, appartenant à un niveaustratigraphique plus récent que la zone fossilifère du Monte Mario, mais encore pliocène supérieur; nous verrons d'ailleurs qu'elle se retrouve, sous Je nom de Tapes Dianæ Requ., jusque dans le Quaternaire récent. ; 3 En outre, deux espèces, non citées dans l'ouvrage de M. Cerulli-Irelli, existent, néanmoins, avec une étiquette indiquant leur provenance, dans les collections du Laboratoire de Géologie de la Faculté des Sciences de Lyon (coll. Locard). Mon aimable confrère de Rome, auquel j'ai soumis les échantillons en question, déclare ne pouvoir être en mesure de rejeter absolument l'authenticité d'une telle prove- nance, bien que cette authenticité lui paraisse douteuse, Ce sont : Phos poly- gonum Br. et Nassa clathrata Born. La présence de cette dernière espèce au Monte- Mario n'aurait rien que de très naturel; vu qu'elle se rencontre encore dans le Sicilien de Palerme, FAUNE 293 ancien, que dans ce seul gisement du Monte Mario, où elles sont représentées d’ailleurs par quelques rares exemplaires seulement ; leur présence communiquerait à ce gisement un caractère un peu plus ancien que les faunes habituelles du Calabrien. Mais il convient de ne pas attribuer une trop grande importance à ce fait, car notre connaissance de ce gisement du Monte Mario, situé à proximité d’une grande capitale, et objet, depuis un siècle, des récoltes et des études d’une pléiade de paléontologistes, est certainement beaucoup plus intime que celle d'aucun autre gisement « postpliocène ». La découverte, dans de telies conditions, d'individus isolés de ces espèces archaïques, doit raisonnablement nous faire prévoir qu'on pourra les rencontrer ailleurs, dans d’autres gisements du même âge moins étudiés. Et cela nous prouve seulement une fois de plus l'intime liaison des faunes pliocène ancienne et calabrienne, en nous montrant l'extinction progressive des formes archaïques, qui, avant de disparaitre définitivement, persistent çà et là à l’état d'individus isolés. B. Les espèces émigrées. — J'entends par là les formes étran- gères aux faunes méditerranéennes plus anciennes et retirées aujourd'hui dans la mer du Nord. De ce nombre sont, au Monte Mario, les espèces suivantes : Buccinum humphreysianum Cyprina islandica L. Benn. Cochlodesma prætenue Pultn. Modiola modiolus L. Malgré les quelques réserves faites pour les trois premières de ces formes (voir 5° partie), on peut néanmoins les considérer comme de bonnes espèces caractéristiques des faunes récentes ; mais elles se rencontrent encore toutes dans le Sicilien : leur intérêt au Monte Mario provient donc surtout de ce qu’elles communiquent à ce gisement un caractère de jeunesse par rapport au Pliocène ancien. Enfin, pour donner une idée plus concrète de la faune de ce gisement, j'ajouterai que, parmi ces formes caractéristiques, celles qui sont les plus fréquentes et qui jonchent la surface des affleurements sont les Nasses, les Cérithes, les Turritelles, les Dentales, les Cardila revolula, les Chames, les Térébratules, les Cyprines; à elles seules, et sans tenir 294 MONTE MARIO compte des trouvailles exceptionnelles, elles suffisent à donner à ce gise- ment ure physionomie calabrienne inférieure. Fossiles autres que les Mollusques. Les autres groupes animaux ne donnent pas, à beaucoup près, des résultats aussi intéressants que les Mollusques : ils sont d’ailleurs beaucoup moins connus. Les Polypiers ont été étudiés par M. de Angelis d’Ossat [65]; cet auteur a noté la différence importante qui existe entre la faune des sables du Monte Mario et celle des marnes vaticanes, mais il l’attribue surtout au changement de facies : il n’a d’ailleurs trouvé dans ces sables que six espèces, dont deux vivantes dans la Méditerranée, et ne croit pas pouvoir leur attribuer une grande importance stratigraphique. Beaucoup plus abondants sont les Bryozoaires étudiés par Neviani [180]; dans son ensemble, la faune est nettement différente de celle du Pliocène ancien : et elle a un caractère relativement littoral, correspon- dant d’après l’auteur à une profondeur comprise entre o et 150 mètres. Ristori [199] a étudié les Crustacés du Monte Mario; les dix espèces qu’il y a reconnues accusent aussi un âge plus récent que le Pliocène ancien : ce sont toutes des formes vivantes de la Méditerranée actuelle, à part quelques-unes qui se retrouvent sur les côtes d'Angleterre. Enfin, il nous reste à mentionner une dernière découverte fort intéressante. Lors du creusement d’un puits au fort qui occupe le sommet du Monte Mario, on a mis à jour une molaire d'Eléphant, associée à des Echinolampas Hoffmanni Desor ; cet Oursin n’a rien de bien caractéristique, car il est très commun depuis le Pliocène ancien Jusqu'au Sicilien inclusivement : quant à la molaire, en assez mauvais état, on peut la voir au Musée Géologique de l'Université de Rome; elle appartient certainement à l'Elephas meridionalis Nesti!. Comme elle a été rencontrée dans les sables jaunes supérieurs à la zone fossilifère, cela nous prouve que le gisement du Monte Mario n’est certainement pas plus récent que la faune à ÆElephas meridionalis, c'est-à-dire qu'il ne peut pas être attribué au Quater- naire. D’après Meli [172], une autre molaire d’Æ. meridionalis aurait 1 J'ai eu la bonne fortune de pouvoir faire contrôler cetle détermination par M. Ch. Depéret. QUATERNAIRE DE CIVITA-VECCHIA 295 éte trouvée, à ce même niveau stratigraphique, dans les sables quartzeux jaunes, sans éléments volcaniques, appartenant aux termes supérieurs du Pliocène : elle proviendrait toujours du massif de la rive droite du Tibre, des monts de la Magliana en aval de Rome. 20 Le Quaternaire de la côte au Nord de Rome. La constitution de cette côte est simple : une vaste plaine litto- rale, plate, marécageuse et déserte, où s'étendent à perte de vue de maigres pâturages, station d'hiver des moutons transhumants; au- dessus, une chaîne de collines qui la domine assez brusquement : près de Montalto, Corneto, Palo, et jusqu’au Tibre, ces collines sont pliocènes ; à Civita-Vecchia, elles sont éocènes et s’avancent jusqu’à la mer. Et il est facile de se convaincre que la plaine littorale a été entaillée dans les formations qui constituent les collines. Ainsi, près de Palo (au lieu dit «le Cave », près de Monteroni, sur la côte, et dans les tranchées du chemin de fer), on voit affleurer au milieu de cette plaine, sous une mince croûte de Quaternaire, les mollasses cal- caires (célèbres ici sous le nom de macco) à Flabellipectens, du Pliocène ancien. Entre Givita-Vecchia et Corneto, le soubassement du Quaternaire est formé, d’abord, par l'Eocène ; puis, vers le Fosso Cave del Gesso, ce sont les formations gypsifères du Miocène supérieur et les marnes bleues plaisanciennes, qui apparaissent; sur la rive droite de ce ruisseau, ce sont des sables jaunes à faune pliocène ancienne typique {Pecten reghiensis Seg.). Le long du Fiume Mignone, les argiles « scagliose » de l'Eocène réapparaissent ; enfin, près de la station de Corneto, on retrouve des marnes sableuses jaunes, très fossilifères, du Pliocène ancien. Ces couches pliocènes se prolongent ici en formant les collines qui dominent la plaine littorale. Au Sud de Civita-Vecchia, c’est le massif de collines de la rive droite du Tibre, ou massif du Monte Mario : la série pliocène y est tout entière visible, jusqu’au Calabrien que nous venons de décrire. Au Nord de Civita-Vecchia, la falaise, au sommet de laquelle s'élèvent les tours pittoresques de Corneto-Tarquinia, montre la coupe suivante, qu'il est d’ailleurs facile de reconstituer d’après la carte géologique au 1/100.000°. Cornebo Rivage Séatron Va Aurelia 150 ! | "3 Q: 75 aa 0 E1G. 41. — Coupe des collines pliocènes et de la plaine côtière quaternaire à Corneto, près Civita-Vecchia. Q2. — Quaternaire récent : panchina à Conus lestudinarius. Q1. — Quaternaire ancien : sables à Pectoncles. . P3. — Sables jaunes et grès calcaires à Amphistégines de Corneto, P2.— Marnes sableuses blanches à Terebratula cf. ampulla . . .} Pliocène P1. — Argiles bleues plaisanciennes . Echelle des hauteurs, 1/15.000 ; des longueurs, 1/60.000. Toute la série pliocène est en continuité parfaite : il s’agit bien là d’un seul cycle sédimentaire, dont on ne voit d’ailleurs pas le sommet à Corneto même, car les formations gréseuses qui constituent (à 150 mètres d'altitude) le sommet des escarpements de Corneto sont encore fran- chement marines, et dénotent même une profondeur assez considérable. Je ne rappelle ici la constitution de cette série pliocène (sans intérêt pour nous, puisqu'on n'y connaît pas de faune calabrienne typique) que pour mieux souligner l’indépendance complète des dépôts quaternaires qui la ravinent, et reposent, comme on l’a vu, sur des formations plus anciennes quelconques. Le /facies de ces dépôts quaternaires est assez variable, mais toujours très littoral, montrant ainsi les caractères habituels à ces formations d'anciennes plages émergées : Ce sont : des grès calcaires, surtout développés au voisinage du massif éocène de Civita-Vecchia, où ils prennent le nom de scaglia- riccia! et sont activement exploités, — des sables meubles à coquilles roulées de Pectoncles et à abondants matériaux volcaniques, — des couches graveleuses à Cladocora cespitosa, — des marnes blanches lagunaires à Cardium edule, — des bancs de galels de plage passant aux alluvions des petits fleuves côtiers, elc.; — en un seul point, au-dessous de Corneto, dans les tranchées faites pour la correction de la Via Aurelia etrusca, il m'a semblé voir, sous les sables à Pectoncles, des marnes bleues qui indiqueraient des dépôts plus profonds et plus tranquilles. — Le facies de marnes blanchâtres ou bleuâtres lagunaires, à Cardium edule, est surtout développé vers le Nord de la région que nous étudions, 1 Cf. R. Meli : Sui dintorni di Civita-Vecchia (Atti d. R. Accad. dei Lincei, ser. 3, vol. V, Roma, 1879), et T. Tittoni : La regione trachitica dell’ Agro Sabatino e Cerite (Boll. d.Soc. geol. ital., vol. IV, 1885, p. 337), STRATIGRAPHIE ET FACIES 297 entre Orbetello et Montalto : ces couches ont été signalées là par Fuchs et par Lotti, et il est facile de les voir dans les tranchées du chemin de fer. Divers niveaux. La plaine littorale, formée par ces dépôts quaternaires, a en général une altitude moyenne de 20 à 30 mètres; et il est ainsi extrêmement probable que la mer qui l’a entaillée dans les forma- tions plus anciennes, et recouverte d'une mince couche de dépôts très littoraux ou lagunaires, ne devait guère dépasser l’a/{ilude de 30-40 mètres. Mais on trouve encore du Quaternaire marin à des niveaux plus élevés. Ainsi, en dessous du village de Corneto, les sables à valves de Pectoncles, surmontés de cailloutis, montent jusqu’à 60 mètres environ (voir la fig. 41). Et dans le massif éocène, on trouve des traces de niveaux plus élevés encore : sur le versant Nord, la « panchina » exploitée près de la Torre Orlando ne s'élève guère qu'à 60-70 mètres; mais sur le versant Sud, au-dessus de Santa Severa, Tittoni (loc. cit.), auquel on doit une carte géologique de cette contrée, indique encore la « panchina » quaternaire dans la région Terre nuove et le Pian Sultano, jusqu'à 130 mètres d'altitude; toutefois, il s’agit peut-être ici de sables pliocènes supérieurs, ce qu'il est difficile de décider en l’absence de faune caractéristique. Il semble bien prouvé, en tout cas, que ces diverses formations doivent se répartir entre plusieurs niveaux distinct : j'ai observé en effet au Nord de Palo, au lieu dit « I tre Ponti », la coupe figurée ci-contre. Plateau à 25-507. EEE ES ES ES Fic. 42. — Coupe du plateau quaternaire au lieu dit « I tre Ponti », au Nord de Palo (environs de Civita -Vecchia). 3. — Terre rouge (produit d’altération), ravinant irrégulièrement les grès 2. 2. — Grès calcaires (Panchine) à Spondylus g&deropus, Lima squamosa, etc., avec bancs de galets perforés à la base. 1. — Conglomérats à gros galets peu roulés, exploités pour l'empierrement (formation de plaine côtière). — En B, banc sablo-gréseux. — En C, surface de transgression marine avec croûte d'altération antérieure. 298 QUATERNAIRE DE CIVITA-VECCHIA On y voit des « panchine » marines fossilifères, reposant sur des for- mations de plaine côtière : le contact se fait par une croûte durcie formée pendant une phase d’altération continentale; cela semble bien indiquer qu'une régression de la mer a précédé la transgression qui a déposé les « panchine ». Les faunes quaternaires. Au point de vue paléontologique autant qu’au point de vue stratigraphique, ces formations quaternaires de la Maremme romaine sont encore fort incomplètement connues. Les listes de fossiles les plus longues sont celles données par Meli (loc. cit.), qui a signalé cent trente-trois espèces dans le Quaternaire des environs de Civita-Vecchia ; il est difficile de préciser le ou les niveaux exacts dont elles proviennent. Cet auteur n’y a reconnu d’ailleurs que des coquilles méditerranéennes actuelles, à l'exception d'un débris de Ceri- thium en très mauvais état, auquel 1l est difficile d'accorder une impor- tance stratigraphique. | Personnellement, j'ai récolté une faune assez intéressante entre Corneto et Givita-Vecchia, près de la ferme de Fontana Matta. Là, la vallée du Fiume Mignone montre les argiles « scagliose » de l'Eocène recouvertes par des sables jaunes, eux-mêmes surmontés par des graviers à Cladocora cespitosa et des marnes à Cardium edule, constituant, à 40 mètres d’altitude, le sommet du plateau quaternaire; la liste complète des espèces récoltées dans ces couches supérieures est donnée dans l’appendice. Je me contenterai ici d'y noter d’abord le facies tres litloral (accusé en particulier par de nombreuses pholades) et la présence de deux espèces caractérisliques : Chama placentina Defr., Arca syracusensis May. Ces deux espèces, dont la première est connue dans le Sicilien de Palerme, sont bien nettement éteintes et ne se rencontrent même plus dans les couches à Strombes. On aurait donc là l'indice d'une ligne de rivage à une altitude supérieure à 40 mètres, et dans laquelle n'apparaît encore aucun des éléments Caractéristiques de la faune à Strombes. Les collections du R. Ufficio Geologico à Rome renferment un certain nombre de fossiles quaternaires de Civita-Vecchia, sans indication de provenance plus précise; ce sont d'ailleurs des formes banales, parmi lesquelles on peut noter toutefois quelques espèces semblant devenues actuellement plus rares dans la région, telles que Patella ferruginea Gmel., Chlamys pesfelis L., variété de grande taille, Ranella { Bufona- ria) scrobiculator L. FAUNES 299 Mais surtout, j'ai vu dans ces collections une forme très inté- ressante : c'est un grand Cône assez mal conservé, mais qui, par sa taille, et surtout par sa spire aplatie, se montre nettement distinct des Conus mediterraneus actuels : il se rapporte donc très probablement au Conus tesludinarius, grande espèce partout si abondante et si caractéristique dans les couches à Strombes. La provenance de cette intéressante coquille est très exactement connue : elle a été récoltée « dans le Quaternaire de Corneto, au voisinage de la station, le long de la ligne du chemin de fer ». Effectivement, comme je m'en suis rendu compte moi-même, on voit là des lambeaux de « panchina » quaternaire surmonter les marnes du Pliocène ancien, à une altitude de 15-20 mètres (voir la coupe, fig. 41). Enfin, Je dois rappeler l'attention sur la découverte, signalée autrefois par Meli [172], d’une dent d'Elephas antiquus dans ces anciennes plages quaternaires. Elle a été rencontrée dans la loca- lité dite Tre Filari, sur la rive gauche du Fiume Martà, à 1 kilo- mètre environ en aval de Corneto-Tarquinia : on avait fait là une tranchée pour la rectification de la Via Aurelia etrusca, dans sa descente vers le Fiume Martà; ce gisement était constitué par des sables à abondants matériaux volcaniques, avec coquilles roulées (Pectunculus, Pecten jacobæus, Cardium Lamarcki), indiquant une plage, à 40 mètres au-dessus du lit du Fiume Marta. Comme ce dernier coule à 10-15 mètres environ, on voit que ce débris d'Elé- phant serait ainsi contemporain d’une ligne de rivage à 50-60 mètres au moins, celle même, très probablement, que j'ai moi-même observée et signalée plus haut dans cette même région, en dessous de Corneto. Le grand intérêt de ce gisement est donc de nous montrer la présence de l’Æ. anfiquus dans des dépôts correspon- dant à une ligne de rivage relativement élevée, et ravinant la série pliocène, laquelle est caractérisée au contraire par l’Æ. meridio - nalis. Dans le même ordre d'idées, je signalerai aussi un autre gise- ment d'£. antiquus dont la coupe a été donnée par Stella {218}, et situé en amont de Rome, près du Ponte Molle. Ici ce mammifère a été rencontré dans des cailloutis alluviaux ravinant également des couches marines à faune identique à celle du Monte Mario. 300 PLIOCÈNE SUPÉRIEUR DE TOSCANE Gonclusions : En résumé, on retrouve, sur cette côte de la Maremme romaine, des traces de lignes de rivage quaternaires, en contre-bas de la grande surface de remblaiement calabrienne; cette dernière s'abaisse notablement au voisinage de la mer (150-200 mètres d'altitude, par exemple), et, par suite, sa distinction d'avec les anciennes plages quaternaires en devient moins nette; mais l'indé- pendance stratigraphique des formations quaternaires n’en reste pas moins suffisamment manifeste pour que tous les géologues n'aient eu aucune difficulté à la constater. Les plus anciennes de ces lignes de rivage quaternaires atteignent une altitude de 130 mètres environ, et on ne sait rien de caracté- ristique sur leur faune. Puis vient un niveau de 40-60 mètres au moins, à Arca syracusensis, Chama placentina et Elephas antiquus. Tout cela peut être rapporté au Sicilien (s. 1.). Enfin, une ligne de rivage plus basse (15-35 mètres?) correspond aux couches à Strombes. $ 3. — LA TOSCANE 1° Le Pliocène supérieur dans la vallée de l’Arno,. (PI. IV, fig. 2 et 3) Grâce aux nombreux travaux des géologues pisans et florentins, le Pliocène de la vallée de l’Arno est un des mieux connus de toute l'Italie. T1 nous intéressera surtout ici en ce qu’on y rencontre deux gisements célèbres de Pliocène supérieur : celui dit du Val d’Arno, avec une faune de Mammifères « villafranchienne » typique, et celui de Vallebiaja, près Fauglia, au Sud de Pise, dont la riche faune marine indique l’âge calabrien. Je me bornerai ici à indiquer, d'une façon simple et rapide, comment on peut concevoir les relations stratigraphiques de ces nes et leur place dans la série pliocène. I. — Le gisement de Vallebiaja. Ce gisement est situé dans les collines pliocènes qui bordent, vers le Sud, la vaste plaine quaternaire de l’Arno à Pise. La série des couches pliocènes est ici nettement visible (pl. IV, fig. 2) en VALLEBIAJA 301 suivant par exemple, entre Orciano et Colle Salvetti, la voie ferrée de Rome à Pise!. Au-dessus des formations lagunaires et gypsifères du Miocène supérieur, qui ont fait ici l’objet des travaux classiques de Capellini, viennent de puissantes marnes bleues à facies plai- sancien, donnant un pays de collines arrondies et dénudées, aux larges horizons; leur faune, bien connue à Orciano pisano, ne diffère pas decelle du Plaisancien typique de l'Italie du Nord. Au-dessus, et par passages insensibles, viennent des sables jaunes qui, par suite du plongement léger et général des assises vers le Nord, forment une bande de collines boisées, au Nord de la précédente ; ce sont ces sables qui nous intéressent le plus ici. A leur partie inférieure, ils renferment des intercalations de bancs épais gréso-calcaires, souvent pétris d’Amphistégines ou de Lithothamniums?, et absolument identiques aux calcaires ou mollasses à Amphistégines que l’on peut suivre partout dans le Pliocène méditerranéen, depuis l'Algérie et la Calabre jusqu’à la côte française (mollasse de Biot). Dans toutes ces régions, ces couches indiquent en général un niveau relativement élevé dans la série pliocène, car elles correspondent à un facies zoogène plutôt littoral, qui annonce l'approche de la fin du cycle de remblaiement. Mais, ici tout au moins, leur faune reste encore pliocène ancienne, puisqu'elles contiennent des espèces aussi caractéristiques que le Flabellipecten flabelliformis Br. etle Chlamys latissimus Br.; on peut les considérer comme de l’Astien supérieur à. C'est en effet à la parfie supérieure de ces sables jaunes que se rattache le niveau fossilifère de Vallebiaja. Le petit vallon désigné sous le nom de Vallebiaja se trouve à 3 kilomètres environ à l'Ouest de Fauglia ; il prend sa source au Poggio dei Venti (qui le sépare de la vallée du Torrente Tora où passe la voie ferrée) et aboutit au petit village de Sorbo, sur le Rio Tavola. Ce vallon est entaillé dans des collines sableuses atteignant go-100 mètres d'altitude et dont la coupe de détail, nettement visible, a été décrite récem- l Voir, par exemple, d'Achiardi [57]. ? Voir, à ce sujet, diverses notes de d’Achiardi, Fuchs, Manzoni, Seguenza (Boll. d. Comit. geol. d'Italia, 1874, vol. V), et surtout la monographie détaillée due à de Amicis [64]. 3 De Amicis (64] conclut en considérant ces calcaires à Amphistégines comme un facies particulièrement littoral de la partie supérieure des sables jaunes anté- rieurs au niveau de Vallebiaja. 302 PLIOCÈNE SUPÉRIEUR DE TOSCANE ment par Busatti [27] et peut être résumée de la manière sui- vante : ; 1° Au sommet des collines (go-100), bancs caillouteux intimement mêlés aux sables, indiquant ainsi la fin du remblaiement pliocène ; 2° Sables jaunes très épais, sans fossiles; 3° Assise sableuse assez mince, à faune nettement littorale (Cladocores, Chames) ; 4° Sables argileux constituant l'horizon fossilifère proprement dit, à 25-30 mètres d'altitude environ ; 5° Assises plus argileuses difficilement visibles dans le fond du vallon. Aïnsi, comme pour beaucoup d’autres gisements (Monte Mario par exemple), la couche fossilifère se trouve précisément à l'endroit où un facies plus sableux succède à un facies plus argileux. Mais le point essentiel pour nous est de reconnaître que toute cette série de couches est en parfaite continuité, à parlr des argiles bleues d'Orciano. Cette continuité avait beaucoup frappé Busatti qui conclut aussi, sans hésitation, au rattachement de cet horizon de Vallebiaja au Pliocène. Quant aux alluvions etaux dépôts de plaine côtière marquant la fin du remblaiement pliocène, ils ont été presque partout enlevés par l'érosion, et on ne les retrouve plus, au sommet des sables jaunes, que sur les col- lines les plus septentrionales, bordant la grande plaine de l’Arno. D'après MM. Gioli | 145] et de Stefani ([92], p. 5 del’extr.), ils plongeraient même, à partir de là, sous le niveau de cette plaine, de manière qu'ils auraient été rencontrés à 104 mètres de profondeur par le puits artésien de S. Piero in Grado, entre Pise et la mer. Comme l'avait déjà remarqué d’Achiardi [57], ces dépôts sont constitués presque uniquement par des galets de roches (en particulier du verrucano permien) provenant, non des collines livournaïises voisines, mais bien des Monts Pisans et des Alpes apuanes. Ainsi, et bien que son allure soit maintenant difficile à reconsti- tuer, la grande plaine d’alluvions de la fin du Calabrien n’en a pas moins dû exister ici, et c'est sur elle qu’a pu se faire, jusque bien au Sud de l’Arno, le transport de ces matériaux lointains. La coupe schématique, pl. IV, fig. 2, représente ainsi la place de ce niveau de Vallebiaja dans la série pliocène. Bien entendu, une coupe analogue s'observerait en un point quelconque plus à l’Est ou plus à l'Ouest: j'ajouterai même que l’horizon de Vallebiaja VALLEBIAJA 303 se retrouve fossilifère en d'autres points situés à peu près sur la même bande Est-Ouest, par exemple dans les localités de Crespina et de Vallino del Merlo, dont les collections du Laboratoire de Géologie de la Faculté des Sciences de Lyon possèdent une assez riche série de fossiles. Il s’agit partout d’une faune unique que nous étudierons sous le nom de faune de Vallebiaja. Par contre, M. de Stefani a signalé dans la région un autre horizon fossulifère stratigraphiquement supérieur au précédent. Il se voit, dit-il!, à 88 mètres d'altitude « nel poggetto della casa di Vallebiaja, prendendo dal Rio la strada di Piazza », c’est-à-dire précisément au sommet des collines sableuses, dont le soubassement est constitué par le niveau de Vallebiaja. M. de Stefani? considère ce niveau de Piazza comme le repré- sentant unique, dans l'Italie du Nord, d’un « Postpliocène moyen », qui serait caractérisé par le Pecten Peslutræ L. (— Chlamys seplemradiatus Müller). En divers points des environs de Fauglia, j'ai moi-même récolté des fossiles, appartenant tous à des espèces actuelles, dans ces sables jaunes supérieurs ; il est indubitable que l'horizon visé par M. de Stefani repré- sente bien en effet, dans la région, l’extrême sommet de la série pliocène : mais le C. septemradiatus n'ayant, à mon avis, rien de bien caractéris- tique, la faune n’en est pas suffisamment connue pour se prêter à des discussions intéressantes. La faune de Vallebiaja. — Il nous manque encore, pour la faune de Vallebiaja, une monographie aussi complète et aussi soi- sneuse que pour le Monte Mario. Néanmoins, d'après les études de Manzoni, Lawley, Busatti, etce., elle est suffisamment connue pour Le but que nous nous proposons. Et surtout, M. de Stefani [101], dans sa belle étude d’ensemble du « Postpliocène méditerranéen », en a cité toutes les espèces caractéristiques. C'est ainsi que, d'après cet auteur, on peut y signaler comme espèces disparues à affinités pliocènes anciennes et bien nettement caractérisées Plicatula mytilina Phil. Cardium pectinatum L. Arca syracusensis Mayer G. multicostatum Br. A. pectinata Br., var. minor Cardilia Michelottii Desh. A. mytiloides Br., var. minor Arcopagia corbis Bronn 1 Cf. de Stefani [90], p. 9 de l'extr. 2 Cf. de Stefani |ror|, pp. 391-392. Sr Des LEE ANS PSE RSE £ NE Le el ss 30% | PLIOCÈNE SUPÉRIEUR DE TOSCANE Gastrana lacunosa Chemn. Nassa musiva Br. Glavagella bacillum Br. GCerithium varicosum Br. Cancellaria hirta Br. Turritella tornata Br. J’y ajouterai, d'après mes propres récoltes : Chlamys cf. inæquicostalis Terebratula cf. ampulla Br. Lmk. Chama placentina Defr. Comme espèces émigrées, ou éléments postérieurs à la faune pliocène ancienne typique, on ne connaît encore à Vallebiaja que la seule Cyprina islandica L. : elle y a été découverte par Genti- luomo!, et je l'y ai moi-même rencontrée (on la trouvera figurée plus loin); aussi je m'étonne qu'elle n'ait pas été citée par Busatti [27] dans son étude sur Vallebiaga. En résumé, on peut définir ce gisement de Vallebiaja comme un Monte Mario un peu moins bien connu : presque toutes les espèces fréquentes au Monte Mario sont représentées à Vallebiaja, à peu près avec le même degré de fréquence; et les formes restées jusqu'à présent spéciales au Monte Mario y étant extrêmement peu com- munes, on peut supposer qu'elles se rencontreraient aussi à Valle- biaja, si ce gisement était mieux connu. J'ajouterai que, parmi les formes caractéristiques, celles qu'on peut facilement ramasser sur le gisement, sans recherches approfondies, sont, en particulier, les Turritella tornata, Chama placentina, Arca syracusensis, Cardium mullicostatum, etc. Paléontologiquement aussi bien que stratigraphiquement, c'est donc du Calabrien inférieur ; le reste du Calabrien est représenté par les sables jaunes supérieurs et par les alluvions à galets exo- tiques qui couronnent la série. II. — Le Val d'Arno supérieur etles faunes de Mammifères. Avant d'entrer dans la grande plaine quaternaire qui s’étend d'Empoli à Pise et à la mer, l’Arno traverse une série de dépres- sions intraapennines, allongées Nord-Ouest-Sud-Est. Leur origine est évidemment tectonique : ce sont des bassins synclinaux drainés et reliés les uns aux autres par des cluses transversales. L'histoire Cf, Mauzoni et Gentiluomo [167]. en nan VAL D’ARNO 305 du remplissage de ces bassins et de leurs captures les uns par les autres a été récemment retracée avec beaucoup de clarté par Pantanelli! et aussi par Oberti|185|. Le premier, vers l'amont, de ces bassins que traverse l’Arno, est celui de Bibbiena-Sta, dit aussi du Casentino. Puis vient le bassin de Montevarchi-Fiqglne : c'est à celui-ci qu’on réserve d'habitude le nom de Val d'Arno supérieur; ensuite, après une cluse où l’Arno coule encaissé dans une gorge assez étroite en aval de Pontassieve, le fleuve débouche dans le bassin de Florence-Pistoie ; une dernière cluse, entre Signa et Monte-Lupo, l'amène enfin dans la large plaine quaternaire où il serpente jusqu’à la mer; à cette dernière partie du cours de l’Arno, on a pris l'habitude de donner le nom de Val d'Arno inférieur. Les deux bassins supérieurs, celui du Casentino et celui de Montevarchi, sont encore presque entièrement remplis de sédi- ments lacustres et fluviatiles du Pliocène, dans lesquels le fleuve coule encaissé; dans le bassin de Florence-Pistoie, au contraire, il ne subsiste plus de ce remplissage que des lambeaux insigni- fiants (en particulier la terrasse de S. Domenico au-dessous de Fiesole), bordant une immense plaine quaternaire. Dans le Val d'Arno inférieur, on entre dans le domaine du Pliocène marin : ce terrain forme toutes les collines qui limitent vers le Sud la plaine d'alluvions modernes; nous avons précisément étudié la coupe de ces collines à propos du gisement de Vallebiaja. Tous ces bassins lacustres appartiennent à la longue série de dépressions intraapennines que l’on peut suivre d’une extrémité à l'autre de l'Italie, depuis l’ancien lac du Mercure (Calabre) et ceux du Vulture, étudiés par de Lorenzo (voir plus haut, p. 135) jusqu’à ceux des provinces romaines (Terni, Rieti), étudiés par Verri {voir p. 289), et enfin à ceux de la Toscane, que nous venons de citer et auxquels il faudrait ajouter le Val di Chiana, le Mugello (vallée de la Sieve), la Garfagnana (vallée du Ser- chio) et le Val di Magra, ces derniers rendus classiques par M. de Ste- fani [93]. Le remblaiement, commencé dans ces anciens lacs dès le Pliocène ancien, n'a cessé qu'au moment où ils ont été atteints par l'érosion régressive venue de la mer, et il a pu, pour certains d’entre eux, se con- tinuer jusque dans le Quaternaire : c'est le cas pour certaines dépressions ! Cf. D. Pantanelli : Storia geologica dell’ Arno /Boll. d. Soc. geol. ilal., vol. XIX, 1900). Uxiv. p6 Lyon. — Gianoux 20 206 PLIOCÈNE SUPÉRIEUR DE TOSCANE de la Basilicate (voir plus haut, p. 136) et aussi pour le Val de Chiana, où les lacs du Trasimène, de Chiusi, de Chianciano, jalonnent une zone indécise entre les bassins du Tibre et de l’Arno. Les gisements de Mammifères sont nombreux dans les anciens bassins lacustres : nous ne parlerons ici que du plus célèbre d’entre eux, le val d'Arno supérieur !. La série de remblaiement pliocène y a été profondément entaillée par l’Arno et de nombreux petits affluents, qui coulent dans des cañons fort pittoresques à parois abruptes; la multiplicité de ces coupes, constamment rafraïchies, permet d’éludier facilement la constitution de ce Pliocène, et c’est à cela aussi qu'est due certainement la fréquence des découvertes de Mammifères fossiles. Comme le montre la coupe figurée pl. IV, fig. 3, la région a d'abord été occupée par un lac, au fond duquel se sont déposées des argiles _ lacustres (dites localement « stellicione »), contenant des fossiles d’eau douce étudiés par de Stefani [103]; dans ces argiles, et en général près de leur base, s'intercalent des bancs de lignites exploités dans de nom- breuses carrières2. Par des alternances répétées, ces argiles passent, à leur partie supérieure, à des bancs de poudingues ( « sansino », c’est-a- dire galets gros comme des olives) qui terminent la série, et indiquent que l’ancien lac a été remblayé et transformé en une vaste plaine alluviale. La surface de cette plaine alluviale est encore nettement visible dans la topographie; elle semble d'ailleurs avoir été déformée par des mouve- ments épirogéniques, car, d'après Pantanelli (loc. cit.), elle se retrouve- rait à des altitudes variables dans les divers points du bassin, et serait en général plus élevée sur la bordure Est, où elle atteindrait 437 mètres près de Reggello, que sur la bordure Ouest, où je l’ai observée à 280- _300 mètres; il est possible d’ailleurs qu'il y ait eu, après le maximum du remplissage, des alternatives de creusement et de remblaiement, ayant donné des terrasses successives, dont l'étude détaillée serait encore à faire. 1 Voir surtout, à ce sujet, les travaux de dé Stefani [94, 97, 101, 104], Ristori [198), Weithofer! (284], etc. 2 La combustion spontanée de ces lignites, le long de leurs zones d'affleurément, produit la cuisson des argiles, qui se ancforment ainsi en une sorte de brique rouge naturelle, dite très improprement «latérite »; les latérites, avec leur couleur rouge, visible de loin, servent de points de repère aux mineurs et sont un indice certain de la présence en profondeur des lignites; ces phénomènes de combustion spontanée doivent être assez anciens, car j'ai observé des galets roulés de cette « latérite » dans des alluvions dominant de plusieurs JPIIes le lit des ruisseaux actuels. VAL D’ARNO 307 La faune et la flore de ce Pliocène lacustre sont depuis longtemps célèbres et ont été l’objet d’une revision récente par Weithofer!234]; je ne m'y étendrai donc pas ici. D’après les anciens géologues italiens, dont l'opinion a été récemment adoptée par M. Depéret, on peut y distinguer deux horizons straligraphiques : L'un correspond à la parle inférieure des argiles de base; la flore y contient beaucoup d'espèces tropicales (étudiées par Strozzi et Gaudin), à affinités miocènes, et la faune de Mammifères indique un âge pliocène ancien!; à vrai dire, l'individualité de ce niveau, si mal représenté en Italie (et non admis par beaucoup de géologues italiens), est surtout marquée, non dans le val d'Arno, mais dans le bassin du Serchio (Garfagnana). Au-dessus, le. niveau fossilifère contenant la faune proprement dite du val d'Arno, correspond aux a/luvions supérieures (sansino), et 1l renferme la faune willafranchienne typique, avec grande abon- dance d’Elephas meridionalis. Il nous reste maintenant à examiner les relations de ces dépôts lacustres avec le Pliocène marin. Il est probable, comme l’a admis Pantanelli, que la gorge de l’Arno, entre le bassin de Montevarchi et celui de Florence, résulte d'une capture récente, postérieure au remblaiement pliocène. Le lac du val d'Arno supérieur devait, au Pliocène, se déverser dans la mer par le Sud, soit par le val de Chiana, où le Pliocène lacustre passe progressivement au Pliocène marin dans les environs de Fojano, soit par le val d'Ambra, aboutissant au Pliocène saumâtre de Sienne. Quoi qu'il en soit, M. de Stefani a insisté, depuis long- temps, sur le fait qu'il y a continuité stratigraphique entre les couches pliocènes lacustres du val d’Arno supérieur et les couches pliocènes marines de la province de Sienne, lesquelles se prolongent à leur tour dans le val d’Arno inférieur. L'étude directe de la faune de Mammifères de ces dépôts marins dans le val d'Arno inférieur va nous confirmer entièrement cette conclusion. 1 Et non miocène, comme on le croyait autrefois. n Ex E £ % 14 308 PLIOCÈNE SUPÉRIEUR DE TOSCANE Dans ces couches marines, comme dans les couches lacustres, la vraie faune pliocène ancienne n’est que rarement et mal représentée, et seulement dans les niveaux tout à fait inférieurs (Casino); revanche, la faune vwillafranchienne est très développée, et on connaît, dans la région, d'innombrables gisements d'Elephas meri- dionalis (voir surtout Weithofer!). Il semble même bien prouvé que cette faune villafranchienne est apparue avant: la disparition définitive de la faune marine pliocène ancienne, c’est-à-dire dans l’Astien supérieur. Des renseignements très précis à ce sujet ont été obtenus par des fouilles faites en 1880 par Forsyth-Major dans les sables jaunes du val d’Arno inférieur, à Montopoli; ces fouilles ont fourni de nombreux Mammifères villafranchiens, tels que : l’'Equus Stenonis, le Rhinoceros etruscus, le Bos etruscus, etc... (Cf. Weithofer, Loc. cit.). Une molaire d'Elephas meridionalis a aussi été rencontrée tout près du lieu des fouilles. Enfin, dans les excavations mêmes pratiquées par Forsyth-Major, Pantanelli? a récolté, entre autres coquilles, le Ælabellipecten flabelliformis, forme essentiellement archaïque; le même auteur cite encore une espèce astienne, bien caractérisée, Venus islandicoides Tmk., dans une: couche où un squelette de Rhinoceros etruscus fut trouvé,:par de professeur Toscani, près de Montopoli, oil àf | J'ai choisi ces exeraples, parce qu'ils sont, particulièrement. précis, mais il n’est pas douteux que beaucoup des nombreuses molaires d’Elephas meridionalis, trouvées dans lé val d'Arno inférieur, doi- vent provenir de ces niveaux assez anciens du Pliocène*. Il est donc infiniment probable que cette même espèce a re aussi contemporaine des couches de Vallebiaja; cela résulterait des faits observés à Rome (voir plus haut, p. 294); et j'ai noté, d’ail- leurs, au Musée Géologique de l'Université de Pise, un fragment de na Dale avec deux molaires typiques dE. meridionals, pro- venant des sables jaunes de Fauglia (podère Bergamagnasca). Bien entendu, il n’existe dans le Pliocène Soc aucune citation » = T Eros I 1 1’ Elephas lyrodon de cet auteur doit être HER É comme .un meridionalis jeune, ainsi que l'a montré Puccioni : Dell Elephas lyrodon (Weith. ) del Valdarno (Riv. ital. di Paleont., anno XI, fasc. Il, p. 74-78, Perugia, 1905). moisi 2 In Boll. d. Soc. one italiana, vol. VI, 1880. & Voir aussi la mandibule de Bos etruscus trouvée dans des argiles DRACÈREE aux environs de Sienne et dont il est longuement parlé dans de Stefani (r03]. : ENVIRONS DE TOSCANE 309 authentique de l’Elephas antiquus, comme l’a montré M. Weithofer!; nous retrouverons, au contraire, cette espèce en abondance dans le Quaternaire de Livourne. 2° Le Quaternaire marin des collines livournaises, de la Maremme toscane ct de l’Archipel tosean, C’est seulement le long de la côte, et tout près de la mer, qu'on trouve, dans cette région, du Quaternaire marin; à ces anciennes plages doivent correspondre certainement, plus en amont, dans les vallées, des terrasses fluviatiles; mais l’étude de ces dernières n’est pas encore assez avancée pour qu'on puisse en faire état, I. Les Gollines livournaises, Le Quaternaire des environs immédiats de Livourne est depuis long- temps célèbre. Outre les travaux des anciens géologues, tels que Savi et Cocchi, il convient surtout de rappeler les études d’Appelius[5]|: cet auteur a publié une liste de coquilles fossiles des environs de Livourne, autrefois récoltées par Caterini : ce travail, très remarquable au point de vue paléontologique, est malheureusement bien difficile à utiliser à notre point de vue. Car, pour la plupart, ces fossiles proviennent de travaux ou de fouilles exécutés dans la ville elle-même, ou dans ses environs immé- diats : ils n’ont pas été récoltés par l’auteur et Caterini lui-même les a ramassés dans des déblais; aussi, Appelius prévient-il que l’on ne peut accorder une confiance absolue à leur répartition en zones distinctes, pourtant soigneusement indiquée dans le texte. Les caractères pétrogra- phiques donnés pour ces diverses zones ne permettent d’ailleurs pas de se faire une idée bien exacte de leur facies. Enfin, il s'agit le plus souvent de localités devenues maintenant inaccessibles à l'observation. De sorte que l'ouvrage d’Appelius, s’il a mérité de devenir classique au point de vue paléontologique, ne peut pas fournir beaucoup de ren- seignements sur la succession des faunes récentes. Des études ultérieures sont dues à MM. Lorrt [162], Merci [177] et DE STEFANI [90, 92, 99, 101, 104] et, dans les travaux de ces deux derniers 1! Le cas de l'Elephas antiquus de Rignano, trouvé dans les argiles plaisanciennes(?), reste énigmatique (cf. Weithofer) : ce serait l’unique cas où cette espèce aurait été signalée dans le Pliocène. La détermination, vérifiée par M Depéret au Musée de Rome, est parfaitement exacte, mais il paraît bien invraisemblable que la pièce provienne réellement des argiles plaisanciennes, 310 : QUATERNAIRE DE TOSCANE auteurs, on trouvera une bibliographie complète, que je me dispense de donner ici. Mais c'est seulement dans les publications de M. de Stefani qu'on trouvera des données paléontologiques. ; L'éminent professeur de Florence a eu l'occasion [90, 92] d’étudier des sondages profonds, destinés à des recherches d'eaux minérales dans la plaine à quelques kilomètres au Nord-Est de Livourne, à 15 mètres d'altitude (sources de la Salute) : il a pu récolter dans les déblais de nombreux fossiles soigneusement déterminés, mais il avoue ne pouvoir malheureusement préciser toujours de quelle zone ils proviennent. J'ajouterai enfin que l'étude directe des affleurements se présente dans les conditions les plus défavorables possibles, et, malgré des excursions répétées, ne m'a permis de faire que des observations d’un intérêt assez limité. Les couches les plus anciennes connues sur cette côte occiden- tale des ne livournaises, cpentennen certainement au Plio- cène ancien : ce sont des Die bleues à Pleurotomes, à facies plaisancien. en a cité une riche faune, bien caractéristique, dans un affleurement situé « à 5 kilomètres au Sud-Est de Livourne, dans un plateau boisé ». Les sondages des Pagliai et du Confine ont fourni à M. de Stefani ([g2|, p. 20-21) un ensemble d'espèces bien caractéristiques. Cet auteur cite encore un certain nombre d’autres affleurements. D’après l’éminent géologue de Hanence. on trouverait aussi, dans le sous-sol de la plaine de Livourne, des couches équivalentes à celles de Vallebiaja et, par suite, calabriennes. Et, de fait, les faunes qu'il cite dans les sondages des Pagliai (p. 19). et surtout du Corallo nuovo (p. 18), sont des plus typiques à cet égard, s’il n'y a pas eu mélange; on y trouve, en particulier, les caractéristi- ques Turritelles éteintes. ; rs Argiles de Livourne à Cyprina islandica. — Mais les dépôts les plus connus et les plus fossilifères sont des argiles bleues à Cyprina islandica, dont la faune a été surtout étudiée par Appelius, et que G. Sd [207] avait déjà rapproché des couches de Ficarazzi ; elles semblent bien, en effet, être siciliennes. D'après de dos ([92], p. 8), ces terrains reposeraient, « avec discordance et irrégqularité », sur les argiles pliocènes, et, ou le même auteur ([90], p. A) s'exprime ainsi, à leur sujet : «.... ces. SICILIEN 311 argiles à Cyprina islandica, de mer plus profonde, rencontrées sur le Pliocène, ou sans trace sûre de celui-ci, dans quelques puits, à la Salute, et dans toutes les fouilles, à Livourne, et riches en restes d'Elephas antiquus (Falc.) et d’'Hippopotamus Pentlandi (von Meyer) ». Si cette contemporanéité est vraiment bien certaine, on aurait là un fait extrêmement important qui, joint à l'indépendance stratigraphique de ces argiles d’avec le Pliocène, prouverait nette- ment leur âge quaternaire. La faune marine s'accorde bien avec cette conclusion, car elle présente une identité presque parfaite avec celle de Ficarazzi. Au milieu d'un nombre immense d'espèces actuelles, Appelius y a signalé (par exemple, gisement de l’Arena labronica, quatrième et cinquième couches) comme espèces éfeintes : Clavagella bacillaris Desh. Plicatula mytilina Phil. Nucula placentina Lmk. Brocchia sinuosa Br. Crenella sericea Bronn Dentalium rectum L. : et comme formes émigrées : Cyprina islandica L. Arcopagia crassa Penn. GCochlodesma prætenue Pultn?. Mitra cf. Aquini O. G. Costa #. Toutes ces espèces sont précisément connues dans le Sicilien de Palerme. Il faudrait y ajouter, il est vrai, d'après Appelius, quelques autres formes éteintes, mais leur signification stratigraphique est plus obscure, et les déterminations demanderaient à être revues; tel est le cas pour : Dosinia orbicularis Ag. — Cerithium (Potamides) nodoso-plicatum Hôrnes (espèce probablement encore vivante dans les faunes saumâtres actuelles). — Adeorbis Woodi Hôrnes (cité jusque dans les couches à Strombes de Barcelone par Almera [1]). — Dentalium Michelottir Hôrnes (?). — D. inæquale Bronn, etc... J'ajouterai que ces divers gisements sont situés tout près du 1 Gité sous le nom de D. elephantinum L. 2 Cité sous le nom de Thracia prætenuis Pultn. 3 Cité sous le nom de Tellina crassa Penn. “ C'est très probablement à une espèce de ce groupe (voir 5e partie) qu'il faut rapporter la M. scrobiculata var. minor citée par Appelius, 312 QUATERNAIRE DE TOSCANE niveau actuel de la mer, comme celui de Ficarazzi, Ste ils res- semblent aussi beaucoup par leur facies. Mais il serait surtout nécessaire de connaîtré avec précision un certain nombre de coupes montrant bien la succession des divers niveaux et leurs relations stratigraphiques mutuelles. Panchina de Livourne. — Enfin, la plus récente et la plus visible de toutes ces formations quaternaires des environs de Livourne est l’assise gréso-calcaire connue depuis longtemps sous le nom de « panchina de Livourne ». Elle est nettement indépendante de toutes les formations antérieures, et j'ai pu vérifier que, aux environs d’Antignano, elle reposait directement sur l'Eocène, parfois par l'intermédiaire de minces couches argilo-sableuses où argileuses. Cette « panchina » forme là un banc épais, à l'altitude de 25-30 mètres, et comme elle a un facies évidemment très littoral, cela correspond à une ligne de rivage de 35 mètres environ. On peut, d’ailleurs, retrouver aussi les traces d'une ligne de rivage plus basse; elle est marquée par une plateforme littorale très nette, à 12-15 mètres d'altitude, recouverte par une mince croûte de calcaires à Lithothamnium et autres fossiles littoraux (en particulier au Nord de la Torre del Boccale). | < C'est très probablement de ces « panchine » récentes que pro- viennent les Strombes cités par les auteurs dans le Quaternaire de Livourne sous des noms divers (par exemple, Sérombus gigas); on peut en voir une série de fort beaux exemplaires dans les collections de l’Institut technique de Livourne; ils appartiennent, sans aucun doute possible, au Sfrombus bubonius (Lmk.); à côté d'eux, j'ai pu voir, dans les mêmes collections, beaucoup de grands Cônes sûrement différents du Conus mediterranéus et se rapportant très probablement au C. festudinarius des couches à Strombes. Enfin, une autre forme exotique a été citée aussi par Appelius dans le Quaternaire de Livourne : c’est l’ Imbricaria Caterinü } Meneghini ; l'espèce est nouvelle, mais nous verrons (5° partie), que ce genre, inconnu au Pliocène, et qu’on croyait jusqu’à présent confiné dans la région indopa- cifique, a été récemment signalé sur les côtes Ouest d'Afrique. Cette espèce serait donc comparable aux autres formes subtropicales des couches à Strombes, et proviendrait sans doute de ces couches. £ PER COTE AU SUD DE LIVOURNE 313 A ces « panchine » récentes, semble enfin se rattacher le célèbre gisement de Mammifères, dit du Monte Tignoso : c’est, ou plutôt c'était une simple éminence de calcaire miocène, s’élevant de quel- ques mètres au-dessus de la plaine, à 12 ou 15 mètres d'altitude, un peu au Nord de l’Ardenza : ce petit monticule était entouré de « panchina » à coquilles marines, auxquelles s’associaient des brèches ossifères. Tout cela a été entièrement détruit par des exploi- tations, et il est actuellement impossible de rien voir ; d’après les descriptions d'Appelius, il est probable que les dépôts ossifères devaient être un peu postérieurs à la panchina. Cette faune de Mammifères a été récemment revisée par del Campana [80], qui y a reconnu en particulier : Rhinoceros Merchi Jaeger, Hippopotamus amphibius L. Elephas antiquus Fale., Arctomys marmota, Schr., Hystrix sp., etc. Cette coexistence de l’Eléphant antique et de la Marmotte est très curieuse !. Conclusions. — En résumé, on ne saurait, pour le moment, formuler de conclusions bien précises au sujet de ces dépôts quater- naires de Livourne. Il semble qu'on puisse y retrouver, indépen- dants de la série pliocène, d’abord un Sicilien à Cyprina islandica qui serait contemporain de l’Elephas antiquus, et, ensuite, des couches contenant la faune à Sfrombus, associée également à l'Eléphant antique. II. La Maremme toscane. Des « panchine » qualernaires sont connues tout le long de la Maremme, jusqu à Orbetello, ainsi qu’à l'Ile d'Elbe?. Elles reposent sur n'importe quels terrains antérieurs, ce qui montre leur indé- pendance d'avec le Pliocène ; mais leur étude n'est pas très avancée au point de vue qui nous intéresse. Nous ne pouvons guère que noter les alfitudes auxquelles elles atteignent, et les rares fossiles intéressants qu'on y a cités. | Ces derniers sont malheureusement trop peu nombreux : 1 Peut-être s'agit-il ici, comme me l'a suggéré M. Depéret, non de la Marmotte, mais du Bobac (Arctomys Bobac Schr.), appartenant à la faune des steppes. ? Voir en particulier les travaux de Lotti [162]. de Stefani [95] et surtout Merciai [177], où l'on trouvera de belles illustrations et une bibliographie complète. 314 QUATERNAIRE DE TOSCANE M. de Stefani [102] a signalé le Tapes Dianæ Requien dans les anciennes plages du Chiarone ; et j'ai récolté Arcopagia crassa Penn. dans des graviers serpentineux, reposant directement sur les roches vertes éocènes, un peu au Nord de- Gastiglioncello, près de la côté, à 20-30 mètres d' altitude. Au point de vue altimétrique, déjà aux environs É Livourne, on peut trouver des traces de lignes de rivage relativement élevées ; ainsi, sur les flancs du Monte Nero, on voit à 5o-6o mètres dalhtude des bancs gréso-sableux, avec débris de coquilles, reposant sur l’Eocène perforé. Plus au Sud, en dessous des carrières de calcaire du Monte Burrone, existe un large replat à 100 mètres, recouvert d'une mince couche de sables jaunes : le long des pentes de la montagne, ces sables s'élèvent même jusqu’à 150 mètres, mais dans cette partie supérieure, leur grain très fin et l’absence de débris de fossiles marins semblent indiquer qu'il s’agit de formations éoliennes analo- gues aux « grès à Hélices » d'Algérie et au « Marès » des Baléares. Le Pian della Pineta, au-dessus de la Torre del Romito, estégalement une plate-forme à 100 mètres, nettement accusée dans la topogra- ie et résultant évidemment d’un ancien niveau de base : mais Je n’y ai pas trouvé trace de couverture sédimentaire. Près du cimetière de Rossignano, la panchina atteint, d'après Lotti, et je l’ai moi-même vérifié, l'altitude de 70 mètres. Sur la rive gauche du fleuve Cecina, Lotti signale la panchina à 100 mètres d'altitude et à 8 kilomètres de la mer. Merciai ([177], p. 42) la retrouve à 180 mètres dans les collines trachitiques de S. Vin- cenzo, et Lotti! à 165 mètres dans les monts de Campiglia. On la voit encore à. 100 mètres dans le massif de Piombino (Merciai, Loc. cit., p. 48), à 150 mètres dans les monts de Castiglione (de Stefani), pour ne citer que les niveaux les plus élevés. Ces lignes de rivage élevées sont donc peut-être siciliennes ; mais Merciai, comme avant lui Lotti, insiste beaucoup sur le difficultés qu'il y a parfois à Der ces « panchine » élevées des facies littoraux (calcaires à Amphistégines) du Pliocène. Enfin, dans les plaines de Grosseto et d'Orbetello, Lotti et Fuchs [133), en particulier, signalent, à des altitudes inférieures à 30 mètres, un Qua- 1 Boll. d. R. Comit. geol. d'Italia, vol. XVE, 1885, p. 253. ITALIE DU NORD 315 ternaire marin représenté surtout par des marnes à Cardium edule, et se continuant par Montalto jusqu’à Cività-Vecchia. Merciai a d’ ailleurs donné une carte paléogéographique de la mer quaternaire sur toute cette partie de la côte, et il y a étudié avec une grande précision les change- ments survenus au cours des temps historiques. III. — L'Archipel Toscan. La « panchina » quaternaire de l’/le d’Elbe est célèbre, car M. Lotti l’a signalée, près de Capo Liveri, jusqu’à 200 mètres d’alti- tude! : il serait bon toutefois de vérifier s'il ne s’agit pas là d'un facies littoral du Pliocène ou encore d'un dépôt éolien. Beaucoup plus important pour nous est le Quaternaire de l'ile de Pianosa, car il renferme une riche faune rendue classique par Simonelli [215]. Sur du Pliocène ancien représenté par des mollasses calcaires zoogènes, on voit là des lambeaux de grès quaternaires à de faibles altitudes (2-3 mètres) au-dessus du niveau de la mer. Ces couches renferment la faune typique à Strombus bubonius; outre le Strombe qui est très abondant, Simonelli y a reconnu un grand Cône quil rapporte au Conus testudinarius que nous sommes habitués à rencontrer partout dans cet horizon ; les autres fossiles sont des formes méditerranéennes actuelles, les précisément qui abondent partout dans les facies littoraux des couches à Strombes, telles que Patella ferruginea, Columbella rustica, Arca Noæ, ete. Il est donc extrêmement probable que ces couches de Pianosa corres- pondent à une ligne de rivage très basse, peut-être de 15 mètres seulement. $ 4, — LE PLIOCÈNE SUPÉRIEUR DANS L'ITALIE DU NORD Le Pliocène de la vallée du PÔ * représente le {ype classique, subappennin, de cet étage. À des argiles plaisanciennes y sont super- posés des sables asfiens, couronnés eux-mêmes par des alluvions villafranchiennes. 1 Cocchi l'avait observée à 7n mètres sur la côte sud de l’île dans la vallée des Grazie. ? Je ne dirai rien ici des côtes ligures, me contentant de renvoyer à l'ouvrage classique d'A, Issel : Liguria geologica e preistorica, 2 vol. avec atlas, Genova 1892. Voir aussi du même auteur, surtout pour le Quaternaire, un travail plus récent [148]. 316 PLIOCÈNE SUPÉRIEUR - En plus de ces trois étages, Plaisancien, Astien, Villafranchien, M. Sacco a cru devoir y distinguer un autre étage, le Fossanien, ayant pour type des formations saumâtres, développées aux environs de Fossano, entre l'Astien et le Villafranchien, et que l’on retrouve en divers autres points du bassin du P6. L’Astien étant typiquement marin et le Villafranchien continental, l'existence d’une pareille zone de passage est tout à fait naturelle et ne semble pas mériter la création d'un étage nouveau : en tout cas, ce nom de Fossanien ne peut s'appliquer qu à Ce facies saumâtres. É Quant à la distinction du Plaisancien et de l'Aslien, elle paraît être due uniquement à des questions de facies : il n’y a réellement aucun moyen de distinguer un Plaisancien à facies sableux, ou « pseudoastien » pour employer le langage de M. Sacco, de l'Astien véritable. Néanmoins, comme ces deux expressions de Pan et d’Astien s’appliquent à des faunes bien typiques, et que, la plupart du temps, sur tout le pourtour de la Méditerranée, ces faunes se montrent superposées, il est légitime et commode de les conserver (voir plus haut, p. 21). Les alluvions du Villafranchien marquent, dans la vallée du Pô, la fin du remblaiement pliocène, et elles se montrent tout à fait équivalentes aux «alluvions des plateaux » des géologues français. Par contre, les dépôts quaternaires glaciaires et fluvio-glaciaires ravinent partout l'entière série pliocène. Cela ressort nettement, par exemple, des travaux de Penck et Brückner; et cette même indé- pendance du Quaternaire et du Pliocène se vérifie aussi dans le centre du bassin ; on sait, par exemple, qu’à Turin, les alluvions quaternaires reposent directement sur le Plaisancient, Ainsi, l’Astien et le Villafranchien, qui devaient primitivement remblayer toute la plaine du P6, ont été enlevés et nous ne retrouvons plus les restes de l’ancienne Haine alluviale de la fin du Pliocène que sous forme de lambeaux conservés le long des versants alpins et apennins?. Ce grand remblaiement a dû commencer, dans le fond du golfe du Pô, dès la fin de l'Astien : puis les deltas des fleuves alpins et apennins ont peu à peu progressé vers l'Est, faisant ainsi reculer les rivages de la mer pliocène. Donc, les régions où nous : Cf. F. Sacco : Il Piacenziano sotto Torino (Bol. d. Soc. geol. ital., vol. XXNT, 100) 1). ? Au sujet de la morphologie de l'Apennin du Nord, voir l'intéressante étude de G. Braun: Beiträge zur Morphologie des pcs Apennin (Zeitschr. der Gesellsch. für Erdkunde zu Berlin, 1967, n°s 7, 8). ITALIE DU NORD 317 pouvons espérer retrouver les sédiments marins les plus élevés dans la série pliocène, équivalents à la partie inférieure des alluvions villafranchiennes de l’Astésan, doivent être recherchées dans les parties de la plaine du Pà atteintes les dernières par le remblaie- ment, c'est-à-dire dans la région voisine de l’Adriatique. Là, l’exis- tence de Calabrien marin paraît possible. © Or, précisément dans cette partie orientale du bassin du P6, on trouve, à la partie supérieure de la série pliocène, des indices de l'existence d’une faune plus récente que les faunes plaisancienne et astienne typiques. Nous allons examiner cette question en détail. Le problème des faunes à Cyprina islandica de l'Émilie. Nous verrons (5° partie) que la Cyprina islandica n'a jamais été rencontrée dans les riches faunes pliocènes du Piémont. Dans l’Emilie, au contraire, sa présence dans le Pliocène (s. 1.) est absolument certaine à Castellarquato et dans la province de Parme (voir de Stefani | 101], p. 371). Reste à savoir à quel niveau précis elle se rencontre dans la série pliocène et quelle faune exacte l'accompagne. Ici, les opinions des divers auteurs sont quelque peu discordantes ; je ne puis que les rapporter, n'ayant pas encore eu l’occasion de visiter moi-même ces localités. M. F. Sacco considère les couches à Cyprina islandica du Plai- santin comme typiquement plaisanciennes ; il est ainsi conduit à n'attribuer à cette espèce aucune importance stratigraphique. D. PaAnrANELLI | 188] rappelle que la Cyprine se rencontre à Castel- larquato dans des couches inférieures au calcaire à Amphistégines : il considère donc ces couches à Cyprines comme impossibles à distinguer du Pliocène typique et nullement comparables au « Post- pliocène de l'Italie du Sud ». M. DE STErAN, au contraire, partant de cette idée que la C. islandica ne saurait se rencontrer dans le vrai Pliocène ancien typique, a eu le premier l’idée de préciser la faune accompagnant cette espèce dans le Plaisantin : dans son ouvrage fondamental sur les terrains récents de la Méditerranée [101], 1l donne une petite liste des espèces « compagnes certaines de la Cyprine » ; ce sont des espèces actuelles, Le savant professeur de Florence en conclut que l’on est là en dehors du Pliocène typique et il rattache ces couches à son Postpliocène inférieur, 318 à PLIOCÈNE SUPÉRIEUR La question a été reprise plus récemment (1900) par T. Levi [158] qui s’est appliqué à à suivre minutieusement la succession des faunes dans la région de Castellarquato. Me \- D'après lui, les espèces qu’on peut récolter dans les mêmes couches que la Cyprine, appartiennent toutes à des formes encore vivantes, sauf : T'apes senescens Dod., T. vetula Bast., Cerithium varicosum Br., qui sont, comme nous le verrons, des espèces éteintes à cachet pliocène bien net, mais qui se rencontrent également dans les faunes à Cyprines du Calabrien inférieur typique (Vallebiaja, Monte- Mario, Girgenti!, etc.). Dans les assises supérieures à ces couches à Cyprines, T. Levi déclare n'avoir récolté qu’une seule espèce éteinte, le Pecten scabrellus Lmk. ? Toutes ces constatations tendent évidemment à prouver que les couches à Cyprina islandica du Plaisantin doivent étre attribuées au Postpliocène inférieur des géologues italiens, soit au Calabrien. Levi recule toutefois devant une conclusion aussi formelle : il remarque que ces couches sont à peu près au même niveau stratigraphique que d’autres (les sables de Riozzo) renfermant 25 pour 100 d'espèces éteintes. Et il conclut à l'impossibilité de séparer les couches à Cyprines du Pliocène ordinaire; elles auraient seulement un facies un peu différent, plus profond que ne l'ont d'ordinaire les: sables jaunes de ce même horizon stratigraphique. Ces divergences dans les opinions des auteurs s'expliquent facile- ment : il est en effet tout à fait impossible d'établir une coupure straligraphique dans la. série des couches pliocènes du Plaisantin et du Modenais. Mais avec M. de Stefani, et conformément aux observations faites par T.-Levi, il faut bien reconnaître qu'on ne rencontre plus, au sommet de la série, la faune astienne typique. La seule présence de la Cyprine n'aurait pas une grande valeur, car ce serait un événement isolé et d’ailleurs, en d’autres points de la Méditerranée (Algérie(?) et surtout région appulo-garganique), nous voyons cette même coquille apparaître presque à la base de la série pliocène (voir p. 144, 148); mais l'absence des grandes et belles 1 Le T. senescens subsiste même, à peine modifié, sous le nom de T. Dianæ, jusque dans le Quaternaire récent. 2 Mais on peut avoir affaire ici à une variété douteuse, comme celle du Monte Mario, ou encore à la forme survivante de ce groupe, le P. commutatus Mtrs, — P. Philipp (Recl.), que M de Stefani rattache, à titre de variété, au P: sca- brellus. i Ê ITALIE DU NORD 319 espèces habituelles de l'Astien me paraît, si elle est bien réelle, un fait très important et qui donne à ces couches un caractère identique à celui des gisements de Vallebiaja et de Monte Mario. Je crois, en somme, que l'on peut voir ici la dernière trace, dans le bassin du Pô, du Calabrien inférieur marin, individualisé au point de vue paléontologique, mais stratigraphiquement inséparable du vrai Pliocène. Dans la Romagne, on n'a pas rencontré, à ma connaissance, la Cyprina islandica, mais il semble y avoir également des indices de l'existence du Calabrien marin. Fuchs [131], étudiant les collines suba- pennines entre Ancône et Bologne, reconnaît l'impossibilité d'y établir dans le Pliocène la moindre coupure stratigraphique, mais il rappelle l'attention sur un fait intéressant constaté autrefois par Foresti; cet auteur avait noté, en effet, une modification graduelle de la faune, en passant des couches inférieures aux couches supérieures : la proportion des espèces vivantes, de 30 pour 100 dans les assises les plus anciennes, devient de 79 pour 100 dans les plus récentes. Dans le même ordre d'idées, je citerai encore les listes de fossiles données par Toldo [223], pour les sables jaunes supérieurs des environs d'Imola : elles ne contiennent que des formes vivantes, et ont un cachet nettement calabrien!. Toutefois, ces observations demanderaient à être reprises avec plus de précision, tant au point de vue stratigraphique qu’au point de vue paléontologique. En tout cas, en continuant à suivre, vers le Sud, cette zone plio- cène subapennine, nous allons rejoindre les régions étudiées plus haut, sur la côte adriatique de l'Italie du Sud, et où le Calabrien était développé d’une façon si typique. Ainsi la série sédimentaire pliocène et la succession de faunes qu'on y observe, se retrouveraient identiques à elles-mêmes d’une extrémité à l’autre de la mer Adriatique; mais le remblaiement aurait marché plus vite dans le Nord que dans le Sud, comme aujourd’hui d’ailleurs. ! Ce même auteur a d'ailleurs surtout étudié, dans la région, les terrasses fluvia- tiles quaternaires; il les a retrouvées aux mêmes altitudes relatives dans les diffé- rentes vallées, et situées à des hauteurs de 10, 25, 54 mètres, au-dessus des thalwegs actuels. 320 COTES AFRICAINES | GHAPITRE AU] AUTRES RÉGIONS $ 1. — LES COTES AFRICAINES f° La série pliocène. Il est impossible. actuellement de reconnaître avec certitude le Calabrien sur les côtes africaines de la Méditerranée potOentAles bien que le Pliocène ancien y soit pañieu connu. Tunisie. En Tunisie, on voit le Pliocène ancien bien développé et fossilifère à Monastir et au Cap Bon par exemple ‘; il y est partiellement recou- vert en disconfinuité par les dépôts quaternaires à Sérombus bubonius. Au Cap Bon, d’après M. Allemand-Martin?, la supérieure de la série pliocène est constituée par d’épaisses couches de sables gréseux, où la faune semble se modifier; on n'y voit plus que des débris de Pectoncles et de Cérithidés appartenant tous à des espèces actuelles; peut-être faut-il voir là l'étage calabrien, qui occuperait ainsi au Ca Bon la même situation stratigraphique que dans l'Italie du Sud; mais les fossiles sont trop rares pour que l'on puisse vérita- blement parler d’une faune calabrienne. | Sahel d'Alger. \ Des faits analogues se présentent en Algérie. Je me bornerai à dire quelques mots, à ce sujet, de la région du Sahel d'Alger où la série pliocène est ru bien étudiée et fossilifère®. - 4 Cf, Elick et nee a de Lamothe [153]. ; » 2 Cf, Allemand Martin : Aperçu sur la structure géologique (dela re da Cap Bon (Tunisie) (C. R. Acad. Sc., CXLIX, P. 489-491, Paris, 1909), et communica- tions orales de l’auteur. ? Voiren particulier le compte rendu de la réunion de la Société Géologique de PLIOCÈNE 921 L'extrême base du Pliocène ancien y est représentée par de puissantes marnes bleues, rapportées par certains géologues au Sahélien, mais qu'il n'y a aucune raison de ne pas considérer comme la base du Pliocène!. Car elles sont concordantes avec le niveau fossilifère qui les surmonte. Comme dans beaucoup de régions d'Italie, en effet, les marnes de base ne renferment pas de fossiles et ceux-ci n'apparaissent que dans une pre- mière intercalation plus sableuse : c’est la zone fossilifère de marnes Jaunes, bien connue dans tout le Sahel d'Alger, et dont une liste d’es- pèces a été donnée par MM. de Lamothe et Dautzenberg [152] : la faune y est encore pliocène ancienne de la manière Ja plus nette. Au-dessus de cette zone fossilifère, le facies devient de plus en plus littoral : des marnes sableuses, on passe à des sables et des grès, dont on peut citer comme type les grès de Draria. En même temps, sur les bords du bassin pliocène, le caractère des assises change : on rencontre des mollasses calcaires zoogènes, riches en Pectinidés et en Brachiopodes =mollasses de Mustapha) ; souvent se réalise même le facies de grès calcaires à Amphislégines?, identiques à ceux que nous avons ren- contrés dans l'Italie du Sud où leur développement est amené par des conditions de sédimentation tout à fait pareilles. Toute cette série est d'ailleurs absolument continue et on ne sau- rait y établir la moindre coupure stratigraphique *. Malheureusement, la série de remblaiement pliocène, que nous retrouvons ainsi, est fort incomplète; la partie supérieure nous manque totalement; les assises les plus élevées, représentées par des sables et grès du type « grès de Draria », sont encore certaine- inerit bien loin des alluvions continentales qui devraient couronner la série, Et de plus, ces formations supérieures ne sont pas fossili- fères, de sorte que nous ne savons si la limite du Pliocène ancien et du Calabrien vient passer en dessus ou en dessous d'elles. Mais, en France en Algérie {Bull. de la Soc. Géol. de France, 3° série, vol. XXIV, 1896) et les travaux plus récents de MM. de Lamothe et Dautzenberg |152]. ! Bien entendu, ceci s'applique seulement à la région d’Alger et non au Sahélien typique de Carnot, > Etudiés en particulier par Zittel (Bull. de la Soc. Géol. de France, 3 série, vol. XXIV, 1896, p. 969). Celle que M. Welsch a essayé d'introduire, dans les mollasses calcaires, entre un Pliocène ancien et un Pliocène supérieur, est fort peu justifiée, comme a bien voulu me le confirmer encore M. Depéret, car elle ne repose que sur une fausse discordance (dont l'apparence est düe à des phénomènes de stratification oblique) comme celle que j'ai étudiée plus haut (p. 8r) en détail à Monte Corvo, près Reggio. Univ. pe Lyon. — Graxoux, 2| 922 COTES AFRICAINES tout cas, il est bien certain que ces couches étaient primitivement recouvertes par une série d’assises très puissante, tout à fait comparable au Calabrien de l'Italie du Sud, et terminant le rem- blaiement pliacène. Le niveau de la mer pliocène se retrouve en effet, dans la région d'Alger, à une altitude voisine de 500 mètres, d’après le général de Lamothe ([155], p. 242). Or, les premiers temps du Quaternaire sont, d'après ce même géologue, marqués par l’arrivée, jusque sur le massif isolé de la Bouza- réah, de cailloutis originaires de l'Atlas: cette arrivée n'a pu se produire que s'il existait une vaste plaine alluviale remblayant la dépression actuelle de la Mitidja, qui sépare ce massif des premières chaînes atlasiques. Ce phénomène est, comme l’a montré le général de Lamothe, antérieur à la plus haute ligne de rivage quaternaire reconnue dans la région (325 mètres) : il date donc de la fin du Pliocène, et la plaine alluviale ainsi constituée, marquant le terme du remblaiement pliocène, est. l'homologue de ces plaines côtières d'âge calabrien supérieur, que nous avons vues ceinturer partout la péninsule italienne. Cette puissante série phiocène a été ensuite attaquée par l'érosion quaternaire, et tous les sédiments postérieurs, correspondant aux lignes de rivage si bien étudiées par le général de Lamothe, la ravinent nettement. En résumé, nous retrouvons, dans cette région d'Alger, l'impor- tante coupure stratigraphique que j'ai choisie partout comme limite du Pliocène et du Quaternaire. Ma manière de concevoir cette limite se trouve ainsi tout à fait d'accord avec celle récemment adoptée par le général de Lamothe |155]. Malheureusement, la fin du remblaie- ment pliocène, le Calabrien, a été ici enlevée par l'érosion. Province d'Oran et Maroc. = Il en est de même plus à l'Ouest, dans la province d'Oran et au Maroc. On ny connaït pas de couches à faune calabrienne venant se placer au-dessus du Pliocène ancien, qui se présente toujours raviné par les lignes de rivage quaternaires. Le Pliocène se continue ainsi, avec les mêmes caractères, Jusqu'à Tétouan, où il est extrêmement fossilifère !, et, franchissant le détroit de Gibraltar, Cf. L. Gentil et À, Boistel : Sur l'existence d'un remarquable gisement pliocène PLIOCÈNE 323 nous le retrouverions sur les côtes atlantiques marocaines avec une faune riche en Pectinidés, mais ne différant en rien de la faune habituelle du Pliocène méditerranéen. Si l'on se rappelle en outre que MM. Dollfus et Cotter [123] ont décrit récemment dans le Pliocène du Portugal une faune encore identique, on en conclura qu'il n’y avait pas encore, au Pliocène ancien, de différenciation entre une faune atlantique et une faune méditerra- néenne; ou plutôt la Méditerranée ne nous apparaît alors que comme une dépendance de l'Atlantique, sans individualisation. C’est une conséquence très naturelle de la grande largeur que devait avoir à ce moment le détroit de Gibraltar. Car l'altitude des dépôts pliocènes sur les deux rives du détroit est voisine de 100 mètres!, et comme il s'agit de for- mations relativement profondes, le niveau de la mer pliocène devait y atteindre ou y dépasser 150 à 200 mètres. Conclusions. En résumé, nous ne connaissons pas jusqu'à présent, en Algérie, d'une manière certaine, du Calabrien marin. Peut-être a-t-il existé, et 1l serait à rechercher dans les couches encore marines qui sur- montent en continuité le Pliocène ancien. Mais ces couches sont très peu fossilifères et, ne renfermant que de très rares espèces banales, elles n’ont pas attiré l'attention des observateurs ?. En tout cas, ici comme partout ailleurs, la fin du Pliocène corres- pond à un remblaiement général, commandé par un niveau de base d'altitude probablement très élevée et semblant croissante depuis le détroit de Gibraltar jusqu'aux environs d'Alger. C'est sous l'influence de ce niveau de base, qu'ont pris naissance partout de vastes plateaux, recouverts, soit d’a/luvions, soit de la « croûte tra- verlineuse » habituelle des pays calcaires à climat subtropical et à Tétouan (Maroc) (Comples rendus Ac. Se., t. CXL, pp. 1725-1727, Paris, 1905). 1! Voir surtout les travaux de L. Gentil, par exemple. ? M. Welsch a longuement insisté (Pliocène d’Alger, Bull. de la Soc. Géol. de France, 3e série, vol. XVII, 1889, p. 125) sur les différences paléontologiques existant entre son Pliocène ancien et son Pliocène supérieur, dans les environs d'Alger, Il a même comparé ce dernier aux divers dépôts dits « postpliocènes » de lItalie du Sud et de la Méditerranée orientale. Ces observations sont extrêmement intéressantes et mériteraient d'être reprises, mais il est difficile de les interpréter telles quelles, car la coupure stratigraphique admise par l’auteur entre ses deux subdivisions du Plio- cène ne peut guère ètre conservée (voir ci-dessus, p. 32r, note 3), 324 COTES AFRICAÎNES analogue à celle que l'on rencontre à la même époque dans la Toscane et dans la province de Rome. Ce sont de tels sédiments continentaux que l’on peut considérer, d’après leur situation strati- graphique, comme les équivalents continentaux du Calabrien1. Je n'insiste pas sur leur faune, dont l'étude serait en dehors de mon sujet. Je me bornerai à y rappeler la persistance des éléments miocènes africains ((razella, Antilopes, Hipparion); ils se trouvent associés à des formes nouvelles immigrées, dont l’arrivée dans les pays méditerranéens marque nettement la limite du Pliocène ancien et du Pliocene supérieur (Elephas meridionalhis, Equus Stenonis, Bos, etc.). La faune continentale de l'Afrique du Nord avait donc, à cette époque, un caractère d'ensemble assez nettement différent de celui qu'offrait la faune du Pliocène supérieur européen, Leur contemporanéité n'est néanmoins pas douteuse et il est . intéressant de voir la faune à E. meridionalis se présenter de part et d'autre de la Méditerranée dans des conditions stratigraphiquesidentiques. 2: Le Quaternaïre des côtes africaines. Le Quaternaire des côtes africaines de la Méditerranée occidentale vient de faire l’objet d'un mémoire magistral du général de Lamothe |155]. Je me contenterai donc, négligeant les travaux précédents, de rappeler ici les résultats généraux acquis dans ce mémoire, de manière à les comparer avec ceux obtenus dans les autres régions. 1. Résultats stratigraphiques. Au point de vue stratigraphique, la coupure séparant le Pliocène ot le Quaternaire se présente avec une absolue netteté. Car les formations quaternaires ne sont représentées ici que par des dépôts lout à fait littoraux d'anciennes plages, dont l'indépendance d'avec la mer phocène est manifeste; ils reposent en discontinuité sur des Lerrains plus anciens quelconques, y compris le Pliocène. Leur classification chronologique résulte évidemment de l’altitude 1 Voir, à ce sujet, la thèse toute récente de L. Joleaud : Etude géologique de la vhaine numidique el des Monts de Constantine (Algérie), Montpellier; 19tr (pp. 240; 269 ct suiv.). QUATERNAIRE 32) à laquelle ils se rencontrent. Le général de Lamothe a pu ainsi répartir ces dépôts quaternaires entre huil anciennes lignes de rivage, dont l'altitude décroît à mesure qu'elles sont plus récentes : elles s'échelonnent ainsi à 325, 265, 204, 148, 103, 60, 31, 18 mètres au-dessus de la mer actuelle, chiffres qui, d'après l'auteur, se montrent les mêmes sur toute l'étendue de côtes étudiée à ce point de vue, depuis la région d'Oran jusqu'en Tunisie. Quelle que soit l'opinion adoptée sur la cause quia produit ces changements dans l'altitude relative des terres et des mers, la clas- sification chronologique relative de ces dépôts littoraux n’en subsiste pas moins telle que l’a admise l'auteur. II. Résultats paléontologiques. Les faunes de ces formations quaternaires africaines sont fort iné- galement connues ; tandis que celles des plus récentes (niveaux de 18 et de 31 mètres) sont certainement parmi les plus riches de toutes celles des gisements méditerranéens de cette époque, par contre les plus anciennes ne peuvent, comme nous allons le voir, donner aucun renseignement utile. A. Faune des niveaux supérieurs à 103 mètres, — Les rares fos- siles signalés à ces niveaux appartiennent tous à des espèces lif{a- rales, encore vivantes dans la Méditerranée. Je ne saurais en effet attribuer aucune certitude aux citations faites par M. Ficheur, dans les poudingues de Bellefontaine (niveau de 148 mètres, du Pecten scabrellus Lmk. et de l'Amussium cristatum Bronn; la pre- mière de ces espèces a pu être trop facilement confondue, soit avec des variétés du P. opercularis L., soit avec la forme encore vivante P. com- mutalus Mtrs. (voir 5° partie); quant à l'Amussium crislalum, sa présence dans des dépôts aussi littoraux est matériellement impossible. Le général de lamothe, auquel j'ai soumis ces observations, a bien voulu me confirmer lui-même les réserves qu'il avait déjà faites d’ailleurs à ce sujet. Par contre, il me paraît intéressant de souligner la présence du Pecten maximus L. dans ce même niveau de 148 mètres (gisement du Djebel Hadjeret). Cette espèce, dont l'absence dans le Pliocène ancien méditerranéen paraît bien certaine, v pénètre au contraire dans les faunes plus récentes. 326 COTES AFRICAINES B. Faune du niveau de 103 mètres. — Elle n’est guère connue (à part quelques espèces actuelles récoltées par le général de Lamothe) que par une liste de coquilles rencontrées par Bleicher dans le fameux gisement du puits Kharouby (province d'Oran); cette liste a un cachet d'ensemble quaternaire fort net ; les quelques espèces disparues de la Méditerranée actuelle ont été discutées par le général de Lamothe, et il me paraît difficile d'en faire état au point de vue Se C. Faune du niveau de 00 mètres. — La faune citée ici par le général de Lamothe ne comprend que des espèces vivantes dans la Méditerranée, au nombre de trente-huit; elle a donc un cachet nettement quaternaire. Nous y remarquerons pourtant la Venus fasciata Da Costa, considéré par l’auteur comme une espèce atlan- tique. Les gisements de ce niveau signalés par le général de Lamothe dans les falaises à l'Ouest d'Oran ont été récemment explorés par M. Pallarv, qui m'en a envoyé une série de coquilles : ce sont d’ailleurs toutes des espèces méditerranéennes, sauf la Cancellaria (Solatia) piscaloria Gmel.!, espèce sénégalienne, mais représentée dans le Pliocène méditerranéen par la forme connue sous le nom de C. hirta Br., et justement rattachée par M. Sacco à la C. piscatoria, à titre de variété. En outre, une grande Chame récoltée là par M. Pallary, et assez mal conservée, m'a paru se rapporter à la C. placentina Defr., espèce éteinte bien connue dans le Sicilien de Palerme et dont la see dans le Quaternaire ancien d’ Algérie n'aurait par suite rien que de très naturel. D. Faunes des niveaux de 31 mètres et de 18 mètres. — Il ne me semble pas possible d'établir de distinction paléontologique entre ces deux niveaux, dont j'étudierai les deux faunes simultanément ; les gisements les plus riches sont sans contredit ceux de Monastir (Tunisie) et d’Arzeu (province d'Oran). Avec les localités de Tarente, Ravagnese, Nice, San-Juan de Vilasar (Espagne), ce sont certainement les points où nous voyons le plus beau développement de la faune dite à S{rombus bubonius. Le facies des couches de Monastir, en particulier, les plus fossilifères, rappelle, d’une 1 Un: des échantillons est figuré dans le présent ouvrage. \ QUATERNAIRE SR manière frappante, d'après les descriptions des auteurs, celui des mêmes couches à Tarente : ce sont des vases calcaires, parfois sableuses, où les fossiles, dans les régions où les vases n'ont pas été ultérieurement cimentées, sont d’une magnifique conservation et faciles à extraire en bon état; le caractère général de la faune au point de vue bathymétrique, ainsi que l'altimétrie des gisements, se correspondent également d'une manière parfaite; et on ne peut manquer d'être frappé d’une analogie si complète présentée par des gisements aussi éloignés les uns des autres. Ces faunes algériennes ne renferment absolument aucune espèce éleinte. Je ne puis en effet me décider à attribuer une valeur quelconque à la citation d'un exemplaire unique de T'rochus bullula P. Fischer, trouvé à Monastir. Outre qu'il provient peut-être d'assises pliocènes remaniées. il appartient à un groupe de petits Trochus (sizyphinus, strialus, exaspe- ralus, Gravinæ, etc), en pleine évolution, largement représenté dans la Méditerranée actuelle, et où les espèces sont des plus difficiles à délimiter. IL ne nous reste donc plus à considérer que les espèces émigrées. Le plus grand nombre d'entre elles habitent les côtes atlantiques de l’Afrique et ont par conséquent des a/ffinilés subtropicales; leur détermination ne peut faire l'objet d'aucun doute et leur absence de la Méditerranée actuelle peut être considérée comme absolument certaine. Tornatina Knockeri Smith Natica Turtoni Smith Conus testudinarius Martini Tugonia anatina Gmel. Tritonidea viverrata Kiener Arca Geissei Dunker! — Cantharus variegatus Mytilus senegalensis Reeve — Gray M. Charpentieri Dunker Strombus bubonius Lmk. Deux autres de ces espèces ont été parfois signalées à l'étal vivant dans la Méditerranée, mais elles y sont très rares, et, en tout cas, sans racines dans les faunes antérieures à la faune à Strombes : de ! Cette espèce est citée ici pour la premitre fois; elle provient des récoltes faites par M. Bédé dans les couches 4 Strombes de Sfax: on la trouvera figurée ici. 328 COTES AFRICAINES sorte quon peut les conserver au nombre des types GRCIREUQUES de cette formation; ce sont : Natica lactea Cine Pusionella nifat Brug. Enfin, deux autres ont une valeur un peu moindre, car elles sont représentées dans la Méditerranée par des espèces voisines, et leur détermination peut laisser place à quelque doute ; ce sont : Mactra Largillierti Smith, Cardita senegalensis Reeve. I11. — Synchronismes avec les formations types de l'Italie Méridionale. Si nous cherchons maintenant à comparer, au double point de vue paléontologique et stratigraphique, ce Quaternaire africain avec les formations développées dans l'Italie du Sud, nous serons conduits aux conclusions suivantes : Tout d'abord la coupure établie entre Pliocène et Quaternaire paraît la même dans les deux régions : le Calabrien marin nous est inconnu en Algérie, mais 1l reste certainement, entre le dépôt des couches pliocènes anciennes et celui des plus vieilles lignes de rivage quaternaires (ou, pour parler comme le général de Lamothe, la date de l’arrivée sur le Sahel du premier caillou de l'Atlas), un laps de temps immense qui correspond au Pliocène supérieur. Partout en Algérie, les faunes à caractère quaternaire se montrent nettement discordantes d'avec le Pliocène; aussi le général de Lamothe, qui avait d’abord [154] placé un peu arbitrairement la limite du Pliocène et du Quaternaire entre les niveaux de 265 et de 204m , a récemment | 155] adopté pour l'Algérie une coupure tout à fait pareille à celle que J'avais admise dans l'Italie du Sud. Passons maintenant au détail du synchronisme des diverses assises qualernaires. Un fait doit nous frapper tout d’abord : c'est la similitude complète qui existe, à tous points de vue, entre les niveaux africains de 18 et 31 mètres et les couches à Strombes de l'Italie du Sad. Il n’est pas douteux que ces diverses formations ne doivent être considérées comme contemporaines. Quant aux lignes de rivage plus élevées de la côte africaine, leur facies nous interdit toute comparaison avec la faune sicilienne typique, car dans des sédiments aussi littoraux on ne peut s'attendre COTES IBÉRIQUES 329 à rencontrer aucune des espèces émigrées ou éleintes qui carac- térisent le Sicilien et qui sont propres à des facies vaseux d’une. certaine profondeur. Ainsi, la paléontologie ne nous est d'aucun secours, et il ne nous reste plus à invoquer que l'alfifude atteinte dans les deux régions par les lignes de rivage correspondantes. fl ne faut pas se dissimuler qu'un synchronisme basé ainsi sur un seul caractère n'a guère que la valeur d'une définition ou d'un postulat, puisque nous n'avons pas de deuxième caractère nous permetlant de contrôler les assertions basées sur le premier. Néanmoins, il faut bien admettre provisoirement un essai de parallélisme. Je ferai remarquer alors que l'altitude des couches à Strombes en Italie et en Algérie est fort comparable. [1 est donc naturel de penser que l'altitude des formations plus anciennes doit aussi y être comparable, quelle que soit d’ailleurs l’hypothèse que l'on adopte sur la cause des mouvements relatifs des terres et des iners dans les deux cas. On est ainsi conduit à paralléliser la ligne de rivage algérienne de 103 mètres avec les couches siciliennes de Palerme. Quant aux lignes de rivage plus hautes des côtes africaines, elles pourraient être contemporaines des formations quaternaires élevées que jai notées un peu partout dans l'Italie du Sud (région de Cotrone, Taormina, etc.), mais que je n'ai pas étudiées en détail parce qu'elles ne me montraient pas de faune caractéristique. 8 », — LES COTES IBÉRIQUES f° Le Piiocène. Je ne dirai que quelques mots des côtes atlantiques, région en dehors de mon sujet. Le Pliocène y est bien connu dans la basse et la moyenne vallée du Guadalquivir!; nous retrouvons là, dans cet ancien golfe marin fermé vers l'Est, la série de remblaiement habituelle. A la base sont de très puissantes (au moins 500 mètres) argiles à facies ! Cf. R. Douvillé, Esquisse géologique des Préalpes subhéliques (Partie cen trale), Thèse de doctorat, 222 p.. 19 fig., 2r pl., Paris 1906, pp. 108 et 128, 330 COTES IBÉRIQUES plaisancien, passant à leur partie supérieure à des grès et mollasses à facies astien ; la série se termine par des grès et conglomérats alluviauæ, qui, d'après R. Douvillé, semblent bien concordants avec le Pliocène marin. On aurait donc là le Calabrien, terminant le remplissage de l’ancien golfe, et je crois dès lors que l’on peut se rallier entièrement à l'avis si judicieusement exprimé par cet auteur sur l’inexistence d’un détroit subbétique au Pliocène. Malheureusement les fossiles manquent dans cette série et en particulier rien ne nous indique l'existence d’une faune marine calabrienne. . Il en est de même, plus au Nord, sur la côte portugaise, où de belles faunes pliocènes anciennes ont été étudiées par Dollfus et Cotter [123]. J'insisterai un peu plus sur les côfes méditerranéennes de l'Es- pagne, car on a cru parfois y rencontrer une faune plus récente que celle du Pliocène ancien. Il n’en est rien d’ailleurs, comme l'ont montré en dernière analyse MM. Bergeron et Michel-Lévy !. Dans les environs de Walaga, les auteurs de la « Mission d’ Andalousie » ont décrit une faune plaisancienne typique, surmontée de sables égale- ment fossilifères à’ facies asfien. Quant au gisement célèbre de S. Pedro de Alcantara, ils y ont récolté une faune extrêmement riche, où ils paraissent avoir été particulièrement frappés par « l'association de types franchement pliocènes avec d’autres rares dans la Méditerranée actuelle, ou cantonnés dans les grandes profon- deurs », En réalité, il s’agit bien de Pliocène ancien typique, et la faune de S. Pedro de Alcantara ne diffère en rien de celle des gise- ments classiques de l'Italie du Sud, où, comme on sait, ces types profonds sont plus fréquents que dans l'Italie du Nord et la France ?, Le Pliocène est également bien développé dans le golfe de Vera, au Sud de Carthagène, où il a été signalé en particulier par Schrodt [205]; des marnes plaisanciennes typiques, très riches en foraminifères, y sont recouvertes de sables et de grès. Par contre, certains des conglomérats que l’auteur rapporte au Pliocène supérieur doivent probablement être considérés comme quaternaires (voir plus loin, p. 333). ! Mémoires présentés par divers savants à l'Académie des Sciences de l'Institut nalional de France, t. XXX, n° 2, Paris, 1889. ? Aussi, je ne saurais adopter l'opinion récemment formulée par R. Hôrnes (| 1461, p. 762), qui considère ces formations comme d'âge diluvial, tout en faisant des réserves sur la précision de la limite entre Diluvium et Pliocène. °° = =. QUATERNAIRE 331 Les collections du Laboratoire de Géologie de Lyon contiennent d'ailleurs des séries de fossiles pliocènes de cette même région, provenant de Parazuelos, près Carthagène !, et de Bornuevo, près Mazzaron ?; dans les deux cas, il s’agit de facies calcaires mollas- siques avec Brachiopodes néritiques et Pecten rhegiensis Segu. En Catalogne, le Pliocène ancien a été étudié en détail* aux environs de Barcelone ; mais, ici encore, les termes supérieurs du remblaiement ne sont pas connus, et dans les limons rouges sur- montant en concordance les couches à faune marine, on trouve le Mastodon arvernensis, ce qui exclut leur âge villafranchien supé- rieur. Les choses se présentent donc ici tout à fait comme dans la France méridionale, où, entre les dépôts pliocènes marins du fond des vallées et les plateaux d’alluvions élevés, existe une lacune complète dans nos connaissances. Enfin, le Pliocène ancien est bien développé près de la frontière française, dans l'Ampurdan, où il se présente dans des conditions identiques à celles du Roussillon. Il est donc extrémement probable que le Calabrien de toute la péninsule ibérique est représenté uniquement sous un facies conti- nental. 2° Le Quaternaire. Les deux seules régions de la côte méditerranéenne ibérique ? où Jon ait signalé d’une manière certaine du Quaternaire marin fos- silifère sont le rocher de Gibraltar et les environs de Barcelone. Je dois, en outre, à M. Pallary des indications inédites sur un gisement de la province d'Almeria. ! Coll, Locard. ? Ces fossiles m'ont été aimablement donnés par M. Gallaud, professeur au Lycée de Versailles. * Voir surtout la monographie de Almera et Bofill [2], et les Comptes-rendus de l’excursion de la Société Géologique de France (Bull. de la Soc. Geol. de France, 3e série, t. XXVI, 1898). i Sur lesquels on retrouve, en Espagne, comme en France, un beau dévelop- pement de la faune à Elephas meridionalis. : Pour la côte atlantique, que je ne puis étudier ici, on verra surtout le beau travail de MM. Choffat et Dollfus : Quelques cordons littoraux marins du Pléisto- cène du Portugal {Bull. de la Soc. Géol. de France, 4° série, t. IV, rgo4). 33 COTES IBÉRIQUES Gibraltar. Les observations faites sur le rocher de Gibraltar ont été résumées récemment avec beaucoup de détails dans le bel ouvrage de M. Robert Douvillé!. Elles sont dues surtout à des géologues anglais et en particulier à MM. Ramsay et Geikie (Quarterly Journal of the Geolog. Soc., XXXIV, 1878). Nous en noterons seulement les conclusions : 1° Sur le rocher de Gibraltar existent des traces de lignes de rivage, marquées par des plates-formes d’abrasion et par des coquilles marines, à diverses hauteurs : 200 mètres, 88 mètres, 57 mètres, 23 mètres, 16 mèlres et au-dessous: 2° L'âge de ces diverses lignes de rivage reste difficile à préciser; il ne paraît pas impossible que la plus haute d’entre elles corresponde au niveau de la mer pliocène supérieure, mais nous n'en avons aucune preuve. Quant aux autres, leur attribution au Quaternaire s'impose, après tout ce que nous avons vu dans les autres régions de la Méditerranée. Toutes ces anciennes plages ne renferment d’ailleurs que des faunes littorales banales, composées d'espèces toutes actuellement vivantes dans la Médi- terranée, et par suite sans signification; 3° Dans les cavernes, on a rencontré une riche faune de Mammifères de l'âge de l’Elephas antiquus; d'après les géologues anglais, elle y aurait vécu avant l'époque de la ligne de rivage de 200 mètres, et ces savants en déduisent une histoire assez compliquée du Rocher de Gibraltar; cette histoire ne paraît d’ailleurs pas établie avec toute certitude. De tout cela, il faut retenir surtout la découverte de l’Elephas antiquus, indubitablement contemporain d’une ligne de rivage de 93 mètres ?. Province d'Ailmeria. M. Pallary a bien voulu me communiquer quelques indications sur un gisement quaternaire exploré par lui à Cocedores, entre Vera et Aguilas (Sud de Carthagène). Presque au niveau de la mer, il à ! Handbuch der regionalen Geologie, IEL Band, 3 Abteilung : la Péninsule ibérique. À, L'Espagne (Heidelberg, 1911). ? M. Pallary m'a dit avoirobservé celte célèbre ancienne plage de Gibraltaret avoir retrouvé aussi des traces de dépôts quaternaires à Tanger, QUATERNAIRE 333 récolté la un Strombus bubonias Lmk. d’une belle conservation ! et dont ia détermination ne peut faire l’objet du moindre doute. Les couches à Strombes sont donc représentées ici, et la ligne de rivage à laquelle elles correspondent ne doit atteindre qu'une altitude très faible (15-30 mètres au plus). C'est probablement le même gisement ou, en tout cas, un gisement analogue, qu'a décrit Schrodt | 205] dans la même région, sur la route de Vera à Aguilas, à la Rambla del Esparto. Il cite là, dans des conglomérats tres littoraux : Patella peraff. Adamsont Dunker, Trochus lurhinalus (Gmel., Strombus aff. coronatus Defr. L'auteur attribue d’ailleurs cette faune au Pliocène supérieur, ce qu’on ne saurait admettre, car, même en ne tenant pas compte du Strombe, les deux premières espèces restent précisément étrangères aux faunes pliocènes : en particulier la présence de la Patelle sénégalienne est intéressante à noter, dans des dépôts qui représentent visiblement les couches à Strombes. Environs de Barcelone. Beaucoup plus faciles à interpréter sont les résultats obtenus aux environs de Barcelone par le chanoine Almera [1], qui y a signalé en 1904 les couches à Strombes. Au point de vue sfratijraphique, les conditions de ce gisement sont les suivantes : la côte est ici formée par une chaîne de collines granitiques, séparées de la mer par une plaine côtière quaternaire, A S. Juan de Vilasar, sous les alluvions fluvio-marines de la plaine cotière, des puits ont montré des sables fins ertrémement fossilifèrés, surtout dans les parties les moins élevées ; la couche la plus fossi- lifère se trouve ainsi à 150 mètres de la plage et à peu près au niveau de la mer actuelle. Ge gisement est done en somme dans une situalion stratigraphique (out à fait identique à celle du gisement de Ravagnese, près Reggio (voir p. 217), mais à urie altitude bien plus faible; comme à Ravagnese, on a affaire à une ancienne plage recouverte par des dépôts continentaux | Déposé actuellement dans les collections du Laboratoire de Géologie de | Uni- versilé de Lyon, 334 COTES IBÉRIQUES postérieurs, et la faune de cette plage est d'autant plus riche que l'on s'adresse à des facies plus profonds. Il va sans dire que, dans les deux cas, se manifeste la plus complète indépendance stratigraphique d’avec le Pliocène. M. Almera cite dans ce gisement environ 1/40 espèces de Mollusques; je me bornerai à examiner celles qui ne se rencontrent plus actuellement dans la Méditerranée; ce sont : 19 Sérombus bubonius Lmk., cité sous le nom de S. medilerraneus Duclos, mais rapproché ensuite, par l'auteur lui-même (note à la fin de l’article), de l'espèce de Lamarck, conformément aux observations publiées par MM. Dautzenberg et Dollfus; _ 2° Conus lestudinarius Martini; cette espèce est appelée C. Mercati Br., par M. Almera; le général de Lamothe (|153}, p. 451), qui a vu, au Musée de Barcelone, les fossiles de S. Juan de Vilasar, affirme qu'il s'agit bien du grand Cône quaternaire, extrêmement voisin d’ailleurs de la forme pliocène ; 30 Adeorbis Woodi Hôrnes, var. lateumbilicata Almera et Bofill; cette forme, dont le type provient du Pliocène de la Catalogne ([2|, p. 9x, pl. VE, fig. 18), aurait un caractère plutôt archaïque, et appartiendrait à une espèce pliocène ; mais Je n'ose considérer comme fossile caracté- ristique, une coquille de si petite taille, appartenant à un groupe bien représenté dans la Méditerranée actuelle, et où les espèces sont très difli- ciles à délimiter ; 4° Nassa mutabilis L. var. gibba Brug. in Br. ; la N. gibba Br. est généralement identifiée à la N. obliquata Br., espèce éteinte ; mais il est extrèmement probable que M. Almera a eu ici seulement en vue une variété vivante sans intérêt de la NV. mulabulis ; 50 Pecten distortus Costa; le Chlamys (Hinnites) distorlus da Costa, paraît actuellement relégué dans l'Atlantique; il est probable que la coquille de S. Juan de Vilasar doit se rapporter à la forme semidistorta du Chlamys multistriatus Poli, signalée par M. di Monterosato sur les côtes méditerranéennes d'Afrique ; ; 6° Pectunculus glycimeris L.; on admet parfois que cette espèce ne vit plus dans la Méditerranée; mais elle est tellement voisine du P. bima- culatus Poli, méditerranéen, que je ne puis en faire état. En résumé, il ne nous reste plus, comme éléments vraiment carartéristiques, que le Conus testudinarius et le Sérombus bubo- COTES FRANÇAISES 330 nius, formes vivantes sur les côtes atlantiques d'Afrique; au point de vue paléontologique, l'attribution de ce gisement aux couches à Strombes n'est pas douteuse, ainsi que M. Almera l’a vu immédia- tement. La liste de cet auteur nous montre d'ailleurs que la profondeur où vivait cette faune est assez notable: il la rapporte (p. 522) à la « zone des Laminaires »; en particulier des formes telles que Arca diluvii Lmk., Cassidaria echinophora L., etc., nous montrent qu'il ne saurait être question d’un dépôt tout à fait côtier. La ligne de rivage de la mer à Strombes correspond donc ici à une alfitude certainement supérieure à 15 mètres, et probablement voisine de 30-40 mètres. S 5. — LES COTES FRANÇAISES Je suis obligé de laisser complètement de côté les ferrasses flu- viatiles, développées partout sur les côtes françaises : quand leur étude d'ensemble sera achevée, elles fourniront certainement des données fondamentales au problème des anciennes lignes de rivage; mais une telle étude serait, par sa complexité même, tout à fait en dehors de ce travail : il est préférable de n'en pas parler du tout plutôt que de s’exposer à tirer des faits jusqu’à présent publiés par les auteurs des constatations prématurées. En se bornant aux facies marins, on se trouve au contraire en présence d’un petit nombre d’observations précises, dont 1l est permis d'essayer la synthèse. C’est d’ailleurs ce qu'a fait déjà, avec une clarté magistrale, M. C. Depéret, dans deux publications [87, 88], qui ont orienté dans une direction nouvelle les recherches de cette nature. Je me bornerai donc à montrer comment les faits signalés par M. Depéret peuvent se rattacher à ceux que nous avons reconnus ailleurs sur le pourtour de la Méditerranée. 1° Le Pliocène. Des dépôts à faune pliocène ancienne sont depuis longtemps 1 De pareils essais de synthèse ont été tentés par M. Boule |{24] et par M. Haug (Traité de Géologie); on y trouvera la bibliographie régionale. 330 COTES FRANÇAISES connus dans le Var etles Alpes-Maritunes; ils font suite d'ailleurs à ceux de la Ligurie et on y retrouve facilement la succession habi- luelle du Pliocène italien : des argiles profondes, à faune plai- sancienne, y sont surmontées par des sables asfiens. Les principales modifications de facies intéressantes sont dues au plus ou moins grand développement et à la nature des apports terrigènes. Dans le voisinage de la vallée du Var, il se développe, au sommet du Pliocène, une masse puissante de poudinques, ancien delta sous-marin du Var, car on y trouve des intercalations à faune marine. Sur les côtes plus abruptes, se développent au contraire des facies zoogènes, tels que le « Pliocène blanc à Brachiopodes, Oursins, Ostrea cochlear » de M. Depéret et le « calcaire ou mollasse à Amphistégines d'Antibes et de Biot ». Le facies blanc à Brachiopodes est des plus fréquents sur les parties abruptes des côtes calabraises (par exemple, détroit de Messine) ; enfin, il est remarquable de constater que la mollasse de Biot, superposée à des argiles plaisanciennes, possède exactement le même facies et la même situation stratigraphique que les calcaires à Amphistégines de l'Algérie, de la Sicile, de la Calabre et de la Toscane. Dans toute cette série, dont la continuité ne peut faire aucun doute, on ne trouve pas d’indices d'une faune marine plus récente que celle du Pliocène ancien. Les équivalents stratigraphiques du Calabrien de l'Italie du Sud y seraient à rechercher dans les couches tout à fait supérieures des poudinques du Var, quil serait peut- ètre intéressant d'explorer à ce point de vue. M. Depéret a d’ailleurs déjà noté la présence, dans ces niveaux supérieurs, du Pecten jacobæus (à l'exclusion des nombreux Pectinidés propres au Pliocène ancien) qui contribue à leur donner un cachet plus récent. Mais actuellement aucune donnée ne permet d’affirmer la présence du Calabrien marin. ee Il en est de même sur foutes les cotes françaises; nulle part où n'y connait la faune marine calabrienne. Mais l'existence des termes supérieurs de la grande série de remblaiement pliocène y est montrée par les témoins continentaux de ce remblaiement, les alluvions des plateaux qui, par leur faune de Mammifères (Ælephas meridionalis), se rattachent nettement au Pliocène supérieur. QUATERNAIRE 337 20 Le Quaternaire. Tous les dépôts que nous allons étudier maintenant! se pré- sentent en disconfinuité évidente avec la série pliocène : leur âge quaternaire est non moins bien établi par la paléontologie. A. Rivages de 85 mètres et de 55-60 mètres. Les plus anciens d'entre eux se trouvent dans la région de Nice, et correspondent aux lignes de rivage de 85 mètres et de 55-60 mètres, admises par M. Depéret. Ils sont visiblement antérieurs aux couches aStrombes et correspondent, au moins le plus élevé, à notre Sici- lien ; c’est bien ce qu'avait proposé M. Depéret en faisant ressortir l’analogie d'altitude entre ces formations et celles de Palerme. Sans être bien caractéristique, la faune ne s’oppose pas à un tel parallélisme, Toutes les coquilles qu'on y a rencontrées sont encore vivantes dans la Méditerranée, sauf le Balanus concavus Bronn, espèce vivante aux Antilles, en Australie et sur les côtes américaines du Pacifique : cette Balane est d'ailleurs, d’après de Alessandri [63|, des plus fréquentes dans le « Postpliocène » italien, en particulier dans le Sicilien de Palerme. Deux espèces, le Chlamys pes-felis L. et la Lima squamosa L,, sont représentées dans un des gisements niçois par un grand nombre d'échantillons de forte taille, alors qu'aujourd'hui la pre- mière, surtout, de ces deux espèces, semble devenue un peu plus rare. J'ajouterai que, d'après mes récoltes, ces deux coquilles don- neraient lieu, dans le Sicilien de Palerme et de plusieurs autres localités d'Italie, à des remarques analogues. 1 J'ai eu le plaisir de visiter un certain nombre de ces gisements quaternaires niçois en compagnie de notre excellent confrère, M. Caziot, auquel j'exprime ici Ma vive reconnaissance. Je n'ai d’ailleurs rien à ajouter aux faits signalés ou rappelés par M. Depéret; toutefois, j'ai eu l’occasion de constater entre le Trayas et Théoule (Esterel) un assez grand développement de dépôts littoraux analogues à celui décrit par le général de Lamothe, au Trayas; l'un de ces dépôts de plage était formé de sables et graviers (malheureusement non fossilifères), en masse assez considérable pour avoir fait l’objet d’une exploitation dans la propriété de M. Pierron à la pointe de la Galère (altitude : 50 mètres environ). Univ. pe Lyon. — Gienoux. 22 338 COTES FRANÇAISES Les autres espèces émigrées ou disparues caractéristiques du Sicilien manquent à Nice : ce fait n'est d'ailleurs pas pour nous surprendre, car les facies des gisements de Nice, en général rocheux et littoraux, ne con- viennent pas du tout au genre de vie de la plupart de ces espèces; au point de vue de la nature des dépôts, de leurs relations stratigraphiques, de leur faune, ces gisements montrent une similitude complète avec ceux, probablement contemporains, du Capo di Milazzo, en Sicile, tout à fait pareil à notre Cap Ferrat français. B. Rivage de 28-30 mètres. M. Depéret reconnaît ensuite une ligne de rivage à 28-30 mètres ; il y rapporte deux groupes de gisements : 1° Une formation connue depuis longtemps aux environs de Biot, sous le nom de sables à Tellina planata de Vaugrenier ; ces sables renferment une faune de plage sableuse assez riche, spécialement en petits Tellinidés, mais on n’y a rencontré aucune forme carac- téristique ; : 2° Des graviers sous-marins bien développés en divers points des environs de Villefranche (presqu'île Saint-Jean, etc.) et de Monaco (grotte du Prince) et contenant une faune très intéressante. Je vais en relever les éléments les plus importants. On y trouve d’abord des coquilles africaines disparues de la Méditerranée, éminemment caractéristiques des couches à Strombes ; M. Depéret signale ainsi : .Strombus bubonius Lmk., Conus testudinarius Martini, Ar fe Tritonidea viverrata Kiener!. _ Ayant eu l’occasion de revoir les riches matériaux de ces gise- ments existant dans les collections de l’Université de Lyon, j'y ai reconnu en outre la présence de la Natica lactea Guilding?. Nous retrouvons donc là quatre espèces étrangères à la faune actuelle de la Méditerranée, et tout à fait caractéristiques. 1 Sous le nom de Cantharus variegatus Gray. ; .? Dont les échantillons étaient auparavant déterminés comme W. Guillemint Payr. QUATERNAIRE 339 En outre, je rappellerai encore l'abondance, dans ces gisements niçois, de plusieurs grandes et belles coquilles à affinités subtropicales, qui sont maintenant devenues plus rares et localisées plus spécialement dans les parties méridionales de la Méditerranée ; telles sont : Cassis undulala Gmelin, Cassis saburon L., Tritonium nodiferum L., T. costatum Born (— olearium auct.), Purpura hæmastoma L., Patella ferruginea Gmelin. D'une extrémité à l’autre de la Méditerranée occidentale, c'est une association que nous avons retrouvée partout dans les gisements du même âge. C. Rivage de 13 mètres. Après la formation de ces dépôts, M. Depéret est conduit à admettre un mouvement négatif fort important, qui a amené la mer en dessous de son niveau actuel. Puis, grâce à une nouvelle oscillation positive, le niveau de la mer est remonté jusqu à une altitude de 13 mètres au moins. A cette ligne de rivage de 13 mètres se rapportent un assez grand nombre de gisements épars dans la région niçoise, à l’éfang de Berre, enfin sur les côtes du Languedoc. La seule espèce intéressante qu'ils renferment est le Tapes Dianæ Requien, rencontré à Capestang (Languedoc) et figuré ici. Dans la cinquième partie de ce travail, j'ai exposé d’une manière détaillée comment on peut comprendre l’histoire et la signification stratigra- phique de cette espèce : elle persiste en Corse (étang de Diane) et sur les côtes toscanes, jusque dans des dépôts très récents, proba- blement en partie contemporains de ceux du Languedoc. Enfin, les côtes françaises nous fournissent un cas extrêmement important de relations stratigraphiques entre les couches à Strom- bes, et une faune de Mammifères du type dit à Elephas antiquus. C'est le gisement de la grotte du Prince, étudié en détail par M. Boule | 24]. Certaines observations ont fait l'objet de divergences d'interprétation de la part de MM. Boule, Depéret [87] et Flamand; elles [ne portent d’ailleurs que sur des faits de détail à notre point de vue. Et on peut considérer comme définitivement établies, d’après les faits observés à la grotte du Prince, les deux données suivantes : 340 COTES FRANÇAISES 1° L’Elephas antiquus vivait encore sur le pourtour de la Médi- terranée, après le moment où la faune à Sérombus a fait son appa- rition dans cette mer. ; 2° Postérieurement aux couches à Strombes, il est nécessaire d'admettre un grand mouvement négatif, ayant abaissé le niveau de la mer bien au-dessous du niveau actuel; c'est pendant cette période qu'ont vécu les Elephas antiquus de la grotte du Prince. Appendice. — Gisement sous-marin de Banyuls. J’ai déjà, en rg910, rappelé l'attention sur ce gisement; et, depuis, les faits les plus intéressants qu'y ont observés MM. Pruvôt et Robert [ 195, 196], ont été vulgarisés par le Traité de Géologie de M. Haug. Ces auteurs ont dragué au large du cap Creus, entre 100 et 200 mètres de profondeur, un grand nombre de coquilles mortes qui montrent l'existence d'un véritable gisement fossilifère sous- marin. La faune est une faune sicilienne des plus caractéristiques : aucun autre gisement ne présente plus de ressemblance avec celui de Ficarazzi. On n’y trouve pas d'espèces éteintes, mais les formes septentrio- nales sont nombreuses : Chlamys septemradiatus Müll. Modiola modiolus L. Astarte sulcata da Costa Cyprina islandica L. Tapes rhomboides Penn. Panopæa norvegica Spengl. Chlamys islandicus L. Mya truncata L. Les trois premières de ces espèces existent encore dans la Méditer- rañée, où elles sont en voie d'extinction, mais les cinq autres sont des formes nettement septentrionales, toutes connues d'ailleurs dans le Calabrien ou le Sicilien de l'Italie méridionale. Enfin, un peu plus à l'Est, M. Pruvôt a dragué dans les mêmes conditions la grande Veptunea sinistrorsa Desh., forme atlantique si caractéristique du Calabrien et du Sicilien méditerranéen. Au large de Marseille, la Magellania cranium Müll., a été également rencontrée à l’état de coquille fossile par Marion (cf. Pruvôt et Robert, loc. cit. ); cette espèce atlantique, qui paraît bien actuellement disparue de la Méditerranée, est très ab on- dante dans le Calabrief et le Sicilien. < BALÉARES AL SA — LES ILES BALÉARES Les dépôts néogènes et quaternaires y sont depuis longtemps connus: ils ont fait l'objet d'une étude détaillée de la part d'Hermite!; on y trou- vera la bibliographie antérieure qui ne nous intéresse pas ici. Depuis le travail d'Hermite, nos connaissances n'ont guère été modifiées par les publications ultérieures : je citerai seulement de courtes notes de R. Hôrnes ([146], p. 637) et de L.-W, Collet 40, 4r]. Et surtout je dois une bien vive reconnaissance à M. P. Fallot qui a bien voulu me faire part de ses observations personnelles et me communiquer un grand nombre d'échantillons de roches et de fossiles fort intéressants. Un premier fait important, signalé par Hermite, et confirmé par les travaux ultérieurs, est l'absence du Pliocène marin aux Baléares. Rapprochant ce fait de l'absence du Pliocène marin observée aussi sur la partie de la côte espagnole qui fait face à l’Archipel, certains auteurs en ont conclu à l'existence d’une chaîne émergée au Pliocène, reliant les îles à la péninsule et effondrée depuis. Le Quaternaire est représenté par des dépôts marins fort inté- ressants : 1: Les Couches à Strombes. Les seules formations quaternaires que l’on puisse suffisamment caractériser au point de vue paléontologique, sont des conglomérals et des grès grossiers, plus ou moins sableux, situés à de très faibles altitudes au-dessus du niveau de la mer (1 à 5 mètres environ), et contenant la faune dite à Strombus bubonius. Hermite signale dans ces couches une seule espèce différente de celles vivantes actuellement dans la Méditerranée, le Sfrombus mediterraneus (Duclos), dont il indique en même temps les rap- ports étroits avec le S. bubonius (Lmk.). Les récoltes faites par M. Fallot m'ont montré de très nombreux échantillons de cette belle coquille, et il n'y a aucun doute qu’elle n’appartienne bien au Strombe méditerranéen quaternaire, et non à la forme pliocène : leur analogie est frappante en particulier avec ceux qu'on peul ! Hermite, Etudes geologiques sur les iles Baléares, thèses Fac, Sc, Paris, 1879. 342 BALÉARES récolter dans les « panchine » de Sferracavallo, près Palerme, où ces couches montrent le même facies et le même mode de fossili- sation, Ces matériaux m'ont montré en outre l'existence d’un Conus qui m'a paru plus voisin des grands Cônes exotiques, compagnons du Strombe, que du Conus mediterraneus!. On peut noter, en outre, l’abondance de Cassis saburon Brug., Pur- pura hæmastoma L., Trochus turbinatus Born, Cardium tubercula- tum L., Spondylus gæderopus L., Murex trunculus L., Tritonium costalum Born, etc., tous représentés par des variétés de très grande taille, à coquille épaisse et fortement ornée; bien que n'étant pas stricte- ment caractéristiques des couches à Strombes, ces formes n’en contribuent pas moins à accentuer le caractère subtropical de cette faune, caractère qui paraît avoir beaucoup frappé R. Hôrnes (loc. cit., p. 655). En tout cas, la présence du Sfrombus, et peut-être d'un Conus cf. testudinarius, suffit à nous confirmer la place de cette faune dans la classification chronologique. Il est essentiel de remarquer que tous les points où cette faune a été recueillie sont à des altitudes très faibles, ne dépassant pas 5 mètres environ. | 2° Le «Marès » ou calcaire à Helix. Par contre, on connaît aux Baléares des formations quaternaires qui s'élèvent à des hauteurs bien plus grandes. C’est le cas pour les couches désignées par Hermite sous le nom assez impropre de « calcaire à Helix » et pour lesquelles on peut reprendre, avec M. Hôrnes, le nom local de « Marès ». Ce sont des grès formés de menus grains de quartz, et de petits débris de coquilles, réunis par un ciment calcaire : la roche est tendre et peut s'exploiter à la scie; son facies est absolument . identique à celui des « grès à Hélices » connus depuis longtemps sur la côte algérienne, et que le général de Lamothe [155] vient précisément de décrire avec beaucoup de précision. Parmi les fossiles récoltés par G: Haime, à Palma et appartenant au Laboratoire de Géologie de la Sorbonne, j'ai remarqué un Sfrombus bubonius assez bien conservé et typique, et de grands Cônes déterminés C. mediterraneus, mais qui sont proba- blement des C, testudinarius. QUATERNAIRE 243 L'interprétation exacte des conditions de formation de ce « Marès » soulève quelques difficultés. Hermite l’a considéré comme un calcaire marin, plus récent que les couches à Strombes : c’est une opinion qui, telle quelle, ne saurait être admise, car, tandis que les couches à Strombes, sous un facies extrêmement littoral, sont localisées à de très faibles altitudes, le Marès, au contraire, s'élève jusqu'à au moins 100 mètres d'altitude, dans l’intérieur des terres. S'il était marin, il cor- respondrait done à des lignes de rivage très élevées et par suite anté- rieures à la mer à Strombes. Il est d’ailleurs certain que toutes les forma- tions désignées sous le nom de « Marès » ne sont pas contemporaines, car, comme l'a vu Hermite, et plus tard Hôrnes, on trouve des couches iden- tiques au « Marès » jusque sur les conglomérats à Strombes, Ainsi le nom de « Marès » s'applique seulement à un facies du Quaternaire. Et la seule question qui nous intéresse, c’est de décider si ce facies est {oujours marin. Contrairement à l'opinion d'Hermite, et d'après les nombreuses observations que m'a communiquées M. P. Fallot, il semble bien que le « Marès » soit en grande partie éolien, et formé, comme les orès à Hélices d'Algérie, par d'anciennes dunes consolidées !. Les preuves formelles de sédiments marins sont toujours loca- lisées à de très faibles altitudes : c’est le cas pour le « Marès » du port d'Andraitx (Majorque), situé près du niveau de la mer, où Hermite (p. 206) a récolté quelques coquilles marines. 3° Les anciennes lignes de rivage. — Synchronisme avec les autres régions. 1° Le synchronisme des couches à Strombes des Baléares avec celles développées partout ailleurs dans la Méditerranée occidentale n'est pas douteux. Il est d’ailleurs difficile de fixer avec précision l'alti- tude de la ligne de rivage correspondant à ces couches : toutefois, étant donné le facies et la faune de ces couches ainsi que leur faible altitude (quelques mètres au plus) au-dessus de la mer actuelle, il est extrêmement probable que la mer où elles se sont déposées ne dépassait pas l'altitude de 30 ou 35 mètres. 1 Cette consolidation peut être même surprise, comme l'a vu M. Fallot, sur les dunes actuelles, et elle donne une roche identique au Marès. 34 : BALÉARES Depuis l'époque de leur formation, les mouvements relatifs des terres et des mers ont donc eu dans cet archipel une résultante très voisine de celle qu’ils ont eue sur la plupart des rivages de la Méditerranée occi- dentale. En se basant sur les observations de L.-W. Collet, cette ana- logie serait encore plus frappante, puisque cet auteur a signalé à Majorque des ferrasses à 15 mètres et à 30 mètres, comme en Algérie, à Tarente, etc. Mais ces points de détail demanderaient évidemment à être . précisés. 2° Pour le « Marès », il est encore beaucoup plus difficile d'arriver à des conclusions certaines, puisqu'il s’agit d'une formation en grande partie éolienne, spécialement aux altitudes élevées. Hermite admet que le niveau moyen atteint par ce « Marès » est de 70-80 mètres. M. P. Fallot en a observé à Minorque des lambeaux à 110 mètres d'altitude. Enfin, d’après Hôrnes (loc. cit., p. 658), on en rencontrerait jusqu'à 300 mètres à Majorque. En admettant l’origine éolienne de ces « Marès » élevés, la reconstitution des lignes de rivage correspondantes demanderait une étude spéciale et délicate, analogue à celle que le général de Lamothe a menée à bien avec tant de succès pour les grès à Hélices d'Alger. S’il était permis de raisonner par analogie dans les deux cas, on pourrait faire les remarques suivantes : la hauteur des dunes actuelles ne dépasse pas, tant aux Baléares qu’en Algérie, une valeur de 40 mètres environ. D’après le général de Lamothe, celle des dunes fossiles reste toujours sensiblement la même. On aurait ainsi, sans vouloir préciser davantage, la preuve que les dépôts de Marès élevés témoignent de lignes de rivage proba- blement supérieures à celle des couches à Strombes et, par suite, d'âge sicilien!. La question n’a d’ailleurs, à notre point de vue, qu'un intérêt fort restreint, puisque, en tout cas, les faunes correspondantes à ces anciennes lignes de rivage ne sont pas connues. En résumé, nous aurons surtout à retenir de cette étude l'existence aux Baléares des couches à Strombes, développées avec une faune, un facies, des conditions de gisement, identiques à ceux 1 Je me borne à rappeler, à ce sujet, que M. L.-W. Collet signale à Majorque, sans autre précision, une terrasse marine de roo mètres. CORSE 349 qu'elles nous offrent dans la plupart des autres pays méditer- ranéens. Je ferai surtout ressortir leur analogie curieuse avec les « panchine » à Strombes de Sferracavallo, qui ont, jusque dans les détails, un facies absolument semblable; ces dernières reposent aussi sur des grès à Helix à stratification entre-croisée, analogues au facies « Marès », qu'Hermite {loc. cit., p. 280) a vu, au Télé- oraphe de Palma, inférieur aussi aux couches à Strombes. S 5. — LA CORSE ET LA SARDAIGNE 1° La Corse. La stratigraphie des formations néogènes de la Corse ne peut être considérée comme bien connue. L'existence du Pliocène ancien fossilifère sur la côte orientale y avait été indiquée comme probable, d'après Hollande !, qui fit déterminer, par Munier-Chalmas, des fossiles récoltés près d’Aléria ; de Stefani [102] a reparlé plus tard de ce gisement?. En tout cas, on ne sait encore rien de précis sur l'existence du Pliocène supérieur dans l’île. Les sédiments quatlernaires, complètement indépendants du Pliocène, y sont, par contre, mieux connus. Ce sont des graviers et poudingues développés le long de toutes les côtes et atteignant des altitudes assez notables au-dessus du niveau de la mer. Leur étude a été reprise récemment, avec des vues tout à fait modernes, par M. Lucerna [164]. Cet auteur reconnait l'existence, tout autour de l'ile, de terrasses liflorales, fragments d'anciennes plaines côtières, étagées à des hauteurs décroissantes au-dessus du niveau de la mer. Il serait absolument inutile d'entrer dans le détail des descriptions locales: je me contenterai de noter les résultats auxquels est arrivé l’auteur. D’après lui, on pourrait ainsi retrouver en Corse les traces de quatre anciennes lignes de rivage, situées aux altitudes de 66 mètres, 30-40 mètres, 20-25 mètres, 15-20 mè- ! Cf. Hollande, Géologie de la Corse (Annales des Sciences géologiques, IX, 1877, D. 95). > Tout récemment, M. Maury a bien voulu me communiquer des fossiles qui prouvent d'une manière certaine l'existence, dans cette région, de marnes torto- niennes à Ancilla glandiformis, recouvrant les calcaires à Clypéastres; il est pro- bable que ce sont ces marnes qui ont été prises pour du Pliocène ancien: l'existence réelle de ce dernier en devient donc douteuse, 346 CORSE tres: il faudrait y ajouter, en outre, quelques lignes de rivage très basses et plus récentes. Influencé par des idées peut-être un peu trop théoriques, M. Lucerna considère que chacune de ces lignes de rivage, marquant un maximum positif de la mer, correspond aussi à un maximum d'extension glaciaire dans l’île : les phénomènes glaciaires et les déplacements du niveau de la mer auraient ainsi suivi une marche concomitante : il est amené ainsi à rattacher les quatre lignes de rivage successives aux quatre périodes gla- ciaires classiques de la région alpine, Günz, Mindel, Riss et Würm ; on aurait ainsi une solution très (peut-être même trop) simple et élégante du problème si difficile qu'est le synchronisme des formations quaternaires marines et fluvio-glaciaires. C’est à ce titre que j'ai cru nécessaire d’attirer l'attention sur cette intéressante tentative #, Par contre, au point de vue, qui nous préoccupe surtout, des relations entre ces anciens rivages et les jaunes marines succes- sives, la Corse ne nous a encore presque rien appris. M. Lucerna (loc. cit., p. 139) a donné quelques listes de faunes quaternaires déterminées par M. Schaffer; ces fossiles proviennent, d’ailleurs, de lignes de rivage récentes et ont été récoltés à des altitudes inférieures à 30 mètres. Tous appartiennent à des espèces méditerranéennes vivantes et ne présentent aucun intérêt stratigra- phique. Il faut, cependant, signaler un Strombus sp., indiqué dans cette liste comme provenant des pentes de la Tour de la Parata, près Ajaccio, à une altitude probablement très faible. Malheureu- sement, comme a bien voulu me l'écrire M. Schaffer, que j'ai consulté à ce sujet, il s’agit d’un fragment spécifiquement indéterminable. Néanmoins, si la détermination générique est exacte, commeiln'y a dans le Quaternaire méditerranéen aucune autre espèce connue que le S. bubonius, il faudrait voir là l'indice de l'existence des couches à Strombes en Corse. | Un gisement quaternaire marin paraissant assez riche existe près de Saint-Florent, et j'ai pu étudier une série de coquilles qui en proviennent?; 1 D'après M. Maury (communication inédite), on retrouverait de la manière la plus nette, dans les environs d'Aléria, trois terrasses quaternaires aux altitudes suc= cessives de 10, 30-35, 50-60 mètres. 2 Elles ont été données aux collections du Laboratoire de Géologie de la Faculté des Sciences de Lyon, par M. l'abbé Beroud. SARDAIGNE 347 ce sont toutes d'ailleurs des espèces actuelles sans intérêt. Il est probable que ce gisement doit être celui déjà signalé par Hollande (loc. cut., p. 97), à une altitude de quelques mètres seulement. Enfin, on connaît depuis longtemps un riche gisement fossilifère sur la côte Est, près de l’éfang de Diane : c’est une petite colline s’élevant sur la rive orientale de cet étang et atteignant une altitude de 25 mètres environ! ; elle est presque entièrement formée par une accumulation de coquilles, en particulier d’huîtres, dans des conditions de gisement qui excluent l’hypothèse de l'intervention humaine?., De là provient une espèce éteinte intéressante, le Tapes Dianæ Requien. Ces formations de l'étang de Diane doivent être à peu près contemporaines des couches à Strombes, mais leur facies un peu saumâtre en exclut forcément la faune habituelle et caracté- ristique de ces couches. Les affinités sont ici avec les faunes égale- ment un peu lagunaires du Roussillon et de la Maremme toscane, localités où a été rencontré aussi le Tapes Diane. 2° La Sardaigne. La Sardaigne est encore à peu près inconnue pour les questions qui nous intéressent. On doit se borner, à peu de choses près ?, à la fort belle étude du général de La Marmora, excellemment résumée par Issel ([149], p. 220). Le Pliocène y est inconnu, mais, par contre, l'existence du Quaternaire marin y est bien certaine. Tout le long des côtes, on y observe des conglomérats et des grès fort analogues aux « panchine » de Toscane. La plupart du temps, ces lambeaux quaternaires restent confinés près de la mer, à des alfitudes inférieures à 3 ) mètres. Mais, en certains points, La Marmora les a décrits à des hauteurs bien plus grandes; c'est le cas, en particulier, pour l’ancienne plage déve- ! Voir, parexemple, Issel [149], p. 220. > D'après des renseignements inédits de M. Maury, ces couches fossilifères de l'étang de Diane appartiendraient au niveau de 30-35 mètres et surmonteraient des argiles à Helix; ce dernier fait est fort intéressant, car il nous prouve l'existence » , . ire 4 : : ” * d'un mouvement négatif antérieur à la transgression qui a ramené la mer à 35 mètres. Je signale, seulement pour mémoire, le travail de G. Capeder f[29.. 348 me SARDAIGNE loppée aux environs de Cagliari et où des dépôts marins fossilifères montent jusqu'à près de 100 mètres ; d’autres coquilles, rencontrées par le même auteur à des altitudes encore plus grandes (324 mètres près d’Iglesias), devront probablement être interprétées comme des « débris de cuisine ». D'ailleurs, et malheureusement, il s’agit toujours d’espèces litto- rales banales appartenant toutes à la faune actuelle. Aussi, à notre point de vue, tous ces gisements n’ont-ils qu'une importance secon- daire ; il serait à désirer que leur étude de détail fût reprise, spécia- lement pour les environs de Cagliari. | CINQUIÈME PARTIE HISTOIRE DES PRINCIPAUX GROUPES DE MOLLUSQUES MARINS PENDANT LE PLIOCÈNE ET LE QUATERNAIRE! CHAPITRE PREMIER LAMELLIBRANCHES OSTRÉIDÉS Cette famille, où toutes les espèces sont extrêmement poly- morphes, ne peut guère fournir d'indications précises, et c'est seulement sur le groupe de l'Ostrea cochlear Poli que j'aurai à donner quelques renseignements. Auparavant, je me contenterai de rappeler la fréquence particulière, dans le Pliocène ancien, des grandes formes du type de l'O. Forskali Ch. = 0, cucullata Born et de l'O. lamellosa Br.; mais ce groupe est trop complexe pour pouvoir être étudié ici, puisque je me propose seulement de signaler les espèces utilisables en stratigraphie, Aussi, je n'attacherai pas d'importance aux quelques formes rencontrées au Monte Mario par M. Cerulli-frelli [32] et rapportées par lui à des espèces éteintes. 1 Celte histoire ésl envisagée suttout äu point de vue de so äpplication à la chronologie des sédimerits. J'ai négligé entiérement la question de nomenclature et de synonymie ; comme il s'agit la plupart du temps d'espèces bien connues, je me contente de renvoyer aux ouvrages classiques de Fontannes [126], Bellardi et Sacco [13], Bucquoy, Dautzenberg et Dollfus [237], Dollfus et Dautzenberg [241], Weinkauff [233], Locard [159, 160], etc. ; dans le travail de De Franchis [701, par exemple, on trouvera une bibliographie assez complète de la malacologie des terrains récents. 390 LAMELLIBRANCHES Bien entendu, au point de vue bathymétrique, les huîtres du groupe edulis appartiennent pour la plupart aux facies tout à fait littoraux (ex. : « formation huîtrière » de l'Etang de Diane en Corse (p. 347), ancienne plage sicilienne de Mortelle (p. 208), etc.), où ces coquilles se retrouvent avec une abondance extraordinaire. Groupe de l'Ostrea (Pycnodonta) cochlear Poli. Cette forme, comprise au sens large, se perpétue. depuis le Pliocène jusqu'à l’époque actuelle, puisque l'O. cochlear, type, vit encore dans la Méditerranée. IL est donc délicat d'utiliser en strati- graphie cette espèce, d’ailleurs assez polymorphe!. Un certain nombre de variations peuvent être nettement attribuées à l'influence du facies. 1° Dans les marnes blanches de mer profonde du Plaisancien, on a affaire à des formes régulières, à valve droite très profonde, tout à fait lisse extérieurement : la surface de fixation est très réduite, le test est plutôt mince, souvent composé de feuillets calcaires fragiles, à éclat nacré (ex. : argiles de Cacariaci, près Mileto). ; 2° Dans les facies grossiers, gréseux, au contraire, la forme devient très contournée, plus ou moins grossièrement plissée extérieurement : car la surface de fixation se développe beaucoup de façon à embrasser parfois plus de la moitié dela surface extérieure de la coquille; en même temps, le test devient compact et solide. Ces formes un peu aberrantes sont surtout développées dans les graviers du Calabrien {très abondantes à Gravitelli), mais se trouvent aussi dans les grès du Pliocène ancien (Terreti?). _ 3° Dans les facies de vase sableuse ou de mollasse calcaire à grain fin (Nardo, Brucoli, Gravina, argiles de Tarente, Monosterace, Nizzeti, etc.), la forme la plus fréquente est d'assez petite taille, à caractères intermé- diaires, très analogue au type actuellement connu dans la Méditerranée, Comme ayant une véritable importance au point de vue sfrati- graphique, je ne puis guère signaler que la forme navicularis Br., ! Pour plus de détails, je me contenterai de renvoyer, outre aux ouvrages géné- raux, à la belle monographie de Foresti : Dell’ Ostrea cochlear Poli, e dialcune sue varielä, Imola, 1880. 2 Il est probable que l'O. pedemontana, espèce de Mayer reprise avec un point de doute par Sacco, puis citée par de Lamothe et Dautzenberg dans le Plaisancien d'Alger, doit étre attribuée à une adaptation de ce genre, ANOMIIDÉS 351 souvent considérée comme espèce distincte : elle est caractérisée par sa grande taille, son test épais, son aire cardinale inclinée parfois jusqu’à 90 degrés sur le plan de séparation des valves. Cette mutation si particulière ne se rencontre que dans le Pliocène ancien (Terreti, Gallina et la plupart des gisements classiques) : elle semble donc constituer un rameau latéral, s’éteignant par des formes géantes avec le Pliocène ancien!. Dans le Calabrien et le Sicilien, toutes les formes que j'ai rencontrées, en tenant compte des variations dues aux facies et dont j'ai parlé plus haut, rentrent dans le type actuellement vivant. Mais l'Ostrea cochlear, strictement limitée comme habitat à la zone des laminaires et surtout aux zones coralligènes, donne de précieuses indications bathymétriques. Aussi, la voit-on diminuer de fréquence depuis le Pliocène ancien : se gisements les plus abondants sont dans les marnes plaisanciennes (e aussi le « Pliocène blanc » à Brachiopodes des côtes françaises). -- Au Calabrien elle se trouve encore relativement fréquente dans les argiles sableuses (Gravina), les marnes à coraux (Brucoli), les graviers à Pachy- lasma giganteum (Gravitelli), etc. Dans le Quaternaire elle devient rare à Ficarazzi et on ne la trouve plus jamais dans les dépôts quaternaires littoraux. La citation la plus récente parait être celle de Seguenza qui la signale comme rare dans les couches à Strombes de Ravagnese, et encore, ne l'ayant pas retrouvée moi-même, Je ne reproduis cette citation que sous toutes réserves. ANOMIIDÉS Cette famille nous fournira bien peu de renseignements intéres- sants, et 1l serait prématuré de vouloir y tenter la reconstitution de rameaux phylétiques. Cela tient au grand polymorphisme des Anomies, auquel vient s'ajouter encore ici le miméfisme puisque ces mollusques vivent fixés et épousent l’ornementation des coquilles qui leur servent de support. En tenant compte de ce phénomène, on peut, avec la plupart des auteurs modernes, réduire beaucoup le ; M. de Gregorio (1883, Sfudi di talune Ostriche viventi e fossili) prétend toute- fois avoir rencontré des huîtres vivantes identiques à la vraie navicularis, 352 LAMELLIBRANCHES nombre des espèces vivant dans la Méditerranée. Les plus impor- tantes sont : Anomia ephippium L., avec de multiples variétés dont beaucoup étaient considérées autrefois comme des espèces distinctes. Cette forme est partout très abondante à l’état fossile : certaines variétés seraient peut-être propres au Pliocène ancien, mais les raisons signalées plus haut ne permettent guère de les considérer comme des fossiles caractéristiques. Anomia (Monia) patelliformis L. est également commune au Pliocène et à la faune actuelle. Anomia (Monia) glauca Monterosato : c'est à M. di Monterosato que revient le mérite d’avoir distingué cette espèce, jusqu'alors confondue avec ses voisines. Mais M. Sacco a déjà appelé l'attention sur les affinités très grandes de cette espèce vivante avec l’A. striata Br., fossile classique du Pliocène italien. Et de fait, en comparant des exemplaires fossiles du Modenais avec des types de l'A. glauca que je dois à l’obligeance de M. di Monterosato, je n’ai pu trouver aucune différence notable, étant donné le polymorphisme des Anomies. Es En l’absence de matériaux plus abondants, il me paraît difficile de trancher définitivement la question, mais provisoirement je ne vois pas la possibilité de distinguer l’A. glauca de l'A. striata, et le nom de Brocchi doit être conservé comme plus ancien. La conséquence en est que l'A. sériata Br., souvent considérée dans les listes de faunes pliocènes supérieures, comme une espèce éteinte, doit être au contraire assimilée à une espèce vivante et perd par suite tout son intérêt stratigraphique!. Anomia aculeata Müller : M. Cerulli-Irelli a récemment montré qu’on pouvait réunir au type de l'espèce, lequel est atlantique, à la fois la forme fossile et la forme vivant dans la Méditerranée; cette espèce n’a donc plus aucun intérêt pour nous. ! M, Cerulli-Irelli, qui a soigneusement étudié les Anomies du Monte Mario, est aussi d'avis de réunir l'espèce de Brocchi à la forme vivante. Le même auteur, en prenant pour base de la détermination de ces coquilles un examen sérieux des empreintes musculaires, a, on peut le dire, renouvelé la question : cela l'a amené à remanier un peu les anciennes espèces et à en créer de nouvelles; je n'ai pas cru devoir m'engager dans cette voie fort intéressante, étant donné le petit nombre des échantillons suffisamment bien conservés que j'ai pu étudier et le peu d'intérêt probable des déductions stratigraphiques que l’on en pourrait tirer, SPONDYLIDES 9399 Au point de vue bathymétrique, ces diverses Anomies ne sont pas non plus d’un grand secours. L'A. ephuppium est un exemple classique de Mollusque à répartition verticale étendue, puisque, de la zone littorale, il descend à plus de 1.000 mètres, C’est ce qui explique sa fréquence dans les facies les plus divers; en particulier dans les graviers du Calabrien du détroit de Messine, où les galets leur offraient de nombreuses surfaces de fixation, ces Anomies sont parfois les seules coquilles fossiles que l’on rencontre sur de vastes étendues. Les À, striala et patelliformis, qui actuellement n'habitent pas des zones aussi littorales, ne se montrent à l’état fossile que dans des sédi- ments d'une certaine profondeur : les formations les moins profondes dans lesquelles je les ai rencontrées sont celles de Ficarazzi et de Rosarno (Sicilien); leurs gisements habituels sont les marnes calcaires ou sableuses du Calabrien (Gravina, Brucoli, etc.); dans les « panchine » quaternaires, et dans les couches à Strombes, je ne les ai point trouvées, et Seguenza ne les cite pas non plus à Boveto et à Ravagnese. DIMYIDÉS Cette famille, très ancienne, ne parait plus être représentée aujourd'hui dans les mers européennes. C’est seulement aux Antilles que l'on aurait rencontré des coquilles appartenant probablement au genre Dimya (Margariona). D'après Fischer, l'Ostrea tenuiplicata décriteet figurée par Seguenza ([206|, p. 123, pl. XIT, fig. 1) serait extrêmement voisine de ces formes survivantes. L'espèce de Seguenza, qui est encore citée par cet auteur jusque dans le Pliocène ancien de Gallina (Ouest), représenterait ainsi la dernière survivance dans nos mers de cette famille. Elle donnerait ainsi un cachet tout à fait archaïque à cette faune de Gallina (Ouest), que M. de Stefani a rangé dans son « Postpliocène ». On suit d’ailleurs que M. Sacco a retrouvé jusque dansle Plaisancien du Piémont des formes analogues à l'espèce de Seguenza : il les rattache à titre de variété miopliocenica à la Dimya fragilis Koenen de l'Oligocène du Nord de l'Allemagne. SPONDYLIDÉS Genre Spondylus Les Spondyles sont des animaux de mer chaude, qui, même à l'époque pliocène, n’ont jamais vécu dans le Nord de l’Europe, Ce Uxiv, pe Lyon, — Gicnoux, 23 354 LAMELLIBRANCHES genre n'est actuellement représenté dans la Méditerranée que par deux espèces : 1° le Spondylus gæderopus L., qui vit surtout sur les fonds rocheux ou de vases calcaires, à des profondeurs assez faibles (2-30 mètres, d’après Weinkauff) : il est relativement rare sur les côtes françaises, où il paraït en voie de disparition, etil n’est réellement abondant que sur les côtes Sud de la Méditerranée (Italie du Sud, Afrique) et dans l'Atlantique marocain et sénégalais; 2° le Spondylus Gussonii Costa, petite espèce très rare, qui vit dans les fonds coralliens à 200 mètres de profondeur. C'est là une faune résiduelle, car aux époques antérieures, ce genre était représenté avec plus d'abondance et de variété. Au Pliocène ancien, outre les deux espèces actuelles, on rencontre en effet partout dans la Méditerranée le Spondylus crassicosta Lmk. qui, par son ornementation très caractéristique,se montre appartenir à un groupe tout différent; au Calabrien il a déjà disparu et constitue ainsi un des éléments caractéristiques du Pliocène ancien par rapport au Pliocène supérieur. Enfin, 1l existait encore au Pliocène ancien une autre forme rela- tivement abondante dans le bassin du Rhône et que Fontannes y a désignée sous le nom de Spondylus ferreolensis. M. Sacco l’a réunie à une espèce plus anciennement créée, le S. concentricus Bronn, assez fréquent dans le Plaisancien de l'Italie du Nord. Ce sont des formes de facies vaseux, à ornementation plus délicate et à costulation relativement régulière. Mais si on ne tenait compte que de l'ornementation, il me paraîtrait difficile de les distinguer de certaines variétés du S. gæderopus, dont nous parlerons plus loin. Le caractère différentiel le plus net, d'après les descriptions et les figures de ces deux auteurs, me paraît être la présence d’un profond sillon ligamentaire creusé dans le talon triangulaire de la partie externe de l'aire cardinale sur la valve fixée : j'ai pu constater moi-même que ce sillon était parfois remarquablement développé! et permettait ainsi facilement la distinction de l'espèce vivante et de l'espèce fossile ; bien qu'il n’en soit pas toujours ainsi, on peut néanmoins, avec Fontannes et M. Sacco, maintenir cette distinction. Le S. concentricus = $S. ferreolensis nous fournit donc encore une espèce caractéristique du Pliocène ancien. 1 Exemplaires de la collection Deydier, au Laboratoire de Géologie de Lyon. SPONDYLIDÉS 35) Quant au Spondylus gæderopus, on le rencontre déjà aussi dans le Pliocène et particulièrement dans les facies sableux de l’Astien. Mais il est en général représenté par des formes à ornementalion peu vigoureuse, qui se rapprochent plus à ce point de vue du S. concentricus que de la forme vivante la plus commune du S. gæde- ropus et en particulier de sa variété aculeala Phil. C'est encore le cas dans les argiles sableuses du Calabrien : à Castrovillari, par exemple, J'y ai rencontré une forme tout à fait pareille au type pliocène ancien. Mais je crois que c’est plutôt là une question de facies. En effet, pour trouver la forme épaisse el épineuse des mers actuelles, il faut s'adresser à des facies plus littoraux. On la rencontre déjà dans les mollasses calcaires siciliennes du Monte Pellegrino. Mais le maximum de développement de cette forme a lieu dans les couches à Strombus. Pendant cet épisode de mer chaude favorable à leur développement, les côtes méditerranéennes élaient partout abondamment peuplées de ces grands Spondyles épineux : ils sont très nombreux dans les couches à Strombes de Nice, dans celles de Toscane, de Gallipoli; à Tarente, ils forment des bancs entiers associés aux récifs de Cladocores, et à Rava- wnese on peut ramasser des quantités de valves libres rejetées sur l'ancienne plage : ils abondent également dans les « panchine » de Sferra- cavallo, ainsi que dans celles des côtes algériennes et tunisiennes. On ne peut évidemment les considérer comme caractéristiques de la Méditer- ranée à Strombes, puisqu'ils ont vécu dans notre mer avant et après, mais il est certain que leur beau développement et leur grande répartition à cette époque constituent un fait digne d’être noté, et qui contribue à donner à la faune un cachet subtropical. Le $. Gussonii appartient à un groupe déjà individualisé dès le Miocène; sa présence n’est intéressante qu'au point de vue bathy- métrique. Seguenza le signale dans le Pliocène ancien de Gallina (Ouest), et je l'ai rencontré dans les marnes à coraux de Brucoli : il indique donc, pour ce dernier gisement en particulier, une profondeur de 150-200 mètres au moins, et lui donne un caractère très différent de celui des « panchine » quaternaires toujours beaucoup plus littorales. 356 LAMELLIBRANCHES Genre plicatula. Ce genre est actuellement tout à fait disparu de nos mers et n’a plus de représentants que dans les mers chaudes, en particulier dans l'Atlantique tropical (Antilles). Dans le Pliocène ancien, au contraire, 1l est assez abondamment représenté par la Plicatula mytilina Phil., espèce bien classique des gisements italiens. Et surtout il est très important pour nous de noter que cette espèce a survécu au Pliocène ancien. On la trouve en effet dans le Calabrien du Monte Mario (Cerulli-Irelli, et collections du Laboratoire de Géologie de Lyon) et de Vallebiaja; Seguenza la cite dans son Sicilien près de Reggio-Archi!et Philipp l'avait signalée dans la Valle Lamato (Pliocène s. 1.). — Enfin nous la retrouvons encore dans le Sicilien de Palerme, au Monte Pellegrino (di Monterosato |114]). — Par contre, elle est inconnue dans les couches plus récentes du Quaternaire. M. di Monterosato m'a également envoyé une autre Plicatule prove- nant encore du Monte Pellegrino, sous le nom de PL. abscondita Monter. in sched. ; cette petite coquille, par sa forme arrondie, sa surface externe presque lisse, ses bords internes ornés de petites denticulations tubercu- leuses, m'a paru présenter les plus grandes affinités avec la P. (Sain- tiopsis) lævis Bellardi, très rare dans le Pliocène ancien du Nord de l'Italie et retrouvée dans le Calabrien du Monte Mario, par M. Cerulli- Irelli, qui l’a fort bien décrite et figurée. On aurait donc là l'indication d’un second phylum ayant également traversé tout le Pliocène pour venir se (erminer au Sicilien. Quoi qu'il en soit, ces Plicatules, dont le v'enre même est éteint dans nos mers, sont parmi les espèces disparues les plus caracté- ristiques des étages calabrien et surtout sicilien. LIMIDÉS Cette fanulle ne m'a fourni aucune indication intéressante. Les Limes paraissent dans l'ensemble plus fréquentes dans les mers actuelles que dans les mers pliocènes. 11 s’agit là très probablement du gisement calabrien de Monte Corvo. LIMIDÉS 307 En particulier, la Lima (Radula) squamosa Lmk., la plus litto- rale de toutes, est une des coquilles les plus fréquentes dans les « panchine » quaternaires : on sait, d’après M. Depéret [88|, que, dans le Quaternaire ancien de Nice, elle est représentée par une remarquable variété de grande faille. À part cela, tous les exem- plaires que j'en ai récoltés ne diffèrent en rien des formes actuelles : à peine pourrait-on signaler que, dans les formes de vases un peu profondes (Calabrien et Sicilien), la coquille est plus mince et moins épineuse, ce qui doit être certainement dû au facies. On a parfois distingué dans cette famulle des formes propres au Pliocène ancien (par exemple, L. Cocconii Fontannes); elles pa- raissent jusqu'à présent manquer dans le Calabrien où déjà on ne trouve plus que les espèces vivant dans la Méditerranée, Je dois signaler toutefois que M. Bellini [16] a observé dans les blocs de grès fossilifères rejetés par le Vésuve, et arrachés par lui à son soubasse- ment, une Lime qu'il décrit et figure comme espèce nouvelle, sous le nom de Radula vesuviana : représentée par un unique échantillon et pro- venant d’un niveau stratigraphique aussi mal défini, cette espèce nouvelle devient bien difficile à interpréter. D'autant plus que, comme le fait remarquer M. Bellini lui-même, elle est très voisine de la Lima { Lima- tula) subauriculata Montagu, espèce actuelle de la Méditerranée, dont certains exemplaires atteignent, d’après Locard ([160|, t. IT, p. 416), une dimension égale et même supérieure (14 millimètres) à celle (12 milli- _ mètres) de la forme du Vésuve. De même, M. Cerulli-Irelhi a signalé dans le Calabrien du Monte Mario quelques petites espèces qui seraient éteintes ou émigrées ; ainsi il y à retrouvé la Limea strigilata Br., représentée par une seule valve : c'est une forme fréquente dans le Miocène et le Pliocène ancien, et qui parait disparue de notre mer. Il a rencontré également au Monte Mario Ja Lima (Limatula) ovata Wood, qui serait vivante seulement dans l'Atlantique; enfin, encore dans ce groupe de la Z. subauriculala, 1 à décrit une espèce nouvelle, Lima (Limatula) inæquisculpta. Mais ce sont là des coquilles extrêmement petites, très difficiles à déterminer, et surtout on ne peut considérer les faunes actuelles de Limalula comme entièrement connues, car on y décrit constamment des formes nouvelles. Je crois done ne pas devoir retenir comme fossiles caractéristiques les espèces calabriennes que je viens de signaler. Au point de vue halhymétrique, un certain intérêt s'attache à cette même L. subauriculata Mts. : c'est une espèce profonde, qui ne remonte 308 LAMELLIBRANCHES jamais au-dessus de 50 mètres, et vit le plus souvent à des profondeurs bien plus grandes. Sa fréquence assez grande dans le gisement de Fica- razzi, par exemple, nous donne donc une précieuse indication sur le niveau qu'atteignait la mer Sicilienne aux environs de Palerme. PECTINIDÉS Bien entendu, je ne puis prétendre passer en revue toutes les espèces pliocènes et actuelles: il me suffira de citer les plus abondantes, et surtout celles dont l’histoire présente, au cours du Pliocène supérieur ou du Quaternaire, des épisodes intéressants. Je distinguerai dans cette famille, à l’exemple de MM. Depéret et Roman [89], quatre grands genres : Pecten (s. str.), Flabellipecten, Chlamys et Amussium ; dans chacun de ceux-ci, je grouperai les espèces étudiées d’après leurs affinités ; ces groupements correspondent à peu près, avec moins de rigidité, aux nombreux sous-genres adoptés par M, Sacco !. I. — Genre Pecten (s. str.). 19 Groupe du Pecten Jacobæus I. Cette espèce est une des plus abondantes dans tous les dépôts pliocènes et quaternaires de caractère tant soit peu äftoral. Elle est surtout fréquente dans les dépôts calcaires, où elle acquiert de grandes dimensions et, pour ainsi dire, exagère ses caractères typi- ques: test solide et épais, côtes très carrées, saillantes, anguleuses et sillonnées de costules également carrées et squameuses (cf. var. squami- fera Sacco) sur la valve droite ; côtes arrondies sans aucune trace d’ornementation longitudinale sur la valve gauche ; dans ces conditions, elle prend donc le facies habituel des coquilles vivant dans les eaux riches en calcaire, ; Au point de vue de sa répartition stratigraphique, on sait que cette espèce apparaît dès la base du Pliocène, où elle semble dériver du P. Grayi Michelotti (P. præjacobæus Brives) du Miocène. Mais, outre qu'elle est très rare dans les marnes plaisanciennes, à 1 Voir aussi E. Philippi,-Beiträge zur Morphologie und Phylogenie der Lamelli- branchier, II. Der Stammesgeschichte der Pectiniden (Zeitschr. d. deutsch. Geolog. Gesellsch,, Band 52, Berlin, 1900, p. 64-117). PECTINIDÉS 359 cause de la trop grande profondeur où ces sédiments se sont formés, elle n’acquiert pas encore, dans l’Asfien ?, la grande taille et l'extrème fréquence à laquelle elle atteint dans le Calabrien et le Quaternaire. Dans les sables du Calabrien et de l’Astien, elle cède encore le pas au Chlamys opercularis, qui descend à de bien plus grandes profon- deurs qu’elle. Mais dans les « panchine » quaternaires de toute la Méditerranée, on peut dire que c’est le fossile le plus fréquent. Comme on vient de le voir, il ne peut malheureusement donner d'indications stratigraphiques précises. Mais on peut lui rattacher deux séries de formes intéressantes qui passent, l’une au P. rhegiensis, l’autre aux Peignes océaniques du type du P. maximus actuel. P. rhegiensis Seguenza et formes voisines. Le P. rhegiensis type provient du Pliocène ancien (Zancléen de Seguenza) de Terreti, près Reggio, où je l'ai moi-même retrouvé. Seguenza l’a cité en outre, dans son Zancléen, dans les gisements de Vigna di Mare (ou Testa del Prato), près Reggio, des Piani della Melia et des environs de Stilo. J’ai reconnu également la présence de l’espèce typique dans le Pliocène ancien de Meynes (Gard) (collections de la Fac. desSc. de Grenoble), dans le Plaisancien de Castellarquato (collections de l'Université de Lyon) et dans le Pliocène ancien des environs de Civita- Vecchia, où j'en ai recueilli moi-même desfragments typiques dans les sables à Pecten flabelliformis du Fosso Cave del Gesso (route de Corneto). Notre espèce est citée encore sous le nom de P, Macphersont Bergeron, dans le Pliocène lombard par Martinelli 8. Depuis, cette intéressante espèce, restée longtemps oubliée, a été reconnue dans beaucoup de gisements des côtes françaises et afri- caines (cf. Depéret et Roman [89}), particulièrement dans les régions où le Pliocène prend le facies de mornes blanches à brachiopodes et Ostrea cochlear : elle affectionne donc une zone plus profonde que celle où vit d'ordinaire le P. jacobæus. ! Dans les mers actuelles, MM. Bucquoy, Dautzenberg et Dollfus [237] indiquent son habitat comme allant de 4 à roo mètres de profondeur. > Elle y est souvent remplacée par le P. rhegiensis ou des formes voisines, comme nous le verrons plus loin. * A. Martinelli : la Galleria di Gattico ed i suoi fossili pliocenici {Ati d. Soc, loscana di Sc. nalur., Memorie, vol. XXIII, p. 160-226, Pise, 1907). 260 LAMELLIBRANCHES Le P. rheqiensis constitue donc une bonne espèce caractéristique de la base du Pliocène. Par contre, j'ai rencontré, jusque dans le Calabrien, des formes qui paraissent constituer un passage entre le P. rhegiensis et le P. jacobæus. M. Sacco signale déjà que les variétés hipartita Foresti et subbipartila Sacco, du P. jacobæus, offrent de grandes affinités avec le P. rhegiensis!; les matériaux que j'ai pu récolter à ce sujet, confirment tout à fait ce rapprochement, et m'ont engagé à placer le P. rhegiensis au voisinage du P, jacobæus : on a de véritables formes de passage, pour lesquelles la distinction spécifique devient tout à fait douteuse ; et dans les anciennes listes de fossiles, le P. rhegiensis est très fréquemment déter- miné comme Vola bipartita Foresti ou Vola maxima var. bipartila Foresti. En tout cas, ces formes de passage (que j'appellerai P. jacobæus var. hipartila) semblent disparaître avant le Quaternaire. M. Sacco Îles signale dans l’Astien du Nord de l'Italie, M. Foresti, dans l'Emilie, M. Dollfus, dans le Plaisancien du Portugal ; je les ai rencontrées dans le Pliocène ancien de Terreti et jusque dans le Calabrien du Pentimele?, Ainsi l'ensemble du P. rhegiensis et de ces formes voisines semble constituer un groupe dont l’évolution s'est arrêtée avant le Quaternaire : elles sont toujours de petite taille, ce qui conduit à les considérer comme ayant encore des affinités ancestrales. Elles sont probablement issues de la même souche que le P. jacobæus et ont constitué un rameau parallèle à celui qui a donné cette dernière espèce. PF, maximus EL. et formes voisines. On sait qu’actuellement le groupe du P. jacobæus est représenté dans les mers d'Europe par deux formes qui, tout au moins à l’état adulte, sont faciles à distinguer l’une de l’autre : 1° lé P. jacobæus 1 Cette opinion est également adoptée, tout au moins dans l'ensemble, par M. Dollfus [123]. ? Par contre, dans le Calabrien du Monte Mario, d'après M. Cerulli-Irelli, le P. jacobæus n'est-représenté que par des variétés sans intérêt, qui se rencontrent à l'état vivant ; l'absence des formes de passage au PL. rhegiensis peut s'expliquer parle facies beaucoup plus littoral. PECTINIDÉS 261 qui semble propre à la Méditerranée; 2 le P. maximus!, habitant l'Atlantique? et extrêmement rare en tout cas dans la Méditerranée, Les anciens auteurs (voir Weinkauff [233], t. 1, p. 267) avaient bien signalé le P. maximus vivant dans notre mer, mais sur la foi des savants auteurs des « Mollusques du Roussillon », je l'avais même considéré autre- fois [141] comme tout à fait atlantique. Depuis, M. Dautzenberg à eu l'amabilité de me prévenir qu'il pouvait confirmer la présence de cette espèce à Oran, A l’état fossile, le P. maximus est connu dans les formations récentes du Nord-Atlantique ; et on rencontre en abondance, dans le Pliocène du Nord de l'Europe, une forme extrêmement voisine, le P. grandis Sow. Beaucoup d'auteurs avaient cité le P. maæimus dans le Pliocène médi-, terranéen #, mais il y a eu souvent confusion, soit avec des variétés sans intérêt du P. jacobæus, soit même avec des espèces toutes différentes, telles que le P. Planariæ Simonelli, étudié plus loin; une telle erreur fut commise, par exemple, par M. Meli ([174|, p. 336, note 2), qui avait cité le P. maximus au Monte Mario, après avoir fait, dit-il, une compa- raison entre des échantillons fossiles et d'autres vivant dans l'Atlantique ; plus tard, ce même auteur ([239], p. 544) reconnut qu'il s'agissait là du P, Planartieæ. ! M. di Monterosato (Revision de quelques Pectens des mers d'Europe, Journ. de Conchyliologie, 1899) admet dans la Méditerranée une troisième espèce, le P. inler- medius Monterosato : cette forme, relativement peu rare dans l'Adriatique, serait intermédiaire entre le jacobæus et le maximus ; mais elle aurait 16-18 côtes au lieu de 14-16 comme dans ces deux dernières espèces : la figure typique, assez médiocre, ne permet guère de la distinguer d'un jacobæus juv. J'ai pu voir dans la collection de M. Dautzenberg des échantillons de ce P. intermedius envoyés par M. di Mon- terosato lui-même : il nous a semblé qu'il s'agissait là d'une forme de petite taille du P. jacobæus, impossible à séparer de cette dernière espèce (on sait d'ailleurs qu'à l'état jeune la distinction des P. jacobæus et maximus est souvent très déli- cate). En tout cas, ce P. intermedius n'a rien de commun avec les formes de pas- sage dont je parlerai plus loin. >? MM. Depéret et Roman [89], après avoir mis nettement en évidence les carac- tères distinctifs du P. mazimus et du P. jacobæus, attribuent dubitativement cette différenciation à l'action des marées. C'est là une explication dont il me parait diffi- cile de se rendre compte : il semble plutôt que ce soit à la {empéralure et à la richesse en calcaire des eaux marines que le P. jacobæus doive ses caractères particuliers ; le mode d'ornementation saillante, anguleuse, squameuse, qui, dans cette dernitre espèce, témoigne d2 la moindre économie de calcaire dans la construction d'une coquille de volume interne donné, peut être vraisemblablement attribué à un habitat dans des eaux plus chaudes et, partant, plus riches en calcaire. 3 Voir, par exemple, les nombreuses citations rapportées par Meli [171]. 362 LAMELLIBRANCHES Aussi, après une enquête soigneuse, MM. Depéret et Roman [89] concluaient récemment à l'absence de toute citation authentique du P. maximus fossile dans les régions méditerranéennes. D'après les matériaux que j'ai récoltés moi-même, j'ai pu con- stater la présence indubitable du P. maximus dans le Calabrien et le Quaternaire de l'Italie du Sud, mais à l’état de rareté. Je puis citer comme exemples précis : 1° deux fragments de valves droites provenant, l’un de Monte Corvo, près Reggio (Calabrien), l’autre de Ravagnese (couches à Strombes), et qui ne peuvent laisser aucun doute sur leur identité complète avec l'espèce océanique : les côtes sont tout à fait aplaties et arrondies et les costulations s'étendent dans les intervalles des côtes aussi bien que sur les côtes elles-mêmes; 2° deux valves plates très bien conservées et récoltées, l’une à Monte Corvo :(Calabrien), l’autre dans une panchina qualernaire (sicilienne ou post- sicilienne) au Nord de Brucoli (dans la tranchée du chemin de fer, à quelques centaines de mètres au Nord de la station), près Syracuse; par leur ornementation longitudinale, ces valves diffèrent nettement du P. jacobæus, et montrent une similitude absolue avec l'espèce atlantique. Dans diverses collections, d’ailleurs, j'ai vu des exemplaires typiques de P. maximus fossiles dans les régions méditerranéennes. Ainsi, au Musée géologique de l'Université de Palerme, il existe un très beau P. maximus, provenant de Militello (probablement partie supérieure du Pliocène, ou Calabrien) et dont la détermination ne peut être contestée. Les collections du R. Ufficio Geologico, à Rome, contiennent deux indi- vidus typiques de P. maximus, provenant l’un de Reggio-Archi (proba- blement Calabrien de Monte Corvo), l’autre de Brucoli, près Syracuse (Calabrien ou Quaternaire). Enfin, j'ai retrouvé dans les collections du Laboratoire de Géologie de la Sorbonne un très beau Pecfen (figuré ici) qui, par sa valve convexe, à côtes arrondies et à costulations longitu- dinales s'étendant même dans l'intervalle des côtes, se rapporte indubi- tablement au magimus : il provient du Sicilien de Palerme. Aïnsi, tout en admettant que la plupart des citations du P. maxi- mus dans les faunes méditerranéennes se rapportent soit au P. Pla- nariæ, soit au P. jacobæus var. bipartita, il n’en reste pas moins que certaines d’entre elles doivent bien être authentiques !. 1 Je rappellerai entre autres : la citation de M. Welsch [235], qui signale l’asso- ciation du P. mazimus et du P. jacobæus, dans le Pliocène d'Alger ; celle de M. Issel PECTINIDÉS 363 De plus, dans les gisements de Monte Corvo, Gravitelli, Mileto (Calabrien), Rosarno {Sicilien), Tarente (couches à Strombes), j'ai trouvé, au milieu d'un nombre considérable de P. jacobæus types, des formes intermédiaires entre les deux espèces. Les côtes de la valve convexe ne sont plus carrées, saillantes, angu- leuses comme dans le jacobæus, mais aplaties et arrondies comme dans le maximus; par contre, l'ornementation n’est pas celle du maximus, car les costules ne sont que faiblement ou point du tout indiquées sur les dépressions intercostales. A tous les points de vue, on a la des formes de passage, pour lesquelles il est absolument impossible de tracer une limite entre les deux espèces!; je leur ai simplement attribué le nom de P. jacohæus var. aff, P. maximus. On remarquera, d’ailleurs, que tous les gisements dans lesquels jai signalé le P. maximus ou ces formes de passage, sont d'âge calabrien ou quaternaire : dans le Pliocène ancien, il semble bien que l’on ne trouve que le P. jacobæus, avec ses variétés actuel- lement vivantes dans la Méditerranée. Donc en résumé, au Calabrien et au Quaternaire (y compris les couches à Strombes), le groupe du P. jacobæus était représenté dans la Méditerranée : 1° par le P. jacobæus très abondant ; — 2° par le P. maximus très rare; — 3° par des formes de passage, relativement rares, entre les deux espèces. Comment convient-il d'interpréter ces faits ? Au premier abord on serait tenté de voir la une évolution sur place, qui, aux dépens du P. jacobæus, aurait donné naissance, au Calabrien, au P. matimus émigré ensuite dans l'Atlantique. Mais c’est là une interprétation impossible à admettre, puisque, dès le Pliocène ancien, qui a rencontré le P. mazimus dans les couches calcaires supérieures aux argiles pliocènes de l’ile de Zante (ces deux citations se rapportent peut-être au Pliocène supérieur) ; enfin celle d'E. Dumas {S{atistique géologique du département du Gard, p. 653), qui signale le P. maximus dans son grand cordon littoral quaternaire entre Maguelonne et le Grau de Palavas. Enfin, tout récemment, le général de Lamothe ([155|, p. 278 et 287) cite le P. mari- mus dans le Quaternaire d'Algérie, dans ses niveaux de 18 mètres (couches à Strombes), de 60 mètres et de 148 mètres (Quaternaire ancien). 1 Comme je l'ai déjà dit plus haut, ces formes de passage, qui ont la grande taille habituelle des P. jacobæus et maximus, n’ont rien de commun avec le petit P. inltermedius Monterosato. 364 LAMELLIBRANCHES _vivait dans les mers du Nord de l’Europe le P. grandis, forme très voisine du maxrimus. La meilleure manière de synthétiser les faits consiste à voir, dans ces formes étrangères à la faune méditerranéenne autochtone, des importations atlantiques commencées au Calabrien et se conti- nuant dans le Quaternaire. Aïnsi le point de départ du dévelop- pement du groupe aurait été le P. Grayi miocène ! : dès le Pliocène en seraient dérivés (?) le P. jacobæus d'un côté, les P. maximus-gran- dis de l’autre, ainsi que des formes intermédiaires. Le P. jacobæus seul se serait installé dans la Méditerranée, mais, à divers moments de l’histoire géologique, des immigrations atlantiques auraientamené sur les côtes méditerranéennes des formes du type maximus. Ainsi compris, ce phénomène ne serait plus isolé et se rattacherait aux immigrations océaniques qui débutent dès le Calabrien, pour se continuer jusque dans les couches à Sfrombus. Et il est curieux de trouver, dans ces dernières couches, le P. maximus, forme septentrionale, côte à côte avec de nombreuses espèces de l'Atlantique africain : cela contribue à nous montrer que le caractère principal de ces faunes spéciales introduites dans la Méditerranée, est d’être « océaniques » plutôt que spécialement septentrionales ou méridionales : ce sont des essais, avortés, de renouvel- lement de la faune méditerranéenne. Enfin, actuellement, les rares s{alions où l’on ait signalé la présence certaine du P. maximus dans la Méditerranée sont précisément celles où se rencontrent d'ordinaire les coquilles à affinités marocaines ou séné- galiennes : tel est le cas pour les côtes d'Algérie (Oran). Et, en dehors de s cette station d'Oran, la seule citation qui avait paru acceptable à MM. Bucquoy, Dautzenberg et Dollfus |237] est celle de Hidalgo à Minorque? : il est naturel de croire que c’est sur de telles côtes insulaires, ! On a malheureusement fort peu de données sur les faunes de Pectinidés de l'Atlantique. Aussi, est-il extrêmement intéressant de rappeler ici les résultats déduits par MM. Depéret et Roman [89] de l'étude des matériaux rapportés par M. Lemoine des côtes atlantiques du Maroc : ces savants y ont reconnu la présence du P. jacobæus au Pliocène ancien et l'association des P. jacobæus et marimus au Quaternaire (voir aussi Boislel, B.S.G.F., 1905). Enfin on sait que MM. Choffat cet Dollfus (loc. cit.) signalent le P. maximus dans le Quaternaire (plage de 60 mètres) du Portugal. Actuellement, le P. maximus est partout très abondant dans l’Atlan tique, depuis la Norvège jusqu'aux côtes marocaines ; tandis que le P. jacobæus n'a guère été signalé qu'aux Canaries par d'Orbigny : il y a été retrouvé par le Travailleur et le Talisman ([160j, t. Il, p. 373). 4 ? Plus récemment, M. Locard ([ 160], t, II, p. 372) a exprimé à peu près la même opinion. PECTINIDES 365 dont la faune est plus isolée du reste de la faune méditerranéenne actuelle, que les débris des faunes anciennes ont dû le mieux pouvoir survivre à l'état de « faunes résiduelles ». Les tableaux ci-dessous résument ce que nous avons dit des affi- nités et de la répartition géographique et stratigraphique des P. jacobæus, rhegiensis, maæximus. Mers pu Norp MÉDITERRANÉE ATLANTIQUE Actuel. . .|P. jacobæus (c. c.), P. ma-|P. maæimus (c. c.)|P. maximus (c.c.). œimus (r. r.). P.jacobæus(r.r.). Quaternaire .| P. jacobæus (ce. e.) et var.|P. maximus, P. ja-|P. maximus, af. mazimus (r.), P. maxi-| cobæus mus (r.). Calabrien. .|P. jacobæus (c. c.) et var. ? ? aff. maximus (r.) et var. bi- partila(r.), P.maæimus(r.). Pliocène anc.|P. jacobæus (c.) et var. bi-|P. jacobæus et? |P. grandis. parlila (r.), P. rhegiensis. P. jacobæus 4 P, maæimus P. jacobæus, var. af. P. marimus D, grandis INK ? P. jäcobæus var, bipartita D, Hiogiensis D. Grayi 2% Groupe du Pecten benedictus Lmk. Le P. benedictus Lmk. est une espèce essentiellement confinée _ dans le Pliocène ancien et qui à ce titre ne nous intéresse qu'indirec- tement. Mais son groupe est encore représenté dans le Pliocène supérieur (Calabrien) par une belle espèce, le P, Planariæ Simonelli, dont je dois par suite dire quelques mots. "1 366 LAMELLIBRANCHES Ce P. Planariæ existe déjà dès le Pliocène ancien : le type même de l'espèce a été récolté par Simonelli [215], à l’île de Pianosa, au milieu d’une faune nettement pliocène ancienne. Depuis, on a rencontré l'espèce dans le Pliocène ancien de la Toscane et du Maroc (Cf. Depéret et Roman [89]). Au Calabrien, on la connaît au Monte Mario! (Cerulli-Irelli[32]), dans le Pliocène supérieur de la côte d’Anzio, près Rome (Meli {171]), et à Vallebiaja (Ugolini). D’après M. Nelli {179}, elle serait représentée dans le Postpliocène (Calabrien) de l'ile Lampedusa, par une variété de petite taille dénommée par Trabucco ? Peclen Lampedusæ. En outre, Meli [171] la signale aussi dans le Quaternaire ancien (?) de la côte romaine à Anzio (gisement dit de la fornace Maronese); enfin, M. Dollfus a cru la reconnaître dans la faune atlantique du R10 de Oro, que cet auleur a récemment (Comptes rendus sommaires des Séances de la Société Géologique de France, 1911, n° 15) considérée comme identique à la faune actuelle de cette région ?. En laissant de côté ces deux dernières citations, qui me paraissent prêter à la discussion au point de vue stratigraphique, on voit que cette espèce ne dépasserait pas dans nos mers le Pliocène supérieur. J'ai d’ailleurs personnellement récolté dans le Calabrien de Monoste- race (cf. p. 51) un fragment bien typique de valve convexe, qui, comparé avec des moulages de grands P. Planariæ de Vallebiaja, ne m'a montré d'autre différence qu’une taille peut-être légèrement inférieure“; en tout cas, et c'est l'important, il s'agit certainement là d’une forme éteinte du groupe du P. benedictus. Aïnsi on peut reconstituer de la manière suivante l’histoire, dans nos mers, de ce groupe du P. benedictus. Au Pliocène ancien il était très abondamment représenté dans la Méditerranée par le P. benedictus, forme centrale du groupe, accom- pagné de quelques formes voisines plus rares (P. planomedius Sacco, P. Planariæ) ; puis à la fin du Pliocène ancien le P. bene- dictus disparaît complètement *, donnant lieu ainsi à une impor- 1 Où, comme nous l'avons vu plus haut, elle avait été confondue d’abord, par M. Meli et les anciens auteurs, avec le P. marimus L. _? Cf. G. Trabucco : l’Isola di Lampedusa, Studio geo-paleontologico (Bol. d. Soc. geol. ilal., 1890, vol. IX, p. 573). 3 M. Depéret, revenant sur la question {tbid., 1912, n° 13), a de nouveau établi d’une manière certaine l’âge miocène de cette faune : il s'agissait ici, non du P. Planariæ, mais probablement du Flabellipecten Almerai Dep. et Rom. 4 Mais supérieure encore à celle du P. Lampedusæ Trabucco cité plus haut. 5 On sait que dans la mer Rouge il est encore représenté par une espèce fort voisine, le P. erythræensis Sow. PECTINIDÉS 367 tante coupure stratigraphique. Mais le groupe est encore représenté dans le Calabrien par un rameau latéral, l'espèce ou mutation P. Planariæ, qui vient à son tour s’éteindre par des formes de grande taille à l'extrême fin du Pliocène. Les faunes quaternaires semblent ne plus contenir aucune forme du groupe. Il, — Genre Flabellipecten Ce genre est, comme on sait, définitivement disparu de nos mers. D'autre part il est très abondamment représenté, dans tous les gise- ments classiques du Pliocèue ancien, par une espèce centrale, le F. flabelliformis Br., à laquelle viennent parfois s’adjoindre deux formes extrêmement voisines, les F. Alessii Phil. et F. Bosniasckii de Stef. et Pant. Le F. Alessi paraît spécial aux facies de sables fins ou argileux; il a d’ailleurs la coquille plus mince et moins fortement ornementée, carac- tères habituels aux Mollusques de ces facies; le F. flabelliformis abonde plutôt dans les facies de graviers grossiers ; ainsi, dans le Pliocène ancien de Terreti, près Reggio, ses valves sont accumulées en bancs épais, au milieu des graviers à Bryozoaires et Amphistégines. Mais le genre ne s'éteint pas entièrement avec le Pliocène inférieur, Il est vrai qu'il manque dans les gisements classiques du Monte Mario et de Vallebiaja, et contribue à leur donner un air de Jeunesse relativement à d’autres gisements voisins, mais plus anciens, où abonde le K. flabelliformis. Par contre j'ai pu constater dans le Calabrien du détroit de Messine, la présence de cette dernière espèce, qui sy montre en compagnie des formes septentrionales caractéristiques de cet étage. Le cas le plus net nous est offert par le gisement de Monte Corvo (Reggio-Archi, probablement Sicilien de Seguenza); là, au milieu d'une faune par ailleurs nettement calabrienne, on peut récolter côte à côte le Æ. flabelliformis et le Buccinum undatum L. des mers du Nordt. i J'ai eu le plaisir de faire constater cette association sur le terrain à M. Depéret, 368 LAMELLIBRANCHES J'ai, en outre, recueilli dans les sables du versant Nord du Monte di Pentimele (près Reggio) des valves typiques de ce même Flabellipecten, dans des endroits où, d’après la situation topographique, il est extrème- ment probable que l’on a affaire aussi à du Calabrien; mais, dans ce massif où les fossiles sont rares, la limite entre le Pliocène ancien et le Pliocène supérieur est difficile à tracer d'une manière affirmative!. Ainsi le genre Flabellipecten, si abondant et s1 caractéristique partout dans le Pliocène ancien, laisse encore au Pliocène supérieur quelques rares représentantsisolés : cette persistance est un fait très important, en ce qu'elle souligne la continuité paléontologique qui relie le Calabrien au Pliocène ancien. Dans la nomenclature que j'ai adoptée, on peut dire que les Fabellipecten caractérisent le Pliocène dans son ensemble par opposition au Quaternaire où ils ont disparu. III, — Genre Chlamys 1° Groupe du Ghlamys opercularis L?, Nous aurons surtout à étudier dans ce groupe le C. opercularis L., et le C. scabrellus Lmk. avec ses nombreuses variétés; ce sont là des formes dont les affinités sont évidentes ; elles sont représentées dans le Pliocène et le Quaternaire méditerranéens avec une abondance extraordinaire : mais à cause de leur très grand polymorphisme, il est nécessaire d'en pousser l'étude jusque dans les détails, si on veut pouvoir s’en servir comme d'indicateurs stratigraphiques. Chlamys opercularis L. — Comme on le sait, cette forme, abon- dante dans les mers européennes actuelles, est aussi extrêmement répandue dans le Pliocène et le Quaternaire méditerranéens. Cela tient, en partie, à l'étendue de son habitat en profondeur, lequel va des rivages jusqu'à plus de 1.000 mètres; mais, dans l’ensemble, elle reste confinée dans une zone plus profonde que le P. jacobæus; très rare dans les formations littorales, elle domine au contraire dans les sables fins ou les argiles des zones plus profondes. ! Les sables du Pentimele sont, dans la carte géologique au 1/100:000, relevée pat M. Cortese, attribués en bloc au Quaternaire supérieur, ? Sous-genre Æquipecten Saceo. PECTINIDÉS 369 Malheureusement, cette espèce si fréquente est d’un intérêt abso- lument nul en stratigraphie. On sait qu'a l’époque actuelle on peut y distinguér un certain nombre de variétés, dont quelques-unes seraient méditerranéennes, d’autres atlantiques. Elle est au moins aussi variable à l’état fossile; mais, après avoir examiné de nombreux matériaux, je me suis convaincu que l'étude de ces variétés ne permettait d'arriver à aucune conclusion tant soit peu ferme et intéressante; toutes se rencontrent à peu près à tous les niveaux et avec toutes les formes de passage. _ Chlamys scabrellus Lmk. — Le C. scabrellus type, est une grande coquille aplatie, à côtes arrondies, essentiellement caracté- ristique du Pliocène ancien ; elle s'oppose au C. opercularis par un certain nombre de caractères que nous sommes habitués à rencon- trer dans les formes littorales : test plus épais, ornementation plus accusée, côtes moins fines et moins nombreuses. Et en effet, elle prospère dans des dépôts plus littoraux, ou plutôt à facies plus grossier. Comme d’autre part on rencontre beaucoup de formes de passage entre ces deux espèces, il est naturel de considérer que le C. scabrellus dérive, par adaptation littorale, du même type ancestral que le C. opercularis (cf. Sacco [13]). Quoi qu'il en soit, il est certain que le C. scabrellus (type) est assez éloigné et nettement distinct du C. opercularis, pour constituer une excellente espèce très facile à reconnaître. La variabilité du C. scabrellus peut aussi se manifester dans une direction toute différente et nous conduire ainsi à une forme remarquable, la variété bollenensis (Mayer sp.). Je n’ai pas à insister sur les caractères de cette forme bien connue (voir par exemple Fontannes et Sacco) ; je rappellerai seulement qu’elle se montre constamment associée au C. scabrellus type, et avec tous les intermédiaires : il est donc peu rationnel d’y voir une espèce distincte, Mais ce qu'il y a d’intéressant pour nous, c’est qu'il existe dans la Méditerranée une forme vivante, assez rare, qui est avec le C. opercularis la seule survivante de ce groupe, et qui est impossi- ble à séparer spécifiquement du C. bollenensis. C'est l'espèce Univ. pe Lyon. — Gicnoux. 24 370 LAMELLIBRANCHES actuellement connue sous le nom de GC. commutatus Montlero- sato — Pecten Philipp Recluz nor Michelotti = P. gibbus Phi- lippi non L. — P. scabrellus var. Philippu Recluz in de Ste- fani — P. solidulus Monterosato, olim, non Reeve!.: J'ai comparé des exemplaires? provenant du Quaternaire supérieur et. indubitablement identiques à la forme vivante, avec des lots de C. bol- lenensis du Pliocène ancien : il n’ÿ a aucun doute que le type actuel ne soit représenté dès le Pliocène ancien. Mais si l’on fait intervenir un nombre suffisant d'échantillons, des différences d'ensemble apparaissent immédiatement. Le C. commutalus du Quaternaire et des mers actuelles est plus petit, à oreillettes moins développées, à côtes plus carrées et plus rapprochées, à valve gauche plus convexe et même gibbeuse ; les exem- plaires à striation longitudinale sont plus rares; il y a en somme une exagération des caractères par lesquels le C. bollenensis se différencie du cles Aussi je crois qu’il sera plus commode et plus instructif de conserver le nom de C. hollenensis pour la forme pliocène associée au C. scabrellus, et celui de C. bollenensis mutation commutata pour la mutation qui seule subsiste au Quaternaire et dans les mers actuelles. On voit done combien il est délicat d'utiliser en stratigraphie le C. bollenensis : seules certaines formes, de plus grande taille, à oreillettes plus grandes, à côtes plus rondes, peuvent être retenues comme caractéristiques du Pliocène ancien; mais inversement, aucune forme ne peut être considérée comme caractéristique du Quaternaire, puisque toutes se rencontrent dès la base du Pliocène. Après avoir ainsi précisé brièvement les diverses formes de ce groupe, il me reste à en indiquer la répartition stratigraphique. Dans le Pliocène ancien classique (vallée du Rhône, Italie, etc.), toutes ces formes se rencontrent : le C. opercularis avec toutes ses variétés de passage au C. scabrellus, cette dernière espèce avec les termes de passage au C. bollenensis qui y est lui-même typique et abondant, mais dont certains échantillons sont déjà impossibles à distinguer de la mutation vivante. | ! On trouvera dans Locarp ([160o] L. 11, p. 383) les principales références biblio- graphiques ; d’ailleurs la synonymie donnée par cet auteur est en grande partie inexacte, Car, comme a bien voulu me le confirmer M. Dautzenberg, on a long- temps confondu à tort ce C. commutalus, forme méditerranéenne, avec des Peignes tout différents, inconnus dans la Méditerranée : P. solidulus Reeve, de l’Atlan- tique africain, — P. flabellum Gmel., de la même région (voir G.-F. DoLLrus [122], p. 62). — P. gibbus L., de l'Amérique. 2 Figurés ici. : PECTINIDÉS 371 Dans le Calabrien, le C. scabrellus type devient déja {rès rare : dans l'Italie du Sud, c’est à peine si je puis lui rapporter quelques fragments de valves, recueillis à Monte Corvo et au Monte di Pentimele (Reggio); par contre, dans ces deux gisements, un caractère pliocène très net est fourni par la présence du C. bollenensis, encore abondant et représenté par des types nettement différents de la mutation commulala; au Monte Mario !, je ne connais le C. scabrellus que par ce qu’en dit M. Cerulli- Irelli [32]; cet auteur l’y signale comme rare, et les spécimens qu'il figure paraissent s'éloigner du C. scabrellus type, pour se rapprocher du C. opercularis (en particulier le nombre des côtes a une tendance à augmenter). Enfin, dès le début du Qualernatre et jusque dans les mers actuelles, le C. opercularis et la mutation commutala du C. hollenensis restent les seuls représentants de ce groupe. Le premier est très abondant dans les formations argileuses de mer profonde du Sicilien (Ficarazzi, Rosarno) ; le second est surtout bien représenté dans les formations plus littorales : panchines quaternaires du Marchesato, couches à Strombes de Tarente et Ravagnese; cela est d’ailleurs d'accord avec son habitat actuel, puisque Weinkauff dit l'avoir rencontré à Alger par des fonds de 8 à 12 mètres En somme, les indications stratigraphiques que ce groupe est susceptible de fournir peuvent être résumées de la manière suivante: dès que l’on trouve une forme qui ne peut rentrer dans le cadre de la mutation commutata du C. bollenensis, on doit la considérer comme caractéristique du Pliocène ; de plus, l'abondance du C. sca- brellus type est un indice de Pliocène ancien. Au point de vue phylogénique, on pourrait être tenté au premier abord de considérer la série C. opercularis, C. scabrellus, C. bollenensis, C. commulatus comme représentant une série évolutive réelle, puisqu'on trouve tous les termes de passage, Mais en fait, ces formes se ren- contrent déjà toutes dès le Pliocène ancien. Aussi il me parait plus naturel de chercher l’origine du groupe dans les formes de petite taille du C. opercularis (par exemple les variétés elongala, plioparvula, etc., figurées par Sacco), qui présentent des caractères mixtes et juvéniles, et qu’on est souvent embarrassé pour 1 À Vallebiaja, je n'ai rencontré ni le C. scabrellus, ni le C. bollenensis, mais seu- lement une autre forme disparue, paraissant au premier abord voisine du scabrel- lus, mais que j'ai préféré rattacher au C. inæquicoslalis, appartenant au groupe des Flexopectens, étudié plus loin. 372 ‘ LAMELLIBRANCHES répartir entre les quatre types ci-dessus nommés. De ces formes ances- trales dériveraient, par des phylums indépendants, tous les types étudiés, dont deux seulement auraient persisté jusqu’à nos jours. Chlamys spinosovatus Sacco. — On trouve enfin dans les faunes pliocènes anciennes une autre série d’Æquipectens ; ce sont les C. spinosovatus Sacco, C. Bicknelli Sacco, et C. Angelonü Meneghini in Sacco : ces formes, voisines entre elles, se rapprochent par certains caractères des Chlamys s. str.; elles sont toutes jusqu’à présent spéciales au Pliocène ancien, et paraissent d’ailleurs assez rares. Et je n'en parle ici que parce que j'ai récolté moi-même dans les mollasses calcaires de Valsavoja (au Sud de Catane) une forme tout à fait identique au C. spinosovatus décrit et figuré par M. Sacco ; la présence de cette espèce donne un caractère très net de « Pliocé- nicité » à ce gisement qu'on a parfois considéré comme quater- naire. D'après M. Sacco, il faudrait en outre identifier au C. Angeloni un Pecten Sequenzai de Gregorio cité par M. de Gregorio (Nuove Con- chiglie postplioceniche, Naturalista siciliano, 1883) dans le Postpliocène (?) des environs de Palerme. 20 Groupe du Chlamys pes-felis L.!-. Ce groupe se réduit à une seule espèce bien isolée, le G. pes- felis L. devenu rare partout dans la Méditerranée : Weinkauff le signale comme vivant probablement à des profondeurs relati- vement considérables ; Aradas et Benoit [5] l’indiquent comme rare partout sur les côtes de Sicile. Et dans l'Atlantique, elle est venue se réfugier dans les faunes insulaires (Madère, Canaries). Au Pliocène, le C. pes-felis paraît avoir été plus répandu et il pré- sente quelques variations intéressantes. Les exemplaires dela base du Pliocène, dans les facies marneux, sont plus petits, à coquille plus mince, à côtes plus effacées : c'est la variété ligustica Sacco, que j'ai retrouvée par exemple à S. Giuseppe di Valanidi. Ceux des facies calcaires ou sableux sont de plus grande taille, à ornemen- tation plus grossière (ex. à Gallina). 1 Sous-genre Manupecten Monterosato. PECTINIDÉS 373 Dans le Quaternaire, le C. pes-felis semble acquérir son maximum de prospérité. Je l'ai trouvé en très grande abondance dans les pan- chine quaternaires du Marchesato (Capo Castelle, Capo Colonne); le Musée de Géologie de Pise en contient qui proviennent des pan- chine quaternaires de Livourne ; la panchina de Givita-Vecchia en a fourni des exemplaires au Musée de Rome. M. Depéret à signalé dans le Quaternaire de Nice l'abondance du C. pes-felis représenté par une variété de très grande taille: une forme identique existe dans le Sicilien de Palerme (Musée de Palerme). Il y a donc là une variété de grande taille propre à l’époque sicilienne, où l'espèce atteindrait ainsi son apogée ; dans les couches à Strombes, en effet, elle n'est représentée que par une forme de plus petite taille et moins fréquente. Mais, malgré tout, cette espèce ne peut constituer à pro- prement parler un fossile caractéristique. 3° Groupe du Ghlamys varius L.' Ce groupe ne présente guère d'intérêt au point de vue stratigra- phique. Dans tout le Pliocène et jusqu’à l’époque actuelle, il est représenté par deux espèces qui abondent partout et ne peuvent donner la moindre indication stratigraphique, le G. varius L. et le GC. multistriatus Poli. Au point de vue des profondeurs, il suffit de se rappeler leur habitat actuel (o à 250 mètres pour le varius, 10 à 250 mètres pour le mulli- sérialus) pour voir que ces espèces doivent être très répandues dans les divers facies, surtout sur les fonds sableux. Ce sont donc encore là des fossiles très abondants et malheureusement très peu instructifs. Mais je dois dire quelques mots d’une autre forme de ce groupe, le G. islandicus Müller; c’est une grande coquille des mers du Nord, également représentée à l’état fossile dans les Crags anglais et belge par des exemplaires en général étiquetés comme Pecten striatus Sowerby. Elle passe généralement pour être absente, à l'état vivant ou fossile, dans la Méditerranée. Pourtant Marion dit l'avoir draguée au large de Marseille ; de plus elle a été citée (voir plus haut, p. 76) par G. Seguenza dans le « Post- LU ! Sous-genre Chlamys s. str, 374 LAMELLIBRANCHES pliocène » (probablement calabrien) du Détroit de Messine ; mais elle ne figure pas dans la dernière liste des formes septentrionales du Sicilien de Palerme, dressée par M. di Monterosato [114]. Or il existe dans les collections de l'Université de Lyon un bel exemplaire de C. islandicus avec l'indication de provenance du Monte Pellegrino. En outre elle est citée par MM. Pruvot et Robert [196] dans le gisement sous-marin du Cap Creus, d'âge probablement sicilien. Il est donc certain que cette forme a réellement vécu dans la Méditerranée sicilienne, tout en y étant assez rare pour avoir échappé à la plupart des recherches. Si le fait se confirmait, on aurait là une espèce bien caractéristique à ajouter à la liste des émigrés du Nord de la faune sicilienne ; enfin, si on accepte la détermination de Marion, cette espèce subsisterait encore dans la Méditerranée : ce serait un émigré du Nord attardé, comme nous en avons d’autres exemples. Je signalerai encore dans ce groupe le G. Bruei Payraudeau, forme vivante, connue dès la base du Pliocène, mais toujours trop rare pour qu'on puisse se faire une idée exacte de ses mutations. J'ai rencontré cette intéressante espèce dans les marnes jaunes à Foraminifères du Pliocène ancien de Milazzo et dans les graviers cale- briens du gisement de Monte Corvo : sa présence ici est importante à noter, car elle nous montre que ce gisement appartient à une zone pro- fonde; en effet le C. Bruei ne paraît pas remonter actuellement au-dessus de 200 mètres et se tient d'habitude à des profondeurs beau- coup plus considérables. Mes exemplaires sont absolument conformes à la description détaillée et à la figuration excellente qu'en donne Locard ([16o] t. IL, pl. XVIL, fig. 1-4) auquel J'emprunte les renseignements qui précèdent. Enfin, c’est dans ce même groupe que viendraient se placer les Peignes fixés et déformés, souvent réunis dans le genre Hinnites : pour l'interprétation de ces formes, je me contenterai de renvoyer à l'excellent exposé de MM. Bucquoy, Dautzenberg et Dollfus [2357]. _ D'après ces auteurs, il semble bien certain que les Hinnites ont actuellement disparu de la Méditerranée. Ils y étaient, par contre, abondants au Pliocène ancien dans la plupart des gisements clas- siques : je n’en connais d’ailleurs pas de citations dans les faunes plus récentes. J PECTINIDÉS 375 Aussi est-il très intéressant de signaler que j'ai récollé moi-même, dans le gisement de Gallina (Est) à faune nettement calabrienne (Ssguenza y a pris le type de son Saharien inférieur), des valves gigantesques identiques à l’H. ercolanianus Cocconi, espèce bien connue dans le Pliocène ancien et actuellement éteinte. Comme nous l'avons vu pour les Flabellipecten, c'est encore là un fait qui nous montre bien la liaison intime entre les faunes du Pliocène inférieur et du Calabrien (Postpliocène inférieur des auteurs) : le genre Hinnites est done caractéristique du Pliocène méditerranéen dans son ensemble. 4 Groupe du Ghlamys latissimus Br. Le G. latissimus est une espèce des plus répandues et des plus caractéristiques dans le Pliocène ancien, tout au moins dans l'inter- prétation que j'ai donnée à cet étage. Elle existe, en effet, et je l'ai moi-même rencontrée, dans le gisement de Gallina (Ouest), dont M. de Stefani fait du « Postpliocène », mais que, à l'exemple de Seguenza, j ai attribué au Pliocène ancien, en raison du grand nombre d'espèces disparues qu'il renferme. Ce C. latissimus est d’ailleurs inconnu au Monte Mario et à Vallebiaja: j'en ai récolté une valve douteuse dans les sables du Monte di Pentimele, près Reggio, _mais Je crois quil s'agit encore là de Pliocène ancien. En raison de sa fréquence, cette espèce est donc très intéressante en ce qu'elle nous fournira un critérium pratique dont on peut user souvent pour distinguer le Pliocène inférieur du Calabrien. Mais je rangerai encore dans ce groupe une autre forme extré- mement curieuse, qui n estencore connue, dans le Pliocène supérieur, que par un seul exemplaire récolté au Monte Mario, et soigneuse- ment décrit et figuré par M. Cerulli-Irelli ([32}, t. XI, pl. XXII, fig. 9) sous le nom de Ghlamys {Lyropecten) Melii Ugolin — Pecten Ponzii Meli?. Pour ce qui concerne la synonymie de cette espèce, je me contente de renvoyer à cet auteur. Ce C. Mel ne serait connu, en dehors du Monte Mario, que dans le Miocène de la Sardaigne et dans le Miocène (ou ! Sous-genre Macrochlamys Sacco. > Cf. R. Meli [174]. 376 LAMELLIBRANCHES Pliocène) des environs de Civita-Vecchia. L'exemplaire du Monte Mario !, tordu et déformé, est d’ailleurs assez différent des autres types de l’espèce : M. Cerulli-Irelli attribue ces particularités à une anomalie accidentelle ayant gêné la croissance. L'interprétation de cette forme reste, comme on le voit, assez délicate, mais, en tout cas, c’est là sûrement une coquille tout à fait disparue de nos mers ; elle présente seulement des affinités, d’ail- leurs assez lointaines, avec des Chlamys exotiques du groupe Lyropecten. 5e Groupe du Ghlamys glaber L.? On peut réunir dans ce groupe quatre espèces voisines, reliées les unes aux autres par de multiples formes de passage, ce sont : G. glaber L., G. proteus Solander, G. flexuosus Poli, espèces méditerranéennes vivantes, bien connues d’après les travaux de Locard [160], et surtout de MM. Bucquoy, Dollfus et Dautzen- berg [237], qui en ont bien fixé la nomenclature, et GC. inæquicostalis Lmk., espèce fossile récemment précisée par M. Sacco [13]. Le polymorphisme observé dans des séries recueillies dans le même facies, dans la même localité, nous montre qu'il s’agit là d’un groupe en évolution active, à tendances multiples et à espèces non encore bien caractérisées. Leur étude serait d’autant plus intéressante que cette évo- lution se passe tout entière dans le cadre, en somme restreint, de notre Méditerranée#. Mais on aurait à soulever trop de problèmes de nomen- clature pour que nous puissions l’aborder ici. Je me contenterai d'indiquer les conclusions suivantes, suggérées par l'étude de mes matériaux et les indications des auteurs : 1 Dont les collections du Lab. de Géol. de l'Université de Lyon possédent un bon moulage. ? Sous-genre Flexopeclen Sacco, pars. 3 Voir aussi Locard : Contrib. faune malacol. française, XI, Monog. genre Pecten (Lyon, 1888). 4 A l’état fossile, ce groupe est confiné en effet dans le Pliocène et le Quaternaire méditerranéens. On connaît quelques citations d'espèces vivantes dans l'Atlantique (G. glaber au Portugal, GC. flezuosus au Portugal et à Madére), mais elles y sont toujours rares et localisées dans: les régions tributaires de la Méditerranée. PECTINIDÉS 377 10 À l’état fossile, dans les formations tant soit peu profondes, spécialement dans le Pliocène, la délimitation des diverses espèces devient encore plus difficile que pour les formes actuelles. Et il semble bien que les formes ancestrales du groupe doivent être recherchées dans des coquilles de petite taille, à caractères mixtes, à test mince, à côtes faiblement indiquées!. 2° Ainsi le G. glaber L. paraît, tout au moins, assez rare dans les formations antérieures au Quaternaire. Au Pliocène, 1l est inconnu en France et en Algérie; en Italie, il est représenté en général par des formes à caractères ancestraux *?. Par contre, dans le Quaternaire, et spécialement dans les dépôts un peu littoraux, il est extrêmement abondant, et à caractères très constants. Partout (Languedoc, (Corse, Pouilles, Marchesato, Tarente, etc.) il est représenté par des formes de grande taille, à test solide, à profil gibbeux très caractéristique’. Ces types sont certainement les mieux définis de tout le groupe étudié ici; et ils nous fournissent un exemple intéressant de forme purement médi- terranéenne, constituée à une époque relativement récente par une évolution sur place, due probablement à une adaptation littorale. 3° Le G. inæquicostalis Lmk. paraît spécial au Pliocène ancien, où on lerencontre d’ailleurs en compagnie de formes de passage avec les variétés signalées plus haut du C. glaber. J'ai d’alleurs rencontré dans le Calabrien des collines livour- naises (Vallebiaja, Casa Poponaja près Fauglia, Vallino del Merlo) une forme que j'ai rattachée, tout ‘au moins provisoirement, au C. inæquicostalis : elle est remarquable par son test solide, sa ten- dance à la forme pyxoïde et les lamelles concentriques squamu- leuses qui s'étendent entre les côtes : ce dernier caractère la 1 J'ai observé en particulier dans le Quaternaire du Tavoliere di Puglia des formes de ce groupe à test presque hyalin et à côtes à peine indiquées. >? La forme la plus répandue à cette époque paraît être, par exemple, celle figurée par M. Cerulli-Irelli [32], pl. IV, fig. 7. ÿ Ces caractères s’exagèrent encore dans la var. liburnica (Stosse, Journal de Conchyl. XLVIIT, n° 3, p. 188), sur laquelle M. L. Joleaud Bull. de la Soc. Lin- néenne de Provence, 1910, p. 70) a récemment attiré l'attention. Cette variété, actuellement répandue surtout dans l'Adriatique, représente la forme extrême d'une adaptation aux facies très littoraux et sublagunaires. De telles formes solides et gibbeuses sont très abondantes dans les stations préhistoriques et historiques de la Méditerranée : au cas signalé par M. Joleaud {loc. cit.) je pourrais en ajouter beau- coup d’autres (Coll. Lab. Géol. Lyon); je les ai recueillies également dans les stations grecques de Tarente, 318 LAMELLIBRANCHES rapproche de la var. squamulosella Sacco, mais certains exemplaires ont toutes leurs côtes parfaitement égales. __ En tout cas cette forme (figurée ici) est bien éfeinte actuellement, et à ce titre 1l est intéressant de signaler sa présence dans le Calabrien. 6° Groupe du Ghlamys tigrinus Müller‘. « Cette espèce est très abondante, tant vivante que fossile, dans les mers du Nord, et je n’ai point les matériaux nécessaires pour l’étudier. Je me borne donc à attirer l'attention sur sa présence dans le Sicilien de Palerme, à Ficarazzi, où elle est d’ailleurs très rare, et avait été signalée par M. di Monterosato [114]. L'échantillon figuré ici et que je dois à l’obligeance de notre savant confrère de Palerme, appartient à une variété lisse analogue à celles figurées, par exemple, par Sowerby? et par Wood; M. di Monterosato en fait (in sched.) une variété frigida. Mais il ne me paraît pas douteux qu'elle ne rentre bien dans le cadre de l’espèce vivante, très polymorphe comme on sait. A l’état fossile, je ne connais cette forme dans la Méditerranée que d’âprès les figures et les citations de Sacco [13] et d'Almera et Bofill |2]; encore n'est-il point sûr qu’elle n'ait pas été confondue avec d’autres espèces. Elle est donc à peu près étrangère aux faunes méditerranéennes antérieures au Sicilien. Comme elle n’a jamais été signalée dans le Quaternaire récent, ni dans la Médi- terranée actuelle, on peut la tenir pour une des formes septentrionales les plus caractéristiques du Sicilien. ; 70 Groupe du Ghlamys clavatus Poli.i Je réunirai dans ce groupe les deux espèces actuelles bien clas- siques GC. clavatus Poli de la Méditerranée et G. septemradiatus Müll., des mers du Nord. Comme trait caractéristique de ce groupe, on peut noter en particulier la très petite taille des oreillettes. 1 Sous-genre Flexopecten Sacco, pars. ? Min. Conch., tab. DXLI, fig. r, Pecten obsoletus. 3 The Crag Mollusca {Paleont. Soc. 1850), tab. V, fig. 22. 4 Sous-genre Peplum B. D. D, Pour le sous-genre Platipecten Monterosato, voir par exemple Crema [240]. PECTINIDÉS 379 Nous ne pouvons en faire ici la revision complète et je me bornerai à apprécier les formes qu'on rencontre dans le Pliocène supérieur et le Quaternaire. Dans l'Italie du Sud, en particulier, ces faunes récentes renferment en effet, avec une abondance extraordinaire, des coquilles évidem - ment voisines du C. septemradiatus Müll. — Pecten peslutræ L. : c’est sous ce nom qu'elles étaient citées par tous les anciens auteurs, qui y voyaient dès lors des formes à affinités septentrionales. Depuis, M. di Monterosato a proposé de les considérer comme appartenant à une espèce spéciale éfeinte, le C. subclavatus Cantraine, opinion adoptée par la majorité des paléontologistes italiens. Enfin, récemment, M. Crema en a séparé encore une autre espèce, qui serait également éfeinte, le C. Estheris Crema. C'est cet ensemble de formes que nous allons examiner. Je prendrai comme point de départ la forme qu’on rencontre à Ficarazzi, car c'est elle précisément qui a été appelée par M. di Monterosato P. subclavatus. Elle était autrefois déterminée par M. di Monterosato lui-même, comme P. seplemradialus ; mais dans une étude récente, cet auteur! a montré que, à son avis, cette forme différait de l'espèce atlantique : il a donc repris pour elle le nom de P. subclavatus donné en 1835 par Cantraine ? à un fossile très abondant dans les graviers pliocènes supé- rieurs de la province de Messine. D’après MM. di Monterosato, Scalia [204], Crema [240|, le P. subclavalus s’opposerait au ?. seplemradiatus par ses côtes principales plus saïllantes et ses stries longitudinales mieux marquées 5. Ayant pu comparer des échantillons recueillis à Ficarazzi avec les nombreux C. septemradialus vivants de la collection Dautzenberg, il m'a paru, ainsi qu'à M. Dautzenberg, bien difficile de voir là deux espèces distinctes : car l'espèce vivante est très polymorphe, spécialement au point de vue de la costulation. En tout cas, et c'est là le point de vue qui nous intéresse, le C. subclavatus de Cantraine et des auteurs italiens n’est pas une forme ! Revision de quelques Pectens des mers d'Europe {Journal de Conchyliologie, 1899, n° 3). ? Diagnose de quelques espèces nouvelles de Mollusques (Bull. de l'Acad. royale des Sciences de Bruxelles, II, p. 396). * Voir surtout GC. Crema {240}, où l'on trouvera une soigneuse synonymie. 380 LAMELLIBRANCHES éteinte : c'est tout au plus une variété du C. seplemradiatus vivant. D'ailleurs en étudiant d’autres gisements que celui de Ficarazzi, nous allons pouvoir mettre en évidence le polymorphisme de L'Esnèee qu'on y rencontre. Pour lever tous les doute) à cet égard, J'ai fait figurer ici une série de ces formes : J'ai pris comme point de départ un exemplaire de C. seplemradialus vivant, provenant des côtes d'Angleterre (fig. 1 et 1° ) : il représente pré- cisément la forme considérée par M. di Monterosato comme type de _ l'espèce. Cette forme paraît manquer en effet à Ficarazzi, mais il est facile de récolter ailleurs (par exemple dans le Sicilien de Rosarno ou dans celui de Gallipoli) des échantillons fossiles absolument identiques (fig. 2 et 2). Ainsi le C. seplemradiatus, même compris dans ce sens étroit, existe à l’état fossile dans le Pliocène supérieur et le Quaternaire de l'Italie du Sud. Maintenant, à partir de cette forme, nous allons voir la costulation s'accentuer par une série de passages insensibles, et la forme figurée fig. 3 et 3°, qui représente le C. subclavatus de Ficarazzi, nous apparaîtra comme bien liée intimement à la forme vivante des fig. 1 et 1* * ; il est intéressant, néanmoins, de la distinguer, car elle correspond au type le plus généralement répandu à l’état fossile; on peut l'appeler C. sep- temradiatus var. subclavata Cantr. sp. A partir de cette dernière variété, continuons maintenant à suivre notre série de formes. Tout d’abord on peut assister à un développement progressif de l'orne- mentation, par la continuation du processus qui nous a fait passer du C. seplemradiatus type au C. subclavatus. Dans certains cas, les costules longitudinales se développent seules, les côtes principales restant peu marquées et la forme générale de la coquille le plus souvent aplatie : c'est, autant qu'on en peut juger sans figures, la var. planala Monte- rosato. Plus souvent encore, les côtes principales s’accentuent en même temps que les costules : il se développe des lamelles concentriques squameuses qui, en passant sur les costules, leur donnent un aspect imbriqué. Ces variélés à lesl épais el rugueux (voir les fig. 4, 5, 52) me paraissent se rapprocher de la variété figurée par Crema ([240|, fig. 2), et que je proposerai d'appeler var. Cremai. On voit que ces formes sont tellement éloignées du GC. septemradiatus type qu'on serait tenté de voir là deux espèces distinctes, ce qui devient impossible après l'examen d’un ! Et, dans la plupart des gisements, on peut récolter, avec le C. septemradiatus type, toute la série des formes de passage au C. subclavatus type, PECTINIDÉS 381 nombre suffisant de gisements et d'échantillons : partout les termes de passage abondent. Ces variétés à sculpture bien accusée et à test solide sont d'ailleurs, comme toujours, surtout développées dans les facies sableux grossiers (graviers de Gallina, sables de Terreti). Mais il importe de faire remarquer que ces variations ne pré- sentent aucun intérêt stratigraphique : toute cette série de formes se rencontre déjà dans le Pliocène ancien, et encore dans le Calabrien. Et si, au Sicilien, les variétés à forte costulation sont rares, cela tient probablement à ce que nous ne connaissons pas, pour cet étage, le facies de graviers grossiers, mais profonds, favo- rable à leur développement. Le polymorphisme de ce groupe ne se manifeste pas que dans l'ornementation. Il peut atteindre aussi d'autres caractères plus importants, comme la convexité des valves et la forme des côtes prin- cipales. Et c’est ainsi que les limites du C. septemradiatus et du C. clavatus arrivent, quand on peut examiner un grand nombre d'échantillons, à devenir tout à fait imprécises!. On sait en effet que les caractères distinctifs de cette dernière espèce par rapport au C. seplemradialus sont : valve droite plate, valve gauche plus concave (avec tendance à la forme « pyxoïde »), côtes plus saillantes et mieux limitées, analogues à celles des Flexopectens; de plus la striation radiale n'apparaît en général que près du bord ventral, et, même dans les variétés complètement striées (var. Dumasi Payraudeau), l’ornementation est en général différente près de ce bord ventral, qui présente toujours une tendance à s’infléchir et à s’épaissir. Or le passage du C. septemradiatus au C, clavatus peut s’observer soit dans les formes striées, soit dans les formes à côtes principales lisses. 1° Dans les formes striées, on part des variétés planala et Cremat du C. septemradialus pour aboutir à la var. Dumasi du C. clavatus. Les figures 5 et 5° représentent de tels termes de passage : la valve droite a déjà un peu la tendance pyxoïde, la forme concave, et les côtes bien saillantes du C. clavalus; la valve gauche a bien l’ornementation de 1 À une pareille conclusion était déjà arrivé de Franchis [70], p. 40. 382 LAMELLIBRANCHES la var. Dumasi, mais la forme encore un peu concave est plutôt celle du C. septemradiatus. Le C. Estheris Crema est aussi, ainsi qu'il résulte implicitement des descriptions et des figures de l’auteur, un terme de passage entre les deux formes : par sa valve gauche plate il se rattache au C. clavalus, mais par l’ensemble de son ornementation il appartient aux variétés fortement striées du C. septemradiatus : il ne m'apparaît guère possible de le conserver à titre d'espèce distincte. Enfin les figures 6* et 7? montrent encore deux valves droites de ces formes de pas- sage : dans la figure 6°, l'ornementation est bien celle du C. clavatus, mais la valve est encore concave; la valve de la figure 7° est au contraire tout à fait plate et identique au C. Estheris figuré par Crema. La figure 8° qui représente une valve droite de C. clavatus var. Dumast typique, est destinée à servir de point de comparaison. Pour ne pas aug- menter la nomenclature, j'appliquerai le nom de C. septemradialus var. Estheris Crema sp., à ces formes striées faisant passage entre les variétés striées (var. Cremai) du C. septemradiatus et du C. clavatus (var. Dumasi). 2° Pour les formes lisses, les passages les plus nets s’observent dans les argiles pliocènes, et surtout dans les formes de petite taille. Dans le Plaisancien du Modenais, par exemple, j'ai reconnu l’existence de nom- breuses petites formes presque entièrement lisses, impossibles à répartir entre les C. septemradiatus et clavalus, et associées en même temps à la var. suhclavata. Parmi les formes de grande taille, la plus fréquente, figurée par Sacco ([13], fase. XXIV, pl. XII, fig. 18, 19) sous le nom de P. septemradiatus var. triradiata Müll., est encore intermédiaire entre les deux espèces. Les figures 13, 18, 19, 20, 21 de cet auteur loc. cit.) se rapportent encore à des formes peu striées, également intermédiaires; et l'on peut adopter pour ces termes de passage le nom de C. seplemradialus var. miopliocenica Sacco. Formes strices var. Dumasi var, Estheris var, Cremai var, subclavala Formes lisses type var. miopliocenica type G. clavatus CG. septemradiatus L'étude de la répartition stratigraphique de ces diverses formes n’est guère instructive, car toutes se rencontrent, plus ou moins PECTINIDÉS 383 fréquentes, depuis la base du Pliocène jusqu'à l'époque actuelle. Toutefois, dans le Plaisancien marneux, le C. seplemradiatus est encore rare et la note dominante parait étre donnée par le C. clavatus et ses termes de passage au C. septemradialus. C’est surtout au Calabrien et au Sicilien que cette dernière espèce prend un déve- loppement numérique extraordinaire. Il est naturel de penser que les formes ancestrales de tout le groupe doivent être recherchées dans les types lisses à caractères intermédiaires (cf. var. mioplio- cenica); dans les divers rameaux issus de cette souche primitive, la striation se serait ensuite développée. L'influence des facies est ici nettement visible, spécialement pour le C. septemradiatus, pour lequel je dispose de matériaux plus riches. Ainsi, les formes complèlement lisses sont localisées dans les facies d'argiles plastiques : argiles bleues de Gravina, de Tarente, de la côte Sud de Sicile (Terranova), du Plaisancien de l'Italie du Nord. Les formes légèrement striées (var. subclavala) sont extrêmement développées dans les argiles sableuses de Ficarazzi, Balestrate, Rosarno, Nizzeti, Monoste- race, Gallipoli, Mileto, et dans les sables fins de Monte-Corvo, du Monte di Pentimele, etc. La var. planata est spécialement abondante dans les gres à Cyprina islandica de S Maria di Catanzaro, où tous les exem- plaires que j'ai récoltés se rapportent à cette forme. Enfin, les graviers grossiers de Terreti, Gallina, Monte-Corvo, ainsi que les mollasses calcaires de Nardd, montrent surtout des formes à ornementalion vigoureuse. Au point de vue bathymélrique, on connaît la répartition étendue du C. clavatus (de 2 à 1.200 mètres, d’après MM. Bucquoy, Dollfus et Dautzenberg); aussi, à l’état fossile, le trouve-t-on partout, depuis les argiles bleues du Plaisancien jusqu'aux « panchine » littorales du Qua- ternaire. Quant au C. seplemradialus, il reste cantonné à de plus grandes profondeurs : il est très répandu dans les dépôts coralligènes du Calabrien et du Sicilien et en particulier il a prospéré à l’époque sici- lienne à une profondeur de 80-100 mètres. Il semble tout à fait absent des formations plus littorales : ainsi on ne le connaît pas dans les couches à Strombes, pourtant si riches, de Tarente!, de Ravagnese?, de Boveto, etc. ! On l'y a parfois cité, mais par confusion avec la faune des argiles de Tarente. ? Seguenza ne cite point là son P. peslutræ L.—C. septemradiatus ; j'en ai récolté un seul fragment, probablement remanié, car l'espèce pullule dans les couches plio- cènes du voisinage, 384 LAMELLIBRANCHES Actuellement, le C. clavalus est cantonné dans la Méditerranée, où il est relativement abondant; au contraire, le C. septemradiatus, largement répandu dans l'Atlantique et les mers du Nord, est devenu extrêmement rare et reste confiné à de grandes profondeurs dans la Méditerranée, où il a été rencontré par divers auteurs!. On peut donc, en terminant, synthétiser ainsi l’histoire de ce groupe : | Au Pliocène ancien, le groupe du C. clavatus était assez pauvre- ment représenté dans la Méditerranée par les C. clavatus et septem- radiatus, avec des formes de passage; cette dernière espèce, fré- quente dans l'Italie du Sud et l'Italie Centrale, devient plus rare dans l'Italie du Nord; elle est inconnue dans la vallée du Rhône, en Algérie, en Catalogne, au Portugal. Dans le Calabrien et le Sicilien, le C. septemradiatus prend un développement numérique extraordinaire et s'accompagne partout de nombreuses variétés. Puis, après le Sicilien, cette espèce se montre en voie d'extinction dans la Méditerranée, tandis qu’elle prospère dans les mers du Nord. Sous ces réserves, on peut donc appliquer au C. septemradiatus. le qualificatif d’émigré du Nord. _ Ce groupe ne peut donc nous donner de fossile bien caracté- ristique. On peut seulement dire que l’abondance du C. septemra- diatus fournit une présomption en faveur du Pliocène supérieur ou du Quaternaire inférieur. | Aussi je ne puis comprendre pourquoi M. de Stefani a pu attribuer une telle importance à cette espèce, au point de la choisir pour dénommer une de ses zones du « Postpliocène ». On sait, en effet, qu'il a opposé [ro1] un « Postpliocène inférieur à Cyprina islan- dica » à un « Postpliocène moyen à Pecten septemradiatus ». Le C. septemradiatus n’est pas même caractéristique du Postpliocène dans son ensemble; à plus forte raison ne peut-il guère l’être d'une zone de ce Postpliocène, . 8 Groupe du Chlamys incomparabilis Risso®. Ce groupe est totalement dénué d'intérêt, car il ne comprend que 1 Voir par exemple Garus [30], t. II, p. 74; mais il a dû y avoir souvent des confusions avec le C. clavalus ; voir aussi Locard | 160]. |: 2 Sous-genre Palliolum Monterosato. AVICULIDÉS 385 des espèces qui, du Pliocène ancien, se prolongent sans modifications jusque dans la Méditerranée actuelle ; elles sont, d’ailleurs, toujours assez rares. 9o Groupe du Chlamys excisus Bronn!. Le C. excisus est une espèce très particulière et bien isolée, de grande taille, qui n’est connue que dans le Pliocène ancien; c’est donc un rameau qui s'éteint avant le Calabrien, en même temps que beaucoup d’autres formes caractéristiques. IV, — Genre Amussium. Je passerai rapidement sur ce genre, car nous n’y trouvons que des formes absolument spéciales au Pliocène ancien (A. cristatum Bronn, À. oblungum Phil. —? Pecten comitatus Fontannes) ou des espèces communes au Pliocène ancien et aux mers actuelles (A. fenestratum Forbes); ces dernières sont d’ailleurs des coquilles de très petite taille, rares et difficiles à déterminer, dont on ne peut tenir compte en stratigraphie. AVICULIDÉS Genre Pinna. L'étude de ce genre à l'état fossile est rendue extrêmement délicate par la mauvaise conservation des échantillons ; la plupart du temps, on ne peut juger ni de l’ornementation superficielle, ni de l'extension des lobes nacrés à l'intérieur des valves, caractères tous deux très importants. Les Pinna sont actuellement représentées dans la Méditerranée par trois espèces? : les P. nobilis L. et pectinata L., communes partout, très bien caractérisées et figurées par MM. Bucquoy, Dollfus et Dautzenberg |[237|, et la P. pernula Chemn., plus spéciale à la Méditerranée du Sud. A l’état fossile, il n’y a guère à y ajouter que les deux citations de P. tetragona Br. et de P. Brocchü d'Orb., toutes deux fréquentes dans le Pliocène, 1 Sous-genre Lissochlamys Sacco. > En négligeant P. ensiformis Monterosato et P. angustana Lmk., dont l'individua- lité paraît discutable. 42 ot Univ. DE Lyon. — Gicnoux 386 LAMELLIBRANCHES La P. Brocchii d'Orb. est considérée par quelques auteurs (Fontannes), je ne sais pourquoi, comme le précurseur de la P. nobulis. Elle a, au contraire, les plus grandes affinités avec la P. pectinata: M. Sacco [13] l'y rattache à titre de variété peu importante, et son opinion a été adoptée par M. Cerulli-Irelli [32] qui a rencontré cette forme au Monte Mario. L'examen de plusieurs exemplaires admirablement conservés, provenant du Pliocène du Roussillon (Coll. Lab. Géol. Lyon) me conduirait a la même conclusion. Ainsi la P. Brocchii ne peut être considérée comme une espèce éleinte. Quant à la P. tetragona Br., elle est généralement considérée comme une bonne espèce disparue et caractéristique du Pliocène. Il est pourtant difficile de se faire une idée nette de ses caractères spécifiques. Brocchi ne la figure pas, et l'unique figure donnée par Sacco [13] se rapporte à un échantillon tout à fait incomplet. M. Cerulli-Irelli la cite au Monte Mario, où elle serait connue par un seul exemplaire, mais ne la figure pas. M. di Monterosato l’a signalée autrefois [116] au Monte Pellegrino, mais il ne la garde plus dans son dernier catalogue des formes éteintes et émigrées [114]. Il est donc difficile d'attribuer une grande importance à ces citations diverses. Dans l'Italie du Sud, les Pinna sont fréquentes dans le Quaternaire. Elles sont en particulier extrêmement abondantes dans le dépôt finement sableux et littoral de Boveto. M. de Stefano [109], rencontrant à Morrocu la continuation des formations fossilifères de Boveto, y a retrouvé ces coquilles en si grande abondance, qu'il a baptisé ce gisement du nom de « strati a Pinne ». G. Seguenza [206] avait identifié cette forme des couches à Strombes avec la P. pernula Ch. vivante. M. de Stefano, au contraire, la détermine comme P. tetragona Br. et insiste sur l'intérêt particulier que présente la découverte dans ce gisement d’une forme éteinte. C’est là une question qu'il importait de trancher. Tout d’abord, qu'est-ce au juste que l'espèce de Brocchi? Est-il sûr qu’elle soit bien différente de la P. nobilis, laquelle, par contre, n’est que rarement citée à l’état fossile? Et surtout, ici en particulier, rien dans les exemplaires qué j'ai recueillis à Boveto ne m'engage à voir en eux une forme éteinte. Ils ne m'ont paru se différencier en rien de la P. nobilis vivante avec laquelle je les ai comparés directement. Il est possible que des échantillons particulièrement bien conservés aient permis à Seguenza une identification avec la P. pernula Ch., dont je n’ai pu me procurer d'exemplaires vivants et qui est d’ailleurs assez voisine de la P. nobilis. En tout cas, et c'est pour nous l'essentiel, la Pinna des couches à AVICULIDÉS 387 Strombes de Reggio ne peut être considérée comme une espèce différente des types méditerranéens actuels. La même chose peut se répéter pour les couches à Strombes de Tarente, où l'on peut récolter en grande abondance des Pinna exactement: pareilles à celles de Boveto M. de Angelis [226] les cite sous le nom de P. squamosa Lmk., syno- nyme de P. nobulis L.; cette même P. nohilis est encore citée par le général de Lamothe [155] dans les couches à Strombes de Monastir. En résumé donc, autant qu on peut en juger pour des coquilles fossiles s1 difficiles à récolter en bon état, la faune de Pinna parait n'avoir pas sensiblement varié dans la Méditerranée depuis le Pliocène ancien jusqu'à nos Jours, et n'est susceptible de fournir aucune indication stratigraphique. Genre Avicula. Ce genre étant très mal connu à l’état fossile, je me bornerai à rappeler que M. di Monterosato [114] a considéré comme une espèce éteinte une Avicule de Ficarazzi au sujet de laquelle il s'exprime ainsi : «€ Avwicula sp. : — l'épaisseur des fragments ren- contrés montre qu’elle appartient à une espèce différente de l'A. tarentina. » C'est cette forme qui a été désignée par M. de Gre- gorio { Naturalista siciliano, anno VI) sous le nom de À. hirundo L., var. ficarazellensis de Greg. M. Sacco [13] fait remarquer le grand polymorphisme de ces coquilles et conclut même au rattachement de l'espèce pliocène A. phalenacea Lmk. à l'A. hirundo vivante, à titre de variété voisine de la forme de Ficarazzi et de l'A. atlantica Brown, autre forme vivante généralement réunie à la première. Sans entrer dans les détails, je conclurai donc que l'on ne peut attribuer, jusqu'à présent, aux fragments récoltés à Ficarazzi la valeur d’une véritable espèce éteinte ou émigrée. Genre Perna. Ce genre essentiellement pliocène ancien ne pénètre pas dans les faunes que j'étudie. Aussi, il ne nous intéresse ici qu'à titre négatif, pour ainsi dire, car sa disparition de la Méditerranée con- stitue un fait important venant accentuer la distinction entre les faunes pliocènes ancienne et récente. On sait d’ailleurs que, comme 388 LAMELLIBRANCHES beaucoup d’autres formes anciennes, il subsiste encore dans l’Atlan- tique chaud, sur les côtes d'Afrique; il témoigne ainsi du caractère subtropical de la faune qui peuplait la Méditerranée au Pliocène ancien. MYTILIDÉS Genre Mytilus. Les Moules sont très rares et en général très mal conservées dans le Pliocène ; ainsi, il est remarquable que M. Cerulli-Irelli soit arrivé à la conclusion que presque toutes les Moules du groupe edulis citées au Monte Mario sont en réalité des Modioles : ce résultat, fruit d'une étude soigneuse, doit rendre sceptique pour beaucoup de citations de Mytilus fossiles. Au contraire, les Mytilus du groupe de M. edulis L. se montrent très fréquentes partout dans les dépôts de graviers grossiers du Calabrien supérieur de l'Italie du Sud (Gravitelli, Mortelle, S. Fran- cesco, Monte Corvo, Musalà, Gallina, Mileto, S. Maria di Catan- zaro, Caraffa di Catanzaro, etc.). Ils sont représentés là par des formes de grande taille, très solides, aff var. (an sp.) herculea Monterosato, dont le galbe très variable ne permet pas de décider si on a franchement la forme méditerranéenne (M. galloprovincialis Lmk.), plutôt que la forme atlantique (M. edulis type); d’ailleurs ils sont associés à des faunes relativement profondes" et s'écartent en cela des types des M. edulis et galloprovincialis actuels, qui prospèrent surtout dans les zones tout à fait littorales. Ces formes de grande taille se retrouvent dans les dépôts quaternaires à facies détritique un peu grossier (Monte Pellegrino, Mortelle et surtout Milazzo). Ainsi, étant donné la très grande rareté de ces coquilles dans le Pliocène ancien, on voit que ce groupe edulis ne s'est franchement développé dans la Méditerranée qu’au Calabrien ; et, à cette époque, la différenciation du type méditerranéen (M. gallo-provincialis), par . rapport aux types atlantiques, n'y était point encore aussi nette qu'aujourd hui. 1 Facies à Pachylasma giganteum Phil, à Gravitelli, à Chlamys Bruei Payr.à | Monte Corvo, etc. MYTILIDÉS 389 Quant aux Mylilus du groupe de M. minimus Poli, on peut penser que leur histoire a été analogue, bien que les documents paléontologiques soient ici beaucoup plus rares. Par contre, le M. afer Gmel. — A. piclus Born appartient à un groupe tout différent : son centre de développement reste encore actuel- lement dans l’Atlantique africain, car 1l ne pénètre guère dans la Médi- terranée que sur les côtes d'Algérie, et il y est relativement peu commun. A l'état fossile on ne le connaît que dans les couches à Strombes d'Algérie. Enfin, l'espèce la plus intéressante que nous ayions à mentionner ici est le Mytilus senegalensis Lmk. — M. Charpentieri Dunk!. Par les stries longitudinales qui ornent la surface extérieure de la coquille, cette espèce est facile à distinguer de toutes les autres Moules méditerranéennes, et elle appartient en effet à un groupe spécial (section Hormomya) tout à fait étranger à notre mer. Aussi est-il extrêmement intéressant de constater que M. Bédé a ren- contré cette espèce dans les couches à Strombes de Sfax?. Ce sera donc pour nous une des espèces émigrées les plus caractéristiques de cette faune à Sfrombus ; actuellement elle vit au Sénégal et dans les iles du Cap-Vert; je le figure ici. Genre Modiolaria. Ce genre est représenté dans la Méditerranée actuelle par quelques petites espèces qui sont déjà connues dans le Pliocène ancien et ne paraissent pas avoir varié depuis. Genre Crenella. Conformément à l'avis de M. di Monterosato [114], c'est au genre Crenella que je rapporterai une belle coquille bien connue dans le Sicilien de Palerme, la C. sericea Bronn; elle a été placée par beaucoup d'auteurs (Cerulli-Irelli, etc.) dans le genre Modiolaria, tandis que M. Sacco, suivi par MM. de Lamothe et ! On en trouvera la synonymie complète dans Dautzenberg [60] p. 55: voir les figures du Syst. Conch. Cabinet de Martini und Chemnitz, Band VIII, Abth.3, pl. VIII, fig. 3 (M. Charpenlieri) et pl. XI, fig. r, 2. 3 (M. senegalensis). > Cf. Pallary : Note sur la présence du Mytilus Charpentieri dans une plage sou- levée de la Tunisie (Bull. Soc, Hist. nat, de l'Afrique du Nord, 15 janvier 1910). 390 L'AMELLIBRANCHES Dautzenberg [152], en a fait une Arcoperna. Quoi qu'il en soit, cette espèce est bien caractérisée, et, malgré son grand polymorphisme, si bien mis en évidence par M. Cerulli-Irelli [32], on ne peut la con- fondre avec aucune autre coquille des faunes récentes. La C. sericea est assez généralement répandue dans le Pliocène ; elle reste encore relativement commune dans le Calabrien; nous l'y voyons citée en particulier au Monte Mario [32], à Gravina [120], à Sciacca [121], etc. Enfin, elle n'est encore point très rare dans le Sicilien de Palerme et de Livourne [3] (voir les planches). Dans la faune actuelle, le genre Crenella n’est représenté dans la Méditerranée que par quelques petites formes très rares!, qui n’ont abso- lument rien de commun avec notre espèce. Quant à la C. Dollfusi (Dautzenberg [59] p. 116, pl. IV, fig. 1, 2, 3) qui vit au Sénégal, elle se rapprocherait un peu plus de la GC. sericea, mais elle en diffère encore beaucoup par son galbe et sa taille plus petite. En résumé, la C. sericea est une forme éteinte bien caractéristique et constitue à ce titre une des espèces les plus intéressantes des faunes calabriennes et surtout siciliennes. Genre Modiola. Deux espèces seulement, de ce genre actuellement si développé, surtout dans les mers du Nord, méritent de retenir l'attention : 1° M. supralamellosa Mayer — (?) M. fragilis Monterosato. M di Monterosato a distingué sous le nom de Modiola fragilis? une coquille fossile dans le Sicilien de Palerme, où elle avait été citée antérieurement sous le nom de M. adriatica Lmk. Cette nouvelle espèce est, d’après lui, très voisine de la coquille du Monte Mario figurée par Cerulli-Irelli [32] sous le nom de M. supralamellosa Mayer. J'ai pu comparer des échantillons typiques de la forme du Monte Pelle- grino que je dois à l’obligeance de M. di Monterosato, avec la forme du Monte Mario, dont il existe dans les collections du Laboratoire de Géologie de Lyon un exemplaire bien conforme aux figures de M. Cerulli-Irelli. 1 Crenella rhombea Berkeley'in EF. et H.,C. decussata Jeffr., C. arenaria H. Martin, ? Di Monterosato [114], sans description ni figure. \ MYTILIDÉS 391 Les deux formes sont évidemment extrêmement voisines. Mais d’autre part, comparée à des échantillons vivants de M. adriatica, la M. fragulis ne paraît en différer par aucun caractère important, spécialement si l’on s'adresse à des formes vivantes allongées et de grande taille, comme la var. stranqulata Locard, ou encore la variété voisine figurée par MM. Bucquoy, Dautzenberg et Dollfus [237], pl. 28, fig. 8, 9, vo, 11. — En outre, M. Cerulli-frelli appelle l'attention sur les affinités de la M. supralamellosa du Monte Mario avec la M. vestita Phil., vivante dans la Méditerranée ; et M. Sacco signale les rapports étroits qui unissent la M. supralamellosa avec la M. Martorellu Hidalgo, également vivante dans la Méditerranée. Toutes ces observations, que je ne puis préciser faute de matériaux vivants, montrent néanmoins que cette forme peut difficilement être mise à part de la faune méditerranéenne actuelle. De sorte que n1 la A7. fragilis du Monte Pellegrino, n1la M. supra- lamellosa du Monte Mario ne méritent d'être considérées comme des formes éteintes. 2° Modiola modiolus [. — Cette espèce a été signalée pour la première fois dans l'Italie du Sud, par Philippi [190], qui en a donné une excellente figuration sous le nom de M. grandis Phil. — G. Seguenza [206] la signale dans les environs de Reggio, sous son nom linnéen. La présence de cette espèce dans la même région a été récemment rappelée par G. de Stefano ([109], p. 271). Toutes ces citations se rapportent à une même localité, le gisement célebre de Carrubbare, près Reggio (probablement calabrien), où J'ai moi- même retrouvé un fragment bien typique de cette intéressante espèce ?. G. Seguenza [07] l’a signalée dans la « zone supérieure du Pliocène récent » (probablement calabrien) de la province de Messine, sans préciser la localité. La M. modiolus a été rencontrée par M. Bellini [15] dans les for- mations récentes du golfe de Naples (calabrien ou quaternaire). ! Il ne semble pas que l'on puisse conserver la dénomination de Philippi : le seul caractère particulier de la forme de Carrubbare, figurée par cet auteur, serait la taille exceptionnelle. Mais certains exemplaires vivants (déterminés par Locard) que j'ai pu examiner dans les collections du Muséum d'Histoire naturelle de la ville de Lyon atteignent une taille tout aussi grande, > J'en ai vu d'ailleurs de très nombreux et très beaux échantillons, provenant ausside Carrubbare, dans les collections, aujourd'hui détruites, de l'Institut technique de Reggio. 392 LAMELLIBRANCHES Enfin M. Cerulli-Irelli [32] a figuré, du Monte Mario, une M. mo- diolus qui paraît bien identique au type vivant, bien que la taille soit un peu plus faible : l'espèce est d'ailleurs très rare dans ce dernier gisement. Toutes ces citations se rapportent indubitablement au Calabrien ou peut-être au Quaternaire (gisement d’Ischia cité par M. Bellim). Dans le Pliocène ancien classique de la Lombardie et du Piémont, de la vallée du Rhône, etc., on peut affirmer l'absence de toute forme de ce groupe. Foresti? a décrit et figuré dans le Pliocène de Bologne (sables marneux jaunâtres du Monte Biancano) une M. modiolus L. var. intermedia Foresti : elle s'éloigne un peu du type et de la figure de Philippi par son galbe, mais néanmoins elle appartient bien au même groupe. Mais il n’est pas certain qu'il s'agisse bien ici de Pliocène ancien typique : peut-être a-t-on affaire aux couches à Cyprina islandica (voir plus haut, p. 317). Voilà tout ce que l'on sait actuellement sur la présence de cette espèce dans les faunes méditerranéennes, car, actuellement, la M. modiolus est une espèce septentrionale des plus caractéris- tiques : elle ne descend pas au Sud de l'Angleterre et ne se rencontre déjà plus sur les côtes françaises (au moins d’après Locard). L'histoire de cette intéressante coquille, autant du moins qu'on peut l’esquisser pour le moment, se montre donc un peu analogue à celle de la Cyprina islandica. Issue évidemment d'une forme ancestrale peu éloignée de la M. adriatica, elle a eu pour centre de développement les mers du Nord. Dans le Pliocène ancien, sa pré- sence dans la Méditerranée est tout à fait douteuse, et en tout cas limitée à l'Italie centrale. Au Calabrien, l'introduction de cette forme atlantique a eu son maximum d'importance avec les grandes coquilles de Carrubbare. Puis elle redevient confinée dans les mers du Nord. Tout nous porte donc à voir en elle une véritable forme immigrée et non méditerranéenne autochtone. 1 Parmi les espèces figurées par M. Sacco, la seule qui s'en rapprocherait par sa grande taille est la M. mytiloïdes Br. ; mais par son crochet terminal ou subter- minal, cette espèce se rattache au groupe de la M. barbata L., espèce vivante médi- terranéenne sans intérêt pour nous. ? Foresti : Cataloso dei Molluschi fossili delle colline bolognesi GE d. Accad. d. Sc. dell Istil. di Bologna, série III, t. IV, r874), p. 42, pl. I. fig. : ARCIDÉS 393 ARCIDÉS Genre Pectunculus. Bien que les Pectoncles soient partout extrêmement abondants à l’état fossile, je me suis décidé à les passer complètement sous silence. L'étude critique des espèces de Pectoncles fossiles est une tâche très difficile qui supposerait d'abord une grande habitude des formes vivantes ; et, au point de vue stratigraphique, il me paraît bien délicat d'en tirer des conclusions de quelque poids. Aussi je me contenterai de reproduire ici l'opinion généralement admise, d'après laquelle le P. glycimeris L. serait une espèce actuellement atlantique, mais ayant accompagné à peu près partout dans la Méditerranée, au Calabrien et au Sicilien, les autres « émigrés du Nord ». Genre Arca, La plupart des espèces d'Arches n’ont point d'intérêt stratigra- phique, car elles sont communes au Pliocène et au Quaternaire, sans présenter dans ces étages de mutations suffisamment générales pour pouvoir caractériser tel ou tel niveau. Au point de vue hathymétrique elles ne m'ont fourni non plus aucune donnée digne d’être signalée. Les À. Noæ L. et harbata L. se montrent plus spécialement abondantes dans les dépôts lifloraux (Tarente, Milazzo, « panchine » quaternaires, etc.); les A. laclea L. et surtout telragona Poli sont plutôt fréquentes dans les formations de la zone coralligène (S. Maria di Catanzaro, Brucoli, etc.). Je n'aurai de faits intéressants à signaler que pour les À. diluvu, pectinata et mytiloïdes. 1. Groupe de l'A. (Anadara) diluvii Lmk. Cette forme se perpétue depuis les dépôts argileux du Plaisan- cien, où elle est extraordinairement abondante (ex. Castellarquato), jusque dans la faune vivante. Mais elle est actuellement en voie de disparition : rare partout, elle est généralement confinée dans les zones profondes. D'ailleurs, comme il arrive souvent aux espèces sur le point de disparaître, ce rameau de l'A. diluvii parait, en quelque sorte, s’être actuellement dissocié. C'est ainsi que, parmi 394 LAMELLIBRANCHES les formes récentes et vivantes à rapporter à ce groupe, on peut citer : 1° Des types tels que ceux figurés par B. D. D.([237), pl. XXXI, fig. 13-17) : ils représentent la forme centrale du groupe, et on retrouve dans les faunes pliocènes des échantillons qui leur sont absolument identiques. 2° L’A. corbuloïdes Monterosato, également bien caractérisée et figurée par B. D. D. [237]. Cette belle et grande espèce, restée longtemps méconnue, paraît relativement répandue dans la Médi- terranée. A l’état fossile, on n’en connaît point de citation pliocène{, et parmi. les nombreuses variétés de l'A. diluvii à cette époque, il n’en est aucune qui puisse lui être complètement identifiée : ainsi, certaines Arches pliocènes ont bien 33 côtes?, comme l'A. corbuloides ; d'autres ont le galbe très transverse de cette dernière espèce (ex. : var. pertransversa Sacco);, d’autres encore ont ses côtes très légèrement granuleuses; mais ces divers caractères ne se trouvent pas réunis sur le même individu : l’A. corbuloides n’est pas encore constituée. On a ici un exemple de ce qui se passe en général au moment de l’apparition d’une forme nouvelle : ses caractères apparaissent d'abord isolément et dissociés ; puis ils se réunissent régulièrement, l'espèce est alors définie. — Les dépôts les plus anciens dans lesquels on rencontre l’A. corbuloides paraissent être les couches à Strombes : je l’ai trouvée nettement ‘caractérisée à Ravagnese et à Tarente, où elle atteint déjà une taille comparable à celle des exem- plaires vivantsÿ. Ainsi cette espèce semble être une forme méditerranéenne autoch- tone, apparaissant dans les couches à Strombes, après avoir pris naissance sur place aux dépens des variétés de l'A. diluvü pliocène. A ce titre, il était intéressant de la signaler, car elle contribue à donner un cachet récent aux faunes de Ravagnese et de Tarente (où elle est d’ailleurs rare, comme dans la mer actuelle). 1 La citation de G. Trentanove (Boll. d. Soc. geol. ital. vol. XX, 191r, p: 53r) dans le Miocène des collines de Livourne, me paraît très douteuse, comme le dit d’ailleurs l’auteur lui-même. 2 J'ai observé ce caractère dans des À. diluvit du Pliocène d'Asti. | 3 Le Général de Lamothe ([155], p. 279) vient de la signaler aussi dans les couches à Strombes d'Algérie. ARCIDÉS 395 3° A côté de l'A. corbuloïdes, j'ai rencontré à Ravagnese des formes qui me paraissent différentes des types figurés par B. D. D. [237]. Ce sont des coquilles très profondes, à test extrêmement épais et à forme massive : le bord cardinal est très fort, et les dents médianes sont relativement plus développées qu’à l'ordinaire : le galbe est peu trans- verse, assez régulièrement rhomboïdal et les bords dorsal et ventral sont grossièrement parallèles, de sorte que la coquille est à peine inéquilaté- rale et prend un aspect cardiiforme. Au Monte Pellegrino, on trouve une forme qui, par le contour, la proéminence du crochet, l'épaisseur du test, se montre intermédiaire entre cette variété de Ravagnese et les types pliocènes; cette forme du Sicilien de Palerme est rapportée par M. di Monterosato à l'A. Polu Mayer, souvent citée vivante et considérée généralement comme synonyme de l’A. diluvur. 4° L’A. Talismani Locard [160|, de l'Atlantique, représente encore une mutation actuelle particulière de l’A. diluvii, caracté- risée par un développement extraordinaire de la région umbonale, développement déjà indiqué dans certaines variétés pliocènes!. Peut- être cette espèce est-elle identique à une forme méditerranéenne, l'A. Weinkauffi Crosse, qui présente cette même particularité. Quoi qu'il en soit, ces variétés quaternaires et actuelles s’écartent assez notablement du type le plus répandu dans le Pliocène, 11. Groupe de l'Arca (Anadara) pectinata Br.?. Je rangerai dans ce groupe, à côté de l'A. pectinata Br., deux autres espèces, l'A. syracusensis Mayer et l’A. Geissei Dunker. 1° Arca pectinata Br. — Sous sa forme typique, l’A. pectinata est une coquille de grande taille, bien caractérisée et très répandue dans les faunes pliocènes classiques; elle ne dépasse pas le Pliocène. ancien et peut être retenue à ce litre comme fossile caractéristique. Mais on trouve jusque dans le Pliocène supérieur une variété de petite taille, qu'on peut appeler var. minor; c'est celle que M. Ce- | Voir par exemple la curieuse forme figurée par M. Gerulli-Irelli ([32] pl. VI, fig. 15) sous le nom de var. subantiquata Sacco. >? Il existe des espèces à caractères intermédiaires entre ceux de l'A. diluvii et de l'A. peclinata ; aussi, me parait-il difficile d'adopter, pour cette dernière espèce, un Sous-genre spécial Pectinalarca Sacco (non Peclinarca, comme l'ont écrit MM. Dollfus et Cotter [123}). 396 LAMELLIBRANCHES rulli-Irelli [32]) a rencontrée au Monte Mario, où elle avait été citée, en même temps qu'à Vallebiaja, par M. de Stefani [101 |. L'individualité de cette forme paraît déja accusée dans le Pliocène ancien, puisque dans certaines régions (vallée du Rhône et Roussillon, d’après Fontannes) elle existe seule, à l'exclusion de la grande forme typique. Ces formes de petite taille ont d'ailleurs fréquemment fait l’objet d’erreurs de nomenclature, et elles sont souvent citées sous le nom d'A. Breislaki Phil. non Basterot!. On a'donc là l'indication d'un rameau spécial ayant persisté jusque dans le Pliocène supérieur, mais éteint avant le début du Quaternaire. 2° Arca syracusensis Mayer, — Il existe dans le Pliocène des formes généralement méconnues, à caractères intermédiaires entre l'A. diluvu et l'A. pectinata. On peut y distinguer avec MM. Sacco [13] et Cerulli-Irelli [32], auxquels je renvoie pour les références, : deux formes à la vérité très voisines, l’A. Darwint Mayer? et l’A. syracusensis Mayer. : Elles sont déjà abondantes dans le Pliocène ancien (Sacco [13] et de Stefani [94]). Elles persistent dans le Pliocène supérieur et elles y sont en général représentées par des formes plus spécialement voisines de l'A. syracusensis, ce qui n’a rien d'étonnant, car le type de cette espèce provient du « Postpliocène » de Syracuse, tandis que celui de l’A. Dariwini provient du Miocène du Bordelais. Tel est le cas, à mon.avis, pour la forme rencontrée par M. Cerulli-: Irelli au Monte Mario, où elle n'est poiut rare; j'ai pu constater aussi son abondance dans le Calabrien des collines livournaises (Vallebiaja et localités voisines) où elle avait été signalée déjà par M. de Stefani [101]. B. Nelli [179] cite aussi l’A. syracusensis dans le « Postpliocène » (Calabrien) de l'île Lampedusa. e Enfin j'en ai récolté plusieurs exemplaires bien typiques, figurés ici: ! J'ai pu étudier, grâce à l’obligeance de M. di Monterosato, des exemplaires de cette coquille provenant de Militello, localité typique de Philippi:ce sont des formes de petite taille qui se rattachent au groupe de l'A. diluvii et n’ont certaine- ment rien à faire avec l'A. pectinata. ? Fig. in Sacco [13], fase. XX VI, pl, V, fig. 11, 12. * Fig. in Sacco, loc. cil., fig. 13, et aussi par G. Trentanove (Boll. d. Soc. Geol. ilal,, vol. XX, 1901, tav. VIIL, fig. 4) dans le Miocène des environs de Livourne. ARCIDES 397 dans le Quaternaire (Sicilien ?) des environs de Civita-Vecchia (gise- ment de la Casa Fontana Matta), la persistance de cette forme archaïque dans des formations aussi récentes m'a paru un peu sur- prenante, mais la détermination ne peut être mise en doute. En résumé, ce rameau spécial de l'A. syracusensis, actuellement éleint dans notre mer, y a persisté Jusque pendant le début du Quaternaire. 3° Arca Geissei Dunker *. — Cette espèce vit au Sénégal et aux îles du cap Vert (Dautzenberg [59]) et n’a Jamais été citée jusqu'à présent dans les faunes méditerranéennes. J'ai récolté personnellement cette forme dans les couches à Strombes de Tarente, et je l'ai reconnue ensuite dans les matériaux récoltés par M. Bédé dans les couches à Strombes de Sfax, et conservés dans les collections de Géologie du Muséum de Paris. Ayant constaté l'impossibilité de la rapporter à aucune espèce des faunes méditerranéennes, J'ai soumis mes échantillons à M. Daut- zenberg, qui a constaté leur identité avec l'espèce sénégalienne. Comme M. Dautzenberg a bien voulu me le faire remarquer, l'A. Geis- ser se distingue bien nettement de l'A. peclinala en ce qu'elle a « la région postérieure plus déclive à partir de l'angle dorsal, et les côtes bifides sur la région antérieure ». Ce caractère des côtes bifides, en particulier, est très net : je l'ai, il est vrai, observé sur certaines formes pliocènes et miocènes de l'A. pectinala, mais il n’est encore là ni constant, ni régulier. Toutefois, il me paraît probable que les deux espèces A. Geissei et À. peclinala dérivent d’une souche ancestrale commune, peut-être miocène. En tout cas, la présence de cette forme sénégalienne dans les couches à Strombes est des plus intéressantes au point de vue stra- üigraphique (voir les planches). 111. Groupe de l'Arca mytiloïdes Br. Cette belle espèce, bien caractérisée, abonde dans le Pliocène ! Le nombre et la conservation des échantillons semblent bien exclure l'hypothèse d'un remaniement. D'ailleurs il est possible que l'A. syracusensis ait été rencontrée par G. Seguenza jusque dans les couches à Strombes de Ravagnese (voir plus haut, P. 222). > Figurée par Kobell, Conch. Cab., 2° édition, p. 163, pl. XLI, fig. 5, 6, 398 - LAMELLIBRANCHES ancien et se continue jusque dans le Calabrien sans modifications sensibles. En Italie, il pouvait sembler que la forme striée (c'est le type de Brocchi) fût relativement plus rare dans le Pliocène ancien (Cf. Sacco [13/) et plus fréquente dans le Calabrien (Monte Mario, cf. Cerulli-Irelli [32]); mais M. Dollfus [123] vient de montrer que, dans le Pliocène ancien du Portugal, c'est la forme striée qui domine. En tout cas, cette Arche est abondante au Monte Mario. M. de Stefani ([1o1], p. 378) en cite une variété minor à Vallebiaja. Je l'ai également rencontrée à Girgenti où elle coexiste aussi avec la Cyprina islandica. Philippi la cite dans le Calabrien, à Piazza et à Gravina et M. de Lorenzo dans le Calabrien de Senise (Basilicate) (voir plus haut, p. 139). Son absence en Calabre à ce même niveau s'explique, car elle habite les facies argilo-sableux et ne saurait se rencontrer dans les graviers coralligènes du Calabrien de Calabre. Mais dès le début du Quaternaire, cette forme a complètement disparu et les faunes siciliennes ne contiennent plus la moindre trace de ce rameau. Ce groupe est donc essentiellement caractéristique du Pliocène dans sôn ensemble, et il contribue à donner aux faunes du Calabrien un cachet archaïque par rapport à celles du Sicilien. Genre Limopsis. Les deux espèces de ce genre connues dans le Pliocène, L. (Pec- tunculina) anomala Eichwald, et L. aurita Brocchi, ne paraissent pas différer de leurs représentants actuels dans la Méditerranée. Car la première peut être considérée comme extrêmement voisine de la L. minuta Phil., ou de la L. pygmæa Phil., connues dans la faune méditerranéenne, où la deuxième se retrouve également. Ce sont d'ailleurs des formes de grande profondeur, et on peut sup- poser que leurs variétés actuelles ne sont pas suffisamment connues. Dans la Méditerranée, le dragage le moins profond qui ait ramené des L. aurita paraît être celui du Porcupine à l’Adventure-Bank, par 55-108 mètres; la Limopsis minuta est encore plus profonde. — Aussi ces formes, encore abondantes dans le Calabrien (Monte Mario, Monos- terace, Monte Corvo, Brucoli, etc.),sont-elles extrêmement rares dans les NUCULIDÉS 399 dépôts postérieurs moins profonds : on ne peut guère citer que la L. minula à Ficarazzi (di Monterosato |[115}) et la L. aurita à Boveto (G. Seguenza [206]). Le genre Limopsis ne peut donc donner aucune indication strati- graphique. NUCULIDÉS Genre Nucula. La seule espèce de ce genre qui ait une véritable importance strati- graphique est la N. placentina Lmk. Cette Nucule, déjà bien individualisée dès la base du Pliocène, constitue une espèce facile à reconnaître et bien caractérisée. Au Pliocène ancien, elle abonde partout, comme on le sait, sur- tout dans les facies marneux du Plaisancien. Au Calabhrien elle est encore très abondante, surtout dans les facies argilo-sableux de la Sicile du Sud {Sciacca, Girgenti). Seguenza la cite également à Monosterace, M. Cerullh-Irelli, au Monte Mario, M. de Stefani, à Vallebiaja ; les collections de l’Université de Naples en contiennent de beaux exemplaires provenant du Calabrien de Gravina, ete... Mais elle persiste encore au Sicilien, car elle se trouve à Ficarazzi, à Balestrate! et à Livourne; elle y est, il est vrai, déjà plus rare, et ne parait pas atteindre un aussi beau développement que dans le Calabrien. En tout cas, l'époque sicilienne a marqué la fin de cette espèce : on ne la retrouve plus nulle part dans les couches à Strombes, n1 dans les mers actuelles. La N. placentina sera donc pour nous une des espèces éteintes les plus caractéristiques du Sicilien par rapport aux faunes plus récentes. Les autres Nucules n'’offrent point d'intérêt particulier. Les deux espèces les plus communes, N. nucleus JL. et N. sulcata Bronn, se continuent sans modifications depuis la base du Pliocène jusque dans les mers actuelles : la première arrive Jusque dans les dépôts litto- raux ; la deuxième est confinée dans des zones plus profondes : ainsi, on ne la rencontre plus dans les formations postérieures au Sicilien ; elle 1 J'en figure ici un exemplaire de cette localité. 400 LAMELLIBRANCHES manque en particulier daus les riches faunes de Tarente, fait qui nous en indique le caractère littoral. Au Monte Mario, M. Cerulli-[relli a soigneusement décrit et figuré deux très petites espèces de Nucules : la N. Jeïffreysi Bell., voisine de la N. sulcata et qui serait une forme éteinte, et la N. tenuis Montagu, peu éloignée des N. nucleus L. et N. nitida Jeffr., et qui serait émigrée dans les mers du Nord. Brugnone a cité aussi la NV. fenuis à Ficarazzi, mais là elle a été identifiée par M. di Monterosato avec la N. ægeensis Forbes, forme méditerranéenne. D'ailleurs la N. fenuis a été plusieurs fois citée dans les eaux méditerranéennes, en particulier au Capo S. Vito, par M di Monterosato. — Je n'ose vraiment pas attribuer une grande impor- tance stratigraphique à des espèces d'aussi petite taille, qui ont pu facile- ment échapper aux recherches, tant à l’état vivant qu'à l’état fossile, et qui, de plus, ne paraissent pas s’écarter énormément de l’ensemble des petites Nucules vivantes. Genres Leda, Yoldia, Portlandia. Je n'ose pas non plus tenir compte en stratigraphie de ces petites espèces, dont l’étude serait à reprendre en comparant les formes fossiles aux formes vivantes obtenues par les récents dragages. Naturellement, je passe sous silence un certain nombre d'espèces bien caractérisées, mais qui ne se trouvent que dans le Pliocène ancien : les unes sont éteintes, les autres émigrées dans les mers du Nord. Cela nous montre, et c’est la seule conclusion que nous en retiendrons, que dans le Pliocène ancien (et peut-être aussi dans le Calabrien) la faune de Nucu- lidés profonds était sensiblement plus riche et plus variée que dans la Méditerranée actuelle. CARDITIDÉS Genre Cardita. Les Cardites sont essentiellement des formes lit{orales de mers chaudes, en régression dans les mers tempérées : c'est ainsi que lan faune de Cardites de la Méditerranée actuelle n'est qu'un reste très appauvri des faunes miocène et pliocène. | 4 Actuellement cinq espèces seulement vivent dans la Méditerra- née : ce sont les C. antiquata, aculeata, calyculata, trapezia, corbis, d'importance et d'intérêt fort inégaux. "1: à CARDITIDES 101 1° Cardita (Miodon) corbis Philippi. Cette espèce est inconnue dans le Pliocène de l'Italie du Nord; dans l'Italie du Sud c’est une forme toujours rare, aussi bien dans le Pliocène que dans la mer actuelle; elle ne peut donner aucun renseignement stratigraphique. Il est remarquable de la retrouver dans le Pliocène d'Angleterre auquel elle contribue à donner un cachet méridional. Il existe aussi plusieurs espèces voisines, récemment précisées par MM. Dollfus et Cotter [123], mais qui, étant propres au Pliocène ancien, ne nous intéresseront pas. 2° Groupe de la Cardita calyculata L. Cette espèce se retrouve déjà, sous sa forme typique, dans la Méditerranée pliocène; mais à cette époque, elle était accompagnée d'une mutation spéciale, qui s’est éteinte par des formes de grande taille à la fin du Calabrien : c’est la G. elongata Bronn. Ces deux espèces ont été soigneusement précisées par M. Cerulli-Irelli [32 et je ne reviendrai pas sur leurs caractères distinctifs. Les grandes affinités de la C. elongata et de la C. calyculata sont évi- dentes, mais elles n’autorisent pas à confondre complètement les deux formes, comme l’a fait Weinkauff ([233]!, €. I, p. 156) ; d'autant plus que la forme elongata est bien localisée dans le temps : très abondante au Pliocène ancien, elle est encore bien représentée au Monte Mario par de grands individus ; et les collections du Laboratoire de Géologie de l'Université de Lyon en contiennent également des exemplaires bien caractérisés provenant du Calabrien des environs de Vallebiaja?. Dans Ptalie du Sud, je n'ai pas rencontré cette forme, qui n'y est pas non plus signalée par les auteurs. Par contre, dès le Sicilien, on ne trouve plus que la C. calyculata, identique à la forme vivante. . Enfin, dans les couches à Strombes de Monastir, MM. Flick et Pervinquière [124] ont cité la G. senegalensis Reeve — C. rufes- cens Lmk. — Jeson Adanson à. ! Plus récemment, MM. Dollfus et Dautzenberg (Conch. Miocène moyen bassin de la Loire, Mém. Soc. Géol. France, t. XIV, fasc. I, p. 286) ont considéré l’elon- gala comme une variété de la calyculala. 2 On en trouvera un figuré ici. C4 Cette espèce a été retrouvée dans la même localité par le général de Lamothe | ([155] p. 279). Univ. DE Lyon. — Gicnoux 26 | | | | 402 LAMELLIBRANCHES Comme j'ai pu-m'en rendre compte d’après les échantillons obligeam- ment communiqués par M. Pervinquière {et dont l’un est figuré ici), cette coquille de Monastir est bien conforme à la C. senegalensis Reeve telle qu’elle est figurée dans Kiener //con., Ba X, Abth. 1, p. 44, pl. XII, fig. 13), par contre, elle ne se distingue guère de la C. calyculala que par sa taille un peu plus grande!; enfin, elle n’a aucune affinité avec la | C. elongata pliocène. On peut donc résumer ainsi l'histoire de ce groupe : La C. calyculata type n'a pas cessé d’habiter la Méditerranée depuis le début du Pliocène ancien jusqu'à nos jours : mais pendant tout le Pliocène, et jusqu'au Calabrien inclusivement, elle était accompagnée par un rameau spécial assez bien individualisé, celui de la C. elongata, qui s’est éteint par des formes de grande taille. D'autre part, un rameau moins bien individualisé continuait à pros- pérer dans l'Atlantique africain pour y donner les grandes C. sene- galensis actuelles : et c’est seulement à l’époque des couches à Strombes que ces dernières formes auraient pénétré momentané- ment dans la Méditerranée. 80 Gardita (Glans) trapezia L. Cette petite espèce méditerranéenne est très rarement citée à l'état fossile. En effet, si son individualité est nettement accusée au milieu des faunes actuelles, par contre elle n'est guëre distincte des individus jeunes d’espèces voisines, dans les riches faunes pliocènes. C’est donc une petite espèce à affinités multiples, peu différenciée, à caractères ancestraux. Elle ne nous fournira aucun renseignement stratigraphique. Les formes qui nous restent maintenant à étudier sont extrêmement abondantes au Pliocène : elles ont de plus toutes, entre elles, des affinités étroites, de sorte que les limites et la nomenclature des espèces n'ont» pas toujours été exactement interprétées. Cela rendra naturellement plus. douteuses les relations phylétiques que je vais essayer d'établir. 40 Gardita (Glans) intermedia Br. C'est une coquille des plus répandues partout dans le Pliocènem 1 Diamètre antéro-postérieur 32 millimètres, au lieu des 23 millimètres indiqués par Locardet B. D. D. comme dimension maximum pour l'espèce méditerranéenne: * ne CARDITIDÉS 103 ancien ; on verra surtout les excellentes figures de Sacco ([13] fase. 27, tav. IV, fig. 5-6); caractérisée par sa forme allongée, ses côtes sillonnées longitudinalement, son petit dentelon cardinal antérieur supplémentaire, cette espèce me paraît former un phylum à part. Ce phylum subsiste encore dans le Calabrien, où il est repré- senté au Monte Mario par des formes un peu plus arrondies (cf. Cerulli-Irelli [32], tav. XII, fig. r7-20), mais il n'y atteint déjà plus la fréquence extraordinaire qu'il montrait au Pliocène ancien. Dans le Calabrien de l'Italie du Sud, mes matériaux ne me permettent pas de reconnaitre la présence de l'espèce. En tout cas, dès le Sicilien, la C. intermedia a définitivement disparu des faunes méditerranéennes. 5° Groupe de la Gardita (Glans) aculeata Poli. J'y réunirai la G. aculeata actuelle et la G. rudista Lmk. plio- cène ; ces deux espèces sont en effet intimément liées, et il n’est pas douteux que la C. aculeata ne dérive de la C. rudista. En prenant comme base l'excellente étude par laquelle M. Cerulli- Irelli [32] a précisé les caractères distinctifs de ces deux formes, on peut conclure que : La C. aculeata type paraît très rare ou même absente au Pliocène ancien, tandis que la rudista y est très abondante et d’ailleurs très polymorphe‘. Au Monte Mario (Calabrien) on voit apparaitre l’aculeata type, mais elle y est encore, d’après M. Cerulli-Irelli, beaucoup plus rare que la rudista. Dans l'Italie du Sud, l’aculeata parait débuter plus tôt, dès le Pliocène ancien de Terreti et de Gallina? (Ouest), d’après les quelques échantillons que j'y ai recueil- lis. En tout cas, dans le Calabrien de Monosterace, j'ai rencontré l'aculeata bien typique et de grande taille ; et M. de Franchis* l’a figurée dans le Calabrien de la terre d'Otrante, en la distinguant soigneusement de la C. rudista. Enfin, dans le Sicilien, la rudista a disparu pour faire place à Paculeata, qui vit encore dans la Méditerranée ; elle y est d'ailleurs rare et confinée dans la zone corallienne. 1 Certaines variations conduisent à la C. aculeata, d'autres à la C, rhomboïdea. dont nous allons parler. = >? G. Seguenza [206] l'avait déjà citée dans son « Astien à facies mixte » de Gallina, # Cf, F. de Franchis [70/, p. 57 et tav. II, fig. 6. ‘404 LAMELLIBRANCHES 60 Groupe de la Gardita (Glans) rhomboïdea By. Nous placerons dans ce groupe toutes les formes plus ou moins rhomboïdales, dont les côtes ne sont séparées que par des interstices linéaires, les espaces intercostaux étant complètement supprimés. Le centre de ce groupe est formé par la G. rhomboïdea, bien figurée par M. Sacco [13] et extrêmement abondante dans le Plio - cène de l'Italie (par exemple Castellarquato). Sous sa forme typique, cette espèce est surtout fréquente dans le Pliocène ancien : ainsi, au Monte Mario, elle est très rare. Mais de ce type central dérivent de nombreuses mutations (voir les planches). I. — La GC. rhomboïdea Br. var. inermis Michelott, dont on trouvera une bonne figure dans Sacco. Cette mutation paraît per- sister dans le Calabrien, car je l’ai rencontrée à Girgenti, où elle est relativement abondante. II. — La G. revoluta Seg. — Le type de l'espèce provient du gisement de Gallina (Ouest) (sommet du Pliocène ancien, ou, pour M. de Stefani, « Postpliocène inférieur »), où je ne l'ai pas retrouvée. Mais au Monte Mario, on peut récolter en grande abondance une Cardite que MM. de Stefani et Pantanelli ont les premiers identifiée avec l'espèce, assez médiocrement figurée, de Seguenza. Depuis, M. Cerulli-Irelli [32] a donné de belles figurations de cette forme du Monte Mario : c'est une coquille d'assez petite taille, à crochets très proéminents, très déversés, et à côtes complètement lisses. Cette forme si particulière me paraît dériver de la C. rhomboïdea du Pliocène ancien par l'intermédiaire de la var. inermis. III. — D'autres formes que je ne puis juger que d'après des figures : telles sont la G. rhodiensis Fischer! et la G. subrevoluta de Stefani? : Je ne les cite que pour montrer combien diverses et localisées ont été les variations du groupe rhomboïdea sur le point de s'étendre. , IV. — La G. bollenensis Mayer est encore une race régionale spéciale au Pliocène rhodanien ; mais elle reste très voisine du type, dont elle ne diffère guère, d'après Fontannes, que par la présence d’un petit dentelon cardinal antérieur, pareil à celui de la C. inter 1 Mém. Soc. géol. France, série 3, vol. I, 1877, p. 138, pl. I, fig. r, ra. 2 Lamell, plioc,, p. 189, tav. X, fig. ri-r3. = CARDITIDÉS 405 media ; et encore ce petit dentelon, comme j'ai pu le constater moi-même, est-il le plus souvent très réduit et parfois complète- ment indistinct. En résumé, ce groupe de la C. rhomboïdea atteint son apogée dans le Pliocène ancien. Avant de disparaître, il donne divers rameaux qui aboutissent à la var. inermis de Girgenti, à la C. revo- luta du Monte Mario, etc ; et au Sicilien il a complètement disparu. Il est curieux de constater qu'il se termine par des formes à côtes très lisses et effacées, absolument comme le groupe de la C. Jouan- neti miocène s’est terminé dans le Sahélien! par une var. læviplana Depéret, caractérisée également par une atténuation de l'ornemen- tation. 7° Groupe de la Cardita (Actinobolus) antiquata I. La forme type du groupe est une coquille vivante très répandue dans toute la Méditerranée?. Dans le Pliocène ancien méditerra- néen, cette forme paraît rare et on ne peut guère y rapporter que des individus jeunes, à détermination incertaine. Ainsi, M. Sacco [13] ne la figure pas dans le Piémont et la Ligurie. Mais dans le Pliocène atlantique, MM. Dollfus et Cotter l'ont rencontrée au Portugal. En revanche, on trouve en abondance dans le Pliocène ancien d'Italie la G. pectinata Br., grande espèce bien caractérisée : c’est certainement un rameau latéral issu de la forme type. La C. Matheroni May. du Pliocène français constitue aussi un rameau latéral du Pliocène ancien : c’est une forme assez aberrante, caractérisée par des côtes contiguës et aplaties, comme dans la C. rhomboïdea, alors que dans la C. antiquata vivante elles sont bien saillantes, carrées et séparées par un espace intercostal plus ou moins large, mais existant toujours. 1 D’après Forestiet Scarabelli (Sopra alcuni fossili pliocenici delle vicinanze d’Imola, Boll. Soc. Geol. Ital. 1897), elle persisterait dans l'Emilie jusque dans le Pliocène ancien ? ? Cette espèce est très polymorphe et très diversement interprétée par les auteurs. Ainsi M. Sacco y réunit, à côté de la forme vivante, des formes pliocènes assez aberrantes {C. rhodiensis) et des formes miocènes (C. Partschi) ; M. Dollfus [r23|, tout en signalant l’impossibilité de cette dernière assimilation, ne prête pas grande attention à l’écartement des côtes et réunit à la C. antiquala des formes à côtes absolument contiguës (ex : C. rhodiensis). 406 LAMELLIBRANCHES Dans le Calabrien on assiste, au Monte Mario, à la continuation de la C. pectinata ; mais ici la C. anfiquata typique est apparue. M. Cerulli-Irelli [32] en a donné d'excellentes figures que M. Dollfus, je ne sais pourquoi, sépare de l'espèce vivante!. A Girgenti j'ai aussi récolté, dans le Calabrien, une belle Cardite de ce groupe très voisine de l'espèce vivante, et en particulier de la variété actuelle elata B. D. D.?, mais beaucoup plus épaisse et solide. Enfin dès le Quaternaire, ce groupe se réduit à la C. anfiquata, qui prend dès lors un très grand développement. Résumé. Les conclusions stratigraphiques de cette trop longue étude peuvent être résumées en peu de mots. Par sa faune de Cardites, le Calabrien, et spécialement le Calabrien inférieur (Monte Mario, « Girgenti), est encore nettement relié au Pliocène, comme le montre bien le tableau ci-dessous. Mais dès l’époque sicilienne, cette faune Actuel. . .., (c. c.) ; ; @) 1 0 CE 3 | 1 1 | Quaternaire.‘ senegalensis (c.) I 5 (c.) PLU) | e Plioc, sup. .: (r.) GR) (r.) HAN (C2) (x) Û ÿ 1 | (C) . ) ) aculeata @œ) cn CNE Ge ICS | Plioc. inf. .: calyculata elongala \ intermedia ‘ rudista : (r. r.) (CC) CC) CC) Actuel oi C2 ( Quaternaire. : (r.) Plioc. sup. . (r.) (r.) l Ge) (r.) AC Û ! revoluta | (CRE Plioc. inf. .! C. GC. CRE C. C. C. \ antiquata pectinata Matheroni' subrevoluta rhomboïdea bollenensis. D (es mm) (c. c.) : (x.) (c. c.) 1 J'ai pu étudier moi-même, dans les collections du Lab. de Géol. de l'Univ.“de Lyon, un très bel exemplaire provenant du Monte Mario et absolument identique à la forme actuelle. 2? Je ne vois aucune affinité, comme le voudrait M. Dollfus [123], entre cette variété et la C. anliquata var. proboscidea Michelotti in Sacco, qui me paraît au contraire appartenir au groupe de la GC, rhomboïdea, ASTARTIDÉS 107 se réduit aux espèces actuelles. Seule l'importation momentanée, pendant l'époque des Strombes, d’une forme sénégalienne, la C. senegalensis, viendrait (à supposer que son individualité fût bien prouvée) faire une diversion intéressante dans l’histoire des Cardites méditerranéennes, ASTARTIDÉS Genre Astarte. Nous nous arrêterons seulement dans ce genre sur deux espèces voisines : l’À. fusca Poli et l’A. sulcata Da Costa, qui jouent un rôle important dans les faunes récentes. La distinction, et par suite l'histoire, de ces deux formes, présentent quelques difficultés et méritent que nous y insistions : Dans le Pliocéne ancien, l'A. sulcata paraît très localisée et relativement rare : Sacco ne confirme point sa présence dans le Piémont et la Ligurie; dans la vallée du Rhône et le Roussillon, on sait que les Astartes sont inconnues. Déjà dans le Modenais, on la rencontre; c’est ici une forme de petite taille, à grosses côtes régulières et bien saillantes, le galbe en est subrhomboïdal. Et en Calabre, nous la retrouvons aussi dès la base du Pliocène, par exemple à Terreti. Mais, dans le Pliocène ancien, la forme la plus abondante est une Astarte à forme plus régulièrement triangulaire, lisse ou costulée, mais dans ce cas à côtes plus fines et plus irrégulières : c'est l'A. incrassala de Brocchi, que l’on s'accorde généralement à réunir à l'espèce vivante ou A. fasca de Poli: les formes fossiles se répartiraient entre le type vivant et plusieurs variétés (euglypha, incrassala, etc.) d'importance tout à fait secondaire et sans intérêt stratigraphique. Ainsi dans le Pliocène ancien on voit déjà individualisés 2 phy- lums, dont les caractères sont nettement tranchés. D'ailleurs, les 1 3 Astartes sont ici relativement rares et, comme on l’a vu, l'A. sul- , 1) cata reste même spéciale à certaines formations, sans doute plus profondes (graviers à Bryozouires de la Calabre, marnes bleues du Modenais). Dans le Calabrien de l'Italie centrale, les conditions paraissent rester les mêmes qu'au Pliocène ancien : les Astartes du Monte Mario figurées par M. Cerulli-[relli appartiennent toutes au type fusca, et ne sont pas 408 F LAMELLIBRANCHES différentes de celles du Pliocène de l'Italie du Nord. C’est probablement que l’on n’a pas ici les facies plus profonds, de graviers ou de marnes coralligènes, qui vont nous montrer en Calabre une évolution si rapide et si curieuse de la faune, Dans le Calabrien de l'Italie du Sud on assiste à un développe- ment extraordinaire de l’un des phylums existant au Pliocène ancien. Partout, en effet, à Monte Corvo, à Monosterace, à Gallina, à Brucoli, etc., il est facile de récolter en quantité considérable des Asfarle sulcata qui montrent partout aussi la plus curieuse variété (voir la planche qui leur a été consacrée ici). ; Tout d'abord, une première série de figures montre le développe- ment de la forme normale. On voit que ses caractères restent bien constants, tels que je les ai indiqués plus haut par opposition avec l’A. fusca. Dans quelques gisements (Brucoli), l’évolution s'arrête là : on a l'A. sulcata type. Mais, dans la plupart des gisements calabriens, l’évolution continue vers d'autres formes. Une deuxième série de figures montre, en effet, que, partantde l'A. sul- cata type, on arrive, par des passages insensibles, à des formes qui en paraissent très éloignées : la coquille augmente de taille, . les costulations s'atténuent et arrivent à n'être plus visibles que près des sommets : on a alors tout à fait l’ornementation de l’À. fusca var. incrassata. De plus, la forme devient plus régulière, la troncature de l'extrémité postérieure disparaît presque, et le galbe, devenant plus triangulaire et plus élevé, se rapproche de celui de l'A. fusca. On a donc là une véritable « convergence » vers l'A. fusca. Mais on ne peut pourtant mettre en doute la réunion spéci- fique de ces formes, que j'appellerai var. pseudofusca, avec l'A. sul- cala. D'abord ces modifications procèdent par passages insensibles à partir de la sulcala type : on les voit se produire, toujours dé la même façon, dans plusieurs gisements de la même époque. D'autre part, les différences avec PA. fusca, bien que fort atténuées, existent toujours un peu : la forme reste moins régulièrement triangulaire, les sommets moins élevés, moins pointus; enfin les quelques côtes que l’on aperçoit près des sommets sont moins fines et moins rapprochées. Il faut bien reconnaître toutefois que, si cette var.pseudofusca se rencontrait seule, sans les termes de passage qui la relient à l'A. sulcata, on serait embarrassé pour sa = ASTARTIDÉS 109 détermination spécifique. Aussi Philippi, qui avait récolté en grande abondance ces Astartes pliocènes, les réunit-il toutes en une seule espèce, car peut-être n'a-t-il pas connu la véritable À. fusca, beaucoup plus rare à ces niveaux et confinée dans des gisements spéciaux. Mais ce groupe de formes si curieuses et si abondantes paraît localisé dans le Calabrien!. Car dans le Sicilien nous ne trouvons plus guère, à Ficarazzi, que des formes assez typiques. L’A. fusca et l'A. sulcata sont toutes deux citées par M. di Monterosato dans le Sicilien de Palerme, où elles ne sont pas, d’ailleurs, très communes : la forme la moins rare à Ficarazzi a été appelée par cet auteur À. e/fossa, sans doute à cause de sa lunule profondément enfoncée?. Mais une comparaison directe entre des échantillons types de Ficarazzi, envoyés par M. di Monterosato, et la belle série d’A. sulcata vivantes de la collection Dautzenberg m'a persuadé que cette À. effossa représentait à peine une variété du type actuel, où beaucoup d'exem- plaires montrent une lunule aussi déprimée que dans la coquille de Ficarazzi . En tout cas je ne puis considérer la forme du Sicilien de Palerme comme une espèce éteinte. Dans les gisements plus littoraux ou plus récents de Milazzo et de Ravagnese, je n’ai récolté que des À. fusca, variété à test assez épais et lisse. L'absence de l’A. sulcata doit tenir ici à des conditions locales, probablement au facies plus grossier, moins profond, car on sait que cette coquille vit encore dans la Méditerranée. Elle y est d’ailleurs beaucoup plus rare que l'A. fusca : mais cette dernière est également loin d'être fréquente. En résumé, les Astartes paraissent en régression rapide dans la Méditerranée. C'est au Calabrien qu'elles semblent avoir atteint leur apogée. À cette époque, le groupe de l’A. sulcata, aujourd’hui encore prospère dans la mer du Nord, s’y est abondamment développé et a poussé un rameau latéral qui s'est terminé par des formes lisses de grande taille : aussi, les Astartes de ce groupe, sans être absolument caractéristiques du Calabrien, contribuent, par leur abondance et leur variété, à donner à la faune calabrienne un cachet ! Toutefois, dans les gisements pliocènes anciens de Marcellinara et de Gallina Ouest, on trouve déjà quelques rares individus qui se rapprochent de la var. pseudo- fusca. 2 M. di Monterosato considère son 4. effossa comme une forme éteinte, car, dit-il, «elle ne ressemble à aucune des espèces des mers du Nord ». 3 Ce caractère apparaît aussi chez les formes pliocènes : dans beaucoup de gise- ments calabriens j'ai rencontré des formes identiques à celle de Ficarazzi. ik 410 LAMELLIBRANCHES particulier : elles fournissent, en pratique, un indice stratigraphique des plus commodes. Le tableau ci-dessous synthétise ces conclusions | Actuel Se a ae (r.) (2) Quaternaire eee ee | $ cs \ Pleene supérieur. . . . . | us var. pseudofusca (c.c.) (c.c.) Pliocène inférieur . . . . . A. fusca (c.) | A. sulcata (c.) : C2 KELLYELLIDÉS, ERYCINIDÉS, GALEOMMIDÉS Je cite ici seulement pour mémoire ces trois familles, car elles M ne comprennent que des coquilles de petite taille et extrêmement fragiles. Aussi, sont-elles très rarement citées à l’état fossile ; dès le Pliocène ancien, toutes les espèces connues sont eau à des formes actuellement vivantes. Inversement, beaucoup d'espèces. vivantes n’ont pas été signalées à l’état fossile, mais cet enrichisse- ment de la faune doit n'être qu'apparent et tenir exclusivement à la difficulté de leur récolte et de leur détermination. CARDIIDÉS Les Cardium sont un des genres les plus richement représentés dans les faunes pliocènes et actuelles. Ils comprennent de nombreuses espèces de grande taille, faciles à reconnaître, bien délimitées; les variations spécifiques sont en général assez faibles, et surtout elles paraissent être exclusivement de caractère adaptatif ou régional, n’altérant pas les limites des espèces. C’est donc un genre en état de développement normal, en état d'équilibre. Aussi est-il relativement peu intéressanim pour le stratigraphe; néanmoins, à cause de son extrême abondance, je l'étudierai en détail, car il est ll de se faire une idée nette et précise de l’histoire de ses diverses espèces dans la Méditerranée. Groupe du Cardium aculeatum L. Ce groupe est représenté dans la faune actuelle de la Méditer- ranée par deux espèces voisines, le C. aculeatum L. et le C. pau cicostatum Sowerby, mais déjà distinctes des la base du Pliocène.M CARDIIDÉS A1 Le G. aculeatum parait atteindre actuellement son apogée. Au Pliocène ancien et au Calabrien, il était représenté par des formes déjà très voisines du type vivant, mais qui présentent néanmoins avec lui, dans l'ensemble, quelques légères différences. La taille est généralement moins grande, la forme plus transverse (cf. var. transversa Sacco); la coquille est moins oblique, le côté posté- rieur moins dilaté et moins nettement tronqué. En un mot, les caractères distinctifs de l'espèce, ceux qui l’éloignent le plus des autres Cardium méditerranéens, n’ont pas encore acquis le degré d'intensité qu'ils ont dans les grandes formes vivantes : on en pourra juger en examinant les figures de M. Sacco ! [13], et celles de M, Cerulli-Irelli [32]; l'examen direct de spécimens provenant du Calabrien du Monte Mario, de Fauglia et de Santa Maria di Catanzaro m'a donné la même impression. Par contre, dans le Sicilien, j'ai recueilli à Rosarno des individus identiques à la forme actuelle ; il en est de même à Tarente, dans les couches à Strombes, où l'espèce présente un magnifique déve- loppement, car on a affaire ici à un facies littoral, où elle est sur- tout prospère. Le G. paucicostatum typique est une forme de petite taille, à test mince, qui descend jusque dans des zones beaucoup plus pro- fondes que l’espèce précédente ; le type de l’espèce a persisté sans modifications appréciables depuis le Pliocène ancien jusque dans les mers actuelles. Mais il existait, en outre, au Pliocène, un rameau latéral : c'est la variété Bianconiana Cocconi, très bien figurée par MM. Cerulli-Irelli et Sacco, et extrêmement abondante dans les facies de marnes ou de sables fins du Pliocène ancien. Cette forme, bien caractérisée, a persisté Jusque dans le Calabrien : M. Cerulli- Irelli l’a rencontrée au Monte Mario, et j'en ai retrouvé un frag- ment dans le Calabrien de Girgenti (Porto-Empedocle). Là, ce rameau s’est éteint par des formes de grande taille, sans laisser de descendance, et on ne retrouve plus au Sicilien que les petits C. paucicostatum typiques. Cardium erinaceum Lmk. Cette espèce bien isolée est stable depuis la base du Pliocène, ! À ce propos, je me rangerai tout à fait à l'avis de M. Dollfus qui détermine comme C. aculeatum la forme figurée par M. Sacco, pl. VII, fig. XIII, sous le nom de C, paucicostatum. 112 LAMELLIBRANCHES et, encore actuellement, elle est uniquement méditerranéenne : elle nous offre donc un bel exemple de forme autochtone et persistante. Groupe du Gardium echinatum L. Ce groupe paraît atteindre son apogée, comme abondance et variété de formes, dans les facies vaseux du Sicilien. D'autre part, son étude est rendue très difficile par son extrême polymorphisme. Je commencerai donc par décrire les types du Sicilien, pour lesquels J'ai pu réunir des matériaux extrêmement abondants. Pour plus de précision, je prendrai comme point de départ quatre formes princi- pales, que je vais décrire successivement : 19° C. echinatum L,, type. L'échantillon figuré ici provient des mollasses calcaires siciliennes de Valdese, près Palerme; comparée aux nombreux matériaux vivants de la collection Dautzenberg, cette coquille apparaît identique à la forme atlantique qui doit être considérée comme le type du C. echina- tum L. Par ses grosses côtes rugueuses, elle fait même passage à la variété Duregnei de Boury; mais, comme j'ai pu m'en assurer par une comparaison directe avec un échantillon de C. Duregnei faisant partie des collections de l'Université de Lyon, elle en diffère encore par sa forme moins globuleuse, moins renflée!. L'essentiel pour nous, c’est qu'il s’agit là, tant pour le C. echinatum que pour le C. Duregnei, de formes atlantiques actuellement disparues de la Méditerranée. 2° C. echinatum L. var. mucronata Poli. C'est la forme si répandue actuellement dans la Méditerranée; on la trouvera excellemment décrite et figurée par B. D. D. [237]. 39 C. echinatum L. var. Deshayesi Payr. C'est là certainement une des coquilles les plus abondantes à Fica- razzi. Comparée à la figuré que donne Payraudeau de son (C. Deshayesi (Mollusques de Corse, pl. 1, fig. 33-55), elle n’en diffère que par sa taille 1 M. di Monterosato avait cité [114] le C. Duregnei parmi les espèces atlantiques du Sicilien de Palerme. Tout récemment il a eu l’obligeance de me communiquer. les échantillons sur lesquels il basaïit cette citation et qui n'ont aucun rapport avec le véritable C. Duregnei. M. di Monterosato propose de leur appliquer le nom de C. Brocchii (Mayer). Pour moi, ce sont simplement des formes voisines des variétés Deshayest et propexæa, étudiées plus loin. E CARDIIDES #13 plus grande et sa forme un peu oblique; les mêmes caractères paraissent aussi l’écarter des figures données par B. D. D. [237] pour cette espèce. Mais une comparaison directe de mes nombreux spécimens de Ficarazzi avec les riches matériaux vivants de la collection Dautzenberg m'a convaincu de l’identuilé de la forme fossile avec celle de la Méditerranée actuelle; les figures ci-dessus citées se rapportent peut-être à des échan- tillons non complètement adultes ; M. Cerulli-Irelli, d’après la figuration qu'il donne, a adopté la même interprétation que moi pour l'espèce de Payraudeau. 4° C. echinalum L. var. propexa Mtrs. sp. Ici, comme on peut s en rendre compte en examinant la figure donnée plus loin, l'ornementation est des plus curieuses et permet de reconnaître cette forme au premier coup d'œil, quand on a affaire à des échantillons bien conservés. Ses caractères concordent trait pour trait avec ceux du C. propexæum Monter. : cet auteur propose, en effet [114], le nom de C. propexum pour « une forme des mers du Nord et de Ficarazzi appelée C. echinatum, var. tenuis, coslis angustlioribus par Môrch », et il la caractérise en disant : « Se distingue du C. Deshayest, auquel elle ressemble le plus, par ses côtes plus nombreuses, sa forme plus trans- verse et ses papilles adossées les unes aux autres ». Mais il ne parait pas, d’ailleurs, qu'il faille voir là une espèce distincte, car elle se sépare du C. Deshayesi seulement par une exagération des caractères qui ont donné naissance à cette même variété Meshayest. Ayant ainsi bien fixé les types principaux entre lesquels on peut répartir les C. echinalum du Sicilien, il convient de remarquer que, grâce à l'extrême abondance de ces coquilles dans ces gisements, on peut trouver à peu près {ous les passages entre ces formes. Aussi, n ai-je pas Jugé à propos de faire dans cet ensemble des coupures spécifiques. La forme dominante dans le Sicilien, à Ficarazzi comme à Rosarno, est le C. Deshayesi ; et on voit nettement que les types extrêmes en sont dérivés par adaptation : le C. echinatum type se rencontre dans le facies littoral de mollasse calcaire du Monte Pellegrino ; et il a le facies habi- tuel des espèces qui vivent dans ce milieu : coquille épaisse, ornemen- tation grossière et massive. Au contraire, l’autre terme de la série, constitué par le C. propexzum, est un exemple remarquable de coquille adaptée aux fonds argileux : le test est mince, la couleur gris noirâtre uniforme, l’ornementation extrêmement délicate et fragile; les papilles A14 LAMELLIBRANCHES aplaties et recourbées vers le bord palléal forment comme autant de petites ancres qui retiennent l’animal dans la vase et assurent sa progres- sion régulière dans un seul sens, en s’opposant à tout déplacement qui entrainerait le bord palléal en haut. Il nous reste maintenant à suivre la répartition stratigraphique et géographique de ces diverses formes. Dès la base du Pliocène, on se trouve en présence de 2? phylums distincts. L'un est celui du C. echinatum type et de sa variété Dure- gnei : dans le Pliocène ancien, il est représenté par les belles coquilles que M. Sacco a figurées sous le nom de C. echinatum var. gibba (Defrance), et qu'il n'est guère possible de distinguer du C. Duregnei actuel. L'autre est le groupe mucronatum-Deshayesi, avec des formes analogues à celles que nous avons vues à Ficarazzi. Mais dans l’ensemble, toutes ces formes sont encore peu abon- dantes. Pendant le Calabrien, je ne connais pas d’échantillon qui puisse -correspondre au premier des deux phylums cités précédemment ; mais ce phylum doit continuer néanmoins. Par contre, le groupe mucronatum-Deshayesi commence à prendre un grand développe- ment : il est bien représenté au Monte Mario, sans doute aussi à Vallebiaja ; dans l'Italie du Sud, on le retrouve à Gravina, à Nardo, à Monosterace et surtout à Castrovillari et Carrubare, où il trouve un facies argileux très propre à son développement !; sa rareté relative dans les riches faunes calabriennes du Détroit de Messine (Monte Corvo, Gallina, Gravitelli, etc.) doit être attribuée au facies de graviers trop grossiers. : Au Sicilien, on assiste dans les facies argilo-sableux à grain fin de Ficarazzi, Gallipoli, Rosarno, Balestrate, Castellamare, à un développement extraordinaire du groupe mucronatum-M Deshayesi, avec tendance plus ou moins accentuée à la variété propeæa ; l'immense développement numérique de ces belles M coquilles est un des traits qui frappent le plus au premier examen des faunes siciliennes : elles en forment vraiment l'élément domi- nant. Puis, dès les couches à Strombes (Ravagnese, Tarente), la faune 1 Il y accompagne la Cyprina islandica qui recherche les mêmes facies : c'en est, comme au Sicilien, un véritable commensal. CARDIIDES 415 de Cardium se trouve réduite à la faune méditerranéenne actuelle, avec le même degré de fréquence des diverses formes. Le groupe echinatum (type)-Duregnei a définitivement abandonné la Méditer- ranée, le C. Deshæ#yesi est devenu rare, la seule forme fréquente est le mucronatum ; et ces deux survivants sont plus isolés l'un de l’autre actuellement qu'aux époques antérieures. On voit donc que, bien que les C. propexum et echinatum (type) soient des « formes seplentrionales », on ne peut les qualifier avec certitude d’ «immigrés du Nord » au Calabrien et au Sicilien : car ils ont des racines sur place dans les faunes méditerranéennes pliocènes; il est difficile de décider si leur centre de développement a été l'Atlantique, ou bien au contraire si ce sont des formes autochtones développées sur place aux dépens de la faune indigène. Quatern. supér. var. Duregnei ebhACIUELe 0 (r.) (cc) (c.) (r.) C.echinatum | var. propexa SICUIET EE... (type) (r.) (c. c.) (c. ©.) (c.) Calabrien . . . . a (c. c.) (c.) Pliocène anc. . var. gibba C.mucronatum C. Deshayesi (r.) (c.) (r.) | | Groupe du C. echinalum Cardium tuberculatum JL. Cette espèce paraît s'être perpétuée sans modifications sensibles depuis la base du Pliocène jusqu’à nos jours. Mais elle donne des indications utiles au point de vue bathymétrique et au point de vue des facies. C’est une forme le plus souvent très littorale, qui ne descend jamais (Bucquoy, Dautzenberg et Dollfus, d’après Jeffreys) au-dessous de 75-100 mètres. Les formes des dépôts vaseux d’une certaine profondeur sont en général de plus petite taille, à coquille mince, à forme plus régulièrement orbiculaire, à ornementation moins grossière avec de fines papilles assez développées ; cet ensemble de caractères ancestraux, qui rapprochent l'espèce du C. echinatum, se rencontrent surtout dans les facies de marnes plaisanciennes. L 416 LAMELLIBRANCHES A ces formes se rattacheraient quelques spécimens que l’on rencontre dans le Sicilien de Palerme, et dont M. di Monterosato a fait des espèces ou variélés spéciales. Cet auteur m'a ainsi communiqué, provenant du Monte Pellegrino : 1° une variété ohiquala, à peine plus oblique que le type; 2° un C. carditoides, qu’il considère (in sch.) comme une espèce éteinte, et qui n'est qu'une exagération de la variété précé- dente, avec la région umbonale un peu déversée obliquement. En outre, ce même auteur distingue, sous le nom de C. tuberculatum var. frigida, de petites formes provenant des dépôts siciliens du Fiume Oreto (bassin de Palerme). Je ne crois pas que l’on puisse attribuer la moindre importance straligraphique à toutes ces variétés, d’ailleurs extrèmement _voisines du type. Dans les dépôts tout à fait lilforaux, la coquille devient très grande, lourde et épaisse, à caractères spécifiques bien accusés, avec une orne- mentation plus grossière ; les tubercules disparaissent : c’est la variété mutica (B. D. D.) qui représente le terme final de l’évolution du groupe. Par suite de son habitat littoral, cette espèce est, dans l’ensemble, plutôt rare dans le Pliocène ancien. Elle devient plus abondante dans celles des formations calabriennes qui ont un caractère un peu littoral (Monte Mario). Dès le Sicilien elle abonde : ainsi au Monte Pellegrino, à Rosarno, sa fréquence nous indique qu'il s'agit de dépôts formés dans une mer dont la profondeur ne dépassait certai- nement pas 100 mètres. Enfin dans les couches à Strombes (Rava- gnese, Tarente), et dans toutes les « panchine » littorales, elle devient extraordinairement répandue, comme dans la mer actuelle. Cardium (Trachycardium) multicostatum Brocchi. C'est une forme très caractéristique et bien isolée. Abondante dans le Pliocène ancien, elle se retrouve encore très fréquente dans le Calabrien au Monte Mario, à Vallebiaja, à Girgenti; après quoi elle disparait définitivement de nos mers. C'est donc une des espèces qui contribuent le plus à donner un cachet nettement pliocène aux couches calabriennes. Cardium (Ringicardium) hians Brocchi. Le C. hians est encore une espèce bien isolée, sans modifications depuis la base du Pliocène. Mayer avait cru pouvoir séparer la forme fossile de la forme vivante ; mais Weinkauff ([233] t. I, CARDIIDÉS 17 p. 130), après l'examen de nombreux échantillons et une discus- sion serrée des arguments de Mayer, conclut quil est impossible de maintenir cette distinction. Le C. hians est d'ailleurs en voie de régression marquée : autrefois très répandu dans toute la Méditerranée, il est maintenant à peu près confiné sur les côtes d'Algérie. Son abondance dans le Quaternaire de Tarente, à quelques mètres au-dessus de la Méditerranée actuelle, nous est un indice que la mer des couches à Strombes dépassait certainement ici de 30 mètres environ le niveau actuel, car Weinkauff indique 40 mètres comme profon- deur minimum pour le C. hians vivant. Groupe du Cardium papillosum Poli (sous-genre Parvicardium). Le C. papillosum Poli est très répandu au triple point de vue stratigraphique, géographique et bathymétrique. C’est une forme variable, assez peu différenciée, et présentant encore des affinités étroites avec certains autres Parvicardium ; je crois donc qu'il ne faut guère attendre de lui des renseignements stratigraphiques. Je signalerai seulement la grande taille que cette espèce atteint dans le Calabrien, où certains individus mesurent jusqu’à près de 30 millimètres de diamètre transverse, se montrant ainsi aussi grands que la variété actuelle maxæima (B. D. D.) draguée aux Açores par 150 mètres. Au Monte Mario, M: Cerulli-Irelli a distingué plusieurs variétés, voisines de cette grande forme. À Castrovillari, à Nizzeti, elle a été déterminée comme C. obli- quatum Aradas — C. Aradasi Crema. Mais je ne vois dans cet ensemble de formes actuelles et pliocènes aucune variation assez importante pour être utilisée en stratigraphie. Je laisse de côté les autres Parvicardium, dont l'étude ne nous apprendrait rien d'intéressant, et je me borne à signaler que M. Cerulli-Irelli a retrouvé au Monte Mario, où elle est rare, une espèce bien caractérisée et assez fréquente dans le Pliocène ancien, le G. hirsutum Br. : c’est une forme éteinte bien typique. Cardium (Cerastoderma) edule I. Cette espèce pliocène et actuelle est extraordinairement poly- morphe : une revision d'ensemble serait nécessaire pour tirer un parti stratigraphique de la répartition de ses diverses variétés. Univ. De Lxon. — Gicnoux. 27 118 LAMELLIBRANCHES Mais l'importance des variations locales, dues aux adaptations si diverses de la vie littorale, paraît devoir masquer les mutations stratigraphiques. Aussi, me bornerai-je à signaler ici, parmi les matériaux que jai pu recueillir personnellement, les formes qui m'ont paru s’écarter le plus des variétés généralement décrites. Actuellement, le C. edule ne descend guère au-dessous de 30 mètres de profondeur, et il habite le plus souvent tout près du niveau même de la mer; c'est donc une espèce strictement liforale qui indique avec préci- sion la position des rivages anciens. Aussi ne l’ai-je rencontrée que dans des formations tout à fait littorales ou lagunaires. Au Calabrien, elle est connue dans l'Italie du Nord(Monte Mario, Monts livournais, etc.). Plus au Sud, je l'ai récoltée à Castrovillari, près de l’ancien rivage du Pliocène supérieur, et surtout, en très grande abon- dance, dans les argiles ligniteuses qui, à Caraffa di Catanzaro, marquent la fin du Calabrien marin et font passage aux alluvions du Pliocène supérieur. Dans le Quaternaire, le C. edule devient forcément beaucoup plus fréquent. Il abonde à Mortelle et à San Francesco, nous témoignant qu'il y avait là, à l'époque sicilienne, de grandes lagunes analogues à la lagune actuelle du Faro : la faune de Cardium qu'on y récolte pré- sente le même ensemble de formes (var. Lamarcki, clodiensis, paludosa) que nos étangs actuels du golfe du Lion, comme jai pu m'en assurer par une comparaison directe des deux faunes. J'ai récolté également à Mortelle une coquille très curieuse : c'est un petit Cardium arrondi, caractérisé par une déformation tout à fait parti- culière de la partie postérieure : 1l existe dans cette région une sorte de carène obtuse partant du sommet pour aboutir au bord palléal; cette carène délimite une aire triangulaire postérieure très déprimée, ce qui donne à la coquille une forme brusquement tronquée, et sur cette tron- cature le bord palléal dessine une sinuosité; sur la surface extérieure de cette aire, l'ornementation change brusquement : les côtes s’effacent et les stries d’accroissement sont au contraire beaucoup plus marquées!. J'ai figuré sous le nom de var. Mortellensis cette curieuse race locale. A Tarente, le C. edule abonde, représenté par des formes solides d'assez grande taille, qui peuvent se grouper autour des types alfior B.D. D., umbonatus Wood, Lamarchi Reeve, figurés par B. D. D. [237] 1 J'avais cru d'abord qu'il s'agissait là d'une simple monstruosité, mais j'ai retrouvé plusieurs individus différents présentant identiquement les mêmes caractères. Ce serait donc une monstruosité devenue héréditaire: CARDIIDÉS 419 et Sacco [13]. On le trouve ici dans un facies franchement marin, côte à côte avec la riche faune à Strombes,; en tout cas, il nous prouve par son abondance que ces dépôts de Tarente sont très lifloraux, et, en tenant compte de sa coexistence avec le C. hians, il confirme l'exactitude du chiffre de 35 mètres que nous avons admis comme cote de la mer à Strombes à Tarente. Enfin je veux signaler l'abondance dans le Qualernaire ancien du Marchesato (gisement de Casa Campanoro, près Cutro) d’une forme tout à fait remarquable, très solide, de très grande taille !, qui atteint les dimensions de la variété major B. D. D., mais dont le galbe est du type Lamarcki-umbonata-allior : je propose le nom de Cofronensis pour cette forme gigantesque du Quaternaire méditerranéen ffigurée ici). Dans ce même gisement, j'ai également rencontré une forme très parti- culière par le petit nombre de ses côtes : ce sera une variété /5-coslala. Groupe du Cardium norvegicum Spengler (sous-genre Lævicardium.) Ce groupe est actuellement représenté dans nos mers par deux espèces, le G. norvegicum, commun à la Méditerranée et à l’Atlan- tique, et le G. oblungum Chemn., spécial à la Méditerranée. Ce sont deux formes voisines étroitement apparentées, mais que l’on peut retrouver déjà distinctes dès la base du Pliocène. Toutefois, dans le Pliocène ancien, le C. oblunqum paraît beaucoup plus rare : c'est donc une forme essentiellement autochtone et méditer- ranéenne, qui ne commence à se développer que dans le Calabrien (Monte Mario, Carrubbare, Porto Empedocle, Vallebiaja) pour atteindre son maximum au Qualernaire et à l’époque actuelle. Quant au C. norvegicum, l'étude de la répartition géographique de ses variétés actuelles offre un certain intérêt ; mais pour les formes fossiles, une telle étude ne m'a guère paru susceptible de conduire à des résultats bien concluants. Mais dans ce sous-genre Lævicardium, on rencontre des formes fossiles qui appartiennent à des phylums tout différents. Tel est le C. cyprium Brocchi, espèce nettement caractérisée et actuellement disparue : elle ne paraît pas avoir survécu au Pliocène ancien, car on ne la voit nulle part citée dans le Calabrien. Au 1 53 millimètres de diamètre antéro-postérieur, 46 millimètres de diamètre umbono-ventral. 420 | LAMELLIBRANCHES Monte Mario, toutefois, M. Cerulli-Irelli a décrit et figuré une forme intéressante restée jusqu'alors inédite, le G. Jeyffreysi Rigacci in sch. ; étant spéciale à ce gisement, cette espèce ne peut nous apprendre grand'chose ; néanmoins, comme elle a de très grandes affinités avec le C. cyprium, elle donne à la faune du Monte-Mario un caractère nettement archaïque. Sous-genre Discors. Les Discors, avec leur ornementation dissymétrique si frappante ont actuellement tout à fait quitté nos mers. Ils étaient relative- ment abondants dans la Méditerranée au Pliocène ancien, repré- sentés par une belle coquille qu’on peut, à la suite de M. Cerulli- Irelli, dénommer C. lævinflatum Sacco — C. pectinatum auct. Cette belle espèce persiste encore dans le Calabrien, au Monte- Mario et à Fauglia près Vallebiaja (coll. de l'Université de Lyon). Dès le Sicilien, elle a déjà disparu de notre mer. Ses descendants vivent probablement dans l'Atlantique tropical ; ainsi ce C. lævin- flatum paraît fort voisin du C. lyratum Sow., connu aux Antilles et découvert aussi aux îles du Cap-Vert (cf. Locard [160], t. IE, p. 269). Sous-genre Nemocardium. Ce sous-genre est représenté dans le Pliocène ancien par le G. striatulum Brocchi, espèce qui est relativement commune : elle n’y a que peu survécu dans le Calabrien : on n’y connaît en tout que deux valves provenant du Monte Mario : c'est donc encore une de ces formes éteintes, essentiellement pliocènes anciennes, mais persistant encore localement dans le Pliocène supérieur. Conclusions. En résumé, et si l’on a égard surtout au parti que l’on peut tirer de ces Cärdium au point de vue stratigraphique, on peut y dis- -tinguer : I. — Des groupes absolument spéciaux au Pliocène (s. 1.), fré- quents au Pliocène ancien, et dont l'extinction s'achève au cours du Calabrien, tels sont les sous-genres Trachycardium, Discors et Nemocardium, et le Parvicardium hirsutum. CHAMIDÉS 421 IL. — Des espèces ayant donné, au cours du Pliocène et du Qua- ternaire, quelques rameaux latéraux utilisables en stratigraphie : par exemple, les C. aculeatum, paucicostatum, avec le rameau var. Bianconiana spécial au Pliocène (s. 1.), — et le C. echinatum avec le type et la var. propexa, abondants dans le Quaternäire médi- terranéen. III. — Des espèces stables ayant traversé le Pliocène et le Qua- ternaire sans changements appréciables : C. erinaceum, C. tuber- culatum, C. hians, C. oblungum-norvegicum. IV. — Des espèces « affolées », à variations multiples et inco- hérentes, soit qu'il s'agisse d'adaptations locales /C.edule), soit qu'on ait affaire à de petites espèces encore mal différenciées, à caractères ancestraux (nombreux Parvicardium)). CHAMIDÉS Malgré l'extrême polymorphisme que les Chames doivent à leur vie fixée, il est néanmoins possible d'y suivre assez nettement un certain nombre de phylums distincts; comme l'ont remarqué MM. Sacco ey Cerulli-Irelli, qui ont fait de ce groupe une soigneuse étude, les espèces sont beaucoup plus faciles à délimiter que l’on ne pourrait s’y attendre, d'après la grande confusion qui règne dans leur nomenclature. Prenant pour point de départ les descriptions spécifiques données par ces auteurs, je supposerai connues les formes les plus classiques. Les Chama des faunes récentes peuvent se répartir en deux séries, dextrorse et sinistrorse, inverses l’une de l’autre. Et, bien qu à une forme donnée de la première série, on puisse faire corres- pondre parfois (par la taille, la nature de l'ornementation) une forme équivalente dans la deuxième, néanmoins je ne crois pas qu'il faille voir là un dimorphisme ; conformément à l'avis exprimé par M. Sacco!, il me paraît probable que ces deux séries ont dû évoluer indépendamment l’une de l’autre. 1° Série sinistrorse. Cette série est actuellement représentée dans la Méditerranée par la Chama gryphina Lmk., forme bien connue. La C. gry- 1 À propos de la C. gryphoide s [13], fase. XX VII, p. 66. 422 LAMELLIBRANCHES phina est très abondante dès le Pliocène ancien, et, à côté du type actuel, on rencontre là une variété major, qui semble disparue maintenant ; en effet, tandis que cette variété fossile atteint 8 centi- mètres de diamètre, la forme actuelle ne dépasserait pas 40 milli- mètres (Locard) ou 32 millimètres (B. D. D.); ce type de grande taille semble avoir persisté jusque dans le Calabrien (Monte Mario, d’après M. Cerulli-Irelli [32 |). 2° Série dextrorse. Le type actuel de cette série est la G. gryphoides L., si com- mune partout dans la Méditerranée. Cette forme de petite taille se rencontre dès la base du Pliocène et semble n'avoir guère varié depuis. Mais on trouve aussi au Pliocène ancien d’autres Chames dextrorses qui, par leur ornementation et aussi leur plus grande taille, se différencient nettement de la C. gryphoides ; il faut, avec M. Sacco!, leur restituer le nom de GC. placentina Defrance. Les caractères différentiels de cette espèce ont été bien précisés par MM. Cerulli-Irelli et Sacco; je me contenterai de les résumer d’une manière schématique, en disant que c’est l'équivalent dextrorse de la C. gryphina, var. major. Il est bien évident, en tout cas, que c’est là un type disparu de la Méditerranée, où il n'existe plus aucune Chame dextrorse atteignant une aussi grande taille. Cette grande Ch. placentina typique est encore abondante dans le Calabrien; elle y est connue, en effet, au Monte Mario, à Valle- biaja et à Fauglia (Coll. de l’Univ. de Lyon); je l’ai récoltée per- sonnellement à Vallebiaja et, dans l'Italie du Sud, à Monosterace, Santa Maria di Catanzaro, Poe to Empedocle. Elle est également en connue dans le Sicilien, et j en figure ici un exemplaire du Monte Pellegrino. — Enfin, je l’ai rencontrée dans le Quaternaire des environs de Civita-vecchia (gisement de la Casa Campanoro ?), c’est-à-dire dans des formations antérieures aux couches à Strombes et qui doivent être à peu près contemporaines 1 Voir la synonymie dans cet auteur |13]. ? M, Dautzenberg a bien voulu me confirmer la délermination de ces échantillons. CHAMIDÉS 423 du Sicilien. J'ai cru également reconnaître la même espèce dans le Quaternaire (niveau de 60 mètres) d'Oran (voir plus haut, p. 326) Ainsi, cette C. placentina peut être retenue comme une des espèces éteintes caractéristiques du Calabrien et du Sicilien. Mais il subsiste encore dans les mers actuelles quelques rares formes sur lesquelles je voudrais rappeler l'attention, car elles me paraissent représenter un rameau latéral de ce phylum de la C. placentina. Tel est le cas pour la G. circinnata (Monterosato{), et pour la G. Nicolloni (Dautzenberg ?) ; la première de ces deux espèces, généra- lement méconnues, est rare dans la zone corallienne de la Méditerranée ; la deuxième n’a été citée que dans l'Atlantique, et d’ailleurs, comme a bien voulu me le confirmer M. Dautzenberg, elle est extrêmement voisine de la forme méditerranéenne. Ce sont de petites coquilles qu’on pourrait presque appeler des C. pla- centina, var. minor : elles possèdent en effet l’ornementation de la C. pla- centina, c'est-à-dire de grosses lamelles concentriques foliacées, mais leur taille, plus petite, est à peu près celle de la C. gryphoides. J'ai rencontré des formes de ce groupe dans le Calabrien de Musalà et surtout de Brucoli, près Syracuse, où elles sont extrêmement abon- dantes ? : j'en figure ici. Ainsi, dès le Pliocène, à côté du phylum principal constitué par la C. placentina, venant s’éteindre par des formes de grande taille dans le Quaternaire‘, il existerait un rameau latéral, représenté par des formes de petite taille et conduisant à la C. circinnala de la Méditerranée et à la C. Nicolloni de l'Atlantique. ! Di Monterosato, 1878 (Enumerazione e sinonimia, ete., p. 11). ? Dautzenberg, 1892 (Bulletin de la Société des Sciences nat. de l'Ouest de la France, Il, p. 133, fig. 1-5); voir aussi les excellentes figures de Locard [160), t. I, p. 273, pl. XIII, fig. 1-4. C'est à tort, me semble-t-il, que MM. Dollfus et Cotter ([x23], p. 49) assimilent la C. Nicolloni à la C. gryphina, var. inversa Bronn, figurée par M. Sacco |13], car ces deux formes sont inverses l'une de l’autre. 3 J'avais d'abord rapporté mes échantillons à la C. Micolloni ; mais M. Dautzenberg a bien voulu les examiner et me confirmer leur identité plus spéciale avecla C. cir- cinnata,tout en me faisant remarquer les affinités très étroites de ces deux espèces. * Faute de matériaux de comparaison, je ne puis qu'indiquer ici l'hypothèse sui- vant laquelle la C. yataron (Dautz., 1891), forme sénégalienne, représenterait le sur- vivant actuel, en dehors de la Méditerranée, du phylum de la C. placentina. A4 LAMELLIBRANCHES ACIUELE EE Co (r.) (e. c.) Quaternaire . (c.) (r.) (c.) | Calabrien .. (c.) (r.) (c.) C. circinnata (c.) (c.) Pliocène anc. C. gryphina C. gryphina GC. placentina C. gryphoïdes (c.) var. major (cc) (c.) (& @) | | | rec MO le sl. Série sinistrorse Série dextrorse ISOCARDIIDÉS Isocardia cor L. Cette belle espèce est répandue partout dans les facies de vases sableuses el argileuses à Chlamys opercularis, et manque dans les for- mations strictement littorales : ainsi, elle ne se trouve pas dans la faune, si riche par ailleurs, des couches à Strombes de Tarente. La seule forme qui me paraisse mériter d’être signalée est celle figurée par M. Cerulli-Irelli [32] au Monte Mario sous le nom de var. Margeriana Cocconi; cette variété, qui me semble caractérisée surtout par ses crochets très proéminents, très massifs, bien détachés, peu couchés, se retrouve identique dans les couches de Girgenti, contempo- raines de celles du Monte Mario. Peut-être aurait-elle des affinités avec la var. hibernica Reeve, vivante dans les mers du Nord, et avec la var. alla, que Locard | 160] déclare être plus spéciale aux mers du Nord. Mais il s'agit là de nuances tellement peu marquées que je me borne à les signaler sans en tirer de conclusions. CYPRINIDÉS Cyprina Islandica L.t. Cette espèce doit surtout sa célébrité à sa grande fréquence dans le Sicilien de Palerme : c'est une forme de grande taille, très facile à reconnaître, tout à fait étrangère à la faune méditerra- néenne actuelle, et dont l'identité avec l'espèce vivante dans les mers du Nord (en laissant de côté des questions de nuances sur lesquelles je reviendrai) est facile à constater sans connaissances conchyliologiques spéciales. 1 Voir les planches hors texte. CYPRINIDÉS 125 Je commencerai par énumérer les gisements où cette espèce a été signalée dans la Méditerranée occidentale, et J'étudierai ensuite les principales variations, d’ailleurs peu importantes, qu'elle y présente. Gisements de la G. Islandica. La présence de notre espèce dans le vrai Pliocène ancien ne peut pas être confirmée d’une manière tout à fait certaine. Les . gisements pour lesquels la question se pose, sont les suivants : 1° L'lalie du Nord. — Nous avons déjà examiné plus haut (p. 312) ces gisements et constaté les divergences d'opinion des auteurs à leur sujet. M. Sacco [15] a décrit et figuré des C. islandica typiques, provenant du Plaisancien et de l’Astien du Plaisantin,où elles ne seraient pas très rares J'ai pu étudier moi-même, dans les collections du Laboratoire de Géologie de l'Université de Lyon, plusieurs exemplaires provenant de Fossetta, Grizzaga, Bagalo. Par contre, M. de Stefani, après avoir confirmé l’exis- tence de l'espèce dans l’Emilie, considère que toutes ces Cyprines pro- viennent de couches stratigraphiquement supérieures au Pliocène ancien, et il semble bien, comme nous l’avons vu, que des travaux récents lui aient donné raison. De sorte que l’on ne peut souscrire définitivement aux conclusions de M. Sacco, qui affirme ici la présence de la Cyprine dans le vrai Pliocène ancien. ; 2° La terre d'Otrante.— J'ai déjà signalé (p. 148), d’après de Franchis, la présence de la C.islandica dansles mollasses calcaires à facies « materin » qui forment, dans la terre d’Otrante, la base de la série pliocène. Mais, ici, le Pliocène ancien est certainement d'épaisseur très réduite, et il se pourrait bien que, en certaines localités tout au moins, une partie de ces mollasses fût d'âge calabrien. Toutefois, là, il paraît possible que la Cyprine ait vraiment vécu en même temps que la faune typique du Pliocène ancien. 3° Le Pliocène d'Alger. — MM. de Lamothe et Dautzenberg [152| ont récemment signalé la Cyprine dans les marnes du Sahel d'Alger, et s’il fallait prendre leur citation absolument à la lettre, il n'y aurait pas de doute sur l’âge pliocène ancien de ce gisement!. Mais on peut admettre que, là comme dans l'Emilie, l'attention n'a pas été suffisamment attirée sur la possibilité de distinguer dans le Pliocène plusieurs faunes succes- sives ; et si la Cyprine provient de couches stratigraphiquement supé- 1! En particulier, ces auteurs citent la C. islandica et l'Amussium cristatum dans le même gisement de « El-Achour ». 126 LAMELLIBRANCHES rieurés, on pourrait croire que ces couches appartiennent au Calabrien. Ici, encore, il reste donc quelque doute. Mais, en tout cas, même en admettant que tout ou partie de ces citations se rapportent vraiment au Pliocène ancien, la présence de la C. islandica dans cet étage n'en resterait pas moins un fait exceptionnel, limité à une sorte de province sud-méditerranéenne, plus ouverte aux influences atlantiques. Pour le Calabrien, les citations de la GC. islandica deviennent très nombreuses. Elle est bien connue à Vallebiaja!, où je l’ai moi-même récoltée : au Monte Mario, elle est relativement commune ; une bonne partie des cita- tions de la terre d'Otrante doivent se rapporter au Calabrien ; dans la Basilicate, elle est connue à Pistieci ; M. Crema l’a trouvée à Castrovu- lari, et les gisements de la Calabre sont très nombreux : elle abonde à S. Maria di Catanzaro (voir p. 35); à Monosterace, G. Seguenza [206] la signale comme rare, et je l'y ai moi-même retrouvée. Le même auteur la cite à Carrubbare, à S. Cristina d’Aspromonte, etc. En Sicile, G. Seguenza l'a récoltée à Vaso, Barcellona, Castroreale ; M. di Stefano la signale à Sciacca, et nous l’avons vue à Girgenti. Dans le Sicilien, elle apparaît partout où cet étage se présente sous un facies suffisamment profond pour permettre son dévelop- pement : A Ficarazzi, on la récolte avec une abondance extraordinaire : au Monte Pellegrino, elleest plus rare, car elle prospère plutôt dans les facies sablo-argileux que dans les eaux calcaires. À Balestrate, Castellamare et Rosarno, elle est au moins aussi abondante qu’à Ficarazzi : je l'ai ren- contrée également dans les argiles bleues de Gallipoli. Enfin, plus au Nord, elle se retrouve dans le Sicilien de Livourne : et elle est parmi les coquilles les plus caractéristiques du curieux gisement sous-marin que nous avons signalé plus haut (p. 340) sur les côtes françaises, au large de Banyuls. Enfin, avant les couches à Strombes, la C. islandica a définitive- ment quitté la Méditerranée : elle est actuellement fréquente dans les mers du Nord. ! Aussi est-ilétonnant de ne pas la voir signalée dans le travail de Busatti [27]. Re Ce RE # ire _ CYPRINIDÉS 427 Sa station la plus méridionale paraît être le golfe de Cadix, où le Travailleur l'a draguée par 103 mètres de profondeur (cf. Locard [160]); d'ailleurs, comme la plupart des coquilles septentrionales, elle semble se rencontrer à des profondeurs croissantes, à mesure qu'on des- cend vers le Sud; et, à l’état fossile, c'est encore au Monte Mario et à Vallebiaja que paraissent être ses gisements les plus littoraux,. Variations de la C. Islandica. Dans ce qui précède, nous avons admis l'identité spécifique de la coquille fossile dans la Méditerranée avec l'espèce linnéenne vivante dans les mers du Nord; ce fait a parfois été contesté. Je me contenterai, à ce sujet, de renvoyer aux études spéciales très approfondies de M. Cerulli-Irelli [32] et surtout de M. de Franchis ;70]. J'y ajouterai seulement que la comparaison directe des formes fossiles italiennes avec les nombreux échantillons vivants de la Collection Dautzenberg m'a convaincu, comme ces auteurs, du grand polymorphisme de l'espèce vivante, et de l'impossibilité absolue d'en séparer les individus fossiles dans les pays méditerra- néens. Aussi me semble-t-il particulièrement étrange de voir, dans la dernière liste des fossiles de Palerme dressée par M. di Monte- rosato [114], la Cyprine rangée au nombre des formes éfeintes, sous le nom de C. æqualis Sow. Mais, une fois constatée cette identité spécifique, on peut signaler, dans les formes fossiles, tout comme dans l'espèce vivante, d'assez notables variations. D'une manière générale, les formes les plus anciennes sont de plus petite taille et à contour arrondi. C’est le cas pour les Cyprines de l'Italie - du Nord, que M. Sacco a appelées var. plio-rolunda. À Vallebiaja, les formes arrondies subsistent aussi, comme le montre la figure donnée ici; et au Monte Mario, M. Cerulli-Irelli en a fait une variété suhbrotunda. Mais il est juste d'ajouter qu'au Monte Mario même, à Girgenti, et surtout à S. Maria di Catanzaro (voir la figure ci-après), on trouve des formes bien plus transverses. Au Sicilien, l'espèce atteint son maximum de développement dans la Méditerranée : certains individus de Ficarazzi ont une taille supérieure à celle de tous leurs prédécesseurs dans le Pliocène ; en même temps le galbe s’allonge et les extrémités deviennent presque pointues: c'est une véritable forme {ransversa !. 1 De toutes les formes de Cyprines, celle de Ficarazzi, rapportée par M. di Monte- 428 LAMELLIBRANCHES Gonclusions. On peut donc résumer de la façon suivante l’histoire de la C. islandica. \ Son centre de développement a été la mer du Nord, où elle est très fréquente dans le Pliocène anglais et belge, accompagnée de formes de passage à des espèces voisines (C. æqualis Sow., C. tumida Nyst), ce qui nous indique un groupe en voie d'évolution active. Son apparition dans la Méditerranée au Pliocène ancien est dou- teuse et elle y demeure en tout cas très rare. Par contre, au Cala- brien et plus encore au Sicilien, elle devient très abondante et aboutit (peut-être par une petite évolution sur place) aux formes géantes et très transverses de Ficarazzi. Après quoi elle quitte la Méditerranée. Elle mérite donc de rester une des formes septentrionales les plus caractéristiques du Calabrien et du Sicilien ; et n'ayant, en tout cas, pas de racines dans le Miocène méditerranéen, c'est à la fois un « immigré » et un « émigré du Nord ». VÉNÉRIDÉS Genre Meretrix (— Cytherea). Le Pliocène ancien nous montre toute une série de grandes et belles Meretrix qui en sont des éléments caractéristiques. Telles sont les : M. (Amiantis) Brocchii Desh., M. islandicoides Lmk., M. gigas Lmk., M. (Gallista) italica Defr. — M. pedemontana Agass., bien précisées par M. Sacco [13]. De toute cette riche faune, je ne connais qu'une seule espèce qui dépasse le Pliocène ancien : c'est la M. Brocchii, que M. Cerulli- Irelli signale comme très rare au Monte Mario. Ainsi, les formes ci-dessus citées seront très importantes au point de vue statigra- phique ; leur abondance sera toujours un signe certain de Pliocène ancien. rosato à la C. æqualis Sow., est précisément celle qui s'éloigne le plus de la figure type de Sowerby; car cette dernière représente une coquille très arrondie, presque globuleuse, VÉNÉRIDES 429 Quant aux deux autres espèces, M. (Callista) Chione L. et M.(Pitar) rudis Poli, elles persistent, sans modifications intéressantes, depuis la base du Pliocène jusqu’à l'époque actuelle. La première, en particulier, acquiert, dès le Calabrien, une abondance extraordinaire et une taille comparable à celle des individus vivants : à Monte Corvo, Musala, Ravagnese, Tarente, elc., ses valves sont éparses par milliers à la sur- face des gisements. Genre Circe (— Gouldia). La C. minima Montagu, espèce vivante et fossile des la -base du Pliocène, abondante partout, n'offre par suite aucun intéret. Genre Dosinia (— Artemis). Ce genre est représenté actuellement dans nos mers par deux espèces, communes à Ja Méditerranée et à l'Atlantique, la D. exoleta L. et la D. lupinus Poli. Beaucoup d'auteurs détachent de cette dernière, à titre d'espèce distincte, la var. lincta Pultn., forme plus spécialement océanique, le type lupinus étant méditerranéen. Je suivrai l'opinion de B. D. D.! [237] qui n'admettent pas de distinction spécifique, en se basant sur l'existence de formes de passage, et surtout sur ce fait que la localisation des deux formes, l’une dans la Méditerranée, l’autre dans l'Atlantique, n'est pas aussi rigoureuse qu'on l’avait cru. Dans le Pliocène ancien, les Dosinia sont encore relativement rares : le genre est alors représenté par : 1°la D. exolela, bien typique ; — 2° une forme géante bien caractérisée, la D. orbicularis Agass.; — 3°un ensemble tres polymorphe, généralement rapporté à la D. lupinus (s. L.); les exemplaires de petite taille sont appelés par M. Sacco var. Philippir Agass., tandis que les plus grands sont rapportés par lui à la var. lincta ; en réalité on y observe plus spécialement une tendance à la Var. ficaraliensis dont nous allons parler. Quant à la vraie D. lupinus, contrairement à l'avis exprimé par Fontannes, elle est beaucoup plus rare dans le Pliocène méditerranéen. Dans le Pliocène supérieur, les choses ne paraissent pas changer beau- coup, à part la disparition des grandes 1). orbicularis. La D. exoleta? 1 Voir l'étude intéressante de De Franchis [70], p. 94. > C'est au groupe de la D. exoleta que me semblent se rapporter les deux espèces nouvelles, D. Portist et D. di Slefanoi, citées au Monte Mario par M. Cerulli- lrelli; elles m'ont paru bien voisines de certaines formes des Crags anglais et 430 LAMELLIBRANCHES continue d'être abondante spécialement dans les facies sableux (Carrub- bare, Musala, S. Francesco, Piscopio, etc.). Et, à la constance de cette espèce, s'oppose toujours le polymorphisme de la D. lupinus; mais ici s'affirme plus nettement (Carrubbare par exemple) la tendance vers la var. ficaratiensis que nous allons voir si abondante dans le Quaternaire. Partout en effet, dans le Sicilien sablo-argileux, à Ficarazzi, à Rosarno, à Balestrate, à Livourne (Coll. Lab. Géol. Univ. Lyon), on peut récolter par centaines une Dosinia de grande taille, généralement déterminée comme D. lincta. Mais, après avoir comparé directement des échantillons de Ficarazzi avec les nombreuses Dosinia vivantes de la Collection Dautzenberg, il nous a semblé que la forme sici- lienne figurée ici se différenciait du type océanique actuel par sa taille constamment plus grande, son contour plus circulaire, sa forme plus bombée, son ornementation plus vigoureuse : provisoirement tout au moins, j'en ai donc fait une var. ficaratiensis !, qui s’écarte plus encore de la lupinus tvpe que ne s'en écarte la vraie lincta. Les ressemblances de cette var. ficaratiensis sont en tout cas bien plutôt avec la forme océanique actuelle qu'avec le type méditerranéen, de sorte qu'on peut la considérer comme une « forme à affinités atlantiques. » Cette D. ficaratiensis est, comme je l’ai dit, déjà représentée dans le Pliocène ; mais elle n’y montre ni la grande taille, n1 le dévelop- pement numérique qu’elle atteint au Sicilien, spécialement dans les facies un peu profonds. Je l’ai pourtant rencontrée dans le Qua- ternaire plus littoral de Milazzo et de Ravagnese, où elle voisine avec la D. exoleta et avec la D. lupinus type, apparaissant ici (d’après mes récoltes) pour la première fois 2. belges, et il y aurait lieu aussi de les comparer aux espèces vivantes du Sénégal: D'ailleurs, étant représentées chacune par un unique échantillon, on ne peut en tenir compte en stratigraphie. ! M. di Monterosato m'a envoyé quelques échantillons du Monte Pellegrino con- sidérés par lui comme une forme éteinte, qu'il appelle « Artemis lincta var. coarc= lala Brugnone miss. »; ces échantillons ne me paraissent différer des Dosinia de Ficarazzi que par leur forme un peu plus haute par rapport à la largeur; il nya pas là de quoi motiver la création d'une variété spéciale. ? MM. Flick et Pervinquière [124] ont signalé dans les couches à Strombes de Monastir l'existence de deux for mes sénégaliennes, le Cotan et le Dosin d'Adamson- La première n’est qu'une variété de D. exoleta, à peine distincte du type ; quant à la deuxième, que vient d'étudier récemment M. Dollfus ([122], pl. II, fig. 19-20); elle serait, par « sa lunule polie et sans rides », assez différente des espèces médi- terranéennes, mais il n’est pas prouvé que ce soit bien elle qui se rencontre dans les couches à Strombes. ", à TER 7 VÉNÉRIDÉS 431 Au point de vue stratigraphique, l'abondance de la D. lupinus var. ficaraliensis au Sicilien peut donc être considérée comme un des traits importants de la faune de cette époque : AICuel 0-70 (c.) var. lincta (c.) (Atlantique) | Quatern. sup. D. lupinus (r.) (c.) (type) (e?) Sicilien var. ficaraliensis (cc) (c.) sens a | Calabrien . . . .(c.) pl. var. Pliocène anc.. aff. ficaraliensis D.exolela D.orhicularis | Groupe dela D. lupinus Genre Venus. Groupe de la V. (Chamelæa) gallina L. Cette espèce méditerranéenne vivante est déja représentée dès la base du Pliocène et y montre le même polymorphisme qu'actuel- lement. Ce sont surtout les caractères de l’ornementation qui sont intéressants à étudier. Dans la forme {ype, la coquille est couverte de bourrelets aplatis et irréguliers, souvent bifurqués dans la partie médiane ou postérieure. Dans les formes vivantes laminosa Laskey, striatula da Costa, ces bourre- lets sont remplacés par des lamelles minces et plus régulières : ces formes ont souvent été considérées comme des espèces distinctes, mais B. D. D. [237] ont montré qu'on rencontrait tous les passages au lype, et qu’il était impossible de voir là autre chose que de simples variétés. Dans tout le Pliocène et le Quaternaire, on rencontre ces deux formes, el la var. laminosa est même spécialement bien représentée à l’état fossile : il faut y rapporter la V. rhysalea de Fontannes, la V. Philip- pii de Mayer, comme l’a indiqué M. Sacco |13]. Au Monte Mario, M. Cerulli-lrelli a repris pour cette forme le nom de V. lamellosa Ray- neval' (1854); pour lui on aurait là une véritable espèce distincte, répandue dans le Pliocène, le Calabrien, et peut-être, dit-il, le Sicilien de Palerme. A Ficarazzi, M. di Monterosato cite cette forme sous le nom de 1! Non V. lamellosa Defrance, 1818 (Cytherea) — V, multilamella Lmk. 432 LAMELLIBRANCHES V. gallina var. laminosa, et à S. Flavia [117] il signale des formes ana- logues comme V. Philippii Mayer. Personnellement, j'ai constaté l'abondance extrême de ces variétés lamelleuses, identiques à la forme du Monte Mario, dans le Calabrien des collines livournaises, dans le Sicilien de Rosarno et de Balestrate, dans les couches à Strombes de Ravagnese, où l’on trouve aussi tous les pas- sages à la forme type. Mais en acceptant, ce qui me paraît très naturel, leur réunion aux variétés vivantes du type laminosa, elles perdent beau- coup de leur intérêt stratigraphique. Je remarquerai seulement qu'à l'époque actuelle, ces variétés lamelleuses seraient, d’après B. D. D. [237], plus spéciales à l'Atlantique. D'ailleurs, à l’état fossile, la répartition de ces variétés paraît surtout liée aux facies, sans aucune considération d'âge. Ainsi dans le facies franchement sableux d’Altavilla (Pliocène ancien) et dans les « pan- chine » littorales quaternaires, c’est l’ornementation type qui domine, landis que, dans les formations argilo-sableuses fines, on trouve surtout les formes à ornementation lamelleuse délicate. Groupe de 1a V. (Ventricola) verrucosa L. La V. verrucosa, espèce plutôt littorale, est extrêmement abon- dante, dans tous les dépôts à facies peu profond, depuis le Pliocène ancien jusque dans les mers actuelles. À première vue elle semble- rait plus abondante dans le Quaternaire, mais cela tient à ce que la plupart des formations connues de cet étage sont littorales. Cette espèce est donc sans intérêt pour nous. Mais à côté d'elle, vivait dans la mer pliocène une forme voisine, quoique bien caractérisée, la V. excentrica Agass.; et ce rameau latéral, spécial au Pliocène ancien, nous fournit donc un fossile caractéristique important. Groupe de la V. (Ventricola) casina L. Cette espèce est peu commune dans le Pliocène ancien et dans la Méditerranée actuelle; mais je l'ai récoltée en très grande abon- dance dans beaucoup de gisements calabriens, et elle m'a paru présenter des variations intéressantes. Dans les gisements classiques du Pliocène ancien, notre espèce est encore mal caractérisée et montre des tendances diverses : il est probable que l’on est là tout près de la souche même de l'espèce, VÉNÉRIDÉS 133 et que l’on a affaire à des formes ancestrales à caractères synthé- tiques. Ainsi, les rares formes figurées par M. Sacco [13] sous le nom de V. casina sont bien peu caractéristiques : en particulier ses fig. 2, 3, 4 (pl. IX, fasc. 28) me paraissent devoir être rapportées à des variétés _ lamelleuses de V. gallina!. Dans le Roussillon, c’est à ce groupe de la V. casina que l'on devra rapporter la V. Depereti Fontannes, espèce très rare qui offre une grande analogie avec la V. mullilamella, dont elle diffère pourtant par l'absence du petit dentelon antérieur sur la valve gauche, dentelon si caractéristique de cette dernière espèce. À Castellar- quato, on retrouve (voir la figure donnée ici) une forme identique à la V. Depereli, présentant elle aussi les plus grandes analogies avec la V. mullilamella. Dans l'Italie du Sud, notre espèce est également rare au Pliocèneancien. Je ne l’ai trouvée qu'à Gallina (0.) et à Terreti. Dans ce dernier gisement, elle est très typique et présente même déjà une tendance à la var. crassa, dont nous allons parler ; à Gallina, au contraire, on a des variétés un peu aberrantes, où la dent cardinale médiane de la valve droite est assez nettement bifurquée, en même temps que la valve gauche montre un léger indice du petit dentelon supplémentaire de la V. multilamella. D'après ces observations, on peut donc supposer que la V. casina a commencé à se différencier au Pliocène ancien ?, aux dépens de formes ancestrales voisines de la V. mullilamella. Au Calabrien, l'espèce prend immédiatement un bien plus grand développement et montre d'autres variations intéressantes, qui paraissent d’ailleurs étroitement dépendantes des facies. Dans les graviers grossiers, mais coralligènes, du Calabrien de l'Italie du Sud, la coquille, très aplatie, acquiert une grande soli- dité et une énorme épaisseur: l’ornementation devient très grossière; les lamelles, couchées vers les crochets, se soudent complètement à la coquille de façon à former de larges cordons aplatis qui rap- pellent l'ornementation de la V. fasciata: j'ai rencontré cette forme, que j appellerai var. crassa, dans les gisements de Brucoli, Monte 1 M: Sacco en indique lui-même l’analogie avec la V. lamellosa R. E. P. dont nous avons parlé plus haut. ? Les citations de l'espèce dans le Miocène me paraissent se rapporter à des formes très différentes du véritable type. Gf. la mut, asthena, si bien figurée par MM. Dollfus et Dautzenberg ([241], p. 198). Univ. DE Lyon. — Gicnoux. 28 434 LAMELLIBRANCHES Corvo, Musalà et du Pentimele. Elle me paraît résulter nettement d’une adaptation à la vie dans des eaux agitées, au voisinage des récifs coralliens (Brucoli), ou sur des fonds de graviers grossiers (Musalàa, Monte Corvo). Mais il est intéressant de noter que ses affinités sont plutôt avec les formes vivantes dans l'Océan qu'avec celles de la Méditerranée: on en pourra juger en comparant cette . variété crassa aux exemplaires vivants de différentes provenances figurés par B. D. D. ([237], t. II, pl. 58); ce serait donc là un indice du caractère atlantique de la faune calabrienne. D'ailleurs dans ces mêmes gisements, et en particulier à Musala, on trouve côte à côte avec cette var. crassa des individus à lamelles plus nombreuses, plus fines, mieux détachées, plus foliacées: ce sont les variétés Aradasi B. D. D. et Siciliana Aradas et Benoît: elles prédominent dans les gisements à facies sableux, plus fin, de Monosterace, S. Francesco, Carrubbare, S. Maria di Catanzaro, Nardo, Nizzeti. Quoi qu'il en soit, par son abondance extraordinaire et sa ten- dance à la var. crassa, la V. casina forme un élément important des faunes calabriennes. Au Sicilien, en effet, on ne rencontre plus que des formes très voisines des variétés méditerranéennes vivantes, et l'espèce est devenue bien plus rare. À Rosarno, je n’en ai trouvé qu'une valve et à Milazzo un bel exem- plaire bivalve. Au Monte Pellegrino, on a toujours une forme voisine de la var. Aradasi, mais dans ce facies éminemment calcaire, les lamelles redeviennent plus fortes, bien saillantes et foliacées. Enfin, dans les dépôts plus récents, la profondeur n’est en général les assez erde pour nous permettre de retrouver notre espèce. C’est seule- ment à Ravagnese que j'ai pu en recueillir de beaux échantillons, voisins de la var. Aradasi. La planche ci-après, où sont figurés cinq exemplaires de V. casina, fera apprécier le grand polymorphisme de cette espèce. A partir de la petite forme indifférenciée des marnes plaisanciennes !, on verra se manifester des adaptations diverses, aux eaux agitées coralliennes (Brucoli), aux fonds de graviers grossiers (Monte Corvo), de sables fins (Ravagnese), aux eaux calcaires (Monte Pellegrino). | 1 Remarquer en particulier la région postérieure, qui n'offre pas encore la tron- cature si caractéristique de la vraie W, casina. VÉNÉRIDÉS 435 Groupe de la V. (Ventricola) libellus Rayneval, Van den Ecke, Ponzi. La V. libellus ! est une forme à affinités miocènes, très facile à distinguer de toutes les autres Venus pliocènes. En dehors de l'Italie du Sud, cette espèce est relativement peu commune dans les argiles plaisanciennes de la vallée du Rhône*?, du Var’, de l'Italie septentrionale et centrale et de l'Algérie. Dans l’Astien, elle est encore moins commune; mais elle persiste jusque dans le Calabrien, au Monte Mario, représentée par de rares exem- plaires; c'est de la d’ailleurs que provient le type de l'espèce (cf. Cerulli-Irelli [32] ). En Calabre, je l'ai récoltée dans le Pliocène ancien de Terreti et de Gallina (0.); j'ai pu ainsi l'identifier avec la V. messanensis de Seguenza, pour laquelle l’une des localités types est précisément celle de Gallina (voir les planches ci-après). Seguenza ne figure pas son espece et se contente de la caractériser en ces termes ([206], p. 279) : « Espèce très voisine de la V. effossa par la forme et la sculpture, mais très distincte par sa lunule non enfoncée. » Cette diagnose, un peu sommaire, est néanmoins très suffisante pour faire reconnaître la V. {bellus. Les exemplaires récoltés par moi à Gallina sont parfaitement typiques comme V. libellus ; par suite d’une décortication partielle du test, les cordons arrondis caractéristiques de cette dernière espèce paraissent parfois remplacés par des lamelles saillantes ; mais tous mes échantillons montrent des particularités propres à la V. libellus, et que je considère comme très caractéristiques : présence sur la valve gauche d’un petit dentelon cardinal antérieur (moins développé que celui des Cythérées), dent cardinale médiane de cette même valve nettement bifideÿ, forme arrondie et très globuleuse à l’état adulte, plus transverse et plus aplatie à l’état jeune. La persistance de cette espèce archaïque, actuellement tout à fait 1 MM. Dollfus et Dautzenberg [241], p. 200), ont préféré reprendre pour cette espèce la dénomination de V. cireularis Desh., restée jusqu'alors un simple nom de collection. >? Où elle est citée par Fontannes sous le nom de V. Bronni May., var. comila- tensis Font. 8 Je l'ai reconnue dans des échantillons récoltés à Biot par le commandant Caziot. i Cf. de Lamothe et Dautzenberg [152], p. 500. 5 Voir la fig. 7, pl. IX, fasc. 28, de Sacco [13]. 436 LAMELLIBRANCHES éteinte, jusque dans le Calabrien du Monte Mario et du Détroit de Messine, est donc très intéressante à noter. La V. (Ventricola) effossa Bivona! appartient par son orne- mentation au groupe de la V. libellus, mais elle est bien caracté- risée par sa lunule très enfoncée: c’est une espèce tout à fait isolée, à ce point de vue, et, d’ailleurs, toujours rare. A l’état fossile, je ne connais guère que les citations de Seguenza [206], dans le Calabrien de la province de Reggio, et de M. di Monterosato [115] dans le Sicilien du Monte Pellegrino. Je l’ai moi-même retrouvée dans les couches à Strombes de Tarente, et dans le Calabrien de Brucoli, de Monte Corvo et de Musalà, où elle est relativement abondante. Jen’ y ai d’ailleurs reconnu aucune variation notable, et cette forme bien isolée paraît aussi bien constante, fait général en pareil cas. Dans les mers actuelles, la V. effossa, bien que rare et confinée plutôt dans les zones profondes, paraît cependant avoir une répartition bathymé- trique étendue, puisque le Challenger l’a draguée aux Açores par plus de 800 mètres et le Porcupine sur les côtes d'Algérie entre 9 et 93 mètres. On la signale un peu partout dans la Méditerranée et dans l’Atlantique chaud (côtes d'Afrique, Madère, Canaries, Açores, Sainte-Hélène). Ainsi, complètement inconnue dans le Pliocène ancien de la Médi- terranée, elle apparaît dans le Calabrien de l'Italie du Sud, sans doute par immigration d’origine atlantique; et actuellement elle est en voie de disparition dans notre mer ?. C'est donc un exemple de forme «cryptogène», dont le centre de développement(?) doit se trouver probablement dans l’Atlantique; dans ces faunes tertiaires, où les formes de passage sont souvent trop abondantes au gré des paléontologistes, et où les enchaine- ments d'espèces sont plutôt trop faciles à établir, il est curieux de rencontrer ainsi une espèce à origine aussi énigmatique. V. (Ventricola) multilamella Lmk. Cette espèce a toujours vécu dans les fonds argileux d’une cer- 1 On en trouvera, en particulier, une excellente figure dans Philippi [190]. ? Marion (Ann. du Musée de Marseille, série 2, t. I, fasc. I, p. 170) signale l'abondance de la V. effossa dans les Dardanelles, mais toujours à l'état de coquille morte. VÉNÉRIDÉS PONT taine profondeur, depuis la base du Pliocène jusqu'à l’époque actuelle. Au Plaisancien, c'est un des fossiles les plus fréquents et les plus abondants. A l’Asfien, elle est également très commune, et le demeure encore au Calabrien, partout où le facies est un peu argi- leux (Monte Mario, Vallebiaja, Gravina, terre d'Otrante, Monoste- race, Girgenti, etc...). Au Sicilien, elle se rencontre à Ficarazzi, Balestrate, Castellamare, Rosarno, Livourne. Je ne la connais pas dans les dépôts plus récents, ce qui est dû évidemment à leur manque de profondeur.— Car elle vit ac{uellement, quoique très rare, dans la Méditerranée et dans l'Atlantique lusitanien et africain; depuis le Sicilien elle semble néanmoins en voie de régression. Toutefois, certaines variétés? paraissent propres au Pliocène ancien : tel serait le cas, d’après M. Sacco, pour la V. multilamelloïdes Sacco, var. allernans Bonelli; et il est curieux de remarquer que précisément ces formes anciennes présentent, soit par leur ornementation, soit par la réduction du petit dentelon cardinal antérieur supplémentaire, des affi- nités avec les formes ancestrales de la V. casina signalées plus haut. V.(Circomphalus) plicata Gmel. Cette espèce si nettement caractérisée ne dépasse pas le Pliocène ancien, et est par suite intéressante au point de vue stratigra- phique. D'ailleurs elle vit actuellement au Sénégal * avec beau- coup d’autres de ses compagnes des faunes méditerranéennes anciennes. V. (Timoclea) ovata Pennant. La remarquable extension stratigraphique, géographique et bathy- métrique de cette espèce, l’une des plus abondantes dans tous les gisements, lui enlève tout intérêt à notre point de vue. 1 On voit donc qu’à aucun titre cette espèce ne peut être considérée comme caractéristique du Pliocène, comme on l’a fait parfois, en laissant à la forme vivante le nom de V. nux Gmel. — V. nuciformis Loc. Les coll. du Lab. de Géol. de l'Univ. de Lyon possèdent en particulier un bel exemplaire (envoyé par le D' B. Serradell) provenant des côtes d'Espagne, et absolument identique aux individus les plus grands et les plus typiques des marnes plaisanciennes. >? La V. Boryi Desh., souvent mal interprétée, n'est qu'une variété de V. multi- lamella, comme j'ai pu le constater sur les types provenant de Morée et conservés à l'Ecole des Mines. ÿ Voir à ce sujet Dollfus et Cotter [r23]. 438 LAMELLIBRANCHES Groupe de la V. (Glausinella) fasciata da Gosta. Cette espèce vivante, prise au sens large, se rencontre dès la base du Pliocène; mais on peut arriver à quelques conclusions en descen- dant dans le détail des variétés ou petites espèces voisines. A. — Nous dirons ainsi quelques mots de la V. scalaris Bronn, fossile dans le Pliocène ancien. Certains auteurs (B. D. D. [237)) l'identifient avec une variété vivante de la V. fasciala ; d’autres (Fontannes, Sacco, Cerulli-Irelli) maintiennent la distinction spécifique. Si les seuls caractères distinctifs étaient tirés de l’ornementation, il faudrait se ranger à l’avis de B. D. D.. Mais Fontannes, puis M. Sacco, enfin M. Cerulli-Irelli [32], ont fait remarquer que, dans l'espèce fossile de Bronn, il existait un petit rudiment du dentelon cardinal supplémentaire des Cythérées : c’est un caractère archaïque que nous avons déjà rencontré plusieurs fois dans les formes anciennes. Pour ma part, je l’ai observé d’une manière con- stante dans des exemplaires du Modenais, de l’Astésan, de Castellarquato, du Roussillon, du Pliocène niçois. Donc étant donné: 1° la concordance entre l'apparition de ce petit dentelon et certains caractères d’ornemen- tation ; 2° la localisation stratigraphique de la V. scaiaris, ainsi définie, dans le Pliocène ancien — je crois utile de conserver cette forme à titre d'espèce distincte. Cette V. scalaris est très généralement répandue dans le Pliocène an- _cien : au Calabrien, elle n’est authentiquement connue que par une seule valve au Monte Mario [32]. Tous les échantillons que j'ai pu récolter dans l'Italie du Sud, dans le Calabrien ou dans le Quaternaire, se montrent dépourvus de dentelon antérieur et peuvent se répartir entre les diverses variétés vivantes. L'espèce de Bronn ainsi définie aurait donc une signification strati- graphique précise. B. — On sait qu'actuellement la V. fasciata type est plutôt océani- que, tandis que les variétés méditerranéennes peuvent se grouper autour de la V. Brongniarti Payr.!: que devient cette distinction à l’état fossile ? D'abord, d’une manière générale, la taille est un peu plus petite dans les formes fossiles que dans le type actuel, mais à part cela la distinction des deux races méditerranéenne et atlantique ne semble pas aussi mar- quée qu'aujourd'hui. 1 Voir à ce sujet B. D. D. [237]. VÉNÉRIDÉS 439 Ainsi dans le Calabrien j'ai récolté des V. fasciala à peu près typiques! à Monosterace, Musalà, Monte Corvo, Carrubbare ; au Monte Mario, M. Cerulli-Irelli signale la var. rudis B. D. D., à affinités océaniques, mais néanmoins plus petite que le type. Par contre, dans le Sicilien et le Quaternaire récent, je n'ai rencontré que des formes pouvant rentrer dans le cadre des variétés méditerranéennes. — C’est seulement dans les couches à Strombes d’'Arzeu que le général de Lamothe ([155|, p. 280) signale la forme atlantique. Mais en somme, ces faits n’ont qu'une importance minime au point de vue stratigraphique. Genre Lucinopsis La Lucinopsis undata Forbes et Hanley est une forme vivante, dans la Méditerranée et l’Atlantique ; à l’état fossile, elle est fréquente dans les Crags, et connue aussi dans le Pliocéne et le Quaternaire de l'Italie du Sud; par contre elle semble manquer dans le Pliocène de l'Italie du Nord : ce serait là un des faits mettant en évidence l'isolement précoce, par rapport aux éléments atlantiques, des faunes de la Méditer- ranée septentrionale ; la faune astienne typique apparaît en quelque - sorte comme une faune résiduelle non renouvelée par immigration. Genre Tapes. Les Tapes forment un groupe actuellement en pleine évolution: la preuve en est dans leur abondance et leur extrême polymorphisme. Au contraire, à l'état fossile, ce sont des coquilles plutôt rares: cela tient sans doute en partie à leur habitat, en général localisé dans d'étroites zones littorales, mais aussi, certainement, au fait que c’est un groupe d'apparition récente, et d’origine probablement atlan- tique. Je me bornerai à signaler quelques formes qui m'ont paru intéressantes au point de vue stratigraphique, et qui appartiennent aux deux groupes du Tapes rhomboïdes Pennant et du Tapes aureus Gmel. Groupe du Tapes rhomboides Pennant. Le T. rhomboides est une espèce actuellement répandue surtout dans l’Aflantique; dans le Pliocène méditerranéen, les formes qui 1 Voir les planches ci-après. 4/0 LAMELLIBRANCHES s'en rapprochent sont le T. vetula Basterot et le T. eremita Brocchi. Le T. vetula, souvent considéré (Dollfus [123], p. 20) comme la souche ancestrale du T. rhomboides, me paraît constituer au contraire un rameau latéral qui n’a pas laissé de descendants dans nos mers; les caractères du T. vetula adulte et typique (sculpture, forme allongée et élancée, minceur relative de la charnière, conca- vité du bord dorsal en avant des crochets) ne se retrouvent à aucun degré dans la forme actuelle. La grande espèce de Basterot marque donc le dernier épanouissement d’un rameau latéral qui s'est éteint avec le Pliocène ancien: dans le Calabrien, on ne le retrouve déjà plus. Le T. eremita Brocchi, espèce de petite taille du Pliocène ancien italien, possède au contraire tous les caractères d'une forme ances- trale. Les différences qui existent entre la forme type de Brocchi et le T. rhomboides ont été très bien précisées par M. Cerulli-Irelli et mes observations confirment en tous points les conclusions de cet auteur. Mais entre ces deux espèces tous les passages me pa- raissent exister: dès le Pliocène ancien, on rencontre des formes S (variétés submajor et subedulis de M. Sacco) difficiles à séparer du T. rhomboides !. Dans le Pliocène supérieur, le T. eremita type devient très rare, et au contraire se développent des formes de plus grande taille extrêmement voisines du rhomboides. Toutefois on y observe fré- quemment que la sculpture est formée par des sillons concentriques plus marqués et plus espacés que dans le type ordinaire vivant; c'est le cas pour les coquilles du Monte Mario figurées par M. Cerulli-Irelli; et dans le Calabrien de Girgenti j'ai retrouvé un Tapes tout pareil que je figure ici: je propose pour ces formes le nom de 7. rhomboides var. antiqua; leur sculpture présente quelque ressemblance, d’ailleurs fort lointaine, avec celle du T. vetula, et c’est peut-être ce qui a pu faire croire que l'espèce vivante descendait de ce T. vetula. Il est probable que cette ana- logie est due à une adaptation (réalisée dans les 2 cas) à des facies plus argileux, plus fins, que ceux où vivent d'ordinaire les Tapes. Dans les facies sableux du Calabrien de l'Italie du Sud, on voit 1 MM. de Lamothe et Dautzenberg [152] citent même le T. rhomboides dans le Pliocène ancien d'Algérie ; d'ailleurs ces auteurs ne spécifient pas sil s'agit bien du type ou d'une variété. VÉNÉRIDÉS A1 se développer avec une abondance extraordinaire un grand Tapes qui, par son extrême fréquence, constitue un élément faunique des plus importants au point de vue pratique. C'est une coquille que Je ne saurais séparer spécifiquement du T°. rhomboides. Mais son impor- tance stratigraphique et quelques caractères particuliers m'ont porté à en faire, tout au moins provisoirement, une mulalion spéciale que j'appellerai calabrensis, extraordinairement développée à Carrub- bare, San Francesco, Musala, et que j'ai retrouvée également à Santa Maria di Catanzaro (voir les planches). Les figures données ici la définiront mieux que toute description; on y remarquera tout d’abord sa grande taille : certains individus atteignent jusqu’à 65 millimètres de diamètre antéro-postérieur, dépassant ainsi de beaucoup la dimension (57 millimètres) indiquée par B. D. D. [237] pour leur variété mayor : ils s’éloignent d'ailleurs de cette variété par leur galbe beaucoup plus transverse, rappelant celui du type ou de la var. Lepidula Locard; enfin les sillons concentriques caractéristiques de ce groupe sont bien marqués et assez espacés. Cette variété Calabrensis, appartenant à un groupe plutôt océanique, et ayant en outre des affinités plutôt avec les formes océaniques qu'avec les formes méditerranéennes de ce groupe !, contribue à accentuer le cachet atlantique des faunes calabriennes. Au Sicilien, on retrouve au Monte Pellegrino une forme tout à fait analogue, de taille un peu plus petite; il en est de même, d’après mes propres récoltes, à Balestrate, à Castellamare del Golfo, à Milazzo, à Mortelle près Messine. Dans les couches à Strombes, les coquilles de ce groupe du rhomboides deviennent beaucoup plus rares, et plus voisines du type ou des variétés vivantes; elles se rencontrent à Tarente, à Boveto et Ravagnese, et enfin, d’après le général de Lamothe ([155], pp. 229, 281), en Algérie. La répartition actuelle du T. rhomboides (s. 1.) est encore sujette à controverses. Cette espèce et ses variétés abondent dans l’Atlan- tique: elles ont été parfois citées vivantes dans la Méditerranée (Mac-Andrew, Weinkauff, Locard, B. D. D., ete...); tout récemment le général de Lamothe / loc. cit.) a néanmoins considéré le T. rhom- boides comme exclusivement océanique. Il est en tout cas certain quil est en voie d'extinction dans la Méditerranée. 1 Voir à ce sujet B. D. D. [237]. 44e LAMELLIBRANCHES Au point de vue qui nous intéresse, on peut résumer ainsi l’histoire du groupe. Dans le Pliocène ancien, le T. rhomboides commence à se diffé- rencier aux dépens de formes ancestrales voisines du T. eremita, mais il est encore rare; il reste encore peu fréquent dans le Calabrien de l'Italie du Nord; mais dans l'Italie du Sud, mieux ouverte aux influences de l'Atlantique (où a dû rester constamment le centre de développement du groupe), 1l se développe avec une richesse extrême, aboutissant ainsi aux grandes coquilles de la var. calabrensis. Au cours du Sicilien et des couches à Strombes, il décroît peu à peu dans notre Méditerranée pour venir presque sy éteindre à l’époque actuelle, tandis qu’au contraire il continue à peupler les côtes atlan- tiques. Sans mériter strictement le titre d'«émigré du Nord», puisqu'il a déjà apparu dans la Méditerranée au Pliocène ancien, et qu'il y compte peut-être encore des représentants vivants, le T. rhomboides garde néanmoins dans l’ensemble un caractère nettement océanique; à ce titre son abondance dans le Calabrien, sa présence dans le Sicilien et les couches à Strombes, méritent d'être retenues ici. Groupe du Tapes (Pullastra) aureus Gmel. Ce groupe, actuellement bien représenté à la fois dans l’Atlan- tique et dans la Méditerranée, me paraît être plutôt d'origine atlantique. Le T. aureus, en effet, connu dans le Pliocène de l’An- gleterre, manque dans celui de l'Italie du Nord; il a été cité dans l'Italie centrale; Seguenza ne le signale pas dans le Pliocène de l'Italie du Sud, et je ne l'y ai pas non plus retrouvé : c’est seulement avec le Quaternaire (Milazzo, Tarente) qu'il y devient abondant. Mais je désire surtout appeler l'attention sur d’autres espèces de ce groupe qui me paraissent très intéressantes à notre point de vue. e Il s’agit d’abord du T. senescens Doderlein: c’est une coquille de grande taille, bien caractérisée, et qui se rencontre, peu fré- quemment il est vrai, dans le Pliocène ancien de l'Italie. M. Cerulli= Irelli l’a reconnue au Monte-Mario, où elle est relativement plus. abondante, et en a donné d’excellentes figurations, en y réunissant, à titre de variété, le T. caudatus d’Ancona du Pliocène ancien des environs de Sienne : notre espèce persiste d’ailleurs, dans ce massif VÉNÉRIDÉS 443 du Monte Mario, jusque dans les couches saumâtres qui forment l'extrême sommet de la série pliocène (voir plus haut, p. 292). Au Quaternaire, le T. senescens se continue directement par une forme représentative, le T. Dianæ Requien. Le type de cette espèce, bien figurée par Locard, provient du Quaternaire de l’étang de Diane en Corse! : M. de Stefani a récemment [102] reparlé de ce gisement de l'étang de Diane; il rapproche à ce propos le 7. Dianæ du T. senescens et rappelle que cette coquille a été rencontrée «dans le Quaternaire de l’Hellespont et sur les plages du Chiarone dans la Maremme toscane ». On le retrouve encore dans le Quaternaire récent du Languedoc (voir plus haut, p. 339). Enfin j'ai récolté dans le Quaternaire ancien de Cutro (près Cotrone, gisement de la Casa Campanoro) un fragment qui me paraît indubitablement se rappor- ter à ce groupe du senescens-Dianæ, bien que la disposition du pla- teau cardinal soit quelque peu troublée par une monstruosité acci- dentelle. M. Cerulli-Irelli a fort exactement indiqué les différences qui séparent le T. Dianæ typique du T. senescens typique. Mais en réalité ces diffé - rences ne sont pas absolues : ainsi l’ornementation du 7”. senescens var. caudala d'Anc. rappelle beaucoup celle du 7. Dianæ ; et inversement, il existe des variétés du 7”. Dianæ extrêmement voisines de certains exem- plaires du Monte Mario, comme je m'en suis assuré par la comparaison directe des échantillons. Dans la Méditerranée orientale, Tournouër? avait depuis longtemps déjà signalé le 7°. Dianæ dans les dépôts fossilifères (très probablement calabriens) de Rhodes et de Cos : il constatait en même temps ses affini- tés avec le T. decipiens Dod.=— T.. senescens Dod. et avec le 7”. aureus. Enfin, il est curieux de constater qu'une coquille tout à fait analogue abonde dans le Quaternaire de la Mer du Nord: MM. Victor Madsen, V. Nordmann et N. Hartz décrivent et figurent (Danmarks geologiske Uendersogelse, série 2, n° 17) avec beaucoup de détails un T'apes aureus var. eemiensis (nov. var.), qui est un des éléments les plus caractéris- tiques des couches quaternaires à Cyprina islandica du Danemark et de la ! Requien, Cytherea Dianæ, 1848. — Calaloque des coquilles de Corse, p. 23. — Fig. in Locard, Descriplion de la faune des terrains tertiaires moyens de la Corse, p. 190 et pl. VII, fig. 1, 2, 3. — Cette espèce a été fort inexactement interprétée par M. di Monterosato ([117], p. 4 de l'extr.) qui l'attribue «au genre Dosinia ou Arthemis ». — Voir les figures données ici. > Tournouër, Etude sur les fossiles tertiaires de l'ile de Cos (Annales scienti- fiques de l'Ecole normale supérieure, 2e série;ft. V, 1876). DA LAMELLIBRANCHES Hollande : ils le considèrent à juste titre comme une forme éteinte, qui me paraît, d’après leurs figurations, tout à fait voisine du T. Dianæ. Ainsi cette dernière espèce représenterait, assez pauvrement d’ailleurs, dans la Méditerranée, un rameau spécial plus abondant dans la mer du Nord, et dont l'extinction définitive dans ces deux mers serait extrêmement récente. Au point de vue bathymétrique, les Tapes actuels sont tous Lit{oraux, à l'exception du 7. rhomboides, qui peut atteindre la profondeur de 200 mètres: c’est aussi le seul qui soit un peu largement représenté dans les matériaux que j'ai récoltés. Au contraire, les T°. {Amygdala) decus- satus L. et T. {Pullastra) geographicus Gmel. se montrent localisés strictement dans les formations quaternaires de Mortelle, S. Francesco près Reggio, Milazzo, Capo Castelle, dont ils démontrent le caractère absolument littoral. SERRE sn is GE di 1 À | 4 Le Là PÉTRICOLIDÉS Cette famille n'est représentée dans les faunes méditerranéennes que par une unique espèce, la Petricola lithophaga Retzius, avec de nom- breuses variétés, considérées par Locard comme des espèces distinctes. Comme on la connaît dès le Pliocène ancien, elle est totalement dénuée d'intérêt pour nous. À REA y dote 1 UNGULINIDÉS Genre; Diplo donta On retrouve seulement, dans le Pliocène ancien, des formes très peu différentes de celles qui vivent encore aujourd'hui dans la Méditerranée; à plus forte raison en est-il de même au Calabrien et au Sicilient. M. Cerulli-Irelli a, il est vrai, rangé parmi les espèces éteintes du Monte Mario la D. artastea Nyst ; mais cette coquille est bien voisine de la D. trigonula Broun?, à laquelle M. Sacco la rattache à titre de variété: + Son importance au point de vue stratigraphique me paraît donc tout à fait secondaire. rs 1 G. Seguenza a rapporté avec doute à la D. Savignyi Vaillant, espèce vivante | dans la mer Rouge, une unique valve récoltée par lui dans les couches à Strombes… de Boveto. Cette forme m'est inconnue et je n'ose tenir compte ici de cette citation. Ê ? Impossible à séparer de la D, apicalis Philippi, forme vivante méditerranéenne. à LÉ PSAMMOBIIDÉS 445 Je me bornerai donc à une seule remarque, c’est que l'espèce la plus commune du genre, la D, rotundata Montagu, paraît en voie de décrois- sance dans la Méditerranée. Car, tandis qu'elle est extrêmement abondante dans le Pliocène, le Sicilien (Palerme), les couches à Strombes (Tarente), elle est devenue moins répandue dans notre mer; on sait d’ailleurs que sa répartition dans l'Atlantique estfort vaste, Genre Axinus Ce genre ne nous fournira non plus aucune forme caractéristique, car les A. flexuosus Montagu et A. biplicatus Philippi, assez répandus dans le Pliocène et le Quaternaire, vivent encore actuellement, bien qu'ils semblent devenus plus rares. Au Monte Mario, M. Cerulli- Irelli a décrit deux nouvelles formes, À. suborbiculatus et A. reticu- latus, dont la deuxième surtout est fort bien individualisée ; mais comme ce sont des espèces nouvelles, basées sur un ou deux échantillons, elles n'ont qu'un intérêt purement paléontologique. DONACIDÉS Les matériaux que j'ai eu l'occasion d'examiner ne me permettent de formuler aucune conclusion intéressante. Dans l’ensemble d’ailleurs, les Donax fossiles sont toujours assez rares, car leur habitat se réduit à d’étroites zones littorales : c'est seulement dans les « panchine » quater- naires qu'ils deviennent un peu abondants : ils y sont représentés par des formes identiques aux espèces méditerranéennes actuelles, et parmi lesquelles domine le Donax trunculus L. PSAMMOBIIDÉS Il existe dans le Pliocène ancien quelques formes de Psammobia actuellement éferntes : telles sont les P. uniradiata Br., P. (Solenotel- lina) Labordei Bast.;, mais comme elles disparaissent avant le Cala- brien, je me borne à les signaler ici. Les autres espèces de cette famille ne donnent aucune indication strati- graphique. | M. di Monterosato rapporte bien la Diplodonta du Silicien de Palerme à l’es- pèce de Montagu, mais il considère que la forme vivant actuellement dans la Médi- terranée en est différente, et il a proposé pour elle les noms de D. orbiculata Mon- terosato — D. inlermedia Biondi. Ces distinctions qui portent sur de légères variations de galbe me paraissent hors de propos à notre point de vue. 446 LAMELLIBRANCHES SOLÉNIDÉS Dans le genre Solenocurtus, le seul fait à signaler est l'existence au Monte Mario d'une espèce nouvelle, créée par M. Cerulli-Irelli, le S. Monterosatoi; elle est représentée d’ailleurs par une unique valve, et on ne peut lui attribuer aucune signification stratigraphique, d'autant plus que les auteurs sont loin d’être d’accord sur le nombre et les limites des espèces à distinguer dans ce genre. Les Solen et genres voisins sont généralement très difficiles à déter- miner à l'état fossile : je ne vois guère à signaler, pour les terrains que nous étudions, qu’un seul fait : ce serait la persistance, jusque dans le Cala- brien du Monte Mario [32], d'une forme pliocène ancienne figurée déjà par M. Sacco sous le nom de Gultellus cultellus L. var. Olivii Cocconi, Il me semble d'ailleurs que cette forme a de très grandes affinités avec le C. pellucidus Penn. des mers du Nord. Je ne puis qu'indiquer cette interprétation, mais on ne saurait admettre l'existence dans le Pliocène méditerranéen, d'une variété d’une espèce vivant aujourd'hui ES l'Océan indien, comme c'est le cas pour le C. cultellus L. MÉSODESMATIDÉS Les genres Ervilia et Donacilla (an Mesodesma), qui représentent cette famille dans les faunes méditerranéennes, ne nous fournissent aucune donnée intéressante : on verra à leur sujet la soigneuse étude qu'en a faite M. Cerulli-Irelli [32]. MACTRIDÉS HT AUSETRT Genre Mactra. Je me bornerai ici aux remarques suivantes : 1° Les Mactres sont en Ééneral très pauvrement représentées à l'état fossile dans la Méditerranée: leur centre de développement paraît être resté plutôt dans l’Atlantique. Seule la M. (Spisula) subtruncata Da Costa, habitant des zones plus profondes que les autres espèces, est partout 2bondante dans le Pliocène et le Quater- 1 Par contre, la forme figurée par M. Sacco [13], fasc. 29, tav. IV, fig. 20, sousle nom de Phaxas pellucida Penn. est probablement à rapporter au C: fenuis Phil, vivant dans là Méditerranée. MACTRIDÉS 447 naire ; au Calabrien (Monte Mario, S. Francesco) et au Sicilien (Rosarno), elle possède la grande taille et la forme très haute par rapport à la largeur, qui caractérisent actuellement les individus vivant sur les côtes françaises de l’Aflantique et de la Manche. 2° La M. (Spisula) solida L., souvent citée parmi les « émigrés du Nord » des faunes méditerranéennes récentes, mérite une men- tion spéciale. Sa présence dans la Méditerranée actuelle reste douteuse ou, tout au moins, exceptionnelle : la seule citation à retenir paraît être celle de M. di Monterosato!, qui la signale à Malaga. A l'état fossile, elle abonde dans le Pliocèene du Nord de l'Europe et du Portugal?; dans le Pliocène ancien de la Méditerranée elle a été signalée à Castellarquato (Namias) et dans l'Italie centrale (Pantanelli), mais peut-être a-t-elle été confondue avec la M. sublruncala ?. G. Seguenza la cite dans son Saharien infé- rieur (Calabrien) des environs de Reggio“; Philippi l’aurait récoltée à Monosterace, Sciacca, Caltanisetta (Calabrien). Plus certaine est sa pré- sence dans le Sicilien de Palerme (di Monterosato). On voit donc que, depuis la base du Pliocène, la situation ne parait guère avoir changé: la AZ. solida a toujours été rare dans la Méditerranée et ne peut guère être retenue comme une « espèce caractéristique ». 3° M. Bédé [12] a signalé dans les couches à Strombes de Sfax la présence de la M. Largillierti Smith, espèce étrangère aux faunes méditerranéennes et vivant actuellement sur les côtes Ouest d'Afrique. J'ai pu étudier moi-même des exemplaires provenant de cette même localité et les comparer à l'espèce sénégalienne et à la M. stultorum L., espèce vivante méditerranéenne. On reconnaît sur ces exemplaires la striation de la lunule et du corselet, trait si caractéristique de la M. Lar- gillierti ; de même la taille du fossile de Sfax (80 millimètres de diamètre 1 Journal de Conchyliologie, 1898, p. 26. > Cf: Dollfus et Cotter [123]. $ Je laisse de côté la citation douteuse de MM. Almera et Bofill [2] dans le Pliocène de Catalogne. 4 La M. elliptica Brown, espèce voisine ou variété de la M. solida, est citée en Sicile, à Barcellona (probablement Calabrien) par M. de Stefani [101], p. 394. Collection Bédé au Laboratoire de Géologie du Muséum de Paris et collection Allemand-Martin au Laboratoire de Géologie de l'Université de Lyon. 448 LAMELLIBRANCHES antéro-postérieur, au lieu de 60 millimètres dans la M. stullorum) est plus grande que celle de l’espèce méditerranéenne ; par contre, les cro- chets restent néanmoins moins proéminents que dans la forme du Séné- gal. On en jugera par les figures données ici. Il semble donc bien que l'on puisse maintenir la détermination de M. Bédé et considérer par suite la M. Largillierti comme une des espèces chaudes caractéristiques des couches à Strombes; mais je ne l’ai retrouvée nulle part en dehors de Sfax. 4° Enfin J'ai récolté dans les couches à Strombes de Ravagnese une valve gauche d'une Mactra qu'il m'a été impossible d’assimiler (même après l’avoir comparée aux riches matériaux de la Collection Dautzen- berg) à aucune espèce fossile ou vivante dans la Méditerranée ou au Sénégal. Je la figure ci-contre sous le nom de M. Rhegiensis nov. sp., ce qui me dispense d’en donner une très longue de- scription. La coquille est mince, mais solide; le sinus palléal très profond, attei- gnant le milieu de la longueur; les deux dents cardinales sont peu diver- gentes; la dent latérale antérieure est, à son extrémité postérieure, un peu ondulée et plus saillante. Sa forme très allongée la fait distinguer à première. vue de toutes les espèces du genre : elle présente certaines affinités, d’ ailleurs lointaines, avec la M. (Pseudoxyperas) proaspersa Sacco — M. oblunga Millet!, formes miocènes ; la M. emporilensis Almera et Bofll? du Pliocène de Catalogne a, elle aussi, un galbe très allongé, mais elle est bien difficile à apprécier. Bien entendu, jusqu’à nouvel ordre, cette forme ne peut nous donner aucune indication stratigraphique. Genre Eastonia. L’'E. rugosa Chemn., seule espèce de ce genre représentée dans nos faunes, est intéressante comme exemple de forme en voie de . disparition progressive de la Méditerranée. Elle y est encore extrêmement répandue au Pliocène ancien, un peu plus 1 Cf. Sacco [13], fasc. 29, tav. VI, fig. 16-19, et Dollfus et Dautzenberg [241|, p. 14, pl. VI, fig. 22-24. ' ? Cf. Almera et Bofill [2}, table IX, fig. 7. MYIDÉS 149 rare au Calabrien, et dans les couches à Strombes elle n’est connue qu'en Algérie! ; actuellement elle paraît tout à fait localisée au voisinage de Gibraltar et sur les côtes algériennes?, cependant qu’elle continue à pros- pérer sur les rivages atlantiques de l'Afrique. C’est en somme une forme archaïque atlardée. Genre Lutraria. Les deux espèces bien connues L. oblunga Chemn. et L. lutraria L., abondantes partout dès le Pliocène ancien, ne donnent lieu à aucune observation intéressante. CARDILIIDÉS Je me borne ici à signaler la Cardilia Michelottii Desh. Cette espèce est seule, dans le Pliocène italien, à représenter cette famille confinée aujourd'hui dans la région indopacifique. À l'état fossile elle est toujours très rare, mais il importe de remarquer ici qu’elle subsiste Jusque dans le Calabrien au Monte-Mario et à Vallebiaja : la persistance de cette forme, à affinités évidemment très anciennes, comme il résulte de sa répartition géographique actuelle, est donc un argument en faveur du rattachement au Pliocène des couches calabriennes. MYIDÉS Genre Mya. Les Myes ont toujours été des coquilles essentiellement aflan- hques, et il est facile de compter toutes les citations qui en ont été faites dans les faunes méditerranéennes. 1. Mya truncata L. On a signalé cette espèce à l’état fossile dans les seules localités méditerranéennes suivantes : L Bédé [12], de Lamothe [155] et matériaux récoltés à Sfax par M. Allemand-Martin. > D'après M. Meli (Sulla Eastonia rugosa Chemn., ritrovata vivente e fossile nel litorale di Anzio e Nettuno in provincia di Roma, Boll, d. Soc. Malacol. Ital., t. XX, 188), elle formerait encore quelques colonies isolées sur les côtes tyrrhéniennes. ‘ Je laisse entiérement de côté le genre Sphænia qui ne nous montrerait rien d'intéressant. Univ. px Lyon. — Gicnoux, 29 150 LAMELLIBRANCHES 1° La Terre d'Otrante, où elle est très abondante, d’après de Franchis [70], dans les environs de Galatina, et citée aussi à S. Pietro in Lama, par de Giorgi ; ces gisements peuvent être rap- portés au Calabrien ; de Giorgi la signale à Gallipoli, et je crois l'avoir récoltée à Brindisi; dans ces deux derniers cas, il s'agirait de Sicilien. 2° Le Sicilien de Palerme (gisements de Ficarazzi et du Fiume Oreto), où elle n’est point rare. 3° Le gisement sous-marin de Banyuls (SIeONE au large du Cap Creus (voir p. 340). Enfin notre espèce, très abondante dans le Pliocène et le Qua- ternaire du Nord de l’Europe, est actuellement surtout répandue dans les mers polaires et anglaises : ses citations les plus méridio- nales me paraissent être celles de Locard [160] ; le Talisman aurait en effet dragué la A1. truncata dans le golfe de Cadix par 103 mètres et au Cap Saint-Vincent par 36 mètres ; elle arrive done, comme on le voit, tout près du Détroit de Gibraltar. Au point de vue morphologique, les formes de la Terre d'Otrante et de Palerme, les seules que j'aie pu examiner, sont certainement plus voisines de la forme typique des côtes d'Angleterre que de la var. uddevallensis G.-0. Sars; c’est ce qu'avait déjà montré de Franchis pour les exem- plaires de Cie et les figures que je donne ici pour la forme de Palerme m'éviteront d'insister sur cette question, pour laquelle je renvoie au travail de de Franchis [70]. En résumé, la Mya truncata, disparue actuellement de la Médi- terranée, et sans racines dans les faunes indigènes du Miocène et du Pliocène ancien, est une des espèces « émigrées du Nord » les plus caractéristiques des faunes sicilienne et probablement calabrienne : elle manque absolument dans les couches à Strombes. 11. Mya arenaria L. Cette espèce est très répandue dans l'Atlantique, et elle était jusqu'à présent inconnue dans les faunes méditerranéennes. Pourtant, d'après M. Vlès!, elle serait relativement commune dans les environs de Toulon: vivant enfouie dans le sable, à une certaine profondeur, il n’est pas éton 1 Cf. Vlès, Sur la présence de la Mye dans la Méditerranée (Bull. de l’Institut Océanographique de Monaco, n° 94, février 1907). CORBULIDÉS 451 nant qu'elle ait jusqu'à présent échappé aux recherches des conchyliolo- gistes : ce même argument ne vaut plus pour les gisements de fossiles. De sorte qu'il faudrait conclure que la Mye n’est apparue que récemment dans la Méditerranée : ce serait donc un « immigré atlantique » de la période actuelle. Genre Tugonia Ce genre vit actuellement sur les côtes Ouest d'Afrique et de- meure étranger aux faunes méditerranéennes pliocène et actuelle f. Aussi est-1l extrêmement intéressant de rappeler l'attention sur la découverte, faite par MM. Flick et Pervinquière [124], de la T. anatina Gmelin ? dans les couches à Strombes de Monastir. Cette espèce sénégalienne, impossible à confondre avec aucune autre coquille méditerranéenne, sera donc pour nous une des formes chaudes caractéristiques de la faune à Strombes (voir les planches). CORBULIDÉS Genre Corbula. La seule espèce de ce genre qui soit réellement abondante dans les faunes méditerranéennes est la C. gihba Olivi; mais précisément sa grande exlension géographique, bathymétrique et stratigraphique lui enlève tout intérêt à notre point de vue. Il existe aussi dans le Pliocène ancien un autre groupe de Corbules, C. revoluta Br., C. Cocconu Font., représenté actuellement au Sénégal par des formes voisines; ces espèces passent généralement pour éfeinles dans la Méditerranée; mais la C. revoluta a été citée vivante à Palerme par Aradas et Benoît 5], et d'autre part, il existe encore de petites Cor- bules méditerranéennes dont il faudrait reprendre l'étude en les comparant aux formes pliocènes et sénégaliennes. Genre Corbulomya. Si l’on se fiait aux citations, la C. mediterranea Costa, espèce vivante de la Méditerranée, y serait d'introduction récente ; car la citation la plus ! M. de Stefani cite pourtant la T. anatina Gmel. dans le Pliocène méditerranéen, sans indication de localité. > Voir la synonymie dans Dautzenberg [59], p. 145. 5 Cf, B, D, D. [237], p. 582 et Dollfus [122], p. 48. NES EE Le [= ar A52 LAMELLIBRANCHES ancienne est celle de M. Cerulli-Irelli [32] au Monte Mario!; mais la petite taille et la fragilité de cette espèce ont dû la faire méconnaître sou- vent, et on ne peut en tirer aucune indication stratigraphique. GLYCYMÉRIDÉS Genre Panopæa. 1. Groupe de la P. (Glycymeris) glycymeris Born. On a déjà beaucoup écrit sur la nomenclature des diverses formes de ce groupe. Récemment, MM. Dollfus et Cotter [123] ont présenté un excellent résumé de la question; adoptant leurs conclusions, je suis conduit à résumer dela manière suivante l'histoire de ce groupe, en me basant surtout sur les matériaux que j’ai pu étudier. On peut y distinguer deux formes extrêmes: l’une, la P. glycy- meris var. Faujasi Ménard, domine au Pliocène ancien ; l’autre, ou P. glycymeris Born type, vit actuellement dans la Méditerranée et surtout l'Atlantique. La var. Faujasi s'oppose au type, d’abord par sa faille plus petite?, et aussi par son galbe; les extrémités sont arrondies, à contour assez régu- lièrement ovalaire; la partie antérieure du bord cardinal est assez nettement tombante ; au contraire, dans le type, le contour est plus rhomboïdal, car le bord postérieur est nettement tronqué et la partie antérieure du bord cardinal reste bien horizontale et vient se placer dans le prolongement de la partie postérieure de ce même bord. Il'est juste d'ajouter qu’à côté de ces deux formes extrêmes, on observe de nombreuses variations : ainsi les jeunes de l'espèce vivante reproduisent les caractères de la variété pliocène, ce qui indique bien leur filiation ; inversement on trouve déja, dès le Pliocène ancien, des variétés (var. colligens Sacco [13], fasc. 29, tav. XI, fig. 4) qui ont le galbe de la forme vivanteë. ! Elle est connue dans l'Atlantique dès le Pliocène ancien : Cf. Dollfus et Cotter [123]. ? 15 centimètres de diamètre antéro-postérieur pour les plus grands individus figurés par M. Sacco [13] et pour les nombreux et beaux exemplaires du Pliocène du Roussillon existant dans les Collections du Laboratoire de Géologie de Lyon (exceptionnellement, l’un d’eux atteint 18 centimètres). Pour le type, les échantillons des couches à Strombes de Tarente atteignent jusqu'à 22 centimètres, et M: Sacco assure avoir vu des coquilles vivantes de 27 centimètres de longueur. 3% La var. subnorvegica Sacco (loc. cit., fig. 6), peut, au contraire, être rattachée, comme l’a proposé M. Dollfus (loc. cit.), à des rameaux différents vivant actuelle LE 1 arf) (né! +yShsai di 2 à ui es pdt GLYCYMÉRIDÉS 453 A l’état fossile, on trouve le type vivant réalisé dès les couches à Strombes, autant du moins que j'ai pu en juger d’après de nom- breux et beaux exemplaires récoltés à Tarente. Par contre, dans le Calabrien et même encore dans le Sicilien, c'est plutôt la var. Faujasi qui domine, bien que l’on ait déjà un passage au type vivant. Ainsi au Monte Mario, la dimension maxi- mum reconnue dans cette var. Faujasi par M. Cerulli-Irelli est déjà de 19 centimètres; et à Vallebiaja j'ai récolté de magnifiques exemplaires ayant 18 centimètres; dans l'Italie du Sud, le seul fragment déterminable que j'aie pu recueillir provient de Girgenti (gisement de Porto-Empedocle) et appartient aussi à la var. Faujasi. La forme qu’on trouve dans le Sicilien de Palerme a été bien figurée par Philippi {190}, qui l’a rapportée à la var. Faujasi!. Actuellement notre espèce, assez commune dans l’Atlantique sur les côtes du Portugal, est devenue très rare dans la Méditerranée ; les seules citations certaines sont Tarente, Taormina (Weinkauff), Nice (Locard), Cette {Granger); enfin E. Dumas? signale l'abondance des grandes Pano- pées (23 centimètres de longueur) dans un ancien cordon littoral quater- naire entre le Grau de Palavas et Maguelonne, et insiste sur leur absence dans la faune actuelle de la région. Ainsi la P.glycymeris, si fréquente partout dans le Pliocène ancien et supérieur, et encore florissante à l'époque des Strombes, paraît être, depuis une époque très récente, en régression marquée dans notre mer. Elle nous offre un exemple intéressant de forme ayant varié sur place, en augmentant de faille, depuis le Pliocène, mais en somme, comme il arrive le plus souvent en pareil cas, il est bien délicat d'utiliser ces variations en stratigraphie. ment dans les mers du Nord ; il en serait de même, à mon avis, de la forme appelée par Fontannes P. norvegica Spengler, var. artesensis Font., qui ne présente pas la zone déprimée, rayonnant à partir des crochets, si caractéristique de l'espèce de Spengler, et n’a, par suite, rien à voir avec le groupe, tout différent, de la P. nor- vegica. ! Cette détermination avait été d'abord admise par M. di Monterosato [115]; plus récemment [114] cet auteur, prenant pour type la figure de Philippi, en a fait, je ne vois pas trop pourquoi, une espèce nouvelle, sous le nom de P. Phi- lippii Mts. > E. Dumas, Statistique géologique, minéralogique, etc., du département du Gard, vol. IT, p. 653, 454 LAMELLIBRANCHES II. P. (Glycymeris) norvegica Spengler. C’est là une espèce arctique bien caractérisée : actuellement !son centre de développement est dans les mers polaires (mer Blanche, Norvège), d'où elle descend jusque sur les côtes françaises (Finis- tère, d’après Locard). A l’état fossile, elle se rencontre dans les Crags anglais et belges. Dans la Méditerranée, je n’en connais que trois citations : ° Le Sicilien de Palerme, à Ficarazzi, où Philippi l’a le premier figurée sous le nom de P. Bivonæ Phil. ; depuis, M. di Monterosato a reconnu son identité avec l'espèce vivante et elle est devenue bien classique : on verra en particulier les belles figures qu'en donne M. Sacco ([13], fasc. 29, tav. XI, fig. 7). l 2° Le gisement sicilien sous-marin exploré au large de Banyul par MM. Pruvôt et Robert (voir p. 340). 2 3° Le Calabrien de Girgenti, où Stôhr l’a citée dans les grès de la Rupe Atenea et de la ville même de Girgenti (voir plus haut, p. 168) : ici toutefois nous n'avons aucune garantie de l'exactitude de cette détermination?. La P. norvegica est en tout cas sans racines dans les faunes plus anciennes, et totalement disparue de la Méditerranée après le Sici- lien : c’est, à la fois, un « émigré » et un « immigré du Nord », très caractéristique du Sicilien et apparaissant peut-être dès le Calabrien. On pourrait d’ailleurs discuter sur l'identité absolue dela forme vivante avec celle du Crag et avec celle de Ficarazzi. Ainsi, prenant comme point de départ la figure de Forbes et Hanley, je lui ai comparé un bel exemplaire du Crag de Clyde (Ecosse) : ce dernier a le côté antérieur moins arrondi, presque anguleux à sa rencontre avec le bord cardinal; la forme de Ficarazi figurée par M. Sacco est identique à celle du Crag. Par contre, l'individu de Ficarazzi figuré ici est de taille bien plus petite, et le côté antérieur y est beaucoup plus court, de sorte que la coquille paraît plus haute par rapport à la largeur : ce serait la var. borealis Mts. (in sched.). 1 Voir la bonne figure donnée par Forbes et Hanley (pl. XI) pour l'espèce vivante: 2 Dans le Calabrien de Nardo, près Lecce (Terre d’Otrante), j'ai récolté un frag- ment de coquille, avec charnière, où il m'a semblé reconnaître la P, norvegica; tou tefois je n'ose en fenir compte ici, labre LS. GASTROCHÆNIDÉS, PHOLADIDÉS, TÉRÉDINIDÉS 455 Ces variétés ne changent d’ailleurs rien à la signification stratigraphique de l'espèce et par suite ne nous intéressent pas ici. , Genre Saxicava Les coupures spécifiques sont très difficiles à préciser dans ce genre, et je ne crois pas que, depuis la base du Pliocène jusqu'à l’époque actuelle, on puisse y trouver des formes suffisamment caractéristiques au point de vue stratigraphique. Aussi je me bornerai à rappeler que M. di Monterosato, dans son plus _récent travail sur les fossiles de Palerme [114|, cite à Ficarazzi, comme espèce septentrionale actuellement disparue de la Méditerranée, la S. pho- ladis L. Dans ses listes précédentes, toutes les Saxicaves de Ficarazzi étaient rapportées à la S. arclica, espèce méditerranéenne actuelle. Par contre, ce même auteur m'a envoyé récemment une série de Saxicaves de ce gise- ment : les unes sont qualifiées par lui de voisines de la pholadis, tandis que d’autres sont érigées en espèce spéciale sous le nom de S. frigida. En réalité toutes ces formes ne me paraissent pas s'écarter beaucoup du cadre de la S. arclica vivante! (on sait même que Jeffreys fait rentrer dans ce cadre la S. rugosa et la S. pholadis) ; elles sont surtout remarquables par le développement plus grand de la région antérieure. Dans les argiles de Gallipoli, on trouve en abondance une forme ana- logue un peu plus allongée et plus aplatie. Enfin la $. arclica var. saæica- velloides, que M. Cerulli-frelli figure au Monte Mario, me paraît également voisine. Mais au point de vue stratigraphique, je n’ose pas tenir compte de ces variétés et je ne les ferai pas figurer dans mes listes de fossiles carac- téristiques. GASTROCHÆNIDÉS, PHOLADIDÉS, TÉRÉDINIDÉS Ces familles ne peuvent fournir la moindre indication stratigraphique tant soit peu certaine. La seule forme un peu caractéristique que l’on puisse y signaler est Martesia (Aspidopholas) rugosa Brocchi, forme archaïque propre au Pliocène ancien et qui ne pénètre pas dans nos faunes récentes. Cf. Sacco [13]. 1 En particulier elles me paraissent s'éloigner de la S. pholadis des mers du Nord (dont les collections du Laboratoire de Géologie de l'Université de Lyon possèdent de nombreux exemplaires vivants et fossiles) par leur taille plus petite, leurs cro- chets plus proéminents, leurs carènes plus nettes, tous caractères qui les rappro- chent, au contraire, de l'espèce méditerranéenne. 456 * LAMELLIBRANCHES LUCINIDÉS Genre Lucina. Sous-genre Lucina s. str. La L. fragilis Phil. représente ce sous-genre dans notre mer depuis le Pliocène ancien et n'offre aucun intérêt ; je signalerai seulement son abondance dans les couches à Strombes de Tarente, ce qui s'explique par son habitat relativement littoral! (20-40 mètres d’après Weinkauff). Sous-genre Megaxinus. Les Megaxinus étaient abondants au Pliocène : actuellement il n’en subsiste plus qu’une seule espèce, la L. transversa Bronn, de petite taille, fragile, toujours rare; elle est connue depuis le Miocène, et de fait, c'est un {ype ancestral, qui s’est seul conservé, tandis que la plupart des rameaux latéraux du groupe se sont éteints avant le Quaternaire. Les principales de ces formes éteintes, de grande taille et bien caractérisées, sont les L. elliptica Bors. — Azxinus rostratus Pec- chiohi, L. Bellardiana Mayer — L. cunctata Font., et L. incrassata Dubois. Elles sont déjà moins fréquentes au Pliocène ancien qu’au Miocène. Dans le Calabrien, M. Cerulli-Irelli confirme au Monte Mario la présence de la L. elliptica qui y serait extrêmement rare : cette même forme a été signalée par G. Seguenza [206] à S. Cris- tina d'Aspromonte (probablement Calabrien) sous le nom d’Axinus rostratus?; enfin j'ai moi-même récolté dans le Calabrien de Gir- genti un grand exemplaire bien caractérisé de L. Bellardiana. En tout cas, dès la base du Quaternaire, on ne trouve plus dans nos mers que la seule Z. {ransversa, dont la fréquence paraît même avoir diminué depuis le Quaternaire inférieur. 1 C'est à tort que j'ai signalé plus haut (p. 149), d’après de Franchis, la L. Sis- mondæ Desh. parmi les espèces éteintes : en réalité, cette forme est synonyme de la L. fragilis et les exemplaires figurés par de Franchis [70] ne différent du type vivant que par leur taille peut-être un peu plus forte. 2 J'ai noté dans les collections de l'Université de Naples des « Eucina rostrala, du Pentimele », mais ici il est difficile d’affirmer s'il s'agit de Pliocène ancien ou supérieur (voir plus haut, p. 80), TS : LUCINIDÉS 457 Sous-genre Dentilucina. 1° La L. borealis L., forme pliocène et actuelle, ne présente aucun intérêt. On peut noter toutefois qu’elle semble maintenant en régres- sion dans la Méditerranée, tout au moins par rapport au développe- ment exubérant dont elle a fait preuve jusque dans les couches à Strombes (Boveto, Ravagnese). Mais au Pliocène il s'en est détaché un rameau latéral intéressant, la var. persolida Sacco, qui semble avoir eu une existence assez éphémère. Cette L. persolida se distingue de la L. horealis par sa coquille beau- coup plus épaisse, ses valves plus bombées, son ornementation moins régu- lière, ses crochets plus saillants, etc. Il existe d'ailleurs tous les termes de passage, ainsi que j'ai pu le constater dans l’Astien de Strongoli, et même, à vrai dire, le type figuré par Sacco sous le nom de var. persolida ne représente pas le terme extrême de l’évolution de ce rameau. Ces Dentilucines épaisses se montrent confinées dans le Pliocène (comme les Megaxinus épais!) : on les connait dans le Pliocène ancien de l'Italie du Nord (Sacco); je les ai rencontrées à Stron- soli et à Marcellinara, et, d’après M. Sacco, il faudrait y ratta- cher les L. aspromontana Seg. et L. circularis Seg., du Pliocène ancien dela Calabre. Enfin M. Cerulli-Irelli vient d'en décrire une valve provenant du Monte Mario : c'est jusqu'à présent la seule cita- tion calabrienne. 2° La D. Meneghinii de Stef. et Pant.?, parait spéciale au Plio- cène ancien. Il en est de même de la D. orbicularis, très belle coquille de grande taille, extrêmement abondante dans l’Asfien. où elle marque la fin d’un rameau que l'on peut suivre depuis le Miocène. Sous-genre Myrtea La L spinifera Montagu, seule à représenter ce sous-genre dans nos L Il est curieux de constater, en effet, que cet épaississement de la coquille se retrouve dans d’autres groupes de Lucines: ainsi la ZL.(Megaæinus) elliptica est une forme épaisse et géante apparentée à la L. {ransversa au test mince; la L. /Mega- minus) incrassala dérive, de la même manière, de la L. Bellardiana; et ces formes épaisses se rencontrent toutes dans les mêmes conditions d'habitat (en particulier, faunes d'argiles à Pleurotomes). > De Stefani, 1888, Nuov, Moll, Plioc, Siena, p. 191, tav. IX, fig. 27-28, 458 LAMELLIBRANCHES faunes, né montre aucun fait intéressant. On peut remarquer pourtant que, dans le Pliocène supérieur (Castrovillari, Monosterace), le Sicilien {Castellamare), et même les couches à Strombes (Tarente), elle était beau- coup plus fréquente qu’à présent. Sous-genre Jagonia La L. reticulata Poli1, relativement abondante dans toutes nos faunes, bien qu'ayant plutôt un caractère de mer chaude, n’offre aucun intérêt stratigraphique. Sous-genre Godokia. Ces belles coquilles sont abondamment représentées dans le Pliocène italien par la L. leonina Basterot ; jusqu’à présent, aucune Codokia n'avait été citée dans les faunes plus récentes que le Pliocène ancien. Mais j'ai retrouvé dans les collections du Laboratoire de Géologie de l’Université de Lyon une Codokia portant l'indication « Sicilien, Monte Pellegrino » et dont l'authenticité ne me paraît pas douteuse?. Cet échantillon est d’ailleurs un peu différent de la forme la plus habi- tuelle au Pliocène : l’ornementation radiale est très marquée et la coquille est armée de saillies épineuses naissant à la rencontre des côtes concentriques et des côtes radiales. Ces caractères, quiéloignent le fossile de Palerme de la forme pliocène, le rapprochent au con- traire d’une espèce vivant dans la Mer Rouge, la L. tigerina L. Grâce à l’amabilité de M. Dautzenberg, j'ai pu comparer directement la coquille de Palerme avec des exemplaires vivants de la Mer Rouge et constater leur parfaite identité (voir aussi les planches), Il est probable que la Z. tigerina du Sicilien de Palerme est le descen- dant direct des L. leonina, qui vivaient dans la Méditerranée pliocène. M. Sacco [13] a appelé l'attention sur les grandes affinités de ces deux espèces entre elles et même sur l'existence de formes de passage, qu'il a appelées L. leonina var. (ransiens 3. On ne peut donc considérer la 1 Il faudrait, pour cette espèce, reprendre le nom de J. decussata O.-G Costa: Cf. Dollfus et Dautzenberg [241]. ? Cette coquille était mêlée à d'autres provenant indubitablement du Monte Pel= legrino ; en outre, la roche qui la remplissait était bien la mollasse calcaire blanche caractéristique de ce gisement. $ J'ai récolté moi-même de pareilles formes de passage dans le Pliocène ancien d'Altavilla. TELLINIDÉS 459 forme du Sicilien comme une immigrée venue de la mer Rouge, phéno- mène dont nous n’aurions d’ailleurs aucun autre exemple. En tout cas, la présence dans la faune sicilienne d’une telle coquille à affinités érythréennes est curieuse et intéressante à signaler. Sous-genre Divaricella La L, divaricata L., seule espèce de ce sous-genre dans nos faunes, ne présente aucun intérêt spécial, sauf qu'au Pliocène ancien elle paraît avoir été plus petite qu'actuellement!. Au Calabrien, au contraire, a prospéré (Musalà) une variété de grande taille (14-15 millimètres de diamètre antéro-postérieur, au lieu de 10 chez le type); peut-être cela nous indique-t-il, avec les espèces voisines des côtes d'Afrique, des affi- nités qu'il m'est impossible de préciser, faute de matériaux. Genre Loripes Le L. lacteus L., très abondant partout, n’a aucun intérêt stratigra- phique. Il descend jusque dans les profondeurs (marnes plaisanciennes), mais son habitat de prédilection est sur les plages un peu vaseuses et même saumâtres (Boveto, Tarente, etc.). Le L. Smithii est une espèce nouvelle, créée par G. Seguenza pour une coquille qu'il dit abondante dans les couches à Strombes de Boveto et vivante à Lancerotte (Canaries). La diagnose et la figure qu’il en donne ([206], p. 359, tav. XVII, fig. 44) sont tout à fait insuffisantes, même pour une attribution générique. A mon avis, il s’agit tout simplement de la Zucina (Megaxinus) transversa Bronn, qui, relativement fréquente dans les couches à Strombes, n'y est point citée par Seguenza, et, d'autre part, a été précisément signalée à Lancerotte par Mac-Andrew (in Weinkauff). Enfin je ne connais pas le L, dentatus Defr., espèce miocène qui, d'après Sacco, se trouverait encore dans le Pliocène ancien, mais que MM. Dollfus et Dautzenberg [241] font éteindre au Tortonien. TELLINIDÉS Genre Tellina Les Tellines sont partout très répandues et en plein développement dès la base du Pliocène : aussi les espèces sont-elles nombreuses et sou- ! Cf. var. rotundoparva Sacco. 460 LAMELLIBRANCHES vent difficiles à délimiter. D'ailleurs la plupart d’entre elles se sont pour- suivies sans grandes modifications depuis le Pliocène ancien, et n’offrent, par suite, aucun intérêt stratigraphique. | M. Cerulli-Irelli a décrit au Monte Mario une espèce nouvelle, T. (Pero- næa) transiens, qui paraît très voisine de la T. nitida Poli, et n’est d’ailleurs représentée que par une seule valve; il est impossible de la considérer comme une forme caractéristique. Enfin, je noterai que la T. (Oudardia) compressa Br., bien connue dans le Pliocène ancien, est encore relativement abondante dans le Sici- lien (Palerme, Rosarno, Balestrate) et les couches à Strombes de Tarente; la présence de cette espèce, devenue aujourd’hui très rare, était intéres- sante à rappeler. Cela dit, je passe complètement sous silence toutes les innombrables autres espèces de Tellines pour m’arrêter seulement sur deux formes inté- ressantes du Sicilien. 1° T.(Macoma) aroda de Greg. Cette forme, dont le type est à Ficarazzi, est actuellement consi- dérée par M. di Monterosato comme une espèce éteinte. Elle présente pourtant les plus grandes affinités avec la T. cumana Costa, espèce assez fréquente actuellement dans la Méditerranée et bien étudiée par B. D. D. [237] : les seules diffé- rences consistent dans le galbe : la forme de Palerme est en général beaucoup plus allongée que l'espèce vivante ; peut-être aussi, dans la coquille sicilienne, le test est-il un peu plus épais, et, conséquemi- ment, l'appareil cardinal un peu plus fort. Ces différences ne me paraissent pas suffisantes pour motiver une coupure spécifique, et encore moins pour attribuer à la forme de Palerme une importance stratigraphique : ce sera pour nous tout au plus une variété de l'espèce vivante. Cette T. cumana est d’ailleurs connue dès le Pliocène ancien, comme le montrent les figures de M. Sacco [13] ; et on sait aussi que la 7. mista de Fontannes en est extrêmement voisine. Mais, surtout, ce groupe était représenté par la T. elliptica Br., dont certaines variétés se rapprochent beaucoup de la 7°. aroda : en particulier, la forme que M. Sacco a figurée sous le nom de T. elliplica var. antisa de Greg.,se montre, par son galbe 1 Voir les figures données ici, parent PTS CE 2 Dal à Vas é É Al TELLINIDÉS 461 et par le développement de la charnière, absolument identique à la forme de Ficarazzi; la seule différence est la taille, bien plus petite dans la forme pliocène. On pourrait donc comprendre de la manière suivante l’histoire de ce groupe. Au Pliocène ancien, il était surtout représenté par la 7”. elliptica Br., forme ancestrale de petite taille, à variations multiples, à laquelle se rat- tacheraient la 7. mista et la T°. cumana figurées par M. Sacco. Au Cala- brien les documents me manquent. Au Sicilien la taille augmente et nous rencontrons un rameau latéral, à peine différencié, la T°, aroda de Fica- razzi. Enfin, acluellement, la T'. cumana est définitivement constituée ; et à côté d’elle vit encore une forme très rare (Portugal, Malaga, Alger), la T. melo Sow., qui, d'après M. di Monterosato [117], se montre identique à la T°. elliplica. 20 T.(Macoma) perfrigida de Greg. Ce nom s'applique à une coquille bien caractéristique du Sicilien de Palerme, où elle est relativement commune dans les gisements de Ficarazzi et du Fiume Oreto.M. de Franchis l’a retrouvée dans le « Postpliocène » (probablement Calabrien) de la Terre d'Otrante, aux environs de Galatina ; en comparant la figure qu'il en donne ({7o|, tav. IT, fig. 1) avec l'exemplaire de Ficarazzi figuré ici, on pourra se rendre compte de l'identité des deux formes : j'ai d’ailleurs pu moi-même étudier ces Tellines de la Terre d'Otrante dans la collection de Giorgi. Cette forme bien définie a été désignée par des noms divers : on la voit appelée 7’. obliqua Sow. par M. de Franchis (et Coll. du R. Ufficio geo- logico à Rome), 7°. calcaria Chemn. par M. di Monterosato, T°. balthica L. (Coll. de l'Université de Palerme). Et de fait elle présente des affinités plus ou moins marquées avec ces diverses espèces; on verra à ce sujet l'étude très soigneuse faite par M. de Franchis ([70|, p. 128) : l'étude comparative que J'ai faite de la coquille sicilienne avec de nombreux exemplaires des trois espèces ci-dessus m'a amené seulement à vérifier la plupart des conclusions de cet auteur. En particulier la très grande dis- semblance qui existe dans la forme du sinus palléal des deux valves, caractère si curieux de la 7°. perfrigida, se retrouve dans le fossile des Crags et du Quaternaire d'Uddevalla, généralement appelé 7. obliqua. Parmi les formes vivantes, les plus grandes affinités de notre coquille sont avec la 7. balthica, mais, même après l'avoir confrontée avec les Tellines 462 LAMELLIBRANCHES de la Collection Dautzenberg, je n'ai pu l'identifier avec certitude à aucune forme vivante. , Pour ne préjuger de rien, je laisserai donc à la coquille de Fica- razzi et de la Terre d'Otrante le nom de 7’. perfrigida ; quant à sa signification stratigraphique, il n’est pas douteux que ce ne soit celle d'une forme septentrionale, à la fois « immigrée du Nord », car rien d'analogue n'existe dans les faunes méditerranéennes antérieures, et « émigrée du Nord », puisque ses affinités sont avec des formes actuelles atlantiques. Genre Arcopagia Ce genre est en très forte régression dans la Méditerranée, et il est intéressant de suivre l’extinction progressive de ses diverses espèces. 1° L’Arcopagia Sedwigcki Micht., forme géante du groupe, ne paraît pas survivre à la fin du Pliocène ancien. 2° L’A. ventricosa M. de Serres — A. corbis Bronn, résiste plus longtemps. Abondante au Pliocène ancien, elle est encore commune dans le Calabrien du Monte Mario (Cerulli-Irelli) et de Vallebiaja, où je l'ai moi-même récoltée. M. de Franchis la signale dans le Calabrien de la Terre d’Otrante. On ne la connaissait pas jusqu’à présent dans les faunes plus récentes : aussi est-il intéressant de signaler que Je l’ai trouvée dans le Sicilien du Monte Pellegrino, près du petit village de Vergine Maria (voir les planches); cette espèce doit donc être très rare dans le Sicilien, pour y avoir Jusqu'à présent échappé aux recherches. Enfin, actuellement, elle a totale- ment disparu de la Méditerranée et ses analogues vivants ne se retrouvent plus que sur les côtes Ouest d'Afrique. 3° L'A. crassa Pennant a une histoire fort intéressante. Au Pliocène ancien, c'est une forme très répandue, à la fois dans la Médi- terranée et dans l'Atlantique (Crags, Portugal) ; au Calabrien elle devient déjà plus rare dans notre mer : M. Cerulli-Irelli n'en cite que quelques valves au Monte Mario : je l’ai récoltée dans le Cala- brien de Monte Corvo et de Girgenti. Au Sicilien, nous la retrou- 1 Dans le même cas sont aussi les À. lelala Bonelli et 4. cingulata Font., der- niers et rares représentants, dans le Pliocène ancien, de rameaux archaïques. SCROBICULARIIDÉS 163 vons encore au Monte Pellegrino (di Monterosato), et je l'ai rencontrée dans des sables serpentineux (niveau de 35 mètres?) à Castiglion- cello, au Sud de Livourne, Enfin, dans les couches à Strombes, elle a été citée comme très rare par G. Seguenza à Boveto. Elle continue à prospérer dans l’Aflantique et les mers du Nord, cependant qu'elle est devenue fort rare dans la Méditerranée !, au point même que beaucoup d'auteurs (B. D. D.!237]) n'y ont point admis son existence. Sans être vraiment ni une « émigrée » ni surtout une « immigrée du Nord », l'A. crassa n'en montre pas moins des affinités plutôt atlantiques. Genre Capsa Brug. — Gastrana Schum. Les deux seules espèces de ce genre dont nous ayions à nous occuper ont eu des destinées fort diverses. 1° La G. fragilis L. s'est perpétuée sans modifications sensibles dans notre mer depuis le Pliocène ancien jusqu'à l'époque actuelle? ; elle ne présente par suite aucun intérêt; son abondance indique des facies vaseux littoraux ou lagunaires (Tarente, Mortelle, Boveto). 2° La G.lacunosa Chemn. est, au contraire, dans la Méditerranée, une forme essentiellement pliocène. Très abondante dans l’Astien, elle paraît déjà en forte régression au Calabrien : M. Cerulli-Irelli n'en a découvert que deux valves au Monte Marioÿ. Et actuelle- ment cette espèce ne subsiste plus que sur les côtes atlantiques du Maroc et du Sénégal. SCROBICULARIIDÉS Les genres Scrobicularia et Syndesmya, composant cette famille, ne renferment dans nossfaunes aucune espèce intéressante au point de vue stratigraphique ; quelques espèces peuvent donner des indications 1 Voir les citations rappelées par Carus [30], vol. II, p. 160. ? MM. Dollfus et Dautzenberg ([241|, p. 151) rapportent les formes pliocènes et quaternaires de la Méditerranée à la C. laminosa Sow., dont le type est un fossile du Crag. Ces formes méditerranéennes sont, au contraire, considérées par M. Sacco [13] comme de simples variétés de la C. fragulis actuelle; il me paraît, en effet, difficile de leur attribuer aucune importance stratigraphique. # Elle aurait été rencontrée à Ficarazzi par M. de Gregorio; mais M. di Monte- rosato n’a point confirmé ce fait. Put e d GENRE + PRET AN RS QE ARE PRESS EN EPA E NUL ES Fou 5 v SSI PRG EE A LAN 1 et ae DO Fra a ù i - Se Ÿ RE D VAS PV ERA SN De :4 % 464 LAMELLIBRANCHES sur les facies : ellessont toutes caractéristiques des fonds de vases sableuses fines, mais elles y vivent à des profondeurs diverses. Ainsi la Syndesmya longicallus Scacchi, qui ne semble pas actuelle- ment, dans la Méditerranée, remonter au-dessus de 70-80 mètres, est surtout abondante dans les marnes plaisanciennes ; mais il est intéres- sant de signaler sa présence à Ficarazzi. Par contre, la Syndesmya (Lutricularia) ovala Philippi ne se rencontre guère aujourd'hui que dans les eaux saumâtres ; sa présence dans les | couches à Strombes de Tarente nous indique le voisinage de lagunes littorales. CUSPIDARIIDÉS, SOLÉNOMYIDÉS, PANDORIDÉS, VERTICORDIIDÉS, LYONSIIDÉS Ces familles n'offrent pas grand intérêt à notre point de vue. Je me bornerai à rappeler qu'on peut y signaler quelques formes disparues depuis le Pliocène ancien. Telles sont certaines espèces de Cuspidarta : par exemple la CGuspidaria (Myonera ?) maxima Mayer, dont M. Cerulli-Irelli signale un fragment très douteux au Monte Mario. Mais la plus importante de ces espèces disparues est la Pecchiolia argentea Mariti, belle coquille très caractéristique et confinée dans les facies mar- neux du Pliocène ancien; elle paraît bien déjà éteinte au Pliocène supé- rieur, d'où je n’en connais aucune citation. Ces familles renferment, par contre, nombre d'espèces vivantes jamais signalées à l’état fossile, particulièrement parmi les Verticordia et les Cuspidaria ; comme ce sont des espèces rares, ou mal connues, je ne crois pas le fait important. ANATINIDÉS Cette famille n’est composée dans nos mers que d’un petit nombre d'espèces, dont la plupart ne nous montrent, depuis le Pliocène ancien, aucune variation intéressante : c’est le cas pour les genres Thracia et Poromya, ce dernier d’ailleurs très rare et confiné dans les facies profonds de l'Italie du Sud. Une exception est fournie par la coquille fossile que Philippi avait appelée Anafina oblunga, et que l'on a reconnue depuis iden- tique à une forme vivante dans les mers du Nord, le Gochlodesma prætenue Pultney. Le genre Cochlodesma est inconnu dans les faunes méditerranéennes du 4 PHOLADOMYIDÉS 465 Pliocène ancien! et de l’époque actuelle : il s’agit donc là d'une forme bien caractérisée, bien isolée dans les faunes méditerranéennes, et dont l'histoire est des plus intéressantes à préciser. Actuellement le C. prætenue reste exclusivement atlantique et il habite en particulier nos côtes françaises de l'Océan et de la Manche. Jeffreys l'a signalé dans la Méditerranée?, mais cette citation ne s’appuye que sur des données très hypothétiques, comme l’a montré Weinkauff ([233],t. 1, p. 40) et on peut, avec M. di Monterosato, la rejeter complètement. À l'état fossile il est inconnu dans le Pliocène ancien de la Méditerranée ; c'est seulement dans le Calabrien qu'on le voit apparaître ; Seguenza l'y signale à Monosterace dans son Sicilien et aux environs de Reggio dans son Saharien inférieur ; et récemment M. Cerulli-Irelli a confirmé sa pré- sence au Monte Mario et en a donné de bonnes figurations. Nous le retrouvons dans le Sicilien ; à Palerme, d’après M. di Monterosato, il est abondant au Monte Pellegrino, plus rare à Ficarazzi; c’est du Sicilien de Palerme que proviennent les exemplaires figurés ici. Enfin notre espèce est inconnue dans les formations quaternaires plus récentes que le Sicilien. Son histoire est donc pareille à celle de beaucoup d’autres émi- gres du Nord, et on peut la retenir comme une des bonnes espèces caractéristiques du Calabrien et du Sicilien. PHOLADOMYIDÉS On sait que cette famille est actuellement en voie de disparition. Très marquée dès le Tertiaire ancien, cette tendance paraît encore s être accentuée au cours du Pliocène. Dans le Pliocène ancien, eneffet, les Pholadomyes, sans être communes, ontété rencontrées un peu partout dans les facies argileux ou argilo-sableux fins, et sont représentées par diverses espèces paraissant bien indépen- dantes. Ainsi on peut mettre tout à fait à part la Ph. valicana Ponzi, espèce créée pour un fossile des marnes plaisanciennes du Monte Vaticano, puis citée par M. Sacco dans le Plaisancien de l'Italie du Nord. La forme mio- cèene Ph. alpina Matheron est la tête d’un groupe assez développé dans le { Je laisse de côté les citations d'Almera et Bofill en Catalogne ([2], p. 166 pl. XIII, fig. 17-18), basées sur des échantillons de très petite taille, assez médiocre- ment figurés, et en tout cas différents du C. prætenue. > Voir aussi les quelques citations rapportées par Carus [30]. Uxiv. DE Lyon. — Giçnoux 30 466 LAMELLIBRANCHES Pliocène ancien de diverses régions d’Italie, el où on a distingué diverses espèces assez voisines, telles que Ph. tyrrhena Simonelli ([2:15|, p. 214, pl. IV, fig. 3), Ph. appula de Franchis [70], et aussi, d'après Simonelli loc. cit.), Ph. Vaticant Van den Ecke ; c'est à ce même groupe que semble appartenir la Ph. candida Sow. vivante. Dans le Pliocène supérieur, ces coquilles deviennent de véritables raretés. M. Cerulli-Irelli en signale trois exemplaires au Monte Mario, et il les rapporte à la Ph. alpina. Au Quaternaire, la famille n'est connue que par un seul exemplaire rencontré à Ficarazzi par di Blasi [113] et conservé dans les Collections de l'Université de Palerme ; M. Gemmellaro ([139], p. CLVI) en a donné récemment une bonne figuration ; il appartient à l'espèce vivante PA. Lovent Jeffreys. Actuellement, enfin, les Pholadomyes, toujours très rares, sont surtout représentées dans les grands fonds de l'Atlantique : c'est la que l’on rencontre la P. candida Sow., la P. Loventi Jeffreys, la P. africana P. Fischer, la P. arata Verril et Smith (cf. Locard [160]). Dans la Médi- terranée on ne connaît que la P. Loveni, et les moindres profondeurs auxquelles elle ait été trouvée sont 300 mètres (Palerme, di Monterosato) et au-dessus (?) (Marseille, Marion). Ces espèces vivantes sont d’ailleurs différentes des formes pliocènes; 1l est donc probable que les Pholadomyes pliocènes sont encore incomplètement connues, ce qui n’a rien d'éton- nant. Aussi ce groupe est fort peu propre à donner des indications stra- tigraphiques ; provisoirement toutefois, on peut garder la P. alpina dans la liste des formes éteintes du Pliocène supérieur. Enfin la pré- sence de la P. Loveni dans le gisement de Ficarazzi est intéres- sante au point de vue bathymétrique; toutefois elle ne doit pas nous faire exagérer la profondeur à laquelle a pris naissance ce dépôt, car cette espèce y est associée à un grand nombre de coquilles beaucoup plus littorales ; et on ne doit pas oublier que c’est la nature du fond, bien plutôt que la profondeur, qui règle l'habitat des Mollusques. CLAVAGELLIDÉS Je n’airien à ajouter, pour cette famille, aux données classiques : pour être reprise utilement, l'étude des Clavagelles fossiles deman- derait des matériaux exceptionnels. On en connaît, dans le Pliocène ancien, deux espèces actuelle- =! MAS Le 1 ltéiultiselddr Tia SCAPHOPODES 467 ment éfeintes : la C. Brocchii Lmk. et la C. (Stirpulina) bacil- lum Br. Cette dernière espèce persiste jusque dans le Calabrien et le Sicilien, où elle est représentée par une variété de grande taille, var. bacillaris Desh. — Aspergillum maniculatum Philippi. Cette forme a été rencontrée au Monte Mario par M. Cerulli-Irelli, à Gravina par Philippi, à Sciacca par M. di Stefano ; elle existe égale- ment à Vallebiaja (Musée de l’Université de Pise). Dans le Sici- lien, elle est connue depuis Philippi dans les dépôts de Palerme et Je l’ai également rencontrée à Balestrate; Appelius [3! la cite à Livourne. Je me borne à renvoyer, au sujet de cette espèce, aux études et figurations excellentes de Philippi et de MM. Sacco ([13],fasc. XXIX, pl. XIV, fig. 45-46) et Cerulli-Irelii. Conformément à l’avis de tous ces auteurs, je la considérerai comme une espèce éteinte, caracté- ristique à ce titre du Calabrien et du Sicilien. Car dans la Méditerranée actuelle, les C. balanorum Scacchi, C. Meli- tensis Broderip, C. aperla Sow., qui représentent ce genre, sont en effet bien différentes de l'espèce fossile et n’appartiennent même pas au sous- genre Séirpulina. Elles ont plus de rapports avec la C. Brocchii du Plio- cène, dont la C. aperta actuelle représente peut-être le descendant. CHAPITRE IT SCAPHOPODES Il est très difficile de tirer de ce groupe des indications stratigraphi- ques. La spécification des Dentales! est en effet extrêmement délicate ; et, sil est toujours possible de mettre un nom sur un échantillon, en revanche :l est tres difficile de faire la « critique » des espèces, de les suivre à travers les faunes fossiles et actuelles, ce qui serait pourtant né- . | Voir la revision de ce groupe faite récemment par M. Bellini : Paleontografia italica, XV, 1909. 468 SCAPHOPODES cessaire pour pouvoir en Lirer parti en stratigraphie. En particulier, comme il arrive pour beaucoup d’autres formes profondes, la faune actuelle de Dentales ne peut être considérée comme bien connue : il suffit, pour sen convaincre, de considérer la profusion d'espèces nou- velles qui sont rapportées par des expéditionscomme celle du Travailleur et du T'alisman. Je me bornerai donc à parler ici des quelques espèces signalées comme éleintes ou émigrées dans les faunes « postpliocènes ». 1° Dentalium sexangulum Schrœter. Cette espèce accuse certaines relations avec le groupe actuel du D. novemcostatum Lmk., mais la grande forme typique est cer- tainement éteinte : abondante au Pliocène ancien, elle semble se continuer jusque dans les couches tout à fait inférieures du Cala- brien, où je l’ai recueillie à Girgenti. 2° Dentalium Michelottii Hærnes et D.fossile Schræter. Ces deux Dentales pliocènes, à affinités archaïques, sont encore signalés comme très rares dans le Calabrien du Monte Mario par M. Cerulli-Irelli. 4° Dentalium rectum L. Comme l'ont déja montré MM. Sacco et Cerulli-Irelli, c’est bien sous ce nom qu'il convient de désigner une belle coquille bien caractérisée et très fréquente dans tout le Pliocène de l'Italie du Sud, et signalée sous les noms les plus divers : D. Delesserti Chenu, D. striatum Lmk., D. Phiippii Mts.!. Ce D. rectum semble manquer dans le Pliocène de la vallée du Rhône, de l'Espagne, de l’Algérie; il est très rare dans le Plaisancien de l'Italie du Nord, plus fréquent dans les argiles bleues du Modenais (Foresti); il devient extrêmement commun dans le Pliocène ancien de l'Italie du Sud (par exemple dans les argiles du Marchesato). Ainsi, dès le Pliocène an- cien, celte espèce nous apparaît comme spécialement développée dans l'Italie centrale et méridionale, ce qui doit tenir surtout, d’ailleurs, à ce qu’elle habite plutôt les facies profonds. ! M. de Franchis |70] considère le D. Delesserti comme différent du D. Philippir; le premier serait propre au Pliocène, le second au « Postpliocène ». Comme à la plupart des paléontologistes italiens, cette distinction me pa raît impossible, nent DENTALIIDÉS 469 La même chose se remarque au Calabrien : tandis qu’elle n’est connue, au Monte Mario, que par un seul exemplaire (Cerulli-Irelli), elle abonde au contraire partout dans le Calabrien de l'Italie du Sud: Terre d'Otrante, Gravina,S, Maria di Catanzaro, Monosterace, Nizzeti, Brucoli, Terranova, Girgenti. Enfin elle persiste, quoique un peu moins abondante, dans le Srcilien, où nous la rencontrons à Ficarazzi, à Castellamare, à Rosarno, à Galli- poli, à Tarente (argiles bleues). Les couches quaternaires plus récentes correspondent à des facies trop littoraux pour que l’on puisse l’y rencontrer, même en supposant qu'elle ne soit point déjà éteinte. : On ne connaît, en effet, aucune citation bien précise de cette coquille à l'état vivant. Le type de l'espèce est figuré avec la mention « habitat inconnu », et est probablement fossile. M. di Monterosato [114] la range au nombre des espèces éteintes. M. Dautzenberg m'a affirmé n'en avoir jamais vu d'exemplaires vivants ; et les quelques citations des auteurs doi- vent se rapporter à des individus fossiles recueillis au fond de la mer?. Par contre, MM. Sacco et Cerulli-Irelli ont pu examiner quelques exemplaires de provenance incertaine (« Oceano settentrionale »), mais « certainement vivants », comme a bien voulu me le confirmer person- nellement ce dernier auteur. En tout cas, au point de vue pratique, on peut, Je crois, garder ce D. rectum dans la liste des espèces disparues de notre mer et caractéristiques du Calabrien et du Sicilien. & Dentalium variabile Desh. M. Cerulli-Irelli a été conduit à reprendre ce nom de Deshayes pour désigner une série de Dentales du Monte Mario, jusqu’à présent détermi- nés comme 1). sexangulum Br., D. septemcostatum Rigacci, D. oclogo- num R. E. P., D. novemcostatum Lmk. Tel qu'il a été compris par M. Cerulli-Irelli, ce D. variahile est extré- mement polymorphe; on peut le définir rapidement en disant qu'il est l Voir plus haut (p. 224, note 2), la citation très douteuse, par M. de Stefano, de cette espèce dans les couches à Strombes de Ravagnese. > Payraudeau (Moll. de Corse, p. 19) l'a signalée sous le nom de D. elephan- tinum L., dans la faune actuelle de la Corse (localités de Figari, Santa Manza, Algaiola); mais, avec Weinkauff, il est raisonnable de croire qu'il s'agit d'exemplaires fossiles, dont la conservation, toujours excellente, peut induire en erreur. — De même, Locard ([160|, vol. IT, p. 112) cite un fragment de D. elephantinum dragué par le Travailleur dans le golfe de Cadix, mais il fait les mêmes réserves, os ( 470 SCAPHOPODES très voisin du groupe du D. novemcostatum Lmk., mais que le nombre des côtes, très variable, est le plus souvent de sept ou huit. M. Cerulli lui-même insiste sur les affinités étroites entre ce D. variabile et les formes vivantes du groupe novemcostatum, et reconnaît que, pour les individus ayant neuf côtes, la distinction spécifique devient impossible. D'ailleurs, le nom de Deshayes a été créé pour des Dentales provenant probablement de l'Océan Indien et n’a, depuis, jamais été appliqué à aucune forme vivante ou fossile. La seule solution rationnelle consiste donc à rattacher ces Dentales du Monte Mario au groupe méditerranéen, pliocène et actuel, des D. novem- costatum Lmk.. D. inæquicostatum Dautz. (— D. alternans B. D. D.). En particulier, la forme désignée par M. Sacco sous le nom de D. novem- costatum var. pseudaprina Sacco (Plioc. ancien de l'Italie du Nord) me paraît bien voisine des exemplaires du Monte Mario. Personnellement, j'ai retrouvé dans divers gisements calabriens (Vallebiaja, Fauglia) ou siciliens (Balestrate) les mêmes types qu’au Monte Mario. Actuellement ces formes à 6-8 côtes paraissent (?) éleintes, maïs on ne peut, il me semble, leur attribuer la valeur de fossiles caractéristiques. 50 Dentalium Brugnonei Monterosato. M. di Mounterosato a proposé ce nom pour un Dentale de Ficarazzi (Sicilien), dont il a bien voulu m'envoyer des échantillons, et qu'il consi- dère [114] comme appartenant à une espèce éteinte. Depuis, j'ai re- trouvé des individus tout à fait identiques dans le Calabrien de S. Maria di Catanzaro. Par son ornementation, composée de 16-17 côtes, ce D). Brugnoneise rap- proche du D. dentale L.,surtout quand on le regarde du côté du sommet. Mais, à une certaine distance du sommet, les côtes deviennent simple- ment des arêtes séparant des facettes très planes, lisses, brillantes, qui donnent à la coquille un aspect tout particulier. D'ailleurs M. Dautzenberg, auquel j'ai soumis cette intéressante coquille, l’a reconnue à peu près identique à des Dentales vivants déter- minés (?) D. agile Sars, espèce qui se rencontre, comme on sait, à des profondeurs inférieures à 100 mètres, dans l'Atlantique et la Méditer- ranée. Ainsi, quel que soit le nom à attribuer à la coquille de Ficarazzi, elle ne me paraît pas assez différente des formes actuelles pour qu’on puisse la considérer comme une espèce éteinte caractéristique. 1 Ce même auteur avait d'abord rapporté [115] ce Dentale à la forme vivante D. striolatum Stimpson, tb. ; 3 ‘ ; De Apt PT GASTROPODES ATA 6° Dentalium calabrum Monterosato miss., (in Grema /54]). J'en dirai autant d'une forme fossile dans le Pliocéne de la Calabre et décrite avec beaucoup de détails par M. Crema qui en fait une espèce éteinte ; J'en ai recueilli moi-même des exemplaires, bien conformes à ses figures et descriptions, dans les argiles pliocènes de Monosterace et du F. Macellaï près Pellaro (Sud de Reggio). Ce D). calabrum appartient lui aussi au groupe du ?). dentale; mais par sa faible courbure et la finesse de son ornementation, ilse rapproche plus spécialement des formes vivantes du groupe 1). agile Sars, D. striolalum Stimpson : on sait d'ailleurs combien est difficile l'appréciation de ces formes, car, tandis que Locard ([160|, vol. Il, p. 117 et suiv.) les garde à titre d'espèces distinctes, au contraire les abondants matériaux rapportés par l'expédition du Challenger ont conduit Watson à ne les considérer que comme des variétés du 1). dentale. CHAPITRE II GASTROPODES OPISTHOBRANCHES Les Opisthabranches sont représentés dans les faunes pliocènes et actuelles par de nombreuses espèces, pour la plupart de petite taille et très polymorphes : on ne peut les considérer comme bien connues, car les auteurs y décrivent constamment des formes nouvelles, soit vivantes, soit fossiles. Je me bornerai donc à signaler quelques-unes des espèces considérées, dans les faunes récentes, comme éfeintes ou émigrées, par les divers auteurs, Genre Actæon, Actæon bovetensis Segu. Cette espèce a été créée par Seguenza ([206] p. 351, pl. XVI, fig. 40 pour un exemplaire récolté par lui dans les couches à Slrombes de Bo- velo : je n'ai pu l'y retrouver moi-même, car tous les Ac{æon que j'ai recueillis à Boveto appartiennent à l'A. tornatilis L..,et à sa var. semi- striala Férussac sp., formes pliocènes encore vivantes et par suite dénuées KTR GASTROPODES d'intérêt pour nous. L’A. bovetensis est pourtant, d’après les descriptions et figures de son auteur, bien nettement caractérisé par sa petite taille, sa spire plus saillante et ses tours moins aplatis que dans l’A. {ornatilis. Depuis, M. Cerulli-Irelli ([32]}, vol. XVI, pl. VIII, fig. 57) a rapporté à cette espèce un exemplaire du Monte Mario qui paraît, en effet, bien conforme au type de Seguenza et distinct de l’A. fornatilis. Ces deux auteurs ne font d’ailleurs aucun commentaire sur la signification de cette forme. Cette signification me paraît donc énigmatique et je n'ose attribuer aucune importance stratigraphique à une coquille aussi rare et d'aussi petite taille, qui a pu si facilement échapper aux recherches dans les faunes vivantes ou fossiles. Genre Tornatina. Tornatina Knockeri Smith. Cette espèce, dont le type vit sur les côtes du Sénégal, a été signalée par Seguenza comme fossile à Boveto, dans les couches à Strombes, et ne l’ayant pas rencontrée moi-même, je n'ai aucune observation personnelle à ajouter à ce sujet. D’après la figure de Smith!, ce serait une espèce bien caractérisée, impossible à confon- dre avec les autres Tornatines méditerranéennes. Depuis, elle a été retrouvée en Algérie, toujours dans les couches à Strombes, par le Général de Lamothe. Cette T. Knockeri doit donc être considérée, ainsi que l’a fort bien vu Seguenza, comme une de ces formes tropicales immi- grées momentanément dans la Méditerranée à l’époque des couches à Strombes. Ce sera pour nous une des espèces caractéristiques de ce niveau. Les autres Tornatina méditerranéennes, dans lesquelles les cou- pures sous-génériques et spécifiques sont difficiles à préciser, ne nous fourniront aucune autre indication intéressante. M. Cerulli-Irelli a tou- tefois retrouvé dans le Calabrien du Monte Mario une espèce considérée comme éfeinle, abondante dans le Pliocène ancien, la T. spirata Br., qui parait en effet assez bien séparée des types méditerranéens actuels. Quant à la T, (Retusa) perstriata Cerulli-Irelli, qu'il décrit, du même 1 Smith, A list of species of shells from W. Africa with descriptions of those hitherto undescribed {Proc. Zoul, Soc. of London, 1871, p. 727-789, pl LXXWV, fig. 30). ; OPISTHOBRANCHES 173 gisement, comme espèce nouvelle, nous ne saurions par cela même lui attribuer une signification stratigraphique, d'autant plus qu'elle paraît extrèmement voisine du groupe actuel 7°, (Relusa) truncatula Brug. Genre Scaphander. M. di Monterosalo a considéré comme se rapportant à une espèce émi- orée, S. norvegicus Mts., les beaux Scaphandres que l’on récolte assez fréquemment à Ficarazzi, plus rarement au Monte Pellegrino, dans le Sicilien. Il les avait d’abord considérés comme une simple variété, vivant dans les mers du Nord, du S. lignarius L. représenté dans la Méditer- ranée. En réalité, ils sont impossibles à séparer spécifiquement de cette dernière espèce, spécialement de ses variétés de petite taille {Scaphander hgnarius type Risso, non Linné). L'espèce ou variété de M. di Montero- sato a été d’ailleurs fondée! sur une figure de Sars? que B. D. D. ([237], p. 937) rapportent bien au S. lignarius L. C’est donc là tout au plus une variété de l'espèce méditerranéenne, variété qui ne peut point en être séparée d’après Locard. Aussi nous laisserons complètement de côté cette forme dans notre examen des espèces caractéristiques. Genre Bulla. M. di Monterosato m'a aimablement communiqué des échantillons de Ficarazzi, appartenant à l'espèce Bulla semilævis Jeffreys, considérée » APP JS» par lui comme vivante dans l’Océan et non dans la Méditerranée. Or, Locard ([160], t. I, p. 57) a reconnu cette petite coquille dans les récoltes faites par Le T'ravailleur au large de Marseille : je ne puis donc la con- P 5 J P sidérer comme une espèce certainement émigrée. Genre Bullinella (Cylichna). On trouve à Ficarazzi une petite coquille appelée par Brugnone B. obesiuscula Brugnone et considérée par M. di Monterosato comme une forme éteinte. Or cet auteur lui-même a, d’après Locard ([160,, t. E, p. 71) déterminé une B. obesiusculadans les matériaux de dragage recueil- lis par le Travailleur sur les côtes provençales. Quant aux deux espèces nouvelles, Bullinella (Gylichnina) gigan- tulina et B. (Gylichnina) mariana, fondées par M. Cerulli-Irelli sur deux exemplaires uniques du Monte Mario, il n'ya pas lieu naturellement 1 Conch. prof. mare Palermo, p. 29, in Naluralisla Siciliano, 1890. 2 Sars, 1878, Moll. reg. arct. Norv., pl. XVIII, fig. 7, Scaphaänder lignarius, ATX GASTROPODES d’en tenir compte ici, surtout dans un groupe aussi riche en espèces mal délimitées. PLEUROTOMIDÉS La faune des Pleurotomidés méditerranéens est bien loin d'avoir à l’heure actuelle la même richesse qu’au Pliocène ancien. À cette époque, la famille était représentée par une foule de grandes espèces. descendantes directes des formes des «argiles à Pleurotomes» miocènes, et que l’on peut récolter partout en très grande abon- dance, surtout dans les facies argileux. Mais dès le début du Pliocène supérieur, il y a dans cette faune un changement radical. A part quelques rares exemples que nous allons étudier, toutes les grandes et belles espèces si caractéristiques du Pliocène ancien disparaissent d’un coup: il ne subsiste plus que des formes de petite taille, que nous retrouvons encore aujourd’hui dans la Méditerranée actuelle. Leur spécification est en général fort délicate, et comme elles paraissent toutes déjà représentées dès la base du Pliocène, leur étude ne serait guère intéressante à notre point de vue. Je me contenterai donc de noter d’abord, au point de vue général, l'importance de l’appauvrissement subi par cette famille à la fin du Pliocène ancien: il en résulte une coupure paléontologique très marquée entre ce Pliocène ancien et le Calabrien. Aussi les Pleuro- _tomidés sont-ils parmi les groupes invoqués dès longtemps, et avec juste raison, par M. de Stefani, pour séparer son «Postpliocène » du Pliocène. Je passe maintenant à l'examen spécial de quelques espèces dont l’histoire offre un certain intérêt stratigraphique. Raphitoma harpula Br. et R. Columnæ Scacchi. Les Raphitomes du Pliocène vrai comprennent, à côté des petites formes seules survivantes actuellement, nombre de grandes espèces aujourd'hui disparues; une seule nous retiendra ici : c'est le R. harpula Br. Car on rencontre dans le Calabrien et dans le Quaternaire une forme extrêmement voisine, le À. Columnæ Scacchi. Cette dernière espèce a en effet été citée dans le Calabrien à Gravin« fé PLEUROTOMIDÉS l 175 di Puglia (type de Scacchi, Philippi), dans la Valle Lamato (Philippi), à Villa S. Giovanni, et dans les environs de Reggio (Sesuenza), dans la vallée du Crati (Crema [56], p. 27) ; dans le Srcilien, elle est connue à Ficarazzi (Philippi, di Monterosato), et sa rareté dans les gisements de cet âge s'explique par le fait qu’elle n'habite guère que les facies profonds. Elle était d’ailleurs déjà en voie de disparition, puisqu'elle ne paraît pas avoir survécu au Sicilien!. En tout cas elle est nettement différente des formes vivantes les plus voisines, À. nebula Montagu et R. attenuala Montrs., en particulier par sa taille beaucoup plus forte et ses côtes transversales bien plus serrées. Ce R. Columnæ s’est donc éteint dans la Méditerranée sans donner de descendants. Par contre, ses affinités avec le R. harpula Br. sont évidentes. Le type du À. Columnæ provient du Calabrien de Gravina : j'en ai étudié des exemplaires récoltés par moi à Gravina même ?, et ils méritent en effet d’être spécifiquement séparés du À. harpula. On verra dans Bellardi ([13], fase. IT, p. 321) l’énumération, très soigneusement faite, des caractères différentiels entre les deux espèces. Pourtant les formes de transition abondent. Ainsi lataille de la coquille de Gravina est beaucoup plus grande que celle de l'espèce de Brocchi : à Ficarazzi, au contraire, le R. Columnæ demeure bien plus petit et ne diffère guère du À. harpula que par ses tours moins renflés et sa suture moins profonde. De même lun des caractères indiqués par Bellardi « striæ transversæ uniformes, non majores super costas longitudinales » ne paraît pas constant dans l'espèce de Scacchi, et plusieurs de mes échantillons offrent à ce point de vue un passage au À. harpula. Aussi ne faut-il pas s'étonner de rencontrer le À. Columnæ cité à côté du À. harpula, dans le Pliocène ancien, ce qui nous montre bien qu'il s'agit là de deux formes étroitement apparentées : Seguenza le signale dans son Astien à Bovalino, Monosterace, Gallina (O.). Bellardi le cite même dans le Miocène supérieur. En résumé, le R. Columnæ a des affinités essentiellement plio- cènes : il dérive probablement du PR. harpula, auquel il survit. Car nous le vovons persister dans le Calabrien et dans le Sicilien à facies profond, après quoi 1l disparaît. Le À. Columnæ sera donc pour ! Néanmoins, s’il faut en croire une citation de G. Seguenza, qui la signale comme très rare à Boveto, elle aurait persisté jusque dans les couches à Strombes. ? Voir les planches, 476 GASTROPODES nous une des espèces éleintes re de ces deux derniers étages. Raphitoma plicatella Jan, R. vulpecula Br., R. submarginata Bonelli. Ces trois espèces sont signalées au Monte Mario par M. Cerulli-Irelli, qui les considère comme disparues : ce sont de petites formes vraiment trop voisines de leurs analogues vivantes pour qu’on puisse leur attribuer une valeur stratigraphique. Surcula nodulitera Phil, Cette espèce disparue est citée par G. Seguenza [206] dans le gisement de S. Cristina d'Aspromonte, gisement qu'il considère comme astien, mais que l’on doit, avec M. de Stefani, regarder comme postpliocène (Calabrien) en raison du petit nombre de ses espèces éteintes. La citation de Seguenza nous fournirait donc encore un exemple d’une forme éteinte de Pleurotomidé ayant persisté dans le Calabrien ; maisilest à craindre qu'il ait pu y avoir mélange avec la faune de couches plus inférieures. Enfin le gisement du Monte Mario nous montre encore, grâce aux patientes recherches de M. Cerulli-Irelli, un exemple remarqua- ble de la disparition progressive des espèces pliocènes. Get auteur y a retrouvé, en effet, représentées le plus souvent par quelques échan- tillons rarissimes, des espèces qui jouaient un rôle plus ou moins important au Pliocène ancien. Elles sont d’ailleurs d'intérêt fort inégal; en voici la liste: Drilla sigmoidea Bronn. — Espèce bien caractérisée et relative- ment fréquente au Pliocène ; elle n’est connue au Monte Mario que par trois exemplaires. Daphnella Romanii Libassi. — C'est une forme petite, mais bien caractérisée et décidément disparue de nos mers. Rare au Pliocène ancien, elle l’est encore plus au Monte Mario, où M. Cerulli-Irelli n’en connaît que trois exemplaires. Bela bucciniformis Bell. — Cette très petite coquille n’est connue que du Miocène et du Pliocène de l’Italie du Nord, et du Monte Mario : partout elle se montre très rare. Aussi ne peul- os attribuer une grande importance stratigraphique. Mangilia mitreola Bonelli, très rare au Monte Mario et bien voi- sine des petites espèces vivantes, ne mérite pas d’être retenue comme fossile caractéristique, TS TÉRÉBRIDÉS 477 TÉRÉBRIDÉS Cette famille ne nous intéresse ici que d’une manière tout à fait indirecte, car elle est tout entière confinée dans le Pliocène ancien; les Terebra sont d'ulleurs des coquilles à affinités essentiellement tropicales ; elles sont actuellement en plein développement le long des côtes africaines de l’Atlantique, sans remonter d’ailleurs au Nord des Canaries; on retrouve là des formes très voisines de celles qui peuplaient la Méditerranée au Pliocène ancien. La disparition de ces belles coquilles dès le début du Calabrien est un signe de plus de l’appauvrissement général subi à cette époque par la faune méditerranéenne. Il existe pourtant une citation de T'erehra dans les faunes récentes. Seguenza dit, en effet, avoir rencontré dans les dépôts de Musala (Cala- brien, Saharien supérieur pour Seguenza) un exemplaire unique qu'il rapporte à la T. corrugata Lmk. var. regina Desh., vivante. N'ayant retrouvé cette coquille ni dans mes récoltes, ni dans les collections!, je ne puis en apprécier autrement les affinités. Toutefois, il estextrèmement naturel de voir là une forme autochtone, descendant directement des Térèbres si abondantes au Pliocène ancien; son histoire serait ainsi exac- tement pareille à celle de la Mifra Bronni, qui se retrouve précisément dans le même gisement (voir plus loin) : elle donne donc aux couches de Musalà un caractère archaïque bien net ; il est en tout cas curieux de la voir vivre là à côté du Buccinum undatum, qui est au contraire une coquille essentiellement septentrionale. On ne saurait voir un exemple plus frappant du caractère mixte de ces faunes calabriennes, où, aux derniers représentants des faunes chaudes pliocènes, s'associent des formes froides arrivées par immigration, Enfin, c’est à cette famille des Térébridés que je rattacherai, suivant l'opinion de M. Cossmann, le genre Pusionella qui va nous donner lieu à quelques remarques intéressantes. Les Pusionelles sont actuellement cantonnées sur les côtes atlan- tiques de l'Afrique tropicale. À l’état fossile elles ne sont connues que pendant le Miocène, où, en France et en Italie, elles sont repré- sentées par de rares coquilles voisines des espèces actuelles, | On sait que les collections G. Seguenza ont été détruites en même temps que l'Université de Messine lors du tremblement de terre du 28 décembre 1908. 478 GASTROPODES dont elles sont évidemment les ancêtres directs: ainsi la L. fauro- nifat Sacco de l’Helvétien de Turin est extrêmement voisine de la P. nifat Brug. vivante au Sénégal. Pendant tout le Pliocène, ce genre semble avoir quitté la Médi- terranée. Il n'y réapparaît que dans les couches à Strombes où, à Monastir, MM. Flick et Pervinquière ont signalé la P. nifat : cette espèce doit d’ailleurs, même actuellement, continuer à vivre, bien que très rare, sur les côtes d'Algérie, car Weinkauff affirme ([233}, t. II, p. 111) en avoir récolté un individu vivant à Alger : il l’a lui- même, dit-il, retiré du filet. Mais la présence de cette coquille dans les couches à Strombes n’en est pas moins intéressante: on peut l’in- terpréter comme «un immigré du Sud attardé jusqu’à l’époque actuelle. » CONIDÉS Nous retrouvons d’abord dans cette famille un fait général: c’est l’appauvrissement de la faune méditerranéenne actuelle par rapport à la faune pliocène. Tandis qu'au Pliocène ancien, on rencontre par- tout un nombre immense d'individus de grande taille, souvent bien ornés, appartenant à une foule d'espèces, la famille se trouve réduite, dans la Méditerranée actuelle, à une seule espèce, extraordinairement polymorphe il est vrai, le Gonus mediterraneus Brug. Cette espèce existe d’ailleurs dès la base du Pliocène et n'a, depuis, jamais cessé d’habiter la Méditerranée: elle est donc pour nous tota- lement dénuée d'intérêt. C'est dès la base du Calabrien que se produit la disparition en masse des espèces pliocènes : dans toutes les riches faunes cala- briennes de l'Italie, on ne rencontre absolument que le seul C. mediterraneus (localisé d’ailleurs dans les facies relativement littoraux, l'espèce étant, actuellement aussi, littorale). Peut-être faut-il faire exception pour le Monte Mario. M. Cerulli-Irelli ([32], vol. 16, p. 48) y cite en effet cinq espèces de Cônes : G. Mercati Brocchi, G. Pyrula Br., G. Pelagicus Br., GC. striatulus Br. et GC. mediterraneus Brug. La première de ces espèces est représentée par un seul échantillon, déci- dément différent de l'espèce vivante par sa spire aplatie. L'individu unique de C. pyrula, figuré aussi par M, Cerulli-Irelli, est également assez typique. Quant aux échantillons de C. pelagicus et striatulus, ils ne ES ER ges DD np DE TE | CONIDÉS 179 me paraissent pas, d'après les figures de cet auteur, assez éloignés des variations du C. mediterraneus pour qu'on puisse en tenir compte en stratigraphie, En somme, dans cette faune du Monte Mario, que l'on doit ranger dans la partie tout à fait inférieure du Calabrien, on voit que l'extinction des Cônes pliocènes est, pour ainsi dire, un fait accompli, puisqu'on n'y en connait en tout que deux individus appar- tenant à des rameaux éteints. Dans les faunes quaternaires anciennes, au Sicilien, la même pau- vreté continue: on n'y connaît que le seul Conus mediterraneus. Mais tout d'un coup, dans les couches à Strombes, on assiste à un enrichissement momentané: sur tout le pourtour de la Méditer- ranée on trouve en abondance, à côté du C. mediterraneus, d'autres Cônes de grande taille, sur la détermination spécifique desquels on a discuté, mais qui, en tout cas, sont absolument distincts des formes méditerranéennes actuelles. Aussi ces grands Cônes quaternaires avaient depuis longtemps retenu l'attention des géologues, et on les a appelés de noms divers : C. Mercati Br., C. quinaicus Hwass, C. papilionaceus Hwass, G. testudinarius Martini. J'en figure ici différents exemplaires. Cette dernière détermination, proposée autrefois par Simonelli [215|, pour des Cônes de Pianosa, et par G. Seguenza [206] pour des exemplaires de Ravagnese, est, d’après M. Dautzenberg, tout à fait exacte !. Ce C. testudinarius, inconnu dans les faunes méditer- ranéennes antérieures aux couches à Strombes, vit actuellement sur les côtes atlantiques de l'Afrique. D'ailleurs, il est certain que ces grands Cônes quaternaires mon- trent d'étroites affinités avec le C. Mercati Br., espèce classique du Pliocène ancien : ce dernier en représente peut-être la forme ancestrale. Mais, même si on voulait réunir spécifiquement les deux formes, il n'en subsisterait pas moins, dans l’état actuel de nos connais- sances, une lacune entre l'espèce vivant dans le Pliocène ancien et celle apparaissant seulement dans le Quaternaire à Strombes. Il est naturel de considérer cette apparition comme due à une immi- gration véritable, qui a ramené dans la Méditerranée une espèce | Cet auteur me l’a encore confirmé tout récemment, après examen d'échantillons de Tarente ayant conservé leur coloration. 480 GASTROPODES (accompagnée d’ailleurs de beaucoup d'autres) dont le centre de développement était resté dans l'Atlantique. L'association constante, dans les couches à Strombes, de ce Cône avec toute une faune dont l'histoire est analogue à la sienne, constitue un argument très fort en faveur de cette interprétation. Et l'importance stratigraphique de cette espèce est encore beaucoup augmentée par le fait de sa fréquence et de sa constance dans les couches à Strombes. On la connaît en effet des gisements suivants : S. Juan de Vilasar près Barcelone, Baléares, environs de Nice (divers gisements), côte romaine près de Civita-Vecchia, Rava- gnese, Boveto, Tarente, Sferracavallo près Palerme, côtes algériennes et tunisiennes (nombreux gisements). Et dans ceux de ces gisements qui sont un peu riches (Tarente, Nice, Algérie, Ravagnese, etc.) elle est vraiment abondante. G. Seguenza |[206| a signalé, en outre, dans les couches à Strombes de Ravagnese, trois espèces nouvelles de Cônes, qu'il définit seulement par de très courtes diagnoses : ce sont les G. subventricosus, C. Man- tovani, GC. Rheginus. Des deux premières formes je ne puis rien dire, mais je soupçonne que ce sont seulement, comme la troisième, des variétés de C. meduiter - raneus. J’ai récolté, en effet, dans les couches à Strombes de Ravagnese et de Tarente, des exemplaires qui concordent bien avec la description donnée par Seguenza pour son C. rheginus; ce sont des formes de petite taille, à spire très aplatie à profil concave : les premiers tours seuls sont saillants et forment dans l’axe de la coquille une sorte de petit aiguillon très pointu. J'avais cru voir là une espèce spéciale, mais M. Dautzenberg, qui a eu l’obligeance d'examiner mes échantillons, a reconnu que ces carac- tères résultaient d'une décortication partielle du test, et que ces formes devaient être rapportées à des variétés de C. mediterraneus. Il existe en effet des variétés vivantes du C. mediterraneus, dans lesquelles la spire s’aplatit en même temps que le dernier tour devient plus régulièrement conique. C’est le cas par exemple pour le Conus imelus décrit par M. de Gregorio ‘ et figuré par Kiener?. Mais surtout 1 Stud. tal. conch. medit. viv. e foss. (Bull. d. Soc. Malac. Ital., 1885, vol. XI, p. 356). M. de Gregorio caractérise ainsi cette forme : « Spire très courte, enfoncée en dedans, avec les premiers tours saillants en forme de petite protubérance conique et un peu pointue. Vivant dans la Méditerranée, zone des éponges ». 2 PI. ror, fig. 4-5. ge Hi ge hi. D À CANCELLARIIDÉS 481 mes échantillons fossiles de Tarente et de Ravagnese (= ? C. rheginus) me paraissent voisins du C. medilerraneus var. Vayssieri Pallary!, vivant et fossile dans les couches à Strombes à Sfax (voir les planches). En somme, ces petits Cônes des couches à Strombes ne s’écartent pas beaucoup du cadre des variétés vivantes du C. mediterraneus, et, par suite, n'ont point d'intérêt stratigraphique. On peut donc résumer de la manière suivante l'histoire des Conidés méditerranéens. Dès la fin du Pliocène ancien, disparition brusque de toutes les nombreuses et belles espèces pliocènes, dont une seule survivra jusqu'à l’époque actuelle: c’est le C. mediterraneus. Puis, à l'époque des couches à Strombes, apparition momentanée d’une espèce à affinités sénégaliennes, mais dont on peut retrouver les racines dans les faunes du Pliocène ancien. La soudaine fréquence de ces Cônes dans tous les gisements de la faune à Strombes nous paraît sexpliquer par un courant d'immigration d’origine atlantique. Mais cet enrichissement de la faune méditerranéenne n’a été que momentané, car la faune actuelle de cette mer est de nouveau réduite au seul C. mediterraneus, avec de nombreuses variétés. CANCELLARIIDÉS Cette famille comprend elle aussi de nombreuses espèces bien caractérisées, propres au Pliocène ancien, et dont les descendants paraissent se retrouver aujourd'hui sur les côtes occidentales d'Afrique. Actuellement, il n'y a plus dans la Méditerranée qu’une espèce de Cancellaire qui soit vraiment fréquente: c’est la Cancel- laria cancellata L. Cet appauvrissement subit de la faune coïncide à peu près avec la limite supérieur, du Pliocène ancien, et l'absence des belles espèces pliocènes constitue un des nombreux caractères négatifs des faunes dites postpliocènes. Quelques-unes de ces espèces toutefois paraissent avoir dépassé cette limite; ce sont la C. hirta Br. et la C. uniangulata Desh.; leur histoire nous intéresse donc, ansi que celle de la C. cancellata : ces trois formes ont d’ailleurs évolué d’une manière tout à fait indépendante. 1 Figuré également dans Kiener, table 100, fig. 17. Univ. pe Lyon. — Giçcxoux ol 482 GASTROPODES 10 Groupe de la G. (Bivetia) cancellata Lmu. Ce groupe est déjà représenté dans la Méditerranée pliocène par une forme très voisine du type actuel. On trouve en effet en abon- dance dans tous les gisements du Pliocène ancien (Astésan, Mode- nais, Altavilla, etc.) une Cancellaire qui ne diffère de la C. cancel- lata actuelle que par des caractères secondaires. La taille est constamment plus petite, les cordons longitudinaux sont plus nombreux et, partant, plus serrés. C’est cette forme que M. Sacco a décrite et figurée ([13], fase. 16, pl. IT, fig. 55) sous le nom de C. cancel- lata L. var. pluricosticillata Sacco; d'Orbigny l'avait d’ailleurs distin- guée sous le nom de G. subcancellata d'Orb., et c’est sous cette dernière dénomination que M. Cossmann (|242| fasc. 3, pl. I, fig. 1-2), l’a récemment figurée. En réalité, il's’agit seulement là d'une variété de l'espèce vivante, variété qu’il n’est même possible d'apprécier qu'en examinant un grand nombre d’échantillonsf. Au Pliocène supérieur, les documents deviennent moins abon- dants; mais toutefois il semble que le type actuel soit désormais constitué, comme le montre un échantillon que j'ai récolté à Musalà; de même les rares individus rencontrés au Monte Mario gardent à peine une trace des caractères archaïques, à en juger par les figures qu'en donne M. Cerulli-Irelli ([32}, t. XXX VIII, fig. 8). Dans les couches à Strombes, plus littorales, cette Cancellaire devient de nouveau abondante (Ravagnese, Boveto, Tarente, etc.) et tout à fait semblable au type vivant. À l'époque actuelle, il semble, d’ailleurs, que la forme ancestrale, var. subcancellata d'Orb., ou pluricosticillata Sacco, ait, comme beaucoup de types plio- cènes, continué à vivre sur.les côtes occidentales d'Afrique, car on ne peut guère en séparer la C. similis d'Orb., considérée aujourd’hui comme une variété atlantique de la C. cancellata. En tout cas, c'est là un bel exemple d’évolution sur place, mon- trant des modifications très lentes et peu sensibles, et s’accom- pagnant d’un accroissement de la taille dans les formes récentes. 2° Groupe de la G. {(Solatia) hirta Br. Ici encore, les diverses formes de ce groupe ne sont séparées que 1 Ainsi l'individu figuré par M. Cossmann se rapproche plus de la forme actuelle que la moyenne des individus du Pliocène ancien. CANCELLARIIDÉS 483 par des nuances insensibles. Celle que l’on doit considérer comme ancestrale, et qui est en effet abondante dans le Pliocène ancien, est la G. piscatoria L. var. minor Bronn, de M. Sacco ([13], fase. XVT), auquel j'emprunte une partie des données qui suivent. Cette forme ancestrale, en augmentant légèrement de taille, a donné dans l'Atlantique la G. piscatoria L., actuellement com- mune sur les côtes d'Afrique. Dans la Méditerranée, il s’en est détaché un rameau latéral, bien développé dans le Pliocène ancien, et aboutissant aux grandes formes épineuses bien connues sous le nom de G. hirta Br.. Cette C. hirta a d’ailleurs survécu un peu à la fin du Pliocène ancien. Elle est, en effet, assez commune au Monte Mario!'; M. de Stefani [101] l'a signalée à Vallebiaja et à Sciacca; les collections du Laboratoire de Géologie de l'Univ. de Lyon en possèdent de beaux exemplaires pro- venant aussi du Calabrien des collines livournaises (gisement de Crespina); enfin j'en ai récolté un individu de grande taille dans le Calabrien de Girgenti. Mais dès la fin du Calabrien, ce rameau de la C. hirta s'éteint complètement dans notre mer, et le sous-genre Solatia tout entier devient éfrançger aux faunes médilerranéennes. Aussi crois-je devoir appeler l'attention sur la découverte, par M. Pallary, d’une Solatia dans le Quaternaire (niveau de 6o m.) des environs d'Oran. Malgré leur médiocre conservation, les échan- üllons qui m'ont été communiqués par M. Pallary? me semblent se rapporter à la forme sénégalienne actuelle C. piscatoria, plutôt qu'au rameau pliocène C. hirta. De sorte que la coquille d'Oran nous apparaît comme un de ces «immigrés atlantiques» dont nous avons déjà tant d'exemples au cours du Quaternaire. 30 Groupe de la C.(Tribia) uniangulata Desh. Ce groupe des Tribia est, lui aussi, très abondant dans les faunes pliocènes, où il est représenté par la G. uniangulata Desh. (passant insensiblement, par la var. pseudocoronata Sacco, à la C. coronata Schacchi), et par la GC. tribulus Br. ©. 1e M. Cerulli-Irelli l'a appelée C. piscatoria var, minor, avec passages à la 2. hirta. > L'un d'eux est figuré ici. 3 , ni Û 2 : Q D'après M. Cossmann ([242], fasc. 3, p. 18); M. Sacco, au contraire, range cette dernière espèce dans le sous-genre Svellia. EP ue he CNE * 484 GASTROPODES Puis, dès la fin du Pliocène ancien, on observe le même appau- vrissement que dans les autres groupes de Cancellaires, et il ne subsiste plus dans la Méditerranée qu'une ou deux espèces, la G. coronata Scacchi et la G. Angasi Crosse: elles y sont d’ailleurs fort rares; la première est localisée dans la Méditerranée méridio- nale, et la seconde n’a été signalée que tout récemment par M. Daut- zenberg ([59], p. 32) dans le golfe de Gabès: elle paraît au contraire beaucoup plus fréquente au Sénégal. En somme, ce sous-genre Trihia est en voie de disparition dans la Méditerranée, depuis le Pliocène récent. La C. coronata typique est connue à l’état fossile dans le Calabrien : Vallée du Crati (Crema[56|, p. 27), collines livournaises (collections de Lyon), Monte Mario (Cerulh-Irelli)}, — et dans le Sicilien : Monte P ellegrino (di Monterosato). MARGINELLIDÉS Ce sont des coquilles à affinités subtropicales. Cette famille était représentée dans la faune méditerranéenne du Pliocène ancien par de grandes et belles espèces (par exemple Marginella auris- leporis Br.) dont la disparition contribue à accentuer la coupure paléontologique entre le Pliocène ancien et le Calabrien. Car dès la fin du Pliocène ancien, on ne trouve plus dans la Méditerranée que de petites espèces, à la vérité fort nombreuses, mais tellement difficiles à déterminer que leur histoire ne parait pas susceptible de conduire à des résultats stratigraphiques 1m- portants. Ainsi M. di Monterosato considère comme une espèce éteinte du Suci- lien de Palerme sa Marginella (Gibberulina) ovulina Mits., qu'il dit « du groupe de la G. occulta Mts. mais plus grande » ; je ne crois pas que l’on puisse faire jouer à cette petite espèce aucun rôlestratigraphique. Je noterai d’ailleurs, en passant, qu’elle me paraît extrêmement voisine de la Gibberulina, Monterosalor Locard, draguée dans l'Atlantique par le Travailleur, en compagnie d’une foule d’autres de ces petites espèces si difficiles à apprécier. R Pour des raisons analogues, je ne puis me décider à attribuer d'impor- tance stratigraphique à la Marginella clandestina Brocchi, espèce classique du Pliocène ancien et supérieur, et que M. Cerulli-Irelli sépare de la coquille vivante jusqu’à présent citée sous ce nom : les différences MITRIDÉS 185 invoquées par lui sont en somme bien minimes dans un groupe où le polymorphisme est aussi grand. MITRIDÉS! Ici encore, le trait le plus saillant de l’histoire de cette famille est la disparition brusque, dès la fin du Pliocène ancien, de très nom- breuses espèces dont on ne retrouve plus trace dans les faunes méditerranéennes plus récentes. Les quelques espèces qui survivent, et qui forment la population actuelle de la Méditerranée, ne pré- sentent point, entre la base du Pliocène et l’époque actuelle, de modifications suffisamment notables. Très rares sont donc, dans ce groupe, les formes intéressantes au point de vue stratigraphique : 19 Mitra cupressina Br. Cette espèce, bien caractéristique des dépôts de mer profonde du Pliocène ancien (facies plaisancien), où elle abonde, dans le Nord comme dans le Sud de l'Italie (en particulier dans les marnes blanches du Marchesato), puis devenue plus rare dans les sables littoraux de l’Astien, parait avoir dépassé la limite inférieure du Calabrien. Car je l'ai rencontrée, en compagnie d'un ensemble d'espèces vivantes à cachet nettement Calabrien, dans les graviers à Brachiopodes de la Valle Lamato (gisement dit Pont sur le F. Amato). C'est donc un exemple de ces espèces anciennes qui persistent çà et là isolément dans les faunes composites du Calabrien inférieur. 20 Mitra Bronni Michelotti. Il en est de même pour la M. Bronni : cette espèce, relativement fréquente dans le Miocène et le Pliocène du Nord de l'Italie, avait déjà été signalée dans le Calabrien de Musalà par G. Seguenza, qui n'en avait récolté qu’un seul exemplaire, tout à fait semblable, déclare-t-il, à la forme typique de la M. Bronni: cet échantillon uni- que fut ensuite communiqué à Bellardi, lequel ne fut pas aussi aflir- ! La famille des Volutidés a toujours été tout à fait étrangère aux faunes méditer- ranéennes; aussi je ne m'explique pas la citation faite par Fischer {Manuel de Con- chyliologie, p. 606) d'un Yelus papillatus Schumacher dans le Pliocène algérien. 486 GASTROPODES matif dans la détermination : il le considéra ([13], fase. V, p. 269) comme une espèce inédite, voisine de la M. Bronni et de la M. Sis- mondæ Michelotti. J'ai été assez heureux pour récolter moi-même à Musalà un exem- plaire de cette belle coquille, et je crois qu'on peut, sans trop de scrupules, le rapporter à la M. Bronni. M. Dautzenberg, qui a bien voulu l’examiner, n’a pu le rapprocher d'aucune espèce vivante et m'a confirmé cette détermination. Il diffère de l'espèce pliocène, surtout par sa taille plus grande, son galbe plus élancé, et l'absence complète de sillons décurrents sur la partie moyenne et inférieure des derniers tours: mais on sait que ce dernier caractère est également fréquent dans les formes pliocènes. D'ailleurs, dans cet échan- tillon de Musalà que j'ai figuré ici, sous le nom de var. Calabrensis, les premiers tours sont entièrement sillonnés, ce qui indique bien ses rapports ancestraux avec des formes entièrement sillonnées, telles que le type de la M. Bronni. Ainsi nous retrouvons là, dans le Calabrien, le dernier représen- tant de ce groupe de la M. Bronni, essentiellement miocène et plio- cène : il nous manifeste la continuité existant entre les faunes du Pliocène ancien et du Pliocène récent. 30 Mitres du Monte Mario. Cette continuité vient d’être encore confirmée par les récentes études de M. Cerulli-Irelli. Cet auteur a en effet décrit dans le Calabrien du Monte Mario sept espèces de Mitra. L'une, la M. Fontannesi, est une espèce nouvelle basée sur un échan- tillon unique : pour ces deux raisons, nous ne pouvons en tenir compte ici. Deux autres espèces, les Mitra (Uromitra) pyramidella Brocchi et plicata Br. ne s’écartent pas assez des variétés vivantes de la £. ebenus L. méditerranéenne, pour pouvoir constituer des formes éteintes caracté- ristiques. Mais, par contre, les quatre (ou trois) autres appartiennent bien certainement à des rameaux disparus de notre mer dès la fin du Pliocène: ce sont les Mitra astensis Bellardi et fusiformis Brocchi, représentées chacune par trois échantillons, et les Mitra atava Bellardi et turricula Jan, dont M. Cerulli-Irelli ne connaît qu'un spécimen, et qui peuvent être, d'ailleurs, réunies en une seule espèce. Ainsi ces Mitres éteintes, si abondantes dans le Pliocène ancien, ne MITRIDÉS 187 sont plus représentées au Monte Mario que par huit individus en tout. On ne saurait citer un exemple plus frappant de la disparition pro- gressive des types archaïques dans les faunes du Pliocène supérieur ; et, d'autre part, cela nous explique la rareté des citations de ces types dans les autres gisements calabriens, infiniment moins étudiés que celui du Monte Mario. 4° Mitra Aquini O.-G. Costa Le type de cette espèce, conservé au Musée zoologique de l'Univer- sité de Naples, a été décrit par O.-G. Costa! comme vivant dans la Méditerranée, mais il provient en réalité, comme a bien voulu me le confirmer après examen M. di Monterosato, du Quaternaire (couches à Strombes) de Tarente. Le savant conchyliologiste de Palerme a pu reconnaître son identité avec une Mitre du Sicilien de Palerme (Monte Pellegrino) qu'il avait d’abord [115] déterminée comme M. striatula Br., puis dont il avait fait [114] une ‘espèce nouvelle sous le nom de M. cingulosa?. De mon côté, j'ai retrouvé cette même espèce dans les couches à Strombes de Ravagnese, où elle avait déjà été signalée par Seguenza |206| sous le nom de Mifra scrobiculata Br. Enfin, c’est très probablement encore cette même forme qui a été signalée par Appelius [3} dans le Quaternaire de Livourne, sous le nom de M. scrobiculata Br., var. minor ; mais ici comme pour toutes les citations d'Appelius, on ne peut en préciser le niveau ; nous l'avons rapportée au Sicilien (voir plus haut, p. 311). Comme on pourra s'en convaincre par l'examen des figures données ici, il s'agit d’une espèce bien différente de toutes les formes vivantes dans la Méditerranée, et qui se rencontre donc dans le Sicilien (Palerme, Livourne?) et dans les couches à Strombes (Ravagnese, Tarente). Il nous reste à étudier ses affinités, d'une part avec les formes 1 O.-G. Costa, Risullali Viagq. Adriat., Napoli, 185r, p. 8. ? M. di Monterosato a l’obligeance de me prévenir qu'après une nouvelle étude du type de la M. Aquini, il le croit un peu différent de sa M. cingulosa. Mais peut être ces différences ne dépassent-elles pas les limites de la variété; en tout cas le fait essentiel, à mon avis, est que toutes ces formes appartiennent à un même groupe, à affinités atlantiques, et étranger à la faune méditerranéenne actuelle, comme il est dit plus loin [ Nofe ajoulée pendant l'impression]. 488 GASTROPODES méditerranéennes pliocènes, d'autre part avec les espèces vivantes exotiques. La M. Aquini est très voisine des espèces pliocènes bien connues, M. striatula Br. et M. scrobiculata Br., comme le montrent d’ailleurs les déterminations citées plus haut. Elle me paraît surtout présenter de grandes affinités avec la M.striatula, car on n’y retrouve pas, dans les intervalles des cordons décurrents, les stries si caractéristiques de la M. scrobiculata. D'après les renseignements qui m'ont été obligeamment fournis par MM. Dautzenberg et di Monterosato, la M. Aquini paraît extrè- mement voisine de formes aflanfiques, pour la plupart assez mal connues ; telles sont : M. scrobiculata von Martens, 1876 !, non Brocchi (Cap Vert) — M. Turtoni E. Smith, 1890 ? (Sainte-Hélène), M. Hamillei Petit, (Côtes d'Afrique). Aussi ai-je cru préférable de conserver le nom de Costa pour la forme fossile dans le Quaternaire méditerranéen. Quant à l'interprétation de son rôle stratigraphique, elle est, comme on voit, assez délicate. Si l'absence du groupe dans la Médi- terranée pendant le Pliocène supérieur (Calabrien), absence jusqu'à présent confirmée par les faits, est bien réelle, il faut considérer sa réapparition au Sicilien comme résultant d’une immigration d’origine atlantique. Mais cet enrichissement de Ja faune méditerranéenne aurait été de courte durée, puisque le groupe y est de nouveau éteint aujourd'hui. 5° Imbricaria Gaterinii Meneghini:. Cette espèce a été citée seulement dans les terrains « pos{pliocènes » de Zivourne par Appelius [3]. Mais il ne m'a pas été possible de la retrouver, et l’on sait que le catalogue d’Appelius est bien difficile à uti- 1 Figurée in Kobelt, /con., 1900, p. 57, pl. XLIIL, fig. 8. ? Proc. Zool. Soc. of London, 1890, p. 205, pl. XXII, fig. r. 3 Voir pour cette espèce les références dans Dautzenberg ([59], p. 46). 4 La Mitra exilima Loc. (Locard [160}, t. I, p. 152, pl. XIV, fig. 27-29) draguée per le Talisman au large du Soudan par 150 et 350 mètres de fond, paraît en être aussi extrêmement voisine ; elle s’en distingue surtout par sa taille plus petite, 19 millimètres de longueur. ® G. MensGmini : Milra Caterinii, nuova specie di conchiglia scoperta dal com- pianto G. B. Caterino Caterini ed a lui intitola (1 br. VIII p., avec à photographies, Livorno, Tipografia G. Fabbreschi e C., 1868). FASCIOLARIIDÉS 489 liser en stratigraphie, car il s’agit de coquilles recueillies pour la plupart dans des déblais, sans que l’on puisse savoir en toute certitude de quelle couche elles proviennent. Je me borne donc à reproduire sans commen- taires la citation d’Appelius, tout en faisant remarquer que ce genre, auparavant connu seulement au Cap et dans le Pacifique, a été signalé récemment sur les côtes Ouest de l'Afrique : Imbricaria carhonacea Hinds, cité par M. Dautzenberg ([59], p.47 et [244], p. 28). Il est pro- bable que l'espèce fossile de Toscane doit être intimement liée à celle vivante dans l'Atlantique : ce genre, inconnu dans tout le Pliocène médi- terranéen, serait donc momentanément apparu dans nos mers au Quater- naire : il aurait ainsi un grand intérêt stratig'aphique {. FASCIOLARIIDÉS Seuls les grands genres Fasciolaria-Lathyrus et Fusus sont représentés dans les faunes que nous étudions. 1° Les Fasciolaires ne comprennent plus actuellement dans la Méditerranée qu'une seule espèce assez polymorphe, la Fasciolaria lignaria L., qui dérive évidemment du groupe pliocène F. fimbriata Br. — F. lawleyana d'Anc. Les caractères distinctifs de ces diverses espèces ont élé soigneusement étudiés par Bellardi, d'Ancona, et par M. Cerulli-Irelli. Bellardi avait déjà indiqué l'existence de tous les termes de passage entre son Lathyrus subfimbriatus et l'espèce vivante. Après avoir comparé une série de Æ, lignaria vivants (existant dans les collections du Muséum de la ville de Lyon) avec des spécimens d’Asti répondant à peu près à la }°, law- leyana des auteurs, il m'a paru bien difficile de voir là une coupure spéci- fique. L'évolution a été dans ce groupe à peine sensible et bien difficile à utiliser en stratigraphie. Au Calabrien et au Qualernaire, ce sont d’ailleurs des fossiles assez rares. M. Cerulli-Irelli rapporte ceux du Monte Mario aux espèces plio- cènes anciennes ; et j'ai récolté dans le Calabrien de Girgenti un individu bien voisin de la F, lawleyana; par contre dans les couches à Strombes, le type actuel apparaît nettement individualisé (Sfax, coll. Allemand- Martin). ! M. Dautzenberg, auquel je viens de communiquer les photographies originales de la Mitra Caterinii, me confirme son identité certaine avec l'Imbricaria carbo- nacea [Note ajoulée pendant l'impression]. 190 GASTROPODES 2° L'étude du genre Fusus, sans pouvoir donner de résultats d’une bien grande utilité pratique, est néanmoins assez intéressante. Car on y observe un certain nombre de formes propres au Pliocène. Tels sont par exemple les Fusus longiroster Brocchi, F. clavatus Brocchi, F. etruscus Pecchioli, grandes coquilles très abondantes dans le Pliocène ancien, et dont on trouvera de belles figurations dans l’ouvrage de M. Sacco ([13], fasc. XXX). Ces espèces sont certainement en très forte régression dès le Calabrien, et je vais énumérer les citations qu'on en a faites dans cet étage. ‘ Seguenza ([206], p. 262) signale le F. longiroster à S. Cristina d'As- promonte, dans une faune qu'il considère comme Astienne, mais que l’on peut, avec M. de Stefani, ranger plutôt dans le Pliocène supérieur (Cala- brien). Au Monte Mario. M. Cerulli-Irelli a confirmé la fréquence rela- tive du F. longiroster, et il y a décrit en outre, représentée par un unique échantillon, une forme du groupe efruscus-clavalus, sous le nom de Fusus Rigaccii Cerulli-Irelli. Une forme analogue, le F. Syracusioides Brugnone, se rencontrerait dans le Pliocène supérieur de Caltanisetta (Brugnone {25}) et de l’île Lampedusa (Nelli [179|). Dans le Quaternaire, par contre, toutes les espèces de Fusus peuvent sans difficultés se grouper autour des formes méditerra- néennes vivantes ; dans la plupart des gisements, d'ailleurs, c’est le groupe du F. rostratus Olivi qui est surtout bien représenté. Aussi je n’attacherai pas d'importance, au point de vue de la paléonto- logie stratigraphique, à un certain nombre de petites espèces du Sicilien de Palerme, considérées comme éteintes ou émigrées par M. di Monte- rosato : ce sont les suivantes : Pseudofusus flexicauda Mts., qui me paraît rentrer dans les limites de variabilité du si polymorphe F. rostralus L, actuel; Pseudo- fusus latiroides di Blasi, var. différente, d’après M. di Monterosato, du type de l'espèce méditerranéenne, qui, elle-même, appartient encore d’ailleurs au même groupe du F. rostralus. Le Fusus /Pagodula) multilamellosus Phil., souvent cité dans les faunes récentes, ne peut être considéré, ainsi que le voudrait M. di Mon- terosato, comme une espèce atlantique, car il a été formellement cité dans la Méditerranée par divers auteurs, notamment Locard et Kobelt; M. di Monterosato lui-même l’a signalé autrefois au large de Palerme, et les différences entre la forme fossile (type de l'espèce) et la forme médi- CHRYSODOMIDÉS 491 terranéenne vivante, sont trop subtiles si elles existent, pour que nous puissions les utiliser ici. Enfin je signalerai le Fusus {Pagodula) squamulatus Br., forme pliocène ancienne et éteinte, rencontrée au Monte Mario par M. Cerulli-frelli qui la rattache d’ailleurs, contrairement à l'opinion de M. Cossmann ([242], fase. V, p. 103), au genre Mure. CHRYSODOMIDÉS Dans cette famille, qui comprend surtout des coquilles boréales, une espèce surtout intéresse les faunes que nous étudions: c’est celle qui a été souvent appelée Fusus contrarius L., et qui doit être désignée sous le nom de Chrysodomus sinistrorsus Desh!. Je commencerai d’abord par bien préciser la nomenclature et l'identité de cette espèce. Elle a été souvent confondue en effet avec une forme voisine, également sénestre, qui, au Pliocène, habitait les mers du Nord de l'Europe : c’est le Ghrysodomus contrarius L. sp. Le Chrysodomus fossile dans les terrains méditerranéens est en effet assez différent de ce C. contrarius L. des Crags. Nyst, étudiant la faune du Pliocène belge, avait déjà remarqué que «l’on ne peut confondre avec cette espèce (le C. contrarius du Crag) le À. contrarius de Philippi, qui est le F. sinistrorsus Desh. ». Plus récemment, M. di Monterosato [114] a attiré de nouveau l'attention sur cette importante distinction, devenue maintenant familière à tous les paléontologistes italiens. Enfin Locard ([160|, t. [, p. 355) est revenu encore sur la question, et a montré pourquoi on devait, à son avis, réserver le nom de C. contrarius L. à la forme du Crag, et celui de C. sinistrorsus Desh. à l'espèce fossile à Ficarazzi et vivante dans l'Atlantique lusitanien ?. Aussi Je ne vois pas de raison décisive pour admettre la nomenclature adoptée par M. Dautzenberg ([59|, p. 49). Ce savant malacologiste propose en effet de réserver le nom de C. contrarius L. à la forme de l’Atlan- tique Sud, en alléguant que la description de Linné convient mieux à ! Deshayes, 1830, Encyclopédie méthodique, t. II, p. 160. 2 Moir, en outre, l'étude détaillée de ces formes dans Kobelt, Zcon. d. schalent(r. europ. Meeresconch., et surtout dans le travail cité plus loin de F. W. Harmer. 492 GASTROPODES cette dernière. En réalité cette description est confuse, car une partie de la diagnose linnéenne (esta simillima M. antiquo, rudis sed perversa) s’appliquerait mieux à la première des deux espèces, tandis que l’autre partie (strivs {ransversis elevatis, æqualibus, etc...) convientàla dernière. Dans ces conditions, j'estime qu'il vaut mieux, tout au moins provisoire- ment, s’en tenir à la nomenclature exposée plus haut et très générale- ment adoptée par les paléontologistes italiens. Je me borne donc à indiquer rapidement les caractères différen- tiels entre les deux espèces: j'ai pu en effet comparer des C. sinis- trorsus vivants et fossiles avec des C. contrarius des Crags anglais et belges; les différences m'ont paru assez importantes pour motiver une coupure spécifique. Les exemplaires du Crag s’éloignent de ceux de Ficarazzi : 1° par leur dernier tour plus dilaté, ce qui donne à la coquille un galbe plus trapu et fait paraître la spire moins haute ; 2° surtout par leur ornementation : dans le C. contrarius les cordons décurrents sont très inégaux et certains d'entre eux sont notablement plus saillants ; si on compare entre eux les deuxième ou troisième tour dans les deux espèces, les divergences s’accen- tuent encore : dans la forme du Crag les cordons décurrents s’y réduisent à trois, tres saillants, le supérieur déterminant une véritable carène! ; au contraire dans le C. sinistrorsus, si l’on remonte la spire vers le Re on voit ces cordons rester parfaitement égaux et subsister tous, toujours égaux et très fins. Jusque sur le troisième ou le quatrième tour, où ils sont encore au nombre d’une quinzaine ? Quant aux C. sinistrorsus vivants dans l'Atlantique, tout en possédant une ornementation moins finement régulière que celle des individus de Ficarazzi, ils s’écartent aussi notablement des C. contrarius des Gris (voir les Fee de Harmer et celles données ici). J'ajouterai enfin que le C. sinistrorsus est sûrement une forme norma- lement sénestre, car on ne rencontre, mi à l'état vivant, m1 à l’état fossile, aucune forme dextre qui lui soit associée et qui lui soit identique. Ayant ainsi précisé les affinités et la nomenclature de cette espèce, il nous reste à en étudier soigneusement la répartition. 1 Ce caractère distinctif ressort assez bien des figures mêmes données par Deshayes (Traité de Conchyliologie, pl. CIX) pour le Fusus contrarius (fig. 9-10) et le F. sinistrorsus (fig. 8). > Par contre, la protoconque a un aspect très différent : elle est lisse, présentant une carène unique peu saillante. CHRYSODOMIDES 193 Tout d'abord, le genre Chrysodomus est complètement inconnu dans les faunes méditerranéennes du Miocène el du Pliocène ancien. Il y apparaît seulement au Calabrien et semble y être encore assez rare : 1l avait été cité, à ma connaissance, dans les gisements de cet âge, près de Sciacca, par Philippi, près de Messine et à S. Cristina d'Aspromonte, par Seguenza [206 et 07] : ce dernier gisement était même considéré comme astien par cet auteur ; mais, en raison du très petit nombre des espèces éteintes et de la présence de plu- sieurs formes septentrionales, 1l faut décidément, avec de Stefani ([gr}, p. 234), le regarder comme « postpliocène » (Calabrien). Enfin, j'ai été assez heureux pour récolter moi-même le C. sinis- trorsus à Brucoli, près Augusta, et à Terranova di Sicilia, dans des couches sans doute Calabriennes. Dans le Sicilien, notre espèce devient beaucoup plus abondante comme individus, mais on ne la rencontre que dans peu de gise- ments, car, étant donné son habitat toujours profond, il ne faut pas s'attendre à la trouver dans les facies littoraux sous lesquels se présentent trop souvent les dépôts siciliens. À Ficarazzi, par contre, elle est très fréquente, puisqu'il s’agit là d’un dépôt formé à près de 100 mètres de profondeur. Et c’est probablement au Sicilien qu'il faut, comme on l’a vu, rapporter aussi ce gisement de Palmi dont la faune citée par de Stefani ([9r}, p. 232) renferme aussi le C. sinis- trorsus. La plupart des autres gisements siciliens, où cette espèce a dû vivre, sont aujourd hui encore recouverts par la mer: ainsi s'explique que cette coquille, rencontrée dans des dragages ou rejetée à la côte par les vagues, ait parfois été citée comme vivante dans la Méditerranée. M. R. Meli!, par exemple, en a signalé quatre exemplaires pêchés sur les côtes d'Algérie : il n’est pas abso- lument certain qu'il ne s'agisse pas de fossiles rejetés à la plage. De même s'expliquerait la citation faite par Michaud de cette espèce à Barcelone. Enfin le C. sinistrorsus est au nombre des espèces les plus caractéristiques du curieux gisement sicilien sous-marin que les dragages de M. Pruvôt nous ont révélé au large de Banyuls | 196]. Aussi la plupart des malacologistes s’accordent-ils à considérer le GC. sinistrorsus comme actuellement éfeint dans la Méditerranée. I] | R: Meli, Ancora sugli esemplari di Neplunea sinistrorsa pescali sulla costa d'Algeri {Boll. d. Soc. Geol., Ital., t. XIV, 1895). 494 GASTROPODES ne persiste plus que dans l'Atlantique, où il s'étend depuis le Cap Blanc (Dautzenberg [59], p. 49) et le Maroc (Locard [160], t. I, p. 357) jusqu'au Golfe de Gascogne (dragages de Hirondelle); l'in- dividu vivant que j'ai fait figurer ici provient des côtes portugaises où l'espèce, toujours assez rare, paraît avoir son maximum de fréquence. Enfin je rappellerai en terminant que toutes ces formes, tant vivantes que fossiles, forment un ensemble absolument homogène ; il serait difficile d'y distinguer même des variétés un peu impor- tantes ! ; iln’y a bien là qu'une seule et même espèce, le C. sinis- trorsus Desh. Pour éclaircir complètement la question, 1l est maintenant néces- saire de dire un mot des Chrysodomus vivants ou fossiles dans les mers du Nord. Précisément une étude synthétique fort intéressante a été publiée récemment par M. F.-W. Harmer?. D'après cet auteur, il faut admettre que les formes dextres et sénestres ont évolué indépendamment les unes des autres. La série sénestre est représentée dans la partie inférieure (à faune chaude) des Crags : elle comprend le C. contrarius avec ses nombreuses variétés, figurées par S. Wood ; il est probable que le C. sinistrorsus en est dérivé directement. Actuellement cette série sénestre est éteinte dans les mers du Nord3. La série dextre est représentée parle C. antiquus L., qui apparaît dans la partie supérieure (à faune froide) des Crags anglo-belges, et vit encore en Angleterre ; à cette espèce il faut ajouter quelques formes alliées, telles que C. carinatus Penn. et C. despectus L., que l’on rencontre aussi dans les Crags à faune froide, mais qui ne vivent plus actuellement que dans les mers tout à fait septentrionales (Norvège, régions arcti- ques). On peut donc admettre, avec M. Harmer, l'existence de trois 1 La variété Romoliana Mts. in sch., que M. di Monterosato y.a distinguée à Ficarazzi, ne me paraît pas, comme je m'en suis assuré par l'examen des échan> tillons types, se distinguer par aucun caractère suffisamment important à notre point de vue. 2 F. W. HARMER : On the range in time and space of Fusus (Neptunea) antiquus and, its allies {Proceedings of the fourth international Congress of Zoology, Gam- bridge, 1898, pp. 222-225 et pl. 3). 8 Les individus sénestres que l’on rencontre aujourd'hui très rarement dans les. mers du Nord, sont, d’après M. Harmer, de simples anomalies sénestres du C. ant quus, et n'ont rien de commun avec les espèces normalement sénestres. CHRYSODOMIDÉS 495 sroupes indépendants, à caractère de plus en plus septentrional : le groupe confrarius-sinistrorsus !, le groupe antiquus, et le groupe carinatus-despectus. À l'époque des faunes froides, ces trois groupes sont tous descendus momentanément vers le Sud. C'est ce que montre le schéma ci-dessous. Ainsi s'explique ce fait, en apparence paradoxal, que les Chrysodomes sénestres coexistent avec une faune relativement chaude dans les Crags anglais, tandis quils accompagnent dans la Méditerranée une faune relativement froide. Rien ne montre mieux le caractère essentiellement régional des renseignements stratigraphiques que l’on peut attendre des espèces fossiles. MÉDITER- ATLANTIQUE MERS RANÉE LUSITANIEN MER DU NORD ARCTIQUES Actuel et aatern. sup. sinistrorsus anliquus carinalus cilien . . . . sinistrorsus ? | [ (Grags à faune froide) antliquus carinalus D labrien. . . sinistrorsus GR DEEE | se | iocène inf. contrarius (Crags à faune chaude) ? ? RE — Série sénestre Série dextre Ainsi le C. sinistrorsus, sans être une forme vraiment septen- trionale, comme on l'avait eru tout d’abord, alors qu'on le confondait avec Le C. contrarius, est néanmoins un exemple net de ces formes immigrées d'origine aflantique, qui sont venues temporairement enrichir la faune méditerranéenne. Sans racine dans les faunes de la Méditerranée pliocène, et actuellement émigré, il constitue un des éléments les plus caractéristiques de ces faunes « postpliocènes » pour lesquelles Suess a créé son quatrième étage méditerranéen. Sa grande facilité de détermination (c'est le seul grand Gastropode sénestre des faunes méditerranéennes) et sa fréquence à Ficarazzi | | L'origine primitive septentrionale du C. sinistrorsus paraît être décelée égale- ment par la répartition en profondeur de ses divers habitats actuels. En effet, tandis que sur les côtes d'Afrique, son point extrême de pénétration vers le Sud, elle a été rencontrée par 1.000 et 500 mètres de profondeur, elle remonte vers la Surface à mesure qu'on s’avance vers le Nord. Et dans le Golfe de Gascogne, c'est à guère plus de 100 mètres que l'Hirondelle l’a rencontrée, dans des conditions bathy- métriques analogues, par conséquent, à celles que nous montre aujourd’hui le gise- ment sicilien de Ficarazzi. 496 GASTROPODES l’ont rendu à juste titre célèbre. Mais il ne faudrait pas, comme on le voit d’après sa répartition géographique actuelle, en faire état pour attribuer des rigueurs polaires au climat de l'Italie méridio- nale pendant le Sicilien. Genre Euthria De nombreuses espèces de ce genre peuplaient la mer pliocène ; elles ont toutes disparu dès la fin du Pliocène ancien, ne laissant subsister qu'un seul rameau, celui de l'E. cornea L.; qui est encore abondante actuellement dans la Méditerranée. Mais ce rameau a subi une évolution sur place fort intéressante, bien qu'elle ne porte que sur des caractères assez fugaces et appréciables seulement si l’on possède un nombre suffisant d'échantillons. Bellardi avait fort bien remarqué en effet ([13/, fasc. I, p. 220) que l'E. cornea du Pliocène ancien est assez différente du type actuel : elle est souvent plus petite, et surtout plus allongée, plus svelte, à spire plus aiguë, à tours plus aplatis et moins déprimés au voisinage de la suture, « ce qui tend à lui donner un profil plus régulièrement conique ; c'était la variété À de Bellardi, et il convient de la désigner, avec M. Sacco ( [13], fasc. XXX, p. 34) sous Je nom de var. plioelongata Sacco; les figures données ici permettront d'apprécier les différences entre ces formes, visibles seulement si on s'adresse à des échantillons bien adultes. Or, dès le début du Calabrien, cette modification du type pliocène est déjà un fait accompli, ainsi que j'ai pu le vérifier sur tous les échantillons de prove- nances diverses (Vallebiaja, Monte-Mario!, Girgenti, Castrovillari, Fauglia, . Nizzeti, Valle Lamato, etc.,) que j’ai eus à ma disposition. Ce fait a déja été signalé d’ailleurs par M. de Stefani ([100], p. 6 et [ror], p. 381), comme exemple de l’évolution qui s'est produite entre les faunes plio= cènes anciennes et récentes. — Mais on peut se demander ici si ces modifications ne sont pas dues à des différences de facies (marnes pro fondes au Pliocène, dépôts plus littoraux dans les formations récentes): BUCCINIDÉS Genre Buccinum Nous répartirons les diverses espèces ou variétés qui nous inté= 1 M. Cerulli-Irelli vient précisément de figurer un certain nombre d’E. cornea du Monte Mario; à côté de formes identiques au type vivant ([32], pl. XXXIX, fig. 14. par exemple), on y rencontre encore quelques spécimens à cachet archaïque (fig.19 en particulier), | | | | | | BUCCINIDES 197 ressent, d'apres leurs chefs de file, en deux groupes, celui du B. undatum L., et celui du B. humphreysianum Bennet, ce dernier répondant à peu près au sous-genre Mala Jeffreys, récem- ment précisé par M. Cossmann ([242|, fasc. 4, p. 140 !). 1° Groupe du Buccinum undatum L.:. Ce groupe est totalement inconnu dans les faunes classiques du Plaisancien et de l’'Asfien de la Méditerranée ; il est en effet essen- tiellement d’origine septentrionale, car nous le voyons prospérer dans les Crags anglais et belges, s'y développer durant tout le Pliocène et le Quaternaire, et persister jusqu'à l'époque actuelle : le B. undatum est en effet, aujourd hui, une coquille des plus com- munes dans la mer du Nord, la Manche, les côtes atlantiques de la France. Vers le Sud, 1l ne parait pas dépasser le golfe de Gascogne*. Ce B. undatum est extrèmement polymorphe, tant à l’état vivant que dans ces faunes fossiles septentrionales, et les auteurs y ont distingué un nombre plus ou moins grand d'espèces et de variétés : par exemple B. grœnlandicum Chemn., B. finmarkianum Verkruisen, B. Donovant Gray, etc., pour les formes vivantes, B. {tenerum Sow., etc., pour les formesifossiles. Ces distinctions n’ont, à notre point de vue, aucune impor- lance: ce sont toutes là des formes constituant, en particulier au point de vue de la répartition géographique, un ensemble bien homogène. Dans les régions méditerranéennes, c’est seulement au Calabrien que nous les voyons apparaître ; elles y arrivent certainement par Voie d'immigration, car on ne leur connaît aucun ancêtre autochtone dans le Pliocène ancien etmême dans le Miocène méditerranéen. Mais, dès le Calabrien, le nombre des gisements où a été rencontré le B. undatum est assez grand; Seguenza le signale dans son « Sicilien » ou Pliocène supérieur à Monosterace et à Villa S. Giovanni, et dans son Saharien inférieur à Reggioet à Monteleone ; de Stefani ([g1], p.241 et 242 et |101/, p. 379) et Lovisato le citent à Caraffa di Catanzaro et à Girifalco, dans une des régions où les L C'est à tort, comme on le verra, que M. Cossmann considère ce sous-genre comme inconnu à l'état fossile. > Voir les planches. … | Les dragages du Travailleur ont ramené une espèce de ce groupe, le B. Fin- markianum Verkruisen, au Nord de l'Espagne, par 411 mètres. 4 Univ. px Lyon. — Gicnoux. PAUSE, PR EM EE D 498 GASTROPODES caractères stratigraphiques du Calabrien sont les plus nets. Je l'ai rencontré moi-même en exemplaires bien typiques à Musalà, où il n'avait pas été signalé par Seguenza, à Carrubbare, et dans les sables calabriens de la région des Archi (Nord de Reggio), en particulier à S. Francesco, sur les flancs du Monte di Pentimele, et dans le gisement dit de Monte Corvo, où J'ai pu constater son association avecle Pecten flabellhiformis : ce dernier point, à lui seul, suffirait à nous prouver que, l'apparition du Buccinum undatum dans la Méditerranée était déjà un fait accompli dans des faunes bien anté- rieures à celle du Sicilien de Palerme. Néanmoins il semble que cette espèce manque encore dans les zones tout à fait inférieures du « Postpliocène », à l'extrême base du Calabrien ; cela paraît résul- ter de son absence dans les gisements, à affinités anciennes, du Monte Mario et de Vallebiaja. C'est dans le Sicilien de Palerme, à Ficarazzi, au Fiume Oreto, au Monte Pellegrino, que nous retrouvons la dernière trace de l’exis- tence du B. undatum dans la Méditerranée ; il est en effet connu depuis longtemps dans ces localités fossilifères, et il y est encore relativement fréquent. Dans toutes ces faunes méditerranéennes, le B. undatum montre d’ailleurs un assez grand polymorphisme, quant à la forme générale et au développement plus ou moins accentué des côtes transversales. C’estm ainsi que, dans le Sicilien de Palerme, M. di Monterosato y a reconnu plusieurs variétés identiques aux variétés actuelles des mers arctiques® . B. undatum var. pelagica Sars, B. Donovani (?) Gray, B. grœnlan… ) y dicum Chemn. !, dont j'ai entre les mains divers exemplaires vivants Oum fossiles. Mais, comme Je l’ai déjà dit plus haut, ces distinctions n'ont pour nous qu’une importance secondaire, et pour plus de simplicité on peut, conformément d'ailleurs à l'avis de beaucoup de conchyliologistes; réunir toutes ces formes sous le nom unique de B.undatum. La seule remarque générale qui paraisse intéressante, c’est que les individus fossiles (tant dans les Crags que dans les terrains méditers ranéens) sont loin d'atteindre la grande taille à laquelle arrive actuelles ment l’espèce vivante dans les mers du Nord. Ce serait là un exemple de plus de l'augmentation de la taille au cours de l’évolution d’un rameaü phylétique. 1 Brugnone, qui pourtant ne comprenait pas l'espèce d'une façon bien large, estime [26] que le B. grœnlandicum cité à Ficarazzi par M. di Monterosato, est impossible à séparer du B. undatum. 4 a | BUCCINIDÉS 499 En résumé, le centre de développement de ce groupe parait être toujours resté dans le bassin de l'Atlantique Nord. Au Calabrien et au Sicilien, seulement, il a fait une apparition temporaire dans la Méditerranée, qu'il n’habite plus aujourd’hui ; et cette immigration constitue un point de repère précieux dans l’histoire des faunes méditerranéennes et, par conséquent, dans la stratigraphie du Plio- cène et du Quaternaire. Le B. undatum (s. 1.) mérite donc d’être cité parmi les « émigrés du Nord » les plus typiques de ces faunes « postpliocènes ». 2° Groupe du Buccinum (Mala) humphreysianum Bennet. Ce groupe est beaucoup plus riche que le précédent en petites espèces ou variétés. Son habitat est en général bien plus profond, et, comme à l'ordinaire en pareil cas, sa répartition géographique beaucoup plus vaste, bien que son centre principal de développement reste aussi dans les mers du Nord. De même, son extension stratigraphique dans les terrains que nous étudions est aussi plus grande. Comme le B. undatum, le B. humphreysianumest, en effet, sans racines dans les faunes méditerranéennes anciennes ; il manque tota- lement dans le Miocène et même dans le Pliocène ancien de l'Italie du Nord. Le premier indice que nous ayions de sa pénétration dans la Méditerranée est la citation que Seguenza en a faite dans son gisement « astien » de Gallina (0.), où il le signale comme relative- ment commun et représenté par la variété striata Phil. Je l'ai moi-même rencontré dans ce gisement en compagnie de nombreuses espèces franchement pliocènes (Pecten flabelliformis, P. latissimus, ete.). Nous avons d’ailleurs d’autres exemples d'immigrations atlantiques, surtout pour des formes profondes, débutant dès le Plio- cène ancien dans l'Italie du Sud. Quoi qu'il en soit, c'est surtout dès le Calabrien que ce groupe du Buccinum humphreysianum se développe; nous le trouvons citédans une foule de gisements de cet âge : Reggio-Archi (Seguenza), Caraffa di Catanzaro, Nao, Vallelonga (de Stefani), Carrubare (Philippi), ete. ; je l'ai moi-même récolté ? dans le Calabrien à Monte Corvo, ! Voir les planches. > M. Dautzenberg a bien voulu contrôler quelques-unes de mes déterminations. Er PENSE PERS) ES RTE Me, Gr NÉE ne RUES QE nn A Sn eng he 54 ES IDE SAS RESTE Etc ER SEE ER ne ef EE En pen se nt 500 GASTROPODES Monosterace, S. Francesco, Nizzeti (où il avait été cité par « M. Scalia [204]). Enfin M. Cerulli-Irelli vient de le décrire au Monte Mario ; il y est représenté par un spécimen unique de petite taille, mais à part cela bien conforme aux échantillons de l'Italie du Sud. Dans le Sicilien, il se retrouve dans tous les gisements à facies | assez profond et assez argileux ; ainsi on le rencontre à Palerme (di Monterosato), à Palmi (de Stefani), à Livourne(?) (Appelius); je 4 l’ai récolté à Rosarno, à Gallipoli, à Castellamare del Golfo, etc. : Les couches à Strombes ne nous révèlent point de faunes assez ; profondes pour nous permettre d'y retrouver ce B. humphreysia- | num, mais son existence y est extrêmement probable, puisqu'il per- siste encore actuellement dans la Méditerranée. Mais l'espèce y 4 apparaît en voie de disparition, et est loin d'atteindre le degré de fréquence qu'elle a dans les mers plus froides. Dans les faunes fossiles aussi bien qu’à l’état vivant, les Buccins de ce groupe montrent d’ailleurs un extrême polymorphisme : aussi y a-t-On. distingué un grand nombre d'espèces ou de variétés sans grand intérêt pour nous. D'autant plus que ces coupures sont la plupart du temps basées sur le galbe, qui est extrêmement variable d'un individu à l’autre, et sur le plus ou moins grand développement des stries décurrentes caractère souvent très difficile à apprécier dans les échantillons fossiles où la couche externe du test est rarement bien conservée. | Ainsi M. di Monterosato, qui avait cité autrefois le B. humphreysianum à Ficarazzi, fait maintenant de la coquille de Ficarazzi une espèce nouvelle sous le nom de B. frigidum Mis. in coll. : il est bien clair qué 4 nous ne devons pas changer pour cela son ANAL stratigraphiquer… elle doit rester pour nous inséparable de la forme des mers du Nord. La variété si bien figurée par Philippi([ 190], p. 193, tab. XVII, fig. r) à Palerme sous le nom de B. striatum Phil., et identique au B. Nat de Aradas | et Benoît [5], paraît être particulièrement fréquente dans les terrains" méditerranéens : c'est elle qui est le plus souvent rappelée dans les cita tions des auteurs, et j'en ai moi-même récolté des exemplaires bieñ« typiques dans le Sicilien de Gallipoli. Mais nous ne pouvons, commé voudrait le faire M. di Monterosato (|[114|... « erroneamente citato come vivente »), lui attribuer le rôle stratigraphique d’une espèce éteinte“. elle ne s'écarte pas assez des limites de variation de la forme vivante. De même, Locard a cru pouvoir créer, pour les formes vivantes dans la Médi- terranée, deux espèces nouvelles, différentes du B. humphreysianum (lequel serait pour lui uniquement atlantique), et qu'il a appelées B. atraë nt oo BUCCINIDÉS 501 todeum Locard et B. Monterosatoi Locard (cf. Locard [160]). Je crois» à Ja suite de beaucoup d'auteurs, que les caractères distinctifs de ces formes sont d'importance tout à fait secondaire. Je ne puis d’ailleurs, faute d'une abondance suffisante de matériaux vivants, entrer dans le détail de la discussion de toutes les petites variétés. Une telle discussion n'aurait d’ailleurs aucun intérêt pour nous, et, au point de vue stratigraphique, nous pouvons nous contenter de résumer ainsi l'histoire du B. Aumphreysianum, en prenant cette espèce au sens large. Le centre de développement du groupe était, au Pliocène ancien, dans les mers du Nord de l'Europe. Dèsle sommet du Pliocène ancien, il commence à faire une apparition dans la Méditerranée, mais seule- ment dans les parties de cette mer les plus ouvertes aux influences atlantiques, et dans une région où les facies indiquent un régime de courants ; ainsi il ne pénètre pas encore dans l'Italie du Nord. Au cours du Calabrien et du Sicilien, il se développe de plus en plus et envahit tout le bassin de la Méditerranée occidentale. À l'heure actuelle, il y persiste encore, mais il y paraît en voie de disparition. Dans l'Atlantique, il abonde aujourd'hui surtout dans le Nord, et sa répartition s’y étend vers le Sud jusque sur les côtes marocaines! Il représente donc dans ces faunes méditerranéennes un « immi- gré du Nord », mais à apparition précoce (puisqu'il y entre dès le Pliocène ancien) et à disparition tardive (puisqu'elle n’est pas encore un fait accompli). Sa signification stratigraphique est par suite beaucoup moins précise que celle du B. undatum, et il ne peut nous servir d'une manière absolument rigoureuse à caractériser les faunes pliocènes et quaternaires de la Méditerranée ; son abon- dance particulière dans le Calabrien et le Sicilien mérite toutefois d'être soulignée. Genres Cyllene et Janiopsis Ces genres essentiellement miocènes et pliocènes anciens ne pénètrent pas dans les terrains que nous étudions. Aussi je ne les signale ici que pour montrer, par un exemple de plus, l’'appauvrissement des faunes «postpliocènes » par rapport aux faunes méditerranéennes antérieures. » Où le Talismana dragué les B.atractodeum et Monterosaloi, d’après Locard({160|, L: I, p. 279-280). 302 GASTROPODES Et il est intéressant de noter aussi que plusieurs des espèces de ces genres sont représentées acluellement sur les côtes occidentales d'Afrique : ainsi, d’après Bellardi, la Cyllene Desnoyersi Basterot, du Miocène et du Pliocène italien, est très voisine de la Cyllene lyrata Lmk. actuelle. Genre Phos C'est aussi un genre miocène et pliocene, dont les descendants vivent aujourd'hui sur la côte atlantique de l'Afrique. Mais la forme méditer- ranéenne pliocène, le Phos polygonum Br., a peut-êtreun peu survécu à la fin du Pliocène ancien; car elle a été citée au Monte-Mario par Rayne- val, van den Ecke et Ponzi, et les collections du Laboratoire de Géologie de l’Université de Lyon en possèdent un bel exemplaire de cette prove- nance Î. Genre Pisania . Les diverses espèces de ce genre pliocène et actuel ne paraissent avoir subi, depuis la base du Pliocène, aucune modification : elles ne sont donc d'aucun intérêt pour nous. Genre Tritonidea Je m'occuperai uniquement, dans ce genre, de la Tritonidea (Gantharus) viverrata Kiener?, espèce fossile dans les couches à Strombes et vivante au Sénégal, dont l’histoire est fort intéres- sante au point de vue stratigraphique. Les Tritonidea ne sont représentées dans le Miocène méditerra= néen * que par des formes très rares, en particulier par la Trito- nidea lirata Bellardi (Pollia), que son auteur lui-même rapproche « de la Pollia tafon Desh. — P. variegata Gray », laquelle n'est autre que notre T. viverrata. Cette T. lirata est assurément voisine de la forme actuelle du Sénégal et il est très raisonnable de la con 1 Cet exemplaire, provenant de la Collection Locard, a'été soumis à l'examen de M. Cerulli-Irelli, qui m'a déclaré garder des doutes sérieux sur l'authenticité de son gisement ; on sait, en effet, que cet auteur n’a point retrouvé notre espèce dans sa revision de la faune du Monte Mario. 2 La citation faite par M. Cossmann ([242], fase. IV, p. 169) de Tritonidea {Can tharus) Orbignyi Payr. dans «les couches récentes de Palerme », résulte probables ment d'une inadvertance: il s'agit sans doute de Pisania Orbignyt Payr., coquille des plus communes dans les faunes récentes et actuelles. 3 Dans l'Atlantique, notre espèce paraît assez ancienne, car elle est signalée (avec doute, il est vrai), dans le Miocène de la Grande Canarie par Rothpletzet Simonellim « Die marinen Ablagerungen auf Gran Canaria » {Zeitschrift d. deutschen geolo> gischen Gesellschaft, t. XLII, 1890, p. 677). BUCCINIDÉS 503 aidérer commé une forme ancestrale de cette dernière : elle en dif- fère surtout par sa taille bien plus petite, ce qui est en effet un carac- tère des formes archaïques. Au Pliocène, par contre, nous ne trouvons plus rien dans les faunes méditerranéennes qui puisse être rapproché de notre 7, viver- rala. Les espèces qui représentent le genre (Pollia plicata Br., P. subspinosa Bell., P. æquicostata Bell.) s’en écartent beaucoup par leur ornementation : il est facile de s’en assurer en comparant les figurations données par Bellardi | 13] pour ces trois espèces, avec celles que je donne ici pour la forme actuelle et fossile dans les couches à Strombes. Donc, quand nous voyons, à l’époque des couches à Sfrombes, cette espèce reparaître dans la Méditerranée, nous sommes en droit d'affirmer qu'elle n’a pas de racines dans les faunes méditerra- néennes antérieures, et que, par suite, c'est certainement une espèce immigrée. Cette immigration a été d'ailleurs de courte durée, puisque cest uniquement dans les couches à Strombes que la T. viverrala a été rencontrée. Actuellement elle a disparu de la Méditerranée et ne vit plus que sur les côtes occidentales d'Afrique, au Sénégal et aux îles du Cap-Vert (cf. Dautzenberg [59], p. 50). A l’état fossile, elle n'était Jusqu'à présent connue que dans les couches à Strombes des environs de Mice et de Monastir, où elle a été reconnue pour la première fois par M. Dautzenberg. Il est pourtant curieux de voir, bien antérieurement, cette même espèce décrite et figurée par Fischer (in Rivière, Congrés de l'A. F. À. S. à Grenoble en 1884) sous le nom de Tritonidea Rivierei Fischer, dans une série de coquilles fossiles apportées par l'homme préhistorique dans les cavernes de Baoussé-Roussé, près Monaco. Fischer la considérait comme une espèce nouvelle probablement pliocène : on voit maintenant quelle provient sans aucun doute des couches à Strombes, précisément fossilifères au voisinage de la grotte. J'ai été assez heureux pour rencontrer encore cette T. viverrata dans trois autres gisements du même âge où elle n'avait jamais été signalée, savoir : Sferracavallo près Palerme, Ravagnese près Reggio et Tarente!. La découverte de cette coquille dans des gisements où » [l existe, dans les Collections de l’Université de Naples, une coquille provenant A 2e Le PAR ES Re TE F2 A ÉNISSS RAI OUR 904 GASTROPODES elle n'avait jamais été citée, mais où je m'étais pour ainsi dire prédit d'avance sa présence, est un des arguments les plus frappants en faveur de l’unité de cette faune à Sfrombus et de son individualité en tant qu'horizon paléontologique ; la T. viverrata est ainsi un des éléments les plus caractéristiques de cet horizon. NASSIDÉS Genre Nassa Groupe de la Nassa mutabilis L. (Nassa s. st.). L'espèce type de ce groupe n'offre pas d'intérêt stratigraphique, car elle se poursuit pendant tout le Pliocène et le Quaternaire jus- qu'à l'époque actuelle, sans présenter de mutations intéressantes. Mais j'insisterai un peu sur une forme voisine, la N. obliquata Br. Cette dernière présente un certain nombre de caractères ancestraux par rapport à la N. mutabilis : taille plus petite, et persistance sur toutelam coquille des stries décurrentes qui, chez la N. mutabilis, disparaissent le plus souvent sur la plus grande partie du dernier tour ; ladistinction des deux formes a d’ailleurs été excellemment précisée par Bellardi ([13/, fase 5 Mp 23); : Cette N. obliquata, fréquente dans le Pliocène ancien, était tou=« jours citée au Monte Märio où Conti la signale sous le nom de N.gibba. Mais M. Cerulli-lrelli ([32}, p. 295), qui a eu entre les mains la collection Conti, n’y a reconnu que des variétés de N. mutabilism J'ai pu vérifier en tout cas qu’elle se prolongeait dans le Calabrien. des collines livournaises, car les collections du Laboratoire de Géo= logie de l’Université de Lyon en contiennent un exemplaire très typique (gisement de Vallino del Merlo). | Dans le Sicilien, comme aussi, semble-t-il, dans le sommet d Calabrien, nous n'en retrouvons plus trace. Groupe de la N. clathrata Born (s. g. Niotha). La nomenclature est, dans ce groupe, rendue extrêmement difficile du « Postpliocène de Tarente » et qui m'a bien semblé identique à l'espèce en ques tion, autant que j'ai pu m'en assurer d’après un rapide examen : elle y Sen déter minée comme Purpura rosea (?). EEE a NASSIDÉS 505 par la grande variété des formes et par les passages graduels qu’on observe entre elles. Ces Nasses sont en effet des plus abondantes dans tous les gisements classiques du Pliocène ancien, et Bellardi y a multiplié les coupures spécifiques. Le {erme extrême de cette série, le plus différencié, est la N. clathrata type de Brocchi, caractérisée par sa grande taille, sa spire relativement basse, surtout par sa vigoureuse ornementation cancellée subépineuse, par ses sutures approfondies et ses tours profondément canaliculés. Ce type paraît être surtout réalisé nettement dans les facies sableux relati- vement grossiers de l’Astésan. Dans les dépôts plus fins et plus argileux du Plaisantin et du Mode- nais, les formes qui dominent sont, au contraire, plus sveltes, à spire plus haute, à suture moins profonde, à tours à peine canaliculés ; en même temps les cordons transversaux s'atténuent et l’ornementation devient moins épineuse. On a ainsi une série de formes qui, à partir de la N. clathrata type, en passant par la N. clathrala var. oblusepercos- lala Sacco — var. A Bellardi, puis par les N. Cantrainei Bell., N. hio- tensis Depontailler, et par la N. emiliana Mayer, tendent finalement vers la N. serrata Br., sans que l’on puisse mettre entre elles de démarca- tion bien tranchée quand on a affaire à un grand nombre d'échantillons !. Et par cette N. serräla, si abondante dans les argiles bleues du Mode- nas, on arrive ainsi à des formes très compréhensives, qui montrent également des affinités avec le groupe de la N. prismatica Br., comme Va indiqué Bellardi, et qui représentent probablement des {ypes ances- traux. Ainsi les facies paraissent avoir joué un rôle dans la différencia- lion de toutes ces formes : les grandes Nassa clathrata épineuses représentent le terme extrême de l'adaptation aux facies littoraux sableux d’Asti. Le même fait semble se vérifier dans l’histoire ultérieure du groupe, que nous allons voir s’éteindre peu à peu. Ainsi la N. clathrata type passerait dans le Calabrien; et c’est encore dans un facies sableux, au Monte Mario, que nous l'y retrou- verians (les collections de l’Université de Lyon en contiennent des exemplaires très typiques ?). ! Voir à ce sujet les fase. 3 et fase. 30 de MM. Bellardi et Sacco [13]. > M. Cerulli-Irelli, qui n’a point signalé la N. clathrala au Monte Mario, a bien Voulu revoir ces exemplaires : l'authenticité de leur provenance lui paraît peu pro- bable, sans que l’on puisse rien affirmer. 506 GASTROPODES Au contraire, les formes moins ornées et moins canaliculées, du type de la N. emiliana, sont encore abondantes dans les dépôts argi- leux et argilo-sableux du Sud de l'Italie, dans le Calabrien et le Sicilien. Leur spire s’allonge, leur taille surtout augmente, et le groupe s'éteint définitivement dans le Sicilien de Palerme, par une grande et belle coquille désignée par M. di Monterosato (| 114], p. 4) sousle nom de N. ficaratiensis Mts. Et de fait, on a là une mutation bien nette (figurée ici) qui mérite d'être distinguée par un nom particulier. Nous l’appellerons donc, pour souligner ses affinités, N. clathrata Br., mut. ficaratiensis Mts. sp. Je puis la citer dans le Calabrien à Girgenti, dans le Sicilien à (Castellamare del Golfo, à Balestrate, à Ficarazzi et au Monte Pellegrino. Dans le Sicilien de Palerme, M. di Monterosato y a distingué deux formes qui me paraissent extrêmement voisines de la N. ficaratiensis, type, et qui, à notre point de vue, ne méritent pas d'en être séparées : ce sont les N. approximans' du Monte Pellegrino, et N. ficaratiensis var. oreltäna du gisement dit « F. Oreto », laquelle est seulement un peu plus petite et plus globuleuse que le type. En tout cas, et c'est pour nous le point essentiel, il s’agit certai=« | nement là d'une forme éteinte actuellement dans la Méditerranée? et dont toutes les affinités sont avec les espèces pliocènes du groupe de la N. clathrata: cette forme sera donc pour nous une des espèces disparues les plus caractéristiques du Calabrien et du Sicilien: 4 Le tableau ci-dessous en résume les affinités et la répartition stra= 4 tigraphique. 4 Sicilien N. ficaratiensis | Calabrien . . .. N. “de N. clathrata(?) Pliocène anc.. . N. serrata —+ N. ee etc. et var. —+ M. clathrata (type)\ facies argileux facies sableux | =. 4 3 1 Cette N. approtzimans Mts. ([r14], p. 4) serait intermédiaire entre la V.fica raliensis et la vraie N. clathrata : les échantillons que son auteur a bien voulu.me, communiquer ne m'ont pas paru montrer ce passage : ils sont à peu près identiques à la N. ficaratiensis (voir la figure donnée ici). 2 Kobelt (Icon. d. schalentr. europ. Meeres Conch.,t. 1°", p. 143) indique et figure (pl. XXV, fig. 16-17), d'après von Martens, une N. clathrata vivante : on n’en connais | | NASSIDÉS “07 Groupe de la N. reticulata L. (s. g. Hinia),. Ce groupe n'est plus actuellement représenté dans nos mers que par la seule N. reticulata L., espèce à la vérité très polymorphe, ayant un habitat exclusivement littoral (elle ne descend pas au-des- sous de 0 mètres de profondeur d’après B. D. D., de 20 brasses d'après Weinkauff). Mais au Pliocène on peut v rattacher un ensemble de formes bien plus riche, et ayant une extension bathy- métrique beaucoup plus grande. Bellardi y a distingué, dans le Plaisancien et l’Astien, une foule d’espèces assez difficiles à pré- ciser (MN. recticostata, alava, corrugata, antiqua), mais la plus nette est la N. musiva de Brocchi. Dans la série des formes de ce oroupe, elle occupe en effet l'extrémité opposée à celle de la N. reti- culata, à la fois par ses caractères morphologiques et par son habitat. La forme la plus lillorale qui soit en effet connue dans ce groupe est la N. nitida actuelle de Jeffreys, habituellement réunie à titre de variété à la N. reficulata, et vivant dans les faunes tout à fait littorales, même saumâtres (Jeffreys, Weinkauff). Ici, les côtes transversales, spécialement sur le dernier tour, sont plus fortes, mais beaucoup moins nombreuses et plus écartées, que dans la N. reticulata. Puis viendrait la N. reticulata type, sur la description de laquelle je n'insiste pas et qui a, comme on l’a vu, un habitat encore littoral : c'est aussi dans des dépôts sableux qu'on la rencontre le plus souvent à l'état fossile!. Là se clôt la série des formes vivantes?2. Mais dans les dépôts un peu profonds du Pliocène, on rencontre des formes plus allongées, à côtes longitudinales beaucoup plus fines et plus nombreuses : on arrive ainsi au type appelé N. musiva par Brocchi, el relié en réalité à la N. reticulata par toute une série d'intermédiaires. Ainsi, dans ce groupe, seules les formes littorales ont survécu: et trait en tout que deux fragments provenant de l'Atlantique équatorial (dragages de la Gazelle); d'après la figure, d'ailleurs, cette coquille s'éloignerait de la N. cla- thrata typique, pour se rapprocher davantage de la N. ficaratiensis. 1 Pour ma part, je ne l'ai recueillie, dans l'Italie du Sud, qu'à Boveto et à Rava- guese, en compagnie d'échantillons qui montrent déjà un passage à la var. nilida, ce qui contribue à accentuer le caractère littoral de ces gisements. > M: di Monterosato ([ 117, p. 12]) a signalé, dans des lagunes de l'Egypte, mélangée avec la N. reticulala type, une var. ressemblant à la musiva: mais elle en reste, néanmoins, fort distincte, à son avis ; et j'ajouterai que la différence de l’habitat suffit à lever tous les doutes à cet égard. ‘ légères différences avec le type pliocène : la sculpture est souvent 508 > GASTROPODES nous allons voir maintenant comment s’est faite l'extinction des formes profondes. En effet, la N. musiva ne disparaît pas avec le Pliocène ancien; elle persiste dans le Calabrien et le Sicilien (montrant toujours les mêmes passages à la N. reticulata). Au Calabrien, elle a été citée à Villa S. Giovanni (Sicilien de Seguenza), aux environs de Regygio et de Monteleone (Saharien de Seguenza), à Castrovillari (Crema 156], p. 26), dans les argiles subetnéennes (Scalia [204], p. 35, sous le nom de N. crassesculpta), au Monte Mario (Conti!}, à Val 4 lebiaja (de Stefani), à Gravina et à Sciacca (di Stefano), ete... Per-… sonnellement, je l’ai récoltée à Musalà et à Monte Corvo (où elle 4 abonde), à Monosterace, à Carrubbare, dans la vallée Lamato (F.M S. Ippolito); d'après les collections de l'Université de Lyon, je puis encore la signaler dans le Calabrien des Monts livournais (Vallino del Merlo). Dans le Sicilien, elle est connue à Ficarazzi. Mais, dans la plupart de ces gisements récents, elle présente de. un peu plus marquée, la spire plus allongée, et surtout la taille devient beaucoup plus grande (3 centimètres). On peut adopter pour cette mutation, le nom de crassesculpta Brugnone sp., em- ployé par M. di Monterosato [114] pour la forme de Ficarazzi. Ses caractères différentiels sont d'ailleurs bien loin, à mon avis, de nécessiter une coupure spécifique. à Cette mut. crassesculpta descend directement de la N. musiva type du Pliocène ancien, et elle marque ainsi l'extinction, dans la Méditerranée, de ce rameau qui disparaît avec les formes de grande taille du Calabrien et du Sicilien. Car il est bien certain que cette. 4 belle coquille (figurée ici) n'a son analogue dans aucune des espèces de la Méditerranée actuelle. | A ce titre, et ce sera là la conclusion pratique résultant de l’étud de ce groupe, la N. musiva mut. crassesculpta peut être compté au nombre des espèces éteintes bien caractéristiques du Calabrien et du Sicilien ?. , 1 Cilation confirmée par M. Cerulli-Irelli, qui insiste aussi sur la grande taille : qu'atteint l'espèce (voir plus loin). 2 En particulier, sa fréquence à Musalà, où elle n'avait pas été signalée par Sesuenza, constitue un argument très fort pour ne pas rattacher ce gisement aux couches à Strombes, comme le voulait cet auteur. | | NASSIDÉS 509 Facies profonds Facies littoraux Quaternaire sup. et actuel . .N. reliculala var. nilida SONORE À ... mul. crassesculpla LAON MONET mut. crassesculpta Pliocène ancien . . . .... N, musiva N. en formes de passage Groupe de la N. limata Chemn. (5. g. Uzita). La N. limata est une coquille vivant actuellement dans les zones pro- fondes de l'Atlantique et surtout de la Méditerranée : elle est d’ailleurs relativement peu abondante et semble en-voie d'extinction. Au Pliocène, au contraire, ce groupe est très abondamment représenté par la N. pris- matica Br., qui se rencontre par milliers d'exemplaires dans tous les gisements classiques. Cette forme fossile est d’ailleurs extrêmement voi- sine du type actuel, et les avis des auteurs sont partagés à ce sujet. M. di Monterosato, Bellardi, Locard tiennent les deux espèces pour distinctes. Bellardi et de Franchis ({[70|, p. 145, tav. Il, fig. 7, 8, 9) en particulier ont nettement précisé les caractères différentiels qui militent, à leur avis, pour la séparation des deux espèces. Weinkauff, au contraire, après l'examen de nombreux individus vivants, considère une telle distinction comme impossible; et récemment, M. Cerulli-Irelli ([32], p. 299) vient de se rallier à la même opinion. Dans le Sicilien et surtout dans le Calabrien, ce groupe est très riche- ment représenté dans tous les gisements à facies vaseux. Les nombreux échantillons que j'y ai récoltés se montrent en général plus voisins du type vivant que des formes pliocènes (cela est net surtout pour les formes de Ficarazzi, que M. di Monterosato appelle N. limala var. corpulenta Mts. in sched.) ; mais Je n'ose accorder à des différences aussi légères et aussi peu constantes aucune importance stratigraphique ?. L Locard ([16o], t. I, p. 271) cite, d'ailleurs, dans le Pliocène, la vraie NV. limala; et il y signale également sa N. denticulala Adams des mers actuelles : cette der- nière espèce, ainsi que je m'en suis assuré par l'examen d'échantillons fossiles de Biot (Antibes), déterminés par Locard lui-mème (Collections de l'Université de Lyon), ne me paraît guère pouvoir être distinguée de la N. prismatica typique. > Dans sa dernière liste de fossiles du Sicilien de Palerme [114], M. di Montero- sato range parmi les espèces éteintes de Ficarazzi sa Nassa prælonga Mts., qu'il avait d’abord ((115}, p. 16) considérée comme une var. elongata de la N. limata : à cause du polymorphisme reconnu par cet auteur lui-même dans l'espèce vivante, je ne puis garder cette N. prælonga au nombre des espèces caractéristiques du Sicilien, 510 GASTROPODES Je me contenterai donc d’appeler l’attention sur la répartition bathy- métrique de ce groupe, qui fournit d'intéressantes indications. Actuelle- ment, en effet, la NV. limafa ne paraît jamais remonter au-dessus de 70 mètres (cf. par exemple Locard |160]). A l’état fossile, elle abonde dans les gisements profonds du Calabrien ; elle devient déjà moins fré- quente dans les couches de Ficarazzi et de Rosarno, déposées à une pro- fondeur de 80-100 mètres ; à Ravagnese et Boveto elle n'existe plus; et enfin elle manque absolument dans les dépôts encore plus littoraux de Tarente et dans les « panchine » côtières. Cette répartition est tout à fait d'accord avec les conclusions auxquelles nous avons été conduit pour la bathymétrie de tous ces gisements. Groupe de la Nassa incrassata Müller (sous-genre Hima). Ce groupe est extrêmement polymorphe, tant dans le Pliocène que dans les mers actuelles, et les coupures spécifiques, dans cette multitude de petites formes, sont éminemment variables avec les auteurs. Aussi Je me suis décidé à le négliger complètement au point de vue des indications stratigraphiques. C’est ainsi que je ne tiendrai pas compte de la N. pusilla Philippi, habi- tuellement considérée comme éteinte, et dont j'ai sous les yeux des exem- plaires provenant du Monte Mario et de Ficarazzil, ni non plus de la NV. angulala Br., espèce pliocène connue au Monte Mario. L’extrême variabilité de ces petites coquilles, qui manifestent ici un développements exubérant où il serait bien malaisé de suivre des rameaux phylétiques m’empêche d’y voir des formes vraiment caractéristiques pour les divers niveaux. Groupe de la N. semistriata Brocchi (sous-genre Amycla). Ce groupe est abondamment représenté et en pleine évolution dans les mers pliocènes ; aussi cette grande espèce est-elle découpée par les auteurs en une multitude de petites espèces, souvent bien difficiles à caractériser; 1l suffit, pour s'en convaincre, de jeter un coup d'œil sur les planches que Bellardi ([13], fase. 3, pl. IX)a consacrées à la figuration de ces formes. Ac{uellement, le groupe paraît être presque en voie d'extinction, mais tout en étant relatives 1 Où M. di Monterosato en a distingué, sous le nom de N. oretana Mts. in Coll une forme très voisine un peu plus grande. — Cette même M. pusilla est encore citée par Seguenza dans son « Sicilien » des environs de Reggio. Enfin, sous.le nom de N. serraticosta Bronn, M. de Stefani (|ror], p. 378) rappelle sa présence Vallebiaja, à Livourne, à Sciacca, dans la Valle Lamato. | | | NASSIDES 511 ment pauvre en individus, il n’en reste pas moins très polymorphe, puisque, à côté de la N. semistriata typique, les auteurs ont encore décrit une N. gallandiana Fischer !, une N. Edwardsi Fisch. ?, une N. ovoidea Loc. ÿ. Bellardi insiste, lui aussi, sur le polvymorphisme des individus vivants. ; Je me bornerai ici à préciser les caractères généraux offerts par l'ensemble des diverses faunes pliocènes et quaternaires, dont j'ai pu étudier d’abondants échantillons, sans entrer dans des détails morphologiques qui seraient hors de propos avec notre but strati- graphique. Dans le Pliocène ancien, la forme dominante est la N. semistriata type de Brocchi, avec ses stries décurrentes bien marquées à la base du dernier tour, s’espaçant et s’atténuant quand on s'approche : du milieu de ce tour et disparaissant complètement quand on y arrive : vers la suture de ce dernier tour, on retrouve une ou deux stries bien nettes. Mais à côté de cette forme typique, on rencontre, avec tous les passages, une forme intégrostriée dans laquelle le der- nier tour est, même dans son milieu, orné de sillons décurrents: relativement rare dans le Piémont, cette variété « intégrostriée » devient plus fréquente dans le Modenais : c'est ce qu'avait fort bien vu Foresti ([127], p. 45) qui, après avoir noté l'abondance de la N. semistriata dans le Pliocène du Modenais, ajoute : « Si riscon- trano alcune varietà, fra le quali primeggia la var. integrostriata del Sismonda. » Mais, en somme, la forme dominante, dans ces faunes du Pliocène ancien, est la N. semistriata type. Au contraire, dans les faunes calabriennes, ce sont les formes intégrostriées qui prédominent de beaucoup, presque à l’exclusion de la N. semistriata typique. Elles atteignent ici une taille vraiment exceptionnelle (jusqu'à 26 millimètres de longueur), en même temps que la sculpture s’accuse : toute la coquille est recouverte de stries décurrentes, profondes, bien marquées et régulièrement espacées ; le type qui se constitue ainsi, et qui atteint son apogée dans cet étage calabrien, mérite donc de constituer une mutation particu- L Cf, P. Fischer, Journal de Conchyliologie, 1883, p. 82, pl. IL, fig. 6. > Cf. P. Fischer, chid., 1852, p. ro, et Locard [160], t. I, p. 267, pl. XIII, fig. 29-31. à Cf. Locard, Contrib. faune malacol. française, X, Monogr. Buccinidæ, p. 89, pl. unique, fig. 13. . Fischer?, et c'est sous ce nom qu'elles sont souvent citées main: 512 GASTROPODES lière, que l’on trouvera figurée ici sous le nom de mut. calabrensis : je l’ai rencontrée dans tous les gisements de cet étage, et elle est spécialement abondante au Monte Mario, à Gravina, Girgenti, Porto Empedocle, Terranova di Sicilia, ete. À | Mais, comme on l’a vu, on rencontre déjà dans le Pliocène ancien des formes intégrostriées extrêmement voisines, par exemple la N. gigan- î tula Bonelli!. De telles formes, rares en Piémont, moins dans le Mode- nais, deviennent de plus en plus abondantes à mesure qu'on s'adresse à 4 des gisements plus méridionaux : ainsi elles sont communes dans le gise- H ment pliocène ancien de Gallina (O.) et dans les sables à Pecten flabelli- L formis de Terreti (Zancléen de Seguenza). Il n’est d’ailleurs pas rare de 4 rencontrer ainsi, dans l'Italie du Sud, dès le Pliocène ancien, des formes qui manquent dans le Plaisancien et l’Astien de l'Italie du Nord, et qui k n’acquièrent leur maximum de fréquence que dans le Pliocène supérieur. $ 4 Pr Dans le Sicilien, les grandes coquilles de la mut. calabrensis semblent avoir disparu : on ne rencontre plus que des formes de petite taille, toujours intégrostriées, à spire moins haute et à forme | plus trapue. Elles répondent bien aux caractères de la N. Edwardsi tenant dans les travaux récents des paléontologistes italiens : c’est, je crois, à M. di Monterosato que revient le mérite d'avoir reconnu l'identité de la forme fossile à Ficarazzi, avec l’espèce de Fischer. ë D'ailleurs, dans les faunes plus anciennes, on trouve déjà des formes identiques, par exemple au Calabrien, dans les argiles subetnéennes $ (Scalia [204]) et dans le Postpliocène de Castrovillari (Crema (56) Mais la prédominance presque exclusive de cette espèce ou variété 1 N. Edwardsi dans les dépôts siciliens, n’en mérite pas moins d' être soulignée : en dehors de Ficarazzi, je l’ai rencontrée encore à Ba= lestrate et à Castellamare del Golfo. Mais ici la richesse en ind vidus de ce groupé,est bien loin d'atteindre celle des argiles calabriennes, qui correspondent à des facies beaucoup plus pro fonds. k Et dans les dépôts plus récents que le Sicilien, en particulier. 1 Aussi voit-on fréquemment ce nom d'espèce figurer dans les listes de faunes, calabriennes : Postpliocène livournais (de Stefani), argiles subetnéennes (Scalia), vallée du Crati (Crema). 2 Voir, en particulier, l'excellente description que donne Locard ([160], t:MLs p. 267) de cette espèce. Elle est figurée ici. NASSIDÉS 513 dans les couches à Strombes, nous ne connaissons pas de facies assez profond pour y retrouver des formes de ce groupe. Acluellement, en effet, les stations les moins profondes dans lesquelles elles aient été signalées sont celles citées par Locard ([160], t. [., p. 270), au large du Portugal, par 80-100 mètres de fond : ces données concordent bien avec la répartition de ce groupe à l'état fossile, puisque nous le ren- controns jusque dans les gisements de Ficarazzi, Balestrate, etc., qui corres- pondent, comme nous l'avons admis, à des profondeurs de 60-100 mètres. En résumé, on voit que si ces différentes variétés, voisines les unes des autres, ne peuvent guère être choisies comme fossiles caractéristiques, en revanche, la prédominance de telle ou telle d'entre elles, dans chaque niveau, n’en mérite pas moins d’être signalée. MENGl . . . . N.semistriala N. ne N, ovoïdea N. gallandiana elient.. ... N. Edwardsi Pi bnen.. N. calabrensis liocène ancien. Mut. gigantula ———— N. semistriala et var. Quant à la Nassa corniculum L., avec ses nombreuses sous-espèces ou variétés si abondantes actuellement sur les fonds sableux littoraux, elle paraît être une adaptation littorale de ce groupe ; son absence ou sa rareté (cf. Bellardi et Sacco |13]) dans les gisements classiques du Plio- cène italien, doit tenir à ce que ces derniers ne correspondent pas aux conditions exigées pour le développement de l'espèce. Car je l’ai ren- contrée au contraire en abondance à Milazzo par exemple, où ces condi- | tions sont précisément remplies. | n Enfin un autre phylum que nous pouvons, avec M. Cossmann, ratta- | cher au groupe dela N. semistriala, est celui de la N, recondita Mayer, | essentiellement miocène et pliocène ancienne, Il semble pourtant que ce phylum ait persisté jusque dans le Calabrien inférieur, représenté par une espèce ou variété très voisine, la N. macrodon Bronn, carles collections de l'Université de Lyon possèdent des exemplaires de cette dernière forme provenant du Calabrien des collines livournaises (gisement de Fauglia près Vallebiaja!). | LM, Cerulli-frelli vient aussi d'en reconnaitre deux exemplaires au Monte Mario, [se qui souligne l'analogie faunique du Calabrien toscan avec celui des environs de | ome. Univ. ve Lyon. — Gicnoux. CS ( er” 514 GASTROPODES Groupe de la N. costulata Renieri (s. g. Telasco). La nomenclature des espèces de ce groupe est tout à fait confuse. On sait, en effet, qu’en instituant son espèce, Renieri avait en vue une coquille vivante de l’Adriatique. Or, la première figuration de l'espèce a été donnée par Brocchi, et se rapporte à une forme fossile dans le Plaisancien de l'Italie du Nord, n'ayant rien d’analogue dans la faune actuelle. La N. costulata de Brocchi n’a donc aucun rapport avec l'espèce de Renieri. Dans ces conditions, il est bien préférable, à l’exemple de Bellardi [13], de reprendre pour cette forme fossile le nom de N. italica Mayer, qui ne prête à aucune : ambiguïté !. , Ainsi comprise, cette NV. ifalica est essentiellement caractéristique des facies profonds du Pliocène ancien : en outre des gisements classiques de l'Italie du Nord et du Sud de la France, je puis encore signaler son abondance dans les marnes blanches du Marchesato et à dans le Pliocène ancien de la Vallée Lamato (Marcellinara) et de 3 Gallina (0.). Partout elle se montre associée aux Nasses du groupe à 4 Lac r. Hé à t. semistriata et on trouve tous les passages entre les deux espèces C'est ce qu'avait déjà remarqué Foresti ([127], p. 44 et 45) dont “4 N. semistriata var. furrita For. ? (loc. cit., pl. 2, fig. 5-6) représenten une de ces formes de passage, déjà extrémement voisine de la N. italica (type). * Cette N. italica constitue donc une espèce spéciale au Pliocèné ancien, et ne paraît pas se continuer dans le Calabrien? : à ce titre. sa présence dans la gisement de Gallina (O.) était intéressante a signaler comme preuve de l’âge pliocène ancien de ces couches. Quant à la N. costulata Renieri non Brocchi, il est bien difficile de« savoir d’une manière précise à quelle forme ce nom s'applique : carce groupe présente à l'état vivant un polymorphisme extraordinaireMll 1 Sans parler des figurations dues aux paléontologistes italiens, on trouverauné excellente photographie de cette N. ilalica (sous le nom de NM. coslulata) dans low vrage de M. Cossmann ([242], fase. 4, pl. IX, fig. r2) : l'échantillon reproduit donne une idée exacte de la forme la plus commune dans les marnes plaisanciennes: 2 Non N. turrita Borson, espèce de grande taille qui s'éteint avec le Pliocené ancien. # Je ne puis m'expliquer quelle forme M. Crema a eu en vue, quand il cite([o6}, p. 26), dans le Postpliocène de la vallée du Crati, une N. italica Mayer qu'il considère comme encore vivante. _ NES | | NASSIDÉS 515 suffit pour s'en convaincre de jeter les yeux sur la planche où MM. Buc- quoy, Dautzenberg et Dollfus ([237}, t. I, pl. 11, fig. 18-36) ont repré- senté quelques-unes des principales variétés qu'ils rattachent à la M. costulala Renieri, et dont beaucoup d’autres auteurs ont fait des espèces distinctes. On pourra se convaincre ainsi qu'aucune de ces nombreuses formes na de rapport avec l’espèce fossile de Brocchi, ainsi que le constatent eux-mêmes les auteurs des Mollusques du Roussillon. D'ailleurs les JV. cosfulala (s. 1.) s'écartent encore de la W. ifalica par leur habitat, car elles sont essentiellement littorales et abondantes surtout sur les fonds rocheux. Par suite même de leur extrême polymorphisme, elles ne peuvent nousètre d'un grand intérêt stratigraphique, et on retrou- verait déjà, dans les facies littoraux du Pliocène, les formes ancestrales (exemple N. recticostata Bellardi) de toutes ces petites espèces si diffi- ciles à caractériser. Groupe de la N.conglobata Br. (s. q. Desmoulea). Je ne signale ici ce groupe qu’à titre d'exemple, car il n'intéresse pas nos faunes récentes. Il est propre, en effet, aux faunes du Pliocène ancien, et a définitivement disparu de la Méditerranée dès avant le Calabrien : la N. conglobata est ainsi un exemple de ces formes de grande taille constituant des fins de séries, dont l'évolution sur place s’est arrêtée ; elle forme ainsi un contraste parfait avec le groupe précédemment étudié de la N. costulala, qui nous montrait au contraire une multitude de petites coquilles en voie d'évolution active. Groupes de la N. gibbosula L./{s.g. Arcularia)et dela N.neritea L. (s. g. Gyclonassa). Les espèces types de ces groupes n'ont cessé d’habiter la Méditerranée depuis le Pliocène ancien jusqu'à l'époque actuelle, et sont par suite dénuées d'intérêt pour nous. D'après Bellardi, on observerait encore ici, dans le premier de ces groupes, un accroissement de la taille chez les formes les plus récentes. Je dois, en outre, mentionner que quelques auteurs ont cru pouvoir attribuer une certaine importance straligraphique aux Arcularia ; ce sous-genre est représenté actuellement dans la Méditerranée par deux espèces, la N. gibbosula L. et la N. circumeincta Adams, cette der- bière n'étant d’ailleurs qu'une variété, très difficile à apprécier, de la pre- mière. Les deux formes sont connues à l’état fossile, et M. Cerulli-Irelli spécifie avoir rencontré au Monte Mario, à côté de la N. gihbbosula typique, des variétés identiques à la N. cireumecincta; récemment, le général de 516 GASTROPODES Lamothe (|155], p. 237), en signalant ces deux coquilles dans les couches à Strombes de Monastirt, les considère comme émigrées dans la Médi- terranée orientale, et y voit l'indice du fait que cette région a pu consti tuer un « asile » où se seraient réfugiés les descendants des faunes pliocènes. Cette conclusion ne me paraît pas bien certaine, au moins en ce qui regarde les Arcularia, car ce sous-geure a été cité vivant en divers points de la Méditerranée occidentale (France, Corse, Sicile, Italie). Enfin,à ce même groupe des Arcularia, appartient encorela N. affinis Cocconi, représentée dans le Calabrien du Monte Mario par un unique exemplaire, d’après M. Cerulli-Irelli ; cet auteur la considère comme une espèce éleinle : ses affinités avec les N. gihbosula et circumcincta me paraissent trop étroites pour qu'on puisse la retenir comme bonne espèce caractéristique. Genre Dorsanum. Ce genre, exclusivement miocène et pliocène ancien dans la Méditer- rannée, se rencontre actuellement sur les côtes Ouest d'Afrique, nous manifestant ainsi les affinités bien connues qui existent entre les faunes« méditerranéennes anciennes et la faune actuelle de l'Atlantique sub tropical, COLUMBELLIDÉS Cette famille est d’un bien faible intérêt au point de vue stratigra= phique. Comme toujours, nous y retrouvons des espèces propres au Pliocène ancien et nettement caractérisées: par exemple, Columbella (Atilia) nassoïdes Grateloup, G. (Atilia) thiara Bell., etc. | D'autres groupes se perpétuent jusque dans la Méditerranéen actuelle, mais la plupart sont extrêmement polymorphes, et mêmes les espèces vivantes ne peuvent être considérées comme bien connues. Ainsi le groupe de la G. (Mitrella) scripta L. est dé] HEAUnte au FH np € ancien; au Monte HR M. Cerulli-Irelli en a Atilia ; représenté à l'époque actuelle par la G. minor Sec ce | sous-genre était au Pliocène ancien beaucoup plus riche en espèces et M. Cerulli-Irelli y signale au Monte Mario la G. subulata Brocchi espèce à affinités nettement pliocènes. 1 J'ai déterminé également une N. gibbosula dans les couches à Strombes de Sfax (matériaux de M. Allemand-Martin). MURICIDÉS 917 Quant à la G. rustica L.., si abondante aujourd’hui sur nos plages, on pourrait être tenté de la considérer comme une forme cryptogène, acquisition récente pour la faune méditerranéenne. Car on ne trouve dans les citations des auteurs, pour les faunes pliocènes anciennes, aucune forme analogue. Il est possible, en effet, qu'elle soit d’origine atlantique et apparue dans la Méditerranée seulement au Calabrien (où M. Cerulli-[relli en a rencontré cinq individus au Monte Mario) et au Sicilien (elle y abonde à Mortelle et à Milazzo où Philippi l'avait déjà signalée). Mais il faut prendre garde ici à l'habitat très spécial de cette espèce, qui reste toujours confinée à de érès faibles profon- deurs (o à 10 brasses d’après Weinkaulff, o à 20 mètres pour B.D.D.) et prospère surtout sur les côtes rocheuses. Les facies où elle devrait abonder sont donc ceux qui, à l'état fossile, échappent le plus souvent aux observations par leur faible étendue et puissance, et la facilité de décalcification des coquilles qu'ils renferment. — Dans ces conditions je crois que l'absence de la C. rustica dans les faunes pliocènes n'est qu'une apparence, et qu'il vaut mieux ne pas en faire état au point de vue de la paléontologie stratigraphique. Mais cette espèce reste, comme on le voit, susceptible de fournir des données intéressantes au point de vue hathymétrique, puisqu'il y a de grandes probabilités pour que les dépôts où elle se rencontre en abon- dance ne correspondent pas à des profondeurs supérieures à20 mètres: sa présence dans les couches à S{rombes de T'arente, pour lesquellesla richesse paléontologique et le facies lithologique ont souvent fait croire à des dépôts plus profonds, est donc importante à signaler. Naturellement c’est le fossile par excellence des « panchine » littorales du Quaternaire (Capo Gastelle, Capo Colonne, Mortelle, couches à Strombes de Sferracavallo, @pietra molare » post-sicilienne de Ficarazzi, gisements des côtes fran- çaises et algériennes, etc.). EE MURICIDÉS Je ne puis songer à faire une revue complète de toutes les formes connues dans cette famille, tant à l’état vivant qu’à l’état fossile. Ilfaut noter surtout qu'ici, comme dans beaucoup d’autres groupes, la faune du Plio- cène ancien paraît plus riche que les faunes récentes. Les gisements classiques du Nord de l'Italie et de la Toscane ont fourni nombre d'’es- pèces dont nous ne retrouvons plus d'équivalents dans la Méditerranée ictuelle : et, inversement, les formes qui vivent aujourd'hui dans cette | 518 GASTROPODES mer étaient pour la plupart représentées par des formes presque identiques dès le Pliocène ancien. Je signalerai donc seulement quelques espèces citées plus spécialement à propos des caractères distinctifs des faunes récentes. Genre Trophont Le centre de développement de ce genre est toujours resté dans les mers boréales, et les seules formes qui aient jamais pénétré dans la Méditerranée appartiennent au sous-genre Trophonopsis : on peut « les grouper autour d’une espèce type, le Trophon (Trophonopsis)« muricatus Mtg. L'histoire de ce groupe est absolument identique à celle du Buc= cinum humphreysianum Benn.. Comme lui, il manque absolument dans les riches faunes Plaisanciennes et Astiennes de l'Italie du £ Nord, tandis qu'il abonde au contraire dans les Crags anglais etm belges. Son centre de développement au Pliocène ancien était donc certainement dans les mers du Nord. Mais nous le voyons commencer déjà à apparaître dès cette époque dans l'Italie du Sud, où les influences atlantiques se sont fait sentir plus tôt. Car Seguenza le« signale comme très rare dans le gisement pliocène de Gallina (O0.}, où il accompagne, comme nous l'avons vu,le Buccinum humphrey sianum?. Dès le Calabrien il devient abondant, et j'ai constaté sam présence dans les gisements de Nizzeti, Porto Empedocle, Monoste | race, Gravina ; Seguenza le signale encore dans son Saharien infé rieur des environs de Reggio, et de Franchis l’a reconnu dans les argiles de Galatina. Dans le Sicilien on le connaît à Ficarazi, et je l'ai récolté à Castellamare del Golfo et à Gallipoli. — Enfin, il pers siste, comme on sait, dans la Méditerranée actuelle aussi bien que dans l’Atlanzique, mais il semble en voie de disparition dans la Médis terranée. | Partout, tant à l’état vivant qu’à l'état fossile, il se montre très polÿ= morphe, et accompagné en particulier de la var. (an sp.) barvicensis Johnsto 1 Dans l'interprétation de ce genre, j'adopte ici l'opinion de M. Cossmann,-eljfen écarte par exemple le Fusus (Pagodula) mullilamellosus Phil. 2? De Franchis [70] le cite même dans le gisement pliocène ancien d’Altavilla® 3 On en trouvera, par exemple, une bonne figuration dans l'ouvrage classiquede Forbes et Hanley, pl. CXI, fig. 5-6. MURICIDÉS 519 Aussi je n'attacherai pas d'importance stratigraphique aux petites variétés ou espèces que M. di Monterosato y a distinguées dans le Sicilien de Palerme, et qu'il a eu l’obligeance de me communiquer. Ainsi les Trophonopsis muricatus var. frigida Mts. et var. sulco- vestita Mts. me paraissent bien voisins du type. Le Trophonopsis valida Mts., dont j'ai sous les yeux de beaux exem- plaires provenant du gisement sicilien dit « F. Oreto », a beaucoup plus d'individualité : c'est une coquille de grande taille, où le profil des tours est plus arrondi que dans le 7. muricalus type, avec le méplat de la partie supérieure des tours moins accusé, et une ornementation moins épineuse, plutôt cancellée, tous caractères qui donnent à la coquille un aspect de Pseudofusus. Mais en somme c’est surtout par sa taille (23 mil- limètres de longueur) que ce T°. valida se distingue des autres 7°. muri- catus qu'on récolte à Ficarazzi; or, il faut bien se rappeler que. dans ce dernier gisement (comme d’ailleurs actuellement à des profondeurs assez notables), on a plutôt affaire à une var. minor du T°. muricalus ; car, dans les zones plus littorales, l'espèce actuelle atteint le plus souvent 15-20 millimètres (cf. Locard [160]t. I, p. 349). Il est donc possible que ce D. valida ne soit tout au plus qu'une variété major du 7°. muricatus 1. En tout cas, même s'il s'agissait d’une mutation spéciale éteinte, comme elle n'est connue jusqu’à présent que dans ce seul gisement du F. Oreto, on ne pourrait en tirer de conclusions au point de vue stratigraphique. Ainsi, pour résumer l'histoire de ces Trophonopsis, nous ne pou- vons guère que répéter ce que nous avons dit au sujet du Buccinum humphreysianum: ce sont des formes immigrées du Nord qui com- mencent à apparaître dès le Pliocène ancien dans l'Italie du Sud, deviennent très répandues au Calabrien et au Sicilien, et continuent encore à enrichir la faune méditerranéenne, Genre Murex, Murex (Hadriania) craticulatus Br. Le type de l'espèce de Brocchi est une forme pliocène ; mais la plupart ! Par les proportions de sa spire et de son dernier tour, il se rapprocherait encore du D. Richardi Dautzenberg et Fischer ([62], p. 438, pl. XVIII, fig. 6); mais il s'en éloigne par sa taille et son ornementation. — Enfin, à certains égards, ce T. valida se montrerait intermédiaire entre le T. muricatus et le Murex Gaudioni Monterosato dragué à l'état de coquille morte dans le Bosphore, et décrit et figuré par Marion {Annales du Musée d'Histoire naturelle de Marseille, 1898, série 2, €. Ier, fase. r, P.178); mais cette dernière espèce est remarquable par la brièveté de la spire et les dimensions du dernier tour. 520 GASTROPODES des auteurs y réunissent une coquille actuellement assez abondante dans la Méditerranée. D’après quelques paléontologistes italiens‘, la forme typique de Brocchi serait maintenant éfeinte, et il faudrait attribuer à la forme vivant actuellement dans la Méditerranée, le nom de M. Brocchii Monterosato. Ce M. Brocchii existerait d’ailleurs déjà dans le Pliocène ancien, puis subsisterait seul dans le Pliocène récent, le Quaternaire, et à l’époque actuelle. En réalité, après l'examen d'individus fossiles de provenances diverses et l'étude des figures des auteurs, je ne vois guère la possibilité de garder une telle distinction. Il est vrai que dans les sables calabriens (par ex, à Monte Mario, dans les collines livournaises, à Vallebiaja, à Nizzeti, etc.) prédominent des formes à tours arrondis et peu carénés (caractères de M. Brocchü), mais en revanche on trouve des formes carénées { M. crati- culalus type) aussi bien à l’état vivant qu'a l’état fossile. Cette distinc- tion ? me paraît donc impossible à utiliser en stratigraphie et, à l’exemple de B. D. D. [237], je mettraile M, Brocchu Mis. en synonymie complète avec le M. craliculatus Br. . Murex (Ocinebrina) scalaris Br. et M. imbricatus Br. Ces deux espèces, pliocènes anciennes et éteintes, viennent d'être reconnues au Monte Mario par M. Cerulli-Irelli.— Dans ce gisement ce sont d’ailleurs les deux seuls Muricidés vraiment caractéris- tiques. Groupe du M. brandaris L. L'étude comparative du M. brandaris L. actuel, et de la forme voisine M. torularius Lmk. du Pliocène ancien, a été faite soi- gneusement par divers auteurs et en particulier par Bellardi ([13], fase. I, p. 51) qui a admirablement précisé les caractères diffé- rentiels de ces deux types. D’après lui, on considérait le M. {oru- larius comme propre au Pliocène et ancêtre du M. brandaris, 1 Cf, di Monterosato ({r15], p. 12), de Stefani ([2o1], p. 38:), de Kranchis ((70|, p-. 150). ? Une distinction analogue, également fugace, pourrait être étudiée entre la forme pliocène Murex cristatus Br., et la forme actuelle Murex Blainvillei Payr.; la forme pliocène a été reconnue au Monte Mario par M. Cerulli-Irelli, et j'en puis citer.des exemplaires bien typiques provenant du Calabrien des collines livournaises (gise- ments de Fauglia et Vallino del Merlo). * Pour la forme appelée par cet auteur Murer squamulalus Br., voir plus haut, P: 491. MURICIDÉS 524 lequel se serait ainsi constitué dès la fin du Pliocène ancien. Et M. de Stefani cite cette évolution comme exemple des différen- ciations qui séparent les faunes pliocènes et «postpliocènes ». En réalité il y a une petite modification à apporter à cette ma- nière de voir. En effet, s’il est vrai que le véritable M. forularius!, avec ses grandes épines recourbées en arrière, sa spire déprimée, ses sutures profondes, sa grande taille, etc., est absolument spécial au Pliocène ancien, il est non moins certain que le véritable M. brandaris y existe déjà, comme il est facile de s'en convaincre en examinant les collections des gisements classiques ?. Ainsi le M. brandaris, bien que vivant encore actuellement, est au moins aussi ancien que le M. {orularius; et même il y a plus encore: les jeunes A. {orularius sont impossibles à distinguer du M. brandaris. Donc, au contraire de l'opinion courante qui consi- dère le M. brandaris comme dérivé du {orularius, nous sommes conduit à regarder le A. brandaris comme plus voisin des formes ancestrales du groupe, tandis que le forularius représenterait un rameau latéral distinct. C'est probablement ce rameau latéral qui persiste encore actuel- lement sur les côtes occidentales d'Afrique, sous le nom de M. cor- nutus L., car Bellardi a longuement insisté sur les étroites affinités de cette forme vivante et du A7. torularius. Venons-en maintenant aux formes pliocènes supérieures et qua- ternaires. Dès le Calabrien, le vrai M. forularius paraît bien disparu de notre mer. Parmi tous les exemplaires que J'ai étudiés (Monte Mario, collines livournaises, Porto Empedocle, Gravina, Valle Lamato, etc...), aucun ne représente la forme si typique des sables d'Asti. Néanmoins on y trouve certains individus à galbe lourd et trapu”, où les sutures se font le long de la carène, englobant ainsi les épines du tour précédent : ce sont là des caractères de A. toru- larius, car dans la forme quaternaire et vivante, les sutures se font nettement au-dessus de la carène, de sorte que les épines des ! Voir les excellentes figures de M. Sacco [13], fase. 30, pl. IV, fig. 31-32. 2 Voir, par exemple, les figures 6 et 8 de la planche I dans l'ouvrage de M. Coss- mann [2421, fase. 5; ces figures représentent des individus provenant du Pliocène de Castellarquato, très différents du véritable M. {orularius et typiques comme M. brandaris (surtout la fig. 8). % Voir Cerulli-Irelli [32], pl. XLI, fig. r, 2, 522 GASTROPODES tours successifs restent dégagées. Ces variétés calabriennes paraissent rappeler beaucoup le M. tumulosus Sow., vivant aux Canaries, et considéré précisément par M. Dautzenberg! comme intermédiaire entre les M. brandaris et cornutus. Enfin, dès le Sicilien, on ne trouve plus que le véritable A. bran- daris vivant, d’ailleurs très polymorphe?. Quaternaire et actuel . . . . . M. brandaris M, tumulosus M. cornutus Calabriem ere nt Pliocène ancien . . . .. ... M. brandaris > M, torularius Genre Purpura. Ce genre n'est que pauvrement représenté au Pliocène ancien, d’abord par quelques rares espèces voisines de la P. hæmastoma L. actuelle, et surtout par un sous-genre ou genre très curieux, Acanthina — Monoceros. L’Acanthina monacanthos Br., en parti-. culier, est une espèce classique, confinée dans le Pliocène ancien*. Quant à la Purpura {Stramonita) hbæmastoma L., qui est seule à représenter le genre dans la Méditerranée actuelle, c’est pour nous une espèce intéressante. Car elle (ou des espèces qui la représen- tent) estextrêmement rare dans le Pliocène ancien: elle estinconnue en particulier dans le Pliocène français. Et elle devient au contraire extrêmement abondante avec les couches à Strombes: dans les facies littoraux de ces couches, c’est, avec le Trochus taurbinatus Born et les grandes Patelles du groupe ferruginea, une des coquilles les plus fréquentes partout. On sait qu’actuellement elle est redevenue très rare sur les côtes Nord de la Méditerranée; son centre de déve- loppement reste dans les eaux plus chaudes des côtes africaines 1 Dautzenberg, Mém. Soc. Zool. Fr., t. II, 1890, p. 153. — Cette espèce a été récem- ment figurée par M. Dollfus (122), pl. I, fig. 25. 2 Voir les onze figures qu'en a donnes récemment le D’ B. Serradell {Nota sobre el Murex brandaris Linneo y les seves varietates, Barcelone, 1912). La forme vivante, figurée, sans indication de provenance, par M. Cerulli-Jrelli ([82], pl. XI, fig. 9), sous le nom de M. brandaris, me paraît tout à fait aberrante. On y remarque même, sur le canal, un rudiment de la deuxième rangée d'épines carac- téristique du groupe iunalosus torularius-cornutus. 3 M. de Stefani cite cette espèce dans le « Postpliocène » de Vallelunga (Calabre); mais il y a tout lieu de croire (v. plus haut, p. 60), qu’il s'agit de Pliocène ancien. TRITONIDÉS 523 méditerranéennes et atlantiques; encore au début de l’époque pré- historique elle paraissait, sur les rivages Nord de la Méditerranée, plus fréquente qu'aujourd'hui (Issel [149], p. 85). Sa présence dans les faunes récentes, où elle accompagne les autres «émigrés du Sud» plus caractéristiques, est donc un indice de plus de leur caractère subtropical. Elle à par suite un certain intérêt stratigraphique. TRITONIDÉS Genre Tritonium. Je passe sous silence les quelques formes de cette famille qui sont spéciales au Pliocène ancien; quant aux espèces actuelles de la Méditerranée, elles sont suffisamment peu nombreuses pour que nous puissions examiner successivement l’histoire de chacune d'elles. Tritonium nodiferum Lmk. Cette belle espèce était déjà représentée partout dans la Médi- terranée pliocène. Il est seulement intéressant de noter qu'à cette époque elle ne paraissait pas atteindre la taille gigantesque qu’elle à acquise dans les mers quaternaires (Sicilien de Palerme, Mortelle, S. Francesco près Reggio, etc.) et actuellest. Tritonium (Lampusia) corrugatum Lmk. Cette espèce, si répandue actuellement, descend certainement, comme l'a montré Bellardi, du groupe pliocène T. affine Desh. T. Doderleini d'Anc. Et, à ce sujet, le savant paléontologiste italien a montré, dans des descriptions comparatives qui peuvent rester comme des modèles d'observation précise et minutieuse, les carac- ! Les belles figurations données par M. de Gregorio {Annales de Géologie et de Paléontologie, 112 livraison, Palerme, janvier 1893) font nettement ressortir le polymorphisme de cette espèce. On sait que l'une de ces formes du groupe nodi- ferum a été élevée au rang d'espèce spéciale par MM. Aradas et Benoît [5]: c'est le T. Seguenzæ, localisé, dans la Méditerranée, au Sud du détroit de Messine, et carac- térisé par la coloration rouge de son ouverture et par son ornementation:; on en trouvera de magnifiques illustrations dans l'Iconographie des coquilles européennes de Kobelt. J'ajouterai aussi que M. Cerulli-Jrelli ([32], p. 315) vient de constater que ce T. nodiferum atteignait déjà dans le Calabrien (Monte Mario) une taille bien supé- rieure à celle des individus du Pliocène ancien. 524 GASTROPODES tères distinctifs des types extrêmes, tout en insistant sur les formes de passage qui relient le groupe pliocène ancien au T. corrugatum de la Méditerranée et au T. pileare L. des côtes d'Afrique. En tout cas cette évolution paraît déjà accomplie dans le Pliocène récent!, et l'est sûrement dans le Quaternaire; car la forme fossile dans le Sicilien de Palerme est un véritable T. corrugatum, sans aucun caractère d’affinité avec les formes pliocènes. Aussi, à notre point de vue, je n'attacherai pas d'importance à la var. peregrina, que M. di Monterosato y a distinguée; d'apres l'examen d'échantillons types, obligeamment communiqués par l’auteur lui-même, cette forme me paraît d’ailleurs excessivement voisine du type. Le T. torulosum Brugnone, aussi du Monte Pellegrino, en est encore très voisin, d’après les renseignements qu'a bien voulu me communiquer M. di Monterosato : c’est d’ailleurs une espèce nouvelle basée sur un échantillon unique ; pour toutes ces raisons, je ne puis, comme le fait M. di Monterosato, lui faire jouer le rôle stratigraphique d'une espèce Meteinte, - Tritonium (Lampusia) cutaceum L. Sans être extrêmement commune, cette belle espèce est actuel- lement très répandue dans la Méditerranée. Aussi est-il curieux de constater que son origine reste encore très obscure. Les seules cita- tions que j'en connaisse à l’état fossile sont assez douteuses: Risso la cite dans le Quaternaire de Nice, et G. Seguenza [206] en signale des fragments très rares dans le Pliocène ancien de Gallina (0.). Sans que l'on puisse décider, d’une façon certaine, de la date de son apparition dans la Méditerranée, ce serait donc là une forme «cryptogène», inconnue dans les faunes méditerranéennes miocènes (et pliocènes?) et qui n’a acquis son développement actuel qu’à üne époque probablement assez récente, Tritonium (Lampusia) costatum Born? Cette forme est le T. olearium auct. non L. —T. parthenopeum ‘ Pourtant M. Cerulli-[relli ({32], p. 315) rapporte.encore au T. affine quelques spé- cimens récoltés dans le Calabrien du Monte Mario. 2 Conformément à l'opinion de M. Sacco ([13|, fase. XXX, p. 37) et contrairement à celle de M. Dautzenberg [59], je placerai cette espèce dans le sous-genre Lampusia et non dans le sous-genre Cymatium. EX: do TRITONIDES 029 von Salis. — La forme pliocène décrite par Brocchi sous le nom de Murex doliare, et très répandue dans le Pliocène ancien, est déjà identique à cette espèce actuelle, vivant dans la Méditerranée et sur les côtes Ouest de l’Afrique. Elle paraît même avoir été, à l’époque des couches à Strombes, plus abondante qu'aujourd'hui : ce serait donc une de ces coquilles à affinités plutôt subtropicales, qui tendent à disparaître de notre mer. Trilonium (Colubraria—Epidromus) reticulatum Blainville. Ce sous-genre tout entier est étranger aux faunes classiques du Pliocène ancien de l'Italie du Nord, bien que dans le Miocène du Piémont on trouve déjà des formes (d’ailleurs très rares) extrémement voisines, décrites et figurées par Bellardi sous les noms de 7”. Deshayesi Michelotti et 7°. obscurum Reeve. Puis nous retrouvons notre espèce citée par Seguenza,comme tres rare, dans le Pliocène ancien de Gallina (0.) et dans le Calabrien du Détroit de Messine (Reggio, Villa S. Giovanni, Musalà) ; elle devient relativement peu rare dans les couches à Strombes, d’où j'ai pu en étudier un exemplaire rapporté par M. Allemand-Martin des îles Kerkennah (près Sfax); enfin on sait qu'actuellement elle est surtout développée dans la partie Sud de la Méditerranée. En résumé, l'absence de cette espèce dans les faunes pliocènes si riches de l'Italie du Nord est un fait à noter: le centre de développement du T,. reticulalum paraît être toujours resté subtropical, et c'est surtout en accompagnant les autres formes chaudes des couches à Strombes qu'elle s’est répandue dans la Méditerranée. Enfin, je terminerai l'étude de ce genre par une espèce très impor- tante au point de vue stratigraphique, le: Tritonium (Cymatium) ficoïdes Reeve!. C’est une coquille littorale, confinée actuellement (Dautzenberg |59], p. 68) sur les côtes occidentales d'Afrique et aux îles du Cap Vert. Le sous-genre tout entier estinconnu dans les faunes pliocènes médi- ! Outre les figurations données par Réeve (Conch. icon., pl. XII, fig. br) et par Tryon (Man. of Conch., IL, p. 13, pl. VIL, fig. 46), on consultera aussi sur cette espèce une bonne étude de Petit de la Saussaye (Journal de Conchyliologie, t. III, 1892, pl, IL, fig. 10), 526 GASTROPODES terranéennes. Comme nous allons le voir, c'est très probablement seulement à l'époque des couches à Strombes qu'il a pénétré dans la Méditerranée, d’où 1il est aujourd'hui disparu. J'ai, en effet, moi-même récolté le T°. ficoides dans le Quaternaire de Tarente (horizon à Sérombus), et M. Dautzenberg a eu l'amabilité de vérifier ma détermination. D'ailleurs les figures ci-jointes qui représentent côte à côte un individu fossile de Tarente et un exemplaire vivant du Sénégal, permettront de comparer les deux formes. Les seules citations que je connaisse de cette espèce, à l’état fos- sile!, sont celles de Seguenza (][206], p. 353), qui la signale à Ravagnese et à Musalà comme très rare. Je n'ai malheureusement pu la retrouver dans aucune de mes récoltes de ces deux localités. Or, il est bien certain que Seguenza l’a réellement trouvée dans l’une au moins des deux, car il n'aurait pu imaginer de toutes pièces la présence, dans ses récoltes, d’une espèce exotique, la même précisément que J'ai retrouvée à Tarente. Comme la faune de Ravagnese, par tous ses autres caractères paléontologiques et stratigraphiques, se rattache à la zone à Sérombus, nous avons donc toutes les raisons d'admettre que la citation de Seguenza est exacte en ce qui concerne le gisement de Rava- gnese. Pour celui de Musalà, je ne puis l’accepter sans réserves. Car, comme nous l'avons vu, la faune de Musalà est par ailleurs totalement différente de la faune à Sfrombus : non seulement on n y rencontre ni le Sfrombus, ni ses autres compagnons habituels, mais encore le facies des sables de Musalà les montre appartenir à une zone bien plus profonde que celle où vit habituellement le 7”. ficoides, que M. Dautzenberg signale sur les côtes africaines à des profondeurs variant de 6 à 20 mètres. Ainsi, sans exclure absolument la possibilité de la pénétration, dans la Méditerranée, de cette espèce à une époque bien antérieure à celle des anciennes plages à Strombes, je ne puis accepter sans vérification nouvelle la station de Musalà, pour laquelle Seguenza a pu être victime d’une erreur causée par un mélange de récoltes. Quoi qu'il en soit, on voit l'intérêt de cette espèce au point de vue stratigraphique : absolument étrangère aux faunes de la Médi- 1 En dehors de la région qui nous intéresse, le T. ficoides a été signalé dans des conglomérats quaternaires aux îles du Cap Vert (Cf. de Rochebrune, Mouvelles Archives du Muséum, 1881, 2e série, IV, p. 304); comme il y vit encore actuelle- ment, cette citation n’a pas grand intérêt. TRITONIDES 527 terranée pliocène, elle constitue un exemple net de ces coquilles à affinités subtropicales qui sont venues, compagnes des Strombes, enrichir momentanément la population méditerranéenne. Je la con- sidère done comme essentiellement caractéristique de la faune à Strombus, et on peut s'attendre à la retrouver dans les gisements de cet âge où elle n’a pas encore été signalée. Genre Apollon (emend. Cossmann). Apollon scrobiculator L. Cette espèce, souvent désignée sous le nom de Ranella (Bufona- ria) scrobiculator, n'a pas une grande importance stratigraphique. Elle est représentée, en effet, dans les faunes méditerranéennes miocènes et pliocènes anciennes, par des formes très voisines con- sciencieusement étudiées par Bellardi (A. nodosum Borson). La distinction entre le type pliocène et le type actuel est très diffi- cile, car les caractères différentiels indiqués par Bellardi sont loin d'être bien constants. Pourtant on peut dire d’une manière géné- rale que, comme toujours, l'espèce semble avoir notablement augmenté de taille depuis le Pliocène ancien. Nous la retrouvons dans le Pliocène supérieur (Musalà, Villa S. Giovanni, d'après Seguenza, Nizzeti, etc.) et dans le Sicilien (Palerme, d'après M. di Monterosato). Enfin, c’est une des espèces les plus constantes dans les couches à Strombes : on l'y retrouve à Nice (gisements du Cap Ferrat, collections de l’Université de Lyon), à Ravagnese, à Tarente, en Algérie. Actuellement, elle paraît en voie de régression dans la Méditerranée septentrionale : elle est moins rare au contraire sur les côtes de Sicile et d'Afrique, et moins encore sur les côtes africaines de l'Atlantique. Il est donc intéressant de constater que, comme pour plusieurs autres espèces à affinités subtropicales, son maximum de fréquence dans la Méditerranée paraît avoir eu lieu à l'époque des couches à Strombes. Apollon (Aspa) marginatus Gmelin!. Je me borne à signaler ici cette belle espèce bien isolée, qui est ! Pour l'interprétation générique de cette coquille, bien connue sous le nom de Ranella marginata, je me conforme à l'opinion de M. Cossmann ([242],fasc. V,p. 118), qui, d’ailleurs, la signale à tort comme vivante dans la Méditerranée. 528 GASTROPODES une des plus classiques dans les faunes miocènes et pliocènes anciennes, Car elle ne pénètre pas dans les faunes du Pliocène supérieur; elle sera donc pour nous essentiellement caractéristique du Pliocène ancien. Et actuellement, comme beaucoup de ses com- pagnes dans le même étage, elle est localisée sur les côtes occiden- tales d'Afrique, où elle paraît d’ailleurs en voie d'extinction, si l'on songe à son abondance et à sa vaste répartition dans les faunes anciennes. ; Genre Ranella, Ranella gigantea L. Cette espèce a évolué sur place, dans la Méditerranée, depuis le Pliocène ancien jusqu à l’époque actuelle. Il n’y a à signaler qu'un accroissement notable de la taille : tandis que la hauteur des indi- vidus pliocènes est de 14 centimètres, d'après Bellardi, elle atteint actuellement 0 centimètres, d’après Weinkauff ([233|, t. II, p. 71). CASSIDIDÉS Les deux seuls genres de cette famille qui intéressent nos faunes pliocènes et quaternaires sont les genres Cassis (ou Cassidea, nom récemment adopté par M. Cossmann) et Cassidaria. Genre Cassis. Ce genre est actuellement représenté dans la Méditerranée par deux espèces : C. saburon Gmel. et C. undulata Brug., dont nous allons étudier l’histoire. Mais auparavant nous devons mentionner l'existence au Pliocène ancien d’un troisième rameau, dont les descendants sont actuellement émigrés hors de la Méditerranée : M. Sacco a précisé cette phylogénie, et montré que les G. crumena Brug. var. pseudocrumena d’Orb., GC. protesticulus Sacco, G. marginatus de Serres, représentaient, dans le Pliocène ancien méditerranéen, les formes ancestrales des G. testi- culus L. et G. crumena Brug. exotiques, vivant en particulier sur les côtes Ouest d'Afrique. C’est encore un exemple des affinités sub- tropicales de la faune pliocène ancienne, par rapport à laquelle les faunes méditerranéennes plus récentes se montrent appauvries. Quant aux formes tuberculées réunies par M. Sacco dans le sous-genre EE : CASSIDIDES 529 Echinophoria Sacco (exemple Cassis intermedia Br.), on les croyait complètement éteintes avec le Pliocène ancien, mais M. Cerulli-Irelli ([32], p. 317) vient de décrire un exemplaire de GC. intermedia dans le Calabrien du Monte Mario ; la découverte de cette intéressante espèce dans ce gisement nous montre, une fois de plus, les affinités pliocènes des faunes calabriennes. Cassis saburon Gmelin. Cette espèce est citée, par beaucoup d'auteurs, comme fossile des le Miocène. Après une étude comparative soigneuse de la forme vivante et de la forme miocène et pliocène, M. Sacco a nettement fait ressortir les caractères qui les séparent dans l’ensemble : il a donc repris pour l'espèce fossile dans le Pliocène le nom de Cassis lævigata Defrance, différent du G. saburon actuel. Mais entre ces deux espèces tous les passages existent. Dans les faunes pliocènes supérieures et quaternaires anciennes, le type actuel n'est pas encore définitivement constitué, et on peut noter encore des caractères archaïques. Ainsi dans le Calabrien de Gravina, le groupe est représenté par une forme de grande taille, entièrement couverte de stries décurrentes (carac- tère de C. saburon), mais que la spire allongée et le dernier tour peu glo- buleux rattachent nettement au type lævigala ; elle ne se distingue, en effet, de C. lævigatla Defr. var. sériala Defr., que par sa taille plus forte. Au Monle-Mario, par contre, les exemplaires récemment figurés par M. Cerulli-Irelli ([32], pl. XLII, fig. 21-23) ont bien le galbe du C. saburon, mais la surface lisse du lævigala. Enfin au Srcilien, on trouve à Ficarazzi une belle coquille appelée par Brugnone Cassis platystoma Brugn. et que j'ai fait figurer ici; elle est, comme on le voit, nettement différente du C. sahuron actuel; sa surface est complètement lisse sur le dernier tour, et surtout son galbe est encore plus effilé et plus svelte que dans le C. lævigata pliocène. Je la considérerai donc comme une mutation éteinte du C. saburon. Car je ne crois pas que l'on puisse la regarder comme une véritable espèce disparue, puisque son groupe subsiste encore dans la Méditerranée, et y montre, d’après Weinkauff ([233}, t. II, p. 40), un extreme polymor- phisme : cet auteur signale en particulier la grande variabilité du dévelop- pement de la sculpture décurrente, Dans les couches à Strombes, par contre, on trouve partout en abondance le vrai C. saburon. avec sa spire surbaissée, son dermier Univ. DE Lyon, — Grenoux, 94 930 GASTROPODES tour très globuleux et son ornementation caractéristique. Il paraït même avoir été, à cette époque, plus fréquent qu'il ne l’est aujour- d’hui dans la Méditerranée, car actuellement il n’ést guère un peu abondant que sur les côtes d'Afrique, habitat ordinaire des espèces méditerranéennes à affinités subtropicales. Cassis undulata Gmelin—G. sulcosa Brug. Cette belle espèce paraît avoir été très rare au Pliocène ancien : inconnue dans les gisements classiques du Piémont, elle n’est citée que dans le Plaisantin; on commence à la rencontrer dans le Cala- brien au Monte Mario (Cerulli-Irelli), où on n'en connaît d’ailleurs qu'un exemplaire. Elle est un peu plus fréquente dans le Calabrien de l'Italie du Sud (Philippi, Crema, Seguenza) ; Seguenza ne la cite pas dans la province de Reggio, mais J'en ai récolté un exemplaire à Musalà. Par contre, elle est connue dans le Sicilien. de Palerme, et elle devient très fréquente partout dans les couches à Strombes!, auxquelles elle contribue à donner un caractère subtropical, car, en dehors de la Méditerranée, c’est surtout sur les côtes africaines qu’on la rencontre actuellement. Genre Cassidaria. Représenté dans la Méditerranée actuelle par deux espèces, . G. echinophora L. et G. tyrrhena Chemnitz, ce genre n'offre pas d'intérêt pour nous, car les formes que l’on rencontre dès le Plio- cène ancien sont déjà extrêmement voisines des types actuels; ces espèces sont d’ailleurs très polymorphes, et 1l ne me paraît pas possible d’y distinguer des mutations ayant une valeur strati- graphique. DOLIIDÉS 5 Cette famille n'offre pas un grand intérêt pour nous, en raison de sa rareté dans les faunes récentes que nous étudions. Je me bor- nerai, toutefois, à faire remarquer l’appauvrissement qu'elle subit dès la fin du Pliocène ancien. Car elle n’est plus représentée dans la 1 J'ai pu, en particulier, étudier de nombreux échantillons de C. undulata pro- venant des couches à Strombes des environs de Nice (Collections de l'Université de Lyon) et de Tarente (Collections de l'Université de Grenoble). CYPRÆIDÉS 31 Méditerranée actuelle que par deux espèces, Dolium galea l,rset Dolium crosseanum Monterosato {Journal de Conchyliologie, 1869, t. XVII, p. 228, pl. XII, fig. 1), alors qu'au Pliocène ancien elle comprenait, en outre du genre Dolium représenté par un certain nombre d'espèces, le genre Ficula, actuellement tout à fait disparu de notre mer. CYPR ÆIDÉS Les formes de cette famille les plus abondamment représentées dans nos faunes appartiennent au sous-genre Trivia de Cypræa : aussi c'est par elles que nous commencerons notre étude. Genre Cypræa Sous-genre Trivia. Les deux espèces! méditerranéennes de ce sous-genre, Cypræa europæa L. et C. pulex Gray, ont une vaste répartition géogra- phique, puisque la principale d'entre elles, la C. europæa, s'étend jusque sur les côtes d'Angleterre. À l’état fossile, ce groupe a éga- lement une grande extension ; mais, à côté de formes identiques aux vivantes, on y rencontre aussi des espèces spéciales au Pliocène ancien : telles sont les C. dimidiata Bronn, C. sphæriculata Lmk., G. dorsolævigata Cocconi — C. gibha Seguenza ?. Peut-être ces formes à affinités pliocènes anciennes ont-elles pénétré dans les faunes plus récentes. Ainsi les collections de l'Uni- versité de Lyon possèdent plusieurs belles Cypræa provenant du gisement calabrien de Crespina (collines livournaises) et apparte- nant évidemment au groupe de l’europæa, mais qui montrent sur la face dorsale le sillon médian caractéristique de la forme pliocène C. dimidiata Bronn. Toutefois, comme ce caractère se rencontre, d’après Weinkauff ([233], t. II, p. 8), même dans la C. europæa vivante, je n oselui attribuer une grande importance stratigraphique. 1 Je ne considère pas comme une espèce bien distincte la C. Mollerali Locard (Cf. Locard [160], L. I, p. 104). > J'ai récolté moi-même un exemplaire de cette coquille dans le gisement pliocène ancien de Gallina (O.), d'où provient le type de Seguenza; et je crois ainsi pouvoir affirmer l'identité de l'espèce de Seguenza avec la C. dorsolænigata et non avec la C. sphæriculata, comme l'indique dubitativement Sacco. 3 M. Cerulli-Irelli vient de décrire ([32], p. 323), précisément dans le Calabrien, au Monte Mario, une forme tout à fait identique, sous le nom de C. europæa, var. pediculoides Cerulli-Irelli. 582 GASTROPODES IL faut probablement faire de même pour la citation de la C.sphæriculata Lmk. dans le Sicilien de Palerme (Monte Pellegrino, di Monterosato [114]) : d’après les renseignements que m'a obli- geamment communiqués M. di Monterosato, cette espèce n'y serait connue que par un seul exemplaire. Or, si, dans l’ensemble, le type pliocène sphæriculata est assez bien caractérisé, en revanche il existe de nombreuses formes de passage au type europæa, formes dont la détermination précise est des plus difficiles. Dans ces condi- tions, je n'ose considérer la coquille en question comme une espèce disparue caractéristique du Sicilien. J'en ferai autant, à plus forte raison, pour une forme du gisement de Ficarazzi que M. di Monterosato a eu l’amabilité de me communiquer sous le nom de T'rivia frigida Mts., et qu'il considère comme éteinte, quoique très voisine de la T. arclica Mtg. : je ne lui vois aucun caractère différentiel important avec la 7”. europæa qui est, comme on sait, très polymorphe. D'ailleurs la T°. arctica a été réunie par son auteur lui-même à la 7°. europæa, et Weinkauff la met en synonymie avec cette dernière espèce. Sous-genres Gypræa (s. str.) et Luponia. Les autres espèces du genre Cypræaqui nous intéressent, et qui se répartissent dans les sous-genres Cypræa s. str. et Luponia, ont un caractère nettement tropical. Extrêmement abondantes au Miocène, elles sont déjà en forte régression dans le Pliocène. Leur absence, ou tout au moins leur grande rareté dans les faunes plus récentes, les rerid bien peu intéressantes pour nous, et c'est d'après la belle mono- graphie que M. Sacco a consacrée à cette famille que je retracerai ici leur histoire. Des quatre espèces du Pliocène ancien, G. porcellus Br., G. reticu- lata Lmk.— C. physis Br., G. flavicula Lmk., G. labrosa Bonelli!, les deux premières seulement sont encore actuellement représentées dans la Méditerranée par des formes extrêmement voisines, la G. pyrum Gmel. et la G, utriculata Lmk., var. -achatidea Gray sp”. En revanche, on rencontre maintenant dans la Méditerranée deux autres espèces, la G. lurida L. et la CG. spurca L., qui peut-être résultent . ! Dont la C. Davidi Fontannes n'est qu’une variété. 4 Souvent citée sous le nom de C. physis Br. CYPRÆIDÉS 533 d’une immigralion récente d’origine méridionale. Toutes ces Cyprées, en effet, sont très rares dans les eaux méditerranéennes et y apparaissent comme des éléments en quelque sorte étrangers. De fait, elles se rencon- trent toutes (sauf peut-être la C. achatidea, qui est nettement une espèce autochtone) sur les côtes de l'Atlantique subtropical (Canaries, Guinée, Sénégal, etc.). Il est regrettable que la rareté des documents paléonto- logiques pendant le Pliocène supérieur et le Quaternaire ne nous permette pas de préciser davantage l’histoire de ces belles coquilles. La C. achatidea est connue au Monte Pellegrino, et j'en ai récolté des frag- ments, de détermination très douteuse, dans le Calabrien de S. Maria di Catanzaro et dans les couches à Strombes de Tarente !. Genres Amphiperas (— Ovula) et Erato Les espèces qui représentent ces genres dans les faunes méditer- ranéennes n'ont pas sensiblement varié entre le Pliocène ancien et l'époque actuelle, et ne peuvent, par suite, donner d'indications stra- tigraphiques. Genre Cyphoma ° Ce genre tout entier est éfranger aux faunes méditerranéennes, tant vivantes que fossiles : aussi est-il très important de mentionner ici que Seguenza signale comme rare, dans les couches à Strombes de Boveto près Ravagnese, un Cyphoma dont il a fait une espèce nouvelle sous le nom de G. bovetensis (Sesguenza [206/, p. 351, pl. XVII, fig. 4r). N'ayant pas retrouvé moi-même celte espèce, je ne puis rien ajouter à ce qu'en dit Seguenza. Mais au point de vue de l'appréciation de sa signi- fication stratigraphique, je ne puis la considérer comme une forme éteinte : car son groupe est actuellement représenté dans les mers 1 Ces lignes étaient déjà rédigées quand j'ai eu connaissance du ({ravail de M. Cerulli-Irelli sur les Cyprées du Monte Mario, {travail qui nous apporte quelques faits intéressants. C’est ainsi que la C. flavicula Lmk. = C. elongata Br., jusqu'alors essentiellement pliocène ancienne, est encore représentée au Monte Mario par un unique exemplaire. L'auteur y signale, en outre, un individu de C. spurca. Quant aux deux formes nouvelles, C. Infernoi et C. denliculina Sacco var. mariana, fondées chacune également sur des échantillons uniques, leur signification demeure tout à fait obscure. Les difficultés de détermination et la rareté de ces Cypræidés me confirment dans l’idée qu'il est pour le moment bien difficile de les utiliser en stratigraphie. ? On peut aussi, avec Fischer, considérer Cyphoma comme un sous-£enre d'Ovula. 534 GASTROPODES chaudes et Seguenza, lui-même, fait ressortir les étroites analogies de son espèce avec la G. gibbosa [.. actuelle. On sait que cette espèce est assez répandue sur les côtes occidentales de l'Atlantique tropical ; je ne la connais d’ailleurs que par la figuration qu'en donne le Systematisches Conchylien-Cabinet de Martini et Chemnitz!; la forme actuelle paraît plus grande que le type de Seguenza, avec un bourrelet médian plus accentué ; mais la figure de Seguenza ne semble pas excellente. Quoi qu'il en soit, puisque le genre est inconnu dans les faunes méditerranéennes plus anciennes, il s’agit sûrement d’une coquille immigrée. Je la rangerai donc dans la catégorie de ces espèces à affinités tropicales qui ont pénétré toutes ensemble dans la Médi- terranée à l’époque des Strombes. STROMBIDÉS Les Strombes ne sont développés dans les faunes méditerra- néennes qu'à deux niveaux : d’abord au Pliocène ancien, où M. Sacco les réunit tous en une seule espèce, le Sérombus coronatus Defrance, ensuite, au Quaternaire, dans un horizon paléontolo- gique que leur abondance a fait nommer « couches à Strombes » : ils y sont représentés par une espèce actuellement vivante, le Strombus bubonius Lmk. Ainsi, au premier abord, les Strombes apparaissent done comme des fossiles très importants pour la chronologie du Pliocène et du Quaternaire méditerranéen. Je n'insisterai pas beaucoup sur la description des formes plio- cènes: elles sont, comme l'a fort bien dit M. Sacco, tellement variables, qu'il serait nécessaire d'établir une variété pour chaque échantillon étudié. Le seul point qui nous intéresse ici, c'est de les comparer aux Strombes du Quaternaire et de voir lesquels s’en écartent ou s’en rapprochent. Prenons donc comme point de départ le type moyen du S. coronatus, tel qu'on le rencontre le plus fréquemment dans les formations plaisan- ciennes et astiennes de toute la Méditerranée (Roussillon, vallée du 1 Band V, Abth. 3, p. 193, pl. XLIX, fig. 6-7. STROMBIDÉS 535 Rhône, Alpes-Maritimes, Italie, Sicile, Algérie, Espagne) : on en trouvera d'excellentes figurations dans les travaux de d’Ancona ! et de Fontannes ([126], p. 151, pl. IX, fig. 1 ?); quant aux figures 21-25 et 26-27, de M. Sacco (|13|, fase. 14, pl. I), elles correspondent aussi à des variétés très voisines du type. A parür de cette forme, nous rencontrons d’abord une premuère série de variations qui nous écartent encore plus des Strombes quaternaires : la taille augmente, la spire s’aplatit beaucoup, les tubercules du dernier tour s'allongent et parfois se recourbent, mais ils restent lourds et massifs ; le terme extrême de cette série me paraît être la très belle et gigantesque coquille que l'on trouve par exemple en abondance dans le Pliocène ancien (Astien) d’Altavilla, et que l'on peut appeler, à la suite de M. de Gregorio : S. coronatus var. altavillensis de Greg. (voir les planches). Mais on rencontre également, dans le Pliocène, une deuxième série de formes, qui présentent un type tout différent, et très éloignées au premier abord de notre var. altavillensis, tellement que, sans les termes de passage, on en ferait sans aucun doute deux espèces absolument dis- linctes. Ici, en effet, on assiste à des modifications inverses des précé- dentes : la spire s'élève et s’allonge, de même que l'ensemble de la coquille, qui devient ainsi plus svelte. En même temps, les tubercules du dernier tour s’atténuent, ou plutôt cessent d’être des épines lourdes pour devenir de vrais tubercules pointus, régulièrement coniques. C'est la forme appelée S. tuberculiferus par Marcel de Serres, nom que l’on doit conserver à titre de variété : on la trouvera très bien figurée par Fontannes (loc. cit., fig. 2) et Sacco (loc. cit., fig. 25 his). Comme on l’a déjà fait remarquer, cette var. {uberculifera reproduit à l’état adulte le stade jeune du S, coronalus : elle représente donc la pers'stance d'une forme ancestrale, Et de fait, il est facile de retrouver cette forme dans le Miocëne, M. Sacco cite, en effet, notre var. {uberculifera dans le Tortonien du Piémont, Dans le bassin de Vienne, la coquille figurée par Hôrnesè sous le nom de $, coronalus, se rattache également à la même série de variétés, Enfin nous reparlerons plus loin de la forme qu'on trouve dans les faluns de Touraine. Or, il est très important de noter que c'est précisément dans ce groupe que se rencontrent les types les plus voisins des Strombes quaternaires : 1 P. 313, pl. I, fig. 1-2. 2? La figure de Fontannes fait bien ressortir les caractères du type, mais corres- pond à une forme de petite laille. * Die fossilen Mollusken des Tertiär-Beckens von Wien, Ba I, pl. XVII, fig, r. 236 GASTROPODES la figure de Hôrnes ci-dessus citée pourrait aussi bien se rapporter à l’un d'eux. En résumé, on trouve dans le Pliocène ancien une succession de formes, qui, partant du S. tuberculiferus (réalisé chez toutes les autres à l'état jeune), passent par des types tels que le S. coronatus selon Hôrnes', arrivent au S. coronatus type du Pliocène, puis aux var. compressonana et perspinosonana de M. Sacco, et aboutis- sent enfin à la gigantesque var. alfavillensis que j'ai figurée. Ce der- nier type nous apparaît donc comme la fin de l'évolution d’un rameau phylétique, et nous allons voir que c'est celui qui s'éloigne le plus des formes quaternaires et actuelles. Il nous faut en effet arriver jusqu'aux « couches à Sfrombes », pour y retrouver une abondance d'échantillons comparable, et même bien supérieure, à celle du Pliocène. Car dans les formations intermédiaires (Calabrien et Sicilien), les Strombes ne sont connus, comme nous le verrons, que par des individus extrêmement rares qui ne sont pas suffisants pour nous renseigner sur le sens des varia- tions du groupe à ces époques. Dans le Quaternaire, par contre, le Strombe est l’un des fossiles les plus caractéristiques et est connu depuis longtemps. On le rencontre, en effet, sur les côtes françaises dans les environs de Nice et de Monaco, à Livourne, à Pianosa, en Corse (?), à Rava- gnese et Boveto (près Reggio), à Tarente, à Gallipoli, à Mellisello dans l’Adriatique, en Tunisie (Sfax, Cap Bon, îles Kerkennah), en Algérie (nombreux gisements), en Espagne ($S. Juan de Vilasar, près Barcelone, Cocedores près Alméria), dans les Baléares. Sor- tant de la Méditerranée occidentale, nous le retrouverions à Chypre (Gaudry), dans l'isthme de Corinthe (Jousseaume, C. Depéret), etc. Aussi la présence de cette coquille, si étrangère à la faune méditer- ranéenne actuelle, dans des sédiments visiblement très récents, a-t-elle depuis longtemps frappé tous les géologues. | Mais c'est sous les noms les plus divers qu'ils l'ont citée, sui- vant que leur attention était spécialement attirée sur la comparaison avec les espèces fossiles ou avec les espèces vivantes. C'est pour 1 Que M. Sacco rattache avec doute auS. nodosus Borson, espèce essentiellement miocène, à titre de variété propenodosa Sacco; ses affinités avec le groupe coronatus me paraissent au contraire bien plus grandes, STROMBIDÉS 537 elle qu'a été créé le nom spécial de Strombus mediterraneus Duclos, nom nouveau qui, par conséquent, ne préjuge derien. Aussi, bien des auteurs ont-ils adopté cette dénomination, qui ne peut prêter à aucune confusion car, visiblement, dans ces dépôts qua- ternaires, on ne rencontre bien qu'une seule et même espèce de Strombe fossile. Mais, pour préciser sa signification, les géolo- gues ont été amenés à la rapprocher des formes connues dans le Pliocène, tandis que les conchyliologistes recherchaient au contraire ses analogues dans la faune actuelle. Ainsi nous trouvons très souvent notre espèce citée sous les noms de S. coronatus Defr. ou de S. Mercati, qui sont synonymes; et, de fait, les affinités entre les deux formes coronatus et mediter- raneus sont très visibles. Mais beaucoup d'auteurs ont reconnu des différences entre elles. Seguenza, par exemple, constate qu'à Rava- onese on trouve une forme quil appelle bien $S. coronatus, mais qu il déclare de taille plus petite et à spire plus proéminente que le type pliocène. MM. Simonelli, de Stefani, etc. ont écalement reconnu la nécessité de distinguer ces deux formes. Par contre, tous les conchyliologistes ont été à peu près unanimes à constater l'identité du S. mediterraneus avec le S. bubonius Lmk., vivant actuellement au Sénégal, au Gabon, dans les îles du Cap-Vert, jusquà une profondeur de 100 mètres, mais confiné habituellement dans des fonds de 15-20 mètres. Soupçonnée par beaucoup d'anciens géologues (Pomel, Fischer et Tournouër, etc.), adoptée par M. de Stefani, par M. Jousseaume, cette manière de voir a été récemment confirmée par MM. Dautzenberg et Dollfus. La comparaison de très nombreux exemplaires fossiles des provenances les plus diverses, avec quelques échantillons du S. hubonius vivant, m'a montré en effet l'impossibilité de distinguer spécifiquement ces deux formes. Il y a bien quelques légères différences : ainsi les formes vivantes sont en général moins épaisses, avec des tubercules moins développés, une surface plus ondulée (ce que fait fort bien remarquer N.Jousseaume); mais ce sont là des différences n'ayant guère qu'un caractère individuel, et auxquelles je ne saurais attacher aucune importance. Il nous reste maintenant à apprécier les rapports de notre fossile avec le S. coronatus du Pliocène. M, de Stefani ([ 101], p. 393)admet, dans le Quaternaire, la présence 538 GASTROPODES simultanée des deux espèces: je ne sais sur quels échantillons est basée l'opinion du savant professeur italien : pour ma part, je n’ai jamais vu, parmi les nombreux exemplaires français, italiens, africains, que j'ai eu l'occasion d'étudier, aucun individu que l’on puisse rap- porter franchement au S. coronatus. À part la hauteur de la spireet beaucoup d’autres caractères, la différence la plus importante con- siste, à mon avis, en ce que, dans les Strombes quaternaires, la rangée supérieure de tubercules reste visible et saillante jusque. tout près du sommet, car la suture se fait en-dessous de ces tuber- cules, au lieu de les englober comme dans le type pliocène. Mais par contre, on trouve, comme nous l'avons vu, dans le Pliocène et dans le Miocène, des variétés de Strombus coronatus très voisines du Strombus bubonius. Et, chose curieuse, c’est surtout dans le Miocène que les ressemblances sont les plus grandes. J'ai déjà fait remarquer l'analogie frappante qu'il y a entre le fossile mio- cène du Bassin de Vienne représenté par Hôrnes /loc. cit.) et la forme du Quaternaire. MM. Dollfus et Dautzenberg n’ont pas hésité à retrouver le S. bubonius dans le Miocène de la Touraine, et, de fait, l'échantillon que je figure ici se montre beaucoup plus voisin du Strombe quaternaire que du S. coronatus. Il semblerait donc, d'après cela, que ce $. bubonius soit une forme extrêmement ancienne, et que le véritable S. coronalus du Pliocène représente seulement un rameau latéral qui se serait développé localement, par suite, peut-être, de son isolement dans la Méditerranée. Mais ce qui rend encore un peu incertaine l’histoire de ce groupe, c'est la rareté des données que nous possédons à son égard pendant les étages calabrien et sicilien, Il existe au Musée Géologique de l'Université de Pise quelques exem- plaires de Strombesétiquetés «S, Severina », et qui, s'ils proviennent bien de cette localité de la Calabre, ne peuvent guère avoir été récoltés dans un autre terrain que le Calabrien (ou la partie supérieure du Pliocène ancien). Ceux-ci m'ont semblé tout à fait identiques aux Strombes qua- ternaires, dont il existe précisément dans la même vitrine des échantillons magnifiques fournis par la « panchina » de Livourne. Grâce à l’amabilité du regretté professeur L. Seguenza, j'ai pu voir dans les collections de l'Université de Messine (avant le tremblement de terre de 1908) de beaux Strombes provenant de Caltanissetta (Sicile) ; dans cette localité, seule la série Pliocène est représentée, et ces fos- rene à Var nt pee LERCN L ATEE STROMBIDÉS 539 siles proviennent probablement du Pliocène supérieur : ils m'ont paru identiques au S. buhonius du Quaternaire. Enfin G. Seguenza cite, dans son Saharien inférieur de Monteleone et de Reggio (Calabrien), de petits exemplaires et des fragments, très rares, de Strombus coronatus. N'ayant pas retrouvé moi-même de Strombe dans ces gisements, il m'est impossible de rien ajouter à la cita- tion de Seguenza ; mais peut-être ces fossiles proviennent-ils du Pliocène ancien, fossilifère dans ces localités. Je ne connais aucune citation de Strombe dans le Sicilien. J'ai pu étudier au Musée de Palerme un échantillon assez bien conservé, récolté par des ouvriers dans les tranchées du chemin de fer entre le tunnel de Castellamare et la station de Calatafimi-Ségeste. J'ai visité cette localité en compagnie de M. C. Depérel : nous n'y avons point récolté d’autres fossiles, mais la formation d’où provient le Strombe nous à paru être le prolongement des couches, d'âge probablement Srcilien, si fossilifères aux environs de Castellamare, où elles forment le soubassement d’une terrasse alluvio-marine à 100 mètres d’altitude environ. Le Strombe en question se rapproche sûrement beaucoup plus du S. bubonius que du S. coronalus; toutefois il s'écarte de la forme la plus commune dans le Quaternaire par l'épaisseur de son labre et ses tubercules très trapus. Tels sont tous les documents que j'ai pu réunir sur l'existence du genre Strombe dans la Méditerranée pendant le Pliocène supérieur et le Sicilien. Comme on le voit, ils sont des plus rudimentaires, et on ne peut manquer d'être frappé de la rareté des Strombes dans ces formations, par ailleurs si fossilifères. Dans l'ensemble, et en se basant surtout sur les faits les plus importants, on peut donc résumer ainsi l'histoire du groupe : Dès le Miocène, on trouve dans l'Atlantique une forme ances- trale extrêmement voisine du Sfrombus bubonius, et qui pénètre dans le bassin méditerranéen. Puis, au Pliocène ancien, se déve- loppe dans la Méditerranée un rameau latéral, le Strombus coro- natus, aboutissant à des formes tout à fait aberrantes, telles que le gigantesque S. alfavillensis. Ensuite le développement du groupe subit un brusque temps d'arrêt, sans qu'il soit possible de dire quels sont les rameaux qui persistent. Enfin, dans le Quaternaire supérieur, nous retrouvons une phase de développement exubérant, mais le rameau du coronatus a complètement disparu ; seule subsiste la forme ancestrale, le S{rombus bu bonius, encore actuellement vivant dans l'Atlantique subtropical, mais éteint dans la Méditerranée. 940 GASTROPODES Le fait le plus marquant de cette histoire est le grand développe- ment, subit, de cette coquille dans les couches à Strombes. Ce développement se produit précisément au moment où la faune méditerranéenne s'enrichit d'un certain nombre d'autres espèces subtropicales, immigrées de l'Atlantique. De sorte que, tout en constatant la persistance probable de quelques rares Strombes pendant le Pliocène supérieur et le Sicilien dans la Méditerranée, je crois que l'invasion véritable, dont témoignent les couches à Strombes, ne résulte pas d'une évolution sur place, mais bien d’une immigration due à des changements de climat ou de courants, Couches à Strombes. S. bubontus SICILE PAPE ? Calabrniens 2% a var, allavillensis Pliocène ancien . .. S, coronatus var. tuberculifera me. leger MioCéne ee S. aff. bubonius CHÉNOPIDÉS ( — APORRHAIDÉS) Toutes les formes qui nous intéressent dans cette famille appar- tiennent au sous-genre Chenopus! {s. str.)et peuvent se grouper autour de trois grandes espèces, dont l'une, le C. uttingerianus Risso, est actuellement éteinte, tandis que les deux autres, C. pes- pelecani L. et C. serresianus Michaud, vivent encore dans Îla Méditerranée. Chenopus pespelecani L. C'est une des coquilles liftorales les plus communes dans toutes nos mers (Atlantique et Méditerranée) : aussi je n'insiste pas sur sa 1 C’est sans doute par inadvertance que M. Cossmann (|242|, livr. 6, p. 74) range dans le genre Arrhoges le Chenopus alalus Eichwald, d’après des échantillons du Plaisancien de Cannes. J'ai eu l’occasion d'examiner des échantillons provenant de cette même localité et déterminés Ch. alatus : ils ne représentent tout au plus qu'une variété de Ch. ultingerianus (comme l’a dit, d’ailleurs, M. Sacco [13}), et n'ont natu- rellement rien de commun avec les Arrhoges. CHÉNOPIDÉS SA description; je me contenterai de dire que, par rapport aux deux espèces suivantes, elle est caractérisée par sa spire élevée, allongée, ses derniers tours peu dilatés, surtout par son ornementation com- posée de gros tubercules saillants et assez espacés. Cette même forme vivait déjà dans le Pliocène ancien, plus fréquente naturellement dans les facies littoraux. Ainsi M. Sacco la signale comme rare dans le Plaisancien du Nord de l'Italie, où elle est représentée surtout par une var. minor, reconnue également par Fontannes dans le Pliocène du bassin du Rhône; elle est plus fréquente au contraire dans l’Astien. Dans l'Italie du Sud, je l’ai rencontrée à tous les niveaux du Pliocène et du Quaternaire, surtout dans les facies sableux : ainsi elle abonde dans les dépôts littoraux de la zone à Strombes à Tarente. Dans le Sicilien de Palerme, M. di Monterosato a cru pouvoir en dis- linguer, sous le nom de G. alterutra Mts., une forme qu'il considère comme une espèce éteinte |114]. Sur ses indications, M. Crema a décrit et figuré (|56|, p. 25, pl. IV, fig. 9-10) cette même forme dans le Calabrien de la vallée du Crati. Je ne vois aucune différence suffisamment impor-- tante entre le C. alterutra et l'espèce vivante, dont on connaît la grande variabilité : aussi Je ne crois pas qu'il faille voir là une espèce éteinte .caractéristique du Sicilien. En résumé, on voit que ce premier phylum, se poursuivant depuis la base du Pliocène jusqu'à l’époque actuelle, n’a pas grand intérêt stratigraphique, et ne peut guère donner que des indications sur les facies. Chenopus uttingerianus Risso. Cette espèce est caractérisée par sa spire courte et ventrue et par ses carènes décurrentes à peine tuberculées : elle possède le même nombre de digitations que l'A. pespelecani, auquel beaucoup d'auteurs (Kiener) l'ont réunie à tort. Car elle s’en distingue non seu- lement au point de vue morphologique, mais aussi par sa répar- tition bathymétrique et stratigraphique. Ce C. uttingerianus est, en effet, très caractéristique des facies marneux de grande profondeur du Pliocène ; c’est essentiellement une espèce plaisancienne, comme l'a bien montré M. Vinassa de Regny!. 1 Vinassa de Regny, Il Chenopus uttingerianus Risso € il Ch. pespelecani L. del Pliocene italiano {Boll. d. Soc, malacol. ilal., vol. XX, 1895, p. 21, tav. IT). b42 GASTROPODES Aussi est-il extrêmement intéressant de noter la persistance de cette espèce dans les faunes calabriennes : je l’ai rencontrée en abondance dans tous les gisements de cet âge à facies suffisamment profond (Gravina, Nizzeti, Terranova di Sicilia, Porto Empedocle, Girgenti!, etc.). Mais déjà dans le Sicilien elle a disparu : c’est donc une de ces espèces éteintes, à affinités anciennes, qui persistent dans le Calabrien et nous montrent la liaison intime existant entre les faunes du Pliocène ancien et récent. Chenopus serresianus Michaud. Cette forme vivante, assez rare, a été excellemment décrite et figurée par B. D. D. [237|. Elle diffère surtout des deux espèces précédentes par l'apparition d’une digitation de plus, sur laquelle se prolonge la carène inférieure des tours. Elle se distingue, en outre, du C. uttingerianus, par sa spire moins ventrue et ses carènes plus nettement tuberculeuses ; enfin, elle s’écarte du C. pespelecani par la forme des digitations, grêles et élancées, qui rappellent ainsi le C. uttingerianus, et par son ornementation composée de tubercules bien plus fins et serrés. A tous égards, cette forme est bien, plus voisine du Ch. uttinge-" rianus. Aussi peut-on se ranger à l’avis de MM. Sacco et Vinassa de Regny, qui considèrent le serresianus comme descendant de l’uttingerianus par l'apparition d’une digitation supplémentaire : passage facile à comprendre, car on trouve fréquemment dans les Chenopus des formes monstrueuses à digitation surnuméraire (exemple : C. deciscens Philippi). D'ailleurs, notre espèce com- mence précisément à devenir abondante au moment où le C. uttin- gerianus disparaît, c'est-à-dire au Sicilien. Comme l’uftingerianus, c'est une forme profonde. Elle ne paraît pas exister dans le Pliocène ancien du Piémont et de la Ligurie. M. Sacco signale seulement dans ces régions l’exis- tence de formes de passage (var. pliofransiens Sacco), où il voit avec raison, un indice de transformation de l’uftingerianus en serre- sianus. Elle commence à se rencontrer, mais reste encore rare, dans le Modenais, où elle est représentée par une forme de petite taille, 1 M. Cerulli-Irelli ([32], p. 324) vient de la signaler dans le Calabrien du Monte Mario; il en donne une excellente figuration. CHEÉNOPIDÉS 543 à paume large et mince, analogue à celle que nous allons rencontrer dans le Plaisancien de l'Zfalie du Sud. Ici, en effet, dans les marnes blanches du Marchesato et de la province de Reggio, Seguenza et Philippi avaient déjà signalé l'abondance de ce C. serresianus. Dans les dépôts siciliens à facies suffisamment profond (Ficarazzi, Gallipoli) cette espèce devient abondante, et remplace complètement le C. uttingerianus qui a disparu. M. di Monterosalo, au contraire, rapporte la forme de Ficarazzt au Ch. Macandrewæ Jeffreys, espèce vivante actuellement dans les mers du Nord de l'Europe, et qu'il croit différente de la forme méditerranéenne, pour laquelle il réserve le nom de Ch. serresianus. L'interprétation de l'espèce de Jeffreys varie d'ailleurs beaucoup avec les auteurs : Aradas et Benoît [5], après avoir remarqué que Jeffreys lui-même avait rapporté ensuite son espèce au Ch. serresianus, la considèrent, avec Weinkauff, comme une variété du Ch. pespelecant ; M. di Monterosato lui-même (Note Conch. rade de Civilavecchia, p. 17, 1877) avait antérieurement insisté sur l'identité des deux formes 1. Quoi qu'il en soit, j'ai pu constater moi-même que la forme que l'on rencontre à Ficarazzi concorde absolument avec les excellentes figurations de l'espèce méditerranéenne vivante données par B. D. D. [237] (c'est tout au plus si on peut remarquér que, dans les fossiles, la paume est un peu plus large). Aussi; je ne puis considérer, avec M. di Monterosato, la coquille de Ficarazzi comme une espèce émigrée du Nord: c’est, au con- traite, une forme autochtone et qui, depuis, a continué à vivre dans la Méditerranée. Son absence dans le Quaternaire récent (couches à Strom- bes) n’est qu'apparente, et tient à ce que nous ne connaissons pas pour ces niveaux des facies assez profonds. Car on ne la rencontre guère mainte- nant au-dessus de 100 brasses de profondeur (Weinkauff [233|, t. Il, p. 153). Marion [169] l’a pourtant trouvée dans le golfe de Marseille à 6o mètres : cela explique sa présence à Ficarazzi. L'histoire de ce groupe nous montre donc, en résumé, un excel- lent exemple d'évolution sur place accomplie depuis le Pliocène infé- rieur, Et, comme nous avons déjà eu l'occasion de le voir dans d’autres groupes, cette évolution semble avoir commencé plus tôt dans 1 Je dois, d’ailleurs, faire remarquer que les échantillons que M. di Monterosato m'a obligeamment envoyés sous le nom de Ch. Macandrewæ, sont différents du Ch. Macandrewæ tel qu'il a été compris par M. Dautzenberg {Mém. Soc. Zoo. de France, t. IV, 189r, p. 616, pl. XVI, fig. 13). 544 GASTROPODES l'Italie du Sud, être partie, en quelque sorte, de cette région cen- trale de la Méditerranée, plus soumise à l'influence des courants atlantiques. CÉRITHIDÉS Le seul groupe important dans cette famille est celui du Geri- thium vulgatum L. (sous-genre Ptychocerithium in Cossmann). Ces coquilles sont, en effet, extrêmement abondantes dans toutes Les faunes que nous étudions ici. Leur polymorphisme est immense, et il est souvent rare, dans une même récolte, de pouvoir trouver deux individus tout à fait identiques. Aussi, dans chaque nouveau travail de malacologie descriptive relatif à ce groupe, on trouve instituées des espèces ou variétés nouvelles : celles-ci résultent, bien entendu, non pas de découvertes nou- velles, puisqu'il s'agit presque toujours de formes communes, mais le plus souvent de simples différences d'interprétation entre les divers auteurs, Il me serait impossible et inutile d'entreprendre ici un tel travail des- criptif; je me contenterai de renvoyer, outre aux ouvrages généraux de Malacologie, à quelques études spéciales publiées sur ce groupe : tels sont par exemple les travaux de Locard{, de M. di Monterosato?, de M. de Gregorio?, et enfin une note de M. Créma [56] où sont décrites et figu- rées plusieurs formes intéressant nos faunes récentes. La lecture de ces travaux laisse d’ailleurs l'impression d’une confusion inextricable, et il est extrêmement difficile d’en tirer des conclusions utilisables en stratigraphie. Après l'étude des figures et des descriptions des auteurs, et surtout des matériaux abondants que j’ai pu récolter moi- même dans les divers gisements pliocènes supérieurs et quaternaires, je suis arrivé à me représenter de la façon suivante l’histoire du groupe. J'y distinguerai d'abord une première forme, le Gerithium vulgatum L. fype, avec d'innombrables variétés ; je n’insiste pas sur .sa description : on la trouvera très bien figurée, par exemple, dans l'ouvrage de B. D. D. ([237/, pl. 22, fig. 1, 2 (type), et fig. 3, 5, 6, 7, var.). Par rapport aux formes que nous décrirons plusloin, ce C'.vulgatum est caractérisé surtout par son ornementation épineuse, 1 Les Cerithium et les Cérithidés des mers d'Europe (Annales de la Societé d'Agri- culture. Histoire naturelle, ele. de Lyon, 1902). 2 Nota su talunt generi della famiglia di Cerithidae, Palermo, 1910. 3 Quarta nota su talune conchiglie mediterranee viventi e fossili (Naturalista sici liano, anno XX, Palermo, 1908. — Quinta nota, etc.; tbid:, anno XXI, r910, etc.). | | | | | | | CÉRITHIDÉS 545 ses tours plus ou moins convexes, sa forme relativement courte et trapue, avec une spire s’élargissant rapidement, et des derniers tours dilatés. Ces caractères n'ont rien d’absolu, et ils sont sujets à s’atténuer tous plus ou moins. Néanmoins, ils s'appliquent, dans l'ensemble, assez bien, à la moyenne des individus que l’on peut récolter en abondance sur les plages actuelles ou dans les gisements littoraux des couches à Strombes (Algérie, Tarente, Nice). Une deuxième forme importante sera, pour nous, le Gerithium varicosum Br.; elle occupe, dans la série que nous étudions, l’extrémité opposée à celle du C. vulqatum : elle s’en distingue, en effet, par sa taille plus forte, ses tours plus plats, avec des sutures superficielles, ce qui rend le profil de la coquille presque régulièrement rectiligne ; les sillons décurrents sont bien marqués, et la sculpture transverse, d’abord composée de plis à tubercules émoussés, s atténue de plus en plus vers les derniers tours, de sorte que ceux-ci sont à peu près lisses, montrant seulement quelques varices ; en même temps, la coquille est souvent plus régulière- ment allongée, les derniers tours peu dilatés, à peine distincts des autres. On trouve d’ailleurs tous les intermédiaires entre ces deux types extré- mes ; à de telles formes de passage j'appliquerai le nom de Cerithium vul- gatum var. alucastra Brocchi sp., mais on pourrait tout aussi bien les appeler C. varicosum var. {ransiens Sacco; leurs caractères sont intermé- diaires entre ceux des deux espèces précédemment décrites : l’ornemen- tation se compose de stries longitudinales bien marquées et de côtes transverses pourvues de tubercules mousses : l'ornementation transversale s'atténue d’ailleurs de plus en plus vers les derniers tours, sans disparaître aussi complètement que dans le C. varicosum typique. Cette var. alucas- tra a été très bien figurée à l'état vivant par B. D. D. [237] ; quant à la var. {ransiens de M.Sacco |13|, elle. représente une forme plus voisine du varicosum. Enfin, 1l nous reste à décrire une dernière espèce bien caracté- risée : c'est le Cerithium crenatum Br., dont le type est fossile dans le Pliocène italien. Bien que relié par de nombreux passages au groupe vulgatum-varicosum, ce C, crenatum, sous sa forme typi- que, constitue une espèce bien caractérisée, qui n’a plus de repré- sentants dans la faune méditerranéenne actuelle ; on la trouvera, par exemple, bien figurée dans Sacco [13]. Univ, De Lyon, — Gicenoux, 35 216" GASTROPODES Ayant constaté la fréquence de ces formes de passage, beaucoup d'auteurs ont proposé, par exemple, de réunir en une seule € espèce les C. vulgatum et varicosum. Cette dernière espèce est cependant, sous sa forme typique, des plus faciles à reconnaître, et surtout c'est l'étude de sa répartition stratigraphique, qui va nous conduire à lui attribuer une existence phylétique indépendante. Examinons, en effet, quels sont les caractères d'ensemble offerts par les faunes successives de Cérithidés. Au Pliocène ancien, la forme dominante du groupe est déjà le C, vulgatum et spécialement les variétés alucastra et voisines ; les formes très épineuses sont rares et, en outre, comme l'a fait remar- quer M. Sacco, les coquilles n’atteignent pas la taille des grands vulgatum actuels. On les voit passer au varicosum, dont le type provient précisément du Pliocène et se montre abondant dans tous les gisements classiques. En même temps, d’autres individus de cette série vulqalum-varicosum accusent des tendances vers le C. crenatum Br., dont le type reste néanmoins plus isolé. Les mêmes caractères subsistent, à peu de choses près, dans les faunes du Pliocène supérieur ; peut-être le vulgatum y est-il un peu plus fréquent et plus voisin de la forme actuelle, Mais surtout on y retrouve encore le varicosum et le crenatum. Cette dernière espèce a été citée, en effet, par Crema (|237], p. 25) dans les dépôts cala- briens du bassin du Crati (Castrovillari); quant au C.varicosum, je l'ai moi-même récolté dans le Calabrien des collines livournaises (Valle- biaja) et de la Sicile du Sud (Girgenti!) ; 1l y est associé à la Cyprina islandica : l'espèce possède ici tous ses caractères typiques et acquiert une très grande taille; elle nous apparaît comme une fin de série. En effet, dans les faunes quaternaires, ces deux espèces, essen- tiellement pliocènes, ont disparu, et les Cérithes qu'on y trouve peuvent facilement rentrer dans le cadre des multiples variations du vulqatum. Aussi je ne crois pas qu'il faille attribuer une grande importance aux 1 M. Cerulli-frelli ((32], p. 328) vient également de signaler le C. varicosum dans le Calabrien du Monte Mario; cette espèce y est représentée, comme dans les autres gisements Calabriens, par des formes de très grande taille marquant ainsi la ten- dance au gigantisme au moment de l'extinction de ce rameau. — Le même auteur signale aussi au Monte Mario le C. crenato-coronatum Sacco, qui n’est guère qu'une variété de C, crenatum. per CÉRITHIDES 547 quelques formes qu'on y a considérées comme éteintes : la plus remar- quable d’entre elles est le C. di Blasu Monterosato, fort bien décrit et figuré par Crema ([56|, p. 24, table IV, fig. 6-7) et dont le type provient du Sicilien du Monte Pellegrino. C'est une forme remarquable par ses tours très aplalis et son ornementation atténuée : elle rentre évidemment dans les types de passage entre vulgalum et varicosum, mais reste très éloignée de cette dernière espèce; ce n’est pas, certainement, une véri- table espèce éteinte. Ainsi le fait dominant, au point de vue stratigraphique, dans l’histoire du groupe, est la persistance jusqu’à la fin du Pliocène des deux formes éfeintes, crenatum et varicosum; cette dernière, en particulier, est très éloignée de toutes nos formes méditerra- néennes actuelles ; elle est donc une des plus typiques parmi les espèces disparues caractéristiques du Calabrien. La considération du développement ontogénique de ces diverses formes confirme d’ailleurs la probabilité des phylums que nous y avons admis. Dans le groupe vulqatum-varicosum en particulier, les stades jeunes sont à peu près identiques partout et rappellent les formes moyennes telles que la var. alucas{ra. Puis, en s’éloignant du sommet de la coquille, on voit apparaître peu à peu les différenciations qui conduisent aux deux types extrêmes ; si l’'ornementation devient de plus en plus épineuse, on arrive au vulqatum et à ses variétés spinosæ; si, au contraire, elle s'atténue, en même temps que les tours s'aplatissent, on aboutit au varicosum. Cette seule constatation suffirait à nous prouver que l’on ne saurait, comme on serait tenté de le faire au premier abord, considérer la forme pliocène varicosum comme ancêtre de la forme actuelle vulgatum ; c'est l'inverse qui est vrai, bien au contraire. Cela nous montre une fois de plus combien il faut se défier des rameaux phylétiques unilinéaires hâtivement construits, auxquels on doit substituer le plus souvent des phylums parallèles avec ramifications latérales. Il semble d’ailleurs que les facies ont dû jouer un rôle dans ces diffé- renciations. Car les formes épineuses du type vulgalum, lant fossiles que vivantes, apparaissent plutôt littorales; les types varicosum et alucastra semblent plus particuliers aux dépôts vaseuxæ un peu profonds : ainsi, au Pliocène ancien, le C. varicosum est spécialement abondant dans les argiles à facies plaisancien de Castellarquato, du Modenais, du Bolo- gnais, tandis que les formes des sables d’Asti se rapprochent du type vulgatum ; dans le Pliocène supérieur, les couches à C. varicosum de Vallebiaja et de Girgenti correspondent à des facies beaucoup moins D48 GASTROPODÉS grossiers que les graviers à C. vulgatum du Calabrien de Calabre. Enfin dans le Quaternaire, la forme alucastra et les var. voisines se trouvent surtout dans les facies relativement profonds du Sicilien de Palerme et des couches à Strombes de Ravagnese, tandis que les centaines de Céri- À thes que l’on peut récolter à Tarente ont l’ornementation très épineuse du vulgatum typique ; le même fait est signalé par les malacologistes dans la faune actuelle. TRICHOTROPIDIDÉS Les Trichotropis sont des coquilles essentiellement boréales ; leur centre de développement a toujours été dans les mers arctiques, d’où elles se sont avancées plus ou moins loin sur les côtes de l’Europe ou de l’Amérique du Nord; actuellement, tandis que le T. borealis, qui nous intéresse seul ici, reste exclusivement boréal, le genre Trichotropis paraît s'étendre assez loin vers le Sud, puisque Locard ([160], t. I, p.467) a signalé un T. densistriata Jeffreys aux îles du Cap-Vert. Aussi est-il extrêmement intéressant de noter la présence du Trichotropis borealis Broderip et Sowerby, dans le gisement sici- lien de Ficarazzi, près Palerme. Cette espèce y a été récoltée par Brugnone, et citée par M. di Montero- sato dans ses premiers travauxsur les Mollusques fossiles du Sicilien de Palerme [1:15, 116], elle est devenue ainsi classique, surtout depuis que M. Suess a compris le Z'richotropis borealis dans la liste des « émigrés du Nord » caractéristiques de son quatrième étage méditerraréen. M. di Monterosato ne l'avait point citée dans sa dernière liste des coquilles éleintes et émigrées du Monte Pellegrino et de Ficarazzi [114]; mais, sur ma demande, il a eu l'obligeance de me communiquer l'échantillon ré- colté autrefois par l’abbé Brugnone et faisant partie maintenant de sa propre collection. C'est ce spécimen, unique jusqu’à présent, que j'ai figuré ici. C'est là, peut-être, la plus typique de ces coquilles septen- trionales qui caractérisent le Sicilien ; c'est certainement la plus nettement « boréale » de toutes, et son apparition dans la Méditer- ranée coïncide précisément avec l’époque où l'influence des « cou- rants froids » paraît avoir atteint son maximum, TT TURRITELLIDÉS 549 TURRITELLIDÉS De tous les Gastropodes méditerranéens, les Turritelles sont certaine- ment parmi les plus abondants, sur les fonds vaseux, tant au Pliocène qu'à l'époque. actuelle. Les travaux de MM. Sacco, di Monterosato, Crema, de Franchis, etc., ont déjà apporté à leur histoire des contribu- tions fort intéressantes. Naturellement, je m'étendrai surtout sur les formes les plus communes, car, en dehors deleur importance pratique plus grande, on peut se faire une idée plus exacte de leurs variations. Genre Turritella. Je mentionnerai d'abord, d'après M. Sacco, quelques groupes s'éteignant avec le Pliocène ancien : ils contribuent à accentuer la coupure paléontologique entre le Pliocène ancien et le Calabrien, mais comme ils ne pénètrent pas dans les faunes que nous étudions, ils ne nous intéressent pas directement. Tel est le cas pour le sous-genre Archimediella Sacco, essentiellement miocène, mais quiest encore représenté dans le Pliocène ancien par quel- ques variétés de la T. Archimedis Brongn., et par la T. bicarinata Eichwald (Castellarquato, Toscane). De même, les T. varicosa Br. et T. dicosmema Fontannes, grandes coquilles richement ornées, mar- quent l'extinction dans nos mers du sous-genre Torculoidella Sacco. Enfin, dans le sous-venre Aaustator Montfort, les T. biplicata Bronn et T. marginalis Br. correspondent aussi à deux rameaux qui s'éteignent avec le Pliocène ancien, Les trois phylums qui nous restent maintenant à étudier, et qui sont d’ailleurs de beaucoup les plus abondamment représentés dans le Pliocène, sont : 1° le groupe de la T. (Zaria) subangulata Br.: 2° le groupe de la T. fricarinata Br.: 4 le groupe de la T. (Haus- tator) triplicata Br. 1° Groupe de la T.{Zaria) subangulata Br. Ce groupe est caractérisé par ses tours plus ou moins nettement carénés, ornés de cordons décurrents très fins et réguliers (plus ou moins développés, suivant les variétés), avec un cordon (rarement deux très voisins, var. ditropis Font.) plus saillant sur la carène, #50 GASTROPODES de sorte que le profil des tours est formé de deux lignes droites se coupant sous un angle obtus et plus ou moins émoussé. Cette espèce est très fréquente dans les marnes miocènes et surtout pliocènes : elle est extrêmement abondante à Castellarquato, plus rare dans l’Astien de l’Astésan, très commune dans les marnes bleues de la Ligurie, des Alpes-Maritimes, de la Vallée du Rhône, de l'Algérie, ete. Dans l'Italie du Sud, elle est extrêmement fréquente dans les marnes plaisanciennes du Marchesato, etc. Cette T. subangulata semble avoir quelque peu dépassé la limite supérieure du Pliocène récent, et pénétré dans les faunes calabriennes inférieures. Seguenza la cite à Santa Cristina d'Aspromonte dans un gisement qu'il rattache à l’Astien, mais qu’il vaut mieux, confor- mément à l'avis de M. de Stefani, considérer comme du « Postplio- cène » tout à fait inférieur. De même, divers auteurs (Lovisato, de Stefani, etc.) citent cette espèce dans le Détroit de Catanzaro, associée à des faunes nettement « postpliocènes ». Elle est signalée en outre dans le Calabrien de Galatina (de Franchis), de Caltanis- setta (Brugnone) et de Lampedusa (Nelli[179]); M. de Stefani [92] la signale dans diverses localités des environs de Livourne, maïs il est plus probable qu'il s’agit là de Pliocène ancien. En tout cas, nous sommes conduit à admettre la persistance de la vraie T. subangu- lata jusque dans le Calabrien !. Par contre, dès le Sicilien elle a disparu et il est bien certain qu'à l’époque actuelle elle n’habite plus la Méditerranée, tout au moins sous sa forme typique. On rencontre, en effet, dans le golfe de Gabès, une petite Turritelle, découverte et décrite par M. di Monterosato sous le nom de T. deci- piens Mts. (très bien figurée par B. D. D., [237], t. I, pl. XXVIII, fig. 12-15), et qui, par sa forme générale et le profil de ses tours, présente quelque analogie avec certaines formes jeunes de T. subangulata?. Mais en tout cas les deux espèces sont nettement distinctes : la grande coquille pliocène est certainement éteinte, et même en admettant que la 1 M. Cerulli-Irelli ([32], p. 345) vient dela signaler au Monte Mario en compagnie d’une autre espèce bien caractérisée et très curieuse, la T. unicarinata Cerulli-Irelli; à affinités pliocènes. 2 Weinkauff déclare (Supplemento alle Conchiglie del Mediter. : Boll. d. Soc, Malacol. Ilal., 1870), d'après Benoît, que la 1’. subangulata vit encore dans le golfe de Tunis; c'est très probablement l'espèce de M. di Monterosato qui a donné naïis- sance à cette opinion. EE —————"——————————— brie TURRITELLIDÉS 551 T. decipiens appartienne bien au même groupe, il faudrait y voir une forme ancestrale ayant survécu pendant que s'éteignait le rameau latéral si développé au Pliocène ancien ; c'est là une manière de voir qui se vérifie fréquemment, 2° Groupe delaT. tricarinata Br. Les formes de ce groupe sont caractérisées par leurs tours convexes et leurs sutures assez profondes. La Turritella communis Risso, qui le représente actuellement dans la Méditerranée, vit par milliers sur les fonds vaseux à des profondeurs de 10 à 200 mètres. Dans le Pliocène ancien, ce groupe est bien développé dans tous les gisements classiques, mais l'espèce qui le représente est très géné- ralement citée sous le nom de T. tricarinata Br!. La distinction de ces deux formes est d’alleurs diversement appréciée par les auteurs. M. Sacco conclut à l'impossibilité d’une coupure spécifique, et je crois que l’on ne peut moins faire que de partager son opinion, pour peu que l’on ait eu l'occasion d'étudier des matériaux un peu abondants. Et cette opinion se trouve justifiée, en quelque sorte, aussi par des considérations stratigraphiques : car on trouve déjà dans le Pliocène des T. communis typiques, de même que certains individus vivants ne peuvent être distingués de la T. éricari- nata typique. Néanmoins, dans l'ensemble, et en faisant intervenir de nombreux échantillons, les diverses faunes, pliocène ancienne, cala- brienne, quaternaire et actuelle, présentent chacune des caractères particuliers, 1° Dans le Pliocène ancien domine la forme qu'on peut appeler T. tri- carinata Br. (ype : elle est caractérisée par ses trois cordons décur- rents bien saillants ; sur les derniers tours apparaissent souvent d'autres cordons intermédiaires, mais ils restent toujours très petits et ne masquent jamais la prédominance des trois premiers; enfin la taille reste toujours notablement plus faible que dans l'espèce actuelle ?; tout en étant partout abondamment représenté, notre groupe ne paraît pas encore acquérir, dans le Pliocène ancien, le développement vraiment exubérant que nous allons lui voir prendre dans les formations plus récentes, ! Je laisse de côté ici la T. aspera Sismonda, qui paraît étroitement reliée à ce groupe, mais demeure absolument spéciale au Pliocène ancien (Italie, Vallée du Rhône, Roussillon) : c'est donc un rameau latéral éteint. > C'est ce que remarque M. Sacco, qui, néanmoins, rattache la plupart de ces formes pliocènes à la var, communis. : 552 GASTROPODES 2° En effet, dans le Calabrien et dans le Sucilien profond, le facies de sables argileux à Turritelles prend une importance extraordinaire, et ces coquilles, qu’on peut y récolter par centaines, manifestent une grande variabilité. Mais à côté d'individus pareils à la 7°. (ricarinala type, et d’autres semblables à la 7. communis que nous caractériserons tout à l'heure, la forme dominante est une coquille de taille relativement grande, à tours bien arrondis et bien convexes, portant encore trois cordons principaux bien nets, mais avec des cordons intermédiaires bien dévelop- pés : elle a été distinguée par M. di Monterosato sous le nom de T. plio- recens Mts. et excellemment décrite et figurée par MM. Scalia ([204|, p. 20) et Crema (|56}, p. 18, pl. IT, fig. 10-12). Bien entendu, c’est tout au plus une variété de la T°. fricarinata. A 3° Enfin, dans la Méditerranée actuelle, le groupe est tout aussi abondamment représenté par la T. communis fype!, ou plus exacte- ment, pour adopter la nomenclature de M. Sacco, par la 7°. tricarinata Br. var. communis Risso sp. Ici la coquille est très allongée et svelte, les tours moins convexes que dans les formes précédentes; et surtout, à partir du sixième tour environ, les trois cordons principaux cessent d’être reconnaissables, égalés qu’ils sont par les cordons intermédiaires qui couvrent toute la surface de la coquille d’un réseau serré et ré- gulier. Mais en somme, ce sont là des variations insignifiantes, qui n'ap- paraissent que si l’on peut étudier un grand nombre d'échantillons. Leur intérêt stratigraphique est donc très minime. Cela nous montre une fois de plus combien il est délicat d'utiliser dans la classification stratigraphique les faits d'évolution sur place, et combien au contraire les faits de migration, apparitions ou disparitions brusques, fournis- sent à ce point de vue des points de repère plus précis. Nous noterons aussi en passant l’augmentalion progressive de la taille que nous a montrée l’évolution de ce phylum. | Enfin il est intéressant aussi de constater la similitude des slades jeunes chez toutes ces formes : le type primitif est la fricarinata à trois cordons seuls existants : réalisé à l'état adulte dans la T. fricarinata, ce type passe à l'état de stade jeune dans la 7”. pliorecens ; enfin ce stade pliore- cens est lui-même dépassé dans la 7°. communis. 1 Dans l'Atlantique, on rencontre une forme un peu différente, désignée par M. di Monterosato {Conch. prof. Palermo, 1890, p. 9) sous le nom de TZ. Britannica Mts.; on en trouvera une figure bien typique, sous le nom de 7. communis, dans Forbes et Hanley (pl. LXXXIX, fig. 1-3); elle est surtout reconnaissable à ses tours aplatis et à ses sutures peu profondes, TP TURRITELLIDÉS 558 9° Groupe dela T.(Haustator) triplicata Br. Ce groupeest caractérisé, par rapport aux précédents, par ses tours très aplatis, ses sutures par conséquent peu profondes, et enfin par ses cordons décurrents plus gros et plus irréguliers. Outre la T, fri- plicata, connue fossile et vivante, ce groupe comprend encore de belles coquilles essentiellement pliocènes, les T. vermicularis Br. et T. tornata Br.. Des formes de passage existent entre toutes ces espèces, tellement que B. D. D. ([237], t. I, p. 227) ont proposé de n'y voir que des variétés de la T!. triplicata. Nous allons étudier en détail la répartition de ces diverses formes. J, — La T. triplicata Br. existe depuis le Pliocène ancien et vit encore actuellement. Mais, tant à l’état fossile qu à l’état vivant, elle est relativement peu fréquente (surtout en regard de l’abon- dance du groupe précédent). C’est une coquille toujours de petite taille, si on la compare aux 7. vermicularis et fornata: mais son polymorphisme est très grand, en ce qui, concerne le nombre et l'importance relative des cordons décurrents. Aussi les auteurs y ont-ils distingué, tant à l’état vivant qu’à l’état fossile, une foule de petites espèces qui ne sont en réalité que des variétés. Je signalerai seulement la T. breviata Brugnone — 7°. mediterranea Mits., très bien décrite et figurée par M. Crema ([56|, p. 18 et pl. II, fig. 13, 14), la T. breviata Brugn. var. abystronica Crema ([56|, pl. IT, fig. 15, 16), les T. tricarinata Br. var. duplicata Phil. et var. obsoleta B. D. D. ([237], t. I, pl. XXVITI, fig. 5), enfin la T. triplo- cincta Mts. in coll., toutes formes qui me paraissent extrèmement voi- sines. Il en est de même des formes désignées par de Franchis [70] sous les noms de T. incrassata Sow. et de T. Sandrii de Franchis. Un peu plus à part sont les formes de grande taille et à tours plus con- vexes appelées T. turbona Mts. et T. Monterosatoi Kobelt — (d’après Locard) 7’. triplicata var. turbona in B. D. D. ([237|, €. 1, pl. XXVIH, fig. 3); ces dernières accusent même une légère tendance vers la 7°. ver- micularis, tendance encore plus accentuée dans la T. lyciensis de Franchis 70]. Mais l'étude de mes matériaux, provenant des diverses zones du Pliocène et du Quaternaire, m'a montré la multiplicité des formes 554 GASTROPODES de HeSSE entre tous ces types; et m'a convaincu qu'ils ne peuvent servir à caractériser les niveaux. Je me contenterai donc de noter la persistance dans la Méditer- ranée, depuis le Miocène jusqu'à l’époque actuelle, de cette T. sripli- cata!, extrêmement polymorphe?, et dont les deux formes extrêmes paraissent être la T. breviata et la T, Monterosatoi, IT. — Les T. vermicularisBr. et tornata Br. sont deux espèces bien caractérisées (voir les figures et descriptions excellentes de M. Sacco), des plus abondantes dans tous les gisements pliocènes classiques. Leur grande taille suffit à les distinguer de la T. friplicata, mais à l’état jeune elles se montrent très semblables à cette dernière espèce: toutefois la distinction spécifique se justifie au double point de vue morphologique et stratigraphique: ainsi dans les formes typiques de vermicularis-tornata, la coquille est couverte de stries décurrentes très fines et régulières, qui s'étendent, sans s'atténuer, même sur les cordons, ce qui n'arrive pas dans les T'. friplicata. De plus, ces deux espèces restent limitées au Pliocène s. l., et l'histoire de leur répar- tition stratigraphique est des plus intéressantes à retracer. Ainsi, dès le Pliocène ancien, on rencontre partout en abondance les T. vermicularis et tornata; la première de ces espèces est plus spé- cialementfréquente dans les facies sableux un peulittoraux (Astien de l'Astésan et d'Altavilla, parexemple); la seconde semble au contraire plus répandue dans les sédiments plus fins (argiles plaisanciennes), Entre les deux on rencontre d'ailleurs toutes les formes de passage : telles sont les T. vermicularis var. Brocchii Bronn et var. pro- toides Mayer. On peut ainsi reconstituer, comme le dit fort bien M. Sacco, une série continue qui, partant de la T. vermicularis, caractérisée par ses tours convexes, ses sutures assez profondes, ses trois cordons écartés, arrive à la T. fornata, forme de grande taille 1 J'ai employé ici le nom de Brocchi, comme l'ont fait la plupart des malacolo- gistes, dans un sens très large, en y comprenant l'espèce vivante avec toutes ses variétés. M. Cerulli-Irelli vient de faire remarquer, en effet, que la forme vivante la plus commune ne répondait pas au type figuré par Brocchi sous le nom de T. éri- plicala : il propose donc la dénomination : 7. biplicata Brn. = T. triplicata auct. non Br. 2 Voir aussi à ce sujet Nelli ([r79], p. 833). # Dans la Vallée du Rhône et le Roussillon, la T. vermicularis donne lieu à Ai erses autres variétés assez aberrantes, groupées par Fontannes autour de sa T. rhodanica. : RE PEN 4 lo TURRITELLIDÉS 555 à tours tout à fait plats, à sutures superficielles, avec des cordons décurrents nombreux et contigus. Il esttrès important pour nous de constater que ces formes se conti- nuent dans le Pliocène supérieur. Dans le Calabrien inférieur, nous retrouvons en effet la T'. vermicularis et sa var. Brocchii à Vallebiaja (collections de l'Université de Lyon, citations de divers auteurs); au Monte Mario, cette dernière forme est accompagnée de la T. tornata bien typique (id.) ; la T. vermicularis a été citée d’une foule de gise- ments postpliocènes de l'Italie du Sud (détroit de Catanzaro) et de la Sicile (versant Ouest des Monts Péloritains) où je l’ai moi-même récoltée à Girgenti. La dernière trace de l'existence des formes de ce groupe paraît fournie par le gisement de Porto Empedocle, correspondant au sommet des couches calabriennes de la région de Girgenti. Car dans le Sicilien, et à plus forte raison dans le Quaternaire plus récent, ces T. vermicularis et {ornata ont définitivement dis- paru. En résumé, et pour reprendre tous les faits que nous a fournis le groupe de la T. triplicata, nous voyons persister jusqu'à l’époque actuelle, cette petite espèce polymorphe et peu différenciée, à carac- - tères ancestraux ; au contraire, le rameau latéral constitué par les T. vermicularis et {ornata vient s'éteindre, par des formes de grande taille !, avant le début du Quaternaire : il accentue la haison intime des faunes pliocène ancienne et calabrienne, Quaternaire et var. var. actuel . ... breviata T.triplicata lurbona var, Calabrien . .. | T.vermicularis Brocchit T.tornata var. var. var. Pliocène anc.. breviata—T.triplicala—tlurbona T.vermicularis—Brocchii—T.tornala Genre Mesalia. Ce genre est jusqu’à présent inconnu dans le Pliocène et dans le Qua- 1 M. Cerulli-Irelli ([32], p. 350) vient précisément d'insister sur le véritable gigan- tisme manifesté par ces T. {ornala dans le gisement calabrien du Monte Mario. 556 GASTROPODES ternaire méditerranéen. L'espèce qui vit actuellement dans la Méditer- ranée (M. brevialis Lmk., avec sa variété ou espèce voisine, M. sub- decussata Cantraine) peut donc être considérée comme une acquisition nouvelle et récente pour la faune méditerranéenne : elle résulte certaine- ment d'une immigralion atlantique, car on sait qu'actuellement le centre de développement de ces formes, et en particulier de la M. brevialis, se trouve sur les côtes Ouest d'Afrique, où elles sont abondantes. Dans la Méditerranée, au contraire, ces Mesalia sont toujours très rares et loca- lisées dans les parties de cette mer les plus soumises aux influences atlantiques : détroit de Gibraltar (Weinkauff [233], t. II, p. 322), côtes d'Algérie et du Maroc (Dautzenberg [59], p. 76). C’est donc un des peu fréquents exemples d’une coquille méditerra- néenne actuelle non autochtone. Genre Mathilda. Ces coquilles peu communes et difficiles à caractériser dans les faunes fossiles ne nous fournissent aucun renseignement spécialement intéres- sant : Je me contenterai de noter la persistance, jusque dans la Méditer- ranée actuelle, de la M. quadricarinata Br.! et de la M. elegantis- sima O.-G. Costa, et au contraire l'extinction, avec le Pliocène ancien, des M. granosa Borson et M. Brocchii Semper. CÆCIDÉS Dès le Pliocène ancien, on retrouve dans la Méditerranée les deux prin- cipales des espèces qui y vivent actuellement : Gæcum trachea Mts., et G. (Brochina) glabrum auct. non Mtg. — GC. auriculatum de Folin. Les quelques autres espèces actuelles récemment créées, et non citées à l'état fossile, telles que C. subannulatum de Folin, Parastrophia Folini B. D. D., etc..…., ont pu échapper trop facilement aux recherches dans les gisements à cause de leur fragilité et de leur petite taille. LITTORINIDÉS Par suite de leur habitat spécial (souvent au-dessus du niveau dela mer), les Littorinidés échappent le plus souvent à la fossilisation, surtout dans les formations un peu anciennes. Le genre Littorina est connu au Pliocène ancien par une seule ! M. di Monterosato ([117], p. 10, note 1) a précisé les légères différences qui existent entre le type fossile et le type vivant, pour lequel il propose le nom de M. Macandrewæ H. Adams(Eglisia); il constate, en particulier, un accroissement de la Laille dans la forme récente. SOLARIIDES 591 espèce, la L. (Melaraphe) ariesensis Font., qui semble bien différente des Littorines méditerranéennes actuelles. Fontannes la rapproche de la L. angulifera Lmk., répandue aujourd’hui sur les côtes africaines et américaines de l’Atlantique tropical (en particulier Sénégal, îles du Cap- Vert, Guinée). Par contre, les rares formes signalées (Seguenza) dans les formations plus récentes appartiennent aux espèces vivantes de la Méditerranée. Le genre Lacuna est également connu dans le Pliocène ancien el à l'état vivant, mais toujours peu fréquent : je n’ai pas de matériaux pour comparer les types fossiles et actuels. Dans l’ensemble, et vu la rareté de ces Littorinidés à l’état fossile, 1l ne semble impossible de pouvoir actuellement retracer leur histoire d'une façon tant soit peu précise. Tout au plus peut-on affirmer que les grandes et belles formes si communes aujourd’hui sur nos côtes atlanti- ques {L. rudis), n’ont jamais, à aucune époque, pénétré dans la Méditer- ranée! ; malgré l'invasion de formes atlantiques caractéristiques du « quatrième étage méditerranéen », cette mer a donc toujours gardé, à certains égards, son caractère de « mer intérieure ». FOSSARIDES Cette famille est représentée, dans la Méditerranée actuelle, par deux espèces correspondant probablement à deux rameaux phylétiques dis- tincts : l’une, le F. costatus Br.?, est connue dès le Pliocène ancien, d’où en provient le type ; l’autre, le F. ambiguus L., n'y a été citée à l’état fossile que dans les faunes récentes (Sicile, Philippi ; Rhodes, Fischer) : actuellement, d’ailleurs, elle se montre répandue dans l'Atlantique où elle descend jusqu'au Sénégal. Peut-être faut-il y voir une acquisition récente des faunes méditerranéennes, introduite par immigra- tion d’origine atlantique? ? SOLARIIDÉS Cette famille subit, dans la Méditerranée, un appauvrissement tres important à la fin du Pliocène ancien: à cette époque on assiste en effet | Et cela, probablement, à cause de l'absence de marées. Qu'il vaudrait mieux dénommer F., sulcosus Br.; cf. Dautzenberg [214], p. 47. # Les Collections du Laboraloire de Géologie de l'Université de Lyon possèdent de beaux exemplaires de Fossarus provenant du Calabrien des collines livournaises (Vallino del Merlo); ils ont le galbe du cosfatus,mais l’ornementation de l’ambiquus; néanmoins je ne crois pas qu'il faille y voir des formes intermédiaires : ce sont plutôt des costatus jeunes, 558. GASTROPODES à la disparition, dans notre mer, de nombreuses espèces, telles que Sola- rium (Philippia) formosum Jan, S. (Granosolarium) millegranum Emk., S. semisquamosum Bronn, S. pseudoperspectivum Br., etc. . Le Solarium (Philippia) hybridum L. — S. conulus Weinkauff, qui est actuellement un des plus abondants dans la Méditerranée, n’est pas connu fossile ; et il faut remonter jusqu’au Miocène pour lui trouver des formes ancestrales : S. subconoideum d'Orb. d’après Sacco. Peut- être est-ce une espèce immigrée récemment, car on la connaît aussi vivante dans l'Atlantique. Les autres espèces méditerranéennes paraissent autochtones. Les familles des Homalogyridés, Skénéidés, Jeffreysiidés, repré- sentées actuellement par des espèces pour la plupart inconnues à l’état fossile, ne nous intéresseront pas ici : ce sont des coquilles très petites et d'une détermination très difficile, qui ont pu facilement échapper aux recherches. RISSOIDÉS. Cette famille est en état d'évolution exubérante, tant dans les faunes pliocènes et récentes que dans nos mers actuelles. Il est vraiment impos- sible, non seulement d'y suivre des rameaux phylétiques, mais même d'y préciser des coupures spécifiques : des espèces nouvelles vivantes ou fossiles y sont constamment décrites. Aussi, d’une manière générale, jene crois pas que les quelques espèces citées comme émigrées ou éteintes dans les faunes que j'étudie, aient une importance stratigraphique quelconque. C'est donc seulement pour mémoire que je signale ici la Rissoia lila- cina Recluz, dont M. di Monterosato m'a obligeamment communiqué des exemplaires provenant du Sicilien de Palerme; il la considère comme émigrée ; sur ses indications, M. Crema ([56], p. 16) l’a retrouvée dans le Calabrien de la vallée du Crati. Ce dernier auteur signale aussi dans cette même localité une Rissoia puella Monterosato (loc. cit., pl. II, fig. 8), qu'il dit éteinte. Les familles des Hydrobiidés, Truncatellidés, n'offrent dans nos faunes aucune forme intéressante. CAPULIDÉS Genre Capulus, Ce genre est actuellement réduit dans la Méditerranée à une seule 1 Voir aussi le travail de L. Seguenza : Rissoidi neogenici della provincia di Messina (Palaeontografia italica, IX, 1908). + + & mari er cent tiidinéattimttienttatt Ye En - CAPULIDÉS 559 espèce, le Capulus hungaricus L., d’ailleurs autochtone et déjà abondante dans le Pliocène ancien. Au contraire, dans les faunes fossiles, on rencontre, à côté de ces Capulus s. st., d’autres espèces d’ailleurs très polymorphes, appar- tenant au sous-genre ou genre Brocchia : elles peuvent se grouper autour de deux formes principales : B. sinuosa Br. (Brocchia s.st.) et B. sulcosa Br. (sous-genre Amathinoides, Sacco). Les types de ces espèces proviennent du Pliocène ancien de l'Italie du Nord, où M. Sacco en a fait une soigneuse étude. Mais il est extrêmement important pour nous de noter que la Brocchia sinuosa Br. (avec des variétés ou petites espèces voisines! dont la distinction n'offre pas d'intérêt) se retrouve aussi dans les faunes plus récentes. Ainsi J'ai pu en étudier des exemplaires pro- venant du Calabrien du Monte Mario, de Monosterace, de Santa Maria di Catanzaro; Seguenza la cite dans son étage saharien infé- rieur des environs de Reggio (gisements probablement calabriens ?). Enfin elle est aussi représentée dans le Sicilien de Palerme, au Monte Pellegrino : S. Biondi y avait distingué là (cf. di Montero- sato [115]) comme espèces spéciales une foule de variétés, iden- tiques pour la plupart aux variétés pliocènes, et qu'on peut, avec M. Sacco, réunir toutes à la B. sinuosa. C'est donc là une des formes éleintes les plus caractéristiques du Calabrien et du Sicilien ; à ce titre je l'ai fait figurer ici. Tandis que le rameau de la B. sinuosa persistait ainsi dans la Méditerranée longtemps après la fin du Pliocène, celui de la B. sul- cosa parait, au contraire, avoir quitté notre mer dès la fin du Pho- cène ancien. Par contre, au lieu de s’éteindre, cette B. sulcosa vit encore sur les côtes occidentales d'Afrique, « asile » habituel de nos faunes méditerranéennes anciennes : cette intéressante découverte, toute récente, est due à M. Dautzenberg ([59], p. 83). Genre Crepidula, Les Crépidules ne nous donneront aucun renseignementintéressant. Car ! Décrites par S. Bionoi : Monografia del gen. Brocchia (Atti d. Accad. Gioenia di Sc. nat. in Catania, vol. XIX, 1864). ? B. Nelli ([179], p. 837) vient également de signaler une forme de ce groupe, la Brocchia lævis Bronn, dans le Calabrien de l'ile Lampedusa. 560 GASTROPODES la G. unguiformis Lmk. traverse toutes nos faunes, du Pliocène ancien à l'actuel, et la CG. Moulinsi Michaud, autre espèce actuelle, est extré- mement. voisine de certaines variétés de la G. gibbosa Defrance, dont le type est pliocène ancien ; d’autres formes de ce même groupe de la C. guhbosa paraissent au contraire spéciales au Pliocène ancien. Genre Calyptræa. Il ne comprend qu'une espèce, G. chinensis L., forme banale à tous les niveaux. Genre Addisonia. Ce sont de petites coquilles de grande profondeur, actuellement vivantes dans la Méditerranée : elles ne sont pas citées à l’état fossile, mais il serait néanmoins fort imprudent d’y voir des formes récemment immigrées, en raison de leur petitesse et de leur habitat très spécial, conditions qui suffisent à expliquer cette absence de citations. XÉNOPHORIDÉS Cette famille est en voie de disparition dans nos mers. C’est ainsi que, dans le Pliocène ancien, M. Sacco y a décrit une grande variété de formes spéciales à cet étage : telles sont les X. Deshayesi Miche- lotti, X. infundibulum Br., X. testigera Bronn, X. (Tugurium) plioitalica Sacco, et X. (rugurium) plioextensa sites À partir du Pliocone supérieur inclusivement, tous les échantil- lons que l’on rencontre peuvent être groupés en une seule grande espèce, la X, crispa Kônig. Les auteurs y ont distingué plusieurs petites espèces ou variétés !. Ainsi la forme pliocène ancienne serait la X. crispa des auteurs, ou plutôt la X. commutata Fisch.; dans le Calabrien et le Sicilien on ren- contrerait la X. trinacria Fischer, considérée par M. di Monterosato comme une espece éteinte ; enfin on devrait réserver à la forme médi- terranéenne vivante le nom de X. mediterranea Tiberi. D'après l’exa- men des figures des auteurs et d'individus fossiles de provenances diver- ses, je ne puis considérer ces distinctions spécifiques comme suffisamment motivées pour être utilisées en stratigraphie.. | 1 Voir surtout de Franchis ([70/, p. 184). NATICIDÉS o61 Je retiendrai donc seulement la décroissance progressive et fort nette du genre, qui paraît, en effet, presque éteint dans la Méditer- ranée!. La X. mediterranea semble y être presque localisée sur les côtes d'Algérie, car beaucoup des citations qu'on en a faites des côtes de Sicile doivent se rapporter à des individus fossiles remaniés par la mer (cf. Weinkauff {233}, t. IT, p. 341). A ce titre, l’abon- dance des Xénophores dans le Sicilien de Palerme donne à ces cou- ches un cachet archaïque. NATICIDÉS A quelques rares exceptions près, les Naticidés ne peuvent, pour le moment, être d’un grand secours en stratigraphie. Aussi, avant d'aborder l'étude des trois formes qui nous intéresseront plus spé- cialement, c'est-à-dire la ÂNafica Montacuti Forbes, la N. lactea Guilding, et la NV. Turfoni Smith, je me bornerai à quelques consi- dérations générales. Car les Natices jouent, en effet, un rôle numérique des plus importants dans les faunes pliocènes et récentes : c’est par centaines qu’on peut les récolter dans tous les gisements à facies argileux ou argilo-sableux. Mais leur détermination précise offre les plus grandes difficultés : l'abondance des matériaux etla constatation de formes de passage multiples rendent les coupures tout à fait incertaines. C'est surtout dans le sous-genre Naticina que ces difficultés s'aug- mentent encore. Aussi s’explique-t-on, quand on a pu manier des séries assez nombreuses d'échantillons, que M. Sacco ait cru devoir réunir presque toutes les formes pliocènes de ce sous-genre en une seule espèce, la Vatica catena da Costa, extrêmement polymorphe. Il est illusoire de vouloir déterminer ces coquilles d’une manière rigoureuse : on ne peut guère que rechercher les tendances dominantes de ce groupe en pleine évolution. On peut dire ainsi que ces faunes de Naticina pliocènes et récentes nous montrent, à partir d'un éype moyen, qui correspondrait à la N. sordida Philippi, non Swainson — N. fusca de Blainville, des modi- fications dans deux directions différentes : 1° la première, où les tours deviennent très embrassants, le galbe plus aigu, la callosité columellaire plus développée, conduit à la forme figurée par Philippi sous le nom de 1! Son centre de développement actuel s'est reporté sur les côtes Ouest d'Afrique, où la X. senegalensis Fischer, espèce du groupe crispa, est relativement abondante. Univ. pe Lyon. — Gicnoux. 30 CR dE md # 3 7 R " NÉE ne Lo Ta d LS 2 7 ME US A. PEN PÆd ce 562 GASTROPODES N. macilenta Phil. (M. Sacco adopte pour ces formes le nom de AN. hemiclausa Sow.) : c’est le cas surtout pour les faunes un peu profondes, tant à l'état vivant qu'à l’état fossile ; 2° la deuxième, dans laquelle les ô tours s'arrondissent et deviennent peu embrassants, avec dés sutures bien Æ marquées et une forme globuleuse, en même temps que la taille s'accroît : 5 on arrive ainsi à la grande N. catena typique, abondante actuellement, $ mais rarement réalisée à l’état fossile. Cela tient peut-être à ce que cette tendance est d’origine plus récente que l’autre, mais cela résulte aussi en partie de l'habitat plus strictement littoral de ces formes, qui seront par $ suite plus difficiles à rencontrer fossiles. Quant aux autres espèces bien caractérisées qui peuplent actuellement la Méditerranée, telles que la N. Dillwyni Payr., la N. (Nacca) mille- punctata L. (avec la forme voisine N. hebræa Martyn), la N. (Pay- raudeautia intricata Donov., la N.(Neverita) josephinia Risso, etc... elles ne paraissent pas avoir subi de transformations importantes depuis le début du Pliocène. Enfin le genre Sigaretus paraît être en forte régression dans la Méditerranée depuis le Pliocène ancien ; actuellement il est réduit à une seule espèce méditerranéenne, S. striatus de Serres —S. haliotordeus L., tandis qu'il comprenait au Pliocène ancien encore une autre espèce, S. concavus Lmk., actuellement réfugiée sur les côtes du Sénégal (Dautzenberg, [59], p. 91). Il ne nous reste plus maintenant qu'à étudier les trois espèces particulièrement importantes pour nous. Natica (Naticina) Montacuti Forbes!. Cette espèce se rencontre dans les faunes récentes de l'Italie, et elle y est considérée généralement comme une forme atlantique émigrée : nous allons étudier de plus près la question. | Tout d’abord il ne s’agit pas ici d’une espèce très facile à recon- naître. Elle est, néanmoins, assez bien caractérisée par sa petite taille, sa forme globuleuse, sa spire déprimée, ses tours bien arrondis, surtout, enfin, par l’aspect de la région ombilicale : l'ombilic reste, en effet, complètement ouvert, et le bord columellaire dessine en face de cette ouverture une petite sinuosité, simulant l'arrivée Voir les figures de Forbes, Malacol. monensis, 1838, p. 172, pl. IL, fig. 3-4. — Jeffreys, British Conchology, 1867-1869, IV, p. 227; V, p. 215, pl. LXXXVIII, fig. 6. — Tryon, Man. of Conch., part. XXIX, p. 39, pl. XIV, fig. 30. 90 bus NATICIDÉS 563 d’un funicule (voir les figures ci-après, où cette espèce est repré- sentée d'après des individus vivants et fossiles). En réalité, il n’est pas toujours facile, comme je l’ai constaté moi-même, de la dis- tinguer de certains échantillons de la N. fusca, qui a un habitat analogue, de sorte que les deux espèces se trouvent généralement associées dans les mêmes gisements: elles appartiennent évidemment au même groupe. Aussi est-il difficile d'être très affirmatif dans l'étude de sa répar- tition, car elle a très bien pu, dans certains cas, être confondue avec d’autres espèces. Pourtant on peut affirmer son absence dans les si riches faunes miocènes et pliocènes anciennes du Piémont et de la Ligurie ; car, bien que Seguenza ([207|, p. 12) eût indiqué sa pré- sence possible dans l’Astésan, M. Sacco, qui avait ainsi l'attention attirée spécialement sur ce point, déclare ne l'y avoir point ren- contrée. Par contre, sa présence dans le Pliocène ancien de l'Italie du Sud est confirmée par Seguenza, qui la cite dans son Astien à Riace et à Gallina (O.), où je l’ai moi-même retrouvée. Dans le Calabrien elle devient beaucoup plus fréquente : je l’ai récoltée à Monte Corvo, et Seguenza la signale à Monosterace, aux environs de Reggio et à Musalaà. Dans le Sicilien elle n’est point rare à Ficarazzi. Son absence dans les couches à Strombes peut n'être qu ‘apparente, car elle n’habite pas des facies aussi littoraux (elle ne remonte guère actuellement au-dessus de 6o mètres de profondeur). Enfin, aujourd’hui, son centre de développement est évidemment dans les mers du Nord, particulièrement au voisinage de l’Angle- terre d’où provient le type de l'espèce. Suivant Locard ([160], t. I, p. 472), sa répartition dans l'Atlantique s'étendrait de la Norvège au Portugal, et elle pénétrerait même dans la Méditerranée sur les côtes d'Espagne et d'Algérie. Pourtant beaucoup de malacologistes, et en particulier Seguenza et M. di Monterosato, la considèrent comme une espèce strictement atlantique, et lui donnent, dans les faunes méditerranéennes récentes, la signification d'un émigré du Nord. Son histoire est, en somme, très analogue à celle de plusieurs autres formes, telles que le Buccinum humphreysianum (voir plus haut, p. 501). Elle ne paraît pas autochtone dans la Méditerranée : elle commence à y pénétrer dès le Pliocène ancien, restant alors 564 GASTROPODES confinée dans l'Italie du Sud: elle y atteint son maximum de fré- quence au Calabrien et au Sicilien, et, à l'heure actuelle, elle y est, sinon tout à fait éteinte, au moins en voie de disparition. Je la rangerai donc parmi les formes à affinités septentrionales, sans que l’on puisse, en toute rigueur, la considérer comme une espèce « émigrée du Nord ». Natica (Mammilla) lactea Guilding. Cette coquille! appartient au sous-genre Mammilla représenté actuellement par deux groupes d'espèces, dont l’un habite l'Océan Indien, l’autre les côtes occidentales d’Afrique?. La N. lactea vient se ranger dans le second de ces groupes; car elle est actuellement confinée dans la zone littorale, sur les côtes du Sénégal et des îles Canaries (Dautzenberg, [59], p. 90). Elle paraït bien éteinte dans la Méditerranée, malgré les doutes exprimés à ce sujet par Jousseaume (voir plus loin). D'autre part, la N. lactea est absolument étrangère aux faunes méditerranéennes du Miocène et du Pliocène, qui ne ren- ferment même aucune espèce appartenant au sous-genre Mammilla. Le seul moment où elle ait pénétré dans la Méditerranée est l’époque des couches à Strombes ; aussi est-il particulièrement intéressant d'insister sur sa présence dans ces couches. J'ai, en effet, retrouvé cette N. lactea (et M. Dautzenberg a eu l’amabilité de vérifier quelques-unes de mes déterminations) dans les dépôts à Strombes de Tarente et de Ravagnese : d’ailleurs Seguenza l'avait déjà signalée ([207], p. 354) à Ravagnese et à Boveto, où il La dit abondante, sous le nom de N. porcellana d’Orb.. En étudiant les collections du Laboratoire de Géologie de l’Université de Lyon, je l’ai également retrouvée dans les couches à Strombes des environs de Nice (gisements du puits Risso et de la villa du Roi des Belges) ; elle y avait jusqu’à présent été méconnue et déterminée comme N. Guillemini Payr.. Enfin, en dehors de la région que je me suis proposé d'étudier ici, je signalerai également sa présence, 1 N. lactea Guilding (Transactions Linn. Soc., XVII, 1831, p. 29) —N. porcellana d’Orbigny (Mollusques des îles Canaries, p. 84, pl. VI, fig. 27,28). Voir les figures données ici. 2 J'ai retrouvé sur la plupart de mes échantillons fossiles le petit sillon transverse de la callosité du bord columellaire, que Jousseaume (voir plus loin) dit être carac- téristioue du groupe atlantique par opposition au groupe indien. NATICIDÉS 565 d’après Jousseaume !, dans le Quaternaire de l’isthme de Corinthe, où elle accompagne également le S{rombus bubonius. Cette coquille a pourtant été citée par Seguenza dans un gisement que je considère comme bien antérieur aux couches à Strombes, dans celui de Musalà, rapporté par moi au Calabrien. Ainsi, en acceptant la citation de Seguenza, la N. lactea serait apparue dans la Méditerranée dès le Calabrien, Mais il est juste de remarquer que Musalà est la seule localité où elle ait été signalée en dehors des couches à Strombes ; pour ma part, tandis que je puis confirmer les citations de Seguenza en ce qui concerne la localité de Ravagnese, je n’ai pu retrouver notre espèce dans mes récoltes faites à Musalà. Je ne puis donc que transcrire ici, sous toutes réserves, l'assertion de Seguenza, qui aurait besoin, à mon avis, d'une confirmation. Et je considérerai la N. lactea, jusqu’à nouvel ordre, commeune de ces formes subtropicalesimmigrées momentanément dans la Méditer- ranée en même temps que le Sfrombus bubonius et beaucoup d’autres coquilles ; elle sera donc pour nous un des fossiles les plus caracté- ristiques des couches à Strombes et les plus importants au point de vue pratique, en raison de son abondance relative dans ces couches. Natica Turtoni Smith: Ces considérations s'appliquent également à une autre forme fossile dans les couches à Strombes de Monastir que le général de Lamothe vient d'y signaler sous le nom de Natica Turtoni E.-A. Smith? ; cette espèce, vivant actuellement au Sénégal, à Sainte-Hélène et aux îles du Cap-Vert, n’a jamais été signalée ailleurs dans les faunes méditerranéennes et m'est inconnue :; elle doit donc être encore rangée parmi les formes caractéristiques de la faune à Strombes. Seguenza a signalé en outre, dans les gisements de Boveto, Ravagnese et Musalà, une autre espèce exotique, en ces termes : « Natica orientalis Gmel. — N. canrena Segu. non Lmk. La forma è proprio di questa specie, ma i colori presentano delle macchie diversamente disposte, che ricordano la N. fanel Adamson. Vive alle Indie. » Si cette 1! Bulletin de la Société Géologique de France, 3e série, t. XXI, p. 408. ? Figurée dans E.-A. Smith, Mar. Moll. of St-Helena (Proc. Zool. Soc. of London. 1890, p. 269, pl. XXI, fig. r4). 566 Va GASTROPODES citation devait être acceptée à la lettre, on aurait la l'exemple étrangeet. unique d’une espèce actuelle de l'Océan Indien ayant pénétré dans le Quaternaire méditerranéen : aussi y a-t-il lieu d’être soupçconneux. Je dois ajouter de plus qu'il s’agit évidemment d’une forme du groupe dela Natica Dillwyni Payr. vivante dans la Méditerranée et fossile dans le Pliocène { Natica s.s. ou section Cochlis Morch). Or, cette N. Dillwyni, que j'ai précisément récoltée à Ravagnese, n'y est au contraire pas citée par Seguenza, qui l'indique par contre dans le Miocène. Il est donc très possible que Seguenza ait fait là quelque confusion. Ces raisons m'amè- nent à négliger, au moins provisoirement, la citation de Seguenza. SE GUENZIIDÉS Ce sont de petites coquilles toujours très rares, dont la position systé- matique reste encore discutée. Actuellement on ne les rencontre que dans l'Atlantique, à de grandes profondeurs (700 mètres au minimum sl faut en croire les données fournies par les expéditions du 7ravalleur et du Talisman). Dansle Pliocène de l'Italie du Nord, les Seguenzia paraissent manquer complètement; on commencerait à les rencontrer dans le Pliocène de Bologne ; et dans l'Italie du Sud, leur présence au Miocène et au Pliocène ancien est bien connue. C’est à ce titre que J'ai tenu à en parler ici. Car ils sont un exemple de ces formes atlantiques très pro- fondes, spéciales au Pliocène ancien de l'Italie du Sud, et démontrant les affinités entre la faune profonde actuelle de l'Atlantique, et les faunes fossiles d’une Méditerranée pliocène plus ouverte aux influences océa- niques qu'elle ne l’est actuellement. Les familles des Oocorythidés et des Adéorbidès, sans intérêt au point de vue spécial des faunes récentes que nous étudions, nous montreraient des faits analogues. SCALARIIDÉS Les Scalaires pliocènes et actuelles sont extrêmement riches en espèces soigneusement étudiées par divers auteurs, en particulier par M. de Boury, mais pour la plupart très difficiles à déterminer. | Le fait le plus important de l’histoire de ce groupe est la disparition d’un grand nombre de formes avant le Pliocène supérieur. Ainsi, d’après les travaux de M. Sacco, les sous-genres Stenorhytis, Cirsotrema, Discoscala, Acrilla, RENE RETE NS Hemiacirsa, s’éteignent dès la fin du Pliocène ancien. Sent Aussi les faunes pliocènes supérieures et quaternaires ne nous offrent Mes th né htc her | en. # HA CE EULIMIDÉS 567 plus aucune forme que l’on ne puisse faire rentrer dans les espèces encore actuellement vivantes dans la Méditerranée. Cela me parait être le cas en particulier pour une espèce qui serait spéciale au Calabrien, et que M. Crema a décrite ([56], p. 17, table III, fig. 9), sous le nom de Sca- laria Sormanii Crema : elle a été rencontrée par cet auteur à Castro- villari et appartient au groupe de la S. communis Lmk., abondante actuellement ; je ne crois pas possible de la considérer comme une espèce caractéristique. EULIMIDÉS La plupart des espèces de cette famille n’ont subi, depuis la base du Pliocène ancien, aucune modification importante; elles ne nous sont donc d'aucun secours en stratigraphie, d'autant plus que leur détermination spécifique est le plus souvent fort difficile. Aussi, je ne vois guère à étudier spécialement dans cette famille qu'une forme intéressante, connue généralement sous le nom de N. eburnea Risso. Les Niso fossiles dans le Pliocène ancien de l'Italie du Nord ont été étudiées avec grand soin par M. Sacco : après avoir constaté leur extrême variabilité, cet auteur remarque que la plupart des indi- vidus fossiles s’écartent un peu du type figuré par Risso!, et paraissent au contraire se rapprocher beaucoup plus d’une espèce vivante dans l’Archipel indo-malais (Nicobar) et connue sous le nom de N. tere- bellum Chemn. Il conclut en proposant de rattacher ces Niso pliocènes à l’espèce vivante de Chemnitz, à titre de variétés. Cette conclusion ne peut être acceptée sans commentaires, étant donné qu'il n'y a aucune relation directe entre la faune pliocène méditerranéenne et la faune indo-pacifique actuelle. C’est, en effet, le plus souvent sur la côte occidentale d'Afrique que nous sommes habitués à retrouver les formes actuelles représentatives des types pliocènes. Or, le genre Niso était resté sur cette côte longtemps inconnu. C’est tout récemment (1891) que M. Dautzenberg ([60|, p. °o, pl. IL, fig. 6) a décrit et figuré un N. Ghevreuxi Dautzenberg, provenant de la baie de Gorée?. Le savant conchyliologiste a reconnu en même temps les grandes affinités existant entre son espèce et le N. eburnea fossile. 1 1826, Hist. nat. Europe mérid., IV, table VIII, fig. 98. 2? Il a été retrouvé depuis en d’autres points de la côte africaine. Cf, Dautzenberg (59), p. 95. 568 GASTROPODES : Les différences indiquées par lui (tours plus plans et complètement lisses) sont parfaitement nettes si on prend pour terme de comparaison le N.'eburnea typique de Risso, dont M. Sacco a donné une excellente figure ([13], fase. XXX, pl. XXIV, fig. 5). Mais on trouve à l’état fossile des variétés de NV. eburnea qu'il est vraiment impossible de distinguer spécifiquement du type figuré par M. Dautzenberg ! : telles sont par exemple les formes figurées par Sacco, fasc. XI, pl. I, fig. 43, 44, 45. Il est bien certain, en tout cas, que le N. Chevreuxi représente le descendant à peine modifié du type pliocène. Quant à la question de savoir si le N. terebellum représente la même espèce que le N. Chevreuxi, c’est un problème de conchyliologie actuelle qui nous importe peu ici. L'essentiel est de noter qu’il n’est pas rationnel de réunir les formes fossiles avec une espèce de l'Océan indien, puisque leurs descendants certains vivent sur la côte d'Afrique. Dans ces conditions, je crois préférable de conserver pour la forme fossile le nom de N. eburnea, quitte à y reprendre les nombreuses variétés distinguées par M. Sacco. Et ce qui nous intéresse le plus ici, c’est de noter que ce N. ebur- nea ne disparaît pas de la Méditerranée avec la fin du Pliocène ancien. Il y persiste encore dans le Calabrien ; je l’ai récolté à Vallebiaja et j'ai pu en étudier des exemplaires provenant du Monte Mario et des collines livournaises (Crespina, Vallino del Merlo) ; M. de Stefani ([1or], p. 377) le cite également à Sciacca et à Vallebiaja. C’est donc là une forme caractéristique du Pliocène dans son ensemble, et contribuant ainsi à le faire distinguer du Quaternaire. PYRAMIDELLIDÉS L'étude de cette famille est des plus ingrates pour le paléontolo- giste : c’est un véritable fouillis de petites coquilles extrêmement polymorphes, dans lequel il est très difficile de préciser des cou- pures spécifiques ou sous-génériques. Aucune espèce de cette famille ne peut, à mon avis, être considérée comme un bon fossile stratigraphique. 1 La seule différence appréciable consiste en ce que, dans la forme fossile, le der- nier tour est, en général, plus arrondi, moins nettement caréné, TURBINIDÉS 569 Aussi est-ce pour mémoire que je rappelle ici certaines formes du Sicilien de Palerme, que M. di Monterosato m'a aimablement commu- niquées, en ajoutant qu'il les croyait différentes des espèces méditerra- néennes actuelles, et vivantes seulement dans l'Atlantique. Telle serait l’'Odostomia {Odontoslomia, Brachyslomia, Plychostomon) rissoides Hanley ; le type provient bien, en effet, des mers du Nord, mais M. di Monterosato comprend sans doute cette espèce dans un sens très étroit, car l'O. rissoides est citée vivante dans la Méditerranée par divers auteurs, en particulier Weinkauff ([233], t. II, p. 220), B. D. D. ([237], t. I, p. 164) et Locard ([160], t. I, p. 448). Turbonilla (Pyrqostelis) rufa Phil. serait également représentée dans le Sicilien de Palerme par la var. crenata Brown, absente dans la Méditerranée. Outre que le type de Brown est douteux (cf. B. D. D., loc. cit., p. 184), cette espèce est telle- ment polymorphe, tant à l’état vivant qu'à l'état fossile (cf. Sacco [13], fasc. XII, p. 3), qu'on ne saurait attribuer une grande importance à la répartition géographique de telle ou telle de ses variétés. NÉRITIDÉS Genre Nerita. Les Nérites sont encore des formes exclusivement pliocènes anciennes et réfugiées actuellement sur les côtes d'Afrique ; je ne crois pas que l’on ait jamais comparé soigneusement les formes fossiles et les formes séné- galiennes actuelles. En tout cas ce genre est, à ma connaissance, étranger aux faunes méditerranéennes pliocènes supérieures et quaternaires. Genre Neritina. Les espèces actuelles de Néritines se rencontrent dès la base du Pliocène, et ne sauraient par suite donner la moindre indication strati- graphique. TURBINIDÉS Genre Phasianella Ce genre littoral est représenté actuellement dans la Méditerranée par trois espèces : P. pullus L., P. speciosa von Müdhlfeldt, P. tenuis Michaud ; ces formes existaient déjà dès le Pliocène ancien dans les facies littoraux. La dernière d’entre elles estrarement citée fossile, il est vrai, mais, comme elle est à beaucoup d'égards 570 GASTROPODES intermédiaire entre les deux autres, il est probable qu’elle a pu être méconnue. Genre Turbo Les représentants de ce genre dans nos faunes sont suffisamment peu nombreux pour que nous puissions retracer successivement l’histoire de chacun d’entre eux. - Sous-genre Leptothyra À. — L'étude du groupe du Turbo mamilla Andrezsowski, qui appartient à la section Gantraineia, est assez intéressante ; deux espèces vont nous occuper dans cette section : le T. mamilla, dont le type est un fossile miocène, et le T. peloritanus Cantraine !, espèce instituée pour une forme fossile dans le Pliocène de la Calabre et retrouvée depuis dans les grandes profondeurs. Cette dernière espèce présente d’ailleurs un grand polymorphisme, tant à l’état fossile qu’à l’état vivant. Dans mes matériaux ? j'ai pu observer une série continue partant de formes tout à fat lisses (T. glabratus de Philippi, T. carinatus Cantraine) pour aboutir à des échantillons entièrement recouverts de cordons décurrents bien marqués : var. cingulata Locard ([160], t. II, p. 18 et t. I, pl. 21, fig. 28-36) ou T. filosus Philippi ; ces formes très ornées, de grande taille, bien différenciées, paraissent se rencontrer surtout dans les facies de graviers un peu grossiers (Monte Corvo, Gal- lina O.): elles constitueraient une «fin de série ». Par son autre extrémité, au contraire, notre série de formes comprend des coquilles relativement petites, sans aucune trace de sillons décurrents ; parfois même, la petite carène plus ou moins marquée qui règne sur le milieu des tours s’efface complètement, et on arrive ainsi à des formes qui ne diffèrent guère du 7. mamilla que par la taille ; je les ai désignées sous lenom de var. acarinata. Il est donc très possible que, par ces formes intermédiaires, le T. peloritanus vienne ainsi se relier au T. mamilla. J'ai cru en tout cas intéressant d'indiquer ce polymorphisme, et, comme on pourra le voir d’après les figures données ici, il n'y a pas de doute que ! Cantraïne, Malacologie méditerranéenne et littorale, pl. VI, fig. 22, 23. — Voir aussi Locard [160]. 2 Voir les planches. AE no d Lu Fe ET em 4 ‘4 Ce &/ ui Poe nd, Re a < + TURBINIDÉS 971 ces formes ne passent vraiment les unes aux autres !. Mais dans l’ensemble il subsiste néanmoins une coupure très importante entre le peloritanus et le mamilla, qui constituent ainsi deux espèces nettement distinctes. La répartition stratigraphique serait d’ailleurs tout à fait d'accord avec cette filiation probable. Au Miocène (Helvétien-Tortonien), nous assistons en effet au maxi- mum de développement du T. mamilla. Dans le Pliocène ancien, le mamilla est en régression marquée, et par contre le peloritanus apparaît : il est relativement abondant dans l’Italie du Sud, où je l’ai rencontré à Mileto, dans la vallée du F. Macellaï, dans la Valle Lamato (Marcellinara), et à Gallina (0.), où il est associé (d’après Seguenza) au T. mamulla ; dans l'Italie du Nord, le T. peloritanus est signalé par Sacco dans le Plaisancien du Modenais, tandis que le même auteur ne l’a pas retrouvé en Piémont, ni dans la Lombardie. Au Calabrien, le T. mamilla paraît avoir complètement disparu?, tandis que le 7°. peloritanus atteint son maximum de fréquence. Je puis le citer dans les gisements de Valle Lamato, de Monte Corvo, Brucoli, Monosterace, Nardo, Gravitelli, Musalà. Dans le Sicilien, il est également connu au Monte Pellegrino, où M. di Monterosato le signale sous le nom de 7rochus filosus Philippi. Enfin actuellement sa répartition est assez étendue. Vers le Nord il remonte jusque sur les côtes de Bretagne* ; on le connaît dans le golfe de Gascogne, et il descend à l'Ouest du Soudan (Locard [160], t. I, p. 18) et aux Açores (Dautzenberg [62], p. 473); il a été dragué dans la Méditerranée à 300 mètres de profondeur entre la Sardaigne et l'Italie (Expédition du Washington). Donc, le T. peloritanus ne peut être en toute rigueur considéré comme un émigré atlantique, ainsi que l’a fait Seguenza et que l’avait fait d'abord M. di Monterosato “ [115]. Néanmoins, c’est une espèce en voie de disparition dans la Méditerranée: son centre de développement actuel est certainement dans l'Atlantique. Son histoire ! En particulier, je crois que les synonymies indiquées avec doute par MM. Daut. zenberg et Fischer ([62], p. 473) peuvent être confirmées. 2 J'en figure des exemplaires provenant des collines livournaises, du gisement de Portignano ; mais je ne puis décider s'il s’agit là d’un gisement du Pliocène ancien ou du Calabrien inférieur. $ Locard, les Coquilles marines au large des côtes de France, p. 120. “ Dans un travail plus récent [r14], cet auteur ne considère plus notre espèce comme une forme émigrée, 572 GASTROPODES est, à ce point de vue, analogue à celle du B. humphreysianum et notre espèce apparaît dans la Méditerranée aux mêmes époques. Mais elle en diffère au point de vue des origines, car tandis que les Buccins n’ont point de racines dans les faunes miocènes et sont bien des formes immigrées, par contre, le T. peloritanus, s’il dérive, comme nous l'avons supposé, du T. mamilla, serait une forme autochtone, résultant d’une évolution sur place et non d’une immi- gration. | Dans l’ensemble, la fréquence de cette belle espèce, si facile à reconnaître, dans les dépôts pliocènes supérieurs de l'Italie du Sud, est intéressante à souligner ici : elle nous est une preuve de plus des influences atlantiques qui ont agi sur la faune de ces dépôts, et elle accentue leur facies profond; sa présence dans le gisement de Musalà, où Seguenza ne l'avait point rencontrée, rapproche ces couches de celles, calabriennes, de Monte Corvo, où la même espèce est également abondante, et les écarte des gisements à Sfrombus voisins, tels que Ravagnese et Boveto, correspondant à des facies beaucoup moins profonds. B. — Dans la section Leptothyra (s. str.), seul le T. sanguineus L. est représenté dans nos faunes. C’est, au contraire de la précédente, une forme essentiellement méditerranéenne, mais comme elle n’a subi aucune modification depuis le début du Pliocène jusqu’à l’époque actuelle, elle n’est d'aucun secours au stratigraphe. GC. — Enfin nous terminerons l’étude du genre T'urbo en ajoutant qu'il comprend encore un certain nombre d'espèces propres au Pliocène ancien. Tels sont, d’après M. Sacco ([13], fase. XXI, p. 8-9) : T. (Collonia) excalliferus Sacco et T. (Pseudonina) Bellardii Michelotti. Genre Astralium. La seule forme survivante de ce groupe dans la Méditerranée actuelle est le si commun et si polymorphe A. (Bolma) rugosum L. : on le connait d’ailleurs, identique au type actuel, dès le Miocène. - Par contre, on lui trouve associées, dans le Pliocène ancien, d’autres formes qui ne paraissent pas avoir survécu; tels sont par exemple les A. tuberculatum Marcel de Serres, et A. affine Cocconi, qu'on peut rattacher, suivant M. Sacco, à l'espèce actuelle à titre de variété, mais qui n’en ont pas moins une certaine individualité, puisque dans certaines. | | TROCHIDÉS 573 régions ils existent seuls, à l'exclusion de l'espèce typique : c'est le cas, par exemple, dans le Pliocène du bassin du Rhône. Egalement confinés dans le Pliocène ancien sont les A. (Bolma) Borsoni Michelotti, À. (Bolma) castrocarensis Foresti, A. (Orma- stralium) fimbriatum Borson; toutes ces espèces sont d'ailleurs à peu près localisées dans les facies marneux profonds. Mais dès le Calabrien on ne trouve plus que des formes qui rentrent sans difficulté dans les innombrables variations de l'espèce vivante, pour laquelle il faudrait, comme le disent MM. Bucquoy, Dautzenberg et Dollfus, établir une variété pour chaque individu. TROCHIDÉS Les Trochidés sont parmi les coquilles les plus abondamment représentées dans les faunes récentes. Aussi, bien qu'ils ne nous fournissent pas d'espèces très importantes au point de vue strati- graphique, je retracerai à grands traits l’histoire des divers genres qui composent cette famille. Genre Clanculus. Ces petites coquilles, à test épais, sont plus spécialement littorales, et on peut par suite les récolter par centaines dans tous les dépôts quater- naires : elles paraissent affectionner particulièrement les facies à poly- piers littoraux; ainsi dans les couches à Strombes de Tarente, on constate de la façon la plus nette qu’elles se développent surtout dans les points où apparaissent, dans ces couches, les récifs de Cladocora. Malheureusement, les trois espèces qui vivent actuellement dans la Méditerranée, G. coral- linus Gmel., GC. (Clanculopsis) cruciatus L., C. (Clanculopsis) Jussieui Payr.?, ne peuvent être distinguées de leurs représentants res- pectifs dans le Pliocène ; elles ne peuvent donc donner aucune indication stratigraphique. Genre Banilia,. Ce genre ne comprend dans nos faunes qu’une seule espèce, limitée ! Aussi je n’attacherai aucune importance stratigraphique à la variété delphi- noides Mts., fossile au Monte Pellegrino, et que son auteur a bien voulu me commu- niquer en ajoutant qu'il la considérait comme éteinte. ? Le sous-genre Clanculella, établi par M. Sacco pour le C. Jussieui, et basé sur une simple différence d’ornementation, ne me paraît pas justifié, d’autant plus que j'ai observé, précisément à ce point de vue, des passages entre les C. Jussieui et C. cruciatus. 574 GASTROPODES aux facies profonds. M. Sacco a cru devoir séparer, sous le nom de D. sublimbata d’Orb. les types fossiles du type vivant D. Tinei Cal- cara — Craspedotus limbatus Philippi. Mais Locard ([160], t. II, p. 19) est conduit à accorder à l’espèce vivante un assez grand polymorphis- me : aussi, à l'exemple de Seguenza, je crois qu’on peut y englober les formes fossiles. En tout cas, cette belle coquille est toujours trop rare pour être d’une utilité pratique dans l'étude des faunes récentes. Genre Trochus. Sous-genre Trochocochlea. On peut dans l’ensemble, au double point de vue de leurs relations phylogéniques et de leur répartition géographique et stratigra- phique, diviser les espèces de ce sous-genre en deux groupes distincts : 1° Les unes, localisées dans la Méditerranée et dans l’Atlantique africain, y sont actuellement représentées par les T. turbinatus Born, T. articulatus Lmk., T. mutabilis Phil., et quelques autres petites espèces voisines, toutes très intimement reliées entre elles d’ailleurs. Les citations de ces formes dans le Pliocéne sont relativement rares: M. Sacco signale une variété du T°”. {urbinatus dans l’Italie du Nord; Foresti cite le T!. fragarioides Lmk.=— T°. furbinatus Born dans l’Astien des collines de Bologne; j'ai moi-même récolté à Gallina (O.) (où Seguenza avait signalé la même espèce) des Troques ayant la forme du turbinatus mais avec la coloration de l’articulatus. Cette rareté doit n’être qu'apparente, et tenir surtout à l’habitat extrêmement littoral de ces coquilles. Car dans les formations quaternaires, où ces facies tout à fait littoraux sont mieux conservés, on voit immédiatement ce groupe du T. turbinatus prendre un développement aussi grand que celui qu'il a aujourd’hui, spécialement dans les dépôts côtiers rocheux (Milazzo, Capo Colonne, « panchine » à Sérombus). 2° Un deuxième groupe, au contraire, est actuellement éteint dans la Méditerranée! et n’est représenté dans nos faunes fossiles que par le T. Brocchii Mayer. Sous sa forme typique, cette belle espèce pliocène est nettement carac- 1! Voir, pourtant, les citations rapportées par Carus. Elles ne sont point admises par Weinkauff, ni par Locard. Re PCT NU OT TROCHIDÉS 575 térisée par ses tours carénés et concaves en dessus ; c'est indubitablement une espèce disparue, une fin de série. Aussi est-il intéressant de noter sa persistance dans le Calabrien de la Toscane : les collections du Labora- toire de Géologie de l’Université de Lyon en possèdent de fort beaux exemplaires provenant de divers gisements des collines livournaises (Crespina, Vallino del Merlo). Certaines variétés (var. perpicla Sacco) ou espèces pliocènes très voisines (7. subcinerarius d’Orb. in Sacco) paraissent d’ailleurs, d’après M. Sacco, indiquer un passage au groupe océanique des T. cinerarius L. et T. obliquatus Gmel. : ainsi le T°. Brocchit serait, dans la Méditerranée, le terme extrême de l’évolution d’un groupe qui a continué à se développer surtout dans l’Atlantique du Nord, où les deux espèces précédemment citées sont des plus abon- dantes. La présence, dans les couches calabriennes de Toscane, du T'. Brocchü, espèce essentiellement pliocène, était en tout cas pour nous des plus importantes à signaler. Sous-genre Oxystele. Les Oxystele sont actuellement disparus de nos mers, et n’habi- tent plus que les eaux tropicales ou subtropicales. Dans tous les gisements classiques du Pliocène ancien, on rencontre en abondance l'O. patula Brocchi. Et, comme précédemment, ce type essentiel- lement pliocène se prolonge jusque dans le Calabrien de la Toscane (Crespina, Fauglia, Vallebiaja). C'est une de ces nombreuses formes qui établissent la continuité entre les faunes du Pliocène ancien et du Pliocène supérieur. Sous-genre Gibbula. ) Le T. magus L., espèce actuelle, est, dans ce sous-genre, la forme la plus abondante de beaucoup dans les faunes pliocènes, et il convient de remarquer que c’est précisément un des rares Gibbula qui descendent jusqu’à des profondeurs notables. L'espèce est d’ail- leurs extrêmement polymorphe, et on pourrait y distinguer, tant à l'état vivant qu'à l’état fossile, d'innombrables variétés. Certaines de ces variétés ou espèces voisines, telles que T. argentarius Mayer, T. semirotundus Sacco, paraissent spéciales au Pliocène ancien. Mais toutes les variations que l’on rencontre dans le Pliocène récent ou le Quaternaire rentrent aisément dans le type actuel et ne peuvent être considérées comme caractéristiques. Tel est le cas, par exemple, pour le T. filiformis Rayneval, van den 576 GASTROPODES Ecke et Ponzi, 1854, du Monte Mario, qui, comme je m'en suis assuré moi-même par l’examen d’un échantillon provenant de cette localité, est extrêmement voisin de la variété actuelle obsoleta B. D. D. Cette même variété obsoleta, que l’on rencontre dans le Sicilien de Palerme, est con- sidérée par M. di Monterosato comme une forme océanique ; mais l'espèce à laquelle elle appartient est vraiment trop polymorphe pour que l’on puisse attribuer à la variété la valeur stratigraphique d’une forme émigrée. L'histoire des autres groupes de Gibbula, pour la plupart litto- rauæ, est extrêmement difficile à préciser, car l’absence de colora- tion dans les formes fossiles et l’extrême polymorphisme de ces petites coquilles rendent les déterminations spécifiques fort délicates. Toutefois, dans l’ensemble une chose frappe : c’est l'extrême rareté de ces formes dans les faunes pliocènes. Aïnsi, dans les riches gise- ments du Piémont, les seules formes pas trop rares, d'après M. Sacco, seraient le T. Adamsoni Payr., espèce commune actuellement, et le T. divergens Bonelli, espèce disparue (?). Dans le Quaternaire littoral (par exemple, à Milazzo, dans les « panchine » du Marche- sato, etc..), on assiste, au contraire, à un développement exubérant de ces petites coquilles qui, comme actuellement, peuplent les côtes rocheuses d’un véritable fouillis d'espèces très difficiles à distinguer : telles sont les T. umbilicaris L., T. ardens von Salis, T. divari- catus L.,T. varius L., etc..., et T. Richardi Payr., parfois consi- déré comme le type d'un sous-genre Phorcus. Ainsi, en supposant que l’absence de ces espèces littorales, au Pliocène, ne soit pas qu'apparente (nous avons déjà vu que les faunes côtières rocheuses étaient, en général, très mal conservées), on est amené à constater dès le début du Quaternaire une évolution intense dans ce groupe. Rien ne nous autorise d’ailleurs à supposer que ce soit là le résultat d'immigrations; tout, au contraire, nous porte à y voir le développement sur place de la faune très littorale pliocène, si incomplètement connue. Et nous ne pouvons guère en retenir qu'un fait! : la rapidité et la richesse d'évolution des faunes 1 M. Crema [56] signale, dans le Calabrien de la Vallée du Crati, une espèce nou- velle, le T. (Gibbula) di Stefanori; comme elle n’a pas encore été citée ailleurs; elle est, par ce seul fait, dépourvue d’un grand intérêt stratigraphique; en oùbre, il ne serait pas impossible qu'elle ne fût, comme DRetqne l’auteur lui-même, qu'une variété du T. umbilicaris L. TROCHIDES 077 littorales comparées à la stabilité et à la pauvreté des varialions dans les espèces profondes. Sous-genre Forskalia. Dès la base du Pliocène, ce sous-genre est représenté par les deux espèces qui vivent encore actuellement, T. fanulum Gmel. et T. Gutta- dauri Phil. : elles paraissent d’ailleurs reliées par des formes de passage, la seconde de ces espèces représentant une adaptation plus profonde que la première. Sous-genre Zizyphinus (— Galliostoma,. Comme pour le genre Gibbula, le paléontologiste se trouve ici en présence d'un groupe en évolution active, dont les variations sont multiples et quelque peu désordonnées. Nous devons dire d'abord qu'on n y observe, depuis le Pliocène ancien, aucun renouvellement de la faune : 1° Les formes lif{orales du groupe du T. zizyphinus L. (section Zizyphinus s. str.) sont déjà fréquentes dans les faunes classiques du Pliocène ; et l'absence des citations de quelques espèces actuelles, T. dubius Phil., 7. Laugieri Payr., T. Gualtieri Philippi, pour ces faunes, n'est probablement qu'apparente, étant donné la difficulté qu’on éprouve à les caractériser sur des échantillons fossiles. 2° Quant aux petites espèces ornées du groupe T. exasperatus Penn. (section Jujubinus Monterosato), étant plus profondes, elles sont mieux connues à l’état fossile, et presque toutes sont signalées dans le Pliocène ancien. 3° Reste le groupe, également profond, du T. granulatus Born (section Ampullotrochus Monterosato), d’ailleurs relié aux Zizy- phinus s. st. par des formes de passage, telles que T. cingu- latus Br. On peut y suivre d'abord très facilement un premier phylum, celui du T. miliaris Br., qui, accompagné de sa var. millegranus Phil., se poursuit depuis le Pliocène ancien jusqu’à l’époque actuelle sans modifications. Quant au T. granulatus Born, il va nous offrir un certain nom- bre de variations intéressantes. D'abord, au Pliocène ancien, on a une prédominance de formes à cordons décurrents peu granuleux, presque lisses, que M. Sacco a désignées sous les noms de T. granu- Uxiv. pe Lyon. — Gicnoux. 37 578 GASTROPODES latus var. laureana Mayer, T. perstriolatus Sacco. La même ten- dance continue à s’observer au Calabrien et au Sicilien. Car on trouve dans le Calabrien de Reggio (Seguenza), puis dans le Sicilien de Palerme, en assez grande abondance, une forme remarquable, appelée par Brugnone T. granulatus var. lævis Brugn.!, et dont M. di Monterosato a fait une espèce spéciale sous le nom de T. Bru- gnonei Mts. in sched. (figurée 1c1°); cet auteur et MM. Bucquoy, Dautzenberg et Dollfus ([237], t. I, p. 361) s’accordent à la consi- dérer comme éteinte. Sans aller jusqu'à lui accorder une valeur spécifique, en raison de l’extrême polymorphisme de tous les Zizy- phinus, je ferai tout au plus de cette forme une variété à affinités pliocènes, ayant persisté jusque dans le Sicilien. D'autant plus qu'il ne serait pas impossible qu'elle se reliât au T°. cingulatus Br., dont le type est pliocène, mais que Weinkauff identifie à des indi- vidus vivants dans la Méditerranée. En dehors de la remarquable variété que nous venons d'étudier, ce groupe du 7. granulatus est encore intéressant comme « indicateur de profondeur » : c’est surtout par des fonds vaseux de 60 à 80 metres que cette espèce paraît acquérir sa plus grande fréquence. Dans le golfe de Marseille, Marion ([169], p. 107) l’a considérée comme caractéristique d’une zone vaseuse à 1°. granulatus et Capulus hungaricus, qui remonte jus- qu'à 75 mètres. Son abondance à Ficarazzi, sa présence à Ravagnese, son absence dans les formations quaternaires plus littorales, nous fournissent donc à ce sujet des indications précises fort importantesÿ, 1 Brugnone, Miscellanea malacologica, pars I, p. 12, pl. unique, fig. 23. 2 Ses affinités avec le T. granulatus (type) ne me paraissent pas douteuses : elle possède même la coloration si caractéristique (spécialement sur la face inférieure) de cette dernière espèce. 8 Je signalerai enfin, dans ce groupe, des formes très curieuses, que j'ai récoltées en assez grande abondance dans divers gisements calabriens ou pliocènes anciens (Gravitelli, Gallina Ouest, Monte Corvo); elles me paraissent nettement différentes du T. granulatus, et se relieraient au T. bullatus Phil. et aux grands Zizyphinus costulés dragués par le Travailleur et le Talisman et décrits par Locard [160]. Ce sont, en somme, dans l’ensemble, des formes voisines du TZ. cingulatus Br. et qui sont intermédiaires entre les groupes du T. zizyphinus et du T. granulatus. Ainsi dans les marnes pliocènes des environs de Pellaro (Fiumara dei Macellaï) près Reggio, j'ai rencontré un individu presque identique au T. lagueatus de Locard ([160], t. IT, p. 38, pl. IL, fig. 16-19); dans le gisement calabrien de Monte Corvo (Reggio-Archi) se trouve une forme à test épais paraissant très voisine du T: Hiron- dellei Dautzenberg et Fischer ([62], p. 481, pl. XXI, fig. 5). Au même groupe paraïis- sent appartenir encore les formes figurées par L. Seguenza (Boll. d. Soc. Geol. Ital., vol. XXI, tav. XVII) sous les noms de Gibbula Maurolici G. Seg. (fig. 17), et Calliotropis formosissimus G. Seg. (fig. 14), et provenant du Pliocène ancien des DRE 0 CYCLOSTRÉMATIDÉS Qt —? © Genre Solariella. Ces petites coquilles délicatement ornées sont actuellement répandues dans les grandes profondeurs de l'Atlantique, depuis les côtes d'Afrique jusqu'aux mers boréales; elles sont d’ailleurs très riches en espèces, et des expéditions comme celles du Challenger et du Travailleur et Talisman en ont fait connaître une foule de nouvelles. Dans la Méditerranée, la seule citation de ce genre est la S. Oftor Philippi (Trochus), draguée par le Washington entre la Sardaigne et l'Italie. Par contre, au Pliocène, les Solariella étaient relativement abondantes dans notre mer, surtout dans les facies profonds de l'Italie du Sud ; deux espèces y sont connues dans le Calabrien : ce sont les S. Ottoi Phil. et S. peregrina Libassi { Trochus!), que j'ai moi-même récoltées dans les mollasses calcaires à Cyprina islandica de Nardd (Terre d’Otrante?). Sans pouvoir être qualifiées de formes caractéristiques, ces Solariella sont néanmoins intéressantes en ce qu'elles nous montrent, par rapport à la faune méditerranéenne actuelle, la plus grande richesse des faunes pro- fondes pliocènes en espèces atlantiques. CYCLOSTRÉMATIDÉS Cette famille ne comprend que de très petites coquilles de grande profondeur, très rares et probablement très incomplètement connues, et pour cela inutilisables en stratigraphie. Le genre Gyclostrema, douteux dans le Pliocène ancien du Nord de l'Italie, est représenté dans celui du Sud par le G. (Tharsis) romet- tensis Seguenza, encore vivant dans la Méditerranée au-dessous de 400 mètres de profondeur. Le genre Tinostoma, par contre, est assez abondamment représenté dans le Pliocène ancien de toute la région méditerranéenne par le T. Woodi Hôrnes, Adeorbis à : ce serait là une espèce pliocène éteinte. Mais il convient de remarquer que le genre est encore actuellement repré- senté sur les côtes occidentales d'Afrique par le T. azoricum Daut- zenberg et Fischer {[62]|, p. 485, pl. XXI, fig. 16-18), qui diffère toutefois environs de Messine. Mais ce sont là des espèces trop rares et trop mal connues pour qu'on puisse leur demander des indications stratigraphiques. 1! Considérée par M. Sacco comme extrêmement voisine de formes vivantes dra- guées par le Challenger. ? Cela nous montre que ces sédiments correspondent à une ancienne ligne de rivage très élevée. 3 Au sujet de la citation de cette espèce dans les couches à Strombes de Cata- logne, voir plus haut, p. 334. 580 GASTROPODES un peu de l’espèce pliocène, en particulier par son ouverture plus petite et plus écartée de l’axe. HALIOTIDÉS La seule espèce qui représente actuellement cette famille dans nos mers, Haliotis tuberculata L. (s. 1.) existait déjà dès le Pliocène ancien et n’a subi depuis aucune modification un peu importante. On sait que la forme vivante aujourd'hui dans la Méditerranée, ou H. lamellosa Lmk., est légèrement différente de la tuberculata {ypique qui paraît plutôt océanique ; la plupart des auteurs ne voient là qu'une différence de variété, et Weinkauff a insisté sur l’impossibilité d'établir une distinction spécifique, opinion à laquelle M. Dautzenberg s’est récemment rallié ({59], p. ro4). | En tout cas, il est intéressant de signaler qu’au Pliocène ancien, l'espèce, en restant en général plus petite qu’actuellement (Sacco), possède des caractères intermédiaires entre la forme océanique et la forme médi- terranéenne : c’est l’Æ. {uberculata var. lamellosoides Sacco. Et pour ma part, j'ai récolté en abondance dans le Quaternaire de Milazzo une forme géante, convexe, à contours arrondis, à plis peu développés, qui se rapproche ainsi beaucoup de la variété océanique. Ainsi la différenciation de ces deux races locales paraît avoir été autre- fois moins accentuée qu'aujourd'hui. PLEUROTOMARIIDÉS Le genre Scissurella, seul survivant de cette famille dans nos faunes, ne paraît pas avoir beaucoup varié depuis le Pliocène ancien : certaines espèces sont décrites par Seguenza dans le Pliocène de la Calabre (Gallina O.) comme éteintes!. Mais ces petites coquilles sont trop rares et peut-être aussi trop incomplètement connues pour qu’on puisse les uti- liser en stratigraphie : elles ne jouent d’ailleurs aucun rôle dans nos faunes récentes, FISSURELLIDÉS Genre Fissurella. L'histoire de ce genre est facile à retracer brièvement, étant donné le petit nombre des espèces qui le composent. ; | Nous y trouvons d’abord un premier phylum, celui de la Fissu- 1 Ce sont, d’ailleurs, des espèces nouvelles. dec * FISSURELLIDÉS 581 rella nubecula L., qui se distingue nettement des autres espèces méditerranéennes. Cette forme vivante n'est pas citée à l’état fos- sile et, comme on ne peut la confondre avec aucune autre des Fissurelles pliocènes et actuelles, nous sommes amené à y voir une acquisition récente pour les faunes méditerranéennes, une forme cryptogène. À moins toutefois que, comme il s’agit d'une forme essentiellement littorale, elle ait échappé à la fossilisation pendant le Pliocène. Pourtant, l'hypothèse d’une :mmigration de date récente s’accorderait bien avec ce que nous savons de sa répartition géogra- phique actuelle. Car, en dehors de la Méditerranée, elle est préci- sément abondante dans l'Aflantique tempéré et subtropical, où elle s'étend depuis le golfe de Gascogne jusqu au Sénégal et à la Guinée. On rencontre, en outre, dans la Méditerranée actuelle, trois espèces bien classiques : F. italica Defrance — F. neglecta Desh., F. græca L., F. gibberula Lmk., espèces d’ailleurs intimement reliées entre elles. Il est très facile de leur trouver respectivement des ancêtres autochtones dans les faunes du Pliocène ancien, et il n'y à à peu près pas de différences entre les formes actuelles et les formes fossiles : c’est dans ces dernières (et en particulier dans les stades jeunes) que l’on rencontre surtout des formes de passage entre les trois espèces. Enfin, il me reste à examiner une forme que l'on rencontre dans le Sicilien de Palerme : c'est une très grande Fissurelle que j'ai fait figurer ici, sous le nom de F. gibberula Lmk. var. latecostata Brugnone. Sa taille (5 à 7 centimètres de longueur) suffit à la faire distinguer, à première vue, de toutes les formes vivantes analogues ; aussi Je la crois éteinte. Elle ne figure pas pour- tant dans la dernière liste d'espèces disparues publiée par M. di Monterosato [114]. Pourtant ce savant l'avait rangée, en 1877 [115], parmi les espèces éteintes, sous le nom de « F. latecostata Bru- gnone — ? À. costaria Bast. var. grandis ». Ses affinités sont assez difficiles à établir, comme on peut s'en rendre compte d’après l'examen de la figure : par son ornementation concentrique pres- que nulle, et son ornementation radiale composée de côtes peu sail- lantes, contiguës (trois côtes un peu plus faibles séparées par des 582 GASTROPODES côtes plus fortes), elle se rapproche, en effet, de la F. t{alica Defr. — F. costaria Bast.; par sa forme très gibbeuse, avec une base de sustentation fortement concave, par son foramen étranglé, elle se rattache à la F. gibberula; et ses affinités sont surtout étroites avec une forme vivante que M. di Monterosato a élevée au rang d'espèce sous le nom de F. dorsata, et dont il a eu l’amabilité de me com- muniquer des échantillons fossiles du Monte Pellegrino. Cette F. dorsata a été admise comme espèce par divers auteurs, en particulier par Locard ([160|, t. II, p. 76), qui en a bien fait ressortir les caractères, et par Sacco qui l’a signalée dans le Pliocène ancien. Par contre, M. de Gregorio, qui en a donné d'excellentes figurations !, a fait ressortir ses doubles affinités, d’une part avec F. costarta, de l’autre avec F. gibberula; il conclut en la considérant plutôt comme une forme locale que comme une véritable espèce, Nous avons donc là un exemple de ces passages entre les espèces vivantes, dont nous parlions plus haut. Et je crois que l’on peut rattacher, à titre de variété, la forme que nous étudions à l’une de ces espèces et en particulier à la F. grbberula: c'était d’ailleurs l'avis primitif de M. di Monterosato qui la citait en 187; ([x15], p. 8) sous le nom de F, gibba Phil, — F. gibherula Lmk. var. dorsata. Quoi qu’il en soit, il est bien certain que la grande Fissurelle du Sicilien de Palerme ne se distingue guère de cette var. dorsata que par sa taille beaucoup plus forte. Aussi, comme cette dernière, je la rattacherai à titre de variété à la F. gibberula, et je lui laisserai le nom de var. latecostata qui lui avait été imposé par Brugnone comme nom d'espèce. Ce sera donc pour nous, seulement une mufation, particulière au Sicilien de Palerme, d’une espèce par ailleurs bien connue dans les faunes pliocènes et actuelles: cela lui enlève naturellement beaucoup de son intérêt stratigraphique. Genres Emarginula et Prepilidium (Williamia). Les diverses espèces ne paraissent pas avoir évolué d’une façon sen- sible depuis le Pliocène ancien : ce sont des formes méditerranéennes autochtones. 1 Annales de Géologie et de Paléontologie, 9° livraison (Palerme, 1891), pl. I, fig. 6-r1. __vde. 2. PATELLIDÉS 583 Genre Puneturell:. Les Punclurella, formes profondes, sont au contraire actuellement cantonnées dans l'Atlantique : aussi est-il intéressant de noter leur présence dans les faunes méditerranéennes anciennes. C’est ainsi qu'on les connaît dans le Pliocène ancien de grande profondeur de la Toscane et de la Calabre, où Seguenza a signalé dans son gisement de Gallina (O.) la P. (Cranopsis) capuliformis Pecchioli, que j'y ai moi-même retrouvée. Et il est encore plus intéressant de noter la persistance, jusque dans le Calabrien (Sicilien de Seguenza) de Villa S. Giovanni près Reggio, de la P. (Fissurisepta) papillosa Segu. C’est avec raison que Seguenza rangeait cette rare coquille parmi les espèces atlantiques caractéristiques des termes supérieurs de la série pliocène. Genre Zeidora. Je signale ici seulement pour mémoire ce genre curieux, cantonné aujourd’hui dans le Pacifique. Il a été rencontré dans le Pliocène ancien de la Ligurie (Bellardi, Sacco) et de la Calabre (Gallina O., Seguenza, sous le nom générique de Crepiemarginula): c'est donc un rameau complètement éteint dans nos mers dès avant le Pliocène supérieur. ACMÆIDÉS Cette famille ne comprend qu’une seule espèce très polymorphe, Acmæa virginea Müller, qui, vivante actuellement, est connue dès la base du Pliocène. PATELLIDÉS Genre Patella. Les Patelles sont essentiellement des fossiles de facies. Elles ne dépassent guère quelques mètres de profondeur, et le plus souvent, c'est au niveau même de la mer qu’elles se rencontrent en abon- dance, et seulement sur les côtes rocheuses. Aussi sont-elles extrêmement rares dans les formations un peu anciennes, où, comme je l'ai dit déjà plusieurs fois (en particulier à propos des Trochidés), les faunes littorales rocheuses ont beaucoup de chances d'échapper à la fossilisation, Ainsi dans les riches gisements plio- cènes de l'Italie du Nord et du Sud de la France, Fontannes ni M. Sacco n'en figurent pas un seul individu. Mais cette absence n’est qu'apparente, 584 BRACHIOPODES car, comme le fait remarquer M. Sacco lui-même, la grande majorité de ces gisements classiques correspondent à des fonds argileux ou à des plages sableuses où ces coquilles n’ont pu se développer. D'ailleurs les auteurs citent des Patelles fossiles dans le Modenais et surtout dans le Sud de l'Italie, où j'en ai moi-même récolté à tous les niveaux du Pliocène. Mais 1l s’agit presque toujours de coquilles roulées entraînées par les courants dans des profondeurs où elles n'auraient pu vivre : leur pré- sence s'explique ainsi dans ces facies à la fois grossiers et profonds si particuliers au Pliocène de l'Italie du Sud. Par contre, dans les faunes rocheuses, littorales, du Quaternaire, les Patelles sont extrêmement abondantes, et donnent de précieuses indica- tions bathymétriques : ainsi elles pullulent dans les rochers de Milazzo, dans les « panchine » à Strombes ; elles manquent au contraire au Monte Pellegrino et à Ficarazzi (on ne les retrouve que le long des anciens rivages siciliens de la Conca d’Oro) et sont encore extrêmement rares dans les facies de vase calcaire des couches à Sfrombus de Tarente. Au point de vue de leur détermination spécifique, les Patelles n’offrent pour la plupart qu'un intérêt assez restreint. On sait que Weinkauff, suivi en cela par MM. Bucquoy, Dau- tzenberg et Dollfus, n’admet dans la Méditerranée que trois espèces! : P. ferruginea Gmel., P. lusitanica Gmel., P. cærulea L., cette dernière dénomination réunissant un grand nombre de formes inti- mement reliées entre elles. Ce sont ces deux dernières espèces seulement, que l'on reconnaît dans les faunes pliocènes. Quant à la Patella ferruginea Gmel., espèce de grande taille et bien caractérisée, elle ne paraît pas être représentée dans la Médi- terranée pliocène. La seule citation que j'en connaisse, en effet, pour cette époque, est celle de Seguenza [207], qui la signale à Altavilla; mais 1l déclare ne pas en avoir eu d’échantillons entre les mains: et comme la spécification des Patelles est fort délicate, cette unique 1 Il faudrait y ajouter quelques formes à affinités subtropicales, non citées par Weinkauff ; telle serait, par exemple, la P. safiana Lmk. qui pénètre dans la Médi- terranée méridionale, restant confinée sur les côtes du Maroc et de l'Algérie. Ces formes sont inconnues à l'état fossile et paraissent avoir une histoire analogue»à celle de la P. ferruginea que nous retracerons plus loin. — Pour leurs caractères distinctifs, voir par exemple Servain (Etude sur les Patellidæ des mers d'Europe, Angers, 1886), qui considère comme trois espèces distinctes les P: safiana, P. fer- ruginea et P. Rouxi Payraudeau, cette dernière étant généralement rattachée à la P. ferruginea à titre de variété. c 1 sl rt Ma ae en SR w Éd de + 85 co BRACHIOPODES ns citation me paraît tout à fait sujette à caution. Cette P. ferruginea n'apparaît donc dans nos faunes qu à l'époque des couches à Strom- bes, dans lesquelles elle est partout abondante (Nice, Monaco, Sfer- racavallo, Algérie) quand le facies le permet (ainsi je ne l’ai pas rencontrée à Tarente) : elle semble même, à cette époque, avoir été plus généralement répandue qu'aujourd'hui, car on sait qu'actuel- lement elle reste très rare sur les côtes françaises et italiennes et même en Sicile, d’après Philippi!; c'est surtout sur les côtes afri- caines qu'elle a conservé la même abondance et la même taille qu'à l’époque des Strombes. Ainsi, de ces données, malheureusement incomplètes, 1l semble- rait résulter que la P. ferruginea est une forme « eryptogène » immi- grée dans la Méditerranée à l'époque des couches à Strombes, c'est- à-dire précisément en compagnie d’autres formes à affinités atlan- tiques. Car c'est évidemment dans l’Atlantique et probablement dans l'Atlantique africain, qu'il faut rechercher son origine. Comme beaucoup de ces grandes espèces bien ornées, à cachet subtro- pical, elle paraît maintenant en voie de disparition sur nos côtes. CHAPITRE IV BRACHIOPODES Les Brachiopodes jouent un rôle considérable dans les faunes plio- cènes récentes de l'Italie du Sud; ear nous retrouvons là les facies relativement profonds qu'ils habitent pour la plupart. Ils peuvent donc facilement, en raison de leur abondance, nous fournir deux sortes d'indications : 1° Les espèces qui vivent encore actuellement permettent de nous faire une idée de la profondeur à laquelle se sont déposées les couches qui les contiennent à l'état fossile; 2° Comme nous allons le voir, certains d'entre eux sont extrêmement impor- tants comme fossiles caractéristiques. 1! Aradas et Benoît {5} la disent pourtant abondante en Sicile. D86 BRACHIOPODES Ce groupe à d’ailleurs fait l’objet de nombreux travaux : on sait que Seguenza [209], M. Sacco [13], et Davidson! ont spécialement étudié les Brachiopodes tertiaires italiens. Mais j'aisurtout été amené à consulter le très important mémoire publié par MM: Fischer et Oehlert sur les Bra- chiopodes recueillis par l'expédition du Travailleur et du Talisman2. Car ces auteurs ont non seulement décrit les formes vivantes, mais encore se sont préoccupés de les comparer aux formes fossiles voisines. Il m'a, d'autre part, été facile de recueillir moi-même d’abondants maté- riaux dans beaucoup de gisements pliocènes de l'Italie méridionale, et d’y réussir quelques préparations d'appareils brachiaux. D’après l'étude de ces matériaux et la lecture des travaux antérieurs, j'ai cherché à résumer l’état actuel de nos connaissances sur la répartition stratigraphique des Brachiopodes dans le Pliocène et le Quaternaire, et à voir quel parti on peut en tirer pour la classification de ces terrains; dans ces conditions, je me verrai conduit à traiter avec des développements fort inégaux les divers groupes de Brachiopodes. CRANIIDÉS Ainsi j'aurai très peu de choses à dire des Craniidés; car les espèces s'y retrouvent sensiblement les mêmes dans le Pliocène et dans la -faune actuelle, sans que l’on puisse y trouver de variations utilisables en stratigraphie. D'ailleurs, même la Grania anomala Müll. (avec diverses variétés ou races locales), qui est pourtant la plus abondante, reste néanmoins assez rare à l’état fossile. Je ne vois guère à signaler spécialement que la très curieuse espèce dénommée par Seguenza Grania lamellosa, avec un test extrèmement épais et des impressions musculaires saillantes : cet auteur la cite dans _le calcaire pliocène de San Filippo inferiore, près Messine. J'ai retrouvé cette même espèce dans le « tuf calcaire » de Valsavoja, près Catane. Je ne crois pas qu'aucune des nombreuses variétés actuelles de la C. anomala puisse lui être comparée; il s’agirait donc là d’une forme pliocène dispa- rue, et, à ce titre, elle contribuerait à donner un cachet pliocène à cette faune de Valsavoja, elle a été citée aussi par M. Dainelli [58] dans les mollasses calcaires (tu/fi) pliocènes de la terre d'Otrante. 1 On italian tertiary Brachiopoda {The geological Magazine, vol. VI,"1870). 2? Expéditions scientifiques du « Travailleur » et du « Talisman», ete. Brachiopodes, par P. Fischer et D.-P. Oehlert Paris, Masson, r891). RHYNCHONELLIDÉS 587 RHYNCHONELLIDÉS Dès la base du Pliocène, on peut distinguer dans les Rhyncho- nelles des mers européennes, deux phylums distincts: Le premier débute dans le Pliocène par la R. sicula Segu.. Cette espèce, non décrite par Seguenza, est figurée par Jeffreys!, et par Davidson (loc. cit., pl. XX, fig. 6); elle n'est d’ailleurs connue que dans le Pliocène ancien de l'Italie du Sud. De là descend l’ac- tuelle R. cornea Fischer?, qui s'étend de la Bretagne au Soudan, où elle est très abondante; on ne l’a pas encore rencontrée au- dessus de cinq cents mètres de profondeur. Ce premier phylum est caractérisé par la forme aplatie de la coquille, qui a un contour tri- gone et un bord frontal rectiligne ; entre la forme pliocène et la forme actuelle, on observe une augmentation de taille du double. La rareté de ce phylum à l’état fossile, rareté due probablement à la grande profondeur de son habitat, lui enlève toute utilité pratique. Un deuxième phylum est constitué au Pliocène par la R. bipartita Brocchi, espèce commune dans le Pliocène ancien de toute la Médi- terranée ; 1l est représenté actuellement par la R. psittacea Gmel., reléguée dans les mers du Nord, et ne descendant pas au Sud de la Manche: c'est essentiellement une espèce arctique circumpolaire. Dans le Pliocène ancien, la À. bipartita s'accompagne d’un rameau latéral, la R. (Hemithysis) plicato-dentata Costa, considérée tantôt (Sacco), comme une espèce distincte, tantôt comme une simple variété; les figures données par Philippi ([110], tab. XVIII, fig. 5), paraissent bien montrer tous les passages avec le type. En tout cas, ce qui nous intéresse le plus 1c1, c’est de noter que la disparition de ce groupe dans la Méditerranée coïncide à peu près exactement avec la fin du Pliocène ancien; en particulier la pré- sence de la À. bipartita dans le gisement de Gallina (0.), dont M. de Stefani a voulu faire du «Postpliocène», contribue à donner à ce gisement un caractère nettement archaïque. À un autre point de vue, il est également curieux de souligner la 1 On the Mollusca procured during the Ligthning and Porcupine Expeditions, 1868-1870. Proceedings of the Zool. Soc. of London, 1878, pl. XXII, fig. 10. >? Voir la synonymie et les références dans Fischer et Oehlert (loc. cit., p. 13), auxquels j'emprunte les renseignements qui suivent. 3 Var. $, margine plicata, Philippi. 588 BRACHIOPODES fréquence, dans tous les gisements classiques du Pliocène ancien, de ces formes à affinités nettement boréales, qu'on pourrait assez jus- tement qualifier d’ «émigrés du Nord». TÉRÉBRATULIDÉS Nous passerons rapidement sur les genres Platidia, Mühlieldtia (an Megerlia), Terebratulina. Les deux derniers sont très richement représentés dans le Pliocène et même le Quaternaire (Palerme), car leur. habitat est beaucoup moins profond que celui de la plupart des autres Brachiopodes : ils habitent surtout dans la zone des Coraux, et le gise- ment de Brucoli, en.particulier, est un des plus typiques qui se puissent voir pour étudier cette association. Mais ils ne peuvent nous fournir aucun renseignement intéressant, au point de vue stratigraphique. Genre Terebratula. Ce genre est représenté dans le Pliocène italien par une infime variété de formes, pour lesquelles les paléontologistes ont créé une foule de dénominations considérées tantôt comme de véritables espèces, tantôt comme de simples variétés. Il suffit de jeter un coup d'œil sur les planches de Sacco et de Seguenza pour se rendre compte qu'au premier abord il semble bien difficile d'attribuer à toutes ces variations une valeur stratigraphique. A ce point de vue, la véritable clef pour débrouiller ce chaos réside dans une coupure sous-générique proposée par M. H. Douvillé en 1880 !. Parmi ces Térébratules pliocènes et actuelles, nous pouvons en effet, avec cet auteur, séparer des Terebratula sensu striclo un sous-genre appelé Lhiothyris, nom changé depuis, par suite d’un double emploi, en Liothyrina Oehlert. Ces Liothyrina sont caracté- risées, comme l'ont fort bien résumé MM. Oehlert et Fischer, par leur test lisse non plissé, et par suite leur bord frontal rectiligne, par leur foramen très petit, leur appareil brachial très court, où les branches ascendantes restent rudimentaires. Les Terebratula 6. str. auront par contre les caractères inverses. On pourra ensuite discuter sur la valeur des coupures spécifiques à faire dans ces deux sous-genres, mais la distinction établie par M. Douvillé nous permet de préciser d'une manière simple l'histoire 1 Bulletin de la Soc. Géol. de France, 3° série, t. VII, p. 265. 24 Qu rod y'en mc scscla nhts à 5 ES TÉRÉBRATULIDÉS 582 des Térébratules pliocènes et quaternaires de la Méditerranée. En effet les Liothyrines ainsi définies, vivant déjà au Pliocène, con- tinuent d'exister actuellement, tandis que les Terebratula s. str. sont étroitement limitées au Pliocène: elles y persistent jusque dans le Pliocène supérieur, et forment un des éléments les plus caractc- ristiques des faunes calabriennes; mais dès le Sicilien elles ont disparu. C’est là un fait important pour la classification des forma- tions récentes de l'Italie du Sud, et 1l nous conduit à adopter, entre le Pliocène et le Quaternaire, la limite même à laquelle nous avons été conduit par des raisons stratigraphiques. En raison de l’abon- dance des Térébratules en Calabre et Sicile, nous avons là un cri- térium pratique très commode pour distinguer le Pliocène du Quaternaire. Ce point capital une fois établi, je vais maintenant reprendre brièvement l'histoire de ces deux sous-genres, Terebratula et Lio- thyrina. Sous-genre Terebratula s. str. La distinction des nombreuses espèces établies dans ce sous-genre est le plus souvent très délicate. Les deux types principaux du Pliocène méditerranéen y sont : T°. ampulla Brocchi, de forme aplatie et large, et T. sinuosa Brocchi, dont la coquille est fortement plissée ; enfin, on a parfois très improprement appliqué le nom de T. gran- dis Blumenbach, à des formes de grande taille, très allongées, à commissure frontale très sinueuse, mais dont les valves ne portent pas de plis!. Toutes ces formes se rencontrent partout dans le Pliocène: mais elles sont reliées les unes aux autres par de mul- ° tiples formes de passage, et, d’après Seguenza, c'est seulement l’appareil apophysaire qui serait capable de donner des caractères internes suffisamment constants. D'ailleurs, en Sicile et en Calabre, la forme de beaucoup la plus intéressante pour nous est une très grosse coquille que Seguenza a, dans ses monographies les plus récentes, séparée de la T. grandis des auteurs, sous le nom de 7. Scillæ. J'en figure ici des exem- plaires. On peut la considérer comme la forme dominante dece groupe 1! On trouvera beaucoup de renseignements sur la synonymie de T. grandis dans Dollfus et Cotter [125], p. 87. 590 BRACHIOPODES dans les facies de grande profondeur, mais elle ne se trouve pas limitée à une seule zone paléontologique, comme l’a cru Seguenza qui s’en est servi pour caractériser sa « zone quatrième » du Pliocène (CF. Seguenza [207]). On la rencontre en effet dès le Pliocène ancien : ainsi à Gallina (0.) nous la trouvons associée aux Chlamys latissimus et Flabellipecten flabelliformis, c’est-à-dire à une faune essentiel- lement pliocène ancienne; et en même temps, elle persiste, dans les couches de Gallina E., jusque dans le Calabrien. M. Sacco la signale dans le Pliocène ancien du Plaisantin, où elle est plus rare; car dans les facies moins profonds de l'Italie du Sud, ce sont les types ampulla et sinuosa qui dominent de beaucoup et persistent jusque dans le Cälabrien du Monte Mario et de Vallebiaja. Quoi qu'il en soit, et conformément à ce que J'ai dit plus haut, la distinction de ces différentes espèces nous importe peu; l'essentiel est de noter que ce sous-genre Terebratula s. str. disparaît défini- tivement dès la fin du Pliocène. La gigantesque 7. Saillæ, attei- gnant dix centimètres de longueur, représente donc le terme extrême de l’évolution de ce sous-genre, et, comme toujours, nous voyons cette évolution se terminer par des formes de très grande taille. Sous-genre Liothyrina. Les Liothyrines pliocènes paraissent encore fort mal connues ; on peut admettre avec M. Sacco qu'elles font complètement défaut dans le Pliocène ancien de l'Italie du Nord. En Algérie, aucune Liothyrine n'est signalée dans la récente revision des faunes plio- cènes publiée par MM. de Lamothe et Dautzenberg ! [152]; enfin ces coquilles sont également inconnues dans le Pliocène français. Ces faits n’ont d’ailleurs qu'une importance purement locale, car les Liothyrines, du groupe de la T.. vitrea, abondent dans le Pliocène de l'Italie du Sud. La forme la plus abondante en Sicile et en Calabre est celle qui a été bien figurée par Philippi [190] sous le nom de T. vitrea var. minor, et désignée depuis par la plupart des paléontologistes par l'appellation de T. minor Suess ; c'est aussi la T. affinis de Cal- cara. Cette petite Liothyrine à test globuleux, à surface tout à fait 1 Pourtant MM. Fischer et Oehlert (loc. cit., p. 55), signalent la T. vifrea dans Je Pliocène de l'Algérie. bird : : À 3 3 3 î î TÉRÉBRATULIDÉS 591 lisse, se rencontre avec une abondance extraordinaire dans le Plio- cène ancien du détroit de Messine ; elle y forme de véritables cal- caires, à grain très fin et souvent très durs, qui sont exploités pour les constructions (colonnes de l’ancienne Université de Mes- sine), et arrivent à ressembler tout à fait à des calcaires à Brachio- podes crétacés ou jurassiques ; dans les couches plus sableuses ou marneuses, il est par contre facile d'obtenir des préparations magnifiques de leur appareil brachial. Il est remarquable de constater que, dans la plupart des gise- ments, cette 7. minor est presque seule à représenter les Liothy- rines ; les autres espèces qui lui sont associées se montrent toujours beaucoup plus rares. Aussi me semble-t-il rationnel de la con- sidérer comme une espèce distincte et non comme une simple variété. Seguenza a en outre décrit et figuré dans le Pliocène de l'Italie du Sud plusieurs autres formes voisines de la 7”. vitrea. Ce sont ses T. Meneghi- niana, Lyelliana, Michelottiana, elliptica : toutes se rapprochent beau- coup de l'espèce vivante, mais elles sont bien plus rares que la 7°. minor et moins bien individualisées: je crois qu’on peut les rattacher à la T°. vifrea à titre de variétés. D'ailleurs, quand la conservation est défectueuse, il est souvent difficile de dire si l’on n’a pas affaire à des T'erebratula s. str. On ne peut donc, à ce point de vue, accorder beaucoup de confiance aux citations des auteurs. Dans la nature actuelle, la T. vifrea est au contraire représentée par des formes typiques de grande taille. MM. Fischer et Oehlert remarquent que les formes minor, plutôt rares, ne méritent pas d'être regardées comme ayant une importance spécifique. L'évolution des Liothyrines du groupe vitrea peut donc être résu- mée de la manière suivante : au Pliocène, prédominance de la T. minor, la forme typique n'étant encore qu'à l’état de raretéet mal caractérisée. À l'époque actuelle, au contraire, l'accroissement de taille est devenu général dans ce phylum et la forme dominante est la grande T'. vifrea typique. C’est là encore un exemple intéressant de cette augmentation de taille dans les rameaux phylétiques ; mais il est difficile d'en déduire des conclusions utilisables au point de vue stratigraphique. À côté de ce phylum de la T. vitrea, je crois qu'il faut en distinguer un 992 BRACHIOPODES second, celui de la T. sphenoidea Philippi, qui peut se suivre du Plio- cène jusque dans les mers actuelles sans permettre d'y voir d'autre variation intéressante qu’une légère augmentation de la taille. L'ëndivi- dualité de ce phylum me paraît résulter d’abord de la morphologie de ces coquilles : la forme extérieure reste, en effet, assez constante dans l’ensemble (ainsi, parmi les nombreuses espèces figurées par Seguenza, il est aisé de reconnaître que seule la T°. Benoifiana rentre dans ce phylum; on consultera à ce sujet le schéma expressif publié par M. Sacco, et qui paraît résumer d’une manière assez heureuse l'histoire de ces Liothy- rines);, mais cette individualité résulte aussi de leur habitat, beaucoup plus profond que celui de la T°. vitrea ; dans les mers actuelles, la 7°. sphe- noidea ne paraît pas remonter au-dessus de 500 mètres, et les sédiments pliocènes où elle est représentée de la manière la plus abondante et la plus typique, sont en même temps les plus profonds : ainsi je l'ai récoltée en grande quantité dans les marnes à Foraminifères du Pliocène ancien de Milazzo !. Genre Magellania (an Waldheïimia) Les Magellania ont à l’état actuel et fossile une histoire très intéressante. Elles sont jusqu à présent inconnues dans le Pliocène de l'Italie du Nord ; elles abondentau contraire dans le Pliocène de la Calabre et dela Sicile, et en particulier dans le Calabrien, Actuel- lement, les explorations récentes ont démontré leur vaste répartition dans l’Aflantique ; elles ont été rencontrées depuis les côtes de Scandinavie jusqu’à celles du Soudan. Par contre, les dragages n’en ont ramené, dans la Méditerranée, que quelques valves isolées, privées de l’animal. Nous pouvons donc les considérer comme des coquilles en voie d'extinction dans la Méditerranée, et leur attribuer une signification atlantique. Ici encore, les déterminations spécifiques précises demeurent délicates. On consultera à ce sujet la très soigneuse revision de ces formes faite par MM. Fischer et Oehlert ; on peut y distinguer deux groupes principaux : les Wacandrewia, caractérisées par l'ab- sence de pièces deltidiales (foramen incomplètement clos) et la pré- sence, chez le jeune, d'un pilier septal disparaissant chez l’adulte ; et les Magellania s. str., où le foramen est complètement clos et où un septum dorsal persiste chez l'adulte. 1 En compagnie d’une mutation spéciale de la T. minor, la T. Meneghinrana Segu. Sos um RE TÉRÉBRATULIDÉS 593 Le phylum des Macandrewia est surtout représenté au Pliocène par la forme appelée par Philippi Terebratula euthyra ; quant à l'espèce vivante, M. cranium Müll., elle ne diffère guère de la forme de Philippi, d'après MM. Fischer et Oehlert, que par sa taille un peu plus grande. L'examen des spécimens fossiles que jai récoltés dans l'Italie du Sud, et leur comparaison avec des matériaux vivants provenant de l'expédition du Caudan !, m'ont confirmé abso- lument dans cette impression, et m'ont montré une fois de plus cette augmentation progressive de la taille au cours de l’évolution d'un phylum. Le groupe des Magellania s. sér. est à la fois plus abondamment représenté et plus polymorphe ; mais d'une manière générale, 1c1 encore, la taille des nombreux individus fossiles que j'ai recueillis un peu partout dans le Pliocène en Sicile et Calabre, est toujours en moyenne notablement inférieure à celle des exemplaires vivants que j'ai pu leur comparer. Le type pliocène le plus fréquent est en effet la Terebratula septata de Philippi, que les auteurs ont tour à tour séparée ou réunie à la forme vivante, Magellania septigera Loven. À côté d’elle, Seguenza a-distingué quelques autres espèces également très voisines, M. Davidsoniana, M. depressa, M. pelort- {ana ; ce ne sont guère que des variétés, auxquelles il m'est impos- sible d'attribuer le moindre rôle stratigraphique. En résumé, l'histoire de ce genre Magellania est très une et très simple ; son centre de développement a été évidemment toujours dans l'Atlantique ; mais, dès la base du Pliocène, nous le voyons pénétrer dans la Méditerranée ; il y reste cantonné dans l'Italie du Sud, soit que la profondeur fût, là seulement, suffisante, soit qu'il n'ait pu se propager au delà de cette région plus directement expo- sée aux courants atlantiques ; là, on peut affirmer son existence jusqu au Calabrien inclusivement ; depuis ce moment, il y a subi une forte régression, et actuellement il paraît éteint dans la Méditerra- née. Les Magellania du Calabrien, sans être précisément de véri- tables « émigrés du Nord », accusent néanmoins des affinités nette- ment atlantiques. En somme, la faune de Brachiopodes de la Méditerranée actuelle ! Collections du Laboratoire de Zoologie de la Faculté des Sciences de Lyon. Univ. pe Lyon. — Gicnoux 3 (o2] 594 > _ BRACHIOPODES | est très appauvrie par rapport à la faune pliocène ; les trois grands es groupes des Rhynchonella, des Terebratula s. str., des Magellania, qui y ont joué au Pliocène un rôle si important, en ont maintenant disparu, et cet événement coïncide à peu près avec les grands chan- LES gements géographiques qui marquent la limite du Pliocène et du Quaternaire. | : pr Le n SIXIÈME PARTIE RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS CHAPITRE PREMIER LA SUCCESSION DES FAUNES MALACOLOGIQUES RÉCENTES DANS LA MÉDITERRANÉE OCCIDENTALE J'ai déjà indiqué, dans l'introduction du présent ouvrage (p. 25), comment on était amené, par des considérations à la fois paléontolo- giques et stratigraphiques, à distinguer dans les formations récentes les étages suivants : Pliocène ancien, Pliocène supérieur ou Calabrien, Sicilien, couches à Strombes. En faisant intervenir la notion de lignes de rivage succes- sives, on peut distinguer dans le Quaternaire une série de « niveaux » successifs, qui peuvent être anté-siciliens ou post- siciliens, et arriver ainsi à des subdivisions de détail. Mais, pour le moment, ces subdivisions ne peuvent être appliquées à l’histoire des faunes. De sorte que, laissant de côté la faune pliocène ancienne, en dehors de notre sujet, nous allons passer en revue les érois élapes principales de cette histoire, étapes qui correspondent respec- tivement au Calabrien, au Sicilien et aux couches à Strombes. Suivant en cela la méthode indiquée si magistralement par M. de Stefani [101], je me bornerai à rappeler ici les formes carac- téristiques de ces faunes successives, telles que nous les avons défi- nies plus haut (p. 18). 596 SUCCESSION DES FAUNES $ 4. — LA FAUNE CALABRIENNE Nousallons voir que l’on ne peut, à vrai dire, parler d’une faune calabrienne unique, car il y a des différences notables entre les faunes du Calabrien supérieur et du Calabrien inférieur. Faisons, pour un moment, abstraction de ces différences, et considérons la faune calabrienne dans son ensemble. On peut alors dire que, dès le Calabrien, la faune méditerranéenne a déjà acquis, à peu de chose près, sa physionomie actuelle. Cela tient, non pas à l'apparition des espèces vivantes, qui existaient déjà presque toutes dès le Pliocène ancien, mais bien plutôt à la disparition des nombreuses formes qui donnaient à la faune pliocène ancienne un caractère sispécial. Enumérer ces formes, ce sera donc indiquer les différences fauniques entre le Calabrien et le Pliocène ancien : cette énumération complète serait beaucoup trop longue, et par là même dépourvue d'intérêt ; je me contenterai de rappeler les plus importants des groupes disparus. Formes du Pliocène ancien disparues de la Méditerranée avant le Pliocène supérieur. Quelques Ostréidés : Ostrea co- Dosinia orbicularis Ag., Tapes chlear Poli var. navicularis Br. Famille des Dimyidés. Quelques Spondylidés : S. crassi- costa Lmk., S. concentricus Brn. Quelques Lima : L. Cocconü Font. Nombreux Pectinidés : Pecten rhegiensis Seg., P. benedictus Lmk. et sp. aff., quelques Flabel- lipecten, Chlamys spinosovatus Sacco et sp. aff., C. latissimusBr., C. excisus Brn., quelques Amus- sum. Famille des Pernidés. Anca pectinata Br. type. Quelques Nuculidés. ÿ Nombreux Vénéridés : Meretrix islandicoides Lmk., M. gigas Lmk., M. pedemontana Lmk., Venus excentrica Ag., V. plicala Gmel, vetula Bast., Psammobia unira- diata Br., P. Labordei Bast. Martesia rugosa Br. Nombreux Lucinidés : Lucina in- crassata Dubois, L. Meneghinu de Stef. et Pant., L. orbicularis Desh. Arcopagia Sedwigcki Michti., A. {e- lala Bonelli, A. cingulala Font. Cuspidaria maæima May. Pecchiolia argentea Mariti. Quelques Pholadomya. Nombreux Dentaliidés. Très nombreux Pleurotomarii- dés, Conidés, Gancellariidés, Marginellidés, Mitridés,Fas- ciolariidés. r à Quelques Euthria. Genres Cyllene, Jantopsis, Phos (?), quelques Tritonidea. FAUNE CALABRIENNE 597 Quelques Nassa, genre Dorsanum. Nombreux Solariidés. Nombreux Columbellidés et Sigarelus concavus Lmk. Muricidés. Nombreux Scalariidés. Quelques Tritonidés et Ranel- Genre Nerila. lidés ; genre Aspa. Quelques Turbo,Astralium,Gibbula. Quelques Gassididés et Dolii- Genre Zeidora. dés : genre Ficula. Rhynchonella bipartita Br. Quelques Gypræidés. Quelques Térébratulidés. Assez nombreux Turritellidés. Crania lamellosa Ses Littorina ariesensis Font. Comme j'en ai déjà averti dans l'introduction, ces formes qualifiées de « disparues » peuvent très bien continuer à vivre dans d’autres mers, par exemple, dans l’Atlantique tropical : le fait est reconnu pour un cer- tain nombre de ces formes, et il n'est pas douteux qu'une connaissance plus approfondie de la faune africaine actuelle augmenterait encore beau- coup ce nombre. L'essentiel est pour nous de noter que ces espèces sont disparues de la Méditerranée. Leur utilisation stratigraphique se trouve donc limitée au bassin méditerranéen. Je ferai remarquer en outre que ce terme de « formes disparues » ne s'applique pas à des espèces qui auraient continué à vivre dans la Médi- terranée, mais en se transformant; ce sont bien réellement des phylums disparus, des rameaux évolutifs qui ont quitté notre mer sans y laisser de descendants directs; nous verrons plus loin que les phénomènes d’évolu- tion sur place, de « mutation », ne sont guère utilisables pratiquement en stratigraphie. Cette liste suffira, je pense, à montrer l'importance de la coupure paléontologique qui sépare, dans l’ensemble, le Pliocène ancien du Calabrien. Aussi bien est-il à peine nécessaire d'insister sur ce point, car la plupart des paléontologistes italiens l'ont déjà fait fort clairement ; on verra à ce sujet les travaux de G. di Stefano [121] et surtout de C. de Stefani [rot]. Il en est tout autrement pour la limite supérieure de l'étage Calabrien. Car la coupure qui sépare le Calabrien du Quaternaire est surtout nette au point de vue stratigraphique ; elle reste néanmoins marquée dans les faunes. Pour le montrer, je donne ci-dessous la liste des espèces qui, disparaissant au cours du Calabrien, ne pénètrent point dans le Quaternaire, 298 SUCCESSION DES FAUNES Formes calabriennes disparaissant avant le Quaternaire. Pecten Planariæ Simonelli, Flabellipecten flabellifor- mis Br., Chlamys scabrel- lus Lmk., C. bhbollenensis Mayer, + GC. Melii Ugol., GC. cf. inæquicostalis Lmk., Hinni- tes ercolanianus Cocconi. Arca mytiloides Br., A. pec- tinata Br. var. minor. + Cardita intermedia Br. GC. rudista Lmk.,C. rhomboi- dea Br., GC. revoluta Ses. + G. pectinata Br., C. elon- gata Brn. Astarte sulcata da Costa var. pseudofusca nov. Cardium paucicostatum Sovw. var. bianconiana Cocconi sp., C. multicostatum Br, + C. hirsutum Brn.,+ C. Jeffreysi Rigacci (sp. aff. C. cyprium Br.), G. lævinflatum Sacco, + G. striatulum Br. + Meretrix Brocchii Desh, Venus libellus R. E. P.,-+- Ve- nus scalaris Bronn. Cardilia Michelottii Desh. Lucina elliptica Bors., L. Bel- lardiana Mayer, + L. perso- lida Sacco. —— Gapsa lacunosa Chemn. + Pholadomya alpina Math, var. Dentalium sexangulum Schrô- ter, + D. Michelottii Hôrnes, —- D. fossile Schrôter. + Tornatina spirata Br. Cancellaria hirta Br. Mitra cupressina Br., M. Bronni Michelotti, + M. as- tensis Bell., + M. fusiformis Br., + M. atava Bell., + M. turricula Jan. Fusus longiroster Br, + F. Rigaccii Cerulli-Irelli, F. syra- cusioides Brugnone, F. squa- mulatus Br. Nassa obliquata Br., N. semi- striata Br. var. calabrensis nov. (aff. N. gigantula Bonelli), N. macrodon Brn. + Columbella erythrostoma Bonelli, + G. subulata Br. Murex brandaris L., var. aff. M. torularius Lmk. + Cassis intermedia Br. + Cypræa flavicula Lmk. Chenopus uttingerianus Risso. GCerithium crenatum Br.,C.va- ricosum Br. Turritella subangulata Br, T. vermicularis Br., T. tor- nata Br. Niso eburnea Risso. Trochus Brocchii Mayer, T. pa- tula Br. Sous-sgenre Terebratula s.str. + Drillia sigmoidea Bronn, + Daphnella Romanii Libassi, Surcula nodulifera Phil. Terebra corrugata Lmk., var. regina Desh. (in Seg.) + Conus Mercati Br., + C. py- rula Br. Ces formes sont d’ailleurs d'importance inégale, et on trouvera dans la cinquième partie l’indication de leurs gisements et de leurs affi- nités. Il convient d’abord d’en mettre à part un certain nombre : ce TE Le 16 FAUNE CALABRIENNE 099 sont celles précédées d’une + dans la liste ci-dessus; elles n'ont été, jusqu'à présent, rencontrées que dans le seul gisement du Monte Mario. Parmi celles qui restent, beaucoup n'ont été trouvées qu'à l’état de raretés, et dans un nombre de gisements fort limité. Par contre, celles de ces espèces qui sont les plus abondantes et qui paraissent persister Jusqu'à la fin du Calabrien, sont, par ordre d'importance : Les Térébratules, les Cérithes, les Turritelles, les Cardites, la Nassa semistriata var. calabrensis, les Astarte sulcata var. pseudo- fusca, etc. La disparition de ces espèces est en effet progressive, et comme nous le verrons plus loin, il paraît y avoir une grande différence entre les faunes du Calabrien inférieur et supérieur. On remarquera enfin que les différences fauniques qui séparent le Pliocène supérieur du Quaternaire, sont loin d’égaler celles qui exis- tent entre le Pliocène ancien et le Pliocène supérieur : car dans ce dernier cas, ce sont, non plus des espèces, mais des groupes tout entiers, sous-genres, genres ou familles, qui disparaissent de la faune méditerranéenne. Après avoir ainsi examiné les « disparitions » (par émigration ou par extinction complète) qui ont appauvri la faune au cours du Calabrien, 1l nous reste à examiner les « apparitions » qui sont venues l’enrichir. Ces espèces, immigrées de l'Atlantique, nous donneront des caractères positifs pour distinguer le Pliocène supé- ieur du Pliocène ancien. Formes d'origine atlantique apparaissant pendant le Galabrien. Pecten maximus L. + Trophon muricatus Mts. Chlamys islandicus L. Chrysodomus sinistrorsus Modiola modiolus L. Desh. + Cyprina islandica L. + Buccinum undatum L. Mactra solida L. + Buccinum humphreysia- Mya truncata L. num Benn. Tellina perîfrigida de Greg. +- Natica Montacuti Forb. Cochlodesma prætenue Pultn. Puncturella papillosa Seg. Magellania septigera Lov. Sauf celles marquées d'une +, ces espèces ne sont d'ailleurs con- nues que dans un très petit nombre de gisements, parfois même dans un seul. 600 SUCCESSION DES FAUNES Toutes persistent dans le Sicilien. Un certain nombre vivent même encore dans la Méditerranée : ce sont donc des «immigrés », mais non des « émigrés ».. Car ces formes sont des éléments nou- veaux absolument étrangers aux faunes antérieures !: elles nous donnent, par suite, des caractères positifs permettant de distinguer le Pliocène ancien du Calabrien, et marquant le début du qua- trième étage méditerranéen de Suess. Mais, plus encore que dans le cas des disparitions de formes, ces « apparitions » ne se font pas simultanément. Subdivisions du Calabrien. Un certain nombre de critériums purement paléontologiques vont donc nous permettre de distinguer plusieurs phases succes- sives dans l’histoire des faunes calabriennes. M. de Stefani, et à sa suite beaucoup de géologues italiens, ont d’ailleurs très bien fait ressortir ces transformations graduelles et successives. A. — Calabrien inférieur. Dans un Calabrien inférieur, les « immigrés du Nord » n'appa- raissent encore quen très petit nombre, tandis que les formes archaïques, survivants attardés des faunes pliocènes, restent assez nombreuses. Un des plus anciens, et en tout cas le mieux connu, de ces gise- ments à affinités archaïques, est celui du Monte Mario (voir p. 290), considéré par M. de Stefani comme le type même de son « Post- pliocène inférieur ». A peine plus récent paraît le gisement de Vallebiaja, moins bien connu (voir p. 303). La position stratigraphique de ces deux gisements est d’ailleurs tout à fait d'accord avec cette interprétation. Car, tant à Vallebiaja qu'au Monte Mario, les sables fossilifères surmontent directement les argiles du Pliocène ancien, et appartiennent donc à la base du Calabrien. Parmi les innombrables gisements de l'Italie du Sud, je n’en connais aucun qui soit aussi typique comme Calabrien inférieur que * 1 Sur ces divers points, voir les réserves faites à propos de chacune de ces formes dans la cinquième partie. FE Fa L= ent ! 4 a La Pisfhiey. HAT MP * SUBDIVISIONS DU CALABRIEN 601 le Monte Mario. En Calabre, en effet, il est extrêmement probable que le facies de marnes blanches profondes comprend, non seule- ment le Pliocène ancien, mais aussi la base du Pliocène supérieur : nous en avons eu une preuve nette dans les environs de Catanzaro (p. 39) ; or, ces marnes ne renferment pas de niveau fossilifère bien caractéristique, car ceux-ci n'apparaissent qu'avec les premiers apports sableux. Le gisement de Gallina O., considéré par M. de Stefani comme du Calabrien inférieur, doit plutôt être rattaché au Pliocène ancien : nous avons déjà étudié la question (p. 101). Quant au gisement de S. Cristina d'Aspromonte, dont G. Seguenza a fait de l’Astien, il doit appartenir, ainsi que nous l'avons admis (p. 60), avec M. de Stefani, à une zone assez basse du Calabrien; mais, ne l'ayant pas étudié moi-même, je ne puis rien ajouter à ce qu’en disent les auteurs. Parmi les gisements que j'ai personnellement étudiés, celui de Monte Corvo (p. 83) me parait témoigner d'affinités assez archaiques ; on y rencontre en particulier un Ælabellipecten, et, comme formes septentrionales, je n'y ai trouvé que des Buccins : et cette zone à Flabellipecten flabelliformis et Buccinum undatum recouvre ici directement les marnes blanches à Polypiers formant la base très réduite de la série pliocène. Enfin, en Sicile, la faune des grès et des argiles de Girgenti peut être rapportée au Calabrien inférieur (voir p. 164); cela est naturel d'ailleurs d'après sa position stratigraphique, immédiatement au- dessus des marnes plaisanciennes. B. — Calabrien supérieur. La plupart des gisements fossilifères de l'Italie du Sud semblent donc appartenir au Calabrien supérieur. Au point de vue paléontologique, ce Calabrien supérieur est remarquable par la très grande rareté (pour une même localité) des espèces éleintes, et au contraire par l'abondance des formes septen- trionales ; mais ces dernières, dont le nombre apparaît considérable d'après la liste donnée plus haut, sont loin de se trouver réunies dans un même gisement : elles apparaissent sporadiquement, et, à ce point de vue, aucun gisement calabrien ne montre une richesse en « émigrés du Nord » comparable à celle du Sicilien de Palerme. 602 SUCCESSION DES FAUNES Mais si, négligeant les formes caractéristiques, toujours plus ou moins rares, on envisage la physionomie d'ensemble de ces faunes calabriènnes, elles ont déjà un caractère d'extrême jeunesse, et montrent fort peu de différences avec les faunes quaternaires. Aussi s’explique-t-on fort bien que M. de Stefani, ne prêtant d'attention qu'au point de vue paléontologique, ait contemporanéisé la plupart de ces gisements du Calabrien supérieur avec le Sicilien de Palerme. $ 2. — LA FAUNE SICILIENNE Comme je l’ai déjà fait remarquer, le gisement de Palerme réunit à lui seul toutes les espèces caractéristiques du Sicilien trouvées ailleurs. C’est donc cette faune de Palerme qu'il nous suffira d'étu- dier comme fype de la faune sicilienne. Nous le ferons en prenant pour base les beaux travaux de M. di Monterosato |[114-116]!. On trouve précisément énumérées, dans une publication récente de cet auteur [114], toutes les espèces éteintes et émigrées caractéristiques de cette faune, les seules qui nous intéressent ici. Le savant conchyliologiste de Palerme a bien voulu me communiquer des échantillons de la plupart d’entre elles. Depuis cette publication, d’ailleurs, il a été amené à distinguer un grand nombre d'espèces ou variétés nouvelles, de sorte que la liste donnée par lui en 1891 s’en trou- verait, en apparence, remaniée de fond en comble. Mais je suis tenu ici d'interpréter ces formes à un point de vue tout à fait différent de celui auquel se place M. di Monterosato : je ne puis en effet retenir comme espèces caractéristiques que celles qui sont suffisamment bien définies, isolées, faciles à reconnaître, pour qu'un stratigraphe puisse en tenir compte. Ce travail de critique a été fait pour chaque espèce en particu- lier, dans la cinquième partie de cet ouvrage, et il m'a amené à admettre, dans les listes de M. di Monterosato, quelques modifications concernant en particulier les petites espèces (Rissoidés, Pleurotomidés, etc.). Je me borne donc à citer ici les espèces qui subsistent après ce travail de cri- 1 On trouvera dans un travail de M. Checchia-Rispoli [34] beaucoup d'indications sur la faune échinologique du Sicilien de Palerme. Je ne puis la discuterici, et me contente de noter la très grande fréquence, dans le gisement du Monte Pellegrino;, des Echinolampas Hoffmanni Desor : j'en aï recueilli moi-même de nombreux exemplaires, ainsi que dans le Sicilien de Balestrate. Il est curieux de voir persister jusque dans des faunes aussi récentes un genre aussi étranger à la Méditerranée actuelle. 1 | 4 | | FAUNE SICILIENNE 603 tique, en renvoyant, à propos de chacune d'elles, à ce qui en a été dit plus haut. 1° Formes éteintes du Sicilien de Palerme. Plicatula mytilina Phil, P. abscondita Mtrs. — ?P.lævis Bell. Sd Crenella sericea Brn. Nucula placentina Lmk. Chama placentina Defr. Lucina (Codokia) tigerina L. Arcopagia ventricosa M. de serres Clavagella bacillum Br. Dentalium rectum L. Raphitoma Columnæ Scacchi Nassa clathrata Born mut. ficaratiensis Mtrs. sp. Nassa musiva Br. mut. cras- sesculpta Brugnone sp. Brocchia sinuosa Br. et var. Comme précédemment pour le Calabrien, il s’agit ici, non pas de mutations éteintes, mais de rameaux disparaissant de la Médi- terranée après le Sicilien. Les formes suivantes ne sont guère que des mutations, jusqu’à présent non signalées en dehors du Sicilien, d'espèces encore vivantes dans la Méditerranée : Tellina cumana mut. aroda de Greg. sp. Cassis platystoma Brugn. Cypræa sphæriculata Lmk. Trochus granulatus Born var. lævis Brugn. Fissurella gibberula Lmk. var. latecostata Brugn. sp. A ces formes, qui n'ont pas grande importance stratigraphique, on pourrait évidemment en ajouter beaucoup d’autres. 2° Formes émigrées du Sicilien de Palerme. Un certain nombre sont des formes franchement septentrionales, complètement disparues de la Méditerranée, ce sont : Chlamys islandicus L., GC. ti- grinus Müll. Cardium echinatum L., type. Cyprina islandica L. Dosinia lupinus L. var. ficara- tiensis nov., aff. D. lincta Pult, Tapes rhomboides Penn. Mya truncata L. Panopæa norvegica Speng. Cochlodesma prætenue Pultn. Chrysodomus sinistrorsus Desh. Buccinum undatum L. et var. Trichotropis borealis Brod. et Sow. Natica Montacuti Wood 604 SUCCESSION DES FAUNES D'autres ne peuvent être considérées comme absolument éteintes dans la Méditerranée, mais elles y sont tout au moins fort rares et en régression évidente : ce sont des émigrés du Nord attardés : Pecten maximus L. Arcopagia crassa Penn. Chlamys septemradiatus Müll. Buccinum humphreysianum et var. è Benn. et var. Mactra solida L. D’autres enfin, auxquelles j'ai laissé des noms particuliers, sont néanmoins érès voisines d'espèces atlantiques vivantes : telles sont entre autres : Cardium echinatum L. var. Tellina perfrigida de Greg. propexa Mtrs. sp. Mitra cf. Aquini O. G. Costa Toutes ces espèces servent ainsi, concurremment avec les formes éteintes, à distinguer la faune sicilienne de la faune actuelle. Reste maintenant à voir comment on peut distinguer cette même faune sicilienne de la faune calabrienne. On le pourra surtout par des caractères négatifs; et nous avons donné plus haut la liste des espèces disparues avant le Quater- naire, et qui peuvent être utilisées à cet effet ; 1l est remarquable en particulier de constater l'absence complète, dans le Sicilien de Palerme (comme d’ailleurs dans tous les autres gisements quater- naires) des Terebratula s. str., des Cerithium varicosum, des Tur- ritella vermicularis et {ornata, si abondants presque partout dans le Pliocène supérieur, jusqu'au sommet du Calabrien. Les caractères positifs sont plus difficiles à préciser. Comme formes immigrées apparaissant dans la Méditerranée seulement avec le Sicilien, on ne peut guère citer en toute rigueur quele Trichotropis borealis et le Chlamys tigrinus; la Panopæa norvegica semble avoir été rencontrée dans le Calabrien de Girgenti par Stôhr ; quant aux autres émigrés du Nord, ils sont tous connus dans la Méditer- ranée dès le Calabrien. Mais il y a néanmoins, à ce point de vue, une importante différence entre les faunes calabrienne et sicilienne. On ne connaït, en effet, dans le Calabrien, aucun gisement où autant de formes septentrionales se trouvent réunies avec autant de fréquence que dans le Sicilien de Palerme ; certainement c’est au Sicilien que se trouvent portées au TRE DATE 2 FAAMEY FAUNE DES COUCHES A STROMBES 605 maximum les influences atlantiques qui ont paru à Suess assez importantes pour mériter la création d’un quatrième étage médi- terranéen. 80 Les formes caractéristiques des autres gisements quaternaires antérieurs aux couches à Strombes. Le gisement de Palerme étant de beaucoup le plus riche de tous les gisements quaternaires antérieurs aux couches à Strombes, 1l n'est pas étonnant de constater que ces autres gisements ne nous apprennent presque rien de plus sur les faunes quaternaires. Comme espèces caractéristiques n'ayant pas été rencontrées à Palerme, je ne puis guère citer que les formes septentrionales sui- vantes! : Modiola modiolus L. (gisement sous-marin près de la frontière franco-espagnole, gisements d'Ischia et de Pouzzoles). Venus fasciata Da Costa (Algérie, niveau de 60 mètres). Et deux espèces éteintes : Arca syracusensis Mayer (gisement de Casa Fontana Matta, niveau de 50-60 mètres, près Corneto). Tapes Dianæ Requien (Quaternaire ancien du Marchesato, niveau de 160-230 mètres). Une autre forme est à signification plus obscure : c’est la Cancel- laria piscatoria Gmel. (niveau de 60 mètres près d'Oran), qui peut être, soit une forme autochtone descendant des formes pliocènes anciennes, soit une forme immigrée, venue des mers africaines. $S 3. — LA FAUNE DES COUCHES A STROMBES On ne peut plus guère nier que les couches à Strombes ne pré- sentent une individualité très marquée, au seul point de vue paléon- tologique ; cette individualité résulte de l'association constante d’un certain nombre de coquilles à affinités méridionales, formant les seules « espèces caractéristiques » de cette faune. Car le rôle des espèces éteintes est définitivement terminé. Je ne puis en effet tenir compte de la Mactra rhegiensis, espèce nouvelle connue par un seul exemplaire des couches à Strombés de 1 Je laisse de côté les espèces signalées comme éteintes par le général de Lamothe dans le Quaternaire ancien d'Algérie : elles ont été discutées plus haut (p. 325). 606 SUCCESSION DES FAUNES Ravagnese (voir p. 448), ni du Trochus bullula Fisch., cité par le général de Lamothe en Algérie (voir p. 327). Néanmoins on peut signaler spécialement le Tapes Dianæ Requ., qui, descendant sur place du Tapes senescens pliocène, persiste jusque dans des couches peut-être plus récentes encore que les couches à Strombes. Mais en somme ce ne sont là que des raretés exceptionnelles, et le caractère dominant de la faune est donné par des espèces à affinités subtropicales. Un certain nombre ont pu être identifiées avec des coquilles vivant actuellement sur les côtes d'Afrique, Sénégal, Guinée, îles du Cap-Vert, Canaries. Ce sont : Mytilus senegalensis Reeve Conus testudinarius Martini — M. Charpentieri Dunk. Tritonidea viverrata Kiener Arca Geissei Dunk. Tritonium ficoides Reeve Gardita senegalensis Reeve Strombus bubonius Lmk. Mactra Largillierti Smith Natica lactea Guild. Tugonia anatina Gmel. Natica Turtoni Smith Tornatina Knockeri Smith Pusionella nifat Brug. D’autres n’ont été jusqu'à présent identifiées avec aucune espèce vivante, mais elles appartiennent à des genres ou sous-genres inconnus dans la Méditerranée actuelle, et représentés au contraire sur les côtes occidentales d'Afrique, où il est probable que l'on découvrira les descendants directs des formes en question. Telles sont : Imbricaria Caterinii Mene- Cyphoma bhbovetensis G. Se ghini t guenza D'autres enfin, absentes ou tout au moins très rares dans la Méditerranée, se retrouvent dans l'Aélantique tempéré : Pecten maximus L. Tapes rhomboides Penn. Venus fasciata da Costa : Mitra cf. Aquini O.-G. Costa Dosinia lupinus L. var. aff. D. lincta Pult. Enfin, nous y signalerons encore certaines espèces, vivantes dans la Méditerranée, mais fréquentes aujourd’hui seulement dans les 1 M. Dautzenberg vient de me confirmer l'identité de cette espèce avec l'Z. car- bonacea Hinds, des côtes d'Afrique. (TAN da hs à L' tr agit nt Eh nel de ehtiots ré di à ta sm Sent ad 15 4 - Laté trés MIGRATIONS 607 parties les plus chaudes de cette mer, et qui, à l'époque des Strombes, étaient au contraire abondantes partout : Spondylus gæderopus, Cassis nium costatum, Panopæa saburon, G. undulata, Tri- glycymeris, Purpura hæma- tonium nodiferum, Trito- stoma, etc. Parmi ces formes, les plus caractéristiques sont évidemment les premières, qui sont d’ailleurs de beaucoup les plus abondantes dans tous les gisements. Elles permettent de distinguer par des caractères positifs la faune à Strombes, non seulement de la faune actuelle, mais encore des faunes quaternaires plus anciennes. Car il semble bien qu'un bon nombre de ces espèces n’ont pas de racines dans les faunes méditerranéennes antérieures ; elles ont par suite immigré momentanément dans notre mer à l’époque des Strombes, pour en émigrer ensuite. Cette conception, comme toutes celles qui résultent de faits négatifs, est évidemment provisoire. Déjà, comme l'a fait remarquer avec juste raison M. de Stefani, on entrevoit pour cer- taines d’entre elles la possibilité d’une filiation directe par des ancêtres ayant toujours habité la Méditerranée (voir ce qui est dit plus haut du Sérombus, du Conus et de la Tugonia); mais, pour les autres, elles détonent certainement dans les faunes méditerra- néennes. D'ailleurs, la question ne se pose qu'au point de vue théorique, car, pratiquement, l'individualité de ces couches à Strombes, où apparaissent simultanément toutes ces coquilles si caractéristiques, apparaît au premier coup d'œil. Peut-être un tel fait n'a-t-il qu’une valeur empirique (comme, il ne faut pas se le dissimuler, la plupart des criteriums d'âge employés en géologie), mais il n'en est pas moins fort commode pour arriver à une chronologie à peu près exacte de ces dépôts récents. D'autant plus que, partout où on les trouve, ces couches à Strombes se montrent, au point de vue stratigraphique, plus récentes que tous les autres dépôts quaternaires. $ 4. — CONCLUSIONS. — MIGRATIONS ET ÉVOLUTION SUR PLACE PROVINCES PALÉONTOLOGIQUES Dans l'exposé sommaire que nous venons de faire ci-dessus, on aura été sûrement frappé par le fait que, pour caractériser les 608 SUCCESSION DES FAUNES faunes qui se sont succédées dans la Méditerranée depuis le début du Pliocène, nous n'avons fait appel qu'à des apparitions et à des disparitions de formes, c’est à dire à des phénomènes de migration. Ces phénomènes de migration ont en effet l'avantage, au point de vue stratigraphique, de donner lieu à des renouvellements plus ou moins importants, mais en tout cas relativement rapides, de la faune; comparés aux phénomènes d'évolution sur place, ils nous permet- tront donc d'établir, dans la succession des faunes en un même point, des coupures plus précises. Au contraire, les mutations subies sur place sont, pendant la durée géologique relativement courte du Pliocène et du Quaternaire, presque impossibles à utiliser au point de vue stratigraphique. Car ces mutations se révèlent en général, non pas par des caractères précis, visibles sur un seul individu, mais par des caractères d'en- semble, appréciables seulement après examen d’une multitude d'échantillons appartenant à des faunes successives (voir plus haut le cas des Turritelles du groupe friplicata-communis); leur étude, très intéressante au point de vue paléontologique, ne présente pas en stratigraphie un grand intérêt pratique. De nombreux cas de ces faits d'évolution sur place ont été étudiés dans la cinquième partie. Je me bornerai à rappeler ici, à titre d'exemples, ceux qu'on peut considérer comme les plus classiques, et qui ont donné lieu à des dénominations différentes pour la forme pliocène et la forme actuelle. Forme pliocène ancienne Forme actuelle Cardita rudista. . . . G. aculeata. Tapes eremita. — T. oboidest var. an- tiqua. . . «+ T. rhomboides. Panopæa irevemenie var. PAU ja st Fou P. glycymeris. Cancellaria cancellata var. ote lata : GC. cancellata. Fasciolaria nee. F. lignaria. Euthria cornea var. tenirqe te E. cornea: - Raphitoma harpula. — KR. Columnæ. : Nassa prismatica N. limata.. -Murex craticulatus . . . . . : . . . M. Brocchii. - Murex cristatus. . . . . . . . .. . .. M, Blainvillei. ÉVOLUTION 609 Tritonium affine dns Cassis saburon var. lævigata . Saburon. Chenopus uttingerianus . . Serresianus. T. corrugatum. [0 PRE C1 Turritella triplicata. — T. for . T. communis. X D Xenophora commutata . . . . mediterranea. Danilia sublimbata . . - . . . . . . Tinei Ces mutations sont de valeur très inégale ; quelques-unes sont très marquées, si marquées même qu'on peut douter de leur unité phylétique (exemple les Chenopus) ; la plupart ne sont appréciables, comme nous l'avons dit, qu'en étudiant un très grand nombre d’échantillons (exemple Panopées, Turritelles) ; dans d’autres enfin (exemple Xénophores), il y a si peu de différences entre la forme ancienne et la forme récente, que la plupart des auteurs renoncent complètement à les distinguer. La rareté apparente de ces phénomènes d’évolution tient à des causes qui nous empêchent de les reconnaître nettement; et à ce point de vue, les espèces peuvent se partager en deux groupes opposés : 1° des formes stables, toujours aisément reconnaissables, et dans lesquelles, depuis le début du Pliocène, il est bien difficile de saisir la moindre variation; 2° des formes ou plutôt des groupes de formes, en évolution active, avec de nombreux rameaux qu'il est dif- ficile de déméler ; dans ce cas, ce polyphylétisme mêmenous empêche de reconstituer exactement comment ont dû se produire les varia- tions dans chaque phylum différent. Ce phénomène de polyphylétisme nous apparaît ainsi extrêmement fréquent, presque comme la règle; ainsi, j'ai eu bien souvent à con- stater que les formes éteintes les plus caractéristiques représentent des fins d'évolution de rameaux latéraux, tandisqueles formesancestrales, à différenciation moins marquée, et par cela plus souples aux varia- tions, continuent à vivre, prêtes à donner de nouveaux rameaux latéraux dans la suite de leur évolution. En tout cas, une loi me paraît bien nettement se dégager des faits : c’est celle de l'augmentation de taille au cours de l’évolution des rameaux phylétiques. On sait que M. Depéret a excellemment fait ressortir l'importance de cette loi pour l’étude des Vertébrés. Ainsi les formes qui disparaissent, et qui sont les plus utiles à consi- dérer en stratigraphie, sont presque toujours de grandes coquilles, grandes tout au moins par rapport aux autres formes de leur groupe qui Univ. DE Lyon. — Gicnoux. 39 610 SUCCESSION DES FAUNES continuent à vivre ; aussi bien, est-ce parmi ces grandes coquilles que se rencontrent presque toutes les espèces caractéristiques ; personne ne songerait à utiliser pour la classification chronologique les petites espèces de Rissoidés ou de Cérithidés, par exemple, non pas seulement à cause de leur petite taille, mais surtout à cause de leur polymorphisme, en d’autres termes, de la multiplicité et de l’exubérance de leurs rameaux phylétiques. Influence des facies. Nous avons noté, au cours de la cinquième partie, divers exemples d'espèces où des variétés différentes peuvent être attribuées à des adaptations à des facies différents. Ces adaptations seront même, si l’on n’y prend garde, une cause d'erreur dans l'étude des phénomènes d'évolution sur place, et voici comment : On peut poser en principe général que les facies les mieux connus dans les formations successives sont d'autant plus profonds que ces formations sont plus anciennes. Ainsi, quand on voudra définir pour une même espècele s formes dominantes qui se succèdent dans les divers terrains étudiés ici, on sera tout naturellement amené à con- sidérer comme dominantes des formes profondes pour les formations anciennes du Pliocène, et des formes litforales pour les dépôts récents du Quaternaire; de là une tentation bien naturelle de consi- dérer les premières comme une mutation ancestrale des secondes, en ne voyant là qu'une évolution uniphylétique. La réalité semble tout autre: car il est probable que l’on a affaire ici à deux rameaux différents et ayant évolué parallèlement, l'un composé de variétés littorales et l’autre de variétés profondes de la même espèce!. Cette considération nous explique en partie aussi le fait que la plupart des formes vivantes inconnues à l’état fossile sont des formes très littorales ; l'impossibilité où nous sommes de leur trouver des formes ancestrales voisines, tient donc à une simple lacune dans nos connaissances. On sait d’ailleurs qu’inversement, les faunes profondes fossiles ont été plus rapidement connues que les faunes profondes actuelles, et chaque jour s’augmente le nom-— bre des espèces profondes connues auparavant seulement à l’état 1 On pourrait dire aussi qu'il ne s'agit que d’un seul tronc évolutif, dans lequel les mêmes causes (les facies) ont donné naissance, pendant les diverses périodes successives, aux mêmes adaptations (c'est-à-dire aux mêmes variétés). PR RS Mes ee à 3 Na RL OPEL "45 PROVINCES CONCHYLIOLOGIQUES 611 fossile et que les récentes explorations rapportent du fond des mers actuelles. Néanmoins, dans l’ensemble, on ne peut manquer d’être frappé de la richesse en formes et de la rapidité d'évolution des espèces littorales, comparées à la monotonie et à la stabilité des espèces profondes. Marion avait déjà érigé en principe ce fait que « ce sont les faunes littorales qui donnent à chaque mer son caractère zoolo- gique propre », et il est très remarquable de constater que les dif- férences paléontologiques entre le Pliocène ancien et l'époque actuelle, si marquées pour les faunes un peu littorales, s’atténuent de plus en plus si l'on s'adresse à des faunes très profondes. A tel point que certaines récoltes faites dans les marnes blanches du Pliocène ancien de l'Italie du Sud ne fournissent que des espèces (Seguenziidés, Solariidés, Dentalidés, Nuculidés, etc.) encore vivantes. Provinces conchyliologiques. Dans le cadre fort restreint de la Méditerranée occidentale, on ne peut guère distinguer, à proprement parler, de provinces conchy- liologiques. Les différences de faune entre les diverses parties de cette mer paraissent plus marquées actuellement qu'au cours du Pliocène et du Quaternaire. Pour l’époque actuelle, il ressort nettement du travail de Wein- kauff [233] que la faune des côtes algériennes (et aussi de la Sicile et de Malte) est notablement plus riche en espèces que celle du reste de la Méditerranée occidentale; d’ailleurs, ces formes, qui enrichissent ainsi les parties les plus méridionales de la Méditer- ranée, ont des affinités nettement atlantiques, et leur centre de développement se trouve, en général, sur les côtes Ouest-africaines : ce sont des héritages de la faune à Strombes. À l’époque des Strombes, en effet, ces espèces chaudes parais- saint plus uniformément répandues dans toute la Méditerranée, car nous trouvons dans les gisements niçois les Spondylus gæderopus, Apollon scrobiculator, etc., qui ont aujourd’hui presque abandonné les côtes françaises. Dans le Pliocène et le Sicilien, la faune méditerranéenne est presque parfaitement homogène. Il est très frappant, à ce sujet, de 612 GISEMENTS DE MAMMIFÈRES. faire la remarque suivante : MM. De Lamothe et Dautzenberg [152] viennent de faire une revision soigneuse de toutes les espèces du Pliocène algérien, et ce travail ne leur a montré qué des espèces ou variétés identiques à celles que l’on trouve dans les gisements du même âge del’ Jtalie 1. Fontannes avait bien insisté sur l'existence de nombreuses nee spéciales au Pliocène rhodanien, mais pour nombre d’ entre elles, M. Sacco aremarqué qu’elles se retrouvent en réalité en Italie; d'ailleurs, comme le dit Fontannes lui-même, ces variétés spéciales se montrent. en général confinées dans les parties les plus reculées de l’ancien fjord rho- danien, c'est-à-dire dans des conditions de facies très spéciales. Enfin, si les faunes pliocènes de l'Italie du Sud accusent souvent un caractère particulier, cela tient surtout à ce qu'elles correspondent à à des _facies profonds inconnus ailleurs : elles ont des affinités plus atlanti- ques, et partant une plus grande richesse que la faune profonde de la Méditerranée actuelle. Il semble donc que, depuis le début du Pliocène, la faune pro- fonde de la Méditerranée soit allée en s’appauvrissant, en même temps que la faune littorale s'enrichissait en variétés locales 2, et s’écartait de plus en plus de la faune atlantique. C’est le sort com- mun à toutes les mers intérieures. CHAPITRE If LES GISEMENTS DE MAMMIFÈRES Bien que l'étude des faunes continentales soit en dehors de mon sujet, j'ai cru bon de rappeler ici les trop rares gisements de Mam- mifères qui peuvent être mis enrelation avec des formations : marines bien caractérisées ?. mo à ce aie . ’ai dit pu haut te partie, P. 6) au sujet d ie 1 À part de très rares exceptions. 8 2 On peut citer comme exemple tout le groupe du Chalmys glaber. 3 Pour l'Italie méridionale, le catalogue de Flores [125] constitue un répertoire utile. cnAt æ «TES Ti! » ELEPHAS MERIDIONALIS 613 la classification de ces faunes de Mammifères, Je me bornerai à distinguer ici deux groupes de gisements : les uns contiennent l'Elephas meridionalis et se rapportent au Villafranchien, ou Pliocène supérieur; les autres contiennent l'Elephas antiquus, forme quaternaire. $ 1. — GISEMENTS A ELEPHAS MERIDIONALIS La faune villafranchienne à ÆElephas meridionalis semble bien apparaître un peu avant le début du Calabrien, tel que nous l’avons défini à l’aide des faunes marines; on sait, en effet, que dans le pays d’Asfi les Mastodontes et les Eléphants caractéristiques se ren- contrent déjà dans les couches supérieures de l’Astien typique et y sont associés à des coquilles marines. En Toscane, nous avons constaté le même fait (voir p. 308). Certains géologues italiens, entre autres M. de Stefani, sont même allés beaucoup plus loin et n'ont pas reconnu la possibilité de distinguer une faune de Mammifères, pliocène ancienne, distincte de la faune villafranchienne; cela tient à ce que cette faune ancienne est assez mal représentée en Italie. Mais ailleurs les travaux des géologues français ont suffisamment montré son indi- vidualité. Il est bien prouvé, néanmoins, qu'en Toscane la faune villafranchienne du Val d’Arno se montre contemporaine des cou- ches supérieures marines du Pliocène ancien. Aussi semble-t-il assez peu rationnel de faire débuter le Quaternaire avec l'apparition des KEléphants : car cela obligerait à couper en deux, d'une façon tout à fait arbitraire, les couches marines du Pliocène de l'Italie du Nord. Il m'a paru préférable de distinguer simplement un Pliocène supérieur marin ou Calabrien, tout en reconnaissant que la limite de ce Calabrien marin ne coïncide pas exactement avec celle du Villafranchien continental ; ce fait n'a d’ailleurs rien d'étonnant, car il n'y a aucune raison pour que les changements survenus dans les faunes marines soient précisément contemporains des immigrations continen- tales qui ont amené dans nos régions la faune villafranchienne d’origine asiatique. - ! Au sens donné, en général, en France, à cet étage : on sait que M. Haug con- sidère, au contraire, la faune à E. meridionalis comme marquant le début du Qua- ternaire. D RP ETE CES VON \ Re Un SE 614 GISEMENTS DE MAMMIFÈRES Il nous reste maintenant à rappeler un certain nombre de faits montrant que la faune villafranchienne a bien vécu pendant le Ca- labrien marin; je me borneraï à citer quelques gisements particu- : lièrement typiques, et où il s’agit de pièces bien déterminées et de % provenance bien authentique : 1° Il existe au Musée géologique de l’Université de Pise une molaire bien typique d'£lephas meridionalis, provenant des environs de Fauglia (p. 308), c'est-à-dire de couches marines probablement à peu près contemporaines de celles de Vallebiaja. 2° J'ai déjà rappelé plus haut (p. 294) la molaire d'Elephas meri- dionalis, également bien typique, trouvée au Monte Mario, associée à des Oursins (Echinolampas), au-dessus des couches contenant la faune marine classique du Monte Mario; cela nous montre avec la $ plus entière certitude que l’Elephas meridionalis a vécu là posté- * rieurement au Calabrien inférieur. Un autre exemple nous est fourni par la molaire de la même espèce, citée par Meli dans le Pliocène : supérieur des Monts de la Magliana (voir p. 294). 3° Une autre molaire a été soigneusement étudiée par L.Seguenza, sous le nom de « Eléphant de Gravitelli » ([212], p. 14). Elle était conservée dans le Musée géologique de l’Université de Messine, et provenait « des sables quartzifères à faune typique du Pliocène supérieur, étage Sicilien », de Gravitelli, près Messine; nous avons déjà étudié en détail la coupe de cette localité et montré qu'il s'agissait là de Calabrien; cette molaire, malgré son médiocre état de conservation, a été déterminée par L. Seguenza comme E. CRT. mie meridionalis. 4 Enfin, je ne puis me retenir, sortant de la Méditerranée occi- È dentale, de rappeler ici le gisement d'Anfimachia, à Cos, sur Fa lequel mon attention a été appelée par M. Depéret [86]. On voit, en effet, là, une abondante faune de Mammifères villafranchiens des plus typiques coexister avec une faune de Mollusques marins, appartenant tous à des espèces vivantes et dont l’âge récent, proba- blement calabrien, n’est pas douteux. ETS Dé jeu 4" vbs etes $ 2. — GISEMENTS A ELEPHAS ANTIQUUS Il semble bien que la durée de temps pendant laquelle l’Elephas antiquus a vécu dans l'Italie du Sud, et probablement dans toute ELEPHAS ANTIQUUS 615 la Méditerranée occidentale, a été fort longue, car ce Mammifère se montre, comme nous le verrons, déjà contemporain du Sicilien marin, et, en même temps, il a certainement vécu encore postérieu- rement à l'apparition de la faune à Strombes ; je vais signaler ici les principaux gisements quil est possible de mettre en relation avec des dépôts marins : 40 Gisement de Livourne. Les travaux faits pour la construction de certaines parties de la ville et du port de Livourne ont permis de récolter, dans des ter- rains certainement marins, de très nombreux restes d’'E. antiquus bien typiques, que l’on peut voir, en particulier, dans les Musées des Universités de Florence et de Pise. Comme nous l’avons vu, ces couches marines sont d’âges très divers et se rapportent soit au Sicilien, soit aux couches à Strombes ; de sorte que l’on peut avoir ici quelque incertitude sur la faune marine exactement contem- poraine des Æ. antiquus. Toutefois, d'après M. de Stefani, cette espèce aurait bien été rencontrée, à Eivourne, dans les couches à Cyprina islandica (voir p. 311), c’est-à-dire dans le Sicilien. 2° Gisement de Corneto, près Civita-Vecchia. Ce gisement a été étudié plus haut (p. 299) : il s'agit de restes d’E. anfiquus provenant de couches marines sans faune caracté- ristique, mais qui se montrent discordantes d'avec la série pliocène et correspondent à une ancienne ligne de rivage située à une altitude de 60 mètres environ. 3° Gisement de S. Severo, près Foggia. On en a vu plus haut (p. 280) les conditions stratigraphiques. La molaire d'£. antiquus, étudiée et figurée par M. Checchia-Rispoli, a été trouvée, indubitablement en place, dans une série de remblaie- ment quaternaire qui dépend d’un niveau de base de 100 mètres environ. La faune marine de ces couches n’est pas caractéristique, mais tout indique que nous avons bien là du Sicilien marin. 4° Gisements des environs de Reggio. Nous en retiendrons seulement trois : 616 GISEMENTS DE MAMMIFÈRES A. Le gisement le mieux connu, au point de vue stratigraphique, est celui de Condora, sur la route carrossable de Reggio à Terreti. Cette route recoupe, en effet, le soubassement marin de la terrasse de Condora ou du cimetière de Reggio, correspondant à un niveau de base de 100 mètres environ ; on a trouvé là (pour plus de détails, voir L. Seguenza [212]) un squelette presque entier d'Eléphant, dont quelques molaires seulement furent conservées au Musée géo- logique de l’Université de Messine, puis étudiées et figurées par L. Seguenza, qui y reconnut un Æ. antiquus bien typique. Pour l’âge de ces couches marines de Condora, on peut hésiter (voir plus haut, p. 227) entre le Sicilien et le niveau à Strombes, mais elles sont sûrement quaternaires. B. Des restes de Mammifères ont été cités par G. de Stefano au nord de Reggio, dans la région appelée Monte Corvo; cet auteur [rr1] avait signalé là, côte à côte, l'Elephas meridionalis et le Rhinoceros Mercki, coexistence plutôt surprenante ; une discussion eut lieu à ce sujet entre lui et M. Flores. On trouvera des détails nombreux dans L. Seguenza [212], qui a, de nouveau, décrit et figuré une molaire assez bien conservée et nettement caractérisée comme Æ. antiquus. La position stratigraphique est malheureuse- ment difficile à préciser: cet Æ. anfiquus doit provenir, très probablement, des alluvions fluvio-marines du niveau de 100 m. (Sicilien), qui est précisément fossilifère tout près de là, à S. Francesco, où nous l'avons étudié plus haut (p. 228). .: G. Dans la localité de Morrocu, c’est-à-dire dans la région du célèbre gisement fossilifère de Boveto, G. de Stefano a signalé et figuré une molaire d’éléphant, revue ensuite par L. Seguenza, qui en a fait un Æ. antiquus: ce fossile provient certainement des couches à Strombes, et la coupe de la localité est identique à celle que nous avons décrite à Ravagnese et à Boveto. 5° Gisement de Mortelle, près Messine. Il s’agit, ici, d'une molaire d'E. antiquus, autrefois conservée à l'Université de Messine, et étudiée par L. Seguenza sous le nom de « Eléphant du Faro superiore » ; elle à été trouvée « dans le. Quaternaire inférieur marin des collines du Faro superiore, associée à des valves de Pectunculus »; ce sont là, très probablement, les dépôts de la terrasse marine sicilienne, à 100 m., dominant le ELEPHAS ANTIQUUS 517 village de Mortelle, et dont j'ai donné la coupe plus haut (p. 208); on) j'y ai moi-même trouvé des débris de défenses. 6° Gisements de la région de l'Etna. Les faits relatifs à ces gisements ont été relatés plus haut (Per): A. Des restes d'Hippopotamus Pentlandi ont été trouvés à une très grande altitude dans les rochers du Château de Taormine ils nous montrent donc que cet hippopotame, animal lourd et ne ‘s'éloignant jamais beaucoup des rivages, a dû vivre ici à une époque où le niveau de la mer atteignait une altitude très considérable, probablement 150 ou 200 mètres. B. Un Ælephas antiquus a été signalé par Basile dans la terrasse du Piano Reitana, correspondant à un niveau de base de 100 mètres environ. 7: Gisement de Porto-Empedocle, près Girgenti!. Stôhr a signalé, dans les sables jaunes de la terrasse quater- naire, à 70-80 mètres, des environs de Porto-Empedocle, des restes dE. antiquus et d’E. africanus; comme je l’ai déjà indiqué (p. 215), il est probable que tous ces restes doivent être rapportés à la première de ces espèces. 8° Gisements de Palerme:. Nous aurons à distinguer soigneusement, dans la région de Palerme, les gisements qui se montrent contemporains du véritable Sicilien type, et ceux qui se rattachent, au contraire, aux dépôts littoraux post-siciliens étudiés plus haut. A. Gisement de Luparello. Cette localité est située exactement à l’ouest de Palerme, près du 1 Je laisse de côté l’ € Eléphant de Rizzolo » (voir L. Seguenza f[212l), trouvé sur le territoire de Francofonte, province de Syracuse. C’est un E. antiquus découvert dans des alluvions continentales surmontant des sables marins très fossilifères : je n'ai pas visité cette localité, mais, d’après la faune, il me parait que les sables marins doivent appartenir au Calabrien. Les alluvions peuvent donc être Cala- briennes supérieures ou Siciliennes, et, d'après la présence de l'Eléphant, cette der- nière hypothèse est la plus probable. > Je ne parlerai pas ici des grottes ossifères, si nombreuses dans la province de Palerme : elles contiennent la faune à E. antiquus et Hippopolamus Pentlandi : mais elles ne nous renseignent pas directement sur le synchronisme de cette faune avec les faunes marines. 6 18 GISEMENTS DE MAMMIFÈRES bord de la plaine quaternaire, et au-dessous du village de Baïda, construit sur les premières pentes du Monte Cuccio. M. de Gregorio [76] a signalé là des molaires d'Elephas anfiquus dont il a donné des figurations assez médiocres. Ce fossile a été trouvé associé à des coquilles très littorales. Ce gisement devant se trouver à une altitude de 60-80 mètres, et dans une région où il n'existe pas de dépôts post-siciliens, il ne me paraît pas douteux qu'il ne pro- vienne bien des couches déposées sur les anciens rivages de la mer sicilienne. B. Localité non précisée des environs de Palerme. IL existe, dans les collections de l’Université de Palerme, une belle molaire d'E. antiquus que j'ai eu l’occasion d'y examiner en compagnie de M. Depéret; des moulages de cette pièce sont, d’ailleurs, répandus dans divers musées italiens, et sa détermination n’est point douteuse: on voit encore, attachée à la dent, une coquille de Pecten jacobæus. Mon excellent confrère et ami G. Checchia-Rispoli a bien voulu me confirmer que la gangue de cet échantillon était certainement formée par « les classiques fufs calcaires du Sicilien de Palerme »; j'ajouterai qu’au point de vue lithologique, ces mollasses calcaires du Sicilien sont très faciles à distinguer des formations post-siciliennes (pietra molare et scorcione). Malheureusement, comme provenance, nous n'avons que l'indication « environs de Palerme ». C. Gisement de l'Acqua dei Corsari. Il s’agit encore de molaires d'E. antiquus décrites par M. de Gregorio [76]; mais, ici, elles proviennent de la « Pietra molare » post-sicilienne que nous avons précisément étudiée plus haut (p- 196) à l'Acqua dei Corsari, petite localité située non loin de Ficarazzi : cette formation est probablement à pes près contempo- raine des couches à Strombes. 9° Gisements des Côtes algériennes.. Les conclusions qui résultent de l’étude de ces gisements viennent d'être précisées récemment par le général de Lamothe ([155] p. 238); elles n’apportent aucun fait nouveau bien intéressant, et nous montrent seulement la persistance, jusqu'après le niveau de 18 mètres (couches à Strombes), d’éléphants du groupe de l’anti- quus (E. iolensis Pomel, Æ. atlanticus Pomel). CONCLUSIONS 619 10° Gisement de Gibraltar. J'ai déjà indiqué plus haut (p. 332) les résultats auxquels sont arrivés, ici, MM. Ramsay et Geikie : certaines de leur conclusions ne paraissent pas à l'abri de toute critique, mais il demeure néanmoins bien prouvé, et c’est ce que nous en retiendrons, qu'ici l'E. anti- quus se montre contemporain d'une ligne de rivage à 23 mètres. 11° Gisement de la grotte du Prince, à Monaco. Des nombreux faits constatés ou discutés dans cette localité célèbre, nous n'avons à retenir ici qu'une seule conclusion indubi- table, c’est que la faune à Æ. antiquus a vécu, ici encore, postérieu- rement aux couches à Strombes. $ 3. — CONCLUSIONS En résumé, si nous voulons retenir seulement les faits bien prouvés relatifs au synchronisme des formations marines et des faunes de Mammifères, nous serons amenés à formuler les conclu- sions suivantes : 1° La faune villafranchienne à Ælephas meridionalis est apparue dans nos régions un peu avant la fin de l’Astien marin (faits observés dans la Toscane et l’Astésan); 2° L’Elephas meridionalis a certainement vécu encore après le Calabrien inférieur (gisement du Monte Mario) ; 3° L’Elephas antiquus se montre contemporain du Sicilien marin typique (gisement de Palerme); 4° Cette même espèce vivait encore, sur tout le pourtour de la Méditerranée occidentale (Monaco, Algérie) après le dépôt des couches marines à Strombus bubonius. La concordance approximative des deux classifications, basées sur les faunes de Mammifères et sur les faunes marines, apparaît donc nettement : dans l’ensemble, le Villafranchien correspond au Calabrien; et la faune à Æ. antiquus, ou Quaternaire ancien de certains auteurs (M. M. Boule), correspond à la fois au Sicilien et aux couches à Strombes. Cette dernière constatation appelle une remarque importante : elle » 620 GISEMENTS ET FACIES souligne en effet la {rès grande durée de l'E. antiquus : au point de vue des faunes marines, il est impossible de considérer la faune à Æ, antiquus comme une unité; type d’un Quaternaire inférieur ; né ést au contraire eommode de considérer les lignes de rivage atitérieurès au Sicilien, et lé Sicilien lui-même, comme types d'un Quaternaire inférieur, tandis que les couches à Strombes, contenant la dernière faune marine que l’on puisse.distinguer de la faune actuelle, peuvent, à ce point de vue, être fort justement qualifiées de Quaternaire supérieur. CHAPITRE III PRINCIPAUX GISEMENTS ET FACIES CLASSÉS STRATIGRAPHIQOUEMENT $ Î. — LE CALABRIEN I. — La limite inférieure du Calabrien. La question de la limite du Calabrien ne se pose qu’au point de vue paléontologique, car, au point de vue stratigraphique, il est naturellement impossible de définir la position de cette limité dans la série pliocène continue. ES Pour le plus grand nombre des gisements fossilifères, Cote limite est, en général, assez facile à préciser : la preuve en est qu'il y a presque toujours accord entre les divers géologues italiens pour distinguer le « Postpliocène » du Pliocène vrai. Il y a, néanmoins, deux exemples principaux où cette unanimité n'est point réalisée : ce sont, d’une part, le gisément de Gallina O., et, d'autre part, les mollasses de la Terre d'Otrante. J'ai déjà discuté plus haut ces deux cas et montré qu'à mon avis, dans tous les deux, il s'agissait de Pliocène ancien. Je n’y reviens ici que pour en montrer l'intérêt au point de vue général. La faune de Gallina O. est en effet extrêmement intéressante, car aucune autre ne nous montre mieux le passage : insensible du. Plio- cène ancien au Calabrien, au point de vue paléontologique. Dans ce gisement, que j'ai rattaché à l'extrême sommet du Pliseène + È M | CALABRIEN 621 ancien, les formes éteintes ne sont plus aussi abondantes comme individus que dans les gisements plaisanciens et astiens classiques, mais elles le sont encore comme nombre, et si, conformément l'avis exprimé à plusieurs reprises par M. de Stefani, j'avais consi- déré ce gisement comme calabrien, cela m'aurait conduit à allonger encore beaucoup la liste des formes éteintes persistant dans le Cala- brien; pour moi, le caractère de la faune de Gallina O. est dù surtout à sa plus grande profondeur par rapport aux gisements classiques de l'Italie du Nord. Le problème posé dans la Terre d'Otrante (et plus généralement dans les Pouilles) est tout autre : ici la base de la série pliocène est ormée par des mollasses calcaires où les fossiles sont assez nom- breux, mais disséminés, non réunis en niveaux fossilifères précis, sur la position stratigraphique desquels on pourrait discuter. Je érois avoir montré que la partie inférieure, tout au moins, de ces mollasses calcaires, devait être d'âge pliocène ancien; quant à leur partie supérieure, et, en tout cas, aux argiles qui les surmontent, elles sont certainement d'âge nn . Tout récemment, les deux maîtres du Tertiaire italien, MM. C. de étetdai et F. Sacco, ont exprimé à ce sujet des avis absolument opposés. M. Sacco ‘, surtout frappé par les faits de continuité stratigraphique, considère les argiles bleues des Pouilles (de Gravina en particulier), comme absolument contemporaines des argiles plaisanciennes de l'Italie du Nord ; les mollasses calcaires (materin) représenteraient simplement une a enciation locale (à facies « pseudo-astien ») de la base du Plai- sancien ; et les sables surmontant les argiles seraient astiens. M. pe Srerani, au contraire, et à sa suite un grand nombre de géolo- gues, portant: leur attention uniquement sur les faunes, ont une tendance à rapporter toute la série pliocène de Gravina et de la terre d’Otrante (y compris les mollasses calcaires) au « Postpliocène ». . La vérité me parait être entre ces deux extrêmes, et rien ne marque mieux la nécessité d'un étage calabrien, distinct du Plio- cène ancien GE sa faune, mais appartenant encore stratigraphique- ment à la série pliocène. 1 Les premières parties de cet ouvrage étaient déjà rédigées quand j'ai eu connais- sance du travail de M. Sacco [200]. 622 GISEMENTS ET FACIES 225 II — Ya-t-il du Calabrien en dehors de l’Italie méridionale? Après avoir reconnu et défini l'étage calabrien dans la Calabre et la Sicile, nous l’avons suivi, remontant vers le Nord, jusqu’en Toscane; dans l'Italie du Nord, nous avons indiqué la dernière trace du Calabrien marin dans les faunes à Cyprina de l'Emilie. , Dans le Piémont, la Ligurie et la France méridionale, on ne connaît jusqu'à présent aucune faune marine que l'on puisse rap- porter avec certitude au Calabrien; il est extrêmement probable que cet étage y est représenté uniquement sous son facies conti- nental, par les alluvions « villafranchiennes » à Elephas meridionalis Léo Appel Léa.” qui en occupent la place stratigraphique, c’est-à-dire couronnent la série phiocène!. En Espagne et dans les Iles de la Méditerranée occidentale, on ne è connaît non plus rien de comparable au Calabrien marin, mais notre connaissance du Pliocène de ces régions est encore par trop incomplète. Sur les côtes africaines, enfin, il ne serait pas impossible que le Calabrien fût représenté par le sommet de la série pliocène marine (grès du type dit de Draria); mais, ici non plus, on ne connaît encore point de faune suffisamment caractéristique. III. — Les facies. Dans des formations aussi récentes, la notion de facies n’a plus un grand intérêt géographique, en raison de l’extrême irrégularité de ces facies, liés essentiellement à des conditions toutes locales. De plus, le Calabrien n'étant que la fin du remblaiement plio- cène, on verra en un même point s'y succéder des facies différents de Fe en plus littoraux. La répartition géographique des facies du Calabrien n'a donc pas grand intérêt? ; il suffira de remarquer que, dans l’ensemble, et HI LE 1 Peut-être faut-il faire exception pour les poudingues marins du Delta du Var, et pour certains sables et conglomérats marins qui, en Ligurie, surmontent le Plio- cène classique : il ne serait pas étonnant de voir le ‘facies marin persister plus longtemps dans ces régions éloignées des grands golfes comblés par les alluvions fluviatiles. 2 Voir toutefois plus haut (p. 130, 163, 173) l'opposition étudiée entre un facies subapennin et un facies appulo-garganique. CALABRIEN 623 comme pour le Pliocène ancien, on y rencontre des formations de plus en plus profondes à mesure que l’on parcourt l'Italie du Nord au Sud. Mais ces facies influent profondément sur la physionomie des faunes. On pourra donc, à ce point de vue, distinguer les princi- paux types suivants : 1° Marnes blanches oubleues à Polypiers isolés et à Nuculidés. C'est le facies le plus profond que nous connaissions : il est développé uniquement dans l'Italie du Sud, et nous l’avons trouvé, par exemple, dans le détroit de Messine, dans l’isthme de Catan- zaro, sur la côte ionienne, etc. C’est, malheureusement, le plus ingrat au point de vue stratigraphique, car la faune y est, en général, très pauvre en espèces ; celles-ci sont des formes très pro- fondes et, par suite, banales, connues dans le Pliocène ancien et découvertes par les recherches récentes dans les grandes profon- deurs actuelles : nombreux Foraminifères, Lédidés, Nuculidés, Cuspidarndés, Seguenzüdés, Jeffreysuidés, Solariidés, Dentalidés, Polypiers isolés, etc. A vrai dire, comme ces marnes font suite à d’autres marnes dont la base est certainement pliocène ancienne, il est fort malaisé de mettre dans cet ensemble marneux une limite entre le Pliocène ancien et le Pliocene récent; il est seulement probable que le sommet doit être, dans bien des cas, pliocène supérieur, car nous avons observé parfois, comme à S. Maria di Catanzaro, l'apparition de la faune calabrienne typique dans des intercalations de facies plus clastiques à la partie supérieure de la série marneuse. Mais en somme ce facies ne doit empiéter qu’assez peu sur le Calabrien. 2° Marnes blanches à Brachiopodes. Ce facies n’est qu’une modification du précédent, et doit corres- pondre à une profondeur un peu moins grande, étant donné l'abon- dance des Brachiopodes, lesquels, comme l’a montré M. de Stefani, devaient habiter dans la mer pliocène une zone disposée le long des rivages, en deçà de la zone plus profonde occupée par les marnes précédentes. On le trouve développé surtout aussi en Calabre, et particulièrement dans le détroit de Messine, et il se prête, au point de vue stratigraphique, aux mêmes remarques que le précédent. On 624 GISEMENTS ET FACIES y rencontre en abondance les Terebratula s. str., et aussi des Magellania, qui le différencient des mêmes facies développés dans le Pliocène ancien de l'Italie du Nord. 30 Graviers coralligènes. Ils représentent le facies habituel du Calabrien dans le détroit de Messine (Musalà, Reggio-Archi, Gallina, Gravitelli, etc...) et aussi sur certaines parties de la côte ionienne (Monosterace, région Est du détroit de Catanzaro): malgré leur facies assez grossier, leur faune dénote une assez grande profondeur. Mais, outre les types profonds, on y trouve encore de très nombreuses coquilles habituel- lement confinées dans des zones plus littorales, et qui descendent ici très bas, grâce au régime de courants sous-marins manifesté par le mode de sédimentation. Aussi la faune est-elle extrêmement riche et variée ; aux Brachio- podes du facies précédent s'associent de nombreux Lamellibranches et Gastropodes de grande taille et richement ornés ; les Buccinum undatum, Natica Montacuti, les Astarte, la Venus libellus, les Mitres, les Nasses, les Térébratules, les Magellania, fournissent quelques espèces caractéristiques, noyées dans un grand ensemble banal. Il faut signaler aussi l'abondance des Cirrhipèdes profonds, et, en particulier, des Pachylasma giganteum Phil., dont les pièces forment souvent (Gravitelli, Valle Lamato), presque à elles seules, des bancs entiers. .. Ges graviers, très grossiers, mais néanmoins profonds, peuvent atteindre des épaisseurs d'une centaine de mètres; et, au point de vue de la Géologie générale, je crois devoir attirer l'attention sur le rôle très important qu'ils jouent dans la constitution des terrains récents de l'Italie du Sud. 4° Marnes sableuses à Turritelles et à Ghlamys opercularis. … Elles correspondent à une zone moins profonde, et surtout à des eaux plus tranquilles que le facies précédent; aussi les trouve-t-on surtout dans d’anciens golfes abrités : vallées du Crati et du Mesima, centre du détroit de Catanzaro, Sud-Est de la Sicile, terre d'Otrante, détroit des Pouilles, Monte Mario, Vallebiaja. Ici apparaissent de nombreux mollusques habitant les fonds sablo-vaseux; les formes a 5 actéristiques sont fournies par les Arca mytiloïdes, À. syracu- QUATERNAIRE 625 sensis, de nombreux Cardudés, des Cardites, des Cancellaires, des Nasses, et surtout des Turritelles du groupe vermicularis-tornata et des Cerithium varicosum, associés à des Cyprina islandica. On pourrait distinguer dans ce facies deux subdivisions : l'une, plus marneuse, où dominent les Turritelles, et paraissant plus pro- fonde (type : Vallée du Crati) ; l’autre, plus sableuse, avec une faune de Lamellibranches plus riche et plus variée (type : Monte Mario, Vallebiaja) ; c'est le facies dit des «sables jaunes », relativement httoraux. 5° Facies franchement littoraux et sublagunaires. Naturellement, on trouvera partout des facies véritablement lifto- raux au sommet de la série de remblaiement pliocène ; ce seront des sables riches en Lamellibranches, mais où manqueront en géné- ral les espèces caractéristiques, qui ont pour la plupart un habitat plus profond. D'ailleurs, dans une même coupe, il est souvent impossible de séparer la faune de celle des couches immédiatement inférieures, montrant un des facies précédents. Au-dessus encore, et dans les couches de passage aux alluvions continentales, on trouve fréquemment des intercalations à facies lagunaire ; telles sont, par exemple, les marnes à Cardium edule, Cerithium vulgatum, de Castrovillari et de Caraffa di Catanzaro, et la « formazione salmastra » éludiée aux environs de Rome par Clerici [39] avec Cardium edule et Tapes caudatus ; ces couches saumâtres passent ici à des sables à Corbicula fluminalis ; enfin une bonne partie des sédiments pliocènes saumâtres de la Toscane, étudiés par de Stefani, doit peut-être être rattachée au Pliocène supérieur. Mais, m'étant limité dans ce travail à l'étude des facies franchement marins, je n’ai touché qu'accessoirement à ces forma- tions subcontinentales. $ 2. — LE QUATERNAIRE Le point de vue paléontologique est actuellement insuffisant pour nous permettre une chronologie de tous les gisements quaternaires. Car, comme nous l'avons dit dans la première partie de ce travail, on peut bien distinguer dans ce Quaternaire deux faunes successives, la faune _Sicilienne et la faune à Strombes ; mais malheureusement beaucoup de Univ, DE Lyon, — Gicnoux. 40 626 GISEMENTS ET FACIES gisements ne renferment aucun des éléments caractéristiques de l’une ou de l’autre de ces faunes. Pour ceux-là, on en est alors réduit à une classification purement stra- tigraphique, basée sur la succession des lignes de rivage. L'ordre chrono- logique ainsi obtenu, rigoureusement exact quand on s'adresse à une étendue de côtes restreinte, devient de plus en plus approché à mesure qu'on considère des régions plus éloignées les unes des autres. Mais il subsiste néanmoins une concordance d'ensemble indéniable: la preuve en est que partout où l'on peut faire intervenir des considérations d'ordre paléontologique, elles se montrent en harmonie avec les résultats précé- ER PRE demment obtenus. En tout cas, il faut prendre un parti, et essayer de débrouiller un peu ce chaos. Nous le ferons en classant les lignes de rivage quaternaires d'après leur altitude : certains verront là des synchronismes rigoureux ; d’autres, un simple procédé d’exposition ; en tout cas c’est certainement une bonne hypothèse de travail. À 7 “ Notre point de départ sera dans ce fait que la faune sicilienne typique correspond à un ancien rivage à 80-100 mètres d'altitude ; et précisément nous avons retrouvé un peu partout d'anciennes lignes de rivage à cette hauteur. Nous conviendrons de les attribuer au Sicilien!. Nous avons reconnu, en diverses régions, des lignes dé rivage élevées, à des altitudes supérieures à 100 mètres ; on n'y connaït point jusqu’à présent de faune caractéristique ; nous les considérons ï comme du Quaternaire ancien anté-sicilien. 3 Au contraire, postérieurement au Sicilien, les couches à Strombes, bien définies au point de vue paléontologique, correspondent à des < niveaux de 35 ou de 15 mètres. | Enfin, entre les couches à Strombes et le Sicilien, on retrouve en | divers points un niveau de 60 mètres environ, dont la faune, banale, ne renferme ni les formes froides du Sicilien, ni les formes chaudes des couches à Strombes ; mais si l'absence des secondes parait bien réelle, celle des premières peut fort bien n'être qu'apparente et tenir au facies. Je signalerai ici seulement les gisements les plus importants, 1 Sauf l'exception locale de Ravagnese, où une ancienne plage à Strombes se montre précisément soulevée à cette altitude de r00 mètres. QUATERNAIRE 627 car le but principal de cet ouvrage a été de mettre en relation les faunes avec les phénomènes stratigraphiques. I. — Hautes lignes de rivage anté-siciliennes. Je n'y insisterai guère, car elles n'ont jusquà présent montré aucune faune tant soit peu abondante ; on n’y connait d’ailleurs que des facies tout à fait liftoraux, conglomérats très souvent durcis en « panchine », où les fossiles ont presque toujours disparu par décal- cification. C'est certainement sur les côtes d'Algérie que ces anciennes lignes de rivage sont le mieux connues, grâce aux belles recherches du général de Lamothe ; ce savant y reconnait des niveaux succes- sifs à 325, 265, 204, 148 mètres. En Sicile, nous avons appelé l'attention sur des traces de lignes de rivage qui se trouveraient jusqu'à des altitudes de 300 mètres, dans la région de Siculiana, Ribera, Calamonaci, près Sciacca, sur la côte Sud. Il faut aussi signaler spécialement le gisement fossili- fère de Taormina à 155 mètres, intéressant par son indépendance complète d'avec le Pliocène. Sur les rives du Détroit de Messine, et plus généralement dans toute la Calabre, on retrouve des traces d'anciens niveaux de base élevés ; mais elles n'apparaissent guère que dans la topographie, à l'état d'anciennes plaines alluviales ou côtières, sans gisements de fossiles ; de plus, nous ne pouvons nous servir de leur altitude pour les synchroniser avec celles du reste de la Méditerranée, car, précisé- ment. dans les environs de Reggio, nous avons la preuve de soule- vements récents plus intenses que partout ailleurs. La région la plus intéressante à ce point de vue est le Warchesato, où nous avons étudié des dépôts fossilifères, à facies très variés, correspondant à des niveaux marins de 180-230 mètres. Je rappellerai en outre les hauts plateaux de la Terre d'Otrante, dont la formation a été attribuée par M. Biasutti à des niveaux de base élevés (200 mètres, 147 mètres). Enfin, à Capri, nous avons signalé des gisements fossilifères, d’ailleurs sans intérêt paléontologique, à de grandes altitudes (200 mètres); il en serait de même pour l'ile d’Elbe, d'après M. Lotti. 628 GISEMENTS ET FACIES En dehors de l'Italie et de l’Algérie, je ne vois guère à rappeler que les anciennes plages du rocher de Gibraltar (200 mètres). En somme, l'étude de ces anciens niveaux, encore peu avancée, ressortirait plutôt du domaine de la morphologie. II. — Le Sicilien (s. str.) ou niveau de 80-100 mètres. La faune typique du Sicilien, avec ses espèces éteintes et ses « émigrés du Nord », ne se rencontre qu'en un très petit nombre de localités, car elle est forcément cantonnée dans les facies profonds et argileux. Les seuls gisements vraiment typiques! sont d’abord ceux du golfe de Palerme (Monte Pellegrino et Ficarazzi), et ensuite ceux du golfe de Castellamare (Balestrate et Castellamare) ; on peut aussi y ajouter les localités de Rosarno en Calabre, de Tarente, Brindisi et Gallipoli dans la Terre d'Otrante, de Livourne en Toscane, et enfin le gisement sous-marin des Pyrénées-Orientales. A part le gisement du Monte Pellegrino, dont nous avons déjà étudié le facies (mollasse calcaire zoogène), tous ces gisements sici- liens se présentent dans des conditions analogues de facies et d’alti- tude : ce sont des argiles plus ou moins sableuses, situées à peu de mètres au-dessus du niveau de la mer actuelle, et renfermant une faune relativement profonde. Ainsi on y trouve quelques espèces tout à fait étrangères aux faunes littorales, comme les Buccinum humphreysianum, les Turbo pelorita- nus, les Venus multilamella, les Astarte sulcata, etc. ; mais la note domi- nante est fournie par l'abondance extraordinaire des Chlamys septemra- diatus et opercularis, des T'urritella communs, des Isocardia cor, des Trochus granulatus, etc.; d’après Marion, la zone où apparaissent actuel- lement ces dernières espèces se trouve en général vers 80-100 mètres de profondeur. Et, en effet, on rencontre encore dans ces gisements siciliens quelques formes relativement littorales, qui nous empêchent de leur attribuer un facies trop profond ?. 1 Voir la carte d'ensemble, pl. V. 2 On a rencontré dans le gisement de Ficarazzi (voir p. 111) un exemplaire de Pholadomya Loveni, espèce actuellement très profonde (plusieurs centaines de mètres) ; je crois qu'il ne faut pas lui attribuer une trop grande importance pourla bathymétrie du gisement, car il s’agit d'un individu isolé, et, de plus, elle a pu être amenée par un courant froid à une altitude supérieure à celle à laquelle les dragages l’atteignent habituellement. . cdi F3, QUATERNAIRE 629 Partout ailleurs, le niveau de 80-100 mètres se montre réduit à des lambeaux de formations lit{orales, non fossilifères, ou ne ren- fermant que des espèces banales; mais /a grande généralité de ce niveau, sur toutes les côtes méditerranéennes, mérite d'être soulignée. On le trouve d’abord tout le long de la côte Nord de la Sicile, formant une ceinture continue, qui, à l'Ouest, vient se raccorder aux dépôts du bassin de Palerme; on n'y voit guère, d’ailleurs, que des conglomérats d’anciennes plaines côtières; vers l'Est, cette ceinture de dépôts siciliens aboutit, près de l'entrée Nord du détroit de Messine, à Mortelle, où l'on retrouve des facies d'anciennes plages sableuses et de lagunes littorales ; nous avons déjà noté la discordance de ces dépôts quaternaires sur le Calabrien; de l’autre côté du détroit, les mêmes facies se retrouvent, avec la même discordance, à S. Francesco, au Nord de Reggio. Dans la partie centrale du détroit, le Sicilien paraît surélevé et réduit à des lam- beaux de terrasses alluviales. Dans la plaine de Catane, de vastes plaines alluviales semblent égale- ment se rattacher à un niveau de base de 80-90 mètres. Sur la côte Sud de la Sicile, à T'erranova, à Girgenti, à Sciacca, nous avons partout noté des fragments plus ou moins étendus, parfois fossilifères, d'anciennes plaines côtières dépendant toujours d'une mer à 8o mètres environ. Il faut mettre à part les régions de Syracuse et de Trapani-Marsala ; dans cette bande méridionale, faisant suite à la zone appulo-garganique, le Quaternaire est envahi par le facies calcaire ; les côtes sont bordées de vastes plateaux, formés de « panchine » calcaires dans lesquelles il est difficile de faire la part qui revient aux différents niveaux. En Calabre, au contraire, grâce à la chaîne cristalline, on retrouve les facies de transport, donnant des plaines côtières bien nettes. Sur la côte tyrrhénienne, nous avons ainsi retrouvé le niveau de 80-100 mètres près de Scilla (gisement de Palmi), dans le golfe de Gioia (gisement de Rosarno), sur les flancs du Capo Vaticano, dans le golfe de S. Eufemia, et plus au Nord encore. Sur la côte ionienne, la continuité de cette ancienne plaine côtière est encore plus nette; nous l'avons étudiée à Gerace, à Monosterace, près de l'entrée de l’isthme de Catanzaro; dans le Marchesalo, son individualité paraît s’effacer devant celle de niveaux plus hauts ou plus bas. Mais en bordure de la Sila, dans la vallée inférieure du Crati et jusqu'à Tarente, les traces d’un niveau de base à 80-100 mètres sont presque partout visibles, sous forme de dépôts côtiers ou de terrasses fluviatiles. 630 GISEMENTS ET FACIES Au-delà, on entre dans le domaine appulo-garganique, les facies cal- caires prédominent, et la topographie cesse d’être instructive ; seuls les gisements de T'arente, Gallipoli, Brindisi (?) semblent témoigner de l’exis- tence du Sicilien. Par contre, dans le Tavoliere di Puglia, les apports apennins arrivent de nouveau jusqu'à la mer, et on voit se constituer une plaine côtière typique, résultant d’une série de remblaiement marine sous un niveau de base de 80-100 mètres. Cette même disposition semble bien se retrou- ver plus au Nord, jusqu'à Ancône; et au delà, il est probable qu’en conti- nuant à suivre notre plaine côtière sicilienne, nous la verrions se raccorder avec une des ferrasses qui remblaient la vallée du P6, en à contre-bas des plateaux villafranchiens. Sur les côtes françaises, en Sardaigne, aux Baléares, à Gibraltar et en Afrique, on retrouve, un peu partout, dans les mêmes conditions, un ancien niveau de 80-100 mètres. ; + III. — Niveau de 50-60 métres. % En beaucoup de points, on retrouve des gisements qui, par leur altitude, se montrent intermédiaires entre le Sicilien et les couches à Strombes. Ces gisements n’ont, à vrai dire, aucune individualité paléontologique : l'absence des formes caractéristiques du Sicilien peut fort bien n'y être qu'une apparence, due seulement à leur facies + trop littoral; quant à l’absence des formes chaudes des couches à 4 Strombes, elle paraît bien réelle, et c'est à ce titre surtout que la considération de ce niveau est intéressante. On peut y rapporter les sables fossilifères de Milazzo, dont le dépôt paraît bien un peu postérieur à la ligne de rivage sicilienne de la côte Nord de la Sicile, et témoigne d’un niveau marin à 6o mètres environ. En Calabre, ce niveau est surtout bien repré- senté dans la région de Cofrone, où nous avons retrouvé d'immenses plaines côtières recouvertes d’une croûte de sédiments marins litto- raux, dépendant sans doute d’un niveau de base à 50-60 mètres. Dans les environs de Corneto et de Civita-Vecchia, puis de Livourne (Castiglioncello), quelques gisements peuvent se rapporter au même niveau (voir p. 314). Ce niveau a été nettement signalé sur les côtes françaises par M. Depéret : on le voit dans les environs de Nice et dans l’Esterel ; et nous avons déjà insisté sur l’analogie du gisement niçois du Cap Ferrat avec celui du Capo di Milazzo. QUATERNAIRE 631 Enfin, en Algérie, on peut lui comparer les plages à 60 mètres du 2 2 général de Lamothe. IV. — Couches à Strombhes : niveaux de 30-35 et de 15 mètres environ. Les traces d'anciennes lignes de rivage deviennent ici tellement nombreuses, qu'il serait fastidieux de vouloir les énumérer toutes; je ne parlerai donc ici, comme ne rentrant vraiment dans mon sujet, que de celles où on a pu reconnaître la faune à Strombes, horizon paléontologique nettement défini; et je classerai ces gisements d'après les facies. 1° Vases calcaires marneuses ou sableuses. A ce type, on peut rattacher dans l’ensemble le gisement de Tarente, dont nous avons longuement étudié les variations de facies secondaires le long du Mare piccolo, et aussi, d’après les descriptions des auteurs, celui de Monastir. Dans ces facies calcaires, quand ils ont échappé à une cimentation ultérieure, les fossiles sont faciles à dégager et admirable- ment conservés, on a là des dépôts d’eau tranquille, le long de côtes plates, calcaires, sans apports détritiques. Par cimentation, ces vases passent à des « panchine » où les coquilles perdent souvent leur test par décalcification, et deviennent, en tout cas, fort difficiles à extraire. Ce type de sédiments paraît assez répandu, mais peu intéressant; dans la « panchina » de Livourne, on observe son passage à des facies plus sableux. 2° Sables fins. Ici on retrouve d'anciennes plages, formées dans des anses abritées; aussi ces dépôts sont-ils riches en Lamellibranches à test fragile. Le type même de ce facies nous est offert par les parties les plus fossilifères du gisement de Ravagnese, où, comme nous l'avons vu, on peut observer toute une série de dépôts de plus en plus côtiers, jusqu’au cordon littoral. À Bovelo, on a également une ancienne plage sableuse où les eaux devaient être particulièrement tranquilles, même saumâtres, surtout au sommet de la série. Le gisement de S. Juan de Vilasar, près de Barce- lone, paraît très analogue à celui de Ravagnese. 3° Graviers des côtes rocheuses. Le long des côtes rocheuses, les formations marines se réduisent à des lambeaux très limités, recouvrant les petites plates-formes rocheuses, 632 CONCLUSIONS enfouis dans les anfractuosités, ou garnissant le fond des petites anses : ce sont des facies d’eaux agitées, où prédominent surtout les Gastropodes et les Lamellibranches à test solide et bien orné. Les gisements de cette nature n'ont donc qu'une étendue fort restreinte, et cela nous explique qu'on n’en connaisse guère que dans des régions très étudiées; tel est le cas pour les gisements du Niçois et de Monaco. 4 Panchine. On appelle ainsi des grès calcaires assez tendrès et homogènes pour pouvoir être exploités à la scie, mais durcissant à l’air,; ils résultent de la cimentation ultérieure de sédiments extrêmement variés, depuis des sables calcaires jusqu’à des vases argileuses. Cette roche est tres répan- due dans le Quaternaire méditerranéen, comme l’avait déjà fait remarquer la Marmora, et certains auteurs ont émis les hypothèses les plus fantai- sistes pour expliquer sa formation!. Bien entendu, il peut y avoir des « panchine » de tous âges, depuis le Pliocène jusqu’au Quaternaire le plus récent. Ce facies est assez ingrat pour la recherche des fossiles, qu’on ne peut obtenir, le plus souvent, qu’à l’état de fragments ou de moules. Les gise- ments de ce facies où l’on a rencontré la faune à Strombes sont les sui- vants : Sferracavallo (près Palerme), Gallipoli, Mellisello (Adriatique?), Corneto, Livourne, Baléares, Cocedores (province d’Alméria, Espagne), nombreux gisements africains. Mais la considération des facies est ici d’un intérêt secondaire ; bien plus importante est celle de leur altitude. A ce point de vue, il faut d’abord mettre à part les gisements de Ravagnese et Boveto, près Reggio, au centre même du Détroit de Messine, et où l’ancien rivage de la mer à Strombes est soulevé Jusqu'à 100 mètres d'altitude : 11 est impossible de ne pas voir là le témoignage des soulèvements récents qui ont affecté et affectent probablement encore cette partie spécialement instable des côtes méditerranéennes, dont les formes topographiques suffisent au premier coup d’œil à accuser la jeunesse. Cette exception mise à part, on constate, et c’est là un fait très important, que, nulle part dans la Méditerranée occidentale, la faune à Strombes n'apparaît avant les lignes de rivage de 35 mètres. On doit considérer ce fait comme définitivement établi. Sur les 1 Voir à ce sujet Merciai [x77]). ? Cf. Martelli [170]. DUAL SPAS MOUVEMENTS RELATIFS DES TERRES ET DES MERS 633 détails, on peut ensuite discuter : ainsi, il est souvent difficile de décider s1 tel ou tel gisement doit être rapporté à une ligne de rivage de 35 mètres ou inférieure à cette altitude. Pour l'Algérie, le général de Lamothe s’est arrêté aux deux chiffres de 31 et de 18 mètres; et Je dois ajouter que toutes les observations que j'ai faites ailleurs ne se sont en rien montrées contraires à cette manière de voir. Mais je n'oserai pas apporter trop d’affirmations pour ces précisions de détail. CHAPITRE IV CONCLUSIONS : LES MOUVEMENTS RELATIFS DES TERRES ET DES MERS Dans tout ce qui précède, je me suis borné à exposer des faits, indépendamment de toute hypothèse. Et si j'ai employé parfois des expressions telles que « ancienne mer à 100 mètres » ou « ancien rivage soulevé à 100 mètres », c'était uniquement pour la commo- dité du langage, et sans rien préjuger de la nature de ces mouve- ments. Car je cherchais, en première ligne, à arriver à un essai de classification chronologique des formations marines récentes. Mais, pour beaucoup d’esprits, ce n’est là qu'un acheminement à une autre question plus haute et plus obscure, celle des mouvements relatifs des terres et des mers. On peut indiquer pour ce problème deux solutions extrêmes et opposées, comme je l'ai déjà exposé antérieurement [144] : 1° Dans une première théorie, que j'appellerai la fhéorie épirogé- nique, on suppose le niveau de la mer (et, dans notre cas, d’une petite mer intérieure comme la Méditerranée occidentale) absolu- ment fixe et invariable : tous les déplacements verticaux des lignes de rivage sont attribués alors à des soulèvements ou à des affais- s ements des continents; ces mouvements du sol, qui ne sont pas liés forcément aux mouvements orogéniques, peuvent être qualifiés, à la suite de M. Haug, de « mouvements épirogéniques ». 634 CONCLUSIONS 2° Une deuxième théorie, due à M. Suess, et depuis brillamment développée par le général de Lamothe, peut être appelée la {héorie eustatique. Dans sa forme extrême, on y suppose fixes les masses continentales : les déplacements de la ligne de rivage seraient alors produits exclusivement par des oscillations d'ensemble ou « eusta- tiques » du niveau des mers. Il paraît bien que ces opinions extrêmes renferment chacune une part de vérité : c’est ce que nous allons essayer de préciser. Tout d’abord il est évident que la fhéorie euslalique ainsi poussée à l'extrême est insoutenable. Car elle ne peut s'appliquer, par exemple, à la fin de la période pliocène: nous pouvons considérer comme certain que le maximum de la transgression pliocène sur nos côtes françaises, entre Marseille et l'Espagne, n’a pas dépassé 200 mètres, tandis qu'en Calabre il a dépassé 1.000 mètres, et qu'en Algérie il atteindrait 5oo mètres d’après le général de Lamothe. Des mouvements propres du sol sont donc certai- nement intervenus (comme d’ailleurs, cela est évident, aux périodes géologiques plus anciennes). Plus près de nous, nous avons eu un exemple précis de ces mou- vements du sol, en étudiant les couches à Strombes [141]: tandis que, sur tout le pourtour de la Méditerranée, la mer à Strombes n'a certainement pas dépassé l'altitude de 35 mètres, nous retrouvons à Ravagnese ses anciens rivages soulevés à 100 mètres d'altitude. Plus près de nous encore, l’histoire des anciens rivages dans le golfe de Naples, puis celle, moins connue, de l'Efna, nous montrent d’autres de ces exceptions locales. Aussi bien, je crois que plus personne ne songe à nier la réalité de ces «mouvements locaux», même très récents. Et, cette réalité une fois admise, la théorie eustatique en devient aussi difficile à attaquer qu’à défendre avec des arguments précis. Car 1l est souvent fort délicat de faire la part des mouvements locaux et des «mou- vements d'ensemble ». Mais cette constatation n’atteint pas forcément la réalité de «l’eus- tatisme». Elle nous explique même, dans une certaine mesure, pourquoi les mouvements propres des mers, s’ils ont vraiment existé, sont si difficiles à prouver et à déméler. Car le nombre et l'impor- tance des mouvements locaux du sol continental doivent croître MOUVEMENTS RELATIFS DES TERRES ET DES MERS 635 évidemment à mesure qu’on s'adresse à des périodes plus anciennes : et c'est seulement dans les régions restées constamment s{ables que l’on pourra s’attendre à retrouver, inaltérées, les {races de l’eustatisme. Ainsi, moyennant cette resfriction indispensable, la plupart des arguments apportés contre la théorie eustatique tombent d’eux- mêmes. Reste à voir maintenant quelles preuves on peut apporter en sa faveur. L'idée même de l’eustatisme est née, cela est certain, de la con- statation de la généralité ou de la presque généralité des fransgres- sions marines, à toutes les époques géologiques. Evidemment, quand on voit, pendant une période déterminée, toutes les « aires conti- nentales», c’est-à-dire toutes les parties de l'écorce terrestre qui jouent à cette époque le rôle de compartiments stables, être enva- hies toutes en même temps par le flot de la mer, cela suggère inévi- tablement l’idée d’une immense marée montante, dont la cause et les effets sont uniques comme la mer, au lieu d’être multiples comme le sont les continents eux-mêmes. Mais cette grandiose vue de Suess, bien des fois développée depuis, constitue plutôt une magni- fique synthèse, qualitative pour ainsi dire, qu'un ensemble de preuves précises, quantitatives. Ce sont de telles preuves que justement on serait en droit d’at- tendre de l'étude des périodes récentes. Mais alors on s’apercevra immédiatement à combien de difficultés on se heurte, si l’on veut arriver à une précision rigoureuse dans les détails. Il est en effet extrêmement difficile, dans bien des cas, de fixer à ro mètres près l'altitude d'une ancienne ligne de rivage; et, de plus, la paléontologie ne fournit qu’une synchronisation très approxima- tive : elle permet d'éviter les erreurs grossières, mais non de des- cendre aux précisions de détail. Pour atteindre à ce dernier but, des monographies très soigneuses seraient nécessaires, et je n'ai pu songer à les entreprendre ici. Aussi, sans vouloir apporter ici des arguments précis absolu- ment indiscutables pour ou contre l’eustatisme, je me contenterai de signaler un fait général indéniable: c'est l'existence d'un certain rythme d'ensemble dans les déplacements des lignes de rivage. D’après les belles recherches du général de Lamothe, un rythme 636 CONCLUSIONS unique s’appliquerait ainsi à toutes les côtes d'Algérie; et M: De- péret a montré que le même rythme s’étendait aussi aux côtes françaises. Sur la côte Nord de la Sicile, on ne peut manquer d'être frappé par la continuité de la ligne de rivage sicilienne à une alti- tude de 80 à 100 mètres; cette même ligne de rivage se retrouve sur de grandes longueurs des côtes italiennes. Pour les couches à Strombes, nous -voyons un grand nombre de gisements, que tout nous conduit à considérer comme contemporains, se grou- per autour de lignes de rivage à 15-35 mètres. _ Les terrasses fluviatiles, dont nous n'avons pas parlé ici, et qui, dans leur partie aval tout au moins!, «enregistrent» avec une grande précision toutes les variations du niveau de base marin, nous mon- treraient encore le même rythme d'ensemble: des études pour- suivies par des observateurs indépendants, sur des systèmes fluvia- tiles très éloignés les uns des autres, semblent partout donner des résultats concordants: même nombre d’anciens maxima du niveau de base, et mêmes altitudes relatives de ces maxima, Des constatations de cet ordre et de cette généralité ne doivent pas être négligées, car c’est justement pour les exprimer que les théories sont faites. Sous ce rapport, la théorie épirogénique se montre plutôt infé- rieure à la théorie eustatique : elle n'a ni la simplicité, ni la clarté de cette dernière. Il est facile de concevoir que le niveau de la mer s'élève ou s’abaisse d’un bloc; et, s'il est difficile de trouver les causes premières de ces mouvements, en revanche il est encore plus difficile à la fois de concevoir et d'expliquer comment d’im- menses longueurs de côtes auraient pu se mouvoir tout d'une pièce, plusieurs fois de suite, tout en gardant parallèles leurs positions successives. Aussi s’explique-t-on facilement le rôle actif qu'a joué et jouera encore la théorie eustatique : les recherches qu'elle a suscitées, dans toutes les directions, nous ont montré précisément la réalité de ces mouvements d'ensemble et l'unité de leur rythme, indépendamment de toute hypothèse sur leur cause. En se bornant, sans trop l’approfondir, à cette notion de mou- ! La partie amont peut être sous la dépendance plus ou moins directe des phé- nomènes glaciaires. MOUVEMENTS RELATIFS DES TERRES ET DES MERS 637 vements d'ensemble, on peut esquisser de la manière suivante l'his- toire de la Méditerranée occidentale. Au début de la période pliocène, commence partout une grande transgression, amenant la ligne de rivage à une altitude maximum qui ne sera Jamais dépassée dans la suite, mais qui est variable avec les diverses régions: minimum dans le Languedoc, elle est maxi- mum en Calabre et en Sicile. Pendant la période de stabilité relative du niveau de base qui correspond à ce maximum, se construisent des formes topographiques dont on retrouve les traces partout: pénéplaines sur les continents, nappes alluviales dans les vallées et les dépressions lacustres, plaines côtières dans les golfes ; les côtes se régularisent, l'archipel Sud-italien se soude par ces plaines allu- viales en une masse unique; en Algérie, l'ile de la Bouzaréah est réunie au continent et envahie par les apports du Tell, etc. Ce s{ade de maturité n'est peut-être pas partout exactement contemporain, et semble en particulier être survenu un peu plus tard en Italie queen Algérie et en France. Bien des inconnues restent encore; l’absence du Pliocène aux Baléares, en Sardaigne, à l’île d'Elbe, en Corse, et sur de longs trajets des côtes françaises et espagnoles, nous indique peut-être l'existence, au centre même de la Méditer- ranée occidentale, de masses continentales ayant eu une histoire toute différente et encore entièrement obscure. Ensuite, et jusqu'à l'heure actuelle, c’est un abaissement général des lignes de rivage, coupé certainement de transgressions momen- tanées et d'amplitudes successivement décroissantes; après avoir atteint au Sicilien leur maximum, les introductions de coquilles septentrionales diminuent d'importance pour laisser la place, à l’époque des Strombes, à une faune momentanément plus chaude. Mais ce ne sont là que des nuances paléontologiques; et il est curieux de constater combien ces mouvements importants des terres et des mers ont eu peu d'influence sur les faunes marines. La faune que nous retrouvons aujourd’hui dans les anciennes plages calabriennes à 1.000 mètres d’altitude est déjà presque identique à la faune actuelle. L'évolution des faunes marines nous apparaît done comme infiniment lente par rapport à l’évolution des formes du terrain. APPENDICE LISTES DES MOLLUSQUES, BRACHIOPODES ET POLYPIERS Récollés dans divers gisements pliocènes el quaternaires de l'Italie Ces listes, bornées aux espèces recueillies par moi-même, n’ont aucune préten- tion à être complètes : leur but est, au contraire, de donner une idée d'ensemble des faunes, sans tenir compte des formes rares. Pour plus de brièveté, on n'a pas indiqué les attributions sous-génériques, que l’on trouvera pour la plupart dans la cinquième partie. Les Polypiers ont été déterminés par M. Filliorat, qui m’a aimablement donné tous les renseignements nécessaires à leur sujet. Les formes éfeintes sont marquées +, les formes à affinités septentrionales e, et les formes à affinités méridionales 0. Cette dernière distinction n'a pas été faite pour les Polypiers : le signe + s’applique pour eux à toutes les espèces inconnues dans la Méditerranée actuelle. I. — PLIOCÈNE ANCIEN 1. — Altavilla. Contrada Cannamasca, au $S. d’Alta villa. — Facies de sables jaunes relati- vement littoraux. — Voir p. 17,4. — Liste de fossiles dans G. Seguenza [207]. Ostrea cf. edulis L. Anomia ephippium L. — patelliformis L. Pecten jacobæus L. + Flabellipecten flabelliformis Br. + — Alessii Phil. Chlamys flezuosus Poli — opercularis L. — scabrellus Lmk. — — var. bollenensis May. — varius L. Pinna cf. pectinata L. Pectunculus sp. Arca diluvii Lmk. Leda fragilis Chemn. PS Ps + Cardita antiquata var. aff. Mathe- roni May. sp. + — intermedia Br. var. denti- fera Gocconi + — rudista Lmk. Cardium tuberculatum L. — papillosum Poli + — multicostatum Br. — erinaceum L. — echinatum cf. var. mucro- nata Poli — hians Br. + Meretrix gigas Lmk. — rudis Poli + Venus excentrica Agass. — gallina L. — multilamella Lmk. — ovata Penn. + — plicata Gmel. Dosinia exoleta L. — lupinus L. var. aff. lincta Pultn. Psammobia färoensis Chemn. Solenocurtus antiquatus Pultn. 640 APPENDICE Solenocurtus candidus Ren. Solen cf. marginatus Penn. Mactra subtruncata Da Costa var. triangula Ren. Corbula gibba Olivi Eastonia rugosa Chemn. Lucina borealis LE. + — elliptica Bors. + — leonina Bast. var. medio- lævis Sacco + — leonina var. transiens Sacco + — Meneghini De Stef. et Pant. spinifera Mte. Tellina balaustina L. — donacina L. + Dentalium serangulum Schr. + Terebra reticularis Nyst +Conus Mercati Br. + Drillia Brocchit Born. + Cancellaria cancellata L. var. pluri- costicillata Sacco + — wvaricosa Br. + Fasciolaria etrusca d’Anc. + — fimbriata Br. + Nassa clathrata Born — mutabilis L. + — turrita Bors. — semistriata Br. + Murex torularius Lmk. — trunculus L. + Tritonium cf. affine Br. + Ranella (Aspa) marginata Mart. + Strombus coronatus Defr. var. al- tavillensis De Greg. Cerithium vulgatum Brug. + — varicosum Br. + — crenatum Br. + Turritella subangulata Br. + — vermicularis Br. Crepidula unguiformis Lmk. Natica cf. catena Da Costa — josephinia Risso — millepunctata L. + Trochus patula Br. + Rhynchonella bipartita Br. + Terebratula ampulla Br. 2. — Terreti. Entre le village de Terreti et le Monte Goni. — Facies assez profonds : grès marneux, graviers à Bryozoaires. — Voir p. 91. — Liste de fossiles dans G. Seguenza [206]. Ostrea cf. edulis L. —— Forskäli Chemn. — cochlear Poli ER — var. navicularis Br. Anomia striata Br. — patelliformis L. Pecten jacobæus L. va — var. bipartita For. + — rhegiensis Seg. + Flabellipecten flabelliformis Br. Chiamys clavatus Poli var. Du- masi Payr. — septemradiatus Müll. — — var. Cremai nov. — opercularis L. — scabrellus Lmk. — — aff. var. bollenensis May. — multistriatus Poli + Hinnites ercolanianus GCocconi + + + — — var. subdistorta Sacco Arca barbata L. — Noæ L. Pectunculus sp. 2 Limopsis anomala Eichw. ; Cardita aculeata Poli Astarte sulcata Da Costa Chama gryphoides L. 4 Venus casina L. { .— ovata Penn. : 1 + — libellus R. E. P. Meretriz rudis Poli Gouldia minima Mie: Lucina borealis L. — spinifera Mts. — retliculata Poli Syndesmya alba Wood Cylichna cf. Brocchii Michelotti Fusus rostratus Olivi — lamellosus Bors. Ranella gigantea Emk. Turritella triplicata auct. Calyptræa chinensis L. Natica cf. catena Da Costa + Scalaria retuspina De Greg. Trochus miliaris Br. APPENDICE 6 Patella-cerulæa L. Megathyris decollata Chemn. + Mühlifeldlia eusticta Phil. — lruncata L. Rhynchonella bipartila Br. Terebralula minor Phil. + — cf. Scillæ Seg. e Magellania sepligera Lov. 3. — Gallina Ouest. Sommet du Pliocène ancien. — Mar- nes sableuses et graviers : facies pro- fonds. — Voir p. 101. — Liste de fos- siles dans G. Seguenza [206]. Ostrea Forskäli Chemn. — cochlear Poli + — — var. navicularis Br. Anomia striata Br. Spondylus gæderopus L. + Plicatula mylilina Phil. Pecten jacobæus L. + Flabellipecten Alessii Phil. Chlamys clavatus Poli —— — var. inflexæa Poli © —— seplemradialus Müll. var. subclavata Cantr. sp. æ — latissimus Br. — opercularis L. + — scabrellus Lmk. var. bolle- nensis May. — pesfelis L. : + Amussium oblungum Phil. + Hinniles ercolanianus Cocconi Arca Noæ L. Nucula sulcata Brn. Cardita aculeata Poli Aslarte sulcata Da Costa 7 = — var. pseudofusca nov. — bipartila Phil. + Cardium cf. hirsutum Brn. + Chama placentina Defr. Venus faseiala Da Costa var. aff. Brongniarli Payr. — casina L. — mullilamella Lmk. — verrucosa L. — dlibellus R. E. P. — ovala Penn. Meretriæ chione L. Univ. ve Lxox. — Gicxoux. = > Meretrix rudis Poli Circe minima Mte. © ) Tapes rhomboides Penn. Pelricola lithophaga Retz. Mactra sublruncata Da Costa var. triangula Ren. Tellina elliplica Br. — pulchella Lmk. — serrala Ren. Gastrana fragilis L. + Capsa lacunosa Chemn. + Dentalium rectum L. + — passerinianum Cocconi — gadus Mig. Cylichna ef. Brocchii Michelotti tingicula auriculala Mén. Marginella ovulæformis Seg. Mitrolumna olivoidea Cantr. l'usus rostratus Olivi — vaginaltus Crist. et Jan ® Buccinum humphreysianum Benn. var. + Nassa ilalica May. + — semistriata var. aff. gigan- tula Bonelli sp. Columbella scripta L. — subulala Br. Ranella gigantea L. + Cypræa dorsolævigala Cocconi Cerithium vulgalum Brug. Billium reticulatum Da Costa Turritella triplicala auet. + — cf. vermicularis Br. + Calyplræa chinensis L. Natica millepunctata L. — cf. calena Da Costa Scalaria plicosa Phil. — cf. tenuicosta Michaud Nerilula nerilea L. Turbo pelorilanus Cantr. — rugosus L. Trochus granulatus Born — miliaris Br. var. millegrana Phil. — varius L. — lurbinalus Born Fissurella gibberula Lmk. © Puncturella capuliformis Pecch. Paltella cerulæa L. + Rhynchonella biparltila Br. 642 APPENDICE Mühlfeldtia truncata L. + — eusticta Phil. Terebratulina caput serpentis L. + Terebratula cf. Scillæ Seg. © Magellania septigera Low. © — cranium Müll. 4, — Marcellinara, Sables et graviers coralligènes. — Voir p. 34. Ostrea cochlear Poli? Pecten jacobæus L. + Flabellipecten Alessiü Br. + Chlamys scabrellus Lmk. var. bol- lenensis May. — septemradiatus Müll. ? — hyalinus Poli? Arca aspera Phil. — lactea L. — cf. obliqua Phil. Pectunculus sp. Limopsis aurita Br. Nucula sulcata Brn. Leda excisa Phil. +Yoldia nitida Br. Astarte sulcata Da Costa Chama gryphoides L. Lucina borealis L. + — cf. persolida Sacco Syndesmya alba Wood var. similis Phil. sp. + Pecchiolia argentea Mariti + Poromya sp. ? +Conus antediluvianus Br. Fusus vaginatus Crist. ct Jan + Nassa ilalica May. — limata Chemn.? + Turritella tornata Br. + — vermicularis Br. Natica cf. catena Da Costa Turbo peloritanus Cantr. Terebratula minor Phil. — sphenoidea Phil. ? + Ceratotrochus typus Seg. Lophohelia Defrancei E. et H. Cladocora cespitosa Gualt. 5. — Marchesato. Marnes blanches : facies très profond — Diverses localités, voir p. 193. — Liste de fossiles dans Neviani [181], II. Limopsis anomala Eichw. Corbula gibba Olivi + Dentalium rectum L. + Pleurotoma calliope Br. + Surcula dimidiata Br. + Raphitoma harpula Br. + Drillia sigmoidea Brn. + Mitra cupressina Br. + Fusus longiroster Br. — rostratus Olivi + Nassa italica May. Cassidaria echinophora L. Chenopus serresianus Michaud + Turritella subangulata Br. Natica millepunctata L. — cf.catena Da Costa 6. — Strongoli. Sables argileux : facies « astien ». — Voir p. 124. + Flabellipecten Alessii Phil. + Chlamys scabrellus Emk. Ra — var. bollenensis May. — opercuülaris L. — varius L. — multistriatus Poli Arca diluvi Emk. Pectuneulus sp. + Cardita intermedia Br. + — rudista Lmk. + — rhomboidea Br. Astarte fusca Poli Lucina borealis E: + — elliptica Bors. + — bellardiana May. + — persolida Sacco + Dentalium sexangulum Schr. + Terebra Basteroti Nyst var. plioce- nica Font: + — relicularis Nyst - + Conus antediluvianus Br. + Surcula dimidiata Br. Mitra cf. ebenus L. Fusus rostratus Olivi + Nassa clathrata Born — semistriata Br. + Cerithium varicosum Br. satin APPENDICE 643 Cerithium vulgatum L. var. alu- castra B. D. D. + Turrilella subangulala Br. + — lornala Br. Natica millepunctala L. — cf. calena Da Costa + Terebratula ampulla Br. + Flabellum avicula Michelin 7. — Corneto. Marnes jaunes. — Près de la station du chemin de fer, voir fig. 41 et p. 295). Ostrea cochlear Poli + Flabellipecten Alessii Phil. Chlamys varius L. — mullistriatus Poli + — inæquicostalis Lmk. + — Bicknelli Sacco + Amussium crislatum Brn. + Cardita intermedia Br. + Cardium multicostatum Br. + — aculeatum L. var. bianco- niana Cocconi + Meretriz gigas Lmk. Mactlra sublruncata Da Costa Tellina elliplica Br. IL. — CALABRIEN $. — CGirgenti (grès). Niveau des grès de Girgenti: Cala- brien inf. — Voir p. 168. Anomia ephippium L. Pecten jacobæus L. Chlamys opercularis L. — varius L. — mullistriatus Poli — fleæuosus Poli var. biradiala Tiberi Modiola adriatica Lmk. + Arca myliloides Br. Pectunculus sp. + Nucula placentina Lmk. — sulcata Brn. Leda fragilis Chemn. Cardita antiquala Lmk. — aculeata Poli à + — rhomboidea Br. var. iner- mis Michelotti Cardila corbis Phil. Astarle sulcata Da Costa Cardium aculeatum L,. — echinatum L. — hians Br. — norvegicum L. + — mullicoslatum Br. Chama gryphoides L. + — placentina Defr. ® Cyprina islandica L. Isocardia cor L. Meretrix chione L. Dosinia exoleta L. Venus mullilamella Lmk. — ovala Penn. — fasciata Da Costa var. Bron- gniarli Payr. + Tapes rhomboides Penn. var. anti- qua nov. Diplodonta rotundata Mtg. ? Corbula gibba Olivi Panopæa glycymeris L.. var. aff. Faujasi Mén. + Lucina cf. bellardiana May. — spinifera Mtg. Tellina distorta L. ? ® Arcopagia crassa Penn. + Dentalium rectum L. — novemcostalum Lmk. + — serangulum Schr. + Cancellaria hirta Br. Milra ebenus L. Fusus rostratus Olivi Fasciolaria lignaria L. Euthria cornea L. Nassa semistriata Br. — — var, Edwardsi Fisch sp. D — var. CalabTrensis mov. — clathrata Born Murex trunculus L. + — brandaris var. aff. M. loru- larius Lmk. tanella gigantea L. Chenopus pespelecani L. + — ullingerianus Risso + Cerithium varicosum Br. + Turrilella lornata Br. + — vermicularis Br. Natica ef. calena Da Costa 644 APPENDICE Natica millepunctata L. Turbo rugosus L. Trochus granulatus Born + Flabellum avicula Michelin var. siciliense E. et H. 9. — Cirgenti (argiles). Niveau des argiles supérieures : Ca- labrien supérieur. — Voir p. 169. Chlamys opercularis L, + Nuculu placentina Lmk. — sulcata Brn. Cardium papillosum Poli var. maxzima B. D. D. © Cyprina islandica L, e Dosinia lupinus L. var. cf. Ficara- liensis nov. Venus ovata Penn. Mactra subtruncata Da Costa Lucina spinifera Mtg. Nassa semistriata Br. — — var. Edwardsi Fisch. sp. + — clathrata Born var. Ficara- liensis nov. Murezx trunculus L. + Cerithium varicosum Br. Turritella communis Risso — triplicata auct. + Flabellam avicula Michelin var. Siciliense E. et H. 10. — Porto Empedocle. Ravin de Pancamo. Sables argileux : Calabrien supérieur. — Voir p. 170. Lima hians Gmil. Chlamys opercularis L. Arcaidiluvii Emk. var. aff. suban- tiquata d’Orb. Pectunculus sp. + Nucula placentina Emk. — sulcata Brn. -— nucleus L.? Leda fragilis Chemn. — var. delloidea Risso + Cardium aculeatum L. var. bian- coniana Cocconi — echinatum L, + Cardium erinaceum L. — oblongum Chemn. — papillosum Poli Chama gryphoides L. + — placentina Defr. ° Cyprina islandica L. e Dosinia lupinus L. var. Ficaratien- sis nov. Venus fasciata Da Costa var. Bron- gniarli Payr. — multilamella Lmk. — ovata Pen. Corbula gibba Olivi Panopæa glycymeris L. var. Dentalium novemcostatum Lmk. Fusus rostratus Olivi + Nassa. clathrata Born var. Ficart- liensis nov. — mutabilis L. + — semistriata Br. var. Cala- brensis nov. Trophon muricatus Mtg. var. bar- vicensis Johnst. sp. + Murex brandaris var. aff. M. toru- larius Lmk. — cf. scalaris Br. — trunculus L. Cassidaria echinophora L. Cypræa europæa Mtg. Chenopus pespelecani L. + — utlingerianus Risso + Cerithium varicosum Br. + Turritella tornata Lmk. Crepidula unguiformis Lmk. Xenophora cf. crispa Kônig Natica cf. catena Da Costa — mMillepunctata EL. Trochus granulatus Born Fissurella græca L. 11. — Terranova di Sicilia. Versant S. du Monte Lungo. — Argiles bleues. — Voir p. 171. Pecten jacobæus L. Chlamys opercularis L: — varius L. © — seplemradiatus Müll. et var. subclavata Cantr. sp. Nucula sulcata Brn. à né à x “x SR DRE muse LE 2 APPENDICE 645 Cardium oblongum Chemn. Isocardia cor L. e Dosinia lupinus L. var. Ficaralien- Sis nov. + Dentalium rectum L. Fusus rostratus Olivi — vaginatus Crist. et Jan e Chrysodomus sinistrorsus Desh. + Nassa semistriata Br. var. cala- brensis nov. Murex trunculus L. Cassidaria echinophora L. + Chenopus uttingerianus Risso - + Cerilhium varicosum Br. Natica cf. catena Da Costa 12. — Brucoli. Au N. de Syracuse. — Marnes calcai- res à polypiers : facies profond. — Voir p. 162. — Liste de fossiles dans Fuchs et Bittner [136]. Ostrea cochlear Poli Anomia striata Br. Spondylus Gussonii Costa Chlamys opercularis L. — multisitriatus Poli — clavatus Poli var. infiera Poli. — clavalus var. Dumasi Payr. — sepltemradiatus Müll. var. subclavata Cantr. Mytilus galloprovincialis Lmk. ? Arca aspera Phil. — obliqua Phil. ? — tetragona Poli Pectunculus sp. Limopsis anomala Eichw. Nucula nucleus L. — sulcata Brn. Leda fragilis Chemn. Cardita aculeata Poli Aslarte sulcata Da Costa Cardium papillosum Poli var. Ara- dasi Crema Chama gryphoides L. + — placentina Defr. Meretrix rudis Poli Venus casina L. var. incrassita nov, Venus effossa Biv. — ovala Penn. Loripes lacteus L. Milrolumna olivoidea Cantr. Fusus rostratus Olivi var. e Chrysodomus sinistrorsus Desh. Nassa limala Chemn. + — semistriala Br. var. cala- brensis nov. Murex bracteatus Br. Trilonium coslatum Born Cassidaria echinophora L. Turritella triplicala auct. — communis Risso ? Crepidula unguiformis L. Turbo peloritanus Cantr. Trochus Monlagui Wood — miliaris Br. — zizyphinus L. Crania anomala Müll. var. lurbi- nata Poli Megathyris decollata Chemn. Mühlfeldtia truncata L. Terebratulina caput serpentis L. Terebratula minor Phil. e Magellania cranium Müll. ? Lophohelia Defrancei E. et H. Amphihelia miocenica Seg. Dendrophyllia cornigera Lmk. 13. — Valsavoja. Au $S. de Catane. — Mollasses calcai- res : Calabrien inférieur ou même Plio- cène ancien. — Voir p. 161. Ostrea cf. edulis L. — cochlear Poli Anomia ephippium L. Lima inflata Chemn. Chlamys opercularis L. — multistriatus Poli — varius L. + — spinosovalus Sacco — pesfelis L. — clavatus Poli var. inflexu Poli _ — var. Dumasi Payr. © — seplemradiatus Müll. var subclavata Cantr. sp. + Nucula placentina Lmk. ? 646 APPENDICE Isocardia cor L. + Crania lamellosa Seg. Mühifeldtia truncata L. Terebratula minor Phil: + — cf. ampulla Br. 14. — Nizzeti. Argiles subetnéennes. — Voir p. 157- 158. — Liste de fossiles dans Scalia [204]. Ostrea cochlear Poli ? Chlamys opercularis L. © — septemradialus Müll. var. subclavata Cantr. sp. Arca lactea L. ? Pectunculus sp. Nucula nucleus L. — placentina Lmk. ? — sulcala Brn. Leda fragilis Chemn. Cardita aculeata Poli Cardium norvegicum Spengl. — papillosum Poli e Cyprina islandica L. ? Meretrix chione L. Circe minima Mig. e Dosinia lupinus L. var. Ficaralien- sis nov. — exoleta L. Venus casina L. — fasciata Da Costa var. Bron- gniarli Payr. — ovala Penn. Donaxz trunculus L.? Mactra subtruncata Da Costa var. triangula Ren. Corbula gibba Olivi Dentalium vulgare Da Costa — reclum L. Mitra cornicula L. ? : e Buccinum humphreysianum Benn. Euthria cornea L. Nassa neritea L. | — — var. Donovani Risso — semisiriata Br. var. Edward si Fisch. sp. Columbella scripla L: Trophon muricalus Mig. ? Murex Brocchii Mtrs, + + Eralo lævis Donov. + Chenopus utlingerianus Risso Biltium reliculatum Da Costa Turrilella communis Risso var. pliorecens Mtrs. sp. Crepidula Moulinsi Mich. Calyptræa-chinensis L. Natica cf. calena Da Costa — millepunctala L. — intricata Donov. Trochus Montagui Wood — magus L. — striatus L. Fissurella græca L. + Caryophyllia communis Seg. 15. — Gravitelli. Près Messine. — Sables et graviers coralligènes à Pachylasma giganteum Phil. — Voir p. 69, E. Oslrea cochlear Poli Pecten jacobæus L. ® — — var. aff. P. maximus L. Chlamys flexuosus Poli ? — mullistriatus Poli — varius L. — opercularis L. e — septemradialus Müll. var. subclavata Cantr. sp. * Mytilus galloprovincialis Lmk. Arca tetragona Poli Circe minima Mts. Clathurella gracilis Mto:. Nassa limata Chemn. ? Turbo peloritanus Cantr. Trochus groupe granulatus Born — Zzizyphinus L. var. E Mühlfeldtia truncata L: Terebratulina caput-serpentis L. Terebratula minor Phil. — sphenoidea Phil. ° Magellania cranium Müll. e — septigera Loven + Isis melitensis Goldf. Lophohelia Defrancei E. et EH. Amphihelia miocenica Seg. Dendrophyllia cornigera Lmk. + Cœnopsammia Scillæ Seg. APPENDICE 647 16. — Carrubbare. Près Reggio. — Sables fins. — Voir p. 95. — Liste dans Seguenza [206]. Ostrea cf. edulis L. Anomia palelliformis L. Pecten jacobæus L. Chlamys opercularis L. — commulalus Mtrs. — varius L. — clavalus Poli? — incomparabilis Risso Mytilus galloprovincialis Lmk. e Modiola modiolus L. Arca barbata L. — tetragona Poli Pectunculus sp. Nucula nucleus L. Astarte sulcata Da Costa +) — — var. pseudofusca nov. Cardium echinatum L. var. mu- cronata Poli — norvegicum Spengl. — oblongum Chemn. — papillosum Poli var. maxi- ma B. D. D. Meretrix chione L. — rudis Poli Dosinia exoleta L. e9 — lupinus L. var. ficaratien- Sis nov. Venus casina L. — fasciata Da Costa var. Bron- gniarti Payr. — ovala Penn. — verrucosa L. © Tapes rhomboides Penn. Diplodonta rotundata Mtg. Psammobia färoensis Chemn. ? Solen ensis L. Ervilia casteana Mig. Mactra subtruncata Da Costa Saæicava arctica L. Lucina borealis L. Woodia digitaria L. Tellina donacina L. Dentalium vulgare Da Costa e Buccinum undatum L. Nassa incrassata Müll. — limala Chemn, + Nassa mulabilis L. — musiva Br. Cypræa europæa Mtg. var. aff. C. sphæriculata Lmk. Eralo lævis Donov. Cerithium vulgatum L. et pl. var. Billium reliculatum Da Costa Turrilella communis Risso var. pliorecens Mtrs. sp. — lriplicala auct. Capulus hungaricus L. Calyptræa chinensis L. Natica cf. catena Da Costa — millepunctata L. Turbo rugosus L. Trochus magus L. — miliaris Br. — zizyphinus L. 17. — Gallina Est. Près Reggio. — Sables et graviers à Brachiopodes. — Voir p. 103 — Liste dans Seguenza [206]. + Ostrea cf. edulis L. Anomia patelliformis L. Lima squamosa L. — hians Gmel. Pecten jacobæus L. — — var. Chlamys varius L. ; — mullistriatus Poli — pesfelis L. — opercularis L. — fleruosus Poli var. percolli- gens Sacco — clavatus Poli var. inflexa Poli — — var. Dumasi Payr. — septemradiatus Müll. var. Cremai nov. Hinnites ercolanianus Cocconi Mytilus galloprovincialis Lmk. Arca barbata L. — lactea L. — Noæ L. Pectunculus sp. Leda pella L. Cardium papillosum Poli? Meretrix chione L. — rudis Poli 648 ‘ APPENDICE Circe minima Mig. Dosinia exoleta L. Venus casina L. — verrucosa L. — gallina L. Macetra, subtruncata Da Costa Corbula gibba Olivi Divaricella divaricata L. Loripes lacteus L. Murexz brandaris L. Cypræa europæa Mis. Cerithium vulgatum L. et var. Bittium, reticulatum Da Costa Nerilula neritea L. Turbo rugosus L. Crania anomala Müll. var. turbi- nata Poli. Megathyris decollata Chemn. Terebratula minor Phil. æ — cf. Scillæ Sep. ° Magellania septigera Loven + Caryophyllia polymorpha Seg. + — aculicostala Sep. + Flabellum avicula Michelin var. siciliense E. et H, — extensum Michelin Balanophyllia sp. Dendrophyllia cornigera Lmk. + 18. — Monte di Botte. Route Reggio-Terreti: tuileries de Pozzicelli. — Sables argileux. — Voir D. 88. Anomia ephippium L. Pecten jacobæus L. Chlamys multistriatus Poli — opercularis L. + — scabrellus Lmk. var. bolle- nensis May. 9 — septemradiatus Müll. var. subclavata Cantr. sp. Cardium papillosum Poli Venus casina L. Patella cerulæa XL. 19. — Monte di Pentimele. Au N. de Reggio. — Sables et gra- viers profonds. — Voir p. 82-83. Ostrea cochlear Poli Anomia ephippium L. + Flabellipecten. flabelliformis Br. Pecten jacobæus L. 3 È + — — var. bipartita For. + Chlamys latissimus Br. — opercularis L. + — scabrellus Lmk. + — — var. bollenensis May. Pectunculus sp. Astarte sulcata Da Costa Cardium norvegicum Spengl. — papillosum Poli Venus casina L. — ovala Penn. - ® Tapes rhomboides Penn. Lucina borealis L. © Buccinum undalum L:. Nassa limata Chemn. 20. — Monte Corvo. Au N. de Reggio. — Sables fins et graviers profonds. — Voir p. 84. Osirea cochlear Poli? à Anomia patelliformis L. — ephippium L. — striata Br. Lima hians Gmel. Pecten jacobæus L: © — maximus L. + Flabellipecten flabellhijormis Br. Chlamys multistriatus Poli — varius L. — Bruei Payr. — opercularis L: + — scabrellus Emk. + — — var. bollenensis May. — glaber L. — ‘clavatus Poli var. inflexu Poli — — var. Dumasi Payr. © — septemradiatus Müll. var. subclavata Cantr. sp. e — — var. Cremai nov. Mytilus galloprovincialis Emk. var. herculea Mtrs. sp. Modiola barbata LE. Arca barbata L. — lactea L. — Noæ L. ide Gite as idée és Mantes à | ché TE à # ON EDR her = 477 + + APPENDICE 649 Pectunculus sp. Limopsis aurila Br. Astarte sulcala Da Costa — — var. pseudofusca nov. Cardium norvegicum Spengl. — papillosum Poli var. Aradasi Crema Merelrix chione L. Dosinia exolela L. Circe minima Mio. Venus casina L. — effossa Biv. — fasciala Da Costa — ovala Penn. — verrucosa L. Psammobia färoensis Chemn. EÉrvilia castanea Mtg. Mactra Subtruncala Da Costa Lutraria lulraria L. Lucina borealis L. Loripes lacteus L. Jagonia reliculata Poli Woodia digitaria L. Divaricella divaricata L. Arcopagia crassa Penn. Dentalium vulgare Da Costa Clathurella gracilis Mtg. Fusus rostralus Olivi var. cincla. var. lathyroides Di Blasi — vaginalus Crist. et Jan — cf. lamellosus Bors. Buccinum undalum L. — humphreysianum Benn. Nassa limata Chemn. — reticulala L.? — musiva Br. var. sculpta Brugn. sp. Columbella scripta L. Murex aciculatus Lmk. Cerithium vulgatum Brug. et var. Biltium reliculatum Da Costa Turritella triplicata auct. Crepidula Moulinsi Michaud Calyptræa chinensis L. Natica millepunctata L. — Montaculi Forbes — cf. calena Da Costa Turbo rugosus L. — peloritanus Cantr, Cr'Asse- Trochus conulus L. — Montagui Wood — groupe de granulalus Born — magus L. — miliaris Br. — strialus L. — zizyphinus L. Haliolis cf. lamellosa Look. Fissurella gibberula Lmk. — græca L. Palella cerulæa L. Mühlfeldlia truncala L. Terebratula minor Phil. Terebralulina caput-serpentis L. + Sltephanocyathus elegans Se + Desmophyllum affine Seg. Lophohelia Defrancei E. et H. Amphihelia miocenica Seg. + Cœnopsammia Scillæ Seg. œ D: 21. — Musala. Près Villa S. Giovanni. — Sables et graviers profonds. — Voir p. 108 — Liste dans Seguenza [206]. Anomia ephippium L. — palelliformis L.) — striala Br. Spondylus gæderopus L. Pecten jacobæus L. Lima hians Gmel. — squamosa L. Chlamys opercularis L. — commulalus Mtrs. — pesfelis L. — varius L. — mullistriatus Poli — cf. flexœuosus Poli — clavalus Poli var. Dumasi Payr. ® — seplemradialus Müll. var. subclavala Cantr. sp. — cf. rimulosus Phil. Mytilus galloprovincialis Lmk. Arca barbala L. — Noæ L. — lactea L. Pectunculus sp. Astarte sulcala Da Costa + — — var. pseudofusca nov. 650 APPENDICE Astarte triangularis Mtg. ? Cassis undulata Gmel. Cardium norvegicum Spengl. Cypræa europæa L. — papillosum Poli Cerithium vulgatum Brug. et var. Chama gryphoides L. Bittium reliculatum Da Costa + — placentina Defr, Triforis perversus L. var. cylin- Meretrix chione L. drata Mtrs. | — rudis Poli Turrilella triplicata auct. Dosinia exoleta L. Calyptræa chinensis L. ° — lupinus L. var. ficaraliensis Natica cf. catena Da Costa nov: — millepunctata L. Venus casina L. Turbo peloritanus Cantr. var. | — effossa Biv. — rugosus L. k — jJasciata Da Costa var. aff. — sanguineus L. | Brongniarti Payr. Trochus conulus L. 1 — gallina L. — corallinus L. | — ovata Penn. — fanulum Gmel. ; — verrucosa L. — Guttadauri Phil. 3 ® Tapes rhomboides Penn. — Jussieui Payr. . Donax politus Poli — magus L. E Psammobia depressa Penn. — miliaris Br. var. millegrana $ — färoensis Chemn. Phil. x Mactra subtruncata Da Costa — striatus L. 4 Lutraria lutraria L. — zizyphinus L. À Lucina borealis L. Haliotis ef. lamellosa Lmk. F Loripes lacteus L. Fissurella gibberula Lmk. É Woodia digitaria L. — græca L. à Divaricella divaricata L. Patella cerulæa 1. Jagonia reticulata Poli Mühilfeldtia truncata L. | Tellina donacina L. Terebratulina caput-serpentis L. Dentalium vulgare Da: Costa Terebratula minor Phil. Cancellaria cancellata L. ° Magellania cranium Müll. + Mitra cf. Bronni Michelotti — septigera Lov. Fusus rostratus Olivi var. cincta. + Distichopora sp. (r). — vaginatus Crist. et Jan + Ceratotrochus typus Seg. e Buccinum undatum L. Desmophyllum sp. Euthria cornea L. Lophohelia Defrancei E. et H. Nassa costulata Ren. Amphihelia miocenica Seg. — incrassata Müll. + Cœnopsammia Scillæ Seg. — limata Chemn. Astroides calycularis Pall. + — musiva Br. var. crasse- sculpta Brugn. sp. É : ea Nero nee I 22. — S. Giuseppe di Valanidi. Columbella scripta L. Au S. de Reggio. — Marnes sableu- Murex trunculus L. ses à Brachiopodes. — Voir p. 110-111. — Blainvillei Payr. Trilonium costatum Born Osirea cochlear Poli ? 1 D'aprés M. Filliozat, ce genre, vivant seulement dans les mers chaudes, est cité pour la première fois dans le Pliocène. DS APPENDICE 651 Anomia cf. patelliformis L. Peclen jacobæus L. Chlamys opercularis L. — mullistriatus Poli — pesfelis L. var. Sacco — flezuosus Poli — clavatus Poli Peclunculus sp. Patella cerulæu L. (remanié ?). Mühlfeldtia truncala L. + Terebratula cf. Scillæ Seg. — minor Phil. e Magellania sepligera Loven ligustica 23. — Fiumara dei Macellai. Au S. de Reggio. — Marnes très pro- fondes et marnes sableuses : en partie Pliocène ancien. Voir p. 110-111. Pecten jacobæus L. Chlamys opercularis L. — clavatus Poli — septemradiatus Müll. var. subclavata Cantr. sp. Nucula sulcata Brn. + Leda clavata Calcara ? + — excisa Phil. + Neilo pusio Phil. Syndesmya longicallus Schacchi Cuspidaria rostrala Spengl. Verticordia acuticostata Phil. Dentalium quinquangulare Forbes Nassa limata Chemn. Turbo peloritanus Canir. Trochus groupe de granulalus Born zizyphinus L. — Otloi Phil. ? Mühtlfeldtia truncata L. Megathyris decollata Chemn. Terebratulina caput-serpentis L. + Terebratula cf. Scillæ Seg. — minor Phil. e Magellania septigera Lov. ? + Isis melitensis Goldf. + Caryophyllia suborbicularis Seg. + Caryophyllia communis Seg. + Ceralolrochus typus Seg. + Slephanocyathus elegans Seg. Lophohelia Defrancei E. et H. + Cœnopsammia Scillæ Seg. 24. — Mileto. Près Monteleone. — Marnes et sables peu profonds. — Voir p. 56. Pecten jacobæus L. e — — var. aff. P. maximus Chlamys opercularis L. — mullistriatus Poli 9 — septemradiatus Müll. var. subclavata Cantr. sp. . — — var. Cremai nov. Mytilus galloprovincialis Lmk. Arca obliqua Phil. (x) Pectunculus sp. Limopsis anomala Eichw. (1) Nucula sulcata Brn. Astarte sulcata Da Costa (x) Cardium norvegicum Spengl. — papillosum Poli Meretrix chione L. Dosinia exoleta L. e — lupinus L. nov. Venus fasciata Da Costa cf. var. Brongniarti Payr. sp. — ovata Penn. Mactra subtruncata Da Costa Corbula gibba Olivi Lucina borealis L. Loripes lacteus L. Jagonia reticulala Poli Tellina distorta L. ? + Dentalium rectum L. — vulgare Da Costa Cylichna cylindracea Penn. (1) Mitra ebenus L.? Fusus rostratus Olivi (x) — vaginatus Crist. et Jan (x) Pisania d’Orbignyi Payr. Nassa mutabilis L. — limata Chemn. (1) var. ficaraliensis ! Espèce spéciale au niveau inférieur de marnes profondes, 652 APPENDICE + Nassa semistriata Br. var. cala- brensis nov. (1) + Chenopus utlingerianus Risso (1) Cerithium vulgatum L. Natica cf. catena Da Costa Turbo peloritanus Cantr. Trochus magus L. — ardens von Salis ? Palella cerulæa L. + Terebratula cf. Scillæ Seg. (x) Amphihelia miocenica Seg. 25. — Piscopio. Au S. de Monteleone, — Sables peu profonds. — Voir p. 54. Anomia palelliformis L. Pecten jacobæus L. Chlamys opercularis L: — multistriatus Poli — varius L. — clavatus cf. var. Payr. Mytilus galloprovincialis Lmk. Arca lactea L. Cardita calyculata L. Chama gryphoides L. Meretrix chione L. Dosinia exoleta L. Venus fasciata Da Costa var. Bron- gniarli Payr. — gallina L. ® Tapes rhomboides Penn. Venerupis irus L. Donax politus Poli Ervilia castanea Mig. Mactra subtruncata Da Costa Lutraria lutraria L. Corbula gibba Olivi Lucina borealis L. Loripes lacteus L. Tellina distorta L. Murex Blainvillei Payr. var. aff. M. cristatus Br. Trochus conulus L. lFissurella gibberula Lmk. ? Megathyris decollata Chemn. e Magellania septigera Lov. Dumasi | Espèce spéciale au niveau inférieur de marnes profondes, P P 26. — Monosterace. Voir p. 50. — Sables et graviers assez profonds. — Liste de fossiles dans Se- guenza [206]. Ostrea cochlear Poli Anomia ephippium L. — striata Br. Peclen jacobæus L. + — cf. Planariæ Simondlli. Chlamys opercularis L. — commutatus Mtrs. — clavatus Poli var. Dumasi Payr. — clavatus var. infleæa Poli © —— septemradiatus Müll. var. subclavata Cantr. sp. Arca diluvu Lmk. ï Pectunculus sp. Limopsis anomala Eichw. Nucula nucleus L. — sulcala Brn. Leda fragilis Chemn. Cardita aculeata Poli — corbis Phil. ? Cardium echinatum L. var. mu- cronata Poli — papillosum Poli var. Aradasi Crema Chama gryphoides L. + — placentina Defr. e Cyprina islandica L. Meretriz chione L.? — rudis Poli e Dosinia lupinus L. var. ficaratien- Sis nov. Venus casina L. — multilamella Lmk. — verrucosa L. — fasciata Da Costa var. — gallina L. — ovata Penn. Solenocurtus candidus Ren. Mactra glauca Born — subtruncata Da Costa Lutraria lutraria L. Corbula gibba Olivi APPENDICE 053 Saxicava arclica L. Lucina borealis L. — spinifera Mig. Tellina serrata Ren. Dentalium vulgare Da Costa + — rectum L. Conus medilerraneus Brug. Fusus rostralus Olivi var. lathy- roides Di Blasi — rostratus Olivi var. cinclu. e Buccinum humphreysianum Benn. Nassa limata Chemn. — mulabilis L. + — musiva Br. var. crasse sculpta Brugn. sp. + — semistriata Br. var. cala- brensis rov. Nerilula neritea L. Trophon muricatus Mtg. ? Cassidaria echinophora L. Cypræa europæa Mte. Chenopus pespelecani L. Cerithium vulgatum L. var. alu- castra B. D. D. Bitlium reticulatum Da Costa Turritella communis Risso var. pliorecens Mtrs. sp. — triplicata auct. Capulus hungaricus L. + Brocchia sinuosa Br. ? Calyptræa chinensis L, Natica millepunctata L. — josephinia Risso — cf. catena Da Costa Scalaria communis Lmk. Turbo peloritanus Cantr. — rugosus L. Trochus magus L. — miliaris Br. — zizyphinus L. + Balanophyllia sp. 2%. — S. Maria di Catanzaro (niveau inférieur). Calabrien inférieur : grès à Cyprina islandica. — Noir p. 36, B. — Liste de fossiles dans Neviani [181]. Ostrea cf. edulis L. Anomia striala Br. Pecten jacobæus L. Chlamys opercularis L. — clavatus Poli Mytilus cf. galloprovincialis Lmk. Arca barbala L. — diluvii Lmk,. — lactea L. — letragona Poli Peclunculus sp. + Astarte sulcata Da Costa var. pseu- dofusca nov. Cardium aculeatum L. Chama gryphoides L. + — placentina Defr. © Cyprina islandica L. Isocardia cor L. ® Dosinia lupinus L. var. ficaralien- sis nov. Venus fasciata Da Costa var. Bron- gniarli Payr. — gallina L. — casina L. — verrucosa L. Mactra subtruncata Da Costa Corbula gibba Olivi + Dentalium rectum L. — novemcostalum Lmk. et var. inæquicostala Dautz. — vulgare Da Costa Conus mediterraneus Brug. Mitra ebenus L. Fusus rostratus Olivi var. cincla. Nassa limala Chemn, — mulabilis L. + — semistriala Br. cf. var. calu- brensis nov. ? Mureæ trunculus L. Cassis undulata Gmel. ? Cypræa europæa Mte. — cf. physis Br. Chenopus pespelecani L. Bittium reticulalum Da Costa Turritella triplicala auct. — communis Risso var. pliore- cens Mtrs. sp. + Brocchia sinuosa Br. Natica millepunctata L. — cf. calena Da Costa Turbo rugosus L, 654 APPENDICE Trochus Montagui Wood — striatus L. 28. — S. Maria di Catanzaro (niveau supérieur). Sables et grès: Calabrien supérieur. — Voir p. 37 D. — Liste de fossiles dans Neviani [181]. Anomia patelliformis L. Lima squamosa L. Chlamys opercularis L. — mullistriatus Poli © — seplemradiatus Müll. var. planata Mtrs. Mytilus cf. galloprovincialis Emk. Arca barbata L. — tetragona L. Pectunculus sp. Cardita antiquata Lmk. — aculeata Poli ? — corbis Phil. + Astarte sulcata Da Costa var. aff. pseudofusca nov. Cardium tuberculatum L. — norvegicum Spengl. — papillosum Poli var. Ara- dasi Crema Chama gryphoides L. e Cyprina islandica L. Meretrixæ chione L. Dosinia exolela L. e — lupinus L. var. ficaratiensis nov. Venus casina L. — ovala Penn. e Tapes rhomboides L. Solen ensis L. Mactra subtruncata Da Costa Lucina borealis L. — divaricata L. — digilaria L. Thracia pubescens Pulin Dentalium Brugnoner Mtrs. - Nassa limata Chemn. Neritula neritea L. Columbella scripla L. Cerithium vulgatum L. + — varicosum Br. ? Bitlium reticulatum Da Costa Triforis perversus L. Turritella communis Risso var. pliorecens Mtrs. sp. — triplicata auct. Capulus hungaricus E. Calyptræa chinensis L. Natica cf. catena Da Costa Trochus conulus LE. — Montagui Wood .— miliaris Br. . — Sstriatus L. Fissurella gibberula Lmk. — græca L. Patella cerulæa L. Megathyris decollata Chemn. 89. — Valle Lamato. .: Fiumara S. Ippolito. Rive gauche de Ia EF. S. Ippolito en amont du Stretto Veraldi. — Argiles sableuses à Turritelles : Calabrien su- périeur. — Voir p. 39. Anomia ephippium L. Chlamys opercularis L. © — septemradiatus Müll. Arca diluviüi Lmk. Pectunculus sp. Nucula sulcata Brn. Leda fragilis Chemn. — pella L. Cardium echinatum L: var. mu- cronata Poli — norvegicum Spengl. — papillosum Poli. Isocardia cor L: Meretrix chione L. — rudis Poli £ .Circe minima Mte:. 6 Dosinia lupinus LE. var. ficaralien- sis NOM. Venus fasciata Da Costa var. Bron- gniarti Payr. — gallina L. — ovala Penn. Donax venusius Poli var. parvo- lunga Sacco Solenocurtus antiquatus Pultn. Mactra subtruncata Da Costa Corbula gibba Olivi Lucina spinifera Mtg. APPENDICE 655 Tellina compressa Br. — donacina L. — cumana Da Costa ? Pleurotoma undatiruga Biv. Fusus rostratus Olivi var. cincla. Euthria cornea L. Nassa limata Chemn. + = musiva Br. var. sculpta Brugn. — semistriata Br. var. Edward- si Fisch. sp. Murexz brandaris L. var. aff. M. ‘o- rularius Lmk. Cassidaria echinophora L. Cypræa europæa Mtge. Chenopus pespelecani L. — serresianus Mich. Turritella communis Risso var. pliorecens Mtrs. sp. Calyptræa chinensis L. Natica millepunctata L. — cf. catena Da Costa Scalaria tenuicosta Mich. Turbo rugosus L. Trochus miliaris Br. — magus L. crasse- 30. — Valle Lamato. S. Pietro a Maïda., Soubassement du plateau de Brunini. — Marnes sableuses à Térébratules. — Voir p. 39. Pecten jacobæus L. Chlamys opercularis L. ® — septemradiatus Müll. ? Pectunculus sp. Nucula nucleus L. — sulcata Brn. e Cardium echinatum L. aff. var. propexæa Mtrs. sp. — norvegicum Spengl. — papillosum Poli Isocardia cor L. Venus ovata Penn. Solen ensis L. Corbula gibba Olivi ® Buccinum humphreysianum Benn. Nassa limata Chemn. Cassidaria echinophora L. ? + Chenopus ultingerianus Risso ? Cerithium vulgalum L. var. alu- castra B. D. D. Turrilella triplicala auct. — communis Risso var. plio- recens Mtrs. sp. Natica millepunctata L. — cf. catena Da Costa Trochus magus L. — miliaris Br. ° Magellania cranium Müll. ® — sepligera Loven 31. — Valle Lamato. Route Nicastro-Pizzo au pont sur le F. Amato. — Graviers grossiers à Pa- chylasma giganteum Phil — Voir p. 39. Lima hians Gmel. Chlamys opercularis L. © — seplemradialus Müll. var. Limopsis aurita Br. Venus fasciata Da Costa var. Bron- gniarti Payr. Solen ensis L. ? Mactra subtruncata Da Costa + Mitra cupressina Br. Fusus rostralus Olivi var. cincla. — vaginatus Crist. et Jan e Buccinum humphreysianum Benn. ? Nassa limata Chemn. Turbo peloritanus Cantr. Fissurella italica L. Mühlfeldtia truncata L. Terebratulina caput-serpenlis L. + Terebratula cf. Scillæ See. ® Magellania septigera Lov. 32. — Castrovillari. Argiles bleues, argiles sableuses à Turritelles, sables à Cladocores. — Voir Pp. 119. — Liste de fossiles dans Crema [56]. Spondylus. gæderopus L. Pecten jacobæus L. Chlamys varius L. À , 1 656 APPENDICE 4 Chlamys hyalinus Poli Phasianella pullus L. Arca lactea L. Trochus exasperatus Penn. Nucula nucleus L. Cladocora cespitosa Gualt. — sulcata Brn. Leda pella L. 33. — Bernalda. Cardium echinatum L., var. mu- Sables et -arales Cane Ce iCaln cronata Poli brien supérieur ou Quaternaire an- — paucicostatum Sow. cien. — Voir p. 139. — papillosum Poli var. Ara- : : ET Grare. Ostrea cf. edulis L. 1 ES DT Pecten jacobæus L. 1 Teocar die Chlamys opercularis L. 4 Meretrix chione L. Pectunculus Sp: di Pol Nucula nucleus EL. | Circe minima Mig. ° Dosinia lupinus L., var. ficaratien- sis Mtrs. sp. Venus fasciata Da Costa, var. Brongniarti Payr. — ovata Penn. — verrucosa L. Psammobia färoensis Chemn. Solenocurtus antiquatus Pultn. — candidus Ren. Mesodesma cornea E. Corbula gibba Olivi Lucina borealis L. — spinifera Mte. Loripes lacteus L. Tellina donacina L. — nitida Poli Syndesmya prismatica Mie ) Mangilia albida Desh. Clathurella purpurea Mie. ? Fusus rostratus Olivi Euthria cornea L. Nassa limata Chemn. — multabilis L. — pygmæa L. — semistriata Br. var. Ed- wardsi Fisch. sp. Murex trunculus L. — brandaris L.? Chenopus pespelecant L. Turritella triplicata auct. — communis Risso var. plio- recens Mtrs. Nalica millepunctata L. — cf. catena Da Costa Turbo rugosus EL. — sulcata Brn. ; 1 Cardium echinatum L. var. mu- ceronata Poli — tuberculatum L. Isocardia cor L. £ Meretrix chione L. : Venus ovata Penn. Ê — fasciata Da Costa var. Bron- gniarti Payr. Mactra subtruncata Da Costa ñ Corbula gibba Olivi Lucina borealis L. HS Nassa mutabilis L. H — reticulata L. var. aff. N. mu- ; siva Br. Es — semistriala Br. var. Edward- 4 . 5 r1 si Fisch. sp. F 4 Turrilella communis Risso var. pliorecens Mtrs. sp. 34. — Gravina di Puglia, Argiles supérieures et sables : Cala- brien supérieur. — Voir p. 136, note 1, et p. 138. Liste de fossiles dans Di Ste- fano et Viola [120]. Ostrea cochlear Poli Anomia striata Br. Pecten jacobæus L. Chlamys opercularis L. — multistriatus Poli — flezuosus Poli var. pyæoi- dea Loc. — septemradiatus Müll. var. subclavata Cantr. sp. Arca diluvii Emk- Pectunculus sp. APPENDICE 657 Nucula nucleus L. — sulcala Brn. + Astlarte suleata Da Costa et var. pseudofusca nov. Cardium aculeatum L. — echinalum L. var. mucro- nata Poli __ hians Br. — norvegicum Spengl. — oblungum Chemn. — papillosum Poli var. Ara- dasi Crema Isocardia cor L. Meretrixæ chione L. — rudis Poli Venus fascialta Da Costa var. Brongniarti. Payr. — multilamella Lmk. Solenocurtus antiqualus Pultn. Mactra subtruncata Da Costa Panopæa glycymeris L. var. aff. | Faujasi Mén. Saxicava arclica L. Syndesmya longicallus Seacchi + Dentalium rectum L. Scaphander lignarius L. + Raphitoma Columni& Scacchi Drillia crispala Jan Fusus rostratus Olivi — vaginalus Crist. et Jan Nassa limata Chemn. + — semistriala Br. var. cala- brensis nov. Murexæ trunculus L. eu Drandaris. L. var. aff. M torularius Lmk. Lrophon muricalus Mig. var. bar- vicensis Johnston Cassis saburon Brug. var. Cassidaria echinophora L. Chenopus pespelecani L. +, — ullingerianus Risso Cerithium vulgalum L. + — varicosum Br. Turrilella communis Risso var. pliorecens Mirs. sp. — (lriplicata auct,. Calyptræa chinensis L. Natica millepunelala Risso — josephinia Risso Univ. pe Lyon. — Gicnoux. Nalica cf. calena Da Costa Trochus magus L. 35. — Nardo (près Lecce). Mollasses calcaires et base des argi- les : Calabrien inférieur et en partie Pliocène ancien. — Voir p. 148. Ostrea cochlear Poli Peclen jacobæus L. Chlamys opercularis L. — mullistriatus Poli —— clavatus Poli © __ seplemradialus Müll. var. aff. Cremai nov. Arca letragona Poli + Nucula placentina Lmk, Cardita aculeata Poli — rhomboidea Br. var. iner- mis Michlti. + Astarle sulcata Da Costa et var. pseudofusca nov. Cardium echinatum LL. var. Des- hayesi Payr. — oblungum Chemn. — norvegicum Spengl. à © Cyprina islandica L. Isocardia cor L. Meretrix chione L. — rudis Poli ® Dosinia lupinus L. var. jicaralien- Sis noy. Venus. casina LL. var. Aradasi BDD: — ovala Penn. Lucina borealis L. Thracia conveza Wood Poromya grañulala Nyst et West. — neæroides See. )? + Dentalium reclum L. Cylichna cylindracea Penn. Nassa limala Chemn. + Chenopus utlingerianus Risso Turrilella triplicata auect. Xenophora crispa Kônig Natica millepunctala L. — cf. calena Da Costa Turbo pelorilanus Cantr. e Solariella peregrina Libassi Fissurella ilalica L. = «© 658 APPÉNDICE ; + Terebratula cf. Scillæ Ses. + Caryophyllia corniculata Seg. Ill. QUATERNAIRE ANTÉSICILIEN 36. — Cutro (Casa Campanoro), près Cotrone. Facies littoraux : 170 m. d'altitude. — Voir p. 242. Ostrea cf. edulis L. Pecten jacobæus L. Chlamys varius L. — glaber L. var. sulcata LEmk. —— — var. anisopleura Loc. — proteus Sor. Pectunculus sp. Nucula nucleus L. Cardium tuberculatum L. — norvegicum Spengl. — edule L. et var. cotronensis nov. Meretriz chione L. — rudis Poli Circe minima Mte. Dosinia exoleta L. Venus fasciata Da Costa, var. Bron- gniarti Payr. + Tapes cf. Dianæ Requien Donaxz trunculus L. Corbula gibba Olivi Loripes lacteus L. Tellina donacina L. — distorta L. — nitida Poli — pulchella Emk. Dentalium vulgare Da Costa — novemcostatum Lmk. Cerithium vulgatum L. Natica millepunctata L. Turbo rugosus L. Fissurella italica L. Cladocora cespitosa Gualt. IV. — SICILIEN OÙ NIVEAU DE 80-100 M. 37. — Castellamare del Golfo. Argiles sableuses : faune profonde. — Voir p. 200. Anomia striata Br. Lima hians Gmel. Chlamys opercularis L: — multistriatus Poli — clavatus Poli e —— septemradiatus Müll. var. subclavata Cantr. — hyalinus Poli Arca tetragona Poli — pectunculoides Scacchi Pectunculus sp. Nucula nucleus L. + — placentina Lmk. Leda fragilis Phil. Cardita aculeata Poli ? Astarte sulcata Da Costa Cardium echinatum L. var. mu- cronata Poli — echinatum L. var. Deshayesi Payr. . — — var. propeza Mtrs. — norvegicum Spengl. — oblungum Chemn. Isocardia cor E. Meretrix rudis Poli e Dosinia lupinus L. var. ficaratien- sis nov. Venus multilamella Emk. — ovata Penn. © Tapes rhomboides Penn. Azxinus biplicatus Phil. Solenocurtus antiquatus Pultn. Lucina spinifera Mtg. Thracia conveza Wood + Dentalium rectum L: Actæon tornatilis E: Scaphander lignarius L. Clathurella Cordieri Payr. Mitra cornicula EL. ? Fusus rostratus Olivi? e Buccinum humphreysianum Benn. + Nassa clathrata Born var. ficara- tiensis Mtrs. sp. ; — limata Chemn. — semistriata Br. var. Edwaru- si Fisch. Trophon muricatus Mts.? Cassidaria echinophora E. Cypræa europæa Mig: Erato lævis Donov. Chenopus pespelecani L, APPENDICE 659 Cerithium vulgalum L: var. alu- castra B. D. D. Turrilella communis Risso — triplicala auct. Capulus hungaricus L. Calyptræa chinensis L. Xenophora crispa Künig Natica millepunctata L. — cf. catena Da Costa Trochus magus L. — miliaris Br. 38. — Balestrate. Golfe de Castellamare ; argiles sa- bleuses ; faune profonde (80 m. envi- ron). — Voir p. 201. Ostrea cf. edulis L. Pecten jacobæus É. Chlamys opercularis L. — commulatus Mirs. — mullistriatus Poli — glaber L. — flexuosus Poli var. percoi- ligens Sacco — clavatus Poli © — septemradialus Müll. var, subclavala Cantr. — hyalinus Poli? Pinna cf. nobilis L. Arca diluvii Lmk. — tetragona Poli Pectunculus sp. Nucula nucleus L. — sulcata Brn. + — placentina Lmk, Leda fragilis Phil. Cardium aculeatum L. — echinalum L. var. mucro- nala Poli — — Deshayesi Payr. Que — propeæa Mirs. — norvegicum Spengl. — papillosum Poli — minimum Phil. e Cyprina islandica L. Isocardia cor L. Meretrir chione 1. — rudis Poli e Dosinia lupinus L. var. ficara- liensis nov. Venus fasciala Da Costa var. Brongniarti Payr. — gallina L. — mullilamella Lmk. — ovala Penn. e Tapes rhomboides Penn. Solenocurlus candidus Ren. Mactra subtruncata Da Costa Corbula gibba Olivi Lucina spinifera Mtg. — transversa Brn. — divaricata L. Tellina compressa Br. Cuspidaria cuspidata Olivi + Clavagella bacillum Br. Dentalium novemcostatum Lmk. GIE var. pseudaprina Sacco Scaphander lignarius L. Ringicula auriculata Mén. + Nassa clathrala Born var. ficara- liensis Mrs. — semistriata Br. var. Æd- wardsi Fisch. Murex brandaris L. Cassidaria echinophora L. Turritella communis Risso — triplicala auct. Capulus hungaricus L. Xenophora crispa Kôn. Natica millepunctata L. — josephinia Risso Scalaria elegans Risso Trochus miliaris Br. 39. — Mortelle. Collines de Faro superiore, au N. de Messine. — Facies très littoraux. — Voir p. 208. Ostrea edulis L. Spondylus gæderopus L. Pecten jacobæus L. Chlamys varius L. — mullistriatus Poli iylilus galloprovincialis Lmk. — — var. herculea Mtrs. {rca lactea L. 660 Arca Noæ L. Pectunculus sp. Nucula nucleus L. Leda pella L. Cardium tuberculatum L. — paucicostatum Sow. — papillosum Poli — exiguum Gmel. ? — norvegicum Spengl. — edule L. — — var. quindecimcosta- ta nov. APPENDICE — — var. mortellensis nov. etc. Chama gryphoides L. Meretrix chione L. — rudis Poli Circe minima Mig. Dosinia exoleta L. Venus gallina L. — verrucosa L. Tapes decussatus L. — rhomboides Penn. Diplodonta rotundata Mtg. Psammobia depressa Penn. — füroensis Chemn. Mesodesma cornea L. Corbula gibba Olivi Lucina fragilis Phil. — divaricata L. — reliculata Poli Loripes lacteus LE. Tellina donacina L. — nitida Poli Gastrana fragilis L. Dentalium dentale L. — novemcostatum Lmk. inæquicostata Dautz. — vulgare Da Costa Mangilia albida Desh. Columbella rustica L. Murex trunculus L. — Blainvillei Payr. Tritonium nodiferum Lmk. | Chenopus pespelecani L. Cerithium vulgatum L. — rupestre Risso Trochus ardens von Salis ? — cruciatus L. ) Cladocora cespitosa Gualt. Var, 40. — Rosarno, Argiles sableuses : faune profonde. — Voir p. 233. Ostrea stentina Payr.? Anomia striata Br. Pecten jacobæus L. QUE — var. aff. P. mari- ; mus L, Chlamys opercularis L. — multistriatus Poli ® — septemradiatus Müll. On. — — var, subclavata Cantr, Nucula nucleus L. — sulcata Brn. Cardium aculeatum L. — tuberculatum L. — oblongum Chemn. — echinatum L. var. mucro- nata Poli — — var. Deshayesi Payr. sp. . — — Var. propera Mtrs. sp. ® Cyprina islandica L. Isocardia cor L. Meretrix chione L. — yrudis Poli ° Dosinia lupinus L. var. ficaratien- Sis nov. Venus casina L. — multilamella Emk. — gallina L. — ovala Penn. s Solenocurlus antiqualus Pultn. — candidus Ren. Solen ensis L. Mactra corallina L. — subtruncata Da Costa Lutraria lutraria L. Corbula gibba Olivi Panopæa glycymeris Born Saxzicava arctica L. Lucina borealis L. — spinifera Mto. Tellina serrata Ren. — compressa Br. Thracia pubescens Pultn. ? + Dentalium rectum L. ° Buccinum humphreysianum Benn. Nassa mutabilis L. APPENDICE 661 Nassa limata Chemn. Cassidaria echinophora L. Turrilella communis Risso Natica millepunclata L. — cf. catena Da Costa Trochus magus L. — conulus L.? / 41. — Gallipoli. Falaise des Fontanelle : argiles bleues et argiles sableuses, faune profonde. — Voir p. 2%. Chlamys opercularis L. © — septemradiatus Müll. et var. subclavata Cantr. Modiola adriatica Lmk. var. Nucula nucleus L. — sulcata Brn. Aslarte sulcata Da Costa Cardium echinatum L., var. mu- cronata Poli —- — var. Deshayesi Payr. — ceæiguum Gmel. ? ® Cyprina islandica L. Isocardia cor L. Venus ovala Penn. Solenocurtus antiquatus Pultn. Corbula gibba Olivi Saxicava arctica L. — frigida Mtrs. + Dentalium rectum L. e Buccinum humphreysianum Benn. var. Nassa limata Chemn. Trophon muricalus Mig. Chenopus serresianus Mich. Turritella triplicata auct. — communis Risso Trochus miliaris Br. V. — NIVEAU DE 50-60 M. 42. — Milazzo. Facies littoral rocheux: — Voir p. 204. Ostrea cf. edulis L. Anomia ephippium L. Spondylus gæderopus L. Lima hians Gmel. — squamosa L,. Chlamys glaber L. var. — mullistrialus Poli — varius L. fleæuosus Poli Mylilus galloprovincialis Lmk. var. herculea Mtrs. Modiola barbata L. Arca barbata L. — lactea L. — Noæ L. Pectunculus sp. Cardita calyculata L. — corbis Phil. Astarte fusca Poli Kellyia sebelia Cantr. — complanala Phil. Cardium norvegicum Spengl. — oblongum Chemn. — luberculatum L. — erinaceum L. — papillosum Poli — exiguum Gmel. ? Chama gryphina L. — gryphoides L. Meretriæ chione L. Circe minima Mtg. Dosinia exoleta L. — lupinus L. aff. var. ficaru- tiensis nov. ? Venus verrucosa L. — casina L. — gallina L. — ovala Penn. Lucinopsis undata Penn. — Lajonkairei Payr. Tapes rhomboides Penn. — pullastra Mte. — aureus L. ? Venerupis irus L. Petricola lithophaga Retz. Diplodonta rotundata Mtg. ? Psammobia depressa Penn. Solen ensis L. à Lucina borealis L. — divaricata L. — reticulata Poli Loripes lacteus L. Tellina donacina L. — incarnata L. Dentalium vulgare Da Costa 662 APPENDICE Ringicula auriculala Mén. Conus mediterraneus Brug. Clathurella Cordieri Payr. — Leufroyi Mich. — purpurea Mig. Marginella miliaria L. Mitra cornicula L. — ebenus L. var. plicalula Br. Pisania maculosa LEmk. Eulhria cornea L. Nassa costulata Ren. — incrassata Müll. — corniculum L. — mutabilis L. Neritula neritea L. Columbella rustica L. — scripla L. Murexz Edwardsi Payr. — erinaceus L. var. tarentina Lmk. — trunculus L. Tritonium nodiferum Lmk. — cosiatum Born ? Cypræa europæa Mtg. — pulez Gray Cerithium vulgatum L. — rupestre Risso Bittium reticulatum Da Costa Turritella triplicata auct. Rissoina Bruguieri Payr. Calyplræa chinensis L. Nalica intricata Donov. — millepunctala L. Scalaria communis Lmk. Turbo rugosus L. — sanguineus L. Trochus Adansoni Payr. — ardens von Salis — articulatus Lmk. — conulus L. — corallinus L. — crucialtus L. var. — divaricatus L. — exasperatus Penn. — fanulum Gmel. — Jussieui Payr. — rarilineatus Mich. — Richardi Payr.? — Striatus L. — turbinatus Born Colonne. Côte au S. de Cotrone. — Facies tres littoraux divers. — Voir p. 241. * Pectunculus sp. 1 4 Trochus umbilicaris L. — varius L. — zizyphinus L: Haliotis lamellosa Lmk. et var. aff. H. tuberculata. Fissurella græca L. — italica L. — gibberula Lmk. Patella cerulæa EL. Gadinia Garnoti Payr. Cistella cuneata Risso Flabellum anthophyllum Ehrenb. Astroides calycularis Pall. 43. — Capo Castelle et Capo Ostrea edulis L. Spondylus gæderopus L. Lima squamosa L. Pecten jacobæus L. Chlamys varius EL. — mullistriatus Poli — pesfelis L. — fleæœuosus Poli — commutatus Mtrs. Lithodomus lithophagus L. Arca barbata L. — lactea L. No 1. — pulchella Reeve Nucula nucleus L. Cardita calyculata L. Cardium luberculatum L. — papillosum Poli — edule L. Chama gryphina LE. — gryphoides L, Coralliophaga lithophagella Lmk. Dosiria exoleta L. — lupinus L., type Venus verrucosa L. — gallina L. Tapes pullastra Mtg.? Venerupis irus L: Mactra subtruncata Da Costa Corbula gibba Olivi Pr Lé Rite agi. ou 22 APPENDICE Lucina reliculala Poli Tellina planala L. — distorta L. — balaustina L. Gastrana fragilis L. Conus medilerraneus Brug. Mangilia Vauquelini Pavr. Pisania d'Orbignyi Payr. Euthria cornea L. Nassa costulata Ren. — incrassata Müll. Neritula neritea L. Murex trunculus L. Apollon scrobiculator L. Cerithium vulgatum L. — rupestre Risso Bitlium reticulatum Da Costa Natica millepunctata L. — cf. catena Da Costa. Scalaria communis Lmk. Phasianella pullus L. — speciosa Von Mühlf. Turbo rugosus L. — sanguineus L. Trochus ardens Von Salis — corallinus L. — cruciatus L. — exasperatus Penn. — fanulum Gmel. — striatus L. — umbilicaris L. — zizyphinus L. Haliotis lamellosa Lmk. Fissurella gibberula Lmk. — græca L. — ilalica L. Emarginula elongata Costa Patella cerulæa L. Cladocora cespitosa Gualt. 44. — Gorneto : Casa Fontana Matta. Route de Corneto à Civita-Vecchia. — Facies très littoral : marnes et graviers à Cardium edule. — Voir p. 298. Ostrea edulis L. Pecten jacobæus L. Arca barbata L. — lactea L. — Noæ L. 663 + Arca syracusensis May. Peclunculus sp. Cardium tuberculalum L. — edule L. Chama gryphoides L. + — placentina Defr. Venus gallina L. — verrucosa L. Donax trunculus L. Mactra corallina L. - — subtruncata Da Costa Lutraria lutraria L. Pholas dactylus L. Nerilula nerilea L. Cladocora cespilosa Gualt. VI. — COUCHES À STROMBES 45. — Sferracavallo (près Palerme). Facies de « panchina » littorale. — Voir p. 192. Ostrea slentina Payr. Spondylus gæderopus L. Lima inflata Chemn. Peclen jacobæus L. Chlamys clavatus Poli Mytilus galloprovincialis Lmk. Arca Noæ L. — pulchella Reeve ? Meretrix chione L. Conus mediterraneus Brug. O — lestudinarius Martini Tritonidea viverrata Kiener Columbella rustica L. Murex trunculus L. Purpura hæmastoma L. Strombus bubonius Lmk. Cerithium vulgatum L. Bittium reticulatum Da Costa Turbo rugosus L. Trochus turbinatus Born Patella cerulæa L. — ferruginea Gmel. 16. — Ravagnese (et Boveto, près Reggio). Sables ou graviers d’ancienne plage : faune relativement profonde, 0 à 50 m. — Liste de fossiles dans Seguenza [206]. 664 APPENDICE Ostrea cf. edulis L. Anomia ephippium L. Spondylus gæderopus L. Pecten jacobæus L. ® — maxrimus L. Chlamys” opercularis L. — commulatus Mitrs. — multistriatus Poli — flexuosus Poli var. biradiata Tiberi — glaber L:yar. — incomparabilis Risso ? Pinna nobilis L. Arca barbata L. — Noæ L. — letragona Poli. ë "—"lactea L: — diluvii Emk. et var. — corbuloides Mitrs. Pectunculus sp. Nucula nucleus L. Leda pellia L. Kellyia complanata Phil. Cardium tuberculatum L. — echinaltum L. var. mucro- nala Poli — erinaceum L. — norvegicum Spengl. — oblongum Chemn. — papillosum Poli Chama gryphoides L. Meretrix chione L. — rudis Poli Circe minima Mts. Dosinia exoleta L. — lupinus L. type e — var af TiCUT UCI sis noy. Venus verrucosa L. Casinos — gallina L. — cf. fasciata Da Costa — ovata Penn. e Tapes rhomboides Penn. Diplodonta rotundata Mte. Psammobia färoensis Chemn. Solenocurtus antiquatus Pultr.. — candidus Ren. Solen ensis L. Ervilia castanea Mig. + Mactra corallina L. — subtruncata Da Costa — rhegiensis nov. Corbula gibba Olivi Pholas dactylus L. Lucina borealis L. — fragilis Phil. — reticulata Poli — divaricata L. — digitaria L. © Loripes lacteus L. Tellina serrata. — pulchella Lmk. — nilida Poli — incarnata L. — donacina L. — balaustina L. T'hracia papyracea Wood - Dentalium novemcostatum Lmk. var. inæquicostata Dautz. Ringicula auriculata Mén. Conus mediterraneus Brug. et var. — lestudinarius Martini Pleurotoma gracilis Mtg. Cancellaria cancellata L. Mitra cornicula L. — cf. Aquini O. G. Costa Tritonidea viverrata Kiener Euthria cornea L. Nassa mutabihs L. — limata Chemn. — incrassala Müll. Columbella scripta L: Murex brandaris L. — trunculus L. Purpura hæmastoma L. Tritonium costatum Born Cassis undulata Gmel. Cypræa europæa Mig. Strombus bubonius Emk. Cerithium vulgatum L: Bittium reticulatum Da Costa Turritella communis Risso Calyptræa chinensis L. Nalica millepunctata L. — catena Da Costa — Dillwyni Payr. — lactea Guild. Scalaria communis Lmk. Turbo rugosus L, APPENDICE Trochus granulatus Born — conulus L. — exasperalus Penn. — Striatus L. — Zzizyphinus L. var. cingu- lata. — lurbinalus Born Fissurella gibberula Lmk. Patella cerulæa L. Caryophyllia cyathus Sol. et Ellis — clavus Scacchi Amphihelia miocenica Seg. 47. — Tarente. Rivages du Marc piccolo : facies très divers, profondeur de 10 à 30 m. envi- ron. — Voir p. 256 et 269. Ostrea cf. edulis L. Anomia ephippium L. Spondylus gæderopus L. Lima inflata Chemn. — squamosa L. Peclen jacobæus L. — — var. af. P. maxi- mus L. Chlamys varius L. — mullislrialus Poli — pesfelis L. — flexuosus Poli — — var. biradiata Tib. — glaber L. — — var. sulcala Lmk. — — var. anisopleura Loc. — proteus Sol. — commulalus Mitrs. Pinna nobilis L. Modiola barbata L. Arca barbata L. = \OEACIE — lactea L. — corbuloides Mitrs. 0 — Geissei Dunk. Pectunculus sp. Nucula nucleus L. Leda pella L. Cardita calyculata L. — antiquala Lmk. — trapezia L. Cardium tuberculatum L, 665 Cardium aculeatum L. — paucicostaltum Sow. — erinaceum L. — hians Gmel. — norvegicum Spengl. — oblongum Chemn. — papillosum Poli — exiguum Gmel. — edule L. var. Lamarcri Reeve major Chama gryphina L. — ,gryphoides L. Meretrix chione L. — rudis Poli Circe minima Mig. Dosinia exoleta L. — lupinus L. type Venus verrucosa L. — gallina L. — fasciata Da Gosta — effossa Biv. — ovala Penn. Lucinopsis undata Penn. Tapes rhomboides Penn. Axinus flexuosus Mtg. Diplodonta rotundata Mig. Psammobia depressa Penn. — füroensis Chemn. Solenocurtus antiquatus Puitn. — candidus Ren. Solen marginatus Penn. — siliqua L. — ensis L. Maclra subtruncala Da Costa Lutlraria lutraria L. — oblonga Chemn. Corbula gibba Olivi Panopæa glycymeris Born Pholas dactylus L. Lucina transversa Brn. — fragilis Phil. — spinifera Mig. — reliculala Poli — divaricata L. Loripes lacteus L. Tellina planala L. — serrala Ren. — nilida Poli. — incarnala L. — donacina L. 666 EE APPENDICE Tellina cumana Da Costa — compressa Br. — balaustinu L. Gastrana fragilis L. Syndesmya alba Wood. — ovata Phil. Cuspidaria cuspidata Olivi Dentalium vulgare Da Costa — dentale L. — novemcostatum Lmk. var. inæquicostata B. D. L. Conus mediterraneus Brug. O0 — testudinarius Martini Mangilia albida Desh. — multilineolata Desh. Clathurella Cordieri Payr. Cancellaria cancellata L. O0 Trilonidea viverrata Kien. Euthria cornea L. Nassa incrassata Müll. Columbella rustica L. Murex brandaris L. — trunculus L. — Blainvillei Payr. Purpura hæmastoma L. var. Tritonium nodiferum Lmk. — costatum Born O — ficoides Reeve Cassis saburon Brug. Cassis undulata Gmel. Cassidaria echinophora L. Cypræa pulex Gray Strombus bubonius Lmk. Chenopus pespelecani L. Cerithium vulgatum L. et var. Biltium reticulatum Da Costa Turritella communis Risso — triplicala auct. Natica millepunctata L. — cf. catena Da Costa — lactea Guild. Scalaria communis Risso Turbo rugosus L. Trochus ardens Von Salis * — corallinus L. — crucialus L. — eæasperatus Penn. —. fanulum Gmel. — Jussieui Payr. — magus L. — striatus L.? Haliotis lamellosa Emk. Fissurella gibberula Lmk. — græca L. — italica L. Emarginula elongala Costa ? Cladocora cespitosa Gualt. PS [D INDEX BIBLIOGRAPHIQUE . ALMERA (D. J.), Üna playa de terreno cuaternario antiguo en el Ilano de San Juan de Vilasar. Memorias de la R. Academia de Ciencias y Artes de Barcelona, 3° série, vol. IV, n° 39, 1904, p. 515-523. ALMERA (D. J.) et D. A. Borrrz, Moluscos fosiles recogidos en los terrenos pliocenicos de Cataluña (222 p., 14 planches). Bolelin de la Comision del Mapa geologico de España, S LÉRE, UM necRer APPELIUS (E.-L.), Catalogo delle conchiglie fossili del Livornese desunto dalle collezioni e manoscritti del defunto G. P. Caterini. Boll. d. Soc. malacologica italiana, t. IT, Pisa, 1870. 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Uomit. geol. d'Italia publie une bibliographie complète, avec analyses détaillées. de tous les (travaux relatifs à la géologie italienne. 668 ; = INDEX BIBLIOGRAPHIQUE Memorie descrittive della Carta geologica d'Italia, vol. I, Roma, 1886. 7. Barpacar (L.) et Mazzerri, Nota sulla serie dei terreni nella Regione solfifera di Sicilia. Boll. d. R. Comil. geol. d'Italia, vol. XI, 1880, p. 8. 8. BAsiLe (G.), L’elefante fossile nel terreno vulcanico dell’ Etna. Atli d. Accad. Gioenia di Sc. nat., 3° série, vol. XI, Catania, 1876. 9. Bassanr (F.), La ittiofauna delle argille marnosi plistoceniche di Taranto e di Nardo (Terra d’Otranto) (riche bibliograph.). Atti d. R. Accademia ‘d. Sc. fis. e mat. di Napoli, JMSÉTIE MON PTS ROSE 10. Bassanr (F.) et GALDIERI, Scavo geologico eseguito a Capri. Atti d. Soc. lIial. per il Progresso delle Scienze, IVa Riunione, Napoli, ottobre 1910. 11. BATTAGLIA (A.) et S. Cioraro, Scoperte paleontologiche presso Ter- mini Imerese. Boll. d. R. 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Bullinella, 473. Cæcidés, 556. Cæcum, 556. Calliostoma, 577. Callista, 428. Calyptræa, 560. Cancellaria, 481. Cancellariidés, ASr. Cantharus, 5o2. Cantraineia, 570. Capsa, 463. Capulidés, 558. Capulus, 558. Carätidés, Aro. Cardilia, 449. Cardiliidés, 449. Cardita, 400. Carditidés, 4oo. Cardium, 410. Cassidaria, 530. Cassidea, 528. Cassididés, 528. Cassis, 528. Cerastoderma, 417. Cérithidés, 544. Cerithium, 544. Chama, 421. Chamelæa, 437. Chamidés, 21. Chénopidés, 540. Chenopus, 540. Chlamys, 368. Chrysodomidés, 490. Chrysodomus, 490. Circe, 429. Circomphalus, 4337. Cirsotrema, 566. Clanculella, 573. Clanculopsis, 573. Clanculus, 573. Clathroscala, 560. Clausinella, 438. Clavagella, 464. Clavagellidés, 464. Cochlis, 566. Cochlodesma, 464. Codokia, 458. Collonia, 572. Colubraria, 595. Columbella, 516. Columbellidés, 516. Conidés, 478. Conus, 478. Corbula, 457. Corbulidés, 45r. Corbulomya, 451. Crania, 583. Craniidés, 583. Cranopsis, 583. Craspedotus, 574. Crenella, 380. Crepidula, 559. Crepiemarginula, 565. Cultellus, 446. Cuspidaria, 464. Cuspidariidés, 464. Cyclonassa, 515. Cyclostrema, 579. Cyclostrémalidés, 577. Cylichna, 473. Cylichnina, 473. Cyllene, 5or. Cymatium, 525. Cypræa, 537. Cypræidés, 537. Cyphoma, 553. Cyprina, 424. Cyprinidés, 424. Cytherea, 428. Danilia, 553. Daphnella, 456. Dentaliidés, 467. Dentalium, 468. Dentilucina, 457. Desmoulea, 5195. Dimyidés, 3b3. Diplodonta, 444. Discoscala, 566. Discors, 420. Divaricella, 459. Doliidés, 430, INDEX ALPHABÉTIQUE Dolium, 457. Donacidés, 445. Donacilla, 446. Donax, 445. Dorsanum, 516. Dosinia, 429. Drillia, 456. Eastonia, 448. Echinophoria, 520. Eglisia, 556. Emarginula, 582. Epidromus, 525. Erato, 533. Ervilia, 446. Erycinidés, 4ro. Eulimidés, 557. Euthria, 496. Fasciolaria, 489. Fasciolariidés, A89g. Ficula, 437. Fissurella, 580. Fissurellidés, 580. Fissurisepta, 585. Flabellipecten, 367. Flexopecten, 376. Forskalia, 573. Fossaridés, 557. Fossarus, 553. Fusus, 489. Galeommidés, Aro. Gastrana, 463, Gastrochænidés, 155. Gibberulina, 484. Gibbula, 555. Glans, 402. Glycyméridés, A5». Glycymeris, Abo. .Gouldia, 429. Granosolarium, 558. Hadriania, 519. Haliotidés, 580. Haliotis, 580. Haustator, 549. Hemiacirsa, 566. Hermithyris, 587. ITima, 5ro, Hinia, 505. Hinnites, 354. Homalogyridés, 558. Hormomya, 3809. Hydrobiidés, 558. Imbricaria, 488. Isocardia, 424. Isocardiidés, 421. Jagonia, 158. Janiopsis, 5or. Jeffreysiidés, 558. Jujubinus, 535. Kellyellidés, Aro. Lacuna, 553. Lævicardium, 4r9. Lampusia, 523. Lathyrus, 480. Leda, 400. Leptothyra, 550. Lima, 855. Limatula, 355. Limea, 353. Limidés, 356. Limopsis, 398. Liothyrina, 588. Liothyris, 588. Lissochlamys, 385. Littorina, 556. Littorinidés, 556. Loripes, 459. Lucina, 450. Lucinidés, 156. Lucinopsis, 439. Luponia, 532. Lulraria, 440. Lutricularia, 464. Lyonsiidés, AG4. Lyropecten, 375. Macandrewia, 592. Macoma, 460. Macrochlamys, 355. Mactra, 446. Mactridés, 446. Magellania, 592. Mala, 497. Mammilla, 564. Mangilia, 476. Manupecten, 372. Margariona, 353. Marginella, 484. Marginellidés, 184. Martesia, 455. Mathilda, 556. Megaxinus, 456. Megerlia, 588. Melaraphe, 553. Meretrix, 428. Mesalia, 555. Mesodesma, 446. Mésodesmalidés, 4AG. Miodon, 4or. Mitra, 485. Mitrella, 516. Mitridés, 485. Modiola, 390. Modiolaria, 389. Monia, 352. Monoceros, 522. Mubhlfeldtia, 588. Murex, 519. Muricidés, 515. Mya, 440. Myidés, 449. Myonera, 464. Myrtea, 455. Mytilidés, 388. Mytilus, 388. Nacca, 562. Nassa, 504. Nassidés, 504. Natica, 56r. Naticina, 567. Nemocardium, 420. Neptunea, 493. Nerila, 569. Nérilidés, 569. Neritina, 569. Neverita, 562. Niotha, 504. Niso, 567.: 2 Nucula, 390. Nuculidés, 399. Ocinebrina, 520. INDEX ALPHABÉTIQUE Odontostomia, 569. Odostomia, 569. Oocorythidés, 566. Ormastralium, 553. Ostrea, 3/9. Ostréidés, 349. Oudardia, 460. Ovula, 535. Oxystele, 555. Pagodula, 490. Palliolum, 384. Pandoridés, 464. Panopæa, 452. Parastrophia, 556. Parvicardium, 413. Patella, 583. Patellidés, 583. Payraudeautia, 562. Pecchiolia, 464. Pecten, 358. Pectinarca, 395. Pectinatarca, 395. Pectinidés, 358. Pectunculina, 398. Pectunculus, 393. Peplum, 378. Perna, 387. Peronæa, 460. Petricola, 444. Pétricolidés, 444. Phasianella, 569. Phaxas, 446. Philippia, 558. Pholadidés, 455. Pholadomya, 465. Pholadomyidés, 465. Phorcus, 576. Phos, 502. Pinna, 385. Pisania, 502. Pitar, 429. Platidia, 588. Platipecten, 378. 1 Pleurolomartidés, 5$So. Pleurotomidés, 454. Plicatula, 356. Pollia, 502. Poromya, 464. Portlandia, 400. Uxiv. DE Lyox, — Gicxoux. 689 Propilidium, 580. Psammobia, 4/45. Psammobiidés, 145. Pseudofusus, 490. Pseudonina, 572. Pseudoxyperas, 448. Ptychocerithium, 544. Ptychostomon, 569. Pullastra, 442. Puncturella, 583. Purpura, 522. Pusionella, 455. Pycnodonta, 350. Pyramidellidés, 568. Pyrgostelis, 569. Radula, 357. Ranella, 528. Raphitoma, 474. Retusa, 472. Rhynchonella, 587. Rhynchonellidés, 583. Ringicardium, 416. Rissoia, 558. Rissoidés, 558. Saintiopsis, 350. Saxicava, 5/5. Scalariidés, 566. Scaphander, 473. Scissurella, 580. Scrobicularia, 463. Scrobiculariidés, 463. Segœuenzia, 566. Seqguenziidés, 566. Sigaretus, 562. Skénéidés, 558. Solariella, 579. Solariidés, 55 Solarium, 558 Solatia, 482. Solen, 446. Solénidés, 446. Solenocurtus, 446. Solénomryidés, 464. Solenotcllina, 445. Sphænia, 449. Spisula, 446. Spondylidés, 355. Spondylus, 353. Je 690 Stenorhytis, 566. Stirpulina, 467. Stramonita, 522. Strombidés, 534. Strombus, 534. Surcula, 476. Sveltia, 183. Syndesmya, 463. Tapes, 430. Telasco, 514. Tellina, 459. Tellinidés, 459. Terebra, 477. Terebratula, 588- Térébratulidés, 588, Terebratulina, 588. Térébridés, 473. Térédinidés, 455. Tharsis, 570. Thracia, 464. Timoclea, 435. Tinostoma, 579. INDEX ALPHABÉTIQUE Torculoidella, 549. Tornatina, 472. Trachycardium, 416. Tribia, 483. Trichotropididés, 548. Trichotropis, 548. Tritonidea, 5o2. Tritonidés, 528. Tritonium, 523. Trivia, 531. Trochidés, 573. Trochocochlea, 554! Trochus, 574. Trophon, 518. Trophonopsis, 518: Truncatellidés, 558, Tugonia, 451. Tugurium, 560. Turbo, 550. Turbinidés, 569. Turbonilla, 569. Turritella, 540. Turritellidés, 549. Üromitra, 486. Uzita, 509. Vénéridés, 428. Ventricola, 432. Venus, 431. Verticordia, 464. Verticordiidés, 464. Vola, 360. Volutidés, 485. Waldheimia, 592. Williamia, 582. Xenophora, 560. Xénophoridés, 560. Yetus, 485. Yoldia, 400: Zaria, 549. Leïidora, 583. Zizyphinus, 577. | PO INDEX ALPHABETIQUE DES ESPÈCES ET VARIÉTÉS FIGURÉES N. B. — Les chiffres romains se rapportent aux numéros des planches, les chiffres arabes aux numéros des figures. Arca Geissei Dunk., VIII, 3, 4, 5, 6, 64. — syracusensis May. , XIV, 11, 12, 13, 14. Arcopagia ventricosa M. de Serres, XIV, 1. Aslarle fusca Poli, XVIIT, 9, 1o. — sulcata Da Costa, XVIIT, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 18. —— — .var. pseudofusca nov., XVIII, 109. Brocchia (voir Capulus). Buccinum humphreysianum Benn. var. frigida Mtrs., XIII, 5. — — var. striata Phil., XII, 4, 6. — undatum L., XII, 3. Cancellaria piscatoria Gmel., VI, 11, tra. Capulus sinuosus Br. var. Bellardü Biondi, XV, 3, 4. Cardita elongata Brn., XVI, 5. — revoluta Seg., XIX, 3. — rhomboidea Br., AIX, 1. — — var. inermis Michelotti, XIX, 2. — senegalensis Reeve, XVI, 6. Cardium echinatum L., XI, 3. — — var. propeæa Mtrs., XI, 4. — edule L. var. cotronensis nov., XVII, 10, tt. — — var. mortellensis nov., XVII, 13, 14. — — var. quindecim-coslata nov., XVII, 12. Cassis saburon Brug. var. platystoma Brugn., XV, 1, 12, Chama circinnata Mtrs., XIV, 7, 8, 9, 10. — placentina Defr., XIV, 2, 3, 4, 5, 6. Chlamys clavatus Poli, XVIII, 8. — commutalus Mitrs., XVII, 5, 6, 7, 8, 9, INDEX ALPHABÉTIQUE -Chlamys cf. inæquicostalis Lmk., XVII, 2, 3, 4. — islandicus L., X, 8, 9. £ Chlamys septemradiatus Müll., XVIII, 1, 1, 2, 2a, — — var. Cremai nov., XVIIE, 5, 5a, G. — — var. Estheris Crema, XVII, 3. — — var. subclavata Cantr., XNIII, 3, 3a, 4. — ligrinus Müll., XI, 8, 9. Chrysodomus sinistrorsus Desh., XIII, x, 2. Cochlodesma prætenue Pultn., IX, 7, &. Conus medilerraneus Brug. var., VI, 8, 9, ro. — tesludinarius Martini, VI, 4, 5, 6, 3. Crenella sericea Brn., XIV, 16, 164. Cyprina islandica L., X, 1, 2. 3. — XI, x, 2. — XII, x, >. Dosinia lupinus L. var. ficaraliensis nov., XI, 5, 6, 9. Euthria cornea L., XIX, ro. — — var. plioelongala Sacco, XIX, 0. Fissurella gibberula Lmk. var. latecostata Brugn., XV, 2, a. Lucina tigerina L., XNI, x, 2. Mactra Largillierti Smith, VIIT, x, 14, 2, 24. — rhegiensis nov. sp., XVI, 5, 5a. Magellania sepligera Loven, XX, 8. Milra cf. Aquini O. G. Costa, VIT, 15, 16, 17, 18. — Bronni Michelotti var. calabrensis nov., XV, 12. Mya truncata L., IX, x, 2, 3. — — var. uddevallensis G. O. Sars, IX, 4. Mytilus senegalensis Reeve, VIIT, 7, 8, 9, 10, 1. Nassa clathrala Born var. ficaraliensis Mtrs., XV, 10, II. — musiva Br. var. crassesculpla Brugn., XV, 5, G. — semislriata Br. var. calabrensis nov., XV, 5. — — var. Edwardsi Fisch., XV, 8, 9. Natica lactea Guild., VII, 7, 8, 9, 10, 11, 12. — Montacuti Forbes, XIII, 7, 8, 9. Nucula placentina Lmk., XIV, 15. Panopæa norvegica Spengl:, IX, 5, 6, 6a, Pecten maximus L., XVII, r. Plicalula mytilina Phil., XIV, 17, 18. Raphitoma Columnæ Scacchi, XV, 15. Strombus bubonius Lmk., VI, 1, 2, 3. — VIT, 1. — XXI, x, 8. — coronatus Defr. var. altavillensis De Greg., XXI, 2. Tapes Dianæ Requ., XV, 17, 18. ; DR Ne INDEX ALPHABÉTIQUE Tapes rhomboides Penn. var. antiqua nov., XI, 5. var. culabrensis nov., XII, 3, 4. Tellina cumana Da Costa var. arodu De Greg., X, 6, 7. — perfrigida De Greg., X, 4, 4à, 5. Terebratula minor Phil., XX, 1, 2. — Scillæ Seg., XVI, 5, 4, 4a. Trichotropis borealis Brod. et Sow., XIII, 10, ro, 71. Tritonidea viverrata Kiener, VII, >, 3, 4, 5, 6. Trilonium ficoides Reeve, VII, 13, 134, 14. Trochus granulatus Born var. lævis Brugn., XV, 13, 14. Tugonia anatina Gmel., VIT, 19, 20, voa. Turbo mamilla Andr., XIX, z1. — pelorilanus Cantr., XIX, 17, 18. — — var. acarinala nov., XIX, 12, 13, 14. — — var. carinala Cantr., XIX, 15, 16. Venus casina L., XIX, 4, 4a, 5, 6. — — var. crassa nov., XIX, 7, 8, 8a, — fasciala Da Costa, XIT, 6, 7, 8, 9. — libellus R. E. P., XV, 16, 16a. Ziyon. — imprimerio A. REY, 4, rue Gentil. — (61619 693 PLANCHES ä3. — Alluvions récentes. = nn PLaNcat I Région centrale du Détroit de Catanzar ni ë es He ® Rivage N. du détroil de Catanzaro Divlo > LRU ESA IONEATe ifésa del Barone Voie ferrée Marcellënara ie 600 s0 CR M EE RE ER À 300 1 : En SN SS 0° Pi —l0 FiG: 1 — Coupe montrant les modifications de facies dans la série pliocène vers le rivage nord du détroit dé Calanzaro. 3 TS F : Pc, — Conglomérats, alluvions continentales. C: —:Kacies de conglomérats envahissant la ce ASE o Ne EN Te Pliocène supérieur (Calabrien). 100 more lot GBC Ps Ps. — Graviers grossiers et SADIES CON Al GER ES M : l ( ) PSE Pa: —"Argiles à faune profonde. RO LE ES NU 0 a dur 45% : Y D CONS CODES CON NM par Pliocène ancien, Echelle des hauteurs et des longueurs 3/100:000: Piani della Limina 5 Gerace, ct. Monosterace, etc. ; D RER — — _ _ © Jurfac : LE SE == lpoyraphique _ dla L ER RET DE MON CF, Pliecène RL 7 Merionienn Socle prépliocère il £ = Marnes blanches du Pliocène ancien Grès calcaire à Amphistégines. Argiles sableuses et graviers du Plio- ; ; à facies profond. HE pliocène ancien(p.p.) facieslittoral. El Cène récent (facies profond). Sables et graviers littoyaux du Pliocène, FiG. 2. — Coupe théorique montrant la répartition des facies dans le Pliocène de la côle orientale de la Calabre méridionale (région de Gerace-Monosterace). | Région Badia Gi . Gi ee (Gisement de Gale, £) sement. allina z À : Gallina (2507) z a 300 à A de Gallina Cordon lilloral pis. Terrasse Æ ds ; de la mer a dtrombes — — = Fe lamélière (1002) Ancien niveau de la mer a Jtromkes= + 100 525 ) el Le ll Plaine cofière aëtae lemme ll 3 Fic. 4, — Coupe des collines de Gallina, près Reggio, Montrant l'indépendance stratigraphique du Quaternaire {couches à Strombes de Ravagnese)let de la série pliocène (gisements de Gallina). Conglomérats à gros galets: | Sijarien inférieur de : ! Calabrien Graviers grossiers . + & | NÉ RO Galets de plage .} Saharien supérieur pr HSE Sea | . Seg Q: — Dépôts marins à Strombes: Sables grossiers . À P. — Série pliocène. de G. Seguenza. : Xe E, S fi Sables-fins.. 4 Le : Sables fins marneux Er | Astien à facies mixte Pliocène ancien . Marnes sableuses . + :{ de G. Seguenza. 49. — Alluvions de la terrasse de Gallina (Sicilien ?). MATE ) # * 4j — Alluvions quaternaires anciennes (antésiciliennes?)} (Merrasses mal'individualisées:) Echelle des hauteurs et des longueurs 1/10,000. 2 ._ PLancxe II Monte Gon Boo Terreti } . ‘ Ci ' i 600 500 400) 400 300 Riquye Cimetière 200 1 Reggio 1 ü 200 10 E ; Terrarre de Condora L'ASpE QU" EE EC 0 Ouest Est Euc. 1. — Coupe dé Reggio à Terreti, Montrant la position stratigraphique des sables calabriens du Monte di Botte el l'existence dlune faille affectant la série pliocène. ä3. — Plaine côlière moderne. Calabrient. j Cs. — Sables et graviers coralligènes. Facies littoraux. Quaternaire . . j as. — Alluvions de la terrasse de Condora. Gm. — Argiles bleues. s l Pc. — Grès calcaires à Amphistégines. a,. — Alluvions quaternaires anciennes. Pliocene ancien Pg. — Marnes calcaréo-gréseuses à Flabellipectens. Ps. — Sables blancs à Flabellipectens. Mi. — Miocène. Pm. — Argiles blanches. Echelle des hauteurs et des longueurs 1/25,000 Montemesola 200 — 200 5 Regione Caselle ‘ Jan Giorgio 150 ù É Casa d'Ayala 4 100 _ Masseria S Pietro (2 ! = —_ l 50 rer — : Qs à Cr NNEe RE RE RE CR EP NS Et F6. ». — Coupe des terrains pliocène eb quaternaire (type appulo-garganique) dans les environs de Tarente, Montrant leur mutuelle indépendance stratigraphique. Pc. — Grès et conglomérats. . . . . . . Pe Qs: — Sédiments littoraux à Sérombus bubonius, plus ou moins calcaires (tufo mazzaro). É Pa. — Argiles plastiques et argiles sableuses DEA: : CHEN Série pliocène, Qa. — Argiles de Tarente (Sicilien? — Niveau de 70-80 M.) à: à: à: = à Ghefenretec Pm. — Mollasses calcaires (tufo zuppigno), facies « malerin ». Pliocëne ancien. é Cr. — Calcaires crétacés. Echelle des hauteurs 1/10:000, des longueurs 1/50:000: + Apennin es: | Partie centrale du detroit des Foutller ss . Massif calcaire deshouilles RE RUn. Pliocène à type sub-apennin Pliocène a type apulo-garganique : 300 SZ A 600 LS 400 re A. re, Fic, 3: — Coupe théorique montrant la constitution du Pliocène dans le Détroib des Pouilles bentre un type appulo-garganique, où l'épaisseur lotale se réduit, en même temps qu'apparaissent, à la base, des mollasses voyènes (facies & malerin »), et un Lype Subapennin, caractérisé par d'énormes épaisseurs de sables et conglomérals). f ; Ps. — Sables et conglomérats. , Pa. — Argiles sableuses et argiles P follasses (u tufi ») calcaire } Calabrien. ER ALL F “Echelle approximative mlone es by liocène. « Mer dd Cu î 2 77 | Praxcue III 200 : 4 Zonedes poudinques et grès cétits Zone des sables argio-caleatres Zone des argiles profondes (Ficarazzt) pr ä 100 100 À 0 0 î F6. 1. — Coupe théorique du bassin de Palerme (ancien fond de la mer Sicilienne), montrant Ja répartition des divers facies du Sicilien. Sur la côte à L'Est de Palerme, l'érosion marine actuelle a fait reculer la falaise jusqu'en À B, de sorle que le Sicilien n'est plus représenté que par des formalions très littorales (voir la fig. ci-dessous), Echelle des hauleurs 1/10,000, des longueurs 1/50.000. 3j é > Piano Olivi Altgvilla à Rivage actuel : r Plaine côtière S. cctlienne : Mi œil 1 / ecdn dair, a" " " ——— OR EAN y == ee Jicilienne (80 environ), } Plaine côtière actuelle ! ES Grès calcaires à Amphistégines. 74 = Sables à faune aslienne (gisement d'Allavilla). Sicilien. Sn Dern sui ù Ë ables et grès à coquilles marines EF Couches de base, avec blocs de calcaires secondaires: Fc. ». — Coupe de lancienne plaine côlière sicilienne à Allavilla (Est de Palerme). ù Echelle des longueurs et des hauteurs 1/12:000. 3 # n Regione Prestica l ke 160-2007 Falaises du Capa Colonne = ù Atvcau de 35 Plaine ic. 3. — Profil des deux terrasses quaternaires marines au Capo Colonne, près Cotrone (Calabre) Ê Echelle des longueurs et des hauteurs 1/12,500. Route, de Palagian ; | : 100 F Lo Forese Fico Madonna délla Stella Casa Carmigiano Cozzo Marziotto À 80 L Fu 2e Niveau: de 70n 2 _ 1 me =---Niveau de135m C3 Dépôts modernes; dunes et marnes lagunaires à Cardium e dule. Sables fins et grés, . . . . . . . j , h | Dépôts Conglomérals grossiers . . . . . . À (niveaux — Marnes d'eau douce ou saumätres. .. À Du he : d EG... Coupe de Palagianello à lièmer, suivant le cours de.la Lama di,Lenna, # (Montranbrles plaines côtières alluvic-manines fu Quaternaire dans la région à l'Ouest de Tarente). Echelle des hauteurs 1/3,on0, des longueurs 1/50.00 . FETE À A W: mé" rue 3 la base du k PLancue IV Monts Sabins Dépressions lacustres tntra-apennines (Terni, Rieti, etc...) De as MAT S £ S Region des anciens rivages pliotènes (Pxlombara, Fara Sabina,, etc.) Allgoises du Tibre EÆ] Conglomérats et alluvions. JOMES, e — Coupe théorique montrant la répartition des facies dans le Pliocène ancien et récent, entre Rome et la chaîne apennine Sables et argiles sableuses. (d'après les travaux des géologues romains). Æ, Argiles bleues plastiques. (Les hauteurs sont fort exagérées par rapport aux longueurs. Les tufs volcaniques surmontant le Pliocène n'ont pas été indiqués.) E Limite du Pliocène ancien et du Pliocène récent. : Sables : Jauñes : Argiles blèues Alluvions graternaires Plaine de l'Arno Ë Nord FiG. ©. — Coupe schématique des collines pliocènes au Sud de Pise Montrant la situation straligraphique du gisement de Vallebiaja dans la série pliocène (d’après les travaux des géologues toscans et spécialement de C. de Stefani, d'Achiandi, de Amuicis, Busatli, etc.). Calabrien CC. — Zone fossilifère de Piazza (Postpliocène moyen de C. de Stefani). BB!,. — Zone fossilifère de Vallebiaja (Postpliocène inférieur de G. de Stefani). 4. — Alluvions à galels provenant des Monts Pisans. 3. — Sables jaunes supérieurs. ee i . — S jaunes inférieurs avec i i srès MCE & RTE. Ponte irien 2 ables jaune ntercalations de grès calcaires à Amphistégines 1. — Argiles bleues plaisanciennes (à la base, faune d'Orciano). Castelnuovo (280%) Cartel) Rs divwopra (280) , Mines de lignite (1707) T6: Arno fleuve ï 300 300 ne MISERERE L Cioyann 230 ! pars RS D RSR RRE 200 F2 “g — à, Alluvions \recentes 00 C 2% = 100. s_0 N.E Conglomérais (Sansino) alternant avec des lits argilo-sableux (faune de Mammifères dile du Val d'Arno). — Pliocène récent : Villafranchien. Æ= Argiles bleues (Stellicione) à coquilles lacustres et empreintes Végélales (rares Mammifères). — Pliocène ancien. em Liaite Echelle des longueurs 1/50.000, des hauteurs 1/20.000. Fic. 3: — Coupe:lansversale du bassin pliocène lacustre du Val d’Arno supérieur (ypewe série de remblatement continentale intraapennine): . GE: | Calabrien marin : Région où le sommet de la série pliocène montre la faune marine calabrienne. QT Pliocène ancien marin: Extension des dépôts marins à faune pliocène ancienne, Pliocène continental: Principaux bassins lacustres intra-apennins (faune conti- nentale villafranchienne). Gisements à faune marine Sicilienne lypique. + e Gisements où l’on a rencontré l'une au moins des espècesgearactéristiques des couches à Strombes. N.-B. — Celle carte est destinée seulement à emplacer les principales localités dont il est parlé au ours de cel ouvrage. Elle nt aucune prétention à lexactilude en cequi concerne l'extension des pliocènes. On a utilisé pour l’établir, outre la carle géologique internalionale, les cartes spéciales pour le Pliocène par MM. Funlannes, R. Douvillé, Brives, de Lamotlie, de Lorenzo, Sacco, de i, Th. Fischer, etc... ll Valence alt | J{|| il fil Bassin du Guadalquivir | - fl TO De fLordoue Fille 4 Malaga {Gibraltar 1 è que Mo) S Q hi DSi I % 7 ES dr | } 3 ISE (UE (ll (LL | k LL jy Rouss} on Ca Creus Ange ) Vurdan Juan de Vilasar Barcelone Minorque SCueva dela Hermita Andraitx Majorque PLancHe V 1) à rence Ye, IN Ancé bbiena #2 000 Mellisello ice | Ï h (LE Fa | l Il Lt nr Ale EUR PB U n got . Pu ge se Fa ; ésuve 7, te. Dhecce a Ischia 5 | | M | £ Caprio Golfe #5,)Ca): ÉE ANS de Salerne Hors Ë Gallipoli ÉA strovillari B ano u | qe |Got pre ‘ Capo Colonne Golfe de atanzaro S. EufemigA à #Monosterace ) Capo Vaticano Rosarno hu” di Termini | “5 | 35 œ ID LU 2 eLinosa Ë a Lampedusa PL. VI. — ESPÈCES SÉNÉGALIENNES FOSSILES DANS LES COUCHES À STROMBES. CI. M. Gignoux (Lab. Géol. Grenoble) Phototypie Bourgeois Frères, Chalon ur-5 Frc. t F1G. 2 et 3 Fic. 4, 5, 6 Fic. 7 Fic. 8 et 9 Fc. 10 Fi. 1x et 114 Univ. pe Lyon. — Gicenoux, PLANCHE VI ESPÈCES SÉNÉGALIENNES FOSSILES DANS LES COUCHES À STROMBES Strombus bubonius Lamarcx. — Couches à Strombes de Tarente. — Coll. Lab. Géol. Grenoble. Strombus bubonius Lamarcx. — Couches à Strombes de Ravagnese, près Reggio; individus jeunes, — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Espèce vivant au Sénégal, mais apparentée à des formes méditerranéennes miocènes et pliocènes, — Voir pl. VII et XXI, et p. 534. Conus testudinarius Marrinr. — Couches à Strombes de Tarente. — Coll. Lab. Géol. Grenoble (4, 5) et Lyon (6). Conus testudinarius MarriNr. — Couches à Strombes de la presqu’ile Saint-Jean, près Nice. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Espèce vivant au Sénégal, mais voisine du C, Mercali plio- cène. — Voir p. 479. : Conus mediterraneus Brucuières var. — ? GC. rheginus SEGUENZA. — Couches à Strombes de Tarente. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Des formes analogues existent à Monastir (Coll. Dautz.) et à Ravagnese {? C. rheginus de Seguenza), toujours dans les couches à Strombes. Elles semblent résulter de la décorti- cation partielle de variétés du C. medilerraneus, telles que la suivante. — Voir p. 480. Conus mediterraneus Brucuiëres var. Vayssieri PaL- LARY. — Couches à Strombes de Tunisie (Cap Bon). — Coll. Allemand-Martin (Lab. Géol. Lyon). Figurée pour comparaison avec les formes précédentes, cette variété vit encore sur les côtes tunisiennes.— Voir p. 480. Cancellaria (Solatia) piscatoria GmMeLiN. — Quaternaire du niveau de 60 mètres, à Oran. — Coll. Lab. Géol. Lyon (Pallary miss.). Cette espèce vit actuellement sur les côtes atlantiques d'Afrique. Au Pliocène elle a donné dans la Méditerranée un rameau latéral, C. hirta Br., actuellement éteint, — Voir p. 483. Toutes les figures sont de grandeur naturelle, A PS #} PL. VII. — ESPÈCES SÉNÉGALIENNES FOSSILES DANS LES COUCHES À STROMBES. CI. M. Gignoux (Lab. Géol. Grenoble) Phototypie Bourgeois Frères, Chalon-sur=Sa0 Fic. FrG. rc. Fr. F1G, F1G. FT: 2, 3 et 4 PA 7 à 11 12 19 el 19a 14 PLANCHE VII ESPÈCES SÉNÉGALIENNES FOSSILES DANS LES COUCHES A STROMBES Strombus bubonius Lauarcx. — Couches à Strombes de Monastir (Tunisie). — Coll. Lab. Géol. Grenoble (de La- mothe miss. ). Pour cette espèce, voir pl. VI et XXI, et p. 534. Tritonidea (Gantharus) viverrata Kiexer. — Couches à Strombes de Ravagnese, près Reggio (fig. 2), de Monastir (fig. 3), de la presqu'île Saint-Jean, près Nice (fig. 4). — Coll. Lab. Géol. Lyon. Tritonidea (Gantharus) viverrata Kiener. — Couches à Strombes de la presqu'ile Saint-Jean, près Nice. — Coll. Lab. Géol. Grenoble. Tritonidea (Cantharus) viverrata Kiexen. — Exem- plaire vivant des côtes du Sénégal. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Forme tout à fait exotique, ne pénétrant dans la Méditer- ranée que pendant les couches à Strombes, — Voir p. 502, Natica (Mammilia) lactea GuizniNG. -— Couches à Strombes de Tarente (fig. 7 et 8) et de Ravagnese, près Reggio (fig. 9, 10 et 11). — Coll. Gignoux (Lab Géol. Lyon). Natica (Mammilla) lactea GuirninG. — Exemplaire vivant des côtes du Sénégal. — Coll. Lab. Géol. Lyon (Dautzenberg miss.). Cette espèce n'est connue avec certitude dans la Méditer- ranée que pendant les couches à Strombes. — Voir p. 564. Tritonium (Gymatium) ficoides Rezve. — Couches à Strombes de Tarente. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Tritonium (Cymatium) ficoides Reeve. — Exemplaire vivant des côtes du Sénégal. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Le sous-genre tout entier est inconnu dans la Méditerranée en dehors des couches à Strombes. — Voir p. 525, F1. 15 Mitra cf. Aquini O.-G. Costa. — Type de la M. cingulosa Monterosato. — Sicilien du Monte Pellegrino, près Palerme. N — Coll. Lab. Géol. Lyon (Monterosato miss.). F16.16,17et18 Mitra cf. Aquini O.-G. Cosra. — Couches à Strombes de Ravagnese, près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). ; Cette espèce, nettement différente de toutes les formes méditerranéennes vivantes, a des affinités étroites avec {a ce M. strialula du Pliocène ancien, et avec des espèces vivant. dans l'Atlantique tempéré ou chaud. — Voir p. 487. FiG. 19 Tugonia anatina Guen. — Couches à Strombes de Monastir. — Coll. Ecole des Mines Paris (Flick miss. ). F16. 20 et 01 Tugonia anatina Gmezix. — Exemplaire vivant du Sénégal. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Genre tout à fait disparu de la Méditerranée actuelle. — Voir p. 451. à Toutes les figures sont de grandeur naturelle, PL. VIII. — ESPÈCES SÉNÉGALIENNES FOSSILES DANS LES COUCHES A STROMBPBES. CI. M. Gignoux (Lab. Géol. Grenoble) Phototypie Bourgeois Frères, Chalon-sur-Saôn tt Frc. Frc. Fric. Fi. FiG. Fic, PLANCHE VIII ESPÈCES SÉNÉGALIENNES FOSSILES DANS LES COUCHES À STROMBES 1 et 1à 2 eb oa 3 el 4 9, 6. et\62 7, 8, el 9 10 eË 11 Mactra Largillierti Puizippr. — Couches à Strombes de Sfax (îles Kerkennah). — Coll. Allemand-Martin (Lab. Géol. Lyon). Mactra Largillierti Pnicippr. — Exemplaire vivant des côtes de Guinée. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Cette espèce est, à vrai dire, assez difficile à distinguer, surtout à l’état fossile, des grandes Mactres méditerranéennes: outre le galbe, le meilleur caractère semble fourni par les sillons concentriques de la lunule et du corselet, sillons bien visibles sur les figures. — Voir p. 447. Arca (Anadara) Geissei Dunvxer. — Couches à Slrombes de Sfax. — Coll. Bédé {Muséum Paris). Arca (Anadara) Geissei Dunxer. — Couches à Strombes de Tarente. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Cette espèce vit au Sénégal et n'a jamais été rencontrée dans la Méditerranée en dehors des couches à Strombes. — Voir p. 397. Mytilus (Hormomya) senegalensis Rezve. — Couches à Strombes de Sfax. — Coll. Lab. Géol. Lyon (Dautzenberg miss. ) Mytilus (Hormomya) senegalensis Rerve. — Exem- plaires vivants de Dakar. — Coll. Lab. Géol. Lyon (Pallary miss. ). Ce sous-genre tout entier n'a également jamais été ren- contré dans la Méditerranée en dehors des couches à Strombes. — Voir p. 389. Toutes les figures sont de grandeur naturelle, PL. IX. — ESPÈCES SEPTENTRIONALES FOSSILES DANS LE CALABRIEN ET LE SICILIEN. CI. M. Gignoux (Lab. Géol Grenoble Phototypie Bourgeois Freres, Chalon-sur-Saône 8 ) YP Ét PLANCHE IX ESPÈCES SEPTENTRIONALES FOSSILES DANS LE CALABRIEN ET LE SICILIEN Fi. 1 et » Mya truncata Linné. — Valve droite (fig. 1), valve gauche (fig. 2). — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Espèce rare dans le Calabrien des Pouilles, fréquente dans le Sicilien de Palerme, inconnue dans les faunes méditerra- néennes antérieures et postérieures. — L'exemplaire figuré apparaît nettement, par son galbe, intermédiaire entre le type vivant (fig. 3) et la var. uddevallensis (fig. 4), mais néanmoins plus voisin du type vivant. — Voir p. 449. Fic. 3 Mya truncata Linné. — Valve droite. — Exemplaire vivant des côtes d'Angleterre. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Fic. 4 Mya truncata Liné, var. uddevallensis G. O.Sars. — Valve droite. — Quaternaire récent de Narvik (Laponie). — Coll. P. Lory (Lab. Géol. Grenoble). F1G. 5, 6 et 6 Panopæa (Glycymeris) norvegica SPexGLER. — Valve droite (fig. 5), valve gauche (fig. 6 et 62). — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon. À la même histoire que la Mya truncala. — Voir p. 454. F1G. 7 et 8 Cochlodesma prætenue Pure. — Valve droite (fig. 8), | valve gauche (fig. 7). — Sicilien de Palerme (Ficarazzi, fig 7; Monte Pellegrino, fig. 8). — Coll. Lab. Géol. Lyon (Monterosato miss. ). Forme septentrionale connue dans les faunes méditerra- néennes depuis le Calabrien inférieur jusqu'au Sicilien inclu- sivement. — Voir p. 464. Toutes les figures sont de grandeur naturelle. PL. X. — ESPÈCES SEPTENTRIONALES FOSSILES DANS LE CALABRIEN ET LE SICILIEN. CI. M. Gignoux (Lab. Géol. Grenoble) PLANCHE X ESPÈCES SEPTENTRIONALES FOSSILES DANS LE CALABRIEN ET LE SICILIEN DS ic. 1, 2,5 Cyprina islandica Linné. —— Variélé allongée; fig. », 3, É exemplaires jeunes. — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll Lab. Géol. Lyon. Douteuse dans le Pliocène ancien, fréquente dans le Cala- brien et le Sicilien, cette espèce a, depuis lors, quitté la Médi- terranée. — Voir pl. XI et XII, et p. 424. Fc. 4, 4 et 5 Tellina (Macoma) perîfrigida pe Grecoro. — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon (di Monterosato miss. ). Forme connue dans le Calabrien de la Terre d'Otrante et dans le Sicilien de Palerme; étrangère aux faunes méditer- ranéennes, elle appartient au groupe de la 1. obliqua Sow., fossile dans les Crags, et de la T. ballhica L., vivante dans les mers du Nord. — Voir p. 461. Fc. 6 et 7 Teilina (Macoma) cumana 4 CosrA var. aroda DE Gre- GORIO Sp. — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon (di Monterosato miss. ). Mutalion spéciale au Sicilien(?) de la 7. cumana répandue actuellement dans toutes les mers d'Europe. — Voir p. 460. Fic. 8 Chlamys islandicus Mürrer. — Sicilien du Monte Pelle- grino, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Fic. 9 Chlamys islandicus MüLrer. — Exemplaire vivant des mers du Nord. — Coll. id. Espèce tout à fait étrangère aux faunes pliocènes anciennes de la Méditerranée : elle n'est citée dans le Calabrien que par G. Seguenza (Messine). — Voir p. 373. Toutes les figures sont de grandeur naturelle. Univ. DE Lyon.— Gicnoux. PL. XI. — ESPÈCES SEPTENTRIONALES FOSSILES DU CALABRIEN ET DU QUATERNAIRE. CI. M. Gignoux (Lab. Géol. Grenoble) ENG Frc. 2 Fire. 3 Fire. 4 Fic. 8 Fic. 9 PLANCHE XI ESPÈCES SEPTENTRIONALES FOSSILES DU CALABRIEN ET DU QUATERNAIRE | Cyprina islandica Linné. — Sicilien de, Gallipoli. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Cyprina islandica Linné, var. arrondie. — Sicilien de Balestrate, près Castellamare del Golfo. — Coll. id. Pour cette espèce, voir pl. X, XII, et p. 424. Cardium echinatum Linné. — Forme type. — Sicilien du Monte Pellegrino (Valdese), près Palerme. — Coll. id. Le type de cette espèce, représenté dans les faunes plio- cènes par des variétés extrêmement voisines, vit actuelle- ment dans l'Atlantique. — Voir p. 412. Cardium echinatum Linné, var. propexa Monrerosaro sp. — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. id. Cette variété est spéciale au Sicilien, mais extrêmement voisine de formes vivantes dans les mers du Nord. — Voir P. 413. Dosinia lupinus Lin, var. ficaratiensis nov. — Sici- lien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. id.) Dosinia lupinus Linwé, var. ficaratiensis nov. — Cou- ches à Strombes de Ravagnese, près Reggio. — Coll. id. Cette variété est très répandue dans le Calabrien et le Qua- ternaire de la Méditerranée; elle est très voisine de la D, lincta Pultn., vivante dans l'Atlantique. — Voir p. 430. Chlamys tigrinus Mürr. — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon (di Monterosato miss.), Chlamys tigrinus Müzr. — Exemplaire vivant dans les mers du Nord, figuré ici pour comparaison, — Coll. Lab, Géol. Lyon. Cette espèce, très polymorphe, n'est connue d'une manière certaine dans la Méditerranée qu'au Sicilien, — Voir p, 378, Toutes les figures sont de grandeur naturelle, RARES de PL. XII. — ESPÈCES SEPTENTRIONALES FOSSILES DANS LE CALABRIEN ET LE SICILIEN. CI. M. Gignoux (Lab. Geol, Grenoble) Photôtypie Bourgeois Frères, Chalon-sur-Saône PLANCHE XII ESPÈCES SEPTENTRIONALES DU CALABRIEN ET DU SICILIEN Cyprina islandica Linxné. — Calabrien de S. Maria di Catanzaro. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). CGyprina islandica Livwé. — Forme arrondie; Calabrien de Vallebiaja (collines livournaises). — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Voir pl. X et XI et p. 424. Tapes rhombhoides PEnnantr var. calabrensis nov. — Sicilien du Monte Pellegrino près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Tapes rhomboides PEnnaxr var. calabrensis nov. — Calabrien sup. de S. Francesco (Monte di Pentimele), près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Tapes rhomboides PENNANT var. antiqua nov. — Cala- brien inf. de Girgenti. — Coll. id. Espèce représentée dans le Pliocène ancien par le T. eremila Br., aux dépens duquel elle se différencie par des formes de passage telles que la var. antiqua; la var. de grande taille calabrensis est extrêmement fréquente au Calabrien, plus rare au Quaternaire; actuellement, l'espèce est en voie de disparition dans la Méditerranée, tandis qu’elle prospère dans l'Atlantique. — Voir p 439. 16. Getz Venus (Clausinella) cf.fasciata DA Cosra. — Calabrien de Monte Corvo, près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Venus (Clausinella) fasciata Da Cosra var. aff. V. Brongniarti Payr. — Couches a Strombes de Tarente. — Coll. id. Venus (Clausinella) fasciata Da Cosra. — Forme vivante typique des côtes d'Ecosse. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Actuellement le type de l'espèce vit dans l'Atlantique, tan- dis qu'on trouve dans la Méditerranée une variété ou espèce voisine, V, Brongniarti Payr. — Voir p. 438. Toutes les figures sont de grandeur naturelle, CI. M. Gignoux (Lab. Géol. Grenoble) PLANCHE XIII ESPÈCES SEPTENTRIONALES FOSSILES DANS LE CALABRIEN ET LE SICILIEN 2 RG SRE PPT \ FiG. 1 Chrysodomus sinistrorsus Desnayes. — Sicilien de d Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon. ÿ Fire. 2 Chrysodomus sinistrorsus Desuayes. — Exemplaire ; vivant des côtes du Portugal. — Coll. id. Espèce de l’Atlantique lusitanien, rare dans le Calabrien, fréquente dans le Sicilien de la Méditerranée, Elle descend ES fs sans doute du C, contrarius L., abondant dans les niveaux le inférieurs des Crags anglo-belges. — Voir p. 490. 1 Fic. 3 Buccinum undatum Linné. — Calabrien de Monte Corvo |: , près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Espèce atlantique fréquente dans le Calabrien et le Sicilien, où elle est toujours représentée par des variétés de petite taille. — Voir p. 497. FiG. 4 Buccinum (Mala) humphreysianum BEnxer var. striata Puiippi. — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Pres Buccinum (Mala) humphreysianum Bexner var. fri- gida Monrerosaro sp. — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon (Monterosato miss. ). Fic. 6 Buccinum (Mala) humphreysianum BEnxer, var. aff. striata Puicippr sp. — Sommet du Pliocène ancien de Gallina (Ouest), près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Espèce très rare dans le sommet du Pliocène ancien (Italie du Sud), très fréquente dans le Calabrien et le Sicilien : elle est actuellement en voie de disparition dans la Méditerranée, très abondante et polymorphe dans l'Atlantique Nord. — Voir p. 499. re Natica (Naticina) Montacuti Fonses. — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon (Monte- Ï ù rosalo miss.). Natica (Naticina) Montaeuti Hé — Calsbrien e -Monte Coivo, près Reggio, — Coll. Ge (Lab. Géol. Lyon). AE \ Natica (Naticina) Montacuti Forres. — Exemplaire vivant des côtes d'Ecosse. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Espèce actuelle des mers d'Angleterre, pénétrant dans la Méditerranée au Calabrien et au Sicilien, — Moir p. 561. SOwWERBY. — Sicilien °° @ F16. 10 et 10 Trichotropis bcrealis Brorermep et ; de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Moutescealo, Palerme. | Trichotiopis korealis Broneme et Sowersy. — Exem- plaire fossile dans le Quaternaire récent de Mortreals (Canada). — Coll. Lab. Géol. Lyon. Cette espèce, éminemment boréale, n’est représentée dans les terrains méditerranéens que par le seul exemplaire figuré ici, et récolté par l'abbé Brugnone. — Voir p. 548. FTG. nr Toutes les figures sont de grandeur naturelle, sauf les ne. $ 10 el 10%, qui sont grossies deux fois. Pr. XIV. — Espèces ÉTEINTES DU PLIOCÈNE SUPÉRIEUR ET DU QUATERNAIRE. CI. M. Gignoux (Lab. Géol. Grenoble) PLANCHE XIV ESPÈCES ÉTEINTES DU PLIOCÈNE SUPÉRIEUR ET DU QUATERNAIRE I Arcopagia ventricosa M. ne Serres. — Sicilien du Monte , Pellegrino (Vergine Maria), près Palerme. — Coll. Gignoux (Lab. Géol, Lyon). Cette espèce n'était pas, jusqu’à présent, connue plus haut que le Pliocène. — Voir p. 462. 2. 3 Chama placentina Derrance. — Valves gauches (fG). — Sicilien du Monte Pellegrino, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon. - 4 Chama placentina DEerrance. — Valve droile (x). — Cala- brien de Porto-Empedocle, près Girgenti. — Coll. Gignoux (Lab, Géol. Lyon). 6. 5et6 Chama placentina Derrance. — Valves droites (x). — Quaternaire (niveau de 40-60 m.) des environs de Cività- Vecchia (Casa Fontana Matta). — Coll. id. Cette grande Chame dextrorse, bien connue dans le Pliocène et le Sicilien, est actuellement éteinte. — Voir p. 422. 5, 7 à 10 Chama circinnata p1 Moxrerosaro. — (Dét. Dautzenberg). — Valves droites (x). — Calabrien de Brucoli, près Syra- cuse. — Coll. id. Espèce vivante actuellement dans la Méditerranée, et, au Pliocènce, impossible à distinguer des var. minor de l'espèce précédente. — Elle paraît constituer avec la C. Nicolloni Dautz. de l'Atlantique, la souche ancestrale de tout le groupe. — Voir p. 423. Ë Fi. 11 Arca (Anadara) syracusensis Mayer. — Calabrien des collines livournaises. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Fic-12,13et14 Arca (Anadara) syracusensis Mayen. — Quaternaire (niveau de 4o-6o m.) des environs de Cività-Vecchia (Casa Fontana Matta). — Coll. Gignoux (Coll. Lab. Géol. Lyon). Espèce bien connue au Pliocène ancien el supérieur ; elle n'avait pas encore été trouvée dans le Quaternaire et est main- tenant éteinte. — Voir p. 396. Fes 1) Univ. pe Lyon. — Gicxoux. | près Palerme. — Coll. Très commune dans le Plioc ee) Dee rare Gens le Sicilien, actuellement éteinte. — Voir p: 399. : 7 F16. 16 et 16a % Crenella sericea Bron. — Sicilien du Monte Pellegrino 0 3 j à près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon (di Monterosato miss. ). Espèce pliocene, rare dans le Sicilien, actuellement éteinte. — Voir p. 389. Fic.ipcti8 Plicatula mytilina Pur. — Calabrien des collines livournaises. — Coll. Lab. Géol. Lyon. actuellement disparu de nos mers. — Voir p 356. Toutes les figures sont de grandeur naturelle. PL. XV,.— FORMES ÉTEINTES DU lLIOCÈNE SUPÉRIEUR ET DU QUATERNAIRE CI. M. Gignoux (Lab Géol. Grenoble) Frc. Frc. Fra Frc Frc. PLANCHE XV FORMES ÉTEINTES DU PLIOCÈNE SUPÉRIEUR ET DU QUATERNAIRE 1 GE ra 2 el où .3 el4 .b el 6 Cassis (Semicassis) saburon Brucuiïres var. platy- stoma BruGnone sp. — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon (di Monterosato miss.). Variété spéciale (?) au Sicilien, mais espèce polymorphe existant dans la Méditerranée depuis le Pliocène ancien jus- qu'à présent. — Voir p. 529. Fissurella gibberula Lauarcx var. latecostata Bru- GNONE sp. — Sicilien du Monte Pellesrino, près Palerme. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Variété de grande taille paraissant spéciale au Sicilien. — Voir p. 58r. Capulus (Brocchia) sinuosus Broccnr var. Bellardii Bronnr sp. — Fi1G. 3. Sicilien du Monte Pellegrino, près Palerme. — Coll. Lab. Géol, Lyon (di Monterosato miss.). — Fi. 4. Calabrien de S. Maria di Catanzaro. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Les Brocchia s'éteignent dans la Méditerranée après le Sicilien. — Voir p. 559. Nassa (Hinia) musiva Broccnr var. crassesculpta BruGNoNE sp. — F1iG. 5. Calabrien de Monoslerace, Cala- bre. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). — F1G.6. Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon (di Monterosato miss.). Espèce pliocène venant s'éteindre dans le Sicilien par une variété de grande taille. — Voir p.508. Nassa (Amycla) Semistriata Broccur var. calabrensis nov. — Calabrien de Gravina di Puglia. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Très voisine de la var, an sp. N. giganlula Bon., du Plio- cène ancien; très commune dans le Calabrien, cette muta- tion d'une espèce pliocène et actuelle parait rester exclusi- vemen{ pliocène. — Voir p. 5r2, LOT er Fire. 8 et 9 Nassa (Amycla) semistriata Broccnr var. Edwardsi Fiscmer sp. -— Sicilien de Ficarazzi près Palerme. — Coll. - Lab. Géol. Lyon (di Monterosato miss.). Forme pliocène et encore vivante représentant habituelle- ment l'espèce dans le Sicilien. — Voir p. 512. - Fic. 10 etir1 Nassa (Niotha) clathrata Born var. ficaratiensis Monrerosaro sp. — Sicilien du Monte Pellecrino (fig. 10, nus type de la N. approximans Mis.) et de Ficarazzi (fig. 11). — Le j Coll. Lab. Géol. Lyon (di Monterosato miss.). | C'est par cette variété que vient s'éteindre, dans le Sici- lien, ce sous-genre essentiellement pliocène. — Voir p. 56. Fi. 12 Mitra Bronni Micuerorr var. calabrensis nov. — Cala- brien de Musalà, près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Espèce classique du Pliocène ancien, extrêmement rare dans le Calabrien. — Voir p. 486. : Fic 13 et14 Trochus (Zizyphinus) granulatus Born var. lævis BruGNoxE. — Sicilien du Monte Pellegrino (fig. 13) et de Ficarazzi (fig. 14), près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Variété spéciale au Sicilien (?) d’une espèce banale. — Voir p. 578. F1G. 15 Raphitoma Columnæ Scaccair. — Calabrien de Gravina. di Puglia. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). C'est par cette espèce que vient s'éteindre dans le Sicilien le R. harpula du Pliocène ancien. — Voir p. 474. ; FiG. 16 et16 Venus (Ventricola) libellus RaynevaL, VAN DEN Ecxe, a Ponzr. — Partie supérieure du Pliocène ancien, gisement de Gallina (O.) près Reggio. — Coll. id. ette espèce, jou rare, s'éteint dar - Cett ce, toujours assez rare, s'éteint dans le Cala f brien inférieur. — Voir p. 435. Fi1G. 17 Tapes Dianæ RequiEN. — Quaternaire de l’Etang de Diane, en Corse (niveau de 35 m.?). — Coll. Lab. Géol. Lyon POSER (Maury miss.). Fic. 18 Tapes Dianæ REQUIEN. — Quaternaire de Capestang (Hérault). — Coll. Miquel. E. C'est par cette espèce que vient s’éteindre, peu avant les d temps actuels, le T. senescens Dod. du Pliocène. — Moir p.443. ÿ Toutes les figures sont de grandeur naturelle: Ù D. PR D PL. XVI. — FossiLES DIVERS DU PLIOCÈNE SUPÉRIEUR ET DU QUATERNAIRE. CI. M. Gignoux (Lab. Géol. Grenoble) Phototypie Bourgeois Frères, Chalon-sur-Saôn PLANCHE XVI FOSSILES DIVERS DU PLIOCÈNE SUPÉRIEUR ET DU QUATERNAIRE FrG. x Lucina (Codokia) tigerina Lixné. — Sicilien du Monte- Pellegrino, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Lyon. FrG. 2 Lucina (Godokia) tigerina Linxé. — Quaternaire de Djibouti. — Coll. Lab. Géol. Grenoble. Espèce très voisine de la Z. leonina Bast. du Pliocène ancien; vit actuellement dans la Mer Rouge. — Voir p. 458. FrG. 3, 4$el4* Terebratula ampulla Broceui, forme Scillæ SEeGurxzA Sp. — Calabrien de Gallina (Est), près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Grande valve isolée d'un individu très adulte et de grande taille, montrant bien l'ondulalion très accentuée de la com- missure (fig. 3). Exemplaire plus petit à commissure presque plane (fig. 4, 44). C'est par cette grande coquille que vient s'éteindre, dans le Calabrien où elle est très fréquente, le sous-genre pliocène Terebralula s.str. — Voir p. 589. FiG. 5 et 5 Mactra (Pseudoxyperas?) Rhegiensis nov. sp. — Valve gauche unique trouvée dans les couches à Strombes de Ravagnese, près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). — Voir p. 448. Fre. 6 - Cardita senegalensis Reeve. — Couches à Strombes de Monastir, — Coll. Pervinquière (Lab. Géol. Sorbonne). Frc.l; Cardita elongata Bronx. — Calabrien des collines livour- naises. — Coll, Lab. Géol. Lyon. Ces deux formes ne sont guère que des variétés de la C. calyculala L., qui habite la Méditerranée depuis le Plio- cène; la deuxième, bien individualisée, s'éteint à la fin du Pliocène; la première vit actuellement au Sénégal, mais n'est guère distincte de la C. calyculata. — Voir p. 401. Toutes les figures sont de grandeur naturelle, PL. XVII. — FossILES DIVERS DU PLIOCÈNE SUPÉRIEUR ET DU QUATERNAIRE. CI. M. Gignoux (Lab. Géo!. Grenoble) PLANCHE XVII FOSSILES DIVERS DU PLIOCÈNE SUPÉRIEUR ET DU QUATERNAIRE TG Pecten maximus Lixvé. — Sicilien du Monte Pelleserino, près Palerme. — Coll. Lab. Géol. Sorbonne. Espèce éminemment atlantique; apparaît dans la Méditer- ranée au Pliocène supérieur et au Quaternaire, sans y être jamais fréquente; elle y est actuellement très rare et très localisée (Oran). — Voir p. 360, PC 2, 6,4 Chlamys cf. inæquicostalis Lamuarcx. — Calabrien de Vallebiaja (collines livournaises)., — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Forme très voisine du polymorphe C. inæquicostalis du Pliocène ancien. Ce rameau, détaché sans doute très tôt du groupe du C. glaber L., est actuellement éteint, — Voir p. 377. FiG. 5 à 9 Chlamys commutatus Moxrerosaro. — Valves droites (fig. 7 el 8), valves gauches (fig. 5 el 6). — Couches à Strombes de Ravagnese, près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Cette espèce,impossible à distinguer de certains exemplaires du C. bollenensis May., du Pliocène ancien, est actuellement dans la Méditerranée la seule forme survivante du groupe pliocène du C. scabrellus. — Voir p. 370. Fic. 10 et 11 Cardium (Cerastoderma) edule Linné, var. cofronensis nov. — Quaternaire ancien des environs de Cotrone, Calabre (gisement de la Casa Campanoro, près Cutro). — Coll. Gignoux (Lab, Géol. Lyon). Cette forme géante participe à la fois des variétés allior B. D. D. et umbonala Wood. — Voir p. 419. Fc. 12 Cardium (Cerastoderma) edule Linxé, var. 15-costala nov. — Quaternaire (Sicilien) de la contrée Mortelle, près Messine. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). FiG. 13 et 14 Gardium (Cerastoderma) edule LinNé, var. {an monstr.) morlellensis nov. — Même gisement. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Curieuse déformation se manifestant sur de nombreux indi- vidus du même gisement, et, par suite, ne semblant pas êlre une monstruosité accidentelle. Ces deux dernières variétés sont des exemples des varialions locales, fréquentes dans les faunes lagunaires. — Voir p. 418 Toutes les figures sont de grandeur naturelle. PL. XVIII. — EXEMPLES DE VARIATIONS DANS LES GROUPES DU Chlamys seplemradiatus Mürr ET DE L'Astarte sulcata DA CosTaA. | CI. M. Gignoux (Lab. Géol. Grenoble) Phototypie Bourgeois Frères, Chalon-sur-Saône PLANCHE XVIII EXEMPLES DE VARIATIONS DANS LES GROUPES DU « CHLAMYS SEPTEMRADIATUS » MULL. ET DE L’« ASTARTE SULCATA » DA COSTA Fr. pret r2 Chlamys septemradiatus MüzLer. — Exemplaire vivant dans les mers d'Angleterre, — Coll. Lab. Géol. Lyon. Fic. 2 el 2a Chlamys septemradiatus MürLer.— Sicilien de Rosarno, Calabre, — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Fic. 3 et 31 GChlamys septemradiatus MüzLer, var. subclavala Cax- TKAINE Sp. — Sicilien de Ficarazzi, près Palerme. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). FIG. 4 Chlamys septemradiatus MüLLer, var. — Forme de pas- sage entre la var. subclavala et la var. Cremai. — Pliocène ancien de Gallina (0.). — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Fic. 5 et 51 Chlamys septemradiatus MüzcLen, var. Cremai nov. — Pliocène ancien de Terreti (fig. 5+) et de Gallina (O.) (fig.5), près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). F1G. 6 Ghlamys septemradiatus Müzrer, var. — Forme de pas- sage de la var. Cremai à la var. Estheris. — Pliocène de Nardo, près Lecce. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Frc7 Ghlamys septemradiatus Müzrer var. Es{heris Crema sp. — Pliocène ancien de Gallina (O.), près Reggio, — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Fic. 8 Chlamys clavatus Por. — Pliocène de Nardo, près Lecce. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). x Les fig. 1 et 7 représentent une série de variations du C. septemradialus (1,2, 3, 5, 6, 7, 8 : valves gauches — r1, 21, 34, 4, 5a : valves droites); le groupe a son centre de développe- ment actuel dans les mers du Nord; au Pliocène ancien, et surtout au Calabrien et au Sicilien, il était extrêmement abondant dans la Méditerranée où il est aujourd'hui en voie de disparition. La forme type el la var. subclavala sont encore vivantes; les var. Cremai el Estheris paraissent Univ. DE Lyon. — GicNoux 48 ‘éteintes (?) (peut-être sont-elles très voisines de la var. vivanté dans la Manche décrite par MM. Dautzenberg et Fischer [62], p. r87), et cette dernière indique un passage à l'espèce voi- sine (actuelle et méditerranéenne) C. clavatus, reproduite ici à titre de comparaison. — Enfin, ces diverses variations peu- vent être mises en relation avec les facies. — Voir p. 379. - Fic. g et io Astarte fusca Pour. — Forme costulée, du Pliocène ancien de Strongoli, près Cotrone (fig. 9), et forme lisse, des couches à Strombes de Ravagnese, près Reggio (fig. 10). — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Espèce figurée ici pour comparaison ayec la suivante, F1G. 11 à 14 Astarte sulcata Da Cosra. — Développement de la forme type, costulée, depuis le jeune (fig. 11), jusqu'à l'adulte 4 (fig. 14). — Calabrien de Brucoli, près Syracuse. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Re F1c. 19 à 19 Astarte sulcata DA Cosra. — Passage du type costulé (fig. 15) à la var. lisse, de grande taille, pseudofusca nov. : (fig. 19). — Calabrien de Carrubbare, près Reggio. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Groupe rare actuellement dans la Méditerranée, très abon- dant au Pliocène : la fréquence de la var. pseudofusca carac- térise plus spécialement le Calabrien. — Voir p. 407. Toutes les figures sont de grandeur naturelle. PL. XIX, — EXEMPLES DIVERS DE VARIATIONS ET D'ADAPTATIONS. CI. M. Gignoux (Lab. Géol. Grenoble) Phototypie Bourgeois Frères; Chalon-sur-Saône PLANCHE XIX EXEMPLES DIVERS DE VARIATIONS ET D’ADAPTATIONS ErG. x Cardita (Glans) rhomboidea Broccemr. — Plaisancien de Castellarquato. — Coll. Lab. géol. Lyon. HrG-N2 Cardita (Glans) rhomboidea Broccur var. inermis = Micuezorrr. — Calabrien de Girgenti. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). "Frc. 6 _ Cardita (Glans) revoluta G. Srcuenza. — Calabrien du Monte Mario — Coll. Lab. Géol. Lyon. Ces trois figures montrent le passage de la première espèce pliocène ancienne, à la deuxième, pliocène supérieure (le groupe s'éteint dans la Méditerranée avec le Pliocène). Ces variations, se rencontrant dans des facies analogues, ne sont pas dues directement à des adaptations. — Voir p. 404. Fic. 4à 8 Venus (Ventricola) casina Linné. — Série de diverses variétés au cours du Pliocène et du Quaternaire, — Coll. Lab. Géol. Lyon. FrG. 4 et 4. — Forme de petite taille, à caractères ances- traux, des marnes plaisanciennes (Castellarquato). Fic. 5. — Grande forme typique des facies de sables fins. — Couches à Strombes de Ravagnese, près Reggio. Fr@. 6. — Forme à lamelles concentriques bien dévelop- pées, mais fragiles. — Facies calcaire zoogène du Monte Pellesrino (Sicilien de Palerme). Fic. 7, 8 et 84. — Var. crassa nov., spéciale au Cala- brien et ayant surtout des affinités avec les formes atlan- tiques actuelles. Forme à test très épais et à ornementation solide. — Facies à polypiers de Brucoli, près Syracuse (fig. 7), à graviers grossiers coralligènes de Monte Corvo, près Reggio (fig. 8 et 82). Ces diverses variétés sont évidemment en relation avec les facies. — Voir p. 132. Euthria cornea Linné var. plioelongata Sacco, ne Marnes profondes du Plaisancien de Castellarquato. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Euthria cornea Linné. — Couches à Strombes de Boveto, près Reggio. — Forme littorale de la Méditerranée actuelle et des dépôts récents. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Ces variations, interprétées par M. de Stefani comme un phénomène de rulalion, pourraient aussi n'être que des adaptations à des facies différents. — Voir p. 496. FiG, 11 Turbo (Leptothyra) mamilla Anprezsowsky. — Plio- cène (supérieur?) de Portignano, près Livourne. — Coll. Lab. Géol. Lyon. Espèce miocène et pliocène qui est peut-être la forme ancestrale du 7. peloritanus. — Voir p. 570. Fi. 12, 13,14 Turbo (Leptothyra) peloritanus CANrRAINE Var. aca- rinata nov. — Calabrien de Brucoli, près Syracuse (fig. 12, 13) et Pliocène ancien de Mileto, Calabre (fig. 14). — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). F1G. 15, 16 Turbo (Leptothyra) peloritanus CanrRaINE var. cari- nata CanNTRAINE sp. — ZJrochus glabratus Philippi. — Pliocène ancien de la Fiumara Macellaï près Regoio. — Coll. id. Frc. 17, 18 Turbo (Leptothyra) peloritanus CanrraINe. — Trochus filosus Philippi. — Calabrien de Monte Corvo, près Reggio (fig. 17) et Pliocène ancien de Gallina (O.) (fig. 18). — Coll. id. Espèce pliocène et actuelle de grande profondeur : les figures 12 à 18 en montrentune série continue de variations à partir de formes ancestrales voisines du 7. mamilla. — Voir p. 570. Toutes les figures sont de grandeur nalurelle. : auouS-1ns-uo|uq9 ‘soig1y sto981nog a1dAojoqq € UOÂT 19179 1 "MAHINAANS ANHIOITA AG SHAOdOIHOVAY — KX Id PLANCHE XX BRACHIOPODES DU PLIOCÈNE FrG.x Terebratula (Liothyrina) minor Puirippr. — Marnes pliocènes du Vallone Cacariaci, près Mileto (Calabre). —— Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). FiG. 2 Terebratula (Liothyrina) minor Purriprr. — Pliocène ancien de Terreli, près Reggio. — Coll. id. Cette petite forme représente habituellement dans le Plio- cène la T. vitrea actuellement vivante. — Voir p. 588. Frc3 Magellania septigera Love. — Sommel du Pliocène ancien de Gallina (Ouest), près Reggio. — Coll. id. Forme à affinités septentrionales ; débute dès le sommet du Pliocène ancien dans l'Italie du Sud; mais son maximum de développement dans la Méditerranée a lieu au Calabrien. — Voir p. 592. * Cette planche doit être regardée avec un binocle stéréosco- pique. Toutes les figures sont grossies deux fois environ. Pr. XXI. — STROMBES MIOCÈNES, PLIOCÈNES ET QUATERNAIRES. PLANCHE XXI STROMBES MIOCÈNES, PLIOCÈNES ET QUATERNAIRES Fr. 1 Strombus bubonius Lamarck. — Couches à Strombes de Tarente. — Coll. Gignoux (Lab. Géol. Lyon). Fiç. » Strombus coronatus Derrance, var. altavillensis DE GREGOR1O. — Pliocène ancien d’Altavilla (Contrada Can- namasça), près Palerme. — Coll. id. Fi. 3 Strombus aff. bubonius Lavarcx. — Faluns de la Tou- raine. — Coll. Lab. Géol. Lyon (Lecointre rniss. ). La forme miocène apparait nettement comme l'ancêtre de la forme quaternaire et actuelle; la forme pliocène, au con- traire, s'en écarte davantage; c’est un rameau latéral, dont le maximum de différenciation aboutit à la gigantesque variété allavillensis, qui représente ainsi une fin de série. — Voir pl: VI et VIL et p. 534. Cette planche doit être regardée avec un binocle stéréosco- pique. — Fig. r, réduction de 2/3. — Fig. », réduction de 1/2. — Fig. 3, réduction de 2/3 environ. ANNALES DE L'UNIVERSITÉ DE LYON A. FONTEMOING, 4, rue Le Goff. Onomasticon Taciteum, Fè Ph. Fagra (II, Fasc. LIT SRE ae 45 fr. L’«Agamemnon » d' Eschyle texte, traduction et com- mentaires, par Paul REGNAUD (I, Fasc. 6). Gfr. Notes critiques sur quelques Traductions allemandes de poèmes français au moyen âge, par J. Fir- MRRVAQNEPIASC AS) AU Ne Gifr. Au musée de l’Acropole d'Athènes. — Etudes sur la sculpture en Attique avant la ruine de l'A cro- pole lors de l'invasion de Xerxés, par Henri LEcHAT (II, Fasc. 10). (Epuisé). . . . 8fr. Cultes militaires de Rome. Les Enseignes, par Ch: RENEL (I{, Fusc. 12). . . . . "fr. 50 Sophocle. — Étude sur les ressorts dramatiques de son théâtre et la composition de ses tragédies, par F. ALLÈGRE (II, Fasc. 15). . . . 8 fr. Daos : tableau de la Comédie grecque pendant la pé- riode dite nouvelle (Kopwtdto Don par Ph -E. LEGRAND (II, Fasc. 22). . . : 45 fr. La Femme Docteur : Mme Gottsched : son modèle français Bougeant, ou Jansénisme et Piétisme, par A. Vuzrrion (Il, Fasc. 23). . . . 6 fr. Les Fouilles de Fourvière en 19114, par C. GERMAIN DE MonrAUZzAN (II, asc. 25) . . . . Gfr. Ernest LEROUX, 28, rue Bonaparte. Phonétique historique et comparée du sanscrit et du zend, par P. Recnaup (Fusce. 19). . 5 fr. L'évolution d’un Mythe. Acçvins et Dioscures, par Charles RENEL (Fasc. 24). . . . . . Gfr. Etudes védiques et post: Nonaues. par Paul REGNAUD (Fasc. 38). aie 7 fr. 50 Bharatiya-Natya-Çastram, Traité de Bharata sur le théâtre, texte sanscrit, avec les variantes tirées de quatre manuscrits, une table analytique et des notes parJoanny Grossur (asc. 40). 45 fr. Recherches sur l’Origine de l’Idée de Dieu, d’après le Rig-Véda, par A. Guérinor (II, Fasc. 3) "7 fr. 50 Dictionnaire étymologique du latin, et du grec dans ses rapports avec le latin, d'après la méthode … évolutionniste (Linguistique indo-européenne appliquée), par Paul Reanaun (Il, Fasc. 19) AO fr. GAUTHIER-VILLARS, 55, quai GdS-Augustins. Sur la théorie des équations différentielles du premier ordre et du premier degré, par Léon AURONNEPAUSCIG) M 0. 02 1 Q9lifr, Recherches sur l'équation personnelle dans les observations astrônomiques de passages, par HA CONNESSIAT (FasC. 2) 0 un... t'5ifr. Recherches sur quelques dérivés surchlorés du phénol et du benzène, par Etienne BarraL asc 17) : > do ANT Sur la représentation des courbes gauches algé- briques, par L. AUTONNE (Fasc, 20) . . 3 fr. Sur le résidu électrique des condensateurs, par PAAHOULLEVIGQUE (FGSC, JE) Gr, Synthèse d’aldéhydes et d’acétones dans la sér naphtalène au moyen du chlorure d'aluminium L. Rousser (asc. 30). . Recherches expérimentales sur quelques ac mètres ns At par H, Rico (Fase. 29) die . De la constitution des Hcalotdee ae X. Causse (1, Fasc. 2). | Etude sur les occultations HEnce d'étoiles D: lune, avec un catalogue normal des HASTAUES Joanny LagruLA (I, Mase, 5) . Sur les combinaisons organomagnésiennes mixt leur application à des synthèses d'acides, cools et d'hydrocarbures, par Victor Gria (ll, Re GO} à 6 0 à MO ec ORAN Sur la décomposition d’une LU TÉON linéaire r et orthogonale en un produit d'inversions, par AURONNEN TER ONC LA) RER Quelques considérations sur les groupes d’ordr et les groupes finis continus, par Le Vavas (1, Fasc. 15) M ANR te Sur les Formes mixtes, de Léon AUronNI Fasc. 16). Recherches ne ee sur se sonate liqu par A.-M. Cranoz (l, Fusc. 18). Quelques démonstrations relatives à la théori nombres entiers complexes cubiques. — priétés de groupes d'ordre fini, par Rayr Le Vavasseur (I. Fasc. 21) . Sur les Groupes de matrices linéaires non inverti par Léon AUToNNE (1. Fasc. 25). Sur les groupes commutatifs et pseudo-nuls de « tités hyperconplexes, par Léon AurTonne (I, : Ex ARE pee Observations ailes 5 RTE fai l'Observatoire de Lyon, par MM. Le Caper, GRULA, GUILLAUME, MERLIN et FLaJoLET (I. A) hé Ma ro te TE RCA Les Céphéides net comme étoiles do avec une monographie de l'étoile variable phée, par Michel Lurzer (1, Fasc. 33) . J.-B. BAILLIÈRE et Fils, Recherches anatomiques et expérimentales s métamorphose des Amphibiens anoures, E. BaTaiLLoN (Fasc, 2). Û Anatomie et Physiologie comparées de la Ph dactyle. Structure, locomotion, tact, olfac gustation, action dermatoptique, photogénie, une théorie générale des sensations, pa Dr Raphaël Dugois (Fasc. 3) . . . . 4 Sur le pneumogastrique des oiseaux, pe E. VREUR (asc. 4) Recherches sur la valeur nb éE pendices superstaminaux de la fleur des toloches, par Mle A, Mayoux (Fusc. 5) Etude stratigraphique sur le Jurassique inférier Jura méridional,par Attale Ricne{Fasc. 10). 19, rue Hautefe ANNALES DE L'UNIVERSITÉ DE LYON Etude expérimentale sur les propriétés attribuées à la tuberculine de M. Koch, faite au laboratoire le médecine expérimentale et comparée de la Kaculté de Médecine, par M. le professeur ARrLOING, M. le D' Roner et M. le D' Courmonr (Fasc. LA) eee. OT: Histologie comparée de. Hp dans ses rap- ports avec la Morpholozie et l’histoire généalogique de ces plantes, par Paul PARMENMER (Fasc. 10) RS RS Sr en AIT: Recherches sur “ ne et la localisation du Tanin chez les fruits comestibles fournis par la famille des Pomacées, ie Mile A. Maxoux (CES CAT) RER A 0 PE PE Etude surle Bilharzia one et la Bünarziose, | par MM. Lorreret ViazLeroN(Fasc. 16). A10Ofr. Monographie de la Faune lacustre de l'Eocène moyen, par Frédéric Roman (I, Fasc. 1er). 5 fr. Etudes sur le Polymorphisme des Champignons, in- fluence du milieu, par Jean BeAUVERE (I, Fasc. 3). 7 fx.50 L'Homme quaternaire ins le Bassin du Rhône, Etude géologique et añthropoloyique, par Ernest CHanrre (Il, Fasc. 4). . . . Gfr. La Botanique à Lyon avant la Révolution et l’histoire du Jardin botanique municipal de cette ville, par M. GÉrarD (Fasc. 23). 3 fr. 50 Physiologie comparée de la Marmotte,par le Dr Ra- phaël Dugois (Fasc.25) . 45 fr. Etudes sur les terrains tertiaires du Dauphiné, de la Savoie, et de la Suisse occidentale, par HP ADOUX AMP HAS) REP ETC RO fire Recherches physiologiques sur l’appareil respiratoire des oiseaux, par J.-M. Soum, (Fasc. 28) 8 fr. 50 Résultats scientifiques de là campagne du « Caudan» dans le golfe de Gascogne (août-septembre 1895), par R. KœuLer (Fasc. 26) 3 vol. 32 fr. Anatomie pathologique du système lymphatique dans :a sphère des néoplasmes malins, par le Dr GC. Recaup, et le Dr EF. Baron (Fasc.33) 5fr. Recherches stratigraphiques et paléontologiques dans le Bas-Languedoc, par Frédéric Roman. CHUSCRO LOC PORTE DA 8 fr. Etude du champ électrique de l'atmosphère, par Georges Le Caner (Fasc. 35). : . . . 6 fr. Les Formes épitoques et l’Évolution des Cirratuliens par Maurice (CauLrceryx et Kélix Mesnir (Hasc 139) 000 He A EiT 00 Etude géologique et nie du Carbonifère inférieur du Mâconnais, par A. VArFiER (I, Fase. 7) Leo es 8 fr. Contributions à l’Embryologie des Nématodes, par AMCONTEN TE FOSC SG) OMR RDC Contributions à l’étude des larves et des métamor- phoses desdiptères, par C.Vaney (1, Fasc. 9).6 fr. Contribution à l’étude de la classe des Nymphéinées par J.-B.-J. CarxrrLor (1, Fasc. 10). . "7 fr. 50 Lyon. — Imprimerie A. REY, 4, rue Goutil — 6167) Monographie géologique et paléontologique des Cor- bières orientales, . par Louis Doncreux (I, HIS CELA) RENNES Men 7e OIL Contribution à l'étude des composés diazoamidés, par Louis Meunier (I, Fasc. 13) + . = … … 5 fr Etude stratigraphique et paléontologique sur la Zone à Lioceras concavum du Mont d’Or lyonnais, par Attale Ricme (I, Fasc. 14). 7 fr. 50 Catalogue descriptif des Fossiles nummulitiques de l'Aude et de l’Hérault — PREMIÈRE PARTIE : Montagne Noire et Minervois, per Louis DoNciEUx, en collaboration avec MM, J. Mrquez et J. Lam- BERT:(J. FOSC 7) NE Gite DeuxIÈME PARTIE (fasc. |) Corbières septentrio- nales, par Louis DonciEux en collaboration avec M.Maurice Lerice (1, Masc.22). 7 fr. 50 Deuxième PARTIE (fasc. Il) Corbières septen- triona'es, par Louis DonciEux. en collaboration avec M.dJ. LamBerT (I, Fascicule 30). 7 fr. 50 Minéralogie des départements du Rhône et de la Loire, par Ferdinand Gonnarp (1, Fascicule 19). 4 fr. Recherches sur l’anatomie comparée et le dévelop- pement des Ixodidés, par Amédée Bonner (PUS C 20) RER ER END OUT Les Oiseaux des phosphorites da Quercy, par C. GAILLARD (0 EGSC ON EEE BIT Etude des Mammifères miocènes des Sables de l'Or- léanais et des Faluns de la Touraine, par le D’ Lu- cien Mayer (1, Fasc. 24). . 10 fr. Etude sommaire des Mammifères fossiles des faluns de la Touraine proprement dite. (Bossée, Le Lou- roux, Manthelan, La Chapelle-Blanche, Sainte- Maure, Paulmy, Ferrière-Larcon, Savigné-sur- Lathan, par le D' Lucien Mayer, en collabora- tion avec la comtesse Pierre LEGcoINTRE (I, HS Ce 0) ETES 3 fr. Contribution à l’étude de l'Hibernation chez les Inver- tébrés: recherchesexpérimentalessurl'hibernation de l’Escargot (Heliæ pomatia L), par Marguerite BELTONNIERASC DENT RE RO IT Contribution à l'étude des Pupipares, par Emile Massonvar (I, Fasc. 28). … : 10 fr, Contribution à l'étude des Perles fines, de la nacre. et des Animaux qui les produisent, par le Dr Ra- phaël Dugois (I, Fasc. 29) … .... : 6'fr Recherches physiologiques sur la fixation et le mode . de nutrition de quelques Nématodes, parasites du tube digestif de l'homme et des animaux, par le Dr Charles Garin, avec 55 figures dans le texte or ROM 5e 400 © He Recherches sur l'acide oxalique dans l'organisme animal, par F. SARvONAT (l, asc. 35). . & fr Les Formations marines pliocènes et quaternaires de l'Italie du Sud et de la Sicile, par M. Gicnoux, avec 4? figures de coupes dans le texte et 21 plan: ches hors texte (WSRASCL IS 0) CSS #) 45 fr. e os mx a, or mA PR RSS RÉ 8 age OT mA < RE ee QD, Pre rer SES